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BIOGRAPHIE
NOUVELLE
DES CONTEMPORAINS.
Les soussignés déclarent que les Exemplaires non revêtus de
leurs signatures seront réputés contrefaits.
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DE l'iMI'HÏMERIE DE PLASSAN, RUE DE VAUGIRARD, N° l5,
DERRIÈRE l'odÉON.
à
ojïr ^f/ak&r -Scott.
BIOGRAPHIE NOUVELLE
DES
CONTEMPORAINS,
ou
DICTIONNAIRE
HISTORIQUE ET RAISONNÉ
DE TOUS LES HOMMES QUI, DEPUIS LA RÉVOLUTION
FRANÇAISE, ONT ACQUIS DE LA CÉLÉBRITÉ
PAB LECfiS ACTIONS, LETJKS ECRITS, LEURS ERREURS OU LEURS CRIMES,
SOIT EN FRANCE, SOIT DANS LES PAYS ÉTRANGERS;
Précédée d'un Taideau par ordre ehronologiqut des époques céièires et des événe-
mens remarquables, tant en France qu'à l'étranger, depuis lySy jusqu'à ce jour,
et d'une TaiAe alphabétique des assemblées législatives, A partir de V assemblée
constituante jusqu'aux dernières chambres des pairs et des députés.
Par mm. A. V. ARNAULT, ancien membre de l'Institut; A. JAY;
E. JOUY, DE l'Académie française; J. NO R VINS, et autres
Hommes de lettres. Magistrats et Militaires.
obnèb de 3oo portraits au burin,
d'après les plus célèbres artistes.
TOME VINGTIÈME.
THll— Z
II
PARIS,
A LA LIBRAIRIE HISTORIQUE, HOTEL DALIGRE,
m E SAIBT-nONORÉ, W" I 23,
1825.
^"
BIOGRAPHIE
NOUVELLE
DES CONTEMPORAINS.
w
THU
THTJGUT (le baron de), mi-
nitilre-d'élat de l'empereur d'Alle-
ni.igne, naquit à Vienne en 1735,
d'une famille obscure, et ne dut
qu'i ses taîens l'étonnante fortune
à laquelle il s'éleva. L'impératrice
Marie-Thérèse, visitant un jour le
collège des langues orientales , où
il avait été admis, frappée du té-
moignage qu'on lui rendit de ses
succès, changea son nom de Thu-
nigut , qui signifie vaurien en pa-
tois autrichien, en celui de Tliuqut
[ fais bien ) , et le recommanda
aux chefs de l'établissement. Dès-
lors son sort fut assuré. Il occupa
d'ahord desemplois subalternes, et
devint ensuite iiiternonce impérial
à Constantinople , d'où il passa
comme ministre i\ Varsovie , et
fut nommé, en mars 17^9, com-
missaire en Valachie. Directeur-
général des affaires étrangères en
1790, puis chancelier de cour et
d'état , il obtitit, l'aunéc suivante,
le poste de ministre des affaires
étrangères, et fut enfin nommé,
en 1796, premier ministre d'état.
Entièrement livré aux affaires ,
n'entretenant presque aucun com-
r. XX.
merce avec les autres hommes , il
Jouit de toute la confiance de sou
souverain, dirigea en quelque
sorte la conduite de la cour de
Vienne pendant la guerre de la ré-
volution française, et on le regar-
da généralement comme l'orga-
nisateur des guerres qui si long-
temps divisèrent les deux nations ;
aussi fnt-il constamment en butte
au resseniiment du gouvernement
de la France. Ketiré à Presbourg
après la paix de Lunéville, il sen-
tit se ranimer, dans les loisirs de
la vie privée, son ancien goût
pour la littérature orientale, dont
il s'occupa avec la même ardeur
que dans sa jeunesse, et entre-
tint, pour cet objet , une corres-
pondance suivie avec M. Muller,
bibliothécaire de la cour de Vien-
ne , qu'il allait même visiter de
temps en temps. Vers la fin do
i8o3, le baron de Thugut épousa
la fille d'un seigneur belge, lin
voyage qu'il fil à Vienne, en i8o(J,
fit supposer qu'il avait repris du
crédit et qu'il était question de sa
rentrée au ministère; les journaux
françaiè démentirent ce bruit, el
a TIIU
la cour de Vienne garda le silence;
«îlle tie crut pas devoir offenser un
voisin puissant, en mettant i\ la
lôle des affaires un homme qui
s'en était toujours monlré le cons-
tant ennemi. Néanmoins on lui
confia une branche du départe-
ment des affaires étrangères, qu'il
administra jusqu'à la fin de 1808.
Il retourna alors à Presbourg, a-
vt-c le rang de conseilter-d'état et
la grand'croix de l'ordre de Saint-
Etienne; il y reprit les occupa-
tions qu'il avait interrompues
pend<'\nt une absence de deux an-
nées, et y vécut solitaire comme
auparavant. Revenu dans la capi-
tale de l'Autriche quelque temps
après, il y mourut le 2S mai 1818,
dans la 83" année de son âge,
laissant une fortune considérable,
dont il établit l'empereur léga-
taire universel.
ÏHUREL (Jean), le plus an-
cien soldat de l'Europe, membre
de la légion -d'honneur, naquit
en 1699, i\ Orin , département
des Basses-Pyrénées, et mourut
à Tours , déparlement d'Indre-et-
Loire, le 10 mai 1807, dans la
io8* année de son âge. Il s'en-
gagea le 17 septembre 1716, dans
le régiment d'infanterie de Tou-
raine, et servit avec distinction
pendant près d'un siècle. Blessé,
en 1753, au siège de Rehl, d'un
coup de feu dans la poitrine, il le
fut de sept coups de sabre, dont
six sur la tête, en 1769, à la ba-
taille de Minden. Le régiment de
Tonraine ayant reçu, en 1787,
l'ordre de se rendre dans l'un des
ports de Elance, afin de s'y em-
barquer , Thurel . figé alors de 88
ans, voulut, malgré ses chefs,
^aire la route à pied ; il refusa de
THU
monter sur les voilures, décla-
rant • que cela ne lui était jamais
arrivé, et qu'il ne commencerait
pas. » Le 8 novembre de la même
année, il fut présenté à Louis XVI,
qui lui accorda une pension de
3oo fr. , dont 200 réversibles sur
la tête de sa femme , et après elle
sur celle de chacun de ses enfans.
Présenté à l'empereur Napoléon ,
ce prince le décora de la croix de
la légion-d'honneur, el lui donna
une pension de 1200 francs. Il
habitait Tours, et lorsqu'il mou-
rut, il servait encore comme vé-
téran. « Il était, dit M. Joseph
Laval'ée, plein de loyauté, d'hon-
neur et de bravoure; il a traversé
tout un siècle accompagné de
l'estime de tous ceux qui le con-
nurent et lui commandèrent. »
Trois de ses frères furent tués à la
bataille de Fontenoy; un de ses
fils, décoré de la médaille des vé-
térans, caporal dans la compagnie
où Thurel servait , fut également
tué sur le champ de bataille en
I 782 ; un autre de ses fils était en-
core au service un peu avant la
restauration , en 1814.
THLRIOT DE LA ROSIÈRE
(Jacques-Alexis), avocat à l'é-
poque de la révolution, fit partie
de la première assemblée électo-
rale. Le \à juillet, M. Thuriot
fut député par elle à M. de Lau-
nay, gouverneur de la Bastille,
pour parlementer. La réponse
qu'il en reçut n'ayant point calmé
les esprits, l'attaque commença:
on en connaît les résultats. Il fut
ensuite nommé juge au tribiuial
du district de Sezanne, départe-
ment de la Marne, et , en septem-
bre 1791, élu, par ce départe-
ment , député i\ l'assemblée légis-
THU
lative. Dès les premières séances,
il se prononça contre la cour et le
ministère. Le 8 février, il parla
avec force contre les émigrés , et
demanda que leurs biens fussent
mis sous le séquestre , ce qui fut
décrété le lendemain. Quelques
jours après, il dénonça le ministre
de la guerre Narbonne , p(>ur a-
voir envoyé à l'armée, de sa pro-
pre autorité, un règlement mili-
taire, et ie déclara pour ce seul
fait digne de mort. Vers le m«';nie
temps, il annonça que le peuple
de Paris était prêt à s'insurger si
on ne lui augmentait les secours
pécuniaires auxquels on l'avait
accoutumé, et vota tme commis-
sion en faveur des détenus d'Avi-
gnon. Il ne paraît pas qu'à cette
époque M. Thuriot se piquru
d'être très-conséquent dans ses
votes, sans doute pour établir son
impartialité. Ainsi , tandis qu'il
déclarait, à l'occasion des trou-
bles élevés dans ditlerens dépar-
temens, que la trahison était gé-
nérale, il repoussait une députa-
lion qui attribuait à la trahison
les échecs éprouvés alors par l'ar-
mée française ; ainsi , tandis qu'il
volait l'ajournement d'une fête,
proposée en faveur de Simonneau,
mairt" d'Klampes, tué dans l'exer-
cice de ses fonctions , il s'o{)posait
à la suj»pression du traitement
d'un million nccor^Jé aux frères de
Louis XVI , alors émigrés. Le a5
mai, il s'éleva contre les prêtres
insermentés , et demanda leur dé
porlalion ; le 2 juillet, il prononça
un long discours, dans le but d'ob-
tenir le licenciement de l'état-
major de la garde parisienne, et
de faire déclarer la patrie en «lan-
ger ; le 26, il lit décréter la pcc-
THU 3
manence des sections de Paris et
de tout le royaume, et fit envoyer
son collègue Tarbé à l'Abbaye ,
pour avoir, disait-il, insulté l'as-
semblée ; le 27 , il obtint la vente
des biens des émigrés. Dans la
journée du 10 août, il justifia, à
la tribune, la municipalité usur-
patrice , provoqua im décret d'ac-
cusation contre d'Abancourt, mi-
nistre de la guerre, et de Laporte,
ministre de la liste civile, et fit
décréter, sur la demande de Dan-
ton, des visites domiciliaires, et
la réélection des juges-de-paix de
l'aris. Le 11, il empêcha la for-
mation d'un nouveau directoire
du département de Paris , et ob-
tint que les statues des rois se-
raient brisées. Il fit ensuite subs-
tituer le tribunal extraordinaire à
la cour martiale , dont une loi a-
vait ordonné la formation, et fit
attribuer à ce tribunal le droit de
jil^er sans appel les prévenus de
contre-révolution. Le 2 septem-
bre suivant, il fut nommé l'un
des commissaires à l'effet d'arrêter
la fureur du peuple qui se portait
aux prisons pour immoler les pri-
sonniers ; mais il revint bientôt,
avec ses collègues, déclarera l'as-
semblée qu'ils n'avaient obtenu
aucun succès. Le 4 septembre, il
fil rejeter la proposition faite à
l'assemblée de prêter serment de
haine aux rois et à la royauté ,
prétendant que ce serait anticiper
sur les droits de la convention, qui
allait se réunir, lilu membre de
cette a^^semblée par ie départe-
meul de la Marne, il fui dénoncé,
peu de jours après, par l'ex-minis-
tre Narbonne, comme ayant reçu
de lui des sommes considérables;
mais la dénouciaiion n'étant ap-
4 THU
puyée d'aucun t'ait, on pasm à
l'ordre du jour. II fit décréter que
tous les membres absens eussent
à revenir à leur poste , et deman-
da , le 13, que Louis XVI fût jugé
sou» trois jours. Nommé l'un des
commissaires pour faire connaître
au roi le décret qui lui accordait
un conseil, il fit atitori.-ier M. do
Malesherbes à communiquer li-
brement avec ce prince, et lors
des appels nominaux sur le juge-
ment , il vola corjtre l'appel au
peuple, pour la mort , et contre le
sursis. Le 21 janvier, il informa
la convention que Michel Lepelle-
tier avait été tué la veille au Pa-
lais-Royal, et fit décréter une ré-
compense pour celui qui arrête-
rait son assassin. Le même jour,
Pétion ayant voulu proposer un
rapprochement des partis, M.
Thuriot lui reprocha les assassi-
nats de septembre , que , comme
maire, il eût dû empêcher, di-
sait-il, quoiqu'il sût très-bien
qu'à cette époque Pétion et ses
amis étaient en butte à la plus
cruelle proscription. Lors de la
formation du tribunal révolution-
naire, en mars 1795, il demanda
que les jurés volassent à haute
AToix. Le mois suivant, il contri-
bua puissamment à l'établisse-
ment d'un comité de salul-public;
mais ce que l'hisloire reprochera
peut-être le plus à M.ïhuriot, c'est
d'avoir été ini des plus ardens
provocateurs des journées désas-
treuses des 5i mai et 2 juin, où
furent anéantis les hommes les
plus propres i\ faire honorer la li-
berté et à maintenir le respect des
lois. Nommé président le 27 juin,
il devint, le 10 juillet, membre
du comité de salul-public renou-
THU
vêlé, et ne parut user de ce nou-
veau pouvoir que pour exercer de
nouvelles rigueurs, surtout à l'é-
gard de ses malheureux collègues
échappés aux proscriptions du a
juin. I! parut revenir cependant
à des sentimens plus modérés, et •
fit, quelque temps après, réha-
biliter la mé.T^Joire des infortunés
Labarre et d'Elalonde, condamnés
à un supplice horrible pour avoir
commis la nuit, et dans un état
d'ivresse, non un sacrilège, mais
une irrévérence envers une image
du culte catholique; enfin il délivra
le département de la Loire de l'a-
troce proconsul Javoques , le Car-
rier de ces contrées. Dénoncé , le
4 août 1793, aux Jacobins, par
suite des divisions qui s'étaient
élevées entre lui et Robespierre,
il donna sa démission du comité
de salut-public; mais les dénon-
ciations s'accrurent par cette mar-
que même de faiblesse, et il fut
obligé, pour se justifier, de dé-
rouler le tableau des mesures a-
cerbes dont il avait été ou le
provocateur ou le complice. Ce
moyen ne lui ayant pas complète-
ment réussi, il attaqua la faction
d'Hébert, qu'il regardait comme
le seul obstacle à sa popularité;
mais il n'en fut pas plus heureux :
Hébert parvint à le faire exclure
des Jacobins, où il ne fut réintégré
qu'après le 9 thermidor. Quelque
soit le sentiment qui ait dirigé M.
Thuriot à cette époque fameuse,
ou ses craintes personnelles, ou
sa haine contre Robespierre, il se-
rait injuste de le priver de sa part
de courage dans cette journée; il
présidait la convention, et chaque
fois qiie Robespierre voulait éle-
ver la voix, il agitait sa sonnette
THIJ
en criant de toules ses forces i Tu
n'as pas ta parole! Ces mots sans
cesse répétés, et le bruit éclatant
de la sonnette, déconcertèrent
Robespierre au point de pouvoir
à peine faire entendre ces paroles:
« Me donneras-tu la parole, pré-
sident des brigands {voy. Robes-
PiEERE. ) M. Thuriot qui, le len-
demain du 9 thermidor, avait fait
comprendre de nouveaux conven-
tionnels au nombre de ceux mis
hors la loi la veille, s'appliqua,
dès qu'il fut rentré aux Jacobins,
à défendre les complices du tyran
qu'il venait d'abattre, et fit reje-
ter, comme calomnieuse , la pre-
mière dénonciation de Lecointre
de Versailles. Bientôt après , il
parla contre les mesures sévères,
fe plaignit de la faiblesse que l'on
mettait à poursuivre les restes du
parti de Robespierre; mais s'étant
montré l'un des principaux mo-
teurs de l'insurrection anarchique
du 12 germinal an 3, il fut dé-
crété d'arrestation le iG, et d'ac-
cusation le 3 prairial, pour avoir
pris part au nouveau mouvement
qui avait éclaté le i", et qui avait
pour but de délivrer et faire ab-
soudre les membres arrêtés ou
proscrits en germinal. Il échappa
par la fuite à l'exécution de ces
deux décrets, et fut amnistié le
4 brumaire an 4 ( ^^ octobre
ï ■ ^"^ V Après la session , il fut
1 Mr le directoire, com-
1 près le tribunal de
.;s le i8 brumaire, il
d membre de la commission
d s émigrés et juge au tribunal
rriminrl de la Seine; il en exer-
çait encore les fonctions co 1804.
(Chargé d'interroger Moreau, Pi-
tfhfgru et Georges, il fit le rap-
TIE
S
port de tout ce procès. En février
i8o5, il passa à la cour de cassa-
tion en qualité de substitut du
procureur-général impérial, et fut
nommé membre de la légion-
d'honneur. Il perdit sa place à la
première restauration , et la reprit
pendant les cent jours, en i8i5.
Après le second retour du roi ,
contraint de quitter la France, par
la loi du 12 janvier 1816, il s'est
retiré dans le royaume des Pays-
Bas , et s'est fixé à Liège, où il
exerce la profession d'avocat.
THUROT(FRANçois),professeur
de langue et de philosophie grec-
ques au collège royal de France,
place qu'il occupe encore aujour-
d'hui (1826), a publié les ouvra-
ges suivans , qui lui ont générale-
ment valu les suffrages des savans
et du public : 1° Hermès ou Re-
cherches philosophiques sur la
grammaire unioerselte j traduit de
l'anglais, de Harris, avec des re-
marques et additions , 1 796 , in-S" ;
2* f^ie de l^aurent de Médicis, sur-
nommé leJUagnifique^ traduit de
l'anglais, 1799, 2 vol. in-8°;
3° apologie de Socrate , d'après
Platon et Xénophon, en grec et en
français, 1806, in-S"; 4° l^s Phé-
niciennes d'Euripide, avec un choix
des icholies grecques et des notes
françaises (et le texte grec), i8i3,
in-8°; 5° Plusieurs dialogues de
Platon , 181 5, in-8*.
TIERNKY ( Georges ) , mem-
bre de la chambre des coujmunes
de l'Angleterre, l'un des chefs les
plus distingués de l'opposition,
fit des études de droit, et suivit
néanmoins la carrière de la poli-»
tique et des finances. Tous se*
vœux tendirent ensuite à obtenir
une place au parlement ; ce ne Cul
C TIE
qu'i\ la troisième tentative, oili la
nominalion de son coinpéliteur
ayant été annulée pour la seconde
fois, qu'il lut déclaré par le par-
lement dépulé légal du bourg de
Southwark à la chambre des com-
munes. Il se rangea sur-le-champ
du côté de l'opposilion , et parla
eur tous les sujets imporlans dont
la chambre eut à s'occuper. En
179G, il demanda avec force une
réforme parlementaire, et signala
la corruption qui régnait dans les
élections. L'année suivante, lors-
qu'à l'occasion de la suspension
des paiemens en argent, Pitl pro-
posa d'autoriser la banque à éniet-
■Ire des billets de î20 schelling*^
M. Tierney, en secondant Fox
dans son opposition à celte me-
sure, demanda que la banque fît
connaître sa situation. Il combat-
tit dans la même session les dis-
positions proposées pour réprimer
la sédition qui avait éclaté parmi
les marins. A la rentrée du parle-
ment , il voulut faire 'exclure de
la chambre M. Dundoâ, comme
occupant la place de troisième se-
crclaire-d'élat , abolie par le bill
de Burke. Cette conduite, qu'il
tint pendant assez de temps, fut
d'autant plus remarquée , que ,
seul des membres de l'opposition,
il assistait aux séances, les autres
croyant de voir s'en abstenir, parce
qu'ils blâmaient comme injuste la
guerre que la Grande-Bretagne
soutenait contre la France. iNéan-
inoins il appuya, en 1798, le bill
proposé par M. Dundas , pour
mettre le gouvernement en état
de pourvoir à la sftreté du royau-
me. Les débats du 35 mai sui-
Yanf, relatifs au bill proposé pour
suspendre les prérogatives des
TIE
gens de mer, entraînèrent entre
Pitt et lui une contestation qui se
termina par un duel, dans lequel
aucun des deux antagonistes ne
fut blessé. En 1790, M- Tierney
s'opposa à l'envoi de troupes en
Irlande , pour en soumettre le»
liabitans, et à l'union parlemen-
taire de ce pays, comme dange-
reuse pour la liberté anglaise. En
1800 , au sujet de l'expédition
malheureuse de Hollande, il re-
procha aux ministres de ne faire
la guerre que pour le rétablisse-
ment de la maison de Bourbon,
réclama l'ouverture de négocia-
tions pacifiques, et proposa d'or-
donner qu'aucune somme ne pût
être envoyée à l'empereur d'Alle-
magne, après qu'il aurait signé
un traité séparé avec la républi-
que française. En novembre, il
nia tous les avantages qui , selon
les ministres, résultaient de la
guerre; il parla dans le même
sens sur l'expédition d'Egypte , et
contre la rupture du traité d'EI-
Arish. Il s'éleva ensuite contre les
mesures arbitraires, multipliées
sous le prétexte de poursuivre le
jacobinisme, et combattit le bill
d'oubli [bill of indemnily) , pro-
posé en faveur des fonctionnaires
publics qui, depuis 1795, avaient
fait arrêter ou détenir des per-
sonnes réputées suspectes. Cette
marche, soutenue dans la voie
constitutionnelle, avait rendu M.
Tierney cher à tous les amis de
la liberté. Un changement de mi- ,
nistère , qui lui procura des em-
plois lucratifs, eut une influence
remarquable sur ses principes; il
se rapprocha de l'administration:
néanmoins la transition fut gra-
duée , et il ne fut pas diflicile d'à-
TIE
percevoir les ménageiaens dont il
usait pour ne pas heurter l'opi-
nion. Pill étant rentré à la chan-
cellerie en i8o5, M. ïierney se
raUacha à l'opposition , et lut nom-
mé secrétaire en chef du gouver-
nement d'Irlande, lors du renou-
vellement du ministère en iSofi.
Les changement survenus dans la
direction des affaires de l'état après
la mort de Fox, n'influèrent en
rien sur la position de M. Tiernejr,
qui s'était ménagé des amis parmi
les successeurs de cet habile mi-
nistre ; il fut même placé sous
lord Grenville à la tête du corps
de contrôle pour les aff.iires de
rinde, emploi qu'il perdit dans
un nouveau changement du mi-
nistère. A cette époque, les élec-
teurs de Southwark , qui ne
voyaient plus en lui qu'un candi-
dat ministériel, lui préférèrent
»on concurrent; mais il fut élu
dans un autre bourg i la nomina-
tion du gouvernement. Il se rap-
procha dès-lors , pendant quelque
ten;)ps, du parti de l'opposition.
Depuis 1807 jusqu'en i8i3, il
n'y eut presque point d'affaires
importantes où il no parlât con-
tre le ministère; ainsi il blâma,
en 1H07, la traite des nègres; en
1808, l'attaque de Copenhague;
en 1809, le plan et la conduite
des ministres, relativement à l'ex-
))édilion anglaise en Espagne, et
h celle de Walcheren l'année sui-
vante ; le 19 iuillct, il s'élevn
contre le bill de lord Stanhope,
»ur les billet» de caisse; et le 1 5
mai iSi3, après avoir déploré la
publicité qu'on avait donnée à
l'uffairc de la {Princesse de Galles
( voy. Caroline ) , il se rangea du
cOté du ministère. Cependant, le
TIE t
24 jui" i^'4> '' répondit ù. lord
Castlereagh, qui prêtait à l'oppo-
liilion des vues intéressées dans
cette affaire, « qu'on avait profité
de la maladie du roi pour dégra-
der la princesse et lui faire subir
des affronts humilians, dont le
parlement seul pouvait demander
justice. » Le 5 novembre, il atta-
qua les minisires au sujet de la
guerre d'Amérique, et démontra
le ridicule des plans de finances
de M. Vansiltart, chancelier de
l'échiquier. Sa conduite dans les
débals auxquels la rentrée en Fran-
ce de Napoléon, en 181 5, four-
nit matière, donna la mesure de
sa prudence; il s'exprima de ma-
nier? à rester maître de se pro-
noncer d'après les évéïiemens. En
février 1816, il parla sur l'état
des forces que le gouvernement
se proposait de garder sur pied,
et déclara qu'il craignait le pou-
voir d'un monarque soutenu par
i5o,ooo hommes; dans le même
mois, il insista sur la lecture to-
tale des pétitions adressées à la
chambre, ajoutant <■ que c'était
bien le njoins qu'on pût faire que
de prêter l'oreille aux prières du
peuple. » Au mois d'avril , il blâ-
ma avec force la conduite d'un
garde à cheval , qui s'était permis
des voies de fait à l'égard de deux
membres de la chambre, et se
récria contre l'emploi de la force
armée dans les cérémonies ||ubli-
ques, où l'intervention des cons-
tables pouvait suffire au main-
tien de l'ordre. Dans le couraut
de mai, il attaqua l'énormilc de
la liste civile, « abus dont la plu-
part des états européens présen-
tent aujourd'hui l'existence , et
l'un des plus funestes à la liberté,
8 TIE
par la manière dont il facilite
l'emploi des moyens de corrnp-
tion. » An mois de juillet suivant,
M. Tieruey fut attaqué d'une ma-
ladie qui fil désespérer de sa vie ;
il se rétablit néanmoins , et repa-
rut au parlement le 6 mai 1817.
Il n'avait rien perdu de son talent
ni de sa causticité, et donna ime
nouvelle preuve de l'un et de l'au-
tre , en discutant un bill d'amnis-
tie proposé par les ministres; lord
Casllereagh y répondit, mais ne
put détruire l'impression qu'il
avait faite dans la chambre. De-
puis ce moment, M. Tierney prit
la parole beaucoup moins sou-
Tent, et parut se borner aux ques-
tions concernant les finances . les
affaires et les ressources de l'Inde,
(let orateur est un exemple frap-
pant du discrédit où peuvent en-
traîner un homme même d'un
grand talent, la versatilité de sa
conduite et l'indécii^ion de son
caractère public; il fut im temps
où les électeurs du parti popu-
laire , dans leur enthousiasme ,
faisaient bapliser leurs enfaus
sous le nom de M. Tierney; à une
autre époque, les mêmes élec-
teurs, pour signaler leur mépris
pour un homme qu'ils regar-
daient comme un apostat politi-
que , donnaient à leurs chiens un
nom qu'ils avaient tant vénéré.* Il
a publié : 1° Lettre au très-liorio-
rable^ienri Dundas , sur la situa-
tion de la Compagnie des Indes-
Orientales, in-8°, 1791. C'est une
critique qui parut sous le voile de
l'anonyme, et qui fut réfutée par
M. Georges Anderson. 2° M. Tier-
ney publia sous son nom une au-
tre Lettre de M. Anderson à M.
Dundas, sur l'état des affaires de
Tir.
la Compagnie des Indes, in- 8',
1791 ; 3° deux Lettres sur la péti-
tion de Colchester, in-Zj", 1791 ;
4° Situation réelle de la Compagnie
des Indus-Orientales , eu égard à
ses droits et à ses privilèges, in-8",
'707-
TILLY (le comte de ), lieute-
nant-général, grand-offîcier de la
légion - d'honneur , chevalier de
Saint-Louis, grand'croix tle l'or-
dre de l'aigle-rouge de Prusse ,
membre de la chambre des repré-
sentans , entra de bonne heure
dans la carrière des armes , et ,
quoique noble, ce ne fut qu'à la
révolution , dont il* adopta les
principes, qu'il dut le grade de
colonel. Le général Dumouriez le
choisit pour aide -de -camp en
1792, et lui confia le commande-
ment de Gerlriiydenberg , place
où il avait réuni tous les moyens
qui pouvaient lui faciliter l'entrée
de la Hollande. La levée du siège
de Maëstrichl força Dumouriez à
s'éloigner; avant de partir, il fit
donner au colonel dé Tilly sa pa-
role d'honneur qu'il ne rendrait
pas la place sans un ordre écrit de
sa main. L'événement arriva bien-
tôt. Par suite de la perte de la ba-
taille de Nerwinde,et des capitula-
tions d'Anvers et de Bréda, il fut
sommé, au nom du comte de War-
tensleben , chef d'état- major du
prince Frédéric d'Orange, de
« remettre la place, ou d'être,
dans le cas contraire, du premier
jusqu'au dernier, passés au fil de
l'épée, sans miséricorde quelcon-
que, n M. de Tilly répondit sim-
plement au parlementaire : « M.
le comte de Warfensleben s'est
trompé d'adresse. » Néanmoins
une seconde sommation lui ayant
TTL
été faite, il déclara qu'il capilu-
lerait s'il en recevait l'ordre du
général Dumouriez. On lui fit ob-
server que ce général n'était plus
au service de la république. M. de
ïilly resta inébranlable, et en ef-
fet, il ne capitula que le i" avril
1793, sur la présentation de l'or-
dre écrit de Dumouriez lui-même.
Il obtint, par suite de «es vives
instances, que la garnison ne dé-
filerait pas devant les troupes
étrangères. Envoyé à l'armée des
côtes de Cherbourg, il en prit le
commandement le 12 novembre
de la même année. Au mois de dé-
cembre,il remportade grands avan-
tages sur lesVendéens, et fut toule-
fois forcé de donner sa démission,
comme noble ; remis presque aus-
sitôt en activité à l'armée de Sam-
bre-et-Meuse, il en commanda la
réserve , lorsque , sous les ordres
du général Jourdan , elle pas^a le
Rhin en 1795. A l'affaire du 20
vendémiaire, à Hoecht, près de
Nidda, il repoussa pendant toute
la journée les tentatives que fit
l'ennemi pour franchir celte ri-
viéie. Nommé, au mois de janvier
179G, commant^mt des neuf dé-
Fartemens réunis, il se concilia
estime générale par son athni-
nislralion sage, sa justice et son
désintéressement. Chef d'état-
major de l'année du Nord, au
mois d'août 1796, il conserva
cette qualité à l'armée de Sambre-
el-Meuse, où il passa en 1798,
et fut nommé inspecteur-général
des troupes françaises stationnées
en Hollande. Le gouvernement
consulaire lui confia, en 1799, le
coniniandemenlde.s 24' et 25* di-
visions. En 1800, employé à l'ar-
mée de l'Ouest en qualité de gé-
TIN 9
néral de division , il commanda
en chef, par intérim t pendant
seize mois. Il eut, en 1804, le
commandement de la cavalerie au
camp de Boulogne. Passé au pre-
mier corps d'armée, le général
de Tilly fit, avec autant de distinc-
tion que de parfait désintéresse-
ment,les campagnes d'Allemagne,
de Prusse et d« Pologne. Il se
conduisit d'une manière aussi no-
ble en Espagne , où il reçut de
l'emploi en 1808. Gouverneur de
la province de Ségovie , après
l'occupation de Rladrid, il s'y fit
estimer de tous les habitons. Il
eut, en 1811, en Andalousie,
im commandement de cavalerie ;
à la bataille d'Occana , il fit des
prodiges de valeur, montra « une
habileté consommée dans l'art de
faire manoeuvrer la cavalerie»,
et fit aux Anglais un grand nom-
bre de prisonniers. De retour en
France, en août 181 5, il devint
inspecteur-général de cavalerie.
Après la première restauration ,
en j8i4, le roi le nomma cheva-
lier de Sairtt-Louis, puis grand-
olïicier de la légion-d'honneur.
Vendant les cent joui's . en i8i5,
le général de Tilly fut nommé par
Napoléon , président du collège
électoral du déparlement du Cal-
vados, qui l'élut à la chambre des
représentans. A la seconde res-
tauration, il fut mis à la retraite.
Le général de 'l'illy mourut A Pa-
ris, le 10 janvier 1822, regrelté
de tous ses frères d'armes et es-
timé de tous ses concitoyens , qui
rendaient justice à ses qualités per-
sonnelles cl à ses vertus civiques.
TINDAL ( Ralph Dikdas, ba-
ron de), lieutenant-général des
arméci françaises , et depuis du
10 TIN
celles du nouveau royaume des
l'ays-Bas , officier de la légion-
d'honneur, etc, ncen 1773a Deven-
ter, en Hollande, entra dans la
carrière des armes dès sa première
jeunesse, et s'y distingua par ses
talens et sa brillante valeur. Il en
donna de fréquentes preuves pen-
dant la campagne de 1799 contre
les Anglais, dans la Nord -Hol-
lande. Il y fut blessé difl'érentes
fois, et grièvement à la bataille
de Bergen le 19 septembre. Nom-
mé capitaine de la garde du grand-
pensionnaire Schimmelpennink ,
il passa ensuite dans celle du roi
Louis, qui le nomma major, et
bientôt colonel du beau régiment
de grenadiers de la garde hollan-
daise. A l'époque de la réunion
de la Hollande à l'empire fran-
i;ais , ce régiment fut incorporé
dans la garde impériale, et le co-
lonel Tindal en conserva le com-
mandement. En 18 12, il fut promu
au grade de général de brigade, et à
la fin de la campagne, ilfutnom-
iTié adjudant -général des chas-
seurs à pied de la gartle. Il com-
manda cette brigade jusqu'au 26
août 181 5, veille de la bataille de
Dresde, où il fut de nouveau griè-
vement blessé , en débouchant des
portes de cette ville, à la tête de
son corps. Napoléon le nomma
général de division , ordonnant
qu'il continuerait d'être considéré
cornme faisant partie de la garde
impériale, et lui conféra, en outre ,
le titre de baron. Le général ïindal,
par suite de ses blessures , se re-
tira à Versailles, et après les évé-
nemens de 1814, il retourna dans
sa patrie. Le nouveau souverain
du royaume des Pays-Bas s'em-
pressa de réclamer les services
TIN
d'un militaire aussi distingué, qui
rentrait dans ses foyers, précédé
de la plus brillante réputation ; il
fut nommé lieutenant -général ,
inspecteur de l'infanterie, et, vers
la fin de l'année 1814, chargé
du portefeuille du ministère de la
guerre en Belgique. Il rendit
d'éminens services dans ce poste,
et l'armée batavo-belge lui dut,
en grande partie, sa prompte et
belle organisation. En 181 5, legé-
néral Tindal eut le commande-
ment en chef de l'armée de réser-
ve ; le roif de France, Louis XVIII ,
lui envoya la croix du mérite mi-
litaire , et le roi des Pays-Bas le
nomma commandeur de l'ordre de
Guillaume. Depuis cette époque,
le commandement de la sixième
division territoriale, dont la place
de Namur est le chef-lieu, a été
confié à ce général.
TINGRY ( Pierre-Frawçois ) ,
chimiste et pharmacien à Genève,
est né dans cette ville, et y est de-
venu successivement membre de
la société pour l'encouragement
des arts, et professeur de chimie
à l'flcadémie. M. Tingry fixa sur
lui l'attention, eo publiant , en
1785, une analyse fort savante de
la source ferrugineuse qui avait 1
été découverte , en 1785. aux
bords de la Drise, près de Ca-
rougc. Outre cet ouvrage , il a
donné dans le recueil de l'acadé-
mie de Turin, et dans les Annales
de Chimie ,' plusieurs Mémoires
remarquables , entre autres , i"
sur la composilion de l'éiher, 1 788;
1° sur l'acide phosplioriqiie, 1789 ;
3° sur la consistance que les huiles
acquièrent à ta lumière, «798 ; 4"
sur la phosphorescence des corps, et
particulièrement des eaux de lamer;
TIP
5° sur la nature du fluide électrique;
(i'enfin, un ou vragequi jouitd'une
très-griinde estime, un Traité sur
l'art de faire et d'employer les ver-
nis, a vol. in -8", Genève, i8o5.
TIPOO-SAEB, sultan de My-
»ore, fils d'Hayder- Ali-Rhan,
succéda à son père le 9 novembre
1782. Hayder-Ali avait fondé ,
par ses conquêtes et son génie,
l'un des plus formidables empires
de rindonslan. Fils d'un oUicier
de cavalerie du Mogol , auquel le
rajah de Mysore avait donné, pour
récompense de ses services, la for-
teresse de- Bengalore cl le pays
environnant, il profita de la jeu-
nesse du rajah, dont il se constitua
Je tuteur, pour s'emparer du trône
sous le nom de régent, et s'y con-
solider par sa prudence et son cou-
rage. Après a voir conquis Canara et
Calicul, on vil rentrer triomphant
ù Seringapalnam, et en maître de
plusieurs royaumes, celui qui,
peu d'années auparavant, en était
«orti simple officier. Cette gloire
ne servit qu'à lui inspirer de plus
grands desseins; réunir les débris
de l'empire d'Aureng Zebe, et
chasser les Anglais de l'Inde, telle
était la pensée politique d'Hayder.
Plusieurs foi» l'orage , que ce
grand homme avait soulevé con-
tre les usurpateurs, fondit sur eux
et troubla leur repos ; mais la pru-
dence et la tactique européennes
devaient triompher de toute la
bravoure et de toute l'impétuosité
de leur ennemi. Hayder. battu A
Trinomaly , connut , dan-* cette
campagne, le fils auquel il devait
léguer l'empire. Tipoo-Saëb,
l'aîné de ses enl'ans, dévastait le
Carnaticet menaçait IMadras, pen-
«latif que le général Sniilh avait
TIP 11
reporté la guerre au sein du My-
0ore. La mort d'Hayder, contre
le génie duquel la fortune, la ruse
et la politique avaient conspiré,
légua la puissance à Tipoo-Saëb,
qui prit le titre de sultan. Ce jeune
guerrier, d'une bravoure témé-
raire, d'une ûme plus ardente que
profonde, d'un esprit plus violent
que réfléchi, outré dans ses qua-
lités comme dans ses défauts ,
ferme jusqu'à l'opiniSlrelé, vindi-
catif jusqu'à la cruauté, accessi-
ble à tous lessentimens généreux,
doué d'une de ces organisations
impétueuses que nul obstacle ne
peut arrêter, que nulle résistance
ne peut vaincre ; magnifiqutî dans
l'emploi du pouvoir; imprudent
cl implacable dans sa générosité
comme dans sa vengeance : cet
homme voulut continuer l'ouvra-
ge de son père; ses desseins furent
conçus avec plus d'audace que de
prudence. A peine les Anglais eu-
rent-ils appris la morl d'Hayder,
qu'ils attaquèrent son fils dans son
royaume même. Battus sur tous
les points par Tipoo-Saëb, sou-
tenu par plusieurs délachemens
français, ils furent obliges de; lui
rendre les provinces qu'ils avaient
conquises. Cependant l'adresse de
leur politique répara bientôt les
désastres de celte campagne, et
les possessions anglaises, mena-
cées d'une destruction prochai-
ne, se trouvèrent, parole trai-
té même qui suivit celle campa-
gne, mieux affermies que jamais )
nu-delà du cap de Bonne-Espéran-
ce. Huil années de paix succédè-
rent à celte guerre glorieuse. La
magnificence, l'activité cl les ver-
tjis d«; Tipoo-Saëb se déployè-
rent librcmetil ; il accuelllil A s»
12 IIP
cour plusieurs ofliciers français :
son atrabilité gagnait les cœurs, il
n'était pas dénué d'instruction, et
mêlait aux pompes asiatiques
quelque sentiment du goût et de
la grûce européenne. Toutes les
passions, l'amour, la gloire, les
arts, remplissaient son cœur;
lassé d'un long repos, éveillé par
l'image des victoires de son père,
il résolut d'attaquer de nouveau
les possessions anglaises. Trois de
ses ambassadeurs allèrent sollici-
ter l'appui du cabinet de Versail-
les ; ses envoyés, reçus en grande
pompe, n'obtinrent aucun Iruit de
lcurambassade,etTipoo-Saëb, fa-
tigué d'entendre l'un d'eux vanter,
à leur retour, les magnidcences et
le bonheur de la France, lui tran-
cha la tête de sa propre main.
Cependant on allait envoyer des
renforts au sultan, lorsque la ré-
volution française éclata et laissa
le malheureux prince sans allié,
sans secours, forcé de lutter con-
tre les ennemis puissans qu'il a-
vait irrités, et que sa présence et
sa puissance inquiétaient sans
cesse. Tipoo-Saëb , bravant tant
de diflicu'tés réunies, commença
les hostilités; aussitôt le général
Cornwallis entra dans le iVlysore,
et trompant, par des marches ha-
biles, la vigilance du sultan, alla
investir Bengalore, place impor-
tante , prise après deux mois de
siège. L,e courage que Tipoo-Saëb
montra pendant cette campagne,
fut absolwnent inutile; il paya les
frais de la guerre , et céda à l'An-
gleterre le tiers de ses domaines.
Son Hme lière se révolta contre
ce traité ; le besoin de la ven-
geance l'occupa tout entier, les
plaisirs s'exilèrent de sa cour, il
IIP
•e couvrit d*habits de deuil, son
administration devint plus sévère,
il ne songea plu» qu'aux moyeils
de rendre aux Anglais les af-
fronts qu'il en avait reçus. Il com-
bina long-temps les ressources
éloignées ou prochaines auxquel-
les sa politique pouvait avoir re-
cours , écrivit à Bonaparte , con-
quérant de l'Egypte; négocia avec
les principaux états de l'Inde, et
le directoire français ; s'entendit
avec les Abdalis, accueillit tous
les Européens qui pouvaient le
servir dans ses relations diploma-
tiques ou dans ses affaires mili-
taires, fortifia ses places, chercha
à semer la discorde entre les Hol-
landais, lesAnglaiset les Français;
enfin entra en correspondance a-
vec un officier français nommé
Raymond, puissant à la cour du
Nizam, et maître d'un corps de
i4!.ooo hommes et d'un territoire
dont le revenu était évalué à qua-
totze millions : mesures bien en-
tendues, qui annotiçaient chez
Tipoo sultan, un coup d'œil vaste
et juste , mais dont l'exécution
fut suivie avec trop d'impruden-
ce et trop de précipitaliofi. Ce-
pendant la destruction des éta-
blissemens français préparait de
loin l'envahissement des états de
Tipoo-Saëb, et les Anglais, avides
de conquérir un si beau royaume,
fortifièrent leurs alliances avec
les princes ses ennemis, et te-
naient sur pied une armée de
70,000 hommes. Quelques né-
gociations insidieuses précédè-
rent la déclaration des hostilités;
on opposa la ruse à la ruse avant
de combattre la force par la force.
Tipoo-Saëb cherchait à tempori-
ser encore, lorsque deux armées
TIP
anglaises, sorties de Madras et de
Bombay, s'avancèrent vers le My-
sore pour y pénétrer de deux
côtés différens. Cette déclaration
de guerre, ou plutôt cette guerre
sans déclaration, avait pour pré-
texte les relafions de Ïipoo-Saëb
avec le gouvernement français;
mais dans la réalité, les Anglais
n'attendaient, depuis long-temps,
qu'une occasion favoralile pour
renverser le trône de Mysore et
s'emparer de cet état, qui leur
offrait une communication non
interrompue entre la côte de Co-
romandeî et celle de Malabar.
Tout se réunissait contre le mal-
heureux Tipoo-Saëb ; la richesse
desesennemis, leurs troupes supé-
rieures en discipline; ^ peuple
ruiné par des exaclions et déci-
mé par des levées de troupes, la
trahison de son ministre Meer-
Saeïb , tout conspirait s;j ruine.
Cependant le sultan faisait têle à
l'orage ; après avoir été battu aux
combats décisifs de Sedeaser et de
Maliiveljy, il alla s'enfermer dans
Seringapatnain , sa capitale. Ces
1^ Anglais lui firent alors des propo-
sitions très-dures , qu'il refusa
obstinément; vaincre ous'cnvelir
sous les débris de sa capitale, fut
la dernière résolution de ce Mi-
ihridate de Tlndouslan. Canonnée
pendant la nuit du 20 avril. 1799,
battue en brèche le lendemain ,
elle fut disputée i\ l'ennemi avec
lo plus opiniâtre bravoure par le
sultan lui-même, qui se montrait
à tous les postes dangereux, et
par les Mysoréens qui , ralliés par
5oo Français que commandait le
colonel Chapuys, firent des pro-
diges de courage. Ce prince périt
cribh; de coups , au milieu des
TIR i3
siens j et frappé, dit-on, par le
poignard du traître Meer-Saeïb.
Pour découvrir ce cadavre hé-
roïque, il fallut soulever des mon-
ceaux de corps sous lesquels il
était ensev«di. Meer-Saeïb fut é-
gorgé par les cipayes, et enterré
sous les babouches de la garde
mysoréenne; aujourd'hui même
le lieu de sa sépulture est infâme
et consacré aux plus vils usages.
Telle fut la vie de Tipoo-Saëb,
fils du grand Hayder-Ali-Rhan ,
toujours brave, toujours en lutte
avec le sort. Peu de héros des
temps modernes ont mérité mieux
que lui Ihonneur de paraître sur
la scène dramatique, entre les Ba-
jazet et les Gengis. On sait que
la fragèdie de M. Jouy, intitulée :
Tipoo-Saëb, représentée en 1811,
c'est-à-dire douze ans seulement
après la mort de ce prince, dut en
partie son succès à la vérité histo-
rique à laquelle l'auteur put se
montrer d'autant plus fidèle, qu'il
avait été plusieurs fois admis à lu
cour et dans les camps du sultan
de Mysore.
TlftABOSCHl (Jérôme) , cé-
lèbre littérateur italien, né à Ber-
gamele 18 décembre i^Si, fut ad-
mis, à l'âge de quinze ans, dans
l'institut des Jésuites, et, en sor-
tant du noviciat, il entra dans la
carrière de l'enseignement. Il se
liv«» d'abord, avec ardeur, aux
évades ihéologiqnes , mais se don-
nant ensuite un but plus utile, il
cultiva la littérature, et composa
plusieurs discours, qui annoncè-
rent l'élévation de son esprit et
J'étendue de ses connaissances.
En i ^ôt) il fit paraître l'histoire
de l'ordre des Jlumilics ( Vetera
liumiUatorum monamenta. Milan ,
»4
lia
3 vol. in-fol.), qui le plaça au
rang des preinierd lilléraleurs de
son temps. Le comte de Finiiiaii,
qui ne perdait aucune occasion
pour encourager les talens , allait
se charger de l'élévalion de l'au-
teur, lorsque François m le choi-
sit pour successeur de Granelli ,
dans la place de conservateur en
chef de la bibliothèque de Modè-
ne. Profilant des trésors que la
munilicencedes princes d'Esté avait
accumulés dans ce vaste dépôt des
connaissances humaines, le nou-
veau bibliothécaire conçut le
plan d'un ouvrage, qu'avant lui
on aurait cru au - dessus des
moyens d'un seul homme. L'I-
talie, cet ancien berceau des
lettres et des arts, n'avait pas en-
core trouvé un écrivain qui eût
pris soin de rassembler, dans un
seul cadre, les litres épars de ses
richesses littéraires. La tâche en
était d'autant plus difficile, qu'il
fallait s'élever au-dessus des pré-
tentions nmnicipales, et juger
chaque auleur d'après la valeur
réelle de ses ouvrages. Il fallait,
en outre, avoir fait une étude pro-
fonde des classiques anciens et
Aiodernes , être initié dans les
sciences, avoir du goût pour les
uns , et posséder ce coup d'oeil si
nécessaire pour classer avec or-
dre et intelligence, tant de ma-
tériaux employés à la consl^HJC-
lion d'un édifice aussi riche da^js
les détails qu'il devait être simple
et proportionné dans l'ensemble.
Ce grand ouvrage parut après
dix années de travail, et, s'il n'a
pu échapper aux critiques de quel-,
ques censeurs pustéres, il a trou-
vé un plus grand nombre d'admi-
rateurs, qui en ont pris la défense.
TIR
VHistolre de la littérature italien-
ne^ plusieurs fois réimprimée eu
Italie, et dont il existe des abrégé»
en français et en allemand, re-
monte jusqu'aux temps des Étrus-
ques , «*t , en suivant toutes les vi-
cissitudes de la civilisation de la
grande Grèce, des Romains et des
Italiens, s'arrête à la fin du 17*
siècle, qui aurait été l'avant-der-
nier si l'auteur n'avait pas été
forcé de suspendre ce travail. Le
duc de Modène le récompensa,
en le nommant chevalier, tX en
l'appelant dans son conseil. Tira-
boschi crut ne pouvoir mieuxlui té-
moigner sa reconnaissance qu'en
composant une biographie des au-
teurs nés dans ses états. ( Bibliê-
teca moclenese. Modène, 1781, (5
vol. in-4°), et en publiant diffé-
rens ouvrages sur l'histoire et
la topographie du même pays.
[Memoriestoriclie Modenesi, ibid.,
1793, 3 vol. in-^i" ; Storia delta
Badia di Nonantola, ibid. , 1784,
2 vol. in-fol., et Dizionario topo-
grafico storico degli stali estensij
ibick, 1824» in-4''.) Il ne cessait
pas cependant d'enrichir la lit-
térature de plusieurs morceaux
sur des sujets nouveaux, ou qui
exigeaientdenouvelles recherches.
Un homme, dont la vie entière
avait été consacrée à des travaux
utiles ou glorieux pour sa patrie,
ne pouvait qu'y être aimé et ho-
noré ; aussi sa mort, arrivée le 3
juin 1794) répandit le deuil dans
toute l'Italie, où la mémoire de
Tiraboschi sera aussi durable
qu'elle y est révérée.
TIKLET (le vicomte Lobis) ,
lieuleiiiint-général, commandeur
des ordres royaux de l.i légion-
d'honneur et de Saint-Loui», est né
TIS
en 1773, et fut élevé à l'école d'ar-
tillerie deChâlons. Capit.iine d'ar-
tillerie en 1795, à l'âge de 20 ans,
il était, 3 ans après, chef de batail-
lon des pontonniers à l'armée de
Sambre-et-Meuse. Ses services lui
valurent, en 1799, le grade de
colonel, et, peu de temps aprè^, la
place de chef d'élat-major d'artil-
lerie à l'armée d'Orient. En i8o3,
il fut nommé général de brigade,
et employé en Hollande, en Alle-
magne et en Espagne. La retraite
de Portugal, au mois de juillet
1812, lui fournit l'occasion d'être
cité avec distinction; il le fut aussi
pour la part qu'il prit, en octo-
bre (1812), i la poursuite des An-
glais, qui furent forcés de lever
le siège de Burgos. 11 obtint, en
i8i3, le grade de général de di-
vision. Inspecteur-général d'artil-
lerie pour les directions de Tou-
louse, Montpellier, Perpignan et
Bayonne, il reçut du roi, le 19
juillet 1814, la croix de Saint-
Louis, et le til.-e de grand-ollicier
de la légion-d'hont»eur, le i/| fé-
vrier 181 5. Le général Tirlel com-
mandait, en 181 5, l'artillerie du
2* cor|)s d'observation. Il est en-
core aujourd'hui (182'») employé
dans le corps royal d'artillerie.
TISSOT (le chevalier Clé-
ment-Joseph), docteur en méde-
cine, officier de la légioti-dhon-
neur, uildecin consultant de M.
le duc d'Orléans, vice-président
de la société de médecine-prati-
que, est né vers 1750, à Onians,
département du Jura; il est origi-
naire de Suisse et parent du célè-
bre'fissot, H qui il doit des <;on-
seil» dans ses études ujédicales.
Ueçu docteur en 177G, il vint A
Paris, où il fut !«• disciple, le s.c-
TIS i5
crétaire et l'ami de son compa-
triote Tronchin {voyez ce nom),
A la recommandation duquel il re-
put, en 1787, le brevet de méde-
cin-ailjoint de la maison du duc
d'Orléans. Appelé, en 1788, en
qualité de chirurgien en chef ad-
joint du camp de Saint -Orner,
commandé par le prince de Con-
dé, il fut, peu de temps après,
nommé par le roi inspecteur divi-
sionnaire des hôpitaux de l'Alsace
et de la Franche-Comté, fonc-
tions qu'il quitta en 1792 pour oc-
cuper celles de chirurgien en chef
de l'hôpital militaire de Lyon, jus-
que après le siège de cette ville.
<■ M. Tissot, dit un de ses biogra-
phes, a éprouvé beaucoup de
persécutions pendant la révolu-
tion. Après la levée du siège de
Lyon, en 1795, il fut suspendu de
ses fondions, puis arrêté et tra-
duit à la commission temporaire,
pour avoir publié tm écrit, d'après
le vœu de la municipalité provi-
soire, sur les causes de la mort
des blessés par des armes à feu ,
dans la journée du 29 mai, et
pour avoir obéi aux ordres du
comte de Précy. il fut encore ar-
rêté à Paris en 1796, dénoncé au
général en chef à Maycnce, en
1797, *"*«'été à Wesel, en 1798, et
à Dusseldorff en 1799. On l'accu-
sa, dans celle dernière ville, d'en-
tretenir des correspondances avec
Pichegru , Couchery et d'autres
députés proscrits à la journée du
18 fructidor. » Après la p.tix de
Lunéville, en 1801, il reçut le
brevet d'officier de santé supé-
rieur dé l'hôpital d'Aix-la-Cha-
pelle, pour l'inspection des eaux
minérales. Remis en activité de
service, il fil toutes les campagnes
ifi
TIS
«l'Autriche, de Prusse, de Polo-
gne, d'Italie, etc., et lut Dommé,
en récompense , chevalier de la
légion - d'honneur. M. ïissol a
rendu des services trés-imporlans
à rhunianité, en arrêtant, en
1794 et 1795, les épidémies qui
s'étaient manifestées dans les hô-
pitaux militaires et dans les dépôts
de prisonniers de guerre établis
dans les ci-devant provinces de
Bourgogne et de la Franche-Comté,
et en 1806, en portant les secours
de son art aux prisonniers autri-
chiens cantonnés dans la Souabe.
L'archiduc Charles le félicita par
une lettre flatteuse, lui envoya le
diplôme de membre honoraire de
l'académie impériale Joséphine de
médecine à Vienne, et une taba-
tière de grand prix, ornée d'un
médaillon faisant allusion à cette
dernière épidén)ie. En 1809, étant
à Vienne avec l'armée française ,
il reçut de la municipalité de cette
ville l'expression publique de sa
l'cconnaissance; et en 1814» pré-
senté à l'empereur d'Autriche,
alors à Paris avec les autres sou-
verains alliés, il fut très -bien
accueilli par ce monarque. M.
Tissot exerce encore aujourd'hui
(1825) les fonctions de vice-pré-
sident de la société de médecine-
pratique. Il a publié: 1° Gymnasti-
que médicinale , Paris, in- 12, 1781;
a" Topographie médicinale de ISeuf-
châleau, suivie d' observations sur
les dangereux effets des coups de
plat de sabre « (ce qui a détermi-
né , dit le biographe que nous
avons déjà cité, la suppression de
cette punition militaire par une
ordonnance du 14 juillet 1789)0;
sur les maladies résultantes du sé-
jour des soldats dans les prisons.
TIS
et sur les moyens de les prévenir
par une autre peine ^ publiée par
ordre du roi dans le 7* vol. du
Journal de médecine militaire, en
1788; 3° Observations sur les cau-
ses de la mort des blessés par des
armes à feu, que l'on accusait avoir
été chargées avec des balles empoi-
sonnées dans la journée mémorable
du 29 mai, Lyon 1793; 4° Obser-
vations générales sur le service de
santé et l'adminislralion des hôpi-
taux ambulans et sédentaires y Lyon,
1793; 5" Recueil d' observations sur
les causes de l'épidémie régnant
dans les hôpitaux et les dépôts de
prisonniers de guerre, des départe-
mens de Saùne-et-Loire et de la
Côte-d'Or, et sur les moyens d'en
arrêter les progrès, Dijon 1 794 ;
6° Receuil d'observations sur les
abus diins l'ordre des évacuations
des malades et des blessés de l'ar-
mée dans les déparlemens du
Doubs, du Jura et de la Haute-
Saône, Besançon, 1794 ; 7° Du ré-
gime diététique dans la cure des
maladies; 8° Des effets du sommeil
et de la veille dans le traitement
des maladies; 9° De l' influence des
passions de l'âme dans les mala-
dies, et des moyens d'en corriger
les m.auvais effets. Ces trois der-
niers ouvrages, approuvés par l'a-
cadémie royale de chirurgie de
Paris en 1779, 1781 et 1780, ont
été traduits en allemand €t impri-
més à Brunswick en 1799. 10° Né-
crologie de Lorentz , médecin en
chef de l'armée du Rhin, publiée
in-S", et insérée dans le Journal
de Paris en avril i 801; 11° Compte
rendu au grandbailU du landgraviat
de Meklembourg, conseiller-auli-
que du roi de fVurtemberg, sur
l'épidémie de? prisonniers autri-
y
^tXiJ.uit.
TOA
chiens dans la Souabe, imprimé,
en français et en allemand , }»ar
ordre supérieur A Slockak , juin
1806.
TISSOT (P. F.), voy. le Si-p-
ptÉMENï (le ce 20* TOl.
TOALDO ( Joseph ) , célèbre
astronome italien, naquit en 1719
A l'ianezze, petit hameau non loin
de Vicence. A l'âge de i4 ans, il
fut placé au séminaire de Padoue,
où il prit le degré de docteur en
théoldgie , et fut chargé de l'en-
seignement des belles-lettres. En-
traîné vers l'élude des sciences
exactes, il composa une préface
et des notes po«ir une réimpres-
sion des œuvres de Galilée , et il
eut à lutter contre la timidité de
trois censeurs, qui auraient voulu
exclure de cette édition les fameux
dialogues sur le système du mon-
de. Nommé archiprêtre de Mon-
legalda, petit village situé entre
Padoue et Vicence, il ne cessa du
donner à l'étude le temps qu'il
pouvait dér<»b«'rc\ ses devoirs. Pé-
nétré d'un sentiment de recon-
naissance envers labbé Coiili ,
ilont il avait été l'élève , il pii!)lia
une notice sur la vie de ce littéra-
teur , qui fut imprimée h. la tête
•de ses ouvrages. Appelé, en 17(>2,
par le sénat de Venise A occuper
le» chaires d'astronomie, de géo-
graphie el de météorologie à l'u-
niversité de Padoue , Toaido em-
ploya son crédit pour faire décré-
ter la fondation d'un observatoire,
dont il se chargea de donner le
plan el de surveiller les travaux.
Il profita pour cela d'une au-
cieime tour qui avait appiirlcnii
au fameux tyran Eccelin , et dès
ipie les insirnmens purent y Olre
placés, il continua les observations
T. \X.
TOA 17
des deux Poleni , el établit, dans
un ouvrage intitulé Saggio Mcteo-
rologico , les conjectures qu'on
pouvait en tirer pour calculer
avec pr(dîabilifé les acc.idens fu-
turs de l'atmosphère. Il fit mieux
apprécier l'iuiportauce de celie
théorie, en répondaiità une ques-
tion de l'académie de Montpel-
lier, sur l'application de la mé-
téorologie ù l'agriculture. Sou
mémoire fiit couronné , et il at-
tira, sur celte partie de la physi-
que, l'attcnlion des savans, enlre-
autres de l'électeur Palatin , qui
fonda une société njétéorologique
ù Manheim. Toaido travaillait de
son côté A confirmer son système
par tous les moyens que pou-
vaient lui fournir son iuslruction
et son expérience. Ayant remar-
qué qu'au bout de dix-huit ans,
les phénomènes météorologiques
reroivmiencent et se succèdent à
peu près dans le même ordre , il
dressa les tables de trois de ces
périodes . auxquelles il donna le
nom de Saros^ et que les astrono-
mes appelèrent nussi Cycles Toal-
ilini. Il fit paraîlieen même temps
un JAurnal astro-nu''téorologiquc,
destiné principalenuml à répan-
dre sa découverte. Il composa
aussi une dissertation sur la (dia-
leur de la lune, pour prouver la
force d'allraclion que cette |'l,i-
nèle exerce sur les corps terics-
1res. Sa théorie fut attaquée par
Frisi , auquel il répondit par
un mémoire qui fait partie «les
actes de l'académie de Berlin.
Partisan r.èlé des découvertes
utiles . Toaido s'«'mj)rcssa d'aCï
créditer, par simi sulfrage , celle
de Franklirï , sur les conduc-
teurs électriques, et il arma l'oli-
i8
10 A
5ervatfȔrc de Gadoue du premier
jîaralonm rre qu'on ait vu dans
les él.ils vénilieiis. Il serait trop
long de s'arrêter au délai! de tou-
ti's les produclions qui sorlirent
de la plume de ce professeur ; il
ne se passait pas d'année qu'il ne
publiât quel que ouvrage remarqua-
ble, tels sont:sa méthode pour dé-
terminer les longitudes, ses tables
de vitalité, ses traités degnomoni-
que , et de trigonométrie , ses
Scliediasmes astronomiques , dont
les deux premiers roulent sur les
éclipses du soleil, et le troisième
sur le passage de Mercure devant
cetaslre; un discours sur les hi-
vers extraordinaires , plusieurs
discussions sur la sécheresse de
1779, sur les brouillards et sur
l'influence dés météores ignés; un
pronostic des temps et des sai-
sons, lire du passage des oiseaux,
un dictionnaire météorologique ,
des considérations sur un nouveau
cycle et sur les aspects des pla-
nètes ; les présages généraux et
particuliers des pluies et des vents
pour le golfe Adriatique , dé-
duits de l'inspection du ciel ;
un mémoire sur le passage d'An-
nibal par les Apennins , etc.
Les rciuieils savans s'enrichirent
de plusieurs de ses écrits. Il pu-
blia, dans le journal de Modène,
une défense de Leibnitz contre le
sentiment de Deluc, louchant la
descente du mercure dans le ba-
romètre sous un ciel pluvieux ;
dans celui de Pise, un mémoire
sur l'influence lunaire, en réponse
aux objections de Frisi. Il donna
aux journaux de Paris, de Venise,
de Vicencc, aux opuscules scien-
tifiques de Milan, et aux actes de
la société Palatine, une foule de
TOC
discours et d'observations relatif»
à la méléorologic et à la physique
Les Anglais publièrent, dans Ks
Transactions de Londres, son écrit
de œstu reciproco maris adriatici;
l'institut de Bologne plaça dan^*
ses actes le mémoire de calore iu-
nari , et l'académie de Berlin im-
prima la dissertation de vi lume
in almospheram, ex observalionibus
baromctricis. Lalande publia aussi
plusieurs observations astronomi-
ques de Toaldo dans les mémoi-
res de l'académie des sciences de
Paris , et un plus grand nombre a
été inséré dans ceux de la société de
Padoue. Au commencement du
mois de novembre «798, ce savant
éprouva deschagrins quiallérèrent
sa gaîlé naturelle, et quelques jours
après,il fut frappé d'apoplexie, dont
il mourut le 1 1 décembre suivant.
TOCQUEVILLE(N. COMTE de),
maître des requêtes , préfet du
déparlement de la Somme, oflicier
de la légion-d'honneur, exerçait,
sous le gouvernement impérial ,
les modestes fonctions de maire
d'un village des environs de Ver-
sailles. Il dut aux événemens po-
litiques de 18 14 sa haute fortune
administrative. Le roi le nomma,
ù la première reslauralion , préfet*
du département de Maine-et-Loi-
re; Napoléon, à son retour, au 20
mars 181 5, destitua M. de Toc-
queviile à qui Louis XVIII, après
la seconde restauration , confia la
préfecture de l'Oise. A celle épo-
que les armées étrangères pesaient
sur la France, et les Prussiens oc-
cupaient Senlis et le reste du dé-
partement. L'un des généraux de
ces dernières troupes exigea de
M. deTocquevillelaremisedes re-
gistres où étaient apposées les si-
TOC
TOD
rhj
'9
ft
gnatures des habitans qui Vêtaient
prononcés pourl'acte additionnel.
M. de Tocqueville donna une
preuvede fermeté eldeloyauté ; il
refusa. Le général étranger n'in-
sista pas. La noble conduite que
ce fonctionnaire public avait te-
nue en cette circonstance ne pa-
raît pas l'avoir mis à l'abri, dans la
suite de ses fonctions, des repro-
ches graves des hommes sages
et modérés; on l'a blâmé d'a-
voir provoqué des destitutions ,
dont, plus tard, on a reconnu
l'injustice. En 1816, il adminis-
trait le département de la Côte-
d'Or. Le même esprit d'impartia-
lité nous fait un devoir de rap-
porter l'arrêté qu'il publia le 9
août de la même année , lors du
passage, par Dijon, de Madame,
duchesse d'Angoulême ( aujour-
d'hui Madame la Dauphinc ).
« Considérant, dit-il, que l'en-
thousiasme et les transports de
joie que les habitans de Dijon ont
montrés à l'occasion du séjour
dans cette ville de S. A. R. Ma-
dame, ne permettent pas de dou-
ter qu'il n'y ait parmi tous lesha-
tans une parfaite unanimité de
sentimens et d'attachement pour
le roi et la famille royale ; consi-
dérant que ces sentimens, mani-
festés si hautement, ôlent toi^e
crainte à l'égard de l'influence
que les ennemis du trône pour-
raient exercer sur le peuple de la
bonne ville de Dijon ; considérant,
etc.; les mesures de haute prdice
auxquelles sont soamis quelques
individus de la ville dfliDijon, ces-
sent d'avoir leur effet, et ces indi-
vidus sont déchargés des obliga-
tions qu'elles leur imposaient. »
En iJ>i7 , M. de ïocqueville
passa à la préfecture de la Mo-
selle , qu'il administra jusqu'en
1825, époque où il fut nommé à
celle de la Somme. M. de Tocque-
ville, qui occupe encore aujour-
d'hui ( 1825) cette préfecture , a
épousé une fille du président Ro-
sambo, gendre de l'illustre de Ma-
lesherbes; deux fils qu'il a eus de
celte union suivent la carrière
militaire.
TODERINI ( Jeak-Baptiste ) ,
né à Venise en 1728, professa
quelque temps la philosophie à
Forli, et vécut ensuite à Vérone,
où les travaux du marquis 3Lifl'ei
lui firent naître le goût des anti-
quités. Il s'était amusé à rassem-
bler une suite de médailles frap-
pées en l'honneur des jésuites ,
auxquels il appartenait, et des rois
goths, avec lesquels il les avait as-
sociés. Celte afTeclion pour les il-
lustres barbares se développa
avec plus de force dans un séjour
de cinq ans qu'il fit à Constanli-
nople, où il alla en 1781, à la
suite de Garzoni, baile de la ré-
publique de Venise à la Porte. II
porta son attention vers la litté-
rature turque, acheta un grand
nombre de manuscrits et de livres
orientaux, rechercha toutes sortes
d'instrumens astronomiques, nau-
tiques, géométriques, etc., sortis
des ateliers ottomans, et se chargea
d'apprendre à l'Europe que les
Turcs avaient des imprimeries,
des bibliothèques, des académies,
et qu'ils ne sont rien moins qu'é-
trangers à la littérature agréable.
0 Je cultivais, dit-il, l'amitié de
» quelques savons ottomans, et sur-
»tout du viuderis de la Validé^
• pour assurer mes recherches et
«cclaircirmcs doutes. S'il arrivait
^o
TOL
•»qiie Ces sa vans ne fussenf pas
» d'accord entre «ux, je m'adre»»-
»sai9 au mufli pour avoir un felfa
"OU sentence déDr»i(ive. 11 y a, û
»la porte de son palais, des écri-
» vains auxquels on présente l.i
» question qui passe aux mains du
«uiui'ti, et quelques jours après,
■'ptiur peu d'argent , on a la déei-
«sion, ou le fetfa signé de sa pro-
»pre main. Si la question répugne.
« ouverteinent à la loi, aprè:* l'a-
"• voir lue à peine , ils vous la ren»
»deiit, en vou^i disant qu'elle est
«contraire à la loi. » Avec ces pui.'*-
saus auxiliaires, dont on aurait
tort de solipyonner l'ignorance , il
l'ut en étal de publier .son ouvrago,
qui étonna par la sir»gulartté du
sujet; il lut hientôt annoncé dans
le^ journaux, et traduit en fran-
çais et en allemand. Le cardinal
liorgia , chez lequel Toderini s'é-
tait lait présenter comme rauteur
de la Littérature des Turcs, lui de-
manda un jour s'il en avait trouvé
la langue difficile? — « Je n'ai
pas eu le temps de l'apprendre,
lui répondit ïoderrni. — Bravo !
bravissimo ! reprit en riant son é-
minence; vous avez eu le talent
de parler de ce que vous ne com-
prenez pas. » Toderini mourut à
Venise, le 4 juillet 1799. Ses au-
tres ouvrages -sont des disserta-
tions peu importantes sur des ob-
jets de physique et d'histoire na-
turelle.
ÏOLL, lieutenant-général sué-
dois , né dans un rang obscur, en
une des provinces méridionales
de la Suéde , s'éleva à une haute
fortune par un mérite particulier,
et joua un rôle important sous les
règnes des rois Gustave III et Gus
tave IV. 11 commença sa carrière
TOL
|)ar l'exercice d'im petit emploi de
judicature provinciale, dont il fut
firivé par jugement d'un tribunal
supérieur. De puissans ennemis, a
ce qu*il assurait, l'avaient injuste-
ment accusé de malversations. Il
entra ensuite dans l'administration
forestière, et perdit encore la place
subalterne qu'il y avait obtenue,
par suite d'une accusation pareille
k la première. Quand le n»i Gus-
tave ni prépara, en 1772, la ré-
volut«-jn par laquelle il changea
la constitution et les loi-j fonda-
fnentaFes de la Suède au profit
de la prérogative royale, il mit M.
Toll au nombre de ses ag-cns se-
crets. M. Toll montra le pltis
grand zèle et déploya une habi-
leté remarquable en secondant,
dans sa province, hes vues du roi.
Le revirement politique heureu-
sement tern)iné, M. Toll fut ré-
compensé de ses services par des
lettres de noblesse et un grade
dans l'armée. Son crédit augmen-
ta depuis de jour en jour, et il se
vit admis dans les conseils inti-
mes du roi , où , en courtisan con-
sommé, il allait toujours au-de-
vant des volontés du prince, fa-
cilit.int ensuite, par son génie,
l'exécution des projets monarchi-
ques, quels qu'ils fussent. Nommé
colonel d'un régiment de cavale-
rie, et bientôt général, il fut en ou-
tre revêtu de décorations «t com-
blé défaveurs. En 1788, quand le
roi eut pris la résolution d'atta-
quer la Russie, alors engagée dans
une guerre avec la Porte-Otto-
mane , le ^néral Toll fut chargé
de pourvoir à tout ce qui était né-
cessaire pour l'on verture de la cam-
pagne. Il ne s'agissait, disait-on,
que de marcher droit sur Féters-
*
TOL
bourg, et il serait facile de 8'em-
parer de celle capitale qui, aiimi
que les Ironlières septentrioitalt'S
de lu lliisirie^ se Itouvait pre.-»-
quo enlièreinenl dégarnie de
troupes; on devait ensuite forcer
rinjpératrice Catherine IJà rendre
A la Suède qiielquts-nnes des pro-
vinces perdtHîS par Charles XII.
Le général Toll n'avait jamais lait
la guerre, mais on avait la pins
haute opinion de ses talens , tant
militaires qu'administratifs, e^il
(rut I(ii-ni0me, ainsi que les au-
tres jeunes conseillers du roi , que
ractivité et l'audace suppléeraient
de reste à l'expérience qu'ils n'a-
vaient encore pu acquérir. L'ar-
mée suédoise lut embarquée à la
hâte pour la Finlande ; il impor-
tait en effet d'opérer avec la plus
fïrande célérité; mais celle armée,
dé$ qu'elle eut mis pied à terre
à HeMnglbrs, première ville de
la Finlande suédoise, ,-e trouva
dépourvue du matériel le plus in-
ilispensahle pour agir ; il fallut at-
tendre pendant trois semaines
l'arrivée de la plus grande partie
de rartillcrie et des munitions de
guerre. On échoua ensuite dans
I attaque de la petite place de Fré-
drichshamn et dans celle de la bi-
coque de Ny.-Iott. Des canons de
gros calibre y avaient été amenés
i\ grands frais; mais pui' une mé-
prise de l'adminislra'tion militaire,
les Ixnilels avaient eu une autre
destination, et les invalides russes,
qui gardaient ces deux places, ne
«e laissèrent pas eflrayer par des
coups de canon tirés A poudre.
Pélersbourg fut dés-lors sativé.
Les vivres man(|néient bientôt
.1 rarinéc suédoise: il fallut se.
n'lircr,el les soldais !Jiarch.iie;jl
TOL ai
nu - pieds , leurs pourvoyeur*
inexpérimentés n'ayant point pré-
vu que le» chaussures s'usaient
vite en campagne. Les troupes fin-
noises et suédoises murmuraient
hautement ,. et le roi, avant de
quitiev lui-même l'arinée , prit le
parti de renvoyer le général Toll
dans le midi de la Suède, disgrâce
(|ui ne fut cependant qu'appa-
rente. Il eut bientôt un comman-
dement important dans la provin-
ce de Scanie . limitrophe du Dane-
marck, et on lui attribua , fausse-
ment peul-êire, le plan d'incen-
dier, en pleine paix, le port de
Copenhague , où hivernait uiu;
flotte russe. La Suède venait de
terminer ses dilVéretis avec le Da-
nemarck; un ollicier subalterne ,
nommé lienzelstierna , fut néan-
moins envoyé de Scanie à Copen-
hague, où il acheta, d'un capi-
taine de navire anglais, un gros
bâtiment , qui fut, de concert avec
ce capitaine, chargé de matières
combustibles, et (]ui devait, par
le premier vent favorable , êiro
allumé au milieu des vaisseaux ru^-
ses et danois, élroitement serrés
les uns contre les autres dans l'inté-
rieur du port. L'explosion eût été
terrible, la plupart de ces vaisseaux
ayant leur chargement complet
en poudre, ileureusement pour la
ville de (Copenhague, le second du
capitaine anglais, après avoir fait
de vains eflorts pour détourner
son chef de ce projet incendiaire,
dé»iouvrit le cotnplol,la veille mê-
me de son exéculion, au gouver-
nement danois, Lebrfilot fut saisi,
<'t le peuple de Copeidiague, indi-
gné, se portait en f<}ulo à l'hôlel
d«; l'amliassadeur de Suède, qui,
cuti^rcuj«nl ùrangcr A ce coin-
2« 10 L
plot, se présenta hardiment de-
vant la multitude, Cl ouvrir tou-
tes les portes de son hôtel , et de-
manda lui-même qu'on le visitSt,
bien sûr qu'on n'y trouverait au-
cun des coupables, ni aucun in-
dice de sa participation à leur
trame. Benzelstierna et ses com-
plices furent bientôt découverts
et arrêtés, jugés et condamnés i\
mort; mais le prince royal de Da-
ncuiarck (le roi actuel) fit grâce
de la vie à ces agens subalternes.
Le gouvernement suédois les dé-
savoua, et le général Toll, haute-
raenl accusé à Copenhague de les
nvoir dirigés , soutint toujours
qu'il n'avait eu aucune relation
avec eux. Après la mort de Gus-
tave III, le crédit des deux prin-
cipaux favoris de ce prince, MM.
Armfeldt et Toll, baissa sensible-
ment sous la régence du duc de
Sudermannie. Pour les éloigner,
on donna au premier une mission
diplomatique à Naples, et au se-
cond une autre mission pour Var-
sovie; mais une cassette, contenant
les correspondances secrètes du ba-
ron Armfeldt, ayant été saisie en
Italie par un autre agent diplo-
matique suédois , fut envoyée au
prince-régent, et on y découvrit
un vaste projet tendant à priver
ce prince de la régence par une
révolution militaire, et à l'aide
d'une flotte et de troupes étran-
gères qui devaient être introdui-
tes en Suède. Le jeune roi Gus-
tave IV devait être déclaré majeur
avant le temps fixé par la loi.
Quelques lettres du général Toll
parurent prouverque cette trame,
habilement ourdie, lui était au
moins connue, sans qu'il l'eût, se-
lon soii devoir, fait connaître au
TOL
gouvernement. Les deux diplo-
mates furent rappelés et sommés
de comparaître devant une cour
de justice à Stockholm. Le baron
Armfeldt n'obéit point et se rendit
en Russie, où il obtint du service
en même temps qu'il fut con-
damné à mort en Suède. Le gé-
néral Toll résolut de braver l'o-
rage, et retourna à Stockholm,
où il fut mis en jugement et con-
damné à la perte de tous ses em-
plois. Il regrettait surtout son
beau régiment, qui lui assurait de
nombreux avantages , un grand
établissement et une haute in-
fluence dans la province de Scanie;
mais il supporta avec courat^e sa
disgrâce, qu'il savait bien d'ail-
leurs ne devoir point être de lon-
gue durée. En effet, dès que le jeu-
ne roi Gustave IV, déclaré majeur,
eut pris en mains les rênes de l'é-
tat, il rappela les favoris de son
père. Le général Toll reprit ses
anciens emplois ; le colonel au-
quel le prince régent avait donné
son régiment fut obligé de le lui
rendre, et M. Toll fut en outre noni-
mé gouverneur-général des pro-
vinces méridionales du royaume;
mais on ne l'emploj'a plus à la
guerre, pour laquelle ce lieute-
nant-général n'avait jamais mon-
tré de talent. Après la révolution
de 1809 et la chute de Gus-
tave IV, le duc de Suderman-
nie, devenu roi sous le nom de
Charles XIII, parut aussi avoir
oublié ses anciens griefs comme
régent, contre le général Toi!, lui
conserva tous ses emplois , et y
ajouta de nouvelles faveurs. Cet
homme véritablement habile mou-
rut en Scanie, il y a quelques an-
nées, dans un âge très- avancé.
TOL
TOLLERON (Edmb-Hewbi-
Charles), ciseleur à Paris, an-
cien iniliiaire, naquit à Aulicim,
déparlemenl de la Nièvre , vers
1786, d'une honnête famille d'ar-
tisans. Il exerçait l'état deciselcîir,
pour lequel il avait beaucoup de
goût, lorsqu'il fut appelé sous les
drapeaux, en vertu de la loi de la
conscription. Les événemens po-
litiques de 1814 le rendirent à son
ancienne profession, qu'il reprit à
Paris, où il vivait honorablement
du fruit de son travail. Lié avec
Pleignier et Carbonneau [voyez
ces noms), il fut associé ù ce qu'on
a appelé la conspiration des pa-
triotes (le 181G, et chargé de gra-
ver la planche des cartes de rallie-
ment des conjurés. Arrêté au mois
de juin (1816), il fut, avec Car-
bonneau et Ph.'ignier, traduit à la
cour d'assises de la Seine. Sa dé-
(juise fut remarquable par la fran-
cTiise, la bonne foi et l'éloquence
naturelle qu'il développa dans le
cours de son procès. II déclara les
motifs qui l'avaient porté ù pren-
dre une pari dans cette déplora-
ble affaire. «Le timbre, dit-il, que
j'ai gravé portait ces mots : union,
honneur, patrie, formant une de-
vise chère à tous les Français, et je
n'y ai rien vu de répréhensible. J'ai
00 ans, ajoula-t-il ensuite, j'ai été
élevé dans des principes contrai-
res à ceux qu'il est aujourd'hui de
mon devoir de respecter et de ihé-
rir; il n'est donc pas étonnant que
j'aie erré dans une circonstance
semblable. » Dans la séance du 6
juillet, après que son avocat eut
parlé pour sa défense, il prit la
parole, et s'abandonnanl à l'cx-
puudion de son Ame, il dit aux ju-
rés :« Vous avez pu voir, mcs-
lOL 25
sieurs, que je n'ai jamais cherdié
à déguiser la vérité sur tout co
qui me rcgar Je dans cette aflaire.
J'ai cru que je me ferais un mé-
rite aux yeux de mes juges eu
parlant avec la plus grande fran-
chise. Si je me suis tromj)é, elle
n servi à nie perdre; mais tel est
mon caractère, que je préfère être
puni ayant dit la vérité, que d'a-
voir sauvé ma vie par le menson-
ge. On me reprochera sans dodto
d'avoir usé de réserve sur ce qui
concernait mes coaccusés. Quoi !
moi, j'aurais livré aux tribunaux,
un ami, un père de famille, Car-
bonneau enûn ! Ah I le législateur
qui a infligé des peines si terribles
pour la non révélation connais-
sait bien l'ûme des vrais Français;
il savait quel mépris nous atta-
chons au nom de délateur. Pour
moi, la nature qui m'a doué d'un
courage à toute épreuve, m'a
doué aussi d'une âme sensible et
généreuse ; je saurai supporter
mon sort, quelque rigoureux qu'H
soit; je n'aurais pu survivre au
premier regard du mépris. » Con-
damné à mort dans la même séan-
ce, il entendit avec calme et fer-
meté la déclaration du jury. Il
reprit la parole et dit : « Je prie
la cour de considérer qu'il me
senible que j'ai droit au bénéfice
de l'article 108 du Code pénal. »
ïoUeron se pourvut en cassation
et en grâce : il fut exécuté le 28
juillet, à 8 heures du soir, en che-
mise, la tête couverte d'un voile
noir, après avoir eu préalable-
ment le poing coupé, comme par-
ricide. Sa fermeté ne se démentit
pas un seul instant.
TOLSTOÏ { tu cowTt OsTFB-
MAt»N), général russe, d'une fa-
•i'i TOL
nulle ancienne, coninicnça à se
laire connaître dans les guerres do
Turquie et de Pologne, où il mon-
tra de la bravoure et des talens
militaires, et se trouva, au mois
de septembre i8o5, à la tête d'un
our[)s d'armée que l'Autriche des-
tinait à agir Ctintre la France ;
mais ses exploits se bornèrent à
pénétrer dans l'électorat d'Hano-
vre, et à cerner la forteresse de
Hamein, où commandait le géné-
ral Barbou. Le résultat de la ba-
taille d'Austerlitz Ibrpa M. Tole-
loi à évacuer l'électorat , et néan-
moins il reçut le gouvernement
de Saint-Pétersbourg, et les dé-
corations de plusieurs ordres. Au
commencement de 1812, il rem-
plaça le comte de Schuwaloffdans
le commandement d'un corps rus-
se; le 1" juillet, à Ostrowno, il eut
nn engagement avec un corps
français qu'il prétendit avoir bat-
tu , et poursuivi iV 4 werstes en
avant de sa position ; les Français
rétablirent la vérité , en 'conti-
nuant leur mouvement en avant.
L'année suivante, le général ïols-
loi perdit le bras gauche dans un
combat opiniâtre qu'il engagea à
Piroa contre une colonne françai-
se, et parvint à garantir la Bohê-
me , menacée d'une invasion. Le
17 octobre i8i3, le maréchal
Gouvioa Saint-Cyr le défit com-
plètement à Planen, et lui prit
5,000 hommes et 20 pièces de ca-
non. Il se retira alors sur l'Elbe,
où il opéra sa jonction avec le
comte de Rlenau; leurs efforts
réunis eurent pour résultat défi-
nitif la capitulation de Dresde,\et
de Sonnenstein. L'empereur de
Russie apprécia les services du
coujte de Tolstoï pendant cette
TOM
campagne et la suivante, et f'en
récompensa par plusieurs grâc«;s',
et notamment par ime somme de
5oo,ooo roubles, qu'il lui accorda
pour rétablir ses affaires, à titre
de prêt remboursable en dix ans.
Le gouvernement de Bohême lui
offrit une coupe de grand prix, sur
laquelle le général fit graver les
noms des officiers qui avaient péri,
à l'affaire de Pirna, et dont il fit
ensuite hommage à la chapelle
du régiment de Préobraschenski.
Le comte de Toisloi , un instant
anjbassadeiu- de Bussie à Paris,
en 1814 1 fut remplacé par M.
Pozzo-di -Borgo. Il mourut h
Dresde, vers la fin de décembre
1816. M. de Toisloi était grand-
maréchal de la cour, et chevalier
de différens ordres russes et étran-
gers.
TOMMASINI ( Jacques ) , cé-
lèbre médecin italien , né à Pa%-
me, en 1769, trouva dans son
père le premier instituteur de sa
jeunesse. En 1794,1! fut nommé
professeur de physiologie et de
patologle dans l'université de
cette ville ; il embrassa la doctrine
àxi contre-stimulus {voy. Rasori),
que par sa réputation et par ses
ouvrages il a beaucoup contribué
à accréditer. Appelé à occuper la
chaire de clinique-médicale à Bo-
logne, au moment où on l'élevait à
la place d'inspecteur de santé et
des études à Parme, il flotta long-
temps indécis entre les instances
de ses compatriotes, qui auraient
voulu le retenir dans sa patrie, et
celles d'une jeunesse nombreuse,
qui l'altendail au sein d'une des
plus anciennes universités de
l'Europe. 31. Tommasini n'écouta
que les intérêts de la science, et eu
TOM
1816, il prit le chemin de Bolo-
gne, où les professeurs et les élè-
ves se portèrent à sa rencontre
pour le ranaener en triomphe jns-
qu'à la porte de son hôtel. Cet
enthousiasme augmenta encore le
jour où il prononça son discours
d'ouverture, dans lequel il déve-
loppa les principes fondamentaux
de la nouvelle doctrine médicale.
En 1819, les habitans de Parme
auraient désiré qu'il vînt occuper
la place de proto-médecin , restée
vacante par la mort de Rfbiki
( voy. ce nom ). La jalousie et les
Intrigues de quelques obscurs ad-
versaires empêchèrent le gouver-
nement de rendre hommage au
mérite d'un si illustre citoyen, et
ce n'a été qu'en iSaS, que la du-
chesse de l'arme lui a conféré le
titre de son médecin honoraire.
Ce professeur, devenu l'oracle de
la médecine en Italie, est consulté
par les personnages les plus émi-
nens. Il avait donné ses soins i
la princesse Caroline, que l'éclat
d'une couronne n'a pu tenir à
l'abri d'une persécution. Accablée
j)ar une foule d'individus, qui met-
taient l'indiscrétion de leurs aveux
au prix de l'or qu'on leur offrait
pour les obtenir, celte malheu-
reuse princesse implora le S( cours
de quelques hommes estimés,
dont elle connaissait trop les prin-
cipes pour craindre de les voir
fléchir sous le pouvoir. M. Tom-
niasini répondit à cet appel, dé-
cidé à paraître devant la cour des
lords comme le défensetir d'une
reine outragée ; mais les nom-
bieuses anomalies de ce procès no
lui permirent pas de s'acquitter
de ce généreux devoir. Dégagé de
les soins, il parcouiut PAngle-
TON
aS
terre et l'Ecosse, recevant par-
tout les témoignages les plus écla-
tans d'admiration et d'estime.
Plusieurs corps savans s'empres-
sèrent de l'admettre dans leur
sein , et la société de médecine
d'Edimbourg lui adressa son di-
plôme le jour même qu'il entrait
dans cette ville. ïommasini vient
de recevoir un hommage non
moins flatteur, et bien plus tou-
chant de la part de ses élèves ,
qui lui ont fait frapper une mé-
daille d'or , portant d'un côté
son portrait , et de l'autre ces
mots : A Giacomo Toinmasini, idis'
cepoli riconoscenti. Ses ouvrages
sont : 1" Quanto influisca il cuore
sul/a circolazioue del sangue, Par-
me , 1 794 » in-S" : 2° Storia ragio-
nala d'una diabète, ibid. , 1794»
in -8° ; 5" Dclla nuova doltrina me-
dica Haliana prolusione, Florence,
1817, in-S"; 4' Ricerclie palolo-
gic/ie siilla febhre di Livonio , e
sulla febhre gialla americatia , Na-
ples, 1817, 2 vol. in-8"; 5" Con-
siderazioni patologicliesalC infiam-
mazione e sulla febbre continua,
Pise, iHao, in-8"; 0° Prospelto
de" risullamenli otttnuti nella cli-
nica medica d'un trir.nnio , ibid. ,
1820, in-S" ; 7° Discorsi suit'
insegnamenlo medico-cUnico dcli'
Inghilterra e del.' Italia, Cologne,
1822, in-8"; 8° Sloria délia rna-
latlia , délia quale viori il conte
Pertirari, Jmola, i823, iniO;
p" Opère viinori, IJologne , 1821-
1824. 3 vol. in-S"; 10" delta né-
cessita di soltoporre ad utia xtatis-
(ira i fatli pià important i delta me-
dicina pnilica , ibid. , 182J, in-8".
TONDl (Mathiki'). directeur
«lu nnisée minéralogique de Na-
pies, natjuit en I7t)2, à Sansc-
2b
TON
Ycro, dans la province de Capi-
lanata. Destiné à la profession de
médecin, il iriéla aux éludes de
son état celles des sciences natu-
relles, pour lesquelles il avait de
l'attrait. A l'aide de quelques
traités de botanique, il reconnut
les j)Iantes des lieux environnans
cl surtout du Mont - Gargan ,
dont il escalada les sommets. A
l'âge de i^ ans, il fut envoyé à
l'université de Naples, où la voix
de Petagna et l'exemple de Cirillo
le fortifièrent dans son goût pour
les observations de la nature, et
le mirent en état d'ouvrir un
cours de chimie, d'entomologie
et de botanique. Adoptant la ré-
forme que Lavoisier venait de
proclamer en France, il fut des
premiers à parler son nouveau
langage en Italie. Les connais-
sances dont il avait fait preuve
dans ses leçons fixèrent sur lui
rattention du général Parisi , que
le gouvernement napolitain ve-
nait de placer à la tête d'une expé-
dition de physiciens qui devaient
aller se perfectionner en Allema-
gne, dans les travaux des mines et
dans la fusion des métaux. M.Ton-
di profita de son séjour à Vienne
pour fréquenter la société de Jac-
qiiin , de Plenck, de Born , et le
jardin de Schœnbrunn ; les cabi-
nets publics et particuliers d'his-
toire naturelle remplirent les mo-
mens qu'il ne consacrait pas à
s'entretenir avec ces savans. Il se
rendit ensuite à Schemnitz, où il
ébaucha un cours de docimasti-
que , d'après le plan adopté dans
cette célèbre école ; il poiissa en
même temps ses recherches sur
U\ molibdène, sur le Tangtein, sur
la manganèse, et ses elTorts furent
TON
couronnés du pins heureux suc-
cès. Les résultats de ces expé-
licnces et de celles qu'il entreprit
sur la barite, la chaux et la ma-
gnésie, fiMcnt soumis au baron
de Born, qui en parla favorable-'
ment dans le second volume du
Catalogue des Fossiles, de M'"
Baab. Le même naturaliste se
chargea de communiq(n;r à La-
voisier quelques mémoires du mi-
néralogiste italien, pour les faire
insérer dans les Annales de chimie.
M. ïondi , en attendant, ne ces-
sait pas d'explorer les nnnes de la
Haute et de la Basse-Hongrie, et de
presque tous les états héréditaires.
En 1795, il passa le détroit, visita
les trois royaumes, et fit des ex-
cursioms aux Hébrides, aux Or-
cades , et jusqu'en Islande. A son
retour d'Angletcrr.e, le bâtiment
sur lequel il était embarqué fut
capturé à la hauteur du Texel ,
par une frégate française, qui
l'emmena prisonnier à Flessingue.
Dès qu'il put recouvrer sa liberté,
il se dirigea sur Bâle pour gagner
Augsbourg, et se rapprocher de
l'Italie. En passant par Landsberg,
il fut arrêté et envoyé au camp
de Stenpajh, où le général autri-
chien voulait le faire fusiller com-
me émissaire de l'armée fran-
çaise. Ce ne fut pas sans beaucoup
d'efforts qu'il parvint à le détrom-
per; mais à peine venait-il de
quitter les prisons de l'Autriche,
qu'il tomba dans les mains des
Bavarois, auxquels il inspira 1rs
mêmes soupçons, et qui ne l'au-
raient pas mieux traité s'il n'avait
pris la résolution hardie de se jeter
dans le Leck, pour se dérober à
leurs avant-postes. En arrivant à
Naples, il fut chargé de dresser
un rapport sur les mines de fer et
de houille , qu'on prétendait avoir
découvertes dans les Abruzzes et
à Gifuni. Il fit ensuite un voyage
en Calabre, où il voulut s'oppo-
ser aux désordres qui régnaient
dnnflesétablissemensdeStiioelde
la Mongiana.Leschangemens qu'il
avait proposés déplurent à quel-
ques anciens employés qui étaient
intéressés à la conservation de
ces abus. Profitant des troubles
qui commençaient à se manifester
en Calabre , par la présence d'une
nrmée française dans le royaume,
ils ameutèrent une partie des ou-
vriers,et seporlèrent en foule chez
leur chef, qu'ils ne purent altein-
dre, mais dont ils saccagèrent la
maison. M. Tondi se rendit dans la
capitale, où il fut enrôlé daiis la
garde nationale, avec laquelle il
fcc trouvait à Revigliano le jour
où la garnison de ce fort dut ca-
pituler avec les Anglais. Enve-
loppé dans la proscription des pa-
triotes napolitains, il vint cher-
cher un asile en France, et vécut
quelque temps à Lyon , où il diri-
gea les travaux d'une mine de
charbon de terre, près de Saint-
Foi, A sept lieues de cette ville.
Ce premier essai et l'occasion
qu'il eut ensuite de déployer ses
connaissances en rédigeant le ca-
talogue du cabinet minéralogique
de "Weiss , lui procurèrent une
place nu musée d'histoire natu-
relle h Paris, et lui gagnèrent l'es-
time de Dolomieu et de Haiiy. Ce
dernier le chargea de la classifica-
tion des ininéraux et de la traduc-
tion de plusieurs articles extraits
des ouvrages étrangers. M. Tondi
donnait nussi des cours de ininéra-
lojie, et s'occupait à coricliir sa
TON %7
collection particulière de quelques
nouvelles substances. Il avait en-
trepris, dans ce dessein, un voyage
en Espagne, où il futsurprisparla
révolution qui y éclata en 1808,
et qui Itii coûta la perte de pres-
que tout ce qu'il avait ramassé. Il
se sauva à bord d'un vaisseau qui
manqua de périr dans la traversée,
et qu'une galère ennemie remor-
qua dans un port de Sardaigne. Le
gouverneur de cette île s'obstina
à renvoyer M. Tondi à Naples,
où ce professeur ne s'arrêta qu'un
mois, se refusant aux propositions
qu'on lui fit pour le retenir dans
sa patrie. Il revint à Paris repren-
dre l'exercice de ses fonctions,
dont il s'est acquitté jusqu'en
1812. A celte époque, des offres
plus pressantes et plus généreuses
l'engagèrent à rentrer à Naples,
où il a été successivement nommé
premier inspecteur -général des
eaux et forêts, professeur à l'uni-
versité, et directeur du musée de
minéralogie. Ses principaux ou-
vrages sont : 1° Ililuzioni di cld-
mica, Naples, 1787, in-8°; 2' Is-
truztonesitlla seminagione e planta-
gione dd' bosqhi , ibid. , i8i5, in-
8° ; 3° La caccia considerala corne
prodotto sclvano , ad uso de' forcs-
<fl/i,ibid. , 181 5, 10-8°; 4" /^'s-
corso pronunzialo in occasione deW
apertara délia callcdra di geogvo-
sia, ibid., 1817, in-8"; 5° Etc-
mcntidi Orittognosia, ibid. , 1817-
1823, 3 vol. in-8% fig, ; G" la
Srienza selvana ad uso de' forestali,,
ibid. , 1821,3 vol. in-S" , fig. ; 7°
Klcmenli di orcognosia, ibid. ,
1824, in-8'', fig. Ce dernier ou-
vrage f;«il suite aux EUmens d'O-
ryclognosie , avec lequel il forme
un cours complet de géognosic.
28
TON
c'est-à-dire de la connaissance do
la terre.
TONE ( Tobobald-Wolfe), cé-
lèbre patriote irlandais, chef et
fondateur de l'association des Ir-
landais-unis, naquit ;'i Dublin, le
ao juin 1763. Sa famille, le desti-
nant au barreau, lui fit faire avec
soin ses études à l'université de
Dublin, et son cours de droit à
l'école du Temple, à Londres.
Tonc s'efforça, par égard pour ses
parens , de plier son génie actif
aux exigeances d'une profession
qui, chaque jour, lui devenait de
plus en plus pénible,etlibre bientôt
de suivre ses goûts, il se lança dans
la carrière hasardeuse de la poli-
tique. « Ce qui porta ses premiè-
res idées vers celle partie, dit
l'auteur d'une notice sur Tone ,
fut la misère où se trouvait plon-
gée l'Irlande, l'un des pays les plus
éminemment favorisés par la na-
ture. Sa situation par rapport au
commerce des Indes et de l'Amé-
rique, ses ports sûrs et nombreux,
sa population très-nombreuse, sa
fertilité presque incroyable y ap-
pellent les richesses, l'abondance
et le bonheur, tandis, qu'au con-
traire, languissante sous l'oppres-
sion, elle ne sert que de grenier
et de magasin à la Grande-Bre-
tagne; il vit que l'Irlande était
«acrifiée aux Anglais, qui connais-
saient et redoutaient ses ressour-
ces naturelles et que ce n'était qu'en
secouant son joug qu'elle pourrait
se relever de sa situation et pren-
dre la plaie qui lui est due dans la
balance de l'Europe. Il vit que ce
qui maintenait le pouvoir politique
de l'Anglelerre était, i" I oppifs-
sion sous laquelle étaient les ca-
t ludiques qui composaient les qua-
TON
Ire cinquièmes de la nation ; a" la
division el la haine qu'entretenait
l'Angleterre entre eux et les pro-
testansdissidens. Eflectuer l'union
cordiale entre ces deux partis fut
donc le moyen que se proposa
Tone, pour étabUr en Irlande un
gouvernement national, sous le-
quel ce pays reprendrait son rang. *
Tone publia, en 1790, nn écrit ou
pamphlet politique contre l'ad-
ministration du gouvernement an-
glais en Irlande. Cette brochure
eut beaucoup de succès, et fit ad-
mettre l'auteur, dès qu'il se fut
nommé, dans la société des whigs
de Belford. Une nouvelle bro-
chure, en faveur des catholiques,
ne produisit pas* moins de sensa-
tion, et détermina le parti oppri-
mé, quoique Tone fût anglican,
à le nommer secrétaire de son co-
mité central. Cette marque de con-
fiance l'attacha plus fortement en-
core à la cause qu'il avait embras-
sée; il rédigea les pétitions, les
défenses des catholiques, et fut
adjoint à la députation chargée,
en 1795, de demander au roi l'a-
bolition des lois pénales sous les-
quelles ils gémissaient. iMais le
principal but de Tone était tou-
jours de consolider l'union entre
les catholiques et les dissidens
qui dominaient dans le Nord ,
moyen qu'il regardait comme le
seul propre à secouer le joug op-
pressif de l'Angleterre. Il y réus-
sit enfin ; et sur les débris des
partis religieux qui avaient si long-
temps déchiré son pays, il élablit
la société des Irlandais-unis. Li3
gouvernement anglais vit avec ef-
iVoi cette association, et Tone fut
appelé devant le parlement, où le
chaiiceUer le traita de « jcrpcnt
TON
nourri dans le sein de l'état. »
Tone, menacé dans sa liberté pour
n'avoir pas voulu abandonner le
parti des catholiqnes, se retîra en
Amérique nu commencement de
1795, empoiiantavec Kii l'estime
et les regrets de ses concitoyens.
Il ne vécut pas long^- temps dans
cet exil volontaire. Son attache-
ment aux Irlandais-Unis, et leurs
Instances pour appuyet leur cause
auprès de la France, l'invilution
riîéme que lui fit le gouver-
nement directorial de se rendre
en France, le déterminèrent il
qtiittcr rAménq»»e, et en janvier
I7<j6. il était à Paris, où il se con*
«•ertait avec le général Hoche. Les
résultats de leur entrevue lurent
les expéditions de la baie de ban-
try et du Texel. Il prit alors du
service dans l'armée française, t»ilt
il devint successivement, mais en
jreu de temps, chef de brigade
et adjudant-général. Après avoir
été employ*; dans ces deux expé-
ditions, il passa dans l'armée de
Sambre-et- Meuse, puis dans l'ar-
niée d'Angleterre, et enfin dans
l'expédition du général Hardy. Il
avait serfi sotis les généraux Ho-
che, Daendels, Bonaparte, Desaix
et Kilmaiiie. Lors de cette der-
nière expédition, le vaisseau sur
lequel il était monté soutint,
pendant une journée entière, un
combat achar/ié contre 4 vais-
seaux de ligne anglais. Il fut pris
à la fin. Un des amis de collège
de Tone, sir George Hill, gouver-
neur de Londondery, le dénonça,
dit-on, et par suite, Tone fut con-
duit, chargé de cliaines. h Did)!in.
Traduit devant une cour martiale,
lorsqu'il parut d«'vanl .«es juges,
il arracha son uniforme, et dit avec
TOO ^9
indignation : a Ces fers, du moins,
ne flétriront pas les signes révérés
de fa nation que j'ai servie; je suis
plus fier de les porter pour la cau-
se que j'ai embrassée, que si j'é-
tais décoré d'une étoile ou d'une
jarretière. » Le discours qu'il
prononça pour sa défense ne dé-
lirentit point ces nobles senti-
mens,etmême, en le condamnant,
ses juges ne purent lui refuser
le témoignage de leurs regrets. Il
péril on 1798, à lAge de 35 ans ,
(l'ayant pu obtenir l'honneur d'ê-
tre fusillé. « Aimable dans la so-
ciété, dit rauleurdela noticedont
nous avons déjA parlé, hardi et
original dans ses conceptions po-
litrques , il ne connaissait ni les
difïicuUés ni le découragement.
Sa vie active lui laissa peu de loi-
sir potir écrire, et le peu d'ouvra-
ges qu'il a publiés scuit fous des
discu.ssions politiques 5ur les évé-
nemens du jour; mais le style
brillant et pur, les idées neuves
et profondes, les distinguent émi-
uenimenl des écrits ordinaires.
M. Tone fils a publié, en 181a, à
Paris, un petit iu-4°, sous ce litre :
Etal civil et poHlufue de l'ilalie
sous la domination des Gollis. Cet
écrit concourut sur la question
ouverte par la classe d'histoi-
re et de littérature ancienne de
l'institut , et obtint une men-
tion honorable. » Quand On con-
sidère l'étendue des connaissan-
ces, la sagacitéd'csprit qu'exigeait
le sujet à traiter, et le mérite de
l'ouvrage publié par M. Tone, on
est surpris que ce soit l'ouvrage
d'un ieune homme de i5 ans.
TOOKE (Wimjvm), savant ec-
clésiastique,- et littérateur anglais,
membre de la société royale de
3o
TOO
Lontlrcï et de l'académie impé-
riale de Saint-Péter!*bourg, csl né
en 1744- Sa famille voulut lui
faire embrasser la profession d'im-
primeur, et le fit entrer chez M.
Bowyer, habile typographe; mais
M. Tooke, qui avait fait de bon-
nes études, et qui préférait l'état
ecclésiastique, se fit admettre dans
les ordres en 1770. Envoyé à
Saint-Pétersbourg en qualité de
chapelain de la Aiclorerie anglaise,
il y remplit avec zèle ses honora-
bles fonctions, et profita de ses
loisirs pour visiter les bibliothè-
ques et les établissemens publics,
et se lier avec les hommes les
plus instruits d» la llussie. Il paya
noblement cette hospitalité par
les ouvrages qu'il composa pen-
dant plus de ao ns de séjour à
Saint-Pétersbourg , et que nous
citerons plus bas. M. Tooke re-
tourna à Londres en 1792, et de-
puis cette époque, il y a constam-
ment résidé. Il a donné, en 1798,
comme éditeur, le Dictionnaire
général de biographie, i5 vol. in-
8% et a fait insérer des articles re-
marquables dans le Gentleman's
magazine. En 1814? il est devenu
chapelain de sir William Domvil-
ie. OndoitàM. ïooke les ouvrage:?
suivant: 1° les Amours d'OtlinieL
et d' Aclisah, roman en 2 vol. in-
12, 1767; 2° Traduction des ou-
vrages de Falconet et de Diderot^
sur la sculpture f in-4% ^777; 5'
la Russie ou Histoire complète de
toutes les nations qui composent cet
empire^ 4 vol. in-S", 1780; ^"Vie
de Catherine //, impératrice de
Russie, 5 vol. in-8°, 1797; 5°
Coup-d'œil sur fempire deRussie,
pendant le règne de Catherine II,
jusqu'à ta fin du 18° siècle , 5 vol.
ÏOP
in-8', 1799, ouvrage traduit en
français; 0° Histoire de Russie de-
puis la fondation de cet empire jus-
qu'à f avènement de Catherine II,
•2 vol. in-8°, 1800; i;" Description
de Pétershourg , trad. de l'alle-
mand de Slorch, in-8", 1800.
TOPINO-LEBKUN (Jeas-Bap-
tiste), né à Marseille, vint jeune
ù Paris, et y cultiva Tart de la
peinture, pour lequel il avait les
plus heureuses dispositions. Il y
fit des progrès rapides et devint
un des bons élèves du chef de
l'école française. Tous ceux qui
l'ont connu dans les ateliers de
M. David ont rendu justice, non-
seulement aux talens que le jeune
artiste développa de bonne heure,
mais ù son caractère franc, hon-
nête, et d'une grande douceur à
cette époque. Passionné, comme
presque tous les artistes de ce
temps, pour les nobles idées d'in-
dépendance et de liberté, il em-
brassa la cause popnl^re avec en-
thousiasme, dès le commencement
de la révolution ; mais bientôt sa
tète méridionale s'exalta, et son
républicanisme devint sombre et
soupçonneux. Ami particulier du
maire d'Arles, A ntonelle, ci-devant
marquis, mais depuis fougueux
partisan des opinions les plus exa-
gérées, et juré au tribunal révolu-
tionnaire, Topino- Lebrun ne vit
plus que par les yeux de cet ami.
Celui-ci le fit connaître aux chefs
de la faction terroriste, qui virent
d'abord combien ce jeune homme
passionné , pouvait leur devenir
utile. Ils le firent nommer, ainsi
que son ami, juré au tribunal ré-
volutionnaire, où il eut la coupa-
ble condescendance de siéger avec
des hommes de sang, et de de-
TOP
venir lui-môine rinstrument du
crime. Ayant cependant résisté
pendant quelques niornens aux
ordres des déceinvirs, dans le
procès de Camilie-Desnioulin ,
Hérault de Séchelies et Danton,
et n'ayant enfin donné son vote
qu'après avoir été menacé de par-
tager lui-même le sort des accu-
sés, la faction dominante crut ne
plus pouvoir compter sur son dé-
vouement, et il l'ut écarté de l'o-
dieux tribunal. Le remords d'a-
voir pris part ù ses actes le pour-
suivitjusqu'ùla findesa vie. Sous
ki gouvernement directorial, To-
pino-Lebrun accompagna Bassal,
qui se rendait en Suisse, chargé
d'une mission près de ce gouver-
nement, et ne s'occupa pendant
qjielque temps que de peinture.
De retour en France, en 1797, il
fit plusieurs tableaux, dont le plus
remarquable, la Mort de Calas
Graccliiis, fut acheté par le gou-
verneiuentet donné au musée de
Marseille, ville natale de l'auteur.
Cet ouvrage capital aiuionçail un
véritable talent ; mais Tartisle
abandonna depuis ses pinceaux et
sa palette, pour se lancer de nou-
veau dans l'arène politique. La
révolution du 18 brumaire lui ins-
pira une haine violente contre Bo-
naparte, et enflamma au plus haut
point son ancienne ardeur démo-
cratique. Il secrutappelé ù sauver
la république, à s'illustrer comme
brutus et à immoler le nouveau
César. Lié depuis plusieurs années
avec le célèbre sculpteur romain
Cérachi [voyez ce nom), qui avait
conçu le même dessein, ils s'ad-
joignirent Aréna, Demervillc et
Diana, comme eux ardens répu-
blicains. Le premier cotjsul devait
TOP 5i
être poignardé, le 9 novembre
1800, i\ l'Opéra, où l'on donnait
la première représentation des
Horaces, Mais Demerville ayant
laissé entrevoir ses projets à son
ami Barrère, qui le découvrit au
général Lannes, des mesures fu-
rent prises en conséquence, et les
conjurés, munis de leurs poi-
gnards, furent tous arrêtés à l'O-
péra même, à l'exception de De-
mervillc, qui s'échappa et se ca-
cha pendant quelques jours, mais
qui se livra bientôt dans l'espoir
d'obtenir au moins la vie sauve.
Topino-Lebrun, mis en jugement
avec ses complices, fut condaniné
à mort par le tribunal criminel du
la Seine, et exécuté le 5i janvier
1801. Il s'était présenté avec as-
surance devant ses juges, ne cher-
chant point à nier sa participation
au complot qu'on lui imputait, et
marcha à l'échafaud avec le calme
et le courage qui ne l'avaient point
abandonné un seul instant durant
une longue procédure, ni pen-
dant les derniers jours de sa vie.
TOPSEiXT (J. N. ), cx-Iégis-
laleur, capitaine de vaisseau en
retraite, etc., se prononça en fa-
veur de la révolution, et fut nom-
mé, au mois de septembre 1792,
par le département de l'Eure, dé-
puté à la convention nationale. Il
ne prit aucune part au procès de
Louis XVI, étanlabsent pour cau-
se de maladie. Ses connaissances
dansla marine lui firent préférer le
travaildesbureaux sur cette matiè-
re , dans laquelle il fit plusieurs
rapports remarquables. Envoyé
en mission dans dilTérens ports, il
évita de donner lieu à aucune
espèce de plainte , et y réussit
entièrement. Il faisait partie de la
3a
TOll
flotte qui, en 1795, sortit d» porl
<le Brest, et fut attaquée par les
Anglais. Nommé à son retour
ineiiii)re du conseil des anciens,
il cessa de fij^urer dans cette as-
semblée au mois de mai 1798;
à celte époque, il obtint le grade
de capitaine de vaisseau, et devint
plus tard offîcier de la légion-
d'honneur. Mis à la retraite en
1814, il reçut en m&mc temps
la croix de Saint-Louis.
TORCY (François), membre
des conciles nationaux de France,
était prôlre de la doctrine chré-
tienne de la maison de Vitry, dé-
partement de la Marne; il devint
successivement recteur du collège
de Sainl-Omer et vicaire -géné-
ral de Reims. Il adopta les prin-
cipes de la révolution avec sages-
se, et dès 1789, il manifesta ses
opinions politique? et religieuses,
dans lesquelles les excès du régime
de la terreur ne l'ont point fait va-
rier. Doux et tolérant, il^'elTorça,
par s(!S actions et par ses ouvra-
ges, de réconcilier les partis, et
telle noble mission n'a pas tou-
jours élé sans fruit près des hom-
mes dignesdecomprendre son zèle
apostolique. Il mérita deux fois,
en 1797 et en 1801, d'être appelé
aux conciles qui se tinrent à Pa-
ris. Ce vertueux ecclésiastique
mourut en 1806, dans une obscu-
rité qu'il avait toujours recher-
chée. Ses principales productions
sont ï" Eclaircisseviena sur la cons-
titution du clergé de France, 1789,
in-8°, réimprimé l'année suivante;
9." l'Eglise gallicane vengée de tou-
te accusnlion de schisme contre ceux
qui l'en accusent, in-8". 1792;
5° Vrais principes sur le mariage,
ou lettre à un curé en réponse à
Toa
différentes questions concernant les
naissances , les mariages et dé-
cès , et la loi du divorce, 1 795 ;
4" accord des institutions républi-
caines avec les règles de l'Église.
TORENO ( LE COMTE DE ), mem-
bre dcs cortès de 1810 et de 1820,
est né à Oviédo, dans la princi-
pauté des Asturies, le 26 novem-
bre. Sa famille est l'une des plus
illustres de la province, et il s'est
montré , dans sa carrière privé<;
comme dans sa carrière politique,
l'un des citoyens de l'Espagne les
plus distingués par leurs lumiè-
res, leurs principes libéraux et
leurs hautes qualités personnel-
les. Le comte de Toreno a fait d<:
brillantes éludes dans la Castille ,
et particulièrement à Madrid. Les
sciences naturelles, les langues sa-
vantes et les principaux idiomes de
l'Europe (entre autres le français
qu'il parle parfaitement bien) oc-
cupaient ses veilles studieuses,
lorsque, étant à Madrid, le 2 mai
1808, il fut témoin des événe-
mens qui s'y passèrent. Bon ci-
toyen, homme éclairé, il se vou.i
sur le champ aux intérêts natio-
naux, et il partit pour sa ville na-
tale, où il arriva lors des mou-
vemens populaires. Malgré son
extrême jeunesse, il reçut de ses
concitoyens, dévoués à l'indépen-
dance nationale , la mission de
se rendre en Angleterre, aGn d'y
négocier une alliance entre les
cabinets de Londres et de Madrid.
Ses efl'orts eurent un plein siiccès.
Député, en 1812, à Cadix, par
la province de Léon> afin de de-
mander !a convocalinu des cor-
les , il concourut puissamment ,
par son énergie, à la création de
la régence. La province des Aslu-
li
TOR
ries le nomma son député; il n'a-
vait pas encore atteint l'âge exigé
( 25 ans) pour siéger dans cette
assemblée ; mais les coitès l'ad-
mirent, néanmoins, en considé-
ratioD des services qu'il venait de
rendre à la cau^e commune. « Dé-
fenseur constant et désintéressé
des principes libéraux, disent les
auteurs d'une biograpliie étran-
gère, il attaqua les droits féo-
daux, dont le maintien eût ce-
pendant été favorable à ses intérêts
personnels, parla en faveur de la
liberté de la presse, et se pro-
non(;a surtout avec la plus grande
force contre l'inquisition. Il con-
tribua efïicarement aux disposi-
tions qui furent prises pour régu-
lariser les finances et rétablir le
crédit public ; il eut aussi beau-
coup de part à l'abolition des or-
dres religieux. Une semblable
marche politique ne pouvait man-
quer de le signaler à la persécu-
tion qui suivit le retour de Fer-
dinand VII. Il fut contraint de
quitter ses terres, où il s'était re-
tiré, et de se réfugier en Angle-
terre , d'où il pa«sa en Franc»?. Eu
mai 181G, il fut arrêté à Paris ,
probablement à cause de son al-
liance avec le brave général Por-
lier (voy. ce nom), qui avait épousé
sa sœur ; mais II ne tarda pas à
être mis en liberté, et les journaux
aimoncèrent que son arreslalir)n
avait été l'eflel d'une méprise. Il
liabita celle capitale jus((u'à l'é-
poque où le dévouement intré-
pide d'un petit nombre de guer-
riers donna enfin à l'Espagne un
signal auquel elle répondit tout
entière (janvier, février et mars
i8ao). Rappelé dans sa patrie, le
comte de Toreno a élé nommé
TOR 55
ambassadeur h Berlin; mais il a
refusé cette honorable mission ,
eu alléguant que ses propriétés ,
qui avaitnt souffert de son lonyp
séjour chez l'élranger, exigeaient
sa présence. On assure toute-
fois que sa démission a élé re-
fusée par le roi , qui s'est borné
à lui accorder un congé. » On
a cependant rej)roché au comte
de Toreno de ne pas avoir sou-
tenu parfaitement aux cortès
de 1820, le beau caractère qu'il
avait développé en 1812. Il s'alié-
na , dit-on , les esprits par ses opi-
nions politiques . et surtout par ses
spéculations de finances. Son oppo-
sition aux exallatos avait nui au
député aux yeux de queiques-ims;
son intervention darts l'emprunt
le compromit aux yeux de tous.
TOKMAZOFF (le comte de) ,
général de cavalerie russe , gou-
verneur de Moskow, était jeune
encore lorsqu'il fil ses premières
armes contre les Perses ; il se si-
gnala par son courage et ses ta-
lens, et les vainquit dans plusieurs
rencontres. Moins heureux dans
la campagne de 1794, contre les
Polonais, il fut batlu par Koscius-
ko à Uaslavicé, entre Cracovie et
Varsovie : l'impératrice Cathe-
rine Il ne l'en récompensa pas
moins par la grand'croix de Sl-
>Vladimir et par une épée enri-
chie de diamans. Le maréchal
Buxhowdefi , gouverneur mili-
taire de Riga , forcé , eiî 1807, do
quitter son gouvernement , fut
remplacé par le général T(»rma-
zolV, qui ne vit pa» plus tôt le ma-
réchal de retour, qu'il abandonna
ses fonctions pour solliciter sa dé-
mission , qu'il obtint le 20 no-
vembre 1808. A l'époque de Pin-
34
TOU
vasion de l'empereur Napoléon
en Russie , le général ïormazoff
comiiiandait un corps destine à
<;ouvrir le duché de Varsovie, et
pénétra dans la Pologne le iC
juillet 1812. Il céda bientôt à la
marche impétueuse des Français,
et fut obligé de reculer : il atten-
dit l'ennemi dans la forte position
de Podubna; il y fut battu et éva-
cua entièrement le pays. Il reprit
sa revanche aii mois de décem-
bre , en s'emparant de Grodno ,
lorsque les troupes françaises ,
épuisées de fatigues, de froid et de
faim , se replièrent sur l'Allema-
gne. Il combattit à Lutzen , dans
la campagne de i8i5, et y dé-
ploya beaucoup de bravoure sans
obtenir aucune espèce de succès.
Au mois de septembre 1834, il
fut nommé gouverneur de ftlos-
kow^, en remplacement du comte
Kostopchii).
TORNÉ ( Pierre Anasthase ) ,
évêque constitutionnel, naquit à
Tarbes, le 21 janvier 1737, d'une
famille dont le chef était juriscon-
sulte et officier des eaux et forêts.
Le goût que le jeune Torné an-
nonça de bonne heure pour les
sciences le sauva des dangers
d'une mauvaise éducation. A pei-
ne sorti de l'enfance, il entra dans
la congrégation de la doctrine
chrétienne, société rivale des jé-
suites , mais cultivant, sans in-
trigue, sans ambition, sans into-
lénuice, les beaux-arts et l'ensei-
gnement, par le seul désii d'être
utile et renfermant dans son sein
plus de philosophes que de bigots;
son activité n'était pointemployée
à des objets frivoles. Torné, jeune
encore , devint géomètre ; un
Traité de Mathématiques, qui de-
TOR
vint classique, fut l'heureux pré-
sage de ses talens. D'Alembert 'A
Lagrange le jugèrent digne de par-
tager leurs travaux. Ses premiè-
res années furent passées ainsi au
sein d'une société savante, sensi-
ble à la gloire et au plaisir obscur
de former des enfans. ïorné sen-
tit encore le besoin d'instruire des
hommes. Une carrière plus vaste
s'ofl'ril devant lui; mais il conser-
va jusqu'à la fin de sa vie le plus
tendre souvenir des leçons et des
principes qu'il avait reçus dans
cette société vraiment honorable.
Dès l'âge de 20 ans, il prépara les
matériaux des ouvrages qui de-
vaient un jour faire sa réputation.
Pfu d'hommes, à cette époque ,
avaient reçus au même degré les
qualités d'un excellent orateur.
Il fut armé de bonne heure contre
les préjugés; des vues grandes et
salutaires s'iissociaient en lui à
des expressions vives , sans dé-
clamation ni fausse chaleur. Rour-
daloue , sur les pas de Rossuet et
de Massillon , l'avait devancé :
c'était beaucoup que d'oser suivre
leurs traces; ce ne fut pas asseï
pour Torné. Il sut se former une
route nouvelle et laisser après lui
la foule d'ouvrages composés sur
les mêmes sujets. Jamais il ne
connut cette austérité larmoyante
qu'on voudrait inutilement faire
prendre pour la vertu. La fran-
chise avec laquelle il expose une
doctrine primitivement fondée
sur la tolérance et l'humilité ,
mais défigurée par l'intérêt, le
fanatisme et l'orgueil; le lieu, les
circonstances dans lesquels il la
produit, toutannonce la fermeté,
la noble fierté, qui ne permettent
ni de l'oindre ni de dissimuler ;
TOR
mais cet amour des homme? qui
rend ennemi de toute persécu-
tion : c'est dire assez qu'il se con-
damna à une vie retirée. Associé
aux travaux littéraires des acadé-
mies de Toulouse , de Nanci ,
d'Orléans, etc., Torné avait été
annoncé à Paris; il y jouit d'une
considération qu'on a beaucoup
depeine à yacquérir, et qu'il con-
serva plus dilUcilement encore
dans son propre pays. Il s'était
affranchi, comme il l'annonce lui-
même dans ta préface de ses ser-
mons imprimés, d'un exorde mé-
thodique et de la forme symétri-
que qui coupe le fil de l'aHention
quand les sujets peuvent être pré-
sentés d'une nianière plus natu-
relle. Les temples qu'on avait vus
désert•^ ne sulfisaient [las pour
contenir les flots de ses auditeurs,
lorsque Torné fut appelé à la
cour de Louis XV. 11 ne se dissi-
mula pas l'étendue de)*^levoirs que
lui imposa la puissance ni les incon-
véniens attachés à la faveur douce
et amère d'annoncer de grandes
vérités devant «les courtisans ;
ceux, plus j^rands «uicore, de lut-
ter contre le torrent des vices et
le scandale qui «levaient amener
l'explosion des lumières: Torné les
exposa avec courage. Simple et
.suldime dans ses discours, il eut
pour admirateurs le? amis d'une
morale qui force la politique à
respecter le honheur des indivi-
dus; on applaudit, même à la
cour, ce pas«;.gede la fidélité duc
aux souverains : « Ne croyez pas
» que par iine inviolable fidélité,
» j'enlende ici une aveugle obéis-
» sauce aux ordres justes ou in-
I» justes de non maîtres, ime dé-
0 pendanoe toujours prête à leur
TOR 55
» sacrifier les lois sacrées de l'é-
» tat, à étouffer, pour les servir,
» les cris de la conscience. Qui
» oserait donner le beau norn de
» fidélité l'i cette lâcheté honteuse
» et sacrilège? Père, mère, maître,
» souverain, ne doivent être obéis
» au préjudice de lu loi ; hésiter
» dans le choix serait un crime :
B disgrâces, châlimens , prisons ,
« martyre , il faut tout souffrir
■ courageusement, tel est l'exem-
• pie à jamais mémorable de la
» légion thébéene. » Ue grands
einplois, l'honneur de partager la
dégradation des boyards de Ver-
sailles ne peuvent retenir Torné :
la faveur, bien loin de l'éblouir,
lui devient importime ; le calme
de la solitude, dont il avait joui du-
rant plus de vingt ans, convenait
mieux à son âme. Il choisit pour
demeure le prieuré de Saint-Paul,
à l'entrée de la vallée de G;impan,
L'oraison lunèbre de Louis XV ,
qu'il prononça devant l'assemblée
des états de Bigorre. ne fut pas du
moins souillée par la flatterie qui
j>oursuit les rois jusqu'au tom-
beau. Mais rien n'a pu exruser
Torné auprès de l'ignorance pri-
vilégiée ; elle ne lui pardonna ja-
mais ni la supériorité de ses talens,
ni sa noble franchise ; les senii-
mens qu'il professait devaient lui
attirer de nombreux ennemis ,
tout autre en aurait été effrayé ;
il était dans sa destinée de mar-
cher entre l'admiration et la jalou-
sie. La malignité ne supportait
pas un prieur aimable qui riait
des superstitions, donnait des grâ-
ces à la raison et de la gaîlé an
bon sens : -riiu» ue lui imposait si-
lence sur ce qu'il croy.iit raisonna-
ble et juste. Il nttenditit des jours
50
TOR
nouveaux;ces jours brillèrent pour
lui, il les avait prévus en arra-
ihanl la preniiîire pierre de l'édi-
fice réoiJal. Torné présenta à ras-
semblée nationale ranal3'se exac-
te des cahiers des députés. On
retrouva dans tous ses écrits la
même indépendance de la pensée,
ce même bonheur d'expression
qui le distinguent. Le département
du Cher, sans le secours des bri-
gues et des ressorts toujours visi-
bles de la séduction , l'appela aux
fonctions épiscopales. Trop digne
pour les refuser, il ne céda à ce
vœu que par cet amour du bien
public, auquel il savait tout sa-
crifier. Son premier soin en arri-
vant :\ Bourges, fut d'ôler tout
prétexte à ceux qui , en excitant
les discordes civiles, se plai-
gnaient des désordres qu'ils fai-
saient naître par leurs clameurs et
leurs imprudentes provocatiotis.
Pontife citoyen, président du dé-
partement, il lui procura, par sa
modération et ses travaux, un
repos trop com[)romis ailleurs.
Appelé en 1790 à l'assemblée lé-
gislative , Torné n'employa pour
maintenir la dignité de la repré-
sentation nationale, que la su-
périorité de ses talens et celle de
ses conseils. Indifférent pour les
richesses et pour toutes les digni-
tés , il n'aspirait qu'à jouir des
sentimens tendres et de la félicité
domestique , adoucissement aux
uiaux de la vie dans les consola-
tions et l'union des âmes tendres,
que Home uîoderne a elle-même
sanctifiée. Lorsque la liberté pa-
rut se livrer à des excès qui pou-
vaient la perdre , ou ofiVir à ses
♦^nnenxis tant de ressources contre
elle , des causes trop connues
TOR
pour les rappeler, ramenèrent l'é
vêque du Cher au sein de sa pa-
trie. Tout autre que Torné, en ac-
ceptant la modique place de bi-
bliothécaire de l'école centrale de
Tarbes , aurait cru faire le sacri-
fice de son amour-propre. Torné
éprouva cette vérité de l'orateur
romain, que les belles-lettres con-
solent puissamment au fort de nos
revers. Il conservait tout le feu de
la jeunesse, son cœur n'avait pas
vieilli ; sa vie fut un travail con-
tinuel ; son âme, pleine d'images
douces et riantes , était plus à ses
amis qu'.-^ lui-même. Personne
n'encourageait les jeunfts talens
avec plus de plaisir, personne ne
rendait plus de justice à sesrivaiix.
Jamais il n'éprouva la crainte ni
aucun des tourmens ordinaires du
cœur humain, et cet homme a
traîné le poids d'une affreuse mi-
sère. Sa fortune ayant souffert la
réduction commune et des mal-
heurs particuliers, il dut l'exis-
tence de ses derniers jours à une
femme douée des charmes de l'es-
prit, que donnent l'énergie et la
constante ami tié(madame Cl a rac).
Torné n'aperçut pas la tnort qui
vint le frapper; i! s'endormit du
sommeil éternel à Tarbes, dans l'a-
sile d'un ami (M. Merens), qui l'a-
vait retiré chez lui, le 25 nivôse
de l'an 5 cîe la république fran-
çaise, âgé d'environ 70 ans.
TORO ( LE MARQUIS DEL ) , né i'i
Caraccas vers 17O9. d'une famille
distinguée, était colonel, cheva-
lier de l'ordre de Charles III. et
recteur de la municipalité de Ca-
raccas , à l'époque de la révolu-
lion de 1808, et au moment mê-
me où les corlès et le frère de
l'empereur {voy. Bonaparte-Jo-
TOll TOR r>7
ïeph) se ilisputaient le liôiie tl'Es- quand il eut besoin de retiforts et
pagne; il se rangea à l'iivis de d'approvisionnemens , il lui fut
ceux qui voulaient un gouvern*;- impossible de s'en procurer; d'un
ment indépendant de ees deux autre côté , les mauvais temps
i'.utorités, et fut arrêté, en 1808 , l'empêchèrent d'exécuter l'atla-
corame signataire d'une pétition que projetée contre la Vêla de
qui tendait à établir, dans la pro- (îoro; le marquis del Toro, obligé
vince de Venezuela, une junte ri- de battre en retraite, n'échapj)a
vale de celle d'Espagne. Sa cap- qu'avec peine aux difficultés qu'il
tivité ne dura que quelques jours, rencontra, et manqua totalement
néanmoins il resta étranger. aux le but de son entreprise, l/annéc
affaires jusqu'au moment où la suivante , chargé de réduire la
municipalité de Caraccas, s'étant ville de Valencia, qtie les Espa-
réunie aux députés nommés par gnols qu'elle renfermait dans son
le peuple, prit les rênes du gou- sein avaient obligée de se séparer
verneinent sous le nom de junte de la république de Venezuela, il
suprême, en reconnaissant toute- ne força qu'avec peine, et une
fois la souveraineté de Ferdinand perle considérable, le passage qui
VII. Tel fut, le 19 avril 1810, le y conduisait; son gouvernement ,
signal de la révolution, auquel qui commençait à douter de son
répondirent les autres provinces habileté, le rappela, et lui don
de l'état de Venezuela. Les agens na pour successeur le fameux
de la métropole, voulant arrêter Miranda [voy. ce nom). Dès-lors
cet élan patriotique, prirent des le marquis del Toro duT craindre
mesures de rigueur pour le rél;i- de tomber entre les mains des
blîssement de la monarchie abso- espagnols; il chercha son salut
lue dans celte contrée. Le gou- dans la fuite, et se retira à la Tri-
verneur royal de Maracaybo me- nilé , où il vécut long-temps des
naça en même temps les déparie- secours de sa famille, lous ses
mens de Mérida et de Truxillo, biens ayant été confisqués par or-
au secours desquels la junte su- dre du roi. On crut un instant
prênie envoya le marquis del que les événemensqui eurent lieu
Toro à la lêle d'un corps de trou- en Espagne, en 1820 , auraient
pcs. Celui-ci négocia d'abord avec quelque influence sur le Nou-
le gouverneur pour l'amener à veau-Monde, et que les haines,
son parti ; n'ayant pu réussir, il les vengeances , disparaîtraient
marcha contre le déparlement de pour faire place à la paix, si né-
(îoro, et entra sur son territoire cessaire aux deux parti». Cet cs-
en riovembrc 18m. Son expédi- poir s'est évanoui; le Nouveau-
lion, qui eu\ d'abord du succès, Monde a été obligé de conquérir
échoua par le peu de précautions son indépendance, et les derniers
que prit le cherjiour la faire réus- succès de IJolivar( i8a5) paraissent
sir; il s'était enfoncé dans un pays l'avoirassuréepour jamais, Lemar-
sauvage et sablonneux, sans échc- quis del Toro, qui y' a c(uicouru
louiier ses Irouprs. pour asstir(;r «h; tous ses nmyens dans des cir-
scs communicaliuus, d«; sorte que, con.slaiices dilliciles, doit recueil-
38
TOR
lir aujourd'hui, au iniluiu de ses
concitoyens, le fruit de ses ef-
forts.
TORO ( DON Ferdinand del ) ,
frère du précédent, ne à Carac-
cas en 1779, passa fort jeune en
Jlspngne, où il servit dans Taruiée
de terre jusqu'en 1811. Il revint
à cette époque à Caraccas avec le
grade de colonel, l'emploi de
sous-inspecteur-général et la dé-
coration de Tordre de Charles III.
Au moment où les idées d'indé-
pendance se manifestèrent dans
l'Amérique, il se montra leur par-
tisan, prit rang parmi leurs dé-
fenseurs, et combattit avec beau-
coup de courage sous les ordres
du général Miranda. 11 contribua
aussi puissamment à la prise de
Valeucia ; mais au rTioment où,
emporté par sa valeur, il attaquait
une batterie royaliste, il eut les
deux jaiilbes coupées par un bou-
let de canon. Ayant survécu à
l'ampulation , mais hors d'état de
servir sa patrie , il prit le parti de
se retirer avec son frère à l'île
de la Trinité, où il resta jusqu'au
moment où il lui fut permis d'al-
ler jouir dans sa patrie de la li-
berté qu'elle avait si glorieuse-
ment conquise. Il est générale-
ment regardé comme un très-bon
militaire.
TOaRE (Bernard de la), évo-
que de Casteilamare, né à Naples
en 1746? embrassa Pétat ecclé-
siastique, en quittant le barreau,
auquel il était destiné. Il se forma
dans le séminaire métropolitain,
où il occupa ensuite une chaire
de pliilosophie et la place de di-
recteur de l'académie apologéti-
que do la religion catholique. En
1791 , il fut élevé au siège épis-
TOR
copal le Marsico-Nuovo, en Basi-
liuate Plein de zèlt; pourl'éduca-
tiou du clergé,doiit l'instruction lui
pa.-aissait le meilleur moyen pour
rendre la religion respectable,
son premier soin fut d'organiser
un séminaire, qu'il légua à son
successeur, lorsquil fut appelé à
gouverner l'égli-e de Letlere et
de Gragnano. Celle nouvelle des-
tination le rapj.irucha de la capi-
tale, et le mit par là en élat <le se
charger de quel(|ues travaux ex-
traordinaires. Le gouvernement
napolitain le nomma membre d'u-
ne commission d'évêques, créée
poi;r discuter les affaires ecclésias-
tiques du royaume, et Pie VI, en
partant de Rome, lui donna une
marque d'estime, en le choisissant
pour son légat apostolique. Pen-
dant les troubles politiques qui
eurent lieu à ISaples en 1799, ce
sage prélat sut par sa prudence et
ses conseil», calmer TefTervescen-
ce populaire, et il renouvela
l'exemple de l'évêque d'Imola
{voj. Pie VII), en rappelant ses
ouailles à l'obéissance des lois.
Mais comme dans une lettre pas-
torale, adressée à ses diocésains,
il avait prouvé la compatibilité de
la religion catluilique avec le gou-
vernement républicain, au retour
de la cour de Siciie, il fut arrêté
et jeté dans un cachot, dont il ne
sortit que pour être condamné à
l'exil. Chassé de sa patrie, qu'il a-
vait édifiée par sa piété, il vint
chercher un asile en France, où il
se fit chérir par la douceur de son
caractère. Après la paix de Flo-
rence (en 1800), il lui fut permis
de rentrer dans ses foyers, mais
il préféra d'aller vivre à Rome,
où il resta jusqu'à l'année 1806 ^
TOR
que le royaume de Naple» retoin-
i)a 80US la domination élraDgère.
Joseph Bonaparle, qui, en mon-
tant sur le trône, avait été obligé
de donner un exem|)le de ferme-
lé, en éloignant de ses étals le
cardinal archevêque {voy. Ruffo-
Louis), le Ot remplacer par l'évê-
que de Gragnano, qui prit le litre
de grand-vicaire, et remplit ces
fonctions pendant tout le règne
de Joseph et de Joachim (voy. Mu-
BAT.) Le séminaire de cette ville
reput alors une nouvelle organi-
sation; les prêtres, les curés, et
toutes le» classes de l'ordre ecclé-
siastique, présentèrent le specla-
ble bien rare dans un pays catho-
lique, de la tolérance, de la cha-
rité et de la soumission aux lois.
Pfacé à la tête du comité-général
de bienfaisance, Rernard de la
Torre eut soin des pauvres, qui ne
le trouvèrent jamais sourd à leurs
plaintes. Il était habitué à parla-
i^er son bien avec les malheu-
reux, et on l'avait déjà vu, dans
une année de discite, épui,»er tou-
tes ses ressources, réformer sa ta-
ble, vendre sa voiture, ses che-
vaux, et jusqu'à son anneau épis-
copal, pour répandre en abondan-
ce les aumônes. Le roi Joachim
rendit honimage à se» vi-rtus , en
le nommant aumônier de ses en-
fans, et en le décorant du grand-
cordon de l'ordre des Deux-Sici-
les. Au retour de Ferdinand IV,
en i8i5, le grand-vicaire de Na-
ples se relira dans son diocèse, où
il ne s'occupa <jue des devoirs de
son ministère. Lorsque, iiar l'effet
du concordai conclu, en 1818,
entre le roi de Naples et la cour
de Rome, le sieste de Lettere
et (iragnano fut réuni à l'églijc
ÏOR
^1)
de Caslellammare, ce digne é-
vêque se transporta dans sa nou-
velle résidence, et songeait déjà
à la fondation d'un séminaire.
Frappé d'un coup d'apoplexie,
il mourut à Portici , le 28 mai
1820. Il a laissé un traité sur
les Caractères des incrédules , pu-
blié en 1779; "" poëme sur le
rétablissement du christianisme ,
imprimé en 1816, et un ouvrage
sur la f^érité de la religion chré-
tienne, qui n'a paru qu'après sa
mort.
ÏORRÈS (Louis DA MoTTA Tko
ET ) , genlilhomme de la maison
de roi de Portugal, de son con-
seil , et vice-amiral dans la ma-
rine portugaise, naquit à Lisbonne
le 16 mars 1769; troisième ûls
d'un autre du même nom , grand-
trésorier de Leuta et gouverneur
du Ceara, grand au Brésil, et de
dona Anne d'Azevedo Continho,
il descendait par son père de Mem
Gundar la Motte , gentilhomme
français , compagnon <lu comle
Henri de Portugal. Entré dans le
corps (le la marine dès l'ûge de i4
ans, il fit ses études à l'académie
des gardes-marines, y obtint les
prix en trois différens examens,
ayant subi le dernier devant S.
M. la reine régnante de Portugal,
Marie 1", les princes feu dom
Joseph et dom Jean, aujourd'hui
roi. Lieutenant de mer en 1788,
brigadier d'une compagnie des
gardes - marines embarqués , et
capitaine-lieutenant en 1791 , il
servit constamment, du 24 avril
1786 jusqu'en 1790, sur les vais-
seaux le Uon Succès, les Plaisirs,
la Conception , la Méduse , la
Marie première, et sur les frégates
le Prince du Brésil , la Minerve,
4o
TOR
le Saint-Raphaël et la Charlotte,
lesquels firent partie des flottes
qui, dans le temps, furent em-
ployées sous divers chefs à la
croisière du détroit de Gibraltar
et à Naples, Calheri, etc. Capitaine
de frégate en 1793, il s'embarqua
sur la Reine de Portugal ^ un des
vaisseaux de l'escadre du contre-
amiral A. J. do Valle, escadre qui,
unie à celle d'Angleterre , com-
mandée par l'amiral lord How,
s'occupa à croiser sur les cô-
tes de France et d'Angleterre jus-
qu'en 1795 ; bientôt il eut le com-
mandement du brick le Lièvre, de
22 canons, sur lequel il fut à Gi-
braltar, Ceuta et Tetuan; capi-
taine de mer et de guerre en 1 796,
et commandant la frégate VUlysse,
il fut à Marrocos conduire des ca-
deaux pour l'empereur, et retour-
na à Lisbonne, après sa commis-
sion, avec i4 hommes en état de
service, à cause d'une épidémie
déclarée à bord de la frégate.
Déji\ chef de division, il fut em-
ployé à la défense du port de
la capitale en 1797, 1798 et 1799;
eut sous ses ordres une flottille
de canonnières et des barques
flottantes, et la première division
du corps, Brigade Royale des ma-
rines, et après, en l'absence du
général marquis de Niza, toutes
les trois divisions du même corps,
qu'il organisa. Le i5 mars 1800,
il partit de Lisbonne pour le Bré-
sil, sur la frégate l'^^mazone, com-
mandant un convoi de sept vais-
seaux de guerre et de cent quatre
vaisseaux marchands; ce convoi,
le plus riche qui soit sorti du Por-
tugal, arriva heureusement aux
ports de sa destiriation , où il
mouilla avec ceux qui étaient pour
TOR
Bahia , en juillet de la même
année , sa frégate ayant ouvert
une voie d'eau de trente pouces
par heure. Il continua à servir
dans la station d'Amérique, et y
fut chargé de bloquer Rio de la
Ptata, ayant sous ses ordres la
Marie première ; ce service, dans
une saison très-orageuse , dura
plus de trois mois, et il y prit un
brick espagnol. Pendant la paix,
il gouverna la capitainerie de la
Paraiba du Nord au Brésil, où il
se fit aimer par son gouverne-
ment sage et populaire; chargé
par le prince -régent de deman-
der aux peuples une souscrip-
tion pour les besoins de l'état,
il commença par mettre son nom
à la tête de la souscription pour
6,25o fr. , et son exemple étant
généralement suivi, il envoya en
Portugal la somme de i5o,ooo fr.
En décembre i8o5, il fut envoyé
à Gibraltar prendre le comman-
dement de la flotte du détroit ,
composée de deux vaisseaux, deux
frégates et deux bricks , et en
même temps chargé d'aller à Ar-
gel pour faire la paix avec le bey;
déployant son pavillon sur la
Reine de Portugal, il débarqua en
Argel dans son canot, y resta sept
jours, et ne put rien faire, à cause
des prétentions inouïes de ces bar-
bares; alors retournant à bord, il
établit des croisières si actives ,
qu'i^ prit deux corsaires arge-
liens, et en bloqua deux autres si
étroitement, un à Saint-Lucar de
Bararaeda, et l'autre à Arzilla .
qu'ils furent obligés de se rendre.
Cette flotte prit aussi trois polo-
naises sur les forces de Tripoli, pour
venger l'insulte qu'ilsavaient faite
au pavilIonportugais,en emmenant
TOR
un bSlirnent d'Hambourg, ancré
prèsdu forld'Ericeira. N'ayant pas
suivi la famille royale au Brésil
en 1807, ù cause de la mauvaise
volonté du ministre de la marine
d'alors, il montra , en 1808, son
patriotisme , donnant pour les be-
soins de la guerre 8,2.57 francs en
argent, quelques ustensils et un
bon cheval pour la cavalerie, et
il prit aussi le commandement
d'une brigade des légions natio-
nales. En 181 1 , il partit pour Rio
de Janeiro par ordre du prince,
lequel, à son arrivée, le fil com-
mandeur de l'ordre de Saint-Be-
noît d'Avis. Contre - amiral en
1812, il fut nommé capitaine-
général du royaiune d'Angola, en
Afrique, en iHi5. Une belle pro-
menade publique, une grande
halle aux comestibles, l'agrandis-
sement de la place du palais, des
avenues d'arbres plantés, les for-
teresses et les casernes réparées ,
et surtout l'intérêt que lui inspira
rhôpital royal de la Miséricorde ,
lequel était entièrement dénué de
tout le nécessaire, et pour lequel
il obtint une souscription de
85,ooo fr., y entrant avec 5,760
IV. , ce qui lui donna les moyens
d'approvisionner l'hôpital et de
laisser encore de l'argent à son
successeur ; ces belles actions ,
jointes à ses manières populaires et
à son désintéressement, rendront
à jamais s&n nom célèbre dans ce
pays. Vice-amiral en 1818, il re-
tourna à Rio de .laneiro en 1819,
et y fut nonmié, en 1820, con-
seiller de guerre dans le conseil
supérieur et militaire. Accompa-
gnant le roi pour le Pfirttigal , eu
i8*ii, il y fut employé dans le
conseil de l'amirauté jusqu'à son
TOU
4»
extinction ; alors se retirant che^
lui, il ne put survivre au total
anéantissement de la monarchie
portugaise, et il est mort le 26
mai 1823. Sa perle, vivement
regrettée par son roi et par ses
camarades, prive la nation por-
tugaise d'un de ses meilleurs ofli-
ciers de marine. 11 laissa de sa
femme, née M"" Falcao Wanzel-
1er, un fils, aujourd'hui major, et
deux filles.
TOLlLAN (Pierre- Antoine),
naquit à Toulouse en 1761, et non
à Bordeaux comme l'a avancé
sans fondement la biographie mo-
derne d(j libraire Eymery. Il était
domicilié <lans la capitale de la
Guienne quand la révolution é-
clata. Les principes du nouvel or-
dre de choses charmèrent l'iime
ardente de Toulan; il se montra
enthousiaste à l'excès de la régé-
nération politique, et partit pour
Paris, afin, disait-il, de l'admirer
de plus près. Son zèle parut digne
de récompensée; on lui donna une
place lucrative dans l'administra-
tion des biens des émigrés. Quel-
ques chefs de parti de celte épo-
que, croyant pouvoir l'employer
utilement dans leurs inlérêls, le
firent comprendre au nombre des
membres de la commune de Pa-
ris. Après le 10 août 1792, Louis
XVI et sa famillle ayant été cou-
duilsauTemple, leur garde fut con-
fiée aux officiers municipaux de la
ville. Toulan ne j)ut voir de près
celle grande infortune sans la
secourir autant qu'il dépendrait
de lui. Bientôt même un motif
plus impétueux encore se joignit
■\ ce senlimrnt généreux , car
un voile mystérieux couvre une
partie des actions de Toulan; Il
4» TOU
parvint à faire connaître à la
reine qn'ello pondait compter ïur
sa fidélité, et dès lors il la servit
avec zèle. Voici ce qu'en dit Cléry
dans 5es Mémoires : « Un jeune
homme, nommé Toulan, que je
croyais à ses propos un des pins
grands ennemis de la famille
royale, vint un jour près de moi,
et me «errant la main: — Je ne
puis, me dit-il avec mystère, par-
ler aujourd'hui à la reine à cause
de mes camarades; prévenez-la
que la commission dont elle nj'a
chargé est faite; que dans quel-
ques jours je serai de service, et
qu'alors je lui porterai la répon-
se. Etonné de Tent u'Ire parler
ainsi, et craignant qu'il ne me
tendît un piège: — Monsieur, lui
dis-je, vous vous trompez, vous
vous trompez en vous adressant à
moi pour de pareilles commis-
sions. — r Non , je ne me trompe
pas, répliqua-t-il en me serrant la
main avec plus de force , et il se
retira. Je rendis compte à la reine
decette conversation : vous pouvez
vous fier àToulan, me dit-elle. »
M. Hue, dans son ouvrage, parle
également avec éloge de ce jeune
homme, dont les efforts généreux
ne furent pas couronnés du suc-
cès. Il servit à entretenir la cor-
respondance de la reine avec ses
amis du dehors; mais trop d'em-
pressement, des manières trop
respectueuses envers les augustes
prisonniers, perdirent Toulan : ii
éveilla les soupçons des espions
nombreux dont la tour du Temple
était environnée; on l'arrêta, ainsi
ijue neuf autres officiers munici-
paux, accusés comme lui d'avoir
voulu favoriser l'évasion de Mar ie-
Ântoinette, et le tribunal révolu-
TOU
tiunnaire de Paris le condamna -à
la peine de mort le 3o juin 1794.
T013L0NGE0N ( le vicomte
François-Emmanuel de ) , ancien
colonel de chasseurs, membre de
l'assemblée constituante et du
corps-légiïlatif, membre de l'ins-
titut, commandant de la légion-
d'honneur, naquit à Champlite ,
près de Gray, département de la
Haute-Saône, Destiné par sa nais-
sance à la carrière des armes, il
fit néanmoins des études très-dis-
tinguées , et entra de bonne heure
au service. Il employait ses nom-
breux loisirs à cultiver les lettres,
et se fil connaître bientôt par son
mérite comme écrivain. • il donna
une preuve de ses talens, dit M.
Grappin, secrétaire perpétuel de
l'académie de Besançon , lors-
qn'après la séance publique du 3o
juin 1779, dans une réunion des
membres de l'académie et des
chefs de corps militaires , en l'hô-
tel de M. le maréchal de Ségur,
qui avait été installé ce jour-li
même à l'académie , M. de Tou-
longeon lut rme pièce de poésie
qui fut tellement goûtée, que dans
celte réunion même, on lui des-
tina, par acclamation, la premièr«
place d'académicien qui viendrait
à vaquer. Ce poëme était une al-
légorie fine et ingénieuse sur la
retraite de Mars au l'arnasse, dont
il ne fut pas difficile de faire l'ap-
plication. Nommé académicien ti-
tulaire le k" décembre de la même
année, M. de Toulongeen prit sa
place à la séance publique qui eut
lieu cinq jotirs après. Son dis-
cours de réception fut un chef-
d'œuvre de délicatesse et de goût,
qu'une extrême modestie relevait
encore. C'est une harangue êlo-
TOU
qucnte où sont développées ton-
tes les nuances de l'esprit, où l'o-
rateur observe son influence sur
les ouvrajjes inCMne de génie , et
présente en quoique sorte l'his-
toire de l'esprit pour le siècle qui
vient de s'écouler, o Le génie
crée , disait M. de ïoulongeon ,
l'imagination invente; le talent se
fixant sur un objet déterminé,
produit , exécute ; . le jugement
apprécie et choisit; l'esprit plane
sur toutes ces facultés de l'âme,
embellit et perfectionne De
toutes nos facultés , c'est la plus
perfectible ; il s'approprie tout, il
louche à tout ; et tandis que le
génie , dédaignant les secours
étrangers, s'éliiuce par ses seules
forces, se siiflit et s'alimente par
sa propre substance, l'esprit se
met à sa suite , observe ses écarts,
les évite, s'enrichit de tout ce qu'il
néglige, ajoute la beauté des for-
n)es à la richesse de la matière ,
copie les traits origiiiaux de son
rival, et Cuit par lui ressembler
assez pour oser se mettre à sa
place. Tout ce qu'il a touché n'est
pas or; mais tout ce qu'il louche
en prend la couleur. » Que j'ai-
merais à suivre M. deToulongeon
dans l'analyse qu'il fait de l'es-
prit, de» prodiges qu'il enfante,
de SCS erreurs ! A ses yeux, Vol-
taire eut le pas sur tout ses ému-
les, parce que ceux-là n'avaient
qu'un genre, et que tous les gen-
res étaient de son domaine. « Il
porta le sceptre de la littérature ,
qui, pcndatit quarante ans, avait
été dans les maitts de Fontenelle,
mais que Voltaire surpassa par lu
variété de se» connaissances et
par le brillant de son esprit. Fon-
tenelle, donnant le ])u:! à l'humuie
TOU
43
d'esprit sur l'homme savant , s'é-
tait borné i\ mettre l'esprit à la
mode , et à dépouiller la science
et l'érudition du costume impo-
sant qui tenait l'esprit éloip;né
d'elles. Son esprit, tout en agré-
ment et en grâce, paraissait con-
sacré tout entier à la société. Il
n'employait qu'une tournure fa-
cile et légère, et n'humiliait Ri-
mais les préventions... Le bel es-
prit, dit enclore M. de Toulon-
geon, l'esprit des mois était déjà
tombé; Molière en avait fait jus-
tice. Il fallut que l'esprit cherchât
de nouveaux domaines; il s'em-
para de la poésie, puis de la phi-
losophie; et ce sont peut-être les
deux élémens qui lui convenaient
le mieux , parce que l'un apparte-
nait à l'imagination , et l'autre au
raisonnement. L'esprit, qui de sa
nature est imitateur, produisit
dès-lors une quantité d'ouvrages
brillans par l'élégance et la légè-
reté; mais ou ne vit presque plus
s'élever ces monumeris du génie,
tels qu'en avait donné le siècle de
Louis XIV. La poésie, alors sim-
ple et correcte, devint précieuse
cl maniérée; les grâces y présidè-
rent encore, mais leur nudité anti-
que se chargea d'ornemens. L'es-
prit fit hur la poésie l'effet qu'elle
fait ordinaire ment su ries hommes:
il altéra le caractère , on saisit
mieux les nuances, mais les grand»
traits se {)erdirent. Montesquieu
est le premier qui appliqua l'es-
prit à la philosophie, comme Des-
cartes avait appliqué le premier
l'algèbre à la géométrie. La phi-
losophie y gagna ; l'esprit , qui est
entreprenant , loi communi(|ua
son audace ; elle parla plus hatil,
elle osa dire tout ce qu'elle crui
44
TOI]
une vérité; et en cc!a . ses inten-
tions excusèrent ses erreurs
Mais l'esprit et la philosophie ne
se réunirent jamais avec plus d'a-
vantage que dans le Télémaque
de Fénélon, pour donner au mon-
de leur ohel-d'œuvrc. L'esprit y
a prêté à la philosophie toutes ses
grâces, et a reçu d'<lle toute sa
vSOiiidité — Fontenelle avait ame-
né la mode de l'esprit; Helvétius
amena celle de la philosophie, et
la philosophie , autrefois retirée
dans le cabinet des sages, se ré-
pandit dans la société. Mais quelle
lut son influence ? Et l'esprit et la
philosophie, en étendant la masse
des lumières, ajoutèrent-ils aux
vertus, ou du moins au bonheur
des hommes? » Ce discours
n'a pas été publié. Dans la même
séance ( 5o juin 1779), il lut
une imitation de deux idylles de
Gessner, qui fut très-applaudie.
M. de Toulongeon était, avant la
révolution, colonel de soo régi-
ment. Il se montra philosophe à
une époque où rien n'annonçait
que les principes philosophiques
détruiraient un jour les préjugés
et le vieil édifice de la monarchie.
Non content d'avoir rendu libre
vses vassaux, il écrivit pour la li-
berté générale. En 1788, il avait
déjà prouvé qu'il était l'ami du
peuple dans ses Principes naturels
et constitutifs des assemblées na-
tionales, ouvrage qu'il fit circuler
avant la tenue des états-généraux,
avant même les états de Franche-
Comté , qui les précédèrent im-
médiatement. )> On y voit un rai-
sonneur profond, calciilant, d'a-
près les monumcns de l'histoire .
les droits des peuples et des sou-
verains , fixant aux princes l'éten-
TOU
due de liMir autorité, au clergé e>
A la noblesse ce qu'ils pouvaient
légitimenient revendiquer de pri-
vilèges , mais reconnaissant dans
le peuple la principale force de
l'état; d'où il conclut la nécessité
de soulager cette partie intéres-
sante de la nation, et de la ren-
dre habile aux dignités dont la
perspective seule pourrait la con-
duire à de grandes actions , et
accroître par conséquent la gloire
de l'empire. » Député aux étals-
généraux, en 1789, par la no-
blesse de la Franche-Comté , il y
partagea les principes de la mi-
norité de son ordre, et néanmoins
il s'efforça d'excuser le? protesta-
tions du clergé et de la noblesse,
qui se croyaient liés par leurs
sermens. Ce fut M. de Toulon-
geon qui , au mois de septembre
1789, proposa de soumettre la
déclaration des droits à la sanc-
tion de Louis XVL II rédigea, le
26 janvier 1790, le décret por-
tant qu'aucun membre de l'as-
semblée, même en donnant sa
démission, ne pourrait accepter
d'emploi de la cour. Dans la
séance du 12 avril, il demanda
l'ordre du jour sur la proposition
tendant à déclarer la religion ca-
tholique religion dominante. Au
mois de janvier 1791 , il se plai-
gnit de l'inscription de son nom
parmi ceux du club monarchique,
et s'opposa à ce que les membres
de l'assemblée fussent rééligibles
aux assemblées suivantes. Il in-
sista, au mois de jtiin, pour que
le droit de faire grâce fût conser-
vé au roi. Le 2^ du même mois,
il demanda que ce prince, qui ve-
nait d'être ramené de Varennes,
fût trailé avec le respect cl les
TOU
égards que méritaient son carac-
tère. Sa noble conduite dans l'as-
seiTiblée lui valut des témoignages
éclatans de l'estime de ses conci-
toyens , lorsqu'à la fin de la ses-
sion J1 retourna à Gray, où était
son régiment. Des lettres de bour-
geoisie lui lurent offerles dans
une boîte d'or, témoignages civi-
ques dont il était si bien capable
de sentir tout le prix. Plus tard,
en 1796, il devint membre de
l'institut national, mien 1802, le
déparlement de la Nièvre le nom-
ma candid.it au corps-législatif,
où il fut réélu par le même dé-
partement en 1809. ^I' ^*^ Tou-
longeon mourut à Paris, le aS
décembre 1812, dans la G'i' an-
née de son Age. Ses restes furent
déposés au cimetière de Mont-
martre , où on lui éleva un mo-
nument. 0 II fut universellement
regretté pour son caractère hono-
raW* et toujours indépend;ml ,
pour H's mœurs douces et pures,
enfin, pour son attachement sin-
cère à la cause de la liberté. 0 Les
principaux ouvrages de M. de
Toulongeon sont : 1° Histoire de
France, depuis i^Sy jusqu'à l'é-
poffue du consulat. Sans préjuges
comme sans acception de person-
nes, il écrit ce qu'il a vu, et il avait
tout observé. » Toujours éloigné
des extrêmes , il eut le bon esprit
de n'épouser aucune des factions
qui déchiraient nos assemblées
nationales, et de se trouver ainsi
au milieu des événemens qu'il se
proposait de faire connaître, et k
la distance nécessaire pour en
apercevoir les causes ; aussi a-t-II
décrit les causes et les effets avec
cette véracité, celte impartialité,
cette pureté de style, qui font le
TOU 4r»
bon historien. Tout intéresse dans
cet ouvrage. L'auteur y traite en
maître jusqu'à la partie militaire,
ne déguisant point les fautes de
quelques généraux , et rendant
hommage à l'habileté des autres.
Toutes les actions de guerre, im-
portantes par leurs résultats, pa-
raissent sur des plans particuliers;
les marches - manœuvres , sur des
cartes lopogranhiques, et les opé-
rations combinées des armées ,
sont réduites sur des cartes géo-
graphiques , de manière à en pré-
fienler l'ensemble. Celle histoire
de France est divisée par épo-
ques, et suivie de pièces justifi-
catives, dont la plupart étaient
inédites , mais toutes remarqua-
bles par leur liaison aux faits et
par leur rapprochement des évé-
nemens rapportés dans le texte.
C'est, sinon l'histoire la plus com-
plète ^ du moins la plus impar-
tiale ,*la mieux raisnnnée, la plus
étnyée de inonumens, et l'imn
des mieux écrites de toutes celles
qui ont paru sur le même sujet. ■
2° Manuel révolutionnaire ou Pen-
sées morales sur la situation poli-
tique des peuples en révolution,
tradijit en allemand ; 3° Plan
d'une institution militaire et na-
tionale de l'armée française ; l\°
plusieurs Mémoires sur l'esprit
public; sur le régime diététique
d'une nation; sur son état politi-
que ; sur l'usage du numéraire
dans un grand état; sur les épo-
ques de la révolution ; sur le droit
naturel dans les institutiim* poli-
tiques ; sur la question : Comment
peut-on assurer la libnrté indivi-
duelle dans \n\ état représentatif,
ejc. Ces mémoires furent lus à la
classe des sciences morales de
46 TOU
l'institut , dont il était devenu
membre ; le recueil de ce corps
savant renferme encore, du inêuio
auteur, plusieurs autres Mémoires
sur l'analyse des idées et des sen-
sations ; sur la mémoire, etc.
5° une traduction en vers du 3*
livre de l'Iliade, le discours pré-
liminaire de l'atlas militaire; un
mémoire sur Vesprit, dont on a
dit, dans le temps, qu'il était
écrit avec la chose même ; d'au-
tres mémoires sur l'état actuel de
l'agriculture, sur la fondation et
l'établissement des colonies nou-
velles. A la classe d'histoire et de
littérature ancienne, un mémoire
ayant pour litre : de la traduction
des anciens poètes épiques et de
l'harmonie imilative ; une notice
sur le ré«:ime et la discipline des
amphithéâtres romains; une se-
conde sur les {wiucipales familles
de Rome; un essai stir les pério-
des de la civilisation des peuples ;
une traduction en vers de la 4" sa-
tire de Perse; des notes sur Ho-
mère: d'autres sur les mots y^//<î-
manl et Germqni. A la première
classe de l'inslitut, un mémoire
sur les inconvéniens des moulins et
usines établis sur les petites riviè-
res , et à la classe de littérature et
beaux-arts, un mémoire sur Vin-
fluence de la liberté publique sur
les arts , et réciproquement ; 6° en
j8o3, il a publié deux volumes,
qui ont été suivis de sept autres ,
sous le titre de Manuel du Mu-
séum,français : c'est une descrip-
tion analytique et raisonnée des
monumeus conservés au Mms^w/h,
ornée d'une gravure au trait de
chacun des tableaux; 7° une tra-
duction des Commentaires de Cé-
sar, 2 vol. in-8", ouvrage pos-
TOU
ihnrae ; 8° parmi plusieurs éloges,
on doit citer ceux de iVl. de Guil-
bert (1790), et de Camus (1806),
membre de l'institut; 9° sous le
voile de l'anonyme, en 1808,
in-8", un poëme en trois fhanis
sur VAmour; 10° enfin M. de
Toulongeon a laissé en manus-
crits un assez grand nombre d'ou-
vrages de littérature et de poésie.
TOULONGEON (le marquis),
maréchal-de-camp des armées du
roi avant la^volulion , frère du
précédent, fut, comme lui, dé-
puté aux éliits-généraux, en 1 789,
par la noblesse de la Franche-
Comté. I.c marquis de Toulon-
geon, dévoué aux doctrines ultra-
monarchiques, donna bientôt sa
démission de député, et se retira
en Suisse. De Fribourg , où il
s'était fixé, il écrivit au roi et à
ses frères, pour protester contre
les événemens de la révolution.
La lettre adressée au roi paerint
à ce prince ; mais celle adressée à
ses frères fut saisie à Verdun , en-
voyée à la convention nationale,
qui le décréta d'accusation. Le
marquis de Toulongeon renonça
volontairement à sa patrie , et
passa bientôt au service de l'Au-
triche. On voit, d'après ces faits,
que c'est à tort que l'on a inséré
dans la table du Moniteur, à l'ar-
ticle du vicomte de Toulongeon
( voy. l'article précédent ) , ce.-*
mots : « Qu'après les événemens
du 10 août 1792, le vicomte de
Toulongeon était passé au service
d'Autriche; qu'il avait été décrété
d'accusation, en octobre, sur un
rapport de llewbell, pour sa cor-
respondance avec Louis XVI et
ses frères ; qu'il avait quitté le
service d'Autriche en 1790, et
TOU
qu'il était rentré en France en
•797' » ^^^ faits doivent , ainsi
que nous venons de l'établir, être
appliqués au uiiirquis , et non au
vicomte de Toulongeon, qui n'a
jamais émij^ré ni porté les armes
contre la France.
TOULONGEON ( Marie-Mar-
GCEBiTE - Joséphine d'Aubigné ,
ÉPOUSE DU MARQris DE ). Cette
dame, 0 dernier rejeton de l'illus-
tre maison d'Aubigné, devenue
si célèbre par la brusque franchise
d'Agrippa d'Aubigné envers Hen-
ri IV, et par l'éclalante fortune de
M""deMaintenon, «naquitn Paris,
le 5o août \';l[6. Son père , Louis
d'Aubigné , était gouverneur de
Saninur. Elle épousa, ayant à
peine atteint sa 19* année, le mar-
quis de Toulongeon, frère aîné
des précédens, qui fut lieulenant-
général et commandant de Besan-
çon. La révolution la priva de sa
fortune, perte qu'elle supporta
avec résignation, ainsi que la pri-
vation de sa liberté, qui ne lui fut
rendue qu'après les événemens
du 9 thermidor an 2 (27 juillet
1794 )• Depuis cette époque jus-
qu'à celle de sa inort, arrivée le
25 mars i8o5, elle vécut dans sa
famille, retirée à Fointainebleau,
chérie et honorée pour ses ver-
tus, qui ne se démentirent dans
aucune circonstance , même les
plus critiques de sa vie.
TOU POT DE BEVAUX (N.),
vice-présideni du tribunal de pre-
ujière instance de Chaumonl ,
ex-membre de la chambre des dé-
putés, où il fut nommé, en 1819,
par le département de la Haute-
Marne, s'est fait remarquer parmi
les membres du côté gauche. Lors
de la discussion sur la loi .suspen-
TOU 47
sive de la liberté individuelle, il
démontra que cette loi était inu-
tile ; néanmoins il annonça qu'il
en voterait l'adoption, si l'on en
restreignait l'action auxseuls com-
plots contre la famille royale. Le
i5 marsil proposaderéduireàdeux
mois le t^rme de l'incarcération;
le 1 5, il proposa encore un amen-
dement tendant à ce qu'il fût en-
joint aux préfets d'inscrire sur un
tableau le nom des personnes qu'ils
auraient fait arrêter, et aux minis-
tres, de présenter ces tableaux dans
la première quinzainede|pses9ion;
enfin , dans cette même séance , il
proposa encore un amendement
portant que la loi cesserait d'avoir
son effet un mois après l'ouverture
de la prochaine session. Ces trois
amendemens furent rejetés parla
majorité. Le 5o juin, il demanda
que les budgets fussent soumis à
la chambre dans le premier mois
de chaque session, et mis en dé-
libération dans le courant du troi-
sième mois. Cette marche ne con-
venait pas au ministère, et cet a- *
mendement. ne fut pas plus heu-
reux que les précédens. M. Tou-
pot de Bevaux vota contre les deux
lois d'exception, et fut du nombre
des 95 votans contre le nouveau
syslèfne électoral. Cet honorable
membre a subi la dissolution to-
tale de la cliambre en 1823, et
n'a pas été réélu à la chambre sep-
tennale de i824' Il conlinue à
remplir ses fonctions dans la ma-
gistrature.
T0UULET(KENÉ),néle7Juia
1 ^58, h Ambfu'se (Indrc-et-LoinB),
reçut une éducation soignée au
collépj'de Pontlevoi, tenu par des
bénédictins. Il étudia h; droit à
Orléans, suivit à Paris des cours
48
TOI)
de physique et de médecine, et
acheva son instruction par des
voyages, tant en France qu'à l'é-
tranger. Attaché cl la rédaction du
Moniteur, il en est un des colla-
borateurs les plus distingués com-
me des plus anciens. Il a fourni
auïsi de savans articles au Maga-
xin encyrlopédiqae , aux Annales
littéraires, etc. 31. Tourlet a pu-
blié plusieurs ouvrages qui an-
noncent une grande érudition et
un goût éclairé pour l'antiquité
classique : i° Guerre deTroie, de-
puis la m«rt d'Hector, poëme tra-
duit du grec de Quintus de Smyr-
ne ; Paris, iSoo, 2 vol. in-8°; une
seconde édition de cette traduc-
tion, accompagnée du texte grec,
et enrichie de notes savantes, est
prête à être livrée à l'impression;
2° Odes de Pindare, traduites en
français avec le texte grec en regard.
Cet ouvrage , extrêmement re-
commandahle, joint à l'avantage
précieux d'un texte très-correct,
celui d'une version aussi élégante
que fidèle. On sent quelles diflicul-
tés l'auteur eut à vaincre, pour
traduire avec précision un poète
qui , dans les écarts de son imagi-
nation s'abandonne à un enthou-
siasme qui tient souvent de la fu-
reur. M. Tourlet (\st le premier, en
France , qui ait donné une véri-
table idée du prince des poètes
lyrique?; aussi son ouvrage a-t-
11 mérité les éloges des savans les
plusdistingués. "b" Œuvres complè-
tes de l' empereur Julien. Cette tra-
duction qui n'est inférieure à celle
de Pindare, ni en fidélité, ni en
élégance, est un véritable service
rendu à la philosophie et aux let-
tres. L'auteur s'est, avec raison,
attaché à (aire connaître le carac-
TOl)
1ère de Julien, de ce prince exalté
par les uns , et injurié par les
autres; il a su réduire ù sa juste
valeur le surnom iV A postât , que
l'ignorance et l'esprit de secte lui
ont donné, et que lui donne en-
core aujourd'hui l'intolérance sa-
cerdotale. L'ouvrage infiniment
remarquable de M. Tourlet, nous
paraît devoir fixer l'opinion des
modernes sur cet homme célèbre
qui a ollert le rare exemple de la
philosophie sur le trône.
TOURNON (le comte Philippe-
Camille-Cas imib Marcelin de ) «
pair de France, conseiller-d'état,
gentilhomme honoraire de la
chambredu roi, chevalier de Saint-
Louis, commandeur de la légion-
d'honneur, etc., est né à Apt, dé-
partement deVaucluse, d'une an-
cienne famille de Provence. II
devint, sousie gouvernement im-
périal, auditeur au conseil-d'état,
puis intendant à Bareuth. En 1819,
M. de Tournon fut fait prisonnier
dans cette ville par les Autrichiens,
qui l'emmenèrent en Hongrie. A
son retour en France, il reçut la
préfecture de Rome, qu'il occu-
pait encore lorsque le roi Joachim
(«oj. Mirât) s'empara des états
romains. Il refusa de continuer
ses fonctions sous l'administration
de ce prince, et revint dans sa
patrie. Napoléon , pendant les
cent jours , en i8i5, voulut lui
confier la préfecture du Finistère,
puis celle de l'Hérault; mais il ne
crut pas devoir les accepter. Après
la seconde restauration , Louis
XVIII le combla successivement
de faveurs, le nomma à la pré-
fecture de la Gironde, et, le 4
novembre 1818, il le comprit au
nombre des maîtres de requêtes
TOU
en service exlraordinaire. M. de
Touriion passa de celle préfecture
à celle du Rliôue, qu'il cessa d'oc-
cuper en 1825. Il est depuis 1824
pair de France et conseiller-d'état
en service extraordinaire; il est
aussi (1825) président du conseil
des bâtinicns civils au ministère
de l'inléritur.
TOUUNON ( Dominique- Jérô-
me), médecin en chef des hôpi-
taux militaires de Bayonne et de
Bruxelles, ancien professeur de
botanique, professeur -adjoint à
l'école de chirurgie de Toulouse,
■ville où il est né, est plus connu
par sa pratique que par ses ou-
vrages , dont nous citerons les
principaux : 1" Liste chronologi-
que des ouvrages des médecins et
chirurgiens de Bordeaux , et de
ceux qui ont exercé l'art de guérir
dans celte ville, avec des annota~
tions, et l'éloge de Pierre Desiult,
Bordeaux, 1799, i vol. in-H"; 2°
Supplément à cette liste, Toulouse,
i8oO, in-S"; o" Flore de Toulouse,
ou Description des plantes qui
croissent dans les environs de cette
ville, Toulouse, 1811, 1 vol. in-8°.
M.Tournon adonné dilTérens Mé-
moires dans le Magasin encyclopé-
dique, dans le Journal de Santé et
d'Histoire naturelle, dans le Jour-
nal de Médecine, etc. 11 est mem-
bre de l'académie des sciences de
Buidcaux, et de plusieurs autres
sociétés savantes.
TOUllNON (N.), littérateur,
cultivait paisiblement les lettres ,
lorsque la révolution éclala. 11 en
adopta les principes avec modé-
ralion. Victime de l'affreux régime
de la terreur, il périt sur l'écha-
faud à la (Jn de I7g5. Il a publié :
1° l'Art du Comédien ; 2° tes
TOU 49
Promenades de Clarisse et du mar-
quis de Volzi, ou Nouvelle Mé-
thode pour apprendre les princi-
pes de la tangue et de l'ortogra-
plie françaises, à C usage des dames,
1784; 5° Hévoluiions de Paris, dé-
diées à la nation, 1789-1790; 4'
Introduction aux révolutions de
l'Europe, 1790. C'est une contre-
façon du Journal des Révolutions,
publié par L. Prudhomme; 5°
Moyens de rendre propres les rues
de Paris, 1790.
TOUIUIETTE (Marc-Antoine-
Lo€1s-Clauet de la), ancien ma-
gistrat, savant naturaliste, naquit
à Lyon, en 1729. II commença ses
études dans cette ville, et les ter-
mina au collège d'IIarcourt à Pa-
ris. De retour dans sa ville natale,
il fut pourvu par les soins de son
père, prévôt des marchands, d'u-
ne charge de magistrature qu'il
exerça pendant ao années, et dont
il se démit ensuite , afin de se
livrer exclusivement à sa passion
pour l'histoire naturelle. De la
zoologie et de la minéralogie qu'il
avait cultivées avec soin, il passa
à l'étude de la botanique, qui fut
sa science favorite. Ses collections
en insectes et en mines du Lyon-
nais, du Dauphiné et de l'Auver-
gne, étaient remarquables; niai.^
son herbier était surtout aussi
nombreux que riche. « La 1766,
dit l'auteur d'une notice sur ce
savant, d'après son éloge, par JU.
Bruyset, libraire, et confrère de
LaTourrette à l'académie de Lyon^
il introduisit au-dessus de la pe-
tite ville de l'Arbresle, dans un
vaste parc, tous les arbres et ar-
bustes étrangers qui pouvaient
s'y acclimater; dans l'enceinte mê-
me de Lyon, il s'éîait fMiné un
4
5o
TOU
jardin où il a cuitivé plus de Uo'n
mille espèces de piaules rares. »
La Tourrette, pour augmenter ses
connaissances, et ajouter de nou-
velles possessions à son beau ca-
binet, voyagea en Italie, en Sicile,
■etc., et se réunit ensuite à J. J.
Rousseau, son ami , pour herbo-
riser avec lui dans la Grande-
Chartreuse. « Que n'êles-vous des
nôtres, écrivait J. .1. Rouss^^au à
du Péron, vous trouveriez dans
notre guide, M. de La Tourrette,
un botaniste aussi savant qu'ai-
mable, qui vous lemit aimer tou-
tes les sciences qu'il cultive. »
Instruit, sociable, bon par excel-
lence, La Tourrette était l'ami de
tous les hommes distingués avec
lesquels il était en correspondan-
ce, et l'on doit citer entre autres
Linnée, de Haller, Adanson, de
Jussieu. La révolution le surprit
au milieu de ses occupations pai-
sibles. Il la vit naître, comme tous
les gens de bien, avec joie , et il
se montra l'un de ses plus vrais et
de ses plus sages partisan?. Le
siège de Lyon, en 1795, vint na-
vrer son cœur. Les fatigues et les
inquiétudes qu'il lui causa , à lui
et à tous ses concitoyens , lui fl-
rent éprouver une péripneumonie
dont il ne s'occupa point assez,
et qui bientôt le ravit aux sciences
et à ses nombreux amis, dans la
64* année de son 2ge. Nous cite-
rons ses ouvrages d'après la source
où nous avons puiséles principaux
faits sur ce savant. Ce sont : 1°
Démonstrations élémentaires de bo-
tanique, 1766, a vol. in-8°. Elles
ontobtenu plusieurs éditions pos-
térieures. Bourgelal venait d'éta-
blir à Lyon la première école vé-
térinairc; il fallait donner aux é-
TOU
lèves la connaissance des plantes
usuelles; La Tourrette, et son ami
l'abbé Kozier, se chargèrent de ce
soin, et publièrent cet écrit. Le
premier en traça le plan , en dé-
termina la forme, et se chargea de
V introduction^ chef-d'œuvre de
concision et de clarté, où l'on ne
trouve rien à ajouter, rien à re-
trancher. Haller a fait l'analyse
des démonstrations, comme ap-
partenant en entier à l'abbé Ro-
zier, et le modeste La Tourrette
ne fit jamais parvenir jusqu'à lui
aucune réclamation à cet égard;
-2" F'oyage au Mont-Piln , 1 770 ,
in-S". L'auteur s'y montre obser-
vateur attentif et grand naturaliste.
Dans la première partie, il déter-
mine la situation des montagnes ,
leur élévation, les ruisseaux qui
en découlent , les forêts qui les
couvrent, les minéraux qui s'y
trouvent, les animaux et les in-
sectes qui y ont fixé leur séjour.
La seconde partie est consacrée
tout entière à la botanique. Le
premier, il a indiqué sur ces mon-
tagnes sous-alpines un grand nom-
bre de plantes rares, et même une
espèce neuve, VAlisma-parnassi-
folia. 5° Clitoris Lugdunensis ,
1785, iu-8°. Ce petit ouvrage é-
tonna les botanistes, par le grand
nombre des espèces qu'il renfer-
me, surtout dans la cryptogamie.
On s'était persuadé, et Linnée
croyait lui-même que nos pro-
vinces méridionales étaient beau-
coup moins riches en mousses et
en champignons que les contrées
du Nord. L'énumération de laChlo-
ris prouve que nous n'avons rien
à leur envier à cet égard. ^"Con-
jectures sur l'origine des bélemni-
tes. Elles sont insérées dans le
I
TOU
Dictionnaire des Fossiles^ do Ber-
trand. L'aulciir pense que les bé-
letnnitPs ne sont que des poinles
«l'oursin, 5° Mémoire sur les
monstres végétaux. Il est imprimé
dans le Journal économique du
mois de juillet ijGi. LaTourrctte
y décrit plusieurs sinji^ularités
de son cabinet. 6° Mémoire sur
l' helmintliocorton ou mousse de
Corse ^ inséré dans le Journal de
Physique. Ce mémoireesl instruc-
tif. M. Bruyset a lu dans une séan-
ce publique de celle compagnie
une savante notice sur la vie el les
écrits de ce naturaliste.
TOURZEL ( Louise- Elisabeth
«E CliOY-D'HAVaÉ, DCCHESSE DE ) ,
gouvernante des eufans de Fran-
ce ù répo(]ue de la révolution ,
s'est rendue rccoiumaudable par
sa constante fidélité ù la tamille
royale. Elle fut du voyage du roi
à Varennes, et accompagna ce
prince el sa famille lorsqu'on les
ramena à Paris. On prétend que
les préparatifs du départ de ^"'■de
Tourzel, furent cause d'un relard
qui trompa le manjuis de Bouille,
{voy. ce nom) et donna le temps
au pouvoir exécutif de s'opposer
à ce (|ue Louis XVI dépassât les
iVonlières. Elle ne quilla point son
po^tclorsdesévénemensdu loadfll
1792, et suivit 1.1 famille royale à
l'assemblée législative. Pindaiit ce
t»'mp«, elle laissait au châleau des
i'uilerie». à la merci des assaillans,
sa fille, à peine Tigée de i5 ans,
qu'heureusement des amis fidèles
parvinrent ;^ sauver. iM"' de Tour-
zel suivit les enfans de France
dans la prison du Temple. Elle en
fui éloignée dix jours après, avec
la princesse de Lamballe,et ren-
liTinéc ;i I» Fore.»'. Dans les fu-
TOl) 5i
nesles journées de septembre, elle
échappa au massacre des prisons
par les soins de Manuel , procu-
reurde la commune. M^'deTour-
zel resta détenue jusqu'après le q
lliKi-midor an a (i79_1)- Rendue à
la liberté, elle ne quitta point la
France , espérant êlre utile au
dauphin el à iMadame royale , \
qui elle fit connaître les intention*
du roi au sujet du mariage de cette
princesse avec son cousin le duc
d'Angoulême (aujourd'hui IM. le
dauphin.) Celte circonstance la fit
f rrôlerde nouveau. Louis XVI, pro-
fondément touché du dévouement
de celle dame, avait appris à sou
malheureux fils à ajouter à ses
prières ces paroles louchantes :
"Dieu tout- puissant , donne li
«IM"' de Tourzel les forces dont
• elle a besoin pour supporter les
»maux «ju'elle endure à cause de
• nous! •) Sous le consulat et sous
l'empire, iM°" de Tourzel eut l'or-
dre de se tenir éloignée de Paris.
Elle reçut de Louis XVIII, eu
1H16, le litre de duchesse, avec la
faculté de le transmettre à sa mort
(arrivée peu de temps après) i\ sou
pelit-fils, qui a également succéd*-
àson pèreetàson grand-oucledan^
la charge de grand-prévôt de l'hô-
tel du roi. La fille de c<îlle respec-
table dame, Pauline de Tourzel,
dont il a déjà été question, resl.i
dan? la tour du Temple avec IMa-
dame royale : elle a épousé 1\1. de
Béain, chambellan de l'impéra-
trice Joséphine {voy. Joséphine.)
TOUSSAINT-LOUVEIITURE,
général noir ( j^oy. LouvERTrnK.)
TOUSSAINT ■( Claude - Jac-
Qi'Es), architecte , contrôleur et
inspecteur des bniimens du roi,
pensionnaire de S. 1\|. , membre
5a
TOU
de la société royale académique
des sciences de Pari?, est né dans
celle ville en 1781. C«;t artiste
laborieux, attaché depuis trente
années aux grandes adinînistra-
lions publiques et aux bûlimeus
de la couronne, s'est d'abord fait
connaître à Paris par l'institution
d'une école d'architecture sur \\n
plan nouveau. Tous les ateliers de
ses confrères étant destinés à for-
mer dos dessinateurs, M. Tous-
saint, habitué de bonne heure au
mouvement et aux détails de la
conslfuction , a voulu être utile i\
cette multitude d'élèves, qui, tou-
jours dessinant, restaient étran-
gers à la science pratique de leur
art, et c'est pour y parvenir qu'il
fonda son Ecole- pratique d' Arclii-
tectui'e. Cet utile établissement
prospérait, et avait déjà rendu de
grands services, lorsque le fonda-
teur fut appelé à des fonctions qui
le forcèrent à l'abandonner. Le ré-
sumé des principes de M. Toussaint
est consigné dans le Traitéde géo-
Tuétrie et d'arcliitectare théorique et
pratique, simplifié. Cet ouvrage est
très-recherché, etembrasse toutes
les parties de l'art et de la cons-
truction. L'auteur, s'étant parti-
culièrement attaché à être simple
et méthodique , son traité est de-
venu classique, et a été surnom-
mé à juste titre, par un de nos ar-
chitectes les plus célèbres, l'En-
cyclopédie de l'architecture. M.
Toussaint vient (1825) de pu-
blier le premier volume d'un
ouvrage qui en aura quatre, avec
quatre-vingts gravures, et qui a
pour titre : Mémento des archi'
tcctes , des ingénieurs, entrepre-
neurs, vérificateurs, etc., compre-
nant les détails vont établir les
TOW
prix courang de tous les travaux;
théorie de construction; outils et
machines; lois des b3timens civils
et ruraux; ordonnances forestiè-
res; législation sur la garantie, les
hypothèques , le voisinage , les
moulins et rivières, les manufac-
tures, plantaiions, etc. ; droits de
voiries et d'entrées, analyse des
matières premières ; tableaux de
réduction; géométrie; les cinq or-
dres, exemples de bâlimçns, ino-
numens et jardins; modèles de
devi'<, procès-verbaux, et autres
actes du ressort des architectes,
des entrepreneurs, et des experts;
partie contentiense dubâtiuient,
inventions modernes; abrégé de
statique et de dynamique appli-
quées à la construction et aux
jardins, etc., etc. Dans cet im-
portant trav.til , qu'une marche
toujours méthodique et un style
clair et facile rendent agréable à
lire , l'auteur met en présence
tous ceux qui l'ont précédé, et qirî
ont traité la partie si abstraite du
contentieux de l'architecture; il
fait ressortir les nombreuses con-
tradictions dans lesqmdles ils sont
tombés, et présente des résultats
simples et à la portée de tout le
monde. M. Toussaint prouve, par
ces deux ouvrages si différons en-
tre eux, qu'il possède également
bien la théorie et la pratique de
son art.
TOWERS (Joseph), historien
anglais, naquitàSoulhwarck. vers
1757. Il fit do bonnes études , et,
pour obéir à sa famille, il en)bras-
salaprofession d'imprimeur. Quit-
tant bientôt cet étal, pour lequel
il n'avait aucun goût, il prit une
maison de librairie à Londres. Cet
établissement l'avant mis en rela-
I
TOW
Ifon avec plusieiars ininistics pro-
Jestans de la secle des presbyté-
riens, il changea encore d'état,
llcçu dans les ordres en ly"/^, il
alla remplir les fonctions de pas-
leur, dans une congrégation, à
Highgale. E;îvoyé, en 1778, avec
Price, à la conférence de Newing-
ton-Green, il fut reçu, en 1779,
docteur en l'université d'Edim-
bourg. Il mourut en 1799. On lui
doit les ouvrages suivaus : 1° Bio-
graphie britannique, 7 vol. in-8°,
ouvrage très-»utiie; 2° Observations
sur V Histoire cC Angleterre de Hu-
me ; 5° Histoire de la vie et du rè-
gne de Frédéric II de Prusse, 2
vol. in-8°; 4" Défense de Locke;
5" plusieurs Sermons; Q»" àa?, Trai-
tés de politique ; 7" Il a concouru
à la Nouvelle Biographie britanni-
que de Rippis.
TOWiNLEY (CnARLEs). célèbre
antiquaire anglais, membre de la
société royale de Londres, garde
du muséum britannique, etc., na-
quit d'une faujille honorable de
Townley-IIall, dans le comté de
Lancasire. Après avoir terminé de
très-bonnes études, et libre de se
livrer à son penchant pour l'art
numismatique et les nionumens
anciens, il forma une collection
remarquable de statues antiques ,
médailles, manuscrits , etc. 11 a-
vait réuni dans sa maison de West-
minster »me ftiule de fragmens
li'architecture égyptienne, et de
modèles des plus célèbres monu-
mens de la (Jrèce et de Rome. Sa
collection de médailles s'élevait A
un haijt prix , et l'on citait parini
>-es manuscrits nombreux et rares,
un manuscrit d'Homère, sur le-
quel a été faite une très-belle é-
(iilion de ce poète, lia Français,
TRA
55
W. d'Hancarvillc, a, dit-on, pu-
blié et enrichi les afitiquités étrus-
ques de ïownley. Ce savant an-
glais mourut en i8o5, laissant,
par testament, une somme de
4,000 liv, sterl. pour la construc-
tion d'un édifice, destiné à rece-
voir tous les objets composant sa
collection.
TRACY (Destctt db) , l'un des
hommes remarquables de ce
temps, par la fixité de ses opi-
nions et la sagacité de son esprit.
Colonel d'infanterie en 1789, il
fut envoyé aux états-généraux
par la noblesse du Bourbonnais.
On a eu tort de le confondre avec
i\l. de Crecy, député des états
d'Artois, qui le premier demanda
l'abolition de tous les titres do
noblesse. Toutefois 31. de Tracy
embrassa la cause des libertés pu-
bliques, et se prononça en faveur
de la tuléranCe des cultes. Il ré-
clama aussi pour les hommes de
couleur, la jouissance de tous les
droits de citoyen. Quand on dis-
cuta si M. de Bouille devait être
chargé de pouvoirs étendus, ou si
l'on devait les entraver de mille
manières, M. de Tracy émit pour
opinion, qu'il croyait convena!)lc
ou de ne lui accorder aucune
confiance, ou de la lui accorder
entière : que pour lui il n'avait au-
cune raison pour se unifier de M.
de Bouille. Tout ce que les bio-
graphes ont attribué depuis cette
époque à M. de Tracy est un ro-
man sans base; il est faux qu'en
1793, M. de Tracy ait accompa-
gné La Fayette : l'histoire de la dé-
tention de M. de Tracy en Autri-
che est tout aussi peu fondée. Il
se retira A Auteuil, s'y livra exclu-
sivement à des travaux scientifi-
54
TRA
ques, fui jcU; en prison on 179^.
en sortit une année; «près en 179'!,
et devint membre de l'inslilut à sa
fftrmalion. Meml)re du comité
d'instruction publique en 17991
il avait déjà marqué parmi les
meta physiciens, et don né (les preu-
ves de la pénétration et de la pro-
fondeur de son esprit. Celle secte
d'idéologues 3 comme les nommait
Napoléon, dont la puissance posi-
tive a toujours vu avec un juste
effroi la puissance de la pensée,
n'eut pas de plus ferme appui que
M. de Tracy. Cependant il fut
membre du sénat, où il eut peu
d'influence. Le 1" avril i8i4i 'l
vota la formation du gouverne-
ment provisoire, et le lendemain la
déchéance de l'empereur. Le roi le
nomma pairde France, et peiidar)t
les cent jours, en 181 5, il ne fut ni
employé ni poursuivi. En i8o8,
il avait remplacé ù l'académie-
française le ^avanl Cabanis. On
lui doit plusieurs ouvrages, qui
ont fait faire de grands et d'uti-
les progrès à la science des sensa-
tions et à l'analyse de l'entende-
ment humain : i" Observations sur
le système actuel d'instruction pu-
blique, 1801 ; 2* Eiémens d'idéolo-
gie en cinq parties. On lui attribue
un assez grand nombre de mé-
moires anonymes, très -remar-
quables par la force de la pensée.
Le dernier ouvrage que M. de
ïracy ait publié , est aussi admi-
rable par le style que par le sujet:
c'est un Essai sur le génie et les
ouvrages de Montesquieu. M. de
Tracy jouit de loisirs studieux,
d'une vieillesse respectée, et d'u-
ne grande et juste réputation. On
« iujprimé dans la Biographie des
Contemporains (vol. V), sous le
TKA
nom de DESTtTTDETRACY,une uoii-
ce où se trouvent répétés plusieurs
faits inexacts, auxquels le présent
ariirle servira de rectification.
TUA IN NO Y (Piekre-Amable-
Jean-Baptisxe), né à Amiens en
1772, sortit du collège en 1791.
et entra de suite, comme étudiant
en médecine, à l'Hôtel-Dieu de
celte ville. Il fit des progrès ra-
pides dans la carrière qu'il avait
embrassée avec ardeur, et fut peu
de temps après, appelé en qualité
de chirurgien-major d'un batail-
lon de réquisitionnaires d'Amiens,
grade dans lequel il recueillit des
témoignages de satisfaction de la
part de ses chefs. Après l'amal-
gaine de ce bataillon dans d'aii-
tres corps, il revint à Amiens, ren-
tra à riiôtel-Dieu, et y fut chargé
du service de chirurgien en se-
cond. Le zèle, l'activité et l'intel-
ligence qu'il mit à s'acquitter de
ses devoirs, lui acquirent la bien-
veillance des administrateurs de
cet établissement. Désirant faire
une étude particulière de la mé-
decine, il se rendit à Paris en l'an
4 ('795.1 où il se livra sans relâ-^
che à celte étude jusqu'en l'an 7
(1798). Les brillans succès qu'il
y obtint lui méritèrent des en-
couragemens de la part des pro-
fesseurs les pins distingués. Dans
la même année, il remporta au
concours, la chaire de professeur
d'histoire naturelle à l'école cen-
trale du département de la Som-
me , place qu'il remplit avec la
plus grande dislinciion jusqu'à la
suppression de celle école. C'est
alors qu'il fut reçu médecin à la
faculté de médecine de Paris : sa
thèse sur le prognostic des affec-
tions sympathiques de l'cpil dans
TRA
les maladies algues lui fil beau-
coup d'honneur. Appelé ensuite
aux fonctions de prol'esseur de l'é-
cole communale de botanique de
la ville d'Amiens, il publia une no-
tice historique du jardin de celle
école, un catalogue d'après le sys-
tème de Liiuiée, et im tableau sy-
noptique des organes des plantt^s,
tableau qui reput Tapprolialion de
beaucoup de savans; et il jeta dès-
lors les bases d'une nouvelle clas-
sification générique, qu'il se pro-
pose de publier un jour. On doit
à ses pressantes instances, entre
autres améliorations précieuses
du Jardin des Plantes, son agran-
dissement et la construction de
deux serres, di>nt une chaude ei
une d'orangerie. Comme méde-
cin des pauvres, il fit insérer dans
les journaux plusieurs observa-
tions qui furent accueillies avec
Intérêt, et particulièrement celles
où, par des expériences sur les a-
nimaux, il démontra que le sucre
n'était pas l'antidote de l'empoi-
!»onnement par le vert-de-gris,
ainsi que l'avait dit M. Galet.
Nommé, en 181 4» médecin des é-
pidémies pour les arrondissemens
d'Amiens et de Donrlens, il se
consacra exclusivement à l'étude
des maladies qui régnent le plus
ordinairement dans son départe-
ment. Après avoir observé l'in-
lluence des diverses températures,
dans les différentes localités, sur
la santé des habitans, eu égard ù
leur profession, leur régime,
leurs habitudes et leur tempén*.-
ment , il publia*, en 18 19, un
Trailà clcmentaire des maladies
«pidi^miques. Cet ouvrage, consi-
•léré comme étant le fruit de l'é-
tude, de l'ub»crvation et d'uuu
IRA
55
heureuse pratique, lui valut des
mentions honorables dans plu-
sieurs journaux de médecine, et
dans divers procès-verbaux de so-
ciétés savantes et littéraires ; il
lui fit aussi donner successive-
ment le titre de membre associé
du comité médical, de l'athénée
de médecine, de la société de mé-
decine pratique , de la faculté
royale académique des sciences
de Paris, et des sociétés royales
de Lyon, de Bordeaux, etc., etc.;
enfin il lui mérita, outre le suffra-
ge de iVUl. les doyen et profes-
seurs dus facultés de Montpellier
et de Strasbourg, celui de M. le
docteur Portai, premier médecin
du roi; et cette importante appro-
bation de l'ouvrage est motivée sur
l'utilité que les officiers de santé
peuvent en retirer pour leur pra-
tique. LedocteurTrannoy a récem-
ment publié un mémoire en répon-
se à ces. questions proposées par
l'académie des sciences, arts, et
belles-lettres de Rouen : 1' Est-il
prouvé, par des observations exac-
tes, qu'il existe des fièvres par in-
fection sans cependant être conta-
gieuses? 2° en admettant l'exis-
tence de ces fièvres, quelles sont
les principales causes qui donnent
lieu i\ leur développement et A
leur propagation.^ 3' quels sont
les moyens propres ù les prévenir
ou à en arrêter les progrès? Ce
mémoire a fixé particulièrement
l'attention des médecins observa-
teurs, qui reconnaissent que les
fièvres les plus simples, par l'effet
de la malpropreté, l'encombre-
ment de» malades dans des appar-
temens où l'air circule à peine,
développent des symptômes d'a-
dynamie et d'ataxie, qui donnent
îJO TI\A
lieu à des i^inanatlons moi^jifi-
ques. Le docteur Trannoy, par a-
luour pour son art et par un zè-
le philantropique qu'on ne saurait
trop louer, v$X, depuis 1820, le
principal rédacleur dans le jour-
nal de la Somme, d'un bulletin
qui offre chaque mois la concor-
dance de l'état atmosphérique
avec les maladies qui ont ré{;;né
dans le mois précédent à Amiens
et SCS environs. Ces bulletins, pré-
sentant souvent un grand intérêt,
sont justement appréciés des mé-
decins les plus célèbres de la ca-
pitale, qui en ont fait d'honorables
mentions.
TllAUTMANSDORFF.WEmS
BERG (Ferdinahd prince de), mi-
nistre-d'élat autrichien, né le 12
janvier 1749» épousa, le 18 mai
1772, la comtesse Caroline de
Colloredo, devint ensuite cham-
bellan et conseiUer-d'élat intime
d'Autriche, et fut chargé, en 1 787,
de négociations tendant à em-
pêcher le second fils du roi de
Prusse d'être nommé coadjuteur
de l'électeur de Mayence , litre
qu'il était sur le point d'obtenir.
Vers la fin de la même année, il
remplaça le comte de Beljioso
dans les fonctions de ministre plé-
nipotentiaire en Brabant. Les cir-
constances rendaient ce poste ex-
trêmement difficile; M. de Traut-
mansdorff s'y conduisit avec pru-
dence et adresse, et ses actes ad-
ministratifs obtinrent l'assenti-
ment général. Celte charge fut
supprimée, en 1792, à la suite de
l'invasion de ces provinces par les
Français. Son souverain lui accor-
da, à litre de dédommagement,
une pension de 6,000 florins d'Al-
lemagne, rpj'il consacra à augmen-
TBA
l(!r les pensions des employés de
la chancellerie. M. de Traulmans-
dorff fut mis sur les rangs pour
remplacer M. de Thugut, après
sa retraite du ministère, mais on
lui préféra M. Louis de Cobent-
zel. II fut nommé successivement
grand-maître de la cour, élevé à
la dignité de prince de l'empire,
puis chargé de demander en ma-
riage, pour l'empereur, l'archi-
duchesse Béalrix d'Est , depuis
impératrice. Le prince Ferdinand
de Trautmansdorff faisait encore,
en 1820, partie du ministère au-
trichien, avec le rang de minis-
tre-d'état et des conférences.
ÏRAVOT (le baron Jean-
Pierbe), lieutenant-général, com-
mandeur de la légion-d'honneur,
né le 6 janvier J767, embrassa lu
carrière militaire dès sa jeunesse.
Il entra d'abord comme simple
soldat dans un régiment d'infan-
terie, et s'éleva rapidement par
ses talens et sa brillante valeur au
grade d'adjudant- général. Après
s'être distingué pendant les pre-
mières campagnes de la révolu-
tion , et avoir souvent été cité
pour sa belle conduite, il fut em-
ployé dans la Vendée, sous les or-
dres du général en chef Hoche.
Pendant toute cette guerre déplo-
rable, les enneitiis mêmes qu'il
était chargé de soumettre, rendi-
rent justice, non - seulement à
l'habileté et au courage du général
ïravot, mais encore aux rares et
précieuses qualités d'un chef qui,
à cette époque, et au milieu des dis-
cordes civiles, se fit constamment
remarquer par sa loyauté et son
humanité. Le nom de Travol ins-
pirait aux Vendéens non moins
de confiance après le combat qu'il
TRA
ne leur causait impnraranl lîo res-
pecl et (le crainte. Chargé par le
j^énéral Hoche de j)Our.siiivre le
fameux Charette, il l'atteignit à
la Chabottière, en Poitou, et le
fit prisonnier le 23 mars i 79G, Ce
chef vendéen fit A plusieurs re-
prises, devant le Irihunal militaire
de Nantes , l'éloge des bons pro-
cédés et de la générosité du chef
républicain auquel il avait été
forcé de se rendre. Nommé géné-
ral de brigade, Travol commanda
encore dans les départemens de
l'Ouest pendant les années 1799
et 1800; il fut nommé membre
de la légion-d'honneur en i8o5,
commandant de la même légion
Je 14 juin 1804, général de divi-
sion le 1" février i8o5 , et élu
candidat au sénat- conservateur
nu mois de mai suivant. Vers la
fin de la même année, il fut ap-
pelé au commandement de la 12°
division militaire à Nantes; passa
ensuite ^ l'armée d'Espagne , et
})rit le commandement de la divi-
fion du général Harispe, qui avait
été blessé. Après la première ren-
trée du roi, en )8i4» le général
Travot *e retira dans son dépar-
tement. Ptniîanllts cent jours, en
i8i5, il eut un commandement
dans la V-endéc, y fit une procla-
mation pour engager les habilans
à ne point prendre les armes, et
livra quelques combats aux trou-
pes que commandait le marquis de
La Roche-Jacquelein; mais il s'ac-
quitta de sa mission dilTicile, plu-
tôt encore en pacificateur qu'en
guerrier. Le lieutenant - général
Lamarque, son ancien en grade,
prit bientôt le commandement en
chef, et le général Travot, ap-
pelé par Napoléon à la chambre
TRA 57
des pairs , créée pendant les cent
Jours, quitta la Vendée avant le
second retour du roi. Il se relira
de nouveau , à cette époque, dans
sa famille, où il était loin de s'at-
tendre au coup qui devait bientôt
le frapper. Il venait de recevoir
du ministre de la guerre , duc de
Feltre, une lettre flatteuse, qui lui
annonçait qu'une pension de re-
traite était accordée à ses services.
Son nom n'était point porté sur
les listes publiées par l'ordon-
nance du 24 juillet 181 5, et celui
de son général en chef, Lamar-
que, n'était inscrit que sur la se-
conde liste 5 dite des trente-huit ,
qui furent exilés. Il croyait qu'un
sort pire ne pouvait être réservé
à celui qui recevait, qu'à celui
qui donnait les ordres supérieurs,
et aux termes mêmes de l'ordon-
nance les listes étaient définiti-
vement closes. Mais la veille de la
promulgation de la loi d'amnistie
du 12 janvier 1816, le télégra-
phe transmit, de la pari du duc de
Feltre, à un conseil militaire sié-
geant à Rennes, l'ordre de com-
incricer des poursuites judiciaires
conirc le général Travot, et à cet
tflet , de faire entendre , s'il se
pouvait , un témoin à l'instant
même, ce qui devait rendre inap-
plicable au général les disposi-
tions de celte même loi, qui ac-
cordait une amnistie ù tous les
individus contre lesquels il n'y
avait point de j)rocédure enta-
mée. Le témoin ne put cependant
être si vite entendu, et les pour-
suites ne purent être commencées
dans la journée où la dépêche té-
légraphique était arrivée; mais
on y suppléa en considérant l'or-
dre télégraphique lui - même
58
TRA
comme un commencement légal
de poursuites. Une circulaire du
ministre de la justice, explicative
de l.i loi d'aumistie, déclara, il
est vrai , que Ja détention même
ne constituait pas le commence-
ment do poursuites , mais le con-
seil de f^uerre passa outre. Le gé-
néral Travot récusa le général
qui présidait le conseil de guerre,
comme ayant combattu contre lui,
et comme étant son ennemi per-
sonnel. Le conseil se déclara com-
pétent, et le président prononça
lui - même négativement sur la
récusation portée contre lui com-
me juge. Un délai de quelques
jours fut sollicité par les défen-
seurs de l'accusé; le conseil passa
encore outre, prononça son arrêt,
et le général Travot est condamné
ù mort. Parmi les délits imputés
an général, il y en avait surtout
un remarquable, et jusqu'alors
inconnu dans les fastes de la ju-
risprudence criminelle, « La mo-
dération , est-il dit dans le réqui-
sitoire, la modération ne fut point
une des armes les moins redoutables
entre ses mains, la clémence elle-
même fat un de ses moyens de suc-
cès. » Le général Travot se pour-
vut en révision contre l'arrêt qui
le condamnait à mourir de la
mort des traîtres. Les moyens de
cassation parurent nombreux à
ses défenseurs; cependant com-
me une partie de ces moyens n'a-
vaient point prévalu dans la pre-
mière plaidoirie, ce fut un devoir
pour les avocats de les rassembler
<le nouveau , de les développer
tous, de les corroborer d'argu-
mtjns puisés dans les lois, dans la
charte, dans les meilleurs crimi-
nalistes, enûn, de faire un der-
TRA
nier effort pour démontrer l'évi-
dence, et pour obtenir la révi-
sion du jugement. Ils remplirent
ce devoir avec une supériorité de
talent et avec un dévouement
qui honore le barreau de Rennes.
Des mémoires en faveur du con-
damné furent signés par treize
avocats de ce barreau , qui s'était
déjà offert presqu'en entier pour
défendre le général Travot. Leur
Précis arrachait des larmes d'at-
tendrissement aux lecteurs. On
leur répondit que des juges mili-
taires , étrangers i.ux dédales de
la chicane, ne se laissaient poirit
éblouir, qu'on a accordé aux dé-
fenseurs une latitude immense ,
indéfinie, illimitée, et qu'on veut
bien considérer comme excusable
peut-être l'abus quils ont fait du
droit de défense. Cependant la
consultation, les observations et le
précis furent dénoncés par le gé-
néral président du premier con-
seil, au garde-des-sceaux et au
ministre de la police. On ne ju-
gea point à propos de sévir contre
les avocats , malgré cette dénon-
ciation. Il eût été nouveau en ef-
fet de simplifier ainsi les procès
criminels, eu envoyant les avo-
cats rejoindre les cliens qu'ils
n'auraient pas sauvés. L'arrêt fut
confirmé par le conseil de révi-
sion. Mais S. M. Louis XVIII ac-
corda des lettres de grâce , dans
lesquelles il est dit : « Nous avons
reconnu que certaines considéra-
tions provoquent notre indulgen-
ce, •> et la peine de mort fut com-
nmée en vingt années de prison.
Le général Travot , qui avait tant
de fois bravé la mort avec intré-
pidité sur les champs de bataille ,
fut accablé de l'idée d'une capli-
TRE
vite (le vltigl ans; il clait alors
presque sexagénaire , sa raison
s'aliéna entièrement, et on le con-
duisit en cet état au château de
Ham, ne voulant pas le laisser en
Bretagne. M"' la baronne Travot
qui n'avait pas quitté son illustre
et malheureux époux dans les ca-
chots, l'accompagna au château
de Han» , et vint ensuite à Pa-
ris , pour y solliciter la liber-
té de son mari. L'histoire con-
temporaine doit un juste tribut
d'éloge au dévouement sans bor-
ne de cette courageuse épouse. Il
est cruel d'ajouter qu'elle n'en fut
point récompensée. S. A. R. le
duc d'Angoulême, qui s'est ho-
noré par tant de bonnes et glo-
rieuses actions, plaida la cause du
malheur; grâce à la généreuse in-
tervenliou de ce prince, les fers du
général Travot furent brisés, après
une captivité de deux ans, et il tut
rendu aux soins de sa famille;
mais le coup était porté : sa rai-
son ne revint pas, et il languit
encore dans une maison de santé,
où il acheva sa glorieuse et dé-
plorable vie.
TRÉIIOUAUTS ( Pierre- Ju-
lien ) , capitaine de vaisseau de
première classe, chevalier de la
légion-d'honiUMir, na(niit à l'Ile-
de-France. Il entra par goftt dans
la carrière maritime, et y gagna
successivement ses grades jusqu'à
celui d'officier supérieur, et cha-
cun d'eux fut la récoujpi'n^ed'ime
action remarquable, soit en sous-
ordre, soit lorsqu'il commantl.i
«•n chef. Il s'est trouvé à onze
condjats. Volontaire «;n 17^5, of-
ficier en 1777, lieutenant de fré-
gate en 1779, snus-lietilenaul de
vaisseau en 1786, liculeiianl en
TRÉ 59
179a, capitaine en l'an .3, il fui
fait chef de division en l'an 6.
Nommé membre de la légion-
d'honneur A la création de l'or-
dre, il mourut le 20 floréal an 12.
Tréhouarts fit la guerre de l'Inde,
en 1 770 , sous les ordres de M. de
SufTren, qui l'avait distingué, et
qui se plut à rendre publiquement
justice à ses talens et à son cou-
rage, a Ses belles actions sur la
Cybelle, dit M. Lavallée dans une
notice stir ce brave marin , ont
pour jamais illustré celte frégate.
Il la commandait lorsqu'elle était
en station à l'Ile-de-France ; et,
par le terrible combat qu'elle li-
vra aux Anglais, le 1" brumaire
an 5, il eut le bonheur de con-
server à la France cette colonie si
précieuse. Le port de l'Ile - de-
France était depuis long -temps
bloqué par deux vaisseaux de
guerre anglais, le Centurion et le
Diomède. Une extrême disette se
faisait sentir, et l'on y était réduit
l'à six onces de pain par jour. La
Cy belle et une autre frégate étaient
les seules forces maritimes que la
colonie pût opposer aux Anglais.
Il fui décidé qu'elles Sf, dévoue-
raient pour le salut général, et
iraient combattre ces deux vais-
seaux qui leur étaient si supé-
rieurs. Tréhouarts accepta avei;
transport cette honorable et pé-
rilleuse mission. Eu effet , les
deux frégates appareillent, sor-
tent, lencontrflnt les deux vais-
seaux ennemis et les allaquenl.
Dans celle lutte si inégale , la
Cybetle n'sta, depuis trois heures
isprès-midi jusqii'A six heures du
soir, par le travers du Centurion ,
Je combat lanl A j)Orlée de fusil.
Enfin, démâtée de tous ses hu-
6o
TRE
nîers , ayant trois pie('s el demi
d'eau dans la calle, il lui fallut
songer à se retirer. Mais son ob-
jet était rempli; ïréhouarti» laissa
le Centurion si uialtraité et telle-
ment dégréé, qu'il lut obligé de
rallier le Dlornède pour lui porter
des secours , et qu'il ne put sui-
vre la Cybellc, qui, s'élant fait
prendre à la remorque par l'autre
frégate , rentra le lendemain à
rile-de-France. Pendant la nuit,
le Centurion ayant été déu)âté de
tous ses mâts, les Anglais levè-
rent leur croisière ; le port fut li-
bre, et, en peu de jours, l'abon-
dance reparut et régna dans l'île.
En l'an 4:» la Cy belle , toujours
commandée par Tréhouarts, s'é-
lant réunie à une autre division
française, fut une des quatre fré-
gates qui, le 24 fructidor, à la
côte de Sumatra, livrèrent aux
deux vaisseaux anglais de j'4i ^''
Victorieux et C Arrogant, l'un des
plus mémorables combats dont
les mers de l'Inde eussent été jus-
qu'alors le théâtre. 11 était à crain-
dre que cette journée ne tournât
à l'avantage de deux vaisseaux de
celte force; mais la valeur fran-
çaise en ordonna autrement , et la
gloire en resta tout entière aux
frégates. Le combat commença à
buit heures du malin, et ne lîuit
qu'à midi. Les deux vaisseaux an-
glais prirent la fuite. Le Victo-
rieux fut surpris par le calme pen-
dant le fort de l'action. La Cy belle
mit alors son canot en mer, se fit
remorquer, et, se maintenant en
travers à la poupe du Victorieux,
le foudroya. Cette manœuvre har-
die , exécutée par un équipage
intrépide, plein de confiance dans
son chef, et accoutumé à vaincre
TRE
avec lui , acheva de désemparer le
vaisseau ennemi, qui ne gagna
Madras qu'avec beaucoup de pei-
ne. Tréhouarts ramena en France
la Cybelle, sur laquelle il avait
cueilli lant de lauriers, et après
74 jours de traversée, il entra au
poit de Uochefort au mois de
messidor de l'an 5. Le 19 germi-
nal de l'an 6, il reçut le coumian-
dcment du vaisseau le Formida-
ble, de 80 canons. Le capitaine
Tréhouarts garda ce commande-
ment pendant une année, et ne le
quitta que pour passer au com-
mandement du Neptune, au port
de Toulon. »
TllÉHU DE MONTniERIVY
( N. ) , ex-mun)bre de la chambre
des di'pulés, où il avait été élu,
eu 1817 , par le département
d'IlIc-et-Vilaiue. Dès. le commcn-
ceuicnl de la révolution, dont il
adopta avec sagesse le.« principes,
il remplit successivement les fonc-
tions de commissaire des guerres
et de commissaire-ordonnalcur,
et les cessa long-temps avant le
rétablissement du gouvernement
royal en 1814. Appelé aux fonc-
tions législatives , en i 817, il prit
place au côté gauche, première
section , vota contre les deux lois
d'exception, et fut un des quatre-
vingt-quinze opposans au nou-
veau système électoral. RI. Tréhu
de Monlhierry sortit de la cham-
bre à l'expiration de son mandat,
et n'a point été réélu aux sessions
suivantes.
TREILHARD ( le comte Jean-
Baptiste ), ancien membre du di-
rectoire exécutif de la république,
minislre-d'état sous le gouverne-
mont impérial, grand-uflicier de
la Icgion-d'honneur, etc. , naquit
TRE
à Brivcs, dans le Bas-Limousin,
afijourd'luii dépaileiiieiit de la
Corrèze. Les doctriuaires y le-
uaient un coHéj^'e, dans lequel il fit
ses premières études; il les conti-
nua à Paris, au colii ge d'Harconrt,
et il embrassa ensuite la profession
d'avocat, que ses pères avaient
exercée avec honneur dans le lieu
de leur naissance. En 17O9, un
procès important que les habitans
de IJrives eurent avec le duc de
Noailles, el qu'il plaida pour ses
concitoyens, le tirèrent de l'obs-
curité. La dispersion des parle-
niens , en 1^71 , ayant ccarlé M.
Treilhard du barreau , il occupa
une place de directeur des fermes,
qu'il résigna , en i 775 , pour ren-
trer dans la carrière dont il avait
d'abord fait choix. Les magistrats
exilés venaient, à cette époque,
d'être rendus à leurs fonctions; il
fut bientôt appelé aa conseil de la
ferme-générale, et se trouva in-
vesti d'une grande confiance. Il y
eut peu d'affaires d'éclat dans les-
quelles il ne fftt chargé ou de
parler, ou d'écrire, ou de con-
sulter; mais il reçut bientôt un té-
moignage plus éclatant de l'es-
time de SCS concitoyens , qui le
nommèrent député aux étals-gé-
néraux en 1789. Pendant toute la
durée de l'assemblée constituante,
il exerça une grande influence.
Dans les premiers jours de juin de
la même année, il présenta des
observations conciliatrices sur In
réunion des trois ordres ; le a
septen)l)re suivant, il vota pour
une seule chambre et pour le vélo
!^u?pen:<if du roi. Devenu mem-
bre et rapporteur habituel du co-
mité ecclésiasti(pie, il présenta et
Oi ad"r>t«'r Ijus le» décn Is rela-
TEE
Ci
tifs au clergé et à sa nouvelle
constitution; proposa la suppres-
sion des ordres religieux, appuya
la demande faite à rassemblée
d'aliéner des biens ecclésiastiques
jusqu'à la concurrence de quatre
cents millions, et s'opposa à ce
que l'administration de ces biens
fût laissée au clergé. Nommé pré-
sident de l'assemblée , il main-
tint avec fermeté le calme dans
les délibérations, et imposa si-
lence aux tribunes devenues déjà
tumultueuses. Pendant le coursdo
l'assemblée législative, M. Treil-
hard présida successivement un
tribunal civil et un tribunal crimi-
nel; sous cette seconde assem-
blée, la révolution avait changé
de face : des hommes ardens, que
faisaient mouvoir les ennemis de
l'ordre, prêchaient hautement le
renversement de la monarchie. W.
Treilhard fut élu, en 1792, dé-
puté à la convention nationale par
le département de Scitie-et-Oise ;
il y proposa , pendant le cours
des débats relatifs au procès du
roi, d'accorder un ou plusieurs
conseils à ce prince, ce qui fui
décrété, sursa demande, le 10 dé-
cembre de la même année. Il fut
élu président de l'assemblée le 25
décembre suivant. Dans les pre-
miers jours de janvier 1793, il
s'éleva avec force contre l'sn-
fluence que les sections de Paris
voulaient s'arroger dans le pro-
cès qui allait décider du sort du
monarque ; il vota cependant ainsi
que la majorité, mais se prononfa
avec énergie pour l«^ sursis i\
l'exécution de la scnlence, et con-
tinua à ne point séparer de son
vote celui de sursis ( fait facile à
vérifier par les procès-verbaux de
<»i TRE
rassemblée, maïs qui a été dénatu-
ré dans le Moniteur. ) Pendant h\
séance orageuse de la nnit dn ven-
dredi 18 au samedi 19 janvier,
Marat et quelques autres députés,
du haut de la Montagne, appuyés
par les cris tumultueux des tri-
bunes, voulurent faire décider
qu'il n'y avait pas lieu à délibérer
sur cette question du sursis. RI.
ïreilhard, au milieu de ces cris,
quitta brusquement le fauteuil de
président, leva la séance, et se
retira, suivi d'un grand nombre
de députés. Après son départ, il
fut question de le mander à la
barre ; mais cette proposition
n'eut pas de suite, et la discussion
sur le sursis eut lieu le lendemain.
Dans la séance du 0 janvier même
année, un débat violent s'était dé-
jà ouvert sous sa présidence, llo-
i)espierre et Marat avaient rempli
les tribunes de leurs aflidés , qui
poussaient d'horribles clameurs.
Le président s'était couvert, la
sonnette s'était brisée dans ses
mains ; enfin il rétablit l'ordre et
censura Robespierre. Celui-ci .
ayant obtenu la parole, se livra à
de violentes accusations contre M.
Treiihard, qui se contenta de dire:
« Je pourrais répondre à Robes-
pierre , mais je ne veux pas oc-
cuper l'assemblée de moi. Il y a
entre nous un juge qu'il ne peut
récuser ni corrompre , c'est l'opi-
nion publique. » Robespierre fit
périr depuis des hommes qui l'a-
"vaiful moins offensé. M. Treiihard
échappa par un rare bonheur à sa
vengeance. Élu, le 7 avril i;r95,
membre du comité de salut-
public, que la convention venait
d'instituer dans son sein , il fut
envoyé, peu après, en mission
TRE
dans le département delà Gironde
où il fut arrêté pendant quelque*
jours lorsqu'on y apprit les atten-
tats commis à Paris, le 3i mai,
1" et 2 juin , contre la représenta-
tion tjalionale. Il (piilta ensuite
Bordeaux pour se rendre dans le
déparlement de la Dordogne, d'où
il lut bientôt rappelé, conmie trop
modéré, par le parti de la Monta-
gne. M. Treiihard demeura parfai-
tement étranger à tous les actes
de la faction sanguinaire, qui do-
mina bientôt l'assemblée et cou-
vrit la France de deuil ; mais dès
le i5 thermidor (5 juillet), trois
jours après la mort de Robes-
pierre , il fut porté de nouveau
au comité de salut-public , et y
prit part aux travaux législatifs les
plus imporlans. Il proposa la ra-
lifioalion du traité conclu A Brde
avec la Prusse, le iG germinal
an 3(4 novembre 1794), et fit
adopter, le 12 messidor suivant
(3o juin 1795), par la conven-
tion , l'échange proposé par le co-
mité de salut-public. des repré-
sentans et des minisires français
arrêtés en Autriche, avec la fille
du roi Louis XVI, détenue au
Teujple. Après la fin de la session
conventionnelle, M. Treiihard en-
tra au conseil des cinq-cents; il
présida plusieurs fois cette as*em-
blée , et y prononça un grand
nombre de discours remarquables
sur les matières de législation.
Sorti de ce conseil le 20 mai 1 798,
il se vouait à la retraite, après a-
voir refusé le ministère de la jus-
tice , lorsque le gouvernement le
nomma successivement n)embre
du tribunal de cassation, où ses
collègues lui déférèrent une pré-
sidence ; ministre plénipotentiaire
TRE
i\ Lille; ainbnssadfur à NapleS, el
enfin ministre plénipotentiaire nu
congrès de Uasiadt. Le général
Bonaparte était considéré comme
le chef de la Irgation française à ce
congrès; mais après son départ
pour rexpédilion d'Egypte, les
principaux pouvoirs furent remis
à M. ïreilhard, qui avait conduit
la négociation pres^u'à son terme,
lorsque les sulîrages du corps-lé-
gislatif l'appeltTcnt an directoire
le 26 floréal an G ( i5 mai i^qS),
en remplacement de François de
Neufchâleau. iMais dès le 28 prai-
rial an 7 ( iG juin 1799), à la suite
d'un nouveau revirement politi-
que, opéré cette fois par les con-
seils législatil's contre le directoire
exécutif, et qu'on peut regarder
comme la contre-partie du 18
fructidor an 5 (4 septembre 1797),
la nomination de M. Treilhard fut
annullée, sous prétexte d'un vice
de forme. Il quitta sans dilliculté
le poste qu'il n'avait point recher-
ché, et donna lui-même sa dé-
mission deux jours avant qu'un
acte pareil fût arraché à ses col-
lègues La Kéveillère-Lépeaux et
iMtrlin. Rendu à la vie privée jus-
qu'à l'établissement du gouverne'
ment consulaire , il fut alors nom-
mé vice-})résident, et ensuite j)ré-
sident du tribunal d'appel de l'a-
ris. L'époque de sa présidence est
encore aujourd'hui, pour la ma-
gistrature et pour le barreau, l'ob-
jet des plus honorables souvenirs.
Appelé ensuite par Napoléon au
conseil-d'élat, il y prit une part
Ires-active à la discussion du code
civil, du code criminel, du code
de procédure et du code de com-
merce ; il en rédigea plusieurs ti-
tres importans. et les présenta au
TRE
G3
corps-législatif, nctlamment la lo'
du divorce, qui, en rendant la
dissolution du mariage diilicile,
(bien plus même qu'en d'autres
pays, tels que la Pologne, où le
divorce entre catholiques est per-
mis) ne rendait [)oint cependant la
dissolution impossible. Cette loi,
abolie sans discussion en 181 5,
n'eut, pendant sa durée, que
d'heureux effets pour la saine mo-
rale et le repos des familles. M.
Treilhard se prononça avec persé-
vérance et une grande énergie en
faveur de l'institution du jury, et
c'est peut-être à ses conslans ef-
forts et à ceux «l'un petit nombre
de ses collègues, que la France
est redevable du niaintien de cette
institution salutaire. Il réclama
d'abord l'unanimilé dans les dé-
cisions du jury, ainsi qu'elle est
établie en Angleterre , et se rédui-
sit ensuite i\ demander la majorité
des deux tiers pour opérer la con-
damnation ; mais ses propositions
ne furent point admises. L'empe-
reur, dont il combattait souvent
les opinions, accueillait cependant
quel(|uefois ses conseils. M. Treil-
hard était président de la section
de législature <Ju conseil-tl'étflt ,
membre du comité contentieux de
la maisr)n de Napoléon, grand-
olïicier de la légion-d'honiieur ,
chevalier de l'ordre de la couronne
de Fer, et mii.istre-d'élat, lors-
qu'alTaibli par de longs travaux,
il mourut à Paris, le i" décembre
1810 , âgé de G8 ans.
TRElLflARI), lieutenant-gé-
néral (voy. l'article qui suit celui
de Trklis.)
TRELIS ( .JEAN-Ji'UKN ) . an-
cien bibliothé(-aire , conserva'eur
des cabinets d'antiques et d'his-
64 TRK
toire naturelle de la ville de Nî-
mes, secrétaire perpétuel de l'a-
cadémie royale du Gard, et mem •
bre de celle de Lyon, naquit A
Alais en 1757. Héritier des lu-
mières, de la philosophie et delà
raison supérieure de son père ,
qui dirigea seul son éducation, il
vint de bonne heure à Paris, for-
tifier et perfectionner son goût
passionné pour la littérature et
pour les arts , dans la société des
hommes les plus célèbres en tous
genres; et, de retour dans ses
loyers, il fut assez heureux pour
y trouver une réunion, peut-être
unique en province , d'hommes
aimables et éclairés dans tous les
rangs et de tous les âges, dont les
encouragemens et l'exemple con-
tribuèrent à développer ses ta-
lens. Sa vie aurait été purement
philosophique et littéraire, si, dès
l'aurore de la révolution, la haute
considération dont il jouissait ne
l'avait fait appeler, par le vœu de
ses concitoyens , au maniement
des affaires publiques. Après s'être
fait remarquer par sou patriotis-
me, par la sagesse de ses vues,
par la modération de son carac-
tère et par son éloquence dans les
assemblées du tiers -état, il fut
nommé membre du directoire de
son département; et là, d'un côté,
les résistances et les entreprises
contre-révolutionnaires et fanati-
ques; de l'autre, les agitations
désorganisatrices, ne lui fourni-
rent que trop d'occasions de si-
gnaler, souvent au péril de ses
jours , son amour pour la vraie
liberté, son respect pour les lois
et son inébranlable fidélité à la
royauté constitutionnelle. Echap-
pé au danger qui le menaça à la
TKE
chute du trôno, il fut forcé de se
dérober, par la fuite, à la proscrip-
tion , comme complice du pré-
tendu fédéralisme. Il parvint ;'i «e
réfugier en Suisse à travers mille
périls, et il y attendit plus d'un
an 1:> fin de son exil. Il en charma
les ennuis en chantant la cascade
de Lauffen , composiiion qu'une
société de gens de lettres de Zu-
rich fit imprimer avec luxe, et en
consacrant un beau poërae, en-
core inédit , aux Alpes et aux
grands et pittoresques effets de la
nature helvétique. Rentré dans sa
patrie, il eut à regretter la perte
de son portefeuille, qui renfermait
les travaux littéraires des dix plus
belles années de sa vie, et qu'une
terreur exagérée fit livrer aux
flammes pat ceux qui en étaient
restés dépositaires. Il se consola
plus aisément de celte perte que
ses amis , qui en appréciaient
mieux que lui la valeur. Sa vie,
jusqu'aux troubles de i8i5, s'é-
coula paisiblement dans les dou-
ceurs de l'étude, au milieu d'une
précieuse collection de livres qu'il
avait formée dans le sein de la
bibliothèque publique confiée à sa
f^arde , et où il avait institué un
cours de bibliographie, dont il
fut lui-même le professeur, et
dans les travaux académiques ,
lorsque la marche des événemeiis
eut permis de les reprendre. Ou-
ti'e le grand nombre de morceaux
en prose et en vers dont il a per-
sonnellement enrichi les notices
publiées par l'académie du Gard,
et qui tous portent l'empreinte
d'un excellent esprit et d'un ta-
lent d'écrivain très-distingué, l'a-
nalyse raisonnée des autres ou-
vrages contenus dans les huit prc-
Ï&E
iTîiers volumes de ce recueil, n'at-
tesle pas moins honorableinenl la
variété de ses connaissances, la
piirelé, l'élégance et la flexibilité
de son style. Mais il fallut une se-
conde fois s'anaiher à ces douces
occupations. Bien qu'il fûtrestéab-
solunientétrangerauxmouveniens
des cenl jours, en 181 5, sa qualité
de prolestant sulïït pouratlirersur
lui la persécution , quand les cir-
constances eurent réveillé toutes
les fureurs du fanatisme à la voix
hypocrite de quelques hommes
animés d'im tout autre intérêt
que celui de la reli|;ion-. Dégoûté
d'un pays désormais livré <\ la
haine sanguinaire de quelques in-
solcns dominateurs, ouverlement
protégés par la puissance publi-
que, M. Trelis, à l'exemple de
tant d'antres, le quitta pour ja-
mais. 11 s'est fixé à Lyon, où,
grâce à son mérite, il a été bien-
tôt accueilli comme il avait droit
de l'être : l'académie s'est em-
pressée de se l'attacher, et la con-
fiance d'une société libre, com-
posée de citoyens d'élite , a eu re-
cours à son zélé pour l'établisse-
ment de l'enseignement mutuel.
Parmi beaucoup de productions
inédites de M. Trelis, on peut ci-
ter comme très-retnarquables, un
poëme en quatre chants sur les
progrés de l'esprit humain dans le
18' siècle, des versions poétiques
de l'essai sur la critique de l'ope,
du Frométhée d'Eschyle, de l'Ân-
ligoneet des Trachiniennesde So-
phocle, et une traduction en prose
des satires de l'Arioste, qu'il se
propose de publier in(;cssamment.
TUEF.LIAIU) (le comte Aisne-
François -Chables) , lieutenant-
général , commandeur de la lé-
T. XX.
TRE
05
gion -d'honneur , chevalier de
Saint-Louis , né à Parme , le 9
février 176^, d'une famille noble
française. Il entra nu service dans
le régiment de la ileine-dragons,
comme cadet gentilhomme, le 6
uovemhce 1780 ; il fut nommé
sous-lieuteOrtut le 19 octobre
1781, lieutenant le 28 avril 1788,
et passa , avec le même grade , au
T>° régiment de chasseurs à cheval,
le ii5 janvier 1792; capitaine au
même corps le 6 août de la tnôme
année, lieutenant-colonel au 11'
de chasseurs à cheval le 7 avril
1793, colonel au même régiment
le i5 fructidor an 2, général de
brigade le 24 fructidor an 7 ; il
fut enfin nommé général de divi-
sion le 5 décembre 1806. Il a fait
les campagnes de 1792 et 1795 aux
armées du Nord, de la Moselle et
des Ardenncs; de l'an i"au llhin,
dans le Palalinat ; des années 2, 3,
4 et 5 aux armées de Sambre-el-
iMeuse et d'Allemagne; des années
6 et 7 , en Hollande et en Suisse;
des années 8 et 9, à l'armée gallo-
balave; des années I2et i3, à l'ar-
mée des côtes de l'Océan ; de l'an
i/j et de i8o(5, à la grande-armée
en Allemagne et eu Pologne; de
1808, en Espagne; de 1809, en
Allemagne , grande - armée ; de
1810, i8i I, 181 a et i8i3 , en Es-
pagne elen Portugal; enfindei 8 i/j,
à la grande-année, en Champagne.
Parmi les actions remarquables
qu'il a faites depuis 1792, nous
citerons les suivantes. Etant de
grande garde avec 3o chevaux,
en avant de Philip[)evillc, le 4
mars, il fut attaqué par les Au-
trichiens; il tint ferme, doima le
temps ,à son régiment de se dé-
ployer, et fut blessé dans l'actiou ;
66
TRE
aux avani-postcs de La Chapelle,
il rofut, en quiililé de capilaine,
Tordre du général Slenglc, cuiii-
ninndant l'avanl-garde, de fe por-
ter en reconnaissance, avec son
«eicadron et irois compagnies d'i«t-
ranter[e, a Durcn, sur luièvicre,
d'occuper celle vill<; , et d'en-
voyer CQ av;»!!t des partis pour
s'armer si l'ennemi avail repassé
le Kbin ; il iiil aliaqné des son
arrivée, à «me lieure du matin,
par un corps autrichien de 5,ooo
hommes. 11 se inainlinl jusqu'au
jour, el assura sa retraite, qu il fit
en bon ordre. Envoyé sur le Rhin,
dans le Palalinat, et commandanl,
comme lieutenant-colonel, 5oo
chasseurs à cheval de dift'érens
■corps, il prit pari à toutes les ac-
tions qui eurent lieu à la reprise
du Palalinat sur l'armée prus-
sienne , et assista à la balailie ties
lignes de Wissembourg ainsi qu'au
déblocus de Landau. Â la suite
de celte campagne, il lut rappelé
avec son régiment à l'armée des
Ardennes, qui venait d'être in-
corporée dans celle de Sambre-et-
Meuse. Le général Hébert le choi-
sit pour prendre le commande-
inent d'un corps de partisansde 5oo
chevaux , pour inquiéter l'ennemi
-sur ses derrières, et donner jour-
nellement au général en chef
Jourdan des renseignemens sur
les manœuvres de l'armée autri-
chienne. A 11 bataille de Fleurus,
il était, en qualité de colonel, à
l'avanl-garde du corpscommandé
par le général Moreau, qui formait
l'aile droile de l'armée de San)bre-
el-Meuse ; il soutint avec son ré-
giment, le jour de la bataille, de-
puis deux heures du matin , les at-
taques réitérées de la cavalerie lé-
TRE
gère des Autrichiens. Après la ba-
taille de Fleurus, il suivit le corps
de Moveau, qui se dirigeait sur le
Rhin pour attaquer Coblentz ; le
colonel Trelliard se distingua en
avant de cette ville . au village de
la Ïour-Blanche, où il culbuta la
cavaleiie eimemie , la poursuivit,
lui prit 180 chevaux, et mit 200
hommes hîirs de combat. Le len-
demain , à la prise de CoblenJE , il
chargea ave»^ son régiment les re-
doutes qui étaient en avant de
cette place , sen empara pour sui-
vre les Autrichiens , et serait en-
tré avec -eux dans la ville s'ils
n'avaient promptemenl f'iit sauter
une arche du pont sur la Moselle:
la ville capitula de suite, et lar-
mée y entra le même jour. Il
conliima de servir à l'avant-garde
de Moreau , le suivit dans le
Hourecouck et au blocus de
Mayence, et se distingua sur la
Rlire, où il commandait une avant-
garde ; détaché . coupé de son
corps d'armée , il fut obligé de se
l'aire jour à travers l'ennemi, qui le
poursuivit pendant quatre lieues
sans pouvoir l'entamer; il rejoi-
gnit le corps de Moreau sans au-
tr« perte que quelques tués et
blessés. En avant de Rreutsnack, il
s'élança sur l'ennemi, l'enfonça, et
entra pêle-mêle dans la ville avec
lui; iilit '2,5oo prisonniers de toute
arme au village de "Sperimglien-
gnien, près de Rreutsnack. Dans
une reconnaissance, il chargea le
régiment de Kerer hussards, et
lui lit éprouver une perte de i6o
chevaux. Sur le plateau de Par-
tenheim, au blocus de Mayence,
dans une sortie que fil l'ennemi ,
il attaque sa cavelerie, forte de
i5oo cîievaux, l'enfonce, le pour-
TRE
suit, lui prend *.îoo chevaux, et n»t;t
i5o honiin*-s liors de combat. A
une autre époque, dans les der-
niers jours de sepleuibre. l'enne-
mi ayant fait une sortie de Mayen-
ce, par un épais brouillard, rarmée
attaqua et cidbuta le« avan t-posfes,
pénétra dan? le camp et les bi-
vouacs de la lifjne , et mit tout en
désordre. Le colonel Trelliard qui
.se trouvait à l'extrême gauc'je, et
qui n'avait pas été attaqué, prit
sur lui de quitter son poste pour
se porter avec son régiment où é-
lail le danger, et malgré le brouil-
lard, le désordre et la confusion,
il se précipita sur l'ennemi ; après
trois charges consécutives et
meurtrières, il arrêta ses progrès,
reprit l'artillerie, dont il s'était
emparé, et le força à la retraite.
Dans une autre rencontre, au vil-
lage de Marienbonne, sous Mayen-
ce , il chargea l'ennemi, fit un
bataillon de pandours prisonnier
et 120 Juissards. Lorsque le géné-
ral Marceau fut tué à AUenkir-
chen, il servit avec son régiment ;\
la division du général Grenier ,
passa le Khin à la tête de cette
division, et, chargeant les redou-
tes en avantdeNeuwied,il lit 2,000
prisonniers. Il servit également à
l'avant-garde du généra! Souham,
au commencement de l'an 7 , en
Suisse. Son régiment n'eut au-
cune occasion de se distinguer
à celle époque ; le colonel Trel-
liard fut rappelé de près de BH-
le, où il se trouvait, pour al-
ler, comme général de brigade,
occuper le commandement de la
(Cavalerie française en Hollande.
H prit part aux dilTérens combats
qui eurent lieu à la déroule de
l'armée anglaise près d'Alque-
TftE
67
mard ; il fit ensuite partie de l'ar-
mée gallo-balave, commandée par
le général en chef Augereau, et
commanda l'avant-garde du lieu-
tenant-général Duhem. Il se dis-
tingua particulièrement h For-
kem , où il se trouvait à l'aile
gauche de l'armée, combattit tout
le jour, en avant de cette ville,
un corps autrichien, numérique-
ment beaucoup plus fort que celui
qu'il commandait, contint l'enne-
mi par des manoeuvres hardies, et
lui opposa la plus vive résistance.
Appelé au can)p de Boulogne le
21 frimaire an i5, il eut le com-
mandement de la brigade de hus-
sards de la division du général
Bournier , marcha en Allemagne ,
à Ulin et à Austerlitz, et comman-
dait , à l'ouverture de la campa-
gne, l'avant-garde des grenadiers
du général Oudinot ; il se distin-
gua au combat de Wertinguen, à
la Irte des 9* et 10' de hussards,
chargea l'ennemi, prit trois pièces
d'artillerie, et fit 700 prisonniers.
A Braunau, sur le Danube, l'en-
nemi, qui occupait encore cette
place, avait les ponts; le général
Trelliard fil mettre pied à terre à
une partie de ses hussards, s'em-
para des barques que l'eimcmi a-
vait négligé d'emmener sur l'autre
rive, passa le fleuve, entra dans
la ville, et en chassa l'ennemi. A
Vienne, il eut ordre du grand-duc
de Berg {voy. iMurat) de seconder
le général Bertrand, aide-de-camp
de l'empereur, qui était chargé
de s'emparer des ponts sur le Da-
nube. Il se porta ensuite avec sa
brigade sur Stoeraii pour éclairer
le corps du grand-duc de Berg,
et dirigeait l'avant-garde; il fit
deux bataillons prisonniers. Char~
68
TRE
gé d'occuper Wichan, ou Murarie,
po^lc placé en poitile en avant de
l'armée, le général Trelliard reçnt
pour inslruclion île ne point aban-
donner ce poste , n'importe le
nombre des assaillans. Les Russes
vinrenl attaquer Wichau le jour
même où il avait fait pousser des
reconnaissances sur toutes les di-
rections , sans qu'on eût aucune
nouvelle de l'ennemi ; il se croyait
en pleine sécurité, lorsqu'à onze
heures du soir les Russes culbu-
tèrent ses postes avancés, et en-
trèrent pêle-mêle dans la ville
avec eux. Le général défend de
monter h cheval, donne l'ordre
que les hussards se rassemblent
de suite sur la place avec leur ca-
rabine , et bientôt il chaise l'en-
nemi ; mais les Russes arrivent en
force avec de l'artillerie, et après
une attaque de quatre heures, ils
envoient au général Trelliard un
parlementaire lui annoncer que la
place était bloquée par un corps
considérable , et le sommer de se
rendre. Le général s'y refusa ,
parvint à faire connaître sa posi-
tion au grand-duc deBerg, qui
était à i4 lieues, et, jusqu'à l'arri-
vée des lorces qui le firent déblo-
quer, il se défendit avec la plus
grande intrépidité. A la bataille
d'Austeriilz , il partagea avec l'ar^
mée la gloire de cette journée,
fut envoyé le soir à la poursuite
de l'ennemi, et fit grand nombre
de prisonniers. Dans la campagne
de Prusse, en 1806, il eut le
commandement de la divi.'^ion de
cavalerie légère attachée à l'avant-
garde du 5* corps, commandé par
le maréchal Lasne. Le 10 octo-
bre, appuyé par une brigade d'in-
ianterie de la division Suchet,
TRE
commandée par le général Reille,
il chargea l'ennemi dans son mou-
vement de retraite , le culbuta et
le poursuivit. Le résultat de cette
brillante charge fut G, 000 prison-
niers, avec trois généraux, trois
drapeaux, (;t trente pièces d'artille-
rie. C'est à cette affaire que le prin-
ce Louis de Prusse, qui comman-
dait ce corps ennemi, fut tué dans
la charge par un sous-ofïicier de la
division de cavalerie légère. A la
bataille d'Iéna, le général Trel-
liard, aveo sa division, couvrait
le flanc gauche du 5' corps; il
chargea quatre carrés d'infanterie,
fit 8,000 prisonniers, prit 4 ^^r^"
peaux, 2 généraux, et 8 pièces
d'artillerie. Envoyé à la poursuite
du corps prussien , commandé
par le général Bliicher, qui se re-
tirait sur Lubeck, il atteignit deux
fois son arriére-garde, <;t lui fit bon
nombre de prisonniers. Arrivé à
Stettin,surrOder,le maréchal Las-
nele détacha avec sa division pour
aller à la poursuite de l'ennemi
jusqu'à la Vistule. Il s'acquitta de
celte mission avec un plein succès,
fit grand nombre de prisonniers ,
et força l'ennemi à passer le fleu-
ve; il traversa la Vistule, toujours
formant l'avant-garde du maré-
chal Lasne. Au combat de Pultusk,
où le maréchal et le 5° corps firent
des prodiges de valeur, le général
Trelliard fut grièvement blessé ;
le maréchal lui envoya le soir un
oflîcier lui dire que l'empereur
l'avait nommé général de divi-
sion , en récompense de sa bril-
lante conduite durant cette cam-
pagne. Aussitôt que sa blessure
lui permit de monter à cheval , il
sollicita auprès de l'empereur la
permission de retourner à l'ar-
TRE
mée. Il fut envoyé en Espagne
dans les premiers jours de 1808,
où il fut chargé du commande-
ment de la province de Villoria ,
passa en Castille, et y fit une
^'ucrre active au corps espagnol et
aux bandes de guérillas. Appelé
en 1809 à la grande- armée , en
Allemagne , il ne put arriver assez
à temps j)o»ir prendre part aux
brillantes actions de cette cam-
pagne. Renvoyé, en iSio, en Es-
pagne, il y Cl les campagnes de
iSio, 1811, 1812 et i8i5, tant
en Espagne qu'en Portugal; il
commandait en Portugal la ré-
serve de cavalerie, ?e distingua
avec sa division à Coïnibre, et
lorsque l'armée fit sa retraite. Au
retour du Portugal , il fut appelé
à Madrid pour commander fa ca-
valerie légère de l'armée du cen-
tre; envoyé ensuite dans la Mar-
che, il prit le commandement de
cette province, et celui de la 4° di-
vision de dragons. Il eut à com-
battre les troupes espagnoles, qui
cherchèrent à s'en emparer, et les
corps nombreux de guérilla'? qui
infestaient celte province. Le gé-
néral Morillo, avec un corps d'in-
fanterie de 5,000 hommes, 5oo
chevaux, et 5 pièces d'artillerie,
voulait prendre Almagro , ville
au centre de la Manclie ; le géné-
ral Trelliard, prévenu de la mar-
che du général espagnol, part à
minuit avec 3oo chevaux , une
pièce d'artillerie légère et arrive à
Almagro ;\ la pointe du jour, au
moment où le général Morillo at-
taquait les faubourgs; il charge de
suite en flanc sa colonne, en lui
envoyant un seul coup de canon ;
met en fuite In cavalerie et l'infan-
terie, fait grand nombre de pri-
TRE
«»
sonnîcrs, et le chasse de la pro-
vince. Lorsque le roi Joseph [voy.
Bonaparte) fit sa retraite de Ma-
drid sur Valence, le général Trel-
liard fut chargé de couvrir ce
mouvement avec la 4' division de
dragons qu'il commandait, forte
seulement de 1,100 chevaux; il
attaqua l'avant-garde anglaise, qui
avait i,5oo chevaux, 5 batteries
et 5 pièces d'artillerie , se diri-
geant sur Madrid ; il cull)ularen-
nemi entre les villages de Macala-
houda et la Rosa, lui prilS |)ièces
d'artillerie, 200 chevaux, tua loo
hommes, et en mit 4')o hors de
combat. Cette affaire est un des
plus beaux faits d'armes de cava-
lerie par l'opiniâtreté de l'ennemi,
qui revint trois fois à la charge
dans l'espérance de reprendre son
artillerie : ce ne fut qu'à la der-
nière qu'il fut enfoncé. Cette bril-
lante action assura la tranquillité,
la marche du roi sur Valence,
et celle d'un convoi de plus de
2,000 voitures, la plupart rem-
plies d'habitans de Madrid, qui
emmenaientavec eux letir famille.
Le 1" janvier 1814 » il fnt appelé
de l'armée d'Espagne à la grande-
armée en Champagne , avec la a"
division de cavalerie qu'il com-
mandait. En avant de Nangis, le
I 5 février, à la tête de sa division,
soutenue par le corps du comte
Gérard, il attaqua et culbuta l'a-
vant-garde russe, lui prit i() piè-
ces de canon, fit 5, 000 prison-
niers , et la poursuivit jusque sous
Provins. Le 24 du même mois,
avec la 1' brigade de sa division,
il attaqua l'arrière-garde autri-
chienne, qui se retirait de la Mai-
son-Blanche sur Bar-sur-Seine ,
entama celte arrière garde à lu
:jo Ti\E
hauteur de !a Maison-Hlancbc, lui
fit 1,200 prisonniers d'infanterie,
prit un drapeau , poursuivit la ca-
valerie pendant cinq lieues , fit
prisonniers loo canonniers ou
chevau-légcrs , tua bon nombre
d'hommes , et en mit 200 hors de
combat. A Arcis-sur-Aube, il sou-
tint et couvrit la retraite du corps
commandé par le maréchal Ou-
dinot, et quoique l'ennemi le fou-
droyât de son artillerie et du fou
de son infanlGrie , il fit sa retraite
par Echigni , et par sa contenance
et sa fermeté empêcha l'ennemi
de l'entamer. Nommé gouver-
neur de BelIe-Iie-en-Mer , au
mois de juin 18145 il a été mi;^ à
la retraite le 1" octobre i8i5,
après 55 ans de services. Il jouit
aujourd'hui (182.0), dans sa fa-
mille , de l'estime de ses conci-
toyens.
ÏRENCK (Frédéric, BARON de),
qu'une persécution sans exemple
et une mort funeste ont rendu
également célèbre, naquit, le 16
février 1726, à Kœnigsberg, ca-
pitale de la Prusse orientale. Il
annonça, dès ses jeunes années, un
, caractère entreprenant et aventu-
reux, et eut au collège iriême ,
avec deux de ses camaradts, deux
affaires d'honneur, dont il sortit
avec avantage. Admis i l'âge de
seize ans à la cour du grand Fré-
déric, en qualité de cadet dans le
régiment de ses gardes, il parvint
bientôt à la plus grande faveur,
et le roi se l'attacha comme aide-
de-camp. Berlin réunissait alors
les hommes les plus célèbres de
l'Europe; Voltaire, Maupertuis,
et beaucoup d'autre> savans , em-
bellissaient cette capitale; le jeune
Trenck était l'objet de tous les
TRE
égards par ses qualités brillantes ,
par les grâces de son eeprit , et
peut - ôtre aussi par les distinc-
tions dont l'honorait son souve-
rain. La guerre, qui éclata à cette
époque entre rAulriche et la
Prus«e, et dans laquelle Trenck
se signala par une grande bra-
voure, mit le comble à sa faveur;
il fut décoré de l'ordre du mérite.
Une intrigue amoureuse avec une
dame du plus haut rang vint
tout à coup détruire ses espéran-
ces de gloire et de fortune. Punir
celte espèce de crime, s'il exis-
tait réellement, c'eût été le révé-
ler; on l'accusa d'ime correspon-
dance criminelle avec son frère
François, chef des pandours dans
l'armée autrichienne; des lettres
interceptées, ou plutôt supposées,
convainquirent tous ceux qui n'é-
taient pas du secret, que le baron
de Trenck avait entretenu des
correspondances avec l'armée en-
nemie. Il fut arrêté et conduit à
la citadelle de Glatz, Au bout de
cinq mois, il forma le projet de
briser ses fers ; le complot fut dé-
couvert, et une seconde tentative
n'eut pas plus de succès. Dès-lors
il dut renoncer à tout espoir de
grâce ou de justice. Néanmoins
un de ses camarades , que le mal-
heur n'avait pas rendu infidèle à
l'amitié, lui facilita, au péril de
sa vie , les moyens de s'échapper.
Le baron de Trenck se réfugia à
Vienne, où il obtint de l'impéra-
trice-reine , à la sollicitation de
plusieurs grands seigneurs, une
compagnie de cavalerie dans le
régiment de Cardoue, cuirassiers.
Il fit ensuite un voyage de trois
mois en Russie, auquel on sup-
posa des motifs politiques ; il eut
TRE
aussi rimprudencft d»; s'arrêter à
Dnntzick, pour y terminer, avec
5es frères et ses sœurs, le partage
de la succession de leur mère ,
morte en cette ville; mais déjà
l'on préparait son cachot à iMajr-
debourg. Un de ses ennemis ayant
écrit de Vienne au roi de Prusse ,
que ïrenck ne faisait le voyage
de Danlzick que pour trouver le
moyen de l'assassiner, on prit tou-
tes les mesures pour l'arrêter, et
il le fut au moment même oi'i ,
instruit du sort qui l'attendait, il
s'embarquait sur un vaisseau sué-
dois pour retourner en Russie,
lînfermé d'abord dan? lu prison
de DanJzick, il en partit birtitùt
sous l'escorte de trente hussards,
qui le conduisirent à Berlin, d'où
il fut transféré , p.w Spandau ,
dans un cachot île Slagdebourg;
il y fut chargé de chaînes du poids
de 45 livres, mais dont, par une
adresse inouïe, il se débarrassait
ou se révélait i"i volonté, trom-
pant ainsi la surveillance de ses
geôliers. Quand il ne s'occupait
pas ôe.i moyens de recouvrer sa
liberté, ce qu'il fit à plusieurs re-
prises, mais toujours infructueu-
sement, il s'exeryait à un genre
d'industrie qui ajoutait encore à
l'intérêt qu'avaietit fait naître ses
malheurs : il était parvenu à graver
sur des verres, avec la pointe d'un
rlonJ, des dessins qui faisaient
l'admiration des hauts personna-
ges à (pli il les adressait. Cepen-
dant on intercédait toujours en sa
fav«:ur,même l'impératrice Marie-
Thérèse. Le roi répondait tou-
jours : a Trenck est un homme
dangereux; tant que je *ivrai, il
lift verra pas le jour. » Néan-
moins, le 24 décembre 1774» F'*^-
TRE
7'
dérick , à l'occasion de sa fête ,
ordonna que le baron fût mis sur-
le-champ en liberté, avec ordre
de ne point paraître A lu cour, ni
même à Berlin. L'intérêt qu'il
avait inspiré pendant sa captivi-
té cessa tout à coup dès qu'il fut
libre ; on ne se souvint plus de
lui en Autriche; il ne put même
rentrer dans ses biens, dont s'é-
taient emparés les curateurs qu'on
lui avait donnés. Il fit cependant
nn triariage honorable, et alla se
fixer à Aix-la-Chapelle , où il se
livra , pour vivre, à des opéra-
tions de commerce , qui ne lui
réussirent point ; il se trouvait
dans un état voisin de la gêne,
lorsque la révolution française
vint lui fourm'r l'espoir de repa-
raître avec avantage dans le mon-
tlc. II arriva, en 1790 , à Paris,
y fut accueilli par les sociétés po-
pulaires , et se lia particulière-
nient avec Latude, victime com-
me lui du pouvoir arbitraire. A
répn(|ue où les Prussiens péné-
trèrent en France, il olVrit «le ras-
sembler tous les Prussiens mé-
contens de leur gouvernement,
qui se trouvaient en France, et
(l'en former un régiment de ca-
valerie, qu'il (^induirait lui-même
h l'ennemi. C'était l'époque des
sonp(;ons 5 il n'en fut pas exempt,
malgré les gages qu'il avait don-
nés à la liberté. On le regarda
comme un espion de la Prusse ;
il fut arrêté qiichjue temps après
et conduit dans les prisons d(!
Saint-Lazare. A défaut de motifs
réels pour le mettre en jugement,
on l'engloba dans une prt^tenduc
conspiration iït:^ pri-^ons, et il fut
condamné à mort sous ce ridicule
prétexte. Avant d'aller nu »up-
72
TRE
plice, il écrivit à sa femme la let-
tre la plus touchante, et mourut
avec courage. Ainsi périt, i\ l'âge
de 70 ans, victime d'une faction
qui se disait amie de la liberté ,
celui qui , toute sa vie, avait gémi
gous le despotisme royal.
ITiÈSTAILLOUS ( N. ) , dit
commimément TaiiSTAiLLONS, ou
TRois-TRANcnANS, cu patois lan-
guedocien, fut un de ces monstres
qui déshonorèrent par leurs cruau-
tés le parti qu'ils voulaient servir,
ets'effoi'cèrentdelerendreodieux.
11 y a celte différence néanmoins
que les hommes du parti opposé
firent eux-mêmes justice, au 9
thermidor, de tous ceux qui a-
vaient abusé de l'anarchie du mo-
ment pour ordonner ou commet-
tre des assassinats ultra -révolu-
tionnaires , tandis que Trèstail-
lous et ses pareils, qui s'étaient
rendus fameux à force de crimes,
au mois d'août 181 5, à Nîmes,
pour rendre par la terreur la fac-
tion ultra-royaliste, maîtresse des
•élections , trouvèrent un appui
constant dans ceux qui les avaient
soudoyés , et échappèrent pres-
que tous à la rigueur des lois.
i\l. de Serre, dont le témoignage
peut être de quelque poids sur
cette matière, quoiqu'il ait tenu
un autre langage lorsqu'il était
garde-des-sceaux en 1820, s'ex-
primait ainsi sur Trèstaillous, dans
le comité secret de la chambre
des députés, du 25 mars 1819 :
o Parlerai -je , messieurs , d'un
homme dont j'ai horreur de pro-
noncer le nom ? Trèsl aillons, pré-
venu de crimes affreux , devient
l'objet des poursuites du minis-
tère public. L'autorité judiciaire
ne veut pas qu'il soit jugé dans la
TRI
ville même théâtre de ses cri-
mes , tant la consternation de» ci-
toyens, tant la terreur qu'inspire
le prévenu font craindre pour la
liberté des délibérations de la jus-
tice; il est envoyé aux assises de
Riom. Le croiriez - vous , mes-
sieurs, on ne peut trouver aucun
témoin qui dépose des crimes de
Trèstaillous ( commis en plein
jour, à la face d'une ville entière),
et il s'en présente cent pour at-
tester son innocence? » En-
hardi par l'impunité, il a conti-
nué de porter le sobriquet atroce
qu'il s'était lui-même donné, et
de se montrer partout avec au-
dace an milieu des populations
auxquelles Ses fureurs ont imposé
un honteux silence.
TRINQUELAGUE ( Chablbs-
François de ) , chevalier de la lé-
gion-d'honneur, premier prési-
dent de la cour royale de Mont-
pellier, conseiller-d'état, ex-mem-
bre de la chambre des députés ,
est né le 29 décembre 1747» à
IJzès , département du Gard ,
et fut reçu avocat au parlement
de Toulouse. En 1776, il rem-
porta le prix proposé par l'acadé-
mie de Nîmes, pour VEloge de
Fléclùer, et, en 1781, il succéda à
son père, avocat-syndic d'Uaès.
Membre de la seconde assemblée
des notables, il y seconda avec
tant de zèle les vues ministériel-
les, qu'il en reçut la récompense
dans les lettres de noblesse qui
furent accordées à son père, et
dans l'expectative pour lui-même
de la place de syndic-général de
la province de Languedoc. La ré-
volution ne tarda pas à anéantir
les litres honorifiques et les espé-
rances de l'emploi lucratif. II n'est
TRI
pa? bien constant que M. Trin-
quelague se soit prononcé pour
la révolution; toutefois, comme
alors on n'accordait guère d'em-
ploi qu'aux hommes qui don-
naient des garanties de leur pa-
triotisme, on dut croire que M.
Trinquelague avait mérité de de-
venir maire de la commune où il
était né, puis président de dis-
trict. Ce fonctionnaire municipal
jugea prudent de se cacher en
1793 , et de ne reparaître qu'après
cette fatale époque en son an-
cienne qualité d'avocat, Aj>proba-
teur du gouvernement impérial,
puisqu'il consentit à devenir sa
créature , il fut successivement
nommé, 11 l'époque de la réorga-
nisation des tribunaux, premier
avocat -général à la cour impé-
riale de Nîmes , et en 181a, can-
didat au corp^-législatif, où néan-
moins il ne fut point appelé. Le
gouvernement royal ne l'employa
pas pendant la première restao-
ralion , en i8i4 * ni Napoléon
pendant les cent Jours, on 181 5.
La seconde restauration le remit
en évidence, et dès le mois d'août
i8i5, il prit séance à la chambre
des députés ^ en vertu de son élec-
tion par le département du Gard.
Au mois de décembre suivant, il
fit partie de la commissior) char-
gée de l'examen du projet de loi
sur le rétablissement des cours
prévôtales, en faveur desquelles
il se prononça fortement. Le 2g
du même mois, rapporteur d'une
commission centrale, il demanda
une loi « qui ordonnât que le 21
janvier de chaque année , il y eût
dans le royaume un deuil géné-
ral ; qu'il fût fait le même jour
un service dans chaque église de
TRI
7^
France , et qu'en expiation du
crime de ce malheureux jour, il
fût élevé, sur une place de la ca-
pitale, aux frais de la nation , une
statue à Louis XVI, avec ces mots
graves sur le piédestal : La France
libre à Louis XVI. -> M- Trin-
quelague réclama, dans la séance
du 7 janvier 1816, non sans ex-
cilor des murmures parmi les
membres de la minorité, un chan-
gement au projet de loi dit d'flm- •
nisde, comme exceptant de cette
loi (c'est la loi du 12 janvier
1816, rendue contre les conven-
tionnels dits volans) les crimes et
les délits envers les particuliers ,
et proposa de la rédiger ainsi:
« L'amnistie s'étend aux crimes
et délits commis envers les parti-
culiers jusqu'à ce jour, et qui ont
été la suite ou de l'entreprise de
l'usurpateur, ou de la réaction à
laquelle a donné lieu son entre-
prise. On pourrait, ajouta -t- il,
en abuser contre les royalistes du
Midi, qui, exaspérés parles atten-
tats de leurs ennemis, ont pu se
livrer à leur tour à quelques ex-
cès. Faudra-t-il que dans ces dé-
partemens fidèles, les cachots res-
tent encore ouverts pour recevoir
de nouvelles victimes? » Au mois
de lévrier suivant, il fut nommé
membre de la commission chargée
d'examiner la proposition de M.
de Ronald, ayant pour objetlasup-
pression du divorce; il prononça,
a cette occasion, dans le comité se-
cret, un discours, d'où l'on a ex-
trait le passage suivant : « C'est
aux époques les plus désastreuses
de notre révolution, que l'esprit
de désordre et de licence qui en
dirigeait et précipitait les mouve-
niens, amena le divorce au milieu
74
TRI
de nous. La loi qui consacre ce
granil attentat est du 20 septem-
bre 179a, c'est-à-dire, donze
jours après le massacre des \)vîi-
tres, (les pontifes, et d'une foule
innombrable de victimes immo-
lées i\ la haine de la religion, de
la royauté, de nos lois antiques,
immolées dans le sein de la capi-
tale, sous les yeux des autorités,
sans obstacle avant le crime, sans
poursuite après sa consomma-
tion. » Ce n'était pas dans ces
deux occasions, et surtout dans
celle de la loi d'amnistie, rappe-
ler tout-à-fait la maxime royale
union et oubli; mais M. Trinque-
lague , conune beaucoup il'au-
tres, pensait sans doute que c'é-
tait servir le monarque que d'al-
ler au-delà de sa volonté. Dans le
même mois, il fut nommé procu-
reur-général de la cour royale de
Pau , et sous-secrétaire-d'état au
département de la justice. L'or-
donnance royale du 5 septembre
1816, mit un terme aux travaux
de la chambre dite introuvable.
M. Trinquelague fut réélu à la
nouvelle chambre par le départe-
ment du Gard, «où, disent les
auteurs d'une biographie étran-
gère, l'esprit qui avait dicté l'or-
donnance n'avait point pénétré. »
Dans la nouvelle chambre, il vota
constamment, ainsi qu'il l'avait
fait dans la première , avec le
parti des exclusifs, qui toutefois
n'était plus en majorité. Il obtint,
au mois de décembre de la même
année, de nouvelles lettres de
noblesse , le? ancienne-! n'ayant
pu être enregistrées, en 17^9, à
cause de la suppression des j)ar-
lemens. Le ministère changea par
suite de la célèbre ordonnance du
TRI
5 septembre, et M. Trinquelague
perdit, en janvier 1817, sa place
de sous-secrélaire-d'état. 11 passa
au conseil-d'éfat en service ordi-
naire. L'un des membres de la
série qui sortireal de la chan)bre
à la fin de la session de itîi8, fl
ne fut pas réélu aux sessions sui-
vantes; il avait été nommé, le 19
avril 1817, conseiller à la cour
de cassation, et conseiller - d'é-
tat en service extraordinaire. M.
de Trinquelague est aujourd'hui
(1825) premi-er président de la
cour royale de Montpellier.
TRIF ( Af.BERT-D0MIMQtJB), flU-
cien colonel au service de France,
depuis lieutenant-général au ser-
vice du royamne des Pays-Bas,
officier de la légion-d'honneur et
commandeur de l'ordre militaire
de Guillaume, naquit à Grœnin-
gue, en 17^6. Se destinant dès sa
jeunesse à la carrière des armes,
il entra à l'âge de i5 ans, comme
cadet, dans un régiment d'infan-
terie, fut nommé enseigne l'aimée
suivante (1792), assista au siège
de Landrccies , et fit, avec les
trou{)es hollandaises, les premiè-
res campagnes de la révolutii)n
contre les Français. A près le chan-
gement politique qui s'opéra en
son pays en 1795, et la fuite du
stadhouderen Angletene, l'armée
hollandaise reçut une destination
nouvelle; au lieu de combattre
les Français, elle devint leur auxi-
liaire. M. Trip, nommé lieutenant
en premier, servit avec distinc-
tion dans la Nord-Hollande, en
1799, et eut part à tous les com-
bats qui se livrèrent contre les
Russes et les Anglais, débarqués
sur les côtes de cette province.
L'entreprise desassailhms leur de-
TRI
Tint, comme on sait, funeste ; il
n'était pas facile à cette époque de;
violer impunément le territoire
de la France ou de ses alliés. En
>8o6, le roi Louis {voy. Bona-
parte-Josepd) nomma iM. Trip
capitaine dans sa nouvelle gar-
de, et peu de temps après, chef
d'escadron des grenadiers à che-
val. Deux ans plus tard, il ob-
tint le gradé de colonel avec le
commandement du 2* régiment
de cuirassiers , et fut eu outre
nommé écuycr du roi. Il marcha,
vers la fin de i8o8, contre le chef
de partisan prussien, Schill, qui
faisait alors la guerre pour son
propre compte , et contribua à sa
défaite dans la ville de Stralsund.
Le roi de Danemarck envoya , ;\
cette occasion, la croix de l'ordre
de Danebrog au colonel Trip.
Nommé, eu 1810, comman-
deur de l'ordre de l'Union , dont
il avait été un des premiers che-
valiers lors de son institution, il
accompagna , en sa qualité de
grand -cuyer, le roi Louis lors
du dernier voyage que ce prince
fil i\ Paris, peu de ten)ps avant
son abdication volontaire d'une
royauté qu'on lui avait imposée
malgré lui. La Hollande, bien-
tôt incorporée à l'empire fran-
çais, le colonel Trip suivit le
sort de ses frères d'armes batavcs,
et passa dans les rangs des guer-
riers français. Son beau régiment
devint le 14* de cuirassiers, et il
continua à se distinguer à la lête
de ce corps ; il (il avec lui la guerre
d'Allemagne et la campagne de
Uussie , fut grièvement blessé au
passage de la Bérésina lors de la
retraite de l'armée française, et
fut nonimé oflicier de la lé-nnu-
TRO
75
d'honneur après la bataille de
Dresde, en i8i5, dans laquelle
il venait encore de déployer la
plus brillante valeur. A la suite
des événemens de cette époque,
lorsqiie la Hollande eut recouvré
son indépendance, le colonel
Trip s'etnpressa de rentrer dans
sa pairie , et offrit ses services an
prince d'Orange, qui en était de-
venu le souverain. C<^lui-ci, ren-
dant justice aux talens militaires
d'un olFicier aussi distingué, le
nomma d'abord son aide-de-camp
et lui conféra, eu 181 5, le grade
de général-major. 11 commanda
en cette qualité un corps de ca-
valerie belge et batave pendant la
campagne de la même année, et
se distingua à la bataille de Wa-
terloo. En 181O, il fut nommé
lieutenant-général et chargé d'une
mission extraordinaire en Russie,
où il porta à l'empereur Alexan-
dre la nouvelle de la naissance du
premier fils de l'héritier de la cou-
ronne du royaume des Pays-Bas,
beau-frère de l'empereur. Le gé-
néral Trip fut décoré, à cette oc-
casion, de la grand'croix de l'or-
dre de Sainte-Anne. A son retour,
il eut 1« commandement en chef
de la cavalerie, et en 1820, celui
de la première division territoriale
du royaume des Pays-Bas . dont
le quartier-général est à Utrechl.
TKOISOEUFS ( Antoine -Am-
buoise), ex-législateur, né ;\ Pa-
risen ij^^o, s'était origiuiiireuM'nt
destiné au barreau, et était avocat
à Paris lors de la suppression des
parlemens. Après avoir servi d'a-
bord dans les rangs de l'armée, où
l'a valent appelé les lois du temps,
il eut bientôt à remplir des fttnc-
lioiis importantes auprès des ar-
^6 TRO
niées du Nord et de Sambro-et-
Meuse, et il fut, en même temps,
chargé de Ja régie des domaines
à Bruxelles, jusqu'à ce que l'ad-
minisiration française vînt en
prendre possession. Nommé de-
puis secrétaire d'une des grandes
administrations locales, chargées
de façonner les Belges au joug
des lois et des institutions fran-
çaises, il fui successivement, lors
de la réunion de la Belgique à la
France, administrateur et secré-
taire-général du déparlement de
l'Escaut. En 1808, il fut élu, par
ce même déparlement, membre
du conseil des cinq-cents. Dans le
cours de sa carrière administra-
tive, qui cessa en 1810, il parut
différentes fois à la tribune , soit
pour faire des rapports, soit pour
prendre part aux discussions, ou
pour célébrer lu gloire de nos ar-
mées. Appelé, dans la même an-
née, aux fonctions de juge au tri-
bunal civil séant àGand, il renon-
ça à la magistrature en i8iq, et
revint à Paris, où, depuis 18 13,
il est avocat à la cour royale.
TBOMELIN ( Jean - JACQrES,
COMTE de), né en Bretagne, élevé
à l'école militaire de Vendôme ,
était sous-lieutenant au régiment
de Limousin en 1788; il quitta
la France en 1791, et fit la cam-
pagne des princes. Ayant suivi le
prince Léon, depuis duc de Ro-
han, à Quiberon, il fut après cette
expédition, chargé par le comte
d'Artois, à diverses reprises, de
plusieurs missions périlleuses en
Normandie, et se trouvait à bord
de la frégate commandée par sir
Sidney-Smith, qui fut prise de-
vant le Havre. Dans ce moment
critique, sir Sidney, forcé d'a-
TRO
mener son pavillon , eut , a»i fort du
péril, la présence d'espritd'engager
tout son équipage à celer que le
comte deTroinelin fût un émigré
français, et ce terrible secret fut
Éfi bien gardé, que conduit à Pa-
ris, il resta 18 mois renfermé au
Temple sous un nom supposé;
étant totalement inconnu, il fut
assez adroit pour obtenir du di-
rectoire l'ordre d'être reconduit
en Angleterre, où il mit tout en
œuvre pour délivrer ses compa-
gnons de captivité. Ce fut dans
cette intention qu'il revint en se-
cret à Paris, et que, réunissant
ses efforts à ceux de quelques
hommes dévoués , il réussit à
procurer l'évasion de sir Sidney,
et à favoriser son arrivée en An-
gleterre. Nommé chevalier de
Saint-Louispar S. A. U. Monsieur,
en octobre 1798, il fut quelques
mois après arrêté à Caen , et par-
vint de nouveau à s'échapper.
Contraint de s'éloigner, il suivit
sir Sidney en Turquie, et succé-
da à Philipeaux, après le siège de
Saint- Jean -d'Acre, auprès du
grand-visir, et plus lard, près du
capitan - pacha. Il fit avec eux,
contre les Français, comme lieu-
tenant - colonel , les campagnes
de Syrie et d'Egypte. Il rentra
dans sa patrie au commencement
de 1802, et obtint sa radiation de
la liste des émigrés; à cette époque
de calme et de pacification, il se re-
lira à la campagne, et depuis long-
temps il vivait tranquille à iMor-
laix, lorsque son nom, prononcé
à un espion de police par Spencer
Smith, fut cause de son arresta-
tion, et, par suite, de la nouvelle
carrière qu'il a parcourue. Con-
duit d'abord à Paris, il resta six
( J'Y >///"// r/ /
Jliflant .
Fix'iin/ t/et .cf tfculf
TRO
mois en prison, et n'en sortit que
pour entrer au service, en qualité
de capitaine, au 1 12' régiment.
Ileçu dans l'armée avec une par-
faite bienveillance, employé bien-
tôt à l'état-major de l'armée de
Dalmalie , particulièrement re-
marqué du duo de Raguse, qui
le chargea de quelques missions
difficiles, i! gagna le grade de
chef de bataillon sur le champ de
bataille, et rendit des services
réels au brillant passage de la
Croatie, par l'armée de Dalmatie,
en 1809. Après la paix do Vienne,
et rillyrieétant cédée h la France,
il fut nommé colonel du 6* régi-
ment territorial croate; il y résida
plusieurs années. Employé, en
i8i3, à l'armée d'Allemagne,
comme chef d'élat-major d'u-
ne division, il fut nommé officier
de la légion- d'honneur après la
bataille de Baulzen, et général de
brigade après celle de Léipsick.
Il se trouva renfermé, en i8i4»
dans la place de Mayence comme
chef d'état-major. A la première
restauration, il fut placé par le
comte d'Artois, major à la suite
des grenadiers royaux à Metz,
etquiltace corps, le iGmars i8i5,
pour rentrer à Metz avec le maré-
chal Oudinot, qui le 24 l'en-
voya à Paris. Le 11 juin, le ma-
réchal-de-camp Tromelin reçut
des lettres de services pour être
employé au 6" corps d'armée ;
aussi commandait-il une brigade à
AValerloo, qui, sous les yeux du
comte (le Lobau , combattit l'une
des d(;rnières à Walerluo ; mais
proMiptement de retour ù Paris ,
le général Tromelin fut chargé,
par le président du gouvernement
provisoire, de diverses négocia-
TRO
77
tions près du duc de Welling-
ton. A la deuxième restaura-
tion, et depuis 1816, il a été
employé comme inspecteur d'in-
fanterie , et chargé de l'orga-
nisation des troupes en 1820.
On peut affirmer qu'il a porté
dans l'exercice de ses fonctions
beaucoup de justice et d'impar-
tialité. Il a prouvé qu'il ne reniait
point d'avoir été sur de glorieux
champs de batailles, et surtout
qu'il était toujours reconnaissant
de l'accueil qu'il avait reçu, en
180G, lors de son apparition dans
les rangs de l'ancienne armée. Il
a fait la dernière campagne d'Es-
pagne, en Catalogne (en 1825), et
s'est distingué par une belle con-
duite sous les ordres du maréchal
Moncey.
TRONCHET (François-Denis),
membre du sénat-conservateur,
officier de la légion-d'honneur,
ex-membre de plusieurs assem-
blées législatives , ancien avocat
au parlement de Paris, bûtonnier
de cet ordre, et président de la
cour de cassation, naquit à Paris
en 172G. Issu d'une famille esti-
mée dans la magistrature , il fut
destiné i'i suivre la carrière du
barreau, et son penchant répon-
dit au vœu de son père. La fai-
blesse de son organe ne lui permit
pas de selivrer loutentier A l'exer-
cice de l.i parole, et bientôt il fut
forcé de s'attacher exclusivement
au travail du cabinet, moins bril-
lant, moins prompt i\ donner la
renommée, mais {)lus favorable
au jurisconsultequi veut posséder
à fond la science des lois. Profond
dans cette science, droit, vrai, il
jouissait d'une haute réputation,
et était regardé comme l'une des
;« TRO
lumières du b.irrciiii lorsque la
révolution éclata t il en adopta
avec sagesse les principes , et, en
1789, il fut nounné député aux
él;its-(^énéraux. Il s'y fit remar-
quer par la p.irt active qu'il prit
au travail des comités. « Vingt lois,
dit M. Lavallce. dans une notice
sur cet honorable citoyen , portè-
rent l'cmpreinlc de ses lumières
et de sa prévoyance. » Il était
président de l'assemblée consti-
tuante lorsque Mirabeau mourut.
« Tronchet , président, notifia
celte perte à l'assemblée. On crut
entendre la sagesse annoncer aux
hommes la perte du génie. » A la
fin de la session de l'assemblée
constituante, il reprit l'exercice
de sa profession. Louis XVI, mis
en jugement par la convention
nationale, choisit Tronchet pour
son défenseur {voy. De Sèze. )
Tronchet accepta ce glorieux man-
dat. La funeste destinée du mo-
narque devait faire évanouir la
plus belle défense. Echappé com-
me par miracle à l'affreux régime
de la terreur, il fut nommé , au
mois de septembre 1795, par le
département de Seine-et-Oise ,
membre du conseil des anciens.
Il en faisait encore partie lors de la
révolution du 18 brumaire an 8
( 9 novembre 1799. ) Le premier
consul Bonaparte l'honora de son
amitié, et ne laissa point échapper
l'occasion de rendre ses services
utiles à la patrie. « Président du
tribunal de cassation , l'un des ré-
dacteurs du Code civil, il ne res-
tait plus à Tronchet d'autre gloire
■!i recueillir, que de voir le voeu
unanime du tribunat et du corps-
législalif le porter au sénat. » Il
en fit partie jusqu'à l'époque de
TRO
sa mort, arrivée le lo mars 180G.
Il fut enterré avec pompe dans
l'église de Sainte-Geneviève (le
Panthéon français.) M. François
de NcuchAleau , président du sé-
nat-conservateur, prononça l'o-
raison fimébre de Tronchet. <• La
patrie, dit M. La vallée, rendit à sa
dépouille mortelle des honneurs
commandés par leshautes dignités
qu'ilavaitoccupées; mais l'estime
publique le disputa auxconvenan-
ces, et dans celle pompe funèbre, il
sembla que le sentiment eût tout
ordonné, et que l'étiquette n'eût
aucun droit. L'éloquence ap-
porta de riches tributs sur la tom-
be de l'homme qui l'avait si bien
servie par ses écrits; et, toutes
les fois que la France se rappelle-
ra les vertus elles talens de Tron-
chet, elle se souviendra avec
quelle dignité , quelle précision,
quelle élégance oratoire, quel res-
pect pour la vérité, M. de la Malle
a célébré ce célèbre juri^^consuUe.
Il appartenait à M. de la Malle de
remplir ce devoir. On doit hono-
rer la mémoire de celui dont on
hérite à tant d'égards, p Tronchet
se délassait de ses travaux, com-
me magistrat, en cultivant la lit-
térature , et même la poésie. Il
a laissé, en portefeuille, une tra-
duction de l'Histoire de Charles-
Quint, par Robertsou, un Abré-
gé de celle d'Angleterre, par Hu-
me et par Barrow, et un Tableau
de l'établissement du Mahométis-
me considéré comme religion ,
comme institution civile et com-
me gouvernement politique : « Et
ce qui est plus admirable encore,
dit M. de la Malle, c'est qu'après
avoir fait toutes ces choses, il les
tint secrètes, ne voulut point s'en
TRO
glorifier, et ne consentit janinis à
en rien publier; portant sans doute
le sentiment religieux des conve-
nances, jusqu'à penser qu'il serait
lîors de son oaraclère, de «a pro-
fession ou de ses fonctions, de se
produire comme auteur d'ouvra-
ges étrangers h son état ; et la mo-
destie, jusqu'à croire que ses ou-
vrages ne méritaient pas qii'on
les rendît publics. » Une traiicdie
de Caton d'Utique, des traduc-
tions en vers de quelques fragmens
de l'Ariosle, de Millon, de Thom-
pson , de l'riur, attestent que les
muses lui furent chères. M. La-
vallée termine ainsi l'éloge de
Trunchet : <> Ses manières se res-
sentaient de l'austérité de ses
mœurs. II faut le dire, il n'eut
point cetle amabilité prévenante
qui distingue le Français; fnais nul
homme ne fut plus essentiel dans
le commerce de la vie. I! mérita
d'avoir beaucoup d'amis; il les
chérit constamment, ne les cares-
sa jamais, et n'eu perdit aucun.
Tout ce qui portait le litre de de-
voir était sacré pour lui; il quit-
tait tout pour remplir ceux que
commandent et la vie privée et
la vie politique. II serait diflicile
de citer un meilleur fils, un meil-
leur parent, un meilleur citoyen,
un jurisconsulte plus sédentaire ,
un législateur plus laborieux, un
magistral plus infatigable. » Napo-
léon, au rapport de M. Las (hises
{voy. sesMém. tom. III,pag. a84)
jugeait ainsi cet illustre citoyen :
" Tronchet, dil-il, était l'âme du
conseil-d'élat ; il avait un esprit
éminemment profond et juste ;
mais il .«autait par-dessus les évé-
ncmens, et ne savait pns se dé-
fendre. »
TRO
79
TRONCHON (CoARLEs) , pro-
priétaire-cultivateur, chevalier de
la légiun-d'honneur, membre de
l'assemblée législative , de la
chambre des représentans et de la
chambre des députés , habitait le
département de l'Oise, où sont
situées ses propriétés, lorsque lu
révolution éclata. La disette des
blés s'élant fait sentir dans la ville
de Meaux en 1 78g, M. Tronchon ,
que ses travaux agricoles avaient
fait connaître de ses concitoyens,
vint à leur secours, non-seule-
ment par tous les sacrifices qui
dépendaient (le sa propre fortune,
mais encore par son crédit, et ijs
lui durent les approvisionnemcns
qui leur étaient nécessaires. La
ville de Meaux, reconnaissante,
lui vola, et fit frapper en sou
honneur une médaille d'or :
hommage civi((ue peu com-'
mim et bien flatteur. Par suite
de la nouvelle organisation muni-
cipale, à celle époque, il devint
membre du conseil-général du
déparlement de l'Oise, qui s'em-
pressa de l'élire, au mois de sep-
tembre 1791 , dépulé à «l'assem-
blée législative. Il y fut l'un des
plus fermes soutiens de la consti-
tution de 1791. Secrétaire (le l'as-
semblée au 10 août 179a, il re-
(;ut des mains d'un grenadierdela
garde nationale le fils de Louis
XVI , et tint le royal enfant dans
ses bras jusqu'au moment où il
put le rendre à son auguste mère.
Il ne fit poini parlie de la conven-
tion nationale, qui succéda, au
mois de septembre 1792, à l'as-
semblée législative, et, heureux
de se livrer aux occupations de
la vie privée , il ne Ijrigua sous
la république, sous le consulat,
8o
TRO
soiis l'empire, ni sons le gouver-
nement royal, en 1814 , aucune
fonction publique, aucun emploi.
Ses travaux agricoles, ses conci-
toyens, sa famille, furent les seuls
objets de ses pensées et de ses
soins. Venihint le% cent Jours , en
18 15, il fut nommé à la chambre
des rcprésentans ; les circonstan-
ces étaient graves, il accepta sa
mission. Peu après la seconde res-
tauration , en 1816, on lui im-
puta à crime ses fonctions mo-
mentanées. Au-dessus des calom-
nies et des persécutions, il triom-
pha par sa seule dignité, et reçut
de ses concitoyens , en 1817 ,
après la loi du 5 février, im nou-
veau mandat qui le mit à même
de se montrer à la chambre des
députés ce qu'il avait toujours
été, un des plus honorables ci-
toyens, un des plus dignes défen-
seurs des intérêts populaires. Pla-
cé, par ses opinions libérales, au
côté gauche , il vota, dans la ses-
sion de 18 19, contre les deux lois
d'exception, et fut de la minorité
(les 95 membres) qui repoussa
inutilement le nouveau système
électoral. Réélu immédiatement à
sa sortie de la chambre, en 1822,
il a été frappé par la dissolution to-
tale, en 1823, et n'a pas été nom-
mé , du moins jusqu'à ce jour
(1825), à la chambre devenue sep-
tennale.
TRONÇON - DU - COUDRAY
(Guillaume-Alexandre), naquit à
Reims en i^SS; il avait fait avec
distinction ses études à Paris , et
était reçu avocat au parlement de
celte ville. Sa probité, ses talens
oratoires , et les causes importan-
tes dont'il fut chargé , lui avaient
acquis de la célébrité avant la ré-
TRO
volulion en 1789; il ne prit que
peu de part aux événemens poli-
tiques de cette époque, et n'oc-
cupa aucune fonction publique ;
mais en octobre f^95, lorsque
la faction de la Montagne eut
résolu de faire condamner l'infor-
tunée reine Marie-Antoinette par
le tribunal révolutionnaire, aucun
avocat n'ayant osé s'offrir pour
plaider la cause de cette prin-
cesse, le tribunal nomma, pour
la forme, Mi\I. Tronçon-du-Cou-
dray et Chauveau-la-Garde dé-
fenseurs d'office. Quoique con-
vaincus d'avance de l'inutilité de
leurs efforts, ils remplirent tous
deux, avec autant de talent que
de courage, leur dangereuse mis-
sion; mais, ainsi qu'ils l'avaient
prévu , ils ne purent arracher
l'illustre victime au sort que
ses persécuteurs lui préparaient
depuis les sept mois de son
douloureux veuvage. Peu de
jours après la mort de la reine,
Trouçon-du-Goudray fut arrêté,
ainsi que son collègue M. Chau-
veau-Lagarde, sous le prétexte
illusoire d'avoir été instruits par
Marie - Antoinette de faits im-
porlans au salut de la république,
et de ne les avoir point dénoncés;
mais ils furent remis en liberté
par un décret de la convention
nationale même, après avoir dé-
montré, dans les interrogatoires
qu'ils subirent , la fausseté des
imputations élevées contre eux.
Au mois de frimaire de l'an 3
( fin de novembre i;'94 ) , Tron-
çon-du-Coudray se chargea de la
tâche difficile de défendre, de-
vant le tribunal révolutionnaire
alors rcîiouvelé, quelques-uns
des anciens membres du co-
TRO
mité de Nnnlcs, qui avaient obéi
aux iiijoiiclions et secondé les fu-
reurs de Carrier. Après la mise en
activité de la constitution de l'an
3 et rélablisscmerU du g^ouver-
neirient directorial , Tronçon-du-
Coiidray fut nommé, par le dé-
partement de Seine-et-Oise, dé-
puté au conseil des anciens ( 20
mai 1796. ) Il y acquit une grande
infliiefice, et fui bientôt considéré,
par le directoire , comme un des
membres les plus opposés aux
vues du gouvernement; il se pro-
nonça en effet, dans le conseil,
avec une grarjde force contre cer-
taines opérations de la majorité
des directeurs, et parut enfm s'ê-
tre mis au rang de leurs plus im-
placables ennemis aux appmcbes
du 18 fructidor, où la lutie s'en-
gagea entre les deux parti'^. Il fit
le fameux rapport relatif à la
marche des troupes appelées vers
Paris h cette époque par le di-
rectoire; ce rapport fut loin cepen-
dant de produire l'effet que Tron-
çon-du-Coiidray et ses amis s'en
étaient promis ; mais il détermina
les mesures d'iniquité qui furent
prises contre l'orateur. Frappé
par le coup d'état qui mutila les
deux conseils, et inscrit sur lu nou-
velle liste de proscription , Tron-
çon-du-Coudray fut tr.insporté,
avec un grand nombre de ses collè-
gues, sur leschirrettes qui condui-
sirent à llochefort les adversaires
vaincus des trois directeurs. Em-
barqué dans ce port, il arriva ma-
lade à la Guyane française , et n'y
put résister long-tenips à ses cha-
grins et à l'insalubrité du climat.
Il mourut à (>ayenne, le 21 juin
1798, à peine âgé (Je quarante-
< ioq aM!>, hii.isant en France une
I. XX.
TRO
81
veuve et uhc famille noipbreuse,
accablées par un sort aussi peu
mérité. Tous ceux qui ont connu
Tronçon-du-Coudray ont rendu
justice à ses qualités et à ses ver-
tus, et ont déploré la triste desti-
née de cet homuje de bien.
TROU DE ( LE BARON ÂMABLE-
Gille), contre-amiral , officier de
la légion-d'honneur, chevalier do
Saint-Louis, est né à Cherbojirg,
département de la Manche. Il en-
tra au service de mer comme
simple matelot, et s'éleva succes-
sivement, par son intrépidité et
ses talens, au grade de contre-
amiral, qu'il obtint en 18 ro. En
1804, il avait reçu le brevet d'of-
ficier de la légion-d"honneur. Ce
brave marin s'était fait remarquer
avant cette époque par la valeur
extraordinaire avec laquelle son
vaisseau s'était défendu contre
plusieurs vaisseaux anglais. L,a
fortune n'avait pas secondé son
courage; il avait été fait prison-
nier. Sa belle conduite, noblement
appréciée de l'ennemi lui-même ,
valutà M.Troude, lorsqu'il débar-
qua à Londres, l'honneur d'être
porté en triomphe. Il fut échangé.
En 181 5, il montait te Courageux,
qui, dans la rade de Cheriiourg,
reçut à son bord riu)pératricc
Marie-Louise. L'année suivante ,
M. le duc de Berri, rentrant en
Franc* après les événemens poli-
tiques qui venaient de renverser le
gouvernement i;npérial, passade
la frégate anglaise l'Eurolan sur
le vaisseau de M. Troiide , qu'il
nomma le fis. (^f prince; chargea
l'amiral de se rendre à l'Iymouth
}tonr s'y metlre à la di.'<po3ilion
de Louis XVIII , e^ le raujcner
en France. Le roi accueillit très-
6
8 a
TIIO
bien M. Troude, lui donna de sa
iiinin ta croix de Saint-Lonis, et
inoiita ."yur son vaissf'au. Le coii-
ire-amiral Tioude a ôlé mis i'i la
relraiU; par i^uhv. de la seconde
rcslauratiun ct> 181 5. lia (ait iiii-
priincr la relation d<' la réception
que lai avaient l'aile 8,000 prison-
niers français et les chefs anglais.
TKOUVJÈ (Clatjde-Josepu, ba-
hom), rédacteur journaliste, ex-
amhassadeur, ex préfet, et depuis
iiiiprinieur à Paris, né le 24 *•'-'?"
tenibre 17G8, à Chalonne.i, dans
la ci-devant province d'Anjou ,
vint jeune à Paris, et Cl ses études
au collège d'Harcourl. Il embrassa
avec chaleur la cause populaire au
coinmenceaient de la révolulion,
et devint» eu 1791 , un des prin-
cipaux rédacteurs du Moniteur.
11 s'était déjA l'ait connaître dans
la république (h-s leilres par quel-
ques opuscules poétiques , un
grand nombre d'.trticles de jour-
naux, et par luie tragédie d'An-
vharslroem {voy. ce nom), desti-
née au Théâtre - Français, mais
qui ne fut point représentée. Sou
Ode à l" Egalité, en 1792; son
Hymne su?- ta prise de Toulan , eu
i7g3,etsor\ chant de guerre La
mort à tout esclave anglais, avec
l'épigraphe Détendu est Carlhago,
chant dont il lit hommage ù la
conveuli,ou nationale en l'an 2
(179:^), furent cilés à celle épo-
que pour huir verve poétique et
l'ardent républicanisme qui y ré-
gnait. Il com})osa encore, iamêuie
iVAnic,\\n Hymne à l'Etre suprême,
pour la fête où présidait Robes-
pierre , et après la chute de celui-
ci , il fit représenter au théâtre
Feydeau !a tragédie de Puasanias,
doul la révolution du 9 thermidor
FRO
parut lui avoir fourni quelques in-
ciJens, et «pii eut un grand suc-
cès par l«:s tableaux éuergi({ues
que l'auteur y traçait des hor-
ribles scènes du jègne de la tei-
reur. Lors de rétal»lis>em(!nl «le
la coUïtiUilion de l'an 3 (6 bru-
maire au 4» 28 uclobre 1796 ),
M. Trouvé fut nommé secrétaire-
général du directoire -exécutif;
mais il donna sa démission au
bout de quelques jours , pour re-
preu'lre la direction en chef du
Moniteur. En 179G, le directeur
La Uèveillère-Léjieaux, dont il c-
tait |)articulièremen.t protégé, lui
lit épouser la fille de xM. André
l'houin, administrateur du Jardin
des Fiantes, et le lit nommer,
quelque temps après, secrétaire
de légation À la cour de Naples,
près de laquelle ilfutticcrédilé, six
mois pluslaril,en qualité de char-
gé des affaires de France. Il com-
posa à celte époque une ode plei-
ne de chaleur contre ceux qu'il ap-
pelait les conspirateurs du 18 fruc-
tidor, et dont cette joinnée ve-
nait, selon lui, de faire justice. Le
même directeur, dans sa bienveil-
lance pour M. Trouvé , lui fit
confier, en mars 1798, une mis-
sion diplomatique plus importante
que celle de Napies , mais dans
laquelle il eut le malheur d'é-
chouer comjilètement. Le direc-
toire-exécutif de la république
française venait de concevoir le
dessein d'organiser , conformé-
ment à ses vues. particulières, la
nouvelle république cisalpine, et
nomma M. Trouvé ambassadeur
à Milan. Il avait pour instruction
d'y établir un directoire et des
conseils législatifs, dont les meirr-
bres lui avaient été désisivés à Pa-
TRO
ris, et qui étiiienl bien loin de
réunir en leur laveur la majorité
(les Vœux de leurs cunciloyous.
Quand ce plan fut connu à Milan,
il excita l'iiidignation gi'iicraîe.
Lesnioyciisviolens employés pour
investir du pouvoir des hoinuies
repou;:.sé> par l'opinion publique,
portèrent l'irritation au comble.
Le •général cisalpin Lahoz , qui
s'était un des premiers prononcé
avec le plus d'énergie pour l'in-
dépendance de sa patrie, se rendit
à Paris, espérant taire désavouer
par le g.ouvernernent français, la
conduite de son agent à Milan.
« 11 s'ajîit, disait ce général dans
aune lettre qu'il fit imj)rinier, de
• déjouer une conspiration odieuse
ocotitre notre constitution, et de
• connaître le sentiment du di-
xrcctoire sur une poignée de scé-
"lératsqui s'assemblent chez l'am-
nbassadeur Trouvé, et qui com-
rt posent le comité de« novateurs. »
Cette démarche ne réussit pas
d'abord. Vainement le général
Lahoz représenla-t-il qu'un peu-
ple généreux, qui sent le prix
de l'indépendance qu'il vient d'ac-
quérir au prix de tant de sacrifices,
ne peut être privé du droit pré-
cieux d'être gouverné par des ma-
gistral? de son choix, et (ju'il n'y
renoncera pas sans résistance. M.
Trouvé continua ses opérations,
fit connaître sou nouveau plan de
constitution, et donna la liste des
législateurs choisis par lui. Alors
l'indignation ne connut plus de
bornes; des placards et des libelles
furent répandus contre l'ambas-
sadeur de France, son caractère fut
méconnu , et snn autorité récu'ée.
On eut bientôt lieu de craindre
un soulèvement général, et le di-
TRO
83
l'ectoire français se vit enfin obli-
gé de sacrifier un agent contre le-
quel tant de clameurs s'étaient é-
levées. Il l'ut rap[)elé de Milan en
vendémiaire an 7 (ociobre 1798),
et Fouché vint le remplacer le aii
du même mois ( i3 octobre). Avant
de partir, l'ex-ambassadeur expri-
ma éloqucmment<\ une députation
des deux conseils établis par lui,
ses Vœux pour la prospérité de la
république cisalpine. Ason retour
à Paris, ses protecteurs au direc-
toire le nommèrent presqu'aussi-
lôt ministre plénipotentiaire à
Stultgard. Il y fut fi-oidement
accueilli, et le ministre anglais
Paget l'accusa, très-injustement
sans doute, de vouloir révolution-
ner le NVurtemberg. La guerre,
l'obligea de partir de Sluttgard
en février 1799, et il fut ensuite
somuïé de quitter sur-le-champ
l'Allemagne. Peu de temps après
son retoiir à P.iris, eut lieu le
revirement politique qui exclut
du directoire, en prairial an 7,
(juin 1790), La Kéveillère -Lé-
jieaux, Merlin et Treilhard. Privé
d'une protection puissante , J\I.
Trouvé devint encore l'objet de
violentes attaques au conseil des
cinq-cents. Les députés, Bertrand
du (lalvados et Briot, le dénoncè-
rent pour sa conduite en Italie,
et le conseil prit la résolution
d'envoyer un message au direc-
toire, pour se faire communiquer
le résultat des poursuites qui a-
vaient dûétredirigées contre l'cx-
ambassadeur. Le directoire ré])on-
dit qu'il avait chargé le ministre
des relations extériemes de faire
un rapport sur ce sujet ; mais le
retour du général eu chef Bona-
parte d'Egypte, et la révolution du
H TRO
18 brumaire, firent bientôt perJre
enlièreiiient de vue, toutes le» af-
faires tie ce genre. La poésit; vint
fucore Iieurcuseincnt à cette épo-
que «u secours de M. Trouve, il
chanla en vera hiirnionieux et
biûlans d'enlhousiasiiie , le Viiin-
(jueur du 18 brumaire, et lors
de rétablissement du gouverne-
ment consulaire (4 nivôse an 8,
aC décembre 1799), il fut nommé
membre du tribunal, installé le
1" janvier 1800. Il y montra «n
grand dévouement au premier
consul Bonaparle, qui l'en récom-
pensa, au.mois de juin i8o5, par
la préfecture du département de
l'Aude. Sous le gouvernement
impérial, il fui en outre nommé
membre de la légion-d'honneur
et baron de l'empire. Lors de la
restauration, en 1814, M. Trouvé
protesta de son entier dévouement
à la cause royale, fit une procla-
mation éloquente le 20 avril 18 14>
dans laquelle, parlant de lui-mê-
me, il dit : ■ Le plus sûr garant
«delà fidélité qu'on promet, c'est
»le dernier témoignage de la fi-
» délité qu'on a gardée. » Présen-
té à Monsieur et ù i\L le duc
d'Angoulême, à leur passage par
Carcassonne et Montpellier, il en
obtint la promesse de la conserva-
tion de sa place de préfet de
l'Aude. Il se trouvait par congé
à Paris, quand le Moniteur du 7
mars 181 5 annonça que Napo-
léon avait débarqué à Cannes. Il
partit le même jour pour sa pré-
fecture, où il arriva le 12, et où il
employa tous ses moyens pour le
maintien de l'autorité du roi. Obli-
gé de céder ù une force majeure
et de cesser ses fonctions, il revint
ù Paris, où il résida pendant \eseent
TRU
Jours (181 5). Présenté au roi, le 8
juillet, à Saint-Denis, il demanda
la permission de retourner dans la
préfecture qu'il avait long-temp»
administrée, et l'obtint. II s'y si-
gnala de nouveau par son zèle;
mais après l'ordonnance du 5
septembre i8ifi, il perditsa place.
Sans fonctions publiques depuis
celte époque , il a pris une part
active à la rédaction du journal
nitra-royaliste le Conservateur, et
a depuis établi à Paris une impri-
merie, d'où sont sortis plusieurs
écrits du même genre, et qui livre
encore aujourd'hui au public (18 2 5)
le journal de C Aristarque. lia aus-
si publié un ouvrage sur les état»
de l'ancienne province de Langue-
doc, et sur le département de l'Au-
de, dont M. le duc d'Angoulême a
accepté la dédicace, et qui a pa-
ru, en i8i8, sous le titre d'JSwa*
historique ^ 2 vol. in-4°.
TRUDAINE DE LA SABLIÈ-
RE (Charles-Locis ), conseiller
au parlement de Paris, élait fils de
l'ancien intendant-général des fi-
nances, dnnt Condorcet a fait l'é-
loge le plus flatteur. Le jeune con-
seiller (il n'avait pas 29 ans) fut
condamné à mort, et exécuté, lui
et son frère Marie-Louis, égale-
ment jeune magistrat, à peine âgé
de 28 ans, la veille même de la
révolution du 9 thermidor an a
(27 juillet 1794)» l'un et l'autre
comme complices de la prétendue
conspiration de la prison de Saint-
Lazare, où ils étaient enfermés.
L'infortuné Trudaine de la Sa-
blière avait gravé sur les murs de
son caciiot ces vers touchans, qui
annonçaient d'heureuses disposi-
tions pour la poésie :
La fleur Itiisint tomber si tJte Upguitsantc ,
ïi\i;
Semble dire »■ léphir, pourc|Boi m'^TeiJVet - 1» •
Z^phir, t2 vipeur bienfaisante
Ne rendra point la vie à mon front abattu.
Je languis ; le matin i> ma tige épuis^tr,
Apporte vainement le tribut de ses pieurs.
Et le» bienfaits de la rosée
Ne ranimeront point l'éclat de mes couleurs.
Il approche le noir orage !
Sons l'effort ennemi d'un souffle détesté,
Je verrai périr mon feuillage.
Demain le voyageur tdmo n de ma beauté,
De ma beauté sitôt flétrie,
Viendra pour me revoir ; ô regrets superflus!
Il viendra, mais dans In prairie
Ses yeux ne me trouveront plus.
TRUGUET ( Laurent - Jbar-
Fbauçois), Ois «l'un chef d'escadre
désarmées navales, entra garde de
ia marine A l'époque où les mi-
nistres de Louis XV venaient
«rinstiltier des examens rigoureux
(à i'inslar des armes du génie et
(le l'arlilleriè), pour propager une
haute insiruclion parmi les ofTi-
i-ier.s de mer. Peu d'années après
«on entrée au service, Truguet oh-
tint dans le;* examens qu'il subit
8ur le cours entier de mathémati-
ques de M. Bezoul, plusieurs des
prix décernés par Louis XV pour
les gardes de la marine les plus
instruits. Ces premiers succès
dansées sciences rencouragèren!
A s'y livrer entièrement, et à les
appliquer constamment à la pra-
tique de la mer. Ces études et une
longue navigation le mirent en é-
tal, dans le cours de sa carrière
militaire, de pouvoir exécuter a-
vec succès des travaux géogra
phiques et astronomiques, et des
ouvrages sur la manœuvre des
vaisseaux et sur la tactique nava-
le; de pouvoir aussi à l'aide de ses
études, méditer avec fruit .sur les
grands principes de haute adn)i-
nislration <.-t de la politique; de
pouvoir enfin plus tard en faire
l'application dans les places émi-
nentes qu'il occupa, d'amiral coin-
loandaut des armées, de ministre
TRU
85
de !a marine et d'ambassadeur,
Truguet avait dé;à fait huit cam-
pagnes dans différentes mers, com-
me garde de la marine et ensei-
gne de vaisseau, lorsqu'en 1778,
la guerre fut déclarée à l'An-
gleterre. Il fit sans désemparer
cette célèbre guerre si fertile en
grands événemens, et qui ne fut
pour lui, en quelque sorte, qu'une
seule campagne de guerre de six
ans, sous les ordres des amiraux
d'Estaiug, deGuichen, de Gras.se et
de Vaudrouil, qui eurent succc-
sivement le commandement d«;
nos forces navales aux Indcs-Oc-
cidenlalcs et aux États-Unis d'A-
mérique. Il prit part, par consé-
quent, avec le grade de lieutenant
de vaisseau, à tous les combats et
i^ toutes les batailles navales, glo-
rieuses et inalheureuse.s, livrées
aux armées anglaises par ces ami-
raux; il fut presque toujours char-
gé du service important des si-
gnaux et des autres principaux dé-
tails des vaisseaux ; et vers la fin
de la guerre, il comm indail en se-
cond un vaisseau de haut-bord.
Attaché personnellement, par la
nature de son service, i l'amiral
d'Estaing, il prit part dans les an-
nées 1778 et 1779, aux expédi-
tions de terre de cet amiral, et
c'est ainsi qu'il commanda une
comjtagnie de grenadiers à l'atta-
que de Sainte-Lucie, et qu'il rem-
plit les fonctions de major de ma-
rine auprès de sa personne, au
terrible assaut de Savaimah, où
il s'élança, sous ses yeux et par
son ordre, un des premiers sur le.s
relranchcmens ennemis. Mais les
assiégés bien fortifié*, et qui a-
vaient reçu la veille de» renforts- A
notre insu, repouisèrent cet n&-
fe
80
ÏUU
saut. L'attaque rr;tiH;aise fut rnisc
«ians la plus complète dcroulc;
forcé «rabaiulonricr dos rcinpail?
en partie gravis, il fut as^iez liou-
rciii pour relrouver sou auiiral ,
resté seul et rciiversé sur les bonis
du glacis, où il venait de recevoir
deux blessures au bras cl à la j;iu)-
be, qui lui interdisaient (ont u)ou-
VL'uiLMt. Il s'empara de lui, et au
milieu du. l'eu le plus nourri de
la place victorieuse, il put lui
.sauver la libert'é et la vie. Récla-
inant l'assistance de deux grena-
diers, qui furent tués dans le
transport, et favorisé par un
brouillard assez épais, il le rame-
n I au corps de réserve, conunan-
dé par le vicomte de Noailles.
L'amiral .sollicita et olitint pour
lui la croix de Saint-Louis, dont
il le décora lui-même au mois de
février i^8o, faveur bien précoce
et bien honorable. Trnguet, pen-
dant cette guerre, fui blessé deux
i'ois assez grièvement, et ce n'est
qu'ù la paix conclue en i ^-85, qu'il
prit quelque rep^)S, ainsi que ses
<;ompagnons d'armes. i\L'us l'inac-
tion ou le service paisible des
ports ne pouvait convenir à
son amour ardent pour sa profes
sion. Truguet saisit avec transport
l'occasion d'aller à Constanlino-
ple, coopérer aux travaux imj>osés
au célèbre Choiseul - Gouffier ,
nommé ambassadeur, et dont il a-
vait obtenu l'amitié lors de son
voyage dans la Grèce, qu'ils a-
vaient parcourue ensemble. Cet
ambasi-adeur, chargé expressé-
ment, par le cabinet de Versailles,
de régénérer, autant que possible,
les Turcs dans l'art des fortifica-
tions et des campeuiens, dans Tar-
tiilerie et les fonderies, dans la
TllU
construction des vaisseaux, de
leurs maruxMivres et de la tactique
navale, fut acc(juipagnédans celle
airdjas«ade ^i importante par des
ingénieurs de terre et de iner, et
par des ofïlciers d';ulillerie du
[)liis grand iiiérilc. Le roi asso-
cia il lie si imporlans travaux
TrugiK't. eu lui confiant le com-
nian(l(;nient d'unf; corvette, qui
devait être iinmédialeincnt sous
les ordres de cet ambas.sadeur. Il
mil à la voile, du [)ort de Lorient,
la première année de la paix en
178-1. Pendant cette mission, qui
dura quaire ans et demi, il fut
cliar-é d(^ plusieurs objets impor-
lans : 1° d'instruire les amiraux ci
odiciers ottomans dans l'art na-
val et la pratique des manoeuvres.
Il composa de suite pour ces ma-
rins un Traité de m a uœuvre.s- pra-
tiques, et plus tard un Traité de
tactique navale à leur portée, ou-
vrages qui furent imprimés en ca-
ractères turc j.et traduits dans cette
langue, avec les termes techniques
correspondans, par les soins et le
zèle du vice-amiral de la flolte
turque, homme très-instruit et
d'une affabilité rare; 2° de lever
des caries nuu-ines basées sur des
observations astronomiques, et
liéespar de grandes opérations Iri-
gonométrique^, des mers de TAr-
chipel. de iMannara et de la mer
Noire : 5" de négocier enfin avec
les beys régnau-^ d'Egypte, et les
princes arabes les plus puissans
du Désert, un traité de commer-
ce et de transit de l'Inde par A-
lexandrie, Suez, et la mer llouge.
Celle grande pensée conçue par
Louis XVI, et sur laquelle on a
toujours gardé le silence, fut con-
fiée dans son exécution à son zèle,
TKIJ
fl couronijée du plus jçrand stic-
cès. Jl parvint au Caire, après u-
ne négociation assez di(Tioile et
assez longue, à (aire signer par les
Ueya et les princes arabes [»ln-
sieurs traités fondanienlanx et
d'exécution, pour en garantir la
sûreté et rendre le nouveau com-
merce à l'abri de toute insulte et
«le toute déprédation. Le commer-
ce maritime de la France et sur-
tout la ville de Marseille auraient
pu, dès l'année 1 788, jouir des im-
meii.xes avijutagcs que leur dflVait
celte m)uvelle route de l'Inde,
ainsi garantie de tous dangers et ;\
l'abri de toute trahison. Déjà plu-
sieurs des principales maisons de
cononserce de Alarseille avaient
fail des offres pour le» expédi-
tions , déjà l'ambassadeur avait
aplani les entraves que la Porte
pouvait opposer à ce commerce;
mais malheureu<;ement à celte é-
poque, le contrôleur- général <les
finances, ne voulant s'occuper que
du rétablissement matériel de
l'ancienne compagnie des Indes,
dédaigna ce puissant auxiliaire, et
fil perdre ainsi à la France les a-
vanlages politiques, militaires et
comnierciaiix , dont il est inutile
aujourd'hui de «lévelopper les a-
vantages inappréciables. Trois ans
plus tard on perdit tout, compa-
gnie des Indes el commerce par
Suez. Pendant les délais et les
longueurs inséparables de toute
espèce de négociation avec les
Turcs, il parcouriit la Basse et la
llaule-Egyple, en observant !«;»
produits, le commerce et toutes
les richesses que ce sol pouvait
offrira un gouvernement civilisé.
Il rédigea sur ces importans ob-
jets, un mémoire qui intéressa le
TRI! 87
roi, et qui depuis s'est trouve
en original dans les mains du gé-
néral de l'armée française (Bona-
parte), envoyé dans ces contrées,
(le général à son retour en Fran-
ce, lui dit avoir lu avec intérêt et
avec fruit ce. mémoire, dont le
but principal était de faciliter nos
commimications militaires et
commerciales avec l'Inde. Tru-
guet revint en France, et débarqua
au port de Toulon au commen-
cement de 1789. Arrivé à Paris,
il reçut du roi les témoignages les
plus honorables de satisiaotion
sur cette mission si longue, et
qui pouvait devenir d'une si gran-
de utilité pour son service. 11 fut
envoyé, en 1790, h Brest, pour y
prendre le commandement d'une
IVégite destinée à une mission par-
ticulière et délicate. Les appro-
ches d'une guerre imminenle sus-
pendirent son départ. En 1791,
Louis XVI appréciant le zèle ,
l'instruction et le dévouement
de Trugnct, l'autorisa, après j»lu-
sieurs audiences particulières, à
faire un voyage en Angleterre ,
pour y compléter ses connaissan-
ces nautiques et administratives.
Présenté à Georges II I, il en obtint
une protection particulière, qui lui
permit de parcourir tous les ports,
où il fut parfaitement accueilli par
les amiraux et par les commissai-
res du roi. Aidé desi grandes faci-
lités, il put, par des comparaisons
faites avec soin, apprécier ce que
la marine anglaise pouvait avgir.
de supérij'ur à la nôtre dans ses
applications habiles de la théorie
à la pratique et à l'installation des
vaisseaux. Il examina surtout les
avantages que présenlaienl la
simplicité de sou administration
■
88
TRU
inariiiino dans le» porl?, et ceux
surtoul qu'offrait ù l'activité des
opérations et au maintien des
bonnes in.stitutionâ nautiques le
conseil d'amirauté. l>e souve-
nir de ce voyage, réuni à ses ve-
cherches sur la marine hollandai-
se, *i simple et si économe dan?
l'administration de ses ports et
arsenaux, ne l'ut pas perdu pour
lui, quand plus tard, il fut ap-
pelé au commandement des ar-
mées navales et au ministère de
la marine. A son retour d'Anjjle-
tt-rre, il fut élevé par Louis XV au
grade de contre-amiral à son choix,
faveur d'autant pins grande que
»;on ancienneté ne l'appelait pas, A
beaucoup près, à celte élévation.
Bientôt après, en avril «792, il rc-
fut le commandement de toutes
les forces navales qui devaient se
réunir dans la Méditerranée. Le
roi avait senti l'importance d'être
maître sur cette mer si fertile en
ressources commerciales, et qui,
par les Dardanelles, s'étend jus-
qu'en Colchide, et par Alexandrie
et Suez jusque dans l'Inde, l ne
circonstance particulière prouva
quelles sont les ressources de la
France (avec un bon gouverne-
ment) pour augmentersa marine.
A cette époque, un ministre de la
marine du roi lui avait déclaré
officiellement , dans un rapport
rendu public, qu'il était impossi-
ble d'armer un seul bâtiment de-
puis l'émigration des odiciers de
marine. Le ministre fut changé;
uri autre plus éclairé et moins
homme de parti lui succéda, et
ries ordres furent donnés dans tous
les ports, d'armer, équiper et fai-
re sortir des escadres, qui de-
vaient former dans la 31éditerra-
TRU
née une armée navale de 22 vais-
seaux deligne. Cependant, d'après
l'émigration d'un gnr.id nombre
d'officieri de marine, il devint ur-
gent de réunir dans les ports, et
fur les yaisseaux nouvellement
armés, tous ceux qui avaient cru
aussi de leur devoir de ne point
abandonner la personne du roi et
la patrie. I! s'en trouva à cet ap-
pel un nombre sulTisant, ayant as-
sez d'expérience et de talens, pour
former les étals-majors de ces
vaisseaux, qui se trouvèrent ainsi
avec de bons équipages très-bien
armés. Dans inoins de trois mois,
tout fut terminé et tout prévu
pour une guerre maritime dont
on était déjà menacé par l'Angle-
terre et l'Espagne, et pour l'exé-
cution des plans du roi, avant
celte déclaration. Il fallait à l'épo-
que de tant d'insurrecti(ms pré-
venir celle du midi de la France,
déji'i si agitée, en lui assurant les
grains de l'étranger, et par con-
séquent obtenir l'alliance ou la
neutralité de toutes les puissances
du littoral de celte mer. On s'as-
sura de Naples. et avec les mê-
mes moyens, il fut aisé d'établir
des relations sûres avec Maroc,
Alger, Tripoli et Tunis. Il deve-
nait enfin indispensable, nous
trouvant déjà en guerre avec l'Au-
triche et la Russie, de nous mé-
nager l'alliance oflénsive et défen-
sive de la Porte Ottomane, et de
la consolider par des gages d'a-
mitié de la plus grande force, car
il ne s'agissait rien moins que
d'obtenir d'elle une diversion sur
les frontières de l'Autriche, qui,
de concert avec la Prusse, mena-
çait vivement les nôtres. De»
instructions furent données en con-
TRU
séquence à l'amiral Trugiiel, pour
se rendre dans la mer Noire,
pour y attaquer et occuper au pro-
fit de la Portf , Sevastopoi, en Cri-
mée, et Kerson, à l'embouchure
du Dnieper, cl tout autre éta-
blissement des Russes, ayant ap-
partenu aux Turcs avant, les der-
niers traités de paix. Le succès
d'un pareil plan, si favorable aux
Vrais intérêts de la Porte, devait
procurera la France le commer-
ce presque exclusif de la mer Noi-
re, et lui garantissait la haute
protection de la Porte, pour don-
uer suite aux traités antérieure-
ment obtenus en Egypte,, relati-
vement au commerce de l'Inde
par Suez. Truguet qui connaissait
toutes 4es ressources de l'Orient
pour les constructions navales ,
ftvait demandé que Ton envoyât à
Constantinople ftl. Brun, ingé-
nieur habile, pour améliorer les
constructions navales des Turcs,
et pour pourvoir à nos besoins, si
la flotte française y arrivait. En
méditant sur ce plan de campagne,
qui étendait un système commer-
cial jusqu'en (^Jlchide, par la mer
Noire, et jusque dans l'Inde par
Suez, on voit avec une attendris-
sante admiration le monarque, a-
lors même que la révolution me-
naçait le trône.s'occuper pour la se-
conde fois de ?<on règne, de la res-
tauration et de la gloire de ia m.ui-
nc française. Ne voit-on pas aussi
éclat»T cette grande vérité qu'on
cherche envain à dégiiitcr, qu'ime
bonne marine militaire peut tou-
jours concourir pnissnnnncnt aux
succès des armées de terre, quand
«Ile est soumise à de bons plans
de campagne? et n'est-il pas évi-
Jeni, comme l'a démontré Trwguel
TRU
8©
àlacliambre des pairs, que dan»
la situation actuelle d« l'Europe,
la France ne peut se passer de
6on concours, soit pour soutenir
une guerre avec gloire, soit pour
lu prévenir? et quelle confiance
ne doit pas inspirer à la naliot» sa
force navale, qui ne peut jamais
menacer ses libertés et ses insti-
tutions, ni entraîner l'ennemi sur
son territoire, même après les
plus grandes défaites? C'est en-
fin à !a marine seule bien orga-
nisée, qu'appartient le bonheur de
réparer pendant la paix toutes les
plaies d'une longue guerre de ter-
re. On verra ultérieurement dans
le cours de la carrière de l'amiral
Truguet, l'urgente nécessité de ne
confier la destinée de la înarine
qu'aux amiraux les plus distin-
gués, qui seuls doivent inspecter
la marine marchande, et diriger
exclusivement la marine militaire
dans les ports et à la mer, aujour-
d'hui surtout où les olFiciers de
mer ont presque tous Tinstruc-
tion la plus distinguée, et qui ne
cesse de s'accroître par roxj)érien-
ce des arsenaux et de la naviga-
tion. C'est en juillet 179a que
tout fut prêt dans les trois grands
ports, et c'est à cette époque où
les dangers du roi s'accroissent.
La crise terrible approche et
quel est le fonctionnaire public,
le général, l'amiral, qui ne soit
porté à tout abandonner sans le
cri de patrie qui pénètre *aii
fond de son cœur, sans l'ajtpro-
che d»! l'étranger, qui par ses pro-
clamations menace la France d'u-
ne entière destruction , sans le
motif le plus puissant, les ordres
du monarque? L'amiral Truguet .le
plus reconnaissant, le plus Odelc
90 TRU
de SCS sujets, le supplie de lui
tracer ses devoir;? au inotnent où
il lui est ordonné d'aller prendre
le commandement de la flotte de
la ftléditerranée. Les amiraux
Thevenard et La Touche, se ren-
dant à Biesl, éproiîvenl les mêmes
anxiétés. € Marins, leur dit le roi,
"n'abandonniez jamais ■vos vais-
«seaux, et défendez-les toujours
«au prix de votre sang contre les
«ennemis du dehors, qui les e{)n-
«voileijt, et qui peut-être susci-
»tenl des troubles intérieurs poiir
• s'en eniparer plus facilenient.
»La marine est étrangère aux dis-
0 cordes civibis, et son devoir est
»de défendie les poj-ts, les arse-
nnaux, les côtes et le commerce,
«contre tout ennemi extérieur.»
Acceptant une lâche aussi glo-
rieuse, l'umiral Truguet partit de
l'aris pour aller porter son pavil-
lon sur le vaisseau le Tonnant, et
subir toutes les horreurs des ré-
voltes multipliées, qu'il parvint
toujours à calmer par son coura-
ge et l'énergie de son caractère,
toutes les ordonnances ayant per-
du leur vigueur. Sa mission était
tracée, et dès les premiers jours de
septembre, il se préparait à met-
tre à la voile, le nouveau minis-
tère ayant approuvé rexécution
de ses instructions données par le
roi. Cependant on exigea qu'aupa-
ravant il allât s'emparer de Nice,
Villel'ranche et Oneille, tandis que
le 'général Montesquiou s'empa-
rerait de la Savoie; il se rendit
«levant ces places qu'il soumit sans
diflicullé. Oueille, gouverné par
quelques fanatiques, eut la lâcheté
de massacrer nos oificiers parle-
mentaires, attirés sur le rivage
par dcxS démonstrations d'amitié.
TRtJ
Un pareil crime méritait une pu-
nition, et des troupes firent débar-
quées commandées par un vieux
généial qui venait de penlre son
petit-fils dans ce massacre. Il brû-
la en partie la ville, qu'il trouva
déserte, tous les habitaus s'élant
retirés dans les terres aux pre-
miers coups «le canon des vais-
seaux-. Les coupables échappèrent
avec les innocens; on les réclama
en vain, et le seul sang qui lut ré-
pandu fut celui des onicier> en-
voyés en parlementaires sotis le
dra|)eau blufic. Tel est l'évén»;-
ment d'Onriile. L'escadre de six
vaisseaux<lu contre-amiral LaTon-
che vint le joindre devant Nice,
et l'escadre de llochefort du mê-
me nombre de vaisseaux,gpous les
ordres du contre-atniral Trogoff,
un peu plus lard, devant Cagliari.
C'e>t ainsi que fut réunie une ar-
mée navale dt-dix sept vaisseaux
de ligne, deux grosses bombardes,
et plusieurs frégates, tandis qu'à
Toulon on continuait l'armement
de six vaisseaux, dont deux à trois
ponts. La frégate qui portait no-
tre nouvel ambassadeur à Cons-
tantinople, s'étant ralliée à Gènes
à résoudre, on aurait pu partir de
Gênes même pour se rendre aux
Dardanelles, s'il ne lût arrivé de
nouveaux ordres à l'amiral poui*
aller s'empar«:r de la Sardaigne.
Le motif qu'alléguait h; gouver-
nement était de s'assurer les res-
source* en vivres de cette île, de-
venue ennemie par la guerre dé-
clarée au Piémont, et pour s'assu-
rer des ports de- îles de Saint-
Pierre et bant - lago , néces-
sairement intermédiaires entre
la France, la Sicile et l'Archipel;
pour l'exécution de celle conque-
ÏRU
le , la force navale seule ne pou-
vait iniilheiireusi!|nent suflire , il
/'allait d(;.5 troupes ilc débarqut^-
ineni; ïruguet en fit dcuiander
au général en chef* de raimée
d'Italie, et, le rendez-v()us fixé
dans la baie de Cagliari, il se ren-
dit de suiic i\ Ajaccio , pour de-
mander à Paoli, qui y cnniinan-
dait encore , tous les régimcns
d'inlanterie et d'artillerie dont il
pouvait disposer, ainsi que le ma-
réchal-de-canip Casabianra , qui
s était déjà distingué, sous les or-
dres de Biron. vers les froiitiért.'s
de la lielgiquc. L'amiral, chef
8uj)rr'me des forces de terre et de
mer, lo chargea de tous les dé-
tails d'organisation et d'embar-
quement pour l'expédiliotj pro-
jetée. Il commandait la forteresse
d'Ajaccio et la division militaire;
il invita Panli à diriger une contre-
attaque sur le nord de la Sar-
daigne, tandis qu'il allait s'em-
parer des îles Saint-l'ierre et de
Cagliari, ce qui fut exécuté. Une
circonstance remarquable doit ici
être citée : Napoléon Bonaparte
élait alors à Ajaccio capitaine
d'artillerie; il su rendit sur le
vaisseau amiral pour solliciter la
pernjission de faire partie de
l'expédition, et de la suivre par-
tout. Il fut agréé; mais les com-
missaires corses et les chefs mili-
taires refusèrent de le proposer,
et demandèrent môme son exclu-
sion. L'amiral, qui avait déjà ap-
précié son instruction et son en-
thousiasme [)0ur la guerre , le dé-
signa an général l'aoli pour l'em-
ployer dans'l.i contre-attaque qui
devait partir de Bonifacio , sous
les ordres de Colonna . neveu de
ce général. 11 fut en eiïct détaché
TRU
0»
pour s'emparer des îles de la Ma-
delaiue , ce qu'il fit. I^s lenteurs
dans le rassemblement des for-
ces de terre , la prolongation
de séjour dan>< la rade d'Ajaccio,
permirent aux hommes exagérés,
aux jacobins fougueux, dont 1»
place et la flotte étaient déjà
remplies, de renouveler les hor-
reurs qu'ils avaient déjà com-
mises à Toulon et à Marseille. Un
jour de la fin d'octobre, une ré-
voiîe terrible éclate à Ajaccio ;
elle devient générale parmi le^
h'ibitans. les militaires en garni-
son, et les marins de toutes les
embarcations de l'escadre qui é-
taieut alors à terre. L'amiral était
à dîner chez iM"* Bonaparte mè-
re . qui avait réuni chez elle
plusieurs chefs de l'escadre er
toute sa famille, ainsi que sor. uls
Napoléon; il reçoit un biilet qui
lui annonce que \< citodelle est
au pouvoir des rebelles , que déjà
i\e^ massacres ont lieu, et que le
projet de ces forcenés est de pen-
dre,comme accusés d'aristocratie,
les olTiciers du régiment en gar-
nison en (lorse depuis ij-88. L'a-
miral quitte à l'instant la table:
seul, sans chapeau et sans armes
pour n'effrayer personne, il court,
trouve la rue déserte; il apprend
que la population entière est dans
la citad(dle, il y vole; il rencontre
à la porte le général Casablanca .
jetant des cris impuissans ; il aper-
çoit, sur les batteries élevées, des
potences dressées, des coides
préparées, et plusieurs malheu-
reuses victimes qu'on allait exé-
cuter. Il fend la foule , qui , le
voyant sans armes et lêle-nue, lui
laisse un passage libre; il monte
sur l'échafaud. A l'aspect de leur
9» TIVl»
intrépide amiral, les inaiin*, oc-
cupés de leurs préparalif;* m«ilr-
triers, s'arrêtent; il fait signe qu'il
veut parler à la multitude qui en-
combre la place, et tout-à-coup
un prolond silence succède aux
cris de la fureur. Enfin, après une
heure, il obtient que ces victimes
vouées à la mort, soient jugées
légalement dans les vingt- quatre
heures. 11 termine son discours
par l'ordre d'évacuer la citadelle,
ce qui fut exécuté dans peu de
minutes; il en remit les clefs au
général Casablanca , avec ordre
d'assembler un conseil de guerre.
Ces malheureux, tous innocens,
furent acquittés ( c'étaient des
sergens), et portés en triomphe
le lendemain sous les yeux de
l'amiral. Les chefs de la sédition
furent surveillés, et la flotte put
mettre à la voile pour se rendre
en Sardaigne. Dans le cours de
cette campagne, l'amiral Truguet
dut apaiser souvent des révoltes
sur les vaisseux, et ramener au
devoir, par son audace, des équi-
pages qui avaient méconnu l'auto-
rité de leurs ofliciers. Ces détails,
si pénibles à rappeler, doivent
faire apprécier le courage et le dé-
vouement à la patrie de nombre de
ces ofliciers de l'ancien corps de la
marine, qui aimèrent mieux bra-
ver tant de dangers populaires et
l'échafaud , que d'abandonner le
gouvernail au moment du péril,
et surtout de servir l'étranger ar-
mé contre la France. L'amiral se
rendit d'abord< de la Corse aux
îles Saint-Pierre, dont il s'empara,
et qu'il fortifia pour protéger les
navires du commerce français ,
qui , par la diversité des vents
dans ces parages, se trouvent pres-
TRU
que toujours forcés d'y relûcher
allant dans le Levant, ou ù leur
retour. Il se présenta ensuite de-
vant Cagliari, qu'il somma de se
rendre. Il bvait lieu d'espérer,
d'après le rapport du consul de
France, qui venait de celte place,
que leshabitans, pour éviter un
bombardement, ouvriraient leurs
portes ; il s'était trompé. Le gou-
verneu r fit sortir tous les habitans,
ouvrit les prisons et les bagnes,
et prit le parti de se défendre. La
place tira à bout portant sur le ca-
not parlementaire; mais ce re-
nouvellement d'un acte atroce ne
tua ni ne blessa personne, et la ré-
ponse à cette barbarie fut à l'ins-
tant même le signal du bombar-
dement. Les ouvrages furent en
])arlie démolis , et hientôt le
magasin à poudre sauta en l'air.
Les vaisseaux attaquèrent tou-
tes les batteries ennemies. Sur
ces entrefaites arrivèrent les trou-
pes envoyées par le général en
chef de l'arïTiée de Nice. Ces
troupes , au nombre de 2,000
hommes, composaient un corps
appelé la Phalange marseillaise;
troupe sans discipline; mais on
crut que le courage pourrait as-
surer quelque succès. L'amiral
les plaça sous les ordres immé-
diats de Casabianca, et lui-même,
après avoir reconnu la hauteur
qui dominait la place, et d'où l'on
pouvait l'écraser et la forcer à ca-
pituler, ou la prendre d'assaut,
débarqua toutes ses troupes en
bon ordre avec leur artillerie.
Quelques centaines de paysan* oc-
cupaient ce faible retranchement
avec plusieurs petits canons en
fer, et pendant que le feu de»
vaisseaux et des bombarde» atli-
TRU
rait snr eux le feu et l'attention
des assiégés, les 2,000 hommes
débarqués devaient facilement
5'empurer de cette hauteur. L'a-
miral avait ordonné sur-le- champ
l'attaque; mais il reçut un billet
du général des troupes, qui le pré-
venait qu'il préférait attaquer pen-
dant la nuit. A la nuit close, la co-
lonne de droite, établie sur le gra-
vier de la mer, fit un mouvement
pour se placer dans une prairie voi-
sine; la colonne de gauche croit
que c'est l'ennemi qui est descendu
de la montagne pour l'attaquer,
et lire sur elle; celle-ci lui ri-
poste, et ces deux colonnes, criant:
sauve qui peut! courent en dé-
sordre vers le point de la plage
où l'on avait débarqué; et, criant
à la trahison, voulant retourner
sur les vaisseaux, elles menacèrent
leur général et son état-major de
les massacrer si elles n'obîenaient
pas leur rembarquement. Cet in-
fortuné général supplie l'amiral
de lui sauver la vie, et d'envoyer
toutes ses embarcations pour
prendre ses troupes. Truguet dé-
nonça à lu France entière tant de
lâcheté, ce qui lui valut bientôt
après des persécutions. Obligé de
renoncer ù la prise de Cagliari ,
par l'efTct de cette insurrection,
l'amiral se borna à mieux fortifier
«ncore les îles de Saint-Pierre. Il
renvoya à Nice ces indignes sol-
dats, et en Corse une j.;rande j>ar-
lie de» troupes que lui avait cou liées
le général l'aoli. Il se serait ce-
pendant déterminé à conserver
sur sa flolte ces dernières , pour
obtenir plus de succès dans 800
expéilition de la mer Noire , si un
aviso, expédié par le ministre de
la marine, n'était venu lui aimon-
TRU 93
cer la déclaration de guerre à la
Franco par l'Angleterre et l'Es-
pagne , avec l'injonction d'un
prompt retour à Toulon , pour
concerter ur» nouveau plan de
campagne. Il ordonna aux divi-
sions qui devaient transporter le»
troupes en Corse et à Nice , de se
rallier le plus tôt possible A Toulon,
et lui-même mit à la voile et y
arriva au commencement de mars
1 795. Il se re§d1l de suite A Paris ,
après avoir confié le commande-
ment de l'armée, par intérim , au
contre-amiral Trogoff, le plus an-
cien de Ses ofliciers-géuéraux. La
guerre maritime ayant éclaté, on
vit pour cette fois la France n'ê-
tre pas prise au dépourvu, et sa si-
tuation , au début de cette guerre,
était d'autant plus brillante qu'elle
présentait vingt-quatre vaisseaux
de ligne bien armés ou prêts A
l'être, au seul port de Toulon. Ces
vaisseaux étaient commandés par
des capitaines distingués par leurs
talens et leur expérience, et se-
condés par des équipages nom-
breux et composés de bons mate-
lots. La première démarche de
l'amiral à son arrivée à Paris, fut
de solliciter et d'obtenir un code
pénal et l'établissement des cour»
martiales, pour prévenir désor-
mais l'insurrection. Il avait fait a-
dopter un nouveau plan de cam-
pagne qui, sans exclure entière-
ment le premier, qui fut simple-
ment ajourné , embrassait une
grande expédition dans l'Inde,
où l'on pouvait prendre à l'im-
provisle des niesures contre le
commerce anglai'^ , et s'assurer
l'alliance de Tipoo-Saëb. Mais peu
de jours avant l'èpocjue fixée pour
son retour ù son armée de Tou-
94 TRU
Ion, arriva la funeste journée du
3i mai, où le corp«-Iégislalil" fut
iiKttilé, plusieurs ininislres desti-
tués, et beaucoup de députés ar-
rêtés et incarcérés: c'était le coin-
hïencement de la terreur. Le tra-
vail marititne, les instructions de
campagne, les cours martiales,
tout fut suspendu, et l'amiral re-
tenu à Paris sous divers prétextes,
desititué enfin de^ï^commande-
meut en août , loi arrêté et en-
fermé dans les preiriiers jours de
septembre, lors de la publication
de la loi des suspects. On sait
qu'à cette époque, de grands ex-
cès soulevèrent les habitans de
Toulon, qui, menacés par terre
par une armée révolutionnaire,
et bfoqués par mer par l'armée
conibinée des Anglais et des Espa-
gnols, préférèrent se mettre sous
la domination des Anglais, qui
s'emparèrent de la ville pour
les princes français, et cepen-
dant il ne dépendit pas de ces mê-
mes Anglais qu'un incendie , pré-
paré avec art , ne dévorât tous les
établissemens du port de Toulon,
après avoir réuni à leurs flottes
nos meilleurs vaisseaux. A la mort
de Robespierre, les prisons furent
ouvertes, et l'amiral, mis en li-
berté, fut bientôt rendu à l'acti-
vité, et lors de la création du di-
rectoire, nommé ministre de la
marine. Pendant les deux années
de son ministère , la marine reprit
son énergie, la discipline fut ré-
tablie, et le véritable honneur,
auxiliaire de l'amoTir de la patrie,
anima tous les esprits dans les
ports et sur nos vaisseaux. Tru-
gaet, à son début, fut obligé
d'orgartiser la totalité du person-
nel de la marine miHtaire et admî-
TRU
nistraiive. de créer les régimens
d'artillerie établis par la loi , et de
mettre en retraite tous les indivi-
dus que les principes ultra-révolu-
tionnaires avaient infestés jusque
dans les grades les plus élevés. 11
rappela de suite tous les ancierts
ofliciers , amiraux et capitaines
qui avaient été, comme lui, des-
titués et incarcérés; il leur confia
les escadres, et les marins revi-
rent encore à leur fêle des géné-
raux qui avaient acquis de l'expé-
rience et quelque gloire avant la
révolution. N'ayant pu obtenir
de5 chambres législatives la révo-
cation de la loi maritime du 5
brumaire, que des commis de
marine , députés , avaient fait
rendre par la convention dans les
derniers jours de son existence,
il fut assez heureux pour trouver,
dans cette même loi du 3 bru-
maire, un moyen d'interprétation
qui lui permit de remplacer les
administrateurs supérieurs des
ports par de célèbres ingénieurs ,
tels que les Sané, Groignard ,
Gautier, Chevillard, Forfait, Le-
roi, etc., etc. Cette lutte contre les
administrateurs de marine en cré-
dit dans les chambres, qui parais-
saient exploiter la révolution à
leur profit, et cette victoire rem-
portée sur leurs prétentions am-
bitieuses, lui suscita bien des en-
nemis dans les deux chambres.
Après ces premiers travaux pour
l'organisation des ports, du ma-
tériel et du personnel de la ma-
rine , il fallut s'occuper des colo-
nies. Saint-Domingue, malgré
ses désastres récens et son en-
tière subversion, fut organisé
d'après la constitution nouvelle
de la métropole, et tous les noirs
TRU
s'y soumirent. L'oflensif fut pris
sur le-j Anglais, qui s'étaient éta-
lilis et retranchés dans quelques
places, et ils en furent chassés.
Leurs forces navales ne purent ja-
mais inlercepler les couirnuiiica-
tions si nonïbreuses qui furent
établies avec nos colonies par nos
vaisseaux et nos division», pour
y transporter des troupes , des
munitions de guerre et des appro-
visionncmens de toute espèce ,
tant l'intelligence et l'activité de
nos capitaines surent exécuter
ponctuellement les instructions
bien combiiiées qui leur furent
données. Les autres colonies fu-
rent également soumises à une
administration constitutionnelle.
Le ministre eut à déplordr l'in-
surreclion de l'assemblée colo-
niale de l'île de France contre les
ordres du gfjuvernement et les
lois en vigueur. Elle avait cepen-
dant adopte les principes de la ré-
volution et incarcéré plusieurs
des chefs de la colonie comme a-
ri>tocrales; mais elle crut, pour
éviter l'abolition de l'esclavage,
la traite et les conséquences d'un
'système plus humain et plus po-
litique, devoir préférer des intérêts
particuliers à l'intérêt public, qui
ne repose légitimement que sur les
lois. Cette révolte fut un des pre-
miers obstacles que le ministre
rencontra pour l'exécution de ses
vastes projets contre la puissance
anglaise dans l'Inde. Des plans
généraux de guerre furent hardi-
ment conçus et arrêtés par le di-
rectitire, ot'i siégeaient alors deux
ingénieurs très-instruits, Carnot
';l Letourneur. Le premier arrêté
:uésii:ié par le ministre de la nja-
; ' , < I ajjréé de suite, était li-
TRU
95
belle d'une manière lemarquable;
il était ainsi conçu : i" Il sera ar-
mé des forces navales sulTisanles
pour jeter trente mille hommes en
Irlande, sous les ordres du géné-
ral Hoche; 2* il sera organisé sur
nos côtes les moyens nécessaires
pour en jeter soixante mille sur les
côtes d'Angleterre et d'Ecosse; 3"
le ministre de la marine est char-
gé de l'exécution prompte do cet
arrêté. On vil bientôt des esca-
dres expédiées pour toutes les
mers, et ces escadres bien diri-
gées , après avoir exécuté des hos-
tilités particulières, devaient se
réunira une époque bien choisie,
pour être supérieures à nos enne-
mis à cette même époque, et por-
ter un grand coup en débarquant
une armée de braves. C'est ainsi
que se prépara l'exécution de l'ar-
rêté ci-dessus. L'Angleterre prise
au dépourvu quand elle croyait
notre marine anéantie par nos
malheurs passés, et entièrement
desorganisée, se trouva mena-
cée en Irlande , à la Jamaïque, A
Terre-Neuve et dans l'Inde même.
Sans entrer clans trop de détails,
on sait que 22,000 hommes par-
tirent de Brest pour l'expédition
d'Irlande, sous les ordres de l'a-
miral r.lorard de Galles, ayant
l'amiral liruix pour major-géné-
ral, et les troupes commandées
par le général Hoche ; on sait
aussi qu'une division de frégates
avait déjà été envoyée dans l'Inde,
sous les ordres de l'amiral du Ser-
ccy, et que l'amiral Villaret, com-
mandant huit vaissoauX de ligne
avec des troupt!s, était tout prêt à
bre»t , en octobre ify^J, pour s'y
rendre, muni d'instructions très-
importantes. L'escadre de htiitou
96 TRU
neuf vaisseaux, commandée par
l'amiral Riuhery, avait reçu l'or-
dre de mettre à la voile de Cadix ,
où il avait l'ait entrer un riche
convoi pris sur l'ennemi; ses re-
tards trop prolongés dans celle
rade, et qui lui furenl reprochés,
l'enipêclièrent d'attaquer la Ja-
maïque , en passant d'abord :\
Saint-Domingue, où des troupes
se trouvaient toutes prêtes pour
cette attaque. Il n'eut le temps
que d'attaquer Terre-Neuve, dont
il détruisit les élablissemens de
pêche et les navires pêcheurs. A
son retour en France, il relâcha h
Rochefort, au lieu de se rendre di-
rectement à Brest, ce qui retarda
lo départ de l'expédition contre
l'Irlande. Il serait pénible de dé-
noncer les causes étrangères aux
conceptions du ministre, qui en-
travèrent et déconcertèrent une
grande partie de ses opérations, et
c'est ainsi que, par une de ces
fatalités qui détruisent quelquefois
les ()roiels les mieux conçus , l'in-
dépendance de l'Irlande ne put
être consonmiée , et que l'Angle-
terre ne dut son salut, soit en Ir-
lande, soit dans l'Inde, qu'à la
faiblesse et ù l'irrésolution de
trois ou quatre chefs qui, jusqu'à
celte époque, avaient mérité la
confiance du ministère , mais
qui ne la justifièrent pas au mo-
ment de ces entreprises hardies.
Il est à remarquer surtout, pour
la gloire de ce ministère, que le
plan d'une première campagne
que les marins français devaient
seuls exécuter avec tous ses dan-
gers, se rattachaient à une allian-
ce sincère et de bonne foi avec
l'Espagne etla Hollande. Le^non-
venient général de leurs forces a-
TRU
vait été exclusivement confié au
ministre ïruguet , qui corres-
pondait seul avec les cabinets de
Madrid et de La Haye; il en ré-
sultait ainsi, dans les opération»
concertées , secret et activité,
L'Espagne avait promis , et avait
en effet 20 vaisseaux de ligne tout
prêts, et la Hollande 12 vaisseaux
ave»; 1 5,ooo homnies de débar-
quement, qu'un de nos généraux
avait été inspecter. Leur inertie
menaçante dans leurs ports, exi-
gée d'eux, forçait les Anglais à des
croisières d'observation ruineuse,
et qui facilitaient nos sorties etno»
opérations particulières. La con-
fiance était lelle avec nos alliés,
que la Hollande, connaissanlnotre
pénurie en finances, et les entraves
que cette pénurie mettait à notre
activité, vint à notre secours, et ce
qu'elle nous donna généreusement
pour nos armernens de l'Inde, put
permettre aussi d'augmenter nos
autres arméniens, et les travaux
de nos arsenaux. L'Espagne avait
promis les mêmes secours pécu-
niaires , tant la confiance était
grande dans le système franche-
ment adopté. Les conséquences
des succès plus que probables de
cette seule première campagne
devaient être bien funestes à l'An-
gleterre, prise presque partout au
dépourvu , et un plan général
d'altaque à la seconde campagne,
avec les forces navales de nos al-
liés , réduisait cette colossale
Angleterre à devenir une puis-
sance du second ordre. C'est vers
cette époque, où la marine renais-
sait, où ses colonies prospéraient,
où de nouvelles expéditions s'or-
ganisaient pour réparer les effet»
iJe tant de malveillance et de fai-
TRU
blesse, et lôsisier aux cruelles
influences des discordes qui ré-
gnaient dans les hauts pouvoirs de
la république, qu'arriva la révo-
lution du 18 fructidor (septem-
bre 1797). Le parti qui triom-
pha dans cette journée , etivoya
!^(is victimes à la Guiane, et vou-
lut avoir des ministres nouveaux;
le portefeuille de la n)arine fut
ôté au ministre Tru^yuet. Le di-
rectoire, où ne se trouvaient plus
Carnot ni Le Tourneur, désarma
nos vaisseaux, licencia leurs é-
quipages, réunis et exercés avec
tant de soins, et abandonna à eux-
M)êmes nos allié*, auxquels nos
désanncmens laissèrent sur les
bras toutes les forces ennemies,
qui les écrasèrent, quand ils vou-
lurent mettre en mer. Le vertige
directorial fut sans bornes , puis-
que nos frégates furent livrées à
l'agiotage pour en faire des cor-
saires; on achetait ces frégates
comme des effets de bourse. Sur
ces entrefaites Bonaparte arriva à
Paris, après sa glorieuse campagne
d'Italie, terminée par le traité de
Oampo-Formio. Son influence ar-
rêta les progrès du mal; on lui
donna le titre de général en chef
de l'armée contre l'Angleterre;
Truguet, dans Tinlérét (ie la ma-
rine.s'empressa des'imiràlui pour
obtenir le réarmement de nos es-
cadres; mais la condescendance
du directoire pour le réarmcmenl
d'une escadre t» Toulon , n'avait
d'autre but que d'éloigner Bona-
part<î de Paris, et de l'envoyer en
Egypti;. Trugîiet, repoussé encore
du minisiére de la marine, par le
niT-fue parti qui éloignait Bonapar-
te, fut envoyé comme ainl)assa(leur
à Madrid, sous le prétexte qu'il sc-
T. XS.
TRU
97
rait utile \ l'Espagne pour sa ma-
rine et ses colonies. On hâta sou
départ, bientôt après on h3ta ce-
lui de Bonaparte, qui ayant à évi-
ter ou à braver les forces navales
anglaises, bien supérieures aux
siennes dans la Méditerranée, de-
vait succomber sans un miracle
de la fortune, car il eut le bon-
heur inouï de pouvoir rallier plu-
sieurs convois, attaquer et pren-
dre Malte, et débarquer toutes se»
troupes à Alexandrie, avant l'ar-
rivée de l'amiral Nelson sur ces
cotes. Nous ne pouvons nous re-
fusera donner quelques détails sur
cette ambassade, qui devint bien-
tôt une mission aussi diflicile que
délicate , et dans laquelle l'am-
bassadeur exerça une influence
qui fut toujours inconnue ou mal
appréciée, et qui aurait eu pour
l'Espagne et pour la France, son
alliée, des conséquences bien pré-
cieuses, si le directoire n'avait eu
à cette époque d'autre politique
que sa conservation contre ses en-
nemis. Notre traité d'alliance n'a-
vait encore réparé ni les injustice^
ni les spolialioua des autorités et
des tribunaux espagnols envers les
négociiHis et armateurs français :
le commerce de Lyon deverm as-
seï important avec l'Espagne, de-
puis la guerre contre les Anglais,
avait à se plaindre des entraves
qu'y mettait l'administration des
douanes. Beaucoup de Français
arrêtés dans les Indes-Occidenta-
les, qui étaient devenus suspect»
par suite de notie révolution ,
avaient été traduits en Espagne,
et incarcérés dans 1(!S cachots
de l'inquisition. Se.» intelligcice»
avec jiliisii.urs nieiubres de ce tri-
bunal, lui firent connaître Iv nom-
m
98 ÏRU
bre el le nom de ces infortunés; ils
furent tous mis en liberté, et le
premier devoir envers rimmanité
rempli, il prc'isenta des demandes
sur les trop justes réclamations du
commerce français; il eut la sa-
tisfaction de voir accueillies ces
demandes, auxquelles on fit droit
autant qu'il était possible de le
faire dans les circonstances où l'on
se trouvait. Mais le plus didicile à
concilier ou à éluder, était relatif
aux mesures ;\ prendre contre le
nombre Immense d'émigrés fran-
çais, la plupart ecclésiastiques,
qui s'étaient réfugiés en Espagne,
où le gouvernement castillan les
avait accueillis pendant sa guer-
re avec la France, et dont on exi-
geait l'expulsion depuis la paix.
L'ambassadeur, placé entre un de-
voir rigoureuxet le sentiment que
tout Français éprouve pour d'au-
tres Français, que les discordes
civiles ont désunis, ne put garan-
tir la sûreté de tous, qu'en se con-
certant avec le ministère, compo-
sé alors d'bommes d'état qui pro-
fessaient les principes les plus purs
et les plus humains. On se borna
à éloigner momentanément de la
cour quelques personnages des
plus marqi.ans , et qui y jouis-
saient de beaucoup de considéra-
lion et de cr<;dit, sans les priver ce-
pendant de leurs émolumens; un
régiment, composé d'officiers é-
migrés, dont le gouvernement
français exigeait la dissolution ou
le renvoi dans les colonies, fut
envoyé seulement aux îles Ma-
jorque et Minorqiie. Le direc-
toire parut satisfait de cette con-
descendance, que l'on fit bien
valoir, et qui conserva en Espa-
gne la niasse nombreuse d'émi-
grés, auxquels même de puissans
secours français parvinrent par
l'entremise de plusieurs curés. Ce
fut enfin tout ce que l'humanité
put obtenir de la politique du
temps. Il était d'autres sacrifices
que le gouvernement français exi-
geait du roi d'Espagne; mais ceux-
ci devant humilier sa personne
royale, et la forcer à renoncer à tout
prix à l'alliance française, ils ne
sortirent jamais du portefeuille de
l'ambassadeur, et il est à remar-
quer, qu'à cette époque, nos en-
nemis cherchaient à dissoudre,
par les offres les plus brillantes,
celte alliance renouvelée avec
l'Espagne. En entrant en Espagne,
l'ambassadeur avait donné un
exemple trop rare de désintéresse-
ment, en renonçant au privilège
si abusif qui accordait pendant
six mois l'entrée franche de tout
espèce de droit aux effets person-
nels de l'ambassadeur, et qui,
sous prétexte d'objets à son usa-
ge, devenait un moyen de contre-
bande très- lucratif- Il ordonna
de tout visiter, et de confisquer
tout ce qui ne serait pas sur ses
factures. Sa conduite généreuse
et loyale lui eut bientôt mérité
l'estime de la cour et de tous les
gens de bien , dont il espéra pou-
voir se servir bientôt pour obte-
nir des succès dans les plans qu'il
méditait pour l'avantage de la
France, de l'Espagne, et plus par-
ticulièrement pour affermir, sur
des bases solides , l'autorité du
roi, et l'union des colonies ù la
métropole, qui, de jour en jour,
s'affaiblissait d'une manière ex-
traordinaire. Il était parvenu à ob-
tenir la confiance et l'amitié des
ministres, dont plusieurs, tels que
TRU
Urquijo, Saavedra, Caveillano, é-
laieiit lies hommes du plus grand
mérite, qui connaissaient j)arfai-
icment l'ctat précaire où se Irou-
vait l'Espagne métropole et coio-
iiialf. lj*i premier miiiistie [voyez
GoDoï), trop occupé de lui-mê-
me, el saturé d'honneurs et de
bienfaits de tons les genres, ne put
jamais concevoir qu'il se présen-
tait à lui une gloire plus réelle ,
qui pouvait l'élever au rang des
plus grands hommes d'étal, et un
moyeu illustre de s'acquitter en-
vers leurs majestés de tout ce qu'il
leur devait en régénérant la na-
tion espagnole au nom du roi, en
aiTermissaiit sur des hases consti-
tutionnelles son trône si menacé
par les tempêtes politiques qui
l'avoisinaient, et en rattachant à
jamais ses immenses colonies, en
les appelant à participer à ce nou-
vel ordre de choses. Au lieu de
suivre ce noble conseil , auquel
les autres ministres avaient donné
leur assentiment, le prince de la
l'aix continua d'abuser de son
crédit, d'en mépriser l'auguste
source, et l'ut ainsi au-devant
d'une disgnice qui eût été terri-
ble sans la généiitsilé des minis-
tres, qui ohlinrent du roi de bor-
ner une vengeance éclatante à un
simple éloignement des aftain;s ;
il lui l'ut même perniisde paraître
quelqiiet'ois à la cour. Funeste
générosité sous le rapport de la
politique, et qui bientôt décon-
certa tous les projets de régéné-
ration, en laissant à cet ex -pre-
mier ministre les moyens de re-
conquérir, [)ar sa présence à la
cour et ses intrigues, un pouvoir
(|ue la nation abhorrait, et qui fut
une des principale- causes de tous
TRU 90
les malheurs de Charles IV et de
la reine. L'ambassadeur ïruguel,
a{)rès la chute du favori, se lia
intimement avec les ministres ,
qui tous furent d'avis de commen-
cer par assimiler le tribmial de
l'inquisition, quant A sa publicité,
avec les autres tribunaux du
royaume. C'était en eilel détruire
son infernale autorité ; ensuite
d'abolir les majorais; enfin, l'éta-
blioscmenld'un gouvernement re-
présentatif et constitutionnel qui
n'aurait })aru d'abord que le retour
des belles et antiques institutions
nationalessi chères mtx Castillans,
et que le despotisme et le fanatis-
me avaient seids dégradées, mais
toutefois en l'appelant ces antiques
certes. Tous les hommes éclairés
étaient d'avis de les modifier con-
formément à l'esprit du 18* siè-
cle , et à la politique de l'Europe.
La disgrâce du prince de la Paix,
désirée si ardemment, étant con-
sommée, elle ne forma plus qu'un
vœu. celui d'une constitution na-
tionale. Cette généreuse conces-
sion, venant du trône, se serait
opérée sans convulsion, sans ver-
ser une goutte de sang, et l'on eût
vu en très-peu detemj)S une régé-
nération dans le commerce et l'a-
(^riculture, une nouvelle circula-
tion d'immenses capitaux enfouis
depuis bien long-temps; une union
à jamais dural>le entre les colonies
heureuses et la métropole enri-
chie , onauraitvueufm la royauté
.légitiuje et cmstitutionnelle don-
nant ù tout une vie nouvelle, et
s'atferniissant à jamais : quels a-
vantages la France ne dev.iit-ellc
pas retirer de sa nouvelle alliance
avec une nation libre sons un gou-
vernen>eut monarchique, sage et
fort, qui pouvait de plus en plu»
auguieiiter sa uiarine, et olï'rir de
iiouvelici forces pour consolider
la liberté des mers. Mais le direc-
toire, bien loin d'acx'ueillir et de
proléger son ambassadeur dans
rexéculion de ce plan, ne s'occu-
pait qu'à se défendre des factions,
qui toutes l'accusaient de nos re-
vers en Italie, qu'il n'avait pas su
prévenir, et dt; favorit-er des spo-
îiatioiis qui lai;-sair.nt nos soldats
dans la misère. L'Espagne parut
une nouvelle proie à ces spolia-
teurs eirréués. On vit arriver à Ma-
drid des intrigans se disant agens
du directoire à l'insu de l'ambassa-
deur, mais, à ce qu'on prétend, pro-
tégés sous main par son secrétaire
d'ambassade : l'un d'eux, revêtu
d'un costume de commissaire du
gouvernement, se présente, de-
mandeau ministreespagnol desau-
diences, en obtient une furtive-
ment, où il exige les fournitures
générales des armées de terre et
de mer, et à ce prix, il promet la
protection la plus spéciale du di-
rectoire français. Cet agent, d'o-
rigine espagnole, avait encore con-
tre lui une condamnation infa-
mante par contumace. On ne
pourrait croire à una telle dé-
mence, si on n'avait su depuis
que les résultats de cette auda-
cieuse fi)urberie devait produire
des millions aux protecteurs et
aux protégés. L'auibassadeur s'en
plaignit an directoire, dont ces
misérables osaient emprunter le
nom, et il ajouta qu'en attendant
sa réponse, qui ne pouvait être
douteuse , il allait les dénoncer au
roi, pour les faire arrêter et les
faire poursuivre devant les tribu-
naux. Ils avaient pris la fuite. Le
TftU
directoire approuva lu conduit»
de l'imibassadeur ; mais peu de
temps après, il fut rappelé, et sou»
divers prétextes, exile de Franco
cviinx\c émigré, lui , son secrétaire
particulier et toutes les personnes
de sa suite. L'amiral avait choi-
si la Hollande pour le lieu de son
exil ; il y fut accueilli ; on le com-
bla d'égards. 11 avait eu pendant
son ministère de hautes relation»
avec les hiinislres, les amiraux cl
généraux bataves. Il avait même
été très-utile à ce gouvernement
pendant la durée de son ambas»
sade. Cet exil dura neuf mois. Lne
nouvelle révolution dans le direc-
toire le rappela à l'aris, et ce fut
deux moisaprèsson retour quel'on
apprit le débarquementà Fréjusdu
général en chef Bonaparte, venant
d'Egypte. I5onaparte,non>mé con-
sul, lui olfrit le ministère de la
me" ri ne. Il l'efil accepté par dé-
vouement à celte marine qui avait
tant de secours à réclamer, s'il
n'eût reconnu , après plusieurs
entrevues particulières avec le
premier consul, la diversité de
leurs principes sur Saint-Domin-
gue, et la différence de leurs opi-
nions sur quelques personnage?
qui avaient trahi sa confiance pen-
dant son ministère, et que le con-
sul voulait employer. Il refusa
donc ce ministère; mais il crut
devoir ne pas refuser celle de con-
seiller - d'elal , fonctions qu'il a
exercées pendant quatre ans. Il
reçut, en 1802, le commande-
ment de l'armée navale combinée
réunie à Cadix, avec le litre émi-
nenl d'amiral en chef, qui com-
j)or tailles attributions de ministre.
Le général en chef Bonaparte, qui
avait laissé l'Lgyple sous le com-
mnndfinenl du brave Rfébcr, gai- trop confians dans les fjvantage»
Hait l'espoir de la conserver, en de ce repos et dans le gétiie de
lui envoyanl'de grands secours Napoléon , auraient livré leurs
de France. Appelé au consulat, capitaux, leurs marcliandiscs et
et ayant tous les moyens, il fit leurs vaisseaux à l'Océan. Ils les
plusieurs tentatives qui n'eu- livrèrent ainsi à la cupidité an-
rent aucun succès; il ne put mê- glaise, qui, avant la fin de l'an-
nie faire parvenir des renforts à née , déclara à l'improviste la
Malle. Lorsqu'il apprit l'assassi- guerre à la France. C'est à l'épo-
nat de Kléber, remplacé par le que do celte paix d'Amiens que
général le plus ancien après lui l'amiral revint à Taris, après avoir
( le général iMenou ) , plein de reçu l'ordre d'envoyer A Saint-
bravoure , sans doute, mais bien Domingue une partie de ses vais-
inférieur i\ la lâche qui lui était st-aux avec les troupes françaises
imposée, il pressentit alois que qui étaient à Cadix , pour aller se
celle conquéle allait lui échapper ranger sous les ordres du général
s'il n'organisait à la hâte de puis- en chef Leclerc. Celte paix valut
sans secours. Il se défern)ina en bientôt à l'Angleterre l'entière in-
conséquence à envo^'er l'amiral dépendance de Saint-Domingue,
Truguet prendre le commande- que le premier consul Bonaparte
ment en chef des forces combi- voulut conquérir au profit de l'es-
néesiHIadix, où devaient se rallier clavage, avec une armée d'élite,
bienlôt à son pavillon amiral l'es- quand cette colonie appartenait
cadre de Linois , celle de Gan- constitulionnellement à la France;
leauine, et enfin celle de Decrès , celte impolitiqneet injuste guerre
qui avait reçu l'ordre de rempia- lui fut suggérée par des conseillers
rer à Rr)cheforl l'amiral Brnix, perfides qui l'emportèrent sur ton-
qu'nne maladie sni)ite avait forcé les les instances de Trnguel pour
de renon^-er \ son commande- l'en détourner. Ce qu'il avait pré-
inenl. Si «le pareilles mesures a- dit n'arriva malheureusement que
valent été prises plus tôl, il est trop tôt. Nous perdîmes notre ar-
vraisemblablc que l'Egypte, Mail»; niée, nos marins et la colonie la
et toule la Méditerranée restaient ]>lns riche du monde; ses pro-
à la France. C'est au milieu de ce il!iils,son industrie, ses échanges,
grand mouvement d'escadres , tout fut perdu pour la France,
dont le rendez-vous général était Fnûii la guerre étant déclarée par
dans le port de Cadix, que l'on l'Angleterre (en 1804), lionapar-
apprit la capitulation de l'armée te ordonna la construction d'une
française en Fgyplc. Celle cir- immense flottille i\ Boulogne , et
constance si f.ivorable a l'An- lui creusa des ports dans le sable
glelcrre la détermina à accep- pour la contenir; mais il fallait
1er la paix. Paix désastreuse! qui en même tetns organiser une ar-
devait être incessamment roni- méc navale à Brest. Celle organi-
pue par l'Angleterre, et comme .«ation d'une armée qui devait
beaucoup d'hoirmies sages le pré- transporter vingt mille hommes
voyaient, quand nos négociuii* , commandés par le général Auge-
reau,d«:puis maréchuldc l'enipiri;,
fut confiée àTruguet. Elle lut bien-
tôt équipée, soumise à la plus
exacte discipline et à des régle-
mens de service pour tous les gra-
des. L'union entre les chefs de
terre et de mer établit s«ir la
flotte une harmonie parfaite , et
jusque-là peut-être sans exemple.
Les opérations importantes de
cette armée, composée de vingt-
deux vaisseaux de ligne, auxquels
pouvaient aisément se rallier, par
une bonne manœuvre, les esca-
dres de Rochefort et de la Co-
rogne, étaient concertées secrète-
ment entre l'amiral et le premier
con.->ul, ([ui lui avait déjà écrit que
la floltille sous les ordres de l'ami-
ral Bruix était prête. Trugiiet n'at-
tendait donc que l'ordre du dé-
part, et la marine pouvait espérer
d'effacer à jamais le souvenir de
tant de fautes , de tant de revers ,
et reconquérir son puissant ascen-
dant dans la politique de l'Eu-
rope, lorsqu'on apprit à Brest,
par dépêches télégraphiques et
par courriers extraordinaires, que
Napoléon voulait se faire procla-
mer empereur, en se soumettant
toutefois au vœu spontané de ses
généraux de terre et de mer. L'a-
miral Truguet, animé par d'au-
tres principes et d'autres senti-
mens politiques que les généraux
commandans les corps d'armét: ,
crut devoir refuser d'approuver
cet acte d'ambition qui livrait la
France à une nouvelle dynastie.
Il s'efforça cependant, et, il par-
vint à prévenir toute discorde que
son refus pouvait allumer, et qui
serait devenue mille fois plus dan-
gereuse à Brest que partout ail-
leurs. Il fut à l'instant destitué
TilU
par le nouvel empereur, du com-
mandement de l'armée qui était
déjà prête à mettreà la voile; Napo-
léon n'eut plus qu'une seule pen-
sée , celle de faire reconnaître su
couronne par les puissances de
rEur;>pe. L'effet de son njéconten-
tement contre Truguet fut tel, qu'il
lui ôta toutes ses places, et l'effaça
même de lalistedesgrand>-ofllcier»
de lalégion-d'honnenr, lui qui déjà
avait été désigné pour être maré-
chal de l'empire. Truguet, satis-
fait du témoignage de sa cons-
cience, satisfait d'avoir pu rem-
plir dans une circonstance si im-
portante plusieurs grands devoirs,
ne regretta que de se voir arra-
cher la gloire personnelle qu'il
pouvait espérer d'acquérir avec
une si belle armée navale, si bien
organisée, et un corps de soldais
si braves, en exécutant des plans
d'opérations d'une si haute im-
portance. Il regretta surtout de
voir ajourner peut-être indéfini-
ment la gloire de la marine mili-
taire de France , qui se trouvait
alors dans une attitude respecta-
ble, possédant de si braves offi-
ciers et des marins si exercés. Il
se voua à la retraite la plus abso-
lue, emportant les regrets de tous
les corps qui assistèrent à son dé-
part de Brest : regrets bien réels
et exprimés d'une manière aussi
touchante qu'honorable. 11 put
jouir dans sa retraite du souvenir
consolant d'avoir fait, pendant le
consulat, tout le bien qu'il avait
dépendu de lui de faire à sa pa-
trie, en s'opposant de toutes ses
forces au système de ruine adopté
sur Saint-Domingue , dont il était
si facile de prévoir l'horrible ca-
tastrophe; en ne cessant de com-
TRL
baltre ces monstrueux et ruineux
travaux d'uncflottille dont les cons-
tniclions hasardées et vicieuses ne
pouvaient atteindre le but qu'on se
proposait; soit enfin en présentant
au premier consul le seul plan de
guerre que l'on pût adopter con-
tre l'Angleterre pour conserver
l'Kgypte, IMtiIle, et ruiner cette
puissance dans ses colonies occi-
dentales et dans son vaste empire
indien; plans qui, pendant son
ministère, t'urcnt sans cesse en-
través, mais qui ne pouvaient que
réussir sous une autorité unique
qui disposait de beaucoup d'ar-
gent et de beavicoup de soldats.
(Je l'ut après avoir laissé l'amiral
Truguet pendant quatre ans dans
«me défaveur absolue, que Na-
poléon , croyant avoir encore
besoin de ses services, le rap-
pela, et après lui avoir confié
les débris de l'armée navale de
Kochefort , en partie incendiée
devant l'île d'Aix par les machi-
nes infernales des Angbus , lui re-
tira ce commandement peu de
mois après, pour lui confier la
haute administration maritime de
totite la Hollanile, qu'il lui dé-
signa comme un petit minisière.
Truguet, heureux de pouvoir en-
core servir sa patrie et les Hol-
landais , qu'il chérissait depuis
long-temps , accepta une place où
l'on pouvait faire tant de bien, et
certes , sans conditions et avec
un désintéressement remarqua-
ble; car Napoléon, en lui impo-
sant de nouveau une si pénible
tâche, ne lui restitua ni sa place
uu conseil-d'élat, où il avait siégé
quatre ans, ni aucim des titres,
cordons et dotations, qu'il avait
donnés en abondance aux nmi-
TRU . io3
raux ù l'époque de sa disgrûce et
pendant toute sa durée. Pendant
trois ans qu'il a administré la ma-
rine en Hollande, l'amiral Tru-
guet n'a cessé d'employer tous
ses efforts et tous les moyens d'es-
time dont il jouissait pour affai-
blir les effets de l'oppression et de
l'arbitraire, dont on accablait ce
peuple devenu français; pour pro-
téger son industrie en dévelop-
pant ses pê(îheries sous le blocus
le plus rigide ; pour lui donner
enfin , en l'absence de ses colo-
nies , tous les moyens possibles
d'existence et de bénéfices. La re-
connaissance de ses nombreux ad-
ministrés l'ont bien souvent dé-
dommagé de ses pénibles sollici-
tudes. Enfin i\ l'époque de la ré-
volution hollandaise, en novem-
bre i8i3, qui appela le prince
d'Orange, il ne balança pas, lors-
que toutes les grandes autorités
se retiraient, i\ rester h son poste
au péril de sa fortune, de sa li-
berté et de sa vie, pour le salut
de la flotte du Texel, sous les or-
dres du brave Verhuell [voyez ce
nom), soit pour protéger tant de
Français que leurs chefs avaient
abandonnés , soit pour conserver
les chantiers et arsenaux menacés
d'incendie dans la première fré-
nésie révolutionnaire. C'est ainsi
qu'il a peut-être puissamment
contribué à sauver la ville même
d'Amsterdam, en sac'hant par sa
persuasion , et surtout par son
autorité , qui ne fut jamais mé-
connue dans ce désordre, conte-
nir sur les chantiers et occuper
de leurs travaux accoutumés plu-
sieurs njilliers d'ouvriers , dont
l'Insurrection eût mis le combk
i\ l'anarchie populaire , qui déjù
io4
ITtU
avail porto la fluiiime »ur plu-
kieurs maison. C'est aussi pyr la
sagesse de ses conseils et par l'in-
fluence que toute sa conduite lui
avail acquise auprès de» indivi-
dus nouvellement revêtus des
pouvoirs du prince d'Orange, que
l'on attendait à La Haye, qu'il a
prévenu l'elFusion du sang fran-
çais. Tant de généreux eflorts
lui luérilaient une meilleure des-
tinée Dès qu'il apj)rit le dé-
barquement du prince d'Orange,
i! demanda des passeports, qui lui
lurent donnés avec l'ordre ù tou-
tes les autorités de respecter sa
jiersonne, et particulièrement aux
autorités du port de Rotterdam,
de lui donner le yactli de l'état
pour son passage en France. On
embarque en eliet ses bagages sur
le yaclh. Le vice-amiral, naguère
sous ses ordre», qui commande
ces chantiers, le reçoit , l'accueil-
le , lui donne à dîner. Tranquille
dans un lieu fermé par des grilles,
il attend la nuit close et l'heure
de la marée pour traverser la
ftieuse. Qui pourrait le croire !
c'est à la nuit close qu'on ouvre
les grilles du port à un parti de
Cosaques réguliers, qui s'em[)are
de sa personne et de tous ses ba-
gages. Il proleste contre une pa-
reille violation du droit des gens,
puisqu'il représentait des otages
enlevés pour sa sûreté à Dtrecht,
et qu'il devait renvoyer de l'autre
rive de la Meuse ; c'était une
étrange violation du droit d'hos-
pitalité accordé par le gouverne-
ment provisoire du prince d'O-
range. Rien ne put convaincre ces
Cosaques, qui, après s'être emparé
de tous ses effets, l'entraînèrent;
mais les autorités d'Amsterdam,
cédant ù lu générosité de leur cn-
ractère, se rendirent en toute hâte
auprès du print.e pour réclamer
la garantie qu'elles avaient donnée
en son nom. En conséquence, te
prince, voulant ratifier tout ce qui
avait été lait en son nom, envoya
sur-le-champ des ordres précis
pour le retirer des mains des Co-
saques, ainsi que tout ce qu'il»
avaient enlevé du yactii. On re-
lira de leurs mains ce que l'on
put; mais l'amiral fit néanmoins
mie perte Irès-considérahie. Ar-
rivé ù La Haye, il y demeura sous
la protection du prince royal, non
comme prisourii«'r, mais comme
otage, en attendant un échange :
les otages prisa Utrechl a valent été
transféré? à Paris. Au mois d'avril
18 14» on apprit l'entrée des alliés
dans Paris et l'abdication de l'em-
pereur; ramiral Truguet put alors
se mettre en route pour la Fran-
ce. Au mois de mai , Louis XVIII
le rétabliten activité de serviceà la
lête i\n corps de la marine. Pen-
dant les cent jours, en 181 5, il ne
reput de Napoléon ni missions, ni
faveurs, ni aucun témoignage de
bienveillance personnelle, et ce-
pendant il avail rempli les devoir»
que Ihonneur lui avait imposé»,
au péril de sa foi tune, de sa li-
berté et de sa vie, jusqu'au mo-
ment de l'abdication. A la seconde
restauration , et dès le mois de
juillet (181 5), il lui fut ordonné
par le roi de se rendre à Brest ,
avec l'ordre formel de garantir
contre toute agression , toute sur-
prise et toute occupation étran-
gère, les immenses richesses na-
tionales renfermées dans ce pre-
mier port du royaume ; il en de-
venait (disaient ses instruclions) »
TRU
respon?able au rot et i la nation.
Les Prussiens, que l'on poiivail
croire les instriimens passifs d'une
autre puissance, étaient déjà ar-
rivés à Reunes, et se liûlaient de
se rendre à Brest. L'amiral Tru-
guet les dépassa , et arriva en
toute hâte dans ce port, où il prit
à l'instant et sans discontinuer
lotîtes les mesures propres à l'aire
respecter et conserver intact ce
riche dépôt qui lui était confié.
Louis XVIII appréciant les ser-
vices que Truguet avait rendus
à la France sous le règne de
Louis XVI, et tous ceux qu'il
rendit depuis en qualité de mi-
nistre de la marine , de com-
luandant d'armées navales, elc ,
répara les injustices dont il a-
vait été souvent victime dans
^a longue carrière militaire, ad-
ministrative et politique, en lui
conférant les dignités de grand'
croix des ordres de Saint-Louis
et de la légion-d'honneiir, et le
titre de comte; en l'élevant enfin
à la pairie le 5 mai 1819. L'ami-
ral ne pouvait mieux mériter ni
mieux justifier cette dernière fa-
veur du roi, qu'en s'appliquant
constamment à éclairer la cham-
hre et le ministère sur les plus
chers intérêts de l'état , sur les
moyens de régénérer la marine
royale. On l'a vu, à l'époque de
chaque budget , solliciter non-
seulement un surcroît de fonds si
indispensable , mais encore pré-
senter tous les moyens de les uti-
liser avec fruit, en pressant les
nombreux ministres qui se sont si
rapidement 8uc<;édés , d'adopter
les institutions qui seules peuvent
assurer les succès de nos opéra-
tion», c'est-à-dire en simplifiant
TRU loi
l'orf^anisation des ports sous l'au-
torité unique d'un seul amiral res-
ponsable, en créant des équipage»
de ligne pris dans le contingent
de la loi du recrutement, en don-
nant une meilleure éducation aux
élèves de la marine soumis à un
concours pour leur admission, et
réunis dans les ports et non à An-
goulême, en réclamant enfin un
cor)seil d'amiraux qui pût, par sa
bonne composition, préserver le
département de la marine de tant
<]('. nouveaux systèmes , de tant de
fausses et ruineuses opérations ,
produits inévitables de cette suc-
cession si rapide de ministres
étrangers au service de la marine.
Il a pu proclamer à la même tri-
bune sa reconnaissance et son ad-
miration pour Louis XVI . deux
fois régénérateur de la mariu« et
fondateur du magnini|iie pcu-t de
Cherbourg ; conception si bril-
lante et si utile à la France, que
son gouvernement commettrait
une grande faute de négliger son
achèvement, et montrerait une
véritable ingratitude si on refusait
de donner à ce port le no-m de
Louis XVI. L'amiral Truguet en
a fait la proposition dans la ses-
sion de i8'2/|. Dans cette même
année, il ofl'rit à Louis XVIil
un travail de sa jeunesse pen-
dant sa longue mission à Cons-
tantinople. Ce sont les cartes ma-
rines levées astroriottliqncment
par lui, commandant alors un>i
corvette du roi , des mers de l'Ar-
chipel, de IMarmara, du Hosphore
et de l'entrée de la mer Noire.
Tel on a vu Truguet au conimen-
rement de sa carrière, tel on le
voit encore aujourd'hui, en i8'i~>.
après de* services effectif» en
io6
TRC
si graiid nombre, sans cesse oc-
cupé de l'ulilité et des succès de
la marine, à la têle de laquelle il
se trouve, et aussi capable qu'il
l'était il y a vingt ans, de com-
mander les armées navales. L'a-
miral Truguet a constamment
présente à la pensée celle opinicm
de Louis XVI, le véritable res-
taurateur de la marine, qui ne
cesiiait de répéter qu'il la croyait
indi!>pens;ible à la richesse et à la
puissance de la France , ainsi qu'à
la gloire personnelle de ses rois.
La vie politique et privée du com-
te Trugwet est celle d'un homme
de bien et d'un citoyen distin-
gué. Il a figuré constamment avec
honneur dans le.^ premières digni-
tés de son pays, et il recueille
chaque jour le tribut d'estime et
de considération attaché à cette
. longue carrière de services utiles
et irré|)rochahlcs, que pendant un
demi-siècle il a rendus à sa patrie.
TRLLLARD (N. ), ingénieur,
convenliormel, etc., se montra,
dès le commencement de la révo-
cation, dévoué auxnou veaux prin-
cipes. Au mois de septembre 1 792,
le déparlem<;nt de la Côte-d'Or,
qu'il habitait, le nomma député
à la convention nationale. Il ne
s'y fil remarquer qu'à Tépoque du
procès du roi, dans lequel il vota
avec la majorité. Cette année mê-
me («795) il fut, avec son collègue
Berlier (ccj. ce nom), envoyé à
l'armée du Nord pour y veiller à
la remonte de la cavalerie. M.
Trullard était à la levée du siège
de Dunkerque, dont il fit connaî-
tre la nouvelle à la convention
nationale; il fit hommage à celte
assemblée d'un boulet de six li-
vres, qui avait passé par-dessus
TRI)
sa tCte. N'ayant point été porté à
l'un ou l'autre conseil lors de la
réélection des deux tiers des mem-
bres de la convention , ni élu pos-
térieurement, il disparut de la
scène politique. Le dircctoire-exé-
cnlif l'employa ppu après en qua-
lité de commissaire; mais depuis
celte époque, on l'a totalement
perdu de vue.
TllUPHÉMI (N. ) , boucher à
Nîmes, s'est acquis une affreuse
célébrité par la part qu'il a prise,
en i8i5, aux massacres qui ont
porté l'effroi dans les contrées du
Midi ; son nom , associé à ceux de
Servant et de Trestaillous, inspire-
ra la même horreur, et accusera
conslamment l'inexplicable con-
duite des autorités, qui semblaient
paralysées an milieu du sang qui
coulait autour d'elles. Truphémi,
traduit en novembre 1819, après
quatre ans d'impunité, devant la
cour d'assises de Kiom , départe-
ment du Puy-de-Dôme, était ac-
cusé d'avoir massacré, le 1" avril
181 5, un ofiicier en retraite nom-
mé Bourillon, professant la reli-
gion réformée; l'instruction et les
débats prouvèrent la moralité de
la victime, et l'âme atroce du
bourreau, qui, en plein jour, ar-
rache un citoyen paisible des bras
de sa femme, l'entraîne sur une
place publique avec des circons-
tance d'une atroce dérision , et
retend mort à ses pieds, en le
frappant de plusieurs coups, à la
vue des citoyens épouvantés; puis
conservant un imperturbable sang-
froid, il s'empare du chapeau de
sa victime, parce qu'il le croit
meilleur quelesien. Lecrimeétait
avéré, les circonstances en étaient
effroyables, on invoquait le té-
TRY
inoiguage d'une ville entière;
l'avocat (le Truphéini , nommé
d'office pour le détendre, ne pou-
vait rien contester ; il senlit, com-
me l'avocat de Servant, que ce
Ibrlait tombait de plus haut, et
il se réduisit, comme lui, à de-
mander aux juré? : « Si lorsque
\cà provocations étaient impunies,
les agens devaient être frappés;
cl s'ils écraseraient \c ver de terre,
tandis que \csserpetis continuaient
à lever une tête menaçante. » La
déclaration unania)e du jury con-
damna à mort Truphémi , qui se
[lourvut en cassation. Un vice de
l'orme fil armuller la procédure ,
et renvoyer le coupable devant la
cour d'assises de Valence. Son cri-
me, semblable à celui de Servant,
qui subit la peine de mort , y fut
considéré d'un autre oeil ; il fie
fut condanmé qu'à la peine des
travaux forcés à perpétuité. Tou-
jours plein de confiance en ses
prolecleurs, il a interjeté appel de
ce second jugement ; mai>* son
pourvoi n'ayant pa^ été admis,
le jugement a élé mis à exécution,
et, le '^y avril i8io, Trupliémi a
été exposé Pi flétri. Il n'est pcul-
êlre pas inulile d'observer, pour
faire ci'nnaître à quels excès peut
^e porter le fanatisme religieux ,
que cet assassin, au moment de
son arrestation, fut regardé com-
me un martyr de la foi catholique;
les dév()tes do Nîmei* firent une
quête en sa faveur, et le recom-
mandèrent aux prières de l'église.
TKV (Ukrtra?«d), président du
tribunal de première instance de
l'.iris. membrt' de la chambre des
députés, chevalier de la légion-
d'honueur , naquit à Pari? le f) fé-
vrier 1754. Il lit ses études pour
TRY 107
suivre la carrière du barreau, et
devint successivement avocat au
parlement et aux conseils du roi.
Une année avant la révolution, il
avait été reçu conseiller au Châ-
telet. Pendant nos troubles civils
il évita de se mettre en évidence,
et échappa ainsi au régime de la
terreur. Sous le geuvernement
consulaire, et lors de la réorga-
nisation des tribunaux, en 1800,
M. Try fut nommé substitut du
commissaire du gouvernement
près le tribunal d'appel ; premier
avocat-général à la cour d'appel,
en 1810 , et président du Irilîunal
de première instance, le 6 janvier
1811, par suite de l'admission à la
retraite de M. Berlhereau , qui en
exerçait les fonctinns. M. Try fut
confirmé dans sa présidence après
la première restauration, en 1814»
et nommé, la même année , che-
valier de la légion -d'honneur.
Napoléon le destitua au 20 mars
181 5; mais après le second re-
tour du roi, il reprit ses fonctions
et fut nommé membre de la cham-
bre des députés , où il appuya tous
les projets ministériels, entre au-
tres ceux sur les écrits dits sédi-
tieux, sur l'abolition du divorce,
clc. Chargé du rapport de la com-
mission nommée pour examiner
le projet de loi relatif aux écrits
saisis en vertu de la loi du 21 oc-
tobre 1814 j il proposa, le i3 jan-
vier 1817, l'adoption de la loi.
Rapporteur de la conunission i\
laquelle avait été renvoyé l'exa-
men du projet de loi concernant
les détenus pour<letles il demanda
le ntainlièn de la loi dans toute
sa sévérité. Quoique nommé, en
septembre 1817 et en 1818, pré-
sident d'une section du collège
io8
TlJR
électoral de Paris, il ne fui point
réélu à la chaiîibre ; mais le gou-
■verneiDent Ta dédommagé, en
lui conférant, au mois de no-
■vemlne 1818, le litre de maître
des rcquGtos. M. Try mourut en
1821.
TUllRHEIM (N. barok), ban-
quier, membre dolalégion-d'hon-
iieur, membre de la chambre de3
députés, etc. , est né à Strasbour:;,
déparlement du Bas-Rhin, et ap-
partient à une famille do cette vil-
le, estimée dans la magistrature.
Il adopta avec sagesse les princi-
pes de la révolution, et fut revêtu
de plusieurs fondions mimicipa-
les. Sojis le régime de la terreur,
sa modération le fit classer parmi
les suspects, et il fut obligé, pour
éviter la mort, de fuir sa patrie;
il se retira en Allemagne. Le cal-
me rétabli, il rentra en France, se
livra aux affaires commerciales,
et l'on cite à son honneur qu'ayant
perdu des sommes considérables
parle discrédit du papit^r monnaie
il ne remboursa en cette valeur,
aucun des capitaux que ses conci-
toyens lui avaient confiés. Il fut
élu au sénat-conservateur, mais il
ne fit point partie de ce corps. Le
gouvernement l'autorisa à accep-
ter la place de ministre des finan-
ces du grand-duché de Bade. Au
bout de quelques mois il obtint sa
démission , et rentra en France
décoré de Tordre de la Fidélité de
Bade, et avec le titre de baron.
Devenu membre de la légion-
d'honneur après la première res-
tauration, en i8i4> il fut nommé,
par le déparlement du Bas-Rhin,
membre de la chambre des dépu-
tés dite /n^roai'flô/f, où il vota avec
la minorilé. Appelé, en 1819, par
TUR
ordonnance royale, Alaprésidenr»?
du collège électoral de son dépar-
tement, il ne triompha de son
concurrent à la députation , que
par le scrutin de ballolage. Du
centre gauche de la chambre, il
a voté contre les deux lois d'ex-
ception , et pour le nouveau
mode électoral amendé. Il faisait
partie de la chambre dissoute en
totalité, en 1825. Réélu immé-
diatement à la chambre septenna-
le, IM. ïurkheim est meinbre du
conseil-général de Brasklcim, du
directoire luthérien, etd<; la com-
mission spéciale consultative, pour
le culte prolestant, attachée au
nn'nistère de l'intérieur.
TUJiLOT (l'abbé), homme de
lettres, ancien grand- vicaire de
Naiici, etc. , naquit à Dijon, dé-
parlement de la Côte-d'Or, le 2.5
janvier iy^5. Il appartenait à une
faniillc de magistrats qui lui fit
donner une éducation soignée . et
il embrassa par gofit Télat ecclé-
siasli(|ue. Homme instruit, et de
moeurs pures, il fut chargé, par
Louis XVI, de l'éducalion de M-
le duc de Bourbon, qu'il eut le
malheur de perdre à Rome, où il
l'avait conduit pourcompléterson
éducation. A son retour dans sa
patrie, il reçut des consolations
de la famille royale. Madame Vic-
toire le choisit pour son aumônier;
il fut ensuite nommé vicaire-gé-
néral du diocèse de Nanci , et
pourvu d'un bénéfice. La révolu-
lion le priva de ses emplois ; ce-
pendant il obtint une place à la
bibliothèque du roi , et la conser-
va jusqu'à l'époque de sa mort ,
arrivée dans la 84* année de son
/ige, le 1 5 janvier 1825. L'abbé
Turlot esl aulcur de plusieurs nu-
TUR
Trnges. Les dtîiix plus rcîiiarqua-
bles ifont : i" Théorie de l'avenir,
2 vol. 111-8° , où il développe avec
talent des idées douces et conso-
lantes sur l'avenir de l'homme.
Ses théories paraissent générale-
ment abstraites et même para-
doxales; mais elles sont revêtues
de Tonnes agréables, et rendues
dans un style pur et élégant. 2'
De V Instruction, i vol. in- 12. Cet
ouvrage, où l'on remarque un
discours préliminaire très-étendu
et une analyse fort bien faite des
connaissances humaines, a pour
objet de guider les études d'un
jeune homme qui, au sorlir du
collège, veut perfectionner l'édu-
cation qu'il y a reçue, et étendre
son instruction par d'utiles lec-
tures.
TUKOT ( Joseph ) , secrétaire-
général du ministère de la police
à l'époque de la révolution du 18
brumaire an 8(«) novembre 1799)»
était aus.-i à celte époque proprié-
taire de la Gazette de France, dont
il céda la rédaction principale, et
ensuite la propriété, à M. Belle -
mare , depuis commissaire-géné-
ral de police à Anvers. An rapport
des auteurs «le la Galerie des Con-
tem()orains de Bruxelles, M. Tu-
rot s'intéressa dans une entreprise
de fournitures de l'armée d'Alle-
magne ; des accusations graves
ayant été portées contre l'entre-
prise, M. Turut fut traduit, en
1806. par (»nlre de l'empereur,
devant un conseil «le guerre. Il
fut acquitté ; mais de retour à Pa-
ris, il sollicita inntiltMnent de l'em-
ploi ; ce ne fut que pendait les
cent jours ^ en i8i5, qu'il obtint,
})ar la protection de Fouché,dur
d'Oirante, la place de commis-
TUR
log
sairc-général de police dans les
départemens du Nord. La seconda
restauration ne lui a conservé qu«
le titre de conseiller de police.
M. Turot est auteur, sous le voile
de l'anonyme , d'un assez grand
nombre de brochures politiques,
dont la plus remarquable , qu'il a
avouée, a pour litre : de l'Oppo-
sition et de la Liberté de la Presse,
Paris, in-8", 1799. On lui attri-
bue l'épigramme si connue sur
Rapinat {voyez ce nom.) M. Tu-
rot mourut dans une complète
obscurité en 1825.
TLRREAIJ (N.), membre de
la convention nationale, etc., é-
tait, à l'époque de la révolution,
avocat dans le déjiarlement de
l'Yonne , dont il devint admistra-
teur en 1790. Nommé, en sep-
tembre 1791 . par les électeurs du
UMMoe déparlement, député sup-
pléant à l'assemblée législative,
il ne fut point appelé à y prendre
séan(;e; mais à la réélection de
l'année suivante, pour la conven-
tion nationale, il réunit de nou-
veau les suftVages «le ses conci-
toyens, et, cette fois, siégea de
suite dans l'assemblée; il n'y fut
point remarqué avant le piocés du
roi, dans bquel il vota la mort
sans appel ni sursis. L'un des
montagnards les plus prononcés,
Turreau appuya fortement le coup
d'état des 3i mai, 1" et 2 juin
1795, contre le parti de la Gi-
ronde, et ne démentit malheureu-
sement pas 1.1 violenct! de ses pre-
mi«"'res opinions dans la mission
(|u'il remplit à l'armée de l'Ouest.
Il voulait le trionijdie de la répu-
blique, et ne le jugeait possible,
la vtiyant menacée à la fois par le»
ennemis de l'extérieur et ceux do
no IDK
l'intérieur, que par les mesures les
plus capables d't-puuvanler tant
de nombreux et redoutables enne-
mis; il appréciait néanmoins les
hommes qui montraient des prin-
cipes plus sages, et il signala avec
beaucoup de courage et de fer-
meté, ii la convention et au co-
mité de salut-public, les mesures
qui éloignaient des arnjées, par
une scandaleuse destitution , les
généraux Caudaux et Aiibert du
lia^et {voj. ces noms). Malgré
ce mouvement de justice et d'hu-
manité, il fut mairilcuu dans sa
mission , où il continua h ne pas
démériter la confiance de ses pro-
tecteurs , en suivant à la lettre
leurs sanglans arrêts. Accusé de la
mort de plusieurs patriotes de
Noirmouliers, il fut détendu par
son atroce collègue Carrier {voy.
ce nom ). La révolution du 9 thei-
midor an 2 (27 juillet 1794) "^'t
fin à sa mission, et il revint à la
convention nationale , où il se
montra l'ennemi des terroristes.
Ce fut Turreau, agent de la fac-
tion sanguinaire, qui fit décréter,
le i4 thermidor, l'arrestation de
Fouquier-Tinville et sa traduction
au tribunal révolutionnaire , et
qui, le i5 juillet suivant (27 mes-
sidor an 5 ) , accabla d'un seul
mot Joseph Lebon , qui osait se
justifier en accusant quelques-uns
de ses collègues : Scélérat , peins-
toi , toi-même ! Non - seulement
Turreau survécut à la proscrip-
tion des hommes de son parti ,
mais il fut nomirié peu après com-
missaire près de l'armée d'Italie.
Signalé comme ayant été , dans la
ci-devant Bretagne, le complice
des actes révolutionnaires du
^ç^néral Turreau {voy. l'article
Tl'K
suivant), il écrivit à la conven-
tion pour se défendre à ce sujet.
11 ne fut point réélu an conseil des
cinq-cents, ni par lu convention
elle-même , lors de la réélection
des deux tiers de ses membres, ni
[>ar le déparlement de l'Yonne.
Le directoire-exécutif le nomma
son commissaire, ù l'elTet de ra-
mener ou conduire sous les dra-
p<!aux les conscrits et réquisition-
paires. Turreau mourut peu de
temps après. On lit le passage sui-
vant dans M. Las Cases (tom. 1",
p. 199 et 200 ) : « Représentant
du peuple a l'armée de Nice, assez
insignifiant. Sa femme, extrême-
ment jolie, fort aimable, parta-
geait et par fois dirigeait sa mis-
sion. Le ménage faisait le plus
giand cas du général d'artillerie
(Napoléon); il s'en était lout-ù-
fait engoué et le traitait au mieux
sous tous les rapports , ce qui était
un avantage immense; car dans le
cas de l'absense des lois, ou de
leur improvisation , un représen-
tant du peuple était nue véritable
puissance. (]elui-ci fut un de Cfux
qui , dans la convention , contri-
buèrent le plus à faire jeter les
yeux sur Napoléon lors de la
crise de vendémiaire : c'est une
.suite naturelle des hautes impres-
sions que lui avaient laissées le
caractère et la capacité du jeune
général. »
TURREAU (le baron), lieute-
nant-général, grand-oflicier de la
légion-d'honnetir , parent du pré-
cédent, entra de bonne heure dans
la carrière des armes, et était ca-
pitaine d'infanterie à l'époque de
la révolution. Dévoué au nouvel
ordî-e de choses, il continua de
servir d'abord, en 1792, sous le
ÏLR
général Beurnonville à l'armée de
la Moselle, et en ijg."*, à rariuée
de la Vendée , où il devint géné-
ral de brigade, puis général de
division ; il prit , en cette dernière
qualité, le coinniandement de
l'armée des Pjrénées-Orientales ;
mais il le garda peu, et passa dans
l'Ouest, où il commanda en chef.
Le général Turreaii dut à ses ta-
lens et à son courage ses différens
grades; chargé d'un commande-
ment aussi important que celui
des pays insurgé*, et forcé d'obéir
aux ordres implacables du comité
de salut-public , il fut dénoncé,
après la révolution du 9 thermidor
au 2 (27 juillet 1794), pour sa
conduite dans TOuest. Il se jusliûa
en produisant les arrêtés du gou-
vernement. Le résultat de sa tra-
duction devant le directeur du
jury de Tours, et ensuite devant
un conseil de guerre, fut son ac-
quittement après une assez longue
détenticm. Babeuf ayant été con-
damné i\ mort le 5 prairial an ;')
( 25 mai 1797 ) , le général Tur-
reau adopta un de ses en fans. Re-
mis en activité sous le gouverne-
ment consulaire, il eut le com-
mandement d'une division de l'ar-
mée de réserve; il passa ensuite
dans le Valais , où il maintint la
tranquillité. Le premier consul
Bonaparte le nomma, en 1804 >
ministre plénipotentiaire près des
litats-Liiis d'Amérique, et grand-
officier de la Icgion-d'honneur ; il
ne cessa de remplir ses fonctions
diplomatiques qu'en 1810, épo-
que où il fut rappelé et employé
en Allemagne. Il avait le coni-
mandement de Marier.berg , dans
le grand-duché de Wiirtzhourg ,
TYS ni
ors des événemens politiques de
1814. Pendant les cent jours , eu
181 5 , il fut chargé de la défense
de la rive gauche de la Seine ; il
fut ensuite nommé ( le 2 juillet de
la même année) commissaire de
l'armée française pour l'exécution
de la convention du 5 juillet :
mission qu'il ne dépendit pas de
lui de remplir selon le vœu du
mandat qu'il avait accepté. De-
puis la seconde restauration, il vit
retiré au seiu de sa famille. Le gé-
néral Turreau a donné, pendant
\es cent jours f une nouvelle édi-
tion de l'ouvrage qu'il avait pré-
cédenimenl publié sous l« titre
de : Mémoires historiques sur la
guerre de ta Vendée.
TYSZIEWICZ (Thérèse Po-
NiATOvrsKi, comtesse), nièce du
dernier roi de Pologne , Stanislas
Auguste {voy. Stanislas Auguste),
et sœur du prince Poniatowski
( voy. ce nom ), s'est rendue re-
commandable par sa constante
affection pour la France, (ju'elle
avait habitée pendant plusieurs
années avant la révolution. Jille
était liés instruite , et avait une
prédilection toute particulière
pour la langue et la littérature
françaises. A toutes les époque»
de nos troubles civils , sa maison
de Varsovie fut ouverte à nos ex-
patriés sans distinction d'opinions,
et le trait raconté par l'abbé De-
lille dar.s imc note de son poëme
de la Pitié, se rapporte à celle
dame et à son frèie. Dans sa jeu-
nesse, elle avait épousé le comte
Vincent Tysziewicz, dont elle fut
obligée de se séparer quelque
temps après son mariage. La com-
tesse Tv7,i«Mvif7, f-l morte il y a
I
LT.O
ULL
j>lusieur» années , estimée cl rc- lou5 Ici» Français qui cnrrnt Ir
tçreltée de sei compatriotes •:l de bonheur de la connaître.
u
UGONI (Camille), né à Brcs-
cia CM 1784» s'e.-l placé au nom-
bre des bons lillérateurs par la
publication d'une Histoire de In
lillérature italienne, pendant la
seconde moitié du 18* siècle, dont
il n'a paru que les trois pre-
miers volumes. Quoiqu'il ne se
soit engagé qti'à donner une suite
aux Siècles de la littérature ita-
lienne, de son compatriote Cor-
niani, il est facile de sentir com-
bien ce supplément est au-dessus
de son modèle par l'importance
des recherches et par la profon-
deur des obst'i'vations. Le style
de M. Ugoni est aussi plus soigné;
et son ouvrage serait irréprocha-
ble s'il avait osé adopter un autre
plan que celui de son prédéces-
seur, dont il ne s'est pas caché les
défauts dans les Mémoires sur la
vie et les écrits de Corniani. Non
moins recommandable par ses lu-
mières que par son instruction ,
ce littérateur avait mérité d'ê-
tre placé à la tête de l'athé-
née et lin lycée de Brescia:
Plein de zèle pour l'instruction
de la jeunesse, il ne pouvait pas
échapper aux rigueurs d'un gou-
vernement ennemi de tout perfec-
tionnement social. Plutôt que de
fléchir sous le dc^rpoSisnie des do-
minateurs de sa patrie , 31. Ugoni
a préféré sacrifier ses affections
et sa fortune ; et après avoir visité
la Suisse et l'Angleterre, il est
venu dcniander l'hospitalité à la
France, où il est occupé de la
continuation de son ouvrage. Il
est aussi l'auteur d'une traduc-
tion estimée des Commentaires de
César, d'une Vie de Montecuccoli
et des Essais sur Pétrarque , tra-
duits de l'anglais de Foscolo.
ULLOA (don Antonio), cé-
lèbre mathématicien espagnol ,
naquit à Séville en 1716, et mou-
rut en 1795. Issu d'une famille,
honorable, il fit des très-bonnes
étud<:s, et suivit la carrière mari-
time, où il entra a l'âge de vingt
ans, et où il mérita successive-
ment tous ses grades, jusqu'à ce-
lui de lieutenant- général et de
commandeur de l'ordre de Saint-
Jacques. Don Ulloa fut adjoint à
don Georges Juan , chargé d'ac-
compagner au Pérou les acadé-
miciens français qui devaient y
déterminer la figure de la terre.
Onze ans après son départ d'Es-
pagne , il revenait dans sa patrie,
lorsqu'il fut fait prisonnier parles
Anglais, qui l'emmenèrent à Lon-
dres. Il s'y lia avec les principaux
sa vans de ce pays, entre autres i\l.
Folker, pré>ident de la société
royale, qui lui rendit toutes sortes
de bons offices; il lui dut parti-
culièrement la restitution de ses
papiers et la liberté. De retour i\
ftiadrid, don Ulloa publia son
Voyage dans l' Amérique méridio-
nale, qui eut beaucoup de succès,
et qui lui fil donner la mission de
repartir pour l'Amérique, d'où
ULL
il rapporta les matériaux de «es
Nouvelles américaines ou Entre-
tiens physiques et historiques sur les
Amériques méridionale et septen-
trionale. Cet ouvrage fut suivi de
la Marine ou forces navales de
l'Europe et de l'Afrique , qu'il
présenta an minislère espagnol
en 1775. Aces travaux utiles, on
doit ajouter que don Ulloa décou-
vrit, en 1778, iitt point lumineux
dans la lune ; publia, dans la mê-
me année, des observations sur
l'éclipsé de soleil; fonda en Es-
pagne le premier cabinet d'his-
toire naturelle, le premier labo-
ratoire de métallurgie, et le canal
do navigation et d'arrosemenl de
la Vieille-Castille; fit également
le j'remier connaître à sa patrie
la platine et ses propriétés, l'é-
leclricité et le magnétisme artifi-
ciel ; pcrfeclionna l'art de la gra-
vure et de l'imprimerie espagno-
le , qui, par ses sollicitations, fit
envoyer aux frais du gouverne-
ment des jeunes gens en pays
étrangers pour s'y perfectionner
dans les arts libéraux et méiani-
ques; qui enfin fit rédiger sous
sa direction les cartes géographi-
ques de l'Espagne. Dot: Ulloa ren-
dit encore de nouveaux services à
l'industrie manufacturière de son
pays, en établissant à Ségovie ,
par ordre et pour le compte du
roi, une fabrique de draps, qui
luttèrent avec avantage contre les
draps les jdus lins des autres con-
trées.
ULLOA (don Martin), savant
littérateur espagnol , neveu du
précédent, naquit en 1750, et
mourut h Cordouc en 1800. Il
devint successivement président
de l'académie de» belles-lelfr«s
T. IX.
U1\0
ii3
de Séville, président de la société
patriotique, membre des acadé-
uiies de la langue et d'histoire de
Madrid , enfin président de l'aca-
démie royale de Séville. On lui
doit une Histoire des académies de
Madrid f des Mémoires sur l'ori-
gine et le génie de la langue cas-
tillane; des Dissertations sur la
patrie des Goths ; sur les premier»
habitans de l'Espagne; sur l'ori-
gine des duels, etc., etc. Don
Martin Ulloa passe pour un des plus
savans biographes de sa patrie.
URQULJO (le chevalier don
Maria>o-Llis d' ), ministre-d'état
espagnol, naquit dans la Vieille-
Castille, et fut élevé en Angle-
terre. Dans sa jeunesse , il fit plu-
sieurs voyages, et de retour eu
Espagne, il suivit la cairière di-
plomatique, d'abord sous les mi-
nistres Florida-Blanca , d'Aranda
et d'Alcuilia, et ensuite sous M.
de SaaveJra. qu'il remplaça en
1798. Il dut sa nomination au
ministère , autant à l'honorable
réputation dont il jouissait qu';\ la
protection particulière de la reine.
Tous les efforts du chevalier d'Ur-
quijo tendirent à la destruction de
l'effioyable tribunal de Tinquisi-
lion , et il eut le bonheur de réus-
sir; le tribunal fut supprimé, et
par suite du même bienfait, ses
immenses possessions furent ré-
parties entre des établissemens
publics et de bienfaisance. Le cler-
gé ne pardonna pas au ministre
vertueux le coup qu'il lui avait
porté. Il s'attacha par ses intri-
gues, ses calomnies et sa puis-
sance, toujours redoutable, ù des-
servir le ministre et à arrêter ses
utiles reformes; il le détruisit dans
l'iespril du prince de la Paix {voy.
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nHi%ll Wl ll«iMB^BK<BBB«t VKBMft^ «B N(^BMW^pM BBMl^|rinft BK bIMM/N:
liBNl èwM 9BI TtHB MHBlt % Im«|«B à HilMk A)p>è» là W>Mfct ^Blljk^
I l(i
VAC
rcni^o , (jui remit l'Italie t>on.« i.-i
(toiTiitialiuii rraiiçîiisf; , il dcviot
membre, du corps-Uîgislalif, pré-
sident du mC'in»' corps, sccrélairc-
rlVîtat, {)iiis iniiiistr»! de l'inté-
rieur dti royaume d'Italie. L'em-
pereur JNapoléofi, qui lui accor-
dait une estime particulière, l'a-
vait nommé comte de l'empire,
graud'croix de la conroiine de ftr
et chevalier dt,- la léj!jion-«riion-
i»eiir. Le comte Vaocari perdit sou
pv~)rtelVuille par suite des «Wéne-
mens politiques deiSi/^. Il se
retira alors à Modène, où il vil
étranger aux alfaires publiques,
culliv^mt les lotiies, (pi'il a to\i-
jours aimées, et dans lesquelles
il a obtenu des succès. Pendant cl
depuis sa carrière politique, la
sagesse coiistaïUe de sa conduite ,
son patriotisme et ses qualités
personnelles lui ont concilié tou-
tes les opinions, <;t ont assuré le
repos à sa pliilosophique retraite.
VACIIKll DE TOLRNIÎ.MINE
(Charles, le baron), docteur en
droit, président honoraire du tri-
bunal de iMaiiriac. département
du Cantal, chevalier de la légion-
d'honneur, est né à Pleaux, même
département, le 4 novembre i y55,
d'un père qui était avant la révo-
lution, subdélégué de l'intendan-
ce d'Auvergne, et juge à Mau-
riac. M. Vacher de Tourneminc
fut chargé, en 1786, par le garde-
des-sceaux de Miromesnil, de re-
chercher les anciens monuniens
écrits de l'histoire de la province
d'Auvtrgn«, et il s'occupa avec
succès de ce travail. En 1788, il
fil paraître un mémoire histori-
que et politique sur les an-
( ien» étals- généraux dje Fran-
ce et sur lea étals particulier*
VAC
de lii province <l'Auvcrgne. Il
fut élu, en 1791, par ses conci-
toyens, administrateur de son dé-
partement, et devint peu de temps
après pré.-ident, et ensuite prncu-
leur- général - syndic , fonctions
(pi'il cessa de remplir en 179a.
En vendémiaire an 4. •' reçut une
nouvelle (narque de l'estime et
de l'alVeclion de ses concitoyens,
qui l'élurent député, et il siégea
au conseil des anciens jusqu'au m)
brumaire an 8; il y soumit un
grarjd nombre de rapports et d'o-
pinions sur divers sujel-i admi-
nistratifs, judiciaires, politiques et
militaiies. Nommé le 2 frimaire
an 8, délégué des consuls dans la
dix-septième division militaire,
aujourd'hui la première, il s'ac-
quitta de celle mission de la ma-
nière la plus honorable. A cette
époque, il fut élu, par le sénat-con-
servateur, membre du corps- lé-
gislatif, où il siégea jusqu'à la fin de
i8ot>. Il avait été présenté par ce
corps, comme candidat pour le se-
nnt. Rentré dans ses foyers, M. Va-
cher de Tournemine a été nom-
mé membre du conseil-général de
son département, et maire d'une
commune rurale. En 1809, il fut
n(uumé juge, et ensuite président
du tribunal de Mauriac. Le 23
août i8i5, il fut élu membre de
la chambre des députés. Il y pro-
nonça deux opinions, l'une sur
un projet de loi relatif à des me-
sures <le stireté générale, l'autre
contre une [)roposition tendant à
la réduction des cours et des tri-
bunaux. Il a continué à siéger
dans la chambre des députés jus-
qu'e:i 1819. Le roi a créé M. Va-
cher de Tourhemine, baron en
1817, et il a été nommé chevalier
VAD
«le la légion-d'hoiinenr en i8ai.
Admis depuis sur sa demande à la
retraite, il lui a été accordé une
pension et le titre de président ho-
noraire. Son fils aîné s'est distin-
gué dans la carrière nnlilaire, ft
sert avec l<; grade de lieutenant-
colonel dans l'artillerie à cheval.
VADIER (N. ), conseiller an
présidial de Painiers, fut député
du tiers-élat de cette province
aux états-généraux en i^t^Q. Il
«'éleva, le i4 juillet 1791, contre
l'inviolabilité du roi, qui venait
d'êJre ramené de Varennes, et de-
rnauija la déchéance de ce prince.
Néanmoins il protesta deux jours
après de sa haine pour le gouver-
nement républicain, et jur*i de dé-
fendre les décrets au péril de sa
vie. Le 20 août de la même année,
il attaqua le mode proposé pour
former la garde conslitulionuelle
du roi, et demanda que tous les
départemcns fussent admis à gar-
fler ce premier f<jnctionnaire pu-
blic. Nommé en septembre 1792,
par le département de r.4rriége,
>iépulé a la convention nationale,
il y prit place à l,i Montw^ne, et vo-
ta la mort de Louis XVI, »ans ap-
pel et sans sursis. Il fut un des
auteurs des journées des Ji mai,
1" et 1 juin 179J, contre le parti
de la Gironde. Il dirigea en juil-
let l'expédition <le Neuilly, dont
1 14 habilans périrent sur l'écha-
faud. Le 14 septembre, il entra
au comité de sftrelé-générale , et
fc montra jusqu'à la chute de Ko-
bespierr»; le plu» ardent ennemi
des vrais républicains; il tenait
ainsi la paroh; (pi'il avait donnée
aux jacol)ins. le jour où il fut por-
té 6 la présidence de la conven-
tion : • Que la massue lévolulion-
VAU 1 I :
naire écraserait tous les tyrans. »
.\près avoir successivement dé-
fendu et abandonné la faction de
la commune de Paris, il fit mettre
en liberté Mazuëi, commandant de
l'armée révolutionnaire, et deux
mois après, il le fit monter ù l'écha-
faud. Quelques jours après, à la
suite d'un i apport fait par Amar
cnntre Chabot, Bazire, Delaunay,
Julien et Fabre d'Eglantine, il
s'opposa à ce que ce d<Tnier fût
entendu ;\ la barre pour se discul-
per des faits qui lui étaient inipu-
tés; à la même époque, il essaya
de justifier le comité de sf»reté-gé-
nérale d'avoir l'ait arrêter le beau-
père de (^amille-Desmoulins, qui
périt quelques jours après avec
sou gendre et sa belle et géné-
reuse fille. C'est, assure-l-on, pen-
dant qu'ils étaient détenus avec
Danton, Philippeaux et plusieurs
autres membres de la convention,
que par un ralTluemcnt de férocité,
fut concerté entre Vadier, Voiil-
land,Amav,Saint-.Tustet Fouquier-
Tinville, l'atroce projet d< s préten-
dues conspirations des prisons, a-
fin qu'aucun de ceux qui y étaient
détenus n'en pfit sortir : des pri-
sonniers étaient accusés de résis-
tance à la loi. et sous ce prétexte
absurde, ils étaient mis hors des
débats elenvoyés i\ l'échafiud sans
délibération. Vadier fut W\n des
membres les plus actifs du comi-
té de salul-public ; nul autre ne
présenta plus de noms à la pros-
cription: l'e-x-charlreux Doin Cer-
le, constituant , Catherine Théos,
dite la mère de Dieu et plusieurs
autres, allaient être, sur sa deman-
de, trad\iits au tribunal révolu-
tir)nnairc. lorsque Kobesp.iern: lui-
ruênie les sauva, en faisant voir
ii8
VAD
le ridicule de l'accusation dirigée
contre eux. Ce fut un grief que
Vadier ne lui pardonna pas, et qui
l'unit aux thermidoriens, dont il
ne partageait pas les principes.
En effet, dans la fameuse journée
où fut renversée la tyrannie dé-
cem virale, Vadier n'accu?a pas Ro-
bespierre d'avoir versé le sang et
dévasté sa patrie, mais d'avoir
tourné eu ridicule les travaux du
comité de sûreté-générale, et d'a-
voir traité de pitoyable farce la
conspiration de Catherine Théos.
Ses inculpations contre Dumas,
président du tribunal révolution-
naire, ne portaient pas non plus
sur les nombreuses victimes qu'il
avait égorgées, mais sur ses efforts
à vouloir faire passer le vertueux
Collot-d'Herbois pour un cons-
pirateur. Vadier et ses collègues
avaient tous une querelle à ven-
ger: nu 9 thermidor, ils crurent
faire oublier, par leur acharne-
ment contre Robespierre, la part
qu'ils avaient prise aux criiries
que la France lui reprochait. Aus-
si, dénoncé un mois après, comme
chef des terroristes, par Lecoin-
tre de Versailles, osa-t-il, comme
avait fait Marat, paraître à la tri-
bune, un pistolet à la main, prêt à
se tuer si la convention ne procla-
mait pas son innocence et ne ren-
dait pas justice à ses soixante ans
de vertus. Dénoncé un mois après
pour les condamnations injustes
qu'il avait provoquées, il trouva
des appuis assez puissans pour
faire rejeter la dénonciation com-
me calomnieuse. Il fut moins
heureux le 5 frimaire an 5; la con-
vention, sur de nouvelles dénon-
ciations qui lui arrivaient de tou-
tes parts, chargea le comité de
VAL
sûreté-générale de faire un rap-
port sur lui et sur ses collègues
du comité de salut-public, Bil-
laud-Varennes, Collot-d'Herbois
et Barrère; tous quatre furent dé-
crétés d'accusation et admis à se
défendre devant l'assemblée; une
insurrection menaçante, suscitée
par leurs partisans, interrompit
la discussion, et n'empêcha pas
néanmoins qu'ils ne fussent con-
damnés à la déportation. Vadier
trouva le moyen de s'y soustrai-
re ; caché dans Paris, il ne fut ni
déporté, ni traduit devant le tri-
bunal criminel de la Charente-In-
férieure, conformément à un dé-
cret du 24 mai, qui rapporta celui
du 1" avril. Il reparut sur la scè-
ne politique en floréal an 4 (mai
1796); compromis dans la cons-
piration de Babeuf, il fut arrêté
et envoyé devant la haute-cour
nationale de Vendôme , où il fut
acquitté le 7 prairiai~an 5 ( mai
1797). Le décret lancé précé-
deunneut contre lui n'ayant pas
été purgé, le gouvernement con-
sulaire le mit en surveillance
au mois de décembre 1799, et
lui rendit bientôt ses droits de ci-
toyen. Vadier a continué d'habiter
la capitale jusqu'à la restauration
du gouvernement royal en 1814.
A cette époque, il fut forcé de
quitter la France par suite de la
loi du 12 janvier 1816. Il s'est
fixé dans le royaume des Pays-
Bas.
V A L A N T ( Jean - Honoré ) ,
grammairien , exerçait à l'époque
de la révolution, dont il adopta les
principes, le modeste état d'insti-
tuteur dans «ne maison particu-
lière. Il embrassa, dit-on, l'état
ecclésiastique , et fut ordonné
VAL
prêtre par l'abbé Fauchet, évo-
que constitutionnel du départe-
ment du Calvados. Proscrit en
1795 à raison de ses fonctions sa-
cerdotales, il déclara, pour re-
couvrer sa liberté, qu'il n'avait
jamais été prêtre : cette déclara-
tion lefitsortir delà Conciergerie.
Fondateur d'une espèce d'acadé-
mie grammaticale et littéraire, il
y renonça bientôt, n'ayant pas
réussi dans son projet, et rentra
dans l'instruction publique , en
formant un pensionnat. M. Va-
lant a publié un assez grand nom-
bre d'ouvrages; nous citerons les
principaux. Ce sont : \' Epilre à
Louis XVI , sur son acceptation
fies lois constitutionnelles, '79'»
in -S"; 2" delà Garantie sociale,
considérée dans son opposition avec
la peine de mort, imprimée par or-
dre de la commission des onze ,
1796, in-8"; 5° le Cosmète, ou
rAmi de l'instruction publique ,
1798, in-8°; 4° Code moral pour
servir à l'instruction de la Jeunesse
et des différentes classes de la so-
ciété, depuis le simple citoyen jus-
ffu'à l'homme d'état, 1799. in- 12:
5" Abrégé du Code moral, 1799,
in- 12; G° les mânes de Lamoignon
de Malesherbes , ancien ministre-
d'état, ode, suivie d'un extrait de
ses pensées mises en vers, i8o3, in-
8°; 7° Lettre à M. François de Neuf-
çhâteau sur cette question : les mots
Avant Que, peuvent- ils avoir la
négation Ne pour complément ?
i8io, in-S"; 8° Lettres académi-
ques, 181 1-1812, in-8°; ()' l'Edu-
lation du poète, poème imité de
Vida, i8i4»in-i2; 10' Essai de
traduction en vers du Télémaque.
Cette entreprise ne fut pas beu-
reuse. Jauiiiis du Saint -Ange,
VAL
"9
l'abbé Delille ni lU. Tissot n'au-
raient eu l'idée de mettre Fénélon
envers.
VALAZÉ ( Chaules -Edouard
Dufriche), député à la conven-
tion nationale, né à Alençon, dé-
partement de l'Orne, le 23 jan-
vier 1751, entra au service mili-
taire dans sa première jeunesse ,
et suivit ensuite la carrière du
barreau , dans laquelle il se dis-
tingua. Au commencement de la
révolution, il faisait valoir par
lui - même des propriétés assea
considérables dans le département
de l'Orne; et vers la fin de 1789 ,
ses concitoyens l'élurent maire
d'Essay, petite ville près d'Alen-
çon. il exerça cette magistrature,
alors populaire, à la satisfaction
générale; s'attachant à maintenir
l'ordre , à faire exécuter les dé-
crets de l'assemblée nationale, ù
éclairer les habifans de sa ville et
les paysans des paroisses voisines,
tant sur les devoirs imposés que
sur les droits acquis par la grande
révolution qui venait de s'opérer,
Valazé acquit lui-même, par cet
apostolat volontaire, la confiance
et l'alîeclion des habitans de toute
la contrée envircnnante. Il fut
nommé, A la presque unanimité
des électeurs du département do
l'Orne, député à la convention
nationale. Il y forma une liaison
étroite avec les membres les plus
distingués de cette députation de
la Gironde, dont il devait parta-
ger l'infortune, et qu'ont rendu
si diversement célèbres tant de
talens, de vertus, d'erreurs, une
intrépidité si héroïque et une fm
si funeste. Bientôt Valazé prit un
grand ascendant dans ce parti, et
Âlarat, dans sa feuillu de bouc et
lao
VAL
(le «anij:, J'tc l'Ami du Peuple,
ne le désignait que sons le noiri
de chef fies hommes d'étal , hoin-
mes qu'il fallait tous égorger, se-
lon le sanguinaire démagogue.
Valazé avait mérité sa haine, ainsi
qtie celle de tonte la faction de llo-
bespierre , en se prononçant avec
la'plus grande énergie, et dès les
premières séances de la conven-
tion, contre la' commune usurpa-
trice de Paris , qui s'était installée
elle-n)ême, après la journée du
loaoftt 1 792; il avait demandé à la
convention qu'on procédât immé-
diatementà l'inventaire et à l'exa-
men des papiers du comité de sur-
veillance de celte commune, dont
étaient émanés les ordres des épou-
vantables massacresde septembre ,
et qui refusait en outre de rendre
aucun compte des sommes qu'elle
avait extorquées et employées à
d'indignes usages. Il s'éleva avec
force, le 19 décembre 1792, pen-
dant le procès du roi, contre un
arrêté de cette même commune,
qui ordonnait que les conseils du
monarque fussent fouillés avant
de communiquer avec lui. Vaia-
zé, ainsi que les prin(;ipaux mem-
bres du parti de la Gironde, crut
pfuivoirsauverla vie deLouis X VI,
en se prononçant pour l'appel au
peuple, et il appuya les éloquens
discours de Vergniaud, Guadet et
autres membres de la conven-
tion nationale, qui exigeaient cet
appel avant lexécution de la sen-
tence. Il eût été bien autrement
courageux de ne céder à au-
cune influence, à aucune ter-
reur, et de faire plutôt le sacrifice
de sa propre vie que de voler
avec la majorité sur la première
question, celle de la culpabilité.
VAL
Valazé demanda encore, mais vai-
nement, dans les premiers jours
de janvier 1795 , la mise eu
accusati(Uï de Pache , totir-à-
tour ministre de la guerre ou
maire de Paris, et toujours un
des plus actifs agens de l'anarchie
et de la terreur. Deux jours après,
il dénonça aussi vainement le dé-
magogue iMaral, qui avait provo-
qué et signé une adresse des ja-
cobins contre une partie des mem-
bres de la convention même. Dans
la séance du i5 avril 1793, de
prétendus commissaires des 4^
sections de Paris, dont quelques
audacieux intrigans s'étaient em-
parés , vinrent arrogamment de-
mander l'expulsion de 22 député»
delà (convention. La hideuse com-
mune de Paris suivi! de près celte
députation , ei vint émellre le
même vœu. Valazé était un des
premiers inscrits sur la liste de
proscription ; il n'en déploya que
plus d'énergie à combattre les fac-
tieux de toutes couleurs. Marat le
dénonça à son tourquelques jours
après, l'accusant d'être un des
chefs du prétendu complot inven-
té par ce misérable, et tendant à
transférer la convention à portée
des déparlen)ens de l'Ouest, où
commençaient à se manifester les
premiers syptômes de l'insurrec-
tion vendéemie. Valazé démontra
facilement l'absurdité de celte im-
putation, et couvrit d'ignominie
son accusateur. Il continua de-
j)uis à répondre avec la même
énergie aux accusations toujours
vagues, fausses et perfides, qui se
multiplièrent contre lui et ses
amis au sein de la convention, et
l'on vit même souvent Valazé, le
pistolet ou l'épée à la main , dé-
VAL VAL i»i
fier le? factieux de la Monlagne, avait fait tirer le canon d'alarme
et les appeler à vid' r leurs diflé- deux heures auparavant, ffttaine-
rens avec lui en combats singu- né à la barre de la convention ,
lier», qu'ils n'acceptèrent jamais, que le commandant de la force
Marat préféra le dénoncer encore armée, Henriot, fût décrété d'ac-
comme l'un des auteurs des assas- cusalion , et protesta en outre
sinats dirigés dans la nuit du 9 au contre toute délibération dans l'é-
10 mars contre Valazé lui-même tat de trouble et d'asservissement
et ses collègues, députés de la où se trouvait l'assemblée. Mais
Gironde, assassinats auxquels ils sa voix généreuse, ainsi que cel-
n'échappèrent que parce qu'ils les de ses amis, fut bientôt élouf-
furent ave-tis à temps du com- fée; et dès le 2 juin, sur la de-
plot. La dérisoire atrocité de ce re- mande d'une horde de pétition-
proche excita une indignation gé- naires armés , convertie en uio-
nérale , et Valazé écra>a encore lion par Marat, l'iurestation de
de son éloquence ce vil adver- Valazé fut décrétée , avec celle de
haire. Mais les cons{)iraleurs de la Vergniaud, Gensonné , Lanjiii-
faction de Robespierre n'en pour- nais, le Hardi, l'étiou, Boilleau,
suivirent pas moins leurs atroces Biroteau , (Jomairo , Bertrand,
projets. Le 10 mai, la convention Gardien, Kervelegan, Mollevaut,
quitta la saile du Manège, 011 elle Borgoeing, Barbaroux , Lidon ,
avait siégé jusque-là, et vint le- Buzot, Liisource, Uabaut, Bris-
nir sa première séance au châleau S(tt, Salles, Ch;imbon, Gorsas,
desTuileries.Decelteépoqueoom- Grangeneuve, Lesage , Vigée ,
mença le mouvement qui se ter- Louvet, Henri Larivière et Sil-
niina par les attentais du 5i n)ai, lery {^voyez ces divers noms ).
1" et 2 juin. Intimidée par les Dans le courant du mTMue mois
factieux, la convention nationale, de juin , le bruit se répandit à
bientôt esclave et avilie, cernée, Paris qu'une amnistie devait être
le 5i mai , par les troupes d'Hen- jiroposée en faveur de tous les
riot ( voy. ce nom ) , par une niul- députés mis en arreslalion. Va-
titude immense et slupide, qui lazé, dès qu'il eut connaissance
ne savait pas elle-même dans de ce projet, fit la déclaration
quel but on l'avait ameutée, con- formelle <jue, pour sa part , il re-
tentit à se mutiler de ses propres pousserait toute amnistie comme
mains. On arracha à la tribune un outrage. Innocent, il n'en
ses plus élocpiens oralcnrs , qui avait pas besoin , et conj)able , H
ne lardèrent pas à être traînés A ne réclamait que la plus sévère
l'échafaud par ks implacables en- justice. On lui oflVit les moyen*
nemis qu'ils avaient Irop long- de se dérober par la fuite au sort
temps méprisés. Le 01 mai, à 8 qui le menaçait, mais il s'y re-
heures du inatin , après ta nuit la fusa avec une inébranlable fer-
plus orageuse , Valazé parut ])our mêlé. Décrété d'accusation, sur
la dernière fois à cette tribune, le rapport du dép«ilé Anwir ( voy.
et déjà sous le poignard des as- vf. nom ) , dans la séance du .^
sassins, il demanda que celui qin* octobre »79-)j et traduit au tri-
i^a VAL
bunal i(Wolutionnaire, son carac-
tère inflexible ne se démentil pas
un seul instant devant ses juges
assas^'ns. On lui reprocha d'avoir
tenu chez lui de fréquens conci-
liabules de fédéralistes'^ il répon-
dit qu'il tenait à honneur d'avoir
souvent reçu chez lui ses hono-
rable? collègues , dont quelques-
uns étaient maintenant ses coac-
cusés ; inais il déclara que dans
ces généreuses réunions, jamais
la question du prétendu fédéra-
lisme n'avait été débattue. A l'ins-
tant où Herinan, le président du
tribimal de sang, prononça la sen-
tence de mort contre les accusés,
Valazé se plongea un stylet dans
le cœur. Son plus proche voisin,
condamné comme lui, le voyant
chanceler, se hâle de le soutenir,
en lui disant : Tu te troubles, Va-
lazé.— Non, je meurs, répondit-
il. A ces mots, un affreux tumulte
éclata dans la salle, et tous les
condamnés à la fois la firent re-
tentir du cri : Kive la république!
L'accusateur - public , Fouquier-
Tinville , d'exécrable mémoire,
requit de suite, et le docile tri-
bunal ordonna : que le cadavre
de Valazé serait transporté au pied
de l'échafaud, sur une charrette
qui suivrait celles où ses malheu-
reux collègues devaient être traî-
nés au supplice. Après la chute
de Robespierre , la convention
fonda, par un décret du 1 1 ven-
démiaire an 4 (3 octobre 1795),
une fête annuelle en mémoire des
illu.slres victimes immolées par la
tyrannie décemvirale, et une pen-
sion fut accordée à la veuve et aux
enfans de Valazé. On lui doit plu-
sieurs ouvrages. En 17841 il avait
publié celui intitulé : Lois péna-
VAL
les, qui fut généralement approu-
vé par les publicistes et juriscon-
sultes de cette époque. On a en-
core de lui le Rêve , conte philoso-
ptiique, inséré dans un volume dw
la Bibliothèque des romans , et
une Défense des accusés du 5i mai.
Valazé composa ce dernier écrit
dans sa prison, où il le cacha, et
où il fut découvert par son col-
lègue Pénières, qui le publia en
1795; on y trouve des faits inté-
ressans, une force de logique et
une chaleur de style remarqua-
bles. Valazé a laissé en manus-
crits , un Plan d'administration
pour les maisons de correction;
une Suite aux lois pénales ; un
Mémoire sur la cause de l'élévation
des Vf,peurs dans l'atmosphère ;
une Explication des tuyaux capil-
laires , et le Moyen de suppléer
par de bonnes lois aux relis^ions.
VALCARCEL (don Joseph-An-
tonio), agronome espagnol, na-
quit dans le royaume de Valence
en i73'2. L'état déplorable où il
trouva l'agriculture lui inspira
l'idée d'appeler l'attention du gou-
vernement siir cette branche im-
portante de l'administration pu-
blique; il composa un Traité gé-
néral d'agriculture , pour la com-
position duquel il s'environna de
toutes les lumières soit nationales,
soit étrangères, qu'il lui fut possi-
ble de recueillir, et vit ses soins
récompensés par l'accueil distin-
gué que les propriétaires et les
savans même firent à son ouvra-
ge. Il y avait deux siècles qu'Al-
fonse de Herrera avait écrit sur
le même objet, et depuis cette
époque l'Espagne n'avait pas fait
un pas dans cette science. Valca-
rel eut l'honneur de combler ce
VAL
vide immeuse, et de meltre son
paysan niveau des contrées agri-
coles de l'Europe. Son traitégéné-
ral fut suivi d'Instructions sur la
culture du riz, dédiées au comte
de Aranda, Valence, 1768, et en-
fin lï Instructions sur la culture du
lin. Valence, 1781. Valcarcel
mourut à Valence en 1800.
VALCARCEL ( Pio- Antonio),
comte de Lunnares, savant anti-
quaire , parent du précédent ,
iifiquit dans le royaume de Va-
lence vers l'année 1740. Un é-
c;irt de jeunesse ayant forcé son
père i le faireenfermer au château
d'Alicante, il eut le bonheur d'y
rencontrer le marquis de Val de
Flores Vélasquez, alors prison-
nier d'état, et lui fut redevable
des talcns et des connaissances
auxquels il dut sa célébrité. De-
venu libre , sa passion pour l'étu-
de , loin de se ralentir, sembla
s'accroître encore; livré tout en-
tier à son goût pour l'étude , et
toujours docile aux conseils de
Vélasquez, son maître et son ami,
il forma, sous sa direction, un ca-
binet de i)l(i« de 1200 médailles,
un autre cabinet d'histoire natu-
relle, et enfin une collection pré-
cieuse d'instrumens de mathéma-
tiques. Ce fut au Viilieu de ces
savantes occupations qu'il passa
sa vie enliérc. Il mourut , en
1800, dans la (i8* année de son
ili^e. Il avait composé plusieurs
ouvrages, dont les plus importuns
ont paru sous ces titres : i" Re-
cueil de médailles des peuples an-
ciens d<: l'Espagne, avec leur ex-
plication ; 2° Dissertation sur les
peuples appelés Barbos Sw^unti-
nos, avec les inscriptions de Sa-
gunte, ville ancienne du royaume
VAL i'^5
de Valence; 5° Description de Lu-
centum, aujourd'hui Alicante, avec
l'explication des inscriptions, sta-
tues, médailles, etc., trouvées
dans ses ruines; 4° Inscription de
Carlltago nova, ville ancienne,
appelée aujourd'hui Carthagène ;
b" Explication des inscriptions et
statues d'Almazarron, ville du
royaume de 31urcie ; 6° enfin Ob-
servations sur la situation de la
colonie Illici, dans lesquelles il
prouva qu'elle n'était pas située
sur l'emplacement où existent au-
jourd'hui les villes de Elche et de
Alcndia.
VALCKENAER ( Gaspard-
Loms), célèbre helléniste hollan-
dais, né en 1756, fit d'excellentes
études; devint d'abord professeur
à l'université de Franeker en Fri-
se, succéda ensuite dans celle de
Leyde à Hermsethuis, dont il
avait été le disciple , et acquit
bientôt la réputation de l'un des
plus célèbres hellénistes de son
temps. Les ouvrages qu'il a pu-
bliés sullisent pour illustrer sa
mémoire, mais ils ne forment que
la plus faible partie de ce qu'il a
écrit. Personne n'a mieux connu,
sous tous ses rapports , la littéra-
ture ancienne ; il avait tout lu , et
faisait des extraits de tout c« qu'il
lisait; ses notes surtout annon-
cent une grande érudition et une
grande sagacité. Les principaux
ouvrages de ce savant sont en
latin. L'un d'eux contient des ob-
servations sur deux discours de
saint ChrysOstôme, et des notes
sur quelques passages du Nouveau
Testament. H mourut à Leyde eo
j8o5.
VALCKEN AEa ( Juan ) , fiU du
précédent, après avoir fuit d'ex-
ia4 VAL
cellentes rludes hous la diroclion
de sfiii père , devint professeur
de jurispriulence à l'académie de
Franekt-r, et embrassa avec cha-
leur, dans les troubles de 1786 et
1787, le parti des patriotes con-
tre la maison d'Orangée. Ses opi-
nions politiques contribuèrent au-
tant que son savoir, comme juris-
consulte, à le faire appeler, en
1787, à la chaire du droit, va-
cante à Utrecht par la retraite du
professeur Tydeman , attaché an
parti du sladhoudérat; mais la r<'-
volntion du mois de septembre de
la même année, qiji rétablit l'au-
torité du prince d'Orange, forç.i
M. Valckeuaer de (|uitler son pays
avec un grand nombre des phis
chauds partisans des opinions nou-
velles. Il se réfugia en France; et
le 6 février 1793, il présenta à la
convention nationale une pétition
tendant à obtenir l'appui des ar-
mées françaises en faveur des pa-
triotes hollandais. Ce vœu ne fut
rempli qu'en 179.5. Four rendre
cette cause populaire, il publia
une feuille périodique, intitulée :
l' Avocat de la liberté batnve, re-
marquable surtout par le style.
Nommé professeur du droit pu-
blic et privé, en remplacement
de M. Pestel, il signala son en-
trée en fonctions par un discours
de officio civis balaci in repubiuâ
servalâ. Quatre jours après, il fut
élu fiscal dans la cause de M. Vali-
der Spiegel , prisonnier d'état. Il
prouva, dans le rapport qu'il fit à
ce sujet, que, faute de reuseigne-
mens suflisans, l'affaire n'était pas
encore en état d'être portée de-
vant les tribunaux, et conclut, en
attendant de plus amples infoi-
inalion?, h oc nueM.VanderSpie-
VAL
gel fût détenu adminlstrative-
n»ent; depuis ce moment, partagé
entre les affaires publiques et se?»
devoirs de professeur, il ne put
doimer A ceux ci toute l'assiduité
qu'ils exigeaient. Nommé , en
179Î), à l'ambassade d'Espagne,
eu conservant néanmoins sa place
au sénat académique , il en revint
en 1799, et y retouina sur-le-
champ en qualité d'envoyé ex-
traordinaire, fonctions qu'il rem-
plit jusqu'en 1801. De retour dani
sa patrie à cette époque, il y vé-
cut en simple particulier, et re-
partit bientôt pour Berlin, chargé
de la mission de stipuler avec le
gouvernement prussien des arran-
gcmens relatifs au rembourse-
ment de l'emprunt fait en Hol-
lande en faveur de l'Anlriche, et
hypothéqué sur la Silésie, qui ve-
nait d'être cédée à la Prusse. Sa
négociation n'eut pas le succès
que son habileté pouvait faire es-
pérer; il n'en fut pas moins re-
gardé cotiuîie un négociateur a-
(Iroit et instruit, réputation qu'il
s'était acquise en France, en Es-
pagne, dans lt!S Pays-Bas, et mê-
me en Prusse. Lorsqu'en iSio,
l'empereur Napoléon eut décidé
l'incorporation du royaume de
Hollande à l'empire français, et
que le roi son frère {toy. Bona-
pAKTE Lovis) , eut épuisé tous les
moyens de conserver à son pays
son indépendance, iM. Valckeuaer
fut envoyé à Paris pour tenter un
dernier effort ; mais il trouva Na-
poléon inflexible, et la Hollande
fut incorporée. Le négociateur,
rentré dans ses foyer?, y resta sans
fonctions, habitant tantôt Ams-
terdam, tantôt la campagne. M.
Vaickenaer est chevalier de l'or-
VAl
<lre de l'aigle rouge de Pru^«e» et
membre de l'iiistitiit des Pays-Bas.
VALDES ( DON (Iayetano), a-
miral espagnol , député aux cer-
tes de 1822, etc., esl né vers
1770, dans la province des Astu-
ries, où sa famille est fort consi-
dérée. Porté par goût au service
de mer, il y fut admis fort jeune,
et s'y tit remarquer par son apti-
tude, ses lalens et son courage.
Dans le voyage autour du monde
du marquis de Mala-Espina , il
fut chargé de reconnaître et de
décrire le détroit de Fuca, sur
la côte de Nootka. Valdés , et son
ami Galareo, montés sur les goé-
lettes la Subtile v[ la Mexicaine ,
visilèrentetexaminèrent toute cet-
te cote avec le plus grand soin, et
puhlièrcnt, i leur retour, une re-
lation intéressante de ce voyage.
Valdés prit une part active à tous
les combats que livra ou que sou-
tint In marine espagnole , dé-
ployant dans toutes les occasions
autant de talent que d'intrépidité.
J)e nombreuses et graves blessu-
res JMstiliéient la c<tu(iance et les
récompenses dont il fut l'objet. Il
se fit surtout remarquer nu com-
bat de Saint-Vincent, où il com-
mandant un vaisseau de ligne. Il
reçut dn pren)ier consul Bonapar-
te , à l'époque où la flotte espa-
gnole seréuuitàl escadre françai-
se d.ms le ()ort de Brest, un sa-
bre d'honneur, comme l'im des
marins les plus distingués de
l'Kspagne. A Trafalgar , il com-
mandait, sous les ordre> »le l'ami-
ral Dumanoir, le vai«seau le Nep-
tune. «Voyant, disent les auteurs
d'une biographie étrangère, cet
ofTicier opérer une retraite préci-
pitée, qu'il jugea peu honorable,
VAL
ia5
Valdés rallia im vaisseau espagnol,
unou 2 navires français, se jetaau
plus fort delà mêlée, sauva deux
bâtimeus qui étaient sur le point
d'être pris par rennemi, et tomba
couvert de blessures sur l'entre-
pont de sou vaisseau, qui, après
la lutte la plus acharnée, entra
dans le port de C.idix avec les na-
vires qui l'avaient si bien secon-
de^, et ceux qui lui devaient leur
délivrance. » Le gouvernement
espagnol lui coufi;i, en 1808, le
conimandement de l'escadre qui
devait se rendre de Carlhagène à
Toulon. L'envahissement de l'Es-
pagne par l'eirjpereur Napoléon
ranima dans le cœur de cet officier
l'amiKir de la patrie. « Il sentit que
s'il se rendait à Toulon , cette es-
cadre était perdue poin l'Espagne,
et substituant à l'obéissance trop
souvent mécani(|ued'un militaire
le patriotisme réfléchi d'un ci-
toyen, il manœuvra tellement au
sortir de la rade de Carthagéne,
qu'au lieu de cingler vers Toulon,
il se dirigea sur Tile de Minorque.
Le grand-duc de Berg, qui com-
maiulait alors les forces française»
à Madrid, et dirigeait provisoire-
ment les affaires de la péninsule,
irrité de la courageuse désobéis-
sance de Valdés , lui ôta le com-
mandement et le rappela. » L'in-
surrection était générale à son
débarquement : il y prit part aus-
sitôt, et entra dans l'armée de
terre. Il concourut , avec ses
concitoyens , à la première dé-
fense de Sarragosse, d'où il passa,
les l'rançais s'étant retirés, dan»
les Asturies ; il y reçut le com-
mandement des troupes insurgée»
de cette province , et fut griève-
ment blesîé d'un coup de feu dan»
laG
VAL
la poitrine à l'affaire d'Espinosa.
Il se rendit, par ordre de la junte
centrale, à Cadix, où il prit le
coinmaiidement de l'escadre lé-
gère qui dél'endiiit le port, et re-
<;ut presque aussitôt le gouverne-
ment de la place, poste alors de la
plus haute importance. « Le zèle,
la vigilance et l'activité qu'il mit
à s'acquitter de ses nouvelles fonc-
tions, lui assurèrent la reconnais-
sance de ses concitoyens, ainsi
que l'estime des étrangers et des
ennemis eux-mêmes. Il se mon-
tra très-attaché aux principes li-
béraux, et en qualité de prési-
dent de VJjanlamienlo de Cadix ,
il fit une adi-esse de remeroîment
aux corlès pour la constitution
qu'ilsavaient donnée à l'Espagne;
et lorsque cette assemblée eut dé-
crété l'abolition de l'inquisition ,
il prononça un discours plein de
sagesse et d'énergie pour rendre
grâce aux législateurs de celte
dispositron salutaire. » Ferdinand
VII rétabli sur le trône en iSi/j»
Valdès, qui était devenu lieute-
nant-général , lut en butte aux
persécutions de ces hommes qui
jouissaient des avantages de la
restauration, sans avoir participé
aux dangers qu'avaient courus les
Espagnols qui l'avaient préparée.
Un ordre royal le confina au châ-
teau d'Alicante, où il était encore
détenu lors delà révolution cons-
titutionnelle du 7 mars 1820. Ren-
du par suite à la liberté, il l'ut
réintégré dans la place de gouver-
neur de Cadix. Nommé ministre
de la guerrre, il occupa ce poste
peu de temps, et fut élu par ses
concitoyens membre des certes
en 182a. Valdès a joué depuis un
iôle important, lléfugié d'abord
VAL
ù Gibraltar, il fut obligé ensuite
de se sauver dans les états de Ma-
roc. Fiéclamé par le consul espa-
gnol , qui offrit même une somme
considérable pour qu'il lui fût li-
vre, il n'a dû son salut qu'à la
généreuse intervention du consul
auiéricain à Maroc. Après avoir
couru les plus grands dangers,
il a débarqué en Angleterre, où il
est encore. «M. de Valdès, dit l'au-
teur de la Galerie espagnole, avec
plus de vivacité d'esprit que de
profondeur et de savoir, a des re-
parties fines et piquantes, un style
vigoureux et original, qui sou-
vent interrompt la gravité de l'as-
semblée aux dépens de ses ad-
versaires, et contraste avec son
air insouciant et de bonhommie.
Il n'est pas jusqu'à son balance-
ment de corps, habitude prise
sur les bâtimens, qui ne donne à
ce député une singularité de pan-
tomime qu'augmente encore le
pittoresque de ses expressions. »
VALDÈS ( RoDRiGiEz) , com-
mandant de Cadix lors de la ré-
volution de 1820, n'est point delà
famille du précédent, avec lequel
d'ailleurs il n'a rien de commun
sous le rapport des vertus et du
mérite. Rodriguez de Valdès s'op-
posa de tout son pouvoir aux pro-
grès de l'insurrection qui avait é-
claté à l'île de Léon, le 1" janvier
1820; les mesures qu'il prit dans
l'intérieur et à l'extérieur pour
mettre la place à l'abri du mouve-
ment constitutionnel, inspira l'é-
pouvante , et fit comprimer le feu
patriotique qui allait éclater parmi
les habitans. Les progrès de ceux
que l'Espagne regardait comme
ses libérateurs, furent tels à la fin,
que le commandant « parut céder
VAL
aux désirs impatiens des habitans
de Cadix, en pt-rmettant de pro-
clamer dans rcntelnle de cette
ville la constitution des cortès :
il iavita même le général Quiroga
h assistera cette cérémonie; mais
le 10 mars ù onze heures du ma-
tin, lorsque le peuple rassemblé
sur la place publique se livrait à
l'allégresse , on vit paraître tout-
à-coup le bataillon des guides du
gouverneur, et un autre corps dit
de Lealtad ( de la loyauté ), dont
les élémens, à ce qu'on prétend,
avaient été fournis par les bagnes
les priions, et qui, par des dé-
charges multipliées, portèrent la
terreur et la mort au milieu de
cette foule désarmée. Celte bou-
cherie dura jusqu'à 5 trois heures,
avec des circonstances révollaii-
l«'S. » Le roi accepta, peu de jours
après, la constitution , et rempla-
ça Rodriguez Valdés dans sou
commandement par le général
Odonnojhu. Il donna à ce général
l'ordre de dissoudre, après les a-
voir désarmés, les deux corps qui
avaient si lâchement répandu le
sang de leurs concitoyens, et de
traduire les auteurs de ces assassi-
nats devant les tribunaux. Ces
ordres furent ponctuellement exé-
lés. Les deux corps furent con-
duits hors de la ville et désar-
més, et Rodriguez Valdcs, ainsi
(jue ses complices, enfermés dans
les prisons de la forteresse. Le
triomphe du pouvoir absolu, en
Espagne , a bientôt rendu aux
hommes tels que Rodriguez Val-
dés cette funeste influence qui
prolonge les désordres et l'anar-
chie.
VA L ÉE ( SiLTAiK - Chables,
comte), lieutenant -général d'ar-
VAL
13:
tillerie , inspecteur - général de
cette arme, grand'croix de la lé-
gion - d'honneur , chevalier de
Saint-Louis, est né le i8 décem-
bre 1773. II prit du service au
commencement de la révolution,
et parvint rapidement au grade
de colonel du i*' régiment d'ar-
tillerie à pied; c'est en cette aua-
lité qu'il fit les campagnes de 1 006
et 1807. La croix d'officier de la
légion-d'honneur fut la récom-
pense des services qu'il rendit.
Il obtint de l'emploi en 1809, et
fut rappelé pour passer en Espa-
gne. Les sièges de Lérida, de Mé-
quinenza, de Tarragone , de Tor-
lone et de Valence, en 1810, lui
valurent, le 6 août 181 i, le grade
de général de division. Il continua
de servir en Espagne jusqu'au
i5 avril i8i3, jour où il se dis-
tingua particulièrement contre les
Anglais. Les événemens politi-
ques de 1814 Je ramenèrent dans
sa patrie, où Louis XVIII lui don-
na la croix de Saint-Louis, le 27
juin de celte année, et le nomma,
le I" juillet 1814» inspecteur-gé-
néral d'artillerie dans les direc-
tions de Strasbourg et de NeUf-
brissac. Il devint successivement
commandeur et grand - officier
de la légion-d'honneur. Au mois
de juin i8i5, il cbmmanda l'ar-
tillerie du 5* corps d'armée. A-
près la seconde restauration, le
Vi)\ le nomma inspecteur-géné-
ral et rapporteur du comité cen-
tral d'artillerie. Le général Valée
présidait, au mois de mai 1816,
le conseil de guerre qui con-
damna à mort par contumace le
général Lefcbvre - Desnouotfes
{voy. ce nom). Il est encore
aujourd'hui ( i8i5 ) employé
12«
VxVL
daii3 le corpn royal du l'artillerie.
VALEiNGE'( Cynus- Mabie-
AlEXANDRE de ïlMBRUNE-TlMBBONE,
COMTE UE ) , pair de France , lieu-
tenant-général, commandant de
la légion - d'honneur, naquit à
Agen,le 20 août 1 767, d'une des fa-
milles les plus anciennes et les plus
considérées du midi de la France.
Destiné au service militaire dés sa
première jeunesse, il entra d'a-
bord dans le corps royal de Tar-
lilleric en 1774? passa capitaine
au régiment de Koyal-Cavalerie
en 1778, fut attaché pendant quel-
que temps en qualité d'aide-de-
camp nu maréchal de Vaux, et
nommé colonel en second du ré-
giment de Bretagne en 1784- M.
de Valence, doué de tous les avan-
tages extérieurs, d'tm esprit dis-
tingué et cultivé avec soin , obtint
de grands succès à la cour, au
commencement du règne de Louis
XV^I. Il eut bientôt la charge de
premier écuyer du duc d'Orléans,
grand-père du duc actuel, et fut
nommé colonel -commandant du
régiment de Chartres- Dragons.
JiOrs de la convocation des états-
généraux, en 178g, il fut élu dé-
puté suppléant de l'ordre de la
noblesse, mais ne prit point séance
à l'assemblée constituante. Il ne
s'en prononça pas moins pour
une sage réforme des abus de
l'ancien régime, et pour l'amé-
lioration de l'ordre social par des
institutions constitulionricllesque
l'immense majorité des Français
demandait instamment. Il ne ces-
sa depuis de servir avec chaleur
la cause de la liberté , par ses dis-
cours et l'influence qu'il exerçait
déjà , jusqu'au moment où il put
verser son sang pour elle. En mai
VAL
1 7î)a , il fut employé en qualité de
maréchal-de-canip à l'armée de
Luckner, s'empara de Courtrai,
})assa ensuite sous les ordres de
Dumouriez, fut promu au gra-
de de général de division le 20
août de la même année, com-
manda les grenadiers et les cara-
biniers à l'affaire de Valmy, en
Champagne, où il força, par l'ha-
bileté de ses manœuvres et la
courageuse contenance de sa di-
vision, le duc de Brunswick, qui
avait déjà tourné une aile de l'ar-
mée française, à s'arrêter et à son-
ger plutôt à se défendre qu'à con-
tinuer ses attaques. Au mois de
septembre suivant, le général
Valence remplaça Dillon à l'armée
des Ardennes. Il eut ordre de sui-
vre les Prussiens dans leur re-
traite, et signa la capitulation par
laquelle, pour n'être plus atta-
qués pendant leur marche rétro-
grade , ils s'engagèrent à rendre
la place de Longwy, et à repasser
au plus tôt les frontières de la
France. Après l'évacuation forcée
du territoire par les Prussiens, le
général Valence combattit avec la
même valeur l'armée autrichien-
ne; contribua aux glorieux succès
de la journée de Jemmapes, s'em-
para successivement des places
de Charleroi , de Namur, et du
château de celte dernière ville.
IMais cette campagne, si heureu-
sement terminée, fut suivie, en
1795, par de funestes revers.
Dumouriez avait dès le commen-
cement de celte année excité
la méfiance et la haine des jaco-
bins et du parti le plus exagéré de
la convention; le nouveau minis-
tre de la guerre l'ache, leur ser-
vile instrument et l'ennemi per-
VAL
sonncl du vainqueur de Jemma-
|>eii, liii.'Sait l'année viclorifusc
manquer de tout , et conlrariuit
tous te? jilauâ du générai en chef.
Des roniniissaires civils y portè-
rent le triiuble et la désorganisa-
tion. L'Angleterre venait de pren-
dre j>art à la guerre, et entraîna
à ga suite la république batave.
Le 1" mars, le prince dcCobourg,
à la (ète d'une urinée ibruiidablc,
se mit en mouvement, l'orça le
général Miranda à lever à la liAle
le siège de Maëstricht, el les Fran-
çais à évacuer Liège. Ce ne l'ut que
dans les plaines de Tirlemont que
rariuée, déjà considérablement
diminuée , put se lallier. On se
lésulut à livrer encore une grande
bai.iille , et le champ en fut choisi
à Ncrwinde, où, cent ans aupa-
ravant, le maréchal de Luxem-
bourg avait battu l'armée de Guil-
laume II L L«; combat cmumença
avec le jour le i8 mars. L'aile
droite était coiiimandée par le gé-
néral Valtnce, le ceulre par le
duc de Chartres (aujourd'hui duc
d'Orléans), et l'aile gauche par
le général Mirauda. Celle der-
nière fut enl'oncéc et mise en dé-
route. Le général Valence enleva
le* villages d'Oberwiudeel de Ner-
niiide , que les Autrichiens, eu
forces rupérieures, parvinrent A re-
piondre. Le duc de Chartres , a-
près des prodiges de valeur, les
eu chassa; mais leur aile droite,
«jui avait battu Miranda, revint au
secours des troupes de leur cen-
tre. Des bataillons de volontaires
encore peu aguerris, se croyant
tournés , se débandèrent en jetant
le cri funeste de sauve qui peut.
Ou évacua Nerwinde; le feu de
quci(]ues baiaiDons de liijne, bien
VAL
ti9
dirigé parle duc de Charlrei<,|>er-
uiit à l'inlanlerie de se rnllier. La
cavalerie se couvrit de gloire. Le
gént.-ral Valence, avec l'intrépi-
dité dont il avait donné déjà tant
de preuves, lit plusieurs charges
brillantes, et recul trois coups de
sabre sur la tête, dont il a con-
servé jusqu'à sa mort les glorieu-
ses cicatrices. On parvint enGn à
repousser les Autrichiens, et l'or-
mée française resta maîtresse du
champ de bataille; mais elle avait
payé cher cet avantage, et Du-
mouriez, dont l'échec de son «ile
gauche avait subitement dégarni
le flanc, voyant qu'il était hors
d'état de conliniier l'ofleusive ,
ordonna le leudeniain la re-
traite , qui devint une suite de
combats continuels pend;Mif qua-
tre jours el quatre nuits. De uou-
veaux commissitires f'e la conven-
tion arrivér^:nl bietitôt A l'armée.
Les dénonciations contie !e géné-
ral en chef et ses .unis ïe laulli-
plièrenf. Dumonriez, que la con-
vention nienaçail encore plus que
l'ennemi, avait depuis long-temps
conçu le dessein de la renverser,
de marcher sur Paris, et d'y opé-
rer une révolution nouvelle. Il
entra, dès le aa mars, en uégo-
ciation avec le prince de Cobourg,
dont il fallut d'abord s'assurer.
On sait quelle fut l'issue de l'al-
liance de Uutnoiiriez avec l'étran-
ger. Les généraux français , qui
passaient pour avoir eu des liai-
sons intimes aveclem- chef, quoi-
qu'ils n'eussent en rien participé'
à son dernier projet, furent cn-
vidoppés dans sa disgrâce et pros-
crits comme lui. Le général Va-
lence se trouva contraint de fuir
une pairie qu'il avait si bien set-
•J
i3o
TAl
vie. Il ne s'y déterniinu cepen-
dant qiK! sur l'annonce positive
du mandat d'arrêt lancé centre
lui. A la nouvelle de son départ,
lu faction .«angninaire, qui dispo-
sait du pouvoir, et qui avait d'jj;\
Ijaulemtnt demandé sa tête , le
mit hors la loi, sans qu'il fût per-
mis à ses amis, à la veille d'être
proscrits eux - mêmes , de rien
tenter [lour sa défense. Toujours
fidèle à sa patrie, au milieu des
persécutions et de l'exil , il ne
voulut pas même séjourner mo-
mentanément dans les pays en
guerre avec la France , et chercha
un asile dans les étais du joi de
Daneniarck. Retiré à la campa-
gne dans les environs d'Altona,
repoussant tout projet de ven-
geance contre ses concitoyens, il
put jouir de loin du spectacle des
combats acharnés de se:* ennemis,
jacobins et conventionnels, qui
s'entre-déchiraienl de leurs pro-
pres mains. Mais le sort cruel et
de plus en plus menaçant de sa
famille, restée en France, lui cau-
sa long-temps de vives alarm.es.
M. de Valence avait épousé la fille
du comte de Genlis {voy. l'article
Sillery), jeune personne qui réu-
nissait aux charmes de la figure,
le plus noble caractère et tous les
avantages d'un esprit distingué.
Son père fut immolé sur l'écha-
faud par la faction de Robespierre;
sa tante, M"" de Montesson, veuve
du duc d'Orléans était en prison ;
sa mère, iM""' de Genlis, vivait dans
l'exil; elle-même, séparée de ses
enfans, fut incarcérée pendant
tout le régne de la terreur, et sans
cesse dénoncée dans sa prison mê-
me, n'échappa que par une espèce
de miracle au sort de son maiheu-
VAL
reux pérr. La jeunesse, la boriô
et la courageuse résignation de M**
de.Valencc, intéressèrent si vive-
ment un simple artisan charron ,
membre d'un comité révolution-
naire, et inspecteur de la prison
où elle était enfermée, qu'il ris-
qua de soustraire des cartons tou-
tes les dénonciations et pièces qui
pouvaient la compromettre, ou
seulement rappeler qu'elle exis-
tait encore : on gagna ainsi du
temps. La révolution du 9 thermi-
dor la sauva, et celle du ^i^ bru-
maire {lermit au général Vii!en<e
de revoir sa patrie. Rayé de la lis-
te des émigrés sous le gouverne-
ment consulaire , il devint, en
1801, président du canton de Ver-
sy , département de la Marm^, où
il avait eu des propriétés. Le col-
lège électoral de ce département,
qu'il présida en i8o3, l'élut can-
didat au sénat-conservateur, où il
fut appelé à siéger le 1" février
i8o5. Le 20 mars 1807, il reçut
le commandement de la 5* divi-
sion de réserve dans Tiniérieur ,
et passa en Espagne en 1808, où
il commanda une division de ca-
valerie. Employé pendant la dé-
sastreuse campagne de Russie, il
commanda avec la plus haute dis-
tinction une division de cavalerie
sous les ordres de Joachim , roi
de Naples {voy. Mtjrat), et fut cilé
pour la valeur qu'il déploya ci ia
bataille de Mohilow. Au mois de
décembre 18 15, il fut envoyé eu
qualité de commissaire extraordi-
naire à Besançon, dans la 6' divi-
sion militaire, où il prit toutes les
mesures urgentes à celte époque;
pourvut à la défense de la ville de
Besançon; se mit ensuite à la tête
d'une colonne de gardes natioaa-
TAL
les el de quelques troupes de li-
gne, el se porta, nu mois de jan-
vier i8i<^,ù Gray, où il tint toutes
les forces ennemies en échec pen-
dant sept jours. De retour de sa
mission après les désastres de cel-
te campagne et l'abdication de Na-
poléon, il l'ut nommé pair de Fran-
ce par ordonnance royale du 4 juin
j8i4. Il continua à siég;er pendant
les cent jours, en 181 5, dans la
chambre haute. Désigné à la fin de
juin, par le gouvernement provi-
soire, pour être un des plénipo-
tentiaires chargés de proposer un
armistice au général Bliicher, il se
rendit d'abord au quartier-général
prussien, et fut de nouveau en-
voyé, en la même (jualité, auprès
du duc de Wellington avec le
comte Boissy d'Anglas. L'ordon-
nance royale du 24 juillet fil con-
naître que le comte de Valence a-
vail cessé de Aiirc partie de la
chambre des pairs, el une nouvel-
le ordonnance du 4 septembre sui-
vant, que le lieuteuanl-général de
Valence était mis à la retraite.
Rappelé depuis à la chambre des
pairs par l'ordonnance du 21 no-
vembre 1819, il y a siégé jusqu'à
sa mort , el n'a cessé d'y doimer
dans toutes les occasions des preu-
ves multipliées de son })atriotisme,
de son amour de l'ordre el d'une
sageli!)erlé. Dans sa nouvelle car-
rière politique, peut-être moins
brillanle mais non moins utile que
celle de? armes, il s'est constam-
ment montré le courageux défen-
seur de la liberté individuelle, de
la liberté de la presse el de tous les
droits nationaux. Après une longue
et douloureuse maladie, le comte
de Valence a été enlevé, en 1822, A
sa famille el h ses nombreux annis,
VAL
i3i
laissant do vifs regrets i tous cetix
qui l'ont connu el une mémoire
vénérée dans sa pairie. De ses
deux filles, l'aînée, dame d'hon-
neur de M°" la duchesse d'Or-
léans, a épousé le comte de Cel-
les, député aux états-généraux du
royaui7ie des Pays-Bas, qui, avar.t
de se retirer dans sa patrie, la Bel-
gique, a pendant plusieurs années
administré, comme préfet, le dépar-
tement de la Loire-Inférieure, et y
a laissé les plus honorables souve-
nirs. La cadette a épousé un des
frères d'armes de son père, le gé-
néral comte Gérard, aussi distin-
gué par sa valeur que par ses ta-
lens militaires, et qui a depuis pris
rang parmi les défenseurs des liber-
tés nationales, comme député de
la ville de Paris, à la seconde cham-
bre {toy. Celles el Gérard.) Outre
plusieurs discours prononcés à la
chambre des pairs, dont le dernier
fut en faveur de la famille du mal-
heureux Lesurques, injustement
condamné à mort, le comte de
Valence a publié, en i7{)(î, un
ouvrage intitidé : Essai sio' tex
finances de la rc publique fran-
çaise, et sur les moyens ci' auran»
tir les assignats, 1 vol. in-8''. Cet
écrit est plein d'idées neuves el
d'aperçus financiers remarqua-
bles.
VALENTIN DE LAPELOUZE
(Jean- Baptiste ) , né à Bruyères,
département des Vosges , le 20
juillet 1777. La révolution Icsu:-
j)rit au milieu de ses éludes, qu'il
continua cependant aidé des con-
seils de l'abbé Georgel [voy. ce
nom), son compatriote, jusqu'à \a
déportation de ce célèbre jésuite.
Appelé :\ l'école de Mars de la
plaine des Sablons, en 179'}, il dc-^
i5a VAL
vint un des élèves iiislruct«urs de
celte école, qui coopéra au 9 ther-
midor. 11 servit ensuite comme
officier clans un des bataillons des
Vosges, qui étaient en grand nom-
bre i l'armée du Uhin. La faiblesse
de sa vue le força de renoncer à la
canièie militaiie, et à entrer dans
celle de radiuinistiation. Après a-
\oir occupé divers emplois dans
son département, il fut chargé de
diri^^er la coinplabilité de la lote-
rie. Il se servit poiM' cela de la mé-
thode des parties doubles, qu'il
eut le preniier l'idée d'iutroduire
dans une grande administration ,
v.t obtint par la un tel succès, que
Jes comptes de la loterie lurent
souvent présentés comme modè-
les dans les rapports annuels de
la chambre des comptes, et (|Ue
la méthode, des parties doubles
lut applicjuéeà la comptabilité du
trésor, ainsi que de tous les éfa-
blisscmens (jui en dépendent. En
1807, le sénateur général Ferino,
son oncle, ayant été nommé gou-
verneur d'Anvers avec tous les
pouvoirs civils et militaires, il l'ac-
compagna en qualité d'aidc-de-
camp, et concourut;! tous les tra-
vaux entrepris pour la défense de
celle place et dus établissemens
maritimes qui 3' existaient. Résis-
liint à toutes les tentatives de sé-
duction, il avertit son oncle de
l'énorme contrebande qui se fai-
sait sur l'Escaut, depuis Flessin-
gue jusqu'à Anvers, ainsi que des
abus qui se commcltaient dans la
perception de I'»h troi. Il rédigea
à ce sujet un rapport (|ui l'ut adres-
sé par le général Ferino au gou-
yernement, et qui servit à l'éclai-
rer sur la conduite du général qui
comuiacdait à cette celte époque
VAL
à Flessingue. L'affaire de l'octroi
n'éclata que plus tard. Nommé
capitaine de grenadiers de la 1"
légion de la garde nationale de Pa-
ris, M. Valentin de Lapelouzc ma-
nifesta dans ïeti cent jours., en i8i5,
des opinions qui fournirent contre
lui la matière de nombreuses et
violentes dénonciations, et il fut'
destitué, en 1816, de sa place à la
loterie, place qu'il avait créée et
occupée pendant 18 ans. L'amitié
des grenadiers de sa compagnie,
l'estime et la confiance du duc de
Choiseul, alors colonel de la 1" lé-
gion, lui firent cependant conser-
ver son grade de capitaine de la
garde nationale, et il occupe en-
core ce poste aujourd'hui. M. Va-
lentin de Lapelouzea employé de-
puis les loisirs que lui laissait sa
destitution , à des recherches sur
l'économie politique et les finan-
ces, matières qu'il avait constam-
ment étudiées. Il n'interrompit
ces travaux que pour diriger mo-
mentanément une partie in)por-
tante au comité des receveurs-gé-
néraux. Ayant acquis en 1820, un
intérêt au Courrier Français, il
prit, au commencement de l'année
suivante, la direction de ce jour-
nal, qu'il n'a pas quittée depuis, et
dans laquelle les événemens des
dernières années lui ont fourni de
nomi)reuses occasions de prouver
qu'il savait également résisicraux
persécutions et aux séductions de
tous gemes. 11 concourt aussi à la
rédaction de celte feuille, notam-
ment par des articles sur les finan-
ces, qu'il a l'art de rendre clairs
et intéiessans peur toutes les cla;»-
ses de lecteurs.
VAL11LT,EIIT (Jean-Mame-Ro-
GEft), général de brigade, voiu-
VAL
mandant de ta légion-d'honneur ,
naquit à Avranches, département
de la Manche, le ai mai 1765.
Issu d'une famille honorable ,
mais dont le nom était sans par-
ticule , il recul une éducalion dis-
tinguée, dont son goût pour les
armes changea la direction. Sa
famille ne contraria point les pro-
jets qu'il avait formés; il se pré-
senta pour subir les examens dans
l'artillerie, qu'il affectionnait;
mais un édit du roi en excluait
les roturiers, et il ne l'ut point
admis. De dégoût, il faillit, dit-
on, s'expatrier. Son amour pour
ses païens le retint, et il entra,
comme simple soldat , dans le ré-
gim<înt de Rohan-Soubise infan-
terie. Il était rentré dans sa fa-
mille lorsque la révolution éclata.
Les principes du nouvel ordre de
choses convenaient trop à son Ame
libérale pour qu'il ne les adopt/tt
pas avec entliousiasme , mais sans
exagération , sans ambition , et
par l'unique motif d'être utile à
son pays , en se rangeant parmi
ses braves défenseurs. Nommé par
ses camarades chef du premier
bataillon de la Manche, !l se ren-
<lit à l'iirmée du général Rocham-
beati. » Il suit, dit M. Lavallée,
Lnckner dans la Belgique , il as-
socie son nom aux braves défen-
seurs de Lille, il entre vainqueur
dans la citadelle d'Anvers, il brave
les glaces de i^QÔ sur le rhamp
de bataille de Lawfeidt ; seul, il
conserve dans son corps la disci-
pline exilée de l'armée de Du-
inouriez; seul, dans les murs du
i^ucsnoy , pressé par l'ennemi , il
en impose aux désorganisateurs
et les désarme; seul enfin des pri-
sonuier? français, que le sort con-
VAL i55
traire relègue au fond de la Hon"
grie, il consacre à l'étude de la
guerre des jours que des revers,
précurseurs de tant de triomphes,
rendaient un moment inutiles à la
France. Il lui est rendu ; il se re-
trouve avec ses anciens compa-
gnons; ils sont réunis à cette a8*
demi-brigade, cette fidèle amie
de la victoire, et, à leur tête, il
marche à des lauriers certains.
C'est avec elle que, le 28 ther-
midor an 7 , il enleva le Simplon ,
ce colosse posé p;ir la nature au
milieu des Alpes colossales ; en
vain les Autrichiens en défen-
daient les flancs escarj)és, en vain
leur artillerie foudroie les témé-
raires qui les osent gravir; Val-
huberl brave tout, et la monta-
gne, et les hommes, et les ca-
nons ; il arrive , il attaque , il dis-
perse ; hommes, canons, mon-
tagne, tout est en sa puissance,
et maître de l'énorme mont, iné-
branlable comme loi , tous les ef-
forts de l'ennemi ne peuvent lui
arracher ce poste formidable, que
sa bravoure a conquis en une
heure, et qu'il a promis à l'hon-
neur français de conserver tou-
jours. Il entre en Italie; l'armée
française arrive; le passage du Pô se
prépare. Le général Mainoni,VaI-
hubert et quelques autres braves,
se jettent dans la première barque,
ils franchissent le fleuve, et I0
succès de leur audace amène celui
de l'armée qu'ils précédent. Deux
jours après, le 19 prairial an 8,
Vaihubert fond comme l'éclair sur
un gros d'Aiitrichiens; ils sont
plus de cent, il e«t seul, qu'im-
porte? Ils sont frappés, vaincus,
épouvantés; ils mettent bas les
armes, ils sont prisonniers. A
i3/i
VAL
Blontebello , la cavalerie autri-
chienne avance; mais les grena-
dier» de la 28' sont h\, Valhubcrl
est avec eux. Les grenadiers le re-
gardent; son front est calme, sa
sécurité semble leur dire : «Je me
«repose sur voire courage, vous
• vaincrez; » ils vainquirent. A
Marengo, le feu le plus meurtrier
tonne long-lcmps sur la 28*, elle
demeure inébranlable; Valhubcrt
est encore avec elle. Grièvement
blessé, il commande toujours, et
la douleur n'obtient point d'em-
pire sur son sang- froid ; enfin au
passage de Mincio, un boulet le
renverse et le prive de la voix;
on le presse de se retirer, c'est
en vain. Son refus s'exprime par
ses gestes; il se fait remettre à
cheval, et conli"nue de combattre. »
Une arme d'honneur et une grati-
fication de 12,000 francs lui sont
décernées. Le premier consul Bo-
naparte lui adresse la lettre sui-
vante , écrite tout entière de «a
main : « Je vous envoie un brevet
«d'honneur; je n'oublierai jamais
t les services que la bonne et brave
• 28' a rendus à la patrie; je me
«souviendrai, dans toutes les cir-
» constances, de votre conduite à
«Marengo; !)lessé, vous voulûtes
• vaincre ou mourir sous mes
»ycux. ') Les 12,000 francs, il les
partage avec sa demi-brigad<\
Peu après (1804), il est élevé au
rang de général de brigade. Du
camp de Boulogne, il passe à la
grande-armée , lors de la reprise
des hostilités avec l'Autriche. Un
si brave guerrier ne pouvait mouv
rir hors du champ de bataille. A
Austerlilz , il combat dans la divi-
sion Suchet, « à jamais célèbre
par cette manœuyre brillante et
VAN
inouïe qui sépare l'aile droite des
Russes du centre du leur armée, n
L'ordre du jour prescrivait de ne
point dégarnir les rangs pour en-
lever les blessés. Renversé, le a
décembre i8o5 , par un éclat d*o
bus, qui lui fracasse la cuisse, le
général Valhubcrt voit ses soldats
s'avancer pour l'enlever. «Arrêtez
9 mes amis, leur crie-l-il, souve-
') nez- vous de l'ordre du jour ;
rtvous me relèverez après la vic-
»toire. » La blessure de cet in-
Irépi.le guerrier était mortelle ; il
l'apprit avec fcrineté. « Je meurs
» duns une heure, écrivil-il à l'em-
npereur; j'aurais voulu faire plus
«pour vous. Je ne regrette pas la
»vie, puisque j'ai participé à une
1) victoire qui vous assure un règne
«heureux. Quand vous penserez
«aux braves qui vous étaient dé-
» voués, pensez à ma mémoire.
«Il me suffit de vous dire que j'ai
«une famille, je n'ai pas besoin de
«vous la recommander.» Dans les
plaines mêmes de la Moravie ,
ses camarades lui élevèrent un
monument, et l'empereur Napo-
léoii, par un décret impérial,
donna le nom de Valhubcrt à une
des places de Paris.
VANDAMME (Domisiqie, com-
te D'UxEBOtBG), lieutenant-géné-
ral, grand-cordon de la légion-
d'houneur, est né à Cassel, dé-
parlement du Nord , le 5 novem-
bre 1771. Il entra fort jeune dans
la carrière des armes, passa aux
îles dans un régiment colonial ,
revint en France à l'époque des
états-généraux, en 1789, et for-
ma, dès nos premiers troubles po-
litiques, une compagnie franche,
connue sous le nom de chasseurs
fin Mont-Cassel , dont il devint le
ys-
VAN
chef. Il la comuiandu pciulanl l.i
campagne de 1792, et mérita, par
sa conduite, le grade de général
de brigade. Il jeta dés-Iors le? tbn-
demens de celte haute réputation
de bravoure qui ne fit que s'ac-
croître dans toute sa carrière mili-
taire, et qu'il justifia par une foule
d'actions d'éclat. Il fut employé,
en 1793, à l'armée du Nord, s'em-
para de Furnesau mois d'octobre,
bloqua Nieuport , se vit bientôt
obligé d'abandonner cette place
pour éviter l'approche des alliés,
et perdit, dans la retraite, une
partie de ses munitions et de son
artillerie, ce qui ne l'empêcha pas
d'obtenir différt-ns succès dans sa
roule. Le 29 avril 179^, il prit la
ville de Menin conjointement a-
vec Moreau , se rendit mailrc de
Schenck le 6 novembre, et s'em-
para de Budwick trois jours après.
Il passa ensuite avec sa division à
l'aile gauche de l'armée de Sam-
bre-et-Meuse, et y fit, sous Jour-
dan , la campagne de 1795. En
1 796, il était à l'armée du Kbin , et
fut surtout remar(|iié aux airaires
des 14 et i5 juillet vers Alpers-
hach; le 24 août au passage du
Lech , et deux mois après à l'atta-
que des hauteurs de Friedberg. A
l'ouverture de la campagne de
1797, il aida puissamment l'ar-
nîée à traverser le Rhin, en sou-
tenant, à la tête de l'avant-garde ,
les vives attaques de l'ennemi.
Dans les combats de llanau et de
Diersheirn , qui en furent la suile,
le général Vandamme se condui-
.sit avec la même distinction.
Nommé général de division le 5
février J799» il commanda en
celte qualité l'aile gauche de l'ar-
mée du Danube; se rendit bien-
YAN i35
tôt en Hollande, sous les orvln*
du général Brune, et prit une part
active aux succès de cette cain-
piigne. Forcé, par l'état où l'a-
vaient réduit ses fatigues cl ses
blessures, à se livrer à quelque
repos, il se retira à Cassel, et re-
tourna , au mois d'avril 1800,
prendre le commandement d'une
division à l'armée du llhin ; il y
montra son intrépidité accoutu-
mée au pa^sagi; du fleuve , entre
Stein et Schafhou.?e ; ensuite à
l'ailaque de Hohen-Twiel , qio
défendaient 80 pièces de canun ,
et qui se rendit le 5o avril, et en-
fin les 2 et 4 niai suivant, aux coni-
hals d'Eugcn et de Mocrskirsch.
Il pa.isa, en 1801, à l'armée da
Grisons, s'y distingua comme
dans les précédentes campagnes,
et reçut du premier consul Bo-
naparte, au mois de septem'jr
1800, une paire de pistolets de la
manufacture de Versailles. Nom-
mé , à celle époque , commandant
de la G' division, il devint, l'an-
née suivante, grand-olficier de la
légion-d'lionneur, fut dirigé vers
la grande-armée , on septembre
i8o5, lors de la reprise des hos-
tilités, et commanda la 2* divi-
sion du corps d'armée du maré-
chal Soult. Le 4 octobre, il se
rendit maître du pont de Dona-
werlh, se porta le G sur Augs-
bourg, s'en empara le 9, se trou-
va aux combats livrés dans le cou-
rant de ce mois , fit 3,ooo prison-
niers dans la Ilaute-Souabe , et
fut nommé grand-aigle de la lé-
gion-d'honneur après la bataille
d'Austerlitz. Dans la campagne de
180G et 1807, il fut chargé de la
conquête de la Silésic; il fit le
siûg« de Bresiau , et s'en empara
VAN
Le général Vaiidamnie , employé
'ôit i O'iviriuj , (Ml 1S09 , Contre
l'Aiiti i(;})t; , coniin.md.i les "NVnr-
f(!!nl)tigeois, et remporta une vic-
toirt; comjlèle au combat d'Lr-
fort, en avant de la lûle du pont
de Liiitz, où il mit en déroule
trois l'oliinnes autrichiennes. Le
I" ianvitr 1811, il lut nommé
pré^i()»*nt du collège électoral
d'iiazcbrouck. Il devait faire par-
tie de l'expôdilion contre !:»
Ilii«sie; muis qut^lques dcinêiés
ervc le rci de Wesi[>halie ( voy.
BowAVÀiUE Jérôme) le firent di.s-
t^racicr, et il reçut l'ordre de 9-e
reudie à Cai«sel. Cependant il eut,
\','rf^ la fni de j8i5, le comman-
cfetneiit d'un corps de troupes qui
?o réunissait dans la 52*' division.
Le 5 a\ril, les divisions Saint-
Cyr et Durulte l'étant venues re--
joindre à Brème, il se disposait à
attaquer les Russes, lorsque l'ar-
niislice suspendit les li isiiiiiés. Le
a5 août, il marcha sur Pirna et
lîoendorff, dont il s'empara, et
le 2/i , il attaqua et battit le duc de
AVitlemberg, auquel il fit 2,000
prisonniers. Le 29 , il traversa la
gorge de la grande chaîne des
montagnes de Bohèine, et s'ap-
procb.a de Kulm , où il trouva le
général Oslermann à la tête de
10,000 Uusses. Le général Van-
damme, qui ne comptait jamais
ses ennemis, soutint un combat
opiniâtre, et développa la plus
étonnante valeur. Forcé néan-
moins de rétrograder , il fit la
faute irréparable de rester à Kulm,
au lieu de reprendre position sur
les hauteurs. L'ennemi sut pro-
fiter de cet avantage; renforcé des
gardes russes, il tombe sur les
Français le 3o au matin ; ceux-
VAN
ci font bonne contenance; mais
vers les deux heures, un nouvel
ennemi, le général Kleist, dé-
bouchant p.u- les moniagues, vint
If* C' rner de toute» part-. Le gi:-
rér 1 Vandanimc, attaqué sur tous
les pdinls, ne perd ni son courage
ni son sang-froid; malheureuse-
ment ses ordres sont mal com-
pris ou rna! exécutés, il perd toute
son artillerie el 6,000 soldats, et
est liii-mênie Uni (»risonnier. On
le conduisit sous une escorte
russe à L;;hii , où il trouva le gé-
néral Morcau à l'agonie. La foule
qui prodiguai! •e'' marques de 1 in*
léièl le plus tendre au tr;.nsfuge
français, n'était pas disposée '1 té-
moigner, à la valeur malheureuse,
les ég<uds qui lui étaient dus à
bien pins juste titre, et le général
Vandamme fut exposé à d'indi-
gnes insultes ; le graud-duc Cons-
tantin osa même lui faire Oter son
épée. L'empereur Alexandre, qui
saviiil mieux apprécier le courage,
la lui fit rendre sur- le-cbamp. Le
général Vandamme, fut transféré
à Moskou , et de là à AViatka . an
nord de Kasan , à 20 lieues de la
Sibérie. La paix de 181 -J le rap-
pela en France, où il airiva le 1"
septembre. Le duc de Fcllre, qui
venait de remplacer le maréchal
Gouvion-Saint-Cyr au ministère
de la guerre, lui donna Tordre de
quitter Paris en vingt-quatre heu-
res. Il reparut au 20 mars i8i5;
Napoléon le nomma pair de Fran-
ce , et lui confia le commande-
inent de la 2* division de l'armée.
Chargé ensuite du 5* corps, sous
le général Grouchy , il assura les
succès de la bataille de Fleurus
par les avantages qu'il remporta
ensuite à l'attaque de Wavres II
VAN
était à la poursuile de l'enneini ,
lorsqu'il apprit l'issue de la ba-
taille de \Valerloo. Jamais il ne
mollira plus d'habilelé que dans
totle cir( oiislance ; Tordre avec
lequel il opéra sa retraite fit
craindre un instant ù l'ennemi
que sa victoire ne fût pas com-
plète. En elTet, un corps d'armée
presque intact, et un matériel
considérable d'artillerie, ramenés
alorî en France, laissaient encore
aux amis de la patrie l'espoir
d'empt^cher, sinon une invasion
nouvelle, du moins les résultats
honteux qu'une occupation libre
du territoire pouvait entraîner.
L'armée française compta bientôt
80,000 comballans. Cf tte nouvel-
le, transmise, le 5juillet, :"l lacham-
bro des représenta ns , y excita les
applaudi«!stn)«ns les plus vils. Le
général Vandamnie iinnonçait que
b s ^^•n^li;is^ai^es envoyés auprès
de son armée avaient été témoins
de l'enti.ousiasme et de l'ardeur
de ses troupes. « Je suis fier, ajou-
tail-il, d'ôtre venu au secours de
la capitale avec une pareille ar-
mée. Ses courageuses dispositions
ne peuvent njanquer de nous faire
obtenir des conditions plus avan-
tageuses, si nous sommes obligés
de traiter avec nos ennemis. » Le
pénérnl Vandamme occupait alors
J\lont-l\onge , Meudon , Vanvres
«•t Issy. Ce fut dans cette circons-
tnnctî que plusieurs généraux vin-
rent lui offrir le commandement
de l'armée, qu'il ne crut pas de-
voir accepter. Le gouvernement
provisoire traitait cependant avec
les puissances alliées, et obtint la
cessation des hostilités avec la
condition que l'armée française se
retirerait derrière la I/oire. Le gé-
VAN
«57
nér.d Tniidamme s'y rendit com-
me les autres généraux, et n'en
fut pas moins compris dans l'or-
donnance du 24 juill*^' 181 5; il
remit le commandt-ment des 3" et
fi' corps, et se retira dans nne
maison de campagne près de Li-
moges, déparlenient de la Haute-
Vienne ; mais il reçut ordre du
préfet d'en sortir dans vingl-qna-
tre heures. Il prit la route d'Or-
léans , et là, il lui fut enjoint d'al-
ler habiter Vierzon, département
du Cher. Ces actes, d'une auto-
rité inquiète, donnèrent lieu h
différens bruits, plus ou moins ri-
dicules. On le représentait tantôt
comme un chef de parti, levant
des contributions à main armée ;
tantôt comme un fjigitif qui venait
d'être airêté. L'ordonnance du l'Z
janvier 1816 fixa son sort , en lo-
bligeant de sortir du royaume ; il
se réfugia d'abord à Gand; mais
n'ayant pu obtenir la permission
d'y résider, il s'embarqua pour
les Étals-Unis, où il séjourna en-
viron deux années. Revenu en
France avant l'ordonnance qui
prononça le rappel des bannh , il
fut détenu quelque? inslans, et
reçut bientôt un passe-port pour
sortir du royaume. Le général
Vandamme possédait une. terre
aux environs de Gand , où il fixa
sa résidence jusqu'à l'époque où
il fut autorisé à rentrer dans sa
patrie. Mis en disponibilité, il u
été compris dans l'ordonnance du
moisdesepletnbreiSa/jjqtii admet
A la retraite un grand nombre dn
généraux. On s'est formé du ra-
ractère de ce général une idée
que certains faits ont démentie;
on a exagéré le mal , et jamais on
n'a parlé du bien. Par exemple ,
'•jS van
'es liiihitans de Cassel , où il est
n«i, jouissent d'un hôpital qu'il a
construit et fondé de ses propres
deniers. Il est peu de personnes
qui compensent ainsi, par des
bienfaits, le mal que les circons-
tances les ont quelquefois forcées
de faire.
VANDER MAESEN ( Edme-
Martiit, comte), général de divi-
sion , membre de la légion-d hon-
neur, né à Versailles le 1 1 novem-
bre 1767, manifesta de bonne
heure son goût pour In profession
des armes. Il entra, en 1782, au
régiment de Tourraine, et passa
par tous les grades, jusqu'à celui
de lieutenant , qu'il obtint en
1793. A celle époque, de nom-
breux bataillons de volontaires
arrivaient aux armées presque
sans instruction ni discipline. Lu
minisîre ayant voulu que l'on s'en
occupât , le lieutenant vander
Maesen fut du nombre des offi-
ciers de ligue désignés par le gé-
néral en clief de l'année pour les
Instruire. On lui confia le 10' et
II" bataillons du Jura, qui, en
moins de trois mois, furent en
état d'entrer en campagne. De
retour à son régiment, il fut nom-
mé quartier-maître du bataillon
de guerre, puis adjuilant-major,
et enfin chef du 1 1* bataillon du
Jura, le 14 octobre 179J. C'est
de ce temps que datent les actions
qui l'ont fait remarquer de ses
chefs. Lebataillon que commandait
vander Maesen faisait partie des
troupes destinées à la défense des
lignes de V/issembourg. Dans la
retraite , il coopéra puissamment
au rétablissement de l'ordre. Ar-
rivé près Magiieneau, il prit sur
{ui de dcclarer ù «on bataillon q^xe
VAN
le général l'avait chargé de faim
arrêter tous les militaires qui se-
raient rencontrés isolément. Il
parvint bientôt à les rallier et ù
les préparer à attendre l'ennemi.
Ce fut dans cet état que le géné-
ral de division, Michaud, trouva
cette troupe lorsqu'elle dut faire
partie de sa division. La retraite
s'exécuta sur Vandenheim , près
de Strasbourg. Pichegru vint alors
prendre le commandement de l'ar-
mée ; il sut rallumer l'enthousias-
me et préparer la victoire. Le dé-
blocus de Landau fut décidé, et
l'ordre fut donné pour une atta-
que générale sur toute la ligne.
Le chef de bataillon, vander Mae-
sen , que la confiance du général
Michaud avait appelé à son avant-
garde , commandait dans cette af-
faire un bataillon du io5" régi-
ment, outre les 10' et I i" du Jura,
qui firent des prodiges de valeur.
L'infanterie autrichienne , mal-
gré la plus vive résistance, avait
été forcée d'abandonner la forêt
do Brumpt, et de se retirer der-
rière la Zorn , où <;lle prit posi-
tion après avoir détruit les ponts.
La division française suivit l'en-
nemi de près; une partie reput
l'ordre de passer la Zorn ; mais à
peine parvenue à la rive opposée,
elle fut attaquée et repoussée par
l'ennemi. Nos troupes allaient re-
passer la rivière, lorsque le gé-
néral Michaud ordonna à vander
Maesen de prendre le commande-
ment des grenadiers de la divi-
sion , et de s'emparer de Brumpt,
opération d'autant plus dilïicile ,
que l'ennemi , qui croyait la ville
abandonnée, y arrivait de toutes
parts. Les troupes se rencontrè-
rent; après un combat des plus
TAN
mcurlriers, la ville fut emportée.
Dans cotte affaire, le chef de ba-
taillon , vandcr Maesen, eut un
cheval tué sous lui, et reçut un coup
de feu qui lui traversa la cuisse. A
peine guéri de ses blessures, il re-
joignit son corps, qui faisait alors
partie de la division Ferino. Au
mois de germinal an 2, les Prus-
siens, projetant d'enlever une de
nos reconnaissances, mirent leur
cavalerie en embuscade pour cou-
per toute retraite à la nôtre, près
du village d'Ungstein. Le plan de
l'enneuii aurait infailliblement
réussi, sans le mouvement heu-
reusement combiné du chef de
bataillon vanderMaescn,qui com-
mandait cette avant - gar;!e , et
força les Prussiens à se retirer en
abandonnant leurs éclaireurs. La
cavalerie française ainsi dégagée
rentra dans ses cantonnemens de
Wackcnheim. Quelques autres af-
faires contre les Prussiens lui va-
lurent le grade de chef de brigade.
L» 140* demi-brigade, qu'il com-
mandait, prit part, en l'an 5, aux
divers combats qui mirent Spire ,
Worms et la tête du pont de Man-
heiiii au pouvoir de la France.
Après la prise de Manheim , qui
eut lieu au commencement de
l'an 4> '« général en clief ordonna
A la division Beaupuy de passer le
Khin à Spire. Le chef de brigadi;
vander Maesen traversa le fleuve
h la tête des grenadiers de cette
division, et poussa vers llocke-
num les partis ennemis qu'il ren-
contra à son dcb:irquemcnt. La
division Beaupuy alla bientôt ù la
rencontre de l'ennemi, qui com-
bina ses mouveinens de manière
à acculer l'armée française sur
Manheim. Le général en chef dc-
VAN
i.>9
concerta ce projet, en ordoimant
une attaque sur Franckenthal , ce
qui rappela aussitôt sur ce point
les troupes autrichiennes qui s'en
étaient détachées. L'aJjudanl-gé-
néral Decaen et le chef de brigade
vandcr Maesen, avec son corps,
furent chargés de l'attaque de
droite. Rien ne résista à la valeur
de la i4o% qui, en moins de deux
heures, s'empara du canal , et en-
tra dans la ville au pas de charge
par la porte du llhin. Le surlen-
demain , l'ennemi , qui avait con-
centré sur ce point la majeure
partie de ses forces, attaqua la di-
vision Beaupuy, qui, malgré sa
très -grande infériorité en nom-
bre, se battit avec autant d'au-
dace que d'habileté. Vander Mae-
sen , placé à la gauche , forma les
i4o' et 205" demi -brigades par
demi-batrillon en échiquier, et fit
son mouvement rétrograde à tra-
vers les vastes plaines qui sépa-
rent Epslein de Mutterstadt, sans
que la nombreuse cavalerie enne-
mie osât l'inquiéter dans sa mar-
che. L'armée se relira derrière le
Kuesch, et prit quelque repos pen-
dant l'armistice qui fut alors con-
clu. Les hostilités reconnnencè-
rent peu de temps après, et l'ar-
mée, à la suite de plusieurs al-
faires qui eurent lieu dans le Pa-
lalinat, passa le llhin ù Kehl. La
division du général Beaupuy de-
vait proléger cette opération en
traversant le fleuveùGambsheim.
Déjà les grenadiers , sous les or-
dres du chef de bataillon vander
Maesen et de i'adjudant-générnl
Bellaveine, en louchaient la rive
droite ; mais la crue des eaux
ayant submerge l'île qui devait
faciliter le passage, il fallut rc-
i4o
VAN
nonccr à celle entreprise. Vander
Maesen participa avec son corps
( devenu 62' ) aux batailles d'Of-
rembourg;, de la Rincken, de Ras-
tadt, de Masdi , de Neresclieim ,
de Geserjfeld , de Ncubourg; j\
celles de Lesenfeld, de «il)er:ich,
et ù tontes les affaires où la divi-
sion du général Bcaupiiy donna
dans celte cani[)ajj^ne. La division
fut ensuite attaquée par des for-
ces supérieures que coniiinndait
le feld- maréchal Latour. Le chef
de brigade vander Maesen se mit
en embuscade dans un bois, à
quelques toises de la roule de
RaJisboune, par où l'ennemi de-
vait commencer l'attaque. A pei-
ne ses dispositions étaient laites,
qu'un régiment de cuirassiers s'a-
vança pour contourner le plateau
sur lequel se trouvait placée la
majeure partie de notre artillerie ;
mais il fut reçu par un feu de
mousqueterie si bien dirigé , que
ce corps fut mis dans le plus grand
désordre. L'ennemi, éprouvant la
même résistance sur les autres
points, fut forcé à la retraite. Pen-
dant le siège de Kehl , vander
Maesen fut chargé de la conduite
de plusieurs sorties. Après un long
J)ombaidement, l'ennemi , très-
roppioché du fort, en voulut ten-
ter l'assaut, fit son attaque sur
plusieurs points, et s'empara du
camp retranché, puis de la re-
doute du cimetière. Le général de
brigade Decaen donna ordre aus-
sitôt au chef de brigade vander
Maesen de reprendre ces ouvra-
ges à la tête de son corps , qui
arriva vers neuf heures du soir ;
le combat se prolongea jusqu'à
trois heures du matin avec le plus
^irand acharnement : tout fut re-
VAN
pris, et les Autrichiens qui s'en
étaient emparés y trouvèrent h
mort. Après un second piisrage
du Rhin, l'armée arrêtée dans s.i
n:arche par les préliminaires de
paix signés à Leoben, repassa sur
la rive gauche. A celte njêmc épo-
que . le chef de brigade vander
Maesen fut obligé de remettre le
commandement de la 62' à un
officier récemment rentré au corps,
et de deux jours de grade plus an-
cien que lui. Mais peu de temps
après , le général Jouberl lui don-
na celui de la 55*, avec laquelle
il fit la campagne de l'an 7, A la
division d'avant-garde (h; Tarmée
du Danube. Arrivé à Ostrach . il
fut chargé par le général Lefevre
d'aller reconnaître l'ennemi, qui
paraissait en force en avant de*
villages d'Eidn et d'Dskirch ; ù
son arrivée, une centaine d'Autri-
chiens tombèrent eu son pouvoir.
L'ennemi eut un avantage le len-
demain , et la division Leièvre,
aj>rès la plus vigoureuse résis-
tance, fut contrainte de céder au
nombre. Dans cette circonstance
fâcheuse , le corps du chei de bri-
gade vander Maesen, qui était
demeuré dans la position où il
avait combattu la veille, se trou-
va exposé à être coupé par l'en-
nemi ; mais ayant rallié ses trou-
pes à temps, il effectua sa retraite
sur Pfullendorff, où il présumait
que la division s'était retirée, et
il rejoignit l'armée le soir du mê-
me jour, après avoir culbuté les
troupes ennemies qui voulaient
s'opposer à son passage. Il fui
blessé d'un coup de feu à la jam-
be , ce qui ne l'empêcha pas de
continuer ses fonctions. Vander
Maesen fut cité , pour cette re-
VAN
traiie, dans le mcinoire justiûca-
til' du général en chef Jourdun.
C« fut alors que le gouvernement
tleva cet oflicier au grade de gé-
néral de brigade; mais ses lettres
de service lui ayant été expédiées
à l'armée de Rome, où il devait
être employé, sa promotion lui
lut quelque temps inconnue. Ce-
pendant il commandait à la même
époque une brigade à l'armée du
Danub(î, par Tordre du général
m chef. L'armée ayant repassé le
l^hin, le général vander Maescn
reçut l'ordre de reprendre le
\ ici.'x-Biisack, que les troupes
trançaises avaient évacué quelque
temps auparavant. Arrivé au Neuf-
Brisack, il fait se?" di.spositions ,
exécute le passage du fleuve sous
le feu de l'ennemi, et à la pointe
du jour entre dans la ville au pas
de charge, à la tète îles grenadiers
de la 53" demi - brigade. Après
'•elle opération , il rejoignit en
Suisse l'armée d'avant-garde. Il
contribua à réduire les insurgés
des petits cantons qui avaient pris
])'tste à Rolherthune, et il eut part
aux succès de l'affaire de >Vole-
f.iM, après laquelle il reçut du
ministre de la guerre des lettres
de service pour l'armée du Uhio,
où il fut employé dans la division
«lu général Laroche, restée seule
sur la rive droite pour la défense
.li! iManheim et de Neckereau. Le
;,'ijnéral vander Maesen fut chargé
(ic la défense de ce dernier poste.
l,e deuxième jour coujplémen-
i.iire de l'an 7, à qu;ilre heures
du matin , le prince Charles, qui
urivait de iîuisse avec 7)0,000
hommes, lit attaquer le village de
Kekerveau par la majeure partie
de ses forces, et se» colonnes,
VAN
i4t
quoique appuyées d'une nom-
breuse artillerie, furent reçues à
bout portant par un feu de mi-
traille et de mousqueterie, qui les
mirent chaque fois dans le plus
granil désordre. Durant ce com-
bat, (|ui se prolongea plus de six
heures, les Français montrèrent
la plus rare intrépidité. Le géné-
ral vander i>iaesen, qui avait pris
et repris plusieui-s fois le village
avectîjooo hommes contre 3o, 000,
voyant son artillerie en partie dé-
montée et sa brigade sensiblement
affaiblie, crut prudent de se rap-
procher de Manheim. La retraite
se fit avec ordre , sans que l'en-
nemi tentât de l'inquiéter, et il
vint prendre position près de l'ou-
vrage à corne en arrière de la di-
gue du Rhin. Mais à peine était-
il arrivé dans celle position, que
l'ennemi força les portes de la
ville et s'en empara. Le pont ayant
été rompu , toute retraite fut in-
terdite au général vander Maesen
et à Tadjudant-général Lefol, que
le général Laroche avait détachés
sur le Necker. L'un et l'autre fu-
rent fait prisonniers et conduits
en bohème. Echangé, le 5 janvier
1801, contre le général - major
Meczery, pris à Hohenlinden , le
général vander Maesen rejoignit
aussitôtl'arméeàSalzbourg.Après
le traité d'Amiens, le général de
division Decaen ayant été nommé
capitaine - général des colonie»
orientales, le général vander Mae-
sen fut désigné comme son lieute-
nant , et le ministre le chargea de
l'organisation des troupes de celta
expédition. Il partit avtc elles
pour sa destination, dont le terme
était Pondichéry. L'on s'embar-
(]'ia à Brest le i5 ventôse au 11
Hî
TAN
(i8o5), cl l'on arriva aux Indo^-
Orientalcs; mais la décliiralion de
guerre avec les Anglais étant an-
noncée, toute la division française
se rendit à l'Ile-de-France. Van-
der Maesen fut nomftié général de
division dans cette même année,
puis membre de la légion-d'hon-
neur l'année suivante (5 germinal
an îa ). Il commanda et inspecta
ensuite, en sa qualité de lieute-
nant du capitîiine - général , le?
troupes qui étaient stationnées
aux Iles-de-France et de Bour-
bon. Le 22 septembre 1810 fut
marqué par un combat mémora-
ble (le quatre frégates françaises
contre l'Ile-de-France. Celle af-
faire fit le plus grand honneur au
général vander Maesen. Il fut en-
voyé par le capilaine-général pour
voir s'il lui élail possible de réta-
blir promplemcnt une batterie (la
batterie de la Reine ) , située à
deux lieues du grand port , et qui
avait été abandonnée faute de
troupes. Le général vander Mae-
sen jugeant de quel iiilérêl elle
pouvait être pour la défense sur
ce point, la fit promplement réta-
blir, et fit des dispositions si fa-
vorables contre l'ennemi, que la
première de ces frégates sauta en
engouftVant ses débris dans la
mer; la seconde eut le même sort
le jour suivant , et les deux autres
furent prises. Il n est pas douteux
que les combinaisons du général
vander Maesen aient puissamment
contribué à ce succès, parce que
les AngLiis ne s'allendaient point
à trouver de la résistance devant
celte batterie. Pressés et canonnés
par nos frégates que commandait
M. Duperretjils s'étaient appro-
chés, tant pour se mettre à l'abri
TAN
que pour opérer un dCburque-
nient sur ce point important du
l'île; gênés par nos batteries, qui
contrariaient leurs desseins, ils
s'approchèrent encore davantage
pour faire cesser notre feu. Enfin,
après une lutte opiniâtre , les b3-
timens anglais furent anéantis, en
cherchant à détruire les ouvrages
que la prévoyance du général van-
der Maesen avait élevés. Cepen-
dant l'ile, faute d'une quantité de
troupes su (lisantes pour sa défense,
devait être reprise un peu plus
tard. Elle le fut en effet le 5o no-
vembre 1810, après une vigou-
reuse résistance. Le général van-
der Maesen y fut blessé, et eut
un de ses aides-de-camp lue à ses
côtés. De retour en France, il re-
çut de l'empereur Napoléon l'ac-
cueil le plus flatteur, et fut en-
voyé en Espagne, avant même
que le conseil d'enquêtes efil ter-
miné son rapport sur la prise de
l'Ile-de-France. Arrivé à l'armée
d'Espagne, il y recul bientôt le
commandement d'une division
destinée pour Burgos , sous les
ordres du général Caffarolli. Ce
dernier mit à sa disposition trois
régimens de cavalerie légère, un
seul régiment d'infanterie entier
et six bataillons de divers corp?,
composés de recrues et d'hommes
sortant des hôpitaux. Ce fut avec
4 à 5 mille hommes d'infanterie
de celte espèce, répandus dans les
provinces de Burgos, Sanlander,
Soria, etc. , que fut formée la di-
vision avec laquelle cet officier
général devait assurer les commu-
nications dans cette partie, faire
rentrer les contributions tt les ap-
provisionnemens , et donner la
chasse aux bandes armées. Celle
VAN
lâche difficile était lout-i-fait an-
dessus (les moyens bornés que l'on
avait ijiis ù sa disposition. Mais le
{général vauder Maesen la remplit
pendant un an avic tant d'activilô
cl de succès, que les bandes, cons-
tamment battues dans toutes les
rencontres, et poursuivies sans
relâclie, furent totalement disper-
s»}es. Il établit un système d'ad-
ministration qui, s'il fut favorable
aux Français en leur procurant
l'abondance, ne le fut pas moins
aux habitans, par l'extrême jus-
tice et la probité qui présidèrent
à tous les actes d'autorité. La sa-
gesse de cette administration a été
si profondément sentie par les ha-
bilans de cette province, qu'il n'en
est pas un qui ne conserve encore
le sou venir de cet homine de bien,
et des grands services qu'il a ren-
dus à ce pays. Ce fut à ses soins
que l'on dut la belle défense de
Burgos par le général Dubreton,
qui commandait une bri;^ade de
cette division. Lo général vander
Maesen , qui avait su prévoir de
quelle utilité pouvait être ce fort,
quoique très-imparfaitement cons-
truit, n'avait rien négligé pour le
mettre dans le meilleur état pos-
sible de défense , et l'avait appro-
visionné pour six mois. L'armée
de Portugal ayant été forcée de se
retirer vers l'Ébre, il composa des
meilleures troupes la garnison de
ce fort, et en confia le comman-
dement au général Dubreton.
Après la retraite de l'armée anglo-
portugaise , le général vander
ûlaesen reprit le commandement
de la province de Burgos, etc.
Au mois de mars iSia, il re-
joignit le général Clausel , qui
commandait alors l'armée du nord
VAN
14s
de l'Espagne , en remplacement
de CaiTarelli. Vander Maesen, qui
avait avec lui 4»ooo hommes d'in-
fanterie et 5oo chevaux, obtint
dans différentes rencontres les
avantages les plus brillans , et
s'empara des deux seules pièces
de canon qu'eût Mina. Ce géné-
ral, dans un rapport qu'il adres-
sait aux cortès à Cadix, avouait
que depuis le commencement de
la guerre, il n'avait pas encore été
poursuivi aussi vigoureusement;
surtout, disait-il , « par le général
» vander Maesen , qui est toujours
«sur moi lorsque je l'en crois fori
«loin. Ce général est trés-estimô
«et très -aimé des habitans des
«provinces qu'il gouverne, et sa
«réputation l'a précédé ici; aussi
«lui donne-t-on les renseigne-
siTiens les plus exacts sur mes
omouvemens. Sa probité parti-
nculière et l'exacte discipline qui
«régne dans sa division, me font
«plus de mal que 20 mille hom-
omes de plus commandés par un
«autre général qui n'aurait pas
«ses vertus. Je crains d'être forci
«de sortir de la Navarre, etc.»
Les événemens qui suivirent ayant
obligé le général Clausel i\ rentrer
en France, le duc de Dalmatie
alla prendre le commandement
de l'armée, la réorganisa en neuf
divisions, formant trois corps, et
ordonna ensuite une attaque sur
trois points, afin de reporter le
théâtre de la guerre en Espagne. '
Le 2* corps, sious les ordres du
général Clauseï, fut chargé de
l'attaque sur la roule de Ronce-
vaux, où l'ennemi avait le plus
de forces réunies. Ce fut le géné-
ral vander Maeren, dont la divi-
sion faisait la tcte de la colonne,
144
VAN
qui déboucha le 5 juillet sur ce
point, et qui eut tout l'honneur
de la journée, en enlevant sous
les yeux du maréchal toutes les
positions de l'ennemi, opiniâlre-
nient défendues, et en le forçant
à une retraite précipitée. Pour-
suivi l'épée dans les reins pendant
trois jours, il ne put se rallier qu'à
deux lieues en -deçà de Pampe-
lune, où les divisions qui blo-
quaient cette place avaient pris
position. Trois attaques successi-
ves , dont une très brillante du
général vander Macsen, ayant clé
sans succès, parce que la plus
grande partie de l'armée anglaise,
qui avait levé le siège de Saint-
Sébastien, s'était portée en toute
hâte sur ce point, le maréchal
songea à opérer sa retraite. Le
général vander Maesen fut chargé
de la soutenir, ce qu'il exécuta,
dans un pays extrêmement diiFi-
cile, avec tant d'ordre et de bra-
voure, que l'ennemi ne put par-
venir à prendre upe seule pièce
de canon, ni même un seul hom-
me. Ce général déploya en celte
occasion un talent consommé dans
l'art de la guerre et tin courage à
toute épreuve, qui lui valurent de
la part du général en chef les plus
honorables témoignages. Il avait
reçu deux coups de feu à l'attaque
de Koncevaux, et ses habits fu-
rent criblés de balles pendant la
relraile. Le maréchal voulut en-
suite tenter une attaque sur Saint-
Sébastien, et eu faire leverlesiége,
qui avait été repris. Trois divi-
sions passèrent la Bidassoa le 5i
août, aux cndrt(its guéables , et
l'ennemi, surpris dans ses posi-
tions, fut culbuté sur tous les
points. Cependant l'attaque de
VAN
droite n'ayant pas réussi, le gé-
néral Clausel envoya prévenir le
général vander Alaesen de faire sa
retraite sans perdre un instant. Il
lui donnait en même temps le
commandement des trois divi-
sions, pour qu'il y eût plus d'or-
dre et d'ensemble dans les mou-
vemens que l'on ferait en pré-^en-
ce de l'ennemi ; mais une pluie
qui tomba tout à coup par torrens
pendant trois heures, ayant ren-
du le passage de la Bidassoa im-
praticable, cette retraite devenait
très - difficile , parce que le seul
point par lequel on aurait pu l'exé-
cuter, était le pont de Bera , dont
l'ennemi était maître, et qu'il pa-
raissait disposé à vouloir défen-
dre vi':;;oureusenjenl. La Bidassoa
était devenue un torrent impossi-
ble à franchir II fallait ou s'at-
tendre à mettre bas les armes , ou
s'emparer du pont de Bera à quel-
que prix que ce fût. Le i" sep-
tembre i8i3, à minuit, le géné-
ral vander Maesen réunit huit
compagnies de grenadiers et de
voltigeurs, et s'élança à leur tête
sur le pont, que l'on traversa saus
tirer un seul coup de fusil. Ces
compagnies se jetèrent aussitôt
dans les maisons crénelées , où , A
coup de baïonnettes, elles firent
un horrible massacre .des hommes
qui les défendaient. L'ennemi fit
des efforts inouïes pour reprendre
les jnaisons, de l'occupation des-
quelles dépendait le sort de 1 0,000
hommes; mais vander Maesen a-
vail si bien pris ses mesures, et
sut inspirer une telle confiance à
ses troupes par sa présence con-
tinuelle au milieu des plus grand*
périls, que loulcs les colonnes eii-
nemico furent repousïces. Enfin ,
VAN
le passage l'ut elTectisé. Il est cer-
tain que shiis la comliiitc fcnneet
pleine d'judace du général vander
M.iesen dans celte circon.>*taoce ,
ces trois divisions aur;iient été
forci';es de déposer le? armes. (]et
intrépide gént;r.tl, qui n'avait pas
voulu quitter on instant la tête du
pont tant que dura le passage «les
troupes, et qui était exposé A l(nis
les feux de l'enncini , tut victime
de son courage et de son ilévoue-
mcnt. Lue balle qui vint le frap-
per, lui traversa les deux flancs,
et il mourut quelques sect»udes
après, le i" septembre »8i5, en-
tre les bras de >1. Charcelay, son
aide-de-camp, qui avait partagé
luus ses dangers sur ce mênif^ ter-
rain, dont il s'était si audacieus«>-
ment emparé, et qu'il avait con-
servé contre tant d'efforts. Ses
dernièri's paroles furent : « Dites
»au général Rouget de prendre le
0 commandement de la division
net de tenir ferme it il ex-
pira aussitôt. Ainsi périt à la fleur
de l'âge l'vui des plus intrépides
et des meilleurs généraux de l'ar-
mée française dans ces derniers
temps. IJn décrut imj)érial venait
de lui donner le titre de comte;
mais cette marque de distinction
arriva trop lard. Son fils reeut
quelque temps a[)rès celui de ba-
ron. La perte du général vander
Maesen fut profondément sentie
par toute l'armée. I^e général
Clause! et le duc de Dalmalie la
regardérenl comme irréparable.
VANDJill MliRSCH (N.)'6Î^-
néral en chef des insurgé* Ur.iban-
çons , naquit i'i Meniu, d'une fa-
mille bonorable de la bo'n'ge«)i-
sie. Porté par gofii au service mi-
litaire, il entra dans Ie8 troupes
T. XX.
VAN 14^
françaises cominaodées par Che-
vert , qui reslimait pour sou cou-
rage, et rap[ielait familièrement
son intrépide Flamand. Du service
français, il passa au service autri-
chien en qualité de lieutenant-co-
lonel. Il rentra ensuite dans ses
foyers , où il vivait paisiblement
lorsque, en J781), il fut choisi par
les lirabauçous mécontens des ré-
formes <le Joseph II {voy. ce nom),
pour commander les rasMunble-
mens qui se formaient à Bréda.
Bientôt il devint membre du co-
mité établi i\ (îand, et enfin com-
mandant en chef des insurgés. A
la tête de troupes peu nombreu-
ses et indisciplinées , il parvint,
par ses taleus, sa prudence cl sa
fermeté, à donner de l'importance
à son parti, appelé des F onckis-
les [voyez l'article de Vonck ) ,
et à remporter des avantages
assez marquans, entre autres aux
affaires de Hoogsiraaten et de
Turuhoiit, où il défit le général
Schroeder. Van Eupen et vander
Noot (î'oy. ces noms), jaloux de
ses succès et de son influence , le
des^^ervireut dans l'esprit des Bra-
bançons, en insinuant avec adres-
se , soit que le général vander
Mersch n'agissait que dans l'inté-
rêt de la maison d'.\utiiche , soit
qu'il voulait opérer une rév(du-
lion démocratique. Ces insinua-
tiims lui enlevèrent la cotilîauce
populaire; ses eniMunis achevè-
rent de le p«:rdre totalement « en
le réduisant à l'iuacli'on, en lui
reftisant toul, et en r.issemhlaut
à grand» frais dans l'intérieur des
forces pour le rival (le général
prussien Schoeufcld ) , qo'ils vou-
laient lui opposer, ce qui donn;i
le spectacle de deux années bra-
10
i.V> VAN VAN
bançonnrs prCtcs à eti venir aux flans la science de la niubic|iie,
mains , et oubliant l'ennemi coin- eiilrepril d" décoMiposer l'art mu-
tnnn pour se détruite ellcs-niê- ^icai. Dans une séance publique
mes. 0 L'armée de Nainur. fjue de l'ai^adéinii- des sciences . en
vander iMer-icli commandait, mon- 1790, il établit « ?nr deux règle*
tra l'inlention di; vonloir ré-»i.>lcr j,^énérales la snccession de.» ac-
au général ^ichœn^eld, qni s'a van- eords et l'ariangement des par-
çail contre elle. Tout à coup elle lies, démontrant que ces deux
livre elle-même à Sclioenleld le règles, reconnues par les musi-
gCfiéral auquel elle paraissait dé- ciens , dépendent elle? - même»
vouée. Vander Mei:-cl) ne put firo d'une loi plus éie>ée qui doit ré-
convaincu par les états d'aucun gir toute l'harmonie. » Son i-y»-
des crimes qui lui étaient impu- lème fut approuvé des plus célè-
tés. Il lut simplement envoyé à la ores composileuis de musique,
citadelle d'Anvers, d'où il ne sor- Philidor, Glui k, Picciui , etc. La
tit qu'au retour de la tranquillité, révolution trouva Vandermonde
Il mourut en 179'2, an peu avant à peu près indifl'érent au mouve-
la conquête de sa patiie par les ment politique qu'elle imprima à
Français. la France; il ne fut ni persécu-
VANDERMONDE ( N. ) , ma- teur ni persécuté, devint profes-
thématicien, membre de l'ancien- seur d'économie politique à l'é-
ne académie royale des sciences cole Normale, et enfin membre
et de l'institut national , naquit à de l'institut national. Il mo\irut
Paris en i735, et fut élève du le 1" janvier 179C.
célèbre mathématicien Fontaine. VAN EUPEN (N.), grand-péni-
11 cultivait les sciences dans une tencier d'Anvers, naquit en liel-
paisible et volontaire obscurité, giqus en 1749- Intrigant, ambi-
lorsqiie son ami Dionis du Séjour tieux et sans mœurs, Van Eupen
lit violence à sa modestie, et le ne vit dans l'exercice du sacerdo-
mit en relation avec les princi- ce, que les moyens de parvenir
paux membres de l'académie des plus facilement au but que ses
sciences. Ses talens et ses qualités passions lui faisaient envisager. II
personnelles le firent rapidement était déjà revêtu de quelques
parvenir à l'académie, où il prit dignités de l'église, lorsqu'une
séance en 1771. Jaloux de justi- intrigue scandaleuse avec une
fier l'opinion favorable du ses col- fenmie le força de s'expatrier,
lègues et de ftiire connaître ses De la Hollande, où d'abord il se
droits à l'estime du monde sa- relira, il passa dans les Pays-Bas,
vant , il publia successivement et prit part dans les intrigues po-
plusieurs mémoires, entre autres litiques. L'un des plus audacieux
sur ta résolution des Equations , instigateurs du parti oligarchique,
les Problèmes de situation , une il fu* le principal agent de Van-
nouvelle espère d' Irrationnelles, \v.^ der Noot, qu'il sauva plusieurs
Éliminations des inconnues dans fois, par sa présence d'esprit, de»
les quantités algébriques, etc. Van- embarras où le mettait le parti des
dermonde , profondément veisé Vonkistes. Van Eupen fut chargé
VAN
prir son chef tlo «lilTérenles négo-
riations en Hollande et en Flan-
dre. Ce fut Van Eiipen qtii propo-
i-a à Vander Nool, le gém'ral prns-
sion î>f;hœnl'elil, afin de l'oppo-er
à Vander iMersch , leur ennemi
coniinun, et pin? particulièrement
celui de Vaii Eupen,qni contribua
heaucoupà le perdre. Dev<MUi 5C-
<Télaire des états du Brabant, Van
f!upeu en exerça le? fonctions jus-
qu'à la fin des troubles. Le i5 no-
vembre 1790, il fit la proposition
de jurer sur le rrucifix de repous-
ser les propositions de rAulriche;
mais les autres membres des étais
s'étant déterminés à accepter ces
propositions , la défection du gé-
néral Sthœnf«dd privafit Vàn
Eupen de tout appui , il s-e sauva
en Hollande, afin d'y être <4 l'abri
du ressentiment du gouverne-
ment autrichien. « De retour dans
?a pairie, après la conquête des
Français, il voulut de nouveau
jouer un rô!e par rascendant que
lui donnait la religion sur ses
compatriotes; et c'est alors que le
directoire, profitant de .son refuy
de prestation de serment, le fit dé-
porter ci la (luiane, où il finit ses
jours en «798. »
V AMEK' ( VicTOB-ArcirsTiN ) ,
homme de lettres, granmiairion
distingué, niembre de la société
royale académique des sciences,
de la société grammaticale, et de
la société des sciences, lettres et
arts de Mûcon, ii>{ né à Surenne,
près Paris, le 21 février ijCf). Il
occupa différcns emplois au nîi-
nistére de la justice, de l'intérieur
et de la guerre. Lors du licencie-
ment de l'armée d'Illyrie, oi'i il
était contrôleur des vivres en
iKio, il revint à l'ar^s , y fil des
VAN
'47
cours publics à l'Oratoire, a vit
l'autorisation du ministre de l'in-
térieur; c'est de cette époque que
date la réputation qu'il s'est ac-
quise, et qu'il soudent aujour-
d'hui honorablement. Il donna
par la suite chez lui, des soirées
gramtnaticales où Tabhé Sicard
et Mercier, membres de l'insiitut,
se rendaient exaclemeul, ainsi ([ue
plusieurs membres de la société
grammaticale, fondée en 1807,
par l'académicien Urbait» Domer-
gue. M. Vanier présida l'Mig-lemps
cette société, et contribua à la pu-
blication des Annales de grammai-
re. Il a inséré dans cet ouvrage
plusieurs dissertaiionsqui ont pro-
voqué des décisions de l'académie
française, wna enlr« autres sur
rad(jplion du signe ai, en rem-
]>lacement du signe o-i qu'on
voit encore figurer dans les dic-
tionnaires et dans presque toutes
nos grammaires. L'al)bé Sicard,
qui assistait à la séance de la socié-
té grammaticale, où celte question
fut agitée, ne partageant pas l'opi-
nion de son collègue, défendait la
dyphtongue oi; n)ais quand l'au-
teur en fut à ce passage de sa liis-
serlation , où il dit : « Du temps
même de François I", où nos
pères prononçaient comme ils é-
crivaienl, le double signe a-i re-
présentait déjà le son simple ê
dans les noms et dans les verbes;
ils ne confondaient pas je nuis avec
je noie, je tais avec je toi; un dais
avec un doigt, une haie avec une
oie : or, si le double signe a-i pei-
gnait bien le son siniple <? dans le
présent du verbe naître, je nais,
tu nais, il naît, le lui refu^ere■/,-
vous aujourd'hui dans l'imparfait
du verbe prendre, je j)re;i«/,v, lu
.:i8
VAN
\)renais, il pranait? S'il peint éga-
lement c*i son dans le présent dn
verbe taire, je tais, tn tais, il tait,
n'est-il p;is cx.iclenienl le même
dan» l'imparlalt dn verbe être, j'é-
tais, tu étais, il était? Remlez-vous
donc à l'évidence en adoptant la
réforme, et faites cesser cette or-
thographe barbare, qui nous fait
confondre français avec français,
paraisse avec paroisse, je perçais
avec je perçois. » L'abbé Sicard
«ni la franchise d'avouer qu'il n'a-
vait rien à répondre, et y mit la
générosité de s'offrir lui-même
pour défendre à l'académie la pro-
position contre laquelle il s'était
toujours prononcé : ce qu'il fit en
effet. M. Vanicr a publié : i" la
Clef des participes, 3' édition, i
vol. in-ia, Paris, 1824^ qu'il '<^ en-
richi d'exemples choisis dans les
meilleurs auteurs, et de deux sa-
vantes <lissertations sur les doc-
trines de l'abbé Sicard et de Do-
mergue, qui ont formé schisme
dans l'école grammaticale de nos
jours. Sa théorie tend à prouver
que nous n'avons qu'une seule
sorte de participe soumis à une
seule règle. Un de nos plus pro-
fonds hellénistes, M. Boissonade,
en rendant compte de cet ouvra-
ge, s'exprime ainsi : «Je n'ai
point vu de traité où la question
des participes, si embrouillée par
nos grammairiens, soit ramenée à
des termes aussi simples. » 2°
Grammaire pratique, adoptée par
l'Université de France , 1 vol.
in- 12, Paris, i834- L'auteur y suit
la marche de la nature; il exerce
les élèves à la pratique, les règles
ne viennent que coinme de sim-
ples remarques qui naissent d'el-
les-mêmes de l'observation des
VAN
faits. Cette excellente méthode é-
tait depui- long-temps signalée par
nos grands maîtres Kullin , Rous-
seau et les Solitaires de Port-Royal.
M. Vanieraeu le bon esprit, peut-
être le courage de la suivre et de la
publier: les suffi âges des officiers de
l'université, et les succès que cha-
quejour obtient sa grammairedans
les institutions où elle est admise,
sont la juste récompense de ses
travaux. On annonce que pour
con)pléter un cours de grammaire,
il va mettre sous presse : 3° Traité
d'analyse-, 4° Traité de syntaxe; 5»
Traité de ponctuation.
VAN - MAANEN ( Cobkeille-
FÉLix ) , ministre de la justice du
roi des Pays-Bas, commandeur
de l'ordre du lion Belgique, né à
La Haye, se consacra au barreau
dès sa jeunesse. Reçu avocat dans
sa ville natale, il y pratiquait arec
succès. Ses travaux judiciaires ne
l'empêclièrenl point cependant
de prendre une part active à tous
les débats politiques qui troublè-
rent long-temps la Hollande. L'a-
vocat Van-Maanen se fit d'abord
connaître par son ardent républi-
canisme, et jona un rôle marquant
parmi les patriotes les plus oppo-
sés aux vues dn chef de la maison
d'Orange. En 1787, sous le règne
de Louis XVI et le ministère de
M. de Vergennes , les patriotes
hollandais, quelque tenjps sou-
tenus par la France, et encouragés
par les promesses de secours plus
efficaces encore, fiers d'ailleurs de
leur force numérique et de la ma-
jorité des suffrages de leurs con-
citoyens , crurent leur cause con-
tre le stadhouderat gagnée. Mais
bientôt une armée prussienne ,
commandée parle prince de Bruns-
VAN
■\vick, entra en HollanJejIes trou-
pes françaises, réunies sur lalron-
tière, cur eut ordre ilese retirer; les
patriotes ab.mdonnés furent vain-
cus, et le stalhouiler, Guillaume
V, ajoutant à ses anciennes j)réro-
gatives. accjuit un pouvoir à peu
près illimilé. « Une. république,
dit dan^ «es mémoires M. Gail-
lard , chargé des affaires du roi de
France à L;i Uayc , une républi-
que dont l'existence physique é-
tait im chef-d'œuvre de l'indus-
trie des hommes réunis en socié-
té, et qui, à l'ombre d'une liberté
bii'nfais inte, avait fleuri par le
commerce et rassemblé dans son
sein une très-îçrande partie des
richesses de l'Europe, cette heu-
reuse contrée, si respectable par
l'antique simplicité de ses mœurs,
vil tout à coup s'éteindre en son
Sein JM.-qu'au nmindre germe de
liberté, par le soufflo eirii)oisonné
du despotisme, et cette métamor-
phose étranp-e fut l'etret de l'ab-
5urd(; opiniâtreté d'un «cul hon»-
me et lie la v;mifé d'une femme. »
Mais de nouvelles révolutions suc-
cé'lèrent à celle où le stadhouder
avait triomphé. En ijjjS, il fut à
son tour forcé r|e fuir, et de cher-
cher péniblement un asile en An-
pb^r-rre. Le parti anti-stadhoudé-
rien. auquel .M. Vaii-Maanen était
alors resté fidèle, le récompensa
de son dévouement. Il fut nommé
d'abord substitut - avocat fiscal
prés la c«jur «l'apjjel pour la pro-
vince de Hollande, et bientôt
ai'rès procureur-général près la
inr-me cour. Il en exerça les im-
jtorlaiites fonctions avec une ri-
goureusfi fenmté. On se rappelle
encore que >1. Ilepelacir Van ÏJriel
{vojr.cii nom), aujourd'hui minis-
VAN iqy
tre-d'élatdu roi des Pays-Bas, et
qui siège en cette qualité dans
les conseils du souverain, à c«îté
de M. Van-Maanen, fut arrêté h
La Haye, pour avoir répondu î\
quelques lettres de ses amis exi-
lés, et que M. Van-Maanen requit
contre l'accusé la peine de mort.
Le tribunal, toujours sévère, mai**
moins que le procureur fiscal ,
prononça cinq années de déten-
tion. Pendant la royauté momen-
tanée de Louis Bonaparte, M. Van-
Maanen devint son ministre de la
justice: mais il perdit cette place
ainsi que la confiance de son nou-
veau souverain, lorsque celui-ci.
en mésintelligence avec son frère,
crut avoir découvert que le mi-
niètre de la justice favorisait les
vues de Napoléon, et s'opposait
en secret à celles qu'il formait lui-
même pour la prospérité du pays,
dont le gouvernement lui avait
été confié. L'accusation, quoique
souvent reproduite , d'avoir sacri-
fié un frère à l'autre, et les inté-
rêts de sa patrie au désir de plaire
à Tempereur, n'a ccjx.'ndant ja-
mais été prouvée, et l'ancien pa-
triotisme de M. Van Maanen au-
rait dû le mettre à l'abri d'un pa-
reil soupçon. Dès l'incorporation
de la Hollande i\ l'empire français,
il fut nommé par Napoléon con-
seiller - d'état , et peu de temps
après, premier président de la
cour impériale de La Haye , com-
mandeur grand\;roix de l'ordre
de l'Union. En i8i5, la position
de M. Van-lMaanen devint didi-
cile. La place importante qu'il oc-
cupait réunissait tro[> d'avantages
pour qu'il voulût risquer d(! la
perdre en prenant part ;'i la révo-
lolion qui eut lieu au mois de no-
i5o
VAN
veinbre cle cette année. Aussi res-
t;i-t-il jusqu'û la fin dévoué a»i
{^oiiverrjemcnt de Napoléon. Mais
l<;s Françilis lurent enfin ohlinjés
(l'évacuer la Hollande, et le prince
d'Orange, fil.s aîné du dernier
stadhouder de la république des
Provinces-Lnies, revint d'Anj;le-
terre,el prit en inain les rênes
du gouvernuniont. C'est alors que
31. 'Van-Waanen eut besoin, et fit
preuve d'une, jiabilclé c<jnsom-
inée. Tous les autécédens lui é-
taient contraires ; l'opinion du
prince, l'ondée sur d'anciens sou-
venirs et sur de nombreux l'ails
récens , paraissait des plus défa-
vorables. Mais telle fut la chaleur
des protestations du const^iller-
d'état président, d'un dévoue-
ment sans bornes à la maison d'O-
range, d'un entier abandon de tous
les principes populaires opposés au
j)ouvoii-, telle fut enfin l'éloquence
persuasive df. cel homme d'état,
qui parvint non-seulement à con-
server sa place, mais qu'il Ini fut
encore accordé d*e?^ercer les fonc-
tions de ministre de la justice.
C'est en celte qualité qu'il porta
la parole, au nom du prince sou-
verain , (^ans l'assemblée des no-
tables, convoquée à Amsterdam
tifi iBi/i? pour voter sur une nou-
velle loi fondamentale. Après la
création du royaume des Pays-
Bas, par l'acte du congrès de
Vienne, M. Yan-Maanen fut déû-
nilivement nommé, le )6 sep-
tembre 1816, ministre de la jus-
tice, poste qu'il occupe encore
aujourd'hui ( iSaS). Il y remplit
tout ce qu'jl a promis. Dans la
session des étftts - généraux de
1817 à i8i3, ila porté et soutenu
dcYarJl la SfCûode chambre deux
VAN
projets de loi. Le premief avait
pour objet de limiter encore da-
vantage la liberté de la pre«;se,
garantie par la loi fondamentale,
mais déj:'i resserrée en des bornes
bien étroites par la loi dite des
cinq cents florins; le second dé-
clarait le droit de chasse un droit
Régalien, ou faisant partie de la
prérogative royale, et en prjvait
par conséquent les propriétiiires
de biens-fonds. Ces deux prc>jets
de loi , présfiités parle ministre,
et qui avaii-nt d'aboid excite d'as-
sez vives alirmes dans le pays,
furent iléfendns avec une éloquen-
ce remarquable, quoique bien dif-
lérente decelli; employée en 1 793,
et avec ime tlcxibililé de talent qui
élonnèrent tous les anciens amis de
M.Van-Maanen. Malgré les effort»
lîe se? amis nouveaux, les deux
lois, impronvées par la nation,
fureril rejetées par la chambre, et
l'orateur exigea mènie vainement
que cette chambre rappelât i"» l'or-
dre l'bonurable député d'Otren-
ge , qui, en les combattant avec
chaleur, n'avait point ménagé le
proposant. Le ministre de la jus-
tice montra encore la niême éner-
gie dans nue autre circonstance
mémorable. Pendant les troubles
de i8i3 «.'t 1814, l'autorité avait
établi temporaiiemeiit et sans au-
tres formes que l'énoncé de sa vo-
lonté, une espèce de tiibunal pré-
vôlal, ou de conseil de troubles 3
pour imprimer, était-il dit, la ter-
reur aux mutins et aux conspira-
teurs , pour contenir l'esprit de
sédition et de soulèvement, au
moment où l'ennemi ei^térieur
(les Français) était aux portes,
l^es membres de cette commissio,n
avaient depuis l^n^-temps cessé
VAN
de 5C réunir; l'on était même con-
vaincu qtie depuis l'établissement
de la constitution et rinslallation
des tribunaux de première et de
seconde instance , la justice ne
s'administrerait plus par des com-
missions. Mais, à la consternation
générale des Belges, le ministre
de la justice remit en activité à
Bruxelles la cour spéciale extraor-
dinaire. • Un cri d'indignation s'é-
leva dans tout le l'ityaume; le mi-
nistre soutenait que celte cour
n'ayant été abolie par aucun acte
public de Tautorité,» il avait le
droit de la rétablir. «Que ne réta-
blissez-vous donc aussi , lui ré-
j»oudit-on , le conseil de troubles
du duc d'Albe, qui a ensanglanté
notre pays ? L'acte qui le suppri-
me serait dillicile à produire. >> La
cour spéciale extraordinaire n'eu
entra pas moins en l'ouclious ;
mais a}>rès avoir condamné un
]>rêtre catholique, l'abbé de Foere,
et quelques individus obscurs, a-
près a voir aiu'i suffisamment Cons-
taté l'oinnipotcnce ministérielle,
on céda à l'opinion, et les commis-
saires se virent congédiés. Plusieurs
écrivains furent à la vérité successi-
vement sacrifiés aux mânes du tri-
bunal défunt. Les journaux, com-
me l'a si bien dit en Franco un
houuue d'état ( .M. le comte de
Villéle), ne font pas rojjiniou, ils
l'expriment; mais les journalistes
qui l'avaient le plus énerglque-
menl exprimée eu celle occasion
ftirent punis. De.« Belges furent
arrêtés, et les rédacteurs qui n'a-
vaient pas eu le bonheur de naître
dans !»• royaume, eu furent exilés
sans procès ou jiigcujeol préala-
ble. Les gcrularmes suppléèifut
aux juges. Lu autre ^^de. p!»r.)«-
YAN i5i
quel M. Van-Maaneu a depuis si-
gnalé encore plus courageuse-
ment, s'il est possible, son admi-
nistration judiciaire, et son désir
de donner au pruivoir exécutif la
force la plus efficace, a été l'in-
carcératiou des six principaux
avocats de Bruxelles; elle eut lieu
en 1819. Le premier volume d'un
ouvrage statistique sur le nouveau
royaume des i'ays-Bus venait de
paraître. L'auteur, iM. Vander-
Straeten, crut n'avoir point fVau-
chi les limites imposées à |a li-
berté de la presse, liberté garantie
par la loi fondamentale. Mais l'ou-
vrage déplut; l'auteur fut arrêté
et uns en cause. MtM. Barlhelemi,
Bayens,Defrcnnc, Doncker,ïarlc
cadet el Slevens, qui tous jouis-
saient d'une haute considération,
due non-seulemenl à leurs lalens,
mais k leur caractère et à leur
honorable conduite en tous les
temps, signèrent en faveur de M.
Vandcr-Straelen , une consulta-
tion , conçue en termes très-mo-
dérés, niais d'une logique pres-
sante. Ils partagèrent bientôt le
sort de leur client. Ou seul com-
bien il serait avantageux à l'auto-
rilé que certains accusés qui au-
raient particulièremenl déplu ne
trouvassent jamais d'avocats. Le
moyen ingénieux d'envoyer en
prison et l'accusé et ses délén-
leurs, n'avait cependant pas en-
core été tenté. Il n'eut pj»s, il est
vrai, au inoins pour là suite, tout
le succès qu'où pouvait s'en prr»-
mettre ; mai> la vengeance du mo-
meirt fut eu nariic siatisfaite. Par-
venus i\ un certam âge, rnais étran-
gers .10 régime des prisons rendu
plus sévère eu cette circonstance,
qitelques-iiiis de? d.'tciiu»; tombé-
il
\3j. van
rent mnlaJes. Tout le barreau de
Jiriixelies jçAinit do ?e voir privô
de ses principaux orneiiiensi. Les
iiomltreu.ses clieiitelîes des six
avocats nt' se plaignirent pas
moins amèreinetit,en vo3'ant leurs
înlérêls lésés, et le cours de la
justice en qnelqne sorte suspendu
pour eux. Il fallut enfin, après
plusieurs seniaînes d'uru; rigou-
reuse caplivité,se résoudre à l'aire
juger des citoyens jusque-là irré-
prucl:ab!es, et qui tous nés dans
le [>ays, ne pouvaient pius être ex-
Irajudiciaiienienl exilés ou mis à
la disposition des gendarmes.
Quand la cause fut appelée, une
partie des populations des villes
de Gand, d'Anvers, de Louvain,
et des bourgs ou village* environ-
uans, se rendit en t'"nlc à Bruxel-
les. Les chemins étaiint couverts
de voyageurs qui s'intéressaient
vivement au sort des accusés. Le
tribuua!, quoique composé com-
me les autres cours du ro^'aume ,
de juges amovibles, faiblement
salariés, cl qui tous attendaient
leur avancement ou leur fortune
du bon plaisir ministériel, ne crut
pas cependant pouvoir sévir à son
gré en cette occasion. Les six avo-
cats furent honorablement acquit-
tés, remis en liberté et lecou-
duils chez eux aux acclamations
prolongées de la multitude qui
environnait le tribunal. Mais M.
Vandcr-Slraelen fut condamné à
rester en prison et à payer une
amende surpassant de beaucoup
sa fortune, et que ses concitoyens
l'aidèreul à acquitter au moyen
d'utjc souscription ouverte en sa
faveur. M. Van-Maaneu adminis-
tre encore avec la même distinc-
tion cl. 'a même vigueur le dépar-
VAN
tement de la justice. Ses talens
littéraires l'ont fait nommer mem-
bre de l'institut du royaume des
Pays-Bas. Il n'a point publié d'é-
crits ; mais il a, dit-(»n, en porte-
feuille des mémoiresd'un grand in-
térêt .-ur les phases révolutionnai-
res de son pays.
VAN MAKWM (Martin), l'un
des plus grands pb\siciens et bo-
tani>tes des Pays-Bas, est né à
Deift, vers l'année i^5o. Il ma-
nifesta, étaitt trés-jeune encore,
mi goftt décidé pour les mathéma-
tiques, et trouva dans son père,
très-bon n)<'ithéiriaticien lui-mê-
me, un guide éclairé pour l'étude
de cette scienee. Envoyé à l'aca-
démie de Groniugue pour y étu-
dier la médecine, il s'y appliqua
avec le même succès, et futpro-
niu nu double gridede docteur en
n)édecine et en philosophie. I! y
soutint encore à cette occasion u-
ne dissertation botanique, qu'on
ne peut citer avec trop d'éloge.
Ce sont des aperçus nouveaux sur
cette science, et des observations
aussi justes que profondes. Quel-
que temps auparavant, il avait
publié im excellent traité sur
l'électricité, Gronlngue , 1776,
in-8°. II fut l'un des diciple-. les
plus distingués du célèbre profes-
seur Piene Camper, qui l'honora
de son amitié jusqu'à sa mort.
Après avoir terminé ses études,
!V1. Van Muwm alla s'établir à
Harlem, pour y exercer la méde-
cine; mais bientôt subjugué par
son goût pour la physique, il y
ouvrit un cours de cette sciencn,
qui, ayant un très-grand succè>, le
détermina à abandonner la prati-
que de la médecine pour se li-
vrer tout culier aux sciences phy-
VAN
niques. La rcpiitalion qu'il y ac-
quit le fit i,ominer st^cn'taire de la
socitlé (h- Harlem. Si celte socié-
té lui fa honi>eiir par c«'tte nomi-
nation, (le soji côté Cet habile na-
ttirali.«j(e n'honora pas m ins le
corps iiuqiiel il « tait aj50cié, et par
riniMortatice de ses travaux, et par
l;i célébrité qu'il lui procnia dans
tout le monde savant. A la mêine
époque, il fttt nommé prolesseur
[trctor) de physiqtie dan> la même
ville, et peu de temps après di-
recleur du cabinet de physique de
Teyier. Il donna tant de soins à
cet étahlis-^ement , el employa a-
vec un tel discernement pour le
t'ompléler, les sommes dont il
pouvait disposer, qti'il l'éleva ;\
un degré de perfection el de splen-
deur, auquel ne peuvent atteindre
les plus beaux cabinets de l'Euro-
pe. Ce que les étrangers et les cu-
rieux admirent surtout en passant
par Harlem, ce sont les gazomè-
tres et ime électricité d'mie gran-
deur immense. M. Va» Marwm,
dont le nom est devenu européen,
s'est rendu célèbre par une foule
d'expériences intéressantes dans
la chimie el dans la physique,
dont le but était non-seulement
de les perfectionner, mais encore
de les rendre plus utiles à la vie
commune. Parmi les instrumens
pour la physique et la chimie rpie
M. Van iMarwin a perfecliontiés,
la machine électrique avec son ap-
pareil tient le pri inier rang; le se-
cond pciil-êlre attribué à la pom-
pe prieuuialiquc, qui fui perfec-
tionnée au point (prdle porte le
nom de pompe pneumatique du
docteur f^an Manrm; et le troisiè-
me enfin, au ga/ouifire de I.avoi-
sier, dont la descripiicm se trouve
VAN
i55
dans le Courrier dfx Arts et Belles-
lettres, journal hebdoMiadaire. iui-
primé à Harlem, tom. VIII, in-/i°.
M. Meerman. dans f^e'^Jiumles des
Sciences et des Arts, pagei56. rend
un hommage aussi juste (pie vrai
à M. Van i>larwm, en parlant des
services qu'il a rendus au musée
Teyiérion, lorsqu'il dil «qu'il pos-
«sède une aptitude toute particu-
«lièreà f.ivoriser les sciences phy-
«siques et chimiques par l'invcn-
))tion de nouveaux instrumens, le
» perfectionnement de ceux qui
«exi-itent déjà, et la continuation
«non interrompue de ses expé-
nriences. » M. Van .Marwm a pu-
blié la plus grande partie de ses
observalions sur la physique, la
chimie et l'histoire naturelle, dans
le Courrier des Arts et Belles-Let-
tres. On en (rouvera l'énuméra-
tion dans ses Tables des matières.
On a encore de lui deux Mémoires
sur Céleclricité, couronnés par la
société batave, pour la philo;'Ophie
expérimentale, à Rotterdam, dont
le premier, qui a M. Van Marwm
seul pour auteur, a été imprimé
en 1781, dans le (i' vol. des œu-
vres de cette société, et le second,
auquel M. Paels Van Twostwyk
a coopéré, et qui porte les noms
réunis de ces deux savans, a paru
en 1785, dans le ()' vol.; un troisiè-
me mémoire, que la même socié-
té a couronné, et auquel a égale-
ment coopéré M. Paets Van
Twostwyk , est intitulé : Sur la
nature des exhalaisons nuisibles des
marais, lieux d'aisance, hôpitaux,
mines, etc., et sur les moyens de les
corriger, et de secourir les person-
nes qui en ont été atteintes, publié
en «7^7, dans le 8' vol. des œu-
vres de cette société. Une discu-^-
154
VAN
sion qui s'éleva entre M. Herselin
et M. Van Marwm, sur une qiics-
lion hjdrostali(]iie, prouva aussi
combien ce doiiiier élait instruit
dans celte partie de la méc3ni([ue.
C'est eu 1801 qu'il [lublia sa Â^/-
IreàM. VoUn, sur ta colonne élec-
trique; elle était écrite origiuaire-
liient en français; il eu a donné
evisuite une traduction hollandai-
se. M. Van Marwm est chevalier
de l'ordre du Lion Belgique, niem-
hre de l'institut dt's Fays-Bas et
de plusieurs autres sociétés savan-
tes, nationales et étrangères. .
VAN MONS (Jean-Baptiste),
célèbre chitniste belge, est né à
Bruxelles, le 11 rioveinbre i^65.
II s'appliqua de bonne heure à
l'étude de la chimit; , devint un
pharmacien habiles , et malgré ses
connaissances et un long exercice
au milieu d'- ses concitoyens, il
étudiait encore cette science, lors-
que les découvertes de Lavoisier
lui donnèrent un essor auquel on
dut les succès innnenses qui en
ont fait depuis une science nou-
velle. Van Mous ne pouvait être
indifférent à cette révolution ; il
l'adopta avec enthousiasme, et la
propagea en Allemagne et dans
tout le reste de l'Europe. Il fit
plus encore ; pour activer sans
cesse les progrès de la chimie, il
établit avec les savans des diver-
ses contrées une correspondance
suivie, au moyen de laquelle il
communiquait aux étrangers les
découvertes et les travaux des
Français, et faisait passer à ceux-
ci les recherches et les résultats
des étrangers. Pour qu'un inter-
prète infidèle ne vînt pas altérer
le sens des no,tions transmises, il
se .sqmïiit au. pénible travail d'é-
VAN
tu'iier les diverses langues de
riiurope, et il est parvenu A les
posséder et à les écrire toute»
avec facilité. Lorsqu'en 1792, à
la suite de l'invasion des Fran-
çais, on organisa à Bruxelles une
asseit)blée de représenlans tlu
peuple, M. Van Mous y fut appelé
un des premiers. Le gouverne-
ment français ayant par suite éta-
bli une école centrale à Bruxel-
les , l'y nomnia professeur de phy-
sique et de chimie. Il cessa alors
d'exercer la pharmacie , et eu
1807, il se fit recevoir docteur
à la faculté de Paris. Depuis les
événemens de i8i4» il est asso-
cié étranger de l'académie de Pa-
ris, et professeur à l'uinversité de
Louvain. Il a publié des ouvrages
sur les différentes branrhes de
sciences qu'il a cultivées. Voici
les principaux : i" Essai sur les
principes de la chimie antiplogiS'
tique, in -8", Bruxelles, 1785;
3° Pharmacopée manuelle, in -8°,
Bruxelles, au 9; 5° Synonymie
des nomenclatures chimiques mo-
dernes, par Brugualelli , traduit
de l'italien, 1802, iii-8°, ibid. ,
an 1 1 ; 4° Journal de chimie et de
physique , 6 \ol. in-8°, Bruxelles,
années 9, 10 et 1 i ; 5" Principes
d'électricité, in-8°, ibid. , an 11;
6° Théorie de la combustion , iu-8°,
ibid., an 12; 7" Essai sur une
théorie chimique modifiée, 4 vol.
in-8", ibid. , 1806-1807 : cet ou-
vrage n'est point achevé ; 8" Lettre
à M. Bucholz , sur la formation
des métaux, 181 1 , in-8' ; 9° Elé-
mens de chimie philosophique, par
Davy, traduit de l'anglais, avec
de nombreuses additions, 2 vol.
in-8°, Bruxelles, 18 «5- 18 16; 10''
Principes élémentaires de chimie
VAN
plùlosophique , avec des explica-
tions gètirrales de la doctrine et
des proportions déterminées, in- 12,
IJiuxelle?, 1818. M. Van Âlons a
uus^'i élé, pcnJant plusieurs an-
nttir> , lin des rt.dacteurs des An-
nales de thiniie , rédigées à l*aris,
et il enrichi tl'nne foule d'articles
la plupart di'S journaux «cientiû-
«fut-s de l'Europe. Il s'es^t occi.pé
«it'puis plus de quinze ans du per-
fi'Ctiunnement des diverses espè-
ces de fruits, par la méthode du
^einis, et n'a cessé de faire ses ex-
périences surGo,ooopieds d'arbres
semés. Il a pu^^lié, en 1820, un ou-
vrage sur ce genre de cull;ire.
VANNI (Chables), membre de
la jimte d'état, créée à Naples, en
'794 ' s'était jeté de bonne heure
dans le barreau pour y chercher
quelque moyen d'existence. Sp
sentant incapable de s'élever par
ses talens, il eut recours A l'intri-
gue, et par une conduite aussi lâ-
che que coupable, il vint à bout
de >e faire remarquer.il avait déjà
donné la mesure de son immora-
lité eu s'offrant. en 17^5, à l'allan-
te, pour séduire quelques jeunes
gens, qu'il devait lui faire sur-
prendre dans une loge de francs-
maçons à Capodimonte. Cette
trahison , qui plongea dans le
deuil plusieurs familles, avait va-
lu à ce iriisérable une place dans
la magistrature, et le rendit ew-
suile digt»e de prendre part à la
persécution des patriotes iirspoli-
tains, qu'Aclon avait ronseillé»! ù
la reine. Vanni, qui a élé pendant
quelques années l'arbitre de la for-
tune et de la vie des plus honnê-
tes citoyens , avait été charge
d'^xainin^r la comptabilité du
pripce de.Tai^sia, un d^s griinds
VAN 1 55
olficiers de la couronne, qne le
roi avait eu l'idée de placer à la
tête d'une fabrique de soieries,
qu'il venait de fonder à San-Leu-
cio. Il arriva ce qu'il était facile
de prévoir: les employés subal-
ternes s'eniichirent, et le chef de
rétablissement fut déclaré respon-
sable do leurs dilapidations. Van-
ni. qui s'était montré plutôt le
bourreau que le juge du prince de
ïarsia, fut choisi par Acton com-
me rinslrumtnt le jdus actif de
sou despotisme. La première jun-
te , qui n'avait pas répondu à l'at-
tente du aiinistie, fut cassée,
et Vanni, C...., Guidobaldi furent
appelés à consommer la ruine de
l'état et des familles. l\> commen-
cèrent par démoraliser une partie
de la nation pour la faire servir à
dénoncer l'autre : ils tendirent
leurs lîlels dans tout le royatmie,
et personne ne put restera l'abri de
l'injustice et de la calonmie. Cet
épouvantable terrorisme dura pres-
que quatre ans, et ne finit que peu
avant la première invasion des
Français en 1799. La nation, fa-
tiguée d»î tant d'excès, éclata en
invectives contre ses oppresseurs
el le gou verîientenl se vit obligé do
mettre un terme à la fureur de la
junte d'état. Sacrifié par ses pro-
pres collègues, qui le chargèrent
de tons leurs crimes, Vanni fut
destitué et banni de la capitale.
Celte disgrûce l'accabla d'autant
plus, que le royaume d<! Naples
ne tarda pas à être occupé par les
armées républicaines, l'ouisuivi
par ses remords, et craignant la
vengeance de ses ennemis, ii s'a-
dressa à la reine pour être reçu ù
bord de l'escadre <|ui devait em-
mener la couc en Sicile. Cette de-
i56
VAN
mande ne fdtpas.'icuiieilliOjOtVnM-
ni iH! vit alors d'autre ressource
pour lui que d'altcMilcr à son exis-
toiice. x\varit de se fr.tpner, il écri-
vit ce billet qu'on trouva [in'is de
son cadavre : « !/iiigratiludo d'u-
une cour peifide, Tapproclie d'un
"Cnnerni redoutable, le manque
1; d'asile, m'ont porté à n)e deli-
»vrer d'une vie qui m'est à char-
"•,'e. Qu'on n'accuse personne de
»ce crime. Puisse ma mort servir
"d'exemple aux autres inquisi-
» leurs, et leur apprendre à être
«sages. .) Vanni se détruisit dans
ime petite maison, à Sorrento, le
kS janvier 1 709.
VAN-PRAÈT ( Joseph-Basile-
Bernard ) , né à Bruges en juillet
1737, vint fort jeune en France,
et fit ses éludes au collège d'Arras.
En 1784,11 entra comme employé
à la bibliotlièque du roi. Quoique
la nature de ses occupations pai-
sibles et séde,nlaires, et une ex-
trême modestie qui l'empêcha
toujours de se produire en public,
dussent contribuer à lui assurer
ime vie douce et tranquille, et à
le mettre à l'abri des persécutions
pendant les troubles de la rérolu-
linn, néanmoins il (ut, en 1795,
dénoncé comme aristocrate, avec
quelques-uns de ses collègues,
entre autres Barthélémy, Champ-
l'ort et Capperonnier, et incarcéré
aux ftladelonnetles, où il ne resta
que douze jours, ayant été récla-
mé par le comité de sa section.
Après avoir rempli pendant deux
ans, par intcriui , les fonctions de
conservateur de la bibliothèque ,
M. Vau - Praet fut nommé à cet
emploi en 1796, pour les livres
imprimés. Depuis quarante ans
qu'il est à la bibliothèque royale,
YAN
les personnes qui la fréquentent
n'ont jamais eu qu'à se louer de
son obligeance et de son aménité:
il sait habilement faire apprécier
aux éliaiigers l'impoitance et la
richesse de l'établi-sement auquel
il est préposé, et dont la France
s'enorgueillit à juste titre. Il a
reçu , en 1814? 'a décoration de
la légion-d'honneur et des lettres
de naturalisation, son pays natal
ne se trouvant plus alors renfer-
mé dans les liniiles assignées à la
France. M. Vau-Praet, mem])re
de l'académie celtique, de la so-
ciété royale académique dos scien-
ces de l'a ri s , et correspondant de
l'institut de Hollande, a publié
divers ouvrag'i* qui alte-^lent ime
grandeéruditiou en bib'ingranhie :
1° Recherches sur la vie et les écrits
de Colard Maiision , iiupiimeur à
Bruges durant le 1 5' siècle; i"^
Notice abrégée d'un uianuscrlt fran-
çais de la bibliothèque du roi, in-
titulé : Tournois de la Gruthuse ;
5° Description des manuscrits de ta
bibliothèque du duc de la Val Hère,
5 vol. in-8''; 4" Catalogue des li-
vres imprimés sur vélin de la bi-
bliothèque du roi , 5 vol. in-S" ,
1825 ; 5" pour faire suite à l'ou-
vrage précédent, Catalogue des
livres imprimés sur vélin, tant
des autres bibliothèques publi-
ques que des bibliothèques parti-
culières, 5 vol. in-8". i824-
VANSITÏARÏ ( Nicolas) ,
chancelier de l'échiquier, etc. ,
est né h Londres , d'une famille
originaire de Hollande. Il com-
mença ses études à Weslujiu^ter,
et les termina à Oxford en 1791.
Ayant déployé de grands talens
comme financier à la chambre dos
communo?, où il avait été élu.
VAIS
el possédant une grande fortune
avec l.j réputation d'une sévère
inJéjjrité, il devint, en 1800, se-
crétaire de la Irésîorerie, époque
de la tbrm.ition du ministère qui
i-uccéda à W. Pitl. Quelque temps
après, presque à la suite de la
ujorl de M. l'ercival, il lut nom-
mé aux fonctions importantes de
chancelier de l'échiquier. Les 4
et3i mars iSij, il ûl à la cham-
bre des communes un long r.ip-
port sur l'état des finances de
l'Angleterre, et prouva qu'elles
étaient devenues exlrcuiement
florissantes depuis la prorogation
du parlement , et depuis celle
épocpie jusqu'aux derniers événe-
mens militaires. Il prt^senta en-
suite un plan général d'améliora-
tion ; c'était un projet d'amortis-
sement de la délie publique, qui
fixa d'autant plus Tallenlion de la
chambre, qu'il créait des fonds
suflisans pour cet objet, et qu'il
ofl'rait la facilité d'alléger les
créances de l'élat. Le 8 novem-
bre 1814, il se montra le défen-
seur des ministres , en repoussant
l'attaque dirigée contre eux par
i>I. \Vithbri;ad, à l'occasion de
l'adresse d'un juge au prince-ré-
gent, sur la manière d'adminis-
trer la justice. Le i5 mars 181 5,
il proposa d'acheter de la com-
pagnie fie la mer du Sud , son pri-
vilège exclusif de commerce avec
l'Amérique méridionale. A celle
occasion, MM. Wilhbread et Ben-
net tracèrent un tableau effrayant
de la guerre qui dé.4olait les colo-
nies espagnoles, et demandèrent
au gouvernement de prendre des
mesures pour rappnxdier les deux
partis et assurer la liberté de 18
millions d'Espagnols dei> deux
VAN lô:
Amériques. M. Vansittart leur ré-
pondit « que l'Angleterre avait
fait offrir sa médiation , mais qu'il
ne convenait pas de rien faire qui
pûl être considéré conmie uu
manque de foi envers le roi d'Ls-
pague, malgré tous les avantages
que le commerce libre avec l'A-
mérique espagnole pouvait pro-
curer à la Grande-Bretagne. '>
L'Angleterre fit tout pour l'Amé-
rique, en restant inaclive; si elle
eût employé la force pour com-
primer l'élan des peuplt-s , les
haines y eussent été inextingui-
bles, comme on le voit chez d'au-
lies nations, et les Anglais épui-
seraient encore aujourd'hui leur
sang tt leurs subsides dans ces
contrées, au lieu d'y recueillir les
avantages que leur assure la re-
connaissance de l'indépendance
qu'elles ont conquise. M. Vansit-
lart, membre de la société bibli-
que, prononça en cette qualité
dans rassemblée qui eut lieu, en
mai 181G, un discours où il fai-
sait le plus grand éloge de la
sainte -alliance. Il est peu élo-
quent ; les chifl'res sont ses armes
habituelles, et jamais il ne ré-
pond aux traits quelquefois acé-
rés qu'on lui lance du haut de la
tribune , qu'en déroulant un im-
mense cahier tie calculs, derrière
lequel il conserve un flegme im-
perturbable. M. Vansitlart a pu-
blié : 1" Uéflexions sur la nécessité
el l'avantage d'une paix immé'
(iiale , in -8", 1788; 2° Lettre à
M. Pilt sur la conduite d<^3 direc-
teurs de 1(1 banque f avec des obser-
vations sur le pamphlet de. Mor-
gan , relatif à la dttte publique,
in - 8% 1 79.5 ; ?>' liecheixben sur
l'état dts finances de ta Grande-
1 58
VAU
Jiretagne, in-8% i 79C ; 4° Subs-
liivce (le deux discours sur le rap-
port du comité des niotinaics, in 8",
181 I ; 5* Trois Lettres sur la so-
ciété anglaise et étrangère de ta
Bible, \n-i)°, tSia, iiLsérée.-? dans
le Pampleleer, 11° 1"; 6' Discours
à la chambre des communes , 20
lévrier i8i5, sur le comité des
voies et moyens ; •p' Budget de
181 5. Ct'S deux dernières bro-
chures ont été insérée» dans le
Pampleleer y avec des obstrva-
tion«.
VAUBLANC-VIENNOT(lecom-
TE Vincest-IMarie de), membre de
\i\ cbambre des députés, membre
du conseil supérieur de commer-
ce, grand-olficier de la lé;;ion-
d'hormeur, chevalier de Saint-
Louis, etc. , est né en i^-ôô Élevé
à l'école militaire, il suivit quel-
que temps la carrière des armes.
Secrétaire de la noblesse de iMe-
luu, en 1789, il fut nommé, au
mois de septembre 1791, par le
département de Seine-et-Marne,
à l'assemblée législative, où il .•«e
montra bientôt l'un des meudires
les plus opposés au nouvel ordre
de choses. Il parla en laveur des
émigrés et des prêtres réfraclai-
res, demanda que le comité di-
plomatique présentât un rapport
sur la nécessité d'éloigner des
frontières les Iréres du roi ; s'op-
posa au séquestre des biens des
émigrés , voulut , mais inutile-
ment, défendre le ministre de
Lessart, empêcha M. Bertrand de
ftjolleville d'être mis en accusa-
tion, et obtint la suspension du
décret rendu contre i»!. de Noail-
ies, ambassadeur à Vienne. M. de
Vaublanccombattit avec beaucoup
de courage l'amnistie propo.-ée en
VAL
faveur de Jourdan {yoy. ce nom) ,
et des autres auteurs des nia«>a-
crcs de la (i/rtc/tre d'Avignon ; il
fil décréter d'accusation Marat,
et interrompit avec iudigfialion la
lecture d'une pétition par laquelle
un fils dénonçait le? opinions de
sori père. Il prit contre Tes Giron-
dins la défense de AJ. de La Facet-
té , enfin il fit mandera la barre
de l'assendjlée l'étion, maire de
Paris, et M. Roedérer, procureur-
s^'udic du département , pour
qu'ils y rendissent compte des
mesures qu'ils avaient ordonnées
j»oin" assin-er la tranquillité de la
capitale. Il ne fut point réélu à la
convention natiouide. Ses prin-
cipes qui, lorsqu'il était membre
de rassemblée législative , l'a-
vaient signalé à la haine du peu-
ple , et plusieurs fois < X| osé à sa
vengeance, le firent uuîttre hors
la loi sous le régime de la ler-
leur; il échappa néann)oins à la
proscription, «t reparut après la
révolution du 9 thermidor an 2.
Président de la section Poisson-
nière à l'époque de l'insurrection
sectionnaire contre la convention
nationale (1 796), il fut condamné
à mort par coutuniace, conjme
ayant fait partie des comités di-
recteurs de ce mouvement sédi-
tieux. Dans le même temps, deux
jours avant cette C(mdamnalion ,
le déparlement de Seine-et-Marne
le nommait député au conseil des
cinq-cents. Le 29 janvier 1796.
il réclama une première fois con-
tre ce jugement , et ne réussit pas
à le faire annuler : il fut plus heu-
reux à la seconde. Acquitté à la
fin d'août de la même année, il
parut au conseil des cinq-cents,
le 2 septembre 1796, pour y prcn-
y
TAU
dre séance et prononcer le ser-
ment (le haine à fa royauté. Il le
prêta, an grand étonnemenl de
l'assemblée. Tous ses discours au
conseil fnrent une constante op-
position au parti républicain et
au directoire-exécutif. A l'époque
'lu i8 fructidor an 5 (1797) •> lors
de la lutte entre le directoire et
les conseils, il était membre de
la coriimission des inspecteurs
chargés de prendre les mesures
de résistance; le directoire ayant
triomphé, il fut condamné à la
déportaiion. Il parvint à s'y sous-
traire, et passa en Suisse, d'où il
se rendit en Italie, et revint en
France après l'établissement du
gouvernement consulaire, lin 1800,
membre du corps - législatif par
élection du sénat-conservateur, il
fut nommé, en i8o4» par le dé-
parlement de Seine -et - Mart)e ,
candidat au sénat ; devint , en
i8o5, préfet du département de
la Moselle , et successivement
comte de l'empire et comman-
dant de la légioû-dhonneur. En
i8i3, il fut attaqué de la maladie
contagieuse causée par le grand
nombre de soldats malades ou
blessés dirigés sur MvAz , chef-
lieu de sa préfecture, et en faveur
desquels iM. de Vaublanc avait
fait établir plusieurs hôpilaux. Il
tut un des premiers à se pronon-
cer contre l'empereur et pour 1«
rétablissement du gouvernement
royal ; et au ?.o mars 181 5, à ex-
horter lii garde nationale à rester
fidèle au roi , et à prernlre , de
concert avec le maréchal Oudi-
not , lies mesures pour défendre
»la ville contre Napoléon. Ce prin-
ce, (}ui avait fait tant d'ingrats
tans se venger, donna cependant
VAU i5()
l'ordre d'arrêter M. de Vaublanc,
qui toujours informé à temps des
dangers qu'il courait, se hâta de
prendre la fuite. Il arriva à Luxem-
bourg, où le général autrichien
lui témoigna une grande considé-
ration. iM. de Vaul)lanc revint à
Paris, à la suite du roi, en 1814.
Ce prince le nomma successive-
conseiller-d'étal , préfet du dépar-
lement des Bouch(;»-du-Rhône et
ministre de l'intérieur. M. de Vau-
blanc a marqué son mitnslére
dans le monde savant, [)ar la réor-
ganisation, en 181G, de rin<litut,
où tant de nouveaux académi-
ciens improvisés vinrent occuper
les places d hommes qui jouis-
saient depuis long- temps d'une
haute considération littéraire.
Comme l'un des organes du gou-
vernement, il a peu marqué, cl
a été remplacé au ministère de
l'intérieur par M. Laine, aujour-
d'hui vicomte et pair de France.
A sa retraite , M. d«; Vaublanc fui
nommé ministre d'état et mem-
bre du conseil-privé. En 1820, il
a été élu par le département du
Calvados membre de la chambre
des députés, et réélu, en 1824, à
la chambre septennale ; il est
membre libre di; l'académie royale
des lieaux arts. Ses ouvragts sont :
i' Considérations critiques sur la
nouvelle ère , sous la forme d'un
discours supposé i\ la tribune du
conseil des cinq-cents, suivi de
l'extrait d'un mémoire à l'astro-
nome Dt.'lambre, sur les moycu.n
de trouver les années sexiiles du
nouveau calendrier, 1801, iu-8" ;
2" Rivalité de la France et de
rÀngleterrCj depuis la conqm'''te
de Guiltaumi; , eu io()(i, jusqu'à
la rupture du traité d'Amiens
iGo
\AV
p;ir l'Angleterre, i8oô, in - 8°.
VAUCaRAUD (Pierre-IIénû-Ma
RIE de), vice-amiral, grand'croix
de l'orrlre royal el iniiil.iire de
Salnt-Loiiis, oflJi.ier de l'ordre
royal de la iégion-d'honneur, né
en 174', a"X sahles d'OInnne, se
voua de bonne heure au service
de mer, et s'embarqua, en 1756,
sur \c vaisseau VEveillé, comme
garde de la marine. Enseigne en
1762, il montait le Tonnant, qui
releva la garnison d<' Wahon, et
fit lu remise de (!elte foitcresse.
Coinrnandanl d'un aviso dans l'es-
cadre d'évolution sous les ordres
du comte d'Orvilliers, il était
chargé de porler les ordres et de
répéter les signaux. Il se distin-
gua dans ce service, et fut ch.irgé
d'apporter à Vc-rsailles le compte
des opénitions. Au combat d'Oues-
sant, il suppléa M. L)u<;haîraud,
qui commandait l'arrière-garde ,
et qui venait d'être grièvement
blessé. Par son dévouement il
sauva toute la flotte de Bre?t, que
iDenaçait de l'incendie leuibrasse-
meiit du vaisseau le Roland. A la
recommandation de WiVl. d'Orvil-
liers et Duchaftaud, ses ihefs, il
reçut le commandement de la fré-
gate le Fox, capturée sur les An-
glais, et fut le major eu second de
W. d'Orvilliers dans les flottes
combinées de France et d'Espa-
gne, dirigées contre les Anglais,
il l'ut major-général de l'armée
de M. delà Touobe-Tréviile, char-
gée de retnplacer aux Antilles cel-
le du comte de Giiichen. Il ten-
dit dans ce poste d'importans ser-
vices, et sauva encore la flotte
française d'un incendie qu'allait y
occasioner l'embrasement du vais-
seau V Intrépide. M. de Vaugiraud
VAU
se conduisit avec beaucoup de
bravoure , quoi.^ue blessé dans le
combat contre l'amiral Pioduey; il
était sur le vai>seau amiral la Vil-
le de Paris, qui fut forcé de te
rendre. Le conseil de guerre char-
gé de prononcer sur cet événe-
ment, rendit le témoignage le plus
flatteur de la conduite de W. de
Vaugiraud, et le roi eu lui adres-
sant une lettre de félicitition , lui
annonçai-l qu'il lui avait accordé
une nen>ion de lîsoo francs. Com-
mandant en second dans la pre-
mière escadre d'évolution d'Albert
de Kiom? , il passa, en 1788, au
coumiandement de la Gracieuse,
de*tinée à la station des colonies
occidentales. En 17S9, il aida M.
de Vioménil, gouverneur de la
IMartiiiiquc, à apaiser les mouve-
inens insurrectionnels que ve-
ïiaient de faire naître les événe-
mens de la révolution. De retour
dans ses foyers, à l'épociue du dé-
part du roi pour Varennes, M. de
Vaugiraud se mit à la tête de plu-
sieurs gentilshommes du Poitou ,
et résista à main armée aux forces
« nv4iyées pour arrêter l'insurrec-
tion qu'ils dirigeaient. Un décret
de prise de corps ayant été lancé
contre lui, il émigra et se rendit
à Cobleutz. Les prioces français
le chargèretU d'organiser le corps
de la m. rine en compagnies, et
dès le commencement des hosti-
lités, il eut le commandement
d'une C'Hiipaguie noble de cavale-
rie destinée au service des prin-
ces. Lors du licenciement, il se
rendit en Angleterre, d'où il de-
vait passer dans la Vendée, poury
porter les ordres du roi; mais il
resta à Londres, et fut chargé, lors
de l'expédition de Quibernn, de
I
VED
diriger le njouveinent de sir J.
Warren; après le dé.saslre de cel-
te expédition, chef de huit cha-
loupe;3canonnières,il sauva del'ar-
tiilerie et un grand nombre de
soldats. Il retourna ù Londres,
d'où il revint avec Louis XVIII
en 1814. Ce prince le tionini;i vi-
ce-uiiiiral el gouverneur de la
Martinique. Pendant l*i^ cent jours,
en i8i5, le roi l'éleva au poste
de gouverneur-général des Antil-
les. Depuis lors son administra-
tion fui loin d'obtenir rapproi)a-
tion générale; néanmoins il resta
ù son poste jusqu'à l'expiration
des trois années de son gouver-
nement. Ln 1818, il remit sa co-
lonie an général Donzelot, son
successeur, et revint à Paris; il a
été admis à la retraite.
VEDKL ( DoMISIOI:E- IIONORÉ-
Marie-Aktoine comte de), lieute-
nant-général, commandeur de
l'ordre i<»yal de la légion-d'hon-
neur, chevalier de l'ordre royal
de Saint-Louis , né à Monaco le 2
Juillet 1 7^5, est issu d'une ancien-
ne famille militaire, originaire de
Marsillargues, département du
Gard. Il entra au service dans le
régiment du Maine-Inférieur, où
servait son père. Nommé sous-
lieutenant en «jS;", lieutenant en
1791 . capitaine «;n juille! 1792, il
fil la campagne de «792 à l'armée
du Nord, où il '^e distingua parti-
culièrement à l'.iflViire «le W'irlon;
rentra à l'armée d'Italie au régi-
meiit du Maine , vers la fin de cet-
te année, lors de rinsurrection du
régiment de ligne eontre ses of-
ficiers; la fermeté qu'il dé{»loya à
cette ucca.>>ion lui aurait coûté la
vie, si Masséna et les olTiciers du
bataillon de gardes nationales du
T. XX.
VED
161
Var, qu'il commandait ne se fus-
sent hâtés de venir à son secour».
iliippelé au service par l.i loi du
i5 mars i7f)3, il obtint le com-
mandement d'ime compagnie
franche, qui reçut ordre de se
rendre en Corse, et fut choisi
pour être mis à la tête de loules
les comj)agnies franches réunies.
Durant les dilférens sièges qut;
les Anglais entreprirent dans cette,
île en 1793, su troupe Ql conli-
nnellement le service de canon-
niers. Au siège de Caivi , il délit les
assiégeant et se fit particulière-
ment remarquer en soutenant et re-
poussant l'assaut que l'armée an-
glaise dirigea contre le fortMotzel-
lo, dont la brèche était praticable
et les batteries démorilées. Il fut
blessé le 21 pluviôse an 2. Appelé
à l'état-major-géiiéral de rarméu
d'Italie, en qualité d'adjoint (le
1" pluviôse an 3), il y servit avee
une grande acliviléj se distingu.»
au passage du Pô, à celui de l'Ad-
da, aux affaires de Lonato et Sa-
lo; remplit plusieurs missions im-
portantes, entre autres celle pé-
rilleuse de traverser seul la «iroitu
du 'iyrol, pour aller à la recherche
dv la division Augereau. A la tête
du 1" régiment di; hussards, lors
du |)assage de la Breala , il fit six
cents prisonniers, s'empara du
parc de réserve des Autrichiens, et
entra le premier dans les villages
dt; Feltre et de Bassano. A l'affai-
re de Céréa, en \ an 4» il fut char-
gé de se retjdre, avec une escorte
de 25 chasseurs à ch(;va!, à San-
guinetlo, où, ayant d'y arriver, il
eut à combattre trois escadrons
postés en éch(ilons sur relie route.
Le passage qu'il parvint à effec-
tuer, opéra une diversion ulilu
iG'i VED
niix nmnvcmens de l'armée. L«
i" nivôse un 5, il fut chargé du
cnininandemonl d'un batiiillon de
la 17* demi-brigade légère; c'est
à sa têle (|u'à la bataille de Rivoli,
le 36 dn même moi.x, il enleva à
la baïonnette îe posle très-impor-
tant de la chapelle San iMarco .
qu'il défendit avec la plus gramle
opinitilreté, et où il fut bles!<é griè-
vement. Le 6 germinal an 7, à la
têle des grenadier» réunis de t.»
division Grenier, il força le rr-
Iranchement autrichien à la gao-
che de Bussolengo, où, après di-
vers traits d'une grande bravoure,
il re^ut plusieurs bles^^ures. et eut
la jambe gauche cassée. Laissé
sur le champ de bataille , son
cheval tué sous lui, il ne donna
signe d'existence que quelques
heures après. Sa Conduite mise à
l'ordre, lui valut le grade de chef de
brigade, qui ne put être coulirmé
que le 4 nivôse an 8, époque où
il prit le commandement de la 1 7*
demi-brigade d'infanterie légère.
C'est à la tête de celle-ci qu'il fit
les campagnes de l'an 8 à l'armée
d'Italie , et celle de l'an 9 aux ar-
mées de réserve et des Grisons. Le
lo nivôse de cette année, il défit
les Autrichiens au Mont Thonal,
se rendit maître des redoutes, et
fit des prisonniers. Il passa ensui-
te du camp de Boulogne, où son
régiment faisait partie de la divi-
sion de Suchet, au 5' corps de la
grande-armée commandée par le
général Lannes. Le 21 vendé-
miaire an i4i il contribua puis-
samment à la prise d'Llni. A la
tête de quatre compagnies de son
régiment, il se rendit maître {\e<
redoutes avancées, et entre autres
de c«lle de Frauensberg. II pour-
VED
suivit avec une telle rapidité Ici
Autrichiens, qui les défendaient
qu'il eulra pêle-mêle avec eux
dans la place; secondé dans ce
ninovenicnl par les tirailleurs du
Si" régiment, il fit 19,00 pri.-on-
iii<is. Huit mille ennemis établis
dans les ba>li(ms de cette partie de
la ville avaient déjà déposé leurs
armes en un énorme faisceau, lors-
que, revenant de leur première
stupeur, ils s'aperçurent que le
mouvement du colonel Vedel n'é-
tait [)as soutenu. Il se vit entouré
à son tour, et forcé de céder à lu
fortune. Pendant les trois jours
qui précédèrent la bataille d'Aus-
terlitz, il tint la campagne avec
son seul régiment d'infanterie, en
présence de toute l'armée russe.
Le 2 décembre i8o5, jour de cel-
le bataille, il fut chargé de servir
de pivot à l'aile gauche de l'ar-
mée, à la position importante du
Santon, où il eut à combattre con-
tre cinq à six mille Russes. Nom-
mé général de brigade à la suite
des deux campagnes de Vienne, il
fut chargé du commandement de
la brigade de gauche de la division
Suchet ; c'est à sa tête qu'il fit la
campagne de l'russe. Le 10 octo-
bre 1806, à l'afTaire de Saaifeld, il
contribua à la défaite de l'avant-
garde prussienne que -commandait
le jiiince Louis de Prusse , et
dont les résidtals furent si heureux
et si importans pour l'armée fran-
çaise. Le 14 du même mois , à la
bataille d'iéna, la brigade du gé-
néral Vedel fut long-temps tenue
en réserve sous les ordres immé-
diat» de l'empereur, qui lui fit
renforcer divers points. La garde
impériale, que commandait le ma-
réchal duc de Dantzick, étant ve-
Il
VED
nue le remplacer, il fut charçré d'en-
lever de vive loice la position de
droile de renn< mi, qui taisail une
grande résistance conln' les ellorts
du duc de (>a.>liglioue. Le général
Vfdel parvint à s'emparer de la
posiiioii, tii un grand nombre de
prisonniers, et poussa le même
jour ce succès jusqu'à Weimar.
Le 20décen;bre i8i»6, à Taftaire de
Pultnc'k, après plusieurs charges,
ayant enlevé, à la lêtt de sa briga
de, les deux premières lignes rus-
ses et une batterie de douze ca-
nons, il l'ut grièvement blt-ssé d'u-
ne halle au gt.nou gauche, et ne se
détermina à quitter le champ de
bataille qu'à la dernière extrémi-
té et a[>rès avoir été renversé par
un biscayen. Lncore convales-
cent, il l'ut nommé gouvirneurdc
l'île de la Nogat, et de la place de
Marienbourg, sur la Vi^lule. Ten-
dant les canlounemens que piit
l'armée sur la l'assargc, à l'issue
de la bataille d'Ëylau, la manière
avec laquelle il parvint à approvi-
sionner l'armée dans ce moment
dillicile, celle avec laquelle il par-
vint à relever les fortilicalions de
l'ancienne place de Marienbourg,
et surtout la tête du puni en avant
de la Vislule, lui méritèrent des é-
loges réitérés, et lui firent conlier
une brigade active, avec l'ordre
spécial d'organiser et de comman-
der par intérim, la u° division du
corps de réserve, sous les ordres
du maréchal Lannes, dont le corps
d'armée contribiasi efiicacement
A l'issue de la campagne de 1S07.
C'est à la tête de cette division
pour entrer en ligne, qu'il quitta
?on gouvernement et Marien-
bourg, le 4 juin 1807. Le 9 du mê-
me mois, il se trouva en l'ace des
VED
icr.
Russes qu'il poursuivit ;\ la gauche
de (iiiltslad; c'est là qu'il remit lo
commandement au général Ver-
dier. arrivait en toute diligence de
Maples. Le général Vedel conser-
va sous se* ordres le comniande-
ment de sa brigade. Le 10 juin, à
Heiisberg, à 10 heures du soir, il
reçoit l'ordre de marcher sur l'ar-
mée russe, en cidonne d'attaque
et à la baïoimelle; il l'exécute a-
vec une rare lémérilé, s'empare
des redoutes opiniâlremenl déten-
dues toute la j(Hirnée et détermine
les Uusses à évacuer Heiisberg
dans la nuit. Il eut à regretter bien
des braves du 12* léger et du 5*
régiment de ligne; mais il l'ut cou-
ronné par un brillant succès : il
l'ut lui-même blessé deux lois. Le
i.'l juin, à la bataille de Friedland,
le général Vedel, après avoir ren-
forcé le centre de la ligne de ba-
taille, se transporta à la droite a-
vec un régiment, chargea l'enne-
mi, revint au centre, tint la ligue
d'attaque depuis le commence-
ment de la journée jusqu'à onze
heures du soir, reçut à diverses re-
prises les éliiges directs de l'empe-
reur, qui, après le tr.iilé de Til-
sitt, le nonxua général de division.
Les généraux Vedel et Rnlfin fu-
rent les seuls élevés au grade de
général de division pend.mt la
brillarile canipagnc de Prusse. Le
gémral Vedel reçut l'ordre d'aller
prendre le coinmandetnent de la
a' division du -r corps de la Gi-
ronde, qui entra au5?ilôl en Espa-
gne. Le 'jG juin 1808, il délit qua-
tre mille llspagnols retranchés
dans les défilés escarpés de la
SitMTa-Moréna. Le 19 juillet, au
combat de Uaylen, il enleva trois
canon», deux drapeaux, fil qu'une
lO
\ED
CA'.nls [ifisoniiiers, et à l'instant
d'c'tîecluer sa jcuiclioi» avec la i"
division, dont il n't;liiit séparé que
par le corps cntiiMiii qu'il venait de
haltre , il recul l'ordre inoui de
suspendre toule lio.slililé. ^N'ayant
connu que le lendemain la véri-
table situation du corps français
dont il était séparé, il fit tout ce
qui dépendait de lui pour l'en sor-
tir, par l'attaque qu'il méditait et
qu'il reçut encore l'ordre de ne
i>oint tenter. Voyant que toute
hostilité devenait inutile, et vou-
lant au moins mcttie ses troupes
à l'abri d'être tournées, et par là
couvrir Madrid, il jiarvint à en
imposer aux Espagnols, au point
que, se tenant toute la nuit sous
les armes dans la crainte d'une at-
taque générale de sa pari, il par-
vint à ciTectuer sa retraite, et par
là déroba une grande journée de
marche. C'est dans cette nouvelle
position que lui parvînt l'ordre
réitéré et impératif", d'arrêter ses
troupes, attendu qu'elles étaient
comprises dans un traité que l'on
assurait conclu, et qui néanmoins
n'existait point encore. Ayant o-
béi comiue d'ailleurs les lois lui
en imposaient l'obligation , il tut
destitué le i"mars ji<i 9, par sui-
te de cette inexplicable affaire; ce
ne lut que le i" mai de la même
année, que la conduite que le gé-
néral Vedcl aurait (iû tenir en
i8o8 lot erJin déterminée. Dès
18 15, il lut honorablement relevé
delà dertitutioti q;ii pesait sur lui,
et appelé au eouimandement d'u-
ne diusion de l'armée de réserve
d'Italie. En 1814? détaché avec
4,000 hommes de l'aroiée d'Ita-
lie, pour porter des renforts à cel-
le de Lyon, il défendit 'le passage
VEI
de la Dnrance; c'est à cette occa-
sion qu'il eut à Roman un vif
ctif^agement avec l'armée autri-
chienne. Après le traité de Paris,
il devint inspecteur-général d'ar-
me dans la 8* division militaire;
et en i8i5, par suite d'un nou-
veau travail ministériel, il fut
nommé au connnandement de lu
i4' division militaire, 2' subdivi-
sion. Il commanda toute la divi-
sion jusqu'en juillet, où il fut rem-
placé : c'est depuis cette époque
que le général Vedel est en dis-
ponibilité. Cet officier- gêné rai ,
nommé comte de l'empire à ta
formation des majorais, a obtenu
son avancement sur le champ
de bataille , par suite de ses servi-
ces, et de nombreuses et graves
blessures.
\ EIMARS ( Loève), né à Paris,
en 1709, entra de bonne heure
dans un des lycées de celte ville,
et s'y appliqua spécialement à
l'étude des mathématiques , qui
devaient lui ouvrir les portes de
l'école polytechnique. Les événe-
mens politiques de 1814 fct de
1818 changèrent la direction de ses
•idées, et tandis que les armées des
puissances étrangères occupaient
le territoire français, il parcourait
le nord de l'Allemagne, une partie
du Daneniarck et de la Pologne.
De retour à Paris, il y fut nommé
élève <le la marine ; mais il renon-
ça bientôt à cet emploi, et alla vi
siter le midi de la France et l'An-
gleterre. Il s'était rendu fan)ilicr
les idiôn>es du nord de la Grande-
Bretagne , et avait mis à profit
son séjour dans les universités ;
les travaux littéraires devinrent
son occupation exclusive. M.
Loève Veimars a coopéré à la ré-
YEN
daclion de plusieurs [ournanx, et
a été l'un des principaux rédac-
teurs de V Album, où se* article?
furent remarqués. Il était, il y a
quelques années , le plus jeune
des cotlahoraleurs de M. Millin ,
fondateur du Magasin encyclopè-
dique ; il est aujourd'hui l'un des
écrivains de la Revue encyclopédi-
que, où il rédige les articles de
littérature étrangère. Parmi les
ouvrages qu'il a publiés , on a dis-
tingué les Manteaux, nouvelles;
Ja traduction des Mélanges lit-
téraires de JVielands, VHisloirc
des tribunaux secrets dans te nord
de l'Allemagne, et ime Chrono-
logie universelle qui fait partie de
la Bibliothèque du 19' siècle. On
sait qu'il se dispose à publier une
histoire des littératures ancien-
nes, allemande et du u^oyen âge,
et un recueil de ballades anglaises
et écossaises.
VENAILLE (N.), membre de
la convention nationale, substitut
du procui-eur-inipérial de Romo-
ranlin, etc. , adopta avec cbaleur
\es principes de la révolution ,
occupa d'abord plusieurs fonc-
tions municipales , et fut ensuite
nommé, au mois de septembre
1792 , par le déparlement de
Loir-et-Cher, député ù la con-
vention nationale. Dans le procès
du roi, il vota avec la majorité.
A la fin de la session, il rentra
dans ses foyers, où bientôt il rem-
plit les fonctions de commissaire
du directoire-exécutif; il les perdit
par l'efffît de la révolution du 18
brumaire an 8 (9 novembre 1799);
mais, sons l'empire, il fui nom-
mé stdjslitul du procureur-iu)pé-
rial au tribunal de première ins-
tance de Romoraulin, fondions
YEN
iu:>
qu'il occupait encore à rcj)oqne
des événemens politiques de 1 8 1 /j;
il était au'.*si membre du conseil
d'arrondissement. M. Venaille a
été atteint par la loi du 12 janvier
1816, rendue contre les coîiven-
tionnels dit votans , et a élé forcé
de s'expatrier; il s'est réfugié en
Suisse, où on le croit encore,
YENTIMIGLIA (Joskph), «irin-
ce de Belmonle, gentilhomme de
la chambre du roi des Deux-Sit^i-
los, chevalier de l'ordre royal de
Saint-J.uivier , grand d'Esp;ig;'.e
de 1" classe , naquit à Palcrnic en
1767, d'une des principales famil-
les de Sicile. Elevé à Kofne au col-
lège Nazaréen, il eut pour iuslitii-
teur le P. iMichelangelo iMonti ,
avec lequel il resta intimement
lié jusqu'à sa mort. Dans un voya-
ge qu'il enlr<;pril jeune encore, il
visita les principaux pays de l'Euro-
pe, et fit \n\ louf» séjour en Fran-
ce, où il épousa une ilcinoisell»;
Française du même nom que lui.
De retour en Sicile, il enl i)ienlôt
occasion de donner des preuves
de son [/alriolisme. L'uni ver.'-ilé
actuelle de Palerme lui doit d'a-
voir conservé son existence ; sans
sa persévérante et vigoureuse op-
position aux prét(Mitions des Jé-
suites, qui, après leur rétablisse-
ment en Sicile, firent tous leurs
efforts pour s'en emparer, elle au-
rait fini par devenir leurs proie.
Une carrière plus vaste vint en-
suite s'ouvrir devant lui, et il eu"
bientôt à lutter contre des difficul-
lés plus graves. La cour de INa-
ples s'était reliièe en 1806, pour
la seconde fois en Sicile, se flat-
tant de pouvoir recouvrer par ses
propres forces le royaume de Na-
ples. Elle avait aussi ù entretenir
i6C
VKN
uti fjrand nombre d'ômigrés na-
jiolitains (jui l'.'ivîiient buivi:* i\ Pa-
ïenne. Le ^raud besoin d'iirgent
lui fil convoquer, en 1810, le par-
lement pour demander de.» subsi-
des exlriiordinaiieîi. Le prince de
Beltnonte, sourd ù toutes les sé-
ductions, donna en cette circons-
tance l'exemple jusqu'alors incon-
nu d'une honoiable et ferme ré-
sistance aux prétentions immf>dé-
rées de la cour. Le parlement, ra-
nimé par son exemple, soutint
avec vigueur les intérêts de la na-
tion. Cet événenient ne fut toute-
fois que l'avant-coureur d'autres
événemens plus remarquables en-
core. La cour n'ayant pas trouvé
sufïïsansles subsides qui lui furent
accordés, prit le parti d'imposer
des taxes sans l'intervention du
parlement. C'est au prince de Bel-
inonte que l'on dut alors une pro-
testation que la plupart des ba-
rons signèrent , et qu'on présen-
ta en 181 1, à la cour de la part du
bras baronal dont il était mem-
bre (le bras baronal était une
des trois brandies dont l'ancien
parlement de Sicile était compo-
sé; c'était la réuiiion des barons
parlenientJiires du royaume). La
cour, irritée de cette résistance, fit
arrêter le 19 juillet, pendant la
nuit, par la force armée, comme
perlurbaieurs de la trauquilUlè pu-
blique, le prince de Belmonle et
quatre autres barons, le prince de
Gastel-Nuovo, le prince de Villa-
Franca, le prince de Aci et le duc
d'Augio. Elle les fit embarquer
aussitôt, et fit enfermer le prince
. de Belmonte dans un château de
l'ile de la Favignana. 11 y resta
plusieurs mois, et subit pendant
tout ce temps toutes les rigueurs
VEN
d'un emprisonnement trè.«-sévè-
rc. Sa santé en éproura les tris-
tes effets et fut sensiblement alté-
rée. Délivré de «-a prison par l'in-
tervcnlion de ia Grande-Bretagne,
il fut bientôt après nomtné con-
seiller et secrélairt-d'élat dans le
nouveau ministère qui se forma
sous l'influence de l'Angleterre ,
et on lui donna le porlefeuilb; des
affaires étrangères. Ses laleos et
ses qualités émincnfes ne tardè-
rent pas à lui gagner la confiance
de lord W. Bentinck, alors minis-
tre plénipotentiaire près de la
cour de Sicile, et commandant
des forces britanniques dans la
Méditerranée. Il usa du crédit
qu'il avait auprès de ce ministre,
pour procurer à son pays de nou-
velles institutions. Il fut puissam-
ment secondé dans cette opéra-
tion par M. le duc d'Orléans, qui
appréciait ses lalens et lui mon-
trait beaucoup de considération.
Une constitution qui n'était dans
le fond que l'ancienne constitu-
tion sicilienne, modifiée d'après
les nouveaux besoins de la socié-
té et modelée sur celle d'Angle-
terre, fut discutée on 1812, pen-
dant plusieurs tnois, par le parle-
ment et sanctionnée par le roi. Le
prince de Belmonle jou;i un grand
rôle dans ces événemen-^, et de-
vint le ressort principal de toutes
les opérations qui se firent à celte
époque en Sicile. Il reçut d.ins ^
cette occasion une lettre très-flat-
teuse de lord Ca*llereagh , dans
laquelle ce ministre en fai>ant son
éloge, lui témoignait, de la part
du prince-régenl d'Angleterre (au-
jourd'hui Georges IV), sa satisfac-
tion pour les services qu'il avait
rendus à son pays. Quoique doué
VEN
cl'un courage extraordinaire et
d'un caractère fort cl prononcé,
soit qu'il ne fût pas encore l'ait aux
agitations des grandes asseinblécs,
soit que son esprit cotninençâl dé-
jà à ressentir les effets de l'alltra-
tion de sa santé, au lieu de résis-
ter aux attaques du parti anti-
constitutionnel qui se forma dans
les deux chambres du parlement,
et qui se croyait fort de la protec-
tion du roi, il se laissa rebuter
par les didicullés, cl prit le timi-
de parti de se retirer du ministè-
re cl du parlement. Son exemple
fut suivi par ses collègues et par
SCS amis, qui cédèrenl le champ à
leurs adversaires, et devint ainsi
très-funeste A la cause de la liber-
té. Il revint quelque temps après
occuper une place dans le conseil-
d'état, mais il était trop tard; il
eut de plus à lutter avec des obs-
tacles provenant d'une division
qui malheureusement avait déjà
pris naissance parmi les partisans
mêmes de la constitution. Les
grands événemens du continent,
en »8i4» vinrent bientôt porter
le dernier coup à la cause qu'il a-
vail embrassée. L'Angleterre re-
tira sou armée de la Sicile, et l'ap-
pui qu'elle av.'iit jusqu'alors don-
né à la constitution, qui ainsi que
ses partisans fui abandonnée à
son sort. Le roi reprit le gouver-
nement de l'île, et un nouveau
ministère se forma. Le prince de
Btlmonle ainsi que ses collègues
furent éloignés du conseil-d'état,
et il se vit exposé aux insultes de
sesadversaires. qui, enivrés par le
succès, se livrèrent A des excès
contre lui et contre ses amis. Il eut
encore le tort peut-être «le déses-
pérer trop tôt des affaires de son
VER
167
pays, et tout malade qu'il était, il
conçut le projet de se rendre à Pa-
ris, dans l'intention d'y rejoindre
lord Castlereagh, qui allait assis-
ter au congrès de Vienne, et d'a-
voir avec lui une conférence sur
le sort de la Sicile. En juillet
1814, il s'embarqua pour Marseil-
les, dans le même vaisseau qui
conduisait en France M. le duo
d'Orléans cl loiile sa famille. Il
souQVit beaucoup dans ce trajet,
et il arriva très-malade à Marseil-
le. Le voyage qu'il entreprit aus-
silôl pour Paris, malgré l'avis
contraire des médecins et de ses
amis, acheva sa perle. Tous les ef-
forts des plus hdbiles médecins
qui le soignèrent à son arrivée, et
tous les soins que M. le duc d'Or-
léans lui prodigua devinrent inu-
tiles. Il mourut au mois d'octo-
bre de la même année à l'Age de
47 ans. Une superbe maison de
campagne, et un btîau jardin
qu'il avait fait bâtir sur une
colline, près du môle rie Paler-
me, où il n'y avait prest|iic point
de Ir.ices de végétalion, atmon-
cent aux voyageurs qui arrivent
dans ce port le goût et la magnifi-
cence du prince de Belmonte. Le
legs qu'il fit à l'université de Paler-
me , d'une superbe collection de
tabicauxetde gravures anciennes,
fut le dernier trait de son patrio-
tisme et de stm amour pour les
beaiix-arls. Mais c'est surtout par
la i>art principale qu'il prit à la
constitution de son pays en 1812,
que le prince de Belmontc sera
toujours regretté des Siciliens, et
de tous Ceux qui chérissent lu
cause de la liberté <les peuples.
VLRDIER (Jean-Antoine, com-
te), lieulenant-général en retraite,
iGS
VER
{ïiand'croix de la légion-d'hon-
neur, chevalier de Sainl-Louis,
membre de la chambre des pairs
d(! Napoléon, est cré à Toulouse,
département de la Hanle-Garon-
ne , le i" mai i 7G7 , d'une famille
Jionorahle de plébéiens. II eulra
an service en 1785, et ne fut
nommé sous -lieutenant qu'en
1792. La révolution, qui ne vou-
lait dans ses braves que destalens
«t l'amour de la pairie, vit croître
rapidement la fortune militaire de
M. Verdier. En i7<)4> il t^'*''''^ f'^"
jiilaine des volontaires de la Hante-
(Jaronne, et fut choisi, peu de
lomp« après, par le général Au-
tçereau pour aide-de-camp. Il re-
cul de l'emploi à l'armé'.; des Py-
lénées-Orientales ; et, à la lêle
d'un bataillon des chasseurs de la
Drôme, il s'empara du camp re-
tranché de Liers, que défendaient
4.000 Espagnols et 80 bouches à
l'eu. Ce beau fait d'armes décida
la reddition de Figuières, et valut
au capitaine Verdier, en 170^5 '^
grade d'adjudanl-général, chef de
};rigade. Il passa A l'armée d'Ita-
lie , et reçut sur le champ de ba-
taille de Castiglione , le grade de
f^énéral de brigade. Constamm(;nl
on activité jusqu'à la jiaix de
Léoben, il fit partie de l'expédi-
lion d'Egypte, où il commanda
les grenadiers et les éclaireurs de
la division Kléber , réunis sous
Suint-Jean-d'Acre. Commandant
de la province de Damietle , il
jtiarcha, avec seulement 1,000
hommes, contre 8.000 Turcs et
Anglais sous ies ordres de sir Sid-
ney Smith [roy. Smith), et défit
complètement ce corps ; les deux
tiers furent tués, et le reste fut
pris avec 10 pièces de canon. Un
VER
sabre d'honneur lui fut décerna
en récompense. Sa belle conduite
au siège du Caire le fit élever au
grade de général de division. Rap-
pelé d'Egypte avant l'évacuation ,
et envoyé en Italie, il cominand.i
une division sons les ordres de
Murât; se rendit en Etrurie avec
le général Gouvion-Saint-Cyr. et
occupa la Fouille, La reprise des
hostilités avec l'Autriche fit passer
le général Verdier sous le com-
mandement de iVlasséna. Envoyé
en Toscane, puis dans le royaume
de Naples, il aida le général Ré-
gnier à chasser I armée napoli-
taine jusqu'en Sicile. Le général
Verdier, employé à la grande-
armée , se distingua , i\ peine ar-
rivé sur le champ de bataille, à
Heilsberg, et ensuite à FriedIand.
Par suite de la paix de Tilsilt, it
reçut une autre destination ; il eut
ordre de conduire et de comman-
der un corps d'armée en Espagne,
Il soutint sa réputation au combat
de Logrogno et au premier siège
de Sarragosse, place dont il s'é-
tait emparée en presque totalité ,
lorsque, par suite de la retraite de
Madrid , il eut ordre de cesser ses
opérations. A la reprise de l'offen-
sive, il entra d.ms Madrid, fit le
siège de Cirone , et remit son
commandement au maréchal Au-
gerean , gouverneur de la Catalo-
gne. Le général Verdier fil partie,
sous le maréchal Oudinot, de l'ex-
pédition de Russie en 1812; il se
distingua de nouveau sur la Dris-
sa , et fut grièvement blessé de-
vant Polo>k (les iC) et 17 août
1812): cette blessure le força de
rentrer en France. En i8i3, il
commanda en second , sous les
ordres du vice-roi d'Italie [x^oyer
VER
Ceadharnais Eugène ), le second
rorps (ie l'année IViinco-italienne.
La heile pari qu'il prit à la I)a-
taille du Rlincio le fit créer
grand'croix de la légion-d'hon-
neiir; après la restauration, en
1814 » il reçut du roi la croix de
Saint-Louis. Pendant les cent
jours, en 181 5, Napoléon le noni-
nia membre de la chambre des
pairs qu'il venait d'inslilut-r . et
lui confia le commandement de
la 8* division à Marseille. La
nouvelle des désa«.|res de Wa-
terloo ayant fait arborer la co-
carde hlaiitlie à Marseille, le gé-
néral Verdier, voulant éviter de
combattre ses conciloyeus, fil sor-
tir ses trouj)es la nuit, et se porta
sur Toulon, où l'apparition d'une
flotte anglaise rendait sa présence
nécessaire, A la seconde restau-
ration, il a été mis à la retraite.
Il jouit, au sein de sa famille, de
la considération que lui ont mé-
ritée ses lalens, la belle p;:rl de
gloire qu'il a arquise dans sa lon-
gue carrière militaire, enfin la sa-
gesse et la modération de ses prin-
cipes.
VERDIER (Jean), né en 1-55,
à la Ferté-Bernard , département
de la Sarlhe. Successivement avo-
rtât au parlement, docteur en mé-
decine et instituteur, il fonda à l'a-
ris, vers 1770, une maison de
santé pour le redressetncjit des
difformités, dont il fil bieiilôl une
njaison «l'éducation nby.^ique et
» morale , établie sur un plan , uni-
que alors par son étendue, et
dont le siucè>« était aussi brillant
^ qu'il paraissait assuré. Une opé-
m ration financière du comlc de
jf Buffon , intendant du Jardin du
Roi, qui aciiela et revendit au roi,
VER
iGp
pour ftre réuni à ce jardin , le ter-
rain dans lequel se trouvait com-
pris l'hôtel Magny, o\\ était éta-
blie la maison d'éducation de Jean
Verdier, commença la ruine de
l'établissement et de celui qui
l'avait fondé , ruine que vint con-
sommer la révolution. Membre
de la municipalité de Paris au 10
aoftt 1792, Jean Verdii;rfut, pen-
dant long-temps, chargé de veil-
ler et de satisfaire aux besoins
de Louis XVI à l'époque de sa
détention au Temple, et ce prin-
ce s'ettlretint plusieurs fois avec
lui de son établissement et de la
spoliation de Buffon à son é-
gard, sur laquelle il avouait avoir
élé trompé alors. En 1794, il fut
envoyé, comme médecin , par le
n:inislre de l'intérieur, à Com-
picgnc, qui était aftligée, depuis
I 5 mois , d'une maladie épidémi-
quc à laquelle ses soins apportè-
rent le remède et la terminaison,
II fut moins, heureux à Senlis , où
il fut arrêté en revenant de Com-
piègne , p<Mir donner ses soins
dans une circonstance analogue ,
les médecins de l'hôpital militaire
n'ayant point voulu suivre ses
conseils pour combattre la fièvre
putride qui y régnait, et la mé-
thode de Pringle qu'ils suivaient
y ayant fait beaucoup de victimes.
Dans la même année, il fut nom-
mé par le district de la Ferlé-Bcr-
nai'd, lieu de sa naissance, l'un
des élèves de cette école normale,
fruit d'une grande pensée, dont
l'existence fut aussi courte que son
illustration fut grande; niais dont,
ainsi qu'il arrive souvent en Fran-
ce, on lira trop peu de parti;
école dont b-s «lisciples étaient,
après les maître*, l'élite des géni
170
VER
instruits, et df»nt quelques-uns
auraient pu se placer sur la même
ligne que Itiirs ni-uCes.seurj. De-
puis cotte époque , il professa
pendiint quelque temps la méde-
cine légale ù V Académie de législa-
tion , établissement fondé sous le
consulat, par un de nos plus cé-
lèbres jurisconsultes, im pair de
France, connu de tout le monde
parsoiiamourdubien public. Jean
Verdier a publié une foule d'ou-
vrages de médecine, d'édiîcalion,
de législation, de philologie et
de grammaire. Les principaux
sont. Ouvrages de médecine : \°
Journal de Médecine populaire,
d'éducation et d'économie, 8 ca-
hiers in-iS", formant 2 vol. , an 9
(iHoo); 2° lu Cranomancie du
docteur Gall, anéantie au moyen
de l'anatomie et de la physiologie
de l'âme, brochure in-8"; 5° Plan
d'Osthautroj»ie , nouvel art de
traiter les diirormilés organiques,
par des exercices appropriés et di;
nouvelles machines élastiques et
mobiles, etc. ; 5° Introiluclion à
la connaissance des plantes , dont
la dernière édition se trouve en
tête de l'almanach du Bon Jar-
dinier, pour l'an 9 (1802) ; 5° Ca-
lendrier des amateurs de la vie et
de l'humanité, ou Avis sur l'As-
physiatrique , la médecine des
asphyxiés ou trépassés, etc. , in-
12, 1816; ouvrage présenté au
roi. Ouvrages sur Céducation; 6"
Cours d'éducation physique , mo-
rale, religieuse ou littéraire, ou
plan et système d'éducation, a-
dopté par l'auteur dans sa maison ;
ouvrage aussi curieux qu'impor-
tant, qui arma contre lui l'en-
vie, et qui lui valut, de la part
des corps privilégiés, un procès
VER
au parlement, qu'il gagna hono-
rablement. Ce procès donna lien
à la publication . que fit Jean
Verdier, de l'o.ivrage suivant :
7" iMénioire historique et poli-
tique sur les fonctions et les
droits rts[)cciifs des trois classes
d'iiistituieui.-. de la jeunesse, éta-
blis en France pour les trois or-
dres de l'état, avec les preuves
des plans d'éducation proposés,
exé(;utéset perieclionués par l'au-
teur, in- 12; 8" Recueil de mé-
moires et d'observations sur Irf
pcrffclihililé de l'homme, 6 re-
cueils in-!2, formant 2 vol. ; 9*
Discours sur l'éducation natio-
nale, physique et morale des deux
sexes , in-S"» 1792- Ouvrages de
législation : lo* La Jurisprudence
de 1.1 médecine en France , com-
prenant un eS'ai sur cette Juris-
prudence, i vol.; la Jurispru-
dence générale de la médecine, a
vol. ; la Jurisprudence particu-
lière de la chirurgie , 2 vol. ; en
tout 5 vol. in- 12, 17G3 et i704.
Des obstacles de la part de l'au-
torité s'opposèrent à la publica-
tion des Jurisprudences particu-
lières de la médecine et de la phar-
macie, dont l'auteur avait réuni
les inatériaux. Ouvrages de philo-
logie et grammaire : 11" Tableau
analytique de la Grammaire géné-
rale , appliquée aux langues sa-
vantes, iu-12. iHoo: 12" l'Art
d'enseigneretd'étudier les langues
française et latine, ensemble ou
séparément, par l'analyse etla syn-
thèse , etc., in-12; \o° Système
de la langue latine, pour en réta-
blir l'usage particulier par la dou-
ble traduction, in-12; i4° l'Art
de discourir grammaticalement,
ou Grammaire générale du dis-
VER
cours purement prainmatical, in-
»2; i5* Recueil des mots varia-
bles , français et l;itins, in-12 ; i6*
l'Art poélifjiie d'Hoiace, corrige
dans 120 «endroits du texte. av#c
une nuuvelle traduction , de-* ana-
lyses graiiiinalicales, logiquts et
poétiques, et des critiques de la
plupart des éditions, etc. , dédié
au comte Fourcrcy, in- 12, 1804;
17° Poënie séculaire d'Hor.tce,
angmefité d'une strophe, corrigé
d'après le texte, traduit en fran-
çais et comparé, dan'^ une,de .>-es
odes, avec le sublime eau -que
de Moïse .'\ir le pas«:ige de la mer
Riinge, aussi traduit «ur le texte
hébreu. Ce savant laborieux avait
fait , sur les aphurismes dHipjx»-
crale, un travail analytique mui-
bl.Tlile à celui sur l'art poétique
d'iJorace , ainsi que des taldeaux
analyti({nes et synthétiques île
rentendemenl el de l'esprit hu-
mains, d:ins lesquels il avait pris
pour hae de sa critique Con-
dillac et (-h. Bonnet, l-ne loule
d'.Mitres recher<hes savantes a-
vaient f-ccu; é si l;d)oriense car-
rière, et «lans les dernière!- années
de sa vie . rherrliant à concilier la
chronol'.gii- de la («enèse avec les
systèmes chronologiques des na-
tur:>!istes, il avait décriuvert une
foule d'« rreurs dans la traduction
du livre .'•acre, et l'existence de
deux personnages du no m d'Adam,
à deux époqiuîs difCérenles , d'où
naii'sei'l les erreurs et l«:s discor-
dances entre les système^ religieux
et philosophi<pies; malheureusc^-
mcnt ce» recherches seront per-
dues. Jean Verdier mourut à Paris,
le 6 inin 1820, dans sa 8G' année.
VhRDIER-IIELKilN (Jean-
Fbançois ) , docteur en médecine,
VER
'7»
né à Paris le i4 septembre 1767 ,
fds du précédent, fut quelque
temps collaborateur de son père
dans sa maison <l'éducation , dans
la publication des articles de ju-
risprudence de la médecine du
Dictionnaire de médecine, de VEn-
cyclopedie méthodique , et dan»
celle de son Journal de Médecine
populaire. Après avoir été em-
ployé comme chirurgien des ar-
mées de la république, il exerça
la uu'decine à Paris, où il a pu-
blié : 1" Discouru sur le devoir et le
besoin d^ aimer , avec une épigra-
phe tirée de tsaiut-Péravi , Paris,
in-12, an 8 (1800). Reçu maîtrc-
ès-art* dans l'ancienneuniversité,
et ba'.'helier en ii)édecine, Ver-
dier-Huerlin prit le titre de doc-
teur diins les nouvelles écoles en
l'an i'>. (180/1), et y soutint une
thèse médicale sur l'allaitentent et
i'éducalion physique des enfans.
iW sujet n'était pas neuf sans
dotite ; mais l'auteur sut le n ndre
encore iotére>>sant, etprouvji dans
cet ouvrage qu'il s'était f>ailicu-
liéremeiil occupé de la médecine
infanliie , trop négligée par la
plupart des médecins. Sa lhè>*e,
proprement dite, avait pour litre :
2 ' Essai aphoristique sur l'allaite-
ment. Il Va p«d)lia avec, 3" un dis-
cours sur l'ullailemenl et l'éduca-
tion physique des enfans, dan«> le-
qu< I il développe son sujet en
médecin, en homme de bien et
eu littérateur. A cette époque, le
fœtus trouvé dans le corps d'un
jeune garçon de Verneuil faisait
beaucou|) de bruit |>ar la sing(tla>
rite du fait; Vcrdier-IIeurtin pu-
blia, annexée aux deux mor( eaux
précédrns , 4* '""^ Dissertation
sur le fœtus trouvé à Verneuil^ dans
17» VER
e corps (fan enfant mâle, avec
une gravure représentant le fœtus
dans la même position qu'il y oc-
cupait, avec les mêmes dimen-
sions et d'après nature. Le volu-
me contenant ces trois morceaux
forme un in-S" de 211 pages. li
y avait plus de trois ans que le
docteur Verdier- Heurtin était
chargé de constater les décès dans
un des arrondissemens de Paris,
lorsque celte place, enviée de-
puis long-temps, toute tnodique
qu'en fussent les rétributions, lui
fut ôtée pour la confier à un soi-
disant officier de santé. Cette in-
justice lui donna lieu de publier ,
5° Mémoire et réclamation présentés
à M. Froc/iot, préfet de In Seine,
etc., Paris, an i3 (i8o5),in-4°
de 12 pages. Plus tard, l'auteur
fut rétabli dans les mêmes fonc-
tions, mais" dans un autre arron-
dissement. Vcrdier-Heuitin mou-
rut presque subitement , le 24
mai i8'25. Agé de 55 ans et demi,
des suites d'une maladie de foie.
VERDIER-DU-CLOS ( Tho-
mas-Desis) frère et oncle des pré-
cédens, naquit à la Ferlé-Bernard,
ïe 5o septembre i^/i-l- Waîlre-ès-
arfs de l'université de Paris, maî-
tre en chirurgie cl docteur-méde-
cin de l'université do Nanci, il
avait étudié la chirurgie sous son
père et sous son frère aîné, Jean
Verdier, puis sous Ant. Petit, à
riIôlel-Dieu de Paris. Il servit
comme chirurgien des armées en
Corse, exerça la médecine et la
chirurgie à la Ferlé-Bevnard , sa
ville natale, où il fut médecin de
riIôtel-Dieu depuis 1788 jusqu'à
sa mort, arrivée le 9 février 18 i5.
D'une activité et d'une philan-
tropig infatigables, il fut cons-
tamment appelé, soit seul, soil en
VER
chef, avec ses confrères , au trai-
tement de plusieurs épidémies,
sur lesquelles il réunit toutes les
observations médicales de sa pra-
ti»^e. ce qui lui fournit plusieurs
mémoires intéressans qu'il adres-
sa aux autorités publiques et à
l'ancienne société royale de mé-
decine, qui le nomma l'un de ses
associés dès l'année 17S5. Cette
marque d'estime pour ses travaux
ne fit que stimuler son zèle , et en
1789, il avait fourni treize mé-
moires il cette société, tant sur
les épidémies que sur deux opé-
rations de la symphise, qu'il avait
heureusement exécutées, ainsi
que sur divers autres sujets. Dif-
férens travaux d'utilité publique
médicale l'ont occupé pendant sa
longue pratique, et il en adressa
les résultats, soil au comité de
santé de l'assejTibléc constituante,
soit à l'administration départe-
mentale de la Sarlhe. Les princi-
paux sont ; 1° Vues générales sur
rétablissement d'un hôpital civil
dans chaque district, pour les ma-
lades , les vieillards infirmes, les
femmes en couche et les enfans na-
turels; 2° sur les devoirs des méde-
cins chargés du traitement de« ma-
ladies épidémiques; 5" sur rétablis-
sement d'un bur«\iu , pour les en-
fans naturels, dans chaque district,
avec un projet de règlement pour
l'administration de ce bureau.
Enfin , comme médecin, car nous
avons ensuite à considérer le fonc-
tionnaire public, il a laissé : i*
Breviarium mer/ici clinici seu fas-
ciculus quaramlum nationum ad
médium clinium utilium , ex di-
rersift autorihus selectarum; 2" His-
toire d'une symphysèotomie prati-
quée arec succès pour la tnére et
pour l'enfant, le 25 janvier 1786,
I
I
VER
par Verdier-du-Clos^ doclenr ,
«tf. Le iMans, Munnojer, Paris,
Didot el Méquij^non, 1787, in-S".
Dès l'aurore de la révolu lion, les
compatriotes de Verdier-du-Clos
lui confièrent les principales ionc-
lions publiques de leur ville, et
lors de la convocation des étals-
généraux , le cahier qu'il avait ré-
digé , et dans lequel il demandait,
entre autres choses , la responsa-
ifililé des ministres et la fixation de
la liste civile , fut adopté par ses
concitoyens comme l'expression
de leur vœu, et il eut la satisfac-
tion de voiries idées qu'il avait é-
niises dans ce cahier , adoptées
par l'assemblée nationale , et de-
venir la base du droit public des
Français, droit public qui n'a
cessé d'être reconnu, au moins en
principe, depuis celle époque jus-
qu'ii l'établissement de la charte
conslituliotmelle inclusivement.
Nommé maire de la ville de la
Ferlé-Bernard en 1787, el suc-
cessivement juge-de-paix, juge
au tribunal civil du district, juge
au tribunal criminel du départe-
ment de la Sarlhe ; puis , en celte
qualité, choisi pour directeur du
jury d'accusation qui existait a-
lors, il peut être curieux de lire
ce que Verdier-du-Clos disait aux
jurés d'acciisatiun qu'il élait char-
gé de diriger, et de le comparer
avec ce qui se passe, actuellement
que nous sommes privés de cette
iuslitulion , et que celle du jury
de jugement est déjà tant ébranlée
6t même dénaturée. « Un jury
«d'accusation , leur disait-il , for-
»mé au moment du besoin, dont
• les membres éj>ars sont rassem-
i> blés .«ans se connaître, «jui , par
• conséquent, n'ont pu se concer-
VER
17a
• ter on être prévenus, et dont
• l'opinion et le jugement ne peu-
» vent être influencés par l'amitié
• ou la haine, doit avoir la con-
» fiance de la société et de l'incnl-
»pé, et tranquilliser les esprits
• sur la sûreté de l'un et la liberté
»de Taulre. Si l'on pouvait tracer
> d'autres règles de conduite au
))jury d'accusation que celles de
» suivre les mouvcmens de sa per-
•)Suasion intime, on pourrait diitî
«qu'il devrait tendre à la sévérité,
»de même que celui de jugement
«doit toujours tendre à la dou-
« ceur, afin de concilier ce que l'on
«doit à la sûrelé publique avec les
• senlimens d'humanilé qui veu-
»lent qu'il faille plutôt innocenter
u plusieurs coupables que de punir
.«un innocent. Pour fixer toute
"Votre attention sur l'objet qui
» vous rassemble , au nom de la li-
» berté d'un homme et de la sûrelé
«de tous, je vais vous faire lecture
"des jtièces , vous entendre! les
«témoins et la partie plaignante;
• mais n'entendez point les dépo-
«sitions écrites; après quoi, dans
• la crainte religieuse d'influencer
• votre opinion en aucune ma-
»nière et pour obéir à la loi, je
>! vous laisserai seuls.... vous pré-
» venant encore que ni l'acte d'ac-
«cusalion par moi rédigé , ni les
«conclusions du counnissaire na-
»tional, ne doivent avoir aucune
l'influence sur voire décision,
«mais seulement le sentiment in-
«lime et impartial de voire propre
«conscience.... • Sous l'empire
de Ik constitution de l'an 3, Ver-
dier-du-CIos fut encore président
de canton ; ce sont les dernières
fonctions publiques qu'il ait rem-
plies. Il a laiîsé une foule de mé.
174
VER
moires et de documcns qui prou-
vent !>on zèle ardent pour In chose
piibliqnc, et spi^ci<il('inent pour
l'intérêt de ses adiaini^itrés , eu fa-
veur desquels il ne cessa de solli-
citer de.* cKiforilés supérieures
des élablisseniens utiles, lels que
conrecliun des routes, création
de loires, qu'il obtint, et divers
autres, tous uliles.
VEKDIEa ( Pierre-Loï;is), ne-
veu et eonsin des précédens, né
à la Ferré-Bernard vers l'année
1780, se livia d'aboid à l'étude de
riiorlogerie, piofession bien pro-
pre à lui faire laire des progrès
dans celle qu'il embrassa depuis.
Après la mort de son pèrt;, ancien
pharmacien, il étudia la cliirurgie,
et particulièrement la partie des
hernies et celle des accouchemens,
et se fil recevoir chirurgien. Non-
seulement il fit des progrès dans
la chirurgie herniaire, mais il en
fit faire à son art, en inventant
ou perfectionnant des machines
ou des inAJrumens ingénieux,
non-seulement pour les hernies,
«jais encore pour réduire les dif-
formités humaines , ou s'opposer
ii leurs progrès, et, en outre, uo
mannequin perfectionné pour la
démonstration de la pratique de»
accouchemens. On trouve, avec
raison, M, Verdier placé dans le
nouveau Dictionnaire de Médecine,
qui se publie actuellement, à l'ar-
ticle liRAYER, à côté des premiers
maîtres de son art, les Lacroix et
les Lafond. M. Verdier vient aussi
de succéder au célèbre Féburier ,
le premier qui ait établi en Fran-
ce la fabrication des inslriMnens
de chirurgie en gomme élastique.
M. Verdier a publié : i" Rapport
et notes sur les bandages et appa-
VIÎR
reils inventés par M. Verdier,
chirurgien-horniaire de la UKuiue
royale, des hOpilaux uiiliiairos de
France,elc. ; a" Observations d'une
hernie sus pubienne antéro-epiploi-
(fue volumineuse, guérie par l'em-
ploi du mercure doux , etc. , par
Verdier, etc., in-8% 1819; 5" Mé-
moire sur un appareil com|>rt^ssif
de l'artère iliaque externe, dans le
cas d'auévrisme inguinal, lu à la
section de chirurgie de l'académie
de médecine, le 7 février i825,
par P. L. Verdier, etc.; Paris,
iu-S", i8'iô , avec une belle pi in-
che gravée. M. Verdier a publié
de plus la description de son
mannequin pour la dém sustration
des accouchemens, avec une litho-
graphie.
VERGEZ (Jean-Marie), lieute-
nant-général en retraite, est né le
I I janvier 1707, à bainl-Pé, dé-
partement des Hautes- Pyrénées.
II entraau service comme soldat,
en 1 778, et dut à la révolution tous
lesgradesqu'ilaobteims. En 1792,
il marcha aux frontières , et fit la
cam|;ague de celte année. Le 9
février 1795, le gouvernement le
nomma capitaine dans le 1" batail-
lon des chasseurs des montagnes;
d.ins le courant de l'an 2, il servit
à l'armée des Pyrénées - Occi-
dentales, où il commanda les
éclaireurs de la colonne. Il enle-
va lui-même deux drapeaux à
l'ennemi, à la prise de Marsa, et
le même soir, il sauva les troupe»
françaises en éteignant deux mè-
ches allumées pour faire sauter
un magasin à poudre, dont l'ex-
plosion eût entraîné la perte du
fori. A la prise de Tolosa, il s'em-
para de rariillcrie ennemie en sai-
sissant les mulets employés pour
VER
l'enlever. Le 23 vendémiaire an
5 , ou lui dut la conservalion d'un
magasin à poudre considérable,
auquel l'enneuii avait mis le feu,
en plaçant des mèches allumées
dans de» barils enfoncés. Il as-
sura ainsi les avantages qu'avait
procurés à l'armée l'importante
prise de Lescornbery. Au mois de
germinal an 4 » il avait le com-
mandement des carabiniers de
l'armée des côtes de l'Océan ,
lorsqu'il eut un engagement avec
Charette, chef des Vendéens; il
tua d'abord deux chefs qui l'ac-
compagnaient, et le saisit ensuite,
après l'après l'avoir blessé d'un
coup de pistolet et d'un coup de
sabre pendaiit le combat; uo ar-
rêté du directoire-exécutif le nom-
ma en lérompense, le i8 thermi-
dor suivant, chef de bataillon.
Pendant les années 5, 6 et 7 , il
servit dans les armées d'Italie, de
Rome et de Naples, et passa, en
sa qualité de chef de bataillon, à
la la* demi-brigade de ligne. A
l'affaire de Lestorta,prèsdeUome,
le 25 frimaire an 7, se trouvant à
la tête «l'un détachement, il prit
deux pièces de canon à une des
colonnes napolitaines ; le 16 flo-
réal, le général en chef Macdo-
nald le nomma chef de brigade. Il
fut blessé d'un cf)up de feu à l'é-
paule droite, à la prise de tMo-
dène, le 24 prairial, et d'un au-
tre c«)np de feu ù la hanche droite,
le Ç) fructidor, à l'alVaire de Chia-
vnri. Il se signala par une action
hardie, le 1 5 brumaire, devant
Novi ; à la tête d'ufi escadron, il
coupa la ligne ennemie et s'em-
para de tonte son artillerie, com-
posée de cinq pièces de cunon et
de Jeuri caisson*:; il decidu ainsi
VER 175
la victoire en laveur de? Françai?.
Le i5 Qoréal an 8, un arrêté du
premierconsul Bonaparte le con-
firma dans son grade de chef de
brigade. Nommé ensuite colonel
du 12* régiment d'infanterie de
ligne, il devint olTicier de la lé-
gion-d'hoimeur, et fut enjployé k
la troisième division du camp do,
Bruges; général de brigade en
1807, il a cessé depuis 1810 de
figurer sur les cadres de l'armée.
Le général Vergez, maréchal-de-
cainp depuis la restauration, vient
d'être promu, par le roi (mai
1825), au grade honorifique de
lieu tenant -général.
VERGNIAUD ( Pierre^Victcb-
NiEN ), fils d'un avocat estimé de
Limoges, naquit en cette ville en
1768. Il alla exercer à Bordeaux
la profession de son [icrc, et fit,
dès ses premiers essais, pressen-
tir ce prodigieux talent qui devait
dans la suite , et sur un plus vaste
théâtre, se développer avec tant
d'éclat. Il n'était pas resté en ar-
rière du mouvement que la phi-
losophie avait imprimé à la Fran-
ce : les acceris de Mably, de Kay-
nal, de Rousseau, etc., avaient
fortement retenti dans son 3me,
et les événemens de 178c) le trou-
vèrent tout préparé. Il se fit re-
marquer à cette époque par son
patriotisme , comnjc; il s'était déjà
iail remarquer par son éloquence.
Fn 1790, il fut nommé membre
de l'administration départemen-
tale de la Gironde. L'année sui-
vante , il fut élu député de ce dé-
partement à l'assemblée législa-
tive. Dès la troisièirie séance,
Couthon ]»roposa de bannir du
cérémonial, ilaiis les r;»pporls de
l'assemblée avec le roi, les mot*
176
VER
de sire et de majesté, comme peu
convenables ù la dignité des rc-
présentans du peuple. Vergniaud
appuya et fit adopter celle propo-
sition. Ses motils étaient plus spé-
cieux que solides , et l'assemblée
revint bientôt sur sa décision. Ce
l'ut le 3 5 octobre qu'il déploya
pour la première fois ù la tribune
toute la puissance de son talent.
Lu nation était alarmée des ras-
semblemens de troupes étrangè-
res qui s'opéraient sur le Rbiu ;
elle s'indignait surtout de voir les
nobles quitter en foule leur pa-
trie pour se réunir aux ennemis
qui menaçaient de l'envahir. Ver-
gniaud, dans un discours plein de
chaleur, de mouvemens impé-
tueux, de raisonnemens brusques
et leri-assans, demanda que l'émi-
gration et les menées du clergé
fussent réprimées par des mesu-
res rigoureuses, et que le comte
de Lille , depuis Louis XVllI , fût
sommé, aux termes de la consti-
tution , de rentrer en Frimce dans
les deux mois, sous peine d'être
déchu de ses droits à la régence.
Des trois lois qui furent portées à
cet effet, celle relative au comte
de Lille fut seule sanctionnée.
Vergniaud occupait le fauteuil le
jour que le ministre de la justice,
Duport - Duterlre , vint donner
communication aux députés du
veto dont le roi frappait les deux
premières. Au moment où le mi-
nistre entreprit d'en ex|)rimer les
raisons, Vergniaud, d'une voix
sévère, lui imposa silence , en lui
déclarant que « la constitution ac-
cordait bien aii roi le droit de re-
fuser la sanction, mais non celui
^e développer les motifs de son
refus. i> Le 27 décembre, il pro-
V£R
posa un projet d'adresse au peu-
ple , pour accompaj^ner l'envoi
aux dépailemens du discours pro-
noncé par le roi le i4 décembre ,
au sujet de l'enrôlement des émi-
grés ; pour faire connaître à la
nation les mesures que l'assem-
blée avait proposées, et n'avait
pu faire adopter; pour la rendre
juge entre eux et le pouvoir exé-
cutif. « Dims les graudes occa-
sions , disait-il, les communica-
tions ont le double avantage, et
de ranimer la confiance dans les
représentans de la nation , et de
ranimer l'esprit public dans le
cœur de tous les citoyens. » Cette
adresse , composée sous l'inspira-
tion de la méfiance et des préven-
tions, était une déclamalion qui
fut généralement jugée peu digne
d'un législateur. L'asseml)lée se
contenta d'en décréter l'impres-
sion. C'était assurer une partie
des effets qu'elle pouvait produi-
re , sans ei) prendre la responsa-
bilité sur elle. Cette méfiance ,
cette haine contre la cour, ne le.
quittèrent jamais. On le vit s'op-
poser à l'impression du diseours
du ministre de la guerre, Nar-
bonne, qui, à son retour des fron-
tières, témoignait, j;ar d'hypo-
crites protestations , le désir de
conserver avec l'assemblée la plus
parfaite intelligence ; voter, le 1"
février 1792 , pour le décret d'ac-
cusation porté contre Bertrand de
WoUeville, ministre de la marine;
le 10 mars, à la suite d'un dis-
cours plein de véhémence, voter
un second décr<'t d'accusation
contre le ministre des affaires é-
trangères, qu'il accusait de tous
les malheurs qui avaient ensan-
gîanté la ville d'Avignon. Dans
VEll
une aulre séance, il s'écriait, en
rt'proiliiisaiit un des plas beaux
mouveniens de Mirabeau : « Du
bam de celte tribune où je vous
parle, on ajUMÇoit le palais où
des conNciilcrà pervers égarent et
trompent le roi que la eonstiln-
«ion nous a donné, forgint les fers
doul il-i veulent nous enchaîner,
et préparent les manœuvres qui
doivent nous livrer à la maison
d'Autricbc. Je vois les fenêtres
du palais (iù l'on trame la contre-
révolution, où l'on coinbin»; les
iDoyeus de nous replonger dans
l'esclavage, après nous avoir l'ait
passer par toutes les Ji(»rreurs de
l'anarcbie et toutes les fureurs
de la guerre civile. Le jour est ar-
rivé où vous pouvez inetire un
terme à tant d'audace, à tant d'in-
solence, et confondre enfm tous
les conspirateurs. L'épouvante et
l'borreur sont souvent sorties dans
des tetnps antiques, et au nom du
d«;sp.ilismc . de ce palai.- fameux;
qu'illes y renhvul aujourd'hui au
nom (le la loi ; qu'elles y piMiétrent
(bins Inus les cœurs : que tous ceux
qui rbabilenl sai lient que tiotre
ctmstilutiud n'accorde l'inviolabi-
lité qu'au roi; qu'ils sach<!nt que
la loi y atteindra sans distinction
tous les coupables, et qu'il n'y a
pas une seule lêle convaincue d'ê-
tre criminelle qui puisse échap-
per ù son glaive! » II fut le pre-
mier qui éleva la question de la
déchéance du roi long - temps
avant le lo aoftl. Le lio juin , lors-
que Rœdercr vint dénoncer à l'as-
semblée le rassemblement qui se
fijrmait dans l'aiis, et l'objet os-
l(:«sible de ce ra><?emblement ,
tout en avouant combien il était
peu déceat qu'une foute armée en
X. XX.
VER 177
désordre fût introduite dans le
sanctuaire de la loi , il soutint que
puisqu'on l'avait souffert jusqu'a-
lors , on devait encore le souffrir.
Le 18 juin, son exaltation l'aveu-
gla au point de lui taire pronon>-
cer une violente diairii)e contre le
général La Fayette, qui , dans une
lettre pleine de franchise , de sa-
gesse et de patriotisme, dénon-
çait à l'assemblée lis excès de la
faction ultra-révolutionnaire, et
lui montrait de loin l'abime dans
lequel des Iionmies perfides ou
forcenés allaient entraîner la pa-
trie. Tout ce qui tenait ou avait
tenu à la cour lui faisait ombra-
ge. Les événemens, au reste, pri-
rent soin eux-mêmes de justiiier
ses soupçons, puisque ses prédic-
tions furent presque toutes réali-
sées. Cette imprudente exaspéra-
tion , si naturelle d'ailleurs daiss
la situation critique où se trouvait
la liberté, et qui, dans tous les
cas, ne ]>eut qu'h(uiorer sou ca-
ractère, puisque l'intérêt général
é^ était l'unique objet, et qu'on
ne peut lui reprocher, dans au-
cune circonstance de sa vie, d'a-
voir été mu par des vues person-
nelles, cette exaspération ne lui
ût jamais oublier ni les hns de la
morale publique, ni les droits de
l'humanité. On avait surpris une
lettre qui pouvait contenir des ré-
vélations importantes, et qui mê-
me avait déjà été dériachetée ;
Vergniaud s'opposa fortement à
ce qu'on eu fît aucun nsai^e. Le
ao juin , tout en demandant l'ad-
mission de la foule armée dans la
«aile (les séances, il voidnt (pi'une
depulaliou de soixante membres
fût envoyée aux Tuileries, pour
veiller à la sûreté du roi et de s*
178
TER
famille. Ce jour-Ui même, on le
vit »c prôcipilor au milieu du tu-
nniite, el exhorter à l'ordre et à
la décence ecltc niullitiui»; , dont
on pouvait craindre les excès. On
l'a accu?é d'avoir f.iit l'iipolot^ie
des massacres d'Avii^Mion : l'accu-
sation esl calomnieuse. Il se bor-
na à invoquer l'aumistie pour les
coupables , et l'on ne peut s'em-
pêcher de convenir que des rai-
sons politiques du plus grand poids
militaient en laveur de son opi-
nion. Iiupélueuxdans sou attaque
contre la cour, plein de mépris
pour les hommes « accoutumés ù
parler de la liberté sans enthou-
siasme, et de l'esclavage sans hor-
reur; * attentif A exciter l'indi-
gnation populaire , mais incapa-
ble d'avoir recours , pour obtenir
ce résultat, ù aucun moyen horj-
teux, à aucune voie détournée;
aveuglé sur les intentions de cer-
tains hypocrites déjà iufluens,que
les malheurs de la France et ses
propres malheurs allaient bientôt
lui apprendre à connaître, il cofi-
tribua puissamment, ainsi que
plusieurs autres Girondins , à la
journée du lO août. Il présidait
par intérim l'assemblée nationale
au moment où Louis XVI vint se
rélugier dans son sein. i. Je sui»
venu, dit le roi, pour éviter un
grand crime; je me croirai tou-
jours en sûreté au milieu des re-
présentans de la nation ; j'y pas-
serai la journée. » Vergniaud lui
répondit: « L'assemblée nationale
cormaît tous ses devoirs; elle re-
garde comme un des plus chers
le maintien de toutes les autorités
constituées. Elle demeurera fer-
me à son poste, et, s'il le fout,
ûou« saurons tous y mourir. »
VER
P«'ndant toute la durée du com-
bat, dont l'issue fut quelque temp*
douteuse , il ne changea pas un
moment de visage ; sa fermeté , sa
tranquillité, son courage, ne se
démentirent pas un moment.
J^msqiie le président, Merlet, vint
reprendre son poste, il se rendit A
la coumiission extraordinaire, et
reparut deux heures après à la tri-
bune, où il proposa la convoca-
tion d'une convention nationale,
la suspension de Louis XVI , et la
translation du monarque et de sa
famille au pal.iis du Luxembourg.
«Messieurs, dit -il, je viens au
nom de la commission extraordi-
naire vous proposer une mesure
bien rigoureuse : je la présenterai
cependant sans réflexions. Je m'en
rapporterai à la douleur dont vous
tîtes pénétrés pour juger combien
il inij-orle au salut de la patrie que
vous la décrétiez sur-Ie cliamp. »
Laça rrièrelégislntivede Vergniaud
se divise en deux parties bien dis-
tinctes. La première, que nous
avons déjà parcourue rapidement,
où , toujours agresseur, il déve-
loppa avec tant de talent toutes
les ressources de l'éloquence tri-
bunitienne ; la seconde, où con-
tent de la victoire que la révolu-
tion venait de remporter, il ne
s'occupa plus que d'en arrêter les
désastreuses conséquences. Mal-
heureusement il était déjà trop
tard ; la lutte de l'ordre contre
l'anarchie n'était plus égale. Il est
bien déplorable que parmi les Ci-
rondins, tous honnêtes gens, dé-
voués à l'intérêt général, élo-
quens , éclairés et intrépides, il
ne se soit point trouvé un seul
homme qui réimît à sa probité as-
sez de publique pour déjouer let
TER
machinalions de Robespierre , de
Danton, elc. , ni aîsez de force
morale pour réunir les bons ci-
toyens, et imposer au peuple le
calme et la modération. Ils pro-
testèrent conlre les excès (iont ils
étaient les témoins; ils appelèrent
l'indignation des contemporains
et (le la postérité contre leurs au-
teurs; ils ne purent arrêter leur
marche dévastatrice. Ils firent
néanmoins tout ce qui était en
leur pouvoir; leurs efforts, pour
n'avoir pas été couronnés du suc-
cès, n'en furent pas moins héroï-
ques; leur dévouement n'en fut
pas moins sublime, et leur sang,
répandu pour la patrie, ne nous
permet pour eux d autres senti-
mens que la douleur, le respect
et radmirali(jn. Vergniaud , qui
s'était montré presque toujours A
la têle des Girondins, n'abandonna
plus un moment ce [;0'le, aussi-
tôt qu'il fut devenu périlleux; cer-
tain de fU(.C(»nd)er, il réscdut de
ren)plir ses obligations dans toute
leur étendue, et de ne cesser de
combattre qu'en cessant de vivre.
Il s'opposa avec un courage tou-
jours nouveau, et à la déj>orta-
tion générale des prêtres , et à la
jiroposilion d'organiser un corps
de douze cents ijrannicides , et
au mandai d'amener lancé par la
commune contre Girey Diipré ,
l'intrépide collaborateur de liris-
50t dans la rédaction du Patriote
français. Il ne ménagea pas l'cx-
pres.-ion de son indignation, lors-
(jue l'épouvantable massacre du 2
septembre eut enfin dévoilé les
odieux complots de la commune.
Ce fut lui qui fit charger le con-
»cil-exécutil d'envoyer des com-
missaires au-devant de5 [)riiiun-
VER
«79
niers d'Orléans , pour les sous-
traire au sort affreux qui les nje-
naçait : mesure qui aurait pu être
salutaire, si l'exécution en avait
été confiée à d'autres mains. Le
17 septembre, il s'unit à Rersaint,
pour faire décréter que les mem-
bres qui composaient cette com-
mune sanguinaire répondraient
sur leur têle de la sûrelé des pri-
sonniers. Que pouvait faire tle
plus un homme déjà signalé aux
poignards, qui n'avait d'autre
puissance que son éloquence , et
à qui chaque jour enlevait quel-
que chose de son ancienne popu-
larité ? « I! est temps , s'écriail-il,
de briser ces chaînes honteuses,
d'écraser celle horrible tyrannie!
Il est temps que ceux qui ont fait
trembler les hommes de bian
tremblent à leur tour ! Je n'ignore
pas qu'ils ont des poignards à
leurs ordres; eh ! dans la journée
du 2 seplfUibre , n'ont -ils pas
voulu les diriger conlre plusieurs
d'entre nous? Dans leijrs listes de
pro.-criplions , u'ont-ils j»as voulu
dénoncer plusieurs d'entre nous
comme des traîtres? Et ma tête
aussi est proscrite. La calomnie
veut él(>uller ma voix; mais elle
peut encore se faire entendre ici ,
et. je vous en atteste, jusqu'au
coup qui me frappera de mort,
elle tonnera de tout ce qu'elle a
de force contre les crimes et les
scélérat?. » « Les proscriptions
passées, disait-il un autre jour, le
briiit des proscriptions futures ,
les troubles intérieurs , ces haines
particulières, ces délations infâ-
mes, ces arrestations arbitraires,
ces violations de la propriété, en-
fin, cet oubli de toutes les loiii ,
ont répandu lu consternation et
iTio VER
l'effroi. L'hoinuie de bien se ca-
che ; il fuit avec horreur ces scè-
nes <]e siing; et il fiiut Ijicn qu'il
se cache , rhoiniiic verliieux ,
quand le crinie triomphe. Il n'en
a pas rh<irrih!e .-entiinent ; il se
tait, il s'éloigne, il attend pour
reparaître des temp? plus heu-
reux. Il e>^t des hommes , au con-
traire, à !a foi"s hypocrites et fé-
roces, qui ne se mon'reut qiie
dan« les caJamilés publiques, com-
me il est des insecte.» malfaisans
que la terre ne produit que dans
les orages; ces hommes répan-
dent sans cesse les soupçons, les
niéfiarices, les jalousies, les haï-
mes, les vengeances. Ils sont avi-
des de sang; dans leur propos sé-
diliciix, ils am/ocr«//5fH/ la vertu
même, pour acquérir le droit de
la (ouler aux pieds ; ils démocrati-
sent le crime, pour pouvoir s'en
ra«.«asier, sans avoir à redouter le
glaive de la justice. Tous leurs ef-
- forts tendent à déshonorer au-
jourd'hui la plus belle des causes,
«fin de soulever contre elle toutes
les nations amies de l'humanité. »
Yergniaud fut réélu membre de la
convention nationale. II s y mon-
tra ccnslamment ce qu'il avait été
pendant le dernier mois de las-
gemblée législative. Son courage,
soutenu par la plus héroïque ré-
signation , semblait croître à me-
sure que le péril devenait plus im-
minent. Dès le 3 5 septembre, il
appela sur Marat l'indignation de
l'assemblée; mais sa voix, autre-
fois si juiissante, ne produisait
p!us (p^'une courte et imiliie agi-
tation. Dès celte époque , il ne
monta plus (pie bien rarenionl à
la tribune. A son indolence nalu-
felle, qu'jl ne savait vaincre que
VER
lorsque les circonstances agitaienï
forleuicnt son iune, se joignit la
cerliluile où il était d»- riueflica-
cilé de ses elloiis. Il n'était |)liis
snulenu que par la fermeté de ses
principes; il sentait qu'il ne pou-
vait plus que protester contre; les
excès qui allaient se commettre,
et sa mort, qu'il voyait arriver,
lui paraissait la plus éloquente des
protestations. « Sans cesse abreu-
vé de calonuiies, disait- il le i5
mars i 795 , je me sui'< abstenu de
la tiibuue tant que j'ai pensé que
ma présence pourrait y exciter
des passions, et que je ne pouvais
y apporter l'espérance d'y être
utile à mon pays. » Mais toutes
les fois qu'il ouvrait la bouche, la
franchise et l'énergie de ses ilécla-
ralions, ses méprisantes apostro-
phes , ses sarcasmes amer.-, té-
mcùguaient a-sez la profonde et
douloureuse indignation qui s'é-
tait emparée de son 5me. Le 5i
décembre, il prouva, dans un dis-
cours remaripiabie, la nécessité de
soumettre au }>euple la décision
de l'assemblée dans le procès de
Louis XVI. Ses arguniens étaient
irrésistibles; la Montagne , dont
celle détermination aurait , pour
un moment, paralysé les projets,
n'y répondit que par des cris de
fureur; Vergniaud, inébranlable,
et menaçant encore au milieu de
la tempête, accabia un instant de
son éloquence cette faction redou-
table, et parvint à faire décréter
l'arrestation de Bentabolle, l'un
des membres les plus exaltés. Ce
fut alors qu'il démontra Texis-
tence d'un complot qui avait pour
but l'assassinat d'un grand nom-
bre de ses amis et de lui-même.
Il vola la mort de Louis XVI ;
TER
Triais on p^l éloniié qu'.iprès avoir
invoqué l'iippcl îiu peuple, il ait
voté ctjnlrc le sursis. Vergniaud
fui noiiiiiié président !e lo janvier
1790. Ce l'ut lui qui prononça l'ar-
rêt du malheureux prince ; il dut
peut-être à la violence des senti-
mens qui l'agitèrent ah)rs , une
fièvre ardente qui s'empara de lui,
après les séances dt-s 16 et 27 jan-
vier, et qui lit craindre qutique
temps pour ses jours. Le 10 mars,
à peine eut - il entendu Hiire la
proposition d'instituer le tribunal
révolutionnaire, que, s'élançant
vivement à la tribune : « Lors-
qu'on vous propose, s'écria-t-il,
(le décréter létablisseirjent d'une
inquisition mille lois plus redou-
table que celle de Venise, nous
devons déclarer que nous mour-
rons tous plutôt que d'y consen-
tir. » C'est ce jour-là même que
lut découverte celte conspiration,
connue sous le nom de conspira-
tion du jo mars, et qui n'eut d'au-
tre elFet que ceux que lui donnè-
rent la Montagne et la commune,
si empressées de tirer parti de
tous les événemens funestes. On
ne manqua pas d'en accuser les
G i rondins. Vergniaud repoussacel-
te ridicule accus. ition HVec sa su-
périorité ordinaire. « On a vu ,
dit-il, dans un endroit du dis-
cours qu'il improvisa en celle oc-
casion , ou H vu se développer
j)aruii nous cet étrange système,
d'après lequel on vous dit : Vous
êtes libres , mais pen.sez comme
nous sur telle ou telle question
d'économie politique , ou nous
vous dénonçons aux vengeances
du peuple ; vous Ctes libres, mais
courbe» la tête devant l'idole que
nous enoensons, ou nous vou»
VER i«»
diMionçons aux vengeances du
peujde; vous êtes libres, mais as-
sociez-vous à nous pour persécu-
ter le? honinies dont nous redou-
tons la probité et les lumière.';, ou
nous vou? désignons par des dcno-
minations ridicules, et nous vous
dénonceroiis aux vengeances du
peuple. Alors, citoyens, il fut
permis de craindre que la révolu-
tion, connue Saturne, dévorant
successivement tous se» en fans,
n'engendrât enfin lo despotisme
avec toutes les calamités (pii rac-
compagnent. » Et peu après, s'a-
dressant au peuple lui-même:
c Un tyran de l'antiquité avait un
lit de fer, sur lequel il faisait éten-
dre ses victin)ijs, mutilant celles
qui étaient plus grandes que le lit,
disloquant duuîoiireiisemenl cel-
les qui l'étaient moins , pour leur
faire alleiiulre le niveau. Ce tyran
aimait l'égalité; et voilà celle des
scélérats qui te déchirent par leurs
fureurs. <> Ses ennemis ftirent ré-
duits au silence, mais non rebu-
tés. Ils prirent une «narchc plus
adroite ; ils l'attaquèrent au de-
hors, ainsi que ses amis, et exci-
tèrent peu à peu la défiance et la
haine d'une multitude ombr;igeu-
se. Le 1" avril, lorsque l'assem-
blée apprit la défection de Du-
mouriez, on lui surprit la décla-
ration qu'elle poursuivrait ses
membres mêmes, contre lesquels
il y aurait de fortes présomptions
de culpabilité. Le 10 avril, quel-
ques sections présentèrent à la
harro une adresse dirigée contre
les Girondins. Pétion fit entendre
contre celte adresse d'énergiques
réclamations. Après lui , Robes-
pierre s'éleva pour la soutenir.
«Je viens, dit -il, dévoiler le»
i8a
VER
trames tle celle {^rande conjura-
tion. » Voici quelques - uns des
cliet'j d'ticcusalion , qu'il faiî^ait
porter principalement sur Ver-
gri-iaud, Guadet et Gensonné : (Je
s'êlre opposés ù la déchéance du
9 roi; d'avoir loué La Fayelle et Nar-
borine; d'avoir calomnié lo con-
seil - général de la commune de
Paris ( après le 2 septembre ) ;
d'avoir voté l'appel au peuple ;
d'être des meneurs, des iutrigans,
des modérés ! On a peine à con-
cevoir de pareilles accusations ,
dont quelques-unes sont des élo-
ges, et de la plupart desquelles les
faits eux-mêmes étaient une réfii-
ialion sans réplique. Vergniaud
monta à la tribune immédiate-
rnenl après Robespierre; et pas-
s^ant en revue les différens chefs
d'accusation { il y en avait dix-
huit), montrant la fausseté des
uns, le ridiculb des autres, et l'ab-
surdité de toutes, el mettant ha-
bilement en contraste sa conduite
et celle de Robespierre lui-même,
il le couvrit de confusion el de
honte, et ne lui laissa plus d'au-
tre voie que la force ouverte pour
arriver à son but. Guadet parla
après Vergniaud, acheva de ré-
veiller le courage de la majorité
de l'assemblée, et, s'apercevant
de l'impression qu'il avait pro-
duite, il lança tout à coup contre
Marat un décret d'accusation, qui
fut presque unanimement accueil-
li, et adopté sur-le-champ. Le
coup était hardi ; mais la Monta-
gne avait trop d'influence au de-
hors pour qu'il pût réussir. Le
peuple se souleva; les commissai-
res des sections reparurent à la
barre, renouvelant les accusations
do Robespierre, et demandant la
VER
mise en liberté de l'Ami du peu-
ple, laquelle leur fut accordée.
Cependant le côté droit allait en-
core remporter une demi-victoi-
re, qui, peut-être, lui était mé-
nagée à dessein par la Motjlagne
elle - même. Grangeneuve" jeune
parut à la barre à la tête d'tme dé-
putation du départen)ent de la
Gironde , qui ne se croyait pas
aiors étranger aux intért-ls de I»
liberté. Les réclamations de Gran-
geneuve ne furent pus sans effet.
Le 20 mai, sur la rédaction do
Vergniaud, fut rendu un décret
ainsi conçu : « La convention na-
tionale improuve, comme calom-
nieuse, la pétition qui lui a été
présentée par trente-cinq sections
de Paris. » La commission des
douze fut formée; ses actes ne
servirent qu'à exaspérer la haine
du peuple , qui , le 3o , se déclara
en insurrection. Dès lors, tout fut
perdu pour la liberté et pour la
patrie. Ce fut dans ces pénibles
circonstances que Vergniaud dé-
veloppa toute la fermeté, toute
l'énergie, toute la grandeur de
son june. Poursuivi au dehors de
l'assemblée par les calonmies des
agitat(!urs et les fureurs d'un peu-
ple égaré, menacé au-dedans par
les vociférations et les poignards
des tribunes, son visage sloïque
ne laissa jamais entrevoir la moin-
dre émotion. Ln des derniers jours
de mai, au moment où mille voix,
séduites ou salariées. demandaient
sa tête î\ la convention, i! entre
seul au ihéAtre de la Répu!)liqiie.
« Est-ce vous, Vergniaud, lui dit
un de ses amis? Que venez-vous
faire ici? Peut-être en ce moment
êles - vous décrété d'accusation.
— Je lésais, répond Vergniaud;
TER
mnis que puis-je à loul cila? J'ai
bravé tous les danger?, el mu (ion-
leur est de les avoir bravé.s inuti-
lement. J'ai lait à mon pays le sa-
crifice de mes jours; c'est le der-
nier que je pui?se lui faire ; je dé-
kire seulement qu'il ne lui soit
point inutile, mais je ne l'espère
pas. J'ai rempli tous mes devoirs;
c'est à Paris à l'aire le sien. .> Le
3i mai, au milieu du désordre,
du tumulte et de l'eflVoi qui iV-
gnaienl dans l'assemblée, Ver-
gniatid lait jurer à ses tuliègues
«le mourir tous à leur poste. On
annonce un moment après que les
»ections soulevées se sont mises
en marche; Vergniaiid fait décré-
ter qu'elles ont bien mérité de la
jalrie, en ce qu'elles ont mainte-
nu le respect dû aux propriétés et
à la sûreté des personnes. Le i"
juin, il rassembla tout ce qui lui
restait de forces pour combattre
liu proj'U de pioclatnation pro-
posé par Barrère, dans lequel les
evénemens de la veille étaient
odieusement dénaturés. Le lende-
main, il fut décrété d'arrestation ;
il se rendit sans résislance. Depuis
celte époque jusqu'à sou juge-
ment, de nombreuses occasions
de fuir lui furent offertes ; il ne
voulut jamais eu profiler. Tra-
duit , le 25 (»clobre, devant le
tribr.nal révolutiounaire, il se dé-
fendit avec simplicité, avec cal-
me; il démonlr.i la fausseté de
tous les faits avancés à sa cbarfîe,
el néaimioins fui condamné ;\
mort. Il s'élail procuré utJ poison
trés-sjbtil ; mai-> voyant ses an»is
condamnés avec lui, il leur dé-
clart» que puisqu'il n'avail pas as-
fte» de poison pour eux Ions, ili
les accompagnerait à l'échafaud.
TBR
i85^
Il y porta sa tête le 3i ootobro
i7«j5. Vergniaiul fut, sans contre-
tliU le premier orateur de l'assem-
blée législative et de la conven-
lion. Une imagination brillante et
riche, un style énergique et ani-
mé, des traits hardis, de? mou-
vemens véhémens, sortant avec
impétuosité d'une ûme ardente et
passionnée, tels sont les caractè-
res distinclifs de son (aient. Tous
ces avantages étaitiil rebaiissés
par le plus noble débit. 11 était
|>eu suîCepliidc de grands tra-
vaux; mais la nature y avait sup-
pléé par une (îonception facile et
promple, et une mémoire prodi-
gieuse.
VERHLELL ( Ghables-He»bi,
comte), pair de France, vice-
aM)iral en retraite, grand'croix de
la légion-d'liotmeur, etc. , est né
à Doesberg (Gueidre) vers 1770.
Vorté par goût au service triari-
lime, il entra comme cadet dans
la marine de son pays . et était
parvenu au grade de lieutenant
lorsque la révolution éclata en
1793. N'en ayant point adopté les
principes, il fut obligé de quitter
le service, et resta sans emploi
jusqu'en 1804. C'était l'époque
où l'empereur Napoléon menaçait
l'Ariglelerre d'une descente ; il
demanda au gouvernement de la
iioilande un ancien ollif^ier de
marine, pour corr)mander 1;1 flot-
lille hollandaise, qu'il voulait réu-
nir à Boulogne ; le choix se ûxa
sur le frère de M. Verhuell, capi-
taine de haut-bord, marin distin-
gué, qui refusa le poste honr)ra-
ble qu'on lui offrait ; mais il indi-
qua son frère cadet, qui accepta,
et fut envoyé en France ; de sorte
qu'il devint en un jour, do siiupl*
i84 VER
lionlenniil de vaisseau, vice-ami-
r;il, comme le remarque le roi
I.otii? ( voy. Bonaparte - Louis )
dans ses Dorumens et remarques
historiques sur la Hollande, 3 vol.
JD-H", Briix«'IU>s. Il ne tarda pas
à justifier la confiance qu'on avait
eue en lui. Iii.-liuil de la mission
que le nouvel amiral avail à rem-
plir, l'amiral anjrlais l'attendit au
]»assiij;e avec un grand nombre
de vaisseatix et de t"régat«îs sous
ses ordres. L'amiral Verhuell, at-
taqué lorsqu'il parut près du cap
Cuinez à l:^ lête de la flottille qu'il
conduisait à Boulogne , eut à sou-
tenir un rude combat , où il mon-
tra autant de cnurage que d'babi-
lelé , et força l'ennenn à se reti-
rer. Il conserva sous le gouver-
nement du grand-pensionnaire,
Schimmelpeiiniiick , le grade de
vice-amiral, et fut en outre nom-
mé , en 1806. membre de li dé-
pulalion hollandaise chargée de
traiter avec le gouvernement fran-
çais pour les intérêts de son pays.
Quatre mois se passèrent en né-
gociations , dont le résidîal fut
(jiHvramiral Verhuell et ses col-
lègues demandèrent pour roi de
Hnllande le prince Louis, frère
de l'empereurNapoléon. Le grand-
pensionnaire Scbimmelpenninck
n'ay)prouva pas celte disposition,
qui anéantissait la république.
L'amiral Verhu(!ll reçu ^ ainsi que
les autres députés, en audience
solennelle, par l'empereur Napo-
léon , prononça le discours où un
prince étranger était appelé au
gouvernement de la Hollande. Il
fut créé iniuisJre de la marine par
le roi Louis, et successivement
maréchal du royaume et comte de
Sevenaar. La Hollande ayant été
VÉR
réunie à l'empire français, l'amiral
Verhuell [)assadansce grade au ser-
vice de France, fut nommé grand'
cr(tix de l'ordre «le l'Union et
chargé du commandement du
Helder. Kn 181 5 et 1814, il dé-
fendit ce port avec une rare cons-
tance cc.ntre les Hollandais eux-
mêmes , qui avaient profité des
malheurs de notre patrie pour se
détacher de son alliance. Ce ne
fut qu'après l'entrée des troupes
étrangères à Paris et l'abdication
de Napoléon , qu'il remit la place
du Helder au général Jonge, qui
l'assiégeait. M. Verhuell revint
dans sa patrie adopîive , et fut
nonnné un des inspecteurs de la
marine. Il est depuis 1819 mem-
bre de la chîimbre des pairs.
VÉRITÉ (Charles), né à la
Ferlé-Bernard, dép,irlen»ent de
laSarlhe, n)aire, |)uis adminis-
trateur du district de cette ville,
fut élu par le département de la
Sarihe, en 1791, à l'assemblée
législalive; il ne fil point partie
de la convention nationale. Ren-
tré dans l'administration munici-
pale, il fut ensuite nonnné admi-
nistrateur de son dé[>artement.
Sans emploi sons les gouverne-
mens consulaire o.t impérial, il
devint dans bs cent jours, en
iSi.T, sous-préfet de l'arrondis-
sement de Mamers, même dé-
partement; il refusa depuis de se
mettre sur les rangs , comme l'en
sollicitaient ses amis , qui sont
ceux de la liberté , pour entrer à
la chambre des députés , son âge
ne lui permettant pins de se livrer
fructueusement, dit-il, à ses ho-
norablestr;ivaux. !M. Vérité, d'ans
toutes les fondions publiques
qu'il a remplies, comme dans sa
TER
retraite, a su nit'^riler et conser-
ver l'eslime de ses ailininistrés et
en général de ses concitoyens,
par (irie grande sagesse et par une
grande invariabilité de principes
et de conduite, dans des temps
où Ces deux qualités sont restées
l'apanage d'un trop petit nombre
de personnes.
VERMIGLIOLI (Jean-Baptis-
te), membre de plusieurs socié-
tés savantes, professeur d'archéo-
logie, conservateur du cabinet des
antiques à Perouse, est né dans
cette ville en i^CJç), et a été éle-
vé à Orvielte, où il ticheva en ptu
«le temps ses éludes. De retour
dans sa patrie, il se mit à fouiller
les archives, les musées et les bi-
bliiilbéques, pour en exhumer tout
ce qui pouvait coniribticr à on é-
claircir l'histoire, il a publié im
grand nombre d'où vraj^cs , entre
autres un cours d'archéologie, qui
C;t devenu un livre classique en
Italie. Ce savant jouit d'uue gran-
de considération auprès de ses
compatriotes, et plusieurs de ses
écrits mériteraient d'être traduils
el connus par les étrangers. N(Mjs
regrettons que i.i nature de notre
ouvrage nous oblige -à ne citer
que les suivans : i° Dell' AiUira
città (H Arna, Perouse, 1 800, in-8';
2' le anlirlie iscrizioni perugine
cou itna disstrtazione salle origini
(U Ptrngin, ibid., iHri'i. 3 vol.
in-''j°; 5' Islorin de' >li.sripliriuli ,
ibid., i8o/|, iri-8°; /j" la Tipoi^ra-
l'ia péril gina ilrt .srrolo Xf^^ ibid.,
l8u(), in-8°; 5* Metnorie per .scrui-
re alla vita di IMatiirartzio, ibid.,
1807, in-8"; 6" Memorie di Jacopo
A ntif/uarj, elc. ibid., i8i5, in-8';
7* Délia zicca t délie tnonete peru-
gine, ibid., 1816, in-:'!"; %* Lezioni
VER
i85
elemeutarl di archeologla , i!>id.,
1822, 2 Vol. in 8"; 9° Bihliogra-
fia stoiico-periigina y ibid., ih25,
in-4''; 10" Congetlare sopra una
grande iscriiione etrusra scoperta
nel 1822, ii)id., ir2.!), iu-4°; « •"
Di un quadranle unico ed inedito
del museo di Pcrugia, ibid,, i825,
in-8".
VKIVNEITJI PUIRASEAU (le
BARON Joseph de) , d'abord maire
de sa comn)urie, |>uis membre du
conseil-général de départi-ment ,
et enfin président du tribuiial de
Nontron. fut nommé, en 1791,
par le déparlcuient de la Dorilo-
irne , député j"! l'assemblée légis-
lative, 011 il siégea an côté droit,
et vola avec le parti nmdéré. A la
fin de la sessicm , il se retira dans
.'^a coîiimune et échap[)a aux pros-
criptions de la terreur. Juge-de-
paix fie Biissière-Badil, haut-juré
à la hante-cour de Vendôme vn
179;, président du trii>unal cri-
minel de la Dôrdogiie eu 1799,
préfet de la Corrèx'e eu 1 Hoo, pré-
fet du Mont-Blanc en 1802, il fut
appelé , en 1804, à 'a diriction
des droifs-réunis iU\ déparlement
de la Rlayenne, fonctions qu'il
refusa. C'est alo^s que, de Tagré-
inent du ministre de l'intérieur,
il s'occupa de rédiger la stiili^lique
du département du iMiuil-Blanc.
Il tlirigea ensuite un bureau par-
ticulier près du minislre de l'in-
lérieur, présida le conseil électo-
ral de Nontron en 1809, et devint
en 1810 membre du corps-légis-
latif; le 29 décembre i8i3. il ap-
puya, en comité général, la pro-
posiliou de f lire imprinvr le rap-
))ort de M. J.ainé, présenté an non»
d'une commission exiraordinaire.
Le 24 septcinbre iSi4, il parla en
■
iS6
VER
faveur du projet de naturalisation;
le 28 octobre, il appuya le projet
de reslitulion aux émigrés, de
leurs [jiens non vendus; il rleinau-
da ensuite que les biens cédés à
la caisse d'auiorlissemeul et aux
hospices fussent restitués à leurs
propriétaires, avec la clause ex-
presse de prendre des mesures
propres à tranquilliser les acqué-
reurs de biens nationaux. Le 27
décembre, il se prononça pour les
auiandemens de la commission
au projet de loi sur la courdecas-
sation. M. Vcrneilh-Puiraseau fit
partie de la chambre des cent jou7'Sf
en »8i5. Depuis 1814 jusqu'en
1823, il a constamment siégé aux
diverses chambres, à l'exception
de la chambre dite introuvable , où
il n'a point été appelé. Dans la ses-
sion de 1819, il s'est [>rononcé
contre les deux lois d'exceptions;
toutefois, il a voté pour le nou-
veau systènie électoral, en ap-
puyant l'amendement de M. Koin
\voy. ce nom), qui conserve en
partie l'élection directe. M. Ver-
neilh - Puiraseau a été nommé
par le roi baron et chevalier de la
légion-d'honneur. On a de lui :
1° Statistique du département du
Mont-Blanc, Paris, luO^yin-Zi"
de 570 pages. Elle passe pour la
meilleure de toutes les statis-
tiques qui ont été pnl)liées, au
nombre de près de deux cents ,
sur les différens déparlemens.
Une première édition in-folio,
commencée à l'imprimerie du
gouvernement, n'a pas été ter-
minée; 2° Observations des com-
missions consultatives sur te pro-
jet du code rural. I.e minisli'e de
l'intérieur fit remettre, en 1817,
des exemplaires de. cet ouvra-
VER -
gc aux bibliothèques publiques..
VEUNES (Jacob), célèbre pas-
teur genevois, naquit à («enève
en 1728. Il fit de brillantes élu-
des, et montra dès-lors le germe
des taîens qu'il développa dans la
suite. Après s'être long-temp*
préparé au ministère évangélique,
auquel il se destinait, il fut nom-
mé, en 1770, pasteur de sa villtt
natale. Ami de la liberté, il s'al-
tdciia au parti pa^ciutique , et fut
enveloppé dans sa disgrâce en
1782. Forcé de s'exiler à celle
époque, il ne rentra dans sa pa-
trie qu'après la révolution qui "
éclata en 1789. Il mourut à Ge-
nève en 1791 , à Tâge de G5 ans «
laissant l'exemple d'une vie plei-
ne (le bonnes œuvres et d'utiles
travaux. On doit au pasteur Vcr-
nes , outre un journal intitulé :
Choix littéraires, en 24 vol. in-ia,
des Lettres et dialogues sur le chris-
tianisme de J. J. IVousseau, en
réponse à quelques lettres de cet
homme célèbre; un roman, sou.s
le titre de Conférences philosophi-
ques; un Catéchisme à l'usage de
toutes les religions chrétiennes ,
et enfi.i VExamen de cette ques-
tion, qui sans doute avait alors de
l'importance : Convient-il de di-
minuer à Genève le nombre des
sermons? Jacob Vernes sut aussi
s'exercer dans des genres moins
sérieux : il faisait facilement des
vers. Les sermons de M. Vernes
n'ont été imprimés qu'après sa
mort; c'est, au rapport des pro-
teslans eux- mêmes, ce qu'ils ont
de mieux en ce genre. Son fils,
François Vernes, né en janvier
1705, s'est ojcnpé avec succès de
travaux littéraires, et a produit
une foule d'ouvrages en prose et en
' VER
\er5. On accorde quelque estime
à son poëme. en 16 chants, inti-
tulé : la Franciade, a vol. in-8°.
1790. 11 a été l'éditeur des Ser-
mons de ^on père.
* VEllNET (CtAroE-JosEPH), est
né à Avignon 1»; \[\ août 17 «4- ^^'-
re, et fi^rand-père de peintres, il é-
tait fils d'un peintre, d'Antoine
"Vernet, qui fut son premier cl à
peu près son seul maître. A 18
ans, il quitta le (lomtat pour se
rendre à Rome. Le hasard, qui le
décida à y aller par mer, détermi-
na la direction de son talent. Ha-
bitué à dessiner tout ce qu'il ren-
contrait , et n'ayant devant les
yeux, pendant la traversée, que la
mer, le ciel et des vaisseaux, il des
sina ces ohjets dans toutes lea si-
tuations oi"i le hasard les lui pré-
senta . et il se reconnut appelé à
peindre surtout les scènes si va-
riées, et toujours sublimes dont
l'Océan est le ihérarc. Dans son
enlhousiaMiie, il ne croyait pas
pouvoir les contcmplera<sez long-
temps et d'assez près. Du rivage
il eût été trop loin d'elles; cVst
au milieu de la tempête même
qti'il se plut à en étudier les
accidens an pied d'ur» mât au-
quel il s'était Tiit lier. Pendant que
chacun tremblait et ne voyait au-
tour de soi qu'un ciel prêt à fou-
droyer le bâtiment, qu'une mer
prête ;'i l'engloutir; m ces momens
de silence, qui dans b-s grands pé-
rils sont aussi bien que les cris,
une expression de terreur, on en-
tendit Vernet s'écrier que cen
beau! et toute sa personne était
imituée d'une exaltation que le
pinceau d'Horace, son pclit-fils,a
bien mieux rendu que notre plu -
me. Vernet resta vingt aQ5 en Ila-
VER
187
lie, où il fit un grand nombre
d'ouvrages qui étal)lirent sa répu-
tation. On citait principalement
ceux dont il orna la galerie
de Borgbèse, et ceux du palais
Kondanini, où il s'est plu à imi-
ter le faire de Salvator Rosa II
fut lié en Italie avec tous les ar-
tistes célèbres de son temps, mai*
plus particulièrement avec le*
peintres Solimèncs, Jean Paul Pa-
nini, Locatclli ; il fut lié encore
de la plus intime amitié avec l'Or-
])hée de l'époque, avec Pergolese.
Ce grand musicien quillait peu
l'atelier de Vernet, où il trouvait
au.isi d'heureuses inspirations. Il
y composa entre autres im verset
de cet admirable Slahat, qui après
un siècle, est encore cité comme
un modèle de mélodie et d'expres-
sion. Vernet avait en possession
le brouillon de ce verset, qu'il ap-
porta à Paris, et que sa famille
possède peut-être encore. En 1752,
il fut appelé en France par le
gouvernement pour })eindre les
])rinclpaiix ports de mer. Nommé
à eelte époque membre de l'aca-
démie royale de peinture, il y fut
élevé au rang de conseiller en
1 763. 11 est mort en 1 789. On por-
te à près de 200 le nombre des ta-
bleaux grands et petits qu'il a
faits en France, de 1752 à 1789. La
mort l'a surpris en quelque sorte
le pinceau à la main, et ce pinceau
n'a pas eu de vieilb'sse; tous se»
ouvrages sont dignes de lui. La
seule récompense, la seule dis-
tinction que le gouvernement ait
accordée à Vernet, c'est un logc-
mcrt au Louvre. Il avait épousé,
à Rome, i\l"" Parker, fille d'«m An-
glais callndique , odicier (tans l.*»
n»arinc du pape. Verncl a joui de
!r
i88 VEn VER
son vivant de la pins haute con- nu sous le nom de CABLE-VERTtET,
sidératioti. Il la (levait à ses la- peirilre d histoire , ineiiibie de
res qualiîcs non nioin.^ (iii'à ses linstilnt, thcvalier dts or<li»^5 de
f^rands talm-; i! avail hcnncfmp Sainl-Michfd cl (!•• la It-fiion-d'hon-
d esjHit, de j^aîté, de iiatnri'i, et en neur. esl né à BMid-aux \<: i ] i'"'"''-
niôme ienip>l)eanc,on[)d',i-pi()!iib, l^SS. Elevé de son jx'-re, il a eonj-
dc mesure et même de dignité, menée de. très-hiMiiie heure rélu-
Répando dans la meilleure coni- de de la peinture; à 17 ans, il ob-
paj^nie, il savait s:"ûter les i)lai- tint à l'académie le second prix:
sirs et y cnntrihner. Il racontait à à -i^, en 1 782, il remporta le grand
iT)erveille. A i'aris comme à Home, prix, et partit pour Uonie en qna-
il a été recherché partons les hom- lité de pensionnaire du roi; en
mes célèbres de son temps; il a 1 787, C. Yernel a été reçu niein-
élé l'ami de plusieurs d'entie eux. bre de racatlémie royale de pein-
Peu de peintres ont joint à une turc, après avoir présenté pour sa
pralifjue plus habile, uae théorie réception i\n tableau de i5 pieds
plus prolonde, plus juste et en de proportion, représentant le
même temps [)lus claire. Il par- triomphe de Paul Emile; c'est le
lait épalemcnl bien de son art aux premier des grands ouvrages his-
gens du monde et aux artistes, toriques qu'il a faits. En i8i4«'''i
quoiqu'il leur dît, ou peut-être été ru)mmé membre do l'institut
parce qu'il leur disait les mêmes royal. Ses principaux ouvra'i,es
choses d'une maïuère toute diil'é- sont : la Bataille de Rivoli, 10
rente, et qu'il avait le talent de pieds : la Bataille de Marenj;o, 02
traduire pour les uns dans la lan- pieds; la Bataille d'Austerlilz, Dé-
gue usuelbî ce (pi'il expliquait part des Maréchaux, 2-2 p. ; l'En-
aux autres dans la langue spécia- tréedans Milan, gpieds; la Batail-
le. Diderot, enchanté de sa con ver- le de Wagram, i5 pieds; dans de
sation, l'invita à composer un ou- moindres proportions, uo grand
vrage, en lui proposant d'en re- nombre de sujets de guerre, de
xoivhi rcùixction. f^otre slylc gâte- chasse ou de taniaisie; des por-
r ai t ma peinture f répondit Vornet. traits à idieva! , jarrni lesquels se
Honnête, droit, facile et bon dans trouvtMit celui de >apc!eon et ce-
ses discours connue dans ses ac- lui de Mgr. le duc de. Berri.
tions , il fui toute sa vie complète- A cette suite d'ouvratre? peints,
ment étranger aux tracasseries, dont il serait impossible de faire
aux rivalités, aux haines d'acadé- ici l'analyse, on peut joindre
mie ou de jMoi'ession. Prodigue une suite bien plus nombreuse en-
de ses conseils el de son appui à ccre de dessins et de lithogra-
tous ceux qu! les réclamèrent, il p'iies dans ton? les genres el sur
ne se permit jamais la plus légè- tous le? sujets, depuis ceux qui
re plaisanlerie contre le plus min- appartiennent à riiistoire jusqu'à
ce talent ou le plus médiocre ou- ceux <pii représentent les scènes
vrage. les plus familières. Parmi les pre-
VEBNET ( Antousk- Charles- miers, on distingue 28 dessins
Horace), fils du précédent, con- in-fol., pour les campagne» d'Jla-
j/y/A,
e^r//e/~^.
TIu/utI L'/eiirr fiiiuc .
Fiviiii/ ,M . !•/ Xra/^ ,
VER VEa 189
lie du général Honaparle. Veniet tableaux , qui embrassent un si
en entrant dans l académie de vaste horizon, et au uiilieu de
peinture, (jui depuis s'est fondue celte multiplicité d'aciions, Ho-
dans la 4' classe de linsiitut, eut race Vernel a su appeler l'allen-
la vive satisfaction d y siéger près tion d'abord sur tout ce qui con-
de son père; il y siégera probable- court à déterminer le résultat que
ment aussi près de son Uls. poursuit l'armée qui doit vaincre,
VEKNET (FIorace) . ûls, petit- et indiquer par le mouvement de»
ùb , arrière-petil-fils des précé- lignes de balaillcquellc sera l'issue
dens, est né à Paris le 5o juin de l'action qui s'engage entre les
1789, aux galeries du Louvre, corps qui sont aux prises. Il ne
où demeuraient son père et son néglige pas cependant les actions
grand-père. II sénjblait que prête particulières, et ne s'allacbe pas
à nous retirer un Vernct, la na- moins à peindre les individus que
lure ait voulu conipcnser aussitôt les mas-es. Mais ces détails sont
cette perte. Il semblerait aussi, liés avec tant d habileté à l'ensem-
d'après la diversité des apliludes ble de l'action, qu'il faut y reve-
dont elle a doué le dernier des nir pour les distinguer et s'aper-
Vernet , qu'elle ait voulu repro- cevoir que cet immense tableau
duire les talens de trois généra- est coniposé d'une innombrable
tions dans un seul individu que de quantité de tableaux particuliers
plus elle dota d'un talent qui lui qui s'y fondent sans s'y perdre,
est particulier. Né au milirn de Les batailles d'Horace Vernet res-
ta fermentation généreuse qui pré- semblent à ces récits où l'histoire
céda la révtdulion, Horace Ver- de chacun se retrouve dans l'iiis-
net semble <n j)articippr; il a en toire générale , qu'avant tout on
lui je ne suis quoi d'analogue à a le besoin de lire tout entière,
l'esprit qui, à cette époque, ani- Horace, qui par se-* batailles s'est
niait tontes les têtes , mais qui, en montré l'émule de son père, a
le portant vers ce qui est grand, annoncé aussi, par plusieurs ta-
ne l'a jamais fait dévier de la ligne bleanx de marine, que son grand-
du bon et du lieau. Conduit par père avait un successeur. Lt quel
tui noble palriolisme , c'est on re- est le genre où il ne soif pas ap-
traçarit les faits les plus glorieux pelé à réussir? Des portraits pleins
aux armes françai.-e», que, si jeu- de vie et de pensée, des scènes,
ne, il s'est ac<piis déjà une si tantôt gracieuses, tantôt piaisan-
belle réputati'in. l>es baiailies de tes, tantôt terribles, mais toujours
Jeinmappes, de Montmirail , de pleines d'esprit et d'expression, et
Hanau , l'ont placé au premier dont les sujets sont pris, soit dans
rang dt-s peintres dans ce genre, l'intérieur des familles, soit dans
où il n'e»l pas facile d'atteindre ù Icslravuuxou lesamusemensde la
la j)erlection ; dans ce genre, qui campagne, soitdanslesaccidensde
vent surtout l'exactitude et le la chasse, de la guerre et du bri-
mouvemenl, étf)ù r«.'xactilude est gandage,qui ont ensendjle plus
si près de la froideur et le mon- d'analogie qu'on ne le croirait,
vemcnt de la confusion. Dansées prouvent qu'il n'y a rien d'ina-
igo
VER
bordable pour son pinceau facile
et fécond. Mais ce qui le distin-
gue entre tant d'h.ibiles arlistes
dont cette époque abonde, c'est
l'esprit de srs coujposilions; non-
•eulenjcnt elles enchantent l'œil,
elles satisfont l'imagination, mais
elles provoquent souvent les plus
profondes réflexions. Tel est par-
ticnlièrenient le mérite du Soldat
laboureur, tableau où, sans y pen-
ser peut-être , Horace Vernet a
mis en action cette belle image
de Virgile :
Agricola incurvo terrant molitur aratro,
Exesa inveniet scabrd rubiginc pila, .
Aut gravibus rosirit galeas pulsabit inanes,
Grandiajut eff'ossi.i mirabitur oaa scjiuUris.
Un jour le laboureur dans ces mêmes sillons
Où dorment les débris de tant de bataillons,
Heurtant avec le soc leur antique dépouille,
Trouvera sous ses pas des dards rongés de rouille,
Entendra retentir les casques des héros,
Et d'un œil effrayé contemplera leurs os.
Ce mérite se retrouve aussi dans
le Soldat de IVaterloo. Qui peut,
sans tomber dans un abime de
médilaliuns, otmtempler sur ce
champ de bataille ce soldat blessé
survivant seul à ses compagnons,
à ses chefs, qu'il vient d'enterrer,
colonne chancelante, mais debout
encore au milieu des ruines du
monument dont elle a fait partie?
L'idée de ce tableau est liée inti-
mement à la pejisée de l'autre. Ce
sont deux scènes d'un même dra-
me, séparées par quelques siècles
ou par quelques mois. Si nous
voulions analyser toutes les con-
ceptions d'Horace Vernet , le plus
fécond peut - être des peintres
qu'ait produits la France, cet ar-
ticle n'aurait pas de bornes. On
sait qu'en ibau les tableaux d'Ho-
race Vernet suffisaient déjà seuls
à remplir son vaste atelier, où le
public vint jouir de ces compo.-i-
VER
lions, auxquelles l'entrée du Lou-
vre était alors refusée. Nous ren-
voyons le lecteur au catalogue dres-
sé à celte occasion par MM. Jay et
Jouy.Nous ne pouvons néanmoins
refuser ici ime attention particu-
lière au Chien du Régiment , la
production la plus naïve, la plus
piquante et la plus vraie peut-être
qui ait été souscrite du noui de
Vernet. Sous le feu de la mitraillq
et de la mousquelerie. au fort de
la bataille, deux jeunes tambours
ne s'occupent que de leur barbet
blessé; ils lui prodiguent tout, jus-
qu'à leur eau-de-vie; indiCféren»
aux dangers qui les entourent, à
la mort qui pleut autour d'eux,
ils sont tout aux souffrances de
leur chien. Ils sont intrépides à
force de sensibilité. C'est par une
cause tout opposée que l'est ce
personnage qu'on a rencontré
partout; ce capitaine qui, tout
à sa manœuvre, ne s'occupe pas
plus de ce barbet que si c'était un
homme. 11 en est de ce petit ta-
bleau comme certains petits poè-
mes que leur perl'ectiun met si
fort au-dessus de tant d'épopées.
Est-il beaucoupdegrands tableaux
d'hislt»ire qui vaillent le Chien du
Régiment? Il suffirait à la ré-
])utation d'un artiste. La barrière
de Clichj, la défense de Sarragos-
se, le Cheval du Trompette, mé-
riteraient aussi des articles à part;
mais ce serait à n'en pas finir. Et
l'auteur de tant d'ouvrages n'a pas
IrenJe-six ans! Puisse-l-il soutenir
et accroître long - temps encore
l'honneur du nom qu'il porte? Il
en est peu d'aussi nobles. Trois
générations suffisent pour chan-
ger en gentilhomme le petit-fib
d'un obscur anobli; et depuis qua-
VER
(re générations, les Veri>(;t fonl
illustres ! Les Didot «enl.>< se sont
fait une pareille noblfsse.
VERNIER (le COMTE Théodore),
né ù Lons-Ie-Saultiier, était avo-
cat à l'époque de la révolution,
dont il soutint les principes avec
modération; nommé, en 1789,
député du tiers-état du bailliage
d'Aval, en Franche-Comté, aux
états-généraux, il s'y occupa sur-
tout des finances. Il publia eu
1791, sur cette paitie, un ouvrage
qu'il inlilula: Élémens de finances.
1 1 présida l'assemblée vers le même
temps, ()roposa en juin suivant, au
moment du départ du roi, une fa-
brication d'armes dans toute la
France , et présenta divers projets
contre l'émigration, qui ne furent
point admis. Rentré dans ses foyers
après la session, il fui <lé[Hilé par
la département du Jura, en sep-
tembre I79'2 , à la convention na-
tionale ; il vola la détention de
Louis XVI, comme législateur,
et refusa de prononcer comme ju-
ge. H y reprit ensuite son travail
favori , celui des finances, où il
avait déjà fait preuve de lumières.
Il ne put écliappiT aux proscrip-
tions du 19 mai, et fut un des
73 députés mis en arrestation.
Rappelé dans le «eiu de la con-
vention après le 9 thermidor, il
présidait l'assemblée au 1" prai-
l'ial ati 3 (20 mai «795), et ne
-e laissa point intimider par les
menaces de la multitude furieu-
se qui s'était emparée de la sal-
le. t\lembrc du conseil des an-
cien» , sous le directoire , il ne
ftit point atteint par la révolution
du 18 iructidor, et «r montra fa-
vorable à celle du 18 brumaire;
il fit partie de la commission in-
VER 191
tcrmédiaire de son conseil. Créé
sénateur lors de l'organisation
du gouvernement consulaire en
1799, il conserva ce titre jus-
qu'en 1814. Il adhéra alors à
la déchéance de l'empereur, et
au rappel de la maison de Rour-
bon. Le roi le nomma pair de
France, le4j<iin i8i/|. Napoléon
ne lui ayant point conservé cette
dignité à son retour, en 18 15, il
reprit son rang dans la chambre
royiilc, à la seconde restauration
des Bourbons. Le comte Théodo-
re Vernier est mort en 1818. Il a
laissé, comme littérateur, un ou-
vrage pour faciliter la lecture de»
Essais de Montaigne , et un Abré-
gé analytique deSénèqae. Ces deux
ouvrages ont obtenu im succès
d'estime.
VEKNINAC DE SAINT-MAUR
(N.), né i\ Cahors en i'jV'>i. vint
à l*aris, jeune encore, tt s'y fit
connaître par quelques pièces de
vers, qui furent insérées dans le.i
journaux et dans VAlmanacli des
Muses. Il embrassa avec trans-
port, en 1789, la cause de la li-
berté; fut envoyé par le roi, le 1"'
juin 179», dans Iccomtat Venais-
siu , avec Lescènc, Desmaisons et
l'abbé Mulot, pour y apaiser le.-»
troubles qui désolaient ce malheu-
reux pays. Ils arrêtèrent momen-
tanément le îours des assassinats,
mais ne prirent point les mestires
propres à les empêcher de se re-
produire; au'si se renou vellèrent-
ils bientôt à la Glacière, et peut-
être furent-ils le prélude de ceux
dont Paris devait être le théAfre
un an après, dans les premiers
jours de septembre. Il tut nom-
mé mifiislre de France en Suède,
où il arriva le rG mai 1795!. deux
192
VER
jours apn'is les fuiiér;»iIl<'S de Giis-
lavt' III. Quel!|u«; dis})()sée que
lui la cour (l'j Stiède à adopter les
prinripc* de la révoliiliini l,Vi"içai-
se, elle se inoiitia peu favorable à
M. Verniuac, el lorsque l'innée
suivante, le baron de Staël fui en-
voyé de Suède a Paris, six semai-
nes après la mort de Louis XVI,
les deux gouvern(>mcns rappelè-
rent respeclivement leurs minis-
tres. Chargé, en février 1795, de
se rendre à Constantinople avec
le titre d'envoyé extraordinaire,
il fit son entrée dans cette ville le
26 avril. Malgré le cérémonial
employé jusqu'alors, à sa premiè-
re audience, il se fit précéder d'u-
ne musique militaire, et escorter
d'un détachement de troupes fran-
çaises, la baïonnette au bout du
fusil, jusque dans la seconde cour
du sérail, où elles présentèrent
les armes au grand visir et aux
autres membres du divan. Ce ne
fut pas la seule innovation à la-
quelle cette anibassade ait donné
lieu; M. de Verninac est le pre-
mier étranger qui ait fait impri-
mer et dislril)uer une gazette dans
sa langue à Constantinople. Il re-
çut du grand-visir le titre de ci-
toyen; mais comme ce mot n'a-
vait pas d'équivalent en turc, il
fut prononcé en français. Chargé
de notifier à la Porte le traité de
paix avec la Prusse, il réussit à
faire reconnaître la république
française, et à obtenir l'envoi d'un
ambassadeur pernianent à Paris,
dans la personne de Seïd-A!y-Ef-
fendi; mais il fut moins heureux,
malgré ses conférences avec les
ministres de Suède et de Prusse,
dans le projet de faire entrer le
grand-seigneur dans une îdliancc
VER
avec'la France, ayant trouvé une
opposition constante de la part «le
tous |(-s autres ambassadeur-;, et
surtout de ceux di; Russie et d'An-
gleterre. II dem;tnda son rappel
à cette é[)o(|ue, fut remplacé par
Aubert du iiayet, et quitta Cons-
tantinople dans les premiers jours
de noveujbre '796. Forcé de dé-
barquer à Naple.- , il y fut arrêté
et gardé à vue pendant quelques
mois, et n'eut la liberté de revenir
en France qu'en mai 1797. Le 9
juin de la même année, il fut re-
çu en grande audience par le di-
rectoire-exécutif, auquel il pré-
senta un étendard ottoman et un
diplôme de Selim III: il était in-
troduit par Charles de Lacroix,
ministre des relations extérieure»,
dont il épousa la fille peu de temps
après. A la première création des
préfectures, en 1800. il lut nom-
mé par le gouvernement consu-
laire à celle du Rhône, rrt reçut, en
1801, la mission de se rendre dans
le Valais, qui se constitua bientôt
en république, sous la protection
de la France. Pour reconnaître le
zèle avec lequel il avait servi les
intérêts de ce petit état, la diète
valaisanne lui accorda, pour lui
et sa famille, les droits et titres de
citoyen du Valais. Depuis ce mo-
ment, il resta san? fonctions publi-
ques. En sei)tembre 181G, son ar-
roiulissement l'élut candidat à la
chambre des députés; mais l'esprit
du temps empêcha sa nomination.
RI. de Verninac , mort de^tuis
plusieurs années , avait publié :
1° Oraison funèbre de Louis-
PkUippf dur d'Orléans^ 1-86; a*
un Recueil de poésies; .">' Recher-
ches sur les cours et les procédures
criminelles d'Angleterre, extraites
_>^c '€. f^utoj'
VEll
<le Blackstonc sur les lois anglai-
ses, 179»» in-8°; 4* Description
physique et politique du départe-
ment du Rhône, 1S02, in-8".
VERVIEK (Jean-Baptiste), né
à Gîintl le 8 murs 1760, eiiibiassa
de bonne heure 1%'tat militaire,"
aïKjiiel cependant il renonça, quoi-
que revêtu d'un grade très-hono-
rable, pour s'appliquer entière-
ment aux sciences et aux beaux-
arts. Il fit de bonnes et rapides
«tudes, et fut nommé, en 1777 «
docteur en médecine , et en 1 779,
médecin m chef des armées de
l'impératrice Marie-Thérèse, en
Belgique. Après la guerre de Ba-
vière, le gouvernement autrichien
le nomma médecin et chirurgien
en chef d'une expéditi'>n d'AI'ri-
que et des Antilles, en le char-
geant d'une uiission secrète et
particulière. Avi-le d'étudier, sous
un autre hémisphère, les mer-
veilles de la nature, il entreprit,
de son propre mouvement, difTé-
l'ens voyages de long cours. En-
fin , de retour dans sa jiatrie, il y
exiTça pendant 55 ans , avec la
plus grande dislincliou, l'art dif-
ficile de guérir, et consacra sans
cesse aux sciences et aux arts,
dont le gnftt était sa passion, le
peu de loisirs que lui laissait une
pratique nombreuse. Il fut succes-
sivement , à Gand , médecin en
chef des hôpitaux militaires, mé-
decin di's hospices civils, et pré-
sident de la société de médecine.
Aucun genre d'instruction, aucune
branche des connaissances humai-
nes, n'étaient entièrement étran-
gères à cet honmie modeste, niais
profondément érudit; aussi le» sa-
vans, les hommes de lettres, les
artistes dont s'honore la Belgique,
T. XX.
\IC
190
étaient-ils, pour la plupart, ou
ses ccrrespondans ou ses amis.
Recommanddble surtout par les
qualilésde son cœur, cet ami des
hommes avait toujours* besoin
d'affections, et la bienfaisance é-
tait le trait principal de son carac
tère. Sa douce philanthropie le
conduisait partout 01^ il savait un
être souffrant, et souvent il ajou-
tait aux conseils de son art les se-
cours de sa bourse; aussi, i\ sa
mort, arrivée en décembre 1817,
laiss a-t-il dans la classe peu for-
tunée tous les regrets et les souve-
nirs de la reconnaissance. Il était
membre de plusieurs sociétés sa-
vantes; on a de lui une Disserta-
tion sur Cart des accouchemens , et
one traduction des J phorismes
d'Uippocrate.
VICTOa ( TEnaiN ) , duc de
B'dliiue, pair et ujaréchal de
France, grand-cordon de la légion-
d'honueur, commandeur de baint-
Louis, etc. . né à la Marche, dans
la ci-devant Lorraine, en 1766.
A I 5 ans , il entra au service dans
l'artillerit;. Il dut à la révolution
l'avancement rajjide qu'il obtint;
sa belle conduite au siège de Tou-
lon, «t;u 1795, lui valut le grade
de général de brigade. Rétabli de
doux couj)S de feu qu'il avait re-
çus à ce siège, il se rendit à l'ar-
mée des l'yrénées-Orienlalfs, et
«e trouva aux sièges' de Sainl-
Elme et de Roses, et à toutes les
batailles qui furent livrées jusqu'A
l'époque du traité de Bûle II ,>c fit
remarquer, en 1790, auxiliaires
de Loano, de Cosaria et de Dego ;
mais plus particulièreinenl, en
1797, ii celles de la Favorite et de
Saint-(ieorges, où il fil mettre bas
les armes à 8,uoo hununcs de la
i3
M)'» Vie
division autrichienne de Provera;
il reçut eu récompense le grade
de général de division. Il battit
J'cnrietni sur le Serio , surprit la
place crAiicône, et fil prisonniers
5,000 hommes qui en Jormaient
la garnison, ce qui délerinina le
pape ù signer le traité de ïolen-
liuo. Pendant la paix que procura
celui de Cauipo-Formio, le gé-
néral Victor eut le commande-
ment du déparlement de la Ven-
dée, où il parvint à rétablir le
ealme. 11 retourna en Italie en
1799, et prit, avec sa divii^ion ,
une part horjorabic aux batailles
de Sainte-Lucie, de Vilia-Franca,
d'Alexandrie , de la Trébia et de
Novi ; raffaire de Monlebello était
commencée lor-qu'il y arriva as-
sex à propos p(jur en déterminer
le succès, et cinq jours après, il
commandait l'avant-garde à la ba-
taille de (\lureugo. Chargé de sou-
tenir les eflbrts de l'armée autri-
chienne , il le fil pendant huil heu-
res, jusqu'à l'arrivée, de l'armée
française, sans perdre un pouce de
terrain. L'n sabre d'honneur lui fut
décerné par le premier consul Bo-
naparle. Il parfit aussitôt avec l'or-
dre de prendre lecommandement
de l'armée gallo-balave, destinée,
disait-on , à une expédition pour
la Louisiane; ce projet ne roçtit
point d'exécution. Le général Vic-
tor resta néanmoins en Hollande,
se maria à L§ Haye, el ne quitta
sou poste qu'après le traité d'A-
miens ; il se rendit ensuite à la
cour de Daneniarck en qualité
d'ambassadeur de la république,
et y resta jusqu'au moment où la
guerre éclata entre la France et
la Prusse. Il fut blessé à la ba-
taille d'Iéna, s« distingua ensuite
Vie
à la bataille de Puisluck, et prit
part a tous les succès qui illuslrè-
reut la campagne de 1806. Com-
mandant, en 1807, du 1" corps
(lu la granje-armée à la bataille
de Friedland, dont le succès fut
dû en partie à Thabileté de ses
manœuvres, il reçut le bâton de
maréchal de l'empire sur le champ
de bataille même. Après le traité
de Tilsitt, il fut nommé gouver-
neur de Berlin; pendant i5 mois»
il occupa ce poste. Employé en
Espagne sur la fin de 1808, il y
commanda un corps d'armée, à
la tête duquel il se distingua con-
tre l'armée de Galice, et fut vain-
queur aux bataille^) de Spinosa ,
de Sommo-Sierra et de Madrid ;
il fut également heureux, en 1809,
à la bataille d'I'clés, où il battit
le duc de l'Infantado , et lui fit
1 5,000 prisonniers; il compensa
ainsi la perte que ce même géné-
ral avait fait éprouver à l'armée
française à Baylen, en forçant, on
ne sait encore par quels moyens,
le corps du général Dupont à ca-
pituler. Les succès qu'il obtint à
la bataille de Medellin furent dé-
cisifs ; il détruisit l'armée com-
mandée i)ar Cuesta. Plus tard, il
perdit la bataille de ïalavera,
après seize heures de combat et
des prodiges de valeur, et néan-
moins força les Espagnols , par
(me marche savante et hardie , à
abandonner le passage de Pena-
Perros, et nul ainsi toute l'An-
dalousie au pouvoir des Français.
Chargé d'investir Cadix , il la fit
entourer de remparts inexpugna-
bles , et ne pouvant s'en rendre
u!aîtr<! , il prit des ujesures pour
être lui-même à l'ahri de_ toute
insiulte. En effet , il eut à repous-
vie
ser les allaques de 24,000 Anglais
et Espagnols réunis , qui voii-
laienl le prendie par derrit're pour
l'obliger à se retirer. Il gagna la
bataille de Chiclana, el força les
troupes combinées à rentrer dans
Cadix. Appelé en Russie en »8i2,
il quitta le blocus de Cadix, et eut
sous ses ordres le 9° corps ; il se
couvrit de gloire au combat di; la
Bcrésina. Kn i8i5, à la bataille
de Dresde , où il commandait le
2' corps , il fixa la victoire p.'^r une
manœuvre hardie, qui enleva les
positions de la gauche des alh'és,
et isola i5.ooo Autrichiens qui lu-
i-ent faits prisonniers. Les cham{)S
de >Vachau, de Léipsick. et de Ha-
nau , furent également témoins
de sa valeur, quoiqu'elle n'eût
pas partout le même succès. Ayant
repassé le Rhin , il marcha sur
Strasbourg, et mil en état de dé-
fense toutes les places de l'Alsace;
il défendit ensuite les Vosges pied
à pied; mais des forces supérieu-
res l'obligèrent de se replier sur
la Aieuse, où il tint encore quel-
ques jours, et ensuite sur Saint-
Dizier, d'où il chassa les Russes le
27 janvier i8i4- Quelques jours
après , il s'empara du village de
Bricnne malgré i5,ooo hommes,
tant Russes que Prussiens, qui
Toccu paient. Le g février, il se
dirigea vers la Seine, seconda
les opérations de l'empereur à
Champ- Aubert et la Ferlé, et dé-
fendit les ponts de Jiogent jus-
qu'au 16; le 17, il se porta sur
Nangis, etde là sur Villeneuve, et
contribua puissamment au succès
de ces deux alTtires. Un repos de
quelques heures :\ Salins fit man-
quer , dit-on , l'occupation des
ponts de Montereau, ce qui lui al-
VIG
195
tira de vifs reproches de la part de
l'empereur. Si le maréchal en fut
vivement affecté, il reprit bientôt
une noble revanche par la con-
duite valeureuse qu'il tint le 7
mars à l'abbaye de Vaucler, où il
passa un défilé défendu par 60
pièces de canon, et eut une grande
part au gain de la bataille de
Craonne, où il fut encore blessé
d'une balle. Après la restauration,
en 1814, il reçut du roi la croix de
S:iinl-Louis , et le gouvernemcrnt
de la 2' division militaire à Mé-
zières , et lorsqu'en mars i8i5,
Napoléon revint de l'ile d'Elbe , le
duc de Bellune fit tous ses efforts
pour empêcher le mouvement des
troupes; n'ayant pu y parvenir,
il se rendit en Belgique avec le roi,
et y resta jusqu'au mois de juillet
181 5. A Cftte époque, il rentra en
France à la suit»; des troupes é-
trangères el des Bourbcms ; fut
nommé quelque temps après pré-
sident du collège ébctoial de
Loir-et-Cher, pair de France ,
major-général de la garde royale,
et enfin présidint de la commis-
sion chargée d'examiner la con-
duite des officiers j)endant les cent
jours , en 181 5. Il fut désigné par
le roi, eu i8iG, pour représenter
l'armée française au mariuge du
duc de Berri. Louis XVIU, de-
puis, ne cessa de donner des preu-
ves de confiance au duc de Bel-
lune. Le i5 décembie 1821, un
mois après le départ du njarquis
de Latour-Maubourg pour l'am-
bassade de Constantinople, il fut
nommé minisire de la guerre. Le
choix d'un guerrier qui avait fait
long- temps la guerre en Espagne,
donna encore plus de consistance
aux bruits qui se répandaient alon
lOO
vie
que les troupes qui se rassem-
blaient au pied (les l'yrénées ,
sous le nom de cordon sanitaire ,
n'altendaient qu'un trioinenl favo-
lab^e pour pénétrer eu Espagne,
et ces bruits, qui iuquiélaienl tous
les amis de la paix, ne s'affaibli-
rent, ni par le démenti que leur
donna . par la voie des journaux,
le 27 décembre suivant, le secré-
taire-général du iniiiisicre de la
guerre, ni même par l'onlonn mce
du 22 septenibre 1 822 , qui décla-
rait (pu; les troupes employées au
cordon sanitaire seraient uiaitite-
nues comme corps d'observation
«laus les positions qu'elles occu-
paient. L'incertitude que laissait
encore sur cet objet important
le discours du trûoe, à l'ouverture
des chambres, le 28 janvier 1825,
«iP dissipa le 2 lévrier, lor.iqu'oti
sut que le travail d'organisation
de l'armée destinée à eulrer en
Espagne était dtfuiitivement ar-
rêté, et que le duc de Belluue a-
vait exprimé fortement le dé?ir
de servir à cette arutée en qua-
lité de major-général. Les désiis
tin maréchal ne furent pas rem-
plis; l'organisation de l'arniéedite
des Pyrénées-Occidentales, qui
parut le 6 février, désignait le gé-
uéral Guillemot comme chef d'é-
tat-major. Déjà, à cette époque ,
l'emprunt Ouvrard était l'objet
des plaintes de Tambassadeur es-
pagnol à Prfris, ce qui n'empêcha
pas un journal royaliste de nier,
quelques jours après, que la com-
mission de MM. Ouvrard et Tour-
ton existai. Le ministre de la
guerre activait de tous ses moyens
les préparatifs de la guerre d'Es-
pagne; le 10 février, il présen-
tait à la chambre des députés un
Vie
projet tendant à ce que les Fran-
çais libérés fussent rappelé» sous
les drapeaux, projet qui fut, ù
quelques modifications près , con-
verti eu loi ; le i4 février, il prit
une décision annonçant qu'il se-
rait organisé, à Niort, des briga-
des de mulets de bât pour le ser-
vice de l'armée d'observation , et
eufiu , le 19 février, M. Marchand
arrivait à Perpignan comme agent
(partie des vivres) du ministre de
la guerre. Une ordonnance du roi,
en date du 17 mars, nomma le
uuiréchal duc de Belluue major-
général de l'armée des Pyrénées,
et une autre ordonnance du même
jour, nomma le vicomte Digeon
pair de Frani e et lieutenant-fréné-
ral , ministre et secrôtaire-d'élat.
et le ciiargea, en cette qualité, du
portefeuille de la guerre pendant
l'absence du duc de Belluue. On
répandait dans le public que le
maréchal avait été envoyé sur les
lieux pour juger par lui-même si
les fournitures en tout genre a-
vaient été faites d'une manière
convenable et satisfaisante, avec
d'autant plus de raison que M. de
la Bourdonnaye avait dit dans la
chambre des députés , « que , par
la plus étonnante contradiction,
les préparatifs apparenssont pour
la guern;', et les mesures réelles
pour la paix. Voyez , ajoutait l'ho-
norable membre, le prélude de
tous les jnaux qui se préparent
dans le désonlre des administra-
tions militaires et la pénurie de
tous les approvisionnemens. » Le
ducdeBeliuneueremplitpas néan-
moins le poste que lui déléguait
l'ordonnance royale ; le comte
Guillen>inot resta chef d'état-ma-
jor-général, et ue ce?sa pas ur»
vie
instanl (Vf.n faire le? fonctions.
Dès-lors le duc de Belhine put
s'occu()er d»; ce fini ét.iit ftent-êlfe
!e seul but de ga mission. Aussi
écrivait-on de B;iyonne, le 8 avril,
que ce n'était que depuis quel(|ues
jours que le matériel de l'armée
était orgnnisé, et que MM. Ou-
vrard et Tourtnn étaient définiti-
vement chargés de la fourni lure
générale des vivres. Nous ne pré-
jugeons rien dans raffaire du pi e-
n)ier de ces deux munilionnaires,
qui est portée devant l<.s trihu-
naux( 1825); nousrapporftiis siiu-
jilernent les faits consignés dans
les journaux du tenip»; les discus-
sions élevées dans la chambre des
députés semblent l'accuser. Ce
qu'a dit de lai le duo de Bellune,
dans une autre circonstance, ne
lui est pas favorable. Bientôt sans
doute toute la vérité sera connue,
et l'opinion générale fixée. Le duc
de Bellune n'est resté auprès du
prince généralissime que j)Our ê-
Ire témoin du passage de la lîi-
dassoa. Il quitta l'armée à cette
époque même, et était de retour
à Paris le i4 avril; le lendemain,
il reprit le portefeuille de la guer-
re , et rétablit dans leurs fonc-
tions tous ceux qui en avaient été
éloignés pendant s(»n abscence.
Due ordonnance du roi , rendue
le 'iS octobre . et contresignée j>iir
M. de Villèle. président du con-
seil, nomma le duc ne Bellune
miuislre-d'élat et meujbre duc )n-
seil-privé. Celle retraite, ou peut-
être ce renvoi, parut avoir laissé
des traces daic son cœur, car
nommé ù l'umbasiadc de Vienne
quelques mois après, il la refusa.
On a prétendu que ce refii* avait
eu lieu à la suite de diilicnllcs élc-
VIC le-
vées ù la cour de Vienne, relati-
vement à sa personne et au litre
de duc de Bellune; mais on a dft
ai)andonner bientôt cette opinion,
le duc de Bellune étant parti en-
suite pour son ambassade, et
ayant été très-bien accueilli. Le
duc de Bellune revint jouir à Pa-
ris du repos honorable dft à ses
longs services, et Charles X vient
d'ajouter aux honneurs dont il é-
lait déjà comblé , celui de le nom-
mer chevalier de l'ordre du Saint-
Esprit, dans la promotion que ce
nuMiarque a faite à Reinjs, le len-
demain de son sacre.
VICTOR EMMANUEL V, roide
Sardaigne, second fils de Victor-
Amédée 1(1, naquit le "i^ juillet
1759. Il ne fut connu, jusqu'à
son avènement au trône, que sous
le litre de duc d'Aoste. L'état mi-
litaire, pour lequel il avait un goût
décide , fut l'objet constant de ses
éludes; il ne confiait à aucun au-
tre le soin de commander les
camps d'exercice que le roi faisait
former de lemps en temps, siir-
liuit à la fin de son régne et donna
des preuves de connaissances é-
letKlues dans celte partie. Le ai
avril 1789, il épousa la princesse
Thérèse, fille de l'archiduc d'Au-
triche Ferdinand. La révolution
française, qui éclata peu après',
trouva en lui im adversaire, sinon
puissant, au moins très-pronon-
cé. Il Contribua bi;aucoup à faire
entrer la Sard^iigne dans la coali-
tion, et dès que la guerre fut dé-
clarée, en 179;?, il se mit à la tête
d'un corps de troupes, se porta
avec lui à l'allaque du village de
Gillette, dans le comté de Nice,
passa ensuite le col de Vial, cô-
tojra les limites orientales de la
ïqS VIC '
ProveOce , enleva les postes de
Delterre et de Boyoïi, et se pré-
senta môme jusqu'asix embou-
chures du Var ; qtielqut-s jours
après, ii repoussa nos troupes à
Gandola, el coupa l'iûle droite
de l'armée. Le couUe de Saint-
André, chargé de s'emparer du
poste d'IJtelle, ne }»uty parvenir,
ce qui força le dm- d'Aoste d'opé-
rer sa retraite el de regagner les
gorges. On a fortement reproché
dans le temps à ce prince d'avoir
enflammé le zèle des hahilans de
la campagne, et de les avcjir por-
tés à des fureurs de fanatisme
qu'on fut obligé de réprimer par
des punitions exemplaires. Lors-
que des négociations furent enta-
mées , en 1796, avec le général
en chef Bonaparte, le ducd'AosIe
s'opposa de tout son pouvoir à un
projet de pacification qui contra-
riait son système politique et son
goût pour la guerre, et voyant,
ses efiorls inutiles , il prit le parti
de se retirer dans l'Italie méridio-
nale. Le roi, son fière, Charles-
J'immanuel, ayant abdiqué, le 4
juin 1803, le duc d'Aoste, sous
le nom de Victor-Emmanuel lui
succéda dans ses états, réduits
alors à la seule île de Sardaigne.
I! V resta jusqu'à ce que les évé-
nemens de i8i4 le replacèrent à
l.i tête du Piémont, détaché de
l'empire français, et augtiienté du
territoire de l'étal de Gènes, qui
ne fut pas assez heureux pour
recouvrerson indépendance, mal-
gré les promesses solennelles des
souverain» alliés. Bientôt les Pié-
niontais, qui attendaient du gou-
vernement des institutions analo-
gues aux lumières acquises par
trente années de révolution, el
VID
dont ils avaient joui sous la do-
mination française, s'aperçurent
qu'on les faisait rétrograder vers
leurs ancieimes institutions, et
qu'on détruisait insensihiemetkt
toutes celles qui avaient fait leur
prospéritt'i. Les persécutions reli-
gieuses mêmescommencèrentà s'y
renouveler à laide du fanatisme;
une foule de personnes en ont
ressenti les effets. Les Juifs, qui
jouissaient dans ce royaume de
tous les droits de cité, ont été
forcés, par un édit du 1" mars
181G, de vendre, dans le délai de
r> années, lous les biens immen
blés qu'ils avaient acquis sous le
gouvernement précédent ; mais
un trait d'intolérance religieuse,
dont la raison et l'humanité s'in-
dignent au point de le trouver in-
croyable, hiême après la loi ren-
due en France, en iSaS, sur le
sacrilège, c'est le supplice d'un
malheureux, condamné, en 1819,
à être brûlé vif, pour avoir volé
les ornemens d'ime Madone. Les
habitans de Chambéry ont été les
impassibles témoins de cet horri-
ble spectacle. Le roi Victor-£m-
maimel suivit l'exemple de son
frère Charles-Emmanuel; il ab-
diqua, le i5 mars 1821, laissant
la couronne à son fière, Charles-
Félix de Savoie.
VIDAL ( 'S.) , astronome cé-
lèbre, naquit à iMirepoix, dépar-
tement de l'Ar iège. Jeune encore
il attira sur lui les regards du
monde savant, et l'académie des
sciences de Toulouse le reçut au
nombre de ses membres. Il étu-
diait sans relAche , suppléant par
son imagination, aux instrumens
de haut prix , que la médiocrité
de sa fortune ue lui permettait
VID
pas d'acquérir; ii Gonslrcibit lui-
môme la plupart de ceux qui lui
étaient indispensnbles. M. de Ri-
quet Bonrepos, arrière-petit-fiis
du célèbre inventeur du canal,
aimait aussi l'astronomie; il con-
nut Vidal, l'appela à sa terre de
Bonrepos , où il avait l'ait cons-
truire un inagru'fiqucob>;ervaloirt'.
Là ce laborieux savant put, jusqu'à
la révolution, se livrer sans obs-
tacle à ses cccupatior)s chérie-.
Ses travaux furent appréciés par
l'académie des S( iences de l'ai is ;
Lalande , plus particulièrement,
lui rendit un éclatant houiinaj;e ,
en lui donnant le nom de Trismé-
gisle, que la postérité sans doute
ne lui enlèvera pas. On dit dans
l'ouvrage sur la connaissance du
temps ^ que Vidal avait lait à lui
seul plus d'observaliuns de iMtr-
cure que tous le? astronomes île
l'univers ensemble. Il fut choisi
par I.alande pour l'aidera dr»;>scr
le catalogue des étoiles nouvelles.
Vidal se trouvait alors à IMircpoix,
et pouvait voir d(; retfe ville six
degrés du ciel méridional, qui é-
laient invisibles aux astronomes
de l'aris. Après une loule d'ob-
servations exactes et prolongées,
pendant lesquelles chaque étoile
fut soumise trois fois à un ri-
goureux examen , il forma un ca-
taloçjue de huit cent quatre -vin g(-
liuit étoiles australes^ inconnues a-
vant hji, comfiosant les étoiles
de la cinquième juscpi'à In huiliè-
ine grandeur. La position de tous
les astres fut ramenée à urie épo-
que commune, celle du lo nivô-o
an 7, après y avoir appliqué l'é-
quation de la pré»M!ssion des équi-
noxes. Lalande montra un en-
thousiasme extraordinaire û lu vue
VID 10a
de cet imn)ense travail, dont il fit
le plus grand éloge. Vidal, durant
vingt-huit ans, s'occupa de» re-
cherches sur les propriétés de l'ai-
mant ; il donna malheureusement
dans la manie des systèmes , en
rapportant toutes les variation»
de la boussole , à un aimant pro-
digieux placé près du centre de la
terre, et ayant un diamètre (^4 ^*^''''
moins gros que cs-tte planète, te
roman fut, conune tous les systè-
mes, appuyé sur des probabilités,
des conjectures, et même des ex-
périences ; mais la nature est un
Protée habile ; elle échappe à tous
ceuxqui veuhriil laconnaîlre,enles
égalant tous à la fois. Nommé di-
recteur tle l'observatoin; de Tou-
louse, il y professa l'asti-onomie
avec un rare talent, et mou-
rut à iMirepoix on iHi 1. Vidal é-
tail correspondant de la première
classe de l'inslilut. Il a consigne
sescalcids, ses découvertes , ses
observations, dans de nombreux
ménmires, «iont la collection ne
pourrait que servir à étendre le
domaint; de la science.
VIDAL (N.), graveiir, narpiit à
Toulouse et étudia son art dans sa
ville natale, sous la direi tion de
Simonin et de lîaour, parent de
M. B.ionr Lormian , auteur d'O-
masis. il vint à Paris, v\ y lutta
long-temps cositre l'inforliuie. A
force de persévérance, il se fit con-
naître par son mérite ; on ne dé-
daigna plus de remployer, lors^-
qu'on eut apprécié la touche a-
gréable de sou burin. Vidal grava
une n(jmbreuse suite choi>ie par-
mi les œuvres de no- p(;inlres mo-
dernes. David, le créateur elle
chef de notre grande école, confia
ù l'artiste loulousin y le buiii de
200 VIT-;
i<;j)rochiire son gracieux tableau
i\ Hélène et Paris. Ce fui le plus
bel ouvrage dtî Vidal, (jui, dans
cette composition , s'éleva à la
hauteur de son luodèlc. 11 niounit
j>rémafnréiiH.'iit à Paris en i8o:|.
VIEL ( Dtiennk-Beunard), né à
la Nouvelle-Orléans (Louisiane),
le 3i octobre 1706. Son père,
chirurgien estimé, était corres-
pondant de l'académie des scien-
ces de Paris. C'est à lui qu'on doit
la découverte de la cire végétale
du Myrica cerifera, et des usages
auxquels on peut l'employer. Cet
homme éclairé voulut que son fils
vînt chercher en France, une édu-
cation qu'il ne pouvait pas loi pro-
curer ù la Nouvelle-Oiléans. Le
jeune Viel suivit le cours de ses
éludes au collège de Juilly, diri-
gé par des membres de la congré-
gation de l'Oratoire. Il se sentit
ensuite appelé i entrer dans les
rangs de ceux qu'il avait eu pour
maîtres. Après avoir professé avec
la plus grande distinction dans les
villes de Soissons et du Mans, il
fut réclamé par le collège de Juil-
ly, où il enseigna pend;mt 17 ans
les humanités et la rhétorique II
parlait avec satisfaction de ces
premières années d'une vie si uti-
lement em|>loyée, et l'on peut allir-
mer, d'après le lémoighnge unani-
me des nombreux élèves qui ont
profité de ses leçons, que l'ensei-
gnement, loin de lui oiî'rir une tâ-
che pénible, était pour lui comme
pour eux une source inépui>iable
de jouissance. En 1776, Viel fut
nommé grand-préfet des études
dans le même collège. Plus de
trois cent cinquante écoliers, tous
les professeurs et maîtres de quar-
tiers, se trouvèrent dès-lors sous
tiE
son inspection. Il lui fallut à la
fois s'assurer que partout l'instruc-
tiou était convenablement distri-
buée, et partout maintenir sévère-
ment l'ordre et la discipline, sans
laisser nulle part |)révalair la ri-
gueur ou l'injustii.-e. Douze ans
consacrés à ces foncticms, donnè-
lent lieu au P. Viel de développer
un mélaugo heureux de sévérité
et d'iiuhilgence, d'assiduité et de
sagacité, et de prouver qu'il n'é-
tait pas moins propre à diriger
l'enseignement qu'à le répandre.
Arrivé au terme de celte carrière
laborieuse, il commençait à jouir
d'un repos acheté par plus de tren-
te ans de services, lorsque les évé-
rfemens de la révolution amenè-
rent la dissolution de la congréga-
tion de l'Oratoire. Il voulut alors
revoir son pays natal, et s'embar-
qua à Bordeaux le "i'i septembre
1791. De retour à la Louisiane, il
a fait pendant plus de vingt ans
le bonheur de sa famille, qu'il y re-
trouva, celui des amis qu'il ne tar-
da pas à y acquérir, et celui des
habitans de la paroisse des Atac-
Apas, dont il était devenu le pas-
teur. Mais des lieux mêmes qui
l'avaient vu naître, il se sentait
rappelé vers la France par les sou-
venirs et les vœux de ses anciens
élèves. Déjà quelques-uns d'entre
eux avaient occupé de lui le pu-
blic savant. Dans aucun temps ses
travaux ne lui avaient fait négli-
ger le culte des muses latines, et
l'on peut dire que peu de person-
nes avaient poussé aussi loin l'étu-
de lalangue de Virgile. Ce fut dans
cette langue qu'il voulut transpor-
ter le chef-d'œuvre de l'illustre
Fénélon, le Télcmaque. Il y réus-
sit, et sou travail était déjà en é-
TIE
tat de paraître lorsqu'il partit pour
la Louisiane, liiissant son manus-
crit entre le* mains d'un ami. Six
de «es élèves en devinrent les édi-
teurs en 1808, et les suffraj^es du
public ne tardèrent pas ;\ prouver
que leur alTectîoM ne leur avait
point l'ait illusion sur l'éuiiucnt
mérite de leur ancien Mrntoi-. M.
Lemaire, prolesseu:' de poésie la-
tine à la laculté des lettres de Ta-
ris, fit insérer, dans les feuilles pu-
bliques du 3o septembre 1808, un
éloge mérité de cet ouvrage, c La
» traduction de M. Viel, dit il, est
«digne de l'original. Les tournii-
'>res, les périodes, les descriptions,
«les métaphores, les compurai-
Msons, tout est reproduit d'une
omaiHère si vive, si touchante,
«qu'on s'imagine entendre Féiié-
» Ion lui-même : c'est la même t'or-
»ce, la même noblesse, l.i même
» onction, la mê'iîe sévérité de
) goût. C'est un nouveau ftpre clus-
Mique , monument de reconnais-
Dsance, que des élèves pleins de
«zèle ont élevé à la gloire d'un
• maître qu'ils chérissent. La dé-
"dicace est aussi neuve que tou-
» chante :
^Stephano Bernardj f^iel
••Prti byter'i
"In Aeadcmia JuU^ccnci
-Studi^rum ultm modcratori
"Hjc ipsius a/iui
•'QuoJ typit mandari relligioii curavcrunt
•'Offtrebaiu
"Amantissimi et mtmores atumni. .»
Aue. Creuié de Lciscr, J M. E. Salvi-rtf,
J. n. B. Eyriif, A. V. Arniuli,
J. A. J. Dwraat, Eutebiiu Salvertc.
Le cardinal de Bcaussot, dans la
deuxième édition de son Histoire
de Fénèlon,a\)rii,i\\o\v parlé avan-
tageusement de M. Viel et de son
ouvrage, ajoute, en transcrivant
cette dédicace : « Il semble qu'il
soit donné aux admirateurs de Fé-
VIE
aoi
nélon, comme à Fénélon lui-mê-
me, de trouver loti jours des amis
fidèles et des di-ciples reconnais-
sans. » Le 8 juin 1812, M. Viel
revint en France, où il vit, dans
toutes les classes de la société, m\
grand nombre de ses anciens élè-
ves, développer les fruits de l'ins-
friiction qu'ils avaient reçue de
lui. En 1816, il fit paraître, sous le
titre de Misccllanea lalitio gallica,
\in recueil où se trouve la traduc-
tion française de l'Art poétique,
et du second livre des épîtres d'Ho-
race. Certc traduction contient
sur le véritable sens du poète latin
des vues neuves et justes. Résolu
de finir ses jours au lieu même où
il les avait si long-temps consa-
crés aux soins de l'instruction pu-
blique, M. Viel, s'établit en 181 5,
au collège de .Tuilly, relevé par les
soins de quelques-uns de ses an-
ciens collègues. C'est au milieu
d'eux qu'il termina sa longue et
honorable carrière, le i(> décem-
bre 1831 , à l'âge de 8() ans pas-
sés.
VIEL (('lîAULES-FnANçois), ar-
chitecte, naquit en i^/pà Paris,
où il niourut en 1820. 11 n'est pas
moins distingué comme praticien
que comme auteur. C'est h ses
soins qu(î l'on doit la construction
di! l'hospice du faubourg Saint-
.Ja(;ques, celle du bâtiment de la
l'itié, celle du Mont-de-Pi^té, rue
des Blancs-Manteaux et rue du l*a- ^
radis, enfin l'égoùt de llicêtre, ou-
vrage souterrain, ju;,'é digne des
anciens. Ses ouvrages, conune é-
crivain, sont : x' Projets (fun mo-
nument consacré à 1 lus toi re natu-
relle, in-4", 1780; a'^Lt'/Zre.j sur
l'architecture de> anciens et l'ar-
chitecture moderne, in-S", i-So-
aoa VIE
1781-1787; 5" Observations plùlo-
soplùqaes sur l'usage d'exposer les
ouvrages de peinture et de sculp-
ture, in-H", 1788; 4° Principes de
Tordonnance et de la construction
des bûtimens, 5 vol. in-4", de
1797 à 1814 ; 5° Moyens potip la
restauration des piliers du dôme
du Panthéon français, plusieurs
éditions; la dernière, in-4", est de
1813 ; 6" Plans et coupes des pro-
jets do restauration des piliers du
dôme du Panthéon français, in-4%
1798; 7° Décadence de l'archilec-
ture à la fin du 18' siècle, in-4'',
1800; 8" des Points-d'appui indi-
rects dans ta construction des bdti-
vuns, 1802, in-4°; 9° delà Cons-
truction des édifices publics sans
l'emploi du fer, etquf 1 en doit être
l'usage dans les balimens particu-
liers, i8o5, in-4''; i^° des Ancien-
nes Eludes de l' architecture, et de
la nécessité de les remettre en vi-
gueur, et de leur utilité pour l'or-
donnance des bâtimens civils ,
1807, in-4''; 'i" Inconvéniens de
la communication des plans d'édi-
fices avant leur exécution, i8i3,
in-4°: 12" Notice nécrologique sur
M. Chalgriiig 1814, in-4"; «<'>"
Grand Egoilt de Bicêtre, ordonné
par le roi Louis XIV, plans, élé-
vation, coupes et profil, 1817,
in-4°; i4" Dissertation sur les cor-
nes antiques et modernes, ouvra-
ge philosophique, 1786, in-8"'.
VIEN (r,E COMTE Joseph-Marie),
né en 1716, apprit les premiers é-
lémens de la peinture à Montpel-
lier, sa ville natale. Il vint à Paris
en »74^« dévoré de la soif de la
gloire. Les prix sembli»ienl n'a-
voir été ir#litués que pour lui.
Ses succès lui méritèrent l'hon-
neur d'être envoyé à Rome com-
VIE
me pensionnaire du roi ; c'est \h
que dans la contemplation d'une
nature admirable et dans l'étude
des plus parfaits modèles, il puisa
cette profonde connaissance du
beau , dont il avait en lui le sen-
timent, et qu'il devait ressusciter
en France. A son retour, il ouvrit
une école exclusivement consa-
crée à l'étude de la nature et de
l'antique. Pour faire prévaloir son
système, il eut à combattre deux
ennemis puissans, la routine et
la mode. I/écoIe française était
bien dégénérée de la gloire dotit
elle avait brillé. A Lesueur, à Le-
brun avaient succédé les fîoypel,
auxCoypel succédait Boucher. Ce
dernier, substitUHnl à l'imitation
de la nature choisie des formes et
des couleurs dont il ne trouvait
de moilèle que dans son imagina-
lion, avait entraîné l'art dans un
des écarts les jdus inconcevables
où il se soit jamais égiU'é. Pour le
ramener dans la bonne roule, que
d'obstacles Vien n'eut -il pas à
vaincre! il en liiompha pourLint,
soit par ses préceptes, soit par ses
excm()les. Il forma cette école ,
d'où sont sortis David et Vincent,
et que continuent non-Sfulement
leurs élèves, mais la totalité des
pei n tresacluelk ment vi vans. Pres-
que tous les peintres supérieurs
dont se glorifie l'époque présente
sont ou élèves de Vien ou élèves
de ses élèves. Il profess.i , depuis
1750 jsH<ju'en 1773. Toutes les
fonctions, tous les honneurs dus
à la supériorité dans son art, Vien
les obtint. Recteur de l'académie
de peinture et de sculpture, de
l'académie d architecture, direc-
teur en France des élèves p»-oté-
gés par le roi, il fut aussi nommé
VIE
directeur de l'école de Rome, et
premier peintre de Louis XVI ,
qui le décora de l'ordre de Saint-
Michel. Napoléon lui accorda plus
encore, comme on le verra. Plus
d'un souveiain tenta d'enlever
Vien à la France. La Russie, le
Danemarck lui offrirent des hon-
neurs et (le l'argent. Il refusa tout;
la plus brillante fortune ne valait
pas à ses yeux l'honorable aisance
qu'il s'était faite dans sa patrie.
Peu d'artistes ont autant produit
que Vien, qui dans les dernières
années de sa vie reprenait encore
quelquefois le crayon. Il fit pour
la ville de Tarascon sept j^raiids
tableaux, dont les sujets sont ti-
rés de la vie de sainte Mailhe. A
Paris, on voit de lui au Muséum
un Ermite endormi , et un tableau
de Saint Germain et Saint Vin-
cent. A Saint - Roch , un Saint
Denis prêchant, et unixR('farrec-
tion du Lazare. A la manu facture
des Gobelins, plusieurs grands ta-
bleaux , sujets pris dans l'Iliade.
A Tarascon, la Marchande d'a-
mours, V Amour fuyant fesctuvas^e,
et Saint Thibaut offrant au roi une
corbeille de lis. Vien a fait aiis-^i
beaucoup de tableaux pour IM"""
Geoffrin et pour M"" Dubarry.
Dans les oragc.« de la révolution ,
qui reuversèrent sa fortune sans
altérer l'égalité de son caractère,
rhcrclianl des consolations , et
peut-être des illusiofis dans la cul-
ture de son art , il ccunposa un
grand nombre de dessins et d'es-
quisses, presque tous dans legmre
anacréonliqiie. C'étaient les jeux
des nymphes et des amours. Son
imagination était féconde, suQ es-
prit vif, son cœur excellent. A
mesure que l'ordre renaissait en
VIE
ao5
France, la fortune de ce père
de la peinture s'améliora. Nom-
mé ummbre de l'institut lors de
la création de ce corps, qui re-
cueillait les plus illustres débris
des anciennes académies, Vien ,
sons le consulat, fut fait membre
du sénat , et commandant de la
légion - d'honneur ; il fut créé
conjte sous l'empire. Il est mort
à Paris, le 27 mars 1809, à l'âge
de prés de qS ans.
VIEN ( M "' M ARIE - RÉBOUL ) ,
épouse du comte Vien, dut aussi
de la célébrité à l'art où s'illustra
son njaii. Elle excellait dans Ti-
iiiitation de la nature morte, on
devrait dire inanimée. Elle eut
pour miîire le comte de Caylus,
qui lui donna des coquillages à
peindre; elle les imitait avec une
rare perfection. Charmé des pro-
grès de sa jeune élève, le comte,
qui en parlait avec éloge dès (|ue
l'occasion se présentait, engagea
M. Vien à lui donner des conseil*.
Le m. litre devint bientôt l'époux
de son écolière, qui, peu après,
fut jugée digne d'entrer ilans l'a-
cadémie de peinture de Paris. La
majeure partie des ouvrage* de
M"* Vien est en Russie; mais il
reste d'elle encore en France des
tableaux de fleurs et de fruits.
Elle peignait aussi les oiseaux avec
une admirable vérité. A te talent,
!M"" Vien joignait tous les avan-
tages de la beauté. Aussi le grand
peintre, à la destinée duquel la
sienne avait été associée , disait-
il. en admirant des flcm's qu'elle
peignait, elle les répand sur ma
vie. M"" Vien mourut âgée de 77
ans, en décembre iSo;"). Du ma-
riage de ces artistes , est né M.
Vien fijs, qui s'est adonné comme
ao4
VIE
«iix avec succt's A l'art auquel sa
l'amMIe doit laiU de célébrité. Une
t'einine aussi devait encore hono-
rer ce nom : c'e*t celle doiit il
sera question dans l'articlfe sui-
vant.
VIEN ( RI-" UOSE-CÉLESTE Ba-
ciiE ) , fille du général de ce
ijom, épouse de Al. Vîen le fils,
est née ù Rouen. C'est vers la lit-
térature que son goût l'a portée.
Initiée dans la connaissance du
grec par l'honorable Laporte Du-
theil, l'un des premiers hellénis-
tes de l'inslilut, elle a traduit
Anacréon avec autant de fidélité
et toute l'élégance qu'on pouvait
attendre d'une femme. Dn chant
sacré, des poésies légères disper-
sées dans les recueils périodiques
et dans les journaux, lui assi-
gnent une place parmi les dames
qui cultivent aujourd'hui la poé-
sie avec le plus de talent. Al""
Vien a i'.iit hommage de la tra-
duction d'Anacrénn à l'académie
de Bordeaux, dont elle est mem-
bre.
VIENNET ( Jacques-Joseph ) ,
membre de l'assemblée législa-
tive, de la convention nationale
et du conseil des anciens, naquit
dans la ci-devant province de Lan-
guedoc, le l 'i avril ijS/f, d'une
famille où il est de tradition que
son fondateur descend d'un géné-
lal de Didier, roi des Lombards,
dont Muratori a parlé. M. Vien-
net prit du service, en 1774» dans
le régiment de Languedoc -dra-
gons, et fil, en qualité de sous-
lieutenant, avec trois autres olfi-
ciers do la même famille, et sous
les yeux d'un de ses oncles, aide-
major, la guerre dite de sept-ans.
Retiré du service, il vivait paisi-
VIE
hlement à Bézicrs, lorsqu'on 1790,
ses concitoyens lui confièrent les
fonctions d'officier municipal.
L'année suivante, le déparlement
de l'Hérault le nomma membre
d«; l'assemblée législative, et le
réélut, en 1792, à la convention
nationale, oii . dans le procès du
roi , il vota d'abord l'incompé-
tence de l'assend)lée, ensuite l'ap-
pel au peuple, la réclusion et le
sursis. On a remarqué dans son
opinion le passage suivant : « Je
crois avoir prouvé que Louis n'a
cessé d'être roi qu'à l'époque où
vous avez aboli la royauté; je crois
encore qu'il ne peut être jugé
comme houjme J'ai toujours
pensé qu'une assei^blée de légis-
lateurs ne pouvait s'ériger en tri-
bunal judiciaire; que le même
corps ne pouvait à la fois exercer
la justice et faire des lois; que
celte cumulation de pouvoirs se-
rait une monstruosité, etc. » Le
vote de M. Viennet, s'il n'est pa-
le pretnier, en entraîna plusieurs
autres non moins courageux, au
nom'nre desquels on doit placer
celui du mari de M""' de Genlis ,
ce qui contrariait un peu l'aàser-
liou de cette dame, qui, dans ses
Mémoires, prétend que le vole de
AI. de Genlis fut le premier, ou
même le seul. Pendant *'>ute la
durée de sa mission, M. Viennet
se conduisit d'après ces principes
vraiment constitutionnels, luttant
avec courage contre les proscrip-
teurs, el arrachant à la mort uu
grand nombre de victimes. Nous
citerons un seul fait que nous em-
pruntons à une biographie dont
1 exactitude n'est pas douteuse, en
ce qui concerne M Viennet. « Qua-
tre cents suspects étaient détenus
VIE
dans les priions du dépaitement
de l'Héniiilt. La commission d'O-
range venait de faire tomber trois
cents têtes dans celui du Gard, et
un député en mission pressait vi-
vement le comité de sûrelé-géiié-
lale d'envoyer cette commission
dans le département voisin. M.
Viennet , secondé de son collègue
Cnslilhon, combat tous les rai-
sonnemens du proconsul, brave
ses menaces, le menace lui-mê-
me, et gagne ainsi le 9 tbermidor,
qui sauva la vie à tous ces déte-
nus. Ce vertueux député a sou-
vent été désigné sous le nom de
V honnête homme de la convention ,
et ses concitoyens lui ont depuis
long-temps donné celui de vieuje
Romain. » La session convention-
nelle terminée, il passa au conseil
d«.'S anciens, d'où il sortit en 175)8.
Après neul ans de législature, il
rentra dans ses foyers plus pauvre
qu'à son départ. Lorsque son lils
( voy. un des articles plus bas ) se
vit en âge de rendre à son tour
des services à la patrie , il lui écri-
vit pour qu'il lui fit obtenir une
sous-lieulenance. 11 lui répondit :
« l'rend'* un mousquet, et va ga-
gner ce que tu pourras; je ne suis
pas ici pour faire les all'aires de
ma famille et l'avancer au préju-
dice des iiutres citoyens. » Ce trait
de vertu antique est parfaitement
justifié par le suivant , aussi beau
<;t aussi rare : Chargé de la re-
monte des quatorze armées de la
républitpie , il refusa' sept cent
cinquante mille francs en or, que
lui offrait le fournisseur pour pas-
ser qnel<]ues milliers de mauvais
< hevaux. Sa probité faillit lui coû-
ter la vie. Dénoncé pour avoir
entravé, par ce refus, les opéra-
VJE
20 5
tions de la remonte, i^ fut obligé
de se défendre auprès du comité
de salut-public , qui finit par lui
rendre justice. Il mourut, le 12
août 1824, regretté de tous ses
concitoyens. Une Notice sur cet
bouiirable citoyen parut peu après
dans le Journal de Paris.
VIKNNET ( Esprit ) , frère du
précédent , curé de l'église de
Saiul-iMéry, à Paris, doîit il a eu
la direction pendant quarante an-
nées , s'est fait constamment re-
marquer par les touchantes vertus*
de son ministère. Il a été le père
des pauvres, et a fondé un hos-
pice dans le cloître même de son
église. Ce vénérable pasteur, qui,
eu 1790, avait prêté serment à lu
constitution civile du clergé, dé-
crétée par l'assemblée constituan-
te, fut inutilement, pendant six
mois, supj)lié par M. de Joigne ,^
archevêque de Paris, de rétracter
un serment qui n'a jamais troublé
sa conscience. On fit près de lui
quelques démarches pour savoir
s'il accepterait l'évêché constitu-
tionnel de Paris. Il répondit qu'il
n'occuperait jamais un siège dont
le titulaire, M. de.Juigné, vivait
encore, t^t ajouta qu'il avait cru
devoir prêter son serment, parce
qu'^l n'y trouvait rien de contraire
a l'évangile et à la doctrine de l'é-
glise ; mais que ces distinctions
nouvelles iVassermeutr, de ré frac-
taire n'ôlaient rien aux droits de
l'archevêque. 31. le curé Viennet
mourut paisiblement, sans crainte
et sans faiblesse, en 179O, empor-
tant la vénération de tous ses pa-
roissiens.
VIENNET (Jeas-Pows-Goii.-
LA.tME) , homire de lettres, chef
de bataillon au corps royal d'é-
2()6
VIE
tat-major, •chevalier des ordres
royaux de Saint-Louis et de la lé-
gion-d'honneur, fils et neveu des
précédens, est né à Béziers le 18
novembre 1777. A peine dans sa
dix-huitième année, il entra an
service, en 1796, comme lieute-
nant en second d'artillerie de ma-
rine, emploi ()iril dut à une la-
veur spéciale du ministre Truguet,
qui la lui accorda à l'insu de M.
Viennet père {voy. le premier ar-
ticle ). Il servit dans ce corps jus-
qu'à la formation du corps royal
d'état-m.ijor par le maréchal Gou-
vion Saint-Cyr, et fut admis en
qualité de capitainean corps royal,
où il devint chef de bataillon en
1822. Par suite de circonstances
diverses, la carrière politique de
M. Viennet n'eut pas tout l'éclat
que devaient lin' procurer son cou-
rage , son activité et ses talens.
Monté sur V Hercule^ en 1798, il
fut pris par les Anglais, et passa
neuf mois sur les pontons si tris-
tement célèbres de l'Angleterre. H
servit avec distinction , en i8i5,
dans l'artillerie de la marine aux
batailles de Lutzen , de Bautzcn,
où il gagna la croix de la légion-
d'hounenr; de Dresde et de Léip-
sick, où il fut fait prisonnier au
moment où le pont de Léip^ck
sautait. Rendu à sa patrie par suite
du rétablissement du gouverne-
ment royal , en 1814 ;. il fut mis à
la demi-solde. Pendant les cent
jours, en 181 5, il refusa de signer
Vacte additionnel , comme il avait
refusé précédemment de voter
pour le consulat et pour l'empire.
II appuya son vote négatif, en
18 i5, de deux brochures, dont
l'une a pour titre : Lettre d'un
Français à l'empereur, sur ta si-
VIE
tuation de la France et de l'Eu-
rope , et sur la constitution qu'on
nous prépare; et l'autre. Opinion
d'un homme de lettres sur la cons-
titution proposée. M. Viermet a en-
core donné, sous le voile de l'a-
nonyme, une autre brochure in-
titulée : Lettre d'un vrai royaliste
à M. de Chateaubriand, i\ l'occa-
.'•ion de l'ouvrage de ce célèbre
écrivain : de la Monarchie selon la
Charte. Fixé à Paris depuis 181 4»
M. Viennet consacre ses loisirs
aux muses. Il a pris rang parmi
nos poètes distingués, par la pu-
blication d'un volume f\.e Poésies,
dans lequel se trouve son Eptlre
à M. Raynouard , qui fut couron-
née par l'académie des jeux flo-
raux, en 1810, et d'un recueil de
24 ÉpUres sur des sujets politi-
ques et littéraires ; par des Dialo-
gues des morts, en vers, et un
poëme de Parga , qui a eu trois
éditions. Ces derniers ouvrages
ont obtenu le succès le plus flat-
teur. Le pocme de Parga a été
traduit en grec moderne, et a valu
à l'auteur des témoignages de la
reconnaissance des Parganistes.
L'un d'entre eux lui a adressé une
épître de deux cents vers grecs.
M. Viennet a encore donné une
Promenade philosophique au cime-
tière du P. Lachaise. 11 est au mo-
ment (1825) de mettre au jour uq
poëme en 21 chants, dans la ma-
nière de l'Aristole, dont le héros
est Philippe- Auguste. Il s'occupe
d'un autre poëuie intitulé : FraU'
eus , en 12 chants : six sont déjà
composés. Ri Viennet a lait jouer
à l'Académie royale de musique
l'opéra cVAspasie et Périclès , et
au Théâtre-Français la tragédie
de Clovis. Quatre autres tragédies
YIG
du mf me auteur sont reçues i ce
théâtre. L'un des rédacteurs du
Journal de Paris, de i8i5à 1818,
M. Viennet, dont l'honorable ca-
ractère fuit tout asservissement,
a Cessé de coopérer à celte t'euille
du moment où elle tut vendue A
im ministre. M. Viennet est m<,'m-
bre de la société royale académi-
que des sciences et de lu société
philolechnique.
VIENNET ( Antoine ) , cousin
du précédent, est né à Narbonue.
Il a servi pendant vingt ans , s'est
trouvé à plus de vingt batailles,
et u été blessé à chacune d'elles.
(Je brave militaire est chevalier
de la légion-d'honneur et de Saint-
Louis, et commandant (aujour-
d'hui 1826) de la garde nationale
de sa ville natale.
YIGEE ( Loris - Guillaume-
Bernard), homme de lettres, né
à Pari? en i755, s'est tait con-
naître dès sa jeunesse par un grand
nombre de poésies fugitives insé-
rées dans CAlnianach des Muses,
et autres recueils périodiques. Il
était, avant la révolution en 1789,
secrétaire du cabinet de Madame.
Il publia à celte époque une Ode
à la liberté , et n'en fut pas moins
privé de la sienne pendant le rè-
gne de la terreur, quoiqu'il n'eût
pris aucune part active aux évé-
neiuens qui précédèrent ce règne,
et qu'il fût même consiamment
manifesté son aversion pour les
débats politiques. IVtinis en liber-
té après le 9 thermidor, iM. Vigée
sentit bientôt sa verve se rani-
mer, et célébra en ^ers harmo-
nieux la gloire du vainqueur de
l'Italie, la naissance du roi de
Kome, et les actes les plus reiT)ar-
quables du régne impérial. Il ûl
VIG
207
aussi un cours public de littéra-
ture à l'Athénée, fonction dans
laquelle il succéda à Lahurpe ,
sans obtenir toutefois les succès
de son prédécesseur. Ce cours de-
vint même l'objet de quelques cri-
tiques , d'une sévérité peut-être
exagérée. Il travailla depuis au
recueil périodique intilulé : Veil-
lées des Muses, devint ensuite le
principal rédacteur de-l'Àlmanach
des Muses, dont il continua la pu-
blication jusqu'à sa mort, et fut
un des auteurs de la Nouvelle Bi~
bliotliéque des Romans. M. Vigée
excellait dans la lecture à haute
voix. Il savait donner aux vers
qu'il récitait, et les siens furent
hnbituellcraent de ce nombre , un
charme qu'on était parfois étonné
de ne plus leur retrouver dans le
silence du cabinet. Il fut nommé,
en 1814, lors de la première res-
tauration , lecleur du roi. Depuis
celte époque, M. Vigée a saisi avec
empressement toutes les occa-
sions de rendre hommage à la
magnanimité des princes de l'au-
guste maison de Botirb(m, et n'a
guère laissé passer de solennités
sans offrir au roi le tribut de sa
muse. 11 s'est aussi fait remarquer
par ses démêlés avec les premiers
corps litléraires de la France.
Quoique souvent cité parmi les
candidats qui pouvaient préteii-
dre aux honneurs de l'académie-
franraise , mais n'ayant jamais
obtenu assez de voix pour être
admis dans le sanctuaire, M. Vigée
s'en est vengé en lançant une
•bule d'épigrammes contre les
académies. Sous ce rapport, il
a eu quelque ressemblance avec
Piron. Vers «la fin «le sa carrière,
il avait cependant, ainsi que Tau-
ao8 YIG
leur de la Métromanie, pris son
parti sur l'exclusion académique;
ainsi que lui, il fil aussi su propre
épilaphe en deux vers, qu'il pu-
blia en 1817, annonçant que ma-
lade el sonllVant, il senlait sa fin
prochaine. Le distique de M. Vi-
gée ainsi conçu :
Ci-gît qui fit des vers, les fit mal , et ne put,
Quoiqu'il fût sans espr.t, être de l'institut.
ne resta point sans réplique; tm
itiembre de l'-icadénue-lVancaise
y répondit avec plus d'amertume
que de justice par le quatrain sui-
vant :
Vigée écrit qu'il est un sot :
Pense-t-il qu'on le contredise?
Non , l'épithète est si précise,
Que tout Paris le prcrd au mot.
M. Yigée était bien loin cepen-
dant de mériter une épithéte aussi
sévère. La plupart de ses ouvra-
ges se distinguent par la grâce et
la facililé. Sun style est élégant et
correct, niais il manque sou vent de
force et de chaleur. Ses composi-
tions dramatiques laissent beau-
coup à désirer, tant pour l'inven-
ticn de la fable que pour le comi-
que des situations, mais elles sont
en général spirituellement dialo-
guées. On a de lui : 1° Epilre en
vers aux membres de l' académie-
française , décriés dans le dix-liui-
ticme siècle, 1776, in-S"; a" les
Aveux difliciles , comédie, 1783,
in-8°; 5° i' Entrevue, comédie,
1783, in-8" ; 4° ^« Belle-Mère, ou
les Dangers d'an second mariage ,
comédie, 1788, in-8°; 5° la Ma-
tinée d'une Jolie Femme, comédie,
1793 , in-8°; 6° la Vivacité à l'é-
preuve, comédie, non imprimée;
7° Œuvres diverses contenant Ni-
non de l'Enclos, comédie en un
acte et en vers, suivi de Poésies
VIG
fugitives, 1 797, in-8" ; 8" ma Jour-
née, poiime, 1798, in-8°; (f mes
Conventions, épître, suivie de vers
et de prose, 1800, in- 12; 10°
Discours couronné par Cacadémie
de Monlauban sur celte question :
Comlnm la critique amère est nui-
sible aux talens,' 1807. in-S"; 1 i*
É pitre à L. F. Ducis,siir les acan-
tages de la médiocrité, 1810, iii-S" ;
1 2" Discours au roi de Rome. 1811,
10-4" ( et dans les Hommages poé-
tiques de Lacet ) ; i5° la Tendresse
filiale, 1813 et 1816; 14" lyésies,
5° édition, i8i3,in-8°; 1 5" Pro-
cès et mort de Louis XVI , i8i4»
in-8"; 16° la Princesse de Babj-
/or/<3, opéra, 181 5, in-8°; 17" le
Pour et le Contre , dialogue reli-
gieux y moral, politique et litté-
raire, 1818, in-S". M. Vigée est
mort à Paris en 1820. Il était frère
de M"' Lebrun , qui a acquis de la
célébrité par ses succès dans l'art
de la peinture.
VIGER (Loi'I5-Fba>'çois-Sébas-
tien), membre de la convention
nationale, naquit aux Rosiers, dé-
pariement de Maine-et-Loire , le
7 juillet 1755, et reçut une édu-
cation très-soignée ; ayant fini ses
études très-jeune, il désira entrer
dans la marine. Son père, qui é-
tait négociant, prit intérêt sur
un vaisseau chargé de faire la
traite; le jeune Viger fit le voya-
ge en qualité d'enseigne; mais
l'humanité de ><m caractère ré-
pugnant à un trafic aussi barbare,
à son retour i! suivit la carrière
du droit, et après être resté long-
temps à Paris , il acheta, en 1 78 1,
la charge de'std).-litut des gens du
roi. au présidial d'Angers. En cet-
te qualité, il fut chargé plusieurs
fois de porter la parole dans des
VIG
afîairfs d'un liant inlérêt; il s'en
acqiiilla toujours d'une manière
dislinjîiiée. Kii 17^7, r.icadéiiiJe
d'Aiijîi'is mit .'Ml concours ce svj-
jet : Quels sont les moyens d'encou-
rat^er le commerce A Angers? Le
mcmoire de M. Viger oi)lint le
prix, et son auteur fut élu mem-
bre honoraire de racadémie. En
1790, M. Viger fut uommé pro-
cureur-syndic du district d'An-
jiers, et fut chargé seul du travail
de fixer le traitement des ecclé-
siastiques de son district; il y mit
beaucoup de sagesse et de modé-
ration. Désirant que la réforme
des abus s'opérâl en ménageant,
autant qu'il était possible, les in-
térêts, il se lit des ennemis parmi
les exagérés. Il se détermina à se
démellre d<; ^a place dès le com-
mencement de 1792. Lorsque les
l'russichs entrèrent en J.onaine,
M. Viger augmenta volontaire-
ment le nombre des défenseurs de
la pairie ; il se trouva à la bataille
de Jenimapcs; mais la faiblesse du
sa sauté l'obligea d«i quitter le ser-
vice. Au mois de septembre de la
même ann«je (1792), les éh^cleurs
étant assemblés à JSaunjur, pour
i)o'n>rner des députés à la conven-
tion nalionale, l'on y annonça
l'horrible événeineut du massacre
des prisons. M. Viger monta à la
tribune, et témoigna toute l'in-
dignation qu'il en éprouvait. L'e.x-
pression de ces senlimens fui
la cause qu'on ne le nomma que
])remier suppléant ; il entra à la
cou vent ion dans les premiers jours
de mai I7!)3, et devint mmmu-
bre de la commission des douze,
chargée de faire un rapport sur la
conduite de la commune de Paris,
ce qui lui valut d'ûlre cuinpiia
X. xz.
VIG a 09
dans le décret d'arrestation des
membres de celte commission ,
sur la motion de Le Vasseur de
la Sarlhe; il subit, le5i octobre
suivant, le sort de ses nialheureux
collègues. M. Viger s'était marié
en 1781 , et n'a point eu d'en-
l'ans.
VIGNOLLE ( Martin, comte),
lieutenant-général, grand- cordon
de la légion -dhonneur, comman-
deur de Saint-Louis, conseiller-
d'état, préfet, commandant mili-
taire, député du département du
Gard , naquit à Marsillargue, dans
la ci-devant province de Langue-
doc , le i.S mars 17C5. Il fut ad-
mis, en 1780, dans le régiment de
IJarrois-infanterie, en qualité de
cadet gentilhomme; son avance-
ment fui peu rapide, et c'est à la
révolution, dont il adopta les
principes, ipi'il dut le grade de
capitaine , auquel il fut promu eu
1792. Employé, cette année mê-
me à l'armée des Alpes, couunan-
dée parlegénéraldeMonlesquiou,
il se distingua à la prise de JNice,
au in')is de septendjre , et devint
adjudant-général au commence-
njent de 1794- H commandait eu
cette qualité une colonne à la
prise de Saorgio , le 29 avril
(179^1), et avait le même com-
mandement à la prise du col de
Tende. Sous-chef de l'état-tnajor
du général Keliermann, il fut
chef d'état-majordu général Sclié-
rer; mais ce dernier ayiint été
remplacé par le général Bonapar-
te, M. Vignolle dut céder ce litre
à lierlhier, et ne conserver que;
celui de sous-chef. Il sc distin-
gua de nouveau à Monlenotte et
à De go, et reput, à cette occa-
sion , une lettre de félicitaiion du
4
âio VIG
direcloire-cxéciitif. Il concourut,
à la suite de la bataille de Mon-
dovi, au traité par Icfjucl le roi
de Sardaigiie cousculail à ce *|ue
les forteresses de Ceva , de Coid,
d'Alexandrie, etc., reçusseot gar-
nison française ; se fit reuïarquer
au pont de Lodi , et obtint en ré-
compense le grade de général de
brigade, que lui lit accorder le
général eu chef îîonaparte, sur
cet éloge : « Que AI. Vignolle a-
nvait montré une bravoure sûre ,
')un lalont et une activité rares. »
Blessé d'un coup de feu à la ba-
taille d'Arcole , il reçut, dès son
rétablissement, le commandement
de la province de Crémone, puis
celui du Milanais. La campagne
terminée par le traité de Campo-
Foruiio, le généial Vignolle fut
chargé des fonctions do chef d'é-
tat-major de l'ari^iée, et le géné-
ral en chef Bonaparte ayant quitté
l'Italie, il devint ministre de la
guerre de la république cisalpine.
Lors de la reprise des hostilités ,
en novembre H 798 . le général
Vignolle quitta le ministère pour
entrer en activité. Après s'être
emparé do Sienne, il eut la garde
des Apennins toscans, et après la
retraite de l'armée fi-ançaise d'I-
talie, il alla, par ordre du géné-
ral Moreau , organiser à Nice les
bataillons supplémentaires. Le gé-
néral Berthier, devenu ministre
de la gufiTe par suite de la révo-
lution dii i8 brumaire an 8, l'ap-
pela près de lui pour remplir les
fonctions <lc secrétaire -général
du ministère. Deux mois après
H se rendit à Dijon, pour orga-
niser l'armée de réserve. Employé
dans la nouvelle campagne d'Ita-
lie, il passa le Tes^n avec une co-
VIG
lonne, occupa Milan , dont il bl<i-
qua la citadelle, cominaufla dans
la Lombardie après la bataille de
iMarengo, et concourut à l'orga-
nisation de la république italien-
ne. Le 26 décembre 1800, au
passage .lu Mincio, il courut des
dangers, etson aide-de-camp fut
tué à SCS côtés; la campagne ter-
minée, il passa de nouveau au
commandement du iMiianais, et
reçut, en 1802, lecotnmandemenl
des troupes slatiotmée* à Bergame
<'l Como. Eu i8i)5, il revint à
Paris. Nomm ! , vers le même
temps, chef d'étal-majur de l'ar-
mée de Hollande il fut promu le
27 août (i8o3), au grade de gé-
néral de division et chargé de di-
riger dans la campagne de i8o4,
sous le général Mirmout, le 2*
corps de la grande -armée. Chef
d'élat-major de l'armée destinée
à cond);iltre les Russes et les Mon-
téné;;rins,et à dél)loquer Raguse,
où était enfermé le "énéral Lau-
o
ristou, il prit une grande part au
combat de Debilibriok, en avant
de Castel- iVuovo, et aux affaires
qui terminèrent les hostilités. Le
général Vignolle revint en France
et en repartit pour remplir les
fonctions de chef d'état -major
général. Il était à la prise de Vien-
n<; , à la bataille d'EssIing, etc.,
et le 18 juin 1809, il fut envoyé
comme chef d'état-major-général
à l'armée d'Italie. A la première
joiUTiée de VVagram , un biscayen
lui fra(;assa la tempe et lui enle-
va l'œil; il fut obligé de rester
deux mois à Vienne pour se réta-
blir. Il passa à Milan an mois de
septembre ( i 809), et y organisa,
au commencement de 1812, une
armée destinée à être réurue à celle
VIL
qui opérait contre les Russes. Ce
fut en vain que le général Vignolle
demanda à servir acliveinenl ; il
resta en Italie pour commander
le.s tronpesqni s'y trouvaient. Le
prince vice - roi ( voyez Eugène
BuAunARNAis) revint à Milan en
181 5; le g( lierai Vignolle réorga-
nisa l'armée d'Italie, et fit la cam-
pagne jusqu'à ce que, par suite
des événemens de 1814 > il lût
forcé de ramener l'armée sur les
frontières de France. Iln'eul point
de service pendant les cent jours ,
en i8i5; après le second retour
du roi , il devint commandant de
la 18* division militaire à Dijon.
L'ordonnanre royale du 1*' aoHt*
181 5 le mit à la retraite; nu mois
de mars 1818, il devint préfet de
la Corse, commandant militaire,
et <nfin menibre de la chambre
des députés, dont il faisait encore
partie lorsqu'il mourut A Paris, le
1 5 novembre 1824. On doit au gé-
néral Vigi'iolle un Précis historique
des opérations de l'armée d' Italie
en i8i5 et i8i4, Paris, 1817-
1818. On assure qu'il a en porte-
feuille un Essai historique sur ta
campagne de rarmée d'Italie en
1809.
VILLAI-RANCA (le prince Jo-
seph Alliata de ) , gentilhomme
de la chambre de S. M. le roi des
Deux-Sicilcs , chevalier de l'or-
dre royal de Saint-Janvier, grand
d'Espagne de première classe ,
naquit i Naples, en 17C4, de
parens palermitains , d'une des
principales familles de Sicile,
quoique originaire de Fisc. Il fut
élevé dans lu m.iison paternelle
sous une discipline austère. Tiès-
jeune, il épousa une fille du prin-
ce Valguarnera. Pour apprécier
ML 211
mieux son caractère, il faudrait,
avant de le voir figurer sur le
théâtre politique , l'avoir suivi
dans sa vie privée; car les socié-
tés et les cercles politiques ne
sont ordinairement que des théâ-
tres où chacun joue un rôle. C'est
d'ins le sein de sa famille que Ton
est vraiment soi-même. Le prince
de Villafranca est bon é[)oux et
bon père, et comme homme privé,
il est chéri de tous ceux qui le
connaissent. Membre de la cham-
bre des barons ( braccio baronule )
dans le parlement de 18 10, il sou-
tint avec vigueur les intérêts po-
pulaires. Il fui membre de la com-
mission qui présenta, en 18 1 1, à la
députatiotidu royaume,la faneuse
remontrance au roi de la part des
barons siciliens contre les taxes
qu'on avait imposées à l'insu du
parlement, ce qui lui valut d'être
l'un des cinq barons qui furent ar-
rêtés dans la nuit du 19 juillet de la
même aimée par la force mili-
taire, « coirune perturbateurs de
la tranquillité publique », et d'ê-
tre confiné pendant plusieurs moi»
dans l'île de Pantellarie, jusqu'à
ce qu'il fût délivré par la média-
lion du gouvernement britanni-
que. Lorsqu'cn 1812, le roi con-
voqua le parlement pour travail-
ler à la nouvelle constitution, il
fut dans la chambre des barons
l'un de ses défenseurs les plus zé-
lés, et il contribua beaucoup ù
son succès. C'est A cette occasion
qu'il prit tant de goCit pour l'ins-
IrucUon et pour l'étude aux(|uel-
les il a depuis voué tous ses loi-
sirs. Le zèle et l'intelligence qu'il
déploya alors et la loyauté de son
caractère, lui méritèrent, en 181.^,
lorsque le nouveau parlement su
ai a VIL ^IL
rassemhla sous (I(î nouvelles for- h: cherclier ù boni du vaisseau;
um^, tt quoiqu'il lui irès-jiuiic , cri le conduisit in triomphe dans
la place de président de la (liaui- l,i \ill(:. et on le proclama prési-
hre des pairs. Il soutint celte Ifl- dml di; la juoic. Il occupa pen-
che si laborieuse et si didicile. et d.int deux mois ci Ite place très-
dans laquelle il n'avait ni aiihcé- dillicile, dan> I iqiielle il montra
dent ni uioilèie à .'•uivie, avec allant d'intréj)idilé que de talent
beaucoup d liiibiU lé et à la sa- et de saf^esse , «'iaril parvenu à
lisfaction ycuérale. Lorsque le nielUt,' un terme à l'anarchie et a
ministère constituliotmel donna établir un gciuvcriituient qui eut
sa démission, il quitta sa pbice ; du nioins pour résultat d'ép:ttgiier
mais un nouveau ministère s'étant des scènes de saiiji et des catas-
organisé quelqui; tenips après, il trophes dont on n'aurait pu pré-
reçut le portefeuille dv^ alïaires voir le terme et l'étendue. La
étrangères , et fut l'un des mem- marche du général Fiorestan Pé-
Lres du conseil-d'état. Le u)inis- pé, qui, vers la fin de septembre ,
tère dont il faisait partie lut dis- de Milazzo s'avançait sur Palerme
sous en 1814. Util alors un voya- avec une armée napolitaine, oc-
ge sur le cunlinenf , et iési.i;i casiona une se(;onde commotion.
long-tem[)S en Toscane , oii il fut Le princte de YiilaiVanca eut l'im-
alteinl d'une maladie longue et prudence de quitter Paierme. Il
très-grave, dont il est res'lé bf>i- se rendit sur l'invitation du gé-
tevix. Il se trouv.'iil à ISaples, en néral l'épé, et dajires ime réso-
juillet i8'20, lorsque la révolution lution de la junte a Tern)ini, pour
y éclata. 11 prévit les dé^ordres faire partie d'une députation qui
qui devaient arriver en Sicile , et allait traiter d'un accommode-
paria avec beaucoup de courage ment av(.'c ce général. Un engage-
et de franchise à S. A. 11. le meut entre la flottille napolitain»
prince - vicaire , du sort de son et quelques barques canonnières
pays et des mesures à prendre; paleriuitaines , près de ïermini ,
mais ce fut vainement. Il partit exj)Osa à des dangers très-graves
pour Falerme, où il n'arriva que la barque pat lenientaire dans la-
ie 24 juillet , huit jours après que quelle se Inuivait la dépuJalion.
l'insurrection avait éclatée. Cela Le piii.ce , ;iinsi que les autres
n'empêcha pas qu'il ne fût soup- liépulés, furent obligés, pour se
çonné à ÎSaples d'en avoir été Tinj- sauver, de gagner le rivage en se
t«ur. Leprinccde Aciavaitdéjè'iélé jetant a la nitr. Cette nouvelle, et
assassiné la veilif. e! le cardinal la marche que Laiinée continuait
Graviiia, .uchevêque de l'aierme, sur la capitale , excita de nouveau
ainsi que plusieuis .uitie? mem- la populace, qui crut avoir été
bres de la junte venaieni ('The si- tr;due. Le prince de Villafranca
^aiés comme de nouvelles victi- fui lui .uiême soupçonné d'avoir
mesàlafureurpopulaire. L'arrivée pris pari à la lrahi?on. Son palais
du prince de Villafranca cahna les fut assailli, el une maison de cam-
esprits, et arrêta heureusement pagne, t:vec un délicieux jardin,
les excè» de la populace. On alla près de la ville, pillée et dévastée.
ViL
Il scjourna ensuite penilanl Inng-
t<Mnps à Teriniiii , inêiiu: après
rciiti'f'e (les Iroiipes iiiifrichien-
ncs. D»; retour à Faleiiue, il y vit
flnns i.i retraite, {coûtant tles plai-
«ir^; (loiil une conscience sans re-
proches peut seule assurer la j(»uis-
sance aux hounues verlutux qui,
après avoir figuré dans le monde,
rentrent ijaits la vie privée.
VILLAR (Norr-GABLiEL-Lic
DP. ), nicnjl)re de riustitut et de I i
léj^ion-d'lionncur, évêrpie consti-
tulionnel, etc., est né à Tftulnuse,
département de la Ilaute-Caron-
ne, vers ij-4B. II entra, jeiuie en-
core . dans la congrégation des
doctrinaires, et devint principal
du c(jllége de la Flèclie. La révo-
lution, dont iladu])ia avecsjgesse
les j)rincipeSj le p(trta aux fono-
lions publiques, d'^ibord comme
é\êque constitu lionne! du dépar-
lement de la Mayenne; il fut sa-
cré en cette qualité , à Paris, le
22 mai ijf)!. M. Villnrfuteusuilc
élu, au mois de septembre «792»
député à la convention nationale,
où, dans le procès du roi , il vola
la détenlion et le bannissement à
la paix. Non-seulement il se démit
|>ar lu suite de son épiscopat, mais
il retuMiça encore aux rondions
t'r«;li>iastiques. Successivement
membre du corps- législatif , de
lin^lilut, iosp(;ctcur-général des
éludes, ef conseiller ordinaire de
l'université, SI. Viljar n'est pltis
aujourd'hui (i8'25) que membre
(Urinsli tut (académie -française);
il est attaché i\ la commission du
dictionnaire. On lui doit : ^''quei-
ques Lettres pastorales, i\\i."\\d pu-
bliées lorsqu'il était évèque; v."
difléri;ns Rapports à la conven-
tion nationale, entre autres p04U'
VIL 2i3
faire conserver le collège dcî Fran-
ce jusqu'à l'organisation de l'ins-
Iruclirm publique; pour fixer la
somme à répartir enire i i8savans,
lillérateurs et artistes; enfin pour
l'organisation des liibliothéques
de Paris ; 5' des Poésies dans
quelques recueils, particulière-
ment la Décade philosopliiqucde^
fraginens de V Iliade en vers; 4"
Notice des travaux de Utlcratnrt et
beaux-arts de l'institut national,
pendant les années Q et \o ( Mé-.
moires de l'inslitut, i, 525,. 11,
io-t)a-79); 5° Notice sur la vie
et les ouvrages do Louvet ( Mémoi-
res de rinslilnt. classe de littéra-
ture et beaux- arts, t. II, llist. ,
p. 27), 6" Notice sur lavieet les ou-
vrages de Jean Dusautx (ibid., 5,
Ilist., p. 52); ']" Notice sur la vie et
les ouvrages d' Etienne lioallée, ar-
chitecte (ibid.. p. 45-)
VILLARKT ( Jean - Chrisos-
TÔME , BARON de) , membre de l'as-
semblée constituante, ai\cien évè-
que d'Amiens et de Casai, etc.,
est né. le «7 janvier 1757, à IVho-
dez, dépîjrtement de l'Aveyron,
d'une famille noble. Il embrassa
l'état ecclésiastique, fut nommé
vicaire - généra! de l'évêché de
Illiodez.et élu, par le clergé de
la sénéchaussée de Villefranche ,
député aux états - généraux en,
178!). Peu remarqué pendant la
session , il le fut heureu>etnent
moias encore sous le régiiue de la
Itrr^'ur, auquel il échappa. Le 9
avril 1803, par suite du concor-
dai , il fut )>onrvu de l'évêché
d'Amiens, d'où il passa au siège
de Casai , départenif ni de Ma-
rengo, le 21 juin 1804. Celle
mèmp année, le collège électoral
du département de la Somme l'a-
2l4
VIL
Tait dcsigrié pour candidat an sé-
nal-coiiservatenr. M. de Villaret
fut nommé successivement chan-
celier de l'université impériale,
premier aumônier du roi Joseph
( VOy. BoNAPARTE-Jo«EPH ), et of-
tiiier de la légion - d'honneur.
Comme heaucoup d'autres fonc-
tionnaires puldics, lors des évé-
nemens politiques de 1814? M.
de Villaret vota la déchéance de
l'empereur et le rétablissement
de la niiiison de Bourbon. Néan-
moins, à son retour en mars 181 5,
N i|niIéon , par un décret du 5o
de ce mois, le riiiiinlint dans les
fonctions de chiincelier de Tuni-
versité impériale , fonctions qu'il
a perdues à la seconde restaura-
tion, par suite delà réorganisation
de l'université, comme il avait
perd» quelque temps auparavant
son évêché de Casai tiu rétablis-
scnu;nt du royaume de Sardai-
gne.
VILLARET (le MARQUIS DE ) ,
maréchal-de-camp , commandeur
de l'ordre royal et militaire de
Saint - Louis , frère de l'amiral
Villaret - Joyeuse (dont l'article
suit ) , fit des études disîinguées
en mathématiques, entra dans le
corps de l'artillerie , et était li(;u-
tenanl-colonel lorsque la révolu-
tion éclata. 11 ne partagea point
les nouvelles doctrines politiques,
émigra , et servit à l'armée du
prince de Condé. Aussitôt que les
circonstances le lui permirent, il
rentra dans sa patrie, et tout en-
tier livré à ses afl'eclions domes-
tiques, il s'occupa uniquement de
l'éducation de ses deux neveux,
que son intrépide frère avait pour
ainsi dire légués à sa tendre amitié.
Tous deux ont répondu à ses soins
VIL
véritablement paternels , et on*
conquis des grades honorables ,
l'un sur terre et l'autre sur mer.
Le grade de maréchal-de camp et
le titre de commandeur de Saint-
Louis sont venus décorer sa re-
traite et sa vieillesse. Le marquis
de Villaret mourut en 1824. Son
ami, IM. de La Croix, membre de
la légion - d'honneur et juge au
tribunal civil de Versailles, a payé
un tribut touchant de regrets à sa
mémoire.
VILLARET DE JOYEUSE (le
COMTE Loris- Thomas), vice -ami-
ral. grand-olTicier de la légion-
d'hoiMieur, et en dernier lieu gou-
verneur-général de Venise, na-
quit à Auch en i^So, d'une ancien-
ne famille de Gascogne. Il montra
dès sa première jeunesse un pen-
ciant décidé pour le service de
mer; sa famille, par des raisons
particulières, ne se rendit pas à
ses vœux, et le fit entrer dans les
gens d'i'.rmes de la maison du roi;
mais dès qu'il eut atteint sa seiziè-
me année, n'écoulant plus que son
gortt, il s'embarqua en qualité de
volontaire. Il avait fait d'excellen-
tes études : le désir de se distin-
guer, un caractère heureux mé-
lange de douceur et de fermeté,
une bravoure enfin que rien'n'é-
tonnait, firent bientôt remarquer
le jeune Villaret de Joyeuse des
chefs sous lesquels il parcourut
les mers de l'Inde. En 1773, il fut
nommé capitaine en second d'un
bâtiment destiné à porter des trou-
pes pour proléger l'établissement
qu'on voulait former à Madagas-
car; il fit depuis plusieurs cour-
ses, avec le même grade, ?-\\tVA-
tatante. Ne se trouvant point em-
ployé activeuacnt à l'époque où
ôlb
^-o
CQ/O/if/^û/ ItZ/ft/'et- (loufiuie .
VIL
les^ Anglais vinrent niellre le siège
devant Pondichéry en 1778, il
concourut volontairement à la dé-
fense de cette place sous les ordres
de M. deBellecombe. Sur le conip-
le avantageux que cet officier-gé-
néral rendit des services de iM. Vil-
larel de Joyeuse, il fut promu au
grade de eapilnine de brûlot. En
IJ781, il eut le coMimandenietil ûii
m brûlot le Pulvériseur , qui faisait
» partie de la ttoUt que commandait
le bailli de SuiTren dans les mers
de l'Inde. Cethommecélèbre, qui,
par des opérations aussi audacieu-
ses qu'habilement combinées, em-
ployant à la fois les forces de ter-
re et de mer, sut rendre aux armes
françaises leur ancien lustre, et
qui seul sut encore humilier ta
puissance anglaise, démêla bien-
tôt parmi tant d'oHiciers distin-
gués qui servaient sous ses ordres,
le mérite de Villaret de Joyeuse.
Au siège de Gondelour, il le choi
sit pour aide-de-camp, et lorsque
les opérations maritimes recom-
mencèrent, il lui confia le com-
mandement de la Bellone , qu'il
quitta quelque temps après pour
celui de la DfayuUc. Ce fut avec
ce bâtiment que M. Villaret se
trouva chargé d'une iriission diffi-
cile, qui demandait ime expéiieii-
ce consommée et une grande ré-
solution. Il s'agissait d'aveilir M.
de l'einier, qui avec une division
navale avait été envoyé pour ué-
toyer la rade de iMadras , qu'une
escadre anglaise beaucoup plus
forte que la sienne croisait au lar-
ge près de celle côte, épiant les
vaisseaux français, dont elle espé-
rait bien faire sa proie. Pour les
prévenir à temps, il (allait passer
au milieu de cette croisière an-
VI L
2l5
glaise. «Je vous ai choisi, dit le
» brave Suffren au commandant
»de la Nnyade, parce que j'ai be-
"SOMi d'un houjme de tOte ; faites
nloot ce que vous poiu-rez pour
i>reu)plir votre mission, je vous
• donne carte blanche. Vous serez
«chassé en allant ou en revenant :
n vous serez probablement pris;
• mais vous vous battrez bien, c'est
»ce que je veux. » Arrivé aux at-
lérages de Madras, mais n'ayant
pu mettre la vi;;ilance de l'cune-
ini en défaut, Villaret voulut au
moins en succombant, faire con-
naître à la division qu'il avait mis-
sion de sauver le danger qui la
menaçait. Le vaisseau de ligue an-
glais le Sceptre^ de 64 canons, lui
donnait déjà chasse. Villaret lit
monter sur le pont de la Najade
tout son équipage, composé de
120 hon)nies, et leur dit : «Ce
«n'est qu'un bâtiment armé par la
«compagnie des Indes. (Il savait
«biea le contraire), des braves
» connue vous ne se laisseront pas
«prendre par un marcharul. » On
lui répondit par des acclamations,
et tout fut disposé pour le <ombat.
Villaret m; commença cependant
la canonnade que lorsqu'il fut près
la côte, et qu'il eut atteint le point
où les Français pouvaient le voir.
Là, sans autre espoir que d'avertir
les siens, la plus terrible lutte
s'engage. Pendant trois heures,
une faible corvette de >8 canons
résiste à un vaisseau de ligne, et
cela ;\ une distance si rapprochée,
que le commrxlore anglais se fai-
sait clairement entendre, en criant
à M. de Villaret : » Brave jeune
i> homme, conservez à voire roi un
» o/firier qui sait si bien défendre son
1» pavillon. » Lu corvette, cutière>
2l6
VIL
int'fit démâtée, avec hiiil pieds
d'eau dans sa cale , ayant penlii
les trois quarts de sou équijKtg*
fl près de couler ha^, se rendit vaï-
fin. Mais les vaisseaux français,
iîislrnits de la présence de l'enne-
mi, durent leur snlut à ce dévoue-
ment héroïque. Le capitaine dn
Sceptre refusa l'épée si vaillam-
ment défendue , que son prison-
nier voulut lui remettre, et les An-
j;lais comblèrent Villaret de mar-
ques d'estime. Il fut échangé peu
de temps après, et t\l. de liussy
qjii conimandait les forces de ter-
le française dans l'Inde, le décora
de l'une des trois croix de Saint-
(jouis que le roi avait mises à sa
disposition. L'amiral Suirren lui
donna le commandeinenl de la
frégate Coventri, avec laquelle il
termina la campagne. Il eut, en
1783, l'ordre d'aller à Batavia
pour traiter avec la compagnie
hollandaise d'intérêts importans.
A son arrivée, il salua la place se-
lon l'usage ; le commantlant hol-
landais ne lui ayant pas fait ren-
«he le salul, il s'emtjossa pendant
la nuiU et fit signifier que si on
ne lui rendait pas le lendemain les
honneurs qui lui étaient dus, il
foudroycrait la place. Dès les pre-
miers rayons du soleil, la frégate
française fut saluée d'autant de
coups de canon qu'elle en avait ti-
rés la veille. Les négociations fu-
rent conduite;» avec la même fer-
meté, et Villaret oblint qu'on fît
droit à ses justes demandes. Il ne
revint en France qu'après la »;on-
clusioD de la paix, et fut nommé
successivement lieutenant de vais-
seau, major de la marine à Lo-
rient, et capitaine de vaisseau. Il
remplit avec ce dernier grade «tîc
VIL
mission à Saint-Domingue, où îl
se trouva lors des premiers trou-
bles de la colonie ; revint en Fran-
ce avec le «louveaii pavillon, et eut
en 1795. le commandement t\n
vaisseau de ^4 canons, le Trajuri ,
qui tit partie de l'escadre aux or-
dres du vice-amiral Morard de
Cal les. La mt,'me année, la con-
vention nationale l'clevn an {Çrade
de conîre-amiial, et lui confia le
comn)andement en chef de l'ar-
mée navale de l'Océan, poste qu'il
n'avait point sollicité, et qu'il ac-
cepta même avec répiignaiice, vu
l'insuborilinatiou qui régnait à cet-
te époque sur les escatires de la
république. Mais l'estim»; et l'af-
fection générale dont il jouissait
parmi ses frères d'arnves, et la fer-
meté de son caractère, lui fourni-
rent les moyens de rétablir l'ordre
partout où il comrnan<lait ; l'aini-
ral Villaret de Joyeuse ne s'était
point prononcé en faveur de lu
révolution et passait môme pour
être très-opposé aux principes
professés par les trois pr^-mières
asseiiiblées délibérantes. Mais il
n'avait pas cru devoir abandonner
la France à rexeni)>lede tant d'of-
ficiers distingués de la marine qui
émigrèrent, ni pouvoir refuser à
sa patrie le secours de son bras.
Jean-Bon Saint-Andfé {voy. ce
nom), membre de la convention
nationale, qui fut investi pendant
quelque ten»ps d'uno^utorité illi-
mitée dans le déparlement de la
marine, availcoutume de dire : « Je
sais que Villaret est un aristocrate;
mais c'est un brave qui se battra
toujours bien. « Il montra en effet
tant de courage et de talens dans
le poste difficile qu'il avait accep-
té, qu'on le lui conserva .pendant
VIL
plusieurs années. On sait comhien
la journée du i5 praiiial an a (i"
juin 1794) aurait encore été bril-
lante pour la marine française ,
*ans la fausse nianœuvre 1]»'. (|U(;I-
ques oapitaintâ iuexpérinieulés ,
qui lai-^ïèrent couper la Jif^ue.
.lean-Bnn Suin(-An<Jré fut blessé
à cÔJé lie l'amiral Villan;!, dont il
uiontnit le vaisseau. Les Franrais
perdirentplusieurs bûtimens, mais
on parvint à faire entrer dans U-s
ports un riche convoi de giains
d'Amérique, impatiemment atten-
du. L'amirid Villaret s'oppoî^a, au-
tant qu'il put, .^ l'expédition mal
heureuse qu'on (it sortir des ports
au milieu de l'hivei" l'anuée sui-
vante, mais il ne fut point écouté.
En l'an 4, il déploya le pins };rand
courage dans le combat qui fut li -
vré sous l'île de Croix, contre des
forces plus que doubles des sien-
nes. Entouré de plusieurs vais-
seaux ennemis, le sii;n était criblé
de boulets lorsqu'il parvint enfin
à se dégager. Il se prononça en-
core, «n l'an 5, contre l'expédition
d'Irlande, dont il prédit la triste
issue, et voyant tiuijours ses con-
seils négligés, il donna -^a <lén»i>-
sion. que le directoire accepta. En
tyfjCi, l'amiral Villaret fut nommé,
par le département du iMorbihan,
député au conseil des cinq-cents.
Il s'y lia avec les chefs du parti
dit de Clic/iy , et se munira cons-
tannnent opposé au gouverne-
ment directoriaJ, qui le compta
bientôt an nombre de ses plus dan-
gereux entieuiis, et qui s'en ven-
gea lors du coup d'étal du 18
fructidor. Condamné à la déporla-
tiorj, Villaret parvint à scsousirai-
re aux poursuilos dirigées contre
lui, et dut à ruinilié qui lui offrit
VIL
21
courageusement \\n asile, le bon-
heur d'échapper au sort qui atten-
dait tant d'infortunés dans les dé-
serts infects de Sinamary. Mais
quelque teuipsjiprès, il fit à l'in-
térêt lie sa famille et à la sftreté
de ses amis, le sacrifice de ce qui
lui restait de liberté, et se rendit,
en 1799, au lieu d'exi), assigné
par le directoire aux condamnés
(pii avaient échappé à la première
(léporlation. H fut rappelé de l'île
d'Oléron.par legénéral en chef lio-
naparte, dès les pren>iers jours de
rétablissement du gouvernement
consulaire, et il vint reprendre un
po:>le nu'.rilé par tant de services
et de dévouement i la patrie. Son
retour dans les ports français fut
un jour de lêle pour l'armée na-
vale de l'Océan, dont il continua
de diriger les opérations avec le ti-
tre de vice-amiral. Lorsqu'aprè^
le traité; d'Amiens, le, gouverne-
ment résolut de raltiicher à la mé-
tropole la riche colonie de Sainl-
Domingne, l'amiral Villaret fut
«hargé du commandement de la
llolte expédilionuaire. (jui y trans-
porta les tKJupcs françaises. En
i8oa, il fut nommé eaj)itaine-gé-
néral des îles de la iMarlini(|ue et
'Je Sainte-Lucie, (jn'il gouverna
pendant sept ans. Son administra-
lion poila l'empreinte de son ca-
raelère ; elle fut aclive sans tra-
casseries i'I bienveillante sans fai-
blesse. Jl a laissé dans e-es îles les
plus honorabltis souveiwfs. Atta-
qué par les Anglais en 1809, il fut
obligé, après une vigoureuse résis-
lance contre des forces supérieur
res, et après avoir éprouvé dan»
le fort iiuurbon le boii)bar(h:meiit
Lt: plus terrible, de rendre la Mar-
tinique. A son retour eu Frauce^
2i8 VIL
îl no cessa de demaiuler que sa
conduite fût examinée jiidiciaire-
nifiit, mais il ne {)ijI obtenir d'ê-
tre jugé. «;t l'empereur lui fit écrire
par le niinislre di; la marine, qu'a-
près avoir examiné lui-même sa
conduite, il le nommait iu gou-
vernement général de Venise, et
au comniandement de la i 2* divi-
sion militaire. C'est dans l'exenii-
ce de ces fonctions éminentes,
qu'il fut enlevé à la France et à sa
famille en 1812, à l'âge de 62 ans.
Unissant les qualités sociales les
plus aimables à de solides vertus,
chéri de ceux qu'il a commandés,
et estimé de ceux qu'il a combat-
tus, Villarel de Joyeuse a laissé
d'incffiiçables regrets dans le
cœur de ses anciens frères d'ar-
mes, et de tous ceuxqui l'ont con-
nu.
VILLÈLE (le comte de), voyez
le Supplénifnl de ce volume.
VILLEMAIN (Abel-François),
né à Paris le 11 juin 1791. a fait
sa réiborique à Paris, au lycée
impérial, sous MiM. Luce deLan-
cival et Castel. Ces habiles pro-
fesseurs comptent peu d'élèves
aussi distingués ; celui-là fat bien-
tôt jugé digne de devenir maître.
Ses succès précoces le firent ac-
cueillir par i\l. deFontanes, qui,
lors de l'organisation de l'univer-
sité impériale, l'employa d'abord,
en 1810, comme professeur de
réthorique au lycée Gliarlema-
gne , puis le nomma professeur à
la faculté dos lettres de Paris.
Les travaux de l'enseignement ne
détournaient pas M. Villemain
de ceux de la composition. En
1812, il obtint, au jugement de
la secfmde classe de l'institut, le
prix de l'Éloge, de Montaigne, et
VIL
la mr^me année, il fut chargé de
prononcer le discours latin à la
di>tribnlion soleimelle du con-
cours général d(! l'université. En
1814 » il remj>orta de nouveau le
prix à l'in-titut par \\n discours
sur les avantages et les hiconvénieng
(le lu critique; il le recul eu pré-
sence de Tempereur de Russie et
du roi de Prusse, qui. après avoir
garanti ù la capitale la conserva-
tion de ses monurnens, se plu-
rent, en assistant à cette séance,
à manilésler l'estime qu'ils por-
taient à l'académie où tous les
arts libéraux sont représentés; à
un corps composé de l'élite des
savaus, des littérateurs et des ar-
tistes de la France, et même de
l'Europe, puisqu'il y a peu d'hom-
mes illustres à ces titres chez l'é-
tranger, dont le nom ne soii ins-
crit sur la liste des correspondans
de l'institut. M. Villemain adressa
à cette occasion aux deux souve-
rains, un discours cpii fut trouvé
très - convenable dans cette cir-
constance difficile sous plus d'un
rapport. Deux ans après, il ob-
tint encore un prix à l'institut; le
prix de l'Eloge de Montesquieu.
Appelé par M. Dccaze à la place
de directeur de la librairie, il s'en
démit en 1819, à l'époque 01^ ii
fut nommé maître des requêtes ;
il ne se démit pas toutefois de la
chaire d'éloquence à la faculté des
lettres. Pensant comme les Four-
croy. les Monge, les Lacepède,
les Cuvier, que les fonctions du
professorat ne sont incompatibles
avec aucune fonction publique,
et qu'il n'est pas de dignité qu'el-
les ne relèvent, M. Villemain ne
s'est abstenu de faire son cours
que losrque sa santé ne le lui per-
VIL
mettuit pas. Peu tle cours sont
aupsi suivis quf le t>ien; succ«.'s
d'autant plus flaitonr pour ce pro-
fesseur, qu'il le doit aut;uit à la
pureté de sa doctrine et à l'éléva-
tion de ses principes . qu'au ta-
lent avec lequel il les expose. On
ne l'a pas entendu sans une vive
satisfiiclion , faire en chaire des
vœux p(uir la liberté des Grecs,
au mornenl oi'i les aulnrilés, dans
la dépendance desquelles le tien-
nent ses fondions , attendaient de
lui des opinions tout à-fait oppo-
sées. Itulépendamment des ou-
vrages dont nous avons fiarlé ci-
dessus , :>i. Villeinaii) a publié
une Vie de Cromxvell, en 2 vol. ;
une traduction de la République
de Circron, et plusieurs morceaux
de littératur»*.
VILLENAVE (MATHtnis-Gtir.-
laime-'Iuérèse), honnnie de let-
tres, est né le i3 avril 17^2, à
Saint-Félix de Caraman, dépar-
tement de la Haute-Garonne. iVI.
Villenave habitait Nantes au coni-
inenceuient de la révolution. R<'-
gardé comme fédéraliste, il fut,
sons le régime de la terreur, du
nombre descent Ireute-deux Nan-
tais que Carrier envoya de cette
ville à Paris pour y être jugés p^ir
le tribunal révolutionnaire. Il é-
tait, dit-on, ainsi que ses co-in-
fortunés compagnons , destiné à
périr dans les bateaux à sous-pa-
pes ; mais ils arrivèrent heureu-
sement à laGonciergerie. On dit
encore que,désigné« comme Ven-
déens, ils devaient, en conséquen-
ce, passer par les armes. Ils par-
vinrent à persuader, que bien loin
d'être ce qu'on préteudail, ils a-
vaient défendu celte ville, et l'a-
valent conservée à la république.
VIL 2J9
Leur supposilii'U fut facilenien
admise: ils obtinrent la pcrmis-
sif>n d'être transférés dans une
maison de santé. La révolution
du 9 thermidor an 2 ( 27 juillet
1794 ) les rendit libios. En 1796,
dans le procès de Charette [voyez
ce nom). M. Viih navr piit la dé-
fense de ce génériti , qu'il ne put
soustraire à la mort. Depuis ce
temps, il «si resté, du moins os-
t«nsiblt ment, élran^erà la politi-
que. Comme joiMnalisle , il a tra-
vaillé à la Quotidienne et aux An-
vales politiques. Comme litléra-
li'ur, il a pul.lié : 1" Ode sur le dé-
rourmevt liéroique du pt inrc Muxi-
Tuiliru-J ules-Lropvld de Briiris-
ivirk, qui a con( ourru fiour h' prix
de l'acadéM»!! -française. i'86, io-
8°; 2" Plaidoyer dotis f affaire du
comité rérolutionnaire de Nantes ,
1795, iu-S"; ^"Relation du voya-
ge de cent trente- deux Nantais à
Paris, 1795, io-8°; /|" tes Méta-
morphoses d'Ovide , traduction
nouvel le, ai\'e le texte latin y suivie
de l'explication des fables et de
notes. Cet ouvrage a obtenu un
succès h-^Mjorable.
VlLLENKllVE (N.). vice-ami-
ral, grand-officier d(! la légion-
d'hotmeur, étaitofficierde marine
lorsque la révolution éclata. Il en
adopta les principe?, et fut cons-
tamment employé dans nos cam-
pagnes maritimes ; il se fit parli-
cuiièrement remarquera ta batail-
le d'Aboukir. ot^ Il parvint à sau-
ver sa division , ^l à rentrer avec
trois vaisseaux à Malle. Il com-
manda en chef, en 1802, l'esca-
dre «ilalionnée aux îles i\ii Vent;
lut pron)u, au mois de juin 1804»
au grade de vice-amiral; chargé ,
au mois de septembre i8o5 , du
220 VIL VIL
cominajidement de l'escadre de an veni des Français, hiised'oiieJl
Toulon, el fil sa jonclioti avec les faible, la mer honleiise. L'année
forces de (]adix, puis se rendit aux coiiiI)inée, sur 1 annonce dessi-
lles du V<;nt , enfin revint en lui- {;nanx faits pendant l.i nuit parla
ro[)(\ A celle épo.|iie, il rencontra frégate, se forme en bataille au
la llulte de l'amiral anj;lais Cal- point lUi jour, par rangs de vil»-*-
der, à qui il livra coinbal; il per- se, siuis avoir égard mu posie as-
dit deux vaisseaux espagnols; signé pour chaque bâlimenl. Nous
ayanlconservér;ivaniage du vent, goov»;'rnions à peine à 81ieureset
il entra au Ferrol. Commandant , demie, virés de bord ton:» à la fois,
au mois d'ociobre i8o5, le? forces lof pour lof, pris bâbord amures,
françai>es et espagnoles réunies l'armée anglaise courant grand
dans la baie de Cadix, il ré, oint largue sur deux colonnes, six
d'attaquer les Anglais prés du cap vaisseaux à trois |)Onts entête,
de ïr.ilalgar. Nous empruntons bonnettes hautes el b:isses, ce qui
les détails de celte funeste action lui donna la facilité d'attaquer
qui a été (liver>ement ex|)liquée , à midi et demi par un mouvement
à M. Ltîlellier, ollicier de la lé- spontané, le centre et l'arrière-
gioM-d'honueur , etc., ancien na- garde de notre ligne. Qu'auraient
pitaine de vaisseau, qui y com- faits dans celte circonstance les
mandait le Formidable {^voyez le amiiaux hs plus expérimentés?
Conslitutiormcl du 20 juin i8ii5). Laisserarriver, fuir, chercher à se
« Le sentiment qui détermina l'a- couvrir dévoiles, à éviter le com-
mJral Villeneuve àsortir delà baie bat, rentrer à Cadix cainmnés par
de Cadix, dit H. Letellier, était l'efmemi c'eût été couvrir de dés-
un sentiment éminemment Iran- honneur le pavillon français. Il
çais ; il croyait vaincre, nous le n'y avait pas d'autres manœuvres
croyions comme lui; les officiers, à iaire, à la distance où se Iron-
ies équij)agesparlageaient son en- vait l'ennemi, que celles ordon-
thoiisiasme ; l'ordre de mettre à nées par l'amiral Villeneuve. Une
la voile ne trouva pas uncenseur... fois l'action commencée sur une
Les Anglais venaient d'être signa- ligne de j5 vaisseaux occupant ,
lés. Cinq de leurs vaisseaux s'é- vu la faiblesse du vent, plusd'u-
taient détachés de leur escadre; ne lieue d'étendue, la responsa-
les signaux en avaient instruit Ta- bilité devenait [lersonnelle pour
jijiral comrnandant ; l'occasion é- tous les commandans des vais-
lait favoroble. iMM. de Cravina seaux et frégates. L'amiral Ville-
.(co/. Gravina) et de Villeneuve se neuve combattante à portée de
décidèrenl au combat, ignorant pistolet, entouré d'ennemis, cou-
que les Anglaisauraieni remplacé vert de fumée, déntâté, blessé,
leurs vai.-seanx par cinq autres, ne pouvait quesebaltre en brave,
et que leur nombre était toujouis el il l'a fait. S«;s instructions fê-
le même. La. victoire qu'obtint ront preuve un jour de la pureté
Nelson [voy. ce nom) dans cette de ses intentions, des senlimens
affaire, est due à l'avantage de français qui l'aDimaieut; il avait
«'être trouvé, le 29 vendémiaire, tout prévu ; les élémens seuls fu-
^ VIL VIL 2a»
rcnt cause de noire ruine : elle guerre, pour avoir désol)éi à mes
l'ut couiplèle. » Fait prisonnier oriiies, tt conséquemment avoir
»yir le Bucentaure, va\s>f au nnnvaï perilu la flotte (car je lui avais
de 80 canons, l'amiral Villeneuve ordonné de ne pas mettre i\ la
lut conduit en Angleterre, où il voile et de ne pas s'engager avec
obtint la pernii-jsion de .'•e choisir les Anglais), résolut de se dé-
une résidence à 3o milles de triiire; il prit ses gravures de cœur,
Londres. Respectant dans cet a- les compara de nouveau avec !?a
mirai ime grande inlurlune, dont poitrine, lîl exactement, au centre
liii-n)ême s'est cruellement puni, de la gravure, une longue pitiTire
et laissant au temps le scinde avec une longue épingle, fixa tn-
/iier l'opinion publique, nous suite celle épingle, anlant que
nous sommes contentés de rap- possible, à la même place, contre
j>orter ro[)inion d'un brave olïi- sa poitrine, l'enfonça juscju'à la
cier. Nous ferons connaître, parle tête, pénétra le cœur et »;xpira.
même motif d'impartialité , la Lorsqu'on ouvrit sa chambre ou
pensée de Napoléon sur les lalens le trouva mort; l'épingle était
et le caractère de l'amiral Ville- dans sa poitrine, et la maripie
neuve. «Avec plus de vigueur, au faite dans la gravure correspon-
cap Finistère, Villeneuve eût pu dait à la blessure île son sein. Il
rendre l'attaque de l'Angleterre n'aurait pas dû agir ainsi ; c'était
praticable. Son apparition avait un brave, bien qu'il n'eût aucim
été condjinée de Irès-loiû, avec talent. » Celle funeste fin arrivée
beaucoup d'art et de calcul, en le 2r)avril iKoG, dément l'inexacte
opposition à la routine des m.irins et singulière assertion des auteurs
<pii entourai«-nt Napoléon; et tout de la Bioi^raphie moderne publiée
réussit jusqu'au moment décisif; par le libraire Alexis ii;ymer3\
alors lu mollesse de Villeneuve Ils disent : « Après être resté
vinttout perdre » (Lis Cases, t. quelque teujps à Rennes, il s'y
III, p. 29(). ) On trouve cet autre brûla la cervelle, de chagrin d'a-
jugemcnt dans les mémoires du voir été m tl apprécié par Bona-
docteur O'iUéara (t. II, p. 54 ) : parte, et dans la ciaitite, dit-on,
«■ Villeneuve, lorsqu'il fut fait d'un jugement inique , comman-
prixMniier par les Anglais, fut dé par cet ex-empere«ir.n
tellemtnt altligé de sa délaite, VI L L EN E L V F ( le MAnQCis
(pi'il étudia l'anatomie pour se Poss Louis- François de), né en
détruire lui-même. A cet effet il 1774' d'une ancienne famille de
acheta plusieurs gravures. analo- la ci-devant province de Langiie-
miqnes du cœur, et les compara doc, se fil remarquer dès le com-
avec son propre corps, pour s'as- meuc«;mcnt de la révolution, par
surer «;xaclcment de la position une grande opposition aux nou-
dc cet organe. Lors de son arrivée veaux principes; il fut arrêté,
en Fiance, je lui ordonnai de res- comme suspect, en «795; rendu
ter ù Rennes, et de ue jtas venir à la liberté, il continua à mani-
à Pari'. Villeneuve, craignant l'ester les mêmes opinions. M. de
d'être jugti par un cou»cil de Villeneuve se fixa ù Touluuie, «t
sa a
VIL
prit, en 1797, une p.irl si active
aux élections, qu'il fitl , dit- on ,
blessé de plusieurs coups de sabre.
Le gouvernernen'; impérial le
nomma, en i8o4j membre du
conseil-général du département
de la Haute-Garonne , fonctions
qu'il accepta ainsi que celles de
n)aire de sa commune en i8i5.
A la lin de cette année , l'armée
du maréchal Soult revenait d'Es-
pagne, dans un état d'épuisement
suite de glorieux combats. !>!. de
Villeneuve, au rapport de la Bio-
graphie des frères Michaud, « pro-
hiba par une jtublication officielle
la levée des réquisitions frappées
par l'armée du maréchal. » Cette
conduite, que l'histoire caracté-
risera , fait dire aux auteurs d'u-
ne biographie étrangère « qu'il
paya de sa destitution un crime
qu'il eût dû payer de sa tête. »
Ce ne fut pas là le seul service
que M. de Villeneuve rendit à
la cause qu'il servait. Il seconda
lord Wellington, près duquel il
se rendit, et M. Jules de Solignac,
commissairedu roi, qui lenomrna
préfet de Tarn-et-Garonne : no-
mination qui ne fut pas confirmée
par le roi après l'entrée de ce
prince à Paris ; mais peu de temps
après, M. de Vdleneuve devint
préfet des Hautes-Pyrénées. L'un
des six préfets qui se réimirent au
commencement de mars i8i5,
près M. le duc d'Angoulême , à
Bordeaux, lors c'u retour de Na-
poléon de l'ile d'Elbe, il retourna
promptement à ïarbes. où il éta-
blit une commission de salut public,
pour faire exécuter les ordres du
roi; cette mesure n'ayant pas le
succès qu'il en espérait, il se re-
lira sur la frontière de son dépar-
VIL
tcment, où il fut arrêté dans la
nuit du II au 12 avril par ordre
de Napoléon. Conrhiil à T.iibes ,
puis à Toulouse , il allait être
tran't'éré à Paris lor-qu'il parvint
à s'évader. Il j)a>!sa en E^^pagne ,
et rejoignit iM. le duc d'Augou-
lêu)c à Puycerda . en Catalogne.
S. A. R. , lors lie sa rentrée en
France, au mois (!(• juillet, nom-
ma iM. de Villeneuve administra-
teur-général des 2(3 départemens
du Midi , qui s'étendaient de
Chambéri à Biideaiix. " C'est \h,
disent les auteurs do la biographie
étrangère que nous avons déjà ci-
tés, qu'il organisa les premiers
élémens de ce gouvernement oc-
culte si long-temps en opposition
avec celui du roi , et dont la péti-
tion courageuse de M. Midierde
Monjau et les débats de la cham-
bre des députés , en avril, mai et
juin 1820, ont révélé la seorète
et pui-saule influence à la France
et à l'Europe. De ce poste, com-
me d'un fort inexpugnable, M. de
Villeneuve, soutenu par un pou-
voir invisible, devant lequel recula
constamment celui du roi , sus-
pendait, contrariait ou annulait
tous les actes du mifiistère royal,
étonné de tant d'audace, mais im-
puissant contre elle. Ce mirjisière
essaya néanmoins une dernière
tentative;ce futde faire mander M.
de Villeneuve à Paris, pour y ren-
dre compte de sa conduite à l'ins-
tant même où le collège électoral
du déparlement de l'Hérault allait
s'ouvrir sous sa présidence. Arrivé
dans cette ville avec les recom-
mandations de ses protecteurs ,
M. de Villeneuve traita de puis-
sance à i)uissance avec le minis-
tère, lequel, ne l'ayant appelé à
TIL
Taris que parce qu'il contrariait
tontes ses opérations dans le Midi,
comiDenpiiit ù reconnaître qu'il
avait commis une faute; que M. de
Villeneuve était beaucoup plus
dang;ereux pour lui à Paris qu'à
Toulouse, et qu'il y allait de son
existence à l'y renvoyer. Il mit
l-out en œuvre poury réussir, mais
il était trop lard; toutes ses forces
échouèrent contre le crédit d'un
obscur administrateur, et le mi-
nistère, victime d'une sécurité et
d'une imprévoyance sans excuse,
dut abandonner les rênes de l'état.
On eût pu croire que ce triomphe
était un grand événement dans la
vie de M. de Villeneuve, et qu'il
allait au moins succéder à ceux
dont la disgrSce était, en partie,
son ouvrage; il n'en fut rien; on
se borna A lui donner de stériles
assurances de satisfaction, et après
l'avoir f.iil attendre une année en-
tière, on le nomma , vers la fin de
janvier 1816, préfet du départe-
ment du Cher. Aévoqué un moisi
après l'ordoimance du 5 septem-
bre, époque à laquelle on sait que
le gouvernement semblait vou-
loir se réconcilier avec l'opinion
publique , le niarquis de Ville-
neuve a été appelé, en <^i(),à la
préfecture des Pyrénées -Orien-
tales , lorsque les doctrines de
i8i5ont recommencé à nîpren-
dre faveur auprès de lui. » iM. de
Villeneuve devint , en iSa3, pré-
fet de la Oeusc ; il passa l'année
suivante à la préfecture de la Cor-
rèïe , où il se trouve encore au-
jourd'hui (182.5.)
VILLENEUVE BAUGEMONT
(le comte Christophe), conseil-
ler-d'élat, officier de la légion-
d'bouneur, préfet du département
VIL
223
des Bouches-du-Rhône , est né à
Bargemont , dans la ci - devant
Provence, d'une faaiille ancienne.
Il servait en qualité de sous-lieu-
tenant dans le régiment Royal-
Roussillon , infanterie, k l'époque
de la révoluticm ; il fit partie de la
garde constitutionnelle de Louis
XVI en i;92. M. Villeneuve Bar-
gemont échappa aux proscrip-
tions du régime de la terreur, et
dtivint successivement, en 1801,
inspecteur des poids et mesures
dans les départemens méridio-
naux; en i8o:î, sous-préfet à Né-
rac ; en 1806, préfet du départe-
ment de Lot-et-Garonne; enfin,
en 1808, njembre de la légion-
d'honneur. Il se prononça , en
i8i/)|» pour le rétablissement de
la famille des Bourbons sur le
trône de France, fut maintenu
par le roi datjs ses fonctions, des-
titué par Napoléon pendant les
cent Jours, eu i8ï5, et rétabli
dans son poste après la seconde
restauration. Il passa , an mois
d'octobre 181 5, à la prélecture
des Bouches-du-Rhône, qu'il oc-
cupe encore aujourd'hui (iSaS.)
Il a [lublié : i° Notice sur la ville
de Nérac, ouvrage principalement
consacré à célébi^r la mémoire
de Henri IV, Agen, 1 808; 2''f^ojage
(tans la vallée de Barcelonnette ,
dédié à S. A. H. Mgr. duc d' An^
gouléine, Agen, iSiS^ù' Rapport
sur des fouilles faites à Fréjus en
i8o5; 4' Notice sur Théopolis
(Ba^ses-Alpcs) , 1811 ; ^'Disser-
tation sur le lieu qu'occupait, dans
l' Aquitaine , le peuple désigné par
César sous le nom de Suliates. Ces
trois derniers ouvrages ont été
imprimés dans les mémoires de
la société d'u;;riculturc d'Agen.
aui
VIL
VILLLNELVE BARGEMONT
( tE MARQUIS Ferdinand de) , t'rôre
du pieccdeiit , jin;l»u, chevalier
de lUidte el du la lègion-d'hoii-
ueur, etc. , servait dans ia inarJDC
avant la révolulion. Depuis» oeUe
époque, il vivait relire dans sa
laiiiille lorsqu'il fut uoininé, aux
approches du 20 uiai> 181 5, sous-
prélel de Caslellane. Couuuau-
daut de la garde naliuualc de cette
■ville, il voulut arrêter la marche
de Napoléon sur Paris. Ses elïovls
lurent inutiles- M. le duc d'An-
goulêinc le ncjniuia provisoire-
ment prélet des Jiasses-Alpes ; il
ne put occuper ce poste qu'après
les désastres do Waterloo. II de-
vint, en 1818, préfet des Pyré-
nées-Orientales, d'où il passa, en
1823, à la préfecluie de la Nièvre,
fonctions qu'il occupe encore au-
jourd'hui ( ibaS). Il e?t depuis
i8i2 membre de la chambre des
députés pour le département des
liasses-Alpes.
VILLENEUVE BAllGEMONÏ
( LE BARON Joseph de) , chevalier
de Malte et de la légion-d'hon-
neur, préfet, frère des précédens,
remplissait à l'époque de la pre-
mière restauration, en i8i4, la
place de conseiller référendaire à
la cour des comptes. Le roi le
nomma chevalier de la légion -
d'honneur au mois d'août de la
même aimée. Après la seconde
restauration , il fut nommé préfet
de la Haute-Saône; il en remplit
encore les fonctions aujourd'hui
(i825)..
VILLENEUVE BARGEMONT
(le vicomte Albas de) , chevalier
de Malte et de la legion-d hon-
neur, maître des requêtes, etc. ,
■ frère des précédens, fut auditeur
VI M
au conseil-d'état, et successive-
ment préfet de LériJa el de Na-
mursous le gouvernement impé-
lial. Après la première restaura-
lion, en 1814, ie roi le nomma
préfet de Tarn-et-Garonne, poste
d'où il s'éloigna à l'époque du re-
tour de Napoléon, en mars 18 i5.
La seconde re^-tauiation le^endit
à su préfecture. 11 est aujourd'hui
(»8a5) préfet de la Loire-lnfé-
rieuie.
VIMAR ( Nicolas, comte de ),
pair de France , est né le 3o octo-
bre 1744» ii Mesnières , près de
Neufchâlel , dé|)arlement de la
Seine-Inférieure. Avocat au par-
lement de Rouen , après s'être
convaincu qu'il ne réunissait pas
toutes lesqualités nécessaires pour
la plaidoirie , il y renonça. Eu
1790, il occupait parmi ses col-
lègues un rang distingué, com-
nu; écrivain et connue juriscon-
sulte. A cette époque de la {)re-
miêre organisation des corps mu-
nicipaux, il fut nonjmé procureur
de la commune de Rouen. 1! exis-
tait alors dans cette ville des
ateliers de charité, refuge de la
fainéantise et foyer de désordres;
il proposa , et la municipalité ,
composé* d'hommes sages et fer-
mes , adopta la mesure d'y subs-
tituer des bureaux de bienfaisan-
ce. Cette mesure, exécutée avec
prudence el vigueur, rétablit l'or-
dre et la paix dans la ville de
Rouen , qui fut pendant plusieurs
années l'asile d'un grand nombre
de personnes persécutées dans
leurs départemens. Députt'i, eu
1791, :'j l'assemblée législative,
M, Vimar y vota constamment
avec le parti constitutionnel; fut
euiprisonné durant dix mois sous
VI M
le régime de la terreur , refusa le
ministère de la justice, auquel il
l'ut appelé par le directoire-exé-
cutif après le i8 l'ructidor an 5
(4 septembre 1797) ; mais il con-
sentit à devenir membre d'un des
comité? de bienfaisance dont il
avait provoqué l'établissement ,
cl bientôt après du comité central
d'mstructiou publique, qui avait
la surveillance des écoles du dé-
partement. Porté au conseil des
anciens par le suffrage de ses com-
patriotes , en 1798, il fut nommé,
le 21 octobre de la même année,
un des secrétaires de ce conseil,
où il a fait plusieurs rapports ,
dont l'un avait pour objet une ré-
solution du conseil des cinq-cents,
qui déclarait irrévocables les Min-
ier de domaines nationaux quoi-
qu'irrégulières, et non-seulement
celles qui étaient déjà faites , mais
encore celles qui se feraient par la
suite. La conclusion de ce rap-
port , quoique fondée sur les vrais
principes, n'était pas conforine à
l'opinion qui dominait alors; elle
fit naître des débats violens. On
sait combien était critique l'état
de la France ii la fin de 1799 et
au commencement de l'année sui-
vante; ses armées avaient éprou-
vé, des revers , la guerre civile se
ranimait, et le retour de l'anar-
cbie semblait inévitable. M. Vi-
uiar prit ufie part très-aclive à
l'événement du 18 brumaire; il fit
partie de la commission législa -
tive du conseil dont il était mem-
bre ; refusa le ministère de la jus-
tic« qui lui fut offert pour la se-
comle fois, et fut nommé, peu
de jours après, un des trente un
premiers séualeurs ; Jasénatorerie
de Nanci lui* lut conférée le 38
T. XX.
VIN
223
moi 1804. Il fut aussi appelé,
dès l'origine, au comité conten-
tieux de la légion-d'honneur, et il
en est encore membre aujour-
d'hui (1835). Nommé, le 3i juin
1811, grand-officier de la même
légion, il avait été précédemment
créé comte comme tous les sé-
nateurs; il vota, le r'avriî i8i4i
la déchéance de l'empereur , et
ensuite le rappel des princes de la
maison de Bourbon ; il fut un de>
membres de la commission char-
gée de préparer la charte consti-
tutionnelle. Le roi, par son or-
donnance du 4 juif» 1814, le fjom-
ma pair de France. Député par le
collège électoral de son déparle-
ment, en 18 15, à la chambre des
représentans , il y fit partie du co-
mité de constitution ; après les
cent jours , il rentra dans celle des
pairs, où il vote avec la minorité
qui défend nos libertés constitu-
tionnelles.
VINCENS ( Jean-Césa-r), de
l'académie royale de Nîmes , de
la société des antiquaires de Lon-
dres , et correspondant de la so-
ciété royale et centrale d'agricul-
ture, naquit à Nîmes le iG sep-
tembre 1755. Elevé par son -père,
qui avait cultivé à la fois la litté-
rature, l'archéologie et l'écono-
mie politique, et publié quelques
ouvrages en divers genres, il pui-
sa dans les leçons de cet habib',
instituteur le goût des arts et des
"sciences, et tous les éléniens des
connaissances qu'il étendit et per-
fectionna ensuite par ses propres
études. Elles eurent principale-
ment pour objet la chimie, la phy-
si(|ue, l'histoire naturelle et la sta-
tistique. C'est lui qui a fourni tout
ce qui tient à ces sciences dans la
aîG
VIN
Topographie de la ville de Nîmes
et de sa banlieue^ i vol. tn-li", cou-
ronné, en l'^iy^-, par la société
royale de niéclecii'.c . et publié er)
1802; 011 vr;i;,M' 1res distingué, qui
«'est pas re^l^t;il>t à une utilité
locale, coujnie son litre seniMe
l'annoncer, et auquel i)arlicipa .
pour la partie médicale, M. Bau-
mes, alors médecin à Nîmes, et
bientôt après professeur célèbre
de la faculté de Montpellier. Vin-
cens a laissé en manuscrit un
grand nombre de mémoires inlé-
vesians sur différentes applications
pratiques des théories scientifi-
ques aux arts, an commerce et à
l'agriiMilture ; de ce nombre est
surlonl un beau travail sur l'édu-
cation des vers ù s^oie, qui, connu
de feu le docteur Nysten, a été cité
par lui avec éloge. En «791, il fut
menibrc de l'assemblée législa-
tive, et l'un de*i membres les plus
laborieux du comité des domai-
nes. Il s'honora, dans ces temps
de crise, de partager les opinions
et le courage des vrais amis de la
liberté, de l'ordre et de la mo-
narchie constitutionnelle. Accusé
de royalisme sous le régime de la
terreur, il fut emprisonné, et tra-
duit devant un tribunal révolu-
tionnaire; il échappa à la con-
damnation capitale, grâce à la
présence d'esprit avec laquelle il
se défendit, à l'intérêt qu'il ins-
pira aux habitans de la commune
où il s'était retiré, et qui, appe-
lés pour apprécier l'accusalion ,
témoignèrent tous en sa faveur,
et enfin à l'espoir qu'avaient ses
persécuteurs de se faire, dans un
autre moment, contre lui . un li-
tre décisif d'une lettre qu'il avait
écrite pendant le fédéralisme ,
VIN
qu'i>n croyait avoir trop légère-
ment cherchée dan» le dépôt pu-
blic, où elle aurait dû se trouver,
et qu'on se croyait certain de dé-
couvrir plus tard ; mais on a tout
lieu (le fjcnscr (pi'elle avait été
.>-(;crtltinint cuit vec et anéantie
par un employé humain, quoi-
qu'il ne se soit jamais vanté de
cette bonne action. La cbute de
llobespierre empêcha l'effet de
l'espèce de plus ample informé
sous lequel l'accusé était resté ;
toutefois sa détention se prolon-
gea long-temps encore ; eniîn il
sortit de prison, mais avec une
santé extrêmement altérée. Il
mourut au mois d'août 1801.
VINCENT (François-André),
peintre d'histoire , membre de
l'institut et de la légion -d'hon-
neur, professeur aux écoles roya-
les des beaux-arts, naquit à Paris
le 3o décembre 1746- Son père,
peintre distingué dans le genre du
portrait, et qui avait été beaucoup
employé à la cour de Louis XV,
lui fit donner une bonne éduca-
tion. Entraîné par son penchant
pour la peinture, le jeune Vincent
étudia cet art avec autant de zèle
que d'assiduité. C'était encore
nialheurensement le règne des
Jîoucher, des Vanloo et des Natoi-
re; mais un véritable artiste dans
le génie historique, le seul que la
France comptât alors, ouvrait une
école qui, perfectionnée bientôt
par David, son disciple, allait éle-
ver au plus haut point la gloire
de l'école française. M. Vincent
père, doué d'un sentiment vrai
dans le.- arts, ne tarda pas à sentir
que Vien était le maître qu'il de-
vait donner de préférence à son
fils. Les progrès de l'élève furent
VIN
si rapides qu'ils élonnèreiU le maî-
tre; le jeune Vincent, sur son ta-
bleau de Germanicus , remporta
le prix qui l'envoyait ix Rome aux
frais du gouvernement. D'une san-
té faible, il ne Ut pas sous le beau
ciel de l'Italie, dan^ cette patrie
des arts, toutes les études ((u'il se
proposait. Ses souffrances conli-
iHjelles ne lui permirent pa« de
méditer assez Michel-Ange, Ra-
phaël et le Corrége; mais la péné-
tration de son esprit y suppléa.
De retour à Paris, il redoubla d'ar-
deur, et produisit beaucoup d'ou-
vrages de mérite dans un genre
qui lui était particulier; peu d'ar-
tistes ont réuni autant de connais-
sances non-seulement dans son
art, mais en littérature; il avait
aussi une mémoire heiireuse et u-
oe grande facilité à s'exprimer.
Il a fait beaucoup d'articles pour
le Dictionnaire des beaux arts à
l'inslilut. A tous ces titres, IVl. Vin-
cent joignait la bonté du cœur, la
justice la plus intègre, et surtout
un zèle infatigable pour rendre
service. Il a succombé i\ une lon-
gue et douloureuse maladie, le 5
août 1816, regretté de tous ceux
qui l'ont connu. Ses ouvrages \fs
plus estimés sont : i° Saint Jérô-
me éveillé par l'av^e , sonnant la
trompette; 2" le président Mole
saisi par les factieux, est regardé
généralement comme son meil-
leur tableau ; 0° deux tableaux
parfaitementsemblable.s,donU'un,
Achille luttant contre le Xante,
est aux G(d)elins; 4° 'i'^ (^cs plus
remarquables de ce maîlre e.^t la
Piscine miraculeuse, placé dans u-
no église de Rouen. 5" Dorée enle-
vant Orithie , morceau de réccp-
tioti de l'auteur ù l'académie; G"
VIN 22;
Arie et Pcetus est aux Gobelins ;
7" la clémence d'Auguste et Pyr-
rus enfant, se réfugiant dans le
palais de Glaucias, roi d'Illirie ,
ont été faits pour l'électeur de
Trêves. 8° Henri IV rencontrant
Sully, blessé après la bataille d'I-
vry, grand tableau qui est au châ-
teau de Saint-Cluud; 9" Renaud
et Arniide , tableau fait pour M.
le comte d'Artois, il y a 40 ans;
m'' Zcuxis choisissant tm modèle
parmi les jeunes filles que lui pré-
sentent les babilans de Crotone:
il est aux Gobelins; «1° Guitlau-
vie-Tell précipitant Gésier dans le
lac, se voit encore àToulouse; l'j-
un dessin de u5 pieds, sur toile,
représentant la Bataille des Py-
ramides, figures grandes comnje
nature. Le prince de Neufchûtel
lui en fit fiire un plus petit pour
sa terre dt; Gros-Bois. C'est son
dernier ouvrage, l'un des plus
grands et îles plus beaux qu'il ait
composés. M. Vincent a formé
beaucoup d'élèves : Saint-Ours,
Mermée, Meynier, Ansiaux,Thé-
vcQin, membre de l'institut, der-
nièrement directeur de l'académie
à Rome, Horace Vernel, IVu Léon
Paillère, Heim, Thomas, Fores-
tier, IVlauzaissc, etc., etc.
VINCENT (Fra:*çois-Nicolas) ,
secrétaire - général du ministère
de la guerre, était clerc d'avocat
à l'époque de la révolution, dont
il embrassa avec chaleur les prin-
cipes. Connu de Pache , minisire
de la guerre en 1792, il fut nom-
mé, au mois d'octobre de la mô-
me année, parce ministre, son
prolecteur, et ensuite son ami ,
chef des bureaux de celle admi-
nistration. Le général Bcurnon-
ville, ayant succédé à Pache, des-
2a« VIN
litua Vincent au mois de février
i^qS; mais sous le minislère de
lioucholle, qui remplaça Benr-
lionvillc, Vincent fui rappelé, et
nommé secrélairc-f^énéral de la
guerre. Devenu, par l'imporlance
de son emploi el son activité un
piiu inlrigunle, un <lcs chefs les
plus marquans des cordeliers, Vin-
cent se forma, dit-on, une cour,
et donna des emplois. Ronsin lui
dut sa nomination de général de
l'armée révolutionnaire. La for-
lune de Vincent pâlit devant l'ac-
eusalion qu« porta contre lui à la
convention Philippeaux, qui l'ac-
cusa, lui elRon^in, des déroutes
que l'armée républicaine avait é-
prouvées dans la Vendée. Décrété
d'accusation le 17 décembre 1795,
Vincent recouvia la liberté le 2
février 1794» P'^'' suite des efloris
de Danton , qui l'avait défendu
avec chaleur, et par l'inflnence
des cordeliers. Ingrat envers ceux
qui l'avaient si ellicacement se-
couru, Vincent se réunit à la fac-
tion d'Hébert, qui se sépara des
cordeliers, el éprouva bientôt le
sort des principaux partisans de
ce dernier. Il devint l'une des vic-
times des cordeliers et des jaco-
bins. Traduit au tribunal révolu-
tionnaire, il fut condamné à mort
Ie4gt'rminal an 2 (24nîars » 794)>
et exécuté n'ayant pas atteint sa
2'j* année. On lui rej)rocbe ce san-
guinaire propos qu'il aurait tenu
dans une séance des cordeliers :
« Pour sauver la France, dit-il,
«il n'y a qu'un moyen; c'est d'ex-
» terminer, sans en excepter un
«seul, les nobles el les prêtresl »
VINCENT ( Pierre - Charles-
Victor), membre de la conven-
tion nationale et du con-eil des
VIN
anciens, exerçait la profession d'a-
vocat lorsque la révolution éclata.
Il en adopla les principes avec
beaucoup de franchise et de mo-
dération , et fut élu , au mois de
^eplembre 1792, par les électeur»
de Paris, dépulé à la convention,
où , dans le procès du roi , il vota
la détenlion du monarque et son
bannissement à la paix. Meujbre
du comité des domaines, il fil plu-
sieurs rappurls sur les droits féo-
daux , les prêtres , etc. , el fut un
des signataires de la protestation
du 6 juin 1795, contre les alleu-
tats du 01 mai précédent. L'un
des 73 membres de l'assemblée
décrétés d'arrestation, il fut em-
prisonné, et ne recouvra la li-
berté qu'après le 9 thermidor an
3 (27 juillet 1794)- Devenu mem-
bre du conseil des anciens par
siiile de la réélection des deux
tiers convenlioimels , il sortit du
conseil le 20 ujai 1797, ^* '^'^ P'^**
eu part aux affaires publiques.
VINCENT (le baron Nicolas-
Charles de), général autrichien,
est plus connu comme diplomate
que comme militaire; il est l'un
des signataires du traité de Cam-
po-Formio. Comblé des faveurs
de son souverain , qui lui donna,
en 1807, en récompense des ser-
vices qu'il lui avait rendus dans
plusieurs missions délicates, une
lerre en Gaiicie, d'une valeur de
prés de 200,000 florins. Il fut
nommé, en 1814, ambassadeur
près de Louis XVIII, qu'il ac-
compagna à Gand à l'époque des
événemens de mars 181 5. Le
baron de Vincent avait été ,
en 1814 • pour les puissances
alliées , el avant l'érection du
royaume des Pays-Bas, gouver-
VIN
tieur-'^énéral de la Beln;iqne et du
pays de Liég;c. Il est loiijoms
(1825) nmba.«ïi;ideur pr(;s du roi
de France. Chambellan de l'etn-
pereiir et colorud d'un régiment
de chevau - légers , le baron de
Vincent est encore grand'croix
de l'ordre de Saint - Léopold et
t'Iievalier de plusieurs ordres, tant
nationaux (pi'étrangers.
VINCIION DE Qr^MONï
( Cuarles-Antoine ) , né à l'aris
le i4 t'évri» r 1778, entra très-
jeune au service de la marine, et
s y distingua en plusieurs occa-
sions. Attaché i\ l'amiral Bruix en
qualité d'aide - de - camp, il lut
chargé, en 1804, d'aller recon-
naître les forces ennemies, qui,
sous les ordres de l'amiral Nel-
son, venaient a tlaipier la llotti lie de
Boulogne. Il rendit d'imporlans
services dans la nuit où cette at-
taque eut lieu, qui serait devenie
désastreuse sans la haute valeur
que déployèrent les officiers et les
soldats de la marine. Il eut depuis
une afluire très-briliantc , comme
«ommandant de la place de Cux-
haven , contre sir Georges Sluart,
qui alla l'attaquer avec quelques
vaisseaux anglais, et qui l'ut re-
poussé. Lors de l'entreprise au-
dacieuse du duc de Bnmswick
()eU,qui, à la lOte de quelques
troupes légère', prit les armes,
«'t fit une guerre de partisan <lans
le nord de rAllemagiie, le général
danois Ewald {voy. ce nom), agis-
sant avec des Iruupesdesa nation,
alliée de la France , voulait com-
biner se» mouvemens avec ceux
d'un général westphalierj , pour
couper au duc sa retraite sur le
Wescr. Au refus de plusieurs of-
ficiers du pays, M. Vinchon de
VIN
2 -in
Quémonl se chargea dos dépêches
du général Ewald, et les porta,
sans autre passeport que son au-
dace, à travers un pays agité par
celte guerre extraordinaire, ju —
qu'au quartier - général du chef
westphalien, à Delmenhor»t. La
lenteur de ce dernier donna ce-
pendant au duc de Brunswick
Oels la facilité de s'échapper avec
les débris de sa troupe, et de s'em-
barquer i\ la hâte pour l'Angle-
terre. Après avoir servi dix-sept
ans dans la marine, ftl. Vinchon
eu sortit en 1812, fut nommé l'an-
née suivante capitaine au i" régi-
ment <les gardes d'honneur, et quel-
que temps après chef d'escadron.
Lors de la rentrée du roi, en 18 i^i
il obtint la croix de Saint-Louis,
et en i8i5, l'adjudance du chcl-
teau royal de Pau, dont son ami
le comte de Gain avait été nommé
gouverneur. Mais au mois d'avril
i8a5, iM. Vinchon de Quémont,
par une démarche publique, dont
les journaux parlèrent diverse-
ment, et qui fit sensation à celle
époque, anuonpa qu'il se démet-
tait de sa place et renonçait à sa
décoration. Il fit imprimer la let-
tre qu'il adressait à cette occasion
à S. M. Louis XVIII. En accu-
sant les nnnistres et en soutenant
qu'il existait im 1^0 avertie ment oc-
culte parfaitement connu d'eux,
mais ignoré du r(>i, gouvernement
déjà dénoncé par un mygi^tral,
M. iMadier de Monjau {voy. ce
nom), JM. Vinchon ajoutait : « Que
dans le gouvernement représen-
tatif, il est du devoir do tout ci-
toyen d'éclairer le prince sur les
dangers où les ageus du pouvoir
précipitent l'état. I^es rois ne peu-
vent mal faire , mais ils peuvent
330
VIN
«voir de mauvais confeillers; a-
lors il est important, pour eux et
pour le pays, que l'abîme soit mis
à découvert, .le n'ai qu'un moyen
d'aller de mon lieu reuse obscurilé
jusqu'au trône. Il est p»''nib!e , il
est douloureux... Sire, je vous
résigne le brevet de chevali^îr de
Saint -Louis; je \ous résigne le
brevet d'adjudant du château royal
de l'au. Je vais satisfaire par ce
qui va suivre au serment exigé des
ebevaliers de Saint-Louis... Sire,
vous pouvez, juger la France, à
voir un obscur citoyen, qui, pou-
vant espérer la juste récompense
de son dévouement, mais ayant
par -dessus tout l'amour de son
devoir, se trouve dans l'obligation
de venir déposer sur les marches
du trôn», sur l'autel de la patrie,
le brevet d'une place nécessaire à
son existence, et celui d'une dé-
coration qui est le prix d'honora-
bles services. Signé Vinchon de
QuÉMOST. •) Cette courageuse dé-
marche n'eut d'autre suite que l.'>
radiation de l'auteur de la lettre
des contrôles de l'armée.
VINET ( Pierue) , membre de
la convention nationale et du con-
seil des cinq-cents^ n'est connu
que par son vole dans le procès du
roi , et par sa rétraction sous le
gouvernement royal. Député au
mois de septembre i^O'Ji, à la pre-
mière de ces- assemblées , par le
département de la Charente-In-
férieure, il se prononça dans le
procès du roi pour la mort sans
appel et sans sursis. Membre du
conseil des cinq-cents par la réélec-
tion des deux tiers convention-
nels, M. Yinet en sortit en 11798,
et ne fut pas réélu. Perdu de vue
sous le gouvernement consulaire
VIN
et sous le f;ouvernement impérint.
et n'ayant, avant ni après \c^cent
jours, en »8i5, rempli de fonc-
tions publiques ni signé l'acte ad-
ditionnel, il n'a pas élé compris
dans la loi du 12 janvier 18 lO,
rendue contre les conventionnels
dits volans. On trouve dans la bio-
graphie des hommes vivans de*
frères Michaud, la déclaration que
nous allons rapporter, et qui pa-
rut dans les journaux en 1818.
« W. Vinet, disent ces biographes,
à sa sortie du conseil des cinq-
cents, rentra dans l'obscurité et
tomba dans la dernière misère. »
Voici maintenant la déclaration :
* Je soussigné. Pierre Vinet. Agé
de ^r» ans, natif de Saint-Ciers
du Taillan , ancien député à la
convention, étant ai-tuellement ,
et depuis le '20 septembre 1816, à
l'hôpital de Blaye , oi'i je suis re-
tenu par autorisation supérieure ,
pour cause de maladie incurable ;
désirant, dans toute la sincérité
de mon cœur, nie réconcilier avec
mon Dieu, et réparer, autant
qu'il est en moi, le mal auquel j'ai
concouru pendant que je faisais
partie de celte fatale assemblée,
en y adhérant aux mesures désas-
treuses qui en sont émanées, et
particulièrement au décret qui a
condamné le vertueux Louis XVI
à mort, décret auquel je n'ai don-
né mon assentiment que par la
terreur dont j'étais saisi , et qui
avait anéanti toutes les facultés de
mon esprit et de mon cœur, ce-
pendant je déclare avec vérité
n'avoir fait ni motion ni discours
contre le roi ni la famille royale.
J'alTirme même avoir sauvé, dans
mon département, im millier d'in-
nocentes victimes dévouées à l'es-
VIN
rlnvage on à la mort. Puiïsspat les
témoignages de ma condiiile et
les torrens de larmes que je n'ai
cessé de verser pour ne niT-lre jias
opposé autant que je le devais h
un crime nus^i atroce, atténuer
ma culpabilité! C'est au pied du
trône de mon roi que je voudrais
faire amende honorable, et réf-lxi-
nier im pardon si nécessaire ^ ma
triste existence. » Non» ne révo-
quons point en doute l'authentici-
té de cette déclaration ; nous fe-
rons remarquer toutefois que M.
Viîipt a été bien lent à la faire.
Ce n'est que quatre ans aprt!S la
resauration du gouvernement
royal, lorsqu'il est à l'hôpital , et
.Igé de ^3 ans, qu'il se rcpent
d'un acte qu'il a fait dans la force
de l'âge, et qu'il en rend j)ubl1-
que la déclaration. Il semble
<|u'elle eût été plus méritoire en
1814. Malheureusement M. Vinet
n'est pas seul dans ce cas; mais
c'est à peu près le seul dont nous
ayons cité le tardif repentir dans
cet ouvrage.
VINOf ( Gilbert .Ti; M EN , ba-
ron ) , maréchal-de-camp, '•om-
mandeiir de l'ordre royal de la
It'îgion-d'honneur et chevalier de
Saint-Louis, né en 1 r^a à Sois-
sous , département de l'Aisne, est
fils d'un avocat au parlement. £11
1702, iVl. Vinot quitta le collège
J.ouis-le-Grand pour voler A la
défense de la patrie. Refusant le
grade d'olTirier qui lui était of-
fert, il partit comme volontaire
avec le i" bataillon des grena-
IJSL diers de Paris. Après une campa-
^K gne à l'armée du Nord , il entra
WL en qualité de fourrier dans le afi"
HP régiment de cavalerie, où il fut
bientôt nommé sous-lieutcoant.
VIN
23 1
Incorpore, par suite du licericie-
ment de ce corps, dans le 22" ré-
giment de chasseurs à cheval, il
y obtint successivement tous ses^
grades, jusqu'à celui de colonel à
la suite, qu'il dut à sa belle con-
duite à la bataille de Rio-Sacco,
dans laquelle , eu chargeant un
b.'itaillon carré, il fut grièvement
bles*é. IMus tard, il prit le com-
mandement du 2" <le hussards ,
avec lequel il fit preS(|ue toutes les
campagnes de l'armée d'Espagne.
Le .3 mars 181 5, il fut nommé
général debrigade, récompense de
sou zèle soutenu pour le service,
ainsi que de la bravoure qu'il a-
v ait déployée pendant 20 an née s de
combats «lans la Belgique, à l'ar-
mée des Pyrénées-Orientales, en
Italie, en l']gypte, en Allemagne,
en Pologne et en Espagne. Le ba-
ron Vinot, qui a toujours fait le
service de troupes légères , s'est
parliculiércmcnt distingué auxba-
taiiles d'Heilsberg, de Friediand ,
d'Albuéra et de la Gébi)ra, où ^
à la tèle de fy^o cavaliers du 2* de
hussards, il pénétra trois fois dans
un camp de dix mille Esj>agnols^
et les força de, changer de posi-
tion, (^e fait est c<msigné, ainsi
que sa conduite à Albuéra , <lans
les rapports du maréchal Soult
La défense de Ronda fit .-^u^si
beaucoup dhouneur au colonel
Vinot, gouverneur de celte ville
et commandant autour de celle
place, située dans les montagnes
à un rayon de plus de 20 lieues.
Avec 4 i'« 5oo hommes seulement,
il se maintint près de troismois con-
tre les efîorts d'une populace in-
surgée et contre les att,.qijes réi-
térées de plusieurs corps nom-
breux, qui tenlèrcDl de le débua*
202
\I0
qucr (le ce poslr^ iinporlant, qui
n'était point forlifié : (on peut à
ce sujet consulter l'ouvrage de
M. de Rocca sur rEspaj:!;ue, et les
ordres du jourdu uiaréchalSoiiIt).
Pendant les cent jours , en i8i5,
le baron Viuot combattit glorieu-
sement dans les rangs l'rancais
pour repousser l'invasion étran-
i;ère, et reçut une blessure à la
bataille de Mont-Sainl-Jean, après
laquelle il s'est retiré dans le ci-
devant Béarn, au sein ie sa (a-
mille.
VIOMEISIL ( LE MA-RQlilS DU
IlotJS de), uiarécbal et pair de
France, chevalier de l'ordre du
Saint-Esprit, ancien grand'croix
de l'ordre royal et militaire de
Saint -Louis, officier de l'ordre
royal delà légion-dhonneur, etc.,
s'est fait connaître dans la guerre
d'Amérique sous le iDarécbal de
llochambeau. Il y servaiten quali-
tédecolonel, etson frère enqualiié
de maréchal-de-camp. M. deViotne-
nil émigra au commencement de
la révolution, et fut chargé du com-
luandenient de l'avant-i^arde de
l'armée du prince de Condé. Dans
les premiers mois de i^gS, il leva
un régiment au service d'Angle-
terre ; mais ce régiment ayant été
presque aussitôt réformé, M. de
Viomenil retourna à l'armée du
prince de Condé, qui le chargea
du commandement d'une division
de son avant -garde pendant la
campagne de 1796. L'année pré-
cédente.il avait été nommé grand'-
croix de l'ordre de Saint-Louis. Le
corps des émigrés passa à la solde
de Russie, et bientôt il fut licen-
cié. M. de Viomenil suivit alors
le prince de Condé en Angleterre.
En 1801, avec l'autoriîation du
VIS
gouvernement anglais, il passa
en Portugal « pour, dit un de ses
biographes , y servir en cas de
guerre. Les occasions seules man-
quèrent à son (ourage. >> M. de
Viomenil revint «mi France en
18] 4» après l'occupation par les
armées étrangère*. Le roi le noin-
nia pair de France et membre de
la commission chargée de vérifier
les services des anciens officiers.
A l'approche du 20 mars 181 5, il
eut le commandement des volon-
taires rojaux qui s'organisaient à
Vincennes, il suivit Louis XVIII
à Gand. A la seconde restanra-
lion, il fut nommé commandant
de la 11' division militaire à Bor-
deaux, puis, le 10 janvier 1816,
gouverneur de la i5' division à
Rennes. Dans le mois de juillet
suivant, le bâton de maréchal de
France récompensa ses services.
M. de Viomenil est aujourd'hui
(1825) gouverneur de la iS" di-
vision militaire. Son neveu , le
baron Charles-Gabriel de Viome-
nil, a fait les campagnes de l'ar-
mée du- prince de Condé, où il a
reçu la croix de Saint-Louis , et
est devenu, en juin 18149 maré-
chal - de - camp. INommé ensuite
commandant du département de
la Drôme, il est compris (1825)
au nombre des maréchaux- de-
camp en disponibilité.
VISCONTI (Enmiis-Qlirixcs),
célèbre archéologue, né à Ron)e
le 1" novembre i^ai, annonça
presqu'en naissant une ardeur cl
une aptitude extraordinaires pour
tous les genres d'instruction. Il
connaissait les lettres de l'alpha-
bet avant de pouvoir les articu-
ler ; et à peine iigé de trois ans , il
discernait sur les médailles les tê-
iiuiiiiciir, ei nu ceieure c;(>mmt; un mus ijui un;i)ui(ij^iit>iuui ico ;•««>■■
prodie^e par les jcmrnaux lillérai- ficfS, onx hal)illeiiiens qui di.stin-
re« du temps. ATâge de dix ans, il guaient les tlij^nilés , aux pomjies
en soutint une seconde sur la géo- qui ( iivironnaient les magistrats ,
graphie, la chronologie , les lan- qui embellissaient les triomphes ,
gties anciennes, la numismatique, qui s'observaient aux funérailles ;
l'hi.itoire romaine, la géographie; à toutes ces connaissances lun-
et deux ans après, il répondit à gués et variées qui rendent si
toutes les questions qui lui furent difficile l'étude de l'antiquité. Vis-
adicpsées sur la trigonométrie , conli n'avait pas encore décidé à
l'analyse et le calcul différentiel, quelle branche de sciences il de-
Son père, homme très-savant, et vait plus particulièrement s'atta-
qui avait été son seul instilu- cher, que son génie planait déjà
teur, le soumettait à ces essais, sur tout le vaste domaine que l'es-
moins pour satisfaire son amour- prit humain peut envahir. Vers le
propre que pour montrer, comme mois de juin 17G8 , un lâche as-
il le disait lui-même , par des suc- sassiiiat enleva au monde savant
ces si précoces, la supériorité de le célèbre "SVinckelmann , qui se
l'éducation particulière sur celle rendait à Rome pour présider à la
des écoles publiques; opinion con- formation du musée du Vatican.
testable,et qui aujait besoin d'au- Le père d'Eunius fut appelé à lui
très exemples pour être adoptée, succéder, et dès-lors s'ouvrit de-
Les espérances données par le vaut son jeune élève la carrière
jeune Visconli commencèrenl à se qu'il a ensuite parcourue avec un
réaliser avant qu'il sortit de l'en- si grand éclat. La science de l'an-
fance. Il ne faisait qu'atteindre sa tiquité, que nos aïeux avaient ré-
trcizième année, lorsqu'il publia duite à un assaut d'érudition, s'é-
une traduction en vers de l7/(?- tait frayée une nouvelle route à
cube d'iiuripide , qu'il exécuta l'aide de la philosophie , qui avait
sans le secours d'aucun cornmen- répandu la lumière au milieu des
tateur. Il la flt suivre de quel- mystères les plus profonds de la
ques fragmens de Piudare , aux- religion el de la politique des an-
queU il ajouta l'exposé de la mé- ciens gouvernftmens. Ce qui jadis
thode qu'il avait imaginée pour n'était destiné qu'à servir d'appât
réussir dans sa version. Attiré vers à une curiosité oiseuse couuneii-
l'étude de la littérature ancienne, cail à être l'objet de profondes
il lut et relut les auteurs classi- méditations. Le comte de (>aylus
ques, dans le but d'y recueillir entreprit de séparer les bronzes et
lestradilions les plusauthentiques les marbres, et do les classer par
sur le» dieux , les héros, les épo- ordre de temps , de lieux ^ de su-
<jues et les événeinens les plus re- jets. Winckelir.ann , par des con-
marquîibles de l'histoire des na- jecturcs et des raj)prochemens in-
tiotis et de la vie des hommes il- génieux, avait rendu ces monu-
234 VIS
inens instructifs ; m;i!s il fallait
encore un génie élev»? qui le» eût
interrogés pour découvrir leur
âge, leursjlyie, leur ilestiuation,
et pour nous inoutrer ensuite par
quels degrés et p;ir (juelles causes
les art» étaient tour à tmir passés
des ateliers di' Phidias jusqu'aux
conceptions bizarres <ies siècles
barbares. Il n'y avait jamais eu
un temps plus favorable pour le>
travaux archéologiques. Llii mou-
veujiKit ^>éuéial entraînait les es-
'pril« Teis l: critique de l'art et de
i'antiijuité : lïcnuîanum et l'oni-
péia venaient d'être découverts.
La Cj.ande-Grèce reproduisait au
îiwe les njonumens de son an-
cicojie gloire. La Sicile, la Grèce,
i'Asie-iVlineure, l'Egypte, la Perse,
relrouvaionî par le zèle des voya-
geurs les titrt V épars de leur gran-
<ieur passée, lies langues primiti-
ves de l'Italie , de îa Phénicie se
rccotnposaiesil pur les efforts ré-
pétés des suvans; et Home mo-
derne, cette mine inéi^uisabie de
nionumens, s'enrichissait tous les
jours de quelques nouvelles con-
quêtes, tandis que les palais des
princes se transfoirmaieot en mu-
.«■écs ouverts à l'advniration publi-
que. Viscoiiti méditait dans le si-
lence du cabinet le plan d'un
ouvrage immense pour arracher
l'archéologie aux m.ï)ins de l'igno-
rance et de la pri'isomplion. (^e
que Marini avait fait pour les
chartes, Worcelli pour les inscrip-
tions, Eckhei pour les médailles,
Zoiiga poiir l'Egypte, Passeri et
Lanzi pour les Etrusques, Vis-
conli se proposait de l'exécuter
pour les antiqu ités grecques et ro-
maines, en adoptant une échelle
beaucoup plus raste et mieux cal-
VIS
culée. Clément XIV et Pie VI,
ces deux ponlife.» ()ui relevaient
l'éclat de la tiare par la noble pro-
tection qu ils accordaient aux arts,
avaient arrêté qu'on achetât aux
l'rii-. de la chambre apostolique
tous les objets d'un mérite recon-
nu , qui, répandus dans les mains
des marchands ou réfugiés dans
l«a palais des nobles ignorans ,
couraient le risque de devenir la
proie de quelques avides spécula-
teurs. Pie VI couronna cette ma-
gnanime entreprise, en ordonnant
(pje les monumens du musée du
Vatican fussent gravés et accom-
pagnés d'explications savantes.
Visconti et son père répondirent
aux désirs de S. S., et, en 1783 ,
ils publièrent le Musée Pie-Clé-
nienlin^ qui, dans l'espace de peu
d'années, fut porté à sept gros
volumes in-f<d. On sait mainte-
nant qu'ils appartiennent tous à
Ennius, quoique sur le titre du
premier on lise le nom de Jean-
BaplLsle. A la mort de ce dernier,
arrivée en i7«S4, son fils lui suc-
céda dans la place de conserva-
teur, qu'il cumula avec celle de
camérier d'honneur de Pie VI.
La description du Museo Plo-Cle-
mentiuo peut servir de modèle à
tous ceux qui seront chargés
d'une pareille tâche. On y ad-
mire presqu'à chaque page la
sagacité avec laquelle l'auteur a
expliqué les monumens par les
monumens , les statues par les
médailles , les auteurs par les ins-
criptions , et les inscriptions par
les auteurs. Profondément versé
dans les traditions de l'antiquité,
sur les actions et les fonctions de
ses nombreuses divinités, Visconti
n'est jamais embarrassé par les
VIS
différences imillipliées qu'on a-
perçoit d.ins leurs iUtribuls ou
dans leurs symboles; ii retrouve
toujours les autorités qui parais-
sent avoir .-ervi de {juide à l'ar-
tiste; il les puise dans les écri-
vains de tous les siècles, quelque-
fois même dans les scholiasles ,
dont toufelbis il n'employait le
témoignage qu'avec une réserve
connnandée par la dislance (jui
sépare leur siècle de ceux des au-
teurs originaux. Pendant qu'il é-
tait occupé de la publication du
musée pontifical , li-s nouvelles
découvi-rles venaient le di!.traire
de c<: travail général pour le jeter
dans les discussions particulières.
En 1780, on avait découvert à
Home VHypog<'e , ou lon)beaii
des Seipions. A peine l'ut-il pos-
sible de pénétrer dans ce caveau,
qui renfermait les restes de tant
de héros, que Visconti s'empressa
d'y descendre pour donner ta des-
cription de tous les objets qu'on
y avait trouvés. Il expliqua suc-
cessivement la collection de Jenc-
kins ; les monumens de Gaabiani ,
les mosaïques d'Azara, les bas-
reliefs de la villa Pinciana, et un
grand nombre d'antiquités qui
devinrent le sujet de ses savantes
méditations. Après la chute du
trône pontifical, Rome, qui n'a-
vait point oublié s<ui ancienne
existence , voulut Ctre gouvernée
par des consuls, des sénateurs et
des tribims. Visconti, qui s'était
concilié la considération publi-
que , fut appelé A la première ma
gistralure de la nouvelle républi-
que; mais un honunage tout aussi
flatteur, et beaucoup plus durable
pour lui, fut celui d'être attaché
à notre musée national ^ que la va-
VIS 255
leur de nos soldats avait orné des
plus spleudides trophées de la vic-
toire. Nommé conservateur du
musée central des arts , Visconti
y revit avec joie la plupart de ses
anciennes connaissances. "V Apol-
lon et les Muses, le Torse et VÀn-
tinoiis j le Gladiateur et le Lao-
coon, la Cléopâtre vt le Tibre. Ces
précieuses conquêtes , entassées
dans les galeries du Louvre, at-
tendaient une place convenable
pour se montrer aux regards éton-
nés de la France. Visconti les clas-
sa d'après son système, et rédi-
gea les !iolices, qui donnaient.
j)Our ainsi dire, le si^nalci!;; ni <\^
ces hôtes, que chaque Frau^jais
était empressé de connaître. Dé-
gagé de ces soins et admis au sein
d(! deux classes de l'institut , ce
savant Italien voulut témoigner
sa reconnaissance au pays (jui l'a-
vait adopté avec tant de distinc-
tion. Ce fut alors qu'il publia
l'explication des va^es peints du
musée français, une notice sur la
statue en basalte qu'on voyait à
Saint -Cloud, la description «lu
ha-i-reli<;f en marbre de Numidie,
représentant la troisième et la der-
nière bataille donnée à Arbelles
contre Darius, et de pltisieurs au-
tres morceaux qui faisaient partie
de nos collections, etc. Mais le li-
tre qui établit le plus sa réputation
littéraire, et (|ui rendia le non) de
Visconti immoriel, c'est son grand
ouvrage sur V Iconographie grec-
que et romaine , c'esl-ù dire le re-
(;ueil des portraits authentiques
des personnages les plus célèbres
de l'antiquité. Le choix d«'s nom-
breux mouuinen« dont il a tiré
les type» de ses ima:;es, et la con-
fiance que ses lalcns avaient ins-
25(> VIS VIS
pirc^e, ont <lonné à cet ourrage inen ininulieux de retle superbe
un degré (raiitonlé que j>t:rsnn- colloction , il jngcii qu'elle ne va-
ne ne lui conteste. L'iconof^ru- lail pus n)oin^ de trente-t'inq mille
J)liie grccqiieconlieni pl(l^ de (mis j^ninics (875.000 l"r.), qui lurent
cenls pi)rtruils, et la ron)aine , a!is>ilôt remises fin propriétaire
dont Visconli n'a publié que la sais* la moindre réclamation. De
première, partie <;n offrira presque retour à l'ari^ , Vi^conti rendit
autant lorsque M. JMongcz l'aura compte de son voyai,'»' , et r<in)-
coniplélé<-,(l'a[)rcs le plan de l'an- ninnicpia à l'inslitul ^es idée; sur
teur. Cette magnifit|ue entreprise, les objets qii'il venait d'apprécier,
exécutée aux frais dii trésor, était Ce tut son dernier travail , et di-
protégée par l'iionune exlraordi- gne de ceux (|ui l'avaient précé-
naire qui accueillait toutes les dé. Atteint d'une maladie dou-
grandes pensées capabb.'S ds don- loureuse, qui flt en peu de temps
ner une haute idée de sa puis- des progrés effrayans, il mou-
sauce. Il s'était même réservé rut le 7 lévrier iS 18 . laissant un
toute l'édition; et un jour f|ue vide que personne, jusqu'à pré-
Visconti lui offrait le. premier sent, ne paraît a\oir rempli,
exemplaire de son ouvrage, il lui VISCONTI ( Ferdinand) , ex-
dit ; « Donnez-moi la liste des directeur dn dépôt de la guerre de
«personnes auxquelles il vous Naples , né v.n 1772 à Palernie,
«plaira do l'enrojer; je rnc char- recul un grade dans l'armée avant
wgerai volonlieis de vos commis . d'être en âge de commencer ses
»sions. n Telle était l'opinion qui études. Il fut placé au collège ini-
s'était formée en Europe sur le litaire, où il n'aurait rien appris,
mérite de Visconti , que le parle- si son génie n'eût suppléé à la
jnent d'Angleterre lui déféra l'un médiocrité de ses maîtres. Atta-
des plus mémorables arbitrages ché an serviced'un régiment d'ar-
dont l'histoire des arts puisse con- lillerie, il s'exerçait dans les éco-
server le souvenir. Il s'agissait les d'application , que le général
d'examiner et d'apprécier la su- Pommereuil venait de fonder à
perbe collection des marbres grecs l'instar de celles de Melz, lors-
enîevés par lord Elgin aux tem- qu'un mandat d'arrêt lancé cou-
ples de Thésée et de Minerve, et tre lui par la junte d'état, quifrap-
dont le gouvernement anglais é- pait aveuglement l'innoceut et le
tait disposé à faire l'acquisition, coupable , interrompit sa carrière
La chambre des communes, qui pour le jeter dans les cachots de
devait accorder les fonds, fut ar- l'île de Pantelleria. Arraché à la
rctéc par la divergertce des opi- société, hors de communication
nions manifestées par les savans avec sa famille, et ignorant tou-
et les artistes nationaux sur lu va- jours la cause de sa disgrâce, il
leur de ces vénérables débris. Fa- resta sur ce rocher jusqu'à 1 1 paix
ligué de ces retards, le parlement de Florence (1801), dans laquelle
prit le parti de s'en rapporter à le vainqueur stipula en faveurdes
"Visconti. qui futalors engagé de se victimes. 11 se rendit alors à INa-
rendre à Londres. Après un fxa- pies dans l'espoir d'y recouvrer sa
VIS
]>Iace ; mais le gouvernement, qui
avait juré de pardonner, ne ces-
sait pas de le poursuivre, el pour
se soustraire ;i ces vexations , M.
Visconti alla s'établira Milan, que
ses ancêtres avaient autrefois gou-
verné, el où il s'estima très-heu-
reux d'être reçu en qualité de lieu-
tenant dans lecorpsdes ingénieurs
géographes. Il était parvenu au
grade de sous-directeur du bureau
topographique , lorsque Joseph
Bonaparte, monté sur le trône de
Naples ( i8o5), demanda le rap-
pel des militaires napolitains en-
gagés au service étranger. Le gou-
vernement italien, qui sentait la
diflicuité de remplacer M. Vis-
conti, fit des démarches auprès de
l'empereur Napoléon pour con-
fierver un officier aussi distingué.
Il l'avait déjà chargé de La levée
d'une grande carte administrative
et utilitaire de la Lombardie, et
il lui avait fourni les moyens né-
cessaires pour la construction de
la carte de la n)er Adriatique. M.
Visconti, ne pouvant tirer aucun
parti des matériaux qui lui furent
remis à Vienne sur la topographie
des états vénitiens , réunis au
royaume d'Italie par le traité de
l'resboiirg , se transporta sur les
lieux pour déterminer la lati-
tude et la longitude d'un grand
nombre de positions qui n'avaient
jamais été reconnues, el il em-
brassa dans ses observations les
côtes de l'Islrie , de Quarncro, de
la Datmalie et de l'Alb.inie, de-
puis Trieste jusqu'à liudiia. Ses
opérafiuns se croisèrent souvent
avec celles de M. Beautcmps-
lieaupré, que le gouverneujent
français avait envoyé dans les
mêmes parages pour reconnaître
VIS
237
les ports militaires de la Dalmalie
et de rislrie. En 1810, M. Vis-
conti accompagna le général Dan-
thouard dans le Tyro! , pour fixer
les limites entre la Bavière et le
royaunje d'Italie. Il fut employé,
l'année suivante, à la démarca-
tion des provinces illyiiennes du
cOîé deïarvis et de iMalborghetto,
et il continua ensuite la reconnais-
sance n)ilitaire de leur frontière
du côté de l'Autriche, en suivant
la direction des Alpes et de la
Save , depuis Villach jusqu'à la
jonction de celte rivière avec
l'Unna. Ces services lui avaienj
déjà mérité les grades de chef
d'escadron des ingénieurs - géo-
graphes , et de directeur en se-
cond du'bureau topograplùque do
Milan, lorsque les événemens qui,
en 1814, renversèrent le royaume
d'Italie, semblèrent avoir conso-
lidé l'existence politique du roi Mu-
rat. Cédant aux invitations de ce
prince , et pressé par les vœux de
ses amis, M. Visconti se rendit à
Naples, où, en arrivant, il fut
a<lmis avec le même rang dans
l'étaf-major de l'armée, et placé à
la tête du bureau topographique
en remplacement de lUxzi-Zanno-
ni, (pii venait de mourir. Cet éta-
blissement n'était, à cette époque,
qu'un atelier de cartes fabriquées
sans principes scientiliques , et
par simple spéculation de coiii-
merce. M. Visconti le monta sur
le même pied que les dépôts de
la guerre de Paris et de Milan ; il
le pourvut d'un grand nombre
d'inslrumens , rédigea des ins-
tructions pour les opérations géo-
désiqiies ou astronomiques , et
substitua aux anciennes méthode»
de dessiner el de graver les car-
'j38 vis vis
tes, celle des iiicillciir.^ gt'ogva- t<v« ses places, il esl condamné à
phes modernes. Ferdinand IV, à vivre dan> l'oisiveté dans un pays
son retour de Sicile , confirma le qu'il pourrait illustrer par ses
bureau topographiqiie de Naples, talens. Ses onvrajjes sont : i°
approuva les anciens tta\aux , et la jurande (>arle administrative
ordonna une i^rande triangulatK>n et militaire du royaume d'Italicî,
pour la levée de la carte générale en sept ieiiilles , publiée à Milan
du royaume. Tout paraissait de- i8ii-i8i5, et remarquable par
voir seconder les vmis de M. Vis- la richesse et la précision des dé-
conti , dont le gouvernement se tails , ainsi que par la beauté de
plut à honorer le mérite. Il l'avait l'exécution ; u" la Carte hydrogra-
porté en peu de temps au rang de phique de la mer Adriatique, com-
colonel d'état-major, de membre posée d'une Carte générale d'as-
du conseil des ponts-el-chaussées, sembiage, en deux grandes t'euil-
et de celui des contributions di- les, et des Caries particulières,
çectes , pour la formation du ca- en A'ingt feuilles, avec un portulan,
dastre. Le choix que le prince hé- et une collection de vues des ports
réditaire fit de lui , en 1820, pour principaux. Ce grand travail, pour
siéger dans la junte provisoire du lequel tous les matériaux avaient
frouvernement conslilulicmnel, et été préparés, etdontil n'avaitparu
la nomination de député de la pro- que la moilié avant )8i4» a été
vinee de Naples, turent de non- achève d'après le.'- dessins de M.
veaux hommages rendus à >;es ta- Visconli ; et ce seul ouvrage suf-
lens et à sa probité. M. Visconti firait pour le placer au nombre
répondit à ce double appel du mo- des pi'en)iers géographes vivans.
narque et de la nation, en s'ac- Pendant qu'il a dirigé le dépôt de
quittant avec zèle, mais sans os- la guerre à iSaples, il avait entre-
lentati<m , des devoirs qui lui a- pris, 1° une grande triangulation
vaient été imposés. Il ne parut qui de vail joindre l'observatoirede
jamais à la tribune ; mais attaché cette capitale avec les observatoi-
au comité de la guerre, il discuta res de l'alerme et des autres villes
tons les projets relatifs à l'organi- d'Italie, servirde baseà la nouvelle
sation de l'armée et à la défense cartedu royaume, à la mesure d'un
du royaume. A la rentrée des Au- arc du méridien entre l'île de Pia-
trichiens et du roi, il reprit les nosa et la pointe méridionalede la
fonctions de direcieur du bureau Calabre,et à celle d'un autre arcde
topographique, et fut même con- parallèle entre cette extrémité sud
suite pour la réforme des études et l'île de iMarettimo ; 2° une
de l'académie royale de marine, grande Carte hydrographique du
La modération de ses principes, littoral du royaume, avec le plan
la régularité desa conduite et î'im- de chaque port; 5° nue Carte to-
porlauce de sesservices, ne purent pographique des environs de Na-
cepenJant sauver iM. Visconti des pies, en neuf grandes feuilles,
«ombreuses épurations qui eurent en}brassant le pays compris entre
Heu dans l'administration et à Patria , Noia , Cava , Amalfi et la
l'armée en 1822. Destitué de ton- mer, avec les îles d'Ischia, de
VIT
Procida et de Capri. De tous ces
ouvragiis, qu'on aurait pu voir
tonninés dans l'espace de «ept
anj, il ne reste qu'une partie des
triangle:?, l'hydrographie des cô-
tes baignées par la mer Adriati-
que, et la carte des environs de
Naples, dont il a été publié les
deux premières feuilles, conte-
nant les îles. C'est uu chef-d'œu-
vre de précision et d'élégance.
Tout a été suspendu par la desti-
tution de M. Visconli,et personne
que lui n'est en état de les conti-
nuer. Ou a arrêté également la
levée de la grande carie du royau-
me , que iM. Visconti n'espérait
pas achever , attendu l'exiguité
des moyens mis à sa disposition
pour une si vaste entreprise.
VITROLLES ( LE BARON Ec-
gène-Frawçois-Auguste d'Arnaud
de) , ministre-d'éiat , chevalier de
Saint-Louis et de Siiiiit-Je.ni de
Jérusalem, issu d'une famille |>ar-
iemenlaire de la ci-devani l'ro-
vence, est né au château (ht Vi-
trollejç eu 1774- Très-jeime en-
core lorsqtJC la révolution éclata ,
il suivit le mouvement de l'émi-
gration , et ne rentra en France
qu'après les évènemens du 18
brumaire an 8 ( ijyo) : il avait
alors 2;') ans. Plein d'aclivilé et
«l'ambition, il essaya de s'ouvrir
la carrière des affaires publiques
sous le gouvertienient consul. lire,
mais il n'y put réussir. Il n'occu-
pa, sous le gouvernement impé-
rial , qiu- de modestes fonctions
muiiicipdLS, et n'obtint di l'em-
pereur que le litre de baroti de
l'empire. A la suite de lu désas-
treuse campagne de iVloscoii
(1812), .M. de Vitrolles se voua,
tlu moins plus particulièrement,
VIT aôg
ù la cause des Bourbons, et lors-
que, en 1814 . le congrès de Châ-
tillon-sur-Seine négociait encore
avec l'empereur Napoléon, il s'y
rendit sans caractère avoué, sans
aucune espèce de mission , con-
duit seulement par la fortune, et
s'efforça d'être utile à la cause
royale en lui servant d'intermé-
diaire près des diplomates étran-
gers. Monsieur , comte d'Artois
( aujourd'hui Charles X ) , était à
Nanci. M. de Vitrolles fui envoyé
vers ce prince pour lui faire con-
naître la rupture des négociations.
Kevêtu de la confiance de S. A.
R. et muni des pouvoirs les plus
étendus, il se rendait, sous un
déguisement, au quartier-général
des souverains alliés, lorsqu'il fut
arrêté par les troupes françaises
pendant que l'empereur se portait
sur Sairit-Dizier. i\l. de Vitrolles,
caché, comme nous venons de le
dire, sous un costume étranger,
qui pouvait le fair<; pendre com-
me espion, était, avec nn grand
nuiubre d'autres prisonniers, ra-
mené à Paris , lorsqu'il parvint
d'abord à détruire les documens
qui l'auraient compromis, et en-
suite à s'évader. Les troujies étran-
gères maîtresses de la capitale,
M. de Vitrolles y arriva. S. A.
R. M onsieurV us ixil nommé secré-
taire-d'élat provisoir*.'. Ces fonc-
tions, que le roi confirma, cesȏ-
r(;nt au mois de mars i8i5, épo-
que où , par suite de la marche de
Napoléon sur Paris, il fut envoyé
dans le Midi, pour y organiser une
insurrecli«in générale. Pendant ce
temps, la famille royale »<; relirait
en Belgique. Les efforts de M. de
Vitrolles furent à peu près impuis-
sanij. Il ne put opérer que dca
2 jO
VOL
uiouvcinens partiels. Le 14 avril
181 5, il fut arrêté à Toulouse;
mais il fut rcrïiis eu liberté par
ordre du duc d'Otranle ( voyez
FoscnÉ ) , ministre de la justice,
le jour même où Napoléou alxli-
quail pour la seconde fois. M. de
Vitrolles, de retour à Paris, re-
j)rit sa jdace parmi les iiiiuistres-
d'étal ot celle de secrétaire des
conseils du roi. Le département
des Basses-Alpes le nomma mem-
bre de la fameuse chambre de
i8io, dite introuvable; il y vota
avec la majorité. Ses opinions y
furent cependant assez modérées,
et ses honorables collègues du cô-
té droit virent avec étonnement
dans la brochure qu'il publia à
cette époque, sous le titre da Mi-
nistère dans un gom^ernement re-
présentatif, des doctrines assez
sages et des idées généralement
justes et niodérées. Il paraît que
cette espèce de changement ne
fut pas perdu de vue un peu plus
tard. La place de secrétaire drs
conseils cessa la même année
(i8i5) de donner entrée au con-
seil des ministres. Elle fut sup-
primée définitivement au mois
d'août 1817, et une ordonnance
du 24 juillet 1818, raya, sans
considérans, M. de Vitrolles du
nombre des ministres - d'état.
« Quoique cette ordonnance n'é-
nonçât aucun motif, disent les au-
teurs d'une biographie étrangère ,
on sut fort bien alors que des intri-
gues secrètes qui se rattachaient
à l'existence de ce gouvernement
occulte^ qui a commencé avec la
1" restauration, avaient donné
lieu à cette rigueur. « Il est ren-
tré au conseil privé en 1824.
VOLNEY (Constanxis-Frax-
VOL
çois Chasseboetjf, comte de), an-
cien membre du sénat, pair de
France, conjmandant de la lé-
gion-d'honneur, etc. , naquit en
1755 à Craon , en Bretagne. Il
montra dès l'enfance le plus ar-
derjl désir de s'instruire, et fit
d'excellentes études. Un attrait
invincible le portait vers les voya-
ges de long (;ours et les recher-
ches scientifiques dans des con-
trées peu connues. Dès qu'il de-
vint maître de son modeste patri-
moine, il se hâla de le convertir
en argent, et s'embarqua pour le
Levant; il avait résolu de parcou-
rir en tout sens l'Egypte et les
parties de la Syrie les moins ex-
plorées avant lui par les savans.
N'ayant encore qu'une connais-
sance insulTisante des langues de
l'Orient, il alla d'abord s'enfer-
mer pendant près d'une année
dans un co\iventde maronites, au
milieu des montagnes du Liban,
où il liouva des ressources qu'il
lui eût été impossible de se pro-
curer en Europe. Volney y fit par-
ticulièrement une étude appro-
fondie de l'arabe, qu'il parvint à
parler avec facilité. Après une ab-
sence de plus de deux années, il
revint en France, et y publia son
premier ouvrage, sous le titre de
Foyage en Syrie et en Egypte, qyi
eut le plus grand succès, et q>;i
fut bientôt traduit en allemand,
en anglais et eu hollandais. Par
une niéthode difterente de celle
de la plupart des voyageurs, Vol-
ney ne se met jamais en scène lui-
même , et se borna à donner la
description la plus exacte, de tout
ce qui est vraiment digne d'inté-
rêt dans les pays qu'il a visités.
Ses tableaux de mœurs a'en sont
-dk
J. r'Uo/ju-
'/
VOL
pas moins animés . et les détails
historiques qu'il loiiruit 9ur les
petif)l»;s divers vl If s chefs de ces
contrées, détails pre^q le incon-
nus ju-iqu'.'dors , donnèrent un
noijvcud prix h cet nnvrufre qui se
distinguait d'ailltiirs p.'»r l.t clarté,
la précision et l'clégance dn style.
Recherché dans la nieillenrc so-
ciété de l'aris, et accueilli comme
il le méritait par l«'S savans, Vol-
ncy se plaidait surt\»ut dans les
réunions qui avaient lien chez la
respectable veuve d'Helvétius. Sa
niai»on d'Autenil était le remiez-
vous d'hommes dislingaé-* et de
tout ce qui survivait encore de ces
philosophes du dix-hniiième siè-
cle, qui avaient contribué à don-
ner un si puissant e.-sor à la raison
liumaiiie. Volney s'y lia d'une a-
inilié intime, et que la mort seule
put interrompre, avec le savant
Cabanis, alors jeune comme lui.
Tous deux se rendaient souvent
ensemble d'AiHeuil a l'assy, clnz
un d« s fondateurs de la lii>eilé
américaine, Tillustre trankliii,
qui les avait vus chez M"* Ilelvé-
tius, et ils trouvèrciit dans l'en-
tretien de ce sa^e, dej^^iaves sujets
de méditation sur les révolutions
des empires. Les piodij^alilés et
les désordres de la lin du règne
de Louis W avaient depuis long-
temps fait prévoir aux esprits
éclairés, qu'une révolution en
France était inévitable. Lorsque
Louis XVI, cédant au vœu des
parlemen>el de l'immense majo-
rité «le» Français, CfMivoqua le? é-
tats généraux en 17H9. les villes et
les |iro\ in es s'empressèrent d'en-
voyer au centre ro mmn 11, ce qu'el-
les avaiefil d'hommes les plus re-
cuuimatKiables par leurs lalens et
VOL
9.4 ï
leur patriotisme. Voîney. qui fut é-
lu député du tiers-élat de la séné-
chaussée d'Anjou, se montra cons-
tamment fidèle aux vœux de ses
C(»iniiiettans , et embrassa avec
chaleur la cause d'une sage li-
berté. Il parut souvent et toujours
avec succès à la tribune nationale.
En septembre 1791, il lit hom-
mage à l'assemblée constituante
d'un ouvrage (pj'il venait de pu-
blier sous ce litre : fes Haines, ou
Méditations sur les résolutions flen
empires^ qui a eu depuis un grand
nombre d'édilionn, et dont Tidée
première avait été conçue dans le
cabinet de Franklin. Lorsqu'un
apprit à Paris que l'impératrice
de Russie, Catherine II, avait ac-
cédé à la coalition contre la
France, Volney écrivit , le 4 dé-
cembre 1791, une lettre à Grimm,
clungé d'affaires de l'impératrice,
en lui renvoyant la méd.iilb; d'or
que cette princesse lui av;iit fait
remettre en témoignage «le sa .sa-
ti-faclion de l'envoi d'un exem-
plaire du Voyage en Syrie et en
E^^yple. 0 File m'accorda cette
«iiiediiile, disait Volney, comme
(.un gage de son estime , c'est
«pour conserver cette estime qsie
ojela lui renvoie. » A la fin d'une
des séances les plus orageuses de
l'asseuildée constituante, Volnev
fil la motion de convoquer les as'-
sembiées primaires électorales ,
alin <pi'elles eu-sent à procéder à
une nouvelle nomination de dé-
putes. Il m«)tiva cette propositiofi
sur ce que les membre^ d'une au-
tre assemblée n'ayant point pris
part aux premières et plus vives
discussions, seraient inruns atu-
més les uns contre les autres, et
qu'il leur serait ainsi plus facile
16
2'ia
VOL
de calmer les tempêtes qui mena-
çaient la palrif , et de rtimener Its
citoyens à dos senliincns d'union
et de paix. Celte proposition, d'a-
bord accueillie avec faveur, l'ut
cependant écartée par l'ordre du
jour. Les orateurs qui la combat-
tirent, rappelèrent aux députés
qu'ils s'étaient engaj^és par la ser-
ment prêté dans le jeu de pau-
me à Versailles, à ne se point
séparer avant d'avoir donné une
constitution à la Franct-. Après la
clôture des sessions, Volney ac-
compagna M. Pozzo di Borgo en
Corse, avec l'intention d'y exécu-
ter quelques grands projets d'a-
mélioration agricole. Ses essais
pour cultiver dans cette île la can-
ne à sucre , l'indigo et plusieurs
plantes utiles des tropiques, eu-
rent du succès; mais les troubles
qui survinrent à cette époque le
forcèrent d'abandonner des éla-
blissemens qui auraient contri-
bué à la prospérité du pays. Bo-
naparte , encore simple oflicier
d'artillerie , apprit à connaître
\olney en Corse , et prit pour lui
une haute estime , qui s'accrut
encore lorsque ce général, pen-
dant son expédition d'Egypte, eut
reconnu par lui-même combien
l'auteur du voyage en ce pays, a-
vait été fidèle historien et habile
observateur ilevenu à Paris, Vol-
ney, dont le pati iolisme était bien
connu, mais dont l.i haine pour
les excès commis par de soi-di-
sant patriotes, n'était pas nroins
prononcée, ne put échapper aux
persécutions des terroristes. In-
carcéré pendant dix mois , il ne
recouvra sa liberté qu'après le 9
thermidor. En novembre 1794, »I
(ïit nommé prûie-^seui- d'histoire
VOL
aux écoles normales, où sescourSj
conçus sur un plan vaste et philo-
sophique, obtinrent un succès gé'-
néral. En i^Q^^, il entreprit de
nouveaux vnyages , et visita le»
Etals-Unis d'Amérique. L'ami de
Franklin y reçut l'accueil le plus
flatteur. "NVa.-bington , le fonda-
teur de h\ liberté du Nouveau-
Monde, la {gloire de sa patrie et
de son siècle, invita le voyageur
français à venir le voir dans la re-
traite, où le héros américain cul-
tivait paisiblement ses champs .
après avf)ir long - trmps présidé
aux conseils de cette république
qu'il avait fondé»; et défendue.
Volney se serait probablement é-
tabli aux Etats -Lois; mais des
nuages s'étant élevés entre ce gou-
vernement et celui de sa patrie,
lacrainted'une ruptureouverle, le
décidaàrepasser en France au prin-
temps de 1798. Après la révolution
du 18 brumaire, le premier con-
sul Bonaparte le nomma sénateur,
et l'avait même désigné, dit-on,
pour occuper le second consulat.
Mais une dissidence d'opinions
assez prononcée sur certains prin-
cipes de goiivernement , empêcha
cette nomination d'avoir lieu. Dans
le sénat . Volney fit constamment
partie avec les Lunjuinais, Caba-
nis, Destutt de Tracy, Collaud,
Garât, et quelques autres, de cette
estimable, mais faible minorité,
qui osa, quoique vainement, s'op-
poser à ceT[i\'ms séiiatu.i-consuUes,
que le grand nombre de leurs col-
lègues décrétait de confiance. A-
près la rentrée du roi , Volney fut
nommé, par ordonnance du 4 i"in
i8i4> membre de la chambre des
pairs, y siégea jusqu'à sa mort,
et fidèle a-jx :r.êmes principes, s'y
VOL
montra toujours au rang des dé-
fenseurs des droits nationaux. Une
courte nrialadie l'enleva à son pays,
qu'il aurait encore pu long-tenaps
servir, et à ses nonjbreux amis,
à qui sa mémoire sera toujour*
chrre. II mourut à Paris îe 24
avril 1820. On o de lui les ouvra-
ges su i vans : 1° Voyage en Syrie
et en Egypte, fait en ijSS, Paris,
1785, 2 vol. in-S", et quatrième
édition, 1807; 2* Considérations
sur la guerre actuelle des Turcs ,
1788, in-8". L'auteur y combat
plusieurs opinions du baron de
Tott et de Peyssonel. Il a inséré
ces considérations dans la troi-
sième édiiion du voyage en Syrie
m 1800. 3" Les Ruines ou Médi-
tations sur tes résolutions des em-
pires , »7î)i< in-S", et troi-iéme
édition , augmentée de l'ouvrage
suivant : 4° '« I-'Oi naturelle ou
Catéchisme du citoyen français ,
1790, in-i(j ; 5" Simplification des
langues orientales ou Méthode nou-
t^elle et facile d'apprendre les lan-
gues nrnhe, persane et turque, avec
les caractères européens , «795,
in-8" ; 6" Leçons d' histoire pro-
noncées à l'école normale, •79f),
in-8"; 1810, iu-8"; 7" Tableau du
r limai et du soi de l' Amérique ,
i8o5, 2 vol. in-8", ;ivoc planches,
terminé par un Vocabulaire de la
langue des Miamis; 8" l\ apport
fait à r académie celtique sur l'ou-
vrage russe de M. le professeur
Pallas : Vocabulaires comparés
d«s langues de tonte la terre ,
i8o5, in-4°, et dans les Mémoires
de l* académie celtique , cahiers i
et 5, et dans le Moniteur i\v^ 1 et
2 brumaire an \(\. L'auteur y fait
voir que \eV ocahiilariatolius orhis,
coutposé par ordre de l'iiripéra-
VOL
•i^Ti
triée Catherine II, ne petit servir
de Vocabulaire universel, l'alpha-
bet russî! étant trop incomplet
pour cet usage; et quoique M.
iMasson , dans le recueil de l'aca-
démie celtique, ait prouvé que
plusieurs des fautes de ce Voca-
bulariapenvcut être attribuées au
professeur Pallas lui-même, qui
n'avait pa< une connaissance par-
faite de la langue russe , Volney
n'en a pas moins démontré qu'un
alphabet universel est encore îi
trouver. Il a engagé l'académie
celtique à s'occuper de cette re-
cherche , et y a beaucoup tra-
vaillé lui-même. Déjà, lors de la
publication de sa méthode nou-
velle pour apprendre l'arabe, le
persan et le turc,Tolnpy avait
proposé pour reujplacer l'alpha-
bet arabe , dont on se sert aussi
pour le persan et le turc , tm nou-
vel alphabet, formé de lettres la-
tines, de quatre lettres grecques,
et de douze nouveaux caractères.
Il y trouvait l'avantage d'expri-
mer chaque son, ou articulation
simple, par un caractère unique,
tandis qu'il faut souvent deux ou
trois caractères de l'alphabet usi-
té pour représenter une seule
lettre arabe, q" Supplément â
l'Hérodote de Lorclicr, ou Chro-
nologie d'Hérodote, conforme à son
texte, Paris, 1808, 2 vol. in-H* ;
10° Questions de statistique d l'u-
sage des voyageurs, i8io, in -8°;
1 1" Recherches nouvelles sur l'his-
toire ancienne, i8i4- i8i5, 5 vol.
in - 8". Vcdney était membre de
l'institut national depuis In fonda-
tion, de la société asiatique de Cal-
cutta et «le-i principales académies
de l'Europe. • '
VOLPATO (Jea>), célèbre gra-
v..j', VOL
veur ilalicn, né à Bassano ea
1^33, passa ses premières années
à tracer des dessins pour les bro-
deurs, et à les broder lui-même.
Il s'appliqua ensuite à la gravure,
dans laquelle il reçut quelques le-
çons de Bartolozzi, qui travaillait
alors pour les établissemens <;al-
cographiques de Remondini. Peu
après le départ de cet artiste pour
l'Angleterre, Volpato alla se fixer
à Rome , o|i une société d'ama-
teurs avait conçu le projet de l'ai-
re graver avec magnificence les
peintures de Raphaël , qui déco-
rent le palais du Vatican. Appelé
à prendre part à cette vaste entre-
prise, il se fil remarquer parmi
tous ses collègues. O fut après la
publication de l'école d'Athènes,
que M. Raphaël Morghen vint le
prier de le recevoir au nombre
de ses élèves. Volpato prit un soin
particulier de son instruction, et
loin d'être jaloux de ses progrès,
il employa tout son crédit pour é-
tendre sa renommée. Lorsqu'il
sentit ne pouvoir plus lui être uti-
le par ses conseils, il désira se l'at-
tacher par ses bienfaits, et il lui
accorda la main de sa fille. Ce
n'est pas le seid artiste qu'il ait
formé : Rome lui doit la plupart
des talons qui sont sortis de son
école moderne d'incision. Volpa-
to connaissait tous les secrets de
cet art; son burin était plutôt ten-
dre que hardi , mais il traduisait
avec esprit les beautés des com~
positions originales. Ce célèbre
i«raveu;: mourut à Rome en i8o3,
regretté par tous ceux qui avaient
eu occasion d'apprécier ses ver-
tus et SCS talens. Son portrait ,
peint par Kauflnian, fut gravé par
Morghen; et Canova voulut aussi
VON
en consacrer la mémoire par mii
monument qu'il lui éleva dans
l'église des Saints-Apôtres, à Ro-
me.
VONCR(N.), avocat, chef du
parti patriotique, lorsque les Bra-
bançons s'opposèrent aux innova-
tions de Joseph II , parti auquel
on donna le nom de F onckisies ,
était un homme distingué par son
instruction, ses talens, et surtout
son esprit actif et entreprenant.
L'un des premiers écrivains qui
embrassèrent la cause nationale,
lorsque l'empereur Joseph II
{voy. ce nom) voulut apporter des
changemens notables dans le gou-
vernement des Pays-Bas, il fut
bientôt signalé aux agens de l'au-
torité, et pour se soustraire A leur»
]>otirsnites, il se retira en Hollan-
de au commencement de if 88; là.
de concert avec Vander Noot
{voy. NooT, Vander Mersch et
Van L'upen), il travailla à dispo-
ser les puissances qui protégeaient
la constitution brabançonne à ap-
puyer les efforts des patriotes dans
la révolution qui s'organisait eu
silence. li devint membre , puis
président du comité secret de Bré- ^
da, et forma à Hasselt une autr«i
association également secrète, la-
quelle, au moyen de contributions
volontaires, arma les premiers
soldats du Brabant, qui, sous Van-
der Mersch, chassèrent les trou-
pes autrichiennes. Alors Vonck
rentra dans son pays; mais la ri-
valité qui s'établit entre lui et
Vander ÎNoot devint funeste à la
cause commune. Les chefs de l'in-
surrection, au lieu de chercher ;i
détruire cette rivalité, se partagè-
rent entre Vonck et Noot. Vander
Mersch et le ducd'Ursel s'attache.
vou
renl plus intimement au premier,
qui pendant quelque temps con-
;*erva la plus grande influence
dans les affaires des insurgés. Le
second, secondé de Van Eupen et
de Schoenfeld, parvint bientôt à
enlever à Vonck ?on crédit, en
s'eflbrçant de persuader aux états
des diflérentes provinces que ce
chef voulait rendre la révolution
démocratique. C'est en effet le but
que Vonck s'était proposé du mo-
ment où il avait remarqué que ses
ennemis disposaient à leur gré
des troupes et de, l'argent des
étals. La chute de Vonck entraî-
na rapidement celle du parti pa-
triotique. Il mourut en 1 792, à Lil-
le, département du Nojd, où il s'é-
tait retiré.
VOULLAND (HoRi) , avocat,
ex-magistrat et membre de plu-
sieurs législatures, naquit j\ (j/.ès
en i^So. Il professait la religion
réformée, et suivait, en qualité
d'avocat, le barreau de Nîmes,
lorsque la révolution éclata. Le
tiers-état de la sénéchaussée de
Nîmes et de Beaucaire le nomma
député aux état" - généraux en
178g. Ami de Rabaut Saint-
Etienne et de sa famille, il mani*
festa les mêmes principes , mais
avec plus d'exagération. Rabaut
Saint-Etienne le fit nommer mem-
bre du comité des recherches. Il
lit un grand nombre de rapports,
et signala Tessier, ci-devant ba-
ron de Margueritle, comme au-
teur des troubles de Nîmes ; prit
la défense du club de cette ville;
dénonça la ville de Carpentras, où
les nobles et les prȔtres, soutenus
par la cour de Kome, font de Car-
pentras un foyer de contre-révo-
lution, et provoqua 1.» réunion du
VOU
24»
eomtat d'Avignon à la France. La
session de l'assemblée constituan-
te terminée, il passa, au mois de
mars 1791, au tribunal de cassa-
tion, et fut nommé, en septembre
1 7914, par le déparlement du Gard,
député à la convention nationale,
où il vota la mort du roi. Succes-
sivement secrétaire et président
de cette asseuiblée, membre du
comité de sûreté - générale , et
enfin président de la* société des
jacobins , il continua, jusqu'aux
approches du 9 thermidor an 2 , i\
se montrer tout dévoué au parti
de la Montagne ; cependant éclai-
ré sur la tyrannie de Robespierre,
ou craignant de devenir lui-même
sa victime , il fui un des premiers
à concourir à sa chute. Lecoinlre
de Versailles ne l'en dénonça pas
moins, le a8 août 1794» comme
un des complices du tyran. Au-
cun excès notoire n'étant im-
puté à Voulland, il se justifia,
fut acquitté , et parvint à obtenir,
soit la même faveur, soit la même
justice, pour son oncle le général
Voulland {voy. l'article qui suit).
Dénoncé de nouveau avec ses an-
ciens-collègues du comité de sO-
relé-générale, il fut décrété d'ar-
restation le 9 prairial an 3 ( 28
mai 1795), et rendu à la liberté
par suite d'amnistie. ftJaret , li-
braire, recueillit Voulland che»
lui , et lui prodigua pendant deux
ans toutes sortes de secours. 11
mourut, en 1802, dans un état
Yoisin de l'indigence.
VOULLAND (N.). général sous
lu république , oncle du précé-
dent, était (Capitaine de grenadiers
à l'époque de la révolution, dont
il adopta avec ardeur les princi-
pes. Commandant de la girde r»a-
243 WAG
tioriale tl'L'zc.'* en I/09, il parvînt
rapidctnunt <iii gr;ide de général de
brigade , que réclama en sa fa-
veur Je gt'méral d'Agobert, et fut
nommé, au mois de janvier 179'^,
commandant de la ville de Mar-
seille; il conserva ce poste jusqu'a-
près la chute de Robespierre,
son protecteur. Serres et Auguis,
membres de la convention natio-
uale, en mission, l'iuculpcrent à
WAG
l'occasion de Reynicr de Marseil-
le, ultra - révolutionnaire, qui,
arrêté par leur ordre, fut délivré
par des hommes armés. Le géné-
ral Voulland se vit par suite des-
tituer et mettre en arrestation. Le
conventionnel, son neveu (voyez
l'article précédent), prit sa dé-
fense, et le fit acquitter en i^Q^.
Il a été perdu do vue depuis cette
époque.
w
>VAFl'LARD (N.), auteur dra-
matique, naquit vers 1788. Il
commença tie très-bonne heure à
briguer Jcs palmes du théâtre, et
s'associa avec quelques auteurs ,
dont le nom protégea sa jeune
muse. "Wafilard donna au Vaude-
ville , le Voile W Angleterre, en
société avec M. Morcau; au Gym-
nase dramatique, avec IMM. Pi-
card e\ Fulgence, Un Jeu de Bour-
se ; il a encore donné avec ces der-
niers, au théfltre de l'Odéon , les
Deux Ménages^ un moment d'Im-
prudence ^ le Voyage à Dieppe,
etc., etc. Ces comédies avaient
fait concevoir des espérances
qu'une mort prématurée a anéan-
ties. Wafilard fut ravi aux lettres,
à sa famille et à de nombreux a-
ïuis, au commencement de jan-
vier 1824.
WAGNER (Bernard-Henri),
horloger-mécanicien du roi , né à
Paris le 10 mai 1790, fut élevé
h l'école centrale de Fontaine-
bleau, et termina ses éludes à
Paris, à l'école polymathique,
dirigée par M. Botet. iSesparens,
qui le destinaient au barreau ,
voyant son peu de vocation pour
cet état, le placèrent dans le com-
merce. Ce fut alors que se pro-
nonça fortement son goût pour la
mécanique , et pendant les trois
années qu'il passa chez un négo-
ciant, il employa tous ses momens
de loisir à l'élude de la physique
et de la chimie. Il fut ensuite oc-
cupé deux années chez un horlo-
ger célèbre pour la main-d'œu-
vre ; et, de retour dans sa famille,
il entra dans une carrière enlière-
ment conforme à ses goûls, et
qui doit lui procurer une exis-
tence honorable. Les procédés
imaginés par M.W^agner pour tail-
ler les roues dentées, et qu'il a
livrés au public avec le désinté-
ressement le plus noble, ont puis-
samment contribué à l'améliora-
tion de nos filatures; c'est aux
applications qui ont été faites de
ces procédés , que l'on est rede-
vable de la bonne disposition et
de la précision des engrenages de
toutes les machines à l'usage des
manufactures. La commission des
phares, établie par M. le ilircctonr-
pénéral de» ponts- et -chaussées,
chargea IM.\Va»ner,en 1816, de la
construction des machines de rota-
tion appliquées à ces appareils; il
est parvenu à les faire tourner ré-
{fulièieim-nt et sans secousse, quoi-
que charj^ées d'un poids énorme.
Ces machines ont déjà été lori-
guem€fit éprouvées sur plusieurs
points de nos côtes, à la salislac-
tion des marins. Les horloges pu-
bliques de M. Wagner sont belles,
solides et exactes ; toutes leurs
parties ont encore acquis un nou-
veau degré de pertéclion depuis
la diirniére exposilion des pro-
duits de l'industrie nationale ; le
volume en est considérablement
réduit , et les prix très-modérés.
Enfin cet artiste, recommaudable
sous tous les rapports, ne cesse
de prouver à ses émules que , si
le génie peut bien se traîner mal-
gré SCS fers, il vole quand il a su
les briser; aussi le jury central,
prenant en considération les ser-
vice» journaliers que M. Wagner
rend ù l'industrie et aux manu-
far-lures, hii a-l-il décerné deux
médailles d'argent de première
classe, l'une en 1819, et la se-
conde en iSaS; et nous croyons
pouvoir assurer qu'à cette der-
nière époque, il eut dans plusieurs
discussions la majorité du jury
pour la médaille d'or.
WAGRAM ( AtEXANURK Bbr-
TIIIER, l'BlNCE DE NeIITCHATEL ET
de). La notice suivante est prise
tout entière dans l'excellent ou-
vrage du comte Mathieu Dumas,
lieutenant - général , contempo-
rain, frère d'armes, premier et
constant ami du uiaréchal Bcr-
(bier. Cet arliclc , émincmmcat
WAG
2,7
français y nous a paru satisfaire
également à l'intérêt de la vérité
et à celui de la gloire nationale ,
heureusement inséparables pour
la vie du plus vieu.x soldat de no-
tre liberté. Nous avons crurem-
plir ainsi l'attente de nos lecteurs-
et le but bien connu de notre ou-
vrage, et nous allons au-devant
de Paccusatiot) de plagiat, en. dé-
clarant que nous n'avons inséré
cette notice que d'après une au-
torisation arrachée à la modestie
de son auteur. Ce morceau dis-
tingué, sous le double rapport du
style et de la fidélité historique,
recommanderait i lui seul l'ou-
vrage que le général comte Du-
mas a consacré ^ l'honneur de
nos armes , et dont le succès lui i\
donné un rang honorable parmi
nos premiers écrivains. L'avant-
dernier alinéa , également de la
mC-me main, a été intercalé pour
compléter cette notice biographie
que. « Le feu maréchal Berlhier,-
prince de Wagram, et ci-devanfc-
prince de NeufchSlel, fut l'un des
personnages les plus remarqua-
bles qui aient figuré sur la grande
scène militaire. Il possédait Ics-
qualités les plus essentieliôs^. du
général, une valeur caliïWi-et bril-
lante , un excellent jogement ,
formé par l'éducation la plus soi-
gnée , éclairé par uuc longue ex-
périence, et peut - être la plus
étendue et la plus variée qu'un
soldat puisse acquérir; il porta
les armes pendant un dcmi-siè-
clc, fit la guerre dans les quatre
parties du monde, ouvrit et ter-
mina trente-deux campagnes. En
sortant des écoles , après de bon-
nes études mathématiques, il a-
cheva d'acquérir sous les yeux d»
a4S
WAG
son père, nncien inj;énicnr-j»éo-
i:raplie, el l'un des premiers au-
teurs «le la riclie coilicliot: du
àèpôi de la guerre, les connais-
sances néressaire;* pour roriiicr
un hou oûicier d'état-inajor ; il se
fit dislini!;iier par rexacliliide et
la [>re>tes.>e de ses opérations sur
le terrain . t:l par la pureté el l'a-
gréaient de sa inaiiière de dessi-
ner. Le l'eu roi. qui <t plaisait aux
travaux de gtographie «t de to-
pographie, cl qui y portait un
goût éclairé par «le- connaissances
très éieudiics, daigna emidoy^r
ce jeune olïicicr à dresser la belle
carte des chasses, dont les minu-
tes, corrigées de la niain du roi,
sont restées comme un modèle
partait, et qui , imité depuis dans
tous les pays de l'Europe , n'a pas
«té surpassé. iM. le prince de Lam-
besc attira Berlhier dans son ré-
giment de dragons de Lorraine,
la meilleure école de cavalerie qui
existât alors en Europ<; ; il dut à
cette faveur l'avantage si essentiel
pour l'homme de guerre, de ma-
nier avec vigueur et adresse son
cheval et ses armes. 11 lit sa pre-
mière campagne en Amérique ,
dans l'état-major de l'armée coni-
ïnandée par le comte de Kocham-
beau, se fit remarquer au ctnnbat
Kaval de la Chesapeak , et à la re-
connaissame de New-York , où ,
sou» le feu des batteries augl. lises,
escortant le généial en chef avec
le comte Charles de Damas, «pii
eut son cheval tisé sons lui, et
mêlé avec; un parti anglais, il tua
de sa propre main le dragon qui
s'était le plus approché du grou-
pe, et fit plusieurs prisonniers :
telles furent ses premières arn^es
dans cette guerre, où il s'acquit,
WAG
par son activité, sa valeur et se*
talons, une réputation qu'il a de-
puis jusiifiée. Il fil partie de l'é-
tat-major du baron de Vioménil,
dans rexi)édition diri;.;ée contre
la Jamaïque, el qui lut suspendue
par la paix de i^fiS, si :lorieuse
p(»ui la Krance. ba navigation, ses
voyages accrurent avec la masse
de ses rcumaiftsances son ardeur
de s'instruire. Devenu olficier su-
périeiu' dans le corps de l'elat-
major-général formé par le maré-
chal de Segnr, ilenipli^a le temps
de la paix à divers travaux mili-
taires ; il suivit les ér.cdes de tac-
tique, dans lé-quelles le roi Louis
XVI, après divers essais, fit por-
ter ses ordonnances de formation
et de manœuvres pour les deux
armes à un tel j)ointde perfection,
et sur des principes si solides et
si simplifiés, que nous sommes
devenus maîtres à notre tour, d'i-
milalenrs que nous étions. Le co-
lonel Berlhier visita les camps du
roi de Prusse, fut euïployé à ce-
lui de Saint-Omer, sous les or-
dres de M. le prince de Coudé ,
et remplit, en 1789, les fonctions
de chef d'élai-major sous le barou
de Bezeuval, jusqu'à la disloca-
tion de l'armée rassemblée sous
Paris. Dans les preniiers orages
de la révolution , nommé coni-
niandant de la garde nationale de
Yersailhis , atlaqué par les plus
furieux démagogues , il sut se
maintenir et donner des preuves
réitérées de fermeté, de dévoue-
ment et de fidélité au roi. Dans
les tensps désastreux de la ter-
reur, dont le fléau commença a-
vec la déclaration de guerre, \%
général Berlhier se rendit à l'ar-
uiée; il y fut employé comme
WAG
fhef d'cta»,- major, tl'abord sous
le général La Fayelle , et ensuite
sous LutkîK'r; il ne quitta plus
les drapeaux iVançais, l'asile de
tant de liraves, le refuge de l'hon-
neur. Il combattit sur tontes les
IVoutiércs pendant les cinq pre-
mières campayiics; il fil des ac-
tions brillantes, et fut a>sez heu-
reux pour rester obscur à celte
époque uù les tabus et les an-
ciens services étaient des titres de
proscription. Le général Bona-
parte ( et ce ne tut pas pour celui-
ci la moindre laveur de la t'or-
tune), rencontrant i l'arfuée d'I-
talie, d(»at il [u'it le couimanJe-
ment au mois de mars 179b» le
général Berlhier, en fit son com-
pagKOu d'armes et le principal
instrument de ses succès. Pendant
dix - neuf années remplies par
seize campagnes, presque toutes
doubles, d'ete et d'hiver, l'his^-
toire de la vie du maréchal lier-
thier n'est outre que celle des
guerres de Bonaparte et de ses
opérations, dont il dirigea tou-
jours tous les détails d'exécution
dans le cabinet et sur le terrain :
constamment occupé de ces dé-
tails immenses, et de jour en jour
plus compliqués , son inlatigable
activité semblait délier le génie
ardent dans la sphère duquel il
était entraîné ; il travaill.tit avec
tin ordre admirable , saisissait a-
veo promptitude et sagacité les
vues générales, les dispositions à
peine indiquées, et dfuinait en-
suite tous les ordres d'exécution
av<!c prévoyance , clarté et conci-
sion. Discret , impénétrable , mo-
deste, il ne se liiisail janvtis va-
loir; il était exact , juste et même
*ûv«re pour lout ce qui toucbuii
WAG
249
au service; mais il donnait tou-
jotirs l'exemple du zèle et de la
vigilance; il maintenait la disci-
pline avec rigueur, et savait faire
respecter, par ceux qui lui étaient
subordonnés, quels que fussent
leur rang et leur grade , l'autorité
qui lui était confiée. Le général
lierthier n'ayant commandé en
chef que l'armée de réserve et
sons les yeux du premier consul ,
son nom ne retentira peut - être
pas dans l'histoire comme celui
des généraux ses émules, qui ont
attaché lnurs noms à de grands
évcnemens , et par des victoires
qui leur sont uniquement et jus-
tement attribuées ; unns il eut ce-
pendant une si grande part à ces
mêmes victoires par tout ce qu'il
fit pour les préparer, par tant de
faits d'armes qui , tels que le pas-
sage du pont de Lodi , lui sont
personnels , que des litres de gloi-
re si nombreux ne lui seront pas
conl(!stés ; et sans doute que si
Napoléon eût écrit ses commen-
taires, il aurait pu dire avec vé-
rité que , depuis la bataille de
Montenotte jusqu'à la bataille »lc
Léipsick. , il n'est aucun de ses
succès auquel les conseils de son
major- général n'aient coopéré,
aucune de ses irréparables fautes
dont la vieille expérience de son
compagnon d'armes n'ait cherché
à le détourner. Lors de la pre-
mière restauration de la maison
de Bourbon sur le trône de Fran-
ce , dégagé de se» sermens par
l'abdication de Napoléon , dégagé
de ses devoirs envers le généra-
lissime qu'il avait si fidèlement
servi , et qui déposait le cornmap
dément des braves armées fran-
çaises, le inuréchul prince de W**-
a5o
WAG
grain resta comme ses illustres
compagnons, Gdèle à la foi, aux
glorieuses aiiçles et aux drapeaux
français, ramenés par la ftirtune
et floltaris entre les mains de nos
princes. Il [»ré.-enta lui-même au
roi les marériiaux de l'empire, et
reçut avec eux le lilre de maré-
chal de France ; il fut nommé ca-
pitaine de la 5' compagnie des
gardes-du-corps de S. iM. L'épo-
que du 20 mars 181 5 fut celle de
la fin de la longue carrière mili-
taire du prince de Wagram. Re-
tiré à Bamberg< au cïiAteau du
prince de Bavière, sou heau-père,
avec son épouse, la princesse de
Bavière et ses trois enfans, il gé-
missait sur les' malheurs de la
France. L'heure fatale sonna pour
lui au moment même où les trou-
pes étrangères, qui allaient une
seconde fois souiller le sol de sa
patrie, défilaient sous ses yeux.
Il fut foudroyé par une attaque
d'apoplexie, (jui le précipita du
balcon de son appartement dans
la rue. Nous n'avons dû considé-
rer ici le prince de Wagram que
sous les raj)porls de l'homme pu-
blic ; nous trouverions aussi dans
sa vie privée des sujets de justes
«loges et de nouveaux motifs
d'honorer sa mémoire. Qu'il soit
permis <^ l'amitié, à la fraternité
d'armes, de rappeler les qualités
sociales qui lui concilièrent l'es-
time de tous les gens de bien ;
Tardent amour de son pays , qui ,
dans toutes les circonstances, fut
le premier mobile de ses actions ;
son humanité, que le spectacle
des scènes sanglantes qu'il eut
sans cesse sons les yeux, ne fit
que rendre plus active et plus tou-
chante; son noble désiutéressc-
WAL
ment, sa modération dans la hau-
te fortune, ses douces aifections
pour sa famille, et sa constante
fidélité à ses amis. ■>
WALPOLE (HOBACE, COMTE
d'Oxford), linérateur anglais, na-
quit à Londres, ef élail le troisiè-
me fils du célèbre ministre Ro-
bert ArValpolo, «qui contribua fë
plus à introduire la vénalil« dans
le sein du parlement britaimique»»
Horace AValptde, dont l'éducation
fut trèj-soignée, montra dès sa
jeunesse un goût passionné pour
les lettres; mais il dut, par égard
pour sa famille, suivre du moin»
momentanément la carrière des
affaires publiques. Successive-
ment inspecteur des importations
et exportations, huissier de l'échi-
quier et membre du parlement,
il se retira, du moment qu'il put
suivre ses goûts, dans une de ses
terres à Strawberry-Hill , où il
composa différens ouvrages, dont
nous donnerons les titres plus bas.
Une seule fois comme membre du
parlement, il s'était fait remar-
quer; c'est lorsqu'il avait pris, en
1742» la parole pour la défense de
son père. Depuis il s'est borné à
voler en faveur du ministère, jus-
qii'en 1761, que se termina sa car-
rière politique, et à se prononcer
ensuite contre les principes que
consacrait la révolution française.
Eu 179'» il devint comte d'Oxford"
par la mort de son neveu, décédé
sans enfans mâles. On doit à Ho-
race "Walpole : i" Catalogue d'au~
teurs célèbres; 2° Doutes histori-
ques concernant Richard lll , roi
d' Angleterre, et sur les crimes qu»
lui sont imputés ; 5° Anecdotes re-
latives à la peinture; 4° le Château
d'Otrante, roman dans le genre
WAS
d'Anne Rudcliffe {voy. ce nom); 5*
Essai sur le jardinage moderne; 6°
La Mère mystérieuse, tragédie; ']"
enfin des Opuscules poétiques. Il
faut joindre à celle énumcration
>a Correspondance a\iiC M"* Dudef-
lant, a qui n'ayant jamais rien aimé
dans sa vie, s'avisa d'éprouver
pourlui un sentiment passionné. »
II mourut en 1797.
AVASHINGTÔN ( Georges ) ,
général, et Tun des fondateurs de
Ja république des États-Unis, na-
quit dans le comté de Fairfax, en
Virginie, le 22 février 1752. Il se
distingua dans la guerre que sou-
tint la France contre l'Angleterre
dans le Canada , et repoussa mê-
me les Français, qui avaient fait
quelques ravages sur les frontiè-
res de la Virginie; mais bientôt il
fut forcé de se replier devant des
lorces supérieures. Peu après , le
général Braddock, qui comman-
dait les Anglais, ayant été défait
et blessé mortellement devant le
fort Duqucsne, Washington, qui
lui servait d'aide-de-camp, effec-
tua avec un grand talent, et un
succès digne de son talent, une re-
traite périlleuse, qui lui fit rejoin-
dre le colonel Dunbar, chef d'un
autre corps d'armée. Aprèa la
guCrre, il se retira avec le grad»
de major. Il se livrait paisible-
ment à des travaux agricoles dans
son habitation de Rlont-Vernon ,
quand lout-à-coup les colonies de
l'Angleterre forment la résolution
de se soustraire à l'avarice et au
despotis^ne de la mère-pntrie.
Dans chacune des provinces de
l'Amérique septentrionale s'orga-
nisent des assemblées dont l'auto-
rilé se substitue à cttlle des délé-
gués du roi de Ut Grandu-fircta»
WAS
i5i
gne; des hommes sages et voués
pour la plupart à l'élude des lois
et de la politique, des citoyens phi-
losophes, à la lête desquels il faut
principalement placer un impri-
meur (Franklin), un charpentier
(Thomas-Payne), un maîlre d'éco-
le ( Adams) , etenfin un laboureur
(Washington), saisissent celte oc-
casion d'appliquer des principes,
dont ils attendent le bonheiu" de
leur })ays; ils provoquent un con-
grès national, composé de dépu-
tés des diverses provinces. Ce
congrès, après une déclaration des
droits particuliers de l'Amérique,
et des droits généraux des nations,
choisit Washington pour généra-
lissime, et c'est ce choix qui va
fixer en Amérique la victoire et
la liberté. A peine Washinglon
est-il arrivé ù l'armée des insur-
gés , qui alors bloquaient Boston ,
qu'il se rend maître de celte ville,
après avoir réduit les Anglais à
une honteuse capitulation : ses o-
pérations militaires sont puissam-
ment secondées, d'un côté par le
général Lée, qui fait une brillan-
te défense à Charles-Tovvn ; de
l'autre par le colonel Arnold, qui,
avec une poignée d'homnies, s'ou-
vre la route du Canada , et effec-
lue ensuite avec bonheur une re-.
traite devenue nécessaire; par La
Fayette enfin, qui, A peine Sgé df.
vingt ans, s'est arraché à son pays
et aux douceurs d'un hyménée
récent, pour conquérir fi une na-
tion étrangère le plus beau trésor
des peuples et de l'homme; gé-
néreux sacrifice, dont l'amitié de
Washington et la reconnaissance
éternelle des Américains l'ont dé-
dommagé , et le dédommagent
encore de nos jours (i825), après
■2Ô2 >VAS
l'iifoir appelé dans leur sein, par
les honiR'(ii& qu'ils lui rendent, et
an lé l'étant sous le titre heureux
iVHôte de la nation : tout cepen-
dant ne l'ut pas succès dans cette
guerre. "Washington l'avait com-
mencée sans argent, sans muni-
tions, sans magasins; il avait à di-
riger une nation patiente et coii-
rageuse, mais trop peu susceptible
de cet enthousiasme qui enfante
les succès prompts et décisifs, et
obstiuée d'ailleurs à repousser la
discipline et l'instruction militai-
re. Il perd, en 1777. la bataille
de Brandiwine, cl Philadelphie est
conquise par les Anglais. Cette
défaite sert de prétexte à «es en-
nemis pour le décrier; il est pres-
que délaissé dans son camp; 1«
congrès même lui témoigne de la
froideur. Mais bientôt, grâce à
l'ardente amitié et au zèle infati-
gable de La Fayette, la vertu du
grand homme triomphe, on lui
rend justice ; on le déclare le pre-
mier libérateur de la nation. En
1 778, il prend sa revanche à Mont-
Moulh sur les Anglais, et ce suc-
cès est bientôt suivi d'un autre
plus brillaat encore. Aidé du 7000
Français , à la tête desquels outre
La Fayette, on distingue Charles
de Lameth, Mathieu Dumas, et
cet Alexandre Berthier qui dès-
lors préludait à une grande gloire
et à de hautes destinées, Washing-
ton, par les manœuvres à la fois
les plus sages et les plus brillan-
tes, force le général Cornwallis à
s'enfermer dans les murs d'Yorck-
Town, et à signer bientôt après
une capitulation humiliante. Dès
ce moment, les Anglais parurent
renoncer à la possession de l'Amé-
rique septenlrionaîe ; des armées
WAS
en présence gardèrent pendant 18
mois une trêve tacite qui annon-
çait une paix prochaine. Cette
paix fut enfin signée le 20 janvier
17^5, et l'Angleterre reconnut,
par un traité, l'indépendance de»
États-Unis. Washington en fut élu
le président, et ne songea plus
qu'à établir une constitution sage,
et propre à affermir la puissance
qu'il avait fondée; il savait qu'il
ne sulljt p is de conquérir la liber-
té, mais qu'il faut la savoir con-
server, et que des lois sages peu-
vent seules en assurer la durée.
Après avoir donné tous ses soins à
cet important objet, il sentit qu'il
était temps de sanctionner la ré-
publique par sa retiaite. Sembla-
ble à ces anciens Romains qui, au
sortir du champ de bataille ou des
plus hautes dignités de l'état, re-
tournaient modestement aux tra-
vaux de l'agriculture, il résolut
d'aller finir ses jours en cultivant
de ses mains les champs de ses pè-
res. On ne peut lire sans atten-
drissement les adieux qu'il adres-
sa, avant de partir, à ses ollicier»
assemblés : » Ne croyez pas que
))je renonce à la gloire, leur di-
» sait-il; je m'en propose une très-
» élevée; c'est celle d'être un bon
ifccultivateur dans un pays qui doit
«tout tenir de l'agriculture. Si
«nous nous sommes donné réci-
nproquement de bons exemples à
»la guerre, je veux vous en donner
«encore, ou en recevoir de vous
"dans des travaux paisibles. Nous
»nous visiterons, mes amis, et
«c'est dans nos champs bien cnlti-
»vés, au sein de nos heureuses la-
» milles et de nos joyeux domes-
» tiques, que nous nous rappele-
»rons tant de dangers, tant de ira-
WAS
• vaux et lant de bienfaits de la
«Providence. Je prends congé de
» vous, le cœur plein de l'aH'^iClioM
» la plus pure, et pénétré de la plus
"ardente reconnaissance. Fuissent
nies jours qui vont suivre être
«aussi heureux pour vous que
1) ceux qui les ont précédés ont été
"glorieux! Je ne puis aller à cha-
»cun de vous lui dire adieu ; mais
«je Serai reconnaissant si chacun
)>de vous vient me serrer ia muin.»
Tous vinrent en silence et avec é-
motion, serrer la maiu de leur gé-
néral, qui peu après s'embarqua
pour Annapolis, où le congrès lui
donna des marques nouvelles d'un
al lâchement bien mérité, et d'une
aUujiration aussi viv»"; que légiti-
me. Une lettre que AVashinglon é-
crivit de sa retraite, exprime en
termes tonchaus et philosophi-
ques le bonheur qui suivit ses
nobles travaux : « Simple parli-
wculier sur les bords du l*olow-
iinack, ù l'ombre de u»a vigne et
j de mon figuier, loin du tumulte
«des camps et de l'embarras des
«affaires publiques, je m'aban-
> donne ù ces douces jouissances
»qui fuient ou l'ambitieux qui as-
• pire aux emplois, ou le minis-
»trft qui nuit et jour s'occupe du
• soin de rendre son pays heureux,
»el peut-être de ruiner les états
n voisins, connne si ce globe ne
• pouvait suffire à tous les hom-
«mes. Le courtisan qui attend du
«sourire gracieux de son souve-
nrain, l'arrêt de sa destinée, ne
■ peut avoir l'idée Je mon br)n-
nhcur. Non-seulement je me suis
«éloigné d'un ihéûlre rempli d'a-
«gitations, mais dans le recueille-
«ment, je savoure les douceurs de
»Ia vio privée. Sans porter envie
»à p."rsonnc, jo me lais.«prai tran-
«quillement entraîner par le flcu-
» ve de la vie, jusqu'au monteiil
«où j'irai m'endormir avec mc«;
«ancêtres.» Mais si Washington'
n'avait pas besoin de l'antorité
suprême, sa patrie avait besoin
d'un tel chef; on l'arracha donc
de sa retraite pour lui confier de
nouveau le pouvoir dictatorial. La
révolution française était alors
dans toute sa force (1792). Il s'é-
tait formé aux États-Unis un par-
ti, qui, appuyé par Genêt, envoyé
de France à Philadelphie, tendait,
dit-on, à diviser la république, de
Washington en deux états diffé-
rens , et ù l'entraîner dans une
guerre contre l'Angleterre. Was-
hington, malgré les attroupemens
excités à la lin de 1793, et plu-
sieurs écrits dirigés contre sa per-
sonne en 1794? malgré les enne-
mis qu'il rencontra même au sein
du congrès, et quelques différens
qui s'élevèrent entre les JÉtats-
L'nis et l'Angleterre, vint pour-
tant à bout, par sa sagesse et sa
fermeté, de maintenir Li paix au
dedans et au dehors. En mars
1797, il quitta la présidence pour
aller habiter en Virginie, au milieu
des champ» où il était rtè. Tous
les partis se réunirent alors pour
le louer et le regretter, et il con-
serva, à la salisf-iclion générale,,
le commjïndement suprême de»
armées américaines. Avant de
quitter Philadt-lphie, il déposa lef^
fonds nécessaires pour la fonda-
tion d'une université dan» la ville
neuve, élevée sur les rives du Po-
towmack. Il mourut d'une esqui-
nancie, le samedi 14 décembu;
1799, H onze heures du soir. Cuei-
ricr, citoyen et sage, Washingtou
254
WAS
offrit la réunion de tout ce qui
failles {ijianilâ hommes; à peine
déconvre-t-on une tache dan- sa
vie, une imperfection dans ^on
caractère. L'atnour de la gloire
lut chez hien fle^ hmtjme.'" illus-
tres le principe des actions bril-
lantes et d'un dévouement géné-
reux; chez Washington, ce fut l'a-
mour de la pairie, toujours pur
et désintéressé. La gloire n'était
pas nécessaire à celte Cnne noble,
qui trouvait sa récompense dans
la pratique même du bien et du
beau, et dans les services rendus à
son pays. Ce n'était pas la profon-
deur des vues et la hardie>se de
l'esprit qui dominaient en lui;
mais peut-être que son grand
sens, sa tranquillité d'esprit inal-
térable, sa patience, son âme su-
périeure à la bonne comme à la
mauvaise fortune, furent plus uti-
les à la cause qu'il soutint. C'est
par là qu'il a fondé cette républi-
que dont la puissance et la gloire
vont croissant chaque jour, et qui,
pure encore de tous les excès d'u-
ne civilisation trop avancée, re-
produit les beaux jours de Rome
e^t d'Athènes. Grand à la tête de
la république, comme général et
comme administrateur, Washing-
ton ne le fut pas moins dans sa vie
privée, où il offrit aux siècles mo-
dernes un Cincinnatus nouveau.
Il eût été grand partout o\\ la for-
tune l'eût placé, parce qu'il était
de sa nature d'être grand. Tout le
inonde connaît le legs que lui fit
Franklin dans son testament : «Je
oiègue au général Geoiges Was-
»hington, mon ami et l'ami de
li l'humanité, le bâion de potnmier
"Sauvage dont je me sers pour
«me promener. Si ce bâton était
WAl
» un sceptre, il lui conviendrait de
nmême. » A sa mort, le gouver-
nement français a porté <on deuil,
et a fait prononcer son éloge pu-
blic par i\I. de Fontanes.
WASOWICZ (N. ), colonel,
entra au service dans l'armée du
duché de Varsovie et passa , en
1810, comme lieutenant dans le
régiment des ehevau-légers polo-
nais de la garde impériale. Ap-
pelé, en 1819,, à l'état-major gé-
néral, il suivit l'empereur Napo-
léon dans le cours de toute cette
campagne. Il le suivit, lui troi-
sième, dans le voyage que fit ce
prince do Wilna à Paris; enfin,
pendant les campagnes de j8i5
et 1814 •. il le suivit encore, et
parvint successivement jusqu'au
grade de colonel. Il ne quitta
Fontainebleau qu'après le départ
de l'empereur pour l'île d'Elbe.
Placé, en 1814» comme colonel
à la suite de l'armée du royaume
de Pologne , il y servit encoro
quelques années . et vil mainte-
nant dans la retraite (iS^ô).
WATRIN (iN.), général de di-
vision, membrede la légion-d'hon-
neur, naquit ;"i Beau vais, départe-
ment de l'Oise, vers 1772. L'un
«les [iremiers, il vola à la défense
de la patrie, dès que le territoire
françai-., au commencement de la
révolution, fut menacé par la coa-
lition étrangère. Il entra au ser-
vice comme simple soldat, et é-
lait parvenu, en l'an 2, par son
zèle, son courage et ses talens,
au grade d'adjudant-général, dans
lequel il reçut de l'emploi à l'ar-
mée des côtes de l'Océan. E;î'v«''
bientôt au grade de général de
brigade, il fut employé par le gé-
néral Hoche, qui lui avait voné
WAT
une estime particulière. Le g«'3né-
ral Walrin, coiDpiis ;>u nuinbro
des pénéranx qui devjiienl com-
mander dans l'expôdilioii d'Irlan-
de , rt-çut une aiilrc destination ,
cl l'armée de Sainbrc-et-iMeuse
!e compla parmi ses chefs. Il se
signala particulièrement à la jour-
née de Neuvied, au combat de
Neuhoff, à la suite duquel sa di-
vision poursuivit les Autricliiens
jusque sous les murs dfe Mayence.
Il leur enleva leur bagage, trois
pièces de canon, le colonel Barco
et tous les ofliciers de ce corps,
avec 8o'.) prisonniers. Walriu fit
partie de l'expédiliori de Saint-
Domingue sous le général Hédou-
ville, et mérita d'être menlionué
honorablement pour l'avoir habi-
lement secondé dans ses opéra-
tions. De retour en France, il fut
envoyé, en l'an 7, à l'armée d'I-
talie. C'est là qu'il reçut le grade
du général de division. Le 8 tVuc-
lidor, avec i,5oo braves, i! battit
complètement un corps de (> à
7,000 honmics. Pendant douze
heures, ù la bataille de Novi, il
tint en échec l'armée russe, qui
voulait couper la roule de Novi à
Gavi. Le 2 brumaire an 8, quatre
mille Français sous ses ordres et
ceux du général Dombrowsky ,
quoique sans artillerie, sans ca-
valerie, attaquèrent audacieuse-
ment dans leur can>p environ six
mille Aulrichiims et douze cents
cavaliers, soutenus par sept piè-
ces de canon , et les mirent dans
•me pleine déroute. Le a5 frimaire
an 8, le général Wutrin bal le gé-
nérnl Kray à Vallegio , attaqué
Ivrée, que six mille homines dé-
fendent, et y entre de vive force
«l'un côté pendant que d'un autre
le générjl, depuis maréchal Lan-
AVAT
25&
nés, s'empare d'une partie de la
ville, où tout ce qui n'a j;as été
tué est forcé de se rendre. Au
combat de Cbin^ella , aux batail-
les de Montebello et de Marengo ,
le général Walrih fit des prodiges
de valeur. Il y perdit son jeune
frère, son ami, son uriique espoir
et celui de ^n famille. Le courage
de ce brave général fut noble-
ment récompensé par un sabre
d'honneur ; il portait ces mots
d'un côté : Bataille de Maueivco ,
COMMANOtE PAH LE PtlEMIEn CONSUL
BoNAPABTE, et de l'autre : f)oN?cé
PAR LE GOUVER^r.MEÎiT DE LA RÉPC-
BLIQCE FKADf AISE AU GÉNÉHAL >Va-
TRiN. La paix signée , il reçut le
command».Mnenl d'une division de
l'armée d'ohservation du iMidi.
Sept vaisseaux de ligne , trois fré-
galrs et plusieurs autres bàlimens
anglais sous les ordres de l'amiral
Waren , s'approchent de Castel-
lamarc, et débarquent trois mille
hommes. Le généial Watrin se
précipita sur eux, leur tua ou
blessa douze cents hommes, leux'
fit deux cents prisonniers , et
força le reste à se rembarquer
précipitamment. Sur sa demande,
il fait partie de la nouvelle expé-
dition de Saint-Domingue; il ar-
rive, débarque, combat, et ne
succombe que sous les ravages de
l'épidémie. Le général Watrin ,
honoré d'un sabre à Marengo ,
était légionnaire de droit. Sa mort
fut une cause de deuil pour lou-<
SCS compagnons d'armes et pour
ses concitoyens, qui tou» se plai-
saient A rendre hommage à ses
vertus civiques.
>VATRIN (Jean - Baptiste) .
capitaine au i" régiment de dra-
gons, membre de la légion-d'hrtn*
Dcur, naquit à Mclz, duparleai«nt
256 V. A r
(le la Mo«rllo. Admis !e i5 février
i7j)2, comme chasseur à cheval
dans le 5° r«Jgiii)enl, il était capi-
taine (le dra{î;on9 le i5 venlôsc au
8. Nous empruntons à M. Laval-
léc le récit des principale» actions
<le c^ brave olïicier. « A l'affaire
de Neuvich, dil-il, après que l'on
se lut emparé des redoutes, le ca-
pitaine Watrin chargea un batail-
lon ennemi. A l'instant où il cher-
chait à s'emparer d'un drapeau ,
il reçut la décharge entière d'un
peloton. Il eut ses habits criblés
de balles; renversé sans connais-
sance sur le cou de son cheval ,
sans perdre cependant ses étriers,
il fut emporté par lui ; mais bien-
tôt après, ayant repris l'usage de
ses sens, il retourne sur l'ennemi,
et fait mettre bas les armes à cin-
quante hommes , que , dans sa
première charge, il avait séparés
de leur bataillon. Il n'avait avec
lui que onze hussards, qui furent
tous ou tués ou blessés dans cette
action. A l'affaire de Zurich, com-
mandant deux compagnies d'in-
fanterie, et défendant le passage
de l'Albis , par ordre du général
Drouc^t, il remplit celte mission
avec succès, empêcha l'ennemi
de pénétrer, et le força, après un
combat opiniâtre, à la retraite.
Ses dispositions et le courage de
sa troupe furent également admi-
rés , et elles contribuèrent à la
victoire. A IMonlebello , à la tc'îte
de son escadron , s'éîant porté en
avant et à la droite de la division,
par ordre du général Dclmas, il
empêcha l'ennemi de le déborder,
et eut à combattre six cents hus-
sards. Dans cette circonstance im-
portante par son succès à la ma-
yœuvre de la division, il leeut la
"WAT
charge de toute la ligne ennemie ,
et maintenant son escadron der-
rière un ravin qui longeait l'en-
trée d'un défde, il empêcha l'en-
nemi de le franchir et par le feu
du pistolet et par la pointe au
corps. On mit tant d acharnement
de part et d'antre dans l'attaque
et (lans la défense, que l'on se
jetait réciproquement le» pisto-
lets à la tête. Enûn Walrin et ses
bra vescoujpa gnous lriom|diércnt,
l'ennensi fut obligé de faire re-
traite après avoir essuyé une per-
te considérable. Watrin eut l'hon-
neur d'être cité dans les rapports
odiciels des généraux Delinas et
Bauujont. » Nommé membre de
la légion-d'honneur par décret du
a6 frimaire an la, il mourut le
i" brumaire an il\.
WATTIER SAINT-ALPHON-
SE (hE COMTE Pierre), lieutenant-
général, grand-oflicier de lu lé-
gion-d'honneur, etc. , né à Laon ,
département de l'Aisne , le 4 ***■?-
tembre «770, fit de bonnes études
au collège de cette ville , et dès le
moi» de septembre 1792, au mo-
ment où la patrie était menacée,
entra an service dans la cavalerie.
11 se distingua bientôt par ses ta-
lens et sa bravoure, et devint snc-
cessivement chef d'escadron, aide-
de - ciunp du général Lasalle et
colonel; il fit en cette dernière
qualité la campagne de i8o5. Au
passage du Lech , avec deux cents
drag'iiis, il mit en fuite un corps
ennemi qui déièndait le pont ; il
fut moins heureux au combat de
Diernstein , où il combattit avec
la même valeur, et fut fait pii-
sonnier. Sa conduite avait fixé sur
lui les regards de l'emperear Na-
poléou, qui le fil échanger, et le
WEL
nomma son écu^er. La nouvelles
preuves de valeur qu'il donna à la
iiataille d'Austerlilz lui niérilé-
rt'ut le grade de général de bri-
gade. Dans la campa^gue de i8o(),
au combat de SclileiU, il fif une
iliarge de cavalerie qui fut citée
tomme un des beaux laits d'armes
<les guerres de l'époque. Il re^'ut,
le 14 mai 1807, le litre de com-
mandant de la légion-d'honneur,
et en 1808, il l'ut envoyé eu Es-
l>agne, où il tint une couduile bril-
Jnute aux journées de Burgo.s, de
Fuenlès-Onoro, de Lerin, d'Alca-
niï, etc. Ele\ é au grade de général
de division, le H août 1811 , et
rappelé en France à la même épo-
que, il passa en Piussie , et se si-
gnala aux affaires nombreuses
qui eurent lieu dans celte mal-
lieureuse expédition. Il échappa
à ses désa«ilies, et ne posa les ar-
mes qu'après la capitulation de
Paris , eu 18 i4- Ayant donné son
adhésion à l'abdicatitui de l'em-
pereur, il reçut la croix de Saiut-
Louis le iç) juillet i8i4. Pendant
les cent jours, en i8i5, i! l'ut
chargé par Napoléon du comman-
dement de la 5° division de cava-
lerie de l'arnjée du Nord. Les ré-
Millalï- de la bataille de Waterloo
Tobligèrent de suivre l'armée au-
delà de la Loire. Lors du licen-
ciement, il l'ut mis à la demi-
solde. Placé ensuite sur les cadres
des lieutenans-généraux en dis-
ponibilité, il se trouve depuis plu-
sieurs années inspecteur-général
de la gendarmerie royaledeFrance.
WELLESLEY ( Richard Col-
ley, MARQiis he), pair d'Angle-
terre, ambassadeur, ministre-d'é-
tat, fils aîné de lord Gérard Col-
ley, comte de Morniugton, des-
T. XX.
WEL 2fi7
cendant d'une ancienne famille
d'Irlande, dont l'origine remonte,
dit-on , à Ferdinand , roi de Cas-
lille, est né le 3 1 juin 1760. Dès
l'âge de quatorze ans , il se for-
mait à la discussion parlemen-
taire dans un simulacre de cham-
bre de commerce établi par les
écoliers au célèbre collège d'Eton,
où il avait commencé ses études,
qu'il termina ensuite à Oxl'ord. Le
22 mai I 784 > il perdit son père ,
succéda à sa fort(me et à ses di-
gnités, et fut nommé bientôt après
nombre du conseil-[)rivé d'Irlan-
de, puis membre du parlement
pour Windsor. C'est à cette épo-
(|ue qu'il mérita les bonnes grâces
du roi, et fut admis d,ins la so-
ciété privée de la famille royale.
Lord Welleslcy ne tarda pas à se
faire remarquer par sa haine con-
tre la France, devenue républi-
caine. Cette conduite lui attira
toutes les faveurs de la cour; il
devint successivement lord de la
trésorerie, commissaire pour les
all'aires de l'Inde, et gouverneur-
général des possessions anglaises
dans ce pays. Les Français étaient
alors maîtres de l'Egypte ; la crain-
te que le voisinage de l'Inde ne
les déterminât à former des liaisons
aveo Tipoo-Sacb (voy. ce nom),
lui fit prendre la précaution de
leur fermer, par une escadre, le
détroit de B.-tb-el-Mandeb. Il dé-
pêcha ensuite le général ilarris
avec l'ordre d'attaquer Ijeringa-
patnam. Cette capitale, vivement
pressée, se défondit avec vigueur;
mais enfin elle fut pii^e «l'assaut «
et la mort du sultan mil tout \h
Maïssour au pouvoir des Anglais.
Dans l'enthousiasme (|u'excitu cet-
te victoire en Angleterre , lor J
'7
258
\m:l
"Wellcslcy fut créé inarquh» d'Ir-
lande, reput les remercîinens des
deux chambres, et fut autorisé
par le roi à ajouter h ses armes
celles que portait l'étendard du
monarque indien. Une nouvelle
V guerre éclata bientôt entre les
Mahratles et les Anglais; le mar-
quis de Wellesley leva une armée
de cinquante-cinq raille hommes;
conquit en trois mois tous les pays
situés entre le Djoumna et le Gan-
ge, et força Scindiah et le rajah
de Berar à faire la paix. Ses vues
se portèrent même alors sur l'E-
gypte, et malgré ses vastes pro-
jets sur l'Inde, il avait détaché ,
en 1801, un corps d'armée pour
aider à conquérir cette contrée.
Lord Wellesley avait besoin de
repos ; il demanda son rappel, et
fut remplacé, en juillet 1807, par
lord Cornwallis, qui mourut trois
^ mois après son arrivée. Tant d'heu-
reux résultais purent flatter l'or-
gueil anglais; mais loin d'alléger les
charges publiques , ils augmentè-
rent la dette de douze millions
stèrlings , dont sept millions dé-
pensés en frais pour terminer des
entreprises gigantesques (jue l'is-
sue a pu seule justifier. L'Inde
doit néanmoins au marquis de
Wellesley quelques établissemens
utiles. II a fondé à Calcutta un
collège, et formé plusieurs socié-
tés de savans pour l'agriculture
et l'histoire naturelle. De retour
en Angleterre, il fut l'objet de
plaintes amères pour ses manières
hautaines, son faste oriental, son
despotisme et ses dilapidations ;
ces plaintes, plusieurs fois répé-
tées dans la chambre des com-
munes , n'eurent cependant au-
cune suite, ha i^oy, le roi lui
V>EL
ayant fait proposer le niini«lérc
des af&ires étrangères, il le refu-
sa ; il accepta, en 1809, l'ambas-
sade d'Espagne, dont la position
était alors très-critique, et il y
montra beaucoup d'habileté. A la
fin de la même atjnée, il consentit
à remplacer M. Canning aux affai-
res étrangère?, et s'attacha sur-
tout à friire triompher la cause es-
pagnole, qu'il sentait liée à celle de
l'Angleterre. Après les succès de
l'armée anglaisée, commandée par
lord Wellington à Talaveyra , en
18 JO, lord Liverpool proposa de
lui voter des remercîmens , ainsi
qu'à son armée ; le marquis de
AVeliesley parla avec réserve des
exploits de son frère, et avec ad-
miration de ceux de l'armée. Quel-
ques différens ayant éclaté dans le
ministère, en 1812, au sujet de
la guerre d'Espagne, après l'as-
sassinat de il. Perccval {voy. ce
nom) , il fut chargé par le prince-
régent de concilier les parties , et
n'ayant pu y parvenir, il donna sa
démission de ministre. Parti^in
des concessions politiques que ré~
clamait constamment l'IrJande. il
les sollicita pour elle avec cha-
leur le ai avril. Un discours qu'il
fit sur le même objet, le i" juil-
let suivant, produisit une grande
sensation sans aucun résultat. De-
puis ce moment, on le vit pres-
que toujours dans les rangs de
l'opposition ; ainsi , par suite d'un
discours du prince-régent, il pas-
sait en revue les opérations de la
guerre d'Espagne, et prouvait que
le système du ministère « avait été
timide sans prudence, et sordide
sans économie. » Le 22 avril i8i(),
il proposa un système d'écono-
mie, applicable à toutes les bran-
VfEL
rliesck l'administration, et parlicii-
Jiérement ^ rélabli<seraent mili-
taire. En février 1817. à l'occa-
sion d'une loi (le circonstance pro-
posée contre les méconlens que
l'on disait exister dans la Grande-
Bretagne , il observa avec beau-
coup de sagesse qu'avant de pro-
mulguer une pareille loi, il fallait
démontrer bien clairement l'iu-
siilFisance de la législation ordi-
naire ; il protesta ensuite avec é-
nergie contre lu suspension de Vnc-
tfAVhabea.scorpus. LordWellesley,
dans les fonctions éminenles qu'il
a remplies, a donné la mesure de
soij habileté, de ses t;dens et de
la profondeur de ses vues; mais
ou peut s'étonner, après la con-
duite qu'on lui reproche d'avoir
tenue dans l'Inde , de le voir, à la
tête du partie de l'opposition , ré-
clamer l'émancipation de l'Irlan-
de et l'exécution des lois protec-
trices des libertés de son pays. Il
avait épousé, en 1794» une Fran-
çaise nommée Rolland , morte
sans enfans, en )8iC. On a publié
plusieurs écrits sous son nojn sur
les alTaireH de l'Inde.
WELLESLEY ( Williams ) ,
frère du précédent, membre du
parlement pour Queeu's County,
eu Irlande , gouverneur de ce
comté, et inioistre du départe-
ment de la Monnaie, est né le 20
mai 1763. II prit, en 1778, le
surnom de Pote^ de sir AVilliams
Pôle, son cousin , qui lui laissa ,
cette nnnée, toute sa fortune. M.
Wellesley-Pole devint ensuite se-
crétaire-d'étal en Irlande. Il se fit
remarquer dans ses fonctions par
sa sévérité à l'égard des catholi-
ques, et notamment par la circu-
laire qu'il adressa, eu 1811, aux
WEL
ar><)
principaux magistrats : « Pour n -
quérir l'emprisonnement de tou-
tes personnes qui se trouveraient
compj'ises dans la formation des
assemblées que les catholiques
voulaient établir à Dublin, pour
la conduite de leurs affaires. »
Cette mesure causa en Angleterre
beaucoup d'alarmes; le comte de*
Moira demanda même aux minis-
tres si M. Poie avait agi en vcriu
de leurs instructions, et sur la ré-
ponse négative, des copies de la
circulaire furent mises sur le bu-
reau. Par suite rappelé d'Irlnnde,
il reprit sa place à la chambre des
commîmes, et s'expliquaut sur sa
conduite , le 5 mars , il répondit à
ime motion de M. Pousomby,que
le lord lieutenant et le procureur-
général avaient eu connaissance
de sa lettre avant son émission.
En 1814 » à l'occasion des E-^pa-
guols arrêtés à Gibraltar, puis li-
vrés à leur gouvernement, M.
"Wellesley dit qu'il adoptait à leur
égard les principes de ftl. With-
bread {voy. ce nom), et ajouta
<• que sou frère, l'ambassadeur i\
Madrid , avait employé tontes les
remontrances pour engager le
gouvernement espagnol ù aban-
donner son système qu'aucun des
Wellesley n'était capable d'ap-
prouver. » Il est encore aujour-
d'hui (1825) membre de la cham-
bre des communes d'Angleterre et
minisire-d'élaf.
WELLESLEY ( sin Fïenui ) ,
frère des précédentî , conseiller-
privé et grand'crolx de l'ordre du
Bain, né le 20 juin 1775, entra
de boime heure dans la carrière
diplomatique, qu'il a constam-
ment suivie. Il accompagna lord
Malmesbury à Lille, en 1797, et
aGo
WEL
^>as>iii ensuiie dans l'Inde, en qua-
lité de secrétaire du marquis de
Wellesley, son Irére, Nommé, eu
1801 , lieutenant - gouverneur
d'Aoude, il en revint, en i8o5,
pour remplir en Angleterre le pos-
te de lord de la trésorerie; il passa
peu de temps après aux fonctioni
de secrétaire du trésor, et les ré-
sig;na bientôt pour exercer en Es-
pagne celles d'ambassadeur. On a
prétendu que le décret rendu par
Je roi d'Espagne en octobre 1814»
contre l'introduction des cotons
anglais, était une vengeance du
reins qu'avait fait cet ambassa-
deur de fournir au gouvernement
espagnol un subside considérable.
Les mesures qni furent alors adop-
tées en Espagne, et dont sir Wel-
lesley assure avoir clierché à pré-
venir l'exécution, ayant rendu,
comme l'ont dit ses partisans, sa
position extrêmement désagréa-
ble, il demanda et obtint la per-
mission de quitter Madrid, et re-
vint en Angleterre en i8i5. De
nouveaux motifs le portèrent bien-
tôt à retourner au poste qu'il ve-
nait de quitter, et il n'a cessé de
l'occuper qu'au moment où une
monarchie constitutionnelle com-
mençait à régir l'Espagne ; ce qui
parut accréditer l'opinion peu fa-
vorable que les Espagnols avaient
conçue de ce ministre : ils pré-
tendaient que l'influence dont sir
"NVellesley jouissait auprès de leur
souverain , n'avait pas toujours
été exercée d'une manière avan-
tageuse pour les intérêts politi-
ques du pays.
WELLINGTON (Arthcr-Wed-
TESLEY, DUC DE ) , frère des précé-
dens ( voyez AVellesley ) , né à
Dungan-Caslle, le 1" m«i 1769,
WEL
fut élevé au collège d'Eton, en-
voyé ensuite en France à l'école
militaire d'Angers, et enfra fort
jeune au service. Le marquis de
Wellesley,son frère, lui ayant ache-
té la lieutenance-colonelle du 55*
régiment, il accompagna l'année
suivante (1794)» lord Àloira ù Os-
tende, et commanda une brigade
dans la retraite de Hollande, sous
le duc d'Yorck. Eu 1796, embar-
qué comme colonel pour les Indes-
Occidentales , il ne put remplir sa
mission , ayant reçu l'ordre, pen-
dant que la flotte était retenue
dans le port par une tempête,
d'aller faire des recrues en Irlan-
de. L'année suivante, il était avec
son frère dans l'Inde, et combat-
tit à la bataille de Mallavelli, où
Tipoo-Saëb fut vaincu; il contri-
bua ensuite à la prise de Seriuga-
patnam , et en fut nommé gou-
verneur. Après avoir éloigné, sui-
vant l'ordre qu'il en avait reçu,
la famille du sultan des lieux de
sa puissance, il revint dans la ca-
pitale du Maïssour, dont il était en-
core gouverneur au moment où
Hondiah-Waugh, aventurier in-
dien , fit une incursion sur les
terres de la compagnie. Chargé
d'arrêter la marciie de ce parti-
san, il parvint à disperser toute
sa troupe et à !e luer lui-même,
après un combat sanglant. Ce suc-
cès le fit nommer major-général.
La guerre ayant éclaté ensuite en-
tre les Mahrattes, à l'occasion de
l'ambition de quelques - uns de
leurs chefs, et les Anglais ayant
pris le parti du l'aishwa, chef des
Wahraltes occidentaux, on mit à
la disposition du major -général
Arthur un corps de cavalerie pour
se porter à son secours. Après une^
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XV EL
marche longue et pénible, il at-
teignit les troupes reunies de Scin-
diah et du Rajah de Berar, qui ve-
naient de se réconcilier avec Hol-
kar, et les vainquit tous trois près
du village foilifié d'Assye , qui
donna son nom à la bataille; aus-
sitôt, sans donner à ses ennemis
le temps de se reconniûire, et sans
écouter leurs propositions de paix,
il se mit à la poursuite des Mah-
rattcs, détruisit la cavalerie de
Scindiah, défit l'infanterie de Be-
rar dans les plaines d'Argomme ,
se rendit maître de la forteresse de
Gaivilphar, et in)posa aux deux
chefs les condition? les plus rigou-
reuses. L'audace et l'activité que
ce général déploya dans cette oc-
casion contrastent étrangement
avec la lenteur et la circonspec-
tion qu'il montra dans des cir-
constances autrement importan-
tes, et qui pouvaient lui devenir
si fatales, si la fortune ne l'eût
puissamment secondé; la victoire
d'Asëyeeutde tels résullnts, qu'un
monument fut élevé à Calcutta
pour en perpétuer le souvenir ; le
vainqueur recul les remercîmens
du parlement d'Angleterre, et fut
nommé chevalier de l'ordre du
Bain. De retour en Angleterre, en
i8o5, il eut le commandoujent
d'une brigade dans l'armée du gé-
néral Cathcart, destinée à agir sur
le continent, mais que la victoire
des Français à Austerlilz obligea
de se rembarquer. H remplaça à
celte époque le marquis de Corn-
wallis en qualité de colonel du ^8"
régiment, dont il avait été lieu-
tenant-colonel pendant treize ans.
En 1806, il fut élu député deNew-
{lorldansTiledeAVight à la cham-
ire dus commuoes; et épousa dans
^EL
261
la m*Mne année miss Pakenham ,
sœur du comte de Longford. Nom-
mé, en 1807, premier secrétaire
de l'Irlande, il quitta ce poste a-
vaut d'en avoir exercé les fonc-
tions, pour commander la réser-
ve envoyée en Danemarck, sous
le général Cathcart ; contribua
puis^amment au succès de l'af-
faire de Kinge, et fut ensuite char-
gé , pour son pays, de la capitu-
lation de Copenliague. On se rap-
[lelle l'impression que fit en Eu-
rope, à cette époque, cette grande
iniquité politique ; elle se termina
par des remercîmens unaniuies
votés à l'armée par les deux cham-
bres, et adressés personuelleme;it
par l'orateur des communes au
général Wellesley, lorsqu'il y re-
parut à son retour. Elevé , en
1808, au grade de lieutenant-gé-
néral, il fut chargé de l'expédition
de Forlngal; il débarqua à l'eni-
bouchure du IMondego, se réunit
au général Spenceir, qui lui ame-
nait 5,000 hommes de renfort, et
se dirigea sur Lisbonne. Le i8
août, l'armée anglaise rencontra
l'avanl-iiîarde du général Junot,
et engagea un combat sanglant,
où elle eut quelque avantage; les
Français prirent leur revanche le
21 , troi« jours après; sir Arthur
Wellesley, qui jusquc-li avait di-
rigé les opérations, contrarié dans
quelques-unes dts mesures qu'il
avait conseillées, et que le com-
mandant en chef n'avait pas sui-
vies, remit ses pouvoirs a sir Hew
Dalrymple, qui négocia avec Jii-
not la convention de Cintra, sous
la condition que les Français éva-
cueraient le Portugal et repasse-
raient en France avec armes et
bagages. Celle cuuvcDlion , ([hI
'2G'i
AVEL
fut iinprouvoe en Aiiglctcrre , y
tlovint la iiialiiire d'un procès in-
tenté au géiiéral Dilryinple, dans
lequel sir Arlluir Wclleslcy fut en-
tendu, (e qui le retint quelque
temps éloij^né de l'armée; eniin
il repartit avec le titre de vicomte
de Wellin^^ion , et le commande-
tnent en chef de l'armée anglo-
portugaise. 11 débarqua à Lisbon-
Jie le 2'2 avril 1809, marcha vers
le Douero, attaqua à Oporto le
maréchal Soult avec des forces
.•î-upérieurcs, et l'obligea d'aban-
doiiner le Portugal. Revenant aus-
sitôt sur .ses pas , il rentra en Es-
jîagne , et alla occuper la position
de Talavcyra de la lleyna , où il
soutint pendant deux jours, sans
être débusqué, les eflbrts des trou-
pes françaises. Ce succès négatif
fut regardé en Angleterre comme
une victoire conijdète; le général
"Wellington y devint l'objet de
l'enthousiasme général ; les deux
chambres lui volèrent des remer-
cîinens et une annuité de deux
mille livres sîerling^.et le roi lui
accorda la pairie avec le titre de
lord vicomte AVellington de Tala-
veyra. Les maréchaux Soult et
Ney reparurent bientôt, et pas-
sant rapidement de Salamanque
en Estramadure, ils forcèrent le
général anglais de traverser le
Tage sur le pont de l'Arzobis-
po 5 qui était sa seule ressour-
ce , comme il l'avoua lui-mê-
me, et de rentrer ainsi en Por-
tugal; il donna de cette retraite
forcée plusieurs motifs qu'il ne
nous appartient pas d'apprécier.
Il profila du repos qu'on lui laissa
pendant quelques mois pour pré-
parer la défense du Portugal; tous
ses cirorls se bornèrent à prendre
WEL
une forte position sur la Coa, k
être témoin dos sièges dû Ciudad-
Rodrigo et d'Alnu';ida, entre-
pris par Masséna, et à voir tom-
ber la première de ces places au
pouvoir du maréchal. Celui-ci
voulut profiler de ce succès pour
emporter le poste formidable de
Busaco, que lord Wellington oc-
cupait encore ; mais ce ne futqu'a-
près plusieurs tentatives inutiles
qu'il parvint à tourner sa position
et à le forcer à la retraite; le gé-
néral anglais alla en toute hâte se
rcnfermerdans les lignesqii'il avait
fait construire, avec des précau-
tions infinies et le plus grand se-
cret, à Ïorrès-Védras, appât fu-
neste contre lequel la valeur fran-
çaise, sans calculer le danger, alla
presque toujours se briser en vains
efforts. Masséna, ix la vue de ces
immenses retranchemens, deman-
da des renforts, et après les avoir
attendus six mois iimtilement, il
quitta les lignes devant lesquelles
il était resté forcément inaclif, et
rentra en Espagne, retraite habile
qui procura à lord Wellington le
titre de marquis deXorrès-Védras.
Ainsi son gouvernement le ré-
compensait, non pas pour avoir
remporté des victoires, mais pour
avoir évité des défaites. Quelque
temps après , voulant s'illustrer
par des succès positifs, il alla blo-
quer la ville d'Aiméida; le prince
d'EssIing accourut pour la dé-
fendre, livra bataille à l'ennemi,
et le mit dans le plus grand dan-
ger , lord Wellington ayant Al-
méida à dos et s'élant laissé accu-
ler à la Cca. Deux jours après, la
garnison se fit jour à travers l'ar-
mée anglaise, après avoir fait sau-
ter les ouvrages de la place. Ceci
WEL
s'était passé au mois de mai 1811;
'es 6 et 9 juin, le général Wel-
lington voulut regagner h Badajoa
ce qu'il avait manqué à Alméida;
mais il fut repoussé avec une
perle considérable dans les deux
assauts qu'il fil donner i"! cette vil-
le. En septembre, il passa le Tage
pour prendre ses cautonnemens
d'hiver, prépara l'attaque de Ciu-
dad-Rodrigo, et tomba sur cette
place ù l'iujproviste ; Il l'emporta
d'assaut à la suite de onze jours
de tranchée, le 11 février 1812.
Après ce succès, il fut créé par la
régence grand d'Espagne de pre-
unère classe , et nommé comte
d'Anglcicrre par le prince-régent,
qui lui lit aocorder en outre, par
les deux chambres, une nouvelle
pension de deux mille livres ater-
lings. Le comte d'Angleterre vou-
lant justifier sur-le-champ ces fa-
veurs, reprit l'attaque de Badajoz
avec toutes ses forces, et s'en em-
para après avoir perdu beaucoup
de monde. Maître alors de la cam-
pagne, il repassa le Tagc, et en-
tra en Ca.stilie avec une artnée
imposante. Cependant le maréchal
Marmunt, ayant été rejoint par le
général Uonml, se crut asst;z fort
pour et) mesurer avec les Anglais,
et commença rne suite de ma-
uoeuvres qui inquiétèrent leur
général, et l'cnjpêchèrent d'a-
gir. Celte conduite donnant plus
de confiance au maréchal, il n'at-
tendit pas les renforts des ar-
mées du centre et du Nord, et
passa sur la gauche de la Tormès.
Lord Wellington prit une position
favorable pour l'observer, et au
moment où le flanc gauche de
l'armée française manœuvraitpour
envelopper »oq aile droite, il al-
WEL
a63
taqua celte armée du côté où elle
se trouvait afl'aiblie , la renversa
tout entière, cl remporta la vic-
toire de Salamanque. Le combat
ne cessa qu'à la nuit. Le lende-
main, 25 juillet, il se mit à la
poursuite des Français; mais fai-
sant tout i\ coup volte-face, il re-
passa le Douero , marcha sur Ma-
drid, comme Impatient de jouir
des acclamations de la capitale, et
y fit une entrée triomphante. De
nouveaux remercîmens lui furent
décernés, on lui conféra de nou-
veaux titres , et la chambre des
communes vota une somme de
cent mille livres sterlings pour lui
former un établissement. La su-
périorité morale que lord Wel-
lington avait voulu donner au
parti du roi Ferdinand , en parais-
sant en vainqueur à Madrid, dé-
viât presque nulle par le défaut
de moyens pour l'appuyer. Le
maréchal Soult avait quitté Cadix
et l'Andalousie, et marchait con-
tre lui; le général Souhani, qui
remplaçait le maréchal Marmont,
s'avançait sur Burgos. Lord Wel-
lington, voulant se faire un point
d'appui contre ces forces réunies,
essa3'a d'attaquer Je vieux chAteau
de celle ville ; mais il échoua
complètement ; le général Dubre-
ton , qui le commandait, le força
de s'éloigner. Cette imprudente
entreprise fut blâmée par ses par-
tisans mêmes. Cependant quatre
artnées françaises, dont il n'avait
pas su calculer la marche, ve-
naient sur lui, et l'atteignirent
au-delà de la Tormès ; sa position
était critique au dernier point; ce
furent les généraux français qui
l'en tirèrent ; un repos de qua-
rante Iieures qu'ils furent forcés
26.f
WEL
rl'accortlcr à leurs urm»';cs, donna
le t«;iTips;iii génénil anj^lai* de s'é-
chapper tt d'opérer sa retraite s.'ins
aucuneperle; ce résultat inaltendii
fournit une nouvelle occasion de
lui prodiguer de nouvelles récom-
penses. Le prince-régent, délivré
à cette époque des restrictions de
la régence , usa de son pouvoir
pour créer lord Wellington mar-
quis du royaume-uni, et le parle-
ment lui vola encore une gratifi-
cation de cent mille livres ster-
ling ; il avait été créé en Portugal
comte de Vimieira et marquis de
Torrès-Védras. Lord Wellington ,
pour opérer l'évacuation totale de
Ja Péninsule, se rendit à Cadix
en janvier 18 13, cl communiqua
en personne avec la régence de
cette ville. Le résultat de cette
démarche fut qu'on plaça sous
son commandement immédiat les
armées espagnoles mises sur un
meilleur pied, et que la totalité
de ses forces s'éleva à 80,000
hommes. Pour l'exécution de ses
projets, il fallait tromper l'armée
française, qui occupait une forte
position derrière le Douero. Il si-
mula une attaque de front avec
deux divisions , tandis que son
année passait le fleuve quelques
lieues au-dessous, et tournait ain-
si la position des Français, qui se
replièrent sur Burgos, et de lu sur
Vittoria. A la lauie que fit le ma-
réchal Jourdan de prendre posi-
tion dans le bassin de Vittoria,
sans être en état d'attendre l'en-
nemi , il ajouta celle de s'affaiblir
encore en détachant la division
Maucnne pour escorter un con-
voi. Le résultat de ces mesures
fut la perte du poste important
d'ArlauzoQ ot de la bataille de \it-
WEL
toria, qui eut lieu le 24 mai i8i3i
et dans laquelle les Français, cé-
dant à la nécessité, abandonnè-
rent leurs positions, un nombre
considérable de canons, chariots,
munitions, bagages, etc. Le grade
de feld-maréchal , une lettre du
prince -régent, des remercîmens
votés par le parlement, el le don
de la terre de Sotlo di Roma, que
lui firent les cortès d'Espagne,
furent la récompense de cet avan-
tage signalé. Lord Wellington fit
aussitôt commencer les sièges de
Pampelune el de Saint-Sébastien,
el repoussa le maréchal Soult, (|ui
s'avançait au secours de ces deux
places; mais bientôt il retomba
dans ses anciennes hésitations, et
ne se détermina h passer la Bidas-
soa qu'au mois d'octobre suivant.
Ce retard, que rien ne peut jus-
tifier, donna le temps au maré-
chal Soult de réorganiser une ar-
mée alîaiblie, et de forlifier les
places importantis pour les met-
tre à l'abri d'un coup de main; et
lorsque le général anglais se fut
décidé à marcher en avant, ce fut
avec une lenteur qui semblait an-
noncer la crainte de rencontrer
l'ennemi. Enfin les deux armées
se trouvèrent en présence le 27
février 1814 » près d'Orthès ; les
Français, malgré leur infériorité
numérique, firent une belle résis-
tance , mais ne purent tenir la
route de Bordeaux, où les Anglai*,
sous les ordres du général Dal-
housie, pénétrèrent le 12 mars.
Le maréchal Soult, après quel-
ques succès obtenus sur son anta-
goniste , s'était retiré sous les
murs de Toulouse, où il se forti-
fiait pour défendre le passage de
la Garonne; le général anglais ly
WEL AVEL 2C.5
Suivit, et se hasardii enfin à lui sée? , il établit aussitôt son quar-
livier bataille le 10 avril; 20,000 tier-gtlnéral à Bruxelles , et y pu-
li(jmmes avaient à se défendre blia une déclaration des pnissan-
contre 80,000; on se battit avec ces au peuple français, pour l'en-
acharnenient ; les Anglais perdi- gager à ne prendre aucune part à
reut plus de soldats que n'en la nouvelle lutle qui allait s'enjra-
eomplait l'armée française, et la ger, assurant qu'elle n'était diri-
victoire se serait inévitablement gée que contre la per>onue de
déclarée pour celle - ci , sans la Napoléon. Les maux qui avaient
faute que fit un général de divi- suivi la première invasion ne dis-
sion de se laisser trop emportera posaient pas les esprits à ajouter
son ardeur, en quittant le poste foi à ces proujesses bienveillantes,
qu'il avait ordre de garder (voy. et l'on se réunit autour de Napo-
l'art. Soclt). line suspension d'ar- léon pour repousser du territoire
mes fut proclamée, etsuivie d'une français les troupes étrangères,
convention qui terminaenfin cette Dès le i5 juin i8i5, ce prince a-
lorigue et sanglante lutte. On ne vait passé la Sambre, et se trou-
calcula p;is en Angleterre ce que vaiten mejsure d'altaqiur les Prus-
le dernier succès de lord W'el- siens, qu'il défit à Ligny. Aussitôt
lington lui avait coûté; l'orgueil voulant profiler de ce premier
national l'exagéra sintoul pour succès, il se porta avec son acti-
rendre plus bumilianle peut-être vite ordinaire contre l'armée an-
la chute du seul ennemi qu'elle glo - hollandaise , qui se rassem-
eut à redouter; et les dernières Liait en avant de Bruxelles. Dans
récompenses que le souverain et le le moment même, le duc de Wel-
parlement pouvaient lui décerner lington se trouvait à un bal <lans
après toutes celles qu'il avait déjA la capitale des l'ays-Bas , chez la
riîçufs , lui furent otî<;rles : le duchesse de Ilichmond. (î'est là
prince-régent le créa marquis de qu'il reçut la première nouvelle
Douero et duc de AVellington, et de l'échec éprouvé par les Prus-
le parlement vota en sa faveur siens. Il part aussitôt avec son
400,000 livres sterliugs, qui de- état-major, et se hâle de réunir
vaient être employées en achat de SfS troupes sur Waterloo, bourg
terres. Il se rendit ù Londres peu sitwc à trois lieues de Bruxelles,
de temps après, et reçut pour la ayant derrière lui la forêt de Soi-
douzième fois les reu)ercîmens gnies. Un combat sanglant s'en-
des deux chambres , auxquelles iï gagea le 16 entre le corj)S du ma-
se pré».cnla le 1" juillet. Le 5 juil- réchal Ney el les tfoupe» belges ,
let, lord Wellington fut nonnné sous les ordres du prince d'Oran-
nmbn«sadeur auprès du roi de ge , renforcées de quelques régi-
France, et envoyé ensuite au con- mens anglais; mais il n'eut aucun
grès devienne, où il se trouvait résultat. Le 17, Napoléon, près-
encore lors du retour de Napoléon que eertain de triompher, s'avan-
en France au mois de mars i8i5. ça vers les champs de Waterloo,
Proclamé parles souverains alliés el le lendemain 18, eut lieu celle
généralissime des troupes coall> bataille terrible, où taut de &ang
26G
WEL
lut vcrsû, où Je si graïul? in-
térêts turent déhaltus, «t où le
sort de la France lut mis uny se-
conde fois en que.slion. Cette ba-
taille, également connue sons le
nom de journée de Mont-Sainl-
Jean, de Belle- Alliance ou de
Waterloo, où l'opinirilrelé dans
la défense répondit pendant tout
le jour ii l'impétuosilé des atta-
ques, allait se terminer par un
dernier effort où les Français a-
vaient réuni tout ce qui devait
leur assurer un succès complet,
lorsque vers les cinq heures, ils
virent arriver sur leur flanc l'a-
vant-garde de l'armée prussienne
qui , ralliée et renforcée , mar-
chait au secours des Anglais. Bien-
tôt débordés et chargés avec vi-
gueur, toute résistance leur fut
impossible, et leur valeur ne leur
servit qu'à trouver la mort , qu'ils
préféraient à la fuite. L'histoire
seule peut rendre un compte im-
partial de ce grand événement ;
elle dira comment une défense,
en quelque sorte improvisée, pré-
valut sur le plan d'attaque le plus
savamment conçu ; comment Blu-
cher, complètement battu deux
jours auparavant, reparut tout à
coup au moment décisif; com-
ment, d'un autre côté, des géné-
raux français négligèrent d'exécu-
ter des ordres donnés à plusieurs
reprises, ou restèrent immobiles
au bruit du canon qui écrasait
leurs frères dTarmes ; comment
enOn le cri funeste de sauve qui
peut, qui avait déshonoré les pre-
mières batailles de la révolution,
se Gt entendre dans celle qui de-
vait la terminer lilùcher, à la
tête de sa nombreuse cavalerie ,
profita du désordre qui se mani-
AYl'L
fesia dans l'armée française pour
la ])oursuivre à outrance. I>e»
deux généraux ennen)is arrivè-
rent sous les murs de la capitale
au moment où Napoléon venait
d'abdiquer pour la seconde fois.
Après diCférens pourparlers , on
capitula; l'armée française se re-
tira au-deh'i de la Loire, et les
Bourbons rentrèrent dans Paris.
Lord Wellington no tarda pas à
recevoir de sa patrie de nouveaux
témoignages de gratitude. Les
deux chambres lui votèrent des
remercîmens, et une somme de
200 mille livres slerlings fut ajou-
tée à toutes celles qu'il avait déjà
reçues, et tous les souverains de
l'Lurope, rivalisant de munificen-
ce avec l'Angleterre, prouvèrent
quelle importance ils attachaient
aux événemens de Waterloo. A la
suite du traité du 20 novembre
181 5, lord W'ellington réunit les
fonctions diplomatiques à sou
commandement militaire; devenu
ainsi responsable des mesures dic-
tées par le comité qui, depuis
celte époque , a paru gouverner
l'Europe. Sa gloire a déjà trouvé
des juges sévères, et peut -être
des détracteurs chez les peuples
qui ont cru avoir à se plaindre de
ces mesures dont il n'était quo
l'instrument. Au reste, on s'ac-
corde à rendre justice à son im-
partialité dans les discussions qui
ont eu lieu entre les puissances
alliées et la France, au sujet des
réclamalions que faisaient les su-
jets de ces puissances contre le
gouvernement français ; il contri-
bua également à l'évacuation de
la France, ordonnée en 1818, par
les souverains rassemblés à Aix-
la-Chapelle. C'est au commence-
WEL
ment de celte année que, rentrant
dans son hôtel à une heure du
matin, on tira, dit-on, sur sa
voiture un coup de pistolet qui
ne laissa aucune Iracu. Cet évé-
nement lut jujçé diver.sement par
le public; il donna lieu à un pro-
cès qui, malgré les recherches les
plus exactes, ne procura aucune
lumière sur les auteurs de cet é-
vénement. Lord Wellington, dans
les diverses positions où il s'est
trouvé, a iTionlré un caractère
honorable; sévère sur la disci-
pline, mais ami du soldat, il sait
l'attacher à ses devoirs en pour-
voyant A tous ses besoins; il fit
aimer riiumanité aux guérillas en
donnant trois piastres pour cha-
«jiie prisonnier qu'on lui amenait;
enfin étant généialissime des trou-
pes étrangfères eu France , il évita
autant qu'il le put la vicdence et
les désordres. Quant à ses lalens
diplomatiques, on ne put guère
en juger dans la mission toute
pacifique qu'il remplit en France.
11 est bien difficile de n'avoir pas
raison quand on peut disposer de
i5o,ooo baïonnettes. Lord Wel-
lington, depuis son retour dans
sa patrie, s'est peu lait remar-
quer dans les débals parlemen-
taires, si ce n'est par «on opposi-
tion constante aux vœux de ses
compatriotes d'Irlande. 11 a élé
nommé, à la fin de 1818 , grand-
maître de l'artillerie, charge qu'il
occupe encore aujourd'hui (1825).
Lareconnaissancenatiotialea vou-
lu ajouter aux dons brillaus et so-
lides dont le général anglais avait
élé comblé, plusieurs monumens,
parmi lesquels on ci le le pont dit de
/^a/cr/00. Lord Wellington a deux
fils de son mariage avec miss Pan-
WES 267
kenham; l'aîné, .Igé de 18 ans,
porte le titre de marquis de Doue-
ro. Il ne sera pas sans intérêt pour
le lecteur de connaître l'opinion de
l'empereur Napoléon sur lord Wel-
lington, que les hardis pruneurs de
ce général ont osé mettre en paral-
lèle avec le premier capitaine des
temps modernes. » Lord Welling-
ton, disait l'empereur [voj. les
uîémoires de M. Las Cases, tome
Vll,pag. 277), n'a qu'un talent
spécial ; Berthicr avait bien le
?ien. 11 y excelle peut-être ; mais
il n'a pas de création ; la i'ortune
a plus fait pour lui qu'il n'a fait
pour elle. Quelle différence avec
ce Marlborough , désormais son
émule et son parallèle ! Marlbo-
rough, tout en gagnant des ba-
tailles , maniait les cabinets et
subjuguait les hommes. PourWel-
lington, il n'a su que se mettre à
la sm'te des vues et des plans de
Castelroagh ; aussi M'" de Staël
avait-elle dit que, hors de ses ba-
tailles, il n'avait pas deux idées...
Ses victoires, leur résultat, leur
influence hausseront encore, mais
son nom baissera , même de son
vivant, etc. » M. de Las Cases
avait rapporté (pag. 275 et 27G )
ce qui suit : « On m'assura, disait
Napoléon , que c'est par Welling-
ton que je suis ici ( Sainte-Hé-
lène ) , et je le crois. C'est digne ,
du reste, de celui qui , au mépris
d'ime capitulation solennelle , a
laissé périr Ney, avec lequel il
s'était vu souvent sur le champ de
bataille. Il est sftr que pour nmi
je lui ai fait passer un mauvais
quart -d'heure. C'est dèsormaiH
nu titre pour les grandes Ames ;
la sienne ne l'a pas senti. Ma
chute et le sort qu'on nie rcser-
a68
WEL
v;iit lui ménageaient une gloire
bien supérieure encore à toutes
ses victoires, et il ne s'en est pas
tlouto. Ah ! qu'il doit un beau
cierge au vieux Blucher ! Sans
celui-là , je ne sais pas où serait
sa Grâce, ainsi qu'ils l'appellent;
mais moi , bien sûrement je ne
serais pas ici. Ses troupes^ont été
admirables, ses dispoî'itions à lui
pitoyables, ou pour mieux dire,
il n'en a fait aucune. Il s'était mis
dans l'impossibilité d'en faire, et,
chose bizarre, c'est ce qui a fini
par le sauver. S'il efit pu com-
mencer sa retraite, il était perdu.
Il est demeuré maître du champ
de bataille, c'est certain ; mais Ta-
l-il dû à ses combinaisons? Il a
recueilli les fruits d'une victoire
prodigieuse ; mais son génie l'a-
vait-il préparée?... Sa gloire est
toute négative; ses fautes sont im-
menses. Lui, généralissime euro-
péen, chargé d'aussi grands inté-
rêts, ayant en front un ennemi
aussiprompt, aussi hardi que moi,
laisser ses troupes éparses, dor-
mir dans une capitale , se laisser
surprendre! Et ce que peut la fa-
talité quand elle s'en mêle ! En
trois jours, j'ai vu le destin de la
France , celui du monde échapper
à mes combinaisons! D'abord sans
la trahison d'un général qui sort
de nos rangs pour aller avertir
l'ennemi, je dispersais, je détrui-
sais toutes Ces bandes, sans qu'el-
les eussent pu se réunir en corps
d'armée; puis, sur ma gauche,
sau,s les hésitations inaccoutumées
de ISey aux Qualre-Bras , j'anéan-
tissais toute l'armée anglaise. En-
fin, sur ma droite, les manœuvres
inouïes de Grouchy, au lieu de
garantir une victoire certaine, ont
WES
consommé ma perte et précipité;
la France dans un gouffre. » Le
docteur O'Méara, dans ses Mé-
moires (tome 1", p;»ge 4^2 )j ^e
trouve en parfaite harmonie avec
M. de Las Cases sur la conduite
de-lord Wellington à Waterloo. A
son rapport, Napoléon dit parti-
culièrement : « Il n'avait aucun
moyen de retraite, et s'il eût cher-
ché h l'effectuer, il n'aurait pas
sauvé uii seul homme de son ar-
mée. Il dut le gain de la bataille
d'abord à la fermeté et à la bra-
voure dos troupes, car les Anglais
se sont battus avec le plus grand
acharnement et le plus grand cou-
rage ; ensuite à l'armée de Blu-
cher, à qui on devrait plutôt at-
tribuer la victoire qu'au duc de
Wellington , parce qu'il a déployé
plus de talent comme général.
Battu la veille, il avait rassemblé
ses troupes , qu'il conduisit au
comb«t dans la soirée. »
AVESTERMANN (François-Jo-
seph), général au service de la ré-
publique, naquit en 1764» û Mols-
heim, en Allemagne, et était offi-
cier au service de France, lorsque
la révolution éclata. Républicain
par caractère, il embrassa les nou-
velles opinions politiques avec
une ardeur extrême, et devint
greffier de la municipalité de Ha-
guenau en \y()0. La part qu'il
prit aux troubles qui éclatèrent a-
lors dans cette ville, le fit mander
à Paris, où il fut bientôt chargé de
diriger à la tête des Marseillais et
des Brcslois, l'attaque du 27 juil-
let, 1792. contre les gardes natio-
naux réunis en banquet aux
Champs-Élisées, et dont la réu-
nion était suspecte aux chefs, qui
voulaient le renversement de U
VES
monarchie. Le lo août 1792,
Westermann ù la tête des Bre^tois,
■se signala avec un courage qui
tenait de la fureur à l'attaque du
château des Tuileries, où il entra
le premier. C'est contre les Suis-
ses surtout qu'il montra la plus
grande animosité. Envoyé peu a-
près à l'armée des Ardennes en
qualité de commissaire et avec un
grade militaire, il g;"gna la con-
liaiice de Dumouriez, qui le char-
gea des fonctions d'adjudant-gé-
néral. Westermann, nommé com-
mandant de la légion du Nord,
justifia son avancement par sa
bravoure et ses lalens , et rendit
dos services signalés »'n 1792 et
1 790. Le grade de général de bri-
gade en fut la récompense. Il pas-
sa dans la Vendée, sous les ordres
de liiron , et eut d'abord des suc-
rés vers Parlhenay et (>hraillon.
Mais les revers qu'il éprouva dans
celte dernière ville, le 5 juillet
(179,1), le firent destituer et tra-
duire à la barre de la convention
nationale. S'étanl justifié devant
le tribunal militaire, où la conven-
tion l'avait renvoyé, il repartit
aussitôt pour la Vendée, où , sui-
vant les ordres qu'il avait reçus, il
incendia les villes de Thouars, de
Bressuire et de TifT.inges, et rava-
gea les châteaux et les terres de
lliM. de Lescure et de La Uoche-
Jacquelein. Cette fidélité à des or-
dres barbares ne put le sauver
d'une nouvelle proscription. D«'s-
tilué une seconde fois, et égale-
ment traduit à la barre de la con-
vention, il se justifia. Danton, son
ami, fit rendre un décret où il était
dit que Westermann avait parfai-
tement bien rempli ses devoirs.
Carrier et Collol-d'Herbois l'ac-
MIE
'26^
cu?èrent d'intrigues, et Hébert le
signala burlesquement comme un
vionstrc et un modéré. La vérita-
ble cause de cette inimitié était
l'attachement que Westermann
portait au parti des Cordeliers. Il
fut traduit au tribunal révolution-
naire avec Danton, Camille-Des-
moulins et plusieurs autres, et
condamné à mort le 16 germinal
an 2. Son courage ne se démentit
pas un seul instant, et il reçut la
mort avec le plus grand calme.
WIELAND (CHRisToi-nE-MAR-
TiN ), célèbre écrivain, qui, pen-
dant une longue suite d'années, a
illifhtré la littérature germanique,-
par de nombreux ouvrages, tant
en vers qu'en prose, naquit en
1755, dans la petite ville de Bibe-
rach, en Souabe. Il fil d'excellen-
te» études, qu'il acheva à l'univer-
sité saxonne d'Erfurt. Son goftt
pour les vers se développa de
bonne heure. A l'âge de 14 ans, il
avait composé un poëme sur la
Destruelion de Jérusalem, ouvra-
ge qui annonçait déjà un talent
réel. Bientôt le jeune poète prit
un essor plus élevé, et marcha de
succès en succès. Doué d'une sen-
sibilité véritable, d'une imagina-
lion brillante, et sachant don-
ner à la langue allemande, riche
mais rude, une flexibilité mu-
sicale et gracieuse inconnue avant
lui, il excita l'enthousiasme de la
plupart de ses concitoyens, qui
lui décernèrent le surnom glo-
rieux de l^oltaire de l' Allemagne.
Wicland ne s'est pas sans doute
toujours distingué par ce tact
exquis, ce goût aussi sûr que fin,
qui caractérisent éminemment la
plupait des productions de l'in-
cumpurabl^ écrivain dont la Fran-
«70 M'tE
te s'honore. Mais au moins s'en
rapproche-t-il souvent par réclat
de son imagination, par une laci-
Mté extraordinaire à traiter toulea
sortes de sujets, à passer du grave
au doux, du plaisant au sévère, i\
faire jjadiner la philosophie, et ;\
orner des grâces du plus aimable
enjouement, les austères précep-
tes de la morale même. W'ieland
avait étudié les anciens d'une fa-
çon plus érudile que la plupart
des poètes , et joignait à ses talens
des connaissances étendues. Sa
conversation était pleine de char-
nue; animé, enthousiaste comn)e
tous les hommes de génie, il avait
conservé jusqu'à la lin de sa lon-
gue et honorable carrière tout le
feu de son heureuse jeunesse.
Quelques critiques envieux, s'a-
charnèrent après ses ouvrages ,
mais ne purent troubler sa vie.
Son noble caractère le mettait à l'a-
bri de toute atteinte partie d'aussi
bas; de nombreux amis, les suf-
frages d'un public éclairé, la bien-
veillance a''un prince généreux,
Î|ui s'était lîmpressé de raccueil-
ir dans ses étals, et qui l\ii con-
serva jusqu'à la fin la même alTec-
tion , l'auraient d'ailleurs facile-
ment consolé des attaques de ses
adversaires. Ceux-ci lui repro-
chaient surtout de corrompre le
goût allemand, de manquer de
nationalité, de céder à une in-
ïlucnce étrangère, et de chercher
il transplanter tiur l'antique sol de
la (iermanie les futiles beautés de
la lilléraliire française. Le simple
énoncé de ces gi'iefs suffit pour en
faire apprécier la -valeur. Plus heu-
reux que tant d'antres hommes de
Jcitres ses contemporains, Wie-
iand n'eut jamais à lutter caulre
le besoin , ni à Implorer la pro-
tection du puissant, si souvent |
payée par le sacrifice de l'indé- |
pendance du faible. Cet écrivain
jouit de bonne heure de toute sa
renommée, et des distinctioris
dues i\ sor) mérite. Dès l'année
1762, il se fixa à "Weimar, ville
qu'on appelait déjà V Athénée de
C Allemagne, où une cour libéra-
le recherchait la société des hom-
mes les plus distingués , et où l'a-
mour des lettres et des beaux-arts
servait de lien fraternel entre toua
les rangs. Il y contracta une heu-
reuse alliance qui répandit du
charme sur le reste de sa vie. Ad-
mis bientôt dans la familiarité des
souverains, il fut nommé par le duc
de SaxeWeiinar son conseiller in-
time. Les principales académies de
l'Europe s'honorèrent en l'admet-
tant au nombre de leurs mem-
bres. Napoléon lui envoya la croix
de la légion-d'honneur, et plu-
sieurs princes, à son exemple, le
décorèrent de leurs ordres. Char-
gé d'ans et d'honneurs, Wieland
termina paisiblement sa carrière
au milieu d'amis fidèles, et au sein
d'une famille qui le cliérissait ten^
dremcnt. Il mourut à "NVeimar,
vers la fin de 1818, à l'âge de 85
ans. Ses œuvres complètes, qui
ont eu plusieurs éditions en Alle-
magne, forment un grand nombre
de volumes. JNous nous bornerons
à citer ici quelques-uns de ses ou-
vrages. Ses premiers essais furent
des imitations des anciens. A 18
ans, il publia un Art d' Aimer j
peu de temps après parut un Poè-
me sur la nature des choses, qu'il
avait terminé en trois mois, et
dans lequel on trouve développés
avec talent, les systèmes philoso-
AVIE
j)hiqiies tle IMalon et de Lribnitz.
Deux Iragéflies et deux poèmes
envers licxainètres, l'un intitulé
Abraham, et l'nulre, Cyrus, suivi-
rent de près. Le foinan philoso-
phique d'Agal/ion, qui pa^se pour
un des chefs-ii'œnvre deWieland;
celui do Peregrinus Protéc, ou les
dangers de C enthousiasme , que
plusieurs personnes préfèrent en-
core, une foule d'autres ouvrag:es
en prose, prouvèrent la fécondité
inépuisable et la flexibilité du ta-
lent de cet auteur, qui se prêtait à
d»;3 sujets aussi divers, et qui sut
fondre habilement dans tous ses
écrits, la philosophie et l'érudi-
tion, la sensibilité et Tenjoue-
inent. Musarion, la Philosophie
des Grâces, Idris, })oëni(* héroï-
comique, l'Histoire d'un jeune
Grec, le Miroir d' Or ou les hois
du Cliéchian, roman politique,
II* Nouveau Don Quichotte, le char-
mant poëme (VObéron, qui seul
efit suin pour placer le poète au
faîlc du Parnasse germanique,
des poésies légères pleines de grâ-
ces, des Nouvelles comiques , sont
encore dus à sa fertile plume. Dis-
ciple de Socrate et de l'iatori, sou-
vent heureux émule d'Horace,
de Tibulle, de Lucien, couleur
nimahle connue ILtmilton, on
ri;lrouve encore dans se» écrits en
jirose, une partie de la grâce et
lie la facilité de Voltaire, et dans
])lusieurs de ses poëmes (tels
qu'Idris et Obéron), la verve et
l'imagination féconde de l'Arios-
le. Ainsi que les hommes de let-
tres les plus distingués de son é-
po(jue, Wieland était sincère ami
de In liberté, et fut fidèle à celle
noble cause jusqu'à sa mort. S'il
y avait quelque seeplicisme en sa
WIE
271
philosophie, il n'y avait ni doute
ni hésitation en son dévouement
à la pairie et aux intérêts sacrés
de riiuiiianité. Il rédigeait encore
en 1818, année de sa mort, un
journal politique intitulé l'Amida
peuple^ dans lequel il donnait un
libre cours à ses seniimens. Celte
feuille, conlinuée quelque temps
par un digne successeur, qui ma-
nifestait les mêmes principes li-
béraux, a été supprimée avec la
liberté de la presse, dont les con-
grès de Carlsbad et de Vérone ont
jugé l'Allemagne indigne de jouir.
Les ouvrages de Wieland ont pas-
sé en grande partie, par des tra-
ductions plus ou moins heureu-
ses, dans toutes les langues de
l'Europe. Plusieurs écrivain» é-
trangers ont aussi puisé largement
dans cette mine féconde, sans in-
diquer leurs emprunts. Il existe
en français une traduction de l' A-
gathon, une plus estimée encore
du Peregrinus Protée, par M. Grif-
fet de la Baume; dans celles
A'Oheron et de quelques autres
poëmes, les traducteurs ont eu à
lulter contre la dilïiculté presque
insurmontable de transmettre en
une langue si diiTérente de tours,
de construction et de génie, les
beautés originales de la poé^^ie teu-
tonique. Aussi ces imitations, qui
ne donnent qu'une faible idée de
l'original, ont-elles été peu re-
cherchées.
WIELHORSRI (Joseph), gé-
néral polonais, elc. , était déjà au
service avant 1792. Ayant passé
dans les légions polonaijies en Ita-
lie, il devint, au bout d'^ quelques
années, général de brigade, et re-
tourna dans son p^iys pour y vivre
dans la retraile. Il reprit du sef-
■37^
WIL
vice en 1806, et fut nommé suc-
cessivement conseilier-d'état , et
direcleur de l'admiiiislration de
la {^lierre sons le prince Ponia-
towski, alors mini-'-lre de la guer-
re, il occupa ce poste jusqu'en
1814 > el fut appelé par l'empe-
reur Alexandre à être membre du
comité organisateur de l'armée
polonaise. Mommé ministre de la
guerre, il mourut dans celte char-
ge. Doué d'un esprit vif et délié,
d'un caractère aimable , d'une
grande facilité dans le travail , il
sut, comme homme public, mal-
gré ixne maladie chronique qui- le
retenait au lit une partie de sa vie,
et lui causait des douleurs affreu-
ses, il sut, disons-nous, se rendre
utile et nécessaire au gouverne-
ment dont il était toujours un des
membres les plus actifs; coniuie
homme privé, il fut toujours d'un
commerce facile et agréable.
WILBERFORCE (N.), mem-
bre de la chambre des coramune.s
du parlement anglais, est né, en
1759, à Hull. Il fit ses études à
l'université de Cambridge, et s'y
lia intimement avec William Pilt.
Dès l'âge de 21 ans, il fut chargé
par sa ville natale de la représen-
ter au parlement. L'aimée sui-
vante, en 1787, il fut réélu, et
commença à se faire remarquer
en proposant l'abolition de la trai-
te des noirs, proposition qu'il sou-
tint avec une grande énergie ,
qu'il reproduisit souvent, et qui
enfin triompha des plus grands
obstacles. Approbateur de la ré-
voluticm française, il mérita, le
26 août 1792, sur la proposition
de lirissot, des lettres de citoyen
français. Il justifia cette glorieuse
adoption par le zèle et le courage
WIL
avec lesquels il cornballit,de i fO*
à 1 79b, le parti ministériel, si for-
tement prononcé contre la France.
Ses discours à ce sujet et sa noble
persistance dans la cause de l''^
boliiion de la traite fixèrent l'at-
tention de tous les amis de l'in-
dépendance des peuples et de
l'humanité; mais il perdit beau-
coup de la considération qu'il a-
Vdil acquise lorsque , en 1801, de-
venu approbateur des actes du
ministèrt- , il s'éleva contre ce qu'il
appelait les vues dominatrices du
premier consul Bonaparte. On le
vit ensuite, non -seulement ap-
puyer la suspension de l'acte lia-
beas corpus, mais encore réclamer
le renouvelleujent du bill contre
les séditions, et accuser les mem-
bres de l'opposition de n'attaquer
ces me^ur•;s ultra - ministérielles
« que parce qu'ils en craignaient
l'eflet pour eux-mêmes. » Des es-
pérances trompées ou une varia-
tion trop habituelle aux hommes
d'état qui cherchent la fortune ou
la célébrité partout où ils espè-
rent raUeindre,le raiiienèrrnt sur
les bancs de l'opjiosition. Le 3o
avril i8of» , il provoqua la révoca-
tion i\u bill sur les forces addi-
tionnelles. En 1807, de nouvelles
espérances ou la même mobilité
d'opinions le rattachèrent aux mi-
nistres. Il combattit la motion de
lord Percy, tendante à donner
graduellement la liberté aux noirs
esclaves dans les colonies anglai-
ses, déclarant «que telle n'avait
jamais été son intention. » Dans'
la même année , il soutint le parti
des ministres contre lord Cochra-
ne, qui accusait les homtncs en
place de cumuler scaudaleuse-
raent les traitemens et les pen-
^VIL
slons. Il vola, en 1810, en faveur
de la résolution qui accordait la
ré{^ence au prince de Galles, avec
des re^tri^•tions dont l'opposition
deuiandail l'anéanlissement. Les
niinislres le retrouvèrent, en 1811
etea l^>l2, parmi leurs partisans.
Srs attaques contre les luddistes
le flrtnl aoeuser par sir Francis
liiirdett d'être « prêt A souscrire
à la torture et aux lois de sang que
l'on avait suivies en Irlande. » On
le vit encore, en 1814» s'opposer
à la proposition en laveur des
Norwégiens, qui réclamaient leur
indépendance politique. Depuis ce
temps, considéré comme un appui
du ministère, M.Wilberforce a l'ait
suspecter injustement sans au-
cun doute sa sincérité pour la li-
bi-rté des noirs. Quels qu'aient
été au surplus ses motifs dans
cclli; célèbre cause , les philan-
llutqies ne voient que rbeureux
résultat de ses elforts, et leur es-
time est en propDrlion de l'im-
portance du bienfait. iM.'Wilber-
î'orce a pi\blie,en \'^Ç)-,\xn Exa-
men pratiffue (h's sectes religieuses
admises en Angleterre, et contraire
au léritahie esprit du christianisme.
Cet ouvrage eut du suceès, et fut
plusieurs fois réimprimé.
WILKKS (N.), célèbre aider-
niau et ensuite maire de liOndres,
naquit dans celte ville, où il se fit
connaître pardesécrils énergiques
et parsim oppo^^ition aux doctrines
des ministres. Membre de la cham-
bre des communes en i ^O 1 , il sou-
tint avec j)lus d'éneigie encore ses
principes politiques. Les minis-
tre-* aux(|uels il était devenu o-
dicux le privèrent injustement
de sa librrté; mais il lu recou-
vra, et attaqua vigoureusement
T. XX.
WIL
275
ses oppresseurs : il en obtint des
dédommagemens considérables.
Long-temps l'idole du peuple, il
rentra peu à peu dans l'obscurité,
et mourut dans une sorte d'oubli
en 1797. On trouve dans la Cor-
respondance de La Harpe le por-
trait de ce célèbre alderman, tracé
par tm de ses compatriotes. Voici
les passages les plus remarqua-
bles : «'L'histoire a fait souvent
justice des favoris des rois; il est
peut-être bon de faire connaître
un homme qui est devenu l'itlole
du peuple anglais. Chez lui l'en-
thousiasme est plus triste et plus
dangereux que dans un autre pays,
et un homme y a plus de liberté
pour devenir méchant et factieux.
Wilkes le sut, et conviul souvent
qu'il n'eût osé être ce qu'il était,
s'il n'eût connu son pays. Sa nais-
sance était obscure ef sa laideur
célèbre : ses porirails, qui sont eu
grand nombre, eu donnent tme
faible idée. Il était louche, ses
dents étaient mêlées et crochues;
son rire avait quelque chose d'in-
fernal ; toutes ses passions se pei-
gnaient avec énergie sur son vi-
sage , mais sa phyyicmomic faisait
pardonner ses traits, il aima beau-
coup les femmes, et il se sentait,
disait - il , capable de les aimer
toutes, excepté la sienne. II em-
ploya avec succès les moyens or-
dinaires de se ruiner vile ; la né-
cessité le lit écrire, et son goût
l'a rendu écrivain factieux. Il a
renoncé avec éclat aux grâces pu-
bliques de lu cour, pour être plus
sûrement le pensionnaire du peu-
ple ; d'ailleurs il était trop odieux
au roi et trop avili , pour qu'on
pût se résoudre à l'élever. Il sup-
pléa pur ses écrits au talent de
18
a74 WIL
parler en public, que la nature lui
avait refusé; sou style est clair,
énergique et pur, quoique fijçuré
à l'excès. On dit que la logique
de l'intérêt est courte; c'était la
sienne. Sou intrépidité brava tous
les événeniens . et il s'est inonlré
avec courage dans quelques affai-
res d'honneur. Sa conversation
était vive et spirituelle , mais il y
mêlait sans cesse des propos au-
dacieux et des bouflbnneries ines-
séantes. Il a osé taire mettre dans
les papiers publics un parallèle
de lui avec Brutus, libérateur de
IVome, et un autre de sou his-
toire ( Introduction à l'histoire
d'Angleterre) avec celle de Hu-
me. »
WILLOT ( LE COMTE ÂMÉDÉB
PE ) , lieutenant - général , con»-
niandeur des ordres de Saint-Louis
et de la légion-d'honiieur, est né
a Saint - Germain - en - La^'e , et
était oiïicier à l'époque de la ré-
volution, il lui dut un avance-
ment rapide ; car dès le commen-
cement d'avril ijgS, il était gé-
néral de brigade. Pour parvenir
en si peu de temps aux premiers
grades de l'armée, il fallait avoir
à un I aut degré l'esprit du temps
ou posséder de grands talens mi-
litaires. Nul doute que ce ne soit
à ses talens qu-'il dut son avance-
ment; toutefois la mauvaise for-
tune l'emporta sur le mérite. Bat-
tu à Perpignan et accusé d'impé-
ritie , il fut suspendu. Uemis en
activité, il défit Tenoemi, au mois
de juin 1795, au passage de là
Deva, et au mois de juillet sui-
vant, il entraîna, par les affaires
des 14 et 1 5, la reddition de Bil-
bao. II devint général de division
à l'époque où la paix. fut conclue
NVIL
avec l'Espagne (1795). Chargé
d'un commandement sous le gé-
néral Hoche dans la Vendée, il se
brouilla avec son chef pour cause
d opinion dans les affaires de
l'Ouest. Kn 1796, il fut envoyé
dans le Midi, où .sa conduite est
expliquée par la lettre (|u il écri-
vait au directoire-exécutif, lettre
dont nous citerons un passage qui
n'aura pas besoin de commentai-
res , les faits sont assez connus :
« Les royalistes qui assassinent les
républicains, disait-il dans cette
lettre, les émigrés débarqués sur
nos côtes, ne sont que des fan-
tômes grossiers, avec lesquels on
veut alarmer le gouvernement,
pour donner une fausse direction
à sa vigilance; le seul parti qu'il
ait à combattre, est un amas d'a-
narchistes , de brigands et de scé-
lérats de toute espèce qui infes-
tent ces contrées. » Sa haine pour
la famille du général Bonaparte,
qui combattait glorieusement en
Italie, si; manifesta à cette épo-
que par loutt-s sortes de persé-
cutions subalternes. En l'an 5
(1797), le département des Bou-
cheïi-du-Rhône nomma le géné-
lal Willot député au conseil des
cinq cents, où il fut un des chefs
de la faction de CUcliy. Il attaqua
M. de ïalleyrand , qui venait d'ê-
tre nommé ministre, et ne cessa,
pendant quatre mois, de harceler
par ses dénonciations le direc-
toire-exécutif, qui, au 18 fructi-
dor, le comprit dans une mesure
de déportation contre plusieurs
raembies du conseil et tous les
membres de la commission des
inspectems de la salle, dont le
général W illot faisait partie. De la
prison du Temple, où il fut d'à-
bord enfermé, il fut embarqué
avec ses collègues à Rocheforl
pour la Guiaiie. Il s'échappa avec
quelques-uns d'enlre eux, et ga-
grïa les colonies hollandaises, d'où
il jiassa en Angleterre, et de là
revint sur le continent. Le pre-
mier consul Bonaparte, qui n'a-
vait point oublié la conduite que
le général Willot avait tenue en-
vers sa mère , ses sœurs et ses frè-
res, l'excepta du nombre des dé-
portés . qu'il autorisa à rentrer en
i7f)<). Le général >Villot, au rap-
port des auteurs de diverses bio-
graphies , chercha pour se venger
;i allmner b guerre civile dans le
Midi, et se fit l'auxiliaire des Irou-
pesautrichiennes dans le Piémont.
La bataille de Marengo détruisit
toutes ses espérances. Il s'embar-
qua à Gênes avec un corps d'émi-
grés suisses et français à la solde
de l'Angleterre, et retourna à Lon-
dres, où il se fit agent des Bour-
bons. Lors de l'envahissement de
la France par les puissances étran-
gères, en 1814, il revint à Paris,
tt bientôt partit pour les Etats-
Lnis. De retour à la fin de i8i5,
il fut nommé gouverneur de la
20'' division militaire, devenue 17'
division en 1818. (Je commande-
ment lui fut retiré en juin 1818,
et rendu eu 1819, Il « ces?é d'en
être revêtu en iHu'j.
WILSON (siH Robert- Tho-
mas), major-général anglais, né
à Londres en 1777, d'un («ère qui
avait acquis de la célébrité comme
peintre et comme écrivain. Après
avoir fait d'excellentes étudi-s, il
entra dans la carrière militaire.
Kn mars 1793, lorsque le duc
d'York eut débarqué avec les
troupes anglaises ù U elwo et Sluys,
WIL q;5
lejeuneWilsonserenditen Hollan-
de auprès de ce prince, auquel il fut
présenté par son beau-frère , le
lieutenant - colonel Boswell. Le
duc d'York agréa l'olFre de ses
services, et il fut nommé, peu de
temps après, lieutenant dans le
i5° régiment de dragons. Il trou-
va bientôt l'occasion de se distin-
guer par sa ;aleur et ses talens
militaires. Pendant la campagne
de Flandres, en 1794, il eut, le 24
avril , en accourant bien A propos
avec plusieurs de ses jeunes ca-
marades , l'avantage insigne de
sauver l'empereur d'Allemagne,
qui s'était Hventuré loin de son
camp avec une suite peu nom-
breuse, et qui allait être fait pri-
sonnier par des hussards français.
Une médaille fut alors frappée en
l'honneur de sir Robert Wilson,
et il fut en outre décoré de l'or-
dre uulitaire de Marie -Thérèse.
Peu de temps après, il fut nom-
mé capitaine, et passa avec son
régiment en Irlande, où il servit
pendant les troubles de ce pays.
Kn 1799, il accompagna de nou-
veau le duc d'York dans sa se-
conde et désastreuse expédition
de Hollande. De retour en Angle-
terre après la retraite précipitée
de ce prince , il entra comme ma-
jor dans un régiment levé par le
baron de Hompesch, et s'embar-
qua avec ce corps pour l'Egypte,
où il se fit encore remarquer dans
plusieurs or;casions importâmes.
Le commandant en chef de l'ar-
mée anglaise le chargea de dilTé-
rentes missions auprès du capiian*
pacha, dont il s'acquitta ave(; suc-
cès. Après que le général Kléber
cul été assassiné, et que son suc-
<^esseur au cumiuandeineat eut
•.-;6 WIL
conclu la capitulation, ù la siiile
de laquelle \ts liuu[)es JVariça!>t'S
éyacuèient l'Ejryptc , ^ir Robert
reviiit tu AnyleU'rio , et y f>"blia
lin jneiuier onvraj^e , iiilidilé :
Histoire de l'expédiliun des An-
glais en Egypte , à laquelle est
joint un élut présent du pays et de
ses moyens de défeme^ avec cartes
et le portrait de sir Ralpk Aber-
cromhy. l/auteiir y montre une
grande aniniosilé contre Je général
en chel' Bonaparte, cl rapporte, t^ur
ouï dire, quelques tiiits dont l'exa.--
titude a été contestée; iiuiie l'es-
prit même dans lequel cet ouvra-
ge, d'ailleurs plein d'intérêt, avait
été conçu, devait à cette époque
en assurer le succès en Angle-
terre ; aussi eut-il cinq éditions
consécutives qui rapportèrent à
l'auteur plus de i,5oo liv. sler-
lings. Le régiment de Hompcscli
l'ut licencié quelque temps après,
et sir Robert se lr(jiiva réduit à la
demi-solde de lienlenant-colonel.
Il rentra en activité de service
dans le 20* régiment de dragons,
«t passa au Brésil, sous les ordres
de sir David liaird, qu'il &uivit
au cap de Bonne-Espérance, et
contribua à la prise de posses-
sion de celle riclie colonie par les
troupes anglaises. Au mois de
novembre r8o6 , il accouipagna
le génériil Hulscbinson , que le
gouvernetnent avait chargé d'une
mission secrète auprès de l'empe-
reur de Russie. Toujours avide
d'action et de combats, sir Ro-
bert Wilson senit comme volon-
taire dans l'armée russe , prit part
à toutes les opérations delà guer-
re contre la Fiance, et déploy;-
une activité et une valeur, que
l'empereur Alexandre crut alors
WIL
doToir récompenser par la déco-
ration , encore peu prodiguée, de
Tordre de Sainl-Georges. Apre*
la paix de Tilsitl , il séjourna pen-
dant quelque temps à Péters-
Innng . y fut accueilli avec la plus
haute distinction, et travailla déjà
à réunir una partie des matériaux
qui lui servirent plus lard pour la
Composition de son ouvrage sur
la Puissance po ili^juc et niititaire
de ta Russie. Revenu en Angle-
terre, le gouvernement le ch.ir-
gea bientôt d'une iriission impor-
tante dans ce même pays où on
l'.ii avait témoigné tant de bien-
veillance, xMais le chel' de l'em-
pire russe venait de changer tota-
lement son système politique.
Une liaison intime s'était établie
entre les empereurs Alexandre et
Napolt'on. Sir Robert ne put ob-
tenir aucune réponse satisl'aisantc
aux demandes qu'il avait été char-
gé de taire ; l'alliance avec la
France était certaine, et une guer-
re entre la Russie et la Grande-
Rretague ne pouvait manquer
d'en être la suite. Sir Robert quit-
ta en toulc hAte Pétersbonrg, fit
une diligence extraordinaire , et
arriva à Londres avant le départ
d'un convoi de brainiens russes,
dont il avait déjà eu l'adresse de
retarder la marche par divers obs-
tacles. L'amirauté anglaise eut
ainsi le temps de faire saisir la
frégate Lespectnoi , qui se trou-
vait encore à Portsmouth, et toute
une flotte russe aurait peut-être
été conquise de même, si les vents
contraires n'avaient empêché sir
Sidnry Smith d'arriver à temps
pour exécuter ses ordres à cet é-
gard. Au commencement de la
guerre d'Espagne, sir Robert Wil-
son fut chargé de se rr.iulre à Lis-
bonne, et d'organii-er une année
auxiliaire portugaise, qui devait
agir de concert avec IfS Anglais.
1! s'acquitta de celte missifui avec
un grand zèle, et les Anglais lui
durent parliculièrenient la forma-
tion de cette légion lusUaine qui
letir rendit bientôt d'iniportans
services. Quand, par un nouveau
revirement politique , la guerre
fulre la France et la Russie fut
décidée, en 1813, sir Robert Wil-
son se hâta de retourner en ce
dernier pays, et d'offrir ses ser-
vices à l'enipereur Alexandre, qui
les accepta. I! fit cette terrible
campagne, dont la fin devint si
luneste à une armée long-temps
victorieuse , seconde toutes les
opérations du général Kiitusnw,
et se trouvait à son quarlier-géné-
lal lorsque l'aide-de-canip de Na-
})oléon, le général Lainiston, vint
proposer un armistice, qui fut
refusé. En 1816, sir Robert Wi!-
son, qui s'était rendu depuis quel-
ques mois à Paris, se trouva porté,
])ar un simple sentiment d'hmna-
nilé , à sauver un homme qui jus-
que là li'i avait été entièrement
inconnu. Le général Lavalette ,
condamné à mort, s'était miracu-
leuseirit'nt échappé de la Concier-
gerie la veille du jour même où
il devait être conduit à l'échalaud.
On sait quels cris de fureur cette
évasion fit pousser à certains hom-
mes avides du sang de leurs con-
citoyens. Les recherches les plus
actives eurent lieu ctintre le con-
duumé, encore caché i\ Paris. Sir
lioherlWilson, MM. Hulschinson
«;t liruce(?;()7. ces rjom»), se dévouè-
rent pour le tirer (1(1 péril éminent
qui planait toujours surs.i tête. Us
^VIL 277
parvinrent à le faire sortir de la
capitale sous le déguisement (\\\\\
olïkier anglais, et sir Robert le
conduisit dans sa voilure jusqu'en
Relj,Mque. De retour \ Paris, la
pari qu'il avait prise à cet acte
fut découverte par la police. Dé-
noncé par un domestique de loua-
ge , qui depuis a'^^ez long-temps
avait remarqué dans l'hôtel ha-
bité par sir Robert, mie voilure
donl on ne faisait aucun n>>age,
quoi(iu'elle parût destinée à un
voyage de long cours, et tenue en
état de partir au premier besoin,
il fut aussitôt arrêté, ainsi que
s<îs deux compatrioles, et conduit
à la Conciergerie. Après une as-
sez longue détention, les trois li-
bérateurs de M. de La validité furent
traduits devant la cour d'assises de
Paris. Us montrèrent une grande
fermeté pendant le cours du pro-
cès. La remarquable extension
flonnce par le ministère public
dans son acte d'accusation, au fait
d'avoir aidé un fugitif, déjà échap-
pé de prison , à passer la fron-
tière, fait traité de conspiration
contre la sôreté do l'état, et les
longs interrogatoires que les ac-
cusés subirent, qtti furent aussi-
tôt produits et publiés dans les
journauxde Londres, excitèrent un
é ton ne ment général en An gh; terre.
Les militaires téiT)oignèrent sur-
tout en cette circonstance le vif
intérêt qu'ils portaient à leurs frè-
res d'armes , et quelque temps
après toutes les feuilles publiques
se prononi'èrent avec indignation
contre la pidjlicilé donnée dans
tlie Courier, à une lettre confiden-
tielle écrite par sir Robert W'ilson
à un de ses amis à Londres, pu-
blication qui ne pouvait avoir eu
278
WIL
lieu qu'après la violation du secret
des postes. Sir Robert Wilson
fut enfin condamné , ainsi que
ses deux compatriotes, à trois
mois de prison, peine qu'il subit
i\ laConcier^'eric de Paris, et dont
où lui aurait probablement fait
remise, s'il avait voulu condes-
cendre à demander cettr grâct; au
gouvernement français. On peut
le supposer d'après la manière
dont le roi Louis XVIII envisa-
gea depuis lui-même celte cause.
L'intervention des trois étran-
gers, de quelque manière qu'on
la considère , a au muins fourni
au monarque , l'occasion de faire
plus tard grâce entière à M. de
Lavaletle. Au mois de juillet, sir
Robert revint à Londres, oi^ll fut
accueilli avec enthousiasme par le
jieuple et par ses nombreux amis.
Un ordre du jour du prinee-ré-
gent, daté du lo mai, avait ce-
pendant improuvé la conduite du
général-major Wilson et du capi-
taine Hutschionon ; mais IV Idgs
et Torys se réunirent en celte
occasion pour fêler ceux qui a-
vaient arraché à la mort une vic-
time intéressante. En 1821, sir
llobert Wilson fut nommé par les
électeurs de Southwark (Londres)
membre de la chambre des com-
munes. Il prit rang parmi les plus
zélés défenseurs *\i:,i) libertés na-
tionales, et fit preuve dans plu-
sieurs circonstances de talens ora-
toires Irès-dislingués. Le 4 juillet
de la même année, il parla avec
force contre l' alliert^bitl , et cita à
l'appui de son opinion la conduite
plus que rigoureuse tenue envers
le général Gourgaud, M"" de Mon-
tholon et un vieux prêtre arrivant
de Sainte-Hélène. Mais ce qui pa-
WIL
rut surtout lui avoir attiré l'ani-
madversion personnelle du sou-
verain, c'est que tians le procès
de la malheureuse reine Caroline
d'Angleterre, sir Robert Wilson,
qui n'avait point d'abord paru fa-
vorable à la cause de cette prin-
cesse , l'embrassa avec chaleur
après le scandale occasioné par
l'audition de quelques témoins
italiens, que les ministres avaient
fait venir de Milan. La reine ayant
succombé peu de temps après à
une maladie aiguë, le peuple de
Londres voulut rendre à sa dé-
pouille mortelle tous les honneurs
qui dépendaient de lui; mais le
ministère avait résolu , en l'ab-
sence du roi, alors eu Irlande, que
le convoi funèbre ne passerait
que par des rues détournées de la
capitale. Le peuple indigné se
souleva. Malgré l'emploi de la
force armée et tous les efforts des
Life-Guards, qui tirèrent sur la
multitude, tuèrent deux hommes
et en blessèrent un grand nom-
bre, le peuple l'emporta, et fit
passer le convoi h travers la cité,
où le lord - maire se porta , dès
l'entrée , à sa rencontre. Il fut
prouvé que loin d'exciter les trou-
bles, sir Robert Wilson avait cher-
ché à les apaiser. Se trouvant à
cheval ( dit le Times et antres
journaux impartiaux ) à côté de
plusieurs gentlemen, qui étaient
venus pour rendre leurs derniers
devoirs à la reine, lorsqu'il en-
lendit tirer, il voulut d'abord se
rendre à l'endroit d'où partaient
les coups de fusil, pour connaître
au moins la cause qui avait porté
les troupes à faire feu. Ses amis
cherchèrent à l'en empêcher, en
lui faisant observer que sa pré-
scnce pourrait être interprétée
d'une, manière perfide. Sir Robert
répondit que cflte considération
ne pourrait l'arrêter tant qu'il y
aurait une chance de sauver la vie
d'un seul homme ou d'empêcher
les militaires de se porter à des
actes de violence. Il s'approcha
donc de l'officier commandant, et
lui demanda tout simplement si
c'était par ses ordres que les sol-
dats tiraient. L'officier répondit
que non. — Pour rameur de Dieu,
interposez-vous donc, et prévenez
l'effusion du sang, lui criait le gé-
néral. Le (eu ne tarda pas en eff"*-!
à cesser par l'intervention des of-
ficiers. « Il eût mieux valu, dit le
journal ministériel t/ie Courier,
que mille hommes eussent péri,
«t que l'autorité n'eût pas eu le
dessous. On lui répliqua qu'il va-
lait peut-être mieux sauver la vie
à mille citoyens que de satisfaire
à l'orgueil (l'un ministre. Le gé-
néral AVilson n'en reçut pas moins,
le 17 septembre suivant, une let-
tre du duc d'York, qui, en qua-
lité de généralissime des armées
britanniques et de chef de l'admi-
nistration de la guerre, lui an-
nonçait que le roi n'avait plus
besoin de ses services, et qu'il
était même privé de sa demi-
solde. Cette rigueur, jusque -hî
sans exemple dans les fastes mi-
litaires de la (irande-Brelagnc, fit
une vive sensation dans le ptiblic.
On rappela une autre lettre du
duc d'York, bien difTérenle de
celle-ci, dans laquelle le généra-
li>isime annonçait à sir Robert
qu'il l'avait recommandé au prin-
ce-régent, non-seulement comme
méritant de ravancemenl , mais
comme candidat pour lecomtnan-
dément d'im régiment de cavale-
rie, poste qui rapportait au moins
2,000 liv. sterl. (5o,ooo fr. ) par
an. Maintenant rayé des contrôles
de l'armée sans examen de sa
conduite ni jugement préalable,
sir Robert Wilson adressa plu-
sieur= lettres au prince généralis-
sime et aux ministres, ne sollici-
tant, il est vrai, aucune grâce,
mais demandant instamment à
être traduit devant un tribunal
comjiélent pour être jugé suivant
toute la rigueur des lois. Il ne put
obtenir qu'on fît droit à ces récla-
mations. Sir Rol)crt venait à cette
époque il'accompagner en France
lady Wilson , dont la santé lan-
guissante réclamait des soins et
un climat plus doux. Le minis-
tère français lui fit intimer l'ordre
de quitter immédiatement Paris,
et sous peu de jours la France.
Pendant son absence d'Angle-
terre, ses amis et un grand nom-
bre de personnes auxqnellts il
était entièrement incormu , s'é-
taient concertés et avaient résolu
d'acheter une annuité égale an
double de la demi-solde de major-
général, afin de l'off'rir ["i sir Ro-
bert comme un témoignage de
l'estime et de la reconnaissance
de ses concitoyens. Une souscrip-
tion fut ouverte aussitôt, (!t l'on
remarqua une personne qui déposa
de suite 5oo iiv. sterl. Les élec-
teurs de Southwark se réunirent
dans le même dessein , sous la
présidence du dernier lord-maire,
i'alderman Wood , et avant la fin
du mois d'octobre, plus de 0,ooo
liv. sterl. (i5o,ooofr. environ)
furent consacrée^ à cet acte de ré-
munération nationale. Le 2H avril
i8s3, sir Robert Wilsou publia
28<y WIL >V1L
une adresse aux élccleurs de dont les Ircjupes Tniiir lises ne lar-
SoiUinvark , pour leur annoncer dèient pas a s'trii[);jr«T. Vivement
qu'il se rendait en Kspngne. « Cer- ponrs.iivi et ;i la v«;iile d'être lait
taines circonstances , leur dit-il, prisonnier, il n'eut que le temps
m'ont autorisé S croire que ma de s'end)aiquer n la liTite sur le
jnésence sur ce cliamp de bataille yacht anglais le Nassau, qui (il
sera vue avec plaisir par les dé- voile pour Lisbonne, où il arriva
fenseurs des droits < onsiilulion- le 7 août. Une révcWution rujuvelle
nels. Je pars donc, non pour sa- venait aussi de s'opérer en Porlu-
tisfaire une ambition personnelle gai. Les officiers anglais ne pu-
qui, dans l'élat actuel des choses, rent obtenir la permission de dé-
serait une ambition sans gloire; barquer ; il fut même question de
je pars, non pour prendre parti s'emparer de leurs personnes. Dé-
dans des discordes civiles an mi- jà des soldais portugais envoyés à
lieu desquelles il ne convient à bord du Nassau, comiricnçaient
aucun étranger de s'engager, ex- à en couper les cordages , pour
cepté pour y jnuer le rôle de pa- l'etnpêclier de remettre à la voile;
cificateur; mais je m'attache à la mais les Anglais s'armèrent à leur
jcirtune de l'Espagne , à l'heure tour, et résistèrent vigoureuse-
de la détresse et du péril, résolu ment à celte violence. Il fut enfin
do partager tous ses efforts. » Il permis au yacht Ir. Nassau de par-
offrit d'ailleurs en cet écrit aux tir avec ses passagers pour Gi-
électeurs de Southwark, le choix braltar. Indigné des Irailemens
de le conserver comme leur dé- qu'il avait éprouvés dans la rade
pnlé à lu chambre des comniunes, de Lisbonne, sir Robert écrivit
ou de passer à une nouvelle élec- une lettre au ministre comte Pal-
tion. Ceux-ci ne jugèrent point à mella, pour lui annoncer qu'il ne
propos de lui ôter leur confiance, voulait plus êire compté au nom-
et maigre son absence, il continua bre des chevaliers de l'ordre de la
à être compris au nondjre des Tour et de l'Épée , dont le roi de
membres du parlement. Arrivé Portugal lui avait auparavant en-
en Espagne avec le colonel Lighf, voyé la grande cioix. Le ministre
lord Eskine et plusieurs volon- s'empressa de son côté de publier
taires anglais, il fut nommé lieu- qu'il était rayé de la liste des
tenant - général par les coriès ; membres de cet ordre. Aussitôt
mais la cause des conslilulionnels que sa blessure le lui permit, sir
était déjà presque efitiérement [lobert se rendit de Gibraltar à
perdue. L'armée française avait Cadix , voidant encore contribuer
lait de grands progrès, et quel- h h' défense de cette place. Mais
ques places fortes se défendaient après la prise du Trocadéro , la
seules encore. Sir Robert se jeta garnison de Cadix et les cortès
dans celle de la Corogne, et fut eux-mêmes reconnurent que toute
grièvement blessé dans une sor- résistance contre l'armée partout
tie, le 16 juillet, ainsi que le co- victorieuse des Français devenait
lonel Light, qui lui servait d'aide- inutile. Sir Robert s'embarqua, le
de-camp. Il fut transporté à Yigo, 11 novembre, pour l'Angleterre.
WIL
Aux revers d'une campagne si fu-
iVBSte pour lui s'était joint , pen-
dant -SOU absence, le plus grand
des malheurs domestiques. Lady
"Wilson avait succombé .i sa lon-
gue et douloureuse maladif le i5
août 1825. lin autre malheur,
mais qu'il su})porta , à ce qu'on
assure , avec une singiiliérc ré-
"Signation, fut celui d'être informé
par les gazettts que l't'iopereur de
Russie, l'empereur d'Autriche et
le roi de l'riisse, venaient de le
priver du droit de porter les dé-
corations (les ordres divers dont
ces monarques l'avaient autrefois
gratifié, lorsqu'il combattait C(tn-
Ire Napoléon. Quelques feuilles
publiques le félicitèrent même de
cet événement, et le Statesman dit
à ce sujet : « Sir Robert pouvait
s'attendre à ce qui lui est arrivé;
il n'aurait jamais dû accepter des
marques honorifiques, autres que
celles que la constitution anglaise
accorde. Nous le félicitons d'être
redevenu lout-à-fait Anglais , et
d'avoir fourni un exemple salu-
taire à ceux de «es conipatriotes
qui seraient disposé» à recher-
<her des décorations étrangères. »
Il continue à siéger à la chambre
des communes, et à s'y montrer
fidèle aux principes qui ont dirigé
sa vie entière. Il s'est prononcé
avec chaleur pour la cause des
catholiques d'il lande, et n'a pas
peu contribué à faire passer dans
la chambre, le bill en faveur de
leur émancipation f bill rejeté de-
puis p ir la chambre des pair». Le
i(j mai 182.5, (pnmd le ministre
Canning eut déposé sur la table
de la chambre des connnunes le
traité conclu avec les républiques
de rAmériquc méridionale, des
acclamnlions retentirent de tous
les côtés de la salh;, et sir Robert
"Wilson, i)renant la parole, félicita
la chambre et la nation sur ce
traité. « Cest un hommage, dit-
il, rendu par l'ancien monde aux
droits de l'homme dans le nou-
veau. » Il paya «-nsuite un juste
tribt:! d'éloges à la bravoure et à
la modération (jui ont marqué
tous les efforts des états améri-
cains, pour conquérir leur indé-
pendance; il loua surtout la con-
duite du président de la républi-
que de Ctdombie, du général Bo-
livar, qui « mérite non-seulement
le titre de libérateur de son pays,
mais qui doit encore être regardé
comme un des plus grands bienfai-
teurs du genre humain. » Père d'u-
ne nombreuse famille, sir Robert
a eu la satisfaction il'apprendre que
son fils aîné s'est distingué en plu-
sieurs occasions dans l'Amérique
méiidionale, sous les ordres du
libérateur Rolivar, qui a pris ce
jeune militaire pour un de ses
aides-de-catnp. Sir Robert Wilson,
sous un extérieur grave et froid,
cache une âme ardente. Doué
d'une activité extraordinaire, dé-
voué à ses amis, nul sacrifice per-
sonnel ne lui coûte, quand il s'a-
git de les servir, ou de défendre
mu: cause qu'il croit juste. On lui
accorde des connaissances très-
étendues en mathématiques , en
physique et en astronomie. Outre
l'ouvrage sur l'Egypte, cité phis
haut , il a publié : i" Recherches
sur l'étal présent des forces mi-
litaires de l'empire britannique ,
18114 . in-8°; a" Histoire des cam-
pagnes de Pologne, en 1 8o(> et
iboj', avec des remarques sur l'ar-
mée russe , 1811, iu-/i" ; 5" Puis-
a8a
Vf m
satiçe poUlique et militulrc de la
liussie, i^iy, iii-S". Ce dernier
ouvrage a eu ciii.q /'dilions, et
conlient des détails exact* et aus-
si étendus qu'imporlans-, sur l'ac-
croissement prodigieux de l'em-
pire russe, et sur les dangers dont
cette puissance, dirigée par un
prince amhilieux , pourra mena-
cer un jour l'Europe entière.
WILMPFEN (te baron Feux
de), lieutenant-général, meiribre
di' l'assemblée conslituanle, etc. ,
naquit, en ly^^y, dans nn village
sur les bords du Rhin. Il était le
plus jeune de dix-huit crifans , is-
sus d'une f.uiiille noble, mais pau-
vre. Dès l'âge de 1 1 ans, il quitta
la maison [)atern(;lle, < t se retira
près du duc de Deux -Ponts , qui ,
quelques années aj)rè'<, ayant levé
un régiment pour le service de
France, confia au jeune de >Yimp-
len une enseigne, honneur dont
il se montra digne, en se distin-
guant dans la guerre dite de sept-
ans. Il passa en Corse en 1768,
étant alors capitaine de volontai-
res. Ses talens et son courage lui
valurent à l'âge de aS ans le grade
de lieutenant-colonel et la croix
de Saint Louis. Nommé comman-
dant du régiment de Bouillon, il
fit la guerre de l'indépendance
américaine, et de retour en Eu-
roj-e , il prit part aux sièges de
Mahon et de Cibraltar. Sa con-
duite à celle dernière affaire fut
des plus reuiaïquables. Il délendil
pendant treize heures les lignes
françaises, que les Anglais préten-
daient brfder comme ils avaient
brOlé celles des Espagnols. Le
brevet de brigadier des armées du
roi, et une pension de mille écus,
furent la récompense de son cou-
WIM
rage et de ses succès. Il vivait re-
tiré dans SOS terres, avec le gra-
de de maiéchal-de-camp , lors-
que, en 1 789, la noblesse de Caen
le nomma dé|tuté aux états-géné-
raux. La minorité , dont il faisait
partie, le chargea de rédiger la
protestation contre la majorité,
qui refusait de se réunir à la cham-
bre dos communes. Cette année
même , il proposa d'établir en
Franc»! une démocratie royale.
Membre du comité militaire qui
fut f(U'mé sur sa proposition , il
fut presque toujours chargé des
rapports de ce comité, et rare-
ment dans l'assemblée il prit la
parole sur des matières étrangères
aux attributions de ce mêiTie co-
mité. Lors du départ du roi pour
Varennes (le 21 juin 1791)' '^
demanda et l'assemblée ordonna
que le comité militaire serait char-
gé de la défense extérieure. Il
proposa la simple suspension de
M. de Bouille, prétendant qu'il
ne pouvait être destitué sans ju-
gement ; réclama contre l'abus
que l'on faisait de son nom pour
proposer des mesures ultra-léga-
les, et vers la fin de la session,
fit adopter tous les décrets de ju-
ridiction et de code pénal mili-
taires. Le gouvernement lui con-
fia, en 1792, le commandeu:ent
de ïhionville, qui fut assiégée au
mois de septembre de la même
année par les Autrichiens et les
émigrés, et repoussa vigoureuse-
ment leurs attaques durant cin-
quante-cinq jours. Un décret dé-
clara que le général de Wimpfen
avait lien mérité de la patrie. Il
refusa, dit-on, le ministère de la
guerre. Devenu commandant de
l'armée des côtes de Cherbourg et
■WIM
de la place de ce nom, il écrivit
à la conA'cntion, après les événe-
mens du 3i mai 1795, que « les
corps administratifs de Caen a-
vaicnt fait arrcler comme otage*
lesrepréseiitans Uommeel Prieur,
commissaires à l'armée, pour ré-
pondre de la sûrelé de ceux qui ,
détenus à Paris, étaient sous les
poignards des factieux. » Cette
lettre le fit décréter d'accusation.
Commandant de l'armée départe-
mentale qui marchait sur Paris,
afin de rétablir la véritable repré-
sentation nationale, il écrivit à
Custines {voy. ce non)) pour l'en-
gager k s'unir à lui ; il adressa
aussi aux dé[)artemens méridio-
naux une lettre imprimée pour les
engager à seconder ses mouve-
mens. >Vimpfen n'atteignit pas
son but. « Sacrifié par M. Pui-
saye, qui, disent les auteurs d'une
biographie étrangère, avait voulu
s'emparer, au profit du royalisnie,
d'im mouvement conçu dans le
seul intérêt de la liberté, il fut
défait à Vernon , département de
l'Eure, ù la tête de quelques trou-
pes, peu nonjbreuses et mal dis-
ciplinées, qu'il avait espéré voir
se grossir de tous les ennemis de
la tyrannie.» Le général deWimp-
fcn , obligé de prendre la fuite,
trouva un asile i\ Dayeux , oi'i il
vécut entièrementignoré jusqu'à la
rév(dulion du 18 brumaire an 8 (;)
novembre 1799). A cette époque,
le premier consul lionaparle lui
accorda un trailemenl de retraite,
et le nomma maire de la commu-
ne qu'il habitait. « Il existe du
baron de Wimpfen, disent les au-
teurs que nous avons déjà cités,
des ménïoires manuscrits très cu-
rieux sur l'époque du 3i mai, 1"
%IN
a85
et 2 juin , où il démontre jusqu'à
l'évidence que le royalisme eut la
plus grande part aux événemens de
ces journées et à ceux qui les sui-
virent. »
>VINDHAM (William), mi-
nistre-d'état et pair de la (irande-
Brelagne, membre du parlement,
etc., naquit dans le comté de Nor-
folk, fil ses études à l'universi-
té d'Oxford , et passa ensuite sur
le continent. De retour dans sa
patrie, il fit partie, comn)e simple
amateur des sciences, de l'expédi-
tion qui dt.'vail chercher un pas-
sage vers leprdii du Nord. N'ayant
pu résister au mal de mer, il re-
tourna à Londres , et y maiiilesta
avec beaucoup d'énergie, ([uoique
bien jeune alors, son méconten-
tement de la guerre que l'Angle-
terre faisait à ses colonies d'Amé-
rique. Il se plaça ainsi parmi les
orateurs populaires et les IVi^hs
les plus prononcés. En ijSS. de-
venu membre du parlement, il
s'y lia avec le célèbre Fox et le>
autres mei-ibres de l'opposition,
repoussa, de 1789 a 1791. les doc-
trines de Pitt, vota «mi faveur des
pouvoirs illimités demandés pour
le prince- régent [voy. (iEORCES
IV), et combattit, en 1792, ci>ntrc
le bill de la loterie et la traite des
noirs. Ed. Burke déserta le parti
de l'opposition, et entraîna avec
lui M. AVintIham, qui, avouant
li:uilemenl sa défection, et s'op-
posant à la réforme parlementai-
re, déclara que «quelque étrange
que dût paraître sa conduite, les
circonstances étaient telles qu'il
volerait désormais avec ceux dont
il avait constamment réprouvé
les opérations , el contre ceux
dont les opinions avaient été jus-
2 84 WIN
qu'alors en harmonie avec les
siennes. » Ministériel Irès-pro-
iioncé et ennemi de la révolulion
française, ii s'opposa encore et
non moins vivement, en 1793, à la
proposition de Fox, tendant à ce
que l'Anj^ltterre fît la paix avec la
France. Il termina sa motion en
protestant que « l'intention de
l'Angleterre n'élait pas de donner
à ce pays une forme quelconque
de gouvernement, mais seule-
ment de renverser son adminis-
tration actuelle, avec laquelle il
était impossible de traiter.» Peu
après l'ouverture de la session de
1794, il devint membre du con-
seil privé d'étal, ayant le départe-
ment de la guerre. Il ne jouit pas
en paix de sa rapide fortune. On
l'accusa généralement, et avec du-
reté, d'avoir « déserté le parli sté-
»ri!e de l'opposition pour les
wémoiumens productifs de la
«cour;» leproches qu'il suppor-
ta en hon ministériel, c'est-à-dire
en continuant à toucher ces mê-
mes émolumens, et à déverser la
calomnie sur les membres les
plus marquans de la révolution
française, entre autres le général
La Fayette, dont Fox prit le parti
avec toute la chaleur de sou âme
et la force de son éloqiience. M.
AVindham, en ij^S, fut aus?i en
butte à des reproches d'une aulre
nature. On l'accu.sa (l'êtie l'au-
teur du désastre île Qi;iberon ,
pour avoir mi- à la tête de l'expé-
dition, au lieude M. de Son hreuil,
M. de Puisaye. qui n'était pas aus-
si versé dans l'art militaire. En
1797, à l'occasion des ciu)feren-
res à établir à Lille poiu- la paix,
il déclara qu'elle u'aïuait jamais
lieu tant que la royauté ne serait
WIN
pas réiablie en France. » En i^j)*}»
il reproduisit A la chambre des
communes son opinion pour le
rétablissement de la royauté en
France, «connue étant la chose
nia plus avantageuse pour les iu-
«térêls de la Grande-Bretagne, et
«pour l'exécution parfaite de ses
«projets.» En juin 1800, il de-
manda qu'on tolérât le papisme
eu Arigleterrre, déclarant qu'il
craignait moins quatre à cinq mil-
le prêtres français que les doctri-
nes républicaines; en novembre
de la même armée, il s'opposa à
ce qu'on prît en considération la
proposition de M. Jones, qui vou-
lait qu'on mît sous les yeux des
membres de la chambre une co-
pie de la lettre de l'amiral Keith
au général RIeber, disant que « si
l'on faisait un crime aux nïiuis-
tres d'avoir donné des instructions
qui eussent fait rompre la con-
vention d'Egypte , il faudrait
abandonner toutes les conquêtes
pour ne pas arrêter les négocia-
tions. » Au mois de décembre
(1800), il essaya de justifier les
ministres du reproche que leur
adressait M. Shéridan de n'avoir
jamais voulu sincèrement la paix.
En 180 1, il s'opposa encore à tout
traité de paix avec la France. Le
parti de l'oppositioi» triomphant
enfin des doctrines ministérielles,
M. Windham et ses collègues fu-
rent forcés de donner leur démis-
sion. Il passa à la chambre des
pairs, «où, disent les auteurs d'u-
ne biographie étrangère, il dé-
fendit avec toute la chaleur de
l'intérêt personnel, le bill d'oubli
{bill of .indeinnity) proposé en
faveur des hommes publics, quT
auraient pu commettre des er-
"WIN
reurs dans l'aiTestalioa ou la dé-
icntion des personnes suspeclées
de iiiauvaiscs intentions, et prélen-
dit que celle mfisiire était néces-
saire pour as«<urer la tranquillité
et inspirer de la confiance aux
i'onclionnaires qui avaient fait
leur devoir, et empêché la subver-
sion de leur pays. Les approches
de la pacification avec la France
semblèrent raflerniir encore, s'il
était possible, la constance de son
opposition à cette mesure; et on
le vit repousser vivement les as-
sertions de M. Tierney, relalive-
inent aux concessions à faire à la
république pour avoir la paix, en
disant hautement que sou a^fran-
di«>ement devait au contraire en-
gager l'Europe enlière à se liguer
contre elle pour l'empêcher de
tout envahir. Depuis celte époque
M. VVindham ne laissa passer au-
cuni; occa-ion de dévelo[)per les
mêmes princi|)e8, et sonna cons-
tamment l'alarme sur ce qu'il ap-
pelait les projets, l'ambition, les
envahissemens du gouvernement
français, soulevant sans cesse con-
tre lui les cousidéralions de l'hon-
neur et de l'intérêt britarmique.
Le 5o octobre, il s'éleva contre les
préliminaires de la paix, «{u'il pré-
senta comme une cause de deuil
futur, malgré la joie universelle
qu'elle bemblait exciter alors, et
accusa les nouveaux ministres
d'iiuapacité, en répélaul (|u»: les
vues Je la France étaient d'en-
chaîner la Grande-Bretagne, et de
la réduire à l'état d'impuissance
dont elle avait frappé le continent.
La conclusion de la paix ne chan-
gea point les idées politiqties de
IM. Witutham, et le ministère n'en
fut pus mieux traité parlai. Il l'at-
WIN
285
laqua surtout avec la dernière
violence, pour avoir proposé la
prorogation du parlement dans
un temps où, selon lui, l'ambition
démesurée de Napoléon avait pla-
cé l'Angleterre dans un danger
jusque-là sans exemple; et à la
rentrée du parlement ( le 4 "O"
vembre lîSoî), il se livra aux pro-
vocations de guerre les plus
pressantes avec toute la véhémen-
ce de son caractère. Il continua
d'êlre, en i8o5, le chef de la nou-
velle opposition, et la guerre s'é-
tant rallumée dans l'été de celle
même année, ses prédictions sem-
blèrent effectivement s'accomplir
et ses principes trioiiipher. Pitt
nmurut en janvier i8o6. Le por-
tefeuille de la guerre fut rendu à
M. >Vindham, qui aussitôt propo-
sa au parlement un plan de dé-
fense générale, que l'opposition
atta(]ua vivement, et qui fit naître
une grande agitation parmi les
militaires. La mort de Fox entraî-
na la désorganisation du ministè-
re. M. Windham, remit son por-
tefeuille, et simple membre du
parlement, il signala, en 1807, les
prétentions exclusives des minis-
tres, observant «q^e pour moti-
ver un refus, il suffirait au roi
d'invoquer sa conscience. » Il at-
taqua, en 1808, le u)inistëre au
sujet de la conduite du gouver-
nement relativement au Dane-
marck et au Portugal; en 1809,
il signala les suites funestes de
l'expédition de la (]orogue. L'an-
névî suivante, au mois de mai, il
succomba à une opération chirur-
gicale. Les auteurs que nous avons
déjà cités terminent ainsi leur
notice surce ministre : < M.^ind-
ham, disent-ils, qui passait |^é->
a86
WIN
raleiuent pour exceller duus l'ar-
guint'iUation , mettait néanmoins
tant de subtilité dans ses raison-
neintns qu'il mérita le nom de
métaphysicien. Doué d'une sagaci-
té remarquable, et d'une grande
lacilitc d'expression, il maniait le
sarcasme avec une rare habileté,
qui le plaçait, sous ce rapport, ù
côté des athlètes les plus redouta-
bles de la chambre. On assure
qu'il jugeait sévèrement ses com-
patriotes, ou du moins les classes
iulérieures, qu'il regardait com-
me inévitablement condamnées à
une brutalité sauvage ; et il ex-
primait cette opinion avec la vi-
gueur et l'originalité qui le carac-
térisaient. »
WINSPEAllË (David), ex-
avooat-général à la cour de cassa-
tion de Naples , né dans cette ca-
pitale en 1770, fut élevé au col-
lège du Salvatore, et apprit les
langues savantes sous la direction
de iMgr. Rosini ( voy. ce nom ).
Destiné au barreau, il s'y serait
perdu dans la chicane , s'il n'avait
puisé en lui-même celte sévérité
de principes qui est le préservatit'le
plus sûr contre la corruption de ses
propres collègues. Il se chargea de
quelques procès, mais il s'appli-
qua surtout à examiner les sys-
tèmes qui avaient enlanté tant de
lois souvent contradictoires, et
rarement d'accord avec les be-
soins réels de la société. Sa ré-
putation n'était pas encore établie
lorsqu'on comptait déjà sur ses
talens. Le gouvernement le choi-
sit pour exercer les fonctions d'a-
vocat-fiscal auprès de l'adminis-
tration des postes. M. Winspeare
répql^it à cette marque de con-
fiance, eu assurant les intérêts du
WIN
trésor par une administration sage
et éclairée. Il réforma les abus,
punit les malversations et multi-
plia les expéditions des courriers
pour éviter les retards toujours
fâcheux pour les particulier» et
pour le commerce. Il resserra ainsi
le lien des provinces avec lu ca-
pitule, et prépara le développe-
ment d'un pays que l'œil du voya-
geur croyait civilisé, parce qu'il
y aperc«ivait des ruines iniposan-
tes. Tandis que M. Winspeare é-
tait occupé de ces améliorations,
le royaume de Naples fut envahi
(en i7;)9) par une armée fran-
çaise qui venait y proclamer la
république. Le père de ce ma-
gistrat, qui était alors préfet en
Calabre, remplit dans cette cir-
constance les devoirs de l;i fidé-
lité et de l'honneur. Cette con-
duite lui attira les éloges des hon-
nêtes gens , mais elle exposa sa
famille à la persécution des exa-
gérés. Son fils fut arrêté et retenu
comme otage dans le fort Saint-
Elme. Au retour du roi de Sicile,
il reprit sa place dans la magis-
trature, et choqué des abus qui
régnaient au barreau, il se pro-
posa de les flétrir. Il fit un essai
heureux de ses talens, en publiant
une dissertation sur les Confes-
sions spontanées des coupables, qui
devait être suivie par d autres
mémoires analogues. AJais en
i8o(>, le royaume passa de nou-
veau sous la domination françai-
se, et M. Winspeare, qui vit dis-
paraître avec les anciennes insti-
tutions la plupart des désordres
qu'il avait voulu attaquer, renon-
ça entièrement à son travail. Lors
de l'organisation donnée aux tri-
bunaux, en 1809, il fut nommé
WIN
substitut du procureur-général de
la cour d'appel de Nnples, avec
le titre de maître de requêtes au
con!<eil-d'état ; et en i8iu, il lut
élevé au rang d'à vocat-géiiéral de
la cour de cassation. Profondé-
ment versé dans l'ancienne et
dans la moderfie législation , con-
naissant tous les ressorts du sys-
tème judiciaire et administratif,
il ne lui fut pas dillicile de saisir
l'esprit des nouvelles lois. Ses con-
clusions à la cour de cassation,
ses rapports à la commission du
contentieux et au conseil-d'état,
pourraient, s'ils étaient recueil-
lis , être mis ulilement sous les
yeux de ceux qui sont appelés à
décider de la fortune et de la vie
des citoy«;ns. Mais ce qui rend M.
Winspeare digne de la reconnais-
sance publique, c'est le zèle qu'il
a njontré dans r«xéculion des lois
relatives à l'abolition delà féoda-
lité. Malgré les coups portés aux
privilèges vers la fin du dernier
siècle, les seigneurs n'avaient pas
moins conservé leurs usurpations,
et opposaient un obstacle invinci-
ble aux progrès de la civilisation
et de l'agriculture. Des propriétés
très-étendues, enclavées dans l'en-
ceinte des fiefs, étaient accablées
de dîmes, de corvées et de toutes
ces cjiarges onéreuses et avilissan-
te* que la forée avait Imposées
û la faiblesse. Les biens commu-
naux étaient passés, presqu'en to-
talité , dans les mains des barons ,
par des transactions simulées et
quelquefois frauduleuses. La prag-
matique de i65o, qui en avait
ordonné la réintégration , était
rotée sans efl'et , cl ces grands
propriétaires continuaient ùt jouir
du Iruit de leurs spoliations, qu'ils
>Y1N
aS?
ne cessaient d'augmenter tantôt
par la ruse et tantôt par la violence.
Lescbamps et les forêts, les étangs
et les rivières, les bestiaux et les
hommes, tout était devenu une
matière corvéable, et bien souvent
une propriété exclusive du sei-
gneur, qui étendait aussi ses droit»
prohibitifs sur les arrosemens, les
moulins, les marhines hydrauli-
ques, les engins, la pêche, etc.
De prétendues créances absor-
baient le reste du patrimoine pu-
blic, condamné souvent à payer
des contributions levées sur le»
allodiaux du feudataire. A ces dé-
sordres, déjà graves en eux-mê-
mes, et qui pesaient presque éga-
lement sur le royaume, il faut
ajouter ceux qu'une longue habi-
tude avait consacrés dans certai-
nes provinces Dans la terre d'O-
tranle, par exemple, les barons
prélevaient la dîuie sur tous les
produits naturels et industriels.
En plusieurs endroils des Cala-
bres, ils s'appropriaient les pâtu-
rages des années vides, dans les-
quelles les terres n'étaient point
cultivées; et comme dans les pays
stériles ces intervalles de repos se
prolongeaient quelquefois jusqu'à
cinq années, il en résultait que le
baron possédait un fonds pendant
un f/uiiH/uennium , et ne le livrait
au propriétaire direct qu'une fois
tous les six ans. Plusieurs colo-
nies grecques ou albartaises, aux-
quelles on avait accordé ur» sol
pour s'y établir, étaient peu à peu
tombées sous le plus dur escla-
vage , et on aurait dit, en le!)
voyant, que c'étaient plutôt des
ennemis vaincus que des hôtes
paisibles. Cesempiétemens avaient
donné lieu ù un grand nombre de
288
WIN
procôs , quelques - uns desquels
reuiorilaient jusqu'au berce. lU de
la monarchie. Les représentniis
des coniujunes invoquaient la pru-
tection des lois pour être A l'abri
de ces vexations; ils demandaient
raffranchis.->emefit de leurs pro-
priétés, l'annulation des taxes et
des délies arbitraires, l'autorisa-
tion de pouvoir travailler dans b^s
terres communales. Les barons
éliidaienl ces réclamations, en op-
posant la faveur, l'inlrigue , et
surtout la prescription. La loi pour
l'abolition de la ieodalilé, procla-
mée en 1807, en supprimant les
droits seigneuriaux, avait statué
de ne respecter que ceux qui pro-
venaient d'un titre légitime , et
ne s'opposaient pas à l'émancipa-
tion des communes. On créa une
commission de jurisconsultes char-
gés d'examiner les prétentions ré-
ciproques des barons et des vas-
saux, et qui, au moyen d'une
procédure simple et expéditive,
devait mettre lin à leurs débals,
en les jugeant définitivement, et
sans appel. M. AVinspeare, qui l'ut
nommé procureur-général «le cet-
te commission, déploya autant de
fermeté que d'intelligence pour
vaincre les difiicultés sans nom-
bre qui menaçaient de faire avor-
ter une disposition aussi salutaire.
En moins de trois ans, tous les
procès furent terminés, et il ne
resta plus qu'à exécuter les arrêts
de la commission. On envoya des
commissaires dans les provinces,
et pour donner de l'ensemble à
leurs opérations, il leur fut en-
joint de s'adresser au procureur-
général dans tous les cas qui exi-
geaient de nouveaux éclaircisse-
meus. On investit ces agens du
WIN
gouvernement des pouvoirs le»
plus étendus ; on imprima ;'i leurs
ordonnances le caractère des bus,
et par des transactions aussi «qui-
lables que nécessaires, on réussit
à soustraire les communes à tou-
te dépendance de leurs ancien*
seigneurs. Une masr.e considéra-
ble de biens naiinnaux fut parta-
gée entre les classes les j-.lus indi-
gentes , et le royaume vit s'élever
sur «on sol une nouvelle généra-
tion de propriétaires, qui, déga-
gés de tout asservissement, pro-
mettaient de le fertiliser par leur
industrie. Le gouvernement dé-
cora M. Winspeare du litre de ba-
ron et de la croix de commandeur
de l'ordre des Deux-Siciles : vou-
lant perpétuer le souvenir d'une
révolulion aussi utile, il le chargea
en même temps d'écrire VHis-
loire des abus féodaux dans le
royaume de Naples. Ce savant ma-
gistrat, qui avait pris une part si
active à leur destruction, s'enga-
gea à rendre compte au public
des principes qui avaient présidé
aux travaux de la commission. Il
est à regretter que cet ouvrage,
dont le premier volume parut
en 181 1, n'ait pas été continué,
malgré l'intérêt qu'il fit naître.
Dans une introduction remplie
d'aperçus heureux, l'auteur don-
ne une idée générale de la féoda-
lité, et s'arrête à déterminer le
caractère de celle qui existait à
Naples. Il en marque l'origine,
les progrès , la décadence et la
chute. C'est un tableau dessiné à
grands traits, et qui annonce le
mérite su{)érieur du peintre. En
1814, M- Winspeare fut mis à la
tête du ministère de l'intérieur du
gouvernement, établi provisoire-
>V1N
ment pour l'iidiuinistralion des
clals romuin^. L'année suivante, il
s'éloigna v olonlaiieiu«ntdu royati-
me, et entreprit un voyage en Ita-
Jie, en Frai. ce et en Allenii(g!ie.
Il pasî'a quelque temps à Dresde,
où il conçut le plan d'un ituvrage
sur l'Origine des nations, qu'il
n'a pa«i encore publié. Il prtpara
nm^ï une traduction italienne du
livre des lois tie Cicéron , qu'il
enrichit de plusieurs observalioiis
sur les passages lis plus diiUciles.
ilappelé A Naples vers la fin de
1819, il rentra dans l'ordre des
vocats , et ne tarda pas à couip-
ler parmi ses cliens ceux uiêtiie
:|ue la défense des coinn)unes a-
\ait aigris contre le juge, sans
cesser d'estimer le citoyen, iin
1820, lors des derniers événe-
niens de N.iples, il fut appelé par
le [iriuce héréditaire <\ siéger par-
mi les membres de la junte pro-
visoire du gouvernement consti-
tutionnel. Il fut aussi chargé de
traiter avec le nonce du [tape pour
mettre en exécution If concordat
stipulé en 1818. Au retour du roi
«le Laybach, M. AVmspeare rou-
vrit son cabinet, où la faveur du
public le dédommage depuis ce
temps de la disgrâce du pouvoir.
WliNTER(N. de;, amiral hol-
landais, créé maréchal et comte
de Hiiissen par le roi Louis Na-
poléon, mourut en i8i5, à Paris,
au service de France , où il était
depuis 1810, par suite de la réu-
nion de la Hollande à lenijtire
français. Né avec un grand amour
de l'indépendance, M. de Winter
manifesta la franehise et la no-
blesse de son caractère dé» sa jeu-
nesse, et préféra, par goût, le
M-rvice de mer. Il concourut ù lu
WIN
289
splendeur de la marine de sa pa-
trie par ses talens et son courage.
Déjà lieutenant en 1787, il vit,
comme Hollandais , sa carrière
bornée par suite oe la contre -ré-
volution qui rétablit l'autorité du
stathouder. H se réfugia dans les
armées françaises, où il >e fit re-
maïqucr, et où il gagna le grade
de gênerai de biiga i»-, avec lequel
il rentra dans ses fiyns en 179CJ.
Le gouvernement balave le nom-
ma vice-amiral i\v ses flottes. La
position de l.i marine hollandaise
était alors tnut-à-fait critique. i>J.
deWi(»ler, long-temps bloq'ié dans
le lextd par les Anglais, reçut, an
commencement d'octobre 1797,
l'ordre formel de sortir et d'atta-
quer l'ennemi. Il mit à la voile.
Le 1 1 de ce mois, il livra bataille
■\ la flotte angl.nse; mai» «n bra-
voure, ses talens, son adresse, ne
purent le saii ver d'une défaite que
lovitefois il fit payer cher à l'en-
nemi, dans les mains duquel il
tomba de sa perscmne. (Conduit à
Londres, il y fut traité avec dis-
tinction, et par suite échangé. II
conserva une grande influence
dans la république batave, fut
cotnbléde faveur;» par le roi Louis,
et. après la réunion de sa patrie à
la Frar)ce, distingué par l'empe-
reur Napoléon. Les re?tes de cet
amiral lurent déposés avec tous
les honneurs militaires au Pal)-
tbéon français, redevenu église
de Sainte-Geneviève.
>VlNT/JNGEliODE (le comte
DE ) , général et aml'.assadeur rus-
se, naquit dans le Wurtemberg,
et fut admis très-jeuite encore au
service de Russie, où il parvint
rapidement aux premiers grades
militaires. Il devint général aide-
»9
aj)0
WIT
de-oamp et chambellan de l'em-
pereur. Ses connaissance» diplo-
matiques le firent nommer, au
mois de juin i8o5, ambassadeur
extraordinaire près du roi de
Prusse , afin de déterminer ce
prince à prendre pari à la coali-
tion contre la France. Il passa en-
suite à Vienne , et y hâta la con-
clusion du traité entre l'Autriche
et l'Angleterre. Les hostilités en-
tre la France , la Russie et ses al-
liés ayant éclaté peu après ( sep-
tembre i8o5), il suivit l'empe-
reur de Russie dans le voyage que
ce prince fit en Allemagne, et y
dirigea les opérations des armées
russes dans ce pays. Au mois de
novembre, après la bataille d'Hol-
labrun, en Moravie, il lut chargé
de négocier en faveur du corps
d'armée commandé par le géné-
ral Kutusow, un armistice que
l'empereur Napoléon ne ratifia
pas , les pouvoirs de M. de "Winl-
zingerode n'ayant point été jugés
suffisans. Cet oflicier-généra-!, qui
ne quittait pas l'empereur Alexan-
dre, se trouva à la bataille d'Aus-
terlitz, où il faillit être fait prison-
nier. Devenu général de cavale-
rie, il suivit son souverain dans
la campagne de France, en 1814
et i8i5 , et mourut, le 17 juin
1818, à Wisbaden, près de Franc-
fort, où il s'était rendu pour y
rétablir sa santé. ^
^YITHBREAD ( Samuel), cé-
lèbre chef de l'opposition dans le
parlement anglais, naquit à Lon-
dres en 1758. Son père, l'un des
principauxnégocians de celte ville,
et propriétaire d'une brasserie im-
mense, lui fit donner une éduca-
tion très-soignée; c'était son fils
unique. Le jeune Wilbbread par-
WIT
courut l'Europe avec son précep-
teur, l'historien Coxe, et A son re-
tour dans sa patrie, il épou!>a ^a
sœur de lord Grey, membre dis-
tingué de la chambre des pairs.
Deux ans après, en 1790, les élec-
teurs du bourg de Bedfort l'élu-
rent au parlement. Dès son dé-
but, Samuel Withbread s'annonça
comme un des metnbres les plus
prononcés du parti anti-ministé-
riel. La traite des noirs lui fournit
bientôt l'occasion de montrer le
plus grand zèle contre ce trafic
odieux, qu'il parvint à faire ces-
ser. Ami de la France républi-
caine, il s'opposa vivement, en
1795, à la guerre contre celte
puissance , démontrant avec un
rare talent combien celle guerre
était injuste et politiquement inu-
tile ; dans toutes les occaf^ions , il
vota ensuite pour la cessation des
hostilités. En vain les arguties et
les sarcasmes des appuis du mi-
nistère s'efTorcèrenl-ils de l'éloi-
gner do la cause génére<ise qu'il
avait embrassée; il fut inébranla-
ble et non moins courageux en
combattant en faveur des malheu-
reux déportés à Botany-liey, qui ,
également ennemis de la guerre,
avaient en outre demandé avec
non moins d'énergie la réforme
du parlement. Il fut chargé , en
i8o5, d'accuser publiquement de
malversations lord Melville. Sa
conduite à celte occasion étonna
même les partisans des ministres,
par la force et en même temps la
sagesse qu'il mit dans ses nom-
breuses accusations. Jamais, dans
le ministère qui succéda à celui de
"W. Pitt, il n'approuva, bien que
son beau-frère, lord Grey, fût un
des directeurs de la nouvelle ad-
ministralion , que les principes
qu'il professait, la plus exacte jus-
tice. Eh 1807, il s'occupa de l'a-
tnélioratioti des lois sur les pau-
vres, et toujours l'ami fidèle, mais
sage et éclairé de la France, il se-
condait de tout son pouvoir les
n»';gocialions de paix entamées par
Fox, lorsque la mort dece ministre
fit évanouir les espérances des hom-
mes sages des deux nations. Les
successeurs de Fox ayant convo-
qué un nouveau parlement, M.
Wilhbread fit une adresse énergi-
que aux électeurs de Bcdford, où
il démontrait le danger de celle
mesure, et rappelait tout ce que
le parlement précédent avait tait
« d'utile et de mémorable. » Dans
l'impuissance sous le nouveau mi-
nistère de l'aire le bien qu'il se
proposait, il tourna ses vues vers
le pian d'instruction de la classe
indigente. Il ne fut pas plus heu-
reux; toutes ses propositions é-
chouèrcnt, quoique généralement
approuvées. Partout les ministres
repoussent la lumièie dont on
veut faire jouir les peuples. Cette
même année (1S07) , il combattit
le bill de port d'armes et de droit
de visite, et le qualifia <> d'oppres-
seur et de tyranniqiu;. » En 1808, il
fut l'im des plus véhémens désap-
probateurs de l'atroce incendie de
Copenhague et de la spoliation de
la flotte danoise. C'est ainsi qu'à
cette occasion il apostropha les
ministres : « Pour avoir voulu
conquérir quinze mauvaises car-
casses de vaisseau , vous avez ,
dit-il, attiré sur la nation anglaise
la haine invétérée des Danois, ses
anciens et fidèles alliés. » L'année
suivante (1809), il attaqua encore
«ivec l.i même indépendance les
WIT
agi
ministres au sujet de la guerre
avec l'Amérique; il les combattit
de nouveau quelques mois après
relativement aux malheureuses
expéditions de Flessingue et de
la Corogne, et demanda par suite
un comité d'enquête. Il blâma
non moins fortement l'arrestation
de sir Francis Burdett et les meur-
tres qui avaient eu lieu dans cette
circonstance, rappelant avec la
plus grande énergie les fautes et
les mesures arbitraires du gou-
vernement. Du parti du prince de
Galles {voy. Georges IV) dans la
question de la régence, il fut un
des plus redoutables membres de
l'opposition contre ce prince (de-
venu roi ) , à l'occasion de la con-
duite de la couronne envers la
princesse Caroline, épouse du mo-
narque {voy. Caroline). Lors do
l'abdication de l'empereur Napo-
léon , en i8i4j il censura avec
amertume la conduite du congrès
de Vienne; plus tard, il soutint
Tindépendauce des Norwégiens
contre l'oppression de la Suède ,
et déplora hautement le partage
de la Saxe et de la Pologne. Apre»
b; retour de Napoléon de l'île
d'Elj^e, en mars i8i3, il « s'éleva»
disent les auteurs d'une Biojrra-
phie étrangère, contre la déclara-
lion des alliés, et manifesta le dé-
sir que l'Angleterre ne rentrât pa»
dans la coalition, etc. , etc. » Une
existence politique si remarqua-
ble fut terminée par la plus dé-
plorable catastrophe ; soit qu'il
nourrît un chagrin profond, dont
la cause est demeurée inccmnue,
soit que, commi; on l'.i prétendu,
ses travaux mullipliés, tant com-
merciaux que parlementaires, eus-
sent altéré sa santé, puis sa rai-
uija
wir
son, on le trouva, le 6 juillet
i8i5 , mort dans son cabinet , où
il s'était coupé la gorge avec un
rasoir; l'esprit île parti n'euipêcha
pas les ministériels de déplorer
celte perte cruelle avec presque
autant d'amertume que le fit fop-
positioii elle-même, qui perdait
dans Wilhbread l'un de ses plus
puissans organes. Si en effet quel-
ques orateurs dans ce parti le
surpassaient par l'éclat de leur
éloquence, nul ne possédait à un
plus haut degré ce grand sens ,
cette logique mille et vigoureuse
qui n'entraîne pas sans doute avec
autant de rapidité que les presti-
ges d'tme élocution brillante, mais
qui opère une conviction durable,
renforcée d'ailleurs de toute l'es-
time qu'inspire la personne de ce-
lui qui parle. II emporta surtout
les regrets des pauvres et des op-
primés , dont il s'était constam-
ment montré le défenseur et le
soutien. »
WITHERSOON (Jean) , mem-
bre du congrès américain et pré-
sident du collège de New-Jersey,
naquit à Yester , près d'Edim-
bourg, en Ecosse, vers 1722. Il
fitses études à l'université d'Edim-
bourg , obtint dos dispenses fî'âge
pour prêcher l'évangile, prit les
ordres, cl exerça successivement
son ministère à Dundee, à Du-
blin et à Rotterdam. Son mérite
l'ayant fait connaître dans les con-
trées éloignées, il céda aux ins-
tances qui lui furent adressées de
l'Amérique, et pnrlit, en 1768,
avec sa famille pour Prince-Town,
dans l'état de New-Jersey, où il
se fixa. Dès son arrivée, il obtint
ia direction d'un séminaire qu'il
avait rendu florissant et célèbre,
WIT
lorsque, par suite de la révolution
au)éricain«, il fut privé de cet em-
ploi; mais ses nouveaux conci-
toyens, qiu* appréciaient son mé-
rite et sa droiture, le nommèrent
membre de la convention , où il
justifia les espérances qu'il avait
données. En 1776, il fut envoy;
au congrès en qualité de repré-
sentant des Etats-Unis. Les nié-
ujes lalens, unis aux mêmes qua-
lités morales, attachèrent hono-
rablement son nom à la déclara-
tion de l'indépendance. Ses fonc-
tions législatives ne l'avaient point
éloigné de l'enseignement théo-
logique, et son collège ayant été
rétabli, il en devint le présideni.
Le désir d'améliorer cet établis-
sement le fit passer en Angle-
terre ; sa démarche n'ayant pa<
eu de succès, il repartit pour
New -Jersey. Entièrement livré
depuis cette époque à l'enseigne-
ment et à l'exercice de son minis-
tère, il a continué jusqu'à sa mort,
arrivée en 1794? i jouir de la plus
haute estime. Nous empruntons
la fin de cet article à l'auleur d'une
notice sur cet honorable citoyen.
» Le collège de Witherspoon , dil
l'auleur de celte notice, lui est
redevable de services signalés, car
il a rendu les études littéraire^
plus libérales, plus profondes e>
plus étendues. Il était fait eu tout
pour produire une importante ré-
volution dans le système de l'étiu-
cation , et on croit même qu'il fut
le premier qui porta dans le Nou -
veau-Monde le germe de ces doc-
trines philosophiques que le doc-
teur Reid a développées depuis
avec tant de succès. Witherspoon,
simple dans sa manière comme
prédicateur, orateur grave, nuble
^V1T
imposant , quoiqu'il ne fût jias
ircs-aDimé, était pourtant entraî-
nant, et il était presque impossi-
ble de l'ontentlre sans ntlenlion :
l'anecdote suivante donnera aussi
une idée de la tournure de son
fspril. « Quand l'armée de lîui-
j^oyne lut prise dan.« Saraloga , le
}:énéral Gates en envoya la nou-
\file au congrès par un de ses
aides-de-camp, qui s'amusa en
route, et n'arriva à Philadelphie
qu'après que le bruit de cette vic-
toire y était déjà répandu. Le con-
grès y suivant la coutume , voulut
donner au messager une marqne
lie sa satisfaction, ei. un membre
proposa de lui otlVir une épée ri-
< bernent oruée ; mais Withers-
poon, faisant malignement allu-
sion à sou peu de diligence, de-
manda qu'au lieu d"une épée on
lui donnât des éperons d'or. »
Comme autour, il s'est placé au
premier rang , et a écrit sur la
politique, la morale, la littéra-
ture et la religion , avec un talent
remarquable : il s'est surtout dis-
tingué dans ses débats polémiques
avec les ministres qui soutenaient
les droits des seigneurs au détri-
ment de ceux du peuple dans les
promotions ecclésiastiques , et les
a combattus souvent avec avan-
tage. »
WITHWORTFI ( LORD Char-
I.F.S ), ambassadeur anglais, che-
valier de l'ordre du Bain, etc. , en-
tia de bonne heure dans la carrière
<liplomatique, et se rendit, en
1^85 , :\ Varsovie en qualité d'en-
voyé extraordinaire près du roi
Slanislas-Auguste {voy. ce nom).
De Varsovie, il passa, en 17H8,
il Saint-Pétersbourg, revêtu des
mêmes fondions. Ses services
WIT 293
dans ces deux missions lui valu-
rent, au mois de novembre l'Qo,
la décoration de l'ordre du Bain ,
que l'impératrice Catherine II lui
remit an nom du roi d'Angleterre.
Cette princesse ajouta à celte fa-
veur le don de l'épée dont elle
s'était servie pour lui conférer
l'ordre, et qui était estimée 4,000
roubles. La faveurdonl lord Wilh-
worth jouissait à la cour de Rus-
sie aplanit beaucoup les difficul-
tés qu'il aurait j)u rencontrer dans
la négociation d'un traité d'allian-
ce entre les cabinets de Londres,
de Saint-Pétersbourget de Vienne,
traité qu'il signa en i7<)5. Deux ans
après, il obtint de Paul I", qui ve-
nait de succéder à Calhrrine II,
la ratification d'un Jrai(é*de com-
merce entre ce souverain et l'An-
gleterre. Celte même laveur dont
lord "WiihAvorth avait joui à Saint-
Pétersboyrg augmenta encore
sous le nouveau règne, et l'em-
pereur Paul I" sollicita de Georges
III la pairie pour cet ambassa-
deur. Il venait d'en recevoir la
nouvelle lorsque l'empereur lui
fît donner l'ordre de ne plus pa-
raître à la cour. Il obéit, et par-
tit pour Londres presque sur-le-
champ. En 1803, après la conclu-
sion du traité d'Amiens , il vint
en France en qualité d'ambassa-
deur. Sa mission ne parut }»as
long-lemps pacifique; quinze jours
après son arrivée, un échange de
noies ofTicielIcs inspira de viv«!S
inquiétudes aux amis de la paix.
La stagnation du commerce forti-
fia bientôt ces craintes, qui se réa-
lisèrent entièrement, en 1 8o3, par
le départ de l'ambassadeur an-
glais. liOrd Withworth, à son re-
tour dans sa patrie, fut nommé
2r)4 ^T n-
ionl-lieutcnani du vice-roi d'Ir-
liinde , fonctions qu'il cessa en
1817, pour épouser la duchesse
de Dorset. 11 revint en France, en
1819 , sans caractère apparent.
Partisan déclaré de la note secrète,
il inspira de nouvelles inquiétu-
des ; mais elles cessèrent bientôt
par son départ de Paris. Nous ter-
minerons cet article en rappor-
tant ce que dit Napoléon de lord
Withworlh et de lady Dorset {voy.
les Mémoires du docteur O'Méa-
ra , tome II, page 98). «Lord
AVithworlh est un homme habile,
un peu intrigant, autant que j'ai
pu l'observer, mais adroit; c'est
de plus un bel homme. Les mi-
nistres n'avaient aucune raison de
se plairnlre de lui; car il entrait
bien dans leurs projets. Le détail
qu'ils ont publié de son entrevue
avec moi était plein de menson-
jres. Je n'ai jamais usé envers lui
de violence dans mes manières ni
de grossièreté dans mon langage.
Les ambassadeurs ne purent ca-
cher leur mécontentement quand
ils lurent un tel amas de faits con-
trouvés, et ils les démentirent.
Les Anglais qui habitaient Paris
étaient très-mécontens de son é-
pouse, la duchesse de Dorset : ils
disaient à haute voix que son or-
gueil allait jusqu'à la sottise. La
présentation à la cour fut une
pomme de discorde entre elle et
beaucoup de dames anglaises. Elle
refusait d'introduire celles qui
n'avaient pas été présentées à la
cour de Saint-James; or, il y avait
beaucoup de dames qui ne vou-
Jaient ni ne pouvaient y être pré-
gentées, mais qui désiraient l'être
auprès de moi, et qui étaient re-
WOR
fusées par elle el par son mari. •
WOHOlNZOW ( LE COMTE A-
r.EXATiDxiE de) , grand - chancelier
de Russie, etc. , d'une des plus
illustres familles de cette contrée,
suivit, dès sa jeunesse, la carrière
diplomatique. Il parvint successi-
vement au poste de grand-chan-
celier de Russie, qui lui fut confié
en 1802; le ministère des affaires
étrangères fut ensuite remis dans
ses mains. L'empereur, qui avait
toujours apprécié ses services et
son attachement à sa personne, le
décora des ordres de Saint- Alexan-
dre. M. de Woronzow obtint sa
retraite en i8o4» et fut autorisé à
conserver tous ses titres. Retiré à
Moskow , il mourut dans cette
ville en 1 806.
WORONZOW (N. ) , frère du
précédent, était ambassadeur de
Russie à Londres à l'époque oii
éclata la révolution française.
Chargé, en 1796, de notifier au
roi d'Angleterre l'avènement de
Paul 1" à l'empire, il reçut peu
après de ce prince le grade de gé-
néral en chef, et conserva néan-
moins le poste qu'il occupait à
Londres. Ce fut M. de Woronzow
qui fut chargé de négocier, en
1806, avec le cabinet anglais, la
troisième coalition contre la Fran-
ce. Quoiqu'il ait montré beaucoup
d'habileté dans cette mission, il
s'est peu fait remarquer depuis.
WORONZOW ( LE COMTE Mi-
chel DE ) , lieutenant-général rus-
se, etc. , neveu et fils des précé-
dens, a rempli, comme eux, des
fonctions diplomatiques, et s'est
particulièrement fait remarquer
dans la carrière militaire , où son
avancement fut extrêmemcQt ra-
AYOR
pidc. Il fil, en i8i5 et iSi/ji les
campagnes contre l;i Fronce. Coin-
m^odaut l'avanl-garde de l'année
russe au mois de juin i8i5, il
«.hercha , par un coup de nnain
hardi , à s'emparer de Léipsick ,
tft se porta, au mois d'août sui-
vant, sur l'Elbe, où il occupa
quelques postes pendant que les
Français opéraient leur retraite.
11 se fit remarquer aux batailles
de Bantzen et de Wurchen; s'em-
para de Gassel , que le roi Jérôme
Bonaparte {voy. ce nom) fut forcé
d'abandoriVier ; fit le blocus de
Hambourg, et pénétra en France
en 1814. Dans une proclamation
q'i'il adressa aux habilans des dé-
partcmens des Ardenncs, de l'Aisne
et de la Marne , il les menaçait de
les réduire par le fer et le feu s'ils
prenaient les armes contre les
troupes alliées. Cette proclama-
lion, digne d'im chef de hordes
sauvages, était en outre souillée
d'tm mensonge qui n'est propre
qu'aux peuples les plus corrom-
pus : c'était au nom du prince
royal do Suéde , de Bernadolte ,
ancien maréchal de France, que
le général russe osait parler. Il
jiéuétra dans Reims le 19 mars,
et oreupa le bourg de la Villette
à l'attaque de Paris. A la suite des
cent jours , en i8i5, le comte de
Woronzow commanda le coulin-
pcnt russe pendant l'occupation
de la France par les armées étran-
gères. Il tint son quartier-général
à Maubeuge jusqu'où 1818, épo-
que où il sse rendit au congrès
(l'Aix-la-Chapelle. Outre sou ser-
vice comme lieutenant-général,
le comte de Woron/.ow fait aussi
celui de chambellan et d'aide-de-
camp de l'empereur de Uu.ssie.
WRB
agS
"WRBNA (le comte de), grand-
chambellan de l'empereur d'Au-
triche^ etc., est issu d'une famille
noble d'Allemagne. Il était com-
missaire impérial ;\ Vienne , en
i8o5, lorsque les Français s'em-
parèrent de cette ville. La con-
duite que tint M. de Wrbna pen-
dant l'occupation lui concilia l'es-
time des habilans et des Français;
et lorsque l'empereur d'Autriche
eut été remis en possession de sa
capitale, il nomma M. de Wrbna
son grand-chauibellan, et lui con-
féra la grand'croix de l'ordre de
Saint-Elienne. Un peu avant cette
marque de faveur de son souve-
rain, il avait reçu des habilans de
Vienne une marque non moins
flatteuse de leur reconnaissance
dans l'hommage qu'ils lui avaient
fait du diplôme de bourgeois
honoraire, auquel est attachée
J'exemplion des contributions. M.
de Wrbna remplit, jusqu'en 1 810,
diverses fonctions diplomatiques.
A cette époque , il devint prési-
dent de la commission chargée
de l'amortissement des billets de
banque. Le roi Louis XVIII lui
conféra, en 1816, les ordres de
Saint-iMichel et du Saint-Esprit.
Lu 1818, M. de Wrbna accom-
pagna l'empereur François au con-
grès d'Aix-la-Chapelle.
WRBNA ( LE COMTE Ladislas
de) , fils du précédent, était, en
i8iG, capitaine dans le régiment
de luilans du prince de Schwart-
zerïberg. Celle année même, le
roi Louis XVIII lui envoya la
croix de Saint-Louis. En 1817,
M. de Wrbna partit pourRio-.Ia-
neiru, afin d'y porter la nouvelle
de la conclusion du mariage de
l'archiduchesse Léopoldine avec
.96
WRE
le prince du Brésil. Cette missr'on
lui valut, de ia part du jeune
époux, la croix du commandeur
de l'ordre du Christ et un»- pen-
sion de 45000 IV. Il rapportait de
riche» présens pour IVnipereur
François et pour la princesse l.éo-
j»oldine. lorsqu'il f'ul attaqué par
des pirales qui pillèrent son vais-
seau ; il ne parvint pas à s'échap-
per de leurs mains sans courir de
grai'd'î dangers,
Wi\ÈDE (le prince Charles-
Philippe de) , leld-tnaréchal ba-
varois, ent né à Heideiberg en
1767. Quoi(|ue desliné par sa fa-
mille à la carrière des armes , il
ne prit du service qu à ITige de
35 ans (1793) ; mais son avance-
ment fut rapide; il était cnloucl à
28(1795). Chargé, en 1799, du
oommandemeut du corps franc,
que, sous les auspices du prince
Charles, il avait levé, il obtint
des succès assez imp Ttans , et
parvint bientôt au {^rade de lieu-
tenant - général. Comme officier
supérieur, il est instruit , aclif, et
possède au milieu du péril la plus
grande fermeté ei un rare sang-r
froid. Napoléon le jugeait très-fa-
vorablement; néanmoins il ne pa-
raît pas avoir fait mention de lui
dans ses mémoires. Le prince, de
AVrède, auxiliaire des Français «a
i8o5, fit celte campagne avec une
grande distinction .. et dans, ime
proclamation qu'il adressait à jses
troupes , il leur disait : « Il faut
vaincre ou mourir aux portes de
Munich.» Chargé, après la paix
dç Presbourg, du commandement
ùe l'une desprovinccs bavaroises,
il reçut, en 1806, la grand'croix
de la légion - d'honneur. Il fut
chargé, pendant les années 1&08
WRE
et 1809 , de différentes opération»
dans le Tyrol , et battit constam-
ment les troupes autrichiennes.
Celle même année (1809) , il eut
ordre, sous le prince royal de Ba-
vière, de couvrir la capitale; il
occupa d'abord la position de
Slraubing, puis celle de Neustad,
où il fut rejoint par la 2* division
bavaroi-ie, sous les ordres du gé-
néral l)eroy,à la suite de l'affaire île
Landshut. Après plusieurs actions
partielles . qui furent en général
à l'avantage des Bavarois, s'enga-
gea é, le 20 avril, la bafaille d'A-
bensberg, où le général de Wrède
se distingua de la manière la plus
brillante devant le pont de Sie-
genburg,ct fut cité avec de grands
éloges dans le premier bulletin.
Huit drapeaux, 12 pièces de ca-
non et 18,000 prisonniers, tom-
bèrent au pouvoir des trouj)es ba-
varoises et wurtembergeoises,que
Napoléon commandait en person-
ne. Le surlendemain , le général
de Wrède se dirigea sur l'Inn ,
poursuivant les vaincus. Le 27, il
reçut ordre de se porter à Lauffen
sur la Lutzel,pour tâcher d'attein-
dre le corps autrichien stationné
dans le Tyrol. Ayant en effet joint
le lendemain son arrière-garde, il
s'empara de ses bagages et lui fit
beaucoup de prisonniers. Le jour
suivant- il attaqua l'ennemi de-
vant Saltz.bourg,«tà la suite d'un
combat très-animé , les Bavarois
entrèrent dans cette ville pêle-
mêle avec les fuyards. Le baron
de Wrèdc se signala de. nouveau
dans celte affaire. Il déploya sur-
tout de grands talens i^ la prise
d'Ingpruck et à la bataille de Wa-
gram, où il reçut une blessure
grave; il fut alors élevé au grade
WRE
de feld-raaréchal. Au commence-
ment de 1808, Napoléon ayant
rendu publique une correspon-
dance sai-iie sur un courrier sué-
dois , quoiqu'il ne fût point eu
g'uerre avec cette puissance , et
l'armée bavaroise se Irouvant si-
gnalée dans une des dépêches de
cette correspondance d'une ma-
nière peu honorable , les ofliciers
supérieurs bavarois déclarèrent
qu'ils se rejçardaient tous comme
personnellement insultés par le
ministre qui avait signé cette let-
tre, et qu'ils l'allaqueraieut par-
tout où ils pourrai»!nt le rejoindre.
Vn elTcl, un duel eut lieu entre le
maréchal de Wrède et le comte
de Duben , chargé d'affaires de
Suède à Vienne. Aucun des com-
ballans ne fut tué ni blessé. En
i8i2, le feld-maréchal de Wiède
commanda dans la campagne de
lUissie , si fatale à la France par
les désastres de la plus rigoureuse
des saisons, le contingent bava-
rois. Il s'y conduisit avec la plus
grande bravoure, et les bulletins
français rendirent le compte le
plus flatteur de sa conduite. A
Volontina et à l*olo>k , le corps
sous ses ordres fut un de vmux qui
souffrirent le plus; sa cavalerie
presc^ue tout entière périt dans
ces deux combats. Nos malheurs
détachèrent la Bavière de notre
alliance, et le 8 octobre i8i3, le
j»rince de Wrède signa le traité
qui rompait cette union. Dès lors
il cond>altit avec la mt'ine valeur
les armées que naguère il avait si
noble.ment secondées. Il se porta
en Franconie à la tète d'une ar-
mée de Bavarois et d'Autrichiens.
Vainement cependant il voulut
s'oppos«r à la retraite de l'empc-
AVR È 307
reur Napoléon , que la bataille de
Léipsick forçait à la retraite. Le
combat de Ilanau, le 3o octobre
i8i5, n'empêcha point l'armée
française d'opérer cette retraite ,
où le prince de Wrède fui griève-
ment blessé. On crut même cette
blessure mortelle, et les journaux
français l'annoncèrent officielle-
ment. Ils reprochèrent même à ce
général d'être le principal auteur
de la défection des Bavarois. le
prince de Wrède rétabli, reprit le
commandement des troupes ba-
varoises, et fit la campagne de
France en 1814 ; il eut des succès
à la bataille de Brienne, le i" fé-
vrier, ainsi que le i5 et le i4 du
même mois , en marchant sur
Troyes ; mais Ils lui coûtèrent
cher. Maître de cette ville, il rem-
porta encore des avantages à Bar-
sur-Aube, oti le maréchal Oudi-
not lui était opposé. Le traité de
Paris mil fin à une guerre que si-
gnalèrent tant de malheurs et de
délections. Le feld-maréchal de
Wrède reçut de grandes récom-
penses, et fut élevé au rang de
prince. Pendant les cent jours , en
181 5, il commanda de nouveau
les lrou[>es de Bavière , et pénétra
en F'rance après les désastres de
Waterloo. La paix de nouveau si-
gnée , il fut chargé de missions
imj>ortantes. « On a prétendu que
dans les' discussions diplomati-
ques, qui eurent lieu peu après,
il avait soutenu avec beaucouj»
d'énergie, et même une sorte do
rudesse militaire, vis-à-vis des
ministres prussiens, le principe
de l'indépendance des états qui
avaient formé la confédération di»
Bhin. » Le prince <le Wrède, qui
jouit de toute la conûance de sou
af)«
WIU
souverain, est membre de la cham-
bre (les étals de Bavière.
WlUGHT ( N. ) . omcier de la
marine anj^laiso, fut chargé» cri
i8o5 et 1804, de débarquer sur les
côtes de France le* anciens chefs
de chouans qui s'étaient rendus à
Londres, pour y organiser de non-
veaux iDoyens de « rallumer la
^ guerre civile dans leur patrie, »
La police consulaire, informée de
leurs projets et de la mis^^ion du
capitaine Wright, prit des me-
sures pour se saisir des conjurés,
et s'empara d'abord de l'officier
anglais. Enfermé au Temple, il
parut ensuite comme témoin dans
le procès de Georges Cadoudal
{voy. Cadoudal) et des autres
chefs. Le capitaine Wright ayant
appris la nouvelle de la défaite du
général Mack devant Ulm, se li-
vra au plus violent emportement
contre ce général , qu'il traita de
lAche et de perfide, et à la suite
de cet accès, se coupa la gorge
avec un rasoir le a^ octobre i8o5.
Les ennemis de Napoléon préten-
dirent, sans que le temps ait con-
firmé ce bruit, qu'il avait donné
l'ordre de le mettre à mort, « parce
qu'il n'avait pas voulu servir la
police française. »
WRIGHT ( Joseph ) , peintre
anglais, naquit à Derby en 1754,
et fut élève du célèbre peintre
Hudson, qui comptait dans son
atelier deux hommes devenus eux-
mêmes célèbres depuis, Reynold
«;tMortimer.WrightalIa,en 1775,
ù Rome, où il passa deux années,
et y perfectionna son talent. Il
revint dans sa patrie, où il mou-
rut en 1 797 : il avait acquis la répu-
tation d'un artiste distingué, réus-
sissant également bien dans le
WUR
Iiaysnge, l'histoire et le portrait.
WUITZ. (Joseph), général na-
politain, était né i\ Naples, d'une
famille originaire d'Allemagne.
L'un des partisans de la révolu -
lion qui éclata à Naples en 1799»
il fut chargé du commandement
général de la garde nationale et
de la défense de la ville. Son lèle
et son aciivité se déployèrent dans
cette circonstance. Les officiers
royalistes ayant refusé de servir
la nouvelle république, il s'assura
de leur personne , et afin d'em|»r;-
cher les nombreux détenu* de
profiler du trouble pour ressai><ir
leur liberté et se joindre a>ix en-
nemis intérieurs et exlérieur«, il
fit placer des barils de poudre dans
chaque prison, avec ordre d'y met-
tre le ïe^u au moindre motjvement
d'insurrection de leur part. Il or-
donna des mesures non moins é-
nergiques contre les Lazzaronis,
dont les dispositions hostiles l'in-
quiétaient, et se prépara à repous-
ser vigoureusement l'ennemi qui
approchait de la ville. Toutes
ses dispositions terminées , il se
porta à la tête de sa colonne vers
le pont delà Madelaine, où il se
baltit avec la plus admirable va-
leur. Renversé par une balle, il
fut transporté au Châleauneof, où
il mourut au moment où les trou-
pes rovales y pénétraient.
WURMSER (le comte Dago-
BERT SiGisMOND DE ) , feld- maré-
chal autrichien , elc. , naquit en
Alsace. Ses premières années dans
la profession des armes furent con-
sacrées au service de France. Il
passa ensuite dans les troupes au-
trichiennes, où il parvint succes-
sivement au grade de feld-maré-
chal, récompense de ses talcns
WlJR
pliJlôl que de ?es succès à In tête
des armées. Néanmoins le comte
de Wurmser acquit la réputation
d'un général brave , pltiin d'expé-
rience et très-humain. Ce sont là
de véritables litres à l'estime gé-
nérale. Chargé, en 1790, du com-
mandement de l'armée autrichien-
ne, qui devait s'emparer de l'Alsa-
ce, M, de Wurmser passa le Rhin le
5 avril de celle année, prit Spei-
rerbach,afin de couvrir, de concert
avec un corps prussien, le siège de
Mayence. Cette place a3'ant capi-
tulé, il se porta en avant, força
Ils Français à se retirer des envi-
rons de Landau, et parvint rapi-
dement au pied des Vosges. Péné-
trant ensuite dans les lignes de
Weissembourg. il força encore les
français à reculer jusque vers la
Haute-Alsace. Hagiicnau, Druns-
heim et le Fort-Louis, tombèrent
en son pouvoir, et le conduisirent
A AVantznau, sous Strasbourg.
C'est là que s'arrêlèreut ses suc-
cès. Il ne put s'emparer du pont
de Saverne, et eut de très -vifs
combats à soutenir à Wanlznau
et dans la forêt de Brumpt. Les
Français s'étaient aguerris, et leur
.irméc était plus nombreuse et
mieux dirigée, Pichegru l'atta-
quait avec une rare audace, et
M. de AVurmser, que son Age et
ses iiinrmitès forçaient de confier
à ses lieutenans, pour la plupart
iucapables ou jaloux de son nié-
rilCjdes opérations qui tournaient
presque toujours à son désavan-
tage, fut bientôt repoussé, et en-
fin mis dans une déroule com-
[)Iètc. De refour à Vienne au mois
de janvier 179^. il eut la conso-
l.ilion de voir son souvçrain ne lui
pas imputer ses rêvera et lui con-
WUR agg
server sa confiance. Il lui donna
même une preuve nouvelle de
6on estime, en lui remettant, au
inois d'août 1795, le commande-
mont de l'armée du llaut-Rhin.
« Ce fut alors, dit-on, que le ha-
sard lui ayant fait connaître une
correspondance que le prince de
Condé entretenait avec Pichegru,
il en fit part à sa cour, sans pro-
fiter néanmoins de tous les avan-
tages que lui otTraient des dispo-
sitions aussi inattendues. L'armée
française ayant passé le Rhin et
s'étant portée sur le Necker, Piche-
gru se retira toul-à-coup, et aban-
donna Manheim, qui fut pris a-
près quelques jours de bombarde-
ment. » Il reçut en récompense le
grade de feld- maréchal. Dans la
campagne de 1796, commandant
de nouveau sur la rive gauche du
Rhin, il f(Jt battu par Moroau à
Rebach et à Franckental. Il passa
en Italie, afin de réparer les dé-
faites de Beaulieu et de secourir
Mantoue. D'abord il culbuta les
postes français sur les deux bords
du lac de Guarda ; mais le géné-
ral en chef Bonaparte, qui assié-
geait Mantoue , quitta brusque-
ment ce siège , se précipita sur
M. de Wurmser, et, le l\ août, le
mit dans une pleine déroute. Il le
baltit encore à Roveredo, et de
nouveau, le 8 septembre, au dé-
bouché des gorges de la Brenla.
M. de Wurmser persista à tenter
la forluue. Repoussé par le géyé-
ral Kilmaine de Vérone, dont il
voulait s'emparer, il longea TA-
dige à la tête d'un corps de 5, 000
fantassins et de i.fjoo chevaux ,
évita de tomber dans deux divi-
sions françaises qui croyaient l'a-
voir ccrnôt et arriva par une mar-
5i)o WYC
che aii'^si savante que pénible de-
v;inl Mantono, qu'il dégagea, et
où il entra. La place fut cernée de
nouveau , et se rendit le 2 février
1797, «pi'és la plus belle résis-
tance. Les Français traitèrent M.
de Wurmser avec une sorte de
vénération, et lui accordèrent des
considérations particulières. Ren-
du à Vienne, il fut nommé par
l'empereur commissaire- général
en Hongrie, et doté d'une pen-
sion de 1/4,000 florins. Cet illustre
guerrier, que son souverain ac-
cueillit toujours avec la plus gran-
de bonté, mourut au mois d'août
de la même année (1797)- Napo-
léon , au rapport de M. O'Méara
{voy. ses Mémoires, t. II, p- 99),
disait de Wurmser : « Avant la
capitulation de Mantoue, il avait
continué de m'appeler7VMn6 hoyn-
me. Il était très-âgé, brave comme
nn lion, mais tellement sourd,
qu'il n'entendait pas autour de lui
siffler les balles. »
WYCOMBE ftoBD), membre
du parlement d'Angleterre, est fds
de lord Shelburne, marquis de
Lansdown, auquel on doit la paix
qui fut signée, en 1783, entre l'An-
gleterre et la France. Lord \Vy-
combe a toujours été l'un des
membres les plus inflexibles de
l'opposition, et les ministres ont
eu souvent à repousser ses vives
attaques. En 1794!» •' et le cou-
rage, on peut dire inouï , de faire
pi^jliquement l'éloge des Fran-
çais. Peu de temps après , il con-
sentit à ce que le ministère fît des
recberches contre les sociétés ja-
fobines de l'Angleterre ; mais il
déclara que le premier il pren-
drait leur défense du moment
qu'elles ne réchuncraienl qu'une
WYL
réforme parlementaire. Depuis
cette époque, dit-on, lord Wy-
combe continue à manifester les
mêmes principes politiques.
AVYLLYS (Sasujel), major-gé-
néral des troupes de la république
des Etats-Unis de l'Amérique
septentrionale, naquit en 1757.
Il était fils du colonel républicain
Wyllys, né en Amérique, qui
quitta le service anglais dès le
commencement de ia guerre de
l'Inde, et qui combattit avec la
plus haute valeur pour la cause
de la liberté de sa patrie. Samuel
Wyllys, après avoir fait de bonnes
éludes au collège de Y'alc , où il
prit tous ses degrés en 1759, leva
une compagnie d'infanterie, qui
composa la première garde du
gouverneur de la province de
Connecticut. et fut nommé, en
1 775, par la législature de cet état,
lieutenant -colonel du régiment^
de Spencer. L'année suivante, le
congrès le nomma colonel d'un
régiment formé dans le Connec-
ticut, qui se distingua, sous les.or-
dres de son vaillant chef, pendant
toute la guerre de la révolution.
Après la glorieuse paix de 1782,
et la reconnaissance solennelle de
la république des États-Unis par
toutes les puissances de l'Europe ,
"WyHys fut nommé brigadier, et
peu de temps après major-géné-
ral an la milice de l'état de Con-
necticut. Il remplit aussi avec dis-
tinction plusieurs offices civils, et
en dernier lieu celui de secrétaire- 1
d'état, poste qu'il résigna en 1809,
pour se retirer à Hartford, où ce
vétéran des armées américaiiîcs
termina son honorable carrière, à
l'âge de 85 ans, le 9 juin 1820.
WYNPERSSE (Jacques Thiens
W Y. s
Vas-de), célèbre médecin hollan-
dais, naquit à Groningue le 17
novembre 1761. Fils de Lonis
^Yvnpei■sse, professeur de jihilo-
sojihie à l'universilé de Leytie ,
auquel on doit plusieurs ouvrages
élémentaires souvent réimpriinus,
il fit, sous la direction de son père,
de bonnes études, et de Irès-bonue
heure montra une vocation parti-
culière pour l'exercice de la mé-
decine. Élève des prolésseur» en
médecine et en chirurgie les plus
célèbres de la Hollande, il fut
reçu, en 1785, docteur en l'uni-
versité de Leydc, sur sa thèse
doVa7ikytosle.]Ln 1784, il fit ini-
primer la traduction en latin de
1 Ouvrage du docteur anglais (iuil-
lauuic Hevvson, sio' les vaisseaux
lyrnplialiques. Courotuié en 1786
à Amsterdam, pour un Mémoire
sur la Jaunisse, il reçut, en 1787,
le même honneur de la société
royale de médecine de Paris pour
son Mcinuire sur le muguet, le
millet et le blanchct; cette société
l'admit en même temps au nom-
bre de ses associés étrangers. Une
mort prématurée le ravit, en 1789,
aux sciences, aux pauvres et à
l'amilié. Auteur laborieux, habile
praticien, h(>mme doué des plus
belles qualités du cœur, AVyn-
persse, regretté généralement, a
laissé un cabinet important par le
nombre des préparations anato-
miqucs, parmi lesquelles on re-
marquait une collection com[)lèle
d'os morbeux. Celte précieuse
collection a été acquise par l'uni-
versité de Goi'ttingue.
^VYSZKOWSM ( N. ) , m:«jor
de cavalerie des troupes polouai-
sus. fut un des plus fidèles patriotes
à l'époque de l'insurreclion iiatio-
^\Y^
5oi
nale dirigée par le général Kos-
ciusko en 1794- Major d'un corps
qui s'était formé pour secouer le
joug des Russes , aussitôt qu'il
apprit l'insurrection de ses com-
palrioleset à l'insude son colonel,
il décida le corps entier à aller
rejoindre Ko!?ciusko. Pendant qu'il
était en marche, il fut attaqué par
un corps île grenadiers russes, A
la tête de son petit corps de cava-
lerie, il se précipita sur l'ennemi,
le culbuta , lui tua et blessa beau-
coup de monde, et conduisit fi
Rosciusko, avec bon nombre du
prisonniers, sept pièces d'artille-
rie dont il s'était emparé. Il reçut
de l'emploi dans la Volhinie, et
lors de la retraite du 10 juin, après
la perte de la bataille de Chelm,
il sauva les canons et les débris de
l'armée.
AVYTHE ( Georges ) , chance-
lier de l'état de Virginie, fils d'un
fermier estimé pour sa probité et
ses mœurs pures, naquit en 1726.
Les bons exemples que lui don-
naient ses parens ne purefit rain-
.cre ses penchans portés à la dissi-
pation. Il ne savait encore, à l'âge
de 21 ans, que lire, écrire, et les
cinq premières relaies de l'arilh-
mélique. La perte de son père, et
bientôt celle de sa mère, qu'il eut
à déplorer vers ce temps, ne chan-
gèrent pas ses di-positions. Ce ne
fut qu'à l'SjTv: de 5o ans que, fai-
sant un utile retour sur lui-même,
il chercha, par l'étude et une con-
duiliî régulière, à faire oublier le»
travers de sa jeunesse. Il y réus-
sit au-delà de ses espérances. San:»
le secours d'auctm maître, il aj>-
prit le latin et le grec, et acquit
en peu de temps la parfaite con
naissance des lois de son pays et
Stfît
WYI
(le l'Angletirre. 11 s'iiislrulsit éga-
leincul à fond dans les scieuc»!S
morales et physiques; il devint
aussi un très- habile iiiuthémati-
cien. Repu avocat, il obtint de
grands succès comme orateur et
comme savant jurisconsulte; et
lorsque rAmérique voulut con-
quérir son indépendance , il se
joignit avec son élève et son ami,
Thomas Jefferson , à un corps de
volontaires, qu'il organisa sur un
meilleur plan, et qu'il forma à la
plus exacte discipline. Wythe fut
nommé à la même époque député
dans l'assemblée de la Virginie;
après avoir rempli pendant quel-
que temps et avec distinction les
fonctions d'orateur de la chau)bre
des communes , il se rendit au
congrès, dont il devint un des
principaux membres. On sait que
le congrès , assemblé en 1776 , ne
se sépara qu'après avoir proclamé
l'indépendance américaine. « Il
fut, dit l'auleur d'une notice sur
Wylhe, un des signataires de celle
mémorable déclaration, par la-
quelle! ces héroïques légi.^lateurs
de leur pays engagèrent leur vie,
leur fortune et leur honneur au
maintien et à la défense de ses
droits trop long - temps violés.
'Wythe, après avoir, avec un zèle
infatigable, achevé le nouveau
code des lois qu'il avait été chargé
d'établir avec ses collègues, eut
part à leur exécution dans l'em-
ploi difficile de juge de la cour de
justice : il fut en effet l'un des
trois juges de la haute-cour de la
<;hancellerie, et ensuite chancelier
de la Virginie , place qu'il conser-
va plus de vingt ans, et qu'il gar-
da jusqu'à sa mort. Ce fut surtout
tlaus l'exercice de cet emploi que
WYT
son désintéressement et son pa-
triotisme parurent dans tout leur
jour; car les honoraires que la ré-
publique lui accordait étaient des
plus modiques ; il avait même un
tel mépris pour les richesses, qu'a-
près avoir donné en pur don à son
neveu la moitié du bien qu'il aV^ait
à Elisabeth-Cyiy,et vendu l'autre
moitié, il n'en fut payé que beau-
coup d'armées après. Il fut aussi
nommé membre de la convention
de Virginie, qui, en 1788, s'oc-
cupa de la constitution proposée
aux Etats- Unis. » Son âge déjà
avancé et ses infirmités le déter-
minèrent à s'éloigner des affaires
publiques. Il rentra bientôt dans
lu carrière, et en 1798, il com-
battit la loi sur les séditions et la
levée d'une armée. Deux fois il
occupa la présidence du collège
des électeurs de LixVirginie. Sa
santé s'affiiiblit de plus en plus,
et il mourut, en 1806, à la suite
d'une maladie violente, qui fit
croire qu'ilavait été empoisonné.
Une enquête sévère détruisit cette
opinion. «Le chancelier AVylhe é-
tait d'un caractère sociable, et dès
qu'il fut revenu des erreurs de sa
jeunesse, il se fit une réputatioa
intacte. Sa manière de vivre était
siuiple et modérée, et il trouvait
dans l'art de diminuer les besoins
celui de réprimer la cupidité des
richesses. Comme juge , il fut re-
marquable par sa rigide impartia-
lité , son attachement sincère aux
principes de l'équité, son immense
érudition, et son assiduité infati-
gable aux soins de sa place. Su-
périeur aux préjugés populaires et
à toute influence corruptrice, rien
ne put jamais le faire dévier des
roules de la justice et de la vérité. «
XI AI
XI M
8o3
X
XAVIER ( Antoine - Marie ) ,
violoniste et compoîiileiir de mu-
sique, est né à Paris vers 1739.
« Fils d'un grand seigneur, disent
les auteurs du Dictionnaire lùslo-
rique des musiciens ^ M. Xavier se
vit forcé par la révolution à vivre
du talent qu'il cultivait pour son
agrément. » Ce virtuose , élève
de Berthaume et de iMcstrino, se
fil remarquer aux concerts de la
rue de Grenelle , dont il était l'un
des administrateurs. Il l'ut attaché
pendant dix ans à l'orchestre du
théâtre Fcydeau, et trois ans à
celui de l'Opéra-IJufla. M. Xavier
passa ensuite à l'académie impé-
riale de musique, devint profes-
seur au lycée impérial, et fut at-
taché à la musique particulière de
l'empereur Napoléon; il est au-
jourd'hui ( 1825 ) attaché à l'or-
chestre de l'académie royale de
musique. M. Xavier a publié en-
Ire autres compositions, un œuvre
de duos et plusieurs romances.
M. Kreutïcr lui a dédié un œuvre
de sonates, et M. Ilyacinthe-Jadin
un œuvre de quatuors de violon,
comme exécutant. « La manière
de M. Xavier, disent les auteurs
<|ue nous avons déjà cités , est
large, et l'on ne peut tirer un plus
beau son de son instrument. »
XIMKNÈS (Augustin- Louis,
MARQUIS de), doyen de» poètes
fran(;ais, d'une famille originaire
d'iispagne, naquit à Paris le 28
février 172^. Il s'était for»né à
l'école lies honimes de lettres les
plus distingués du 18* siècle, et
fut intimement lié avec VoltaiiT ,
«qui, dit M. Palissot, par ui.tj
espèce d'adoption très-honorabie,
fit placer plusieurs fois dans ses
éditions des vers du marquis de
Xinienès : témoignage d'estime
qu'il a renouvelé depuis en favour
de M. de Aulhière. » Le marquis de
Ximenès n'occupe pas un haut rang
sur le pâmasse français, mais il
n'en est pas moins digne de l'in-
térêt des amis de la littérature clas-
sique, par le soin avec lequel il a
conservé dans ses ouvrages, le
goût pur des Racine, des Boi-
leau et des Voltaire ; plusieurs
passages de ces mêmes ouvrages
ne seraient peut-être pas désa-
voués par ces illustres auteurs, et
pour appuyer notre opinion, nous
extrairons les vers suivans du dis-
cours qu'il présenta au concours
de l'académie en 1 ySo.
11 est des rois sans force et nés pour l'indolence,
Que la njoUcsse endort, que lintifrêt encense;
rantômes élevas sur un trône avili,
Ils passent comme un songe et tombent dans
l'oubli.
Sous ces règnes de deuil , le mérite, inutile,
Languit décourage, dans un obscur asile.
Et des hommes divins y vivent inconnus,
Mais laissent , en mourant , un nom qui ne meurt
plus.
Illustres malhenrcux! vos ombres consolées
Abandonnent aux rois l'orgueil des mausolées;
La mort y foule aux pieds le faste qui les siiir.
Votre empire commence où leur règne est détruit.
Ce discours ne fut pas couronné,
« quoique Voltaire, ajoute M. Pa-
lissot, regartlTit l'ouvrage comme
un des meilleurs qui cCit jamais
été présenté à ces concour,«^. » Il
a donné les tragédies <VEpic/t(t~
ris, d'Amalazonlef et de Dun Cut-
So4 Ylill
los, un poëme de César au sénat
romain, et un autre poëme, où il
développe cette idée trè.s-']uàte,
que les Icllres ont autant contri-
bué à la gloire de Louis XIV, que
ce monarque avait coniribué à
leurs prog:rè.s; deux Discours en
vers, l'un à la louan|;e de Voltaire,
et l'autre dont le sujet est l'iufluen-
ce de Boileau sur son siècle. Par-
mi ses autres productions, on elle
des Lettres sur la Nouvelle Héloise
de J. J. Rousseau. 11 avait fait pa-
YtR
raître ses œuvres en 1772» et vingt
ans après, il en a donné de nouvel-
les, sous le titre de Codicile d' un
vieillard. Le marquis de Ximenès
fut toujours partisan de la révolu-
tion , mais avec un désintéresse-
ment parlait; il n'a pris aucune
part aux événemens, ni occupé
de fonctions publiques ou autres
emplois. Il mourut peu après la
seconde restauration du gouver-
nen>.ent royal en France : il était
alors dans la 86"" année de son 5ge.
YKREGIJI(Joseph), savant ec-
clésiastique espagnol , naquit à
Vergara , province de Guipuscoa,
vers 1754. Il commença ses étu-
des à Malaga, les continua à Ma-
drid, et vint les terminer à l'aiis,
où il se perfectionna dans les
sciences physiques et naalhénia-
tiques. Son goût pour l'étude, un
jugement sain, un esprit judicieux
et les qualités morales les plus re-
commandab les lui procurèrent des
relations intimes avec les savans
et les gtns de lettres de Paris. De
retour dans sa patrie, il prit les
ordres, reçut la nussion d'instruire
les infaus,el fut chargé, parson sou-
verain,de composer un catéchisme
dont on pût faire un usage géné-
ral en Espagne. Ce rcs[)ectablc
ecclésiastique vivait retiré à Car-
dahalzo, près de Madrid, où il em-
ployait son temps à l'étude et ses
richesses aux bonnes œuvres, sur-
tout à l'égard des enfaus et des
pauvres , lorsqu'il fut traduit, en
J792, au tribunal de l'inquisition.
Nous citerons, d'après une no-
tice sur ce savant , les principaux
griefs qui lui étaient imputés. « Il
avait nié rinfaillibilité du pape et
sa supériorité sur le concile œcu-
ménique , parlé mal de la cour de
lîome, des moines, des scapulai-
res et de l'inquisition, en disant
qu'elle fomentait l'ignorance; il
avait censuré amèrement les prê-
tres qui célébraient l'oHice trop
précipitamment; prétendu que le
jansénisme était un fantôme, et
loué Nicole, Tilleinonl et les Let-
tres provinciales; il possédait dans
sa bibliothèque les ouvrages de
MesetiguY, et doutait de la sain-
teté de Marie d'Agréda. » Mais,
ajoute l'auteur de la notice, ses
véritables crimes étaient de pro-
clamer, comme le clergé français
du temps de Bossuet, les notions
saines su ries limites de? deux puis-
sances et les droits des évêques
envahis en Espagne par l'ultra-
montani^me; de montrer en tout
uu courage imperturbable à sou-
YER
tenir la vérilé, et enfin de joindre
à l'étendue des lu m ières des iiiœur?
auslères : pent-Ptre aussi avait-il
trop manifesté sa manière tie pen-
ser sur les ecclésiastiques émigrés
de France en Kspagne. qui se pré-
tendaient riches en principes de
foi, mais qui étaient réelltînîent
pauvres en pratiques de charité.
Afïligé de voir son pays en pnue
i\ l'ignorance, Yeregui désirait une
nouvelle Pentecôte pour le régé-
nérer. CI II y a trois cents ans, di-
n sait-il, que nous avons se<;oué le
«joug des Maures, et nous soiii-
n mes cdiirbés maintenant sous le
»jfMig (]u j)harisaï-.me ! •> Les prin-
cipes d'honneur et de vertu de
"Veregui Itii avaient fait des aniis
nombreux, zélés et puissans. Le
résultat de leurs démarches fut
qu'après cinq mois les per'^é-
cutions dirigées contre lui ces-
sèrent. Sa doctrine fut décla-
rée pure et sa conduite iriéprn-
chahle. Par un acte de justice, si-
nr>n inouï, du moins trop rare, le
gouvernement le nomnia mem-
bre du tribunal qui venait de l'ab-
soudre. c< Peu de temps après, di-
sent It's auteurs de la notice déjà
citée, on ré|iandit par milliers des"
exemplaires de l'ouvrage de l'ab-
bé Grégoire {vny. ce nom), évê-
(|ue de Blois, contre l'inquisition,
traduit en espagnol, ce qui enga-
gea le tribunal à essayer de ré-
pondre par trois ou quatre voln-
m«'3 composés par divers inquisi-
teurs. Ymtgui prit la plume contre
l'inquiAition dont il était membre,
et composa une savante apologie
de l'ouvrage de rév»'''que d«; Blois,
qu'il envoya euFrance, poury être
publiée ave(^ les pièces de son pro-
cès, comme un monument d'inep-
T. XX.
Y01\
3o5
tie propre àcouTrirdehonte l'infâ-
me tribunal qui fui heureusement
supprimé depuis, et qui vient
d'être rétabli par le trop sévère
Ferdinand VIL » Yeregui, étant à
Bagnères en i8o3, fil imprimer un
ouvrage sous le tilre de : Idea de
catecismo nacional, digne des prin-
cipes qu'il avait toujours profes-
sés. Le succès de ce livre l'avait
déterminé à en préparer une nou-
velle édition ; mais la mort l§ sur-
prit pendant qu'il était occupé de
son travail, l'année même où il
l'avait publié pour la première fois
( i8o5). Il fut regretté à la fois de
ses concitoyens et i\f% Français,
dont il avait toujours été l'ami
fidèle.
YOllCK ( Frédéric duc d'), se-
conil fils du roi d'Angleterre Geor-
ges III, premier pair de la Gran-
de-Bretagne . généralissime des
troupes de terre et chef de l'ad-
ministration militaire, etc., né le
i6 août ijGo.-A l'âge de i6 ans,
il voyagea sur le continent, et sé-
journa long-temp- en Prusse; il y
épousa la fille ainée du roi Frédé-
ric Guillaume H, princesse qui
joignait à tons les avuilages ex-
térieurs, un esprit distingué et des
vertus dignes du sort le plusheu-
reiix, mais qui ne jouit pas long-
temps dn bonheur de fixer l'aita-
chement de son angu-te époux.
En 179'i, quan<l le gouvernement
anglais eut décidé de joindre ses
troupes à celles des arjnées coali-
sées qui devaient envahir la
France, le roi Georges III, ayant
une prcdih.'Ction Miar(piée pour
son second fils, et la pins haute
opinion de sa capacité, Ini donna
[(^commandement en chef de Tar-
inée anglaise destinée à agir sur
3oG YOR
le continent. Le chic d'Yorckfit an
moinâ en plusieurs occiisions preu'
■ve de cour;if:;e personnel. Ch.irgé
du siège de Valenciennes, il par-
vint, après ?ix jeinaines de tran-
chées ouvertes et un bombarde-
ment de plu>ieurs jours, à l'aire ca-
pituler la garnison de cette jilace,
qui manquait d<';ja de vivres et de
muniliouïi de guerre. Il l'ut moins
heureux devant Dunkerque, où
toutc^ ses attaques lurent vigou-
reusement rcp'jussées au com-
mencement de septembre 1793,
et où le 8 du même mois, il fut
complèlement di;fait par le géné-
ral Houohard. Les Anglais essuyè-
rent dans cette journée des perles
considérables, et ne furent plus
d'aucun secours aux coalisés pen-
dant le resle de la campagne. Le
duc, après une pénible retraite,
s'était embarqué pour l'Angleter-
re, afin de coni'érer avec le gou-
vernement sur les opérations d«
la campagne prochaine. Elle de-
vint encore plus désastreuse pour
les alliés. Leduc d'Yorck avait pris
position près dcTournay; mais vi-
vement pressé par les troupes fran-
çaises , il fut obligé de se retirer
d'abord sur Anvers, et malgré le
renfort de 10,000 hommes, que
le lord Moira, qui venait de débar-
quer à Oslende, lui amena, il fut
encore obligé de battre en retrai-
te. Le 10 septembre, il prit posi-
tion sur les bords de la Meuse,
a peu de dislance de Grave, et
ne put se maintenir dans ce
poste; toujours poursuivi l'épée
dans les reins, il fut forcé de re-
gagner à la hâte le lieu de son em-
barquement, qu'il ne put attein-
dre sans éprouver de nouvelles
pertes. De retour en Angleterre,
YOR
leducd'Yorck fut nommé, en 179.5,
(^onnnandant en chef Je l'armée
anglaise, et malgré le mauvais
succès de ses deux premières ex-
péditions, il fut encore chargé, en
1799, de celle qui devait agir en
Hollande de concert avec une ar-
mée russe, commandée par le gé-
néral Ess^n. Le duc d'Yorck dé-
barqua, sans éprou ver de ré-^istan-
ce, avec 5o,ooo hommes, et s'a-
vança d.ins le pays, i! trouva l'ar-
mée galio-balave dans le v(y>ina-
ge d'Alckmaar, occupant une for-
te posilittn, qu'il tenta vainement
d'enlever. Après plusieurs com-
bats [»arliels, le général Brune
remporta les deux victoires signa-
lées de Berghen le 19 septembre,
et d'Alckmaar le 18 octobre sui-
vant. Les débris d»; l'année aniflo-
russe se hâtèreni d évacuer la Hol-
lande, et le duc d'Yorck, pour n'ê-
tre point inquiété pendant sa re-
traite , fut forcé d'accepter la ca-
pitulation rigoureuse que lui im-
posa le général brune. La longue
marche dos Anglais , obligés de
chercher dans le nord de l'Alle-
magne un port d'où ils pourraient
se rembarquer, devint d'une dilïi-
liulté extrême, vu le mauvais état
des chemins , les rigueurs de la
saison et la rareté des subsistan-
ces. Un bien petit nombre des
guerriers qui composaient naguè-
re une armée brillante revirent
avec leur chef le sol de la pairie.
Celle expédition, dont l'issue fut si
désastreuse , donna lieu à de vio-
lentes attaques dans le parlement
britannique contre les ministre»
qui l'avaient projetée, et même
contre le chef chargé de la condui-
re. Le duc d'Yorck reprit néan-
moins à Londres ses fonctions de
YOR
•commandant en clicT. Depuis
<|uelques années une jurande mé-
sintelligenoe régnait entre los deux
fils aînés du roi Georges III. En
mars iSo^, pe'ndant l'aliénalion
mentale de ce monarque , le duo
d'Yorck se réconcilia publique-
ment avec le prince de Galles, et
ce dernier, appelé à la régence et
plus tard au trône, n'aoe^sé depuis
de donner des marques de confian-
cc;i sop frère. Placé A la tête de l'ad-
ministration militaire, des plain-
tes graves s'élevèrent, en 1809,
contre le duc d'Yorck. L'honora-
ble iM. Wardie député à l.> cham-
bre des communes, y fit le 27 jan-
vier de la même année une dénon-
ciation formelle. Après avoir long-
temps parlé devant l'assemblée du
système de corruption qui préva-
laitdans ledéparlement de la guer-
re, il accusa directement le chef
de celle administration. L«! duc
souffrait, disai(-il, que sa maîtres-
se, la fameuse mistriss Clarke, fît
nu honteux trafic det brevets d'a-
vancement et des commissions,
dont il partageait, selon l'accusa-
teur, les profits avec cette femme.
L'orateur conclut en demandant
que la chaiid)rc procédiit de suite
à la nomination d'un comité pour
examiner la conduite du prince,
et en fiiire son rapport. Après d'as-
sez viv«'S discussions, il fut résolu
qu'une enquête sérail faite par un
comité composé de lii chambre en-
tière. Ce procès remarquable oc-
cupa la chambre des communes
pendant plus de deux mois. On
enlei)dit une foule de témoins, et
la salle ne desemplissait pas de cu-
rieux, attirés non moins par l'inté-
rêt de la cause même que par le
scandale qu'elle occaeionait dans
YOR
507
h public. Il fut enfin établi, pai'V
une décision de la chambre, que
mistriss Glarke avait souvent re-
çu de l'argent pour procurer de
1 avancement ; mais que le duc
d'Yorck n'avaitpas eu départ per-
sonnelle aux manœuvres de cette
dame, quoiqu'elle eût de son cô-
té constamnitnt soutenu qu'elle
n'avait agi qu'avec l'autorisation
du duc. Cette décision importan-
te ne .passa cependant qu'à la ma-
jorité de 278 voix contre 196, et
le duc d'Yorck ne crutpoint, après
l'issue Je l'enquête, devoir conser-
ver plus long-temps ses fonctions.
Dès qu'il eut annoncé qu'il don-
nait sa démission , lord Althorpe
proposa à In chambre des comum-
nes de déclarer que son altesse
royale ayant résigné le comman-
dement, et que sélant démis de
tout emploi public, la chambre ne
croyait pas devoir donner mainte-
nant aucune suite à cette affaire.
Le mot maintenant devint l'objet
il'une nouvelle discussion, et les
ministres parvinrent enfin, après
de vifs débats, à le faire suppri-
mer. Knmai 1811, le duc d'Yorck
reprit néanmoins son poste, le roi
son frère lui ayant de nouveau
confié le commandement en chef
des troupes anglaises, et il se trou
ve encore aujourd'hui (i8a5) à la
tête de ct.tle administration im-
portante. En i8i4» il accepta le
grade de feld-maréchal des ar-
mées autrichiennes. A la fin de
mai 1825, le ducd'Yorcks'est pro-
noncé avec une grande véhémen-
ce dans la chambre des pairs, con-
tre l'émancipation des catholiques
d'Irlande, en faveur de laquelle la
chambre des communes venait de
passer un bill, que ce prince a eu
3o8 iOK YOK
satisfaction do \oir rejeter par Dans la st-ancc du lendemain, l«
la chambre où il siég;;. Le discours mCme orateur rendit cepend^mt
tenu par S. A. l\. en cette occ;i- sons un antre rapport, une justice
^ion lut \iveinent atlnqué dans la éclatanleau duc d'ïon k. «Leprin-
chinnljrc des communes. L'iiono- ce, dit-il, nexicntpas ternir»; la
rable inen)hre RI. Brongliiira main au parlenieul. cotjime d'au-
prclendit ruêtnc qu'il ne pouvait 1res de ses illu-tres parens ont
avoir été prononcé tel qu'il venait coutume de l'aire de temps à au-
de paraître par la voie de l'impres- très. Pour ma part, je dormerais
sion. «On m'excusera, dit cet plutôt au duc d'Yortk la sonunc
orateur, si j'entretiens la chambre qu'on demande aujourd'hui pour
d'un libelle étrange qui aurait dû le duc de Cumberland. Les rêve-
donner lieu <i des poursuites tant nus du premier sont inférieurs à
en Angleterre qu'en Irlande : c'est sa dépense; sa fortune est si insuf-
celui qu'on publie , comme étant fisanle pour soutenir la di-rnilé
le discf)urs d'un illustre pcrsonna- de son rang, il est si accablé de
ge, d'un personnage qui occupe dettes, que ses biens sont tons les
le rang le {)lus élevé et le plus jours frappés d'exécution. Il ne
près du trône. Je ne doute pas peut même aller à une course sans
que mon honorable et savant ami, voir ses chevaux et sa voiture sal-
le ])rocurcur-g('néral , ne vienne sis pour dettes, et il s'est souvent
demander à la cour du banc dn vu dans des embarras dont uu
roi , d'insliluer des poursuites cou- simple particulier serait honteux.»
ire rédileur de ce libelle ; car on Peu de temps a|>rés, les journaux
ne pourrait rien imaginer de plus du 9 juin annoncèrent etVective-
calomnieux, de plus outrageant ment un événement pareil, et
pour l'illustre personnage en ques- qu'aussitôt que le duc d'Yorck eut
tion , que de lui faire dire que mis pied à terre aux courses d'As-
quarid il montera sur le trône, il cot, un officier du shérif était ve-
ne gouvernera pas d'après les prin- nu saisir le cheval de S. A. R et
cipes de la constikitiou, mais d'u- celui de son domestique, en exé-
ne manière à lui, mais d'une ma- cution d'un jugement pour dettes,
nière telle que Jacques II lui-mê- Depuis la mort de la princesse
me n'aurait pas imaginée, ou si Charlotte, le duc d'Y'orck est l'hé-
jamais il y eût songé, il n'en avait rilier présomptif de la couronne
au moins rien laissé transpirer, d'Angleterre. Il n'a point eu d'hé-
quand sa conduite provoqiui le rilier? de la princesse son épouse,
bill d'exclusion, ou quand elle le morte en 1820, mais il a plusieurs
fit exclure elfectivement, pour fai- enfans naturels,
re place au roi Guillaume et à sa YORCR DE WATTEMBOL'RG
famille. Jacques ÎI n'a jamais dit (le comtk), lieutenant- général
la millième partie de ce qu'on at- prussien, était peu connu par ses
tribne à S. A. 1\. dans le libelle faits d'armes avant la campagne
en question. Je désire donc qu'on de 1812 eu Russie. Il corrtman-
fasse un exemple de ceux qui ont dait à cette époque un corps de
osé publier ce libelle atroce....» troupes auxiliaires que la Prusse
TOR
avait fonnii à l'iinnéc française.
Après avoir coiiiUaîtii los IVusse*.
sous les ordres du maréchal Mac-
donald, qui dans ses rapports à
i'em pereii r.cila a vt'C do j^rinds élo-
ges la condtiilt* des Prussiutis sous
It-'s murs de Riga, lo p;n<Mal Yorck
donna le premier l'exemple de
passer dans L-s ranî^s des eniiCTnis
qu'il venait de combattre. Lors-
«(tie ce g('^n«''ral eut appris la retrai-
te de Moskow et les désastres de
la grande-armée, il se sépara ino-
pinément, le 3o décemln-e, 18 il?,
dn corps du maréiJial Macdonald,
qu'il devait suivre à nncj journée
de distance; capitula au inoiilin de
Poschiirnu, près Tauroggin, pour
tout le contingent prussien, arec
le général Diebitsch, et se réunit
aux Russes. Il écrivit en même
temps une leltre an chef qu'il ve-
nait d'al)andonni,'r, pour justifier
cette démarche. Les btdietins oHi-
ciels et les journaux français reten-
tissaient cnc<ne «les pompeux élo-
ges donnés au général Yorck, et aux
troupes qu'il commandait, lors-
qu'on apprit avec le plus grand
étonnement cette première défec-
tion. Le roi de Prusse crut devoir
témoigner publiquement son in-
dignation. Des notes oITicielles an-
noncèrent au gouvernement fran-
çais, que le> ordres.étaienl don-
nés pour l'arrestation et la mise
en jugement du général Yorck,
ainsi que pour son remplacement
inmiédint dans le commandement
du corps auxiliaire prussien; mais
le système politicpie de ce cabinet
était entièrement changé av«!c la
fortune de l'armée française. F^e roi
quitta Berlin, où il ne se croyait
plus en sOreté, pour .se rendre en
Silésie, et quoique la diplomatie
YOR 3o(>
conservilt encore des formes ami-
cales dans les notes que le miniv-
tre Hardenb'erg ajre>sait à Paris
en février i8i5, on apprit bientôt
que ce ministre avait signé le 27
du même mais , à Breslaw, un
traité d'alliance offensive et dé-
fensive avec la Russie. La com-
mission, qui fut aussitôt nomtnée
pour examiner la coiuluilc du gé-
néral Yorck, le déclara exempt de
tout blâme. Une hante faveur et
des récompenses suivirent cette
déclaratif)!!. Il eut enfin le bonheur
auquel il aspirait depuis long-
temps, de combattre les Français,
et il fit contre eux les campagnes
de j8i5 et i8i/|. Le 2 mai de la
première année, il assista à la ba-
taille de Luizen, s'y distingua par
son cour.ige persoimel, mais ne
put empêcher la perte de la batail-
le. Le 21 août suivant, il déten-
dait une forte position sur les li-
gnes de la Bober; vivement atta-
qué par les Français, il ne put s'y
maintenir et fut forcé de se retirer
en Silésie, avec une perle consi-
dérablt!. An commencement de
l'année i8i4» après la reiraile des
Français, il passa le Rhin, se porta
dans les environs de McAz. péné-
tra avec son corps, à la suite des
aruïées alliées, en Chatn[)a:,'ne. et
opéra sa jonction avec l'armée ba-
varoise,sous les ordres du général
deWrède, à Joinvillc. l\ assista à la
bataille de Brienne, et essuya mi
échec important à Montmirail. Il
Ht ensuite partie de l'armée qui
investit Paris le 5o mars, et éprou-
va des perles à Saint-Denis. Eji
181 5, le général Yorck comman-
da une division de l'armée prus-
sienne. Le iG juin, son fds unique
fut tué ù la bataille de Ligny. Le
ïo YIU
voi de Pnisso a, depuis la ]),'iix, don-
né ail général Y(»r( k le litre de
comtcdeWalteiTd)()iMg, l'a nommé
gouvernt'iu-fiénéial de la Silébie,
et lui a (ait don d'un châleau et
d'une belle terre dans les envi-
rons de Br( slaw.
YftIAKTE (donTho;«as), poète
espagnol, est né dans l'île de Ca-
iiarie , d'une famille illustre. Il
suivit la carrière administrative >
et occupa l'emploi de chef du mi-
nistère des alTaires étrangères et
de la 1" seorétairerie-d'élat. Son
goût pour la poésie se manifesta
de bonne heure , et il publia suc-
cessivement, entre autres ouvra-
ges, un poëme en cinq chants sur
laMustquc, et un recueil de fables.
qui ont été traduites eu français.
Ces dernières productions, géné-
ralement inspirées par un esprit
de philosophie, fixèrent, sur la fin
du règne de Charles III , l'atten-
tion de ce tribunal odieux qui re-
cherche et interprèle tout et ne
pardonne jamais. Il poursuivit
don Y'riarle comme philosophe,
et lui fit donner la ville pour pri-
son, avec l'ordre de se tenir pi et
à paraître devant ses juges lors-
qu'il en serait requis. L'instruc-
tion ne se fit pas attendre; elle fut
secrète. Yriarte s'elforça , par ses
soumissions, d'apaiser ses impla-
cables ennemis , et eut le rare
bonheur de n'être déclaré que lé-
gèrement suspect. Il fit abjurali()n,
reçut l'absolution , snus la condi-
tion expresse d'accomplir une pé-
nitence qui n'a poiiit été connue
du public. Le poëme de 1 1 Musi-
que, dont il a été question plus
haut 5 parut à Madrid en 1779.
« Il serait à désirer, disent les
auteurs du Dictionnaire historique
YSA
(les musiciens, cpie nous eussion?^
dans noire langue une bonne tra-
duction de cet ouvrage. Celle que
(il aiu ville a donnée fourmille d'er-
reurs et de contre-sens. L'auteur
d'un piiëine en quatre chants sur
la musique, pul)Iié en 1811, cite
dans ses notes des fragmens d'une
tradiiclioti en \er^ français de l'ou-
vrage de Yriarte, où l'on trouve
de la facilité et du talent. 0 Les
deux frères de don Thomas Yriarlc
ont rempli des fonctions diploma-
tiques. Le premier, don Domini-
que , a conclu, à Bâie, un traité
avec le gouvernement républicain
de la France ; le second , do> Beb-
NARDO , était conseiller des Indes
et chevalier de l'ordre royal de
Charles III, lorsque Josiph Bo-
najtarle monta, <.'n 1808, sur le
trône d Espagne. .S'élant att.Tché
au nouveau souverain, il fut ntnn-
iné conseiller - d'état. Don Ber-
nardo Yriarte mourut peu de
temps ajirès. Il s'élait honorable-
ment fait connaître dans les af-
faires de Tétat et dans la carrière
des lettres. En lui s'est éteint le
nom célèbre qu'il portait.
YSABEAlj'(C. A.), membre
de la convention nationale el du
conseil des anciens, appartenait à
la congrégation de l'Oratoire lors-
que la révolution éclata. Ayant
adopté les principes du nouvel
ordre de choses, il fut nommé,
en 1792, [tar le département de
l'Indre, député à la convention
nationale; dans le procès du roi,
il vota avec la majorité. En 1795,
il fut envoyé avec ïallien et Bau-
dot, en mission à Bordeaux, où il
fut accusé d'organiser la terreur,
tandis qu'il était signalé à la même
époque comme un partisan du m&'
Y VA
dérantisme. Le coinilé à% :«alnt-
piiblic, adaptant celle (l«Tiiière dé-
nonciiitioM, le rapp»*lii. Lr> révo-
lution du f) iheriTjidor an 'i (27
juillet 1794) '' laquelle il prilpnrl,
lui fit r«udre la ccintiance de la
«onvention, et il relourna à Bor-
deaux, où il fit restituer aux fa-
milles de plusieurs coiidainués les
biens de ces vicliuies ", il fil aus.*i
nnettre en jugement le président
du tribunal révolutionnaire. De
nouveau dénoncé pour ces faits,
il parvint néxninuins à ?e mainte-
nir à la cduvenlioii avec les autre!»
membres île l'assemblée, auteurs
de la révolution qui renversa Ko
bespierre. Lors lies mouvemens
populaires du \-?. germinal an 7>
( I "avril i7f)5), il indiqua le^cliefs
qui les dirigeaient. Vers la fin de
la même annce, il signala les émi-
grés et les prêtres comme les deux
plus grands Héatix de la républi-
que et demanda leur déportation;
au i5 vendémiaiie an 4 (^ octo-
bre i^O'"')» •' !^^' prononça contre
les sections insurgées. Membre du
conseil de» anciens, il obtint la ra-
diation de Madier de la liste des
émigrés, et, au 18 fructidor an 5
( 4 septembri; 1 797 ) , il se rangea
du parti du directoire-exécutif,
qui le nomma à la ce<isation de ses
fondions législatives, le substitut
de son commissaire près de l'ad-
ministration des postes de Bruxel-
les. Lors desévéfieinens politiques
de i8i4* il perdit un modique em-
ploi qu il occupait à Paris dans
l'administration générale de celle
partie du service public.
YVAKT ( Jeas-Aucustir-Vic-
tob ) , membre de l'institut (ac 1-
démie dos sciences), professeur
d'économie rurale ù l'école Télé-
YVA
5ii
rinaire d'Alfort, est un de nos agro-
nome!; hs plus distingués. Digne
de succéder à Parnientier , il la
remplaça en effet à l'académie.
Après avoir |>arcouru la france,
la Belgique et l'Angleterre, pour y
comparer les différente;} méllio le»
de culture, il donna son Traité
des Assoleniens, qui . ainsi que sou
établissement de Maisons près de
Chai'enton , fut Jiontrableinent
cité dans le rapport sur les prix
décennaux. Le jury s'exprime ain-
si : « Trois cents be(;tares de terre
composent cet établissement. Le
s«d en est sabbmeux et très mé-
diocre. Il était livré régulière-
ment i^ la jaebèie triennale et à la
culture i\u seigle avant M. Yvart.
Par les soins de ce cullivaleur et
par les bons assolemens qu'il asu
introduire, on ne voit {dus de ja-
cbères, et il a (jartout subslituc
avec succès le froment au seigle.
tl entretient un très-beau trou-
peau de i5oo bêtes à laine dépure
race et améliorée, et il e»t le pre-
mier qui ait cultivé en grand le
topinambour, plante si précieuse
pour la noiirrilurc d'iiiver de ces
animaux. Il a dcfeséché des terres
et il entretient conutammenl la
moitié de son exploitation en prai-
ries artificielles. L'exemple de ce
cultivateur a déterminé la plupart
de» babitansde son canton à subs-
tituer le froment au seigle, à cul-
tiver des praiiies urlifirielles et à
supprimer les jaclières. Mais cette
iiiflicnce a pris encore plus d'ex-
tension : la bonne réputation de
M. Yvart a attiré près de lui des
cidtivalcurs et dt"i (iropriétaires
de> divers points de la France; sa
culture a servi de modèle et ses
coDâeiU de guides. 11 a d'ailleurs
5i2 VVA YVE
exposé sa pratiqii».; vl !cs connais- (lomt; |^I), ;'i r;iriicl»i Surressions
sauces positives qii'il a aotpiises fJo culture, sku impoi taiil Iravail
j>ar différons voyages , (fans ie sur les Ast'oUiiuns.
Cours d' A p'icidlure pratique (\\\^'\{ VVElliNOlS ( SiK Francis n'),
prol'esse depuis plusieurs atinées luiriislre de la icpiiblirpie de Ge-
à l'école d'AIIort; et le Traité des jm;\';. est ne duis cette ville en
Asaolemcns qu'il a publié feraépn- 17 Xi, d une faïuille honorable, aux
que dans les annales de l'agricul- soins 'ie laquelle il dut une Irès-
ture. » Les conimissaircs tertni- bonneéduealion. Lncaractèretur-
rient ainsi leur rapport : «Le jury bulent et beaucoiij) d'ambition lui
regrette de ne pouvoir proposer firent conslainnient prer>dre part
un second prix pour récon)penser aux troubles de sa patrie, où il se
M. Yvart des Inivaux é< lairés, ap- fil souvent remarquer parmi les
pliqués à un douiaine borné, qui linnimes les plusdaiiffereux. L'exil
ont servi d'exemple à un canton l'éloigna eu 17S2 ; mais il rentra
mai cidlivé avant lui, ainsi que bus de la révolution du mois de
des leçons par lesquelles il a ré- janvier 1789, et il parut, en i7«»a.
j)andu dans tout l'enipire les lu- dans k-s conlerences qui eurent
niièreg de l'agrieuiture perfection- lieu avec le général tMontes(pjion,
née. » Les autres ouvrages de M. afin de préserver Genève de l'ot-
Yvart sont : 1° Mémoire sur les cupation Irançaise. IN'ayant pu
végétaux qui fournissent des parties parvenir à jouer le nde qu'il s'é-
utiles à l'art du cordier et du tisse- tait proposé , il se rendit en An-
rand, couronné, eu 178S. par la gleterre. d'où il repartit bientôt
société d'agriculture de Paris; 2° avec le fils de lord Eardley, qu'il
Rapport sur les expériences du ci- était chargé d'accompagner sur le
ioyen Houdart, relatives à féco- continent. Après plusieurs voja-
, nomie et à la préparation de ta se- ges , de retour en Angleteire, où
menée, an 8 (1800), in-8"; 5" il te fixa, il s'occupa d'ouvrages
Coup-d'œil sur le sol , le climat et de littérature et de politique. Sa
fai;riculture de la France campa- haine contre la France, qu'il ex-
rée avec les contrées qui l'avoisi- prime avec violence dans ces dil-
nent^et parlicuHèremettt avec l' An- térenles productions, lui valut la
gleterre, Paris, 1801, in-8"; 4" bienveillance du gouvernement
Objet d'intérêt puhlic, recomman- anglais, qui le décoia du titre de
dé à l'attention du gouvernement et chevalier. Les événemens poîiti-
de tous les amis de fagriculture , ques de 1814 ayant lenversé ie
sur la destruction des plantes nui- trône impérial de France, déter-
sibles aux récoltes , courornié (en minèrent la répu])lique de Genève
1817) par l'académie de Liège, à nommer sir Fiancis d'Yvernois
W. Yvart est collaborateur à la sou ministre à Londres, d'où il se
nouvelle édition «lu Théâtre cCa- rendit avec la mCme qualité au
griculture d'Olivier de Serres, au congrès de Vienne. 11 retourna à
nouveau Dictionnaire d'histoire na- Genève après la seconde abdica-
turelle, et au nouveau Cours coin- ' ti )n de Napoléon, en i8i5. « On
plet d' agriculture f où l'on trouve lui doit, disent les auteurs d'une
YVO
notice sur sa vie politique el lit-
téraire, pliisieur.x ouvraj^es poli-
tique? el financiers dont quelques-
uns n« sont ;)us snns mérite , et
piirnn' lesquels ou cite surtout des
Réflexions sur la guerre , où la
doctrine subversive de l'Angle-
terre, ennemie iuiplacable de tout
g(iiiveruen)<;nt français, est bien
con^latée. C'est dans cet ouvrage
quesir Francis d'ïvcrnf>is déclara
qu'il ne s'agissait plus de d< ineui-
brer la France, ni d'exiger le châ-
linienl de ceux qui l'avaient bou-
leversée, ni de rétabliriez émigrés
el la féodalité, m;tis bien de sau-
ver I Allemagne d'un démembre-
ment, d'aï radier à la Fiance ses
conquêtes , et de la repousser daus
son enceinte el dans ^es limites
établies par le traité de Westjiha-
lie. Le Tableau des pertes que lu
révolution et la guerre ont causées
au peuple français^ contenant le
dévelo]>peinenl des paradoxe:* ilu
même auteur, démontre aussi la
liaine profonde que cet écrivain
avait vouée à la France, pour avoir
t ompriiiié son ambition eu i^Sa.
On doit encore à sir Francis d'V-
vernois plusieurs autres écrits de
même nature, inspirés par les
circonstances, et n'ayant pas ou
plus d«' durée qu'elles. »
YVON ( iVllcaEL - DoMINIQlJE-
Bf.r>abd) , né au Hfîvre le 28 juil-
let 17(18, d'une famille estimée ,
mais peu avantagée des dons de
la fortune, prit le-* armes dès sa
jeunesse. Il entra, le fj seplembri!
I 7'j'^ , comme simple soldat dans
YVO
3i5
le bataillon du Havre, le 9* de la
Si ine-Inférieure ; fit avec ce corps
toutes les premières campagnes
de la révolution, y passa succes-
sivement par les grades inférieurs,
et parvint, par sa bonne conduite,
son intrépidité et ses laiens , à ce-
lui de capifaine-adjudant-major.
Lessoldal>deson corps l'appelaient
leur père , et il consiicrait plus de
la moitié de ses appointemen» ik
soulager les besfiius de ses frères
d'armes. Cbaque bnmmo qui sor-
tait ries bôpifcuux tievenait l'objet
particulier de ses soins. Le géné-
ral en clief, après une bataille
où Yvon s'était éminemment dis-
tingué , lui adressa ce-» paroles
flatttui-es : c Je ne connais pas
dans tonte la grande - armée de
plus brave bomme que vous, » et
le surnom lui en resta ; tui le dé-
signa constamment deptiis dans
l'a-ujée sont le titre du. brave
bomme Yvon. Après avoir com-
battu avec la même valeur pen-
dant neuf campagnes consécuti-
ves, en Belgi(]Me, en Italie, en
Pologne et en Allemagne, sans
avoir quitté un seul jour son
corps, <;e brave fut tue le 'i/j dé-
cembre, en passant à la tête de$
grenadiers le pont à moitié dé-
truit de Kolozombia. Il expira en
en;ouragtant encore les siens, et
en criant vive la France! dernier
cri de tant de mouransaux cliamps
de l'honneur cl de la victoire.
Le brave Yvon, regretté de toute
l'armée , était à [leine dans la 58*
année de son A^e.
3i4
ZAB
ZAC
Z
ZABIELLO (le COMTE Micbei,),
};énéral polonais, d'une ancienne
famille do Lithnnnie, suivit dès sa
jeunesse la carrière des armes, et
commandait, en 179';!, contre les
armées russes, le» troupes du Pa-
lalinat, où il était né. Il n'eut pas
seulement à combaMre les enne-
n)i^ de la Pologne : il eut à lutter
contre la faiblesse de Stanislas-Au-
guste {voy. ce nom), qtii, cons-
tamment subjugué par la ptdili-
que de Catheiine II, céda erdin
aux ordres de cetle impérieuse
souveraine, et abdiqua à Grodno.
Le comte Zabiello donna aussitrtt
sa démission, et se relira en Bohê-
me. Quoiqu'il ne prît aucune part
à l'insurrection nationale dirigée
par Kosciusko en i704' ses sen-
timens patriotiques bien connus
le firent persécuter. Arrêté à Carls-
bad et transféré à Prague, il ob-
tint non sans peine sa liberté et
l'autorisation de se retirer à Dres-
de. Il est depuis ce temps resté
étranger aux affaires publiques.
ZABIELLO (Joseph), frère aîné
du précédent , embrassa contre sa
patrie la cause des Russe». Pen-
dant l'insurrection de i794i» '1 l^"t
arrêté à Varsovie. Sa correspon-
dance avec le général Igclstrone
ayant été trouvée dans le< papiers
de ce dernier, il fut traduit devant
le tribunal provisoire, le 3 mai de
la même année, et, convaincu de
trahison, il subit dans les vingt-
quatre heures le supplice de la
corde.
7.ABIRA (Georges), littérateur
grec, naquit à Sialista, «"fi Macé-
doine, et commen^-a -es étude:» en
Thessalonique , qu'il quitta pour
passer en Hongrie, oi'i se* parens
désiraient qu'il apprît le commer-
ce. 11 suivit quelque temps la car-
rière commerciale, peu convena-
ble à ses gofits, et obtint enfin de
sa famille la permission de se li-
vrer à d'autres soins. Les langues
vivantes de l'Europe et la langue
latine l'occupèrent exclusivement,
et bientôt il fonda à Colotscha,
une école pour les Grecs de sa
communion. Elle prospéra, et
tout entier aux lettres, les fruits
qu'il en retirait servaient à
augmenter les richesses de sa bi-
bliothèque.Ce savant fit imprimer,
en 1795, l'ouvrage de Canlemir
sur les Cantaruzènes. A sa mort,
arrivée le 19 septembre i<So'|, il
laissa un nombre considérable de
manuscrits, parmi lesquels se trou-
ve au noud)re des plus importans,
un Théâtre /lellénique , renfer-
mant le catalogue et la biographie
de* écrivains grecs, depuis la pri-
se de Conslantinople.
ZACH (iS. de), feld-«narérhal
autrichien, d'une famille noble,
suivit la carrière des armes, et é-
tait quartier-tnaître-général de l'ar-
mée autrichienne, sous les ordres
de M. fie Mêlas. Il fut faitprisonnier
à la bataille de Alarengo, où il s'é-
tait fait remî^quer par son coura-
ge. L'archiduc Charles l'employa
en la uiême qualité dans la campa-
gne de i8o5, et lui donna, après la
bataille d'Auslerlitz, que suivit le
ZAJ
fraiié de Presbouig, le gouverne-
ment militiiire de Trieste. En
1806, il reçnt d«^ reiupeienr d'Au-
triche le comniandemcnt du régi-
ment d'infanterie de Uièïie, et, en
1808, la croix de coMunaiidetir de
l'ordre de Léopold. En 180;), il
fut employé en Italie, en qualité
«le feid-niaréchal, sous rarcbidiic
Jean; il obtint quelques succès,
mais bientôt il fut forcé d'évacuer
la Carinihie, et de se retirer pré-
ci))ilammenl sur les antres corps
d'armée. Par suite du traité de
Vienne, il fut admis à la retraite,
d'ni"» il n'est p:)S sorli d«?{»iiis.
ZACH (N. de), célèbre astro-
nome, frère do précédent, se livra
exclusivement à l'étude des scien-
ces, et particjdièrcment de l'astro-
nomie, où il fil d<;s progrès si re-
marquables, que le duc de Saxe-
Gotha érigea en sa faveur l'obser-
vatoire de Sééberg. iW. de Z,ach
se plaça bientôt, par ses observa-
lions, au nombre des plus célè-
bres astronomes de l'Europe, il a
publié des Ephéméridcs astrofio-
viKjues et géographiques , qui jus-
tifient ses vastes coiutaissances et
l'importance de sa corresjjondan-
ce scientifique.
ZAJONC/.ECR (le Prince i>e),
vice-roi de Pologne, est issu d'u-
ne famille noble, mais pauvre; il
suivit la carrière des armes et de-
viol aide-de-camp du général Bra-
nicki, grand-général de la cou-
lonne. N<mce (député) à la diète
de Pologne avant l'insurrecljiui
de 1792, il se montra à ce poste
ce qu'il ftit constammenl dans
sa carrière , lun des plus ar-
dens défenseurs de la patrie. Il
fit la campagne contre les Russes,
cl envoya sa démission lorsque
ZAJ 5i5
Slanislas-Auguste eut été forcé de
recevoir la loi de l'impérif-use Cn-
ihrriiie H. L'insurrection natio-
nale de 1794 ramena sous les dra-
peaux jxdonais le brave Zajonc-
zerk,qni avait cherché une retraite
à l'étranger. Kosciusko lui donna
la mission de s'approcherdes fron-
tières afin de jnger des dispositions
des habitans de l'intérieur et des
moyens de défense de l'ennemi.
S'étanl avancé jusqu'à Varsovie.
il courut le danger d'êlre pris. Il
rendit compte à Kosciusko des
résultats de sa tentative . cl resta
dans le pays ponry enlrel«!nir l'es-
prit de liberté qui animait la plu-
part de ses concitoyens. Lo géné-
ral Madalinski ayant commencé
l«!s hostilités coulie les Russes »
Kosciusko se rendit à Cracovie,
accompagné du général Zajonc-
zeck, auquel il donna le ctumnan-
dcmenl d'une division. Il contri-
bua cllicacement à l'alfaire d.e
Raslavia, où les paysans polonais
montrèrent le plusgrand('ourage.
Envoyé en Wolhynie, où il prit
le commandemenl (\c'-- in>urgés,
il fut battu le 10 à Cbclm : l«; la-
lent et le courage qu'il déploya
dans celle aif.iire n'ayant pu ré-
sister à des forces supéri»;ures, ni
réparer le mal que produisit l'in-
capacité d'un de ses généraux,
celle défaite le fil injustement ac-
cuser de trahison par le» ennemis
secrets de l'indépendance natio-
nale;mais le général Zajiuiczeck,
au-dessus de la calomnie, réunit
ses troupes éparses, et avec leurs
débris, dont il ranima la confiance,
il tint la campagne et marcha an
i<ecours de ko'^ciusko, que les
Prussiens refoidaicnt jusque sous
les murs de Varsovie. Uc concert
5i(> ZA.I
avec son chef, il les repoussa, et re-
çut la pré>i()ence delà commission
chiiigée (le juger les |irévi'r)us de
trahison. Kosciiisko,5'élîinl ensui-
te porté en Lithuanie, confia par ///-
térim le coniinandcnieiU an géné-
ral Zajoncze* k , qui le renut an
général Wawzecki, nommé pour
remplacer Kosciusko, fuit prison-
nier à lYlaciéjovvice. Le général Za-
jonczoïk conlinna à <ervir avec le
njf'me zèle la cause de l'indépen-
dance. Il occu])ait le faubourg de
Prague lorsque Suwarow y péné-
tra. Le brave Polonais, blessé dès
le commencement de l'action, se
défcndil avec courage et ne quitta
la ville que lorsqu'il la vit au pou-
voir des Russes, lise retira en Au-
triche, où, malgré l'autorisation
qu'il avait obtenue du e;énéral
d'Harnoncourl, il fut arrêté contre
le droit des gens et conduit dans
ime f(jrteresse en Moravie. L'avè-
nement dt; Paul I" à l'empire lui
rendit la liberté. Il pas«a au ser-
vice de France, cl fit Javec le gé-
néral en chef Bonaparte, qui le
nomma général de divisitm, la
cainpagne d'Egypte. <■ Il s'opposa,
dit-on , jusqu'au dernier nmmeut
à ce qu'on traitât avec les Anglais,
prétendant que sa fidélité à son
général l'obligeait i\ mourir au
poste qu'il lui avait confié. » Re-
venu en France, il reçut un com-
mandement au camp de Boulogne,
passa avec sa division à l'armée
d'Allemagne en i8o5, et fut de
l'expédition funeste de Russie en
i8j2; au combat de Polotsk il eut
une jambe emportée. Les événe-
nemens de 1814 rendirent le gé-
néral Zajtmczeck ù sa patrie. Nom-
mé, en i8i5, par l'empereur A-
lexaudrc, vice-roi de Pologne, il
ZAK
reçut encore de ce monarque, en
18 18, une faveur non veHe. Alexan-
dre lui contera la dignité de |>rin-
ce, et, en terminant la diète de
cette année, fit ainsi l'éloge du
général Zajonczeck : « lin de vus
«plus dignes vétérans, le général
» Zajonczeck , «ne représente par-
«ini vous; bîatichi sous'vos dra-
" peaux, associé constamment à
•) vos succès et à vos revers , il n'a
«cessé de donner des preuves de
» snn dévouement i la patrie ; l'ex-
npérience a complètement justifié
»mon thnix. »
lAKKZEWSRÏ (N. ), nonce
(député) de Poser», se mfuitr.t
constamment dévoué ù sa patrie,
et l'un des illustres Polonais les
plus prononcés contre les Fvusses,
leurs oppresseurs. Eu 1792. il usa
de toute l'iniluencc que lui don-
naient sur le peuple son caractère
personnel et son patriotisme ar-
dent ponrie porter à soutenir avec
vigueur la constitution du 5 mai
1791. Son zèle reçut sa récom-
pense; JM. Zakrzewski fut desti-
tué à la fin de l'année « comme
eimemi des Russes. » Lorsqu'en
1794» Rosciusko ressaisit l'élen-
dard de la liberté, et que les Rus-
ses eurent été chassés de Varso-
vie. M. Zakrzewski fut nommé
de nouveau nonce de Posen. Il
devint président du conseil natio-
nal, et eut la charge spéciale de
la police et des vivres. Varsovie
retomba bientôt au {)Ouvoir des
tro*ipes russes, et quoique la ca-
pitulation ffit revêtue de l'accep-
tation du feld-maréchal Suwarow,
l'implacable Catherine II ordonna
l'arrestation de ZakrzcAvski, d'I-
gnace Potocki, de Thadée Mos-
towbki , et d'un grand oombre
ZAM
frautrcs patriotes distingués. Elle
les fil Ininslérer à Saint- Pélcrs-
buurg, où ils étaicDt encore dé-
tenus lors de l'avènement de Paul
I" à l'empire. ZukrzeM'ski ayant,
parsjutede cet événement, recou-
vré sa liberté, se retira dans ses
terres e« Gallicie, où il mourut
en 1802.
ZAMBECCARI (le comte Fran-
çois ) , célèbre aéronaule italien,
naquit en 1766 à Bol'igne, d'une
l'amille ancienne; il appartenait
pur le drnii de sa naissance au
corps des quarante sénateurs de
celle ville. î^on éduralion fut très-
soignée. ïrès-ini«truit dans les ma-
thématiques , plein d'ardeur pour
l'étude des sciences, il embrassa
néanmoins, par égard pour sa fa-
mille, la profession des armes, et
était odicier de marine au service
de l'Espagne lorsqu'il fut fait pri-
soimier par les Turcs, qui ren-
voyèrent au bagne de Constanti-
nople. L'ambassadeur d'Espagne
réclama fortement et obtint la li-
berté de cet oflicier, qui en pro-
fita po»>r voyager dans le Levant,
en Afrique, et enfin dans les prin-
cipales \illes d'Europe. cLe comte
de Zambeccari, dit l'auteur d'une
notice sur ce célèbre aéronaute,
vonlut trouver la direction des bal-
l(ins'jérostali(|ues, par des njoyens
ingénieux fdiidés sur l'existence
de divers courans d'air à différen-
tes hauteurs, sur l'application des
rames, et enfin sur l'augmentation
ou la diminution du gaz, qu'il opé-
rait à volonté pour de-cendre et
s'élevertour à tour.» Leai septem-
bre 1812, le comte Zambeccari
ayant voulu, malgré im temps peu
favorable, effectuer une expérieu-
crqu'il avait annoncée, il j^'élevu;
ZAM 517
mais en cherchant à se diriger, son
ballon s'accrocha à un arbre et
prit feu. Ainsi péril cet infortuné
aéronau te à l'âge d'environ 56ans.
ZAMOYSKY (le COMTE André),
grand-chancelier de la couronne
de Pologne, l'un des plus illustres
défenseurs de l'indépendance de
sa patrie, embrassa d'abord la pro-
fession des armes, et après s'être
plusieurs fois distingué comme
odicier instruit et brave, il suivit
la carrière des fonctions publiques.
Devenu sénateur et grand-chan-
celier du royaume, il s'efforça d'à-»
paiserles troubles au milieu des-,
quels se fil l'élection de Stanislas
Poniatowski (roj. Stanislas-'Au-
Gi'STE ) à la couronne de Pologne.
Il conserva les fonctions de grand-
'chancelier aussi long-temps qu'il
crut pouvoir les remplir avec in-
dépendance et utilement dans les
inlérêls de son pays. (Jet espoir
perdu , il donna sa démission en
plein sénat, après avoir motivé
sa conduite dans un discours plein
d'énergie. Stanislas-Auguste vou-
lut lui conserver, et plus lard lui
rendre les sceaux. Zamoyrky fut
inébranlable et rentra dans la vie
privée. Lh dièle cependant l'ayant
choisi pour former un code de
lois, il remplit cette mission ;\ lu
satisfaction de ses coiiciloyens.
Toutefois cet important travail,
dans lequel le tiers-état avait vu
augmenter ses privilèges, ye fut
sanctionné par le roi qu'en 1791.
Zamoysky mourut le 12 janvier
1792, honoré de l'estime géné-
rale.. «11 fut, dit Tauteur d'une
notice, philosophe dans toute
l'acception du mot; ses mœur»
publiques et privées le rendirent
aussi recommandable que aes ta-
3i8
ZAN
lens politiques ; il affrancliit le
premier ses vassaux de la servi-
tude, en donnanl ainsi à d'autres
seigneurs un exemple de bienCai-
sauce et d'humanité, qu'ils ne tar-
dèrent pas à suivre. Placé dans
des circonstances moins désas-
treuses, il aurait occupé un rang
distingué parmi les grands hum-
lïies de son siècle, au lieu que
sa carrière ne fut illustrée en par-
tie (juc par ses vertus sociales.
Lors du démembrement de la Po-
Jogne, l'empereur Joseph II ayant
eu en partage les domaines de Za-
moysky, lui avait offert le titre
de prince , qu'il ne voulut pas ac-
cepter. »
ZANGIACOMI (le baron Jo-
seph) , membre de la convention
nationale et du conseil des cinq-
cents , conseiller à la cour de cas-
sation, conseiller-d'état, membre
de la légion-d'honneur, exerçait
à l'époque de la révolution la pro-
fession d'avocat à Nanci, où il
était né. Le département de la
Meurthe le nomma, au mois de
septembre 1792» député à la con-
vention nationale; dans le procès
de Louis XVI, il vota la déten-
tion de ce prince et son bannis-
sement à la paix, M. Zangiacomi
n'occupa guire la tribune que
pour y faire des rapports au nom
du comité des secours publics dont
il était membre. Il passa au con-
seil dgs cinq-cents par suite de la
réélection des deux tiers conven-
tionnels, et sortit du conseil le
28 mai 1798. Devenu membre
du tribunal de cassation après la
révolution du 18 brumaire an 8
(9 novembre 1799), il fut con-
servé dans cette fonction par l'em-
pereur, qui successivement lui
ZIE
donna la croix de la légion -d'hon-
neur, le nomma baron de l'em-
pire et maître des requêtes. Legou-
vernement royal rétabli en 181 4»
conserva k M. Zaugiacfuui ses ti-
tres et emplois, et le comprit en-
suite au nombre des conseillers
d'état. Il mourut en jSaâi
ZI ETH EN , lieutenant-général
prussien, né à Berlin en 1766, é-
tait fils du fameux général de ca-
valerie de ce nom, qui contribua
aux victoires du roi Frédéric II,
et notamment à celle de Torgau,
où il prit sur lui de charger, avec
son régiment de hussards, les cui-
rassiers autrichiens, les renversa,
et décida le gain de la bataille. Ce
général ne s'était marié qu'à 1 âge
de près de 80 ans, et le roi, qui
avait Ir. plus haute estime pour le
vieux guerrier, lui annonça, en le
félicitant sur son mariage, qu'il
serait le parrain de son premier
enfant, engag(;ment qu'il eut à
remplir dès la première année de
cette union tardive. Le jeune Zie-
then reçut au berceau, un brevet
d'o^fficier, dans le régiment de hus-
sards de son père; mais celui-ci
exigea que son fils ne prendrait
son tourd'ancienneté que du jour
où il pourr.'iit rendre des services
effectifs. Il fut élevé avec soin
à l'école militaire de Berlin , qu'il
quitta à l'âge de i5 ans; il se
distingua bientôt par son courage
et ses talens militaires. Après avoir
passé par tous les grades, il fut
nommé colonel du beau régiment
de son père, et bientôt officier-gé-
néral. Il commandait en cette qua-
lité, un corps de cavalerie prus-
sienne à l'ouverture de la campa-
gne de 181 5. Attaqué par l'armée
française près de Charkroi, où il
zni
avait son quartier-général, il es-
suya un échec dans les premiers
jours du mois de juin, el fit »a re-
traite sur Flcurus, d'où il fut en-
core forcé de se retirer après avoir
éprouvé des pertes considérables.
Il se replia alors sur l'armée du
maréchal Blucher, et prit part à la
bataille de Ligny, où les Prussiens
furent battus par Napoléon le 16
juin. Apr^s le désastre de Water-
loo, le général Ziethen fut chargé
de poursuivie les Français en re-'
traite, et il arriw un des premiers
sous les murs de Paris. Lorque la
paix fut conclue, il fut nommé
commandant en chef du contin-
gent prussien , qui fit partie de
l'armée d'occupation que les puis-
sances alliées laissèrent en Fran-
ce. Il établit son quartier-général
à Sedan, où il résida jusqu'û la fin
de 1818, quand les étrangers éva-
cuèrent enfin le royaume.
ZIMMIRMANN (Jeaîs-Geor-
GE>), célèbre médecin suisse, na-
quit à Burg, canton de Berne, le
8 décembre 1728. Entraîné par
«n pen< haut invincible vers l'étu-
de de la médecine, il prit des le-
çons des plus savan§ professeurs
de Goeltingue, de la Hollande et
de Paris. Sa réputation comme
praticien le til nommer, en 1768,
médecin du roi d'Angleterre. Fré-
déric-le-Grand le fit appeler dans
la maladie à laquelle ce prince suc-
comba, muis dont Zimmermann
parvint à force de soins à adoucir
les vives douleurs. Catherine II
voulut se l'iitlachcr comme méde-
cin, mais il refusa de se rendre à
Saint-Péter?bourg, et néanmoins
cette souveraine bii envoya l'or-
dre de Siint- Wladimir. On rap-
porte qu'à l'époque où il publia
El M
ÙIÇ)
son Essai sur la solitude, qui a été
traduit en français, Catherine II
venait de perdre son favori Lans-
koï, qu'elle aimait beaucoup, et
elle nourrissait sa profonde dou-
leur dans une solitude, quand le
livre de Zimmermann lui tomba
entre les mains; elle reparut aus-
sitôt à la cour, et ce fut à cette lec-
ture qu'elle attribua sa consola-
tion. Zimiriermann revint dans sa
patrie vers 1795. H y devint som-
bre et mélancolique, état déplora-
ble qui s'accrut encore par une
maladie mentale dont son fils fut
atteint, et par une maladie de lan-
gueur qui s'empara de sa fille, et
la lui ravit peu de temjjs avant
qu'il cédât lui-même à ses propres
souffrances. Il mourut le 7 octo-
bre 1795, dans 5367" année. Sa
vie a été écrite par iM. Tissot, son
aini et ancien condisciple. Outre
l'ouvrage que nous avons déjà ci-
té, on loi doit encore une Disser^
talion physiologique sur l'irritabi-
lité, un Poème sur le désastre de
Lisbonne, etc. Zimmermann a
laissé en mourant , la réputation
d'un homme vertueux et d'un
grand praticien.
ZIMMERMANN ( Pierre- Jo-
seph-Ccillaume), professeur à l'é-
cole royale de musique et de dé-
clamation , est né ù Paris le 19
mars 1785. Il a étudié sous la di-
rection de M. Boïeldieu, le forté-
piano au conservatoire de musi-
que, et a remporté en 1 799, ayant
à peine atteint sa i4' année, le
prix de cet instrument. Deux ans
après, en 1801, il remporta au'*si
le premier prix d'hartnofiie, qu'il
avait étudiée sous M. Catel.
M. Zimmermann a composé un
grand nombre de romances , det
r>20 ztN
Sonates et des concertos pour le
piano.
ZliNGARELLI (Nicolas), ct-
IcLre coiiJpo.'-ilcur ilalitn , né à
Naples en i'y'^'2, est sorli du con-
servaloire de Loretle , où i! a eu
pour inaîlre Fenaroli , et pour ca-
marades Cimarosa et Giordanello.
II apprit en peu de temps à bien
jouer du violon, et les règles prin-
cipales du chanl et de ï\i eoujpo-
sition. Avant de quitter cet éta-
blissement, il conjposa un inter-
mède, intitulé : / Quattro pazzi,
qui l'ut très-applaudi. Il réussit
mieux encore dans une musique
d'église, où son style grave et
soutenu fixa tous les suffrages.
Malgré ces succès, il fréquenta
quelque temps l'école de Speranza
pour se perfectionner dans la théo-
rie de son art. Speranza était l'un
des meilleurs élèves de Durante ,
et presque aussi bon contrappan-
tistc que son maître. Il obligeait
les jeunes gens à refaire trente
fois de suite le même morceau ,
en variant toujours le ton et la
mesure, sans trahir l'intention du
poète. Mais son style était aride ,
recherché et ennuyeux. La musi-
que de Montezuma , que Zinga-
lelli composa , en 1781, pour le
théâtre de Saint-Charles , se res-
sentit de tous ces défauts. Le pro-
fesseur ne se les dissimula pas; et
dans l'.<i/si«c^û, qu'il écrivit en sept
jours pour le théâtre de Milan , il.
suivit un autre système d'harmo-
nie. Cette pièce fut très-applaudie;
mais ce qui mit le comble à la
réputation du maître, fut l'opéra
de Juliette et Roméo, qu'on dit ne
lui avoir coûté que quarante heu-
res de travail, et qu'on ne cesse
pas d'admirer sur tous les lhé5-
ZIN
très de l'Europe. Parmi ses autres
productions, il faut rappeler //>/«<•
f^riiie, Artaxerce, ApeLeset Cuni-
paspc, le Comte de Saldagna, Pyr-
r/ius, I nés de Castro, Clytemnes-
tre , et surtout la Destruction de
Jérusalem, l'un des meilleurs ora-
torios iiali. us. E:i i7t<9, M. Zin-
garelli donna à l'Aïademie royale
df musique, à Paris, l'opéra d'An-
tigone, \u)ëiiiv de Marmonlel, qui,
à cause des évéueniciis politiques,
n'eut que deux représentations.
A son retour en»italie, il com-
posa un canon à huit \oix, pour
un concours ouvert à Milan , et
qui lui valut la nomination de
maître de chapelle de la cathé-
drale. En i8ot), il remplaça Gu-
glielmi au Vatican, où il resta jus-
qu'à l'année 181 1. S'etant refusé
de prendre part à un Te Deum
pour célébrer la naissance do roi
de Rome, le général Miollis, qui
lui en avait adressé la demande,
eut le tort de l'envoyer escorté
des gendarmes à Paris, ^apoléon,
qui désira le voir, lui demanda
pourquoi il n'avait pas voulu qu'on
chantât pour le roi de Rome ?
Zingarelli lui répondit en souve-
rain : <: Parce que je ne connais
«d'autre roi de Rome que le pa-
ope. » L'empereur lui haussa les
épaules, et le lendemain il lui fit
remettre douze mille francs, avec
l'ordre de composer une messe
pour la chapelle impériale. Murât,
sur la proposition du comte Zurio
(wj. ce nom) , appela ce compo-
siteur à Naples, le décora de Tor-
dre des Deux-Siciles , et le plaça
à la tète du conservatoire de mu-
sique, avec Fenaroli , Paë?iello et
Tritto. M. Zingarelli, qui a sur-
vécu à ses collègues, continue à
zou
diriger ocl élahlii-semenl ; mais
son grand âge, et certains préju-
gé.', peu dignes d'un si beau ta-
lent, rendent son influence pres-
que nulle sur ses élèves. M. Ziii-
gareili est dévot jusqu'à la supei"S-
tition , et il a une aversion pro-
noncée pour l'école uaoderiio. Un
jour que M. Rossini alla visiter le
conservatoire de Naples , le direc-
teur lui dit : « J'ai défendu à mes
«élèves de s'exercer sur vos pa-
• piers ; votre musique peut plsir»
»au ihéiltre , mais elle doit être
"bannie des écoles. » En atten-
dant, le jeune Jiercadante , élève
le plus di-tingué de Zingarelli, n'a
trouvé d'autre moyen pour plaire
au public que celui d'étudier les
productions de Rossini. Son Jpo-
théose d'Hercule est tout-à-fait
dans le stvie du Cygne de Pesaro.
ZOUBO^V (Platon), dernier
favori de l'impéralrice Catherine
II , est issu d'une famille honora-
ble mais sans illustration. Son
édiicati(jn fut Irès-soignée; il par-
lait bien le français, avait des con-
naissances littéraires et faisait pas-
sablement de la nmsique. Il eutra
dans le régiment des gardes de
l'impératrice, où bientôt il devint
lieutenant. Un pli_yi,ique agréable,
une taille moyenne , mais bien
prise, de l'aisance dans les ma-
nières, !es dons ain).ibles de l'es-
prit, Gxérenl l'attention des dantes
de la cour, qui , par leurs éloges,
•ippelérent l'intérêt de l'impéra-
trice sur le jeune lieutenant. A
cette époque, en i78(), Catheri-
ne Il etail plus que sexagénaire,
et Zoubow n'avait pas encore at-
teint SOI) cin({uième lustre. Une si
grande distant c entre les Sges n'ar-
rêta ni l'amliition de l'un ni la bicn-
ZOU 521
veillance de l'autre, et au prin-
temps decette même année, le lieu-
tenant des gardes sollicita ou reçut
l'ordre de prendre le commande-
ment du détachement qui accom-
pagna l'impératrice à Trarskoé-
Selo. Il dina seul avec S. M. ainsi
que cela était d'usage, et par suite
de cette faveur il reçut un présent
de cent mille roubles , fut installé
dans l'appartement des favoris ,
et vit successi\enient son crédit
s'accroître ainsi que sa fortune.
«Veis la fin du règne decette prin-
cesse , dit-on, tout l'empire était
aux pieds de l'heureux Zoubow;
mais la mort de l'impératrice le
replongea dans le néant d'où il
était sorti, » Quoique le favori de
Catherine n'eût point fuit un usage
tyrannique du pouvoir que la fai-
blesse de sa souveraine lui avait
abandonné, son arrogance natu-
relle augmentée par une aussi hau-
te fortune lui avait attiré un grand
nombre d'ennemis; et peu après
ravènenient de Paul 1" an trône, il
dut s'éloigner d'abord de la cour
et quitter ensuite la Russie. Il se
rendit en Allemagne, où se reti-
raient pre^que toujoins les favoris
de l'impératrice lorsqu'elle les
avait disgraciés; il y étala tout le
luxe et les prélenlions qu'il avait
déployés à Saint- Péti;rsbourg.
Bientôt il poussa l'insolence jus-
qu'à vouloir enlever de vive force
la princesse aînée de Courlande.
Paul I", à qui le duc s'en plaignit,
rappela Zoubow en Russie, d'où
il l'éloigna peu de temps après.
En >8o2, Zoubow étant à Varso-
vie, les Polonais indignés de la
part qu'il avait prise dans les mal
heurs de leur patrie {voy. Catue-
&IME, STA.MSLiS-AlGUST£,REl>MN),
Ô2 2 ZOU
voulurent le chasser de leur ville.
Etanl à Carisbad , i>I. do (iiel{»ud
lui rcproclia les malheurs de la
Pologne, el le provotjna en duel.
«Zonhovt^, disent les auteurs de dif-
férentes biographies, influa aussi
beaucoup avec ses frères sur l 'évé-
nement tragique qui amena la mort
de Paul I", etn'a plus joui d'aucun
crédit sous le règne d'Alexandre.»
Celle assertion est inexacte en ce
qui concerne ses frères. Il est aus-
si inexact de dire, comme le font
ces biographes, que Plalon Zou-
bow tua en duel le chevalier de
Saxe. C'est au prince ;>cherbatoff
à qui ce fait doit être imputé.
ZOUBOW (Valérien), frère
cadet du précédent, naquit en
1^60 et suivit lu carrière des ar-
mes, où il montra du courage et
quelques talens dans les grades
inférieurs, mais une entière inca-
pacité comme général en chef.
Valérien Zoubow partagea avec
son frère la faveur de Catherine II.
Dans la guerre contre les braves
et malheureux Polonais, Valérien
ayant perdu une jambe, l'impé-
ratrice lui envoya sur-le-champ
«on propre chirurgien , le cordon
de Saint-André, le brevet <le gé-
néral en chef et une gratifica-
tion de 100,000 roubles, qui fut
suivie presque immédiatement
d'une autre de 5o,ooo pour payer
ses dettes. Chargé, en 1796, du
commandement général de l'ar-
mée envoyée contre les Perses, il
n'obtint aucun résultat important
et l'armée «eut également à souf-
frir de l'incapacité de son général,
de l'insalubrité du pays et des at-
taques des peuples du Caucase
qui la harcelèrent continuelle-
ment. Campée sur les bords du
ZLC
Cyrus , elle était depuis long-
temps dans l'inaction lorsque Zou-
bow reçut la nouvelle de la mort
de l'impératrice avec l'ordre de
faire prêter serment à Paul I", et
d'attendre de nouvelles instruc-
tions pour agir. » Il les attendit
peu; trois semaines après il reçut
l'injonction de partir sur-le-champ
pour rentrer en Russie. Aussitôt
son arrivée, pour éviter une des-
titution, ildonnasadén)issionetse
retira en Courlande, où il était pro-
priétaire de presque tous les biens
des anciensducs.il mou ru ta Saint-
Pétersbourg le 4 juillet 1804.
ZOUBOW (NicotAs), frère des
précédens, eut part comme eux
aux libéralités et à la faveur de
Catherine II. Après avoir parcou-
ru la carrière militaire où il par-
vint au grade de général , il ob-
tint une place de sénateur. Ni-
colas Zoubow mourut l'année
même de la mort de son frère Va-
lérien.
ZUCCARELLI (François), cé-
lèbre peintre-paysagiste italien,
naquit en 1702 à Pitigliano, et
mourut à Venise en 178g, dans la
87* année de son 3gc. Il montra
de très-bonne heure un goût pro-
noncé pour les arts de dessin el sur-
tout dans le genre du paysage, où
ses progrès furent rapides; s'étant
fixé à Venise, il acquit bientôt de
la réputation, et à la fin de sa car-
rière , il jouissait, parmi les pein-
tres et les amateurs, de la plus
haute renommée pour ses talens
comme paysagiste. Ses moeurs
douces et régulières ajoutaient à
l'estime qu'il avait acquise par ses
talens. Parmi ses protecteurs il
citait avec reconnaissance M.
Smith, consul d'Angleterre près
zuc
du gouvernement vénitien. Cet
amaleur t-clairé des aris s'était
pin constamment à favoriser les
talens de Ziiccarelli, et l'avait f.iit
connaître en Angleterre, où Zuc-
cart'lli alla passer quelques an-
nées. Le musée du Louvre pos-
sède pitisieurs tableaux et dessins
de ce ui.ùlre.
ZLCC^HI (le bakon Chables),
<;x-général de division au service
de France et depuis feld-niaré-
chal-lieutenant au service d'Au-
triche, est né vtTs 1776 a l\eg{»io,
et a fait toutes les campagtie» des
Français df puis la conquriede l'I-
l.ilie par le général en chel Bona-
parte jusqu'aux événemens de
1814. M. Z-ncchi, sous lieutenant
en 1796, était chef de bataillon
en iHo.l. Il fut nommé, le 5 mai
1807, major des veilles royaux;
le 6 novembre de la même année^
colonel du 1" régiment de lif^ne
italien; le aa juin 1H09, général
de brigade, et le 28 septembre
1812, général de division. Cet
utricier-général a montré, dans les
difîerens grades qu'il a occupés,
beaucoup de talent et de courage
et a été cité comme un général
du plus grand mérite à la prise
de Laun en vSilésie, le 18 août
181 5 II a fait les campagnes des
année» 5, G , 7 , 8, 9 de la répu-
blique en Italie et en France; de
iSo5 dans le royaume de Naplcs;
de iMoO et 1807 en Dalmatie; de
1809 en Aulriclie: de 1812 et
i8»r> à la grande-armée, et d'I-
talie en 1814. L'em[)(reur Napo-
léon qui avait une estime [)iirti-
culière pour le général /ucchi,
l'avait iion»mé baron de l'empire,
et l'avait décoré des dinéren> or-
dres de France et d'Italie. Il lotiail
ZUM
à^o
surtout la discipline qu'il avait su
maintenir parmi ses troupes; il
lui ténn)igna publiquement sa sa-
tisfaction pour sa conduitt distin-
guée dans la campagne de Saxe en
18 13, lors de la bataille de Leip- ■
sig et de la retraite qui la suivit.
Le général Zucchi' dégagé , en
i8i4, par l'abdication de l'empe-
reur Napoléon , des sermens qu'il
lui avait prêtés, passa à cette épo-
que au service d'Autriche en qua-
lité de fcld-maréchal-lientenant.
ZLMSrEEG (Jean-Rodolphe),
violoniste et compositeur de mu-
sique, de la chapelle du duc de
Wurtemberg, naquit vers 17^0, à
Gausingen dans le pays de Laut-
fenbourg. Il commença son édu-
cation musicale à Tacadéniie du
duc de Wurtemberg, sous la di-
rection du maître de chapelle Po-
li, qui le prit en amitié, et se per-
fectioiuia ensuite par l'étude des
ouvrages de Mattheson, de Mar-
purg et de d'Alembert. « Il jouait,
disent les auteurs du Dictionnaire
historique des Musiciens, non-seu-
lement de son instrument avec
beaucoup d'expres.-ion , mais il
était aussi excellent compositeur
tant pour le violoncelle que pour
le chant. Ses compositions se dis-
tinguant par leur gravité et leur
dignité. » Zumsteeg mourut à
Stuttgard, le 27 janvier 1802; il a
laissé en nianuscrit les composi-
tions suivantes : la Loi Tartare ,
opéra ; Renaud et Armide , opéra;
Tantira, duodrame, par Huber;
Schuss de Gœnseivifz, opéra; ZaU'
lor, opéra, de l.avaux ; les chan-
sons du drame les Brigands; la Fi-
te du Printemps , par KIopstock ;
une messe et plusieurs composi-
tions pour instrumens.
324 ' Z.UR
ZL'RLO (le comte Joseph ) ,
ex - iniiiijir»; de rintérieur à Na-
ph;s, né dons cette ville ei» 1759,
employa acs premières amiées ù
l'étude des belles- lettres et de la
philoso])1iiie. Son déveIopj)«;ineiir
fut tellement précoce, qu'à l'âge
de 14 an» , il était en clat de com-
prendre les ouvrages des écrivains
Jes plus profonds. Un jour qu'il
était entré dans une bil>lioth^que
publique pour y lire les œuvres
postbuiues de Leibnilz, le conser-
vateur auquel il en avait adressé
la demande , frappe de son ex-
trême jeunesse, lui dit que le li-
vre existait, mais qu'il n'était jias
fait poui' être mis dans les mains
d'un enfant. Fiqué de ce refus,
M. Zurlo reprit qu'il serait em-
barrassé de chercher ailleurs que
dans Leibnitz lui même l'explica-
tion d'un passage incompréhensi-
ble de son Art combinatoire ; et il
se mit aussitôt A développer avec
une étonnante facilité les princi-
pes les plus abstraits du système
métaphysique de l'auteur des mo-
nades. Le vieux bibliothécaire ,
que la joie transporte , prend
par la main le jeune philosophe ,
et l'emmène dans l'intérieur de la
bibliothèque , en lui disant que
tout ce qu'il voyait serait désor-
mais à sa disposition. M. Zurlo
usa amplement de cette permis-
sion, <.'t eu peu de temps, il
embrassa un espace immense dans
le domain»^ d«i l'intelligence. Il
passait de la lecture à la médita-
tion, et de la méditation à la lec-
ture : il fréquentait aussi la so-
ciété de gens de lettres, et eut le
bonheur d'être reçu dans le cer-
cle et parmi les amis de Filan-
gieri, dont il a toujours révéré la
ZLR
mémoire. Obligé de faire choix
d'une profession, il se décida pour
le barreau, qui était alors presque
la seule carrière ouverte à Naples
aux talcns et ù la fortune. Mais ù
l'éloquence près, il ne possédait
aucune des qualités nécessaires
pour y rdjtenir de grands succès,
qu'il dédaignait d'ailleurs, n'ayant
jamais eu l'ambition de devenir
un avocat célèbre. Ses vues étaient
tournées vers un but plus élevé :
la science du gouvernement, l'é-
conomie et l'administration des
états, les sources de la prospériié
et de la grandeur nationales lui pa-
raissaient bien autrement impor-
tantes que la défense des intérêts
privés. Il s'était adressé à un per-
sonnage puissant, qui lui Ot espé-
rer une place dans une missiDii
étrangère. C'était le commence-
ment d'une carrière qui répon-
dait en grande partie, aux vœux
de iVl. Zurlo, et il se félicitait de
s'y voir engagé. Il allait rece-
voir sa nomination, lorsqu'il ap-
prit qu'un de ses amis , l'abbé
Panzini , briguait le même em-
ploi, et qu'il y fondait toutes ses
espérances. M. Zurlo ne trouva
pas difficile de lui faire le sacri-
fice des siennes , et il employa
tout son crédit auprès de son Mé-
cène, pour le décider en faveur
de son compétiteur. Il rie tarda
pas j\ être récompensé de cette
généreuse action, lïn 1783, le
gouvernement de Naples l'envoya
dans les Calabres , qui venaient
d'être bouleversées par des trem-
blettiens de terre. Le chef de cette
expédition était le général Pigna-
telli ( t'oy. ce nom ), honnne dé-
nué des qualités indispensables
pour remplir dignement une pa-
ZUR
reille commission. M. Ziirlo,qni
gémissait de voir doux provinces
livroes à la cupidité et à l'igno-
•rance d'un tel administrateur,
cherchait ù en balancer l'influen-
ce, en représentant au roi les be-
soins et les espérances des Cala-
brais. Ses rapports doimèrent une
haute idée de sa capacité , et s'ils
ne purent opérer le bien qu'il s'en
était promis , ils suffirent pour
le faire apprécier, et lui obtenir
une place èminente dans la ma-
gistrature. Il fut ensuite (en 1798)
appelé à la direction des finances ;
elles étaient à cette époque dans
l'état le plus fâcheux, line admi-
nistration vicieuse et les Irais d'un
armement considérable avaient é-
puisé toutes les ressources, et créé
tme dette de plusieurs millions,
qui avait miné le crédit public.
M. Zurlo allait proposer des re-
mèdes énergiques pour guérir de*
plaies aussi profondes , lorsque
l'arrivée des Français sur le ter-
ritoire napolitain vint traverser
ses projets, et l'exposa «ux plu»
grands dangers. Le peuple , qai
avait chargé le dernier ministre
des finances de toutes les fautes
de ses prédécesseurs, se porta en
foule à l'hôtel de M. Zurlo, et le
saccagea de fond en comble : il
n'aurait pas épargné le maître ,
si le» chefs du gouvernement mu-
nicipal, qui s'était formé i\ Naples
•après la fuite du roi , n'étaient
venus retirer le ministre des
mains de celte multitude effré-
née, pour le mettre dans un fort
à l'abri de sa fureur. Dès que la
républi«iue fut organisée, M. Zurlo
quitta son asile, et alla s'enfermer
dans une mai->on de campagne
non loin du la capitale. Au retour
ZUR 3a 5
du roi de Sicile, il fut replacé à la
tête du ministère des finances, dont
le désorilre n'avait fait qu'aug-
menter. Les perceptions des im-
pôts étaient devenues presque im-
possibles , à cause des troubles
excités dans le royaimie par l'en-
treprise du cardinal Ruffo ; le nu-
méraire avait disparu, et les cof-
fres de l'état élaient surchargés
d'inie masse considérable de pa-
pi<'r-mnnnaie, qui n'avait presque
plus de valeur dans le commerce.
Une somme d'environ trente mil-
lions de ducats, que le roi avait
emportés en Sicile, aurait été plus
que suffisante pour réparer en un
instant taiil de maux ; mais ce
prince, qui n'avait négligé aucun
moyen pour grossir son trésor, ne
paraissait nullement disposé à le
verser sur se* peuples ; et le mi-
nistre Qc vil plus de ressource que
dans son propre génie. Son pre-
n)iersoin fut d'amortir le papier-
monnaie, qui était le plu» fort
obstacle au rélaWissemeut du cré-
dit public. Sans reoonrir aux me-
sures ordinaires deis emprunts et
des banqueroutes, il fixa une épo-
que où le papier cesserait d'avoir
cours dans le royaume; et il rapi-
tatlsa , d'après leur valeur nonn'-
nalc, le* billets de banque, dont
le gouvernement se chargea de
payer les intérôls sur des fonds
spécialement hypothéqués au ser-
vice de celte dette. Par ime opé-
ration aussi simple que juste, la
nation fut délivrée du fléau du pa-
pier-monnaie, et elle recouvra son
crédit au moment où elle croyait
ravoircoinplétenienlp(îrdu.Aprè5
cet important service rendu à l'é-
tat, M Zurlo entreprit des réfor-
mes utiles dan» toutes les bran-
526
z\m
ches de l'adminislralion. Le roi
voulut récompenser son zèle par
«ne dotation en leire.'*, dont il ne
iixa que la valeur, accordant au
ministre la faculté de choisir les
propriétés qui lui auraient le
mieux convenu. M. Zurlo ne vou-
lut rien acc«'pler, et il poussa son
désintéressement jusqu'à renon-
cer à ses appoinîeuiens , disant
que les grands fonctionnaires de-
vaient donner celte preuve de dé-
vouement à leur pays, qui me-
naçait de rester écrasé sous l'é-
nonnité des charges. Mais l'exem-
ple de M. Zurlo ne trouva point
d'imitateurs , et on fut même
obligé de rapporter une ordon-
nance qui clasi^ait le paiement
des trailemens les plus forts à la
suite de la solde des troupes et de
celle des petits employés, pour
mettre fin aux clameurs et mê-
me aux invectives de quelques-
uns de ses collègues. Lu atten- "
dant, la nation applaudissait aux
travaux de M. Zurlo , qui devait
bientôt ex|ner ces louanges si bien
méritées. La dextérité avec laquel-
le il avait retiré son pays du bord
de l'abîme, vers lequel on l'avait
poussé, réveilla la jalousie d'Ac-
lon , qui profita d'un moment oii,
par un excès de zèle , le minis-
tre des finances avait obéi sans
restriction aux ordres de la rei-
he , pourle perdre dans l'opi-
nion publique. L'ordre de sa des-
titution lui fut communiqué, lors-
qu'entouré de ses commis , M-
Zurlo signait des papiers pour le
service de l'état. Il se lève tran-
quillement de son fauteuil, prend
congé de ses employés , et entre
dans la voiture, en ordonnant au
cocher d'aller tout droit au fort
ZLIV
de VOEuf. C'était la prison qui lui
avait été destinée, et où il resta
jusqu'à ce que son innocence fut
reconnue et proclamée. On lui
accorda alors sa liberté ; mais ou
se garda bien de lui rendre sa
place. A la seconde invasion du
royaume de Naples , M. Zurlo
n'était point obligé de suivre !a
cour en Sicile ; mais le souve-
nir de? dangers qu'il avait courus
lors de la première révolution, lui
fit prendre le parti de s'embarquer
à bord de l'escadre qui devait
transporter la famille royale à
Palerme. Il vécut dans celte ville
tant qu'il se flatta de n'être à
charge à personne ; mais lors-
que la cour ne fut plus en état de
payer la pension des émigrés , et
que les parens de M. Zurlo furent
nienacés d'un séquestre général à
Naples, il sentit la nécessité de
rentrer au sein de sa patrie. Il y
arriva en 1809, au moment où
le roi Joiichim Mr.ral appelait au-
tour de lui les hommes les plus é-
clairés pour opérer des change-
mens nombreux dans toutes les
parties de l'administration. M. Zur-
lo fut désigné pour le ministère des
finances, qu'il ne voulut point ac-
cepter : à peine consentit- il à faire
inscrire son nom sur le tableau des
conseillers-d'état, espérant échap-
per ainsi aune plus grande respon-
sabilité. Maison avait trop besoin
de sa coopération pour y renon-
cer. On fît de nouvelles démar-
ches, on mit en mouvement tous
les ressorts, et on ne cessa de l'as-
siéger que lorsqu'il se laissa em-
porter. Joachim lui confia d'abord
le département de la justice et du
culte : il le mit ensuite à la tête du
ministère de l'intérieur, qui devait
ZUR
remplacer la féodalité par les
communes, les ordres monasti-
ques par des établissemens de
bienfaisance et d'instruction; de
ce ministère, en un mot, qui,
après avoir sapé les hases de l'an-
cien édifice, était chargé de pré-
parer les matériaux pour la cons-
truction du nouveau. M. Zurlo ,
embrassant d'im coup-d'œil l'é-
tendue de.ses devoirs, ne fut point
découragé de la grandeur de sa
tûche. Plus il apercevait d'obsta-
cles autour de lui, plus il se sen-
tait d'énergie pour les combattre.
Un jugement sûr et une grande
pénétration d'esprit, une activité
rare et un goût pour les vastes
entreprises , telles étaient les qua-
litésde M. Zurlo, qui, fortifiées par
son désintéressement et par l'a-
Jnour du bien public, en faisaient le
levier le plus puissant pour soule-
ver le fardeau qui lui avait été
imposé. Dans un pays où l'on est
habitué à voir les moindres pro-
jets passer d'un ministre à l'autre,
sans jamais s'accomplir , chacun
regardaii,avecime satisfaction mê-
lée de crainte, M. Zurlo terrasser
d'un bras vigoureux les vieilles
institutions, quidevaient faire pla-
ce au nouvel ordre de choses
qu'on voulait établir. La féodalité
fut abolie, et trois cent mille co-
lons vinrent se rHiigcr au nombre
des propriétaires : on cessa de
persécuter les talens; et les éco-
les, les collèges, le» lycée», les
universités, rivalisèrent de zèle
pour former «les citoyens ver-
tueux et utiles à Tétai : la fai-
néaiitis<- fut proscrite, et les rou-
ven?. furent fermés , le nombre
de» irêlrcs réduit, le commerce
protégé, le-» Ateliers multipliés,
ZIR 32;
les efforts de l'agriculteur, les tra-
vaux de l'artiste, les veilles du
savant, encouragés, récompen-
sés, applaudis. Du laboratoire de
chimie, un jardin botanique, les
cabinets minéralogique et zoolo-
gique, des collections de tableaux,
de vases , de marbres , de bron-
zes, de médailles; le magniâque
observatoire sur la colline de Ca-
podimoute, les écoles de clinique
et le théâtre anaiomique des In-
curables, la maison des fous à
A versa, et tant d'autres établisse-
mens philantropiques et scientifi-
q;u-squi s'élèvent muintenant sur
un sol jadis eiicoiubré de couvens
et d'églises , déposeront long-
temps en faveur du patriotisme et
des lumières de M. Zurlo. On en
trouvera la trace même hors de
son pays; à Uome, par exemple ,
où, en i8i4j il employa le peu
de teu)ps que celte ville resta au
pouvoir des Napolitains, pour or-
donner dilTérens travaux, entre
autres ces grandes cloisons qui
garan lissent ;'» présent les fres-
ques (le Raphaël contre les acci-
dens de l'atmosphère. Les Floren-
tins se rappelleront aussi d'«voir
vu un ministre de Joachim s'envi-
ronner de leurs savans pour en
accueillir les vœux et eu honorer
le mérite. Ils n'oublierontpas non
plus le jour où M. Zurlo implora
comme une grâce auprès de son
souverain de l'aider à payer la
rançon de Séralti, capturé sur un
bâtiment sicilien au moment où
il comptait aller achever tran-
quillement ses jours auprès de sa
famille en Toscane : cet homme
;)Ourtant avait été le plus impla-
cable ennemi de M. Zurlo, dont il
avait été lu successeur au minis-
328 ZliR
têre dos finances en i8o3. Le cœur
«le 1>J. Znrlo se montra encore pins
généreux lorsque Joachiin, préci-
pité du trône par les soldats des
puissances dont il avait impru-
demment épousé les intérêts, lais-
sa sa famille entourée de dangers
et à la merci de ses persécuteurs.
Dans ce changement soudain du
sort , M. Znrlo s'attachant aux
personnes dont il ne pouvait dé-
sormais que parta-çer l'infortune,
s'embarqua sur le même vaisseau
qui devait conduire la reine à
Triesle. Après avoir apporté quel-
que consointion dans le cœur con-
tristé de cette malheureuse prin-
cesse , il lui demanda la permis-
sion de la quitter pour aller vivre
incognllo à Venise. La reine crut
devoir lui témoigner sa reconnais-
sance en lui offrant une forte som-
me d'argent, dont elle savait que
le ministre pouvait avoir besoin
dans l'exil auquel it s'était con-
damné. M. Znrlo la remercia, en
disant qu'il ne s^ serait jamais
permis d'accepter d'une famille
tombée dans le malheur, ce qu'il
avait constamment refusé quand
elle était dans la fortune. En effet,
il sortait presque pauvre de ce
long et brillant ministère qui avait
présidé à la destinée d'un royau-
me. En arrivant à Venise, il fut
attaqué par une terrible maladie,
qui faillit lui coûter la vie. A peine
fut-il rétabli, qu'il prépara quel-
ques notes pour une nouvelle édi-
tion d'Anacréon , que son ami , le
général Winspeare, venait de tra-
duire en italien, et qtic M. Mus-
toxidi enrichissait de la vie du
poète. Le désir de se rapprocher
de sa patrie, dont l'entrée lui était
toujours fermée, lui fit préférer
Zt'R
le séjour de Rome, n\\ il resta jus-
qu'à l'autoujne de 1818, époque
de son rappel i\ Naples. Il y vivait
dans la retraite, au milieu d'un
cercle d'amis, et honoré de l'es-
time publique, lorsque le prince-
régent l'appela, en 1820, à faire
partie du nouveau ministère cons-
titutionnel. M. Znrlo obéit à re-
gret : mais une fois engagé au ser-
vice de l'état, il déplojia la plus
grande activité pour s'acquitter
dignement de ses nonrbreux de-
voirs. Il reprit le portefeuille de
l'intérieur, et son premier soin
fut de rassembler les collèges é-
lectora.ix qui devaient procéder à
la formation du parlement natio-
nal. En butte à la haine incon-
sidérée des carbonari f qui lui re-
prochaient des mesures sévères
employées sons Joachim pour
arrêter les écarts de leur secte, il
brava courageusement leurs me-
naces , et ne daigna pas répondre
à leurs calomnies. Lorsque le roi
Ferdinand reçut l'invitation de se
rendre à Laybach , M. Zurlo ,
qui craignait une émeute dans le
royaume, s'empressa d'annoncer
aux préfets le prochain départ du
roi, avant qu'il en eût obtenu l'au-
torisation des cortès. Cette infrac-
tion à un article de la constitution
espagnole, attira sur lui la rigueur
du parlement, qui le mit en état
d'accusation. M. Zurlo se démit
de ses fonctions, et entraîna dans
sa retraite tous ses collègues, qui
voulurent partager sa disgrâce. Il
parut ensuite devant les représen-
tans de la nation pour se justifier
de l'imputation qui lui était adres-
sée. Sa défense, remplie de digni-
té, triompha de toutes les pré-
ventions, et M. Zurlo fut acquitté.
I
ZUR
11 restait cependant dans le cœur
des bons citoyens un genliinent
pénible, en réfléchipsant que le
ministre qui avait consacré toute
sa vie à l'éiBancipation des com-
munes, trouvait dans leurs dépu-
tés, ses plus implacables ennemis.
C'était comme un tuteur mal-
traité par des pupilles qu'il se
serait efforcé d'enrichir. Avant de
soitir du ministère, M. Zurlo a-
vait eu le temps de remettre
au roi un papier contenant ses
idées sur le rôle que ce prince
aurait dû jouer au congrès. Ces
conseils étaient marqués au coin
de la grandeur, et ^lût à Dieu
que celui qui avait juré de défen-
dre les droits de son pays, n'en
eût Jamais écouté d'antres! La
nation napolitaine n'aurait point
à rougir de sa faiblesse , ni à pleu-
rer la perte de sa liberté et de son
indépendance. On sait ce que le
roi de Naples fit à Laybach , et on
ne doit pas s'étonner si, à son re-
tour dans ses états, il n'a plus
jamais voulu se rencontrer avec
M.Zurlo,qui se consola facilement
de cette disgrâce, en cherchant
des distractions dans l'étude et
dans la société de ses amis.
ZUY 529
ZliYLEN-VAN-NIEVELT (le
COMMANDEUR van), est né d'une
famille noble et s'est fait honora-
blement remarquer dans la car-
rière militaire qu'il a suivie suc-
cessivement sur terre et sur mer.
Lors des révolutions de son pays,
et quoique dévoué à la maison
d'Orange, il ne repoussa pas néan-
moins les faveurs dont Louis Bo-
naparte [VOY. BONAPARTE-LODIS) se
plut à le combler, lorsque ce prin-
ce occupa le trône de Hollande ;
il devint alors un des maréchaux
des armétîsdu royaume. Ln 1810,
la Hollande ayant été réunie à
l'empire français, l'empereur Na-
poléon nomma successivement
M. Van-Zuylen c(unte de l'em-
pire, gouverneur du palais d'Ams-
terdam et grand'croix de l'ordre
de la réunion. Ces faveurs étaient
plutôt accordées à la considération
personnelle que M. Van Zuyieu
avait acquise parmi ses conci-
toyens, qu'atix services qu'il a-
vait rendus à la France. Depuis
les événemens politiques de 1814,
M. van Zuylen vit dans la retraite
commandée par son grand 3ge; il
jouit d'une pension conuidtrable
que lui a faite le roi des Pays-Bas.
FIN DU XX' ET DERNIER VOLUME.
SUPPLEMENT GÉNÉRAL
des articles omis J.ins les 20 vol. de cet ouvrage, avec indication,
suivant l'ordre alphabétique, des noms des personnes qui ont des
notices dans les Supplérnens placôs à la suite de chacun des volu-
mes précédens.
ABBE (Baron) , voy. le Supp.
du I" volume.
ALSACl':-HÉNIN-LIÉTARD
(Comte de), voy. le Supplément
du 12' volume.
ANGELIS (André de), com-
mandeur de l'ordre de Charles III,
ex-conseiller-d'étal, estnéàNaples
en 1^80. Après avoir tait de bril-
lantes études à l'académie mili-
taire, fondée dans cette ville par
le général Parisi,il lut nommé offi-
cier d'artillerie en 1798. Il servit
successivement sous les ordres du
chevalier de Saxe et de Roger de
Damas, et se fit remarquer par
son aciivilé et par son intelli-
gence. Les revers de l'armée na-
politaine le dégoûtèrent du mé-
tier de la guerre : il demanda et
obtint une place dans le ministère
des affaires étrangères , dirigé alors
par le général Acton. Il avait été
désigné pour une mission diplo-
matique , lorsqu'on 1806 , peu
avant l'entrée de l'armée fran-
çaise dans la capitale , il reçut
l'ordre de suivre la cour en Si-
cile. Le vaisseau sur lequel il s'é-
tait embarqué, et qui faisait par-
tie de l'escadre royale, en fut sé-
paré par ime horrible tempête au
moment où il allait jeter l'ancre
dans la rade de Palerme. Après
trois jours de périls et d'alarmes,
il fut enfin rejeté dans le port de
Naples, oO le nouveau gouverne-
ment venait d'être proclamé. Le
dévouement que M. de Angelis
avait témoigné à l'ancienne dy-
nastie, ne lui nuisit aucunement
auprès de la nouvelle. Le marquis
de Gallo , en prenant le porte-
feuille des affaires étrangères ,
confia à cet en)ployé la division
des relations politiques, la plus im-
portante de son ministère; et il en
fit ensuite récompenser le zèle par
la nomination de chevalier de l'or-
dre des Deux-Siciles et de maître
Citi requêtes au conseil-d'état. M.
de Angelis resta à son postfe jus-
qu'au printemps de l'année 181 5,
époque à laquelle il fut envoyé à
Vienne, pour prendre part aux
travaux du congre*. Après la chute
du roi Joachim Murai, il se rendit
à Naples , où ses talens et son ex-
périence dans les affaires vainqui-
rent la répugnance du marquis de
Circollo, homme entêté et médio-
cre, qui regardait comme ennemis
des Bourbons tous ceux qui ne les
avaient pas suivis en Sicile, com-
me si une nation entière était
obligée de se déplacer pour accom-
pagner ses princes dans l'exil.
Malgré ces maximes , le vieux
ministre ne put s'empêcher de
faire connaître au roi les ser-
vices rendus par M. de Angelis,
qui reçut la seule croix de com-
mandeur de l'ordre deCharlesIII,
que Ferdinand VII avait mise à la
disposition de son oncle. En 1820,
M. de Angelis était allé passer
quelques mois à la campagne pour
y rétablir sa santé, lorsque pressé
presqn'en même temps d'nccom-
pagiitr le roi à La3'bach , <le rein-
pliicer 1« iDinistre des affaires é-
tranfrères ou «le siéger au conseil-
d'état, il hc décida pour ce der-
nier, qui lui parut un a,*ile sûr et
honorable dans des temps d'orage.
Il y avait élé porté par les vœux
du parleini-nf et par le libre oboix
du monarque ; et il était bien loin
de supposer qu'on dût un jour lui
faire un crime d'avoir accepté une
place qui lui avait été conférée par
décret. Mais le roi, qui lui avait
envoyé le brevet de rouseilier-
d'élat à l-i veille de son départ, eu
approuva la destitution peu après
son retour; et ce n'a été qu'après
deux années d'atleute que M. de
Angelis a enfin obtenu une pen-
sion de retraite, qui a réparé en
partie la preniière injustice.
ANGELIS ( PiEBRE de), frère
du précédent , né à Na[)les en
1782, et élevé comme lui ;\ l'aca-
déuiie u»ilitaire, obtint en 1801,
uu brevet de «ous- lieutenant dans
l'aruiée, qu'il quitta ensuite pour
se livrera l'étude. Il était profes-
seur de l'école pcdytechuique,
lorsque le roi Joachim Mmat l'ap-
pela à la cour, pour lui C(u»fier I é-
ducation de ses eufans. Il lui en-
voya eu même temps, la croix
de l'ordre des Deux-Sîciles, et la
nomination de conseiller cle la pré-
fecture de la ville de Naples. Tant
de bienfait;^ l'attachèrent à ce
prince, dont il suivit la famille
jusqu'à Giiëte, dernier asile que
le royaume de Naples ofiiait
à ceux qui lavaient gouverné.
Rentré daris se» foyers, M. de An-
gelis, qui ava/t perdu toutes ses
places, sentit le besoin de s'occu-
per, et il accepta un emploi sc-
ANG 55i
condaîre dans le dépôt de la guer-
re : mécontent de son sort, et
n'espérant pas de le ^ir amélio-
rer, il prit en 1818, la résolution
de voyager en Europe. Il avait dé-
jà parcouru l'Italie et la Suisse,
lorsque la révolution éclata à Na-
ples, en 1820. Il en apprit la nou-
velle, sur les bords du lac de
Constance, où il ne larda pas à
rerevoir une dépêche de son gou-
vernement, qui l'engageait à se
rendre imiuédialem'""t au con-
grès de Tropp" . - 'ourner
les empereurs de tout* -res-
sion hostile contre Naples. 'é
Angelis, qui ne se dissimul.»
les 'iiflicultés de cette mission,*
lut s'y soustraire. Mais de nouv.,
Ics instances de la part des minis-
tres , et des ordres ennorc plus
pressaus qui lui furent adressés au
luuTi d'un personnage auguste, ne
lui permirent pas de persister dans
sa résolution. Il accepta la place
de chargé d'affaires auprès de la
cour impériale de Pétersbourg, où
il n'a jamais été, n'ayant pu dans
le temps obtenir «es passeports de
la légation russe à Paris. Il regarda
donc de cette dernière ville le nau-
frage de sa pairie, qu'il lui a été en-
suite défendu de revoir. Le roi de
Naples, en sortant des conférences
de Laybach, etavani même de ren-
trer dans sa capitale, bannit de ses
états tous les agens diplomatiques
du gouvernement constitutionnel;
et son ordonnance n'a pas encore
été rapportée sous le rèfçnede son
successeur. M. de Angelis viclime
de c«'t acte arbitraire, a cherché h
oublie| l'injustice des hommes,
dans les jouissances de l'esprit. Li-
vré entièrement à l'étude et aux
travaux littéraires, il a déjà pris
53a
BAI
rang^ parmi nos écriv^ains,quî le re-
gardent coitiîtic leur cuulrèic. II est
un de nos cq,Uahorateur.s,etil tra-
vaille en même temps pour la JB/o-
grnpliic universeUe,où il a remplacé
Giuguené; il a enrichi ce dernier
ouvrage de plusieurs articles im-
portans, tels que Sahator Rosa,
Sunnazar , Servet , Spallanzani ,
Spinoza , etc.
ANSIAUX , peintre, roy. le
Supplément du tome i5.
ARRIGHI, duc de Padoue, voy.
le Supplément du tome i".
ARRIGHI (Hyacinthe), voy.
le Supplément du tome 1.
ARRIGHI ( Antoiise - Lovis ) ,
voy. le Stipplén)enl du tome I.
ARRIGHI (Joseph-Philippe),
9oy. le Supplément du lomc I.
ARRIGHI (Jean), voy. leSupp.
du tome I.
AUUREE, général de brigade,
voy. TErraîa du tome XIII.
AURRÉE, cheC de bataillon,
vôy. l'Errata du tome XIII.
AUBRÉE, colonel, voy. l'Er-
rata du tojne XIII.
AURREE, aidc-de-camp , voi/.
l'Errata du tome XIII.
AUDOUIN, graveur, voy. le
Supplément du tome XV.
RACHEVILLE (Les frères),
voy. le Supplément du tome II.
RAILLOT ( Etienne-Catheri-
ne) .membre de l'assemblée cons-
tituante, naquit en 1768 ; il exer-
çait la profession d'avocat au bail-
liage de Troyes, lorsqu'il fut élu
député aux états-généraux en
178g. Sa modestie ne lui permit
guère de paraître à la tribune
qu'illustraient les lalcns Itf plus
remarquables; mais il travailla
beaucoup dans les bureaux. Après
la session de rassemblée, et dès
BAS
la création du tribunal de cassa-
tion qu'il concourut à organiser,
il cessa de prendre part aux évé-
nemens politiques , ne s'occupant
plus qae de remplir les devoirs de
sa place.II pas-:a ainsi tout le temps
de la terreur; mais en 1796» épo-
que où le directoireexéçulif après
avoir renversé l'hydre révolution-
naire , voulut à son tour gouver-
ner décemviralemtnt et exiger
d'un corps aussi indépendant que
devait l'être la magistrature, une
adhésion servile aux systèmes di-
vers inspirés tour à tour par la
crainte et la violence ; il donna sa
démission cl retourna dans son
pays, où , depuis celte époque, il
partagea son temps entre l'élude
et les travaux agronomiques. Sa
passion pour la langue latine la
lui faisait préférer à toute autre.
C'est sans doute cette passion qui
le porta à traduire entièrement les
Satyres de J uvénal ( un vol. in-8°,
i8.2'2) ; il y joignit des notes plei-
nes d'érudilion et de gofit. Il a
laissé en manuscrit des Recher-
ches sur rhistoire de la Champa-
gne, particulièrement dans les gé-
néalogies. M. Baillot était un hom-
me de bien; il mourut générale-
ment regretté, en i825, à Ervy,
déparlenient de l'Aube.
BARRAL Cde), voy. le Supp.
du tome XVII.
BARllAL, colonel du génie,
voy. le Supplément du tome IX,
B ASC AN S (Pierre-Prosper),
capitaine, né à Villeneu^e-de-Ri-
vièrc, départeuient de la Haute-
Garonne, le i5 janvier 1788, se
destina dès son enfance à la car-
rière des armes. A peine ûgé de
18 ans, il s'enrôla comme volontai-
re dans le /iS"' régiment de ligue.
BAS
qui alors fiiisait partie du premier
corps d'année, sous les ordre» du
maréchal BernadoUe. Le jeune
Ba«can« ne tarda pas à se l'aire dis-
tinguer par son aptitmle et sa bra-
voure. Lor^qu'en i8u8, il fut ap-
pelé à raraiée d'Espagne, il avait
déjà passé par le grade de sous-
oUicier. Bépondant toujours aux
espérances de ses chefs, il sut se
faire remarquer dans beaucoup
d'action.s. auxquelles le 117* ré-
giment dont il fe«ait partie prit
une part active. Il rivalisa d'ar-
deur avec ses vieux compagnons
d'armes à la bataille de Tudella,
et aux sièges de Saragosse , de
Torlose, de Sagonte. de Lérida et
de Vairnce. Dans ce dernier siège,
ri fut blessé par un obus en défen-
dant une redoute avec autant de
sang-froid que d'intrépidité, ba
conduite dans la prise de ces pla-
ces importantes, lui valut siicces-
sivemenl les grades de sons -lieu-
tenant et de lieutenant. Une nou-
velle occasion de se signaler se
présenta à l'aflairc du 12 avril
1810, près Cobcntayna, royaume
de Vidence. Chargé de commen-
cer l'atlaque avec une section de
tirailleurs d'élite et 8 hussards du
4"'. le lieutenant Bascans abor-
de l'ennemi, le charge et le pour-
suit vig()ureu^ement , ju-qu'à ce
que celui-ci renforcé parSoo hom-
me» anglais et siciliens, envelop-
pe au détour d'un bois le lieute-
nant, et réduit à très-peu d'inmi-
mes les braves qui l'accompa-
gnaient. Loin de céder au nom-
bre, le jeune Bascans, par un nou-
vel effort, parvient à se dégager,
fond avec le reste des siens sur
un pelotfta •imemi, et lui fait plu-
sieurs priaonuiers, après l'avoir
BAZ 553
été lui-Miême... Mais atteint d'un
coup de feu au bas ventre, il fut
laissé pour mort sur le champ de
bataille, d'où il ne fut retiré qu'au
bout de quelques heures, ayant
les intestins à jour. Le grade de
capitaine fut le prix de cette nou-
velle rnar'que de valeur. Lorsqu'a-
près plusieurs mois de souffrance,
le jeune invalide se crut en état de
reprendre rang parmi les braves,
le maréchal Suchet l'adjoignit à
son état-major, et demanda pour
lui rétoile de l'honneur que sa
belle conduite lui avait si bien mé-
ritée. Mais les événeoiens qui se
succédaient alors vers le nord
avec tant de rapidité, ne permi-
rent an capitaine Bascans, d'obte-
nir son brevet de légionnaire, que
2 ans plus lard. Dès son retour de
l'ile d'Klbe, Napoléon le nomma
chevalier de la légion-d'honneur,
dont il n'a porté l'insigne que
quelques mois, ayantété plus lard
compris d^ns la liste de ceux à qui
les minislres du roi enlevèrent
cette récompense honorable de
leurs services. L'estime publique,
et l'amilié de .«-es anciens compa-
gnons d'armes, ont suivi le capi-
taine Bascans dans ses foyers.
BA13DET-LAFARGE, voi/. le
Supplément du tome XII.
BAZIN (Rigomer), né au Mans
en «771. De nouveaux renseigne-
mens sur 31 Bigorner Barin nous
mettent à même de rectifier l'ar-
ticle que nous lui avons consacré
dans le tome 2 de cet ouvrage.
Outre les fonctions publiques qu'il
remplit au ftlans dans sa jeunesse,
il partit volontairement pour l'ar-
mée lors de la formation des pre-
miers bataillons en 179»; Jnais
bletsé dés la première affaire, il
334 BAZ
fut forcé d'abandonner la«carrière
militaire. R«'.vemi au Mans, il y
soutint très jeune encore avec »a
plume, la cause qu'il avait voulu
défendre avec son épéc. La jeu-
nesse patriote de cette ville s'éiant
ralliée à ses opinions, ces jeune*
gens furent irai lés de Bazinistes et
considérés comme des factieux.
L'n 1790, un conventionnel en
mission dans la Sarthe , les fii ar-
rêter comme tels, eux et leur clief,
elles fit conduire à Paris, po»Jr être
traduits au tribunal révolution-
naire. Leur tête était dévouée à
l'échafaud, puisque ce député dit
un jour en pleine société popu-
laire du Mans, en regardant sa
montre: « Il est (telle) beure, les
» têtes des factieux baziîiisles sont
«tombées surTécliafaud. » Il n'en
était rien heureusement, le g ther-
midor les avait sauvées. Peu de
temps api es, M. Bazin publia au
Mans le journal intitulé : Chroni-
que manc'dle. Plus tard, il publia
à Paris les Lettres françaises et les
Lettres philosophiques; il l'ut.com-
me nous l'avons déjà dit dans son
article, compromis dans la pre-
jnière conspiration de ÎMallet, qu'il
prétend, dans son Lynx., avoir
été entreprise dans les intérêts des
républicains. Après la retraite de
l'armée française derrière la Loire,
à la suite de la malheureuse ba-
taille de Waterloo, il publia à Or-
léans le prospectus du Lynx, jour-
nal dans lequel ii se proposait de
relever l'esprit national si fort
abattu par le événemens du mo-
ment. Libéré de l'action judi-
ciaire que lui avait fait intenter la
politique des souverains étrangers
pour le fait de cette publication, il
revint dans sa famille au Mans, et
BA7.
y vécut dans la reir.iite jusqu'à
l époque où l'ordonranee du 5
septcir.bre offrit l'auiore d'une
adrnini.?lrati(jn frar-thcnienl cons-
titutionnelle. II publia alors une
suite de brochures serni-p^riodi-
qnes qui paraissaient chaque se-
maine, et dans lesquelles il cber-
chait à exalter les avantages et à
signaler les conséquences du sys-
tème C')n>tilutiounel. Poursuivi
et enifirisonné à plusieurs repri-
ses sous des prétextes fdn< ou
moins vains, sous l'administration
du préfet M. Jules Pasquier, avec
un acharnement dont il est diffi-
cile de se rendre compte en lisant
ces brochuies , des jugemens ho-
norables.entre autres un de la cour
roy;ile d'Angers , le rendirent à la
liberté. Il en profita bien peu
de temps, ayant été tué en dufl
par un odicier de la légion de la
Sarlbe, à la suit»^ d'une querelle
dont on trouva l'occasion lors de
la seconde représentation au Mans
d'un mélodrame que M. liazin a-
vait lait jouer précédemment à
Parisavec succès. Il avait réuni en
un vol. in -H", sous le titre du
Lynx ou Coit.p-tfœil et réflexions
libres sur les affaires du temps.
Ses brochures semi-périodiques;
au moment de sa mort plusieurs
'autres écrits étaient destinés à
composer un second volume. Il
avait aussi projeté et annoncé la
publication d'un journal périodi-
que; c'est ce f[ui nous a fait dire
dans son article, que « quelque
temps avant sa mort il avait créé
le journal libéral de la Sarthe»; il
n'en a point existé de ce genre de-
puis la restauration, VAr<^us de
l'Ouest, entrepris dans ce dépar-
tement, n'ayant pu y être publié.
BAZ
Il a été dit aussi inexactement dans
cet article : o qu'il voulut conti*
nuer le Lynx, et le rendre périodi-
que sons le litre de Lynx ou Jour-
nal des ftdéièsii; on a confondu
les époques. Ce dernier titre était
celui (In journal projeté à Paris
et qu'il voulut continuer à Or-
léans lors de la retraite derrière
la Loire; il eût été ridicule que
plu(> de deux ans après, en réu-
nissant en volunoes les brochures
publiées au Mans, il eCit ajouté au
titre de Lynx qu'il donna à ces
yoluines celui de Journal des fé-
dérés, puisqu'il n'y avait plus de
lédérés et que ce titre seul l'eflt
cotnpromiset eût été séditieux à
cette époque. Outre les ouvrages
ci-dessus, M. Rigomer Bazin a
publié : Charlemagne, tragédie
(non-représentée) en 5 acte;* et
en vers; en mars 1817, et à Paris,
le mélodrame cause occasionelle
de sa n>ort. Il avait écrit une his-
toire de France, presque achevée
et restée inédite. Né avec un ca-
ractère ardent et impétueux, une
âme forte ,^ un cœur noble, gé-
néreux et sensible, il sentit son
imagination s'embraser aux espé-
rances de liberté que donnait le
commencement de la révolnlion
française. «A dix-huit ans. dit-il,
• je crus voir Home dans la Fran-
»ce, Catori au sénat, les (iracques
»i\ la tribune, le grand peuple au
I) Forum, et partout de vertueux
» citoyens. Les faux Gracques vou-
«liinjit me traîner à l'échafaud
» en riant de ma simplicité. » Cette
erreur n'ayant point ahéré ses
principes, il paya par six années
de détention (laiis des prisons d'é-
tal et par des persécutions sans
nombre sou» les gouvernemens
liER 355
suivans, leur inflexible ligidité ;
enOn, il fut tué d'un coup de pis-
tolet (c'est le duel dont il a été
parlé plus haut) en haine de ses
opinions, le 19 janvier 1818.
BERGER, ex-sous -intendant
militaire, vot/. le Supplément du
tome XVII._
BERTEZ.ÈNE, ancien membre
du corps-législatif, voy. l'Errata
du tome X.
BERTH AU LT, architecte, voy.
le Supplément du tome XII.
BERTON ( Jean - Baptiste ) ,
maréchal -de -camp, naquit, en
177/1, :'i Francheval, près de Se-
dan (Ardennes). Sa famille, dis-
tinguée dans la bourgeoisie , et
qui jouissait d'une fortune hono-
rablement acquise, hii fit com-
mencer ses études à Sedan , et
l'envoya, à l'âge de 17 ans, à
l'école militaire de Brieune, i\ peu
prés à l'époque où Bonaparte en
sortait. De l'école de Brienne ,
Berlon passa A l'école d'artillerie
de Chrdons , où il était encore
lorsque le territoire français , me-
nacé parla coalition européenne,
attendait le secours de tous les
amis de la gloire et de l'indépen-
dance nationale : c'était en 1792.
Berton entra en qualité de sous-
lieutenaut dans la légion des Ar-
d(!nnes , qui fit les campagnes de
l'armée de Sambre-et-IMeuse ; il
y gagna le grade de capitaine,
Reujarqué par le général Bcrna-
dotle (aujourd'hui roi de Suètle,
sous Ik nom de CHARLEs-.TEAN),le
jeune capitaine fut attaché A l'état-
major de ce général qiii, devenu
prince rojal, eombatlii contre son
ancienne patrie, et oublia ses an-
ciens compagnons d'armes. Il l'aé-
eompagna en Hanovre etcn Prusse
556
B£R
pcnduDl les années 180G et i8on,
que la bataille d'Austerlilz a ren-
dues célèbres. Le général Viclor,
depuis mHréchal de France et duc
de Bellune, remplaça Bcrnadolle,
blessé au pont de Spanden {et
non au pont de S[)andau, comme
le dit l'auleur de la notice dont
nous parlerons plus bas ; la guer-
re se taisait alors dans la l'russe
ducale, et non dans la Prusse roj/i -
le.) Sous le général Viclor, Bertoo
rendit, particulièrcînent à Tried-
land,des services si iniporlans,
que ce général lui promit de sol-
liciter en sa laveur le grade de co-
lonel.En 1 808, Bertonsuivitle ma-
réchal Vicloren Espagne, et se dis-
tingua de nouveau à la bataille de
Spinosa. Alors le maréchal, en le
•])résbntant à l'euipereur lors de la
revue de Burgos , dit à ce prince :
«C'est le premier chef d'escadron
de mon corps d'armée, pour la va-
leur et les talens ; je vous demande
pour lui un régiment. V. M. peutê-
tre persuadée qu'elle ne saurait le
mettre en de meilleures mains. »
Napoléon répondit : « Je n'ai point
de corps à donner aujourd'hui, je
le fais major » et après quel-
ques instans : « Je n'ai point de
régiment libre, mais je vous fais
adjudant-commandant; vous êtes
un bon otiicier; je me souviendrai
de vous. •> Peu de temps après,
Berton passa en qualité de chef
d'état -major sous les ordres du
général Valence , et de là sous le
général Sébasliani, commandant
du quatrième corps. Il donna de
nouvelles preuves de ses talens et
de son courage à la bataille de
Talaveyra, et surtout à celle d'Aï-
manacid, où il fut blessé en s'em-
parant, i la tête des lanciers po-
Bt:R
lonais, de la plus forte position
«i'Ocana. Le prince de Sobieski ,
témoin de son sang-iVoid et de
son intrépidité, l'embrassa en pré-
sence du régiment , et lui dit :
« Je ferai savoir à ma nation la
manière dont vous venez de vous
conduire à la tête de ses enfans ;
je demanderai pour vous la croix
du mérite nu'litaire; les Polonais
seront Gers de la voir briller sur la
poitrine d'uii brave tel que vous.»
Le général Sébasliani se porta sur
le royaume de Grenade, et confia
à Berton un détachement de 1,000
hommes , en lui ordonnant de
s'emparer de Malaga, que défen-
daient 7,000 hommes de l'armée
espagnole. Berton, devenu maître
de cette ville, en fut nommé gou-
verneur par le maréchal Soult.
Sa c<induite administrative y fut
digne de la bravoure dont il avait
déjà donné tant de preuves. Il eut
à repousser différentes ciltaques,
où il eut toujours du succès. Mais
par suite de la bataille des Ara-
piles , il dut suivre le mouvement
d'évacuation de l'Andalousie. Dans
la retraite, Berton soutint sa ré-
putation de capacité et de bra-
voure, et reçut en récompense,
le 5o mai 18 15, le grade de gé-
néral de brigade. Il justifia la
confiance du maréchal Soult à la
bataille mémorable de Toulouse ,
le 10 avril i8i4- Peu après, sous
le gouvernement royal , il fut mis
à la deiai-solde. Napoléon le re-
mit en activité au 20 mars 18 15,
et Berton eut sous ses ordres une
brigade du corps du général Ex-
celmans : c'est à la tête des i4* et
17' régimens de dragons qu'il se
trouva à Waterloo. Après la se-
conde restauration, il fut cnferiué
BER BER 37.7
à l'Abbaye, où il resta détenu tions, et enfin , secondé d'un cer-
pendant cAnf[ mois. II recouvra lu tain nombre do personnes, s'em-
îiberté s ins avoir subi de juge- pare de l'iiulorilé et pourvoit au
ment. Le général Berton devint reniplacement ou à la confirma-
membre de la société des amis de lion des fonctionnaires publics.
la presse, et publia un Précis ^wr Bertou annonçait qu'un mouve-
les batailles de Fleurus et de Wa- ment semblable devait avoir lieu
terloo. Ses principes politiques, simultanément par tonte la Fran-
ses ouvrages, ses pétitions aux ce , et prenait le titre de général-
chambres, déterminèrent M. le commandant de l'armée nationale
marquis de Latour - Mauhourg, de l'Ouest. Il paraît que le cri do-
ministre de la guerre, à le rayer minant fui celui de vive la liberté!
des contrôles de l'armée, et Al. le quelques personnes y mêlèrent
baron Mounier, fils iSo rex-cnns- celui de vire JSapotéon II ! Enfin,
tituant de ce nom, directeur gé- ime coloime formée, selon l'acte
néral de la {)olice, à faire exercer d'accus ition , de i5 hommes à
contre lui une surveillance, dorit cheval » t de 120 hommes à pied,
il se plaignit vivetrient. N«iiisem- se mit en marche, tanjbour bat-
pruntons à un N' de V Annuaire tant et baïuiière déployée , vers la
nécrologique le récit du procès et ville de Sauuiur; il- furent joints
la fin déplorable du général Ber- en roule par qmdtpies personnes
ton. Cette partie de la vie du gé- des villages environnan». Malgré
néral nous a paru rédigée avec le grand nombre d'individus qui
mesure et im[)artialité , et a été sont entrés dans le complot , dit
d'ailleurs empnuitée aux docu- l'acte d'accusation , les autorités
mens du procès. « Parti île Paris de Sauniur étaient dans la plus
au mois de janvieri822, le général profonde bécurilé. I/euncuii elait
Berton se refulit à Brest, à Rennes, déjà arrivé à iMontreuil, qui en
et enfin à Saumur, où il entra en re- est éloigné de trois lieues, qu'elles
latjon avec plusieurs personnes de en ignoraient la nouvelle , tandis
ces villes et clt-s environs. D.ins la que de distance en di^jtance , il
nuit du 20 février, Berton quitta tiouvail des émissiiires qui lui fai-
Saumnr, et se rendit à Thonars , saient conn lître les dispositions
où il avait des intelligences, entre prises pour le recevoir. C'est de
autre? personnes, avec le com- Wontreuil, où la troupe de Ber-
niandant de la garde nationale et ton arriva à trois heures a()rès-
l'adjoint au mair(!. I^e 2 j février, midi, que les premiers avis furent
à quatre heures du matin, le gé- expédies aux autorités de Saumur,
néral Berton , revêtu de son uni- par le brigadier de la genrlarme-
forme , arbore la cocarde et le rie. Aussitôt quelques mesures de
dra[»eau tricolore dans la ville de défense furent prises dans celle
Thoiiiirs, proclame un gouverne- ville. Cependant la troupe de Ber-
ment provisoire, où il place les ton dépassa le pont Fouchard.
noms do cinq membres de l'op- Après quelques pourparlers avec
position de la chambre des dépu- le maire, le général repassa le
téS) fait vt publie des proclama- pont, le barricada et établit des
T. IX. aa
358
B£R
postes, afin de n'être point sur-
pris : les choses restèrent dans cet
état pendant plusieurs heures. Des
communications eurent lieu entre
les insurgés et les habitans; Ber-
lon et le maire eurent une confé-
rence : la garde nationale demeura
rangée en bataille. Les autorités
de Saumur tinrent un conseil de
guerre, où il fut décidé que Ton
attendrait le jour pour charger
l'ennemi. Berton occupa sa posi-
tion jusqu'à minuit environ. Il fut
instruit de la détermination du
conseil, et donna des ordres pour
effectuer sa retraite. La ville de
Saumur est munie d'un château-
fort où se trouvait un dépôt d'ar-
mes considérable; il était occupé
par une école de caralerie, com-
posée de sous -officiers de touj les
régimens de larmée , qui a été
dissoute après ces événemens. Le
général doima le signal de la re-
traite; il la, fit avec ordre, en
montrant uiie sécurité qui ne peut
s'expliquer que par la confiance
que lui inspira l'inaction de for-
ces bien supérieures aux siennes.
Berton , après s'être couché à
Montreuil, s'y être rafraîchi avec
ses troupes, continua sa marphe
jusqu'à Brion. Sou intention était
de se replier sur Thouars, mais
déjà on y avait pris des mesures
pour y eajpêcher son retour. Il
iallut se séparer ; plusieurs des
chefs prirent la fuite : Berton erra
dans les départemens des Deux-
Sèvres et de la Charente- Infé-
rieure. L'acte d'accusation affirme
que cette tentative fut l'œuvre
d'une société secrète appelée les
Chevaliers de la liberté ou Carbo-
nari; que celle société est dirigée
par un c<;Hiiit« dont le siège est à
bi:r
Paris, et que Berton était l'agent
principal de ce comité dans les
départemens de l'Ouest. Si le pre-
mier complot ourdi à Saumur par
Delon , Sirjan , etc. , eût réussi ,
il devait se mettre à la tête de»
rebelles il est désigné dans la
procéduire instruite à Nantes con-
tre les carbonari , qui avaient pro-
jeté le renversement du gouver-
nement, comme devant prendre
la direction du mouvement aus-
sitôt qu'il aurait éclaté. C'est en-
core lui que l'on indiquait, au
mois de mars 1822, pour prendre
le commandement des militaires
de La Rochelle , qui avaient com-
ploté une révolte. Cependant Ber-
ton avait disparu. Les journaux
annonçaient qu'il était passé en
Espagne, lorsqu'on apprit tout-
à-coup qu'il venait d'être arrêté,
le 17 juin, au lieu nommé Laleu,
commune de Suint- Florent, dans
la maison de campagne de M. De-
lalande , notaire du lieu , par un
sous-olficier de carabiniers, nom-
mé Wolfel ( depuis il a été fait
officier ) , qui s'y prit de la ma-
nière suivante : Selon lui , s;\ fidé-
lité aurait été tentée par des per-
sonnes de Saumur, dans les pro-
jets d(!squelles il feignit d'entrer
pour mieux découvrir leurs des-
seins, dont il tenait son chef ( M.
le colonel Bréon, aujourd'hui ma-
réchal-de-camp) informé. Bientôt
il fut mis en relation avec Berton,
qui se tenait caché auprès de Sau-
mur ; il lui amena successivement
des militaires de son corps , au
nombre de trois. Un jour, reve-
nant de la chasse ensemble , et
rentrant dans la maison de M.
Delalande, où ils devaient dîner
avec quelques autres personnes,
BER
♦oui - à - coup Wolfel couche en
Joue le général , en lui disant :
« Vous êtes prisonnier. « Les trois
autrescarabiniers en firent autant.
Le général dit à Wolfel : « Je ne
m'attendais pas à cela de votre
part, vous qui venez de m'ein-
brasser. .> Wolfel le menaça de
faire l'en sur lui au moindre mou-
vement ; ensuite il sortit pour al-
ler chercher t\n détachement de
carabiniers, qui avait été aposté
à peu de dislance de la maison.
C'est alors qu'il vit arriver un in-
dividu ù cheval, nommé Magnan;
il lui ordonna de s'arrêter, lui dé-
clarant que s'il avançait, il tire-
rait. Wolfel prétend qu'à cet aver-
tissement, Magnan parut vouloir
porter la main à ses pistolets, et
à l'instant il déchargea les sien<,
«t retendit roide niort. Il rentra
aussitôt dans la chambre où se
trouvait Berton , et lui ordonna
de déposer ses armes. Le général ,
continue Wolfel, sortit de dessous
son gilet, un poignard et un pis-
tolet, qu'il posa sur une table, et
lui-même se plaça près d'un lit
(jui se trouvait là, ayant ;\ côté
de lui Baudriitct et Delulande.
Peu après , des cuirassiers arri-
vèrent et amenèrent le général
Berton prisonnier dans le château
de Saumur. La cour royale de
Poitiers instruisit une procédure
contre le général Berton et contre
cinquante-cinq personnes, accu-
*èes d'avoir participé avec lui à
l'insurrection de Thouars. L'n ar-
rêt de la cour de catsation , rendu
sur le réquisitoire du ministère
public, pniir cause de suspicion
légitime , transféra le jugement
de celte aflaire, de la cour d'as-
«is<?8 des Deux-Sèvres, i\ celle de
bi:r
5:^0
Poitiers. Quelques débats préju-
diciels eurent lieu : l'accusé récu-
sait la cour d'assises comme in-
compétente; et, conformément à
l'article 33 de la charte, deman-
dait à être jugé par la cour des
pairs : celte prétention ne fut point
admise. La composition du jury,
que la législation actuelle attribue
aux agensdu gouvernement, avait
fait imaginer d'appeler en témoi-
gnage quelques-uns de ceux qui
le composaient. Cette manière in-
directe d'étendre les récusations,
fut repoussée par la cour. Le gé-
néral Berton avait choisi pour dé-
fenseur M' Mérilhou {voy. ce nom
au supplément du 18' vol. ), du
barreau de Paris : l'autorisation
prescrite par le décret de 1810 lui
fut refusée par le garde-des-sceaux
{M. de Peyronel. ) Au défaut de
iM* iMérilhou, le général appela
M' Mesnard , du barreau de llo-
chefort; l'autorisation lui fut éga-
lement refusée, en même temps
qu'on décidait qu'elle lui était né-
cessaire, ce qui fut contesté par
lui. Berton ayant refusé de faire
un autre choix, la cour d'assises
de Poitiers lui nonuna d'office M"
Dmult, du barreau de celte ville.
Le général Berton, qui ne con-
naissait point cet avocat, et qui
surtout ne voulait pas le recevoir
des maitjs de ses juges, refusa
d'accepter son minislère. La cour
enjoignit néamnoins à l'avocat de
défendre legénéral; mais M' Drault
refjisa énergiquement celle mis-
sion, à cause dt^quoi un arrêt le
raya du tableau : cet arrêt a été
cassé depuis pour défaut de for-
me, par la cour suprême. Dans le
cours des débals, l'accusé articula
les plaintes suivantes : « On m'a
JliO
BER
mis au Sficret le plus iignurf;ux;
on m'a tenu dans des léix'^bres
continuelles, comme un voya^jeur
que l'on conduit dans une caverne
pour l'assassiner. Je n'ai pu com-
muniquer avec M" Drault que le
10 de ce mois (les débals s'ouvri-
rent le 26). liC II seulement j'ai
obtenu la permission de lui pas-
ser des notes. I.ors de mon inter-
rogatoire, M. le président m'a dit
que l'avocat qu'on me nommerait
d'office viendrait dans ma cham-
bre conférer avec moi ; que les
gendarmes se retireraient à quel-
que distance , et me laisseraient
maître de communiquer avec mon
défenseur. Malgré cette promesse,
je n'ai pu voir M'' Drault qu'à tra-
vers deux grilles dont les barreaux
sont très-rapprochés ; je ne l'ai pu
qu'assisté du geôlier et de deux
gendarmes. M. le président a eu
la bonté de modifier cet ordre et
de prescrire à mes gardiens de se
retirer à quelque distance, en ob-
servant toutefois de ne pas me
laisser recevoir des papiers. Le i3
août , je remis à M* Drault quel-
ques notes : le voncierge Cham-
pion était ;\ côté de moi; il avait
Ja tête placée d ms la porte, pres-
que sur mes épaules. Comme je
l'ai écrit à M. le président, j'ai le
malheur d'avoir l'ouïe un peu
dure , et M* Drault ne pouvait
dans ces circonstances me parler
bas. Jamais on n'a interprété le
code d'instruction criminelle com-
me on Ta fait à mon égard, jamais
on n'a imaginé dte pareils subter-
fuges. Le 29 du mois dernier
(juillet), M. le président m'a fait
prévenir que mon pourvoi contre
l'arrêt de la chambre des mises
en accusation devait être consigné
BER
sur le registre du greffe. Le 5 de
ce mois, M' Drault voulut me
passer ses notes; le concierge s'en
<!St emj).iré , en disant qu'il avait
ordre d'en agir ainsi. Ces notes
lurent portées chez M. le procu-
reur-général, qui défendit de me
les conuiiuniquer. Je fis mon
potu'voi d'après des articles de loi
que je ne connaissais pas : M*
Drault fut obligé de venir le len-
demain m'en faire changer la ré-
daction Je déclare à la cour
que jusqu'à ce jour, je n'ai eu
aucune véritable communication
avec mon défenseur. » « Le geô-
lier et les gendarmes , ajoutait
M° Drault, ne se tenaient pas as-
sez éloignés de nous pour que je
pusse parler assez bas pour n'être
pas entendu Je dois dire en
mon âme et conscience que ce
mode de communication m'a paru
si peu propre à remplir le vœu de
la loi, si dangereux pour moi et
pour l'accusé, que je n'ai cru pou-
voir lui faire aucune question.
Tout ce que je lui ai dit, je l'ai
dit à très-haute voix, parce qu'une
réponse mal saisie, mal interpré-
tée , pouvait compromettre les in-
térêts des accusés. » Ces plaintes
furent l'occasion d'un débat qui
parut en constater l'exactitude, et
que M. le président termina en
soutenant que le mode de com-
munication appartient exclusive-
ment au président et au procu-
reur-général. Nous devons ajou-
ter que les accusés étaient con-
duits à l'audience dans des cha-
liots fermés, où ils se plaignaient
de manquer d'air ; qu'ils jetaient
attachés avec des cordes; qu'en
une occasion l'un d'eux en fut re-
tiré blessé ; que les nombreux sol-
BER
dats qui les enlouniient faisaient
fermer les portes des maisons qui
se trouvaient sur leur passage ;
que les flls du général Berton é-
prouvèrenl des entraves de plus
d'un genre pour obtenir la per-
mission de venir à Poitiers, avant
et après la condamnation du gé-
néral ; et enfin qu'on ne leur ac-
corda pas même la triste faveur
d'assister chaque jour au procès
de leur père. Dans la séance du
II septembre, W* Drault se leva
et dit : « M. le président, je suis
chargé par le fils du général Ber-
ton de vous prier de lui donner le
moyen de pénétrer jusque dans la
salle de l'audience : ce jeune
homme est consigné sur la place
Saint-Didier. — M. le président :
Je ne le puis , il a déj.\ assisté à la
séance d'hier... ! » Le système de
défense du général Berton pen-
dant l'audition des témoins, con-
sista à soutenir qu'il ne s'était pas
positivetiicnt insurgé et n'avait
point fait acte d'usurpation de
l'autorité souveraine; que son but
aurait été non le changement de
dynastie, ou le ch.ingemenl de
la forme du gouvernement, niais
seulement le redressement des
griefs allégués contre l'adminis-
tration actuelle. Ce système peu
soutenable, laissait beaucoup do
prise à l'accusation, et chargeait
quelques-uns des co-accusés; aussi
le général se vit bientôt réduit ii
r.ibandonner. On va l'entendre lui-
même présenter sa défense, que
sa longueur el trop de digressions
nous forcent ù ne présenter que
parextr.iil. « Messieurs les jurés,
j'ai été huig-tcmps le maître de
ne pas parait re devant vous; j'iu-
rais pu m'cuibarquer^our l'Es-
BER
341
pagne aussi facilement que l'ont
fait les oiTiciers qui étaient avec
moi; long-temps après leur dé-
part , j'ai eu encore à ma disposi-
tion un bâtiment pour m'}' con-
duire. Plusieurs personnes dans
le pays 01^ j'étais, m'engageaient
continuellement à m'y rendre ,
entre autres une dame qui avait
fait d'avance les frais el les prépa-
ratifs de mon voyage; mais j'ai
)^nsé que fuir loin de la France
était indigne de moi , et que je
commettrais une iHcheté en quit-
tant son territoire, pendant qu'un
certain nombre de mes co-accusés
étaient dans les fers. De grands
intérêts particuliers m'appelaient
j>ourlant en Espagne. Ce que je
dis, messieurs, ne vous étonne-
rait pas si j'avais l'honneur d'être
mieux connu de vous. J'ai eu
même l'intention de me consti-
tuer prisonnier avec les autres ac-
cusés, afin de pouvoir faire con-
naître la #érité à messieurs les
juges, et je l'eusse fait, si un autre
homme que M. Mangin eAt été
procureur général près cette cour.
On n'a rien épargné, messieurs,
pour tâcher de nous avilir à vos
yeux : les épithètes les plus offen-
santes, peu généreuses envers des
accusés, de la pan d'un magistrat
revêtu d'aussi éminentes fonc-
tions, ont montré un caractère
irascible et peu de dignité. Le
courage que l'on croit déployer
lorsqu'on est certain de ne cqurir
aucun risque, de n'être exposé ù
aucun danger, n'est qu'une fanfa-
ronade ridicule; et quand M. le
procureur-général s'est cru auto-
risé, sur un faux rapport, i\ so
servir envers nous du mot de tâ~
chuté f nous l'avoDs méprisé... M.
342
BliR
le procureur-général, par un ju-
gement anticipé, m'a qualiûé d'ex-
géncral sur son acte d'accusation,
sans connaître la catégorie dans
laquelle je me trouvais. J'ai été
mis à la solde de réforme au i"
août de l'année dernière, ce qui
ne diminue que les appoinlemens,
mais cela n'ôte pas le grade : on
peut même être mis tout-à-coup
en activité... Au fond de ma tran-
quille retraite , où je gémissais
sur la détention de mes co-accu-
.^és, j*ai eu l'occasion de lire des
journaux; et n'ayant pas trouvé
le nom de Grandménil parmi ceux
des hommes arrêtés ou fugitifs,
j'ai craint qu'on ne chercli.lt de
■ nouveau à exciler les habitans des
campagnes surtout , à faire des
tentatives inutiles et dangereuses,
pour délivrer leurs concitoyens.
Je désirais pouvoir revenir dans
le département de Maine-et-Loire,
dans les environs de Thouars, y
voir quelques citoyena» notables ,
afin qu'ils pussent d'abord faire
connaître aux prisonniers que je
ne m'étais pas sauvé en Espagne,
comme l'avaient annoncé tous les
journaux; et le premier fut celui
des Débats, qui m'avait fait em-
barquer près de La Rochelle. En
second lieu , je voulais détromper
ceux qui n'étaient point compro-
mis et les empêcher de se com-
promettre , et c'est ce que j'aurais
l'ait; j'aurais rendu un plus grand
service que ne l'a fait le maréchal-
des-Iogis Wolfel, en devenant un
des suppôts de la police. .î'ai su
que Grandménil'avait envoyé quel-
qu'un à ma recherche, qui n'a pu
«ne trouver, mais qui avait pu ac-
quérir des présomptions que j'é-
lals danj lu Sainlonge. Il y est
BER
vftuu lui-même : par la ténacité
de ses recherches, il a troufè
moyen de n)e faire parvenir une
lettre, par la(|uelle il me priait de
le recevoir. J'y consentis; il me
parla de suite de toutes les arres-
tations qu'on avait faites; je ne
les croyais pas aussi nombreuses.
Il vit la peine que cela me cau-
sait; il nje parla alors de l'esprit
de quelques maréchaux-des-logis
des carabiniers ; je lui répondis
que tout ce qu'il me disait ne
m'apprenait autre chose, ?inon
qu'il allait au moins celte fois-là
se faire arrêter, s'il n'en compro-
mettait pas d'autres, et qu'un ré-
giment qui avait à peu près, com-
me tous les autres, cinquante sous-
officiers, et autant d'officiers, n'é-
tait pas à Iii disposition de quel-
ques individus ; qu'il devait en
croire mon expérience militaire.
Il me supplia de venir voir cela
par tnoi-même; je lui répondis
que je le voulais bien, si on me
promettait de suivre mes conseils;
il me le promit, et crt homme
avait beaucoup d'inffuence dans
les campagnes. Quelques jours
après, j'entrepris ce voyage, qui
pouvait me donner l'occasion de
calmer les esprits s'il était néces-
saire ; d'empêcher les gens trop
crédules de se compromettre, en
même temps que j'aurais pu faire
connaître que je n'avais pas quille
la France Je reviens à l'acte
d'accusation dressé par M. le pro-
cureur-général, et je déclare qu'il
est faux en principe et dans ses
conséquences, et par les supposi-
tions et inductions qu'il renferme.
Le mouvement qui eut lieu à
Thouars le 34 février dernier, n'a-
vait pas pour but de renverser le
poiiverncment du roi. et était en-
core bieij inoin^ dirigé contre S.
M. , puisqu'il était l'œuvre des
chevaliers de la liberté, dont le
premier artticlede leurs statuts est
le maintien et ta conservation du
roi et de l' auguste famille réi^nante,
le soutien de la charte, avec l'en-
{çagement de combattre les enne-
mis de la liberté, qui sont ceux
dfc: la charte. Je ne me rappelle
pas bien si ce sont là les propres
mots de ce premier article, mais
je suis sûr que tel en est le sens ;
il m'a été lu à Saumur, en pré-
sence de beaucoup de chevaliers
de la liberté, qui m'ont juré d'y
persister entièrement, et m'ont
l'ait promettre d'y adhérer; per-
sonne de nous n'a dû ni pu parler
de gouvernt'ment provisoire en
France. Il n'est pas vrai que je
sois le chef de celte entreprise ;
il ne m'est pas plus permis de
m'en faire les honneurs que de
in'attribuer celui d'avoir fait ar-
borer les trois couleurs nationa-
les, que S. M. Louis XVIII a
portées, qui ont di;puis flotté avec
gloire dans les quatre parties du
monde, et sous lesquelles le nom
français s'est iumiortalisc : au-
cune puissance de la terre ne peut
détruire ces vérités. La résolution
était prise d'arborer les troië cou-
leurs, et je n'avais pas le droit
d'en décider autrement. Le n)ou-
vcment qui a eu lieu ù Thouars
n'a point été préparé par moi ; il
a pu être déterminé par ni« |)ré-
sence; il aurait pu avoir lieu sans
moi. Je n'y ai rien organisé, je
n'y connaissais personne, j'y ai
trouvé ce qui y existait. On ne
crée pas de semblables choses
dans un jour ni dans un mois ;
BER 54r>
niai? c'est le fruit d'un grand et
long mécontentement. II faut s'ê-
tre commtmiqué long -temps et
souvent les luécontentemens ré-
ciproques, pour en venir au point
de prendre un parti. J'ai laissé
chacun libre d'y participer ou de
se retirer, ce que les uns ont fait.
Les proclamations dont il est
question dans l'acte d'accusation
ne m'étaient pas connues. Je ne
les ai point lues; j'ignore qui les
a faites , qui les a apportées à
Thouars, ou si elles ont été faites
dans cette ville; elles ne sontpoint
signées par moi , et je n'en suis
pas l'auteur. La plupart des accu-
sés, ici présens, n'étaient point
sur la place quand on les y a lues.
RI. le procureur-général prétend
en outre que mon nom est cité
dans une procédure instruite à
Nantes contre des carl)onari , et
dans i]ne insurrection militaire de
La Rochelle, du mois de mars
dernier, deux choses dont je n'ai
eu connaissance que par son acte
d'accusation. Oii e-t la prenve de
ces assertions erronées? quelques
délations, peut-être soulHées aux
oreilles de quelques malheureux
inculpés, afin de leur faire espé-
rer leur grSce, qu'on attache pour
les tromper, au prix honteux d'une
fausse dénonciation , dont (m» a-
doucit l'expression en l'appelant
révélation... Je ne suis point che-
valier de la liberté; si je l'étais,
je serais loin de le désavouer, et
j'ignore Ce que c'est que les car-
bonaft,dont M. le procureur-gé-
néral m'avait parlé lors de mon
interrogatoire, et que par son acte
d'accusation il semble confondre
avecles chevaliers de la liberté...
Nous avons été conduits devant
344
BER
vous, messieurs, dans des cages
montées -sur quatre roues» eo-
cliaînés deux à deux, traversant
deux haies de soMals, précédés
et suivis par des pelotiius d'infan-
terie et de cavalerie, tandis que
les rues aboutissant à celles qui
conduisent Je la prison au paîui-;,
sont t-n outre barrées par d^s
troupes. Vu les mesures extraor-
dinaires de sûreté, la gendarme-
rie, qui voyait sa responsabilité
très à couvert, prit sur elle de
nous ôter les fers ; le général Ma-
larlic ordonna qu'on nous les re-
mît ; on fit des représentations à
la cour sur les accidens qui pou-
vaient en résulter; elle ordonna
un traitement plus humain. On
nous ôla une second»; fois nos
fers ; le même général ordonna
alors de nous attacher avtc des
cordes, ce qui a eu lieu jusqu'au-
jourd'hui. M. le procureur-géné-
ral Mangin a i"ermé l'entrée de la
prison à mes enfans, venus exprès
de l'aris pour me voir, avec une
permission du ministre de la guer-
re, qui 1rs autorisait à rester trois
jours à Poitiers ; tt ils étaient par-
tis , l'un d'Avignon , l'autre de
Nantes, pour aller solliciter cette
permission à Faris. On m'a refusé
la consolation d'embrasser mes
deux fils. Veuillez bien remarquer,
messieurs, que mes fils avaient
une permission d'un des minis-
tres du roi , spécialement pour
venir me voir et rester trois jour»
à Poitiers, afin de pouvoir juger
toute l'étendue de la dictatifre de
M. le procureur-général du roi,
qui n'a pas voulu permettre que
je les visse. Celle épieuve , mes-
sieurs, m'a causé bien du cha-
grin; et c'est ce que l'on voulait.
BER
Mes enfans ont dû retourner de
suite h Paris , avec une douleur
égale à la mierme ; iiuiis indépen-
damment de l'ordre du mini.-tre
de la guerre, ils obtinrent bien
vite celui du ministre de l'inté-
rieur, tenant le portefeuille de la
ju^tice, pour communiquer avec
leur père. M. le procureur-géné-
ral n'a pas pu s'y refuser cette
fois -ci, ni leur faire faire anti-
chambre dans la cour, comme la
première fois; on s'est contenté
de faire prendre des mesures sura-
bondantes, des précautions de sur-
veillance, pendant que mes deux
fils étaient A mes côtés, sous les
verroux. M. le procureur-général
n'a pas voulu permettre qu'ils dî-
nassent une seule fois avec moi...
Je oe puis répondre à tout ce que
vous a dit hier tM. le procureur-
général ; c'e?t ce qu'il avait déjiV
dit dans î-on acte d'accusation. Il
m'a de plus noté comme un Ci)l-
laboraleiir de ia Miierve; c'est
m'accorder trop de mérite que de
m'associer aux écriv.tins qui ré-
dige.îient celte feuille périodique.
Je me rapj)elle d'y avoir fait in-
sérer trois lettres, l'une pour ré-
futer des injures que lord Slan-
hope avait voujie.'- contre la na-
tion française ; l'autre eu réponse
à l'Ermite de la Pruvince , qui
avait rendu compte de la bal.iille
(le Toulouse , et elle avait pour
but de faire connaître une action
d éclat , la j>lus intrépide , faite
par un nommé Vincent, maréehal-
des - logis au 22* régiment des
chasseurs. J.a troiï.ièuie était en
faveur du général Cambroune ,
que des journaux avaient attaqué.
Je n'ai jan)ais eu d'autres rapports
avec la Mina've; chacun pouvait
BER
y taire insérer des lellres. M. le
procureur - g^iéral vous a pré-
senté le prétendu comité direc-
teur, sur des preuves morales ,
comuie le Vieux de la Montagne,
qui Taisait partir du mont Lib.tu
un homme pour aller assassiner
Saint-Louis, et qui, sur d'autres
rapports avaut.igeux à ce monar-
que, envoya un second émissaire
pour donner contre-ordre. Il vous
a parlé de son indulgence, mes-
sieurs, et il vous demandt; beau-
coup de «ang. Si votre conscience
vous dit qu'il faut en verser, je
l'erai l)i« n volontiers le sairifiee
du uiit;n; j'en IV-rais surtout le sa-
crifice a>ec joie, s'il pouvait ren-
dre la liberté à tous ce ix (|ui
m'ont suivi jusqu'à Saumur. Vous
pouvez les éj»argner, messieurs,
aucun sentiment intérieur ne doit
vous en faire de repr(»chc ; je dé-
sirerais, en ce cas, pouvoir four-
nir ù moi seul assez de sang pour
apaii-er la soif de ceux qui eu pa-
raissent si altérés, l'cndant vingt
ans , j'en ai versé sur quelques
champs de bataille; j'y ai épargné
celui des émigrés lorsqu'il» se bat-
taient comre nous. J'en ai sauvé,
connue bien d'autres de mes com-
pagnons d'armes l'ont fait; et
celte générosité avait ses diuigers.
Je n'ai jjuiais fait couler une
goutte de sang français. Celui qui
me reste est pm- ; il est tout fran-
çais. J'ai exposé loug-leuips ma
vie avec gloire |>our imm p.tys.
Si je devais la perdre par la main
de mes concitoyens, je leur pré-
senterais encore ma poitrine avec
le même eour.ige que j'ai toujours
montré devant les ennenns de la
France. Nos noms , messieurs, se-
ront inscrits ensemble dans This-
BER
54 r>
toire : la France et l'Europe nous
jugeront sévèrement et sans par-
tialité. Quoi qu'il puisse arriver,
mon cœur n'a rien à craindre, et
ma devise, comme elle a toujours
été , sera celle-ci :
Dutce et décorum estpro patriâ mori, •
iM. Mangin, procureur- général ,
qui avait été chef de division au
ministère de la justice sous l'ad-
ministralion de 1819, soulinl l'ac-
cusation avec beaucoup de véhé-
mence; il inculpa même grave-
ment plusieurs membres de l'op-
position de la chambie des dépu-
tés, qui avaient été nommés dans
I s débats. Ceux-ci demandèrent
à la cour de cassation l'autorisa-
tion de réclamer une réparaliotj
des tiily.maux; ils n'obtinrent pas
cette autorisation , njais la cour
suprÇme admit dans son arrêt, la
possibilité de juger peu mesurées
les expressions du procur(;ur-gé-
néral de l'oiliers. Après dix -sept
jours de débats, le jury fit con-
naître sa déclaration , A la suite
de laquelle Bcrlon et cinq de ses
co - accusés furent condamnés à
mort. (Le colonel Alix avait été
déclaré coupable de complot par
le jui-y, à la majorité de s<;pt voix
contre cinq; mais la majorité de
la cour se réunit à la minorité du
jury, pour le sauver de la mort.
II a été cond«imné à cinq ans de
détention , comme non - révéla-
tt;ur. ) Trente-deux furent con-
damnés à l'emprisonnement. En
dépeignant le tableau qu'offrit ce
moment terrible, le cjarrateur des
débals nous signale la circons-
tance suivante : « Sauzais se jette
dans les bras de son avocat, l'eni-
braise le» iarni(?s nux yeux. M. le
546
RER
général Malarlic prévienl aussitôt
'es dérenseurs que, par ordr«; de
M. le président , il est détendu à
toutes personnes d'approcher des
prévenus, ni de leur parlt-r. M*
Bréc-hard : Quoi! iM. le général,
même aux avocats? — M. de Ma-
lartic : Oui, monsieur, même aux
avocats, par ordre de M. le prési-
dent. » (M. de Malartic a été nom-
mé comte, « en témoignage, dit
M. le duôde Bellunc (»oy. Victor),
ministre de la guerre , du zèle , de
l'activité, de la prévoyance, avec
lesquels il a dirigé le service de
la place de Poitiers, pendant le
jugement du général Berton. »
(Lettre du ii octobre 1822.) Le
général Berton se pourvut en cas-
sation contre l'arrêt de sa con-
damnation. MiVl. Isamhert et Mé-
rilliou plaidèrent le pourvoi. Le
premier s'exprimait en ces ter-
mes : « Nous avons mis à profit
le délai de huitaine que la cour
a bien voulu nous accorder. iM.
Ch. Berton , fils du général , a
obtenu le lendemain , i'« la préfec-
ture de police, un passeport pour
Poitiers. Ses premières recher-
ches sur l'îîge de M. Boisnet, le
septième juré, n'ont rien produit.
11 les continuait avec toiilft l'ac-
tivité qu'un fils peut mettre pour
sauver la vie de son père, quand
l'autorité militaire a cru devoir le
mettre en surveillaïkce, sous pré-
texte qu'il était militaire, et que,
s'il exhibait un passeport régulier,
il n'était porteur d'aucun congé.
M. Berton fils est présent à l'au-
dience; il nous autori'^e formel-
lement à articuler les fiils sui-
vans : M. le général Malartic ,
commandant le département, l'a
consigné à domicile sous la sur-
BER
veillance des gendarmes, sous le
prétexte qu'il était militaire, avec
défense de cnmmuniquer au de-
hors. M. Berton répondit qu'il
avait été placé en congé illimité ,
ce qui le- mettait hors des cadres
de l'armée ; que dès-lors il était
rentré dans la vie civile, et qu'»!
cette fin un passeport régulier lui
avait été délivré par l'autorité ci-
vile. Ces dillicullés ont forcé M.
Berton fils à revenir à Paris, san.*
avoir pu se procurer la preuve de
l'uge du juré. » L'avocat indiquait
ensuite les moyens de l'accusé,
qui déclarait s'inscrire en faux
contre le procès-verbal des débats
tenus dcv.mt la cour d'assises de
Poitiers, et porter plainte contre
les membres qui la coinposaienl ,
spécialement confie M. le procu-
reur-général, qu'il disait avoir agi
par inimitié contre lui, et à l'é-
gard duquel, ajoutent les coticlu-
sions, « cette inimitié est prouvée
notamment par les insultes por-
tées au malheur de l'accusé pen-
dant la durée des débats , et par
les accusations de lâcheté, tout-
à-fait étrangères à l'accusation. »
M' Mérilhou plaida ensuite avec
beaucoup de chaleur les moyens
de cassation; mais la plainte ne
lut point admise , et le pourvoi
en cissation fut rejeté. Celte dé-
cision parvint à Poitiers par esta-
fette, dans la nuit du 4 'lu 5 oc-
tobre. L'arrêt fut lu aux condam-
nés le 5, à sept heures du matin.
A huit heures, on commença les
apprêts de Texécution. Le grelHer
s'elant présenté à la pri?on pour
donner lecture aux condamnés
Berton et Caffé de l'arrêt de la
cour de cassation , qui rejette leur
pourvoi, Berton, après avoir en-
BER
tendu les premières phrases, in-
lorrompit le grellier en lui disanl:
« C'ost !)on, c'est bon, en voilà
bien assez. » Il se plai-init ao geô-
lier de ce qu'on n'avait pas fait
venir un barbier qu'il avait de-
mande pour se faire raser. L'exé-
culeur arriva ensuite pour arrao-
ger les vêleraens et la chevelure
du {général , de manière à facili-
ter l'exécotion : il coupa tout le
collet de l'habit, et rasa les che-
veux du cou. V Ne pouviez -vous
»pas , lui dit le général, vous con-
» tenter de raballre le collet de
>»mon babil, sans le couper ain-
>»si.^ » A onze heures, on le fit
passer dans la cuisine de la pri-
son , où l'attendaient deux mis-
sionnaires. Dès qu'il les aperçut,
le général leur dit : « Messieurs,
» dispensez -voiis de m'accompa-
> gner. Je sais aussi bien que vous
• tout ce que vous pourrez me
• dire; )« n'ai pas besoin de votre
«ministère. » L'ne petite charrette
découverte l'attendait dans la cour
de la prison; Berlon y fut placé,
les Miains liées derrière le dos ;
un missionnaire était à sa droite
et un autre à sa gauche : l'exécu-
teur était derrière lui pour le sou-
tenir, lierton l'avait chargé de
ce soin , attendu , disait -il , que
n'ayant pas les bras libres, le mou-
vement de la charrette aurait pu
le renverser. Les ecclésiastiques
placés à ses côtés lui adressèrent
quelrjues paroles ; mais , d'après
«on refus obstiné de les écouter,
ils cessèrent de lui parler, et se
tinrent jusqu'au lieu de l'exécii-
lion , la tftfe appuyée dans les
deux mains. Berton , qui par sa
taille élevée dominait les deux
missionnaires, promenait ù droite
BER
347
et à gauche des regards assurés.
Arrivé au lieu du supplice, il fran-
chit avec fermeté les degrés de
l'échafaud , cria : Five la liberté!
vive la France! et reçut le coup
fatal. Ses deux fds étaient partis
de Paris aussitôt après le rejet du
pourvoi , espérant pouvoir em-
luassrr leur père ; mais lors-
qu'ils sont arrivés à Poitiers , il
avait cessé de vivre. Ces jeune»
gens, qui étaient officiers de ca-
valerie, ont jugé convenable de
donner leur démission. Ou leur a
refusé la permission qu'ils ont sol-
licitée , de placer une pierre ail
lieu où reposent les osseiuens de
leur père. Le général Berton était
officier de la légion -d honneur
et chevalier de Saint-Louis. Une
note, insérée dans quelques jour-
naux français peu après sa con-
damnation , annonça que « le gé-
«néral Berton ayant cessé d'afj-
ftpartenir à l'ordre royal de l'E-
»pée, de Suède, son nom vient
«d'être rayé de la liste des cheva-
nliers de cet ordre. » A peine Ber-
ton était-il mort que l'dn vit pa-
raître dans le Journal des Débats
lu lettre suivante , adressée au ré-
dacteur, et datée de Poitiers le i5
octobre 1822 : « Monsieur, j'ai eu
pendant un mois de fréqiiens en-
tretiens atec le général Berton.
Il n'a jamais refusé les secours de
la religion ; il me promettait de
remplir tous les devoirs qu'elle
impose, si son arrêt de mort était
confirmé par la cour de cassation.
Le jour de l'exécution de Berton.
je me rendis de grand matin à l;i
prison avec M. Baudouin, prêtre
missionnaire. Je lui exposai \A
nécessité du sacrement de péni-
tence, el lui rappelai la proinessii
34» BER
qu'il m'avait faite si souvent de
mourir en chrétien. Il in'écouta
en silence, m'embrassa, et ac-
cepta le confesseur que je lui pré-
sentai. Borton s'est confessé deux
fois, avant son départ de la pri-
son. Lorsque le moment de mar-
cher à la u)orl fut arrivé, Berton
devint d'une faiblesse extrême :
, la pâleur de son visage, l'altéra-
tion de tous ses traits, le ren-
daient méconnaissable. J'ai ac-
Compap;né le général jusqu'à l'é-
chafaud , avec M. Baudouin. Il
ne nous a point dit de le laisser
tranquille, ni aucune parole dé-
sobligeante. Je suis, etc. Lambert,
vicaire -général de Poitiers. » —
Les fils du général Berton y ré-
pondirent par une lettre datée de
Paris, du 19 octobre, et insérée
dans le Courrier français. « Mon-
sieur, c'est avec un profond éton-
nemeut que nous avons vu , dans
le N" du Journal des Débats de ce
îour, la lettre de M. l'abbé Lam-
bert, vicaire-général de Poitiers.
Nous concevons aisément que M.
le vicaire-général cherclie à don-
ner à son zèle tout l'éclat et toute
la publicité possibles; mais il est
une douleur légitime qu'il aurait
dû respecter, et il nous semble
qu'il y a bien peu de charité chré-
tienne dans la phrase de sa lettre
qui tend, en démentant la voix
publique , à faire croire que le
général Berton a montré une fai-
blesse extrême, et à flétrir ainsi les
derniers momens de notre infor-
tuné père. Dans cette circonstan-
ce, il ne reste pas même à i\l. le
vicaire - général l'excuse de ne
point nous connaître, lui qui nous
écrivit à Poitiers, le 6 octobre ,
< qu'il faisait des vœux pour que
BER
la justice des hommes ne fît point
retomber tôt on lard les fautes du
père sur la lêle des fils. Agréer ,
etc. , A. Berton, Ch. Berton. »
— Le général Berton a publié :
1° Précis historique , militaire et
critique des batailles de Fleurus et
de IV aterloo ^ dans la campagne
de Flandre, en juin 18 15; de
leurs vianœuvres caractéristiques et
des mouvemens qui les ont précé'
dées et suivies ; avec une carte pour
l'intelligence des marches. Paris,
18 18, in-8°, cinq feuilles un quart;
2* Commentaire sur l'ouvrage^ en
dix-huit chapitres, précédé d'un
avant-propos, de i\I. le général
J. J. ïarayre , intitulé : De la
force des gouvernemens , ou du
rapport que la force des gouver-
nemens doit avoir avec leur na-
ture et leur conslilulion. Paris,
1819, in-8°, douze feuilles et ât-
m\e ; "ù" A M M . les membres de la
chambre des pairs, et à MM. les
députés des départemens au corps
législatif. Paris, i82i,in-8°. une
demi -feuille. C'est une pétition
pour réclamer contre la mesure
par laquelle le général avait été
rayé des contrôles de l'armée; 4°
Considérations sur la police ; Ob-
servations touchant les bruits qu'elle
répand; précédées d'une Lettre à
M. le baron Mounier^ directeur-
général de la police du royaume.
Paris, 1820, 10-8", quatre feuilles.
La Lettre à M. le baron Mounier
a été réimprimée plusieurs fois,
savoir : deuxième édition, sous
ce titre : Lettre sur la mort de
Napoléon ; troisième édition , cor-
rigée et augmentée. Paris, 1821 ;
sixième édition , augmentée d'un
Avis du budget du baron Mounier
sous l'empire, et d'un extrait du
BUL
Morning-Cfironide , du ai juil-
let 1821, in -8", Irois quarts de
feuille. Le gi;néral Berton adonné
des articles à la Minerve française,
aux Annales des faits et sciences
militaires, publiées chez M. Panc-
koucke en 1819, et à l'ouvrage
intitulé : V ictoires et conquêtes des
Français, depuis 1789, publié par
le même libraire. Son nom se
trouve cilé plusieurs fois dans ce
dernier ouvrage.
BICQUELLEY, général , voy.
le Supplément du tome XVIII.
BL.\NC HETON, médecin, vo^.
le Supplément du tome V.
BOIVIN ( Anne-Victoire Cil-
lais, veuve de Louis), voy. le
Supplément du tome XV.
BO.MBELLES (marquis de),
voy. le Supplément du tome VI.
BRICHETEAU, médecin, voy.
le Supplément du tome XVL
BLLLIAllD ( N. ) , botaniste
distingué. On a de lui les ouvra-
ges suivans : 1* Introduction à la
Flore des environs de Paris, i fasc.
in-4°, Paris, 177G; i' Flora par i-
siensisj 5 vol. in-S", Paris, 1776-
1780. Les planches de cet ouvrage
sont fort bien exécutées. Elles
sont fréquemment citées pnr les
botanistes. S" Herbier de la Fran-
ce, Goo in-fol. , 1780 et sequent.
Ce magnifique ouvrage est le plus
beau titre (k: gloire de Uulliard.
11 représenle dans d«-s planches
pcrfailement exécutées, les plan-
Icsdc France les plus intéressantes
à Connaître, soit à cause de leurs
U5ages dans les arts, soit k cause
de leurs propriétés médicales ou
vénéneuses. Au bas de chaque
planche est une notice abrégée
contenant ce qu'il y a de plus in-
téressaiil ù connaître sur chaque
CAR 549
végétal. 4* Plantes vénéneuses et"
suspectes de lu France. On a deux
éditions de cet ouvrage où Bul-
liard passe en revue toutes les
plantes de France qui jouissent
d'une action délétère. Il indique
pour chacune d'elles les moyens
employés pour prévenir ou com-
battre les accidens qu'elles déve-
loppent. La première édition de
1784 est in-fol. ; la seconde de
1798 est in-S", un seul volume.
5" Histoire des champignons de la
France, 1 vol. in-fol. Paris, 1798.
fiulliard est le premior botaniste
français qui ait cherché i\ jeter
quelque jour sur cette partie de la
botaniq;ie Ses planches sont ci-
tées comme les meilleures en ce ,
genre. G° Dictionnaire élémentaire
de botanique , i vol. in-fol., Pa-
ris, 1783. Cet ouvrage a eu trois
éditions. La dernière (i vol. in -8',
Paris, 1799) , a été donnée par le
professeur Richard, qui en a fait
un ouvrage entièrement neuf.
CARDENEAU, maréchal-de-
camp, voy. le Supp. du tome IX.
CARION-NISAS, ex-tribun,
voy. le Supplément du tome Y.
CARON ( AvGLSTiN- Joseph ) ,
lieutenant-colonel, était fort jeune
encore lorsqu'en 178911 entra au
service en qualité de simple sol-
dat. De l'infanterie où il servit
jusqu'en 1791, il passa dans le 4*
régiment de dragons, et fit toutes
les campagnes de la révolution
jusqu'en 18 14, époque du rétablis-
sement du gouvernement royal.
Sa bonne conduite , sa bravoure ,
les talens qu'il développa lui va-
lurent successiveuienl tt)iis ses
grades jusqu'i'icelui de liiMilenant-
colonel et la croix de la légion-
d'honneur. L'époque la plus re-
55o
CAR
marqiiable de sa vie militaire e.«l
«n 1814. Le 'i.i\ février de cotte
année, étant alors major du 17*
régiment, il fut chargé de suivre
un corps ennemi en retraite , et
le poursuivit de Troyes à Bar-sur-
Ornain, à la tête de 272 hommes.
Un régiment de dragons autri-
chiens et un corps d'infanterie,
placés en embuscade dans le vil-
lage de Saint-Phaar, l'attendaient
dans ce village et firent feu sur
lui lorsqu'il s'en approcha. Caron
feint alors un mouvement de re-
traite, attire ainsi lacavalerie dans
une position favorable, et faisant
brusquement volte-face, la char-
ge vigoureusement et lui enlève
plus de 200 chevaux. Retournant
aussitôt sur l'infanterie, il force
2,000 hommes à mettre bas les
armes. C'est à celte occasion qu'il
fut nommé lieutenant- colonel.
Perdu de vue jusqu'en 1820, il fut
impliqué dans la conspiration de
celle année, jugée, en 1821, par la
chauîbre des pairs, comme coupa-
ble de proposition de complot non
agréée. Défendu par M* Barthe,
avocat, il fut acquitté. Il se retira
à Colmar (Haut-Rhin), où il a-
vait son domicile habituel depuis
son licenciement. Le 2juilleti822,
on répand le bruit ù Colmar qu'u-
ne insurrection vient d'éclater
parmi les chasseurs de l'Allier, en
garnison dans cette ville, et l'on
ajoute qu'un escadron est parti se--
crètement avec armes et bagages.
Le lendemain 5, vers midi, on
vit revenir cet escadron ramenant
prisonniers, liés et garrottés sur un
char-à-banc, le lieiitenant-c»lonel
Caron et son écuyer Roger. Ils
furent déposés dans les prisons de
la ville. Les détails de cette affaire
CAR
no peu vent être puisés que d.ins les
pièces du procès, et nousallons rap-
porter ce qu'il y a de plus remar-
quable, d'après l'auteur de V An-
nuaire nécrologique, qui a extrait
littéralement ce qui suit des dé-
clarations des principaux agens à
leurs supérieurs, entre autres le
maréchal-des-logis-chef Thiers, et
le sergent Magnien. « Il (Gérard ,
maréchaldes-logis du 6' régiment
des chasseurs à cheval) s'appro-
cha du sergent (Maguien, sergent
du4<>''de ligne) et de moi , et nous
dit : Mes amis, il s'agit d'une
conspiration; votre bonheur est
assuré, le grade d'ofïicier v-jus
est assuré et la croix. Une pareille
ouverture ayant jeté un grand
trouble dans nos individus, je priai
Gérard de vouloir bien s'expli-
quer plus clairement Gérard
nous embrassa tous deux , et nous
dit : Mes amis, vos colonels é-
taient à Brissac : je les ai vus et
leur ai parlé ; ils ni'otit chargé de
venir vous voir pour vous inviter
à feindre d'entrer dans cette cons-
piration , pour en suivre le fd et
nous mettre à même d'en connaî-
tre les moteurs, pour, dans un
temps opportun, les faire arrêter.
Je suis ici, à HorboMrg, avec le
colonel Caron , qui m'attend pour
dîner, et lequel est à la tête de la-
dite conspiration. Vous pouvez
compter que l'argent ne manque-
ra point; et si nous n'obtenons
point les récompenses promises
par ces scélérats , nous aurons au
moins fait notre devoir, en dé-
jouant leurs infâmes projets —
Ayant entendu cette harangue
faite par Gérard, je lui touchai
cordialement la main, en lui de-
mandant pardon d'avoir pu I»
CAR
soupçonner un instant; mai* que
néanmoins je le prévenais que je
ne demandais pas mieux qire de
«econder ses intentions, si elles
tout pures , mais qu'il me permet-
trait de douter encore jusqu'à
l'instant ou je pourrais parler à
mon colonel Au moment de
mes premières ouvertures, je m'a-
perçus que M. le colonel était ins-
truit de la démarche de Gérard ,
ce (|ui dissipa tous mes doutas. Je
reçus du colonel les instructions
nécessaires pour me conduire dans
cette aflaiie, et l'ordre de rendre
compte tous les jours de mes dé-
marches et de ce que je pourrais
apprendre. (Extrait d'une lettre si-
gnée TA/«r5, du 26 juin 1822. Pro-
cès de Coron, jayg. 10 — 19) \ai
porte de la prison n" i, qui vient
d'être murée , lui a donné ( à Ca-
ron)de forts soupçons contre moi;
il n'en fut dépvrsuadé (jue par les
sermcns qui nous liaient et que
nous jurfnnes de nouveau de con-
server. ( Extrait d'une lettre si-
gnée Magnien , du 28 juin. Procès
de Car on, p.ig. aS).... Il fut con-
venu, comme dan« mon dernier
rapport, que Gérard sortirait de
I. Brissac, avec un escadron, à cinq
heures et demie du soir ; que moi
je partirais de Colmarà cinq heu-
res, et me dirigerais sur la route
de Kounac jusqu'à la montée, où
je trouverais le colonel Caron qui
m'y attendrait. Il fut convenu en
outre, que le sergent Magriien se-
rait chargé de prendre l'habit du
colonel et de le porter jusqu'à cette
montagne pour le lui donner, afin
de s'en revêtir et paraître devant
la troupe en uniforme. Comme
je citcrchais à le tranquilliser du
côté de l'argent, je lui annoopai»
CAR
5St
de ne point arrêter notre projet
pour si peu de chose , que Gérard
et moi nous avions quelques pe-
tits fonds vers nous, et qui, joint»
à ce qu'il pourrait se procurer,
nous sufTiraient pour attendre. Or,
d'après ce qu'il nous jura de nou-
veau, un millier de louis devaient
être mis à sa disposition. iVou.«/?flr-
vinmesàle convaincre ; et il fut déci-
dé que le soir du même jour il ver-
rait Gérard à six heures du soir,
etc.... Toutes les instructions don-
nées, il (Caron) mena le sergent
Wagnien chez lui, auquel il remit
son sabre, son habit, son casque,
qui fut porté dans ma chambre,
à la caserne, jusqu'au lendemain
matin , où le sergent Magnicn doit
venir les chercher pour les porter
au lieu indiqué; excepté le sabre,
qu'il est convenu que je porterai.
Ce dernier article exécuté , je me
rendis chez le général pour lui
rendre compte de mon entrevue.
( Ex trait d'une lettre signée T/jt>r.î,
du 1" juillet 1822. Procès de Ca-
ron , pag. .5i-35) La réponse
déterminative que firent les sieurs
Thiers et Gérard de la nécessité
de leur projet, engagea le sieur
Caron à ne rien reculer. Il est
donc et fut décidé que demain, a
courant, à cinq heures et demie
du soir, l'escadron du G* prendra
sa marche par les vilhgesde Wals-
heim et de Mayenhciu) (que j'ins-
crivis sur mon schakos), pour de
là se rendre à Absheini , lieu du
rendez-vous. C'est à six heures
que doit se faire la sortie du i"
chas'setirs, que je devancerai pour
remettre au lieutenant-colonel Ca-
ron son uniforme et sou sabre,
dont je suis porteur depuis hier au
soir. Arrivé au lieu d« son traves-
."53 CAR
tissement , il doit me remeUrc son
habit bourgeois, et moi le jetor,
si je le juge à propos, dans les vi-^
gnes. J'indiquerai à ma séparation
d'avec le sieur Caron , la roule
qu'il aura prise, afin d'en préve-
4iir le sieur Thiers, qui le suivra
de près. Je serai porteur de ses
habits bourgeois et vous les re-
mettrai, pour en disposer selon
qu'il vous conviendra. Ne pou-
vant le suivre dans celte occasion,
je resterai à Colmar, hors h porte
de RoufFac, derrière l'auberge à
droite, de huit à dix heures et de
midi à quatre, afin d'instruire les
affidés de Caron , qui ne se pré-
senteront à moi qu'au mol et si-
gnede ralliement qu'ils me feront,
des démarches qu'il aura à tenir
pour sa réussite. Il me parla d'un
avocat arrivé depuis peu de jours
à Paris, qui doit être possesseur
de fonds à délivrer, etc. ( Extrait
dune lettre signée Magnien, ser-
gent, adressée à son capitaine,
du )" juillet. Procès de Caron ,
p. 31 )... Dans le dernier rapport
que je vous adressai, il était con-
venu que l'afTaire aurait lieu le
mardi 2 juillet; en conséquence,
le lundi 1", à dix heures et de-
mie du soir, à la suite d'un ren-
dez-vous avec le sieur Caron, je
le suivis, me laissant précéder de
quelque pas, jusque chez lui, où
sa femme me remit le paquetcon-
tonant son uniforme et son cas-
que. Ce fut M. Caron qui descen-
dit le gabre et le porta jusqu'au
détour de la rue, où il me le re-
mit : depuis ce moment, je n'eus
pas d'aulr-e rendez-vous avec lui.
Le mardi 2 , à trois heures et de-
mie, j'allai chercher chez le sieur
Thiers l'uniforme que je lui avais
CAR
déposé, lui-même se chargeant
de lui retnetlre son sabre... L'es-
cadrdn du 1" chasseurs arriva,
précédé (In fourrier C .rré. M. Ca-
ron in envoya voir qui c'était....
A l'arrivée de l'escadron, il pa-
rut; le sieur Thiers lui remit son
sahre. Il harangua alors les chas-
seurs, et termina au cri de vive
Vemptvvwv, 1rs fit Jurer par ce rnêm»
cri , et les mil en-;iiile en marche.
Je rentrai de suite en ville, où je
trouvai M. le préfet (i\l. de Pny-
maigre), qui fil déposer les effets
dont j'étais ptirteur dans le corps-
de-garde de l'odicier. J'allai, le
mercredi 5 , à sept heures du ma-
tin, chez M""* Caron , etc. (Extrait
d'une lettre signée Magnien , ù
son capitaine, datée du 5 juillet.
Procès de Caron, pag. 35-5^) —
Mon colonel, j'ai l'honneur de
vous rendre compte qu'en exécu-
tion de vos ordres, m'étant tra-
vesti hier et mis dans les rang en
simple chasseur, avec M.H. les
oflTiciers de l'escadron qui devait
se joindre en ap'parence à l'iu-
surgé Caron, nous partîmes de
Neuf-Bri.-acàcinqheures un quart
du soir, SOU; le commandement
des sous-olTu iers, commandés à
cet effet. Après une demi-heure
de marche, nous trouvâmes, près
de Weckel.sheim , le domestique
du nommé Roger, écuyer de Col-
mar, lequel ne parut pas encore:
ce domestique nous conduisit à
un quart de lieue; il nous quitta
avec le maréchal-des-logis Gé-
rard, pour aller retrouver son
maîlre qui était dans la forêt :
nous profililmes de cet instant
pour instruire les hommes du mo-
tif de notre départ deNeuf-Brisac.
Nous les trouvâmes pleins de zèle
CAR
et anim»'?s du nirilleiir esprit. L«;
iiiarticli.'il-(]»;s-Jogis Gérard élaiit
i\o retour, nous cniitînnâmes no-
tre, marche sur Dessenlieiin, le
dotnesti(|iie ;\ la tête de la colon-
ne, et Roger à la qiiene. Roger,
])arfaitement rassuré par notre at-
titude, nous conduisit par Rus-
tenhard à Mayeulieim, où nousat-
tendîines environ vingt minutes,
l'escadron de l'Allier, à la tête
duquel se trouvait le sieur Caron.
Il déboucha bientôt de ce village
en tenue de lieutenant-colonel de
dragons. Après avoir fait Ibrmer
son escadron, il s'avança vers nous
et nous harangua en ces termes :
« Braves soldats du sixième régi-
»meut, vous avez juré d'obéir à
«vos sous-ofliciers : les militaires
«français n'ont jamais manqué à
» leur sermcînt. Je suis envoyé par
«l'Empereur pour vous coniman-
»der : j'espère que nous le servi-
»rons avec zèle. Vive l'Empe-
» rtMir ! » Ce cri fut répéta ainsi
qu'il en était contenu : on fit met-
tre pied à terre. Le maréchal-des-
logis'^)arantière adressa aux chas-
seurs du régiment les paroles sui-
vantes : « Le colonel Caron ne
«veut pas que les chasseurs tra-
» vaillent sans avoir dn profit; il
«promet à chaque homme 5 fr.
« par jour, à dater de ce moment ;
Dînais il ordonne que tout ce qui
» sera pris chez l'habitant soit exac-
ntcmentpayé. » Les cris de vive
r Empereur recommencèrent, et on
y ajouta ceux de vive le colonel
(laron... On se remit en roule, se
dirigeant sur Ensisheim. D'après
les ordres repus , nous refusHmes
d'y entrer. A l'entrée de la ville,
('aron voyant qu'on s'obstinait à
ne pas vouloir y entrer, fit p.eri-
CAR 5jj
dre à travers les champs pour
tourner la ville à gauche. Pendant
ce temps, le maréchal-des-logis
Géi-trd avec son ordonnance ( lé
capitaine de Nicol ) entra darij.
cette ville. L'infanterie y était sous
les armes : ce capitaine se fit re-
connaître par le capitaine Lafonl,
sans que la vigilance de celui-ci
en diminuât. De retour, le maré-
chal-des-Jogis Gérard vint dire au
colonel Caron que l'infanterie é-
tait pour nous, et que nous au-
rions les prisonniers quand nous
voudrions. Néanmoins nous ne
voulûmes pas y entrer, nous dé-
fiant en apparence des bonnes in<
tentions de cette infanterie. Caron,
qui jusqu'ici avait été dans une
sécurité parfaite , conçut de vives
inquiétudes. Il se plaignit d'être
un peu serré par les sojjs-ofîiciers,
qui avaient reçu nos ordres pour
ne pas perdre de vue un seul ins-
tant ni Claron, ni Roger, afin d'ob-
server toutes leurs démarches. Ces
sous-officiers s'éloignèrent un peu;
Caron profita de cet instant pour
aller parler bas à Roger. On n'en-
tendit pas ce qu'il lui dit ; mais un
instant après, il se plaignit de ce
que l'argent n'arrivait pas. Il dit
qu'arrivé au premier village ( Bat-
tenheim) il se mettrait en bour-
geois, et qti'accompài!>né de Ro-
ger, il irait chercher des fonds.
IJn peloton lui fut proposé : il !«
refusa ; après des instances réité-
rées, il consentit à se faire ac-
compagner par deux sous -offi-
ciers. Nous jugefimes cette escorte
trop faible; nous résolûmes de
l'arrêter, convaincus que nous ne
trouverions aucun de ses com-
plices A Bail»nh»im. Arrivés j\ c<s
village dis deux lîcnrcs du malin,
35 i CAR
nous le l.iijiàine» entrer chez le
maire. Au moment oi> il s'occu-
pait de faire [)ré[iar<;r des logc-
mens qu'il comptait dissûmiaer ,
on le saisit, en lui déclarant qu'il
était prisonnier. Après une légère
résistance, il fut garrotté ainsi que
ses deux complices. Nous le fouii-
lâines, nous lui enlevâmes ses pa-
piers, qui ne renfermaient rien
d'important à notre connaissance.
Il en fut de même de Roger
J'expédiai sur Habsbeim les ma-
réchaux-des-logis-chefs Thiers et
Darantière, et le maréchal-des-
logis Gérard , avec onlre de dire
au nom de Garon, qu'il attendait
son monde à Battenheim , la fati-
gue des chevaux l'ayant obligé de
s'arrêter... Le maréchal-des-logis
Gérard nous joignit à Colmar.
Toutes les recherches furent inu-
tiles, sinon à prouver les bonnes
ititentions de M. le maire du lieu
et les bonnes dispositions qu'il
allait prendre pour faire arrêter
quiconque ferait mine de vouloir
se joindre à Caron. Ces disposi-
tions, au reste, sont aussi inutiles
là qu'ailleurs, où tout le monde
est resté parfaitement tranquille,
paraissant beaucoup plus surpris
qu'enchanté de cette révolte ap-
parente. A iVlayenheina seulement
le particulier qui a livré le four-
rage et le vin est entré très-chau-
dement dans les projets de Ca-
ron. iSouslui avons entendu tenir
des propos que nous avons cru de-
voir rapporter à M. le procureur-
jçénéral , qui a de suite lancé un
mandat d'arrêt, qui doit être mis
en exécution dans ce moment.
( Extrait d'un rapport à M. Jolly,
lieutenant-colonel , commandant
le régiment des chasseurs à che-
CAR
rai de la Cliarente , «igné H. de
Nicol, daté de Neuf-Brif>ac, 5 juil-
let I Saa. Procès de Caron , p. 7)8-
4'»-) Ce lieutenant - colonel,
(Caron ) a reçu nos chasseurs aux
cris de vive , etc. L'escadron s'est
formé à gauche en bataille. Im-
rnédiatenient après, le sieur Ca-
ron en'a pris le commandement,
et a harangué la troupe, à peu
près en ces termes : « Chasseurs ,
«je suis envoyé pour vous eom-
>) mander par ordre de Tempe -
«reiir Je vous jure de vous
• suivre jusqu'à la mort, et de pé-
»rir à votre tête : jurez aussi de
»me suivre partout où je vous
«conduirai pour le bien du ser-
«vice de S. M. l'empereur. Vive
» l'empereur! » Ce cri a été répé-
té dans l'escadron par tous ceux
qui avaient bien saisi les instruc-
tions que vous leur aviez données
à leur «lépart de Colmar, et par
tous les autres, au signalque nous
leur en avons fait. Ensuite il a
commandé par deux au trot, et
nous a conduils jusqu'à Rouffac,
que nous avons traversé aif pas,
dans le plus grand silence, sans
queles habitansaient fait le moin-
dre signe d'approbation ni d'im-
probalion Après l'arrestation
du sieur Caron, le maréchal-des-
logis-chef Thiers se porta avec
d'autres sous-otTiciers vers FLabs-
heim, qui avait été indiqué com-
me le rendez-vous des partisans
de Caron; mais ils n'y trouvèrent
personne, ce qui prouvait qu'ils
avaient eu l'éveil, ou qu'ils avaient
jugé l'entreprise trop dangereuse.
C'était à Habsheim que le sieur
Caron disait devoir trouver les
fonds nécessaires pour son expé-
dition. Le maréchal-des-io"ris-chef
CAR
T/iiers avait pour instruction , en
se rendant à Habslieim , de persua-
der aux personnes qu'il y attrait
trouvées de se rendre àBallenlieini ,
où Car on les attendait, sa troiipo
étant trop fatiguée pour aller plus
loin ( Extrait d'un rapport à Jl.
Jolly, lieuteunnt-colouel des chas-
seurs à cheval de la Ghai'ente , si-
gné Borel de ta Rivière, lieute-
nant; Aapêde, sous-!ieutenant ;
daté de Colinar, le 5 juillet. Pro-
cès de Caron, p. 43-46 ). Telles
sont , d'après les récits de ceux-
là même qui l'ont conçu et eiïcc-
lué, les circonstances d'tni évé-
nement qui occasiona en Europe
une étrange surprise, et que les
rumeurs publiques ont peint sous
des couleurs encore plus l'âclieu-
scs. J.e i8 septembre 1822, le
lieutenant-colonel Caron et son
co-accu^é Roger comparurent de-
vant le premier conseil de guerre
de la 5* division militaire, séant
à Strasbourg, présidé par M. d'Es-
cordal, colonel du 25" régiment
de ligne. Une décision ministé-
rielle, soutenue par un arrêt do
la cour de cassation , avait enlevé
les accusés à la juridiction ordi-
naire , qui persistait à les retenir.
On s'appuyait, pour cet effet, sur
les lois des 4 nivôse an 4 «t i.l
brumaire an 5, dont l'effet devait
cesser avec la guerre, et qui,
constituant d'ailleurs une justice
exceptionnelle, semblaient de voir
être réputées abolies par la charte
conslilulionnelle. Cette o))inion
n'avait pas été contredite depuis
la restauration, et M. Pasquier,
ancien garde-des-sceaux, l'a dé-
claré expressément à la chambre
des pairs , lorsqu'il proposa à cette
chambre (mars i8a3) de rendre
CAR
555
aux Iribunausortlinaires, en temps
de paix, la connaissance du délit
d'embauchage, imputé aux ci-
toyeus non militaires. Le système
de défense du colonel Caron l'ut,
comme nous l'avons dit, de sou-
tenir que son unique but avait été
de procurer l'évasion des prison-
niers alors traduits devant la cour
d'assises de Colmar. Les militai-
res, principaux témoins à charge
dans cette affaire, et à qui leur
conduite avait valu dès- lors le
grade d'officier, ne firent pas dif-
ficulté de convenir aux débats des
promesses séduisantes qu'ils a-
vaient faites à Caron, par ordre
de leurs chefs , et des instructions
qu'ils avaient transmises à leurs
soldats de pousser des cris sédi-
tieux ( pag. 74, 81, 8(3, 8ç) et
passini). Le journal duHaut-lÙiin,
du 23 juillet, rédigé à la préfec-
ture, comme l'atteste M. Sido »
conseiller de préfecture, dans une
lettre lue à l'audience ( Procès de
Caron, p. 108), s'est exprimé en
ces termes, au sujet de l'affaire
de Caron : « Ici , c'est un lieute-
nant-colonel assez naïf ipour SK
laisser séduire par des sous-olli-
ciers. » La déposition de M. Rei-
thinger, maire de Battenhciin,
renferme quelques détails qui mé-
ritent d'être rapportés, t Le té-
moin dépose, que le 2 juillet, à
une heure du matin, six chas-
seurs arrivèrent devant sa maison,
frappant à la porte pour le réveil-
ler. Il leur ouvrit , après avoir fait
de la lumière. Ils lui annoncè-
rent qu'ils venaient faire des lo-
gemens pour deux cents chas-
seurs, vingt officiers et un colo-i
nel.... Sur la réponse que fit l'un
des six chuâseucs , qu'ils n'avaient
35G
CAR
pus <le feuille de roule, le témoin
leur déclara que t^aus feuille de
roule il ne donnerait pa^ de billets
de logeuîenl; et alors ce chas-
seur répliqua : — Nous ne som-
mes plus les soldats du roi , nous
sommes les soldais de Napoléon,
du roi de Rome. Que dûcs-vous
décela, M. le maire...? Si vous
ne faites pas de billets , nous nous
logerons mililairement. » Le té-
moin fit chercher alors le greffîer
de la mairie, pour faire des billets.
Arrivèrent en même temps les
deux cents chasseurs avec unco-
lonel de dragons, qui entra dans la
chambre ainsi que plusieurs sous-
ofluiers et chass^eurs. On se met
on devoir de faire les billets de lo-
gement... Mais pendant que le co-
lonel est debout, devant la table
où le greffier écrivait les billets,
un chasseur le prend par derrière
et le renverse par terre; tous les
chasseurs lui tombent dessus, en
criant : « Jean f. ....,nous avons
ocru trouver de ton monde ici;
«qu'on sabre ce conspirateur, ce
» scélérat.» Le témoin entendit en-
core crier : « Chasseurs , à moi o ,
ïnais il ne sait si c'était le colonel
ou un autre individu qui était ar-
» ivé avec les chasseurs et qui se
iJ'ouvait aussi dans la chambre;
et on demanda des cordes pour
les attacher. Les domestiques que
le témoin avait envoyés à l'écurie
poui" chercher des cordes, furent
ramenés aussitôt dans la chambre,
par des chasseurs qui disaient :
« Voici des conspirateurs. » On les
relâcha pour aller chercher des
cordes, avec lesquelles on gar-
rotta le colonel et l'autre. Des offi-
ciers déguisés, on des chasseurs,
demandèrent ensuite au téuioia
CAR
unchar-A-bnnc cl u!i cheval, pour
jillcr A llabsheim. H leur constill i
de preudie leurs chevaux, qu'ih
y seraient bien plus vi.e; ce qu'il»
(iront. De retour deHabshcim,
ils vinrent raconter dans la cham-
bre , que s'ils étaient partis un
quart- d'heure plus tôt, ils au-
raient trouvé à Haitsheim dix A
douze conspirateurs, qui ont élé
avertis h temps pour prendre la
fuite... » {Procès, p. io4- ) C.t-
ron et Roger furent défendu» avec
beaucoup de talent et de dévoue-
ment; le premier, par M* Liecli-
tenberger, avocat; le second par
M. Marchand, étudiant en droit.
Après une demi-heure de délibé-
ration, le conseil de guerre, A
l'unanimité, déclara le lieulenant-
colonel Caron coupable d'embau-
chagf;, et le condamna à la peine
de mort. Roger, déchargé de l'ac-
cusation d'en^.bauchage, fut ren-
voyé devant la justice civile. (Dis-
trait par arrêt de la cour de cassa-
tion, de la juridiction doses juges
naturels , pour cause de suspicion
légitime , l'accusé Roger a été tra-
duitdepuis devant la cour d'assises
de la Moselle , qui l'a déclaré cou-
pable de conspiration et a pronon-
cé son arrêt de mort. L'autorité
royale a commué cette peine en
celle de vingt années de travaux
forcés. ) Le conseil de révision
confirma la sentence du conseil
de guerre. Depuis ce moment jus-
qu'à celui de l'exécution, il ne fut
plus permis à Garon de commu-
niquer librement avec personne ,
même avec son défenseur. Deux
exceptions furent accordées pour
deux ecclésiastiques, dont la con-
damné avait reçu les premières
visites, durant l'intervalle de quel-
CAR
qiies jours qui sép^u'a le premier
juj^eincnt du second. Déjà même
el durant ce court espace de te:nps,
<^aron n'avait vu que son défen-
f-vuv eu présence du concierge et
de l'oincieL' de posie, et pendant
une heure chaque jour. Deux au-
tres permissions furent encore ac-
C(u(Iéfts pour un moment, l'une à
un ami dr; Garon qui venait l'en-
tretenir de son fils, l'autre au dé-
fenseur de Roger. Caron reçut
avec calme et fermeté la nouvelle
de sa condamnation. Lorsque le
capitaine rapporteur vint lui en
faire leclure, il était à table : après
l'avoir entendue, il acheva son re-
pa.-*. Dans la matinée du i" octo-
bre ( jour fixé pour l'exécution ),
le défenseur de Caron fit faire
traiij tentatives successives, elpar
diitérentes personnes, auprès de
l'aulorilé supérieure du déparle-
ini;nt. Il demandait à entretenir
Son client au nom de sa femme
et de son enfant. L'autorité per-
^i»ta dans ses refus. Dès le a4 sep-
tembre, M"" Caron , alors déle-
tuie dans la prison de Colmar,
comme complice de 8(m mari ( la
chambre d'accusation de la cour
royale a déclaré depuis n'y avoir
lieu à mettre en accusaliou M"'
Caron ), avait éprouvé le même
refus de M. le procureur du roi.
Vdiei la loUre qu'elle adressa à ce
magistrat, -pour lui demander la
grâce de venir à Strasbourg rece-
voir les derniers adicuxde son ma-
ri.— Des prisons de Colmar, le a4
si'pleriihrc iSau. «A M. le procareur
du roi près le tribunal de premiè-
re instaure de l'arroncjissement de
Colmar. — .Monsieur le procureur
du roi, nvanl-hier, mon mnlheu-
reux ép( u.v a été condamné \
CAR 557
mort par un conseil de guerre ;
il ne m'appartient pas de qualifier
celte condanmation. Depuis trois
moiî, je suis moi-même sous les
verroux, el j'ai été violemmci.t
privée de la triste consolation de
rendre plus supportable sa capti-
vité ii Strasbourg, et d'être pré-
sente à son jugement. Que lu n)a-
lédiclion divine s'appesantisse sur
la tête de celui qui en est la cau-
se ! Demain, M. le procureur du
roi, demain peut-être.... Je n'ose
achever! S'il existe encore parmi
les hommes quelque senliment
d'humanité ou de piété, on ne
peut me refuser d'aller recevoir
les derniers embrasseincns et les
ordres toujours sacrés j)0ur moi ,
de celui qui fil mon bonheur pen-
dant tant d'années, et qui servit
sa pairie avec tant d'honneur et
de courage. J'ose vous supplier,
M. le procureur du roi, de vou-
loir bien perniellre que j'aille au-
près de mon malheureux époux ;
je vous en conjure à genoux. Qu'on
me fasse conduire à mes frais , en
poste, par deux, par quatre gen-
darfues, les fers aux pieds, aux
mains, au cou, enchaînée comme
la plus dangereuse créature, s'il
le faut, je supporterai tout avec
calme, avec plaisir même, si je
puis encore voir et embrasser la
maih(;ureuse viclime de la perfi-
die la plus atroce. Daignez, mon-
sieurle procureurdu roi, m'houo-
rer d'une très-prompte réponse.
Voire respectueuse et très-hum-
ble servante. Femme Caron. » M.
le procureur du roi se crut dan»
la nécessité de faire à Rl""Carou
la réponse siiivanle : — Colmar,
le •if\scptetuhre 182a. «Madame , j«
sens vivement tout ce qijc votm
558
CAR
l^orfiion a do déplorable, et j'é-
prouve un véritable regret de ne
pouvoir l'alléger, en vous accor-
dant la douloureuse consolation
que vous réclamez, par la lettre
que vous m'avez fait l'honneur de
in'écrire, sous la date de ce jour.
L'objet de votre rlemaude n'entre
ni dans mes attributions, ni dans
celles du tribunal. Vous êtes, ma-
dame , sous le j)oids d'un mandai
de dépôt, qui ne peut être annulé
qu'en vertu d'une décision de la
chambre du conseil du tribunal,
que l'état de la procédure à l'é-
gard de quelques-uns de vos co-
prévenus, ne permet pas de faire
intervenir encore. La nature de la
prévention qui pèse sur vous,
madame, ne me permet pas non
f)lus de provoquer votre mise en
iberlé provisoire, moyennant cau-
tion , ni même une simple trans-
lation d'une prison dans une au-
tre. La loi m'en fait une défense
expresse, que je trouve surtout
pénible aujourd'hui. Recevez l'as-
surance de mes regrets et de la
congidéralion distinguée avec la-
quelle j'ai l'honneur d'être , Ma-
dame, votre Irès-humble et très-
obéissant serviteur. — le procureur
du roi; sig?ié VovcriET, substitut. »
Peu d'inslans avant l'heure fixée
pour son supplice, Caron écrivit
deux billets, l'im à son épouse,
l'autre à son défenseur : Voici ces
deux pièces. — Billet à madame
Caron. «■ C'est aujourd'hui, ma
bien-airaée, que ton ami te quitte
pour ne plus te revoir que dans l'é-
lernité. Oh, ma bien-aimée 1 qu-e
celte séparation est cruelle pour
mon cœur! aie bien soin de mon
pauvre Alfred, ménage-toi pour
lui, ne t'abandonne pas au déses-
CAK
poir; il a encore besoin de les Cen-
dres soins. Pour moi, ce soir, je
ne pourrai plus lui être d'aucune
utilité ; j'emporte avec moi au
tombeau tes deux derniers billets ;
ils seront sur mon cœur. Adieu,
ma chère amie, je t'embrasse de
toute mon âme, ainsi que mon
trop malheureux Alfred. Cirok. >»
Billet à M' Liecktenbcrger, avocat.
«Mon cher défenseur et dernier
ami, j'ai reçu vos adieux, receves
ici les miens et mes derniers re-
merciemens : consolez-vous, j«
sais mourir. Si jamais vous voyea
ma malheureuse femme, dites-lui
bien que son souvenir et celui
d'Alfred ne m'ont pas quitté ur»
instant. Je vous prie de retirer
mes effets et de les faire parvenir
à ma femme. Tâchez aussi ^|ue
l'on me paie mon trimestre; il
servira à amortir quelques dettes
que j'ai. On vous défend de me
voir encore, mais on ne me défend
pas de vous aimer : je vous em-
brasse une dernière fois. Cakos.»
Dans cette matinée du i" octo-
bre, Caron reçut une visite de plu-
seurs heures, d'un prêtre nommé
M. Schiltig; il remercia cet ecclé-
siastique des soins qu'il venait lui
offrir. A deux heures après-midi
on vint le chercher, à la prison mi-
litaire où il était gardé, pour le
conduire sur le glacis, devant la
caserne de Finckmalt. Il monta
seul dans une voiture de place,
qu'escortaient des gendarmes à
cheval et un piquet d'infanterie.
Sa mise était soignée, son main-
tien ferme et assuré. Arrivé au
lieu de l'exécution, Caron descer»-
dit de voiture sans le secours de
personne. On lui offrit encore Ins
soins de l'aumônier : il remercia
CAR
(le nouveau. Carou, parcourant
des ^eiix le lerrain , uu-stire lui-
même la (lislauce qui doit le sé-
parer des ^oK^ats dont les balles
vont le percer. On veut lui faire
une seconde lecture de la sen-
tence, il la refuse, en disant : o Je la
connais; c'est inutile. » Un officier
se présente pour lui bander les
yeux et \e faire melti|p à genoux ;
il s'en défend. Debout et dans la
plu» ferme attitude, (^aron d(mne
le signal du roulement ; il com-
mande le feu , et le jugement du
conseil de guerre a reçu son exé-
cution. Cependant on se débattait
encore devant les tribunaux pour
sauver les jours de Caron, que
déjà il avait cessé de vivre. Le 4
octobre Al' I^ambert se présenta à
l'audience de la cour de cassation,
où il parla en ces termes : «Nous
avons été chargés de soumettre à
la cour le pourvoi du lieutenant-
colonel Caron, contre le juge-
ment du conseil de guerre qui le
condamne à la peine de mort. Le
37 septembre nous adressâmes à
Son iixcellenco Mgr. le garde-
des-sceaux une lequcte, dans la-
«pielle nous lui dénoncions le ju-
gement du conseil de guerre, o^in-
me vicié d'incompétence et d'excès
de pouvoir; et nous suppli.lmes le
ministre de le dénoncer & la cour
de cassation, conformément ii l'ai-
ticle44"du code d'instruction cri-
minelle.. l*ar surcroit de précau-
tions, nous nous |)résentâmcs le
lendemain 28, au greffe , pour re-
présenter que rarlicle /j2'| permet-
tait aux condanH)és de tléposer di-
rectement, soit leur requête, soit
leur demande en cassation, san»
emprunter la correspondance mi-
nislériellft. Legrcincrpersistadan»
CAR
'59
ton refus, et nous invita à nous
adresser à M. le président de la
cour. 11 était dans la limite de ses
devoirs; car M. le président, au-
quel notre requf'lc ne put parve-
nir {|ue le 29, api)rouYa ce refus,
cl daigna nous répondre sur-le-
champ que , d'après les formes
légales et les formes en usage ,
la requête ne pouvait être déposée
au greffe, mais devait être adres-
sée nu ministère. M. le président
eut la bonté d'ajouter que si j'in-
fiistais, il m'accorderait la parole
ù la première audience. Le même
jour M. le g;irde-des-sceaux nous
renvoya notre requête, en nous
faisant connaître par un exprés,
qu'il ne croyait pas pouvoir la
recevoir. Nous fîmes part à
l'envoyé des obstacles que nous
éprouvions de la part de la cour
de cassation. Nt)us obtînmes pour
le 4î *''ic audience de son excel-
lence Mgr. le garde-des-sceaux ,
et nous eûmes l'honneur de lui
écrire que nous nous présente-
rions aujourd'hui à la cour, et que
nous auiioivs 1 honneur de rendre
con)plc II son excellence de l'arrêt
qui interviendrait. Nous avons
dans l'inlervalle, écrit une secon-
de lettre à Strasbourg; nous n'a-
vons reçu aucune réponse; nous
ne savons pas même si ces deux
lettres sont parvenues. Nous nous
étions préparés pour présenter ce
matin à la cour, A l'ouverture de
son audience , notre recours en
cassation, et pour la supplier «ren
recevoir le dépôt à son grelTe.
Maisnuenouvellc, transmise com-
me les autres par le télégraphe,
insérée dans Jo journal du soir, et
répétée ce matin par tous les jour-
naux) aunoncc que Caron a tu\n
5 m Cil A
i»on jugement, h; j" octobre. Il
paraît que l'aotorilû militaire ne
connaît aucune espèce de sursis,
pas même pour lu recours à la
clémence du roi, el que l'arrêt est
mis à exécution 3ur- le -champ.
Dans cette douloureuse circons-
tance, nous demandons à la cour
si nous devons plaider pour l'ad-
mission de la requête. La nou-
velle n'est point officielle , el nous
aimons à nous persuader encore
qu'elle n'est pas vraie. » La cour
de cassation déclara n'y avoir lieu
à statuer sur la requête présentée
par M* Isambert, attendu que le
pourvoi n'avait pas été régulière-
ment dénoncé. »
CASTELLA, lieutenant-géné-
ral, voy. le Supp. du tome V.
CASTELLA, maréchal -de-
ramp, voy. le Supplément du
tome XV.
GASTEX, colonel, voy. le
Supplément du tome XV.
CELESIA , ancien ministre de
la république de Gênes, voy. le
Supplément du tome XV.
CELLES (Baron de), voy. le
Supplément du tome XVI.
CHAPTAL (Père), v<7y. le Sup-
plément du tome VI.
CHARRIN (Pierre-Joseph). On
doit ajouter ù l'article qui le con-
cerne {voy. le t. IV) , que depuis
1831 il est attaché au journal an-
glais publié à Paris sous le titre de
Galignani's Messenger, en qualité
de rédacteur. Il y rend compte
des ouvrages français de littéra-
ture et des objets d'arts, tels que
tableaux, gravures, etc. En 1823
vt 1823, M. Gliarrin a donné deux
nouvelles éditions de son Conteur
fies dames , ouvrage qu'il a beau-
coup auaélioré; en i8a4j il a pu-
CUA
nlié VU ermite rôdeur, ou obser-
vations gur les mœurs et les usa-,
ges des Anglais el^ des Français
au commencement du 19' siècle,
2 vol. in- 12. Ce recueil, où l'au-
teur s'est efforcé d'être piquant
et «atirique, a été suivi, en iSaO,
de V Album lyrique i choix de chan-
sons et de romances , 1 vol, in- 18,
et de Conte^ct conseils à mes fils,
3 vol. in-12, imités librement de
Kolzebue. La vente d'un ouvrage
en annonce le succès, et M. Ghar-
rin en prépare déjà une nouvelle
édition. Cet infatigable conteur va
incessamment publier les Contes
de lliermite, ou les Caractères, 2
vol. in-12.
CHARÏRAND, maréchal-de-
camp, voy. le Supp, du t. XIII.
CHAZEr ( Akdré-Reké- Bal-
TUAZAR Aussan de),G1s de M. Alis-
San de Ghuzet, receveur particu-
lier et payeur des rentes, est né
i\ Paris le 25 octobre 1774- L'ar-
ticle consacré à cet homme de
lettres dans le II' tome de la Bio-
graphie des contemporains, con-
tenant des erreurs et péchant par
des omissions, celui-ci en sera le
complément et la rectification.
M.4^hazet fils quitta la France en
1792, en sortant de Juilly, où il
avait fait ses études; fut rayé de
la liste des émigrés sous le miais-
tère de M. Cochon, depuis comte
de l'Apparent; revint à Paris en
novembre 1796, et fut condamné
le 18 fructidor à la déportation
comme rédacteur d'un journal
royaliste intitulé le Dcjcûncr. Il
n'occupa aucune place sous le di-
rectoire ni sous le consulat, et se
livra entièrement à la carrière di's
lettres; il a fait seul ou en société,
un grand nombre d'ouvrages dra-
cnK
!iiali(juc6 dont plusieurs ont ob-
tt-nu du succès; le roi le nomma
clievaiier de la légion d'honneur
à son retour de Gand ; fl dut cette
distinction à la lettre suivante qu'il
fil insérer dans les journaux de la
capitale, avec sa signature : « Un
honnns qui \eut bien me recom-
mander périodiquementà l'estime
publique par ses injures, m'a fait
1 honneur de me dénoncer dan* le
Pairiole de 1789, comme auteur
d'une chanson dont le refrain est,
dit-il, Rendez-nous notre père de
Gand; j'avais le projet de ne point
ri'îpondrc, mais comme j'ai reçu un
grarul nombredelettres anonymes
plus ou moins polies et cerlaines
visites que je ne veux pas quali-
fier, je déclare que cette chanson
n'est pas de moi • si j'avais eu à
traiter une question d'une telle
importance, ce n'est pas par un
calembour que j'aurais exprimé
mon opinion sur un prince aussi
respeclable par ses vertus que par
ses malheurs. » M. Chazet est au-
jourd'hui (1825) bibliothécaire
du roi , receveur jtarticulier des
finances à Valojaeset censeur dra-
matique.
CHLAPOWSKI(I)ÉsiRÉ),i;oy.
le Supplément du tome WII.
CilOPlCKI (N.), général de
division, voy. le Supplément du
I.. tue XVII.
CHRISTOPHE (Henri) , plus
connu sous le nom monarchique
de IIenbi I", roi d'IIaîli , naquit
h l'île de la Grenade, l'une des
Autillcs françaises, le G octobre
i-;(ty. Les biographes sont peu
d'accord sur l'origine de ce célèbre
noir. On trouve dans l'annuaire
Ufcrologique anglais, que (^hris-
ioj»he fui amené en 1780 au Cap-
CHR
36i
Français, où on le vendit comme
esclave à ITigedc la ans. Le colon
qui l'acheta le fit instruire dans la
profession de cuisinier, où par la
suite il excella. Il était, en «789,
cuisinier de l'auberge de la Croix,
tenue par Al""" Montgeon. Chris-
tophe servit dans la guerre dite
de l'indépendance, et fut l.dessé
au siège de Savanah. S'étanl r jndu
ù Saint-Domingue, il fut employé
comme commandeur ou surveil-
lant de nègres de la plantation
dont Durcau-de-la-Malle, traduc-
teur de Tacite , était propriétaire.
Dès le commencement de la guerre
de l'indépendance, où, comme
nous l'avons dit, il fut blessé, il
se fit remarquer par beaucoup do
courage, d'activité, et, malheu-
reusement, de cruauté. Nommé
général de brigade par Toussaint-
Louverture {voy. Locvertire),
le premier chef des noirs iudé-
pendans d'Haïti, il le servit avec un
grand dévouement. Toussaint-Lou-
vcrture, homme d'un mérite peu
commun et le plus modéré de
ses compatriotes, désirait l'indé-
pendance de sa patrie, mais, au-
tant que possible, sans révolution,
sans effusion de sang : il cherchait
ù rapprocher les blancs des hom-
mes de couleur, et à leur inspi-
rer ses sentimens pacifiques, que
repoussaient l'un et l'autre parti.
A la tête des noirs était son neveu
Moïse , ennemi implacable d<;.s
blancs, et très-prononcé d'ailleurs
I)Our l'indépendance complète de
la colonie. Une violente insurrec-
tion suscitée par Muïsé, détermina
Toussaint -Louverture ii sacrifier
cet homme dangereux. H chargea
Christophe d'apaiser linsurr^c-
lion et de ?c saisir de la personne
5(53
Cil IV
do Moïse. Christophe jiislifiii bien-
tôt la confiance de hcm chef. Il
lui livra Moise dont il s'était rendu
maître par trahison , et reçut en
récompense le gouvernement de
la province du JNord. L'enlève-
ment de 31i)ïse, qui l'iil prompte-
jnent mis à mort, et la nomina-
tion de Christophe au poste de
{Touverneur, excitèrent, au mois
d'octobre 1801, un soulèvement
au Cap ei dans d'autres lieux.
Christophe, prompt et terrible,
se porte partout où est le danger,
et, par les plus effroyables châti-
mens, parvient en peu de temps
à éloufler la rébellion. 11 com-
mandait la ville du Cap lors de
l'expédilion du général Leclerc,
en 1802. Le général français
le somma de rendre la place.
Il s'établit à cette occasion , dit
l'auteur d'une très - bonne no-
tice d'où cet article est tiré, une
correspondance sous le rapport de
la générosité des sentimens et de
l'originalité des expressions, qui
dépose tonte entière en faveur du
général noir. Nous en citerons
quelques passages : « Si vous usez
lie la force dont vous me mena-
cez , je vous prêterai toute la
résistance qui caractérise un ofli-
cier-général; et si le sort des armes
vous est favorable, vous n'entre-
rez dans la ville du Cap que lors-
qu'elle sera réduite en cetidres,
et même, dans cet endroit, je
vous combattrai encore.... Quant
aux troupes qui, dites-vous, dé-
barquent en ce moment, je ne les
considère que comme des châ-
teaux de cartes que le moindre
vent doit renverser Pour la
perte de votre estime,, général, je
vous assure (pie je ne désire pas
cim
la mériter au prix quo TOiw y at-
tachez, puisqu'il faudrait agir con-
tre mon devoir pour l'obtenir (iT»
pluviôse an lo) Je n'attends
que la preuve qui doit me con-
vaincre du inaintien de la liberté
et de l'égalité en faveur de la po-
pulation de celte colonie. Les lois
qui consacixMit ces principes, v.l
que la mère-patrie a sans doute
rendues, porteraient dans mon
cœur celte conviction, et je vous
proteste qu'en obtenant cet te preu-
ve désirée, par fj connaissarvce de
ces lois, je nj'y soumettrai immé-
diatement.— Vous me propo-^ez ,
citoyen général , de vous fournir
les moyens de vous assurer du
général Touàsainl-Louverture. Ce
serait de ma part une perfidie, une
trahison, et celjjc proposition dé-
gradante pourmoi, est it mesyeux
une marque de l'invincible répu-
gnance que vous éprouvez à me
croire susceptible des moindres
senlimen;- de délicatesse et d'hon-
neur (2 floréal an 10) 11 y a
douze ans, général, que nous nous
battons pour la liberté, pour ces
mêmes droits que?, comme vous,
nous avons conquis au prix de
notre sang, et j'ai toujours répu-
gné à croire que les Français ,
après avoir fait de si grands sacri-
fices pour les obtenir, viendraient
un jour les ôter à un peuple glo-
rieux de faire partie de la grande
nation, et de jouir, comme elle,
des avantages qu'elle a tirés de la
révolution (2 floréal an jo). »
Les talens du général Leclerc et
la valeur des troupes françaises
triomphèrent des noirs indépen-
daus. Christophe et Dessalines
{voj. Dessalines) se défendirent
avec plus d'intrépidité et furent
GHR
mis hors la loi. Chrislopho forcé
d'évacuer le Foil-aii-Priiici!, livra
cette ville aux flaiiiiiies, et courut
se réunir à aon général eu chef,
Toussaint- Louvcrlure. Ou sait
par quels moyens ca dernier de-
vint prisonnier des Français. Le
mouvement général de l'indépen-
dance parut un instant suspendu.
Le funeste climat de ces contrées
«>péra ce que n'avait pu produire
l'intrépidité des indépendans : il
détruisit l'armée française. « Une
assemblée nationale, convoquée
le 1" janvier 1804.. rendit i\ l'île
son nom primitif d'Haïti. Dessa-
lines fut procl.imé gouverneur-
général à vie. Haïti fut divisé en
fcix départemens militaires com-
mandés par des généraux de di-
vision. Christophe eut le com-
mandement de la division du Cap;
il se trouvait alors le plus ancien
des généraux de l'armée après
Dessalines. » Le gouverneur-gé-
néral se fit élire empereur, et
Christophe devint général en chef
del'armée d'Haïti(i8o5). Péthion,
homme de couleur (vfy.l'KTHion),
commandant de la division de
Port-au-Prince, s'élant mis à la
tète d'une insurrection répulili-
caine , et Dessalines ayant péri
dans la lutte, le nouvel empire
fut détruit l'année suivante^ « La
province du Nord et la première
division de la province de l'Ouest,
rapporte l'auteur de la notice déji
citée, restèrent soumises à Chris-
tophe, tandis que la province du
Sud et la seconde division de
l'Ouest ohéissaient ù Péthion.
Une assemblée composée des dé-
putés des deux partis, convoquée
au Port-au-Prince, se déclara
«:n faveur do Pélhiuu; la iiiino-
CHU
3C3
lité protesta, et, dès les pre-
miers jours de 1807, la guerre ci-
vile avait éclaté. Une nouvelle as-
semblée fut convoquée au Cap
hous l'intluence de Christophe, et
décréta la constitution du 17 fé-
vrier J807. Elle nomma Christo-
phe président à vie de l'état d'Haï-
ti, et généralissime des forces de
terre cl de mer. La plupart des
dispositions de cet acte étaient cal-
quées sur les constitutions consu-
laires de la France. Vers la même
époque, la province du Sud-Ouest
he constitua, sous le titre de ré-
publique il'Haïti. » Sa constitution
établie sur celle des Étals- Unis
d'Aniérique, institua Pélhion pré-
sident pour l'espace de quatre ans,
et remit le pouvoir législatif entro
les mains d'un sénat; Christophe
qui visait, au pouvoir absolu, ne
négligea pas néanmoins le réta-
blissement de l'ordre publie et de
la sécurité individuelle. Il orga-
nisa l'administration, les tribu-
naux, la marine, l'armée, fit des
réglemens propres à favoriser l'a-
griculture, le commerce, tous les
genres d'industrie, et parvint en
peu de temps à des résultats d'au-
tant plus admirables, qu'il agissait
sur une société qui lui o[)posait
des obstacles de toute nature. Ses
armées de terre et de mer furent
bientôt parfaitement organisées,
ses finances atteignirent nu état ré-
gulier et florissant. Des forteresses
furent élevées sur divers points;
entre autres la citadelle Henri, re-
marquable parle luxe de ses fortifi-
calionset desespalais;enfin, toutes
les côtes furent njisesen état <ie dé-
fense. En même temps, Chris-
tophe fournissait des secours A ses
voisins les Espagnols, pour chas-
5G4
CHR
scr los Français de Sanlo Doinia-
{;n, t't |K)ussait la guerre contre la
jé|)tihli(|iie sa rivale, avec activité
qiioiqu'avco peu de succès. Par
un acte du 28 mars 181 1 , le pré-
siflont (>hrislophe se fit proclamer
roi d'Haïti, sous le nom d'Henri
1*^'. Ce lilrc fut déclaré hérédi-
laire dans sa famille, et entouré
de tous les prestiges et de toutes
les décorations des royaumes de
l'Europe moderne. Aucune trace
de gouvernement représentatif ne
fut conservée dans la nouvelle mo-
narchie, si ce n'est un conseil-
d'étal nommé par le roi, et com-
posé de ses généraux et de ses
courtisans. Xlhristophe avait épou-
sé, le i5 juillet 1763, une femme
de sa couleur, nommée Marie-
Lo.iise ; elle fut saluée du non) de
reine ; leur fils aîné , Jacques-Vic-
tor Henri, né le 5 mars i8o4>
devint piince royal d'Haïti. L'édit
qui avait créé la noblesse fut suivi
do celui de création de l'ordre
r lyal et militaire de Saint-Henri
(20 avril 1811), avec une dota-
tion de 3oo,ooo livres de revenu.
Un édit du 7 avril érigea un siège
archiépiscopal dans la capitale
d'Haïti , et des sièges épisco-
paux dans diverses villes du royau-
me; enfin, un édit du 1" janvier
1 81 3 détermina la formule des
litres royaux. Mais l'acte le plus
honorable , comme le plus utile,
di! règne de Christophe, c'est la
pnidication du Code Henri , pro-
mulgué le 20 février 1812. Il est
composé de neuf lois : 1° loi ci-
vile- c'est une copie modifiée, prin-
cipa'.ement quant au premier li-
vre, de notre Code civil. On y re-
marque avecsatisfaction l'absence
du dixorcc, et le maintien de Va-
CEIR
doption; a' lui d« commerce; 5" loi
sur les prises ,• 4° loi sur la procé-
dure civile ; 5" loi criminelle , cor-
reclionnelle, et de police ; elle ad-
met la peine de mort et la confis-
cation des biçns : les bonnes moeurs
et la religion catholique y sont ef-
ficacement protégées ; 6" loi sur lu
procédure criminelle, police correc-
tionnelle , et la simple police : elle
n'admet point le jury: 7" loi con-
cernant la culture ; 8" loi militaire;
9° loi pénale militaire. Le Code
Henri pourrait sans doute donner
lieu à plusieurs observations cri-
ti(jues ; mais, tel qu'il est, on peut
affirmer qu'il fait honte <\ la légis-
lation de quelques nations des
plus civilisées de l'ancien conti-
nent. Une époque remarquable de
la vie de Christophe fut celle de
son sacre etdeson couronnement.
Des fonctionnaires publics de la
partie espagnole de Saint-Domin-
gue , et des officiers supérieurs de
la marine anglaise, se rendirent à
l'invitation d'y assister. La cérémo-
nie eut lieuauCap, le 2 juin 1812;
on y essaya d'égaler le luxe des
cours de l'Europe, et, d'après les
relations officielles qui ont été pu-
bliées,^ paraît certain que ce but fut
atteint. M. Corneille Brelle, préfet
apostolique, nommé par le roi ar-
chevêque d'Haïti et duc de l'Anse,
présidait à la cérémoniereligieuse,
qui fut pratiquée avec toutes les
formules indiquées dans le Ponti-
fical romain. L'année 181 3 fut
marquée par diverses défections
qui, déjà, présageaient à Chris-
tophe sa chute prochaine et le
triomphe ultérieur de la républi-
que; mais plus belliqueux que Pé-
ihion , il compensait, les armes à
h inain , les avantages que son ri-
CHR
val s'était acquis par l'habilclé et
la iiioci/'ialioti de son goiivcrnc-
iiicnt. TuulcrDis , ces (léleclions
exaspérèrent le caraclère 'viulent
«^l soupçonneux de Christophe, et
le portèrent à des actes de cruau-
té, que ses défenseurs eux-iiiênies
n'ont pas entièrement dissimulés.
liU paix rendue à la France par
les événemens de 1814 > établit
une sorte de trêve lacile entre
les deux gouverneniens d'Haïti.
Christophe apprit d'abord avec
satir faction la restauration des
Bourbons, espérant qu'ils sui-
vraient à son éj;;ard une politique
opposée à celle de Bonaparte.
Mais des sentimens tout dilïérens
ne lardèrent pas à prévaloir dans
son esprit, à la suite de la négo-
ciation dont furent chargés, par
M. Malouet, alors ministre de la
marine, MM. Dauxiou-Lavayssc,
Franco-Médina , et Daverman.
Les instructions de ces agens leur
prescrivaient de proposer aux cl icfâ
de l'île de grands avantages per-
sonnels, pour les déterminer à
abandonner les intérêts de leur
nation; il leur était " singulière-
• nient recommandé de se rappro»
ncher le plus possible de l'ancien
• ordre des choses colonial , et de
«ne s'en écarter que là où il leur
• sera démontré impossible de faire
• autrement.» On remarquait aussi
dans leurs instructions les dispo-
sitions suivantes : « . . . 5* Alta-
» cher à la glèbe , et rendre à leurs
n anciens propriétaires, non-seu-
»lement tous les noirs qui tra-
» vaillent actuellement sur les ha-
• bitations, mais encore y ramc-
»ncr, le plus possible, de ceux
»qui se sont affranchis de celte
'«condition 7° Restreindre
CIIR
505
rtla création de nouveaux libres
»de la manière indiquée plus
» haut. » Christophe reçut lescom-
niunicalions qui lui furent faites,
avec r'intlignalion qu'il eftt été
facile de prévoir, si l'on se fût
moins aveuglé; et il est remarqua-
ble que la nouvelle situation des
a/Taire» l'obligea à reKIchcr quel-
que chose de son pouvoir absolu.
Le 21 octobre 181 4? i' convoqua
à Sans-Souci un conseil-général
de la nation, afin de placer s'mis
ses yeux tous les détails relatifs :\
ces négociations, et de leur di)n-
n(;r ensuite la plus grande publi-
cité. Cette me-ure obtint un suc-
cès complet ; elle exalta , au plus
haut degré, l'enthousiasme des
insulaires. « Parmi les membres du
«conseil, dit i'hialorien d'Haïti,
» il y en avait qui avaient j.orlé
• les fers des Français; les mar-
sques encore empreintes sur leurs
«membres' mutilés, attestaient
«leurs longues et cruelles souf-
«franccs, et la barbarie de nos ty-
«rans; d'autres se souvenaient
» d'avoir vu pendre, brftler, noyer,
«ou manger par des chiens, pè-
«res, mères, frères, socurg , pa-
rt rens ou amis ; et l'on venait pro-
«poserà ces vieux guerriers, com-
» verts de nobles cicatrices, et qui
«avaient vu fuir devant eux les
• hordes sanguinaires des Lccbrrc
«et des Rochambeau, de retour-
»ner sous le joug de ces odieux
• tyrans, de choisir entre l'escla-
«vage et la mort ! A l'instant tou-
• tes les haines et les vengeances
• qui avaient été comme assoupies
«parle temps, se réveillèrent avec
• une force et une énergie incroya
«blés.... Chacun prépare des tor-
«ches pour iuccndicr sa propre
36G
CHR
» maison; l'un arguise le tranchant
"de son sabre, l'autio la pointe du
«sa lance; c«;!til-ci nétoie son fii-
»sil; celui-là pn';pai«; son sac de
• campag-ne; déjà !a femme indns-
» trieuse et prévoyanle met de côlé
» le gros linge, les objets utiles et
• indispensables qui doivent ôtre
» conservés , et range de l'autre les
» richesses, les objets de luxe et de
• super jluités , désormais inutiles,
«et destinés à être la proie des
«flammes, etc. » ( Essai sur les
causes de la révolution et des guer-
res civiles d'Halte, pag. 2i2et2i5.)
En même temps Christophe flt
publier un plan de défense géné-
rale du royaume, tout-à-fait ana-
logue aux sentimens dont le peu-
ple se montrait animé, a L'art.
» 1" recommandait aux généraux
» commandant les provinces , etc. ,
■ d'avoir à se munir dès à présent
»même, de bois et de chandelle
»en forme de torches, et de ma-
» tières combustibles propres à in-
• cendier. L'art. 2 prescrivait qu'au
• débarquement de l'armée fran-
• çaise, toutes les villes, bourgs,
» habitations, manufactures et tous
• autres ètablissemens situés dans
«les plaines fussent incendiés de
» fond en comble ; que toute la po-
«pulation fût retirée dans les mon-
«tagnes, les ponts cassés et dé-
atruits, les digues des fleuves,
• rivières et étangs rompus, etc.
«L'art. 9 enjoignait aux généraux
«et ofliciers, au nom de S. M.,
«de ne point faire aucun quartier
• à tous les prisonniers que le sort
• des armes aurait fait tomber en
» leur pouvoir, quels que soient le
«grade, l'Sge et le sexe; qu'ils se-
» raient tous immolés , sans pitié
■ et sans rémission, dans des gcn-
CHR
«rps de supplice les plus horribles.»
(//vùAp.aySet 2;'9.)L'undesagen<«
français, Franco-Médina, tomba .a-
vec ses iulructions, entre les mains
de Christophe. Celui-ci s'empres-
sa de les publier, avec la lettre
que lui avait adressée le chef de
la mission française, t\l. Dauxion-
Lavaysse. Toutes ces pièces étaient
bien propres à exaspérer la popu-
lation noire de Saint-Domingue.
Cependant, il ne fut point fait de
iTud à Médina ; après avoir subi un
interrogatoire judiciaire , il fut
exposé sur la place publique, afln
qu'il fût loisible à chacun de s'as-
surer personnellement de la vé-
rité des faits publiés à son occa-
sion. A la nouvelle du mauvais
succès de cette mission, le gou-
vernement français désavoua les
négociateurs (^Monlteurdu 18 jan-
vier 1 8 1 5 ) ; mais l'efTet que pou-
vait produire ce désaveu fut con-
sidérablement diminué par la di-
vulgation de la teneur littérale,
des instructions ministérielles. Il
y a , du reste , beaucoup de choses
curieuses dans les lettres de M.
Dauxioo-Lavaysse , et qui intéres-
seraient directement les Français
eux-mêmes, si, comme nous l'a-
vons dit, leur gouvernement ne
les avait désavouées. Les événe-
mens qui agitèrent l'Europe en
181 5 et les années suivantes, a-
journèrent indéfiniment les pro-
jets belliqueux que certains colons
se flattaient, en 1814 > de faire
adopter au gouvernement fran-
çais. Cet état provisoire permit à
Christophe de se préparer à com-
battre l'ennemi par des moyens
fdus convenables à un état civi-
isé ; il multiplia les imprimeries,
et, ù leur aide, il répandit, avec
CHR
profusion, lc« écrite contre les
vuns et les i'iteiitions des anciens
colons; il voiiUit changor la lan-
gue de ses peuples , et, A celellct ,
.i[»iès avoir fuit décréter, par le
conseil de la nation , que l'inslriic-
tion pubJifiUK .lierait gratuite ù
Uiûli, et donnée aux frais de la
nation, il fil vt-nirdes prole^seurs
et arlisics anglais, afin que l'édu-
oalion fût reçue par les enfans au
moyen de la langue anglaise , et
il multiplia, le plus qu'il fut pos-
sible, d(;3 écoles d'enseignement
muluel pour cette lan:^ue. Le 20
novembre iSiO, après avoir re-
fusé de recevoir les connnunica-
tions des nouveaux commissaire»
du roi de France, MiM. de Fon-
langts etEsmangarl, Christophe
publia une déclaration, dont l'ar-
ticle i*' portail : « Nous ne traite-
«ronsavecle gouvernement fran-
»çais que sur le même pied, de
• puissance à puissance, de sou-
» verain à souverain ; aucune né-
• gociation ne sera entamée par
«nous avec cette puissance, qui
«n'aurait eu pour base préala-
nble l'indépendance du royaume
«d'Haïti, etc. » Les commissaires
IVancais, également éconduils par
Péthion, mais avec toutes les for-
mes de la civilisation la plus ex-
quise, et de la diplomatie la plus
lairméc, ne tardèrent p;.'S à quit-
ler les parages d'ILûti , sans avoir
mieux réussi que leurs prédéces-
seurs. Une trêve tacite, interrom-
pue par des hostilités sans résul-
tat, se maintenait, depuis plu-
sieurs années, entre le royaume
de (".hrislophe et la république de
l'élhion. Les négociations avec la
France avaient fait éclater, d'une
manière irrécusable, la supério-
CHR 307
rite personnelle de co dernier; et,
néanmoins, l'influence salutair»;
des circonstanciés agissant sur le
roi noir lui-même, l'avait entrai-
né , presqu'à sou insu, à adop-
ter des formes de gouvernement
tnoins absolues. Ainsi , par un
édit du «4 juillet 1S19, il avait
concédé en propriété des terres
aux ofiiciersjsous-olficiers et sol-
dats de son armée, tandis que,
jusqu'alors, il avait réservé cette
laveur pour les généraux et les
dignitair^'s de sa cour. Péthion
mourut au commencement de
18)8, et, conformément à la
constitution de la république, le
général Boycr, désigné par lui,
prit les rênes du gouvernement.
Il réussit d'abord à soumettre à
hi république , par la force des ar-
mes, la contrée appt'lée la(irande-
Anse, où dominait, sous la suze-
raineté de Christophe, mi chef
militaire nominé Goman , ou le
comle de Jérémie. Le spectacle
du gouvernement républicain de
Boyer, à la fois ferme et modéré,
contrastait, de la manière la plus
étrange, avec le régime égoïste,
sordide et barbare de la royauté
de Christophe, et préparait iné-
vitablement la ruine de celle-ci.
La garnison de Saint-Marc en don-
na le signal. Vers la fin de sep-
tembre 1820, cette garnison, in-
dignée des mauvais traiiemens
que Christophe venait de faire su-
bir à son colonel , j)ar l'intermé-
diaire du gouverneur de la ville,
se souleva , coupa la tête à ce gou-
verneur, et envoya une députa-
tion au président Boyer, pour lui
porter son vœu de réunion ;\ la
république. Celui-ci rassembla à
la hntc UD corps de plus de 1 5,ogo
T>iy^
ClIR
hommes, à la iCte duquel il s'a-
vança pour sout<'nir les insurgés
(le Sainl-lMarc. Clirisloplie , relire
dans le palais forlirté de Sans-
Souci, où il fai'^ait sa résidence
ordinaire, s8 trouvait encore ma-
lade d'une attaque de paralysie
qu'il avait éprouvée au mois de
juillet précédent. Obligé de déla-
chcr une partie de son armée con-
tre les insur|;és de Saint-Marc,
il permit ainsi à rinsurredion de
se propager dans la ville du Cap,
capitale de son royaume. Dans la
soirée du 6 octobre , le général
liichard, duc de la Marmelade ,
et l'un des premiers dignitaires
du royaume, proclama, à la tête
des troupes , l'abolilion de la
ro^^'iulé. La population accueillit
ce changement avec enthousias-
me; on mit en liberté tous les in-
dividus que la tyrannie ombra-
geuse de Christophe avait fait je-
ter en prison. Quinze cents hom-
mes environ de la garde de Chris-
tophe, l'élite de son armée, lui
restaient encore fidèles ; il les en-
voya contre les insurgés du Cap,
sous les ordres de Joachim Noëlle,
duc du Port de Paix, frère de sa
femme. Lui-même ne pouvant
marcher à leur tête, il se fit porter
dans leurs rangs avant leur dé-
part, leur prodigua les éloges et
les promesses , et leur commanda,
dit-on , le massacre des blancs et
des hommes de couleur, ainsi que
le pillage de la ville du Cap. Le 8
octobre, les deux armées se trou-
vèrent en présence ; quelques
coups de feu furent échangés ;
mais bientôt la défection entraîna
aussi la garde royale, qui, mal-
gré les efforts de son chef, se réu-
nit au reste de l'armée pour dc-
ClIR
mander la déposition du Chris-
tophe. A celte nouvelle, celui-ci
se voyant réduit, pour tout luoyon
de défense, à la fidélité de (pje!-
qties satellites, et craignant de
tomber vivant entre les main^ des
républicains, se tira un loup de
pistolet dans le cœur, dont il mou-
rut sur la place, leSoctobre 1820,
ù M heures du soir , âgé de 53
tins. Son corps resta pendant plu-
sieurs jours exposé sur la grande
route, sans sépulture. Son fils
aîné, le prince royal, fut massa-
cré; mais sa veuve et ses deux
filles furent respectées, grâce à la
généreuse intervention du prési-
dent lioyer, dont la fermeté ne
tarda pas ù rétablir l'ordre et la
sécurité. Elles vivent aujourdhui
reliréies aux environs de Londres,
dans un état voisin de l'opulence.
Le 26 octobre, la république fut
reconnue par toutes les provinces
de l'ancien royaume d'Haïti ; la
constitution royale fut abolie,
ainsi que les litres de noblesse et
les décorations. Cette révolution
n'a été contrariée que par les va-
nités conlrislées de quelques cour-
tisans de Christophe ; mais elles
ont été réprimées par le président
Boyer, qui a réuni, en 1822, à la
république d'Haïti la partie espa-
gnole de l'ile de Sainl-Dominguc,
qu'il gouverne désormais tout en-
tière avec une admirable sagesse.
Le gouvernement français recon-
naissant enfin qu'un peuple qui
avait su conquérir sa lib(;rlé de-
vait prendre rang parmi les états
indépendans, a consenti (182.5),
moyennant une indemnité de 1 5o
millions en fiveur des colons fran-
çais dépossédés, à reconnaître l'in -
dépendance de Saint-Domingue.
COL
CIIRISTOPHLE DE SAINT-
JORIJE, voy. le Supplcment du
lutnt; XV.
CIVIALE , médecin {voy. son
article au suj)plément du i 2* vol.)
M. Civiale a poursuivi avec un
grand succès ses intcressans tra-
vaux pour le broiement de la
pierre dans la vessie. Il a lu sur
ce sujet plusieurs mémoires à l'a-
cadémie royale des sciences, où
le célèbre Peroy fit sur les résul-
lals obtenus par celte nouvelle
méthode le rapport le plus flat-
teur. Postérieurement, M. Civiale
a obtenu une mention très-hono-
rable dans le rapport de la com-
mission désignée pour décerner
le prix que feu le baron de Mon-
thyon avait fondé pour récompen-
ser les perfectionnemens de la
médecine cl de la chirurgie. Ce
prix semble destiné, l'année pro-
(;haine , à récompenser M. Ci-
viale, auteur de la découverte la
plus préciiMise qui ait été faite en
(hirurgie , et qui a déjà obtenu
dans la pratique de cet art les ré-
sultats les plus avantageux.
CLAUZÈL (le comte), lieute-
nant-général, voy. le Supplé-
ment du loine X.
COLMN (Pierre -Nicolas),
;mcien professeur de belles-lettres
et de philosophie. Depuis l'impres-
sion du V" volume où M. Collin
a un article sous le nom de Collis
(I'Amblt , il a publié : i" Une Pe-
tite gcograpfde départementale, ter-
minée par les curio«ités de l'uni-
vers. Elle a eu deux éditions en
deux ans, i vol, in- 12. a' Logif/ue
fimpiifitie, ou le Maître de logique
élémentaire, à ru>age des deux
pcxes, 1 vol. in-12; 3° Gram-
maire française de Lhomond aug-
T. XX.
DEN 369
raenlée, 1 vol. in-12; 4° jP^-
tile histoire de France^ i vol. in-
>2, contenant les choses extraor-
dinaires, plaisantes, tristes, gaies,
sérieuses , louables , exécrables
qui ont eu lieu, les devoirs des
rois et des peuples, etc.; elle est
à sa deuxième édition. 5° Pc-
tii Répertoire î\Vnsiig;e de la jeunes-
se , I vol. in-12. C'est une espèce
d'encyclopédie historique très-cu-
rieuse. C'est par erreur, ainsi que
nous l'avons dit plus haut, que le
mot d'AMBLY a été joint au nom
de CoLLiN. Cullin d'Ambly (Fran-
çois) est auteur des trois dernier»
ouvrages qui terminent la notice
qui porte son nom, laquelle no-
tice, A part ces trois ouvrages, ap-
partient à M. Collin (Pierre-Ni-
colas).
COLANGELO , évêque ita-
lien , voy. le Supplément du to-
me XVI II.
COUSIN, professeur i l'acadé-
mie de Paris, voy. le Supplément
du tome XVI.
DAMAS , lieutenant-général ,
voy. le Suppléaient du tome V.
DAMAS, général de brigade,
voy. le Supplément du tome; V.
DARCET (Jean- Pierre -Jo-
seph ) , voy. le Supplément du
tome VI.
DARCET, chimiste, roy. le
Supplément du tome VI.
DECANDOLLE, botaniste, tY-j.
le Su|)[ilément du tome V.
DECOUZ, lieutenant-général,
voy. le Supplément du tome XI.
DELAIÏRE , maréchal - de-
camp, voy. le Supplément du to-
me V. .
DENTZKL (le baron), maré-
chal - de camp, voy. le S ipplc-
mcnldu tome XI.
M
3yo DOU
DERREY (N.), ancien maire de
Toulouse, voy. le Supplément du
tome XV.
DEVlSaiE, voy. l'Erratadu to-
me XIII.
DEWAILLY, architecte, »oj. le
Supplt'iment du tome XVIII.
DëWARENGHIEN (baron),
voy. le Supplément du tome VI.
DINCOUUT UE METZ, voy.
le Supplément du tome XVI.
DOIJRILLE (Joseph), connu
sous le nom de Dourille de Crest,
membre de l'académie de Bruxel-
les, et de plusieurs sociétés litté-
raires, est né à Crest (Drôme), le
3i mai 1790. Il entra au service
en 1808, et fit les campagnes du
Tyroi et de l'Allemagne, en 18^08
et 1809. Blessé à Trente, et à Wa-
gram, il revint dans ses foyers
avec un mémoire de proposition
pour la retraite; mais le duc de
Feltre (?;oy.CLARRE), alors minis-
tre de la guerre, lui assigna une
simple gratification, que M. Dou-
rille ne voulut point recevoir. En
i8i4î il était un des secrétaires de
M. le marquis d'Escorches de
Sainte-Croix, préfet du départe-
ment de la Drôme. Son zèle, son
aptitude et sa loyauté, lui acqui-
rent l'estime de ce digue magis-
trat, notamment pendant l'inva-
sion de la France par les troupes
étrangères. M. Dourille avait don-
né des preuves du patriotisme le
plus pur, soit en secondant les 0-
pératious du sous-préfet dans ces
momens difficiles, soit en contri-
buant de ses propres deniers à
l'habillement des braves gardes
nationales, appelées i la défense
de la patrie. Au retour de Napo-
léon, il prit une part très-active
aux événcmens dont la Drôme fut
DOU
le théâtre. A la seconde restaura-
tion, il perdit son emploi, et fut
proscrit de Valence. Rendu à sa
famille, M. Dourille sollicita et
obtint, sous le ministère de M.
Decaze, un brevet de libraire; mais
peu propre au commerce , il l'a-
bandonna pour se livrer entière-
ment à la littérature. En 1822,
il fit des démarches instantes, au-
près de M. le général La Fayette,
pour l'engager à solliciter du gou-
vernement une permission eu fa-
veur du général. Carascosa, afin
que celui-ci pût s'établir en Fran-
ce avec-sa famille , sans courir le
risque d'être livré à ses ennemis,
mais M. de La Fayette lui ré-
pondit que le moment n'était
pas favorable. M. Dourille fut, à
la même époque, le rédacteur des
Tablettes de la brome, petit jour-
nal qui s'imprimait à Valence, et
pour lequel il fut traduit en poli-
ce correctionnelle, condamné par
défaut, et ensuite acquitté. Il fut
aus^i le rédacteur en chef, du jour-
nal l'Argus, qui parut en 1824.
Nous avons de lui les romans sui-
vans, qui sont d'un genre sombre :
Romalino, 2 vol. in- 12, i'aris, Pi-
goreau, 1821; l'Espagnol, 2 vol.
in- 12, fig., Paris, Lelerrier, iSif);
Holdar, ou le tribunal mystérieux^
2 vol. in- 12, fig., Paris, Brian-
chon, 1826; le Parricide, ou les
Calabrais, 2 vol. iu-i2, fig., Pa-
ris, Persan, 1825. On annonce du
même auteur, comme devant pa-
raître incessamment : Henri de
Lorraine, ou la coursons Cliarles
IX et Henri III, l'Enfant de l'é-
chafaud, et l'Obligeant, roman de
moeurs. Ces trois derniers ouvra-
ges forment également 2 vol. cha-
cun dans le même format que les
DUC
précédens. M. Dourillc est au??i
connu, par diverses poésies insû-
réesdiins plusieurs recueils, notam-
ment dans celui des Muses du Midi,
années 1822 et 1825. Lors de l'a-
vènement de Charles X au trône,
il fit paraître une épître , qui eut
deux éditions. La seconde est sui-
vie d'un Songe de F^apoléon, Paris,
Trouvé, 1824. Il a en outre publié,
à l'occasion du sacre de Charles X,
un Chant dithyrambique. Ce'te
pièce a été réimprimée dans la
Couronne poétit/ue de Charles X ,
publiée par le libraire Bouquin de
la Souche. M. Dourillc est aujour-
d'hui (1825) attaché à la rédaction
de plusieurs journaux.
DRALET, homme de lettres,
voy. le Supplément du tome X.
DKOZ,, graveur, voy. le Sup-
plément du tome XIII.
DUCASSE, médecin, voy le
Supplément du tome XIII.
DUCHESNE (Jean), né à Ver-
sailles, le 28 déceujbre 1779, d'une
famille attachée aux bâlirnens du
roi; il reçut chez son père une
bonne éducation, qui lut inter-
rompue, en I7<j5, pur le< événe-
mens de celte époque; il vint à
Paris i\ la fin de »704i cl suivit
plusieurs cours au lycée, depuis
Athénée des arts, seul refuge a-
lors de rinstructii)n publi(jue. Il
se destinait ii entrer à l'école po-
lytechni(pJo , quand le hasard lui
olfrit une place à la Bibliothèque
nationale, aujounrhui bibliothè-
que du roi, où il est coasiamment
resté depuis 1795. Quelques an-
nées encore, il se livra ù l'étude
des mathématiques et de la chi-
mie , ainsi qu'à celle du dessin , et
chercha ii faire partie de l'expédi-
tion du capitaine B.iudin; mais
DUC
071
sa famille s'y étant opposée , il cul-
tiva pendant quelque temps l'ait
de la gravure en bois, enfin il
abandonna entièrement ces di-
verses parties pour s'occuper ex-
clusivement de la connaissance
des estampes. De nombreuses aug-
mentations arrivées au départe-
ment des estampes de la biblio-
thèque nationale pendant larévo-
lution , y avaient été seulement
déposées, et il devenait difficile
d'en faire jouir le public, parce
qu'elles n'étaient pas portées sur
les catalogues. La révolution a-
vait causé quelques bouleverse-
mens dans l'ordre des volumes
d'estampes, d'ailleurs l'ancien ar-
rangement ne pouvait plus con-
venir pour une collection aussi
nombreuse. M. Duchesne sentant
la nécessité d'établir un ordre
mieux raisonné, ciéa, d'après les
idées du baron de Himecken , une
méthode, an moyen de hiquelle
on peut, classer facilement les
grandes collections d'estampes et
les simples recueils. Tous les ou-
vrages d'art sont divisés en vingt-
quatre classes , à chacune des-
(juelles est attribuée une lettre ma-
juscule; chaque classe est subdi-
visée en plusieurs sous-classes,
avec une lettre minuscule, un nu-
méro indique la place du volume
dans la sous-classe à laquelle il
appartient. Lorsqu'une collection
est peu nombreuse, un porte-
feuille peut suffire pour renfermer
toutes les estampes d'une sous-
classe, ou même d'une classe en-
tière. M. Duchesne fut admis au
nombre des membres de l'athé-
née des arts, el parl.igua les nom-
breux travaux de celte société lil-
térairc dans les diverses commis-
57 a DUP
sions dont il fit partie i.t dont il
fut souvent rapporteur; ses con-
frères lui donnèrent un témoi-
gnage de confiance et d'estime en
l'appelant à la place de secrélaire
de la classe des beaux -arts, et
plus tard à celle de secrétaire-gé-
néral. Plusieurs notices de lui ont
été publiées dans les journaux,
ou ont été imprimées séparément,
telles sont: i". Quelques idées sur
l'établissement des frères Pira-
nesi, 1802; 2°. Rapport l'ait à l'A-
thénée des arts de Paris, sur la
fonte de la statue de Jeanue-d'Arc,
i8o5; 3°. Notice historique sur
la vie et les ouvrages de Jules-
Hardouin Mansart ; 4°- Compte
rendu des travaux de l'alhénôedes
arts dans la séance publique de
marsi8o6; 5°. Eloge historique de
Pierre Puget, 1807; 6°. L'Opéra,
le Trésor et la Bibliothèque du
lloi, 1819; ç°. Persiennes et Ja-
lousies, 1823; Notice des estam-
pes exposées à la bibliothèque du
roi, 1825. La première édition
avait paru en 1819. 9°. Compte
rendu à S. Exe. le ministre de l'in-
térieur du voyage fait en Angle-
terre par l'auteur, 1824 ; 10°. Cou-
pole de Sainte-Geneviève, peinte
par M. Gros, 182^; 11°. Essai
sur les vieilles gravures des orfè-
vres Florentins du i5* siècle, 1
vol. in-8».
DUMONT (André), voj. l'Erra-
ta du tome X,
DUMOURIEZ, général, voy. le
Supplément du toine VL
DUPERRÉ, contre-amiral, l'oj.
le Supplément du tome VI.
DU PORT (Adrien). C'est à tort
que dans le vol. 6 de cet ouvrage
nous avons dit, d'après des ren-
seignemcns inexacts, qu'Adrien
FArU
Duport • s'évada des prisons de
Meluu. » Voici le fait : A peine
Duport était-il arrêté, qu'il en-
voya à M. Baillot, membre de
l'assemblée constituante [voy. ce
nom au supplément de ce vol. ) ,
l'abbé Juliette, jeune homme don-
nant à celte époque de belles es-
pérances, pour l'instruire de la
position fâcheuse dans laquelle il
se trouvait, et le prier d'obtenir
de Danton, alors mirn'stre , qu'il
serait jugé par le jury de Melun ,
et non par le comité révolution-
naire. Danton répondit à M. Bail-
lot : 0 Si je puis le faire seul , il
sera jugé par le jury; si au con-
traire je suis obligé do le deman-
der, je ne m'en occuperai pas dans
l'intérêt de ma popularité. » En
effet Duport fut jugé à Melun par
le jtny et acquitté.
DZIEWANOWSKI (N.) , capi-
taine, voy. le Supplément du to-
me XVII.
EBLE, lieutenant-général, voy.
le Supplément du tome XI.
ECKART, auteur, voy. l'Erra-
ta du tome XV.
ESTEVE, maréchal-de-camp,
voy. le Supplément du tome VIH.
FABBRONI, littérateur, voy. le
Supplément du tome X.
FABVIER, colonel, voy. le
Supplément du tome VII.
FAGNANI (le comte), voy. le
Supplément du tome VIII.
FALCK, savant hollandais, r^j.
le Supplément du tome VIII.
FALKO^VSKI (N.), général
de brigade, voy. le Supplément
du lome XVII.
FAREZ, ancien avocat, voy. le
Supplément du tome VIII.
FAUCHER (Les frères), voy.
le Supplément du tome VII.
FON
FAURB LA JONQUIÈRE, co-
louei, voj. le Suppléineiil du to-
me XII.
FITZ-GÉRALD , voj. le Sup-
plément du tome XIII.
FLATÏERS ( Jean - Jacqces ) ,
sculpteur, membre de l'académie
des sciences de Saxe-Weimar. est
né à Greveld, département de la
Roër, sous l'empire français, et
maintenant appartenant au roi de
Prusse; élève distingué de M. Hou-
don sculpteur, et de M. David
peintre, il venait, en 18 15, de
remporter le second grand-prix de
sculpture, lorsque les dangers dont
la patrie était menacée à cette é-
poque, le déterminèrent à voler i^
sa défense. Nommé sous-lieute-
nant au 2* régiment d'infanterie-
légère, il fit la glorieuse, mais fu-
neste campagne de France, qui fut
tL'rrainée par la prise de Paris.
En 1816, M. Flalters fut mis à la
demi-solde; il rentra alors dans la
carrière des heaux-arts, où des
succès ont, chaque armée, couron-
né ses eflorts. Depuis 1819, il en-
richit le salon du Louvre, de ses
productions, parmi lesquelles nous
citerons : une statue d'Hihà^ une
statue colossale pour le tombeau
du général Loyson, une, statue de
Ganimède, enfin une statue d^Eri-
gone dont le jésuitisme du jour
voulait défendre l'exposilion en
182/1. Dans le nombre des bustes
échappés à sa fécondité, on re-
marque ctux de lord Byron, de
Grétry, de Goethe, de MM. iMa-
nuel, Méchin, Lafitte, etc., etc.
FONTVANNE DESJARDINS,
ancien maire de Versailles, vox.
le Supplément du tome XII.
FONZI, (hirurgien dentisti! ,
lojr. le Supplément du tome VIU.
GEN 575
FODCHÉ, duc d'Olrante, coy.
lErrala du tome X.
FREY, typographe, voy. le Sup-
jilément du tome XV.
GAFREIS, peintre saxon, voy.
le Supplément du tome XII.
GARNEREY, peintre dessina-
teur, VOJ. le Supplément du tome
XV.
GARNIER DE SAIiNTES, tv>y.
le supplément du tome IX.
GAULÏ DE SAINT-Gl'R-
MAIN, littérateur, voy. le Sup-
plément du tome XVII.
GAUTIIEROT, peintre d'histoi-
re, voy. le Supplément du tome
IX.
GAY (M"* Sophie), voy. le Sup-
plément du tome X.
GENEVAY ( Antoisk - Fran-
çois), colonel en retraite, ollicier
de la légion-d'honneur, chevalier
de Saint-Louis, est néàMoniflenr,
département du Jura, le 5o dé-
cembre 1776. Il entra au *ervice
comn>e volontaire dans le lo* ba-
taillon du Jura, le 5 août 179-2, et
y fut nomn)é capitaine; il fit
aux armées du Haut et Bas<-Rhin
les campagnes de 1 792, des années
2 et 3 de la république , et passa ù
l'armée d'Italie en l'an 4- A la ba-
taille de Mondovi, il entra un des
premiers dans la redoute; i\ celle de
(îasliglione, avec 12 grenadiers,
il s'empara de 2 pièces de canon ,
• et fit 40 prisonniers. Après iv. trai-
té de Campo-Formio, étant en gar-
nison à Alexandrieen Piémont , il
obtint le 25 germinal an (i, un con-
gé d'un mois, qui le priva de
s'embarquer ;\ Gênes, avec sa de-
mi-brigade; le 3 floréal, 8 jours
après son départ d'Alexandrie, il
se rendit S Toulon, d'où devait
partir une 2* expédition pour l'É-
5;4
GEN
i^yple, mais qui n'eut pai< lii!U. La
^jUerre sur le point de recom-
mencer cntr«; la France et l'Aulri-
che, les délachemens des diff'j-
rons corps de l'armée d'Oricni se
vendirent à Milan, où il? furent
organisés eu corps d'infanterie et
de cavalerie; le capitaine Gcne-
vay y cominanda une compagnie
de grenadier?. Le 5 germinal an 7,
à Tauffers dans le Tyrol , avec sa
compagnie et une de carabiniers
de la 12* demi-brigade d'infante-
rie légère, il coupa de sa commu-
nicalion la division autriobienne
commandée par le général Lau-
don , s'empara de 2 canons, et
contribua à la ruine de celte divi-
sion , qui en tué?, blessés et pri-
sonniers, perdit dans celte action
5ooo bommes et 18 pièces de ca-
non. Le i5 floréal an 7, sur la rou-
te de Bellinzonna à Lugano, il en-
leva 4 compagnies de grenadiers
hongrois retranchées dans un ci-
metière. Le i3 prairial de k mê-
me année, la division du général
Lecourbe, dont le corps d'expédi-
tion infanterie faisait alors partie,
ayant attaqué le corps autrichien,
qui avait franchi le Saint Goihard,
et pénétré dans la vallée d'Urse-
ren , il prit le colonel autrichien
commandant l'avant-garde, et un
capitaine; après la défaite des ar-
mées russe et autrichienne en
Suisse, les officiers, sous-officiers
et soldats du corps d'expédition,
rejoignirent à Toulon les dépôts
de leurs demi-brigades. Il com-
manda la compagnie de grena-
diers du bataillon de la 69* demi-
brigade, faisant partie de la divi-
sion du général Chabraud, qui à
l'armée de réserve dans la campa-
gne de l'an S, passa le petit Saint-
GEN
liernard , et força le fort de Bard à
capituler. Au passage du Mincio,
le 5 nivôse an 9. le capitaine Ge-
nevay fut cité par le général Seras
pour s'être distingué à l'attaque
des hauteurs de Vallegio. Il prit
part <'i la campagne de l'an 10,
dans le royaume de Napics, et à la
réorgani><ation de la 69* denii-bri-
gade, après son retour d'Egypte,
il commanda ime compagnie de
grenadiers; il a fait, à Tarmée sur
les côtes de l'Océan, les campagnes
des années 12 et i3. Au camp
de Boulogne, il reçut la décoration
des braves. Le 22 vendémiaire an
14» il se distingua à la bataille
d'filchingen. Le i3 brumaire de
la même année, la brigade du gé-
néral Roguet s'empara à l'entrée
des gorges du Tyrol, du fort de'
Leutasch, et se porta à Secfcid.
Le lendemain 14, la garnison du
fort de Scharnilz se voyant tour-
née, évacue ce fort pour se retirer
à Inspruck. Chargé avec sa com-
pagnie de garder à Seefeld la
route qui de ce village va à Schar-
nilz, et ayant entendu à 5 heures
du matin un mouvement de trou-
pes sur la route, il se porte à la
rencontre de la colonne ennemie,
que ses grenadiers enfoncent à la
baïonnette. Huit cents prison-
niers, un drapeau et i3 pièces de
canon, furent le résultat du
sang-froid et de la bravoure du
capitaine Genevay. Le 25 décem-
bre 1806, à la prise de Soldauw
dans la Vieille-Prusse, il contri-
bua à enlever un drapeau et 2 ca-
nons. Nommé chef de bataillon
au 76' régiment d'infanterie de li-
gne 6' corps, commandé par le
maréchal Ney, il reçut la croix
d'officier de la légion-d'hooncur.
(JEN
pour s'Ctrc distingtiéà la balaillo de
Friedland. Envoyé en Espagne et
en Portugal, il y fit les campagnes
de 1808, 180C), 1810, i8i I et 1812;
il avait été blessé en iSoc). Nom-
mé major le 28 janvier 18 15, il
passa à la grande-armée, au 140*
régiment de ligne division Alhert,
5' corps, commandé par le prince
de la Moskowa. Sa conduite an
combat de Wolseim, le 19 août
i8i3, entre la division Albert et
un corps de 20.000 Russes, lui va-
lut le grade de colonel du iSg"
régiment. Le 27 août après la
malheureuse affaire de la Ratze-
back , le i/<o' et une compagnie
d'arlilhrJe légère furent envoyés
sur la Buber, pour faire passer sur
la rive gauche de cette rivière , le
grand pure d'artillerie; ne l'ayant
pas trouvé au lieu indiqué, il se
porta sur Kolbcrg, où il avait or-
dre de se rendre, mais à une de-
mi-lieue, une forte colonne d'in-
fanterie , de cavalerie et d'artille-
rie dirigée vers Kolberg, s'é-
tant montrée, il rétrograda sur la
Bober où il arriva à G heures du
soir. Les eaux en étaient tellement
grossies, qu'il de venait impossible
de tenter le passage avec de l'in-
fanterie , sans l'exposer à une
perte certaine. Un paysan dont il
s'empara, refusant de lui indiquer
un paîsage, il mit pied à terre, et
entra dans la Bober tenant le
paysan par le collet ; celui-ci ef-
frayé promit alors d'indiquer un
endroit à peu près guéable, ;\ une
demi-licue de là. il était nuit clo-
se. Le passage s'elfeclue. L'artil-
lerie malgré son courage et sur»
dévouement perd son matériel;
l'infanterie perd un ollicier et i5
hommes; ainsi par l'aclivilû et lu
GEN 575
dévouement de son m.-^or, le i4o'
rejoignit le 28 août, sur le Zobau
Wasser, le 5* corps d'armée, qui
le croyait toudié entre le,s mains
de l'ennemi. Le 14 octobre 18 ij,
le général Albert ayant ordonné
au colonel Genevay de s'emparer
du village de Licbertwolkooell, en
avant de Léipsick, il y pénètre au
pas de charge à la lêle de son ré-
giment, tandis que le j4>'' régi-
ment l'attaquait par la droite, eu
chasse l'ennemi, et fait beaucoup
de prisonniers russes et autri-
chiens. Le 16 octobre à la bataille
de Waselnau, il parvint avec le
chef de bataillon Boarin de son
régiment, et l'adiudaot-njajor Ger-
main du iSâ*", à retirer des mains
des Un sseslcgénéral comte Maison;
quelques instans après le colonel
reçut un coup de feu à la tête. LeiQ
juillet i8i4î le roi le nonmia che-
valier de Saint-Louis, et à l'orga-
nisation de l'armée, il fut placé à
la suite du 24' régiment d'infan-
terie de ligue, dont il prit le com-
mandement. Le 10 juin 181 5, il
a fait à l'armée des Aljies, sous lo
maréchal Siichet, la campagne de
181 5, et fut cité par le maréchal
pour s'être distingué à la tête de
son régiment, le i 5 juin, à Aiguës-
Belle eu Savoie , où le régiment
de Savoie-infanterie fui pris en
entier. Le 8 juillet le colonel Ge-
nevay couvrit avec son régiment la
retraite de l'armée, depuis le pont
d'Ain à Molon, et de là à Wexi-
mieux. Le 10 il fut placé au villa-
ge de Saint-Georges, en arrière
de Meximieux, dangereuse po-
sition occupée par 2 compagnies
de voltigeurs et 100 dragons du
i8'. Il y fut attaqué par I'a\aut-
garde du l'armée autrichienne,
570
GKN
qui ne put le chasser de »a posi-
tion ; à 11 heur(;9 du soir, il eut
ordrt; de se njtiier et de se rendre
:\ Dagneux, sous les ordres du gé-
iiéial comte Mcynadier. Le 1 1
juillet, le 2'[' régiment l'ut placé
siïi' les bailleurs eu avaut de Da-
fjneux, un bataillon de douani<;rs
à sa droite, et un du 67' régiment
à sa 'gauche. Au jour l'avanl-gar-
de autrichienne parut, «l le baron
de Frimonf, Français émigré com-
mandant en chef l'armée autri-
chienne, fit ses dispositions pour
chasser les Français de leurs po-
>ilioUs. A io heures le baron de
Figuelmont chef d'état-major de
M. de Frimont, et un colonel au-
trichien, arrivèrent à Dagneux ,
pour traiter de l'évacuation de
Lyon , avec l'adjudant-comman-
dant Ricci, le lieutenant-général
f acthod et M. Jars maire de Lyon;
vers les 2 heures après midi, M.
de Frimont impatient sans doute
de voir que ses envoyés ne termi-
naient pas aussi vite qu'il le dési-
rait, fait marcher ses troupes sur
les Français, malgré la présence
de M. de Figuelmont, et d'un co-
lonel de son armée, au milieu des
troupes françaises ; ces dernières
les laissent approcher, et font sur
elles un feu si bien dirigé, qu'elles
sont forcées de se retirer; elles se
rallient et marchent de nouveau
en avant et au pas de charge: la
même réception lesattendail, mais
le colonel Genevay reçoit alors
l'ordre de faire cesser le feu, et le
^ colonel qui avait accompagné M.
de Figuelmont est envoyé près
du baron de Frimont, pour l'en-
gagera ne pas renouveler ses mou-
vemens hostiles; M. le baron
irrité de la résistance qu'il avait
(.ES
rencontrée fait marcher fe« trou-
pes en avant pour la 5' fois ; si
les troupes françaises n'avaient
pas eu ordre de ne point faire feu,
M. de Frimont aurait encore eti
la douleur de voir ses troupes ré-
trograder; arrivées à cin(pianle
pas, les Français les somment de
s'arrêter; dtjs oiTiciers autrichiens
répondent qu'ils ont ordre de
marcher, et les Français leur ré-
pliquent qu'ils ont ordre «le gar-
der leurs positions ; pendant ces
pourparlers, le colonel Genevay
s'apercevant qu'une colonne en-
nemie est sur le point de heurter
la gauche de sou régiment, s'y
porte au galop, met pied à terre,
se jette seul au n)ilieu de cette co-
lonne, et demande à parler au gé-
néral qtn" la commande; un olTi-
cier autrichien l'accompagne et le
conduit au général, qui était à la
gauche de lacolorme. «M. le géné-
ral, lui dit le colonel, vous pouvez
disposer de ma vie, mais si à l'ins-
tant vous ue faites arrêter vos
troupes, M. le général baron de
Figuelmont, qui c-t entre les
mains des Français, dans dix mi-
nutes a cessé de vivre. » Le géné-
ral autrichien, plus humain et plus
sage que M. de Frimont, fait aus-
sitôt arrêter sa colonne, donne sa
parole au colonel , que ses trou-
pes passeraient la nuit dans la po-
sition qu'elles occupaient dans ce
moment, et fait accompagner le
colonel par 4 olficiers , pour re-
tourner à son régiment. Les Fran-
çais et les Autrichiens passèrent
ainsi la nuit, à 10 pas les uns des
autres. La convention de l'éva-
cuation de Lyon ayant été si-
gnée, les Français quittèrent leujs
positions le 12 à midi, pour se
GRE
rendre à iMirebel. Après le liceii-
cieraent de l'uruiéc, le colonel Gè-
ne vay se retira dans le Jura, où
pour prix du sang qu'il avait ver-
sé pour la patrie, il fut long-temps
per?éculé; enfin il vit paisible-
ment aujourd'hui (iSa;)), dans
une modeste r<îtraile, n'ayantpour
toute fortune depuis le i" janvier
1823, que la solde de retraite à la-
({uelle ses services, ses campagnes
elses blessures lui ontdonné droit.
GEORGET, peintre, voy. le
Supplément du tome X.
(iILCHRIST, orientaliste an-
f;lais, voy. le Supplément du to-
me XV.
GOICOECHEA , professeur,
i"/. le Supplément du tome VIII.
GOUVION SAINT-CYR, ma-
réchal de France , voy. lo Supplé-
ment du tome XVI.
GRANGENEUVE, avocat, voy.
le Supplément du tome IX.
GRAPPIN, chanoine, voy. le
Supplément du tome XII.
GREGORIO (IlosAïKc), naquit
à Palerjne en octobre i^SS. Il en-
tra dès sa jeunesse dans la carrière
ecclésiastique. Doué d'un esprit
prompt, d'une mémoire heureuse,
il réunissait à une imagination
vive un jugement sûr. Il ne tarda
pas i\ se faire remarquer par ses
qualités et ses talens , qui le tirè-
rent bientôt de son obscurité. Suc-
cessivement lecteur en théologie,
chanoine de la cathédrale, abbé
de Sainte-Marie de Roccudia et
historiographe du roi, il s'est li-
vré avec succès à des travaux his-
toriques, et particulièrement sur
riiisloire de son pays. Lorsqti'en
• 784 parut le fameux Codice di-
ptomalico di Sirilia , que l'abbé
Vtlla prétendait avoir traduit de
GRE 5;7
l'original arabe, c'est M. Gregorio
qui, le premier, en 1786, com-
mença t\ en découvrir et à en faiie
connaître la fausseté. C'est alors
qu'il s'appliqua beaucoup à la
langue arabe, dont la connais-
sance lui devint aussi facile que
celle de la langue grecque. Il pu-
blia , en 1790, dans un volume
in-folio, la traduction de plusieurs
morceaux d'écrivains arabes qu'il
avait tirés de la bibliothèque de
l'Escurial et de celle de Paris; et
il y joignit la iraduclion de diffé-
rentes inscriptions arabes , dont
la Sicile abonde. Il parvint ainsi
à lier ensemble les travaux que
di Giovanni avait faits sur l'époque
byzantine à ceux de Cnruso sur
l'époque de la domination des
Normands et des Suèves en Si-
cile. Cet ouvrage mérita que RI.
Dacier en fît mention et en parlât
avec éloge dans son rapport à
l'empereur Napoléon sur l'état
des sciences, etc. On ne douta
plus, en 1795, de la fausseté du
Code de l'abbé Vella, ce qui fit
beaucoup d'honneur au chanoine
(iregorio , qui avait dû vaincre
dans celte occasion bien des dilli-
cultés et des ob>la(les. En atten-
dant, on avait déjà établi dans
l'université de Pnlerme la chaire
de droit public sicilien, dont M.
Gregorio avait été nommé pro-
fesseur. Il eut alors devant lui un
champ vaste pour se livrer à la
diplomatie sicilienne, qui était en-
core presque dans son enfance.
C'est avec beaucoup de peine que
visitant les archives des églises et
des thancellerie? , et fouillant les
lois anciennes, les coutumes (ro/j-
siiàtudcfi) des villes, les chroni<]ue<
et les vieux diplômes , il réus-
578 G RU
sit à ramasser les malciiaux dont
il avait besoin. Le premier fruit
de SCS recherches fui la BibliO'
tkcijue aragonaise , qu'il publia en
3 vol. en 1793, et dans laquelle
il fait connaître l'état du droit pu-
blic en Sicile du temps des Ara-
gonais. Quelque temps après, en
1794, parut la savante introduc-
tion à son grand ouvrage du droit
public sicilien, et c'est en i8o5
qu'il publia les deux premiers vo-
lumes de cet ouvrage, sous le titre
modeste de Considerazioni suUa
sloria di SicUia. 11 y prend pour
point de départ l'organisation po-
litique que la Sicile eut du temps
des Normands, et il montre en-
suite avec beaucoup de sagacité
et de finesse tous les changemens
survenus dans cette île sous les
différentes dynasties qui se sont
succédé depuis. Dans une matiè-
re qu'on avait tant négligée avant
lui, et dans laquelle cependant il
faut avouer qu'on devait déjà beau-
coup aux travaux de Moncilore et
du savant archevêque monsignor
Testa, on fit en peu de temps bien
des progrès; et la Sicile, qui était
encore restée fort en arrière, peut
maintenant, après M. Gregorio,
ne pas envier certainement Hume
à l'Angleterre , ni Mably à la
France. Il paya cher, par le ra-
pide épuisement de sa santé, l'a-
vantage d'avoir entrepris et exé-
cuté ce que rarement il est permis
de faire à un homme seul ou à
un seul âge. II mourut en juin
1809, sans qu'il eût pu voir la pu-
blication en entier de son ouvrage,
dont les deux derniers volumes
ne parurent qu'après sa mort, en
1810 et en 1816. II n'eut cepen-
dant pas le regret de voir dans la
HAD
même année 1816, avec la fin de
son ouvrage , la fin aussi en Sicila
de cette constitution dont il avait
tracé avec tant de peine et à
travers tant de siècles , l'origine
et les développemens. On lui a
reproché d'avoir peut-être trop
favorisé les prérogatives de la cou-
ronne sur les autres, et notam-
ment sur celles de la classe baro-
nale. Il paraîtra sans doute excu-
sable, si l'on considère sa situa-
tion et l'époque où il écrivait On
a de lui plusieurs mémoires et des
articles sur différens objets de
l'histoire civile et littéraire de Si-
cile, qui, tirés en partie de ses
manuscrits et en partie des alma-
nachs annuels de la cour, où on
les insérail, ont été réunis et pu-
bliés en 1821 , dans deux vol.
in-12. La Sicile honorera toujours
la mémoire du chanoine Grego-
rio, et son nom fixera une époque
dans l'histoire littéraire de son
pays.
HADOT (madame Marie-Adé-
LAÏuE Richard, veuve de Barthé-
lémy ) , romancière, naquit en
1769, et mourut à Paris, en 182 1.
Cette dame a été institutrice pen-
dant la révolution , et a composé
quelques ouvrages sur l'éduca-
tion. Elle fut obligée de cher-
cher dans les produits de sa plu-
me des moyens d'existence que
lui fournissait bien incomplète-
ment son pensionnat primaire.
C'est autant à cette nécessité qu'à
son penchant pour la littérature
que l'on doit sa trop grande fé-
condité dans le genre du roman
et dans le genre monstrueux du
mélodrame, double genre où elle
obtint du succès. Son style com-
me romancière est très-négligé.
IIAD
Subjuguée par son imagination ,
elle composait rapidement et d'a-
bondance, et ne se relirait pas.
Estimée dans ses relations socia-
les , elle se fit de nombreux amis ,
et convenait, avec une modestie
véritable, de l'imperfection de ses
ouvrages, dont nous citerons les
principaux. Ce sont : i" Zadig,
ou la Destinée , mélodrame hé-
roïque, en 3 actes, tiré du ro-
man de Voltaire , joué sur le
théâtre de la Gaîté , le 7 fructidor
an 12, i8oi,in-8°; 1° Maclovie,
comtesse de TVarberg, ou la Peine
du talion f mélodrame historique,
en Sactes, i8o5, in-S"; '5° l' Homme
mystérieux, mélodrame en 5 actes,
joué sm" le (héâtTe de la Gaîté, le
i>2 avril 1806, in-8°, 1806; 4"
Jean Sohieski , ou la Lettre , mé-
lodrame en 3 actes, joué sur le
ihéAtre de la Gaîté , le 22 mai
1806, in-S" ; 5" Jules , ou le Toit
paternel, mélodrame en 3 actes,
joué sur le thétilre des Jeunes
élèves, le )5 juillet 1806.10-8";
6°Àlméria,ou l'Ecossaise fugitive,
mélodrame en 5 actes, joué sur
le théâtre des Jeunes élèves, le 8
décembre 180G, in -8°; 7° Clo-
tildc de Ilapsbourg , ou te Tribu-
nal de Neœstadt, Paris, 1810, 4 vol.
in-12 ; S° Stanislas Zamoski,ou les
Illustres Polonais f 1810, 4 ^ol.
in-12; 9* les Loisirs d'une
bonne mère, ou le Décameron de
l' adolescence y 181 1 , 2 vol. in- 12;
10° l' Amazone de Grenade, mélo-
drame en Sactes, représenté sur le
théâtre de lu Gaîté, le 27 février
1812, Paris, 1812, iu-8* ; ii'
Claricc , ou la Femme précepteur,
mélodrame en 5 actes, représenté
sur le théâtre de la (iaîté, le 3omai
1812, Paris, 1812, ia-8"; 12" les
HAD 379
Mines de Mazzara, ou les Trois
Sœurs, Paris, 1812,4 vol. in-ia;
1 5" les Soirées de société , ou
un Hiver à Paris, Paris, i8i5i,
4 vol. in-12; 14° Anne de Russie
et Catherine d Autriche , ou les
Chevaliers de l'ordre Teulonlque ,
et la Mère écuyer , Paris , 1 8 1 3 ,
3 vol. in-12; i5" Jacques I" , roi
d'Ecosse , ou les Prisonniers
de la tour de Londres , Paris ,
i8i4> 4 vol. in-12; ifi" tes
Deux Casimirs , ou Vingts ans de
captivité, Paris, i8i4, 4 v'- J""
12; 17" tes Novices du monastère
de Frémol, Paris, 1814, 4 ^^1.
in-12; 18" les Durs de Mos-
covie , ou le Jeune Ambassadeur ,
Paris, 1814, 5 vol. in-12; 19°
la Tour du Louvre, ou le Héros
de Bouvines , Paris, i8i5, 4 vol.
in-i 2; 20" ta Vierge de i'Indoslan,
ou les Portugais au Malabar, Pa-
ris, i8iG,4 vol. in-i2; 21''/^'* Af<^-
ritiers du duc de Bouillon, ou les
Français à Alger, Paris, i8i6,
4 vol. in-12. ; 22° l'Honneur et
rÉchafaud , mélodrame en 5 ac-
tes , joué sur le théâtre de la
Gaîté, 1816, in-8°; 23' Guil-
laume Venn , ou les Premiers Co-
lons de ta Pensytvanie, Paris, i8i6,
3 vol. in-12 ; 24° Isabelle de Po-
logne, ou la Famille fugitive, Pa-
ris, 1817, 4 vol. in-12; 25" les
Vénitiens , ou Je Capitaine fran-
çais, Paris, 1817, 4 vol. in-i2;
2G' Archambaud et Roger, ou le
Siège de Metz, Paris-, 1817, 4
vol. in- 1 2 ; 27° Atelwood et Clara,
ou la Montagne de fer , Paris ,
1818, 4 vol. in 12; 28° Ernest
et Vendôme, ou le Prisonnier de
Vincennes, Paris, 1818, 4 vol.
iu-12 ; 29" Fernand d'Alcantara,
ou la Vallée [de Roncevaux , Paris,
58o
HAL
1818, 4 vol. in-13; 7)0' Laurence
de Sully, ou C H ermitage en Suisse^
Paris, 1819, 4 vol. in-12; 5i°
Arahelle et Matkilde, ou les Nor-
mands en Italie, Paris, 1819, 4
vol. in-12; 52° la Jicvolte de Bos-
ton , ou la Jeune liospilaliére , Pa-
ris, 1820, 3 vol. in 12; "ôo" Pierre-
le-Grand et lesStrciUz, ou la For-
teresse dela'Moskowa, Paris, 1820,
3 vol. in-12; 54° Mademoiselle de
Montdidier, ou la Cour de Louis
XI, Paris, 1S21 , 5 vol. in-12,
ornés du portrait de l'auteur. Gel
ouvrage parut la veille de la mort
de l'auteur.
HALEVY (Léon). Depuis l'ar-
ticle que nous avons consacré à
ce jeune liltérateur dans le Sup-
plément de notre 18' volume, il
a publié deux productions nou-
velles : i" un recueil de poésies
.sous ce titre : Trois élégies, sui-
vies d'un fragment épique. Ce re-
cueil a obtenu un succès mérité; le
Sommeil de la mourante a surtout
réuni tous les suffrages. 2° Résu-
mé de r histoire des Juifs anciens ,
un volume in -18; cet ouvrage
manquait à notre littérature : il
est écrit avec beaucoup d'impar-
tialité et de mesure; l'auteur s'est
attaché surtout à présenter les
faits sous leur aspect dramatique
et pittoresque. Malgré les bornes
étroites dans lesquelles il était o-
bligé de se resserrer, il a rendu
son travail très-substantiel ettrès-
complet. La partie de son i-ésumé
où il traite de Jésus-Christ et du
christianisme naissant, est d'au-
tant plus (ligne d'attention , que
M. Léoif Halevy est israélite. « La
religion juive, dit-il, par son dog-
me de l'unité de Dieu, par l'excel-
lence cl la liberté de sa morale ,
HAL
était destinée à devenir ia religion
de la civilisation moderne. Mais
il fallait pour cela compléter sa
morale au lieu de la restreindre.
Il fallait remonter à sa source di-
vine, la reprendre dans sa pureté
primitive, pour lui faire subir une
transfiguration conforme aux be-
soins et à l'esprit du temps. C'est
ce que tenta Jésus; il remonta ù
Moïse, comme Luther, dans la sui-
te, est remonté à Jésus-Ciirist. » Il
faut voir dans l'ouvrage même,
con)ment l'auteur développe cet-
te idée par une analyse tidèle de
l'Evangile; et comment il démon-
tre en même temps, que d'après
les lois juives, Jésus-Christ de-
vait subir la peine capitale. M.
Halevy termine son histoire à la
prise de Jérusalem par Titus; et
après avoir tracé en peu de pages,
un tableau brillant et animé des
juifs, pendant la dispersion, et de
leur état présent, il adresse à ses
co-religionnaires des conseils que
nous voudf'ions pouvoir reprodui-
re ici en entier: il les engage à in-
troduire dans leur culte des réfor-
mes « dont l' urgence est reconnue
» par tous les esprits éclairés ; ce
» culte, ajoute-t-il, n'est pas euro-
opéen, il est asiatique; il gêne
«dans beaucoup de parties l'exer-
» cice des droits et des devoirs ci-
«viques La religion de Moïse,
«ramenée à son principe pour su-
obir les nouvelles formes qu'exi-
Bgent les besoins du temps, repro-
«duirait le christianisme primitif,
»si étrangement déûguré par les
«Pharisiens du catholicisme. » Si
nous nous sommes un peu éten-
dus sur cet ouvrage, c'est qu'il est
doublement important et par la
manière dont il est exécuté, et
IIEN
par la position partic«ili«;re de l'au-
teur.
HAMMER (de), orientaliste,
voy. le Supplément du tome XVI.
HEIBERG, littérateur, voy. le
Supplément du tonte XII.
HENAULT (Jean-François),
négociant, voy. le Sup. ^du t. X.
HÉNIN DE eu VILLE lis
( ÉtIEHNE-FÉLIX , BARON d' ) , MM-
réclial-de-camp, tic. [Voy. sur le
même nom ce qui en a été dit au
IX* I. qui précède, pag. 1 2.'j ;\
128, et dans le XIII' suivant,
pag. 267 à 358.) Nous ajouterons
ici que M. d'Hénin, auteur de
plusieurs ouvrages dont nous a-
vons déjà rendu compte, a pu-
blié, i" la continuation de ses
Archives du Magnélisine animal ,
tomes V, VI, VU et VIII, dans
lesquels on remarque do savantes
observations physiologiques des
plus curieuses , avec des ré-
ilexions très- piquantes sur la fa-
culté de prédire, attribuée aux
somnambules,sur les rêves, sur les
illusions et les visions, sur le som-
meil extatique, sur les miracles
de la phanlmiéxoussie-oniroscopi-
que , qui, suivant cet auteur, sont
tous purement naturels. On v lit
aussi une discussion profonde ,
dans laquelle M. d'Hénin admet
lin»; transfusion de facultés mo-
rales et une atmosphère de sensi-
bilité , qui agissent réciproque-
ment parmi le'K êtres animés, et
qui servent à expliquer les guéri-
sons et les prodiges du magné-
tisme animal ; mais il prétend
qu'il serait inconvenant de la part
des médecins de jouer le rôle iu-
signifiant de magnétiseurs exal-
tés, et de déposer l'honorahle
chausse de docteur, pour vêtir les
HEN 58i
livrées du charlatanisme. On trou-
ve enfin à la pag. 97 à 129 du
VHP tom. , une dissertation vrai-
ment théologique, dans laquelle
M. le baron d'Hénin avance que
Jésus-Christ, comme fils de Dieu
et comme fils de l'homme, a opéré
également des miracles surnatu-
rels, ainsi que des phénomènes
très-naturels, improprement ap-
pelés magnétiques f mais qu'on
doit, dit-il , désigner sous le nom
de miracles phanlaziéxoussiquea.
Il en conclut que le christ était
magnétiseur, et que c'est en Egyp-
te qu'il a été instruit dans l'art de
magnétiser. II fonde cette asser-
tion sur un passage du célèbre
apologiste de la religion chré-
tienne, Arnobe l'ancien, qui a dit
que les païens prélendaient que
Jésus-Christ avait dérobé les pra-
tiques secrètes des prêtres égyp-
tiens, conservées dans les lieux
les plus cachés de leurs temples.
Mgyptiorum ex adylis remotas fu~
ratus est disciplinas. (Arnobius,
lib. I, contra gentiles.) Cette
matière était délicate sans doute,
et l'auteur paraît l'avoir traitée
avec toute la convenance que ce
sujet a dû lui inspirer. a° Une
nouvelle édition de la Monarchie
des Solipscs, in-S". Paris, 182 îj,
précédée d'un discours prélimi-
naire, dans lequel M. d'Hénin y
attaque avec una éloquente éner-
gie les intrigues ambitieuses des
jésuites ou pères de la foi, et y
dévoile hardiment l'immoralité
jésuitique qui, dit-il , menace au-
jourd'hui l'Europe d'une invasion
générale. 5" Des Comédiens et du
Clergé. Cet ouvrage contient des
observations historiques sur les
prêtres autrefois danseurs, far-
582
HER
cciirs , comédiens, fauteurs cl
spectateurs de comédies dans les
églises, et est suivi de réflexions
critiques sur le mandement de M.
l'archevêque de Rouen.
HERMAND(E. L. J. D'.), an-
cien diplomate, voy. le Supplé-
ment du tome IX.
HERSENT (Louis), membre de
l'institut, voj. le Supplément du
tome XV.
HERVÉ (Christophe), colonel
de Pex-ôg' régiment de ligne, ofli-
cier de la légion-d'honneur , che-
valier de Saint-Louis , est né à
Cernans, déparlement de la Sar-
ihe, le i5 avril 1768. Il entra au
service, comme simple soldai,
>en 1785, et n'était parvenu en
178g qu'au grade de l'ourrier. M.
Hervé, qui était rentré dans ses
loyers au comuiencementde 1791,
reprit de l'activité comme volon-
taire au 5' bataillon de l'Yonne,
en 1792, et n'a cessé d'en avoir
qu'en 1816, époque où il fut ad-
mis à la retraite. Les campagnes
de la révolution, où il montra du
talent, de l'activité et du coura-
ge, le firent parvenir successive-
ment au grade de colonel, et lui
valurent la croix de la légion-
d'honneur le 26 prairial aii 1 2 , et
le brevet d'oflicier du même or-
dre le 12 octobre 1812. Il a fait
les campagnes de i 792 à l'armée
de réserve , et de 1795 à l'armée
du Nord; celles des années 2,3,
4 et 5 aux armées du Nord et de
Sambre-et-Meuse; de l'an 6 aux
armées d'Allemagne et de Mayen-
ce; de l'an 7 à l'armée du Danu-
be et d'Helvélitt-; des années 8 et
9 en Helvélie cl en Italie; des
années 12 et i5 sur mer : il fut
embarqué a Toulon, sur le Sci-
HER
ino7i; de l'an 14 et de i8o5 à la
gramlc-armée ; de 1806 cl de 1807
en Prusse et en Pologne; de 1809
à la grande armée d'Allemagne ;
de 1812 en Russie, et de i8i3 et
1814 en France, au blocus de
Schclestadt. Cet officier a tou-
jours montré beaucoup de bra-
voure, notamment au combat
d'Audeffingeu , où il fit 400 pri"
sonnirrs, et où il fui blessé d'un
coup de feu au flanc et au bras
gauche. Dans la campagne de l'an
g , il eut le commandeuieut d'une
compagnie d'éclaireurs au passa-
ge du tMincio; il fut ensuite char-
gé parle général commandant l'a-
vanl-garde, de différentes excur-
sions en avant et sur les flancs de
la division; il s'en acquitta de
manière à justifier la confiance du
général et à acquérir son estime.
Le 5 nivôse an 9, il chargea à la
lêle de sa compagnie sur les hau-
teurs de Valegio, et s'empara de
5 pièces de canon. Le 21 avril
1809, le général Priant lui donna
l'ordre d'enlever avec sou batail-
lon le village de Pering, où il fit un
grand nombre de prisonniers. A la
bataille de Wagrani, il comman-
dait le 108' régiment. Il se fit re-
marquer par sou courage cl sou
sang-froid. A la bataille de Mo-
saïsck, le 7 sepleuibre 1812, il
entra un des premiers dans la re-
doute armée de 18 pièces de ca-
non, que le So" régiujent enleva
à l'ennemi. Il fut blessé d'un é-
clat d'obus au combat d'Ygyate,
le 1*' novembre i8ji2,àla retraite
de Russie. Cet officier supérieur
jouit dans la retraite de l'estime
générale que lui ont méritée ses
longs et honorables services et son
inviolable altachemenl à sa patrie.
J-c ( a<' rU^(r/i<j('/H>^/i
LAN
HOUDON (N. ), membre de
l'inslilut, vcy. le Supplément du
touie X.
llUIiLIN, lieulennnt-général,
voy. le Siippléuient du (orne X.
HUPPÉ, colonel, voy. l'Enata
du tome X.
JEUZMANOWSKI (lr baron),
voy. le Siipplémeut du tome XVII.
JOURDAIN, orientaliste, voy.
le Supplément du tome XI.
JOVEN DE SALAS, conseiller-
d'état espagnol, xoy. le Supplé-
n)eiit du tome XI.
JUDICIS, ancien magistrat,
voy. le Supplément du tome X.
^KELLERMAN , duc de Valmy,
voy. le Supplément du tome XI.
KIRCKHOFF,docleur en mé-
decine , %)oy le Supplément du
tome XVI,
KLICKI, général de caVale-
rie , voy. le Supplément du tome
XVII.^
KOSSAKOWSRI, général, poj.
le Supplément du tome XVII.
KOZIETULSKI, chef d'esca-
dron, voy. le Supplément du tome
XVII.
LAFITIIE , coI-)nel , voy. le
Supplénj(!nl du tome XI.
LAMARCK, savanl naturaliste,
voy, le Supplément du lome XI.
LAMARTINIÈRE, -. n. i •! de
divisir)n , voy. le Suppiément du
tome XII.
LAMBALLE (princesse de),
voy. h; Supplément du tome XI.
LANCitRON (le comte de).
( D.ins le tome X de la Biogra-
phie nouvelle des Contemporains ,
nous a von» consacré une Notice à
M. le comte de I/jngerou,où nous
avons traité avec une grande im-
partialité ce général on chef étran-
ger (|ui, né eo France, a eu le mal-
heur, par 5uitc de sa position po-
LAN
38"
lilique , de combattre ses anôiens
compatriotes et de leur faire beau-
coup de mal à des époques (i795-
i^f)4' ï8i3-i8i4î) où ils étaient
à la fois assaillis par d'implacables
ennemis et par des désastres de tout
genre. Un ami deM.de Langerona
jugé noire article incomplet, et
nous a communiqué sur sa vie des
détails que nous avons accueillis,
quoiqu'ils nous aient paru sou-
vent minutieux, parce que nous
nous sommes toujours fait un de-
voir de montrer noire parfaite im-
partialité et de réunir dans cet ou-
vrage tous les rcnsei-^neniens qui
peuvent servir à éclairer l'histoire
contemporaine. Nous n'hésitons
pas à croire ;'i l'exacliludedes faits
retracés dans celle nouvelle notice
sur M. de Langeron , en laissant
néanmoins ii l'auteur une entière
responsabilité sousce rapport. )i>l.
de Langeron est issu d'une ancien-
ne famille noble et illustrée du Ni-
vernais. Ses ancêtres s'étaient il-
lustrés dans la carrière des armes;
il fut aussi destiné à la parcourir, et
son éducation fut dirigée vers ce
but. Le désir de s'y distinguer l'en-
gagea non-seulement à profiler des
occasions que le liasiird lui offrit,
mais encore à les faire naître. La
guerre entre la France cl l'Angle-
terre, déclarée en 1778, lui j)ro-
cura bientôt ce qu'il souhaitait
avec ardeur. Au commencement
de 1770, '' H"'^'*'* '•^ régiment dis
gardes-françaises, où il servait
comme enseigne surnuméraire,
pour entrer sous-lieutenant dans
le régiment deLimosin-infanterie,
dontson oncle, lecomicde Damas,
était colonel : ce régiment faisait
partie du corps d'armée comman-
dé pur M. le marquis de Langeron,
cousin du jeune tuinlc, cl qui
584
LAN
était desliné A opérer une descente
en Angleterre. Cetic descente
n'eut point lieu : mais le comte
de Langeron, fuyant la vie de
Paris, qui pouvait n'être pas sans
attrait pour un jeune homme de
19 ans, maître d'une grande for-
tune , entra en qualité de sous-
lieutenant dans le régiment de
Bourbonnais infanterie, comman-
dé par le marquis, depuis duc de
Laval - Montmorency , et partit
avec lui de la Rochelle, au mois
de juillet 1782, sur la frégate
l' Ai-gie , pour l'armée du lieute-
nant-général comte de Rocham-
beau, qui se trouvait alors dans
l'Amérique septentrionale , réunie
à l'armée des Etats-Unis, sous les
ordres du général "Washington.
Le comte de Langeron se trouva
(en septembre 1788) au combat
glorieux que les frégates françai-
ses L'Aigle et la Gloire soutin-
rent contre le vaisseau anglais
l'Hector, de 74 canons, et à ce-
lui que les deux mc'mes frégates
eurent dans la Delaware contre
l'escadre anglaise du commodore
Elphingston. La frégate l'Aigle,
que montait le comte de Lange-
ron, échoua et fut prise ; mais à
l'aide de radeaux, il gagna la terre
avec le général baron de Yiomes-
ni'let autres officiers : ils sauvèrent
5 millions d'argent que la cour
envoyait à M. de Rochambeau ,
et abandonnèrent tous leurs équi-
pages. Débarqué près de Phila-
delphie, le comte de Langeron
rejoignit l'armée alliée au camp
de Crampon , sur la rivière d'Hud-
son , et marcha ensuite à Boston ,
où il s'embarqua pourrAinérique
méridionale sur l'escadre com-
mandée par M. le marquis de Vau-
LAN
dreuil, lieutenant-général des ar-
mées navales : il fit la campagne
de 1785, sous les ordres de M. le
général baron de Viomesnil, à
Porto-Cabello, à Caracas, dans
la Terre-Ferme de l'Amérique mé-
ridionale , à Curaçao et à Saint-
Domingue. Au mois de juillet de
la même année, la paix le rame-
na en France , et il obtint le grade
de capitaine au régiment de Con-
dé-dragons : en 1786, il fut nom-
mé colonel en second du régi-
ment de Médoc, et en 1788, co-
lonel surnuméraire du régiment
d'Armagnac. La guerre ven lit d'é-
clater entre la Turquie et la Rus-
sie et l'Autriche, et entre la Rus-
sie et la Suède. Le comte de Lan-
geron , fidèle à ses principes et à
son désir d'acquérir de la gloire,
sollicita long-temps, mais vaine-
ment, la permission de servir
comme volontaire dans l'armée
autrichienne; malgré la protec-
tion que la reine de France, Ma-
rie -Antoinette, lui accorda au-
près de son frère l'empereur Jo-
seph II, ce prince se refusa à
admettre des volontaires étran-
gers dans son armée, et ce refus
fit perdre au comte de Langeron
deux campngues brillantes qu'il
eût pu faire dans l'armée russe.
Le prince de NassauSiégen qui,
entré depuis peu au service de
Russie, avait vaincu sur mer les
Turcs, prèsd'Otchakow, en 1788,
et les Suédois dans la Baltique,
en 1789, se chargea d'obtenir de
l'impératrice Catherine II, pour le
comte de Langeron, la permis-
sion de servir dans ses troupes,
et il partit pour Pétersbourg, où
il arriva le 19 mai 1790. La ré-
volution française était commen-
LAN
côe. Le comte de Langeron se
flattait de revenir bientôt consa-
crer à sa patrie des connaissances
acquises par l'expérience; le sort
en ordonna autrement, et il ne
devait la revoir que 24 ans après.
Admis en qualité de volontaire au
servicedeRussie, le comte de Lan-
geron fut d'abord employé à la flo-
tille commandée par le prince de
Nassau : elle était destinée à agir
contre les Suédois dans la mer
Baltique. On lui confia le com-
mandement d'une division de
chaloupes -canonnières, et il se
trouva, en juin 1790, au com-
bat du détroit de Biorck : sa
conduite lui mérita la croix de
Saint-Georges de la 4' classe. Le
lendemain, il se trouva au com-
bat des deux grandes flottes com-
mandées par l'amiral ïchitcha-
gow et par le duc de Sudcruianie ,
avec qui le roi de Suède se trou-
vait. Ce combat eut lieu près de
Rogcl, el après la défaite des Sué-
dois , le comte de Langeron s'em-
para, avec sa division de chalou-
pes canonnières, de plusieurs bà-
timens ennemis. Huit jours après,
i! commanda l'aile gauche des
chaloupes canonnières à la san-
glante bataille de Rotchensalm,
où la flotille suédoise, comman-
dée par le roi en personne, dé-
truisit la flotille russe. Le comte
de Langeron courut dans caUn
bataille les plus grands dangers.
Il combattit pendant vingt-deux
heures , et ce ne fut qu'avec peine
qu'il gagna la rade de Frédérick-
sham , où le prince de Nassau ras-
sembla les débris de ses forces. Il
s'y maintint tout l'été, et fit mê-
me , au mois d'août , une expédi-
tion dirigée contre l'ilcde Corgé-
T. XX.
LAN
385
sari, dans laquelle le comte de
Langeron commanda dix chalou-
pes-canonnières. Après la paix
avec la Suède, qui se fit au mois
d'août 1790, le comte de Lange-
ron demanda et obtint d'aller ser-
vir contre les Turcs, en Bessara-
bie, à l'armée commandée par
le feld - maréchal prince Po-
temkin : il fut attaché à la flotille
sous les ordres de l'amiral Ribas ,
qui bloquait Ismaël. Cette ville
fut prise d'assaut, le 21 décem-
bre 1790 ( 1" janvier 1791). C'est
un des faits d'armes les plus mé-
morables du siècle. Les Russes ,
au nombre de 25, 000, comman-
dés par le général Suwarow, for-
cèrent et détruisirent 40, 000 Turcs
dans des retranchemens très-éle-
vés, précédés de fossés de plu-
sieurs toises de profondeur. Le
comte de Langeron monta à l'as-
saut à la tète du i" bataillon de»
chasseurs de Livonie, qui faisait
partie de la colonne du général
Arseniew : celte colonne, qui tra-
versa le Danube, supporta le feu
le plus meurtrier pour atteindre
le rempart de la vilh^. Les débris
des bateaux turcs coulés pendant
le siège, empêchant de parvenir
au pied de ce rempart , les Russes
se jetèrent dans l'eau pour monter
ensuite h l'escalade ; mais ils fu-
rent repoussés et rejetés dans le
fleuve : dans la chute que fit le
comte Langeron , il reput une con-
tusion în la jambe. C'est la seule
blessure qu'il ait reçue dans plus
de crut affaires de guerre où il
s'est trouvé. Cependant les Rus-
ses, plus animés que découragés
par la défense qu'on leur oppo-
sait, attaquent de nouveau, et
leur intrépidité est couroimée par
a5
38(i
LAN
'la victoire, que In hivivotire 'U"<
.'issiiigôs qui comballiiioiit fii (iù-
sespérés rendit plus éclalaiite en-
core. Il y périt 3o,ooo Turcs, et
les Russes eurent |)rès de i4,ooo
hommes tués ou blessés; c'était
beaucoup plus que la moitié des
assaillans. Le comte de Langeron
reçut pour ce l'ait d'armes une
épée d'or, avec cette inscription :
A la bravoure. En mai 1791, il
servit encore en Moldavie , sous
les ordres du prince Repnin, en
qualité de colonel, attaché au ré-
giment de Moscow grenadiers.
En juin suivant, il se trouva à la
bataille de Matchin. Il chargea les
Turcs avec les régimens d'Olvio-
pol et deVoronèje hussards , sous
les ordres du général Tormazow,
et reçut une lettre de remercie-
mens du prince Ilepnin. En juin
1791, il se rend h Mons (Ilainault),
et obtient du prince de Saxe-Tes-
chen du service, en qualité du vo-
lontaire, dans son corps d'armée;
il se trouva au combat de la Gri-
suelle , où le général Gouvion fut
tué. Au mois de septembre même
année, le comte de Langeron se
joignit à l'armée des gentilshom-
mes français émigrés, sous les or-
dres des princes, frères de Louis
XVI; il fit en Lorraine et en Cham-
pagne , avec l'armée prussienne ,
commandée par le duc de Bruns-
wick, une campagne pénible et
peu heureuse, et se trouva aux
combats de Verdun , de Scy , et
au siège de Thionville. Après la
retraite de l'armée prussienne et
la dissolution de celle des princes,
le comte de Langeron retourne à
Pétcrsbourg. L'impératrice Ca-
therine II l'envoie avec le duc de
Richelieu dans les Pays-Bas ser-
vir de nouveau à l'armée autri-
LAN
chletmc!, commandée par le ma-
réchal prince do Saxe-Cobourg :
il est chargé de rendre compte à Pé-
tersbourg des opérations de celle
armée. Il y fit les campagnes do
1790 et 1794» «-'t se trouva aux
batailles de Maubeuge, de Lan-
drecies, de Lannoy, deTurcoing,
dcTournay, de Fleurus ; aux com-
bats du camp de César, deGifl'eldt,
de Lefferinkouke, de Ro/cndall,
près de Duiikerquc, de la forêt
de iMormal, de Vattignies, de Wa-
terloo , de Maësiricht; aux sièges
de Valenciennes, de Dunkerque,
duQuesnoy, de Landrecies; à l'as-
saut du chemin couvert de Valen-
ciennes; à deux attaques du camp
retranché deMaubeuge,et au bom-
bardement de Dusseldorf. Lors de
la prise du chemin couvert de Va-
lenciennes , la vivacité de l'attaque
et l'explosion des globes de com-
pression ayant forcé les assiégés
de s'éloigner et de rentrer dans la
ville, le comte de Langeron s'a-
percevant qu'ils avaient abandon-
né les ouvrages extérieurs, les
parcourut tous, d'abord seul, et
s'y établit bientôt avec le comte
François Diedrischstein , lieute-
nant-colonel du génie : la ville
capitule le lendemain. A l'affaire
de Lefferinkouke et à celle de llo-
sendall, près de Dunkerque, le
comte de Langeron fut exposé aux
périls les plus imminens avec le
cotnte d'Alton, lieutenant-géné-
ral autrichien, commandant l'a-
vant-garde des alliés, qui fut tué.
A l'affaire du camp de César, il
sauva lu vie au duc d'Yorck, qui,
par méprise , n'étant qu'à dix
pas d'une colonne ennemie qu'il
croyait hanovrienne et qu'il cou-
rait rejoindre, est arrêté par le
comte de Langeron, et échappe
LAN
ainsi à une mort certaine. A celle
époque on ne faisait pas de pri-
itonniers par ordre formel de la
convention. Après les revers de la
campagne de 1794» et la retraite
des Autrichiens, derrière le Rhin,
le comte de Langeron retourna à
Pétersbourg. L'impératrice lui
donna le régiment des grenadiers
de petite Russie, qu'il rejoignit à
Dubno en l'ologne. Brigadier en
juillet 1796, en juin 1797 il fut
promu, par l'empereur l*aul I",
au grade de général- major , et
nommé chef du régiment d'Uu-
timsk infanterie, alors en garni-
son à Oufa, gouvernement d'O-
renbourg. Pendant l'été de 1797,
l'empereur se trouvant à Kasan,
y passa la revue de sou régiment,
et lui donna la croix de Sainte-
Anne de la 2' classe; il lui offrit
le gouvernement militaire d'Oren-
bourg, qu'il refusa. Il fut fait lieu-
tenant-général en octobre 1798.
Au commencement de 1799, il
fut employé en Courlande et en
Samogitie , en qualité de quartier-
maître - général d'un corps de
a5,ooo hommes, destiné à agir
contre la Prusse, sous les ordres
du général baron Benkendorf. A-
près la retraite de ce général, il
fut chargé du commandement
de ce corps. Lu guerre n'ayant
point eu lieu, ^empereur Paul
I" nouuna le comte de Lange-
ron chef du régiment de Riagsk,
et inspecteur de rinfanterie, de
l'inspcxlion de Bricch : à cette é-
poquc, il reçut l'ordre de Sainte-
Anne de la 1" classe, celui de
Saint-Jean de Jérusalem , et fut
fait comte île l'empire russe. Kn
i8o5, il marcha en Moravie dans
la seconde armée comu)andée par
le général comte Buxowden, et
LAN
387
après la réunion de cette armée
avec la première, sous les ordres
du général Koutouzow , le comte
de Langeron commanda la secon-
de colonne à la bataille d'Auster-
litz. Celte journée fut fatale à l'ar-
mée russe : la défaite et la disper-
sion prévues, mais cependant trop
promptes , de la 4* colonne , com-
mandée par le lieutenant-général
Rliloradowickt , entraînèrent la
perte de la ?>' colonne et de la se-
conde , qui , étant tournées et sans
appui, furent presque anéanties.
Après la conclusion de la paix
entre la France et l'Autriche, le
comte de Langeron ramena sa co-
lonne à Dubno, en Volhynie. En
i8o6, la guerre ayant éclaté de
nouveau entre la Russie et laTur-
quie, le comte de Langeron fut
employé à Bukarest, sous les or-
dres du général en chef Michel-
son , et au commencement de
1807, il fut envoyé en Bessarabie,
où il commanda un détachement
du corps du général baron de
Meyendorf : il se trouva au con>-
bat de Babilé, près d'Ismaël ; au
blocus de cette forteresse, où il
commanda la flotille et le déta-
chement qui occupa l'île deïsche-
lal , et à cinq affaires contre les
Tartares et la garnison d'Ismaël.
Il reçut la croix de Saint-Wladi-
mir, de la 3* classe. Dans l'hiver
de 1807 à 1808, il commanda sur
le Pruth et observa Ismaël. Après
la mort du général Michelson, le
baron de Meyendorf prit le com-
mandement de l'armée de Mol-
davie, et fut bientôt remplacé par
le feld - maréchal prince Prozo-
rowski. Le comte de Langeron
continua de servir sous les ordres
de ce prince , et mérita sa con-
fiance : il le chargea du comman-
588
LAN
tlement do son aile gauche placée
en Bessarabie , et de l'observation
d'Ismaël pendant l'armistice, qui
dura toute l'année 1808. En
1809, la guerre s'étant rallu-
mée , le prince Prozorowski de-
vant passer le Danube avec l'ar-
mée agissante, confla le comman-
dement de l'armée de réserve au
comte de Langeron ; le chargea
de la défense des deux Valachies
et de tout le cours du Danube.
Après le passage de ce fleuve, près
de Galatz, le prince Bagration
succéda au prince Prozorowski ,
décédé, et s'avança le long de la
rive du Danube sur Hirsova et
Silistrie. Le grand -visir était à
Schumla : il n'attaqua pas le
prince Bagration ; se porta sur
Rouschouk, y passa le Danube,
vint camper près de Giurgevo , et
parut vouloir s'avancer sur Bu-
charesl ; et s'il eût exécuté ce pro-
jet, il dévastait la Valachie, en-
levait les hôpitaux russes, et for-
çait le prince Bagration à une re-
traite précipitée sur la rive gau-
che du fleuve. Le comte de Lan-
geron était à Bucharest, il avait
40,000 hommes sous ses ordres ;
mais ils étaient disséminés dans
une étendue de plus de 800 wers-
tes ( 200 lieues) ; depuis Kilia jus-
jusqu'en Servie, où les Turcs
avaient alors de grands ^ucoès.
Près de la moitié de ces forces é-
tait dans les hôpitaux, le comte
de Langeron lui-même était at-
taqué d'une fièvre tierce très-vio-
lente, et si affaibli qu'il lui était
impossible de monter à cheval.
Il ne put rassembler que 6,000
hommes pour défendre la Vala-
chie; la terreur y était au comble
et tous les habitans fuyaient eu
'P'ansylvnnie. Les membies du
LAN
Divan voulaient aussi se retirer :
le comte de Langeron les rassem-
ble et leur dit : « Restez ici et ne
«craignez rien. Je pars anjour-
«d'hui, à dix heures. Après de-
» main jeudi , à pareille heure , l'a-
rt vant- garde du grand-visir sera
• battue, et samedi il ne restera
• pas un ïurc sur la rive gauche
» du Danube. » Tout se passa com-
me il l'avait promis. Il ne pouvait
sauver le pays, l'armée et les ma-
gasins que par une entreprise au-
dacieuse : il la tenta, et elle lui
réussit. On ne peut pas dire qu'il
dut ce succès éclatant à un de ces
hasards heureux qui souvent jus-
tifient des entreprises mal calcu-
lées : le comte de Langeron avait
tout prévu et tout annoncé d'a-
vance. Tout autre général, qui
n'eût pas eu l'expérience de la
guêtre avec les Turcs , que six
campagnes faites contre eux a-
vaient donnée au comte de Lan-
geron , n'aurait pas osé, quelque
parfaites que fussent les troupes
qu'il eût commandées , braver
i5o mille hommes avec 6000; le
comte de Langeron l'osa. Il atta-
qua,, à Fracina, l'avant-garde en-
nemie , forte de i5,ooo hommes,
le jour et à l'heure qu'il avait an-
noncés. Il la culbuta et la pour-
suivit jusque sous les murs de
Giurgevo, où était campé le grand-
visir : il le défia au combat; mais
celui-ci repassa le Danube deux
jours après , et la Valachie fut sau-
vée. Le comte de Langeron reçut
pour cette brillante action la croix
de Saint-Wladimir de la a* classe.
Dans le mois d'octobre naême an-
née, il est chargé du siégede Silis-
trie ; repousse les Turcs dans deux
sorties, et après la bataille peu
heureuse de Tatarilz, livrée par
LAN
le prince Bagralion , il repnsse le
Danube an commencement de
1810. Dans l'hiver de celle an-
née, il commande en Moldavie,
en Bessarabie , et établit son quar-
lier-général à Jassi. En juin 1810,
il est chargé une seconde fois du
siège de Silistrie, qu'il prend a-
près sept jours de tranchée ou-
verte. II reçoit le cordon de Saint-
Alexandre. En juillet, le comte
de Langeronfituneexpédilionlrès-
heureuse à Djumaya et dans les
monts Ilœmus. Il fut attaqué près
de Dirikion, n'ayant que 2, 800 hom-
mes, par le grand-visir qui, malgré
son immense supériorité , ne put
l'entamer. L'ordre de Saint-Geor-
ges de la 5' classe- lui fut dé-
cerné pour ce brillant combat.
A[»cès le malheureux assaut de
Roiischouk, le général en chef
comte Kamensky lui confia la di-
rection du siège de celle place et
de celle de (iiurgevo; elles capi-
tulèrent au mois de septembre.
Dans l'hiver do 1810 à 181 1 l'em-
pereur accorda à M"* la comtesse
de Langeron la croix de l'ordre do
Sainle-Catherine. En mars 18 n,
le comte Rainenski second tombe
malade: l'empereur confie le com-
mandement général de l'armée do
Moldavie au comte de Langcron,
jusqu'à l'arrivée du général Kou-
touzow. En juin, le grand-visir
s'avance sur Couschouk ; le gé-
néral Koutouxow garde d'abord
la défensive, et lui livre ensuite
une bataille, pour laquelle M. de
Langeron est promu au grade de
général en chef. Au mois d'août,
le grand-visir, par une manœuvre
imprévue, audacieuse et couron-
née d'abord par le succès, passa
le Danube prés de Giurgewo et
s'établit dans uit camp retranché;
LAN
589.
le général Koutouzow l'y tient
bloqué pendant trois mol» ; cha-
que jour les deux partis ont des
engagemens sérieux et opiniâtres ;
c'est le comte de Langeron qui a
le commandement de l'armée,
sous le général en chef. Un des
corps de l'armée russe passe le Da-
nube et enlève le camp ennemi;
l'armée turque enveloppée se rend
à discrétion : le grand-visir *e
sauve seul pendant la nuit. Après
cet exploit éclatant, le comte de
Langeron a le commandement des
avant-postes le long du Danube;
du corps de la Valachie et de l'ar-
mée turque prisonnière. Pendant
l'hiver, il est employé secrète-
meut par le général Koulouzow,
à des négociations de paix avec le
grand-visir Achmet. Il reçoit le
grand-cordon de l'ordre de Saint-
Wladimir de la i" classe. La paix
est conclue en mai 1812. Alors,
l'empereur Napoléon avait passé
le Niémen, envahi la Lithuanie,
et s'avançait vers Smolensk. Le
comle de Langeron commande
une colonne de l'armée de l'amj-^
rai ïchitchagow, qui avait succé-
dé au général Koutouzow, et qui
avait marché de Valachie en Po-
logne et ensuite en Lithuanie. Il
se trouve à plusieurs combats sur
le Doug, près de Brecez, ensuite à
la prise de la tête du pont dcBoris-
sowetau combat de laBérézina. ïl
poursuitl'armée française parWil-
na jusqu';\ la Vistule,et eslensuile
chargé du blocus deThorn. L'em-
pereur lui donne la médaille d'ar-
gent de 1812. En mars i8i3, il
est chargé du siège deThorn; a-
près sept jours de tranchée ou-
verte, cette place «e rend. Il re-
çoit de l'empereur l'ordre de Saint-
George» de la •!' classe , cl du roj
og»
tAN
de Prusse, ceux de* Aigles noir
et rouge. Il marche ensuite à liol-
le.n : A la bataille deKœnigsvarta,
il attaque ce village; s'einpaie de
cinq pièces do canon ; fait prison-
niersplugieursgénérauxet environ
1200 hommes. Il se trouve à la
bataille de Baiilzen. Il se relire
ensuite sur Sweidnilz , et nprès
la conclusion d'un armistice, oc-
vnçc les bords de la Sweidnitz-
Vasser. Pendant l'armistice, le
comte de Langeron repoit le com-
mandement de l'armée de Bar-
dai : il e?t ensuite chargé de celui
d'un corps de 5o,ooo hommes ,
qui, avec ceux du général Saken
et du général prussien Yorck ,
composait l'armée de Silésie ,
commandée par le général Blii-
ker. Dans le mois d'août, après
la rupture de l'armistice, H passe
la rivière de Bober ; son avant-
garde est au moment d'être cou-
pée; le comte de Laugeron vole à
son secours avec deux divisions :
le combat est vif et sanglant; son
cheval est tué sous lui. son avant-
garde est dégagée. L'empereur Na-
poléon attaque le général Bliicher
près de Lœvenberg en Lusace, et
l'oblige à la retraite que le comte
de Langeron soutient jusqu'à la
nuit contre les efforts de l'armée
française. A la bataille de Gold-
berg, le maréchal Macdonald at-
taque Bliicher; le comte de Lan-
geron commande la gauche, et
obtient d'ybord des succès; il o-
père ensuite depuis 4 heures jus-
qu'à 9 une retraite par échelons ,
qui lui mérite les éloges du géné-
ral en chef. Il contribua, le i4-
36 août, au gain de la bataille dé-
cisive de la Kazbath, où l'armée
française, contrainte de repasser
la Bober, fit une perte C'<jnsidé-
LAN
rable en matériel et en prison-
niers : le corps du comte de
Langeron combattit depuis 9 heu-
res du matin jitsqu'à 9 heures du
soir : il fut le pivot sur lequel le
i;entre et l'aile droite conversèrent
en exécutant une attaque géné-
rale. Le lendemain, ce même
corps fit mettre bas les armes a
deux bataillons, près de Goldberg.
Le 16-20, la division tlu gé-
néral Puthod, acculée à la Bober,
lut obligée de se rendre au prince
Schterbatow et au général Rond-
zewith , qui faisaient partie du
corps d'armée du comte de Lan-
geron. Dans ces journées, le comte
de Langeron enleva aux Français
un matériel nombreux et leur
fit beaucoup de prisonniers, par-
mi lesquels étaient le général i>u-
fhod et presque tou; ses officiers:
il reçut le chiffre d'adjudant de
l'empereur Alexandre sur ses é-
paulettes. Il soutint, en Lusace,
«l'autres combats qui furent éga-
lement avantageux aux armes
russes : dans le mois de sep-
tembre , les trois corps de l'armée
du général Blucher, commandés
par le comte de Langeron et les
généraux Saken et Yorck, passent
l'Elbe; après un vigoureux combat
ils marchent sur la Saaie et se pla-
cent derrière l'armée française.
Cette grande manœuvre, que
les /itrangers regardent comme
une des plus belles dont l'his-
toire des guerres modernes fasse
mention, contribua beaucoup au
succès de la campagne. iUais pen-
dant cette marche, par un mou-
vement habile et imprévu de
i'empereur Napoléon, le général
Blucher et le comte de Langeron
furent au moment d'être surpris
dans la petite ville d'Uben. JPeu
LAN
<le jours après, Napoléon, dont
les manœuvres étaient devenue?
alors Incertaines, revient A Léip-
sick et y est en grande partie cer-
né par toutes les années des alliés.
Le 4- •() octobre, il attaque la gran-
de arméedcsetnpereurs de Russie,
d'Autriche et du roi de Prusse,
et est attaqué lui-même par le gé-
néral Bliicher : le comte de Lan-
geron enlève les villages deGross
et KleinWetlerilz, prend plusieurs
pièces d'artillerie et fait 2000
prisonniers. Mais il eut dans cette
affaire un moment très-critique :
après la perte de ces deux villages.
Napoléon fit marcher «le grandes
forces au secours de son aile gau-
che ; le comte de Langeron , dé-
bordé par sa gauche, et obligé de
se développer sur une seule ligne
trop étendue, fut vivement re-
poussé sur lo ruisseau de Wete-
rilz, qiii , étant très-marécageux,
lui dorma des inquiétudes fondées
sur son artillerie el sa cavalerie
forcées de se retirer précipitam-
ment. Il fallait payer d'audace et
iurêler l'attaque impétueuse des
Français pour donner le temps de
passer ce ruisseau. Le comte de
Langeron était près de son avant-
garde, il savait ce qu'on peut ob-
tenir de la valeur et de la subor-
dination des soldats russes qui lui
étaient fort attachés : il comman-
de au régiment de Slunelbourg
qui se retirait : « halte , front , en
avant 0; le régiment obéit, quoi-
(|ue.sous une grêle de balles et de
mitraille. Les autres suivent son
exemple; les Français s'arrêtent ,
hésitent tm moment, la retraite
se fait «ans perte, el bientôt le
comte de Langeron reprend l'of-
fensive. Le 6- 18 octobre, à la ba-
taille de Léiphick. le comte de
LAN
^9'
Langeron, sous les ordres du
prince royal de Suède, passe la
Partha , attaque le \illage de
Schœnfeld ; trois fois il le prend,
trois fois il en est repoussé : il le
reprend, s'y établit, et contribue
ainsi sur ce point au gain de la
bataille ; mais il y perd un gêné
rai et près de 5, 000 hommes. Le
7-19, les corps du comte de Lan-
geron et de Saken forcent la porte
de Hall, entrent dans Léipsik à la
baïonnette, et s'emparent de 5y
canons. Il est décoré par l'empe-
reur de Russie de l'étoile de l'or-
dre de Saint-Alexandre, ornée de
diamans, et par le roi de Suède,
de l'ordre du Glaive de la pre-
mière classe. L'armée du général
Bliicher poursuit l'armée fran-
çaise jusqu'au Rhin, et le comte
de Langeron est chargé d'obser-
ver lu tête du pont de Cassol , vis-
à-vis Mayence. Le 1"' janvier
i8i4, '' P'is^e le Rhin à Raul,
enlève Rirrg(;n, et tient Mayence
bloqué pendant les mois de jan^
vier et de février. Il quitte ensuite
le bldcus de cett(; ville , qu'il re-
met au duc régnarït de Saxe-Co-
bourg, cl se rond en France au-
près du général Bliicher, défend
.Soissons , et combat à Laon , à
GraoUne, à Glacy, à Vichi , etc.
Il marche ensuite par Reims et
Châlotts sur Paris. Son avant-
garde force le passage de la Mar-
ne ;\ Triport, .iprès un vif com-
b«t, et s'approche de la capitale.
Le 17-29 mars, il occupe le Bour-
get et repousse les avant-postes
sur la Villelte. Le lendemain 18-
3o , le comte de Langeron com-
mande l'extrême droite des ar-
mées combinées : il observe Saint-
Denis, et emporte d'assaut, ;\ 4
heures du soir, avec le corps du
ùf)'i
LAN
général Rondzcwitch , la position
retranchée de Montmartre; prend
29 canons, et le soirmême occu-
pe les barrières de Paris. Il reçoit
de l'empereur de Russie l'ordre
de Saint-André, et de l'empereur
d'Autriche celui de Marie-Thé-
rèse de la 3* classe. Après la prise
de Paris, le comte de Langeron
marcha sur Lonjumeau, et prit
ensuite ses quartiers à Châions et
h Reims. A son retour en Russie,
il eut le commandement d'un corps
de 70,000 hommes en Volhynie.
En i8i5, il marcha de nouveau
contre la France , et après la
bataille de Waterloo, il prit diffé-
rentes positions en Alsace et en
Lorraine, dont il bloqua les for-
teresses jusqu'à la conclusion de
la paix. Il tut ensuite appelé aux
gouvernomens de Rherson , d'E-
katerinoslaw, de la Crimée : il
fut encore nommé chef de la ville
d'Odessa , des cosaques de la mer
Noire et de ceux du Boug. Gou-
verneur-général de la nouvelle
Russie (en 1822), le comte de
Langeron fut aussi nommé pro-
tecteur du commerce de la mer
Noire et de la merd'Asoph, etc.
Il reçut la démission de tous ces
emplois le 11 mai 1823, et il en
conserva les émolumens coinme
pension de retraite. C'est à l'âge
de 60 ans que le comte de Lan-
geron a terminé sa carrière mili-
taire, et a voué au repos une vie
jusqu'alors fort orageuse, semée
de beaucoup d'événemens diffé-
rens et de quelques succès à la
guerre. Il a quarante-six ans sept
mois de service , savoir : un an
sept mois comme enseigne dans
les gardes-françaises, six ans deux
mois comme sous-lieutenant, dix
mois comme capitaine, dix ans
LEB
quatre mois comme colonel , dix
mois comme brigadier, un an
cinq mois comme général-major,
douze ans dix mois comme lieu-
tenant-général, enfin douze ans
sept mois comme général eu chef
d'infanterie.
LAS AMARILLAS (le marquis
de) , voy. le, Sup, du tome XI.
LE BARON (N.), procureur-
général , voy. le Supplément du
tome XII.
LEBLANC (Honoré), chef de
bataillon , chevalier de Saint-
Louis et de la légion-d'honneur,
né û Chinon, département d'In-
dre-et-Loire, le 24 décembre
1770. A peine entré au service,
il se distingua à l'armée des Py-
rénées-orientales, fut grièvement
blessé en montant à la redoute
de Saint-Clément, it laissé pour
mort sur le champ de bataille;
c'était le 27 brumaire an 5, jour
où le général en chef Dugom-
mier fut tué. Le 7 mai 1807»
M. Le Blanc, alors capitaine
dans le régiment de la garde de
Paris, qui se trouvait au siège
de Dantzick, fit partie des trou-
pes d'élite qui durent s'emparer
de l'île d'Holm; il reçut ordre de
prendre une batterie qui faisait
un feu meurtrier, il y monta par
les embrasures; les canonniers
ennemis furent tués sur leurs piè-
ces; il se dirigea alors sur les der-
rières de l'infanterie russe , et le
commandant ennemi ayant re-
marqué que des Français avaient
pénétré dans la redoute, voulut
faire résistance, il fut tué à la
baïonnette , et le capitaine Le
Blanc, n'ayant avec lui que 20 ou
25 grenadiers, fit mettre bas les
armes à 164 soldats russes; cette
action décida la prise de l'île
LEB
ù'Holin, el Danlzick se rendit
vingt jours après. Au mois de mars
1809, le caj)ilaine Le Blanc, à la
têle de 60 voltigeurs, s'empara,
pendant la campagne de Portu-
gal, de deux pièces de canon,
délènducs par 5oo Portugais. Le
16 mai de la même année, le co-
lonel Dulong, ayant reçu du ma-
réchal Soult l'ordre de s'emparer
du pont de Ponte-Novo , de la
possession duquel dépendait le
salut du corps d'armée qui opé-
rait sa retraite, chargea le capi-
taine Le Blanc de cette expédition
très-périlleuse; cet officier, mal-
gré la difficulté de passer ce pont,
coupé en trois endroits et gardé
par un détachement portugais,
promit au colonel que dans trois
minutes ce détachement n'existe-
rait plus , et que le pont serait au
pouvoir des Français; il tint pa-
role, assaillit avec la plus grande
impétuosité le poste ennemi, le
tailla en pièces, et par celte ac-
tion mémorahle, mise à l'ordre
du jour, il assura la retraite du
corps d'armée. Le même jour,
( 16 mai), les troupes étant arri-
vée» au pont de MisareUa, le ca-
pitaine Le Blanc se trouvait à côîé
du colonel Dulong [voy. ce nom),
lorsque celui-t;i fut atteint d'une
b.die dans la tête qui le renversa.
Alors le capitaine Le Blanc, ne
prenant conseil que de la circons-
tance et de son propre courage,
se préci|)ita sur le pont barricadé,
el, passant sur les morts et les
blessés, arriva au pied d'un ro-
cher coupé à pic, derrière lequel
l'armée portugaise était reIran -
chée; le capitaine u'ayanlavec lui
qu'une poignée de braves, s'él.in-
ra à la baïouuelle avec inic lelb;
intrépidité que l'armée ennemie,
LEB
393
croyant que les Français étaient
en bien plus grand nombre, se
retira en désordre, el, grâce à
cette manœuvre hardie, le capi-
taine Le Blanc sauva , pour la se-
conde fois, dans le même jour, son
corps d'armée. Le 27 avril 1822,
en Espagne , le capitaine Le Blanc
commandait la placed'Aguilar del
Campe , et n'avait pour toute gar-
nison que 73 hommes; les enne-
mis, au nombre de 5,5oo, com-
mandés par le général Mendiza-
bala, envoyèrent un parlemen-
taire, mais le capitaine lui dit do
se retirer, s'il ne voulait pas qu'on
tirât sur lui, ayant fait serment,
ainsi que les braves qu'il com-
mandait, de périr jusqu'au der-
nier plutôt que de se rendre : en
effet, les Espagnols firent pendant
dix-neuf jours la fusillade la plus
soutenue et la plus nourrie. Tout
vint échouer contre le courage de
la brave garnison et de son intré-
pide capitaine ; l'ennemi fut forcé
de lever le siège, et un ordre du
jour, très-brillant et très-délaillè,
lu pendan' trois jours de suite,
par ordre du général en chef, ù
tous les régi mens, fut la première
récompense de cette résistance
héroïque; la seconde fut la nomi-
nation du capitaine Le Blanc au
grade de chef de bataillon. A Wa-
terloo, M. Le Blanc donna de
nouvelles preuves de ce courage
intrépide qui le caractérise : ayant
reçu l'ordre de s'emparer d'une
b.itleric anglaise de 5 pièces de
canon, il marcha en colonne ser-
rée; arrivé à cinquante pas de la
batterie, \s\\ obus éclata prè< do
son cheval; M. Le Blanc, ren-
versé an milieu de son bataillon,
conservant tout son sang-froid ,
fit battre la charge, -c [ui'iipitu
594
LEG
»ur la batterie dont il s'empara,
et reçut U's plu? grands éloges des
généraux témoins de cette action
d'éclat. Tels sont, fort en abrégé,
les principaux faits d'armes de cet
officier, toujours cité comme bra-
ve par l'élite des braves ; s'il n'est
pas parvenu à des grades plus éle-
vés, ce n'est jamais l'homme qui
a manqîié à l'occasion , mais l'oc-
casion qui a manqué à l'homme.
LE BORGNE DE BOIGNE (le
comte), voj. le Supplément du
tome XI.
LECLER.C , général , voj. le
Supplément du tome XVIII.
LECOCQ, licencié ès-lois, voy.
le Supplément du tome XVI.
LECOINÏRE DE VERSAIL-
LES, voj le Supplémentdu tome
XV.
LEE (Samcel) , orientaliste an-
glais, îjoj. le Supplémentdu tome
XV. ^
LEGIER, conseiller à la cour
royale , voy. le Supplément du
tome Xlïl.
LEGRAVEREND (Jean-Marie-
Emmancel-François) , né à Ren-
nes, département d'Ile-et-Vilaine,
en 1776, ancien avocat aux con-
seils du roi et à la cour de cassa-
tion, maître des requêtes, cheva-
lier de la légion -d'honneur, etc.,
a publié, en 1808, un ouvrage
sous le titre de : Traité de la pro-
cédure criminelle devant l«p tribu-
naux militaires et marilimes de tou-
te espèce, 2 vol. in-8°, et en 1816,
la première édition de son Traité
de la législation criminelle eti Fran-
ce, 2 vol. in-4'', qu'il a dédié à M.
lé chancelier Dambray, et dont la
seconde édition a paru en 1823,
avec de nombreuses additions. Il
avait fait paraître, en 1819, des
Observations sur le jury en Fran-
LEG
ce, in-S". En 1814, M. Legrave-
rcnd fut nommé directeur di;s af-
faires criminelles et des grâces à
la chancellerie de France, depuis
ministère de la justice, où, sous le
gouvernement impérial, il avait
été chef de division. En i8i5,
pendant les cent jours, le collège
électoral de- Rennes l'élut à la
chambre des représentans. En
1822, il était au même collège,
le concurrent de M. de Corbière,
ministre de l'intérieur, A vocal aux
conseils du roi et à la cour de cas-
sation, en 1817, il devint, le 24
mars 1819, maître des requêtes
en service extraordinaire, et fut
appelé, en cette qualité, à la dis-
cussion et à la rédaction des pro-
jets de codes militaires. Le i3 dé-
cHimbre 1821, il prit sa retraite et
quitta la place de directeur des af-
faires criminelles et des grâces,
pour se livrer aux occupations de
son cabinet.
LEGRAVEREND (Giillacme-
Marie), conseiller à la cour royale
de Rennes, et membre de la lé-
gion-d'honneur, cousin du précé-
dent, est né dans cette ville, en
1765. Les faits qui le concernent
sont relatés dans l'article de M.
Legraverend, maître des requêtes.
( l^oy. le tome xi, page 276 et sui-
vantes.) Nous nous bornerons à
ajouter qu'il était avocat-général à
la cour royale de Rennes, et pro-
fesseur en droit à la faculté de la
même ville, depuis l'origine, lors-
qu'il fut destitué de ces deux fonc-
tions. En 1816, il fut nommé con-
seiller à la cour royale de Rennes,
où il continue encore de siéger au-
jourd'hui (1825).
LEGUA Y (Etienîse-Chabies),
l'un des peintres les plus distin-
gué? de la manufacture royale de
LEG
porcelaines à Sèvres., né à Sèvres
en 17G2, montra très-jeune enco-
re un goftt trè.s-vif pour la pein-
ture. Son père attaché à la ma-
nufacture en qualité de peintre-
doreur, le fil entrer dans l'école
de cet établissement, où les des-
sins des Boucher, des Vanloo ser-
vaient de modèles aux élèves qui
devaient, quelques années plus
tard, être témoins de la régénéra-
tion de l'école française à laquelle
le génie et le pinceau merveilleux
de David donnèrent un si vif é-
clat. M. Le Guay avait reçu de la
nature avec des dispositions heu-
reuses, le goût du beau, et les
germes d'un vrai talent. Il se pro-
curait des gravures . des dessins
faits d'après de grands maîtres, et
se perfectionnait dannila solitude,
mieux peut-être qu'il n'eût pu le
faire sous les professeurs attachés
à l'établissement royal. M. Foliot
j)cintre et marchand de tableaux,
faisait à la manufacture de fré-
quentes visites, il prit le jeune ar-
tiste en amitié, l'emmena souvent
avec lui dessiner et peindre d'après
nature; aidé de l'expérience et
des conseils de cet excellent ami, ,
il suivit une route nouvelle, et
dès lors fit présager ce qu'il serait
lin jour. A ITige de 19 ans, M.
Le Guay vint à Paris, et entra
comme élève à l'académie; quel-
ques portraits à l'huile en minia-
ture, faits dans les loisirs que lui
laissaient ses études, commencè-
rent sa réputation. Kn 1786, il
peignit en pied et de grandeur na-
turelle, les chevalier et vicomte de
Labellinay. M. le comte Ducayla,
premier gentilhomme de S. A. S.
le prince de Gondé , vit ces por-
traits et pria M. Lcguay <le fair«*
celui du prince , mais à la condi-
LIÎG
595
lion qu'il n'exigerait poinldc séan-
ce de S. A.; cette singulière pro-
position surprit l'artiste qui refu-
sa craignant de ne pouvoir réus-
sir; plusieurs peintres avaient é-
choué dans la même entreprise;
cependant surles instances du pre-
mier gentilhomme, M. Leguay
alla à Ghantilly, où d'après les or-
dres du prince, il pouvait se pré-
senter dans tous les lieux que fré-
quentait son altesse, la voir à tou«
te heure, mais* elle ne consentit
jamais à s'asseoir, ni à rester im-
mobile quelques fninutes. Grâce
à la rapidité avec laquelle M. Le
Guay put saisir les traits de son
modèle, et plus encore à sa mé-
moire, il parvint à faire un por-
trait si ressemblant, qu'il réunit
tous les suffrages. Ge succès inat-
tendu éveilla la jeune ambition
de l'artiste, il suivit les chasses du
prince, et une nouvelle circons-
tance aussi imprévue que la pre-
mière, lui ouvrit le chemin de la
fortune que de graves circonstan-
ces lui fermèrent presqu'aussitôt.
Un soir au soleil couchant et par
un temps superbe, un cerf se jeta
dans l'étang de Cometle, qui bai-
gne les murs du vieux château de
la reine Blanche; l'aspect du lieu
était magnilique ; des collines
couvertes de bois, un moulin ados-
sé à un antique castel, le plus ra-
vissant paysage animé par le mou-
vement des chasseurs et l'aflluen-
ce des curieux, invitèrent le pein-
tre à saisir ses crayons. Son altes-
^e^ l'aperçut et lui dit : « Voilii un
«beau tableau à faire.» Déjà un
croquis informe en était jeté sur
le papier, et de retour an château,
M. Le Guay I acheva. Le lende-
main il soumit le proJL't de ce la-
l)l«!ju à M. Du( iviii. i|'ji lui sur-
396
lEG
pris de I;i rapi.Iité d'un travail si
compliqué, et engagea l'artiste à
l'exécuter à la gouache; il se mit
à l'ouvrage, et peu de temps après
le présenta au prince un jour d'au-
dience. S. A. lui témoigna publi-
quement sa satisfaction , et fut
charmée de trouver dans le même
homme, deux artistes qu'il dési-
rait attacher à sa personne, un
peintre de portraits et un peintre
de chasses. Dés ce jour M.LeGuay
eut son logement ïi Chantilly. La
révolution vint détruire toutes ses
espérances; le prince partit, et
l'artiste dans ces temps orageux
fut obligé pour vivre, de consacrer
son talent à la miniature qu'il
avait abandonnée. Quelque temps
après le propriétaire d'une manu-
facture considérable de porcelai-
nes, M. Dihl, fit choix de M Le
Guay pour diriger ses ateliers, fai-
re des dessins, former des élèves,
et exécuter les compositions ca-
pitales de rétabhVsement. Là M.
Le Guay rendit d'importans ser-
vices à cet art encore dans son en-
fance. Il perfectionna la peinture
sur porcelaine, créa un nouveau
système de couleurs, et reinplaça
le camée, les grisailles, seuls gen-
res qu'on fît alors avec succès dans
la manufatlire de M. Dihl , par un
coloris aussi vrai, aussi séduisant
que l'huile. Son premier essai
exposé au salon , fit une sensation
très-vive surtout parmi les person-
nes qui connaissaient les difficultés
du genre. M. Le Guay s'était pré-
paré une palette, qui lui pennel-
tait d'entreprendre sur porcelai-
ne des tableaux du plus beau co-
loris. M. Le Guay est sans contre-
dit le peintre qui a le plus contri-
bué aux progrès de cet art diffici-
le, par des innovai ions, des per-
LEG
fectionnemens, qui en facilitant
les moyens d'exécution, ont per-
mis à d'habiles artistes, de s'occu-
per de ce genre précieux de pein-
ture, auquel ils ne se seraient pas
livrés, sans doute, si on ne leur
eût applani les premières difficul-
tés. Cette émulation, ce concours
de talens ont tiré la peinture sur
porcelaine du néant où elle était
il y a 5o ans, el l'ont amenée au
degré étonnant de perfection où
elle se trouve aujourd'hui. M. Le
Guay eut un égal succès dans la
peinture sur verre, que depuis
long-temps on regardait comme
perdue. Il fit d'abord de petits ta-
bleaux qui réussirent; ensuite il
en composa sur des glaces dont la
dimension lui permit de peindre
les figures â^ grandeur naturelle.
M. Dihl pour lequel M. Le Guay
exécutait ces peintures, séduit par
la parfaite illusion qu'elles pro-
duisaient, placées au-dehors des
croisées d'un appartement, vou-
lut les vendre pour orner les fenê-
tres de la chambre à coucher prin-
cipale du palais de Saint-Cloud,
mais le prix excessif qu'il y mit
en fit ajourner l'acquisition. Ces
glaces sont maintenant en Angle-
terre, M. Le Guay attaché depuis
seize à dix-huit ans à la manufac-
ture royale, est l'un des peintres
qui ont le plus contribué à établir
et à soutenir la réputation dont
jouit cet établissement royal. Il a
fait de nombreux ouvrages chez
31. Dihl, et à Sèvres; parmi les
principaux nous citerons : i" une
table pour le roi d'Espagne Char-
les IV; elle a 4 pieds de dimension
et représente l'Histoire de Psyché
d'après les dessins de Raphaël.; a"
un vase pour S. M. Louis XVIIl,
représentant Diane au. retour de la
LEU
chasse; 3° un vase pour S, A. I\.
madame ladauphine, dont le sujet
à pour titre Un hommage à la ver-
tu; 4" un déjeuner pour S. A. II.
madame, duchesse de Berry, re-
présentant les Peines et les Plaisirs
de l' Amour, le plateau et les tas-
ses ont 54 figures. 5° \Jx\ très-
grand vase représentant Diane
triomphante des Amours. Ce chef-
d'œuvre le seul de cette impor-
tance qui jusqu'à ce jour ait été
exécuté sur porcelaine, a 6 pieds
de circonférence, 53 figures de
onze pouces de hauteur y sont
habilement disposées, la compo-
sition en est à la fois savante et
gracieuse, le dessin pur, le coloris
d'une vérité parfaite. La réussite
d'une pièce de cette importance
en porcelaine est une chose mi-
raculeuse. Ce magnifique vase qui
a coûté trois ans de travaux à ftl.
Le Guay , a été exposé au Louvre
en janvier 1826, le prix en était
fixé à 5o, 000 francs. S, M. Char-
les X en a fait présent à l'époque
du sacre, au duc de Norlhumbcr-
land, envoyé extraordinaire du roi
d'Angleterre. M. Le Guay a formé
d'excellens élèves parmi lesquels
nous citerons madame Jacotot
dont le talent est l'un des plus re-
marquables pour la peinture sur
porcelaine.
LëLAIIGE, vice-amiral, voy.
le Supplément du tome XIL
LEMAZIRIER ( Pierue- Da-
vid), littérateur, né à Gisors, s'est
occupé pendant plusieurs année»
de travaux un peu différcns de
ceux auxquels il se livre aujour-
d'hui. Il passa presque immédia-
tement du collège dans les admi-
nistrations financières : c'est pren-
dre une route bien détournée pour
LET 397
arriver aux fonctions de «ecrélaire
du comité d'administration de la
Comédie-Française qu'il remplit
depuis long-temps. Il les doit en
partie à son ouvrage publié en
1810 sous ce titre : Galerie histo-
rique des acteurs du Théâtre-Fran-
çais , 1 vol. in-8° , dont La se-
conde édition paraîtra incessam-
ment. M. Lemazuriera composé un
assez grand nombre de pièces fu-
gitives, imprimées d;ms VAlma-
îiach des Muses et autres recueils
du même genre, et qu'il a lues
tant aux séances publiques des so-
ciétéslittérairesdont^il était mem-
bre, qu'à celles de l'athénée de
Paris. La majeure partie de ces
pièces se compose de contes en
vers, parmi lesquels on remarque
Tristan et Clodion le Chevelu ;
le Diable et l' Avocat ; le Roi et le
Paysan; \e Roi Dagobert, où l'au-
teur sait alliera la facilité du style
beaucoup de gaîté et de [)hiloso-
phie. Quelques personnes lui at-
tribuent d'autres ouvrages; niais
il est douteux que ce soit avec fon -
dément. On annonce qu'il va pu-
blier une Histoire du Théâtre et
de la troupe de Molière. Ce tra-
vail, qui peut être intéressant,
appartenait de droit au secrétaire
du Théâtre qui s'honore d'avoir
euMolière pour fondateur. M. Le-
mazurier est un des collaborateurs
de la Bibliothèque dramatique que
publie madame Dabot-Butschert.
LEPIC , lieutenant - général ,
voy. te Supplément du tome XVI.
LEGUA Y, voy. l'Errata du tome
XI IL
LETELLIER ( Pieriie - James-
HiPPOLYTE. ) Depuis limpression
du vol. XI de cet ouvrage, où
nous avons consacré un article àï
5i)S
MAE
M. Letellier, Il a pubiit; un nou-
vel ouvrage, intitulé : Tableaux
historiques de Tacite, le texte en
regard, avec «les notes ( 2 vol.
in -8", i8i5, Paris, Grimbert,
libraire, rue de Savoie. ) Cet ou-
vrage, remarquable par la par-
laite intelligence de l'original,
l'beureuse imitation de ses for-
mes , l't'jlégance et la précision du
style, a obtenu non -seulement
les suffrages de la haute littéra-
ture, mais encore ceux des jom*-
naux de toutes les opinions ; il
vient d'être adopté par l'univer-
sité, pour être donné en prix dans
les collèges royaux.
LETOllï , lieutenant-général ,
vcry. le Supplément du tome XII.
LOUIS XVIII, voy. le Supplé-
ment du tome XVII.
LUlilENSRI, général polonais,
voj. le Sup. du tome XVII.
LUGE IV avocat, voy. le Sup-
plément du tome XIII.
LUC Y, conseiller à la cour
royale, voy. le Sup. du t. XVIII.
MAGCARTHY,chefde batail-
lon , voy. le Sup. du tome XII.
MAGON, général de brigade,
voy. le Supplément du tome XII.
MAELZEL (Jean), mécanicien,
est né à Uatisbonne en 1782. Il
vint fort jeune à Vienne, où il
étudia d'abord la musique et la
mécanique, et acquit une grande
réputation pour la perfection où
il porta l'art de piijuer (noter) les
cylindres pour les orgues mécani-
sés , et reçut le suffrage le plus
honorable de l'institut de France
et des premiers compositeurs de
Paris et de Londres pour la com-
position d'un pan-harmonicon,
qui réunit tous le!< instruniens qui
peuvent composer un orchestre
MAE
complet d'harmonie. Cet Instru-
ment exécute seul des sympho-
nies, des ouv«'rture3, au moyen
de ditlérens cylindres qu'on y a-
dapte. Plusieurs de ces inslrnmens
ont été entendus avec intérêt à
Londres et à Paris. M. Maëlzel est
aussi auteur d'un secrétaire de
sûreté; lorsqu'une main étran-
gère veut l'ouvrir, elle est à l'ins-
tant saisie par deux bras factices,
dont la force s'accroît à raison de
la résistance qu'on leur oppose,
et deux trompettes à l'instant son-
nent l'alarme. La musique doit à
M. Maëlzel le perfectionnement
du métronome ou régulateur mu-
sical, approuvé, en 1816, par l'ins-
titut, et accueilli par tous les com-
positeurs. Il est auteur d'une pou-
pée qui prononce papa et maman,
et d'un trompette mécanique qui
exécute avec force et précision les
fanfares les plus difficiles. Il a per-
fectionné le joueur d'échecs, in-
venté par Kempel, et le petit dan-
seur.de corde de Enslen. Il a ima-
giné un fourgon et un brancard
pour transporter les blessés et les
malades. Un honime seul peut
transporter un blessé et le dépo-
ser sur son lit sans lui faire éprou-
ver aucune secousse. On doit enco-
re à M. Maëlzel la voiture à moulin,
un fauteuil roulant pour les ma-
lades, et un appareil préservatif
du méphitisme, pour lequel il
a reçu de l'empereur d'Au-
triche une médaille en or. M.
Maëlzel mettra le comble à sa ré-
putation en exécutant un nouveau
mélographe ou instrument desti-
né à adjoindre à tous les pianos
et à obtenir la musique que l'on
joue toute notée sur un papier in-
térieur, etc.
MAK
It- MALEZEWSKI (N.). :»nf^'t''>
■ •colonel, toy. le Suppletnenl du
JomeXVII.
MARANON or MARAGNON
(don Antonio), plu? générale-
ment connu sous la dénoniiuation
<lu Trapiste, commandant une di-
vision de l'armée de la Foi , est
né vers 1778, daus un bourg de
^K Navarre. Il s'enrôla comme slin-
Hb fie volontaire , et fit ses premié-
Hb res armes pendant la guerre que
■P les Espagnols soutinrent avec quel-
" que gloire contre les vainqueurs
<le l'Europe. Son audace, portée
souvent jusqu'à la témérité, le fit
parvenir au grade de capitaine
dans le régiment de la princesse,
mais il ne paraissait pas réunir
alors les qualités nécessaires pour
s'élever plus haut, ni même pour
se maintenir dans ce grnde ; c'est
ce qu'il prouva bientôt. Se trou-
vant à Lérida, une ancienne pas-
sion pour le jeu qui semblait l'a-
voir abandonné, se réveilla tout-
à-coup avec fureur : il s'y livra
sans réserve; perdit d'abord tout
l'argent qu'il possédait, mitàcon-
Iribution la bourse de ses amis,
et perdit encore les sommes qu'il
en retira : enfin il porta le délire
jusqu'à jouer le prêt de sa compa-
gnie, et les épaulettes de son gra-
de. Il essaya même, à ce qu on
assure, de vendre son brevet d'of-
ficitr. Une pareille conduite de-
vait lui enlever l'estiuje de ses
chefs, et toute considération par-
mi ses égaux : il perdit effective-
ment l'une et l'autre, et pour se
dérober aux reproches de tes
chefs et à la honte de redescendre,
il se fit dévot, et dans sa ferveur
de circonstance, il quitta de nuit
Lérida, et alla s'enfermer dans un
MAR
•5y<)
couvent de l'ordre de la Trappe ,
dont il endossa l'habit. On pense
bien que le capitaine IMaranon,
devenu fière (luêteur d'un cou-
vent de tràpistes, ne se plaidait pas
beaucoup dans son nouvel état.
Ses*inclinations belliqueuses et
son amour du jeu ne pouvaient
être anéantis sans retour : on sait
d'ailleurs qu'un joueur ne se corri-
ge jamais. Cependant les voeux
qu'il avait prononcés le retenaient
dans sa retraite; mais lorsque les
royalistes de la Péninsule poussè-
rent un nouveau cri de guerre
contre la constitution des Cortès,
l'établie par suite des événemens
de l'île de Léon, il ne manqua pas
de saisir l'occasion que le prétexte
de la religion outragée lui fournis-
sait,pour tenter de devenir un per-
sonnage important, en se faisant
le défenseur de cette religioruLes
préjugés du couvent favorisaient
son projet; il put donc sans avoir
Tair d'en violer la règle, puisqu'il
conservait son froc, remplacer la
besace par l'épaulette, comme il
avait précédemment remplacé l'é-
paulette par la besace; et par ce
moyen se retrouvcrencore sur les
champs de bataille et dans les
maisons de jeu. Il commença par
jouer le rôle d'inspiré, et parvint
à rassembler sous ses ordres un
assez grand nombre de partisans,
qui tous exaspérés par ses dis-
cours, secondèrent merveilleuse-
ment son audace en s'emparant,
par un coup de ujain, du fort d'Ur-
gel, situé au versant méridional
des Pyrénées-Orientales. C'était
au moment oi'i les chefs de l'ar-
mée de la Foi venaient «l'établir
ime régence; Mnranon saisit har-
diment cette occasion pour fairo
4oo
MAR
hommage de sa conquête et de
ses guérillas à ce nouveau gou-
verneuient à qui il prêta serment,
et en recul le titre de général. La
régence s'établit alors à Urgel ,
dont elle pritlenora, et cet exploit
du trapiste est peut-être vérita-
blement le seul à qui il doit sa
célébrité. Il ne fut pas aussi heu-
reux dans une entreprise qu'il fit
sur l'Arragon peu de temps après,
et dans laquelle il échoua complè-
tement. Attaqué le 19 août 1822,
sur les hauteurs d'Ayerbe, par le
général Zarco-del-Valle, il perdit
toutes ses munitions, ses équipa-
ges, son drapeau, trente chevaux,
un grand nombre d'hommes et le
seul canon qu'il possédait. Après
avoir été successivement battu
sur d'autres points, i! fut comme
la plupart des chefs do l'armée de
la Foi, obligé de se sauver en
France pour éviter de tomber en-
tre les mains des constitutionnels,
alors victorieux sur tous les points.
Maranon vint chercher un asile
dans un couvent de Toulouse où
malgré ce qu'en ont publié cer-
tains journaux, il trouva peu d'ad-
mirateurs. Il est reparti de celte
ville, vers l'époque où l'armée
française entra en Espagne, pour
commander la division royaliste
de Biscaye, sous les ordres du gé-
néral Quésada. Ce fougueux moi-
ne , qui hors du champ des com-
bats, aff-iCte de paraître doux,
simple et modeste, ne se montrait
aux soldats qui obéissaient à ses
ordres, qu'en tenant de la main
gauche un crucifix, qu'il élevait
en l'air, et un fouet dans la droi-
te. Sa longue robe était criblée de
balles, qui, selon ce qu'il dit,
n'ont pu l'atteindre. Il portait par
MAR
dessus de larges épaulettca de gé-
néral, et une longue carabine sus-
pendue en sautoir. L'aia grotes-
que que lui donnait cet accoutre-
ment bizarre, ne contribuait pas
peu à attirer sur lui l'attention gé-
nérale, sa taille est d'environ cinq
pieds. On pourra se faire une idée
du style et de l'éloquence du tra-
piste, en lisant quelques fragmens
de la proclamation qu'il adressa
aux armées constitutionnelles, a-
près le passage de la Bidassoa :
« Gloire à Dieu I soldats, le chant
de la tourterelle s'est fait enten-
dre dans notre terre; c'est une
preuve que nous avons passé la
mauvaise saison de l'hiver, et que
nous sommes maintenant dans le
beau, agréable et fleuri prinlems.
La colombe-^» quitté l'arche, et el-
le y rentrera promptement avec
la branche d'olivier au bec; c'est
un signal de paix et de sérénité,
et une preuve que les eaux du dé-
luge ont cessé. Vous avez des
oreilles et vous n'entendez pas :
vous avez des yeux et vous ne
voyez pas. Je vous dis donc que
bientôt les tempêtes et les oura-
gans qui ont aflligé la nation espa-
gnole cesseront, et qu'au lieu de
ces chants patriotiques , produc-
tions de cervelles frénétiques ,
l'Espagne sera remplie de Jubi-
lés, de plaisirs et de contente-
ment, et qu'elle chantera des
hymnes de triomphe et des allé-
luia. Je vous dis que l'on verra
bientôt voguer en paix, avec une
brise agréable, le vaisseau de Pier-
re, qui a été poussé dans les flots
par de violons ouragans. Je vous
dis que la constitution, cet lior-
rible monstre, conçu par l'enfer
dans l'Espagne catholique, et dont
MAR
il ravorlcment a coûté laot de lar-
P mes à nutre suinte U)ère église, et
aux chrétiens ses chers Gis, va
(ILsparaître Ju sol espagnol. Déjà
les armées françaises sont entrées
en Espagne, n'en doutez pas, et
vous serez enveloppés avec la vi-
le canaille, qui, profitant de votre
docilité, vous a mis un bandeau
sur les yeux, afin de vous jeter
pieds et mains liés dans le préci-
pice dont vous ne pouvez sortir.
Oui , soldats et frères en Jésus-
Christ, je vous appelle par ce ten-
dre' nom, alln que sortant de la
léthargie qui vous rend sourds
aux aiguillons de votre conscien-
ce, et vous fait prêter l'oreille à
ces chefs de la perfidie, premiers
nés du diable, vous puissiez en-
core sécher les larmes de notre
tendre mère... Vousavez vu exter-
miner le saint tribunal de la Foi;
vous avez vu exterminer la com-
pagnie de Jésus; vous avez vu sup-
primer les monastères et les cou-
vens ; vous avez vu voler leurs re-
venus, chasser les ecclésiastiques;
vous avez vu la maîtresse des na-
tions esclave!... Vous avez vu vos
chefs politiques, érigés en papes,
chasser de leurs cloîtres celles
qui ont pris le voile.... Vous avez
vu ; les cieux se sont obscurcis
d'une transformation si déplora-
ble; vous avez vu une pierre de
marbre respectée, vénérée et déi-
fiée ! O mon Dieul le respect et
l'adoration qui vous sont si juste-
ment chers, vous ont été arrachés
par des tables ou des pierres éri-
gées dans une place publique
Quel triomphe pour l'impiétél tel-
le est la félicité que nous promet
une race maudite. La ualion sans
WAR
401
foi et sans religion qui offenge le
fils unique de Dieu, peut-elle
donc être heureuse? mes frères,
ouvrez, ouvrez les yeux; vous
pouvez encore éviter le gouffre fa-
tal qui vous attend sans remède.
Abandonnez ces satellites de Sa-
tan ; venez à moi, ou courez aux
royalistes qui sont le plus près
de vous; faites-le sans délai; votre
humble frère le Irapiste vous y
invite. » (Cette pièce curieuse est
datée de Vittoria le 14 avril
1825.) Nous avons omis dana
celte proclamation les apostro-
phes injurieuses à différens mem-
bres des Corlès. Dans une secon-
de proclamation, datée du même
jour et adresnée aux soldats de la
loi, l'indulgent Trapiste, ne coinp-
tant apparenmient pas assez sur
l'appui des Français, appelle ù son
secours l'ange exterminateur pour
anéantir le gouvernement cons-
titutionnel d'Espagne. Au surplus,
Maranon qui ne fit absolument rien
de remarquable pendant la cam-
pagne do ibijj, fut l'un des chefs
espagnols qui s'opposèrent avec
le plus d'énergie à l'exécution du
décret d'Andujar, Rentré dans
son couvent lorsqu'il n'y eut plus
d'armée libérale à combattre ,
il a reçu, dit- on, du roi Fer-
dinand une lettre de félicitatioii
sur sa conduite. Là sans doute, se
sont bornées les récompenses ac-
cordées à ce singulier personnage,
qui, CD raison de l'état qu'il a em-
brassé, a dû renoncer aux hon-
neurs, aux dignités, à toutes les
laveurs de la cour enfin, comme
aux plaisirs du monde. On n'avait
point entendu parler depuis long-
temps du rtivérend frère Mara-
36
/|0C
MAR
non, lorsqu'on uppril d'iihord par
lus leuillos j)ubli(|ijt;s ( iK'25 )
que sa révérence accompagnée du
général Santos Ladron, recru lait
dans le bas Arragon, et faisait long
ses efforts pour insiirrectionner
cette province en favenr du par-
ti de l'Infant don Carlos, ce qtii
donnait de sérieuses inquiétudes
au gouvernement. Presqu'aussi-
tôt on annonça que ce révérend
frère avait été arrêté à Logrono,
et conduit i\ Pampelune. Remis en
liberté, il fut arrêté de nouveau
et confié à la garde de ses suj)é-
rieurs. Le général Bessières qui
servait la même cause, ayant été
pris et fusillé, on assura en nïê-
ine temps que Maranon avait été
trouvé mort dans son lit.
MARGUEUIT (le baron), voy.
le Supplénilnt du toiue XVI.
MARTTÙy (Henry), pieux, sa-
vant et célèbre missionnaire an-
glais, naquit à Truro , dans le
comté de Cornwall , le 18 février
1781. Il montra dès sa jeunesse
les plus purs sentimens de piété,
et se détermina d aller prêcher
l'évangile aux peuples vulgaire-
ment nommés païens. Ce fut dans
«es dispositions qu'il fut ordonné
ministre du Saint-Evangile Bien-
tôt après, il partit pour les Indes-
Orientales; là, il exerpa avec le
plus grand zèle ses fonctions apos-
toliques. Après avoir traduit le
missel anglais en hindostani, il
célébra le service divin dans cette
langue , ce qui fui un spectacle
aussi nouveau qu'attendrissant.
Ensuite il traduisit aussi le nou-
veau testament en hindostani. Le
mauvais état de sa santé l'ayant
forcé d'interrompre «es prédica-
tions, il se détermina d'aller en
MON
Perse. Arrivé à (^Iiircv, il se mit
à Iniduire le nouveau leslameiil
et le jj'tautier en persan, et écri-
vit trois traités de cf)nlroversc en
persan contre la religion musul-
mane ( qui viennent d'être tra-
duits en anglais par M. le Rel.
S. Lee , et j)ubliés sons le litre de
Persian controversies). Il eut de»
conférences publiques avec des
docteurs musuhnans, et avec des
sofm (on déistes). Ensuite il quitta
la Perse, et mourut à la fleur de
son âge dans les plus grands sen-
timens de piété, à Tocat, le i(>
octobre 18 J2. Ses mémoires ont
été publiés en anglais, sous le ti-
tre de Me/noir of the Rev. Henry
Mnrtyv. Il en a déjà paru sept
éditions. Ses traductions du nou-
veau testament en persan et en
hindostani sont imprimées et ré-
pandues en Perse et dans les Indes.
MARET, duc de Rassano,^o)'.
le Supplément d»i tome XIII.
MAIUGNY, chef de bataillon,
t'oy.leSupplétnent du tome XIII.
MÉRILHOU, avocat , rot/. le
Supplément du tome XVI [I.
WEUNIER (N.), général de
division, voy. le Supplément du
lonie XV.
MÉVOLITON (le baron), voy.
l'Errafa du tome XIII.
MONDÉTOUR, ancien maire
de Paris, voy. le Supplément du
tome XV.
MONGLAVE (EcGÎîNEDE),toy.
le Supplément du tome XVII.
MOKRONOWSKI(Stanislas),
tjoî/.le Supplément du tome XVII.
lUONNERET, capitaine, voy.
le Supplément du tome XV.
MONÏÉMONT, homme de let-
tres, voy. le Supplément du tome
XV.
MON
faONTFALCON (lb cnETAUEB
Jbih de), maréchal-dc-tamp, ofli-
cler de la Icgion-d'honneur, et
chevalier de Saint-Couis , né au
Pont de Beauvoisin (Isère), le 6
février 1 767, entra an service le 3
novembre 1786. Cet oITicier géné-
ral qui fît toute» les campagnes de
la révolution, et donna partout
des preuve» du plus grand dé-
vouement, avait dès l'année I703,
signalé son courage sur les champs
«le balaille, et mérité fort jeune
encore le grade d'adjudanf-géné-
ral. Nous regrettons de n'être pa»
à même de citer tous les faits d'ar-
mes qui illustrèrent sa valeur, et
de ne pouvoir suppléer aux omis-
sions involontaire» de l'histoire de
nos campagnes. Quelques traits
épars dans les Victoires et Conquê-
tes, et dans les Fastes de la gloire,
recueillis dans cet article, servi-
ront i\ faire connaître le général
Montfalcon. Il était du petit nom-
bre de ces Français intrépides qui
se rendirent le 6 juillet »8o6, maî-
tres de Raguse, après avoir tra-
versé avec la rapidité du chamois,
et à travers les rochers, malgré la
chaleur excessive et des obstacles
toujours reriaissans, un pays que
les Monténégrins avaient souillé
de cruautés inouïes, et jonché de
cadavres décapités, et de restes fu-
mans d'hommes livrés aux flam-
mes. La retraite de l'armée d'Ita-
lie sur risonio, et l'affaire de Saff-
nitz en i8i5, vinrent ajouter à sa
vieille réputation de valeur, et
servirent à faire briller d'un nou-
vel éclat les talcns militaires de
RI. Montfalcon. Le grade de géné-
ral de brigade, auquel il fut promu
le I*' janvier 1814, ne fut pour lui
qu'une récompense tardive des
MON
4o5
plus honorable* services. Il com-
mandait en 181 5, le département
du Cantal, lorsqu'il reçut après le
retour de Napoléon, l'ordre de se
rendre à l'armée des Alpes, com-
mandée par le maréchal duc d'Al-
buféra. Chargé par le lieutenant
général Desaix d'occuper Bonne-
ville en Savoie, il était dans cet-
te position, lorsque le 27 juin l'en-
nemi s'y présenta avec dt!S forces
supérieures. Le général Montfal-
con l'attendit à bout portant, lui
tua beaucoup de monde, le pour-
suivit et lui fit un grand nombre
de prisonniers. Le 6 juillet suivant
attaqué de nouveau par les Au-
trichiens et les Piémontais ù
Oyonax, sur la route de Saint-
Claude, il se défendit avec sa va-
leur accoutumée, et les battit près
de Dorlans. Le général Montfal-
con dont la carrière militaire a été
trés-aclive, n'a point été employé
depuis celte époque, et a été com-
pris dans rordonnance du l" dé-
cembre 1824.
MONTIJO (dohi Maru-Fraw-
ÇOISE PORTOCARRERO, COMTESSE De) f
grande d'Espagne , etc. , issue
d'une famille dont l'illustration
remonte aux premiers temps de
la monarchie, épousa très-jeune
encore le comte de Montijo, grand
d'Kspagne de première classe ,
l'un des seigneurs les plus dis-
tingués de ce royaume, autant par
ses qualités personnelles que par
sa naissance. Son amour pour la
bonne littérature et ses efforts
pour en propager le goût la firent
bientôt connaître sous les rapports
les plus honorables; elle fit ell«-
méme des progrès si rapides ,
qu'elle ne tarda pas h prendre
place parmi lc« savan» le» plus
4«4
MON
recommanilables de l'Kspagne ;
sa maison devint en même temps
le centre de réunion d'un grand
nombre d'ecclésiastiques, qui joi-
gnaient les lumières aux vertus.
Des prêtres et ilct^ moines intolé-
rans et fanatiques, à qui ces réu-
nions portaient ombrage, parce
qu'elles tendaient à dissiper les
ténèbres où ils voulaient retenir
un peuple ignorant , accusièrent
de jansénisme ceux qui les compo-
saient et particulièrement la com-
tesse; deux d'entre eux, don Bal-
thasar Calvo, chanoine de Saint-
Isidore, et Antoine Guerrero,
dominicain, portèrent même lu
mauvaise foi jusqu';\ publier en
chaire qu'il existait dans la capi-
tale un conciliabule de jansénis-
tes, formé sous les auspices d'une
dame de la première distinction,
qu'ils ne nommèrent pas, mais
qu'ils désignèrent de manière à
ne pas s'y méprendre. Le nonce
de la cour de Home ayant informé
le pape de ce qui se passait, sans
avoir lui-même examiné les mo-
tifs qui faisaient agir les dénon-
ciateurs, sa sainteté, prenant pour
un vrai zèle ce qui n'était réelle-
ment qu'un scandale condamna-
ble, adressa des lettres de remer-
cîmens aux deux prêtres dénon-
ciateurs , et celte approbation de-
Tint le signal de nouvelles dénon-
ciations contre la comtesse et sa
société; on leur reprocha, outre
le jansénisme, d'entretenir une
correspondance religieuse et lit-
téraire avec l'abbé Grégoire, alors
évêque de Blois. Néanmoins la
toute - puissance de l'inquisition
fut obligée. de fléchir devant le
rang et la naissance des accusés.
La comtesse, invitée à s'éloigner
MON
de Madrid, eut l'air de ne céder
qu'à une intrigue de cour, et le.l
inquisiteurs qui avaient mené tou-
te l'affaire, "parurent à tous les
yeux n'y être entrés pour rien.
La comtesse de Montijo s'était re-
tirée à Logronf); elle y mourut
en i8o8 , et malgré la persécution
dont elle avait été la victime, elle
laissa une réputation de vertu et
de charité envers les pauvres, que
ses ennemis même n'osèrent pas
lui contester.
MONTROL (Fra^çois-Mowgin
DE ) est né à Langres en aortt
1798. Son père, capitaine au ré-
giment de liourbon au commen-
cement de la révolution , resta
fidèle aux drapeaux français , et
fit les premières campagnes de la
république avec les armées du
Rhin, de San)bre-et-Meuse et de
la Vendée. Il était devenu un des
officiers supérieurs des élals-ma-
jors des généraux iieurnonville
et Bernadotle, lorsqu'il se retira
du service, à peine âgé de aS ans.
Il fut nommé quelque temps après
inspecteur des eaux et forêts dans
le département de la Haute-Marne.
Le jeune de Montrol entra aussi au
pervice avant l'ûge de 16 ans, et
l'abandonna plus vite encore que
son père, la carrière des armes,
après les événemens de 1814 t^t
i8i5, n'offrant que peu de chan-
ces à l'avancement. Il se rendit ù
Paris, dans le dessein d'y étudier
le droit; mais ù peine arrivé dans
celle ville , il coopéra à la rédac-
tion des Lettres normandes. Ce
recueil, qui avait précédé la Mi-
nerve, et qui se montra constam-
ment aux avant- postes du parti
constitutionnel, était alors rédigé
par MM. Léon Thiessé, Bervilte,
p
MOS
et par Mitt. Bert et ChSteUin, au-
jounniui rédacictirs en chef, le
premier du Journal du commercCf
elle second du Courrier frariçaia.
Quelques-uns des articles que don-
na M. de Moulrolfurentremarqué?,
et l'un d'eux intitulé , des Immi-
grés et des nouveaux Officiers de
l'armée, lui suscita une de ces
affaires dans lesquelles les jeunes
Saint- Aulairc, Saint- Marcellin ,
David et quelques autres, perdi-
rent la vie. Il ne fut que blessé.
En 1831, M. de Montrol publia,
BOUS le nom de M"" Luce-Aimée
Mcerys de M..., fille de l'uo des
membres de l'asscmbb'îe consti-
tuante, un roman intitulé : Saint-
Léon ou la suite d'un Bal masqué,
dont plusieurs journaux nommè-
rent le véritable auteur. M. de
Montrol a fait imprimer depuis
un recueil de poésies légères. Il
a été long-temps le principal ré-
dacteur du Diable boiteux, qu'il
a concouru à fonder; son nom est
inscrit sur le titre du Mercure du
nj* siècle. Les journaux politiques
lui doivent aussi quelques articles.
Il vient dans ce moment ( iSaS)
de publier une Histoire de l'émi-
gration , qui a eu deux éditions.
M. de Montrol est un des auteurs
de la collection des Résumés de
l'Histoire de /''rance par provinces;
relui de la Gbampagne lui n été
confié.
MORAND, général, rv>?/. 5e Sup-
pléuîfcnt du tome XVIII.
MOREAU DE COMMAGNY,
auteur dramatique, roy*, le Sup-
plément du tome XV.
MOS rOWSRI ( Le comte Tni-
i>ée) , noble Polonais, moins cé-
lèbre par stis connaissances lillé-
raires et diplomatique» quc'pnr le
MOS
40 5
rôle honorable qu'il a rempli dans
les affaires de son pays, est ne
à Varsovie le 39 octobre ij'Gô.
Nommé, en 1790 , castellan et
sénateur, il devint dès- lors en
quelque sorte le régulateur de l'es-
prit public, par rinfluence d'una
Gazette nationale dont il était
tout à-la- fois le fondateur et le di-
recteur. La Pologne venait enfin
de s'élever au rang des nations li-
bres en }îc donnant la constitution
de «791; MosloAvski, connu par
son dévouement à la cause de la
liberté , fut nommé membre du
comité constitutionnel : mais ayant
vu bientôt celte cause sainte per-
due par l'adliésion du faible Sta-
nislas au traité de Tergowitz, qui
rendait de nouveau la cour de
Saint- Pélersbourgarbitrc des des-
tins do là Pologne, il quitta sans*
hésiter unpays où l'on ne pouvait!
plus vivre libre, et vint en FVnnce
en 1792. Lié de principes et d'affec-
tions avec les Condorcel, lesVer-
gniaud, les Brissot et leurs amis,
il prit part à tous leurs projets et
eut, au commencement de 179^»
quelques conférences avec les'
membres du gouvernement chez
le ministre Lebrun ; mais elles de-
meurèrent sans effet par suite de-
là révolution du 5i mai et i\\x,
triomphe des montagnards; de-'
venu suspect nu parti vainqueur,''
A cause de ses anciennes relations'
avec les girondins, il courut les
plus grands dangers; la mort de'
la princesse Lubomirska {voy. cû
nom ), traînée A l'échafaud parce"
parti, lui fit entrevoir les dangfM'!^'
qu'il courait. Après avoir été in-''
carcéré trois fois, il n'obtint (pi'a-
Vec beaucoup de peine |a permis-
sion de retourner dans sa patrie.
4o(î
MOS
QutiiquH inuiM du passeports en
règle, il fut arrètù une quatrièuie
fols en Iraversiiiit le département
de la Marne, et traduit au tribu-
nal révolutionnaire de Troyes. Il
aurait infailliblement succombé
dans cette dernière épreuve, si le
hasard n'eût amené sur les lieux un
membre du comité de salut public
qu'il avait connu h Paris (HérauU-
de-Séchelfes) , et qui le sauva.
Retiré enfin, après tant de périls,
danssaterredeTarkominen Polo-
gne, il crovait être à l'abri de nou-
veaux orages ; mais à peine habi-
tait-il cette retraite depuis quinze
jours qu'il vit tout-ii-coup sa mai-
son inveslîo par un corps russe
aux ordres du général-major Sie-
vers, qui l'arrêta au nom de sa
souveraine et le laissa chez lui sous
bonne garde. Le héros de la Polo-
gne, K.osciusko, ayant enfin tenté
au commencement de 1 794 un gé-
néreux effort pour relever l'éten-
dard de l'indépendance, le conjte
Mostowski profitant de la liberté
qu'il avait recouvrée peu de temps
auparavant, se plaça dans les ranjçs
des défendeurs de son pays, et fit
partie du conseil provisoire. Lors
de la prise du faubourg de Pra-
gue, il était membre du conseil
de guerre sous le général Wawre-
ki, que la captivité de Kosciusko
Tenait de placer à la tête de l'in-
surrection polonaise : ne voyant
plus alors d'espoir de salut que
dans une résolution désespérée ,
il proposa de réunir i\ la hûte les
débris de Tarmée, forte encore de
a5,ooo hommes et cent canons ,
de faire à leur tête une trouée ù
travers l'Allemagne, et d'aller re-
joindre l'armée française victo-
rieuse sur les bords du Rhin. Dom-
MOS
browitki chargé d»; l'exéculion de-
ce plan, fut forcé d'y renoncer par
suite des mésintelligences qui «e
glissèrent parmi les autres chefs;
et les infortunés Polonais, après
avoir fait tant de sacrifices et de
si héroïques efforts pour secouer
le joug étranger, virent encore
une fois anéantir leurs dernière»
espérances. iMoslowski, insensi-
ble à ses propres périls, ne vou-
lut point abandonner ses compa-
triotes malheureux : resté à Var-
sovie avec Ignace Potocki et quel-
ques autres compagnons d'infor-
tune, il reçut de Snwarow la pro-
messe que les personnes et les
propriétés seraient respectées ;
mais la modération n'entrait pas
dans les vues de l'implacable Ca-
therine : non contente de tenir
déjà dans la plus dure captivité
le brave Kosciusko, elle fit arrêter
le ao décembre 1794» le comte
MostOAVski qui resta enfermé par
ses ordres au château de Saint-
Pierre- et -Saint -Paul à Péters-
bourg jusqu'au mois de janvier
1797. Rendu à la liberté par la
générosité de Paul 1", il se relira
dans ses terres, s'y livra à l'agri-
culture tout en publiant une col-
lection des classiques polonais, et
devint membre de la société lit-
téraire de Varsovie. Au mois de
janvier i8ot), il eut auprès de
l'empereur Napoléon une mission
dont le moîif n'a jamais été bien
connu, et resta c\ peu près étran-
ger aux afiaires de son pays jus-
qu'à l'abdication de Napoléon.
L'empereur Alexandre étant de-
venu souverain possesseur légi-
time de la Pologne par les décrets
de la sainte-alliance, chercha d'a-
bord à s'entourer d'hommes re-
OtJD
vèhis lie lu cotinniice de leur» con-
cituyeuâ, et confia au comte Tha-
clée Moslowski les déparleniens
(le l'inlérieur et de la police gé-
nérale réunis.
MObïOWSRI (Joseph), frère
aîné du précédent, concouru t coni-
ine nonce de lu diète polonaise
de 1791, ii rélablissenient de la
constitutwn du 5 mai. lin 1792»
il lut député avec le prince Adam
C zarloriski , auprès de la cour de
Saxe, afin d'olfrir la couronoe
de Pologne ;\ l'électeur. Dans un
voyage à Paris qu'il Ot eu 1799»
il lut compromis dans un soi-di-
sant projet de réunir une diète
polonaise i\ i^liian, et obtint néan-
moins l'autorisation de retourner
Jans ses terres situées près de
^Vilna en Lithuauie, oi'i il a fixé
sa résidence. 11 parait être resté
depuis lors étranger aux affaires
dij>lu>iiatiq(ies.
NANI, professeur à l'universi-
té de Pnvie, voy. le Supplément
du tome XV.
NICOLIM, professeur à l'aça-
«lémie de Florence, voy. le Sup-
plt'menl du tome XV.
ODKî'iKlO , savant Génois,,
voy. le Supplément du tome XV.
OGlNSlvl , grand-général de
Lithuanie, voy. le Supplément du
tome XVII.
()GlNSK.I,grand-trésori(r, /(j//.
le Supplémctil du tome XVII.
OGlNSkl, chef de la garde
d'Imnncur de la Lithuanie, voy.
le Supplément du lome XVII.
UKLOFF (le comte), toy. le
Supplément du tome XV.
OUDAILLK ( N.), cultivateur,
lut nomnu'; déj>ulc du tiers -état
>\n l)iiiiliaj;-e de Leauvais aux élal,s-
„f;nér.iui eu 1789.. P/arUiaii nio-
PER 407
déré de la révolution , il montra
constamment du patriotisme ,, et
parut, en 1790, à la tribune, où
il demanda lu résiliation des baux
à louer de la régie des traites pour
les bureaux établis dans l'intérieur
du royaume. Après la session, il
retourna dans ses foyers et ne pa-
rut plus sur lu scène politique.
PAG (N.), général de division,
voy. leSupplémentdu tome XVII.
PASZKOWSKI (N.), général,
de brigade, voy. le Supplément;
du tome XVII.
PEPOLI (lb comte), voy. le
Sup|)lément du tome XVI.
PÉRALDI , colonel , voy. le
Supplément du tome XVII.
PERCE VAL, hotnuie d'état an-
glais, voy. leSupplémentdu tome
XVI.
PERCIER(CHAnLEs), membre
de l'institut (académie des beaux-
arts ) , né à Paris vers 177^»
elk regardé connue im des meil-
leurs architectes de l'époque ac-
tuelle , et l'arc de triomphe qui
décore la place du Carrousel com-
me son plus bel ouvrage. Associé
à tous les travaux exécutés par
M. Fontaine, quV||bail avec luj^
architecte de l'empereur Napo-
léon, il existe entre eux une soli-
darité de méiile qui permet dilli-,
cilcnjent de fixer la part de cha-.
cnri. C'est en counmm qu'ils uni
publié nn miKnifique ouvrage sur
l«;s palais de Rome et les maison»
de plaisance qui embellissent Icâ
envirolis de l;i capitale du monde
çhrélieii. MM. Percier et Fontaine
ont exécuté ensemble les travaux
d'aclièvcmcnl et de restauration
qui ovt été faits au Louvre et aux
Tuileries^ ensuitt,i!s oui nonsiruii
(c magnifupjc cscalicrdui^MScuui-,
4o8
PEU
enfln, le gouvernement impcri;U
n'a rien fait faire de grand el de
magnique qui n'eût été confié aux
lalens de ces deux habiles archi-
tecte,*. Personne ne dessine avec
autant de précision et d'élégance
que M. Percier les détails de l'ar-
chitecture.
PÉRIER (Casimir), banquier,
membre de la chambre des dépu-
tés , el l'un de.< orateurs les plus
distingués de l'opposition, est né à
Grenoble le la octobre 1777» do
Claude Périer, négociant et pro-
priétaire du château de Vezilie près
de Grenoble : nous ne citons cet-
te dernière circonstance que pour
avoir occasion de dire que ce châ-
teau, où se tinrent pour la derniè-
re fois, en 1789, les états du Dau-
phiné, doit être regardé comme
un des berceaux de la révolution.
Élevé au collège de l'oratoire à
Lyon, M. Casimir Perrier, au sof-
t4r de ses études, qu'il fit avec
beaucoup de distinction, embras-
sa fort Jeune la carrière militaire,
où il se montra avec honneur. Il
fit les campagnes d'Italie dans les
années 7 et 8 (1799» et 1800), et
fut nommé advint du génie mili-
taire. Il était attaché à l'état-ma-
jor de celte arme, lorsqu'il se dé-
cida à quitter le service pour se
vouer au commerce; suivant en
cela les dernières volontés de son
père qii'il venait de perdre, et qui
avait laissé d^ms cette profession
la réputation la mieux nïéritée, el
les plus honorables souvenirs. RI.
Casimir Périer, en 1802, leva à
Paris, avec M. Scipion Périer son
frère, une maison de banque dans
la direction de laquelle la péné-
tration de son esprit lui fit acqué-
rir des connaissances très-éten-
PER
dues, qui devaient un jonr lui ser-
vir à éclaircir les questions les plus
épineuses et les plus importantes
sur le crédit public -el les finances
de l'élat; égalcujent habile à fé-
conder l'industrie, devenue le res-
sort principal de la civilisation
moderne et lu source inépuisable
de la prospérité publique, il sut
en associer les travaux dans plu-
sieurs branches, aux opérations de
la banque, dont il agrandit les ré-
sultats. La cristallerie, la filature
du coton, le rafinage des sucres,
ont été plus particulièrement l'ob-
jet de ses soins et de ses constan-
tes invesliga!ions,dans des établis-
semens à la création desquels il a
concouru. La fonderie de Chail-
lot, rétablie ou plutôt recréée par
son frère Scipion , doit aux soins
persévérans qu'il a continué à y
donner, la réputation sans rivale
en France, dont jouit cette tisinc
pour l'excellence des machines
qu'elle livre à l'industrie. M. Casi-
mir Périer vient ( 1826 ) de fon-
der à Passy dans l'ancien couvent
des bonshommes, un établisse-
ment considérable de moulins à
blé, mus par la vapeur; on con-
çoit de quel immense intérêt doit
être pour Paris un établissement
au moyen duquel une population
de neuf cent mille habitans cesse
d'être exposée à souffrir de l'exces-
sive cherté des farines dans certai-
nes années par l'effet de la séche-
resse, la faiblesse du vent et con-
séquemment l'insuffisance des
moutures. L'intime alliance des in-
térêts commerciaux avec les finan-
ces de l'état, dont il avait fait une
étude approfondie, ne permettait
pas à M. Casimir Périer de rester
étranger à la grande (jiieslioQ du
PER
crédit public, quimeltall en mou-
vement lous les esprits. Il fit paraî-
tre en 1816 un écrit contre le sys-
tème (l'emprunt ;\ l'étranger, où
la cl;irté, la ju.-tesse et prinpipale-
ment la nationalité de ses vues en
finances, s'unissent à une noble
hardiesse de pensées exprimées
dans un style à la fois éléj^aiit el
nerveux : cette production qui
révélait à la France un de ces
hommes rares dont parle Quinti-
lien , habiles à bien faire et à bien
(lire, fixa sur son auteur l'atten-
tion publique, qu'elle avait exci-
tée, el fit pressentir les servii^es
qu'il rendrait à son pays, dans les
hautes fonctions législatives, où
il fut appelé le jour mC'me où il
eut alleinl l'âge voulu par la loi.
M. Casimir Périer élu membre de
la chambre des députés en 1817,
par le collège électoral du dépar-
tement de la Seine, en a constam-
ment fait partie depuis cette épo-
que. Satisfaisant dés lors à des de-
voirs plus rigoureux, que lui im-
posait rintért'l général, M. Casi-
mir Périer n'a jamais cessé d'ap.
fiorter le tribut patriotique de ses
umièrcs dans les grandes ques-
tions de finances qui ont été dé-
battues à la tribune législative. On
l'a vu sous le ministère de M. Cor-
vetto, s'opposer de toutes les for-
cesdeson talent ctdesa conviction
au système désastreux des em-
prunts à l'étranger, et insister avec
la même énergie sur l'adoption
de mesures A la fois moins oné-
reuses et plus honorables. Sous le
ministère de M. Rny, il prononça
dans la séance du 12 février i8ii,
ini discours très - remarquable ,
dans lequel il combat, comme u-
110 très- mauvaise opérali(;n finan-
PER 4o\)
cière, la création des annuités. A
propos des funestes événemens
du mois de juin 1820, M. Casimir
Périer fut l'un des députés qui si-
gnalèrent avec le plus de cotirage
et d'indignationà à la chambre, les
attentats commis contre la repré-
sentation nationale; il s'éleva avec
une patriotique chaleur contre les
mesures imprudentes de l'admi-
nistration de cette époque, mesu-
res plus propres à perpétuer le dé-
sordre, en faisant couler le sang des
citoyeus,qu'.\ maintenir la paix pu-
blique; peut-être l'éloquence delà
tribime, cette éloquence de l'aine,
dont Démosthène et iMirabeau of-
frent les plus admirables modèles,
n'a-t-elle jamais été portée plus
loin que dans le discours qu'im-
provisa M. Casimir Périer dans la
séance du 2 j février i8ii, en ré-
ponse aux accusations réitérées
du garde-dcs-sceaux (M. de Ser-
re), tendant iV présenter les dépu-
tés de l'opposition comme des
provocateurs à la révolte, et com-
me ayant contribué par leurs dis-
cours prononcés à la tribune, à fo-
menter les troubles du mois de
juin de l'année précédente : «Non,
messieurs, disait, en terminant,
M. Périer, il n'y a point de cou-
pables de conspiration, les seuls,
les vrais coupables sont ceux qui
ont attenté à la représentation
nationale : si nous avons conspire
pourquoi ne sommes-nous pas on
jugement? quant i moi, je me dé-
pouille du caractère de député , je
repousse un odieux privilège, et
vous, ministres, avant que nous
quittions cette enceinte, ordonner.
Il vos licteurs de se saisir de notre
personne : il faut en finir de tant
d'accusations : avci-vous besoin
4«o MJtt
de nos lûtes, failes-les lotnher;
mais qiio ça soit dcvnnt la loi. »
M. C.isimir Péiier, que la triste
victoire du ministère sur les élec-
tions do ï8i4 privait de l'appui
de presque tous ses honorables
amis, a redoublé d'efforts pour
la défense des droits conslUulion-
néls et des intérêts publics, dans
les sessions do 1824 et i8a5, et
n'a pas perdu une des nombreu-
ses occasions que lui a offertes
M. de Villèlc, d'augmenter ses ti-
tres à la reconnaissance nationale,
en démontrant jusqu'à l'évidence
les malheurs qui devaient résul-
ter des projets de loi de réduction,
de conversion et d'indemnité,
qu'il croyait contraires à la char-
te et de nature à amener de nou-
veaux bouleversemens dans l'état.
La religieuse observation do la
charte constitutionnelle lui parais-
sant surtout inconciliable avec la
loi proposée pour indemniser les
émigrés, il a prononcé, à celte
occasion, un discours de la plus
haute éloquence, dont nous nous
bornerons à citer la péroraison :
« Dans quel intérût cette loi est-
• elle présentée? ce n'est pas dans
• celui de l'émigration, quia si vi-
» vement faitentendresesplaintes;
■ ce n'est assurément pas dans celui
• du pays, si éminemment menacé,
» si victorieusement défendu : c'est
ndans l'intérêt du ministère. Il a
«voulu enchaîner l'émigration,
«seule force qui pût lui résister.
"L'émigration n'étant pas une
n fonction, elle a fait peur au mi-
nnislère, qui ne pouvait la dcsll-
»luer. Ne pouvant la destituer,
»il a voulu la payer. C'est à von?,
«mcsjiwurs, de savoirsl vous ac-
x'Cepleret de passer sous les four-
PKR
»chcs dorées du ministère. L'opi-
» nion (|ue nous représentons, uiu-
«tilée dans ses droits politiques
»pur la colère et la vengeance du
» ministère , volt ses défenseurs ré-
iduits à un petit nombre dans
• celle enceinte. A l'aspect des
» dangers qulmenacent notre pays,
• il ne nous restait qu'A serrer nos
• rangs et à soutenir ainsi les al-
• taques dirigées par le ministère
• contre les Intérêts dont la dé-
• fense nous est confiée : c'est ce
• que nous avons fait. Nous snc-
» comberons, nous le savons ; mais
• du moins aurons-nous la conso-
• lation d'entendre dire aux coeurs
«généreux, aux véritables amis
• du roi et de leur pays, que nous
«n'étions indignes ni du combat,
• ni même ilii succès, filais, que
»dis-je? notre cause n'est point
• perdue! J'en appelle à vous, no-
»bles chevaliers de l'ancienne
«France, qui devez nous jugée.
• Il n'est pas besoin de vous rap-
» peler que les lois de la victoire
• et de l'honneur, dans tous les
• pays, sont de ne se partager les
• dépouilles que de ceux que l'on
• a vaincus. > M. Casimir Perler,
dans la force de l'âge et du talent,
voit s'étendre devant lui une lon-
gue carrière de gloire et de suc-
cès qu'il parcourra, soutenu
par l'eslirae et la reconnaissance
publiques. Déjà il reçoit la douce
récompense de ses nobles travaux
dans l'accueil touchant que .lui
font les habitaus de Grenoble, sa
ville natale , où il se trouve en ce
moment ( juin 1825 ), qui lui
prodiguent les témoignages de la
plus tendre vénération.
PERROT, géograph»;, voi/. le
Supplément du tome XVIIl.
I>IT
PEIVVINQUIÈRES (N.), né à
Fontenaj dans le bas Poitou^ j
exerçait la profession d'avocat a-
vec distinction , quand il lut en-
voyé aux état:» généraux comme
député du tiers -état; il n'y prit
qu'une fois la parole, ce fut pour
demander que le remplacement
de la gabelle fût porté à cinquan-
te-quatre millions. PV Pervin-
quières a, dans tous h s temps et
?ous tous les régnes, professé des
principes constilutiotmels. A l'é-
poque 01^ le gouvernement impé-
rial donna une nouvelle organisa-
tion à l'ordre judiciaire, il fut
nommé l'un des présidents de la
cour de Poitiers, place qu'il occu-
j»e encore aujourd'hui (iS'^S). M.
Pervinquières est le beau-frère du
général comte Belliard , mem-
bre de la chambre des pairs.
PETIET, ex -ministre de la
guerre, voy. le Supplément du
tome XVII.
PEYRONNET (comtb de), voy.
le Supplémf.-nt du tome XVI.
PITARO ( Amtoine) nous écrit
contre cette a.»scrtion de notre ar-
ticle {f^oy. le tome Wl)^ qu'il
avait quitté Paris en 18 j4, pour
rentrer à NapteSf sa patrie. « Je
n'ai jamais eu l'idée de m'expa-
trier de Paris, dit M. Pitaro, et
je o'ai pas l'intention de quitter
cette ville où je fus nommé mem-
bre, en 180a, de la société gal-
vanique et des sciences physiques;
en 1804, de la société médicale
d'émulation; en 1806, membre île
l'institut royal des sciences natu-
relles de Naples; enfin, en 1807,
correspondant de la société impé-
riale d'agriculture de la Seine. An-
Inrisé en t8o8, par décision de la
faculté de Paris et par décret du
POP
411
I" octobre, d'exercer ma profes-
sion dans toute l'étendue de l'em-
pire, j'ai reçu, par décision de la
même faculté, le diplôme de doc-
teur en médecine et al été nom-
mé membre de la société de mé-
decine pratique; en 1809 je fus
nommé médecin légal à la cour
impériale de Paris; en 1816 j'ob-
tins des lettres de naturalisation
et de citoyen français; en i8aa je
devins corespondant de la s(»ciété
royale de Watmester, et, en i8'i5,
membre honoraire de la société
royale de Londres pour la propa-
gation du vaccin. » IVl. Pitaro a
publié les ouvrages suivans : 1°
Traduction de la Théorie de la vie,
par Andria, 180 5; 2" Lettres phi-
lologiques et physiques y 1812; 3"
Mémoires physiologiques et chimi-
ques, même année; 4° La science
delà sétifèrc, ou l'art de produire
la soie avec sûreté et avantage,
i8i8; 5° un Poëme de trois mille
cinq cents vers sur le même
sujet.
PIPELET, médecin, voy. le
Supplément du tome XVIII.
PONCE-CAMUS, peintre, voy.
le Supplément du tome XVIII.
PONS DE L'HÉRAULT, voy.
le Supplément du tome XVII.
POPULE ( N. ) , ancien maire
de Roanne, mérita, dans tout le
cours de la révolution, par la sa-
gesse de ses principes , la modé-
ration de sa conduite , et son dé-
vouen)entÀla patrie , l'estime do
ses concitoyens. Lors de l'invasion
étrangère , en 1 8 1 4 , il ^"^^ '«* •»">-
mer de son courage , et contribua
ainsi A la belle résistance qui les
couvrit de gloire à cette époque.
Le» Français n'ont point oublié et
l'histoire répétera que cette ville.
4t2
POU
ù peine peuplée de gooo habitans,
et n'ayant d'autre défense que la
Loire, porta l'héroïsme jusqu'il ré-
sister à l'ennemi , même après que
Lyon, Moulins, et Nontbrisson,
eurent été occupés, malgré leur
immense population , et qu'elle ne
»e rendit que devant 11,000 Au-
trichiens. AI. Popule siégea à la
chambre des représentans pen-
dant les re«;_/c»ar.î, en i8i5. Nom-
mé à la chambre de» députés en
1818, et placé au centre près de
la gauche, il y défendit les liber-
tés légales, et soutint les intérêts
du département de la Loire qu'il
représentait. Il réclama avec éner-
gie contre la pétition d'un sieur
Remy , du Haut -Rhin, qui de-
mandait que les préfectures du
Rhône et de la Loire fussent réu-
nies et n'en formassent qu'une ,
et obtint l'ordre du jour. Il s'ins-
crivit aussi contre la résolution de
la chambre des pairs, relative-
ment ;\ la loi des élections. Dans la
session de 1819, M. Popule a volé
contre les deux lois d'exception,
et, avec les igS, contre le nou-
veau système électoral. Le 4 juil-
let, il demanda et obtint un con-
gé; il termina ainsi ses fonctions
législatives et ne fut plus appelé à
en remplir de nouvelles.
POTOCKI (Wlobimib), voy. le
Supplément du tome XVII.
POLDRET DE SEVREÏ (Re-
né), colonel d'infanterie, cheva-
lier de Saint-Louis, oUiiner de la
légion-d'honneur et chevalier de
Tordre royal et militaire de l'épée
de Suède, né à Niort (Deux-Sè-
vres) , appartient à une famille es-
timée dan? la magistrature. Il
entra au service le 26 août 1792,
comme simple soldat à la forma-
POU
tion da %* bataillon des Deux-Sè-
vres, et fut nommé sous-lieute-
nant le a4 octobre suivant. Il ser-
vit avec la plus grande distinction
aux difîérenles armées qui se sont
succédé depuis 1792 jusqu'en
1816, et obtint par son courage
et se^ talcns tous ses grades jus-
qu'à celui d(! colonel du loG* ré-
giment de ligne. Il se distingua
particulièrement ;'i l'armée de Sam-
bre-et-Meuse en l'an 4; ''»•' 2* pas-
sage du Rhin, le 14 messidor; à
l'affaire de Bamberg, aux combats
de Coning et Neumarck, même
année, et à la bataille de Vurlz-
bourg le 19 fructidor suivant. Au
passage du ïagliamento , et à la
prise de Gradisca , en Italie,, en
l'an 5, le courage dont il fil preu-
ve lui valut les éloges du général
en chef. Il s'empara à la bataille
d'Austerlilz, à la têle d'un déta-
chement du 9:7* régiment, d'une
batterie d'artillerie de la garde
impériale russe, qui lirait à mi-
traille sur la division du générât
Drouel, et y causait de grands
ravages. Décoré de la légion-d'hon-
neur en 1 806, il fut nommé chef de
bataillon à l'élat-majorde l'armée,
le 5 mars 1807, et aide-de-camp du
prince de Ponte-Corvo(Bernadot-
te)le 29 septembre suivant. Bles-
sé à la bataille de "NVagram, le 6
juillet 1809, d'un coup de feu à la
jambe droite, à son retour de Suè-
de, où il avait accompagné com-
me aide de-camp le prince royal,
il entra dans le 1 06* régiment d'in-
fanterie. Dans la campagne de Rus-
sie, en i8i2, on lui donna le com-
mandement des voltigeurs réunis
de la i5* division, commandée par
le général Deizons; et ce fut à la
lôte de ces voltigeur*, qu'au coiu-
i
PRO
bat il'Ostrowno, prr.s Wilepsk, le
'/() juillet i8 la, il repoussa le» Rus-
ses avec la plus grande vigueur et
«près avoir eu la moilié de ses
braves hors de combat il fut atteint
d'une balle qui lui traversa le cou
et la tête. Sa brillante valeur etson
cour.ige ainsi que le sang - froid
dont il venait de donner des preu-
ves multipliées, furent récompen-
sés sur le champ de bataille de
Wilepsck par la croix d'oflicier de
la légiou-dhonneur. Il fut nommé
en même temps colonel en second
pour être employé à l'état-major-
général de l'armée. En 18 15, il
reçut l'ordre d'aller prendre le
commandement du U)6* régiment
en Italie, le réorgani.^a en entier et
on l'ut nommé titulaire le 1 1 mai
18 13. Il mit, peu après, 4 batail-
lons de guerre en campagne, sous
bfs ordres du prince Eugène {voj.
BEArnAB:*Ais- Eugène) , prit part
avec son régiment à tous les faits
d'armes de cette campagne , fil
toujours preuve d'une grande va-
btur, notannnent au combat de
(îastagnaro, en Italie, sur l'Adige,
où il fut encore blessé d'un coup
de feu au pied droit. Nommé par
le roi en i8i/|, colonel du 87' de
ligne, et chevalier de Saint-Lotiis,
il fut licencié avec son régiment le
i8 novembre i8i5, et admis à la
retraite, quoique jeune encore, à
la fin de 1816.
POUCET (le baron) , vot/. le
Supplément du tome XVI.
PROTEAU ( LE vicomte). Dans
le 17* volume <le cet ouvrage nous
avons dit que iM. Proteau parais-
sait avoir été mis à la retraite de-
puis la seconde ri:slauralion. (]'est
une errcjir. il a continué rl'être em-
ployé. Il commande encore au-
PRO
4i3
jourd'hui (iSaS) à, la résidence de
Limoges, la 5' subdivision de la
21' division militaire. Dans une
lettre qu'il nous adresse à ce sujet,
il nous doime des détails sursa vie
active qui ne nous étaient pus en»
tièrementconnus elque nous nous
plaisons à rapporter en le laissant
parler lui-même. « Il est très-vrai,
dit M. le vicomte Proteau, que
j'étais au service de l'état en 1 793,
et deux voyages successifs aux In-
des orientales et occidentales de
1788 i\ 1792, m'avaient valu le
grade d'oliicicr. Au combat du 1"
juin 1794» contre l'amiral IIoav,
j'étais chargé des signaux sur uti
vaisseau qui, serre -file de l'armée,
eut les honneurs de la journée du
29 mai ; malgré une perle de
7)oo hommes et quoique le vais-
seau fût désemparé, il se présenta
en ligne à la remorque le 1" juin.
Cette affaire prépara, avec l'amour
de mon pays, la conduite que je tins
plus tard,eni797,en Irlande et dont
vous avez rendu l'exacte vérité.
Je dus mon échange et mon prompt
retour dans ma patrie à la sol-
licitude et aux démarches empres-
sées d'un ministre qui m'accueil-
lit avec éloge et encouragement,
et qui depuis m'honore dcsou ami-
tié : il siège aujourd'hui à la cham-
bre des pairs. Dans mon grade de
lieutenant de vaisseau, je fus cons-
tamment embarqué pour cet em-
ploi et celui de major d'escadre :
lorsqu'en ^98 je débutai dans le
oommandcment par celui d'une
corvette d'une marche supérieure,
l'aviso VAt^ile : de celle époque
je ne cessai plus de commander.
En 1 799, dans la campagne de l'O-
céan et de la Méditerranée, je
commandais le Vautour^ cortrelte
4 '4 PftO
lie communication entre les ami-
raux Bruix et Massaredo des ar-
mécsnaTalescoinbinéesdc France
et d'Espagne, En 1800, appelé A
commander la frégate l'Indienne
au Havre, je fis l'inaugnralion de
ce bassin militaire en sortant la
frégate toute armée et équipée , et
forçant le passage contre une di-
vision anglaise qui m'y obst^rvait.
Je parcourus sur celte frégate les
mers de la Manche et de l'Océan,
les côtes d'Espagne et de la Médi-
terranée,toujours au milieu des en-
nemis; à l'aflaire du détroit contre
l'amiral Saumarés, je combattais
à l'arrièrc-garde près des vaisseaux
espagnols VHerménégiUieel le San
Caiios de 110 canons, lorsqu'ils
prirent feu et sautèrent; plus tard
à la paix d'Amiens, je poursuivis
ma course de Cadix pour Saint-
Domingue, où continuant d'être
armé sur le pied de guerre je fus
chargé d'observer du cap Liba-
ron l'escadre anglaise , avec la-
quelle j'eus une rencontre qui me
mérita l'éloge de l'amiral Lalou-
che-ïréville et du ministre de la
marine. Je fis mon retour en Eu-
rope en 1801. Le commandement
de cette frégate me fut toujours
continué. Elle eut la destination
d'être la frégate amirale de la flotte
de Brest. Elle était à l'action de
lîertheaume contre l'amiral Corn-
walis. Au renouvellement de la
guerre, en 1809, elle faisait par-
tie de l'escadrequi était stationnée
sur la rade de l'île d'Aix. Je com-
mandais l'avant-garde, chargé de
1.1 défense de l'estacade qui cou-
vrait l'escadre et sur laquelle j'é-
tais mouillé quand, dans la nuit du
11 avril 1809, l'amiral Gambier
laufa ses brûlots pour incendier
PRO
l'escadre française. Deux machine»
infi^rnales, dites catamarans, fl»il-
tant entre deux eaux précédèrent
d'abord, pour rompre l'estacade
et ouvrir le passage. Leur explo-
sion successive se fil sous le beau-
pré de la frégate; alors suivirent de
tous côtés uoinbrede brûlots; déjà
accroché par deux des premiers,
je fus obligé de manœuvrer pour
m'en débarrasser et éviter ceux
qui se succédaient dans le fil du
courant que j'occupais. En ma-
nœuvrant avec les autres bStimens,
qui tous furent dans la nécessité
d'abandonner leur poste pour pen-
ser à leur salut dans une nuit aussi
efl'royable que désastreuse et au-
dessus des forces humaines, j'é-
chouai sur l'île d'Euet en voulant
éviter d'entrer en rivière de llo-
cheforl dont je voulais laisser le
libre passage aux vaisseaux tirant
plus d'eau que moi et me réserver
comme bâtiment léger pour ré-
sister aux attaques de vive force
qui devaient avoir lieu après un
tel désordre. Demeuré sans se-
cours et exposé aux attaques suc-
cessives de l'ennemi jusqu'au 16
avril, je fus réduit, malgré tous
mes efforts , au parti extrême de
ravir à l'ennemi, qui n'avait déjà
obtenu que trop de succès, le fatal
avantage de disposer des débris de
mon bâtiment que les vagues dé-
molissaient sous mes pieds, en
faisant sauter ses restes pour sau-
ver l'honneur du pavillon. Les lois
militaires m'obligeant de rendre
compte à une cour martiale de la
perte de mon bâtiment, ma déter-
mination fut complètemenl justi-
fiée par la décision de cette cour, au
nom de laquelle l'officier-général
quilaprésidait me remit publique-
PRO
ment cl liOiioral)lemrnl mon t'ipéc.
Je suis anivé ;»u pn&sagfi de l'ai-
li^'^e où vous (liles que je perdis
mon etnpidi. C'est une eireiu"
eoniplèle. Le gouvernement m'en-
voya aussitôt en mission en Hol-
lande. Cette mission remplie, j'eus
le commandement du 17* équi-
paçc de flottille au port de Brest,
avec lequel je passai, en 1811, au
commandement d'une escadrille
au port de Houingne. lin iHia,
j'eus l'ordre de désarmer la flot-
tille de Boulognedont j'avais alors
le commandement et de compo-
ser un corpsde marins d'élite, avec
leqirel je partis le 21 mars de la
même année "pour la campagne de
Jîussie. Ce cor])s de marins, connu
sous la dénomination de 1 r' équi-
page, rendit de grands services
nautiques et militaires; avec lui
j'occupai les cc'iles de Courlande
et la Courlande inférijMire, dont
iVJ. le maréclial Macdonald nie
conlia le commamlemciit. On vit,
dans la retraite, la belle contenance
*\v ce corps. IMacéen arrière-garde
sur lesliauteursdel'Aptaiilt, coupé
d.ms cette position je me jeiai dans
la forteresse de Pelow, d'où je sor-
tis le 9 février ii>i5 avec ce brave
corps sous mes ordres, par suite
d'une capitulation honorable (ar-
mes, bagages, munitions de guerre
et la faculté de faire tête h l'en-
nemi luie fois arrivé sur le Rhin).
Dans ma marclie par la l'russe, nu
milieu des armées russes qui s'a-
viinçaient vers la France , cette
capitulation fut rigoureusement
observée et même avec des égards
militaires. Le 5 avril je rentrai i^
IMayence, et le 21 le chef de l'ar-
mée me dit lui-même • qu'on ne
naviguait plus, que ma présence
PRO
41-5
était inutile dans les ports», et
j'eus l'ordre do suivre le grand
quartier-général li la campagne
(l'Allemagne. J'y remplis les fonc-
tions d'adjudant-commandant, ca-
pitaine de vaisseau employé à la
reconnaissance des défilés, du ^\\k
des rivières, au jet des ponts et
passages de l'armée. Je me suis
trouvé aux batailles de Lutzen, de
Bautzen, de Dresde, de Leipzig et
aux principaux combats de celte
campagne, notamment à celui
d'iiauau contre les Bavarois, cl
qui me valut le grade de général
de brigade. Je commandai en cette
qualité le grand quartier-général
dans la campagne de France, et
j'en eus le commandement supé-
rieur \ Chartres lors de la restiui-
ration. Vous avez signalé à Popi-
nion ce que j'ai fait de remarqua^
biedans la preuiiére; ma coa|)iuite
en Prusse me valut dans le
Moniteur du i" février 18 k*) cet
éloge du roi : « Sa Miijesté a bien
I) voulu témoigner au général Pro-
ttteau qu'elle était contente de ses
«services, et que par la manière
»dout il s'était acquitté de sa mis-
Bsion, il avait bien rempli les in-
> tentions paternelles du roi pour
nies malheureux militaires qu'il
» était chargé de consoler et de se-
» C'iurir.ii Due omission que je me
plais à produire parce que j'ai tou-
jours eu la résolution d'être hom-
me de mes devoirs, c'est que je mar-
chai sur Lyon sous les ordres de
Monsieur, comte d'Artois, et mes
contemporains connaissent l'éncir-
gique dévouement que je marquai
au prince dans celle circonstance
critique, qui me valutoveo des ex-
pressions obligeantes, l'assurance
d'être attaché à S. A. R. J'en al teiiilti
4if;
PI) Y
en vain l'ordrft jusqu'au 20 mars. La
stîconde restauration me trouva à
Cherbourg. Vous avez (Fit ce que
j'y ai ("ait, elles journaux du temps
répétèrent que je venais de con-
server «par la fermeté de ma con-
»duite cette place importante et
«son arsenal, contre les préten-
» tionsdes alliés et celles destronpes
«prussiennes qui en firent le blocus
«rigoureux en août et septembre,
«sans m'être écarté des ménage-
«niens qu'on leur devait. »
PUY ( N. ), un des généraux
espagnols qui se sonb le plus ren-
dus fameux par leurs cruautés
dans l'Amérique méridionale , et
qui ont le plus nui à la cause qu'ils
étaient chargés de défendre, na-
quit en Espagne, et fut obligé de
l'abandonner, poursuivi pour des
délits que l'honneur et les tribu-
naux condamnent également. 11
passa alors dans l'Amérique du
sud, et y forma des liaisons qui
le préparéient au rôle qu'il ne
tarda pas à y jouer. Il avait obtenu
sur les esclaves une .«orte d'in-
fluence dont les royalistes profi-
lèrent habilement pour les soule-
ver contre les indépendans et ex-
citer la guerre civile dans la nou-
velle république de Venezuela.
Puy, l'un des agens secrets de la
cause de la métropole, en devint
ensuite un des généraux les plus
entreprenans. Après avoir repu
des secours en armes et en muni-
lions des gouverneurs de Puerto-
Cabello et de la Guyana , il réunit
les troupes de Coro et de Mara-
caybo , se porta avec elles dans la
partie de l'ouest de la province
de Caraccas, attaqua successive-
ment Barinas, Mérida et Trnxillo,
grossit considérablement son ar-
PLY
méc f en y incorporant tous les
esclaves et les malfaiteurs des
lieux où il passait, auxquels il
donnait la liberté, et en vint au
point de s'emparer de différentes
villes ; mais son passage était par-
tout signalé par des flots de sang
et par des actes d'une férocité
inouie. On peut juger de l'esprit
qui l'animait par le fait suivant :
Puy avait perdu la bataille d'A-
raiire, et s'était réfugié dans la
ville de Barinas. Au moment où
Bolivar marchait pour l'en chas-
ser, Puy donna l'ordre d'arrêter
cinq cent soixante-quatorze per-
sonnes qu'il présumait mécoi»ten-
les de le voir au milieu d'elles, et
en fit fusiller cinq cents sur le
champ, sans aucune espèce de ju-
gement; cette effroyable exécution
allait continuer, lorsqu'un aidc-de-
camp vint annoncer que les répu-
blicains approchaient de la ville.
L'atroce général espagnol deman-
da d'un air inquiet: «Avons-nous le
temps d'exécuter les soixante-qua-
torze prisonniers reslans ? » Non ,
dit l'aide-de-camp , et ce fut ainsi
qu'ils échappèrent à la mort. Mais
sa cruelle vengeance ne fut que
différée ; ayant surpris quoique
temps après cette même ville de
Barinas, il se fit un barbare plai-
sir d'y répandre le deuil et la
consternation, et cette fois, il
prit SCS mesures pour qu'aucun
habitant ne survécût au massacre
général. Cet homme affreux, au
lieu de porter à l'échafaud sa
tête qu'y dévouaient les mânes
de tant de victimes, mourut de
la main des braves. Il tomba quel-
que temps après sous le fer des indé-
pendans dans une affaire où son ar-
mée avait été complètement bat tue.
KAV
RAliBE,IiHéi aleiir, voy. le Sup-
Jilt-uiuiil liu tome WIl.
RAIlBE, ccloiiil, wy. îe Siip-
plruieiil du tome XVII.
UAVliNEL (Louis Gadd, ohhtb
de) naquit ù Cran ville, {teùle
ville ni.iiitjtne de la Normandie,
le iG se()lr:ml)re 1747- ^'' ""^^~
moire apparlient aux Castes de la
ui.irinc, carrière dan.s laquelle il
&e dislingua de bonne heure, et
où il eut un avancement rapide
qn'il ne dut qu'a des laleiis mili-
taires et admini;itra(irs de Tordre
le plus élevé. Il reçut la décora-
lion de l'ordre ro^al et militaire
de Saiul-Loui> sur le chain|t de
bataille, et eut la jrloire d'être sur-
nommé rincori'upUhle par lecorps
auquel il appartenait. iM. de Ra-
venel entra au service, eu i^Gj,
en qualité de volontaire et d en-
seigne sur des vaii'st'aux de com-
merce, armé^ à Saint-Ma!o et à
Cirau ville pour-J'île de Terre-Neu-
ve , le golplie'rte Sjint- Laurent ,
l(îs iles de Saint-Pierre et Mique-
lon ; ei pendant la durée de ce
service parlicnlier, qni lut de trois
aii», il lit deux iiauiVages dans les
ineis h}'perborées. Il s'embarqua
ensuite volontairement ù Saint-
Pierre de Miquelon, sur une flûte
dn roi, ta Pttite fortune , com-
luuudée par M. de Raveuel, son
père , lieutenant de Iréj^ale. l^e
jeune enseigne fut promu , en
1770 , au grade d'aide de port , et
cinployé comme a-^pir.inl dans le
port de Kocbefort. L'année sui-
Tiuile, il reçut onlre de la cour
Je prendre le counnandemenl du
vaisseau le Vicomte de Clmisnil ,
pour aller approvisionner la f;ar-
nison des îles de Saint- Pierre et
iMiquelou. Ln 177.2 , il a'euibar-
T. xn.
lUY
4'7
qua sur la flûte du roi, la Por-
teuse, pour le Sénégal et Gorée,
comme oflicier chargé du détail.
Plus lard, en 1774? '' Ui '« voyage
des îles du Vent eu qualité de troi-
sième olficier; fut nouimé ensei-
gne de vaisseau et de port en 1 775,
el prit succes-ivement le com-
mandement des gai)aies le Crsar
et l'Ours , pour des transports
d'a[)prnvisionnemens el de bois
de construction. Dans raonée
1777, M. de Kaveiu'l fil partie
d'une expédition plus importante,
li s embarqua, comme enseigne
de vaisacau, sur la livgate la Sub-
tile, destinée pour l'Inde, et com-
uiaudee par M. Bidé de Maur-
vill-, capitaine de vaisseau. La
Subtile ayant mouillé à l'Ile-de-
France, :M. de Kavenel fit plu-
sie4M-s voy iges de cette colonie à
Marlagascar. Il faisait partie des
( roisières établies à l'Ile - de-
Frau'îeet au cap < e Bonne-Espé-
rance lorsqu'il deint licottnant
de vaisseau. En 17SU, il fut lieu-
tenant de port, et Tannée suivan-
te , chargé du détail à bord du
vaisseau du roi le- Flamand^ sous
les ordres de M. d'Orves, chef du
l'escadre destinée à faire la gueiT<>
dans l'Inde. M. d'Orves étant
tombé dangereusement malade,
remit le connnandein(;nt de l'es-
cadre au chevalier ile Sufl'ren. Ce
dernier signala stuV début par dei
succès auxquels M. de lUvenel
prit une part trè>-active. Le i*'
mai 178.4, il reçut de Tamiral
Suffren Tordre de débarquer di
v.ii^seau du roi le Flamand, et de
passer ù bord du Héros ^ pour y
être chargé du détail géni:ral de
l'escadre. C«!lle-ci ayant eu quel-
que temps (le relâche» M. de Ra-
4i8
RAV
vend, qui s'élait déjà t'ait con-
naître comme un administrateur
aussi vigilant qu'il ttait liabile ol-
ficier, t'.it cboiî^i pour aller à Tran-
quebar, et y faire des approvision-
nemens militaires de tout genre.
Le 5 de juillet J^Sa, l'escadre
française partit de GnuJiIour pour
aller combattre l'enuemi, qui é-
lait en rade de Négap.itnani : M.
de Ravenel coinmandait la se-
conde batterie du Héros. Les deux
escadres, fort iri.dtraitées, après
Je combat, relâ'hèreut, l'une à
NégaïuUnam , et l'autre à Goude-
lour. Le 26 juillet, M. de Rave-
nel fut du noir)i)re des oiriciers
qui accompagnèrent le bailli de
Saffrcn au camp du N.djab Aydor
Ali Kan. Ce prince prodigua à
l'amiral français les marques de
distinction les plus flatteuses, et
fit un accueil plein de grâce à tous
ceux qui l'avaient suivi. Ce fut
peu de temps après que l'amiral
donna l'ordre d'appareiller pour
aller assiéger Trinquemaley. Le
25 aofit, à cinq heures du soir,
l'e-icadre , après avoir essuyé Iti
feu de la batterie du pavillon en-
neiTii, mouilla dans la baie qui
porte le nom de cette place. Le
débarquement se fil dans la nuit
«lu 2.5 au 26. i^L de Piavencl , pen-
dant le siège de 1 riiiquemaley, où
il se distingua également comme
officier de terre et de mer, signala
sa bravoure de la manière la plua
éclatante dans l'assaut donné à
cette place dans la journée glo-
rieuse (\u 29 août; il eut l'hon-
neur de mouler le second sur la
hièche. M. de Suffren lui avait
confié souvent des négociations
délicates. Il le chargea Aexw fois
d'opérer des diversions difficiles
Î\AV
et périHeiises , et toujours son
sang - froid , son intrépidité, sa
prudence, lui méritèrent les suf-
frages de son chef et les applau-
dissemens de ses frères d'armes.
Il pari lit au général avec cette
franchise si rare, qu'un homme
supérieur seul sait apprécier. Au
coud>at naval de Trinquemaley,
dix vaisseaux tiahissenl; les qua-
tre autres supportent seuls le feu
de l'escadre ennemie. M. de Suf-
fifu {laiiit d'élre ent«uiré ; il s'a-
dresse à M. de liavenel : « Si l 'en-
nemi vire vent devant, vous pren-
drez une mèche, et vous ferei
sauter le Héros. — Général , je
n'en ferai rien. — • Croyez-voos
que je sois homme à survivre à
l'honneur de mon pavillon? — Il
n'y a pas de honte à succomber
quand les forces sont si dispro-
portionnées; toute la honte sera
pour les lâches qtii nous trahis-
sent ; mais mon devoir est de con-
server à la France un intrépide
général et 800 braves. » l'endant
cet entrelien , on s'aperçut heu-
reusement que l'escadre ennemie
manquait la manœuvre présumée;
peut-être aussi l'amiral Hugues
n'avait-il pas osé la commander.
Les Français se signalèrent en-
core par plusieurs avantages qu'ils
reniportèrent sur les Anglais pen-
d 1 tt les années 1782 et 1783. iVI.
de Ravenel était alors major -gé-
néral de Tesiadre. On peut re-
marquer, à II louange de M. de
Jîavenel, qu" le baiili de SuflVen
lui ayant d .mé Tordre de profi-
ter de toutes ies circon-îlances qui
se présenteraient de faire quehpie
bénéfice sur le change des mon-
naies dans les dift'érens bazars de
la côte de Coromandel, où l'ei-
RAV
caJrc avait relâché, M. de Ravc-
/jel fil l'aire une recelte de plu» de
5oo,ooo francs à la caisse de l'es-
cadre. M. Dul'rêne, iiilendaut gé-
néral de (a marine et des colo-
nies, en rendit compte au minis-
tre, qui acoord;i à ftl. de Ravcufl
une j^ratificution de 6,000 l'ranos.
Le 1 1 juin 1^85, le bailii de Stil-
Iren partit de Trinquemaii-y pour
aller attaquer l'ennemi; l'escidre
française n'élait composée que de
.quinze vaisseaux, taudis que l'es-
cadre anjflaise en avait dix-huit;
cependant celte dernière avait tou-
jours cherché à éviter le combat,
jyjais le 21 juin, M. de Suflren ,
qnoiijii'il n'eût pas l'avanta^ie du
vent, commença l'attaque, et força
bieiilôt l'ennemi à la retraite. M.
de ilavenel, qui commandait la
première batterie à boni du jHn'os,
i'ut dangereusement blessé : une
récompense aussi noblement ac-
quise le dédommagea promple-
inent de ce malheur; M- de Suf-
fren le décora de.la croix de Saiwf-
Louis t\ l'arrivée de l'escadre à
Goudelour. Lu paix i'ut annoncée
le '^9 juin suivant. Peu de lem[is
après, i\l. de ilavenel accompagna
le bailli de Suffren , qui revenait
en France. On relâcha A l'Ile-de-
Fraiice, où un repas civique fut
ofl'ert à M. d«; Suffrt n. Des cou-
plets y sont chantés en son hon-
neur; une couronne de lauriers
descend sur sa tête; il la prend et
la p(»se sur celle de M. de Kave-
n«-l , en disant avec vivacité :
a Messieurs, si j'ai eu des succès
dans l'Inde, je les dois à Riive-
nel. » Ces mots, que la postérilé
doit recueillifj ne font pus moins
d'honneur ù l'illustre amiral qui
les prononça, qu'à celui à (j li
RAV 419
il rendait ni} si ^datant témoi~
gnuge. M. de KavencI resta troij
ans en France pour r,endre les
comptes de l'escailre ; et d ins ce*
intervalle, il fut élevé au gradp
de capitaine de vaisseau, il rt;-
lourn,i ensuite dans les colonies,,
uù il continua toujours à être m
activité de service. Il lut chargé,
en 179O, du connnandenient de
la frégate ta i-rcniase , enira dans
la baie de Lauront-Marqucz , el
s'empara du fort porlui^ais. Après
cette expédilion, plusieurs mis-
sions lui furent successivetaent
conGées d;Mis les parages de Ma-
dagascar : il rétablit des croisières
à la pointe de cette île, dans le
cynal Mozambique et à Aujouan.
Il passa, en 1797, au commande-
ment d'ime nouvelle frégate (/a
Forte ) , et reçut du conlre-amù al
Sercey, l'ordre de se renJae à ia
côte de Malabar, pour y <:roiser
pcndint quelque temps ; de faii;e
route ensuite pour Batavia, puis
de remellje au gouverneur hol-
landais, Oversiralen, les ij.o hooji-
nies du 12* bataillon, destinés par
le gouvernement de l'Ile-de-
France à soutenir nos alliés con-
tre les Anglais. Le lendemain de
la sortie du Port-Louis (Ile-de-
France), le la* bataillon se mil
eu révolte complète, et M. de Ra-
venel fut sur le point d'être fu-
sillé : plusiems soldats le couchè-
rent en joue. Il réussit par sa fer-
uielé à leur in)poser, et parvint
à suivre en grande partie ses \\\^-
Iructions. Une seconde insurrec-
tion éclata, le 1" brumair^ a» Ç*
relativement au retran(;hcii>enl,^e
la ritiion d'e?:u, devenu j^b.sQlu-
ment nécessaii;e. 1^. de Raven.;!
eut à soutenir une lulltt crnelk
420 RAV I\AV
avant de pouvoir calmer c»;Ue dan- » voyées, et (.elles qui nous sont an-
gtîreusc effervescence, mais il y i)iioncées,prouvenlqiievousvouleï
parvint, et sut mainlenir son au- «au^si luetlre la fortune à la raison,
torilé. Cependant couiuie l'hon- » Nous vous prions de prendre lec-
ncur du pavillon pouvait être »lure de la dépêche que nous a-
compromis sur la côte de Mala- «dressons à la régence sous ca-
bar, où l'ennemi était en forces ncliet volant. Vous y trouverez à-
très-supérieurcs, il était prudent, <> la fois le lémoif^na|;e de notre
d'après l'expérience qui venait oco.ifiaiice en vous, li coiinais-
d'êlre faite , de ne pas i-'exposei- «sauce de votre -itualion, et des
à un désavantage évident. En cou- «pouvoiis iliitnilés , pour faire en
séquence, iM. de Ravenel prit le » notre nom lout le qui pourra dé-
parti d'entrer dans ie golfe du nttiininer la régence de Bal i\ia à
Bengale, où il fut presque tou- » venir au secours de l'Ile - de-
jours à la cape, souvent à sec et «France, etc. » La régence avait
entre deux eaux. Cette position, dv;mandé que la (livi>ion franpai-e
qui menaçait de devenir dange- séjournât, eu totalité ou en par-
rcuse, détermina le commandant tie, dans les mers de Java et dans
Gosson ù être l'organe du repen- les autres colonies hollandaises,
tir de ses soldats, et de l'exprès- pour les défendre contre les atlu-
sion de leur obéissance. Après cet quesdes Anglais. En conséquence,
événement, M. de Ravenel alla M. de Ravenel partit de Batavia
en rade de Madras, et y prit une pour faire une croisière dans les
corvette de la compagnie, qu'il Moluqnes. Lorsqu'on fut aux en-
cxpédia à l'Ile-de-France, afin virons de Baiijermassin , le flux
d'informer le contre-amiral Ser- de sang qui se déclara avec vio-
cey de sa position. Pendant ce lence dans l'éqtripage . mit t'uit-
temps, il alla croiser à la pointe à-coup 80 hommes hors de scr-
de la Galle, puis il fît route vers vice. Une voie d'eau parut ensuite
Colombo, et s'empara encore du dans l'avant de la frégate, et ajou-
viisseau de compagnie, le Lord ta à cette fâcheuse position. La
Sigot. Les administrateurs gêné- mous.-on s'opposant alors au re-
raux de l'Ile-de-France (MM. Ma- tour à Batavia, M. de Ravenel
larlic et Dupuy) lui écrivirent à n'avait d'autre parti a prendre que
cette occasion : « Nousavous ap- de se rendre à l'Ile-de-France pour
«pris avec peine tous les désagré- recaréner la frégate, et revenir
• mens elles dangers réels aux- ensniteavec des forces pour proté-
» quels vous avez été exposé dans ger l'île de Java et les autres colo-
»les commenceraens de votre ex- nies hollandaises. 11 arriva ù l'ile-
• jiédition. Votre courage et votre de France dans l'état h; plus tléplo-
» prudence ont ramené l'ordre, et rable ; mais il fut vivement afîligé
• cette épreuve, toute glorieuse en recevant l'ordre du gouver-
• qu'elle est pour vous, était bien neur-général de ne faire aucune
• inutile à votre brillante et an- manœuvre pour entrer dans le
ucienne réputation. Deux prises port. Cet ordre était provoqué
»que TOU» nous avez déjà en- par un arrêté de rassemblée co-
RAV
loniale. En obéissant , M. de Ra-
venel aurait exposé la frégate à
couler sur ses ancres, et tous les
malades auraient péri. I! Ut les
représentations les plus puissantes
an gouverneur, en l'assurant que
si on lui refusait encore l'enlrée
du port pendant une heure , l'iui-
manilé lui imposait le devoir d'é-
chouer la frégate. Celte détermi-
nation lui fit obtenir ce qu'il sol-
licitait avec tant d'ardeur. M. de
Kavenel avait été attaqué de fiè-
vres à batavia; elles se renouve-
lèrent à rile-de-France , ce qui
l'obligea de se démettre du com-
mandement de la Uégaie la Forte.
Le gouverneur-général, en rece-
vant sa démission , lui exj)rima
des regrets dans une lettre très-
flatteuse. Telle fut la carrière que
parcourut M. de Ravenel dans un
intervalle de phis de f\5 ans de
service. Lorsqu'il y entra, la porte
de l'avancement était étroile, la
concurrence nombreuse^ et les fa-
Teurs étaient accordétîs, non au
plus digne, mais au plus protégé.
M. de Ravenel triompha de tous
ces obstacles par la force de son
caractère, parla supériorité de ses
lalens et par l'évidence de son
mérite. Ses amis l'appelaient le
Catiiiat de la marine. Le bailli de
Sufl'ren et les (ifliciers de ce corps,
ses compagnons de gloire, sous-
crivirent à celle comparaison. Le
bailli de Suiïren, en le présentant
à Louis XVI, dit à ce prince :
• bire, voilà l'olTicifr auquel vous
devez la conservation de mon ar-
.inée. C'est lui qui nous a nourris
et a entretenu nos vaisseaux. »
La réunion la plus rare des talens
militaires, administratifs, diplo-
matiques, à de grandes connais»
REG
4'ii
sancesen statistique généra]e,est(;C
qui dislingua particulièrement M.
de Ravenel. Ilfutrecommandablfj
en oulre, par des principes aus-
tères, fermes , incorruptibles, par
son courage à lutter contre des
dilapidatenrs pjiissans, et par les
services qu'il rendit à sa patrie.
On ne peut lui reprocher avec
justice qu'une inflexibilité de ca-
ractère et un rigorisme outrés,
qu'il apportait jusque dans l'inté-
rieur de sa famille. Ce fut un tort
qui venait sans doute de l'élat
qu'il avail embrassé et des em-
plois difilciles qu'il avait eus à
remplir; et c'est en quoi il ditVéra
de Câlinât, qui avail su joindre à
un mérite transcendant les mœurs
les plus douces et les plus aima-
bles.^
REAL (le comte), voy. le Sup-
plément du tome XVIIL
, REGNALLT ( Jean-Raptiste-
Etienne-Benoit-Olive), médecin-
consullant du roi, né à Niort, le
i" octobre iy5ç), fut le disciple et
l'ami de Vicq-d'Azyr, qui parvint à
le fixer à Paris , dans le dessein
de l'associer à ses travaux et à ses
succ(8. Lorsque la révolutionécla-
ta , M. Regjiault lut nommé, en
1789, président de la seclion de
Saint -Ëustache. Au milieu de l'ef-
fervescence qui régnait alors, il
se n)onlra constanunent ami de
l'ordre, et sut maintenir la tran-
quillité publii|ue. Il devint, en
i^ç)'! , mendue delà première mu-
nicipalilé constitutionnelle de Pa-
ris, fui nommé, en 1791 , méde-
cin «le l'hôpitiil mililaire du (îros-
Caillou , et <'iifjn médecin ordinai-
re à l'armée de la Moselle. Sa mo-
dération fut bien!/)! r«;gardée par
des hommes exagérés comme une
4^a HrV RtlY
opposition au non vcl ordre flcîcho- ffs premiors grades, ol fut nom
«l'S ; il lui (Irnoucf- , e\ prév»^llll nu; [)ar le roi t-n ifî)2, capitaifiR
qi' un mail. I, il venait d êirc lamé iuljoinl à l'élat-inainr (te l'armée
c<uilielin' )>ar le coutilé de .sfircté- du riidi, toinmaiii.'i'e par le p;éné-
g;énérale,il prit la fuile pour su i\\\ Monlesquioii ; ii servit avec
iousli aiie à l'échaTaud , el s(> ren- di>linelion à l'armét; des Aljies et
dit à Hamltotng , où pendant dix d'Italie, et venait d'être promu an
ans, qu'il y exerça la inéderine, il grade d'adjudant-génèral lorsqu'il
y trouva des Français réfugii's, fut arrêté aux avant-postes, parles
fuyant comme lui la perséeulion, ordres du représenlant du peuple
et crut, avec juste raisi>n, servir Albitte, sur une dénonciation ile
son pays en leur prodiguant les la société populaire ; mais le re-
secours de sop arl. Des affaires présentant (iaslon le rendit à la
d'inlérêl l'ayant appelé à Londres, liberté, sur la demande du général
il y fut précédé par la répnialion en chef Dumas, et d'une dépiila-
qu'il s'éiail faite à Hambourg, et tion de l'armée, qui était venue le
ne larda pas à y obtenir la même réclamer quelques jours avant l'at-
confiance. Le rétablissement du taque du mont-Cenis. Nommé gé-
gouverneinent royal, eu i8i4?ra- néral de brigade en l'an 4» '' '"*
mena tVl. llegiiault dans sa patrie. apj)elé au i8 fruclidor au com-
Mommé celle même année méde- mandement supérieur de Lyon,
cin-consultant du roi, il devint, mis en état de siège, el des dé-
en 181 5, méde(;iii en chef-adjoint partemens du Rhône et de la Loi-
de l'hôpital de la garde royale ; en re; il parvint par sa fermeté et par
J817, médecin des pages de lu de sages mesure-;, à l'arrestation
cha. libre du roi. et chevalier de des principaux chef» des compa-
l'ordie de Saint-Wiehel. M. Ile- gnies de Jésus el du Soleil, qui,
gnault a publié à Londres : Obser- en plein jour el avec la plus gran-
tation sur la phlhisie pulmonaire , de audace, comnieltaient dans
et sur le lichen d'Islande , considé- celte malheureuse ville et dans ses
ré comme médicament et comme ali- environs d(!s excès atroces, et
»?6n^, in-S", ouviage qui aeu trois avaient jeté la terreur parmi les
éditions à Londres et deux i'i Paris, habilans. Ces bandes poursuivies
Il est le rédacteur principal du et détruites, la tranquillité se ré-
Jour/uil universel des Sciences me- t-iblit el les communications fu-
dicules, dont il paraît un numéro renl assurées. Dans ces temps dif-
par mois depuis i8i5. ficiles, le général Rey sut mériter
REGiNlER (ËDMEl, vof/. VEr- l'eslime et la reconnaissance des
rata du tome XVIIL Lyonnais, par sa justice et sa fer-
REY (Lodis-Emmaniel), lieu- meté. Chargé de l'organisation et
fenanl-général des armées du roi, de la formation fie divers corps,
grand-oflicier de la légion-d'hon- il passa en l'an 10, au commande-
neur, chevalier de Saint-Louis, menl du déparlement de Jemma-
est né à Grenoble en 1768. 11 en- pes, fut enjployé en i8o5, à l'ar-
tra au service après avoir termi- mée de Boulogne, où il comman-
iié ses éludes, passa rapideiVient da en 1807 et 1808, la première
REY
division de cclUî armée, et fut
nommé à la fio de i8o8, chet'-d'é-
tat-major général de l'année de
(/alalng;ne, lors de sa l'ormation
sous lc> ordres du maréchal Gon-
vinn Sain[-Cyr; après le départ
du maréchal, il remplit les mêmes
Ibnctifàns sous les ordres du maré-
chal ABgereau. ]l passa en Espa-
gne eu iSio, et remplaça comme
gouverneur génér.il du 5' gouver-
ncmeul, le général Dorsenue nom-
mé au commandement en chef de
l'armée du Nord. Eu juin i8i3,
lors de l'évacuation de Burgos, il
fui chargé par le roi d'Espagne,
du commandement d'un convoi
considérable dirigé sur Saiut-Sé-
baslien, où se trouvaient les mi-
nistres et les principaux olîiciers de
la maison de ce prince. A son arri-
vée le 22 juin dans cette place qui
avait été en partie désarmée pour
former un équifiage de siège, et
privée de ses approvisionnemens
de resserve, qui avaient été dirigés
sur Santona, le général Key n'y
trouva qu'un dépôt de conscrits
de .")5o hommes, commandés par
4 ufliciers. Il s'occupa aussitôt du
réarmement de la place ain«i que
de ses approvisionnemens et des
travaux extérieurs. Après la mal-
heureuse atîaire de Vittoria, le gé-
néral Foy qui avait réuni ù sa di-
vision une partie <les débris de
l'armée, jeta des troupes dans la
place qui, dès le 38 juin, se Irouva
cernée. Le général (îraliam avrc
deux divisions anglaises et une di-
vision portugaise, fut chargé de
l'altnque de Saint-Sébastien. Les
Anglais échouèrent dans h-s as-
sauts livrés le 25 juillet et le 5i
août, où ils ûrenl des pertes énor-
mes, auxquelles on attribue la des-
RKY
423
trnction de la ville. Ueponssé aux
divers assauts, le général Grahani
avait donné l'ordre de la retraite,
lorsqu'un obus ayant éclaté, mit
le feu aux artifices qui se trou-
vaient sur la brèche, et causa de
grands ravages dans les rangs fran-
çais. Dn chef de bataillon, 4 olîi-
ciers et un grand nombre de trou-
pes d'élite furent victimes de ce
malheureux événement. Le géné-
ral Rey accourut sur la brèche
avec des troupes de réserve ; on
s'y maintenait avec la plus gran-
de opiuiâlrelé, lorsqu'un bataillon
portugais ayant eflectué le passa-
ge de la rivière, parvint sous la
protection des batteries de brèche
et après avoir éprouvé de grandes
pertes, à s'établir au pied de la mu-,
raille de mer près de la petite brè-
che, et dans les décombres adja-
cens, d'où l'on ne put parvenir i
le déloger. Alors la retraite fut or-
donnée et la ville défendue pied à
pied. Le général n'abandonna
qu'à 4 hetires la principale traver-
se en avant de l'église, lorsque
toutes les troupes eurent eflectué
leur retraite sur le fort parles deux
communications qui y abotilis-
senl. Du i" au 8, les troupes dans
les diveises po>ilions qu'elles oc-
cupèrent au bivouac, eurent beau-
coup à soulfrir d'une pluie conti-
nuelle, et éprouvèrent de grandes
perles par le feu non interrompu
de 20 mortiers et de i3 obusiers.
Le 8 au matin, les Anglais ouvri-
rent le feu sur le Mirador, et le fai-
ble mur qui entoure lo rocher ù
mi-cftte, avec une batterie de 20
pièces de 24 qu'ils avaient établie
sur le terre-plein de l'ouvrage ù
cornes* et qui était soutenue par
le feu do tuulei les batterie», les
4ai
REV
troupe? n'ayaiil pas d'abri la per-
te riilcûii:ii(l. r3l)le; à unehenr»; Ifs
brèchts «ita.erit pratiiablcs. Le g<'-
néral Rey fil une convention pour
renif lire le cliTilean qui «'titit d.ios
un étal (le coniplèle d» .strnclion.
Il ne restait plus une seule pièce
en étal (le tirer iJans les diverses
batterie.^ : les Anglais lurent éton-
iu':s de la situation dans laquelle
ils trouvèrent cette position, et en
tcuioiguèretït !eur surprise. Pen-
dant la dur- e de (C si»!gc niémo-
ralile (loul l'inveslissenu nt C(un-
lueuçu le 28 juin , le général Key
et sa brave garnison «e couvrirent
d'une gloire immorteMe dans les
nombreux combats qu'ils eurent
à soutenir. L'empereur en maui-
fesl.i baoteuieut !-a satisfaction,
confiirua tous les avanceinens faits
pendant le siège, et accorda des
récoiripensex. Il éleva le général
Rey au grade de général de divi-
sion , le nomma grand ofïieier de
la lëgiou-d'hoi.iieur , et par une
faveur spé< iale et très-rare, il lui
accorda la totolité de se*appointe-
meus pendiuit la dmée de sa capti-
Tité. Le général Rey rentré en Fran-
ce aprèslarestatuationen i8i4»fut
nommé chevalier de Saint-Louis.
Ali fin d'avril 181 5, il reçut l'or-
dre de se rendre à Valeuciennes
en qualité de gouverneur de cette
place imporiaute, qui fut attaquée
après les désastres tie AValerloOt
par un corps d'armée commandé
par le prince Frédéric d'Orange.
Malgré tous leurs elVorîs les alliés
ne purent entrer dans Vaiencien-
nes, qu'après la signature du trai-
té qui déterminait la ligne que de-
vaient occuper les divers corps
d'armées. Le général Rey a eu la
catisfactiod) après avoir défendu
RFY
vaillamment une place sur la fron-
tière ennemie, d'en conserver ime
à la France. Il a été mis jeune en-
core à la retraite par l'ordonnance
de 181 5, et s'est retiré à la cam-
pagne où il s'occupe d'agricultu-
re, « l jouit de l'estime de ses con-
citoyens. ^
REYMOND (Geobcf.-Mabie") ,
dont le nom est écrit Raymokd
duus plusieurs recueils litlér tires»
est né à chambéri, vers »7<>0- '^
est ré lacteur du Journal de Sa-
voie, et principal du collège de
Chambéri, où il est aussi profes-
seur de mathématiques. On lui
doit les prodii'^tions suivantes: i*
A l' auteur de ta. Chaumière indien-
ne, ou Réfutation dusyifème de M.
Bernardin dt Saint-Pierre^ s ir la
figure de la Terre ^ Chambéri ,
1792, in-8*; 2" De ta Peinture con-
sidérée dans ses effets sur les fiotn-
mes en général, et son influence sur
tes mœurs et le gouvernement des
peuples, 1801, in-S"; 1804, in -8°;
3° Essai sur l'émulation dans l'or-
dre social et sur son application à
l'éducation; cet ouvrage a été
mentionné honorablement par
rin>ititut, 1802. in-8°, Genève; 4*
Mctapliysique des études, ouReclier-
cties sur l'état actuel des métfiodes
dans l'étude des tettreset des scien-
ces, et sur leur in (luencerclalivcmcnt
à la solidité de C érudition, Paris,
i8o'(, in-8°; 5° Manuel métrotogi-
que dadépartement duMont-Blanc,
Chambéri, i8o5,in-8";G''De«j; let-
tres à M. Millin, sur l'usage delà
musique dans tes églises, 181 1, in-
f^'; •;" Let/re à M. Villoteau, tou-
chant ses rues sur ta possibilité d'u-
ne tliéorie exacte des principes na-
turels de musique, Paris, 1811 ,in-
8": 8" Essai sur la détermination
a»
RTB
des hases physico-mathématiques
de l'art musical, i8i5, in-8°; <)"
Notice sur tes Charmettes, Genè-
ve, 1811. in-«S" (insérée dans le
Magasin encyclopi'ffique de 1 H 1 i);
10" Notice sur r Institut d'Y Ver-
dun, iSiZj, in-8"; w' Analyse du
bioniètre, instrument pour mesurer
ta vie, ou Mémorial horaire de M.
Jullien, 181 5, in-8'; ii" Eloge de
Biaise Pascal, qui a reiuporlé i'é-
^bndne d'or, à l'académie des
Jeux-Floraux de Toulouse, en
18 iG; 2* édition, 1817, in-8". iM.
Keymond a foiunibed'ioup d'ar-
ticles à la Bihliolhet/ue française
de M. Pougcns, ;ui Magasin en-
cyclopédique de feu Millin, aux
Annales de mathématiques pures
et appliquées, parM.Gergonne,eto.
Il est membre de la société phi-
lotechniqne de Paris, des acadé-
mies de f.yon. de Dijon, de Nî-
mes, de Turin, etc.
KEYMOND (J. B.), capitaine
au corps royal des inJjéni«'urs-géo-
jfraplu'S militaires, membre de dif-
('ér«'ules académies, Jrère aîné du
précédent, est né à Chatnbéri en
I7<>(>. Il a publié : i* en 1795,
et diî n :>uveau en i8o5, avec des
c\\vin^ttn\en9„\\nv.Carte génrrale du
département du Mont-Bianc;'i ', en
181 5, dessinée et gravée pu- lui,
une Carte physique et rninéralogi-
que du Mont-Blanc et des vallées
qui l'avoisinent. Elle avait été le-
vée pendant les années 1797,
1798, et 1799. Il s'occupait, il y
a quelques années, (Vune grande
Carte topographique et militaire des
Alpes, en l'i feuilb;».
RI':///.ONIC(>, liltéra'eiir ita-
lien, rntf. le Sup. du t. XVIII.
RIUÈ.S, médecin . toy. le JSup-
piément du tome XVIII.
ROE
4a5
RIQUET ( COMTE DE Caraman,
PRINCE DE Chimay), voy . le Sup-
plément du tome XVIII.
KOBIÎKT DE SAINT-VIN-
CENT. père etûls, conseillers au
p;irlemeut et à la cour royale,
voff. le Supplément du tome
xvni.
KOliERT (Hcbert), peintre,
voif. le Supplément du tome
XV IH.
UOBERT, peintre de paysa-
ges, voy. le Supplément du tome
xvni.
KO DE, célèbre violoniste, roy.
le Siij>plémeiit du tome XVIII.
ROEST d'ALREMADE (An-
Toi>E-JosEpn BARON de), né à Dor-
dreohl en Hollande, le i5 avril
1782. est entré an service comme
lieutenant de bussards, sous le rè-
gne du roi Louis Napoléon. Nom-
mé Capitaine, écuyer et chevalier
de l'ordre royal de l'union, en
1807, lieutenant-colonel des gar-
d»'s à pied en 1808, colonel du 5*
régiment de hussards eu 1809, et
blessé Irès-dangenuscment le 27
mars de la même année à Ciudad-
Réal en Espagne, il fut fut en-
suite général-uiajor, grand-maré-
chal de la cour du roi et grand-
croix di; l'ordre de l'Union. Apre»
l'abtlicaliun du roi Louis, il resta
au >erviiede l'<Miipercur Napoléon
conune général de brigade. Eu
1810, il fut nouuné chevalier de
lu légiou-d'honncur; en 1811, il
commandait le dé[iartemcut du
Paiiaro à Modène : il mourut le
17 décembre de la même année.
Il s'était trouvé à plusieurs actions
d'éclat, dans lesq .elles il avait dé-
ployé la bravoure la plus brillan-
te : et mi rapport olliciel consa-
cra le souvenir de sa belle cou-
/r'6 ROS
diiilK à r;tn';iir»! do, CiinKid-Ilô:»!.
ROSKN.VlULLJ<:R(J*:nNEST-FRÉ-
dÉric-Charles) , oriciilitlisfe alle-
mand, est ne à Heisberç, le lo
décembre 1768. Son père , pas-
teur ilislingiié, lui fil donner une
éducation soignée, et approuva
sn vocation pour les sciences. M.
Rosenmijiler devint, en ijqS,
profe-^seur de langue arabe à l'u-
niversité de Léipsick, où il avait
terminé ses études , et fut nom-
mé ensuite bibliolbécaire de la
même université, «d'est, dit-on,
un savant orientaliste et exégete
hardi. On lui doit un grand nom-
bre d'ouvrages utiles sur plusieurs
parties des antiquités; d'excellens
morceaux de critique et de litté-
rature de l'Orient ; enfin , un com-
mentaire latin fort étendu sur les
principaux livres de l'ancien Tes-
tament , travail qui a le plus con-
tribué à sa réputation , et qui n'est
pas encore achevé. » On cite parmi
les principales productions de M.
Rosenmuller : i' Zolialri carmen ^
tempU meccani foribus appensum,
vanc primum ex cod. Leidensi ara-
birè edit. » lat. conversum et notis
illustr. , Léipsick, 1792, gr. in-
4°; 2° Selecta quœdam Arabum a-
dagia , nanc primum nrabirè édita,
lat. versa atque illustr., ib., 1797,
gr. in-4° ; 5° Abulfedœ MesopotU'
rnia, arah. primum édita ( dans
le 3* tome du liépertoire bibl. et
orient, de RI. Paulus ). 4° Com-
meiilatio de Pentateurhi versione
persicâ, gr. in-4°« Léipeick, i8i4;
5" Manuel bibliographique de cri-
tique et d'exégèse biblique , 4 ^o\.,
Gœttingen, 1797-1800, in-8°;
0° Recueil et analyse des passages
de l'Ecriture sainte, qui servent
de preuves dans Cexposition des
ROS
dogmes de la théologie chrétienne ;
i" vol., Léipsick, 1795, gr. iti-8*,
La suite de cet ouvrage n'a })as pa-
ru. 1^° Grammaire et Chrestomalhie
arabes, \h., I7;)(), in-S'', S' Histoire
des prétendus envoyés de Dieu et
fondateurs de sectes religieuses ,
parmi les inahométans ( insérée
dans le 1' vol. des iMélanges, pour
l'Histoire des religions, par M.
Staendiin , 1797 ). 9° Poésie
des Arabes , avant Mohammed,
dans les Supplémens à la Théorie
des beaux-arts , par Sulzcr, vol.
5, 1798. lia traduit et accompa-
gné de notes les Mœurs des Bé-
douins, de d'Aryieux; le Timon,
de Lucien ; l'È pitre de Saint-
Jacques ; les Supplémens à l'in-
troduction de J. D. Michaëlis ,
aux livres du iV. T, publiés à Cam-
bridge, en 2 vol. gr. in -4°, par
M. H. Marsh; Gœttingue, 2 vol.
in-4''j 1795-1803. M. Rosenmul-
ler a trois frères, qui se sont dis-
tingués par leurs ouvrages : Jeai»-
ChbÉtien, né en 1771, est pro-
fesseur d'anatomie et de chirur-
gie à Léipsick : il a publié plu-
sieurs écrits sur son art ; Jean-
JÉRÔME-CoNRAo, né en 1776, cul-
tive la littérature historique , et a
donné différens ouvrages dans
cette partie; enfin Philippe, né
en 1776, exerce les fonctions de
pasteur, et a mis au jour des poé-
sies , des traductions , etc.
ROSSIM (JoACHiMo), un de
ces hommes qui , libéralement
dotés pnr la nature , opèrent dans
les arts une révolution violente ,
et changent le goût de leur siècle,
en croyant eux-mêmes n'obéir
qu'à leur caprice. Les chants gra-
cieux de Cimarosa, la musique
légère etbrillantede Paër,avaient
ROS
')uvert la route ; M. Rossini osa
ilavanfagc ; et sans autre systcmc
que celui de se plaire à lui-même,
il créa une école nouvelle, qui
lera de mauvais inn'luteurs, mais
dont le style original pt vif doit
l'aire «poque dans l'histoire de
J'arl musical. Né à Pesuro , en
1789, de pareils villageois, il ap-
prit à chanter avant d'apprendre
à lire, et, ajuès avoir été enfant
de chœur, il entra au conservatoi-
re de Naples, c'est-à-dire qu'il
suivit la route ordinaire , demi-
sacrée , demi - profane, qu'ont
suivie dans sa patrie, tous ces gé-
nies néssans fortime, qui devaient
un jour briller au premier rang,
*»t faire retentir d'hymnes saints
et d'accens voluptueux les vofites
des temples et les salles des jeux
scéniqiies. Beaucoup d'étourdeiie,
de dissipation, d'inconséquences,
marquèrent ses premiers pas dans
la carrière. Il ;ij)pril la composi-
tion, comme un homme qui de-
vine l'art, et qui s'embarrasse as-
sez pt;u des règles. Ses premiers
opéras n'eurent que de légers suc-
cès. On le vit parcourir l'Italie ,
comme c'est la coutume, à la solde
des impresarii ; toujours en relard
dans les engagemensqu'il contrac-
tait, toujours cité pour sa pjrcs-
se, son goût pour les plaisirs, son
dédain de l'avenir, et sa facili-
té à se jouer du public, de son ta-
lent et de sa gloire. A Veiii>c, où
il fut retenu par un imprésario de
mauvaise humeur, et où le pu-
blic avait sifflé une de ses ouv(;r-
tures, ilimaginad'interrompre par
des poses l'ouverture nouvelle
qu'il fut obligé de composer, et
de marquer chacune de ces poses,
d'un coup donné par chaque mu-
KOS
427
sicicn avec le manche de son ins-
trument sm- les chandeliers de fer
blanc qui éclair.;nl les pupitres.
Les exéculans soumis par devoir,
et forcés par une discipline exacte
à exécuter toutes les volontés du
compositeur, remplirent cette sin-
gulière liU'he; et l'harmonie qui
en résulta fut si extravagante, si
singulière, et mit les spectateurs
vénitiens dans une toile furetir,
que l'aKenlion publique s'éveilla,
et que bientôt on ne parla plus
que do l'audacieuse espièglerie du
june Kossini. Son talent se dé-
ploya tout entier au moment
nn'me où son étourderic occupait
les oisifs de l'Italie. Il doima le
Barhiere di Siviglia , et le Nozze
di Figaro. (>'était entrer en lice
avec Faësielloet Mozart. On trou-
va chez 31. Rossini, avec moins
d'étude, moins de perfection, une
verve entraînante, une rapidité
d'expression étonnante, et un /«Wo,
pournousservirdu mot technique,
que personne n'avait encore porté
si loin. Dès lors l'enlhousiasmc
italien proclama Rossini le gio'
7>ane U'ingcnio. En effet, il a ce qui
constitue principalement le génie
dans les arts , de l'imagination ,
<le la verve, et une fertilité mer-
veilleuse. Il a pressé tous le? mou-
V);mensmusi(^'nix,i>t sou vent, pour
obtenir de relTel , il a préféré des
motifs brillans, des thèmes vifs,
dès inspirations gaies, rapides et
riantes, à ces combinaisons dra-
matiques, à ces compositions ?a-
vammcnt expres-ivcs, que l'on
admire chez Gluck , iMozart et
Sponlini. Ces défauts se sont re-.
produits avec plus de force dans
ses autres ouvragtîs, et lindolen-
cc <jle son caractère a joint à ces^
reprO(hcs méiilt'js celui de dé-
daigner trop souvent le choix de
ses motifs , de négliger l'encîhaî-
nemetït des parties, et de repro-
duire larnêiDe j)ensée, on (ce qui
est plus inexcusable ) le uiê'ine
morceau aj^pliqué à dilïérentes
paroles, dans deux ou trois ou-
vrages de genres différens. Sa vie
aventureuse et épicurienne, et sa
manière de composer, sans justi-
fier ces dérauts,lesexpliqnent suf-
fisamment. M. Uossiai n'a besoin
ni de la solitude, ni du silence
pour trouver l'inspiration. C'est
au milieu des fêtes, parmi le bruit
et le fracas, au sein des plaisirs, à
table , en voyage , que sa verve
négligente laisse échapper ces tré-
sors d'une mélodie vive et élégan-
te, mais souvent incorrecte, dont
les accens ont charmé l'Europe.
M ose inEgltlo, la Donna del tago,
Otello , la CenerentoUt, la Gazza
ladra, portent de fréquentes et de
brillantes traces de son génie, qui
ne s'est montré que par intervalles
dans VElisahetta, la Semlramide ,
le Tarco in Ilalia,e\ quelques au-
tres ouvrages plus faibles. Il a
épousé M°" Colbran, et s'est re-
posé depuis celte époque. A Pa-
ris et à Londres, aucune produc-
tion n'a encore signalé l'existence
de son génie. Noirirné directeur
du TbéAtre- Italien de Paris, il
jouit aujourd'hui d'une juste ré-
nommée, qu'il sait mettre à pro-
fil , sans la soutenir et l'agran-
dir : au moment où nous écri-
vons (1825), il s'occupe d'un
grand ouvrage pour le théâtre de
l'Académie royale de Musique;
^ses admirateurs et ses rivaux l'at-
tendent à cette grande épreuve ,
qui a mis le sceau à la réputation
se II
de Sacchini , de Piccini et Je
Gluck.
IIOSNAY. général, voy. le Sup-
plément du loine XVIII.
SABATIKR , célèbre chirur-
gien, roy. le Supplément du tome
XVIII.
SCHIl.T (JEiN- Jacques), ma-
réchal-de camp, commandeur de
la légion-d'houneur , né dans le
département du Bas-Rhin, le i5
mai 17^1, s'enrôla le 26 janvier
177g, comme simple volontaire
dans la légion de Nassau, devenue
par suite de différentes incorpo-
rations, 24"" régiment d'infante-
rie légère. Celte légion faisant
alors partie de l'armée des côtes
de Bretagne, M. Schilt se trouva
îi l'attaque de l'île de Jersey. Il
était quartier-maître trésorier en
1791. A cette époque il passa à
l'armée des Pyrénées-Occidenta-
les, où il servit successivement
sous les ordres des généraux en
chef Servan, Muller et Moncey.
Employé constamment à l'avant-
garde , il participa aux brillana
succès que les Français obtinrent
en Espagne, et se distingua parti-
culièrement à l'attaque des lignes
formidables d'Iruu , à la redditori
des forteresses de Fontarabie et
de Saint - Sébastien , et à la prise
des villes de Vittoria et de Bilbao.
11 obtint le grade de capitaine le 6
novembre 1792, celui de chef de
bataillon le 26 juillet 1793, et fut
nommé général de brigade, le 19
vendémiaire an 3 (10 octobre
1794). Après la paix avec l'Espa-
gne, le général Schilt passa à l'ar-
mée de l'Ouest, où il contribua
aux succès qui forcèrent les der-
niers chefs de l'insurrection à se
soumettre. Employé sous les or-
m
scn
arts des généraux en chef Hoche ,
Moulin, Hédoiiville et Brune, il
acqiiit successivement leur esti-
me et sa conddite honorable lui
valut de la part du directoire-exé-
cutif, une lettre très- flatteuse. Il
resta dans les dépinleinens d'Ile-
et-Vilaine et du Morbihan, jus-
qu'A rentière pacificatiou de ces
contrées. Le général de biigade
Schih fit en Tan 8, partie de l'ar-
niéf de réserve, formée à Dijon;
il se trouva à l'affaire du Tessin ,
au coirïbat de Turbigo, an blocus
du châle. lu de Milan, et a la cé-
li-bre bataille de Marengo : dans
colle journée il donna de nouvel-
les preuve? de talent et de coura-
ge. Le combat était eng;igé depuis
six heures; le l'en le puis violent
se propageait sur toute la ligne, et
de part et d'antre les charges les
plus audacieuses se renouvelaient
sans cesse; un corps ennemi qui
hc prolongeait du côté de Gaslel-
Ceriola , menaçait l'aile droite de
l'armée française : pour ne pas se
1 lisser environner on fut oblige
d'abandonner Marengo, et de
prendre position en avant de ce
village. Ce mouvement indispen-
sable fut exécuté avee une préci-
sion remaripi.ible, sans qm: le feu
se trdUvHl interrompu un seul ins-
tant. En ci; moment la division
dlonnler arrivait sur le champ de
hatailh; , les généraux Schilt et
C.arra-Saint-Cyr, à la têle des 19'
légère et 70* demi-brigades, mar-
chèrent aussitôt sur la droite, et
reprirent une partie du terrain
que les circonstances avaient fait
abandonner aux troupes françai-
ses. Le général Schilt dont la ma-
noeuvre habile pour se dégag«:r
<iv$ forces nombreuses qui l'envi-
SCR
^29
Tonnaient, fut admirée des trou-
pes, reçut les éloges des généraux
en chef, et sa conduite obtint une
mention honorable dans le rap-
port du chef d'état-major-géné-
ral. Emj)loyé en l'an 9, à l'armée
d'Italie, sous les ordres de Brune, il
se distingua au passage du Mincio,
à celui de rA()ige,et à la prise des
positions de Rivoli et de la Cora-
na. La nature du terrain , une
nombreuse arlillerie et les forces
imposaiites de l'ennemi, rendi-
rent l'attaque de ces positions des
pins dangereuses ; le général
Sehilt, avec sa brigade, composée
des premier et deuxième batail-
lons de II 12° légère, et9i* de li-
gne, It s tourna landis que la bri-
gade du général Seriziot les atta-
tpjait de front, et elles furent en-
levées : «Il ne fallait rien moins,
disait le général Oudinot dans soi»
rapport, que l'intrépidité des Fran-
çais, pour gravir ces montagnes
sous une pluie de feu, et empor-«
ter un succès aussi complet que
rapide. » Après avoir parlicipé
aux succès de l'armée d'Italie jus-
qu'à la paix, le général Schilt fut
appelé des bords de la l'iave au
commandement de la ville de Mi-
lan, d'.jù il passa su.xessivement
au rommaiidement de Nice, et à
celui des Alpes maritimes. Ce gé-
néral qui n'a dft son avancement
(ju'à sim mérite, a aussi développé
les talensd'unsageadininistrateur;
en faisant d'une part respecter la
discipline militaire, il a de l'autre
réparé les maux de la guerre, et
soulagé les peuples dont l'admi-
ni>tratinn lui était confiée. Il a ces-
sé de faire partie des cadres de
l'armée en iH iG.
SCRIBE (Kugèhe) , houioïc dq
k:,
SCR
lollrc's , ruii des plus féconds
cotnine des plus iiij^fMiiciix et spi-
ritiiel-s auteurs de hgcis ouvrages
dramatiques, a enriefii les lliéû-
tres du Vaudeville, des Variétés,
de rOpéra-Coniiqne et du Gym-
nase (aujourd'hui théâtre de iMa-
DAME, duchesse de lierry), d'une
l'oide de productions qui, presque
tontes, ont ohlenu un succès de
vogue. Le non.hre des pièces que
M. Scribe a composées, soit seul,
soit en société, se nionie à plus
de cent trente; nous ne citerons
que les principales. (Au Vaude-
ville) , le ISouve-aa Pourceaugnac;
le comte Ory; la Nuit de la Garde
nationale; une Visite à liedUnn; te
Fou de Peronne; la Sonmainhulc;
Frontin mari. - garçon. (Aux Va-
riétés) , le Solliciteur ; les deux
Précepteurs ; le comte WErforl,
ou l'Ennui; l'Ours et le Pacha;
l'Intérieur d'une Elude. (Au Gym-
nase dranialique) , te Secrétaire et
le Cuisinier ; le Parrain; le Gas-
tronome sans argent ; le Colonel;
la Petite Sœur ; te Mariage enfan-
tin ; le vieux Garçon; Michel et
Christine; Philibert marié; lu De-
moiselle et la Dame; C Ecarté;
r Intérieur d'an Bureau; la Loge
du Portier; l' Héritière ; le Coif-
feur et le Perruquier; la il/ailrcsse
au Logis; la Partie et -liccanclte;
un Dernier Jour de fortune; la
Mansarde des Artistes; les Gri-
settes; Rodolphe; Coralj; la Qua-
rantaine; la Haine d'une Femme;
le plus Beau Jour de ta vie. (A l'O-
péra-Comique), laChambre à cou-
c'ja*, mnsi(piede Guénée; le Valet
de Chambre, musique de Carafîa;
Leycester; ta Neige; le Concert à
la Cour; Léocadie; leMûçon. (^os
derniers ouvrages ont été mis
en nnisique jiar M. Auher. com-
positeur plein do ver^e et d'origi-
nalité, qui s'c-'t ac«('iis Une juUe
répulaii 11. (ArOdéon), le V O"
ht de son Rn-al. (Au Théâtre-
Français], Valérie, comédie en
trois actes et en prose. Cette piè-
ce, on M"' >jars remplit le princi-
pal rôle d'une manière inimita-
ble, a l;iit courir tout Paris, et est
restée au courant du ré|>ertoire.
Dans tous les ouvrnges cités i( i ,
iM. Scribe a fait preuve d'ime par-
laite en ente de la scène. Si l'in-
trigue est eu général légère , les
flétails, en revanche, sont pleins
de grâce et d'intérêt. Les pièces
de cet auteur ob'iemieut, si l'on
peut s'exprin.ei' ainsi, un sufc<;S
de bon ton ; au^si est-ce habituel-
lement dans la bonne société qu'il
puise ses inspiratimis. Jeune en-
core, il a déjà beaucoup l'ait pour
sa fortune, et plusieurs ouviages
importans qu'il prépare, dit-on,
ajouteront sans doute encore à sa
gloire.
SÉGUAIN (Jérôme), capitaine
de frégate, chevalier de la légion-
d'houneur, est né à Lyi>n , dépar-
tetnent du ilhône , le 28 juillet
içG'). Dès sa plus tendre jeunesse
il se montra passionné pour les
voyages et pour les études de la
marine. En i7;'i il partit pourlVo-
chelort, où il arma en course, si^r
des vaisseaux de ct; port, jusqu'à
la fm de la guerre de 1776. La
paix laite, il offrit ses services à
la couipagnie des Indes, qui l'em-
ploya en qualité d'oflicier depuis
ijîS/j jusqu'en 179"^; à cette épo-
que, revenant de la Chine, il
quitta le service de la compagnie
pour monter ini corsaire, nom-
mé le Cilojen^doiil les dilfcrenies
SE G
courses n'oflVirent aucune chance
favorable à son avancement ni à
sa fortune. Dans un vovajje qu'il
fit de Lurienl à Toulon, en pas-
sant par liordeiux il y fut retenu
pour prendre le couwnandemrnt
«le la lV<'j|[atc la Citoyenne fran-
çaise, C«; choix fut approuvé par
le giMivernenient , qui venait de
nonunt-r'IU. Scgtiaiu lieutenant
«le vaiivsoau. Pendant Tespacc de
vingl-dciix ujuis (pi'il cimserva ce
coiniiiaii(ieuient, il e^C!)rta et pro-
tégea p!u«ifur-j convois, triompha
d'un grand noniUrc de diin.nillé?,
et les succè? qu'il obtint ne furent
dus qu'à sou expérience et à S(!S
talens. De coiirert aveu la Tamise
et la Républicaine, il fit, dans une
croisière, plu;? de cin(|uante prises
qui ne IVnricliirenl [las, car ne
s'en considérant que coinine le
dépo'ilaiie fidèle, il ne lui resta,
après la reddition de ses compte»,
que l'espoir d'un nouvel eud>ar-
quement. Il fil, sur le vaisseau
les Droits lUl' tiomnte, la première
expédiiiiin d'Irlande , dans la-
quelle, assailli par des forces in-
finiuii'ut supérieures, il soutint
pendant iliuize heures l'un des
ctunbats qui honorent le plus la
marine française. Au retour d'Ir-
lande sou vai'-seau fut battu par
la tempête vX vint s'échouer dans
la baie d'Audicrue. l'Iaoé en qua-
lité d'adjudant clans l'élat-innjor
du contre-amiral iMorard de Gal-
les, il renon^M à celte place pour
prendre l'armement de la fiégate
la Résolue^ en l'absence du capi-
l;une , et la conduire jusqu'au dé-
part pour la «econde expéditi(W)
d'Irlande , dans laquelle, pendant
la traversée, il essuya trois coni-
buls. Après les tleux jiremicrs, la
st(;
L\J\
frégate désemparée et faisant eau
de toutes parts, s'elïorçiit d'arri-,
ver en Italie , lorsque attaquée de
nouveau elle fut obligée d'ame-
ner. Le capitaine Séguain revint
en Fianctî sur parole, et servit
dans l'état-major jusqu'au mo-
ment où il put être échangé. Il
sollicita ensuite de l'emploi sur la
flolille,et obtint le commandement
delà première division dans l'Es-
caut. Il exfiça continuellement
SCS marins, et tint dans le meil-
leur état ses équipages. A la paix,
le gouvernement lui doinia le
commandement de la corvette te
Festin, avec laquelle il fut en-
voyé aux île- du Vent. La paix ne
l'ut pas de longue durée et le ca-
pitaine Si'guain se retrouva e»
présence de l'ennemi. Des péni-
ches angl.iises essayèrent vaine-
ment d'enlever la corvette qu'il
montait; il déjoua lem' projet en
ejuployant Vestacade ^ moyen ex-
traordinaire de défense qu'avant
lui aucun bâtiment n'avait mis en
usage. De rctom' en Europe, il se
signala par un acte triulrépidilô
remarquable. Depuis (juelqucs
jours il attendait à LaberAvzach
un ujouienl favoralile pour pas-
ser sans se c<>mpron»ettre à Brest,
oi'i le gouvcrnemt.nt lui avait
d inné l'ordre de se rendre malgré
la croisière emjcmie. Son lou-
voyage ne p(MiTait guère être fa-
vorisé [lar les flots dans une baie
où les vents de iN. E. ne soufilcot
que sur les cinq heures du matin.
Cela ne l'empêcha pas «l'appareil-
ler le la vendémiaire sur les trois
heur<:sde la nuit, cachant ses feux
afin de filer la côte en approchant
la terre de très-près. Il avait fait
prévenir quelques-uns des forts
432 SEG SHE
qui se trouvaient sur «a route et guahi. mais apr^s l'échinge rVti-
leur ré(M)u(lail au |)orltvoix pour ne soixantaine He <'oups tirés »lu
éviter toute iiiépri!»»;. l'euHiiut le part et d'autre la goélette anglaise
jour il coiïipta trois vaisseaux, l'ut oitligée de «e retirer , et vers
deux frégates et quatre corvettes neuf heures la frégate française,
à la surveillance desquelles il de- dont le capitaine et Téquipa^e a-
vail se .soustraire et qui éraieot à vaient fait preuve de la plus gran-
unc distance d'environ une lieue de intrépidité, trouva un refuge
et demie. Il avait réussi à doubler a>*suré sous le fort de fierthauuie.
le fort du Conquet, mais le fort M. Séguain, pour prtt de ses
Sainte-Barbe, qui ne le reconnut itavaux, oblintla récompense des
})oint, lui lira trois coups de canon braves. Armé d'abord sur le vais-
donl un l'atfeignil vn plein bois. La seau le Cassiird^ en radoub à Brest,
récidive était à craindre et le fort il se distingua depuissur diversbâ-
Saint-Mathieu pouvait imiter ce timens, j>ar plusieurs actions d'é-
funeste exeu)ple ; le capitaine Se- olat. lia cessé d'être compris dans
giiain fut obligé de se couvrir de les cadres des officiers de marine
ses feux de nuit, au ri-que de don- en 181O.
ner l'éveil à l'ennemi. En don- SHl'lLLEY ( Percet-Bisscre ) ,
blant le cap Saint-Malbieu il cou- t^crivain anglais très - distingué,
rait le danger d'être coupé; il un des derniers amis de lurd By-
force audacieusement le passage; ron , a acquis de la célébrité par
mais, comme il l'avait prévu, ses l'origioaliie de ses ouvrages, tant
signaux de nuit attirèrent les vais- en prose qu'eu vers, et par les
seaux ennemis à sa poursuite. Il malheurs de sa vie, qu'il termina,
les aperçut dès le point du jour, il y a peu de temps, dans les flots
courant bord sur bord pour loi delà Méditenanée. Son père, sir
couper la retraite. Il pa^^se au mi- John Shelley, riche baronnet, fit
lieu d'eux et se dispose au combat pendant long-temps partie de lu
avec sou équipage d'élite formé société intime du prince de Galles
sous son coimnaudement. Déjà il ( le roi actuel. Georges IV ) , et
avait doublé plusieurs vaisseaux donna de grands soins à l'édiica-
ennemis, qui croyant sa fuite im- tion d'un fils qui, dès Tenfance,
possible, n'avaient point fait feu. annonçait les plus heureuses dis-
Lientôt la snpériorilé de sa ma- positions, et semblait promettre
nœuvre, la célérité de ses mouve- une illustration nouvelle à sa fa-
mcus d'évolution lui firent dépas- mille. A l'âge de i5 ans, Shelley
ser les frégates, et par sa marche fut tiré d'une pension renommée,
peu ordinaire il évita les bricks et envoyé au collège d'Eton. Il y
qui le poursuivaient de plus près, développa bientôt im caractère
Une gi'ëlettc prétendait encore lui assez bizarre, ne |)renait aucune
couper le passage : elle était armée part aux ainusemens naturels à
de caronades dé seize que les ca- son âge, recherchait la solitude,
nous de la frégate française de- et se montrait aussi réservé que
vaient faire taire. Le combat fut mélancolique. Il aifectail un graod
commencé par le capitaine Se- mépris pour les travaux habituels
SlïK SIÎK 455
Oes classes, los amplifications He ft coiilie tons, il fut renvoyé ave»;
collège, <;t surtout pour les vers éclat de l'université d'OxforJ. Uiiu
Iritius modernes ; mais il fit des pareille rélég.ilion , si tïieheusc
projpès rcniarqnnbles dans les pour un jenne homme, a ordinai-
scleiices exactes. In physique et rement en Angleterre ime grande
la chimie. La liliératiire étrangère innui^nce snr sa destinée; mais
iMit aussi pour lui de grands al- Slielley ne parut nullement afTectô
traits, et la k'ctnre des ouvrages d'une disgrâce qui détruisit ce-
allemands lui donna de bonne pendant presque toutes ses espé-
heure cet esprit romanesque qu'il rances pour l'avenir, et tievint si
montra dès-lors, et qu'il a ton- fatale à son bonheur. Klle le priva
jours conservé. A l'âge de 1 5 ans, immédiatement de l'objet de sou
il publia «es deux premiers m- premier amour, et aliéna à jamais
inans intitulés : J mtrozzi et le de lui sa lamiMe. Son j)ère refusa
Rossicrucicn , dont on parla beau- pendant long- temps de le rece •
coup, et qui parurent fort au- voir dnns sa maison, et quand il
«Icssns des moyens d'un auteur y consentit enfin , ilie traita avec
tie cet âge. Quelques journalisles une telle froi<leur, que le fils crut
})rélendirent y découvrir déjj des lui-même devoir r<'noncer an toit
piÏMcipes irréligicuxet blâtnables. paternel, II se rendit à Londres,
iShelley, après avoir achevé ses 01^ il se ]>rit bienlôl d'une grande
cours à Eton , se rendit à l'tini- passion pour la jeutiecl belle miss
versité d'Oxfnrd. Depuis quelque Vestbrook, qui consentit à partir
temps il s'était lancé dans les «vec lui pour l'Ecosse , et qu'il
cliamps arides de la plus abstruse épousa à Grelna-Grecti. Les âges
inélaphysiquo, et avait entrepris, ieuni» di;s deux époux ne se mon-
sous le u«m supposé d'un*? fiun- laienlqii'à .'5T)anv.Cemariageexas-
n^e, une controverse théologique, péra le pèie i!<! Slielley au |»oint
avec utï haut dignitaire de l'église qu'il cessa loule comnmuication
anglicane. A la fin de son second avec son fils. Celui-ci, après avoir
lame à l'université, il composa passé quelque temps à Edim-
\u\ ouvrage dans lequel, sans res- i)onrg, se rendit en Irlandi;. Toute
jiect pour les opinions les j)lus l'île élail alors agitée par des Iroii-
pénérulemenl établies, il attaquait blés politi<|ues très-graves. Slul-
mêmc, la doctrine révérée des eau- ley publia ù Dublin un pamjddel
SCS finales, et joignant à cette té- qui eut un grand débit. 11 chcr-
mérilé une jactance extravagante, chaii à cabner l'elTervePcence po-
il envoya l'écrit signé de son nom ptdaire, et reconunandail une fer-
à tous les évêques de l'Angle- nielé modérée aux Iil.mdais, leur
terre. La conséquence naturelle prédisant qu'ils n'obtiendraient
d'un acte au^si insensé, fut une jamais par la révcdte , les libertés
citation devant les maîtres du col- qu'ils réclamaient. Il parla dans
lége, et comme il ne voulut point le même stuis à quelques-unes
désavouer son écrit, ni rétracter des assemblées publi(|ues , et fit
se* opinions , se préparant , au preuve de talens oratoires Irès-
conlrairc, ù les souiciiir envers distingué^. Uevctiu en Angleterre
T. XX, . vS
4'î SUE
a In fin tic rannée 1812, il com-
posa le poëmc de Queen Mal) (!■»
IVeine Mab), qu'il envoya h plu-
.•iicurs litlérateurs connus, «*t entre
iuilres à lord Byron. « C'c^t un
ouvrage, disait celui-ci , dans le-
«]ncl il y a beaucoup d'imagina-
tion et de talent. Personne ne sait
mieux que l'auteur que ses opi-
nions et les miennes sur la partie
métaphysique de son poëme dif-
l'èrent essentiellement , quoique
nous soyons d'ailleurs d'accord
avec tous ceux que la bassesse et
Ifi bigoterie n'aveuglent point.
J'admire la poésie de Quoe»i Mab
«;l des autres productions do Shel-
Itiy. » Plusieurs années après , le
poëme de Queen Mab tomba en-
tre les mains d'un libraire,
qui le publia pour son pro-
]>re compte, ce qui donna lieu
à (les poursuites judiciaires, qui
procurèrent à Shelley l'occasion
de désavouer quelques opinions
(le sa fougueuse jeunesse. Son
mariage, dont il eut deux enfans,
ne fut pas heureux. En i8i(), une
séparation eut lieu d'un consente-
ment mutuel, et il partit pour le
coiilinent. Pendant un long séjour
vM Suisse, ce pays enivra son âme
d'une nouvelle passion pour la na-
ture. Il se lia d'une étroite amitié
avec lord Byron à Genève, et cette
amitié a duré toute leur vie. On
a dit que lord Byron , qui en con-
venait lui-même, était en grande
partie redevable des beautés de
tout ce qu'il a écrit à la Villa Dio-
dati ( le troisième chant de Cliild
Harold^ Maiifred et le Prisonnier
Je Chillon) y aux critiques judi-
cieuses que son ami faisait des
imperfections de ses divers ou-
vrages et aux conseils qu'il lui
SHE
donnait. Shelley composa à la
même époque son églogue de Jlo-
salind et llclen et une Ode aux
monlagJies Eaqanéennex , où il y a
de grandes beautés. Il fit ensuite
son premier voyage en Italie, re-
vint en Angleterre , et après la
mort de sa femme, il épousa en
secondes noces miss Mary-Wol>-
tonecraft Godwin , fille de la cé-
lèbre Mary AVolstonecraft . défen-
seur éloquent des droits des fem-
mes, et d'im écrivain non moins
renoînmé, M. Godwin , auteur de
plusieurs écrits politiques et du
roman de Caleh J-VilUam. Shelley,
insouciant sur tout ce qui tenait à
l'argent et généreux à l'excès ,
éprouva quelque temps après
cette union , des embarras ex-
trêmes ; l'héritier du titre de ba-
ronnet et d'une fortune assez con-
sidérable, se trouva à la veille de
n^ourir de faim. Quand il eut enfin
alleint sa majorité, apprenant qu'il
avait droit à quelques propriétés
tenues en fief, il vendit.ces droits
à son père pour une rente viagère
de 1,000 livres sterling, et alla
s'établir à Jlarlow, où il se livra
entièrement à son goût pour la
poésit'. Ce fut pendant son séjour
dans le comté de Buckingham ,
qu'il composa son beau poëme
iV Alastor. on l'Esprit de la soli-
tude, un des plus parlaits modèles
d'harmonie que possède la langue
anglaise, ouvrage plein de verve
et riche des tableaux que l'imagi-
nation du poète avait ébauchés
d'après nature, créés ou embellis
pendant ses excursions dans les
Alpes. Ses revenus étaient loin de
suiïire au train de vie qu'il avait
adopté en Angleterre ; toujours
brouillé «Ytc sa famille, qui avait.
SHE SHE 435
même obtenu que le chancelier dcvirit sujet à des accès de mélan-
lui rclirilt la lulèle de ses enfans colie et d'ahalteincnt. Quoiqu'il
ilu premier lit, sous prélexle des contiuuiit d'écrire pendant les qtia-
oniiiions hétérodoxes du père , tre dernières années de sa vie, il
Snelley résolut de quitter à jamais avait pris la résolution de ne pli s
sa pairie. Il repassa alors pour la rien publier, et ne s'en écarta
dernière fois les Alpes, et s'éta- qu'en deux occasions. Son ardent
hlit d'abord à Venise. Sa liaison amour de la liberté lui inspira le
avec lord lijron y devint enccire poëme iVHcltas ou le Triomphe
plus intime. 11 y Jiubiia le poëme de la Grèce, qu'il dédia à son anu
allégorique de la Rcvollc d'Islam, le [>rinc^ Maurocordalo , et qui a
dont plusieurs journaux anglais été traduit en grec. Son ainilié"
parlèrent ravoral)lemeMt,maisque pour le poète Keats, qui mourut
le Quarlcrly Rewiew critiqua avec à Rome, l'engagea à publier une
amertume, mêlant, selon son ha- élégie (|u'il intitula : Adoinm.
bitude, à ses critiques littéraires. C'est peut-être la plus parfaite de
des personnalités injurieuses con- ses productions. Pendant les der-
Ire l'auteur. Sheljey com[>osa en- niers temps , il voyait tous les
suite le poëme des Amours de jours lord Byron , à qui son ama-
LaonetCyfltera,ettltePrometheus bililé, sa douceur, l'élégance de
uiihonnd ( Promélhée délivré ) , ses manières, ses talens et l'éten-
(ju'il donna comme la traduction due de ses connaissances l'avnient
d'une tragédie retrouvée d'Ks- rendu cher. Connue lord B3'-
chyle. Personne n\ivait en eiret ion, Shelley dédirait mourir jeu-
une connaissance plus parfaite des ne, et ce fut à peu près le seul de
jïoètes dramatiques grecs que ses \oeux que' le sort exauça. Il
Shelliîy ; c'étaient avec IMaton ses aimait, aius^quc son ami, à l'ain;
auteurs favoris, et il en parlait des courses eu mpr, et 11 périt
toujours comme des plus admi- dans un de ces voyages à l'âge de
râbles modèles de style, en poésie 29 ans, entre Livourne et Lericé,
et en prose. Pendant un séjour à le bateau ouvert dans lequel il sV-
JVome , au milieu des ruine> cmu- tait embarqué ny:i\M , dit-on, cha-
vertes de fîtuirs des bains de Ca- viié. On ne retrouva son curps
racaila, il mit en tragédie l'his- que quinze jours après, et il fut
toire des Cc«c/, et lord Byron pré- brftié , selon le désir qu'il avait
ferait cet ouvrage à la plupart des souvent exprimé. Lonl IJyr(»n ^
tragédies modernes. Aprrs avoir fidèle :\ remplir l'ollice d'exécu-^
passé quel(|ue temps à Naples, teur testamentaire et les devoirs
Shelley se fixa enfin avec sou ai- de l'amitié, '])résida à cette triste
niable toujpagne euToseuie. Ca- cérémonie. Les cendres du jeun«î
lomiiié en Angleterre. oiV se;.-, écrits jmète , qui avait gorilé si peu de
et sa personne étaient en butte à tranquillité et de bonheur Sur la
des attaques journalières, aban- terre, furent ensuite déposées prè"»
donné de sa famille, éjirouvant des restes de son ami Keal>«, 'dîiiis'
souvent des be-^oins, et iiiartvr le cimetière situé près de !{• pyra-
d'une infirmité douloureuse, il mile d- ('aïrts'Sextlis , A AOinc.
" Cq lii'ti esl si hcaii , avait dit
Slirllcv, rjti il fi raie presque iiiiinr
ht mort. ') Eiil!ii;iiï'ia.-;tc de bonne
l\)i , cet Iiomnic exlrnordiniiire é-
l;iil dominé par une idée fixe, qu'il
;n;iil iidopléc dès sa jeunesse. Il
< l'iiyail à !a perlectibililé presque
infinie de l'e,«pé< e humaine ; il
préJi.'^ail un nouvel h'^c d'or, dans
le.que! tontes les croyances et Ions
les 5yslèuu:s des hommes seraient
réunis, où toutes les incerlitudes
(!isparaîtraient;nn âjje d'or qui
délivrerait ses semblables des
«.baîn-'^s imposées par le despo-
lisiiie n\i la superstition , et dans
le.quel « lâmc humaine, de sou
tiônc (îtaccessible à la crainte, ne
s'humilierait point devant une
jMiissance inconnue. » L'objet de
toute la vie et de tous les ouvra-
i^es de Sîiclley semble avoir été
de dévelopiïcr les moyens d'at-
teindre à une réforme qu'il croyait
nécessaire ; et quelque erronés
ou visionnaiies que doivent pa-
raître ce5 iTioyens dans Télnt ac-
tuel do la civilisation, soîi esprit
exailé ne formait d'autres vœux
que pour le perreclionnemcnt de
la société et îe bonheur des hom-
m::s. '
SHIPLEY (sir Charles), jrou-
v^'rneur de la Grenade, où cet of-
ficier distinp;ué mourut en i8i4»
dans la Sc)" année de son âge,
était major- général et le pJus
ancien colonel du génie : ce fiit
dans ce corps qu'il reçut son bre-
vet d'officier à l'âge de i4 f»ns. Il
passa trente-cinq ans de son ho-
norable carrière éloigné de sa pa-
trie., .Sir Charles Shjpley avait oh-
tenu plusieurs l'ois des mentions
honoi'ables de la chambre des
communes, pour ses nombreux
sni
et importans «crvicc?. Ddus Tex-
pé<lilion rontre la Giiad( loupe, il
commanda en second sous les or-
dres de sir James Leilh. Comme
ingénieur, sir (yharle? Shipley a-
vait beaucoup de science et d'ha-
bileté; comme militaire, sa bra-
voure, son zèle et son activité
étaient au-dessus de tout éloge.
Comme citoyen, il a toujours mé-
rité l'estime et l'amitié de tous
ceux qui l'ont connu. Il a laissé
trois filles. Lady Slupley, morte
en 1820, avait obtenu , il y a bien
des années, par les efforts les plus
héroïques, l'élargissement de son
mari, prisonnii r en France.
SIMON DE LA MORTIÈRE
(le chevalier), colonel d'état-ma-
jor, et premier aide-de-camp du
maréchal duc deTrévise, était ca-
pitaine, an mois d'avril 1702»
lorsque le désir de concourir d'u-
ne manière active à la défense de
la patrie, le fit renoncer aux pré-
rogatives de son grade, pour en-
trer, en qualité de sous-lieute-
nant, dans le ci-devant régiment
d'Auvergne, devenu 7"* d'infa'î-
teiie légère, qui déjà se trouvait
en présence de l'ennemi. L<; dé-
vouement de cet onicier,'et le sa-
crifice qu'il faisait à sa patrie, fu-
rent appréciés p:ir le général en
chef Rellermanu, et lui valurent le
grade de lieutenant peu de ttnnps
après. Au combat de Torfou,le 19
septembre 179J, les Vendéens qui
ne laisaient alors aucun prison-
nier, avaient repoussé l'avant-
garde, commandée par Rlèber,
malgré les prodiges de valeur de
ce général, et des braves qui l'ac-
compagnaient. La brigade Yi-
menx , dont le lieutenant Simon
faisait putio, reçut l'ordre de ve-
S1.U SIM 4":
IHT se joindre à l'avanl-ganle : dès capitaine , ne faisait point pariio
qu'ellti parut, le cri £/i aca/i// par- de ces bataillons ; mais un de t^rs
li du premier Iciiaillon du 81°" ré- amis , aussi capitaine , père d'une
ginieiil, se prolongea sur toute la ramille nombreuse qui n'a de res-
ligne. La brigade s'ébranle, Ira- source qu'en lui , est destiné à
\erse un marais faiigetix, enirc s'embarquer. 51. Simon s'olFse
dan? le village où elle balaie l'en- pour le remplacer, et n'y parvient
nemi, avec une impétuosité qui pas sans peine. La Dellone, ài>v>id
ne lui donn»; pas le temps de se re- de laquelle fn trouvait le capital -
connaître. M. Simon qui avait ne Simon, cssuva bientôt un com-
parlicipé à ce mouvenienl propo- bat terrible, et l'ut forcée, après
sa au capitaine Teste, de se por- avoir perdu tous ses nirtts, d'amc-
ter imntédialeTiient sur la roule, ner son pavillon; M. Simon lut
avec qiselqiies liommcs de bonne conduit sur les pontons de l'An-
V(donté, aliu de couper la retraite gîelcrre. Vax février 1800, il coiu-
aux Vendéens. Ils partent au pas n)an(lait dans les départcmens de
de Course, suivis d'une poignée l'Ouest, conj(jintcnient avec Fa-
de liraves, qui tous sont tués ou verot , l'avant-gurde du généra!
blessés avant iParriver au but dé- Merle. A la hauteur d'une chajtel-
siré , que les deux olfieiers allci- le. prés de Mauves, on reinonlie
gnent seuls. A rinslaut une fusil- uu poste ennemi, et bientôt iiui^
iade terrible est dirigée cijntre vive fii.si!lade s'iîugage. Le ca])i -
eux; une pluie de feu les couvre, taine Simon à la tête de sa Irotipe,
mai» !e danger qui les menace ne dans un chemin creux, voit sur
lait qu'ajoutera leur courage. Ils la hauteur un soldat" qui rajuste;
opposent, en rij>o.stant avec leurs bien qu'il on soit séjhiré par un
carabines cl leurs pistolets, la fossé fuurré de bioussaill(;s', il
meilleure contenance , lorsque paie d'andaco, dirige la poiiile ;Ic
Te?l<;, frappé d'une bulle, tond)e son sabre vers ce soldat, et lui cr!;- .
A quel(|ues pas de »wn intrépide d'une v»»ix forte : • Si tu tires, tu
lieutenant q»i'U apj»ellc à son se- es mort. » Le Ion dont c<:s piro-
otMirs. Celui-ci y voie. Tandi.s qu'il les furent proMoncecs intimida tel •
j>rodiguaît ses soins au com[ia- Icment le Vendéen qu'il ne lir.i
^ofu» de su valeur, l'ennemT vive- pas, »,'t la présence d'.,>pfit du lu.t-
inisnl poursuivi COJilihuait du ve capilaiue Simon lui i>auva la
iriîr l'Eure essuyer, dans j>a retraite vie. Il fil avec distinction la plu-
précipilée, la dilcharge de loute part des eunipagnes qui eurent
sa mou.<(quelerie. A force de »oins, lien juscpi'en i8i/|, et parvint an
il i.ippelj bOn capitaine à la vie au grade de cotunel. Il reçut le i(i
moment où la victoire se décla- j.uivier de cette année, le com-
laiteu faveur des républicains, mandement delà place de Lau-
liu I7<)8, la S»"* deud-brigade fui grès. Cette ville m.nnptait ab^olu-
ch ngée de fournir d«:ux bataillons ment de (oui ce qui était néoessai-
pour l'expédition d'Irlande, sou» re à sa défense, aucun ouvragi;
l.». ordres du général Hardy; M. n'y était terminé; elle avait \\i'>
'jiii vcj.ait J'Olic nommé caiio^:?; Uiuis poiul Je v.aao;nn(. 1 <,
:^ois
SLM
]><)iiil (le muiiilions , jioinl de vi-
vres : eiinn t^a garuison >e coiiipo-
.<iiit (le quarante-huit grenadiers et
chasseurs delà vieille-garde, et
de vingt conscrits du i53°" régi-
ment d'infanlerie. Il fallait donc
avec soixante-quinze baïoiineltes ,
garder cinq portes , des brèches
praticables, et une demi-lieue de
développement intérieur. L'em-
pereur, trompé sur l'état des for-
ces qui se trouvaient dans la place,
et sur le dévouement de ses habi-
tans, avait donné l'ordre formel
de la défendre jusqu'à l'extrémité.
La nuit du 16 au 17 fut employée
par le colonel Simon à faire ses
dispositions ; il établit des postes,
organisa un conseil de défense, et
se prépara à la plus vigoureuse ré-
sistance. Dès sept heures du ma-
tin quarante mille autrichiens pa-
rurent sous les murs de Langres;
Simon donna l'ordre au chef de
bataillon Delcet, commandant la
garde nationale, de faire battre la
.'jfénérale , en indiquant la place
Champeaux pour point de réu-
nion. Il était enjoint à ce com-
mandant de venir ensuite partici-
per aux délibérations du conseil
de défense, où lui et le vieux capi-
taine Logerot furent les seuls des
babitans qui parurent en unifor-
me, et n'y furent que les organes
du découragement général. Le
colonel en leur adressant les plus
vifs reproches, essaya en vain de
leur rendre quelque énergie. 11 se
dirigea, accompagné du lieutenant
de gendarmerie Isgnard , sur la
place Champeaux, pour y attendre
que la garde nationale se rassem-
blilt, mais personne ne parut. Les
tambours avaient été injuriés par
les femmes de la ville. Des hoin-
sni
mes J'en capabUs d'apprécier
riionncur d'être appelés à la dé-
fense de la patrie, colportaient de
faux avis daus les difl'érens poster»,
pour les prévenir que la retraite
était ordonnée. Induits en erreur
quelques-uns de ces postes se re-
tiraient lorsque le colonel Simon
courut à eux, et les ramena aux
portes de la ville; quelques sol-
dats lui dirent : a Quoi! colonel,
» vous voulez que ïious conibal-
«tionsî malgré notre couriige,
»,pNOurrons-nous tenir contre toute
» une armée?» «Grenadiers, leurré-
» pondit-il, nous saurons mourir!»
Eh bien, nous mourrons! s'écriè-
rent ces braves. Vers une heure
après midi, un billet du général
autrichien Fresnel fut remis au
maire de Langres par un paysan.
Le colonel Simon ne permit i>as
qu'il fût fait de réponse à ce bil-
let, et consigna aux postes le mai-
re et le paysan. De forts partis de
cavalerie poussèrent, quelques ins-
tans après, une reconnaissance au-
tour de la ville, mais ils furent
immédiatement éloignés à coups
de fusil. Alors le commandant lit
mettre en batterie une pièce de
quatre : ce n'était qu'une feinte,
puisqu'il n'avait rien pour faire-
usage de cette pièce. Aussitôt mil-
le voix s'élèvent contre lui et sa
troupe. En vain le colonel Simon
rappelle que six jours auparavant,
ils ont tiré sur un parlementaire
ennemi: qu'ils n'ont d'autre res-
source que de courir aux armes et
de faire bonne contenance, afin
d'obtenir une capitulation hono-
rable. Le nombre des nui lins
augmente, une partie d'entre eux
commence déjà à démolir le mur
d'une poterne, et le colonel est
SIM
if dhligt; d'employer la force {lOiir
P Jus contraindre à se reliier. A trois
heures on reçut un nouveau billet
adressé au ninire , de la part du
j^énéral autrichien, conile de Oyu-
liii ; le colonel Simon écrivit au
lias du billet même : « Un ancien
"Colonel commande dans cette
n}dace; il a avec lui pour gar-
» oison, des grenadiers de la
X vieille garde; il se défendra
njusqu'A la dernière extrémilé. >i
Une heure après, un quart de di-
vision ennemie prit position à
7)00 toises de la ville, et dressa
«les batteries qui commencèrent à
battre la place; plusieurs esca-
drons de cavalerie s'en approchè-
reiil; enfin trois colonjies débou-
chèrent en même temps par di-
vers points. Le baron de Selbilz,
major au régiment de Kleneau,
chevau-légers, se présenta à qua?-
tre heures et demie en parlemen-
taire. On t'introduisit un bandeau
sur les yeux, auprès du comman-
dant français, qu'il somma de ren-
dre la place à discrétion : «Je ne
la rendrai qu'à des conditions ho-
norables, » et sur-le-champ il se
mit à rédiger les articles d'une
capitulation qui fut transmise au
général Gyulai. Celui-ci renvoya
son ultimatum que le brave colo-
nel fut en quelque sorte obligé
d'accepter à brûle-pourpoint; mais
il avait fait tout ce qu'il fallait
pour l'honneur. Le comte Gyulai
cuira dans la ville ù la tète du
( orps d'armée qu'il commandait.
A la joie qu'il maiirî«ait à peine,
il était facile de voir qu'il s'imagi-
nait avoir fait mettre ba- les ar-
mes à une division de la vieille
;;.irde. 11 revint eo elTel dilTicile-
tneiit de sa surprise, lorsque ayant
SUR fiZç)
demandé où était le reste de 1''
garnison, le colonel Simon l'assu-
ra qu'il la voyait toute entière dans
ses soixante-quinze hommes. Le
lendemain il fut présenté au prin-
ce de Schwartzemberg , <|ui ,
instruit de sa bravoure, le rerut
avec la plus grande distinction.
Quoique c^tte glorieuse défense
n'ait pas été couronnée d'un plein
succès, elle eut néanmoins K: ré-
sultat d'empêcher dans la journée
du 17 janvier, la jonction de Ww'
mée du prirjce de Schwartzem-
berg avec celle que commandait
le prince de Wurtemberg, et de
préserver la ville de Langres du
pillage auquel elle aurait été né*
cessairement exposée, si quarante
mille hommes l'eussent empoilée
de vive force. Le chevalier Simon
de la Mortière a été admis i\ la re-
traite depuis la restauration.
SU REM AIN (FrançoisAlexan-
DBE de) , né à Auxonne le lO juil-
let 1755, d'une famille noble de
la ci-devant province de Bourgo-
gne, olïicier de génie A l'époque
de la révolution, devint maire
d'Auxonne en 1790, et vice-pré-
sident de l'administration du dis-
trict de Saint-Jean-de-Losne. On
l'arrêta, en I705, comme noble
et parent d'émigré, à Luxeuil, où
il était à prendre les eaux. Un ma-
nuscrit trouvé dans son porte-
feuille, intitulé : Reflexions sur la
nouvelle constitution donnée à la
Franee , dans lequel il attaquait
fortement l'acte constitutionnel,
le fit conduire à Paris devant le
tribunal révolutionnaire, et fut
cause de sa mort; M. de vSure-
main périt le ai mai 1795. Il a
laissé trois fds, dont l'un est mort
lieutenant de vaisseau; les deux uo
:|40
TAL
trc8 servonl dans la gai ùc royale.
SUllEMAIN(jEAN-nAPIISTEDE),
liciitenant-gériéral, ficicdu pré-
cédcul, était, au coiniTiencenicnt
de la révoliilion. capitaine au i"
régiment d'arlillcrie à pied. Il
émigra en 1792, cuira en ij^^fau
service de Suède , où il devint, un
1811, général d'artillerie et pre-
mier aide-de-camp du roi Char-
les XïII. M. de Suremaiu a lait
avec l'armée suédoi.-e, soit comme
officier supérieur, soit comme gé-
néral, les.camp.'igues de Finlande,
d'Allemagne et de Norvège, el a
commjindé en chef le siège de
Frédericshall. Ce général ayant
eu, eu i8»5, quel'|ucs démêlés
avec le prince royal aujourd'hui
rai Utt Suède {wj. Berisadotte ),
donna b démir^siou de toutes ses
places, obtint un congé honovahlc
et partit pour Gaïul, où se trou-
vait le rai Louis XVI II , près du-
quel étaient déjà ses deux neveux,
l'eu après la seconile restaura-
tion , il fut nommé lieuleuaut-gé-
néral et lieutenant de rui à Metz;
ila depuis demandé et obtenu sa
retraite. On dit que M- de Sure-
»nain a rédigé des mémoires eu-
vieux sur les principaux événe-
«jens arrivés en Suéde pendant le
long séjour qu'il y a l'ait.
TALLEYRAÎSD (Charles Mau-
rice DE PÉRIGORD, PRINCE De).
L'histoire complète de M. de Tal-
leyrand serait rhiî^toire secrète de
notre époque. Non? ne nous en-
gagerons pas à remplir cette tâche
immense ; c'est de M- de Talley-
land lui-même que l'Europe doit
attendre les révélations nécessai-
res à l'accomplissement d'une œu-
vre aussi compliquée qu'elle est
importante. Issu d'une famille an-
T.VL .
cii.niu;. qui régna dans le moyen-
age sur le Qutrcy, iVI. de Talky-
raud eut pour aïeule nrKiteruclle
cette célèbre princesse de,s Lr-
sins, qui joua im si giiirul rôl«:
j)endaiil la guerre de la succession
à la (our de Philippe V. On sait
que toutes les ressources de l'es-
prit, asservies aux manœuvres de
l'ambition, élevèrent au faite du
pouvoir Celle favorite, exemple
fameux de l'inconstance des cours.
M. de Tallryraud sut profiler de
celle leçon uiaternelle, et, à force
d'esprit, de taL-nt et d'adresse,
on le vil toujours maître de gou-
verner à son gré sa destinée, et,
plus d'une fois, celle des empires.
Il naquit à Paris en 1754. On le
destina de bonne heure à l'état
ecclésiastique, et il entra au sé-
minaire de Saint -Sulpice. Des
railleries fines, un commerce
plein de séduction, l'esprit des
affaires, la péaélratiou des hom-
mes el de leurs faiblesses, ne tar-
dèrcnit pas à f;iire remarquer l'ab-
bé de Pérjgord , qui avait à peine
vingt six ans, lorsqu'il fut nommé,
en 1780, agent général du clergé.
Les taluns admiiiistrilifs ne furent
pas les seuls qu'il déploya darw
ces fonctions: lîvêijue d'Aulun ,
lorsque la révolution éclata, il
avail déj;'» laissé apercevoir celte
aptiliide à saisir les fils secrets des
grandes affaires , et Mirabeau ,
dans sa correspondance secrète
avec Berlin, le signalait comme
un dos esprits les plus déliés et les
plus puissans de l'époque. Ce ju-
gement est devenu une prophétie,
A peine M. Tallejrand eut-il fait
les premiers pas dans la carrière
politique, qu'on y reconnut la su-
périorité de son esprit. Elu, ea
'^- *■,
tnTttft/ l/l/uc .
fi-emu i/ci . fl Sfii/ii
TAL
i^8f), député du clergé de son
diocèse aux états- généraux , il
pressentit de bonne heure , ou
plutôt il dirigea et bâta le mou-
vement généra! des esprits, et
Vf)la, dès le 19 juin de la même
année, en faveur de la réunion
ÙH clergé aux communes qui ve-
naient de se constituer en assem-
blée nationale. Ce fut lui qui,
dans la séance du 7 juillet, pro-
posa de déclarer nuls les mandats
impératifs, de n'admettre aucune
protestation à ce sujet, et d'im-
poser aux bailliages l'obligation
de se soumettie aux décrets.
Nommé, le lendemain, membre
du comité de constilutioD , il
n'hésita pns à proposer la sup-
pression dei dîmes du clergé, et
demanda en outre qu'il fftl décla-
ré que ce vote avait été unanime.
Membre du second comité de
constitution, après la dissolution
du premier, il prit encore l'initia-
tive dans k'S mesures les plus im-
portantes de l'assemblée , et pré-
senta un rapport et un projet de
décret sur l'application dos biens
du clergé au houiagement du tré-
sor, public. Sourd aux vaines ré-
clamations de ce corps , et parti-
culièrement A celles des prCtres
du diocèse d'Autun , qui écrivi-
rent à l'assemblée pour désavouer
des principes trop élevés pour
eux, M. de Talleyrand, toujours
dans le secret des variations de
l'esprit public « toujours poussé
par le mouvement général, et
s'y allaelunt avec assee d'adresse
pour le diriger vers des réformes
si.tlutiiires, fut nommé président,
le 16 février 1790. Le premier, il
proposa d'établir, sur nn sys-
tème uniforme ; la théorie des
TAL
4|i
poids et mesures; il présenta,
dans les premiers jours du mois
de juin , un projet de décret à
ce sujet f et fit aussi décréter de
quelle manière serait célébi'ée la
fédération du i4 juillet. Ainsi,
mêlé à tous les évènemens ma-
jeurs, il acquit une grande popu-
larité, et fut vivement applaudi
par le peuple dans une cérémonie
où l'on célébrait l'anniversaire de
la constitution de la chambre des
communes en assemblée natio-
nale. On le vit, pendant la céré-
monie religieuse de la fédératiou
de 1790, officier- ponlificalemcnt
sur l'autel de la Patrie, assisté
des abbés Louis et Desrenaudes.
Un grand nombre de rapports l'i
l'assemblée, sur l'état des finan-
ces, témoignèrent de son habileté
à faire l'application des théories
politiques. L'un des premiers, il
prêta serment d'obéi,>sance à la
constitution civile du clergé, et,
par une adresse du 23 décembre
1790, il en instruisit les eci lé-
siastiques du diocèse d'Autun ,
qu'il invita ;\ suivre sou exemple.
Assisté des évêques de Lydda et.
de Babylone, il sacra les premiers
évêques constitutionnels, et fut
excommunié par le pape Pie VL
Les évènemens se pressaient, et
la marche de l'esprit public so
portait rapidement vers la réor-
ganisation comi)lète de toutes les
instilutions, quand iM. de Talley-
rand se démit de son évêché, et
fut élu n)end)re du directoire du
département de Paris. Mirabeau
mourant déposa ses secrets dans
le sein d'un ami qui avait parla-
péi s<;rvi et peut-être modifié ses
dernier,'; elVorts et ses tlernieh'». suc-
cès dans la carrière politicpie. €'«•»
4'|3
TA L
lai I le sort de M .(]« Talleyraïul ih; se
Iruuver coiislaiiinieiit à la têletlcs
idées {lorninantes , sacis en ar-
borer la bannière. Nommé, avec
M. le.cotule de La Marck, exécu-
teur testarnenlaire de Mirabeau,
ce lui lui qui vint lire à la tribu-
ne l'opinion de ce grand homme
sur le droit de tester. Il soumit
ensuite et discuta un projet d'é-
ducation publique et nationale,
dont les vues éminemment phi-
losophiques attachent à son nom
un écl^t immortel. Il avait con-
çu, (les cette époque, l'idée d'un
institut des sciences et des arts ,
qui ne fut créé que cinq ans après
par un autre gouvernement. Il
lit adopter plusieurs dispositions
pour l'encouragement des arts.
Dans les [)remiers mois de 1792,
il se rendit eri Angleterre, char~
gé d'une mission secrète sur
laquelle on fit beaucoup de con-
jectures, et qui semble avoir eu
pour but l'établissement des deux
chambres en France. D'abord très-
bien accueilli par le ministère
anglais, il commençait à s'enten-
. dre avec M. Pitt, quand un ac-
cord singulier de tous les partis
arrêta ses démarches et neutrali-
sa ses efforts. En même temps que
les jacobins de France le décré-
taient d'accusation comme un é-
rnissaire de la cour, les émigrés
d'Angleterre le signalaient com-
me un émissaire des jacobins; et
le ministère anglais lui donnait
ordre, ainsi qu'à M. de Chauve-
lin, ambassadeur accrédité, de
quitter les îles britanniques sous
vingt -quatre heures. Ce fut,
nous le crojfons du moins , le
seul échec diplomatique que l'ex-
trême irritation des esprits ait fait
TAL
subir à M. de Talleyrand. Il écri-
vit vaineipent pour se justifier,
et partit pour les États-Unis, où
il s'occupa de spéculations com-
merciales. Les passions com-
meuçaietit à se calmer en Fran-
ce , lorsqu'il sollicita la per-
mission d'y rentrer. Le rap-
port de M. J. Chénier, etles vives
instances de madame de Staël,
lui en rouvrirent les portes.
En septembre 1795, la conven-
tion cassa le décret lancé con-
tre lui, et bientôt on le vit ûgurer
parmi les fondateurs du cercle
constitutionnel qui s'établit à l'hô-
tel de Salm à Paris, en 1797. Il y
lut un mémoire sur les avantages
que procurerait à la républiciue
française rétablissement de colo-
nies sur les côtes de l'Afrique
jnaintenant occupées parles puis-
sances barbaresques, et un mé-
moire, aussi remarquable par les
vues que par le style, sur le com-
merce des Etats-Unis. On ne tar-
da pas à s'apercevoir que M. de
Talleyrand était à Paris ; son in-
fluence toujours secrète et tou-
jours puissante se faisait sentir;
nommé, en juillet (1797), après
le 18 fructidor, ministre des
relations extérieures, il se vit
en butte aux accusations de tous
les partis qui redoutaient sa pré-
sence et connaissaient son pou-
voir. Ce déchaînement produisit
une suite de pamphlets, de saty-
res et d'épigramiues, auxquels M.
de Talleyrand répondit par des
Ectaircissenieiis donnés à ses con-
citoyen» , et par sa démission,
donnée vingt-cinq jours après la
publication de cette brochure.
Cette conduite ne désarma point
ses ennemis. Dénoncé à la tribu-
TAL
ne lies jacobins on 1 799, partir» cer-
tain Muqiiet; à la tribun»; des cinq-
cents par Briot,et par Lucien Bo-
naparte ; dans dos pamphlets par
Charles Lacroix, qu'il avait rem-
placé au ministère des affaires ex-
térieures ; enfin, par Quatremère
Uijonval, il se vit, avec un im-
perturbable sang-froid , harcelé
de toutes parts, jusqu'au moment
où le général Bonaparte revenu
d'Egypte, conçut le hardi projet
de changer la forme du gouver-
nemtMit, et de se mettre à la tête
<les aflaires publiques. Il est vrai-
semblable que l'audace du jeune
héros des pyramides, tut puissam-
ment secondée j>ar l'adresse de
l'héritier de Mirabeau. Il fut d'a-
bord question de le placer avec
Cand)acérés au directoire , en
remplacement du général Moulin
et <le Gohier, pour en rendre lu
renversement plus facile : Sieyes,
uu(|iiel on s'adressa dans cette cir-
constance, ne fit rien pour que
M. de Talleyrand devînt son col-
lègue. Alors fut résolue la révo-
lution rlu 18 brumaire, dont la
force des armes fut l'instrument
visible, etdofit M. de Talleyrand,
)tar des préparations habiles, et
l'emploi des combinaisons d'un
esprit toujours fertile en ressour-
ces, fut l'arlrsan le plus actif. Rap-
pelé, fb's le premier frimaire, par
b'S consuls prOTîsoires, au minis-
tère des affaires étrangères, et con-
firmé le 4 nivôse dans ses fonc-
tions par le général Bonaparte
«levenu premier consul, il s'as-
socia à toutes les pensées secrètes
du nouveau gouvernement, et de-
vint l'âme de toutes les négocia-
i'.nns. (>elles qui s'entamèrent a-
vvc l'Autriche i\ Lunéyjllc et qui
TAL
H'w
furent suivies de la paix, avec
l'Angleterre à Amiens, et succes-
sivement avec toutes les puissan-
ces, n'eurent pas d'autre agent
que lui. Un bref du pape Pie VU
avait rendu M. de Talleyrand à la
vie séculière; il épousa madame
Grandt, qu'il avait connue à Ham-
bourg, à son retour des États-
Unis. Admise à la cour naissante
du premier consul , cette dame
ne paraît pas avoir joui de la
même faveur que son époux.
La lutte de Fouché et de M. île
Talleyrand, dont l'habileté rivale
se disputait un pouvoir secondai-
re , fut à la fois vive et secrète :
M. de Talleyrand l'emporta long-
temps sur son adversaire. Fou-
ché mit sous les yeux du premier
consul la minute littérale d'un
traité secret aveO Paul 1", qu'il
avait reçue de se8 agens à Lon-
dres. Il espérait que cette pièce,
qui n'avait pu être commimiquée
que par le niinistre des relations
extérieures, amènerait la disgrâce
de M. de Talleyrand, mais il fut
trompé dans son attente : on dé-
couvrit que celte minute avait été
soustraite du cabinet où elle était
déposée ; et Fouché paya liii-
' même plus tard de sa disgrâce
la tentative qu'il avait essayée.
Quanti Bonaparte échangea son
titre de premier consul contre ce-
lui d'empereur, M. de Talley-
rand fut nommé grand-chambel-
lan de l'empire, et le 5 juin
1806, élevé à la dignité de prince
souverain de Bénévent , il conser-
va le portcrcin'ilc <lcs affaires é-
trangères. A la fin de mars de.
cette même année, il ouvrit avec
M. Fox des négociations pour lu
paix, qui demeurèrent sans ré-
Wi
TAL
suhat. IVomn, le g aoftl 1807,
à la di^iihé de vicc-grand-élec-
leiir, il l'iil remplacé dans son
ministère ))ar M. de ÇJinuipa^ny.
Quand Na|>oléon conçut le pro-
jet de placer un membre de sa fa-
mille sur le trône d'Espagne, le
prince de Béné vent parut condam-
ner unt; entreprise dont son esprit
clairvoyant prévoyait l'effet né-
cessaire. L'opposition du prince
irrila l'empereur, elles premiers
revers de nos troupes en aug-
mentant cette irritation, décidè-
rent la disgrâce du ministre. Eloi-
gné des affaires el du conseil im-
périal, M. deTalleyrand se trou-
va pour ainsi dire placé dans, un
état de surveillance, où la suite
pi ouva que son esprit ne demeura
point inaclif. A peine l'astre impé-
rial commençait-il use couvrir de
nuages, que le prince de Bénévenl
s'occupait déjà secrètement des
moyens de changer la politique
de l'Europe. En vain l'empereur
le ra[)pela pi es de lui : la tra-
îne était ourdie, et M. de Talley-
rand lui-même n'aurait pu >'op-
poser t\ l'accomplissement des
destinées qu'iT avait préparées,
de concert avec le mauvais génie
q!ii enliaîiia le chef de la France
dans ses dernièies expéditions,
^'ous passons ra})idement sur les
événemens où nous ne saurions
indiquer avec précision l'inlhien-
ce qu'exerça M. de Talleyrand.
ISonimé , le 1" avril ibi4i i'^n
des membres et président dti gou-
vernement provisoire, il gouver-
-na la Fiaucc jusqu'à l'arrivée du
comte d'Artois. L'eiu[)ereur de
Knssie habitait l'hôtel du prince
dtîBénévent, qui dut exercer à
cette époque la plus haute in-
fluence sur le soil de la France
TAL
cnliére. Nommé, le 12 mai 18 i»,
minirtre des affaires étrangères .
et pair de France, le 4 juin sui-
vant, sons le nofn de prince de
Talleyrand , il fut «:n voyé au cou-
grès de Vienne ù la fin de celle
année, en qualité de plénij»i*ten-
liairc français. Napoléon, de re-
tour en France en i8i5, lenla
vainement de rattacher à sa for-
tune celui qui semblait faire I.»
fortune des empires. Miis trop
habile pour se fier à des prome.—
ses que la nécessité dictait cl f)ar
suite de cet instinct merveilleux
dont il semble pourvu, il resia
cette fois fidèle aux derniers
sermens qu'il avait faits : de tous
les plénipotentiaire? au congrès
de Vienne , ce fut lui qui sollicita
avec le plus il'ardeur le» déclara-
tions du i5 el du 25 mars 181 ;i,
contre l'empereur Napoléon. Le
prince de Talleyrand rentra à Pa-
ris avec S. M. Louis XVllI, et
reprit, le 8 juillet, la diiecliou
des affaires étrangères avec le ti-
tre de président du conseil ; m;iis,
l'histoire recueillera ce fait ho-
norable, il donna sa démission
après trois mois, ne vaulant pus
attacher son nom au bas d'uu
traité dont les dispositions lui pa-
rai.-saient consommer la honte et
la ruine de la France. Le tiirede
chambellan, qu'il recul ua roi,
le tint auprès li^i prince sans le
rapino^îicr des affaires. Celle dis-
grâce palliée l'exposa de nonvein
à de nomi)reuses attaques-, el ic-
veil'a les bruits caloumieux qui
lui altribuèrenl une pa*rl acùve
ù la mon du duc d'Enghiea. Il ne
répondit à cette absurde attaque
que par le silence du mépris. i\L
de Talleyrand a lini par se placer
à la lète Je lu noble opposition de
TAL
la chambre drs pair*. L'iic vie si
rcinpiic <le délaiîs iinpor'.ntis et
si'crcl!* «'-liippe nrci'S.sairomosit
aux aiueurs d'une biographie,
qui ne peuvent en dessiner que
!&<■ masses principales. Si Napo-
léon eut en partage le génie de
la victoire, M. de Talleyrand eut
celui de la politique: et l'histoire
n'oflVe pas deux exemples aussi
élonnans de l'influence exercée
sur les révolulions d'une longue
époque, par les facultés d'une
seuli: intelligence. Le pouvoir
passa dans les mains de M. de
Talleyrand, qui le donna, sans
le gjirder, et qui ne conserva
pour lui-mC-mc que deux puis-
sances supérieures à toutes les
autres, celle de l'or et celle de
l'esprit. Mêlé sans danger à tou-
tes les catastrophes, planant tou-
jours ina|)erçu sur les évènemens
qu'il |iréparnit, mobile comme la
forlune elle-même, il ne faut le
CDUip.ircr ni à Sully, ni à Riche-
lieu, ni ù Mnr.arin, ni à Colbert ,
iii'à aucun des ministres dont on
gardf le souvenir. Il ne ressemble
(|u'à lui-même, et lui seul peut
se peindre. Il est inutile d'ajouter
que cet esprit, dominateur par
adresse, est délicat, exercé, dé-
lié, fécond en saillies piquantes et
eu railleries de bon goftt. Nous
avons signalé les eiTcls : l'histoire
remontera aux causes, et jugera
l'homme en dernier ressort.
TAl.LEYRÉdD (BAB05 de),
cousin du précédent , and)assa-
deur i\ Napîes, en 1789, murt dans
ré'uigration, père de
TALLEYRAND (Accoste, com-
te de), né à Paris, en 1770, avait
suivi son père îi "Napics. où il re-
cul avec ses frères, Alexandre et
TAL
4'|5
Anatole , une éducation distin-
guée. Il rentra en France en
1800, fut nommé chambellan de
Pcmpercur Napoléon, et son am-
bassadeur en Suisse, fonction
qu'il a continuée souS le roi, jus-
qu'en 182:), époque à laquelle il
a été remplacé. La conduite du
comte de Talleyrand en Suisse a
été constamment appréciée par
les deux nations, et attache à sa
vie d'honorables souvenirs. Nom-
mé pair de France après la secon-
de restauration, il remplit digne-
ment, dans celte haute magistra-
ture, les devoir.^ d'un bon Fran-
çais et d'un homme éclairé sur
les grands intérêts de son pays.
TALLEYRA N D ( Alexandre ,
BARo:» de), son frère, né à Paris,
en 177O, fut d'abord destiné à
l'état ecclésiastique, dont il suivit
les éludes dans le royaume do
Naplcs. Naturalisé Napolitain ,
ainsi que son père, il se crut obli-
gé de servir sa nouvelle patrie :
au moment du danger et à l'épo-
que de la déclaration de la guerre
entre Naples et la république
française, il prit parti dans l'ar-
mée napolitaine, où il servit jus-
qu'en 1802. Il obtint le rang de
major. Mai* la paix ayant rap-
proché les deux pays, il profita
avec empressement de la loi
d'amnistie, et revint en France
chez son frère Auguste , alors
Eropriétaire à la Firté-Saiul-Au-
m, drpartemeMi du Loiret. Il fut
nommé maire de cette commune.
Ce fut là qu'il prit ses pn;mier3
dégrés a<lniiMistratifs. Au retour
de la fatnille royale, il fut nom-
mé préfet du L tiret. Les circons-
tances étaient difficiles; sa nomi-
nation date de l'cnlrée de Mon-
440
ÏAL
sieur, alors lieutenant-général du
ro3'^aume. Il lïil assez heureux ce-
pendant pour maintenir les habi-
tans et l'armée, par sa fermeté et
sa mofléralion, clans la plus gran-
de tranquiUilé. Pendant les cent
Jours, il suivit le roi à Gand, en
reçut uuG mission pour Vienne,
et revint occuper sa préfecture.
Les temps se trouvèrent plus ora-
geux. Les Prussiens lui deman-
dèrent une réquisition de quatre
millions, qu'il refusa. Il fut arrê-
té par eux pour être conduit à
Spandau , et fut mis au secret
à Saiui-Cloud. Pendant celle cap-
tivité momentanée, le roi, pour
le récompenser de sa résistance
aux exigences prussiennes , le
nomma conseiller -d'état. Il re-
tourna à Orléans, et fut nommé
député du Loiret en 181 Set 1816.
En 1817, il fut appelé à la pré-
fecture de Vaucluse, qu'il refusa.
En 1820, il fut nommé à celle de
l'Aisne, où il a continué, jusqu'en
1822, à mériter l'estime et la
confiance de ses administrés; il
convenait à ce déparlement ainsi
qu'il avait convenu à celui du
Loiret; cependant il en fut ôté
pour passer à la préfecture de
l'Allier, où le même motif ne lui
permit pas de rester plus d'un an.
Le baron de Talieyrand est, de-
puis ce temps, en disponibilité
administrative. Il a laissé dans
ses trois préfectures la juste re-
nommée d'im homme de bien,
d'un administrateur intégre, la-
borieux , essenliellemenl conci-
liateur, d'un UKigi^lrat enfin qui
n'oublie ni ce qu'il doit à son
pays ni ce qu'il doit à son sou-
verain. Lesdeuxannéesde son ad-
ministration dans le département
TAU
de l'Aisne, ont été marquées par
un grand travail ;?tatistique, pu-
blié en 1823, sous les auspices de
son successeur. Sic vos non valus.
TALLL'YUANU PÉRIGORD
(Bezok, comte de), frère du prin-
ce de Talieyrand, lieutenant-gé-
néral, gouverneur de Saint-Ger'-
mainen-Laye.
TALLEYRAND PÉRIGORD
(Archambauld, duc de), frère du
précéfleut, lieulenant-iiénéral.
TALLEYRAND P^KIGORD
(nue DE Dixo), fils du précédent,
maréchal-de-camp, a servi sous
l'empereur dès sa première jeu-
nesse. Il a gagné tous ses grades
sur les champs de bataille.
TALLEYRAND ( le cardinal
de), oncle du prince, mort grand
aumônier de France en 1820.
TALiNAY ( Charles-Auguste) ,
statuaire disliugué, fils du pciulie
dont l'article suit, naquit à Paris
en 1768. Entraîné par sa passion
pour les beaux arts, il parvint r; -
pidement à la connaissance d< s
premiers secrets de l'art du sta-
tuaire, et il gagna le prix de
sculpture, qui devait le conduire
à Rome aux frais du gouverne-
ment. jMalheureusemeul les trou-
bles politiques de l'époque ne lui
permirent pas de faire ce voyage.
Les conquêtes des armées fran-
çaises, qui, à la suite de traités,
valurent à la France les chels-
d'œuvre de la Grèce et de Rome
en tableaux et et>^culptmes, le
dédommagèrent bientôt de celle
douloureuse privalion, et il put
compléter au musée du Louvre,
à Paris, son éducation comme ar-
tiste. Taunay obtint par de nom-
breux ouvrages, la confiance du
iïouvernemeut. Les événemeiis
TAU
politiques de 1814 et ï8i5, ravi-
rent à la France, par le droit de
la force , les richesses immenses
de notre musée [voy. Casova ,
LEBRrsTOx et "Wellington). Dans
son désespoir, il s'expatria avec
Lebrelon et plusieurs artistes dis-
tingués, et alla chercher dans un
pays vierge de révolutions, de
lâchetés et de barbaries, un ciel
paisible et la gloire d'être l'un
des fondateurs d'une colonie d'ar-
tistes. IVofcsseur de sculpture à
l'académie des beaux arts de Rio-
Janeiro, il y exécuta plusieurs
ouvrages dignes de son talent,
et, entre autres, la statue du Ca-
iiiitëns. Il mourut à Rio -Ja-
neiro au commencement de i824'
\aEntreUa Brasileira, journal qui
se publie dans cette ville, donna
quelques jours après, un article
nécrologigue, qui est terminé par
ce jugement plein oe goût et de
justice : « Outre le mécanisme de
son art, il possédait à un haut de-
gré ce qui forme le véritable ar-
tiste^ une critique judicieuse, une
érudition variée et un excellent
gofit littéraire. C'était un homme
dont le talent était supérieur aux
ouvrages qu'il laisse après lui, et
qui fut presque toujours contrarié
par les circonstances. »
TALNAY ( Nicolas -Ahtoine),
peintre de genre, membre de l'ins-
titul et de la légion-d'honneur,
père du précédent, et élève de
Casanova. M. Taunay, l'un des
artistes les plus distingués dans
le genre qu'il cultive, enri-
chit depuis 5o ans, de ses agréa-
hies compositions, les expositions
du musée du Louvre. On a re-
marqué au salon de l'an <), son
tableau du général Bonaparte
TIS
4^7
recevant des prisonniers sur le
champ de bataille, après une do
ses victoires en Italie : ce tableau,
qui est un prix d'encouragement,
fait partie de la galerie du Luxem-
bourg, ainsi que le Passage Ue la
Guadarama, pari' année française,
en Espagne^ et une Messe à une
chapelle de saint Rock y dans une
campagne d'Italie; au salon de l'an
to, le Trait de courage d' un en-
fant de 12 ans, qui, au mois de
fructidor de l'an G, à Saint -
l*ol de Léon, était parvenu, a-
près des efforts inouïs, à sau-
ver de la mer deux en fans à peu
près de son âge, qui s'étant trop
avancés , étaient eujporlés parles
flots; au salon dt; l'an 12, un In-
térieur d' hôpital militaire; Henri
IV et le paysan; une Scène de
carnaval; au salon de 180S, l'^;»-
trée de l'empereur des Français
dans la ville de Munich; le Ci-
mabué et Giolto ; V Impératrice re-
cueillant les ouvrages des artistes
modernes; au salon de ï8i<) et
de 1822, parmi une suite assez
nombreuse de tableaux, plusieurs
paysages, vues, etc., du Brésil ,
entre autrcsdeThabitation de l'au-
teur, à cinq lieues environ de Rio-
Juneiro; erjfin au dernier salon
(t824),£/'ez6r, la Bergère des Al'
pes, Henri IF et le paysan, etc.
TISSOT ( Pierre- François ) ,
lomme de lettres, né à Versaille»
(Seiuc-et-Oise), le 10 mai 1^68.
Il commença ses éludes dans cette
ville avec un succès remarquable;
dès l'âge de neuf ans, il rempla-
çait sou maître pour des leçons
que celui-ci donnait à iliverses
personnes. Plusieurs artiîlus cé-
lèbres fréquentaient la pension
dans laquelle il était élevé; il prit
448 TIS
dans leur coinuicrc e lu goût des
arts el une véritable passion pour
le dessin, qu'il cultiva pendant
plusieurs atwiées, avec la secr^:te
intcnlion de devenir peintre. Arri-
vé à Paris en 1782, el placé dans
une pension qui conduisait ses
élèves au collège 31ontaijii, il fut
singulièrement remarqué de deux
lial)iles professeurs du temps, qui
s'appliquèrent à développer' ses
dispositions et à cultiver son goOl;
il fit des progrès rapides, et ob-
tint de brillans succès sous ces
deux maîtres, ainsi que sous M.
Sélis, qui pi'otessait la rhétorique
au collège de Louis-le-Grand. Ses
premiers vers français datent de
Ct Ite époque ; ils sont consacrés à
retracer les derniers momens de
sa mère, qui avait assemblé tous
ses enfans autour de son Ut de
mort pour leur donner sa béné-
diction. Au sortir de ses études,
il entra chez un procureur au
Cbâlelel; rebuté d'abord par les
dégoûts attachés à un travail aride,
il s'appliqua ensuite avec ^èle à
l'étude de la procédure, et sur-
tout à celle du droit; mais il n'a-
biiudonnail pas les lettres, Virgile
el Tibullo ne le quittaient pas; il
était passionné pour Racine et les
autres grands écrivains du siècle
de Louis XIV. Ceux du 18" siècle
eurent leur tour ; il devint en-
tliousiaste de J.-J. Rousseau. Ces
liavaux, le commerce de l'anli-
qtiité dont il avait été nourri, et
jihis encore le niouvcuncnt géné-
ral des esprits dans la suciété, le
disposèrent à aimer les |)rincipes
sur les(juels s'appuie la révolu-
lion française. Jeune encore, ct
n'élanl initié dans aucun secret
politique, il étail témoin des évé-
nemens et non pas aolenr. Le 14
juillet 1789, il iiiarchait dans Ta-
ris avec celte légion du Châlefet
qui contribua tant à rassurer les
habilans; envoyé ensuite en déta-
chement pour assurer les subsis-
tances , il revint au bout d'un
mois, et resta tranquille. Au mois
de rnai 1790, il se relira à 31eu-
don avec un ami pour se livrer à
des études sérieuses. Il ne venait
à Paris que pour assister trois fois
par semaine à des cours du col-
lège de France, ne voyait per-
soime dans cette ville, el retour-
nait de suite à la campagne , où il
ne recevait aucune visite. Comme
tout était objet d'alarmes dans ce
temps, la cour s'inquiéta du sé-
jour des deux jeunes ermites dans
une résidence royale; on apprit
qu'ils vivaient dans une parfaite
solitude et occupés seulement de
leur inslrucif.>n. Une année s'é-
coula ainsi ; en 1791. il fut admis,
ain-i que son ami. à la société des
amis de la conslitulion de Sèvres.
Dans le cours de celle année, il
fil des voyages et quelque sé-
jour à Versailles, toujours alta~
ché aux principes de la révolu-
tion, mais ne jouant aucune es-
pèce de rôle politique. En 1792,
il était de la société des amis de
la constitution à Versailles, où il
se fit remarquer par une grande
franchise d'opiuions , unie à i\i\
esprit conciliateur dont il donna
souvent des preuves au milieu
des deux partis. Il apprit à Meu-
don l'événement du 10 août, dont
il n'avait pas même de soupçon,
ne venant qu<; très - rarement à
Paris, el n'y connaissant aucvm
homme influen!. M. Tissol arriva
à Versailles, où sou cnactère é-
lis
lait tellement connu , que leà ad-
versaires prononcés de la liberté
lui montrèrent leur satisfaction de
son retour. Ils eurent plus d'une
fois à se louer de lui au milieu de
l'eflervescence générale; ils n'ai-
maient pas ses principes; mais ils
ne pouvaient s'empêther de ren-
dre justice à un jeune homme
dont le cœur était exempt de tou-
te haine, et naturellement disposé
il la tolérance politique, quoique
incapable de transiger avec ses
principes. W. Tissot était à Versail-
les secrétaire de sa section, alors en
permanence aux termes d'une loi,
au moment où l'on apprit les mas-
sacres de septembre. A cette cruel-
le époque, il n'a point quitté un
seul moment; il n'aurait pas pu
quitter alors cette ville , car il i'al-
lait lin passe-port, qu'on ne lui
aurait pas donné. Dans l'état des
choses, ni les corps administra-
tifs, ni sa section (c'était la pre-
mière section de la ville), où la
conû;ince des uns et les in<]uiétu-
des secrètes d(.s autres voulaient
impérieu-eineat sa présence , ne
lui auraient pas permis de s'ab-
senter; elTectivement , il eut sou-
vent à faire preuve de zèle pour
empêcher ou prévenir les divi-
sions et les querelles entre les ci-
lo_yens; aussi obtint-il l'unanimité
deâ suiVrages au moment où cette
section très-nombreuse fut trans-
formée en assemblée électorale.
A Celte époque, il eut occa>ioii de
condamner hautement les massa-
cres de septembre devant la so-
ciété populaire de la ville , qui
approuva ses sentiniens. ÎVommé
par elle membre du collège élec-
toral du département, qui s'as-
sembla dani> la ville de Saint-
T. XX.
lis vm
Germain , il se trouva secrétaire
j)rovisoire comme le plus jeune
d'ilge ; il eût été nommé à la con-
vention nationale s'il eût fait le
plus petit effort; l'absence de tou-
te andiition le préserva des dan-
gers d'un si redoutable honneur.
La cause de la faveur générale
d'une réunion d'hommes dont la
plupart ne le connaissaient pas
même de nom , vint de la pré-
sence d'esprit avec laquelle il ras-
sura , par une simple adresse des
volontaires, le corps électoral a-
larmé de la nouvelle subite de la
prise de Verdun. Revenu du corps
électoral de Saint-Germain , dont
il avait été exclu sous le prétexte
du défaut d'âge habilement saisi
par de> ambitions particulières
dont il pouvait réfuter les scru-
pules intéressés, il reprit sa place
à sa section , et eut le bonheur de
montrer un périlleux courage en
contribuant, le 9 septembre 1792,
au salut des prisonniers de la
Geôle, Il n'était que simple ci-
toyen , et n'avait de guide et de
pouvoir (jue son zèle. Toute la
ville fut témoin de sa conduite ir-
réprochable dans cette journée du
massacre des prisonniers d'Or-
léans, où le maire. iM. Richand,
dont il a conservé l'esliine et l'a-
mitié, se conduisit en héros. Ver-
sailles, à quatre lieues de Paris,
cette ville où il était sans cesse en
vue. où il était c(mnu de tout le
inonde, où il n'aurait pu échap-
per un moment aux regards, no
fournirait pas un Ixunme qui osHt
et pût élever et soutenir er> «a pré-
sence et en face de la justice, une
accusation contre lui sur celle af-
freuse journée. Nous l'avons cn-
teuducentfoisen particulier com-
29
/,r)<.
TJS
nie en public, porter lo tléfi à la
Ciiloiiiiiic elle-mêine, soit à l'é-
gard de celte journée, soit a l'é-
gard de toute antre. Ce fut lui
qui, sans aucun autre intérêt que
celui de la justice et de l'huinani-
lé, se chargea de réclamer pour
tous les serviteurs de la famille
royale, que la chute du trône lais-
sait sans pain. Tontes les personnes
attachées au roi , à la reine et aux
frères de ce prince, le regardaient a-
lûis comme leur défenseur, et le
comblaient de bénédictions. Son a-
ini,son beau-frèie, le jeune et in-
fortuné Goujon, qui a ])éri avec
tanlde courageau i'^' prairial, était
■procureur-syndic du département,
ot toute la faveur qu'il en avait
reçue était une place dans un des
bureaux de l'administration dé-
partementale. Il les quitta en
mars i^qS , presque immédiate-
ment après son mariage, pour al-
ler dans la Vendée avec un batail-
lon de volontaires qui contribua
beaucoup au salut de la ville de
Nantes. Il n'exerça aucime fonc-
tion dans cette ville. Mais un hom-
me qui portait le même nom que
lui, sans être son parent , par.ùt
avoir eu dans ce temps une mis-
sion importante du comité de sa-
lut-public dans la Vendée; sui-
vant toute apparence, on Faiira
confondu avec cet individu qu'il
n'a jamais ni vu ni connu. Goujon
ayant été appelé à la commission
de commerce et approvisioiuie-
mens , M. ïissot en devint le se-
crétaire - général, (j'est dans ce
temps qu'il plaça, non sans cou-
rir des dangers, ()lusicurs person-
nes d'une autre opinion que la
sienne, et notamment un prêtre
poursuivi en celte qualité. Il sor-
TIS
lit de celte commission pour se
préj)arcr à suivre son beau-frère,
nommé à l'ambassade de Cons-
tantinople. Celui-ci ayant été ap-
pelé comuie suppléant à la con-
vention nationale, à la place de
Hérault de Séchelles , M. Tissot
fut nommé adjoint de la commis-
sion d'agriculture et de,> arts, dont
M. lierlholet était membre; il y
rendit beaucoup de services en se-
condant avec autant de zèle que
d'activité l'exécution de tous les
ujoyens de perfectionnement a-
doptés par un comité composé des
hommes les plus distingués. C'est
alors qu'il s'empressa de donner
asile dans les bureaux à un magis-
trat distingué , M. Savoye Rollin,
avocat - général du département
de Gren(d)le , qui avait besoin
d'appui dans ces momens diffici-
les , et qui a loujunrs conservé
une vive rec(ini)ai!..-auce de ce
service. M. ïissot eut aussi le dé-
vouement d'aller demander la li-
berté d'un ancien se.'iétaire de
M. de Malesherbes, employé dans
les bureaux de la commission, et
arrêté pour cause d'opinion par
(me autorité jalouse et redoutable
et dans un moment terrible. Il
suivit bientôt son beau - frère ,
nommé commissaire de la con-
vention auprès des armées de la
Moselle et du Rhin. Cette mis-
sion à laquelle il ne participait
que comme secrétaire des repré-
sentans, ifura quatre mois, ne vit
que des succès, ne fit point verser
de larmes, et ne coûta que 4«;'>oo
francs à la république, y compris
les frais de voyage. De retour
après le 9 ihermidor, il reprit sa
place d'adjoint, et la garda jus-
qu'au mois de geroîînal de l'an-
TIS
liée suivante. Arrêlé ù bette épo-
<]i\e sur des snupoons, ou plutôt
parce que son beau-frère avait des
ennemis, il fut relâché au bout
de vingt jours sur les bons témoi-
gnages des députés de S<ùne-et-
Oise, qui I«; défendirent comme
un citoyen dont la conduite était
<;xemple de tous reproclics. Le
maire de Versailles, M. Riohaud,
avait signé avec ses collègues. On
ne pouvait faire de reproches à
M. Tissot pour sa conduite à Ver-
sailles, à moins de lui faire un
crime de ses opinions ; à Paris , il
n'avait pas eu d'autres occupa-
lions que de? fondions admiiiis-M
tratives qui ne permettaient pas
nn ujorniHitde partage, au milieu
d'une disette qu'il fallait combat-
lr«! sans cesse par la vigilance.
Aussi ne le vo_yail-on dans aucune
assemblée politique. En rendant
la liberté à M. Tissot, on ne lui
rendit pas sa plaC(; ; il resta tran-
quille jusqu'au I" pr.uiial, épo-
que où Goujon fut envdioppé darjs
»nie mesure de prc^crlirtion. Ils
n'apprirent tojis deux le soulève-
meni que sur 1rs dix hem'es du
malin. Goujon conçut des s^xip-
(îons sinistres sur ^.el évémMncnt
où trempèrent elTectiveinent qiiel-
qncs hommes vendus aux comi-
tés du gouvernement ; ce dernier
voulait une jf)avnée pour en pf-o-
liter, il parvint à son but. Goujon
avait exigé de sou beau-frère la
promesse et mr-me le se^ ment de
ne se mêler en rien dans U'ue cho-
se si suspecte. iM. Tissol ne revit
son hcau-frère qii'i la commission
militaire, où ce dernier rtcul de
lui ions les secours, tous les avis
fl'un ami fidèle. M. Tissol savait
]>ourtnnt qa'on n'attendait qu'une
TIS 45i
occasion pour le perdre en même
temps que Goujon. On a voulu
ajouter la calomnie au malheur
qu'il éprouva dans cette fatale cir-
constance; et long- temps après,
c'est-à-dire depuis la restaura-
lion, on a répandu des atrocités
à ce sujet eu se servant du nom de
RI. Boissy d'Angla»*. Aussitôt que
ce respectable citoyen a été ins-
truit de ce tait, il s'est empressé
d'écrire à M. ïissot la lettre la
plus flatteuse, qui est eti même
temps le démenti le plus formel
des suppositions et des menson-
ges de la calomnie. Après la mort
l«le Goujon, iM. Tissot reéla seul
et sans aucune fortune |)our sou-
tenir deux familles. Tune aflligée
par une perle irréparable, et d'ail-
leurs sans fortune; l'autre entiè-
rement ruinée par la révolution,
ïl s'imposa alors la retraite l.i plus
austère; mais aprè"? la jorn-née du
iT» vendémiaire, il se jeta dans
l'industrie, devint simple ouvrier
dans un établissement qu'il avait
contribué à fonder étant adminis*
traleur, et finit par élever une fa-
brique spéciale , seul moyen de
fournir à tant de besoins réunis
autour de lui. Les circimstances
changèrent; avant le i8 fructidor,
il fut appelé, comiiu! rédacteur,
dans un bureau administratif au
ministère de la police générale.
Il demeurait alors au faubourg
Saint - Antoine depuis quelques
mois. On ne le prévint pas de la
journée qui se préparait; et quand
il reçut, pendant la nuit, l'ordre
verbal de se mtder du mouve-
ment, il refusa positivement, en
répondant (|ucce n'était pas \i\ un
devoir. Le malin, il se rendit à
son bureau. Les députés arrÊlé»
/|52 TIS
eurent bien à se louer de sa cou-
(liiile; il fit en leur laveur tout ce
qu'on pouvait atlcndre d'un ami
de l'humanité qui avait vu, une
année auparavant, sa famille dans
l'état où il voyait la leur. La nièce
«le Pichegru , la sœur de Gilbert
Demolières , et toutes les femmes
des proscrits, eurent à se louer de
lui. Averti du projet qu'on avait
formé d'égorger les députés arrê-
tés , il contribua à leur salut par
ses conseils el par l'autorité de ses
courageuses paroles; il décida le
ministre à se transporter .-^ur les
lieux, et celui-ci ne revint que le
matin, .après avoir pris toutes les
mesures nécessaires. Parmi les
députés arrêtés éîait Bourdon, de
l'Oise, qui avait fait en germinal
des menaces afiVeuses à M.Tissot,
et demandé qu'on fusillât Goujon
dans le salon de la liberté. Il res-
ta sept înois chef du bureau par-
ticulier du ministre, n'ayant d'au-
tre pensée que de veilier sur les
divers partis pour les empêcher
d'en venir aux mains; prévenir
fut toute sa doctrine. Il reçut le
prix de sa conduite et de son éloi-
gnement pour toutes les mesures
violentes dans la nomination de
député de la Seine aux élections
de l'an 6. Toutes les opinions con-
coururent à son élection, qui eut
lieu à une immense majorité dans
une très -nombreuse assemblée.
II était secrétaire, et Cambacérès
président; celui-ci ne fut nommé
député qu'après M. Tissot. Sa no-
mination ayant été cachée par un
indigne abus de pouvoir, il ne
daigna pas même la défendre, et
se retira dans une campagne près
de Tours ; c'est là qu'il commença
à devenir homme de lettres, en
TIS
traduisant les Bucoliques de Vir-
gile en vers français. Au i8 bru-
maire, quoique convaincu que le
général en chef Bonaparte était
nécessaire el même indispensable
en ce moment, il ne crut pas de-
voir se présenter à cel'ii qui avait
renversé la représenlalion natio-
nale, et resia dans l'obscurité,
occupé des lettres. Au 5 ni\ôse,
ii fut ail été; il avait prévu que
les anciens ennemis de Goujon
saisiraient iinu occasion de se dé-
faire d'un homme qui avait eu
déjà les moyens de se venger, et
qui aurait pu . il est vrai , devenir
=^chef de parti , s'il l'eût voulu ;
mais il refusa de fuir, tant il avait
horreur du crime auquel on vou-
lait l'associer par une mesure de
proscription qui était un coup d'é-
tal. Bonaparte sut celte circons-
tance; des hommes peu bienveil-
laiis pour iM. Tissol, d'autres, tels
que Monge et Bertholet, interro-
gés parle premier consul , répon-
dirent qu'il était sans reproches.
M. Bourienne , qui avait à son
insu nue grande obligation à M.
Tissot, M°" Bonaparte, qui avait
un cœur admirable , se joignirent
à eux , et M. Tissot fut rayé de la
liste.ialale. Le premier consul ré-
sista fortement à des tentatives
faites par la haine secrèle; mais
il voulut savoir ce que l'homuie
que l'on voulait déporter sans ju-
gement avait fait pendant la ré-
volution; i! ordonna un exauien
sévère , et cet examen n'ayant
produit aucun grief, même aucun
soupçon , il promit paix et sûreté
à M. Tissot, et a tenu parole. M.
Tissot respira enfin ; car on lui
avait tendu toutes sortes d'embû-
ches pour le perdre avant l'arri-
TIS
▼ée'de Bonaparte, auquel il dut
vraiment la vie, les déportés étant
tous morts en exil. La publica-
tion d'un ouvrage d'un genre aii.s-
si innocent que le» Bucoliques ,
ÉVappa beaucoup le premier con-
sul. M. Tissot avait recouvré la
liberté ; mais chef d'un établisse-
ment, il eut une peine extrême à
réparer le mal que lui avait causé
une arrestation dans des circons-
tances si graves. Appelé, en i8ofj,
dans les bureaux de M. Français
de Nantes, qui lui avait accordé
toute son amitié, il rendit des ser-
vices à tous les gens de lettres,
artistes et savans ; il Ct beaucoup
pour les autres, et ne «lemanda
rien pour lui. C'est alors qu'il re-
prit avec plus d'ardeur que jamais
le commerce des muscs. Il leur
dut la connaissance et l'amitié de
l'abbé Delille, qui le choisit d'a-
bord pour bon remplaçant, et en-
suite l'indiqua pour son .succes-
seur. Deliile avait reconnu dans
M. Tissot une vo(;alion réelle pour
l'enseignement littéraire; l'expé-
rience a prouvé que ce célèbre
poète ne s'était pas trompé. Pen-
dant onze années , M. Tissot a
remplacé son maître avec un bril-
lant succès, mais non sans se li-
vrer à un travail immense. Ses
leçons étaient suivies avey em-
pressement par la jeunesse , et
jamais aucune d'elles ne fut trou-
blée par le plus léger incident.
On aurait craint de [)erdre quel-
(|ue chose en l'interrompant. La
jeune génération qui brille main-
tenant dans les lettres, a presque
toute profilé des leçons de M.
Tissot; >li>L Casjniir Delavigne
et Lamartine ont suivi son cours.
Tout à coup, sans avoir été cn-
TIS
i53
tendu , sans môme avoir été pré-
venu , le successeur de Delille
s'est vu révoqué sans qu'aucun
reproche lui ait été l'ait par les
ministres, soit sur la révolution,
soit sur sa conduite présente, soit
enfin sur ses leçons; l'un d'eux
lui a dit seulement : « Nous n'a-
))vons aucun fait à vous imputer,
»mais vous n'êtes pas notre hora-
nme: la jeunesse est dans vos
0 mains, nous ne voulons pas
«qu'elle y soit; voilà tout notre
» secret. • M. Tissot a perdu sa
place sans avoir même une pen-
sion , après tant de travaux. Cette
injustice a été suivie de beaucoup
de malheurs domestiques; il a per-
du successivement sou père, sa
fdic , sa femme, son gendre et
deux pelits-enfaiis ; c'est au mi-
lieu de ces chagrins que sont ve-
nue* le surprendre de nouvelles
persécutions. Tout Paris se rap-
pelle encore comment iM. le pré-
fet de police usa d'un pouvoir ar-
bitraire envers ce citoyen, en se
faisant un mérite et même une
gloire de sa partialité. L'entretien
de M. Tissot avec Al. le préfet de
police restera comuje una pièce
du temps. On sait encore par
quelles manœuvres il a été spolié
d'un journal qui éliiit sa proprié-
té, et qu'on lui a fait enlever de
vive force ; ce dernier événement
a causé une perle énorme ;'i M.
Tissot. Et pourquoi tout cela ?
parce qu'il n'a voulu n: se laisser
acheter, ni trahir les intérêts de
ses commanditaires. Tant de pei-
nes accumulées ont failli le con-
duire au tombeau. On ne devine
pas les motifs de l'acharnement
avec lequel on a poursiiivi M. Tis-
sot. .S'il a toujours aimé sincère-
454 lis
rnenl la liberté, sa conduite poli-
tique n'offre «aucun fait que l'on
puisse accuser, l'an un hasard as-
sez étrange, cet homme, qui a
toujours 6uivi ouvertement la ré-
volution, n'a pris une [)art active
à au(i»me de ses. journées. Il n'é-
tait pointa la prise de la Baslille;
on a vu ce qu'il faisait le i4 juil-
let. Aux 5 et 6 octobre, une mala-
die grave le retenait dans son lit.
On ne peut trouver son nom dans
aucun événement politique depuis
cette époque jusqu'en «792; au
10 août, il était à iMeudon; au 2
septembre et jours suivans, à Ver-
sailles ; au 9 septembre, loin de
mériter même un soupçon, ils'est
montré courageux dans cette ville
et à la face de tous ses conci-
toyens ; au 5i mai, il était au
camp de Saint-George-sous-Nan-
tes; au 9 thermidor, à l'armée du
Rhin ; au 1"' prairial, sous les ar-
mes avec la section de Grenelle,
venue pour protéger la conven-
tion, et qui n'a pris aucune part
au mouvement; au 4 pi'iiirial ,
dans les plus grandes inquiétudes
sur son beau-frère, et occupé à
consoler une mère, une soeur,
une épouse, désespérées ; au i5
vendémiaire, sous les armes pour
la convention , mais étranger aux
combats livrés pour sa défense,
il n'eût jamais consenti à tirer sur
ses concitoyens; au 18 fructidor,
n'ayant voulu prendre aucune
part à un mouvement qu'il avait
ignoré; au 18 brumaire, renfer-
mé dans l'obscurité de sa retraite.
C'est, armé de tous ces souvenirs,
que nous l'avons entendu dans le
procès qu'on lui a intenté comme
rédacteur du Pilote, porter en
plein tribunal, à tous ses conlem-
TIS
porains, le défl de trouver même
la trace la plus légère d'une ac-
tion coupable de lui dans la révo-
lution. De son aveu, il y a du
bonheur dans cet assemblage «le
circonstances , qu'on ne soupçon-
ne guère ; mais ce qui n'est point
du hîisard , c'est que depuis tren-
te-six ans on ne j)uisse pas trou-
ver de lui un écrit qui l'accuse.
Et certes, on ne dira pas qu'il a-
vail prévu le temps où l'on pour-
rait lui demander compte de ses
opinions et de ses actes pendant
une révolution qu'il n'a jamais
désavouée un moment. On publie
chaque jour des mémoires sur la
révolution : M. Tissot n'y est pas
même reconnu une seule fois. iVl.
Tissot a été censeur de la Gazette
de France, et s'est montré avec
beaucoup de modération dans cet-
te fonction, avec de la pudeur
dans ?a manière de servir l'hom-
me auquel il devait tout. Aucun
homme de lettres n'a eu à se plain-
dre de lui alors; deux traits mé-
ritent d'être cités. Napoléon vou-
lut savoir le non) de l'auteur d'un
article qui lui avait singulière-
ment déplu : M. Tissot en prit la
responsabilité eu refusant cons-
tamment de déclartir l'auteur.
Quoique très - éloigné des opi-
nions de M. de Châfeaubjiand , il
ne voulut jarnais attaquer cet é-
crivaiu pour complaire -h l'autf»-
rité. « Je ne contribuerai pas, dit-
» il , à avilir un homme de lettres,
»ou à rabaisser son talent. >> Na-
poléon approuva ces sentimens.
On a reproché à iM. Tissot son
dévouement pour l'homme ex-
traordinaire qui fut son bienfai-
teur; il répond : « Celui qui gou-
vernait l'Europe me témoignait
.>
^'' w^
f^/Z/'r/z'/'r//'//
y/y.
y)'v,rj'c/it'tt/'e nr/iw f
A'/f^/ti/ t/e/ f/ ./;v//^.
TIS
(le resliinc; il est venu au-devant
(le moi par ses bienfaits, enfin il
m'avait sauvé la vie; jo l'ai servi
avec d'autant moins tie scrupule
que sous son gouvernement j'ai
trouvé mille occasions de servir
et de défendre les amis de la li-
berté qui avaient besoin d'appui y
et enfin de faire entendre avec un
courage qu'un dévonemcnt connu
De rendait pas suspect, des véri-
tés utiles quelquefois à toute la
France, quand les ministres con-
naissant ma sincérité , m'inter-
rogeaient sur quelques matières
d'administration ou de gouverne-
ment. » On a de M. ïissot une
traduftion en vers des Bucoliques
de Virgile, parvenue à la qua-
trième édition, et que le jury des
prix décennaux proposa comme
digne d'en obtenir un. Une tra-
duction en vers des Baisers de
Jean second^ suivie de qnelqties
poésies erotiques; di'^C fiants pour
le mariage de Napoléon et pour
la naissance du roi de ilomc; un
volume d'Introduction aux fastes
civils de la France , abrégé re-
marquable de riiistoire du monde
jusqu'à nos jours. Il est auteur de
beaucoup d'articles liltérair«!S qui
lui ont valu une juste réputation
de critique. M. Tissot se propose
de donner successivemerl au pu-
blic ses travaux au C(»l!ége de
France, et publie en ce moment
dt:5 Etudes sur f^irqde, qui at-
testent de longues méditations.
Le talent de M. Tissot , comme
poète, est apprécié depuis long-
temps ; c'est la griîce unie à la fttr-
ce. Comme prns3l(;ur, il réunit le
mérite de la pensée à riiarmonie
du langage et au bonheur de l'cx-
prcsiiion ; connue critique , il est
VAL'
/,5r>
d'une impartialité rare , et ses ju-
gemens sont dictés par une raison
solide et un goftt tiès-pur.
VALKENAKR (Jexn). Le der-
nier paragraphe de sa notice^ re-
tranché par erreur, doit être réta-
bli ; il porte : M. Valkenaer mou-
rut en 1822.
VALQUKLIN (Nicolas- Lotis),
célèbre professeur de chimie,
njembre de l'iiistilut (académie
des sciences) , chevalier de la lé-
gion-d'honneur et de Saint-Mi-
chel, professeur honoraire de la
faculté de médecine de Paris, et
membre de presque toutes les aca-
démies de l'Europe , est né eu
17G3, dans la ci-devant province
de Normandie. Il commença ses
études de chimie et de pharmacie
i\ Rouen, et les vint terminer à Pa-
ris, en 1780. Dès «785, le j)rofes-
seur Fourcroy se l'associa comme
préparattîur de ses travaux chimi-
ques, et bientôt s'en fit un émule
et un ami. Cette honorable asso-
ciation dura hm't années consécu-
tives. Il y avait à peine trois mois
que M. Vauquelin était membre
de l'académie royale des sciences,
lorsque par suite des évènemens
de la révolution, les corps acadé-
miques furent supprimés ( i^f)''^)-
A cette épo(pie il alla occuper la
place de Pharmaci(;n, à l'hôpital
militaire (lelMelun;mais dèsl'année
suivante, il fut rappelé à Paris où
le gouvernement le nomma ins-
pecteur des mines, et le chargea
d'établir en faveur des élèves de
l'école des mines, im cours de do-
cimasie, qui lui valut pres«|u'i\ la^
ujfme époque, la place de prnfes
seur adjoint de chimie à l'école
polytechnique. Dès la formation
do l'institut national, il fut cum-
45(j
VAt
pris au nombre des meinbres de
oe corps, et dès l'établissement de
la légion-d'honucur, il en reçut la
croix. Devenu par la mort de Dar-
cet, professeur de chimie au col-
lège de France, il donna sa démis-
sion de la place d'inspecteur des
mines, et réunit à son professorat
l'emploi de directeur de l'école
spéciale de pharmacie, du mo-
ment qu'elle fut créée, llron-
gtiiard, professeur de chimie au
Jardin des Plantes, étant mort, RI.
Vauquelin fut nommé pour lui
succéder, sur la présentation una-
nime de l'institut, de l'adminis-
Iralion, et des inspecteurs des é-
tudes. L'importance de celte nou-
velle chaiie, le força de donner sa
démission de professeur au collè-
ge de France. Après la mort de
Fourcroy, en 181 1 , il se présen-
ta au concours pour le remplacer
comme professeur de chimie, à la
faculté de médecine. Ses concur-
rens par un juste sentiment d'esti-
me et de respect, refusèrent de
lui disputer une chaire, dont il é-
tait reconnu universellement di-
gne de prendre possession. Moins
favorablement apprécié sous le
ministère de 1822, il a été ainsi
que ses illustres confrères à la fa-
culté, MM, les profesi>eurs de Jus-
sieu, Dubois, Pellelan, Pinel, Des-
genettes, Chaussier, Lallomant,
Le Roux et Moreau, mis à la re-
traite, c'est à dire classé parmi les
honoraire?. Mais la haute considé-
ration dont il jouit, n'a reçu aucu-
ne atteinte des rigueurs du pou-
voir. M. Vauquelin, dit l'auleur
d'une notice biographique, n'a pu-
blié ex professa, que le Manuel de
l'Essayeur , 1812, in-S"; mais il
doit sa haute réputation aux belles
VAU
analyses qu'il a faites, soit de con-
cert avec Fourcroy, soit en parti-
culier; à ses expériences publi-
ques , et aux mémoires qu'il a pu-
bliés d.ius les Annales de chimie,
dans le Journal des mines, dan'<
les Annales du muséum^ dans le
Journal de physique et dausT^HQ'-
clopédie méthodique, un qu'il a lus à
l'académie. Ces mémoires sont
très-nombreux; voici les titres des
plus remarquables : 1" Sur la na-
ture de l'alun, [Annales de chimie
•79/)» 2° iV«r la nouvelle substan-
ce mclallique contenue dans le
plomb rouge de Sibérie ( chrome ) .
ibitl., 1798; 3° Notice sur la terre
du Brésil, ibiLl. Cette terre (la Glu-
ciue), éliiit inconnue avant M.
Vauquelin. 4° Deux mémoires sur
l'urine, en société avec F'ourcroy;
ibid., 1799; 5" Surl'fuu del'am-
nios des finmes et des luœhes; ibid.
1 Soo; Ci" Sur le verre d'antimoine;
ibid. 7° Observutions sur l'identité
des acides pyro-muqueux , pyro-
tariareux, pyro-ligneux; et sur la
nécessité de ne plus les regarder
comme des acides particuliers , en
SMciété avec Fourcroy; ibid. 8"
Sur les pierres dites tombées du
ciel; ibid., i8.)5; 9° Sur le platine,
en société avec Fourcroy ; ibid. ,
i8o4; 1 0° Sur la présence d'un nou-
veau sel phosphorique terreu.v, dans
les os des animaux, etc.; en ?ocié-
lé avec Fourcroy; ibid., i8o5; 1 1'
Examen chimique pour servir à
l'histoire de la laite des poissons;
en société avec Fourcroy; ibid.,
1 807; 1 2' Analyse de la matière cé-
rébrale de l' homme et de quelques
animaux, ibid., 1812; \ô" Expé-
rience sur le daphné alpina; ibid.;
i4° Analyse de l'urine de l'autru-
che, et expériences sur le^ excré-
VIA
Ik mens de quelques autres familles
"' d'oiseaux; en société avec Foiir-
croy ; [Annales du muséum d' his-
toire naturelle , Paris, 1811.) iM,
Vauquelin est l'un des fondateur?
(1788) de la célèbre société phi-
loinaliqjie.
VALGIKAUD (Pierre -René-
Marie). On a omis à la fin de ,«a
notice ces mots : Il mourut le i3
mars i8iq, dans la 78* année de
»on âge.
VERNINAC DE SAINT-MAUR.
La date précise de sa mort est du
I" juin 1822. (Voirsa no/<>c à son
ordre alphabétique dans ce 20»
vol. ).
VIALA (Joseph-Agricol) na-
quit ù Avignon, et était écolier de
cinquième en 1792; son profes-
seur eut souvent occaxion d'ad-
mirer son esprit et son caractère.
Jin 1793, il était commandant de
la petite },Mrde nationale d'Avi-
gnon. Il y avait à cette époque
des gardes nationales de cette es-
pèce dans presque toutes les villes
de France ; elles portaient sur leurs
petits drapeaux celte inscription ,
Espérance de la Patrie. Au mois
de juillet 1795, les adrrjinistra-
• cursdu déparlement des Bon clies-
<lu-Rhône arborèrent l'éler.dard
de l'insurrection contre la con-
vention. Ils levèrent une armée
à Marseille, qui se mit en mou-
vement pour marcher au secours
des Lyonnais. A cette époqu»'. la
ville d'Avif^non ce^^sait d'être le
chef-lien du district de Vaucluse,
incorporé dans le déparlemrnt
des IJouches-du-RhAne , cl deve-
nait le chef-lieu du nouveau dé-
partement de Vaucbise. Le direc-
toire du déj)artementdes Boucbes-
dii-Rhônc avait placé à côté du
VIA 457
général de l'armée marseillaise
quelques comtnissaires civils, les-
quels donnèrent ordre aux admi-
nistrateurs du district d'Avignon
de faire préparer les vivres et les
logenieus pour l'armée marseil-
laise. Les administrateurs du dis-
trict de Vaucluse répondirent qu'A-
vignon ne faisait plus partie du
département des Bouches - du-
Rhône, et que si Marseille mé-
connaissait le décret de la con-
vention qui créait le département
de Vaucluse, Avignon saurait le
faire respecter à coups de canon.
Sur cette réponse, les Marseillais,
au nombre de ^,ono homtnes ,
ayant avec eux ao pièces d'artil-
lerie la plupart de gros calibre,
vinrent occuper le villnge de No-
ves, sur la rive gauche de la Do-
rance, rivière qui sépare le dé-
partement des Boucb.es-du-Rhône
de celui de Vaucluse; les Avi-
gnonais, au non)bre de 800 hom-
mes, occu pèlent la rive opposée;
ils n'avaient que deux vieilles cou-
leuvrines de trois livres. D'abord
on se caoonna de part et d'autre.
Le lit de la IJiirance est très-
large, et SCS eaux en changent
50uv«;nt ; elles coulaient alors sous
la chaussée de Noves; le ponton
èlait du côté et au pouvoir des
Marseillais ; déjà on les aperce-
vait y entrant, quand le comman-
dant des Aviguonais demande
quelqu'im <.'e bonne volonté pour
aller couper la cnrde, à l'aide de
la(|uelle le ponton allait ^Ire di-
rigé sur la rive droite. \,k jeune
Vinla se présente; le ctunniantlant
le repousse et .sourit, l'enfant
s'indigne;; il s'élance sur une ha-
che, et part coujme l'éclair; un
de *C9 coMili«r,ipU>s court après lui;
458
VIL
arrivé, au milieu de plusieurs
décharges» au pied du poleau où
la corde du bac était allachée , il
^lait déjà parvenu à la hacher à
moitié, quand il fut atteint d'une
balle qui lui traversa la poitrine.
Il tomba, en disant en provençal :
Qu'on ne le dise pas à ma mère ; je
meurs pour la liberté! Ces der-
nières paroles furent entendues
par son condiscijde, appelé Gui-
uaud, qui s'était hlolli dans un
ravin. Les Marseillais passèrent
la Uurance , et jetèrent dans les
flots le corps de cet illustre en-
l'aût, à qui la nature n'avait rien
épargné du côté de la beauté. La
convention nationale décréta que
s.on buste et celui du jeune Bar-
ra seraient portés au l'authéon.
Eu attendant, ils lurent placés
dans la salle de ses séances, l'un
à la droite, l'aiilre à la gauche
du bureau du président.
VILLELE (le COMTE Joseph de),
ministre des finances, président
du conseil des ministres, cheva-
lier des ordres du roi, est né à
Toulouse, en 1773. ftl. le comte
de Villéle doit, comme tant d'au-
tres, au nouvel ordre des choses,
sa Ibrlune et son élévation ; ce-
pendant il s'est prononcé avec
beaucoup de chaleur, contre les
principes qui ont produit la révo-
lution , et sur lesquels la monar-
chie actuelle est fondée ; il est du
nombre de ces enfans ingrats qui
maudissent leur mère , car «ans la
révolution, MM. de Corbière , de
PeyronnetetdeVillèle, ne seraient
jamais sortis de leur obscurité pri-
mitive. Il a fallu un mouvement
extraordinaire dans les choses et
dans les hommes , pour les pous-
ser sur les hauteurs de la société.
VIL
Ce sont là de ces jeux de la fortu-
ne qui surprennent tout le mon-
de, excepté ceux qui en sont l'ob-
jet. (]e n'est qu'après des recher-
ches très-pénibles, que nous avons
rasseut.blé quelques détails sur la
première partie de l'existence de
M. le comte de Villèle. Il paraît
qu'il fut admis de très bonne heu-
re dans la marine militaire, qu'il
fit une campagne à Saint-Domin-
gue, et revint dans sa patrie en
1791. Peu de temps après il ac-
coiripagna dans l'Inde , M. de
Saint-Félix, qui venait d'être nom-
mé commandant d'une station.
M. de Saint-Félix devint vice-a-
miral, et fut forcé en 1793, de se
réfugier à l'île de Bourbon. Son
attat'hemerjt à l'ancien régime fut
la cause ou le prétexte de celte
persécution. M. de Villèle suivit
le sort de son protecteur, fixa sa
résidence dans l'île de Bourbon ,
et y devint membre de l'assemblée
coloniale; c'est là que M. de Vil-
lèle entouré de nègres, a étudié
l'îul -de gouverner les hommes,
dont il fait depuis quelques an-
nées, une si heureuse application.
C'est là qu'il a puisé ses notions
de liberté civile, ses idées du jus-
te et de l'injuste, et ses théories fi-
nancières. Cette éducation finie,
il revint en France en 1807, et se
fixa à Toulouse ov'i il resta inaper-
çu jusqu'en 18 14- La société se
trouvant alors fortement agitée,
M. de Villèle se jeta dans le mou-
vement, et fit paraître une brochu-
re que nous avons eue sous les
yeux. L'auteur de cet écrit de cir-
constance , composé de verve et
sans arrière-pensée, développe ses
principes politiques, et repousse
avec force le système de gouver-
i^
r
^/iCJe W</<'
I
VIL
nemetU n-prcsenlatif , «ont il est
aujourcJ'hiii ministre ; il s'y élève
avec véhéiueiice contre l'établis-
sement d'une charte constitulion-
nelle. I.e pou voir ab'^olii dans ton-
te son intensité, lui paraît le seul
mode de jçonvernemcnt convena-
ble à la France, elilnen'pugr.epas,
pour y parvenir, à l'emploi des
moyens extrêmes. L'ouvrage qui
renl'ermait ces principes de légis-
lation africaine, eut peu de succès,
et il ne doit qu'à la célébrité inat-
tendue de son auteur, de n'être
pas entièrement tombé dans Tou-
bli qui paraissait sa destination
naturelle. En i8i5, M. de Villéle
fut élu par le déparlement de la
Haule-Garonne , membre de la
chambre des députés apj>elée avec
trop de précifMlation , la chamh'e
introuvable. La session s'ouvrit le
1" octobre d«î la même année. Ce
fut aussi le commmencement des
nouvelles deslmées de M. de Vil-
léle. 11 fit constan'iment partie de
la majorité de cette assemblée,
qui, sous le prétexte d'anéantir la
révolution , ne tendait à rien
moins qu'rt b^idrverser enlièie-
ment la société, et à élever sur les
ruines des libertés publiques et
privées, le monstrueux édifice d'u-
ne royauté surmontée d'aristocra-
tie. C«'8 nouveatjx aristocrates aus-
si turbulefis et vindicatifs, qu'ils
s'étaient montrés jus(|u'alors pai-
sibles et résigné}», voulaient eflVc-
tuer en un jour, ce qui ne jxiuvuit
être sar»s doute que l'œuvre du
temps et de In pali(!nce. W. de Vil-
fèlc plus confiant dan? l'avenir, se
fit reniarquiT par un ton mesuré
et une espèce de modération, qui
contrastaient fortement avec le
langage souvent fréu'-tiquc de ses
VIL
459
collègues. Il avait compris qu'une
irruption trop soudaine et trop
vive sur les libertés nationales,
pouvait compromettre la faction
des privilèges, mais l'iinpulsi<)ij
élait donnée. La majorité se pré-
cipitait de plus en plus vers l'abî-
uie ouvert sous ses pas, lorsque la
célèbre ordonnance du 5 septem-
bre 181G, la força d'ajourner ses
sinistre? projet>. iVI. de Villéle re-
tourna dans se» foyers; mais une
nouvelle nomination le ramena en
1817, dans la chambre élective,
où la faction dite ullra-tiwnarchi-
qufl, se trouva en minorité. M. de
Villéle fit partie de celte minorité,
et c'était un excellent calcul. Cette
fraction de l'assemblée ne comp-
tait dans son sein nucim talent di-
i^ne d'être cité. M. de Villéle qui
énonce assez facilement des cho-
tes communes, parut un aigle
dans son parti, et telle élait la di-
sette d'orateurs ultra-royalistes,
qtie M. de Coibièn; lui-même y
acquit une espèce de réputation.
M. de Villéle par une sorte d'ins-
tinct qui l'a bien servi, s'attacha
aux matières de finances; et depuis
cette époque, tous nos budgets ont
porté les stigmates do sou élo-
quence. Cependant le crédit de la
faction continuait à s'aiTaiblir ,
lorsque la fin tragique de M. le
duc deBerry, vint réveiller ses
espérances. Il fallut un crime aus-
si odieux à tous le»; Français, pour
donner de l'importance au parti
qui recoimaissail alors ftLM. de Vil-
Ule et de Corbière pour ses chefs.
Une nouvelle loi d'élection ayant
assuré au pouvoir le monopole
des nouveaux choix de députés,
et un nouveau ministère s'étnnt
formé, iVJ. de Villéle fui élevé eu
46o
VIL
i8'io, à la vicn-présidence de la
chambre; cette nomination attes-
ta les pro{jrès fie l'influence du
parti opposé aux libertés consti-
tutionnelles, et il l'ut permis à M.
de Villèle d'aspirer sans témérité
an maniement du pouvoir. Le mi-
nistère surnommé indifTéremment
Pasquier ou Siméon, crut pou-
voir enrôler sous ses dr.ipeaux le
côté droit de la chambre. Il s'i-
magina quec'élaitlàleseul moyen
de se soutenir. MM. de Villéle et
de Corbière reçurent le titre et les
appointeinens de ministres; ils
assistaient aux conseils, mais ils
n'avaient point de département.
C'étaient des ministres à la suite,
des espèces de doubles tout prêts
à remplacer les chefs d'emploi.
Un tel ministère ne pouvait con-
venir à [)er5onne, aussi fut-il bien-
tôt renversé aux applaudissemens
de tous les parti;*. Mi\l. de Villèle,
de Corbière et de Feyronnet de vin-
rent ministres; le parti respira et
fut au comble de ses vœux. Mais des
événeinens extraordinaires le for-
cèrent à ralentir sa marche. Le
pouvoir absolu miné de toutes
parts, s'écroula en Espagne, la
commotion se fit sentir à Naples
et dans le IMémont; la sainte al-
liance en frémit. Les rois absolus
accoururent à Vérone , et chargè-
rent le gouvernement français
d'éteindi'e en Espagne, la fermen-
tation populaire, et d'y rétablir
l'ancien ordre des choses. M. de Vil-
lèle ne goûta pas d'abord la [)ro-
position ; mais il se trouva forcé
d'y souscrire. Cent mille Français
se montrèrent dans la péninsule,
sons les ordres de S. A. R. iM. le
duc d'Angoulème. La discipline
des troupes, cl la magnanimité de
VIN
leur auguste chef, jetèrent sur
celte expédition tout l'éclat qu'el-
le pouvait recevoir. Les généreu-
ses espérances du prince furent
trompées; il voulait vaincre pour
le bonheur de l'Espagne; mais la
faiblesse et rinca[;acilé du minis-
tère français a dùrangé tous ces
projets , et l'anarchie dévore le
fruit lie nos victoires! cependant
il fallait satisfaire aux engage-
mens contractés avec le parti do-
minant, qui se subdivise en plu-
sieurs fractions, dont les pins im-
portantes se coujposent de l'émi-
gration, et de la faction ullra-
montaine : il était dilficile d'y par-
venir; de là est venue la nécessi-
té de ces manœuvres odieuses pra-
tiquées à l'époque des dernières
élections, si fortement improuvées
des honnêtes gens de tous les par-
tis , que les ministres »ux-mê-
mes, et en particulier i\l. de Villè-
le , ont cru <levoir les désavouer
publiquement, tout en en recueil-
lant le fruit. C'est (le cette source
que sont jaillis le jésuitisme, la
septennalilé, le milliard de l'émi-
gration et la conversion des 3 pour
loo. C'est ici que nous quittons
M. de Villèle très-embarrassé de
ses mesures, n'osant mesurer l'a-
venir, vivant au jour le jour, et
prêt à f.dre bien d'autres sacrifices
pour conserverie pouvoir, auquel
il est si péniblement monté. Mais
la France e.-père dans la bonté et
la sagesse royale : sou attente ne
sera pas tromnée.
VINOT (le baron Gilbert-Ju-
lien), maréchal-de-camp, né à
Soissons le 17 juillet 1772, fil»
d'un avocat au parlement, com-
?nença sa carrière militaire dans
le i" bataillon de Paris, où il en-
VIN
Ira comme grenadier le 5o juillet
irga , à l'époque où loule la jeu-
nesse française se portait sur les
frontières pour défendre le sol de
la patrie. Il quitta son bataillon
pour le 26' régiment de cavale-
rie, où il fut nommé successive-
ment fourier, maréclial-des logis,
sous - lieutenant , puis incorporé
dans le 22' régiment de chasseurs
à cheval , le 9 phiviôse an 3 ; lieu-
tenant au même régiment le 28
brumaire an 8, capitaine le 25
pluviôse même année, chef d'es-
cadron le i4 mars 1806, colonel
à la suile le 2S août 1808, colonel
titulaire du 2'-t* régiment de hus-
sards, ci-d«tvant Chamborand, le
3 mars i8i3. il a fait les campa-
gnes drt I 7f)2 à l'année du Nord,
de 1793 à l'armée des Pyrénées-
Orierjtales , enfin de 1791, '7'.P,
1796, à l'armée d'Italie. Il fil par-
lie de l'armée d'iigypte, et fut em-
ployé aux armées do Pologne et
d'Allemagne en 180G et 1807, et
à l'armée d'Espagne, depuis 1808
jusqu'à l'évacuation, lin iSi.^j, il
était employé comtne comman-
dant au corps détaché prés de
Paris. M. Vinot s'est distingué
particulièrement à la bataille de
IVio-Seco,où il commandait une
brigade de cavalerie, quoiqu'il ne
fût que colonel. 11 a contmandé
le 2* régiment de hussards pendant
quatre ans, vt se trouvait à la tête
de ce régiment en Espagne. Nom-
mé gouverneur de la l'.onda «-l
des pays environnaus , il s'y main-
tint avec /j5o hommes pendant
plus de Irois mois, contre les ef-
Ibrls d'une pop(dation insurgée et
les attaques réitérées de plusieurfl
corps nombreux. A Fuentès de
Canlos , en Ëstramadure , le colo-
WAL
util
nel Vinot, à la tête du 2* de hus-
sards, contribua puissamment :\
enlever une batterie de i5 pièces
de canon. Il se distingua à la ba-
taille de Gébora, sous les murs
de Badajox. A la bataille d'Al-
bucra, il chargea à la tête de son
régiment, et protégea l'arlillerie
commandée par le général Bou-
chu , qui ne se retira qu'après
avoir épuisé toutes ses munitions.
A Yerumana , il surprit un esca-
dron anglais. Dans une décou-
verte sur la place d'Elvos , il défit
entièremeiU un régiment hano-
vricn. Dans la campagne de 181 5.
le général Vinot commandait une
brigade de cavalerie; à la bataille
de Fleurus, il fut blessé danj^e-
reusemenl. .4près avoir versé son
sang dans plusieurs occasions pour
son pays, cet ofïieier-général s'est
retiré, eu 181 5, dans le départe-
mejit des Basses - Pyrénées, où
M. de (^lermont -Tonnerre , mi-
nistre de la guerre , lui a fait
connaître son admission à la re-
traite.
WALCKKNAER (Charles-
Athanase], membre de linslilut
(académie royale des inscriptions
et bellt's-letires ) , rhevalier de la
Itgion-d'honneur, l'im d(;s maires
dr Paris, et secrétaire-général do
la préfecture du département de
la beine, est né i\ Paris le 25 dé-
cembre 1771. II a con)mi'noé ses
éludes dans cette ville, et par suite
des premiers évédemens de la ré-
volution , voya^'eant dans les
Prty»-Bas et en Aujïletcrre, il les
a continuées à Glasf;ow en Ecosse,
et les u terMjinées a Paris A l'école
des ponts-et-chaussées et à l'école
p(dylechnique. Sans ambition ,
ami de l'étude et indépendant par
46a
WAL
sa fortune, il paraîtrait n'avoir bri-
gué îiucune place ; et durant huit
années de la révolution, loin des
affaires publiques, il aurait vécu
dans une de ses terres à huit lieues
de Paris "On prélend même que
nommé professeur d'histoire à
Montpellier à la formation de l'u-
niversité, iln'accepta point. Safor-
tune littéraire et administrative
date de la fui de 18 13, époque où
le gouvernement impérial succom-
bait insensiblement sous les atta-
ques de ses ennemis de l'intérieur
et de l'extérieur. Ce fut au mois d'oc-
tobre de cette année que M. Walc-
kenaer devint membre de l'insti-
tut impérial, classe d'histoire et
de littérature ancienne. Une or-
donnance royale le nomma che-
valier de la légion-d'honneur le
Î9 octobre 181 4; »'tie autre ordon-
nance royale du ai mars 1816, qui
réorganisa et épura l'institut, le
nomma membre de l'académie
royale des inscriptions et belles-
lettres; une troisième ordonnance
royale du 27 du même mois, le
nomma maire du cinquième ar-
rondissement de Paris, place qu'il
occupa peu de temps; enûn une
quatrième ordonnance du i5 mai
de la même année, le porta aux
fonctions de secrétaire-général de
la préfecture du département de
la Seîne. La place de maître des
requêtes et L- titre de baron , eu
1825, augmentèrent le nombre
des faveurs ministérielles. Nous
empruntons la liste des travaux
de M. Wxdckenaer, liste que nous
abrégeons un peu, à une notice
biographique. Ce sont : 1° Essai
sur l' histoire de l'espèce humaine ,
in-8°, 1798; 2" l'Jle de Wight
ou Charles et Angelina , 2 vol.
WAL
iu-i2, 1798, 181 3. Ce roman a
été traduit <'n allemand, Magde-
bourg, i8o5 ; 5° Faune parisienne
on Histoire ahri'gre des insectes
des environs de Paris , classés d' a-
près le système de Fabricius. Pa-
ris, 1802, 2 vol. in-8". L'ouvrage
est précédé d'un discours sur les
insectes en général , qui a été re-
marqué. Ce qui concerne les arai-
gnées et certairfs hyménoptères
offre des observations entièrement
neuves. 4° Géographie moderne ,
rédigée sur un nouveau plan^ tra-
duite de l'anglais de Pinkerlon ,
augmentée d'un tiers par les no-
tes du traducteur, 6 vol. in-8°, et
allas in-folio, Paris, i8o4; id. ,
nouvelle édition tôt. dément re-
fondue, tom. I et II, 1812. Le
troisième volume a été imprimé
aux trois quarts, mais n'a pas été
publié. L'abrégé du même ou-
vrage en un gros volume in-S" ,
avec cartes, a eu trois éditions,
i8o5 , i8o6, 1811. 5° Tableau des
Aranéides. Paris, i8o5, grand
in-S" ; 6° Histoire naturelle des
Aranéides. 1807. 1808. L'ouvrage
devait avoir trente livraisons ; il
n'en a paru que cinq, tirées à pe-
tit nombre, et avec cinquante fi-
gures. L'auteur, dit-on , se pro-
pose de publier cet ouvrage sous
une autre forme. 7° Dicuili liber
de mensura orbis terrée , nunc pri-
murn in lucem editus, 1807, in-S" ;
8° Voyages dans l' Amérique m.éri^
dionale, par don Félix d'Azara ,
recueillis et publiés par C. A.
Walckenaer, avec des notes de M.
Cuvier. Pari^^, 1809, 4 "^'o'- Jf^-^"
et atlas. Il y en a doux traductions
allemandes. M. Walckenaer a tra-
duit une grande partie de cet ou-
vrage de l'espagnol. Il a mis de
AVAL
i'ortJre dan«« l'ouvrage « el y a
ujoiité (les noUîs. Les ihjiix der-
niers •volume*, qui concerneiif les
oi>eaiix, sont de ftl. Sonnini. La
Notice sur la vie et les ouvrages de
don Azara, par M. AVaIckenaer, a
été imprimée à part, iii-S". Ç)' Cos-
mologie Ou Description générale de
la terre ^ etc. Paris, i8i5, in- 8°
de 800 pages ; 9° Mémoires pour
sertir à i'fiistoire naturelle des a-
heilles solitaires qui composent le
genre halicte. Paris, in-8*, 1817;
10° Carte de l'Egypte et Carte du
Delta, sur lesquelles on a tracé
les ilint'-raires anciens, 1812. Cor-
sica antiqua ex antiquis monumen-
tis eruta. Ces cartes ont été gra-
vées et distribuées en assez grand
nombre à des amis de l'auteur,
mais elles n'cuil jx)int été pu!)liées;
elles font relatives aux ouvrages
suivans , dont l'impression est
commencée depuis loug-len)ps.
1 1' I tinéraire de l'Egypte ancienne,
précédé de recherches sur le mille
romain , in-4'' de 5oo pages , avec
trois cartes. Itinéraire des Gaules
cisalpine et transalpine, in-4° de
600 pages. Géographie historique
des Gaules cisalpine et transalpine
jusqu'à la chute de l'empire romain
en occident, in-4". •2° Divers Mé-
moires lus à l'institut sur les Pyles
caspiennes; sur les itinéraires d'A-
lexandrie et de l'Inde ; sur l'Apu-
lie Peucétieune; sur Anderilum,
capitale dés Gabali ( voy. les liap-
por/s des travaux de la classe d'his-
toire cl de littéralurc, par M. Dau-
nou , I" juillet 1814). H ■'» déjà
paru un «xlrait des découvcrlefl
de l'auteur sur la géographie an-
cienne d'Orient (c'est le plus im-
portant de tous SCS travaux), dans
le Classical journal; (XVI , 4^*7)-
M'AR
46:s
Cet extrait, dont on attend la $ui-
ti;, et que l'on croit de la main de
RI. W. Onselej, est plus anjple et
mieux fait que celui du rapport
dt; l'institut. iS" Mémoires sur les
progrès des connaissances géogra-
phiques à l'est et au sud de l' Asie,
et sur l'origine du peuple mn'ais.
Un extrait a élé lu par l'auteur à
la dernière séance publique. 14°
Le Monde maritime ou Tableau
géographique et historique de l'Ar-
chipel d'Orient , de la Polynésie et
de l'Ausiralasie. Pari'*, 1819. Cet
ouvrage s'imprime sous deux for-
mats, chez Firmin Didot, in-8"
et in-18. Il aura 3 vol. in-S" et
13 vol. in- 18. Les quatre pre-
miers volumes ont paru. iS" No-
tice historique et gé;ographique sur
l'itinéraire de Jérusalem ( d.ms
V Histoire des Croisades , de M.
Mifhaïul ) , tirée à part et donnée
en présent. 16° Dissertation sur
l'or et l'argent considérés comme
marchandise et comme monnaie.
( Dans le Journal d'économie po-
litique de Rœdercr). 17' Une No-
tice sur les UjaUu-icrits de Montes-
quieu, et une Lettre sur la Ta-
rentule, dans les Archives litté-
raires. 18" Diverses dissertations
ou extraits raisonnes de livres
dans le Magasin encyclopédique ,
dans le Mercure étranger, dan» le»
Annales des Voyages. 19" Notes
sur la géographie de Virgile, in-
sérées dans lu seconde édition de
la traduction de l'Enéide de De-
lille. M. Walekenacr a donné ime
Histoire de la tie et des outrages
de La Fontaine, a vol. in-8", avec
portrait, etc.
>VAIIUKN (sin JouN Boriase),
amiral anglais, de l'ancienne fa-
mille des UoRLASB, originaire du
m
WAR
pays de Cornouailles, est né eu
1754. Il commença .«es éludes à
Bicesler, au comté d'Oxford, les
continua à l'école de AVinchesler,
et les cessa tout-.'»-coup pour s'en-
rôler dans la marine., Sa liitnille,
informée de cette brusque déter-
mination, loin de lui en montrer
du mécontentement, s'employa
pour lui faire obtenir l'emploi de
midshipman , et il fit en cette qua-
lité un voyage dans la mer du
Nord, sur le sloop l' Alderney. De
retour en Angleterre , il reprit le
cours de ses éludes, qu'il termina
à l'université de Cambridge; il y
reçut, en 1776, le rliplôme de
maître-ès-arls. Membre du par-
lement, où il représenta pendant
deux années le bourg de Grcat-
Marlow, il fut créé baronnet, et
passa en Amérique sous les or-
dres de ramirul Howe. Peu après,
en 1779. il obtint le commande-
ment d'un sloop de guerre; en
1 78 I , le commaudement , comme
capitaine, de l' Ariane , dont il se
démit pour prendre celui de la
Cléopâlre. Dans la guerre contre
la France, au commencement de
la révolnlion, il eut sous ses or-
dres la Flora y sur laquelle il ar-
bora son pavillon en qualité de
«omniodore d'une escadrille em-
ployée dans le canal. 11 s'empara,
en 1794» de la frégate française
ta Pomone. Chargé, en 1795, de
porter des secours aux insurgés
de la Bretagne, il fut an mom«;nt
d'être fait prisonnier par l'amiral
Villaret-Joyeuse.Le5juilIel(i795),
avant le jour , il débarqua un
corps d'émigrés prés de la baie de
Quiberon, lieu que la conduite
des Anglais, et les désastres des
royalistes franc a is^, ont rendu cé-
>VAR
lébre. Sir John Warren , lorsque
les dangers furent passés, vint en-
core au secours des émigrés ,
moins malencontreusement cette
fois, et leur livra une quantité
considérable de poudre, d'armes
et de munitions. A l'époque de
l'insurrection des Irlarrdais, en
1798, il eut le commanden)enl
d'une forte escadre, et parvint à
empêcher les vaisseaux fratiçais
de secourir les insurgés d'Irlande :
je combat des deux escadres fut
long tt sanglant; mais les forces
anglaises étant bien supérieures à
celles des Français, elles parvin-
rent à leur enlever un vaisseau
de ligne et trois frégates. Nommé
en récom])ense contre-amiral, il
se réunit à la flotte du canal, et
croisa, en 1801, sur les côtes de
France. Néanmois l'amiral Gan-
thaume, à la poursuite duquel il
se mit, parvint à lui éeîiapper, et
se retira vers les côtes d'Egypte.
Ambassadeur à Saint-Pétersbourg,
à la suite de la paix d'Amiens, il
eut bientôt une mission relative
à l'île de Malte, et, à la reprise
des hostilités avec les Élals-Lnis,
lecommandeinentde l'escadre en-
voyée contre eux. Peu après, il
fut remplacé par lord Cocbrane.
Sir John Warren a publié un ou-
vrage qui a obtenu beaucoup de
succès dans sa patrie , c'est ua
Aperçu des forces navales de la
Grande-Bretagne , etc. Cet amiral
a été nommé successivement
grand-cordon de l'ordre du Bain ,
chevalier du Croissant, et con-
seiller privé.
WABREN (JiCQrEs), raajor-
général américain, naquit en i7-i6.
11 était descendantdeRichardWar-
ren qui , un des premiers , s'établit
à IMymouth, en 1620. Jacques
Warreii fit >es éllHle^^ au collège
<rHiiward, et suivit avec honneur
et succès la canière Ju commerce.
A lu mort de son père , arrivée en
I ;-57 , il lui succéda dans la place
de haut-shérif, dont il resta pour-
vti jusqu'à l'époque de la j^ucrre.
« Malgré la part active qu'il prit
dans l'opposition aux mesures du
gouvernenient anglais, dit l'au-
teur d'une notice sur AVarren , il
fut néanmoins nommé, en 1761,
membre de la cour générale , où
il soutint parfailement les droits
de 9011 pays. Le ministère britan-
nique, qui connaissait son habi-
leté et qui le redoutait dans l'op-
position, essaya vainrement de le
gagner par des promesses et de
l'intimider par des menaces; il
résista aux unes comn>e aux au-
tres , et rien ne put altérer son in-
corruptible intégrité. En «775, il
proposa des plans pour l'établis-
sement de comités de correspon-
dance, qui furent généralement
;)doptés , et refusa ensuite de sié-
ger au premier congrès. Mais a-
près la mort de son parent le gé-
néral Warren,.il accepta la prési-
dence du congrès provincial, qu'il
garda jusqu'au naoment où les
troupes vinrent à New-Yorck , et
qu'on eut établi trois déparlc-
mens. Deverm, en 177C, major-
général de la milice, (|uoiqu'il
n'eût jamais été militaire et qu'il
ne connût presque rien dans coite
partie, il s'acquitta de ses fonc-
tions avec zèle; fut élu , après la
foruiation de la constitution de
I l'état de Rlassachussetts, orateur
K de la chambre des représentans ;
• ft, préférant ensuite servir son
pays d'uue manière plus active , il
T. IL.
AVAT
^5
accepta dans la marine un emp!i)i
dont les fonctions étaient lrès-l;i-
borieuses. » W'arren, à qui ses
longs et utiles services avaient
rendu la vie privée nécessaire,
donna sa démission des difléren»
emplois qu'il occupait; mai.tbien-
tôt cédant aux instances de ses
concitoyens, il accepta une place
au conseil doïit il devint prési-
dent. Il mourut en 1808, dauH
la 8a* armée de son âge , généra*
lement regretté.
WATSON ( Richard), lord-
évêque de Landafl", meuibre de la
société royale de Londres, etc.,
naquit à Éversham ver» i''5y, et
commença ses études sous la di-
rection de son père, ecclésiasti-
que instruit, mais que sa pauvreté
avait réduit à l'ob.scure condition
de maître d'école à Kendal. Les
heureuses dispositions de Richard
le firent envoyer au collège de la
Trinité de Cambridge, où il se
distingua par un grand amour de
l'élude, et fut bientôt en état de
prendre tous ses degrés. Nommi»
directeur d'un collège, il donna
des soins particuliers au duc de
Rutland, l'un de ses élèves, qui,
plus tard, devint son ami et son
protecteur. Richard Watson ayant
été pourvu, eii 17O4 » ''*! I»*» chair*
de chimie !\ ruiuver>ilé de Cjun-
bridge , s'efforça par des expé-
riences qui ne furent pas sans dan-
ger pour lui, et par une étud»
constante, à remettre en honneur
cette science qui y était h peu près
uiconnue; succès qui lui valut, ea
1771, sa nomination en qualité d«
membre de la société royale do
Londres. Ses connaissances pro-
fondes en théologie l'uvalcnt por-
té quelq«)C temps aiipar.ivant aux'
3w
/ica
WAT
fVmcîions de iirofcssenr roya! de
théologie à Cninbridge. lin lyrii,
il fui r.liiirgo de prêcher devant
l'université le discours anniver-
snire de la ro«l<niriition anglaise,
qu'il fit imprimer sous le litre de
principes de la révoliilion juslifiés.
EriirSo, il obtint rarchidiaconat
d'Ely, et snoces-sivement la cure
de Norlliwold et cHIe de Knap-
loft. Richard Wat.son donna à cette
époque son J potogie (di. chrislia-
Tiisme, qu'il dédia à Gibbon, et
qui respire» toute la douceur (]'un
ynx'ï chrétien et toute l'urbanité
d'un 1 omme bien né. » Ses Es-
sais chimiques parurent en 178».
L'année sui?ante, lord Rutiand,
son ancien élève, lui obtint le
siège épiscopal de Landaff. Celte
distinction et l'estime qu'il avait
j;énéra!ement inspirée, le firent
élire ou parlement. Il y seconda
Jes ministres qui proposaient un
traité commercial avec la France,
t't se réunit à l'opposition pour
détendre les droits du prince de
Galles. Ami de la France cl ap-
probateur modéré des principes
de lu révolution française, il com-
battit avec force le ministère qui
voulait intervenir dans les af-
l'airos de ce pays. Long -temps
après cependant, et par un senti-
ment (le palrioiistne qu'aurait dfï
inodérer le caractère (ionl il était
revéhi, il approuva publiquement
Lt {guerre, et soulinl , cii » 7îX) '
dans une brochure intitulée ;
Adresse au peuple anglais , f|ue
la guerre devait être coulinuée,
et qu'il fallait à cet elTel s'imposer
lie nouveaux sacrifices. « Celte
adresse, dit-(>n, valut à àon au-
teur des reproches très-ylfs de la
part de plusieurs écrivains poli-
>VAW
tiques , notamment de Wake/reldy
qui s'indigna avec raison qu'un
prélat osât dire que le gouverne-
ment pouvait préle.ver le dixiè-
me de la fortune de chaque parti-
culier ians blesser les lois divines
et humaines. » Le savant et mo-
deste ecclésiastique, depuis sa pro-
molion ù l'épiscopat, avait insen-
siblement oublié et la pauvreté
béréditiîire et la niodéralion qui
accompagne rarement la fortune.
Les favuirs du pouvoir le sid>ju-
gucrent entièrement, et les mi-
nistres le comptèrent au nombre
de leurs partisans intéressés. Ses
richesses considérables lui permi-
rent d'acheter le château de Cal-
garlh, dont il augmenta les reve-
nus en se livrant aux soins de l'a-
grfcullure ; /es lrava(jx dans ce
genre bu firent décerner une mé-
daille d'or par la société des arl«.
Richard Watson mourut le 5 juil-
let 1816, presque octogénaire. On
doit ajouter à la liste des ouvrages
que nous avons cités, un Traité
de théologie^ à l'usage des étudian»
de Cambridge, pid)lié en 1786,
une Apologie de la Bible (1796) ;
(c't'stune réfutation du Siècledela
Raison, de Thomas Payne), et une
Histoire manuscrite de son temps,
« dont on attend avec impatience
la publioalion en raison des docu-
mens qu'elle doit contenir. »
WAAVUZKCKT (le comte Tho-
mas), ministre - d'état polonais,
fl % , naquit d'une famille distin-
guée, et devint, en 1788, mem-
bre de la ilièle chargée d'amélio-
rr^r la forme du gouvernement. Il
prit une pari honorable à la cons-
titution de 1791 , qui devait sous-
traire la l*ob»gue -^ l'anarchie où
la plongeaieul les inuigues de
quelques hoiniue^i amhîtieiix, et
la politique des gouvernemens é-
trangers (|ui voulaient envahir et
se partager ce malheureux royaii-
iniî. Tant d'efforts réunis mirent
la Pologne au pouToir des Russes.
L'insurrection de «794» ■"''^"S h'
direction de Kosciu>ko, compta
un grand nombre de partisans, et
avec eux le comte Wawrze<^ki.
Cet honorable patriote, qui {«^lis-
sait d'une popularité méritée, n'hé-
sila pas dans ce danger pressante
renoncer à des emplois civils qu'il
avait constamuieut exercés, pour
prendre les armes. Il se réunit à
(îiedroye, cl pénétra avec lui en
OourUnde. Kosciusko ayant été^
lait prisonnier <\ la. bataille de Ma-
cijowice, il lui succéda dans le
commaiulement général. Se por-
tant aus^rlôt dans la Lilhuanie, il
y obtint des succès. Il fortilia
Prague, établit un conseil de
guerre, institution nouvelle pour
sescompatrioles, et réunit tous les
moyens dont il pouvait disposer.
Malheureusement ces moyen» fu-
rent insnflisans, et malgré ses ta-
lens , son activité, 8f»n couraiçe,
il ne put défendre le faubourg de
Prague , que Suwarnw attaqua
avec des forces supérieures, et
<l(int il s'empara le 4 novcuibre.
Une grande partie du corps qu'il
commandait, animé de son esprit,
ne voulut pa< se rendre aux Rus-
ses, et il se ri'lira en faisant bonne
rontenaru'e. ^Vawrzi'cki se dirigea
sur le palatinat de Sandomir, où
la division du général Giedroye
(-ombalt')it bravement les Prus-
siens : mais bientôt ses troupes,
épuisées par la faim cl dépour-
vues de uMjuilirm», Tahandonnè-
renl, et il se vil, avec un petit
WER
467
notnbre de braves, pressé par le
général russe Denisow et une forte
division de Prussiens. Sou courage
ne l'ab-uidonna pas; mais écrasé par
le nombre, il tomba enfin au pou-
voir du général russe , qui l'en-
voya prisonnier à Varsovie. Inca-
pable d'une lâcheté, cet intrépide
patriote préféra les prisons de
Saiut-Pétcrsbourg à la honte do
prêter serinent de fidélité à la
Russie. L'avènement de Paul I"
à l'empire lui valut sa liberté. Il
se nttlra et Lilhuanie , 01^ il vi-
vait dans la retraite, entouré dî
l'estime générale. En i8i'j, le
général Wawrzecki voulut donner
aux Frauçais nue preuve de l'at-
tachement qu'il pijrtail à leur na-
tion, l'amie filèle de ce peuple
généreux. Il leva A ses irais un
régiment et le commanda en per-
sonne. C'était de part et d'aulro
le dernier soupir des braves. Les
malheurs de la France étaient irré-
parables, et les puissances étran-
gères envahirent Paris. 1/empe-
reur Alexandre, devenu paisible
possesseur de la Pologne, voulut
s'attacher sa nouvelle conquête
en couiblant de faveurs ses plus
illustres citoyens. Le général
Wawrzecki devint sénateur et en-
suite ministre de la justice, et fut
un des rédacteurs de la dernière
constitution polonaise. Le général
Wawrzecki mourut le 5 août 18 «6,
regretté égniement des Polonais
et des Français.
WERNEC.Kl (le BAnoiH dk ) ,
feld - maréchal - lieutenant autri-
chien , issu d'ime famille noble,
suivit dès sa jeunesse la carrière
de.s armes, et commandait, en
1793, dans le Rrnbani en qualité
de général-major. 11 prit pari au
46B
AVER
siépe de Valericiennes, et fit celui
cit; Duiikerque sous les ordre.» du
général comte d'Alton L'année
suivante , il se distingua à l'alfaire
de Cateau - Cambresi.* , et peu
après, il fut fait t'eld-aiaréchal-
lieuletiant. En 177G, sous les or-
dres de M. de SVarten»leben , il
rendit des services très-itnportans
à Welzlaer, à Limbourg, à Atn-
berg et à Wurtzbourg, où, après
avoir retardé la marche du gé-
néral Jourdan, il parvint ensuite
à précijtiter sa retraite. Ces succès
lui valurent le commandement en
chef des forces autrichiennes sur
le Bas-Rhin. Il était, en 1797, à
Francfort, où son invincible pas-
sion du jeu le retenait, tandis que
le générai Hoche franchissait le
Rhin. M. de Werneck, qui s'était
reposé sur ses généraux du soin
de défendre le front de sa ligue,
apprenant les succès du général
français, arriva précipitamment à
»on armée; mais il était trop tard :
il fut le témoin de sa déroule en-
tière, déroute qui, dit-on, fut la
plus complète qu'ait offerte la
guerre de la révolution. Traduit
à un conseil de guerre comme
«uspect de trahison, il fut hono-
rablement acquitté sous ce rap-
port; mais son souverain lui or-
donna de prendre sa retraite, qu'il
reyul avec une demi-peusiou. Il
fut cependant employé de nou-
veau, eu i8o5, dans l'armée au-
trithit-nne de Bavière. L'incapa-
cité du général Mack , sous les
ordres duquel il était devant Llm,
le détermina, ainsi que l'archiduc
Ferdinand, à quitter ce général
qui sacrifiait ses troupes par
son iaconcevable impérilie. M.
de Werueck ne put cependant évi-
ter le général Murât, qui le pour-
suivait H outrance au moment où
il se rôtirait par la Franconie. At-
teint, défait, il fut obligé de sa
rendre. Plusieurs généraux refu-
sèrent de se soumettre à la capitu-
lation qu'il ajrait signée , et s»
réunirent à l'archiduc F^dinand-
{]n nouveau con-eil de guerre fui
appelé ù prononcer sur sa con-
duite. Il n'y put comparaître à
cause de la maladie qui le rete-
nait à Koenigsgratz. Tant de mal-
heurs en altérant la santé de M. de
Werneck lui causèrent peu aprèi
une attaque d'apoplexie, à laquelle
il succomba. Ce général fut plui
à plaindre qu'à blâmer; il avait
des talens et beaucoup de cou-
rage.
FIN DU SUPPLÉME:^!' GÉNÉRAL.
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