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Full text of "Biographie nouvelle des contemporains; ou, Dictionnaire historique et raisonné de tous les hommes qui, depuis la Révolution française, ont acquis de la célèbrité par leurs actions, leurs écrits, leurs erreurs ou leurs crimes, soit en France, soit dans les pays étrangers"

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BIOGRAPHIE 


NOUVELLE 


DES  CONTEMPORAINS. 


Les  soussignés  déclarent  que  les  Exemplaires  non  revêtus  de 
leurs  signatures  seront  réputés  contrefaits. 


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DE  l'iMI'HÏMERIE  DE  PLASSAN,   RUE  DE  VAUGIRARD,  N°  l5, 
DERRIÈRE  l'odÉON. 


à 


ojïr  ^f/ak&r -Scott. 


BIOGRAPHIE  NOUVELLE 

DES 

CONTEMPORAINS, 

ou 

DICTIONNAIRE 

HISTORIQUE   ET    RAISONNÉ 

DE  TOUS  LES  HOMMES  QUI,  DEPUIS  LA  RÉVOLUTION 

FRANÇAISE,  ONT  ACQUIS  DE  LA  CÉLÉBRITÉ 

PAB  LECfiS  ACTIONS,    LETJKS  ECRITS,    LEURS  ERREURS  OU  LEURS   CRIMES, 

SOIT  EN  FRANCE,  SOIT  DANS  LES  PAYS  ÉTRANGERS; 

Précédée  d'un  Taideau  par  ordre  ehronologiqut  des  époques  céièires  et  des  événe- 
mens  remarquables,  tant  en  France  qu'à  l'étranger,  depuis  lySy  jusqu'à  ce  jour, 
et  d'une  TaiAe  alphabétique  des  assemblées  législatives,  A  partir  de  V assemblée 
constituante  jusqu'aux  dernières  chambres  des  pairs  et  des  députés. 

Par  mm.  A.  V.  ARNAULT,  ancien  membre  de  l'Institut;  A.  JAY; 
E.  JOUY,  DE  l'Académie  française;  J.  NO R VINS,  et  autres 
Hommes  de  lettres.  Magistrats  et  Militaires. 

obnèb  de  3oo  portraits  au  burin, 
d'après   les   plus   célèbres   artistes. 

TOME  VINGTIÈME. 
THll— Z 


II 


PARIS, 

A  LA  LIBRAIRIE  HISTORIQUE,  HOTEL  DALIGRE, 

m  E  SAIBT-nONORÉ,    W"  I  23, 

1825. 


^" 


BIOGRAPHIE 


NOUVELLE 


DES  CONTEMPORAINS. 


w 


THU 


THTJGUT  (le  baron  de),  mi- 
nitilre-d'élat  de  l'empereur  d'Alle- 
ni.igne,  naquit  à  Vienne  en  1735, 
d'une  famille  obscure,  et  ne  dut 
qu'i  ses  taîens  l'étonnante  fortune 
à  laquelle  il  s'éleva.  L'impératrice 
Marie-Thérèse,  visitant  un  jour  le 
collège  des  langues  orientales  ,  où 
il  avait  été  admis,  frappée  du  té- 
moignage qu'on  lui  rendit  de  ses 
succès,  changea  son  nom  de  Thu- 
nigut ,  qui  signifie  vaurien  en  pa- 
tois autrichien,  en  celui  de  Tliuqut 
[  fais  bien  )  ,  et  le  recommanda 
aux  chefs  de  l'établissement.  Dès- 
lors  son  sort  fut  assuré.  Il  occupa 
d'ahord  desemplois  subalternes, et 
devint  ensuite  iiiternonce  impérial 
à  Constantinople  ,  d'où  il  passa 
comme  ministre  i\  Varsovie  ,  et 
fut  nommé,  en  mars  17^9,  com- 
missaire en  Valachie.  Directeur- 
général  des  affaires  étrangères  en 
1790,  puis  chancelier  de  cour  et 
d'état ,  il  obtitit,  l'aunéc  suivante, 
le  poste  de  ministre  des  affaires 
étrangères,  et  fut  enfin  nommé, 
en  1796,  premier  ministre  d'état. 
Entièrement  livré  aux  affaires , 
n'entretenant  presque  aucun  com- 

r.  XX. 


merce  avec  les  autres  hommes ,  il 
Jouit  de  toute  la  confiance  de  sou 
souverain,  dirigea  en  quelque 
sorte  la  conduite  de  la  cour  de 
Vienne  pendant  la  guerre  de  la  ré- 
volution française,  et  on  le  regar- 
da généralement  comme  l'orga- 
nisateur des  guerres  qui  si  long- 
temps divisèrent  les  deux  nations  ; 
aussi  fnt-il  constamment  en  butte 
au  resseniiment  du  gouvernement 
de  la  France.  Ketiré  à  Presbourg 
après  la  paix  de  Lunéville,  il  sen- 
tit se  ranimer,  dans  les  loisirs  de 
la  vie  privée,  son  ancien  goût 
pour  la  littérature  orientale,  dont 
il  s'occupa  avec  la  même  ardeur 
que  dans  sa  jeunesse,  et  entre- 
tint, pour  cet  objet ,  une  corres- 
pondance suivie  avec  M.  Muller, 
bibliothécaire  de  la  cour  de  Vien- 
ne ,  qu'il  allait  même  visiter  de 
temps  en  temps.  Vers  la  fin  do 
i8o3,  le  baron  de  Thugut  épousa 
la  fille  d'un  seigneur  belge,  lin 
voyage  qu'il  fil  à  Vienne,  en  i8o(J, 
fit  supposer  qu'il  avait  repris  du 
crédit  et  qu'il  était  question  de  sa 
rentrée  au  ministère;  les  journaux 
françaiè  démentirent  ce  bruit,  el 


a  TIIU 

la  cour  de  Vienne  garda  le  silence; 
«îlle  tie  crut  pas  devoir  offenser  un 
voisin  puissant,  en  mettant  i\  la 
lôle  des  affaires  un  homme  qui 
s'en  était  toujours  monlré  le  cons- 
tant ennemi.  Néanmoins  on  lui 
confia  une  branche  du  départe- 
ment des  affaires  étrangères,  qu'il 
administra  jusqu'à  la  fin  de  1808. 
Il  retourna  alors  à  Presbourg,  a- 
vt-c  le  rang  de  conseilter-d'état  et 
la  grand'croix  de  l'ordre  de  Saint- 
Etienne;  il  y  reprit  les  occupa- 
tions qu'il  avait  interrompues 
pend<'\nt  une  absence  de  deux  an- 
nées, et  y  vécut  solitaire  comme 
auparavant.  Revenu  dans  la  capi- 
tale de  l'Autriche  quelque  temps 
après,  il  y  mourut  le  2S  mai  1818, 
dans  la  83"  année  de  son  âge, 
laissant  une  fortune  considérable, 
dont  il  établit  l'empereur  léga- 
taire universel. 

ÏHUREL  (Jean),  le  plus  an- 
cien soldat  de  l'Europe,  membre 
de  la  légion -d'honneur,  naquit 
en  1699,  i\  Orin ,  département 
des  Basses-Pyrénées,  et  mourut 
à  Tours  ,  déparlement  d'Indre-et- 
Loire,  le  10  mai  1807,  dans  la 
io8*  année  de  son  âge.  Il  s'en- 
gagea le  17  septembre  1716,  dans 
le  régiment  d'infanterie  de  Tou- 
raine,  et  servit  avec  distinction 
pendant  près  d'un  siècle.  Blessé, 
en  1753,  au  siège  de  Rehl,  d'un 
coup  de  feu  dans  la  poitrine,  il  le 
fut  de  sept  coups  de  sabre,  dont 
six  sur  la  tête,  en  1769,  à  la  ba- 
taille de  Minden.  Le  régiment  de 
Tonraine  ayant  reçu,  en  1787, 
l'ordre  de  se  rendre  dans  l'un  des 
ports  de  Elance,  afin  de  s'y  em- 
barquer ,  Thurel  .  figé  alors  de  88 
ans,  voulut,  malgré  ses  chefs, 
^aire  la  route  à  pied  ;  il  refusa  de 


THU 

monter  sur  les  voilures,  décla- 
rant •  que  cela  ne  lui  était  jamais 
arrivé,  et  qu'il  ne  commencerait 
pas.  »  Le  8  novembre  de  la  même 
année,  il  fut  présenté  à  Louis  XVI, 
qui  lui  accorda  une  pension  de 
3oo  fr.  ,  dont  200  réversibles  sur 
la  tête  de  sa  femme ,  et  après  elle 
sur  celle  de  chacun  de  ses  enfans. 
Présenté  à  l'empereur  Napoléon  , 
ce  prince  le  décora  de  la  croix  de 
la  légion-d'honneur,  el  lui  donna 
une  pension  de  1200  francs.  Il 
habitait  Tours,  et  lorsqu'il  mou- 
rut, il  servait  encore  comme  vé- 
téran. «  Il  était,  dit  M.  Joseph 
Laval'ée,  plein  de  loyauté,  d'hon- 
neur et  de  bravoure;  il  a  traversé 
tout  un  siècle  accompagné  de 
l'estime  de  tous  ceux  qui  le  con- 
nurent et  lui  commandèrent.  » 
Trois  de  ses  frères  furent  tués  à  la 
bataille  de  Fontenoy;  un  de  ses 
fils,  décoré  de  la  médaille  des  vé- 
térans, caporal  dans  la  compagnie 
où  Thurel  servait  ,  fut  également 
tué  sur  le  champ  de  bataille  en 
I  782  ;  un  autre  de  ses  fils  était  en- 
core au  service  un  peu  avant  la 
restauration ,  en  1814. 

THLRIOT  DE  LA  ROSIÈRE 
(Jacques-Alexis),  avocat  à  l'é- 
poque de  la  révolution,  fit  partie 
de  la  première  assemblée  électo- 
rale. Le  \à  juillet,  M.  Thuriot 
fut  député  par  elle  à  M.  de  Lau- 
nay,  gouverneur  de  la  Bastille, 
pour  parlementer.  La  réponse 
qu'il  en  reçut  n'ayant  point  calmé 
les  esprits,  l'attaque  commença: 
on  en  connaît  les  résultats.  Il  fut 
ensuite  nommé  juge  au  tribiuial 
du  district  de  Sezanne,  départe- 
ment de  la  Marne,  et ,  en  septem- 
bre 1791,  élu,  par  ce  départe- 
ment ,  député  i\  l'assemblée  légis- 


THU 

lative.  Dès  les  premières  séances, 
il  se  prononça  contre  la  cour  et  le 
ministère.  Le  8  février,  il  parla 
avec  force  contre  les  émigrés  ,  et 
demanda  que  leurs  biens  fussent 
mis  sous  le  séquestre  ,  ce  qui  fut 
décrété  le  lendemain.  Quelques 
jours  après,  il  dénonça  le  ministre 
de  la  guerre  Narbonne  ,  p(>ur  a- 
voir  envoyé  à  l'armée,  de  sa  pro- 
pre autorité,  un  règlement  mili- 
taire, et  ie  déclara  pour  ce  seul 
fait  digne  de  mort.  Vers  le  m«';nie 
temps,  il  annonça  que  le  peuple 
de  Paris  était  prêt  à  s'insurger  si 
on  ne  lui  augmentait  les  secours 
pécuniaires  auxquels  on  l'avait 
accoutumé,  et  vota  tme  commis- 
sion en  faveur  des  détenus  d'Avi- 
gnon. Il  ne  paraît  pas  qu'à  cette 
époque  M.  Thuriot  se  piquru 
d'être  très-conséquent  dans  ses 
votes,  sans  doute  pour  établir  son 
impartialité.  Ainsi  ,  tandis  qu'il 
déclarait,  à  l'occasion  des  trou- 
bles élevés  dans  ditlerens  dépar- 
temens,  que  la  trahison  était  gé- 
nérale, il  repoussait  une  députa- 
lion  qui  attribuait  à  la  trahison 
les  échecs  éprouvés  alors  par  l'ar- 
mée française  ;  ainsi ,  tandis  qu'il 
volait  l'ajournement  d'une  fête, 
proposée  en  faveur  de  Simonneau, 
mairt"  d'Klampes,  tué  dans  l'exer- 
cice de  ses  fonctions  ,  il  s'o{)posait 
à  la  suj»pression  du  traitement 
d'un  million  nccor^Jé  aux  frères  de 
Louis  XVI ,  alors  émigrés.  Le  a5 
mai,  il  s'éleva  contre  les  prêtres 
insermentés  ,  et  demanda  leur  dé 
porlalion  ;  le  2  juillet,  il  prononça 
un  long  discours,  dans  le  but  d'ob- 
tenir le  licenciement  de  l'état- 
major  de  la  garde  parisienne,  et 
de  faire  déclarer  la  patrie  en  «lan- 
ger ;  le  26,  il  lit  décréter  la  pcc- 


THU  3 

manence  des  sections  de  Paris  et 
de  tout  le  royaume,  et  fit  envoyer 
son  collègue  Tarbé  à  l'Abbaye  , 
pour  avoir,  disait-il,  insulté  l'as- 
semblée ;  le  27 ,  il  obtint  la  vente 
des  biens  des  émigrés.  Dans  la 
journée  du  10  août,  il  justifia,  à 
la  tribune,  la  municipalité  usur- 
patrice ,  provoqua  im  décret  d'ac- 
cusation contre  d'Abancourt,  mi- 
nistre de  la  guerre,  et  de  Laporte, 
ministre  de  la  liste  civile,  et  fit 
décréter,  sur  la  demande  de  Dan- 
ton, des  visites  domiciliaires,  et 
la  réélection  des  juges-de-paix  de 
l'aris.  Le  11,  il  empêcha  la  for- 
mation d'un  nouveau  directoire 
du  département  de  Paris ,  et  ob- 
tint que  les  statues  des  rois  se- 
raient brisées.  Il  fit  ensuite  subs- 
tituer le  tribunal  extraordinaire  à 
la  cour  martiale  ,  dont  une  loi  a- 
vait  ordonné  la  formation,  et  fit 
attribuer  à  ce  tribunal  le  droit  de 
jil^er  sans  appel  les  prévenus  de 
contre-révolution.  Le  2  septem- 
bre suivant,  il  fut  nommé  l'un 
des  commissaires  à  l'effet  d'arrêter 
la  fureur  du  peuple  qui  se  portait 
aux  prisons  pour  immoler  les  pri- 
sonniers ;  mais  il  revint  bientôt, 
avec  ses  collègues,  déclarera  l'as- 
semblée qu'ils  n'avaient  obtenu 
aucun  succès.  Le  4  septembre,  il 
fil  rejeter  la  proposition  faite  à 
l'assemblée  de  prêter  serment  de 
haine  aux  rois  et  à  la  royauté  , 
prétendant  que  ce  serait  anticiper 
sur  les  droits  de  la  convention,  qui 
allait  se  réunir,  lilu  membre  de 
cette  a^^semblée  par  ie  départe- 
meul  de  la  Marne,  il  fui  dénoncé, 
peu  de  jours  après,  par  l'ex-minis- 
tre  Narbonne,  comme  ayant  reçu 
de  lui  des  sommes  considérables; 
mais  la  dénouciaiion  n'étant  ap- 


4  THU 

puyée  d'aucun  t'ait,  on  pasm  à 
l'ordre  du  jour.  II  fit  décréter  que 
tous  les  membres  absens  eussent 
à  revenir  à  leur  poste  ,  et  deman- 
da ,  le  13,  que  Louis  XVI  fût  jugé 
sou»  trois  jours.  Nommé  l'un  des 
commissaires  pour  faire  connaître 
au  roi  le  décret  qui  lui  accordait 
un  conseil,  il  fit  atitori.-ier  M.  do 
Malesherbes  à  communiquer  li- 
brement avec  ce  prince,  et  lors 
des  appels  nominaux  sur  le  juge- 
ment ,  il  vola  corjtre  l'appel  au 
peuple,  pour  la  mort ,  et  contre  le 
sursis.  Le  21  janvier,  il  informa 
la  convention  que  Michel  Lepelle- 
tier  avait  été  tué  la  veille  au  Pa- 
lais-Royal, et  fit  décréter  une  ré- 
compense pour  celui  qui  arrête- 
rait son  assassin.  Le  même  jour, 
Pétion  ayant  voulu  proposer  un 
rapprochement  des  partis,  M. 
Thuriot  lui  reprocha  les  assassi- 
nats de  septembre  ,  que  ,  comme 
maire,  il  eût  dû  empêcher,  di- 
sait-il, quoiqu'il  sût  très-bien 
qu'à  cette  époque  Pétion  et  ses 
amis  étaient  en  butte  à  la  plus 
cruelle  proscription.  Lors  de  la 
formation  du  tribunal  révolution- 
naire, en  mars  1795,  il  demanda 
que  les  jurés  volassent  à  haute 
AToix.  Le  mois  suivant,  il  contri- 
bua puissamment  à  l'établisse- 
ment d'un  comité  de  salul-public; 
mais  ce  que  l'hisloire  reprochera 
peut-être  le  plus  à  M.ïhuriot,  c'est 
d'avoir  été  ini  des  plus  ardens 
provocateurs  des  journées  désas- 
treuses des  5i  mai  et  2  juin,  où 
furent  anéantis  les  hommes  les 
plus  propres  i\  faire  honorer  la  li- 
berté et  à  maintenir  le  respect  des 
lois.  Nommé  président  le  27  juin, 
il  devint,  le  10  juillet,  membre 
du  comité  de  salul-public  renou- 


THU 

vêlé,  et  ne  parut  user  de  ce  nou- 
veau pouvoir  que  pour  exercer  de 
nouvelles  rigueurs,  surtout  à  l'é- 
gard de  ses  malheureux  collègues 
échappés  aux  proscriptions  du  a 
juin.  I!  parut  revenir  cependant 
à  des  sentimens  plus  modérés,  et  • 
fit,  quelque  temps  après,  réha- 
biliter la  mé.T^Joire  des  infortunés 
Labarre  et  d'Elalonde,  condamnés 
à  un  supplice  horrible  pour  avoir 
commis  la  nuit,  et  dans  un  état 
d'ivresse,  non  un  sacrilège,  mais 
une  irrévérence  envers  une  image 
du  culte  catholique;  enfin  il  délivra 
le  département  de  la  Loire  de  l'a- 
troce proconsul  Javoques  ,  le  Car- 
rier de  ces  contrées.  Dénoncé ,  le 
4  août  1793,  aux  Jacobins,  par 
suite  des  divisions  qui  s'étaient 
élevées  entre  lui  et  Robespierre, 
il  donna  sa  démission  du  comité 
de  salut-public;  mais  les  dénon- 
ciations s'accrurent  par  cette  mar- 
que même  de  faiblesse,  et  il  fut 
obligé,  pour  se  justifier,  de  dé- 
rouler le  tableau  des  mesures  a- 
cerbes  dont  il  avait  été  ou  le 
provocateur  ou  le  complice.  Ce 
moyen  ne  lui  ayant  pas  complète- 
ment réussi,  il  attaqua  la  faction 
d'Hébert,  qu'il  regardait  comme 
le  seul  obstacle  à  sa  popularité; 
mais  il  n'en  fut  pas  plus  heureux  : 
Hébert  parvint  à  le  faire  exclure 
des  Jacobins,  où  il  ne  fut  réintégré 
qu'après  le  9  thermidor.  Quelque 
soit  le  sentiment  qui  ait  dirigé  M. 
Thuriot  à  cette  époque  fameuse, 
ou  ses  craintes  personnelles,  ou 
sa  haine  contre  Robespierre,  il  se- 
rait injuste  de  le  priver  de  sa  part 
de  courage  dans  cette  journée;  il 
présidait  la  convention,  et  chaque 
fois  qiie  Robespierre  voulait  éle- 
ver la  voix,  il  agitait  sa  sonnette 


THIJ 

en  criant  de  toules  ses  forces  i  Tu 
n'as  pas  ta  parole!  Ces  mots  sans 
cesse  répétés,  et  le  bruit  éclatant 
de  la  sonnette,  déconcertèrent 
Robespierre  au  point  de  pouvoir 
à  peine  faire  entendre  ces  paroles: 
«  Me  donneras-tu  la  parole,  pré- 
sident des  brigands  {voy.  Robes- 
PiEERE.  )  M.  Thuriot  qui,  le  len- 
demain du  9  thermidor,  avait  fait 
comprendre  de  nouveaux  conven- 
tionnels au  nombre  de  ceux  mis 
hors  la  loi  la  veille,  s'appliqua, 
dès  qu'il  fut  rentré  aux  Jacobins, 
à  défendre  les  complices  du  tyran 
qu'il  venait  d'abattre,  et  fit  reje- 
ter, comme  calomnieuse  ,  la  pre- 
mière dénonciation  de  Lecointre 
de  Versailles.  Bientôt  après ,  il 
parla  contre  les  mesures  sévères, 
fe  plaignit  de  la  faiblesse  que  l'on 
mettait  à  poursuivre  les  restes  du 
parti  de  Robespierre;  mais  s'étant 
montré  l'un  des  principaux  mo- 
teurs de  l'insurrection  anarchique 
du  12  germinal  an  3,  il  fut  dé- 
crété d'arrestation  le  iG,  et  d'ac- 
cusation le  3  prairial,  pour  avoir 
pris  part  au  nouveau  mouvement 
qui  avait  éclaté  le  i",  et  qui  avait 
pour  but  de  délivrer  et  faire  ab- 
soudre les  membres  arrêtés  ou 
proscrits  en  germinal.  Il  échappa 
par  la  fuite  à  l'exécution  de  ces 
deux  décrets,  et  fut  amnistié  le 
4  brumaire  an  4  (  ^^  octobre 
ï  ■  ^"^  V  Après  la  session  ,  il  fut 
1  Mr  le  directoire,  com- 

1  près  le  tribunal  de 
.;s  le   i8  brumaire,  il 
d  membre  de  la  commission 

d  s  émigrés  et  juge  au  tribunal 
rriminrl  de  la  Seine;  il  en  exer- 
çait encore  les  fonctions  co  1804. 
(Chargé  d'interroger  Moreau,  Pi- 
tfhfgru  et  Georges,  il  fit  le  rap- 


TIE 


S 


port  de  tout  ce  procès.  En  février 
i8o5,  il  passa  à  la  cour  de  cassa- 
tion en  qualité  de  substitut  du 
procureur-général  impérial,  et  fut 
nommé  membre  de  la  légion- 
d'honneur.  Il  perdit  sa  place  à  la 
première  restauration  ,  et  la  reprit 
pendant  les  cent  jours,  en  i8i5. 
Après  le  second  retour  du  roi  , 
contraint  de  quitter  la  France,  par 
la  loi  du  12  janvier  1816,  il  s'est 
retiré  dans  le  royaume  des  Pays- 
Bas ,  et  s'est  fixé  à  Liège,  où  il 
exerce  la  profession  d'avocat. 

THUROT(FRANçois),professeur 
de  langue  et  de  philosophie  grec- 
ques au  collège  royal  de  France, 
place  qu'il  occupe  encore  aujour- 
d'hui (1826),  a  publié  les  ouvra- 
ges suivans  ,  qui  lui  ont  générale- 
ment valu  les  suffrages  des  savans 
et  du  public  :  1°  Hermès  ou  Re- 
cherches philosophiques  sur  la 
grammaire  unioerselte  j  traduit  de 
l'anglais,  de  Harris,  avec  des  re- 
marques et  additions ,  1  796 ,  in-S"  ; 
2*  f^ie  de  l^aurent  de  Médicis,  sur- 
nommé leJUagnifique^  traduit  de 
l'anglais,  1799,  2  vol.  in-8°; 
3°  apologie  de  Socrate ,  d'après 
Platon  et  Xénophon,  en  grec  et  en 
français,  1806,  in-S";  4°  l^s  Phé- 
niciennes d'Euripide,  avec  un  choix 
des  icholies  grecques  et  des  notes 
françaises  (et  le  texte  grec),  i8i3, 
in-8°;  5°  Plusieurs  dialogues  de 
Platon  ,  181 5,  in-8*. 

TIERNKY  (  Georges  ) ,  mem- 
bre de  la  chambre  des  coujmunes 
de  l'Angleterre,  l'un  des  chefs  les 
plus  distingués  de  l'opposition, 
fit  des  études  de  droit,  et  suivit 
néanmoins  la  carrière  de  la  poli-» 
tique  et  des  finances.  Tous  se* 
vœux  tendirent  ensuite  à  obtenir 
une  place  au  parlement  ;  ce  ne  Cul 


C  TIE 

qu'i\  la  troisième  tentative,  oili  la 
nominalion    de   son   coinpéliteur 
ayant  été  annulée  pour  la  seconde 
fois,  qu'il  lut  déclaré  par  le  par- 
lement dépulé  légal  du  bourg  de 
Southwark  à  la  chambre  des  com- 
munes. Il  se  rangea  sur-le-champ 
du  côté  de  l'opposilion  ,  et  parla 
eur  tous  les  sujets  imporlans  dont 
la  chambre  eut  à  s'occuper.   En 
179G,  il  demanda  avec  force  une 
réforme  parlementaire,  et  signala 
la  corruption  qui  régnait  dans  les 
élections.  L'année  suivante,  lors- 
qu'à l'occasion   de  la  suspension 
des  paiemens  en  argent,  Pitl  pro- 
posa d'autoriser  la  banque  à  éniet- 
■Ire  des  billets  de  î20  schelling*^ 
M.   Tierney,   en  secondant  Fox 
dans  son  opposition  à  celte  me- 
sure, demanda  que  la  banque  fît 
connaître  sa  situation.  Il  combat- 
tit dans  la  même  session  les  dis- 
positions proposées  pour  réprimer 
la  sédition  qui  avait  éclaté  parmi 
les  marins.  A  la  rentrée  du  parle- 
ment ,  il  voulut  faire  'exclure  de 
la  chambre  M.  Dundoâ,  comme 
occupant  la  place  de  troisième  se- 
crclaire-d'élat ,  abolie  par  le  bill 
de  Burke.    Cette  conduite,  qu'il 
tint  pendant  assez  de  temps,  fut 
d'autant   plus   remarquée  ,  que  , 
seul  des  membres  de  l'opposition, 
il  assistait  aux  séances,  les  autres 
croyant  de  voir  s'en  abstenir,  parce 
qu'ils  blâmaient  comme  injuste  la 
guerre  que  la  Grande-Bretagne 
soutenait  contre  la  France.  iNéan- 
inoins  il  appuya,  en  1798,  le  bill 
proposé   par   M.    Dundas  ,    pour 
mettre  le  gouvernement  en  état 
de  pourvoir  à  la  sftreté  du  royau- 
me.  Les  débats   du   35  mai  sui- 
Yanf,  relatifs  au  bill  proposé  pour 
suspendre    les    prérogatives    des 


TIE 

gens  de  mer,  entraînèrent  entre 
Pitt  et  lui  une  contestation  qui  se 
termina  par  un  duel,  dans  lequel 
aucun   des  deux  antagonistes  ne 
fut  blessé.  En  1790,  M-  Tierney 
s'opposa  à  l'envoi  de  troupes  en 
Irlande  ,   pour  en  soumettre   le» 
liabitans,  et  à  l'union  parlemen- 
taire de  ce  pays,  comme  dange- 
reuse pour  la  liberté  anglaise.  En 
1800  ,    au   sujet   de   l'expédition 
malheureuse  de  Hollande,  il  re- 
procha aux  ministres  de  ne  faire 
la  guerre  que  pour  le  rétablisse- 
ment de  la  maison  de  Bourbon, 
réclama  l'ouverture  de  négocia- 
tions pacifiques,  et  proposa  d'or- 
donner qu'aucune  somme  ne  pût 
être  envoyée  à  l'empereur  d'Alle- 
magne, après  qu'il  aurait  signé 
un  traité  séparé  avec  la  républi- 
que française.   En   novembre,   il 
nia  tous  les  avantages  qui  ,  selon 
les   ministres,    résultaient   de   la 
guerre;   il    parla  dans   le   même 
sens  sur  l'expédition  d'Egypte  ,  et 
contre  la  rupture  du  traité  d'EI- 
Arish.  Il  s'éleva  ensuite  contre  les 
mesures   arbitraires,    multipliées 
sous  le  prétexte  de  poursuivre  le 
jacobinisme,  et  combattit  le  bill 
d'oubli   [bill  of  indemnily) ,  pro- 
posé en  faveur  des  fonctionnaires 
publics  qui,  depuis  1795,  avaient 
fait  arrêter  ou  détenir   des  per- 
sonnes réputées  suspectes.  Cette 
marche,    soutenue   dans  la   voie 
constitutionnelle,  avait  rendu  M. 
Tierney  cher  à  tous  les  amis  de 
la  liberté.  Un  changement  de  mi-  , 
nistère ,  qui  lui  procura  des  em- 
plois lucratifs,  eut  une  influence 
remarquable  sur  ses  principes;  il 
se  rapprocha  de  l'administration: 
néanmoins  la  transition  fut  gra- 
duée ,  et  il  ne  fut  pas  diflicile  d'à- 


TIE 

percevoir  les  ménageiaens  dont  il 
usait  pour  ne  pas  heurter  l'opi- 
nion. Pill  étant  rentré  à  la  chan- 
cellerie en  i8o5,  M.  ïierney  se 
raUacha  à  l'opposition ,  et  lut  nom- 
mé secrétaire  en  chef  du  gouver- 
nement d'Irlande,  lors  du  renou- 
vellement du  ministère  en  iSofi. 
Les  changement  survenus  dans  la 
direction  des  affaires  de  l'état  après 
la  mort  de  Fox,  n'influèrent  en 
rien  sur  la  position  de  M.  Tiernejr, 
qui  s'était  ménagé  des  amis  parmi 
les  successeurs  de  cet  habile  mi- 
nistre ;  il  fut  même  placé  sous 
lord  Grenville  à  la  tête  du  corps 
de  contrôle  pour  les  aff.iires  de 
rinde,  emploi  qu'il  perdit  dans 
un  nouveau  changement  du  mi- 
nistère. A  cette  époque,  les  élec- 
teurs de  Southwark ,  qui  ne 
voyaient  plus  en  lui  qu'un  candi- 
dat ministériel,  lui  préférèrent 
»on  concurrent;  mais  il  fut  élu 
dans  un  autre  bourg  i  la  nomina- 
tion du  gouvernement.  Il  se  rap- 
procha dès-lors ,  pendant  quelque 
ten;)ps,  du  parti  de  l'opposition. 
Depuis  1807  jusqu'en  i8i3,  il 
n'y  eut  presque  point  d'affaires 
importantes  où  il  no  parlât  con- 
tre le  ministère;  ainsi  il  blâma, 
en  1H07,  la  traite  des  nègres;  en 
1808,  l'attaque  de  Copenhague; 
en  1809,  le  plan  et  la  conduite 
des  ministres,  relativement  à  l'ex- 
))édilion  anglaise  en  Espagne,  et 
h  celle  de  Walcheren  l'année  sui- 
vante ;  le  19  iuillct,  il  s'élevn 
contre  le  bill  de  lord  Stanhope, 
»ur  les  billet»  de  caisse;  et  le  1  5 
mai  iSi3,  après  avoir  déploré  la 
publicité  qu'on  avait  donnée  à 
l'uffairc  de  la  {Princesse  de  Galles 
(  voy.  Caroline  ) ,  il  se  rangea  du 
cOté  du  ministère.  Cependant,  le 


TIE  t 

24  jui"  i^'4>  ''  répondit  ù.  lord 
Castlereagh,  qui  prêtait  à  l'oppo- 
liilion  des  vues  intéressées  dans 
cette  affaire,  «  qu'on  avait  profité 
de  la  maladie  du  roi  pour  dégra- 
der la  princesse  et  lui  faire  subir 
des   affronts   humilians,   dont    le 
parlement  seul  pouvait  demander 
justice.  »  Le  5  novembre,  il  atta- 
qua les  minisires  au  sujet  de  la 
guerre  d'Amérique,  et  démontra 
le  ridicule  des  plans  de  finances 
de  M.   Vansiltart,  chancelier  de 
l'échiquier.  Sa  conduite  dans  les 
débals  auxquels  la  rentrée  en  Fran- 
ce de  Napoléon,  en  181 5,  four- 
nit matière,  donna  la  mesure  de 
sa  prudence;  il  s'exprima  de  ma- 
nier? à  rester  maître  de  se  pro- 
noncer d'après  les  évéïiemens.  En 
février  1816,  il  parla  sur  l'état 
des  forces  que  le  gouvernement 
se  proposait  de  garder  sur  pied, 
et  déclara  qu'il  craignait  le  pou- 
voir d'un  monarque  soutenu  par 
i5o,ooo  hommes;  dans  le  même 
mois,  il  insista  sur  la  lecture  to- 
tale des  pétitions  adressées  à  la 
chambre,  ajoutant  <■  que  c'était 
bien  le  njoins  qu'on  pût  faire  que 
de  prêter  l'oreille  aux  prières  du 
peuple.  »  Au  mois  d'avril  ,  il  blâ- 
ma avec  force  la  conduite  d'un 
garde  à  cheval ,  qui  s'était  permis 
des  voies  de  fait  à  l'égard  de  deux 
membres  de  la  chambre,   et  se 
récria  contre  l'emploi  de  la  force 
armée  dans  les  cérémonies  ||ubli- 
ques,  où  l'intervention  des  cons- 
tables   pouvait   suffire   au   main- 
tien de  l'ordre.    Dans  le  couraut 
de  mai,  il  attaqua  l'énormilc  de 
la  liste  civile,  «  abus  dont  la  plu- 
part des  états  européens  présen- 
tent  aujourd'hui   l'existence  ,   et 
l'un  des  plus  funestes  à  la  liberté, 


8  TIE 

par  la  manière  dont  il  facilite 
l'emploi  des  moyens  de  corrnp- 
tion.  »  An  mois  de  juillet  suivant, 
M.  Tieruey  fut  attaqué  d'une  ma- 
ladie qui  fil  désespérer  de  sa  vie  ; 
il  se  rétablit  néanmoins  ,  et  repa- 
rut au  parlement  le  6  mai  1817. 
Il  n'avait  rien  perdu  de  son  talent 
ni  de  sa  causticité,  et  donna  ime 
nouvelle  preuve  de  l'un  et  de  l'au- 
tre ,  en  discutant  un  bill  d'amnis- 
tie proposé  par  les  ministres;  lord 
Casllereagh  y  répondit,  mais  ne 
put  détruire  l'impression  qu'il 
avait  faite  dans  la  chambre.  De- 
puis ce  moment,  M.  Tierney  prit 
la  parole  beaucoup  moins  sou- 
Tent,  et  parut  se  borner  aux  ques- 
tions concernant  les  finances  .  les 
affaires  et  les  ressources  de  l'Inde, 
(let  orateur  est  un  exemple  frap- 
pant du  discrédit  où  peuvent  en- 
traîner un  homme  même  d'un 
grand  talent,  la  versatilité  de  sa 
conduite  et  l'indécii^ion  de  son 
caractère  public;  il  fut  im  temps 
où  les  électeurs  du  parti  popu- 
laire ,  dans  leur  enthousiasme , 
faisaient  bapliser  leurs  enfaus 
sous  le  nom  de  M.  Tierney;  à  une 
autre  époque,  les  mêmes  élec- 
teurs, pour  signaler  leur  mépris 
pour  un  homme  qu'ils  regar- 
daient comme  un  apostat  politi- 
que ,  donnaient  à  leurs  chiens  un 
nom  qu'ils  avaient  tant  vénéré.*  Il 
a  publié  :  1°  Lettre  au  très-liorio- 
rable^ienri  Dundas ,  sur  la  situa- 
tion de  la  Compagnie  des  Indes- 
Orientales,  in-8°,  1791.  C'est  une 
critique  qui  parut  sous  le  voile  de 
l'anonyme,  et  qui  fut  réfutée  par 
M.  Georges  Anderson.  2°  M.  Tier- 
ney publia  sous  son  nom  une  au- 
tre Lettre  de  M.  Anderson  à  M. 
Dundas,  sur  l'état  des  affaires  de 


Tir. 

la  Compagnie  des  Indes,  in- 8', 
1791  ;  3°  deux  Lettres  sur  la  péti- 
tion de  Colchester,  in-Zj",  1791  ; 
4°  Situation  réelle  de  la  Compagnie 
des  Indus-Orientales ,  eu  égard  à 
ses  droits  et  à  ses  privilèges,  in-8", 

'707- 

TILLY  (le  comte  de  ),  lieute- 
nant-général, grand-offîcier  de  la 
légion  -  d'honneur  ,  chevalier  de 
Saint-Louis,  grand'croix tle  l'or- 
dre de  l'aigle-rouge  de  Prusse  , 
membre  de  la  chambre  des  repré- 
sentans ,  entra  de  bonne  heure 
dans  la  carrière  des  armes  ,  et , 
quoique  noble,  ce  ne  fut  qu'à  la 
révolution  ,  dont  il*  adopta  les 
principes,  qu'il  dut  le  grade  de 
colonel.  Le  général  Dumouriez  le 
choisit  pour  aide -de -camp  en 
1792,  et  lui  confia  le  commande- 
ment de  Gerlriiydenberg ,  place 
où  il  avait  réuni  tous  les  moyens 
qui  pouvaient  lui  faciliter  l'entrée 
de  la  Hollande.  La  levée  du  siège 
de  Maëstrichl  força  Dumouriez  à 
s'éloigner;  avant  de  partir,  il  fit 
donner  au  colonel  dé  Tilly  sa  pa- 
role d'honneur  qu'il  ne  rendrait 
pas  la  place  sans  un  ordre  écrit  de 
sa  main.  L'événement  arriva  bien- 
tôt. Par  suite  de  la  perte  de  la  ba- 
taille de  Nerwinde,et  des  capitula- 
tions d'Anvers  et  de  Bréda,  il  fut 
sommé,  au  nom  du  comte  de  War- 
tensleben  ,  chef  d'état- major  du 
prince  Frédéric  d'Orange,  de 
«  remettre  la  place,  ou  d'être, 
dans  le  cas  contraire,  du  premier 
jusqu'au  dernier,  passés  au  fil  de 
l'épée,  sans  miséricorde  quelcon- 
que, n  M.  de  Tilly  répondit  sim- 
plement au  parlementaire  :  «  M. 
le  comte  de  Warfensleben  s'est 
trompé  d'adresse.  »  Néanmoins 
une  seconde  sommation  lui  ayant 


TTL 

été  faite,  il  déclara  qu'il  capilu- 
lerait  s'il  en  recevait  l'ordre  du 
général  Dumouriez.  On  lui  fit  ob- 
server que  ce  général  n'était  plus 
au  service  de  la  république.  M.  de 
ïilly  resta  inébranlable,  et  en  ef- 
fet, il  ne  capitula  que  le  i"  avril 
1793,  sur  la  présentation  de  l'or- 
dre écrit  de  Dumouriez  lui-même. 
Il  obtint,  par  suite  de  «es  vives 
instances,  que  la  garnison  ne  dé- 
filerait pas  devant  les  troupes 
étrangères.  Envoyé  à  l'armée  des 
côtes  de  Cherbourg,  il  en  prit  le 
commandement  le  12  novembre 
de  la  même  année.  Au  mois  de  dé- 
cembre,il  remportade  grands  avan- 
tages sur  lesVendéens,  et  fut  toule- 
fois  forcé  de  donner  sa  démission, 
comme  noble  ;  remis  presque  aus- 
sitôt en  activité  à  l'armée  de  Sam- 
bre-et-Meuse,  il  en  commanda  la 
réserve  ,  lorsque  ,  sous  les  ordres 
du  général  Jourdan  ,  elle  pas^a  le 
Rhin  en  1795.  A  l'affaire  du  20 
vendémiaire,  à  Hoecht,  près  de 
Nidda,  il  repoussa  pendant  toute 
la  journée  les  tentatives  que  fit 
l'ennemi  pour  franchir  celte  ri- 
viéie.  Nommé,  au  mois  de  janvier 
179G,  commant^mt  des  neuf  dé- 

Fartemens  réunis,  il  se  concilia 
estime  générale  par  son  athni- 
nislralion  sage,  sa  justice  et  son 
désintéressement.  Chef  d'état- 
major  de  l'année  du  Nord,  au 
mois  d'août  1796,  il  conserva 
cette  qualité  à  l'armée  de  Sambre- 
el-Meuse,  où  il  passa  en  1798, 
et  fut  nommé  inspecteur-général 
des  troupes  françaises  stationnées 
en  Hollande.  Le  gouvernement 
consulaire  lui  confia,  en  1799,  le 
coniniandemenlde.s  24'  et  25*  di- 
visions. En  1800,  employé  à  l'ar- 
mée de  l'Ouest  en  qualité  de  gé- 


TIN  9 

néral  de  division ,  il  commanda 
en  chef,   par  intérim  t   pendant 
seize  mois.  Il  eut,  en   1804,   le 
commandement  de  la  cavalerie  au 
camp  de  Boulogne.  Passé  au  pre- 
mier corps  d'armée,  le  général 
de  Tilly  fit,  avec  autant  de  distinc- 
tion que  de  parfait  désintéresse- 
ment,les  campagnes  d'Allemagne, 
de  Prusse  et   d«   Pologne.   Il  se 
conduisit  d'une  manière  aussi  no- 
ble en  Espagne ,  où  il  reçut  de 
l'emploi  en  1808.  Gouverneur  de 
la   province   de    Ségovie  ,   après 
l'occupation  de  Rladrid,  il  s'y  fit 
estimer  de  tous  les  habitons.   Il 
eut,    en    1811,   en   Andalousie, 
im  commandement  de  cavalerie  ; 
à  la  bataille  d'Occana ,  il  fit  des 
prodiges  de  valeur,  montra  «  une 
habileté  consommée  dans  l'art  de 
faire   manoeuvrer   la  cavalerie», 
et  fit  aux  Anglais  un  grand  nom- 
bre de  prisonniers.  De  retour  en 
France,  en  août  181 5,  il  devint 
inspecteur-général   de   cavalerie. 
Après  la   première   restauration  , 
en  j8i4,  le  roi  le  nomma  cheva- 
lier de  Sairtt-Louis,  puis  grand- 
olïicier  de   la   légion-d'honneur. 
Vendant  les  cent  joui's  .  en  i8i5, 
le  général  de  Tilly  fut  nommé  par 
Napoléon ,  président  du    collège 
électoral  du  déparlement  du  Cal- 
vados, qui  l'élut  à  la  chambre  des 
représentans.  A  la  seconde  res- 
tauration, il  fut  mis  à  la  retraite. 
Le  général  de  'l'illy  mourut  A  Pa- 
ris, le  10  janvier  1822,  regrelté 
de  tous  ses  frères  d'armes  et  es- 
timé de  tous  ses  concitoyens  ,  qui 
rendaient  justice  à  ses  qualités  per- 
sonnelles cl  à  ses  vertus  civiques. 
TINDAL  (  Ralph  Dikdas,  ba- 
ron de),   lieutenant-général  des 
arméci  françaises  ,   et  depuis  du 


10  TIN 

celles  du  nouveau  royaume  des 
l'ays-Bas  ,  officier  de  la  légion- 
d'honneur, etc,  ncen  1773a  Deven- 
ter,  en  Hollande,  entra  dans  la 
carrière  des  armes  dès  sa  première 
jeunesse,  et  s'y  distingua  par  ses 
talens  et  sa  brillante  valeur.  Il  en 
donna  de  fréquentes  preuves  pen- 
dant la  campagne  de  1799  contre 
les  Anglais,  dans  la  Nord -Hol- 
lande. Il  y  fut  blessé  difl'érentes 
fois,  et  grièvement  à  la  bataille 
de  Bergen  le  19  septembre.  Nom- 
mé capitaine  de  la  garde  du  grand- 
pensionnaire  Schimmelpennink  , 
il  passa  ensuite  dans  celle  du  roi 
Louis,  qui  le  nomma  major,  et 
bientôt  colonel  du  beau  régiment 
de  grenadiers  de  la  garde  hollan- 
daise. A  l'époque  de  la  réunion 
de  la  Hollande  à  l'empire  fran- 
i;ais ,  ce  régiment  fut  incorporé 
dans  la  garde  impériale,  et  le  co- 
lonel Tindal  en  conserva  le  com- 
mandement. En  18 12,  il  fut  promu 
au  grade  de  général  de  brigade,  et  à 
la  fin  de  la  campagne,  ilfutnom- 
iTié  adjudant -général  des  chas- 
seurs à  pied  de  la  gartle.  Il  com- 
manda cette  brigade  jusqu'au  26 
août  181 5,  veille  de  la  bataille  de 
Dresde,  où  il  fut  de  nouveau  griè- 
vement blessé  ,  en  débouchant  des 
portes  de  cette  ville,  à  la  tête  de 
son  corps.  Napoléon  le  nomma 
général  de  division ,  ordonnant 
qu'il  continuerait  d'être  considéré 
cornme  faisant  partie  de  la  garde 
impériale,  et  lui  conféra,  en  outre , 
le  titre  de  baron.  Le  général  ïindal, 
par  suite  de  ses  blessures  ,  se  re- 
tira à  Versailles,  et  après  les  évé- 
nemens  de  1814,  il  retourna  dans 
sa  patrie.  Le  nouveau  souverain 
du  royaume  des  Pays-Bas  s'em- 
pressa   de  réclamer   les   services 


TIN 

d'un  militaire  aussi  distingué,  qui 
rentrait  dans  ses  foyers,  précédé 
de  la  plus  brillante  réputation  ;  il 
fut  nommé  lieutenant -général  , 
inspecteur  de  l'infanterie,  et,  vers 
la  fin  de  l'année  1814,  chargé 
du  portefeuille  du  ministère  de  la 
guerre  en  Belgique.  Il  rendit 
d'éminens  services  dans  ce  poste, 
et  l'armée  batavo-belge  lui  dut, 
en  grande  partie,  sa  prompte  et 
belle  organisation. En  181  5,  legé- 
néral  Tindal  eut  le  commande- 
ment en  chef  de  l'armée  de  réser- 
ve ;  le  roif de  France,  Louis  XVIII , 
lui  envoya  la  croix  du  mérite  mi- 
litaire ,  et  le  roi  des  Pays-Bas  le 
nomma  commandeur  de  l'ordre  de 
Guillaume.  Depuis  cette  époque, 
le  commandement  de  la  sixième 
division  territoriale,  dont  la  place 
de  Namur  est  le  chef-lieu,  a  été 
confié  à  ce  général. 

TINGRY  (  Pierre-Frawçois  )  , 
chimiste  et  pharmacien  à  Genève, 
est  né  dans  cette  ville,  et  y  est  de- 
venu successivement  membre  de 
la  société  pour  l'encouragement 
des  arts,  et  professeur  de  chimie 
à  l'flcadémie.  M.  Tingry  fixa  sur 
lui  l'attention,  eo  publiant  ,  en 
1785,  une  analyse  fort  savante  de 
la  source  ferrugineuse  qui  avait  1 
été  découverte  ,  en  1785.  aux 
bords  de  la  Drise,  près  de  Ca- 
rougc.  Outre  cet  ouvrage  ,  il  a 
donné  dans  le  recueil  de  l'acadé- 
mie de  Turin,  et  dans  les  Annales 
de  Chimie  ,'  plusieurs  Mémoires 
remarquables  ,  entre  autres  ,  i" 
sur  la  composilion  de  l'éiher,  1 788; 
1°  sur  l'acide  phosplioriqiie,  1789  ; 
3°  sur  la  consistance  que  les  huiles 
acquièrent  à  ta  lumière,  «798  ;  4" 
sur  la  phosphorescence  des  corps,  et 
particulièrement  des  eaux  de  lamer; 


TIP 

5°  sur  la  nature  du  fluide  électrique; 
(i'enfin,  un  ou  vragequi  jouitd'une 
très-griinde  estime,  un  Traité  sur 
l'art  de  faire  et  d'employer  les  ver- 
nis, a  vol.  in -8",  Genève,  i8o5. 
TIPOO-SAEB,  sultan  de  My- 
»ore,   fils   d'Hayder- Ali-Rhan, 
succéda  à  son  père  le  9  novembre 
1782.    Hayder-Ali   avait    fondé  , 
par  ses  conquêtes  et  son  génie, 
l'un  des  plus  formidables  empires 
de  rindonslan.    Fils  d'un  oUicier 
de  cavalerie  du  Mogol ,  auquel  le 
rajah  de  Mysore  avait  donné,  pour 
récompense  de  ses  services,  la  for- 
teresse de-  Bengalore  cl   le   pays 
environnant,  il  profita  de  la  jeu- 
nesse du  rajah,  dont  il  se  constitua 
Je  tuteur,  pour  s'emparer  du  trône 
sous  le  nom  de  régent,  et  s'y  con- 
solider par  sa  prudence  et  son  cou- 
rage. Après  a  voir  conquis  Canara  et 
Calicul,  on  vil  rentrer  triomphant 
ù  Seringapalnam,  et  en  maître  de 
plusieurs   royaumes,    celui   qui, 
peu  d'années  auparavant,  en  était 
«orti  simple  officier.  Cette  gloire 
ne  servit  qu'à  lui  inspirer  de  plus 
grands  desseins;  réunir  les  débris 
de   l'empire    d'Aureng  Zebe,   et 
chasser  les  Anglais  de  l'Inde,  telle 
était  la  pensée  politique  d'Hayder. 
Plusieurs    foi»    l'orage  ,    que   ce 
grand  homme  avait  soulevé  con- 
tre les  usurpateurs,  fondit  sur  eux 
et  troubla  leur  repos  ;  mais  la  pru- 
dence et  la  tactique  européennes 
devaient   triompher  de   toute   la 
bravoure  et  de  toute  l'impétuosité 
de  leur  ennemi.  Hayder.  battu  A 
Trinomaly  ,   connut ,   dan-*  cette 
campagne,  le  fils  auquel  il  devait 
léguer    l'empire.     Tipoo-Saëb, 
l'aîné  de  ses  enl'ans,  dévastait  le 
Carnaticet  menaçait  IMadras,  pen- 
«latif  que  le  général  Sniilh  avait 


TIP  11 

reporté  la  guerre  au  sein  du  My- 
0ore.  La  mort  d'Hayder,  contre 
le  génie  duquel  la  fortune,  la  ruse 
et  la  politique  avaient  conspiré, 
légua  la  puissance  à  Tipoo-Saëb, 
qui  prit  le  titre  de  sultan.  Ce  jeune 
guerrier,  d'une  bravoure  témé- 
raire, d'une  ûme  plus  ardente  que 
profonde,  d'un  esprit  plus  violent 
que  réfléchi,  outré  dans  ses  qua- 
lités comme  dans  ses  défauts  , 
ferme  jusqu'à  l'opiniSlrelé,  vindi- 
catif jusqu'à  la  cruauté,  accessi- 
ble à  tous  lessentimens  généreux, 
doué  d'une  de  ces  organisations 
impétueuses  que  nul  obstacle  ne 
peut  arrêter,  que  nulle  résistance 
ne  peut  vaincre  ;  magnifiqutî  dans 
l'emploi  du  pouvoir;  imprudent 
cl  implacable  dans  sa  générosité 
comme  dans  sa  vengeance  :  cet 
homme  voulut  continuer  l'ouvra- 
ge de  son  père;  ses  desseins  furent 
conçus  avec  plus  d'audace  que  de 
prudence.  A  peine  les  Anglais  eu- 
rent-ils appris  la  morl  d'Hayder, 
qu'ils  attaquèrent  son  fils  dans  son 
royaume  même.  Battus  sur  tous 
les  points  par  Tipoo-Saëb,  sou- 
tenu par  plusieurs  délachemens 
français,  ils  furent  obliges  de;  lui 
rendre  les  provinces  qu'ils  avaient 
conquises.  Cependant  l'adresse  de 
leur  politique  répara  bientôt  les 
désastres  de  celte  campagne,  et 
les  possessions  anglaises,  mena- 
cées d'une  destruction  prochai- 
ne, se  trouvèrent,  parole  trai- 
té même  qui  suivit  celle  campa- 
gne, mieux  affermies  que  jamais  ) 
nu-delà  du  cap  de  Bonne-Espéran- 
ce. Huil  années  de  paix  succédè- 
rent à  celte  guerre  glorieuse.  La 
magnificence,  l'activité  cl  les  ver- 
tjis  d«;  Tipoo-Saëb  se  déployè- 
rent librcmetil  ;  il  accuelllil  A  s» 


12  IIP 

cour  plusieurs  ofliciers  français  : 
son  atrabilité  gagnait  les  cœurs,  il 
n'était  pas  dénué  d'instruction,  et 
mêlait  aux  pompes  asiatiques 
quelque  sentiment  du  goût  et  de 
la  grûce  européenne.  Toutes  les 
passions,  l'amour,  la  gloire,  les 
arts,  remplissaient  son  cœur; 
lassé  d'un  long  repos,  éveillé  par 
l'image  des  victoires  de  son  père, 
il  résolut  d'attaquer  de  nouveau 
les  possessions  anglaises.  Trois  de 
ses  ambassadeurs  allèrent  sollici- 
ter l'appui  du  cabinet  de  Versail- 
les ;  ses  envoyés,  reçus  en  grande 
pompe,  n'obtinrent  aucun  Iruit  de 
lcurambassade,etTipoo-Saëb,  fa- 
tigué d'entendre  l'un  d'eux  vanter, 
à  leur  retour,  les  magnidcences  et 
le  bonheur  de  la  France,  lui  tran- 
cha la  tête  de  sa  propre  main. 
Cependant  on  allait  envoyer  des 
renforts  au  sultan,  lorsque  la  ré- 
volution française  éclata  et  laissa 
le  malheureux  prince  sans  allié, 
sans  secours,  forcé  de  lutter  con- 
tre les  ennemis  puissans  qu'il  a- 
vait  irrités,  et  que  sa  présence  et 
sa  puissance  inquiétaient  sans 
cesse.  Tipoo-Saëb ,  bravant  tant 
de  diflicu'tés  réunies,  commença 
les  hostilités;  aussitôt  le  général 
Cornwallis  entra  dans  le  iVlysore, 
et  trompant,  par  des  marches  ha- 
biles, la  vigilance  du  sultan,  alla 
investir  Bengalore,  place  impor- 
tante ,  prise  après  deux  mois  de 
siège.  L,e  courage  que  Tipoo-Saëb 
montra  pendant  cette  campagne, 
fut  absolwnent  inutile;  il  paya  les 
frais  de  la  guerre  ,  et  céda  à  l'An- 
gleterre le  tiers  de  ses  domaines. 
Son  Hme  lière  se  révolta  contre 
ce  traité  ;  le  besoin  de  la  ven- 
geance l'occupa  tout  entier,  les 
plaisirs   s'exilèrent  de  sa  cour,  il 


IIP 

•e  couvrit  d*habits  de  deuil,  son 
administration  devint  plus  sévère, 
il  ne  songea  plu»  qu'aux  moyeils 
de  rendre  aux  Anglais  les  af- 
fronts qu'il  en  avait  reçus.  Il  com- 
bina long-temps  les  ressources 
éloignées  ou  prochaines  auxquel- 
les sa  politique  pouvait  avoir  re- 
cours ,  écrivit  à  Bonaparte  ,  con- 
quérant de  l'Egypte;  négocia  avec 
les  principaux  états  de  l'Inde,  et 
le  directoire  français  ;  s'entendit 
avec  les  Abdalis,  accueillit  tous 
les  Européens  qui  pouvaient  le 
servir  dans  ses  relations  diploma- 
tiques ou  dans  ses  affaires  mili- 
taires, fortifia  ses  places,  chercha 
à  semer  la  discorde  entre  les  Hol- 
landais, lesAnglaiset  les  Français; 
enfin  entra  en  correspondance  a- 
vec  un  officier  français  nommé 
Raymond,  puissant  à  la  cour  du 
Nizam,  et  maître  d'un  corps  de 
i4!.ooo  hommes  et  d'un  territoire 
dont  le  revenu  était  évalué  à  qua- 
totze  millions  :  mesures  bien  en- 
tendues,  qui  annotiçaient  chez 
Tipoo  sultan,  un  coup  d'œil  vaste 
et  juste  ,  mais  dont  l'exécution 
fut  suivie  avec  trop  d'impruden- 
ce et  trop  de  précipitaliofi.  Ce- 
pendant la  destruction  des  éta- 
blissemens  français  préparait  de 
loin  l'envahissement  des  états  de 
Tipoo-Saëb,  et  les  Anglais,  avides 
de  conquérir  un  si  beau  royaume, 
fortifièrent  leurs  alliances  avec 
les  princes  ses  ennemis,  et  te- 
naient sur  pied  une  armée  de 
70,000  hommes.  Quelques  né- 
gociations insidieuses  précédè- 
rent la  déclaration  des  hostilités; 
on  opposa  la  ruse  à  la  ruse  avant 
de  combattre  la  force  par  la  force. 
Tipoo-Saëb  cherchait  à  tempori- 
ser encore,  lorsque  deux  armées 


TIP 

anglaises,  sorties  de  Madras  et  de 
Bombay,  s'avancèrent  vers  le  My- 
sore  pour  y  pénétrer  de  deux 
côtés  différens.  Cette  déclaration 
de  guerre,  ou  plutôt  cette  guerre 
sans  déclaration,  avait  pour  pré- 
texte les  relafions  de  Ïipoo-Saëb 
avec  le  gouvernement  français; 
mais  dans  la  réalité,  les  Anglais 
n'attendaient,  depuis  long-temps, 
qu'une  occasion  favoralile  pour 
renverser  le  trône  de  Mysore  et 
s'emparer  de  cet  état,  qui  leur 
offrait  une  communication  non 
interrompue  entre  la  côte  de  Co- 
romandeî  et  celle  de  Malabar. 
Tout  se  réunissait  contre  le  mal- 
heureux Tipoo-Saëb  ;  la  richesse 
desesennemis, leurs  troupes  supé- 
rieures en  discipline;  ^  peuple 
ruiné  par  des  exaclions  et  déci- 
mé par  des  levées  de  troupes,  la 
trahison  de  son  ministre  Meer- 
Saeïb ,  tout  conspirait  s;j  ruine. 
Cependant  le  sultan  faisait  têle  à 
l'orage  ;  après  avoir  été  battu  aux 
combats  décisifs  de  Sedeaser  et  de 
Maliiveljy,  il  alla  s'enfermer  dans 
Seringapatnain  ,  sa  capitale.  Ces 
1^  Anglais  lui  firent  alors  des  propo- 
sitions très-dures  ,  qu'il  refusa 
obstinément;  vaincre  ous'cnvelir 
sous  les  débris  de  sa  capitale,  fut 
la  dernière  résolution  de  ce  Mi- 
ihridate  de  Tlndouslan.  Canonnée 
pendant  la  nuit  du  20  avril.  1799, 
battue  en  brèche  le  lendemain  , 
elle  fut  disputée  i\  l'ennemi  avec 
lo  plus  opiniâtre  bravoure  par  le 
sultan  lui-même,  qui  se  montrait 
à  tous  les  postes  dangereux,  et 
par  les  Mysoréens  qui ,  ralliés  par 
5oo  Français  que  commandait  le 
colonel  Chapuys,  firent  des  pro- 
diges de  courage.  Ce  prince  périt 
cribh;  de  coups  ,   au    milieu    des 


TIR  i3 

siens  j  et  frappé,  dit-on,  par  le 
poignard  du  traître  Meer-Saeïb. 
Pour  découvrir  ce  cadavre  hé- 
roïque, il  fallut  soulever  des  mon- 
ceaux de  corps  sous  lesquels  il 
était  ensev«di.  Meer-Saeïb  fut  é- 
gorgé  par  les  cipayes,  et  enterré 
sous  les  babouches  de  la  garde 
mysoréenne;  aujourd'hui  même 
le  lieu  de  sa  sépulture  est  infâme 
et  consacré  aux  plus  vils  usages. 
Telle  fut  la  vie  de  Tipoo-Saëb, 
fils  du  grand  Hayder-Ali-Rhan , 
toujours  brave,  toujours  en  lutte 
avec  le  sort.  Peu  de  héros  des 
temps  modernes  ont  mérité  mieux 
que  lui  Ihonneur  de  paraître  sur 
la  scène  dramatique,  entre  les  Ba- 
jazet  et  les  Gengis.  On  sait  que 
la  fragèdie  de  M.  Jouy,  intitulée  : 
Tipoo-Saëb,  représentée  en  1811, 
c'est-à-dire  douze  ans  seulement 
après  la  mort  de  ce  prince,  dut  en 
partie  son  succès  à  la  vérité  histo- 
rique à  laquelle  l'auteur  put  se 
montrer  d'autant  plus  fidèle,  qu'il 
avait  été  plusieurs  fois  admis  à  lu 
cour  et  dans  les  camps  du  sultan 
de  Mysore. 

TlftABOSCHl  (Jérôme)  ,  cé- 
lèbre littérateur  italien,  né  à  Ber- 
gamele  18  décembre  i^Si,  fut  ad- 
mis, à  l'âge  de  quinze  ans,  dans 
l'institut  des  Jésuites,  et,  en  sor- 
tant du  noviciat,  il  entra  dans  la 
carrière  de  l'enseignement.  Il  se 
liv«»  d'abord,  avec  ardeur,  aux 
évades  ihéologiqnes  ,  mais  se  don- 
nant ensuite  un  but  plus  utile,  il 
cultiva  la  littérature,  et  composa 
plusieurs  discours,  qui  annoncè- 
rent l'élévation  de  son  esprit  et 
J'étendue  de  ses  connaissances. 
En  i  ^ôt)  il  fit  paraître  l'histoire 
de  l'ordre  des  Jlumilics  (  Vetera 
liumiUatorum  monamenta.  Milan  , 


»4 


lia 


3  vol.  in-fol.),  qui  le  plaça  au 
rang  des  preinierd  lilléraleurs  de 
son  temps.  Le  comte  de  Finiiiaii, 
qui  ne  perdait  aucune  occasion 
pour  encourager  les  talens  ,  allait 
se  charger  de  l'élévalion  de  l'au- 
teur, lorsque  François  m  le  choi- 
sit pour  successeur  de  Granelli , 
dans  la  place  de  conservateur  en 
chef  de  la  bibliothèque  de  Modè- 
ne.  Profilant  des  trésors  que  la 
munilicencedes  princes  d'Esté  avait 
accumulés  dans  ce  vaste  dépôt  des 
connaissances  humaines,  le  nou- 
veau bibliothécaire  conçut  le 
plan  d'un  ouvrage,  qu'avant  lui 
on  aurait  cru  au  -  dessus  des 
moyens  d'un  seul  homme.  L'I- 
talie, cet  ancien  berceau  des 
lettres  et  des  arts,  n'avait  pas  en- 
core trouvé  un  écrivain  qui  eût 
pris  soin  de  rassembler,  dans  un 
seul  cadre,  les  litres  épars  de  ses 
richesses  littéraires.  La  tâche  en 
était  d'autant  plus  difficile,  qu'il 
fallait  s'élever  au-dessus  des  pré- 
tentions nmnicipales,  et  juger 
chaque  auleur  d'après  la  valeur 
réelle  de  ses  ouvrages.  Il  fallait, 
en  outre,  avoir  fait  une  étude  pro- 
fonde des  classiques  anciens  et 
Aiodernes  ,  être  initié  dans  les 
sciences,  avoir  du  goût  pour  les 
uns  ,  et  posséder  ce  coup  d'oeil  si 
nécessaire  pour  classer  avec  or- 
dre et  intelligence,  tant  de  ma- 
tériaux employés  à  la  consl^HJC- 
lion  d'un  édifice  aussi  riche  da^js 
les  détails  qu'il  devait  être  simple 
et  proportionné  dans  l'ensemble. 
Ce  grand  ouvrage  parut  après 
dix  années  de  travail,  et,  s'il  n'a 
pu  échapper  aux  critiques  de  quel-, 
ques  censeurs  pustéres,  il  a  trou- 
vé un  plus  grand  nombre  d'admi- 
rateurs, qui  en  ont  pris  la  défense. 


TIR 

VHistolre  de  la  littérature  italien- 
ne^ plusieurs  fois  réimprimée  eu 
Italie,  et  dont  il  existe  des  abrégé» 
en  français  et  en  allemand,  re- 
monte jusqu'aux  temps  des  Étrus- 
ques ,  «*t ,  en  suivant  toutes  les  vi- 
cissitudes de  la  civilisation  de  la 
grande  Grèce,  des  Romains  et  des 
Italiens,  s'arrête  à  la  fin  du  17* 
siècle,  qui  aurait  été  l'avant-der- 
nier  si  l'auteur  n'avait  pas  été 
forcé  de  suspendre  ce  travail.  Le 
duc  de  Modène  le  récompensa, 
en  le  nommant  chevalier,  tX  en 
l'appelant  dans  son  conseil.  Tira- 
boschi  crut  ne  pouvoir  mieuxlui  té- 
moigner sa  reconnaissance  qu'en 
composant  une  biographie  des  au- 
teurs nés  dans  ses  états.  (  Bibliê- 
teca  moclenese.  Modène,  1781,  (5 
vol.  in-4°),  et  en  publiant  diffé- 
rens  ouvrages  sur  l'histoire  et 
la  topographie  du  même  pays. 
[Memoriestoriclie Modenesi,  ibid., 
1793,  3  vol.  in-^i"  ;  Storia  delta 
Badia  di  Nonantola,  ibid. ,  1784, 
2  vol.  in-fol.,  et  Dizionario  topo- 
grafico  storico  degli  stali  estensij 
ibick,  1824»  in-4''.)  Il  ne  cessait 
pas  cependant  d'enrichir  la  lit- 
térature de  plusieurs  morceaux 
sur  des  sujets  nouveaux,  ou  qui 
exigeaientdenouvelles  recherches. 
Un  homme,  dont  la  vie  entière 
avait  été  consacrée  à  des  travaux 
utiles  ou  glorieux  pour  sa  patrie, 
ne  pouvait  qu'y  être  aimé  et  ho- 
noré ;  aussi  sa  mort,  arrivée  le  3 
juin  1794)  répandit  le  deuil  dans 
toute  l'Italie,  où  la  mémoire  de 
Tiraboschi  sera  aussi  durable 
qu'elle  y  est  révérée. 

TIKLET  (le  vicomte  Lobis)  , 
lieuleiiiint-général,  commandeur 
des  ordres  royaux  de  l.i  légion- 
d'honneur  et  de  Saint-Loui»,  est  né 


TIS 

en  1773,  et  fut  élevé  à  l'école  d'ar- 
tillerie deChâlons.  Capit.iine  d'ar- 
tillerie en  1795,  à  l'âge  de  20  ans, 
il  était,  3  ans  après,  chef  de  batail- 
lon des  pontonniers  à  l'armée  de 
Sambre-et-Meuse.  Ses  services  lui 
valurent,  en  1799,  le  grade  de 
colonel,  et,  peu  de  temps  aprè^,  la 
place  de  chef  d'élat-major  d'artil- 
lerie à  l'armée  d'Orient. En  i8o3, 
il  fut  nommé  général  de  brigade, 
et  employé  en  Hollande,  en  Alle- 
magne et  en  Espagne.  La  retraite 
de  Portugal,  au  mois  de  juillet 
1812,  lui  fournit  l'occasion  d'être 
cité  avec  distinction;  il  le  fut  aussi 
pour  la  part  qu'il  prit,  en  octo- 
bre (1812),  i  la  poursuite  des  An- 
glais, qui  furent  forcés  de  lever 
le  siège  de  Burgos.  11  obtint,  en 
i8i3,  le  grade  de  général  de  di- 
vision. Inspecteur-général  d'artil- 
lerie pour  les  directions  de  Tou- 
louse, Montpellier,  Perpignan  et 
Bayonne,  il  reçut  du  roi,  le  19 
juillet  1814,  la  croix  de  Saint- 
Louis,  et  le  til.-e  de  grand-ollicier 
de  la  légion-d'hont»eur,  le  i/|  fé- 
vrier 181  5.  Le  général  Tirlel  com- 
mandait, en  181  5,  l'artillerie  du 
2*  cor|)s  d'observation.  Il  est  en- 
core aujourd'hui  (182'»)  employé 
dans  le  corps  royal  d'artillerie. 

TISSOT  (le  chevalier  Clé- 
ment-Joseph), docteur  en  méde- 
cine, officier  de  la  légioti-dhon- 
neur,  uildecin  consultant  de  M. 
le  duc  d'Orléans,  vice-président 
de  la  société  de  médecine-prati- 
que, est  né  vers  1750,  à  Onians, 
département  du  Jura;  il  est  origi- 
naire de  Suisse  et  parent  du  célè- 
bre'fissot,  H  qui  il  doit  des  <;on- 
seil»  dans  ses  études  ujédicales. 
Ueçu  docteur  en  177G,  il  vint  A 
Paris,  où  il  fut  !«•  disciple,   le  s.c- 


TIS  i5 

crétaire  et  l'ami  de  son  compa- 
triote Tronchin  {voyez  ce  nom), 
A  la  recommandation  duquel  il  re- 
put, en  1787,  le  brevet  de  méde- 
cin-ailjoint  de  la  maison  du  duc 
d'Orléans.  Appelé,  en  1788,  en 
qualité  de  chirurgien  en  chef  ad- 
joint du  camp  de  Saint -Orner, 
commandé  par  le  prince  de  Con- 
dé,  il  fut,  peu  de  temps  après, 
nommé  par  le  roi  inspecteur  divi- 
sionnaire des  hôpitaux  de  l'Alsace 
et  de  la  Franche-Comté,  fonc- 
tions qu'il  quitta  en  1792  pour  oc- 
cuper celles  de  chirurgien  en  chef 
de  l'hôpital  militaire  de  Lyon,  jus- 
que après  le  siège  de  cette  ville. 
<■  M.  Tissot,  dit  un  de  ses  biogra- 
phes, a  éprouvé  beaucoup  de 
persécutions  pendant  la  révolu- 
tion. Après  la  levée  du  siège  de 
Lyon,  en  1795,  il  fut  suspendu  de 
ses  fondions,  puis  arrêté  et  tra- 
duit à  la  commission  temporaire, 
pour  avoir  publié  tm  écrit,  d'après 
le  vœu  de  la  municipalité  provi- 
soire, sur  les  causes  de  la  mort 
des  blessés  par  des  armes  à  feu  , 
dans  la  journée  du  29  mai,  et 
pour  avoir  obéi  aux  ordres  du 
comte  de  Précy.  il  fut  encore  ar- 
rêté à  Paris  en  1796,  dénoncé  au 
général  en  chef  à  Maycnce,  en 
1797,  *"*«'été  à  Wesel,  en  1798,  et 
à  Dusseldorff  en  1799.  On  l'accu- 
sa, dans  celle  dernière  ville,  d'en- 
tretenir des  correspondances  avec 
Pichegru ,  Couchery  et  d'autres 
députés  proscrits  à  la  journée  du 
18  fructidor.  »  Après  la  p.tix  de 
Lunéville,  en  1801,  il  reçut  le 
brevet  d'officier  de  santé  supé- 
rieur dé  l'hôpital  d'Aix-la-Cha- 
pelle, pour  l'inspection  des  eaux 
minérales.  Remis  en  activité  de 
service,  il  fil  toutes  les  campagnes 


ifi 


TIS 


«l'Autriche,  de  Prusse,  de  Polo- 
gne, d'Italie,  etc.,  et  lut  Dommé, 
en  récompense ,   chevalier  de  la 
légion  -  d'honneur.    M.   ïissol  a 
rendu  des  services  trés-imporlans 
à    rhunianité,    en    arrêtant,    en 
1794  et  1795,   les  épidémies  qui 
s'étaient  manifestées  dans  les  hô- 
pitaux militaires  et  dans  les  dépôts 
de   prisonniers  de  guerre   établis 
dans  les   ci-devant   provinces   de 
Bourgogne  et  de  la  Franche-Comté, 
et  en  1806,  en  portant  les  secours 
de  son  art  aux  prisonniers  autri- 
chiens cantonnés  dans  la  Souabe. 
L'archiduc  Charles  le  félicita  par 
une  lettre  flatteuse,  lui  envoya  le 
diplôme  de  membre  honoraire  de 
l'académie  impériale  Joséphine  de 
médecine  à  Vienne,  et  une  taba- 
tière de  grand  prix,    ornée    d'un 
médaillon  faisant  allusion  à  cette 
dernière  épidén)ie.  En  1809,  étant 
à  Vienne  avec  l'armée  française  , 
il  reçut  de  la  municipalité  de  cette 
ville  l'expression  publique  de  sa 
l'cconnaissance;  et  en  1814»  pré- 
senté  à  l'empereur    d'Autriche, 
alors  à  Paris  avec  les  autres  sou- 
verains  alliés,    il    fut   très -bien 
accueilli    par    ce    monarque.  M. 
Tissot  exerce  encore  aujourd'hui 
(1825)  les    fonctions  de  vice-pré- 
sident de  la  société  de  médecine- 
pratique.  Il  a  publié:  1°  Gymnasti- 
que médicinale ,  Paris,  in- 12,  1781; 
a"  Topographie  médicinale  de  ISeuf- 
châleau,  suivie  d' observations  sur 
les  dangereux  effets  des  coups  de 
plat  de  sabre  «  (ce  qui  a  détermi- 
né ,    dit  le   biographe   que  nous 
avons  déjà  cité,  la  suppression  de 
cette  punition  militaire  par  une 
ordonnance  du  14  juillet  1789)0; 
sur  les  maladies  résultantes  du  sé- 
jour des  soldats  dans  les  prisons. 


TIS 

et  sur  les  moyens  de  les  prévenir 
par  une  autre  peine  ^    publiée  par 
ordre    du  roi  dans   le  7*  vol.  du 
Journal  de  médecine  militaire,  en 
1788;  3°  Observations  sur  les  cau- 
ses de  la  mort  des  blessés  par  des 
armes  à  feu,  que  l'on  accusait  avoir 
été  chargées  avec  des  balles  empoi- 
sonnées dans  la  journée  mémorable 
du  29  mai,  Lyon  1793;  4°  Obser- 
vations générales  sur  le  service  de 
santé  et  l'adminislralion  des  hôpi- 
taux ambulans  et  sédentaires  y  Lyon, 
1793;  5"  Recueil  d' observations  sur 
les    causes  de   l'épidémie   régnant 
dans  les  hôpitaux  et  les  dépôts  de 
prisonniers  de  guerre,  des  départe- 
mens   de  Saùne-et-Loire  et   de  la 
Côte-d'Or,  et  sur  les  moyens  d'en 
arrêter  les  progrès,    Dijon  1  794  ; 
6°  Receuil  d'observations    sur    les 
abus  diins  l'ordre  des  évacuations 
des  malades  et  des  blessés  de  l'ar- 
mée   dans    les    déparlemens    du 
Doubs,   du  Jura  et  de  la  Haute- 
Saône,  Besançon,  1794  ;  7°  Du  ré- 
gime diététique  dans   la  cure  des 
maladies;  8°  Des  effets  du  sommeil 
et   de   la  veille   dans  le  traitement 
des  maladies;  9°  De  l' influence  des 
passions  de  l'âme  dans  les  mala- 
dies, et  des  moyens   d'en  corriger 
les  m.auvais  effets.  Ces  trois  der- 
niers ouvrages,  approuvés  par  l'a- 
cadémie  royale  de   chirurgie  de 
Paris  en  1779,  1781  et  1780,  ont 
été  traduits  en  allemand  €t  impri- 
més à  Brunswick  en  1799.  10°  Né- 
crologie de  Lorentz ,    médecin  en 
chef  de  l'armée  du  Rhin,  publiée 
in-S",  et  insérée  dans  le  Journal 
de  Paris  en  avril  i  801;  11°  Compte 
rendu  au  grandbailU  du  landgraviat 
de  Meklembourg,    conseiller-auli- 
que  du  roi  de  fVurtemberg,  sur 
l'épidémie  de?  prisonniers  autri- 


y 


^tXiJ.uit. 


TOA 

chiens  dans  la  Souabe,  imprimé, 
en  français  et  en  allemand  ,  }»ar 
ordre  supérieur  A  Slockak ,  juin 
1806. 

TISSOT  (P.  F.),  voy.  le  Si-p- 
ptÉMENï  (le  ce  20*  TOl. 

TOALDO  (  Joseph  ) ,   célèbre 
astronome  italien,  naquit  en  1719 
A  l'ianezze,  petit  hameau  non  loin 
de  Vicence.  A  l'âge  de  i4  ans,  il 
fut  placé  au  séminaire  de  Padoue, 
où  il  prit  le  degré  de  docteur  en 
théoldgie  ,  et  fut  chargé  de  l'en- 
seignement des  belles-lettres.  En- 
traîné   vers  l'élude   des  sciences 
exactes,  il  composa  une  préface 
et  des  notes  po«ir  une  réimpres- 
sion des  œuvres  de  Galilée  ,  et  il 
eut  à  lutter  contre  la  timidité  de 
trois  censeurs,  qui  auraient  voulu 
exclure  de  cette  édition  les  fameux 
dialogues  sur  le  système  du  mon- 
de.  Nommé  archiprêtre  de  Mon- 
legalda,  petit  village  situé  entre 
Padoue  et  Vicence,  il  ne  cessa  du 
donner  à   l'étude  le  temps   qu'il 
pouvait  dér<»b«'rc\  ses  devoirs.  Pé- 
nétré d'un  sentiment  de  recon- 
naissance  envers   labbé    Coiili  , 
ilont  il  avait  été  l'élève  ,  il  pii!)lia 
une  notice  sur  la  vie  de  ce  littéra- 
teur ,  qui  fut  imprimée  h.  la  tête 
•de  ses  ouvrages.  Appelé,  en  17(>2, 
par  le  sénat  de  Venise  A  occuper 
le»  chaires  d'astronomie,  de  géo- 
graphie el  de  météorologie  à  l'u- 
niversité de  Padoue  ,  Toaido  em- 
ploya son  crédit  pour  faire  décré- 
ter la  fondation  d'un  observatoire, 
dont  il  se   chargea  de  donner  le 
plan  el  de  surveiller  les  travaux. 
Il  profita    pour    cela  d'une    au- 
cieime  tour  qui  avait  appiirlcnii 
au  fameux  tyran  Eccelin  ,  et  dès 
ipie  les  insirnmens  purent  y  Olre 
placés,  il  continua  les  observations 

T.    \X. 


TOA  17 

des  deux  Poleni ,  el  établit,  dans 
un  ouvrage  intitulé  Saggio  Mcteo- 
rologico ,    les    conjectures    qu'on 
pouvait   en    tirer   pour    calculer 
avec  pr(dîabilifé  les  acc.idens  fu- 
turs de  l'atmosphère.  Il  fit  mieux 
apprécier  l'iuiportauce    de   celie 
théorie, en  répondaiità  une  ques- 
tion  de  l'académie   de   Montpel- 
lier, sur  l'application  de  la  mé- 
téorologie   ù     l'agriculture.     Sou 
mémoire  fiit  couronné  ,  et  il  at- 
tira, sur  celte  partie  de  la  physi- 
que, l'attcnlion  des  savans,  enlre- 
autres  de  l'électeur  Palatin  ,  qui 
fonda  une  société  njétéorologique 
ù  Manheim.  Toaido  travaillait  de 
son  côté  A  confirmer  son  système 
par   tous    les    moyens  que    pou- 
vaient lui  fournir  son  iuslruction 
et  son  expérience.  Ayant  remar- 
qué qu'au  bout  de  dix-huit  ans, 
les  phénomènes  météorologiques 
reroivmiencent  et  se  succèdent  à 
peu  près  dans  le  même  ordre  ,  il 
dressa  les  tables  de  trois  de  ces 
périodes  .  auxquelles  il  donna  le 
nom  de  Saros^  et  que  les  astrono- 
mes appelèrent  nussi  Cycles  Toal- 
ilini.  Il  fit  paraîlieen  même  temps 
un  JAurnal  astro-nu''téorologiquc, 
destiné  principalenuml  à  répan- 
dre   sa    découverte.    Il   composa 
aussi  une  dissertation  sur  la  (dia- 
leur  de  la  lune,  pour  prouver  la 
force  d'allraclion   que  cette  |'l,i- 
nèle  exerce  sur  les  corps  terics- 
1res.   Sa  théorie  fut  attaquée  par 
Frisi  ,     auquel    il    répondit    par 
un  mémoire  qui   fait    partie    «les 
actes    de   l'académie   de    Berlin. 
Partisan     r.èlé    des     découvertes 
utiles  .   Toaido   s'«'mj)rcssa  d'aCï 
créditer,   par  simi  sulfrage  ,  celle 
de    Franklirï  ,    sur    les    conduc- 
teurs électriques,  et  il  arma  l'oli- 


i8 


10  A 


5ervatfȔrc  de  Gadoue  du  premier 
jîaralonm  rre  qu'on  ait  vu  dans 
les  él.ils  vénilieiis.  Il  serait  trop 
long  de  s'arrêter  au  délai!  de  tou- 
ti's  les  produclions  qui  sorlirent 
de  la  plume  de  ce  professeur  ;  il 
ne  se  passait  pas  d'année  qu'il  ne 
publiât  quel  que  ouvrage  remarqua- 
ble, tels  sont:sa  méthode  pour  dé- 
terminer les  longitudes,  ses  tables 
de  vitalité,  ses  traités  degnomoni- 
que  ,  et  de  trigonométrie  ,  ses 
Scliediasmes  astronomiques  ,  dont 
les  deux  premiers  roulent  sur  les 
éclipses  du  soleil,  et  le  troisième 
sur  le  passage  de  Mercure  devant 
cetaslre;  un  discours  sur  les  hi- 
vers extraordinaires  ,  plusieurs 
discussions  sur  la  sécheresse  de 
1779,  sur  les  brouillards  et  sur 
l'influence  dés  météores  ignés;  un 
pronostic  des  temps  et  des  sai- 
sons, lire  du  passage  des  oiseaux, 
un  dictionnaire  météorologique  , 
des  considérations  sur  un  nouveau 
cycle  et  sur  les  aspects  des  pla- 
nètes ;  les  présages  généraux  et 
particuliers  des  pluies  et  des  vents 
pour  le  golfe  Adriatique ,  dé- 
duits de  l'inspection  du  ciel  ; 
un  mémoire  sur  le  passage  d'An- 
nibal  par  les  Apennins  ,  etc. 
Les  rciuieils  savans  s'enrichirent 
de  plusieurs  de  ses  écrits.  Il  pu- 
blia, dans  le  journal  de  Modène, 
une  défense  de  Leibnitz  contre  le 
sentiment  de  Deluc,  louchant  la 
descente  du  mercure  dans  le  ba- 
romètre sous  un  ciel  pluvieux  ; 
dans  celui  de  Pise,  un  mémoire 
sur  l'influence  lunaire,  en  réponse 
aux  objections  de  Frisi.  Il  donna 
aux  journaux  de  Paris,  de  Venise, 
de  Vicencc,  aux  opuscules  scien- 
tifiques de  Milan,  et  aux  actes  de 
la  société  Palatine,  une  foule  de 


TOC 

discours  et  d'observations  relatif» 
à  la  méléorologic  et  à  la  physique 
Les  Anglais  publièrent,  dans  Ks 
Transactions  de  Londres,  son  écrit 
de  œstu  reciproco  maris  adriatici; 
l'institut  de  Bologne  plaça  dan^* 
ses  actes  le  mémoire  de  calore  iu- 
nari ,  et  l'académie  de  Berlin  im- 
prima la  dissertation  de  vi  lume 
in  almospheram,  ex  observalionibus 
baromctricis.  Lalande  publia  aussi 
plusieurs  observations  astronomi- 
ques de  Toaldo  dans  les  mémoi- 
res de  l'académie  des  sciences  de 
Paris  ,  et  un  plus  grand  nombre  a 
été  inséré  dans  ceux  de  la  société  de 
Padoue.  Au  commencement  du 
mois  de  novembre  «798,  ce  savant 
éprouva  deschagrins  quiallérèrent 
sa  gaîlé  naturelle,  et  quelques  jours 
après,il  fut  frappé  d'apoplexie, dont 
il  mourut  le  1  1  décembre  suivant. 
TOCQUEVILLE(N.  COMTE  de), 
maître  des  requêtes  ,  préfet  du 
déparlement  de  la  Somme,  oflicier 
de  la  légion-d'honneur,  exerçait, 
sous  le  gouvernement  impérial  , 
les  modestes  fonctions  de  maire 
d'un  village  des  environs  de  Ver- 
sailles. Il  dut  aux  événemens  po- 
litiques de  18 14  sa  haute  fortune 
administrative.  Le  roi  le  nomma, 
ù  la  première  reslauralion  ,  préfet* 
du  département  de  Maine-et-Loi- 
re; Napoléon,  à  son  retour,  au  20 
mars  181 5,  destitua  M.  de  Toc- 
queviile  à  qui  Louis  XVIII,  après 
la  seconde  restauration  ,  confia  la 
préfecture  de  l'Oise.  A  celle  épo- 
que les  armées  étrangères  pesaient 
sur  la  France,  et  les  Prussiens  oc- 
cupaient Senlis  et  le  reste  du  dé- 
partement. L'un  des  généraux  de 
ces  dernières  troupes  exigea  de 
M.  deTocquevillelaremisedes re- 
gistres où  étaient  apposées  les  si- 


TOC 


TOD 


rhj 


'9 


ft 


gnatures  des  habitans  qui  Vêtaient 
prononcés  pourl'acte  additionnel. 
M.  de  Tocqueville  donna  une 
preuvede  fermeté  eldeloyauté  ;  il 
refusa.  Le  général  étranger  n'in- 
sista pas.  La  noble  conduite  que 
ce  fonctionnaire  public  avait  te- 
nue en  cette  circonstance  ne  pa- 
raît pas  l'avoir  mis  à  l'abri,  dans  la 
suite  de  ses  fonctions,  des  repro- 
ches graves  des  hommes  sages 
et  modérés;  on  l'a  blâmé  d'a- 
voir provoqué  des  destitutions  , 
dont,  plus  tard,  on  a  reconnu 
l'injustice.  En  1816,  il  adminis- 
trait le  département  de  la  Côte- 
d'Or.  Le  même  esprit  d'impartia- 
lité nous  fait  un  devoir  de  rap- 
porter l'arrêté  qu'il  publia  le  9 
août  de  la  même  année ,  lors  du 
passage,  par  Dijon,  de  Madame, 
duchesse  d'Angoulême  (  aujour- 
d'hui Madame  la  Dauphinc  ). 
«  Considérant,  dit-il,  que  l'en- 
thousiasme et  les  transports  de 
joie  que  les  habitans  de  Dijon  ont 
montrés  à  l'occasion  du  séjour 
dans  cette  ville  de  S.  A.  R.  Ma- 
dame, ne  permettent  pas  de  dou- 
ter qu'il  n'y  ait  parmi  tous  lesha- 
tans  une  parfaite  unanimité  de 
sentimens  et  d'attachement  pour 
le  roi  et  la  famille  royale  ;  consi- 
dérant que  ces  sentimens,  mani- 
festés si  hautement,  ôlent  toi^e 
crainte  à  l'égard  de  l'influence 
que  les  ennemis  du  trône  pour- 
raient exercer  sur  le  peuple  de  la 
bonne  ville  de  Dijon  ;  considérant, 
etc.;  les  mesures  de  haute  prdice 
auxquelles  sont  soamis  quelques 
individus  de  la  ville  dfliDijon,  ces- 
sent d'avoir  leur  effet,  et  ces  indi- 
vidus sont  déchargés  des  obliga- 
tions qu'elles  leur  imposaient.  » 
En    iJ>i7  ,    M.    de    ïocqueville 


passa  à  la  préfecture  de  la  Mo- 
selle ,  qu'il  administra  jusqu'en 
1825,  époque  où  il  fut  nommé  à 
celle  de  la  Somme.  M.  de  Tocque- 
ville, qui  occupe  encore  aujour- 
d'hui (  1825)  cette  préfecture  ,  a 
épousé  une  fille  du  président  Ro- 
sambo,  gendre  de  l'illustre  de  Ma- 
lesherbes;  deux  fils  qu'il  a  eus  de 
celte  union  suivent  la  carrière 
militaire. 

TODERINI  (  Jeak-Baptiste  )  , 
né  à  Venise  en  1728,  professa 
quelque  temps  la  philosophie  à 
Forli,  et  vécut  ensuite  à  Vérone, 
où  les  travaux  du  marquis  3Lifl'ei 
lui  firent  naître  le  goût  des  anti- 
quités. Il  s'était  amusé  à  rassem- 
bler une  suite  de  médailles  frap- 
pées en  l'honneur  des  jésuites  , 
auxquels  il  appartenait,  et  des  rois 
goths,  avec  lesquels  il  les  avait  as- 
sociés. Celte  afTeclion  pour  les  il- 
lustres barbares  se  développa 
avec  plus  de  force  dans  un  séjour 
de  cinq  ans  qu'il  fit  à  Constanli- 
nople,  où  il  alla  en  1781,  à  la 
suite  de  Garzoni,  baile  de  la  ré- 
publique de  Venise  à  la  Porte.  II 
porta  son  attention  vers  la  litté- 
rature turque,  acheta  un  grand 
nombre  de  manuscrits  et  de  livres 
orientaux,  rechercha  toutes  sortes 
d'instrumens  astronomiques,  nau- 
tiques, géométriques,  etc.,  sortis 
des  ateliers  ottomans, et  se  chargea 
d'apprendre  à  l'Europe  que  les 
Turcs  avaient  des  imprimeries, 
des  bibliothèques,  des  académies, 
et  qu'ils  ne  sont  rien  moins  qu'é- 
trangers à  la  littérature  agréable. 
0  Je  cultivais,  dit-il,  l'amitié  de 
»  quelques  savons  ottomans,  et  sur- 
»tout  du  viuderis  de  la  Validé^ 
•  pour  assurer  mes  recherches  et 
«cclaircirmcs  doutes.  S'il  arrivait 


^o 


TOL 


•»qiie  Ces  sa  vans  ne  fussenf  pas 
»  d'accord  entre  «ux,  je  m'adre»»- 
»sai9  au  mufli  pour  avoir  un  felfa 
"OU  sentence  déDr»i(ive.  11  y  a,  û 
»la  porte  de  son  palais,  des  écri- 
»  vains  auxquels  on  présente  l.i 
»  question  qui  passe  aux  mains  du 
«uiui'ti,  et  quelques  jours  après, 
■'ptiur  peu  d'argent ,  on  a  la  déei- 
«sion,  ou  le  fetfa  signé  de  sa  pro- 
»pre  main.  Si  la  question  répugne. 
«  ouverteinent  à  la  loi,  aprè:*  l'a- 
"•  voir  lue  à  peine  ,  ils  vous  la  ren» 
»deiit,  en  vou^i  disant  qu'elle  est 
«contraire  à  la  loi.  »  Avec  ces  pui.'*- 
saus  auxiliaires,  dont  on  aurait 
tort  de  solipyonner  l'ignorance  ,  il 
l'ut  en  étal  de  publier  .son  ouvrago, 
qui  étonna  par  la  sir»gulartté  du 
sujet;  il  lut  hientôt  annoncé  dans 
le^  journaux,  et  traduit  en  fran- 
çais et  en  allemand.  Le  cardinal 
liorgia  ,  chez  lequel  Toderini  s'é- 
tait lait  présenter  comme  rauteur 
de  la  Littérature  des  Turcs,  lui  de- 
manda un  jour  s'il  en  avait  trouvé 
la  langue  difficile?  —  «  Je  n'ai 
pas  eu  le  temps  de  l'apprendre, 
lui  répondit  ïoderrni.  —  Bravo  ! 
bravissimo  !  reprit  en  riant  son  é- 
minence;  vous  avez  eu  le  talent 
de  parler  de  ce  que  vous  ne  com- 
prenez pas.  »  Toderini  mourut  à 
Venise,  le  4  juillet  1799.  Ses  au- 
tres ouvrages -sont  des  disserta- 
tions peu  importantes  sur  des  ob- 
jets de  physique  et  d'histoire  na- 
turelle. 

ÏOLL,  lieutenant-général  sué- 
dois ,  né  dans  un  rang  obscur,  en 
une  des  provinces  méridionales 
de  la  Suéde ,  s'éleva  à  une  haute 
fortune  par  un  mérite  particulier, 
et  joua  un  rôle  important  sous  les 
règnes  des  rois  Gustave  III  et  Gus 
tave  IV.  11  commença  sa  carrière 


TOL 

|)ar  l'exercice  d'im  petit  emploi  de 
judicature  provinciale,  dont  il  fut 
firivé  par  jugement  d'un  tribunal 
supérieur.  De  puissans  ennemis,  a 
ce  qu*il  assurait,  l'avaient  injuste- 
ment accusé  de  malversations.  Il 
entra  ensuite  dans  l'administration 
forestière,  et  perdit  encore  la  place 
subalterne  qu'il  y  avait  obtenue, 
par  suite  d'une  accusation  pareille 
k  la  première.  Quand  le  n»i  Gus- 
tave ni  prépara,  en  1772,  la  ré- 
volut«-jn  par  laquelle  il  changea 
la  constitution  et  les  loi-j  fonda- 
fnentaFes  de  la  Suède  au  profit 
de  la  prérogative  royale,  il  mit  M. 
Toll  au  nombre  de  ses  ag-cns  se- 
crets. M.  Toll  montra  le  pltis 
grand  zèle  et  déploya  une  habi- 
leté remarquable  en  secondant, 
dans  sa  province,  hes  vues  du  roi. 
Le  revirement  politique  heureu- 
sement tern)iné,  M.  Toll  fut  ré- 
compensé de  ses  services  par  des 
lettres  de  noblesse  et  un  grade 
dans  l'armée.  Son  crédit  augmen- 
ta depuis  de  jour  en  jour,  et  il  se 
vit  admis  dans  les  conseils  inti- 
mes du  roi ,  où ,  en  courtisan  con- 
sommé, il  allait  toujours  au-de- 
vant des  volontés  du  prince,  fa- 
cilit.int  ensuite,  par  son  génie, 
l'exécution  des  projets  monarchi- 
ques, quels  qu'ils  fussent.  Nommé 
colonel  d'un  régiment  de  cavale- 
rie, et  bientôt  général,  il  fut  en  ou- 
tre revêtu  de  décorations  «t  com- 
blé défaveurs.  En  1788,  quand  le 
roi  eut  pris  la  résolution  d'atta- 
quer la  Russie,  alors  engagée  dans 
une  guerre  avec  la  Porte-Otto- 
mane ,  le  ^néral  Toll  fut  chargé 
de  pourvoir  à  tout  ce  qui  était  né- 
cessaire pour  l'on  verture  de  la  cam- 
pagne. Il  ne  s'agissait,  disait-on, 
que  de  marcher  droit  sur  Féters- 


* 


TOL 

bourg,  et  il  serait  facile  de  8'em- 
parer  de  celle  capitale  qui,  aiimi 
que  les  Ironlières  septentrioitalt'S 
de  lu  lliisirie^  se  Itouvait  pre.-»- 
quo  enlièreinenl  dégarnie  de 
troupes;  on  devait  ensuite  forcer 
rinjpératrice  Catherine  IJà  rendre 
A  la  Suède  qiielquts-nnes  des  pro- 
vinces perdtHîS  par  Charles  XII. 
Le  général  Toll  n'avait  jamais  lait 
la  guerre,  mais  on  avait  la  pins 
haute  opinion  de  ses  talens  ,  tant 
militaires  qu'administratifs,  e^il 
(rut  I(ii-ni0me,  ainsi  que  les  au- 
tres jeunes  conseillers  du  roi ,  que 
ractivité  et  l'audace  suppléeraient 
de  reste  à  l'expérience  qu'ils  n'a- 
vaient encore  pu  acquérir.  L'ar- 
mée suédoise  lut  embarquée  à  la 
hâte  pour  la  Finlande  ;  il  impor- 
tait en  effet  d'opérer  avec  la  plus 
fïrande  célérité;  mais  celle  armée, 
dé$  qu'elle  eut  mis  pied  à  terre 
à  HeMnglbrs,  première  ville  de 
la  Finlande  suédoise,  ,-e  trouva 
dépourvue  du  matériel  le  plus  in- 
ilispensahle  pour  agir  ;  il  fallut  at- 
tendre pendant  trois  semaines 
l'arrivée  de  la  plus  grande  partie 
de  rartillcrie  et  des  munitions  de 
guerre.  On  échoua  ensuite  dans 
I  attaque  de  la  petite  place  de  Fré- 
drichshamn  et  dans  celle  de  la  bi- 
coque de  Ny.-Iott.  Des  canons  de 
gros  calibre  y  avaient  été  amenés 
i\  grands  frais;  mais  pui'  une  mé- 
prise de  l'adminislra'tion  militaire, 
les  Ixnilels  avaient  eu  une  autre 
destination,  et  les  invalides  russes, 
qui  gardaient  ces  deux  places,  ne 
«e  laissèrent  pas  eflrayer  par  des 
coups  de  canon  tirés  A  poudre. 
Pélersbourg  fut  dés-lors  sativé. 
Les  vivres  man(|néient  bientôt 
.1  rarinéc  suédoise:  il  fallut  se. 
n'lircr,el  les  soldais  !Jiarch.iie;jl 


TOL  ai 

nu  -  pieds  ,  leurs  pourvoyeur* 
inexpérimentés  n'ayant  point  pré- 
vu que  le»  chaussures  s'usaient 
vite  en  campagne.  Les  troupes  fin- 
noises et  suédoises  murmuraient 
hautement ,.  et  le  roi,  avant  de 
quitiev  lui-même  l'arinée  ,  prit  le 
parti  de  renvoyer  le  général  Toll 
dans  le  midi  de  la  Suède,  disgrâce 
(|ui  ne  fut  cependant  qu'appa- 
rente. Il  eut  bientôt  un  comman- 
dement important  dans  la  provin- 
ce de  Scanie .  limitrophe  du  Dane- 
marck,  et  on  lui  attribua  ,  fausse- 
ment peul-êire,  le  plan  d'incen- 
dier, en  pleine  paix,  le  port  de 
Copenhague  ,  où  hivernait  uiu; 
flotte  russe.  La  Suède  venait  de 
terminer  ses  dilVéretis  avec  le  Da- 
nemarck;  un  ollicier  subalterne  , 
nommé  lienzelstierna ,  fut  néan- 
moins envoyé  de  Scanie  à  Copen- 
hague, où  il  acheta,  d'un  capi- 
taine de  navire  anglais,  un  gros 
bâtiment ,  qui  fut,  de  concert  avec 
ce  capitaine,  chargé  de  matières 
combustibles,  et  (]ui  devait,  par 
le  premier  vent  favorable  ,  êiro 
allumé  au  milieu  des  vaisseaux  ru^- 
ses  et  danois,  élroitement  serrés 
les  uns  contre  les  autres  dans  l'inté- 
rieur du  port.  L'explosion  eût  été 
terrible,  la  plupart  de  ces  vaisseaux 
ayant  leur  chargement  complet 
en  poudre,  ileureusement  pour  la 
ville  de  (Copenhague,  le  second  du 
capitaine  anglais,  après  avoir  fait 
de  vains  eflorts  pour  détourner 
son  chef  de  ce  projet  incendiaire, 
dé»iouvrit  le  cotnplol,la  veille  mê- 
me de  son  exéculion,  au  gouver- 
nement danois,  Lebrfilot  fut  saisi, 
<'t  le  peuple  de  Copeidiague,  indi- 
gné, se  portait  en  f<}ulo  à  l'hôlel 
d«;  l'amliassadeur  de  Suède,  qui, 
cuti^rcuj«nl  ùrangcr  A  ce  coin- 


2«  10  L 

plot,  se  présenta  hardiment  de- 
vant la  multitude,  Cl  ouvrir  tou- 
tes les  portes  de  son  hôtel ,  et  de- 
manda lui-même  qu'on  le  visitSt, 
bien  sûr  qu'on  n'y  trouverait  au- 
cun des  coupables,  ni  aucun  in- 
dice de  sa  participation  à  leur 
trame.  Benzelstierna  et  ses  com- 
plices furent  bientôt  découverts 
et  arrêtés,  jugés  et  condamnés  i\ 
mort;  mais  le  prince  royal  de  Da- 
ncuiarck  (le  roi  actuel)  fit  grâce 
de  la  vie  à  ces  agens  subalternes. 
Le  gouvernement  suédois  les  dé- 
savoua, et  le  général  Toll,  haute- 
raenl  accusé  à  Copenhague  de  les 
nvoir  dirigés ,  soutint  toujours 
qu'il  n'avait  eu  aucune  relation 
avec  eux.  Après  la  mort  de  Gus- 
tave III,  le  crédit  des  deux  prin- 
cipaux favoris  de  ce  prince,  MM. 
Armfeldt  et  Toll,  baissa  sensible- 
ment sous  la  régence  du  duc  de 
Sudermannie.  Pour  les  éloigner, 
on  donna  au  premier  une  mission 
diplomatique  à  Naples,  et  au  se- 
cond une  autre  mission  pour  Var- 
sovie; mais  une  cassette,  contenant 
les  correspondances  secrètes  du  ba- 
ron Armfeldt,  ayant  été  saisie  en 
Italie  par  un  autre  agent  diplo- 
matique suédois  ,  fut  envoyée  au 
prince-régent,  et  on  y  découvrit 
un  vaste  projet  tendant  à  priver 
ce  prince  de  la  régence  par  une 
révolution  militaire,  et  à  l'aide 
d'une  flotte  et  de  troupes  étran- 
gères qui  devaient  être  introdui- 
tes en  Suède.  Le  jeune  roi  Gus- 
tave IV  devait  être  déclaré  majeur 
avant  le  temps  fixé  par  la  loi. 
Quelques  lettres  du  général  Toll 
parurent prouverque  cette  trame, 
habilement  ourdie,  lui  était  au 
moins  connue,  sans  qu'il  l'eût,  se- 
lon soii  devoir,  fait  connaître  au 


TOL 

gouvernement.  Les  deux  diplo- 
mates furent  rappelés  et  sommés 
de  comparaître  devant  une  cour 
de  justice  à  Stockholm.  Le  baron 
Armfeldt  n'obéit  point  et  se  rendit 
en  Russie,  où  il  obtint  du  service 
en  même  temps  qu'il  fut  con- 
damné à  mort  en  Suède.  Le  gé- 
néral Toll  résolut  de  braver  l'o- 
rage, et  retourna  à  Stockholm, 
où  il  fut  mis  en  jugement  et  con- 
damné à  la  perte  de  tous  ses  em- 
plois. Il  regrettait  surtout  son 
beau  régiment,  qui  lui  assurait  de 
nombreux  avantages  ,  un  grand 
établissement  et  une  haute  in- 
fluence dans  la  province  de  Scanie; 
mais  il  supporta  avec  courat^e  sa 
disgrâce,  qu'il  savait  bien  d'ail- 
leurs ne  devoir  point  être  de  lon- 
gue durée.  En  effet,  dès  que  le  jeu- 
ne roi  Gustave  IV,  déclaré  majeur, 
eut  pris  en  mains  les  rênes  de  l'é- 
tat, il  rappela  les  favoris  de  son 
père.  Le  général  Toll  reprit  ses 
anciens  emplois  ;  le  colonel  au- 
quel le  prince  régent  avait  donné 
son  régiment  fut  obligé  de  le  lui 
rendre,  et  M. Toll  fut  en  outre  noni- 
mé  gouverneur-général  des  pro- 
vinces méridionales  du  royaume; 
mais  on  ne  l'emploj'a  plus  à  la 
guerre,  pour  laquelle  ce  lieute- 
nant-général n'avait  jamais  mon- 
tré de  talent.  Après  la  révolution 
de  1809  et  la  chute  de  Gus- 
tave IV,  le  duc  de  Suderman- 
nie, devenu  roi  sous  le  nom  de 
Charles  XIII,  parut  aussi  avoir 
oublié  ses  anciens  griefs  comme 
régent,  contre  le  général  Toi!,  lui 
conserva  tous  ses  emplois ,  et  y 
ajouta  de  nouvelles  faveurs.  Cet 
homme  véritablement  habile  mou- 
rut en  Scanie,  il  y  a  quelques  an- 
nées, dans  un  âge  très- avancé. 


TOL 

TOLLERON    (Edmb-Hewbi- 
Charles),    ciseleur   à  Paris,  an- 
cien iniliiaire,  naquit  à  Aulicim, 
déparlemenl  de   la  Nièvre ,   vers 
1786,  d'une  honnête  famille  d'ar- 
tisans. Il  exerçait  l'état  deciselcîir, 
pour  lequel  il  avait  beaucoup  de 
goût,  lorsqu'il  fut  appelé  sous  les 
drapeaux,  en  vertu  de  la  loi  de  la 
conscription.  Les  événemens  po- 
litiques de  1814  le  rendirent  à  son 
ancienne  profession,  qu'il  reprit  à 
Paris,  où  il  vivait  honorablement 
du  fruit  de  son  travail.  Lié  avec 
Pleignier    et  Carbonneau   [voyez 
ces  noms),  il  fut  associé ù  ce  qu'on 
a  appelé  la  conspiration  des  pa- 
triotes (le  181G,  et  chargé  de  gra- 
ver la  planche  des  cartes  de  rallie- 
ment des  conjurés.  Arrêté  au  mois 
de  juin  (1816),  il  fut,  avec  Car- 
bonneau et  Ph.'ignier,  traduit  à  la 
cour  d'assises  de  la  Seine.  Sa  dé- 
(juise  fut  remarquable  par  la  fran- 
cTiise,  la  bonne  foi  et  l'éloquence 
naturelle  qu'il  développa  dans  le 
cours  de  son  procès.  II  déclara  les 
motifs  qui  l'avaient  porté  ù  pren- 
dre une  pari  dans  cette  déplora- 
ble affaire.  «Le  timbre,  dit-il,  que 
j'ai  gravé  portait  ces  mots  :  union, 
honneur,  patrie,  formant  une  de- 
vise chère  à  tous  les  Français,  et  je 
n'y  ai  rien  vu  de  répréhensible.  J'ai 
00  ans,  ajoula-t-il  ensuite,  j'ai  été 
élevé  dans  des  principes  contrai- 
res à  ceux  qu'il  est  aujourd'hui  de 
mon  devoir  de  respecter  et  de  ihé- 
rir;  il  n'est  donc  pas  étonnant  que 
j'aie  erré  dans  une  circonstance 
semblable.  »  Dans  la  séance  du  6 
juillet,  après  que  son  avocat  eut 
parlé  pour  sa  défense,  il  prit  la 
parole,  et  s'abandonnanl  à  l'cx- 
puudion  de  son  Ame,  il  dit  aux  ju- 
rés :«  Vous  avez  pu   voir,   mcs- 


lOL  25 

sieurs,  que  je  n'ai  jamais  cherdié 
à  déguiser  la   vérité  sur  tout  co 
qui  me  rcgar  Je  dans  cette  aflaire. 
J'ai  cru  que  je  me  ferais  un  mé- 
rite aux  yeux  de  mes  juges  eu 
parlant  avec  la  plus  grande  fran- 
chise. Si  je  me  suis  tromj)é,  elle 
n  servi  à  nie  perdre;  mais  tel  est 
mon  caractère,  que  je  préfère  être 
puni  ayant  dit  la  vérité,  que  d'a- 
voir sauvé  ma  vie  par  le  menson- 
ge. On  me  reprochera  sans  dodto 
d'avoir  usé   de  réserve  sur  ce  qui 
concernait  mes  coaccusés.  Quoi  ! 
moi,  j'aurais  livré  aux  tribunaux, 
un  ami,  un  père  de  famille,  Car- 
bonneau enûn  !  Ah  I  le  législateur 
qui  a  infligé  des  peines  si  terribles 
pour   la  non  révélation  connais- 
sait bien  l'ûme  des  vrais  Français; 
il  savait  quel  mépris  nous  atta- 
chons au  nom  de  délateur.  Pour 
moi,  la  nature  qui  m'a  doué  d'un 
courage    à   toute    épreuve,    m'a 
doué  aussi  d'une  âme  sensible  et 
généreuse  ;    je  saurai    supporter 
mon  sort,  quelque  rigoureux  qu'H 
soit;  je  n'aurais  pu  survivre  au 
premier  regard  du  mépris.  »  Con- 
damné à  mort  dans  la  même  séan- 
ce, il  entendit  avec  calme  et  fer- 
meté  la  déclaration   du   jury.  Il 
reprit  la  parole  et  dit  :  «  Je  prie 
la   cour  de  considérer  qu'il  me 
senible  que  j'ai  droit  au  bénéfice 
de  l'article  108  du  Code  pénal.  » 
ïoUeron  se  pourvut  en  cassation 
et  en  grâce  :  il  fut  exécuté  le  28 
juillet,  à  8  heures  du  soir,  en  che- 
mise, la  tête  couverte  d'un  voile 
noir,  après    avoir  eu   préalable- 
ment le  poing  coupé,  comme  par- 
ricide. Sa  fermeté  ne  se  démentit 
pas  un  seul  instant. 

TOLSTOÏ  {  tu  cowTt  OsTFB- 
MAt»N),   général  russe,  d'une  fa- 


•i'i  TOL 

nulle  ancienne,  coninicnça  à  se 
laire  connaître  dans  les  guerres  do 
Turquie  et  de  Pologne,  où  il  mon- 
tra de  la  bravoure  et  des  talens 
militaires,  et  se  trouva,  au  mois 
de  septembre  i8o5,  à  la  tête  d'un 
our[)s  d'armée  que  l'Autriche  des- 
tinait à  agir  Ctintre  la  France  ; 
mais  ses  exploits  se  bornèrent  à 
pénétrer  dans  l'électorat  d'Hano- 
vre, et  à  cerner  la  forteresse  de 
Hamein,  où  commandait  le  géné- 
ral Barbou.  Le  résultat  de  la  ba- 
taille d'Austerlitz  Ibrpa  M.  Tole- 
loi  à  évacuer  l'électorat ,  et  néan- 
moins il  reçut  le  gouvernement 
de  Saint-Pétersbourg,  et  les  dé- 
corations de  plusieurs  ordres.  Au 
commencement  de  1812,  il  rem- 
plaça le  comte  de  Schuwaloffdans 
le  commandement  d'un  corps  rus- 
se; le  1"  juillet,  à  Ostrowno,  il  eut 
nn  engagement  avec  un  corps 
français  qu'il  prétendit  avoir  bat- 
tu ,  et  poursuivi  iV  4  werstes  en 
avant  de  sa  position  ;  les  Français 
rétablirent  la  vérité  ,  en  'conti- 
nuant leur  mouvement  en  avant. 
L'année  suivante,  le  général  ïols- 
loi  perdit  le  bras  gauche  dans  un 
combat  opiniâtre  qu'il  engagea  à 
Piroa  contre  une  colonne  françai- 
se, et  parvint  à  garantir  la  Bohê- 
me ,  menacée  d'une  invasion.  Le 
17  octobre  i8i3,  le  maréchal 
Gouvioa  Saint-Cyr  le  défit  com- 
plètement à  Planen,  et  lui  prit 
5,000  hommes  et  20  pièces  de  ca- 
non. Il  se  retira  alors  sur  l'Elbe, 
où  il  opéra  sa  jonction  avec  le 
comte  de  Rlenau;  leurs  efforts 
réunis  eurent  pour  résultat  défi- 
nitif la  capitulation  de  Dresde,\et 
de  Sonnenstein.  L'empereur  de 
Russie  apprécia  les  services  du 
coujte  de  Tolstoï   pendant  cette 


TOM 

campagne  et  la  suivante,  et  f'en 
récompensa  par  plusieurs  grâc«;s', 
et  notamment  par  ime  somme  de 
5oo,ooo  roubles,  qu'il  lui  accorda 
pour  rétablir  ses  affaires,  à  titre 
de  prêt  remboursable  en  dix  ans. 
Le  gouvernement  de  Bohême  lui 
offrit  une  coupe  de  grand  prix,  sur 
laquelle  le  général  fit  graver  les 
noms  des  officiers  qui  avaient  péri, 
à  l'affaire  de  Pirna,  et  dont  il  fit 
ensuite  hommage  à  la  chapelle 
du  régiment  de  Préobraschenski. 
Le  comte  de  Toisloi ,  un  instant 
anjbassadeiu-  de  Bussie  à  Paris, 
en  1814 1  fut  remplacé  par  M. 
Pozzo-di -Borgo.  Il  mourut  h 
Dresde,  vers  la  fin  de  décembre 
1816.  M.  de  Toisloi  était  grand- 
maréchal  de  la  cour,  et  chevalier 
de  différens  ordres  russes  et  étran- 
gers. 

TOMMASINI  (  Jacques  ) ,  cé- 
lèbre médecin  italien  ,  né  à  Pa%- 
me,  en  1769,  trouva  dans  son 
père  le  premier  instituteur  de  sa 
jeunesse.  En  1794,1!  fut  nommé 
professeur  de  physiologie  et  de 
patologle  dans  l'université  de 
cette  ville  ;  il  embrassa  la  doctrine 
àxi  contre-stimulus  {voy.  Rasori), 
que  par  sa  réputation  et  par  ses 
ouvrages  il  a  beaucoup  contribué 
à  accréditer.  Appelé  à  occuper  la 
chaire  de  clinique-médicale  à  Bo- 
logne, au  moment  où  on  l'élevait  à 
la  place  d'inspecteur  de  santé  et 
des  études  à  Parme,  il  flotta  long- 
temps indécis  entre  les  instances 
de  ses  compatriotes,  qui  auraient 
voulu  le  retenir  dans  sa  patrie,  et 
celles  d'une  jeunesse  nombreuse, 
qui  l'altendail  au  sein  d'une  des 
plus  anciennes  universités  de 
l'Europe.  31.  Tommasini  n'écouta 
que  les  intérêts  de  la  science,  et  eu 


TOM 

1816,  il  prit  le  chemin  de  Bolo- 
gne, où  les  professeurs  et  les  élè- 
ves se  portèrent  à  sa  rencontre 
pour  le  ranaener  en  triomphe  jns- 
qu'à  la  porte  de  son  hôtel.  Cet 
enthousiasme  augmenta  encore  le 
jour  où  il  prononça  son  discours 
d'ouverture,  dans  lequel  il  déve- 
loppa les  principes  fondamentaux 
de  la  nouvelle  doctrine  médicale. 
En  1819,  les  habitans  de  Parme 
auraient  désiré  qu'il  vînt  occuper 
la  place  de  proto-médecin  ,  restée 
vacante  par  la  mort  de  Rfbiki 
(  voy.  ce  nom  ).  La  jalousie  et  les 
Intrigues  de  quelques  obscurs  ad- 
versaires empêchèrent  le  gouver- 
nement de  rendre  hommage  au 
mérite  d'un  si  illustre  citoyen,  et 
ce  n'a  été  qu'en  iSaS,  que  la  du- 
chesse de  l'arme  lui  a  conféré  le 
titre  de  son  médecin  honoraire. 
Ce  professeur,  devenu  l'oracle  de 
la  médecine  en  Italie,  est  consulté 
par  les  personnages  les  plus  émi- 
nens.  Il  avait  donné  ses  soins  i 
la  princesse  Caroline,  que  l'éclat 
d'une  couronne  n'a  pu  tenir  à 
l'abri  d'une  persécution.  Accablée 
j)ar  une  foule  d'individus,  qui  met- 
taient l'indiscrétion  de  leurs  aveux 
au  prix  de  l'or  qu'on  leur  offrait 
pour  les  obtenir,  celte  malheu- 
reuse princesse  implora  le  S(  cours 
de  quelques  hommes  estimés, 
dont  elle  connaissait  trop  les  prin- 
cipes pour  craindre  de  les  voir 
fléchir  sous  le  pouvoir.  M.  Tom- 
niasini  répondit  à  cet  appel,  dé- 
cidé à  paraître  devant  la  cour  des 
lords  comme  le  défensetir  d'une 
reine  outragée  ;  mais  les  nom- 
bieuses  anomalies  de  ce  procès  no 
lui  permirent  pas  de  s'acquitter 
de  ce  généreux  devoir.  Dégagé  de 
les  soins,  il  parcouiut  PAngle- 


TON 


aS 


terre  et  l'Ecosse,  recevant  par- 
tout les  témoignages  les  plus  écla- 
tans  d'admiration  et  d'estime. 
Plusieurs  corps  savans  s'empres- 
sèrent de  l'admettre  dans  leur 
sein ,  et  la  société  de  médecine 
d'Edimbourg  lui  adressa  son  di- 
plôme le  jour  même  qu'il  entrait 
dans  cette  ville.  ïommasini  vient 
de  recevoir  un  hommage  non 
moins  flatteur,  et  bien  plus  tou- 
chant de  la  part  de  ses  élèves  , 
qui  lui  ont  fait  frapper  une  mé- 
daille d'or  ,  portant  d'un  côté 
son  portrait ,  et  de  l'autre  ces 
mots  :  A  Giacomo  Toinmasini,  idis' 
cepoli  riconoscenti.  Ses  ouvrages 
sont  :  1"  Quanto  influisca  il  cuore 
sul/a  circolazioue  del  sangue,  Par- 
me ,  1 794  »  in-S"  :  2°  Storia  ragio- 
nala  d'una  diabète,  ibid. ,  1794» 
in -8°  ;  5"  Dclla  nuova  doltrina  me- 
dica  Haliana  prolusione,  Florence, 
1817,  in-S";  4'  Ricerclie  palolo- 
gic/ie  siilla  febhre  di  Livonio  ,  e 
sulla  febhre  gialla  americatia  ,  Na- 
ples,  1817,  2  vol.  in-8";  5"  Con- 
siderazioni  patologicliesalC  infiam- 
mazione  e  sulla  febbre  continua, 
Pise,  iHao,  in-8";  0°  Prospelto 
de"  risullamenli  otttnuti  nella  cli- 
nica  medica  d'un  trir.nnio ,  ibid.  , 
1820,  in-S"  ;  7°  Discorsi  suit' 
insegnamenlo  medico-cUnico  dcli' 
Inghilterra  e  del.'  Italia,  Cologne, 
1822,  in-8";  8°  Sloria  délia  rna- 
latlia ,  délia  quale  viori  il  conte 
Pertirari,  Jmola,  i823,  iniO; 
p"  Opère  viinori,  IJologne  ,  1821- 
1824.  3  vol.  in-S";  10"  delta  né- 
cessita di  soltoporre  ad  utia  xtatis- 
(ira  i  fatli  pià  important i  delta  me- 
dicina  pnilica ,  ibid.  ,  182J,  in-8". 
TONDl  (Mathiki').  directeur 
«lu  nnisée  minéralogique  de  Na- 
pies,  natjuit  en    I7t)2,  à   Sansc- 


2b 


TON 


Ycro,  dans  la  province  de  Capi- 
lanata.  Destiné  à  la  profession  de 
médecin,  il  iriéla  aux  éludes  de 
son  état  celles  des  sciences  natu- 
relles, pour  lesquelles  il  avait  de 
l'attrait.     A    l'aide     de    quelques 
traités  de  botanique,  il  reconnut 
les  j)Iantes  des  lieux  environnans 
cl    surtout    du    Mont  -  Gargan  , 
dont  il  escalada  les  sommets.  A 
l'âge  de  i^  ans,   il  fut  envoyé  à 
l'université  de  Naples,  où  la  voix 
de  Petagna  et  l'exemple  de  Cirillo 
le  fortifièrent  dans  son  goût  pour 
les  observations  de  la  nature,  et 
le   mirent    en    état   d'ouvrir    un 
cours  de  chimie,  d'entomologie 
et  de  botanique.  Adoptant  la  ré- 
forme   que    Lavoisier   venait    de 
proclamer  en  France,  il  fut  des 
premiers   à    parler  son   nouveau 
langage   en  Italie.    Les   connais- 
sances dont  il   avait  fait  preuve 
dans  ses    leçons  fixèrent  sur  lui 
rattention  du  général  Parisi ,  que 
le  gouvernement  napolitain   ve- 
nait de  placer  à  la  tête  d'une  expé- 
dition de  physiciens  qui  devaient 
aller  se  perfectionner  en  Allema- 
gne, dans  les  travaux  des  mines  et 
dans  la  fusion  des  métaux.  M.Ton- 
di  profita  de  son  séjour  à  Vienne 
pour  fréquenter  la  société  de  Jac- 
qiiin  ,  de  Plenck,  de  Born  ,  et  le 
jardin  de  Schœnbrunn  ;  les  cabi- 
nets publics  et  particuliers  d'his- 
toire naturelle  remplirent  les  mo- 
mens   qu'il  ne   consacrait  pas   à 
s'entretenir  avec  ces  savans.  Il  se 
rendit  ensuite  à  Schemnitz,  où  il 
ébaucha  un  cours  de  docimasti- 
que ,  d'après  le  plan  adopté  dans 
cette  célèbre  école  ;  il  poiissa  en 
même   temps  ses  recherches  sur 
U\  molibdène,  sur  le  Tangtein,  sur 
la  manganèse,  et  ses  elTorts  furent 


TON 

couronnés  du  pins  heureux  suc- 
cès. Les  résultats  de  ces  expé- 
licnces  et  de  celles  qu'il  entreprit 
sur  la  barite,  la  chaux  et  la  ma- 
gnésie, fiMcnt  soumis  au  baron 
de  Born,  qui  en  parla  favorable-' 
ment  dans  le  second  volume  du 
Catalogue  des  Fossiles,  de  M'" 
Baab.  Le  même  naturaliste  se 
chargea  de  communiq(n;r  à  La- 
voisier quelques  mémoires  du  mi- 
néralogiste italien,  pour  les  faire 
insérer  dans  les  Annales  de  chimie. 
M.  ïondi ,  en  attendant,  ne  ces- 
sait pas  d'explorer  les  nnnes  de  la 
Haute  et  de  la  Basse-Hongrie, et  de 
presque  tous  les  états  héréditaires. 
En  1795,  il  passa  le  détroit,  visita 
les  trois  royaumes,  et  fit  des  ex- 
cursioms  aux  Hébrides,  aux  Or- 
cades  ,  et  jusqu'en  Islande.  A  son 
retour  d'Angletcrr.e,  le  bâtiment 
sur  lequel  il  était  embarqué  fut 
capturé  à  la  hauteur  du  Texel , 
par  une  frégate  française,  qui 
l'emmena  prisonnier  à  Flessingue. 
Dès  qu'il  put  recouvrer  sa  liberté, 
il  se  dirigea  sur  Bâle  pour  gagner 
Augsbourg,  et  se  rapprocher  de 
l'Italie.  En  passant  par  Landsberg, 
il  fut  arrêté  et  envoyé  au  camp 
de  Stenpajh,  où  le  général  autri- 
chien voulait  le  faire  fusiller  com- 
me émissaire  de  l'armée  fran- 
çaise. Ce  ne  fut  pas  sans  beaucoup 
d'efforts  qu'il  parvint  à  le  détrom- 
per; mais  à  peine  venait-il  de 
quitter  les  prisons  de  l'Autriche, 
qu'il  tomba  dans  les  mains  des 
Bavarois,  auxquels  il  inspira  1rs 
mêmes  soupçons,  et  qui  ne  l'au- 
raient pas  mieux  traité  s'il  n'avait 
pris  la  résolution  hardie  de  se  jeter 
dans  le  Leck,  pour  se  dérober  à 
leurs  avant-postes.  En  arrivant  à 
Naples,  il  fut  chargé  de  dresser 


un  rapport  sur  les  mines  de  fer  et 
de  houille  ,  qu'on  prétendait  avoir 
découvertes  dans  les  Abruzzes  et 
à  Gifuni.  Il  fit  ensuite  un  voyage 
en  Calabre,  où  il  voulut  s'oppo- 
ser aux  désordres  qui  régnaient 
dnnflesétablissemensdeStiioelde 
la  Mongiana.Leschangemens qu'il 
avait  proposés  déplurent  à  quel- 
ques anciens  employés  qui  étaient 
intéressés  à  la  conservation  de 
ces  abus.  Profitant  des  troubles 
qui  commençaient  à  se  manifester 
en  Calabre ,  par  la  présence  d'une 
nrmée  française  dans  le  royaume, 
ils  ameutèrent  une  partie  des  ou- 
vriers,et  seporlèrent  en  foule  chez 
leur  chef,  qu'ils  ne  purent  altein- 
dre,  mais  dont  ils  saccagèrent  la 
maison.  M.  Tondi  se  rendit  dans  la 
capitale,  où  il  fut  enrôlé  daiis  la 
garde  nationale,  avec  laquelle  il 
fcc  trouvait  à  Revigliano  le  jour 
où  la  garnison  de  ce  fort  dut  ca- 
pituler avec  les  Anglais.  Enve- 
loppé dans  la  proscription  des  pa- 
triotes napolitains,  il  vint  cher- 
cher un  asile  en  France,  et  vécut 
quelque  temps  à  Lyon  ,  où  il  diri- 
gea les  travaux  d'une  mine  de 
charbon  de  terre,  près  de  Saint- 
Foi,  A  sept  lieues  de  cette  ville. 
Ce  premier  essai  et  l'occasion 
qu'il  eut  ensuite  de  déployer  ses 
connaissances  en  rédigeant  le  ca- 
talogue du  cabinet  minéralogique 
de  "Weiss ,  lui  procurèrent  une 
place  nu  musée  d'histoire  natu- 
relle h  Paris,  et  lui  gagnèrent  l'es- 
time de  Dolomieu  et  de  Haiiy.  Ce 
dernier  le  chargea  de  la  classifica- 
tion des  ininéraux  et  de  la  traduc- 
tion de  plusieurs  articles  extraits 
des  ouvrages  étrangers.  M.  Tondi 
donnait  nussi  des  cours  de  ininéra- 
lojie,  et  s'occupait  à  coricliir  sa 


TON  %7 

collection  particulière  de  quelques 
nouvelles  substances.  Il  avait  en- 
trepris, dans  ce  dessein,  un  voyage 
en  Espagne,  où  il  futsurprisparla 
révolution  qui  y  éclata  en  1808, 
et  qui  Itii  coûta  la  perte  de  pres- 
que tout  ce  qu'il  avait  ramassé.  Il 
se  sauva  à  bord  d'un  vaisseau  qui 
manqua  de  périr  dans  la  traversée, 
et  qu'une  galère  ennemie  remor- 
qua dans  un  port  de  Sardaigne.  Le 
gouverneur  de  cette  île  s'obstina 
à  renvoyer  M.  Tondi  à  Naples, 
où  ce  professeur  ne  s'arrêta  qu'un 
mois,  se  refusant  aux  propositions 
qu'on  lui  fit  pour  le  retenir  dans 
sa  patrie.  Il  revint  à  Paris  repren- 
dre l'exercice  de  ses  fonctions, 
dont  il  s'est  acquitté  jusqu'en 
1812.  A  celte  époque,  des  offres 
plus  pressantes  et  plus  généreuses 
l'engagèrent  à  rentrer  à  Naples, 
où  il  a  été  successivement  nommé 
premier  inspecteur -général  des 
eaux  et  forêts,  professeur  à  l'uni- 
versité, et  directeur  du  musée  de 
minéralogie.  Ses  principaux  ou- 
vrages sont  :  1°  Ililuzioni  di  cld- 
mica,  Naples,  1787,  in-8°;  2'  Is- 
truztonesitlla  seminagione  e  planta- 
gione  dd'  bosqhi ,  ibid. ,  i8i5,  in- 
8°  ;  3°  La  caccia  considerala  corne 
prodotto  sclvano ,  ad  uso  de'  forcs- 
<fl/i,ibid. ,  181 5,  10-8°;  4"  /^'s- 
corso  pronunzialo  in  occasione  deW 
apertara  délia  callcdra  di  geogvo- 
sia,  ibid.,  1817,  in-8";  5°  Etc- 
mcntidi  Orittognosia,  ibid. ,  1817- 

1823,  3  vol.  in-8%  fig,  ;  G"  la 
Srienza  selvana  ad  uso  de'  forestali,, 
ibid.  ,  1821,3  vol.  in-S" ,  fig.  ;  7° 
Klcmenli    di    orcognosia,    ibid.  , 

1824,  in-8'',  fig.  Ce  dernier  ou- 
vrage f;«il  suite  aux  EUmens  d'O- 
ryclognosie  ,  avec  lequel  il  forme 
un  cours  complet  de  géognosic. 


28 


TON 


c'est-à-dire  de  la  connaissance  do 
la  terre. 

TONE  (  Tobobald-Wolfe),  cé- 
lèbre patriote  irlandais,  chef  et 
fondateur  de  l'association  des  Ir- 
landais-unis, naquit  ;'i  Dublin,  le 
ao  juin  1763.  Sa  famille,  le  desti- 
nant au  barreau,  lui  fit  faire  avec 
soin  ses  études  à  l'université  de 
Dublin,  et  son  cours  de  droit  à 
l'école  du  Temple,  à  Londres. 
Tonc  s'efforça,  par  égard  pour  ses 
parens  ,  de  plier  son  génie  actif 
aux  exigeances  d'une  profession 
qui,  chaque  jour,  lui  devenait  de 
plus  en  plus  pénible,etlibre  bientôt 
de  suivre  ses  goûts,  il  se  lança  dans 
la  carrière  hasardeuse  de  la  poli- 
tique. «  Ce  qui  porta  ses  premiè- 
res idées  vers  celle  partie,  dit 
l'auteur  d'une  notice  sur  Tone  , 
fut  la  misère  où  se  trouvait  plon- 
gée l'Irlande,  l'un  des  pays  les  plus 
éminemment  favorisés  par  la  na- 
ture. Sa  situation  par  rapport  au 
commerce  des  Indes  et  de  l'Amé- 
rique, ses  ports  sûrs  et  nombreux, 
sa  population  très-nombreuse,  sa 
fertilité  presque  incroyable  y  ap- 
pellent les  richesses,  l'abondance 
et  le  bonheur,  tandis,  qu'au  con- 
traire, languissante  sous  l'oppres- 
sion, elle  ne  sert  que  de  grenier 
et  de  magasin  à  la  Grande-Bre- 
tagne; il  vit  que  l'Irlande  était 
«acrifiée  aux  Anglais,  qui  connais- 
saient et  redoutaient  ses  ressour- 
ces naturelles  et  que  ce  n'était  qu'en 
secouant  son  joug  qu'elle  pourrait 
se  relever  de  sa  situation  et  pren- 
dre la  plaie  qui  lui  est  due  dans  la 
balance  de  l'Europe.  Il  vit  que  ce 
qui  maintenait  le  pouvoir  politique 
de  l'Anglelerre  était,  i"  I  oppifs- 
sion  sous  laquelle  étaient  les  ca- 
t  ludiques  qui  composaient  les  qua- 


TON 

Ire  cinquièmes  de  la  nation  ;  a"  la 
division  el  la  haine  qu'entretenait 
l'Angleterre  entre  eux  et  les  pro- 
testansdissidens.  Eflectuer  l'union 
cordiale  entre  ces  deux  partis  fut 
donc  le  moyen  que  se  proposa 
Tone,  pour  étabUr  en  Irlande  un 
gouvernement  national,  sous  le- 
quel ce  pays  reprendrait  son  rang.  * 
Tone  publia,  en  1790,  nn  écrit  ou 
pamphlet  politique  contre  l'ad- 
ministration du  gouvernement  an- 
glais en  Irlande.  Cette  brochure 
eut  beaucoup  de  succès,  et  fit  ad- 
mettre l'auteur,  dès  qu'il  se  fut 
nommé,  dans  la  société  des  whigs 
de  Belford.  Une  nouvelle  bro- 
chure, en  faveur  des  catholiques, 
ne  produisit  pas*  moins  de  sensa- 
tion, et  détermina  le  parti  oppri- 
mé, quoique  Tone  fût  anglican, 
à  le  nommer  secrétaire  de  son  co- 
mité central.  Cette  marque  de  con- 
fiance l'attacha  plus  fortement  en- 
core à  la  cause  qu'il  avait  embras- 
sée; il  rédigea  les  pétitions,  les 
défenses  des  catholiques,  et  fut 
adjoint  à  la  députation  chargée, 
en  1795,  de  demander  au  roi  l'a- 
bolition des  lois  pénales  sous  les- 
quelles ils  gémissaient.  iMais  le 
principal  but  de  Tone  était  tou- 
jours de  consolider  l'union  entre 
les  catholiques  et  les  dissidens 
qui  dominaient  dans  le  Nord , 
moyen  qu'il  regardait  comme  le 
seul  propre  à  secouer  le  joug  op- 
pressif de  l'Angleterre.  Il  y  réus- 
sit enfin  ;  et  sur  les  débris  des 
partis  religieux  qui  avaient  si  long- 
temps déchiré  son  pays,  il  élablit 
la  société  des  Irlandais-unis.  Li3 
gouvernement  anglais  vit  avec  ef- 
iVoi  cette  association,  et  Tone  fut 
appelé  devant  le  parlement,  où  le 
chaiiceUer  le   traita  de  «  jcrpcnt 


TON 

nourri  dans  le  sein  de  l'état.  » 
Tone,  menacé  dans  sa  liberté  pour 
n'avoir  pas  voulu  abandonner  le 
parti  des  catholiqnes,  se  retîra  en 
Amérique  nu  commencement  de 
1795,  empoiiantavec  Kii  l'estime 
et  les  regrets  de  ses  concitoyens. 
Il  ne  vécut  pas  long^- temps  dans 
cet  exil  volontaire.  Son  attache- 
ment aux  Irlandais-Unis,  et  leurs 
Instances  pour  appuyet  leur  cause 
auprès  de  la  France,  l'invilution 
riîéme  que  lui  fit  le  gouver- 
nement directorial  de  se  rendre 
en  France,  le  déterminèrent  il 
qtiittcr  rAménq»»e,  et  en  janvier 
I7<j6.  il  était  à  Paris,  où  il  se  con* 
«•ertait  avec  le  général  Hoche.  Les 
résultats  de  leur  entrevue  lurent 
les  expéditions  de  la  baie  de  ban- 
try  et  du  Texel.  Il  prit  alors  du 
service  dans  l'armée  française,  t»ilt 
il  devint  successivement,  mais  en 
jreu  de  temps,  chef  de  brigade 
et  adjudant-général.  Après  avoir 
été  employ*;  dans  ces  deux  expé- 
ditions, il  passa  dans  l'armée  de 
Sambre-et- Meuse,  puis  dans  l'ar- 
niée  d'Angleterre,  et  enfin  dans 
l'expédition  du  général  Hardy.  Il 
avait  serfi  sotis  les  généraux  Ho- 
che, Daendels,  Bonaparte,  Desaix 
et  Kilmaiiie.  Lors  de  cette  der- 
nière expédition,  le  vaisseau  sur 
lequel  il  était  monté  soutint, 
pendant  une  journée  entière,  un 
combat  achar/ié  contre  4  vais- 
seaux de  ligne  anglais.  Il  fut  pris 
à  la  fin.  Un  des  amis  de  collège 
de  Tone,  sir  George  Hill,  gouver- 
neur de  Londondery,  le  dénonça, 
dit-on,  et  par  suite,  Tone  fut  con- 
duit, chargé  de  cliaines.  h  Did)!in. 
Traduit  devant  une  cour  martiale, 
lorsqu'il  parut  d«'vanl  .«es  juges, 
il  arracha  son  uniforme,  et  dit  avec 


TOO  ^9 

indignation  :  a  Ces  fers,  du  moins, 
ne  flétriront  pas  les  signes  révérés 
de  fa  nation  que  j'ai  servie;  je  suis 
plus  fier  de  les  porter  pour  la  cau- 
se que  j'ai  embrassée,  que  si  j'é- 
tais décoré  d'une  étoile  ou  d'une 
jarretière.  »  Le  discours  qu'il 
prononça  pour  sa  défense  ne  dé- 
lirentit  point  ces  nobles  senti- 
mens,etmême,  en  le  condamnant, 
ses  juges  ne  purent  lui  refuser 
le  témoignage  de  leurs  regrets.  Il 
péril  on  1798,  à  lAge  de  35  ans  , 
(l'ayant  pu  obtenir  l'honneur  d'ê- 
tre fusillé.  «  Aimable  dans  la  so- 
ciété, dit  rauleurdela  noticedont 
nous  avons  déjA  parlé,  hardi  et 
original  dans  ses  conceptions  po- 
litrques ,  il  ne  connaissait  ni  les 
difïicuUés  ni  le  découragement. 
Sa  vie  active  lui  laissa  peu  de  loi- 
sir potir  écrire,  et  le  peu  d'ouvra- 
ges qu'il  a  publiés  scuit  fous  des 
discu.ssions  politiques  5ur  les  évé- 
nemens  du  jour;  mais  le  style 
brillant  et  pur,  les  idées  neuves 
et  profondes,  les  distinguent  émi- 
uenimenl  des  écrits  ordinaires. 
M.  Tone  fils  a  publié,  en  181a,  à 
Paris,  un  petit  iu-4°,  sous  ce  litre  : 
Etal  civil  et  poHlufue  de  l'ilalie 
sous  la  domination  des  Gollis.  Cet 
écrit  concourut  sur  la  question 
ouverte  par  la  classe  d'histoi- 
re et  de  littérature  ancienne  de 
l'institut  ,  et  obtint  une  men- 
tion honorable.  »  Quand  On  con- 
sidère l'étendue  des  connaissan- 
ces, la  sagacitéd'csprit  qu'exigeait 
le  sujet  à  traiter,  et  le  mérite  de 
l'ouvrage  publié  par  M.  Tone,  on 
est  surpris  que  ce  soit  l'ouvrage 
d'un  ieune  homme  de  i5  ans. 

TOOKE  (Wimjvm),  savant  ec- 
clésiastique,- et  littérateur  anglais, 
membre  de  la  société  royale  de 


3o 


TOO 


Lontlrcï  et  de  l'académie  impé- 
riale de  Saint-Péter!*bourg,  csl  né 
en  1744-  Sa  famille  voulut  lui 
faire  embrasser  la  profession  d'im- 
primeur, et  le  fit  entrer  chez  M. 
Bowyer,  habile  typographe;  mais 
M.  Tooke,  qui  avait  fait  de  bon- 
nes études,  et  qui  préférait  l'état 
ecclésiastique,  se  fit  admettre  dans 
les  ordres  en  1770.  Envoyé  à 
Saint-Pétersbourg  en  qualité  de 
chapelain  de  la  Aiclorerie  anglaise, 
il  y  remplit  avec  zèle  ses  honora- 
bles fonctions,  et  profita  de  ses 
loisirs  pour  visiter  les  bibliothè- 
ques et  les  établissemens  publics, 
et  se  lier  avec  les  hommes  les 
plus  instruits  d»  la  llussie.  Il  paya 
noblement  cette  hospitalité  par 
les  ouvrages  qu'il  composa  pen- 
dant plus  de  ao  ns  de  séjour  à 
Saint-Pétersbourg  ,  et  que  nous 
citerons  plus  bas.  M.  Tooke  re- 
tourna à  Londres  en  1792,  et  de- 
puis cette  époque,  il  y  a  constam- 
ment résidé.  Il  a  donné,  en  1798, 
comme  éditeur,  le  Dictionnaire 
général  de  biographie,  i5  vol.  in- 
8%  et  a  fait  insérer  des  articles  re- 
marquables dans  le  Gentleman's 
magazine.  En  1814?  il  est  devenu 
chapelain  de  sir  William  Domvil- 
ie.  OndoitàM.  ïooke  les  ouvrage:? 
suivant:  1°  les  Amours  d'OtlinieL 
et  d' Aclisah,  roman  en  2  vol.  in- 
12,  1767;  2°  Traduction  des  ou- 
vrages de  Falconet  et  de  Diderot^ 
sur  la  sculpture f  in-4%  ^777;  5' 
la  Russie  ou  Histoire  complète  de 
toutes  les  nations  qui  composent  cet 
empire^  4  vol.  in-S",  1780;  ^"Vie 
de  Catherine  //,  impératrice  de 
Russie,  5  vol.  in-8°,  1797;  5° 
Coup-d'œil  sur  fempire  deRussie, 
pendant  le  règne  de  Catherine  II, 
jusqu'à  ta  fin  du  18°  siècle ,  5  vol. 


ÏOP 

in-8',  1799,  ouvrage  traduit  en 
français;  0°  Histoire  de  Russie  de- 
puis la  fondation  de  cet  empire  jus- 
qu'à f  avènement  de  Catherine  II, 
•2  vol.  in-8°,  1800;  i;"  Description 
de  Pétershourg ,  trad.  de  l'alle- 
mand de  Slorch,  in-8",  1800. 

TOPINO-LEBKUN  (Jeas-Bap- 
tiste),  né  à  Marseille,  vint  jeune 
ù  Paris,  et  y  cultiva  Tart  de  la 
peinture,  pour  lequel  il  avait  les 
plus  heureuses  dispositions.  Il  y 
fit  des  progrès  rapides  et  devint 
un  des  bons  élèves  du  chef  de 
l'école  française.  Tous  ceux  qui 
l'ont  connu  dans  les  ateliers  de 
M.  David  ont  rendu  justice,  non- 
seulement  aux  talens  que  le  jeune 
artiste  développa  de  bonne  heure, 
mais  ù  son  caractère  franc,  hon- 
nête, et  d'une  grande  douceur  à 
cette  époque.  Passionné,  comme 
presque  tous  les  artistes  de  ce 
temps,  pour  les  nobles  idées  d'in- 
dépendance et  de  liberté,  il  em- 
brassa la  cause  popnl^re  avec  en- 
thousiasme, dès  le  commencement 
de  la  révolution  ;  mais  bientôt  sa 
tète  méridionale  s'exalta,  et  son 
républicanisme  devint  sombre  et 
soupçonneux.  Ami  particulier  du 
maire  d'Arles,  A ntonelle,  ci-devant 
marquis,  mais  depuis  fougueux 
partisan  des  opinions  les  plus  exa- 
gérées, et  juré  au  tribunal  révolu- 
tionnaire, Topino- Lebrun  ne  vit 
plus  que  par  les  yeux  de  cet  ami. 
Celui-ci  le  fit  connaître  aux  chefs 
de  la  faction  terroriste,  qui  virent 
d'abord  combien  ce  jeune  homme 
passionné ,  pouvait  leur  devenir 
utile.  Ils  le  firent  nommer,  ainsi 
que  son  ami,  juré  au  tribunal  ré- 
volutionnaire, où  il  eut  la  coupa- 
ble condescendance  de  siéger  avec 
des  hommes  de  sang,  et  de  de- 


TOP 

venir  lui-môine  rinstrument  du 
crime.  Ayant  cependant  résisté 
pendant  quelques  niornens  aux 
ordres  des  déceinvirs,  dans  le 
procès  de  Camilie-Desnioulin  , 
Hérault  de  Séchelies  et  Danton, 
et  n'ayant  enfin  donné  son  vote 
qu'après  avoir  été  menacé  de  par- 
tager lui-même  le  sort  des  accu- 
sés, la  faction  dominante  crut  ne 
plus  pouvoir  compter  sur  son  dé- 
vouement, et  il  l'ut  écarté  de  l'o- 
dieux tribunal.  Le  remords  d'a- 
voir pris  part  ù  ses  actes  le  pour- 
suivitjusqu'ùla  findesa  vie.  Sous 
ki  gouvernement  directorial,  To- 
pino-Lebrun  accompagna  Bassal, 
qui  se  rendait  en  Suisse,  chargé 
d'une  mission  près  de  ce  gouver- 
nement, et  ne  s'occupa  pendant 
qjielque  temps  que  de  peinture. 
De  retour  en  France,  en  1797,  il 
fit  plusieurs  tableaux,  dont  le  plus 
remarquable,  la  Mort  de  Calas 
Graccliiis,  fut  acheté  par  le  gou- 
verneiuentet  donné  au  musée  de 
Marseille,  ville  natale  de  l'auteur. 
Cet  ouvrage  capital  aiuionçail  un 
véritable  talent  ;  mais  Tartisle 
abandonna  depuis  ses  pinceaux  et 
sa  palette,  pour  se  lancer  de  nou- 
veau dans  l'arène  politique.  La 
révolution  du  18  brumaire  lui  ins- 
pira une  haine  violente  contre  Bo- 
naparte, et  enflamma  au  plus  haut 
point  son  ancienne  ardeur  démo- 
cratique. Il  secrutappelé  ù  sauver 
la  république,  à  s'illustrer  comme 
brutus  et  à  immoler  le  nouveau 
César.  Lié  depuis  plusieurs  années 
avec  le  célèbre  sculpteur  romain 
Cérachi  [voyez  ce  nom),  qui  avait 
conçu  le  même  dessein,  ils  s'ad- 
joignirent Aréna,  Demervillc  et 
Diana,  comme  eux  ardens  répu- 
blicains. Le  premier  cotjsul  devait 


TOP  5i 

être  poignardé,    le  9  novembre 

1800,  i\  l'Opéra,  où  l'on  donnait 
la  première  représentation  des 
Horaces,  Mais  Demerville  ayant 
laissé  entrevoir  ses  projets  à  son 
ami  Barrère,  qui  le  découvrit  au 
général  Lannes,  des  mesures  fu- 
rent prises  en  conséquence,  et  les 
conjurés,  munis  de  leurs  poi- 
gnards, furent  tous  arrêtés  à  l'O- 
péra même,  à  l'exception  de  De- 
mervillc, qui  s'échappa  et  se  ca- 
cha pendant  quelques  jours,  mais 
qui  se  livra  bientôt  dans  l'espoir 
d'obtenir  au  moins  la  vie  sauve. 
Topino-Lebrun,  mis  en  jugement 
avec  ses  complices,  fut  condaniné 
à  mort  par  le  tribunal  criminel  du 
la  Seine,  et  exécuté  le  5i  janvier 

1801.  Il  s'était  présenté  avec  as- 
surance devant  ses  juges,  ne  cher- 
chant point  à  nier  sa  participation 
au  complot  qu'on  lui  imputait,  et 
marcha  à  l'échafaud  avec  le  calme 
et  le  courage  qui  ne  l'avaient  point 
abandonné  un  seul  instant  durant 
une  longue  procédure,  ni  pen- 
dant les  derniers  jours  de  sa  vie. 

TOPSEiXT  (J.  N.  ),  cx-Iégis- 
laleur,  capitaine  de  vaisseau  en 
retraite,  etc.,  se  prononça  en  fa- 
veur de  la  révolution,  et  fut  nom- 
mé, au  mois  de  septembre  1792, 
par  le  département  de  l'Eure,  dé- 
puté à  la  convention  nationale.  Il 
ne  prit  aucune  part  au  procès  de 
Louis  XVI,  étanlabsent  pour  cau- 
se de  maladie.  Ses  connaissances 
dansla  marine  lui  firent  préférer  le 
travaildesbureaux  sur  cette  matiè- 
re ,  dans  laquelle  il  fit  plusieurs 
rapports  remarquables.  Envoyé 
en  mission  dans  dilTérens  ports,  il 
évita  de  donner  lieu  à  aucune 
espèce  de  plainte ,  et  y  réussit 
entièrement.  Il  faisait  partie  de  la 


3a 


TOll 


flotte  qui,  en  1795,  sortit  d»  porl 
<le  Brest,  et  fut  attaquée  par  les 
Anglais.  Nommé  à  son  retour 
ineiiii)re  du  conseil  des  anciens, 
il  cessa  de  fij^urer  dans  cette  as- 
semblée au  mois  de  mai  1798; 
à  celte  époque,  il  obtint  le  grade 
de  capitaine  de  vaisseau,  et  devint 
plus  tard  offîcier  de  la  légion- 
d'honneur.  Mis  à  la  retraite  en 
1814,  il  reçut  en  m&mc  temps 
la  croix  de  Saint-Louis. 

TORCY  (François),  membre 
des  conciles  nationaux  de  France, 
était  prôlre  de  la  doctrine  chré- 
tienne de  la  maison  de  Vitry,  dé- 
partement de  la  Marne;  il  devint 
successivement  recteur  du  collège 
de  Sainl-Omer  et  vicaire -géné- 
ral de  Reims.  Il  adopta  les  prin- 
cipes de  la  révolution  avec  sages- 
se, et  dès  1789,  il  manifesta  ses 
opinions  politique?  et  religieuses, 
dans  lesquelles  les  excès  du  régime 
de  la  terreur  ne  l'ont  point  fait  va- 
rier. Doux  et  tolérant,  il^'elTorça, 
par  s(!S  actions  et  par  ses  ouvra- 
ges, de  réconcilier  les  partis,  et 
telle  noble  mission  n'a  pas  tou- 
jours élé  sans  fruit  près  des  hom- 
mes dignesdecomprendre  son  zèle 
apostolique.  Il  mérita  deux  fois, 
en  1797  et  en  1801,  d'être  appelé 
aux  conciles  qui  se  tinrent  à  Pa- 
ris. Ce  vertueux  ecclésiastique 
mourut  en  1806,  dans  une  obscu- 
rité qu'il  avait  toujours  recher- 
chée. Ses  principales  productions 
sont  ï" Eclaircisseviena sur  la  cons- 
titution du  clergé  de  France,  1789, 
in-8°,  réimprimé  l'année  suivante; 
9."  l'Eglise  gallicane  vengée  de  tou- 
te accusnlion  de  schisme  contre  ceux 
qui  l'en  accusent,  in-8".  1792; 
5°  Vrais  principes  sur  le  mariage, 
ou  lettre  à  un   curé  en  réponse  à 


Toa 

différentes  questions  concernant  les 
naissances ,  les  mariages  et  dé- 
cès ,  et  la  loi  du  divorce,  1 795  ; 
4"  accord  des  institutions  républi- 
caines avec  les  règles  de  l'Église. 

TORENO  (  LE  COMTE  DE  ),  mem- 
bre dcs  cortès  de  1810  et  de  1820, 
est  né  à  Oviédo,  dans  la  princi- 
pauté des  Asturies,  le  26  novem- 
bre. Sa  famille  est  l'une  des  plus 
illustres  de  la  province,  et  il  s'est 
montré  ,  dans  sa  carrière  privé<; 
comme  dans  sa  carrière  politique, 
l'un  des  citoyens  de  l'Espagne  les 
plus  distingués  par  leurs  lumiè- 
res, leurs  principes  libéraux  et 
leurs  hautes  qualités  personnel- 
les. Le  comte  de  Toreno  a  fait  d<: 
brillantes  éludes  dans  la  Castille  , 
et  particulièrement  à  Madrid.  Les 
sciences  naturelles,  les  langues  sa- 
vantes et  les  principaux  idiomes  de 
l'Europe  (entre  autres  le  français 
qu'il  parle  parfaitement  bien)  oc- 
cupaient ses  veilles  studieuses, 
lorsque,  étant  à  Madrid,  le  2  mai 
1808,  il  fut  témoin  des  événe- 
mens  qui  s'y  passèrent.  Bon  ci- 
toyen, homme  éclairé,  il  se  vou.i 
sur  le  champ  aux  intérêts  natio- 
naux, et  il  partit  pour  sa  ville  na- 
tale, où  il  arriva  lors  des  mou- 
vemens  populaires.  Malgré  son 
extrême  jeunesse,  il  reçut  de  ses 
concitoyens,  dévoués  à  l'indépen- 
dance nationale  ,  la  mission  de 
se  rendre  en  Angleterre,  aGn  d'y 
négocier  une  alliance  entre  les 
cabinets  de  Londres  et  de  Madrid. 
Ses  efl'orts  eurent  un  plein  siiccès. 
Député,  en  1812,  à  Cadix,  par 
la  province  de  Léon>  afin  de  de- 
mander !a  convocalinu  des  cor- 
les  ,  il  concourut  puissamment  , 
par  son  énergie,  à  la  création  de 
la  régence.  La  province  des  Aslu- 


li 


TOR 

ries  le  nomma  son  député;  il  n'a- 
vait pas  encore  atteint  l'âge  exigé 
(  25  ans)  pour  siéger  dans  cette 
assemblée  ;  mais  les  coitès  l'ad- 
mirent, néanmoins,  en  considé- 
ratioD  des  services  qu'il  venait  de 
rendre  à  la  cau^e  commune.  «  Dé- 
fenseur constant  et  désintéressé 
des  principes  libéraux,  disent  les 
auteurs  d'une  biograpliie  étran- 
gère, il  attaqua  les  droits  féo- 
daux, dont  le  maintien  eût  ce- 
pendant été  favorable  à  ses  intérêts 
personnels,  parla  en  faveur  de  la 
liberté  de  la  presse,  et  se  pro- 
non(;a  surtout  avec  la  plus  grande 
force  contre  l'inquisition.  Il  con- 
tribua efïicarement  aux  disposi- 
tions qui  furent  prises  pour  régu- 
lariser les  finances  et  rétablir  le 
crédit  public  ;  il  eut  aussi  beau- 
coup de  part  à  l'abolition  des  or- 
dres religieux.  Une  semblable 
marche  politique  ne  pouvait  man- 
quer de  le  signaler  à  la  persécu- 
tion qui  suivit  le  retour  de  Fer- 
dinand VII.  Il  fut  contraint  de 
quitter  ses  terres,  où  il  s'était  re- 
tiré, et  de  se  réfugier  en  Angle- 
terre ,  d'où  il  pa«sa  en  Franc»?.  Eu 
mai  181G,  il  fut  arrêté  à  Paris  , 
probablement  à  cause  de  son  al- 
liance avec  le  brave  général  Por- 
lier  (voy.  ce  nom), qui  avait  épousé 
sa  sœur  ;  mais  II  ne  tarda  pas  à 
être  mis  en  liberté,  et  les  journaux 
aimoncèrent  que  son  arreslalir)n 
avait  été  l'eflel  d'une  méprise.  Il 
liabita  celle  capitale  jus((u'à  l'é- 
poque où  le  dévouement  intré- 
pide d'un  petit  nombre  de  guer- 
riers donna  enfin  à  l'Espagne  un 
signal  auquel  elle  répondit  tout 
entière  (janvier,  février  et  mars 
i8ao).  Rappelé  dans  sa  patrie,  le 
comte  de  Toreno  a  élé  nommé 


TOR  55 

ambassadeur  h  Berlin;  mais  il  a 
refusé  cette  honorable  mission  , 
eu  alléguant  que  ses  propriétés  , 
qui  avaitnt  souffert  de  son  lonyp 
séjour  chez  l'élranger,  exigeaient 
sa  présence.  On  assure  toute- 
fois que  sa  démission  a  élé  re- 
fusée par  le  roi ,  qui  s'est  borné 
à  lui  accorder  un  congé.  »  On 
a  cependant  rej)roché  au  comte 
de  Toreno  de  ne  pas  avoir  sou- 
tenu parfaitement  aux  cortès 
de  1820,  le  beau  caractère  qu'il 
avait  développé  en  1812.  Il  s'alié- 
na ,  dit-on  ,  les  esprits  par  ses  opi- 
nions politiques  .  et  surtout  par  ses 
spéculations  de  finances.  Son  oppo- 
sition aux  exallatos  avait  nui  au 
député  aux  yeux  de  queiques-ims; 
son  intervention  darts  l'emprunt 
le  compromit  aux  yeux  de  tous. 

TOKMAZOFF  (le  comte  de)  , 
général  de  cavalerie  russe  ,  gou- 
verneur de  Moskow,  était  jeune 
encore  lorsqu'il  fil  ses  premières 
armes  contre  les  Perses  ;  il  se  si- 
gnala par  son  courage  et  ses  ta- 
lens,  et  les  vainquit  dans  plusieurs 
rencontres.  Moins  heureux  dans 
la  campagne  de  1794,  contre  les 
Polonais,  il  fut  batlu  par  Koscius- 
ko  à  Uaslavicé,  entre  Cracovie  et 
Varsovie  :  l'impératrice  Cathe- 
rine Il  ne  l'en  récompensa  pas 
moins  par  la  grand'croix  de  Sl- 
>Vladimir  et  par  une  épée  enri- 
chie de  diamans.  Le  maréchal 
Buxhowdefi  ,  gouverneur  mili- 
taire de  Riga  ,  forcé  ,  eiî  1807,  do 
quitter  son  gouvernement  ,  fut 
remplacé  par  le  général  T(»rma- 
zolV,  qui  ne  vit  pa»  plus  tôt  le  ma- 
réchal de  retour,  qu'il  abandonna 
ses  fonctions  pour  solliciter  sa  dé- 
mission ,  qu'il  obtint  le  20  no- 
vembre 1808.  A  l'époque  de  Pin- 


34 


TOU 


vasion  de  l'empereur  Napoléon 
en  Russie ,  le  général  ïormazoff 
comiiiandait  un  corps  destine  à 
<;ouvrir  le  duché  de  Varsovie,  et 
pénétra  dans  la  Pologne  le  iC 
juillet  1812.  Il  céda  bientôt  à  la 
marche  impétueuse  des  Français, 
et  fut  obligé  de  reculer  :  il  atten- 
dit l'ennemi  dans  la  forte  position 
de  Podubna;  il  y  fut  battu  et  éva- 
cua entièrement  le  pays.  Il  reprit 
sa  revanche  aii  mois  de  décem- 
bre ,  en  s'emparant  de  Grodno  , 
lorsque  les  troupes  françaises , 
épuisées  de  fatigues,  de  froid  et  de 
faim  ,  se  replièrent  sur  l'Allema- 
gne. Il  combattit  à  Lutzen  ,  dans 
la  campagne  de  i8i5,  et  y  dé- 
ploya beaucoup  de  bravoure  sans 
obtenir  aucune  espèce  de  succès. 
Au  mois  de  septembre  1834,  il 
fut  nommé  gouverneur  de  ftlos- 
kow^,  en  remplacement  du  comte 
Kostopchii). 

TORNÉ  (  Pierre  Anasthase  )  , 
évêque  constitutionnel,  naquit  à 
Tarbes,  le  21  janvier  1737,  d'une 
famille  dont  le  chef  était  juriscon- 
sulte et  officier  des  eaux  et  forêts. 
Le  goût  que  le  jeune  Torné  an- 
nonça de  bonne  heure  pour  les 
sciences  le  sauva  des  dangers 
d'une  mauvaise  éducation.  A  pei- 
ne sorti  de  l'enfance,  il  entra  dans 
la  congrégation  de  la  doctrine 
chrétienne,  société  rivale  des  jé- 
suites ,  mais  cultivant,  sans  in- 
trigue, sans  ambition,  sans  into- 
lénuice,  les  beaux-arts  et  l'ensei- 
gnement, par  le  seul  désii  d'être 
utile  et  renfermant  dans  son  sein 
plus  de  philosophes  que  de  bigots; 
son  activité  n'était  pointemployée 
à  des  objets  frivoles.  Torné,  jeune 
encore  ,  devint  géomètre  ;  un 
Traité  de  Mathématiques,  qui  de- 


TOR 

vint  classique,  fut  l'heureux  pré- 
sage de  ses  talens.  D'Alembert  'A 
Lagrange  le  jugèrent  digne  de  par- 
tager leurs  travaux.  Ses  premiè- 
res années  furent  passées  ainsi  au 
sein  d'une  société  savante,  sensi- 
ble à  la  gloire  et  au  plaisir  obscur 
de  former  des  enfans.  ïorné  sen- 
tit encore  le  besoin  d'instruire  des 
hommes.  Une  carrière  plus  vaste 
s'ofl'ril  devant  lui;  mais  il  conser- 
va jusqu'à  la  fin  de  sa  vie  le  plus 
tendre  souvenir  des  leçons  et  des 
principes  qu'il  avait  reçus  dans 
cette  société  vraiment  honorable. 
Dès  l'âge  de  20  ans,  il  prépara  les 
matériaux  des  ouvrages  qui  de- 
vaient un  jour  faire  sa  réputation. 
Pfu  d'hommes,  à  cette  époque  , 
avaient  reçus  au  même  degré  les 
qualités  d'un  excellent  orateur. 
Il  fut  armé  de  bonne  heure  contre 
les  préjugés;  des  vues  grandes  et 
salutaires  s'iissociaient  en  lui  à 
des  expressions  vives  ,  sans  dé- 
clamation ni  fausse  chaleur.  Rour- 
daloue  ,  sur  les  pas  de  Rossuet  et 
de  Massillon ,  l'avait  devancé  : 
c'était  beaucoup  que  d'oser  suivre 
leurs  traces;  ce  ne  fut  pas  asseï 
pour  Torné.  Il  sut  se  former  une 
route  nouvelle  et  laisser  après  lui 
la  foule  d'ouvrages  composés  sur 
les  mêmes  sujets.  Jamais  il  ne 
connut  cette  austérité  larmoyante 
qu'on  voudrait  inutilement  faire 
prendre  pour  la  vertu.  La  fran- 
chise avec  laquelle  il  expose  une 
doctrine  primitivement  fondée 
sur  la  tolérance  et  l'humilité  , 
mais  défigurée  par  l'intérêt,  le 
fanatisme  et  l'orgueil;  le  lieu,  les 
circonstances  dans  lesquels  il  la 
produit,  toutannonce  la  fermeté, 
la  noble  fierté,  qui  ne  permettent 
ni  de  l'oindre  ni  de  dissimuler  ; 


TOR 

mais  cet  amour  des  homme?  qui 
rend  ennemi  de  toute  persécu- 
tion :  c'est  dire  assez  qu'il  se  con- 
damna à  une  vie  retirée.  Associé 
aux  travaux  littéraires  des  acadé- 
mies de  Toulouse  ,  de  Nanci  , 
d'Orléans,  etc.,  Torné  avait  été 
annoncé  à  Paris;  il  y  jouit  d'une 
considération  qu'on  a  beaucoup 
depeine  à  yacquérir,  et  qu'il  con- 
serva plus  dilUcilement  encore 
dans  son  propre  pays.  Il  s'était 
affranchi,  comme  il  l'annonce  lui- 
même  dans  ta  préface  de  ses  ser- 
mons imprimés,  d'un  exorde  mé- 
thodique et  de  la  forme  symétri- 
que qui  coupe  le  fil  de  l'aHention 
quand  les  sujets  peuvent  être  pré- 
sentés d'une  nianière  plus  natu- 
relle. Les  temples  qu'on  avait  vus 
désert•^  ne  sulfisaient  [las  pour 
contenir  les  flots  de  ses  auditeurs, 
lorsque  Torné  fut  appelé  à  la 
cour  de  Louis  XV.  11  ne  se  dissi- 
mula pas  l'étendue  de)*^levoirs  que 
lui  imposa  la  puissance  ni  les  incon- 
véniens  attachés  à  la  faveur  douce 
et  amère  d'annoncer  de  grandes 
vérités  devant  «les  courtisans  ; 
ceux,  plus  j^rands  «uicore,  de  lut- 
ter contre  le  torrent  des  vices  et 
le  scandale  qui  «levaient  amener 
l'explosion  des  lumières: Torné  les 
exposa  avec  courage.  Simple  et 
.suldime  dans  ses  discours,  il  eut 
pour  admirateurs  le?  amis  d'une 
morale  qui  force  la  politique  à 
respecter  le  honheur  des  indivi- 
dus; on  applaudit,  même  à  la 
cour,  ce  pas«;.gede  la  fidélité  duc 
aux  souverains  :  «  Ne  croyez  pas 
»  que  par  iine  inviolable  fidélité, 
»  j'enlende  ici  une  aveugle  obéis- 
»  sauce  aux  ordres  justes  ou  in- 
I»  justes  de  non  maîtres,  ime  dé- 
0  pendanoe  toujours  prête  à  leur 


TOR  55 

»  sacrifier  les  lois  sacrées  de  l'é- 
»  tat,  à  étouffer,  pour  les  servir, 
»  les  cris  de  la  conscience.  Qui 
»  oserait  donner  le  beau  norn  de 
»  fidélité  l'i  cette  lâcheté  honteuse 
»  et  sacrilège?  Père,  mère,  maître, 
»  souverain,  ne  doivent  être  obéis 
»  au  préjudice  de  lu  loi  ;  hésiter 
»  dans  le  choix  serait  un  crime  : 
B  disgrâces,  châlimens  ,  prisons  , 
«  martyre  ,  il  faut  tout  souffrir 
■  courageusement,  tel  est  l'exem- 
•  pie  à  jamais  mémorable  de  la 
»  légion  thébéene.  »  Ue  grands 
einplois,  l'honneur  de  partager  la 
dégradation  des  boyards  de  Ver- 
sailles ne  peuvent  retenir  Torné  : 
la  faveur,  bien  loin  de  l'éblouir, 
lui  devient  importime  ;  le  calme 
de  la  solitude,  dont  il  avait  joui  du- 
rant plus  de  vingt  ans,  convenait 
mieux  à  son  âme.  Il  choisit  pour 
demeure  le  prieuré  de  Saint-Paul, 
à  l'entrée  de  la  vallée  de  G;impan, 
L'oraison  lunèbre  de  Louis  XV  , 
qu'il  prononça  devant  l'assemblée 
des  états  de  Bigorre.  ne  fut  pas  du 
moins  souillée  par  la  flatterie  qui 
j>oursuit  les  rois  jusqu'au  tom- 
beau. Mais  rien  n'a  pu  exruser 
Torné  auprès  de  l'ignorance  pri- 
vilégiée ;  elle  ne  lui  pardonna  ja- 
mais ni  la  supériorité  de  ses  talens, 
ni  sa  noble  franchise  ;  les  senii- 
mens  qu'il  professait  devaient  lui 
attirer  de  nombreux  ennemis , 
tout  autre  en  aurait  été  effrayé  ; 
il  était  dans  sa  destinée  de  mar- 
cher entre  l'admiration  et  la  jalou- 
sie. La  malignité  ne  supportait 
pas  un  prieur  aimable  qui  riait 
des  superstitions,  donnait  des  grâ- 
ces à  la  raison  et  de  la  gaîlé  an 
bon  sens  :  -riiu»  ue  lui  imposait  si- 
lence sur  ce  qu'il  croy.iit  raisonna- 
ble et  juste.  Il  nttenditit  des  jours 


50 


TOR 


nouveaux;ces  jours  brillèrent  pour 
lui,  il  les  avait  prévus  en  arra- 
ihanl  la  preniiîire  pierre  de  l'édi- 
fice réoiJal.  Torné  présenta  à  ras- 
semblée nationale  ranal3'se  exac- 
te des  cahiers  des  députés.  On 
retrouva  dans  tous  ses  écrits  la 
même  indépendance  de  la  pensée, 
ce  même  bonheur  d'expression 
qui  le  distinguent.  Le  département 
du  Cher,  sans  le  secours  des  bri- 
gues et  des  ressorts  toujours  visi- 
bles de  la  séduction  ,  l'appela  aux 
fonctions  épiscopales.  Trop  digne 
pour  les  refuser,  il  ne  céda  à  ce 
vœu  que  par  cet  amour  du  bien 
public,  auquel  il  savait  tout  sa- 
crifier. Son  premier  soin  en  arri- 
vant :\  Bourges,  fut  d'ôler  tout 
prétexte  à  ceux  qui ,  en  excitant 
les  discordes  civiles,  se  plai- 
gnaient des  désordres  qu'ils  fai- 
saient naître  par  leurs  clameurs  et 
leurs  imprudentes  provocatiotis. 
Pontife  citoyen,  président  du  dé- 
partement, il  lui  procura,  par  sa 
modération  et  ses  travaux,  un 
repos  trop  com[)romis  ailleurs. 
Appelé  en  1790  à  l'assemblée  lé- 
gislative ,  Torné  n'employa  pour 
maintenir  la  dignité  de  la  repré- 
sentation nationale,  que  la  su- 
périorité de  ses  talens  et  celle  de 
ses  conseils.  Indifférent  pour  les 
richesses  et  pour  toutes  les  digni- 
tés ,  il  n'aspirait  qu'à  jouir  des 
sentimens  tendres  et  de  la  félicité 
domestique  ,  adoucissement  aux 
uiaux  de  la  vie  dans  les  consola- 
tions et  l'union  des  âmes  tendres, 
que  Home  uîoderne  a  elle-même 
sanctifiée.  Lorsque  la  liberté  pa- 
rut se  livrer  à  des  excès  qui  pou- 
vaient la  perdre  ,  ou  ofiVir  à  ses 
♦^nnenxis  tant  de  ressources  contre 
elle  ,    des    causes    trop    connues 


TOR 

pour  les  rappeler,  ramenèrent  l'é 
vêque  du  Cher  au  sein  de  sa  pa- 
trie. Tout  autre  que  Torné,  en  ac- 
ceptant la  modique  place  de  bi- 
bliothécaire de  l'école  centrale  de 
Tarbes ,  aurait  cru  faire  le  sacri- 
fice de  son  amour-propre.  Torné 
éprouva  cette  vérité  de  l'orateur 
romain,  que  les  belles-lettres  con- 
solent puissamment  au  fort  de  nos 
revers.  Il  conservait  tout  le  feu  de 
la  jeunesse,  son  cœur  n'avait  pas 
vieilli  ;  sa  vie  fut  un  travail  con- 
tinuel ;  son  âme,  pleine  d'images 
douces  et  riantes  ,  était  plus  à  ses 
amis  qu'.-^  lui-même.  Personne 
n'encourageait  les  jeunfts  talens 
avec  plus  de  plaisir,  personne  ne 
rendait  plus  de  justice  à  sesrivaiix. 
Jamais  il  n'éprouva  la  crainte  ni 
aucun  des  tourmens  ordinaires  du 
cœur  humain,  et  cet  homme  a 
traîné  le  poids  d'une  affreuse  mi- 
sère. Sa  fortune  ayant  souffert  la 
réduction  commune  et  des  mal- 
heurs particuliers,  il  dut  l'exis- 
tence de  ses  derniers  jours  à  une 
femme  douée  des  charmes  de  l'es- 
prit, que  donnent  l'énergie  et  la 
constante  ami  tié(madame  Cl  a  rac). 
Torné  n'aperçut  pas  la  tnort  qui 
vint  le  frapper;  i!  s'endormit  du 
sommeil  éternel  à  Tarbes, dans  l'a- 
sile d'un  ami  (M.  Merens),  qui  l'a- 
vait retiré  chez  lui,  le  25  nivôse 
de  l'an  5  cîe  la  république  fran- 
çaise,  âgé  d'environ  70  ans. 

TORO   (  LE  MARQUIS  DEL  )  ,  né  i'i 

Caraccas  vers  17O9.  d'une  famille 
distinguée,  était  colonel,  cheva- 
lier de  l'ordre  de  Charles  III.  et 
recteur  de  la  municipalité  de  Ca- 
raccas ,  à  l'époque  de  la  révolu- 
lion  de  1808,  et  au  moment  mê- 
me où  les  corlès  et  le  frère  de 
l'empereur   {voy.    Bonaparte-Jo- 


TOll  TOR  r>7 

ïeph)  se  ilisputaient  le  liôiie  tl'Es-  quand  il  eut  besoin  de  retiforts  et 
pagne;  il  se  rangea  à  l'iivis  de  d'approvisionnemens  ,  il  lui  fut 
ceux  qui  voulaient  un  gouvern*;-  impossible  de  s'en  procurer;  d'un 
ment  indépendant  de  ees  deux  autre  côté  ,  les  mauvais  temps 
i'.utorités,  et  fut  arrêté,  en  1808  ,  l'empêchèrent  d'exécuter  l'atla- 
corame  signataire  d'une  pétition  que  projetée  contre  la  Vêla  de 
qui  tendait  à  établir,  dans  la  pro-  (îoro;  le  marquis  del  Toro,  obligé 
vince  de  Venezuela,  une  junte  ri-  de  battre  en  retraite,  n'échapj)a 
vale  de  celle  d'Espagne.  Sa  cap-  qu'avec  peine  aux  difficultés  qu'il 
tivité  ne  dura  que  quelques  jours,  rencontra,  et  manqua  totalement 
néanmoins  il  resta  étranger. aux  le  but  de  son  entreprise,  l/annéc 
affaires  jusqu'au  moment  où  la  suivante  ,  chargé  de  réduire  la 
municipalité  de  Caraccas,  s'étant  ville  de  Valencia,  qtie  les  Espa- 
réunie  aux  députés  nommés  par  gnols  qu'elle  renfermait  dans  son 
le  peuple,  prit  les  rênes  du  gou-  sein  avaient  obligée  de  se  séparer 
verneinent  sous  le  nom  de  junte  de  la  république  de  Venezuela,  il 
suprême,  en  reconnaissant  toute-  ne  força  qu'avec  peine,  et  une 
fois  la  souveraineté  de  Ferdinand  perle  considérable,  le  passage  qui 
VII.  Tel  fut,  le  19  avril  1810,  le  y  conduisait;  son  gouvernement , 
signal  de  la  révolution,  auquel  qui  commençait  à  douter  de  son 
répondirent  les  autres  provinces  habileté,  le  rappela,  et  lui  don 
de  l'état  de  Venezuela.  Les  agens  na  pour  successeur  le  fameux 
de  la  métropole,  voulant  arrêter  Miranda  [voy.  ce  nom).  Dès-lors 
cet  élan  patriotique,  prirent  des  le  marquis  del  Toro  duT  craindre 
mesures  de  rigueur  pour  le  rél;i-  de  tomber  entre  les  mains  des 
blîssement  de  la  monarchie  abso-  espagnols;  il  chercha  son  salut 
lue  dans  celte  contrée.  Le  gou-  dans  la  fuite,  et  se  retira  à  la  Tri- 
verneur  royal  de  Maracaybo  me-  nilé ,  où  il  vécut  long-temps  des 
naça  en  même  temps  les  déparie-  secours  de  sa  famille,  lous  ses 
mens  de  Mérida  et  de  Truxillo,  biens  ayant  été  confisqués  par  or- 
au  secours  desquels  la  junte  su-  dre  du  roi.  On  crut  un  instant 
prênie  envoya  le  marquis  del  que  les  événemensqui  eurent  lieu 
Toro  à  la  lêle  d'un  corps  de  trou-  en  Espagne,  en  1820  ,  auraient 
pcs.  Celui-ci  négocia  d'abord  avec  quelque  influence  sur  le  Nou- 
le  gouverneur  pour  l'amener  à  veau-Monde,  et  que  les  haines, 
son  parti  ;  n'ayant  pu  réussir,  il  les  vengeances  ,  disparaîtraient 
marcha  contre  le  déparlement  de  pour  faire  place  à  la  paix,  si  né- 
(îoro,  et  entra  sur  son  territoire  cessaire  aux  deux  parti».  Cet  cs- 
en  riovembrc  18m.  Son  expédi-  poir  s'est  évanoui;  le  Nouveau- 
lion,  qui  eu\  d'abord  du  succès,  Monde  a  été  obligé  de  conquérir 
échoua  par  le  peu  de  précautions  son  indépendance,  et  les  derniers 
que  prit  le  cherjiour  la  faire  réus-  succès  de  IJolivar(  i8a5)  paraissent 
sir;  il  s'était  enfoncé  dans  un  pays  l'avoirassuréepour jamais, Lemar- 
sauvage  et  sablonneux,  sans  échc-  quis  del  Toro,  qui  y' a  c(uicouru 
louiier  ses  Irouprs.  pour  asstir(;r  «h;  tous  ses  nmyens  dans  des  cir- 
scs  communicaliuus,  d«;  sorte  que,  con.slaiices  dilliciles,  doit  recueil- 


38 


TOR 


lir  aujourd'hui,  au  iniluiu  de  ses 
concitoyens,  le  fruit  de  ses  ef- 
forts. 

TORO  (  DON  Ferdinand  del  ) , 
frère  du  précédent,  ne  à  Carac- 
cas  en  1779,  passa  fort  jeune  en 
Jlspngne,  où  il  servit  dans  Taruiée 
de  terre  jusqu'en  1811.  Il  revint 
à  cette  époque  à  Caraccas  avec  le 
grade  de  colonel,  l'emploi  de 
sous-inspecteur-général  et  la  dé- 
coration de  Tordre  de  Charles  III. 
Au  moment  où  les  idées  d'indé- 
pendance se  manifestèrent  dans 
l'Amérique,  il  se  montra  leur  par- 
tisan, prit  rang  parmi  leurs  dé- 
fenseurs, et  combattit  avec  beau- 
coup de  courage  sous  les  ordres 
du  général  Miranda.  11  contribua 
aussi  puissamment  à  la  prise  de 
Valeucia  ;  mais  au  rTioment  où, 
emporté  par  sa  valeur,  il  attaquait 
une  batterie  royaliste,  il  eut  les 
deux  jaiilbes  coupées  par  un  bou- 
let de  canon.  Ayant  survécu  à 
l'ampulation ,  mais  hors  d'état  de 
servir  sa  patrie  ,  il  prit  le  parti  de 
se  retirer  avec  son  frère  à  l'île 
de  la  Trinité,  où  il  resta  jusqu'au 
moment  où  il  lui  fut  permis  d'al- 
ler jouir  dans  sa  patrie  de  la  li- 
berté qu'elle  avait  si  glorieuse- 
ment conquise.  Il  est  générale- 
ment regardé  comme  un  très-bon 
militaire. 

TOaRE  (Bernard  de  la),  évo- 
que de  Casteilamare,  né  à  Naples 
en  1746?  embrassa  Pétat  ecclé- 
siastique, en  quittant  le  barreau, 
auquel  il  était  destiné.  Il  se  forma 
dans  le  séminaire  métropolitain, 
où  il  occupa  ensuite  une  chaire 
de  pliilosophie  et  la  place  de  di- 
recteur de  l'académie  apologéti- 
que do  la  religion  catholique.  En 
1791 ,  il  fut  élevé  au  siège  épis- 


TOR 

copal  le  Marsico-Nuovo,  en  Basi- 
liuate  Plein  de  zèlt;  pourl'éduca- 
tiou  du  clergé,doiit  l'instruction  lui 
pa.-aissait  le  meilleur  moyen  pour 
rendre  la  religion  respectable, 
son  premier  soin  fut  d'organiser 
un  séminaire,  qu'il  légua  à  son 
successeur,  lorsquil  fut  appelé  à 
gouverner  l'égli-e  de  Letlere  et 
de  Gragnano.  Celle  nouvelle  des- 
tination le  rapj.irucha  de  la  capi- 
tale, et  le  mit  par  là  en  élat  <le  se 
charger  de  quel(|ues  travaux  ex- 
traordinaires. Le  gouvernement 
napolitain  le  nomma  membre  d'u- 
ne commission  d'évêques,  créée 
poi;r  discuter  les  affaires  ecclésias- 
tiques du  royaume,  et  Pie  VI,  en 
partant  de  Rome,  lui  donna  une 
marque  d'estime,  en  le  choisissant 
pour  son  légat  apostolique.  Pen- 
dant les  troubles  politiques  qui 
eurent  lieu  à  ISaples  en  1799,  ce 
sage  prélat  sut  par  sa  prudence  et 
ses  conseil»,  calmer  TefTervescen- 
ce  populaire,  et  il  renouvela 
l'exemple  de  l'évêque  d'Imola 
{voj.  Pie  VII),  en  rappelant  ses 
ouailles  à  l'obéissance  des  lois. 
Mais  comme  dans  une  lettre  pas- 
torale, adressée  à  ses  diocésains, 
il  avait  prouvé  la  compatibilité  de 
la  religion  catluilique  avec  le  gou- 
vernement républicain,  au  retour 
de  la  cour  de  Siciie,  il  fut  arrêté 
et  jeté  dans  un  cachot,  dont  il  ne 
sortit  que  pour  être  condamné  à 
l'exil.  Chassé  de  sa  patrie,  qu'il  a- 
vait  édifiée  par  sa  piété,  il  vint 
chercher  un  asile  en  France,  où  il 
se  fit  chérir  par  la  douceur  de  son 
caractère.  Après  la  paix  de  Flo- 
rence (en  1800),  il  lui  fut  permis 
de  rentrer  dans  ses  foyers,  mais 
il  préféra  d'aller  vivre  à  Rome, 
où  il  resta  jusqu'à  l'année  1806  ^ 


TOR 

que  le  royaume  de  Naple»  retoin- 
i)a  80US  la  domination  élraDgère. 
Joseph  Bonaparle,  qui,  en  mon- 
tant sur  le  trône,  avait  été  obligé 
de  donner  un  exem|)le  de  ferme- 
lé,  en  éloignant  de  ses  étals  le 
cardinal  archevêque  {voy.  Ruffo- 
Louis),  le  Ot  remplacer  par  l'évê- 
que  de  Gragnano,  qui  prit  le  litre 
de  grand-vicaire,  et  remplit  ces 
fonctions  pendant   tout  le   règne 
de  Joseph  et  de  Joachim  (voy.  Mu- 
BAT.)  Le  séminaire  de  cette  ville 
reput  alors  une  nouvelle  organi- 
sation;  les  prêtres,  les  curés,  et 
toutes  le»  classes  de  l'ordre  ecclé- 
siastique, présentèrent  le  specla- 
ble  bien  rare  dans  un  pays  catho- 
lique, de  la  tolérance,  de  la  cha- 
rité et  de  la  soumission  aux  lois. 
Pfacé  à  la  tête  du  comité-général 
de  bienfaisance,    Rernard    de  la 
Torre  eut  soin  des  pauvres,  qui  ne 
le  trouvèrent  jamais  sourd  à  leurs 
plaintes.  Il  était  habitué  à  parla- 
i^er   son    bien   avec   les   malheu- 
reux, et  on  l'avait  déjà  vu,  dans 
une  année  de  discite,  épui,»er  tou- 
tes ses  ressources,  réformer  sa  ta- 
ble, vendre  sa  voiture,  ses  che- 
vaux, et  jusqu'à  son  anneau  épis- 
copal,  pour  répandre  en  abondan- 
ce les  aumônes.  Le  roi  Joachim 
rendit  honimage  à  se»  vi-rtus  ,  en 
le  nommant  aumônier  de  ses  en- 
fans,  et  en  le  décorant  du  grand- 
cordon  de  l'ordre  des  Deux-Sici- 
les.  Au  retour  de  Ferdinand  IV, 
en  i8i5,  le  grand-vicaire  de  Na- 
ples  se  relira  dans  son  diocèse,  où 
il  ne  s'occupa  <jue  des  devoirs  de 
son  ministère.  Lorsque,  iiar  l'effet 
du  concordai  conclu,  en    1818, 
entre  le  roi  de  Naples  et  la  cour 
de    Rome,    le    sieste   de    Lettere 
et   (iragnano   fut  réuni  à   l'églijc 


ÏOR 


^1) 


de  Caslellammare,  ce  digne  é- 
vêque  se  transporta  dans  sa  nou- 
velle résidence,  et  songeait  déjà 
à  la  fondation  d'un  séminaire. 
Frappé  d'un  coup  d'apoplexie, 
il  mourut  à  Portici  ,  le  28  mai 
1820.  Il  a  laissé  un  traité  sur 
les  Caractères  des  incrédules ,  pu- 
blié en  1779;  ""  poëme  sur  le 
rétablissement  du  christianisme , 
imprimé  en  1816,  et  un  ouvrage 
sur  la  f^érité  de  la  religion  chré- 
tienne, qui  n'a  paru  qu'après  sa 
mort. 

ÏORRÈS  (Louis  DA  MoTTA  Tko 
ET  ) ,  genlilhomme  de  la  maison 
de  roi  de  Portugal,  de  son  con- 
seil ,  et  vice-amiral  dans  la  ma- 
rine portugaise,  naquit  à  Lisbonne 
le  16  mars  1769;  troisième  ûls 
d'un  autre  du  même  nom  ,  grand- 
trésorier  de  Leuta  et  gouverneur 
du  Ceara,  grand  au  Brésil,  et  de 
dona  Anne  d'Azevedo  Continho, 
il  descendait  par  son  père  de  Mem 
Gundar  la  Motte  ,  gentilhomme 
français  ,  compagnon  <lu  comle 
Henri  de  Portugal.  Entré  dans  le 
corps  (le  la  marine  dès  l'ûge  de  i4 
ans,  il  fit  ses  études  à  l'académie 
des  gardes-marines,  y  obtint  les 
prix  en  trois  différens  examens, 
ayant  subi  le  dernier  devant  S. 
M.  la  reine  régnante  de  Portugal, 
Marie  1",  les  princes  feu  dom 
Joseph  et  dom  Jean,  aujourd'hui 
roi.  Lieutenant  de  mer  en  1788, 
brigadier  d'une  compagnie  des 
gardes  -  marines  embarqués  ,  et 
capitaine-lieutenant  en  1791  ,  il 
servit  constamment,  du  24  avril 
1786  jusqu'en  1790,  sur  les  vais- 
seaux le  Uon  Succès,  les  Plaisirs, 
la  Conception ,  la  Méduse  ,  la 
Marie  première,  et  sur  les  frégates 
le  Prince  du  Brésil ,  la  Minerve, 


4o 


TOR 


le  Saint-Raphaël  et  la  Charlotte, 
lesquels  firent  partie  des  flottes 
qui,  dans  le  temps,  furent  em- 
ployées sous  divers  chefs  à  la 
croisière  du  détroit  de  Gibraltar 
et  à  Naples,  Calheri,  etc. Capitaine 
de  frégate  en  1793,  il  s'embarqua 
sur  la  Reine  de  Portugal ^  un  des 
vaisseaux  de  l'escadre  du  contre- 
amiral  A.  J.  do  Valle,  escadre  qui, 
unie  à  celle  d'Angleterre  ,  com- 
mandée par  l'amiral  lord  How, 
s'occupa  à  croiser  sur  les  cô- 
tes de  France  et  d'Angleterre  jus- 
qu'en 1795  ;  bientôt  il  eut  le  com- 
mandement du  brick  le  Lièvre,  de 
22  canons,  sur  lequel  il  fut  à  Gi- 
braltar, Ceuta  et  Tetuan;  capi- 
taine de  mer  et  de  guerre  en  1 796, 
et  commandant  la  frégate  VUlysse, 
il  fut  à  Marrocos  conduire  des  ca- 
deaux pour  l'empereur,  et  retour- 
na à  Lisbonne,  après  sa  commis- 
sion, avec  i4  hommes  en  état  de 
service,  à  cause  d'une  épidémie 
déclarée  à  bord  de  la  frégate. 
Déji\  chef  de  division,  il  fut  em- 
ployé à  la  défense  du  port  de 
la  capitale  en  1797,  1798  et  1799; 
eut  sous  ses  ordres  une  flottille 
de  canonnières  et  des  barques 
flottantes,  et  la  première  division 
du  corps,  Brigade  Royale  des  ma- 
rines, et  après,  en  l'absence  du 
général  marquis  de  Niza,  toutes 
les  trois  divisions  du  même  corps, 
qu'il  organisa.  Le  i5  mars  1800, 
il  partit  de  Lisbonne  pour  le  Bré- 
sil, sur  la  frégate  l'^^mazone,  com- 
mandant un  convoi  de  sept  vais- 
seaux de  guerre  et  de  cent  quatre 
vaisseaux  marchands;  ce  convoi, 
le  plus  riche  qui  soit  sorti  du  Por- 
tugal, arriva  heureusement  aux 
ports  de  sa  destiriation  ,  où  il 
mouilla  avec  ceux  qui  étaient  pour 


TOR 

Bahia  ,  en  juillet  de  la  même 
année  ,  sa  frégate  ayant  ouvert 
une  voie  d'eau  de  trente  pouces 
par  heure.  Il  continua  à  servir 
dans  la  station  d'Amérique,  et  y 
fut  chargé  de  bloquer  Rio  de  la 
Ptata,  ayant  sous  ses  ordres  la 
Marie  première  ;  ce  service,  dans 
une  saison  très-orageuse  ,  dura 
plus  de  trois  mois,  et  il  y  prit  un 
brick  espagnol.  Pendant  la  paix, 
il  gouverna  la  capitainerie  de  la 
Paraiba  du  Nord  au  Brésil,  où  il 
se  fit  aimer  par  son  gouverne- 
ment sage  et  populaire;  chargé 
par  le  prince -régent  de  deman- 
der aux  peuples  une  souscrip- 
tion pour  les  besoins  de  l'état, 
il  commença  par  mettre  son  nom 
à  la  tête  de  la  souscription  pour 
6,25o  fr. ,  et  son  exemple  étant 
généralement  suivi,  il  envoya  en 
Portugal  la  somme  de  i5o,ooo  fr. 
En  décembre  i8o5,  il  fut  envoyé 
à  Gibraltar  prendre  le  comman- 
dement de  la  flotte  du  détroit  , 
composée  de  deux  vaisseaux,  deux 
frégates  et  deux  bricks  ,  et  en 
même  temps  chargé  d'aller  à  Ar- 
gel  pour  faire  la  paix  avec  le  bey; 
déployant  son  pavillon  sur  la 
Reine  de  Portugal,  il  débarqua  en 
Argel  dans  son  canot,  y  resta  sept 
jours,  et  ne  put  rien  faire,  à  cause 
des  prétentions  inouïes  de  ces  bar- 
bares; alors  retournant  à  bord,  il 
établit  des  croisières  si  actives , 
qu'i^  prit  deux  corsaires  arge- 
liens,  et  en  bloqua  deux  autres  si 
étroitement,  un  à  Saint-Lucar  de 
Bararaeda,  et  l'autre  à  Arzilla  . 
qu'ils  furent  obligés  de  se  rendre. 
Cette  flotte  prit  aussi  trois  polo- 
naises sur  les  forces  de  Tripoli,  pour 
venger  l'insulte  qu'ilsavaient  faite 
au  pavilIonportugais,en  emmenant 


TOR 

un  bSlirnent  d'Hambourg,  ancré 
prèsdu  forld'Ericeira.  N'ayant  pas 
suivi  la  famille  royale  au  Brésil 
en  1807,  ù  cause  de  la  mauvaise 
volonté  du  ministre  de  la  marine 
d'alors,  il  montra  ,  en  1808,  son 
patriotisme  ,  donnant  pour  les  be- 
soins de  la  guerre  8,2.57  francs  en 
argent,  quelques  ustensils  et  un 
bon  cheval  pour  la  cavalerie,  et 
il  prit  aussi  le  commandement 
d'une  brigade  des  légions  natio- 
nales. En  181 1  ,  il  partit  pour  Rio 
de  Janeiro  par  ordre  du  prince, 
lequel,  à  son  arrivée,  le  fil  com- 
mandeur de  l'ordre  de  Saint-Be- 
noît d'Avis.  Contre  -  amiral  en 
1812,  il  fut  nommé  capitaine- 
général  du  royaiune  d'Angola,  en 
Afrique,  en  iHi5.  Une  belle  pro- 
menade publique,  une  grande 
halle  aux  comestibles,  l'agrandis- 
sement de  la  place  du  palais,  des 
avenues  d'arbres  plantés,  les  for- 
teresses et  les  casernes  réparées  , 
et  surtout  l'intérêt  que  lui  inspira 
rhôpital  royal  de  la  Miséricorde  , 
lequel  était  entièrement  dénué  de 
tout  le  nécessaire,  et  pour  lequel 
il  obtint  une  souscription  de 
85,ooo  fr.,  y  entrant  avec  5,760 
IV.  ,  ce  qui  lui  donna  les  moyens 
d'approvisionner  l'hôpital  et  de 
laisser  encore  de  l'argent  à  son 
successeur  ;  ces  belles  actions  , 
jointes  à  ses  manières  populaires  et 
à  son  désintéressement,  rendront 
à  jamais  s&n  nom  célèbre  dans  ce 
pays.  Vice-amiral  en  1818,  il  re- 
tourna à  Rio  de  .laneiro  en  1819, 
et  y  fut  nonmié,  en  1820,  con- 
seiller de  guerre  dans  le  conseil 
supérieur  et  militaire.  Accompa- 
gnant le  roi  pour  le  Pfirttigal ,  eu 
i8*ii,  il  y  fut  employé  dans  le 
conseil  de  l'amirauté  jusqu'à  son 


TOU 


4» 


extinction  ;  alors  se  retirant  che^ 
lui,  il  ne  put  survivre  au  total 
anéantissement  de  la  monarchie 
portugaise,  et  il  est  mort  le  26 
mai  1823.  Sa  perle,  vivement 
regrettée  par  son  roi  et  par  ses 
camarades,  prive  la  nation  por- 
tugaise d'un  de  ses  meilleurs  ofli- 
ciers  de  marine.  11  laissa  de  sa 
femme,  née  M""  Falcao  Wanzel- 
1er,  un  fils,  aujourd'hui  major,  et 
deux  filles. 

TOLlLAN  (Pierre- Antoine), 
naquit  à  Toulouse  en  1761,  et  non 
à  Bordeaux  comme  l'a  avancé 
sans  fondement  la  biographie  mo- 
derne d(j  libraire  Eymery.  Il  était 
domicilié  <lans  la  capitale  de  la 
Guienne  quand  la  révolution  é- 
clata.  Les  principes  du  nouvel  or- 
dre de  choses  charmèrent  l'iime 
ardente  de  Toulan;  il  se  montra 
enthousiaste  à  l'excès  de  la  régé- 
nération politique,  et  partit  pour 
Paris,  afin,  disait-il,  de  l'admirer 
de  plus  près.  Son  zèle  parut  digne 
de  récompensée;  on  lui  donna  une 
place  lucrative  dans  l'administra- 
tion des  biens  des  émigrés.  Quel- 
ques chefs  de  parti  de  celte  épo- 
que, croyant  pouvoir  l'employer 
utilement  dans  leurs  inlérêls,  le 
firent  comprendre  au  nombre  des 
membres  de  la  commune  de  Pa- 
ris. Après  le  10  août  1792,  Louis 
XVI  et  sa  famillle  ayant  été  cou- 
duilsauTemple, leur  garde  fut  con- 
fiée aux  officiers  municipaux  de  la 
ville.  Toulan  ne  j)ut  voir  de  près 
celle  grande  infortune  sans  la 
secourir  autant  qu'il  dépendrait 
de  lui.  Bientôt  même  un  motif 
plus  impétueux  encore  se  joignit 
■\  ce  senlimrnt  généreux  ,  car 
un  voile  mystérieux  couvre  une 
partie   des  actions  de  Toulan;  Il 


4»  TOU 

parvint  à  faire  connaître  à  la 
reine  qn'ello  pondait  compter  ïur 
sa  fidélité,  et  dès  lors  il  la  servit 
avec  zèle. Voici  ce  qu'en  dit  Cléry 
dans  5es  Mémoires  :  «  Un  jeune 
homme,  nommé  Toulan,  que  je 
croyais  à  ses  propos  un  des  pins 
grands  ennemis  de  la  famille 
royale,  vint  un  jour  près  de  moi, 
et  me  «errant  la  main:  —  Je  ne 
puis,  me  dit-il  avec  mystère,  par- 
ler aujourd'hui  à  la  reine  à  cause 
de  mes  camarades;  prévenez-la 
que  la  commission  dont  elle  nj'a 
chargé  est  faite;  que  dans  quel- 
ques jours  je  serai  de  service,  et 
qu'alors  je  lui  porterai  la  répon- 
se. Etonné  de  Tent  u'Ire  parler 
ainsi,  et  craignant  qu'il  ne  me 
tendît  un  piège:  —  Monsieur,  lui 
dis-je,  vous  vous  trompez,  vous 
vous  trompez  en  vous  adressant  à 
moi  pour  de  pareilles  commis- 
sions. — r  Non  ,  je  ne  me  trompe 
pas,  répliqua-t-il  en  me  serrant  la 
main  avec  plus  de  force  ,  et  il  se 
retira.  Je  rendis  compte  à  la  reine 
decette  conversation  :  vous  pouvez 
vous  fier  àToulan,  me  dit-elle.  » 
M.  Hue,  dans  son  ouvrage,  parle 
également  avec  éloge  de  ce  jeune 
homme,  dont  les  efforts  généreux 
ne  furent  pas  couronnés  du  suc- 
cès. Il  servit  à  entretenir  la  cor- 
respondance de  la  reine  avec  ses 
amis  du  dehors;  mais  trop  d'em- 
pressement, des  manières  trop 
respectueuses  envers  les  augustes 
prisonniers,  perdirent  Toulan  :  ii 
éveilla  les  soupçons  des  espions 
nombreux  dont  la  tour  du  Temple 
était  environnée;  on  l'arrêta,  ainsi 
ijue  neuf  autres  officiers  munici- 
paux, accusés  comme  lui  d'avoir 
voulu  favoriser  l'évasion  de  Mar  ie- 
Ântoinette,  et  le  tribunal  révolu- 


TOU 

tiunnaire  de  Paris  le  condamna  -à 
la  peine  de  mort  le  3o  juin  1794. 
T013L0NGE0N  (  le  vicomte 
François-Emmanuel  de  ) ,  ancien 
colonel  de  chasseurs,  membre  de 
l'assemblée  constituante  et  du 
corps-légiïlatif,  membre  de  l'ins- 
titut, commandant  de  la  légion- 
d'honneur,  naquit  à  Champlite , 
près  de  Gray,  département  de  la 
Haute-Saône,  Destiné  par  sa  nais- 
sance à  la  carrière  des  armes,  il 
fit  néanmoins  des  études  très-dis- 
tinguées ,  et  entra  de  bonne  heure 
au  service.  Il  employait  ses  nom- 
breux loisirs  à  cultiver  les  lettres, 
et  se  fil  connaître  bientôt  par  son 
mérite  comme  écrivain.  •  il  donna 
une  preuve  de  ses  talens,  dit  M. 
Grappin,  secrétaire  perpétuel  de 
l'académie  de  Besançon  ,  lors- 
qn'après  la  séance  publique  du  3o 
juin  1779,  dans  une  réunion  des 
membres  de  l'académie  et  des 
chefs  de  corps  militaires  ,  en  l'hô- 
tel de  M.  le  maréchal  de  Ségur, 
qui  avait  été  installé  ce  jour-li 
même  à  l'académie ,  M.  de  Tou- 
longeon  lut  rme  pièce  de  poésie 
qui  fut  tellement  goûtée,  que  dans 
celte  réunion  même,  on  lui  des- 
tina, par  acclamation,  la  premièr« 
place  d'académicien  qui  viendrait 
à  vaquer.  Ce  poëme  était  une  al- 
légorie fine  et  ingénieuse  sur  la 
retraite  de  Mars  au  l'arnasse,  dont 
il  ne  fut  pas  difficile  de  faire  l'ap- 
plication. Nommé  académicien  ti- 
tulaire le  k"  décembre  de  la  même 
année,  M.  de  Toulongeen  prit  sa 
place  à  la  séance  publique  qui  eut 
lieu  cinq  jotirs  après.  Son  dis- 
cours de  réception  fut  un  chef- 
d'œuvre  de  délicatesse  et  de  goût, 
qu'une  extrême  modestie  relevait 
encore.  C'est  une  harangue  êlo- 


TOU 

qucnte  où  sont  développées  ton- 
tes les  nuances  de  l'esprit,  où  l'o- 
rateur observe  son  influence  sur 
les  ouvrajjes  inCMne  de  génie  ,  et 
présente  en  quoique  sorte  l'his- 
toire de  l'esprit  pour  le  siècle  qui 
vient  de  s'écouler,  o  Le  génie 
crée  ,  disait  M.  de  ïoulongeon  , 
l'imagination  invente;  le  talent  se 
fixant  sur  un  objet  déterminé, 
produit ,  exécute  ; .  le  jugement 
apprécie  et  choisit;  l'esprit  plane 
sur  toutes  ces  facultés  de  l'âme, 

embellit  et  perfectionne De 

toutes  nos  facultés ,  c'est  la  plus 
perfectible  ;  il  s'approprie  tout,  il 
louche  à  tout  ;  et  tandis  que  le 
génie  ,  dédaignant  les  secours 
étrangers,  s'éliiuce  par  ses  seules 
forces,  se  siiflit  et  s'alimente  par 
sa  propre  substance,  l'esprit  se 
met  à  sa  suite  ,  observe  ses  écarts, 
les  évite, s'enrichit  de  tout  ce  qu'il 
néglige,  ajoute  la  beauté  des  for- 
n)es  à  la  richesse  de  la  matière  , 
copie  les  traits  origiiiaux  de  son 
rival,  et  Cuit  par  lui  ressembler 
assez  pour  oser  se  mettre  à  sa 
place.  Tout  ce  qu'il  a  touché  n'est 
pas  or;  mais  tout  ce  qu'il  louche 
en  prend  la  couleur.  »  Que  j'ai- 
merais à  suivre  M.  deToulongeon 
dans  l'analyse  qu'il  fait  de  l'es- 
prit, de»  prodiges  qu'il  enfante, 
de  SCS  erreurs  !  A  ses  yeux,  Vol- 
taire eut  le  pas  sur  tout  ses  ému- 
les,  parce  que  ceux-là  n'avaient 
qu'un  genre,  et  que  tous  les  gen- 
res étaient  de  son  domaine.  «  Il 
porta  le  sceptre  de  la  littérature , 
qui,  pcndatit  quarante  ans,  avait 
été  dans  les  maitts  de  Fontenelle, 
mais  que  Voltaire  surpassa  par  lu 
variété  de  se»  connaissances  et 
par  le  brillant  de  son  esprit.  Fon- 
tenelle, donnant  le  ])u:!  à  l'humuie 


TOU 


43 


d'esprit  sur  l'homme  savant ,  s'é- 
tait borné  i\  mettre  l'esprit  à  la 
mode ,  et  à  dépouiller  la  science 
et  l'érudition  du  costume  impo- 
sant qui  tenait  l'esprit  éloip;né 
d'elles.  Son  esprit,  tout  en  agré- 
ment et  en  grâce,  paraissait  con- 
sacré tout  entier  à  la  société.  Il 
n'employait  qu'une  tournure  fa- 
cile et  légère,  et  n'humiliait  Ri- 
mais les  préventions...  Le  bel  es- 
prit,  dit  enclore  M.  de  Toulon- 
geon,  l'esprit  des  mois  était  déjà 
tombé;  Molière  en  avait  fait  jus- 
tice. Il  fallut  que  l'esprit  cherchât 
de  nouveaux  domaines;  il  s'em- 
para de  la  poésie,  puis  de  la  phi- 
losophie; et  ce  sont  peut-être  les 
deux  élémens  qui  lui  convenaient 
le  mieux  ,  parce  que  l'un  apparte- 
nait à  l'imagination  ,  et  l'autre  au 
raisonnement.  L'esprit,  qui  de  sa 
nature  est  imitateur,  produisit 
dès-lors  une  quantité  d'ouvrages 
brillans  par  l'élégance  et  la  légè- 
reté; mais  ou  ne  vit  presque  plus 
s'élever  ces  monumeris  du  génie, 
tels  qu'en  avait  donné  le  siècle  de 
Louis  XIV.  La  poésie,  alors  sim- 
ple et  correcte,  devint  précieuse 
cl  maniérée;  les  grâces  y  présidè- 
rent encore,  mais  leur  nudité  anti- 
que se  chargea  d'ornemens.  L'es- 
prit fit  hur  la  poésie  l'effet  qu'elle 
fait  ordinaire  ment  su  ries  hommes: 
il  altéra  le  caractère  ,  on  saisit 
mieux  les  nuances,  mais  les  grand» 
traits  se  {)erdirent.  Montesquieu 
est  le  premier  qui  appliqua  l'es- 
prit à  la  philosophie,  comme  Des- 
cartes avait  appliqué  le  premier 
l'algèbre  à  la  géométrie.  La  phi- 
losophie y  gagna  ;  l'esprit ,  qui  est 
entreprenant  ,  loi  communi(|ua 
son  audace  ;  elle  parla  plus  hatil, 
elle  osa  dire  tout  ce  qu'elle  crui 


44 


TOI] 


une  vérité;  et  en  cc!a  .  ses  inten- 
tions excusèrent  ses  erreurs 

Mais  l'esprit  et  la  philosophie  ne 
se  réunirent  jamais  avec  plus  d'a- 
vantage que  dans  le  Télémaque 
de  Fénélon,  pour  donner  au  mon- 
de leur  ohel-d'œuvrc.  L'esprit  y 
a  prêté  à  la  philosophie  toutes  ses 
grâces,  et  a  reçu  d'<lle  toute  sa 
vSOiiidité —  Fontenelle  avait  ame- 
né la  mode  de  l'esprit;  Helvétius 
amena  celle  de  la  philosophie,  et 
la  philosophie  ,  autrefois  retirée 
dans  le  cabinet  des  sages,  se  ré- 
pandit dans  la  société.  Mais  quelle 
lut  son  influence  ?  Et  l'esprit  et  la 
philosophie,  en  étendant  la  masse 
des  lumières,  ajoutèrent-ils  aux 
vertus,  ou  du  moins  au  bonheur 

des  hommes? »    Ce  discours 

n'a  pas  été  publié.  Dans  la  même 
séance  (  5o  juin  1779),  il  lut 
une  imitation  de  deux  idylles  de 
Gessner,  qui  fut  très-applaudie. 
M.  de  Toulongeon  était,  avant  la 
révolution,  colonel  de  soo  régi- 
ment. Il  se  montra  philosophe  à 
une  époque  où  rien  n'annonçait 
que  les  principes  philosophiques 
détruiraient  un  jour  les  préjugés 
et  le  vieil  édifice  de  la  monarchie. 
Non  content  d'avoir  rendu  libre 
vses  vassaux,  il  écrivit  pour  la  li- 
berté générale.  En  1788,  il  avait 
déjà  prouvé  qu'il  était  l'ami  du 
peuple  dans  ses  Principes  naturels 
et  constitutifs  des  assemblées  na- 
tionales, ouvrage  qu'il  fit  circuler 
avant  la  tenue  des  états-généraux, 
avant  même  les  états  de  Franche- 
Comté  ,  qui  les  précédèrent  im- 
médiatement. )>  On  y  voit  un  rai- 
sonneur profond,  calciilant,  d'a- 
près les  monumcns  de  l'histoire . 
les  droits  des  peuples  et  des  sou- 
verains ,  fixant  aux  princes  l'éten- 


TOU 

due  de  liMir  autorité,  au  clergé  e> 
A  la  noblesse  ce  qu'ils  pouvaient 
légitimenient  revendiquer  de  pri- 
vilèges ,  mais  reconnaissant  dans 
le  peuple  la  principale  force  de 
l'état;  d'où  il  conclut  la  nécessité 
de  soulager  cette  partie  intéres- 
sante de  la  nation,  et  de  la  ren- 
dre habile  aux  dignités  dont  la 
perspective  seule  pourrait  la  con- 
duire à  de  grandes  actions  ,  et 
accroître  par  conséquent  la  gloire 
de  l'empire.  »  Député  aux  étals- 
généraux,  en  1789,  par  la  no- 
blesse de  la  Franche-Comté  ,  il  y 
partagea  les  principes  de  la  mi- 
norité de  son  ordre,  et  néanmoins 
il  s'efforça  d'excuser  le?  protesta- 
tions du  clergé  et  de  la  noblesse, 
qui  se  croyaient  liés  par  leurs 
sermens.  Ce  fut  M.  de  Toulon- 
geon  qui  ,  au  mois  de  septembre 
1789,  proposa  de  soumettre  la 
déclaration  des  droits  à  la  sanc- 
tion de  Louis  XVL  II  rédigea,  le 
26  janvier  1790,  le  décret  por- 
tant qu'aucun  membre  de  l'as- 
semblée, même  en  donnant  sa 
démission,  ne  pourrait  accepter 
d'emploi  de  la  cour.  Dans  la 
séance  du  12  avril,  il  demanda 
l'ordre  du  jour  sur  la  proposition 
tendant  à  déclarer  la  religion  ca- 
tholique religion  dominante.  Au 
mois  de  janvier  1791  ,  il  se  plai- 
gnit de  l'inscription  de  son  nom 
parmi  ceux  du  club  monarchique, 
et  s'opposa  à  ce  que  les  membres 
de  l'assemblée  fussent  rééligibles 
aux  assemblées  suivantes.  Il  in- 
sista, au  mois  de  jtiin,  pour  que 
le  droit  de  faire  grâce  fût  conser- 
vé au  roi.  Le  2^  du  même  mois, 
il  demanda  que  ce  prince,  qui  ve- 
nait d'être  ramené  de  Varennes, 
fût   trailé   avec  le  respect   cl  les 


TOU 

égards  que  méritaient  son  carac- 
tère. Sa  noble  conduite  dans  l'as- 
seiTiblée  lui  valut  des  témoignages 
éclatans  de  l'estime  de  ses  conci- 
toyens ,  lorsqu'à  la  fin  de  la  ses- 
sion J1  retourna  à  Gray,  où  était 
son  régiment.  Des  lettres  de  bour- 
geoisie lui  lurent  offerles  dans 
une  boîte  d'or,  témoignages  civi- 
ques dont  il  était  si  bien  capable 
de  sentir  tout  le  prix.  Plus  tard, 
en  1796,  il  devint  membre  de 
l'institut  national,  mien  1802,  le 
déparlement  de  la  Nièvre  le  nom- 
ma candid.it  au  corps-législatif, 
où  il  fut  réélu  par  le  même  dé- 
partement en  1809.  ^I'  ^*^  Tou- 
longeon  mourut  à  Paris,  le  aS 
décembre  1812,  dans  la  G'i'  an- 
née de  son  Age.  Ses  restes  furent 
déposés  au  cimetière  de  Mont- 
martre ,  où  on  lui  éleva  un  mo- 
nument. 0  II  fut  universellement 
regretté  pour  son  caractère  hono- 
raW*  et  toujours  indépend;ml  , 
pour  H's  mœurs  douces  et  pures, 
enfin,  pour  son  attachement  sin- 
cère à  la  cause  de  la  liberté.  0  Les 
principaux  ouvrages  de  M.  de 
Toulongeon  sont  :  1°  Histoire  de 
France,  depuis  i^Sy  jusqu'à  l'é- 
poffue  du  consulat.  Sans  préjuges 
comme  sans  acception  de  person- 
nes, il  écrit  ce  qu'il  a  vu,  et  il  avait 
tout  observé.  »  Toujours  éloigné 
des  extrêmes  ,  il  eut  le  bon  esprit 
de  n'épouser  aucune  des  factions 
qui  déchiraient  nos  assemblées 
nationales,  et  de  se  trouver  ainsi 
au  milieu  des  événemens  qu'il  se 
proposait  de  faire  connaître,  et  k 
la  distance  nécessaire  pour  en 
apercevoir  les  causes  ;  aussi  a-t-II 
décrit  les  causes  et  les  effets  avec 
cette  véracité,  celte  impartialité, 
cette  pureté  de  style,  qui  font  le 


TOU  4r» 

bon  historien.  Tout  intéresse  dans 
cet  ouvrage.  L'auteur  y  traite  en 
maître  jusqu'à  la  partie  militaire, 
ne  déguisant  point  les  fautes  de 
quelques  généraux  ,  et  rendant 
hommage  à  l'habileté  des  autres. 
Toutes  les  actions  de  guerre,  im- 
portantes par  leurs  résultats,  pa- 
raissent sur  des  plans  particuliers; 
les  marches  -  manœuvres ,  sur  des 
cartes  lopogranhiques,  et  les  opé- 
rations combinées  des  armées  , 
sont  réduites  sur  des  cartes  géo- 
graphiques ,  de  manière  à  en  pré- 
fienler  l'ensemble.  Celle  histoire 
de  France  est  divisée  par  épo- 
ques, et  suivie  de  pièces  justifi- 
catives, dont  la  plupart  étaient 
inédites ,  mais  toutes  remarqua- 
bles par  leur  liaison  aux  faits  et 
par  leur  rapprochement  des  évé- 
nemens rapportés  dans  le  texte. 
C'est,  sinon  l'histoire  la  plus  com- 
plète ^  du  moins  la  plus  impar- 
tiale ,*la  mieux  raisnnnée,  la  plus 
étnyée  de  inonumens,  et  l'imn 
des  mieux  écrites  de  toutes  celles 
qui  ont  paru  sur  le  même  sujet.  ■ 
2°  Manuel  révolutionnaire  ou  Pen- 
sées morales  sur  la  situation  poli- 
tique des  peuples  en  révolution, 
tradijit  en  allemand  ;  3°  Plan 
d'une  institution  militaire  et  na- 
tionale de  l'armée  française  ;  l\° 
plusieurs  Mémoires  sur  l'esprit 
public;  sur  le  régime  diététique 
d'une  nation;  sur  son  état  politi- 
que ;  sur  l'usage  du  numéraire 
dans  un  grand  état;  sur  les  épo- 
ques de  la  révolution  ;  sur  le  droit 
naturel  dans  les  institutiim*  poli- 
tiques ;  sur  la  question  :  Comment 
peut-on  assurer  la  libnrté  indivi- 
duelle dans  \n\  état  représentatif, 
ejc.  Ces  mémoires  furent  lus  à  la 
classe    des    sciences    morales    de 


46  TOU 

l'institut ,  dont  il  était  devenu 
membre  ;  le  recueil  de  ce  corps 
savant  renferme  encore,  du  inêuio 
auteur,  plusieurs  autres  Mémoires 
sur  l'analyse  des  idées  et  des  sen- 
sations ;  sur  la  mémoire,  etc. 
5°  une  traduction  en  vers  du  3* 
livre  de  l'Iliade,  le  discours  pré- 
liminaire de  l'atlas  militaire;  un 
mémoire  sur  Vesprit,  dont  on  a 
dit,  dans  le  temps,  qu'il  était 
écrit  avec  la  chose  même  ;  d'au- 
tres mémoires  sur  l'état  actuel  de 
l'agriculture,  sur  la  fondation  et 
l'établissement  des  colonies  nou- 
velles. A  la  classe  d'histoire  et  de 
littérature  ancienne,  un  mémoire 
ayant  pour  litre  :  de  la  traduction 
des  anciens  poètes  épiques  et  de 
l'harmonie  imilative ;  une  notice 
sur  le  ré«:ime  et  la  discipline  des 
amphithéâtres  romains;  une  se- 
conde sur  les  {wiucipales  familles 
de  Rome;  un  essai  stir  les  pério- 
des de  la  civilisation  des  peuples  ; 
une  traduction  en  vers  de  la  4"  sa- 
tire de  Perse;  des  notes  sur  Ho- 
mère: d'autres  sur  les  mots  y^//<î- 
manl  et  Germqni.  A  la  première 
classe  de  l'inslitut,  un  mémoire 
sur  les  inconvéniens  des  moulins  et 
usines  établis  sur  les  petites  riviè- 
res ,  et  à  la  classe  de  littérature  et 
beaux-arts,  un  mémoire  sur  Vin- 
fluence  de  la  liberté  publique  sur 
les  arts ,  et  réciproquement  ;  6°  en 
j8o3,  il  a  publié  deux  volumes, 
qui  ont  été  suivis  de  sept  autres  , 
sous  le  titre  de  Manuel  du  Mu- 
séum,français  :  c'est  une  descrip- 
tion analytique  et  raisonnée  des 
monumeus  conservés  au  Mms^w/h, 
ornée  d'une  gravure  au  trait  de 
chacun  des  tableaux;  7°  une  tra- 
duction des  Commentaires  de  Cé- 
sar,  2  vol.   in-8",  ouvrage  pos- 


TOU 

ihnrae  ;  8°  parmi  plusieurs  éloges, 
on  doit  citer  ceux  de  iVl.  de  Guil- 
bert  (1790),  et  de  Camus  (1806), 
membre  de  l'institut;  9°  sous  le 
voile  de  l'anonyme,  en  1808, 
in-8",  un  poëme  en  trois  fhanis 
sur  VAmour;  10°  enfin  M.  de 
Toulongeon  a  laissé  en  manus- 
crits un  assez  grand  nombre  d'ou- 
vrages de  littérature  et  de  poésie. 
TOULONGEON  (le  marquis), 
maréchal-de-camp  des  armées  du 
roi  avant  la^volulion  ,  frère  du 
précédent,  fut,  comme  lui,  dé- 
puté aux  éliits-généraux,  en  1 789, 
par  la  noblesse  de  la  Franche- 
Comté.  I.c  marquis  de  Toulon- 
geon, dévoué  aux  doctrines  ultra- 
monarchiques, donna  bientôt  sa 
démission  de  député,  et  se  retira 
en  Suisse.  De  Fribourg ,  où  il 
s'était  fixé,  il  écrivit  au  roi  et  à 
ses  frères,  pour  protester  contre 
les  événemens  de  la  révolution. 
La  lettre  adressée  au  roi  paerint 
à  ce  prince  ;  mais  celle  adressée  à 
ses  frères  fut  saisie  à  Verdun  ,  en- 
voyée à  la  convention  nationale, 
qui  le  décréta  d'accusation.  Le 
marquis  de  Toulongeon  renonça 
volontairement  à  sa  patrie ,  et 
passa  bientôt  au  service  de  l'Au- 
triche. On  voit,  d'après  ces  faits, 
que  c'est  à  tort  que  l'on  a  inséré 
dans  la  table  du  Moniteur,  à  l'ar- 
ticle du  vicomte  de  Toulongeon 
(  voy.  l'article  précédent  )  ,  ce.-* 
mots  :  «  Qu'après  les  événemens 
du  10  août  1792,  le  vicomte  de 
Toulongeon  était  passé  au  service 
d'Autriche;  qu'il  avait  été  décrété 
d'accusation,  en  octobre,  sur  un 
rapport  de  llewbell,  pour  sa  cor- 
respondance avec  Louis  XVI  et 
ses  frères  ;  qu'il  avait  quitté  le 
service   d'Autriche    en    1790,    et 


TOU 

qu'il  était  rentré  en  France  en 
•797'  »  ^^^  faits  doivent ,  ainsi 
que  nous  venons  de  l'établir,  être 
appliqués  au  uiiirquis ,  et  non  au 
vicomte  de  Toulongeon,  qui  n'a 
jamais  émij^ré  ni  porté  les  armes 
contre  la  France. 

TOULONGEON  (  Marie-Mar- 
GCEBiTE  -  Joséphine  d'Aubigné  , 
ÉPOUSE  DU  MARQris  DE  ).  Cette 
dame,  0  dernier  rejeton  de  l'illus- 
tre maison  d'Aubigné,  devenue 
si  célèbre  par  la  brusque  franchise 
d'Agrippa  d'Aubigné  envers  Hen- 
ri IV,  et  par  l'éclalante  fortune  de 
M""deMaintenon,  «naquitn  Paris, 
le  5o  août  \';l[6.  Son  père  ,  Louis 
d'Aubigné  ,  était  gouverneur  de 
Saninur.  Elle  épousa,  ayant  à 
peine  atteint  sa  19*  année,  le  mar- 
quis de  Toulongeon,  frère  aîné 
des  précédens,  qui  fut  lieulenant- 
général  et  commandant  de  Besan- 
çon. La  révolution  la  priva  de  sa 
fortune,  perte  qu'elle  supporta 
avec  résignation,  ainsi  que  la  pri- 
vation de  sa  liberté,  qui  ne  lui  fut 
rendue  qu'après  les  événemens 
du  9  thermidor  an  2  (27  juillet 
1794  )•  Depuis  cette  époque  jus- 
qu'à celle  de  sa  inort,  arrivée  le 
25  mars  i8o5,  elle  vécut  dans  sa 
famille,  retirée  à  Fointainebleau, 
chérie  et  honorée  pour  ses  ver- 
tus, qui  ne  se  démentirent  dans 
aucune  circonstance ,  même  les 
plus  critiques  de  sa  vie. 

TOU  POT  DE  BEVAUX  (N.), 
vice-présideni  du  tribunal  de  pre- 
ujière  instance  de  Chaumonl  , 
ex-membre  de  la  chambre  des  dé- 
putés, où  il  fut  nommé,  en  1819, 
par  le  département  de  la  Haute- 
Marne,  s'est  fait  remarquer  parmi 
les  membres  du  côté  gauche.  Lors 
de  la  discussion  sur  la  loi  .suspen- 


TOU  47 

sive  de  la  liberté  individuelle,  il 
démontra  que  cette  loi  était  inu- 
tile ;   néanmoins  il  annonça  qu'il 
en  voterait  l'adoption,  si  l'on  en 
restreignait  l'action  auxseuls  com- 
plots contre  la  famille  royale.  Le 
i5  marsil  proposaderéduireàdeux 
mois  le  t^rme  de  l'incarcération; 
le  1 5,  il  proposa  encore  un  amen- 
dement tendant  à  ce  qu'il  fût  en- 
joint aux  préfets  d'inscrire  sur  un 
tableau  le  nom  des  personnes  qu'ils 
auraient  fait  arrêter,  et  aux  minis- 
tres, de  présenter  ces  tableaux  dans 
la  première  quinzainede|pses9ion; 
enfin  ,  dans  cette  même  séance  ,  il 
proposa   encore  un  amendement 
portant  que  la  loi  cesserait  d'avoir 
son  effet  un  mois  après  l'ouverture 
de  la  prochaine  session.  Ces  trois 
amendemens  furent  rejetés  parla 
majorité.  Le  5o  juin,  il  demanda 
que  les  budgets  fussent  soumis  à 
la  chambre  dans  le  premier  mois 
de  chaque  session,  et  mis  en  dé- 
libération dans  le  courant  du  troi- 
sième mois.  Cette  marche  ne  con- 
venait pas  au  ministère,  et  cet  a-    * 
mendement.  ne  fut  pas  plus  heu- 
reux que  les  précédens.  M.  Tou- 
pot  de  Bevaux  vota  contre  les  deux 
lois  d'exception,  et  fut  du  nombre 
des  95  votans  contre  le  nouveau 
syslèfne  électoral.  Cet  honorable 
membre  a  subi  la  dissolution  to- 
tale de  la  cliambre    en   1823,    et 
n'a  pas  été  réélu  à  la  chambre  sep- 
tennale  de   i824'    Il    conlinue   à 
remplir  ses  fonctions  dans  la  ma- 
gistrature. 

T0UULET(KENÉ),néle7Juia 
1  ^58,  h  Ambfu'se  (Indrc-et-LoinB), 
reçut  une  éducation  soignée  au 
collépj'de  Pontlevoi,  tenu  par  des 
bénédictins.  Il  étudia  h;  droit  à 
Orléans,  suivit  à  Paris  des  cours 


48 


TOI) 


de  physique  et  de  médecine,  et 
acheva  son  instruction  par  des 
voyages,  tant  en  France  qu'à  l'é- 
tranger. Attaché  cl  la  rédaction  du 
Moniteur,  il  en  est  un  des  colla- 
borateurs les  plus  distingués  com- 
me des  plus  anciens.  Il  a  fourni 
auïsi  de  savans  articles  au  Maga- 
xin  encyrlopédiqae ,  aux  Annales 
littéraires,  etc.  31.  Tourlet  a  pu- 
blié plusieurs  ouvrages  qui  an- 
noncent une  grande  érudition  et 
un  goût  éclairé  pour  l'antiquité 
classique  :  i°  Guerre  deTroie,  de- 
puis la  m«rt  d'Hector,  poëme  tra- 
duit du  grec  de  Quintus  de  Smyr- 
ne  ;  Paris,  iSoo,  2  vol.  in-8°;  une 
seconde  édition  de  cette  traduc- 
tion, accompagnée  du  texte  grec, 
et  enrichie  de  notes  savantes,  est 
prête  à  être  livrée  à  l'impression; 
2°  Odes  de  Pindare,  traduites  en 
français  avec  le  texte  grec  en  regard. 
Cet  ouvrage  ,  extrêmement  re- 
commandahle,  joint  à  l'avantage 
précieux  d'un  texte  très-correct, 
celui  d'une  version  aussi  élégante 
que  fidèle.  On  sent  quelles  diflicul- 
tés  l'auteur  eut  à  vaincre,  pour 
traduire  avec  précision  un  poète 
qui ,  dans  les  écarts  de  son  imagi- 
nation s'abandonne  à  un  enthou- 
siasme qui  tient  souvent  de  la  fu- 
reur. M.  Tourlet  (\st  le  premier,  en 
France  ,  qui  ait  donné  une  véri- 
table idée  du  prince  des  poètes 
lyrique?;  aussi  son  ouvrage  a-t- 
11  mérité  les  éloges  des  savans  les 
plusdistingués.  "b"  Œuvres  complè- 
tes de  l' empereur  Julien.  Cette  tra- 
duction qui  n'est  inférieure  à  celle 
de  Pindare,  ni  en  fidélité,  ni  en 
élégance,  est  un  véritable  service 
rendu  à  la  philosophie  et  aux  let- 
tres. L'auteur  s'est,  avec  raison, 
attaché  à  (aire  connaître  le  carac- 


TOl) 

1ère  de  Julien,  de  ce  prince  exalté 
par  les  uns  ,  et  injurié  par  les 
autres;  il  a  su  réduire  ù  sa  juste 
valeur  le  surnom  iV  A  postât ,  que 
l'ignorance  et  l'esprit  de  secte  lui 
ont  donné,  et  que  lui  donne  en- 
core aujourd'hui  l'intolérance  sa- 
cerdotale. L'ouvrage  infiniment 
remarquable  de  M.  Tourlet,  nous 
paraît  devoir  fixer  l'opinion  des 
modernes  sur  cet  homme  célèbre 
qui  a  ollert  le  rare  exemple  de  la 
philosophie  sur  le  trône. 

TOURNON  (le  comte  Philippe- 
Camille-Cas  imib  Marcelin  de  )  « 
pair  de  France,  conseiller-d'état, 
gentilhomme  honoraire  de  la 
chambredu  roi, chevalier  de  Saint- 
Louis,  commandeur  de  la  légion- 
d'honneur,  etc.,  est  né  à  Apt,  dé- 
partement deVaucluse,  d'une  an- 
cienne famille  de  Provence.  II 
devint,  sousie  gouvernement  im- 
périal, auditeur  au  conseil-d'état, 
puis  intendant  à  Bareuth.  En  1819, 
M.  de  Tournon  fut  fait  prisonnier 
dans  cette  ville  par  les  Autrichiens, 
qui  l'emmenèrent  en  Hongrie.  A 
son  retour  en  France,  il  reçut  la 
préfecture  de  Rome,  qu'il  occu- 
pait encore  lorsque  le  roi  Joachim 
(«oj.  Mirât)  s'empara  des  états 
romains.  Il  refusa  de  continuer 
ses  fonctions  sous  l'administration 
de  ce  prince,  et  revint  dans  sa 
patrie.  Napoléon  ,  pendant  les 
cent  jours ,  en  i8i5,  voulut  lui 
confier  la  préfecture  du  Finistère, 
puis  celle  de  l'Hérault;  mais  il  ne 
crut  pas  devoir  les  accepter.  Après 
la  seconde  restauration ,  Louis 
XVIII  le  combla  successivement 
de  faveurs,  le  nomma  à  la  pré- 
fecture de  la  Gironde,  et,  le  4 
novembre  1818,  il  le  comprit  au 
nombre  des  maîtres  de  requêtes 


TOU 

en  service  exlraordinaire.  M.  de 
Touriion  passa  de  celle  préfecture 
à  celle  du  Rliôue,  qu'il  cessa  d'oc- 
cuper en  1825.  Il  est  depuis  1824 
pair  de  France  et  conseiller-d'état 
en  service  extraordinaire;  il  est 
aussi  (1825)  président  du  conseil 
des  bâtinicns  civils  au  ministère 
de  l'inléritur. 

TOUUNON  (  Dominique- Jérô- 
me), médecin  en  chef  des  hôpi- 
taux militaires  de  Bayonne  et  de 
Bruxelles,  ancien  professeur  de 
botanique,  professeur -adjoint  à 
l'école  de  chirurgie  de  Toulouse, 
■ville  où  il  est  né,  est  plus  connu 
par  sa  pratique  que  par  ses  ou- 
vrages ,  dont  nous  citerons  les 
principaux  :  1"  Liste  chronologi- 
que des  ouvrages  des  médecins  et 
chirurgiens  de  Bordeaux ,  et  de 
ceux  qui  ont  exercé  l'art  de  guérir 
dans  celte  ville,  avec  des  annota~ 
tions,  et  l'éloge  de  Pierre  Desiult, 
Bordeaux,  1799,  i  vol.  in-H";  2° 
Supplément  à  cette  liste, Toulouse, 
i8oO,  in-S";  o"  Flore  de  Toulouse, 
ou  Description  des  plantes  qui 
croissent  dans  les  environs  de  cette 
ville,  Toulouse,  1811, 1  vol.  in-8°. 
M.Tournon  adonné  dilTérens  Mé- 
moires dans  le  Magasin  encyclopé- 
dique, dans  le  Journal  de  Santé  et 
d'Histoire  naturelle,  dans  le  Jour- 
nal de  Médecine,  etc.  11  est  mem- 
bre de  l'académie  des  sciences  de 
Buidcaux,  et  de  plusieurs  autres 
sociétés  savantes. 

TOUllNON  (N.),  littérateur, 
cultivait  paisiblement  les  lettres  , 
lorsque  la  révolution  éclala.  11  en 
adopta  les  principes  avec  modé- 
ralion.  Victime  de  l'affreux  régime 
de  la  terreur,  il  périt  sur  l'écha- 
faud  à  la  (Jn  de  I7g5.  Il  a  publié  : 
1°    l'Art   du    Comédien  ;    2°  tes 


TOU  49 

Promenades  de  Clarisse  et  du  mar- 
quis de  Volzi,  ou  Nouvelle  Mé- 
thode pour  apprendre  les  princi- 
pes de  la  tangue  et  de  l'ortogra- 
plie  françaises,  à  C usage  des  dames, 
1784;  5°  Hévoluiions  de  Paris,  dé- 
diées à  la  nation,  1789-1790;  4' 
Introduction  aux  révolutions  de 
l'Europe,  1790.  C'est  une  contre- 
façon du  Journal  des  Révolutions, 
publié  par  L.  Prudhomme;  5° 
Moyens  de  rendre  propres  les  rues 
de  Paris,  1790. 

TOUIUIETTE  (Marc-Antoine- 
Lo€1s-Clauet  de  la),  ancien  ma- 
gistrat, savant  naturaliste,  naquit 
à  Lyon,  en  1729.  II  commença  ses 
études  dans  cette  ville,  et  les  ter- 
mina au  collège  d'IIarcourt  à  Pa- 
ris. De  retour  dans  sa  ville  natale, 
il  fut  pourvu  par  les  soins  de  son 
père,  prévôt  des  marchands,  d'u- 
ne charge  de  magistrature  qu'il 
exerça  pendant  ao  années,  et  dont 
il  se  démit  ensuite  ,  afin  de  se 
livrer  exclusivement  à  sa  passion 
pour  l'histoire  naturelle.  De  la 
zoologie  et  de  la  minéralogie  qu'il 
avait  cultivées  avec  soin,  il  passa 
à  l'étude  de  la  botanique,  qui  fut 
sa  science  favorite.  Ses  collections 
en  insectes  et  en  mines  du  Lyon- 
nais, du  Dauphiné  et  de  l'Auver- 
gne, étaient  remarquables;  niai.^ 
son  herbier  était  surtout  aussi 
nombreux  que  riche.  «  La  1766, 
dit  l'auteur  d'une  notice  sur  ce 
savant,  d'après  son  éloge,  par  JU. 
Bruyset,  libraire,  et  confrère  de 
LaTourrette  à  l'académie  de  Lyon^ 
il  introduisit  au-dessus  de  la  pe- 
tite ville  de  l'Arbresle,  dans  un 
vaste  parc,  tous  les  arbres  et  ar- 
bustes étrangers  qui  pouvaient 
s'y  acclimater;  dans  l'enceinte  mê- 
me de  Lyon,  il  s'éîait  fMiné  un 
4 


5o 


TOU 


jardin  où  il  a  cuitivé  plus  de  Uo'n 
mille  espèces  de  piaules  rares.  » 
La  Tourrette,  pour  augmenter  ses 
connaissances,  et  ajouter  de  nou- 
velles possessions  à  son  beau  ca- 
binet, voyagea  en  Italie,  en  Sicile, 
■etc.,  et  se  réunit  ensuite  à  J.  J. 
Rousseau,  son  ami ,  pour  herbo- 
riser avec  lui  dans  la  Grande- 
Chartreuse.  «  Que  n'êles-vous  des 
nôtres,  écrivait  J.  .1.  Rouss^^au  à 
du  Péron,  vous  trouveriez  dans 
notre  guide,  M.  de  La  Tourrette, 
un  botaniste  aussi  savant  qu'ai- 
mable, qui  vous  lemit  aimer  tou- 
tes les  sciences  qu'il  cultive.  » 
Instruit,  sociable,  bon  par  excel- 
lence, La  Tourrette  était  l'ami  de 
tous  les  hommes  distingués  avec 
lesquels  il  était  en  correspondan- 
ce, et  l'on  doit  citer  entre  autres 
Linnée,  de  Haller,  Adanson,  de 
Jussieu.  La  révolution  le  surprit 
au  milieu  de  ses  occupations  pai- 
sibles. Il  la  vit  naître,  comme  tous 
les  gens  de  bien,  avec  joie ,  et  il 
se  montra  l'un  de  ses  plus  vrais  et 
de  ses  plus  sages  partisan?.  Le 
siège  de  Lyon,  en  1795,  vint  na- 
vrer son  cœur.  Les  fatigues  et  les 
inquiétudes  qu'il  lui  causa  ,  à  lui 
et  à  tous  ses  concitoyens  ,  lui  fl- 
rent  éprouver  une  péripneumonie 
dont  il  ne  s'occupa  point  assez, 
et  qui  bientôt  le  ravit  aux  sciences 
et  à  ses  nombreux  amis,  dans  la 
64*  année  de  son  2ge.  Nous  cite- 
rons ses  ouvrages  d'après  la  source 
où  nous  avons  puiséles  principaux 
faits  sur  ce  savant.  Ce  sont  :  1° 
Démonstrations  élémentaires  de  bo- 
tanique, 1766,  a  vol.  in-8°.  Elles 
ontobtenu  plusieurs  éditions  pos- 
térieures. Bourgelal  venait  d'éta- 
blir à  Lyon  la  première  école  vé- 
térinairc;  il  fallait  donner  aux  é- 


TOU 

lèves  la  connaissance  des  plantes 
usuelles;  La  Tourrette,  et  son  ami 
l'abbé  Kozier,  se  chargèrent  de  ce 
soin,  et  publièrent  cet  écrit.  Le 
premier  en  traça  le  plan  ,  en  dé- 
termina la  forme,  et  se  chargea  de 
V introduction^  chef-d'œuvre  de 
concision  et  de  clarté,  où  l'on  ne 
trouve  rien  à  ajouter,  rien  à  re- 
trancher. Haller  a  fait  l'analyse 
des  démonstrations,  comme  ap- 
partenant en  entier  à  l'abbé  Ro- 
zier,  et  le  modeste  La  Tourrette 
ne  fit  jamais  parvenir  jusqu'à  lui 
aucune  réclamation  à  cet  égard; 
-2"  F'oyage  au  Mont-Piln  ,  1 770 , 
in-S".  L'auteur  s'y  montre  obser- 
vateur attentif  et  grand  naturaliste. 
Dans  la  première  partie,  il  déter- 
mine la  situation  des  montagnes  , 
leur  élévation,  les  ruisseaux  qui 
en  découlent ,  les  forêts  qui  les 
couvrent,  les  minéraux  qui  s'y 
trouvent,  les  animaux  et  les  in- 
sectes qui  y  ont  fixé  leur  séjour. 
La  seconde  partie  est  consacrée 
tout  entière  à  la  botanique.  Le 
premier,  il  a  indiqué  sur  ces  mon- 
tagnes sous-alpines  un  grand  nom- 
bre de  plantes  rares,  et  même  une 
espèce  neuve,  VAlisma-parnassi- 
folia.  5°  Clitoris  Lugdunensis  , 
1785,  iu-8°.  Ce  petit  ouvrage  é- 
tonna  les  botanistes,  par  le  grand 
nombre  des  espèces  qu'il  renfer- 
me, surtout  dans  la  cryptogamie. 
On  s'était  persuadé,  et  Linnée 
croyait  lui-même  que  nos  pro- 
vinces méridionales  étaient  beau- 
coup moins  riches  en  mousses  et 
en  champignons  que  les  contrées 
du  Nord.  L'énumération  de  laChlo- 
ris  prouve  que  nous  n'avons  rien 
à  leur  envier  à  cet  égard.  ^"Con- 
jectures sur  l'origine  des  bélemni- 
tes.   Elles  sont  insérées  dans  le 


I 


TOU 

Dictionnaire  des  Fossiles^  do  Ber- 
trand. L'aulciir  pense  que  les  bé- 
letnnitPs  ne  sont  que  des  poinles 
«l'oursin,  5°  Mémoire  sur  les 
monstres  végétaux.  Il  est  imprimé 
dans  le  Journal  économique  du 
mois  de  juillet  ijGi.  LaTourrctte 
y  décrit  plusieurs  sinji^ularités 
de  son  cabinet.  6°  Mémoire  sur 
l' helmintliocorton  ou  mousse  de 
Corse  ^  inséré  dans  le  Journal  de 
Physique.  Ce  mémoireesl instruc- 
tif. M.  Bruyset  a  lu  dans  une  séan- 
ce publique  de  celle  compagnie 
une  savante  notice  sur  la  vie  el  les 
écrits  de  ce  naturaliste. 

TOURZEL  (  Louise- Elisabeth 

«E  CliOY-D'HAVaÉ,  DCCHESSE  DE  )  , 

gouvernante  des  eufans  de  Fran- 
ce ù  répo(]ue  de  la  révolution  , 
s'est  rendue  rccoiumaudable  par 
sa  constante  fidélité  ù  la  tamille 
royale.  Elle  fut  du  voyage  du  roi 
à  Varennes,  et  accompagna  ce 
prince  el  sa  famille  lorsqu'on  les 
ramena  à  Paris.  On  prétend  que 
les  préparatifs  du  départ  de  ^"'■de 
Tourzel,  furent  cause  d'un  relard 
qui  trompa  le  manjuis  de  Bouille, 
{voy.  ce  nom)  et  donna  le  temps 
au  pouvoir  exécutif  de  s'opposer 
à  ce  (|ue  Louis  XVI  dépassât  les 
iVonlières.  Elle  ne quilla  point  son 
po^tclorsdesévénemensdu  loadfll 
1792,  et  suivit  1.1  famille  royale  à 
l'assemblée  législative.  Pindaiit  ce 
t»'mp«,  elle  laissait  au  châleau  des 
i'uilerie».  à  la  merci  des  assaillans, 
sa  fille,  à  peine  Tigée  de  i5  ans, 
qu'heureusement  des  amis  fidèles 
parvinrent  ;^  sauver.  iM"'  de  Tour- 
zel suivit  les  enfans  de  France 
dans  la  prison  du  Temple.  Elle  en 
fui  éloignée  dix  jours  après,  avec 
la  princesse  de  Lamballe,et  ren- 
liTinéc  ;i   I»  Fore.»'.   Dans  les  fu- 


TOl)  5i 

nesles  journées  de  septembre,  elle 
échappa  au  massacre  des  prisons 
par  les  soins  de  Manuel ,  procu- 
reurde  la  commune.  M^'deTour- 
zel  resta  détenue  jusqu'après  le  q 
lliKi-midor  an  a  (i79_1)-  Rendue  à 
la  liberté,  elle  ne  quitta  point  la 
France ,  espérant  êlre  utile  au 
dauphin  el  à  iMadame  royale  ,  \ 
qui  elle  fit  connaître  les  intention* 
du  roi  au  sujet  du  mariage  de  cette 
princesse  avec  son  cousin  le  duc 
d'Angoulême  (aujourd'hui  IM.  le 
dauphin.)  Celte  circonstance  la  fit 
f  rrôlerde  nouveau.  Louis  XVI, pro- 
fondément touché  du  dévouement 
de  celle  dame,  avait  appris  à  sou 
malheureux  fils  à  ajouter  à  ses 
prières  ces  paroles  louchantes  : 
"Dieu  tout- puissant  ,  donne  li 
«IM"'  de  Tourzel  les  forces  dont 

•  elle  a  besoin  pour  supporter  les 
»maux  «ju'elle  endure  à  cause  de 

•  nous!  •)  Sous  le  consulat  et  sous 
l'empire,  iM°"  de  Tourzel  eut  l'or- 
dre de  se  tenir  éloignée  de  Paris. 
Elle  reçut  de  Louis  XVIII,  eu 
1H16,  le  litre  de  duchesse,  avec  la 
faculté  de  le  transmettre  à  sa  mort 
(arrivée  peu  de  temps  après)  i\  sou 
pelit-fils,  qui  a  également  succéd*- 
àson  pèreetàson  grand-oucledan^ 
la  charge  de  grand-prévôt  de  l'hô- 
tel du  roi.  La  fille  de  c<îlle  respec- 
table dame,  Pauline  de  Tourzel, 
dont  il  a  déjà  été  question,  resl.i 
dan?  la  tour  du  Temple  avec  IMa- 
dame royale  :  elle  a  épousé  1\1.  de 
Béain,  chambellan  de  l'impéra- 
trice Joséphine  {voy.  Joséphine.) 

TOUSSAINT-LOUVEIITURE, 
général    noir  (  j^oy.  LouvERTrnK.) 

TOUSSAINT  ■(  Claude  -  Jac- 
Qi'Es),  architecte  ,  contrôleur  et 
inspecteur  des  bniimens  du  roi, 
pensionnaire  de  S.    1\|.  ,  membre 


5a 


TOU 


de  la  société  royale  académique 
des  sciences  de  Pari?,  est  né  dans 
celle  ville  en  1781.  C«;t  artiste 
laborieux,  attaché  depuis  trente 
années  aux  grandes  adinînistra- 
lions  publiques  et  aux  bûlimeus 
de  la  couronne,  s'est  d'abord  fait 
connaître  à  Paris  par  l'institution 
d'une  école  d'architecture  sur  \\n 
plan  nouveau.  Tous  les  ateliers  de 
ses  confrères  étant  destinés  à  for- 
mer dos  dessinateurs,  M.  Tous- 
saint, habitué  de  bonne  heure  au 
mouvement  et  aux  détails  de  la 
conslfuction ,  a  voulu  être  utile  i\ 
cette  multitude  d'élèves,  qui,  tou- 
jours dessinant,  restaient  étran- 
gers à  la  science  pratique  de  leur 
art,  et  c'est  pour  y  parvenir  qu'il 
fonda  son  Ecole- pratique  d' Arclii- 
tectui'e.  Cet  utile  établissement 
prospérait,  et  avait  déjà  rendu  de 
grands  services,  lorsque  le  fonda- 
teur fut  appelé  à  des  fonctions  qui 
le  forcèrent  à  l'abandonner.  Le  ré- 
sumé des  principes  de  M.  Toussaint 
est  consigné  dans  le  Traitéde  géo- 
Tuétrie  et  d'arcliitectare  théorique  et 
pratique,  simplifié.  Cet  ouvrage  est 
très-recherché, etembrasse  toutes 
les  parties  de  l'art  et  de  la  cons- 
truction. L'auteur,  s'étant  parti- 
culièrement attaché  à  être  simple 
et  méthodique  ,  son  traité  est  de- 
venu classique,  et  a  été  surnom- 
mé à  juste  titre,  par  un  de  nos  ar- 
chitectes les  plus  célèbres,  l'En- 
cyclopédie de  l'architecture.  M. 
Toussaint  vient  (1825)  de  pu- 
blier le  premier  volume  d'un 
ouvrage  qui  en  aura  quatre,  avec 
quatre-vingts  gravures,  et  qui  a 
pour  titre  :  Mémento  des  archi' 
tcctes ,  des  ingénieurs,  entrepre- 
neurs, vérificateurs,  etc.,  compre- 
nant les  détails  vont  établir  les 


TOW 

prix  courang  de  tous  les  travaux; 
théorie  de  construction;  outils  et 
machines;  lois  des  b3timens  civils 
et  ruraux;  ordonnances  forestiè- 
res; législation  sur  la  garantie,  les 
hypothèques  ,  le  voisinage  ,  les 
moulins  et  rivières,  les  manufac- 
tures, plantaiions,  etc.  ;  droits  de 
voiries  et  d'entrées,  analyse  des 
matières  premières  ;  tableaux  de 
réduction;  géométrie;  les  cinq  or- 
dres, exemples  de  bâlimçns,  ino- 
numens  et  jardins;  modèles  de 
devi'<,  procès-verbaux,  et  autres 
actes  du  ressort  des  architectes, 
des  entrepreneurs,  et  des  experts; 
partie  contentiense  dubâtiuient, 
inventions  modernes;  abrégé  de 
statique  et  de  dynamique  appli- 
quées à  la  construction  et  aux 
jardins,  etc.,  etc.  Dans  cet  im- 
portant trav.til ,  qu'une  marche 
toujours  méthodique  et  un  style 
clair  et  facile  rendent  agréable  à 
lire  ,  l'auteur  met  en  présence 
tous  ceux  qui  l'ont  précédé,  et  qirî 
ont  traité  la  partie  si  abstraite  du 
contentieux  de  l'architecture;  il 
fait  ressortir  les  nombreuses  con- 
tradictions dans lesqmdles ils  sont 
tombés,  et  présente  des  résultats 
simples  et  à  la  portée  de  tout  le 
monde.  M.  Toussaint  prouve,  par 
ces  deux  ouvrages  si  différons  en- 
tre eux,  qu'il  possède  également 
bien  la  théorie  et  la  pratique  de 
son  art. 

TOWERS  (Joseph),  historien 
anglais,  naquitàSoulhwarck.  vers 
1757.  Il  fit  do  bonnes  études  ,  et, 
pour  obéir  à  sa  famille,  il  en)bras- 
salaprofession  d'imprimeur.  Quit- 
tant bientôt  cet  étal,  pour  lequel 
il  n'avait  aucun  goût,  il  prit  une 
maison  de  librairie  à  Londres.  Cet 
établissement  l'avant  mis  en  rela- 


I 


TOW 

Ifon  avec  plusieiars  ininistics  pro- 
Jestans  de  la  secle  des  presbyté- 
riens, il  changea  encore  d'état, 
llcçu  dans  les  ordres  en  ly"/^,  il 
alla  remplir  les  fonctions  de  pas- 
leur,  dans  une  congrégation,  à 
Highgale.  E;îvoyé,  en  1778,  avec 
Price,  à  la  conférence  de  Newing- 
ton-Green,  il  fut  reçu,  en  1779, 
docteur  en  l'université  d'Edim- 
bourg. Il  mourut  en  1799.  On  lui 
doit  les  ouvrages  suivaus  :  1°  Bio- 
graphie britannique,  7  vol.  in-8°, 
ouvrage  très-»utiie;  2° Observations 
sur  V Histoire  cC  Angleterre  de  Hu- 
me ;  5°  Histoire  de  la  vie  et  du  rè- 
gne de  Frédéric  II  de  Prusse,  2 
vol.  in-8°;  4"  Défense  de  Locke; 
5" plusieurs  Sermons;  Q»" àa?, Trai- 
tés de  politique  ;  7"  Il  a  concouru 
à  la  Nouvelle  Biographie  britanni- 
que de  Rippis. 

TOWiNLEY  (CnARLEs).  célèbre 
antiquaire  anglais,  membre  de  la 
société  royale  de  Londres,  garde 
du  muséum  britannique,  etc.,  na- 
quit d'une  faujille  honorable  de 
Townley-IIall,  dans  le  comté  de 
Lancasire.  Après  avoir  terminé  de 
très-bonnes  études,  et  libre  de  se 
livrer  à  son  penchant  pour  l'art 
numismatique  et  les  nionumens 
anciens,  il  forma  une  collection 
remarquable  de  statues  antiques  , 
médailles,  manuscrits ,  etc.  11  a- 
vait  réuni  dans  sa  maison  de  West- 
minster »me  ftiule  de  fragmens 
li'architecture  égyptienne,  et  de 
modèles  des  plus  célèbres  monu- 
mens  de  la  (Jrèce  et  de  Rome.  Sa 
collection  de  médailles  s'élevait  A 
un  haijt  prix  ,  et  l'on  citait  parini 
>-es  manuscrits  nombreux  et  rares, 
un  manuscrit  d'Homère,  sur  le- 
quel a  été  faite  une  très-belle  é- 
(iilion  de  ce  poète,  lia  Français, 


TRA 


55 


W.  d'Hancarvillc,  a,  dit-on,  pu- 
blié et  enrichi  les  afitiquités  étrus- 
ques de  ïownley.  Ce  savant  an- 
glais mourut  en  i8o5,  laissant, 
par  testament,  une  somme  de 
4,000  liv,  sterl.  pour  la  construc- 
tion d'un  édifice,  destiné  à  rece- 
voir tous  les  objets  composant  sa 
collection. 

TRACY  (Destctt  db)  ,  l'un  des 
hommes  remarquables  de  ce 
temps,  par  la  fixité  de  ses  opi- 
nions et  la  sagacité  de  son  esprit. 
Colonel  d'infanterie  en  1789,  il 
fut  envoyé  aux  états-généraux 
par  la  noblesse  du  Bourbonnais. 
On  a  eu  tort  de  le  confondre  avec 
i\l.  de  Crecy,  député  des  états 
d'Artois,  qui  le  premier  demanda 
l'abolition  de  tous  les  titres  do 
noblesse.  Toutefois  31.  de  Tracy 
embrassa  la  cause  des  libertés  pu- 
bliques, et  se  prononça  en  faveur 
de  la  tuléranCe  des  cultes.  Il  ré- 
clama aussi  pour  les  hommes  de 
couleur,  la  jouissance  de  tous  les 
droits  de  citoyen.  Quand  on  dis- 
cuta si  M.  de  Bouille  devait  être 
chargé  de  pouvoirs  étendus,  ou  si 
l'on  devait  les  entraver  de  mille 
manières,  M.  de  Tracy  émit  pour 
opinion,  qu'il  croyait  convena!)lc 
ou  de  ne  lui  accorder  aucune 
confiance,  ou  de  la  lui  accorder 
entière  :  que  pour  lui  il  n'avait  au- 
cune raison  pour  se  unifier  de  M. 
de  Bouille.  Tout  ce  que  les  bio- 
graphes ont  attribué  depuis  cette 
époque  à  M.  de  Tracy  est  un  ro- 
man sans  base;  il  est  faux  qu'en 
1793,  M.  de  Tracy  ait  accompa- 
gné La  Fayette  :  l'histoire  de  la  dé- 
tention de  M.  de  Tracy  en  Autri- 
che est  tout  aussi  peu  fondée.  Il 
se  retira  A  Auteuil,  s'y  livra  exclu- 
sivement à  des  travaux  scientifi- 


54 


TRA 


ques,  fui  jcU;  en  prison  on  179^. 
en  sortit  une  année;  «près  en  179'!, 
et  devint  membre  de  l'inslilut  à  sa 
fftrmalion.  Meml)re  du  comité 
d'instruction  publique  en  17991 
il  avait  déjà  marqué  parmi  les 
meta  physiciens,  et  don  né  (les  preu- 
ves de  la  pénétration  et  de  la  pro- 
fondeur de  son  esprit.  Celle  secte 
d'idéologues 3  comme  les  nommait 
Napoléon,  dont  la  puissance  posi- 
tive a  toujours  vu  avec  un  juste 
effroi  la  puissance  de  la  pensée, 
n'eut  pas  de  plus  ferme  appui  que 
M.  de  Tracy.  Cependant  il  fut 
membre  du  sénat,  où  il  eut  peu 
d'influence.  Le  1"  avril  i8i4i  'l 
vota  la  formation  du  gouverne- 
ment provisoire,  et  le  lendemain  la 
déchéance  de  l'empereur.  Le  roi  le 
nomma  pairde  France,  et  peiidar)t 
les  cent  jours,  en  181 5,  il  ne  fut  ni 
employé  ni  poursuivi.  En  i8o8, 
il  avait  remplacé  ù  l'académie- 
française  le  ^avanl  Cabanis.  On 
lui  doit  plusieurs  ouvrages,  qui 
ont  fait  faire  de  grands  et  d'uti- 
les progrès  à  la  science  des  sensa- 
tions et  à  l'analyse  de  l'entende- 
ment humain  :  i"  Observations  sur 
le  système  actuel  d'instruction  pu- 
blique, 1801  ;  2*  Eiémens  d'idéolo- 
gie en  cinq  parties.  On  lui  attribue 
un  assez  grand  nombre  de  mé- 
moires anonymes,  très -remar- 
quables par  la  force  de  la  pensée. 
Le  dernier  ouvrage  que  M.  de 
ïracy  ait  publié  ,  est  aussi  admi- 
rable par  le  style  que  par  le  sujet: 
c'est  un  Essai  sur  le  génie  et  les 
ouvrages  de  Montesquieu.  M.  de 
Tracy  jouit  de  loisirs  studieux, 
d'une  vieillesse  respectée,  et  d'u- 
ne grande  et  juste  réputation.  On 
«  iujprimé  dans  la  Biographie  des 
Contemporains  (vol.  V),  sous  le 


TKA 

nom  de  DESTtTTDETRACY,une  uoii- 
ce  où  se  trouvent  répétés  plusieurs 
faits  inexacts,  auxquels  le  présent 
ariirle  servira  de  rectification. 

TUA  IN  NO  Y  (Piekre-Amable- 
Jean-Baptisxe),  né  à  Amiens  en 
1772,  sortit  du  collège  en  1791. 
et  entra  de  suite,  comme  étudiant 
en  médecine,  à  l'Hôtel-Dieu  de 
celte  ville.  Il  fit  des  progrès  ra- 
pides dans  la  carrière  qu'il  avait 
embrassée  avec  ardeur,  et  fut  peu 
de  temps  après,  appelé  en  qualité 
de  chirurgien-major  d'un  batail- 
lon de  réquisitionnaires  d'Amiens, 
grade  dans  lequel  il  recueillit  des 
témoignages  de  satisfaction  de  la 
part  de  ses  chefs.  Après  l'amal- 
gaine  de  ce  bataillon  dans  d'aii- 
tres  corps,  il  revint  à  Amiens,  ren- 
tra à  riiôtel-Dieu,  et  y  fut  chargé 
du  service  de  chirurgien  en  se- 
cond. Le  zèle,  l'activité  et  l'intel- 
ligence qu'il  mit  à  s'acquitter  de 
ses  devoirs,  lui  acquirent  la  bien- 
veillance des  administrateurs  de 
cet  établissement.  Désirant  faire 
une  étude  particulière  de  la  mé- 
decine, il  se  rendit  à  Paris  en  l'an 
4  ('795.1  où  il  se  livra  sans  relâ-^ 
che  à  celte  étude  jusqu'en  l'an  7 
(1798).  Les  brillans  succès  qu'il 
y  obtint  lui  méritèrent  des  en- 
couragemens  de  la  part  des  pro- 
fesseurs les  pins  distingués.  Dans 
la  même  année,  il  remporta  au 
concours,  la  chaire  de  professeur 
d'histoire  naturelle  à  l'école  cen- 
trale du  département  de  la  Som- 
me ,  place  qu'il  remplit  avec  la 
plus  grande  dislinciion  jusqu'à  la 
suppression  de  celle  école.  C'est 
alors  qu'il  fut  reçu  médecin  à  la 
faculté  de  médecine  de  Paris  :  sa 
thèse  sur  le  prognostic  des  affec- 
tions sympathiques  de  l'cpil  dans 


TRA 

les  maladies  algues  lui  fil  beau- 
coup d'honneur.  Appelé  ensuite 
aux  fonctions  de  prol'esseur  de  l'é- 
cole communale  de  botanique  de 
la  ville  d'Amiens,  il  publia  une  no- 
tice historique  du  jardin  de  celle 
école,  un  catalogue  d'après  le  sys- 
tème de  Liiuiée,  et  im  tableau  sy- 
noptique des  organes  des  plantt^s, 
tableau  qui  reput  Tapprolialion  de 
beaucoup  de  savans;  et  il  jeta  dès- 
lors  les  bases  d'une  nouvelle  clas- 
sification générique,  qu'il  se  pro- 
pose de  publier  un  jour.  On  doit 
à  ses  pressantes  instances,  entre 
autres  améliorations  précieuses 
du  Jardin  des  Plantes,  son  agran- 
dissement et  la  construction  de 
deux  serres,  di>nt  une  chaude  ei 
une  d'orangerie.  Comme  méde- 
cin des  pauvres,  il  fit  insérer  dans 
les  journaux  plusieurs  observa- 
tions qui  furent  accueillies  avec 
Intérêt,  et  particulièrement  celles 
où,  par  des  expériences  sur  les  a- 
nimaux,  il  démontra  que  le  sucre 
n'était  pas  l'antidote  de  l'empoi- 
!»onnement  par  le  vert-de-gris, 
ainsi  que  l'avait  dit  M.  Galet. 
Nommé,  en  181 4»  médecin  des  é- 
pidémies  pour  les  arrondissemens 
d'Amiens  et  de  Donrlens,  il  se 
consacra  exclusivement  à  l'étude 
des  maladies  qui  régnent  le  plus 
ordinairement  dans  son  départe- 
ment. Après  avoir  observé  l'in- 
lluence  des  diverses  températures, 
dans  les  différentes  localités,  sur 
la  santé  des  habitans,  eu  égard  ù 
leur  profession,  leur  régime, 
leurs  habitudes  et  leur  tempén*.- 
ment ,  il  publia*,  en  18 19,  un 
Trailà  clcmentaire  des  maladies 
«pidi^miques.  Cet  ouvrage,  consi- 
•léré  comme  étant  le  fruit  de  l'é- 
tude,  de  l'ub»crvation  et  d'uuu 


IRA 


55 


heureuse  pratique,  lui  valut  des 
mentions  honorables  dans  plu- 
sieurs journaux  de  médecine,  et 
dans  divers  procès-verbaux  de  so- 
ciétés savantes  et  littéraires  ;  il 
lui  fit  aussi  donner  successive- 
ment le  titre  de  membre  associé 
du  comité  médical,  de  l'athénée 
de  médecine,  de  la  société  de  mé- 
decine pratique ,  de  la  faculté 
royale  académique  des  sciences 
de  Paris,  et  des  sociétés  royales 
de  Lyon,  de  Bordeaux,  etc.,  etc.; 
enfin  il  lui  mérita,  outre  le  suffra- 
ge de  iVUl.  les  doyen  et  profes- 
seurs dus  facultés  de  Montpellier 
et  de  Strasbourg,  celui  de  M.  le 
docteur  Portai,  premier  médecin 
du  roi;  et  cette  importante  appro- 
bation de  l'ouvrage  est  motivée  sur 
l'utilité  que  les  officiers  de  santé 
peuvent  en  retirer  pour  leur  pra- 
tique. LedocteurTrannoy  a  récem- 
ment publié  un  mémoire  en  répon- 
se à  ces. questions  proposées  par 
l'académie  des  sciences,  arts,  et 
belles-lettres  de  Rouen  :  1'  Est-il 
prouvé,  par  des  observations  exac- 
tes, qu'il  existe  des  fièvres  par  in- 
fection sans  cependant  être  conta- 
gieuses? 2°  en  admettant  l'exis- 
tence de  ces  fièvres,  quelles  sont 
les  principales  causes  qui  donnent 
lieu  i\  leur  développement  et  A 
leur  propagation.^  3'  quels  sont 
les  moyens  propres  ù  les  prévenir 
ou  à  en  arrêter  les  progrès?  Ce 
mémoire  a  fixé  particulièrement 
l'attention  des  médecins  observa- 
teurs, qui  reconnaissent  que  les 
fièvres  les  plus  simples,  par  l'effet 
de  la  malpropreté,  l'encombre- 
ment de»  malades  dans  des  appar- 
temens  où  l'air  circule  à  peine, 
développent  des  symptômes  d'a- 
dynamie  et  d'ataxie,  qui  donnent 


îJO  TI\A 

lieu  à  des  i^inanatlons  moi^jifi- 
ques.  Le  docteur  Trannoy,  par  a- 
luour  pour  son  art  et  par  un  zè- 
le philantropique  qu'on  ne  saurait 
trop  louer,  v$X,  depuis  1820,  le 
principal  rédacleur  dans  le  jour- 
nal de  la  Somme,  d'un  bulletin 
qui  offre  chaque  mois  la  concor- 
dance de  l'état  atmosphérique 
avec  les  maladies  qui  ont  ré{;;né 
dans  le  mois  précédent  à  Amiens 
et  SCS  environs.  Ces  bulletins,  pré- 
sentant souvent  un  grand  intérêt, 
sont  justement  appréciés  des  mé- 
decins les  plus  célèbres  de  la  ca- 
pitale, qui  en  ont  fait  d'honorables 
mentions. 

TllAUTMANSDORFF.WEmS 
BERG  (Ferdinahd  prince  de),  mi- 
nistre-d'élat  autrichien,  né  le  12 
janvier  1749»  épousa,  le  18  mai 
1772,  la  comtesse   Caroline   de 
Colloredo,  devint  ensuite  cham- 
bellan et  conseiUer-d'élat  intime 
d'Autriche,  et  fut  chargé,  en  1 787, 
de   négociations    tendant   à   em- 
pêcher le  second  fils  du  roi    de 
Prusse  d'être  nommé  coadjuteur 
de  l'électeur  de  Mayence ,   litre 
qu'il  était  sur  le  point  d'obtenir. 
Vers  la  fin  de  la  même  année,  il 
remplaça   le   comte   de   Beljioso 
dans  les  fonctions  de  ministre  plé- 
nipotentiaire en  Brabant.  Les  cir- 
constances rendaient  ce  poste  ex- 
trêmement difficile;  M.  de  Traut- 
mansdorff  s'y  conduisit  avec  pru- 
dence et  adresse,  et  ses  actes  ad- 
ministratifs   obtinrent    l'assenti- 
ment général.   Celte  charge   fut 
supprimée,  en  1792,  à  la  suite  de 
l'invasion  de  ces  provinces  par  les 
Français.  Son  souverain  lui  accor- 
da, à  litre  de  dédommagement, 
une  pension  de  6,000  florins  d'Al- 
lemagne, rpj'il  consacra  à  augmen- 


TBA 

l(!r  les  pensions  des  employés  de 
la  chancellerie.  M.  de  Traulmans- 
dorff  fut  mis  sur  les  rangs  pour 
remplacer  M.  de  Thugut,  après 
sa  retraite  du  ministère,  mais  on 
lui  préféra  M.  Louis  de  Cobent- 
zel.  II  fut  nommé  successivement 
grand-maître  de  la  cour,  élevé  à 
la  dignité  de  prince  de  l'empire, 
puis  chargé  de  demander  en  ma- 
riage, pour  l'empereur,  l'archi- 
duchesse Béalrix  d'Est ,  depuis 
impératrice.  Le  prince  Ferdinand 
de  Trautmansdorff  faisait  encore, 
en  1820,  partie  du  ministère  au- 
trichien, avec  le  rang  de  minis- 
tre-d'état et  des  conférences. 

ÏRAVOT  (le  baron  Jean- 
Pierbe),  lieutenant-général,  com- 
mandeur de  la  légion-d'honneur, 
né  le  6  janvier  J767,  embrassa  lu 
carrière  militaire  dès  sa  jeunesse. 
Il  entra  d'abord  comme  simple 
soldat  dans  un  régiment  d'infan- 
terie, et  s'éleva  rapidement  par 
ses  talens  et  sa  brillante  valeur  au 
grade  d'adjudant- général.  Après 
s'être  distingué  pendant  les  pre- 
mières campagnes  de  la  révolu- 
tion ,  et  avoir  souvent  été  cité 
pour  sa  belle  conduite,  il  fut  em- 
ployé dans  la  Vendée,  sous  les  or- 
dres du  général  en  chef  Hoche. 
Pendant  toute  cette  guerre  déplo- 
rable, les  enneitiis  mêmes  qu'il 
était  chargé  de  soumettre,  rendi- 
rent justice,  non  -  seulement  à 
l'habileté  et  au  courage  du  général 
ïravot,  mais  encore  aux  rares  et 
précieuses  qualités  d'un  chef  qui, 
à  cette  époque,  et  au  milieu  des  dis- 
cordes civiles,  se  fit  constamment 
remarquer  par  sa  loyauté  et  son 
humanité.  Le  nom  de  Travol  ins- 
pirait aux  Vendéens  non  moins 
de  confiance  après  le  combat  qu'il 


TRA 

ne  leur  causait  impnraranl  lîo  res- 
pecl  et  (le  crainte.  Chargé  par  le 
j^énéral  Hoche  de  j)Our.siiivre  le 
fameux  Charette,  il  l'atteignit  à 
la  Chabottière,  en  Poitou,  et  le 
fit  prisonnier  le  23  mars  i  79G,  Ce 
chef  vendéen  fit  A  plusieurs  re- 
prises, devant  le  Irihunal  militaire 
de  Nantes ,  l'éloge  des  bons  pro- 
cédés et  de  la  générosité  du  chef 
républicain  auquel  il  avait  été 
forcé  de  se  rendre.  Nommé  géné- 
ral de  brigade,  Travol  commanda 
encore  dans  les  départemens  de 
l'Ouest  pendant  les  années  1799 
et  1800;  il  fut  nommé  membre 
de  la  légion-d'honneur  en  i8o5, 
commandant  de  la  même  légion 
Je  14  juin  1804,  général  de  divi- 
sion le  1"  février  i8o5  ,  et  élu 
candidat  au  sénat- conservateur 
nu  mois  de  mai  suivant.  Vers  la 
fin  de  la  même  année,  il  fut  ap- 
pelé au  commandement  de  la  12° 
division  militaire  à  Nantes;  passa 
ensuite  ^  l'armée  d'Espagne  ,  et 
})rit  le  commandement  de  la  divi- 
fion  du  général  Harispe,  qui  avait 
été  blessé.  Après  la  première  ren- 
trée du  roi,  en  )8i4»  le  général 
Travot  *e  retira  dans  son  dépar- 
tement. Ptniîanllts  cent  jours,  en 
i8i5,  il  eut  un  commandement 
dans  la  V-endéc,  y  fit  une  procla- 
mation pour  engager  les  habilans 
à  ne  point  prendre  les  armes,  et 
livra  quelques  combats  aux  trou- 
pes que  commandait  le  marquis  de 
La  Roche-Jacquelein;  mais  il  s'ac- 
quitta de  sa  mission  dilTicile,  plu- 
tôt encore  en  pacificateur  qu'en 
guerrier.  Le  lieutenant  -  général 
Lamarque,  son  ancien  en  grade, 
prit  bientôt  le  commandement  en 
chef,  et  le  général  Travot,  ap- 
pelé par  Napoléon  à  la  chambre 


TRA  57 

des  pairs  ,  créée  pendant  les  cent 
Jours,  quitta  la  Vendée  avant  le 
second  retour  du  roi.  Il  se  relira 
de  nouveau  ,  à  cette  époque,  dans 
sa  famille,  où  il  était  loin  de  s'at- 
tendre au  coup  qui  devait  bientôt 
le  frapper.  Il  venait  de  recevoir 
du  ministre  de  la  guerre  ,  duc  de 
Feltre,  une  lettre  flatteuse,  qui  lui 
annonçait  qu'une  pension  de  re- 
traite était  accordée  à  ses  services. 
Son  nom  n'était  point  porté  sur 
les  listes  publiées  par  l'ordon- 
nance du  24  juillet  181  5,  et  celui 
de  son  général  en  chef,  Lamar- 
que,  n'était  inscrit  que  sur  la  se- 
conde liste  5  dite  des  trente-huit , 
qui  furent  exilés.  Il  croyait  qu'un 
sort  pire  ne  pouvait  être  réservé 
à  celui  qui  recevait,  qu'à  celui 
qui  donnait  les  ordres  supérieurs, 
et  aux  termes  mêmes  de  l'ordon- 
nance les  listes  étaient  définiti- 
vement closes.  Mais  la  veille  de  la 
promulgation  de  la  loi  d'amnistie 
du  12  janvier  1816,  le  télégra- 
phe transmit,  de  la  pari  du  duc  de 
Feltre,  à  un  conseil  militaire  sié- 
geant à  Rennes,  l'ordre  de  com- 
incricer  des  poursuites  judiciaires 
conirc  le  général  Travot,  et  à  cet 
tflet ,  de  faire  entendre  ,  s'il  se 
pouvait ,  un  témoin  à  l'instant 
même,  ce  qui  devait  rendre  inap- 
plicable au  général  les  disposi- 
tions de  celte  même  loi,  qui  ac- 
cordait une  amnistie  ù  tous  les 
individus  contre  lesquels  il  n'y 
avait  point  de  j)rocédure  enta- 
mée. Le  témoin  ne  put  cependant 
être  si  vite  entendu,  et  les  pour- 
suites ne  purent  être  commencées 
dans  la  journée  où  la  dépêche  té- 
légraphique était  arrivée;  mais 
on  y  suppléa  en  considérant  l'or- 
dre    télégraphique     lui  -  même 


58 


TRA 


comme  un  commencement  légal 
de  poursuites.  Une  circulaire  du 
ministre  de  la  justice,  explicative 
de  l.i  loi  d'aumistie,  déclara,  il 
est  vrai ,  que  Ja  détention  même 
ne  constituait  pas  le  commence- 
ment do  poursuites  ,  mais  le  con- 
seil de  f^uerre  passa  outre.  Le  gé- 
néral Travot  récusa  le  général 
qui  présidait  le  conseil  de  guerre, 
comme  ayant  combattu  contre  lui, 
et  comme  étant  son  ennemi  per- 
sonnel. Le  conseil  se  déclara  com- 
pétent, et  le  président  prononça 
lui  -  même  négativement  sur  la 
récusation  portée  contre  lui  com- 
me juge.  Un  délai  de  quelques 
jours  fut  sollicité  par  les  défen- 
seurs de  l'accusé;  le  conseil  passa 
encore  outre,  prononça  son  arrêt, 
et  le  général  Travot  est  condamné 
ù  mort.  Parmi  les  délits  imputés 
an  général,  il  y  en  avait  surtout 
un  remarquable,  et  jusqu'alors 
inconnu  dans  les  fastes  de  la  ju- 
risprudence criminelle,  «  La  mo- 
dération ,  est-il  dit  dans  le  réqui- 
sitoire, la  modération  ne  fut  point 
une  des  armes  les  moins  redoutables 
entre  ses  mains,  la  clémence  elle- 
même  fat  un  de  ses  moyens  de  suc- 
cès. »  Le  général  Travot  se  pour- 
vut en  révision  contre  l'arrêt  qui 
le  condamnait  à  mourir  de  la 
mort  des  traîtres.  Les  moyens  de 
cassation  parurent  nombreux  à 
ses  défenseurs;  cependant  com- 
me une  partie  de  ces  moyens  n'a- 
vaient point  prévalu  dans  la  pre- 
mière plaidoirie,  ce  fut  un  devoir 
pour  les  avocats  de  les  rassembler 
<le  nouveau  ,  de  les  développer 
tous,  de  les  corroborer  d'argu- 
mtjns  puisés  dans  les  lois,  dans  la 
charte,  dans  les  meilleurs  crimi- 
nalistes,  enûn,  de  faire  un  der- 


TRA 

nier  effort  pour  démontrer  l'évi- 
dence, et  pour  obtenir  la  révi- 
sion du  jugement.  Ils  remplirent 
ce  devoir  avec  une  supériorité  de 
talent  et  avec  un  dévouement 
qui  honore  le  barreau  de  Rennes. 
Des  mémoires  en  faveur  du  con- 
damné furent  signés  par  treize 
avocats  de  ce  barreau  ,  qui  s'était 
déjà  offert  presqu'en  entier  pour 
défendre  le  général  Travot.  Leur 
Précis  arrachait  des  larmes  d'at- 
tendrissement aux  lecteurs.  On 
leur  répondit  que  des  juges  mili- 
taires ,  étrangers  i.ux  dédales  de 
la  chicane,  ne  se  laissaient  poirit 
éblouir,  qu'on  a  accordé  aux  dé- 
fenseurs une  latitude  immense  , 
indéfinie,  illimitée,  et  qu'on  veut 
bien  considérer  comme  excusable 
peut-être  l'abus  quils  ont  fait  du 
droit  de  défense.  Cependant  la 
consultation,  les  observations  et  le 
précis  furent  dénoncés  par  le  gé- 
néral président  du  premier  con- 
seil,  au  garde-des-sceaux  et  au 
ministre  de  la  police.  On  ne  ju- 
gea point  à  propos  de  sévir  contre 
les  avocats ,  malgré  cette  dénon- 
ciation. Il  eût  été  nouveau  en  ef- 
fet de  simplifier  ainsi  les  procès 
criminels,  eu  envoyant  les  avo- 
cats rejoindre  les  cliens  qu'ils 
n'auraient  pas  sauvés.  L'arrêt  fut 
confirmé  par  le  conseil  de  révi- 
sion. Mais  S.  M.  Louis  XVIII  ac- 
corda des  lettres  de  grâce ,  dans 
lesquelles  il  est  dit  :  «  Nous  avons 
reconnu  que  certaines  considéra- 
tions provoquent  notre  indulgen- 
ce, •>  et  la  peine  de  mort  fut  com- 
nmée  en  vingt  années  de  prison. 
Le  général  Travot ,  qui  avait  tant 
de  fois  bravé  la  mort  avec  intré- 
pidité sur  les  champs  de  bataille  , 
fut  accablé  de  l'idée  d'une  capli- 


TRE 

vite  (le  vltigl  ans;  il  clait  alors 
presque  sexagénaire ,  sa  raison 
s'aliéna  entièrement,  et  on  le  con- 
duisit en  cet  état  au  château  de 
Ham,  ne  voulant  pas  le  laisser  en 
Bretagne.  M"'  la  baronne  Travot 
qui  n'avait  pas  quitté  son  illustre 
et  malheureux  époux  dans  les  ca- 
chots, l'accompagna  au  château 
de  Han» ,  et  vint  ensuite  à  Pa- 
ris ,  pour  y  solliciter  la  liber- 
té de  son  mari.  L'histoire  con- 
temporaine doit  un  juste  tribut 
d'éloge  au  dévouement  sans  bor- 
ne de  cette  courageuse  épouse.  Il 
est  cruel  d'ajouter  qu'elle  n'en  fut 
point  récompensée.  S.  A.  R.  le 
duc  d'Angoulême,  qui  s'est  ho- 
noré par  tant  de  bonnes  et  glo- 
rieuses actions,  plaida  la  cause  du 
malheur;  grâce  à  la  généreuse  in- 
tervenliou  de  ce  prince,  les  fers  du 
général  Travot  furent  brisés,  après 
une  captivité  de  deux  ans,  et  il  tut 
rendu  aux  soins  de  sa  famille; 
mais  le  coup  était  porté  :  sa  rai- 
son ne  revint  pas,  et  il  languit 
encore  dans  une  maison  de  santé, 
où  il  acheva  sa  glorieuse  et  dé- 
plorable vie. 

TRÉIIOUAUTS  (  Pierre- Ju- 
lien ) ,  capitaine  de  vaisseau  de 
première  classe,  chevalier  de  la 
légion-d'honiUMir,  na(niit  à  l'Ile- 
de-France.  Il  entra  par  goftt  dans 
la  carrière  maritime,  et  y  gagna 
successivement  ses  grades  jusqu'à 
celui  d'officier  supérieur,  et  cha- 
cun d'eux  fut  la  récoujpi'n^ed'ime 
action  remarquable,  soit  en  sous- 
ordre,  soit  lorsqu'il  commantl.i 
«•n  chef.  Il  s'est  trouvé  à  onze 
condjats.  Volontaire  «;n  17^5,  of- 
ficier en  1777,  lieutenant  de  fré- 
gate en  1779,  snus-lietilenaul  de 
vaisseau  en  1786,  liculeiianl  en 


TRÉ  59 

179a,  capitaine  en  l'an  .3,  il  fui 
fait  chef  de  division  en  l'an  6. 
Nommé  membre  de  la  légion- 
d'honneur  A  la  création  de  l'or- 
dre, il  mourut  le  20  floréal  an  12. 
Tréhouarts  fit  la  guerre  de  l'Inde, 
en  1 770  ,  sous  les  ordres  de  M.  de 
SufTren,  qui  l'avait  distingué,  et 
qui  se  plut  à  rendre  publiquement 
justice  à  ses  talens  et  à  son  cou- 
rage, a  Ses  belles  actions  sur  la 
Cybelle,  dit  M.  Lavallée  dans  une 
notice  stir  ce  brave  marin  ,  ont 
pour  jamais  illustré  celte  frégate. 
Il  la  commandait  lorsqu'elle  était 
en  station  à  l'Ile-de-France  ;  et, 
par  le  terrible  combat  qu'elle  li- 
vra aux  Anglais,  le  1"  brumaire 
an  5,  il  eut  le  bonheur  de  con- 
server à  la  France  cette  colonie  si 
précieuse.  Le  port  de  l'Ile  -  de- 
France  était  depuis  long -temps 
bloqué  par  deux  vaisseaux  de 
guerre  anglais,  le  Centurion  et  le 
Diomède.  Une  extrême  disette  se 
faisait  sentir,  et  l'on  y  était  réduit 
l'à  six  onces  de  pain  par  jour.  La 
Cy belle  et  une  autre  frégate  étaient 
les  seules  forces  maritimes  que  la 
colonie  pût  opposer  aux  Anglais. 
Il  fui  décidé  qu'elles  Sf,  dévoue- 
raient pour  le  salut  général,  et 
iraient  combattre  ces  deux  vais- 
seaux qui  leur  étaient  si  supé- 
rieurs. Tréhouarts  accepta  avei; 
transport  cette  honorable  et  pé- 
rilleuse mission.  Eu  effet  ,  les 
deux  frégates  appareillent,  sor- 
tent, lencontrflnt  les  deux  vais- 
seaux ennemis  et  les  allaquenl. 
Dans  celle  lutte  si  inégale  ,  la 
Cybetle  n'sta,  depuis  trois  heures 
isprès-midi  jusqii'A  six  heures  du 
soir,  par  le  travers  du  Centurion  , 
Je  combat lanl  A  j)Orlée  de  fusil. 
Enfin,  démâtée  de  tous  ses  hu- 


6o 


TRE 


nîers  ,  ayant  trois  pie('s  el  demi 
d'eau  dans  la  calle,  il  lui   fallut 
songer  à  se  retirer.  Mais  son  ob- 
jet était  rempli;  ïréhouarti»  laissa 
le  Centurion  si  uialtraité  et  telle- 
ment dégréé,  qu'il  lut  obligé  de 
rallier  le  Dlornède  pour  lui  porter 
des  secours ,  et  qu'il  ne  put  sui- 
vre la  Cybellc,  qui,  s'élant  fait 
prendre  à  la  remorque  par  l'autre 
frégate  ,    rentra   le    lendemain    à 
rile-de-France.  Pendant  la  nuit, 
le  Centurion  ayant  été  déu)âté  de 
tous  ses  mâts,  les  Anglais  levè- 
rent leur  croisière  ;  le  port  fut  li- 
bre,  et,  en  peu  de  jours,  l'abon- 
dance reparut  et  régna  dans  l'île. 
En  l'an  4:»  la  Cy belle ,    toujours 
commandée  par  Tréhouarts,  s'é- 
lant réunie  à  une  autre  division 
française,  fut  une  des  quatre  fré- 
gates qui,    le  24  fructidor,  à   la 
côte  de   Sumatra,  livrèrent  aux 
deux  vaisseaux  anglais  de  j'4i  ^'' 
Victorieux  et  C Arrogant,  l'un  des 
plus   mémorables    combats    dont 
les  mers  de  l'Inde  eussent  été  jus- 
qu'alors le  théâtre.  11  était  à  crain- 
dre que  cette  journée  ne  tournât 
à  l'avantage  de  deux  vaisseaux  de 
celte  force;  mais  la  valeur  fran- 
çaise en  ordonna  autrement ,  et  la 
gloire  en  resta  tout  entière  aux 
frégates.  Le  combat  commença  à 
buit  heures  du  malin,  et  ne  lîuit 
qu'à  midi.  Les  deux  vaisseaux  an- 
glais prirent  la  fuite.   Le  Victo- 
rieux fut  surpris  par  le  calme  pen- 
dant le  fort  de  l'action.  La  Cy belle 
mit  alors  son  canot  en  mer,  se  fit 
remorquer,  et,  se  maintenant  en 
travers  à  la  poupe  du  Victorieux, 
le  foudroya.  Cette  manœuvre  har- 
die ,  exécutée   par   un   équipage 
intrépide,  plein  de  confiance  dans 
son  chef,  et  accoutumé  à  vaincre 


TRE 

avec  lui ,  acheva  de  désemparer  le 
vaisseau  ennemi,  qui  ne  gagna 
Madras  qu'avec  beaucoup  de  pei- 
ne. Tréhouarts  ramena  en  France 
la  Cybelle,  sur  laquelle  il  avait 
cueilli  lant  de  lauriers,  et  après 
74  jours  de  traversée,  il  entra  au 
poit  de  Uochefort  au  mois  de 
messidor  de  l'an  5.  Le  19  germi- 
nal de  l'an  6,  il  reçut  le  coumian- 
dcment  du  vaisseau  le  Formida- 
ble,  de  80  canons.  Le  capitaine 
Tréhouarts  garda  ce  commande- 
ment pendant  une  année,  et  ne  le 
quitta  que  pour  passer  au  com- 
mandement du  Neptune,  au  port 
de  Toulon.  » 

TllÉHU  DE  MONTniERIVY 
(  N.  ) ,  ex-mun)bre  de  la  chambre 
des  di'pulés,  où  il  avait  été  élu, 
eu  1817  ,  par  le  département 
d'IlIc-et-Vilaiue.  Dès. le  commcn- 
ceuicnl  de  la  révolution,  dont  il 
adopta  avec  sagesse  le.«  principes, 
il  remplit  successivement  les  fonc- 
tions de  commissaire  des  guerres 
et  de  commissaire-ordonnalcur, 
et  les  cessa  long-temps  avant  le 
rétablissement  du  gouvernement 
royal  en  1814.  Appelé  aux  fonc- 
tions législatives  ,  en  i  817,  il  prit 
place  au  côté  gauche,  première 
section  ,  vota  contre  les  deux  lois 
d'exception,  et  fut  un  des  quatre- 
vingt-quinze  opposans  au  nou- 
veau système  électoral.  RI.  Tréhu 
de  Monlhierry  sortit  de  la  cham- 
bre à  l'expiration  de  son  mandat, 
et  n'a  point  été  réélu  aux  sessions 
suivantes. 

TREILHARD  (  le  comte  Jean- 
Baptiste  ),  ancien  membre  du  di- 
rectoire exécutif  de  la  république, 
minislre-d'état  sous  le  gouverne- 
mont  impérial,  grand-uflicier  de 
la  Icgion-d'honneur,  etc.  ,  naquit 


TRE 

à  Brivcs,  dans  le  Bas-Limousin, 
afijourd'luii  dépaileiiieiit  de  la 
Corrèze.  Les  doctriuaires  y  le- 
uaient  un  coHéj^'e,  dans  lequel  il  fit 
ses  premières  études;  il  les  conti- 
nua à  Paris,  au  colii  ge  d'Harconrt, 
et  il  embrassa  ensuite  la  profession 
d'avocat,  que  ses  pères  avaient 
exercée  avec  honneur  dans  le  lieu 
de  leur  naissance.  En  17O9,  un 
procès  important  que  les  habitans 
de  IJrives  eurent  avec  le  duc  de 
Noailles,  el  qu'il  plaida  pour  ses 
concitoyens,  le  tirèrent  de  l'obs- 
curité. La  dispersion  des  parle- 
niens ,  en  1^71 ,  ayant  ccarlé  M. 
Treilhard  du  barreau ,  il  occupa 
une  place  de  directeur  des  fermes, 
qu'il  résigna  ,  en  i  775  ,  pour  ren- 
trer dans  la  carrière  dont  il  avait 
d'abord  fait  choix.  Les  magistrats 
exilés  venaient,  à  cette  époque, 
d'être  rendus  à  leurs  fonctions;  il 
fut  bientôt  appelé  aa  conseil  de  la 
ferme-générale,  et  se  trouva  in- 
vesti d'une  grande  confiance.  Il  y 
eut  peu  d'affaires  d'éclat  dans  les- 
quelles il  ne  fftt  chargé  ou  de 
parler,  ou  d'écrire,  ou  de  con- 
sulter; mais  il  reçut  bientôt  un  té- 
moignage plus  éclatant  de  l'es- 
time de  SCS  concitoyens  ,  qui  le 
nommèrent  député  aux  étals-gé- 
néraux en  1789.  Pendant  toute  la 
durée  de  l'assemblée  constituante, 
il  exerça  une  grande  influence. 
Dans  les  premiers  jours  de  juin  de 
la  même  année,  il  présenta  des 
observations  conciliatrices  sur  In 
réunion  des  trois  ordres  ;  le  a 
septen)l)re  suivant,  il  vota  pour 
une  seule  chambre  et  pour  le  vélo 
!^u?pen:<if  du  roi.  Devenu  mem- 
bre et  rapporteur  habituel  du  co- 
mité ecclésiasti(pie,  il  présenta  et 
Oi  ad"r>t«'r  Ijus  le»  décn  Is  rela- 


TEE 


Ci 


tifs  au  clergé  et  à  sa  nouvelle 
constitution;  proposa  la  suppres- 
sion des  ordres  religieux,  appuya 
la  demande  faite  à  rassemblée 
d'aliéner  des  biens  ecclésiastiques 
jusqu'à  la  concurrence  de  quatre 
cents  millions,  et  s'opposa  à  ce 
que  l'administration  de  ces  biens 
fût  laissée  au  clergé.  Nommé  pré- 
sident de  l'assemblée ,  il  main- 
tint avec  fermeté  le  calme  dans 
les  délibérations,  et  imposa  si- 
lence aux  tribunes  devenues  déjà 
tumultueuses.  Pendant  le  coursdo 
l'assemblée  législative,  M.  Treil- 
hard présida  successivement  un 
tribunal  civil  et  un  tribunal  crimi- 
nel; sous  cette  seconde  assem- 
blée, la  révolution  avait  changé 
de  face  :  des  hommes  ardens,  que 
faisaient  mouvoir  les  ennemis  de 
l'ordre,  prêchaient  hautement  le 
renversement  de  la  monarchie.  W. 
Treilhard  fut  élu,  en  1792,  dé- 
puté à  la  convention  nationale  par 
le  département  de  Scitie-et-Oise  ; 
il  y  proposa ,  pendant  le  cours 
des  débats  relatifs  au  procès  du 
roi,  d'accorder  un  ou  plusieurs 
conseils  à  ce  prince,  ce  qui  fui 
décrété,  sursa  demande,  le  10  dé- 
cembre de  la  même  année.  Il  fut 
élu  président  de  l'assemblée  le  25 
décembre  suivant.  Dans  les  pre- 
miers jours  de  janvier  1793,  il 
s'éleva  avec  force  contre  l'sn- 
fluence  que  les  sections  de  Paris 
voulaient  s'arroger  dans  le  pro- 
cès qui  allait  décider  du  sort  du 
monarque  ;  il  vota  cependant  ainsi 
que  la  majorité,  mais  se  prononfa 
avec  énergie  pour  l«^  sursis  i\ 
l'exécution  de  la  scnlence,  et  con- 
tinua à  ne  point  séparer  de  son 
vote  celui  de  sursis  (  fait  facile  à 
vérifier  par  les  procès-verbaux  de 


<»i  TRE 

rassemblée,  maïs  qui  a  été  dénatu- 
ré dans  le  Moniteur.  )  Pendant  h\ 
séance  orageuse  de  la  nnit  dn  ven- 
dredi 18  au  samedi  19  janvier, 
Marat  et  quelques  autres  députés, 
du  haut  de  la  Montagne,  appuyés 
par  les  cris  tumultueux  des  tri- 
bunes, voulurent  faire  décider 
qu'il  n'y  avait  pas  lieu  à  délibérer 
sur  cette  question  du  sursis.  RI. 
ïreilhard,  au  milieu  de  ces  cris, 
quitta  brusquement  le  fauteuil  de 
président,  leva  la  séance,  et  se 
retira,  suivi  d'un  grand  nombre 
de  députés.  Après  son  départ,  il 
fut  question  de  le  mander  à  la 
barre  ;  mais  cette  proposition 
n'eut  pas  de  suite,  et  la  discussion 
sur  le  sursis  eut  lieu  le  lendemain. 
Dans  la  séance  du  0  janvier  même 
année,  un  débat  violent  s'était  dé- 
jà ouvert  sous  sa  présidence,  llo- 
i)espierre  et  Marat  avaient  rempli 
les  tribunes  de  leurs  aflidés ,  qui 
poussaient  d'horribles  clameurs. 
Le  président  s'était  couvert,  la 
sonnette  s'était  brisée  dans  ses 
mains  ;  enfin  il  rétablit  l'ordre  et 
censura  Robespierre.  Celui-ci  . 
ayant  obtenu  la  parole,  se  livra  à 
de  violentes  accusations  contre  M. 
Treiihard,  qui  se  contenta  de  dire: 
«  Je  pourrais  répondre  à  Robes- 
pierre ,  mais  je  ne  veux  pas  oc- 
cuper l'assemblée  de  moi.  Il  y  a 
entre  nous  un  juge  qu'il  ne  peut 
récuser  ni  corrompre  ,  c'est  l'opi- 
nion publique.  »  Robespierre  fit 
périr  depuis  des  hommes  qui  l'a- 
"vaiful  moins  offensé.  M.  Treiihard 
échappa  par  un  rare  bonheur  à  sa 
vengeance.  Élu,  le  7  avril  i;r95, 
membre  du  comité  de  salut- 
public,  que  la  convention  venait 
d'instituer  dans  son  sein  ,  il  fut 
envoyé,   peu   après,  en   mission 


TRE 

dans  le  département  delà  Gironde 
où  il  fut  arrêté  pendant  quelque* 
jours  lorsqu'on  y  apprit  les  atten- 
tats commis  à  Paris,  le  3i  mai, 
1"  et  2  juin  ,  contre  la  représenta- 
tion tjalionale.  Il  (piilta  ensuite 
Bordeaux  pour  se  rendre  dans  le 
déparlement  de  la  Dordogne,  d'où 
il  lut  bientôt  rappelé,  conmie  trop 
modéré,  par  le  parti  de  la  Monta- 
gne. M.  Treiihard  demeura  parfai- 
tement étranger  à  tous  les  actes 
de  la  faction  sanguinaire,  qui  do- 
mina bientôt  l'assemblée  et  cou- 
vrit la  France  de  deuil  ;  mais  dès 
le  i5  thermidor  (5  juillet),  trois 
jours  après  la  mort  de  Robes- 
pierre ,  il  fut  porté  de  nouveau 
au  comité  de  salut-public ,  et  y 
prit  part  aux  travaux  législatifs  les 
plus  imporlans.  Il  proposa  la  ra- 
lifioalion  du  traité  conclu  A  Brde 
avec  la  Prusse,  le  iG  germinal 
an  3(4  novembre  1794),  et  fit 
adopter,  le  12  messidor  suivant 
(3o  juin  1795),  par  la  conven- 
tion ,  l'échange  proposé  par  le  co- 
mité de  salut-public.  des  repré- 
sentans  et  des  minisires  français 
arrêtés  en  Autriche,  avec  la  fille 
du  roi  Louis  XVI,  détenue  au 
Teujple.  Après  la  fin  de  la  session 
conventionnelle,  M.  Treiihard  en- 
tra au  conseil  des  cinq-cents;  il 
présida  plusieurs  fois  cette  as*em- 
blée  ,  et  y  prononça  un  grand 
nombre  de  discours  remarquables 
sur  les  matières  de  législation. 
Sorti  de  ce  conseil  le  20  mai  1 798, 
il  se  vouait  à  la  retraite,  après  a- 
voir  refusé  le  ministère  de  la  jus- 
tice ,  lorsque  le  gouvernement  le 
nomma  successivement  n)embre 
du  tribunal  de  cassation,  où  ses 
collègues  lui  déférèrent  une  pré- 
sidence ;  ministre  plénipotentiaire 


TRE 

i\  Lille;  ainbnssadfur  à  NapleS,  el 
enfin  ministre  plénipotentiaire  nu 
congrès  de  Uasiadt.  Le  général 
Bonaparte  était  considéré  comme 
le  chef  de  la  Irgation  française  à  ce 
congrès;  mais  après  son  départ 
pour  rexpédilion  d'Egypte,  les 
principaux  pouvoirs  furent  remis 
à  M.  ïreilhard,  qui  avait  conduit 
la  négociation  pres^u'à  son  terme, 
lorsque  les  sulîrages  du  corps-lé- 
gislatif l'appeltTcnt  an  directoire 
le  26  floréal  an  G  (  i5  mai  i^qS), 
en  remplacement  de  François  de 
Neufchâleau.  iMais  dès  le  28  prai- 
rial an  7  (  iG  juin  1799),  à  la  suite 
d'un  nouveau  revirement  politi- 
que, opéré  cette  fois  par  les  con- 
seils législatil's  contre  le  directoire 
exécutif,  et  qu'on  peut  regarder 
comme  la  contre-partie  du  18 
fructidor  an  5  (4  septembre  1797), 
la  nomination  de  M.  Treilhard  fut 
annullée,  sous  prétexte  d'un  vice 
de  forme.  Il  quitta  sans  dilliculté 
le  poste  qu'il  n'avait  point  recher- 
ché, et  donna  lui-même  sa  dé- 
mission deux  jours  avant  qu'un 
acte  pareil  fût  arraché  à  ses  col- 
lègues La  Kéveillère-Lépeaux  et 
iMtrlin.  Rendu  à  la  vie  privée  jus- 
qu'à l'établissement  du  gouverne' 
ment  consulaire  ,  il  fut  alors  nom- 
mé vice-})résident,  et  ensuite  j)ré- 
sident  du  tribunal  d'appel  de  l'a- 
ris.  L'époque  de  sa  présidence  est 
encore  aujourd'hui,  pour  la  ma- 
gistrature et  pour  le  barreau,  l'ob- 
jet des  plus  honorables  souvenirs. 
Appelé  ensuite  par  Napoléon  au 
conseil-d'élat,  il  y  prit  une  part 
Ires-active  à  la  discussion  du  code 
civil,  du  code  criminel,  du  code 
de  procédure  et  du  code  de  com- 
merce ;  il  en  rédigea  plusieurs  ti- 
tres importans.  et  les  présenta  au 


TRE 


G3 


corps-législatif,  nctlamment  la  lo' 
du  divorce,  qui,  en  rendant  la 
dissolution  du  mariage  diilicile, 
(bien  plus  même  qu'en  d'autres 
pays,  tels  que  la  Pologne,  où  le 
divorce  entre  catholiques  est  per- 
mis) ne  rendait  [)oint  cependant  la 
dissolution  impossible.  Cette  loi, 
abolie  sans  discussion  en  181 5, 
n'eut,  pendant  sa  durée,  que 
d'heureux  effets  pour  la  saine  mo- 
rale et  le  repos  des  familles.  M. 
Treilhard  se  prononça  avec  persé- 
vérance et  une  grande  énergie  en 
faveur  de  l'institution  du  jury,  et 
c'est  peut-être  à  ses  conslans  ef- 
forts et  à  ceux  «l'un  petit  nombre 
de  ses  collègues,  que  la  France 
est  redevable  du  niaintien  de  cette 
institution  salutaire.  Il  réclama 
d'abord  l'unanimilé  dans  les  dé- 
cisions du  jury,  ainsi  qu'elle  est 
établie  en  Angleterre  ,  et  se  rédui- 
sit ensuite  i\  demander  la  majorité 
des  deux  tiers  pour  opérer  la  con- 
damnation ;  mais  ses  propositions 
ne  furent  point  admises.  L'empe- 
reur, dont  il  combattait  souvent 
les  opinions,  accueillait  cependant 
quel(|uefois  ses  conseils.  M.  Treil- 
hard était  président  de  la  section 
de  législature  <Ju  conseil-tl'étflt , 
membre  du  comité  contentieux  de 
la  maisr)n  de  Napoléon,  grand- 
olïicier  de  la  légion-d'honiieur  , 
chevalier  de  l'ordre  de  la  couronne 
de  Fer,  et  mii.istre-d'élat,  lors- 
qu'alTaibli  par  de  longs  travaux, 
il  mourut  à  Paris,  le  i"  décembre 
1810 ,  âgé  de  G8  ans. 

TRElLflARI),  lieutenant-gé- 
néral (voy.  l'article  qui  suit  celui 
de  Trklis.) 

TRELIS  (  .JEAN-Ji'UKN  ) .  an- 
cien bibliothé(-aire ,  conserva'eur 
des  cabinets  d'antiques  et  d'his- 


64  TRK 

toire  naturelle  de  la  ville  de  Nî- 
mes, secrétaire  perpétuel  de  l'a- 
cadémie royale  du  Gard,  et  mem  • 
bre  de  celle  de  Lyon,  naquit  A 
Alais  en   1757.   Héritier  des  lu- 
mières, de  la  philosophie  et  delà 
raison   supérieure  de  son  père  , 
qui  dirigea  seul  son  éducation,  il 
vint  de  bonne  heure  à  Paris,  for- 
tifier et   perfectionner   son   goût 
passionné   pour   la  littérature   et 
pour  les  arts  ,  dans  la  société  des 
hommes  les  plus  célèbres  en  tous 
genres;  et,    de  retour  dans  ses 
loyers,  il  fut  assez  heureux  pour 
y  trouver  une  réunion,  peut-être 
unique  en  province  ,  d'hommes 
aimables  et  éclairés  dans  tous  les 
rangs  et  de  tous  les  âges,  dont  les 
encouragemens  et  l'exemple  con- 
tribuèrent à  développer  ses   ta- 
lens.  Sa  vie  aurait  été  purement 
philosophique  et  littéraire,  si,  dès 
l'aurore  de  la  révolution,  la  haute 
considération  dont  il  jouissait  ne 
l'avait  fait  appeler,  par  le  vœu  de 
ses  concitoyens  ,  au  maniement 
des  affaires  publiques.  Après  s'être 
fait  remarquer  par  sou  patriotis- 
me, par  la  sagesse  de  ses  vues, 
par  la  modération  de  son  carac- 
tère et  par  son  éloquence  dans  les 
assemblées  du  tiers -état,  il  fut 
nommé  membre  du  directoire  de 
son  département;  et  là,  d'un  côté, 
les  résistances  et  les  entreprises 
contre-révolutionnaires  et  fanati- 
ques;   de   l'autre,   les   agitations 
désorganisatrices,  ne  lui  fourni- 
rent que  trop  d'occasions  de  si- 
gnaler,  souvent  au  péril  de  ses 
jours  ,  son  amour  pour  la  vraie 
liberté,  son  respect  pour  les  lois 
et  son  inébranlable  fidélité  à  la 
royauté  constitutionnelle.  Echap- 
pé au  danger  qui  le  menaça  à  la 


TKE 

chute  du  trôno,  il  fut  forcé  de  se 
dérober,  par  la  fuite,  à  la  proscrip- 
tion ,  comme  complice  du  pré- 
tendu fédéralisme.  Il  parvint  ;'i  «e 
réfugier  en  Suisse  à  travers  mille 
périls,  et  il  y  attendit  plus  d'un 
an  1:>  fin  de  son  exil.  Il  en  charma 
les  ennuis  en  chantant  la  cascade 
de  Lauffen  ,  composiiion  qu'une 
société  de  gens  de  lettres  de  Zu- 
rich fit  imprimer  avec  luxe,  et  en 
consacrant  un  beau  poërae,  en- 
core inédit ,  aux  Alpes  et  aux 
grands  et  pittoresques  effets  de  la 
nature  helvétique.  Rentré  dans  sa 
patrie,  il  eut  à  regretter  la  perte 
de  son  portefeuille,  qui  renfermait 
les  travaux  littéraires  des  dix  plus 
belles  années  de  sa  vie,  et  qu'une 
terreur  exagérée  fit  livrer  aux 
flammes  pat  ceux  qui  en  étaient 
restés  dépositaires.  Il  se  consola 
plus  aisément  de  celte  perte  que 
ses  amis  ,  qui  en  appréciaient 
mieux  que  lui  la  valeur.  Sa  vie, 
jusqu'aux  troubles  de  i8i5,  s'é- 
coula paisiblement  dans  les  dou- 
ceurs de  l'étude,  au  milieu  d'une 
précieuse  collection  de  livres  qu'il 
avait  formée  dans  le  sein  de  la 
bibliothèque  publique  confiée  à  sa 
f^arde ,  et  où  il  avait  institué  un 
cours  de  bibliographie,  dont  il 
fut  lui-même  le  professeur,  et 
dans  les  travaux  académiques  , 
lorsque  la  marche  des  événemeiis 
eut  permis  de  les  reprendre.  Ou- 
ti'e  le  grand  nombre  de  morceaux 
en  prose  et  en  vers  dont  il  a  per- 
sonnellement enrichi  les  notices 
publiées  par  l'académie  du  Gard, 
et  qui  tous  portent  l'empreinte 
d'un  excellent  esprit  et  d'un  ta- 
lent d'écrivain  très-distingué,  l'a- 
nalyse raisonnée  des  autres  ou- 
vrages contenus  dans  les  huit  prc- 


Ï&E 

iTîiers  volumes  de  ce  recueil,  n'at- 
tesle  pas  moins  honorableinenl  la 
variété  de  ses  connaissances,  la 
piirelé,  l'élégance  et  la  flexibilité 
de  son  style.  Mais  il  fallut  une  se- 
conde fois  s'anaiher  à  ces  douces 
occupations.  Bien  qu'il  fûtrestéab- 
solunientétrangerauxmouveniens 
des  cenl  jours,  en  181 5,  sa  qualité 
de  prolestant sulïït  pouratlirersur 
lui  la  persécution  ,  quand  les  cir- 
constances eurent  réveillé  toutes 
les  fureurs  du  fanatisme  à  la  voix 
hypocrite    de   quelques    hommes 
animés    d'im    tout    autre    intérêt 
que  celui  de  la  reli|;ion-.  Dégoûté 
d'un   pays   désormais   livré  <\    la 
haine  sanguinaire  de  quelques  in- 
solcns  dominateurs,  ouverlement 
protégés  par  la  puissance  publi- 
que, M.  Trelis,  à  l'exemple  de 
tant  d'antres,  le  quitta  pour  ja- 
mais. 11  s'est   fixé  à  Lyon,  où, 
grâce  à  son  mérite,  il  a  été  bien- 
tôt accueilli  comme  il  avait  droit 
de  l'être  :   l'académie   s'est  em- 
pressée de  se  l'attacher,  et  la  con- 
fiance d'une  société  libre,   com- 
posée de  citoyens  d'élite ,  a  eu  re- 
cours à  son  zélé  pour  l'établisse- 
ment de  l'enseignement  mutuel. 
Parmi  beaucoup  de  productions 
inédites  de  M.  Trelis,  on  peut  ci- 
ter comme  très-retnarquables,  un 
poëme  en  quatre  chants  sur  les 
progrés  de  l'esprit  humain  dans  le 
18'  siècle,  des  versions  poétiques 
de  l'essai  sur  la  critique  de  l'ope, 
du  Frométhée  d'Eschyle,  de  l'Ân- 
ligoneet  des  Trachiniennesde  So- 
phocle, et  une  traduction  en  prose 
des  satires  de  l'Arioste,  qu'il  se 
propose  de  publier  in(;cssamment. 
TUEF.LIAIU)  (le  comte  Aisne- 
François -Chables)  ,   lieutenant- 
général  ,  commandeur  de  la  lé- 

T.   XX. 


TRE 


05 


gion -d'honneur  ,     chevalier    de 
Saint-Louis  ,  né  à  Parme  ,  le  9 
février  176^,  d'une  famille  noble 
française.  Il  entra  nu  service  dans 
le  régiment  de  la  ileine-dragons, 
comme  cadet  gentilhomme,  le  6 
uovemhce   1780  ;   il   fut  nommé 
sous-lieuteOrtut    le     19     octobre 
1781,  lieutenant  le  28  avril  1788, 
et  passa  ,  avec  le  même  grade  ,  au 
T>°  régiment  de  chasseurs  à  cheval, 
le  ii5  janvier  1792;  capitaine  au 
même  corps  le  6  août  de  la  tnôme 
année,  lieutenant-colonel  au  11' 
de  chasseurs  à  cheval  le  7  avril 
1793,  colonel  au  même  régiment 
le    i5  fructidor  an  2,  général  de 
brigade   le  24  fructidor  an  7  ;  il 
fut  enfin  nommé  général  de  divi- 
sion le  5  décembre  1806.  Il  a  fait 
les  campagnes  de  1792  et  1795  aux 
armées  du  Nord,  de  la  Moselle  et 
des  Ardenncs;  de  l'an  i"au  llhin, 
dans  le  Palalinat  ;  des  années  2,  3, 
4  et  5  aux  armées  de  Sambre-el- 
iMeuse  et  d'Allemagne;  des  années 
6  et  7 ,  en  Hollande  et  en  Suisse; 
des  années  8  et  9,  à  l'armée  gallo- 
balave;  des  années  I2et  i3,  à  l'ar- 
mée des  côtes  de  l'Océan  ;  de  l'an 
i/j  et  de  i8o(5,  à  la  grande-armée 
en  Allemagne  et  eu  Pologne;  de 
1808,  en  Espagne;  de  1809,  en 
Allemagne ,    grande  -  armée  ;    de 
1810,  i8i  I,  181  a  et  i8i3  ,  en  Es- 
pagne elen  Portugal;  enfindei  8  i/j, 
à  la  grande-année, en  Champagne. 
Parmi    les  actions   remarquables 
qu'il  a  faites  depuis   1792,  nous 
citerons  les  suivantes.   Etant    de 
grande  garde  avec  3o  chevaux, 
en    avant  de   Philip[)evillc,    le   4 
mars,  il  fut  attaqué  par  les  Au- 
trichiens; il  tint  ferme,  doima  le 
temps  ,à  son  régiment  de  se  dé- 
ployer, et  fut  blessé  dans  l'actiou  ; 


66 


TRE 


aux  avani-postcs  de  La  Chapelle, 
il  rofut,  en  quiililé  de  capilaine, 
Tordre  du  général  Slenglc,  cuiii- 
ninndant  l'avanl-garde,  de  fe  por- 
ter en  reconnaissance,  avec  son 
«eicadron  et  irois  compagnies  d'i«t- 
ranter[e,  a  Durcn,  sur  luièvicre, 
d'occuper  celle  vill<; ,  et  d'en- 
voyer CQ  av;»!!t  des  partis  pour 
s'armer  si  l'ennemi  avail  repassé 
le  Kbin  ;  il  iiil  aliaqné  des  son 
arrivée,  à  «me  lieure  du  matin, 
par  un  corps  autrichien  de  5,ooo 
hommes.  11  se  inainlinl  jusqu'au 
jour,  el  assura  sa  retraite,  qu  il  fit 
en  bon  ordre.  Envoyé  sur  le  Rhin, 
dans  le  Palalinat,  et  commandanl, 
comme  lieutenant-colonel,  5oo 
chasseurs  à  cheval  de  dift'érens 
■corps,  il  prit  pari  à  toutes  les  ac- 
tions qui  eurent  lieu  à  la  reprise 
du  Palalinat  sur  l'armée  prus- 
sienne ,  et  assista  à  la  balailie  ties 
lignes  de  Wissembourg  ainsi  qu'au 
déblocus  de  Landau.  Â  la  suite 
de  celte  campagne,  il  lut  rappelé 
avec  son  régiment  à  l'armée  des 
Ardennes,  qui  venait  d'être  in- 
corporée dans  celle  de  Sambre-et- 
Meuse.  Le  général  Hébert  le  choi- 
sit pour  prendre  le  commande- 
inent  d'un  corps  de  partisansde  5oo 
chevaux ,  pour  inquiéter  l'ennemi 
-sur  ses  derrières,  et  donner  jour- 
nellement au  général  en  chef 
Jourdan  des  renseignemens  sur 
les  manœuvres  de  l'armée  autri- 
chienne. A  11  bataille  de  Fleurus, 
il  était,  en  qualité  de  colonel,  à 
l'avanl-garde  du  corpscommandé 
par  le  général  Moreau,  qui  formait 
l'aile  droile  de  l'armée  de  San)bre- 
el-Meuse  ;  il  soutint  avec  son  ré- 
giment, le  jour  de  la  bataille,  de- 
puis deux  heures  du  matin ,  les  at- 
taques réitérées  de  la  cavalerie  lé- 


TRE 

gère  des  Autrichiens.  Après  la  ba- 
taille de  Fleurus,  il  suivit  le  corps 
de  Moveau,  qui  se  dirigeait  sur  le 
Rhin  pour  attaquer  Coblentz  ;  le 
colonel  Trelliard  se  distingua  en 
avant  de  cette  ville .  au  village  de 
la  Ïour-Blanche,  où  il  culbuta  la 
cavaleiie  eimemie  ,  la  poursuivit, 
lui  prit  180  chevaux,  et  mit  200 
hommes  hîirs  de  combat.  Le  len- 
demain ,  à  la  prise  de  CoblenJE  ,  il 
chargea  ave»^  son  régiment  les  re- 
doutes qui  étaient  en  avant  de 
cette  place  ,  sen  empara  pour  sui- 
vre les  Autrichiens  ,  et  serait  en- 
tré avec -eux  dans  la  ville  s'ils 
n'avaient  promptemenl  f'iit  sauter 
une  arche  du  pont  sur  la  Moselle: 
la  ville  capitula  de  suite,  et  lar- 
mée  y  entra  le  même  jour.  Il 
conliima  de  servir  à  l'avant-garde 
de  Moreau  ,  le  suivit  dans  le 
Hourecouck  et  au  blocus  de 
Mayence,  et  se  distingua  sur  la 
Rlire,  où  il  commandait  une  avant- 
garde  ;  détaché .  coupé  de  son 
corps  d'armée ,  il  fut  obligé  de  se 
l'aire  jour  à  travers  l'ennemi,  qui  le 
poursuivit  pendant  quatre  lieues 
sans  pouvoir  l'entamer;  il  rejoi- 
gnit le  corps  de  Moreau  sans  au- 
tr«  perte  que  quelques  tués  et 
blessés.  En  avant  de  Rreutsnack,  il 
s'élança  sur  l'ennemi,  l'enfonça,  et 
entra  pêle-mêle  dans  la  ville  avec 
lui;  iilit  '2,5oo  prisonniers  de  toute 
arme  au  village  de  "Sperimglien- 
gnien,  près  de  Rreutsnack.  Dans 
une  reconnaissance,  il  chargea  le 
régiment  de  Kerer  hussards,  et 
lui  lit  éprouver  une  perte  de  i6o 
chevaux.  Sur  le  plateau  de  Par- 
tenheim,  au  blocus  de  Mayence, 
dans  une  sortie  que  fil  l'ennemi , 
il  attaque  sa  cavelerie,  forte  de 
i5oo  cîievaux,  l'enfonce,  le  pour- 


TRE 

suit,  lui  prend  *.îoo  chevaux,  et  n»t;t 
i5o  honiin*-s  liors  de  combat.  A 
une  autre  époque,  dans  les  der- 
niers jours  de  sepleuibre.  l'enne- 
mi ayant  fait  une  sortie  de  Mayen- 
ce,  par  un  épais  brouillard,  rarmée 
attaqua  et  cidbuta  le«  avan t-posfes, 
pénétra  dan?  le  camp  et  les  bi- 
vouacs de  la  lifjne  ,  et  mit  tout  en 
désordre.  Le  colonel  Trelliard  qui 
.se  trouvait  à  l'extrême  gauc'je,  et 
qui  n'avait  pas  été  attaqué,  prit 
sur  lui  de  quitter  son  poste  pour 
se  porter  avec  son  régiment  où  é- 
lail  le  danger,  et  malgré  le  brouil- 
lard, le  désordre  et  la  confusion, 
il  se  précipita  sur  l'ennemi  ;  après 
trois  charges  consécutives  et 
meurtrières,  il  arrêta  ses  progrès, 
reprit  l'artillerie,  dont  il  s'était 
emparé,  et  le  força  à  la  retraite. 
Dans  une  autre  rencontre,  au  vil- 
lage de  Marienbonne,  sous  Mayen- 
ce ,  il  chargea  l'ennemi,  fit  un 
bataillon  de  pandours  prisonnier 
et  120  Juissards.  Lorsque  le  géné- 
ral Marceau  fut  tué  à  AUenkir- 
chen,  il  servit  avec  son  régiment  ;\ 
la  division  du  général  Grenier  , 
passa  le  Khin  à  la  tête  de  cette 
division,  et,  chargeant  les  redou- 
tes en  avantdeNeuwied,il  lit 2,000 
prisonniers.  Il  servit  également  à 
l'avant-garde  du  généra!  Souham, 
au  commencement  de  l'an  7  ,  en 
Suisse.  Son  régiment  n'eut  au- 
cune occasion  de  se  distinguer 
à  celle  époque  ;  le  colonel  Trel- 
liard fut  rappelé  de  près  de  BH- 
le,  où  il  se  trouvait,  pour  al- 
ler, comme  général  de  brigade, 
occuper  le  commandement  de  la 
(Cavalerie  française  en  Hollande. 
H  prit  part  aux  dilTérens  combats 
qui  eurent  lieu  à  la  déroule  de 
l'armée    anglaise    près    d'Alque- 


TftE 


67 


mard  ;  il  fit  ensuite  partie  de  l'ar- 
mée gallo-balave,  commandée  par 
le  général  en  chef  Augereau,  et 
commanda  l'avant-garde  du  lieu- 
tenant-général Duhem.  Il  se  dis- 
tingua particulièrement  h  For- 
kem  ,  où  il  se  trouvait  à  l'aile 
gauche  de  l'armée,  combattit  tout 
le  jour,  en  avant  de  cette  ville, 
un  corps  autrichien,  numérique- 
ment beaucoup  plus  fort  que  celui 
qu'il  commandait,  contint  l'enne- 
mi par  des  manoeuvres  hardies,  et 
lui  opposa  la  plus  vive  résistance. 
Appelé  au  can)p  de  Boulogne  le 
21  frimaire  an  i5,  il  eut  le  com- 
mandement de  la  brigade  de  hus- 
sards de  la  division  du  général 
Bournier  ,  marcha  en  Allemagne  , 
à  Ulin  et  à  Austerlitz,  et  comman- 
dait ,  à  l'ouverture  de  la  campa- 
gne, l'avant-garde  des  grenadiers 
du  général  Oudinot  ;  il  se  distin- 
gua au  combat  de  Wertinguen,  à 
la  Irte  des  9*  et  10'  de  hussards, 
chargea  l'ennemi,  prit  trois  pièces 
d'artillerie,  et  fit  700  prisonniers. 
A  Braunau,  sur  le  Danube,  l'en- 
nemi, qui  occupait  encore  cette 
place,  avait  les  ponts;  le  général 
Trelliard  fil  mettre  pied  à  terre  à 
une  partie  de  ses  hussards,  s'em- 
para des  barques  que  l'eimcmi  a- 
vait  négligé  d'emmener  sur  l'autre 
rive,  passa  le  fleuve,  entra  dans 
la  ville,  et  en  chassa  l'ennemi.  A 
Vienne,  il  eut  ordre  du  grand-duc 
de  Berg  {voy.  iMurat)  de  seconder 
le  général  Bertrand,  aide-de-camp 
de  l'empereur,  qui  était  chargé 
de  s'emparer  des  ponts  sur  le  Da- 
nube. Il  se  porta  ensuite  avec  sa 
brigade  sur  Stoeraii  pour  éclairer 
le  corps  du  grand-duc  de  Berg, 
et  dirigeait  l'avant-garde;  il  fit 
deux  bataillons  prisonniers.  Char~ 


68 


TRE 


gé  d'occuper  Wichan,  ou  Murarie, 
po^lc  placé  en  poitile  en  avant  de 
l'armée,  le  général  Trelliard  reçnt 
pour  inslruclion  île  ne  point  aban- 
donner ce  poste  ,  n'importe  le 
nombre  des  assaillans.  Les  Russes 
vinrenl  attaquer  Wichau  le  jour 
même  où  il  avait  fait  pousser  des 
reconnaissances  sur  toutes  les  di- 
rections ,  sans  qu'on  eût  aucune 
nouvelle  de  l'ennemi  ;  il  se  croyait 
en  pleine  sécurité,  lorsqu'à  onze 
heures  du  soir  les  Russes  culbu- 
tèrent ses  postes  avancés,  et  en- 
trèrent pêle-mêle  dans  la  ville 
avec  eux.  Le  général  défend  de 
monter  h  cheval,  donne  l'ordre 
que  les  hussards  se  rassemblent 
de  suite  sur  la  place  avec  leur  ca- 
rabine ,  et  bientôt  il  chaise  l'en- 
nemi ;  mais  les  Russes  arrivent  en 
force  avec  de  l'artillerie,  et  après 
une  attaque  de  quatre  heures,  ils 
envoient  au  général  Trelliard  un 
parlementaire  lui  annoncer  que  la 
place  était  bloquée  par  un  corps 
considérable  ,  et  le  sommer  de  se 
rendre.  Le  général  s'y  refusa  , 
parvint  à  faire  connaître  sa  posi- 
tion au  grand-duc  deBerg,  qui 
était  à  i4  lieues,  et,  jusqu'à  l'arri- 
vée des  lorces  qui  le  firent  déblo- 
quer, il  se  défendit  avec  la  plus 
grande  intrépidité.  A  la  bataille 
d'Austeriilz  ,  il  partagea  avec  l'ar^ 
mée  la  gloire  de  cette  journée, 
fut  envoyé  le  soir  à  la  poursuite 
de  l'ennemi,  et  fit  grand  nombre 
de  prisonniers.  Dans  la  campagne 
de  Prusse,  en  1806,  il  eut  le 
commandement  de  la  divi.'^ion  de 
cavalerie  légère  attachée  à  l'avant- 
garde  du  5*  corps,  commandé  par 
le  maréchal  Lasne.  Le  10  octo- 
bre, appuyé  par  une  brigade  d'in- 
ianterie    de   la  division   Suchet, 


TRE 

commandée  par  le  général  Reille, 
il  chargea  l'ennemi  dans  son  mou- 
vement de  retraite  ,  le  culbuta  et 
le  poursuivit.  Le  résultat  de  cette 
brillante  charge  fut  G, 000  prison- 
niers, avec  trois  généraux,  trois 
drapeaux,  (;t  trente  pièces  d'artille- 
rie. C'est  à  cette  affaire  que  le  prin- 
ce Louis  de  Prusse,  qui  comman- 
dait ce  corps  ennemi,  fut  tué  dans 
la  charge  par  un  sous-ofïicier  de  la 
division  de  cavalerie  légère.  A  la 
bataille  d'Iéna,  le  général  Trel- 
liard, aveo  sa  division,  couvrait 
le  flanc  gauche  du  5'  corps;  il 
chargea  quatre  carrés  d'infanterie, 
fit  8,000  prisonniers,  prit  4  ^^r^" 
peaux,  2  généraux,  et  8  pièces 
d'artillerie.  Envoyé  à  la  poursuite 
du  corps  prussien  ,  commandé 
par  le  général  Bliicher,  qui  se  re- 
tirait sur  Lubeck,  il  atteignit  deux 
fois  son  arriére-garde,  <;t  lui  fit  bon 
nombre  de  prisonniers.  Arrivé  à 
Stettin,surrOder,le  maréchal  Las- 
nele  détacha  avec  sa  division  pour 
aller  à  la  poursuite  de  l'ennemi 
jusqu'à  la  Vistule.  Il  s'acquitta  de 
celte  mission  avec  un  plein  succès, 
fit  grand  nombre  de  prisonniers  , 
et  força  l'ennemi  à  passer  le  fleu- 
ve; il  traversa  la  Vistule,  toujours 
formant  l'avant-garde  du  maré- 
chal Lasne.  Au  combat  de  Pultusk, 
où  le  maréchal  et  le  5°  corps  firent 
des  prodiges  de  valeur,  le  général 
Trelliard  fut  grièvement  blessé  ; 
le  maréchal  lui  envoya  le  soir  un 
oflîcier  lui  dire  que  l'empereur 
l'avait  nommé  général  de  divi- 
sion ,  en  récompense  de  sa  bril- 
lante conduite  durant  cette  cam- 
pagne. Aussitôt  que  sa  blessure 
lui  permit  de  monter  à  cheval ,  il 
sollicita  auprès  de  l'empereur  la 
permission    de   retourner  à   l'ar- 


TRE 

mée.  Il  fut  envoyé  en  Espagne 
dans  les  premiers  jours  de  1808, 
où  il  fut  chargé  du  commande- 
ment de  la  province  de  Villoria  , 
passa  en  Castille,  et  y  fit  une 
^'ucrre  active  au  corps  espagnol  et 
aux  bandes  de  guérillas.  Appelé 
en  1809  à  la  grande- armée ,  en 
Allemagne  ,  il  ne  put  arriver  assez 
à  temps  j)o»ir  prendre  part  aux 
brillantes  actions  de  cette  cam- 
pagne. Renvoyé,  en  iSio,  en  Es- 
pagne, il  y  Cl  les  campagnes  de 
iSio,  1811,  1812  et  i8i5,  tant 
en  Espagne  qu'en  Portugal;  il 
commandait  en  Portugal  la  ré- 
serve de  cavalerie,  ?e  distingua 
avec  sa  division  à  Coïnibre,  et 
lorsque  l'armée  fit  sa  retraite.  Au 
retour  du  Portugal ,  il  fut  appelé 
à  Madrid  pour  commander  fa  ca- 
valerie légère  de  l'armée  du  cen- 
tre; envoyé  ensuite  dans  la  Mar- 
che, il  prit  le  commandement  de 
cette  province,  et  celui  de  la  4°  di- 
vision de  dragons.  Il  eut  à  com- 
battre les  troupes  espagnoles,  qui 
cherchèrent  à  s'en  emparer,  et  les 
corps  nombreux  de  guérilla'?  qui 
infestaient  celte  province.  Le  gé- 
néral Morillo,  avec  un  corps  d'in- 
fanterie de  5,000  hommes,  5oo 
chevaux,  et  5  pièces  d'artillerie, 
voulait  prendre  Almagro ,  ville 
au  centre  de  la  Manclie  ;  le  géné- 
ral Trelliard,  prévenu  de  la  mar- 
che du  général  espagnol,  part  à 
minuit  avec  3oo  chevaux ,  une 
pièce  d'artillerie  légère  et  arrive  à 
Almagro  ;\  la  pointe  du  jour,  au 
moment  où  le  général  Morillo  at- 
taquait les  faubourgs;  il  charge  de 
suite  en  flanc  sa  colonne,  en  lui 
envoyant  un  seul  coup  de  canon  ; 
met  en  fuite  In  cavalerie  et  l'infan- 
terie, fait  grand  nombre  de  pri- 


TRE 


«» 


sonnîcrs,  et  le  chasse  de  la  pro- 
vince. Lorsque  le  roi  Joseph  [voy. 
Bonaparte)  fit  sa  retraite  de  Ma- 
drid sur  Valence,  le  général  Trel- 
liard fut  chargé  de  couvrir  ce 
mouvement  avec  la  4'  division  de 
dragons  qu'il  commandait,  forte 
seulement  de  1,100  chevaux;  il 
attaqua  l'avant-garde  anglaise,  qui 
avait  i,5oo  chevaux,  5  batteries 
et  5  pièces  d'artillerie ,  se  diri- 
geant sur  Madrid  ;  il  cull)ularen- 
nemi  entre  les  villages  de  Macala- 
houda  et  la  Rosa,  lui  prilS  |)ièces 
d'artillerie,  200  chevaux,  tua  loo 
hommes,  et  en  mit  4')o  hors  de 
combat.  Cette  affaire  est  un  des 
plus  beaux  faits  d'armes  de  cava- 
lerie par  l'opiniâtreté  de  l'ennemi, 
qui  revint  trois  fois  à  la  charge 
dans  l'espérance  de  reprendre  son 
artillerie  :  ce  ne  fut  qu'à  la  der- 
nière qu'il  fut  enfoncé.  Cette  bril- 
lante action  assura  la  tranquillité, 
la  marche  du  roi  sur  Valence, 
et  celle  d'un  convoi  de  plus  de 
2,000  voitures,  la  plupart  rem- 
plies d'habitans  de  Madrid,  qui 
emmenaientavec  eux  letir  famille. 
Le  1"  janvier  1814  »  il  fnt  appelé 
de  l'armée  d'Espagne  à  la  grande- 
armée  en  Champagne  ,  avec  la  a" 
division  de  cavalerie  qu'il  com- 
mandait. En  avant  de  Nangis,  le 
I  5  février,  à  la  tête  de  sa  division, 
soutenue  par  le  corps  du  comte 
Gérard,  il  attaqua  et  culbuta  l'a- 
vant-garde russe,  lui  prit  i()  piè- 
ces de  canon,  fit  5, 000  prison- 
niers ,  et  la  poursuivit  jusque  sous 
Provins.  Le  24  du  même  mois, 
avec  la  1'  brigade  de  sa  division, 
il  attaqua  l'arrière-garde  autri- 
chienne, qui  se  retirait  de  la  Mai- 
son-Blanche sur  Bar-sur-Seine  , 
entama  celte  arrière  garde   à   lu 


:jo  Ti\E 

hauteur  de  !a  Maison-Hlancbc,  lui 
fit  1,200  prisonniers  d'infanterie, 
prit  un  drapeau  ,  poursuivit  la  ca- 
valerie pendant  cinq  lieues  ,  fit 
prisonniers  loo  canonniers  ou 
chevau-légcrs ,  tua  bon  nombre 
d'hommes  ,  et  en  mit  200  hors  de 
combat.  A  Arcis-sur-Aube,  il  sou- 
tint et  couvrit  la  retraite  du  corps 
commandé  par  le  maréchal  Ou- 
dinot,  et  quoique  l'ennemi  le  fou- 
droyât de  son  artillerie  et  du  fou 
de  son  infanlGrie  ,  il  fit  sa  retraite 
par  Echigni ,  et  par  sa  contenance 
et  sa  fermeté  empêcha  l'ennemi 
de  l'entamer.  Nommé  gouver- 
neur de  BelIe-Iie-en-Mer ,  au 
mois  de  juin  18145  il  a  été  mi;^  à 
la  retraite  le  1"  octobre  i8i5, 
après  55  ans  de  services.  Il  jouit 
aujourd'hui  (182.0),  dans  sa  fa- 
mille ,  de  l'estime  de  ses  conci- 
toyens. 

ÏRENCK  (Frédéric,  BARON  de), 
qu'une  persécution  sans  exemple 
et  une  mort  funeste  ont  rendu 
également  célèbre,  naquit,  le  16 
février  1726,  à  Kœnigsberg,  ca- 
pitale de  la  Prusse  orientale.  Il 
annonça,  dès  ses  jeunes  années,  un 
,  caractère  entreprenant  et  aventu- 
reux, et  eut  au  collège  iriême  , 
avec  deux  de  ses  camaradts,  deux 
affaires  d'honneur,  dont  il  sortit 
avec  avantage.  Admis  i  l'âge  de 
seize  ans  à  la  cour  du  grand  Fré- 
déric, en  qualité  de  cadet  dans  le 
régiment  de  ses  gardes,  il  parvint 
bientôt  à  la  plus  grande  faveur, 
et  le  roi  se  l'attacha  comme  aide- 
de-camp.  Berlin  réunissait  alors 
les  hommes  les  plus  célèbres  de 
l'Europe;  Voltaire,  Maupertuis, 
et  beaucoup  d'autre>  savans  ,  em- 
bellissaient cette  capitale;  le  jeune 
Trenck  était  l'objet  de  tous  les 


TRE 

égards  par  ses  qualités  brillantes  , 
par  les  grâces  de  son  eeprit ,  et 
peut  -  ôtre  aussi  par  les  distinc- 
tions dont  l'honorait  son  souve- 
rain. La  guerre,  qui  éclata  à  cette 
époque  entre  rAulriche  et  la 
Prus«e,  et  dans  laquelle  Trenck 
se  signala  par  une  grande  bra- 
voure, mit  le  comble  à  sa  faveur; 
il  fut  décoré  de  l'ordre  du  mérite. 
Une  intrigue  amoureuse  avec  une 
dame  du  plus  haut  rang  vint 
tout  à  coup  détruire  ses  espéran- 
ces de  gloire  et  de  fortune.  Punir 
celte  espèce  de  crime,  s'il  exis- 
tait réellement,  c'eût  été  le  révé- 
ler; on  l'accusa  d'ime  correspon- 
dance criminelle  avec  son  frère 
François,  chef  des  pandours  dans 
l'armée  autrichienne;  des  lettres 
interceptées,  ou  plutôt  supposées, 
convainquirent  tous  ceux  qui  n'é- 
taient pas  du  secret,  que  le  baron 
de  Trenck  avait  entretenu  des 
correspondances  avec  l'armée  en- 
nemie. Il  fut  arrêté  et  conduit  à 
la  citadelle  de  Glatz,  Au  bout  de 
cinq  mois,  il  forma  le  projet  de 
briser  ses  fers  ;  le  complot  fut  dé- 
couvert, et  une  seconde  tentative 
n'eut  pas  plus  de  succès.  Dès-lors 
il  dut  renoncer  à  tout  espoir  de 
grâce  ou  de  justice.  Néanmoins 
un  de  ses  camarades  ,  que  le  mal- 
heur n'avait  pas  rendu  infidèle  à 
l'amitié,  lui  facilita,  au  péril  de 
sa  vie  ,  les  moyens  de  s'échapper. 
Le  baron  de  Trenck  se  réfugia  à 
Vienne,  où  il  obtint  de  l'impéra- 
trice-reine  ,  à  la  sollicitation  de 
plusieurs  grands  seigneurs,  une 
compagnie  de  cavalerie  dans  le 
régiment  de  Cardoue,  cuirassiers. 
Il  fit  ensuite  un  voyage  de  trois 
mois  en  Russie,  auquel  on  sup- 
posa des  motifs  politiques  ;  il  eut 


TRE 

aussi  rimprudencft  d»;  s'arrêter  à 
Dnntzick,  pour  y  terminer,  avec 
5es  frères  et  ses  sœurs,  le  partage 
de  la  succession  de  leur  mère  , 
morte  en  cette  ville;  mais  déjà 
l'on  préparait  son  cachot  à  iMajr- 
debourg.  Un  de  ses  ennemis  ayant 
écrit  de  Vienne  au  roi  de  Prusse  , 
que  ïrenck  ne  faisait  le  voyage 
de  Danlzick  que  pour  trouver  le 
moyen  de  l'assassiner,  on  prit  tou- 
tes les  mesures  pour  l'arrêter,  et 
il  le  fut  au  moment  même  oi'i , 
instruit  du  sort  qui  l'attendait,  il 
s'embarquait  sur  un  vaisseau  sué- 
dois pour  retourner  en  Russie, 
lînfermé  d'abord  dan?  lu  prison 
de  DanJzick,  il  en  partit  birtitùt 
sous  l'escorte  de  trente  hussards, 
qui  le  conduisirent  à  Berlin,  d'où 
il  fut  transféré  ,  p.w  Spandau , 
dans  un  cachot  île  Slagdebourg; 
il  y  fut  chargé  de  chaînes  du  poids 
de  45  livres,  mais  dont,  par  une 
adresse  inouïe,  il  se  débarrassait 
ou  se  révélait  i"i  volonté,  trom- 
pant ainsi  la  surveillance  de  ses 
geôliers.  Quand  il  ne  s'occupait 
pas  ôe.i  moyens  de  recouvrer  sa 
liberté,  ce  qu'il  fit  à  plusieurs  re- 
prises, mais  toujours  infructueu- 
sement,  il  s'exeryait  à  un  genre 
d'industrie  qui  ajoutait  encore  à 
l'intérêt  qu'avaietit  fait  naître  ses 
malheurs  :  il  était  parvenu  à  graver 
sur  des  verres, avec  la  pointe  d'un 
rlonJ,  des  dessins  qui  faisaient 
l'admiration  des  hauts  personna- 
ges à  (pli  il  les  adressait.  Cepen- 
dant on  intercédait  toujours  en  sa 
fav«:ur,même  l'impératrice  Marie- 
Thérèse.  Le  roi  répondait  tou- 
jours :  a  Trenck  est  un  homme 
dangereux;  tant  que  je  *ivrai,  il 
lift  verra  pas  le  jour.  »  Néan- 
moins, le  24  décembre  1774»  F'*^- 


TRE 


7' 


dérick  ,  à  l'occasion  de  sa  fête , 
ordonna  que  le  baron  fût  mis  sur- 
le-champ  en  liberté,  avec  ordre 
de  ne  point  paraître  A  lu  cour,  ni 
même  à  Berlin.  L'intérêt  qu'il 
avait  inspiré  pendant  sa  captivi- 
té cessa  tout  à  coup  dès  qu'il  fut 
libre  ;  on  ne  se  souvint  plus  de 
lui  en  Autriche;  il  ne  put  même 
rentrer  dans  ses  biens,  dont  s'é- 
taient emparés  les  curateurs  qu'on 
lui  avait  donnés.  Il  fit  cependant 
nn  triariage  honorable,  et  alla  se 
fixer  à  Aix-la-Chapelle  ,  où  il  se 
livra  ,  pour  vivre,  à  des  opéra- 
tions de  commerce ,  qui  ne  lui 
réussirent  point  ;  il  se  trouvait 
dans  un  état  voisin  de  la  gêne, 
lorsque  la  révolution  française 
vint  lui  fourm'r  l'espoir  de  repa- 
raître avec  avantage  dans  le  mon- 
tlc.  II  arriva,  en  1790  ,  à  Paris, 
y  fut  accueilli  par  les  sociétés  po- 
pulaires ,  et  se  lia  particulière- 
nient  avec  Latude,  victime  com- 
me lui  du  pouvoir  arbitraire.  A 
répn(|ue  où  les  Prussiens  péné- 
trèrent en  France,  il  olVrit  «le  ras- 
sembler tous  les  Prussiens  mé- 
contens  de  leur  gouvernement, 
qui  se  trouvaient  en  France,  et 
(l'en  former  un  régiment  de  ca- 
valerie, qu'il  (^induirait  lui-même 
h  l'ennemi.  C'était  l'époque  des 
sonp(;ons  5  il  n'en  fut  pas  exempt, 
malgré  les  gages  qu'il  avait  don- 
nés à  la  liberté.  On  le  regarda 
comme  un  espion  de  la  Prusse  ; 
il  fut  arrêté  qiichjue  temps  après 
et  conduit  dans  les  prisons  d(! 
Saint-Lazare.  A  défaut  de  motifs 
réels  pour  le  mettre  en  jugement, 
on  l'engloba  dans  une  prt^tenduc 
conspiration  iït:^  pri-^ons,  et  il  fut 
condamné  à  mort  sous  ce  ridicule 
prétexte.   Avant  d'aller  nu   »up- 


72 


TRE 


plice,  il  écrivit  à  sa  femme  la  let- 
tre la  plus  touchante,  et  mourut 
avec  courage.  Ainsi  périt,  i\  l'âge 
de  70  ans,  victime  d'une  faction 
qui  se  disait  amie  de  la  liberté , 
celui  qui ,  toute  sa  vie,  avait  gémi 
gous  le  despotisme  royal. 

ITiÈSTAILLOUS  (  N.  ) ,  dit 
commimément  TaiiSTAiLLONS,  ou 
TRois-TRANcnANS,  cu  patois  lan- 
guedocien, fut  un  de  ces  monstres 
qui  déshonorèrent  par  leurs  cruau- 
tés le  parti  qu'ils  voulaient  servir, 
ets'effoi'cèrentdelerendreodieux. 
11  y  a  celte  différence  néanmoins 
que  les  hommes  du  parti  opposé 
firent  eux-mêmes  justice,  au  9 
thermidor,  de  tous  ceux  qui  a- 
vaient  abusé  de  l'anarchie  du  mo- 
ment pour  ordonner  ou  commet- 
tre des  assassinats  ultra -révolu- 
tionnaires ,  tandis  que  Trèstail- 
lous  et  ses  pareils,  qui  s'étaient 
rendus  fameux  à  force  de  crimes, 
au  mois  d'août  181 5,  à  Nîmes, 
pour  rendre  par  la  terreur  la  fac- 
tion ultra-royaliste,  maîtresse  des 
•élections  ,  trouvèrent  un  appui 
constant  dans  ceux  qui  les  avaient 
soudoyés  ,  et  échappèrent  pres- 
que tous  à  la  rigueur  des  lois. 
i\l.  de  Serre,  dont  le  témoignage 
peut  être  de  quelque  poids  sur 
cette  matière,  quoiqu'il  ait  tenu 
un  autre  langage  lorsqu'il  était 
garde-des-sceaux  en  1820,  s'ex- 
primait ainsi  sur Trèstaillous, dans 
le  comité  secret  de  la  chambre 
des  députés,  du  25  mars  1819  : 
o  Parlerai -je  ,  messieurs  ,  d'un 
homme  dont  j'ai  horreur  de  pro- 
noncer le  nom  ?  Trèsl aillons,  pré- 
venu de  crimes  affreux ,  devient 
l'objet  des  poursuites  du  minis- 
tère public.  L'autorité  judiciaire 
ne  veut  pas  qu'il  soit  jugé  dans  la 


TRI 

ville  même  théâtre  de  ses  cri- 
mes ,  tant  la  consternation  de»  ci- 
toyens, tant  la  terreur  qu'inspire 
le  prévenu  font  craindre  pour  la 
liberté  des  délibérations  de  la  jus- 
tice; il  est  envoyé  aux  assises  de 
Riom.  Le  croiriez  -  vous  ,  mes- 
sieurs, on  ne  peut  trouver  aucun 
témoin  qui  dépose  des  crimes  de 
Trèstaillous  (  commis  en  plein 
jour,  à  la  face  d'une  ville  entière), 
et  il  s'en  présente  cent  pour  at- 
tester son  innocence? »  En- 
hardi par  l'impunité,  il  a  conti- 
nué de  porter  le  sobriquet  atroce 
qu'il  s'était  lui-même  donné,  et 
de  se  montrer  partout  avec  au- 
dace an  milieu  des  populations 
auxquelles  Ses  fureurs  ont  imposé 
un  honteux  silence. 

TRINQUELAGUE  (  Chablbs- 
François  de  ) ,  chevalier  de  la  lé- 
gion-d'honneur, premier  prési- 
dent de  la  cour  royale  de  Mont- 
pellier, conseiller-d'état,  ex-mem- 
bre de  la  chambre  des  députés , 
est  né  le  29  décembre  1747»  à 
IJzès ,  département  du  Gard , 
et  fut  reçu  avocat  au  parlement 
de  Toulouse.  En  1776,  il  rem- 
porta le  prix  proposé  par  l'acadé- 
mie de  Nîmes,  pour  VEloge  de 
Fléclùer,  et,  en  1781,  il  succéda  à 
son  père,  avocat-syndic  d'Uaès. 
Membre  de  la  seconde  assemblée 
des  notables,  il  y  seconda  avec 
tant  de  zèle  les  vues  ministériel- 
les,  qu'il  en  reçut  la  récompense 
dans  les  lettres  de  noblesse  qui 
furent  accordées  à  son  père,  et 
dans  l'expectative  pour  lui-même 
de  la  place  de  syndic-général  de 
la  province  de  Languedoc.  La  ré- 
volution ne  tarda  pas  à  anéantir 
les  litres  honorifiques  et  les  espé- 
rances de  l'emploi  lucratif.  II  n'est 


TRI 

pa?  bien  constant  que  M.  Trin- 
quelague  se  soit  prononcé  pour 
la  révolution;  toutefois,  comme 
alors  on  n'accordait  guère  d'em- 
ploi qu'aux  hommes  qui  don- 
naient des  garanties  de  leur  pa- 
triotisme, on  dut  croire  que  M. 
Trinquelague  avait  mérité  de  de- 
venir maire  de  la  commune  où  il 
était  né,  puis  président  de  dis- 
trict. Ce  fonctionnaire  municipal 
jugea  prudent  de  se  cacher  en 
1793 ,  et  de  ne  reparaître  qu'après 
cette  fatale  époque  en  son  an- 
cienne qualité  d'avocat,  Aj>proba- 
teur  du  gouvernement  impérial, 
puisqu'il  consentit  à  devenir  sa 
créature ,  il  fut  successivement 
nommé,  11  l'époque  de  la  réorga- 
nisation des  tribunaux,  premier 
avocat -général  à  la  cour  impé- 
riale de  Nîmes ,  et  en  181a,  can- 
didat au  corp^-législatif,  où  néan- 
moins il  ne  fut  point  appelé.  Le 
gouvernement  royal  ne  l'employa 
pas  pendant  la  première  restao- 
ralion  ,  en  i8i4  *  ni  Napoléon 
pendant  les  cent  Jours,  on  181 5. 
La  seconde  restauration  le  remit 
en  évidence,  et  dès  le  mois  d'août 
i8i5,  il  prit  séance  à  la  chambre 
des  députés  ^  en  vertu  de  son  élec- 
tion par  le  département  du  Gard. 
Au  mois  de  décembre  suivant,  il 
fit  partie  de  la  commissior)  char- 
gée de  l'examen  du  projet  de  loi 
sur  le  rétablissement  des  cours 
prévôtales,  en  faveur  desquelles 
il  se  prononça  fortement.  Le  2g 
du  même  mois,  rapporteur  d'une 
commission  centrale,  il  demanda 
une  loi  «  qui  ordonnât  que  le  21 
janvier  de  chaque  année  ,  il  y  eût 
dans  le  royaume  un  deuil  géné- 
ral ;  qu'il  fût  fait  le  même  jour 
un  service  dans  chaque  église  de 


TRI 


7^ 


France  ,  et  qu'en  expiation  du 
crime  de  ce  malheureux  jour,  il 
fût  élevé,  sur  une  place  de  la  ca- 
pitale, aux  frais  de  la  nation  ,  une 
statue  à  Louis  XVI,  avec  ces  mots 
graves  sur  le  piédestal  :  La  France 
libre  à  Louis  XVI.  ->  M-  Trin- 
quelague réclama,  dans  la  séance 
du  7  janvier  1816,  non  sans  ex- 
cilor  des  murmures  parmi  les 
membres  de  la  minorité,  un  chan- 
gement au  projet  de  loi  dit  d'flm-  • 
nisde,  comme  exceptant  de  cette 
loi  (c'est  la  loi  du  12  janvier 
1816,  rendue  contre  les  conven- 
tionnels dits  volans)  les  crimes  et 
les  délits  envers  les  particuliers , 
et  proposa  de  la  rédiger  ainsi: 
«  L'amnistie  s'étend  aux  crimes 
et  délits  commis  envers  les  parti- 
culiers jusqu'à  ce  jour,  et  qui  ont 
été  la  suite  ou  de  l'entreprise  de 
l'usurpateur,  ou  de  la  réaction  à 
laquelle  a  donné  lieu  son  entre- 
prise. On  pourrait,  ajouta -t- il, 
en  abuser  contre  les  royalistes  du 
Midi,  qui,  exaspérés  parles  atten- 
tats de  leurs  ennemis,  ont  pu  se 
livrer  à  leur  tour  à  quelques  ex- 
cès. Faudra-t-il  que  dans  ces  dé- 
partemens  fidèles,  les  cachots  res- 
tent encore  ouverts  pour  recevoir 
de  nouvelles  victimes?  »  Au  mois 
de  lévrier  suivant,  il  fut  nommé 
membre  de  la  commission  chargée 
d'examiner  la  proposition  de  M. 
de  Ronald,  ayant  pour  objetlasup- 
pression  du  divorce;  il  prononça, 
a  cette  occasion,  dans  le  comité  se- 
cret, un  discours,  d'où  l'on  a  ex- 
trait le  passage  suivant  :  «  C'est 
aux  époques  les  plus  désastreuses 
de  notre  révolution,  que  l'esprit 
de  désordre  et  de  licence  qui  en 
dirigeait  et  précipitait  les  mouve- 
niens,  amena  le  divorce  au  milieu 


74 


TRI 


de  nous.  La  loi  qui  consacre  ce 
granil  attentat  est  du  20  septem- 
bre 179a,  c'est-à-dire,  donze 
jours  après  le  massacre  des  \)vîi- 
tres,  (les  pontifes,  et  d'une  foule 
innombrable  de  victimes  immo- 
lées i\  la  haine  de  la  religion,  de 
la  royauté,  de  nos  lois  antiques, 
immolées  dans  le  sein  de  la  capi- 
tale,  sous  les  yeux  des  autorités, 
sans  obstacle  avant  le  crime,  sans 
poursuite  après  sa  consomma- 
tion. »  Ce  n'était  pas  dans  ces 
deux  occasions,  et  surtout  dans 
celle  de  la  loi  d'amnistie,  rappe- 
ler tout-à-fait  la  maxime  royale 
union  et  oubli;  mais  M.  Trinque- 
lague  ,  conune  beaucoup  il'au- 
tres,  pensait  sans  doute  que  c'é- 
tait servir  le  monarque  que  d'al- 
ler au-delà  de  sa  volonté.  Dans  le 
même  mois,  il  fut  nommé  procu- 
reur-général de  la  cour  royale  de 
Pau  ,  et  sous-secrétaire-d'état  au 
département  de  la  justice.  L'or- 
donnance royale  du  5  septembre 
1816,  mit  un  terme  aux  travaux 
de  la  chambre  dite  introuvable. 
M.  Trinquelague  fut  réélu  à  la 
nouvelle  chambre  par  le  départe- 
ment du  Gard,  «où,  disent  les 
auteurs  d'une  biographie  étran- 
gère, l'esprit  qui  avait  dicté  l'or- 
donnance n'avait  point  pénétré.  » 
Dans  la  nouvelle  chambre,  il  vota 
constamment,  ainsi  qu'il  l'avait 
fait  dans  la  première  ,  avec  le 
parti  des  exclusifs,  qui  toutefois 
n'était  plus  en  majorité.  Il  obtint, 
au  mois  de  décembre  de  la  même 
année,  de  nouvelles  lettres  de 
noblesse  ,  le?  ancienne-!  n'ayant 
pu  être  enregistrées,  en  17^9,  à 
cause  de  la  suppression  des  j)ar- 
lemens.  Le  ministère  changea  par 
suite  de  la  célèbre  ordonnance  du 


TRI 

5  septembre,  et  M.  Trinquelague 
perdit,  en  janvier  1817,  sa  place 
de  sous-secrélaire-d'état.  11  passa 
au  conseil-d'éfat  en  service  ordi- 
naire. L'un  des  membres  de  la 
série  qui  sortireal  de  la  chan)bre 
à  la  fin  de  la  session  de  itîi8,  fl 
ne  fut  pas  réélu  aux  sessions  sui- 
vantes; il  avait  été  nommé,  le  19 
avril  1817,  conseiller  à  la  cour 
de  cassation,  et  conseiller  -  d'é- 
tat en  service  extraordinaire.  M. 
de  Trinquelague  est  aujourd'hui 
(1825)  premi-er  président  de  la 
cour  royale  de  Montpellier. 

TRIF  (  Af.BERT-D0MIMQtJB),   flU- 

cien  colonel  au  service  de  France, 
depuis  lieutenant-général  au  ser- 
vice du  royamne  des  Pays-Bas, 
officier  de  la  légion-d'honneur  et 
commandeur  de  l'ordre  militaire 
de  Guillaume,  naquit  à  Grœnin- 
gue,  en  17^6.  Se  destinant  dès  sa 
jeunesse  à  la  carrière  des  armes, 
il  entra  à  l'âge  de  i5  ans,  comme 
cadet,  dans  un  régiment  d'infan- 
terie, fut  nommé  enseigne  l'aimée 
suivante  (1792),  assista  au  siège 
de  Landrccies ,  et  fit,  avec  les 
trou{)es  hollandaises,  les  premiè- 
res campagnes  de  la  révolutii)n 
contre  les  Français.  A  près  le  chan- 
gement politique  qui  s'opéra  en 
son  pays  en  1795,  et  la  fuite  du 
stadhouderen  Angletene,  l'armée 
hollandaise  reçut  une  destination 
nouvelle;  au  lieu  de  combattre 
les  Français,  elle  devint  leur  auxi- 
liaire. M.  Trip,  nommé  lieutenant 
en  premier,  servit  avec  distinc- 
tion dans  la  Nord-Hollande,  en 
1799,  et  eut  part  à  tous  les  com- 
bats qui  se  livrèrent  contre  les 
Russes  et  les  Anglais,  débarqués 
sur  les  côtes  de  cette  province. 
L'entreprise  desassailhms  leur  de- 


TRI 

Tint,  comme  on  sait,  funeste  ;  il 
n'était  pas  facile  à  cette  époque  de; 
violer  impunément  le  territoire 
de  la  France  ou  de  ses  alliés.  En 
>8o6,  le  roi  Louis  {voy.  Bona- 
parte-Josepd)  nomma  iM.  Trip 
capitaine  dans  sa  nouvelle  gar- 
de, et  peu  de  temps  après,  chef 
d'escadron  des  grenadiers  à  che- 
val. Deux  ans  plus  tard,  il  ob- 
tint le  gradé  de  colonel  avec  le 
commandement  du  2*  régiment 
de  cuirassiers  ,  et  fut  eu  outre 
nommé  écuycr  du  roi.  Il  marcha, 
vers  la  fin  de  i8o8,  contre  le  chef 
de  partisan  prussien,  Schill,  qui 
faisait  alors  la  guerre  pour  son 
propre  compte  ,  et  contribua  à  sa 
défaite  dans  la  ville  de  Stralsund. 
Le  roi  de  Danemarck  envoya ,  ;\ 
cette  occasion,  la  croix  de  l'ordre 
de  Danebrog  au  colonel  Trip. 
Nommé,  eu  1810,  comman- 
deur de  l'ordre  de  l'Union ,  dont 
il  avait  été  un  des  premiers  che- 
valiers lors  de  son  institution,  il 
accompagna ,  en  sa  qualité  de 
grand -cuyer,  le  roi  Louis  lors 
du  dernier  voyage  que  ce  prince 
fil  i\  Paris,  peu  de  ten)ps  avant 
son  abdication  volontaire  d'une 
royauté  qu'on  lui  avait  imposée 
malgré  lui.  La  Hollande,  bien- 
tôt incorporée  à  l'empire  fran- 
çais, le  colonel  Trip  suivit  le 
sort  de  ses  frères  d'armes  batavcs, 
et  passa  dans  les  rangs  des  guer- 
riers français.  Son  beau  régiment 
devint  le  14*  de  cuirassiers,  et  il 
continua  à  se  distinguer  à  la  lête 
de  ce  corps  ;  il  (il  avec  lui  la  guerre 
d'Allemagne  et  la  campagne  de 
Uussie ,  fut  grièvement  blessé  au 
passage  de  la  Bérésina  lors  de  la 
retraite  de  l'armée  française,  et 
fut  nonimé  oflicier  de  la  lé-nnu- 


TRO 


75 


d'honneur  après  la  bataille  de 
Dresde,  en  i8i5,  dans  laquelle 
il  venait  encore  de  déployer  la 
plus  brillante  valeur.  A  la  suite 
des  événemens  de  cette  époque, 
lorsqiie  la  Hollande  eut  recouvré 
son  indépendance,  le  colonel 
Trip  s'etnpressa  de  rentrer  dans 
sa  pairie  ,  et  offrit  ses  services  an 
prince  d'Orange,  qui  en  était  de- 
venu le  souverain.  C<^lui-ci,  ren- 
dant justice  aux  talens  militaires 
d'un  olFicier  aussi  distingué,  le 
nomma  d'abord  son  aide-de-camp 
et  lui  conféra,  eu  181  5,  le  grade 
de  général-major.  11  commanda 
en  cette  qualité  un  corps  de  ca- 
valerie belge  et  batave  pendant  la 
campagne  de  la  même  année,  et 
se  distingua  à  la  bataille  de  Wa- 
terloo. En  181O,  il  fut  nommé 
lieutenant-général  et  chargé  d'une 
mission  extraordinaire  en  Russie, 
où  il  porta  à  l'empereur  Alexan- 
dre la  nouvelle  de  la  naissance  du 
premier  fils  de  l'héritier  de  la  cou- 
ronne du  royaume  des  Pays-Bas, 
beau-frère  de  l'empereur.  Le  gé- 
néral Trip  fut  décoré,  à  cette  oc- 
casion, de  la  grand'croix  de  l'or- 
dre de  Sainte-Anne.  A  son  retour, 
il  eut  1«  commandement  en  chef 
de  la  cavalerie,  et  en  1820,  celui 
de  la  première  division  territoriale 
du  royaume  des  Pays-Bas .  dont 
le  quartier-général  est  à  Utrechl. 
TKOISOEUFS  (  Antoine -Am- 
buoise),  ex-législateur,  né  ;\  Pa- 
risen  ij^^o,  s'était  origiuiiireuM'nt 
destiné  au  barreau,  et  était  avocat 
à  Paris  lors  de  la  suppression  des 
parlemens.  Après  avoir  servi  d'a- 
bord dans  les  rangs  de  l'armée,  où 
l'a  valent  appelé  les  lois  du  temps, 
il  eut  bientôt  à  remplir  des  fttnc- 
lioiis  importantes  auprès  des  ar- 


^6  TRO 

niées  du  Nord  et  de  Sambro-et- 
Meuse,  et  il  fut,  en  même  temps, 
chargé  de  Ja  régie  des  domaines 
à  Bruxelles,  jusqu'à  ce  que  l'ad- 
minisiration  française  vînt  en 
prendre  possession.  Nommé  de- 
puis secrétaire  d'une  des  grandes 
administrations  locales,  chargées 
de  façonner  les  Belges  au  joug 
des  lois  et  des  institutions  fran- 
çaises, il  fui  successivement,  lors 
de  la  réunion  de  la  Belgique  à  la 
France,  administrateur  et  secré- 
taire-général du  déparlement  de 
l'Escaut.  En  1808,  il  fut  élu,  par 
ce  même  déparlement,  membre 
du  conseil  des  cinq-cents.  Dans  le 
cours  de  sa  carrière  administra- 
tive, qui  cessa  en  1810,  il  parut 
différentes  fois  à  la  tribune ,  soit 
pour  faire  des  rapports,  soit  pour 
prendre  part  aux  discussions,  ou 
pour  célébrer  lu  gloire  de  nos  ar- 
mées. Appelé,  dans  la  même  an- 
née, aux  fonctions  de  juge  au  tri- 
bunal civil  séant  àGand,  il  renon- 
ça à  la  magistrature  en  i8iq,  et 
revint  à  Paris,  où,  depuis  18 13, 
il  est  avocat  à  la  cour  royale. 

TBOMELIN  (  Jean  -  JACQrES, 
COMTE  de),  né  en  Bretagne,  élevé 
à  l'école  militaire  de  Vendôme  , 
était  sous-lieutenant  au  régiment 
de  Limousin  en  1788;  il  quitta 
la  France  en  1791,  et  fit  la  cam- 
pagne des  princes.  Ayant  suivi  le 
prince  Léon,  depuis  duc  de  Ro- 
han,  à  Quiberon,  il  fut  après  cette 
expédition,  chargé  par  le  comte 
d'Artois,  à  diverses  reprises,  de 
plusieurs  missions  périlleuses  en 
Normandie,  et  se  trouvait  à  bord 
de  la  frégate  commandée  par  sir 
Sidney-Smith,  qui  fut  prise  de- 
vant le  Havre.  Dans  ce  moment 
critique,    sir  Sidney,  forcé  d'a- 


TRO 

mener  son  pavillon ,  eut ,  a»i  fort  du 
péril, la  présence  d'espritd'engager 
tout  son  équipage  à  celer  que  le 
comte  deTroinelin  fût  un  émigré 
français,  et  ce  terrible  secret  fut 
Éfi  bien  gardé,  que  conduit  à  Pa- 
ris, il  resta  18  mois  renfermé  au 
Temple  sous  un  nom  supposé; 
étant  totalement  inconnu,  il  fut 
assez  adroit  pour  obtenir  du  di- 
rectoire l'ordre  d'être  reconduit 
en  Angleterre,  où  il  mit  tout  en 
œuvre  pour  délivrer  ses  compa- 
gnons de  captivité.  Ce  fut  dans 
cette  intention  qu'il  revint  en  se- 
cret à  Paris,  et  que,  réunissant 
ses  efforts  à  ceux  de  quelques 
hommes  dévoués  ,  il  réussit  à 
procurer  l'évasion  de  sir  Sidney, 
et  à  favoriser  son  arrivée  en  An- 
gleterre. Nommé  chevalier  de 
Saint-Louispar  S.  A.  U.  Monsieur, 
en  octobre  1798,  il  fut  quelques 
mois  après  arrêté  à  Caen  ,  et  par- 
vint de  nouveau  à  s'échapper. 
Contraint  de  s'éloigner,  il  suivit 
sir  Sidney  en  Turquie,  et  succé- 
da à  Philipeaux,  après  le  siège  de 
Saint- Jean -d'Acre,  auprès  du 
grand-visir,  et  plus  lard,  près  du 
capitan  -  pacha.  Il  fit  avec  eux, 
contre  les  Français,  comme  lieu- 
tenant -  colonel ,  les  campagnes 
de  Syrie  et  d'Egypte.  Il  rentra 
dans  sa  patrie  au  commencement 
de  1802,  et  obtint  sa  radiation  de 
la  liste  des  émigrés;  à  cette  époque 
de  calme  et  de  pacification,  il  se  re- 
lira à  la  campagne,  et  depuis  long- 
temps il  vivait  tranquille  à  iMor- 
laix,  lorsque  son  nom,  prononcé 
à  un  espion  de  police  par  Spencer 
Smith,  fut  cause  de  son  arresta- 
tion, et,  par  suite,  de  la  nouvelle 
carrière  qu'il  a  parcourue.  Con- 
duit d'abord  à  Paris,  il  resta  six 


(  J'Y >///"// r/  / 


Jliflant . 


Fix'iin/  t/et .cf  tfculf 


TRO 

mois  en  prison,  et  n'en  sortit  que 
pour  entrer  au  service,  en  qualité 
de  capitaine,  au  1 12' régiment. 
Ileçu  dans  l'armée  avec  une  par- 
faite bienveillance,  employé  bien- 
tôt à  l'état-major  de  l'armée  de 
Dalmalie  ,  particulièrement  re- 
marqué du  duo  de  Raguse,  qui 
le  chargea  de  quelques  missions 
difficiles,  i!  gagna  le  grade  de 
chef  de  bataillon  sur  le  champ  de 
bataille,  et  rendit  des  services 
réels  au  brillant  passage  de  la 
Croatie,  par  l'armée  de  Dalmatie, 
en  1809.  Après  la  paix  do  Vienne, 
et  rillyrieétant  cédée  h  la  France, 
il  fut  nommé  colonel  du  6*  régi- 
ment territorial  croate;  il  y  résida 
plusieurs  années.  Employé,  en 
i8i3,  à  l'armée  d'Allemagne, 
comme  chef  d'élat-major  d'u- 
ne division,  il  fut  nommé  officier 
de  la  légion- d'honneur  après  la 
bataille  de  Baulzen,  et  général  de 
brigade  après  celle  de  Léipsick. 
Il  se  trouva  renfermé,  en  i8i4» 
dans  la  place  de  Mayence  comme 
chef  d'état-major.  A  la  première 
restauration,  il  fut  placé  par  le 
comte  d'Artois,  major  à  la  suite 
des  grenadiers  royaux  à  Metz, 
etquiltace  corps,  le  iGmars  i8i5, 
pour  rentrer  à  Metz  avec  le  maré- 
chal Oudinot,  qui  le  24  l'en- 
voya à  Paris.  Le  11  juin,  le  ma- 
réchal-de-camp Tromelin  reçut 
des  lettres  de  services  pour  être 
employé  au  6"  corps  d'armée  ; 
aussi  commandait-il  une  brigade  à 
AValerloo,  qui,  sous  les  yeux  du 
comte  (le  Lobau  ,  combattit  l'une 
des  d(;rnières  à  Walerluo  ;  mais 
proMiptement  de  retour  ù  Paris  , 
le  général  Tromelin  fut  chargé, 
par  le  président  du  gouvernement 
provisoire,  de  diverses  négocia- 


TRO 


77 


tions  près  du  duc  de  Welling- 
ton. A  la  deuxième  restaura- 
tion, et  depuis  1816,  il  a  été 
employé  comme  inspecteur  d'in- 
fanterie ,  et  chargé  de  l'orga- 
nisation des  troupes  en  1820. 
On  peut  affirmer  qu'il  a  porté 
dans  l'exercice  de  ses  fonctions 
beaucoup  de  justice  et  d'impar- 
tialité. Il  a  prouvé  qu'il  ne  reniait 
point  d'avoir  été  sur  de  glorieux 
champs  de  batailles,  et  surtout 
qu'il  était  toujours  reconnaissant 
de  l'accueil  qu'il  avait  reçu,  en 
180G,  lors  de  son  apparition  dans 
les  rangs  de  l'ancienne  armée.  Il 
a  fait  la  dernière  campagne  d'Es- 
pagne, en  Catalogne  (en  1825),  et 
s'est  distingué  par  une  belle  con- 
duite sous  les  ordres  du  maréchal 
Moncey. 

TRONCHET  (François-Denis), 
membre  du  sénat-conservateur, 
officier  de  la  légion-d'honneur, 
ex-membre  de  plusieurs  assem- 
blées législatives ,  ancien  avocat 
au  parlement  de  Paris,  bûtonnier 
de  cet  ordre,  et  président  de  la 
cour  de  cassation,  naquit  à  Paris 
en  172G.  Issu  d'une  famille  esti- 
mée dans  la  magistrature  ,  il  fut 
destiné  i'i  suivre  la  carrière  du 
barreau,  et  son  penchant  répon- 
dit au  vœu  de  son  père.  La  fai- 
blesse de  son  organe  ne  lui  permit 
pas  de  selivrer  loutentier  A  l'exer- 
cice de  l.i  parole,  et  bientôt  il  fut 
forcé  de  s'attacher  exclusivement 
au  travail  du  cabinet,  moins  bril- 
lant, moins  prompt  i\  donner  la 
renommée,  mais  {)lus  favorable 
au  jurisconsultequi  veut  posséder 
à  fond  la  science  des  lois.  Profond 
dans  cette  science,  droit,  vrai,  il 
jouissait  d'une  haute  réputation, 
et  était  regardé  comme  l'une  des 


;«  TRO 

lumières  du  b.irrciiii  lorsque  la 
révolution  éclata  t  il  en  adopta 
avec  sagesse  les  principes  ,  et,  en 
1789,  il  fut  nounné  député  aux 
él;its-(^énéraux.  Il  s'y  fit  remar- 
quer par  la  p.irt  active  qu'il  prit 
au  travail  des  comités.  «  Vingt  lois, 
dit  M.  Lavallce.  dans  une  notice 
sur  cet  honorable  citoyen  ,  portè- 
rent l'cmpreinlc  de  ses  lumières 
et  de  sa  prévoyance.  »  Il  était 
président  de  l'assemblée  consti- 
tuante lorsque  Mirabeau  mourut. 
«  Tronchet  ,  président,  notifia 
celte  perte  à  l'assemblée.  On  crut 
entendre  la  sagesse  annoncer  aux 
hommes  la  perte  du  génie.  »  A  la 
fin  de  la  session  de  l'assemblée 
constituante,  il  reprit  l'exercice 
de  sa  profession.  Louis  XVI,  mis 
en  jugement  par  la  convention 
nationale,  choisit  Tronchet  pour 
son  défenseur  {voy.  De  Sèze.  ) 
Tronchet  accepta  ce  glorieux  man- 
dat. La  funeste  destinée  du  mo- 
narque devait  faire  évanouir  la 
plus  belle  défense.  Echappé  com- 
me par  miracle  à  l'affreux  régime 
de  la  terreur,  il  fut  nommé  ,  au 
mois  de  septembre  1795,  par  le 
département  de  Seine-et-Oise  , 
membre  du  conseil  des  anciens. 
Il  en  faisait  encore  partie  lors  de  la 
révolution  du  18  brumaire  an  8 
(  9  novembre  1799.  )  Le  premier 
consul  Bonaparte  l'honora  de  son 
amitié,  et  ne  laissa  point  échapper 
l'occasion  de  rendre  ses  services 
utiles  à  la  patrie.  «  Président  du 
tribunal  de  cassation  ,  l'un  des  ré- 
dacteurs du  Code  civil,  il  ne  res- 
tait plus  à  Tronchet  d'autre  gloire 
■!i  recueillir,  que  de  voir  le  voeu 
unanime  du  tribunat  et  du  corps- 
législalif  le  porter  au  sénat.  »  Il 
en  fit  partie  jusqu'à  l'époque  de 


TRO 

sa  mort,  arrivée  le  lo  mars  180G. 
Il  fut  enterré  avec  pompe  dans 
l'église  de  Sainte-Geneviève  (le 
Panthéon  français.)  M.  François 
de  NcuchAleau  ,  président  du  sé- 
nat-conservateur, prononça  l'o- 
raison fimébre  de  Tronchet.  <•  La 
patrie,  dit  M.  La  vallée,  rendit  à  sa 
dépouille  mortelle  des  honneurs 
commandés  par  leshautes  dignités 
qu'ilavaitoccupées;  mais  l'estime 
publique  le  disputa  auxconvenan- 
ces,  et  dans  celle  pompe  funèbre,  il 
sembla  que  le  sentiment  eût  tout 
ordonné,  et  que  l'étiquette  n'eût 
aucun  droit.  L'éloquence  ap- 
porta de  riches  tributs  sur  la  tom- 
be de  l'homme  qui  l'avait  si  bien 
servie  par  ses  écrits;  et,  toutes 
les  fois  que  la  France  se  rappelle- 
ra les  vertus  elles  talens  de  Tron- 
chet, elle  se  souviendra  avec 
quelle  dignité  ,  quelle  précision, 
quelle  élégance  oratoire,  quel  res- 
pect pour  la  vérité,  M.  de  la  Malle 
a  célébré  ce  célèbre  juri^^consuUe. 
Il  appartenait  à  M.  de  la  Malle  de 
remplir  ce  devoir.  On  doit  hono- 
rer la  mémoire  de  celui  dont  on 
hérite  à  tant  d'égards,  p  Tronchet 
se  délassait  de  ses  travaux,  com- 
me magistrat,  en  cultivant  la  lit- 
térature ,  et  même  la  poésie.  Il 
a  laissé,  en  portefeuille,  une  tra- 
duction de  l'Histoire  de  Charles- 
Quint,  par  Robertsou,  un  Abré- 
gé de  celle  d'Angleterre,  par  Hu- 
me et  par  Barrow,  et  un  Tableau 
de  l'établissement  du  Mahométis- 
me  considéré  comme  religion , 
comme  institution  civile  et  com- 
me gouvernement  politique  :  «  Et 
ce  qui  est  plus  admirable  encore, 
dit  M.  de  la  Malle,  c'est  qu'après 
avoir  fait  toutes  ces  choses,  il  les 
tint  secrètes,  ne  voulut  point  s'en 


TRO 

glorifier,  et  ne  consentit  janinis  à 
en  rien  publier;  portant  sans  doute 
le  sentiment  religieux  des  conve- 
nances, jusqu'à  penser  qu'il  serait 
lîors  de  son  oaraclère,  de  «a  pro- 
fession ou  de  ses  fonctions,  de  se 
produire  comme  auteur  d'ouvra- 
ges étrangers  h  son  état  ;  et  la  mo- 
destie, jusqu'à  croire  que  ses  ou- 
vrages ne  méritaient  pas  qii'on 
les  rendît  publics.  »  Une  traiicdie 
de  Caton  d'Utique,  des  traduc- 
tions en  vers  de  quelques  fragmens 
de  l'Ariosle,  de  Millon,  de  Thom- 
pson ,  de  l'riur,  attestent  que  les 
muses  lui  furent  chères.  M.  La- 
vallée  termine  ainsi  l'éloge  de 
Trunchet  :  <>  Ses  manières  se  res- 
sentaient de  l'austérité  de  ses 
mœurs.  II  faut  le  dire,  il  n'eut 
point  cetle  amabilité  prévenante 
qui  distingue  le  Français;  fnais  nul 
homme  ne  fut  plus  essentiel  dans 
le  commerce  de  la  vie.  I!  mérita 
d'avoir  beaucoup  d'amis;  il  les 
chérit  constamment,  ne  les  cares- 
sa jamais,  et  n'eu  perdit  aucun. 
Tout  ce  qui  portait  le  litre  de  de- 
voir était  sacré  pour  lui;  il  quit- 
tait tout  pour  remplir  ceux  que 
commandent  et  la  vie  privée  et 
la  vie  politique.  II  serait  diflicile 
de  citer  un  meilleur  fils,  un  meil- 
leur parent,  un  meilleur  citoyen, 
un  jurisconsulte  plus  sédentaire  , 
un  législateur  plus  laborieux,  un 
magistral  plus  infatigable.  »  Napo- 
léon, au  rapport  de  M.  Las  (hises 
{voy.  sesMém.  tom.  III,pag.  a84) 
jugeait  ainsi  cet  illustre  citoyen  : 
"  Tronchet,  dil-il,  était  l'âme  du 
conseil-d'élat  ;  il  avait  un  esprit 
éminemment  profond  et  juste  ; 
mais  il  .«autait  par-dessus  les  évé- 
ncmens,  et  ne  savait  pns  se  dé- 
fendre. » 


TRO 


79 


TRONCHON  (CoARLEs) ,  pro- 
priétaire-cultivateur, chevalier  de 
la  légiun-d'honneur,  membre  de 
l'assemblée  législative  ,  de  la 
chambre  des  représentans  et  de  la 
chambre  des  députés  ,  habitait  le 
département  de  l'Oise,  où  sont 
situées  ses  propriétés,  lorsque  lu 
révolution  éclata.  La  disette  des 
blés  s'élant  fait  sentir  dans  la  ville 
de  Meaux  en  1 78g,  M.  Tronchon  , 
que  ses  travaux  agricoles  avaient 
fait  connaître  de  ses  concitoyens, 
vint  à  leur  secours,  non-seule- 
ment par  tous  les  sacrifices  qui 
dépendaient  (le  sa  propre  fortune, 
mais  encore  par  son  crédit,  et  ijs 
lui  durent  les  approvisionnemcns 
qui  leur  étaient  nécessaires.  La 
ville  de  Meaux,  reconnaissante, 
lui  vola,  et  fit  frapper  en  sou 
honneur  une  médaille  d'or  : 
hommage  civi((ue  peu  com-' 
mim  et  bien  flatteur.  Par  suite 
de  la  nouvelle  organisation  muni- 
cipale, à  celle  époque,  il  devint 
membre  du  conseil-général  du 
déparlement  de  l'Oise,  qui  s'em- 
pressa de  l'élire,  au  mois  de  sep- 
tembre 1791  ,  dépulé  à  «l'assem- 
blée législative.  Il  y  fut  l'un  des 
plus  fermes  soutiens  de  la  consti- 
tution de  1791.  Secrétaire  (le  l'as- 
semblée au  10  août  179a,  il  re- 
(;ut  des  mains  d'un  grenadierdela 
garde  nationale  le  fils  de  Louis 
XVI ,  et  tint  le  royal  enfant  dans 
ses  bras  jusqu'au  moment  où  il 
put  le  rendre  à  son  auguste  mère. 
Il  ne  fit  poini  parlie  de  la  conven- 
tion nationale,  qui  succéda,  au 
mois  de  septembre  1792,  à  l'as- 
semblée législative,  et,  heureux 
de  se  livrer  aux  occupations  de 
la  vie  privée  ,  il  ne  Ijrigua  sous 
la  république,  sous  le  consulat, 


8o 


TRO 


soiis  l'empire,  ni  sons  le  gouver- 
nement royal,  en  1814  ,  aucune 
fonction  publique,  aucun  emploi. 
Ses  travaux  agricoles,  ses  conci- 
toyens, sa  famille,  furent  les  seuls 
objets  de  ses  pensées  et  de  ses 
soins.  Venihint  le%  cent  Jours ,  en 
18 15,  il  fut  nommé  à  la  chambre 
des  rcprésentans  ;  les  circonstan- 
ces étaient  graves,  il  accepta  sa 
mission.  Peu  après  la  seconde  res- 
tauration ,  en  1816,  on  lui  im- 
puta à  crime  ses  fonctions  mo- 
mentanées. Au-dessus  des  calom- 
nies et  des  persécutions,  il  triom- 
pha par  sa  seule  dignité,  et  reçut 
de  ses  concitoyens  ,  en  1817  , 
après  la  loi  du  5  février,  im  nou- 
veau mandat  qui  le  mit  à  même 
de  se  montrer  à  la  chambre  des 
députés  ce  qu'il  avait  toujours 
été,  un  des  plus  honorables  ci- 
toyens, un  des  plus  dignes  défen- 
seurs des  intérêts  populaires.  Pla- 
cé, par  ses  opinions  libérales,  au 
côté  gauche ,  il  vota,  dans  la  ses- 
sion de  18 19,  contre  les  deux  lois 
d'exception,  et  fut  de  la  minorité 
(les  95  membres)  qui  repoussa 
inutilement  le  nouveau  système 
électoral.  Réélu  immédiatement  à 
sa  sortie  de  la  chambre,  en  1822, 
il  a  été  frappé  par  la  dissolution  to- 
tale, en  1823,  et  n'a  pas  été  nom- 
mé ,  du  moins  jusqu'à  ce  jour 
(1825),  à  la  chambre  devenue  sep- 
tennale. 

TRONÇON  -  DU  -  COUDRAY 
(Guillaume-Alexandre),  naquit  à 
Reims  en  i^SS;  il  avait  fait  avec 
distinction  ses  études  à  Paris ,  et 
était  reçu  avocat  au  parlement  de 
celte  ville.  Sa  probité,  ses  talens 
oratoires  ,  et  les  causes  importan- 
tes dont'il  fut  chargé  ,  lui  avaient 
acquis  de  la  célébrité  avant  la  ré- 


TRO 

volulion  en  1789;  il  ne  prit  que 
peu  de  part  aux  événemens  poli- 
tiques de  cette  époque,  et  n'oc- 
cupa aucune  fonction  publique  ; 
mais  en  octobre  f^95,  lorsque 
la  faction  de  la  Montagne  eut 
résolu  de  faire  condamner  l'infor- 
tunée reine  Marie-Antoinette  par 
le  tribunal  révolutionnaire,  aucun 
avocat  n'ayant  osé  s'offrir  pour 
plaider  la  cause  de  cette  prin- 
cesse, le  tribunal  nomma,  pour 
la  forme,  Mi\I.  Tronçon-du-Cou- 
dray  et  Chauveau-la-Garde  dé- 
fenseurs d'office.  Quoique  con- 
vaincus d'avance  de  l'inutilité  de 
leurs  efforts,  ils  remplirent  tous 
deux,  avec  autant  de  talent  que 
de  courage,  leur  dangereuse  mis- 
sion; mais,  ainsi  qu'ils  l'avaient 
prévu  ,  ils  ne  purent  arracher 
l'illustre  victime  au  sort  que 
ses  persécuteurs  lui  préparaient 
depuis  les  sept  mois  de  son 
douloureux  veuvage.  Peu  de 
jours  après  la  mort  de  la  reine, 
Trouçon-du-Goudray  fut  arrêté, 
ainsi  que  son  collègue  M.  Chau- 
veau-Lagarde,  sous  le  prétexte 
illusoire  d'avoir  été  instruits  par 
Marie  -  Antoinette  de  faits  im- 
porlans  au  salut  de  la  république, 
et  de  ne  les  avoir  point  dénoncés; 
mais  ils  furent  remis  en  liberté 
par  un  décret  de  la  convention 
nationale  même,  après  avoir  dé- 
montré, dans  les  interrogatoires 
qu'ils  subirent  ,  la  fausseté  des 
imputations  élevées  contre  eux. 
Au  mois  de  frimaire  de  l'an  3 
(  fin  de  novembre  i;'94  )  ,  Tron- 
çon-du-Coudray  se  chargea  de  la 
tâche  difficile  de  défendre,  de- 
vant le  tribunal  révolutionnaire 
alors  rcîiouvelé,  quelques-uns 
des    anciens    membres    du    co- 


TRO 

mité  de  Nnnlcs,  qui  avaient  obéi 
aux  iiijoiiclions  et  secondé  les  fu- 
reurs de  Carrier.  Après  la  mise  en 
activité  de  la  constitution  de  l'an 
3  et  rélablisscmerU  du  g^ouver- 
neirient  directorial  ,  Tronçon-du- 
Coiidray  fut  nommé,  par  le  dé- 
partement de  Seine-et-Oise,  dé- 
puté au  conseil  des  anciens  (  20 
mai  1796.  )  Il  y  acquit  une  grande 
infliiefice,  et  fui  bientôt  considéré, 
par  le  directoire  ,  comme  un  des 
membres  les  plus  opposés  aux 
vues  du  gouvernement;  il  se  pro- 
nonça en  effet,  dans  le  conseil, 
avec  une  grarjde  force  contre  cer- 
taines opérations  de  la  majorité 
des  directeurs,  et  parut  enfm  s'ê- 
tre mis  au  rang  de  leurs  plus  im- 
placables ennemis  aux  appmcbes 
du  18  fructidor,  où  la  lutie  s'en- 
gagea entre  les  deux  parti'^.  Il  fit 
le  fameux  rapport  relatif  à  la 
marche  des  troupes  appelées  vers 
Paris  h  cette  époque  par  le  di- 
rectoire; ce  rapport  fut  loin  cepen- 
dant de  produire  l'effet  que  Tron- 
çon-du-Coiidray  et  ses  amis  s'en 
étaient  promis  ;  mais  il  détermina 
les  mesures  d'iniquité  qui  furent 
prises  contre  l'orateur.  Frappé 
par  le  coup  d'état  qui  mutila  les 
deux  conseils,  et  inscrit  sur  lu  nou- 
velle liste  de  proscription  ,  Tron- 
çon-du-Coudray  fut  tr.insporté, 
avec  un  grand  nombre  de  ses  collè- 
gues, sur  leschirrettes  qui  condui- 
sirent à  llochefort  les  adversaires 
vaincus  des  trois  directeurs.  Em- 
barqué dans  ce  port,  il  arriva  ma- 
lade à  la  Guyane  française  ,  et  n'y 
put  résister  long-tenips  à  ses  cha- 
grins et  à  l'insalubrité  du  climat. 
Il  mourut  à  (>ayenne,  le  21  juin 
1798,  à  peine  âgé  (Je  quarante- 
<  ioq  aM!>,  hii.isant  en  France  une 

I.  XX. 


TRO 


81 


veuve  et  uhc  famille  noipbreuse, 
accablées  par  un  sort  aussi  peu 
mérité.  Tous  ceux  qui  ont  connu 
Tronçon-du-Coudray  ont  rendu 
justice  à  ses  qualités  et  à  ses  ver- 
tus, et  ont  déploré  la  triste  desti- 
née de  cet  homuje  de  bien. 

TROU  DE    (  LE     BARON    ÂMABLE- 

Gille),  contre-amiral  ,  officier  de 
la  légion-d'honneur,  chevalier  do 
Saint-Louis,  est  né  à  Cherbojirg, 
département  de  la  Manche.  Il  en- 
tra au  service  de  mer  comme 
simple  matelot,  et  s'éleva  succes- 
sivement, par  son  intrépidité  et 
ses  talens,  au  grade  de  contre- 
amiral,  qu'il  obtint  en  18  ro.  En 
1804,  il  avait  reçu  le  brevet  d'of- 
ficier de  la  légion-d"honneur.  Ce 
brave  marin  s'était  fait  remarquer 
avant  cette  époque  par  la  valeur 
extraordinaire  avec  laquelle  son 
vaisseau  s'était  défendu  contre 
plusieurs  vaisseaux  anglais.  L,a 
fortune  n'avait  pas  secondé  son 
courage;  il  avait  été  fait  prison- 
nier. Sa  belle  conduite,  noblement 
appréciée  de  l'ennemi  lui-même  , 
valutà  M.Troude,  lorsqu'il  débar- 
qua à  Londres,  l'honneur  d'être 
porté  en  triomphe.  Il  fut  échangé. 
En  181 5,  il  montait  te  Courageux, 
qui,  dans  la  rade  de  Cheriiourg, 
reçut  à  son  bord  riu)pératricc 
Marie-Louise.  L'année  suivante  , 
M.  le  duc  de  Berri,  rentrant  en 
Franc*  après  les  événemens  poli- 
tiques qui  venaient  de  renverser  le 
gouvernement  i;npérial,  passade 
la  frégate  anglaise  l'Eurolan  sur 
le  vaisseau  de  M.  Troiide ,  qu'il 
nomma  le  fis.  (^f  prince;  chargea 
l'amiral  de  se  rendre  à  l'Iymouth 
}tonr  s'y  metlre  à  la  di.'<po3ilion 
de  Louis  XVIII ,  e^  le  raujcner 
en  France.  Le  roi  accueillit  très- 
6 


8  a 


TIIO 


bien  M.  Troude,  lui  donna  de  sa 
iiinin  ta  croix  de  Saint-Lonis,  et 
inoiita  ."yur  son  vaissf'au.  Le  coii- 
ire-amiral  Tioude  a  ôlé  mis  i'i  la 
relraiU;  par  i^uhv.  de  la  seconde 
rcslauratiun  ct>  181 5.  lia  (ait  iiii- 
priincr  la  relation  d<'  la  réception 
que  lai  avaient  l'aile  8,000  prison- 
niers français  et  les  chefs  anglais. 
TKOUVJÈ  (Clatjde-Josepu,  ba- 
hom),  rédacteur  journaliste,  ex- 
amhassadeur,  ex  préfet,  et  depuis 
iiiiprinieur  à  Paris,  né  le  24  *•'-'?" 
tenibre  17G8,  à  Chalonne.i,  dans 
la  ci-devant  province  d'Anjou  , 
vint  jeune  à  Paris,  et  Cl  ses  études 
au  collège  d'Harcourl.  Il  embrassa 
avec  chaleur  la  cause  populaire  au 
coinmenceaient  de  la  révolulion, 
et  devint»  eu  1791  ,  un  des  prin- 
cipaux rédacteurs  du  Moniteur. 
11  s'était  déjA  l'ait  connaître  dans 
la  république  (h-s  leilres  par  quel- 
ques opuscules  poétiques  ,  un 
grand  nombre  d'.trticles  de  jour- 
naux, et  par  luie  tragédie  d'An- 
vharslroem  {voy.  ce  nom),  desti- 
née au  Théâtre  -  Français,  mais 
qui  ne  fut  point  représentée.  Sou 
Ode  à  l" Egalité,  en  1792;  son 
Hymne  su?-  ta  prise  de  Toulan  ,  eu 
i7g3,etsor\  chant  de  guerre  La 
mort  à  tout  esclave  anglais,  avec 
l'épigraphe  Détendu  est  Carlhago, 
chant  dont  il  lit  hommage  ù  la 
conveuli,ou  nationale  en  l'an  2 
(179:^),  furent  cilés  à  celle  épo- 
que pour  huir  verve  poétique  et 
l'ardent  républicanisme  qui  y  ré- 
gnait. Il  com})osa  encore,  iamêuie 
iVAnic,\\n  Hymne  à  l'Etre  suprême, 
pour  la  fête  où  présidait  Robes- 
pierre ,  et  après  la  chute  de  celui- 
ci ,  il  fit  représenter  au  théâtre 
Feydeau  !a  tragédie  de  Puasanias, 
doul  la  révolution  du  9  thermidor 


FRO 

parut  lui  avoir  fourni  quelques  in- 
ciJens,  et  «pii  eut  un  grand  suc- 
cès par  l«:s  tableaux  éuergi({ues 
que  l'auteur  y  traçait  des  hor- 
ribles scènes  du  jègne  de  la  tei- 
reur.  Lors  de  rétal»lis>em(!nl  «le 
la  coUïtiUilion  de  l'an  3  (6  bru- 
maire au  4»  28  uclobre  1796  ), 
M.  Trouvé  fut  nommé  secrétaire- 
général  du  directoire -exécutif; 
mais  il  donna  sa  démission  au 
bout  de  quelques  jours  ,  pour  re- 
preu'lre  la  direction  en  chef  du 
Moniteur.  En  179G,  le  directeur 
La  Uèveillère-Léjieaux,  dont  il  c- 
tait  |)articulièremen.t  protégé,  lui 
lit  épouser  la  fille  de  xM.  André 
l'houin,  administrateur  du  Jardin 
des  Fiantes,  et  le  lit  nommer, 
quelque  temps  après,  secrétaire 
de  légation  À  la  cour  de  Naples, 
près  de  laquelle  ilfutticcrédilé,  six 
mois  pluslaril,en  qualité  de  char- 
gé des  affaires  de  France.  Il  com- 
posa à  celte  époque  une  ode  plei- 
ne de  chaleur  contre  ceux  qu'il  ap- 
pelait les  conspirateurs  du  18  fruc- 
tidor, et  dont  cette  joinnée  ve- 
nait, selon  lui,  de  faire  justice.  Le 
même  directeur,  dans  sa  bienveil- 
lance pour  M.  Trouvé  ,  lui  fit 
confier,  en  mars  1798,  une  mis- 
sion diplomatique  plus  importante 
que  celle  de  Napies ,  mais  dans 
laquelle  il  eut  le  malheur  d'é- 
chouer comjilètement.  Le  direc- 
toire-exécutif de  la  république 
française  venait  de  concevoir  le 
dessein  d'organiser ,  conformé- 
ment à  ses  vues. particulières,  la 
nouvelle  république  cisalpine,  et 
nomma  M.  Trouvé  ambassadeur 
à  Milan.  Il  avait  pour  instruction 
d'y  établir  un  directoire  et  des 
conseils  législatifs,  dont  les  meirr- 
bres  lui  avaient  été  désisivés  à  Pa- 


TRO 

ris,  et  qui  étiiienl  bien  loin  de 
réunir  en  leur  laveur  la  majorité 
(les  Vœux  de  leurs  cunciloyous. 
Quand  ce  plan  fut  connu  à  Milan, 
il  excita  l'iiidignation  gi'iicraîe. 
Lesnioyciisviolens  employés  pour 
investir  du  pouvoir  des  hoinuies 
repou;:.sé>  par  l'opinion  publique, 
portèrent  l'irritation  au  comble. 
Le  •général  cisalpin  Lahoz ,  qui 
s'était  un  des  premiers  prononcé 
avec  le  plus  d'énergie  pour  l'in- 
dépendance de  sa  patrie,  se  rendit 
à  Paris,  espérant  taire  désavouer 
par  le  g.ouvernernent  français,  la 
conduite  de  son  agent  à  Milan. 
«  11  s'ajîit,  disait  ce  général  dans 
aune  lettre  qu'il  fit  imj)rinier,  de 

•  déjouer  une  conspiration  odieuse 
ocotitre  notre  constitution,  et  de 

•  connaître  le  sentiment  du  di- 
xrcctoire  sur  une  poignée  de  scé- 
"lératsqui  s'assemblent  chez  l'am- 
nbassadeur  Trouvé,  et  qui  com- 
rt  posent  le  comité  de«  novateurs.  » 
Cette  démarche  ne  réussit  pas 
d'abord.  Vainement  le  général 
Lahoz  représenla-t-il  qu'un  peu- 
ple généreux,  qui  sent  le  prix 
de  l'indépendance  qu'il  vient  d'ac- 
quérir au  prix  de  tant  de  sacrifices, 
ne  peut  être  privé  du  droit  pré- 
cieux d'être  gouverné  par  des  ma- 
gistral?  de  son  choix,  et  (ju'il  n'y 
renoncera  pas  sans  résistance.  M. 
Trouvé  continua  ses  opérations, 
fit  connaître  sou  nouveau  plan  de 
constitution,  et  donna  la  liste  des 
législateurs  choisis  par  lui.  Alors 
l'indignation  ne  connut  plus  de 
bornes;  des  placards  et  des  libelles 
furent  répandus  contre  l'ambas- 
sadeur de  France,  son  caractère  fut 
méconnu ,  et  snn  autorité  récu'ée. 
On  eut  bientôt  lieu  de  craindre 
un  soulèvement  général,  et  le  di- 


TRO 


83 


l'ectoire  français  se  vit  enfin  obli- 
gé de  sacrifier  un  agent  contre  le- 
quel tant  de  clameurs  s'étaient  é- 
levées.  Il  l'ut  rap[)elé  de  Milan  en 
vendémiaire  an  7  (ociobre  1798), 
et  Fouché  vint  le  remplacer  le  aii 
du  même  mois  (  i3  octobre).  Avant 
de  partir,  l'ex-ambassadeur  expri- 
ma éloqucmment<\  une  députation 
des  deux  conseils  établis  par  lui, 
ses  Vœux  pour  la  prospérité  de  la 
république  cisalpine.  Ason  retour 
à  Paris,  ses  protecteurs  au  direc- 
toire le  nommèrent  presqu'aussi- 
lôt  ministre  plénipotentiaire  à 
Stultgard.  Il  y  fut  fi-oidement 
accueilli,  et  le  ministre  anglais 
Paget  l'accusa,  très-injustement 
sans  doute,  de  vouloir  révolution- 
ner le  NVurtemberg.  La  guerre, 
l'obligea  de  partir  de  Sluttgard 
en  février  1799,  et  il  fut  ensuite 
somuïé  de  quitter  sur-le-champ 
l'Allemagne.  Peu  de  temps  après 
son  retoiir  à  P.iris,  eut  lieu  le 
revirement  politique  qui  exclut 
du  directoire,  en  prairial  an  7, 
(juin  1790),  La  Kéveillère -Lé- 
jieaux,  Merlin  et  Treilhard.  Privé 
d'une  protection  puissante  ,  J\I. 
Trouvé  devint  encore  l'objet  de 
violentes  attaques  au  conseil  des 
cinq-cents.  Les  députés,  Bertrand 
du  (lalvados  et  Briot,  le  dénoncè- 
rent pour  sa  conduite  en  Italie, 
et  le  conseil  prit  la  résolution 
d'envoyer  un  message  au  direc- 
toire, pour  se  faire  communiquer 
le  résultat  des  poursuites  qui  a- 
vaient  dûétredirigées  contre  l'cx- 
ambassadeur.  Le  directoire  ré])on- 
dit  qu'il  avait  chargé  le  ministre 
des  relations  extériemes  de  faire 
un  rapport  sur  ce  sujet  ;  mais  le 
retour  du  général  eu  chef  Bona- 
parte d'Egypte,  et  la  révolution  du 


H  TRO 

18  brumaire,  firent  bientôt  perJre 
enlièreiiient  de  vue,  toutes  le»  af- 
faires tie  ce  genre.  La  poésit;  vint 
fucore  Iieurcuseincnt  à  cette  épo- 
que «u  secours  de  M.  Trouve,  il 
chanla  en  vera  hiirnionieux  et 
biûlans  d'enlhousiasiiie  ,  le  Viiin- 
(jueur  du  18  brumaire,  et  lors 
de  rétablissement  du  gouverne- 
ment consulaire  (4  nivôse  an  8, 
aC  décembre  1799),  il  fut  nommé 
membre  du  tribunal,  installé  le 
1"  janvier  1800.  Il  y  montra  «n 
grand  dévouement  au  premier 
consul  Bonaparle,  qui  l'en  récom- 
pensa, au.mois  de  juin  i8o5,  par 
la  préfecture  du  département  de 
l'Aude.  Sous  le  gouvernement 
impérial,  il  fui  en  outre  nommé 
membre  de  la  légion-d'honneur 
et  baron  de  l'empire.  Lors  de  la 
restauration,  en  1814,  M.  Trouvé 
protesta  de  son  entier  dévouement 
à  la  cause  royale,  fit  une  procla- 
mation éloquente  le  20  avril  18 14> 
dans  laquelle,  parlant  de  lui-mê- 
me, il  dit  :  ■  Le  plus  sûr  garant 
«delà  fidélité  qu'on  promet,  c'est 
»le  dernier  témoignage  de  la  fi- 
»  délité  qu'on  a  gardée.  »  Présen- 
té à  Monsieur  et  ù  i\L  le  duc 
d'Angoulême,  à  leur  passage  par 
Carcassonne  et  Montpellier,  il  en 
obtint  la  promesse  de  la  conserva- 
tion de  sa  place  de  préfet  de 
l'Aude.  Il  se  trouvait  par  congé 
à  Paris,  quand  le  Moniteur  du  7 
mars  181 5  annonça  que  Napo- 
léon avait  débarqué  à  Cannes.  Il 
partit  le  même  jour  pour  sa  pré- 
fecture, où  il  arriva  le  12,  et  où  il 
employa  tous  ses  moyens  pour  le 
maintien  de  l'autorité  du  roi.  Obli- 
gé de  céder  ù  une  force  majeure 
et  de  cesser  ses  fonctions,  il  revint 
ù  Paris,  où  il  résida  pendant  \eseent 


TRU 

Jours  (181 5).  Présenté  au  roi,  le  8 
juillet,  à  Saint-Denis,  il  demanda 
la  permission  de  retourner  dans  la 
préfecture  qu'il  avait  long-temp» 
administrée,  et  l'obtint.  II  s'y  si- 
gnala de  nouveau  par  son  zèle; 
mais  après  l'ordonnance  du  5 
septembre  i8ifi,  il  perditsa  place. 
Sans  fonctions  publiques  depuis 
celte  époque  ,  il  a  pris  une  part 
active  à  la  rédaction  du  journal 
nitra-royaliste  le  Conservateur,  et 
a  depuis  établi  à  Paris  une  impri- 
merie, d'où  sont  sortis  plusieurs 
écrits  du  même  genre,  et  qui  livre 
encore  aujourd'hui  au  public  (18  2  5) 
le  journal  de  C Aristarque.  lia  aus- 
si publié  un  ouvrage  sur  les  état» 
de  l'ancienne  province  de  Langue- 
doc, et  sur  le  département  de  l'Au- 
de, dont  M.  le  duc  d'Angoulême  a 
accepté  la  dédicace,  et  qui  a  pa- 
ru, en  i8i8,  sous  le  titre  d'JSwa* 
historique ^  2  vol.  in-4°. 

TRUDAINE  DE  LA  SABLIÈ- 
RE (Charles-Locis  ),  conseiller 
au  parlement  de  Paris,  élait  fils  de 
l'ancien  intendant-général  des  fi- 
nances, dnnt  Condorcet  a  fait  l'é- 
loge le  plus  flatteur.  Le  jeune  con- 
seiller (il  n'avait  pas  29  ans)  fut 
condamné  à  mort,  et  exécuté,  lui 
et  son  frère  Marie-Louis,  égale- 
ment jeune  magistrat,  à  peine  âgé 
de  28  ans,  la  veille  même  de  la 
révolution  du  9  thermidor  an  a 
(27  juillet  1794)»  l'un  et  l'autre 
comme  complices  de  la  prétendue 
conspiration  de  la  prison  de  Saint- 
Lazare,  où  ils  étaient  enfermés. 
L'infortuné  Trudaine  de  la  Sa- 
blière avait  gravé  sur  les  murs  de 
son  caciiot  ces  vers  touchans,  qui 
annonçaient  d'heureuses  disposi- 
tions pour  la  poésie  : 

La  fleur  Itiisint  tomber  si  tJte  Upguitsantc , 


ïi\i; 

Semble  dire  »■  léphir,  pourc|Boi  m'^TeiJVet  - 1»  • 

Z^phir,  t2  vipeur  bienfaisante 
Ne  rendra  point  la  vie  à  mon  front  abattu. 
Je  languis  ;  le  matin  i>  ma  tige  épuis^tr, 
Apporte  vainement  le  tribut  de  ses  pieurs. 

Et  le»  bienfaits  de  la  rosée 
Ne  ranimeront  point  l'éclat  de  mes  couleurs. 

Il  approche  le  noir  orage  ! 
Sons  l'effort  ennemi  d'un  souffle  détesté, 

Je  verrai  périr  mon  feuillage. 
Demain  le  voyageur  tdmo  n  de  ma  beauté, 

De  ma  beauté  sitôt  flétrie, 
Viendra  pour  me  revoir  ;  ô  regrets  superflus! 

Il  viendra,  mais  dans  In  prairie 

Ses  yeux  ne  me  trouveront  plus. 

TRUGUET  (  Laurent  -  Jbar- 
Fbauçois),  Ois  «l'un  chef  d'escadre 
désarmées  navales, entra  garde  de 
ia  marine  A  l'époque  où  les  mi- 
nistres de  Louis  XV  venaient 
«rinstiltier  des  examens  rigoureux 
(à  i'inslar  des  armes  du  génie  et 
(le  l'arlilleriè),  pour  propager  une 
haute  insiruclion  parmi  les  ofTi- 
i-ier.s  de  mer.  Peu  d'années  après 
«on  entrée  au  service,  Truguet  oh- 
tint  dans  le;*  examens  qu'il  subit 
8ur  le  cours  entier  de  mathémati- 
ques de  M.  Bezoul,  plusieurs  des 
prix  décernés  par  Louis  XV  pour 
les  gardes  de  la  marine  les  plus 
instruits.  Ces  premiers  succès 
dansées  sciences  rencouragèren! 
A  s'y  livrer  entièrement,  et  à  les 
appliquer  constamment  à  la  pra- 
tique de  la  mer.  Ces  études  et  une 
longue  navigation  le  mirent  en  é- 
tal,  dans  le  cours  de  sa  carrière 
militaire,  de  pouvoir  exécuter  a- 
vec  succès  des  travaux  géogra 
phiques  et  astronomiques,  et  des 
ouvrages  sur  la  manœuvre  des 
vaisseaux  et  sur  la  tactique  nava- 
le; de  pouvoir  aussi  à  l'aide  de  ses 
études,  méditer  avec  fruit  .sur  les 
grands  principes  de  haute  adn)i- 
nislration  <.-t  de  la  politique;  de 
pouvoir  enfin  plus  tard  en  faire 
l'application  dans  les  places  émi- 
nentes  qu'il  occupa,  d'amiral  coin- 
loandaut  des  armées,  de  ministre 


TRU 


85 


de   !a  marine  et  d'ambassadeur, 
Truguet  avait  dé;à  fait  huit  cam- 
pagnes dans  différentes  mers,  com- 
me garde  de  la  marine  et  ensei- 
gne de  vaisseau,  lorsqu'en  1778, 
la    guerre    fut    déclarée    à    l'An- 
gleterre.   Il   fit  sans   désemparer 
cette  célèbre  guerre  si  fertile  en 
grands  événemens,  et  qui  ne  fut 
pour  lui,  en  quelque  sorte,  qu'une 
seule  campagne  de  guerre  de  six 
ans,  sous  les  ordres  des  amiraux 
d'Estaiug,  deGuichen,  de  Gras.se  et 
de  Vaudrouil,  qui  eurent  succc- 
sivement   le   commandement   d«; 
nos  forces  navales  aux  Indcs-Oc- 
cidenlalcs  et  aux  États-Unis  d'A- 
mérique. Il  prit  part,  par  consé- 
quent, avec  le  grade  de  lieutenant 
de  vaisseau,  à  tous  les  combats  et 
i^  toutes  les  batailles  navales,  glo- 
rieuses  et  inalheureuse.s,  livrées 
aux  armées  anglaises  par  ces  ami- 
raux; il  fut  presque  toujours  char- 
gé du  service  important  des  si- 
gnaux et  des  autres  principaux  dé- 
tails des  vaisseaux  ;  et  vers  la  fin 
de  la  guerre,  il  comm  indail  en  se- 
cond un  vaisseau   de  haut-bord. 
Attaché   personnellement,  par  la 
nature  de  son  service,  i  l'amiral 
d'Estaing,  il  prit  part  dans  les  an- 
nées  1778  et  1779,  aux  expédi- 
tions de  terre  de  cet  amiral,  et 
c'est   ainsi   qu'il   commanda    une 
comjtagnie  de  grenadiers  à  l'atta- 
que de  Sainte-Lucie,  et  qu'il  rem- 
plit les  fonctions  de  major  de  ma- 
rine auprès  de   sa  personne,  au 
terrible  assaut  de  Savaimah,  où 
il   s'élança,  sous  ses  yeux  et  par 
son  ordre,  un  des  premiers  sur  le.s 
relranchcmens  ennemis.  Mais  les 
assiégés  bien  fortifié*,  et  qui   a- 
vaient  reçu  la  veille  de»  renforts-  A 
notre  insu,  repouisèrent  cet  n&- 


fe 


80 


ÏUU 


saut.  L'attaque  rr;tiH;aise  fut  rnisc 
«ians  la  plus  complète  dcroulc; 
forcé  «rabaiulonricr  dos  rcinpail? 
en  partie  gravis,  il  fut  as^iez  liou- 
rciii  pour  relrouver  sou  auiiral  , 
resté  seul  et  rciiversé  sur  les  bonis 
du  glacis,  où  il  venait  de  recevoir 
deux  blessures  au  bras  cl  à  la  j;iu)- 
be,  qui  lui  interdisaient  (ont  u)ou- 
VL'uiLMt.  Il  s'empara  de  lui,  et  au 
milieu  du. l'eu  le  plus  nourri  de 
la  place  victorieuse,  il  put  lui 
.sauver  la  libert'é  et  la  vie.  Récla- 
inant  l'assistance  de  deux  grena- 
diers, qui  furent  tués  dans  le 
transport,  et  favorisé  par  un 
brouillard  assez  épais,  il  le  rame- 
n  I  au  corps  de  réserve,  conunan- 
dé  par  le  vicomte  de  Noailles. 
L'amiral  .sollicita  et  olitint  pour 
lui  la  croix  de  Saint-Louis,  dont 
il  le  décora  lui-même  au  mois  de 
février  i^8o,  faveur  bien  précoce 
et  bien  honorable.  Trnguet,  pen- 
dant cette  guerre,  fui  blessé  deux 
i'ois  assez  grièvement,  et  ce  n'est 
qu'ù  la  paix  conclue  en  i  ^-85,  qu'il 
prit  quelque  rep^)S,  ainsi  que  ses 
<;ompagnons  d'armes.  i\L'us  l'inac- 
tion ou  le  service  paisible  des 
ports  ne  pouvait  convenir  à 
son  amour  ardent  pour  sa  profes 
sion.  Truguet  saisit  avec  transport 
l'occasion  d'aller  à  Constanlino- 
ple,  coopérer  aux  travaux  imj>osés 
au  célèbre  Choiseul  -  Gouffier  , 
nommé  ambassadeur,  et  dont  il  a- 
vait  obtenu  l'amitié  lors  de  son 
voyage  dans  la  Grèce,  qu'ils  a- 
vaient  parcourue  ensemble.  Cet 
ambasi-adeur,  chargé  expressé- 
ment, par  le  cabinet  de  Versailles, 
de  régénérer,  autant  que  possible, 
les  Turcs  dans  l'art  des  fortifica- 
tions et  des  campeuiens,  dans  Tar- 
tiilerie  et  les  fonderies,   dans  la 


TllU 

construction  des  vaisseaux,  de 
leurs  maruxMivres  et  de  la  tactique 
navale,  fut  acc(juipagnédans  celle 
airdjas«ade  ^i  importante  par  des 
ingénieurs  de  terre  et  de  iner,  et 
par  des  ofïlciers  d';ulillerie  du 
[)liis  grand  iiiérilc.  Le  roi  asso- 
cia il  lie  si  imporlans  travaux 
TrugiK't.  eu  lui  confiant  le  com- 
nian(l(;nient  d'unf;  corvette,  qui 
devait  être  iinmédialeincnt  sous 
les  ordres  de  cet  ambas.sadeur.  Il 
mil  à  la  voile,  du  [)ort  de  Lorient, 
la  première  année  de  la  paix  en 
178-1.  Pendant  cette  mission,  qui 
dura  quaire  ans  et  demi,  il  fut 
cliar-é  d(^  plusieurs  objets  impor- 
lans :  1°  d'instruire  les  amiraux  ci 
odiciers  ottomans  dans  l'art  na- 
val et  la  pratique  des  manoeuvres. 
Il  composa  de  suite  pour  ces  ma- 
rins un  Traité  de  m  a  uœuvre.s- pra- 
tiques, et  plus  tard  un  Traité  de 
tactique  navale  à  leur  portée,  ou- 
vrages qui  furent  imprimés  en  ca- 
ractères turc  j.et  traduits  dans  cette 
langue,  avec  les  termes  techniques 
correspondans,  par  les  soins  et  le 
zèle  du  vice-amiral  de  la  flolte 
turque,  homme  très-instruit  et 
d'une  affabilité  rare;  2°  de  lever 
des  caries  nuu-ines  basées  sur  des 
observations  astronomiques,  et 
liéespar  de  grandes  opérations  Iri- 
gonométrique^,  des  mers  de  TAr- 
chipel.  de  iMannara  et  de  la  mer 
Noire  :  5"  de  négocier  enfin  avec 
les  beys  régnau-^  d'Egypte,  et  les 
princes  arabes  les  plus  puissans 
du  Désert,  un  traité  de  commer- 
ce et  de  transit  de  l'Inde  par  A- 
lexandrie,  Suez,  et  la  mer  llouge. 
Celle  grande  pensée  conçue  par 
Louis  XVI,  et  sur  laquelle  on  a 
toujours  gardé  le  silence,  fut  con- 
fiée dans  son  exécution  à  son  zèle, 


TKIJ 

fl  couronijée  du  plus  jçrand  stic- 
cès.  Jl  parvint  au  Caire,  après  u- 
ne  négociation  assez  di(Tioile  et 
assez  longue,  à  (aire  signer  par  les 
Ueya  et  les  princes  arabes  [»ln- 
sieurs  traités  fondanienlanx  et 
d'exécution,  pour  en  garantir  la 
sûreté  et  rendre  le  nouveau  com- 
merce à  l'abri  de  toute  insulte  et 
«le  toute  déprédation.  Le  commer- 
ce maritime  de  la  France  et  sur- 
tout la  ville  de  Marseille  auraient 
pu,  dès  l'année  1 788,  jouir  des  im- 
meii.xes  avijutagcs  que  leur  dflVait 
celte  m)uvelle  route  de  l'Inde, 
ainsi  garantie  de  tous  dangers  et  ;\ 
l'abri  de  toute  trahison.  Déjà  plu- 
sieurs des  principales  maisons  de 
cononserce  de  Alarseille  avaient 
fail  des  offres  pour  le»  expédi- 
tions ,  déjà  l'ambassadeur  avait 
aplani  les  entraves  que  la  Porte 
pouvait  opposer  à  ce  commerce; 
mais  malheureu<;ement  à  celte  é- 
poque,  le  contrôleur- général  <les 
finances,  ne  voulant  s'occuper  que 
du  rétablissement  matériel  de 
l'ancienne  compagnie  des  Indes, 
dédaigna  ce  puissant  auxiliaire,  et 
fil  perdre  ainsi  à  la  France  les  a- 
vanlages  politiques,  militaires  et 
comnierciaiix ,  dont  il  est  inutile 
aujourd'hui  de  «lévelopper  les  a- 
vantages  inappréciables.  Trois  ans 
plus  tard  on  perdit  tout,  compa- 
gnie des  Indes  el  commerce  par 
Suez.  Pendant  les  délais  et  les 
longueurs  inséparables  de  toute 
espèce  de  négociation  avec  les 
Turcs,  il  parcouriit  la  Basse  et  la 
llaule-Egyple,  en  observant  !«;» 
produits,  le  commerce  et  toutes 
les  richesses  que  ce  sol  pouvait 
offrira  un  gouvernement  civilisé. 
Il  rédigea  sur  ces  importans  ob- 
jets, un  mémoire  qui  intéressa  le 


TRI!  87 

roi,  et  qui  depuis  s'est  trouve 
en  original  dans  les  mains  du  gé- 
néral de  l'armée  française  (Bona- 
parte), envoyé  dans  ces  contrées, 
(le  général  à  son  retour  en  Fran- 
ce, lui  dit  avoir  lu  avec  intérêt  et 
avec  fruit  ce.  mémoire,  dont  le 
but  principal  était  de  faciliter  nos 
commimications  militaires  et 
commerciales  avec  l'Inde.  Tru- 
guet  revint  en  France,  et  débarqua 
au  port  de  Toulon  au  commen- 
cement de  1789.  Arrivé  à  Paris, 
il  reçut  du  roi  les  témoignages  les 
plus  honorables  de  satisiaotion 
sur  cette  mission  si  longue,  et 
qui  pouvait  devenir  d'une  si  gran- 
de utilité  pour  son  service.  11  fut 
envoyé,  en  1790,  h  Brest,  pour  y 
prendre  le  commandement  d'une 
IVégite  destinée  à  une  mission  par- 
ticulière et  délicate.  Les  appro- 
ches d'une  guerre  imminenle  sus- 
pendirent son  départ.  En  1791, 
Louis  XVI  appréciant  le  zèle , 
l'instruction  et  le  dévouement 
de  Trugnct,  l'autorisa,  après  j»lu- 
sieurs  audiences  particulières,  à 
faire  un  voyage  en  Angleterre , 
pour  y  compléter  ses  connaissan- 
ces nautiques  et  administratives. 
Présenté  à  Georges  II  I,  il  en  obtint 
une  protection  particulière,  qui  lui 
permit  de  parcourir  tous  les  ports, 
où  il  fut  parfaitement  accueilli  par 
les  amiraux  et  par  les  commissai- 
res du  roi.  Aidé  desi  grandes  faci- 
lités, il  put,  par  des  comparaisons 
faites  avec  soin,  apprécier  ce  que 
la  marine  anglaise  pouvait  avgir. 
de  supérij'ur  à  la  nôtre  dans  ses 
applications  habiles  de  la  théorie 
à  la  pratique  et  à  l'installation  des 
vaisseaux.  Il  examina  surtout  les 
avantages  que  présenlaienl  la 
simplicité  de  sou  administration 


■ 


88 


TRU 


inariiiino  dans  le»  porl?,  et  ceux 
surtoul  qu'offrait  ù  l'activité  des 
opérations  et  au  maintien  des 
bonnes  in.stitutionâ  nautiques  le 
conseil  d'amirauté.  l>e  souve- 
nir de  ce  voyage,  réuni  à  ses  ve- 
cherches  sur  la  marine  hollandai- 
se, *i  simple  et  si  économe  dan? 
l'administration  de  ses  ports  et 
arsenaux,  ne  l'ut  pas  perdu  pour 
lui,  quand  plus  tard,  il  fut  ap- 
pelé au  commandement  des  ar- 
mées navales  et  au  ministère  de 
la  marine.  A  son  retour  d'Anjjle- 
tt-rre,  il  fut  élevé  par  Louis  XV  au 
grade  de  contre-amiral  à  son  choix, 
faveur  d'autant  pins  grande  que 
»;on  ancienneté  ne  l'appelait  pas,  A 
beaucoup  près,  à  celte  élévation. 
Bientôt  après,  en  avril  «792,  il  rc- 
fut  le  commandement  de  toutes 
les  forces  navales  qui  devaient  se 
réunir  dans  la  Méditerranée.  Le 
roi  avait  senti  l'importance  d'être 
maître  sur  cette  mer  si  fertile  en 
ressources  commerciales,  et  qui, 
par  les  Dardanelles,  s'étend  jus- 
qu'en Colchide,  et  par  Alexandrie 
et  Suez  jusque  dans  l'Inde,  l  ne 
circonstance  particulière  prouva 
quelles  sont  les  ressources  de  la 
France  (avec  un  bon  gouverne- 
ment) pour  augmentersa  marine. 
A  cette  époque,  un  ministre  de  la 
marine  du  roi  lui  avait  déclaré 
officiellement  ,  dans  un  rapport 
rendu  public,  qu'il  était  impossi- 
ble d'armer  un  seul  bâtiment  de- 
puis l'émigration  des  odiciers  de 
marine.  Le  ministre  fut  changé; 
uri  autre  plus  éclairé  et  moins 
homme  de  parti  lui  succéda,  et 
ries  ordres  furent  donnés  dans  tous 
les  ports,  d'armer,  équiper  et  fai- 
re sortir  des  escadres,  qui  de- 
vaient former  dans  la  31éditerra- 


TRU 

née  une  armée  navale  de  22  vais- 
seaux deligne.  Cependant,  d'après 
l'émigration  d'un  gnr.id  nombre 
d'officieri  de  marine,  il  devint  ur- 
gent de  réunir  dans  les  ports,  et 
fur  les  yaisseaux  nouvellement 
armés,  tous  ceux  qui  avaient  cru 
aussi  de  leur  devoir  de  ne  point 
abandonner  la  personne  du  roi  et 
la  patrie.  I!  s'en  trouva  à  cet  ap- 
pel un  nombre  sulTisant,  ayant  as- 
sez d'expérience  et  de  talens,  pour 
former  les  étals-majors  de  ces 
vaisseaux,  qui  se  trouvèrent  ainsi 
avec  de  bons  équipages  très-bien 
armés.  Dans  inoins  de  trois  mois, 
tout  fut  terminé  et  tout  prévu 
pour  une  guerre  maritime  dont 
on  était  déjà  menacé  par  l'Angle- 
terre et  l'Espagne,  et  pour  l'exé- 
cution des  plans  du  roi,  avant 
celte  déclaration.  Il  fallait  à  l'épo- 
que de  tant  d'insurrecti(ms  pré- 
venir celle  du  midi  de  la  France, 
déji'i  si  agitée,  en  lui  assurant  les 
grains  de  l'étranger,  et  par  con- 
séquent obtenir  l'alliance  ou  la 
neutralité  de  toutes  les  puissances 
du  littoral  de  celte  mer.  On  s'as- 
sura de  Naples.  et  avec  les  mê- 
mes moyens,  il  fut  aisé  d'établir 
des  relations  sûres  avec  Maroc, 
Alger,  Tripoli  et  Tunis.  Il  deve- 
nait enfin  indispensable,  nous 
trouvant  déjà  en  guerre  avec  l'Au- 
triche et  la  Russie,  de  nous  mé- 
nager l'alliance  oflénsive  et  défen- 
sive de  la  Porte  Ottomane,  et  de 
la  consolider  par  des  gages  d'a- 
mitié de  la  plus  grande  force,  car 
il  ne  s'agissait  rien  moins  que 
d'obtenir  d'elle  une  diversion  sur 
les  frontières  de  l'Autriche,  qui, 
de  concert  avec  la  Prusse,  mena- 
çait vivement  les  nôtres.  De» 
instructions  furent  données  en  con- 


TRU 

séquence  à  l'amiral  Trugiiel,  pour 
se  rendre  dans  la  mer  Noire, 
pour  y  attaquer  et  occuper  au  pro- 
fit de  la  Portf ,  Sevastopoi,  en  Cri- 
mée, et  Kerson,  à  l'embouchure 
du  Dnieper,  cl  tout  autre  éta- 
blissement des  Russes,  ayant  ap- 
partenu aux  Turcs  avant,  les  der- 
niers traités  de  paix.  Le  succès 
d'un  pareil  plan,  si  favorable  aux 
Vrais  intérêts  de  la  Porte,  devait 
procurera  la  France  le  commer- 
ce presque  exclusif  de  la  mer  Noi- 
re, et  lui  garantissait  la  haute 
protection  de  la  Porte,  pour  don- 
uer  suite  aux  traités  antérieure- 
ment obtenus  en  Egypte,,  relati- 
vement au  commerce  de  l'Inde 
par  Suez.  Truguet  qui  connaissait 
toutes  4es  ressources  de  l'Orient 
pour  les  constructions  navales  , 
ftvait  demandé  que  Ton  envoyât  à 
Constantinople  ftl.  Brun,  ingé- 
nieur habile,  pour  améliorer  les 
constructions  navales  des  Turcs, 
et  pour  pourvoir  à  nos  besoins,  si 
la  flotte  française  y  arrivait.  En 
méditant  sur  ce  plan  de  campagne, 
qui  étendait  un  système  commer- 
cial jusqu'en  (^Jlchide,  par  la  mer 
Noire,  et  jusque  dans  l'Inde  par 
Suez,  on  voit  avec  une  attendris- 
sante admiration  le  monarque,  a- 
lors  même  que  la  révolution  me- 
naçait le  trône.s'occuper  pour  la  se- 
conde fois  de  ?<on  règne,  de  la  res- 
tauration et  de  la  gloire  de  ia  m.ui- 
nc  française.  Ne  voit-on  pas  aussi 
éclat»T  cette  grande  vérité  qu'on 
cherche  envain  à  dégiiitcr,  qu'ime 
bonne  marine  militaire  peut  tou- 
jours concourir  pnissnnnncnt  aux 
succès  des  armées  de  terre,  quand 
«Ile  est  soumise  à  de  bons  plans 
de  campagne?  et  n'est-il  pas  évi- 
Jeni, comme  l'a  démontré  Trwguel 


TRU 


8© 


àlacliambre  des  pairs,  que  dan» 
la  situation  actuelle  d«  l'Europe, 
la  France  ne  peut  se  passer  de 
6on  concours,  soit  pour  soutenir 
une  guerre  avec  gloire,  soit  pour 
lu  prévenir?  et  quelle  confiance 
ne  doit  pas  inspirer  à  la  naliot»  sa 
force  navale,  qui  ne  peut  jamais 
menacer  ses  libertés  et  ses  insti- 
tutions, ni  entraîner  l'ennemi  sur 
son  territoire,  même  après  les 
plus  grandes  défaites?  C'est  en- 
fin à  !a  marine  seule  bien  orga- 
nisée, qu'appartient  le  bonheur  de 
réparer  pendant  la  paix  toutes  les 
plaies  d'une  longue  guerre  de  ter- 
re. On  verra  ultérieurement  dans 
le  cours  de  la  carrière  de  l'amiral 
Truguet,  l'urgente  nécessité  de  ne 
confier  la  destinée  de  la  înarine 
qu'aux  amiraux  les  plus  distin- 
gués, qui  seuls  doivent  inspecter 
la  marine  marchande,  et  diriger 
exclusivement  la  marine  militaire 
dans  les  ports  et  à  la  mer,  aujour- 
d'hui surtout  où  les  olFiciers  de 
mer  ont  presque  tous  Tinstruc- 
tion  la  plus  distinguée,  et  qui  ne 
cesse  de  s'accroître  par  roxj)érien- 
ce  des  arsenaux  et  de  la  naviga- 
tion. C'est  en  juillet  179a  que 
tout  fut  prêt  dans  les  trois  grands 
ports,  et  c'est  à  cette  époque  où 
les  dangers  du  roi  s'accroissent. 

La  crise  terrible  approche et 

quel  est  le  fonctionnaire  public, 
le  général,  l'amiral,  qui  ne  soit 
porté  à  tout  abandonner  sans  le 
cri  de  patrie  qui  pénètre  *aii 
fond  de  son  cœur,  sans  l'ajtpro- 
che  d»!  l'étranger,  qui  par  ses  pro- 
clamations menace  la  France  d'u- 
ne entière  destruction ,  sans  le 
motif  le  plus  puissant,  les  ordres 
du  monarque?  L'amiral  Truguet  .le 
plus  reconnaissant,  le  plus  Odelc 


90  TRU 

de  SCS  sujets,  le  supplie  de  lui 
tracer  ses  devoir;?  au  inotnent  où 
il  lui  est  ordonné  d'aller  prendre 
le  commandement  de  la  flotte  de 
la  ftléditerranée.  Les  amiraux 
Thevenard  et  La  Touche,  se  ren- 
dant à  Biesl,  éproiîvenl  les  mêmes 
anxiétés.  €  Marins,  leur  dit  le  roi, 
"n'abandonniez  jamais  ■vos  vais- 
«seaux,  et  défendez-les  toujours 
«au  prix  de  votre  sang  contre  les 
«ennemis  du  dehors,  qui  les  e{)n- 
«voileijt,  et  qui  peut-être  susci- 
»tenl  des  troubles  intérieurs  poiir 
•  s'en  eniparer  plus  facilenient. 
»La  marine  est  étrangère  aux  dis- 
0 cordes  civibis,  et  son  devoir  est 
»de  défendie  les  poj-ts,  les  arse- 
nnaux,  les  côtes  et  le  commerce, 
«contre  tout  ennemi  extérieur.» 
Acceptant  une  lâche  aussi  glo- 
rieuse, l'umiral  Truguet  partit  de 
l'aris  pour  aller  porter  son  pavil- 
lon sur  le  vaisseau  le  Tonnant,  et 
subir  toutes  les  horreurs  des  ré- 
voltes multipliées,  qu'il  parvint 
toujours  à  calmer  par  son  coura- 
ge et  l'énergie  de  son  caractère, 
toutes  les  ordonnances  ayant  per- 
du leur  vigueur.  Sa  mission  était 
tracée,  et  dès  les  premiers  jours  de 
septembre,  il  se  préparait  à  met- 
tre à  la  voile,  le  nouveau  minis- 
tère ayant  approuvé  rexécution 
de  ses  instructions  données  par  le 
roi.  Cependant  on  exigea  qu'aupa- 
ravant il  allât  s'emparer  de  Nice, 
Villel'ranche  et  Oneille,  tandis  que 
le  'général  Montesquiou  s'empa- 
rerait de  la  Savoie;  il  se  rendit 
«levant  ces  places  qu'il  soumit  sans 
diflicullé.  Oueille,  gouverné  par 
quelques  fanatiques,  eut  la  lâcheté 
de  massacrer  nos  oificiers  parle- 
mentaires, attirés  sur  le  rivage 
par  dcxS  démonstrations  d'amitié. 


TRtJ 

Un  pareil  crime  méritait  une  pu- 
nition, et  des  troupes  firent  débar- 
quées commandées  par  un  vieux 
généial  qui  venait  de  penlre  son 
petit-fils  dans  ce  massacre.  Il  brû- 
la en  partie  la  ville,  qu'il  trouva 
déserte,  tous  les  habitaus  s'élant 
retirés  dans  les  terres  aux  pre- 
miers coups  «le  canon  des  vais- 
seaux-. Les  coupables  échappèrent 
avec  les  innocens;  on  les  réclama 
en  vain,  et  le  seul  sang  qui  lut  ré- 
pandu fut  celui  des  onicier>  en- 
voyés en  parlementaires  sotis  le 
dra|)eau  blufic.  Tel  est  l'évén»;- 
ment  d'Onriile.  L'escadre  de  six 
vaisseaux<lu  contre-amiral  LaTon- 
che  vint  le  joindre  devant  Nice, 
et  l'escadre  de  llochefort  du  mê- 
me nombre  de  vaisseaux,gpous  les 
ordres  du  contre-atniral  Trogoff, 
un  peu  plus  lard, devant  Cagliari. 
C'e>t  ainsi  que  fut  réunie  une  ar- 
mée navale  dt-dix  sept  vaisseaux 
de  ligne,  deux  grosses  bombardes, 
et  plusieurs  frégates,  tandis  qu'à 
Toulon  on  continuait  l'armement 
de  six  vaisseaux,  dont  deux  à  trois 
ponts.  La  frégate  qui  portait  no- 
tre nouvel  ambassadeur  à  Cons- 
tantinople,  s'étant  ralliée  à  Gènes 
à  résoudre,  on  aurait  pu  partir  de 
Gênes  même  pour  se  rendre  aux 
Dardanelles,  s'il  ne  lût  arrivé  de 
nouveaux  ordres  à  l'amiral  poui* 
aller  s'empar«:r  de  la  Sardaigne. 
Le  motif  qu'alléguait  h;  gouver- 
nement était  de  s'assurer  les  res- 
source*  en  vivres  de  cette  île,  de- 
venue ennemie  par  la  guerre  dé- 
clarée au  Piémont,  et  pour  s'assu- 
rer des  ports  de-  îles  de  Saint- 
Pierre  et  bant -  lago ,  néces- 
sairement intermédiaires  entre 
la  France,  la  Sicile  et  l'Archipel; 
pour  l'exécution  de  celle  conque- 


ÏRU 

le ,  la  force  navale  seule  ne  pou- 
vait iniilheiireusi!|nent  suflire ,  il 
/'allait  d(;.5  troupes  ilc  débarqut^- 
ineni;  ïruguet  en  fit  dcuiander 
au  général  en  chef*  de  raimée 
d'Italie,  et,  le  rendez-v()us  fixé 
dans  la  baie  de  Cagliari,  il  se  ren- 
dit de  suiic  i\  Ajaccio  ,  pour  de- 
mander à  Paoli,  qui  y  cnniinan- 
dait  encore ,  tous  les  régimcns 
d'inlanterie  et  d'artillerie  dont  il 
pouvait  disposer,  ainsi  que  le  ma- 
réchal-de-canip  Casabianra ,  qui 
s  était  déjà  distingué,  sous  les  or- 
dres de  Biron.  vers  les  froiitiért.'s 
de  la  lielgiquc.  L'amiral,  chef 
8uj)rr'me  des  forces  de  terre  et  de 
mer,  lo  chargea  de  tous  les  dé- 
tails d'organisation  et  d'embar- 
quement pour  l'expédiliotj  pro- 
jetée. Il  commandait  la  forteresse 
d'Ajaccio  et  la  division  militaire; 
il  invita  Panli  à  diriger  une  contre- 
attaque  sur  le  nord  de  la  Sar- 
daigne,  tandis  qu'il  allait  s'em- 
parer des  îles  Saint-l'ierre  et  de 
Cagliari,  ce  qui  fut  exécuté.  Une 
circonstance  remarquable  doit  ici 
être  citée  :  Napoléon  Bonaparte 
élait  alors  à  Ajaccio  capitaine 
d'artillerie;  il  su  rendit  sur  le 
vaisseau  amiral  pour  solliciter  la 
pernjission  de  faire  partie  de 
l'expédition,  et  de  la  suivre  par- 
tout. Il  fut  agréé;  mais  les  com- 
missaires corses  et  les  chefs  mili- 
taires refusèrent  de  le  proposer, 
et  demandèrent  môme  son  exclu- 
sion. L'amiral,  qui  avait  déjà  ap- 
précié son  instruction  et  son  en- 
thousiasme [)0ur  la  guerre  ,  le  dé- 
signa an  général  l'aoli  pour  l'em- 
ployer dans'l.i  contre-attaque  qui 
devait  partir  de  Bonifacio  ,  sous 
les  ordres  de  Colonna  .  neveu  de 
ce  général.  11  fut  en  eiïct  détaché 


TRU 


0» 


pour  s'emparer  des  îles  de  la  Ma- 
delaiue  ,  ce  qu'il  fit.  I^s  lenteurs 
dans  le  rassemblement  des  for- 
ces de  terre ,  la  prolongation 
de  séjour  dan><  la  rade  d'Ajaccio, 
permirent  aux  hommes  exagérés, 
aux  jacobins  fougueux,  dont  1» 
place  et  la  flotte  étaient  déjà 
remplies,  de  renouveler  les  hor- 
reurs qu'ils  avaient  déjà  com- 
mises à  Toulon  et  à  Marseille.  Un 
jour  de  la  fin  d'octobre,  une  ré- 
voiîe  terrible  éclate  à  Ajaccio  ; 
elle  devient  générale  parmi  le^ 
h'ibitans.  les  militaires  en  garni- 
son, et  les  marins  de  toutes  les 
embarcations  de  l'escadre  qui  é- 
taieut  alors  à  terre.  L'amiral  était 
à  dîner  chez  iM"*  Bonaparte  mè- 
re .  qui  avait  réuni  chez  elle 
plusieurs  chefs  de  l'escadre  er 
toute  sa  famille,  ainsi  que  sor.  uls 
Napoléon;  il  reçoit  un  biilet  qui 
lui  annonce  que  \<  citodelle  est 
au  pouvoir  des  rebelles ,  que  déjà 
i\e^  massacres  ont  lieu,  et  que  le 
projet  de  ces  forcenés  est  de  pen- 
dre,comme  accusés  d'aristocratie, 
les  olTiciers  du  régiment  en  gar- 
nison en  (lorse  depuis  ij-88.  L'a- 
miral quitte  à  l'instant  la  table: 
seul,  sans  chapeau  et  sans  armes 
pour  n'effrayer  personne,  il  court, 
trouve  la  rue  déserte;  il  apprend 
que  la  population  entière  est  dans 
la  citad(dle,  il  y  vole;  il  rencontre 
à  la  porte  le  général  Casablanca . 
jetant  des  cris  impuissans  ;  il  aper- 
çoit, sur  les  batteries  élevées,  des 
potences  dressées,  des  coides 
préparées,  et  plusieurs  malheu- 
reuses victimes  qu'on  allait  exé- 
cuter. Il  fend  la  foule  ,  qui  ,  le 
voyant  sans  armes  et  lêle-nue,  lui 
laisse  un  passage  libre;  il  monte 
sur  l'échafaud.  A  l'aspect  de  leur 


9»  TIVl» 

intrépide  amiral,  les  inaiin*,  oc- 
cupés de  leurs  préparalif;*  m«ilr- 
triers,  s'arrêtent;  il  fait  signe  qu'il 
veut  parler  à  la  multitude  qui  en- 
combre la  place,  et  tout-à-coup 
un  prolond  silence  succède  aux 
cris  de  la  fureur.  Enfin,  après  une 
heure,  il  obtient  que  ces  victimes 
vouées  à  la  mort,  soient  jugées 
légalement  dans  les  vingt- quatre 
heures.  11  termine  son  discours 
par  l'ordre  d'évacuer  la  citadelle, 
ce  qui  fut  exécuté  dans  peu  de 
minutes;  il  en  remit  les  clefs  au 
général  Casablanca  ,  avec  ordre 
d'assembler  un  conseil  de  guerre. 
Ces  malheureux,  tous  innocens, 
furent  acquittés  (  c'étaient  des 
sergens),  et  portés  en  triomphe 
le  lendemain  sous  les  yeux  de 
l'amiral.  Les  chefs  de  la  sédition 
furent  surveillés,  et  la  flotte  put 
mettre  à  la  voile  pour  se  rendre 
en  Sardaigne.  Dans  le  cours  de 
cette  campagne,  l'amiral  Truguet 
dut  apaiser  souvent  des  révoltes 
sur  les  vaisseux,  et  ramener  au 
devoir,  par  son  audace,  des  équi- 
pages qui  avaient  méconnu  l'auto- 
rité de  leurs  ofliciers.  Ces  détails, 
si  pénibles  à  rappeler,  doivent 
faire  apprécier  le  courage  et  le  dé- 
vouement à  la  patrie  de  nombre  de 
ces  ofliciers  de  l'ancien  corps  de  la 
marine,  qui  aimèrent  mieux  bra- 
ver tant  de  dangers  populaires  et 
l'échafaud  ,  que  d'abandonner  le 
gouvernail  au  moment  du  péril, 
et  surtout  de  servir  l'étranger  ar- 
mé contre  la  France.  L'amiral  se 
rendit  d'abord<  de  la  Corse  aux 
îles  Saint-Pierre,  dont  il  s'empara, 
et  qu'il  fortifia  pour  protéger  les 
navires  du  commerce  français , 
qui  ,  par  la  diversité  des  vents 
dans  ces  parages,  se  trouvent  pres- 


TRU 

que  toujours  forcés  d'y  relûcher 
allant  dans  le  Levant,  ou  ù  leur 
retour.  Il  se  présenta  ensuite  de- 
vant Cagliari,  qu'il  somma  de  se 
rendre.  Il  bvait  lieu  d'espérer, 
d'après  le  rapport  du  consul  de 
France,  qui  venait  de  celte  place, 
que  leshabitans,  pour  éviter  un 
bombardement,  ouvriraient  leurs 
portes  ;  il  s'était  trompé.  Le  gou- 
verneu  r  fit  sortir  tous  les  habitans, 
ouvrit  les  prisons  et  les  bagnes, 
et  prit  le  parti  de  se  défendre.  La 
place  tira  à  bout  portant  sur  le  ca- 
not parlementaire;  mais  ce  re- 
nouvellement d'un  acte  atroce  ne 
tua  ni  ne  blessa  personne,  et  la  ré- 
ponse à  cette  barbarie  fut  à  l'ins- 
tant même  le  signal  du  bombar- 
dement. Les  ouvrages  furent  en 
])arlie  démolis  ,  et  hientôt  le 
magasin  à  poudre  sauta  en  l'air. 
Les  vaisseaux  attaquèrent  tou- 
tes les  batteries  ennemies.  Sur 
ces  entrefaites  arrivèrent  les  trou- 
pes envoyées  par  le  général  en 
chef  de  l'arïTiée  de  Nice.  Ces 
troupes  ,  au  nombre  de  2,000 
hommes,  composaient  un  corps 
appelé  la  Phalange  marseillaise; 
troupe  sans  discipline;  mais  on 
crut  que  le  courage  pourrait  as- 
surer quelque  succès.  L'amiral 
les  plaça  sous  les  ordres  immé- 
diats de  Casabianca,  et  lui-même, 
après  avoir  reconnu  la  hauteur 
qui  dominait  la  place,  et  d'où  l'on 
pouvait  l'écraser  et  la  forcer  à  ca- 
pituler, ou  la  prendre  d'assaut, 
débarqua  toutes  ses  troupes  en 
bon  ordre  avec  leur  artillerie. 
Quelques  centaines  de  paysan*  oc- 
cupaient ce  faible  retranchement 
avec  plusieurs  petits  canons  en 
fer,  et  pendant  que  le  feu  de» 
vaisseaux  et  des  bombarde»  atli- 


TRU 

rait  snr  eux  le  feu  et  l'attention 
des  assiégés,  les  2,000  hommes 
débarqués  devaient  facilement 
5'empurer  de  cette  hauteur.  L'a- 
miral avait  ordonné  sur-le- champ 
l'attaque;  mais  il  reçut  un  billet 
du  général  des  troupes,  qui  le  pré- 
venait qu'il  préférait  attaquer  pen- 
dant  la  nuit.  A  la  nuit  close,  la  co- 
lonne de  droite,  établie  sur  le  gra- 
vier de  la  mer,  fit  un  mouvement 
pour  se  placer  dans  une  prairie  voi- 
sine; la  colonne  de  gauche  croit 
que  c'est  l'ennemi  qui  est  descendu 
de  la  montagne  pour  l'attaquer, 
et  lire  sur  elle;  celle-ci  lui  ri- 
poste, et  ces  deux  colonnes,  criant: 
sauve  qui  peut!  courent  en  dé- 
sordre vers  le  point  de  la  plage 
où  l'on  avait  débarqué;  et,  criant 
à  la  trahison,  voulant  retourner 
sur  les  vaisseaux,  elles  menacèrent 
leur  général  et  son  état-major  de 
les  massacrer  si  elles  n'obîenaient 
pas  leur  rembarquement.  Cet  in- 
fortuné général  supplie  l'amiral 
de  lui  sauver  la  vie,  et  d'envoyer 
toutes  ses  embarcations  pour 
prendre  ses  troupes.  Truguet  dé- 
nonça à  lu  France  entière  tant  de 
lâcheté,  ce  qui  lui  valut  bientôt 
après  des  persécutions.  Obligé  de 
renoncer  ù  la  prise  de  Cagliari , 
par  l'efTct  de  cette  insurrection, 
l'amiral  se  borna  à  mieux  fortifier 
«ncore  les  îles  de  Saint-Pierre.  Il 
renvoya  à  Nice  ces  indignes  sol- 
dats, et  en  Corse  une  j.;rande  j>ar- 
lie  de»  troupes  que  lui  avait  cou  liées 
le  général  l'aoli.  Il  se  serait  ce- 
pendant déterminé  à  conserver 
sur  sa  flolte  ces  dernières  ,  pour 
obtenir  plus  de  succès  dans  800 
expéilition  de  la  mer  Noire  ,  si  un 
aviso,  expédié  par  le  ministre  de 
la  marine,  n'était  venu  lui  aimon- 


TRU  93 

cer  la  déclaration  de  guerre  à  la 
Franco  par  l'Angleterre  et  l'Es- 
pagne ,  avec  l'injonction  d'un 
prompt  retour  à  Toulon  ,  pour 
concerter  ur»  nouveau  plan  de 
campagne.  Il  ordonna  aux  divi- 
sions qui  devaient  transporter  le» 
troupes  en  Corse  et  à  Nice  ,  de  se 
rallier  le  plus  tôt  possible  A  Toulon, 
et  lui-même  mit  à  la  voile  et  y 
arriva  au  commencement  de  mars 
1 795.  Il  se  re§d1l  de  suite  A  Paris , 
après  avoir  confié  le  commande- 
ment de  l'armée,  par  intérim  ,  au 
contre-amiral  Trogoff,  le  plus  an- 
cien de  Ses  ofliciers-géuéraux.  La 
guerre  maritime  ayant  éclaté,  on 
vit  pour  cette  fois  la  France  n'ê- 
tre pas  prise  au  dépourvu,  et  sa  si- 
tuation ,  au  début  de  cette  guerre, 
était  d'autant  plus  brillante  qu'elle 
présentait  vingt-quatre  vaisseaux 
de  ligne  bien  armés  ou  prêts  A 
l'être,  au  seul  port  de  Toulon.  Ces 
vaisseaux  étaient  commandés  par 
des  capitaines  distingués  par  leurs 
talens  et  leur  expérience,  et  se- 
condés par  des  équipages  nom- 
breux et  composés  de  bons  mate- 
lots. La  première  démarche  de 
l'amiral  à  son  arrivée  à  Paris,  fut 
de  solliciter  et  d'obtenir  un  code 
pénal  et  l'établissement  des  cour» 
martiales,  pour  prévenir  désor- 
mais l'insurrection.  Il  avait  fait  a- 
dopter  un  nouveau  plan  de  cam- 
pagne qui,  sans  exclure  entière- 
ment le  premier,  qui  fut  simple- 
ment ajourné ,  embrassait  une 
grande  expédition  dans  l'Inde, 
où  l'on  pouvait  prendre  à  l'im- 
provisle  des  niesures  contre  le 
commerce  anglai'^ ,  et  s'assurer 
l'alliance  de  Tipoo-Saëb.  Mais  peu 
de  jours  avant  l'èpocjue  fixée  pour 
son  retour  ù  son  armée  de  Tou- 


94  TRU 

Ion,  arriva  la  funeste  journée  du 
3i  mai,  où  le  corp«-Iégislalil"  fut 
iiKttilé,  plusieurs  ininislres  desti- 
tués, et  beaucoup  de  députés  ar- 
rêtés et  incarcérés:  c'était  le  coin- 
hïencement  de  la  terreur.  Le  tra- 
vail marititne,  les  instructions  de 
campagne,  les  cours  martiales, 
tout  fut  suspendu,  et  l'amiral  re- 
tenu à  Paris  sous  divers  prétextes, 
desititué  enfin  de^ï^commande- 
meut  en  août ,  loi  arrêté  et  en- 
fermé dans  les  preiriiers  jours  de 
septembre,  lors  de  la  publication 
de  la  loi  des  suspects.  On  sait 
qu'à  cette  époque,  de  grands  ex- 
cès soulevèrent  les  habitans  de 
Toulon,  qui,  menacés  par  terre 
par  une  armée  révolutionnaire, 
et  bfoqués  par  mer  par  l'armée 
conibinée  des  Anglais  et  des  Espa- 
gnols, préférèrent  se  mettre  sous 
la  domination  des  Anglais,  qui 
s'emparèrent  de  la  ville  pour 
les  princes  français,  et  cepen- 
dant il  ne  dépendit  pas  de  ces  mê- 
mes Anglais  qu'un  incendie  ,  pré- 
paré avec  art ,  ne  dévorât  tous  les 
établissemens  du  port  de  Toulon, 
après  avoir  réuni  à  leurs  flottes 
nos  meilleurs  vaisseaux.  A  la  mort 
de  Robespierre,  les  prisons  furent 
ouvertes,  et  l'amiral,  mis  en  li- 
berté, fut  bientôt  rendu  à  l'acti- 
vité, et  lors  de  la  création  du  di- 
rectoire, nommé  ministre  de  la 
marine.  Pendant  les  deux  années 
de  son  ministère  ,  la  marine  reprit 
son  énergie,  la  discipline  fut  ré- 
tablie, et  le  véritable  honneur, 
auxiliaire  de  l'amoTir  de  la  patrie, 
anima  tous  les  esprits  dans  les 
ports  et  sur  nos  vaisseaux.  Tru- 
gaet,  à  son  début,  fut  obligé 
d'orgartiser  la  totalité  du  person- 
nel de  la  marine  miHtaire  et  admî- 


TRU 

nistraiive.  de  créer  les  régimens 
d'artillerie  établis  par  la  loi ,  et  de 
mettre  en  retraite  tous  les  indivi- 
dus que  les  principes  ultra-révolu- 
tionnaires avaient  infestés  jusque 
dans  les  grades  les  plus  élevés.  11 
rappela  de  suite  tous  les  ancierts 
ofliciers  ,  amiraux  et  capitaines 
qui  avaient  été,  comme  lui,  des- 
titués et  incarcérés;  il  leur  confia 
les  escadres,  et  les  marins  revi- 
rent encore  à  leur  fêle  des  géné- 
raux qui  avaient  acquis  de  l'expé- 
rience et  quelque  gloire  avant  la 
révolution.  N'ayant  pu  obtenir 
de5  chambres  législatives  la  révo- 
cation de  la  loi  maritime  du  5 
brumaire,  que  des  commis  de 
marine ,  députés  ,  avaient  fait 
rendre  par  la  convention  dans  les 
derniers  jours  de  son  existence, 
il  fut  assez  heureux  pour  trouver, 
dans  cette  même  loi  du  3  bru- 
maire, un  moyen  d'interprétation 
qui  lui  permit  de  remplacer  les 
administrateurs  supérieurs  des 
ports  par  de  célèbres  ingénieurs  , 
tels  que  les  Sané,  Groignard , 
Gautier,  Chevillard,  Forfait,  Le- 
roi,  etc.,  etc. Cette  lutte  contre  les 
administrateurs  de  marine  en  cré- 
dit dans  les  chambres,  qui  parais- 
saient exploiter  la  révolution  à 
leur  profit,  et  cette  victoire  rem- 
portée sur  leurs  prétentions  am- 
bitieuses, lui  suscita  bien  des  en- 
nemis dans  les  deux  chambres. 
Après  ces  premiers  travaux  pour 
l'organisation  des  ports,  du  ma- 
tériel et  du  personnel  de  la  ma- 
rine ,  il  fallut  s'occuper  des  colo- 
nies. Saint-Domingue,  malgré 
ses  désastres  récens  et  son  en- 
tière subversion,  fut  organisé 
d'après  la  constitution  nouvelle 
de  la  métropole,  et  tous  les  noirs 


TRU 

s'y  soumirent.  L'oflensif  fut  pris 
sur  le-j  Anglais,  qui  s'étaient  éta- 
lilis  et  retranchés  dans  quelques 
places,  et  ils  en  furent  chassés. 
Leurs  forces  navales  ne  purent  ja- 
mais inlercepler  les  couirnuiiica- 
tions  si  nonïbreuses  qui  furent 
établies  avec  nos  colonies  par  nos 
vaisseaux  et  nos  division»,  pour 
y  transporter  des  troupes  ,  des 
munitions  de  guerre  et  des  appro- 
visionncmens  de  toute  espèce , 
tant  l'intelligence  et  l'activité  de 
nos  capitaines  surent  exécuter 
ponctuellement  les  instructions 
bien  combiiiées  qui  leur  furent 
données.  Les  autres  colonies  fu- 
rent également  soumises  à  une 
administration  constitutionnelle. 
Le  ministre  eut  à  déplordr  l'in- 
surreclion  de  l'assemblée  colo- 
niale de  l'île  de  France  contre  les 
ordres  du  gfjuvernement  et  les 
lois  en  vigueur.  Elle  avait  cepen- 
dant adopte  les  principes  de  la  ré- 
volution et  incarcéré  plusieurs 
des  chefs  de  la  colonie  comme  a- 
ri>tocrales;  mais  elle  crut,  pour 
éviter  l'abolition  de  l'esclavage, 
la  traite  et  les  conséquences  d'un 
'système  plus  humain  et  plus  po- 
litique, devoir  préférer  des  intérêts 
particuliers  à  l'intérêt  public,  qui 
ne  repose  légitimement  que  sur  les 
lois.  Cette  révolte  fut  un  des  pre- 
miers obstacles  que  le  ministre 
rencontra  pour  l'exécution  de  ses 
vastes  projets  contre  la  puissance 
anglaise  dans  l'Inde.  Des  plans 
généraux  de  guerre  furent  hardi- 
ment conçus  et  arrêtés  par  le  di- 
rectitire,  ot'i  siégeaient  alors  deux 
ingénieurs  très-instruits,  Carnot 
';l  Letourneur.  Le  premier  arrêté 
:uésii:ié  par  le  ministre  de  la  nja- 
;  '  ,  <  I  ajjréé  de  suite,  était  li- 


TRU 


95 


belle  d'une  manière  lemarquable; 
il  était  ainsi  conçu  :  i"  Il  sera  ar- 
mé des  forces  navales  sulTisanles 
pour  jeter  trente  mille  hommes  en 
Irlande,  sous  les  ordres  du  géné- 
ral Hoche;  2*  il  sera  organisé  sur 
nos  côtes  les  moyens  nécessaires 
pour  en  jeter  soixante  mille  sur  les 
côtes  d'Angleterre  et  d'Ecosse;  3" 
le  ministre  de  la  marine  est  char- 
gé de  l'exécution  prompte  do  cet 
arrêté.  On  vil  bientôt  des  esca- 
dres expédiées  pour  toutes  les 
mers,  et  ces  escadres  bien  diri- 
gées ,  après  avoir  exécuté  des  hos- 
tilités particulières,  devaient  se 
réunira  une  époque  bien  choisie, 
pour  être  supérieures  à  nos  enne- 
mis à  cette  même  époque,  et  por- 
ter un  grand  coup  en  débarquant 
une  armée  de  braves.  C'est  ainsi 
que  se  prépara  l'exécution  de  l'ar- 
rêté ci-dessus.  L'Angleterre  prise 
au  dépourvu  quand  elle  croyait 
notre  marine  anéantie  par  nos 
malheurs  passés,  et  entièrement 
desorganisée,  se  trouva  mena- 
cée en  Irlande  ,  à  la  Jamaïque,  A 
Terre-Neuve  et  dans  l'Inde  même. 
Sans  entrer  clans  trop  de  détails, 
on  sait  que  22,000  hommes  par- 
tirent de  Brest  pour  l'expédition 
d'Irlande,  sous  les  ordres  de  l'a- 
miral r.lorard  de  Galles,  ayant 
l'amiral  liruix  pour  major-géné- 
ral,  et  les  troupes  commandées 
par  le  général  Hoche  ;  on  sait 
aussi  qu'une  division  de  frégates 
avait  déjà  été  envoyée  dans  l'Inde, 
sous  les  ordres  de  l'amiral  du  Ser- 
ccy,  et  que  l'amiral  Villaret,  com- 
mandant huit  vaissoauX  de  ligne 
avec  des  troupt!s,  était  tout  prêt  à 
bre»t ,  en  octobre  ify^J,  pour  s'y 
rendre,  muni  d'instructions  très- 
importantes.  L'escadre  de  htiitou 


96  TRU 

neuf  vaisseaux,  commandée  par 
l'amiral  Riuhery,  avait  reçu  l'or- 
dre de  mettre  à  la  voile  de  Cadix , 
où  il  avait  l'ait  entrer  un  riche 
convoi  pris  sur  l'ennemi;  ses  re- 
tards trop  prolongés  dans  celle 
rade,  et  qui  lui  furenl  reprochés, 
l'enipêclièrent  d'attaquer  la  Ja- 
maïque ,  en  passant  d'abord  :\ 
Saint-Domingue,  où  des  troupes 
se  trouvaient  toutes  prêtes  pour 
cette  attaque.  Il  n'eut  le  temps 
que  d'attaquer  Terre-Neuve,  dont 
il  détruisit  les  élablissemens  de 
pêche  et  les  navires  pêcheurs.  A 
son  retour  en  France,  il  relâcha  h 
Rochefort,  au  lieu  de  se  rendre  di- 
rectement à  Brest,  ce  qui  retarda 
lo  départ  de  l'expédition  contre 
l'Irlande.  Il  serait  pénible  de  dé- 
noncer les  causes  étrangères  aux 
conceptions  du  ministre,  qui  en- 
travèrent et  déconcertèrent  une 
grande  partie  de  ses  opérations,  et 
c'est  ainsi  que,  par  une  de  ces 
fatalités  qui  détruisent  quelquefois 
les  ()roiels  les  mieux  conçus  ,  l'in- 
dépendance de  l'Irlande  ne  put 
être  consonmiée  ,  et  que  l'Angle- 
terre ne  dut  son  salut,  soit  en  Ir- 
lande, soit  dans  l'Inde,  qu'à  la 
faiblesse  et  ù  l'irrésolution  de 
trois  ou  quatre  chefs  qui,  jusqu'à 
celte  époque,  avaient  mérité  la 
confiance  du  ministère  ,  mais 
qui  ne  la  justifièrent  pas  au  mo- 
ment de  ces  entreprises  hardies. 
Il  est  à  remarquer  surtout,  pour 
la  gloire  de  ce  ministère,  que  le 
plan  d'une  première  campagne 
que  les  marins  français  devaient 
seuls  exécuter  avec  tous  ses  dan- 
gers, se  rattachaient  à  une  allian- 
ce sincère  et  de  bonne  foi  avec 
l'Espagne  etla  Hollande.  Le^non- 
venient  général  de  leurs  forces  a- 


TRU 

vait  été  exclusivement  confié  au 
ministre  ïruguet ,  qui  corres- 
pondait seul  avec  les  cabinets  de 
Madrid  et  de  La  Haye;  il  en  ré- 
sultait ainsi,  dans  les  opération» 
concertées  ,  secret  et  activité, 
L'Espagne  avait  promis  ,  et  avait 
en  effet  20  vaisseaux  de  ligne  tout 
prêts,  et  la  Hollande  12  vaisseaux 
ave»;  1  5,ooo  homnies  de  débar- 
quement, qu'un  de  nos  généraux 
avait  été  inspecter.  Leur  inertie 
menaçante  dans  leurs  ports,  exi- 
gée d'eux,  forçait  les  Anglais  à  des 
croisières  d'observation  ruineuse, 
et  qui  facilitaient  nos  sorties  etno» 
opérations  particulières.  La  con- 
fiance était  lelle  avec  nos  alliés, 
que  la  Hollande,  connaissanlnotre 
pénurie  en  finances,  et  les  entraves 
que  cette  pénurie  mettait  à  notre 
activité,  vint  à  notre  secours,  et  ce 
qu'elle  nous  donna  généreusement 
pour  nos  armernens  de  l'Inde,  put 
permettre  aussi  d'augmenter  nos 
autres  arméniens,  et  les  travaux 
de  nos  arsenaux.  L'Espagne  avait 
promis  les  mêmes  secours  pécu- 
niaires ,  tant  la  confiance  était 
grande  dans  le  système  franche- 
ment adopté.  Les  conséquences 
des  succès  plus  que  probables  de 
cette  seule  première  campagne 
devaient  être  bien  funestes  à  l'An- 
gleterre, prise  presque  partout  au 
dépourvu  ,  et  un  plan  général 
d'altaque  à  la  seconde  campagne, 
avec  les  forces  navales  de  nos  al- 
liés ,  réduisait  cette  colossale 
Angleterre  à  devenir  une  puis- 
sance du  second  ordre.  C'est  vers 
cette  époque,  où  la  marine  renais- 
sait, où  ses  colonies  prospéraient, 
où  de  nouvelles  expéditions  s'or- 
ganisaient pour  réparer  les  effet» 
iJe  tant  de  malveillance  et  de  fai- 


TRU 

blesse,   et    lôsisier   aux  cruelles 
influences  des  discordes  qui  ré- 
gnaient dans  les  hauts  pouvoirs  de 
la  république,  qu'arriva  la  révo- 
lution du   18  fructidor  (septem- 
bre  1797).    Le   parti  qui  triom- 
pha dans  cette  journée  ,    etivoya 
!^(is  victimes  à  la  Guiane,  et  vou- 
lut avoir  des  ministres  nouveaux; 
le   portefeuille  de   la   n)arine  fut 
ôté  au  ministre  Tru^yuet.   Le  di- 
rectoire, où  ne  se  trouvaient  plus 
Carnot  ni  Le  Tourneur,  désarma 
nos   vaisseaux,   licencia  leurs  é- 
quipages,  réunis  et  exercés  avec 
tant  de  soins,  et  abandonna  à  eux- 
M)êmes  nos  allié*,   auxquels  nos 
désanncmens    laissèrent   sur   les 
bras  toutes  les  forces  ennemies, 
qui  les  écrasèrent,  quand  ils  vou- 
lurent mettre  en  mer.   Le  vertige 
directorial  fut  sans  bornes  ,  puis- 
que  nos  frégates  furent  livrées  à 
l'agiotage  pour  en  faire  des  cor- 
saires;  on  achetait  ces    frégates 
comme  des  effets  de  bourse.  Sur 
ces  entrefaites  Bonaparte  arriva  à 
Paris,  après  sa  glorieuse  campagne 
d'Italie,  terminée  par  le  traité  de 
Oampo-Formio.  Son  influence  ar- 
rêta  les  progrès  du  mal;   on  lui 
donna  le  titre  de  général  en  chef 
de    l'armée    contre  l'Angleterre; 
Truguet,  dans  Tinlérét  (ie  la  ma- 
rine.s'empressa  des'imiràlui  pour 
obtenir  le  réarmement  de  nos  es- 
cadres;  mais  la  condescendance 
du  directoire  pour  le  réarmcmenl 
d'une  escadre  t»  Toulon ,  n'avait 
d'autre  but  que  d'éloigner  Bona- 
part<î  de  Paris,  et  de  l'envoyer  en 
Egypti;.  Trugîiet,  repoussé  encore 
du  minisiére  de  la  marine,  par  le 
niT-fue  parti  qui  éloignait  Bonapar- 
te, fut  envoyé  comme  ainl)assa(leur 
à  Madrid,  sous  le  prétexte  qu'il  sc- 

T.  XS. 


TRU 


97 


rait  utile  \  l'Espagne  pour  sa  ma- 
rine et  ses  colonies.  On  hâta  sou 
départ,  bientôt  après  on  h3ta  ce- 
lui de  Bonaparte,  qui  ayant  à  évi- 
ter ou  à  braver  les  forces  navales 
anglaises,    bien  supérieures  aux 
siennes  dans  la  Méditerranée,  de- 
vait succomber  sans  un   miracle 
de  la  fortune,  car  il  eut  le  bon- 
heur inouï  de  pouvoir  rallier  plu- 
sieurs convois,  attaquer  et  pren- 
dre Malte,  et  débarquer  toutes  se» 
troupes  à  Alexandrie,  avant  l'ar- 
rivée de  l'amiral   Nelson  sur  ces 
cotes.  Nous  ne  pouvons  nous  re- 
fusera donner  quelques  détails  sur 
cette  ambassade,  qui  devint  bien- 
tôt une  mission  aussi  diflicile  que 
délicate  ,  et  dans  laquelle  l'am- 
bassadeur  exerça   une    influence 
qui  fut  toujours  inconnue  ou  mal 
appréciée,  et  qui  aurait  eu  pour 
l'Espagne  et  pour  la  France,  son 
alliée,  des  conséquences  bien  pré- 
cieuses, si  le  directoire  n'avait  eu 
à  cette  époque  d'autre  politique 
que  sa  conservation  contre  ses  en- 
nemis. Notre  traité  d'alliance  n'a- 
vait encore  réparé  ni  les  injustice^ 
ni  les  spolialioua  des  autorités  et 
des  tribunaux  espagnols  envers  les 
négociiHis  et  armateurs  français  : 
le  commerce  de  Lyon  deverm  as- 
seï  important  avec  l'Espagne,  de- 
puis la  guerre  contre  les  Anglais, 
avait  à  se  plaindre  des  entraves 
qu'y  mettait  l'administration  des 
douanes.    Beaucoup   de  Français 
arrêtés  dans  les  Indes-Occidenta- 
les, qui  étaient  devenus  suspect» 
par    suite    de  notie  révolution  , 
avaient  été  traduits  en  Espagne, 
et    incarcérés    dans    1(!S    cachots 
de  l'inquisition.  Se.»  intelligcice» 
avec  jiliisii.urs  nieiubres  de  ce  tri- 
bunal, lui  firent  connaître  Iv  nom- 


m 


98  ÏRU 

bre  el  le  nom  de  ces  infortunés;  ils 
furent  tous  mis  en  liberté,  et  le 
premier  devoir  envers  rimmanité 
rempli,  il  prc'isenta  des  demandes 
sur  les  trop  justes  réclamations  du 
commerce  français;  il  eut  la  sa- 
tisfaction de  voir  accueillies  ces 
demandes,  auxquelles  on  fit  droit 
autant  qu'il  était  possible  de  le 
faire  dans  les  circonstances  où  l'on 
se  trouvait.  Mais  le  plus  didicile  à 
concilier  ou  à  éluder,  était  relatif 
aux  mesures  ;\  prendre  contre  le 
nombre  Immense  d'émigrés  fran- 
çais, la  plupart  ecclésiastiques, 
qui  s'étaient  réfugiés  en  Espagne, 
où  le  gouvernement  castillan  les 
avait  accueillis  pendant  sa  guer- 
re avec  la  France,  et  dont  on  exi- 
geait l'expulsion  depuis  la  paix. 
L'ambassadeur,  placé  entre  un  de- 
voir rigoureuxet  le  sentiment  que 
tout  Français  éprouve  pour  d'au- 
tres Français,  que  les  discordes 
civiles  ont  désunis,  ne  put  garan- 
tir la  sûreté  de  tous,  qu'en  se  con- 
certant avec  le  ministère,  compo- 
sé alors  d'bommes  d'état  qui  pro- 
fessaient les  principes  les  plus  purs 
et  les  plus  humains.  On  se  borna 
à  éloigner  momentanément  de  la 
cour  quelques  personnages  des 
plus  marqi.ans  ,  et  qui  y  jouis- 
saient de  beaucoup  de  considéra- 
lion  et  de  cr<;dit,  sans  les  priver  ce- 
pendant de  leurs  émolumens;  un 
régiment,  composé  d'officiers  é- 
migrés,  dont  le  gouvernement 
français  exigeait  la  dissolution  ou 
le  renvoi  dans  les  colonies,  fut 
envoyé  seulement  aux  îles  Ma- 
jorque et  Minorqiie.  Le  direc- 
toire parut  satisfait  de  cette  con- 
descendance, que  l'on  fit  bien 
valoir,  et  qui  conserva  en  Espa- 
gne la  niasse  nombreuse  d'émi- 


grés,  auxquels  même  de  puissans 
secours  français  parvinrent  par 
l'entremise  de  plusieurs  curés.  Ce 
fut  enfin  tout  ce  que  l'humanité 
put  obtenir  de  la  politique  du 
temps.  Il  était  d'autres  sacrifices 
que  le  gouvernement  français  exi- 
geait du  roi  d'Espagne;  mais  ceux- 
ci  devant  humilier  sa  personne 
royale, et  la  forcer  à  renoncer  à  tout 
prix  à  l'alliance  française,  ils  ne 
sortirent  jamais  du  portefeuille  de 
l'ambassadeur,  et  il  est  à  remar- 
quer, qu'à  cette  époque,  nos  en- 
nemis cherchaient  à  dissoudre, 
par  les  offres  les  plus  brillantes, 
celte  alliance  renouvelée  avec 
l'Espagne.  En  entrant  en  Espagne, 
l'ambassadeur  avait  donné  un 
exemple  trop  rare  de  désintéresse- 
ment, en  renonçant  au  privilège 
si  abusif  qui  accordait  pendant 
six  mois  l'entrée  franche  de  tout 
espèce  de  droit  aux  effets  person- 
nels de  l'ambassadeur,  et  qui, 
sous  prétexte  d'objets  à  son  usa- 
ge, devenait  un  moyen  de  contre- 
bande très- lucratif-  Il  ordonna 
de  tout  visiter,  et  de  confisquer 
tout  ce  qui  ne  serait  pas  sur  ses 
factures.  Sa  conduite  généreuse 
et  loyale  lui  eut  bientôt  mérité 
l'estime  de  la  cour  et  de  tous  les 
gens  de  bien  ,  dont  il  espéra  pou- 
voir se  servir  bientôt  pour  obte- 
nir des  succès  dans  les  plans  qu'il 
méditait  pour  l'avantage  de  la 
France,  de  l'Espagne,  et  plus  par- 
ticulièrement pour  affermir,  sur 
des  bases  solides  ,  l'autorité  du 
roi,  et  l'union  des  colonies  ù  la 
métropole,  qui,  de  jour  en  jour, 
s'affaiblissait  d'une  manière  ex- 
traordinaire. Il  était  parvenu  à  ob- 
tenir la  confiance  et  l'amitié  des 
ministres,  dont  plusieurs,  tels  que 


TRU 

Urquijo,  Saavedra,  Caveillano,  é- 
laieiit  lies  hommes  du  plus  grand 
mérite,  qui  connaissaient  j)arfai- 
icment  l'ctat  précaire  où  se  Irou- 
vait  l'Espagne  métropole  et  coio- 
iiialf.  lj*i  premier  miiiistie  [voyez 
GoDoï),  trop  occupé  de  lui-mê- 
me, el  saturé  d'honneurs  et  de 
bienfaits  de  tons  les  genres,  ne  put 
jamais  concevoir  qu'il  se  présen- 
tait à  lui  une  gloire  plus  réelle  , 
qui  pouvait  l'élever  au  rang  des 
plus  grands  hommes  d'étal,  et  un 
moyeu  illustre  de  s'acquitter  en- 
vers leurs  majestés  de  tout  ce  qu'il 
leur  devait  en  régénérant  la  na- 
tion espagnole  au  nom  du  roi,  en 
aiTermissaiit  sur  des  hases  consti- 
tutionnelles son  trône  si  menacé 
par  les  tempêtes  politiques  qui 
l'avoisinaient,  et  en  rattachant  à 
jamais  ses  immenses  colonies,  en 
les  appelant  à  participer  à  ce  nou- 
vel ordre  de  choses.  Au  lieu  de 
suivre  ce  noble  conseil ,  auquel 
les  autres  ministres  avaient  donné 
leur  assentiment,  le  prince  de  la 
l'aix  continua  d'abuser  de  son 
crédit,  d'en  mépriser  l'auguste 
source,  et  l'ut  ainsi  au-devant 
d'une  disgnice  qui  eût  été  terri- 
ble sans  la  généiitsilé  des  minis- 
tres, qui  ohlinrent  du  roi  de  bor- 
ner une  vengeance  éclatante  à  un 
simple  éloignement  des  aftain;s  ; 
il  lui  l'ut  même  perniisde  paraître 
quelqiiet'ois  à  la  cour.  Funeste 
générosité  sous  le  rapport  de  la 
politique,  et  qui  bientôt  décon- 
certa tous  les  projets  de  régéné- 
ration, en  laissant  à  cet  ex -pre- 
mier ministre  les  moyens  de  re- 
conquérir, [)ar  sa  présence  à  la 
cour  et  ses  intrigues,  un  pouvoir 
(|ue  la  nation  abhorrait,  et  qui  fut 
une  des  principale-  causes  de  tous 


TRU  90 

les  malheurs  de  Charles  IV  et  de 
la  reine.  L'ambassadeur  ïruguel, 
a{)rès  la  chute  du  favori,  se  lia 
intimement  avec  les  ministres  , 
qui  tous  furent  d'avis  de  commen- 
cer par  assimiler  le  tribmial  de 
l'inquisition,  quant  A  sa  publicité, 
avec  les  autres  tribunaux  du 
royaume.  C'était  en  eilel  détruire 
son  infernale  autorité  ;  ensuite 
d'abolir  les  majorais;  enfin,  l'éta- 
blioscmenld'un  gouvernement  re- 
présentatif et  constitutionnel  qui 
n'aurait  })aru  d'abord  que  le  retour 
des  belles  et  antiques  institutions 
nationalessi  chères  mtx  Castillans, 
et  que  le  despotisme  et  le  fanatis- 
me avaient  seids  dégradées,  mais 
toutefois  en  l'appelant  ces  antiques 
certes.  Tous  les  hommes  éclairés 
étaient  d'avis  de  les  modifier  con- 
formément à  l'esprit  du  18*  siè- 
cle ,  et  à  la  politique  de  l'Europe. 
La  disgrâce  du  prince  de  la  Paix, 
désirée  si  ardemment,  étant  con- 
sommée, elle  ne  forma  plus  qu'un 
vœu.  celui  d'une  constitution  na- 
tionale. Cette  généreuse  conces- 
sion, venant  du  trône,  se  serait 
opérée  sans  convulsion,  sans  ver- 
ser une  goutte  de  sang,  et  l'on  eût 
vu  en  très-peu  detemj)S  une  régé- 
nération dans  le  commerce  et  l'a- 
(^riculture,  une  nouvelle  circula- 
tion d'immenses  capitaux  enfouis 
depuis  bien  long-temps;  une  union 
à  jamais  dural>le  entre  les  colonies 
heureuses  et  la  métropole  enri- 
chie ,  onauraitvueufm  la  royauté 
.légitiuje  et  cmstitutionnelle  don- 
nant ù  tout  une  vie  nouvelle,  et 
s'atferniissant  à  jamais  :  quels  a- 
vantages  la  France  ne  dev.iit-ellc 
pas  retirer  de  sa  nouvelle  alliance 
avec  une  nation  libre  sons  un  gou- 
vernen>eut  monarchique,  sage  et 


fort,  qui  pouvait  de  plus  en  plu» 
auguieiiter  sa  uiarine,  et  olï'rir  de 
iiouvelici  forces  pour  consolider 
la  liberté  des  mers.  Mais  le  direc- 
toire, bien  loin  d'acx'ueillir  et  de 
proléger  son  ambassadeur  dans 
rexéculion  de  ce  plan,  ne  s'occu- 
pait qu'à  se  défendre  des  factions, 
qui  toutes  l'accusaient  de  nos  re- 
vers en  Italie,  qu'il  n'avait  pas  su 
prévenir,  et  dt;  favorit-er  des  spo- 
îiatioiis  qui  lai;-sair.nt  nos  soldats 
dans  la  misère.  L'Espagne  parut 
une  nouvelle  proie  à  ces  spolia- 
teurs eirréués.  On  vit  arriver  à  Ma- 
drid des  intrigans  se  disant  agens 
du  directoire  à  l'insu  de  l'ambassa- 
deur, mais,  à  ce  qu'on  prétend,  pro- 
tégés sous  main  par  son  secrétaire 
d'ambassade  :  l'un  d'eux,  revêtu 
d'un  costume  de  commissaire  du 
gouvernement,  se  présente,  de- 
mandeau  ministreespagnol desau- 
diences,  en  obtient  une  furtive- 
ment, où  il  exige  les  fournitures 
générales  des  armées  de  terre  et 
de  mer,  et  à  ce  prix,  il  promet  la 
protection  la  plus  spéciale  du  di- 
rectoire français.  Cet  agent,  d'o- 
rigine espagnole,  avait  encore  con- 
tre lui  une  condamnation  infa- 
mante par  contumace.  On  ne 
pourrait  croire  à  una  telle  dé- 
mence, si  on  n'avait  su  depuis 
que  les  résultats  de  cette  auda- 
cieuse fi)urberie  devait  produire 
des  millions  aux  protecteurs  et 
aux  protégés.  L'auibassadeur  s'en 
plaignit  an  directoire,  dont  ces 
misérables  osaient  emprunter  le 
nom,  et  il  ajouta  qu'en  attendant 
sa  réponse,  qui  ne  pouvait  être 
douteuse ,  il  allait  les  dénoncer  au 
roi,  pour  les  faire  arrêter  et  les 
faire  poursuivre  devant  les  tribu- 
naux. Ils  avaient  pris  la  fuite.  Le 


TftU 

directoire  approuva  lu  conduit» 
de  l'imibassadeur  ;  mais  peu  de 
temps  après,  il  fut  rappelé,  et  sou» 
divers  prétextes,  exile  de  Franco 
cviinx\c  émigré,  lui ,  son  secrétaire 
particulier  et  toutes  les  personnes 
de  sa  suite.  L'amiral  avait  choi- 
si la  Hollande  pour  le  lieu  de  son 
exil  ;  il  y  fut  accueilli  ;  on  le  com- 
bla d'égards.  11  avait  eu  pendant 
son  ministère  de  hautes  relation» 
avec  les  hiinislres,  les  amiraux  cl 
généraux  bataves.  Il  avait  même 
été  très-utile  à  ce  gouvernement 
pendant  la  durée  de  son  ambas» 
sade.  Cet  exil  dura  neuf  mois.  Lne 
nouvelle  révolution  dans  le  direc- 
toire le  rappela  à  l'aris,  et  ce  fut 
deux  moisaprèsson  retour  quel'on 
apprit  le  débarquementà  Fréjusdu 
général  en  chef  Bonaparte,  venant 
d'Egypte.  I5onaparte,non>mé  con- 
sul, lui  olfrit  le  ministère  de  la 
me"  ri  ne.  Il  l'efil  accepté  par  dé- 
vouement à  celte  marine  qui  avait 
tant  de  secours  à  réclamer,  s'il 
n'eût  reconnu  ,  après  plusieurs 
entrevues  particulières  avec  le 
premier  consul,  la  diversité  de 
leurs  principes  sur  Saint-Domin- 
gue, et  la  différence  de  leurs  opi- 
nions sur  quelques  personnage? 
qui  avaient  trahi  sa  confiance  pen- 
dant son  ministère,  et  que  le  con- 
sul voulait  employer.  Il  refusa 
donc  ce  ministère;  mais  il  crut 
devoir  ne  pas  refuser  celle  de  con- 
seiller -  d'elal  ,  fonctions  qu'il  a 
exercées  pendant  quatre  ans.  Il 
reçut,  en  1802,  le  commande- 
ment de  l'armée  navale  combinée 
réunie  à  Cadix,  avec  le  litre  émi- 
nenl  d'amiral  en  chef,  qui  com- 
j)or  tailles  attributions  de  ministre. 
Le  général  en  chef  Bonaparte,  qui 
avait  laissé  l'Lgyple  sous  le  com- 


mnndfinenl  du  brave  Rfébcr,  gai-  trop  confians  dans  les  fjvantage» 
Hait  l'espoir  de  la  conserver,  en  de  ce  repos  et  dans  le  gétiie  de 
lui  envoyanl'de  grands  secours  Napoléon  ,  auraient  livré  leurs 
de  France.  Appelé  au  consulat,  capitaux,  leurs  marcliandiscs  et 
et  ayant  tous  les  moyens,  il  fit  leurs  vaisseaux  à  l'Océan.  Ils  les 
plusieurs  tentatives  qui  n'eu-  livrèrent  ainsi  à  la  cupidité  an- 
rent  aucun  succès;  il  ne  put  mê-  glaise,  qui,  avant  la  fin  de  l'an- 
nie  faire  parvenir  des  renforts  à  née  ,  déclara  à  l'improviste  la 
Malle.  Lorsqu'il  apprit  l'assassi-  guerre  à  la  France.  C'est  à  l'épo- 
nat  de  Kléber,  remplacé  par  le  que  do  celte  paix  d'Amiens  que 
général  le  plus  ancien  après  lui  l'amiral  revint  à  Taris,  après  avoir 
(  le  général  iMenou  )  ,  plein  de  reçu  l'ordre  d'envoyer  A  Saint- 
bravoure ,  sans  doute,  mais  bien  Domingue  une  partie  de  ses  vais- 
inférieur  i\  la  lâche  qui  lui  était  st-aux  avec  les  troupes  françaises 
imposée,  il  pressentit  alois  que  qui  étaient  à  Cadix  ,  pour  aller  se 
celle  conquéle  allait  lui  échapper  ranger  sous  les  ordres  du  général 
s'il  n'organisait  à  la  hâte  de  puis-  en  chef  Leclerc.  Celte  paix  valut 
sans  secours.  Il  se  défern)ina  en  bientôt  à  l'Angleterre  l'entière  in- 
conséquence à  envo^'er  l'amiral  dépendance  de  Saint-Domingue, 
Truguet  prendre  le  commande-  que  le  premier  consul  Bonaparte 
ment  en  chef  des  forces  combi-  voulut  conquérir  au  profit  de  l'es- 
néesiHIadix,  où  devaient  se  rallier  clavage,  avec  une  armée  d'élite, 
bienlôt  à  son  pavillon  amiral  l'es-  quand  cette  colonie  appartenait 
cadre  de  Linois  ,  celle  de  Gan-  constitulionnellement  à  la  France; 
leauine,  et  enfin  celle  de  Decrès  ,  celte  impolitiqneet  injuste  guerre 
qui  avait  reçu  l'ordre  de  rempia-  lui  fut  suggérée  par  des  conseillers 
rer  à  Rr)cheforl  l'amiral  Brnix,  perfides  qui  l'emportèrent  sur  ton- 
qu'nne  maladie  sni)ite  avait  forcé  les  les  instances  de  Trnguel  pour 
de  renon^-er  \  son  commande-  l'en  détourner.  Ce  qu'il  avait  pré- 
inenl.  Si  «le  pareilles  mesures  a-  dit  n'arriva  malheureusement  que 
valent  été  prises  plus  tôl,  il  est  trop  tôt.  Nous  perdîmes  notre  ar- 
vraisemblablc  que  l'Egypte,  Mail»;  niée,  nos  marins  et  la  colonie  la 
et  toule  la  Méditerranée  restaient  ]>lns  riche  du  monde;  ses  pro- 
à  la  France.  C'est  au  milieu  de  ce  il!iils,son  industrie,  ses  échanges, 
grand  mouvement  d'escadres  ,  tout  fut  perdu  pour  la  France, 
dont  le  rendez-vous  général  était  Fnûii  la  guerre  étant  déclarée  par 
dans  le  port  de  Cadix,  que  l'on  l'Angleterre  (en  1804),  lionapar- 
apprit  la  capitulation  de  l'armée  te  ordonna  la  construction  d'une 
française  en  Fgyplc.  Celle  cir-  immense  flottille  i\  Boulogne ,  et 
constance  si  f.ivorable  a  l'An-  lui  creusa  des  ports  dans  le  sable 
glelcrre  la  détermina  à  accep-  pour  la  contenir;  mais  il  fallait 
1er  la  paix.  Paix  désastreuse!  qui  en  même  tetns  organiser  une  ar- 
devait  être  incessamment  roni-  méc  navale  à  Brest.  Celle  organi- 
pue  par  l'Angleterre,  et  comme  .«ation  d'une  armée  qui  devait 
beaucoup d'hoirmies  sages  le  pré-  transporter  vingt  mille  hommes 
voyaient,  quand  nos  négociuii* ,  commandés  par  le  général  Auge- 


reau,d«:puis  maréchuldc  l'enipiri;, 
fut  confiée  àTruguet.  Elle  lut  bien- 
tôt équipée,  soumise  à  la  plus 
exacte  discipline  et  à  des  régle- 
mens  de  service  pour  tous  les  gra- 
des. L'union  entre  les  chefs  de 
terre  et  de  mer  établit  s«ir  la 
flotte  une  harmonie  parfaite  ,  et 
jusque-là  peut-être  sans  exemple. 
Les  opérations  importantes  de 
cette  armée,  composée  de  vingt- 
deux  vaisseaux  de  ligne,  auxquels 
pouvaient  aisément  se  rallier,  par 
une  bonne  manœuvre,  les  esca- 
dres de  Rochefort  et  de  la  Co- 
rogne,  étaient  concertées  secrète- 
ment entre  l'amiral  et  le  premier 
con.->ul,  ([ui  lui  avait  déjà  écrit  que 
la  floltille  sous  les  ordres  de  l'ami- 
ral Bruix  était  prête. Trugiiet  n'at- 
tendait donc  que  l'ordre  du  dé- 
part, et  la  marine  pouvait  espérer 
d'effacer  à  jamais  le  souvenir  de 
tant  de  fautes  ,  de  tant  de  revers , 
et  reconquérir  son  puissant  ascen- 
dant dans  la  politique  de  l'Eu- 
rope, lorsqu'on  apprit  à  Brest, 
par  dépêches  télégraphiques  et 
par  courriers  extraordinaires,  que 
Napoléon  voulait  se  faire  procla- 
mer empereur,  en  se  soumettant 
toutefois  au  vœu  spontané  de  ses 
généraux  de  terre  et  de  mer.  L'a- 
miral Truguet,  animé  par  d'au- 
tres principes  et  d'autres  senti- 
mens  politiques  que  les  généraux 
commandans  les  corps  d'armét: , 
crut  devoir  refuser  d'approuver 
cet  acte  d'ambition  qui  livrait  la 
France  à  une  nouvelle  dynastie. 
Il  s'efforça  cependant,  et, il  par- 
vint à  prévenir  toute  discorde  que 
son  refus  pouvait  allumer,  et  qui 
serait  devenue  mille  fois  plus  dan- 
gereuse à  Brest  que  partout  ail- 
leurs.   Il  fut  à  l'instant  destitué 


TilU 

par  le  nouvel  empereur,  du  com- 
mandement de  l'armée  qui  était 
déjà  prête  à  mettreà  la  voile;  Napo- 
léon n'eut  plus  qu'une  seule  pen- 
sée ,  celle  de  faire  reconnaître  su 
couronne  par  les  puissances  de 
rEur;>pe.  L'effet  de  son  njéconten- 
tement  contre  Truguet  fut  tel,  qu'il 
lui  ôta  toutes  ses  places,  et  l'effaça 
même  de  lalistedesgrand>-ofllcier» 
de  lalégion-d'honnenr,  lui  qui  déjà 
avait  été  désigné  pour  être  maré- 
chal de  l'empire.  Truguet,  satis- 
fait du  témoignage  de  sa  cons- 
cience, satisfait  d'avoir  pu  rem- 
plir dans  une  circonstance  si  im- 
portante plusieurs  grands  devoirs, 
ne  regretta  que  de  se  voir  arra- 
cher la  gloire  personnelle  qu'il 
pouvait  espérer  d'acquérir  avec 
une  si  belle  armée  navale,  si  bien 
organisée,  et  un  corps  de  soldais 
si  braves,  en  exécutant  des  plans 
d'opérations  d'une  si  haute  im- 
portance. Il  regretta  surtout  de 
voir  ajourner  peut-être  indéfini- 
ment la  gloire  de  la  marine  mili- 
taire de  France ,  qui  se  trouvait 
alors  dans  une  attitude  respecta- 
ble, possédant  de  si  braves  offi- 
ciers et  des  marins  si  exercés.  Il 
se  voua  à  la  retraite  la  plus  abso- 
lue, emportant  les  regrets  de  tous 
les  corps  qui  assistèrent  à  son  dé- 
part de  Brest  :  regrets  bien  réels 
et  exprimés  d'une  manière  aussi 
touchante  qu'honorable.  11  put 
jouir  dans  sa  retraite  du  souvenir 
consolant  d'avoir  fait,  pendant  le 
consulat,  tout  le  bien  qu'il  avait 
dépendu  de  lui  de  faire  à  sa  pa- 
trie, en  s'opposant  de  toutes  ses 
forces  au  système  de  ruine  adopté 
sur  Saint-Domingue  ,  dont  il  était 
si  facile  de  prévoir  l'horrible  ca- 
tastrophe; en  ne  cessant  de  com- 


TRL 

baltre  ces  monstrueux  et  ruineux 
travaux  d'uncflottille  dont  les  cons- 
tniclions  hasardées  et  vicieuses  ne 
pouvaient  atteindre  le  but  qu'on  se 
proposait;  soit  enfin  en  présentant 
au  premier  consul  le  seul  plan  de 
guerre  que  l'on  pût  adopter  con- 
tre  l'Angleterre    pour   conserver 
l'Kgypte,   IMtiIle,  et  ruiner  cette 
puissance  dans  ses  colonies  occi- 
dentales et  dans  son  vaste  empire 
indien;   plans   qui,   pendant  son 
ministère,  t'urcnt  sans  cesse  en- 
través, mais  qui  ne  pouvaient  que 
réussir  sous  une  autorité  unique 
qui  disposait  de  beaucoup  d'ar- 
gent et  de  beavicoup  de  soldats. 
(Je  l'ut  après  avoir  laissé  l'amiral 
Truguet  pendant  quatre  ans  dans 
«me  défaveur  absolue,   que   Na- 
poléon ,     croyant    avoir    encore 
besoin   de   ses   services,    le    rap- 
pela,   et   après  lui    avoir  confié 
les  débris  de  l'armée  navale   de 
Kochefort  ,    en   partie   incendiée 
devant  l'île  d'Aix  par  les  machi- 
nes infernales  des  Angbus  ,  lui  re- 
tira   ce   commandement   peu    de 
mois  après,   pour  lui  confier  la 
haute  administration  maritime  de 
totite   la  Hollanile,  qu'il  lui  dé- 
signa comme  un  petit  minisière. 
Truguet,  heureux  de  pouvoir  en- 
core servir  sa  patrie  et  les  Hol- 
landais ,    qu'il   chérissait   depuis 
long-temps ,  accepta  une  place  où 
l'on  pouvait  faire  tant  de  bien,  et 
certes  ,   sans   conditions   et  avec 
un    désintéressement    remarqua- 
ble; car  Napoléon,  en  lui  impo- 
sant  de   nouveau  une   si   pénible 
tâche,  ne  lui  restitua  ni  sa  place 
uu  conseil-d'élat,  où  il  avait  siégé 
quatre  ans,  ni  aucim  des  titres, 
cordons  et  dotations,  qu'il  avait 
donnés    en   abondance  aux  nmi- 


TRU  .  io3 

raux  ù  l'époque  de  sa  disgrûce  et 
pendant  toute  sa  durée.   Pendant 
trois  ans  qu'il  a  administré  la  ma- 
rine en   Hollande,  l'amiral  Tru- 
guet  n'a  cessé  d'employer  tous 
ses  efforts  et  tous  les  moyens  d'es- 
time dont  il  jouissait  pour  affai- 
blir les  effets  de  l'oppression  et  de 
l'arbitraire,  dont  on  accablait  ce 
peuple  devenu  français; pour  pro- 
téger son  industrie  en  dévelop- 
pant ses  pê(îheries  sous  le  blocus 
le  plus  rigide  ;  pour  lui  donner 
enfin ,  en  l'absence  de  ses  colo- 
nies ,  tous  les  moyens  possibles 
d'existence  et  de  bénéfices.  La  re- 
connaissance de  ses  nombreux  ad- 
ministrés l'ont  bien  souvent  dé- 
dommagé de  ses  pénibles  sollici- 
tudes. Enfin  i\  l'époque  de  la  ré- 
volution hollandaise,  en  novem- 
bre   i8i3,  qui   appela   le  prince 
d'Orange,  il  ne  balança  pas,  lors- 
que toutes  les   grandes  autorités 
se  retiraient,  i\  rester  h  son  poste 
au  péril  de  sa  fortune,  de  sa  li- 
berté et  de  sa  vie,  pour  le  salut 
de  la  flotte  du  Texel,  sous  les  or- 
dres du  brave  Verhuell  [voyez  ce 
nom),  soit  pour  protéger  tant  de 
Français  que  leurs  chefs  avaient 
abandonnés  ,  soit  pour  conserver 
les  chantiers  et  arsenaux  menacés 
d'incendie  dans  la  première  fré- 
nésie révolutionnaire.  C'est  ainsi 
qu'il   a   peut-être   puissamment 
contribué  à  sauver  la  ville  même 
d'Amsterdam,  en  sac'hant  par  sa 
persuasion  ,    et  surtout   par  son 
autorité ,  qui  ne   fut  jamais  mé- 
connue dans  ce  désordre,  conte- 
nir sur  les  chantiers  et  occuper 
de  leurs  travaux  accoutumés  plu- 
sieurs  njilliers   d'ouvriers  ,  dont 
l'Insurrection  eût  mis  le  combk 
i\  l'anarchie  populaire ,  qui  déjù 


io4 


ITtU 


avail  porto   la   fluiiime   »ur   plu- 
kieurs  maison.  C'est  aussi  pyr  la 
sagesse  de  ses  conseils  et  par  l'in- 
fluence que  toute  sa  conduite  lui 
avail  acquise  auprès  de»  indivi- 
dus   nouvellement    revêtus    des 
pouvoirs  du  prince  d'Orange,  que 
l'on  attendait  à  La  Haye,  qu'il  a 
prévenu  l'elFusion  du  sang  fran- 
çais.   Tant    de    généreux    eflorts 
lui  luérilaient  une  meilleure  des- 
tinée   Dès  qu'il  apj)rit  le  dé- 
barquement du  prince  d'Orange, 
i!  demanda  des  passeports,  qui  lui 
lurent  donnés  avec  l'ordre  ù  tou- 
tes les  autorités  de  respecter  sa 
jiersonne,  et  particulièrement  aux 
autorités  du  port  de  Rotterdam, 
de  lui  donner  le  yactli  de   l'état 
pour  son  passage  en  France.   On 
embarque  en  eliet  ses  bagages  sur 
le  yaclh.  Le  vice-amiral,  naguère 
sous  ses  ordre»,  qui  commande 
ces  chantiers,  le  reçoit ,  l'accueil- 
le ,  lui  donne  à  dîner.  Tranquille 
dans  un  lieu  fermé  par  des  grilles, 
il  attend  la   nuit  close  et  l'heure 
de   la    marée    pour    traverser  la 
ftieuse.    Qui   pourrait   le   croire  ! 
c'est  à  la  nuit  close   qu'on  ouvre 
les  grilles  du  port  à  un  parti  de 
Cosaques  réguliers,  qui  s'em[)are 
de  sa  personne  et  de  tous  ses  ba- 
gages. Il  proleste  contre  une  pa- 
reille violation  du  droit  des  gens, 
puisqu'il  représentait  des  otages 
enlevés  pour  sa  sûreté  à  Dtrecht, 
et  qu'il  devait  renvoyer  de  l'autre 
rive   de    la    Meuse  ;    c'était    une 
étrange  violation  du  droit  d'hos- 
pitalité accordé  par  le  gouverne- 
ment provisoire  du  prince  d'O- 
range. Rien  ne  put  convaincre  ces 
Cosaques,  qui,  après  s'être  emparé 
de  tous  ses  effets,  l'entraînèrent; 
mais  les  autorités  d'Amsterdam, 


cédant  ù  lu  générosité  de  leur  cn- 
ractère,  se  rendirent  en  toute  hâte 
auprès  du  print.e  pour  réclamer 
la  garantie  qu'elles  avaient  donnée 
en  son  nom.  En  conséquence,  te 
prince,  voulant  ratifier  tout  ce  qui 
avait  été  lait  en  son  nom,  envoya 
sur-le-champ  des  ordres  précis 
pour  le  retirer  des  mains  des  Co- 
saques, ainsi  que  tout  ce  qu'il» 
avaient  enlevé  du  yactii.  On  re- 
lira de  leurs  mains  ce  que  l'on 
put;  mais  l'amiral  fit  néanmoins 
mie  perte  Irès-considérahie.  Ar- 
rivé ù  La  Haye,  il  y  demeura  sous 
la  protection  du  prince  royal,  non 
comme  prisourii«'r,  mais  comme 
otage,  en  attendant  un  échange  : 
les  otages  prisa  Utrechl  a  valent  été 
transféré?  à  Paris.  Au  mois  d'avril 
18 14»  on  apprit  l'entrée  des  alliés 
dans  Paris  et  l'abdication  de  l'em- 
pereur; ramiral  Truguet  put  alors 
se  mettre  en  route  pour  la  Fran- 
ce. Au  mois  de  mai ,  Louis  XVIII 
le  rétabliten  activité  de  serviceà  la 
lête  i\n  corps  de  la  marine.  Pen- 
dant les  cent  jours,  en  181  5,  il  ne 
reput  de  Napoléon  ni  missions,  ni 
faveurs,  ni  aucun  témoignage  de 
bienveillance  personnelle,  et  ce- 
pendant il  avail  rempli  les  devoir» 
que  Ihonneur  lui  avait  imposé», 
au  péril  de  sa  foi  tune,  de  sa  li- 
berté et  de  sa  vie,  jusqu'au  mo- 
ment de  l'abdication.  A  la  seconde 
restauration  ,  et  dès  le  mois  de 
juillet  (181 5),  il  lui  fut  ordonné 
par  le  roi  de  se  rendre  à  Brest , 
avec  l'ordre  formel  de  garantir 
contre  toute  agression  ,  toute  sur- 
prise et  toute  occupation  étran- 
gère, les  immenses  richesses  na- 
tionales renfermées  dans  ce  pre- 
mier port  du  royaume  ;  il  en  de- 
venait (disaient  ses  instruclions)  » 


TRU 

respon?able  au  rot  et  i  la  nation. 
Les  Prussiens,  que  l'on  poiivail 
croire  les  instriimens  passifs  d'une 
autre  puissance,  étaient  déjà  ar- 
rivés à  Reunes,  et  se  liûlaient  de 
se  rendre  à  Brest.  L'amiral  Tru- 
guet  les  dépassa  ,  et  arriva  en 
toute  hâte  dans  ce  port,  où  il  prit 
à  l'instant  et  sans  discontinuer 
lotîtes  les  mesures  propres  à  l'aire 
respecter  et  conserver  intact  ce 
riche  dépôt  qui  lui  était  confié. 
Louis  XVIII  appréciant  les  ser- 
vices que  Truguet  avait  rendus 
à  la  France  sous  le  règne  de 
Louis  XVI,  et  tous  ceux  qu'il 
rendit  depuis  en  qualité  de  mi- 
nistre de  la  marine ,  de  com- 
luandant  d'armées  navales,  elc  , 
répara  les  injustices  dont  il  a- 
vait  été  souvent  victime  dans 
^a  longue  carrière  militaire,  ad- 
ministrative et  politique,  en  lui 
conférant  les  dignités  de  grand' 
croix  des  ordres  de  Saint-Louis 
et  de  la  légion-d'honneiir,  et  le 
titre  de  comte;  en  l'élevant  enfin 
à  la  pairie  le  5  mai  1819.  L'ami- 
ral ne  pouvait  mieux  mériter  ni 
mieux  justifier  cette  dernière  fa- 
veur du  roi,  qu'en  s'appliquant 
constamment  à  éclairer  la  cham- 
hre  et  le  ministère  sur  les  plus 
chers  intérêts  de  l'état  ,  sur  les 
moyens  de  régénérer  la  marine 
royale.  On  l'a  vu,  à  l'époque  de 
chaque  budget  ,  solliciter  non- 
seulement  un  surcroît  de  fonds  si 
indispensable ,  mais  encore  pré- 
senter tous  les  moyens  de  les  uti- 
liser avec  fruit,  en  pressant  les 
nombreux  ministres  qui  se  sont  si 
rapidement  8uc<;édés  ,  d'adopter 
les  institutions  qui  seules  peuvent 
assurer  les  succès  de  nos  opéra- 
tion», c'est-à-dire  en  simplifiant 


TRU  loi 

l'orf^anisation  des  ports  sous  l'au- 
torité unique  d'un  seul  amiral  res- 
ponsable, en  créant  des  équipage» 
de  ligne  pris  dans  le  contingent 
de  la  loi  du  recrutement,  en  don- 
nant une  meilleure  éducation  aux 
élèves  de  la  marine  soumis  à  un 
concours  pour  leur  admission,  et 
réunis  dans  les  ports  et  non  à  An- 
goulême,  en  réclamant  enfin  un 
cor)seil  d'amiraux  qui  pût,  par  sa 
bonne  composition,  préserver  le 
département  de  la  marine  de  tant 
<]('.  nouveaux  systèmes  ,  de  tant  de 
fausses  et  ruineuses  opérations  , 
produits  inévitables  de  cette  suc- 
cession si  rapide  de  ministres 
étrangers  au  service  de  la  marine. 
Il  a  pu  proclamer  à  la  même  tri- 
bune sa  reconnaissance  et  son  ad- 
miration pour  Louis  XVI .  deux 
fois  régénérateur  de  la  mariu«  et 
fondateur  du  magnini|iie  pcu-t  de 
Cherbourg  ;  conception  si  bril- 
lante et  si  utile  à  la  France,  que 
son  gouvernement  commettrait 
une  grande  faute  de  négliger  son 
achèvement,  et  montrerait  une 
véritable  ingratitude  si  on  refusait 
de  donner  à  ce  port  le  no-m  de 
Louis  XVI.  L'amiral  Truguet  en 
a  fait  la  proposition  dans  la  ses- 
sion de  i8'2/|.  Dans  cette  même 
année,  il  ofl'rit  à  Louis  XVIil 
un  travail  de  sa  jeunesse  pen- 
dant sa  longue  mission  à  Cons- 
tantinople.  Ce  sont  les  cartes  ma- 
rines levées  astroriottliqncment 
par  lui,  commandant  alors  un>i 
corvette  du  roi ,  des  mers  de  l'Ar- 
chipel, de  IMarmara,  du  Hosphore 
et  de  l'entrée  de  la  mer  Noire. 
Tel  on  a  vu  Truguet  au  conimen- 
rement  de  sa  carrière,  tel  on  le 
voit  encore  aujourd'hui,  en  i8'i~>. 
après    de*    services   effectif»    en 


io6 


TRC 


si  graiid  nombre,  sans  cesse  oc- 
cupé de  l'ulilité  et  des  succès  de 
la  marine,  à  la  têle  de  laquelle  il 
se  trouve,  et  aussi  capable  qu'il 
l'était  il  y  a  vingt  ans,  de  com- 
mander les  armées  navales.  L'a- 
miral Truguet  a  constamment 
présente  à  la  pensée  celle  opinicm 
de  Louis  XVI,  le  véritable  res- 
taurateur de  la  marine,  qui  ne 
cesiiait  de  répéter  qu'il  la  croyait 
indi!>pens;ible  à  la  richesse  et  à  la 
puissance  de  la  France  ,  ainsi  qu'à 
la  gloire  personnelle  de  ses  rois. 
La  vie  politique  et  privée  du  com- 
te Trugwet  est  celle  d'un  homme 
de  bien  et  d'un  citoyen  distin- 
gué. Il  a  figuré  constamment  avec 
honneur  dans  le.^  premières  digni- 
tés de  son  pays,  et  il  recueille 
chaque  jour  le  tribut  d'estime  et 
de  considération  attaché  à  cette 
.  longue  carrière  de  services  utiles 
et  irré|)rochahlcs,  que  pendant  un 
demi-siècle  il  a  rendus  à  sa  patrie. 
TRLLLARD  (N.  ),  ingénieur, 
convenliormel,  etc.,  se  montra, 
dès  le  commencement  de  la  révo- 
cation, dévoué  auxnou  veaux  prin- 
cipes. Au  mois  de  septembre  1 792, 
le  déparlem<;nt  de  la  Côte-d'Or, 
qu'il  habitait,  le  nomma  député 
à  la  convention  nationale.  Il  ne 
s'y  fil  remarquer  qu'à  Tépoque  du 
procès  du  roi,  dans  lequel  il  vota 
avec  la  majorité.  Cette  année  mê- 
me («795)  il  fut,  avec  son  collègue 
Berlier  (ccj.  ce  nom),  envoyé  à 
l'armée  du  Nord  pour  y  veiller  à 
la  remonte  de  la  cavalerie.  M. 
Trullard  était  à  la  levée  du  siège 
de  Dunkerque,  dont  il  fit  connaî- 
tre la  nouvelle  à  la  convention 
nationale;  il  fit  hommage  à  celte 
assemblée  d'un  boulet  de  six  li- 
vres, qui  avait  passé  par-dessus 


TRI) 

sa  tCte.  N'ayant  point  été  porté  à 
l'un  ou  l'autre  conseil  lors  de  la 
réélection  des  deux  tiers  des  mem- 
bres de  la  convention  ,  ni  élu  pos- 
térieurement, il  disparut  de  la 
scène  politique.  Le  dircctoire-exé- 
cnlif  l'employa  ppu  après  en  qua- 
lité de  commissaire;  mais  depuis 
celte  époque,  on  l'a  totalement 
perdu  de  vue. 

TllUPHÉMI  (N.  ) ,  boucher  à 
Nîmes,  s'est  acquis  une  affreuse 
célébrité  par  la  part  qu'il  a  prise, 
en  i8i5,  aux  massacres  qui  ont 
porté  l'effroi  dans  les  contrées  du 
Midi  ;  son  nom ,  associé  à  ceux  de 
Servant  et  de  Trestaillous,  inspire- 
ra la  même  horreur,  et  accusera 
conslamment  l'inexplicable  con- 
duite des  autorités,  qui  semblaient 
paralysées  an  milieu  du  sang  qui 
coulait  autour  d'elles.  Truphémi, 
traduit  en  novembre  1819,  après 
quatre  ans  d'impunité,  devant  la 
cour  d'assises  de  Kiom  ,  départe- 
ment du  Puy-de-Dôme,  était  ac- 
cusé d'avoir  massacré,  le  1"  avril 
181 5,  un  ofiicier  en  retraite  nom- 
mé Bourillon,  professant  la  reli- 
gion réformée;  l'instruction  et  les 
débats  prouvèrent  la  moralité  de 
la  victime,  et  l'âme  atroce  du 
bourreau,  qui,  en  plein  jour,  ar- 
rache un  citoyen  paisible  des  bras 
de  sa  femme,  l'entraîne  sur  une 
place  publique  avec  des  circons- 
tance d'une  atroce  dérision ,  et 
retend  mort  à  ses  pieds,  en  le 
frappant  de  plusieurs  coups,  à  la 
vue  des  citoyens  épouvantés;  puis 
conservant  un  imperturbable  sang- 
froid,  il  s'empare  du  chapeau  de 
sa  victime,  parce  qu'il  le  croit 
meilleur  quelesien.  Lecrimeétait 
avéré,  les  circonstances  en  étaient 
effroyables,  on  invoquait  le  té- 


TRY 

inoiguage  d'une  ville  entière; 
l'avocat  (le  Truphéini ,  nommé 
d'office  pour  le  détendre,  ne  pou- 
vait rien  contester  ;  il  senlit,  com- 
me l'avocat  de  Servant,  que  ce 
Ibrlait  tombait  de  plus  haut,  et 
il  se  réduisit,  comme  lui,  à  de- 
mander aux  juré?  :  «  Si  lorsque 
\cà  provocations  étaient  impunies, 
les  agens  devaient  être  frappés; 
cl  s'ils  écraseraient  \c  ver  de  terre, 
tandis  que  \csserpetis  continuaient 
à  lever  une  tête  menaçante.  »  La 
déclaration  unania)e  du  jury  con- 
damna à  mort  Truphémi ,  qui  se 
[lourvut  en  cassation.  Un  vice  de 
l'orme  fil  armuller  la  procédure  , 
et  renvoyer  le  coupable  devant  la 
cour  d'assises  de  Valence.  Son  cri- 
me, semblable  à  celui  de  Servant, 
qui  subit  la  peine  de  mort ,  y  fut 
considéré  d'un  autre  oeil  ;  il  fie 
fut  condanmé  qu'à  la  peine  des 
travaux  forcés  à  perpétuité.  Tou- 
jours plein  de  confiance  en  ses 
prolecleurs,  il  a  interjeté  appel  de 
ce  second  jugement  ;  mai>*  son 
pourvoi  n'ayant  pa^  été  admis, 
le  jugement  a  élé  mis  à  exécution, 
et,  le  '^y  avril  i8io,  Trupliémi  a 
été  exposé  Pi  flétri.  Il  n'est  pcul- 
êlre  pas  inulile  d'observer,  pour 
faire  ci'nnaître  à  quels  excès  peut 
^e  porter  le  fanatisme  religieux  , 
que  cet  assassin,  au  moment  de 
son  arrestation,  fut  regardé  com- 
me un  martyr  de  la  foi  catholique; 
les  dév()tes  do  Nîmei*  firent  une 
quête  en  sa  faveur,  et  le  recom- 
mandèrent aux  prières  de  l'église. 
TKV  (Ukrtra?«d),  président  du 
tribunal  de  première  instance  de 
l'.iris.  membrt'  de  la  chambre  des 
députés,  chevalier  de  la  légion- 
d'honueur ,  naquit  à  Pari?  le  f)  fé- 
vrier 1754.  Il  lit  ses  études  pour 


TRY  107 

suivre  la  carrière  du  barreau,  et 
devint  successivement  avocat  au 
parlement  et  aux  conseils  du  roi. 
Une  année  avant  la  révolution,  il 
avait  été  reçu  conseiller  au  Châ- 
telet.  Pendant  nos  troubles  civils 
il  évita  de  se  mettre  en  évidence, 
et  échappa  ainsi  au  régime  de  la 
terreur.  Sous  le  geuvernement 
consulaire,  et  lors  de  la  réorga- 
nisation des  tribunaux,  en  1800, 
M.  Try  fut  nommé  substitut  du 
commissaire  du  gouvernement 
près  le  tribunal  d'appel  ;  premier 
avocat-général  à  la  cour  d'appel, 
en  1810  ,  et  président  du  Irilîunal 
de  première  instance,  le  6  janvier 
1811,  par  suite  de  l'admission  à  la 
retraite  de  M.  Berlhereau  ,  qui  en 
exerçait  les  fonctinns.  M.  Try  fut 
confirmé  dans  sa  présidence  après 
la  première  restauration,  en  1814» 
et  nommé,  la  même  année  ,  che- 
valier de  la  légion -d'honneur. 
Napoléon  le  destitua  au  20  mars 
181 5;  mais  après  le  second  re- 
tour du  roi,  il  reprit  ses  fonctions 
et  fut  nommé  membre  de  la  cham- 
bre des  députés  ,  où  il  appuya  tous 
les  projets  ministériels,  entre  au- 
tres ceux  sur  les  écrits  dits  sédi- 
tieux, sur  l'abolition  du  divorce, 
clc.  Chargé  du  rapport  de  la  com- 
mission nommée  pour  examiner 
le  projet  de  loi  relatif  aux  écrits 
saisis  en  vertu  de  la  loi  du  21  oc- 
tobre 1814  j  il  proposa,  le  i3  jan- 
vier 1817,  l'adoption  de  la  loi. 
Rapporteur  de  la  conunission  i\ 
laquelle  avait  été  renvoyé  l'exa- 
men du  projet  de  loi  concernant 
les  détenus  pour<letles  il  demanda 
le  ntainlièn  de  la  loi  dans  toute 
sa  sévérité.  Quoique  nommé,  en 
septembre  1817  et  en  1818,  pré- 
sident d'une  section   du    collège 


io8 


TlJR 


électoral  de  Paris,  il  ne  fui  point 
réélu  à  la  chaiîibre  ;  mais  le  gou- 
■verneiDent  Ta  dédommagé,  en 
lui  conférant,  au  mois  de  no- 
■vemlne  1818,  le  litre  de  maître 
des  rcquGtos.  M.  Try  mourut  en 
1821. 

TUllRHEIM  (N.  barok),  ban- 
quier, membre  dolalégion-d'hon- 
iieur,  membre  de  la  chambre  de3 
députés,  etc. ,  est  né  à  Strasbour:;, 
déparlement  du  Bas-Rhin,  et  ap- 
partient à  une  famille  do  cette  vil- 
le, estimée  dans  la  magistrature. 
Il  adopta  avec  sagesse  les  princi- 
pes de  la  révolution,  et  fut  revêtu 
de  plusieurs  fondions  mimicipa- 
les.  Sojis  le  régime  de  la  terreur, 
sa  modération  le  fit  classer  parmi 
les  suspects,  et  il  fut  obligé,  pour 
éviter  la  mort,  de  fuir  sa  patrie; 
il  se  retira  en  Allemagne.  Le  cal- 
me rétabli,  il  rentra  en  France,  se 
livra  aux  affaires   commerciales, 
et  l'on  cite  à  son  honneur  qu'ayant 
perdu   des  sommes  considérables 
parle  discrédit  du  papit^r  monnaie 
il  ne  remboursa  en  cette  valeur, 
aucun  des  capitaux  que  ses  conci- 
toyens lui   avaient  confiés.  Il  fut 
élu  au  sénat-conservateur,  mais  il 
ne  fit  point  partie  de  ce  corps.  Le 
gouvernement  l'autorisa  à  accep- 
ter la  place  de  ministre  des  finan- 
ces du  grand-duché  de  Bade.  Au 
bout  de  quelques  mois  il  obtint  sa 
démission ,  et  rentra   en   France 
décoré  de  Tordre  de  la  Fidélité  de 
Bade,  et  avec  le  titre  de  baron. 
Devenu    membre  de   la    légion- 
d'honneur  après  la  première  res- 
tauration, en  i8i4>  il  fut  nommé, 
par  le  déparlement  du  Bas-Rhin, 
membre  de  la  chambre  des  dépu- 
tés dite /n^roai'flô/f,  où  il  vota  avec 
la  minorilé.  Appelé,  en  1819,  par 


TUR 

ordonnance  royale,  Alaprésidenr»? 
du  collège  électoral  de  son  dépar- 
tement, il  ne  triompha  de  son 
concurrent  à  la  députation  ,  que 
par  le  scrutin  de  ballolage.  Du 
centre  gauche  de  la  chambre,  il 
a  voté  contre  les  deux  lois  d'ex- 
ception ,  et  pour  le  nouveau 
mode  électoral  amendé.  Il  faisait 
partie  de  la  chambre  dissoute  en 
totalité,  en  1825.  Réélu  immé- 
diatement à  la  chambre  septenna- 
le, IM.  ïurkheim  est  meinbre  du 
conseil-général  de  Brasklcim,  du 
directoire  luthérien,  etd<;  la  com- 
mission spéciale  consultative,  pour 
le  culte  prolestant,  attachée  au 
nn'nistère  de  l'intérieur. 

TUJiLOT  (l'abbé),  homme  de 
lettres,  ancien  grand- vicaire  de 
Naiici,  etc.  ,  naquit  à  Dijon,  dé- 
parlement de  la  Côte-d'Or,  le  2.5 
janvier  iy^5.  Il  appartenait  à  une 
faniillc  de  magistrats  qui  lui  fit 
donner  une  éducation  soignée  .  et 
il  embrassa  par  gofit  Télat  ecclé- 
siasli(|ue.  Homme  instruit,  et  de 
moeurs  pures,  il  fut  chargé,  par 
Louis  XVI,  de  l'éducalion  de  M- 
le  duc  de  Bourbon,  qu'il  eut  le 
malheur  de  perdre  à  Rome,  où  il 
l'avait  conduit  pourcompléterson 
éducation.  A  son  retour  dans  sa 
patrie,  il  reçut  des  consolations 
de  la  famille  royale.  Madame  Vic- 
toire le  choisit  pour  son  aumônier; 
il  fut  ensuite  nommé  vicaire-gé- 
néral du  diocèse  de  Nanci  ,  et 
pourvu  d'un  bénéfice.  La  révolu- 
lion  le  priva  de  ses  emplois  ;  ce- 
pendant il  obtint  une  place  à  la 
bibliothèque  du  roi ,  et  la  conser- 
va jusqu'à  l'époque  de  sa  mort  , 
arrivée  dans  la  84*  année  de  son 
/ige,  le  1 5  janvier  1825.  L'abbé 
Turlot  esl  aulcur  de  plusieurs  nu- 


TUR 

Trnges.  Les  dtîiix  plus  rcîiiarqua- 
bles  ifont  :  i"  Théorie  de  l'avenir, 
2  vol.  111-8° ,  où  il  développe  avec 
talent  des  idées  douces  et  conso- 
lantes sur  l'avenir  de  l'homme. 
Ses  théories  paraissent  générale- 
ment abstraites  et  même  para- 
doxales; mais  elles  sont  revêtues 
de  Tonnes  agréables,  et  rendues 
dans  un  style  pur  et  élégant.  2' 
De  V Instruction,  i  vol.  in- 12.  Cet 
ouvrage,  où  l'on  remarque  un 
discours  préliminaire  très-étendu 
et  une  analyse  fort  bien  faite  des 
connaissances  humaines,  a  pour 
objet  de  guider  les  études  d'un 
jeune  homme  qui,  au  sorlir  du 
collège,  veut  perfectionner  l'édu- 
cation qu'il  y  a  reçue,  et  étendre 
son  instruction  par  d'utiles  lec- 
tures. 

TUKOT  (  Joseph  ) ,  secrétaire- 
général  du  ministère  de  la  police 
à  l'époque  de  la  révolution  du  18 
brumaire  an  8(«)  novembre  1799)» 
était  aus.-i  à  celte  époque  proprié- 
taire de  la  Gazette  de  France,  dont 
il  céda  la  rédaction  principale,  et 
ensuite  la  propriété,  à  M.  Belle - 
mare  ,  depuis  commissaire-géné- 
ral de  police  à  Anvers.  An  rapport 
des  auteurs  «le  la  Galerie  des  Con- 
tem()orains  de  Bruxelles,  M.  Tu- 
rot  s'intéressa  dans  une  entreprise 
de  fournitures  de  l'armée  d'Alle- 
magne ;  des  accusations  graves 
ayant  été  portées  contre  l'entre- 
prise, M.  Turut  fut  traduit,  en 
1806.  par  (»nlre  de  l'empereur, 
devant  un  conseil  «le  guerre.  Il 
fut  acquitté  ;  mais  de  retour  à  Pa- 
ris, il  sollicita  inntiltMnent  de  l'em- 
ploi ;  ce  ne  fut  que  pendait  les 
cent  jours  ^  en  i8i5,  qu'il  obtint, 
})ar  la  protection  de  Fouché,dur 
d'Oirante,  la  place  de  commis- 


TUR 


log 


sairc-général  de  police  dans  les 
départemens  du  Nord.  La  seconda 
restauration  ne  lui  a  conservé  qu« 
le  titre  de  conseiller  de  police. 
M.  Turot  est  auteur,  sous  le  voile 
de  l'anonyme ,  d'un  assez  grand 
nombre  de  brochures  politiques, 
dont  la  plus  remarquable ,  qu'il  a 
avouée,  a  pour  litre  :  de  l'Oppo- 
sition et  de  la  Liberté  de  la  Presse, 
Paris,  in-8",  1799.  On  lui  attri- 
bue l'épigramme  si  connue  sur 
Rapinat  {voyez  ce  nom.)  M.  Tu- 
rot  mourut  dans  une  complète 
obscurité  en  1825. 

TLRREAIJ  (N.),  membre  de 
la  convention  nationale,  etc.,  é- 
tait,  à  l'époque  de  la  révolution, 
avocat  dans  le  déjiarlement  de 
l'Yonne  ,  dont  il  devint  admistra- 
teur  en  1790.  Nommé,  en  sep- 
tembre 1791  .  par  les  électeurs  du 
UMMoe  déparlement,  député  sup- 
pléant à  l'assemblée  législative, 
il  ne  fut  point  appelé  à  y  prendre 
séan(;e;  mais  à  la  réélection  de 
l'année  suivante,  pour  la  conven- 
tion nationale,  il  réunit  de  nou- 
veau les  suftVages  «le  ses  conci- 
toyens, et,  cette  fois,  siégea  de 
suite  dans  l'assemblée;  il  n'y  fut 
point  remarqué  avant  le  piocés  du 
roi,  dans  bquel  il  vota  la  mort 
sans  appel  ni  sursis.  L'un  des 
montagnards  les  plus  prononcés, 
Turreau  appuya  fortement  le  coup 
d'état  des  3i  mai,  1"  et  2  juin 
1795,  contre  le  parti  de  la  Gi- 
ronde, et  ne  démentit  malheureu- 
sement pas  1.1  violenct!  de  ses  pre- 
mi«"'res  opinions  dans  la  mission 
(|u'il  remplit  à  l'armée  de  l'Ouest. 
Il  voulait  le  trionijdie  de  la  répu- 
blique,  et  ne  le  jugeait  possible, 
la  vtiyant  menacée  à  la  fois  par  le» 
ennemis  de  l'extérieur  et  ceux  do 


no  IDK 

l'intérieur,  que  par  les  mesures  les 
plus  capables  d't-puuvanler  tant 
de  nombreux  et  redoutables  enne- 
mis; il  appréciait  néanmoins  les 
hommes  qui  montraient  des  prin- 
cipes plus  sages,  et  il  signala  avec 
beaucoup  de  courage  et  de  fer- 
meté, ii  la  convention  et  au  co- 
mité de  salut-public,  les  mesures 
qui  éloignaient  des  arnjées,  par 
une  scandaleuse  destitution  ,  les 
généraux  Caudaux  et  Aiibert  du 
lia^et  {voj.  ces  noms).  Malgré 
ce  mouvement  de  justice  et  d'hu- 
manité, il  fut  mairilcuu  dans  sa 
mission  ,  où  il  continua  h  ne  pas 
démériter  la  confiance  de  ses  pro- 
tecteurs ,  en  suivant  à  la  lettre 
leurs  sanglans  arrêts.  Accusé  de  la 
mort  de  plusieurs  patriotes  de 
Noirmouliers,  il  fut  détendu  par 
son  atroce  collègue  Carrier  {voy. 
ce  nom  ).  La  révolution  du  9  thei- 
midor  an  2  (27  juillet  1794)  "^'t 
fin  à  sa  mission,  et  il  revint  à  la 
convention  nationale  ,  où  il  se 
montra  l'ennemi  des  terroristes. 
Ce  fut  Turreau,  agent  de  la  fac- 
tion sanguinaire,  qui  fit  décréter, 
le  i4  thermidor,  l'arrestation  de 
Fouquier-Tinville  et  sa  traduction 
au  tribunal  révolutionnaire ,  et 
qui,  le  i5  juillet  suivant  (27  mes- 
sidor an  5  )  ,  accabla  d'un  seul 
mot  Joseph  Lebon  ,  qui  osait  se 
justifier  en  accusant  quelques-uns 
de  ses  collègues  :  Scélérat ,  peins- 
toi  ,  toi-même  !  Non  -  seulement 
Turreau  survécut  à  la  proscrip- 
tion des  hommes  de  son  parti , 
mais  il  fut  nomirié  peu  après  com- 
missaire près  de  l'armée  d'Italie. 
Signalé  comme  ayant  été  ,  dans  la 
ci-devant  Bretagne,  le  complice 
des  actes  révolutionnaires  du 
^ç^néral   Turreau    {voy.    l'article 


Tl'K 

suivant),  il  écrivit  à  la  conven- 
tion pour  se  défendre  à  ce  sujet. 
11  ne  fut  point  réélu  an  conseil  des 
cinq-cents,  ni  par  lu  convention 
elle-même ,  lors  de  la  réélection 
des  deux  tiers  de  ses  membres,  ni 
[>ar  le  déparlement  de  l'Yonne. 
Le  directoire-exécutif  le  nomma 
son  commissaire,  ù  l'elTet  de  ra- 
mener ou  conduire  sous  les  dra- 
p<!aux  les  conscrits  et  réquisition- 
paires.  Turreau  mourut  peu  de 
temps  après.  On  lit  le  passage  sui- 
vant  dans  M.  Las  Cases  (tom.  1", 
p.  199  et  200  )  :  «  Représentant 
du  peuple  a  l'armée  de  Nice,  assez 
insignifiant.  Sa  femme,  extrême- 
ment jolie,  fort  aimable,  parta- 
geait et  par  fois  dirigeait  sa  mis- 
sion. Le  ménage  faisait  le  plus 
giand  cas  du  général  d'artillerie 
(Napoléon);  il  s'en  était  lout-ù- 
fait  engoué  et  le  traitait  au  mieux 
sous  tous  les  rapports ,  ce  qui  était 
un  avantage  immense;  car  dans  le 
cas  de  l'absense  des  lois,  ou  de 
leur  improvisation  ,  un  représen- 
tant du  peuple  était  nue  véritable 
puissance.  (]elui-ci  fut  un  de  Cfux 
qui ,  dans  la  convention ,  contri- 
buèrent le  plus  à  faire  jeter  les 
yeux  sur  Napoléon  lors  de  la 
crise  de  vendémiaire  :  c'est  une 
.suite  naturelle  des  hautes  impres- 
sions que  lui  avaient  laissées  le 
caractère  et  la  capacité  du  jeune 
général.  » 

TURREAU  (le  baron),  lieute- 
nant-général, grand-oflicier  de  la 
légion-d'honnetir  ,  parent  du  pré- 
cédent, entra  de  bonne  heure  dans 
la  carrière  des  armes,  et  était  ca- 
pitaine d'infanterie  à  l'époque  de 
la  révolution.  Dévoué  au  nouvel 
ordî-e  de  choses,  il  continua  de 
servir  d'abord,  en  1792,  sous  le 


ÏLR 

général  Beurnonville  à  l'armée  de 
la  Moselle,  et  en  ijg."*,  à  rariuée 
de  la  Vendée  ,  où  il  devint  géné- 
ral de  brigade,  puis  général  de 
division  ;  il  prit ,  en  cette  dernière 
qualité,  le  coinniandement  de 
l'armée  des  Pjrénées-Orientales  ; 
mais  il  le  garda  peu,  et  passa  dans 
l'Ouest,  où  il  commanda  en  chef. 
Le  général  Turreaii  dut  à  ses  ta- 
lens  et  à  son  courage  ses  différens 
grades;  chargé  d'un  commande- 
ment aussi  important  que  celui 
des  pays  insurgé*,  et  forcé  d'obéir 
aux  ordres  implacables  du  comité 
de  salut-public ,  il  fut  dénoncé, 
après  la  révolution  du  9  thermidor 
au  2  (27  juillet  1794),  pour  sa 
conduite  dans  TOuest.  Il  se  jusliûa 
en  produisant  les  arrêtés  du  gou- 
vernement. Le  résultat  de  sa  tra- 
duction devant  le  directeur  du 
jury  de  Tours,  et  ensuite  devant 
un  conseil  de  guerre,  fut  son  ac- 
quittement après  une  assez  longue 
détenticm.  Babeuf  ayant  été  con- 
damné i\  mort  le  5  prairial  an  ;') 
(  25  mai  1797  )  ,  le  général  Tur- 
reau  adopta  un  de  ses  en  fans.  Re- 
mis en  activité  sous  le  gouverne- 
ment consulaire,  il  eut  le  com- 
mandement d'une  division  de  l'ar- 
mée de  réserve;  il  passa  ensuite 
dans  le  Valais ,  où  il  maintint  la 
tranquillité.  Le  premier  consul 
Bonaparte  le  nomma,  en  1804 > 
ministre  plénipotentiaire  près  des 
litats-Liiis  d'Amérique,  et  grand- 
officier  de  la  Icgion-d'honneur  ;  il 
ne  cessa  de  remplir  ses  fonctions 
diplomatiques  qu'en  1810,  épo- 
que où  il  fut  rappelé  et  employé 
en  Allemagne.  Il  avait  le  coni- 
mandement  de  Marier.berg  ,  dans 
le  grand-duché  de    Wiirtzhourg , 


TYS  ni 

ors  des  événemens  politiques  de 
1814.  Pendant  les  cent  jours  ,  eu 
181  5  ,  il  fut  chargé  de  la  défense 
de  la  rive  gauche  de  la  Seine  ;  il 
fut  ensuite  nommé  (  le  2  juillet  de 
la  même  année)  commissaire  de 
l'armée  française  pour  l'exécution 
de  la  convention  du  5  juillet  : 
mission  qu'il  ne  dépendit  pas  de 
lui  de  remplir  selon  le  vœu  du 
mandat  qu'il  avait  accepté.  De- 
puis la  seconde  restauration,  il  vit 
retiré  au  seiu  de  sa  famille.  Le  gé- 
néral Turreau  a  donné,  pendant 
\es  cent  jours  f  une  nouvelle  édi- 
tion de  l'ouvrage  qu'il  avait  pré- 
cédenimenl  publié  sous  l«  titre 
de  :  Mémoires  historiques  sur  la 
guerre  de  ta  Vendée. 

TYSZIEWICZ  (Thérèse  Po- 
NiATOvrsKi,  comtesse),  nièce  du 
dernier  roi  de  Pologne  ,  Stanislas 
Auguste  {voy.  Stanislas  Auguste), 
et  sœur  du  prince  Poniatowski 
(  voy.  ce  nom  ),  s'est  rendue  re- 
commandable  par  sa  constante 
affection  pour  la  France,  (ju'elle 
avait  habitée  pendant  plusieurs 
années  avant  la  révolution.  Jille 
était  liés  instruite  ,  et  avait  une 
prédilection  toute  particulière 
pour  la  langue  et  la  littérature 
françaises.  A  toutes  les  époque» 
de  nos  troubles  civils  ,  sa  maison 
de  Varsovie  fut  ouverte  à  nos  ex- 
patriés sans  distinction  d'opinions, 
et  le  trait  raconté  par  l'abbé  De- 
lille  dar.s  imc  note  de  son  poëme 
de  la  Pitié,  se  rapporte  à  celle 
dame  et  à  son  frèie.  Dans  sa  jeu- 
nesse, elle  avait  épousé  le  comte 
Vincent  Tysziewicz,  dont  elle  fut 
obligée  de  se  séparer  quelque 
temps  après  son  mariage.  La  com- 
tesse Tv7,i«Mvif7,  f-l  morte  il  y  a 


I 


LT.O 


ULL 


j>lusieur»  années ,  estimée  cl  rc-     lou5   Ici»   Français   qui   cnrrnt   Ir 
tçreltée  de  sei  compatriotes  •:l  de     bonheur  de  la  connaître. 


u 


UGONI  (Camille),  né  à  Brcs- 
cia  CM  1784»  s'e.-l  placé  au  nom- 
bre des  bons  lillérateurs  par  la 
publication  d'une  Histoire  de  In 
lillérature  italienne,  pendant  la 
seconde  moitié  du  18*  siècle,  dont 
il  n'a  paru  que  les  trois  pre- 
miers volumes.  Quoiqu'il  ne  se 
soit  engagé  qti'à  donner  une  suite 
aux  Siècles  de  la  littérature  ita- 
lienne, de  son  compatriote  Cor- 
niani,  il  est  facile  de  sentir  com- 
bien ce  supplément  est  au-dessus 
de  son  modèle  par  l'importance 
des  recherches  et  par  la  profon- 
deur des  obst'i'vations.  Le  style 
de  M.  Ugoni  est  aussi  plus  soigné; 
et  son  ouvrage  serait  irréprocha- 
ble s'il  avait  osé  adopter  un  autre 
plan  que  celui  de  son  prédéces- 
seur, dont  il  ne  s'est  pas  caché  les 
défauts  dans  les  Mémoires  sur  la 
vie  et  les  écrits  de  Corniani.  Non 
moins  recommandable  par  ses  lu- 
mières que  par  son  instruction  , 
ce  littérateur  avait  mérité  d'ê- 
tre placé  à  la  tête  de  l'athé- 
née et  lin  lycée  de  Brescia: 
Plein  de  zèle  pour  l'instruction 
de  la  jeunesse,  il  ne  pouvait  pas 
échapper  aux  rigueurs  d'un  gou- 
vernement ennemi  de  tout  perfec- 
tionnement social.  Plutôt  que  de 
fléchir  sous  le  dc^rpoSisnie  des  do- 
minateurs de  sa  patrie  ,  31.  Ugoni 
a  préféré  sacrifier  ses  affections 
et  sa  fortune  ;  et  après  avoir  visité 
la  Suisse  et  l'Angleterre,  il  est 
venu  dcniander  l'hospitalité  à  la 


France,  où  il  est  occupé  de  la 
continuation  de  son  ouvrage.  Il 
est  aussi  l'auteur  d'une  traduc- 
tion estimée  des  Commentaires  de 
César,  d'une  Vie  de  Montecuccoli 
et  des  Essais  sur  Pétrarque ,  tra- 
duits de  l'anglais  de  Foscolo. 

ULLOA  (don  Antonio),  cé- 
lèbre mathématicien  espagnol  , 
naquit  à  Séville  en  1716,  et  mou- 
rut en  1795.  Issu  d'une  famille, 
honorable,  il  fit  des  très-bonnes 
étud<:s,  et  suivit  la  carrière  mari- 
time, où  il  entra  a  l'âge  de  vingt 
ans,  et  où  il  mérita  successive- 
ment tous  ses  grades,  jusqu'à  ce- 
lui de  lieutenant- général  et  de 
commandeur  de  l'ordre  de  Saint- 
Jacques.  Don  Ulloa  fut  adjoint  à 
don  Georges  Juan  ,  chargé  d'ac- 
compagner au  Pérou  les  acadé- 
miciens français  qui  devaient  y 
déterminer  la  figure  de  la  terre. 
Onze  ans  après  son  départ  d'Es- 
pagne ,  il  revenait  dans  sa  patrie, 
lorsqu'il  fut  fait  prisonnier  parles 
Anglais,  qui  l'emmenèrent  à  Lon- 
dres. Il  s'y  lia  avec  les  principaux 
sa  vans  de  ce  pays,  entre  autres  i\l. 
Folker,  pré>ident  de  la  société 
royale,  qui  lui  rendit  toutes  sortes 
de  bons  offices;  il  lui  dut  parti- 
culièrement la  restitution  de  ses 
papiers  et  la  liberté.  De  retour  i\ 
ftiadrid,  don  Ulloa  publia  son 
Voyage  dans  l' Amérique  méridio- 
nale, qui  eut  beaucoup  de  succès, 
et  qui  lui  fil  donner  la  mission  de 
repartir  pour    l'Amérique,   d'où 


ULL 

il  rapporta  les  matériaux  de  «es 
Nouvelles  américaines  ou  Entre- 
tiens physiques  et  historiques  sur  les 
Amériques  méridionale  et  septen- 
trionale. Cet  ouvrage  fut  suivi  de 
la  Marine  ou  forces  navales  de 
l'Europe  et  de  l'Afrique  ,  qu'il 
présenta  an  minislère  espagnol 
en  1775.  Aces  travaux  utiles,  on 
doit  ajouter  que  don  Ulloa  décou- 
vrit, en  1778,  iitt  point  lumineux 
dans  la  lune  ;  publia,  dans  la  mê- 
me année,  des  observations  sur 
l'éclipsé  de  soleil;  fonda  en  Es- 
pagne le  premier  cabinet  d'his- 
toire naturelle,  le  premier  labo- 
ratoire de  métallurgie,  et  le  canal 
do  navigation  et  d'arrosemenl  de 
la  Vieille-Castille;  fit  également 
le  j'remier  connaître  à  sa  patrie 
la  platine  et  ses  propriétés,  l'é- 
leclricité  et  le  magnétisme  artifi- 
ciel ;  pcrfeclionna  l'art  de  la  gra- 
vure et  de  l'imprimerie  espagno- 
le ,  qui,  par  ses  sollicitations,  fit 
envoyer  aux  frais  du  gouverne- 
ment des  jeunes  gens  en  pays 
étrangers  pour  s'y  perfectionner 
dans  les  arts  libéraux  et  méiani- 
ques;  qui  enfin  fit  rédiger  sous 
sa  direction  les  cartes  géographi- 
ques de  l'Espagne.  Dot:  Ulloa  ren- 
dit encore  de  nouveaux  services  à 
l'industrie  manufacturière  de  son 
pays,  en  établissant  à  Ségovie  , 
par  ordre  et  pour  le  compte  du 
roi,  une  fabrique  de  draps,  qui 
luttèrent  avec  avantage  contre  les 
draps  les  jdus  lins  des  autres  con- 
trées. 

ULLOA  (don  Martin),  savant 
littérateur  espagnol ,  neveu  du 
précédent,  naquit  en  1750,  et 
mourut  h  Cordouc  en  1800.  Il 
devint  successivement  président 
de   l'académie  de»  belles-lelfr«s 

T.    IX. 


U1\0 


ii3 


de  Séville,  président  de  la  société 
patriotique,  membre  des  acadé- 
uiies  de  la  langue  et  d'histoire  de 
Madrid  ,  enfin  président  de  l'aca- 
démie royale  de  Séville.  On  lui 
doit  une  Histoire  des  académies  de 
Madrid  f  des  Mémoires  sur  l'ori- 
gine et  le  génie  de  la  langue  cas- 
tillane; des  Dissertations  sur  la 
patrie  des  Goths  ;  sur  les  premier» 
habitans  de  l'Espagne;  sur  l'ori- 
gine des  duels,  etc.,  etc.  Don 
Martin  Ulloa  passe  pour  un  des  plus 
savans  biographes  de  sa  patrie. 

URQULJO  (le  chevalier  don 
Maria>o-Llis  d'  ),  ministre-d'état 
espagnol,  naquit  dans  la  Vieille- 
Castille,  et  fut  élevé  en  Angle- 
terre. Dans  sa  jeunesse  ,  il  fit  plu- 
sieurs voyages,  et  de  retour  eu 
Espagne,  il  suivit  la  cairière  di- 
plomatique, d'abord  sous  les  mi- 
nistres Florida-Blanca ,  d'Aranda 
et  d'Alcuilia,  et  ensuite  sous  M. 
de  SaaveJra.  qu'il  remplaça  en 
1798.  Il  dut  sa  nomination  au 
ministère ,  autant  à  l'honorable 
réputation  dont  il  jouissait  qu';\  la 
protection  particulière  de  la  reine. 
Tous  les  efforts  du  chevalier  d'Ur- 
quijo  tendirent  à  la  destruction  de 
l'effioyable  tribunal  de  Tinquisi- 
lion  ,  et  il  eut  le  bonheur  de  réus- 
sir; le  tribunal  fut  supprimé,  et 
par  suite  du  même  bienfait,  ses 
immenses  possessions  furent  ré- 
parties entre  des  établissemens 
publics  et  de  bienfaisance.  Le  cler- 
gé ne  pardonna  pas  au  ministre 
vertueux  le  coup  qu'il  lui  avait 
porté.  Il  s'attacha  par  ses  intri- 
gues, ses  calomnies  et  sa  puis- 
sance, toujours  redoutable,  ù  des- 
servir le  ministre  et  à  arrêter  ses 
utiles  reformes;  il  le  détruisit  dans 
l'iespril  du  prince  de  la  Paix  {voy. 
8 


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I  l(i 


VAC 


rcni^o ,  (jui  remit  l'Italie  t>on.«  i.-i 
(toiTiitialiuii  rraiiçîiisf;  ,  il  dcviot 
membre,  du  corps-Uîgislalif,  pré- 
sident du  mC'in»'  corps,  sccrélairc- 
rlVîtat,  {)iiis  iniiiistr»!  de  l'inté- 
rieur dti  royaume  d'Italie.  L'em- 
pereur JNapoléofi,  qui  lui  accor- 
dait une  estime  particulière,  l'a- 
vait nommé  comte  de  l'empire, 
graud'croix  de  la  conroiine  de  ftr 
et  chevalier  dt,-  la  léj!jion-«riion- 
i»eiir.  Le  comte  Vaocari  perdit  sou 
pv~)rtelVuille  par  suite  des  «Wéne- 
mens  politiques  deiSi/^.  Il  se 
retira  alors  à  Modène,  où  il  vil 
étranger  aux  alfaires  publiques, 
culliv^mt  les  lotiies,  (pi'il  a  to\i- 
jours  aimées,  et  dans  lesquelles 
il  a  obtenu  des  succès.  Pendant  cl 
depuis  sa  carrière  politique,  la 
sagesse  coiistaïUe  de  sa  conduite  , 
son  patriotisme  et  ses  qualités 
personnelles  lui  ont  concilié  tou- 
tes les  opinions,  <;t  ont  assuré  le 
repos  à  sa  pliilosophique  retraite. 
VACIIKll  DE  TOLRNIÎ.MINE 
(Charles,  le  baron),  docteur  en 
droit,  président  honoraire  du  tri- 
bunal de  iMaiiriac.  département 
du  Cantal,  chevalier  de  la  légion- 
d'honneur,  est  né  à  Pleaux,  même 
département,  le  4  novembre  i  y55, 
d'un  père  qui  était  avant  la  révo- 
lution, subdélégué  de  l'intendan- 
ce d'Auvergne,  et  juge  à  Mau- 
riac. M.  Vacher  de  Tourneminc 
fut  chargé,  en  1786,  par  le  garde- 
des-sceaux  de  Miromesnil,  de  re- 
chercher les  anciens  monuniens 
écrits  de  l'histoire  de  la  province 
d'Auvtrgn«,  et  il  s'occupa  avec 
succès  de  ce  travail.  En  1788,  il 
fil  paraître  un  mémoire  histori- 
que et  politique  sur  les  an- 
(  ien»  étals- généraux  dje  Fran- 
ce et   sur   lea    étals   particulier* 


VAC 

de  lii  province  <l'Auvcrgne.  Il 
fut  élu,  en  1791,  par  ses  conci- 
toyens, administrateur  de  son  dé- 
partement, et  devint  peu  de  temps 
après  pré.-ident,  et  ensuite  prncu- 
leur-  général  -  syndic  ,  fonctions 
(pi'il  cessa  de  remplir  en  179a. 
En  vendémiaire  an  4.  •'  reçut  une 
nouvelle  (narque  de  l'estime  et 
de  l'alVeclion  de  ses  concitoyens, 
qui  l'élurent  député,  et  il  siégea 
au  conseil  des  anciens  jusqu'au  m) 
brumaire  an  8;  il  y  soumit  un 
grarjd  nombre  de  rapports  et  d'o- 
pinions sur  divers  sujel-i  admi- 
nistratifs, judiciaires,  politiques  et 
militaiies.  Nommé  le  2  frimaire 
an  8,  délégué  des  consuls  dans  la 
dix-septième  division  militaire, 
aujourd'hui  la  première,  il  s'ac- 
quitta de  celle  mission  de  la  ma- 
nière la  plus  honorable.  A  cette 
époque,  il  fut  élu,  par  le  sénat-con- 
servateur, membre  du  corps- lé- 
gislatif, où  il  siégea  jusqu'à  la  fin  de 
i8ot>.  Il  avait  été  présenté  par  ce 
corps, comme  candidat  pour  le  se- 
nnt.  Rentré  dans  ses  foyers,  M.  Va- 
cher de  Tournemine  a  été  nom- 
mé membre  du  conseil-général  de 
son  département,  et  maire  d'une 
commune  rurale.  En  1809,  il  fut 
n(uumé  juge,  et  ensuite  président 
du  tribunal  de  Mauriac.  Le  23 
août  i8i5,  il  fut  élu  membre  de 
la  chambre  des  députés.  Il  y  pro- 
nonça deux  opinions,  l'une  sur 
un  projet  de  loi  relatif  à  des  me- 
sures <le  stireté  générale,  l'autre 
contre  une  [)roposition  tendant  à 
la  réduction  des  cours  et  des  tri- 
bunaux. Il  a  continué  à  siéger 
dans  la  chambre  des  députés  jus- 
qu'e:i  1819.  Le  roi  a  créé  M.  Va- 
cher de  Tourhemine,  baron  en 
1817,  et  il  a  été  nommé  chevalier 


VAD 

«le  la  légion-d'hoiinenr  en  i8ai. 
Admis  depuis  sur  sa  demande  à  la 
retraite,  il  lui  a  été  accordé  une 
pension  et  le  titre  de  président  ho- 
noraire. Son  fils  aîné  s'est  distin- 
gué dans  la  carrière  nnlilaire,  ft 
sert  avec  l<;  grade  de  lieutenant- 
colonel  dans  l'artillerie  à  cheval. 
VADIER   (N.  ),  conseiller  an 
présidial  de  Painiers,  fut  député 
du   tiers-élat   de    cette    province 
aux  états-généraux   en    i^t^Q.    Il 
«'éleva,  le  i4  juillet  1791,  contre 
l'inviolabilité  du  roi,  qui   venait 
d'êJre  ramené  de  Varennes,  et  de- 
rnauija  la  déchéance  de  ce  prince. 
Néanmoins  il  protesta  deux  jours 
après  de  sa  haine  pour  le  gouver- 
nement républicain,  et  jur*i  de  dé- 
fendre les  décrets  au  péril  de   sa 
vie.  Le  20  août  de  la  même  année, 
il  attaqua  le  mode  proposé  pour 
former  la  garde  conslitulionuelle 
du  roi,  et  demanda  que  tous  les 
départemcns  fussent  admis  à  gar- 
fler  ce  premier  f<jnctionnaire  pu- 
blic. Nommé  en  septembre  1792, 
par  le  département  de  r.4rriége, 
>iépulé  a  la  convention  nationale, 
il  y  prit  place  à  l,i  Montw^ne,  et  vo- 
ta la  mort  de  Louis  XVI,  »ans  ap- 
pel et  sans  sursis.    Il  fut  un  des 
auteurs  des  journées  des  Ji  mai, 
1"  et  1  juin  179J,  contre  le  parti 
de  la  Gironde.  Il   dirigea  en  juil- 
let l'expédition  <le  Neuilly,  dont 
1 14  habilans  périrent  sur  l'écha- 
faud.   Le   14  septembre,  il  entra 
au  comité  de  sftrelé-générale ,  et 
fc  montra  jusqu'à  la  chute  de  Ko- 
bespierr»;  le  plu»  ardent  ennemi 
des  vrais  républicains;   il   tenait 
ainsi  la  paroh;  (pi'il  avait  donnée 
aux  jacol)ins.  le  jour  où  il  fut  por- 
té 6  la  présidence  de  la  conven- 
tion :  •  Que  la  massue  lévolulion- 


VAU  1  I : 

naire  écraserait  tous  les  tyrans.  » 
.\près   avoir   successivement  dé- 
fendu et  abandonné  la  faction  de 
la  commune  de  Paris,  il  fit  mettre 
en  liberté  Mazuëi,  commandant  de 
l'armée  révolutionnaire,  et  deux 
mois  après,  il  le  fit  monter  ù  l'écha- 
faud.   Quelques  jours  après,  à  la 
suite  d'un  i apport  fait  par  Amar 
cnntre  Chabot,  Bazire,  Delaunay, 
Julien    et    Fabre    d'Eglantine,    il 
s'opposa  à  ce  que  ce  d<Tnier  fût 
entendu  ;\  la  barre  pour  se  discul- 
per des  faits  qui  lui  étaient  inipu- 
tés;  à  la  même  époque,  il  essaya 
de  justifier  le  comité  de  sf»reté-gé- 
nérale  d'avoir  l'ait  arrêter  le  beau- 
père  de  (^amille-Desmoulins,  qui 
périt  quelques   jours  après    avec 
sou   gendre  et  sa  belle  et  géné- 
reuse fille. C'est,  assure-l-on,  pen- 
dant qu'ils  étaient    détenus  avec 
Danton,  Philippeaux  et  plusieurs 
autres  membres  de  la  convention, 
que  par  un  ralTluemcnt  de  férocité, 
fut  concerté  entre  Vadier,   Voiil- 
land,Amav,Saint-.Tustet  Fouquier- 
Tinville,  l'atroce  projet  d<  s  préten- 
dues conspirations  des  prisons,  a- 
fin  qu'aucun  de  ceux  qui  y  étaient 
détenus  n'en  pfit  sortir  :  des  pri- 
sonniers étaient  accusés  de  résis- 
tance à  la  loi.  et  sous  ce  prétexte 
absurde,  ils  étaient  mis  hors  des 
débats  elenvoyés  i\  l'échafiud  sans 
délibération.  Vadier  fut  W\n  des 
membres  les  plus  actifs  du  comi- 
té de  salul-public  ;  nul  autre   ne 
présenta  plus  de  noms  à  la  pros- 
cription: l'e-x-charlreux  Doin  Cer- 
le,  constituant ,  Catherine  Théos, 
dite  la  mère  de  Dieu  et  plusieurs 
autres,  allaient  être,  sur  sa  deman- 
de,   trad\iits    au   tribunal  révolu- 
tir)nnairc.  lorsque  Kobesp.iern:  lui- 
ruênie  les  sauva,  en   faisant   voir 


ii8 


VAD 


le  ridicule  de  l'accusation  dirigée 
contre  eux.  Ce  fut  un  grief  que 
Vadier  ne  lui  pardonna  pas,  et  qui 
l'unit  aux  thermidoriens,  dont  il 
ne  partageait  pas  les   principes. 
En  effet,  dans  la  fameuse  journée 
où  fut  renversée  la  tyrannie  dé- 
cem  virale,  Vadier  n'accu?a  pas  Ro- 
bespierre d'avoir  versé  le  sang  et 
dévasté   sa   patrie,   mais  d'avoir 
tourné  eu  ridicule  les  travaux  du 
comité  de  sûreté-générale,  et  d'a- 
voir traité  de  pitoyable  farce  la 
conspiration  de  Catherine  Théos. 
Ses   inculpations  contre  Dumas, 
président  du  tribunal  révolution- 
naire, ne  portaient  pas  non  plus 
sur  les  nombreuses  victimes  qu'il 
avait  égorgées,  mais  sur  ses  efforts 
à  vouloir  faire  passer  le  vertueux 
Collot-d'Herbois  pour  un   cons- 
pirateur.  Vadier  et  ses  collègues 
avaient  tous  une  querelle  à  ven- 
ger: nu  9  thermidor,  ils  crurent 
faire    oublier,  par  leur  acharne- 
ment contre  Robespierre,  la  part 
qu'ils   avaient  prise   aux    criiries 
que  la  France  lui  reprochait.  Aus- 
si, dénoncé  un  mois  après,  comme 
chef  des  terroristes,  par  Lecoin- 
tre  de  Versailles,  osa-t-il,  comme 
avait  fait  Marat,  paraître  à  la  tri- 
bune, un  pistolet  à  la  main,  prêt  à 
se  tuer  si  la  convention  ne  procla- 
mait pas  son  innocence  et  ne  ren- 
dait pas  justice  à  ses  soixante  ans 
de  vertus.  Dénoncé  un  mois  après 
pour  les  condamnations  injustes 
qu'il  avait  provoquées,  il  trouva 
des    appuis    assez    puissans   pour 
faire  rejeter  la  dénonciation  com- 
me   calomnieuse.    Il  fut   moins 
heureux  le  5  frimaire  an  5;  la  con- 
vention, sur  de  nouvelles  dénon- 
ciations qui  lui  arrivaient  de  tou- 
tes parts,  chargea  le  comité  de 


VAL 

sûreté-générale  de  faire  un  rap- 
port sur  lui  et  sur  ses  collègues 
du   comité  de  salut-public,  Bil- 
laud-Varennes,  Collot-d'Herbois 
et  Barrère;  tous  quatre  furent  dé- 
crétés d'accusation  et  admis  à  se 
défendre  devant  l'assemblée;  une 
insurrection   menaçante,  suscitée 
par  leurs   partisans,   interrompit 
la  discussion,  et  n'empêcha  pas 
néanmoins  qu'ils  ne  fussent  con- 
damnés à  la  déportation.  Vadier 
trouva  le  moyen  de  s'y  soustrai- 
re ;  caché  dans  Paris,  il  ne  fut  ni 
déporté,  ni  traduit  devant  le  tri- 
bunal criminel  de  la  Charente-In- 
férieure, conformément  à  un  dé- 
cret du  24  mai,  qui  rapporta  celui 
du  1"  avril.  Il  reparut  sur  la  scè- 
ne politique  en  floréal  an  4  (mai 
1796);  compromis  dans  la  cons- 
piration de  Babeuf,   il  fut  arrêté 
et  envoyé  devant  la  haute-cour 
nationale  de  Vendôme ,  où  il  fut 
acquitté  le  7  prairiai~an  5  (  mai 
1797).    Le    décret    lancé   précé- 
deunneut  contre  lui  n'ayant  pas 
été  purgé,  le  gouvernement  con- 
sulaire   le    mit    en     surveillance 
au    mois  de   décembre  1799,   et 
lui  rendit  bientôt  ses  droits  de  ci- 
toyen. Vadier  a  continué  d'habiter 
la  capitale  jusqu'à  la  restauration 
du  gouvernement  royal  en  1814. 
A  cette  époque,    il   fut  forcé   de 
quitter  la  France  par  suite  de  la 
loi  du    12  janvier   1816.  Il  s'est 
fixé  dans  le  royaume  des  Pays- 
Bas. 

V  A  L  A  N  T  (  Jean  -  Honoré  )  , 
grammairien  ,  exerçait  à  l'époque 
de  la  révolution,  dont  il  adopta  les 
principes,  le  modeste  état  d'insti- 
tuteur dans  «ne  maison  particu- 
lière. Il  embrassa,  dit-on,  l'état 
ecclésiastique  ,    et   fut  ordonné 


VAL 

prêtre  par  l'abbé  Fauchet,  évo- 
que constitutionnel  du  départe- 
ment du  Calvados.  Proscrit  en 
1795  à  raison  de  ses  fonctions  sa- 
cerdotales, il  déclara,  pour  re- 
couvrer sa  liberté,  qu'il  n'avait 
jamais  été  prêtre  :  cette  déclara- 
tion lefitsortir  delà  Conciergerie. 
Fondateur  d'une  espèce  d'acadé- 
mie grammaticale  et  littéraire,  il 
y  renonça  bientôt,  n'ayant  pas 
réussi  dans  son  projet,  et  rentra 
dans  l'instruction  publique  ,  en 
formant  un  pensionnat.  M.  Va- 
lant a  publié  un  assez  grand  nom- 
bre d'ouvrages;  nous  citerons  les 
principaux.  Ce  sont  :  \'  Epilre  à 
Louis  XVI ,  sur  son  acceptation 
fies  lois  constitutionnelles,  '79'» 
in -S";  2"  delà  Garantie  sociale, 
considérée  dans  son  opposition  avec 
la  peine  de  mort,  imprimée  par  or- 
dre de  la  commission  des  onze , 
1796,  in-8";  5°  le  Cosmète,  ou 
rAmi  de  l'instruction  publique , 
1798,  in-8°;  4°  Code  moral  pour 
servir  à  l'instruction  de  la  Jeunesse 
et  des  différentes  classes  de  la  so- 
ciété,  depuis  le  simple  citoyen  jus- 
ffu'à  l'homme  d'état,  1799.  in- 12: 
5"  Abrégé  du  Code  moral,  1799, 
in- 12;  G°  les  mânes  de  Lamoignon 
de  Malesherbes  ,  ancien  ministre- 
d'état,  ode,  suivie  d'un  extrait  de 
ses  pensées  mises  en  vers,  i8o3,  in- 
8°;  7°  Lettre  à  M.  François  de  Neuf- 
çhâteau  sur  cette  question  :  les  mots 
Avant  Que,  peuvent-  ils  avoir  la 
négation  Ne  pour  complément  ? 
i8io,  in-S";  8°  Lettres  académi- 
ques, 181 1-1812,  in-8°;  ()'  l'Edu- 
lation  du  poète,  poème  imité  de 
Vida,  i8i4»in-i2;  10'  Essai  de 
traduction  en  vers  du  Télémaque. 
Cette  entreprise  ne  fut  pas  beu- 
reuse.  Jauiiiis    du    Saint -Ange, 


VAL 


"9 


l'abbé  Delille  ni  lU.  Tissot  n'au- 
raient eu  l'idée  de  mettre  Fénélon 
envers. 

VALAZÉ  (  Chaules -Edouard 
Dufriche),  député  à  la  conven- 
tion nationale,  né  à  Alençon,  dé- 
partement de  l'Orne,  le  23  jan- 
vier 1751,  entra  au  service  mili- 
taire dans  sa  première  jeunesse  , 
et  suivit  ensuite  la  carrière  du 
barreau ,  dans  laquelle  il  se  dis- 
tingua. Au  commencement  de  la 
révolution,  il  faisait  valoir  par 
lui  -  même  des  propriétés  assea 
considérables  dans  le  département 
de  l'Orne;  et  vers  la  fin  de  1789 , 
ses  concitoyens  l'élurent  maire 
d'Essay,  petite  ville  près  d'Alen- 
çon.  il  exerça  cette  magistrature, 
alors  populaire,  à  la  satisfaction 
générale;  s'attachant  à  maintenir 
l'ordre  ,  à  faire  exécuter  les  dé- 
crets de  l'assemblée  nationale,  ù 
éclairer  les  habifans  de  sa  ville  et 
les  paysans  des  paroisses  voisines, 
tant  sur  les  devoirs  imposés  que 
sur  les  droits  acquis  par  la  grande 
révolution  qui  venait  de  s'opérer, 
Valazé  acquit  lui-même,  par  cet 
apostolat  volontaire,  la  confiance 
et  l'alîeclion  des  habitans  de  toute 
la  contrée  envircnnante.  Il  fut 
nommé,  A  la  presque  unanimité 
des  électeurs  du  département  do 
l'Orne,  député  à  la  convention 
nationale.  Il  y  forma  une  liaison 
étroite  avec  les  membres  les  plus 
distingués  de  cette  députation  de 
la  Gironde,  dont  il  devait  parta- 
ger l'infortune,  et  qu'ont  rendu 
si  diversement  célèbres  tant  de 
talens,  de  vertus,  d'erreurs,  une 
intrépidité  si  héroïque  et  une  fm 
si  funeste.  Bientôt  Valazé  prit  un 
grand  ascendant  dans  ce  parti,  et 
Âlarat,  dans  sa  feuillu  de  bouc  et 


lao 


VAL 


(le  «anij:,  J'tc  l'Ami  du  Peuple, 
ne  le  désignait  que  sons  le  noiri 
de  chef  fies  hommes  d'étal ,  hoin- 
mes  qu'il  fallait  tous  égorger,  se- 
lon   le    sanguinaire    démagogue. 
Valazé  avait  mérité  sa  haine,  ainsi 
qtie  celle  de  tonte  la  faction  de  llo- 
bespierre  ,  en  se  prononçant  avec 
la'plus  grande  énergie,  et  dès  les 
premières  séances  de  la  conven- 
tion, contre  la' commune  usurpa- 
trice de  Paris  ,  qui  s'était  installée 
elle-n)ême,  après  la  journée  du 
loaoftt  1  792;  il  avait  demandé  à  la 
convention  qu'on  procédât  immé- 
diatementà  l'inventaire  et  à  l'exa- 
men des  papiers  du  comité  de  sur- 
veillance de  celte  commune,  dont 
étaient  émanés  les  ordres  des  épou- 
vantables massacresde  septembre , 
et  qui  refusait  en  outre  de  rendre 
aucun  compte  des  sommes  qu'elle 
avait  extorquées  et  employées  à 
d'indignes  usages.  Il  s'éleva  avec 
force,  le  19  décembre  1792,  pen- 
dant le  procès  du  roi,  contre  un 
arrêté  de  cette  même  commune, 
qui  ordonnait  que  les  conseils  du 
monarque  fussent   fouillés   avant 
de  communiquer  avec   lui.  Vaia- 
zé,  ainsi  que  les  prin(;ipaux  mem- 
bres du  parti  de  la  Gironde,  crut 
pfuivoirsauverla  vie  deLouis  X  VI, 
en  se  prononçant  pour  l'appel  au 
peuple,  et  il  appuya  les  éloquens 
discours  de  Vergniaud,  Guadet  et 
autres  membres    de    la    conven- 
tion nationale,  qui  exigeaient  cet 
appel  avant  lexécution  de  la  sen- 
tence. Il  eût  été  bien  autrement 
courageux    de    ne    céder    à    au- 
cune   influence,    à    aucune   ter- 
reur, et  de  faire  plutôt  le  sacrifice 
de  sa  propre  vie    que   de    voler 
avec  la  majorité  sur  la  première 
question,  celle  de  la  culpabilité. 


VAL 

Valazé  demanda  encore,  mais  vai- 
nement, dans  les  premiers  jours 
de     janvier    1795  ,    la    mise    eu 
accusati(Uï    de     Pache  ,     totir-à- 
tour    ministre    de    la    guerre   ou 
maire  de   Paris,  et  toujours    un 
des  plus  actifs  agens  de  l'anarchie 
et  de  la  terreur.  Deux  jours  après, 
il  dénonça  aussi  vainement  le  dé- 
magogue iMaral,  qui  avait  provo- 
qué et  signé  une  adresse  des  ja- 
cobins contre  une  partie  des  mem- 
bres de  la  convention  même.  Dans 
la  séance  du    i5   avril   1793,   de 
prétendus   commissaires    des    4^ 
sections  de  Paris,  dont  quelques 
audacieux  intrigans  s'étaient  em- 
parés ,  vinrent  arrogamment  de- 
mander l'expulsion  de  22  député» 
delà  (convention.  La  hideuse  com- 
mune de  Paris  suivi!  de  près  celte 
députation  ,    ei    vint    émellre    le 
même  vœu.  Valazé   était   un  des 
premiers  inscrits   sur  la   liste  de 
proscription  ;  il  n'en  déploya  que 
plus  d'énergie  à  combattre  les  fac- 
tieux de  toutes  couleurs.  Marat  le 
dénonça  à  son  tourquelques  jours 
après,    l'accusant  d'être   un    des 
chefs  du  prétendu  complot  inven- 
té par  ce  misérable,  et  tendant  à 
transférer  la  convention  à  portée 
des  déparlen)ens  de  l'Ouest,  où 
commençaient  à  se  manifester  les 
premiers  syptômes  de  l'insurrec- 
tion vendéemie.  Valazé  démontra 
facilement  l'absurdité  de  celte  im- 
putation, et  couvrit  d'ignominie 
son   accusateur.   Il  continua  de- 
j)uis   à    répondre  avec   la   même 
énergie  aux  accusations  toujours 
vagues,  fausses  et  perfides,  qui  se 
multiplièrent    contre    lui    et    ses 
amis  au  sein  de  la  convention,  et 
l'on  vit  même  souvent  Valazé,  le 
pistolet  ou  l'épée  à  la  main  ,  dé- 


VAL  VAL                   i»i 

fier  le?  factieux  de  la  Monlagne,  avait  fait  tirer  le  canon  d'alarme 
et  les  appeler  à  vid' r  leurs  diflé-  deux  heures  auparavant,  ffttaine- 
rens  avec  lui  en  combats  singu-  né  à  la  barre  de  la  convention  , 
lier»,  qu'ils  n'acceptèrent  jamais,  que  le  commandant  de  la  force 
Marat  préféra  le  dénoncer  encore  armée,  Henriot,  fût  décrété  d'ac- 
comme  l'un  des  auteurs  des  assas-  cusalion  ,  et  protesta  en  outre 
sinats  dirigés  dans  la  nuit  du  9  au  contre  toute  délibération  dans  l'é- 
10  mars  contre  Valazé  lui-même  tat  de  trouble  et  d'asservissement 
et  ses  collègues,  députés  de  la  où  se  trouvait  l'assemblée.  Mais 
Gironde,  assassinats  auxquels  ils  sa  voix  généreuse,  ainsi  que  cel- 
n'échappèrent  que  parce  qu'ils  les  de  ses  amis,  fut  bientôt  élouf- 
furent  ave-tis  à  temps  du  com-  fée;  et  dès  le  2  juin,  sur  la  de- 
plot.  La  dérisoire  atrocité  de  ce  re-  mande  d'une  horde  de  pétition- 
proche  excita  une  indignation  gé-  naires  armés  ,  convertie  en  uio- 
nérale ,  et  Valazé  écra>a  encore  lion  par  Marat,  l'iurestation  de 
de  son  éloquence  ce  vil  adver-  Valazé  fut  décrétée  ,  avec  celle  de 
haire.  Mais  les  cons{)iraleurs  de  la  Vergniaud,  Gensonné  ,  Lanjiii- 
faction  de  Robespierre  n'en  pour-  nais,  le  Hardi,  l'étiou,  Boilleau, 
suivirent  pas  moins  leurs  atroces  Biroteau  ,  (Jomairo  ,  Bertrand, 
projets.  Le  10  mai,  la  convention  Gardien,  Kervelegan,  Mollevaut, 
quitta  la  saile  du  Manège,  011  elle  Borgoeing,  Barbaroux  ,  Lidon  , 
avait  siégé  jusque-là,  et  vint  le-  Buzot,  Liisource,  Uabaut,  Bris- 
nir  sa  première  séance  au  châleau  S(tt,  Salles,  Ch;imbon,  Gorsas, 
desTuileries.Decelteépoqueoom-  Grangeneuve,  Lesage ,  Vigée  , 
mença  le  mouvement  qui  se  ter-  Louvet,  Henri  Larivière  et  Sil- 
niina  par  les  attentais  du  5i  n)ai,  lery  {^voyez  ces  divers  noms  ). 
1"  et  2  juin.  Intimidée  par  les  Dans  le  courant  du  mTMue  mois 
factieux,  la  convention  nationale,  de  juin  ,  le  bruit  se  répandit  à 
bientôt  esclave  et  avilie,  cernée,  Paris  qu'une  amnistie  devait  être 
le  5i  mai ,  par  les  troupes  d'Hen-  jiroposée  en  faveur  de  tous  les 
riot  (  voy.  ce  nom  ) ,  par  une  niul-  députés  mis  en  arreslalion.  Va- 
titude  immense  et  slupide,  qui  lazé,  dès  qu'il  eut  connaissance 
ne  savait  pas  elle-même  dans  de  ce  projet,  fit  la  déclaration 
quel  but  on  l'avait  ameutée,  con-  formelle  <jue,  pour  sa  part ,  il  re- 
tentit à  se  mutiler  de  ses  propres  pousserait  toute  amnistie  comme 
mains.  On  arracha  à  la  tribune  un  outrage.  Innocent,  il  n'en 
ses  plus  élocpiens  oralcnrs  ,  qui  avait  pas  besoin  ,  et  conj)able ,  H 
ne  lardèrent  pas  à  être  traînés  A  ne  réclamait  que  la  plus  sévère 
l'échafaud  par  ks  implacables  en-  justice.  On  lui  oflVit  les  moyen* 
nemis  qu'ils  avaient  Irop  long-  de  se  dérober  par  la  fuite  au  sort 
temps  méprisés.  Le  01  mai,  à  8  qui  le  menaçait,  mais  il  s'y  re- 
heures du  inatin  ,  après  ta  nuit  la  fusa  avec  une  inébranlable  fer- 
plus  orageuse ,  Valazé  parut  ])our  mêlé.  Décrété  d'accusation,  sur 
la  dernière  fois  à  cette  tribune,  le  rapport  du  dép«ilé  Anwir  (  voy. 
et  déjà  sous  le  poignard  des  as-  vf.  nom  ) ,  dans  la  séance  du  .^ 
sassins,  il  demanda  que  celui  qin*  octobre   »79-)j  et  traduit  au  tri- 


i^a  VAL 

bunal  i(Wolutionnaire,  son  carac- 
tère inflexible  ne  se  démentil  pas 
un  seul  instant  devant  ses  juges 
assas^'ns.  On  lui  reprocha  d'avoir 
tenu  chez  lui  de  fréquens  conci- 
liabules de  fédéralistes'^  il  répon- 
dit qu'il  tenait  à  honneur  d'avoir 
souvent  reçu  chez  lui  ses  hono- 
rable? collègues ,  dont  quelques- 
uns  étaient  maintenant  ses  coac- 
cusés ;  inais  il  déclara  que  dans 
ces  généreuses  réunions,  jamais 
la  question  du  prétendu  fédéra- 
lisme n'avait  été  débattue.  A  l'ins- 
tant où  Herinan,  le  président  du 
tribimal  de  sang,  prononça  la  sen- 
tence de  mort  contre  les  accusés, 
Valazé  se  plongea  un  stylet  dans 
le  cœur.  Son  plus  proche  voisin, 
condamné  comme  lui,  le  voyant 
chanceler,  se  hâle  de  le  soutenir, 
en  lui  disant  :  Tu  te  troubles,  Va- 
lazé.—  Non,  je  meurs,  répondit- 
il.  A  ces  mots,  un  affreux  tumulte 
éclata  dans  la  salle,  et  tous  les 
condamnés  à  la  fois  la  firent  re- 
tentir du  cri  :  Kive  la  république! 
L'accusateur  -  public  ,  Fouquier- 
Tinville ,  d'exécrable  mémoire, 
requit  de  suite,  et  le  docile  tri- 
bunal ordonna  :  que  le  cadavre 
de  Valazé  serait  transporté  au  pied 
de  l'échafaud,  sur  une  charrette 
qui  suivrait  celles  où  ses  malheu- 
reux collègues  devaient  être  traî- 
nés au  supplice.  Après  la  chute 
de  Robespierre  ,  la  convention 
fonda,  par  un  décret  du  1 1  ven- 
démiaire an  4  (3  octobre  1795), 
une  fête  annuelle  en  mémoire  des 
illu.slres  victimes  immolées  par  la 
tyrannie  décemvirale,  et  une  pen- 
sion fut  accordée  à  la  veuve  et  aux 
enfans  de  Valazé.  On  lui  doit  plu- 
sieurs ouvrages.  En  17841  il  avait 
publié  celui  intitulé  :  Lois  péna- 


VAL 

les,  qui  fut  généralement  approu- 
vé par  les  publicistes  et  juriscon- 
sultes de  cette  époque.  On  a  en- 
core de  lui  le  Rêve ,  conte  philoso- 
ptiique,  inséré  dans  un  volume  dw 
la  Bibliothèque  des  romans ,  et 
une  Défense  des  accusés  du  5i  mai. 
Valazé  composa  ce  dernier  écrit 
dans  sa  prison,  où  il  le  cacha,  et 
où  il  fut  découvert  par  son  col- 
lègue Pénières,  qui  le  publia  en 
1795;  on  y  trouve  des  faits  inté- 
ressans,  une  force  de  logique  et 
une  chaleur  de  style  remarqua- 
bles. Valazé  a  laissé  en  manus- 
crits ,  un  Plan  d'administration 
pour  les  maisons  de  correction; 
une  Suite  aux  lois  pénales  ;  un 
Mémoire  sur  la  cause  de  l'élévation 
des  Vf,peurs  dans  l'atmosphère  ; 
une  Explication  des  tuyaux  capil- 
laires ,  et  le  Moyen  de  suppléer 
par  de  bonnes  lois  aux  relis^ions. 

VALCARCEL  (don  Joseph-An- 
tonio), agronome  espagnol,  na- 
quit dans  le  royaume  de  Valence 
en  i73'2.  L'état  déplorable  où  il 
trouva  l'agriculture  lui  inspira 
l'idée  d'appeler  l'attention  du  gou- 
vernement siir  cette  branche  im- 
portante de  l'administration  pu- 
blique; il  composa  un  Traité  gé- 
néral d'agriculture ,  pour  la  com- 
position duquel  il  s'environna  de 
toutes  les  lumières  soit  nationales, 
soit  étrangères,  qu'il  lui  fut  possi- 
ble de  recueillir,  et  vit  ses  soins 
récompensés  par  l'accueil  distin- 
gué que  les  propriétaires  et  les 
savans  même  firent  à  son  ouvra- 
ge. Il  y  avait  deux  siècles  qu'Al- 
fonse  de  Herrera  avait  écrit  sur 
le  même  objet,  et  depuis  cette 
époque  l'Espagne  n'avait  pas  fait 
un  pas  dans  cette  science.  Valca- 
rel  eut  l'honneur  de  combler  ce 


VAL 

vide  immeuse,  et  de  meltre  son 
paysan  niveau  des  contrées  agri- 
coles de  l'Europe.  Son  traitégéné- 
ral  fut  suivi  d'Instructions  sur  la 
culture  du  riz,  dédiées  au  comte 
de  Aranda,  Valence,  1768,  et  en- 
fin lï Instructions  sur  la  culture  du 
lin.  Valence,  1781.  Valcarcel 
mourut  à  Valence  en  1800. 

VALCARCEL  (  Pio- Antonio), 
comte  de  Lunnares,  savant  anti- 
quaire ,  parent  du  précédent  , 
iifiquit  dans  le  royaume  de  Va- 
lence vers  l'année  1740.  Un  é- 
c;irt  de  jeunesse  ayant  forcé  son 
père  i  le  faireenfermer  au  château 
d'Alicante,  il  eut  le  bonheur  d'y 
rencontrer  le  marquis  de  Val  de 
Flores  Vélasquez,  alors  prison- 
nier d'état,  et  lui  fut  redevable 
des  talcns  et  des  connaissances 
auxquels  il  dut  sa  célébrité.  De- 
venu libre  ,  sa  passion  pour  l'étu- 
de ,  loin  de  se  ralentir,  sembla 
s'accroître  encore;  livré  tout  en- 
tier à  son  goût  pour  l'étude ,  et 
toujours  docile  aux  conseils  de 
Vélasquez,  son  maître  et  son  ami, 
il  forma,  sous  sa  direction,  un  ca- 
binet de  i)l(i«  de  1200  médailles, 
un  autre  cabinet  d'histoire  natu- 
relle, et  enfin  une  collection  pré- 
cieuse d'instrumens  de  mathéma- 
tiques. Ce  fut  au  Viilieu  de  ces 
savantes  occupations  qu'il  passa 
sa  vie  enliérc.  Il  mourut ,  en 
1800,  dans  la  (i8*  année  de  son 
ili^e.  Il  avait  composé  plusieurs 
ouvrages,  dont  les  plus  importuns 
ont  paru  sous  ces  titres  :  i"  Re- 
cueil de  médailles  des  peuples  an- 
ciens d<:  l'Espagne,  avec  leur  ex- 
plication ;  2°  Dissertation  sur  les 
peuples  appelés  Barbos  Sw^unti- 
nos,  avec  les  inscriptions  de  Sa- 
gunte,  ville  ancienne  du  royaume 


VAL  i'^5 

de  Valence;  5°  Description  de  Lu- 
centum,  aujourd'hui  Alicante,  avec 
l'explication  des  inscriptions,  sta- 
tues, médailles,  etc.,  trouvées 
dans  ses  ruines;  4°  Inscription  de 
Carlltago  nova,  ville  ancienne, 
appelée  aujourd'hui  Carthagène  ; 
b"  Explication  des  inscriptions  et 
statues  d'Almazarron,  ville  du 
royaume  de  31urcie  ;  6°  enfin  Ob- 
servations sur  la  situation  de  la 
colonie  Illici,  dans  lesquelles  il 
prouva  qu'elle  n'était  pas  située 
sur  l'emplacement  où  existent  au- 
jourd'hui les  villes  de  Elche  et  de 
Alcndia. 

VALCKENAER  (  Gaspard- 
Loms),  célèbre  helléniste  hollan- 
dais, né  en  1756,  fit  d'excellentes 
études;  devint  d'abord  professeur 
à  l'université  de  Franeker  en  Fri- 
se, succéda  ensuite  dans  celle  de 
Leyde  à  Hermsethuis,  dont  il 
avait  été  le  disciple ,  et  acquit 
bientôt  la  réputation  de  l'un  des 
plus  célèbres  hellénistes  de  son 
temps.  Les  ouvrages  qu'il  a  pu- 
bliés sullisent  pour  illustrer  sa 
mémoire,  mais  ils  ne  forment  que 
la  plus  faible  partie  de  ce  qu'il  a 
écrit.  Personne  n'a  mieux  connu, 
sous  tous  ses  rapports ,  la  littéra- 
ture ancienne  ;  il  avait  tout  lu  ,  et 
faisait  des  extraits  de  tout  c«  qu'il 
lisait;  ses  notes  surtout  annon- 
cent une  grande  érudition  et  une 
grande  sagacité.  Les  principaux 
ouvrages  de  ce  savant  sont  en 
latin.  L'un  d'eux  contient  des  ob- 
servations sur  deux  discours  de 
saint  ChrysOstôme,  et  des  notes 
sur  quelques  passages  du  Nouveau 
Testament.  H  mourut  à  Leyde  eo 
j8o5. 

VALCKEN AEa  (  Juan  ) ,  fiU  du 
précédent,  après  avoir  fuit  d'ex- 


ia4  VAL 

cellentes  rludes  hous  la  diroclion 
de   sfiii   père  ,   devint   professeur 
de  jurispriulence  à  l'académie  de 
Franekt-r,  et  embrassa  avec  cha- 
leur, dans  les  troubles  de  1786  et 
1787,  le  parti  des  patriotes  con- 
tre la  maison  d'Orangée.  Ses  opi- 
nions politiques  contribuèrent  au- 
tant que  son  savoir,  comme  juris- 
consulte, à  le   faire  appeler,  en 
1787,  à  la   chaire  du  droit,  va- 
cante à  Utrecht  par  la  retraite  du 
professeur  Tydeman ,  attaché  an 
parti  du  sladhoudérat;  mais  la  r<'- 
volntion  du  mois  de  septembre  de 
la  même  année,  qiji  rétablit  l'au- 
torité du  prince  d'Orange,  forç.i 
M.  Valckeuaer  de  (|uitler  son  pays 
avec  un  grand  nombre  des  phis 
chauds  partisans  des  opinions  nou- 
velles. Il  se  réfugia  en  France;  et 
le  6  février  1793,  il  présenta  à  la 
convention  nationale  une  pétition 
tendant  à  obtenir  l'appui  des  ar- 
mées françaises  en  faveur  des  pa- 
triotes hollandais.  Ce  vœu  ne  fut 
rempli  qu'en   179.5.   Four  rendre 
cette   cause   populaire,   il   publia 
une  feuille  périodique,  intitulée  : 
l' Avocat  de  la  liberté  batnve,  re- 
marquable surtout   par   le   style. 
Nommé  professeur  du  droit  pu- 
blic et  privé,  en  remplacement 
de  M.  Pestel,  il  signala  son  en- 
trée en  fonctions  par  un  discours 
de  officio  civis  balaci  in  repubiuâ 
servalâ.  Quatre  jours  après,  il  fut 
élu  fiscal  dans  la  cause  de  M.  Vali- 
der Spiegel ,  prisonnier  d'état.  Il 
prouva,  dans  le  rapport  qu'il  fit  à 
ce  sujet,  que,  faute  de  reuseigne- 
mens  suflisans, l'affaire  n'était  pas 
encore  en  état  d'être  portée  de- 
vant les  tribunaux,  et  conclut,  en 
attendant  de  plus  amples  infoi- 
inalion?,  h  oc  nueM.VanderSpie- 


VAL 

gel    fût    détenu    adminlstrative- 
n»ent;  depuis  ce  moment,  partagé 
entre  les  affaires  publiques  et  se?» 
devoirs  de  professeur,  il  ne  put 
doimer  A  ceux  ci  toute  l'assiduité 
qu'ils    exigeaient.     Nommé ,    en 
179Î),   à  l'ambassade  d'Espagne, 
eu  conservant  néanmoins  sa  place 
au  sénat  académique  ,  il  en  revint 
en   1799,  et  y  retouina  sur-le- 
champ  en   qualité  d'envoyé   ex- 
traordinaire, fonctions  qu'il  rem- 
plit jusqu'en  1801.  De  retour  dani 
sa  patrie  à  cette  époque,  il  y  vé- 
cut en  simple  particulier,  et  re- 
partit bientôt  pour  Berlin,  chargé 
de  la  mission  de  stipuler  avec  le 
gouvernement  prussien  des  arran- 
gcmens    relatifs    au    rembourse- 
ment de  l'emprunt  fait  en   Hol- 
lande en  faveur  de  l'Anlriche,  et 
hypothéqué  sur  la  Silésie,  qui  ve- 
nait d'être  cédée  à  la  Prusse.  Sa 
négociation   n'eut   pas  le   succès 
que  son  habileté  pouvait  faire  es- 
pérer; il  n'en  fut  pas  moins  re- 
gardé cotiuîie  un  négociateur  a- 
(Iroit  et  instruit,  réputation  qu'il 
s'était  acquise  en  France,  en  Es- 
pagne, dans  lt!S  Pays-Bas,  et  mê- 
me en   Prusse.    Lorsqu'en   iSio, 
l'empereur   Napoléon  eut  décidé 
l'incorporation    du    royaume    de 
Hollande  à  l'empire  français,  et 
que  le  roi  son  frère  {toy.  Bona- 
pAKTE  Lovis)  ,  eut  épuisé  tous  les 
moyens  de  conserver  à  son  pays 
son  indépendance,  iM.  Valckeuaer 
fut  envoyé  à  Paris  pour  tenter  un 
dernier  effort  ;  mais  il  trouva  Na- 
poléon inflexible,  et  la  Hollande 
fut  incorporée.    Le  négociateur, 
rentré  dans  ses  foyer?,  y  resta  sans 
fonctions,  habitant   tantôt  Ams- 
terdam,  tantôt  la  campagne.  M. 
Vaickenaer  est  chevalier  de  l'or- 


VAl 

<lre  de  l'aigle  rouge  de  Pru^«e»  et 
membre  de  l'iiistitiit  des  Pays-Bas. 
VALDES  (  DON  (Iayetano),  a- 
miral  espagnol ,  député  aux  cer- 
tes de  1822,  etc.,  esl  né  vers 
1770,  dans  la  province  des  Astu- 
ries,  où  sa  famille  est  fort  consi- 
dérée. Porté  par  goût  au  service 
de  mer,  il  y  fut  admis  fort  jeune, 
et  s'y  tit  remarquer  par  son  apti- 
tude, ses  lalens  et  son  courage. 
Dans  le  voyage  autour  du  monde 
du  marquis  de  Mala-Espina ,  il 
fut  chargé  de  reconnaître  et  de 
décrire  le  détroit  de  Fuca,  sur 
la  côte  de  Nootka.  Valdés  ,  et  son 
ami  Galareo,  montés  sur  les  goé- 
lettes la  Subtile  v[  la  Mexicaine  , 
visilèrentetexaminèrent toute  cet- 
te cote  avec  le  plus  grand  soin,  et 
puhlièrcnt,  i  leur  retour,  une  re- 
lation intéressante  de  ce  voyage. 
Valdés  prit  une  part  active  à  tous 
les  combats  que  livra  ou  que  sou- 
tint In  marine  espagnole  ,  dé- 
ployant dans  toutes  les  occasions 
autant  de  talent  que  d'intrépidité. 
J)e  nombreuses  et  graves  blessu- 
res JMstiliéient  la  c<tu(iance  et  les 
récompenses  dont  il  fut  l'objet.  Il 
se  fit  surtout  remarquer  nu  com- 
bat de  Saint-Vincent,  où  il  com- 
mandant un  vaisseau  de  ligne.  Il 
reçut  dn  pren)ier  consul  Bonapar- 
te ,  à  l'époque  où  la  flotte  espa- 
gnole seréuuitàl  escadre  françai- 
se d.ms  le  ()ort  de  Brest,  un  sa- 
bre d'honneur,  comme  l'im  des 
marins  les  plus  distingués  de 
l'Kspagne.  A  Trafalgar ,  il  com- 
mandait, sous  les  ordre>  »le  l'ami- 
ral Dumanoir,  le  vai«seau  le  Nep- 
tune. «Voyant,  disent  les  auteurs 
d'une  biographie  étrangère,  cet 
ofTicier  opérer  une  retraite  préci- 
pitée, qu'il  jugea  peu  honorable, 


VAL 


ia5 


Valdés  rallia  im  vaisseau  espagnol, 
unou  2  navires  français,  se  jetaau 
plus  fort  delà  mêlée,  sauva  deux 
bâtimeus  qui  étaient  sur  le  point 
d'être  pris  par  rennemi,  et  tomba 
couvert  de  blessures  sur  l'entre- 
pont de  sou  vaisseau,  qui,  après 
la  lutte  la  plus  acharnée,  entra 
dans  le  port  de  C.idix  avec  les  na- 
vires qui  l'avaient  si  bien  secon- 
de^, et  ceux  qui  lui  devaient  leur 
délivrance.  »  Le  gouvernement 
espagnol  lui  coufi;i,  en  1808,  le 
conimandement  de  l'escadre  qui 
devait  se  rendre  de  Carlhagène  à 
Toulon.  L'envahissement  de  l'Es- 
pagne par  l'eirjpereur  Napoléon 
ranima  dans  le  cœur  de  cet  officier 
l'amiKir  de  la  patrie.  «  Il  sentit  que 
s'il  se  rendait  à  Toulon  ,  cette  es- 
cadre était  perdue  poin  l'Espagne, 
et  substituant  à  l'obéissance  trop 
souvent  mécani(|ued'un  militaire 
le  patriotisme  réfléchi  d'un  ci- 
toyen, il  manœuvra  tellement  au 
sortir  de  la  rade  de  Carthagéne, 
qu'au  lieu  de  cingler  vers  Toulon, 
il  se  dirigea  sur  Tile  de  Minorque. 
Le  grand-duc  de  Berg,  qui  com- 
maiulait  alors  les  forces  française» 
à  Madrid,  et  dirigeait  provisoire- 
ment les  affaires  de  la  péninsule, 
irrité  de  la  courageuse  désobéis- 
sance de  Valdés  ,  lui  ôta  le  com- 
mandement et  le  rappela.  »  L'in- 
surrection était  générale  à  son 
débarquement  :  il  y  prit  part  aus- 
sitôt, et  entra  dans  l'armée  de 
terre.  Il  concourut ,  avec  ses 
concitoyens  ,  à  la  première  dé- 
fense de  Sarragosse,  d'où  il  passa, 
les  l'rançais  s'étant  retirés,  dan» 
les  Asturies  ;  il  y  reçut  le  com- 
mandement des  troupes  insurgée» 
de  cette  province  ,  et  fut  griève- 
ment blesîé  d'un  coup  de  feu  dan» 


laG 


VAL 


la  poitrine  à  l'affaire  d'Espinosa. 
Il  se  rendit,  par  ordre  de  la  junte 
centrale,  à  Cadix,  où  il  prit   le 
coinmaiidement  de  l'escadre  lé- 
gère qui  dél'endiiit  le  port,   et  re- 
<;ut  presque  aussitôt  le  gouverne- 
ment de  la  place,  poste  alors  de  la 
plus  haute  importance.  «  Le  zèle, 
la  vigilance   et  l'activité  qu'il  mit 
à  s'acquitter  de  ses  nouvelles  fonc- 
tions, lui  assurèrent  la  reconnais- 
sance de  ses  concitoyens,  ainsi 
que  l'estime  des  étrangers  et  des 
ennemis  eux-mêmes.  Il  se  mon- 
tra très-attaché  aux  principes  li- 
béraux, et  en    qualité  de    prési- 
dent de  VJjanlamienlo  de  Cadix  , 
il  fit  une  adi-esse  de  remeroîment 
aux  corlès    pour   la   constitution 
qu'ilsavaient  donnée  à  l'Espagne; 
et  lorsque  cette  assemblée  eut  dé- 
crété l'abolition  de  l'inquisition  , 
il  prononça  un  discours  plein  de 
sagesse  et  d'énergie  pour  rendre 
grâce   aux    législateurs  de    celte 
dispositron  salutaire.  »  Ferdinand 
VII  rétabli  sur  le  trône  en  iSi/j» 
Valdès,  qui  était  devenu  lieute- 
nant-général ,  lut   en   butte    aux 
persécutions  de  ces  hommes  qui 
jouissaient   des  avantages   de   la 
restauration,  sans  avoir  participé 
aux  dangers  qu'avaient  courus  les 
Espagnols  qui  l'avaient  préparée. 
Un  ordre  royal  le  confina  au  châ- 
teau d'Alicante,  où  il  était  encore 
détenu  lors  delà  révolution  cons- 
titutionnelle du  7  mars  1820.  Ren- 
du par  suite  à  la  liberté,   il  l'ut 
réintégré  dans  la  place  de  gouver- 
neur de  Cadix.   Nommé  ministre 
de  la  guerrre,  il  occupa  ce  poste 
peu  de  temps,  et  fut  élu  par  ses 
concitoyens  membre   des   certes 
en  182a.  Valdès  a  joué  depuis  un 
iôle  important,   lléfugié  d'abord 


VAL 

ù  Gibraltar,  il  fut  obligé  ensuite 
de  se  sauver  dans  les  états  de  Ma- 
roc. Fiéclamé  par  le  consul  espa- 
gnol ,  qui  offrit  même  une  somme 
considérable  pour  qu'il  lui  fût  li- 
vre,  il  n'a  dû  son  salut  qu'à   la 
généreuse  intervention  du  consul 
auiéricain  à  Maroc.  Après  avoir 
couru    les    plus   grands  dangers, 
il  a  débarqué  en  Angleterre,  où  il 
est  encore.  «M.  de  Valdès,  dit  l'au- 
teur de  la  Galerie  espagnole,  avec 
plus   de  vivacité  d'esprit  que  de 
profondeur  et  de  savoir,  a  des  re- 
parties fines  et  piquantes,  un  style 
vigoureux  et   original,   qui  sou- 
vent interrompt  la  gravité  de  l'as- 
semblée aux  dépens  de  ses  ad- 
versaires, et  contraste    avec  son 
air  insouciant  et  de  bonhommie. 
Il  n'est  pas  jusqu'à  son  balance- 
ment de   corps,   habitude   prise 
sur  les  bâtimens,  qui  ne  donne  à 
ce  député  une  singularité  de  pan- 
tomime   qu'augmente   encore   le 
pittoresque  de  ses  expressions.  » 
VALDÈS  (  RoDRiGiEz) ,  com- 
mandant de  Cadix   lors  de  la  ré- 
volution de  1820,  n'est  point  delà 
famille  du  précédent,  avec  lequel 
d'ailleurs  il  n'a  rien  de  commun 
sous  le  rapport  des  vertus  et  du 
mérite.  Rodriguez  de  Valdès  s'op- 
posa de  tout  son  pouvoir  aux  pro- 
grès de  l'insurrection  qui  avait  é- 
claté  à  l'île  de  Léon,  le  1"  janvier 
1820;  les  mesures  qu'il  prit  dans 
l'intérieur  et  à   l'extérieur  pour 
mettre  la  place  à  l'abri  du  mouve- 
ment constitutionnel,  inspira  l'é- 
pouvante ,  et  fit  comprimer  le  feu 
patriotique  qui  allait  éclater  parmi 
les  habitans.  Les  progrès  de  ceux 
que  l'Espagne  regardait   comme 
ses  libérateurs,  furent  tels  à  la  fin, 
que  le  commandant  «  parut  céder 


VAL 

aux  désirs  impatiens  des  habitans 
de  Cadix,  en  pt-rmettant  de  pro- 
clamer dans  rcntelnle  de  cette 
ville  la  constitution  des  cortès  : 
il  iavita  même  le  général  Quiroga 
h  assistera  cette  cérémonie;  mais 
le  10  mars  ù  onze  heures  du  ma- 
tin, lorsque  le  peuple  rassemblé 
sur  la  place  publique  se  livrait  à 
l'allégresse  ,  on  vit  paraître  tout- 
à-coup  le  bataillon  des  guides  du 
gouverneur,  et  un  autre  corps  dit 
de  Lealtad  (  de  la  loyauté  ),  dont 
les  élémens,  à  ce  qu'on  prétend, 
avaient  été  fournis  par  les  bagnes 
les  priions,  et  qui,  par  des  dé- 
charges multipliées,  portèrent  la 
terreur  et  la  mort  au  milieu  de 
cette  foule  désarmée.  Celte  bou- 
cherie dura  jusqu'à  5  trois  heures, 
avec  des  circonstances  révollaii- 
l«'S.  »  Le  roi  accepta,  peu  de  jours 
après,  la  constitution  ,  et  rempla- 
ça Rodriguez  Valdés  dans  sou 
commandement  par  le  général 
Odonnojhu.  Il  donna  à  ce  général 
l'ordre  de  dissoudre,  après  les  a- 
voir  désarmés,  les  deux  corps  qui 
avaient  si  lâchement  répandu  le 
sang  de  leurs  concitoyens,  et  de 
traduire  les  auteurs  de  ces  assassi- 
nats devant  les  tribunaux.  Ces 
ordres  furent  ponctuellement  exé- 
lés.  Les  deux  corps  furent  con- 
duits hors  de  la  ville  et  désar- 
més, et  Rodriguez  Valdcs,  ainsi 
(jue  ses  complices,  enfermés  dans 
les  prisons  de  la  forteresse.  Le 
triomphe  du  pouvoir  absolu,  en 
Espagne  ,  a  bientôt  rendu  aux 
hommes  tels  que  Rodriguez  Val- 
dés  cette  funeste  influence  qui 
prolonge  les  désordres  et  l'anar- 
chie. 

VA  L  ÉE  (  SiLTAiK  -  Chables, 
comte),  lieutenant -général  d'ar- 


VAL 


13: 


tillerie  ,  inspecteur  -  général  de 
cette  arme,  grand'croix  de  la  lé- 
gion -  d'honneur  ,  chevalier  de 
Saint-Louis,  est  né  le  i8  décem- 
bre 1773.  II  prit  du  service  au 
commencement  de  la  révolution, 
et  parvint  rapidement  au  grade 
de  colonel  du  i*'  régiment  d'ar- 
tillerie à  pied;  c'est  en  cette  aua- 
lité  qu'il  fit  les  campagnes  de  1 006 
et  1807.  La  croix  d'officier  de  la 
légion-d'honneur  fut  la  récom- 
pense des  services  qu'il  rendit. 
Il  obtint  de  l'emploi  en  1809,  et 
fut  rappelé  pour  passer  en  Espa- 
gne. Les  sièges  de  Lérida,  de  Mé- 
quinenza,  de  Tarragone ,  de  Tor- 
lone  et  de  Valence,  en  1810,  lui 
valurent,  le  6  août  181  i,  le  grade 
de  général  de  division.  Il  continua 
de  servir  en  Espagne  jusqu'au 
i5  avril  i8i3,  jour  où  il  se  dis- 
tingua particulièrement  contre  les 
Anglais.  Les  événemens  politi- 
ques de  1814  Je  ramenèrent  dans 
sa  patrie,  où  Louis  XVIII  lui  don- 
na la  croix  de  Saint-Louis,  le  27 
juin  de  celte  année,  et  le  nomma, 
le  I"  juillet  1814»  inspecteur-gé- 
néral d'artillerie  dans  les  direc- 
tions de  Strasbourg  et  de  NeUf- 
brissac.  Il  devint  successivement 
commandeur  et  grand  -  officier 
de  la  légion-d'honneur.  Au  mois 
de  juin  i8i5,  il  cbmmanda  l'ar- 
tillerie du  5*  corps  d'armée.  A- 
près  la  seconde  restauration,  le 
Vi)\  le  nomma  inspecteur-géné- 
ral et  rapporteur  du  comité  cen- 
tral d'artillerie.  Le  général  Valée 
présidait,  au  mois  de  mai  1816, 
le  conseil  de  guerre  qui  con- 
damna à  mort  par  contumace  le 
général  Lefcbvre  -  Desnouotfes 
{voy.  ce  nom).  Il  est  encore 
aujourd'hui     (  i8i5  )     employé 


12« 


VxVL 


daii3  le  corpn  royal  du  l'artillerie. 
VALEiNGE'(  Cynus-  Mabie- 

AlEXANDRE  de  ïlMBRUNE-TlMBBONE, 

COMTE  UE  ) ,  pair  de  France  ,  lieu- 
tenant-général,  commandant  de 
la  légion  -  d'honneur,  naquit  à 
Agen,le  20  août  1  767, d'une  des  fa- 
milles les  plus  anciennes  et  les  plus 
considérées  du  midi  de  la  France. 
Destiné  au  service  militaire  dés  sa 
première  jeunesse,  il  entra  d'a- 
bord dans  le  corps  royal  de  Tar- 
lilleric  en  1774?  passa  capitaine 
au  régiment  de  Koyal-Cavalerie 
en  1778,  fut  attaché  pendant  quel- 
que temps  en  qualité  d'aide-de- 
camp  nu  maréchal  de  Vaux,  et 
nommé  colonel  en  second  du  ré- 
giment de  Bretagne  en  1784-  M. 
de  Valence,  doué  de  tous  les  avan- 
tages extérieurs,  d'tm  esprit  dis- 
tingué et  cultivé  avec  soin  ,  obtint 
de  grands  succès  à  la  cour,  au 
commencement  du  règne  de  Louis 
XV^I.  Il  eut  bientôt  la  charge  de 
premier  écuyer  du  duc  d'Orléans, 
grand-père  du  duc  actuel,  et  fut 
nommé  colonel -commandant  du 
régiment  de  Chartres- Dragons. 
JiOrs  de  la  convocation  des  états- 
généraux,  en  178g,  il  fut  élu  dé- 
puté suppléant  de  l'ordre  de  la 
noblesse, mais  ne  prit  point  séance 
à  l'assemblée  constituante.  Il  ne 
s'en  prononça  pas  moins  pour 
une  sage  réforme  des  abus  de 
l'ancien  régime,  et  pour  l'amé- 
lioration de  l'ordre  social  par  des 
institutions  constitulionricllesque 
l'immense  majorité  des  Français 
demandait  instamment.  Il  ne  ces- 
sa depuis  de  servir  avec  chaleur 
la  cause  de  la  liberté  ,  par  ses  dis- 
cours et  l'influence  qu'il  exerçait 
déjà  ,  jusqu'au  moment  où  il  put 
verser  son  sang  pour  elle.  En  mai 


VAL 

1 7î)a ,  il  fut  employé  en  qualité  de 
maréchal-de-canip  à  l'armée  de 
Luckner,  s'empara  de  Courtrai, 
})assa  ensuite  sous  les  ordres  de 
Dumouriez,  fut  promu  au  gra- 
de de  général  de  division  le  20 
août  de  la  même  année,  com- 
manda les  grenadiers  et  les  cara- 
biniers à  l'affaire  de  Valmy,  en 
Champagne,  où  il  força,  par  l'ha- 
bileté de  ses  manœuvres  et  la 
courageuse  contenance  de  sa  di- 
vision, le  duc  de  Brunswick,  qui 
avait  déjà  tourné  une  aile  de  l'ar- 
mée française,  à  s'arrêter  et  à  son- 
ger plutôt  à  se  défendre  qu'à  con- 
tinuer ses  attaques.  Au  mois  de 
septembre  suivant,  le  général 
Valence  remplaça  Dillon  à  l'armée 
des  Ardennes.  Il  eut  ordre  de  sui- 
vre les  Prussiens  dans  leur  re- 
traite, et  signa  la  capitulation  par 
laquelle,  pour  n'être  plus  atta- 
qués pendant  leur  marche  rétro- 
grade ,  ils  s'engagèrent  à  rendre 
la  place  de  Longwy,  et  à  repasser 
au  plus  tôt  les  frontières  de  la 
France.  Après  l'évacuation  forcée 
du  territoire  par  les  Prussiens,  le 
général  Valence  combattit  avec  la 
même  valeur  l'armée  autrichien- 
ne; contribua  aux  glorieux  succès 
de  la  journée  de  Jemmapes,  s'em- 
para successivement  des  places 
de  Charleroi ,  de  Namur,  et  du 
château  de  celte  dernière  ville. 
IMais  cette  campagne,  si  heureu- 
sement terminée,  fut  suivie,  en 
1795,  par  de  funestes  revers. 
Dumouriez  avait  dès  le  commen- 
cement de  celte  année  excité 
la  méfiance  et  la  haine  des  jaco- 
bins et  du  parti  le  plus  exagéré  de 
la  convention;  le  nouveau  minis- 
tre de  la  guerre  l'ache,  leur  ser- 
vile  instrument  et  l'ennemi  per- 


VAL 

sonncl  du  vainqueur  de  Jemma- 
|>eii,  liii.'Sait  l'année  viclorifusc 
manquer  de  tout ,  et  conlrariuit 
tous  te?  jilauâ  du  générai  en  chef. 
Des  roniniissaires  civils  y  portè- 
rent le  triiuble  et  la  désorganisa- 
tion. L'Angleterre  venait  de  pren- 
dre j>art  à  la  guerre,  et  entraîna 
à  ga  suite  la  république  batave. 
Le  1"  mars, le  prince  dcCobourg, 
à  la  (ète  d'une  urinée  ibruiidablc, 
se  mit  en  mouvement,  l'orça  le 
général  Miranda  à  lever  à  la  liAle 
le  siège  de  Maëstricht,  el  les  Fran- 
çais à  évacuer  Liège.  Ce  ne  l'ut  que 
dans  les  plaines  de  Tirlemont  que 
rariuée,  déjà  considérablement 
diminuée  ,  put  se  lallier.  On  se 
lésulut  à  livrer  encore  une  grande 
bai.iille ,  et  le  champ  en  fut  choisi 
à  Ncrwinde,  où,  cent  ans  aupa- 
ravant, le  maréchal  de  Luxem- 
bourg avait  battu  l'armée  de  Guil- 
laume II L  L«;  combat  cmumença 
avec  le  jour  le  i8  mars.  L'aile 
droite  était  coiiimandée  par  le  gé- 
néral Valtnce,  le  ceulre  par  le 
duc  de  Chartres  (aujourd'hui  duc 
d'Orléans),  et  l'aile  gauche  par 
le  général  Mirauda.  Celle  der- 
nière fut  enl'oncéc  et  mise  en  dé- 
route. Le  général  Valence  enleva 
le*  villages  d'Oberwiudeel  de  Ner- 
niiide  ,  que  les  Autrichiens,  eu 
forces  rupérieures,  parvinrent  A  re- 
piondre.  Le  duc  de  Chartres  ,  a- 
près  des  prodiges  de  valeur,  les 
eu  chassa;  mais  leur  aile  droite, 
«jui  avait  battu  Miranda,  revint  au 
secours  des  troupes  de  leur  cen- 
tre. Des  bataillons  de  volontaires 
encore  peu  aguerris,  se  croyant 
tournés ,  se  débandèrent  en  jetant 
le  cri  funeste  de  sauve  qui  peut. 
Ou  évacua  Nerwinde;  le  feu  de 
quci(]ues  baiaiDons  de  liijne,  bien 


VAL 


ti9 


dirigé  parle  duc  de  Charlrei<,|>er- 
uiit  à  l'inlanlerie  de  se  rnllier.  La 
cavalerie  se  couvrit  de  gloire.  Le 
gént.-ral  Valence,  avec  l'intrépi- 
dité dont  il  avait  donné  déjà  tant 
de  preuves,  lit  plusieurs  charges 
brillantes,  et  recul  trois  coups  de 
sabre  sur  la  tête,  dont  il  a  con- 
servé jusqu'à  sa  mort  les  glorieu- 
ses cicatrices.  On  parvint  enGn  à 
repousser  les  Autrichiens,  et  l'or- 
mée  française  resta  maîtresse  du 
champ  de  bataille;  mais  elle  avait 
payé  cher  cet  avantage,  et  Du- 
mouriez,  dont  l'échec  de  son  «ile 
gauche  avait  subitement  dégarni 
le  flanc,  voyant  qu'il  était  hors 
d'état  de  conliniier  l'ofleusive , 
ordonna  le  leudeniain  la  re- 
traite ,  qui  devint  une  suite  de 
combats  continuels  pend;Mif  qua- 
tre jours  el  quatre  nuits.  De  uou- 
veaux  commissitires  f'e  la  conven- 
tion arrivér^:nl  bietitôt  A  l'armée. 
Les  dénonciations  contie  !e  géné- 
ral en  chef  et  ses  .unis  ïe  laulli- 
plièrenf.  Dumonriez,  que  la  con- 
vention nienaçail  encore  plus  que 
l'ennemi,  avait  depuis  long-temps 
conçu  le  dessein  de  la  renverser, 
de  marcher  sur  Paris,  et  d'y  opé- 
rer une  révolution  nouvelle.  Il 
entra,  dès  le  aa  mars,  en  uégo- 
ciation  avec  le  prince  de  Cobourg, 
dont  il  fallut  d'abord  s'assurer. 
On  sait  quelle  fut  l'issue  de  l'al- 
liance de  Uutnoiiriez  avec  l'étran- 
ger. Les  généraux  français  ,  qui 
passaient  pour  avoir  eu  des  liai- 
sons intimes  aveclem-  chef,  quoi- 
qu'ils n'eussent  en  rien  participé' 
à  son  dernier  projet,  furent  cn- 
vidoppés  dans  sa  disgrâce  et  pros- 
crits comme  lui.  Le  général  Va- 
lence se  trouva  contraint  de  fuir 
une  pairie  qu'il  avait  si  bien  set- 

•J 


i3o 


TAl 


vie.  Il  ne  s'y  déterniinu  cepen- 
dant qiK!  sur  l'annonce  positive 
du  mandat  d'arrêt  lancé  centre 
lui.  A  la  nouvelle  de  son  départ, 
lu  faction  .«angninaire,  qui  dispo- 
sait du  pouvoir,  et  qui  avait  d'jj;\ 
Ijaulemtnt  demandé  sa  tête  ,  le 
mit  hors  la  loi,  sans  qu'il  fût  per- 
mis à  ses  amis,  à  la  veille  d'être 
proscrits  eux  -  mêmes ,  de  rien 
tenter  [lour  sa  défense.  Toujours 
fidèle  à  sa  patrie,  au  milieu  des 
persécutions  et  de  l'exil ,  il  ne 
voulut  pas  même  séjourner  mo- 
mentanément dans  les  pays  en 
guerre  avec  la  France ,  et  chercha 
un  asile  dans  les  étais  du  joi  de 
Daneniarck.  Retiré  à  la  campa- 
gne dans  les  environs  d'Altona, 
repoussant  tout  projet  de  ven- 
geance contre  ses  concitoyens,  il 
put  jouir  de  loin  du  spectacle  des 
combats  acharnés  de  se:*  ennemis, 
jacobins  et  conventionnels,  qui 
s'entre-déchiraienl  de  leurs  pro- 
pres mains.  Mais  le  sort  cruel  et 
de  plus  en  plus  menaçant  de  sa 
famille,  restée  en  France,  lui  cau- 
sa long-temps  de  vives  alarm.es. 
M.  de  Valence  avait  épousé  la  fille 
du  comte  de  Genlis  {voy.  l'article 
Sillery),  jeune  personne  qui  réu- 
nissait aux  charmes  de  la  figure, 
le  plus  noble  caractère  et  tous  les 
avantages  d'un  esprit  distingué. 
Son  père  fut  immolé  sur  l'écha- 
faud  par  la  faction  de  Robespierre; 
sa  tante,  M""  de  Montesson,  veuve 
du  duc  d'Orléans  était  en  prison  ; 
sa  mère,  iM""' de  Genlis,  vivait  dans 
l'exil;  elle-même,  séparée  de  ses 
enfans,  fut  incarcérée  pendant 
tout  le  régne  de  la  terreur,  et  sans 
cesse  dénoncée  dans  sa  prison  mê- 
me, n'échappa  que  par  une  espèce 
de  miracle  au  sort  de  son  maiheu- 


VAL 

reux  pérr.  La  jeunesse,  la  boriô 
et  la  courageuse  résignation  de  M** 
de.Valencc,  intéressèrent  si  vive- 
ment un  simple  artisan  charron  , 
membre  d'un  comité  révolution- 
naire, et  inspecteur  de  la  prison 
où  elle  était  enfermée,  qu'il  ris- 
qua de  soustraire  des  cartons  tou- 
tes les  dénonciations  et  pièces  qui 
pouvaient  la  compromettre,  ou 
seulement  rappeler  qu'elle  exis- 
tait encore  :  on  gagna  ainsi  du 
temps.  La  révolution  du  9  thermi- 
dor la  sauva,  et  celle  du  ^i^  bru- 
maire {lermit  au  général  Vii!en<e 
de  revoir  sa  patrie.  Rayé  de  la  lis- 
te des  émigrés  sous  le  gouverne- 
ment consulaire  ,  il  devint,  en 
1801,  président  du  canton  de  Ver- 
sy ,  département  de  la  Marm^,  où 
il  avait  eu  des  propriétés.  Le  col- 
lège électoral  de  ce  département, 
qu'il  présida  en  i8o3,  l'élut  can- 
didat au  sénat-conservateur,  où  il 
fut  appelé  à  siéger  le  1"  février 
i8o5.  Le  20  mars  1807,  il  reçut 
le  commandement  de  la  5*  divi- 
sion de  réserve  dans  Tiniérieur , 
et  passa  en  Espagne  en  1808,  où 
il  commanda  une  division  de  ca- 
valerie. Employé  pendant  la  dé- 
sastreuse campagne  de  Russie,  il 
commanda  avec  la  plus  haute  dis- 
tinction une  division  de  cavalerie 
sous  les  ordres  de  Joachim  ,  roi 
de  Naples  {voy.  Mtjrat),  et  fut  cilé 
pour  la  valeur  qu'il  déploya  ci  ia 
bataille  de  Mohilow.  Au  mois  de 
décembre  18 15,  il  fut  envoyé  eu 
qualité  de  commissaire  extraordi- 
naire à  Besançon,  dans  la  6'  divi- 
sion militaire,  où  il  prit  toutes  les 
mesures  urgentes  à  celte  époque; 
pourvut  à  la  défense  de  la  ville  de 
Besançon;  se  mit  ensuite  à  la  tête 
d'une  colonne  de  gardes  natioaa- 


TAL 

les  el  de  quelques  troupes  de  li- 
gne, el  se  porta,  nu  mois  de  jan- 
vier i8i<^,ù  Gray,  où  il  tint  toutes 
les  forces  ennemies  en  échec  pen- 
dant sept  jours.  De  retour  de  sa 
mission  après  les  désastres  de  cel- 
te campagne  et  l'abdication  de  Na- 
poléon, il  l'ut  nommé  pair  de  Fran- 
ce par  ordonnance  royale  du  4  juin 
j8i4.  Il  continua  à  siég;er  pendant 
les  cent  jours,  en  181 5,  dans  la 
chambre  haute.  Désigné  à  la  fin  de 
juin,  par  le  gouvernement  provi- 
soire, pour  être  un  des  plénipo- 
tentiaires chargés  de  proposer  un 
armistice  au  général  Bliicher,  il  se 
rendit  d'abord  au  quartier-général 
prussien,  et  fut  de  nouveau  en- 
voyé, en  la  même  (jualité,  auprès 
du  duc  de  Wellington  avec  le 
comte  Boissy  d'Anglas.  L'ordon- 
nance royale  du  24  juillet  fil  con- 
naître que  le  comte  de  Valence  a- 
vail  cessé  de  Aiirc  partie  de  la 
chambre  des  pairs,  el  une  nouvel- 
le ordonnance  du  4  septembre  sui- 
vant, que  le  lieuteuanl-général  de 
Valence  était  mis  à  la  retraite. 
Rappelé  depuis  à  la  chambre  des 
pairs  par  l'ordonnance  du  21  no- 
vembre 1819,  il  y  a  siégé  jusqu'à 
sa  mort ,  el  n'a  cessé  d'y  doimer 
dans  toutes  les  occasions  des  preu- 
ves multipliées  de  son  })atriotisme, 
de  son  amour  de  l'ordre  el  d'une 
sageli!)erlé.  Dans  sa  nouvelle  car- 
rière politique,  peut-être  moins 
brillanle  mais  non  moins  utile  que 
celle  de?  armes,  il  s'est  constam- 
ment montré  le  courageux  défen- 
seur de  la  liberté  individuelle,  de 
la  liberté  de  la  presse  el  de  tous  les 
droits  nationaux.  Après  une  longue 
et  douloureuse  maladie,  le  comte 
de  Valence  a  été  enlevé,  en  1822,  A 
sa  famille  el  h  ses  nombreux  annis, 


VAL 


i3i 


laissant  do  vifs  regrets  i  tous  cetix 
qui  l'ont  connu  el  une  mémoire 
vénérée  dans  sa  pairie.  De  ses 
deux  filles,  l'aînée,  dame  d'hon- 
neur de  M°"  la  duchesse  d'Or- 
léans, a  épousé  le  comte  de  Cel- 
les, député  aux  états-généraux  du 
royaui7ie  des  Pays-Bas,  qui,  avar.t 
de  se  retirer  dans  sa  patrie,  la  Bel- 
gique, a  pendant  plusieurs  années 
administré, comme  préfet, le  dépar- 
tement de  la  Loire-Inférieure,  et  y 
a  laissé  les  plus  honorables  souve- 
nirs. La  cadette  a  épousé  un  des 
frères  d'armes  de  son  père,  le  gé- 
néral comte  Gérard,  aussi  distin- 
gué par  sa  valeur  que  par  ses  ta- 
lens  militaires,  et  qui  a  depuis  pris 
rang  parmi  les  défenseurs  des  liber- 
tés nationales,  comme  député  de 
la  ville  de  Paris,  à  la  seconde  cham- 
bre {toy.  Celles  el  Gérard.)  Outre 
plusieurs  discours  prononcés  à  la 
chambre  des  pairs,  dont  le  dernier 
fut  en  faveur  de  la  famille  du  mal- 
heureux Lesurques,  injustement 
condamné  à  mort,  le  comte  de 
Valence  a  publié,  en  i7{)(î,  un 
ouvrage  intitidé  :  Essai  sio'  tex 
finances  de  la  rc publique  fran- 
çaise, et  sur  les  moyens  ci' auran» 
tir  les  assignats,  1  vol.  in-8''.  Cet 
écrit  est  plein  d'idées  neuves  el 
d'aperçus  financiers  remarqua- 
bles. 

VALENTIN  DE  LAPELOUZE 
(Jean- Baptiste  ) ,  né  à  Bruyères, 
département  des  Vosges ,  le  20 
juillet  1777.  La  révolution  Icsu:- 
j)rit  au  milieu  de  ses  éludes,  qu'il 
continua  cependant  aidé  des  con- 
seils de  l'abbé  Georgel  [voy.  ce 
nom),  son  compatriote,  jusqu'à  \a 
déportation  de  ce  célèbre  jésuite. 
Appelé  :\  l'école  de  Mars  de  la 
plaine  des  Sablons,  en  179'},  il  dc-^ 


i5a  VAL 

vint  un  des  élèves  iiislruct«urs  de 
celte  école,  qui  coopéra  au  9  ther- 
midor. 11  servit  ensuite  comme 
officier  clans  un  des  bataillons  des 
Vosges,  qui  étaient  en  grand  nom- 
bre i  l'armée  du  Uhin.  La  faiblesse 
de  sa  vue  le  força  de  renoncer  à  la 
canièie  militaiie,  et  à  entrer  dans 
celle  de  radiuinistiation.  Après  a- 
\oir  occupé  divers  emplois  dans 
son  département,  il  fut  chargé  de 
diri^^er  la  coinplabilité  de  la  lote- 
rie. Il  se  servit  poiM'  cela  de  la  mé- 
thode des  parties  doubles,  qu'il 
eut  le  preniier  l'idée  d'iutroduire 
dans  une  grande  administration , 
v.t  obtint  par  la  un  tel  succès,  que 
Jes  comptes  de  la  loterie  lurent 
souvent  présentés  comme  modè- 
les dans  les  rapports  annuels  de 
la  chambre  des  comptes,  et  (|Ue 
la  méthode,  des  parties  doubles 
lut  applicjuéeà  la  comptabilité  du 
trésor,  ainsi  que  de  tous  les  éfa- 
blisscmens  (jui  en  dépendent.  En 
1807,  le  sénateur  général  Ferino, 
son  oncle,  ayant  été  nommé  gou- 
verneur d'Anvers  avec  tous  les 
pouvoirs  civils  et  militaires,  il  l'ac- 
compagna en  qualité  d'aidc-de- 
camp,  et  concourut;!  tous  les  tra- 
vaux entrepris  pour  la  défense  de 
celle  place  et  dus  établissemens 
maritimes  qui  3'  existaient.  Résis- 
liint  à  toutes  les  tentatives  de  sé- 
duction, il  avertit  son  oncle  de 
l'énorme  contrebande  qui  se  fai- 
sait sur  l'Escaut,  depuis  Flessin- 
gue  jusqu'à  Anvers,  ainsi  que  des 
abus  qui  se  commcltaient  dans  la 
perception  de  I'»h  troi.  Il  rédigea 
à  ce  sujet  un  rapport  (|ui  l'ut  adres- 
sé par  le  général  Ferino  au  gou- 
yernement,  et  qui  servit  à  l'éclai- 
rer sur  la  conduite  du  général  qui 
comuiacdait  à  cette  celte  époque 


VAL 

à  Flessingue.  L'affaire  de  l'octroi 
n'éclata  que  plus  tard.  Nommé 
capitaine  de  grenadiers  de  la  1" 
légion  de  la  garde  nationale  de  Pa- 
ris, M.  Valentin  de  Lapelouzc  ma- 
nifesta dans  ïeti  cent  jours.,  en  i8i5, 
des  opinions  qui  fournirent  contre 
lui  la  matière  de  nombreuses  et 
violentes  dénonciations,  et  il  fut' 
destitué,  en  1816,  de  sa  place  à  la 
loterie,  place  qu'il  avait  créée  et 
occupée  pendant  18  ans.  L'amitié 
des  grenadiers  de  sa  compagnie, 
l'estime  et  la  confiance  du  duc  de 
Choiseul,  alors  colonel  de  la  1"  lé- 
gion, lui  firent  cependant  conser- 
ver son  grade  de  capitaine  de  la 
garde  nationale,  et  il  occupe  en- 
core ce  poste  aujourd'hui.  M.  Va- 
lentin de  Lapelouzea  employé  de- 
puis les  loisirs  que  lui  laissait  sa 
destitution  ,  à  des  recherches  sur 
l'économie  politique  et  les  finan- 
ces, matières  qu'il  avait  constam- 
ment étudiées.  Il  n'interrompit 
ces  travaux  que  pour  diriger  mo- 
mentanément une  partie  in)por- 
tante  au  comité  des  receveurs-gé- 
néraux. Ayant  acquis  en  1820,  un 
intérêt  au  Courrier  Français,  il 
prit,  au  commencement  de  l'année 
suivante,  la  direction  de  ce  jour- 
nal, qu'il  n'a  pas  quittée  depuis,  et 
dans  laquelle  les  événemens  des 
dernières  années  lui  ont  fourni  de 
nomi)reuses  occasions  de  prouver 
qu'il  savait  également  résisicraux 
persécutions  et  aux  séductions  de 
tous  gemes.  11  concourt  aussi  à  la 
rédaction  de  celte  feuille,  notam- 
ment par  des  articles  sur  les  finan- 
ces, qu'il  a  l'art  de  rendre  clairs 
et  intéiessans  peur  toutes  les  cla;»- 
ses  de  lecteurs. 

VAL11LT,EIIT  (Jean-Mame-Ro- 
GEft),  général  de  brigade,  voiu- 


VAL 

mandant  de  ta  légion-d'honneur  , 
naquit  à  Avranches,  département 
de  la  Manche,  le  ai  mai  1765. 
Issu    d'une    famille    honorable , 
mais  dont  le  nom  était  sans  par- 
ticule ,  il  recul  une  éducalion  dis- 
tinguée, dont  son  goût  pour  les 
armes  changea  la   direction.    Sa 
famille  ne  contraria  point  les  pro- 
jets qu'il  avait  formés;  il  se  pré- 
senta pour  subir  les  examens  dans 
l'artillerie,     qu'il    affectionnait; 
mais  un  édit  du  roi  en  excluait 
les  roturiers,  et  il  ne  l'ut  point 
admis.  De  dégoût,  il  faillit,  dit- 
on,  s'expatrier.  Son  amour  pour 
ses  païens  le  retint,  et  il  entra, 
comme  simple  soldat ,  dans  le  ré- 
gim<înt  de  Rohan-Soubise  infan- 
terie. Il  était  rentré  dans  sa  fa- 
mille lorsque  la  révolution  éclata. 
Les  principes  du  nouvel  ordre  de 
choses  convenaient  trop  à  son  Ame 
libérale  pour  qu'il  ne  les  adopt/tt 
pas  avec  entliousiasme  ,  mais  sans 
exagération  ,   sans   ambition  ,   et 
par  l'unique  motif  d'être  utile  à 
son  pays  ,  en  se  rangeant  parmi 
ses  braves  défenseurs.  Nommé  par 
ses  camarades   chef  du   premier 
bataillon  de  la  Manche,  !l  se  ren- 
<lit  à  l'iirmée  du  général  Rocham- 
beati.  »  Il  suit,  dit  M.  Lavallée, 
Lnckner  dans  la  Belgique  ,  il  as- 
socie son  nom  aux  braves  défen- 
seurs de  Lille,  il  entre  vainqueur 
dans  la  citadelle  d'Anvers,  il  brave 
les  glaces  de  i^QÔ  sur  le  rhamp 
de  bataille  de  Lawfeidt  ;  seul,  il 
conserve  dans  son  corps  la  disci- 
pline exilée  de   l'armée   de  Du- 
inouriez;  seul,  dans  les  murs  du 
i^ucsnoy  ,  pressé  par  l'ennemi ,  il 
en   impose   aux  désorganisateurs 
et  les  désarme;  seul  enfin  des  pri- 
sonuier?  français,  que  le  sort  con- 


VAL  i55 

traire  relègue  au  fond  de  la  Hon" 
grie,  il  consacre  à  l'étude  de  la 
guerre  des  jours  que  des  revers, 
précurseurs  de  tant  de  triomphes, 
rendaient  un  moment  inutiles  à  la 
France.  Il  lui  est  rendu  ;  il  se  re- 
trouve avec  ses  anciens  compa- 
gnons; ils  sont  réunis  à  cette  a8* 
demi-brigade,  cette  fidèle  amie 
de  la  victoire,  et,  à  leur  tête,  il 
marche   à   des  lauriers  certains. 
C'est  avec  elle  que,  le  28  ther- 
midor an  7 ,  il  enleva  le  Simplon  , 
ce  colosse  posé  p;ir  la  nature  au 
milieu  des  Alpes  colossales  ;   en 
vain   les   Autrichiens   en    défen- 
daient les  flancs  escarj)és,  en  vain 
leur  artillerie  foudroie  les  témé- 
raires qui  les  osent  gravir;  Val- 
huberl  brave  tout,  et  la  monta- 
gne, et  les  hommes,  et  les  ca- 
nons ;  il  arrive ,  il  attaque ,  il  dis- 
perse ;  hommes,   canons,  mon- 
tagne, tout  est  en  sa  puissance, 
et  maître  de  l'énorme  mont,  iné- 
branlable comme  loi ,  tous  les  ef- 
forts de  l'ennemi  ne  peuvent  lui 
arracher  ce  poste  formidable,  que 
sa    bravoure  a   conquis  en    une 
heure,  et  qu'il  a  promis  à  l'hon- 
neur français  de  conserver   tou- 
jours. Il  entre  en  Italie;  l'armée 
française  arrive;  le  passage  du  Pô  se 
prépare.  Le  général  Mainoni,VaI- 
hubert  et  quelques  autres  braves, 
se  jettent  dans  la  première  barque, 
ils   franchissent  le  fleuve,   et   I0 
succès  de  leur  audace  amène  celui 
de  l'armée  qu'ils  précédent.  Deux 
jours  après,  le  19  prairial  an  8, 
Vaihubert  fond  comme  l'éclair  sur 
un   gros  d'Aiitrichiens;   ils   sont 
plus  de  cent,  il  e«t  seul,  qu'im- 
porte? Ils  sont  frappés,  vaincus, 
épouvantés;  ils  mettent  bas  les 
armes,  ils    sont   prisonniers.     A 


i3/i 


VAL 


Blontebello  ,  la  cavalerie  autri- 
chienne avance;  mais  les  grena- 
dier» de  la  28' sont  h\,  Valhubcrl 
est  avec  eux.  Les  grenadiers  le  re- 
gardent; son  front  est  calme,  sa 
sécurité  semble  leur  dire  :  «Je  me 
«repose  sur  voire  courage,  vous 

•  vaincrez;  »  ils  vainquirent.  A 
Marengo,  le  feu  le  plus  meurtrier 
tonne  long-lcmps  sur  la  28*,  elle 
demeure  inébranlable;  Valhubcrt 
est  encore  avec  elle.  Grièvement 
blessé,  il  commande  toujours,  et 
la  douleur  n'obtient  point  d'em- 
pire sur  son  sang-  froid  ;  enfin  au 
passage  de  Mincio,  un  boulet  le 
renverse  et  le  prive  de  la  voix; 
on  le  presse  de  se  retirer,  c'est 
en  vain.  Son  refus  s'exprime  par 
ses  gestes;  il  se  fait  remettre  à 
cheval,  et  conli"nue  de  combattre.  » 
Une  arme  d'honneur  et  une  grati- 
fication de  12,000  francs  lui  sont 
décernées.  Le  premier  consul  Bo- 
naparte lui  adresse  la  lettre  sui- 
vante ,  écrite  tout  entière  de  «a 
main  :  «  Je  vous  envoie  un  brevet 
«d'honneur;  je  n'oublierai  jamais 
t  les  services  que  la  bonne  et  brave 

•  28'  a  rendus  à  la  patrie;  je  me 
«souviendrai,  dans  toutes  les  cir- 
»  constances,  de  votre  conduite  à 
«Marengo;  !)lessé,  vous  voulûtes 

•  vaincre  ou  mourir  sous  mes 
»ycux.  ')  Les  12,000  francs,  il  les 
partage  avec  sa  demi-brigad<\ 
Peu  après  (1804),  il  est  élevé  au 
rang  de  général  de  brigade.  Du 
camp  de  Boulogne,  il  passe  à  la 
grande-armée ,  lors  de  la  reprise 
des  hostilités  avec  l'Autriche.  Un 
si  brave  guerrier  ne  pouvait  mouv 
rir  hors  du  champ  de  bataille.  A 
Austerlilz ,  il  combat  dans  la  divi- 
sion Suchet,  «  à  jamais  célèbre 
par  cette  manœuyre  brillante  et 


VAN 

inouïe  qui  sépare  l'aile  droite  des 
Russes  du  centre  du  leur  armée,  n 
L'ordre  du  jour  prescrivait  de  ne 
point  dégarnir  les  rangs  pour  en- 
lever les  blessés.  Renversé,  le  a 
décembre  i8o5  ,  par  un  éclat  d*o 
bus,  qui  lui  fracasse  la  cuisse,  le 
général  Valhubcrt  voit  ses  soldats 
s'avancer  pour  l'enlever.  «Arrêtez 
9 mes  amis,  leur  crie-l-il,  souve- 
')  nez- vous  de  l'ordre  du  jour  ; 
rtvous  me  relèverez  après  la  vic- 
»toire.  »  La  blessure  de  cet  in- 
Irépi.le  guerrier  était  mortelle  ;  il 
l'apprit  avec  fcrineté.  «  Je  meurs 
»  duns  une  heure,  écrivil-il  à  l'em- 
npereur;  j'aurais  voulu  faire  plus 
«pour  vous.  Je  ne  regrette  pas  la 
»vie,  puisque  j'ai  participé  à  une 
1)  victoire  qui  vous  assure  un  règne 
«heureux.  Quand  vous  penserez 
«aux  braves  qui  vous  étaient  dé- 
»  voués,  pensez  à  ma  mémoire. 
«Il  me  suffit  de  vous  dire  que  j'ai 
«une  famille,  je  n'ai  pas  besoin  de 
«vous  la  recommander.»  Dans  les 
plaines  mêmes  de  la  Moravie  , 
ses  camarades  lui  élevèrent  un 
monument,  et  l'empereur  Napo- 
léoii,  par  un  décret  impérial, 
donna  le  nom  de  Valhubcrt  à  une 
des  places  de  Paris. 

VANDAMME  (Domisiqie,  com- 
te D'UxEBOtBG),  lieutenant-géné- 
ral, grand-cordon  de  la  légion- 
d'houneur,  est  né  à  Cassel,  dé- 
parlement du  Nord  ,  le  5  novem- 
bre 1771.  Il  entra  fort  jeune  dans 
la  carrière  des  armes,  passa  aux 
îles  dans  un  régiment  colonial , 
revint  en  France  à  l'époque  des 
états-généraux,  en  1789,  et  for- 
ma, dès  nos  premiers  troubles  po- 
litiques, une  compagnie  franche, 
connue  sous  le  nom  de  chasseurs 
fin  Mont-Cassel ,  dont  il  devint  le 


ys- 


VAN 

chef.  Il  la  comuiandu  pciulanl  l.i 
campagne  de  1792,  et  mérita,  par 
sa  conduite,  le  grade  de  général 
de  brigade.  Il  jeta  dés-Iors  le?  tbn- 
demens  de  celte  haute  réputation 
de  bravoure  qui  ne  fit  que  s'ac- 
croître dans  toute  sa  carrière  mili- 
taire, et  qu'il  justifia  par  une  foule 
d'actions  d'éclat.  Il  fut  employé, 
en  1793,  à  l'armée  du  Nord,  s'em- 
para de  Furnesau  mois  d'octobre, 
bloqua  Nieuport ,  se  vit  bientôt 
obligé  d'abandonner  cette  place 
pour  éviter  l'approche  des  alliés, 
et  perdit,  dans  la  retraite,  une 
partie  de  ses  munitions  et  de  son 
artillerie,  ce  qui  ne  l'empêcha  pas 
d'obtenir  différt-ns  succès  dans  sa 
roule.  Le  29  avril  179^,  il  prit  la 
ville  de  Menin  conjointement  a- 
vec  Moreau  ,  se  rendit  mailrc  de 
Schenck  le  6  novembre,  et  s'em- 
para de  Budwick  trois  jours  après. 
Il  passa  ensuite  avec  sa  division  à 
l'aile  gauche  de  l'armée  de  Sam- 
bre-et-Meuse,  et  y  fit,  sous  Jour- 
dan  ,   la  campagne  de   1795.   En 

1 796,  il  était  à  l'armée  du  Kbin  ,  et 
fut  surtout  remar(|iié  aux  airaires 
des  14  et  i5  juillet  vers  Alpers- 
hach;  le  24  août  au  passage  du 
Lech  ,  et  deux  mois  après  à  l'atta- 
que des  hauteurs  de  Friedberg.  A 
l'ouverture  de   la  campagne   de 

1797,  il  aida  puissamment  l'ar- 
nîée  à  traverser  le  Rhin,  en  sou- 
tenant, à  la  tête  de  l'avant-garde  , 
les  vives  attaques  de  l'ennemi. 
Dans  les  combats  de  llanau  et  de 
Diersheirn  ,  qui  en  furent  la  suile, 
le  général  Vandamme  se  condui- 
.sit  avec  la  même  distinction. 
Nommé  général  de  division  le  5 
février  J799»  il  commanda  en 
celte  qualité  l'aile  gauche  de  l'ar- 
mée du  Danube;  se  rendit  bien- 


YAN  i35 

tôt  en  Hollande,  sous  les  orvln* 
du  général  Brune,  et  prit  une  part 
active  aux  succès  de  cette  cain- 
piigne.  Forcé,  par  l'état  où  l'a- 
vaient réduit  ses  fatigues  cl  ses 
blessures,  à  se  livrer  à  quelque 
repos,  il  se  retira  à  Cassel,  et  re- 
tourna ,  au  mois  d'avril  1800, 
prendre  le  commandement  d'une 
division  à  l'armée  du  llhin  ;  il  y 
montra  son  intrépidité  accoutu- 
mée au  pa^sagi;  du  fleuve ,  entre 
Stein  et  Schafhou.?e  ;  ensuite  à 
l'ailaque  de  Hohen-Twiel ,  qio 
défendaient  80  pièces  de  canun  , 
et  qui  se  rendit  le  5o  avril,  et  en- 
fin les  2  et  4  niai  suivant,  aux  coni- 
hals  d'Eugcn  et  de  Mocrskirsch. 
Il  pa.isa,  en  1801,  à  l'armée  da 
Grisons,  s'y  distingua  comme 
dans  les  précédentes  campagnes, 
et  reçut  du  premier  consul  Bo- 
naparte, au  mois  de  septem'jr 
1800,  une  paire  de  pistolets  de  la 
manufacture  de  Versailles.  Nom- 
mé ,  à  celle  époque ,  commandant 
de  la  G'  division,  il  devint,  l'an- 
née suivante,  grand-olficier  de  la 
légion-d'lionneur,  fut  dirigé  vers 
la  grande-armée  ,  on  septembre 
i8o5,  lors  de  la  reprise  des  hos- 
tilités, et  commanda  la  2*  divi- 
sion du  corps  d'armée  du  maré- 
chal Soult.  Le  4  octobre,  il  se 
rendit  maître  du  pont  de  Dona- 
werlh,  se  porta  le  G  sur  Augs- 
bourg,  s'en  empara  le  9,  se  trou- 
va aux  combats  livrés  dans  le  cou- 
rant de  ce  mois  ,  fit  3,ooo  prison- 
niers dans  la  Ilaute-Souabe  ,  et 
fut  nommé  grand-aigle  de  la  lé- 
gion-d'honneur après  la  bataille 
d'Austerlitz.  Dans  la  campagne  de 
180G  et  1807,  il  fut  chargé  de  la 
conquête  de  la  Silésic;  il  fit  le 
siûg«  de  Bresiau ,  et  s'en  empara 


VAN 


Le  général  Vaiidamnie  ,  employé 
'ôit  i  O'iviriuj ,  (Ml  1S09  ,  Contre 
l'Aiiti  i(;})t; ,  coniin.md.i  les  "NVnr- 
f(!!nl)tigeois,  et  remporta  une  vic- 
toirt;  comjlèle  au  combat  d'Lr- 
fort,  en  avant  de  la  lûle  du  pont 
de  Liiitz,  où  il  mit  en  déroule 
trois  l'oliinnes  autrichiennes.  Le 
I"  ianvitr  1811,  il  lut  nommé 
pré^i()»*nt  du  collège  électoral 
d'iiazcbrouck.  Il  devait  faire  par- 
tie de  l'expôdilion  contre  !:» 
Ilii«sie;  muis  qut^lques  dcinêiés 
ervc  le  rci  de  Wesi[>halie  (  voy. 
BowAVÀiUE  Jérôme)  le  firent  di.s- 
t^racicr,  et  il  reçut  l'ordre  de  9-e 
reudie  à  Cai«sel.  Cependant  il  eut, 
\','rf^  la  fni  de  j8i5,  le  comman- 
cfetneiit  d'un  corps  de  troupes  qui 
?o  réunissait  dans  la  52*'  division. 
Le  5  a\ril,  les  divisions  Saint- 
Cyr  et  Durulte  l'étant  venues  re-- 
joindre  à  Brème,  il  se  disposait  à 
attaquer  les  Russes,  lorsque  l'ar- 
niislice  suspendit  les  li  isiiiiiés.  Le 
a5  août,  il  marcha  sur  Pirna  et 
lîoendorff,  dont  il  s'empara,  et 
le  2/i ,  il  attaqua  et  battit  le  duc  de 
AVitlemberg,  auquel  il  fit  2,000 
prisonniers.  Le  29 ,  il  traversa  la 
gorge  de  la  grande  chaîne  des 
montagnes  de  Bohèine,  et  s'ap- 
procb.a  de  Kulm ,  où  il  trouva  le 
général  Oslermann  à  la  tête  de 
10,000  Uusses.  Le  général  Van- 
damme,  qui  ne  comptait  jamais 
ses  ennemis,  soutint  un  combat 
opiniâtre,  et  développa  la  plus 
étonnante  valeur.  Forcé  néan- 
moins de  rétrograder  ,  il  fit  la 
faute  irréparable  de  rester  à  Kulm, 
au  lieu  de  reprendre  position  sur 
les  hauteurs.  L'ennemi  sut  pro- 
fiter de  cet  avantage;  renforcé  des 
gardes  russes,  il  tombe  sur  les 
Français  le  3o  au  matin  ;  ceux- 


VAN 

ci  font  bonne  contenance;  mais 
vers  les  deux  heures,  un  nouvel 
ennemi,  le  général  Kleist,  dé- 
bouchant p.u-  les  moniagues,  vint 
If*  C'  rner  de  toute»  part-.  Le  gi:- 
rér  1  Vandanimc,  attaqué  sur  tous 
les  pdinls,  ne  perd  ni  son  courage 
ni  son  sang-froid;  malheureuse- 
ment ses  ordres  sont  mal  com- 
pris ou  rna!  exécutés,  il  perd  toute 
son  artillerie  el  6,000  soldats,  et 
est  liii-mênie  Uni  (»risonnier.  On 
le  conduisit  sous  une  escorte 
russe  à  L;;hii  ,  où  il  trouva  le  gé- 
néral Morcau  à  l'agonie.  La  foule 
qui  prodiguai!  •e''  marques  de  1  in* 
léièl  le  plus  tendre  au  tr;.nsfuge 
français,  n'était  pas  disposée  '1  té- 
moigner, à  la  valeur  malheureuse, 
les  ég<uds  qui  lui  étaient  dus  à 
bien  pins  juste  titre,  et  le  général 
Vandamme  fut  exposé  à  d'indi- 
gnes insultes  ;  le  graud-duc  Cons- 
tantin osa  même  lui  faire  Oter  son 
épée.  L'empereur  Alexandre,  qui 
saviiil  mieux  apprécier  le  courage, 
la  lui  fit  rendre  sur- le-cbamp.  Le 
général  Vandamme,  fut  transféré 
à  Moskou  ,  et  de  là  à  AViatka  .  an 
nord  de  Kasan ,  à  20  lieues  de  la 
Sibérie.  La  paix  de  181 -J  le  rap- 
pela en  France,  où  il  airiva  le  1" 
septembre.  Le  duc  de  Fcllre,  qui 
venait  de  remplacer  le  maréchal 
Gouvion-Saint-Cyr  au  ministère 
de  la  guerre,  lui  donna  Tordre  de 
quitter  Paris  en  vingt-quatre  heu- 
res. Il  reparut  au  20  mars  i8i5; 
Napoléon  le  nomma  pair  de  Fran- 
ce ,  et  lui  confia  le  commande- 
inent  de  la  2*  division  de  l'armée. 
Chargé  ensuite  du  5*  corps,  sous 
le  général  Grouchy ,  il  assura  les 
succès  de  la  bataille  de  Fleurus 
par  les  avantages  qu'il  remporta 
ensuite  à  l'attaque  de  Wavres  II 


VAN 

était  à  la  poursuile  de  l'enneini , 
lorsqu'il  apprit  l'issue  de  la  ba- 
taille de  \Valerloo.  Jamais  il  ne 
mollira  plus  d'habilelé  que  dans 
totle  cir(  oiislance  ;  Tordre  avec 
lequel  il  opéra  sa  retraite  fit 
craindre  un  instant  ù  l'ennemi 
que  sa  victoire  ne  fût  pas  com- 
plète. En  elTet,  un  corps  d'armée 
presque  intact,  et  un  matériel 
considérable  d'artillerie,  ramenés 
alorî  en  France,  laissaient  encore 
aux  amis  de  la  patrie  l'espoir 
d'empt^cher,  sinon  une  invasion 
nouvelle,  du  moins  les  résultats 
honteux  qu'une  occupation  libre 
du  territoire  pouvait  entraîner. 
L'armée  française  compta  bientôt 
80,000  comballans.  Cf tte  nouvel- 
le, transmise,  le  5juillet,  :"l  lacham- 
bro  des  représenta ns  ,  y  excita  les 
applaudi«!stn)«ns  les  plus  vils.  Le 
général  Vandamnie  iinnonçait  que 
b  s  ^^•n^li;is^ai^es  envoyés  auprès 
de  son  armée  avaient  été  témoins 
de  l'enti.ousiasme  et  de  l'ardeur 
de  ses  troupes.  «  Je  suis  fier,  ajou- 
tail-il,  d'ôtre  venu  au  secours  de 
la  capitale  avec  une  pareille  ar- 
mée. Ses  courageuses  dispositions 
ne  peuvent  njanquer  de  nous  faire 
obtenir  des  conditions  plus  avan- 
tageuses, si  nous  sommes  obligés 
de  traiter  avec  nos  ennemis.  »  Le 
pénérnl  Vandamme  occupait  alors 
J\lont-l\onge  ,  Meudon  ,  Vanvres 
«•t  Issy.  Ce  fut  dans  cette  circons- 
tnnctî  que  plusieurs  généraux  vin- 
rent lui  offrir  le  commandement 
de  l'armée,  qu'il  ne  crut  pas  de- 
voir accepter.  Le  gouvernement 
provisoire  traitait  cependant  avec 
les  puissances  alliées,  et  obtint  la 
cessation  des  hostilités  avec  la 
condition  que  l'armée  française  se 
retirerait  derrière  la  I/oire.  Le  gé- 


VAN 


«57 


nér.d  Tniidamme  s'y  rendit  com- 
me les  autres  généraux,  et  n'en 
fut  pas  moins  compris  dans  l'or- 
donnance du  24  juill*^'  181 5;  il 
remit  le  commandt-ment  des  3"  et 
fi'  corps,  et  se  retira  dans  nne 
maison  de  campagne  près  de  Li- 
moges, déparlenient  de  la  Haute- 
Vienne  ;  mais  il  reçut  ordre  du 
préfet  d'en  sortir  dans  vingl-qna- 
tre  heures.  Il  prit  la  route  d'Or- 
léans ,  et  là,  il  lui  fut  enjoint  d'al- 
ler habiter  Vierzon,  département 
du  Cher.  Ces  actes,  d'une  auto- 
rité inquiète,  donnèrent  lieu  h 
différens  bruits,  plus  ou  moins  ri- 
dicules. On  le  représentait  tantôt 
comme  un  chef  de  parti,  levant 
des  contributions  à  main  armée  ; 
tantôt  comme  un  fjigitif  qui  venait 
d'être  airêté.  L'ordonnance  du  l'Z 
janvier  1816  fixa  son  sort ,  en  lo- 
bligeant  de  sortir  du  royaume  ;  il 
se  réfugia  d'abord  à  Gand;  mais 
n'ayant  pu  obtenir  la  permission 
d'y  résider,  il  s'embarqua  pour 
les  Étals-Unis,  où  il  séjourna  en- 
viron deux  années.  Revenu  en 
France  avant  l'ordonnance  qui 
prononça  le  rappel  des  bannh ,  il 
fut  détenu  quelque?  inslans,  et 
reçut  bientôt  un  passe-port  pour 
sortir  du  royaume.  Le  général 
Vandamme  possédait  une.  terre 
aux  environs  de  Gand ,  où  il  fixa 
sa  résidence  jusqu'à  l'époque  où 
il  fut  autorisé  à  rentrer  dans  sa 
patrie.  Mis  en  disponibilité,  il  u 
été  compris  dans  l'ordonnance  du 
moisdesepletnbreiSa/jjqtii  admet 
A  la  retraite  un  grand  nombre  dn 
généraux.  On  s'est  formé  du  ra- 
ractère  de  ce  général  une  idée 
que  certains  faits  ont  démentie; 
on  a  exagéré  le  mal ,  et  jamais  on 
n'a  parlé  du  bien.   Par  exemple  , 


'•jS  van 

'es  liiihitans  de  Cassel ,  où  il  est 
n«i,  jouissent  d'un  hôpital  qu'il  a 
construit  et  fondé  de  ses  propres 
deniers.  Il  est  peu  de  personnes 
qui  compensent  ainsi,  par  des 
bienfaits,  le  mal  que  les  circons- 
tances les  ont  quelquefois  forcées 
de  faire. 

VANDER    MAESEN    (  Edme- 
Martiit,  comte),  général  de  divi- 
sion ,  membre  de  la  légion-d  hon- 
neur, né  à  Versailles  le  1 1  novem- 
bre  1767,    manifesta   de    bonne 
heure  son  goût  pour  In  profession 
des  armes.  Il  entra,  en  1782,  au 
régiment  de  Tourraine,  et  passa 
par  tous  les  grades,  jusqu'à  celui 
de    lieutenant ,    qu'il    obtint    en 
1793.   A  celle  époque,  de  nom- 
breux   bataillons    de    volontaires 
arrivaient    aux    armées    presque 
sans  instruction  ni  discipline.    Lu 
minisîre  ayant  voulu  que  l'on  s'en 
occupât  ,    le    lieutenant    vander 
Maesen  fut  du   nombre  des  offi- 
ciers de  ligue  désignés  par  le  gé- 
néral en  clief  de  l'année  pour  les 
Instruire.  On  lui  confia  le   10'  et 
II"  bataillons  du  Jura,  qui,  en 
moins  de    trois  mois,   furent   en 
état  d'entrer  en   campagne.    De 
retour  à  son  régiment,  il  fut  nom- 
mé quartier-maître  du   bataillon 
de  guerre,  puis  adjuilant-major, 
et  enfin  chef  du  1 1*  bataillon  du 
Jura,  le   14  octobre   179J.  C'est 
de  ce  temps  que  datent  les  actions 
qui   l'ont  fait  remarquer  de    ses 
chefs.  Lebataillon  que  commandait 
vander  Maesen  faisait  partie  des 
troupes  destinées  à  la  défense  des 
lignes  de  V/issembourg.   Dans  la 
retraite  ,  il  coopéra  puissamment 
au  rétablissement  de  l'ordre.  Ar- 
rivé près  Magiieneau,  il  prit  sur 
{ui  de  dcclarer  ù  «on  bataillon  q^xe 


VAN 

le  général  l'avait  chargé  de  faim 
arrêter  tous  les  militaires  qui  se- 
raient   rencontrés    isolément.    Il 
parvint  bientôt  à  les  rallier  et  ù 
les  préparer  à  attendre  l'ennemi. 
Ce  fut  dans  cet  état  que  le  géné- 
ral de  division,  Michaud,  trouva 
cette  troupe  lorsqu'elle  dut  faire 
partie  de  sa  division.  La  retraite 
s'exécuta  sur  Vandenheim ,  près 
de  Strasbourg.  Pichegru  vint  alors 
prendre  le  commandement  de  l'ar- 
mée ;  il  sut  rallumer  l'enthousias- 
me et  préparer  la  victoire.  Le  dé- 
blocus de  Landau  fut  décidé,  et 
l'ordre  fut  donné  pour  une  atta- 
que générale  sur  toute  la  ligne. 
Le  chef  de  bataillon,  vander  Mae- 
sen ,  que  la  confiance  du  général 
Michaud  avait  appelé  à  son  avant- 
garde  ,  commandait  dans  cette  af- 
faire un  bataillon  du   io5"  régi- 
ment, outre  les  10' et  I  i"  du  Jura, 
qui  firent  des  prodiges  de  valeur. 
L'infanterie    autrichienne  ,    mal- 
gré la  plus  vive  résistance,  avait 
été  forcée  d'abandonner  la  forêt 
do  Brumpt,  et  de  se  retirer  der- 
rière la  Zorn  ,  où  <;lle  prit  posi- 
tion après  avoir  détruit  les  ponts. 
La  division  française  suivit  l'en- 
nemi de  près;   une  partie  reput 
l'ordre  de  passer  la  Zorn  ;  mais  à 
peine  parvenue  à  la  rive  opposée, 
elle  fut  attaquée  et  repoussée  par 
l'ennemi.  Nos  troupes  allaient  re- 
passer la  rivière,  lorsque  le  gé- 
néral Michaud  ordonna  à  vander 
Maesen  de  prendre  le  commande- 
ment des  grenadiers  de  la  divi- 
sion ,  et  de  s'emparer  de  Brumpt, 
opération  d'autant  plus  dilïicile  , 
que  l'ennemi ,  qui  croyait  la  ville 
abandonnée,  y  arrivait  de  toutes 
parts.  Les  troupes  se  rencontrè- 
rent; après  un  combat  des  plus 


TAN 

mcurlriers,  la  ville  fut  emportée. 
Dans  cotte  affaire,  le  chef  de  ba- 
taillon ,  vandcr  Maesen,  eut  un 
cheval  tué  sous  lui, et  reçut  un  coup 
de  feu  qui  lui  traversa  la  cuisse.  A 
peine  guéri  de  ses  blessures,  il  re- 
joignit son  corps,  qui  faisait  alors 
partie  de  la  division  Ferino.  Au 
mois  de  germinal  an  2,  les  Prus- 
siens, projetant  d'enlever  une  de 
nos  reconnaissances,  mirent  leur 
cavalerie  en  embuscade  pour  cou- 
per toute  retraite  à  la  nôtre,  près 
du  village  d'Ungstein.  Le  plan  de 
l'enneuii  aurait  infailliblement 
réussi,  sans  le  mouvement  heu- 
reusement combiné  du  chef  de 
bataillon  vanderMaescn,qui  com- 
mandait cette  avant  -  gar;!e  ,  et 
força  les  Prussiens  à  se  retirer  en 
abandonnant  leurs  éclaireurs.  La 
cavalerie  française  ainsi  dégagée 
rentra  dans  ses  cantonnemens  de 
Wackcnheim.  Quelques  autres  af- 
faires contre  les  Prussiens  lui  va- 
lurent le  grade  de  chef  de  brigade. 
L»  140*  demi-brigade,  qu'il  com- 
mandait, prit  part,  en  l'an  5,  aux 
divers  combats  qui  mirent  Spire  , 
Worms  et  la  tête  du  pont  de  Man- 
heiiii  au  pouvoir  de  la  France. 
Après  la  prise  de  Manheim ,  qui 
eut  lieu  au  commencement  de 
l'an  4>  '«  général  en  clief  ordonna 
A  la  division  Beaupuy  de  passer  le 
Khin  à  Spire.  Le  chef  de  brigadi; 
vander  Maesen  traversa  le  fleuve 
h  la  tête  des  grenadiers  de  cette 
division,  et  poussa  vers  llocke- 
num  les  partis  ennemis  qu'il  ren- 
contra à  son  dcb:irquemcnt.  La 
division  Beaupuy  alla  bientôt  ù  la 
rencontre  de  l'ennemi,  qui  com- 
bina ses  mouveinens  de  manière 
à  acculer  l'armée  française  sur 
Manheim.  Le  général  en  chef  dc- 


VAN 


i.>9 


concerta  ce  projet,  en  ordoimant 
une  attaque  sur  Franckenthal ,  ce 
qui  rappela  aussitôt  sur  ce  point 
les  troupes  autrichiennes  qui  s'en 
étaient  détachées.  L'aJjudanl-gé- 
néral  Decaen  et  le  chef  de  brigade 
vandcr  Maesen,  avec  son  corps, 
furent  chargés  de  l'attaque  de 
droite.  Rien  ne  résista  à  la  valeur 
de  la  i4o%  qui,  en  moins  de  deux 
heures,  s'empara  du  canal ,  et  en- 
tra dans  la  ville  au  pas  de  charge 
par  la  porte  du  llhin.  Le  surlen- 
demain ,  l'ennemi ,  qui  avait  con- 
centré sur  ce  point  la  majeure 
partie  de  ses  forces,  attaqua  la  di- 
vision Beaupuy,  qui,  malgré  sa 
très -grande  infériorité  en  nom- 
bre, se  battit  avec  autant  d'au- 
dace que  d'habileté.  Vander  Mae- 
sen ,  placé  à  la  gauche  ,  forma  les 
i4o'  et  205"  demi -brigades  par 
demi-batrillon  en  échiquier,  et  fit 
son  mouvement  rétrograde  à  tra- 
vers les  vastes  plaines  qui  sépa- 
rent Epslein  de  Mutterstadt,  sans 
que  la  nombreuse  cavalerie  enne- 
mie osât  l'inquiéter  dans  sa  mar- 
che. L'armée  se  relira  derrière  le 
Kuesch,  et  prit  quelque  repos  pen- 
dant l'armistice  qui  fut  alors  con- 
clu. Les  hostilités  reconnnencè- 
rent  peu  de  temps  après,  et  l'ar- 
mée, à  la  suite  de  plusieurs  al- 
faires  qui  eurent  lieu  dans  le  Pa- 
lalinat,  passa  le  llhin  ù  Kehl.  La 
division  du  général  Beaupuy  de- 
vait proléger  cette  opération  en 
traversant  le  fleuveùGambsheim. 
Déjà  les  grenadiers ,  sous  les  or- 
dres du  chef  de  bataillon  vander 
Maesen  et  de  i'adjudant-générnl 
Bellaveine,  en  louchaient  la  rive 
droite  ;  mais  la  crue  des  eaux 
ayant  submerge  l'île  qui  devait 
faciliter  le  passage,  il  fallut  rc- 


i4o 


VAN 


nonccr  à  celle  entreprise.  Vander 
Maesen  participa  avec  son  corps 
(  devenu  62'  )  aux  batailles  d'Of- 
rembourg;,  de  la  Rincken,  de  Ras- 
tadt,  de  Masdi ,  de  Neresclieim  , 
de   Geserjfeld  ,   de  Ncubourg;   j\ 
celles  de  Lesenfeld,  de  «il)er:ich, 
et  ù  tontes  les  affaires  où  la  divi- 
sion du  général  Bcaupiiy  donna 
dans  celte  cani[)ajj^ne.  La  division 
fut  ensuite  attaquée  par  des  for- 
ces supérieures  que  coniiinndait 
le  feld-  maréchal  Latour.  Le  chef 
de  brigade  vander  Maesen  se  mit 
en   embuscade   dans   un   bois,   à 
quelques   toises   de    la    roule    de 
RaJisboune,  par  où  l'ennemi  de- 
vait commencer  l'attaque.  A  pei- 
ne ses  dispositions  étaient  laites, 
qu'un  régiment  de  cuirassiers  s'a- 
vança pour  contourner  le  plateau 
sur  lequel   se    trouvait  placée   la 
majeure  partie  de  notre  artillerie  ; 
mais   il  fut  reçu   par   un    feu   de 
mousqueterie  si  bien  dirigé  ,  que 
ce  corps  fut  mis  dans  le  plus  grand 
désordre.  L'ennemi,  éprouvant  la 
même    résistance   sur  les    autres 
points,  fut  forcé  à  la  retraite.  Pen- 
dant  le  siège   de   Kehl  ,   vander 
Maesen  fut  chargé  de  la  conduite 
de  plusieurs  sorties.  Après  un  long 
J)ombaidement,  l'ennemi  ,    très- 
roppioché  du  fort,  en  voulut  ten- 
ter l'assaut,   fit  son  attaque   sur 
plusieurs  points,  et  s'empara  du 
camp  retranché,   puis  de  la  re- 
doute du  cimetière.  Le  général  de 
brigade  Decaen  donna  ordre  aus- 
sitôt au   chef  de  brigade   vander 
Maesen  de  reprendre  ces  ouvra- 
ges à  la  tête  de  son  corps ,  qui 
arriva  vers  neuf  heures  du  soir  ; 
le   combat  se   prolongea   jusqu'à 
trois  heures  du  matin  avec  le  plus 
^irand  acharnement  :  tout  fut  re- 


VAN 

pris,  et  les  Autrichiens  qui  s'en 
étaient  emparés  y  trouvèrent  h 
mort.  Après  un  second  piisrage 
du  Rhin,  l'armée  arrêtée  dans  s.i 
n:arche  par  les  préliminaires  de 
paix  signés  à  Leoben,  repassa  sur 
la  rive  gauche.  A  celte  njêmc  épo- 
que .  le  chef  de  brigade  vander 
Maesen  fut  obligé  de  remettre  le 
commandement  de  la  62'  à  un 
officier  récemment  rentré  au  corps, 
et  de  deux  jours  de  grade  plus  an- 
cien que  lui.  Mais  peu  de  temps 
après ,  le  général  Jouberl  lui  don- 
na celui  de  la  55*,  avec  laquelle 
il  fit  la  campagne  de  l'an  7,  A  la 
division  d'avant-garde  (h;  Tarmée 
du  Danube.  Arrivé  à  Ostrach .  il 
fut  chargé  par  le  général  Lefevre 
d'aller  reconnaître  l'ennemi,  qui 
paraissait  en  force  en  avant  de* 
villages  d'Eidn  et  d'Dskirch  ;  ù 
son  arrivée,  une  centaine  d'Autri- 
chiens tombèrent  eu  son  pouvoir. 
L'ennemi  eut  un  avantage  le  len- 
demain ,  et  la  division  Leièvre, 
aj>rès  la  plus  vigoureuse  résis- 
tance, fut  contrainte  de  céder  au 
nombre.  Dans  cette  circonstance 
fâcheuse  ,  le  corps  du  chei  de  bri- 
gade vander  Maesen,  qui  était 
demeuré  dans  la  position  où  il 
avait  combattu  la  veille,  se  trou- 
va exposé  à  être  coupé  par  l'en- 
nemi ;  mais  ayant  rallié  ses  trou- 
pes à  temps,  il  effectua  sa  retraite 
sur  Pfullendorff,  où  il  présumait 
que  la  division  s'était  retirée,  et 
il  rejoignit  l'armée  le  soir  du  mê- 
me jour,  après  avoir  culbuté  les 
troupes  ennemies  qui  voulaient 
s'opposer  à  son  passage.  Il  fui 
blessé  d'un  coup  de  feu  à  la  jam- 
be ,  ce  qui  ne  l'empêcha  pas  de 
continuer  ses  fonctions.  Vander 
Maesen  fut  cité ,  pour  cette  re- 


VAN 

traiie,  dans  le  mcinoire  justiûca- 
til'  du  général  en  chef  Jourdun. 
C«  fut  alors  que  le  gouvernement 
tleva  cet  oflicier  au  grade  de  gé- 
néral de  brigade;  mais  ses  lettres 
de  service  lui  ayant  été  expédiées 
à  l'armée  de  Rome,  où  il  devait 
être  employé,  sa  promotion  lui 
lut  quelque  temps  inconnue.  Ce- 
pendant il  commandait  à  la  même 
époque  une  brigade  à  l'armée  du 
Danub(î,  par  Tordre  du  général 
m  chef.  L'armée  ayant  repassé  le 
l^hin,  le  général  vander  Maescn 
reçut  l'ordre  de  reprendre  le 
\  ici.'x-Biisack,  que  les  troupes 
trançaises  avaient  évacué  quelque 
temps  auparavant.  Arrivé  au  Neuf- 
Brisack,  il  fait  se?"  di.spositions , 
exécute  le  passage  du  fleuve  sous 
le  feu  de  l'ennemi,  et  à  la  pointe 
du  jour  entre  dans  la  ville  au  pas 
de  charge,  à  la  tète  îles  grenadiers 
de  la  53"  demi  -  brigade.  Après 
'•elle  opération  ,  il  rejoignit  en 
Suisse  l'armée  d'avant-garde.  Il 
contribua  à  réduire  les  insurgés 
des  petits  cantons  qui  avaient  pris 
])'tste  à  Rolherthune,  et  il  eut  part 
aux  succès  de  l'affaire  de  >Vole- 
f.iM,  après  laquelle  il  reçut  du 
ministre  de  la  guerre  des  lettres 
de  service  pour  l'armée  du  Uhio, 
où  il  fut  employé  dans  la  division 
«lu  général  Laroche,  restée  seule 
sur  la  rive  droite  pour  la  défense 
.li!  iManheim  et  de  Neckereau.  Le 
;,'ijnéral  vander  Maesen  fut  chargé 
(ic  la  défense  de  ce  dernier  poste. 
l,e  deuxième  jour  coujplémen- 
i.iire  de  l'an  7,  à  qu;ilre  heures 
du  matin  ,  le  prince  Charles,  qui 
urivait  de  iîuisse  avec  7)0,000 
hommes,  lit  attaquer  le  village  de 
Kekerveau  par  la  majeure  partie 
de   ses  forces,  et   se»  colonnes, 


VAN 


i4t 


quoique  appuyées  d'une  nom- 
breuse artillerie,  furent  reçues  à 
bout  portant  par  un  feu  de  mi- 
traille et  de  mousqueterie,  qui  les 
mirent  chaque  fois  dans  le  plus 
granil  désordre.  Durant  ce  com- 
bat, (|ui  se  prolongea  plus  de  six 
heures,  les  Français  montrèrent 
la  plus  rare  intrépidité.  Le  géné- 
ral vander  i>iaesen,  qui  avait  pris 
et  repris  plusieui-s  fois  le  village 
avectîjooo  hommes  contre  3o, 000, 
voyant  son  artillerie  en  partie  dé- 
montée et  sa  brigade  sensiblement 
affaiblie,  crut  prudent  de  se  rap- 
procher de  Manheim.  La  retraite 
se  fit  avec  ordre ,  sans  que  l'en- 
nemi tentât  de  l'inquiéter,  et  il 
vint  prendre  position  près  de  l'ou- 
vrage à  corne  en  arrière  de  la  di- 
gue du  Rhin.  Mais  à  peine  était- 
il  arrivé  dans  celle  position,  que 
l'ennemi  força  les  portes  de  la 
ville  et  s'en  empara.  Le  pont  ayant 
été  rompu  ,  toute  retraite  fut  in- 
terdite au  général  vander  Maesen 
et  à  Tadjudant-général  Lefol,  que 
le  général  Laroche  avait  détachés 
sur  le  Necker.  L'un  et  l'autre  fu- 
rent fait  prisonniers  et  conduits 
en  bohème.  Echangé,  le  5  janvier 
1801,  contre  le  général  -  major 
Meczery,  pris  à  Hohenlinden  ,  le 
général  vander  Maesen  rejoignit 
aussitôtl'arméeàSalzbourg.Après 
le  traité  d'Amiens,  le  général  de 
division  Decaen  ayant  été  nommé 
capitaine  -  général  des  colonie» 
orientales,  le  général  vander  Mae- 
sen fut  désigné  comme  son  lieute- 
nant ,  et  le  ministre  le  chargea  de 
l'organisation  des  troupes  de  celta 
expédition.  Il  partit  avtc  elles 
pour  sa  destination,  dont  le  terme 
était  Pondichéry.  L'on  s'embar- 
(]'ia  à  Brest  le   i5  ventôse  au  11 


Hî 


TAN 


(i8o5),  cl  l'on  arriva  aux  Indo^- 
Orientalcs;  mais  la  décliiralion  de 
guerre  avec  les  Anglais  étant  an- 
noncée, toute  la  division  française 
se  rendit  à  l'Ile-de-France.  Van- 
der  Maesen  fut  nomftié  général  de 
division  dans  cette  même  année, 
puis  membre  de  la  légion-d'hon- 
neur l'année  suivante  (5  germinal 
an  îa  ).  Il  commanda  et  inspecta 
ensuite,  en  sa  qualité  de  lieute- 
nant du  capitîiine  -  général ,  le? 
troupes  qui  étaient  stationnées 
aux  Iles-de-France  et  de  Bour- 
bon. Le  22  septembre  1810  fut 
marqué  par  un  combat  mémora- 
ble (le  quatre  frégates  françaises 
contre  l'Ile-de-France.  Celle  af- 
faire fit  le  plus  grand  honneur  au 
général  vander  Maesen.  Il  fut  en- 
voyé par  le  capilaine-général  pour 
voir  s'il  lui  élail  possible  de  réta- 
blir promplemcnt  une  batterie  (la 
batterie  de  la  Reine  ) ,  située  à 
deux  lieues  du  grand  port ,  et  qui 
avait  été  abandonnée  faute  de 
troupes.  Le  général  vander  Mae- 
sen jugeant  de  quel  iiilérêl  elle 
pouvait  être  pour  la  défense  sur 
ce  point,  la  fit  promplement  réta- 
blir, et  fit  des  dispositions  si  fa- 
vorables contre  l'ennemi,  que  la 
première  de  ces  frégates  sauta  en 
engouftVant  ses  débris  dans  la 
mer;  la  seconde  eut  le  même  sort 
le  jour  suivant ,  et  les  deux  autres 
furent  prises.  Il  n  est  pas  douteux 
que  les  combinaisons  du  général 
vander  Maesen  aient  puissamment 
contribué  à  ce  succès,  parce  que 
les  AngLiis  ne  s'allendaient  point 
à  trouver  de  la  résistance  devant 
celte  batterie.  Pressés  et  canonnés 
par  nos  frégates  que  commandait 
M.  Duperretjils  s'étaient  appro- 
chés, tant  pour  se  mettre  à  l'abri 


TAN 

que  pour  opérer  un  dCburque- 
nient  sur  ce  point  important  du 
l'île;  gênés  par  nos  batteries,  qui 
contrariaient  leurs  desseins,  ils 
s'approchèrent  encore  davantage 
pour  faire  cesser  notre  feu.  Enfin, 
après  une  lutte  opiniâtre  ,  les  b3- 
timens  anglais  furent  anéantis,  en 
cherchant  à  détruire  les  ouvrages 
que  la  prévoyance  du  général  van- 
der Maesen  avait  élevés.  Cepen- 
dant l'ile,  faute  d'une  quantité  de 
troupes  su  (lisantes  pour  sa  défense, 
devait  être  reprise  un  peu  plus 
tard.  Elle  le  fut  en  effet  le  5o  no- 
vembre 1810,  après  une  vigou- 
reuse résistance.  Le  général  van- 
der Maesen  y  fut  blessé,  et  eut 
un  de  ses  aides-de-camp  lue  à  ses 
côtés.  De  retour  en  France,  il  re- 
çut de  l'empereur  Napoléon  l'ac- 
cueil le  plus  flatteur,  et  fut  en- 
voyé en  Espagne,  avant  même 
que  le  conseil  d'enquêtes  efil  ter- 
miné son  rapport  sur  la  prise  de 
l'Ile-de-France.  Arrivé  à  l'armée 
d'Espagne,  il  y  recul  bientôt  le 
commandement  d'une  division 
destinée  pour  Burgos ,  sous  les 
ordres  du  général  Caffarolli.  Ce 
dernier  mit  à  sa  disposition  trois 
régimens  de  cavalerie  légère,  un 
seul  régiment  d'infanterie  entier 
et  six  bataillons  de  divers  corp?, 
composés  de  recrues  et  d'hommes 
sortant  des  hôpitaux.  Ce  fut  avec 
4  à  5  mille  hommes  d'infanterie 
de  celte  espèce,  répandus  dans  les 
provinces  de  Burgos,  Sanlander, 
Soria,  etc.  ,  que  fut  formée  la  di- 
vision avec  laquelle  cet  officier 
général  devait  assurer  les  commu- 
nications dans  cette  partie,  faire 
rentrer  les  contributions  tt  les  ap- 
provisionnemens ,  et  donner  la 
chasse  aux  bandes  armées.  Celle 


VAN 

lâche  difficile  était  lout-i-fait  an- 
dessus  (les  moyens  bornés  que  l'on 
avait  ijiis  ù  sa  disposition.  Mais  le 
{général  vauder  Maesen  la  remplit 
pendant  un  an  avic  tant  d'activilô 
cl  de  succès,  que  les  bandes,  cons- 
tamment battues  dans  toutes  les 
rencontres,  et  poursuivies  sans 
relâclie,  furent  totalement  disper- 
s»}es.  Il  établit  un  système  d'ad- 
ministration qui,  s'il  fut  favorable 
aux  Français  en  leur  procurant 
l'abondance,  ne  le  fut  pas  moins 
aux  habitans,  par  l'extrême  jus- 
tice et  la  probité  qui  présidèrent 
à  tous  les  actes  d'autorité.  La  sa- 
gesse de  cette  administration  a  été 
si  profondément  sentie  par  les  ha- 
bilans  de  cette  province,  qu'il  n'en 
est  pas  un  qui  ne  conserve  encore 
le  sou  venir  de  cet  homine  de  bien, 
et  des  grands  services  qu'il  a  ren- 
dus à  ce  pays.  Ce  fut  à  ses  soins 
que  l'on  dut  la  belle  défense  de 
Burgos  par  le  général  Dubreton, 
qui  commandait  une  bri;^ade  de 
cette  division.  Lo  général  vander 
Maesen ,  qui  avait  su  prévoir  de 
quelle  utilité  pouvait  être  ce  fort, 
quoique  très-imparfaitement  cons- 
truit, n'avait  rien  négligé  pour  le 
mettre  dans  le  meilleur  état  pos- 
sible de  défense  ,  et  l'avait  appro- 
visionné pour  six  mois.  L'armée 
de  Portugal  ayant  été  forcée  de  se 
retirer  vers  l'Ébre,  il  composa  des 
meilleures  troupes  la  garnison  de 
ce  fort,  et  en  confia  le  comman- 
dement au  général  Dubreton. 
Après  la  retraite  de  l'armée  anglo- 
portugaise  ,  le  général  vander 
ûlaesen  reprit  le  commandement 
de  la  province  de  Burgos,  etc. 
Au  mois  de  mars  iSia,  il  re- 
joignit le  général  Clausel  ,  qui 
commandait  alors  l'armée  du  nord 


VAN 


14s 


de  l'Espagne  ,  en  remplacement 
de  CaiTarelli.  Vander  Maesen,  qui 
avait  avec  lui  4»ooo  hommes  d'in- 
fanterie et  5oo  chevaux,  obtint 
dans  différentes  rencontres  les 
avantages  les  plus  brillans  ,  et 
s'empara  des  deux  seules  pièces 
de  canon  qu'eût  Mina.  Ce  géné- 
ral,  dans  un  rapport  qu'il  adres- 
sait aux  cortès  à  Cadix,  avouait 
que  depuis  le  commencement  de 
la  guerre,  il  n'avait  pas  encore  été 
poursuivi  aussi  vigoureusement; 
surtout,  disait-il ,  «  par  le  général 
»  vander  Maesen  ,  qui  est  toujours 
«sur  moi  lorsque  je  l'en  crois  fori 
«loin.  Ce  général  est  trés-estimô 
«et  très -aimé  des  habitans  des 
«provinces  qu'il  gouverne,  et  sa 
«réputation  l'a  précédé  ici;  aussi 
«lui  donne-t-on  les  renseigne- 
siTiens  les  plus  exacts  sur  mes 
omouvemens.  Sa  probité  parti- 
nculière  et  l'exacte  discipline  qui 
«régne  dans  sa  division,  me  font 
«plus  de  mal  que  20  mille  hom- 
omes  de  plus  commandés  par  un 
«autre  général  qui  n'aurait  pas 
«ses  vertus.  Je  crains  d'être  forci 
«de  sortir  de  la  Navarre,  etc.» 
Les événemens  qui  suivirent  ayant 
obligé  le  général  Clausel  i\  rentrer 
en  France,  le  duc  de  Dalmatie 
alla  prendre  le  commandement 
de  l'armée,  la  réorganisa  en  neuf 
divisions,  formant  trois  corps,  et 
ordonna  ensuite  une  attaque  sur 
trois  points,  afin  de  reporter  le 
théâtre  de  la  guerre  en  Espagne.  ' 
Le  2*  corps,  sious  les  ordres  du 
général  Clauseï,  fut  chargé  de 
l'attaque  sur  la  roule  de  Ronce- 
vaux,  où  l'ennemi  avait  le  plus 
de  forces  réunies.  Ce  fut  le  géné- 
ral vander  Maeren,  dont  la  divi- 
sion faisait  la  tcte  de  la  colonne, 


144 


VAN 


qui  déboucha  le  5  juillet  sur  ce 
point,  et  qui  eut  tout  l'honneur 
de  la  journée,  en  enlevant  sous 
les  yeux  du  maréchal  toutes  les 
positions  de  l'ennemi,  opiniâlre- 
nient  défendues,  et  en  le  forçant 
à  une  retraite  précipitée.  Pour- 
suivi l'épée  dans  les  reins  pendant 
trois  jours,  il  ne  put  se  rallier  qu'à 
deux  lieues  en -deçà  de  Pampe- 
lune,  où  les  divisions  qui  blo- 
quaient cette  place  avaient  pris 
position.  Trois  attaques  successi- 
ves ,  dont  une  très  brillante  du 
général  vander  Macsen,  ayant  clé 
sans  succès,  parce  que  la  plus 
grande  partie  de  l'armée  anglaise, 
qui  avait  levé  le  siège  de  Saint- 
Sébastien,  s'était  portée  en  toute 
hâte  sur  ce  point,  le  maréchal 
songea  à  opérer  sa  retraite.  Le 
général  vander  Maesen  fut  chargé 
de  la  soutenir,  ce  qu'il  exécuta, 
dans  un  pays  extrêmement  diiFi- 
cile,  avec  tant  d'ordre  et  de  bra- 
voure, que  l'ennemi  ne  put  par- 
venir à  prendre  upe  seule  pièce 
de  canon,  ni  même  un  seul  hom- 
me. Ce  général  déploya  en  celte 
occasion  un  talent  consommé  dans 
l'art  de  la  guerre  et  tin  courage  à 
toute  épreuve,  qui  lui  valurent  de 
la  part  du  général  en  chef  les  plus 
honorables  témoignages.  Il  avait 
reçu  deux  coups  de  feu  à  l'attaque 
de  Koncevaux,  et  ses  habits  fu- 
rent criblés  de  balles  pendant  la 
relraile.  Le  maréchal  voulut  en- 
suite tenter  une  attaque  sur  Saint- 
Sébastien, et  eu  faire  leverlesiége, 
qui  avait  été  repris.  Trois  divi- 
sions passèrent  la  Bidassoa  le  5i 
août,  aux  cndrt(its  guéables  ,  et 
l'ennemi,  surpris  dans  ses  posi- 
tions, fut  culbuté  sur  tous  les 
points.    Cependant    l'attaque    de 


VAN 

droite  n'ayant  pas  réussi,  le  gé- 
néral Clausel  envoya  prévenir  le 
général  vander  Alaesen  de  faire  sa 
retraite  sans  perdre  un  instant.  Il 
lui  donnait  en  même  temps  le 
commandement  des  trois  divi- 
sions, pour  qu'il  y  eût  plus  d'or- 
dre et  d'ensemble  dans  les  mou- 
vemens  que  l'on  ferait  en  pré-^en- 
ce  de  l'ennemi  ;  mais  une  pluie 
qui  tomba  tout  à  coup  par  torrens 
pendant  trois  heures,  ayant  ren- 
du le  passage  de  la  Bidassoa  im- 
praticable, cette  retraite  devenait 
très  -  difficile ,  parce  que  le  seul 
point  par  lequel  on  aurait  pu  l'exé- 
cuter, était  le  pont  de  Bera ,  dont 
l'ennemi  était  maître,  et  qu'il  pa- 
raissait disposé  à  vouloir  défen- 
dre vi':;;oureusenjenl.  La  Bidassoa 
était  devenue  un  torrent  impossi- 
ble à  franchir  II  fallait  ou  s'at- 
tendre à  mettre  bas  les  armes  ,  ou 
s'emparer  du  pont  de  Bera  à  quel- 
que prix  que  ce  fût.  Le  i"  sep- 
tembre i8i3,  à  minuit,  le  géné- 
ral vander  Maesen  réunit  huit 
compagnies  de  grenadiers  et  de 
voltigeurs,  et  s'élança  à  leur  tête 
sur  le  pont,  que  l'on  traversa  saus 
tirer  un  seul  coup  de  fusil.  Ces 
compagnies  se  jetèrent  aussitôt 
dans  les  maisons  crénelées ,  où  ,  A 
coup  de  baïonnettes,  elles  firent 
un  horrible  massacre  .des  hommes 
qui  les  défendaient.  L'ennemi  fit 
des  efforts  inouïes  pour  reprendre 
les  jnaisons,  de  l'occupation  des- 
quelles dépendait  le  sort  de  1 0,000 
hommes;  mais  vander  Maesen  a- 
vail  si  bien  pris  ses  mesures,  et 
sut  inspirer  une  telle  confiance  à 
ses  troupes  par  sa  présence  con- 
tinuelle au  milieu  des  plus  grand* 
périls,  que  loulcs  les  colonnes  eii- 
nemico  furent  repousïces.  Enfin , 


VAN 

le  passage  l'ut  elTectisé.  Il  est  cer- 
tain que  shiis  la  comliiitc  fcnneet 
pleine  d'judace  du  général  vander 
M.iesen  dans  celte  circon.>*taoce , 
ces  trois  divisions  aur;iient  été 
forci';es  de  déposer  le?  armes.  (]et 
intrépide  gént;r.tl,  qui  n'avait  pas 
voulu  quitter  on  instant  la  tête  du 
pont  tant  que  dura  le  passage  «les 
troupes,  et  qui  était  exposé  A  l(nis 
les  feux  de  l'enncini ,  tut  victime 
de  son  courage  et  de  son  ilévoue- 
mcnt.  Lue  balle  qui  vint  le  frap- 
per, lui  traversa  les  deux  flancs, 
et  il  mourut  quelques  sect»udes 
après,  le  i"  septembre  »8i5,  en- 
tre les  bras  de  >1.  Charcelay,  son 
aide-de-camp,  qui  avait  partagé 
luus  ses  dangers  sur  ce  mênif^  ter- 
rain, dont  il  s'était  si  audacieus«>- 
ment  emparé,  et  qu'il  avait  con- 
servé contre  tant  d'efforts.  Ses 
dernièri's  paroles  furent  :  «  Dites 
»au  général  Rouget  de  prendre  le 
0 commandement  de  la  division 
net  de  tenir  ferme it  il  ex- 
pira aussitôt.  Ainsi  périt  à  la  fleur 
de  l'âge  l'vui  des  plus  intrépides 
et  des  meilleurs  généraux  de  l'ar- 
mée française  dans  ces  derniers 
temps.  IJn  décrut  imj)érial  venait 
de  lui  donner  le  titre  de  comte; 
mais  cette  marque  de  distinction 
arriva  trop  lard.  Son  fils  reeut 
quelque  temps  a[)rès  celui  de  ba- 
ron. La  perte  du  général  vander 
Maesen  fut  profondément  sentie 
par  toute  l'armée.  I^e  général 
Clause!  et  le  duc  de  Dalmalie  la 
regardérenl  comme  irréparable. 

VANDJill  MliRSCH  (N.)'6Î^- 
néral  en  chef  des  insurgé*  Ur.iban- 
çons  ,  naquit  i'i  Meniu,  d'une  fa- 
mille bonorable  de  la  bo'n'ge«)i- 
sie.  Porté  par  gofii  au  service  mi- 
litaire, il  entra  dans  Ie8  troupes 

T.   XX. 


VAN  14^ 

françaises  cominaodées  par  Che- 
vert ,  qui  reslimait  pour  sou  cou- 
rage, et  rap[ielait  familièrement 
son  intrépide  Flamand.  Du  service 
français,  il  passa  au  service  autri- 
chien en  qualité  de  lieutenant-co- 
lonel. Il  rentra  ensuite  dans  ses 
foyers  ,  où  il  vivait  paisiblement 
lorsque,  en  J781),  il  fut  choisi  par 
les  lirabauçous  mécontens  des  ré- 
formes <le  Joseph  II  {voy.  ce  nom), 
pour  commander  les  rasMunble- 
mens  qui  se  formaient  à  Bréda. 
Bientôt  il  devint  membre  du  co- 
mité établi  i\  (îand,  et  enfin  com- 
mandant en  chef  des  insurgés.  A 
la  tête  de  troupes  peu  nombreu- 
ses et  indisciplinées ,  il  parvint, 
par  ses  taleus,  sa  prudence  cl  sa 
fermeté,  à  donner  de  l'importance 
à  son  parti,  appelé  des  F onckis- 
les  [voyez  l'article  de  Vonck  )  , 
et  à  remporter  des  avantages 
assez  marquans,  entre  autres  aux 
affaires  de  Hoogsiraaten  et  de 
Turuhoiit,  où  il  défit  le  général 
Schroeder.  Van  Eupen  et  vander 
Noot  (î'oy.  ces  noms),  jaloux  de 
ses  succès  et  de  son  influence  ,  le 
des^^ervireut  dans  l'esprit  des  Bra- 
bançons, en  insinuant  avec  adres- 
se ,  soit  que  le  général  vander 
Mersch  n'agissait  que  dans  l'inté- 
rêt de  la  maison  d'.\utiiche  ,  soit 
qu'il  voulait  opérer  une  rév(du- 
lion  démocratique.  Ces  insinua- 
tiims  lui  enlevèrent  la  cotilîauce 
populaire;  ses  eniMunis  achevè- 
rent de  le  p«:rdre  totalement  «  en 
le  réduisant  à  l'iuacli'on,  en  lui 
reftisant  toul,  et  en  r.issemhlaut 
à  grand»  frais  dans  l'intérieur  des 
forces  pour  le  rival  (le  général 
prussien  Schoeufcld  ) ,  qo'ils  vou- 
laient lui  opposer,  ce  qui  donn;i 
le  spectacle  de  deux  années  bra- 
10 


i.V>                  VAN  VAN 

bançonnrs  prCtcs  à  eti  venir  aux  flans  la  science  de  la  niubic|iie, 
mains  ,  et  oubliant  l'ennemi  coin-  eiilrepril  d"  décoMiposer  l'art  mu- 
tnnn  pour  se  détruite  ellcs-niê-  ^icai.  Dans  une  séance  publique 
mes.  0  L'armée  de  Nainur.  fjue  de  l'ai^adéinii-  des  sciences  .  en 
vander  iMer-icli  commandait,  mon-  1790,  il  établit  «  ?nr  deux  règle* 
tra  l'inlention  di;  vonloir  ré-»i.>lcr  j,^énérales  la  snccession  de.»  ac- 
au  général  ^ichœn^eld,  qni  s'a  van-  eords  et  l'ariangement  des  par- 
çail  contre  elle.  Tout  à  coup  elle  lies,  démontrant  que  ces  deux 
livre  elle-même  à  Sclioenleld  le  règles,  reconnues  par  les  musi- 
gCfiéral  auquel  elle  paraissait  dé-  ciens  ,  dépendent  elle?  -  même» 
vouée.  Vander  Mei:-cl)  ne  put  firo  d'une  loi  plus  éie>ée  qui  doit  ré- 
convaincu  par  les  états  d'aucun  gir  toute  l'harmonie.  »  Son  i-y»- 
des  crimes  qui  lui  étaient  impu-  lème  fut  approuvé  des  plus  célè- 
tés.  Il  lut  simplement  envoyé  à  la  ores  composileuis  de  musique, 
citadelle  d'Anvers,  d'où  il  ne  sor-  Philidor,  Glui  k,  Picciui ,  etc.  La 
tit  qu'au  retour  de  la  tranquillité,  révolution  trouva  Vandermonde 
Il  mourut  en  179'2,  an  peu  avant  à  peu  près  indifl'érent  au  mouve- 
la  conquête  de  sa  patiie  par  les  ment  politique  qu'elle  imprima  à 
Français.  la  France;  il  ne  fut  ni  persécu- 
VANDERMONDE  (  N.  ) ,  ma-  teur  ni  persécuté,  devint  profes- 
thématicien,  membre  de  l'ancien-  seur  d'économie  politique  à  l'é- 
ne  académie  royale  des  sciences  cole  Normale,  et  enfin  membre 
et  de  l'institut  national ,  naquit  à  de  l'institut  national.  Il  mo\irut 
Paris  en  i735,  et  fut  élève  du  le  1"  janvier  179C. 
célèbre  mathématicien  Fontaine.  VAN  EUPEN  (N.),  grand-péni- 
11  cultivait  les  sciences  dans  une  tencier  d'Anvers,  naquit  en  liel- 
paisible  et  volontaire  obscurité,  giqus  en  1749-  Intrigant,  ambi- 
lorsqiie  son  ami  Dionis  du  Séjour  tieux  et  sans  mœurs,  Van  Eupen 
lit  violence  à  sa  modestie,  et  le  ne  vit  dans  l'exercice  du  sacerdo- 
mit  en  relation  avec  les  princi-  ce,  que  les  moyens  de  parvenir 
paux  membres  de  l'académie  des  plus  facilement  au  but  que  ses 
sciences.  Ses  talens  et  ses  qualités  passions  lui  faisaient  envisager.  II 
personnelles  le  firent  rapidement  était  déjà  revêtu  de  quelques 
parvenir  à  l'académie,  où  il  prit  dignités  de  l'église,  lorsqu'une 
séance  en  1771.  Jaloux  de  justi-  intrigue  scandaleuse  avec  une 
fier  l'opinion  favorable  du  ses  col-  fenmie  le  força  de  s'expatrier, 
lègues  et  de  ftiire  connaître  ses  De  la  Hollande,  où  d'abord  il  se 
droits  à  l'estime  du  monde  sa-  relira,  il  passa  dans  les  Pays-Bas, 
vant  ,  il  publia  successivement  et  prit  part  dans  les  intrigues  po- 
plusieurs  mémoires,  entre  autres  litiques.  L'un  des  plus  audacieux 
sur  ta  résolution  des  Equations ,  instigateurs  du  parti  oligarchique, 
les  Problèmes  de  situation  ,  une  il  fu*  le  principal  agent  de  Van- 
nouvelle espère d' Irrationnelles,  \v.^  der  Noot,  qu'il  sauva  plusieurs 
Éliminations  des  inconnues  dans  fois,  par  sa  présence  d'esprit,  de» 
les  quantités  algébriques,  etc.  Van-  embarras  où  le  mettait  le  parti  des 
dermonde  ,   profondément   veisé  Vonkistes.  Van  Eupen   fut  chargé 


VAN 

prir  son  chef  tlo  «lilTérenles  négo- 
riations  en  Hollande  et  en  Flan- 
dre. Ce  fut  Van  Eiipen  qtii  propo- 
i-a  à  Vander  Nool,  le  gém'ral  prns- 
sion  î>f;hœnl'elil,  afin  de  l'oppo-er 
à  Vander  iMersch ,  leur  ennemi 
coniinun,  et  pin?  particulièrement 
celui  de  Vaii  Eupen,qni  contribua 
heaucoupà  le  perdre.  Dev<MUi  5C- 
<Télaire  des  états  du  Brabant,  Van 
f!upeu  en  exerça  le?  fonctions  jus- 
qu'à la  fin  des  troubles.  Le  i5  no- 
vembre 1790,  il  fit  la  proposition 
de  jurer  sur  le  rrucifix  de  repous- 
ser les  propositions  de  rAulriche; 
mais  les  autres  membres  des  étais 
s'étant  déterminés  à  accepter  ces 
propositions  ,  la  défection  du  gé- 
néral Sthœnf«dd  privafit  Vàn 
Eupen  de  tout  appui ,  il  s-e  sauva 
en  Hollande,  afin  d'y  être  <4  l'abri 
du  ressentiment  du  gouverne- 
ment autrichien.  «  De  retour  dans 
?a  pairie,  après  la  conquête  des 
Français,  il  voulut  de  nouveau 
jouer  un  rô!e  par  rascendant  que 
lui  donnait  la  religion  sur  ses 
compatriotes;  et  c'est  alors  que  le 
directoire,  profitant  de  .son  refuy 
de  prestation  de  serment,  le  fit  dé- 
porter ci  la  (luiane,  où  il  finit  ses 
jours  en   «798.  » 

V  AMEK'  (  VicTOB-ArcirsTiN  ) , 
homme  de  lettres,  granmiairion 
distingué,  niembre  de  la  société 
royale  académique  des  sciences, 
de  la  société  grammaticale,  et  de 
la  société  des  sciences,  lettres  et 
arts  de  Mûcon,  ii>{  né  à  Surenne, 
près  Paris,  le  21  février  ijCf).  Il 
occupa  différcns  emplois  au  nîi- 
nistére  de  la  justice,  de  l'intérieur 
et  de  la  guerre.  Lors  du  licencie- 
ment de  l'armée  d'Illyrie,  oi'i  il 
était  contrôleur  des  vivres  en 
iKio,  il  revint  à  l'ar^s ,  y  fil  des 


VAN 


'47 


cours  publics  à  l'Oratoire,  a  vit 
l'autorisation  du  ministre  de  l'in- 
térieur; c'est  de  cette  époque  que 
date  la  réputation  qu'il  s'est  ac- 
quise, et  qu'il  soudent  aujour- 
d'hui honorablement.  Il  donna 
par  la  suite  chez  lui,  des  soirées 
gramtnaticales  où  Tabhé  Sicard 
et  Mercier,  membres  de  l'insiitut, 
se  rendaient  exaclemeul,  ainsi  ([ue 
plusieurs  membres  de  la  société 
grammaticale,  fondée  en  1807, 
par  l'académicien  Urbait»  Domer- 
gue.  M.  Vanier  présida  l'Mig-lemps 
cette  société,  et  contribua  à  la  pu- 
blication des  Annales  de  grammai- 
re. Il  a  inséré  dans  cet  ouvrage 
plusieurs  dissertaiionsqui  ont  pro- 
voqué des  décisions  de  l'académie 
française,  wna  enlr«  autres  sur 
rad(jplion  du  signe  ai,  en  rem- 
]>lacement  du  signe  o-i  qu'on 
voit  encore  figurer  dans  les  dic- 
tionnaires et  dans  presque  toutes 
nos  grammaires.  L'al)bé  Sicard, 
qui  assistait  à  la  séance  de  la  socié- 
té grammaticale,  où  celte  question 
fut  agitée,  ne  partageant  pas  l'opi- 
nion  de  son  collègue,  défendait  la 
dyphtongue  oi;  n)ais  quand  l'au- 
teur en  fut  à  ce  passage  de  sa  liis- 
serlation ,  où  il  dit  :  «  Du  temps 
même  de  François  I",  où  nos 
pères  prononçaient  comme  ils  é- 
crivaienl,  le  double  signe  a-i  re- 
présentait déjà  le  son  simple  ê 
dans  les  noms  et  dans  les  verbes; 
ils  ne  confondaient  pas  je  nuis  avec 
je  noie,  je  tais  avec  je  toi;  un  dais 
avec  un  doigt,  une  haie  avec  une 
oie  :  or,  si  le  double  signe  a-i  pei- 
gnait bien  le  son  siniple  <?  dans  le 
présent  du  verbe  naître,  je  nais, 
tu  nais,  il  naît,  le  lui  refu^ere■/,- 
vous  aujourd'hui  dans  l'imparfait 
du  verbe  prendre,  je  j)re;i«/,v,  lu 


.:i8 


VAN 


\)renais,  il  pranait?  S'il  peint  éga- 
lement c*i  son  dans  le  présent  dn 
verbe  taire,  je  tais,  tn  tais,  il  tait, 
n'est-il  p;is  cx.iclenienl  le  même 
dan»  l'imparlalt  dn  verbe  être,  j'é- 
tais,  tu  étais,  il  était?  Remlez-vous 
donc  à  l'évidence  en  adoptant  la 
réforme,  et  faites  cesser  cette  or- 
thographe barbare,  qui  nous  fait 
confondre  français  avec  français, 
paraisse  avec  paroisse,  je  perçais 
avec  je  perçois.  »    L'abbé  Sicard 
«ni  la  franchise  d'avouer  qu'il  n'a- 
vait rien  à  répondre,  et  y  mit  la 
générosité    de    s'offrir    lui-même 
pour  défendre  à  l'académie  la  pro- 
position contre  laquelle  il  s'était 
toujours  prononcé  :  ce  qu'il  fit  en 
effet.    M.    Vanicr  a  publié  :   i"  la 
Clef  des  participes,   3'  édition,  i 
vol.  in-ia,  Paris,  1824^  qu'il  '<^  en- 
richi d'exemples  choisis  dans   les 
meilleurs  auteurs,  et  de  deux  sa- 
vantes <lissertations  sur  les   doc- 
trines de  l'abbé  Sicard  et  de  Do- 
mergue,  qui  ont  formé   schisme 
dans  l'école  grammaticale  de  nos 
jours.  Sa  théorie  tend  à  prouver 
que   nous    n'avons  qu'une    seule 
sorte  de  participe  soumis   à  une 
seule  règle.   Un  de  nos  plus  pro- 
fonds hellénistes,  M.  Boissonade, 
en  rendant  compte  de  cet  ouvra- 
ge,   s'exprime    ainsi   :    «Je    n'ai 
point  vu  de  traité  où  la  question 
des  participes,  si  embrouillée  par 
nos  grammairiens,  soit  ramenée  à 
des    termes    aussi    simples.  »     2° 
Grammaire  pratique,  adoptée  par 
l'Université    de    France  ,    1  vol. 
in- 12,  Paris,  i834-  L'auteur  y  suit 
la  marche  de  la  nature;  il  exerce 
les  élèves  à  la  pratique,  les  règles 
ne  viennent  que  coinme  de  sim- 
ples remarques  qui  naissent  d'el- 
les-mêmes  de  l'observation    des 


VAN 

faits.  Cette  excellente  méthode  é- 
tait  depui-  long-temps  signalée  par 
nos  grands  maîtres  Kullin  ,  Rous- 
seau et  les  Solitaires  de  Port-Royal. 
M.  Vanieraeu  le  bon  esprit,  peut- 
être  le  courage  de  la  suivre  et  de  la 
publier:  les  suffi  âges  des  officiers  de 
l'université,  et  les  succès  que  cha- 
quejour  obtient  sa  grammairedans 
les  institutions  où  elle  est  admise, 
sont  la  juste  récompense  de  ses 
travaux.  On  annonce  que  pour 
con)pléter  un  cours  de  grammaire, 
il  va  mettre  sous  presse  :  3°  Traité 
d'analyse-,  4°  Traité  de  syntaxe;  5» 
Traité  de  ponctuation. 

VAN  -  MAANEN  (  Cobkeille- 
FÉLix  ) ,  ministre  de  la  justice  du 
roi  des  Pays-Bas,  commandeur 
de  l'ordre  du  lion  Belgique,  né  à 
La  Haye,  se  consacra  au  barreau 
dès  sa  jeunesse.  Reçu  avocat  dans 
sa  ville  natale,  il  y  pratiquait  arec 
succès.  Ses  travaux  judiciaires  ne 
l'empêclièrenl  point  cependant 
de  prendre  une  part  active  à  tous 
les  débats  politiques  qui  troublè- 
rent long-temps  la  Hollande.  L'a- 
vocat Van-Maanen  se  fit  d'abord 
connaître  par  son  ardent  républi- 
canisme, et  jona  un  rôle  marquant 
parmi  les  patriotes  les  plus  oppo- 
sés aux  vues  dn  chef  de  la  maison 
d'Orange.  En  1787,  sous  le  règne 
de  Louis  XVI  et  le  ministère  de 
M.  de  Vergennes ,  les  patriotes 
hollandais,  quelque  tenjps  sou- 
tenus par  la  France,  et  encouragés 
par  les  promesses  de  secours  plus 
efficaces  encore,  fiers  d'ailleurs  de 
leur  force  numérique  et  de  la  ma- 
jorité des  suffrages  de  leurs  con- 
citoyens ,  crurent  leur  cause  con- 
tre le  stadhouderat  gagnée.  Mais 
bientôt  une  armée  prussienne  , 
commandée  parle  prince  de  Bruns- 


VAN 

■\vick,  entra  en  HollanJejIes  trou- 
pes françaises,  réunies  sur  lalron- 
tière,  cur  eut  ordre  ilese  retirer;  les 
patriotes  ab.mdonnés  furent  vain- 
cus, et  le  stalhouiler,  Guillaume 
V,  ajoutant  à  ses  anciennes  j)réro- 
gatives.  accjuit  un  pouvoir  à  peu 
près  illimilé.  «  Une.  république, 
dit  dan^  «es  mémoires  M.  Gail- 
lard ,  chargé  des  affaires  du  roi  de 
France  à  L;i  Uayc ,  une  républi- 
que dont  l'existence  physique  é- 
tait  im  chef-d'œuvre  de  l'indus- 
trie des  hommes  réunis  en  socié- 
té, et  qui,  à  l'ombre  d'une  liberté 
bii'nfais  inte,  avait  fleuri  par  le 
commerce  et  rassemblé  dans  son 
sein  une  très-îçrande  partie  des 
richesses  de  l'Europe,  cette  heu- 
reuse contrée,  si  respectable  par 
l'antique  simplicité  de  ses  mœurs, 
vil  tout  à  coup  s'éteindre  en  son 
Sein  JM.-qu'au  nmindre  germe  de 
liberté,  par  le  soufflo  eirii)oisonné 
du  despotisme,  et  cette  métamor- 
phose étranp-e  fut  l'etret  de  l'ab- 
5urd(;  opiniâtreté  d'un  «cul  hon»- 
me  et  lie  la  v;mifé  d'une  femme.  » 
Mais  de  nouvelles  révolutions  suc- 
cé'lèrent  à  celle  où  le  stadhouder 
avait  triomphé.  En  ijjjS,  il  fut  à 
son  tour  forcé  r|e  fuir,  et  de  cher- 
cher péniblement  un  asile  en  An- 
pb^r-rre.  Le  parti  anti-stadhoudé- 
rien.  auquel  .M.  Vaii-Maanen  était 
alors  resté  fidèle,  le  récompensa 
de  son  dévouement.  Il  fut  nommé 
d'abord  substitut  -  avocat  fiscal 
prés  la  c«jur  «l'apjjel  pour  la  pro- 
vince de  Hollande,  et  bientôt 
ai'rès  procureur-général  près  la 
inr-me  cour.  Il  en  exerça  les  im- 
jtorlaiites  fonctions  avec  une  ri- 
goureusfi  fenmté.  On  se  rappelle 
encore  que  >1.  Ilepelacir  Van  ÏJriel 
{vojr.cii  nom),  aujourd'hui  minis- 


VAN  iqy 

tre-d'élatdu  roi  des  Pays-Bas,  et 
qui  siège  en  cette  qualité  dans 
les  conseils  du  souverain,  à  c«îté 
de  M.  Van-Maanen,  fut  arrêté  h 
La  Haye,  pour  avoir  répondu  î\ 
quelques  lettres  de  ses  amis  exi- 
lés, et  que  M.  Van-Maanen  requit 
contre  l'accusé  la  peine  de  mort. 
Le  tribunal,  toujours  sévère,  mai** 
moins  que  le  procureur  fiscal  , 
prononça  cinq  années  de  déten- 
tion. Pendant  la  royauté  momen- 
tanée de  Louis  Bonaparte,  M.  Van- 
Maanen  devint  son  ministre  de  la 
justice:  mais  il  perdit  cette  place 
ainsi  que  la  confiance  de  son  nou- 
veau souverain,  lorsque  celui-ci. 
en  mésintelligence  avec  son  frère, 
crut  avoir  découvert  que  le  mi- 
niètre  de  la  justice  favorisait  les 
vues  de  Napoléon,  et  s'opposait 
en  secret  à  celles  qu'il  formait  lui- 
même  pour  la  prospérité  du  pays, 
dont  le  gouvernement  lui  avait 
été  confié.  L'accusation,  quoique 
souvent  reproduite  ,  d'avoir  sacri- 
fié un  frère  à  l'autre,  et  les  inté- 
rêts de  sa  patrie  au  désir  de  plaire 
à  Tempereur,  n'a  ccjx.'ndant  ja- 
mais été  prouvée,  et  l'ancien  pa- 
triotisme de  M.  Van  Maanen  au- 
rait dû  le  mettre  à  l'abri  d'un  pa- 
reil soupçon.  Dès  l'incorporation 
de  la  Hollande  i\  l'empire  français, 
il  fut  nommé  par  Napoléon  con- 
seiller -  d'état  ,  et  peu  de  temps 
après,  premier  président  de  la 
cour  impériale  de  La  Haye  ,  com- 
mandeur grand\;roix  de  l'ordre 
de  l'Union.  En  i8i5,  la  position 
de  M.  Van-lMaanen  devint  didi- 
cile.  La  place  importante  qu'il  oc- 
cupait réunissait  tro[>  d'avantages 
pour  qu'il  voulût  risquer  d(!  la 
perdre  en  prenant  part  ;'i  la  révo- 
lolion  qui  eut  lieu  au  mois  de  no- 


i5o 


VAN 


veinbre  cle  cette  année.  Aussi  res- 
t;i-t-il  jusqu'û  la  fin  dévoué  a»i 
{^oiiverrjemcnt  de  Napoléon.  Mais 
l<;s  Françilis  lurent  enfin  ohlinjés 
(l'évacuer  la  Hollande,  et  le  prince 
d'Orange,  fil.s  aîné  du  dernier 
stadhouder  de  la  république  des 
Provinces-Lnies,  revint  d'Anj;le- 
terre,el  prit  en  inain  les  rênes 
du  gouvernuniont.  C'est  alors  que 
31.  'Van-Waanen  eut  besoin,  et  fit 
preuve  d'une,  jiabilclé  c<jnsom- 
inée.  Tous  les  autécédens  lui  é- 
taient  contraires  ;  l'opinion  du 
prince,  l'ondée  sur  d'anciens  sou- 
venirs et  sur  de  nombreux  l'ails 
récens  ,  paraissait  des  plus  défa- 
vorables. Mais  telle  fut  la  chaleur 
des  protestations  du  const^iller- 
d'état  président,  d'un  dévoue- 
ment sans  bornes  à  la  maison  d'O- 
range, d'un  entier  abandon  de  tous 
les  principes  populaires  opposés  au 
j)ouvoii-,  telle  fut  enfin  l'éloquence 
persuasive  df.  cel  homme  d'état, 
qui  parvint  non-seulement  à  con- 
server sa  place,  mais  qu'il  Ini  fut 
encore  accordé  d*e?^ercer  les  fonc- 
tions de  ministre  de  la  justice. 
C'est  en  celte  qualité  qu'il  porta 
la  parole,  au  nom  du  prince  sou- 
verain ,  (^ans  l'assemblée  des  no- 
tables, convoquée  à  Amsterdam 
tifi  iBi/i?  pour  voter  sur  une  nou- 
velle loi  fondamentale.  Après  la 
création  du  royaume  des  Pays- 
Bas,  par  l'acte  du  congrès  de 
Vienne,  M.  Yan-Maanen  fut  déû- 
nilivement  nommé,  le  )6  sep- 
tembre 1816,  ministre  de  la  jus- 
tice, poste  qu'il  occupe  encore 
aujourd'hui  (  iSaS).  Il  y  remplit 
tout  ce  qu'jl  a  promis.  Dans  la 
session  des  étftts  -  généraux  de 
1817  à  i8i3,  ila  porté  et  soutenu 
dcYarJl  la  SfCûode  chambre  deux 


VAN 

projets  de  loi.   Le  premief  avait 

pour  objet  de  limiter  encore  da- 
vantage la  liberté  de  la  pre«;se, 
garantie  par  la  loi  fondamentale, 
mais  déj:'i  resserrée  en  des  bornes 
bien  étroites  par  la  loi  dite  des 
cinq  cents  florins;  le  second  dé- 
clarait le  droit  de  chasse  un  droit 
Régalien,  ou  faisant  partie  de  la 
prérogative  royale,  et  en  prjvait 
par  conséquent  les  propriétiiires 
de  biens-fonds.  Ces  deux  prc>jets 
de  loi ,  présfiités  parle  ministre, 
et  qui  avaii-nt  d'aboid  excite  d'as- 
sez vives  alirmes  dans  le  pays, 
furent  iléfendns  avec  une  éloquen- 
ce remarquable,  quoique  bien  dif- 
lérente  decelli;  employée  en  1  793, 
et  avec  ime  tlcxibililé  de  talent  qui 
élonnèrent  tous  les  anciens  amis  de 
M.Van-Maanen.  Malgré  les  effort» 
lîe  se?  amis  nouveaux,  les  deux 
lois,  impronvées  par  la  nation, 
fureril  rejetées  par  la  chambre,  et 
l'orateur  exigea  mènie  vainement 
que  cette  chambre  rappelât  i"»  l'or- 
dre l'bonurable  député  d'Otren- 
ge ,  qui,  en  les  combattant  avec 
chaleur,  n'avait  point  ménagé  le 
proposant.  Le  ministre  de  la  jus- 
tice montra  encore  la  niême  éner- 
gie dans  nue  autre  circonstance 
mémorable.  Pendant  les  troubles 
de  i8i3  «.'t  1814,  l'autorité  avait 
établi  temporaiiemeiit  et  sans  au- 
tres formes  que  l'énoncé  de  sa  vo- 
lonté, une  espèce  de  tiibunal  pré- 
vôlal,  ou  de  conseil  de  troubles 3 
pour  imprimer,  était-il  dit,  la  ter- 
reur aux  mutins  et  aux  conspira- 
teurs ,  pour  contenir  l'esprit  de 
sédition  et  de  soulèvement,  au 
moment  où  l'ennemi  ei^térieur 
(les  Français)  était  aux  portes, 
l^es  membres  de  cette  commissio,n 
avaient  depuis  l^n^-temps  cessé 


VAN 

de  5C  réunir;  l'on  était  même  con- 
vaincu qtie  depuis  l'établissement 
de  la  constitution  et  rinslallation 
des  tribunaux  de  première  et  de 
seconde  instance  ,  la  justice  ne 
s'administrerait  plus  par  des  com- 
missions. Mais,  à  la  consternation 
générale  des  Belges,  le  ministre 
de  la  justice  remit  en  activité  à 
Bruxelles  la  cour  spéciale  extraor- 
dinaire. •  Un  cri  d'indignation  s'é- 
leva dans  tout  le  l'ityaume;  le  mi- 
nistre soutenait  que  celte  cour 
n'ayant  été  abolie  par  aucun  acte 
public  de  Tautorité,»  il  avait  le 
droit  de  la  rétablir.  «Que  ne  réta- 
blissez-vous donc  aussi ,  lui  ré- 
j»oudit-on  ,  le  conseil  de  troubles 
du  duc  d'Albe,  qui  a  ensanglanté 
notre  pays  ?  L'acte  qui  le  suppri- 
me serait  dillicile  à  produire.  >>  La 
cour  spéciale  extraordinaire  n'eu 
entra  pas  moins  en  l'ouclious  ; 
mais  a}>rès  avoir  condamné  un 
]>rêtre  catholique,  l'abbé  de  Foere, 
et  quelques  individus  obscurs,  a- 
près  a  voir  aiu'i  suffisamment  Cons- 
taté l'oinnipotcnce  ministérielle, 
on  céda  à  l'opinion,  et  les  commis- 
saires se  virent  congédiés.  Plusieurs 
écrivains  furent  à  la  vérité  successi- 
vement sacrifiés  aux  mânes  du  tri- 
bunal défunt.  Les  journaux,  com- 
me l'a  si  bien  dit  en  Franco  un 
houuue  d'état  (  .M.  le  comte  de 
Villéle),  ne  font  pas  rojjiniou,  ils 
l'expriment;  mais  les  journalistes 
qui  l'avaient  le  plus  énerglque- 
menl  exprimée  eu  celle  occasion 
ftirent  punis.  De.«  Belges  furent 
arrêtés,  et  les  rédacteurs  qui  n'a- 
vaient pas  eu  le  bonheur  de  naître 
dans  !»•  royaume,  eu  furent  exilés 
sans  procès  ou  jiigcujeol  préala- 
ble. Les  gcrularmes  suppléèifut 
aux  juges.  Lu  autre  ^^de.  p!»r.)«- 


YAN  i5i 

quel  M.  Van-Maaneu  a  depuis  si- 
gnalé encore  plus  courageuse- 
ment, s'il  est  possible,  son  admi- 
nistration judiciaire,  et  son  désir 
de  donner  au  pruivoir  exécutif  la 
force  la  plus  efficace,  a  été  l'in- 
carcératiou  des  six  principaux 
avocats  de  Bruxelles;  elle  eut  lieu 
en  1819.  Le  premier  volume  d'un 
ouvrage  statistique  sur  le  nouveau 
royaume  des  i'ays-Bus  venait  de 
paraître.  L'auteur,  iM.  Vander- 
Straeten,  crut  n'avoir  point  fVau- 
chi  les  limites  imposées  à  |a  li- 
berté de  la  presse,  liberté  garantie 
par  la  loi  fondamentale.  Mais  l'ou- 
vrage déplut;  l'auteur  fut  arrêté 
et  uns  en  cause.  MtM.  Barlhelemi, 
Bayens,Defrcnnc,  Doncker,ïarlc 
cadet  el  Slevens,  qui  tous  jouis- 
saient d'une  haute  considération, 
due  non-seulemenl  à  leurs  lalens, 
mais  k  leur  caractère  et  à  leur 
honorable  conduite  en  tous  les 
temps,  signèrent  en  faveur  de  M. 
Vandcr-Straelen  ,  une  consulta- 
tion ,  conçue  en  termes  très-mo- 
dérés, niais  d'une  logique  pres- 
sante. Ils  partagèrent  bientôt  le 
sort  de  leur  client.  Ou  seul  com- 
bien il  serait  avantageux  à  l'auto- 
rilé  que  certains  accusés  qui  au- 
raient particulièremenl  déplu  ne 
trouvassent  jamais  d'avocats.  Le 
moyen  ingénieux  d'envoyer  en 
prison  et  l'accusé  et  ses  délén- 
leurs,  n'avait  cependant  pas  en- 
core été  tenté.  Il  n'eut  pj»s,  il  est 
vrai,  au  inoins  pour  là  suite,  tout 
le  succès  qu'où  pouvait  s'en  prr»- 
mettre  ;  mai>  la  vengeance  du  mo- 
meirt  fut  eu  nariic  siatisfaite.  Par- 
venus  i\  un  certam  âge,  rnais  étran- 
gers .10  régime  des  prisons  rendu 
plus  sévère  eu  cette  circonstance, 
qitelques-iiiis  de?  d.'tciiu»;  tombé- 


il 


\3j.  van 

rent  mnlaJes.  Tout  le  barreau  de 
Jiriixelies  jçAinit  do  ?e  voir  privô 
de  ses  principaux  orneiiiensi.  Les 
iiomltreu.ses    clieiitelîes    des    six 
avocats     nt'     se    plaignirent    pas 
moins  amèreinetit,en  vo3'ant  leurs 
înlérêls  lésés,  et  le  cours  de  la 
justice  en  qnelqne  sorte  suspendu 
pour  eux.   Il   fallut  enfin,  après 
plusieurs  seniaînes  d'uru;  rigou- 
reuse caplivité,se  résoudre  à  l'aire 
juger  des  citoyens  jusque-là  irré- 
prucl:ab!es,  et  qui  tous  nés  dans 
le  [>ays,  ne  pouvaient  pius  être  ex- 
Irajudiciaiienienl  exilés  ou  mis  à 
la    disposition     des     gendarmes. 
Quand  la  cause  fut  appelée,  une 
partie  des  populations  des   villes 
de  Gand,  d'Anvers,  de  Louvain, 
et  des  bourgs  ou  village*  environ- 
uans,  se  rendit  en  t'"nlc  à  Bruxel- 
les. Les  chemins  étaiint  couverts 
de   voyageurs  qui  s'intéressaient 
vivement  au  sort  des  accusés.  Le 
tribuua!,  quoique  composé  com- 
me les  autres  cours  du  ro^'aume  , 
de  juges   amovibles,    faiblement 
salariés,    cl  qui   tous  attendaient 
leur  avancement  ou  leur  fortune 
du  bon  plaisir  ministériel,  ne  crut 
pas  cependant  pouvoir  sévir  à  son 
gré  en  cette  occasion.  Les  six  avo- 
cats furent  honorablement  acquit- 
tés,   remis   en   liberté  et    lecou- 
duils  chez  eux  aux  acclamations 
prolongées  de   la   multitude   qui 
environnait  le  tribunal.   Mais  M. 
Vandcr-Slraelen   fut  condamné  à 
rester  en  prison  et   à  payer  une 
amende  surpassant  de  beaucoup 
sa  fortune,  et  que  ses  concitoyens 
l'aidèreul  à  acquitter  au  moyen 
d'utjc  souscription  ouverte  en  sa 
faveur.  M.  Van-Maaneu  adminis- 
tre encore  avec  la  même  distinc- 
tion cl. 'a  même  vigueur  le  dépar- 


VAN 

tement  de  la  justice.  Ses  talens 
littéraires  l'ont  fait  nommer  mem- 
bre de  l'institut  du  royaume  des 
Pays-Bas.  Il  n'a  point  publié  d'é- 
crits ;  mais  il  a,  dit-(»n,  en  porte- 
feuille des  mémoiresd'un  grand  in- 
térêt .-ur  les  phases  révolutionnai- 
res de  son  pays. 

VAN  MAKWM  (Martin),  l'un 
des  plus  grands  pb\siciens  et  bo- 
tani>tes  des  Pays-Bas,  est  né  à 
Deift,  vers  l'année  i^5o.  Il  ma- 
nifesta, étaitt  trés-jeune  encore, 
mi  goftt  décidé  pour  les  mathéma- 
tiques, et  trouva  dans  son  père, 
très-bon  n)<'ithéiriaticien  lui-mê- 
me, un  guide  éclairé  pour  l'étude 
de  cette  scienee.  Envoyé  à  l'aca- 
démie de  Groniugue  pour  y  étu- 
dier la  médecine,  il  s'y  appliqua 
avec  le  même  succès,  et  futpro- 
niu  nu  double  gridede  docteur  en 
n)édecine  et  en  philosophie.  I!  y 
soutint  encore  à  cette  occasion  u- 
ne  dissertation  botanique,  qu'on 
ne  peut  citer  avec  trop  d'éloge. 
Ce  sont  des  aperçus  nouveaux  sur 
cette  science,  et  des  observations 
aussi  justes  que  profondes.  Quel- 
que temps  auparavant,  il  avait 
publié  im  excellent  traité  sur 
l'électricité,  Gronlngue ,  1776, 
in-8°.  II  fut  l'un  des  diciple-.  les 
plus  distingués  du  célèbre  profes- 
seur Piene  Camper,  qui  l'honora 
de  son  amitié  jusqu'à  sa  mort. 
Après  avoir  terminé  ses  études, 
!V1.  Van  Muwm  alla  s'établir  à 
Harlem,  pour  y  exercer  la  méde- 
cine; mais  bientôt  subjugué  par 
son  goût  pour  la  physique,  il  y 
ouvrit  un  cours  de  cette  sciencn, 
qui,  ayant  un  très-grand  succè>,  le 
détermina  à  abandonner  la  prati- 
que de  la  médecine  pour  se  li- 
vrer tout  culier  aux  sciences  phy- 


VAN 

niques.  La  rcpiitalion  qu'il  y  ac- 
quit le  fit  i,ominer  st^cn'taire  de  la 
socitlé  (h-  Harlem.  Si  celte  socié- 
té lui  fa  honi>eiir  par  c«'tte  nomi- 
nation, (le  soji  côté  Cet  habile  na- 
ttirali.«j(e  n'honora  pas  m  ins  le 
corps  iiuqiiel  il  «  tait  aj50cié,  et  par 
riniMortatice  de  ses  travaux,  et  par 
l;i  célébrité  qu'il  lui  procnia  dans 
tout  le  monde  savant.  A  la  mêine 
époque,  il  fttt  nommé  prolesseur 
[trctor)  de  physiqtie  dan>  la  même 
ville,  et  peu  de  temps  après  di- 
recleur  du  cabinet  de  physique  de 
Teyier.  Il  donna  tant  de  soins  à 
cet  étahlis-^ement ,  el  employa  a- 
vec  un  tel  discernement  pour  le 
t'ompléler,  les  sommes  dont  il 
pouvait  disposer,  qti'il  l'éleva  ;\ 
un  degré  de  perfection  el  de  splen- 
deur, auquel  ne  peuvent  atteindre 
les  plus  beaux  cabinets  de  l'Euro- 
pe. Ce  que  les  étrangers  et  les  cu- 
rieux admirent  surtout  en  passant 
par  Harlem,  ce  sont  les  gazomè- 
tres et  ime  électricité  d'mie  gran- 
deur immense.  M.  Va»  Marwm, 
dont  le  nom  est  devenu  européen, 
s'est  rendu  célèbre  par  une  foule 
d'expériences  intéressantes  dans 
la  chimie  el  dans  la  physique, 
dont  le  but  était  non-seulement 
de  les  perfectionner,  mais  encore 
de  les  rendre  plus  utiles  à  la  vie 
commune.  Parmi  les  instrumens 
pour  la  physique  et  la  chimie  rpie 
M.  Van  iMarwin  a  perfecliontiés, 
la  machine  électrique  avec  son  ap- 
pareil tient  le  pri  inier  rang;  le  se- 
cond pciil-êlre  attribué  à  la  pom- 
pe prieuuialiquc,  qui  fui  perfec- 
tionnée au  point  (prdle  porte  le 
nom  de  pompe  pneumatique  du 
docteur  f^an  Manrm;  et  le  troisiè- 
me enfin,  au  ga/ouifire  de  I.avoi- 
sier,  dont  la  descripiicm  se  trouve 


VAN 


i55 


dans  le  Courrier  dfx  Arts  et  Belles- 
lettres,  journal  hebdoMiadaire.  iui- 
primé  à  Harlem,  tom.  VIII,  in-/i°. 
M.  Meerman.  dans  f^e'^Jiumles  des 
Sciences  et  des  Arts,  pagei56.  rend 
un  hommage  aussi  juste  (pie  vrai 
à  M.  Van  i>larwm,  en  parlant  des 
services  qu'il  a  rendus  au  musée 
Teyiérion,  lorsqu'il  dil  «qu'il  pos- 
«sède  une  aptitude  toute  particu- 
«lièreà  f.ivoriser  les  sciences  phy- 
«siques  et  chimiques  par  l'invcn- 
))tion  de  nouveaux  instrumens,  le 
»  perfectionnement  de  ceux  qui 
«exi-itent  déjà,  et  la  continuation 
«non  interrompue  de  ses  expé- 
nriences.  »  M.  Van  .Marwm  a  pu- 
blié la  plus  grande  partie  de  ses 
observalions  sur  la  physique,  la 
chimie  et  l'histoire  naturelle,  dans 
le  Courrier  des  Arts  et  Belles-Let- 
tres. On  en  (rouvera  l'énuméra- 
tion  dans  ses  Tables  des  matières. 
On  a  encore  de  lui  deux  Mémoires 
sur  Céleclricité,  couronnés  par  la 
société  batave,  pour  la  philo;'Ophie 
expérimentale,  à  Rotterdam,  dont 
le  premier,  qui  a  M.  Van  Marwm 
seul  pour  auteur,  a  été  imprimé 
en  1781,  dans  le  (i'  vol.  des  œu- 
vres de  cette  société,  et  le  second, 
auquel  M.  Paels  Van  Twostwyk 
a  coopéré,  et  qui  porte  les  noms 
réunis  de  ces  deux  savans,  a  paru 
en  1785, dans  le  ()' vol.;  un  troisiè- 
me mémoire,  que  la  même  socié- 
té a  couronné,  et  auquel  a  égale- 
ment coopéré  M.  Paets  Van 
Twostwyk  ,  est  intitulé  :  Sur  la 
nature  des  exhalaisons  nuisibles  des 
marais,  lieux  d'aisance,  hôpitaux, 
mines,  etc.,  et  sur  les  moyens  de  les 
corriger,  et  de  secourir  les  person- 
nes qui  en  ont  été  atteintes,  publié 
en  «7^7,  dans  le  8'  vol.  des  œu- 
vres de  cette  société.  Une  discu-^- 


154 


VAN 


sion  qui  s'éleva  entre  M.  Herselin 
et  M.  Van  Marwm,  sur  une  qiics- 
lion  hjdrostali(]iie,  prouva  aussi 
combien  ce  doiiiier  élait  instruit 
dans  celte  partie  de  la  méc3ni([ue. 
C'est  eu  1801  qu'il  [lublia  sa  Â^/- 
IreàM.  VoUn,  sur  ta  colonne  élec- 
trique; elle  était  écrite  origiuaire- 
liient  en  français;  il  eu  a  donné 
evisuite  une  traduction  hollandai- 
se. M.  Van  Marwm  est  chevalier 
de  l'ordre  du  Lion  Belgique,  niem- 
hre  de  l'institut  dt's  Fays-Bas  et 
de  plusieurs  autres  sociétés  savan- 
tes, nationales  et  étrangères.    . 

VAN  MONS   (Jean-Baptiste), 
célèbre  chitniste  belge,  est  né  à 
Bruxelles,  le  11  rioveinbre  i^65. 
II   s'appliqua    de   bonne   heure   à 
l'étude  de  la  chimit; ,   devint   un 
pharmacien  habiles ,  et  malgré  ses 
connaissances  et  un  long  exercice 
au  milieu  d'-  ses  concitoyens,  il 
étudiait  encore  cette  science,  lors- 
que les  découvertes  de  Lavoisier 
lui  donnèrent  un  essor  auquel  on 
dut  les  succès  innnenses  qui   en 
ont  fait  depuis  une  science  nou- 
velle. Van  Mous  ne  pouvait  être 
indifférent  à  cette  révolution  ;  il 
l'adopta  avec  enthousiasme,  et  la 
propagea  en   Allemagne  et  dans 
tout  le  reste   de  l'Europe.    Il  fit 
plus    encore  ;   pour   activer   sans 
cesse  les  progrès  de  la  chimie,  il 
établit  avec  les  savans  des  diver- 
ses contrées  une  correspondance 
suivie,   au  moyen  de  laquelle  il 
communiquait  aux  étrangers  les 
découvertes   et    les    travaux    des 
Français,  et  faisait  passer  à  ceux- 
ci  les  recherches  et  les  résultats 
des  étrangers.   Pour  qu'un  inter- 
prète infidèle  ne  vînt  pas  altérer 
le  sens  des  no,tions  transmises,  il 
se  .sqmïiit  au.  pénible  travail  d'é- 


VAN 

tu'iier    les    diverses    langues    de 
riiurope,  et  il  est  parvenu  A  les 
posséder    et    à    les   écrire   toute» 
avec  facilité.   Lorsqu'en  1792,  à 
la  suite  de  l'invasion    des   Fran- 
çais, on  organisa  à  Bruxelles  une 
asseit)blée    de    représenlans     tlu 
peuple,  M.  Van  Mous  y  fut  appelé 
un   des  premiers.    Le   gouverne- 
ment français  ayant  par  suite  éta- 
bli une  école   centrale  à   Bruxel- 
les ,  l'y  nomnia  professeur  de  phy- 
sique et  de  chimie.  Il  cessa  alors 
d'exercer    la    pharmacie ,    et   eu 
1807,   il  se   fit   recevoir  docteur 
à  la  faculté  de  Paris.  Depuis  les 
événemens  de  i8i4»  il  est  asso- 
cié étranger  de  l'académie  de  Pa- 
ris, et  professeur  à  l'uinversité  de 
Louvain.  Il  a  publié  des  ouvrages 
sur   les    différentes    branrhes   de 
sciences  qu'il  a  cultivées.   Voici 
les  principaux  :  i"  Essai  sur  les 
principes  de  la  chimie  antiplogiS' 
tique,    in -8",  Bruxelles,    1785; 
3°  Pharmacopée  manuelle,   in -8°, 
Bruxelles,  au    9;   5°   Synonymie 
des  nomenclatures  chimiques   mo- 
dernes,    par  Brugualelli ,   traduit 
de  l'italien,   1802,   iii-8°,   ibid.  , 
an   1  1  ;  4°  Journal  de  chimie  et  de 
physique  ,  6  \ol.  in-8°,  Bruxelles, 
années  9,   10  et  1  i  ;   5"  Principes 
d'électricité,  in-8°,  ibid. ,  an  11; 
6°  Théorie  de  la  combustion ,  iu-8°, 
ibid.,   an    12;   7"   Essai  sur  une 
théorie  chimique  modifiée,  4  vol. 
in-8",  ibid.  ,  1806-1807  :  cet  ou- 
vrage n'est  point  achevé  ;  8"  Lettre 
à  M.    Bucholz ,  sur   la  formation 
des  métaux,  181  1 ,  in-8'  ;  9°  Elé- 
mens  de  chimie  philosophique,  par 
Davy,  traduit  de  l'anglais,   avec 
de  nombreuses  additions,  2  vol. 
in-8°,  Bruxelles,  18 «5- 18 16;  10'' 
Principes  élémentaires   de   chimie 


VAN 

plùlosophique  ,  avec  des  explica- 
tions gètirrales  de  la  doctrine  et 
des  proportions  déterminées,  in- 12, 
IJiuxelle?,  1818.  M.  Van  Âlons  a 
uus^'i  élé,  pcnJant  plusieurs  an- 
nttir> ,  lin  des  rt.dacteurs  des  An- 
nales de  thiniie  ,  rédigées  à  l*aris, 
et  il  enrichi  tl'nne  foule  d'articles 
la  plupart  di'S  journaux  «cientiû- 
«fut-s  de  l'Europe.  Il  s'es^t  occi.pé 
«it'puis  plus  de  quinze  ans  du  per- 
fi'Ctiunnement  des  diverses  espè- 
ces de  fruits,  par  la  méthode  du 
^einis,  et  n'a  cessé  de  faire  ses  ex- 
périences surGo,ooopieds  d'arbres 
semés.  Il  a  pu^^lié,  en  1820,  un  ou- 
vrage sur  ce  genre  de  cull;ire. 

VANNI  (Chables),  membre  de 
la  jimte  d'état,  créée  à  Naples,  en 
'794  '  s'était  jeté  de  bonne  heure 
dans  le  barreau  pour  y  chercher 
quelque  moyen  d'existence.  Sp 
sentant  incapable  de  s'élever  par 
ses  talens,  il  eut  recours  A  l'intri- 
gue, et  par  une  conduite  aussi  lâ- 
che que  coupable,  il  vint  à  bout 
de  >e  faire  remarquer.il  avait  déjà 
donné  la  mesure  de  son  immora- 
lité eu  s'offrant.  en  17^5,  à  l'allan- 
te, pour  séduire  quelques  jeunes 
gens,  qu'il  devait  lui  faire  sur- 
prendre dans  une  loge  de  francs- 
maçons  à  Capodimonte.  Cette 
trahison ,  qui  plongea  dans  le 
deuil  plusieurs  familles,  avait  va- 
lu à  ce  iriisérable  une  place  dans 
la  magistrature,  et  le  rendit  ew- 
suile  digt»e  de  prendre  part  à  la 
persécution  des  patriotes  iirspoli- 
tains,  qu'Aclon  avait  ronseillé»!  ù 
la  reine.  Vanni,  qui  a  élé  pendant 
quelques  années  l'arbitre  de  la  for- 
tune et  de  la  vie  des  plus  honnê- 
tes citoyens  ,  avait  été  charge 
d'^xainin^r  la  comptabilité  du 
pripce  de.Tai^sia,  un  d^s  griinds 


VAN  1 55 

olficiers  de  la  couronne,  qne  le 
roi  avait  eu  l'idée  de  placer  à  la 
tête  d'une  fabrique  de  soieries, 
qu'il  venait  de  fonder  à  San-Leu- 
cio.  Il  arriva  ce  qu'il  était  facile 
de  prévoir:  les  employés  subal- 
ternes s'eniichirent,  et  le  chef  de 
rétablissement  fut  déclaré  respon- 
sable do  leurs  dilapidations.  Van- 
ni. qui  s'était  montré  plutôt  le 
bourreau  que  le  juge  du  prince  de 
ïarsia,  fut  choisi  par  Acton  com- 
me rinslrumtnt  le  jdus  actif  de 
sou  despotisme.  La  première  jun- 
te ,  qui  n'avait  pas  répondu  à  l'at- 
tente du  aiinistie,  fut  cassée, 
et  Vanni,  C....,  Guidobaldi  furent 
appelés  à  consommer  la  ruine  de 
l'état  et  des  familles.  l\>  commen- 
cèrent par  démoraliser  une  partie 
de  la  nation  pour  la  faire  servir  à 
dénoncer  l'autre  :  ils  tendirent 
leurs  lîlels  dans  tout  le  royatmie, 
et  personne  ne  put  restera  l'abri  de 
l'injustice  et  de  la  calonmie.  Cet 
épouvantable  terrorisme  dura  pres- 
que quatre  ans,  et  ne  finit  que  peu 
avant  la  première  invasion  des 
Français  en  1799.  La  nation,  fa- 
tiguée d»î  tant  d'excès,  éclata  en 
invectives  contre  ses  oppresseurs 
el  le  gou  verîientenl  se  vit  obligé  do 
mettre  un  terme  à  la  fureur  de  la 
junte  d'état.  Sacrifié  par  ses  pro- 
pres collègues,  qui  le  chargèrent 
de  tons  leurs  crimes,  Vanni  fut 
destitué  et  banni  de  la  capitale. 
Celte  disgrûce  l'accabla  d'autant 
plus,  que  le  royaume  d<!  Naples 
ne  tarda  pas  à  être  occupé  par  les 
armées  républicaines,  l'ouisuivi 
par  ses  remords,  et  craignant  la 
vengeance  de  ses  ennemis,  ii  s'a- 
dressa à  la  reine  pour  être  reçu  ù 
bord  de  l'escadre  <|ui  devait  em- 
mener la  couc  en  Sicile.  Cette  de- 


i56 


VAN 


mande  ne  fdtpas.'icuiieilliOjOtVnM- 
ni  iH!  vit  alors  d'autre  ressource 
pour  lui  que  d'altcMilcr  à  son  exis- 
toiice.  x\varit  de  se  fr.tpner,  il  écri- 
vit ce  billet  qu'on  trouva  [in'is  de 
son  cadavre  :  «  !/iiigratiludo  d'u- 
une  cour  peifide,  Tapproclie  d'un 
"Cnnerni  redoutable,  le  manque 
1;  d'asile,  m'ont  porté  à  n)e  deli- 
»vrer  d'une  vie  qui  m'est  à  char- 
"•,'e.  Qu'on  n'accuse  personne  de 
»ce  crime.  Puisse  ma  mort  servir 
"d'exemple  aux  autres  inquisi- 
»  leurs,  et  leur  apprendre  à  être 
«sages.  .)  Vanni  se  détruisit  dans 
ime  petite  maison,  à  Sorrento,  le 
kS  janvier  1 709. 

VAN-PRAÈT  (  Joseph-Basile- 
Bernard  ) ,  né  à  Bruges  en  juillet 
1737,  vint  fort  jeune  en  France, 
et  fit  ses  éludes  au  collège  d'Arras. 
En  1784,11  entra  comme  employé 
à  la  bibliotlièque  du  roi.  Quoique 
la  nature  de  ses  occupations  pai- 
sibles et  séde,nlaires,  et  une  ex- 
trême modestie  qui  l'empêcha 
toujours  de  se  produire  en  public, 
dussent  contribuer  à  lui  assurer 
ime  vie  douce  et  tranquille,  et  à 
le  mettre  à  l'abri  des  persécutions 
pendant  les  troubles  de  la  rérolu- 
linn,  néanmoins  il  (ut,  en  1795, 
dénoncé  comme  aristocrate,  avec 
quelques-uns  de  ses  collègues, 
entre  autres  Barthélémy,  Champ- 
l'ort  et  Capperonnier,  et  incarcéré 
aux  ftladelonnetles,  où  il  ne  resta 
que  douze  jours,  ayant  été  récla- 
mé par  le  comité  de  sa  section. 
Après  avoir  rempli  pendant  deux 
ans,  par  intcriui ,  les  fonctions  de 
conservateur  de  la  bibliothèque  , 
M.  Vau  -  Praet  fut  nommé  à  cet 
emploi  en  1796,  pour  les  livres 
imprimés.  Depuis  quarante  ans 
qu'il  est  à  la  bibliothèque  royale, 


YAN 

les  personnes  qui  la  fréquentent 
n'ont  jamais  eu  qu'à  se  louer  de 
son  obligeance  et  de  son  aménité: 
il  sait  habilement  faire  apprécier 
aux  éliaiigers  l'impoitance  et  la 
richesse  de  l'établi-sement  auquel 
il  est  préposé,  et  dont  la  France 
s'enorgueillit  à  juste  titre.  Il  a 
reçu  ,  en  1814?  'a  décoration  de 
la  légion-d'honneur  et  des  lettres 
de  naturalisation,  son  pays  natal 
ne  se  trouvant  plus  alors  renfer- 
mé dans  les  liniiles  assignées  à  la 
France.  M.  Vau-Praet,  mem])re 
de  l'académie  celtique,  de  la  so- 
ciété royale  académique  dos  scien- 
ces de  l'a  ri  s ,  et  correspondant  de 
l'institut  de  Hollande,  a  publié 
divers  ouvrag'i*  qui  alte-^lent  ime 
grandeéruditiou  en  bib'ingranhie  : 
1°  Recherches  sur  la  vie  et  les  écrits 
de  Colard  Maiision ,  iiupiimeur  à 
Bruges  durant  le  1 5'  siècle;  i"^ 
Notice  abrégée  d'un  uianuscrlt  fran- 
çais de  la  bibliothèque  du  roi,  in- 
titulé :  Tournois  de  la  Gruthuse  ; 
5°  Description  des  manuscrits  de  ta 
bibliothèque  du  duc  de  la  Val  Hère, 
5  vol.  in-8'';  4"  Catalogue  des  li- 
vres imprimés  sur  vélin  de  la  bi- 
bliothèque du  roi  ,  5  vol.  in-S"  , 
1825  ;  5"  pour  faire  suite  à  l'ou- 
vrage précédent,  Catalogue  des 
livres  imprimés  sur  vélin,  tant 
des  autres  bibliothèques  publi- 
ques que  des  bibliothèques  parti- 
culières, 5  vol.  in-8".  i824- 

VANSITÏARÏ  (  Nicolas)  , 
chancelier  de  l'échiquier,  etc.  , 
est  né  h  Londres  ,  d'une  famille 
originaire  de  Hollande.  Il  com- 
mença ses  études  à  Weslujiu^ter, 
et  les  termina  à  Oxford  en  1791. 
Ayant  déployé  de  grands  talens 
comme  financier  à  la  chambre  dos 
communo?,  où  il  avait  été  élu. 


VAIS 

el  possédant  une  grande  fortune 
avec  l.j  réputation  d'une  sévère 
inJéjjrité,  il  devint,  en  1800,  se- 
crétaire de  la  Irésîorerie,  époque 
de  la  tbrm.ition  du  ministère  qui 
i-uccéda  à  W.  Pitl.  Quelque  temps 
après,  presque  à  la  suite  de  la 
ujorl  de  M.  l'ercival,  il  lut  nom- 
mé aux  fonctions  importantes  de 
chancelier  de  l'échiquier.  Les  4 
et3i  mars  iSij,  il  ûl  à  la  cham- 
bre des  communes  un  long  r.ip- 
port  sur  l'état  des  finances  de 
l'Angleterre,  et  prouva  qu'elles 
étaient  devenues  exlrcuiement 
florissantes  depuis  la  prorogation 
du  parlement  ,  et  depuis  celle 
épocpie  jusqu'aux  derniers  événe- 
mens  militaires.  Il  prt^senta  en- 
suite un  plan  général  d'améliora- 
tion ;  c'était  un  projet  d'amortis- 
sement de  la  délie  publique,  qui 
fixa  d'autant  plus  Tallenlion  de  la 
chambre,  qu'il  créait  des  fonds 
suflisans  pour  cet  objet,  et  qu'il 
ofl'rait  la  facilité  d'alléger  les 
créances  de  l'élat.  Le  8  novem- 
bre 1814,  il  se  montra  le  défen- 
seur des  ministres  ,  en  repoussant 
l'attaque  dirigée  contre  eux  par 
i>I.  \Vithbri;ad,  à  l'occasion  de 
l'adresse  d'un  juge  au  prince-ré- 
gent, sur  la  manière  d'adminis- 
trer la  justice.  Le  i5  mars  181 5, 
il  proposa  d'acheter  de  la  com- 
pagnie fie  la  mer  du  Sud  ,  son  pri- 
vilège exclusif  de  commerce  avec 
l'Amérique  méridionale.  A  celle 
occasion,  MM.  Wilhbread  et  Ben- 
net  tracèrent  un  tableau  effrayant 
de  la  guerre  qui  dé.4olait  les  colo- 
nies espagnoles,  et  demandèrent 
au  gouvernement  de  prendre  des 
mesures  pour  rappnxdier  les  deux 
partis  et  assurer  la  liberté  de  18 
millions    d'Espagnols    dei>    deux 


VAN  lô: 

Amériques.  M.  Vansittart  leur  ré- 
pondit «  que  l'Angleterre  avait 
fait  offrir  sa  médiation  ,  mais  qu'il 
ne  convenait  pas  de  rien  faire  qui 
pûl  être  considéré  conmie  uu 
manque  de  foi  envers  le  roi  d'Ls- 
pague,  malgré  tous  les  avantages 
que  le  commerce  libre  avec  l'A- 
mérique espagnole  pouvait  pro- 
curer à  la  Grande-Bretagne.  '> 
L'Angleterre  fit  tout  pour  l'Amé- 
rique, en  restant  inaclive;  si  elle 
eût  employé  la  force  pour  com- 
primer l'élan  des  peuplt-s ,  les 
haines  y  eussent  été  inextingui- 
bles, comme  on  le  voit  chez  d'au- 
lies  nations,  et  les  Anglais  épui- 
seraient encore  aujourd'hui  leur 
sang  tt  leurs  subsides  dans  ces 
contrées,  au  lieu  d'y  recueillir  les 
avantages  que  leur  assure  la  re- 
connaissance de  l'indépendance 
qu'elles  ont  conquise.  M.  Vansit- 
lart,  membre  de  la  société  bibli- 
que, prononça  en  cette  qualité 
dans  rassemblée  qui  eut  lieu,  en 
mai  181G,  un  discours  où  il  fai- 
sait le  plus  grand  éloge  de  la 
sainte -alliance.  Il  est  peu  élo- 
quent ;  les  chifl'res  sont  ses  armes 
habituelles,  et  jamais  il  ne  ré- 
pond aux  traits  quelquefois  acé- 
rés qu'on  lui  lance  du  haut  de  la 
tribune  ,  qu'en  déroulant  un  im- 
mense cahier  tie  calculs,  derrière 
lequel  il  conserve  un  flegme  im- 
perturbable. M.  Vansitlart  a  pu- 
blié :  1"  Uéflexions  sur  la  nécessité 
el  l'avantage  d'une  paix  immé' 
(iiale ,  in  -8",  1788;  2°  Lettre  à 
M.  Pilt  sur  la  conduite  d<^3  direc- 
teurs de  1(1  banque  f  avec  des  obser- 
vations sur  le  pamphlet  de.  Mor- 
gan ,  relatif  à  la  dttte  publique, 
in  -  8%  1 79.5  ;  ?>'  liecheixben  sur 
l'état  dts  finances  de  ta  Grande- 


1 58 


VAU 


Jiretagne,  in-8%  i  79C  ;  4°  Subs- 
liivce  (le  deux  discours  sur  le  rap- 
port du  comité  des  niotinaics,  in  8", 
181  I  ;  5*  Trois  Lettres  sur  la  so- 
ciété anglaise  et  étrangère  de  ta 
Bible,  \n-i)°,  tSia,  iiLsérée.-?  dans 
le  Pampleleer,  11°  1";  6'  Discours 
à  la  chambre  des  communes ,  20 
lévrier  i8i5,  sur  le  comité  des 
voies  et  moyens  ;  •p'  Budget  de 
181 5.  Ct'S  deux  dernières  bro- 
chures ont  été  insérée»  dans  le 
Pampleleer  y  avec  des  obstrva- 
tion«. 

VAUBLANC-VIENNOT(lecom- 
TE  Vincest-IMarie  de),  membre  de 
\i\  cbambre  des  députés,  membre 
du  conseil  supérieur  de  commer- 
ce, grand-olficier  de  la  lé;;ion- 
d'hormeur,  chevalier  de  Saint- 
Louis,  etc. ,  est  né  en  i^-ôô  Élevé 
à  l'école  militaire,  il  suivit  quel- 
que temps  la  carrière  des  armes. 
Secrétaire  de  la  noblesse  de  iMe- 
luu,  en  1789,  il  fut  nommé,  au 
mois  de  septembre  1791,  par  le 
département  de  Seine-et-Marne, 
à  l'assemblée  législative,  où  il  .•«e 
montra  bientôt  l'un  des  meudires 
les  plus  opposés  au  nouvel  ordre 
de  choses.  Il  parla  en  laveur  des 
émigrés  et  des  prêtres  réfraclai- 
res,  demanda  que  le  comité  di- 
plomatique présentât  un  rapport 
sur  la  nécessité  d'éloigner  des 
frontières  les  Iréres  du  roi  ;  s'op- 
posa au  séquestre  des  biens  des 
émigrés  ,  voulut ,  mais  inutile- 
ment, défendre  le  ministre  de 
Lessart,  empêcha  M.  Bertrand  de 
ftjolleville  d'être  mis  en  accusa- 
tion, et  obtint  la  suspension  du 
décret  rendu  contre  i»!.  de  Noail- 
ies,  ambassadeur  à  Vienne.  M.  de 
Vaublanccombattit  avec  beaucoup 
de  courage  l'amnistie  propo.-ée  en 


VAL 

faveur  de  Jourdan  {yoy.  ce  nom) , 
et  des  autres  auteurs  des  nia«>a- 
crcs  de  la  (i/rtc/tre  d'Avignon  ;  il 
fil  décréter  d'accusation  Marat, 
et  interrompit  avec  iudigfialion  la 
lecture  d'une  pétition  par  laquelle 
un  fils  dénonçait  le?  opinions  de 
sori  père.  Il  prit  contre  Tes  Giron- 
dins la  défense  de  AJ.  de  La  Facet- 
té ,  enfin  il  fit  mandera  la  barre 
de  l'assendjlée  l'étion,  maire  de 
Paris,  et  M.  Roedérer,  procureur- 
s^'udic  du  département  ,  pour 
qu'ils  y  rendissent  compte  des 
mesures  qu'ils  avaient  ordonnées 
j»oin"  assin-er  la  tranquillité  de  la 
capitale.  Il  ne  fut  point  réélu  à  la 
convention  natiouide.  Ses  prin- 
cipes qui,  lorsqu'il  était  membre 
de  rassemblée  législative  ,  l'a- 
vaient signalé  à  la  haine  du  peu- 
ple ,  et  plusieurs  fois  <  X|  osé  à  sa 
vengeance,  le  firent  uuîttre  hors 
la  loi  sous  le  régime  de  la  ler- 
leur;  il  échappa  néann)oins  à  la 
proscription,  «t  reparut  après  la 
révolution  du  9  thermidor  an  2. 
Président  de  la  section  Poisson- 
nière à  l'époque  de  l'insurrection 
sectionnaire  contre  la  convention 
nationale  (1  796),  il  fut  condamné 
à  mort  par  coutuniace,  conjme 
ayant  fait  partie  des  comités  di- 
recteurs  de  ce  mouvement  sédi- 
tieux. Dans  le  même  temps,  deux 
jours  avant  cette  C(mdamnalion , 
le  déparlement  de  Seine-et-Marne 
le  nommait  député  au  conseil  des 
cinq-cents.  Le  29  janvier  1796. 
il  réclama  une  première  fois  con- 
tre ce  jugement ,  et  ne  réussit  pas 
à  le  faire  annuler  :  il  fut  plus  heu- 
reux à  la  seconde.  Acquitté  à  la 
fin  d'août  de  la  même  année,  il 
parut  au  conseil  des  cinq-cents, 
le  2  septembre  1796,  pour  y  prcn- 


y 


TAU 

dre  séance  et  prononcer  le  ser- 
ment (le  haine  à  fa  royauté.  Il  le 
prêta,  an  grand  étonnemenl  de 
l'assemblée.  Tous  ses  discours  au 
conseil  fnrent  une  constante  op- 
position au  parti  républicain  et 
au  directoire-exécutif.  A  l'époque 
'lu  i8  fructidor  an  5  (1797)  •>  lors 
de  la  lutte  entre  le  directoire  et 
les  conseils,  il  était  membre  de 
la  coriimission  des  inspecteurs 
chargés  de  prendre  les  mesures 
de  résistance;  le  directoire  ayant 
triomphé,  il  fut  condamné  à  la 
déportaiion.  Il  parvint  à  s'y  sous- 
traire, et  passa  en  Suisse,  d'où  il 
se  rendit  en  Italie,  et  revint  en 
France  après  l'établissement  du 
gouvernement  consulaire,  lin  1800, 
membre  du  corps  -  législatif  par 
élection  du  sénat-conservateur,  il 
fut  nommé,  en  i8o4»  par  le  dé- 
parlement de  Seine -et  -  Mart)e  , 
candidat  au  sénat  ;  devint ,  en 
i8o5,  préfet  du  département  de 
la  Moselle ,  et  successivement 
comte  de  l'empire  et  comman- 
dant de  la  légioû-dhonneur.  En 
i8i3,  il  fut  attaqué  de  la  maladie 
contagieuse  causée  par  le  grand 
nombre  de  soldats  malades  ou 
blessés  dirigés  sur  MvAz  ,  chef- 
lieu  de  sa  préfecture,  et  en  faveur 
desquels  iM.  de  Vaublanc  avait 
fait  établir  plusieurs  hôpilaux.  Il 
tut  un  des  premiers  à  se  pronon- 
cer contre  l'empereur  et  pour  1« 
rétablissement  du  gouvernement 
royal  ;  et  au  ?.o  mars  181  5,  à  ex- 
horter lii  garde  nationale  à  rester 
fidèle  au  roi ,  et  à  prernlre  ,  de 
concert  avec  le  maréchal  Oudi- 
not ,  lies  mesures  pour  défendre 

»la  ville  contre  Napoléon.  Ce  prin- 
ce, (}ui  avait  fait  tant  d'ingrats 
tans  se  venger,  donna  cependant 


VAU  i5() 

l'ordre  d'arrêter  M.  de  Vaublanc, 
qui  toujours  informé  à  temps  des 
dangers  qu'il  courait,  se  hâta  de 
prendre  la  fuite.  Il  arriva  à  Luxem- 
bourg, où  le  général  autrichien 
lui  témoigna  une  grande  considé- 
ration. iM.  de  Vaul)lanc  revint  à 
Paris,  à  la  suite  du  roi,  en  1814. 
Ce  prince  le  nomma  successive- 
conseiller-d'étal  ,  préfet  du  dépar- 
lement des  Bouch(;»-du-Rhône  et 
ministre  de  l'intérieur.  M.  de  Vau- 
blanc a  marqué  son  mitnslére 
dans  le  monde  savant,  [)ar  la  réor- 
ganisation, en  181G,  de  rin<litut, 
où  tant  de  nouveaux  académi- 
ciens improvisés  vinrent  occuper 
les  places  d  hommes  qui  jouis- 
saient depuis  long- temps  d'une 
haute  considération  littéraire. 
Comme  l'un  des  organes  du  gou- 
vernement, il  a  peu  marqué,  cl 
a  été  remplacé  au  ministère  de 
l'intérieur  par  M.  Laine,  aujour- 
d'hui vicomte  et  pair  de  France. 
A  sa  retraite  ,  M.  d«;  Vaublanc  fui 
nommé  ministre  d'état  et  mem- 
bre du  conseil-privé.  En  1820,  il 
a  été  élu  par  le  département  du 
Calvados  membre  de  la  chambre 
des  députés,  et  réélu,  en  1824,  à 
la  chambre  septennale  ;  il  est 
membre  libre  di;  l'académie  royale 
des  lieaux  arts.  Ses  ouvragts  sont  : 
i'  Considérations  critiques  sur  la 
nouvelle  ère ,  sous  la  forme  d'un 
discours  supposé  i\  la  tribune  du 
conseil  des  cinq-cents,  suivi  de 
l'extrait  d'un  mémoire  à  l'astro- 
nome Dt.'lambre,  sur  les  moycu.n 
de  trouver  les  années  sexiiles  du 
nouveau  calendrier,  1801,  iu-8"  ; 
2"  Rivalité  de  la  France  et  de 
rÀngleterrCj  depuis  la  conqm'''te 
de  Guiltaumi; ,  eu  io()(i,  jusqu'à 
la    rupture   du     traité    d'Amiens 


iGo 


\AV 


p;ir   l'Angleterre,    i8oô,   in  -  8°. 
VAUCaRAUD  (Pierre-IIénû-Ma 

RIE  de),  vice-amiral,  grand'croix 
de  l'orrlre  royal  el  iniiil.iire  de 
Salnt-Loiiis,  oflJi.ier  de  l'ordre 
royal  de  la  iégion-d'honneur,  né 
en  174',  a"X  sahles  d'OInnne,  se 
voua  de  bonne  heure  au  service 
de  mer,  et  s'embarqua,  en  1756, 
sur  \c  vaisseau  VEveillé,  comme 
garde  de  la  marine.  Enseigne  en 
1762,  il  montait  le  Tonnant,  qui 
releva  la  garnison  d<'  Wahon,  et 
fit  lu  remise  de  (!elte  foitcresse. 
Coinrnandanl  d'un  aviso  dans  l'es- 
cadre d'évolution  sous  les  ordres 
du  comte  d'Orvilliers,  il  était 
chargé  de  porler  les  ordres  et  de 
répéter  les  signaux.  Il  se  distin- 
gua dans  ce  service,  et  fut  ch.irgé 
d'apporter  à  Vc-rsailles  le  compte 
des  opénitions.  Au  combat  d'Oues- 
sant,  il  suppléa  M.  L)u<;haîraud, 
qui  commandait  l'arrière-garde , 
et  qui  venait  d'être  grièvement 
blessé.  Par  son  dévouement  il 
sauva  toute  la  flotte  de  Bre?t,  que 
iDenaçait  de  l'incendie  leuibrasse- 
meiit  du  vaisseau  le  Roland.  A  la 
recommandation  de  WiVl.  d'Orvil- 
liers et  Duchaftaud,  ses  ihefs,  il 
reçut  le  commandement  de  la  fré- 
gate le  Fox,  capturée  sur  les  An- 
glais, et  fut  le  major  eu  second  de 
W.  d'Orvilliers  dans  les  flottes 
combinées  de  France  et  d'Espa- 
gne, dirigées  contre  les  Anglais, 
il  l'ut  major-général  de  l'armée 
de  M.  delà  Touobe-Tréviile,  char- 
gée de  retnplacer  aux  Antilles  cel- 
le du  comte  de  Giiichen.  Il  ten- 
dit dans  ce  poste  d'importans  ser- 
vices, et  sauva  encore  la  flotte 
française  d'un  incendie  qu'allait  y 
occasioner  l'embrasement  du  vais- 
seau V Intrépide.  M.  de  Vaugiraud 


VAU 

se  conduisit  avec  beaucoup  de 
bravoure  ,  quoi.^ue  blessé  dans  le 
combat  contre  l'amiral  Pioduey;  il 
était  sur  le  vai>seau  amiral  la  Vil- 
le de  Paris,  qui  fut  forcé  de  te 
rendre.  Le  conseil  de  guerre  char- 
gé de  prononcer  sur  cet  événe- 
ment, rendit  le  témoignage  le  plus 
flatteur  de  la  conduite  de  W.  de 
Vaugiraud,  et  le  roi  eu  lui  adres- 
sant une  lettre  de  félicitition  ,  lui 
annonçai-l  qu'il  lui  avait  accordé 
une  nen>ion  de  lîsoo  francs.  Com- 
mandant en  second  dans  la  pre- 
mière escadre  d'évolution  d'Albert 
de  Kiom? ,  il  passa,  en  1788,  au 
coumiandement  de  la  Gracieuse, 
de*tinée  à  la  station  des  colonies 
occidentales.  En  17S9,  il  aida  M. 
de  Vioménil,  gouverneur  de  la 
IMartiiiiquc,  à  apaiser  les  mouve- 
inens  insurrectionnels  que  ve- 
ïiaient  de  faire  naître  les  événe- 
mens  de  la  révolution.  De  retour 
dans  ses  foyers,  à  l'épociue  du  dé- 
part du  roi  pour  Varennes,  M.  de 
Vaugiraud  se  mit  à  la  tête  de  plu- 
sieurs gentilshommes  du  Poitou  , 
et  résista  à  main  armée  aux  forces 
«  nv4iyées  pour  arrêter  l'insurrec- 
tion qu'ils  dirigeaient.  Un  décret 
de  prise  de  corps  ayant  été  lancé 
contre  lui,  il  émigra  et  se  rendit 
à  Cobleutz.  Les  prioces  français 
le  chargèretU  d'organiser  le  corps 
de  la  m.  rine  en  compagnies,  et 
dès  le  commencement  des  hosti- 
lités, il  eut  le  commandement 
d'une  C'Hiipaguie  noble  de  cavale- 
rie destinée  au  service  des  prin- 
ces. Lors  du  licenciement,  il  se 
rendit  en  Angleterre,  d'où  il  de- 
vait passer  dans  la  Vendée,  poury 
porter  les  ordres  du  roi;  mais  il 
resta  à  Londres,  et  fut  chargé,  lors 
de  l'expédition  de   Quibernn,    de 


I 


VED 

diriger  le  njouveinent  de  sir  J. 
Warren;  après  le  dé.saslre  de  cel- 
te expédition,  chef  de  huit  cha- 
loupe;3canonnières,il  sauva  del'ar- 
tiilerie  et  un  grand  nombre  de 
soldats.  Il  retourna  ù  Londres, 
d'où  il  revint  avec  Louis  XVIII 
en  1814.  Ce  prince  le  tionini;i  vi- 
ce-uiiiiral  el  gouverneur  de  la 
Martinique.  Pendant  l*i^  cent  jours, 
en  i8i5,  le  roi  l'éleva  au  poste 
de  gouverneur-général  des  Antil- 
les. Depuis  lors  son  administra- 
tion fui  loin  d'obtenir  rapproi)a- 
tion  générale;  néanmoins  il  resta 
ù  son  poste  jusqu'à  l'expiration 
des  trois  années  de  son  gouver- 
nement. Ln  1818,  il  remit  sa  co- 
lonie an  général  Donzelot,  son 
successeur,  et  revint  à  Paris;  il  a 
été  admis  à  la  retraite. 

VEDKL     (  DoMISIOI:E- IIONORÉ- 

Marie-Aktoine  comte  de),  lieute- 
nant-général,  commandeur  de 
l'ordre  i<»yal  de  la  légion-d'hon- 
neur, chevalier  de  l'ordre  royal 
de  Saint-Louis  ,  né  à  Monaco  le  2 
Juillet  1 7^5,  est  issu  d'une  ancien- 
ne famille  militaire,  originaire  de 
Marsillargues,  département  du 
Gard.  Il  entra  au  service  dans  le 
régiment  du  Maine-Inférieur,  où 
servait  son  père.  Nommé  sous- 
lieutenant  en  «jS;",  lieutenant  en 
1791  .  capitaine  «;n  juille!  1792,  il 
fil  la  campagne  de  «792  à  l'armée 
du  Nord,  où  il  '^e  distingua  parti- 
culièrement à  l'.iflViire  «le  W'irlon; 
rentra  à  l'armée  d'Italie  au  régi- 
meiit  du  Maine  ,  vers  la  fin  de  cet- 
te année,  lors  de  rinsurrection  du 
régiment  de  ligne  eontre  ses  of- 
ficiers; la  fermeté  qu'il  dé{»loya  à 
cette  ucca.>>ion  lui  aurait  coûté  la 
vie,  si  Masséna  et  les  olTiciers  du 
bataillon  de  gardes  nationales  du 

T.  XX. 


VED 


161 


Var,  qu'il  commandait  ne  se  fus- 
sent hâtés  de  venir  à  son  secour». 
iliippelé  au  service  par  l.i  loi  du 
i5  mars  i7f)3,  il  obtint  le  com- 
mandement d'ime  compagnie 
franche,  qui  reçut  ordre  de  se 
rendre  en  Corse,  et  fut  choisi 
pour  être  mis  à  la  tête  de  loules 
les  comj)agnies  franches  réunies. 
Durant  les  dilférens  sièges  qut; 
les  Anglais  entreprirent  dans  cette, 
île  en  1793,  su  troupe  Ql  conli- 
nnellement  le  service  de  canon- 
niers.  Au  siège  de  Caivi ,  il  délit  les 
assiégeant  et  se  fit  particulière- 
ment remarquer  en  soutenant  et  re- 
poussant l'assaut  que  l'armée  an- 
glaise dirigea  contre  le  fortMotzel- 
lo,  dont  la  brèche  était  praticable 
et  les  batteries  démorilées.  Il  fut 
blessé  le  21  pluviôse  an  2.  Appelé 
à  l'état-major-géiiéral  de  rarméu 
d'Italie,  en  qualité  d'adjoint  (le 
1"  pluviôse  an  3),  il  y  servit  avee 
une  grande  acliviléj  se  distingu.» 
au  passage  du  Pô,  à  celui  de  l'Ad- 
da,  aux  affaires  de  Lonato  et  Sa- 
lo;  remplit  plusieurs  missions  im- 
portantes, entre  autres  celle  pé- 
rilleuse de  traverser  seul  la  «iroitu 
du  'iyrol,  pour  aller  à  la  recherche 
dv  la  division  Augereau.  A  la  tête 
du  1"  régiment  di;  hussards,  lors 
du  |)assage  de  la  Breala  ,  il  fit  six 
cents  prisonniers,  s'empara  du 
parc  de  réserve  des  Autrichiens,  et 
entra  le  premier  dans  les  villages 
dt;  Feltre  et  de  Bassano.  A  l'affai- 
re de  Céréa,  en  \  an  4»  il  fut  char- 
gé de  se  retjdre,  avec  une  escorte 
de  25  chasseurs  à  ch(;va!,  à  San- 
guinetlo,  où,  ayant  d'y  arriver,  il 
eut  à  combattre  trois  escadrons 
postés  en  éch(ilons  sur  relie  route. 
Le  passage  qu'il  parvint  à  effec- 
tuer,   opéra  une   diversion  ulilu 


iG'i  VED 

niix  nmnvcmens  de  l'armée.    L« 
i"  nivôse  un  5,  il  fut  chargé  du 
cnininandemonl  d'un  batiiillon  de 
la  17*  demi-brigade  légère;  c'est 
à  sa  têle  (|u'à  la  bataille  de  Rivoli, 
le  36  dn  même  moi.x,  il  enleva  à 
la  baïonnette  îe  posle  très-impor- 
tant de  la  chapelle  San    iMarco  . 
qu'il  défendit  avec  la  plus  gramle 
opinitilreté,  et  où  il  fut  bles!<é  griè- 
vement. Le  6  germinal  an  7,  à  la 
têle  des  grenadier»  réunis   de   t.» 
division  Grenier,  il   força  le   rr- 
Iranchement  autrichien  à  la  gao- 
che  de  Bussolengo,  où,  après  di- 
vers traits  d'une  grande  bravoure, 
il  re^ut  plusieurs  bles^^ures.  et  eut 
la   jambe   gauche    cassée.    Laissé 
sur    le    champ    de   bataille ,    son 
cheval  tué  sous  lui,   il  ne  donna 
signe    d'existence  que    quelques 
heures  après.  Sa  Conduite  mise  à 
l'ordre,  lui  valut  le  grade  de  chef  de 
brigade,  qui  ne  put  être  coulirmé 
que  le  4  nivôse  an  8,  époque  où 
il  prit  le  commandement  de  la  1 7* 
demi-brigade  d'infanterie  légère. 
C'est  à  la  tête  de  celle-ci  qu'il  fit 
les  campagnes  de  l'an  8  à  l'armée 
d'Italie  ,  et  celle  de  l'an  9  aux  ar- 
mées de  réserve  et  des  Grisons.  Le 
lo  nivôse  de  cette  année,  il  défit 
les  Autrichiens  au  Mont  Thonal, 
se  rendit  maître  des  redoutes,  et 
fit  des  prisonniers.  Il  passa  ensui- 
te du  camp  de  Boulogne,  où  son 
régiment  faisait  partie  de  la  divi- 
sion de  Suchet,  au  5'  corps  de  la 
grande-armée  commandée  par  le 
général    Lannes.     Le   21    vendé- 
miaire an  i4i  il  contribua  puis- 
samment à  la  prise  d'Llni.   A  la 
tête  de  quatre  compagnies  de  son 
régiment,  il  se  rendit  maître  {\e< 
redoutes  avancées,  et  entre  autres 
de  c«lle  de  Frauensberg.  II  pour- 


VED 

suivit  avec  une  telle  rapidité  Ici 
Autrichiens,    qui  les   défendaient 
qu'il    eulra    pêle-mêle   avec    eux 
dans  la  place;    secondé   dans    ce 
ninovenicnl  par  les  tirailleurs  du 
Si"  régiment,  il  fit  19,00  pri.-on- 
iii<is.  Huit  mille  ennemis  établis 
dans  les  ba>li(ms  de  cette  partie  de 
la  ville  avaient  déjà  déposé  leurs 
armes  en  un  énorme  faisceau,  lors- 
que,   revenant  de   leur  première 
stupeur,   ils    s'aperçurent  que  le 
mouvement  du  colonel  Vedel  n'é- 
tait [)as  soutenu.  Il  se  vit  entouré 
à  son  tour,  et  forcé  de  céder  à  lu 
fortune.    Pendant  les  trois  jours 
qui  précédèrent  la  bataille  d'Aus- 
terlitz,  il  tint  la  campagne  avec 
son  seul  régiment  d'infanterie,  en 
présence  de  toute  l'armée  russe. 
Le  2  décembre  i8o5,  jour  de  cel- 
le bataille,  il  fut  chargé  de  servir 
de  pivot  à  l'aile  gauche  de   l'ar- 
mée, à  la  position  importante  du 
Santon,  où  il  eut  à  combattre  con- 
tre cinq  à  six  mille  Russes.  Nom- 
mé général  de  brigade  à  la  suite 
des  deux  campagnes  de  Vienne,  il 
fut  chargé  du  commandement  de 
la  brigade  de  gauche  de  la  division 
Suchet  ;  c'est  à  sa  tête  qu'il  fit  la 
campagne  de  l'russe.  Le  10  octo- 
bre 1806,  à  l'afTaire  de  Saaifeld,  il 
contribua  à  la  défaite  de  l'avant- 
garde  prussienne  que -commandait 
le    jiiince    Louis   de    Prusse ,    et 
dont  les  résidtals  furent  si  heureux 
et  si  importans  pour  l'armée  fran- 
çaise. Le  14  du  même  mois  ,  à  la 
bataille  d'iéna,  la  brigade  du  gé- 
néral Vedel  fut  long-temps  tenue 
en  réserve  sous  les  ordres  immé- 
diat»  de  l'empereur,  qui   lui   fit 
renforcer  divers  points.  La  garde 
impériale,  que  commandait  le  ma- 
réchal duc  de  Dantzick,  étant  ve- 


Il 


VED 

nue  le  remplacer,  il  fut  charçré  d'en- 
lever de  vive  loice  la  position  de 
droile  de  renn< mi,  qui  taisail  une 
grande  résistance  conln'  les  ellorts 
du  duc  de  (>a.>liglioue.  Le  général 
Vfdel  parvint  à  s'emparer  de  la 
posiiioii,  tii  un  grand  nombre  de 
prisonniers,  et  poussa  le  même 
jour  ce  succès  jusqu'à  Weimar. 
Le  20décen;bre  i8i»6,  à  Taftaire  de 
Pultnc'k,  après  plusieurs  charges, 
ayant  enlevé,  à  la  lêtt  de  sa  briga 
de,  les  deux  premières  lignes  rus- 
ses et  une  batterie  de  douze  ca- 
nons, il  l'ut  grièvement  blt-ssé  d'u- 
ne halle  au  gt.nou  gauche,  et  ne  se 
détermina  à  quitter  le  champ  de 
bataille  qu'à  la  dernière  extrémi- 
té et  a[>rès  avoir  été  renversé  par 
un  biscayen.  Lncore  convales- 
cent, il  l'ut  nommé  gouvirneurdc 
l'île  de  la  Nogat,  et  de  la  place  de 
Marienbourg,  sur  la  Vi^lule.  Ten- 
dant les  canlounemens  que  piit 
l'armée  sur  la  l'assargc,  à  l'issue 
de  la  bataille  d'Ëylau,  la  manière 
avec  laquelle  il  parvint  à  approvi- 
sionner l'armée  dans  ce  moment 
dillicile,  celle  avec  laquelle  il  par- 
vint à  relever  les  fortilicalions  de 
l'ancienne  place  de  Marienbourg, 
et  surtout  la  tête  du  puni  en  avant 
de  la  Vislule,  lui  méritèrent  des  é- 
loges  réitérés,  et  lui  firent  conlier 
une  brigade  active,  avec  l'ordre 
spécial  d'organiser  et  de  comman- 
der par  intérim,  la  u°  division  du 
corps  de  réserve,  sous  les  ordres 
du  maréchal  Lannes,  dont  le  corps 
d'armée  contribiasi  efiicacement 
A  l'issue  de  la  campagne  de  1S07. 
C'est  à  la  tête  de  cette  division 
pour  entrer  en  ligne,  qu'il  quitta 
?on  gouvernement  et  Marien- 
bourg, le  4  juin  1807.  Le  9  du  mê- 
me mois,  il  se  trouva  en  l'ace  des 


VED 


icr. 


Russes  qu'il  poursuivit  ;\  la  gauche 
de  (iiiltslad;  c'est  là  qu'il  remit  lo 
commandement  au  général  Ver- 
dier.  arrivait  en  toute  diligence  de 
Maples.  Le  général  Vedel  conser- 
va sous  se*  ordres  le  comniande- 
ment  de  sa  brigade.  Le  10  juin,  à 
Heiisberg,  à  10  heures  du  soir,  il 
reçoit  l'ordre  de  marcher  sur  l'ar- 
mée russe,  en  cidonne  d'attaque 
et  à  la  baïoimelle;  il  l'exécute  a- 
vec  une  rare  lémérilé,  s'empare 
des  redoutes  opiniâlremenl  déten- 
dues toute  la  j(Hirnée  et  détermine 
les  Uusses  à  évacuer  Heiisberg 
dans  la  nuit.  Il  eut  à  regretter  bien 
des  braves  du  12*  léger  et  du  5* 
régiment  de  ligne;  mais  il  l'ut  cou- 
ronné par  un  brillant  succès  :  il 
l'ut  lui-même  blessé  deux  lois.  Le 
i.'l  juin,  à  la  bataille  de  Friedland, 
le  général  Vedel,  après  avoir  ren- 
forcé le  centre  de  la  ligne  de  ba- 
taille, se  transporta  à  la  droite  a- 
vec  un  régiment,  chargea  l'enne- 
mi,  revint  au  centre,  tint  la  ligue 
d'attaque  depuis  le  commence- 
ment de  la  journée  jusqu'à  onze 
heures  du  soir,  reçut  à  diverses  re- 
prises les  éliiges  directs  de  l'empe- 
reur, qui,  après  le  tr.iilé  de  Til- 
sitt,  le  nonxua  général  de  division. 
Les  généraux  Vedel  et  Rnlfin  fu- 
rent les  seuls  élevés  au  grade  de 
général  de  division  pend.mt  la 
brillarile  canipagnc  de  Prusse.  Le 
gémral  Vedel  reçut  l'ordre  d'aller 
prendre  le  coinmandetnent  de  la 
a'  division  du  -r  corps  de  la  Gi- 
ronde, qui  entra  au5?ilôl  en  Espa- 
gne. Le  'jG  juin  1808,  il  délit  qua- 
tre mille  llspagnols  retranchés 
dans  les  défilés  escarpés  de  la 
SitMTa-Moréna.  Le  19  juillet,  au 
combat  de  Uaylen,  il  enleva  trois 
canon»,  deux  drapeaux,  fil  qu'une 


lO 


\ED 


CA'.nls  [ifisoniiiers,  et  à  l'instant 
d'c'tîecluer  sa  jcuiclioi»  avec  la  i" 
division,  dont  il  n't;liiit  séparé  que 
par  le  corps  cntiiMiii  qu'il  venait  de 
haltre  ,  il  recul  l'ordre  inoui  de 
suspendre  toule  lio.slililé.  ^N'ayant 
connu  que  le  lendemain  la  véri- 
table situation  du  corps  français 
dont  il  était  séparé,  il  fit  tout  ce 
qui  dépendait  de  lui  pour  l'en  sor- 
tir, par  l'attaque  qu'il  méditait  et 
qu'il  reçut  encore  l'ordre  de  ne 
i>oint  tenter.  Voyant  que  toute 
hostilité  devenait  inutile,  et  vou- 
lant au  moins  mcttie  ses  troupes 
à  l'abri  d'être  tournées,  et  par  là 
couvrir  Madrid,  il  jiarvint  à  en 
imposer  aux  Espagnols,  au  point 
que,  se  tenant  toute  la  nuit  sous 
les  armes  dans  la  crainte  d'une  at- 
taque générale  de  sa  pari,  il  par- 
vint à  ciTectuer  sa  retraite,  et  par 
là  déroba  une  grande  journée  de 
marche.  C'est  dans  cette  nouvelle 
position  que  lui  parvînt  l'ordre 
réitéré  et  impératif",  d'arrêter  ses 
troupes,  attendu  qu'elles  étaient 
comprises  dans  un  traité  que  l'on 
assurait  conclu,  et  qui  néanmoins 
n'existait  point  encore.  Ayant  o- 
béi  comiue  d'ailleurs  les  lois  lui 
en  imposaient  l'obligation ,  il  tut 
destitué  le  i"mars  ji<i  9,  par  sui- 
te de  cette  inexplicable  affaire;  ce 
ne  lut  que  le  i"  mai  de  la  même 
année,  que  la  conduite  que  le  gé- 
néral Vedcl  aurait  (iû  tenir  en 
i8o8  lot  erJin  déterminée.  Dès 
18 15,  il  lut  honorablement  relevé 
delà  dertitutioti  q;ii  pesait  sur  lui, 
et  appelé  au  eouimandement  d'u- 
ne diusion  de  l'armée  de  réserve 
d'Italie.  En  1814?  détaché  avec 
4,000  hommes  de  l'aroiée  d'Ita- 
lie, pour  porter  des  renforts  à  cel- 
le de  Lyon,  il  défendit 'le  passage 


VEI 

de  la  Dnrance;  c'est  à  cette  occa- 
sion qu'il  eut  à  Roman  un  vif 
ctif^agement  avec  l'armée  autri- 
chienne. Après  le  traité  de  Paris, 
il  devint  inspecteur-général  d'ar- 
me dans  la  8*  division  militaire; 
et  en  i8i5,  par  suite  d'un  nou- 
veau travail  ministériel,  il  fut 
nommé  au  connnandement  de  lu 
i4'  division  militaire,  2'  subdivi- 
sion. Il  commanda  toute  la  divi- 
sion jusqu'en  juillet,  où  il  fut  rem- 
placé :  c'est  depuis  cette  époque 
que  le  général  Vedel  est  en  dis- 
ponibilité. Cet  officier- gêné  rai , 
nommé  comte  de  l'empire  à  ta 
formation  des  majorais,  a  obtenu 
son  avancement  sur  le  champ 
de  bataille  ,  par  suite  de  ses  servi- 
ces, et  de  nombreuses  et  graves 
blessures. 

\  EIMARS  (  Loève),  né  à  Paris, 
en  1709,  entra  de  bonne  heure 
dans  un  des  lycées  de  celte  ville, 
et  s'y  appliqua  spécialement  à 
l'étude  des  mathématiques  ,  qui 
devaient  lui  ouvrir  les  portes  de 
l'école  polytechnique.  Les  événe- 
mens  politiques  de  1814  fct  de 
1818  changèrent  la  direction  de  ses 
•idées,  et  tandis  que  les  armées  des 
puissances  étrangères  occupaient 
le  territoire  français,  il  parcourait 
le  nord  de  l'Allemagne,  une  partie 
du  Daneniarck  et  de  la  Pologne. 
De  retour  à  Paris,  il  y  fut  nommé 
élève  <le  la  marine  ;  mais  il  renon- 
ça bientôt  à  cet  emploi,  et  alla  vi 
siter  le  midi  de  la  France  et  l'An- 
gleterre. Il  s'était  rendu  fan)ilicr 
les  idiôn>es  du  nord  de  la  Grande- 
Bretagne  ,  et  avait  mis  à  profit 
son  séjour  dans  les  universités  ; 
les  travaux  littéraires  devinrent 
son  occupation  exclusive.  M. 
Loève  Veimars  a  coopéré  à  la  ré- 


YEN 

daclion  de  plusieurs  [ournanx,  et 
a  été  l'un  des  principaux  rédac- 
teurs de  V Album,  où  se*  article? 
furent  remarqués.  Il  était,  il  y  a 
quelques  années  ,  le  plus  jeune 
des  cotlahoraleurs  de  M.  Millin  , 
fondateur  du  Magasin  encyclopè- 
dique ;  il  est  aujourd'hui  l'un  des 
écrivains  de  la  Revue  encyclopédi- 
que, où  il  rédige  les  articles  de 
littérature  étrangère.  Parmi  les 
ouvrages  qu'il  a  publiés  ,  on  a  dis- 
tingué les  Manteaux,  nouvelles; 
Ja  traduction  des  Mélanges  lit- 
téraires de  JVielands,  VHisloirc 
des  tribunaux  secrets  dans  te  nord 
de  l'Allemagne,  et  ime  Chrono- 
logie universelle  qui  fait  partie  de 
la  Bibliothèque  du  19'  siècle.  On 
sait  qu'il  se  dispose  à  publier  une 
histoire  des  littératures  ancien- 
nes, allemande  et  du  u^oyen  âge, 
et  un  recueil  de  ballades  anglaises 
et  écossaises. 

VENAILLE  (N.),  membre  de 
la  convention  nationale,  substitut 
du  procui-eur-inipérial  de  Romo- 
ranlin,  etc. ,  adopta  avec  cbaleur 
\es  principes  de  la  révolution  , 
occupa  d'abord  plusieurs  fonc- 
tions municipales  ,  et  fut  ensuite 
nommé,  au  mois  de  septembre 
1792  ,  par  le  déparlement  de 
Loir-et-Cher,  député  ù  la  con- 
vention nationale.  Dans  le  procès 
du  roi,  il  vota  avec  la  majorité. 
A  la  fin  de  la  session,  il  rentra 
dans  ses  foyers,  où  bientôt  il  rem- 
plit les  fonctions  de  commissaire 
du  directoire-exécutif;  il  les  perdit 
par  l'efffît  de  la  révolution  du  18 
brumaire  an  8  (9  novembre  1799); 
mais,  sons  l'empire,  il  fui  nom- 
mé stdjslitul  du  procureur-iu)pé- 
rial  au  tribunal  de  première  ins- 
tance de  Romoraulin,   fondions 


YEN 


iu:> 


qu'il  occupait  encore  à  rcj)oqne 
des  événemens  politiques  de  1 8 1  /j; 
il  était  au'.*si  membre  du  conseil 
d'arrondissement.  M.  Venaille  a 
été  atteint  par  la  loi  du  12  janvier 
1816,  rendue  contre  les  coîiven- 
tionnels  dit  votans ,  et  a  élé  forcé 
de  s'expatrier;  il  s'est  réfugié  en 
Suisse,  où  on  le  croit  encore, 

YENTIMIGLIA  (Joskph),  «irin- 
ce  de  Belmonle,  gentilhomme  de 
la  chambre  du  roi  des  Deux-Sit^i- 
los,  chevalier  de  l'ordre  royal  de 
Saint-J.uivier ,  grand  d'Esp;ig;'.e 
de  1"  classe  ,  naquit  à  Palcrnic  en 
1767,  d'une  des  principales  famil- 
les de  Sicile.  Elevé  à  Kofne  au  col- 
lège Nazaréen,  il  eut  pour  iuslitii- 
teur  le  P.  iMichelangelo  iMonti , 
avec  lequel  il  resta  intimement 
lié  jusqu'à  sa  mort.  Dans  un  voya- 
ge qu'il  enlr<;pril  jeune  encore,  il 
visita  les  principaux  pays  de  l'Euro- 
pe, et  fit  \n\  louf»  séjour  en  Fran- 
ce, où  il  épousa  une  ilcinoisell»; 
Française  du  même  nom  que  lui. 
De  retour  en  Sicile,  il  enl  i)ienlôt 
occasion  de  donner  des  preuves 
de  son  [/alriolisme.  L'uni ver.'-ilé 
actuelle  de  Palerme  lui  doit  d'a- 
voir conservé  son  existence  ;  sans 
sa  persévérante  et  vigoureuse  op- 
position aux  prét(Mitions  des  Jé- 
suites, qui,  après  leur  rétablisse- 
ment en  Sicile,  firent  tous  leurs 
efforts  pour  s'en  emparer,  elle  au- 
rait fini  par  devenir  leurs  proie. 
Une  carrière  plus  vaste  vint  en- 
suite s'ouvrir  devant  lui,  et  il  eu" 
bientôt  à  lutter  contre  des  difficul- 
lés  plus  graves.  La  cour  de  INa- 
ples  s'était  reliièe  en  1806,  pour 
la  seconde  fois  en  Sicile,  se  flat- 
tant de  pouvoir  recouvrer  par  ses 
propres  forces  le  royaume  de  Na- 
ples.  Elle  avait  aussi  ù  entretenir 


i6C 


VKN 


uti  fjrand  nombre  d'ômigrés  na- 
jiolitains  (jui  l'.'ivîiient  buivi:*  i\  Pa- 
ïenne. Le  ^raud  besoin  d'iirgent 
lui  fil  convoquer,  en  1810,  le  par- 
lement pour  demander  de.»  subsi- 
des exlriiordinaiieîi.  Le  prince  de 
Beltnonte,  sourd  ù  toutes  les  sé- 
ductions, donna  en  cette  circons- 
tance l'exemple  jusqu'alors  incon- 
nu d'une  honoiable  et  ferme  ré- 
sistance aux  prétentions  immf>dé- 
rées  de  la  cour.  Le  parlement,  ra- 
nimé par  son  exemple,  soutint 
avec  vigueur  les  intérêts  de  la  na- 
tion. Cet  événenient  ne  fut  toute- 
fois que  l'avant-coureur  d'autres 
événemens  plus  remarquables  en- 
core. La  cour  n'ayant  pas  trouvé 
sufïïsansles  subsides  qui  lui  furent 
accordés,  prit  le  parti  d'imposer 
des  taxes  sans  l'intervention  du 
parlement.  C'est  au  prince  de  Bel- 
inonte  que  l'on  dut  alors  une  pro- 
testation que  la  plupart  des  ba- 
rons signèrent ,  et  qu'on  présen- 
ta en  181 1,  à  la  cour  de  la  part  du 
bras  baronal  dont  il  était  mem- 
bre (le  bras  baronal  était  une 
des  trois  brandies  dont  l'ancien 
parlement  de  Sicile  était  compo- 
sé; c'était  la  réuiiion  des  barons 
parlenientJiires  du  royaume).  La 
cour,  irritée  de  cette  résistance,  fit 
arrêter  le  19  juillet,  pendant  la 
nuit,  par  la  force  armée,  comme 
perlurbaieurs  de  la  trauquilUlè  pu- 
blique,  le  prince  de  Belmonle  et 
quatre  autres  barons,  le  prince  de 
Gastel-Nuovo,  le  prince  de  Villa- 
Franca,  le  prince  de  Aci  et  le  duc 
d'Augio.  Elle  les  fit  embarquer 
aussitôt,  et  fit  enfermer  le  prince 
.  de  Belmonte  dans  un  château  de 
l'ile  de  la  Favignana.  11  y  resta 
plusieurs  mois,  et  subit  pendant 
tout  ce  temps  toutes  les  rigueurs 


VEN 

d'un  emprisonnement  trè.«-sévè- 
rc.  Sa  santé  en  éproura  les  tris- 
tes effets  et  fut  sensiblement  alté- 
rée. Délivré  de  «-a  prison  par  l'in- 
tervcnlion  de  ia  Grande-Bretagne, 
il  fut  bientôt  après  nomtné  con- 
seiller et  secrélairt-d'élat  dans  le 
nouveau  ministère  qui  se  forma 
sous  l'influence  de  l'Angleterre , 
et  on  lui  donna  le  porlefeuilb;  des 
affaires  étrangères.  Ses  laleos  et 
ses  qualités  émincnfes  ne  tardè- 
rent pas  à  lui  gagner  la  confiance 
de  lord  W.  Bentinck,  alors  minis- 
tre plénipotentiaire  près  de  la 
cour  de  Sicile,  et  commandant 
des  forces  britanniques  dans  la 
Méditerranée.  Il  usa  du  crédit 
qu'il  avait  auprès  de  ce  ministre, 
pour  procurer  à  son  pays  de  nou- 
velles institutions.  Il  fut  puissam- 
ment secondé  dans  cette  opéra- 
tion par  M.  le  duc  d'Orléans,  qui 
appréciait  ses  lalens  et  lui  mon- 
trait beaucoup  de  considération. 
Une  constitution  qui  n'était  dans 
le  fond  que  l'ancienne  constitu- 
tion sicilienne,  modifiée  d'après 
les  nouveaux  besoins  de  la  socié- 
té et  modelée  sur  celle  d'Angle- 
terre, fut  discutée  on  1812,  pen- 
dant plusieurs  tnois,  par  le  parle- 
ment et  sanctionnée  par  le  roi.  Le 
prince  de  Belmonle  jou;i  un  grand 
rôle  dans  ces  événemen-^,  et  de- 
vint le  ressort  principal  de  toutes 
les  opérations  qui  se  firent  à  celte 
époque  en  Sicile.  Il  reçut  d.ins  ^ 
cette  occasion  une  lettre  très-flat- 
teuse de  lord  Ca*llereagh ,  dans 
laquelle  ce  ministre  en  fai>ant  son 
éloge,  lui  témoignait,  de  la  part 
du  prince-régenl  d'Angleterre  (au- 
jourd'hui Georges  IV),  sa  satisfac- 
tion pour  les  services  qu'il  avait 
rendus  à  son  pays.  Quoique  doué 


VEN 

cl'un    courage    extraordinaire    et 
d'un  caractère  fort  cl  prononcé, 
soit  qu'il  ne  fût  pas  encore  l'ait  aux 
agitations  des  grandes  asseinblécs, 
soit  que  son  esprit  cotninençâl  dé- 
jà à  ressentir  les  effets  de  l'alltra- 
tion  de  sa  santé,  au  lieu  de  résis- 
ter  aux  attaques  du    parti   anti- 
constitutionnel qui  se  forma  dans 
les  deux  chambres  du  parlement, 
et  qui  se  croyait  fort  de  la  protec- 
tion du  roi,   il  se  laissa  rebuter 
par  les  didicullés,  cl  prit  le  timi- 
de parti  de  se  retirer  du  ministè- 
re cl  du  parlement.  Son  exemple 
fut  suivi  par  ses  collègues  et  par 
SCS  amis,  qui  cédèrenl  le  champ  à 
leurs  adversaires,  et  devint  ainsi 
très-funeste  A  la  cause  de  la  liber- 
té. Il  revint  quelque  temps  après 
occuper  une  place  dans  le  conseil- 
d'état,  mais  il  était  trop  tard;  il 
eut  de  plus  à  lutter  avec  des  obs- 
tacles  provenant   d'une    division 
qui  malheureusement   avait  déjà 
pris  naissance  parmi  les  partisans 
mêmes   de    la    constitution.    Les 
grands  événemens  du  continent, 
en   »8i4»  vinrent  bientôt  porter 
le  dernier  coup  à  la  cause  qu'il  a- 
vail  embrassée.   L'Angleterre  re- 
tira sou  armée  de  la  Sicile,  et  l'ap- 
pui qu'elle  av.'iit  jusqu'alors  don- 
né à  la  constitution,  qui  ainsi  que 
ses    partisans    fui   abandonnée   à 
son  sort.  Le  roi  reprit  le  gouver- 
nement de  l'île,  et  un   nouveau 
ministère  se  forma.  Le  prince  de 
Btlmonle  ainsi  que  ses  collègues 
furent  éloignés  du  conseil-d'état, 
et  il  se  vit  exposé  aux  insultes  de 
sesadversaires.  qui,  enivrés  par  le 
succès,   se  livrèrent  A  des  excès 
contre  lui  et  contre  ses  amis.  Il  eut 
encore  le  tort  peut-être  «le  déses- 
pérer trop  tôt  des  affaires  de  son 


VER 


167 


pays,  et  tout  malade  qu'il  était,  il 
conçut  le  projet  de  se  rendre  à  Pa- 
ris, dans  l'intention  d'y  rejoindre 
lord  Castlereagh,  qui  allait  assis- 
ter au  congrès  de  Vienne,  et  d'a- 
voir avec  lui  une  conférence  sur 
le    sort    de   la    Sicile.   En    juillet 
1814,  il  s'embarqua  pour  Marseil- 
les,  dans   le  même  vaisseau  qui 
conduisait   en    France  M.   le  duo 
d'Orléans  cl  loiile  sa  famille.    Il 
souQVit  beaucoup  dans  ce  trajet, 
et  il  arriva  très-malade  à  Marseil- 
le. Le  voyage  qu'il  entreprit  aus- 
silôl    pour   Paris,    malgré    l'avis 
contraire  des  médecins  et  de  ses 
amis,  acheva  sa  perle.  Tous  les  ef- 
forts  des   plus   hdbiles   médecins 
qui  le  soignèrent  à  son  arrivée,  et 
tous  les  soins  que  M.  le  duc  d'Or- 
léans lui  prodigua  devinrent  inu- 
tiles.  Il  mourut  au  mois  d'octo- 
bre de  la  même  année  à  l'Age  de 
47  ans.   Une  superbe  maison  de 
campagne,    et    un    btîau    jardin 
qu'il    avait    fait    bâtir    sur    une 
colline,   près  du   môle  rie  Paler- 
me,  où  il  n'y  avait  prest|iic  point 
de  Ir.ices  de  végétalion,  atmon- 
cent  aux  voyageurs  qui  arrivent 
dans  ce  port  le  goût  et  la  magnifi- 
cence du  prince  de  Belmonte.  Le 
legs  qu'il  fit  à  l'université  de  Paler- 
me  ,  d'une  superbe  collection  de 
tabicauxetde  gravures  anciennes, 
fut  le  dernier  trait  de  son  patrio- 
tisme et   de  stm  amour  pour  les 
beaiix-arls.  Mais  c'est  surtout  par 
la  i>art  principale  qu'il  prit  à  la 
constitution  de  son  pays  en  1812, 
que  le  prince  de   Belmontc  sera 
toujours  regretté  des  Siciliens,  et 
de    tous   Ceux   qui    chérissent   lu 
cause  de  la  liberté  <les  peuples. 

VLRDIER  (Jean-Antoine,  com- 
te), lieulenant-général  en  retraite, 


iGS 


VER 


{ïiand'croix  de  la  légion-d'hon- 
neur, chevalier  de  Sainl-Louis, 
membre  de  la  chambre  des  pairs 
d(!  Napoléon,  est  cré  à  Toulouse, 
département  de  la  Hanle-Garon- 
ne  ,  le  i"  mai  i  7G7  ,  d'une  famille 
Jionorahle  de  plébéiens.  II  eulra 
an  service  en  1785,  et  ne  fut 
nommé  sous -lieutenant  qu'en 
1792.  La  révolution,  qui  ne  vou- 
lait dans  ses  braves  que  destalens 
«t  l'amour  de  la  pairie,  vit  croître 
rapidement  la  fortune  militaire  de 
M.  Verdier.  En  i7<)4>  il  t^'*''''^  f'^" 
jiilaine  des  volontaires  de  la  Hante- 
(Jaronne,  et  fut  choisi,  peu  de 
lomp«  après,  par  le  général  Au- 
tçereau  pour  aide-de-camp.  Il  re- 
cul de  l'emploi  à  l'armé'.;  des  Py- 
lénées-Orientales  ;  et,  à  la  lêle 
d'un  bataillon  des  chasseurs  de  la 
Drôme,  il  s'empara  du  camp  re- 
tranché de  Liers,  que  défendaient 
4.000  Espagnols  et  80  bouches  à 
l'eu.  Ce  beau  fait  d'armes  décida 
la  reddition  de  Figuières,  et  valut 
au  capitaine  Verdier,  en  170^5  '^ 
grade  d'adjudanl-général,  chef  de 
};rigade.  Il  passa  A  l'armée  d'Ita- 
lie ,  et  reçut  sur  le  champ  de  ba- 
taille de  Castiglione  ,  le  grade  de 
f^énéral  de  brigade.  Constamm(;nl 
on  activité  jusqu'à  la  jiaix  de 
Léoben,  il  fit  partie  de  l'expédi- 
lion  d'Egypte,  où  il  commanda 
les  grenadiers  et  les  éclaireurs  de 
la  division  Kléber ,  réunis  sous 
Suint-Jean-d'Acre.  Commandant 
de  la  province  de  Damietle  ,  il 
jtiarcha,  avec  seulement  1,000 
hommes,  contre  8.000  Turcs  et 
Anglais  sous  ies  ordres  de  sir  Sid- 
ney  Smith  [roy.  Smith),  et  défit 
complètement  ce  corps  ;  les  deux 
tiers  furent  tués,  et  le  reste  fut 
pris  avec  10  pièces  de  canon.  Un 


VER 

sabre  d'honneur  lui  fut  décerna 
en  récompense.  Sa  belle  conduite 
au  siège  du  Caire  le  fit  élever  au 
grade  de  général  de  division.  Rap- 
pelé d'Egypte  avant  l'évacuation , 
et  envoyé  en  Italie,  il  cominand.i 
une  division  sons  les  ordres  de 
Murât;  se  rendit  en  Etrurie  avec 
le  général  Gouvion-Saint-Cyr.  et 
occupa  la  Fouille,  La  reprise  des 
hostilités  avec  l'Autriche  fit  passer 
le  général  Verdier  sous  le  com- 
mandement de  iVlasséna.  Envoyé 
en  Toscane,  puis  dans  le  royaume 
de  Naples,  il  aida  le  général  Ré- 
gnier à  chasser  I  armée  napoli- 
taine jusqu'en  Sicile.  Le  général 
Verdier,  employé  à  la  grande- 
armée  ,  se  distingua ,  i\  peine  ar- 
rivé sur  le  champ  de  bataille,  à 
Heilsberg,  et  ensuite  à  FriedIand. 
Par  suite  de  la  paix  de  Tilsilt,  it 
reçut  une  autre  destination  ;  il  eut 
ordre  de  conduire  et  de  comman- 
der un  corps  d'armée  en  Espagne, 
Il  soutint  sa  réputation  au  combat 
de  Logrogno  et  au  premier  siège 
de  Sarragosse,  place  dont  il  s'é- 
tait emparée  en  presque  totalité  , 
lorsque,  par  suite  de  la  retraite  de 
Madrid  ,  il  eut  ordre  de  cesser  ses 
opérations.  A  la  reprise  de  l'offen- 
sive, il  entra  d.ms  Madrid,  fit  le 
siège  de  Cirone  ,  et  remit  son 
commandement  au  maréchal  Au- 
gerean  ,  gouverneur  de  la  Catalo- 
gne. Le  général  Verdier  fil  partie, 
sous  le  maréchal  Oudinot,  de  l'ex- 
pédition de  Russie  en  1812;  il  se 
distingua  de  nouveau  sur  la  Dris- 
sa ,  et  fut  grièvement  blessé  de- 
vant Polo>k  (les  iC)  et  17  août 
1812):  cette  blessure  le  força  de 
rentrer  en  France.  En  i8i3,  il 
commanda  en  second ,  sous  les 
ordres  du  vice-roi  d'Italie  [x^oyer 


VER 

Ceadharnais  Eugène  ),  le  second 
rorps  (ie  l'année  IViinco-italienne. 
La  heile  pari  qu'il  prit  à  la  I)a- 
taille  du  Rlincio  le  fit  créer 
grand'croix  de  la  légion-d'hon- 
neiir;  après  la  restauration,  en 
1814  »  il  reçut  du  roi  la  croix  de 
Saint-Louis.  Pendant  les  cent 
jours,  en  181 5,  Napoléon  le  noni- 
nia  membre  de  la  chambre  des 
pairs  qu'il  venait  d'inslilut-r .  et 
lui  confia  le  commandement  de 
la  8*  division  à  Marseille.  La 
nouvelle  des  désa«.|res  de  Wa- 
terloo ayant  fait  arborer  la  co- 
carde hlaiitlie  à  Marseille,  le  gé- 
néral Verdier,  voulant  éviter  de 
combattre  ses  conciloyeus,  fil  sor- 
tir ses  trouj)es  la  nuit,  et  se  porta 
sur  Toulon,  où  l'apparition  d'une 
flotte  anglaise  rendait  sa  présence 
nécessaire,  A  la  seconde  restau- 
ration, il  a  été  mis  à  la  retraite. 
Il  jouit,  au  sein  de  sa  famille,  de 
la  considération  que  lui  ont  mé- 
ritée ses  lalens,  la  belle  p;:rl  de 
gloire  qu'il  a  arquise  dans  sa  lon- 
gue carrière  militaire,  enfin  la  sa- 
gesse et  la  modération  de  ses  prin- 
cipes. 

VERDIER  (Jean),  né  en  1-55, 
à  la  Ferté-Bernard ,  département 
de  la  Sarlhe.  Successivement  avo- 
rtât au  parlement,  docteur  en  mé- 
decine et  instituteur,  il  fonda  à  l'a- 
ris,  vers  1770,  une  maison  de 
santé  pour  le  redressetncjit  des 
difformités,  dont  il  fil  bieiilôl  une 
njaison   «l'éducation    nby.^ique   et 

»    morale  ,  établie  sur  un  plan  ,  uni- 
que alors    par    son    étendue,    et 
dont  le  siucè>«  était  aussi  brillant 
^     qu'il  paraissait  assuré.   Une  opé- 
m    ration    financière    du    comlc    de 
jf     Buffon ,  intendant  du  Jardin  du 
Roi,  qui  aciiela  et  revendit  au  roi, 


VER 


iGp 


pour  ftre  réuni  à  ce  jardin  ,  le  ter- 
rain dans  lequel  se  trouvait  com- 
pris l'hôtel  Magny,  o\\  était  éta- 
blie la  maison  d'éducation  de  Jean 
Verdier,  commença  la  ruine  de 
l'établissement  et  de  celui  qui 
l'avait  fondé  ,  ruine  que  vint  con- 
sommer la  révolution.  Membre 
de  la  municipalité  de  Paris  au  10 
aoftt  1792,  Jean  Verdii;rfut,  pen- 
dant long-temps,  chargé  de  veil- 
ler et  de  satisfaire  aux  besoins 
de  Louis  XVI  à  l'époque  de  sa 
détention  au  Temple,  et  ce  prin- 
ce s'ettlretint  plusieurs  fois  avec 
lui  de  son  établissement  et  de  la 
spoliation  de  Buffon  à  son  é- 
gard,  sur  laquelle  il  avouait  avoir 
élé  trompé  alors.  En  1794,  il  fut 
envoyé,  comme  médecin  ,  par  le 
n:inislre  de  l'intérieur,  à  Com- 
picgnc,  qui  était  aftligée,  depuis 

I  5  mois  ,  d'une  maladie  épidémi- 
quc  à  laquelle  ses  soins  apportè- 
rent le  remède  et  la  terminaison, 

II  fut  moins, heureux  à  Senlis  ,  où 
il  fut  arrêté  en  revenant  de  Com- 
piègne  ,  p<Mir  donner  ses  soins 
dans  une  circonstance  analogue  , 
les  médecins  de  l'hôpital  militaire 
n'ayant  point  voulu  suivre  ses 
conseils  pour  combattre  la  fièvre 
putride  qui  y  régnait,  et  la  mé- 
thode de  Pringle  qu'ils  suivaient 
y  ayant  fait  beaucoup  de  victimes. 
Dans  la  même  année,  il  fut  nom- 
mé par  le  district  de  la  Ferlé-Bcr- 
nai'd,  lieu  de  sa  naissance,  l'un 
des  élèves  de  cette  école  normale, 
fruit  d'une  grande  pensée,  dont 
l'existence  fut  aussi  courte  que  son 
illustration  fut  grande;  niais  dont, 
ainsi  qu'il  arrive  souvent  en  Fran- 
ce, on  lira  trop  peu  de  parti; 
école  dont  b-s  «lisciples  étaient, 
après  les  maître*,  l'élite  des  géni 


170 


VER 


instruits,  et  df»nt  quelques-uns 
auraient  pu  se  placer  sur  la  même 
ligne  que  Itiirs  ni-uCes.seurj.  De- 
puis cotte  époque  ,  il  professa 
pendiint  quelque  temps  la  méde- 
cine légale  ù  V Académie  de  législa- 
tion ,  établissement  fondé  sous  le 
consulat,  par  un  de  nos  plus  cé- 
lèbres jurisconsultes,  im  pair  de 
France,  connu  de  tout  le  monde 
parsoiiamourdubien  public.  Jean 
Verdier  a  publié  une  foule  d'ou- 
vrages de  médecine,  d'édiîcalion, 
de  législation,  de  philologie  et 
de  grammaire.  Les  principaux 
sont.  Ouvrages  de  médecine  :  \° 
Journal  de  Médecine  populaire, 
d'éducation  et  d'économie,  8  ca- 
hiers in-iS",  formant  2  vol.  ,  an  9 
(iHoo);  2°  lu  Cranomancie  du 
docteur  Gall,  anéantie  au  moyen 
de  l'anatomie  et  de  la  physiologie 
de  l'âme,  brochure  in-8";  5°  Plan 
d'Osthautroj»ie  ,  nouvel  art  de 
traiter  les  diirormilés  organiques, 
par  des  exercices  appropriés  et  di; 
nouvelles  machines  élastiques  et 
mobiles,  etc.  ;  5°  Introiluclion  à 
la  connaissance  des  plantes  ,  dont 
la  dernière  édition  se  trouve  en 
tête  de  l'almanach  du  Bon  Jar- 
dinier, pour  l'an  9  (1802)  ;  5°  Ca- 
lendrier des  amateurs  de  la  vie  et 
de  l'humanité,  ou  Avis  sur  l'As- 
physiatrique ,  la  médecine  des 
asphyxiés  ou  trépassés,  etc.  ,  in- 
12,  1816;  ouvrage  présenté  au 
roi.  Ouvrages  sur  Céducation;  6" 
Cours  d'éducation  physique  ,  mo- 
rale, religieuse  ou  littéraire,  ou 
plan  et  système  d'éducation,  a- 
dopté  par  l'auteur  dans  sa  maison  ; 
ouvrage  aussi  curieux  qu'impor- 
tant, qui  arma  contre  lui  l'en- 
vie, et  qui  lui  valut,  de  la  part 
des  corps  privilégiés,  un  procès 


VER 

au  parlement,  qu'il  gagna  hono- 
rablement. Ce  procès  donna  lien 
à  la  publication  .  que  fit  Jean 
Verdier,  de  l'o.ivrage  suivant  : 
7"  iMénioire  historique  et  poli- 
tique sur  les  fonctions  et  les 
droits  rts[)cciifs  des  trois  classes 
d'iiistituieui.-.  de  la  jeunesse,  éta- 
blis en  France  pour  les  trois  or- 
dres de  l'état,  avec  les  preuves 
des  plans  d'éducation  proposés, 
exé(;utéset  perieclionués  par  l'au- 
teur, in- 12;  8"  Recueil  de  mé- 
moires et  d'observations  sur  Irf 
pcrffclihililé  de  l'homme,  6  re- 
cueils in-!2,  formant  2  vol.  ;  9* 
Discours  sur  l'éducation  natio- 
nale, physique  et  morale  des  deux 
sexes  ,  in-S"»  1792-  Ouvrages  de 
législation  :  lo*  La  Jurisprudence 
de  1.1  médecine  en  France ,  com- 
prenant un  eS'ai  sur  cette  Juris- 
prudence, i  vol.;  la  Jurispru- 
dence générale  de  la  médecine,  a 
vol.  ;  la  Jurisprudence  particu- 
lière de  la  chirurgie  ,  2  vol.  ;  en 
tout  5  vol.  in- 12,  17G3  et  i704. 
Des  obstacles  de  la  part  de  l'au- 
torité s'opposèrent  à  la  publica- 
tion des  Jurisprudences  particu- 
lières de  la  médecine  et  de  la  phar- 
macie, dont  l'auteur  avait  réuni 
les  inatériaux.  Ouvrages  de  philo- 
logie et  grammaire  :  11"  Tableau 
analytique  de  la  Grammaire  géné- 
rale ,  appliquée  aux  langues  sa- 
vantes, iu-12.  iHoo:  12"  l'Art 
d'enseigneretd'étudier  les  langues 
française  et  latine,  ensemble  ou 
séparément,  par  l'analyse  etla  syn- 
thèse ,  etc.,  in-12;  \o°  Système 
de  la  langue  latine,  pour  en  réta- 
blir l'usage  particulier  par  la  dou- 
ble traduction,  in-12;  i4°  l'Art 
de  discourir  grammaticalement, 
ou  Grammaire  générale  du  dis- 


VER 

cours  purement  prainmatical,  in- 
»2;  i5*  Recueil  des  mots  varia- 
bles ,  français  et  l;itins,  in-12  ;  i6* 
l'Art  poélifjiie  d'Hoiace,  corrige 
dans  120  «endroits  du  texte.  av#c 
une  nuuvelle  traduction  ,  de-*  ana- 
lyses graiiiinalicales,  logiquts  et 
poétiques,  et  des  critiques  de  la 
plupart  des  éditions,  etc.  ,  dédié 
au  comte  Fourcrcy,  in- 12,  1804; 
17°  Poënie  séculaire  d'Hor.tce, 
angmefité  d'une  strophe,  corrigé 
d'après  le  texte,  traduit  en  fran- 
çais et  comparé,  dan'^  une,de  .>-es 
odes,  avec  le  sublime  eau  -que 
de  Moïse  .'\ir  le  pas«:ige  de  la  mer 
Riinge,  aussi  traduit  «ur  le  texte 
hébreu.  Ce  savant  laborieux  avait 
fait ,  sur  les  aphurismes  dHipjx»- 
crale,  un  travail  analytique  mui- 
bl.Tlile  à  celui  sur  l'art  poétique 
d'iJorace ,  ainsi  que  des  taldeaux 
analyti({nes  et  synthétiques  île 
rentendemenl  el  de  l'esprit  hu- 
mains, d:ins  lesquels  il  avait  pris 
pour  hae  de  sa  critique  Con- 
dillac  et  (-h.  Bonnet,  l-ne  loule 
d'.Mitres  recher<hes  savantes  a- 
vaient  f-ccu;  é  si  l;d)oriense  car- 
rière, et  «lans  les  dernière!-  années 
de  sa  vie  .  rherrliant  à  concilier  la 
chronol'.gii-  de  la  («enèse  avec  les 
systèmes  chronologiques  des  na- 
tur:>!istes,  il  avait  décriuvert  une 
foule  d'«  rreurs  dans  la  traduction 
du  livre  .'•acre,  et  l'existence  de 
deux  personnages  du  no  m  d'Adam, 
à  deux  époqiuîs  difCérenles ,  d'où 
naii'sei'l  les  erreurs  et  l«:s  discor- 
dances entre  les  système^  religieux 
et  philosophi<pies;  malheureusc^- 
mcnt  ce»  recherches  seront  per- 
dues. Jean  Verdier  mourut  à  Paris, 
le  6  inin  1820,  dans  sa  8G'  année. 
VhRDIER-IIELKilN  (Jean- 
Fbançois  ) ,  docteur  en  médecine, 


VER 


'7» 


né  à  Paris  le  i4  septembre  1767  , 
fds  du  précédent,  fut  quelque 
temps  collaborateur  de  son  père 
dans  sa  maison  <l'éducation  ,  dans 
la  publication  des  articles  de  ju- 
risprudence de  la  médecine  du 
Dictionnaire  de  médecine,  de  VEn- 
cyclopedie  méthodique ,  et  dan» 
celle  de  son  Journal  de  Médecine 
populaire.  Après  avoir  été  em- 
ployé comme  chirurgien  des  ar- 
mées de  la  république,  il  exerça 
la  uu'decine  à  Paris,  où  il  a  pu- 
blié :  1"  Discouru  sur  le  devoir  et  le 
besoin  d^ aimer ,  avec  une  épigra- 
phe tirée  de  tsaiut-Péravi ,  Paris, 
in-12,  an  8  (1800).  Reçu  maîtrc- 
ès-art*  dans  l'ancienneuniversité, 
et  ba'.'helier  en  ii)édecine,  Ver- 
dier-Huerlin  prit  le  titre  de  doc- 
teur diins  les  nouvelles  écoles  en 
l'an  i'>.  (180/1),  et  y  soutint  une 
thèse  médicale  sur  l'allaitentent  et 
i'éducalion  physique  des  enfans. 
iW  sujet  n'était  pas  neuf  sans 
dotite  ;  mais  l'auteur  sut  le  n  ndre 
encore  iotére>>sant,  etprouvji  dans 
cet  ouvrage  qu'il  s'était  f>ailicu- 
liéremeiil  occupé  de  la  médecine 
infanliie ,  trop  négligée  par  la 
plupart  des  médecins.  Sa  lhè>*e, 
proprement  dite,  avait  pour  litre  : 
2  '  Essai  aphoristique  sur  l'allaite- 
ment. Il  Va  p«d)lia  avec,  3"  un  dis- 
cours  sur  l'ullailemenl  et  l'éduca- 
tion physique  des  enfans,  dan«>  le- 
qu<  I  il  développe  son  sujet  en 
médecin,  en  homme  de  bien  et 
eu  littérateur.  A  cette  époque,  le 
fœtus  trouvé  dans  le  corps  d'un 
jeune  garçon  de  Verneuil  faisait 
beaucou|)  de  bruit  |>ar  la  sing(tla> 
rite  du  fait;  Vcrdier-IIeurtin  pu- 
blia, annexée  aux  deux  mor(  eaux 
précédrns  ,  4*  '""^  Dissertation 
sur  le  fœtus  trouvé  à  Verneuil^  dans 


17»  VER 

e  corps  (fan  enfant  mâle,  avec 
une  gravure  représentant  le  fœtus 
dans  la  même  position  qu'il  y  oc- 
cupait, avec  les  mêmes  dimen- 
sions et  d'après  nature.  Le  volu- 
me contenant  ces  trois  morceaux 
forme  un  in-S"  de  211  pages.  li 
y  avait  plus  de  trois  ans  que  le 
docteur  Verdier- Heurtin  était 
chargé  de  constater  les  décès  dans 
un  des  arrondissemens  de  Paris, 
lorsque  celte  place,  enviée  de- 
puis long-temps,  toute  tnodique 
qu'en  fussent  les  rétributions,  lui 
fut  ôtée  pour  la  confier  à  un  soi- 
disant  officier  de  santé.  Cette  in- 
justice lui  donna  lieu  de  publier  , 
5°  Mémoire  et  réclamation  présentés 
à  M.  Froc/iot,  préfet  de  In  Seine, 
etc.,  Paris,  an  i3  (i8o5),in-4° 
de  12  pages.  Plus  tard,  l'auteur 
fut  rétabli  dans  les  mêmes  fonc- 
tions, mais"  dans  un  autre  arron- 
dissement. Vcrdier-Heuitin  mou- 
rut presque  subitement ,  le  24 
mai  i8'25.  Agé  de  55  ans  et  demi, 
des  suites  d'une  maladie  de  foie. 

VERDIER-DU-CLOS  (  Tho- 
mas-Desis)  frère  et  oncle  des  pré- 
cédens,  naquit  à  la  Ferlé-Bernard, 
ïe  5o  septembre  i^/i-l-  Waîlre-ès- 
arfs  de  l'université  de  Paris,  maî- 
tre en  chirurgie  cl  docteur-méde- 
cin de  l'université  do  Nanci,  il 
avait  étudié  la  chirurgie  sous  son 
père  et  sous  son  frère  aîné,  Jean 
Verdier,  puis  sous  Ant.  Petit,  à 
riIôlel-Dieu  de  Paris.  Il  servit 
comme  chirurgien  des  armées  en 
Corse,  exerça  la  médecine  et  la 
chirurgie  à  la  Ferlé-Bevnard ,  sa 
ville  natale,  où  il  fut  médecin  de 
riIôtel-Dieu  depuis  1788  jusqu'à 
sa  mort,  arrivée  le  9  février  18  i5. 
D'une  activité  et  d'une  philan- 
tropig  infatigables,  il  fut  cons- 
tamment appelé,  soit  seul,  soil  en 


VER 

chef,  avec  ses  confrères ,  au  trai- 
tement de  plusieurs  épidémies, 
sur  lesquelles  il  réunit  toutes  les 
observations  médicales  de  sa  pra- 
ti»^e.  ce  qui  lui  fournit  plusieurs 
mémoires  intéressans  qu'il  adres- 
sa aux  autorités  publiques  et  à 
l'ancienne  société  royale  de  mé- 
decine, qui  le  nomma  l'un  de  ses 
associés  dès  l'année  17S5.  Cette 
marque  d'estime  pour  ses  travaux 
ne  fit  que  stimuler  son  zèle  ,  et  en 
1789,  il  avait  fourni  treize  mé- 
moires il  cette  société,  tant  sur 
les  épidémies  que  sur  deux  opé- 
rations de  la  symphise,  qu'il  avait 
heureusement  exécutées,  ainsi 
que  sur  divers  autres  sujets.  Dif- 
férens  travaux  d'utilité  publique 
médicale  l'ont  occupé  pendant  sa 
longue  pratique,  et  il  en  adressa 
les  résultats,  soil  au  comité  de 
santé  de  l'assejTibléc constituante, 
soit  à  l'administration  départe- 
mentale de  la  Sarlhe.  Les  princi- 
paux sont  ;  1°  Vues  générales  sur 
rétablissement  d'un  hôpital  civil 
dans  chaque  district,  pour  les  ma- 
lades ,  les  vieillards  infirmes,  les 
femmes  en  couche  et  les  enfans  na- 
turels; 2°  sur  les  devoirs  des  méde- 
cins chargés  du  traitement  de«  ma- 
ladies épidémiques;  5"  sur  rétablis- 
sement d'un  bur«\iu  ,  pour  les  en- 
fans  naturels,  dans  chaque  district, 
avec  un  projet  de  règlement  pour 
l'administration  de  ce  bureau. 
Enfin  ,  comme  médecin,  car  nous 
avons  ensuite  à  considérer  le  fonc- 
tionnaire public,  il  a  laissé  :  i* 
Breviarium  mer/ici  clinici  seu  fas- 
ciculus  quaramlum  nationum  ad 
médium  clinium  utilium  ,  ex  di- 
rersift  autorihus  selectarum;  2"  His- 
toire d'une  symphysèotomie  prati- 
quée arec  succès  pour  la  tnére  et 
pour  l'enfant,  le  25  janvier  1786, 


I 

I 


VER 

par  Verdier-du-Clos^  doclenr , 
«tf.  Le  iMans,  Munnojer,  Paris, 
Didot  el  Méquij^non,  1787,  in-S". 
Dès  l'aurore  de  la  révolu  lion,  les 
compatriotes  de  Verdier-du-Clos 
lui  confièrent  les  principales  ionc- 
lions  publiques  de  leur  ville,  et 
lors  de  la  convocation  des  étals- 
généraux  ,  le  cahier  qu'il  avait  ré- 
digé ,  et  dans  lequel  il  demandait, 
entre  autres  choses  ,  la  responsa- 
ifililé  des  ministres  et  la  fixation  de 
la  liste  civile ,  fut  adopté  par  ses 
concitoyens  comme  l'expression 
de  leur  vœu,  et  il  eut  la  satisfac- 
tion de  voiries  idées  qu'il  avait  é- 
niises  dans  ce  cahier  ,  adoptées 
par  l'assemblée  nationale  ,  et  de- 
venir la  base  du  droit  public  des 
Français,  droit  public  qui  n'a 
cessé  d'être  reconnu,  au  moins  en 
principe,  depuis  celle  époque  jus- 
qu'ii  l'établissement  de  la  charte 
conslituliotmelle  inclusivement. 
Nommé  maire  de  la  ville  de  la 
Ferlé-Bernard  en  1787,  el  suc- 
cessivement juge-de-paix,  juge 
au  tribunal  civil  du  district,  juge 
au  tribunal  criminel  du  départe- 
ment de  la  Sarlhe  ;  puis  ,  en  celte 
qualité,  choisi  pour  directeur  du 
jury  d'accusation  qui  existait  a- 
lors,  il  peut  être  curieux  de  lire 
ce  que  Verdier-du-Clos  disait  aux 
jurés  d'acciisatiun  qu'il  élait  char- 
gé de  diriger,  et  de  le  comparer 
avec  ce  qui  se  passe,  actuellement 
que  nous  sommes  privés  de  cette 
iuslitulion  ,  et  que  celle  du  jury 
de  jugement  est  déjà  tant  ébranlée 
6t  même  dénaturée.  «  Un  jury 
«d'accusation  ,  leur  disait-il ,  for- 
»mé  au  moment  du  besoin,  dont 

•  les  membres  éj>ars  sont  rassem- 
i>  blés  .«ans  se  connaître,  «jui ,  par 

•  conséquent,  n'ont  pu  se  concer- 


VER 


17a 


•  ter  on   être   prévenus,    et  dont 

•  l'opinion  et  le  jugement  ne  peu- 
»  vent  être  influencés  par  l'amitié 

•  ou  la  haine,  doit  avoir  la  con- 
»  fiance  de  la  société  et  de  l'incnl- 
»pé,   et   tranquilliser  les  esprits 

•  sur  la  sûreté  de  l'un  et  la  liberté 
»de  Taulre.  Si  l'on  pouvait  tracer 
>  d'autres  règles  de  conduite  au 
))jury  d'accusation  que  celles  de 
»  suivre  les  mouvcmens  de  sa  per- 
•)Suasion  intime,  on  pourrait  diitî 
«qu'il  devrait  tendre  à  la  sévérité, 
»de  même  que  celui  de  jugement 
«doit  toujours  tendre  à  la  dou- 
«  ceur,  afin  de  concilier  ce  que  l'on 
«doit  à  la  sûrelé  publique  avec  les 

•  senlimens  d'humanilé  qui  veu- 
»lent  qu'il  faille  plutôt  innocenter 
u  plusieurs  coupables  que  de  punir 

.«un  innocent.  Pour  fixer  toute 
"Votre  attention  sur  l'objet  qui 
»  vous  rassemble  ,  au  nom  de  la  li- 
»  berté  d'un  homme  et  de  la  sûrelé 
«de  tous,  je  vais  vous  faire  lecture 
"des  jtièces  ,  vous  entendre!  les 
«témoins  et  la  partie  plaignante; 

•  mais  n'entendez  point  les  dépo- 
«sitions  écrites;  après  quoi,  dans 

•  la  crainte  religieuse  d'influencer 

•  votre  opinion  en  aucune  ma- 
»nière  et  pour  obéir  à  la  loi,  je 
>!  vous  laisserai  seuls....  vous  pré- 
»  venant  encore  que  ni  l'acte  d'ac- 
«cusalion  par  moi  rédigé ,  ni  les 
«conclusions  du  counnissaire  na- 
»tional,  ne  doivent  avoir  aucune 
l'influence  sur  voire  décision, 
«mais  seulement  le  sentiment  in- 
«lime  et  impartial  de  voire  propre 
«conscience....  •  Sous  l'empire 
de  Ik  constitution  de  l'an  3,  Ver- 
dier-du-CIos  fut  encore  président 
de  canton  ;  ce  sont  les  dernières 
fonctions  publiques  qu'il  ait  rem- 
plies. Il  a  laiîsé  une  foule  de  mé. 


174 


VER 


moires  et  de  documcns  qui  prou- 
vent !>on  zèle  ardent  pour  In  chose 
piibliqnc,  et  spi^ci<il('inent  pour 
l'intérêt  de  ses  adiaini^itrés  ,  eu  fa- 
veur desquels  il  ne  cessa  de  solli- 
citer de.*  cKiforilés  supérieures 
des  élablisseniens  utiles,  lels  que 
conrecliun  des  routes,  création 
de  loires,  qu'il  obtint,  et  divers 
autres,  tous  uliles. 

VEKDIEa  (  Pierre-Loï;is),  ne- 
veu et  eonsin  des  précédens,  né 
à  la  Ferré-Bernard  vers  l'année 
1780,  se  livia  d'aboid  à  l'étude  de 
riiorlogerie,  piofession  bien  pro- 
pre à  lui  faire  laire  des  progrès 
dans  celle  qu'il  embrassa  depuis. 
Après  la  mort  de  son  pèrt;,  ancien 
pharmacien,  il  étudia  la  cliirurgie, 
et  particulièrement  la  partie  des 
hernies  et  celle  des  accouchemens, 
et  se  fil  recevoir  chirurgien.  Non- 
seulement  il  fit  des  progrès  dans 
la  chirurgie  herniaire,  mais  il  en 
fit  faire  à  son  art,  en  inventant 
ou  perfectionnant  des  machines 
ou  des  inAJrumens  ingénieux, 
non-seulement  pour  les  hernies, 
«jais  encore  pour  réduire  les  dif- 
formités humaines  ,  ou  s'opposer 
ii  leurs  progrès,  et,  en  outre,  uo 
mannequin  perfectionné  pour  la 
démonstration  de  la  pratique  de» 
accouchemens.  On  trouve,  avec 
raison,  M,  Verdier  placé  dans  le 
nouveau  Dictionnaire  de  Médecine, 
qui  se  publie  actuellement,  à  l'ar- 
ticle liRAYER,  à  côté  des  premiers 
maîtres  de  son  art,  les  Lacroix  et 
les  Lafond.  M.  Verdier  vient  aussi 
de  succéder  au  célèbre  Féburier  , 
le  premier  qui  ait  établi  en  Fran- 
ce la  fabrication  des  inslriMnens 
de  chirurgie  en  gomme  élastique. 
M.  Verdier  a  publié  :  i"  Rapport 
et  notes  sur  les  bandages  et  appa- 


VIÎR 

reils  inventés  par  M.  Verdier, 
chirurgien-horniaire  de  la  UKuiue 
royale,  des  hOpilaux  uiiliiairos  de 
France,elc.  ;  a"  Observations  d'une 
hernie  sus  pubienne  antéro-epiploi- 
(fue  volumineuse,  guérie  par  l'em- 
ploi du  mercure  doux ,  etc.  ,  par 
Verdier,  etc.,  in-8%  1819;  5"  Mé- 
moire sur  un  appareil  com|>rt^ssif 
de  l'artère  iliaque  externe,  dans  le 
cas  d'auévrisme  inguinal,  lu  à  la 
section  de  chirurgie  de  l'académie 
de  médecine,  le  7  février  i825, 
par  P.  L.  Verdier,  etc.;  Paris, 
iu-S",  i8'iô  ,  avec  une  belle  pi  in- 
che  gravée.  M.  Verdier  a  publié 
de  plus  la  description  de  son 
mannequin  pour  la  dém  sustration 
des  accouchemens,  avec  une  litho- 
graphie. 

VERGEZ  (Jean-Marie),  lieute- 
nant-général en  retraite,  est  né  le 

I  I  janvier  1707,  à  bainl-Pé,  dé- 
partement des  Hautes- Pyrénées. 

II  entraau  service  comme  soldat, 
en  1 778,  et  dut  à  la  révolution  tous 
lesgradesqu'ilaobteims.  En  1792, 
il  marcha  aux  frontières  ,  et  fit  la 
cam|;ague  de  celte  année.  Le  9 
février  1795,  le  gouvernement  le 
nomma  capitaine  dans  le  1"  batail- 
lon des  chasseurs  des  montagnes; 
d.ins  le  courant  de  l'an  2,  il  servit 
à  l'armée  des  Pyrénées  -  Occi- 
dentales, où  il  commanda  les 
éclaireurs  de  la  colonne.  Il  enle- 
va lui-même  deux  drapeaux  à 
l'ennemi,  à  la  prise  de  Marsa,  et 
le  même  soir,  il  sauva  les  troupe» 
françaises  en  éteignant  deux  mè- 
ches allumées  pour  faire  sauter 
un  magasin  à  poudre,  dont  l'ex- 
plosion eût  entraîné  la  perte  du 
fori.  A  la  prise  de  Tolosa,  il  s'em- 
para de  rariillcrie  ennemie  en  sai- 
sissant les  mulets  employés  pour 


VER 

l'enlever.  Le  23  vendémiaire  an 
5  ,  ou  lui  dut  la  conservalion  d'un 
magasin  à  poudre  considérable, 
auquel  l'enneuii  avait  mis  le  feu, 
en  plaçant  des  mèches  allumées 
dans  de»  barils  enfoncés.  Il  as- 
sura ainsi  les  avantages  qu'avait 
procurés  à  l'armée  l'importante 
prise  de  Lescornbery.  Au  mois  de 
germinal  an  4  »  il  avait  le  com- 
mandement des  carabiniers  de 
l'armée  des  côtes  de  l'Océan  , 
lorsqu'il  eut  un  engagement  avec 
Charette,  chef  des  Vendéens;  il 
tua  d'abord  deux  chefs  qui  l'ac- 
compagnaient, et  le  saisit  ensuite, 
après  l'après  l'avoir  blessé  d'un 
coup  de  pistolet  et  d'un  coup  de 
sabre  pendaiit  le  combat;  uo  ar- 
rêté du  directoire-exécutif  le  nom- 
ma en  lérompense,  le  i8  thermi- 
dor suivant,  chef  de  bataillon. 
Pendant  les  années  5,  6  et  7 ,  il 
servit  dans  les  armées  d'Italie,  de 
Rome  et  de  Naples,  et  passa,  en 
sa  qualité  de  chef  de  bataillon,  à 
la  la*  demi-brigade  de  ligne.  A 
l'affaire  de  Lestorta,prèsdeUome, 
le  25  frimaire  an  7,  se  trouvant  à 
la  tête  «l'un  détachement,  il  prit 
deux  pièces  de  canon  à  une  des 
colonnes  napolitaines  ;  le  16  flo- 
réal,  le  général  en  chef  Macdo- 
nald  le  nomma  chef  de  brigade.  Il 
fut  blessé  d'un  cf)up  de  feu  à  l'é- 
paule droite,  à  la  prise  de  tMo- 
dène,  le  24  prairial,  et  d'un  au- 
tre c«)np  de  feu  ù  la  hanche  droite, 
le  Ç)  fructidor,  à  l'alVaire  de  Chia- 
vnri.  Il  se  signala  par  une  action 
hardie,  le  1 5  brumaire,  devant 
Novi  ;  à  la  tête  d'ufi  escadron,  il 
coupa  la  ligne  ennemie  et  s'em- 
para de  tonte  son  artillerie,  com- 
posée de  cinq  pièces  de  cunon  et 
de  Jeuri  caisson*:;  il  decidu  ainsi 


VER  175 

la  victoire  en  laveur  de?  Françai?. 
Le  i5  Qoréal  an  8,  un  arrêté  du 
premierconsul  Bonaparte  le  con- 
firma dans  son  grade  de  chef  de 
brigade.  Nommé  ensuite  colonel 
du  12*  régiment  d'infanterie  de 
ligne,  il  devint  olTicier  de  la  lé- 
gion-d'hoimeur,  et  fut  enjployé  k 
la  troisième  division  du  camp  do, 
Bruges;  général  de  brigade  en 
1807,  il  a  cessé  depuis  1810  de 
figurer  sur  les  cadres  de  l'armée. 
Le  général  Vergez,  maréchal-de- 
cainp depuis  la  restauration,  vient 
d'être  promu,  par  le  roi  (mai 
1825),  au  grade  honorifique  de 
lieu  tenant -général. 

VERGNIAUD  (  Pierre^Victcb- 
NiEN  ),  fils  d'un  avocat  estimé  de 
Limoges,  naquit  en  cette  ville  en 
1768.  Il  alla  exercer  à  Bordeaux 
la  profession  de  son  [icrc,  et  fit, 
dès  ses  premiers  essais,  pressen- 
tir ce  prodigieux  talent  qui  devait 
dans  la  suite  ,  et  sur  un  plus  vaste 
théâtre,  se  développer  avec  tant 
d'éclat.  Il  n'était  pas  resté  en  ar- 
rière du  mouvement  que  la  phi- 
losophie avait  imprimé  à  la  Fran- 
ce :  les  acceris  de  Mably,  de  Kay- 
nal,  de  Rousseau,  etc.,  avaient 
fortement  retenti  dans  son  3me, 
et  les  événemens  de  178c)  le  trou- 
vèrent tout  préparé.  Il  se  fit  re- 
marquer à  cette  époque  par  son 
patriotisme  ,  comnjc;  il  s'était  déjà 
iail  remarquer  par  son  éloquence. 
Fn  1790,  il  fut  nommé  membre 
de  l'administration  départemen- 
tale de  la  Gironde.  L'année  sui- 
vante ,  il  fut  élu  député  de  ce  dé- 
partement à  l'assemblée  législa- 
tive. Dès  la  troisièirie  séance, 
Couthon  ]»roposa  de  bannir  du 
cérémonial,  ilaiis  les  r;»pporls  de 
l'assemblée  avec  le  roi,  les  mot* 


176 


VER 


de  sire  et  de  majesté,  comme  peu 
convenables  ù  la  dignité  des  rc- 
présentans  du  peuple.  Vergniaud 
appuya  et  fit  adopter  celle  propo- 
sition. Ses  motils  étaient  plus  spé- 
cieux que  solides  ,  et  l'assemblée 
revint  bientôt  sur  sa  décision.  Ce 
l'ut  le  3  5  octobre  qu'il  déploya 
pour  la  première  fois  ù  la  tribune 
toute  la  puissance  de  son  talent. 
Lu  nation  était  alarmée  des  ras- 
semblemens  de  troupes  étrangè- 
res qui  s'opéraient  sur  le  Rbiu  ; 
elle  s'indignait  surtout  de  voir  les 
nobles  quitter  en  foule  leur  pa- 
trie pour  se  réunir  aux  ennemis 
qui  menaçaient  de  l'envahir.  Ver- 
gniaud, dans  un  discours  plein  de 
chaleur,  de  mouvemens  impé- 
tueux, de  raisonnemens  brusques 
et  leri-assans,  demanda  que  l'émi- 
gration et  les  menées  du  clergé 
fussent  réprimées  par  des  mesu- 
res rigoureuses,  et  que  le  comte 
de  Lille  ,  depuis  Louis  XVllI ,  fût 
sommé,  aux  termes  de  la  consti- 
tution ,  de  rentrer  en  Frimce  dans 
les  deux  mois,  sous  peine  d'être 
déchu  de  ses  droits  à  la  régence. 
Des  trois  lois  qui  furent  portées  à 
cet  effet,  celle  relative  au  comte 
de  Lille  fut  seule  sanctionnée. 
Vergniaud  occupait  le  fauteuil  le 
jour  que  le  ministre  de  la  justice, 
Duport  -  Duterlre  ,  vint  donner 
communication  aux  députés  du 
veto  dont  le  roi  frappait  les  deux 
premières.  Au  moment  où  le  mi- 
nistre entreprit  d'en  ex|)rimer  les 
raisons,  Vergniaud,  d'une  voix 
sévère,  lui  imposa  silence  ,  en  lui 
déclarant  que  «  la  constitution  ac- 
cordait bien  aii  roi  le  droit  de  re- 
fuser la  sanction,  mais  non  celui 
^e  développer  les  motifs  de  son 
refus.  i>  Le  27  décembre,  il  pro- 


V£R 

posa  un  projet  d'adresse  au  peu- 
ple ,  pour  accompaj^ner  l'envoi 
aux  dépailemens  du  discours  pro- 
noncé par  le  roi  le  i4  décembre  , 
au  sujet  de  l'enrôlement  des  émi- 
grés ;  pour  faire  connaître  à  la 
nation  les  mesures  que  l'assem- 
blée avait  proposées,  et  n'avait 
pu  faire  adopter;  pour  la  rendre 
juge  entre  eux  et  le  pouvoir  exé- 
cutif. «  Dims  les  graudes  occa- 
sions ,  disait-il,  les  communica- 
tions ont  le  double  avantage,  et 
de  ranimer  la  confiance  dans  les 
représentans  de  la  nation  ,  et  de 
ranimer  l'esprit  public  dans  le 
cœur  de  tous  les  citoyens.  »  Cette 
adresse  ,  composée  sous  l'inspira- 
tion de  la  méfiance  et  des  préven- 
tions, était  une  déclamalion  qui 
fut  généralement  jugée  peu  digne 
d'un  législateur.  L'asseml)lée  se 
contenta  d'en  décréter  l'impres- 
sion. C'était  assurer  une  partie 
des  effets  qu'elle  pouvait  produi- 
re ,  sans  ei)  prendre  la  responsa- 
bilité sur  elle.  Cette  méfiance , 
cette  haine  contre  la  cour,  ne  le. 
quittèrent  jamais.  On  le  vit  s'op- 
poser à  l'impression  du  diseours 
du  ministre  de  la  guerre,  Nar- 
bonne,  qui,  à  son  retour  des  fron- 
tières, témoignait,  j;ar  d'hypo- 
crites protestations ,  le  désir  de 
conserver  avec  l'assemblée  la  plus 
parfaite  intelligence  ;  voter,  le  1" 
février  1792  ,  pour  le  décret  d'ac- 
cusation porté  contre  Bertrand  de 
WoUeville,  ministre  de  la  marine; 
le  10  mars,  à  la  suite  d'un  dis- 
cours plein  de  véhémence,  voter 
un  second  décr<'t  d'accusation 
contre  le  ministre  des  affaires  é- 
trangères,  qu'il  accusait  de  tous 
les  malheurs  qui  avaient  ensan- 
gîanté  la    ville  d'Avignon.    Dans 


VEll 

une  aulre  séance,  il  s'écriait,  en 
rt'proiliiisaiit  un   des   plas  beaux 
mouveniens  de   Mirabeau  :  «  Du 
bam  de  celte  tribune  où  je  vous 
parle,   on   ajUMÇoit    le   palais    où 
des  conNciilcrà  pervers  égarent  et 
trompent  le  roi  que  la  eonstiln- 
«ion  nous  a  donné,  forgint  les  fers 
doul  il-i  veulent  nous  enchaîner, 
et  préparent  les   manœuvres  qui 
doivent  nous  livrer  à  la  maison 
d'Autricbc.    Je   vois   les  fenêtres 
du  palais  (iù  l'on  trame  la  contre- 
révolution,  où  l'on  coinbin»;   les 
iDoyeus  de  nous  replonger  dans 
l'esclavage,  après  nous  avoir  l'ait 
passer  par  toutes  les  Ji(»rreurs  de 
l'anarcbie    et    toutes    les   fureurs 
de  la  guerre  civile.  Le  jour  est  ar- 
rivé où    vous  pouvez  inetire    un 
terme  à  tant  d'audace,  à  tant  d'in- 
solence, et  confondre  enfm   tous 
les  conspirateurs.  L'épouvante  et 
l'borreur  sont  souvent  sorties  dans 
des  tetnps  antiques,  et  au  nom  du 
d«;sp.ilismc .  de  ce  palai.-  fameux; 
qu'illes  y  renhvul  aujourd'hui  au 
nom  (le  la  loi  ;  qu'elles  y  piMiétrent 
(bins  Inus  les  cœurs  :  que  tous  ceux 
qui  rbabilenl  sai  lient  que  tiotre 
ctmstilutiud  n'accorde  l'inviolabi- 
lité qu'au  roi;  qu'ils  sach<!nt  que 
la  loi  y  atteindra  sans  distinction 
tous  les  coupables,  et  qu'il  n'y  a 
pas  une  seule  lêle  convaincue  d'ê- 
tre criminelle  qui  puisse  échap- 
per ù  son  glaive!  »  II  fut  le  pre- 
mier qui  éleva  la  question  de  la 
déchéance    du    roi     long  -  temps 
avant  le  lo  aoftl.  Le  lio  juin  ,  lors- 
que Rœdercr  vint  dénoncer  à  l'as- 
semblée le  rassemblement  qui  se 
fijrmait  dans  l'aiis,  et  l'objet  os- 
l(:«sible    de    ce    ra><?emblement  , 
tout  en  avouant  combien  il  était 
peu  déceat  qu'une  foute  armée  en 

X.   XX. 


VER  177 

désordre   fût   introduite   dans   le 
sanctuaire  de  la  loi ,  il  soutint  que 
puisqu'on  l'avait  souffert  jusqu'a- 
lors ,  on  devait  encore  le  souffrir. 
Le  18  juin,  son  exaltation  l'aveu- 
gla au  point  de  lui  taire  pronon>- 
cer  une  violente diairii)e  contre  le 
général  La  Fayette,  qui ,  dans  une 
lettre  pleine  de  franchise  ,  de  sa- 
gesse et  de  patriotisme,  dénon- 
çait à  l'assemblée  lis  excès  de  la 
faction  ultra-révolutionnaire,   et 
lui  montrait  de  loin  l'abime  dans 
lequel   des   Iionmies    perfides   ou 
forcenés  allaient  entraîner  la  pa- 
trie. Tout  ce  qui   tenait  ou  avait 
tenu  à  la  cour  lui   faisait  ombra- 
ge. Les  événemens,  au  reste,  pri- 
rent soin  eux-mêmes  de  justiiier 
ses  soupçons,  puisque  ses  prédic- 
tions furent  presque  toutes  réali- 
sées. Cette  imprudente  exaspéra- 
tion ,  si  naturelle  d'ailleurs  daiss 
la  situation  critique  où  se  trouvait 
la  liberté,  et  qui,  dans  tous  les 
cas,  ne  ]>eut  qu'h(uiorer  sou  ca- 
ractère, puisque  l'intérêt  général 
é^   était  l'unique  objet,  et  qu'on 
ne  peut  lui  reprocher,  dans  au- 
cune circonstance  de  sa  vie,  d'a- 
voir été  mu  par  des  vues  person- 
nelles, cette  exaspération  ne  lui 
ût  jamais  oublier  ni  les  hns  de  la 
morale  publique,  ni  les  droits  de 
l'humanité.  On  avait  surpris  une 
lettre  qui  pouvait  contenir  des  ré- 
vélations importantes,  et  qui  mê- 
me   avait   déjà    été    dériachetée  ; 
Vergniaud  s'opposa   fortement  à 
ce  qu'on  eu  fît  aucun  nsai^e.  Le 
ao  juin  ,  tout  en  demandant  l'ad- 
mission de  la  foule  armée  dans  la 
«aile  (les  séances,  il  voidnt  (pi'une 
depulaliou  de  soixante  membres 
fût  envoyée  aux  Tuileries,  pour 
veiller  à  la  sûreté  du  roi  et  de  s* 


178 


TER 


famille.  Ce  jour-Ui  même,  on  le 
vit  »c  prôcipilor  au  milieu  du  tu- 
nniite,  el  exhorter  à  l'ordre  et  à 
la  décence  ecltc  niullitiui»; ,  dont 
on  pouvait  craindre  les  excès.  On 
l'a  accu?é  d'avoir  f.iit  l'iipolot^ie 
des  massacres  d'Avii^Mion  :  l'accu- 
sation esl  calomnieuse.  Il  se  bor- 
na à  invoquer  l'aumistie  pour  les 
coupables  ,  et  l'on  ne  peut  s'em- 
pêcher de  convenir  que  des  rai- 
sons politiques  du  plus  grand  poids 
militaient  en  laveur  de  son  opi- 
nion. Iiupélueuxdans  sou  attaque 
contre  la  cour,  plein  de  mépris 
pour  les  hommes  «  accoutumés  ù 
parler  de  la  liberté  sans  enthou- 
siasme, et  de  l'esclavage  sans  hor- 
reur; *  attentif  A  exciter  l'indi- 
gnation populaire  ,  mais  incapa- 
ble d'avoir  recours  ,  pour  obtenir 
ce  résultat,  ù  aucun  moyen  horj- 
teux,  à  aucune  voie  détournée; 
aveuglé  sur  les  intentions  de  cer- 
tains hypocrites  déjà  iufluens,que 
les  malheurs  de  la  France  et  ses 
propres  malheurs  allaient  bientôt 
lui  apprendre  à  connaître,  il  cofi- 
tribua  puissamment,  ainsi  que 
plusieurs  autres  Girondins ,  à  la 
journée  du  lO  août.  Il  présidait 
par  intérim  l'assemblée  nationale 
au  moment  où  Louis  XVI  vint  se 
rélugier  dans  son  sein.  i.  Je  sui» 
venu,  dit  le  roi,  pour  éviter  un 
grand  crime;  je  me  croirai  tou- 
jours en  sûreté  au  milieu  des  re- 
présentans  de  la  nation  ;  j'y  pas- 
serai la  journée.  »  Vergniaud  lui 
répondit:  «  L'assemblée  nationale 
cormaît  tous  ses  devoirs;  elle  re- 
garde comme  un  des  plus  chers 
le  maintien  de  toutes  les  autorités 
constituées.  Elle  demeurera  fer- 
me à  son  poste,  et,  s'il  le  fout, 
ûou«  saurons   tous   y    mourir.  » 


VER 

P«'ndant  toute  la  durée  du  com- 
bat, dont  l'issue  fut  quelque  temp* 
douteuse ,  il  ne  changea  pas  un 
moment  de  visage  ;  sa  fermeté ,  sa 
tranquillité,  son  courage,  ne  se 
démentirent  pas  un  moment. 
J^msqiie  le  président,  Merlet,  vint 
reprendre  son  poste,  il  se  rendit  A 
la  coumiission  extraordinaire,  et 
reparut  deux  heures  après  à  la  tri- 
bune, où  il  proposa  la  convoca- 
tion d'une  convention  nationale, 
la  suspension  de  Louis  XVI ,  et  la 
translation  du  monarque  et  de  sa 
famille  au  pal.iis  du  Luxembourg. 
«Messieurs,  dit -il,  je  viens  au 
nom  de  la  commission  extraordi- 
naire vous  proposer  une  mesure 
bien  rigoureuse  :  je  la  présenterai 
cependant  sans  réflexions.  Je  m'en 
rapporterai  à  la  douleur  dont  vous 
tîtes  pénétrés  pour  juger  combien 
il  inij-orle  au  salut  de  la  patrie  que 
vous  la  décrétiez  sur-Ie  cliamp.  » 
Laça  rrièrelégislntivede  Vergniaud 
se  divise  en  deux  parties  bien  dis- 
tinctes. La  première,  que  nous 
avons  déjà  parcourue  rapidement, 
où  ,  toujours  agresseur,  il  déve- 
loppa avec  tant  de  talent  toutes 
les  ressources  de  l'éloquence  tri- 
bunitienne  ;  la  seconde,  où  con- 
tent de  la  victoire  que  la  révolu- 
tion venait  de  remporter,  il  ne 
s'occupa  plus  que  d'en  arrêter  les 
désastreuses  conséquences.  Mal- 
heureusement il  était  déjà  trop 
tard  ;  la  lutte  de  l'ordre  contre 
l'anarchie  n'était  plus  égale.  Il  est 
bien  déplorable  que  parmi  les  Ci- 
rondins,  tous  honnêtes  gens,  dé- 
voués à  l'intérêt  général,  élo- 
quens  ,  éclairés  et  intrépides,  il 
ne  se  soit  point  trouvé  un  seul 
homme  qui  réimît  à  sa  probité  as- 
sez de  publique  pour  déjouer  let 


TER 

machinalions  de  Robespierre ,  de 
Danton,  elc. ,  ni  aîsez  de  force 
morale  pour  réunir  les  bons  ci- 
toyens, et  imposer  au  peuple  le 
calme  et  la  modération.  Ils  pro- 
testèrent conlre  les  excès  (iont  ils 
étaient  les  témoins;  ils  appelèrent 
l'indignation  des  contemporains 
et  (le  la  postérité  contre  leurs  au- 
teurs; ils  ne  purent  arrêter  leur 
marche  dévastatrice.  Ils  firent 
néanmoins  tout  ce  qui  était  en 
leur  pouvoir;  leurs  efforts,  pour 
n'avoir  pas  été  couronnés  du  suc- 
cès, n'en  furent  pas  moins  héroï- 
ques; leur  dévouement  n'en  fut 
pas  moins  sublime,  et  leur  sang, 
répandu  pour  la  patrie,  ne  nous 
permet  pour  eux  d  autres  senti- 
mens  que  la  douleur,  le  respect 
et  radmirali(jn.  Vergniaud  ,  qui 
s'était  montré  presque  toujours  A 
la  têle  des  Girondins, n'abandonna 
plus  un  moment  ce  [;0'le,  aussi- 
tôt qu'il  fut  devenu  périlleux;  cer- 
tain de  fU(.C(»nd)er,  il  réscdut  de 
ren)plir  ses  obligations  dans  toute 
leur  étendue,  et  de  ne  cesser  de 
combattre  qu'en  cessant  de  vivre. 
Il  s'opposa  avec  un  courage  tou- 
jours nouveau,  et  à  la  déj>orta- 
tion  générale  des  prêtres ,  et  à  la 
jiroposilion  d'organiser  un  corps 
de  douze  cents  ijrannicides  ,  et 
au  mandai  d'amener  lancé  par  la 
commune  contre  Girey  Diipré  , 
l'intrépide  collaborateur  de  liris- 
50t  dans  la  rédaction  du  Patriote 
français.  Il  ne  ménagea  pas  l'cx- 
pres.-ion  de  son  indignation,  lors- 
(jue  l'épouvantable  massacre  du  2 
septembre  eut  enfin  dévoilé  les 
odieux  complots  de  la  commune. 
Ce  fut  lui  qui  fit  charger  le  con- 
»cil-exécutil  d'envoyer  des  com- 
missaires au-devant  de5  [)riiiun- 


VER 


«79 


niers  d'Orléans ,  pour  les  sous- 
traire au  sort  affreux  qui  les  nje- 
naçait  :  mesure  qui  aurait  pu  être 
salutaire,  si  l'exécution  en  avait 
été  confiée  à  d'autres  mains.  Le 
17  septembre, il  s'unit  à  Rersaint, 
pour  faire  décréter  que  les  mem- 
bres qui  composaient  cette  com- 
mune sanguinaire  répondraient 
sur  leur  têle  de  la  sûrelé  des  pri- 
sonniers. Que  pouvait  faire  tle 
plus  un  homme  déjà  signalé  aux 
poignards,  qui  n'avait  d'autre 
puissance  que  son  éloquence  ,  et 
à  qui  chaque  jour  enlevait  quel- 
que chose  de  son  ancienne  popu- 
larité ?  «  I!  est  temps ,  s'écriail-il, 
de  briser  ces  chaînes  honteuses, 
d'écraser  celle  horrible  tyrannie! 
Il  est  temps  que  ceux  qui  ont  fait 
trembler  les  hommes  de  bian 
tremblent  à  leur  tour  !  Je  n'ignore 
pas  qu'ils  ont  des  poignards  à 
leurs  ordres;  eh  !  dans  la  journée 
du  2  seplfUibre  ,  n'ont -ils  pas 
voulu  les  diriger  conlre  plusieurs 
d'entre  nous?  Dans  leijrs  listes  de 
pro.-criplions ,  u'ont-ils  j»as  voulu 
dénoncer  plusieurs  d'entre  nous 
comme  des  traîtres?  Et  ma  tête 
aussi  est  proscrite.  La  calomnie 
veut  él(>uller  ma  voix;  mais  elle 
peut  encore  se  faire  entendre  ici , 
et.  je  vous  en  atteste,  jusqu'au 
coup  qui  me  frappera  de  mort, 
elle  tonnera  de  tout  ce  qu'elle  a 
de  force  contre  les  crimes  et  les 
scélérat?.  »  «  Les  proscriptions 
passées,  disait-il  un  autre  jour,  le 
briiit  des  proscriptions  futures  , 
les  troubles  intérieurs  ,  ces  haines 
particulières,  ces  délations  infâ- 
mes, ces  arrestations  arbitraires, 
ces  violations  de  la  propriété,  en- 
fin, cet  oubli  de  toutes  les  loiii , 
ont  répandu  lu  consternation   et 


iTio  VER 

l'effroi.  L'hoinuie  de  bien  se  ca- 
che ;  il  fuit  avec  horreur  ces  scè- 
nes <]e  siing;  et  il  fiiut  Ijicn  qu'il 
se    cache  ,    rhoiniiic    verliieux  , 
quand  le  crinie  triomphe.  Il  n'en 
a  pas  rh<irrih!e  .-entiinent  ;  il  se 
tait,  il  s'éloigne,  il  attend  pour 
reparaître    des    temp?   plus   heu- 
reux. Il  e>^t  des  hommes  ,  au  con- 
traire, à  !a  foi"s  hypocrites  et  fé- 
roces, qui   ne  se  mon'reut   qiie 
dan«  les  caJamilés  publiques,  com- 
me il  est  des  insecte.»  malfaisans 
que  la  terre  ne  produit  que  dans 
les  orages;   ces  hommes  répan- 
dent sans  cesse  les  soupçons,  les 
niéfiarices,  les  jalousies,  les  haï- 
mes, les  vengeances.  Ils  sont  avi- 
des de  sang;  dans  leur  propos  sé- 
diliciix,  ils  am/ocr«//5fH/  la  vertu 
même,   pour  acquérir  le  droit  de 
la  (ouler  aux  pieds  ;  ils  démocrati- 
sent le  crime,  pour  pouvoir  s'en 
ra«.«asier,  sans  avoir  à  redouter  le 
glaive  de  la  justice.  Tous  leurs  ef- 
-  forts   tendent   à   déshonorer   au- 
jourd'hui la  plus  belle  des  causes, 
«fin  de  soulever  contre  elle  toutes 
les  nations  amies  de  l'humanité.  » 
Yergniaud  fut  réélu  membre  de  la 
convention  nationale.  II  s  y  mon- 
tra ccnslamment  ce  qu'il  avait  été 
pendant  le  dernier  mois  de  las- 
gemblée  législative.  Son  courage, 
soutenu  par  la  plus  héroïque  ré- 
signation ,  semblait  croître  à  me- 
sure que  le  péril  devenait  plus  im- 
minent.  Dès  le  3  5  septembre,  il 
appela  sur  Marat  l'indignation  de 
l'assemblée;  mais  sa  voix,  autre- 
fois   si    juiissante,    ne    produisait 
p!us  (p^'une  courte  et  imiliie  agi- 
tation.   Dès   celte  époque  ,  il    ne 
monta  plus  (pie  bien  rarenionl   à 
la  tribune.  A  son  indolence  nalu- 
felle,  qu'jl  ne  savait  vaincre  que 


VER 

lorsque  les  circonstances  agitaienï 
forleuicnt  son  iune,  se  joignit  la 
cerliluile  où  il  était  d»-  riueflica- 
cilé  de  ses  elloiis.  Il  n'était  |)liis 
snulenu  que  par  la  fermeté  de  ses 
principes;  il  sentait  qu'il  ne  pou- 
vait plus  que  protester  contre;  les 
excès  qui  allaient  se  commettre, 
et  sa  mort,  qu'il  voyait  arriver, 
lui  paraissait  la  plus  éloquente  des 
protestations.  «  Sans  cesse  abreu- 
vé de  calonuiies,  disait- il  le   i5 
mars  i  795  ,  je  me  sui'<  abstenu  de 
la  tiibuue  tant  que  j'ai  pensé  que 
ma    présence    pourrait   y  exciter 
des  passions,  et  que  je  ne  pouvais 
y   apporter  l'espérance   d'y  être 
utile  à  mon   pays.  »    Mais  toutes 
les  fois  qu'il  ouvrait  la  bouche,  la 
franchise  et  l'énergie  de  ses  ilécla- 
ralions,  ses  méprisantes  apostro- 
phes ,  ses  sarcasmes  amer.-,    té- 
mcùguaient  a-sez   la   profonde  et 
douloureuse  indignation  qui  s'é- 
tait emparée  de  son  5me.  Le  5i 
décembre,  il  prouva, dans  un  dis- 
cours remaripiabie,  la  nécessité  de 
soumettre  au   }>euple  la  décision 
de  l'assemblée  dans  le  procès  de 
Louis  XVI.  Ses  arguniens  étaient 
irrésistibles;   la   Montagne ,  dont 
celle  détermination  aurait  ,  pour 
un  moment,  paralysé  les  projets, 
n'y  répondit  que  par  des  cris  de 
fureur;  Vergniaud,  inébranlable, 
et  menaçant  encore  au  milieu  de 
la  tempête,  accabia  un  instant  de 
son  éloquence  cette  faction  redou- 
table,  et  parvint  à  faire  décréter 
l'arrestation  de  Bentabolle,   l'un 
des  membres  les  plus  exaltés.  Ce 
fut   alors   qu'il    démontra   Texis- 
tence  d'un  complot  qui  avait  pour 
but  l'assassinat  d'un  grand  nom- 
bre de  ses  amis  et  de  lui-même. 
Il  vola  la  mort  de  Louis  XVI  ; 


TER 

Triais  on  p^l  éloniié  qu'.iprès  avoir 
invoqué  l'iippcl  îiu  peuple,  il  ait 
voté  ctjnlrc  le  sursis.  Vergniaud 
fui  noiiiiiié  président  !e  lo  janvier 
1790.  Ce  l'ut  lui  qui  prononça  l'ar- 
rêt du  malheureux  prince  ;  il  dut 
peut-être  à  la  violence  des  senti- 
mens  qui  l'agitèrent  ah)rs  ,   une 
fièvre  ardente  qui  s'empara  de  lui, 
après  les  séances  dt-s  16  et  27  jan- 
vier, et  qui  lit  craindre  qutique 
temps  pour  ses  jours.  Le  10  mars, 
à  peine  eut  -  il  entendu    Hiire  la 
proposition  d'instituer  le  tribunal 
révolutionnaire,  que,  s'élançant 
vivement  à  la  tribune  :   «  Lors- 
qu'on vous  propose,  s'écria-t-il, 
(le  décréter  létablisseirjent  d'une 
inquisition  mille  lois  plus  redou- 
table que  celle  de  Venise,  nous 
devons  déclarer  que  nous  mour- 
rons tous  plutôt  que  d'y  consen- 
tir. »  C'est  ce  jour-là  même  que 
lut  découverte  celte  conspiration, 
connue  sous  le  nom  de  conspira- 
tion du  jo  mars,  et  qui  n'eut  d'au- 
tre elFet  que  ceux  que  lui  donnè- 
rent la  Montagne  et  la  commune, 
si    empressées    de    tirer   parti    de 
tous  les  événemens  funestes.  On 
ne  manqua  pas  d'en  accuser  les 
G  i  rondins.  Vergniaud  repoussacel- 
te  ridicule  accus. ition  HVec  sa  su- 
périorité ordinaire.    «  On  a   vu , 
dit-il,   dans  un   endroit  du  dis- 
cours qu'il  improvisa  en  celle  oc- 
casion ,  ou   H    vu  se  développer 
j)aruii  nous  cet  étrange  système, 
d'après  lequel  on  vous  dit  :  Vous 
êtes  libres  ,  mais  pen.sez  comme 
nous  sur  telle   ou   telle   question 
d'économie    politique  ,    ou   nous 
vous  dénonçons  aux  vengeances 
du  peuple  ;  vous  Ctes  libres,  mais 
courbe»  la  tête  devant  l'idole  que 
nous  enoensons,   ou   nous  vou» 


VER  i«» 

diMionçons    aux    vengeances     du 
peujde;  vous  êtes  libres,  mais  as- 
sociez-vous à  nous  pour  persécu- 
ter le?  honinies  dont  nous  redou- 
tons la  probité  et  les  lumière.';,  ou 
nous  vou?  désignons  par  des  dcno- 
minations  ridicules,  et  nous  vous 
dénonceroiis  aux  vengeances  du 
peuple.   Alors,    citoyens,   il   fut 
permis  de  craindre  que  la  révolu- 
tion, connue  Saturne,  dévorant 
successivement  tous   se»  en  fans, 
n'engendrât  enfin   lo   despotisme 
avec  toutes  les  calamités  (pii  rac- 
compagnent. »  Et  peu  après,  s'a- 
dressant  au   peuple   lui-même: 
c  Un  tyran  de  l'antiquité  avait  un 
lit  de  fer,  sur  lequel  il  faisait  éten- 
dre ses  victin)ijs,   mutilant  celles 
qui  étaient  plus  grandes  que  le  lit, 
disloquant  duuîoiireiisemenl  cel- 
les qui  l'étaient  moins  ,  pour  leur 
faire  alleiiulre  le  niveau.  Ce  tyran 
aimait  l'égalité;  et  voilà  celle  des 
scélérats  qui  te  déchirent  par  leurs 
fureurs.  <>  Ses  ennemis  ftirent  ré- 
duits au  silence,  mais  non  rebu- 
tés. Ils  prirent  une  «narchc  plus 
adroite  ;  ils   l'attaquèrent  au  de- 
hors, ainsi  que  ses  amis,  et  exci- 
tèrent peu  à  peu  la  défiance  et  la 
haine  d'une  multitude  ombr;igeu- 
se.  Le   1"  avril,  lorsque  l'assem- 
blée apprit  la  défection   de   Du- 
mouriez,  on  lui  surprit  la  décla- 
ration   qu'elle    poursuivrait    ses 
membres  mêmes,  contre  lesquels 
il  y  aurait  de  fortes  présomptions 
de  culpabilité.  Le  10  avril,  quel- 
ques  sections  présentèrent   à    la 
harro  une  adresse  dirigée  contre 
les  Girondins.  Pétion  fit  entendre 
contre  celte  adresse  d'énergiques 
réclamations.  Après  lui  ,  Robes- 
pierre  s'éleva   pour   la   soutenir. 
«Je   viens,  dit -il,   dévoiler  le» 


i8a 


VER 


trames  tle  celle  {^rande  conjura- 
tion. »  Voici  quelques  -  uns  des 
cliet'j  d'ticcusalion  ,  qu'il  faiî^ait 
porter  principalement  sur  Ver- 
gri-iaud,  Guadet  et  Gensonné  :  (Je 
s'êlre  opposés  ù  la  déchéance  du 
9  roi;  d'avoir  loué  La  Fayelle  et  Nar- 
borine;  d'avoir  calomnié  lo  con- 
seil -  général  de  la  commune  de 
Paris  (  après  le  2  septembre  )  ; 
d'avoir  voté  l'appel  au  peuple  ; 
d'être  des  meneurs,  des  iutrigans, 
des  modérés  !  On  a  peine  à  con- 
cevoir de  pareilles  accusations , 
dont  quelques-unes  sont  des  élo- 
ges, et  de  la  plupart  desquelles  les 
faits  eux-mêmes  étaient  une  réfii- 
ialion  sans  réplique.  Vergniaud 
monta  à  la  tribune  immédiate- 
rnenl  après  Robespierre;  et  pas- 
s^ant  en  revue  les  différens  chefs 
d'accusation  { il  y  en  avait  dix- 
huit),  montrant  la  fausseté  des 
uns,  le  ridiculb  des  autres,  et  l'ab- 
surdité de  toutes,  el  mettant  ha- 
bilement en  contraste  sa  conduite 
et  celle  de  Robespierre  lui-même, 
il  le  couvrit  de  confusion  el  de 
honte,  et  ne  lui  laissa  plus  d'au- 
tre voie  que  la  force  ouverte  pour 
arriver  à  son  but.  Guadet  parla 
après  Vergniaud,  acheva  de  ré- 
veiller le  courage  de  la  majorité 
de  l'assemblée,  et,  s'apercevant 
de  l'impression  qu'il  avait  pro- 
duite, il  lança  tout  à  coup  contre 
Marat  un  décret  d'accusation,  qui 
fut  presque  unanimement  accueil- 
li,  et  adopté  sur-le-champ.  Le 
coup  était  hardi  ;  mais  la  Monta- 
gne avait  trop  d'influence  au  de- 
hors pour  qu'il  pût  réussir.  Le 
peuple  se  souleva;  les  commissai- 
res des  sections  reparurent  à  la 
barre,  renouvelant  les  accusations 
do  Robespierre,  et  demandant  la 


VER 

mise  en  liberté  de  l'Ami  du  peu- 
ple,  laquelle  leur  fut  accordée. 
Cependant  le  côté  droit  allait  en- 
core remporter  une  demi-victoi- 
re,  qui,  peut-être,  lui  était  mé- 
nagée à  dessein  par  la  Motjlagne 
elle  -  même.  Grangeneuve"  jeune 
parut  à  la  barre  à  la  tête  d'tme  dé- 
putation  du  départen)ent  de  la 
Gironde  ,  qui  ne  se  croyait  pas 
aiors  étranger  aux  intért-ls  de  I» 
liberté.  Les  réclamations  de  Gran- 
geneuve  ne  furent  pus  sans  effet. 
Le  20  mai,  sur  la  rédaction  do 
Vergniaud,  fut  rendu  un  décret 
ainsi  conçu  :  «  La  convention  na- 
tionale improuve,  comme  calom- 
nieuse, la  pétition  qui  lui  a  été 
présentée  par  trente-cinq  sections 
de  Paris.  »  La  commission  des 
douze  fut  formée;  ses  actes  ne 
servirent  qu'à  exaspérer  la  haine 
du  peuple  ,  qui ,  le  3o  ,  se  déclara 
en  insurrection.  Dès  lors,  tout  fut 
perdu  pour  la  liberté  et  pour  la 
patrie.  Ce  fut  dans  ces  pénibles 
circonstances  que  Vergniaud  dé- 
veloppa toute  la  fermeté,  toute 
l'énergie,  toute  la  grandeur  de 
son  june.  Poursuivi  au  dehors  de 
l'assemblée  par  les  calonmies  des 
agitat(!urs  et  les  fureurs  d'un  peu- 
ple égaré,  menacé  au-dedans  par 
les  vociférations  et  les  poignards 
des  tribunes,  son  visage  sloïque 
ne  laissa  jamais  entrevoir  la  moin- 
dre émotion.  Ln  des  derniers  jours 
de  mai,  au  moment  où  mille  voix, 
séduites  ou  salariées. demandaient 
sa  tête  î\  la  convention,  i!  entre 
seul  au  ihéAtre  de  la  Répu!)liqiie. 
«  Est-ce  vous,  Vergniaud,  lui  dit 
un  de  ses  amis?  Que  venez-vous 
faire  ici?  Peut-être  en  ce  moment 
êles  -  vous  décrété  d'accusation. 
—  Je  lésais,  répond  Vergniaud; 


TER 

mnis  que  puis-je  à  loul  cila?  J'ai 
bravé  tous  les  danger?,  el  mu  (ion- 
leur  est  de  les  avoir  bravé.s  inuti- 
lement. J'ai  lait  à  mon  pays  le  sa- 
crifice de  mes  jours;  c'est  le  der- 
nier que  je  pui?se  lui  faire  ;  je  dé- 
kire  seulement  qu'il   ne    lui    soit 
point  inutile,  mais  je  ne  l'espère 
pas.  J'ai  rempli  tous  mes  devoirs; 
c'est  à  Paris  à  l'aire  le  sien.  .>  Le 
3i   mai,  au  milieu  du  désordre, 
du  tumulte  et  de  l'eflVoi  qui  iV- 
gnaienl    dans    l'assemblée,  Ver- 
gniatid  lait  jurer  à  ses  tuliègues 
«le  mourir  tous  à  leur  poste.   On 
annonce  un  moment  après  que  les 
»ections  soulevées  se  sont  mises 
en  marche;  Vergniaiid  fait  décré- 
ter qu'elles  ont  bien  mérité  de  la 
jalrie,  en  ce  qu'elles  ont  mainte- 
nu le  respect  dû  aux  propriétés  et 
à  la  sûreté  des  personnes.  Le   i" 
juin,  il  rassembla  tout  ce  qui  lui 
restait  de  forces  pour  combattre 
liu   proj'U  de   pioclatnation  pro- 
posé par  Barrère,  dans  lequel  les 
evénemens    de    la    veille    étaient 
odieusement  dénaturés.  Le  lende- 
main, il  fut  décrété  d'arrestation  ; 
il  se  rendit  sans  résislance.  Depuis 
celte   époque   jusqu'à   sou    juge- 
ment,  de  nombreuses  occasions 
de  fuir  lui  furent  offertes  ;  il   ne 
voulut   jamais   eu    profiler.  Tra- 
duit ,    le   25  (»clobre,    devant   le 
tribr.nal  révolutiounaire,  il  se  dé- 
fendit avec  simplicité,  avec  cal- 
me;   il  démonlr.i   la   fausseté   de 
tous  les  faits  avancés  à  sa  cbarfîe, 
el    néaimioins    fui    condamné    ;\ 
mort.  Il  s'élail  procuré  utJ  poison 
trés-sjbtil  ;  mai->  voyant  ses  an»is 
condamnés  avec  lui,  il  leur  dé- 
clart»  que  puisqu'il  n'avail  pas  as- 
fte»  de  poison  pour  eux  Ions,  ili 
les  accompagnerait  à  l'échafaud. 


TBR 


i85^ 


Il  y  porta  sa  tête  le  3i  ootobro 
i7«j5.  Vergniaiul  fut,  sans  contre- 
tliU  le  premier  orateur  de  l'assem- 
blée législative  et  de  la  conven- 
lion.  Une  imagination  brillante  et 
riche,  un  style  énergique  et  ani- 
mé, des  traits  hardis,  de?  mou- 
vemens  véhémens,  sortant  avec 
impétuosité  d'une  ûme  ardente  et 
passionnée,  tels  sont  les  caractè- 
res distinclifs  de  son  (aient.  Tous 
ces  avantages  étaitiil  rebaiissés 
par  le  plus  noble  débit.  11  était 
|>eu  suîCepliidc  de  grands  tra- 
vaux; mais  la  nature  y  avait  sup- 
pléé par  une  (îonception  facile  et 
promple,  et  une  mémoire  prodi- 
gieuse. 

VERHLELL  (  Ghables-He»bi, 
comte),  pair  de  France,  vice- 
aM)iral  en  retraite,  grand'croix  de 
la  légion-d'liotmeur,  etc.  ,  est  né 
à  Doesberg  (Gueidre)  vers  1770. 
Vorté  par  goût  au  service  triari- 
lime,  il  entra  comme  cadet  dans 
la  marine  de  son  pays  .  et  était 
parvenu  au  grade  de  lieutenant 
lorsque  la  révolution  éclata  en 
1793.  N'en  ayant  point  adopté  les 
principes,  il  fut  obligé  de  quitter 
le  service,  et  resta  sans  emploi 
jusqu'en  1804.  C'était  l'époque 
où  l'empereur  Napoléon  menaçait 
l'Ariglelerre  d'une  descente  ;  il 
demanda  au  gouvernement  de  la 
iioilande  un  ancien  ollif^ier  de 
marine,  pour  corr)mander  1;1  flot- 
lille  hollandaise,  qu'il  voulait  réu- 
nir à  Boulogne  ;  le  choix  se  ûxa 
sur  le  frère  de  M.  Verhuell,  capi- 
taine de  haut-bord,  marin  distin- 
gué, qui  refusa  le  poste  honr)ra- 
ble  qu'on  lui  offrait  ;  mais  il  indi- 
qua son  frère  cadet,  qui  accepta, 
et  fut  envoyé  en  France  ;  de  sorte 
qu'il  devint  en  un  jour,  do  siiupl* 


i84  VER 

lionlenniil  de  vaisseau,  vice-ami- 
r;il,  comme  le  remarque  le  roi 
I.otii?  (  voy.  Bonaparte  -  Louis  ) 
dans  ses  Dorumens  et  remarques 
historiques  sur  la  Hollande,  3  vol. 
JD-H",  Briix«'IU>s.  Il  ne  tarda  pas 
à  justifier  la  confiance  qu'on  avait 
eue  en  lui.  Iii.-liuil  de  la  mission 
que  le  nouvel  amiral  avail  à  rem- 
plir, l'amiral  anjrlais  l'attendit  au 
]»assiij;e  avec  un  grand  nombre 
de  vaisseatix  et  de  t"régat«îs  sous 
ses  ordres.  L'amiral  Verhuell,  at- 
taqué lorsqu'il  parut  près  du  cap 
Cuinez  à  l:^  lête  de  la  flottille  qu'il 
conduisait  à  Boulogne  ,  eut  à  sou- 
tenir un  rude  combat ,  où  il  mon- 
tra autant  de  cnurage  que  d'babi- 
lelé ,  et  força  l'ennenn  à  se  reti- 
rer. Il  conserva  sous  le  gouver- 
nement du  grand-pensionnaire, 
Schimmelpeiiniiick  ,  le  grade  de 
vice-amiral,  et  fut  en  outre  nom- 
mé ,  en  1806.  membre  de  li  dé- 
pulalion  hollandaise  chargée  de 
traiter  avec  le  gouvernement  fran- 
çais pour  les  intérêts  de  son  pays. 
Quatre  mois  se  passèrent  en  né- 
gociations ,  dont  le  résidîal  fut 
(jiHvramiral  Verhuell  et  ses  col- 
lègues demandèrent  pour  roi  de 
Hnllande  le  prince  Louis,  frère 
de  l'empereurNapoléon.  Le  grand- 
pensionnaire  Scbimmelpenninck 
n'ay)prouva  pas  celte  disposition, 
qui  anéantissait  la  république. 
L'amiral  Verhu(!ll  reçu  ^  ainsi  que 
les  autres  députés,  en  audience 
solennelle,  par  l'empereur  Napo- 
léon ,  prononça  le  discours  où  un 
prince  étranger  était  appelé  au 
gouvernement  de  la  Hollande.  Il 
fut  créé  iniuisJre  de  la  marine  par 
le  roi  Louis,  et  successivement 
maréchal  du  royaume  et  comte  de 
Sevenaar.  La  Hollande  ayant  été 


VÉR 

réunie  à  l'empire  français,  l'amiral 
Verhuell  [)assadansce  grade  au  ser- 
vice de  France,  fut  nommé  grand' 
cr(tix  de  l'ordre  «le  l'Union  et 
chargé  du  commandement  du 
Helder.  Kn  181 5  et  1814,  il  dé- 
fendit ce  port  avec  une  rare  cons- 
tance cc.ntre  les  Hollandais  eux- 
mêmes  ,  qui  avaient  profité  des 
malheurs  de  notre  patrie  pour  se 
détacher  de  son  alliance.  Ce  ne 
fut  qu'après  l'entrée  des  troupes 
étrangères  à  Paris  et  l'abdication 
de  Napoléon  ,  qu'il  remit  la  place 
du  Helder  au  général  Jonge,  qui 
l'assiégeait.  M.  Verhuell  revint 
dans  sa  patrie  adopîive  ,  et  fut 
nonnné  un  des  inspecteurs  de  la 
marine.  Il  est  depuis  1819  mem- 
bre de  la  chîimbre  des  pairs. 

VÉRITÉ  (Charles),  né  à  la 
Ferlé-Bernard,  dép,irlen»ent  de 
laSarlhe,  n)aire,  |)uis  adminis- 
trateur du  district  de  cette  ville, 
fut  élu  par  le  département  de  la 
Sarihe,  en  1791,  à  l'assemblée 
législalive;  il  ne  fil  point  partie 
de  la  convention  nationale.  Ren- 
tré dans  l'administration  munici- 
pale, il  fut  ensuite  nonnné  admi- 
nistrateur de  son  dé[>artement. 
Sans  emploi  sons  les  gouverne- 
mens  consulaire  o.t  impérial,  il 
devint  dans  bs  cent  jours,  en 
iSi.T,  sous-préfet  de  l'arrondis- 
sement de  Mamers,  même  dé- 
partement; il  refusa  depuis  de  se 
mettre  sur  les  rangs  ,  comme  l'en 
sollicitaient  ses  amis  ,  qui  sont 
ceux  de  la  liberté  ,  pour  entrer  à 
la  chambre  des  députés  ,  son  âge 
ne  lui  permettant  pins  de  se  livrer 
fructueusement,  dit-il,  à  ses  ho- 
norablestr;ivaux.  !M.  Vérité,  d'ans 
toutes  les  fondions  publiques 
qu'il  a  remplies,  comme  dans  sa 


TER 

retraite,  a  su  nit'^riler  et  conser- 
ver l'eslime  de  ses  ailininistrés  et 
en  général  de  ses  concitoyens, 
par  (irie  grande  sagesse  et  par  une 
grande  invariabilité  de  principes 
et  de  conduite,  dans  des  temps 
où  Ces  deux  qualités  sont  restées 
l'apanage  d'un  trop  petit  nombre 
de  personnes. 

VERMIGLIOLI  (Jean-Baptis- 
te), membre  de  plusieurs  socié- 
tés savantes,  professeur  d'archéo- 
logie, conservateur  du  cabinet  des 
antiques  à  Perouse,  est  né  dans 
cette  ville  en  i^CJç),  et  a  été  éle- 
vé à  Orvielte,  où  il  ticheva  en  ptu 
«le  temps  ses  éludes.  De  retour 
dans  sa  patrie,  il  se  mit  à  fouiller 
les  archives,  les  musées  et  les  bi- 
bliiilbéques,  pour  en  exhumer  tout 
ce  qui  pouvait  coniribticr  à  on  é- 
claircir  l'histoire,  il  a  publié  im 
grand  nombre  d'où  vraj^cs  ,  entre 
autres  un  cours  d'archéologie,  qui 
C;t  devenu  un  livre  classique  en 
Italie.  Ce  savant  jouit  d'uue  gran- 
de considération  auprès  de  ses 
compatriotes,  et  plusieurs  de  ses 
écrits  mériteraient  d'être  traduils 
el  connus  par  les  étrangers.  N(Mjs 
regrettons  que  i.i  nature  de  notre 
ouvrage  nous  oblige  -à  ne  citer 
que  les  suivans  :  i°  Dell'  AiUira 
città  (H  Arna,  Perouse,  1 800,  in-8'; 
2'  le  anlirlie  iscrizioni  perugine 
cou  itna  disstrtazione  salle  origini 
(U  Ptrngin,  ibid.,  iHri'i.  3  vol. 
in-''j°;  5'  Islorin  de'  >li.sripliriuli , 
ibid.,  i8o/|,  iri-8°;  /j"  la  Tipoi^ra- 
l'ia  péril gina  ilrt  .srrolo  Xf^^  ibid., 
l8u(),  in-8°;  5*  Metnorie  per  .scrui- 
re  alla  vita  di  IMatiirartzio,  ibid., 
1807,  in-8";  6"  Memorie  di  Jacopo 
A ntif/uarj,  elc.  ibid.,  i8i5,  in-8'; 
7*  Délia  zicca  t  délie  tnonete  peru- 
gine,  ibid.,  1816,  in-:'!";  %* Lezioni 


VER 


i85 


elemeutarl  di  archeologla ,  i!>id., 
1822,  2  Vol.  in  8";  9°  Bihliogra- 
fia  stoiico-periigina  y  ibid.,  ih25, 
in-4'';  10"  Congetlare  sopra  una 
grande  iscriiione  etrusra  scoperta 
nel  1822,  ii)id.,  ir2.!),  iu-4°;  «  •" 
Di  un  quadranle  unico  ed  inedito 
del  museo  di  Pcrugia,  ibid,,  i825, 
in-8". 

VKIVNEITJI  PUIRASEAU  (le 
BARON  Joseph  de)  ,  d'abord  maire 
de  sa  comn)urie,  |>uis  membre  du 
conseil-général  de  départi-ment , 
et  enfin  président  du  tribuiial  de 
Nontron.  fut  nommé,  en  1791, 
par  le  déparlcuient  de  la  Dorilo- 
irne  ,  député  j"!  l'assemblée  légis- 
lative, 011  il  siégea  an  côté  droit, 
et  vola  avec  le  parti  nmdéré.  A  la 
fin  de  la  sessicm  ,  il  se  retira  dans 
.'^a  coîiimune  et  échap[)a  aux  pros- 
criptions de  la  terreur.  Juge-de- 
paix  fie  Biissière-Badil,  haut-juré 
à  la  hante-cour  de  Vendôme  vn 
179;,  président  du  trii>unal  cri- 
minel de  la  Dôrdogiie  eu  1799, 
préfet  de  la  Corrèx'e  eu  1  Hoo,  pré- 
fet du  Mont-Blanc  en  1802,  il  fut 
appelé  ,  en  1804,  à  'a  diriction 
des  droifs-réunis  iU\  déparlement 
de  la  Rlayenne,  fonctions  qu'il 
refusa.  C'est  alo^s  que,  de  Tagré- 
inent  du  ministre  de  l'intérieur, 
il  s'occupa  de  rédiger  la  stiili^lique 
du  département  du  iMiuil-Blanc. 
Il  tlirigea  ensuite  un  bureau  par- 
ticulier près  du  minislre  de  l'in- 
lérieur,  présida  le  conseil  électo- 
ral de  Nontron  en  1809,  et  devint 
en  1810  membre  du  corps-légis- 
latif; le  29  décembre  i8i3.  il  ap- 
puya, en  comité  général,  la  pro- 
posiliou  de  f  lire  imprinvr  le  rap- 
))ort  de  M.  J.ainé,  présenté  an  non» 
d'une  commission  exiraordinaire. 
Le  24  septcinbre  iSi4,  il  parla  en 


■ 


iS6 


VER 


faveur  du  projet  de  naturalisation; 
le  28  octobre,  il  appuya  le  projet 
de  reslitulion  aux  émigrés,  de 
leurs  [jiens  non  vendus;  il  rleinau- 
da  ensuite  que  les  biens  cédés  à 
la  caisse  d'auiorlissemeul  et  aux 
hospices  fussent  restitués  à  leurs 
propriétaires,  avec  la  clause  ex- 
presse de  prendre  des  mesures 
propres  à  tranquilliser  les  acqué- 
reurs de  biens  nationaux.  Le  27 
décembre,  il  se  prononça  pour  les 
auiandemens  de  la  commission 
au  projet  de  loi  sur  la  courdecas- 
sation.  M.  Vcrneilh-Puiraseau  fit 
partie  de  la  chambre  des  cent  jou7'Sf 
en  »8i5.  Depuis  1814  jusqu'en 
1823,  il  a  constamment  siégé  aux 
diverses  chambres,  à  l'exception 
de  la  chambre  dite  introuvable ,  où 
il  n'a  point  été  appelé.  Dans  la  ses- 
sion de  1819,  il  s'est  [>rononcé 
contre  les  deux  lois  d'exceptions; 
toutefois,  il  a  voté  pour  le  nou- 
veau systènie  électoral,  en  ap- 
puyant l'amendement  de  M.  Koin 
\voy.  ce  nom),  qui  conserve  en 
partie  l'élection  directe.  M.  Ver- 
neilh  -  Puiraseau  a  été  nommé 
par  le  roi  baron  et  chevalier  de  la 
légion-d'honneur.  On  a  de  lui  : 
1°  Statistique  du  département  du 
Mont-Blanc,  Paris,  luO^yin-Zi" 
de  570  pages.  Elle  passe  pour  la 
meilleure  de  toutes  les  statis- 
tiques qui  ont  été  pnl)liées,  au 
nombre  de  près  de  deux  cents , 
sur  les  différens  déparlemens. 
Une  première  édition  in-folio, 
commencée  à  l'imprimerie  du 
gouvernement,  n'a  pas  été  ter- 
minée; 2°  Observations  des  com- 
missions consultatives  sur  te  pro- 
jet du  code  rural.  I.e  minisli'e  de 
l'intérieur  fit  remettre,  en  1817, 
des    exemplaires   de.   cet   ouvra- 


VER       - 

gc  aux   bibliothèques  publiques.. 
VEUNES  (Jacob),  célèbre  pas- 
teur genevois,   naquit   à  («enève 
en  1728.   Il  fit  de  brillantes  élu- 
des, et  montra  dès-lors  le  germe 
des  taîens  qu'il  développa  dans  la 
suite.    Après    s'être    long-temp* 
préparé  au  ministère  évangélique, 
auquel  il  se  destinait,  il  fut  nom- 
mé, en  1770,  pasteur  de  sa  villtt 
natale.  Ami  de  la  liberté,  il  s'al- 
tdciia  au  parti  pa^ciutique ,  et  fut 
enveloppé    dans    sa    disgrâce    en 
1782.    Forcé   de    s'exiler  à  celle 
époque,  il  ne  rentra  dans  sa  pa- 
trie  qu'après  la    révolution    qui  " 
éclata  en    1789.  Il  mourut  à  Ge- 
nève en  1791 ,  à  Tâge  de  G5  ans  « 
laissant  l'exemple  d'une  vie  plei- 
ne (le  bonnes  œuvres  et  d'utiles 
travaux.  On  doit  au  pasteur  Vcr- 
nes ,    outre  un  journal   intitulé  : 
Choix  littéraires,  en  24  vol.  in-ia, 
des  Lettres  et  dialogues  sur  le  chris- 
tianisme de  J.   J.   IVousseau,  en 
réponse  à  quelques  lettres  de  cet 
homme  célèbre;  un  roman,  sou.s 
le  titre  de  Conférences  philosophi- 
ques; un  Catéchisme  à  l'usage  de 
toutes  les  religions  chrétiennes  , 
et  enfi.i  VExamen   de  cette  ques- 
tion, qui  sans  doute  avait  alors  de 
l'importance  :  Convient-il  de  di- 
minuer à  Genève  le  nombre  des 
sermons?  Jacob  Vernes  sut  aussi 
s'exercer  dans  des  genres  moins 
sérieux  :    il  faisait  facilement  des 
vers.   Les  sermons  de  M.  Vernes 
n'ont    été   imprimés  qu'après   sa 
mort;   c'est,  au  rapport  des  pro- 
teslans  eux-  mêmes,  ce  qu'ils  ont 
de  mieux  en  ce   genre.  Son  fils, 
François   Vernes,  né  en  janvier 
1705,  s'est  ojcnpé  avec  succès  de 
travaux  littéraires,   et   a  produit 
une  foule  d'ouvrages  en  prose  et  en 


'     VER 

\er5.  On  accorde  quelque  estime 
à  son  poëme.  en  16  chants,  inti- 
tulé :  la  Franciade,  a  vol.  in-8°. 
1790.  11  a  été  l'éditeur  des  Ser- 
mons de  ^on  père. 
*  VEllNET  (CtAroE-JosEPH),  est 
né  à  Avignon  1»;  \[\  août  17  «4-  ^^'- 
re,  et  fi^rand-père  de  peintres,  il  é- 
tait  fils  d'un  peintre,  d'Antoine 
"Vernet,  qui  fut  son  premier  cl  à 
peu  près  son  seul  maître.  A  18 
ans,  il  quitta  le  (lomtat  pour  se 
rendre  à  Rome.  Le  hasard,  qui  le 
décida  à  y  aller  par  mer,  détermi- 
na la  direction  de  son  talent.  Ha- 
bitué à  dessiner  tout  ce  qu'il  ren- 
contrait ,  et  n'ayant  devant  les 
yeux,  pendant  la  traversée,  que  la 
mer,  le  ciel  et  des  vaisseaux,  il  des 
sina  ces  ohjets  dans  toutes  lea  si- 
tuations oi"i  le  hasard  les  lui  pré- 
senta .  et  il  se  reconnut  appelé  à 
peindre  surtout  les  scènes  si  va- 
riées, et  toujours  sublimes  dont 
l'Océan  est  le  ihérarc.  Dans  son 
enlhousiaMiie,  il  ne  croyait  pas 
pouvoir  les  contcmplera<sez  long- 
temps et  d'assez  près.  Du  rivage 
il  eût  été  trop  loin  d'elles;  cVst 
au  milieu  de  la  tempête  même 
qti'il  se  plut  à  en  étudier  les 
accidens  an  pied  d'ur»  mât  au- 
quel il  s'était  Tiit  lier.  Pendant  que 
chacun  tremblait  et  ne  voyait  au- 
tour de  soi  qu'un  ciel  prêt  à  fou- 
droyer le  bâtiment,  qu'une  mer 
prête  ;'i  l'engloutir;  m  ces  momens 
de  silence,  qui  dans  b-s  grands  pé- 
rils sont  aussi  bien  que  les  cris, 
une  expression  de  terreur,  on  en- 
tendit Vernet  s'écrier  que  cen 
beau!  et  toute  sa  personne  était 
imituée  d'une  exaltation  que  le 
pinceau  d'Horace,  son  pclit-fils,a 
bien  mieux  rendu  que  notre  plu  - 
me.  Vernet  resta  vingt  aQ5  en  Ila- 


VER 


187 


lie,  où  il  fit  un  grand  nombre 
d'ouvrages  qui  étal)lirent  sa  répu- 
tation. On  citait  principalement 
ceux  dont  il  orna  la  galerie 
de  Borgbèse,  et  ceux  du  palais 
Kondanini,  où  il  s'est  plu  à  imi- 
ter le  faire  de  Salvator  Rosa  II 
fut  lié  en  Italie  avec  tous  les  ar- 
tistes célèbres  de  son  temps,  mai* 
plus  particulièrement  avec  le* 
peintres  Solimèncs,  Jean  Paul  Pa- 
nini,  Locatclli  ;  il  fut  lié  encore 
de  la  plus  intime  amitié  avec  l'Or- 
])hée  de  l'époque,  avec  Pergolese. 
Ce  grand  musicien  quillait  peu 
l'atelier  de  Vernet,  où  il  trouvait 
au.isi  d'heureuses  inspirations.  Il 
y  composa  entre  autres  im  verset 
de  cet  admirable  Slahat,  qui  après 
un  siècle,  est  encore  cité  comme 
un  modèle  de  mélodie  et  d'expres- 
sion. Vernet  avait  en  possession 
le  brouillon  de  ce  verset,  qu'il  ap- 
porta à  Paris,  et  que  sa  famille 
possède  peut-être  encore.  En  1752, 
il  fut  appelé  en  France  par  le 
gouvernement  pour  })eindre  les 
])rinclpaiix  ports  de  mer.  Nommé 
à  eelte  époque  membre  de  l'aca- 
démie royale  de  peinture,  il  y  fut 
élevé  au  rang  de  conseiller  en 
1 763.  11  est  mort  en  1 789.  On  por- 
te à  près  de  200  le  nombre  des  ta- 
bleaux grands  et  petits  qu'il  a 
faits  en  France,  de  1752  à  1789.  La 
mort  l'a  surpris  en  quelque  sorte 
le  pinceau  à  la  main,  et  ce  pinceau 
n'a  pas  eu  de  vieilb'sse;  tous  se» 
ouvrages  sont  dignes  de  lui.  La 
seule  récompense,  la  seule  dis- 
tinction que  le  gouvernement  ait 
accordée  à  Vernet,  c'est  un  logc- 
mcrt  au  Louvre.  Il  avait  épousé, 
à  Rome,  i\l""  Parker,  fille  d'«m  An- 
glais callndique  ,  odicier  (tans  l.*» 
n»arinc  du  pape.  Verncl  a  joui  de 


!r 


i88  VEn  VER 

son  vivant  de   la  pins  haute  con-  nu  sous  le  nom  de  CABLE-VERTtET, 
sidératioti.  Il   la  (levait  à  ses    la-  peirilre    d  histoire  ,     ineiiibie    de 
res  qualiîcs   non   nioin.^  (iii'à   ses  linstilnt,   thcvalier  dts  or<li»^5  de 
f^rands  talm-;    i!  avail    hcnncfmp  Sainl-Michfd  cl  (!••  la  It-fiion-d'hon- 
d  esjHit,  de  j^aîté,  de  iiatnri'i,  et  en  neur.  esl  né  à  BMid-aux  \<:  i  ]  i'"'"''- 
niôme  ienip>l)eanc,on[)d',i-pi()!iib,  l^SS.  Elevé  de  son  jx'-re,  il  a  eonj- 
dc   mesure  et  même  de  dignité,  menée  de.  très-hiMiiie  heure  rélu- 
Répando   dans  la  meilleure  coni-  de  de  la  peinture;  à  17  ans,  il  ob- 
paj^nie,  il  savait  s:"ûter  les   i)lai-  tint  à  l'académie  le  second  prix: 
sirs  et  y  cnntrihner.  Il  racontait  à  à  -i^,  en  1  782,  il  remporta  le  grand 
iT)erveille.  A  i'aris  comme  à  Home,  prix,  et  partit  pour  Uonie  en  qna- 
il  a  été  recherché  partons  les  hom-  lité  de  pensionnaire  du   roi;    en 
mes  célèbres  de  son   temps;  il  a  1  787,  C.  Yernel  a  été  reçu  niein- 
élé  l'ami  de  plusieurs  d'entie  eux.  bre  de  racatlémie  royale  de  pein- 
Peu   de  peintres   ont  joint  à  une  turc,  après  avoir  présenté  pour  sa 
pralifjue  plus  habile,  uae  théorie  réception  i\n   tableau  de  i5  pieds 
plus    prolonde,  plus  juste  et   en  de    proportion,    représentant    le 
même   temps  [)lus  claire.  Il  par-  triomphe  de  Paul  Emile;  c'est  le 
lait  épalemcnl  bien  de  son  art  aux  premier  des  grands  ouvrages  his- 
gens  du   monde  et  aux   artistes,  toriques  qu'il  a  faits.  En  i8i4«'''i 
quoiqu'il   leur  dît,    ou  peut-être  été  ru)mmé  membre   do  l'institut 
parce  qu'il  leur  disait  les  mêmes  royal.    Ses    principaux    ouvra'i,es 
choses  d'une  maïuère  toute  diil'é-  sont  :  la  Bataille  de    Rivoli,    10 
rente,  et  qu'il  avait  le   talent  de  pieds  :  la  Bataille  de  Marenj;o,  02 
traduire  pour  les  uns  dans  la  lan-  pieds;  la  Bataille  d'Austerlilz,  Dé- 
gue    usuelbî    ce    (pi'il   expliquait  part  des  Maréchaux,  2-2  p.  ;  l'En- 
aux  autres  dans  la  langue  spécia-  tréedans  Milan,  gpieds;  la  Batail- 
le. Diderot,  enchanté  de  sa  con  ver-  le  de  Wagram,  i5  pieds;  dans  de 
sation,  l'invita  à  composer  un  ou-  moindres  proportions,  uo  grand 
vrage,  en  lui  proposant  d'en  re-  nombre  de  sujets  de   guerre,  de 
xoivhi  rcùixction.  f^otre  slylc  gâte-  chasse  ou  de  taniaisie;    des  por- 
r ai t  ma  peinture f  répondit  Vornet.  traits  à  idieva!  ,  jarrni  lesquels  se 
Honnête,  droit,  facile  et  bon  dans  trouvtMit  celui  de  >apc!eon  et  ce- 
ses  discours  connue  dans  ses  ac-  lui    de    Mgr.    le    duc    de.    Berri. 
tions  ,  il  fui  toute  sa  vie  complète-  A  cette  suite  d'ouvratre?  peints, 
ment  étranger   aux  tracasseries,  dont  il  serait  impossible  de  faire 
aux  rivalités,  aux  haines  d'acadé-  ici    l'analyse,    on    peut    joindre 
mie   ou  de   jMoi'ession.   Prodigue  une  suite  bien  plus  nombreuse  en- 
de  ses  conseils  el  de  son  appui  à  ccre    de  dessins    et  de    lithogra- 
tous  ceux  qu!  les  réclamèrent,   il  p'iies  dans  ton?  les  genres  el  sur 
ne  se  permit  jamais  la  plus  légè-  tous  le?  sujets,   depuis  ceux  qui 
re  plaisanlerie  contre  le  plus  min-  appartiennent  à  riiistoire  jusqu'à 
ce  talent  ou  le  plus  médiocre  ou-  ceux  <pii  représentent  les  scènes 
vrage.  les  plus  familières.  Parmi  les  pre- 
VEBNET     (  Antousk- Charles-  miers,   on   distingue   28    dessins 
Horace),  fils  du  précédent,  con-  in-fol.,  pour  les  campagne»  d'Jla- 


j/y/A, 


e^r//e/~^. 


TIu/utI  L'/eiirr  fiiiuc . 


Fiviiii/  ,M .  !•/  Xra/^  , 


VER  VEa                   189 

lie  du  général  Honaparle.  Veniet  tableaux  ,  qui  embrassent   un  si 
en    entrant    dans    l  académie   de  vaste   horizon,   et   au    uiilieu   de 
peinture,  (jui  depuis  s'est  fondue  celte  multiplicité  d'aciions,  Ho- 
dans  la  4'  classe  de  linsiitut,  eut  race  Vernel  a  su  appeler  l'allen- 
la  vive  satisfaction  d  y  siéger  près  tion  d'abord  sur  tout  ce  qui  con- 
de  son  père;  il  y  siégera  probable-  court  à  déterminer  le  résultat  que 
ment  aussi  près  de  son  Uls.  poursuit  l'armée  qui  doit  vaincre, 
VEKNET  (FIorace)  .  ûls,  petit-  et  indiquer  par  le  mouvement  de» 
ùb  ,   arrière-petil-fils  des  précé-  lignes  de  balaillcquellc  sera  l'issue 
dens,  est  né  à  Paris  le  5o   juin  de  l'action  qui  s'engage  entre  les 
1789,   aux   galeries  du    Louvre,  corps  qui  sont  aux   prises.  Il  ne 
où  demeuraient  son  père  et  son  néglige  pas  cependant  les  actions 
grand-père.  II  sénjblait  que  prête  particulières,  et  ne  s'allacbe  pas 
à  nous  retirer  un  Vernct,  la  na-  moins  à  peindre  les  individus  que 
lure  ait  voulu  conipcnser  aussitôt  les  mas-es.  Mais  ces  détails  sont 
cette  perte.  Il   semblerait  aussi,  liés  avec  tant  d  habileté  à  l'ensem- 
d'après  la  diversité  des  apliludes  ble  de  l'action,  qu'il  faut  y  reve- 
dont  elle  a  doué  le  dernier  des  nir  pour  les  distinguer  et  s'aper- 
Vernet ,  qu'elle  ait  voulu  repro-  cevoir  que  cet  immense  tableau 
duire  les  talens  de  trois  généra-  est  coniposé  d'une   innombrable 
tions  dans  un  seul  individu  que  de  quantité  de  tableaux  particuliers 
plus  elle  dota  d'un  talent  qui  lui  qui  s'y  fondent  sans  s'y  perdre, 
est  particulier.   Né  au   milirn  de  Les  batailles  d'Horace  Vernet  res- 
ta fermentation  généreuse  qui  pré-  semblent  à  ces  récits  où  l'histoire 
céda  la  révtdulion,  Horace  Ver-  de  chacun  se  retrouve  dans  l'iiis- 
net  semble  <n  j)articippr;  il  a  en  toire  générale ,  qu'avant  tout  on 
lui  je  ne  suis  quoi  d'analogue   à  a  le  besoin   de  lire  tout  entière, 
l'esprit  qui,  à  cette  époque,  ani-  Horace,  qui  par  se-*  batailles  s'est 
niait  tontes  les  têtes  ,  mais  qui,  en  montré    l'émule   de  son   père,  a 
le  portant  vers  ce  qui  est  grand,  annoncé  aussi,  par  plusieurs  ta- 
ne  l'a  jamais  fait  dévier  de  la  ligne  bleanx  de  marine,  que  son  grand- 
du  bon  et  du  lieau.   Conduit  par  père  avait  un  successeur.  Lt  quel 
tui  noble  palriolisme ,  c'est  on  re-  est  le  genre  où  il  ne  soif  pas  ap- 
traçarit  les  faits  les  plus  glorieux  pelé  à  réussir?  Des  portraits  pleins 
aux  armes  françai.-e»,  que,  si  jeu-  de  vie  et  de  pensée,  des  scènes, 
ne,    il    s'est   ac<piis   déjà    une    si  tantôt  gracieuses,  tantôt  piaisan- 
belle  réputati'in.  l>es  baiailies  de  tes,  tantôt  terribles,  mais  toujours 
Jeinmappes,  de  Montmirail  ,   de  pleines  d'esprit  et  d'expression,  et 
Hanau  ,   l'ont   placé    au    premier  dont  les  sujets  sont  pris,  soit  dans 
rang  dt-s  peintres  dans  ce  genre,  l'intérieur  des  familles,  soit  dans 
où  il  n'e»l  pas  facile  d'atteindre  ù  Icslravuuxou  lesamusemensde  la 
la  j)erlection  ;  dans  ce  genre,  qui  campagne, soitdanslesaccidensde 
vent    surtout    l'exactitude    et    le  la  chasse,  de  la  guerre  et  du  bri- 
mouvemenl,  étf)ù  r«.'xactilude  est  gandage,qui  ont  ensendjle  plus 
si  près  de  la  froideur  et  le  mon-  d'analogie  qu'on  ne   le  croirait, 
vemcnt  de  la  confusion.  Dansées  prouvent  qu'il  n'y  a  rien  d'ina- 


igo 


VER 


bordable  pour  son  pinceau  facile 
et  fécond.  Mais  ce  qui  le  distin- 
gue entre  tant  d'h.ibiles  arlistes 
dont  cette  époque  abonde,  c'est 
l'esprit  de  srs  coujposilions;  non- 
•eulenjcnt  elles  enchantent  l'œil, 
elles  satisfont  l'imagination,  mais 
elles  provoquent  souvent  les  plus 
profondes  réflexions.  Tel  est  par- 
ticnlièrenient  le  mérite  du  Soldat 
laboureur,  tableau  où,  sans  y  pen- 
ser peut-être  ,  Horace  Vernet  a 
mis  en  action  cette  belle  image 
de  Virgile  : 

Agricola  incurvo  terrant  molitur  aratro, 
Exesa  inveniet  scabrd  rubiginc  pila,  . 
Aut  gravibus  rosirit  galeas  pulsabit  inanes, 
Grandiajut  eff'ossi.i  mirabitur  oaa  scjiuUris. 

Un  jour  le  laboureur  dans  ces  mêmes  sillons 
Où  dorment  les  débris  de  tant  de  bataillons, 
Heurtant  avec  le  soc  leur  antique  dépouille, 
Trouvera  sous  ses  pas  des  dards  rongés  de  rouille, 
Entendra  retentir  les  casques  des  héros, 
Et  d'un  œil  effrayé  contemplera  leurs  os. 

Ce  mérite  se  retrouve  aussi  dans 
le  Soldat  de  IVaterloo.  Qui  peut, 
sans  tomber  dans  un  abime  de 
médilaliuns,  otmtempler  sur  ce 
champ  de  bataille  ce  soldat  blessé 
survivant  seul  à  ses  compagnons, 
à  ses  chefs,  qu'il  vient  d'enterrer, 
colonne  chancelante,  mais  debout 
encore  au  milieu  des  ruines  du 
monument  dont  elle  a  fait  partie? 
L'idée  de  ce  tableau  est  liée  inti- 
mement à  la  pejisée  de  l'autre.  Ce 
sont  deux  scènes  d'un  même  dra- 
me, séparées  par  quelques  siècles 
ou  par  quelques  mois.  Si  nous 
voulions  analyser  toutes  les  con- 
ceptions d'Horace  Vernet ,  le  plus 
fécond  peut  -  être  des  peintres 
qu'ait  produits  la  France,  cet  ar- 
ticle n'aurait  pas  de  bornes.  On 
sait  qu'en  ibau  les  tableaux  d'Ho- 
race Vernet  suffisaient  déjà  seuls 
à  remplir  son  vaste  atelier,  où  le 
public  vint  jouir  de  ces  compo.-i- 


VER 

lions,  auxquelles  l'entrée  du  Lou- 
vre était  alors  refusée.  Nous  ren- 
voyons le  lecteur  au  catalogue  dres- 
sé à  celte  occasion  par  MM.  Jay  et 
Jouy.Nous  ne  pouvons  néanmoins 
refuser  ici  ime  attention  particu- 
lière au   Chien  du  Régiment ,    la 
production  la  plus  naïve,  la  plus 
piquante  et  la  plus  vraie  peut-être 
qui  ait  été  souscrite  du  noui  de 
Vernet.  Sous  le  feu  de  la  mitraillq 
et  de  la  mousquelerie.  au  fort  de 
la  bataille,  deux  jeunes  tambours 
ne  s'occupent  que  de  leur  barbet 
blessé; ils  lui  prodiguent  tout,  jus- 
qu'à leur  eau-de-vie;  indiCféren» 
aux  dangers  qui  les  entourent,  à 
la  mort  qui  pleut  autour  d'eux, 
ils  sont   tout  aux  souffrances  de 
leur  chien.  Ils  sont  intrépides  à 
force  de  sensibilité.  C'est  par  une 
cause  tout  opposée  que   l'est  ce 
personnage    qu'on    a    rencontré 
partout;   ce  capitaine  qui,    tout 
à  sa  manœuvre,  ne  s'occupe  pas 
plus  de  ce  barbet  que  si  c'était  un 
homme.  11  en  est  de  ce  petit  ta- 
bleau comme  certains  petits  poè- 
mes  que  leur  perl'ectiun  met  si 
fort  au-dessus  de  tant  d'épopées. 
Est-il  beaucoupdegrands  tableaux 
d'hislt»ire  qui  vaillent  le  Chien  du 
Régiment?    Il    suffirait   à    la   ré- 
])utation  d'un  artiste.  La  barrière 
de  Clichj,  la  défense  de  Sarragos- 
se,    le  Cheval  du  Trompette,  mé- 
riteraient aussi  des  articles  à  part; 
mais  ce  serait  à  n'en  pas  finir.   Et 
l'auteur  de  tant  d'ouvrages  n'a  pas 
IrenJe-six  ans!  Puisse-l-il  soutenir 
et  accroître  long  -  temps  encore 
l'honneur  du  nom  qu'il  porte?  Il 
en  est  peu  d'aussi   nobles.   Trois 
générations  suffisent  pour  chan- 
ger en  gentilhomme  le  petit-fib 
d'un  obscur  anobli;  et  depuis  qua- 


VER 

(re  générations,  les  Veri>(;t  fonl 
illustres  !  Les  Didot  «enl.><  se  sont 
fait  une  pareille  noblfsse. 

VERNIER  (le  COMTE  Théodore), 
né  ù  Lons-Ie-Saultiier,  était  avo- 
cat à  l'époque  de  la  révolution, 
dont  il  soutint  les  principes  avec 
modération;  nommé,  en  1789, 
député  du  tiers-état  du  bailliage 
d'Aval,  en  Franche-Comté,  aux 
états-généraux,  il  s'y  occupa  sur- 
tout des  finances.  Il  publia  eu 
1791,  sur  cette  paitie,  un  ouvrage 
qu'il  inlilula:  Élémens  de  finances. 
1 1  présida  l'assemblée  vers  le  même 
temps,  ()roposa  en  juin  suivant,  au 
moment  du  départ  du  roi,  une  fa- 
brication d'armes  dans  toute  la 
France  ,  et  présenta  divers  projets 
contre  l'émigration,  qui  ne  furent 
point  admis.  Rentré  dans  ses  foyers 
après  la  session,  il  fui  <lé[Hilé  par 
la  département  du  Jura,  en  sep- 
tembre I79'2  ,  à  la  convention  na- 
tionale ;  il  vola  la  détention  de 
Louis  XVI,  comme  législateur, 
et  refusa  de  prononcer  comme  ju- 
ge. H  y  reprit  ensuite  son  travail 
favori  ,  celui  des  finances,  où  il 
avait  déjà  fait  preuve  de  lumières. 
Il  ne  put  écliappiT  aux  proscrip- 
tions du  19  mai,  et  fut  un  des 
73  députés  mis  en  arrestation. 
Rappelé  dans  le  «eiu  de  la  con- 
vention après  le  9  thermidor,  il 
présidait  l'assemblée  au  1"  prai- 
l'ial  ati  3  (20  mai  «795),  et  ne 
-e  laissa  point  intimider  par  les 
menaces  de  la  multitude  furieu- 
se qui  s'était  emparée  de  la  sal- 
le. t\lembrc  du  conseil  des  an- 
cien» ,  sous  le  directoire ,  il  ne 
ftit  point  atteint  par  la  révolution 
du  18  iructidor,  et  «r  montra  fa- 
vorable à  celle  du  18  brumaire; 
il  fit  partie  de  la  commission  in- 


VER  191 

tcrmédiaire  de  son  conseil.  Créé 
sénateur  lors  de  l'organisation 
du  gouvernement  consulaire  en 
1799,  il  conserva  ce  titre  jus- 
qu'en 1814.  Il  adhéra  alors  à 
la  déchéance  de  l'empereur,  et 
au  rappel  de  la  maison  de  Rour- 
bon.  Le  roi  le  nomma  pair  de 
France,  le4j<iin  i8i/|.  Napoléon 
ne  lui  ayant  point  conservé  cette 
dignité  à  son  retour,  en  18 15,  il 
reprit  son  rang  dans  la  chambre 
royiilc,  à  la  seconde  restauration 
des  Bourbons.  Le  comte  Théodo- 
re Vernier  est  mort  en  1818.  Il  a 
laissé,  comme  littérateur,  un  ou- 
vrage pour  faciliter  la  lecture  de» 
Essais  de  Montaigne ,  et  un  Abré- 
gé analytique  deSénèqae.  Ces  deux 
ouvrages  ont  obtenu  im  succès 
d'estime. 

VEKNINAC  DE  SAINT-MAUR 
(N.),  né  i\  Cahors  en  i'jV'>i.  vint 
à  l*aris,  jeune  encore,  tt  s'y  fit 
connaître  par  quelques  pièces  de 
vers,  qui  furent  insérées  dans  le.i 
journaux  et  dans  VAlmanacli  des 
Muses.  Il  embrassa  avec  trans- 
port, en  1789,  la  cause  de  la  li- 
berté; fut  envoyé  par  le  roi,  le  1"' 
juin  179»,  dans  Iccomtat  Venais- 
siu  ,  avec  Lescènc,  Desmaisons  et 
l'abbé  Mulot,  pour  y  apaiser  le.-» 
troubles  qui  désolaient  ce  malheu- 
reux pays.  Ils  arrêtèrent  momen- 
tanément le  îours  des  assassinats, 
mais  ne  prirent  point  les  mestires 
propres  à  les  empêcher  de  se  re- 
produire; au'si  se  renou  vellèrent- 
ils  bientôt  à  la  Glacière,  et  peut- 
être  furent-ils  le  prélude  de  ceux 
dont  Paris  devait  être  le  théAfre 
un  an  après,  dans  les  premiers 
jours  de  septembre.  Il  tut  nom- 
mé mifiislre  de  France  en  Suède, 
où  il  arriva  le  rG  mai  1795!.  deux 


192 


VER 


jours  apn'is  les  fuiiér;»iIl<'S  de  Giis- 
lavt'   III.   Quel!|u«;  dis})()sée   que 
lui  la  cour  (l'j  Stiède  à  adopter  les 
prinripc*  de  la  révoliiliini  l,Vi"içai- 
se,  elle  se  inoiitia  peu  favorable  à 
M.    Verniuac,   el  lorsque  l'innée 
suivante,  le  baron  de  Staël  fui  en- 
voyé de  Suède  a  Paris,  six  semai- 
nes après  la  mort  de  Louis  XVI, 
les  deux  gouvern(>mcns  rappelè- 
rent respeclivement  leurs  minis- 
tres. Chargé,  en  février  1795,  de 
se    rendre  à  Constantinople    avec 
le  titre  d'envoyé   extraordinaire, 
il  fit  son  entrée  dans  cette  ville  le 
26   avril.    Malgré   le    cérémonial 
employé  jusqu'alors,  à  sa  premiè- 
re audience,  il  se  fit  précéder  d'u- 
ne musique  militaire,  et  escorter 
d'un  détachement  de  troupes  fran- 
çaises, la  baïonnette  au  bout  du 
fusil,  jusque  dans  la  seconde  cour 
du   sérail,    où  elles  présentèrent 
les  armes  au  grand  visir  et  aux 
autres  membres  du  divan.  Ce  ne 
fut  pas  la  seule  innovation  à  la- 
quelle cette  anibassade  ait  donné 
lieu;  M.  de  Verninac  est  le  pre- 
mier étranger  qui  ait  fait  impri- 
mer et  dislril)uer  une  gazette  dans 
sa  langue  à  Constantinople.  Il  re- 
çut du  grand-visir  le  titre  de  ci- 
toyen;  mais  comme  ce  mot  n'a- 
vait pas  d'équivalent  en   turc,  il 
fut  prononcé  en  français.  Chargé 
de  notifier  à  la  Porte  le  traité  de 
paix  avec  la  Prusse,   il  réussit  à 
faire    reconnaître    la    république 
française,  et  à  obtenir  l'envoi  d'un 
ambassadeur  pernianent  à  Paris, 
dans  la  personne  de  Seïd-A!y-Ef- 
fendi;  mais  il  fut  moins  heureux, 
malgré   ses  conférences  avec  les 
ministres  de  Suède  et  de  Prusse, 
dans  le  projet  de  faire  entrer  le 
grand-seigneur  dans  une  îdliancc 


VER 

avec'la  France,  ayant  trouvé  une 
opposition  constante  de  la  part  «le 
tous  |(-s  autres  ambassadeur-;,  et 
surtout  de  ceux  di;  Russie  et  d'An- 
gleterre.   II    dem;tnda  son  rappel 
à  cette  é[)o(|ue,  fut  remplacé  par 
Aubert  du  iiayet,  et  quitta  Cons- 
tantinople dans  les  premiers  jours 
de  noveujbre  '796.  Forcé  de  dé- 
barquer à  Naple.-  ,  il  y  fut  arrêté 
et  gardé  à  vue  pendant  quelques 
mois,  et  n'eut  la  liberté  de  revenir 
en  France  qu'en  mai  1797.  Le  9 
juin  de  la  même  année,  il  fut  re- 
çu en  grande  audience  par  le  di- 
rectoire-exécutif, auquel  il  pré- 
senta un  étendard  ottoman  et  un 
diplôme  de  Selim  III:  il  était  in- 
troduit par   Charles  de  Lacroix, 
ministre  des  relations  extérieure», 
dont  il  épousa  la  fille  peu  de  temps 
après.  A  la  première  création  des 
préfectures,  en  1800.  il  lut  nom- 
mé par  le  gouvernement  consu- 
laire à  celle  du  Rhône,  rrt  reçut,  en 
1801,  la  mission  de  se  rendre  dans 
le  Valais,  qui  se  constitua  bientôt 
en  république,  sous  la  protection 
de  la  France.  Pour  reconnaître  le 
zèle  avec  lequel  il  avait  servi  les 
intérêts  de  ce  petit  état,  la  diète 
valaisanne  lui  accorda,   pour  lui 
et  sa  famille,  les  droits  et  titres  de 
citoyen  du  Valais.  Depuis  ce  mo- 
ment, il  resta  san?  fonctions  publi- 
ques. En  sei)tembre  181G,  son  ar- 
roiulissement  l'élut  candidat  à  la 
chambre  des  députés;  mais  l'esprit 
du  temps  empêcha  sa  nomination. 
RI.    de    Verninac  ,     mort    de^tuis 
plusieurs    années  ,   avait  publié  : 
1°    Oraison     funèbre    de    Louis- 
PkUippf  dur  d'Orléans^   1-86;  a* 
un  Recueil  de  poésies;  .">'  Recher- 
ches sur  les  cours  et  les  procédures 
criminelles  d'Angleterre,  extraites 


_>^c  '€.  f^utoj' 


VEll 

<le  Blackstonc  sur  les  lois  anglai- 
ses, 179»»  in-8°;  4*  Description 
physique  et  politique  du  départe- 
ment du  Rhône,  1S02,  in-8". 

VERVIEK  (Jean-Baptiste),  né 
à  Gîintl  le  8  murs  1760,  eiiibiassa 
de  bonne  heure  1%'tat  militaire," 
aïKjiiel  cependant  il  renonça,  quoi- 
que revêtu  d'un  grade  très-hono- 
rable, pour  s'appliquer  entière- 
ment aux  sciences  et  aux  beaux- 
arts.  Il  fit  de  bonnes  et  rapides 
«tudes,  et  fut  nommé,  en  1777  « 
docteur  en  médecine  ,  et  en  1  779, 
médecin  m  chef  des  armées  de 
l'impératrice  Marie-Thérèse,  en 
Belgique.  Après  la  guerre  de  Ba- 
vière, le  gouvernement  autrichien 
le  nomma  médecin  et  chirurgien 
en  chef  d'une  expéditi'>n  d'AI'ri- 
que  et  des  Antilles,  en  le  char- 
geant d'une  uiission  secrète  et 
particulière.  Avi-le  d'étudier,  sous 
un  autre  hémisphère,  les  mer- 
veilles de  la  nature,  il  entreprit, 
de  son  propre  mouvement,  difTé- 
l'ens  voyages  de  long  cours.  En- 
fin ,  de  retour  dans  sa  jiatrie,  il  y 
exiTça  pendant  55  ans  ,  avec  la 
plus  grande  dislincliou,  l'art  dif- 
ficile de  guérir,  et  consacra  sans 
cesse  aux  sciences  et  aux  arts, 
dont  le  gnftt  était  sa  passion,  le 
peu  de  loisirs  que  lui  laissait  une 
pratique  nombreuse.  Il  fut  succes- 
sivement ,  à  Gand ,  médecin  en 
chef  des  hôpitaux  militaires,  mé- 
decin di's  hospices  civils,  et  pré- 
sident de  la  société  de  médecine. 
Aucun  genre  d'instruction, aucune 
branche  des  connaissances  humai- 
nes, n'étaient  entièrement  étran- 
gères à  cet  honmie  modeste,  niais 
profondément  érudit;  aussi  le»  sa- 
vans,  les  hommes  de  lettres,  les 
artistes  dont  s'honore  la  Belgique, 

T.   XX. 


\IC 


190 


étaient-ils,  pour  la  plupart,  ou 
ses  ccrrespondans  ou  ses  amis. 
Recommanddble  surtout  par  les 
qualilésde  son  cœur,  cet  ami  des 
hommes  avait  toujours*  besoin 
d'affections,  et  la  bienfaisance  é- 
tait  le  trait  principal  de  son  carac 
tère.  Sa  douce  philanthropie  le 
conduisait  partout  01^  il  savait  un 
être  souffrant,  et  souvent  il  ajou- 
tait aux  conseils  de  son  art  les  se- 
cours de  sa  bourse;  aussi,  i\  sa 
mort,  arrivée  en  décembre  1817, 
laiss a-t-il  dans  la  classe  peu  for- 
tunée tous  les  regrets  et  les  souve- 
nirs de  la  reconnaissance.  Il  était 
membre  de  plusieurs  sociétés  sa- 
vantes; on  a  de  lui  une  Disserta- 
tion sur  Cart  des  accouchemens ,  et 
one  traduction  des  J phorismes 
d'Uippocrate. 

VICTOa  (  TEnaiN  )  ,  duc  de 
B'dliiue,  pair  et  ujaréchal  de 
France,  grand-cordon  de  la  légion- 
d'honueur,  commandeur  de  baint- 
Louis,  etc.  .  né  à  la  Marche,  dans 
la  ci-devant  Lorraine,  en  1766. 
A  I  5  ans  ,  il  entra  au  service  dans 
l'artillerit;.  Il  dut  à  la  révolution 
l'avancement  rajjide  qu'il  obtint; 
sa  belle  conduite  au  siège  de  Tou- 
lon, «t;u  1795,  lui  valut  le  grade 
de  général  de  brigade.  Rétabli  de 
doux  couj)S  de  feu  qu'il  avait  re- 
çus à  ce  siège,  il  se  rendit  à  l'ar- 
mée des  l'yrénées-Orienlalfs,  et 
«e  trouva  aux  sièges'  de  Sainl- 
Elme  et  de  Roses,  et  à  toutes  les 
batailles  qui  furent  livrées  jusqu'A 
l'époque  du  traité  de  Bûle  II  ,>c  fit 
remarquer,  en  1790,  auxiliaires 
de  Loano,  de  Cosaria  et  de  Dego  ; 
mais  plus  particulièreinenl,  en 
1797,  ii  celles  de  la  Favorite  et  de 
Saint-(ieorges,  où  il  fil  mettre  bas 
les  armes  à  8,uoo  hununcs  de  la 
i3 


M)'»  Vie 

division  autrichienne  de  Provera; 
il  reçut  eu  récompense  le  grade 
de  général  de  division.  Il  battit 
J'cnrietni  sur  le  Serio ,  surprit  la 
place  crAiicône,  et  fil  prisonniers 
5,000  hommes  qui  en  Jormaient 
la  garnison,  ce  qui  délerinina  le 
pape  ù  signer  le  traité  de  ïolen- 
liuo.  Pendant  la  paix  que  procura 
celui  de  Cauipo-Formio,  le  gé- 
néral Victor  eut  le  commande- 
ment du  déparlement  de  la  Ven- 
dée,  où  il  parvint  à  rétablir  le 
ealme.  11  retourna  en  Italie  en 
1799,  et  prit,  avec  sa  divii^ion  , 
une  part  horjorabic  aux  batailles 
de  Sainte-Lucie,  de  Vilia-Franca, 
d'Alexandrie  ,  de  la  Trébia  et  de 
Novi  ;  raffaire  de  Monlebello  était 
commencée  lor-qu'il  y  arriva  as- 
sex  à  propos  p(jur  en  déterminer 
le  succès,  et  cinq  jours  après,  il 
commandait  l'avant-garde  à  la  ba- 
taille de  (\lureugo.  Chargé  de  sou- 
tenir les  eflbrts  de  l'armée  autri- 
chienne ,  il  le  fil  pendant  huil  heu- 
res, jusqu'à  l'arrivée,  de  l'armée 
française,  sans  perdre  un  pouce  de 
terrain.  L'n  sabre  d'honneur  lui  fut 
décerné  par  le  premier  consul  Bo- 
naparle.  Il  parfit  aussitôt  avec  l'or- 
dre de  prendre  lecommandement 
de  l'armée  gallo-balave,  destinée, 
disait-on  ,  à  une  expédition  pour 
la  Louisiane;  ce  projet  ne  roçtit 
point  d'exécution.  Le  général  Vic- 
tor resta  néanmoins  en  Hollande, 
se  maria  à  L§  Haye,  el  ne  quitta 
sou  poste  qu'après  le  traité  d'A- 
miens ;  il  se  rendit  ensuite  à  la 
cour  de  Daneniarck  en  qualité 
d'ambassadeur  de  la  république, 
et  y  resta  jusqu'au  moment  où  la 
guerre  éclata  entre  la  France  et 
la  Prusse.  Il  fut  blessé  à  la  ba- 
taille d'Iéna,  s«  distingua  ensuite 


Vie 

à  la  bataille  de  Puisluck,  et  prit 
part  a  tous  les  succès  qui  illuslrè- 
reut  la  campagne  de  1806.  Com- 
mandant, en  1807,  du  1"  corps 
(lu  la  granje-armée  à  la  bataille 
de  Friedland,  dont  le  succès  fut 
dû  en  partie  à  Thabileté  de  ses 
manœuvres,  il  reçut  le  bâton  de 
maréchal  de  l'empire  sur  le  champ 
de  bataille  même.  Après  le  traité 
de  Tilsitt,  il  fut  nommé  gouver- 
neur de  Berlin;  pendant  i5  mois» 
il  occupa  ce  poste.  Employé  en 
Espagne  sur  la  fin  de  1808,  il  y 
commanda  un  corps  d'armée,  à 
la  tête  duquel  il  se  distingua  con- 
tre l'armée  de  Galice,  et  fut  vain- 
queur aux  bataille^)  de  Spinosa  , 
de  Sommo-Sierra  et  de  Madrid  ; 
il  fut  également  heureux,  en  1809, 
à  la  bataille  d'I'clés,  où  il  battit 
le  duc  de  l'Infantado  ,  et  lui  fit 
1 5,000  prisonniers;  il  compensa 
ainsi  la  perte  que  ce  même  géné- 
ral avait  fait  éprouver  à  l'armée 
française  à  Baylen,  en  forçant,  on 
ne  sait  encore  par  quels  moyens, 
le  corps  du  général  Dupont  à  ca- 
pituler. Les  succès  qu'il  obtint  à 
la  bataille  de  Medellin  furent  dé- 
cisifs ;  il  détruisit  l'armée  com- 
mandée i)ar  Cuesta.  Plus  tard,  il 
perdit  la  bataille  de  ïalavera, 
après  seize  heures  de  combat  et 
des  prodiges  de  valeur,  et  néan- 
moins força  les  Espagnols ,  par 
(me  marche  savante  et  hardie  ,  à 
abandonner  le  passage  de  Pena- 
Perros,  et  nul  ainsi  toute  l'An- 
dalousie au  pouvoir  des  Français. 
Chargé  d'investir  Cadix ,  il  la  fit 
entourer  de  remparts  inexpugna- 
bles ,  et  ne  pouvant  s'en  rendre 
u!aîtr<! ,  il  prit  des  ujesures  pour 
être  lui-même  à  l'ahri  de_  toute 
insiulte.  En  effet ,  il  eut  à  repous- 


vie 

ser  les  allaques  de  24,000  Anglais 
et  Espagnols  réunis  ,  qui  voii- 
laienl  le  prendie  par  derrit're  pour 
l'obliger  à  se  retirer.  Il  gagna  la 
bataille  de  Chiclana,  el  força  les 
troupes  combinées  à  rentrer  dans 
Cadix.  Appelé  en  Russie  en  »8i2, 
il  quitta  le  blocus  de  Cadix,  et  eut 
sous  ses  ordres  le  9°  corps  ;  il  se 
couvrit  de  gloire  au  combat  di;  la 
Bcrésina.  Kn  i8i5,  à  la  bataille 
de  Dresde  ,  où  il  commandait  le 
2'  corps ,  il  fixa  la  victoire  p.'^r  une 
manœuvre  hardie,  qui  enleva  les 
positions  de  la  gauche  des  alh'és, 
et  isola  i5.ooo  Autrichiens  qui  lu- 
i-ent  faits  prisonniers.  Les  cham{)S 
de  >Vachau,  de  Léipsick.  et  de  Ha- 
nau ,  furent  également  témoins 
de  sa  valeur,  quoiqu'elle  n'eût 
pas  partout  le  même  succès.  Ayant 
repassé  le  Rhin  ,  il  marcha  sur 
Strasbourg,  et  mil  en  état  de  dé- 
fense toutes  les  places  de  l'Alsace; 
il  défendit  ensuite  les  Vosges  pied 
à  pied;  mais  des  forces  supérieu- 
res l'obligèrent  de  se  replier  sur 
la  Aieuse,  où  il  tint  encore  quel- 
ques jours,  et  ensuite  sur  Saint- 
Dizier,  d'où  il  chassa  les  Russes  le 
27  janvier  i8i4-  Quelques  jours 
après  ,  il  s'empara  du  village  de 
Bricnne  malgré  i5,ooo  hommes, 
tant  Russes  que  Prussiens,  qui 
Toccu paient.  Le  g  février,  il  se 
dirigea  vers  la  Seine,  seconda 
les  opérations  de  l'empereur  à 
Champ- Aubert  et  la  Ferlé,  et  dé- 
fendit les  ponts  de  Jiogent  jus- 
qu'au 16;  le  17,  il  se  porta  sur 
Nangis,  etde  là  sur  Villeneuve,  et 
contribua  puissamment  au  succès 
de  ces  deux  alTtires.  Un  repos  de 
quelques  heures  :\  Salins  fit  man- 
quer ,  dit-on  ,  l'occupation  des 
ponts  de  Montereau,  ce  qui  lui  al- 


VIG 


195 


tira  de  vifs  reproches  de  la  part  de 
l'empereur.  Si  le  maréchal  en  fut 
vivement  affecté,  il  reprit  bientôt 
une  noble  revanche  par  la  con- 
duite valeureuse  qu'il  tint  le  7 
mars  à  l'abbaye  de  Vaucler,  où  il 
passa  un  défilé  défendu  par  60 
pièces  de  canon,  et  eut  une  grande 
part  au  gain  de  la  bataille  de 
Craonne,  où  il  fut  encore  blessé 
d'une  balle.  Après  la  restauration, 
en  1814,  il  reçut  du  roi  la  croix  de 
S:iinl-Louis  ,  et  le  gouvernemcrnt 
de  la  2'  division  militaire  à  Mé- 
zières ,  et  lorsqu'en  mars  i8i5, 
Napoléon  revint  de  l'ile  d'Elbe  ,  le 
duc  de  Bellune  fit  tous  ses  efforts 
pour  empêcher  le  mouvement  des 
troupes;  n'ayant  pu  y  parvenir, 
il  se  rendit  en  Belgique  avec  le  roi, 
et  y  resta  jusqu'au  mois  de  juillet 
181  5.  A  Cftte  époque,  il  rentra  en 
France  à  la  suit»;  des  troupes  é- 
trangères  el  des  Bourbcms  ;  fut 
nommé  quelque  temps  après  pré- 
sident du  collège  ébctoial  de 
Loir-et-Cher,  pair  de  France , 
major-général  de  la  garde  royale, 
et  enfin  présidint  de  la  commis- 
sion chargée  d'examiner  la  con- 
duite des  officiers  j)endant  les  cent 
jours  ,  en  181  5.  Il  fut  désigné  par 
le  roi,  eu  i8iG,  pour  représenter 
l'armée  française  au  mariuge  du 
duc  de  Berri.  Louis  XVIU,  de- 
puis, ne  cessa  de  donner  des  preu- 
ves de  confiance  au  duc  de  Bel- 
lune.  Le  i5  décembie  1821,  un 
mois  après  le  départ  du  njarquis 
de  Latour-Maubourg  pour  l'am- 
bassade de  Constantinople,  il  fut 
nommé  minisire  de  la  guerre.  Le 
choix  d'un  guerrier  qui  avait  fait 
long- temps  la  guerre  en  Espagne, 
donna  encore  plus  de  consistance 
aux  bruits  qui  se  répandaient  alon 


lOO 


vie 


que  les  troupes  qui  se   rassem- 
blaient  au    pied    (les    l'yrénées  , 
sous  le  nom  de  cordon  sanitaire  , 
n'altendaient  qu'un  trioinenl  favo- 
lab^e  pour  pénétrer  eu  Espagne, 
et  ces  bruits,  qui  iuquiélaienl  tous 
les  amis  de  la  paix,  ne  s'affaibli- 
rent, ni  par  le  démenti  que  leur 
donna  .  par  la  voie  des  journaux, 
le  27  décembre  suivant,  le  secré- 
taire-général du   iniiiisicre  de  la 
guerre,  ni  même  par  l'onlonn  mce 
du  22  septenibre  1 822  ,  qui  décla- 
rait (pu;  les  troupes  employées  au 
cordon  sanitaire  seraient  uiaitite- 
nues  comme  corps  d'observation 
«laus  les  positions  qu'elles  occu- 
paient.   L'incertitude  que  laissait 
encore    sur  cet  objet    important 
le  discours  du  trûoe,  à  l'ouverture 
des  chambres,  le  28  janvier  1825, 
«iP  dissipa  le  2  lévrier,  lor.iqu'oti 
sut  que  le   travail  d'organisation 
de  l'armée  destinée   à  eulrer  en 
Espagne  était  dtfuiitivement  ar- 
rêté, et  que  le  duc  de  Belluue  a- 
vait  exprimé   fortement  le  dé?ir 
de  servir  à  cette  arutée  en  qua- 
lité de  major-général.  Les  désiis 
tin  maréchal  ne  furent  pas  rem- 
plis; l'organisation  de  l'arniéedite 
des   Pyrénées-Occidentales,   qui 
parut  le  6  février,  désignait  le  gé- 
uéral  Guillemot  comme  chef  d'é- 
tat-major. Déjà,  à  cette  époque  , 
l'emprunt   Ouvrard  était    l'objet 
des  plaintes  de  Tambassadeur  es- 
pagnol à  Prfris,  ce  qui  n'empêcha 
pas  un  journal  royaliste  de  nier, 
quelques  jours  après,  que  la  com- 
mission de  MM.  Ouvrard  et  Tour- 
ton    existai.    Le    ministre    de    la 
guerre  activait  de  tous  ses  moyens 
les  préparatifs  de  la  guerre  d'Es- 
pagne; le   10  février,  il  présen- 
tait à  la  chambre  des  députés  un 


Vie 

projet  tendant  à  ce  que  les  Fran- 
çais libérés  fussent  rappelé»  sous 
les   drapeaux,   projet  qui  fut,   ù 
quelques  modifications  près  ,  con- 
verti eu  loi  ;  le  i4  février,  il  prit 
une  décision  annonçant  qu'il  se- 
rait organisé,  à  Niort,  des  briga- 
des de  mulets  de  bât  pour  le  ser- 
vice de  l'armée  d'observation  ,  et 
eufiu  ,  le  19  février,  M.  Marchand 
arrivait  à  Perpignan  comme  agent 
(partie  des  vivres)  du  ministre  de 
la  guerre.  Une  ordonnance  du  roi, 
en  date   du   17  mars,  nomma  le 
uuiréchal  duc  de  Belluue  major- 
général  de  l'armée  des  Pyrénées, 
et  une  autre  ordonnance  du  même 
jour,  nomma  le  vicomte   Digeon 
pair  de  Frani  e  et  lieutenant-fréné- 
ral ,  ministre  et  secrôtaire-d'élat. 
et  le  ciiargea,  en  cette  qualité,  du 
portefeuille  de  la  guerre  pendant 
l'absence  du  duc  de  Belluue.  On 
répandait    dans    le  public  que  le 
maréchal  avait  été  envoyé  sur  les 
lieux  pour  juger  par  lui-même  si 
les  fournitures  en  tout  genre  a- 
vaient   été   faites    d'une   manière 
convenable  et  satisfaisante,  avec 
d'autant  plus  de  raison  que  M.  de 
la  Bourdonnaye  avait  dit  dans  la 
chambre  des  députés  ,  «  que  ,  par 
la  plus  étonnante  contradiction, 
les  préparatifs  apparenssont  pour 
la  guern;',  et  les  mesures  réelles 
pour  la  paix.  Voyez  ,  ajoutait  l'ho- 
norable membre,  le  prélude  de 
tous    les  jnaux  qui  se  préparent 
dans  le  désonlre  des  administra- 
tions militaires  et  la  pénurie  de 
tous  les  approvisionnemens.  »  Le 
ducdeBeliuneueremplitpas  néan- 
moins le  poste  que  lui  déléguait 
l'ordonnance    royale  ;    le    comte 
Guillen>inot  resta  chef  d'état-ma- 
jor-général,  et  ue  ce?sa  pas  ur» 


vie 

instanl  (Vf.n  faire  le?  fonctions. 
Dès-lors  le  duc  de  Belhine  put 
s'occu()er  d»;  ce  fini  ét.iit  ftent-êlfe 
!e  seul  but  de  ga  mission.  Aussi 
écrivait-on  de  B;iyonne,  le  8  avril, 
que  ce  n'était  que  depuis  quel(|ues 
jours  que  le  matériel  de  l'armée 
était  orgnnisé,  et  que  MM.  Ou- 
vrard  et  Tourtnn  étaient  définiti- 
vement chargés  de  la  fourni lure 
générale  des  vivres.  Nous  ne  pré- 
jugeons rien  dans  raffaire  du  pi e- 
n)ier  de  ces  deux  munilionnaires, 
qui  est  portée  devant  l<.s  trihu- 
naux(  1825);  nousrapporftiis  siiu- 
jilernent  les  faits  consignés  dans 
les  journaux  du  tenip»;  les  discus- 
sions élevées  dans  la  chambre  des 
députés  semblent  l'accuser.  Ce 
qu'a  dit  de  lai  le  duo  de  Bellune, 
dans  une  autre  circonstance,  ne 
lui  est  pas  favorable.  Bientôt  sans 
doute  toute  la  vérité  sera  connue, 
et  l'opinion  générale  fixée.  Le  duc 
de  Bellune  n'est  resté  auprès  du 
prince  généralissime  que  j)Our  ê- 
Ire  témoin  du  passage  de  la  lîi- 
dassoa.  Il  quitta  l'armée  à  cette 
époque  même,  et  était  de  retour 
à  Paris  le  i4  avril;  le  lendemain, 
il  reprit  le  portefeuille  de  la  guer- 
re ,  et  rétablit  dans  leurs  fonc- 
tions tous  ceux  qui  en  avaient  été 
éloignés  pendant  s(»n  abscence. 
Due  ordonnance  du  roi ,  rendue 
le  'iS  octobre  .  et  contresignée  j>iir 
M.  de  Villèle.  président  du  con- 
seil, nomma  le  duc  ne  Bellune 
miuislre-d'élat  et  meujbre  duc  )n- 
seil-privé.  Celle  retraite,  ou  peut- 
être  ce  renvoi,  parut  avoir  laissé 
des  traces  daic  son  cœur,  car 
nommé  ù  l'umbasiadc  de  Vienne 
quelques  mois  après,  il  la  refusa. 
On  a  prétendu  que  ce  refii*  avait 
eu  lieu  à  la  suite  de  diilicnllcs  élc- 


VIC  le- 

vées ù  la  cour  de  Vienne,  relati- 
vement à  sa  personne  et  au  litre 
de  duc  de  Bellune;  mais  on  a  dft 
ai)andonner  bientôt  cette  opinion, 
le  duc  de  Bellune  étant  parti  en- 
suite pour  son  ambassade,  et 
ayant  été  très-bien  accueilli.  Le 
duc  de  Bellune  revint  jouir  à  Pa- 
ris du  repos  honorable  dft  à  ses 
longs  services,  et  Charles  X  vient 
d'ajouter  aux  honneurs  dont  il  é- 
lait  déjà  comblé  ,  celui  de  le  nom- 
mer chevalier  de  l'ordre  du  Saint- 
Esprit,  dans  la  promotion  que  ce 
nuMiarque  a  faite  à  Reinjs,  le  len- 
demain de  son  sacre. 

VICTOR  EMMANUEL  V,  roide 
Sardaigne,  second  fils  de  Victor- 
Amédée  1(1,  naquit  le  "i^  juillet 
1759.  Il  ne  fut  connu,  jusqu'à 
son  avènement  au  trône,  que  sous 
le  litre  de  duc  d'Aoste.  L'état  mi- 
litaire, pour  lequel  il  avait  un  goût 
décide  ,  fut  l'objet  constant  de  ses 
éludes;  il  ne  confiait  à  aucun  au- 
tre le  soin  de  commander  les 
camps  d'exercice  que  le  roi  faisait 
former  de  lemps  en  temps,  siir- 
liuit  à  la  fin  de  son  régne  et  donna 
des  preuves  de  connaissances  é- 
letKlues  dans  celte  partie.  Le  ai 
avril  1789,  il  épousa  la  princesse 
Thérèse,  fille  de  l'archiduc  d'Au- 
triche Ferdinand.  La  révolution 
française,  qui  éclata  peu  après', 
trouva  en  lui  im  adversaire,  sinon 
puissant,  au  moins  très-pronon- 
cé. Il  Contribua  bi;aucoup  à  faire 
entrer  la  Sard^iigne  dans  la  coali- 
tion, et  dès  que  la  guerre  fut  dé- 
clarée, en  179;?,  il  se  mit  à  la  tête 
d'un  corps  de  troupes,  se  porta 
avec  lui  à  l'allaque  du  village  de 
Gillette,  dans  le  comté  de  Nice, 
passa  ensuite  le  col  de  Vial,  cô- 
tojra  les  limites  orientales  de   la 


ïqS  VIC  ' 

ProveOce ,   enleva  les  postes  de 
Delterre  et  de  Boyoïi,  et  se  pré- 
senta môme    jusqu'asix    embou- 
chures  du    Var  ;   qtielqut-s    jours 
après,  ii   repoussa   nos  troupes  à 
Gandola,    el   coupa   l'iûle   droite 
de   l'armée.    Le  couUe  de  Saint- 
André,    chargé  de  s'emparer  du 
poste  d'IJtelle,  ne  }»uty  parvenir, 
ce  qui  força  le  dm- d'Aoste  d'opé- 
rer sa  retraite  el  de  regagner  les 
gorges.  On  a  fortement  reproché 
dans  le  temps  à  ce  prince  d'avoir 
enflammé  le  zèle  des  hahilans  de 
la  campagne,  et  de  les  avcjir  por- 
tés   à   des   fureurs    de    fanatisme 
qu'on  fut  obligé  de  réprimer  par 
des  punitions  exemplaires.  Lors- 
que des  négociations  furent  enta- 
mées ,  en  1796,  avec  le  général 
en  chef  Bonaparte,  le  ducd'AosIe 
s'opposa  de  tout  son  pouvoir  à  un 
projet  de  pacification  qui  contra- 
riait son  système  politique  et  son 
goût  pour  la  guerre,   et  voyant, 
ses  efiorls  inutiles  ,  il  prit  le  parti 
de  se  retirer  dans  l'Italie  méridio- 
nale. Le  roi,  son  fière,  Charles- 
J'immanuel,  ayant  abdiqué,  le  4 
juin  1803,    le  duc  d'Aoste,  sous 
le  nom   de  Victor-Emmanuel  lui 
succéda    dans   ses   états,  réduits 
alors  à  la  seule  île  de  Sardaigne. 
I!  V  resta  jusqu'à  ce  que  les  évé- 
nemens  de  i8i4  le  replacèrent  à 
l.i  tête    du  Piémont,   détaché  de 
l'empire  français,  et  augtiienté  du 
territoire  de  l'étal  de  Gènes,   qui 
ne   fut   pas   assez   heureux   pour 
recouvrerson  indépendance,  mal- 
gré les  promesses  solennelles  des 
souverain»  alliés.  Bientôt  les  Pié- 
niontais,  qui  attendaient  du  gou- 
vernement des  institutions  analo- 
gues  aux  lumières  acquises   par 
trente  années  de  révolution,   el 


VID 

dont  ils  avaient  joui  sous  la  do- 
mination française,  s'aperçurent 
qu'on  les  faisait  rétrograder  vers 
leurs  ancieimes  institutions,  et 
qu'on  détruisait  insensihiemetkt 
toutes  celles  qui  avaient  fait  leur 
prospéritt'i.  Les  persécutions  reli- 
gieuses mêmescommencèrentà  s'y 
renouveler  à  laide  du  fanatisme; 
une  foule  de  personnes  en  ont 
ressenti  les  effets.  Les  Juifs,  qui 
jouissaient  dans  ce  royaume  de 
tous  les  droits  de  cité,  ont  été 
forcés,  par  un  édit  du  1"  mars 
181G,  de  vendre,  dans  le  délai  de 
r>  années,  lous  les  biens  immen 
blés  qu'ils  avaient  acquis  sous  le 
gouvernement  précédent  ;  mais 
un  trait  d'intolérance  religieuse, 
dont  la  raison  et  l'humanité  s'in- 
dignent au  point  de  le  trouver  in- 
croyable, hiême  après  la  loi  ren- 
due en  France,  en  iSaS,  sur  le 
sacrilège,  c'est  le  supplice  d'un 
malheureux,  condamné,  en  1819, 
à  être  brûlé  vif,  pour  avoir  volé 
les  ornemens  d'ime  Madone.  Les 
habitans  de  Chambéry  ont  été  les 
impassibles  témoins  de  cet  horri- 
ble spectacle.  Le  roi  Victor-£m- 
maimel  suivit  l'exemple  de  son 
frère  Charles-Emmanuel;  il  ab- 
diqua, le  i5  mars  1821,  laissant 
la  couronne  à  son  fière,  Charles- 
Félix  de  Savoie. 

VIDAL  (  'S.) ,  astronome  cé- 
lèbre, naquit  à  iMirepoix,  dépar- 
tement de  l'Ar  iège.  Jeune  encore 
il  attira  sur  lui  les  regards  du 
monde  savant,  et  l'académie  des 
sciences  de  Toulouse  le  reçut  au 
nombre  de  ses  membres.  Il  étu- 
diait sans  relAche  ,  suppléant  par 
son  imagination,  aux  instrumens 
de  haut  prix  ,  que  la  médiocrité 
de  sa  fortune  ue  lui   permettait 


VID 

pas  d'acquérir;  ii  Gonslrcibit  lui- 
môme  la  plupart  de  ceux  qui  lui 
étaient  indispensnbles.  M.  de  Ri- 
quet  Bonrepos,  arrière-petit-fiis 
du  célèbre  inventeur  du  canal, 
aimait  aussi  l'astronomie;  il  con- 
nut Vidal,  l'appela  à  sa  terre  de 
Bonrepos  ,  où  il  avait  l'ait  cons- 
truire un  inagru'fiqucob>;ervaloirt'. 
Là  ce  laborieux  savant  put,  jusqu'à 
la  révolution,  se  livrer  sans  obs- 
tacle à  ses  cccupatior)s  chérie-. 
Ses  travaux  furent  appréciés  par 
l'académie  des  S(  iences  de  l'ai  is  ; 
Lalande  ,  plus  particulièrement, 
lui  rendit  un  éclatant  houiinaj;e  , 
en  lui  donnant  le  nom  de  Trismé- 
gisle,  que  la  postérité  sans  doute 
ne  lui  enlèvera  pas.  On  dit  dans 
l'ouvrage  sur  la  connaissance  du 
temps  ^  que  Vidal  avait  lait  à  lui 
seul  plus  d'observaliuns  de  iMtr- 
cure  que  tous  le?  astronomes  île 
l'univers  ensemble.  Il  fut  choisi 
par  I.alande  pour  l'aidera  dr»;>scr 
le  catalogue  des  étoiles  nouvelles. 
Vidal  se  trouvait  alors  à  IMircpoix, 
et  pouvait  voir  d(;  retfe  ville  six 
degrés  du  ciel  méridional,  qui  é- 
laient  invisibles  aux  astronomes 
de  l'aris.  Après  une  loule  d'ob- 
servations exactes  et  prolongées, 
pendant  lesquelles  chaque  étoile 
fut  soumise  trois  fois  à  un  ri- 
goureux examen  ,  il  forma  un  ca- 
taloçjue  de  huit  cent  quatre -vin  g(- 
liuit  étoiles  australes^  inconnues  a- 
vant  hji,  comfiosant  les  étoiles 
de  la  cinquième  juscpi'à  In  huiliè- 
ine  grandeur.  La  position  de  tous 
les  astres  fut  ramenée  à  urie  épo- 
que commune,  celle  du  lo  nivô-o 
an  7,  après  y  avoir  appliqué  l'é- 
quation de  la  pré»M!ssion  des  équi- 
noxes.  Lalande  montra  un  en- 
thousiasme extraordinaire  û  lu  vue 


VID  10a 

de  cet  imn)ense  travail,  dont  il  fit 
le  plus  grand  éloge.  Vidal,  durant 
vingt-huit  ans,  s'occupa  de»  re- 
cherches sur  les  propriétés  de  l'ai- 
mant ;  il  donna  malheureusement 
dans  la  manie  des  systèmes  ,  en 
rapportant  toutes  les  variation» 
de  la  boussole  ,  à  un  aimant  pro- 
digieux placé  près  du  centre  de  la 
terre,  et  ayant  un  diamètre  (^4  ^*^'''' 
moins  gros  que  cs-tte  planète,  te 
roman  fut,  conune  tous  les  systè- 
mes, appuyé  sur  des  probabilités, 
des  conjectures,  et  même  des  ex- 
périences ;  mais  la  nature  est  un 
Protée  habile  ;  elle  échappe  à  tous 
ceuxqui  veuhriil  laconnaîlre,enles 
égalant  tous  à  la  fois.  Nommé  di- 
recteur tle  l'observatoin;  de  Tou- 
louse, il  y  professa  l'asti-onomie 
avec  un  rare  talent,  et  mou- 
rut à  iMirepoix  on  iHi  1.  Vidal  é- 
tail  correspondant  de  la  première 
classe  de  l'inslilut.  Il  a  consigne 
sescalcids,  ses  découvertes  ,  ses 
observations,  dans  de  nombreux 
ménmires,  «iont  la  collection  ne 
pourrait  que  servir  à  étendre  le 
domaint;  de  la  science. 

VIDAL  (N.),  graveiir,  narpiit  à 
Toulouse  et  étudia  son  art  dans  sa 
ville  natale,  sous  la  direi  tion  de 
Simonin  et  de  lîaour,  parent  de 
M.  B.ionr  Lormian  ,  auteur  d'O- 
masis.  il  vint  à  Paris,  v\  y  lutta 
long-temps  cositre  l'inforliuie.  A 
force  de  persévérance,  il  se  fit  con- 
naître par  son  mérite  ;  on  ne  dé- 
daigna plus  de  remployer,  lors^- 
qu'on  eut  apprécié  la  touche  a- 
gréable  de  sou  burin.  Vidal  grava 
une  n(jmbreuse  suite  choi>ie  par- 
mi les  œuvres  de  no-  p(;inlres  mo- 
dernes. David,  le  créateur  elle 
chef  de  notre  grande  école,  confia 
ù  l'artiste  loulousin  y  le  buiii  de 


200  VIT-; 

i<;j)rochiire  son  gracieux  tableau 
i\  Hélène  et  Paris.  Ce  fui  le  plus 
bel  ouvrage  dtî  Vidal,  (jui,  dans 
cette  composition  ,  s'éleva  à  la 
hauteur  de  son  luodèlc.  11  niounit 
j>rémafnréiiH.'iit  à  Paris  en  i8o:|. 
VIEL  (  Dtiennk-Beunard),  né  à 
la  Nouvelle-Orléans  (Louisiane), 
le  3i  octobre  1706.  Son  père, 
chirurgien  estimé,  était  corres- 
pondant de  l'académie  des  scien- 
ces de  Paris.  C'est  à  lui  qu'on  doit 
la  découverte  de  la  cire  végétale 
du  Myrica  cerifera,  et  des  usages 
auxquels  on  peut  l'employer.  Cet 
homme  éclairé  voulut  que  son  fils 
vînt  chercher  en  France,  une  édu- 
cation qu'il  ne  pouvait  pas  loi  pro- 
curer ù  la  Nouvelle-Oiléans.  Le 
jeune  Viel  suivit  le  cours  de  ses 
éludes  au  collège  de  Juilly,  diri- 
gé par  des  membres  de  la  congré- 
gation de  l'Oratoire.  Il  se  sentit 
ensuite  appelé  i  entrer  dans  les 
rangs  de  ceux  qu'il  avait  eu  pour 
maîtres.  Après  avoir  professé  avec 
la  plus  grande  distinction  dans  les 
villes  de  Soissons  et  du  Mans,  il 
fut  réclamé  par  le  collège  de  Juil- 
ly, où  il  enseigna  pend;mt  17  ans 
les  humanités  et  la  rhétorique  II 
parlait  avec  satisfaction  de  ces 
premières  années  d'une  vie  si  uti- 
lement em|>loyée,  et  l'on  peut  allir- 
mer,  d'après  le  lémoighnge  unani- 
me des  nombreux  élèves  qui  ont 
profité  de  ses  leçons,  que  l'ensei- 
gnement, loin  de  lui  oiî'rir  une  tâ- 
che pénible,  était  pour  lui  comme 
pour  eux  une  source  inépui>iable 
de  jouissance.  En  1776,  Viel  fut 
nommé  grand-préfet  des  études 
dans  le  même  collège.  Plus  de 
trois  cent  cinquante  écoliers,  tous 
les  professeurs  et  maîtres  de  quar- 
tiers, se  trouvèrent  dès-lors  sous 


tiE 

son  inspection.  Il  lui  fallut  à  la 
fois  s'assurer  que  partout  l'instruc- 
tiou  était  convenablement  distri- 
buée, et  partout  maintenir  sévère- 
ment l'ordre  et  la  discipline,  sans 
laisser  nulle  part  |)révalair  la  ri- 
gueur ou  l'injustii.-e.  Douze  ans 
consacrés  à  ces  foncticms,  donnè- 
lent  lieu  au  P.  Viel  de  développer 
un  mélaugo  heureux  de  sévérité 
et  d'iiuhilgence,  d'assiduité  et  de 
sagacité,  et  de  prouver  qu'il  n'é- 
tait pas  moins  propre  à  diriger 
l'enseignement  qu'à  le  répandre. 
Arrivé  au  terme  de  celte  carrière 
laborieuse,  il  commençait  à  jouir 
d'un  repos  acheté  par  plus  de  tren- 
te ans  de  services,  lorsque  les  évé- 
rfemens  de  la  révolution  amenè- 
rent la  dissolution  de  la  congréga- 
tion de  l'Oratoire.  Il  voulut  alors 
revoir  son  pays  natal,  et  s'embar- 
qua à  Bordeaux  le  "i'i  septembre 
1791.  De  retour  à  la  Louisiane,  il 
a  fait  pendant  plus  de  vingt  ans 
le  bonheur  de  sa  famille,  qu'il  y  re- 
trouva, celui  des  amis  qu'il  ne  tar- 
da pas  à  y  acquérir,  et  celui  des 
habitans  de  la  paroisse  des  Atac- 
Apas,  dont  il  était  devenu  le  pas- 
teur. Mais  des  lieux  mêmes  qui 
l'avaient  vu  naître,  il  se  sentait 
rappelé  vers  la  France  par  les  sou- 
venirs et  les  vœux  de  ses  anciens 
élèves.  Déjà  quelques-uns  d'entre 
eux  avaient  occupé  de  lui  le  pu- 
blic savant.  Dans  aucun  temps  ses 
travaux  ne  lui  avaient  fait  négli- 
ger le  culte  des  muses  latines,  et 
l'on  peut  dire  que  peu  de  person- 
nes avaient  poussé  aussi  loin  l'étu- 
de lalangue  de  Virgile.  Ce  fut  dans 
cette  langue  qu'il  voulut  transpor- 
ter le  chef-d'œuvre  de  l'illustre 
Fénélon,  le  Télcmaque.  Il  y  réus- 
sit, et  sou  travail  était  déjà  en  é- 


TIE 

tat  de  paraître  lorsqu'il  partit  pour 
la  Louisiane,  liiissant  son  manus- 
crit entre  le*  mains  d'un  ami.  Six 
de  «es  élèves  en  devinrent  les  édi- 
teurs en  1808,  et  les  suffraj^es  du 
public  ne  tardèrent  pas  ;\  prouver 
que  leur  alTectîoM  ne  leur  avait 
point  l'ait  illusion  sur  l'éuiiucnt 
mérite  de  leur  ancien  Mrntoi-.  M. 
Lemaire,  prolesseu:'  de  poésie  la- 
tine à  la  laculté  des  lettres  de  Ta- 
ris, fit  insérer,  dans  les  feuilles  pu- 
bliques du  3o  septembre  1808,  un 
éloge  mérité  de  cet  ouvrage,  c  La 
»  traduction  de  M.  Viel,  dit  il,  est 
«digne  de  l'original.  Les  tournii- 
'>res,  les  périodes,  les  descriptions, 
«les  métaphores,  les  compurai- 
Msons,  tout  est  reproduit  d'une 
omaiHère  si  vive,  si  touchante, 
«qu'on  s'imagine  entendre  Féiié- 
»  Ion  lui-même  :  c'est  la  même  t'or- 
»ce,  la  même  noblesse,  l.i  même 
»  onction,  la  mê'iîe  sévérité  de 
)  goût.  C'est  un  nouveau  ftpre  clus- 
Mique ,  monument  de  reconnais- 
Dsance,  que  des  élèves  pleins  de 
«zèle  ont  élevé  à  la  gloire  d'un 
•  maître  qu'ils  chérissent.  La  dé- 
"dicace  est  aussi  neuve  que  tou- 
»  chante  : 

^Stephano  Bernardj  f^iel 

••Prti  byter'i 

"In  Aeadcmia  JuU^ccnci 

-Studi^rum  ultm  modcratori 

"Hjc  ipsius  a/iui 

•'QuoJ  typit  mandari  relligioii  curavcrunt 

•'Offtrebaiu 

"Amantissimi  et  mtmores  atumni. .» 

Aue.  Creuié  de  Lciscr,       J    M.  E.  Salvi-rtf, 

J.  n.  B.  Eyriif,  A.  V.  Arniuli, 

J.  A.  J.  Dwraat,  Eutebiiu  Salvertc. 

Le  cardinal  de  Bcaussot,  dans  la 
deuxième  édition  de  son  Histoire 
de  Fénèlon,a\)rii,i\\o\v  parlé  avan- 
tageusement de  M.  Viel  et  de  son 
ouvrage,  ajoute,  en  transcrivant 
cette  dédicace  :  «  Il  semble  qu'il 
soit  donné  aux  admirateurs  de  Fé- 


VIE 


aoi 


nélon,  comme  à  Fénélon  lui-mê- 
me, de  trouver  loti  jours  des  amis 
fidèles  et  des  di-ciples  reconnais- 
sans.  »  Le  8  juin  1812,  M.  Viel 
revint  en  France,  où  il  vit,  dans 
toutes  les  classes  de  la  société,  m\ 
grand  nombre  de  ses  anciens  élè- 
ves, développer  les  fruits  de  l'ins- 
friiction  qu'ils  avaient  reçue  de 
lui.  En  1816,  il  fit  paraître,  sous  le 
titre  de  Misccllanea  lalitio  gallica, 
\in  recueil  où  se  trouve  la  traduc- 
tion française  de  l'Art  poétique, 
et  du  second  livre  des  épîtres  d'Ho- 
race. Certc  traduction  contient 
sur  le  véritable  sens  du  poète  latin 
des  vues  neuves  et  justes.  Résolu 
de  finir  ses  jours  au  lieu  même  où 
il  les  avait  si  long-temps  consa- 
crés aux  soins  de  l'instruction  pu- 
blique, M.  Viel,  s'établit  en  181  5, 
au  collège  de  .Tuilly,  relevé  par  les 
soins  de  quelques-uns  de  ses  an- 
ciens collègues.  C'est  au  milieu 
d'eux  qu'il  termina  sa  longue  et 
honorable  carrière,  le  i(>  décem- 
bre 1831 ,  à  l'âge  de  8()  ans  pas- 
sés. 

VIEL  (('lîAULES-FnANçois),  ar- 
chitecte, naquit  en  i^/pà  Paris, 
où  il  niourut  en  1820.  11  n'est  pas 
moins  distingué  comme  praticien 
que  comme  auteur.  C'est  h  ses 
soins  qu(î  l'on  doit  la  construction 
di!  l'hospice  du  faubourg  Saint- 
.Ja(;ques,  celle  du  bâtiment  de  la 
l'itié,  celle  du  Mont-de-Pi^té,  rue 
des  Blancs-Manteaux  et  rue  du  l*a-  ^ 
radis,  enfin  l'égoùt  de  llicêtre,  ou- 
vrage souterrain,  ju;,'é  digne  des 
anciens.  Ses  ouvrages,  conune  é- 
crivain,  sont  :  x'  Projets  (fun  mo- 
nument consacré  à  1  lus  toi  re  natu- 
relle, in-4",  1780;  a'^Lt'/Zre.j  sur 
l'architecture  de>  anciens  et  l'ar- 
chitecture moderne,  in-S",  i-So- 


aoa  VIE 

1781-1787;  5"  Observations  plùlo- 
soplùqaes  sur  l'usage  d'exposer  les 
ouvrages  de  peinture  et  de  sculp- 
ture, in-H",  1788;  4°  Principes  de 
Tordonnance  et  de  la  construction 
des  bûtimens,  5  vol.  in-4",  de 
1797  à  1814  ;  5°  Moyens  potip  la 
restauration  des  piliers  du  dôme 
du  Panthéon  français,  plusieurs 
éditions;  la  dernière,  in-4",  est  de 
1813  ;  6"  Plans  et  coupes  des  pro- 
jets do  restauration  des  piliers  du 
dôme  du  Panthéon  français,  in-4% 
1798;  7°  Décadence  de  l'archilec- 
ture  à  la  fin  du  18'  siècle,  in-4'', 
1800;  8"  des  Points-d'appui  indi- 
rects dans  ta  construction  des  bdti- 
vuns,  1802,  in-4°;  9°  delà  Cons- 
truction des  édifices  publics  sans 
l'emploi  du  fer,  etquf  1  en  doit  être 
l'usage  dans  les  balimens  particu- 
liers, i8o5,  in-4'';  i^°  des  Ancien- 
nes Eludes  de  l' architecture,  et  de 
la  nécessité  de  les  remettre  en  vi- 
gueur,  et  de  leur  utilité  pour  l'or- 
donnance des  bâtimens  civils , 
1807,  in-4'';  'i"  Inconvéniens  de 
la  communication  des  plans  d'édi- 
fices avant  leur  exécution,  i8i3, 
in-4°:  12"  Notice  nécrologique  sur 
M.  Chalgriiig  1814,  in-4";  «<'>" 
Grand  Egoilt  de  Bicêtre,  ordonné 
par  le  roi  Louis  XIV,  plans,  élé- 
vation,  coupes  et  profil,  1817, 
in-4°;  i4"  Dissertation  sur  les  cor- 
nes antiques  et  modernes,  ouvra- 
ge philosophique,  1786,  in-8"'. 

VIEN  (r,E COMTE  Joseph-Marie), 
né  en  1716,  apprit  les  premiers  é- 
lémens  de  la  peinture  à  Montpel- 
lier, sa  ville  natale.  Il  vint  à  Paris 
en  »74^«  dévoré  de  la  soif  de  la 
gloire.  Les  prix  sembli»ienl  n'a- 
voir été  ir#litués  que  pour  lui. 
Ses  succès  lui  méritèrent  l'hon- 
neur d'être  envoyé  à  Rome  com- 


VIE 

me  pensionnaire  du  roi  ;  c'est  \h 
que  dans  la  contemplation  d'une 
nature  admirable  et  dans  l'étude 
des  plus  parfaits  modèles,  il  puisa 
cette  profonde  connaissance  du 
beau  ,  dont  il  avait  en  lui  le  sen- 
timent, et  qu'il  devait  ressusciter 
en  France.  A  son  retour,  il  ouvrit 
une  école  exclusivement  consa- 
crée à  l'étude  de  la  nature  et  de 
l'antique.  Pour  faire  prévaloir  son 
système,  il  eut  à  combattre  deux 
ennemis  puissans,  la  routine  et 
la  mode.  I/écoIe  française  était 
bien  dégénérée  de  la  gloire  dotit 
elle  avait  brillé.  A  Lesueur,  à  Le- 
brun avaient  succédé  les  fîoypel, 
auxCoypel  succédait  Boucher. Ce 
dernier,  substitUHnl  à  l'imitation 
de  la  nature  choisie  des  formes  et 
des  couleurs  dont  il  ne  trouvait 
de  moilèle  que  dans  son  imagina- 
lion,  avait  entraîné  l'art  dans  un 
des  écarts  les  jdus  inconcevables 
où  il  se  soit  jamais  égiU'é.  Pour  le 
ramener  dans  la  bonne  roule,  que 
d'obstacles  Vien  n'eut -il  pas  à 
vaincre!  il  en  liiompha  pourLint, 
soit  par  ses  préceptes,  soit  par  ses 
excm()les.  Il  forma  cette  école  , 
d'où  sont  sortis  David  et  Vincent, 
et  que  continuent  non-Sfulement 
leurs  élèves,  mais  la  totalité  des 
pei  n  tresacluelk  ment  vi  vans.  Pres- 
que tous  les  peintres  supérieurs 
dont  se  glorifie  l'époque  présente 
sont  ou  élèves  de  Vien  ou  élèves 
de  ses  élèves.  Il  profess.i ,  depuis 
1750  jsH<ju'en  1773.  Toutes  les 
fonctions,  tous  les  honneurs  dus 
à  la  supériorité  dans  son  art,  Vien 
les  obtint.  Recteur  de  l'académie 
de  peinture  et  de  sculpture,  de 
l'académie  d  architecture,  direc- 
teur en  France  des  élèves  p»-oté- 
gés  par  le  roi,  il  fut  aussi  nommé 


VIE 

directeur  de  l'école  de  Rome,  et 
premier  peintre  de  Louis  XVI  , 
qui  le  décora  de  l'ordre  de  Saint- 
Michel.  Napoléon  lui  accorda  plus 
encore,  comme  on  le  verra.  Plus 
d'un  souveiain  tenta  d'enlever 
Vien  à  la  France.  La  Russie,  le 
Danemarck  lui  offrirent  des  hon- 
neurs et  (le  l'argent.  Il  refusa  tout; 
la  plus  brillante  fortune  ne  valait 
pas  à  ses  yeux  l'honorable  aisance 
qu'il  s'était  faite  dans  sa  patrie. 
Peu  d'artistes  ont  autant  produit 
que  Vien,  qui  dans  les  dernières 
années  de  sa  vie  reprenait  encore 
quelquefois  le  crayon.  Il  fit  pour 
la  ville  de  Tarascon  sept  j^raiids 
tableaux,  dont  les  sujets  sont  ti- 
rés de  la  vie  de  sainte  Mailhe.  A 
Paris,  on  voit  de  lui  au  Muséum 
un  Ermite  endormi ,  et  un  tableau 
de  Saint  Germain  et  Saint  Vin- 
cent. A  Saint  -  Roch  ,  un  Saint 
Denis  prêchant,  et  unixR('farrec- 
tion  du  Lazare.  A  la  manu  facture 
des  Gobelins,  plusieurs  grands  ta- 
bleaux ,  sujets  pris  dans  l'Iliade. 
A  Tarascon,  la  Marchande  d'a- 
mours, V Amour  fuyant  fesctuvas^e, 
et  Saint  Thibaut  offrant  au  roi  une 
corbeille  de  lis.  Vien  a  fait  aiis-^i 
beaucoup  de  tableaux  pour  IM""" 
Geoffrin  et  pour  M""  Dubarry. 
Dans  les  oragc.«  de  la  révolution  , 
qui  reuversèrent  sa  fortune  sans 
altérer  l'égalité  de  son  caractère, 
rhcrclianl  des  consolations ,  et 
peut-être  des  illusiofis  dans  la  cul- 
ture de  son  art ,  il  ccunposa  un 
grand  nombre  de  dessins  et  d'es- 
quisses, presque  tous  dans  legmre 
anacréonliqiie.  C'étaient  les  jeux 
des  nymphes  et  des  amours.  Son 
imagination  était  féconde,  suQ  es- 
prit vif,  son  cœur  excellent.  A 
mesure  que  l'ordre  renaissait  en 


VIE 


ao5 


France,  la  fortune  de  ce  père 
de  la  peinture  s'améliora.  Nom- 
mé ummbre  de  l'institut  lors  de 
la  création  de  ce  corps,  qui  re- 
cueillait les  plus  illustres  débris 
des  anciennes  académies,  Vien  , 
sons  le  consulat,  fut  fait  membre 
du  sénat ,  et  commandant  de  la 
légion  -  d'honneur  ;  il  fut  créé 
conjte  sous  l'empire.  Il  est  mort 
à  Paris,  le  27  mars  1809,  à  l'âge 
de  prés  de  qS  ans. 

VIEN     (  M  "'    M  ARIE  -  RÉBOUL  )  , 

épouse  du  comte  Vien,  dut  aussi 
de  la  célébrité  à  l'art  où  s'illustra 
son  njaii.  Elle  excellait  dans  Ti- 
iiiitation  de  la  nature  morte,  on 
devrait  dire  inanimée.  Elle  eut 
pour  miîire  le  comte  de  Caylus, 
qui  lui  donna  des  coquillages  à 
peindre;  elle  les  imitait  avec  une 
rare  perfection.  Charmé  des  pro- 
grès de  sa  jeune  élève,  le  comte, 
qui  en  parlait  avec  éloge  dès  (|ue 
l'occasion  se  présentait,  engagea 
M.  Vien  à  lui  donner  des  conseil*. 
Le  m. litre  devint  bientôt  l'époux 
de  son  écolière,  qui,  peu  après, 
fut  jugée  digne  d'entrer  ilans  l'a- 
cadémie de  peinture  de  Paris.  La 
majeure  partie  des  ouvrage*  de 
M"*  Vien  est  en  Russie;  mais  il 
reste  d'elle  encore  en  France  des 
tableaux  de  fleurs  et  de  fruits. 
Elle  peignait  aussi  les  oiseaux  avec 
une  admirable  vérité.  A  te  talent, 
!M""  Vien  joignait  tous  les  avan- 
tages de  la  beauté.  Aussi  le  grand 
peintre,  à  la  destinée  duquel  la 
sienne  avait  été  associée ,  disait- 
il.  en  admirant  des  flcm's  qu'elle 
peignait,  elle  les  répand  sur  ma 
vie.  M""  Vien  mourut  âgée  de  77 
ans,  en  décembre  iSo;").  Du  ma- 
riage de  ces  artistes  ,  est  né  M. 
Vien  fijs,  qui  s'est  adonné  comme 


ao4 


VIE 


«iix  avec  succt's  A  l'art  auquel  sa 
l'amMIe  doit  laiU  de  célébrité.  Une 
t'einine  aussi  devait  encore  hono- 
rer ce  nom  :  c'e*t  celle  doiit  il 
sera  question  dans  l'articlfe  sui- 
vant. 

VIEN    (  RI-"   UOSE-CÉLESTE   Ba- 

ciiE  )  ,  fille  du  général  de  ce 
ijom,  épouse  de  Al.  Vîen  le  fils, 
est  née  ù  Rouen.  C'est  vers  la  lit- 
térature que  son  goût  l'a  portée. 
Initiée  dans  la  connaissance  du 
grec  par  l'honorable  Laporte  Du- 
theil,  l'un  des  premiers  hellénis- 
tes de  l'inslilut,  elle  a  traduit 
Anacréon  avec  autant  de  fidélité 
et  toute  l'élégance  qu'on  pouvait 
attendre  d'une  femme.  Dn  chant 
sacré,  des  poésies  légères  disper- 
sées dans  les  recueils  périodiques 
et  dans  les  journaux,  lui  assi- 
gnent une  place  parmi  les  dames 
qui  cultivent  aujourd'hui  la  poé- 
sie avec  le  plus  de  talent.  Al"" 
Vien  a  i'.iit  hommage  de  la  tra- 
duction d'Anacrénn  à  l'académie 
de  Bordeaux,  dont  elle  est  mem- 
bre. 

VIENNET  (  Jacques-Joseph  )  , 
membre  de  l'assemblée  législa- 
tive, de  la  convention  nationale 
et  du  conseil  des  anciens,  naquit 
dans  la  ci-devant  province  de  Lan- 
guedoc, le  l 'i  avril  ijS/f,  d'une 
famille  où  il  est  de  tradition  que 
son  fondateur  descend  d'un  géné- 
lal  de  Didier,  roi  des  Lombards, 
dont  Muratori  a  parlé.  M.  Vien- 
net  prit  du  service,  en  1774»  dans 
le  régiment  de  Languedoc -dra- 
gons, et  fil,  en  qualité  de  sous- 
lieutenant,  avec  trois  autres  olfi- 
ciers  do  la  même  famille,  et  sous 
les  yeux  d'un  de  ses  oncles,  aide- 
major,  la  guerre  dite  de  sept-ans. 
Retiré  du  service,  il  vivait  paisi- 


VIE 

hlement  à  Bézicrs,  lorsqu'on  1790, 
ses  concitoyens  lui  confièrent  les 
fonctions  d'officier  municipal. 
L'année  suivante,  le  déparlement 
de  l'Hérault  le  nomma  membre 
d«;  l'assemblée  législative,  et  le 
réélut,  en  1792,  à  la  convention 
nationale,  oii .  dans  le  procès  du 
roi ,  il  vota  d'abord  l'incompé- 
tence de  l'assend)lée,  ensuite  l'ap- 
pel au  peuple,  la  réclusion  et  le 
sursis.  On  a  remarqué  dans  son 
opinion  le  passage  suivant  :  «  Je 
crois  avoir  prouvé  que  Louis  n'a 
cessé  d'être  roi  qu'à  l'époque  où 
vous  avez  aboli  la  royauté;  je  crois 
encore   qu'il  ne    peut    être    jugé 

comme  houjme J'ai  toujours 

pensé  qu'une  assei^blée  de  légis- 
lateurs ne  pouvait  s'ériger  en  tri- 
bunal judiciaire;  que  le  même 
corps  ne  pouvait  à  la  fois  exercer 
la  justice  et  faire  des  lois;  que 
celte  cumulation  de  pouvoirs  se- 
rait une  monstruosité,  etc.  »  Le 
vote  de  M.  Viennet,  s'il  n'est  pa- 
le pretnier,  en  entraîna  plusieurs 
autres  non  moins  courageux,  au 
nom'nre  desquels  on  doit  placer 
celui  du  mari  de  M""'  de  Genlis  , 
ce  qui  contrariait  un  peu  l'aàser- 
liou  de  cette  dame,  qui,  dans  ses 
Mémoires,  prétend  que  le  vole  de 
AI.  de  Genlis  fut  le  premier,  ou 
même  le  seul.  Pendant  *'>ute  la 
durée  de  sa  mission,  M.  Viennet 
se  conduisit  d'après  ces  principes 
vraiment  constitutionnels,  luttant 
avec  courage  contre  les  proscrip- 
teurs,  el  arrachant  à  la  mort  uu 
grand  nombre  de  victimes.  Nous 
citerons  un  seul  fait  que  nous  em- 
pruntons à  une  biographie  dont 
1  exactitude  n'est  pas  douteuse,  en 
ce  qui  concerne  M  Viennet.  «  Qua- 
tre cents  suspects  étaient  détenus 


VIE 

dans  les  priions  du  dépaitement 
de  l'Héniiilt.  La  commission  d'O- 
range venait  de  faire  tomber  trois 
cents  têtes  dans  celui  du  Gard,  et 
un  député  en  mission  pressait  vi- 
vement le  comité  de  sûrelé-géiié- 
lale  d'envoyer  cette  commission 
dans  le  département  voisin.  M. 
Viennet ,  secondé  de  son  collègue 
Cnslilhon,  combat  tous  les  rai- 
sonnemens  du  proconsul,  brave 
ses  menaces,  le  menace  lui-mê- 
me, et  gagne  ainsi  le  9  tbermidor, 
qui  sauva  la  vie  à  tous  ces  déte- 
nus. Ce  vertueux  député  a  sou- 
vent été  désigné  sous  le  nom  de 
V honnête  homme  de  la  convention  , 
et  ses  concitoyens  lui  ont  depuis 
long-temps  donné  celui  de  vieuje 
Romain.  »  La  session  convention- 
nelle terminée,  il  passa  au  conseil 
d«.'S  anciens,  d'où  il  sortit  en  175)8. 
Après  neul  ans  de  législature,  il 
rentra  dans  ses  foyers  plus  pauvre 
qu'à  son  départ.  Lorsque  son  lils 
(  voy.  un  des  articles  plus  bas  )  se 
vit  en  âge  de  rendre  à  son  tour 
des  services  à  la  patrie  ,  il  lui  écri- 
vit pour  qu'il  lui  fit  obtenir  une 
sous-lieulenance.  11  lui  répondit  : 
«  l'rend'*  un  mousquet,  et  va  ga- 
gner ce  que  tu  pourras;  je  ne  suis 
pas  ici  pour  faire  les  all'aires  de 
ma  famille  et  l'avancer  au  préju- 
dice des  iiutres  citoyens.  »  Ce  trait 
de  vertu  antique  est  parfaitement 
justifié  par  le  suivant ,  aussi  beau 
<;t  aussi  rare  :  Chargé  de  la  re- 
monte des  quatorze  armées  de  la 
républitpie  ,  il  refusa' sept  cent 
cinquante  mille  francs  en  or,  que 
lui  offrait  le  fournisseur  pour  pas- 
ser qnel<]ues  milliers  de  mauvais 
<  hevaux.  Sa  probité  faillit  lui  coû- 
ter la  vie.  Dénoncé  pour  avoir 
entravé,  par  ce  refus,  les  opéra- 


VJE 


20  5 


tions  de  la  remonte,  i^  fut  obligé 
de  se  défendre  auprès  du  comité 
de  salut-public  ,  qui  finit  par  lui 
rendre  justice.  Il  mourut,  le  12 
août  1824,  regretté  de  tous  ses 
concitoyens.  Une  Notice  sur  cet 
bouiirable  citoyen  parut  peu  après 
dans  le  Journal  de  Paris. 

VIKNNET  (  Esprit  )  ,  frère  du 
précédent ,  curé  de  l'église  de 
Saiul-iMéry,  à  Paris,  doîit  il  a  eu 
la  direction  pendant  quarante  an- 
nées ,  s'est  fait  constamment  re- 
marquer par  les  touchantes  vertus* 
de  son  ministère.  Il  a  été  le  père 
des  pauvres,  et  a  fondé  un  hos- 
pice dans  le  cloître  même  de  son 
église.  Ce  vénérable  pasteur,  qui, 
eu  1790,  avait  prêté  serment  à  lu 
constitution  civile  du  clergé,  dé- 
crétée par  l'assemblée  constituan- 
te,  fut  inutilement,  pendant  six 
mois,  supj)lié  par  M.  de  Joigne ,^ 
archevêque  de  Paris,  de  rétracter 
un  serment  qui  n'a  jamais  troublé 
sa  conscience.  On  fit  près  de  lui 
quelques  démarches  pour  savoir 
s'il  accepterait  l'évêché  constitu- 
tionnel de  Paris.  Il  répondit  qu'il 
n'occuperait  jamais  un  siège  dont 
le  titulaire,  M.  de.Juigné,  vivait 
encore,  t^t  ajouta  qu'il  avait  cru 
devoir  prêter  son  serment,  parce 
qu'^l  n'y  trouvait  rien  de  contraire 
a  l'évangile  et  à  la  doctrine  de  l'é- 
glise ;  mais  que  ces  distinctions 
nouvelles  iVassermeutr,  de  ré  frac- 
taire  n'ôlaient  rien  aux  droits  de 
l'archevêque.  31.  le  curé  Viennet 
mourut  paisiblement,  sans  crainte 
et  sans  faiblesse,  en  179O,  empor- 
tant la  vénération  de  tous  ses  pa- 
roissiens. 

VIENNET  (Jeas-Pows-Goii.- 
LA.tME) ,  homire  de  lettres,  chef 
de  bataillon  au  corps  royal  d'é- 


2()6 


VIE 


tat-major, •chevalier  des  ordres 
royaux  de  Saint-Louis  et  de  la  lé- 
gion-d'honneur, fils  et  neveu  des 
précédens,  est  né  à  Béziers  le  18 
novembre  1777.  A  peine  dans  sa 
dix-huitième  année,  il  entra  an 
service,  en  1796,  comme  lieute- 
nant en  second  d'artillerie  de  ma- 
rine, emploi  ()iril  dut  à  une  la- 
veur spéciale  du  ministre  Truguet, 
qui  la  lui  accorda  à  l'insu  de  M. 
Viennet  père  {voy.  le  premier  ar- 
ticle ).  Il  servit  dans  ce  corps  jus- 
qu'à la  formation  du  corps  royal 
d'état-m.ijor  par  le  maréchal  Gou- 
vion  Saint-Cyr,  et  fut  admis  en 
qualité  de  capitainean  corps  royal, 
où  il  devint  chef  de  bataillon  en 
1822.  Par  suite  de  circonstances 
diverses,  la  carrière  politique  de 
M.  Viennet  n'eut  pas  tout  l'éclat 
que  devaient  lin'  procurer  son  cou- 
rage ,  son  activité  et  ses  talens. 
Monté  sur  V Hercule^  en  1798,  il 
fut  pris  par  les  Anglais,  et  passa 
neuf  mois  sur  les  pontons  si  tris- 
tement célèbres  de  l'Angleterre.  H 
servit  avec  distinction  ,  en  i8i5, 
dans  l'artillerie  de  la  marine  aux 
batailles  de  Lutzen ,  de  Bautzcn, 
où  il  gagna  la  croix  de  la  légion- 
d'hounenr;  de  Dresde  et  de  Léip- 
sick,  où  il  fut  fait  prisonnier  au 
moment  où  le  pont  de  Léip^ck 
sautait.  Rendu  à  sa  patrie  par  suite 
du  rétablissement  du  gouverne- 
ment royal ,  en  1814  ;.  il  fut  mis  à 
la  demi-solde.  Pendant  les  cent 
jours,  en  181 5,  il  refusa  de  signer 
Vacte  additionnel ,  comme  il  avait 
refusé  précédemment  de  voter 
pour  le  consulat  et  pour  l'empire. 
II  appuya  son  vote  négatif,  en 
18 i5,  de  deux  brochures,  dont 
l'une  a  pour  titre  :  Lettre  d'un 
Français  à  l'empereur,  sur  ta  si- 


VIE 

tuation  de  la  France  et  de  l'Eu- 
rope ,  et  sur  la  constitution  qu'on 
nous  prépare;  et  l'autre.  Opinion 
d'un  homme  de  lettres  sur  la  cons- 
titution proposée.  M.  Viermet  a  en- 
core donné,  sous  le  voile  de  l'a- 
nonyme, une  autre  brochure  in- 
titulée :  Lettre  d'un  vrai  royaliste 
à  M.  de  Chateaubriand,  i\  l'occa- 
.'•ion  de  l'ouvrage  de  ce  célèbre 
écrivain  :  de  la  Monarchie  selon  la 
Charte.  Fixé  à  Paris  depuis  181 4» 
M.  Viennet  consacre  ses  loisirs 
aux  muses.  Il  a  pris  rang  parmi 
nos  poètes  distingués,  par  la  pu- 
blication d'un  volume  f\.e  Poésies, 
dans  lequel  se  trouve  son  Eptlre 
à  M.  Raynouard ,  qui  fut  couron- 
née par  l'académie  des  jeux  flo- 
raux, en  1810,  et  d'un  recueil  de 
24  ÉpUres  sur  des  sujets  politi- 
ques et  littéraires  ;  par  des  Dialo- 
gues des  morts,  en  vers,  et  un 
poëme  de  Parga ,  qui  a  eu  trois 
éditions.  Ces  derniers  ouvrages 
ont  obtenu  le  succès  le  plus  flat- 
teur. Le  pocme  de  Parga  a  été 
traduit  en  grec  moderne,  et  a  valu 
à  l'auteur  des  témoignages  de  la 
reconnaissance  des  Parganistes. 
L'un  d'entre  eux  lui  a  adressé  une 
épître  de  deux  cents  vers  grecs. 
M.  Viennet  a  encore  donné  une 
Promenade  philosophique  au  cime- 
tière du  P.  Lachaise.  11  est  au  mo- 
ment (1825)  de  mettre  au  jour  uq 
poëme  en  21  chants,  dans  la  ma- 
nière de  l'Aristole,  dont  le  héros 
est  Philippe- Auguste.  Il  s'occupe 
d'un  autre  poëuie  intitulé  :  FraU' 
eus ,  en  12  chants  :  six  sont  déjà 
composés.  Ri  Viennet  a  lait  jouer 
à  l'Académie  royale  de  musique 
l'opéra  cVAspasie  et  Périclès ,  et 
au  Théâtre-Français  la  tragédie 
de  Clovis.  Quatre  autres  tragédies 


YIG 

du  mf  me  auteur  sont  reçues  i  ce 
théâtre.  L'un  des  rédacteurs  du 
Journal  de  Paris,  de  i8i5à  1818, 
M.  Viennet,  dont  l'honorable  ca- 
ractère fuit  tout  asservissement, 
a  Cessé  de  coopérer  à  celte  t'euille 
du  moment  où  elle  tut  vendue  A 
im  ministre.  M.  Viennet  est  m<,'m- 
bre  de  la  société  royale  académi- 
que des  sciences  et  de  lu  société 
philolechnique. 

VIENNET  (  Antoine  ) ,  cousin 
du  précédent,  est  né  à  Narbonue. 
Il  a  servi  pendant  vingt  ans ,  s'est 
trouvé  à  plus  de  vingt  batailles, 
et  u  été  blessé  à  chacune  d'elles. 
(Je  brave  militaire  est  chevalier 
de  la  légion-d'honneur  et  de  Saint- 
Louis,  et  commandant  (aujour- 
d'hui 1826)  de  la  garde  nationale 
de  sa  ville  natale. 

YIGEE  (  Loris  -  Guillaume- 
Bernard),  homme  de  lettres,  né 
à  Pari?  en  i755,  s'est  tait  con- 
naître dès  sa  jeunesse  par  un  grand 
nombre  de  poésies  fugitives  insé- 
rées dans  CAlnianach  des  Muses, 
et  autres  recueils  périodiques.  Il 
était,  avant  la  révolution  en  1789, 
secrétaire  du  cabinet  de  Madame. 
Il  publia  à  celte  époque  une  Ode 
à  la  liberté ,  et  n'en  fut  pas  moins 
privé  de  la  sienne  pendant  le  rè- 
gne de  la  terreur,  quoiqu'il  n'eût 
pris  aucune  part  active  aux  évé- 
neiuens  qui  précédèrent  ce  règne, 
et  qu'il  fût  même  consiamment 
manifesté  son  aversion  pour  les 
débats  politiques.  IVtinis  en  liber- 
té après  le  9  thermidor,  iM.  Vigée 
sentit  bientôt  sa  verve  se  rani- 
mer, et  célébra  en  ^ers  harmo- 
nieux la  gloire  du  vainqueur  de 
l'Italie,  la  naissance  du  roi  de 
Kome,  et  les  actes  les  plus  reiT)ar- 
quables  du   régne  impérial.  Il  ûl 


VIG 


207 


aussi  un  cours  public  de  littéra- 
ture à  l'Athénée,  fonction  dans 
laquelle  il  succéda  à  Lahurpe , 
sans  obtenir  toutefois  les  succès 
de  son  prédécesseur.  Ce  cours  de- 
vint même  l'objet  de  quelques  cri- 
tiques ,  d'une  sévérité  peut-être 
exagérée.  Il  travailla  depuis  au 
recueil  périodique  intilulé  :  Veil- 
lées des  Muses,  devint  ensuite  le 
principal  rédacteur  de-l'Àlmanach 
des  Muses,  dont  il  continua  la  pu- 
blication jusqu'à  sa  mort,  et  fut 
un  des  auteurs  de  la  Nouvelle  Bi~ 
bliotliéque  des  Romans.  M.  Vigée 
excellait  dans  la  lecture  à  haute 
voix.  Il  savait  donner  aux  vers 
qu'il  récitait,  et  les  siens  furent 
hnbituellcraent  de  ce  nombre ,  un 
charme  qu'on  était  parfois  étonné 
de  ne  plus  leur  retrouver  dans  le 
silence  du  cabinet.  Il  fut  nommé, 
en  1814,  lors  de  la  première  res- 
tauration ,  lecleur  du  roi.  Depuis 
celte  époque,  M.  Vigée  a  saisi  avec 
empressement  toutes  les  occa- 
sions de  rendre  hommage  à  la 
magnanimité  des  princes  de  l'au- 
guste maison  de  Botirb(m,  et  n'a 
guère  laissé  passer  de  solennités 
sans  offrir  au  roi  le  tribut  de  sa 
muse.  11  s'est  aussi  fait  remarquer 
par  ses  démêlés  avec  les  premiers 
corps  litléraires  de  la  France. 
Quoique  souvent  cité  parmi  les 
candidats  qui  pouvaient  préteii- 
dre  aux  honneurs  de  l'académie- 
franraise  ,  mais  n'ayant  jamais 
obtenu  assez  de  voix  pour  être 
admis  dans  le  sanctuaire,  M.  Vigée 
s'en  est  vengé  en  lançant  une 
•bule  d'épigrammes  contre  les 
académies.  Sous  ce  rapport,  il 
a  eu  quelque  ressemblance  avec 
Piron.  Vers  «la  fin  «le  sa  carrière, 
il  avait  cependant,  ainsi  que  Tau- 


ao8  YIG 

leur  de  la  Métromanie,  pris  son 
parti  sur  l'exclusion  académique; 
ainsi  que  lui,  il  fil  aussi  su  propre 
épilaphe  en  deux  vers,  qu'il  pu- 
blia en  1817,  annonçant  que  ma- 
lade el  sonllVant,  il  senlait  sa  fin 
prochaine.  Le  distique  de  M.  Vi- 
gée  ainsi  conçu  : 

Ci-gît  qui  fit  des  vers,  les  fit  mal  ,  et  ne  put, 
Quoiqu'il  fût  sans  espr.t,  être  de  l'institut. 

ne  resta  point  sans  réplique;  tm 
itiembre  de  l'-icadénue-lVancaise 
y  répondit  avec  plus  d'amertume 
que  de  justice  par  le  quatrain  sui- 
vant : 

Vigée  écrit  qu'il  est  un  sot  : 
Pense-t-il  qu'on  le  contredise? 
Non  ,  l'épithète  est  si  précise, 
Que  tout  Paris  le  prcrd  au  mot. 

M.  Yigée  était  bien  loin  cepen- 
dant de  mériter  une  épithéte  aussi 
sévère.  La  plupart  de  ses  ouvra- 
ges se  distinguent  par  la  grâce  et 
la  facililé.  Sun  style  est  élégant  et 
correct,  niais  il  manque  sou  vent  de 
force  et  de  chaleur.  Ses  composi- 
tions dramatiques  laissent  beau- 
coup à  désirer,  tant  pour  l'inven- 
ticn  de  la  fable  que  pour  le  comi- 
que des  situations,  mais  elles  sont 
en  général  spirituellement  dialo- 
guées.  On  a  de  lui  :  1°  Epilre  en 
vers  aux  membres  de  l' académie- 
française ,  décriés  dans  le  dix-liui- 
ticme  siècle,  1776,  in-S";  a"  les 
Aveux  difliciles ,  comédie,  1783, 
in-8°;  5°  i' Entrevue,  comédie, 
1783,  in-8"  ;  4°  ^«  Belle-Mère,  ou 
les  Dangers  d'an  second  mariage  , 
comédie,  1788,  in-8°;  5°  la  Ma- 
tinée d'une  Jolie  Femme,  comédie, 
1793  ,  in-8°;  6°  la  Vivacité  à  l'é- 
preuve, comédie,  non  imprimée; 
7°  Œuvres  diverses  contenant  Ni- 
non de  l'Enclos,  comédie  en  un 
acte  et  en  vers,  suivi  de  Poésies 


VIG 

fugitives,  1 797,  in-8"  ;  8"  ma  Jour- 
née, poiime,  1798,  in-8°;  (f  mes 
Conventions,  épître, suivie  de  vers 
et  de  prose,  1800,  in- 12;  10° 
Discours  couronné  par  Cacadémie 
de  Monlauban  sur  celte  question  : 
Comlnm  la  critique  amère  est  nui- 
sible aux  talens,'  1807.  in-S";  1  i* 
É pitre  à  L.  F.  Ducis,siir  les  acan- 
tages  de  la  médiocrité,  1810,  iii-S"  ; 
1 2"  Discours  au  roi  de  Rome.  1811, 
10-4"  (  et  dans  les  Hommages  poé- 
tiques de  Lacet  )  ;  i5°  la  Tendresse 
filiale,  1813  et  1816;  14"  lyésies, 
5°  édition,  i8i3,in-8°;  1 5"  Pro- 
cès et  mort  de  Louis  XVI ,  i8i4» 
in-8";  16°  la  Princesse  de  Babj- 
/or/<3,  opéra,  181 5,  in-8°;  17"  le 
Pour  et  le  Contre ,  dialogue  reli- 
gieux y  moral,  politique  et  litté- 
raire, 1818,  in-S".  M.  Vigée  est 
mort  à  Paris  en  1820.  Il  était  frère 
de  M"'  Lebrun  ,  qui  a  acquis  de  la 
célébrité  par  ses  succès  dans  l'art 
de  la  peinture. 

VIGER  (Loi'I5-Fba>'çois-Sébas- 
tien),  membre  de  la  convention 
nationale,  naquit  aux  Rosiers,  dé- 
pariement  de  Maine-et-Loire  ,  le 
7  juillet  1755,  et  reçut  une  édu- 
cation très-soignée  ;  ayant  fini  ses 
études  très-jeune,  il  désira  entrer 
dans  la  marine.  Son  père,  qui  é- 
tait  négociant,  prit  intérêt  sur 
un  vaisseau  chargé  de  faire  la 
traite;  le  jeune  Viger  fit  le  voya- 
ge en  qualité  d'enseigne;  mais 
l'humanité  de  ><m  caractère  ré- 
pugnant à  un  trafic  aussi  barbare, 
à  son  retour  i!  suivit  la  carrière 
du  droit,  et  après  être  resté  long- 
temps à  Paris  ,  il  acheta,  en  1 78  1, 
la  charge  de'std).-litut  des  gens  du 
roi.  au  présidial  d'Angers.  En  cet- 
te qualité,  il  fut  chargé  plusieurs 
fois  de  porter  la  parole  dans  des 


VIG 

afîairfs  d'un  liant  inlérêt;  il  s'en 
acqiiilla  toujours  d'une  manière 
dislinjîiiée.  Kii  17^7,  r.icadéiiiJe 
d'Aiijîi'is  mit  .'Ml  concours  ce  svj- 
jet  :  Quels  sont  les  moyens  d'encou- 
rat^er  le  commerce  A  Angers?  Le 
mcmoire  de  M.  Viger  oi)lint  le 
prix,  et  son  auteur  fut  élu  mem- 
bre honoraire  de  racadémie.  En 
1790,  M.  Viger  fut  uommé  pro- 
cureur-syndic du  district  d'An- 
jiers,  et  fut  chargé  seul  du  travail 
de  fixer  le  traitement  des  ecclé- 
siastiques de  son  district;  il  y  mit 
beaucoup  de  sagesse  et  de  modé- 
ration. Désirant  que  la  réforme 
des  abus  s'opérâl  en  ménageant, 
autant  qu'il  était  possible,  les  in- 
térêts, il  se  lit  des  ennemis  parmi 
les  exagérés.  Il  se  détermina  à  se 
démellre  d<;  ^a  place  dès  le  com- 
mencement de  1792.  Lorsque  les 
l'russichs  entrèrent  en  J.onaine, 
M.  Viger  augmenta  volontaire- 
ment le  nombre  des  défenseurs  de 
la  pairie  ;  il  se  trouva  à  la  bataille 
de  Jenimapcs;  mais  la  faiblesse  du 
sa  sauté  l'obligea  d«i  quitter  le  ser- 
vice. Au  mois  de  septembre  de  la 
même  ann«je  (1792),  les  éh^cleurs 
étant  assemblés  à  JSaunjur,  pour 
i)o'n>rner  des  députés  à  la  conven- 
tion nalionale,  l'on  y  annonça 
l'horrible  événeineut  du  massacre 
des  prisons.  M.  Viger  monta  à  la 
tribune,  et  témoigna  toute  l'in- 
dignation qu'il  en  éprouvait.  L'e.x- 
pression  de  ces  senlimens  fui 
la  cause  qu'on  ne  le  nomma  que 
])remier  suppléant  ;  il  entra  à  la 
cou  vent  ion  dans  les  premiers  jours 
de  mai  I7!)3,  et  devint  mmmu- 
bre  de  la  commission  des  douze, 
chargée  de  faire  un  rapport  sur  la 
conduite  de  la  commune  de  Paris, 
ce  qui  lui  valut  d'ûlre  cuinpiia 
X.  xz. 


VIG  a 09 

dans  le  décret  d'arrestation  des 
membres  de  celte  commission  , 
sur  la  motion  de  Le  Vasseur  de 
la  Sarlhe;  il  subit,  le5i  octobre 
suivant,  le  sort  de  ses  nialheureux 
collègues.  M.  Viger  s'était  marié 
en  1781  ,  et  n'a  point  eu  d'en- 
l'ans. 

VIGNOLLE  (  Martin,  comte), 
lieutenant-général,  grand- cordon 
de  la  légion -dhonneur,  comman- 
deur de  Saint-Louis,  conseiller- 
d'état,  préfet,  commandant  mili- 
taire, député  du  département  du 
Gard  ,  naquit  à  Marsillargue,  dans 
la  ci-devant  province  de  Langue- 
doc ,  le  i.S  mars  17C5.  Il  fut  ad- 
mis, en  1780,  dans  le  régiment  de 
IJarrois-infanterie,  en  qualité  de 
cadet  gentilhomme;  son  avance- 
ment fui  peu  rapide,  et  c'est  à  la 
révolution,  dont  il  adopta  les 
principes,  ipi'il  dut  le  grade  de 
capitaine  ,  auquel  il  fut  promu  eu 
1792.  Employé,  cette  année  mê- 
me à  l'armée  des  Alpes,  couunan- 
dée  parlegénéraldeMonlesquiou, 
il  se  distingua  à  la  prise  de  JNice, 
au  in')is  de  septendjre  ,  et  devint 
adjudant-général  au  commence- 
njent  de  1794-  H  commandait  eu 
cette  qualité  une  colonne  à  la 
prise  de  Saorgio  ,  le  29  avril 
(179^1),  et  avait  le  même  com- 
mandement à  la  prise  du  col  de 
Tende.  Sous-chef  de  l'état-tnajor 
du  général  Keliermann,  il  fut 
chef  d'état-majordu  général  Sclié- 
rer;  mais  ce  dernier  ayiint  été 
remplacé  par  le  général  Bonapar- 
te, M.  Vignolle  dut  céder  ce  litre 
à  lierlhier,  et  ne  conserver  que; 
celui  de  sous-chef.  Il  sc  distin- 
gua de  nouveau  à  Monlenotte  et 
à  De  go,  et  reput,  à  cette  occa- 
sion ,  une  lettre  de  félicitaiion  du 
4 


âio  VIG 

direcloire-cxéciitif.  Il  concourut, 
à  la  suite  de  la  bataille  de  Mon- 
dovi,  au  traité  par  Icfjucl  le  roi 
de  Sardaigiie  cousculail  à  ce  *|ue 
les  forteresses  de  Ceva  ,  de  Coid, 
d'Alexandrie,  etc.,  reçusseot  gar- 
nison française  ;  se  fit  reuïarquer 
au  pont  de  Lodi ,  et  obtint  en  ré- 
compense le  grade  de  général  de 
brigade,  que  lui  lit  accorder  le 
général  eu  chef  îîonaparte,  sur 
cet  éloge  :  «  Que  AI.  Vignolle  a- 
nvait  montré  une  bravoure  sûre  , 
')un  lalont  et  une  activité  rares.  » 
Blessé  d'un  coup  de  feu  à  la  ba- 
taille d'Arcole ,  il  reçut,  dès  son 
rétablissement,  le  commandement 
de  la  province  de  Crémone,  puis 
celui  du  Milanais.  La  campagne 
terminée  par  le  traité  de  Campo- 
Foruiio,  le  généial  Vignolle  fut 
chargé  des  fonctions  do  chef  d'é- 
tat-major de  l'ari^iée,  et  le  géné- 
ral en  chef  Bonaparte  ayant  quitté 
l'Italie,  il  devint  ministre  de  la 
guerre  de  la  république  cisalpine. 
Lors  de  la  reprise  des  hostilités  , 
en  novembre  H  798 .  le  général 
Vignolle  quitta  le  ministère  pour 
entrer  en  activité.  Après  s'être 
emparé  do  Sienne,  il  eut  la  garde 
des  Apennins  toscans,  et  après  la 
retraite  de  l'armée  fi-ançaise  d'I- 
talie,  il  alla,  par  ordre  du  géné- 
ral Moreau  ,  organiser  à  Nice  les 
bataillons  supplémentaires.  Le  gé- 
néral Berthier,  devenu  ministre 
de  la  gufiTe  par  suite  de  la  révo- 
lution dii  i8  brumaire  an  8,  l'ap- 
pela près  de  lui  pour  remplir  les 
fonctions  <lc  secrétaire -général 
du  ministère.  Deux  mois  après 
H  se  rendit  à  Dijon,  pour  orga- 
niser l'armée  de  réserve.  Employé 
dans  la  nouvelle  campagne  d'Ita- 
lie,  il  passa  le  Tes^n  avec  une  co- 


VIG 

lonne,  occupa  Milan  ,  dont  il  bl<i- 
qua  la  citadelle,  cominaufla  dans 
la  Lombardie  après  la  bataille  de 
iMarengo,  et  concourut  à  l'orga- 
nisation de  la  république  italien- 
ne. Le  26  décembre  1800,  au 
passage  .lu  Mincio,  il  courut  des 
dangers,  etson  aide-de-camp  fut 
tué  à  SCS  côtés;  la  campagne  ter- 
minée, il  passa  de  nouveau  au 
commandement  du  iMiianais,  et 
reçut,  en  1802,  lecotnmandemenl 
des  troupes  slatiotmée*  à  Bergame 
<'l  Como.  Eu  i8i)5,  il  revint  à 
Paris.  Nomm  !  ,  vers  le  même 
temps,  chef  d'étal-majur  de  l'ar- 
mée de  Hollande  il  fut  promu  le 
27  août  (i8o3),  au  grade  de  gé- 
néral de  division  et  chargé  de  di- 
riger dans  la  campagne  de  i8o4, 
sous  le  général  Mirmout,  le  2* 
corps  de  la  grande -armée.  Chef 
d'élat-major  de  l'armée  destinée 
à  cond);iltre  les  Russes  et  les  Mon- 
téné;;rins,et  à  dél)loquer  Raguse, 

où  était  enfermé  le  "énéral  Lau- 

o 

ristou,  il  prit  une  grande  part  au 
combat  de  Debilibriok,  en  avant 
de  Castel- iVuovo,  et  aux  affaires 
qui  terminèrent  les  hostilités.  Le 
général  Vignolle  revint  en  France 
et  en  repartit  pour  remplir  les 
fonctions  de  chef  d'état -major 
général.  Il  était  à  la  prise  de  Vien- 
n<;  ,  à  la  bataille  d'EssIing,  etc., 
et  le  18  juin  1809,  il  fut  envoyé 
comme  chef  d'état-major-général 
à  l'armée  d'Italie.  A  la  première 
joiUTiée  de  VVagram  ,  un  biscayen 
lui  fra(;assa  la  tempe  et  lui  enle- 
va l'œil;  il  fut  obligé  de  rester 
deux  mois  à  Vienne  pour  se  réta- 
blir. Il  passa  à  Milan  an  mois  de 
septembre  (  i  809),  et  y  organisa, 
au  commencement  de  1812,  une 
armée  destinée  à  être  réurue  à  celle 


VIL 

qui  opérait  contre  les  Russes.  Ce 
fut  en  vain  que  le  général  Vignolle 
demanda  à  servir  acliveinenl  ;  il 
resta  en  Italie  pour  commander 
le.s  tronpesqni  s'y  trouvaient.  Le 
prince  vice  -  roi  (  voyez  Eugène 
BuAunARNAis)  revint  à  Milan  en 
181 5;  le  g(  lierai  Vignolle  réorga- 
nisa l'armée  d'Italie,  et  fit  la  cam- 
pagne jusqu'à  ce  que,  par  suite 
des  événemens  de  1814  >  il  lût 
forcé  de  ramener  l'armée  sur  les 
frontières  de  France.  Iln'eul  point 
de  service  pendant  les  cent  jours  , 
en  i8i5;  après  le  second  retour 
du  roi  ,  il  devint  commandant  de 
la  18*  division  militaire  à  Dijon. 
L'ordonnanre  royale  du  1*'  aoHt* 
181  5  le  mit  à  la  retraite;  nu  mois 
de  mars  1818,  il  devint  préfet  de 
la  Corse,  commandant  militaire, 
et  <nfin  menibre  de  la  chambre 
des  députés,  dont  il  faisait  encore 
partie  lorsqu'il  mourut  A  Paris,  le 
1 5  novembre  1824.  On  doit  au  gé- 
néral Vigi'iolle  un  Précis  historique 
des  opérations  de  l'armée  d' Italie 
en  i8i5  et  i8i4,  Paris,  1817- 
1818.  On  assure  qu'il  a  en  porte- 
feuille un  Essai  historique  sur  ta 
campagne  de  rarmée  d'Italie  en 
1809. 

VILLAI-RANCA  (le  prince  Jo- 
seph Alliata  de  ) ,  gentilhomme 
de  la  chambre  de  S.  M.  le  roi  des 
Deux-Sicilcs ,  chevalier  de  l'or- 
dre royal  de  Saint-Janvier,  grand 
d'Espagne  de  première  classe , 
naquit  i  Naples,  en  17C4,  de 
parens  palermitains ,  d'une  des 
principales  familles  de  Sicile, 
quoique  originaire  de  Fisc.  Il  fut 
élevé  dans  lu  m.iison  paternelle 
sous  une  discipline  austère.  Tiès- 
jeune,  il  épousa  une  fille  du  prin- 
ce Valguarnera.    Pour   apprécier 


ML  211 

mieux  son  caractère,  il  faudrait, 
avant  de  le  voir  figurer  sur  le 
théâtre  politique  ,  l'avoir  suivi 
dans  sa  vie  privée;  car  les  socié- 
tés et  les  cercles  politiques  ne 
sont  ordinairement  que  des  théâ- 
tres où  chacun  joue  un  rôle.  C'est 
d'ins  le  sein  de  sa  famille  que  Ton 
est  vraiment  soi-même.  Le  prince 
de  Villafranca  est  bon  é[)oux  et 
bon  père, et  comme  homme  privé, 
il  est  chéri  de  tous  ceux  qui  le 
connaissent.  Membre  de  la  cham- 
bre des  barons  (  braccio  baronule  ) 
dans  le  parlement  de  18 10,  il  sou- 
tint avec  vigueur  les  intérêts  po- 
pulaires. Il  fui  membre  de  la  com- 
mission qui  présenta,  en  18 1 1,  à  la 
députatiotidu  royaume,la  faneuse 
remontrance  au  roi  de  la  part  des 
barons  siciliens  contre  les  taxes 
qu'on  avait  imposées  à  l'insu  du 
parlement,  ce  qui  lui  valut  d'être 
l'un  des  cinq  barons  qui  furent  ar- 
rêtés dans  la  nuit  du  19  juillet  de  la 
même  aimée  par  la  force  mili- 
taire, «  coirune  perturbateurs  de 
la  tranquillité  publique  »,  et  d'ê- 
tre confiné  pendant  plusieurs  moi» 
dans  l'île  de  Pantellarie,  jusqu'à 
ce  qu'il  fût  délivré  par  la  média- 
lion  du  gouvernement  britanni- 
que. Lorsqu'cn  1812,  le  roi  con- 
voqua le  parlement  pour  travail- 
ler à  la  nouvelle  constitution,  il 
fut  dans  la  chambre  des  barons 
l'un  de  ses  défenseurs  les  plus  zé- 
lés, et  il  contribua  beaucoup  ù 
son  succès.  C'est  A  cette  occasion 
qu'il  prit  tant  de  goCit  pour  l'ins- 
IrucUon  et  pour  l'étude  aux(|uel- 
les  il  a  depuis  voué  tous  ses  loi- 
sirs. Le  zèle  et  l'intelligence  qu'il 
déploya  alors  et  la  loyauté  de  son 
caractère,  lui  méritèrent, en  181.^, 
lorsque  le  nouveau  parlement  su 


ai  a  VIL  ^IL 

rassemhla  sous  (I(î  nouvelles  for-  h:  cherclier  ù  boni  du  vaisseau; 
um^,  tt  quoiqu'il  lui  irès-jiuiic ,  cri  le  conduisit  in  triomphe  dans 
la  place  de  président  de  la  (liaui-  l,i  \ill(:.  et  on  le  proclama  prési- 
hre  des  pairs.  Il  soutint  celte  Ifl-  dml  di;  la  juoic.  Il  occupa  pen- 
che si  laborieuse  et  si  didicile.  et  d.int  deux  mois  ci  Ite  place  très- 
dans  laquelle  il  n'avait  ni  aiihcé-  dillicile,  dan>  I  iqiielle  il  montra 
dent  ni  uioilèie  à  .'•uivie,  avec  allant  d'intréj)idilé  que  de  talent 
beaucoup  d  liiibiU  lé  et  à  la  sa-  et  de  saf^esse  ,  «'iaril  parvenu  à 
lisfaction  ycuérale.  Lorsque  le  nielUt,'  un  terme  à  l'anarchie  et  a 
ministère  constituliotmel  donna  établir  un  gciuvcriituient  qui  eut 
sa  démission,  il  quitta  sa  pbice  ;  du  nioins  pour  résultat  d'ép:ttgiier 
mais  un  nouveau  ministère  s'étant  des  scènes  de  saiiji  et  des  catas- 
organisé  quelqui;  tenips  après,  il  trophes  dont  on  n'aurait  pu  pré- 
reçut le  portefeuille  dv^  alïaires  voir  le  terme  et  l'étendue.  La 
étrangères  ,  et  fut  l'un  des  mem-  marche  du  général  Fiorestan  Pé- 
Lres  du  conseil-d'état.  Le  u)inis-  pé,  qui,  vers  la  fin  de  septembre  , 
tère  dont  il  faisait  partie  lut  dis-  de  Milazzo  s'avançait  sur  Palerme 
sous  en  1814.  Util  alors  un  voya-  avec  une  armée  napolitaine,  oc- 
ge  sur  le  cunlinenf  ,  et  iési.i;i  casiona  une  se(;onde  commotion. 
long-tem[)S  en  Toscane ,  oii  il  fut  Le  princte  de  YiilaiVanca  eut  l'im- 
alteinl  d'une  maladie  longue  et  prudence  de  quitter  Paierme.  Il 
très-grave,  dont  il  est  res'lé  bf>i-  se  rendit  sur  l'invitation  du  gé- 
tevix.  Il  se  trouv.'iil  à  ISaples,  en  néral  l'épé,  et  dajires  ime  réso- 
juillet  i8'20,  lorsque  la  révolution  lution  de  la  junte  a  Tern)ini,  pour 
y  éclata.  11  prévit  les  dé^ordres  faire  partie  d'une  députation  qui 
qui  devaient  arriver  en  Sicile ,  et  allait  traiter  d'un  accommode- 
paria  avec  beaucoup  de  courage  ment  av(.'c  ce  général.  Un  engage- 
et  de  franchise  à  S.  A.  11.  le  meut  entre  la  flottille  napolitain» 
prince  -  vicaire ,  du  sort  de  son  et  quelques  barques  canonnières 
pays  et  des  mesures  à  prendre;  paleriuitaines ,  près  de  ïermini , 
mais  ce  fut  vainement.  Il  partit  exj)Osa  à  des  dangers  très-graves 
pour  Falerme,  où  il  n'arriva  que  la  barque  pat  lenientaire  dans  la- 
ie 24  juillet ,  huit  jours  après  que  quelle  se  Inuivait  la  dépuJalion. 
l'insurrection  avait  éclatée.  Cela  Le  piii.ce  ,  ;iinsi  que  les  autres 
n'empêcha  pas  qu'il  ne  fût  soup-  liépulés,  furent  obligés,  pour  se 
çonné  à  ÎSaples  d'en  avoir  été  Tinj-  sauver,  de  gagner  le  rivage  en  se 
t«ur.  Leprinccde  Aciavaitdéjè'iélé  jetant  a  la  nitr.  Cette  nouvelle,  et 
assassiné  la  veilif.  e!  le  cardinal  la  marche  que  Laiinée  continuait 
Graviiia,  .uchevêque  de  l'aierme,  sur  la  capitale  ,  excita  de  nouveau 
ainsi  que  plusieuis  .uitie?  mem-  la  populace,  qui  crut  avoir  été 
bres  de  la  junte  venaieni  ('The  si-  tr;due.  Le  prince  de  Villafranca 
^aiés  comme  de  nouvelles  victi-  fui  lui  .uiême  soupçonné  d'avoir 
mesàlafureurpopulaire. L'arrivée  pris  pari  à  la  lrahi?on.  Son  palais 
du  prince  de  Villafranca  cahna  les  fut  assailli,  el  une  maison  de  cam- 
esprits,  et  arrêta  heureusement  pagne,  t:vec  un  délicieux  jardin, 
les  excè»  de  la  populace.  On  alla  près  de  la  ville,  pillée  et  dévastée. 


ViL 

Il  scjourna  ensuite  penilanl  Inng- 
t<Mnps  à  Teriniiii  ,  inêiiu:  après 
rciiti'f'e  (les  Iroiipes  iiiifrichien- 
ncs.  D»;  retour  à  Faleiiue,  il  y  vit 
flnns  i.i  retraite,  {coûtant  tles  plai- 
«ir^;  (loiil  une  conscience  sans  re- 
proches peut  seule  assurer  la  j(»uis- 
sance  aux  hounues  verlutux  qui, 
après  avoir  figuré  dans  le  monde, 
rentrent  ijaits  la  vie  privée. 

VILLAR  (Norr-GABLiEL-Lic 
DP.  ),  nicnjl)re  de  riustitut  et  de  I  i 
léj^ion-d'lionncur,  évêrpie  consti- 
tulionnel,  etc.,  est  né  à  Tftulnuse, 
département  de  la  Ilaute-Caron- 
ne,  vers  ij-4B.  II  entra,  jeiuie  en- 
core .  dans  la  congrégation  des 
doctrinaires,  et  devint  principal 
du  c(jllége  de  la  Flèclie.  La  révo- 
lution, dont  iladu])ia  avecsjgesse 
les  j)rincipeSj  le  p(trta  aux  fono- 
lions  publiques,  d'^ibord  comme 
é\êque  constitu lionne!  du  dépar- 
lement de  la  Mayenne;  il  fut  sa- 
cré en  cette  qualité ,  à  Paris,  le 
22  mai  ijf)!.  M.  Villnrfuteusuilc 
élu,  au  mois  de  septembre  «792» 
député  à  la  convention  nationale, 
où,  dans  le  procès  du  roi ,  il  vola 
la  détenlion  et  le  bannissement  à 
la  paix.  Non-seulement  il  se  démit 
|>ar  lu  suite  de  son  épiscopat,  mais 
il  retuMiça  encore  aux  rondions 
t'r«;li>iastiques.  Successivement 
membre  du  corps- législatif  ,  de 
lin^lilut,  iosp(;ctcur-général  des 
éludes,  ef  conseiller  ordinaire  de 
l'université,  SI.  Viljar  n'est  pltis 
aujourd'hui  (i8'25)  que  membre 
(Urinsli tut  (académie -française); 
il  est  attaché  i\  la  commission  du 
dictionnaire.  On  lui  doit  :  ^''quei- 
ques  Lettres  pastorales, i\\i."\\d  pu- 
bliées lorsqu'il  était  évèque;  v." 
difléri;ns  Rapports  à  la  conven- 
tion nationale,  entre  autres  p04U' 


VIL  2i3 

faire  conserver  le  collège  dcî  Fran- 
ce jusqu'à  l'organisation  de  l'ins- 
Iruclirm  publique;  pour  fixer  la 
somme  à  répartir  enire  i  i8savans, 
lillérateurs  et  artistes;  enfin  pour 
l'organisation  des  liibliothéques 
de  Paris  ;  5'  des  Poésies  dans 
quelques  recueils,  particulière- 
ment la  Décade  philosopliiqucde^ 
fraginens  de  V Iliade  en  vers;  4" 
Notice  des  travaux  de  Utlcratnrt  et 
beaux-arts  de  l'institut  national, 
pendant  les  années  Q  et  \o  (  Mé-. 
moires  de  l'inslitut,  i,  525,.  11, 
io-t)a-79);  5°  Notice  sur  la  vie 
et  les  ouvrages  do  Louvet  (  Mémoi- 
res de  rinslilnt.  classe  de  littéra- 
ture et  beaux-  arts,  t.  II,  llist. , 
p.  27),  6"  Notice  sur  lavieet les  ou- 
vrages de  Jean  Dusautx  (ibid.,  5, 
Ilist.,  p.  52);  ']"  Notice  sur  la  vie  et 
les  ouvrages  d' Etienne  lioallée,  ar- 
chitecte (ibid..  p.  45-) 

VILLARKT  (  Jean  -  Chrisos- 
TÔME  ,  BARON  de)  ,  membre  de  l'as- 
semblée constituante,  ai\cien  évè- 
que d'Amiens  et  de  Casai,  etc., 
est  né.  le  «7  janvier  1757,  à  IVho- 
dez,  dépîjrtement  de  l'Aveyron, 
d'une  famille  noble.  Il  embrassa 
l'état  ecclésiastique,  fut  nommé 
vicaire  -  généra!  de  l'évêché  de 
Illiodez.et  élu,  par  le  clergé  de 
la  sénéchaussée  de  Villefranche  , 
député  aux  états  -  généraux  en, 
178!).  Peu  remarqué  pendant  la 
session ,  il  le  fut  heureu>etnent 
moias  encore  sous  le  régiiue  de  la 
Itrr^'ur,  auquel  il  échappa.  Le  9 
avril  1803,  par  suite  du  concor- 
dai ,  il  fut  )>onrvu  de  l'évêché 
d'Amiens,  d'où  il  passa  au  siège 
de  Casai ,  départenif  ni  de  Ma- 
rengo,  le  21  juin  1804.  Celle 
mèmp  année,  le  collège  électoral 
du  département  de  la  Somme  l'a- 


2l4 


VIL 


Tait  dcsigrié  pour  candidat  an  sé- 
nal-coiiservatenr.  M.  de  Villaret 
fut  nommé  successivement  chan- 
celier de  l'université  impériale, 
premier  aumônier  du  roi  Joseph 
(  VOy.  BoNAPARTE-Jo«EPH  ),  et  of- 
tiiier  de  la  légion  -  d'honneur. 
Comme  heaucoup  d'autres  fonc- 
tionnaires puldics,  lors  des  évé- 
nemens  politiques  de  1814?  M. 
de  Villaret  vota  la  déchéance  de 
l'empereur  et  le  rétablissement 
de  la  niiiison  de  Bourbon.  Néan- 
moins, à  son  retour  en  mars  181 5, 
N  i|niIéon  ,  par  un  décret  du  5o 
de  ce  mois,  le  riiiiinlint  dans  les 
fonctions  de  chiincelier  de  Tuni- 
versité  impériale ,  fonctions  qu'il 
a  perdues  à  la  seconde  restaura- 
tion, par  suite  delà  réorganisation 
de  l'université,  comme  il  avait 
perd»  quelque  temps  auparavant 
son  évêché  de  Casai  tiu  rétablis- 
scnu;nt  du  royaume  de  Sardai- 
gne. 

VILLARET    (le   MARQUIS  DE  )  , 

maréchal-de-camp ,  commandeur 
de  l'ordre  royal  et  militaire  de 
Saint  -  Louis  ,  frère  de  l'amiral 
Villaret  -  Joyeuse  (dont  l'article 
suit  )  ,  fit  des  études  disîinguées 
en  mathématiques,  entra  dans  le 
corps  de  l'artillerie ,  et  était  li(;u- 
tenanl-colonel  lorsque  la  révolu- 
tion éclata.  11  ne  partagea  point 
les  nouvelles  doctrines  politiques, 
émigra ,  et  servit  à  l'armée  du 
prince  de  Condé.  Aussitôt  que  les 
circonstances  le  lui  permirent,  il 
rentra  dans  sa  patrie,  et  tout  en- 
tier livré  à  ses  afl'eclions  domes- 
tiques, il  s'occupa  uniquement  de 
l'éducation  de  ses  deux  neveux, 
que  son  intrépide  frère  avait  pour 
ainsi  dire  légués  à  sa  tendre  amitié. 
Tous  deux  ont  répondu  à  ses  soins 


VIL 

véritablement  paternels  ,  et  on* 
conquis  des  grades  honorables  , 
l'un  sur  terre  et  l'autre  sur  mer. 
Le  grade  de  maréchal-de  camp  et 
le  titre  de  commandeur  de  Saint- 
Louis  sont  venus  décorer  sa  re- 
traite et  sa  vieillesse.  Le  marquis 
de  Villaret  mourut  en  1824.  Son 
ami,  IM.  de  La  Croix,  membre  de 
la  légion  -  d'honneur  et  juge  au 
tribunal  civil  de  Versailles,  a  payé 
un  tribut  touchant  de  regrets  à  sa 
mémoire. 

VILLARET  DE  JOYEUSE (le 
COMTE  Loris- Thomas),  vice -ami- 
ral. grand-olTicier  de  la  légion- 
d'hoiMieur,  et  en  dernier  lieu  gou- 
verneur-général de  Venise,  na- 
quit à  Auch  en  i^So,  d'une  ancien- 
ne famille  de  Gascogne.  Il  montra 
dès  sa  première  jeunesse  un  pen- 
ciant  décidé  pour  le  service  de 
mer;  sa  famille,  par  des  raisons 
particulières,  ne  se  rendit  pas  à 
ses  vœux,  et  le  fit  entrer  dans  les 
gens  d'i'.rmes  de  la  maison  du  roi; 
mais  dès  qu'il  eut  atteint  sa  seiziè- 
me année,  n'écoulant  plus  que  son 
gortt,  il  s'embarqua  en  qualité  de 
volontaire.  Il  avait  fait  d'excellen- 
tes études  :  le  désir  de  se  distin- 
guer, un  caractère  heureux  mé- 
lange de  douceur  et  de  fermeté, 
une  bravoure  enfin  que  rien'n'é- 
tonnait,  firent  bientôt  remarquer 
le  jeune  Villaret  de  Joyeuse  des 
chefs  sous  lesquels  il  parcourut 
les  mers  de  l'Inde.  En  1773,  il  fut 
nommé  capitaine  en  second  d'un 
bâtiment  destiné  à  porter  des  trou- 
pes pour  proléger  l'établissement 
qu'on  voulait  former  à  Madagas- 
car; il  fit  depuis  plusieurs  cour- 
ses, avec  le  même  grade,  ?-\\tVA- 
tatante.  Ne  se  trouvant  point  em- 
ployé activeuacnt  à  l'époque  où 


ôlb 


^-o 


CQ/O/if/^û/  ItZ/ft/'et-  (loufiuie  . 


VIL 

les^  Anglais  vinrent  niellre  le  siège 
devant  Pondichéry  en  1778,  il 
concourut  volontairement  à  la  dé- 
fense de  cette  place  sous  les  ordres 
de  M.  deBellecombe.  Sur  le  conip- 
le  avantageux  que  cet  officier-gé- 
néral rendit  des  services  de  iM.  Vil- 
larel  de  Joyeuse,  il  fut  promu  au 
grade  de  eapilnine  de  brûlot.  En 

IJ781,  il  eut  le  coMimandenietil  ûii 
m  brûlot  le  Pulvériseur ,  qui  faisait 
»  partie  de  la  ttoUt  que  commandait 
le  bailli  de  SuiTren  dans  les  mers 
de  l'Inde. Cethommecélèbre, qui, 
par  des  opérations  aussi  audacieu- 
ses qu'habilement  combinées,  em- 
ployant à  la  fois  les  forces  de  ter- 
re et  de  mer,  sut  rendre  aux  armes 
françaises  leur  ancien  lustre,  et 
qui  seul  sut  encore  humilier  ta 
puissance  anglaise,  démêla  bien- 
tôt parmi  tant  d'oHiciers  distin- 
gués qui  servaient  sous  ses  ordres, 
le  mérite  de  Villaret  de  Joyeuse. 
Au  siège  de  Gondelour,  il  le  choi 
sit  pour  aide-de-camp,  et  lorsque 
les  opérations  maritimes  recom- 
mencèrent, il  lui  confia  le  com- 
mandement de  la  Bellone ,  qu'il 
quitta  quelque  temps  après  pour 
celui  de  la  DfayuUc.  Ce  fut  avec 
ce  bâtiment  que  M.  Villaret  se 
trouva  chargé  d'une  iriission  diffi- 
cile, qui  demandait  ime  expéiieii- 
ce  consommée  et  une  grande  ré- 
solution. Il  s'agissait  d'aveilir  M. 
de  l'einier,  qui  avec  une  division 
navale  avait  été  envoyé  pour  ué- 
toyer  la  rade  de  iMadras  ,  qu'une 
escadre  anglaise  beaucoup  plus 
forte  que  la  sienne  croisait  au  lar- 
ge près  de  celle  côte,  épiant  les 
vaisseaux  français,  dont  elle  espé- 
rait bien  faire  sa  proie.  Pour  les 
prévenir  à  temps,  il  (allait  passer 
au  milieu  de  cette  croisière  an- 


VI L 


2l5 


glaise.  «Je  vous  ai  choisi,  dit  le 
»  brave  Suffren  au  commandant 
»de  la  Nnyade,  parce  que  j'ai  be- 
"SOMi  d'un  houjme  de  tOte  ;  faites 
nloot  ce  que  vous  poiu-rez  pour 
i>reu)plir  votre  mission,   je  vous 

•  donne  carte  blanche.  Vous  serez 
«chassé  en  allant  ou  en  revenant  : 
n  vous   serez   probablement  pris; 

•  mais  vous  vous  battrez  bien,  c'est 
»ce  que  je  veux.  »  Arrivé  aux  at- 
lérages  de  Madras,  mais  n'ayant 
pu  mettre  la  vi;;ilance  de  l'cune- 
ini  en  défaut,  Villaret  voulut  au 
moins  en  succombant,  faire  con- 
naître à  la  division  qu'il  avait  mis- 
sion de  sauver  le  danger  qui  la 
menaçait.  Le  vaisseau  de  ligue  an- 
glais le  Sceptre^  de  64  canons,  lui 
donnait  déjà  chasse.  Villaret  lit 
monter  sur  le  pont  de  la  Najade 
tout  son  équipage,  composé  de 
120  hon)nies,  et  leur  dit  :  «Ce 
«n'est  qu'un  bâtiment  armé  par  la 
«compagnie  des  Indes.  (Il  savait 
«biea  le  contraire),  des  braves 
»  connue  vous  ne  se  laisseront  pas 
«prendre  par  un  marcharul.  »  On 
lui  répondit  par  des  acclamations, 
et  tout  fut  disposé  pour  le  <ombat. 
Villaret  m;  commença  cependant 
la  canonnade  que  lorsqu'il  fut  près 
la  côte,  et  qu'il  eut  atteint  le  point 
où  les  Français  pouvaient  le  voir. 
Là,  sans  autre  espoir  que  d'avertir 
les  siens,  la  plus  terrible  lutte 
s'engage.  Pendant  trois  heures, 
une  faible  corvette  de  >8  canons 
résiste  à  un  vaisseau  de  ligne,  et 
cela  ;\  une  distance  si  rapprochée, 
que  le  commrxlore  anglais  se  fai- 
sait clairement  entendre,  en  criant 
à  M.  de  Villaret  :  »  Brave  jeune 
i>  homme,  conservez  à  voire  roi  un 
»  o/firier  qui  sait  si  bien  défendre  son 
1» pavillon.  »  Lu  corvette,  cutière> 


2l6 


VIL 


int'fit  démâtée,  avec  hiiil  pieds 
d'eau  dans  sa  cale ,  ayant  penlii 
les  trois  quarts  de  sou  équijKtg* 
fl  près  de  couler  ha^,  se  rendit  vaï- 
fin.  Mais  les  vaisseaux  français, 
iîislrnits  de  la  présence  de  l'enne- 
mi, durent  leur  snlut  à  ce  dévoue- 
ment héroïque.  Le  capitaine  dn 
Sceptre  refusa  l'épée  si  vaillam- 
ment défendue ,  que  son  prison- 
nier voulut  lui  remettre,  et  les  An- 
j;lais  comblèrent  Villaret  de  mar- 
ques d'estime.  Il  fut  échangé  peu 
de  temps  après,  et  t\l.  de  liussy 
qjii  conimandait  les  forces  de  ter- 
le  française  dans  l'Inde,  le  décora 
de  l'une  des  trois  croix  de  Saint- 
(jouis  que  le  roi  avait  mises  à  sa 
disposition.  L'amiral  Suirren  lui 
donna  le  commandeinenl  de  la 
frégate  Coventri,  avec  laquelle  il 
termina  la  campagne.  Il  eut,  en 
1783,  l'ordre  d'aller  à  Batavia 
pour  traiter  avec  la  compagnie 
hollandaise  d'intérêts  importans. 
A  son  arrivée,  il  salua  la  place  se- 
lon l'usage  ;  le  commantlant  hol- 
landais ne  lui  ayant  pas  fait  ren- 
«he  le  salul,  il  s'emtjossa  pendant 
la  nuiU  et  fit  signifier  que  si  on 
ne  lui  rendait  pas  le  lendemain  les 
honneurs  qui  lui  étaient  dus,  il 
foudroycrait  la  place.  Dès  les  pre- 
miers rayons  du  soleil,  la  frégate 
française  fut  saluée  d'autant  de 
coups  de  canon  qu'elle  en  avait  ti- 
rés la  veille.  Les  négociations  fu- 
rent conduite;»  avec  la  même  fer- 
meté, et  Villaret  oblint  qu'on  fît 
droit  à  ses  justes  demandes.  Il  ne 
revint  en  France  qu'après  la  »;on- 
clusioD  de  la  paix,  et  fut  nommé 
successivement  lieutenant  de  vais- 
seau, major  de  la  marine  à  Lo- 
rient,  et  capitaine  de  vaisseau.  Il 
remplit  avec  ce  dernier  grade  «tîc 


VIL 

mission  à  Saint-Domingue,  où  îl 
se  trouva  lors  des  premiers  trou- 
bles de  la  colonie  ;  revint  en  Fran- 
ce avec  le  «louveaii  pavillon,  et  eut 
en    1795.    le  commandement  t\n 
vaisseau  de  ^4  canons,  le  Trajuri , 
qui  tit  partie  de  l'escadre  aux  or- 
dres  du    vice-amiral  Morard    de 
Cal  les.  La   mt,'me  année,  la  con- 
vention nationale  l'clevn  an  {Çrade 
de  conîre-amiial,  et  lui  confia  le 
comn)andement  en   chef  de  l'ar- 
mée navale  de  l'Océan,  poste  qu'il 
n'avait  point  sollicité,  et  qu'il  ac- 
cepta même  avec  répiignaiice,  vu 
l'insuborilinatiou  qui  régnait  à  cet- 
te époque  sur  les  escatires  de  la 
république.  Mais  l'estim»;  et  l'af- 
fection générale  dont  il  jouissait 
parmi  ses  frères  d'arnves,  et  la  fer- 
meté de  son  caractère,  lui  fourni- 
rent les  moyens  de  rétablir  l'ordre 
partout  où  il  comrnan<lait ;  l'aini- 
ral  Villaret  de  Joyeuse  ne  s'était 
point  prononcé  en  faveur  de    lu 
révolution  et  passait  môme  pour 
être    très-opposé    aux    principes 
professés  par  les  trois  pr^-mières 
asseiiiblées  délibérantes.    Mais  il 
n'avait  pas  cru  devoir  abandonner 
la  France  à  rexeni)>lede  tant  d'of- 
ficiers distingués  de  la  marine  qui 
émigrèrent,  ni  pouvoir  refuser  à 
sa  patrie  le  secours  de  son  bras. 
Jean-Bon    Saint-Andfé    {voy.  ce 
nom),  membre  de  la  convention 
nationale,  qui  fut  investi  pendant 
quelque  ten»ps  d'uno^utorité  illi- 
mitée dans  le  déparlement  de  la 
marine,  availcoutume  de  dire  :  «  Je 
sais  que  Villaret  est  un  aristocrate; 
mais  c'est  un  brave  qui  se  battra 
toujours  bien.  «  Il  montra  en  effet 
tant  de  courage  et  de  talens  dans 
le  poste  difficile  qu'il  avait  accep- 
té, qu'on  le  lui  conserva  .pendant 


VIL 

plusieurs  années.  On  sait  comhien 
la  journée  du  i5  praiiial  an  a  (i" 
juin  1794)  aurait  encore  été  bril- 
lante  pour   la  marine   française  , 
*ans  la  fausse  nianœuvre  1]»'.  (|U(;I- 
ques  oapitaintâ   iuexpérinieulés , 
qui    lai-^ïèrent    couper    la    Jif^ue. 
.lean-Bnn  Suin(-An<Jré  fut  blessé 
à  cÔJé  lie  l'amiral  Villan;!,  dont  il 
uiontnit  le  vaisseau.  Les  Franrais 
perdirentplusieurs  bûtimens,  mais 
on  parvint  à  faire  entrer  dans  U-s 
ports    un  riche  convoi  de   giains 
d'Amérique,  impatiemment  atten- 
du. L'amirid  Villaret  s'oppoî^a,  au- 
tant qu'il  put,  .^  l'expédition  mal 
heureuse  qu'on  (it  sortir  des  ports 
au   milieu  de  l'hivei"  l'anuée   sui- 
vante, mais  il  ne  fut  point  écouté. 
En  l'an  4,  il  déploya  le  pins  };rand 
courage  dans  le  combat  qui  fut  li  - 
vré  sous  l'île  de  Croix,  contre  des 
forces  plus  que  doubles  des  sien- 
nes.   Entouré   de  plusieurs  vais- 
seaux ennemis,  le  sii;n  était  criblé 
de  boulets  lorsqu'il  parvint  enfin 
à  se  dégager.   Il  se  prononça  en- 
core, «n  l'an  5,  contre  l'expédition 
d'Irlande,  dont  il  prédit  la  triste 
issue,  et  voyant  tiuijours  ses  con- 
seils négligés,  il  donna  -^a  <lén»i>- 
sion.  que  le  directoire  accepta.  En 
tyfjCi,  l'amiral  Villaret  fut  nommé, 
par  le  département  du  iMorbihan, 
député  au  conseil  des  cinq-cents. 
Il  s'y  lia  avec  les  chefs  du   parti 
dit  de  Clic/iy ,  et  se  munira  cons- 
tannnent    opposé    au    gouverne- 
ment directoriaJ,  qui  le  compta 
bientôt  an  nombre  de  ses  plus  dan- 
gereux entieuiis,  et  qui  s'en  ven- 
gea   lors    du    coup    d'étal   du    18 
fructidor.  Condamné  à  la  déporla- 
tiorj,  Villaret  parvint  à  scsousirai- 
re  aux  poursuilos  dirigées  contre 
lui,  et  dut  à  ruinilié  qui  lui  offrit 


VIL 


21 


courageusement  \\n  asile,  le  bon- 
heur d'échapper  au  sort  qui  atten- 
dait tant  d'infortunés  dans  les  dé- 
serts infects  de  Sinamary.    Mais 
quelque  teuipsjiprès,  il  fit  à  l'in- 
térêt lie  sa  famille  et  à  la  sftreté 
de  ses  amis,  le  sacrifice  de  ce  qui 
lui  restait  de  liberté,  et  se  rendit, 
en    1799,  au  lieu  d'exi),  assigné 
par  le  directoire  aux   condamnés 
(pii  avaient  échappé  à  la  première 
(léporlation.  H  fut  rappelé  de  l'île 
d'Oléron.par  legénéral  en  chef  lio- 
naparte,  dès  les  pren>iers  jours  de 
rétablissement  du  gouvernement 
consulaire,  et  il  vint  reprendre  un 
po:>le  nu'.rilé  par  tant  de  services 
et  de  dévouement  i  la  patrie.  Son 
retour  dans  les  ports  français  fut 
un  jour  de  lêle  pour  l'armée  na- 
vale de  l'Océan,  dont  il  continua 
de  diriger  les  opérations  avec  le  ti- 
tre de  vice-amiral.    Lorsqu'aprè^ 
le   traité;  d'Amiens,  le,  gouverne- 
ment résolut  de  raltiicher  à  la  mé- 
tropole la  riche  colonie  de  Sainl- 
Domingne,    l'amiral    Villaret  fut 
«hargé  du  commandement  de  la 
llolte  expédilionuaire.  (jui  y  trans- 
porta  les   tKJupcs   françaises.    En 
i8oa,  il  fut  nommé  eaj)itaine-gé- 
néral  des  îles  de  la  iMarlini(|ue  et 
'Je   Sainte-Lucie,  (jn'il  gouverna 
pendant  sept  ans.  Son  administra- 
lion  poila  l'empreinte  de  son  ca- 
raelère  ;  elle   fut  aclive  sans   tra- 
casseries i'I  bienveillante  sans  fai- 
blesse. Jl  a  laissé  dans  e-es  îles  les 
plus  honorabltis  souveiwfs.  Atta- 
qué par  les  Anglais  en  1809,  il  fut 
obligé,  après  une  vigoureuse  résis- 
lance  contre  des  forces  supérieur 
res,  et  après  avoir  éprouvé  dan» 
le  fort  iiuurbon  le  boii)bar(h:meiit 
Lt:  plus  terrible,  de  rendre  la  Mar- 
tinique. A  son  retour  eu  Frauce^ 


2i8  VIL 

îl  no  cessa  de  demaiuler  que  sa 
conduite  fût  examinée  jiidiciaire- 
nifiit,  mais  il  ne  {)ijI  obtenir  d'ê- 
tre jugé.  «;t  l'empereur  lui  fit  écrire 
par  le  niinislre  di;  la  marine,  qu'a- 
près avoir  examiné  lui-même  sa 
conduite,  il  le  nommait  iu  gou- 
vernement général  de  Venise,  et 
au  comniandement  de  la  i  2*  divi- 
sion militaire.  C'est  dans  l'exenii- 
ce  de  ces  fonctions  éminentes, 
qu'il  fut  enlevé  à  la  France  et  à  sa 
famille  en  1812,  à  l'âge  de  62  ans. 
Unissant  les  qualités  sociales  les 
plus  aimables  à  de  solides  vertus, 
chéri  de  ceux  qu'il  a  commandés, 
et  estimé  de  ceux  qu'il  a  combat- 
tus, Villarel  de  Joyeuse  a  laissé 
d'incffiiçables  regrets  dans  le 
cœur  de  ses  anciens  frères  d'ar- 
mes, et  de  tous  ceuxqui  l'ont  con- 
nu. 

VILLÈLE  (le  comte  de),  voyez 
le  Supplénifnl  de  ce  volume. 

VILLEMAIN  (Abel-François), 
né  à  Paris  le  11  juin  1791.  a  fait 
sa  réiborique  à  Paris,  au  lycée 
impérial,  sous  MiM.  Luce  deLan- 
cival  et  Castel.  Ces  habiles  pro- 
fesseurs comptent  peu  d'élèves 
aussi  distingués  ;  celui-là  fat  bien- 
tôt jugé  digne  de  devenir  maître. 
Ses  succès  précoces  le  firent  ac- 
cueillir par  i\l.  deFontanes,  qui, 
lors  de  l'organisation  de  l'univer- 
sité impériale,  l'employa  d'abord, 
en  1810,  comme  professeur  de 
réthorique  au  lycée  Gliarlema- 
gne  ,  puis  le  nomma  professeur  à 
la  faculté  dos  lettres  de  Paris. 
Les  travaux  de  l'enseignement  ne 
détournaient  pas  M.  Villemain 
de  ceux  de  la  composition.  En 
1812,  il  obtint,  au  jugement  de 
la  secfmde  classe  de  l'institut,  le 
prix  de  l'Éloge,  de  Montaigne,  et 


VIL 

la  mr^me  année,  il  fut  chargé  de 
prononcer  le  discours  latin  à  la 
di>tribnlion  soleimelle  du  con- 
cours général  d(!  l'université.  En 
1814  »  il  remj>orta  de  nouveau  le 
prix  à  l'in-titut  par  \\n  discours 
sur  les  avantages  et  les  hiconvénieng 
(le  lu  critique;  il  le  recul  eu  pré- 
sence de  Tempereur  de  Russie  et 
du  roi  de  Prusse,  qui.  après  avoir 
garanti  ù  la  capitale  la  conserva- 
tion de  ses  monurnens,  se  plu- 
rent, en  assistant  à  cette  séance, 
à  manilésler  l'estime  qu'ils  por- 
taient à  l'académie  où  tous  les 
arts  libéraux  sont  représentés;  à 
un  corps  composé  de  l'élite  des 
savaus,  des  littérateurs  et  des  ar- 
tistes de  la  France,  et  même  de 
l'Europe,  puisqu'il  y  a  peu  d'hom- 
mes illustres  à  ces  titres  chez  l'é- 
tranger, dont  le  nom  ne  soii  ins- 
crit sur  la  liste  des  correspondans 
de  l'institut.  M.  Villemain  adressa 
à  cette  occasion  aux  deux  souve- 
rains, un  discours  cpii  fut  trouvé 
très  -  convenable  dans  cette  cir- 
constance difficile  sous  plus  d'un 
rapport.  Deux  ans  après,  il  ob- 
tint encore  un  prix  à  l'institut;  le 
prix  de  l'Eloge  de  Montesquieu. 
Appelé  par  M.  Dccaze  à  la  place 
de  directeur  de  la  librairie,  il  s'en 
démit  en  1819,  à  l'époque  01^  ii 
fut  nommé  maître  des  requêtes  ; 
il  ne  se  démit  pas  toutefois  de  la 
chaire  d'éloquence  à  la  faculté  des 
lettres.  Pensant  comme  les  Four- 
croy.  les  Monge,  les  Lacepède, 
les  Cuvier,  que  les  fonctions  du 
professorat  ne  sont  incompatibles 
avec  aucune  fonction  publique, 
et  qu'il  n'est  pas  de  dignité  qu'el- 
les ne  relèvent,  M.  Villemain  ne 
s'est  abstenu  de  faire  son  cours 
que  losrque  sa  santé  ne  le  lui  per- 


VIL 

mettuit  pas.  Peu  tle  cours  sont 
aupsi  suivis  quf  le  t>ien;  succ«.'s 
d'autant  plus  flaitonr  pour  ce  pro- 
fesseur, qu'il  le  doit  aut;uit  à  la 
pureté  de  sa  doctrine  et  à  l'éléva- 
tion de  ses  principes .  qu'au  ta- 
lent avec  lequel  il  les  expose.  On 
ne  l'a  pas  entendu  sans  une  vive 
satisfiiclion  ,  faire  en  chaire  des 
vœux  p(uir  la  liberté  des  Grecs, 
au  mornenl  oi'i  les  aulnrilés,  dans 
la  dépendance  desquelles  le  tien- 
nent ses  fondions  ,  attendaient  de 
lui  des  opinions  tout  à-fait  oppo- 
sées. Itulépendamment  des  ou- 
vrages dont  nous  avons  fiarlé  ci- 
dessus  ,  :>i.  Villeinaii)  a  publié 
une  Vie  de  Cromxvell,  en  2  vol.  ; 
une  traduction  de  la  République 
de  Circron,  et  plusieurs  morceaux 
de  littératur»*. 

VILLENAVE  (MATHtnis-Gtir.- 
laime-'Iuérèse),  honnnie  de  let- 
tres, est  né  le  i3  avril  17^2,  à 
Saint-Félix  de  Caraman,  dépar- 
tement de  la  Haute-Garonne.  iVI. 
Villenave  habitait  Nantes  au  coni- 
inenceuient  de  la  révolution.  R<'- 
gardé  comme  fédéraliste,  il  fut, 
sons  le  régime  de  la  terreur,  du 
nombre  descent  Ireute-deux  Nan- 
tais que  Carrier  envoya  de  cette 
ville  à  Paris  pour  y  être  jugés  p^ir 
le  tribunal  révolutionnaire.  Il  é- 
tait,  dit-on,  ainsi  que  ses  co-in- 
fortunés  compagnons  ,  destiné  à 
périr  dans  les  bateaux  à  sous-pa- 
pes ;  mais  ils  arrivèrent  heureu- 
sement à  laGonciergerie.  On  dit 
encore  que,désigné«  comme  Ven- 
déens, ils  devaient,  en  conséquen- 
ce, passer  par  les  armes.  Ils  par- 
vinrent à  persuader,  que  bien  loin 
d'être  ce  qu'on  préteudail,  ils  a- 
vaient  défendu  celte  ville,  et  l'a- 
valent conservée  à  la  république. 


VIL  2J9 

Leur  supposilii'U  fut  facilenien 
admise:  ils  obtinrent  la  pcrmis- 
sif>n  d'être  transférés  dans  une 
maison  de  santé.  La  révolution 
du  9  thermidor  an  2  (  27  juillet 
1794  )  les  rendit  libios.  En  1796, 
dans  le  procès  de  Charette  [voyez 
ce  nom).  M.  Viih  navr  piit  la  dé- 
fense de  ce  génériti ,  qu'il  ne  put 
soustraire  à  la  mort.  Depuis  ce 
temps,  il  «si  resté,  du  moins  os- 
t«nsiblt ment,  élran^erà  la  politi- 
que. Comme  joiMnalisle  ,  il  a  tra- 
vaillé à  la  Quotidienne  et  aux  An- 
vales  politiques.  Comme  litléra- 
li'ur,  il  a  pul.lié  :  1"  Ode  sur  le  dé- 
rourmevt  liéroique  du  pt  inrc  Muxi- 
Tuiliru-J ules-Lropvld  de  Briiris- 
ivirk,  qui  a  con(  ourru  fiour  h'  prix 
de  l'acadéM»!! -française.  i'86,  io- 
8°;  2"  Plaidoyer  dotis  f affaire  du 
comité  rérolutionnaire  de  Nantes  , 
1795,  iu-S";  ^"Relation  du  voya- 
ge de  cent  trente- deux  Nantais  à 
Paris,  1795,  io-8°;  /|"  tes  Méta- 
morphoses d'Ovide  ,  traduction 
nouvel  le,  ai\'e  le  texte  latin  y  suivie 
de  l'explication  des  fables  et  de 
notes.  Cet  ouvrage  a  obtenu  un 
succès  h-^Mjorable. 

VlLLENKllVE  (N.).  vice-ami- 
ral, grand-officier  d(!  la  légion- 
d'hotmeur,  étaitofficierde  marine 
lorsque  la  révolution  éclata.  Il  en 
adopta  les  principe?,  et  fut  cons- 
tamment employé  dans  nos  cam- 
pagnes maritimes  ;  il  se  fit  parli- 
cuiièrement  remarquera  ta  batail- 
le d'Aboukir.  ot^  Il  parvint  à  sau- 
ver sa  division  ,  ^l  à  rentrer  avec 
trois  vaisseaux  à  Malle.  Il  com- 
manda en  chef,  en  1802,  l'esca- 
dre «ilalionnée  aux  îles  i\ii  Vent; 
lut  pron)u,  au  mois  de  juin  1804» 
au  grade  de  vice-amiral;  chargé  , 
au  mois  de  septembre    i8o5  ,  du 


220  VIL  VIL 

cominajidement  de  l'escadre  de  an  veni  des  Français,  hiised'oiieJl 
Toulon,  el  fil  sa  jonclioti  avec  les  faible,  la  mer  honleiise.  L'année 
forces  de  (]adix,  puis  se  rendit  aux  coiiiI)inée,  sur  1  annonce  dessi- 
lles du  V<;nt ,  enfin  revint  en  lui-  {;nanx  faits  pendant  l.i  nuit  parla 
ro[)(\  A  celle  épo.|iie,  il  rencontra  frégate,  se  forme  en  bataille  au 
la  llulte  de  l'amiral  anj;lais  Cal-  point  lUi  jour,  par  rangs  de  vil»-*- 
der,  à  qui  il  livra  coinbal;  il  per-  se,  siuis  avoir  égard  mu  posie  as- 
dit  deux  vaisseaux  espagnols;  signé  pour  chaque  bâlimenl.  Nous 
ayanlconservér;ivaniage  du  vent,  goov»;'rnions  à  peine  à  81ieureset 
il  entra  au  Ferrol.  Commandant ,  demie,  virés  de  bord  ton:»  à  la  fois, 
au  mois  d'ociobre  i8o5,  le?  forces  lof  pour  lof,  pris  bâbord  amures, 
françai>es  et  espagnoles  réunies  l'armée  anglaise  courant  grand 
dans  la  baie  de  Cadix,  il  ré, oint  largue  sur  deux  colonnes,  six 
d'attaquer  les  Anglais  prés  du  cap  vaisseaux  à  trois  |)Onts  entête, 
de  ïr.ilalgar.  Nous  empruntons  bonnettes  hautes  el  b:isses,  ce  qui 
les  détails  de  celte  funeste  action  lui  donna  la  facilité  d'attaquer 
qui  a  été  (liver>ement  ex|)liquée  ,  à  midi  et  demi  par  un  mouvement 
à  M.  Ltîlellier,  ollicier  de  la  lé-  spontané,  le  centre  et  l'arrière- 
gioM-d'honueur  ,  etc.,  ancien  na-  garde  de  notre  ligne.  Qu'auraient 
pitaine  de  vaisseau,  qui  y  com-  faits  dans  celte  circonstance  les 
mandait  le  Formidable  {^voyez  le  amiiaux  hs  plus  expérimentés? 
Conslitutiormcl  du  20  juin  i8ii5).  Laisserarriver,  fuir,  chercher  à  se 
«  Le  sentiment  qui  détermina  l'a-  couvrir  dévoiles,  à  éviter  le  com- 
mJral  Villeneuve  àsortir  delà  baie  bat,  rentrer  à  Cadix  cainmnés par 
de  Cadix,  dit  H.  Letellier,  était  l'efmemi  c'eût  été  couvrir  de  dés- 
un  sentiment  éminemment  Iran-  honneur  le  pavillon  français.  Il 
çais  ;  il  croyait  vaincre,  nous  le  n'y  avait  pas  d'autres  manœuvres 
croyions  comme  lui;  les  officiers,  à  iaire,  à  la  distance  où  se  Iron- 
ies équij)agesparlageaient  son  en-  vait  l'ennemi,  que  celles  ordon- 
thoiisiasme  ;  l'ordre  de  mettre  à  nées  par  l'amiral  Villeneuve.  Une 
la  voile  ne  trouva  pas  uncenseur...  fois  l'action  commencée  sur  une 
Les  Anglais  venaient  d'être  signa-  ligne  de  j5  vaisseaux  occupant  , 
lés.  Cinq  de  leurs  vaisseaux  s'é-  vu  la  faiblesse  du  vent,  plusd'u- 
taient  détachés  de  leur  escadre;  ne  lieue  d'étendue,  la  responsa- 
les  signaux  en  avaient  instruit  Ta-  bilité  devenait  [lersonnelle  pour 
jijiral  comrnandant  ;  l'occasion  é-  tous  les  commandans  des  vais- 
lait  favoroble.  iMM.  de  Cravina  seaux  et  frégates.  L'amiral  Ville- 
.(co/.  Gravina)  et  de  Villeneuve  se  neuve  combattante  à  portée  de 
décidèrenl  au  combat,  ignorant  pistolet,  entouré  d'ennemis,  cou- 
que  les  Anglaisauraieni  remplacé  vert  de  fumée,  déntâté,  blessé, 
leurs  vai.-seanx  par  cinq  autres,  ne  pouvait  quesebaltre  en  brave, 
et  que  leur  nombre  était  toujouis  el  il  l'a  fait.  S«;s  instructions  fê- 
le même.  La.  victoire  qu'obtint  ront  preuve  un  jour  de  la  pureté 
Nelson  [voy.  ce  nom)  dans  cette  de  ses  intentions,  des  senlimens 
affaire,  est  due  à  l'avantage  de  français  qui  l'aDimaieut;  il  avait 
«'être  trouvé,  le  29  vendémiaire,  tout  prévu  ;  les  élémens  seuls fu- 


^      VIL  VIL                    2a» 

rcnt  cause  de  noire  ruine  :  elle  guerre,  pour  avoir  désol)éi  à  mes 
l'ut  couiplèle.  »  Fait  prisonnier  oriiies,  tt  conséquemment  avoir 
»yir  le  Bucentaure,  va\s>f  au  nnnvaï  perilu  la  flotte  (car  je  lui  avais 
de  80  canons,  l'amiral  Villeneuve  ordonné  de  ne  pas  mettre  i\  la 
lut  conduit  en  Angleterre,  où  il  voile  et  de  ne  pas  s'engager  avec 
obtint  la  pernii-jsion  de  .'•e  choisir  les  Anglais),  résolut  de  se  dé- 
une  résidence  à  3o  milles  de  triiire;  il  prit  ses  gravures  de  cœur, 
Londres.  Respectant  dans  cet  a-  les  compara  de  nouveau  avec  !?a 
mirai  ime  grande  inlurlune,  dont  poitrine,  lîl  exactement,  au  centre 
liii-n)ême  s'est  cruellement  puni,  de  la  gravure,  une  longue  pitiTire 
et  laissant  au  temps  le  scinde  avec  une  longue  épingle,  fixa  tn- 
/iier  l'opinion  publique,  nous  suite  celle  épingle,  anlant  que 
nous  sommes  contentés  de  rap-  possible,  à  la  même  place,  contre 
j>orter  ro[)inion  d'un  brave  olïi-  sa  poitrine,  l'enfonça  juscju'à  la 
cier.  Nous  ferons  connaître,  parle  tête,  pénétra  le  cœur  et  »;xpira. 
même  motif  d'impartialité  ,  la  Lorsqu'on  ouvrit  sa  chambre  ou 
pensée  de  Napoléon  sur  les  lalens  le  trouva  mort;  l'épingle  était 
et  le  caractère  de  l'amiral  Ville-  dans  sa  poitrine,  et  la  maripie 
neuve.  «Avec  plus  de  vigueur,  au  faite  dans  la  gravure  correspon- 
cap  Finistère,  Villeneuve  eût  pu  dait  à  la  blessure  île  son  sein.  Il 
rendre  l'attaque  de  l'Angleterre  n'aurait  pas  dû  agir  ainsi  ;  c'était 
praticable.  Son  apparition  avait  un  brave,  bien  qu'il  n'eût  aucim 
été  condjinée  de  Irès-loiû,  avec  talent.  »  Celle  funeste  fin  arrivée 
beaucoup  d'art  et  de  calcul,  en  le  2r)avril  iKoG,  dément  l'inexacte 
opposition  à  la  routine  des  m.irins  et  singulière  assertion  des  auteurs 
<pii  entourai«-nt  Napoléon;  et  tout  de  la  Bioi^raphie  moderne  publiée 
réussit  jusqu'au  moment  décisif;  par  le  libraire  Alexis  ii;ymer3\ 
alors  lu  mollesse  de  Villeneuve  Ils  disent  :  «  Après  être  resté 
vinttout  perdre  »  (Lis Cases,  t.  quelque  teujps  à  Rennes,  il  s'y 
III,  p.  29().  )  On  trouve  cet  autre  brûla  la  cervelle,  de  chagrin  d'a- 
jugemcnt  dans  les  mémoires  du  voir  été  m  tl  apprécié  par  Bona- 
docteur  O'iUéara  (t.  II,  p.  54  )  :  parte,  et  dans  la  ciaitite,  dit-on, 
«■  Villeneuve,  lorsqu'il  fut  fait  d'un  jugement  inique ,  comman- 
prixMniier  par  les  Anglais,  fut  dé  par  cet  ex-empere«ir.n 
tellemtnt  altligé  de  sa  délaite,  VI  L  L  EN  E  L  V  F  (  le  MAnQCis 
(pi'il  étudia  l'anatomie  pour  se  Poss  Louis- François  de),  né  en 
détruire  lui-même.  A  cet  effet  il  1774'  d'une  ancienne  famille  de 
acheta  plusieurs  gravures. analo-  la  ci-devant  province  de  Langiie- 
miqnes  du  cœur,  et  les  compara  doc,  se  fil  remarquer  dès  le  com- 
avec  son  propre  corps,  pour  s'as-  meuc«;mcnt  de  la  révolution,  par 
surer  «;xaclcment  de  la  position  une  grande  opposition  aux  nou- 
dc cet  organe.  Lors  de  son  arrivée  veaux  principes;  il  fut  arrêté, 
en  Fiance,  je  lui  ordonnai  de  res-  comme  suspect,  en  «795;  rendu 
ter  ù  Rennes,  et  de  ue  jtas  venir  à  la  liberté,  il  continua  à  mani- 
à  Pari'.  Villeneuve,  craignant  l'ester  les  mêmes  opinions.  M.  de 
d'être    jugti    par    un    cou»cil   de  Villeneuve  se  fixa  ù  Touluuie,  «t 


sa  a 


VIL 


prit,  en  1797,  une  p.irl  si  active 
aux  élections,  qu'il  fitl ,  dit- on  , 
blessé  de  plusieurs  coups  de  sabre. 
Le  gouvernernen';  impérial  le 
nomma,  en  i8o4j  membre  du 
conseil-général  du  département 
de  la  Haute-Garonne ,  fonctions 
qu'il  accepta  ainsi  que  celles  de 
n)aire  de  sa  commune  en  i8i5. 
A  la  lin  de  cette  année ,  l'armée 
du  maréchal  Soult  revenait  d'Es- 
pagne, dans  un  état  d'épuisement 
suite  de  glorieux  combats.  !>!.  de 
Villeneuve,  au  rapport  de  la  Bio- 
graphie des  frères  Michaud,  «  pro- 
hiba par  une  jtublication  officielle 
la  levée  des  réquisitions  frappées 
par  l'armée  du  maréchal.  »  Cette 
conduite,  que  l'histoire  caracté- 
risera ,  fait  dire  aux  auteurs  d'u- 
ne biographie  étrangère  «  qu'il 
paya  de  sa  destitution  un  crime 
qu'il  eût  dû  payer  de  sa  tête.  » 
Ce  ne  fut  pas  là  le  seul  service 
que  M.  de  Villeneuve  rendit  à 
la  cause  qu'il  servait.  Il  seconda 
lord  Wellington,  près  duquel  il 
se  rendit,  et  M.  Jules  de  Solignac, 
commissairedu  roi,  qui  lenomrna 
préfet  de  Tarn-et-Garonne  :  no- 
mination qui  ne  fut  pas  confirmée 
par  le  roi  après  l'entrée  de  ce 
prince  à  Paris  ;  mais  peu  de  temps 
après,  M.  de  Vdleneuve  devint 
préfet  des  Hautes-Pyrénées.  L'un 
des  six  préfets  qui  se  réimirent  au 
commencement  de  mars  i8i5, 
près  M.  le  duc  d'Angoulême  ,  à 
Bordeaux,  lors  c'u  retour  de  Na- 
poléon de  l'ile d'Elbe,  il  retourna 
promptement  à  ïarbes.  où  il  éta- 
blit une  commission  de  salut  public, 
pour  faire  exécuter  les  ordres  du 
roi;  cette  mesure  n'ayant  pas  le 
succès  qu'il  en  espérait,  il  se  re- 
lira sur  la  frontière  de  son  dépar- 


VIL 

tcment,  où  il  fut  arrêté  dans  la 
nuit  du  II  au  12  avril  par  ordre 
de  Napoléon.  Conrhiil  à  T.iibes  , 
puis  à  Toulouse  ,  il  allait  être 
tran't'éré  à  Paris  lor-qu'il  parvint 
à  s'évader.  Il  j)a>!sa  en  E^^pagne  , 
et  rejoignit  iM.  le  duc  d'Augou- 
lêu)c  à  Puycerda  .  en  Catalogne. 
S.  A.  R. ,  lors  lie  sa  rentrée  en 
France,  au  mois  (!(•  juillet,  nom- 
ma iM.  de  Villeneuve  administra- 
teur-général des  2(3  départemens 
du  Midi  ,  qui  s'étendaient  de 
Chambéri  à  Biideaiix.  "  C'est  \h, 
disent  les  auteurs  do  la  biographie 
étrangère  que  nous  avons  déjà  ci- 
tés, qu'il  organisa  les  premiers 
élémens  de  ce  gouvernement  oc- 
culte  si  long-temps  en  opposition 
avec  celui  du  roi ,  et  dont  la  péti- 
tion courageuse  de  M.  Midierde 
Monjau  et  les  débats  de  la  cham- 
bre des  députés ,  en  avril,  mai  et 
juin  1820,  ont  révélé  la  seorète 
et  pui-saule  influence  à  la  France 
et  à  l'Europe.  De  ce  poste,  com- 
me d'un  fort  inexpugnable,  M.  de 
Villeneuve,  soutenu  par  un  pou- 
voir invisible, devant  lequel  recula 
constamment  celui  du  roi ,  sus- 
pendait, contrariait  ou  annulait 
tous  les  actes  du  mifiistère  royal, 
étonné  de  tant  d'audace,  mais  im- 
puissant contre  elle.  Ce  mirjisière 
essaya  néanmoins  une  dernière 
tentative;ce  futde  faire  mander  M. 
de  Villeneuve  à  Paris,  pour  y  ren- 
dre compte  de  sa  conduite  à  l'ins- 
tant même  où  le  collège  électoral 
du  déparlement  de  l'Hérault  allait 
s'ouvrir  sous  sa  présidence.  Arrivé 
dans  cette  ville  avec  les  recom- 
mandations de  ses  protecteurs  , 
M.  de  Villeneuve  traita  de  puis- 
sance à  i)uissance  avec  le  minis- 
tère, lequel, ne  l'ayant  appelé  à 


TIL 

Taris  que  parce  qu'il  contrariait 
tontes  ses  opérations  dans  le  Midi, 
comiDenpiiit  ù  reconnaître  qu'il 
avait  commis  une  faute;  que  M.  de 
Villeneuve  était  beaucoup  plus 
dang;ereux  pour  lui  à  Paris  qu'à 
Toulouse,  et  qu'il  y  allait  de  son 
existence  à  l'y  renvoyer.  Il  mit 
l-out  en  œuvre  poury  réussir,  mais 
il  était  trop  lard;  toutes  ses  forces 
échouèrent  contre  le  crédit  d'un 
obscur  administrateur,  et  le  mi- 
nistère, victime  d'une  sécurité  et 
d'une  imprévoyance  sans  excuse, 
dut  abandonner  les  rênes  de  l'état. 
On  eût  pu  croire  que  ce  triomphe 
était  un  grand  événement  dans  la 
vie  de  M.  de  Villeneuve,  et  qu'il 
allait  au  moins  succéder  à  ceux 
dont  la  disgrSce  était,  en  partie, 
son  ouvrage;  il  n'en  fut  rien;  on 
se  borna  A  lui  donner  de  stériles 
assurances  de  satisfaction,  et  après 
l'avoir  f.iil  attendre  une  année  en- 
tière, on  le  nomma  ,  vers  la  fin  de 
janvier  1816,  préfet  du  départe- 
ment du  Cher.  Aévoqué  un  moisi 
après  l'ordoimance  du  5  septem- 
bre, époque  à  laquelle  on  sait  que 
le  gouvernement  semblait  vou- 
loir se  réconcilier  avec  l'opinion 
publique  ,  le  niarquis  de  Ville- 
neuve a  été  appelé,  en  <^i(),à  la 
préfecture  des  Pyrénées -Orien- 
tales ,  lorsque  les  doctrines  de 
i8i5ont  recommencé  à  nîpren- 
dre  faveur  auprès  de  lui.  »  iM.  de 
Villeneuve  devint ,  en  iSa3,  pré- 
fet de  la  Oeusc  ;  il  passa  l'année 
suivante  à  la  préfecture  de  la  Cor- 
rèïe ,  où  il  se  trouve  encore  au- 
jourd'hui (182.5.) 

VILLENEUVE  BAUGEMONT 
(le  comte  Christophe),  conseil- 
ler-d'élat,  officier  de  la  légion- 
d'bouneur,  préfet  du  département 


VIL 


223 


des  Bouches-du-Rhône ,  est  né  à 
Bargemont  ,  dans  la  ci  -  devant 
Provence,  d'une  faaiille ancienne. 
Il  servait  en  qualité  de  sous-lieu- 
tenant dans  le  régiment  Royal- 
Roussillon  ,  infanterie,  k  l'époque 
de  la  révoluticm  ;  il  fit  partie  de  la 
garde  constitutionnelle  de  Louis 
XVI  en  i;92.  M.  Villeneuve  Bar- 
gemont échappa  aux  proscrip- 
tions du  régime  de  la  terreur,  et 
dtivint  successivement,  en  1801, 
inspecteur  des  poids  et  mesures 
dans  les  départemens  méridio- 
naux; en  i8o:î,  sous-préfet  à  Né- 
rac  ;  en  1806,  préfet  du  départe- 
ment de  Lot-et-Garonne;  enfin, 
en  1808,  njembre  de  la  légion- 
d'honneur.  Il  se  prononça ,  en 
i8i/)|»  pour  le  rétablissement  de 
la  famille  des  Bourbons  sur  le 
trône  de  France,  fut  maintenu 
par  le  roi  datjs  ses  fonctions,  des- 
titué par  Napoléon  pendant  les 
cent  Jours,  eu  i8ï5,  et  rétabli 
dans  son  poste  après  la  seconde 
restauration.  Il  passa  ,  an  mois 
d'octobre  181 5,  à  la  prélecture 
des  Bouches-du-Rhône,  qu'il  oc- 
cupe encore  aujourd'hui  (iSaS.) 
Il  a  [lublié  :  i°  Notice  sur  la  ville 
de  Nérac,  ouvrage  principalement 
consacré  à  célébi^r  la  mémoire 
de  Henri  IV,  Agen,  1 808;  2''f^ojage 
(tans  la  vallée  de  Barcelonnette , 
dédié  à  S.  A.  H.  Mgr.  duc  d' An^ 
gouléine,  Agen,  iSiS^ù'  Rapport 
sur  des  fouilles  faites  à  Fréjus  en 
i8o5;  4'  Notice  sur  Théopolis 
(Ba^ses-Alpcs)  ,  1811  ;  ^'Disser- 
tation sur  le  lieu  qu'occupait,  dans 
l' Aquitaine ,  le  peuple  désigné  par 
César  sous  le  nom  de  Suliates.  Ces 
trois  derniers  ouvrages  ont  été 
imprimés  dans  les  mémoires  de 
la  société  d'u;;riculturc  d'Agen. 


aui 


VIL 


VILLLNELVE  BARGEMONT 
(  tE  MARQUIS  Ferdinand  de)  ,  t'rôre 
du  pieccdeiit  ,  jin;l»u,  chevalier 
de  lUidte  el  du  la  lègion-d'hoii- 
ueur,  etc.  ,  servait  dans  ia  inarJDC 
avant  la  révolulion.  Depuis»  oeUe 
époque,  il  vivait  relire  dans  sa 
laiiiille  lorsqu'il  fut  uoininé,  aux 
approches  du  20  uiai>  181  5,  sous- 
prélel  de  Caslellane.  Couuuau- 
daut  de  la  garde  naliuualc  de  cette 
■ville,  il  voulut  arrêter  la  marche 
de  Napoléon  sur  Paris.  Ses  elïovls 
lurent  inutiles-  M.  le  duc  d'An- 
goulêinc  le  ncjniuia  provisoire- 
ment prélet  des  Jiasses-Alpes  ;  il 
ne  put  occuper  ce  poste  qu'après 
les  désastres  do  Waterloo.  II  de- 
vint, en  1818,  préfet  des  Pyré- 
nées-Orientales, d'où  il  passa,  en 
1823,  à  la  préfecluie  de  la  Nièvre, 
fonctions  qu'il  occupe  encore  au- 
jourd'hui (  ibaS).  Il  e?t  depuis 
i8i2  membre  de  la  chambre  des 
députés  pour  le  département  des 
liasses-Alpes. 

VILLENEUVE  BAllGEMONÏ 
(  LE  BARON  Joseph  de)  ,  chevalier 
de  Malte  et  de  la  légion-d'hon- 
neur, préfet,  frère  des  précédens, 
remplissait  à  l'époque  de  la  pre- 
mière restauration,  en  i8i4,  la 
place  de  conseiller  référendaire  à 
la  cour  des  comptes.  Le  roi  le 
nomma  chevalier  de  la  légion - 
d'honneur  au  mois  d'août  de  la 
même  aimée.  Après  la  seconde 
restauration  ,  il  fut  nommé  préfet 
de  la  Haute-Saône;  il  en  remplit 
encore  les  fonctions  aujourd'hui 
(i825).. 

VILLENEUVE   BARGEMONT 
(le  vicomte  Albas  de)  ,  chevalier 
de  Malte  et  de  la  legion-d  hon- 
neur, maître  des  requêtes,  etc.  , 
■    frère  des  précédens,  fut  auditeur 


VI M 

au  conseil-d'état,  et  successive- 
ment préfet  de  LériJa  el  de  Na- 
mursous  le  gouvernement  impé- 
lial.  Après  la  première  restaura- 
lion,  en  1814,  ie  roi  le  nomma 
préfet  de  Tarn-et-Garonne,  poste 
d'où  il  s'éloigna  à  l'époque  du  re- 
tour de  Napoléon,  en  mars  18  i5. 
La  seconde  re^-tauiation  le^endit 
à  su  préfecture.  11  est  aujourd'hui 
(»8a5)  préfet  de  la  Loire-lnfé- 
rieuie. 

VIMAR  (  Nicolas,  comte  de  ), 
pair  de  France ,  est  né  le  3o  octo- 
bre 1744»  ii  Mesnières ,  près  de 
Neufchâlel ,  dé|)arlement  de  la 
Seine-Inférieure.  Avocat  au  par- 
lement de  Rouen  ,  après  s'être 
convaincu  qu'il  ne  réunissait  pas 
toutes  lesqualités  nécessaires  pour 
la  plaidoirie  ,   il    y   renonça.    Eu 

1790,  il  occupait  parmi  ses  col- 
lègues un  rang  distingué,  com- 
nu;  écrivain  et  connue  juriscon- 
sulte. A  cette  époque  de  la  {)re- 
miêre  organisation  des  corps  mu- 
nicipaux, il  fut  nonjmé  procureur 
de  la  commune  de  Rouen.  1!  exis- 
tait alors  dans  cette  ville  des 
ateliers  de  charité,  refuge  de  la 
fainéantise  et  foyer  de  désordres; 
il  proposa  ,  et  la  municipalité  , 
composé*  d'hommes  sages  et  fer- 
mes ,  adopta  la  mesure  d'y  subs- 
tituer des  bureaux  de  bienfaisan- 
ce. Cette  mesure,  exécutée  avec 
prudence  el  vigueur,  rétablit  l'or- 
dre et  la  paix  dans  la  ville  de 
Rouen  ,  qui  fut  pendant  plusieurs 
années  l'asile  d'un  grand  nombre 
de  personnes  persécutées  dans 
leurs    départemens.    Députt'i,  eu 

1791,  :'j  l'assemblée  législative, 
M,  Vimar  y  vota  constamment 
avec  le  parti  constitutionnel;  fut 
euiprisonné  durant  dix  mois  sous 


VI M 

le  régime  de  la  terreur ,  refusa  le 
ministère  de  la  justice,  auquel  il 
l'ut  appelé  par  le  directoire-exé- 
cutif après  le  i8  l'ructidor  an  5 
(4  septembre  1797)  ;  mais  il  con- 
sentit à  devenir  membre  d'un  des 
comité?  de  bienfaisance  dont  il 
avait  provoqué  l'établissement , 
cl  bientôt  après  du  comité  central 
d'mstructiou  publique,  qui  avait 
la  surveillance  des  écoles  du  dé- 
partement. Porté  au  conseil  des 
anciens  par  le  suffrage  de  ses  com- 
patriotes ,  en  1798,  il  fut  nommé, 
le  21  octobre  de  la  même  année, 
un  des  secrétaires  de  ce  conseil, 
où  il  a  fait  plusieurs  rapports  , 
dont  l'un  avait  pour  objet  une  ré- 
solution du  conseil  des  cinq-cents, 
qui  déclarait  irrévocables  les  Min- 
ier de  domaines  nationaux  quoi- 
qu'irrégulières,  et  non-seulement 
celles  qui  étaient  déjà  faites ,  mais 
encore  celles  qui  se  feraient  par  la 
suite.  La  conclusion  de  ce  rap- 
port ,  quoique  fondée  sur  les  vrais 
principes,  n'était  pas  conforine  à 
l'opinion  qui  dominait  alors;  elle 
fit  naître  des  débats  violens.  On 
sait  combien  était  critique  l'état 
de  la  France  ii  la  fin  de  1799  et 
au  commencement  de  l'année  sui- 
vante; ses  armées  avaient  éprou- 
vé, des  revers  ,  la  guerre  civile  se 
ranimait,  et  le  retour  de  l'anar- 
cbie  semblait  inévitable.  M.  Vi- 
uiar  prit  ufie  part  très-aclive  à 
l'événement  du  18  brumaire;  il  fit 
partie  de  la  commission  législa  - 
tive  du  conseil  dont  il  était  mem- 
bre ;  refusa  le  ministère  de  la  jus- 
tic«  qui  lui  fut  offert  pour  la  se- 
comle  fois,  et  fut  nommé,  peu 
de  jours  après,  un  des  trente  un 
premiers  séualeurs  ;  Jasénatorerie 
de  Nanci  lui*  lut  conférée  le   38 

T.  XX. 


VIN 


223 


moi  1804.  Il  fut  aussi  appelé, 
dès  l'origine,  au  comité  conten- 
tieux de  la  légion-d'honneur,  et  il 
en  est  encore  membre  aujour- 
d'hui (1835).  Nommé,  le  3i  juin 
1811,  grand-officier  de  la  même 
légion,  il  avait  été  précédemment 
créé  comte  comme  tous  les  sé- 
nateurs; il  vota,  le  r'avriî  i8i4i 
la  déchéance  de  l'empereur  ,  et 
ensuite  le  rappel  des  princes  de  la 
maison  de  Bourbon  ;  il  fut  un  de> 
membres  de  la  commission  char- 
gée de  préparer  la  charte  consti- 
tutionnelle. Le  roi,  par  son  or- 
donnance du  4  juif»  1814,  le  fjom- 
ma  pair  de  France.  Député  par  le 
collège  électoral  de  son  déparle- 
ment, en  18 15,  à  la  chambre  des 
représentans  ,  il  y  fit  partie  du  co- 
mité de  constitution  ;  après  les 
cent  jours ,  il  rentra  dans  celle  des 
pairs,  où  il  vote  avec  la  minorité 
qui  défend  nos  libertés  constitu- 
tionnelles. 

VINCENS  (  Jean-Césa-r),  de 
l'académie  royale  de  Nîmes ,  de 
la  société  des  antiquaires  de  Lon- 
dres ,  et  correspondant  de  la  so- 
ciété royale  et  centrale  d'agricul- 
ture, naquit  à  Nîmes  le  iG  sep- 
tembre 1755.  Elevé  par  son -père, 
qui  avait  cultivé  à  la  fois  la  litté- 
rature, l'archéologie  et  l'écono- 
mie politique,  et  publié  quelques 
ouvrages  en  divers  genres,  il  pui- 
sa dans  les  leçons  de  cet  habib', 
instituteur  le  goût  des  arts  et  des 
"sciences,  et  tous  les  éléniens  des 
connaissances  qu'il  étendit  et  per- 
fectionna ensuite  par  ses  propres 
études.  Elles  eurent  principale- 
ment pour  objet  la  chimie,  la  phy- 
si(|ue,  l'histoire  naturelle  et  la  sta- 
tistique. C'est  lui  qui  a  fourni  tout 
ce  qui  tient  à  ces  sciences  dans  la 


aîG 


VIN 


Topographie  de  la  ville  de  Nîmes 
et  de  sa  banlieue^  i  vol.  tn-li",  cou- 
ronné, en  l'^iy^-,  par  la  société 
royale  de  niéclecii'.c .  et  publié  er) 
1802;  011  vr;i;,M' 1res  distingué,  qui 
«'est  pas  re^l^t;il>t  à  une  utilité 
locale,  coujnie  son  litre  seniMe 
l'annoncer,  et  auquel  i)arlicipa  . 
pour  la  partie  médicale,  M.  Bau- 
mes, alors  médecin  à  Nîmes,  et 
bientôt  après  professeur  célèbre 
de  la  faculté  de  Montpellier.  Vin- 
cens  a  laissé  en  manuscrit  un 
grand  nombre  de  mémoires  inlé- 
vesians  sur  différentes  applications 
pratiques  des  théories  scientifi- 
ques aux  arts,  an  commerce  et  à 
l'agriiMilture  ;  de  ce  nombre  est 
surlonl  un  beau  travail  sur  l'édu- 
cation des  vers  ù  s^oie,  qui,  connu 
de  feu  le  docteur  Nysten,  a  été  cité 
par  lui  avec  éloge.  En  «791,  il  fut 
menibrc  de  l'assemblée  législa- 
tive, et  l'un  de*i  membres  les  plus 
laborieux  du  comité  des  domai- 
nes. Il  s'honora,  dans  ces  temps 
de  crise,  de  partager  les  opinions 
et  le  courage  des  vrais  amis  de  la 
liberté,  de  l'ordre  et  de  la  mo- 
narchie constitutionnelle.  Accusé 
de  royalisme  sous  le  régime  de  la 
terreur,  il  fut  emprisonné,  et  tra- 
duit devant  un  tribunal  révolu- 
tionnaire; il  échappa  à  la  con- 
damnation capitale,  grâce  à  la 
présence  d'esprit  avec  laquelle  il 
se  défendit,  à  l'intérêt  qu'il  ins- 
pira aux  habitans  de  la  commune 
où  il  s'était  retiré,  et  qui,  appe- 
lés pour  apprécier  l'accusalion , 
témoignèrent  tous  en  sa  faveur, 
et  enfin  à  l'espoir  qu'avaient  ses 
persécuteurs  de  se  faire,  dans  un 
autre  moment,  contre  lui .  un  li- 
tre décisif  d'une  lettre  qu'il  avait 
écrite    pendant    le    fédéralisme  , 


VIN 

qu'i>n  croyait  avoir  trop  légère- 
ment cherchée  dan»  le  dépôt  pu- 
blic, où  elle  aurait  dû  se  trouver, 
et  qu'on  se  croyait  certain  de  dé- 
couvrir plus  tard  ;  mais  on  a  tout 
lieu  (le  fjcnscr  (pi'elle  avait  été 
.>-(;crtltinint  cuit  vec  et  anéantie 
par  un  employé  humain,  quoi- 
qu'il ne  se  soit  jamais  vanté  de 
cette  bonne  action.  La  cbute  de 
llobespierre  empêcha  l'effet  de 
l'espèce  de  plus  ample  informé 
sous  lequel  l'accusé  était  resté  ; 
toutefois  sa  détention  se  prolon- 
gea long-temps  encore  ;  eniîn  il 
sortit  de  prison,  mais  avec  une 
santé  extrêmement  altérée.  Il 
mourut  au  mois  d'août  1801. 

VINCENT  (François-André), 
peintre  d'histoire ,  membre  de 
l'institut  et  de  la  légion -d'hon- 
neur, professeur  aux  écoles  roya- 
les des  beaux-arts,  naquit  à  Paris 
le  3o  décembre  1746-  Son  père, 
peintre  distingué  dans  le  genre  du 
portrait,  et  qui  avait  été  beaucoup 
employé  à  la  cour  de  Louis  XV, 
lui  fit  donner  une  bonne  éduca- 
tion. Entraîné  par  son  penchant 
pour  la  peinture,  le  jeune  Vincent 
étudia  cet  art  avec  autant  de  zèle 
que  d'assiduité.  C'était  encore 
nialheurensement  le  règne  des 
Jîoucher,  des  Vanloo  et  des  Natoi- 
re;  mais  un  véritable  artiste  dans 
le  génie  historique,  le  seul  que  la 
France  comptât  alors,  ouvrait  une 
école  qui,  perfectionnée  bientôt 
par  David,  son  disciple,  allait  éle- 
ver au  plus  haut  point  la  gloire 
de  l'école  française.  M.  Vincent 
père,  doué  d'un  sentiment  vrai 
dans  le.-  arts,  ne  tarda  pas  à  sentir 
que  Vien  était  le  maître  qu'il  de- 
vait donner  de  préférence  à  son 
fils.  Les  progrès  de  l'élève  furent 


VIN 

si  rapides  qu'ils  élonnèreiU  le  maî- 
tre; le  jeune  Vincent,  sur  son  ta- 
bleau de  Germanicus ,  remporta 
le  prix  qui  l'envoyait  ix  Rome  aux 
frais  du  gouvernement.  D'une  san- 
té faible,  il  ne  Ut  pas  sous  le  beau 
ciel  de  l'Italie,  dan^  cette  patrie 
des  arts,  toutes  les  études  ((u'il  se 
proposait.  Ses  souffrances  conli- 
iHjelles  ne  lui  permirent  pa«  de 
méditer  assez  Michel-Ange,  Ra- 
phaël et  le  Corrége;  mais  la  péné- 
tration de  son  esprit  y  suppléa. 
De  retour  à  Paris,  il  redoubla  d'ar- 
deur, et  produisit  beaucoup  d'ou- 
vrages de  mérite  dans  un  genre 
qui  lui  était  particulier;  peu  d'ar- 
tistes ont  réuni  autant  de  connais- 
sances non-seulement  dans  son 
art,  mais  en  littérature;  il  avait 
aussi  une  mémoire  heiireuse  et  u- 
oe  grande  facilité  à  s'exprimer. 
Il  a  fait  beaucoup  d'articles  pour 
le  Dictionnaire  des  beaux  arts  à 
l'inslilut.  A  tous  ces  titres,  IVl.  Vin- 
cent joignait  la  bonté  du  cœur,  la 
justice  la  plus  intègre,  et  surtout 
un  zèle  infatigable  pour  rendre 
service.  Il  a  succombé  i\  une  lon- 
gue et  douloureuse  maladie,  le  5 
août  1816,  regretté  de  tous  ceux 
qui  l'ont  connu.  Ses  ouvrages  \fs 
plus  estimés  sont  :  i°  Saint  Jérô- 
me éveillé  par  l'av^e ,  sonnant  la 
trompette;  2"  le  président  Mole 
saisi  par  les  factieux,  est  regardé 
généralement  comme  son  meil- 
leur tableau  ;  0°  deux  tableaux 
parfaitementsemblable.s,donU'un, 
Achille  luttant  contre  le  Xante, 
est  aux  G(d)elins;  4°  'i'^  (^cs  plus 
remarquables  de  ce  maîlre  e.^t  la 
Piscine  miraculeuse,  placé  dans  u- 
no  église  de  Rouen.  5"  Dorée  enle- 
vant Orithie  ,  morceau  de  réccp- 
tioti  de  l'auteur  ù  l'académie;  G" 


VIN  22; 

Arie  et  Pcetus  est  aux  Gobelins  ; 
7"  la  clémence  d'Auguste  et  Pyr- 
rus  enfant,  se  réfugiant  dans  le 
palais  de  Glaucias,  roi  d'Illirie  , 
ont  été  faits  pour  l'électeur  de 
Trêves.  8°  Henri  IV  rencontrant 
Sully,  blessé  après  la  bataille  d'I- 
vry,  grand  tableau  qui  est  au  châ- 
teau de  Saint-Cluud;  9"  Renaud 
et  Arniide ,  tableau  fait  pour  M. 
le  comte  d'Artois,  il  y  a  40  ans; 
m''  Zcuxis  choisissant  tm  modèle 
parmi  les  jeunes  filles  que  lui  pré- 
sentent les  babilans  de  Crotone: 
il  est  aux  Gobelins;  «1°  Guitlau- 
vie-Tell  précipitant  Gésier  dans  le 
lac,  se  voit  encore  àToulouse;  l'j- 
un  dessin  de  u5  pieds,  sur  toile, 
représentant  la  Bataille  des  Py- 
ramides, figures  grandes  comnje 
nature.  Le  prince  de  Neufchûtel 
lui  en  fit  fiire  un  plus  petit  pour 
sa  terre  dt;  Gros-Bois.  C'est  son 
dernier  ouvrage,  l'un  des  plus 
grands  et  îles  plus  beaux  qu'il  ait 
composés.  M.  Vincent  a  formé 
beaucoup  d'élèves  :  Saint-Ours, 
Mermée,  Meynier,  Ansiaux,Thé- 
vcQin,  membre  de  l'institut,  der- 
nièrement directeur  de  l'académie 
à  Rome,  Horace  Vernel,  IVu  Léon 
Paillère,  Heim,  Thomas,  Fores- 
tier, IVlauzaissc,  etc.,  etc. 

VINCENT  (Fra:*çois-Nicolas)  , 
secrétaire  -  général  du  ministère 
de  la  guerre,  était  clerc  d'avocat 
à  l'époque  de  la  révolution,  dont 
il  embrassa  avec  chaleur  les  prin- 
cipes. Connu  de  Pache ,  minisire 
de  la  guerre  en  1792,  il  fut  nom- 
mé, au  mois  d'octobre  de  la  mô- 
me année,  parce  ministre,  son 
prolecteur,  et  ensuite  son  ami  , 
chef  des  bureaux  de  celle  admi- 
nistration. Le  général  Bcurnon- 
ville,  ayant  succédé  à  Pache,  des- 


2a«  VIN 

litua  Vincent  au  mois  de  février 
i^qS;  mais  sous  le  minislère  de 
lioucholle,  qui  remplaça  Benr- 
lionvillc,  Vincent  fui  rappelé,  et 
nommé  secrélairc-f^énéral  de  la 
guerre.  Devenu,  par  l'imporlance 
de  son  emploi  el  son  activité  un 
piiu  inlrigunle,  un  <lcs  chefs  les 
plus  marquans  des  cordeliers, Vin- 
cent se  forma,  dit-on,  une  cour, 
et  donna  des  emplois.  Ronsin  lui 
dut  sa  nomination  de  général  de 
l'armée  révolutionnaire.  La  for- 
lune  de  Vincent  pâlit  devant  l'ac- 
eusalion  qu«  porta  contre  lui  à  la 
convention  Philippeaux,  qui  l'ac- 
cusa, lui  elRon^in,  des  déroutes 
que  l'armée  républicaine  avait  é- 
prouvées  dans  la  Vendée.  Décrété 
d'accusation  le  17  décembre  1795, 
Vincent  recouvia  la  liberté  le  2 
février  1794»  P'^''  suite  des  efloris 
de  Danton  ,  qui  l'avait  défendu 
avec  chaleur,  et  par  l'inflnence 
des  cordeliers.  Ingrat  envers  ceux 
qui  l'avaient  si  ellicacement  se- 
couru, Vincent  se  réunit  à  la  fac- 
tion d'Hébert,  qui  se  sépara  des 
cordeliers,  el  éprouva  bientôt  le 
sort  des  principaux  partisans  de 
ce  dernier.  Il  devint  l'une  des  vic- 
times des  cordeliers  et  des  jaco- 
bins. Traduit  au  tribunal  révolu- 
tionnaire, il  fut  condamné  à  mort 
Ie4gt'rminal  an  2  (24nîars  »  794)> 
et  exécuté  n'ayant  pas  atteint  sa 
2'j*  année.  On  lui  rej)rocbe  ce  san- 
guinaire propos  qu'il  aurait  tenu 
dans  une  séance  des  cordeliers  : 
«  Pour  sauver  la  France,  dit-il, 
«il  n'y  a  qu'un  moyen;  c'est  d'ex- 
»  terminer,  sans  en  excepter  un 
«seul,  les  nobles  el  les  prêtresl  » 
VINCENT  (  Pierre  -  Charles- 
Victor),  membre  de  la  conven- 
tion nationale  et  du  con-eil  des 


VIN 

anciens,  exerçait  la  profession  d'a- 
vocat lorsque  la  révolution  éclata. 
Il  en  adopla  les  principes  avec 
beaucoup  de  franchise  et  de  mo- 
dération ,  et  fut  élu ,  au  mois  de 
^eplembre  1792,  par  les  électeur» 
de  Paris,  dépulé  à  la  convention, 
où  ,  dans  le  procès  du  roi ,  il  vota 
la  détenlion  du  monarque  et  son 
bannissement  à  la  paix.  Meujbre 
du  comité  des  domaines,  il  fil  plu- 
sieurs rappurls  sur  les  droits  féo- 
daux ,  les  prêtres ,  etc.  ,  el  fut  un 
des  signataires  de  la  protestation 
du  6  juin  1795,  contre  les  alleu- 
tats  du  01  mai  précédent.  L'un 
des  73  membres  de  l'assemblée 
décrétés  d'arrestation,  il  fut  em- 
prisonné, et  ne  recouvra  la  li- 
berté qu'après  le  9  thermidor  an 
3  (27  juillet  1794)-  Devenu  mem- 
bre du  conseil  des  anciens  par 
siiile  de  la  réélection  des  deux 
tiers  convenlioimels  ,  il  sortit  du 
conseil  le  20  ujai  1797,  ^*  '^'^  P'^** 
eu  part  aux  affaires  publiques. 

VINCENT  (le  baron  Nicolas- 
Charles  de),  général  autrichien, 
est  plus  connu  comme  diplomate 
que  comme  militaire;  il  est  l'un 
des  signataires  du  traité  de  Cam- 
po-Formio.  Comblé  des  faveurs 
de  son  souverain  ,  qui  lui  donna, 
en  1807,  en  récompense  des  ser- 
vices qu'il  lui  avait  rendus  dans 
plusieurs  missions  délicates,  une 
lerre  en  Gaiicie,  d'une  valeur  de 
prés  de  200,000  florins.  Il  fut 
nommé,  en  1814,  ambassadeur 
près  de  Louis  XVIII,  qu'il  ac- 
compagna à  Gand  à  l'époque  des 
événemens  de  mars  181 5.  Le 
baron  de  Vincent  avait  été , 
en  1814  •  pour  les  puissances 
alliées  ,  el  avant  l'érection  du 
royaume  des  Pays-Bas,  gouver- 


VIN 

tieur-'^énéral  de  la  Beln;iqne  et  du 
pays  de  Liég;c.  Il  est  loiijoms 
(1825)  nmba.«ïi;ideur  pr(;s  du  roi 
de  France.  Chambellan  de  l'etn- 
pereiir  et  colorud  d'un  régiment 
de  chevau  -  légers  ,  le  baron  de 
Vincent  est  encore  grand'croix 
de  l'ordre  de  Saint  -  Léopold  et 
t'Iievalier  de  plusieurs  ordres,  tant 
nationaux  (pi'étrangers. 

VINCIION  DE  Qr^MONï 
(  Cuarles-Antoine  )  ,  né  à  l'aris 
le  i4  t'évri»  r  1778,  entra  très- 
jeune  au  service  de  la  marine,  et 
s  y  distingua  en  plusieurs  occa- 
sions. Attaché  i\  l'amiral  Bruix  en 
qualité  d'aide  -  de  -  camp,  il  lut 
chargé,  en  1804,  d'aller  recon- 
naître les  forces  ennemies,  qui, 
sous  les  ordres  de  l'amiral  Nel- 
son, venaient  a  tlaipier  la  llotti  lie  de 
Boulogne.  Il  rendit  d'imporlans 
services  dans  la  nuit  où  cette  at- 
taque eut  lieu,  qui  serait  devenie 
désastreuse  sans  la  haute  valeur 
que  déployèrent  les  officiers  et  les 
soldats  de  la  marine.  Il  eut  depuis 
une  afluire  très-briliantc ,  comme 
«ommandant  de  la  place  de  Cux- 
haven  ,  contre  sir  Georges  Sluart, 
qui  alla  l'attaquer  avec  quelques 
vaisseaux  anglais,  et  qui  l'ut  re- 
poussé. Lors  de  l'entreprise  au- 
dacieuse du  duc  de  Bnmswick 
()eU,qui,  à  la  lOte  de  quelques 
troupes  légère',  prit  les  armes, 
«'t  fit  une  guerre  de  partisan  <lans 
le  nord  de  rAllemagiie,  le  général 
danois  Ewald  {voy.  ce  nom),  agis- 
sant avec  des  Iruupesdesa  nation, 
alliée  de  la  France  ,  voulait  com- 
biner se»  mouvemens  avec  ceux 
d'un  général  westphalierj ,  pour 
couper  au  duc  sa  retraite  sur  le 
Wescr.  Au  refus  de  plusieurs  of- 
ficiers du  pays,   M.  Vinchon  de 


VIN 


2 -in 


Quémonl  se  chargea  dos  dépêches 
du  général  Ewald,  et  les  porta, 
sans  autre  passeport  que  son  au- 
dace, à  travers  un  pays  agité  par 
celte  guerre  extraordinaire,  ju  — 
qu'au  quartier  -  général  du  chef 
westphalien,  à  Delmenhor»t.  La 
lenteur  de  ce  dernier  donna  ce- 
pendant au  duc  de  Brunswick 
Oels  la  facilité  de  s'échapper  avec 
les  débris  de  sa  troupe,  et  de  s'em- 
barquer i\  la  hâte  pour  l'Angle- 
terre. Après  avoir  servi  dix-sept 
ans  dans  la  marine,  ftl.  Vinchon 
eu  sortit  en  1812,  fut  nommé  l'an- 
née suivante  capitaine  au  i"  régi- 
ment <les  gardes  d'honneur, et  quel- 
que temps  après  chef  d'escadron. 
Lors  de  la  rentrée  du  roi,  en  18  i^i 
il  obtint  la  croix  de  Saint-Louis, 
et  en  i8i5,  l'adjudance  du  chcl- 
teau  royal  de  Pau,  dont  son  ami 
le  comte  de  Gain  avait  été  nommé 
gouverneur.  Mais  au  mois  d'avril 
i8a5,  iM.  Vinchon  de  Quémont, 
par  une  démarche  publique,  dont 
les  journaux  parlèrent  diverse- 
ment, et  qui  fit  sensation  à  celle 
époque,  anuonpa  qu'il  se  démet- 
tait de  sa  place  et  renonçait  à  sa 
décoration.  Il  fit  imprimer  la  let- 
tre qu'il  adressait  à  cette  occasion 
à  S.  M.  Louis  XVIII.  En  accu- 
sant les  nnnistres  et  en  soutenant 
qu'il  existait  im  1^0  avertie  ment  oc- 
culte parfaitement  connu  d'eux, 
mais  ignoré  du  r(>i,  gouvernement 
déjà  dénoncé  par  un  mygi^tral, 
M.  iMadier  de  Monjau  {voy.  ce 
nom),  JM.  Vinchon  ajoutait  :  «  Que 
dans  le  gouvernement  représen- 
tatif, il  est  du  devoir  do  tout  ci- 
toyen d'éclairer  le  prince  sur  les 
dangers  où  les  ageus  du  pouvoir 
précipitent  l'état.  I^es  rois  ne  peu- 
vent mal  faire  ,  mais  ils  peuvent 


330 


VIN 


«voir  de  mauvais  confeillers;  a- 
lors  il  est  important,  pour  eux  et 
pour  le  pays,  que  l'abîme  soit  mis 
à  découvert,  .le  n'ai  qu'un  moyen 
d'aller  de  mon  lieu reuse  obscurilé 
jusqu'au  trône.  Il  est  p»''nib!e ,  il 
est  douloureux...  Sire,  je  vous 
résigne  le  brevet  de  chevali^îr  de 
Saint -Louis;  je  \ous  résigne  le 
brevet  d'adjudant  du  château  royal 
de  l'au.  Je  vais  satisfaire  par  ce 
qui  va  suivre  au  serment  exigé  des 
ebevaliers  de  Saint-Louis...  Sire, 
vous  pouvez,  juger  la  France,  à 
voir  un  obscur  citoyen,  qui,  pou- 
vant espérer  la  juste  récompense 
de  son  dévouement,  mais  ayant 
par -dessus  tout  l'amour  de  son 
devoir,  se  trouve  dans  l'obligation 
de  venir  déposer  sur  les  marches 
du  trôn»,  sur  l'autel  de  la  patrie, 
le  brevet  d'une  place  nécessaire  à 
son  existence,  et  celui  d'une  dé- 
coration qui  est  le  prix  d'honora- 
bles services.  Signé  Vinchon  de 
QuÉMOST.  •)  Cette  courageuse  dé- 
marche n'eut  d'autre  suite  que  l.'> 
radiation  de  l'auteur  de  la  lettre 
des  contrôles  de  l'armée. 

VINET  (  Pierue)  ,  membre  de 
la  convention  nationale  et  du  con- 
seil des  cinq-cents^  n'est  connu 
que  par  son  vole  dans  le  procès  du 
roi ,  et  par  sa  rétraction  sous  le 
gouvernement  royal.  Député  au 
mois  de  septembre  i^O'Ji,  à  la  pre- 
mière de  ces-  assemblées  ,  par  le 
département  de  la  Charente-In- 
férieure, il  se  prononça  dans  le 
procès  du  roi  pour  la  mort  sans 
appel  et  sans  sursis.  Membre  du 
conseil  des  cinq-cents  par  la  réélec- 
tion des  deux  tiers  convention- 
nels, M.  Yinet  en  sortit  en  11798, 
et  ne  fut  pas  réélu.  Perdu  de  vue 
sous  le  gouvernement  consulaire 


VIN 

et  sous  le  f;ouvernement  impérint. 
et  n'ayant,  avant  ni  après  \c^cent 
jours,  en  »8i5,  rempli  de  fonc- 
tions publiques  ni  signé  l'acte  ad- 
ditionnel, il  n'a  pas  élé  compris 
dans  la  loi  du  12  janvier  18 lO, 
rendue  contre  les  conventionnels 
dits  volans.  On  trouve  dans  la  bio- 
graphie des  hommes  vivans  de* 
frères  Michaud,  la  déclaration  que 
nous  allons  rapporter,  et  qui  pa- 
rut dans  les  journaux  en  1818. 
«  W.  Vinet,  disent  ces  biographes, 
à  sa  sortie  du  conseil  des  cinq- 
cents,  rentra  dans  l'obscurité  et 
tomba  dans  la  dernière  misère.  » 
Voici  maintenant  la  déclaration  : 
*  Je  soussigné.  Pierre  Vinet.  Agé 
de  ^r»  ans,  natif  de  Saint-Ciers 
du  Taillan  ,  ancien  député  à  la 
convention,  étant  ai-tuellement , 
et  depuis  le  '20  septembre  1816,  à 
l'hôpital  de  Blaye  ,  oi'i  je  suis  re- 
tenu par  autorisation  supérieure  , 
pour  cause  de  maladie  incurable  ; 
désirant,  dans  toute  la  sincérité 
de  mon  cœur,  nie  réconcilier  avec 
mon  Dieu,  et  réparer,  autant 
qu'il  est  en  moi,  le  mal  auquel  j'ai 
concouru  pendant  que  je  faisais 
partie  de  celte  fatale  assemblée, 
en  y  adhérant  aux  mesures  désas- 
treuses qui  en  sont  émanées,  et 
particulièrement  au  décret  qui  a 
condamné  le  vertueux  Louis  XVI 
à  mort,  décret  auquel  je  n'ai  don- 
né mon  assentiment  que  par  la 
terreur  dont  j'étais  saisi  ,  et  qui 
avait  anéanti  toutes  les  facultés  de 
mon  esprit  et  de  mon  cœur,  ce- 
pendant je  déclare  avec  vérité 
n'avoir  fait  ni  motion  ni  discours 
contre  le  roi  ni  la  famille  royale. 
J'alTirme  même  avoir  sauvé,  dans 
mon  département,  im  millier  d'in- 
nocentes victimes  dévouées  à  l'es- 


VIN 

rlnvage  on  à  la  mort.  Puiïsspat  les 
témoignages  de  ma  condiiile  et 
les  torrens  de  larmes  que  je  n'ai 
cessé  de  verser  pour  ne  niT-lre  jias 
opposé  autant  que  je  le  devais  h 
un  crime  nus^i  atroce,  atténuer 
ma  culpabilité!  C'est  au  pied  du 
trône  de  mon  roi  que  je  voudrais 
faire  amende  honorable,  et  réf-lxi- 
nier  im  pardon  si  nécessaire  ^  ma 
triste  existence.  »  Non»  ne  révo- 
quons point  en  doute  l'authentici- 
té de  cette  déclaration  ;  nous  fe- 
rons remarquer  toutefois  que  M. 
Viîipt  a  été  bien  lent  à  la  faire. 
Ce  n'est  que  quatre  ans  aprt!S  la 
resauration  du  gouvernement 
royal,  lorsqu'il  est  à  l'hôpital ,  et 
.Igé  de  ^3  ans,  qu'il  se  rcpent 
d'un  acte  qu'il  a  fait  dans  la  force 
de  l'âge,  et  qu'il  en  rend  j)ubl1- 
que  la  déclaration.  Il  semble 
<|u'elle  eût  été  plus  méritoire  en 
1814.  Malheureusement  M.  Vinet 
n'est  pas  seul  dans  ce  cas;  mais 
c'est  à  peu  près  le  seul  dont  nous 
ayons  cité  le  tardif  repentir  dans 
cet  ouvrage. 

VINOf  (  Gilbert  .Ti;  M  EN  ,  ba- 
ron )  ,  maréchal-de-camp,  '•om- 
mandeiir  de  l'ordre  royal  de  la 
It'îgion-d'honneur  et  chevalier  de 
Saint-Louis,  né  en  1  r^a  à  Sois- 
sous  ,  département  de  l'Aisne,  est 
fils  d'un  avocat  au  parlement.  £11 
1702,  iVl.  Vinot  quitta  le  collège 
J.ouis-le-Grand  pour  voler  A  la 
défense  de  la  patrie.  Refusant  le 
grade  d'olTirier  qui  lui  était  of- 
fert, il  partit  comme  volontaire 
avec  le   i"  bataillon  des   grena- 

IJSL  diers  de  Paris.  Après  une  campa- 
^K  gne  à  l'armée  du  Nord  ,  il  entra 
WL  en  qualité  de  fourrier  dans  le  afi" 
HP  régiment  de  cavalerie,  où  il  fut 
bientôt  nommé  sous-lieutcoant. 


VIN 


23 1 


Incorpore,  par  suite  du  licericie- 
ment  de  ce  corps,  dans  le  22"  ré- 
giment de  chasseurs  à  cheval,  il 
y  obtint  successivement  tous  ses^ 
grades,  jusqu'à  celui  de  colonel  à 
la  suite,  qu'il  dut  à  sa  belle  con- 
duite à  la  bataille  de  Rio-Sacco, 
dans  laquelle  ,  eu  chargeant  un 
b.'itaillon  carré,  il  fut  grièvement 
bles*é.  IMus  tard,  il  prit  le  com- 
mandement du  2"  <le  hussards  , 
avec  lequel  il  fit  preS(|ue  toutes  les 
campagnes  de  l'armée  d'Espagne. 
Le  .3  mars  181 5,  il  fut  nommé 
général  debrigade,  récompense  de 
sou  zèle  soutenu  pour  le  service, 
ainsi  que  de  la  bravoure  qu'il  a- 
v  ait  déployée  pendant  20  an  née  s  de 
combats  «lans  la  Belgique,  à  l'ar- 
mée des  Pyrénées-Orientales,  en 
Italie,  en  l']gypte,  en  Allemagne, 
en  Pologne  et  en  Espagne.  Le  ba- 
ron Vinot,  qui  a  toujours  fait  le 
service  de  troupes  légères  ,  s'est 
parliculiércmcnt  distingué  auxba- 
taiiles  d'Heilsberg,  de  Friediand  , 
d'Albuéra  et  de  la  Gébi)ra,  où  ^ 
à  la  tèle  de  fy^o  cavaliers  du  2*  de 
hussards,  il  pénétra  trois  fois  dans 
un  camp  de  dix  mille  Esj>agnols^ 
et  les  força  de,  changer  de  posi- 
tion, (^e  fait  est  c<msigné,  ainsi 
que  sa  conduite  à  Albuéra ,  <lans 
les  rapports  du  maréchal  Soult 
La  défense  de  Ronda  fit  .-^u^si 
beaucoup  dhouneur  au  colonel 
Vinot,  gouverneur  de  celte  ville 
et  commandant  autour  de  celle 
place,  située  dans  les  montagnes 
à  un  rayon  de  plus  de  20  lieues. 
Avec  4  i'«  5oo  hommes  seulement, 
il  se  maintint  près  de  troismois  con- 
tre les  efîorts  d'une  populace  in- 
surgée et  contre  les  att,.qijes  réi- 
térées de  plusieurs  corps  nom- 
breux, qui  tenlèrcDl  de  le  débua* 


202 


\I0 


qucr  (le  ce  poslr^  iinporlant,  qui 
n'était  point  forlifié  :  (on  peut  à 
ce  sujet  consulter  l'ouvrage  de 
M.  de  Rocca  sur  rEspaj:!;ue,  et  les 
ordres  du  jourdu  uiaréchalSoiiIt). 
Pendant  les  cent  jours  ,  en  i8i5, 
le  baron  Viuot  combattit  glorieu- 
sement dans  les  rangs  l'rancais 
pour  repousser  l'invasion  étran- 
i;ère,  et  reçut  une  blessure  à  la 
bataille  de  Mont-Sainl-Jean,  après 
laquelle  il  s'est  retiré  dans  le  ci- 
devant  Béarn,  au  sein  ie  sa  (a- 
mille. 

VIOMEISIL     (  LE    MA-RQlilS     DU 

IlotJS  de),  uiarécbal  et  pair  de 
France,  chevalier  de  l'ordre  du 
Saint-Esprit,  ancien  grand'croix 
de  l'ordre  royal  et  militaire  de 
Saint -Louis,  officier  de  l'ordre 
royal  delà  légion-dhonneur,  etc., 
s'est  fait  connaître  dans  la  guerre 
d'Amérique  sous  le  iDarécbal  de 
llochambeau.  Il  y  servaiten  quali- 
tédecolonel,  etson  frère enqualiié 
de  maréchal-de-camp.  M.  deViotne- 
nil  émigra  au  commencement  de 
la  révolution,  et  fut  chargé  du  com- 
luandenient  de  l'avant-i^arde  de 
l'armée  du  prince  de  Condé.  Dans 
les  premiers  mois  de  i^gS,  il  leva 
un  régiment  au  service  d'Angle- 
terre ;  mais  ce  régiment  ayant  été 
presque  aussitôt  réformé,  M.  de 
Viomenil  retourna  à  l'armée  du 
prince  de  Condé,  qui  le  chargea 
du  commandement  d'une  division 
de  son  avant -garde  pendant  la 
campagne  de  1796.  L'année  pré- 
cédente.il  avait  été  nommé  grand'- 
croix de  l'ordre  de  Saint-Louis.  Le 
corps  des  émigrés  passa  à  la  solde 
de  Russie,  et  bientôt  il  fut  licen- 
cié. M.  de  Viomenil  suivit  alors 
le  prince  de  Condé  en  Angleterre. 
En   1801,  avec  l'autoriîation  du 


VIS 

gouvernement  anglais,  il  passa 
en  Portugal  «  pour,  dit  un  de  ses 
biographes  ,  y  servir  en  cas  de 
guerre.  Les  occasions  seules  man- 
quèrent à  son  (ourage.  >>  M.  de 
Viomenil  revint  «mi  France  en 
18] 4»  après  l'occupation  par  les 
armées  étrangère*.  Le  roi  le  noin- 
nia  pair  de  France  et  membre  de 
la  commission  chargée  de  vérifier 
les  services  des  anciens  officiers. 
A  l'approche  du  20  mars  181  5,  il 
eut  le  commandement  des  volon- 
taires rojaux  qui  s'organisaient  à 
Vincennes,  il  suivit  Louis  XVIII 
à  Gand.  A  la  seconde  restanra- 
lion,  il  fut  nommé  commandant 
de  la  11'  division  militaire  à  Bor- 
deaux, puis,  le  10  janvier  1816, 
gouverneur  de  la  i5'  division  à 
Rennes.  Dans  le  mois  de  juillet 
suivant,  le  bâton  de  maréchal  de 
France  récompensa  ses  services. 
M.  de  Viomenil  est  aujourd'hui 
(1825)  gouverneur  de  la  iS"  di- 
vision militaire.  Son  neveu ,  le 
baron  Charles-Gabriel  de  Viome- 
nil, a  fait  les  campagnes  de  l'ar- 
mée du-  prince  de  Condé,  où  il  a 
reçu  la  croix  de  Saint-Louis  ,  et 
est  devenu,  en  juin  18149  maré- 
chal -  de  -  camp.  INommé  ensuite 
commandant  du  département  de 
la  Drôme,  il  est  compris  (1825) 
au  nombre  des  maréchaux- de- 
camp  en  disponibilité. 

VISCONTI  (Enmiis-Qlirixcs), 
célèbre  archéologue,  né  à  Ron)e 
le  1"  novembre  i^ai,  annonça 
presqu'en  naissant  une  ardeur  cl 
une  aptitude  extraordinaires  pour 
tous  les  genres  d'instruction.  Il 
connaissait  les  lettres  de  l'alpha- 
bet avant  de  pouvoir  les  articu- 
ler ;  et  à  peine  iigé  de  trois  ans  ,  il 
discernait  sur  les  médailles  les  tê- 


iiuiiiiciir,  ei  nu  ceieure  c;(>mmt;  un  mus  ijui  un;i)ui(ij^iit>iuui  ico  ;•««>■■ 
prodie^e  par  les  jcmrnaux  lillérai-  ficfS,  onx  hal)illeiiiens  qui  di.stin- 
re«  du  temps.  ATâge  de  dix  ans,  il  guaient  les  tlij^nilés  ,  aux  pomjies 
en  soutint  une  seconde  sur  la  géo-  qui  (  iivironnaient  les  magistrats  , 
graphie,  la  chronologie  ,  les  lan-  qui  embellissaient  les  triomphes  , 
gties  anciennes,  la  numismatique,  qui  s'observaient  aux  funérailles  ; 
l'hi.itoire  romaine,  la  géographie;  à  toutes  ces  connaissances  lun- 
et  deux  ans  après,  il  répondit  à  gués  et  variées  qui  rendent  si 
toutes  les  questions  qui  lui  furent  difficile  l'étude  de  l'antiquité. Vis- 
adicpsées  sur  la  trigonométrie  ,  conli  n'avait  pas  encore  décidé  à 
l'analyse  et  le  calcul  différentiel,  quelle  branche  de  sciences  il  de- 
Son  père,  homme  très-savant,  et  vait  plus  particulièrement  s'atta- 
qui  avait  été  son  seul  instilu-  cher,  que  son  génie  planait  déjà 
teur,  le  soumettait  à  ces  essais,  sur  tout  le  vaste  domaine  que  l'es- 
moins  pour  satisfaire  son  amour-  prit  humain  peut  envahir.  Vers  le 
propre  que  pour  montrer,  comme  mois  de  juin  17G8  ,  un  lâche  as- 
il  le  disait  lui-même  ,  par  des  suc-  sassiiiat  enleva  au  monde  savant 
ces  si  précoces,  la  supériorité  de  le  célèbre  "SVinckelmann ,  qui  se 
l'éducation  particulière  sur  celle  rendait  à  Rome  pour  présider  à  la 
des  écoles  publiques;  opinion  con-  formation  du  musée  du  Vatican. 
testable,et  qui  aujait  besoin  d'au-  Le  père  d'Eunius  fut  appelé  à  lui 
très  exemples  pour  être  adoptée,  succéder,  et  dès-lors  s'ouvrit  de- 
Les  espérances  données  par  le  vaut  son  jeune  élève  la  carrière 
jeune  Visconli  commencèrenl  à  se  qu'il  a  ensuite  parcourue  avec  un 
réaliser  avant  qu'il  sortit  de  l'en-  si  grand  éclat.  La  science  de  l'an- 
fance.  Il  ne  faisait  qu'atteindre  sa  tiquité,  que  nos  aïeux  avaient  ré- 
trcizième  année,  lorsqu'il  publia  duite  à  un  assaut  d'érudition,  s'é- 
une  traduction  en  vers  de  l7/(?-  tait  frayée  une  nouvelle  route  à 
cube  d'iiuripide  ,  qu'il  exécuta  l'aide  de  la  philosophie  ,  qui  avait 
sans  le  secours  d'aucun  cornmen-  répandu  la  lumière  au  milieu  des 
tateur.  Il  la  flt  suivre  de  quel-  mystères  les  plus  profonds  de  la 
ques  fragmens  de  Piudare ,  aux-  religion  el  de  la  politique  des  an- 
queU  il  ajouta  l'exposé  de  la  mé-  ciens  gouvernftmens.  Ce  qui  jadis 
thode  qu'il  avait  imaginée  pour  n'était  destiné  qu'à  servir  d'appât 
réussir  dans  sa  version.  Attiré  vers  à  une  curiosité  oiseuse  couuneii- 
l'étude  de  la  littérature  ancienne,  cail  à  être  l'objet  de  profondes 
il  lut  et  relut  les  auteurs  classi-  méditations.  Le  comte  de  (>aylus 
ques,  dans  le  but  d'y  recueillir  entreprit  de  séparer  les  bronzes  et 
lestradilions  les  plusauthentiques  les  marbres,  et  do  les  classer  par 
sur  le»  dieux  ,  les  héros,  les  épo-  ordre  de  temps  ,  de  lieux  ^  de  su- 
<jues  et  les  événeinens  les  plus  re-  jets.  Winckelir.ann  ,  par  des  con- 
marquîibles  de  l'histoire  des  na-  jecturcs  et  des  raj)prochemens  in- 
tiotis  et  de  la  vie  des  hommes  il-  génieux,  avait  rendu  ces  monu- 


234  VIS 

inens  instructifs  ;  m;i!s  il  fallait 
encore  un  génie  élev»?  qui  le»  eût 
interrogés  pour  découvrir  leur 
âge,  leursjlyie,  leur  ilestiuation, 
et  pour  nous  inoutrer  ensuite  par 
quels  degrés  et  p;ir  (juelles  causes 
les  art»  étaient  tour  à  tmir  passés 
des  ateliers  di'  Phidias  jusqu'aux 
conceptions  bizarres  <ies  siècles 
barbares.  Il  n'y  avait  jamais  eu 
un  temps  plus  favorable  pour  le> 
travaux  archéologiques.  Llii  mou- 
veujiKit  ^>éuéial  entraînait  les  es- 
'pril«  Teis  l:  critique  de  l'art  et  de 
i'antiijuité  :  lïcnuîanum  et  l'oni- 
péia  venaient  d'être  découverts. 
La  Cj.ande-Grèce  reproduisait  au 
îiwe  les  njonumens  de  son  an- 
cicojie  gloire.  La  Sicile,  la  Grèce, 
i'Asie-iVlineure,  l'Egypte,  la  Perse, 
relrouvaionî  par  le  zèle  des  voya- 
geurs les  titrt  V  épars  de  leur  gran- 
<ieur  passée,  lies  langues  primiti- 
ves de  l'Italie  ,  de  îa  Phénicie  se 
rccotnposaiesil  pur  les  efforts  ré- 
pétés des  suvans;  et  Home  mo- 
derne, cette  mine  inéi^uisabie  de 
nionumens,  s'enrichissait  tous  les 
jours  de  quelques  nouvelles  con- 
quêtes, tandis  que  les  palais  des 
princes  se  transfoirmaieot  en  mu- 
.«■écs  ouverts  à  l'advniration  publi- 
que. Viscoiiti  méditait  dans  le  si- 
lence du  cabinet  le  plan  d'un 
ouvrage  immense  pour  arracher 
l'archéologie  aux  m.ï)ins  de  l'igno- 
rance et  de  la  pri'isomplion.  (^e 
que  Marini  avait  fait  pour  les 
chartes,  Worcelli  pour  les  inscrip- 
tions, Eckhei  pour  les  médailles, 
Zoiiga  poiir  l'Egypte,  Passeri  et 
Lanzi  pour  les  Etrusques,  Vis- 
conli  se  proposait  de  l'exécuter 
pour  les  antiqu  ités  grecques  et  ro- 
maines, en  adoptant  une  échelle 
beaucoup  plus  raste  et  mieux  cal- 


VIS 

culée.   Clément   XIV  et  Pie  VI, 

ces  deux  ponlife.»  ()ui  relevaient 
l'éclat  de  la  tiare  par  la  noble  pro- 
tection qu  ils  accordaient  aux  arts, 
avaient  arrêté  qu'on  achetât  aux 
l'rii-.  de  la  chambre  apostolique 
tous  les  objets  d'un  mérite  recon- 
nu ,  qui,  répandus  dans  les  mains 
des  marchands  ou  réfugiés  dans 
l«a  palais  des  nobles  ignorans  , 
couraient  le  risque  de  devenir  la 
proie  de  quelques  avides  spécula- 
teurs. Pie  VI  couronna  cette  ma- 
gnanime entreprise,  en  ordonnant 
(pje  les  monumens  du  musée  du 
Vatican  fussent  gravés  et  accom- 
pagnés d'explications  savantes. 
Visconti  et  son  père  répondirent 
aux  désirs  de  S.  S.,  et,  en  1783  , 
ils  publièrent  le  Musée  Pie-Clé- 
nienlin^  qui,  dans  l'espace  de  peu 
d'années,  fut  porté  à  sept  gros 
volumes  in-f<d.  On  sait  mainte- 
nant qu'ils  appartiennent  tous  à 
Ennius,  quoique  sur  le  titre  du 
premier  on  lise  le  nom  de  Jean- 
BaplLsle.  A  la  mort  de  ce  dernier, 
arrivée  en  i7«S4,  son  fils  lui  suc- 
céda dans  la  place  de  conserva- 
teur, qu'il  cumula  avec  celle  de 
camérier  d'honneur  de  Pie  VI. 
La  description  du  Museo  Plo-Cle- 
mentiuo  peut  servir  de  modèle  à 
tous  ceux  qui  seront  chargés 
d'une  pareille  tâche.  On  y  ad- 
mire presqu'à  chaque  page  la 
sagacité  avec  laquelle  l'auteur  a 
expliqué  les  monumens  par  les 
monumens  ,  les  statues  par  les 
médailles  ,  les  auteurs  par  les  ins- 
criptions ,  et  les  inscriptions  par 
les  auteurs.  Profondément  versé 
dans  les  traditions  de  l'antiquité, 
sur  les  actions  et  les  fonctions  de 
ses  nombreuses  divinités,  Visconti 
n'est  jamais  embarrassé  par  les 


VIS 

différences   imillipliées  qu'on   a- 
perçoit  d.ins    leurs    iUtribuls    ou 
dans  leurs  symboles;  ii  retrouve 
toujours  les  autorités  qui  parais- 
sent avoir  .-ervi  de  {juide  à  l'ar- 
tiste; il  les  puise  dans  les  écri- 
vains de  tous  les  siècles,  quelque- 
fois même  dans  les  scholiasles  , 
dont  toufelbis   il    n'employait   le 
témoignage  qu'avec  une  réserve 
connnandée  par   la   dislance  (jui 
sépare  leur  siècle  de  ceux  des  au- 
teurs originaux.  Pendant  qu'il  é- 
tait  occupé  de  la  publication  du 
musée   pontifical  ,   li-s   nouvelles 
découvi-rles  venaient  le  di!.traire 
de  c<:  travail  général  pour  le  jeter 
dans  les  discussions  particulières. 
En  1780,  on    avait    découvert  à 
Home     VHypog<'e ,    ou    lon)beaii 
des  Seipions.  A  peine  l'ut-il  pos- 
sible de  pénétrer  dans  ce  caveau, 
qui  renfermait  les  restes  de  tant 
de  héros,  que  Visconti  s'empressa 
d'y  descendre  pour  donner  ta  des- 
cription  de  tous  les  objets  qu'on 
y  avait  trouvés.  Il  expliqua  suc- 
cessivement la  collection  de  Jenc- 
kins  ;  les  monumens  de  Gaabiani , 
les   mosaïques   d'Azara,   les  bas- 
reliefs  de  la  villa  Pinciana,  et  un 
grand     nombre    d'antiquités    qui 
devinrent  le  sujet  de  ses  savantes 
méditations.    Après  la   chute   du 
trône  pontifical,  Rome,  qui  n'a- 
vait  point    oublié    s<ui    ancienne 
existence  ,  voulut  Ctre  gouvernée 
par  des  consuls,  des  sénateurs  et 
des  tribims.  Visconti,  qui  s'était 
concilié   la    considération   publi- 
que ,  fut  appelé  A  la  première  ma 
gistralure  de  la  nouvelle  républi- 
que; mais  un  honunage  tout  aussi 
flatteur,  et  beaucoup  plus  durable 
pour  lui,  fut  celui  d'être  attaché 
à  notre  musée  national ^  que  la  va- 


VIS  255 

leur  de  nos  soldats  avait  orné  des 
plus  spleudides  trophées  de  la  vic- 
toire.   Nommé    conservateur    du 
musée  central  des  arts  ,  Visconti 
y  revit  avec  joie  la  plupart  de  ses 
anciennes  connaissances.  "V Apol- 
lon et  les  Muses,  le  Torse  et  VÀn- 
tinoiis  j  le  Gladiateur  et  le   Lao- 
coon,  la  Cléopâtre  vt  le  Tibre.  Ces 
précieuses   conquêtes  ,   entassées 
dans  les  galeries  du   Louvre,  at- 
tendaient une   place   convenable 
pour  se  montrer  aux  regards  éton- 
nés de  la  France. Visconti  les  clas- 
sa d'après  son  système,  et  rédi- 
gea les  !iolices,  qui  donnaient. 
j)Our  ainsi  dire,  le  si^nalci!;;  ni  <\^ 
ces  hôtes,  que  chaque  Frau^jais 
était  empressé  de  connaître.  Dé- 
gagé de  ces  soins  et  admis  au  sein 
d(!  deux  classes  de  l'institut ,  ce 
savant   Italien   voulut   témoigner 
sa  reconnaissance  au  pays  (jui  l'a- 
vait adopté  avec  tant  de  distinc- 
tion.   Ce    fut    alors    qu'il    publia 
l'explication  des   va^es  peints  du 
musée  français,  une  notice  sur  la 
statue  en   basalte  qu'on  voyait  à 
Saint -Cloud,   la  description  «lu 
ha-i-reli<;f  en  marbre  de  Numidie, 
représentant  la  troisième  et  la  der- 
nière bataille  donnée  à   Arbelles 
contre  Darius,  et  de  pltisieurs  au- 
tres morceaux  qui  faisaient  partie 
de  nos  collections,  etc.  Mais  le  li- 
tre qui  établit  le  plus  sa  réputation 
littéraire,  et  (|ui  rendia  le  non)  de 
Visconti  immoriel,  c'est  son  grand 
ouvrage  sur  V Iconographie  grec- 
que et  romaine  ,  c'esl-ù  dire  le  re- 
(;ueil    des   portraits   authentiques 
des  personnages  les  plus  célèbres 
de  l'antiquité.  Le  choix  d«'s  nom- 
breux mouuinen«   dont    il  a  tiré 
les  type»  de  ses  ima:;es,  et  la  con- 
fiance que  ses  lalcns  avaient  ins- 


25(>                 VIS  VIS 

pirc^e,  ont  <lonné  à  cet  ourrage  inen  ininulieux  de  retle  superbe 
un  degré  (raiitonlé  que  j>t:rsnn-  colloction  ,  il  jngcii  qu'elle  ne  va- 
ne  ne  lui  conteste.  L'iconof^ru-  lail  pus  n)oin^  de  trente-t'inq  mille 
J)liie  grccqiieconlieni  pl(l^  de  (mis  j^ninics  (875.000  l"r.),  qui  lurent 
cenls  pi)rtruils,  et  la  ron)aine  ,  a!is>ilôt  remises  fin  propriétaire 
dont  Visconli  n'a  publié  que  la  sais*  la  moindre  réclamation.  De 
première,  partie  <;n  offrira  presque  retour  à  l'ari^  ,  Vi^conti  rendit 
autant  lorsque  M.  JMongcz  l'aura  compte  de  son  voyai,'»' ,  et  r<in)- 
coniplélé<-,(l'a[)rcs  le  plan  de  l'an-  ninnicpia  à  l'inslitul  ^es  idée;  sur 
teur.  Cette  magnifit|ue  entreprise,  les  objets  qii'il  venait  d'apprécier, 
exécutée  aux  frais  dii  trésor,  était  Ce  tut  son  dernier  travail  ,  et  di- 
protégée  par  l'iionune  exlraordi-  gne  de  ceux  (|ui  l'avaient  précé- 
naire  qui  accueillait  toutes  les  dé.  Atteint  d'une  maladie  dou- 
grandes  pensées  capabb.'S  ds  don-  loureuse,  qui  flt  en  peu  de  temps 
ner  une  haute  idée  de  sa  puis-  des  progrés  effrayans,  il  mou- 
sauce.  Il  s'était  même  réservé  rut  le  7  lévrier  iS  18  .  laissant  un 
toute  l'édition;  et  un  jour  f|ue  vide  que  personne,  jusqu'à  pré- 
Visconti  lui  offrait  le.  premier  sent,  ne  paraît  a\oir  rempli, 
exemplaire  de  son  ouvrage,  il  lui  VISCONTI  (  Ferdinand)  ,  ex- 
dit  ;  «  Donnez-moi  la  liste  des  directeur  dn  dépôt  de  la  guerre  de 
«personnes  auxquelles  il  vous  Naples ,  né  v.n  1772  à  Palernie, 
«plaira  do  l'enrojer;  je  rnc  char-  recul  un  grade  dans  l'armée  avant 
wgerai  volonlieis  de  vos  commis  .  d'être  en  âge  de  commencer  ses 
»sions.  n  Telle  était  l'opinion  qui  études.  Il  fut  placé  au  collège  ini- 
s'était  formée  en  Europe  sur  le  litaire,  où  il  n'aurait  rien  appris, 
mérite  de  Visconti ,  que  le  parle-  si  son  génie  n'eût  suppléé  à  la 
jnent  d'Angleterre  lui  déféra  l'un  médiocrité  de  ses  maîtres.  Atta- 
des  plus  mémorables  arbitrages  ché  an  serviced'un  régiment  d'ar- 
dont  l'histoire  des  arts  puisse  con-  lillerie,  il  s'exerçait  dans  les  éco- 
server  le  souvenir.  Il  s'agissait  les  d'application  ,  que  le  général 
d'examiner  et  d'apprécier  la  su-  Pommereuil  venait  de  fonder  à 
perbe  collection  des  marbres  grecs  l'instar  de  celles  de  Melz,  lors- 
enîevés  par  lord  Elgin  aux  tem-  qu'un  mandat  d'arrêt  lancé  cou- 
ples de  Thésée  et  de  Minerve,  et  tre  lui  par  la  junte  d'état,  quifrap- 
dont  le  gouvernement  anglais  é-  pait  aveuglement  l'innoceut  et  le 
tait  disposé  à  faire  l'acquisition,  coupable ,  interrompit  sa  carrière 
La  chambre  des  communes,  qui  pour  le  jeter  dans  les  cachots  de 
devait  accorder  les  fonds,  fut  ar-  l'île  de  Pantelleria.  Arraché  à  la 
rctéc  par  la  divergertce  des  opi-  société,  hors  de  communication 
nions  manifestées  par  les  savans  avec  sa  famille,  et  ignorant  tou- 
et  les  artistes  nationaux  sur  lu  va-  jours  la  cause  de  sa  disgrâce,  il 
leur  de  ces  vénérables  débris.  Fa-  resta  sur  ce  rocher  jusqu'à  1 1  paix 
ligué  de  ces  retards,  le  parlement  de  Florence  (1801),  dans  laquelle 
prit  le  parti  de  s'en  rapporter  à  le  vainqueur  stipula  en  faveurdes 
"Visconti.  qui  futalors  engagé  de  se  victimes.  11  se  rendit  alors  à  INa- 
rendre  à  Londres.  Après  un  fxa-  pies  dans  l'espoir  d'y  recouvrer  sa 


VIS 

]>Iace  ;  mais  le  gouvernement, qui 
avait  juré  de  pardonner,  ne  ces- 
sait pas  de  le  poursuivre,  el  pour 
se  soustraire  ;i  ces  vexations ,  M. 
Visconti  alla  s'établira  Milan,  que 
ses  ancêtres  avaient  autrefois  gou- 
verné, el  où  il  s'estima  très-heu- 
reux d'être  reçu  en  qualité  de  lieu- 
tenant dans  lecorpsdes  ingénieurs 
géographes.  Il  était  parvenu  au 
grade  de  sous-directeur  du  bureau 
topographique  ,  lorsque  Joseph 
Bonaparte,  monté  sur  le  trône  de 
Naples  (  i8o5),  demanda  le  rap- 
pel des  militaires  napolitains  en- 
gagés au  service  étranger.  Le  gou- 
vernement italien,  qui  sentait  la 
diflicuité  de  remplacer  M.  Vis- 
conti, fit  des  démarches  auprès  de 
l'empereur  Napoléon  pour  con- 
fierver  un  officier  aussi  distingué. 
Il  l'avait  déjà  chargé  de  La  levée 
d'une  grande  carte  administrative 
et  utilitaire  de  la  Lombardie,  et 
il  lui  avait  fourni  les  moyens  né- 
cessaires pour  la  construction  de 
la  carte  de  la  n)er  Adriatique.  M. 
Visconti,  ne  pouvant  tirer  aucun 
parti  des  matériaux  qui  lui  furent 
remis  à  Vienne  sur  la  topographie 
des  états  vénitiens  ,  réunis  au 
royaume  d'Italie  par  le  traité  de 
l'resboiirg ,  se  transporta  sur  les 
lieux  pour  déterminer  la  lati- 
tude et  la  longitude  d'un  grand 
nombre  de  positions  qui  n'avaient 
jamais  été  reconnues,  el  il  em- 
brassa dans  ses  observations  les 
côtes  de  l'Islrie  ,  de  Quarncro,  de 
la  Datmalie  et  de  l'Alb.inie,  de- 
puis Trieste  jusqu'à  liudiia.  Ses 
opérafiuns  se  croisèrent  souvent 
avec  celles  de  M.  Beautcmps- 
lieaupré,  que  le  gouverneujent 
français  avait  envoyé  dans  les 
mêmes  parages  pour  reconnaître 


VIS 


237 


les  ports  militaires  de  la  Dalmalie 
et  de  rislrie.  En  1810,  M.  Vis- 
conti accompagna  le  général  Dan- 
thouard  dans  le  Tyro! ,  pour  fixer 
les  limites  entre  la  Bavière  et  le 
royaunje  d'Italie.  Il  fut  employé, 
l'année  suivante,  à  la  démarca- 
tion des  provinces  illyiiennes  du 
cOîé  deïarvis  et  de  iMalborghetto, 
et  il  continua  ensuite  la  reconnais- 
sance n)ilitaire  de  leur  frontière 
du  côté  de  l'Autriche,  en  suivant 
la  direction  des  Alpes  et  de  la 
Save ,  depuis  Villach  jusqu'à  la 
jonction  de  celte  rivière  avec 
l'Unna.  Ces  services  lui  avaienj 
déjà  mérité  les  grades  de  chef 
d'escadron  des  ingénieurs  -  géo- 
graphes ,  et  de  directeur  en  se- 
cond du'bureau  topograplùque  do 
Milan,  lorsque  les  événemens  qui, 
en  1814,  renversèrent  le  royaume 
d'Italie,  semblèrent  avoir  conso- 
lidé l'existence  politique  du  roi  Mu- 
rat.  Cédant  aux  invitations  de  ce 
prince  ,  et  pressé  par  les  vœux  de 
ses  amis,  M.  Visconti  se  rendit  à 
Naples,  où,  en  arrivant,  il  fut 
a<lmis  avec  le  même  rang  dans 
l'étaf-major  de  l'armée,  et  placé  à 
la  tête  du  bureau  topographique 
en  remplacement  de  lUxzi-Zanno- 
ni,  (pii  venait  de  mourir.  Cet  éta- 
blissement n'était,  à  cette  époque, 
qu'un  atelier  de  cartes  fabriquées 
sans  principes  scientiliques  ,  et 
par  simple  spéculation  de  coiii- 
merce.  M.  Visconti  le  monta  sur 
le  même  pied  que  les  dépôts  de 
la  guerre  de  Paris  et  de  Milan  ;  il 
le  pourvut  d'un  grand  nombre 
d'inslrumens ,  rédigea  des  ins- 
tructions pour  les  opérations  géo- 
désiqiies  ou  astronomiques  ,  et 
substitua  aux  anciennes  méthode» 
de  dessiner  el  de  graver  les  car- 


'j38  vis  vis 

tes,  celle  des  iiicillciir.^   gt'ogva-  t<v«  ses  places,  il  esl  condamné  à 

phes  modernes.   Ferdinand  IV,  à  vivre  dan>  l'oisiveté  dans  un  pays 

son  retour  de  Sicile  ,  confirma  le  qu'il   pourrait    illustrer    par    ses 

bureau  topographiqiie  de  Naples,  talens.     Ses    onvrajjes    sont  :    i° 

approuva  les  anciens  tta\aux ,  et  la    jurande    (>arle    administrative 

ordonna  une  i^rande  triangulatK>n  et  militaire  du  royaume  d'Italicî, 

pour  la  levée  de  la  carte  générale  en  sept  ieiiilles  ,  publiée  à  Milan 

du   royaume.  Tout  paraissait  de-  i8ii-i8i5,  et  remarquable  par 

voir  seconder  les  vmis  de  M.  Vis-  la  richesse  et  la  précision  des  dé- 

conti ,  dont  le  gouvernement  se  tails ,  ainsi  que  par  la  beauté  de 

plut  à  honorer  le  mérite.  Il  l'avait  l'exécution  ;  u"  la  Carte  hydrogra- 

porté  en  peu  de  temps  au  rang  de  phique  de  la  mer  Adriatique,  com- 

colonel  d'état-major,  de  membre  posée  d'une  Carte  générale  d'as- 

du  conseil  des  ponts-el-chaussées,  sembiage,  en  deux  grandes  t'euil- 

et  de  celui  des  contributions  di-  les,  et  des  Caries  particulières, 

çectes  ,  pour  la  formation  du  ca-  en  A'ingt  feuilles,  avec  un  portulan, 

dastre.  Le  choix  que  le  prince  hé-  et  une  collection  de  vues  des  ports 

réditaire  fit  de  lui ,  en  1820,  pour  principaux.  Ce  grand  travail,  pour 

siéger  dans  la  junte  provisoire  du  lequel  tous  les  matériaux  avaient 

frouvernement  conslilulicmnel,  et  été  préparés,  etdontil  n'avaitparu 

la  nomination  de  député  de  la  pro-  que  la  moilié  avant  )8i4»  a  été 

vinee  de  Naples,  turent  de  non-  achève  d'après  le.'-  dessins  de  M. 

veaux  hommages  rendus  à  >;es  ta-  Visconli  ;  et  ce  seul  ouvrage  suf- 

lens  et  à  sa  probité.  M.  Visconti  firait  pour  le  placer  au  nombre 

répondit  à  ce  double  appel  du  mo-  des  pi'en)iers  géographes  vivans. 

narque  et  de  la  nation,  en  s'ac-  Pendant  qu'il  a  dirigé  le  dépôt  de 

quittant  avec  zèle,  mais  sans  os-  la  guerre  à  iSaples,  il  avait  entre- 

lentati<m  ,  des  devoirs  qui  lui  a-  pris,  1°  une  grande  triangulation 

vaient  été   imposés.  Il  ne  parut  qui  de  vail  joindre  l'observatoirede 

jamais  à  la  tribune  ;  mais  attaché  cette  capitale  avec  les  observatoi- 

au  comité  de  la  guerre,  il  discuta  res  de  l'alerme  et  des  autres  villes 

tons  les  projets  relatifs  à  l'organi-  d'Italie, servirde  baseà  la  nouvelle 

sation  de  l'armée  et  à  la  défense  cartedu  royaume,  à  la  mesure  d'un 

du  royaume.  A  la  rentrée  des  Au-  arc  du  méridien  entre  l'île  de  Pia- 

trichiens  et  du  roi,  il  reprit  les  nosa  et  la  pointe  méridionalede  la 

fonctions  de  direcieur  du  bureau  Calabre,et  à  celle  d'un  autre  arcde 

topographique,  et  fut  même  con-  parallèle  entre  cette  extrémité  sud 

suite  pour  la  réforme  des  études  et  l'île    de    iMarettimo  ;    2°   une 

de  l'académie  royale  de  marine,  grande  Carte  hydrographique  du 

La  modération  de  ses  principes,  littoral  du  royaume,  avec  le  plan 

la  régularité  desa  conduite  et  î'im-  de  chaque  port;  5°  nue  Carte  to- 

porlauce  de  sesservices,  ne  purent  pographique  des  environs  de  Na- 

cepenJant  sauver  iM.  Visconti  des  pies,  en    neuf  grandes   feuilles, 

«ombreuses  épurations  qui  eurent  en}brassant  le  pays  compris  entre 

Heu    dans   l'administration    et    à  Patria  ,  Noia  ,  Cava ,  Amalfi  et  la 

l'armée  en  1822.  Destitué  de  ton-  mer,  avec  les  îles  d'Ischia,   de 


VIT 

Procida  et  de  Capri.  De  tous  ces 
ouvragiis,  qu'on  aurait  pu  voir 
tonninés  dans  l'espace  de  «ept 
anj,  il  ne  reste  qu'une  partie  des 
triangle:?,  l'hydrographie  des  cô- 
tes baignées  par  la  mer  Adriati- 
que, et  la  carte  des  environs  de 
Naples,  dont  il  a  été  publié  les 
deux  premières  feuilles,  conte- 
nant les  îles.  C'est  uu  chef-d'œu- 
vre de  précision  et  d'élégance. 
Tout  a  été  suspendu  par  la  desti- 
tution de  M.  Visconli,et  personne 
que  lui  n'est  en  état  de  les  conti- 
nuer. Ou  a  arrêté  également  la 
levée  de  la  grande  carie  du  royau- 
me ,  que  iM.  Visconti  n'espérait 
pas  achever ,  attendu  l'exiguité 
des  moyens  mis  à  sa  disposition 
pour  une  si  vaste  entreprise. 

VITROLLES  (  LE  BARON  Ec- 
gène-Frawçois-Auguste  d'Arnaud 
de)  ,  ministre-d'éiat ,  chevalier  de 
Saint-Louis  et  de  Siiiiit-Je.ni  de 
Jérusalem,  issu  d'une  famille  |>ar- 
iemenlaire  de  la  ci-devani  l'ro- 
vence,  est  né  au  château  (ht  Vi- 
trollejç  eu  1774-  Très-jeime  en- 
core lorsqtJC  la  révolution  éclata  , 
il  suivit  le  mouvement  de  l'émi- 
gration ,  et  ne  rentra  en  France 
qu'après  les  évènemens  du  18 
brumaire  an  8  (  ijyo)  :  il  avait 
alors  2;')  ans.  Plein  d'aclivilé  et 
«l'ambition,  il  essaya  de  s'ouvrir 
la  carrière  des  affaires  publiques 
sous  le  gouvertienient  consul. lire, 
mais  il  n'y  put  réussir.  Il  n'occu- 
pa, sous  le  gouvernement  impé- 
rial ,  qiu-  de  modestes  fonctions 
muiiicipdLS,  et  n'obtint  di  l'em- 
pereur que  le  litre  de  baroti  de 
l'empire.  A  la  suite  de  lu  désas- 
treuse campagne  de  iVloscoii 
(1812),  .M.  de  Vitrolles  se  voua, 
tlu  moins  plus  particulièrement, 


VIT  aôg 

ù  la  cause  des  Bourbons,  et  lors- 
que, en  1814  .  le  congrès  de  Châ- 
tillon-sur-Seine  négociait  encore 
avec  l'empereur  Napoléon,  il  s'y 
rendit  sans  caractère  avoué,  sans 
aucune  espèce  de  mission  ,  con- 
duit seulement  par  la  fortune,  et 
s'efforça  d'être  utile  à  la  cause 
royale  en  lui  servant  d'intermé- 
diaire près  des  diplomates  étran- 
gers. Monsieur ,  comte  d'Artois 
(  aujourd'hui  Charles  X  )  ,  était  à 
Nanci.  M.  de  Vitrolles  fui  envoyé 
vers  ce  prince  pour  lui  faire  con- 
naître la  rupture  des  négociations. 
Kevêtu  de  la  confiance  de  S.  A. 
R.  et  muni  des  pouvoirs  les  plus 
étendus,  il  se  rendait,  sous  un 
déguisement,  au  quartier-général 
des  souverains  alliés,  lorsqu'il  fut 
arrêté  par  les  troupes  françaises 
pendant  que  l'empereur  se  portait 
sur  Sairit-Dizier.  i\l.  de  Vitrolles, 
caché,  comme  nous  venons  de  le 
dire,  sous  un  costume  étranger, 
qui  pouvait  le  fair<;  pendre  com- 
me espion,  était,  avec  nn  grand 
nuiubre  d'autres  prisonniers,  ra- 
mené à  Paris ,  lorsqu'il  parvint 
d'abord  à  détruire  les  documens 
qui  l'auraient  compromis,  et  en- 
suite à  s'évader.  Les  troujies  étran- 
gères maîtresses  de  la  capitale, 
M.  de  Vitrolles  y  arriva.  S.  A. 
R.  M onsieurV us ixil  nommé  secré- 
taire-d'élat  provisoir*.'.  Ces  fonc- 
tions, que  le  roi  confirma,  cesȏ- 
r(;nt  au  mois  de  mars  i8i5,  épo- 
que où  ,  par  suite  de  la  marche  de 
Napoléon  sur  Paris,  il  fut  envoyé 
dans  le  Midi,  pour  y  organiser  une 
insurrecli«in  générale.  Pendant  ce 
temps,  la  famille  royale  »<;  relirait 
en  Belgique.  Les  efforts  de  M.  de 
Vitrolles  furent  à  peu  près  impuis- 
sanij.    Il   ne  put  opérer  que   dca 


2  jO 


VOL 


uiouvcinens  partiels.  Le  14  avril 
181 5,  il  fut  arrêté  à  Toulouse; 
mais  il  fut  rcrïiis  eu  liberté  par 
ordre  du  duc  d'Otranle  (  voyez 
FoscnÉ  )  ,  ministre  de  la  justice, 
le  jour  même  où  Napoléou  alxli- 
quail  pour  la  seconde  fois.  M.  de 
Vitrolles,  de  retour  à  Paris,  re- 
j)rit  sa  jdace  parmi  les  iiiiuistres- 
d'étal  ot  celle  de  secrétaire  des 
conseils  du  roi.  Le  département 
des  Basses-Alpes  le  nomma  mem- 
bre de  la  fameuse  chambre  de 
i8io,  dite  introuvable;  il  y  vota 
avec  la  majorité.  Ses  opinions  y 
furent  cependant  assez  modérées, 
et  ses  honorables  collègues  du  cô- 
té droit  virent  avec  étonnement 
dans  la  brochure  qu'il  publia  à 
cette  époque,  sous  le  titre  da  Mi- 
nistère dans  un  gom^ernement  re- 
présentatif,  des  doctrines  assez 
sages  et  des  idées  généralement 
justes  et  niodérées.  Il  paraît  que 
cette  espèce  de  changement  ne 
fut  pas  perdu  de  vue  un  peu  plus 
tard.  La  place  de  secrétaire  drs 
conseils  cessa  la  même  année 
(i8i5)  de  donner  entrée  au  con- 
seil des  ministres.  Elle  fut  sup- 
primée définitivement  au  mois 
d'août  1817,  et  une  ordonnance 
du  24  juillet  1818,  raya,  sans 
considérans,  M.  de  Vitrolles  du 
nombre  des  ministres  -  d'état. 
«  Quoique  cette  ordonnance  n'é- 
nonçât aucun  motif,  disent  les  au- 
teurs d'une  biographie  étrangère , 
on  sut  fort  bien  alors  que  des  intri- 
gues secrètes  qui  se  rattachaient 
à  l'existence  de  ce  gouvernement 
occulte^  qui  a  commencé  avec  la 
1"  restauration,  avaient  donné 
lieu  à  cette  rigueur.  «  Il  est  ren- 
tré au  conseil  privé  en  1824. 
VOLNEY  (Constanxis-Frax- 


VOL 

çois  Chasseboetjf,  comte  de),  an- 
cien membre  du  sénat,  pair  de 
France,  conjmandant  de  la  lé- 
gion-d'honneur, etc.  ,  naquit  en 
1755  à  Craon ,  en  Bretagne.  Il 
montra  dès  l'enfance  le  plus  ar- 
derjl  désir  de  s'instruire,  et  fit 
d'excellentes  études.  Un  attrait 
invincible  le  portait  vers  les  voya- 
ges de  long  (;ours  et  les  recher- 
ches scientifiques  dans  des  con- 
trées peu  connues.  Dès  qu'il  de- 
vint maître  de  son  modeste  patri- 
moine, il  se  hâla  de  le  convertir 
en  argent,  et  s'embarqua  pour  le 
Levant;  il  avait  résolu  de  parcou- 
rir en  tout  sens  l'Egypte  et  les 
parties  de  la  Syrie  les  moins  ex- 
plorées avant  lui  par  les  savans. 
N'ayant  encore  qu'une  connais- 
sance insulTisante  des  langues  de 
l'Orient,  il  alla  d'abord  s'enfer- 
mer pendant  près  d'une  année 
dans  un  co\iventde  maronites, au 
milieu  des  montagnes  du  Liban, 
où  il  liouva  des  ressources  qu'il 
lui  eût  été  impossible  de  se  pro- 
curer en  Europe.  Volney  y  fit  par- 
ticulièrement une  étude  appro- 
fondie de  l'arabe,  qu'il  parvint  à 
parler  avec  facilité.  Après  une  ab- 
sence de  plus  de  deux  années,  il 
revint  en  France,  et  y  publia  son 
premier  ouvrage,  sous  le  titre  de 
Foyage  en  Syrie  et  en  Egypte,  qyi 
eut  le  plus  grand  succès,  et  q>;i 
fut  bientôt  traduit  en  allemand, 
en  anglais  et  eu  hollandais.  Par 
une  niéthode  difterente  de  celle 
de  la  plupart  des  voyageurs,  Vol- 
ney  ne  se  met  jamais  en  scène  lui- 
même  ,  et  se  borna  à  donner  la 
description  la  plus  exacte,  de  tout 
ce  qui  est  vraiment  digne  d'inté- 
rêt dans  les  pays  qu'il  a  visités. 
Ses  tableaux  de  mœurs  a'en  sont 


-dk 


J.  r'Uo/ju- 


'/ 


VOL 

pas  moins  animés .  et  les  détails 
historiques  qu'il  loiiruit  9ur  les 
petif)l»;s  divers  vl  If  s  chefs  de  ces 
contrées,  détails  pre^q  le  incon- 
nus ju-iqu'.'dors  ,  donnèrent  un 
noijvcud  prix  h  cet  nnvrufre  qui  se 
distinguait  d'ailltiirs  p.'»r  l.t  clarté, 
la  précision  et  l'clégance  dn  style. 
Recherché  dans  la  nieillenrc  so- 
ciété de  l'aris,  et  accueilli  comme 
il  le  méritait  par  l«'S  savans,  Vol- 
ncy  se  plaidait  surt\»ut  dans  les 
réunions  qui  avaient  lien  chez  la 
respectable  veuve  d'Helvétius.  Sa 
niai»on  d'Autenil  était  le  remiez- 
vous  d'hommes  dislingaé-*  et  de 
tout  ce  qui  survivait  encore  de  ces 
philosophes  du  dix-hniiième  siè- 
cle, qui  avaient  contribué  à  don- 
ner un  si  puissant  e.-sor  à  la  raison 
liumaiiie.  Volney  s'y  lia  d'une  a- 
inilié  intime,  et  que  la  mort  seule 
put  interrompre,  avec  le  savant 
Cabanis,  alors  jeune  comme  lui. 
Tous  deux  se  rendaient  souvent 
ensemble  d'AiHeuil  a  l'assy,  clnz 
un  d«  s  fondateurs  de  la  lii>eilé 
américaine,  Tillustre  trankliii, 
qui  les  avait  vus  chez  M"*  Ilelvé- 
tius,  et  ils  trouvèrciit  dans  l'en- 
tretien de  ce  sa^e,  dej^^iaves  sujets 
de  méditation  sur  les  révolutions 
des  empires.  Les  piodij^alilés  et 
les  désordres  de  la  lin  du  règne 
de  Louis  W  avaient  depuis  long- 
temps fait  prévoir  aux  esprits 
éclairés,  qu'une  révolution  en 
France  était  inévitable.  Lorsque 
Louis  XVI,  cédant  au  vœu  des 
parlemen>el  de  l'immense  majo- 
rité «le»  Français,  CfMivoqua  le?  é- 
tats  généraux  en  17H9.  les  villes  et 
les  |iro\  in  es  s'empressèrent  d'en- 
voyer au  centre  ro mmn 11,  ce  qu'el- 
les avaiefil  d'hommes  les  plus  re- 
cuuimatKiables  par  leurs  lalens  et 


VOL 


9.4  ï 


leur  patriotisme.  Voîney. qui  fut  é- 
lu  député  du  tiers-élat  de  la  séné- 
chaussée d'Anjou,  se  montra  cons- 
tamment fidèle  aux  vœux  de  ses 
C(»iniiiettans  ,    et   embrassa   avec 
chaleur  la  cause   d'une  sage   li- 
berté. Il  parut  souvent  et  toujours 
avec  succès  à  la  tribune  nationale. 
En  septembre  1791,  il  lit  hom- 
mage à  l'assemblée  constituante 
d'un  ouvrage  (pj'il  venait  de  pu- 
blier sous  ce  litre  :  fes  Haines,  ou 
Méditations  sur  les  résolutions  flen 
empires^  qui  a  eu  depuis  un  grand 
nombre  d'édilionn,  et  dont  Tidée 
première  avait  été  conçue  dans  le 
cabinet   de   Franklin.    Lorsqu'un 
apprit   à   Paris   que   l'impératrice 
de  Russie,  Catherine  II,  avait  ac- 
cédé   à    la    coalition    contre    la 
France,  Volney  écrivit ,  le  4  dé- 
cembre 1791, une  lettre  à  Grimm, 
clungé  d'affaires  de  l'impératrice, 
en  lui  renvoyant  la  méd.iilb;  d'or 
que  cette  princesse  lui  av;iit  fait 
remettre  en  témoignage  «le  sa  .sa- 
ti-faclion  de  l'envoi  d'un   exem- 
plaire du   Voyage  en  Syrie  et  en 
E^^yple.    0  File   m'accorda    cette 
«iiiediiile,  disait  Volney,  comme 
(.un    gage  de   son    estime  ,    c'est 
«pour  conserver  cette  estime  qsie 
ojela  lui  renvoie.  »  A  la  fin  d'une 
des  séances  les  plus  orageuses  de 
l'asseuildée  constituante,  Volnev 
fil  la  motion  de  convoquer  les  as'- 
sembiées    primaires   électorales  , 
alin  <pi'elles  eu-sent  à  procéder  à 
une  nouvelle  nomination  de  dé- 
putes. Il  m«)tiva  cette  propositiofi 
sur  ce  que  les  membre^  d'une  au- 
tre assemblée   n'ayant  point  pris 
part  aux  premières  et  plus  vives 
discussions,  seraient  inruns  atu- 
més  les  uns  contre  les  autres,  et 
qu'il  leur  serait  ainsi  plus  facile 
16 


2'ia 


VOL 


de  calmer  les  tempêtes  qui  mena- 
çaient la  palrif  ,  et  de  rtimener  Its 
citoyens  à  dos  senliincns  d'union 
et  de  paix.  Celte  proposition,  d'a- 
bord  accueillie  avec  faveur,    l'ut 
cependant  écartée  par  l'ordre  du 
jour.  Les  orateurs  qui  la  combat- 
tirent,   rappelèrent  aux  députés 
qu'ils  s'étaient  engaj^és  par  la  ser- 
ment prêté   dans  le  jeu  de  pau- 
me à  Versailles,    à    ne  se    point 
séparer  avant  d'avoir  donné  une 
constitution  à  la  Franct-.  Après  la 
clôture  des  sessions,  Volney  ac- 
compagna M.  Pozzo  di  Borgo  en 
Corse,  avec  l'intention  d'y  exécu- 
ter quelques  grands  projets  d'a- 
mélioration  agricole.    Ses   essais 
pour  cultiver  dans  cette  île  la  can- 
ne à  sucre  ,  l'indigo  et  plusieurs 
plantes  utiles  des  tropiques,  eu- 
rent du  succès;  mais  les  troubles 
qui  survinrent  à  cette  époque  le 
forcèrent  d'abandonner  des   éla- 
blissemens  qui   auraient  contri- 
bué à  la  prospérité  du  pays.  Bo- 
naparte ,    encore    simple  oflicier 
d'artillerie  ,    apprit    à    connaître 
\olney  en  Corse  ,  et  prit  pour  lui 
une   haute   estime  ,    qui   s'accrut 
encore  lorsque  ce  général,  pen- 
dant son  expédition  d'Egypte,  eut 
reconnu  par  lui-même  combien 
l'auteur  du  voyage  en  ce  pays,  a- 
vait  été  fidèle  historien  et  habile 
observateur   ilevenu  à  Paris,  Vol- 
ney, dont  le  pati  iolisme  était  bien 
connu,  mais  dont  l.i  haine  pour 
les  excès  commis  par  de  soi-di- 
sant patriotes,  n'était  pas  nroins 
prononcée,  ne  put  échapper  aux 
persécutions  des  terroristes.  In- 
carcéré pendant  dix  mois ,   il  ne 
recouvra  sa  liberté  qu'après  le  9 
thermidor.  En  novembre  1794,  »I 
(ïit  nommé  prûie-^seui-  d'histoire 


VOL 

aux  écoles  normales, où  sescourSj 
conçus  sur  un  plan  vaste  et  philo- 
sophique, obtinrent  un  succès  gé'- 
néral.    En    i^Q^^,   il   entreprit  de 
nouveaux  vnyages ,  et  visita  le» 
Etals-Unis  d'Amérique.  L'ami  de 
Franklin  y  reçut  l'accueil  le  plus 
flatteur.   "NVa.-bington ,   le    fonda- 
teur de   h\   liberté   du   Nouveau- 
Monde,  la  {gloire  de  sa  patrie  et 
de  son  siècle,  invita  le  voyageur 
français  à  venir  le  voir  dans  la  re- 
traite, où  le  héros  américain  cul- 
tivait   paisiblement   ses  champs  . 
après  avf)ir  long  -  trmps  présidé 
aux  conseils  de  cette  république 
qu'il  avait    fondé»;   et   défendue. 
Volney  se  serait  probablement  é- 
tabli   aux  Etats -Lois;   mais  des 
nuages  s'étant  élevés  entre  ce  gou- 
vernement et  celui  de  sa  patrie, 
lacrainted'une  ruptureouverle,  le 
décidaàrepasser  en  France  au  prin- 
temps de  1798.  Après  la  révolution 
du  18  brumaire,  le  premier  con- 
sul Bonaparte  le  nomma  sénateur, 
et  l'avait  même  désigné,  dit-on, 
pour  occuper  le  second  consulat. 
Mais    une    dissidence   d'opinions 
assez  prononcée  sur  certains  prin- 
cipes de  goiivernement ,  empêcha 
cette  nomination  d'avoir  lieu.  Dans 
le  sénat .  Volney  fit  constamment 
partie  avec  les  Lunjuinais,  Caba- 
nis,  Destutt  de  Tracy,  Collaud, 
Garât,  et  quelques  autres,  de  cette 
estimable,  mais  faible  minorité, 
qui  osa,  quoique  vainement,  s'op- 
poser à  ceT[i\'ms  séiiatu.i-consuUes, 
que  le  grand  nombre  de  leurs  col- 
lègues décrétait  de  confiance.  A- 
près  la  rentrée  du  roi ,  Volney  fut 
nommé,  par  ordonnance  du  4  i"in 
i8i4>  membre  de  la  chambre  des 
pairs,  y  siégea  jusqu'à  sa  mort, 
et  fidèle  a-jx  :r.êmes  principes,  s'y 


VOL 

montra  toujours  au  rang  des  dé- 
fenseurs des  droits  nationaux. Une 
courte  nrialadie  l'enleva  à  son  pays, 
qu'il  aurait  encore  pu  long-tenaps 
servir,  et  à  ses  nonjbreux  amis, 
à  qui  sa  mémoire  sera  toujour* 
chrre.  II  mourut  à  Paris  îe  24 
avril  1820.  On  o  de  lui  les  ouvra- 
ges su i vans  :  1°  Voyage  en  Syrie 
et  en  Egypte,  fait  en  ijSS,  Paris, 
1785,  2  vol.  in-S",  et  quatrième 
édition,  1807;  2*  Considérations 
sur  la  guerre  actuelle  des  Turcs  , 
1788,  in-8".  L'auteur  y  combat 
plusieurs  opinions  du  baron  de 
Tott  et  de  Peyssonel.  Il  a  inséré 
ces  considérations  dans  la  troi- 
sième édiiion  du  voyage  en  Syrie 
m  1800.  3"  Les  Ruines  ou  Médi- 
tations sur  tes  résolutions  des  em- 
pires ,  »7î)i<  in-S",  et  troi-iéme 
édition  ,  augmentée  de  l'ouvrage 
suivant  :  4°  '«  I-'Oi  naturelle  ou 
Catéchisme  du  citoyen  français , 
1790,  in-i(j  ;  5"  Simplification  des 
langues  orientales  ou  Méthode  nou- 
t^elle  et  facile  d'apprendre  les  lan- 
gues nrnhe,  persane  et  turque,  avec 
les  caractères  européens ,  «795, 
in-8"  ;  6"  Leçons  d' histoire  pro- 
noncées à  l'école  normale,  •79f), 
in-8";  1810,  iu-8";  7"  Tableau  du 
r limai  et  du  soi  de  l' Amérique  , 
i8o5,  2  vol.  in-8",  ;ivoc  planches, 
terminé  par  un  Vocabulaire  de  la 
langue  des  Miamis;  8"  l\ apport 
fait  à  r  académie  celtique  sur  l'ou- 
vrage russe  de  M.  le  professeur 
Pallas  :  Vocabulaires  comparés 
d«s  langues  de  tonte  la  terre , 
i8o5,  in-4°,  et  dans  les  Mémoires 
de  l* académie  celtique  ,  cahiers  i 
et  5,  et  dans  le  Moniteur  i\v^  1  et 
2  brumaire  an  \(\.  L'auteur  y  fait 
voir  que  \eV  ocahiilariatolius  orhis, 
coutposé  par  ordre  de  l'iiripéra- 


VOL 


•i^Ti 


triée  Catherine  II,  ne  petit  servir 
de  Vocabulaire  universel,  l'alpha- 
bet russî!  étant  trop  incomplet 
pour  cet  usage;  et  quoique  M. 
iMasson  ,  dans  le  recueil  de  l'aca- 
démie celtique,  ait  prouvé  que 
plusieurs  des  fautes  de  ce  Voca- 
bulariapenvcut  être  attribuées  au 
professeur  Pallas  lui-même,  qui 
n'avait  pa<  une  connaissance  par- 
faite de  la  langue  russe  ,  Volney 
n'en  a  pas  moins  démontré  qu'un 
alphabet  universel  est  encore  îi 
trouver.  Il  a  engagé  l'académie 
celtique  à  s'occuper  de  cette  re- 
cherche ,  et  y  a  beaucoup  tra- 
vaillé lui-même.  Déjà,  lors  de  la 
publication  de  sa  méthode  nou- 
velle pour  apprendre  l'arabe,  le 
persan  et  le  turc,Tolnpy  avait 
proposé  pour  reujplacer  l'alpha- 
bet arabe ,  dont  on  se  sert  aussi 
pour  le  persan  et  le  turc ,  tm  nou- 
vel alphabet,  formé  de  lettres  la- 
tines, de  quatre  lettres  grecques, 
et  de  douze  nouveaux  caractères. 
Il  y  trouvait  l'avantage  d'expri- 
mer chaque  son,  ou  articulation 
simple,  par  un  caractère  unique, 
tandis  qu'il  faut  souvent  deux  ou 
trois  caractères  de  l'alphabet  usi- 
té pour  représenter  une  seule 
lettre  arabe,  q"  Supplément  â 
l'Hérodote  de  Lorclicr,  ou  Chro- 
nologie d'Hérodote,  conforme  à  son 
texte,  Paris,  1808,  2  vol.  in-H*  ; 
10°  Questions  de  statistique  d  l'u- 
sage des  voyageurs,  i8io,  in -8°; 
1 1"  Recherches  nouvelles  sur  l'his- 
toire ancienne,  i8i4- i8i5,  5  vol. 
in  -  8".  Vcdney  était  membre  de 
l'institut  national  depuis  In  fonda- 
tion, de  la  société  asiatique  de  Cal- 
cutta et  «le-i  principales  académies 
de  l'Europe.  •  ' 

VOLPATO  (Jea>),  célèbre  gra- 


v..j',  VOL 

veur  ilalicn,  né  à  Bassano  ea 
1^33,  passa  ses  premières  années 
à  tracer  des  dessins  pour  les  bro- 
deurs, et  à  les  broder  lui-même. 
Il  s'appliqua  ensuite  à  la  gravure, 
dans  laquelle  il  reçut  quelques  le- 
çons de  Bartolozzi,  qui  travaillait 
alors  pour  les  établissemens  <;al- 
cographiques  de  Remondini.  Peu 
après  le  départ  de  cet  artiste  pour 
l'Angleterre,  Volpato  alla  se  fixer 
à  Rome ,  o|i  une  société  d'ama- 
teurs avait  conçu  le  projet  de  l'ai- 
re graver  avec  magnificence  les 
peintures  de  Raphaël ,  qui  déco- 
rent le  palais  du  Vatican.  Appelé 
à  prendre  part  à  cette  vaste  entre- 
prise, il  se  fil  remarquer  parmi 
tous  ses  collègues.  O  fut  après  la 
publication  de  l'école  d'Athènes, 
que  M.  Raphaël  Morghen  vint  le 
prier  de  le  recevoir  au  nombre 
de  ses  élèves.  Volpato  prit  un  soin 
particulier  de  son  instruction,  et 
loin  d'être  jaloux  de  ses  progrès, 
il  employa  tout  son  crédit  pour  é- 
tendre  sa  renommée.  Lorsqu'il 
sentit  ne  pouvoir  plus  lui  être  uti- 
le par  ses  conseils,  il  désira  se  l'at- 
tacher par  ses  bienfaits,  et  il  lui 
accorda  la  main  de  sa  fille.  Ce 
n'est  pas  le  seid  artiste  qu'il  ait 
formé  :  Rome  lui  doit  la  plupart 
des  talons  qui  sont  sortis  de  son 
école  moderne  d'incision.  Volpa- 
to connaissait  tous  les  secrets  de 
cet  art;  son  burin  était  plutôt  ten- 
dre que  hardi ,  mais  il  traduisait 
avec  esprit  les  beautés  des  com~ 
positions  originales.  Ce  célèbre 
i«raveu;:  mourut  à  Rome  en  i8o3, 
regretté  par  tous  ceux  qui  avaient 
eu  occasion  d'apprécier  ses  ver- 
tus et  SCS  talens.  Son  portrait , 
peint  par  Kauflnian,  fut  gravé  par 
Morghen;  et  Canova  voulut  aussi 


VON 

en  consacrer  la  mémoire  par  mii 
monument  qu'il  lui  éleva  dans 
l'église  des  Saints-Apôtres,  à  Ro- 
me. 

VONCR(N.),  avocat,  chef  du 
parti  patriotique,  lorsque  les  Bra- 
bançons s'opposèrent  aux  innova- 
tions de  Joseph  II ,  parti  auquel 
on  donna  le  nom  de  F onckisies  , 
était  un  homme  distingué  par  son 
instruction,  ses  talens,  et  surtout 
son  esprit  actif  et  entreprenant. 
L'un  des  premiers  écrivains  qui 
embrassèrent  la  cause  nationale, 
lorsque  l'empereur  Joseph  II 
{voy.  ce  nom)  voulut  apporter  des 
changemens  notables  dans  le  gou- 
vernement des  Pays-Bas,  il  fut 
bientôt  signalé  aux  agens  de  l'au- 
torité, et  pour  se  soustraire  A  leur» 
]>otirsnites,  il  se  retira  en  Hollan- 
de au  commencement  de  if  88;  là. 
de  concert  avec  Vander  Noot 
{voy.  NooT,  Vander  Mersch  et 
Van  L'upen),  il  travailla  à  dispo- 
ser les  puissances  qui  protégeaient 
la  constitution  brabançonne  à  ap- 
puyer les  efforts  des  patriotes  dans 
la  révolution  qui  s'organisait  eu 
silence.  li  devint  membre  ,  puis 
président  du  comité  secret  de  Bré-  ^ 
da,  et  forma  à  Hasselt  une  autr«i 
association  également  secrète,  la- 
quelle, au  moyen  de  contributions 
volontaires,  arma  les  premiers 
soldats  du  Brabant,  qui,  sous  Van- 
der Mersch,  chassèrent  les  trou- 
pes autrichiennes.  Alors  Vonck 
rentra  dans  son  pays;  mais  la  ri- 
valité qui  s'établit  entre  lui  et 
Vander  ÎNoot  devint  funeste  à  la 
cause  commune.  Les  chefs  de  l'in- 
surrection, au  lieu  de  chercher  ;i 
détruire  cette  rivalité,  se  partagè- 
rent entre  Vonck  et  Noot.  Vander 
Mersch  et  le  ducd'Ursel  s'attache. 


vou 

renl  plus  intimement  au  premier, 
qui  pendant  quelque  temps  con- 
;*erva  la  plus  grande  influence 
dans  les  affaires  des  insurgés.  Le 
second,  secondé  de  Van  Eupen  et 
de  Schoenfeld,  parvint  bientôt  à 
enlever  à  Vonck  ?on  crédit,  en 
s'eflbrçant  de  persuader  aux  états 
des  diflérentes  provinces  que  ce 
chef  voulait  rendre  la  révolution 
démocratique.  C'est  en  effet  le  but 
que  Vonck  s'était  proposé  du  mo- 
ment où  il  avait  remarqué  que  ses 
ennemis  disposaient  à  leur  gré 
des  troupes  et  de,  l'argent  des 
étals.  La  chute  de  Vonck  entraî- 
na rapidement  celle  du  parti  pa- 
triotique. Il  mourut  en  1 792,  à  Lil- 
le, département  du  Nojd,  où  il  s'é- 
tait retiré. 

VOULLAND  (HoRi) ,  avocat, 
ex-magistrat  et  membre  de  plu- 
sieurs législatures,  naquit  j\  (j/.ès 
en  i^So.  Il  professait  la  religion 
réformée,  et  suivait,  en  qualité 
d'avocat,  le  barreau  de  Nîmes, 
lorsque  la  révolution  éclata.  Le 
tiers-état  de  la  sénéchaussée  de 
Nîmes  et  de  Beaucaire  le  nomma 
député  aux  état"  -  généraux  en 
178g.  Ami  de  Rabaut  Saint- 
Etienne  et  de  sa  famille,  il  mani* 
festa  les  mêmes  principes ,  mais 
avec  plus  d'exagération.  Rabaut 
Saint-Etienne  le  fit  nommer  mem- 
bre du  comité  des  recherches.  Il 
lit  un  grand  nombre  de  rapports, 
et  signala  Tessier,  ci-devant  ba- 
ron de  Margueritle,  comme  au- 
teur des  troubles  de  Nîmes  ;  prit 
la  défense  du  club  de  cette  ville; 
dénonça  la  ville  de  Carpentras,  où 
les  nobles  et  les  prȔtres,  soutenus 
par  la  cour  de  Kome,  font  de  Car- 
pentras un  foyer  de  contre-révo- 
lution, et  provoqua  1.»  réunion  du 


VOU 


24» 


eomtat  d'Avignon  à  la  France.  La 
session  de  l'assemblée  constituan- 
te terminée,  il  passa,  au  mois  de 
mars  1791,  au  tribunal  de  cassa- 
tion, et  fut  nommé,  en  septembre 
1 7914,  par  le  déparlement  du  Gard, 
député  à  la  convention  nationale, 
où  il  vota  la  mort  du  roi.  Succes- 
sivement secrétaire    et  président 
de  cette  asseuiblée,  membre  du 
comité    de   sûreté  -  générale  ,    et 
enfin  président  de  la*  société  des 
jacobins  ,  il  continua,  jusqu'aux 
approches  du  9  thermidor  an  2  ,  i\ 
se  montrer  tout  dévoué  au  parti 
de  la  Montagne  ;  cependant  éclai- 
ré sur  la  tyrannie  de  Robespierre, 
ou  craignant  de  devenir  lui-même 
sa  victime  ,  il  fui  un  des  premiers 
à  concourir  à  sa  chute.  Lecoinlre 
de  Versailles  ne  l'en  dénonça  pas 
moins,  le  a8  août  1794»  comme 
un  des  complices  du  tyran.  Au- 
cun   excès    notoire    n'étant   im- 
puté à  Voulland,    il   se  justifia, 
fut  acquitté  ,  et  parvint  à  obtenir, 
soit  la  même  faveur,  soit  la  même 
justice,  pour  son  oncle  le  général 
Voulland  {voy.  l'article  qui  suit). 
Dénoncé  de  nouveau  avec  ses  an- 
ciens-collègues du  comité  de  sO- 
relé-générale,  il  fut  décrété  d'ar- 
restation le  9  prairial  an  3  (  28 
mai  1795),  et  rendu  à  la  liberté 
par  suite  d'amnistie.   ftJaret ,   li- 
braire,  recueillit   Voulland   che» 
lui ,  et  lui  prodigua  pendant  deux 
ans  toutes  sortes  de  secours.   11 
mourut,  en    1802,  dans  un  état 
Yoisin  de  l'indigence. 

VOULLAND  (N.).  général  sous 
lu  république ,  oncle  du  précé- 
dent, était  (Capitaine  de  grenadiers 
à  l'époque  de  la  révolution,  dont 
il  adopta  avec  ardeur  les  princi- 
pes. Commandant  de  la  girde  r»a- 


243  WAG 

tioriale  tl'L'zc.'*  en  I/09,  il  parvînt 
rapidctnunt  <iii  gr;ide  de  général  de 
brigade  ,  que  réclama  en  sa  fa- 
veur Je  gt'méral  d'Agobert,  et  fut 
nommé,  au  mois  de  janvier  179'^, 
commandant  de  la  ville  de  Mar- 
seille; il  conserva  ce  poste  jusqu'a- 
près la  chute  de  Robespierre, 
son  protecteur.  Serres  et  Auguis, 
membres  de  la  convention  natio- 
uale,  en  mission,  l'iuculpcrent  à 


WAG 

l'occasion  de  Reynicr  de  Marseil- 
le, ultra  -  révolutionnaire,  qui, 
arrêté  par  leur  ordre,  fut  délivré 
par  des  hommes  armés.  Le  géné- 
ral Voulland  se  vit  par  suite  des- 
tituer et  mettre  en  arrestation.  Le 
conventionnel,  son  neveu  (voyez 
l'article  précédent),  prit  sa  dé- 
fense, et  le  fit  acquitter  en  i^Q^. 
Il  a  été  perdu  do  vue  depuis  cette 
époque. 


w 


>VAFl'LARD  (N.),  auteur  dra- 
matique, naquit  vers  1788.  Il 
commença  tie  très-bonne  heure  à 
briguer  Jcs  palmes  du  théâtre,  et 
s'associa  avec  quelques  auteurs , 
dont  le  nom  protégea  sa  jeune 
muse.  "Wafilard  donna  au  Vaude- 
ville ,  le  Voile  W  Angleterre,  en 
société  avec  M.  Morcau;  au  Gym- 
nase dramatique,  avec  IMM.  Pi- 
card e\  Fulgence,  Un  Jeu  de  Bour- 
se ;  il  a  encore  donné  avec  ces  der- 
niers, au  théfltre  de  l'Odéon  ,  les 
Deux  Ménages^  un  moment  d'Im- 
prudence ^  le  Voyage  à  Dieppe, 
etc.,  etc.  Ces  comédies  avaient 
fait  concevoir  des  espérances 
qu'une  mort  prématurée  a  anéan- 
ties. Wafilard  fut  ravi  aux  lettres, 
à  sa  famille  et  à  de  nombreux  a- 
ïuis,  au  commencement  de  jan- 
vier 1824. 

WAGNER  (Bernard-Henri), 
horloger-mécanicien  du  roi ,  né  à 
Paris  le  10  mai  1790,  fut  élevé 
h  l'école  centrale  de  Fontaine- 
bleau, et  termina  ses  éludes  à 
Paris,  à  l'école  polymathique, 
dirigée  par  M.  Botet.  iSesparens, 


qui  le  destinaient  au  barreau , 
voyant  son  peu  de  vocation  pour 
cet  état,  le  placèrent  dans  le  com- 
merce. Ce  fut  alors  que  se  pro- 
nonça fortement  son  goût  pour  la 
mécanique ,  et  pendant  les  trois 
années  qu'il  passa  chez  un  négo- 
ciant, il  employa  tous  ses  momens 
de  loisir  à  l'élude  de  la  physique 
et  de  la  chimie.  Il  fut  ensuite  oc- 
cupé deux  années  chez  un  horlo- 
ger célèbre  pour  la  main-d'œu- 
vre ;  et,  de  retour  dans  sa  famille, 
il  entra  dans  une  carrière  enlière- 
ment  conforme  à  ses  goûls,  et 
qui  doit  lui  procurer  une  exis- 
tence honorable.  Les  procédés 
imaginés  par  M.W^agner  pour  tail- 
ler les  roues  dentées,  et  qu'il  a 
livrés  au  public  avec  le  désinté- 
ressement le  plus  noble,  ont  puis- 
samment contribué  à  l'améliora- 
tion de  nos  filatures;  c'est  aux 
applications  qui  ont  été  faites  de 
ces  procédés ,  que  l'on  est  rede- 
vable de  la  bonne  disposition  et 
de  la  précision  des  engrenages  de 
toutes  les  machines  à  l'usage  des 
manufactures.  La  commission  des 


phares,  établie  par  M.  le  ilircctonr- 
pénéral  de»  ponts- et -chaussées, 
chargea  IM.\Va»ner,en  1816, de  la 
construction  des  machines  de  rota- 
tion appliquées  à  ces  appareils;  il 
est  parvenu  à  les  faire  tourner  ré- 
{fulièieim-nt  et  sans  secousse, quoi- 
que charj^ées  d'un  poids  énorme. 
Ces  machines  ont  déjà  été  lori- 
guem€fit  éprouvées  sur  plusieurs 
points  de  nos  côtes,  à  la  salislac- 
tion  des  marins.  Les  horloges  pu- 
bliques de  M.  Wagner  sont  belles, 
solides  et  exactes  ;  toutes  leurs 
parties  ont  encore  acquis  un  nou- 
veau degré  de  pertéclion  depuis 
la  diirniére  exposilion  des  pro- 
duits de  l'industrie  nationale  ;  le 
volume  en  est  considérablement 
réduit ,  et  les  prix  très-modérés. 
Enfin  cet  artiste,  recommaudable 
sous  tous  les  rapports,  ne  cesse 
de  prouver  à  ses  émules  que  ,  si 
le  génie  peut  bien  se  traîner  mal- 
gré SCS  fers,  il  vole  quand  il  a  su 
les  briser;  aussi  le  jury  central, 
prenant  en  considération  les  ser- 
vice» journaliers  que  M.  Wagner 
rend  ù  l'industrie  et  aux  manu- 
far-lures,  hii  a-l-il  décerné  deux 
médailles  d'argent  de  première 
classe,  l'une  en  1819,  et  la  se- 
conde en  iSaS;  et  nous  croyons 
pouvoir  assurer  qu'à  cette  der- 
nière époque,  il  eut  dans  plusieurs 
discussions  la  majorité  du  jury 
pour  la  médaille  d'or. 

WAGRAM    (  AtEXANURK   Bbr- 

TIIIER,    l'BlNCE    DE    NeIITCHATEL    ET 

de).  La  notice  suivante  est  prise 
tout  entière  dans  l'excellent  ou- 
vrage du  comte  Mathieu  Dumas, 
lieutenant  -  général ,  contempo- 
rain, frère  d'armes,  premier  et 
constant  ami  du  uiaréchal  Bcr- 
(bier.   Cet  arliclc ,  émincmmcat 


WAG 


2,7 


français  y  nous  a  paru  satisfaire 
également  à  l'intérêt  de  la  vérité 
et  à  celui  de  la  gloire  nationale , 
heureusement  inséparables  pour 
la  vie  du  plus  vieu.x  soldat  de  no- 
tre liberté.  Nous  avons  crurem- 
plir  ainsi  l'attente  de  nos  lecteurs- 
et  le  but  bien  connu  de  notre  ou- 
vrage, et  nous  allons  au-devant 
de  Paccusatiot)  de  plagiat,  en. dé- 
clarant que  nous  n'avons  inséré 
cette  notice  que  d'après  une  au- 
torisation arrachée  à  la  modestie 
de  son  auteur.  Ce  morceau  dis- 
tingué, sous  le  double  rapport  du 
style  et  de  la  fidélité  historique, 
recommanderait  i  lui  seul  l'ou- 
vrage que  le  général  comte  Du- 
mas a  consacré  ^  l'honneur  de 
nos  armes ,  et  dont  le  succès  lui  i\ 
donné  un  rang  honorable  parmi 
nos  premiers  écrivains.  L'avant- 
dernier  alinéa  ,  également  de  la 
mC-me  main,  a  été  intercalé  pour 
compléter  cette  notice  biographie 
que.  «  Le  feu  maréchal  Berlhier,- 
prince  de  Wagram,  et  ci-devanfc- 
prince  de  NeufchSlel,  fut  l'un  des 
personnages  les  plus  remarqua- 
bles qui  aient  figuré  sur  la  grande 
scène  militaire.  Il  possédait  Ics- 
qualités  les  plus  essentieliôs^. du 
général,  une  valeur  caliïWi-et  bril- 
lante ,  un  excellent  jogement , 
formé  par  l'éducation  la  plus  soi- 
gnée ,  éclairé  par  uuc  longue  ex- 
périence, et  peut  -  être  la  plus 
étendue  et  la  plus  variée  qu'un 
soldat  puisse  acquérir;  il  porta 
les  armes  pendant  un  dcmi-siè- 
clc,  fit  la  guerre  dans  les  quatre 
parties  du  monde,  ouvrit  et  ter- 
mina trente-deux  campagnes.  En 
sortant  des  écoles  ,  après  de  bon- 
nes études  mathématiques,  il  a- 
cheva  d'acquérir  sous  les  yeux  d» 


a4S 


WAG 


son  père,  nncien  inj;énicnr-j»éo- 
i:raplie,  el  l'un  des  premiers  au- 
teurs «le  la  riclie  coilicliot:  du 
àèpôi  de  la  guerre,  les  connais- 
sances néressaire;*  pour  roriiicr 
un  hou  oûicier  d'état-inajor  ;  il  se 
fit  dislini!;iier  par  rexacliliide  et 
la  [>re>tes.>e  de  ses  opérations  sur 
le  terrain  .  t:l  par  la  pureté  el  l'a- 
gréaient de  sa  inaiiière  de  dessi- 
ner. Le  l'eu  roi.  qui  <t  plaisait  aux 
travaux  de  gtographie  «t  de  to- 
pographie, cl  qui  y  portait  un 
goût  éclairé  par  «le-  connaissances 
très  éieudiics,  daigna  emidoy^r 
ce  jeune  olïicicr  à  dresser  la  belle 
carte  des  chasses,  dont  les  minu- 
tes, corrigées  de  la  niain  du  roi, 
sont  restées  comme  un  modèle 
partait,  et  qui ,  imité  depuis  dans 
tous  les  pays  de  l'Europe  ,  n'a  pas 
«té  surpassé.  iM.  le  prince  de  Lam- 
besc  attira  Berlhier  dans  son  ré- 
giment de  dragons  de  Lorraine, 
la  meilleure  école  de  cavalerie  qui 
existât  alors  en  Europ<;  ;  il  dut  à 
cette  faveur  l'avantage  si  essentiel 
pour  l'homme  de  guerre,  de  ma- 
nier avec  vigueur  et  adresse  son 
cheval  et  ses  armes.  11  lit  sa  pre- 
mière campagne  en  Amérique  , 
dans  l'état-major  de  l'armée  coni- 
ïnandée  par  le  comte  de  Kocham- 
beau,  se  fit  remarquer  au  ctnnbat 
Kaval  de  la  Chesapeak  ,  et  à  la  re- 
connaissame  de  New-York  ,  où  , 
sou»  le  feu  des  batteries  augl. lises, 
escortant  le  généial  en  chef  avec 
le  comte  Charles  de  Damas,  «pii 
eut  son  cheval  tisé  sons  lui,  et 
mêlé  avec;  un  parti  anglais,  il  tua 
de  sa  propre  main  le  dragon  qui 
s'était  le  plus  approché  du  grou- 
pe, et  fit  plusieurs  prisonniers  : 
telles  furent  ses  premières  arn^es 
dans  cette  guerre,  où  il  s'acquit, 


WAG 

par  son  activité,  sa  valeur  et  se* 
talons,  une  réputation  qu'il  a  de- 
puis jusiifiée.  Il  fil  partie  de  l'é- 
tat-major du  baron  de  Vioménil, 
dans  rexi)édition  diri;.;ée  contre 
la  Jamaïque,  el  qui  lut  suspendue 
par  la  paix  de  i^fiS,  si  :lorieuse 
p(»ui  la  Krance.  ba  navigation,  ses 
voyages  accrurent  avec  la  masse 
de  ses  rcumaiftsances  son  ardeur 
de  s'instruire.  Devenu  olficier  su- 
périeiu'  dans  le  corps  de  l'elat- 
major-général  formé  par  le  maré- 
chal de  Segnr,  ilenipli^a  le  temps 
de  la  paix  à  divers  travaux  mili- 
taires ;  il  suivit  les  ér.cdes  de  tac- 
tique, dans  lé-quelles  le  roi  Louis 
XVI,  après  divers  essais,  fit  por- 
ter ses  ordonnances  de  formation 
et  de  manœuvres  pour  les  deux 
armes  à  un  tel  j)ointde  perfection, 
et  sur  des  principes  si  solides  et 
si  simplifiés,  que  nous  sommes 
devenus  maîtres  à  notre  tour,  d'i- 
milalenrs  que  nous  étions.  Le  co- 
lonel Berlhier  visita  les  camps  du 
roi  de  Prusse,  fut  euïployé  à  ce- 
lui de  Saint-Omer,  sous  les  or- 
dres de  M.  le  prince  de  Coudé  , 
et  remplit,  en  1789,  les  fonctions 
de  chef  d'élai-major  sous  le  barou 
de  Bezeuval,  jusqu'à  la  disloca- 
tion de  l'armée  rassemblée  sous 
Paris.  Dans  les  preniiers  orages 
de  la  révolution  ,  nommé  coni- 
niandant  de  la  garde  nationale  de 
Yersailhis  ,  atlaqué  par  les  plus 
furieux  démagogues  ,  il  sut  se 
maintenir  et  donner  des  preuves 
réitérées  de  fermeté,  de  dévoue- 
ment et  de  fidélité  au  roi.  Dans 
les  tensps  désastreux  de  la  ter- 
reur, dont  le  fléau  commença  a- 
vec  la  déclaration  de  guerre,  \% 
général  Berlhier  se  rendit  à  l'ar- 
uiée;  il  y  fut  employé  comme 


WAG 

fhef  d'cta»,- major,  tl'abord  sous 
le  général  La  Fayelle ,  et  ensuite 
sous  LutkîK'r;  il  ne  quitta  plus 
les  drapeaux  iVançais,  l'asile  de 
tant  de  liraves,  le  refuge  de  l'hon- 
neur. Il  combattit  sur  tontes  les 
IVoutiércs  pendant  les  cinq  pre- 
mières campayiics;  il  fil  des  ac- 
tions brillantes,  et  fut  a>sez  heu- 
reux pour  rester  obscur  à  celte 
époque  uù  les  tabus  et  les  an- 
ciens services  étaient  des  titres  de 
proscription.  Le  général  Bona- 
parte (  et  ce  ne  tut  pas  pour  celui- 
ci  la  moindre  laveur  de  la  t'or- 
tune),  rencontrant  i  l'arfuée  d'I- 
talie, d(»at  il  [u'it  le  couimanJe- 
ment  au  mois  de  mars  179b»  le 
général  Berlhier,  en  fit  son  com- 
pagKOu  d'armes  et  le  principal 
instrument  de  ses  succès.  Pendant 
dix  -  neuf  années  remplies  par 
seize  campagnes,  presque  toutes 
doubles,  d'ete  et  d'hiver,  l'his^- 
toire  de  la  vie  du  maréchal  lier- 
thier  n'est  outre  que  celle  des 
guerres  de  Bonaparte  et  de  ses 
opérations,  dont  il  dirigea  tou- 
jours tous  les  détails  d'exécution 
dans  le  cabinet  et  sur  le  terrain  : 
constamment  occupé  de  ces  dé- 
tails immenses,  et  de  jour  en  jour 
plus  compliqués ,  son  inlatigable 
activité  semblait  délier  le  génie 
ardent  dans  la  sphère  duquel  il 
était  entraîné  ;  il  travaill.tit  avec 
tin  ordre  admirable  ,  saisissait  a- 
veo  promptitude  et  sagacité  les 
vues  générales,  les  dispositions  à 
peine  indiquées,  et  dfuinait  en- 
suite tous  les  ordres  d'exécution 
av<!c  prévoyance  ,  clarté  et  conci- 
sion. Discret ,  impénétrable  ,  mo- 
deste, il  ne  se  liiisail  janvtis  va- 
loir; il  était  exact ,  juste  et  même 
*ûv«re  pour  lout  ce  qui  toucbuii 


WAG 


249 


au  service;  mais  il  donnait  tou- 
jotirs  l'exemple  du  zèle  et  de  la 
vigilance;  il  maintenait  la  disci- 
pline avec  rigueur,  et  savait  faire 
respecter,  par  ceux  qui  lui  étaient 
subordonnés,  quels  que  fussent 
leur  rang  et  leur  grade  ,  l'autorité 
qui  lui  était  confiée.  Le  général 
lierthier  n'ayant  commandé  en 
chef  que  l'armée  de  réserve  et 
sons  les  yeux  du  premier  consul , 
son  nom  ne  retentira  peut  -  être 
pas  dans  l'histoire  comme  celui 
des  généraux  ses  émules,  qui  ont 
attaché  lnurs  noms  à  de  grands 
évcnemens ,  et  par  des  victoires 
qui  leur  sont  uniquement  et  jus- 
tement attribuées  ;  unns  il  eut  ce- 
pendant une  si  grande  part  à  ces 
mêmes  victoires  par  tout  ce  qu'il 
fit  pour  les  préparer,  par  tant  de 
faits  d'armes  qui ,  tels  que  le  pas- 
sage du  pont  de  Lodi  ,  lui  sont 
personnels  ,  que  des  litres  de  gloi- 
re si  nombreux  ne  lui  seront  pas 
conl(!stés  ;  et  sans  doute  que  si 
Napoléon  eût  écrit  ses  commen- 
taires, il  aurait  pu  dire  avec  vé- 
rité que  ,  depuis  la  bataille  de 
Montenotte  jusqu'à  la  bataille  »lc 
Léipsick. ,  il  n'est  aucun  de  ses 
succès  auquel  les  conseils  de  son 
major- général  n'aient  coopéré, 
aucune  de  ses  irréparables  fautes 
dont  la  vieille  expérience  de  son 
compagnon  d'armes  n'ait  cherché 
à  le  détourner.  Lors  de  la  pre- 
mière restauration  de  la  maison 
de  Bourbon  sur  le  trône  de  Fran- 
ce ,  dégagé  de  se»  sermens  par 
l'abdication  de  Napoléon ,  dégagé 
de  ses  devoirs  envers  le  généra- 
lissime qu'il  avait  si  fidèlement 
servi ,  et  qui  déposait  le  cornmap 
dément  des  braves  armées  fran- 
çaises, le  inuréchul  prince  de  W**- 


a5o 


WAG 


grain   resta  comme  ses  illustres 
compagnons,  Gdèle  à  la  foi,  aux 
glorieuses  aiiçles  et  aux  drapeaux 
français,  ramenés  par  la  ftirtune 
et  floltaris  entre  les  mains  de  nos 
princes.  Il  [»ré.-enta  lui-même  au 
roi  les  marériiaux  de  l'empire,  et 
reçut  avec  eux  le  lilre  de  maré- 
chal de  France  ;  il  fut  nommé  ca- 
pitaine de   la   5'  compagnie  des 
gardes-du-corps  de  S.   iM.  L'épo- 
que du  20  mars  181 5  fut  celle  de 
la  fin  de  la  longue  carrière  mili- 
taire du  prince  de  Wagram.  Re- 
tiré  à  Bamberg<  au  cïiAteau  du 
prince  de  Bavière,  sou  heau-père, 
avec  son  épouse,  la  princesse  de 
Bavière  et  ses  trois  enfans,  il  gé- 
missait  sur  les'  malheurs   de    la 
France.  L'heure  fatale  sonna  pour 
lui  au  moment  même  où  les  trou- 
pes étrangères,  qui  allaient  une 
seconde  fois  souiller  le  sol  de  sa 
patrie,  défilaient  sous  ses  yeux. 
Il  fut  foudroyé  par  une  attaque 
d'apoplexie,  (jui  le  précipita   du 
balcon  de  son  appartement  dans 
la  rue.  Nous  n'avons  dû  considé- 
rer ici  le  prince  de  Wagram  que 
sous  les  raj)porls  de  l'homme  pu- 
blic ;  nous  trouverions  aussi  dans 
sa  vie  privée  des  sujets  de  justes 
«loges    et    de    nouveaux    motifs 
d'honorer  sa  mémoire.  Qu'il  soit 
permis  <^  l'amitié,  à  la  fraternité 
d'armes,  de  rappeler  les  qualités 
sociales  qui  lui  concilièrent  l'es- 
time de  tous  les  gens  de  bien  ; 
Tardent  amour  de  son  pays ,  qui , 
dans  toutes  les  circonstances,  fut 
le  premier  mobile  de  ses  actions  ; 
son  humanité,  que  le  spectacle 
des   scènes   sanglantes   qu'il   eut 
sans  cesse  sons  les  yeux,  ne  fit 
que  rendre  plus  active  et  plus  tou- 
chante; son  noble  désiutéressc- 


WAL 

ment,  sa  modération  dans  la  hau- 
te fortune,  ses  douces  aifections 
pour  sa  famille,  et  sa  constante 
fidélité  à  ses  amis.  ■> 

WALPOLE      (HOBACE,     COMTE 

d'Oxford),  linérateur  anglais,  na- 
quit à  Londres,  ef  élail  le  troisiè- 
me fils  du  célèbre   ministre  Ro- 
bert ArValpolo,  «qui  contribua  fë 
plus  à  introduire  la  vénalil«  dans 
le  sein  du  parlement  britaimique»» 
Horace  AValptde,  dont  l'éducation 
fut  trèj-soignée,  montra    dès  sa 
jeunesse  un  goût  passionné  pour 
les  lettres;  mais  il  dut,  par  égard 
pour  sa  famille,  suivre  du  moin» 
momentanément  la  carrière  des 
affaires    publiques.     Successive- 
ment inspecteur  des  importations 
et  exportations,  huissier  de  l'échi- 
quier et  membre  du  parlement, 
il  se  retira,  du  moment  qu'il  put 
suivre  ses  goûts,  dans  une  de  ses 
terres  à  Strawberry-Hill ,    où    il 
composa  différens  ouvrages,  dont 
nous  donnerons  les  titres  plus  bas. 
Une  seule  fois  comme  membre  du 
parlement,  il  s'était  fait  remar- 
quer; c'est  lorsqu'il  avait  pris,  en 
1742»  la  parole  pour  la  défense  de 
son  père.   Depuis  il  s'est  borné  à 
voler  en  faveur  du  ministère,  jus- 
qii'en  1761,  que  se  termina  sa  car- 
rière politique,  et  à  se  prononcer 
ensuite  contre  les  principes  que 
consacrait  la  révolution  française. 
Eu  179'»  il  devint  comte  d'Oxford" 
par  la  mort  de  son  neveu,  décédé 
sans  enfans  mâles.  On  doit  à  Ho- 
race "Walpole  :  i"  Catalogue  d'au~ 
teurs  célèbres;  2°  Doutes  histori- 
ques concernant  Richard  lll ,  roi 
d' Angleterre,  et  sur  les  crimes  qu» 
lui  sont  imputés  ;  5°  Anecdotes  re- 
latives à  la  peinture;  4°  le  Château 
d'Otrante,  roman  dans  le  genre 


WAS 

d'Anne  Rudcliffe  {voy.  ce  nom);  5* 
Essai  sur  le  jardinage  moderne;  6° 
La  Mère  mystérieuse,  tragédie;  ']" 
enfin  des  Opuscules  poétiques.  Il 
faut  joindre  à  celle  énumcration 
>a  Correspondance  a\iiC  M"*  Dudef- 
lant,  a  qui  n'ayant  jamais  rien  aimé 
dans  sa  vie,  s'avisa  d'éprouver 
pourlui  un  sentiment  passionné.  » 
II  mourut  en  1797. 

AVASHINGTÔN  (  Georges  ) , 
général,  et  Tun  des  fondateurs  de 
Ja  république  des  États-Unis,  na- 
quit dans  le  comté  de  Fairfax,  en 
Virginie,  le  22  février  1752.  Il  se 
distingua  dans  la  guerre  que  sou- 
tint la  France  contre  l'Angleterre 
dans  le  Canada ,  et  repoussa  mê- 
me les  Français,  qui  avaient  fait 
quelques  ravages  sur  les  frontiè- 
res de  la  Virginie;  mais  bientôt  il 
fut  forcé  de  se  replier  devant  des 
lorces  supérieures.  Peu  après ,  le 
général  Braddock,  qui  comman- 
dait les  Anglais,  ayant  été  défait 
et  blessé  mortellement  devant  le 
fort  Duqucsne,  Washington,  qui 
lui  servait  d'aide-de-camp,  effec- 
tua avec  un  grand  talent,  et  un 
succès  digne  de  son  talent,  une  re- 
traite périlleuse,  qui  lui  fit  rejoin- 
dre le  colonel  Dunbar,  chef  d'un 
autre  corps  d'armée.  Aprèa  la 
guCrre,  il  se  retira  avec  le  grad» 
de  major.  Il  se  livrait  paisible- 
ment à  des  travaux  agricoles  dans 
son  habitation  de  Rlont-Vernon  , 
quand  lout-à-coup  les  colonies  de 
l'Angleterre  forment  la  résolution 
de  se  soustraire  à  l'avarice  et  au 
despotis^ne  de  la  mère-pntrie. 
Dans  chacune  des  provinces  de 
l'Amérique  septentrionale  s'orga- 
nisent des  assemblées  dont  l'auto- 
rilé  se  substitue  à  cttlle  des  délé- 
gués du  roi  de  Ut  Grandu-fircta» 


WAS 


i5i 


gne;  des  hommes  sages  et  voués 
pour  la  plupart  à  l'élude  des  lois 
et  de  la  politique,  des  citoyens  phi- 
losophes, à  la  lête  desquels  il  faut 
principalement  placer  un  impri- 
meur (Franklin),  un  charpentier 
(Thomas-Payne),  un  maîlre  d'éco- 
le (  Adams) ,  etenfin  un  laboureur 
(Washington),  saisissent  celte  oc- 
casion d'appliquer  des  principes, 
dont  ils  attendent  le  bonheiu"  de 
leur  })ays;  ils  provoquent  un  con- 
grès national,  composé  de  dépu- 
tés des  diverses  provinces.  Ce 
congrès,  après  une  déclaration  des 
droits  particuliers  de  l'Amérique, 
et  des  droits  généraux  des  nations, 
choisit  Washington  pour  généra- 
lissime, et  c'est  ce  choix  qui  va 
fixer  en  Amérique  la  victoire  et 
la  liberté.  A  peine  Washinglon 
est-il  arrivé  ù  l'armée  des  insur- 
gés ,  qui  alors  bloquaient  Boston  , 
qu'il  se  rend  maître  de  celte  ville, 
après  avoir  réduit  les  Anglais  à 
une  honteuse  capitulation  :  ses  o- 
pérations  militaires  sont  puissam- 
ment secondées,  d'un  côté  par  le 
général  Lée,  qui  fait  une  brillan- 
te défense  à  Charles-Tovvn  ;  de 
l'autre  par  le  colonel  Arnold,  qui, 
avec  une  poignée  d'homnies,  s'ou- 
vre la  route  du  Canada ,  et  effec- 
lue  ensuite  avec  bonheur  une  re-. 
traite  devenue  nécessaire;  par  La 
Fayette  enfin,  qui,  A  peine  Sgé  df. 
vingt  ans,  s'est  arraché  à  son  pays 
et  aux  douceurs  d'un  hyménée 
récent,  pour  conquérir  fi  une  na- 
tion étrangère  le  plus  beau  trésor 
des  peuples  et  de  l'homme;  gé- 
néreux sacrifice,  dont  l'amitié  de 
Washington  et  la  reconnaissance 
éternelle  des  Américains  l'ont  dé- 
dommagé ,  et  le  dédommagent 
encore  de  nos  jours  (i825),  après 


■2Ô2  >VAS 

l'iifoir  appelé  dans  leur  sein,  par 
les  honiR'(ii&  qu'ils  lui  rendent,  et 
an  lé  l'étant  sous  le  titre  heureux 
iVHôte  de  la  nation  :  tout  cepen- 
dant ne  l'ut  pas  succès  dans  cette 
guerre.  "Washington  l'avait  com- 
mencée sans  argent,  sans  muni- 
tions, sans  magasins;  il  avait  à  di- 
riger une  nation  patiente  et  coii- 
rageuse,  mais  trop  peu  susceptible 
de  cet  enthousiasme  qui  enfante 
les  succès  prompts  et  décisifs,  et 
obstiuée  d'ailleurs  à  repousser  la 
discipline  et  l'instruction  militai- 
re. Il  perd,  en  1777.  la  bataille 
de  Brandiwine,  cl  Philadelphie  est 
conquise    par  les   Anglais.    Cette 
défaite  sert  de  prétexte  à  «es  en- 
nemis pour  le  décrier;  il  est  pres- 
que délaissé  dans  son   camp;   1« 
congrès  même  lui  témoigne  de  la 
froideur.    Mais   bientôt,   grâce  à 
l'ardente  amitié  et  au  zèle  infati- 
gable de  La  Fayette,  la  vertu  du 
grand  homme  triomphe,    on  lui 
rend  justice  ;  on  le  déclare  le  pre- 
mier libérateur  de  la  nation.   En 
1 778,  il  prend  sa  revanche  à  Mont- 
Moulh  sur  les  Anglais,  et  ce  suc- 
cès  est  bientôt  suivi   d'un   autre 
plus  brillaat  encore.  Aidé  du  7000 
Français  ,  à  la  tête  desquels  outre 
La  Fayette,  on  distingue  Charles 
de  Lameth,  Mathieu  Dumas,  et 
cet  Alexandre  Berthier  qui  dès- 
lors  préludait  à  une  grande  gloire 
et  à  de  hautes  destinées,  Washing- 
ton, par  les  manœuvres  à  la  fois 
les  plus  sages  et  les  plus  brillan- 
tes, force  le  général  Cornwallis  à 
s'enfermer  dans  les  murs  d'Yorck- 
Town,  et  à  signer  bientôt   après 
une  capitulation  humiliante.  Dès 
ce  moment,  les  Anglais  parurent 
renoncer  à  la  possession  de  l'Amé- 
rique septenlrionaîe  ;  des  armées 


WAS 

en  présence  gardèrent  pendant  18 
mois  une  trêve  tacite  qui  annon- 
çait   une   paix    prochaine.    Cette 
paix  fut  enfin  signée  le  20  janvier 
17^5,   et  l'Angleterre   reconnut, 
par  un  traité,  l'indépendance  de» 
États-Unis.  Washington  en  fut  élu 
le   président,  et  ne  songea  plus 
qu'à  établir  une  constitution  sage, 
et  propre  à  affermir  la  puissance 
qu'il  avait  fondée;   il  savait  qu'il 
ne  sulljt  p  is  de  conquérir  la  liber- 
té, mais  qu'il  faut  la  savoir  con- 
server, et  que  des  lois  sages  peu- 
vent seules  en  assurer  la   durée. 
Après  avoir  donné  tous  ses  soins  à 
cet  important  objet,  il  sentit  qu'il 
était  temps  de  sanctionner  la  ré- 
publique par  sa  retiaite.  Sembla- 
ble à  ces  anciens  Romains  qui,  au 
sortir  du  champ  de  bataille  ou  des 
plus  hautes  dignités  de  l'état,  re- 
tournaient modestement  aux  tra- 
vaux de  l'agriculture,   il  résolut 
d'aller  finir  ses  jours  en  cultivant 
de  ses  mains  les  champs  de  ses  pè- 
res.  On  ne  peut  lire  sans  atten- 
drissement les  adieux  qu'il  adres- 
sa, avant  de  partir,  à  ses  ollicier» 
assemblés  :   »  Ne  croyez  pas  que 
))je  renonce  à  la  gloire,  leur  di- 
»  sait-il;  je  m'en  propose  une  très- 
»  élevée;  c'est  celle  d'être  un  bon 
ifccultivateur  dans  un  pays  qui  doit 
«tout  tenir   de   l'agriculture.    Si 
«nous  nous  sommes  donné  réci- 
nproquement  de  bons  exemples  à 
»la  guerre,  je  veux  vous  en  donner 
«encore,  ou  en  recevoir  de  vous 
"dans  des  travaux  paisibles.  Nous 
»nous   visiterons,    mes  amis,  et 
«c'est  dans  nos  champs  bien  cnlti- 
»vés,  au  sein  de  nos  heureuses  la- 
»  milles  et  de  nos  joyeux  domes- 
»  tiques,  que  nous  nous  rappele- 
»rons  tant  de  dangers,  tant  de  ira- 


WAS 

•  vaux  et  lant  de  bienfaits  de  la 
«Providence.  Je  prends  congé  de 
»  vous,  le  cœur  plein  de  l'aH'^iClioM 
»  la  plus  pure,  et  pénétré  de  la  plus 
"ardente  reconnaissance.  Fuissent 
nies  jours  qui  vont  suivre  être 
«aussi  heureux  pour  vous  que 
1)  ceux  qui  les  ont  précédés  ont  été 
"glorieux!  Je  ne  puis  aller  à  cha- 
»cun  de  vous  lui  dire  adieu  ;  mais 
«je  Serai  reconnaissant  si  chacun 
)>de  vous  vient  me  serrer  ia  muin.» 
Tous  vinrent  en  silence  et  avec  é- 
motion,  serrer  la  maiu  de  leur  gé- 
néral, qui  peu  après  s'embarqua 
pour  Annapolis,  où  le  congrès  lui 
donna  des  marques  nouvelles  d'un 
al  lâchement  bien  mérité,  et  d'une 
aUujiration  aussi  viv»";  que  légiti- 
me. Une  lettre  que  AVashinglon  é- 
crivit  de  sa  retraite,  exprime  en 
termes  tonchaus  et  philosophi- 
ques le  bonheur  qui  suivit  ses 
nobles  travaux  :  «  Simple  parli- 
wculier  sur  les  bords  du  l*olow- 
iinack,  ù  l'ombre  de  u»a  vigne  et 
j  de  mon  figuier,  loin  du  tumulte 
«des  camps  et  de  l'embarras  des 
«affaires  publiques,  je  m'aban- 
>  donne  ù  ces  douces  jouissances 
»qui  fuient  ou  l'ambitieux  qui  as- 

•  pire  aux  emplois,  ou  le  minis- 
»trft  qui  nuit  et  jour  s'occupe  du 

•  soin  de  rendre  son  pays  heureux, 
»el  peut-être  de  ruiner  les  états 
n voisins,  connne  si  ce  globe  ne 

•  pouvait  suffire  à  tous  les  hom- 
«mes.  Le  courtisan  qui  attend  du 
«sourire  gracieux  de  son  souve- 
nrain,  l'arrêt  de  sa  destinée,  ne 
■  peut  avoir  l'idée  Je  mon  br)n- 
nhcur.  Non-seulement  je  me  suis 
«éloigné  d'un  ihéûlre  rempli  d'a- 
«gitations,  mais  dans  le  recueille- 
«ment,  je  savoure  les  douceurs  de 
»Ia  vio  privée.  Sans  porter  envie 


»à  p."rsonnc,  jo  me  lais.«prai  tran- 
«quillement  entraîner  par  le  flcu- 
»  ve  de  la  vie,  jusqu'au  monteiil 
«où  j'irai  m'endormir  avec  mc«; 
«ancêtres.»  Mais  si  Washington' 
n'avait  pas  besoin  de  l'antorité 
suprême,  sa  patrie  avait  besoin 
d'un  tel  chef;  on  l'arracha  donc 
de  sa  retraite  pour  lui  confier  de 
nouveau  le  pouvoir  dictatorial.  La 
révolution  française  était  alors 
dans  toute  sa  force  (1792).  Il  s'é- 
tait formé  aux  États-Unis  un  par- 
ti, qui,  appuyé  par  Genêt,  envoyé 
de  France  à  Philadelphie,  tendait, 
dit-on,  à  diviser  la  république,  de 
Washington  en  deux  états  diffé- 
rens ,  et  ù  l'entraîner  dans  une 
guerre  contre  l'Angleterre.  Was- 
hington, malgré  les  attroupemens 
excités  à  la  lin  de  1793,  et  plu- 
sieurs écrits  dirigés  contre  sa  per- 
sonne en  1794?  malgré  les  enne- 
mis qu'il  rencontra  même  au  sein 
du  congrès,  et  quelques  différens 
qui  s'élevèrent  entre  les  JÉtats- 
L'nis  et  l'Angleterre,  vint  pour- 
tant à  bout,  par  sa  sagesse  et  sa 
fermeté,  de  maintenir  Li  paix  au 
dedans  et  au  dehors.  En  mars 
1797,  il  quitta  la  présidence  pour 
aller  habiter  en  Virginie,  au  milieu 
des  champ»  où  il  était  rtè.  Tous 
les  partis  se  réunirent  alors  pour 
le  louer  et  le  regretter,  et  il  con- 
serva, à  la  salisf-iclion  générale,, 
le  commjïndement  suprême  de» 
armées  américaines.  Avant  de 
quitter  Philadt-lphie,  il  déposa  lef^ 
fonds  nécessaires  pour  la  fonda- 
tion d'une  université  dan»  la  ville 
neuve,  élevée  sur  les  rives  du  Po- 
towmack.  Il  mourut  d'une  esqui- 
nancie,  le  samedi  14  décembu; 
1799,  H  onze  heures  du  soir.  Cuei- 
ricr,  citoyen  et  sage,  Washingtou 


254 


WAS 


offrit  la  réunion  de  tout  ce  qui 
failles  {ijianilâ  hommes;  à  peine 
déconvre-t-on  une  tache  dan-  sa 
vie,  une  imperfection  dans  ^on 
caractère.  L'atnour  de  la  gloire 
lut  chez  hien  fle^  hmtjme.'"  illus- 
tres le  principe  des  actions  bril- 
lantes et  d'un  dévouement  géné- 
reux; chez  Washington,  ce  fut  l'a- 
mour de  la  pairie,  toujours  pur 
et  désintéressé.  La  gloire  n'était 
pas  nécessaire  à  celte  Cnne  noble, 
qui  trouvait  sa  récompense  dans 
la  pratique  même  du  bien  et  du 
beau,  et  dans  les  services  rendus  à 
son  pays.  Ce  n'était  pas  la  profon- 
deur des  vues  et  la  hardie>se  de 
l'esprit  qui  dominaient  en  lui; 
mais  peut-être  que  son  grand 
sens,  sa  tranquillité  d'esprit  inal- 
térable, sa  patience,  son  âme  su- 
périeure à  la  bonne  comme  à  la 
mauvaise  fortune,  furent  plus  uti- 
les à  la  cause  qu'il  soutint.  C'est 
par  là  qu'il  a  fondé  cette  républi- 
que dont  la  puissance  et  la  gloire 
vont  croissant  chaque  jour,  et  qui, 
pure  encore  de  tous  les  excès  d'u- 
ne civilisation  trop  avancée,  re- 
produit les  beaux  jours  de  Rome 
e^t  d'Athènes.  Grand  à  la  tête  de 
la  république,  comme  général  et 
comme  administrateur,  Washing- 
ton ne  le  fut  pas  moins  dans  sa  vie 
privée,  où  il  offrit  aux  siècles  mo- 
dernes un  Cincinnatus  nouveau. 
Il  eût  été  grand  partout  o\\  la  for- 
tune l'eût  placé,  parce  qu'il  était 
de  sa  nature  d'être  grand.  Tout  le 
inonde  connaît  le  legs  que  lui  fit 
Franklin  dans  son  testament  :  «Je 
oiègue  au  général  Geoiges  Was- 
»hington,  mon  ami  et  l'ami  de 
li  l'humanité,  le  bâion  de  potnmier 
"Sauvage  dont  je  me  sers  pour 
«me  promener.  Si  ce  bâton  était 


WAl 

»  un  sceptre,  il  lui  conviendrait  de 
nmême.  »  A  sa  mort,  le  gouver- 
nement français  a  porté  <on  deuil, 
et  a  fait  prononcer  son  éloge  pu- 
blic par  i\I.  de  Fontanes. 

WASOWICZ  (N.  ),  colonel, 
entra  au  service  dans  l'armée  du 
duché  de  Varsovie  et  passa  ,  en 
1810,  comme  lieutenant  dans  le 
régiment  des  ehevau-légers  polo- 
nais de  la  garde  impériale.  Ap- 
pelé, en  1819,,  à  l'état-major  gé- 
néral, il  suivit  l'empereur  Napo- 
léon dans  le  cours  de  toute  cette 
campagne.  Il  le  suivit,  lui  troi- 
sième, dans  le  voyage  que  fit  ce 
prince  do  Wilna  à  Paris;  enfin, 
pendant  les  campagnes  de  j8i5 
et  1814 •.  il  le  suivit  encore,  et 
parvint  successivement  jusqu'au 
grade  de  colonel.  Il  ne  quitta 
Fontainebleau  qu'après  le  départ 
de  l'empereur  pour  l'île  d'Elbe. 
Placé,  en  1814»  comme  colonel 
à  la  suite  de  l'armée  du  royaume 
de  Pologne  ,  il  y  servit  encoro 
quelques  années .  et  vil  mainte- 
nant dans  la  retraite  (iS^ô). 

WATRIN  (iN.),  général  de  di- 
vision, membrede  la  légion-d'hon- 
neur, naquit  ;"i  Beau  vais,  départe- 
ment de  l'Oise,  vers  1772.  L'un 
«les  [iremiers,  il  vola  à  la  défense 
de  la  patrie,  dès  que  le  territoire 
françai-.,  au  commencement  de  la 
révolution,  fut  menacé  par  la  coa- 
lition étrangère.  Il  entra  au  ser- 
vice comme  simple  soldat,  et  é- 
lait  parvenu,  en  l'an  2,  par  son 
zèle,  son  courage  et  ses  talens, 
au  grade  d'adjudant-général,  dans 
lequel  il  reçut  de  l'emploi  à  l'ar- 
mée des  côtes  de  l'Océan.  E;î'v«'' 
bientôt  au  grade  de  général  de 
brigade,  il  fut  employé  par  le  gé- 
néral Hoche,  qui  lui  avait  voné 


WAT 

une  estime  particulière.  Le  g«'3né- 
ral  Walrin,  coiDpiis  ;>u  nuinbro 
des  pénéranx  qui  devjiienl  com- 
mander dans  l'expôdilioii  d'Irlan- 
de ,  rt-çut  une  aiilrc  destination  , 
cl  l'armée  de  Sainbrc-et-iMeuse 
!e  compla  parmi  ses  chefs.  Il  se 
signala  particulièrement  à  la  jour- 
née de  Neuvied,  au  combat  de 
Neuhoff,  à  la  suite  duquel  sa  di- 
vision poursuivit  les  Autricliiens 
jusque  sous  les  murs  dfe  Mayence. 
Il  leur  enleva  leur  bagage,  trois 
pièces  de  canon,  le  colonel  Barco 
et  tous  les  ofliciers  de  ce  corps, 
avec  8o'.)  prisonniers.  Walriu  fit 
partie  de  l'expédiliori  de  Saint- 
Domingue  sous  le  général  Hédou- 
ville,  et  mérita  d'être  menlionué 
honorablement  pour  l'avoir  habi- 
lement secondé  dans  ses  opéra- 
tions. De  retour  en  France,  il  fut 
envoyé,  en  l'an  7,  à  l'armée  d'I- 
talie. C'est  là  qu'il  reçut  le  grade 
du  général  de  division.  Le  8  tVuc- 
lidor,  avec  i,5oo  braves,  i!  battit 
complètement  un  corps  de  (>  à 
7,000  honmics.  Pendant  douze 
heures,  ù  la  bataille  de  Novi,  il 
tint  en  échec  l'armée  russe,  qui 
voulait  couper  la  roule  de  Novi  à 
Gavi.  Le  2  brumaire  an  8,  quatre 
mille  Français  sous  ses  ordres  et 
ceux  du  général  Dombrowsky , 
quoique  sans  artillerie,  sans  ca- 
valerie, attaquèrent  audacieuse- 
ment  dans  leur  can>p  environ  six 
mille  Aulrichiims  et  douze  cents 
cavaliers,  soutenus  par  sept  piè- 
ces de  canon  ,  et  les  mirent  dans 
•me  pleine  déroute.  Le  a5  frimaire 
an  8,  le  général  Wutrin  bal  le  gé- 
nérnl  Kray  à  Vallegio ,  attaqué 
Ivrée,  que  six  mille  homines  dé- 
fendent, et  y  entre  de  vive  force 
«l'un  côté  pendant  que  d'un  autre 
le  générjl,  depuis  maréchal  Lan- 


AVAT 


25& 


nés,  s'empare  d'une  partie  de  la 
ville,  où  tout  ce  qui  n'a  j;as  été 
tué  est  forcé  de  se  rendre.  Au 
combat  de  Cbin^ella  ,  aux  batail- 
les de  Montebello  et  de  Marengo  , 
le  général  Walrih  fit  des  prodiges 
de  valeur.  Il  y  perdit  son  jeune 
frère,  son  ami,  son  uriique  espoir 
et  celui  de  ^n  famille.  Le  courage 
de  ce  brave  général  fut  noble- 
ment récompensé  par  un  sabre 
d'honneur  ;  il  portait  ces  mots 
d'un  côté  :  Bataille  de  Maueivco  , 

COMMANOtE  PAH  LE  PtlEMIEn  CONSUL 

BoNAPABTE,  et  de  l'autre  :  f)oN?cé 

PAR  LE  GOUVER^r.MEÎiT  DE  LA  RÉPC- 
BLIQCE   FKADf  AISE    AU  GÉNÉHAL  >Va- 

TRiN.  La  paix  signée  ,  il  reçut  le 
command».Mnenl  d'une  division  de 
l'armée  d'ohservation  du  iMidi. 
Sept  vaisseaux  de  ligne  ,  trois  fré- 
galrs  et  plusieurs  autres  bàlimens 
anglais  sous  les  ordres  de  l'amiral 
Waren  ,  s'approchent  de  Castel- 
lamarc,  et  débarquent  trois  mille 
hommes.  Le  généial  Watrin  se 
précipita  sur  eux,  leur  tua  ou 
blessa  douze  cents  hommes,  leux' 
fit  deux  cents  prisonniers  ,  et 
força  le  reste  à  se  rembarquer 
précipitamment.  Sur  sa  demande, 
il  fait  partie  de  la  nouvelle  expé- 
dition de  Saint-Domingue;  il  ar- 
rive, débarque,  combat,  et  ne 
succombe  que  sous  les  ravages  de 
l'épidémie.  Le  général  Watrin  , 
honoré  d'un  sabre  à  Marengo  , 
était  légionnaire  de  droit.  Sa  mort 
fut  une  cause  de  deuil  pour  lou-< 
SCS  compagnons  d'armes  et  pour 
ses  concitoyens,  qui  tou»  se  plai- 
saient A  rendre  hommage  à  ses 
vertus  civiques. 

>VATRIN  (Jean  -  Baptiste)  . 
capitaine  au  i"  régiment  de  dra- 
gons, membre  de  la  légion-d'hrtn* 
Dcur,  naquit  à  Mclz,  duparleai«nt 


256  V.  A  r 

(le  la  Mo«rllo.  Admis  !e  i5  février 
i7j)2,  comme  chasseur  à  cheval 
dans  le  5°  r«Jgiii)enl,  il  était  capi- 
taine (le  dra{î;on9  le  i5  venlôsc  au 
8.  Nous  empruntons  à  M.  Laval- 
léc  le  récit  des  principale»  actions 
<le  c^  brave  olïicier.  «  A   l'affaire 
de  Neuvich,  dil-il,  après  que  l'on 
se  lut  emparé  des  redoutes,  le  ca- 
pitaine Watrin  chargea  un  batail- 
lon ennemi.  A  l'instant  où  il  cher- 
chait à  s'emparer  d'un  drapeau  , 
il  reçut  la  décharge  entière  d'un 
peloton.  Il  eut  ses  habits  criblés 
de  balles;  renversé  sans  connais- 
sance sur  le  cou  de  son  cheval , 
sans  perdre  cependant  ses  étriers, 
il  fut  emporté  par  lui  ;  mais  bien- 
tôt après,  ayant  repris  l'usage  de 
ses  sens,  il  retourne  sur  l'ennemi, 
et  fait  mettre  bas  les  armes  à  cin- 
quante  hommes  ,   que  ,   dans  sa 
première  charge,  il  avait  séparés 
de  leur  bataillon.  Il  n'avait  avec 
lui  que  onze  hussards,  qui  furent 
tous  ou  tués  ou  blessés  dans  cette 
action.  A  l'affaire  de  Zurich,  com- 
mandant deux  compagnies  d'in- 
fanterie, et  défendant  le  passage 
de  l'Albis ,  par  ordre  du   général 
Drouc^t,  il  remplit  celte  mission 
avec   succès,  empêcha   l'ennemi 
de  pénétrer,  et  le  força,  après  un 
combat  opiniâtre,  à   la   retraite. 
Ses  dispositions  et  le  courage  de 
sa  troupe  furent  également  admi- 
rés ,   et  elles  contribuèrent  à    la 
victoire.   A  IMonlebello  ,  à  la  tc'îte 
de  son  escadron  ,  s'éîant  porté  en 
avant  et  à  la  droite  de  la  division, 
par  ordre  du  général  Dclmas,  il 
empêcha  l'ennemi  de  le  déborder, 
et  eut  à  combattre  six  cents  hus- 
sards. Dans  cette  circonstance  im- 
portante par  son  succès  à  la  ma- 
yœuvre  de  la  division,  il  leeut  la 


"WAT 

charge  de  toute  la  ligne  ennemie  , 
et  maintenant  son  escadron  der- 
rière un  ravin  qui  longeait  l'en- 
trée d'un  défde,  il  empêcha  l'en- 
nemi de  le  franchir  et  par  le  feu 
du  pistolet  et  par  la  pointe  au 
corps.  On  mit  tant  d  acharnement 
de  part  et  d'antre  dans  l'attaque 
et  (lans  la  défense,  que  l'on  se 
jetait  réciproquement  le»  pisto- 
lets à  la  tête.  Enûn  Walrin  et  ses 
bra  vescoujpa  gnous  lriom|diércnt, 
l'ennensi  fut  obligé  de  faire  re- 
traite après  avoir  essuyé  une  per- 
te considérable.  Watrin  eut  l'hon- 
neur d'être  cité  dans  les  rapports 
odiciels  des  généraux  Delinas  et 
Bauujont.  »  Nommé  membre  de 
la  légion-d'honneur  par  décret  du 
a6  frimaire  an  la,  il  mourut  le 
i"  brumaire  an  il\. 

WATTIER  SAINT-ALPHON- 
SE (hE  COMTE  Pierre),  lieutenant- 
général,  grand-oflicier  de  lu  lé- 
gion-d'honneur, etc. ,  né  à  Laon  , 
département  de  l'Aisne  ,  le  4  ***■?- 
tembre  «770,  fit  de  bonnes  études 
au  collège  de  cette  ville  ,  et  dès  le 
moi»  de  septembre  1792,  au  mo- 
ment où  la  patrie  était  menacée, 
entra  an  service  dans  la  cavalerie. 
11  se  distingua  bientôt  par  ses  ta- 
lens  et  sa  bravoure,  et  devint  snc- 
cessivement  chef  d'escadron,  aide- 
de  -  ciunp  du  général  Lasalle  et 
colonel;  il  fit  en  cette  dernière 
qualité  la  campagne  de  i8o5.  Au 
passage  du  Lech  ,  avec  deux  cents 
drag'iiis,  il  mit  en  fuite  un  corps 
ennemi  qui  déièndait  le  pont  ;  il 
fut  moins  heureux  au  combat  de 
Diernstein  ,  où  il  combattit  avec 
la  même  valeur,  et  fut  fait  pii- 
sonnier.  Sa  conduite  avait  fixé  sur 
lui  les  regards  de  l'emperear  Na- 
poléou,  qui  le  fil  échanger,  et  le 


WEL 

nomma  son  écu^er.  La  nouvelles 
preuves  de  valeur  qu'il  donna  à  la 
iiataille  d'Austerlilz  lui  niérilé- 
rt'ut  le  grade  de  général  de  bri- 
gade. Dans  la  campa^gue  de  i8o(), 
au  combat  de  SclileiU,  il  fif  une 
iliarge  de  cavalerie  qui  fut  citée 
tomme  un  des  beaux  laits  d'armes 
<les  guerres  de  l'époque.  Il  re^'ut, 
le  14  mai  1807,  le  litre  de  com- 
mandant de  la  légion-d'honneur, 
et  en  1808,  il  l'ut  envoyé  eu  Es- 
l>agne,  où  il  tint  une  couduile  bril- 
Jnute  aux  journées  de  Burgo.s,  de 
Fuenlès-Onoro,  de  Lerin,  d'Alca- 
niï,  etc.  Ele\  é  au  grade  de  général 
de  division,  le  H  août  1811  ,  et 
rappelé  en  France  à  la  même  épo- 
que, il  passa  en  Piussie ,  et  se  si- 
gnala aux  affaires  nombreuses 
qui  eurent  lieu  dans  celte  mal- 
lieureuse  expédition.  Il  échappa 
à  ses  désa«ilies,  et  ne  posa  les  ar- 
mes qu'après  la  capitulation  de 
Paris  ,  eu  18  i4-  Ayant  donné  son 
adhésion  à  l'abdicatitui  de  l'em- 
pereur, il  reçut  la  croix  de  Saiut- 
Louis  le  iç)  juillet  i8i4.  Pendant 
les  cent  jours,  en  i8i5,  i!  l'ut 
chargé  par  Napoléon  du  comman- 
dement de  la  5°  division  de  cava- 
lerie de  l'arnjée  du  Nord.  Les  ré- 
Millalï-  de  la  bataille  de  Waterloo 
Tobligèrent  de  suivre  l'armée  au- 
delà  de  la  Loire.  Lors  du  licen- 
ciement,  il  l'ut  mis  à  la  demi- 
solde.  Placé  ensuite  sur  les  cadres 
des  lieutenans-généraux  en  dis- 
ponibilité, il  se  trouve  depuis  plu- 
sieurs années  inspecteur-général 
de  la  gendarmerie  royaledeFrance. 
WELLESLEY  (  Richard  Col- 
ley, MARQiis  he),  pair  d'Angle- 
terre, ambassadeur,  ministre-d'é- 
tat, fils  aîné  de  lord  Gérard  Col- 
ley, comte  de  Morniugton,  des- 

T.   XX. 


WEL  2fi7 

cendant  d'une  ancienne  famille 
d'Irlande,  dont  l'origine  remonte, 
dit-on  ,  à  Ferdinand  ,  roi  de  Cas- 
lille,  est  né  le  3 1  juin  1760.  Dès 
l'âge  de  quatorze  ans ,  il  se  for- 
mait à  la  discussion  parlemen- 
taire dans  un  simulacre  de  cham- 
bre de  commerce  établi  par  les 
écoliers  au  célèbre  collège  d'Eton, 
où  il  avait  commencé  ses  études, 
qu'il  termina  ensuite  à  Oxl'ord.  Le 
22  mai  I  784  >  il  perdit  son  père  , 
succéda  à  sa  fort(me  et  à  ses  di- 
gnités, et  fut  nommé  bientôt  après 
nombre  du  conseil-[)rivé  d'Irlan- 
de, puis  membre  du  parlement 
pour  Windsor.  C'est  à  cette  épo- 
(|ue  qu'il  mérita  les  bonnes  grâces 
du  roi,  et  fut  admis  d,ins  la  so- 
ciété privée  de  la  famille  royale. 
Lord  Welleslcy  ne  tarda  pas  à  se 
faire  remarquer  par  sa  haine  con- 
tre la  France,  devenue  républi- 
caine. Cette  conduite  lui  attira 
toutes  les  faveurs  de  la  cour;  il 
devint  successivement  lord  de  la 
trésorerie,  commissaire  pour  les 
all'aires  de  l'Inde,  et  gouverneur- 
général  des  possessions  anglaises 
dans  ce  pays.  Les  Français  étaient 
alors  maîtres  de  l'Egypte  ;  la  crain- 
te que  le  voisinage  de  l'Inde  ne 
les  déterminât  à  former  des  liaisons 
aveo  Tipoo-Sacb  (voy.  ce  nom), 
lui  fit  prendre  la  précaution  de 
leur  fermer,  par  une  escadre,  le 
détroit  de  B.-tb-el-Mandeb.  Il  dé- 
pêcha ensuite  le  général  ilarris 
avec  l'ordre  d'attaquer  Ijeringa- 
patnam.  Cette  capitale,  vivement 
pressée,  se  défondit  avec  vigueur; 
mais  enfin  elle  fut  pii^e  «l'assaut  « 
et  la  mort  du  sultan  mil  tout  \h 
Maïssour  au  pouvoir  des  Anglais. 
Dans  l'enthousiasme  (|u'excitu  cet- 
te victoire  en  Angleterre  ,  lor  J 
'7 


258 


\m:l 


"Wellcslcy  fut  créé  inarquh»  d'Ir- 
lande, reput  les  remercîinens  des 
deux  chambres,  et  fut  autorisé 
par  le  roi  à  ajouter  h  ses  armes 
celles  que  portait  l'étendard  du 
monarque  indien.  Une  nouvelle 
V  guerre   éclata   bientôt   entre   les 

Mahratles  et  les  Anglais;  le  mar- 
quis de  Wellesley  leva  une  armée 
de  cinquante-cinq  raille  hommes; 
conquit  en  trois  mois  tous  les  pays 
situés  entre  le  Djoumna  et  le  Gan- 
ge, et  força  Scindiah  et  le  rajah 
de  Berar  à  faire  la  paix.  Ses  vues 
se  portèrent  même  alors  sur  l'E- 
gypte, et  malgré  ses  vastes  pro- 
jets sur  l'Inde,  il  avait  détaché , 
en  1801,  un  corps  d'armée  pour 
aider  à  conquérir  cette  contrée. 
Lord  Wellesley  avait  besoin  de 
repos  ;  il  demanda  son  rappel,  et 
fut  remplacé,  en  juillet  1807,  par 
lord  Cornwallis,  qui  mourut  trois 
^  mois  après  son  arrivée.  Tant  d'heu- 
reux résultais  purent  flatter  l'or- 
gueil anglais;  mais  loin  d'alléger  les 
charges  publiques  ,  ils  augmentè- 
rent la  dette  de  douze  millions 
stèrlings  ,  dont  sept  millions  dé- 
pensés en  frais  pour  terminer  des 
entreprises  gigantesques  (jue  l'is- 
sue a  pu  seule  justifier.  L'Inde 
doit  néanmoins  au  marquis  de 
Wellesley  quelques  établissemens 
utiles.  II  a  fondé  à  Calcutta  un 
collège,  et  formé  plusieurs  socié- 
tés de  savans  pour  l'agriculture 
et  l'histoire  naturelle.  De  retour 
en  Angleterre,  il  fut  l'objet  de 
plaintes  amères  pour  ses  manières 
hautaines,  son  faste  oriental,  son 
despotisme  et  ses  dilapidations  ; 
ces  plaintes,  plusieurs  fois  répé- 
tées dans  la  chambre  des  com- 
munes ,  n'eurent  cependant  au- 
cune suite,  ha  i^oy,  le  roi  lui 


V>EL 

ayant  fait  proposer  le  niini«lérc 
des  af&ires  étrangères,  il  le  refu- 
sa ;  il  accepta,  en  1809,  l'ambas- 
sade d'Espagne,  dont  la  position 
était  alors  très-critique,  et  il  y 
montra  beaucoup  d'habileté.  A  la 
fin  de  la  même  atjnée,  il  consentit 
à  remplacer  M.  Canning  aux  affai- 
res étrangère?,  et  s'attacha  sur- 
tout à  friire  triompher  la  cause  es- 
pagnole, qu'il  sentait  liée  à  celle  de 
l'Angleterre.  Après  les  succès  de 
l'armée  anglaisée,  commandée  par 
lord  Wellington  à  Talaveyra  ,  en 
18  JO,  lord  Liverpool  proposa  de 
lui  voter  des  remercîmens  ,  ainsi 
qu'à  son  armée  ;  le  marquis  de 
AVeliesley  parla  avec  réserve  des 
exploits  de  son  frère,  et  avec  ad- 
miration de  ceux  de  l'armée.  Quel- 
ques différens  ayant  éclaté  dans  le 
ministère,  en  1812,  au  sujet  de 
la  guerre  d'Espagne,  après  l'as- 
sassinat de  il.  Perccval  {voy.  ce 
nom) ,  il  fut  chargé  par  le  prince- 
régent  de  concilier  les  parties  ,  et 
n'ayant  pu  y  parvenir,  il  donna  sa 
démission  de  ministre.  Parti^in 
des  concessions  politiques  que  ré~ 
clamait  constamment  l'IrJande.  il 
les  sollicita  pour  elle  avec  cha- 
leur le  ai  avril.  Un  discours  qu'il 
fit  sur  le  même  objet,  le  i"  juil- 
let suivant,  produisit  une  grande 
sensation  sans  aucun  résultat.  De- 
puis ce  moment,  on  le  vit  pres- 
que toujours  dans  les  rangs  de 
l'opposition  ;  ainsi ,  par  suite  d'un 
discours  du  prince-régent,  il  pas- 
sait en  revue  les  opérations  de  la 
guerre  d'Espagne,  et  prouvait  que 
le  système  du  ministère  «  avait  été 
timide  sans  prudence,  et  sordide 
sans  économie.  »  Le  22  avril  i8i(), 
il  proposa  un  système  d'écono- 
mie, applicable  à  toutes  les  bran- 


VfEL 

rliesck  l'administration, et  parlicii- 
Jiérement  ^  rélabli<seraent  mili- 
taire. En  février  1817.  à  l'occa- 
sion d'une  loi  (le  circonstance  pro- 
posée contre  les  méconlens  que 
l'on  disait  exister  dans  la  Grande- 
Bretagne  ,  il  observa  avec  beau- 
coup de  sagesse  qu'avant  de  pro- 
mulguer une  pareille  loi,  il  fallait 
démontrer  bien  clairement  l'iu- 
siilFisance  de  la  législation  ordi- 
naire ;  il  protesta  ensuite  avec  é- 
nergie  contre  lu  suspension  de  Vnc- 
tfAVhabea.scorpus.  LordWellesley, 
dans  les  fonctions  éminenles  qu'il 
a  remplies,  a  donné  la  mesure  de 
soij  habileté,  de  ses  t;dens  et  de 
la  profondeur  de  ses  vues;  mais 
ou  peut  s'étonner,  après  la  con- 
duite qu'on  lui  reproche  d'avoir 
tenue  dans  l'Inde  ,  de  le  voir,  à  la 
tête  du  partie  de  l'opposition  ,  ré- 
clamer l'émancipation  de  l'Irlan- 
de et  l'exécution  des  lois  protec- 
trices des  libertés  de  son  pays.  Il 
avait  épousé,  en  1794»  une  Fran- 
çaise nommée  Rolland  ,  morte 
sans  enfans,  en  )8iC.  On  a  publié 
plusieurs  écrits  sous  son  nojn  sur 
les  alTaireH  de  l'Inde. 

WELLESLEY  (  Williams  )  , 
frère  du  précédent,  membre  du 
parlement  pour  Queeu's  County, 
eu  Irlande  ,  gouverneur  de  ce 
comté,  et  inioistre  du  départe- 
ment de  la  Monnaie,  est  né  le  20 
mai  1763.  II  prit,  en  1778,  le 
surnom  de  Pote^  de  sir  AVilliams 
Pôle,  son  cousin  ,  qui  lui  laissa  , 
cette  nnnée,  toute  sa  fortune.  M. 
Wellesley-Pole  devint  ensuite  se- 
crétaire-d'étal en  Irlande.  Il  se  fit 
remarquer  dans  ses  fonctions  par 
sa  sévérité  à  l'égard  des  catholi- 
ques, et  notamment  par  la  circu- 
laire qu'il  adressa,  eu  1811,  aux 


WEL 


ar><) 


principaux  magistrats  :  «  Pour  n - 
quérir  l'emprisonnement  de  tou- 
tes personnes  qui  se  trouveraient 
compj'ises  dans  la  formation  des 
assemblées  que  les  catholiques 
voulaient  établir  à  Dublin,  pour 
la  conduite  de  leurs  affaires.  » 
Cette  mesure  causa  en  Angleterre 
beaucoup  d'alarmes;  le  comte  de* 
Moira  demanda  même  aux  minis- 
tres si  M.  Poie  avait  agi  en  vcriu 
de  leurs  instructions,  et  sur  la  ré- 
ponse négative,  des  copies  de  la 
circulaire  furent  mises  sur  le  bu- 
reau. Par  suite  rappelé  d'Irlnnde, 
il  reprit  sa  place  à  la  chambre  des 
commîmes,  et  s'expliquaut  sur  sa 
conduite ,  le  5  mars  ,  il  répondit  à 
ime  motion  de  M.  Pousomby,que 
le  lord  lieutenant  et  le  procureur- 
général  avaient  eu  connaissance 
de  sa  lettre  avant  son  émission. 
En  1814  »  à  l'occasion  des  E-^pa- 
guols  arrêtés  à  Gibraltar,  puis  li- 
vrés à  leur  gouvernement,  M. 
"Wellesley  dit  qu'il  adoptait  à  leur 
égard  les  principes  de  ftl.  With- 
bread  {voy.  ce  nom),  et  ajouta 
<•  que  sou  frère,  l'ambassadeur  i\ 
Madrid  ,  avait  employé  tontes  les 
remontrances  pour  engager  le 
gouvernement  espagnol  ù  aban- 
donner son  système  qu'aucun  des 
Wellesley  n'était  capable  d'ap- 
prouver. »  Il  est  encore  aujour- 
d'hui (1825)  membre  de  la  cham- 
bre des  communes  d'Angleterre  et 
minisire-d'élaf. 

WELLESLEY  (  sin  Fïenui  ) , 
frère  des  précédentî ,  conseiller- 
privé  et  grand'crolx  de  l'ordre  du 
Bain,  né  le  20  juin  1775,  entra 
de  boime  heure  dans  la  carrière 
diplomatique,  qu'il  a  constam- 
ment suivie.  Il  accompagna  lord 
Malmesbury  à  Lille,  en  1797,  et 


aGo 


WEL 


^>as>iii  ensuiie  dans  l'Inde, en  qua- 
lité de  secrétaire  du  marquis  de 
Wellesley,  son  Irére,  Nommé,  eu 
1801  ,     lieutenant  -  gouverneur 
d'Aoude,  il  en  revint,  en  i8o5, 
pour  remplir  en  Angleterre  le  pos- 
te de  lord  de  la  trésorerie;  il  passa 
peu  de  temps  après  aux  fonctioni 
de  secrétaire  du  trésor,  et  les  ré- 
sig;na  bientôt  pour  exercer  en  Es- 
pagne celles  d'ambassadeur.  On  a 
prétendu  que  le  décret  rendu  par 
Je  roi  d'Espagne  en  octobre  1814» 
contre  l'introduction  des   cotons 
anglais,  était  une  vengeance  du 
reins  qu'avait  fait  cet  ambassa- 
deur de  fournir  au  gouvernement 
espagnol  un  subside  considérable. 
Les  mesures  qni  furent  alors  adop- 
tées en  Espagne,  et  dont  sir  Wel- 
lesley assure  avoir  clierché  à  pré- 
venir l'exécution,  ayant  rendu, 
comme  l'ont  dit  ses  partisans,  sa 
position   extrêmement   désagréa- 
ble, il  demanda  et  obtint  la  per- 
mission de  quitter  Madrid,  et  re- 
vint en  Angleterre  en   i8i5.  De 
nouveaux  motifs  le  portèrent  bien- 
tôt à  retourner  au  poste  qu'il  ve- 
nait de  quitter,  et  il  n'a  cessé  de 
l'occuper  qu'au  moment  où  une 
monarchie  constitutionnelle  com- 
mençait à  régir  l'Espagne  ;  ce  qui 
parut  accréditer  l'opinion  peu  fa- 
vorable que  les  Espagnols  avaient 
conçue  de  ce  ministre  :   ils  pré- 
tendaient que  l'influence  dont  sir 
"NVellesley  jouissait  auprès  de  leur 
souverain  ,   n'avait  pas   toujours 
été  exercée  d'une  manière  avan- 
tageuse pour  les  intérêts  politi- 
ques du  pays. 

WELLINGTON  (Arthcr-Wed- 
TESLEY,  DUC  DE  ) ,  frère  des  précé- 
dens  (  voyez  AVellesley  )  ,  né  à 
Dungan-Caslle,  le  1"  m«i  1769, 


WEL 

fut  élevé  au  collège  d'Eton,  en- 
voyé ensuite  en  France  à  l'école 
militaire  d'Angers,  et  enfra  fort 
jeune  au  service.  Le  marquis  de 
Wellesley,son  frère, lui  ayant  ache- 
té la  lieutenance-colonelle  du  55* 
régiment,  il  accompagna  l'année 
suivante  (1794)»  lord  Àloira  ù  Os- 
tende,  et  commanda  une  brigade 
dans  la  retraite  de  Hollande,  sous 
le  duc  d'Yorck.  Eu  1796,  embar- 
qué comme  colonel  pour  les  Indes- 
Occidentales  ,  il  ne  put  remplir  sa 
mission  ,  ayant  reçu  l'ordre,  pen- 
dant  que   la  flotte   était  retenue 
dans  le   port   par   une   tempête, 
d'aller  faire  des  recrues  en  Irlan- 
de. L'année  suivante,  il  était  avec 
son  frère  dans  l'Inde,  et  combat- 
tit à  la  bataille  de  Mallavelli,  où 
Tipoo-Saëb  fut  vaincu;  il  contri- 
bua ensuite  à  la  prise  de  Seriuga- 
patnam ,  et  en  fut  nommé  gou- 
verneur. Après  avoir  éloigné,  sui- 
vant l'ordre  qu'il  en  avait  reçu, 
la  famille  du  sultan  des  lieux  de 
sa  puissance,  il  revint  dans  la  ca- 
pitale du  Maïssour,  dont  il  était  en- 
core gouverneur  au  moment  où 
Hondiah-Waugh,  aventurier  in- 
dien ,    fit  une  incursion    sur   les 
terres  de  la  compagnie.    Chargé 
d'arrêter  la  marciie  de  ce  parti- 
san, il  parvint  à  disperser  toute 
sa  troupe  et  à  !e  luer  lui-même, 
après  un  combat  sanglant.  Ce  suc- 
cès le  fit  nommer  major-général. 
La  guerre  ayant  éclaté  ensuite  en- 
tre les  Mahrattes,  à  l'occasion  de 
l'ambition   de  quelques  -  uns   de 
leurs  chefs,  et  les  Anglais  ayant 
pris  le  parti  du  l'aishwa,  chef  des 
Wahraltes  occidentaux,  on  mit  à 
la  disposition  du  major -général 
Arthur  un  corps  de  cavalerie  pour 
se  porter  à  son  secours.  Après  une^ 


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XV  EL 

marche  longue  et  pénible,  il  at- 
teignit les  troupes  reunies  de  Scin- 
diah  et  du  Rajah  de  Berar,  qui  ve- 
naient de  se  réconcilier  avec  Hol- 
kar,  et  les  vainquit  tous  trois  près 
du  village  foilifié  d'Assye ,  qui 
donna  son  nom  à  la  bataille;  aus- 
sitôt, sans  donner  à  ses  ennemis 
le  temps  de  se  reconniûire,  et  sans 
écouter  leurs  propositions  de  paix, 
il  se  mit  à  la  poursuite  des  Mah- 
rattcs,  détruisit  la  cavalerie  de 
Scindiah,  défit  l'infanterie  de  Be- 
rar  dans  les  plaines  d'Argomme  , 
se  rendit  maître  de  la  forteresse  de 
Gaivilphar,  et  in)posa  aux  deux 
chefs  les  condition?  les  plus  rigou- 
reuses. L'audace  et  l'activité  que 
ce  général  déploya  dans  cette  oc- 
casion contrastent  étrangement 
avec  la  lenteur  et  la  circonspec- 
tion qu'il  montra  dans  des  cir- 
constances autrement  importan- 
tes, et  qui  pouvaient  lui  devenir 
si  fatales,  si  la  fortune  ne  l'eût 
puissamment  secondé;  la  victoire 
d'Asëyeeutde  tels  résullnts,  qu'un 
monument  fut  élevé  à  Calcutta 
pour  en  perpétuer  le  souvenir  ;  le 
vainqueur  recul  les  remercîmens 
du  parlement  d'Angleterre,  et  fut 
nommé  chevalier  de  l'ordre  du 
Bain.  De  retour  en  Angleterre,  en 
i8o5,  il  eut  le  commandoujent 
d'une  brigade  dans  l'armée  du  gé- 
néral Cathcart,  destinée  à  agir  sur 
le  continent,  mais  que  la  victoire 
des  Français  à  Austerlilz  obligea 
de  se  rembarquer.  H  remplaça  à 
celte  époque  le  marquis  de  Corn- 
wallis  en  qualité  de  colonel  du  ^8" 
régiment,  dont  il  avait  été  lieu- 
tenant-colonel pendant  treize  ans. 
En  1806,  il  fut  élu  député  deNew- 

{lorldansTiledeAVight  à  la  cham- 
ire  dus  commuoes;  et  épousa  dans 


^EL 


261 


la  m*Mne  année  miss  Pakenham  , 
sœur  du  comte  de  Longford.  Nom- 
mé, en  1807,  premier  secrétaire 
de  l'Irlande,  il  quitta  ce  poste  a- 
vaut  d'en  avoir  exercé  les  fonc- 
tions, pour  commander  la  réser- 
ve envoyée  en  Danemarck,  sous 
le  général  Cathcart  ;  contribua 
puis^amment  au  succès  de  l'af- 
faire de  Kinge,  et  fut  ensuite  char- 
gé ,  pour  son  pays,  de  la  capitu- 
lation de  Copenliague.  On  se  rap- 
[lelle  l'impression  que  fit  en  Eu- 
rope, à  cette  époque,  cette  grande 
iniquité  politique  ;  elle  se  termina 
par  des  remercîmens  unaniuies 
votés  à  l'armée  par  les  deux  cham- 
bres, et  adressés  personuelleme;it 
par  l'orateur  des  communes  au 
général  Wellesley,  lorsqu'il  y  re- 
parut à  son  retour.  Elevé ,  en 
1808,  au  grade  de  lieutenant-gé- 
néral, il  fut  chargé  de  l'expédition 
de  Forlngal;  il  débarqua  à  l'eni- 
bouchure  du  IMondego,  se  réunit 
au  général  Spenceir,  qui  lui  ame- 
nait 5,000  hommes  de  renfort,  et 
se  dirigea  sur  Lisbonne.  Le  i8 
août,  l'armée  anglaise  rencontra 
l'avanl-iiîarde  du  général  Junot, 
et  engagea  un  combat  sanglant, 
où  elle  eut  quelque  avantage;  les 
Français  prirent  leur  revanche  le 
21  ,  troi«  jours  après;  sir  Arthur 
Wellesley,  qui  jusquc-li  avait  di- 
rigé les  opérations,  contrarié  dans 
quelques-unes  dts  mesures  qu'il 
avait  conseillées,  et  que  le  com- 
mandant en  chef  n'avait  pas  sui- 
vies, remit  ses  pouvoirs  a  sir  Hew 
Dalrymple,  qui  négocia  avec  Jii- 
not  la  convention  de  Cintra,  sous 
la  condition  que  les  Français  éva- 
cueraient le  Portugal  et  repasse- 
raient en  France  avec  armes  et 
bagages.  Celle   cuuvcDlion  ,  ([hI 


'2G'i 


AVEL 


fut  iinprouvoe  en  Aiiglctcrre ,  y 
tlovint  la  iiialiiire  d'un  procès  in- 
tenté au  géiiéral  Dilryinple,  dans 
lequel  sir  Arlluir  Wclleslcy  fut  en- 
tendu, (e  qui  le  retint  quelque 
temps  éloij^né  de  l'armée;  eniin 
il  repartit  avec  le  titre  de  vicomte 
de  Wellin^^ion  ,  et  le  commande- 
tnent  en  chef  de  l'armée  anglo- 
portugaise.  11  débarqua  à  Lisbon- 
Jie  le  2'2  avril  1809,  marcha  vers 
le  Douero,  attaqua  à  Oporto  le 
maréchal  Soult  avec  des  forces 
.•î-upérieurcs,  et  l'obligea  d'aban- 
doiiner  le  Portugal.  Revenant  aus- 
sitôt sur  .ses  pas  ,  il  rentra  en  Es- 
jîagne ,  et  alla  occuper  la  position 
de  Talavcyra  de  la  lleyna ,  où  il 
soutint  pendant  deux  jours,  sans 
être  débusqué,  les  eflbrts  des  trou- 
pes françaises.  Ce  succès  négatif 
fut  regardé  en  Angleterre  comme 
une  victoire  conijdète;  le  général 
"Wellington  y  devint  l'objet  de 
l'enthousiasme  général  ;  les  deux 
chambres  lui  volèrent  des  remer- 
cîinens  et  une  annuité  de  deux 
mille  livres  sîerling^.et  le  roi  lui 
accorda  la  pairie  avec  le  titre  de 
lord  vicomte  AVellington  de  Tala- 
veyra.  Les  maréchaux  Soult  et 
Ney  reparurent  bientôt,  et  pas- 
sant rapidement  de  Salamanque 
en  Estramadure,  ils  forcèrent  le 
général  anglais  de  traverser  le 
Tage  sur  le  pont  de  l'Arzobis- 
po  5  qui  était  sa  seule  ressour- 
ce ,  comme  il  l'avoua  lui-mê- 
me, et  de  rentrer  ainsi  en  Por- 
tugal; il  donna  de  cette  retraite 
forcée  plusieurs  motifs  qu'il  ne 
nous  appartient  pas  d'apprécier. 
Il  profila  du  repos  qu'on  lui  laissa 
pendant  quelques  mois  pour  pré- 
parer la  défense  du  Portugal;  tous 
ses  cirorls  se  bornèrent  à  prendre 


WEL 

une  forte  position  sur  la  Coa,  k 
être  témoin  dos  sièges  dû  Ciudad- 
Rodrigo  et  d'Alnu';ida,  entre- 
pris par  Masséna,  et  à  voir  tom- 
ber la  première  de  ces  places  au 
pouvoir  du  maréchal.  Celui-ci 
voulut  profiler  de  ce  succès  pour 
emporter  le  poste  formidable  de 
Busaco,  que  lord  Wellington  oc- 
cupait encore  ;  mais  ce  ne  futqu'a- 
près  plusieurs  tentatives  inutiles 
qu'il  parvint  à  tourner  sa  position 
et  à  le  forcer  à  la  retraite;  le  gé- 
néral anglais  alla  en  toute  hâte  se 
rcnfermerdans  les  lignesqii'il  avait 
fait  construire,  avec  des  précau- 
tions infinies  et  le  plus  grand  se- 
cret, à  Ïorrès-Védras,  appât  fu- 
neste contre  lequel  la  valeur  fran- 
çaise, sans  calculer  le  danger,  alla 
presque  toujours  se  briser  en  vains 
efforts.  Masséna,  ix  la  vue  de  ces 
immenses  retranchemens,  deman- 
da des  renforts,  et  après  les  avoir 
attendus  six  mois  iimtilement,  il 
quitta  les  lignes  devant  lesquelles 
il  était  resté  forcément  inaclif,  et 
rentra  en  Espagne,  retraite  habile 
qui  procura  à  lord  Wellington  le 
titre  de  marquis  deXorrès-Védras. 
Ainsi  son  gouvernement  le  ré- 
compensait, non  pas  pour  avoir 
remporté  des  victoires,  mais  pour 
avoir  évité  des  défaites.  Quelque 
temps  après  ,  voulant  s'illustrer 
par  des  succès  positifs,  il  alla  blo- 
quer la  ville  d'Aiméida;  le  prince 
d'EssIing  accourut  pour  la  dé- 
fendre, livra  bataille  à  l'ennemi, 
et  le  mit  dans  le  plus  grand  dan- 
ger ,  lord  Wellington  ayant  Al- 
méida  à  dos  et  s'élant  laissé  accu- 
ler à  la  Cca.  Deux  jours  après,  la 
garnison  se  fit  jour  à  travers  l'ar- 
mée anglaise,  après  avoir  fait  sau- 
ter les  ouvrages  de  la  place.  Ceci 


WEL 

s'était  passé  au  mois  de  mai  1811; 
'es  6  et  9  juin,  le  général  Wel- 
lington voulut  regagner  h  Badajoa 
ce  qu'il  avait  manqué  à  Alméida; 
mais  il  fut  repoussé  avec  une 
perle  considérable  dans  les  deux 
assauts  qu'il  fil  donner  i"!  cette  vil- 
le. En  septembre,  il  passa  le  Tage 
pour  prendre  ses  cautonnemens 
d'hiver,  prépara  l'attaque  de  Ciu- 
dad-Rodrigo,  et  tomba  sur  cette 
place  ù  l'iujproviste  ;  Il  l'emporta 
d'assaut  à  la  suite  de  onze  jours 
de  tranchée,  le  11  février  1812. 
Après  ce  succès,  il  fut  créé  par  la 
régence  grand  d'Espagne  de  pre- 
unère  classe  ,  et  nommé  comte 
d'Anglcicrre  par  le  prince-régent, 
qui  lui  lit  aocorder  en  outre,  par 
les  deux  chambres,  une  nouvelle 
pension  de  deux  mille  livres  ater- 
lings.  Le  comte  d'Angleterre  vou- 
lant justifier  sur-le-champ  ces  fa- 
veurs, reprit  l'attaque  de  Badajoz 
avec  toutes  ses  forces,  et  s'en  em- 
para après  avoir  perdu  beaucoup 
de  monde.  Maître  alors  de  la  cam- 
pagne, il  repassa  le  Tagc,  et  en- 
tra en  Ca.stilie  avec  une  artnée 
imposante.  Cependant  le  maréchal 
Marmunt,  ayant  été  rejoint  par  le 
général  Uonml,  se  crut  asst;z  fort 
pour  et)  mesurer  avec  les  Anglais, 
et  commença  rne  suite  de  ma- 
uoeuvres  qui  inquiétèrent  leur 
général,  et  l'cnjpêchèrent  d'a- 
gir. Celte  conduite  donnant  plus 
de  confiance  au  maréchal,  il  n'at- 
tendit pas  les  renforts  des  ar- 
mées du  centre  et  du  Nord,  et 
passa  sur  la  gauche  de  la  Tormès. 
Lord  Wellington  prit  une  position 
favorable  pour  l'observer,  et  au 
moment  où  le  flanc  gauche  de 
l'armée  française  manœuvraitpour 
envelopper  »oq  aile  droite,  il  al- 


WEL 


a63 


taqua  celte  armée  du  côté  où  elle 
se  trouvait  afl'aiblie ,  la  renversa 
tout  entière,  cl  remporta  la  vic- 
toire de  Salamanque.  Le  combat 
ne  cessa  qu'à  la  nuit.  Le  lende- 
main, 25  juillet,  il  se  mit  à  la 
poursuite  des  Français;  mais  fai- 
sant tout  i\  coup  volte-face,  il  re- 
passa le  Douero ,  marcha  sur  Ma- 
drid, comme  Impatient  de  jouir 
des  acclamations  de  la  capitale,  et 
y  fit  une  entrée  triomphante.  De 
nouveaux  remercîmens  lui  furent 
décernés,  on  lui  conféra  de  nou- 
veaux titres ,  et  la  chambre  des 
communes  vota  une  somme  de 
cent  mille  livres  sterlings  pour  lui 
former  un  établissement.  La  su- 
périorité morale  que  lord  Wel- 
lington avait  voulu  donner  au 
parti  du  roi  Ferdinand ,  en  parais- 
sant en  vainqueur  à  Madrid,  dé- 
viât presque  nulle  par  le  défaut 
de  moyens  pour  l'appuyer.  Le 
maréchal  Soult  avait  quitté  Cadix 
et  l'Andalousie,  et  marchait  con- 
tre lui;  le  général  Souhani,  qui 
remplaçait  le  maréchal  Marmont, 
s'avançait  sur  Burgos.  Lord  Wel- 
lington, voulant  se  faire  un  point 
d'appui  contre  ces  forces  réunies, 
essa3'a  d'attaquer  Je  vieux  chAteau 
de  celle  ville  ;  mais  il  échoua 
complètement  ;  le  général  Dubre- 
ton  ,  qui  le  commandait,  le  força 
de  s'éloigner.  Cette  imprudente 
entreprise  fut  blâmée  par  ses  par- 
tisans mêmes.  Cependant  quatre 
artnées  françaises,  dont  il  n'avait 
pas  su  calculer  la  marche,  ve- 
naient sur  lui,  et  l'atteignirent 
au-delà  de  la  Tormès  ;  sa  position 
était  critique  au  dernier  point;  ce 
furent  les  généraux  français  qui 
l'en  tirèrent  ;  un  repos  de  qua- 
rante Iieures  qu'ils  furent  forcés 


26.f 


WEL 


rl'accortlcr  à  leurs  urm»';cs,  donna 
le  t«;iTips;iii  génénil  anj^lai*  de  s'é- 
chapper tt  d'opérer  sa  retraite  s.'ins 
aucuneperle;  ce  résultat  inaltendii 
fournit  une  nouvelle  occasion  de 
lui  prodiguer  de  nouvelles  récom- 
penses. Le  prince-régent,  délivré 
à  cette  époque  des  restrictions  de 
la  régence  ,  usa  de  son  pouvoir 
pour  créer  lord  Wellington  mar- 
quis du  royaume-uni,  et  le  parle- 
ment lui  vola  encore  une  gratifi- 
cation de  cent  mille  livres  ster- 
ling ;  il  avait  été  créé  en  Portugal 
comte  de  Vimieira  et  marquis  de 
Torrès-Védras.  Lord  Wellington , 
pour  opérer  l'évacuation  totale  de 
Ja  Péninsule,  se  rendit  à  Cadix 
en  janvier  18 13,  cl  communiqua 
en  personne  avec  la  régence  de 
cette  ville.  Le  résultat  de  cette 
démarche  fut  qu'on  plaça  sous 
son  commandement  immédiat  les 
armées  espagnoles  mises  sur  un 
meilleur  pied,  et  que  la  totalité 
de  ses  forces  s'éleva  à  80,000 
hommes.  Pour  l'exécution  de  ses 
projets,  il  fallait  tromper  l'armée 
française,  qui  occupait  une  forte 
position  derrière  le  Douero.  Il  si- 
mula une  attaque  de  front  avec 
deux  divisions ,  tandis  que  son 
année  passait  le  fleuve  quelques 
lieues  au-dessous,  et  tournait  ain- 
si la  position  des  Français,  qui  se 
replièrent  sur  Burgos,  et  de  lu  sur 
Vittoria.  A  la  lauie  que  fit  le  ma- 
réchal Jourdan  de  prendre  posi- 
tion dans  le  bassin  de  Vittoria, 
sans  être  en  état  d'attendre  l'en- 
nemi ,  il  ajouta  celle  de  s'affaiblir 
encore  en  détachant  la  division 
Maucnne  pour  escorter  un  con- 
voi. Le  résultat  de  ces  mesures 
fut  la  perte  du  poste  important 
d'ArlauzoQ  ot  de  la  bataille  de  \it- 


WEL 

toria,  qui  eut  lieu  le  24  mai  i8i3i 
et  dans  laquelle  les  Français,  cé- 
dant à  la  nécessité,  abandonnè- 
rent leurs  positions,  un  nombre 
considérable  de  canons,  chariots, 
munitions,  bagages,  etc.  Le  grade 
de  feld-maréchal  ,  une  lettre  du 
prince -régent,  des  remercîmens 
votés  par  le  parlement,  el  le  don 
de  la  terre  de  Sotlo  di  Roma,  que 
lui  firent  les  cortès  d'Espagne, 
furent  la  récompense  de  cet  avan- 
tage signalé.  Lord  Wellington  fit 
aussitôt  commencer  les  sièges  de 
Pampelune  el  de  Saint-Sébastien, 
el  repoussa  le  maréchal  Soult,  (|ui 
s'avançait  au  secours  de  ces  deux 
places;  mais  bientôt  il  retomba 
dans  ses  anciennes  hésitations,  et 
ne  se  détermina  h  passer  la  Bidas- 
soa  qu'au  mois  d'octobre  suivant. 
Ce  retard,  que  rien  ne  peut  jus- 
tifier, donna  le  temps  au  maré- 
chal Soult  de  réorganiser  une  ar- 
mée alîaiblie,  et  de  forlifier  les 
places  importantis  pour  les  met- 
tre à  l'abri  d'un  coup  de  main;  et 
lorsque  le  général  anglais  se  fut 
décidé  à  marcher  en  avant,  ce  fut 
avec  une  lenteur  qui  semblait  an- 
noncer la  crainte  de  rencontrer 
l'ennemi.  Enfin  les  deux  armées 
se  trouvèrent  en  présence  le  27 
février  1814  »  près  d'Orthès  ;  les 
Français,  malgré  leur  infériorité 
numérique,  firent  une  belle  résis- 
tance ,  mais  ne  purent  tenir  la 
route  de  Bordeaux,  où  les  Anglai*, 
sous  les  ordres  du  général  Dal- 
housie,  pénétrèrent  le  12  mars. 
Le  maréchal  Soult,  après  quel- 
ques succès  obtenus  sur  son  anta- 
goniste ,  s'était  retiré  sous  les 
murs  de  Toulouse,  où  il  se  forti- 
fiait pour  défendre  le  passage  de 
la  Garonne;  le  général  anglais  ly 


WEL  AVEL                  2C.5 

Suivit,  et  se  hasardii  enfin  à  lui  sée? ,  il  établit  aussitôt  son  quar- 
livier  bataille  le  10  avril;  20,000  tier-gtlnéral  à  Bruxelles  ,  et  y  pu- 
li(jmmes  avaient  à  se  défendre  blia  une  déclaration  des  pnissan- 
contre  80,000;  on  se  battit  avec  ces  au  peuple  français,  pour  l'en- 
acharnenient  ;  les  Anglais  perdi-  gager  à  ne  prendre  aucune  part  à 
reut  plus  de  soldats  que  n'en  la  nouvelle  lutle  qui  allait  s'enjra- 
eomplait  l'armée  française,  et  la  ger,  assurant  qu'elle  n'était  diri- 
victoire  se  serait  inévitablement  gée  que  contre  la  per>onue  de 
déclarée  pour  celle  -  ci  ,  sans  la  Napoléon.  Les  maux  qui  avaient 
faute  que  fit  un  général  de  divi-  suivi  la  première  invasion  ne  dis- 
sion  de  se  laisser  trop  emportera  posaient  pas  les  esprits  à  ajouter 
son  ardeur,  en  quittant  le  poste  foi  à  ces  proujesses  bienveillantes, 
qu'il  avait  ordre  de  garder  (voy.  et  l'on  se  réunit  autour  de  Napo- 
l'art.  Soclt). line suspension  d'ar-  léon  pour  repousser  du  territoire 
mes  fut  proclamée,  etsuivie  d'une  français  les  troupes  étrangères, 
convention  qui  terminaenfin  cette  Dès  le  i5  juin  i8i5,  ce  prince  a- 
lorigue  et  sanglante  lutte.  On  ne  vait  passé  la  Sambre,  et  se  trou- 
calcula  p;is  en  Angleterre  ce  que  vaiten  mejsure  d'altaqiur  les  Prus- 
le  dernier  succès  de  lord  W'el-  siens,  qu'il  défit  à  Ligny.  Aussitôt 
lington  lui  avait  coûté;  l'orgueil  voulant  profiler  de  ce  premier 
national  l'exagéra  sintoul  pour  succès,  il  se  porta  avec  son  acti- 
rendre  plus  bumilianle  peut-être  vite  ordinaire  contre  l'armée  an- 
la  chute  du  seul  ennemi  qu'elle  glo  -  hollandaise  ,  qui  se  rassem- 
eut  à  redouter;  et  les  dernières  Liait  en  avant  de  Bruxelles.  Dans 
récompenses  que  le  souverain  et  le  le  moment  même,  le  duc  de  Wel- 
parlement  pouvaient  lui  décerner  lington  se  trouvait  à  un  bal  <lans 
après  toutes  celles  qu'il  avait  déjA  la  capitale  des  l'ays-Bas  ,  chez  la 
riîçufs  ,  lui  furent  otî<;rles  :  le  duchesse  de  Ilichmond.  (î'est  là 
prince-régent  le  créa  marquis  de  qu'il  reçut  la  première  nouvelle 
Douero  et  duc  de  AVellington,  et  de  l'échec  éprouvé  par  les  Prus- 
le  parlement  vota  en  sa  faveur  siens.  Il  part  aussitôt  avec  son 
400,000  livres  sterliugs,  qui  de-  état-major,  et  se  hâle  de  réunir 
vaient  être  employées  en  achat  de  SfS  troupes  sur  Waterloo,  bourg 
terres.  Il  se  rendit  ù  Londres  peu  sitwc  à  trois  lieues  de  Bruxelles, 
de  temps  après,  et  reçut  pour  la  ayant  derrière  lui  la  forêt  de  Soi- 
douzième  fois  les  reu)ercîmens  gnies.  Un  combat  sanglant  s'en- 
des  deux  chambres  ,  auxquelles  iï  gagea  le  16  entre  le  corj)S  du  ma- 
se  pré».cnla  le  1"  juillet.  Le  5  juil-  réchal  Ney  el  les  tfoupe»  belges  , 
let,  lord  Wellington  fut  nonnné  sous  les  ordres  du  prince  d'Oran- 
nmbn«sadeur  auprès  du  roi  de  ge ,  renforcées  de  quelques  régi- 
France,  et  envoyé  ensuite  au  con-  mens  anglais;  mais  il  n'eut  aucun 
grès  devienne,  où  il  se  trouvait  résultat.  Le  17,  Napoléon,  près- 
encore  lors  du  retour  de  Napoléon  que  eertain  de  triompher,  s'avan- 
en  France  au  mois  de  mars  i8i5.  ça  vers  les  champs  de  Waterloo, 
Proclamé  parles  souverains  alliés  el  le  lendemain  18,  eut  lieu  celle 
généralissime  des  troupes  coall>  bataille  terrible,  où  taut  de  &ang 


26G 


WEL 


lut  vcrsû,    où  Je   si  graïul?  in- 
térêts  turent  déhaltus,  «t  où   le 
sort  de  la  France  lut  mis  uny  se- 
conde fois  en  que.slion.  Cette  ba- 
taille, également  connue  sons  le 
nom  de  journée  de  Mont-Sainl- 
Jean,   de  Belle-  Alliance  ou   de 
Waterloo,  où  l'opinirilrelé  dans 
la  défense  répondit  pendant  tout 
le  jour  ii  l'impétuosilé  des  atta- 
ques,  allait  se  terminer  par  un 
dernier  effort  où  les  Français  a- 
vaient  réuni   tout  ce  qui  devait 
leur  assurer  un  succès  complet, 
lorsque  vers  les  cinq  heures,  ils 
virent  arriver  sur  leur  flanc  l'a- 
vant-garde  de  l'armée  prussienne 
qui ,  ralliée  et  renforcée ,  mar- 
chait au  secours  des  Anglais.  Bien- 
tôt débordés  et  chargés  avec  vi- 
gueur,  toute   résistance  leur   fut 
impossible,  et  leur  valeur  ne  leur 
servit  qu'à  trouver  la  mort ,  qu'ils 
préféraient  à  la  fuite.   L'histoire 
seule  peut  rendre  un  compte  im- 
partial de  ce  grand  événement  ; 
elle  dira  comment  une  défense, 
en  quelque  sorte  improvisée,  pré- 
valut sur  le  plan  d'attaque  le  plus 
savamment  conçu  ;  comment  Blu- 
cher,    complètement  battu   deux 
jours  auparavant,  reparut  tout  à 
coup  au  moment  décisif;  com- 
ment, d'un  autre  côté,  des  géné- 
raux français  négligèrent  d'exécu- 
ter des  ordres  donnés  à  plusieurs 
reprises,  ou  restèrent  immobiles 
au   bruit  du  canon  qui  écrasait 
leurs   frères    dTarmes  ;    comment 
enOn  le  cri  funeste  de  sauve  qui 
peut,  qui  avait  déshonoré  les  pre- 
mières batailles  de  la  révolution, 
se  Gt  entendre  dans  celle  qui  de- 
vait la  terminer lilùcher,  à  la 

tête  de  sa  nombreuse  cavalerie , 
profita  du  désordre  qui  se  mani- 


AYl'L 

fesia  dans  l'armée  française  pour 
la    ])oursuivre    à    outrance.    I>e» 
deux   généraux   ennen)is   arrivè- 
rent sous  les  murs  de  la  capitale 
au  moment  où  Napoléon  venait 
d'abdiquer  pour  la  seconde  fois. 
Après   diCférens  pourparlers ,  on 
capitula;  l'armée  française  se  re- 
tira au-deh'i  de  la  Loire,  et  les 
Bourbons  rentrèrent  dans  Paris. 
Lord  Wellington  no  tarda  pas  à 
recevoir  de  sa  patrie  de  nouveaux 
témoignages    de    gratitude.    Les 
deux  chambres   lui   votèrent  des 
remercîmens,  et  une  somme  de 
200  mille  livres  slerlings  fut  ajou- 
tée à  toutes  celles  qu'il  avait  déjà 
reçues,  et  tous  les  souverains  de 
l'Lurope,  rivalisant  de  munificen- 
ce avec  l'Angleterre,  prouvèrent 
quelle  importance  ils  attachaient 
aux  événemens  de  Waterloo.  A  la 
suite  du   traité  du  20  novembre 
181 5,  lord  W'ellington  réunit  les 
fonctions    diplomatiques    à    sou 
commandement  militaire;  devenu 
ainsi  responsable  des  mesures  dic- 
tées   par  le   comité   qui,   depuis 
celte  époque ,  a  paru  gouverner 
l'Europe.  Sa  gloire  a  déjà  trouvé 
des  juges  sévères,  et  peut -être 
des  détracteurs  chez  les  peuples 
qui  ont  cru  avoir  à  se  plaindre  de 
ces   mesures   dont  il  n'était  quo 
l'instrument.  Au  reste,  on  s'ac- 
corde à  rendre  justice  à  son  im- 
partialité dans  les  discussions  qui 
ont  eu  lieu  entre  les  puissances 
alliées  et  la  France,  au  sujet  des 
réclamalions  que  faisaient  les  su- 
jets de  ces  puissances  contre  le 
gouvernement  français  ;  il  contri- 
bua également  à  l'évacuation  de 
la  France,  ordonnée  en  1818,  par 
les  souverains  rassemblés  à  Aix- 
la-Chapelle.  C'est  au  commence- 


WEL 

ment  de  celte  année  que,  rentrant 
dans  son  hôtel  à  une  heure  du 
matin,  on  tira,  dit-on,  sur  sa 
voiture  un  coup  de  pistolet  qui 
ne  laissa  aucune  Iracu.  Cet  évé- 
nement lut  jujçé  diver.sement  par 
le  public;  il  donna  lieu  à  un  pro- 
cès qui,  malgré  les  recherches  les 
plus  exactes,  ne  procura  aucune 
lumière  sur  les  auteurs  de  cet  é- 
vénement.  Lord  Wellington,  dans 
les  diverses  positions  où  il  s'est 
trouvé,  a  iTionlré  un  caractère 
honorable;  sévère  sur  la  disci- 
pline, mais  ami  du  soldat,  il  sait 
l'attacher  à  ses  devoirs  en  pour- 
voyant A  tous  ses  besoins;  il  fit 
aimer  riiumanité  aux  guérillas  en 
donnant  trois  piastres  pour  cha- 
«jiie  prisonnier  qu'on  lui  amenait; 
enfin  étant  généialissime  des  trou- 
pes étrangfères  eu  France  ,  il  évita 
autant  qu'il  le  put  la  vicdence  et 
les  désordres.  Quant  à  ses  lalens 
diplomatiques,  on  ne  put  guère 
en  juger  dans  la  mission  toute 
pacifique  qu'il  remplit  en  France. 
11  est  bien  difficile  de  n'avoir  pas 
raison  quand  on  peut  disposer  de 
i5o,ooo  baïonnettes.  Lord  Wel- 
lington, depuis  son  retour  dans 
sa  patrie,  s'est  peu  lait  remar- 
quer dans  les  débals  parlemen- 
taires, si  ce  n'est  par  «on  opposi- 
tion constante  aux  vœux  de  ses 
compatriotes  d'Irlande.  11  a  élé 
nommé,  à  la  fin  de  1818 ,  grand- 
maître  de  l'artillerie,  charge  qu'il 
occupe  encore  aujourd'hui  (1825). 
Lareconnaissancenatiotialea  vou- 
lu ajouter  aux  dons  brillaus  et  so- 
lides dont  le  général  anglais  avait 
élé  comblé,  plusieurs  monumens, 
parmi  lesquels  on  ci  le  le  pont  dit  de 
/^a/cr/00.  Lord  Wellington  a  deux 
fils  de  son  mariage  avec  miss  Pan- 


WES  267 

kenham;  l'aîné,  .Igé  de  18  ans, 
porte  le  titre  de  marquis  de  Doue- 
ro.  Il  ne  sera  pas  sans  intérêt  pour 
le  lecteur  de  connaître  l'opinion  de 
l'empereur  Napoléon  sur  lord  Wel- 
lington, que  les  hardis  pruneurs  de 
ce  général  ont  osé  mettre  en  paral- 
lèle avec  le  premier  capitaine  des 
temps  modernes.  »  Lord  Welling- 
ton, disait  l'empereur  [voj.  les 
uîémoires  de  M.  Las  Cases,  tome 
Vll,pag.  277),  n'a  qu'un  talent 
spécial  ;  Berthicr  avait  bien  le 
?ien.  11  y  excelle  peut-être  ;  mais 
il  n'a  pas  de  création  ;  la  i'ortune 
a  plus  fait  pour  lui  qu'il  n'a  fait 
pour  elle.  Quelle  différence  avec 
ce  Marlborough  ,  désormais  son 
émule  et  son  parallèle  !  Marlbo- 
rough,  tout  en  gagnant  des  ba- 
tailles ,  maniait  les  cabinets  et 
subjuguait  les  hommes.  PourWel- 
lington,  il  n'a  su  que  se  mettre  à 
la  sm'te  des  vues  et  des  plans  de 
Castelroagh  ;  aussi  M'"  de  Staël 
avait-elle  dit  que,  hors  de  ses  ba- 
tailles, il  n'avait  pas  deux  idées... 
Ses  victoires,  leur  résultat,  leur 
influence  hausseront  encore,  mais 
son  nom  baissera  ,  même  de  son 
vivant,  etc.  »  M.  de  Las  Cases 
avait  rapporté  (pag.  275  et  27G  ) 
ce  qui  suit  :  «  On  m'assura,  disait 
Napoléon  ,  que  c'est  par  Welling- 
ton que  je  suis  ici  (  Sainte-Hé- 
lène ) ,  et  je  le  crois.  C'est  digne  , 
du  reste,  de  celui  qui ,  au  mépris 
d'ime  capitulation  solennelle  ,  a 
laissé  périr  Ney,  avec  lequel  il 
s'était  vu  souvent  sur  le  champ  de 
bataille.  Il  est  sftr  que  pour  nmi 
je  lui  ai  fait  passer  un  mauvais 
quart -d'heure.  C'est  dèsormaiH 
nu  titre  pour  les  grandes  Ames  ; 
la  sienne  ne  l'a  pas  senti.  Ma 
chute  et  le  sort  qu'on  nie  rcser- 


a68 


WEL 


v;iit  lui   ménageaient  une  gloire 
bien  supérieure  encore  à  toutes 
ses  victoires,  et  il  ne  s'en  est  pas 
tlouto.    Ah  !   qu'il   doit    un   beau 
cierge  au   vieux  Blucher  !   Sans 
celui-là  ,  je  ne  sais  pas  où  serait 
sa  Grâce,  ainsi  qu'ils  l'appellent; 
mais  moi ,  bien  sûrement  je  ne 
serais  pas  ici.  Ses  troupes^ont  été 
admirables,  ses  dispoî'itions  à  lui 
pitoyables,  ou  pour  mieux  dire, 
il  n'en  a  fait  aucune.  Il  s'était  mis 
dans  l'impossibilité  d'en  faire,  et, 
chose  bizarre,  c'est  ce  qui  a  fini 
par  le  sauver.  S'il  efit  pu  com- 
mencer sa  retraite,  il  était  perdu. 
Il  est  demeuré  maître  du  champ 
de  bataille,  c'est  certain  ;  mais  Ta- 
l-il  dû  à  ses  combinaisons?  Il  a 
recueilli  les  fruits  d'une  victoire 
prodigieuse  ;  mais  son  génie  l'a- 
vait-il  préparée?...  Sa  gloire  est 
toute  négative;  ses  fautes  sont  im- 
menses. Lui,  généralissime  euro- 
péen, chargé  d'aussi  grands  inté- 
rêts, ayant  en   front  un  ennemi 
aussiprompt,  aussi  hardi  que  moi, 
laisser  ses  troupes  éparses,  dor- 
mir dans  une  capitale ,  se  laisser 
surprendre!  Et  ce  que  peut  la  fa- 
talité quand  elle  s'en  mêle  !   En 
trois  jours,  j'ai  vu  le  destin  de  la 
France  ,  celui  du  monde  échapper 
à  mes  combinaisons!  D'abord  sans 
la  trahison  d'un  général  qui  sort 
de  nos  rangs   pour   aller   avertir 
l'ennemi,  je  dispersais,  je  détrui- 
sais toutes  Ces  bandes,  sans  qu'el- 
les eussent  pu  se  réunir  en  corps 
d'armée;  puis,  sur  ma  gauche, 
sau,s  les  hésitations  inaccoutumées 
de  ISey  aux  Qualre-Bras ,  j'anéan- 
tissais toute  l'armée  anglaise.  En- 
fin, sur  ma  droite,  les  manœuvres 
inouïes  de  Grouchy,  au  lieu  de 
garantir  une  victoire  certaine,  ont 


WES 

consommé  ma  perte  et  précipité; 
la  France  dans  un  gouffre.  »  Le 
docteur  O'Méara,  dans  ses  Mé- 
moires (tome  1",  p;»ge  4^2  )j  ^e 
trouve  en  parfaite  harmonie  avec 
M.  de  Las  Cases  sur  la  conduite 
de-lord  Wellington  à  Waterloo.  A 
son  rapport,  Napoléon  dit  parti- 
culièrement :  «  Il  n'avait  aucun 
moyen  de  retraite,  et  s'il  eût  cher- 
ché h  l'effectuer,  il  n'aurait  pas 
sauvé  uii  seul  homme  de  son  ar- 
mée. Il  dut  le  gain  de  la  bataille 
d'abord  à  la  fermeté  et  à  la  bra- 
voure dos  troupes,  car  les  Anglais 
se  sont  battus  avec  le  plus  grand 
acharnement  et  le  plus  grand  cou- 
rage ;  ensuite  à  l'armée  de  Blu- 
cher, à  qui  on  devrait  plutôt  at- 
tribuer la  victoire  qu'au  duc  de 
Wellington  ,  parce  qu'il  a  déployé 
plus  de  talent  comme  général. 
Battu  la  veille,  il  avait  rassemblé 
ses  troupes  ,  qu'il  conduisit  au 
comb«t  dans  la  soirée.  » 

AVESTERMANN  (François-Jo- 
seph), général  au  service  de  la  ré- 
publique, naquit  en  1764»  û  Mols- 
heim,  en  Allemagne,  et  était  offi- 
cier au  service  de  France,  lorsque 
la  révolution  éclata.  Républicain 
par  caractère,  il  embrassa  les  nou- 
velles opinions  politiques  avec 
une  ardeur  extrême,  et  devint 
greffier  de  la  municipalité  de  Ha- 
guenau  en  \y()0.  La  part  qu'il 
prit  aux  troubles  qui  éclatèrent  a- 
lors  dans  cette  ville,  le  fit  mander 
à  Paris,  où  il  fut  bientôt  chargé  de 
diriger  à  la  tête  des  Marseillais  et 
des  Brcslois,  l'attaque  du  27  juil- 
let, 1792.  contre  les  gardes  natio- 
naux réunis  en  banquet  aux 
Champs-Élisées,  et  dont  la  réu- 
nion était  suspecte  aux  chefs,  qui 
voulaient  le  renversement  de  U 


VES 

monarchie.  Le  lo  août  1792, 
Westermann  ù  la  tête  des  Bre^tois, 
■se  signala  avec  un  courage  qui 
tenait  de  la  fureur  à  l'attaque  du 
château  des  Tuileries,  où  il  entra 
le  premier.  C'est  contre  les  Suis- 
ses surtout  qu'il  montra  la  plus 
grande  animosité.  Envoyé  peu  a- 
près  à  l'armée  des  Ardennes  en 
qualité  de  commissaire  et  avec  un 
grade  militaire,  il  g;"gna  la  con- 
liaiice  de  Dumouriez,  qui  le  char- 
gea des  fonctions  d'adjudant-gé- 
néral. Westermann,  nommé  com- 
mandant de  la  légion  du  Nord, 
justifia  son  avancement  par  sa 
bravoure  et  ses  lalens ,  et  rendit 
dos  services  signalés  »'n  1792  et 
1 790.  Le  grade  de  général  de  bri- 
gade en  fut  la  récompense.  Il  pas- 
sa dans  la  Vendée,  sous  les  ordres 
de  liiron ,  et  eut  d'abord  des  suc- 
rés vers  Parlhenay  et  (>hraillon. 
Mais  les  revers  qu'il  éprouva  dans 
celte  dernière  ville,  le  5  juillet 
(179,1),  le  firent  destituer  et  tra- 
duire à  la  barre  de  la  convention 
nationale.  S'étanl  justifié  devant 
le  tribunal  militaire,  où  la  conven- 
tion l'avait  renvoyé,  il  repartit 
aussitôt  pour  la  Vendée,  où  ,  sui- 
vant les  ordres  qu'il  avait  reçus,  il 
incendia  les  villes  de  Thouars,  de 
Bressuire  et  de  TifT.inges,  et  rava- 
gea les  châteaux  et  les  terres  de 
lliM.  de  Lescure  et  de  La  Uoche- 
Jacquelein.  Cette  fidélité  à  des  or- 
dres barbares  ne  put  le  sauver 
d'une  nouvelle  proscription.  D«'s- 
tilué  une  seconde  fois,  et  égale- 
ment traduit  à  la  barre  de  la  con- 
vention, il  se  justifia.  Danton,  son 
ami,  fit  rendre  un  décret  où  il  était 
dit  que  Westermann  avait  parfai- 
tement bien  rempli  ses  devoirs. 
Carrier  et  Collol-d'Herbois  l'ac- 


MIE 


'26^ 


cu?èrent  d'intrigues,  et  Hébert  le 
signala  burlesquement  comme  un 
vionstrc  et  un  modéré.  La  vérita- 
ble cause  de  cette  inimitié  était 
l'attachement  que  Westermann 
portait  au  parti  des  Cordeliers.  Il 
fut  traduit  au  tribunal  révolution- 
naire avec  Danton,  Camille-Des- 
moulins  et  plusieurs  autres,  et 
condamné  à  mort  le  16  germinal 
an  2.  Son  courage  ne  se  démentit 
pas  un  seul  instant,  et  il  reçut  la 
mort  avec  le  plus  grand  calme. 

WIELAND  (CHRisToi-nE-MAR- 
TiN  ),  célèbre  écrivain,  qui,  pen- 
dant une  longue  suite  d'années,  a 
illifhtré  la  littérature  germanique,- 
par  de  nombreux  ouvrages,  tant 
en  vers  qu'en  prose,  naquit  en 
1755,  dans  la  petite  ville  de  Bibe- 
rach,  en  Souabe.  Il  fil  d'excellen- 
te» études,  qu'il  acheva  à  l'univer- 
sité saxonne  d'Erfurt.  Son  goftt 
pour  les  vers  se  développa  de 
bonne  heure.  A  l'âge  de  14  ans,  il 
avait  composé  un  poëme  sur  la 
Destruelion  de  Jérusalem,  ouvra- 
ge qui  annonçait  déjà  un  talent 
réel.  Bientôt  le  jeune  poète  prit 
un  essor  plus  élevé,  et  marcha  de 
succès  en  succès.  Doué  d'une  sen- 
sibilité véritable,  d'une  imagina- 
lion  brillante,  et  sachant  don- 
ner à  la  langue  allemande,  riche 
mais  rude,  une  flexibilité  mu- 
sicale et  gracieuse  inconnue  avant 
lui,  il  excita  l'enthousiasme  de  la 
plupart  de  ses  concitoyens,  qui 
lui  décernèrent  le  surnom  glo- 
rieux de  l^oltaire  de  l' Allemagne. 
Wicland  ne  s'est  pas  sans  doute 
toujours  distingué  par  ce  tact 
exquis,  ce  goût  aussi  sûr  que  fin, 
qui  caractérisent  éminemment  la 
plupait  des  productions  de  l'in- 
cumpurabl^  écrivain  dont  la  Fran- 


«70  M'tE 

te  s'honore.  Mais  au  moins  s'en 
rapproche-t-il  souvent  par  réclat 
de  son  imagination,  par  une  laci- 
Mté  extraordinaire  à  traiter  toulea 
sortes  de  sujets,  à  passer  du  grave 
au  doux,  du  plaisant  au  sévère,  i\ 
faire  jjadiner  la  philosophie,  et  ;\ 
orner  des  grâces  du  plus  aimable 
enjouement,  les  austères  précep- 
tes de  la  morale  même.  W'ieland 
avait  étudié  les  anciens  d'une  fa- 
çon plus  érudile  que  la  plupart 
des  poètes  ,  et  joignait  à  ses  talens 
des  connaissances  étendues.  Sa 
conversation  était  pleine  de  char- 
nue; animé,  enthousiaste  comn)e 
tous  les  hommes  de  génie,  il  avait 
conservé  jusqu'à  la  lin  de  sa  lon- 
gue et  honorable  carrière  tout  le 
feu  de  son  heureuse  jeunesse. 
Quelques  critiques  envieux,  s'a- 
charnèrent après  ses  ouvrages , 
mais  ne  purent  troubler  sa  vie. 
Son  noble  caractère  le  mettait  à  l'a- 
bri de  toute  atteinte  partie  d'aussi 
bas;  de  nombreux  amis,  les  suf- 
frages d'un  public  éclairé,  la  bien- 
veillance a''un  prince  généreux, 
Î|ui  s'était  lîmpressé  de  raccueil- 
ir  dans  ses  étals,  et  qui  l\ii  con- 
serva jusqu'à  la  fin  la  même  alTec- 
tion ,  l'auraient  d'ailleurs  facile- 
ment consolé  des  attaques  de  ses 
adversaires.  Ceux-ci  lui  repro- 
chaient surtout  de  corrompre  le 
goût  allemand,  de  manquer  de 
nationalité,  de  céder  à  une  in- 
ïlucnce  étrangère,  et  de  chercher 
il  transplanter  tiur  l'antique  sol  de 
la  (iermanie  les  futiles  beautés  de 
la  lilléraliire  française.  Le  simple 
énoncé  de  ces  gi'iefs  suffit  pour  en 
faire  apprécier  la  -valeur.  Plus  heu- 
reux que  tant  d'antres  hommes  de 
Jcitres  ses  contemporains,  Wie- 
iand  n'eut  jamais  à  lutter  caulre 


le  besoin ,  ni  à  Implorer  la  pro- 
tection du  puissant,  si  souvent  | 
payée  par  le  sacrifice  de  l'indé-  | 
pendance  du  faible.  Cet  écrivain 
jouit  de  bonne  heure  de  toute  sa 
renommée,  et  des  distinctioris 
dues  i\  sor)  mérite.  Dès  l'année 
1762,  il  se  fixa  à  "Weimar,  ville 
qu'on  appelait  déjà  V Athénée  de 
C Allemagne,  où  une  cour  libéra- 
le recherchait  la  société  des  hom- 
mes les  plus  distingués ,  et  où  l'a- 
mour des  lettres  et  des  beaux-arts 
servait  de  lien  fraternel  entre  toua 
les  rangs.  Il  y  contracta  une  heu- 
reuse alliance  qui  répandit  du 
charme  sur  le  reste  de  sa  vie.  Ad- 
mis bientôt  dans  la  familiarité  des 
souverains,  il  fut  nommé  par  le  duc 
de  SaxeWeiinar  son  conseiller  in- 
time. Les  principales  académies  de 
l'Europe  s'honorèrent  en  l'admet- 
tant au  nombre  de  leurs  mem- 
bres. Napoléon  lui  envoya  la  croix 
de  la  légion-d'honneur,  et  plu- 
sieurs princes,  à  son  exemple,  le 
décorèrent  de  leurs  ordres.  Char- 
gé d'ans  et  d'honneurs,  Wieland 
termina  paisiblement  sa  carrière 
au  milieu  d'amis  fidèles,  et  au  sein 
d'une  famille  qui  le  cliérissait  ten^ 
dremcnt.  Il  mourut  à  "NVeimar, 
vers  la  fin  de  1818,  à  l'âge  de  85 
ans.  Ses  œuvres  complètes,  qui 
ont  eu  plusieurs  éditions  en  Alle- 
magne, forment  un  grand  nombre 
de  volumes.  JNous  nous  bornerons 
à  citer  ici  quelques-uns  de  ses  ou- 
vrages. Ses  premiers  essais  furent 
des  imitations  des  anciens.  A  18 
ans,  il  publia  un  Art  d' Aimer j 
peu  de  temps  après  parut  un  Poè- 
me sur  la  nature  des  choses,  qu'il 
avait  terminé  en  trois  mois,  et 
dans  lequel  on  trouve  développés 
avec  talent,  les  systèmes  philoso- 


AVIE 

j)hiqiies  tle  IMalon  et  de  Lribnitz. 
Deux  Iragéflies  et  deux  poèmes 
envers  licxainètres,  l'un  intitulé 
Abraham,  et  l'nulre,  Cyrus,  suivi- 
rent de  près.  Le  foinan  philoso- 
phique d'Agal/ion,  qui  pa^se  pour 
un  des  chefs-ii'œnvre  deWieland; 
celui  do  Peregrinus  Protéc,  ou  les 
dangers  de  C enthousiasme ,  que 
plusieurs  personnes  préfèrent  en- 
core, une  foule  d'autres  ouvrag:es 
en  prose,  prouvèrent  la  fécondité 
inépuisable  et  la  flexibilité  du  ta- 
lent de  cet  auteur,  qui  se  prêtait  à 
d»;3  sujets  aussi  divers,  et  qui  sut 
fondre  habilement  dans  tous  ses 
écrits,  la  philosophie  et  l'érudi- 
tion, la  sensibilité  et  Tenjoue- 
inent.  Musarion,  la  Philosophie 
des  Grâces,  Idris,  })oëni(*  héroï- 
comique,  l'Histoire  d'un  jeune 
Grec,  le  Miroir  d' Or  ou  les  hois 
du  Cliéchian,  roman  politique, 
II* Nouveau  Don  Quichotte,  le  char- 
mant poëme  (VObéron,  qui  seul 
efit  suin  pour  placer  le  poète  au 
faîlc  du  Parnasse  germanique, 
des  poésies  légères  pleines  de  grâ- 
ces, des  Nouvelles  comiques ,  sont 
encore  dus  à  sa  fertile  plume.  Dis- 
ciple de  Socrate  et  de  l'iatori,  sou- 
vent heureux  émule  d'Horace, 
de  Tibulle,  de  Lucien,  couleur 
nimahle  connue  ILtmilton,  on 
ri;lrouve  encore  dans  se»  écrits  en 
jirose,  une  partie  de  la  grâce  et 
lie  la  facilité  de  Voltaire,  et  dans 
])lusieurs  de  ses  poëmes  (tels 
qu'Idris  et  Obéron),  la  verve  et 
l'imagination  féconde  de  l'Arios- 
le.  Ainsi  que  les  hommes  de  let- 
tres les  plus  distingués  de  son  é- 
po(jue,  Wieland  était  sincère  ami 
de  In  liberté,  et  fut  fidèle  à  celle 
noble  cause  jusqu'à  sa  mort.  S'il 
y  avait  quelque  seeplicisme  en  sa 


WIE 


271 


philosophie,  il  n'y  avait  ni  doute 
ni  hésitation  en  son  dévouement 
à  la  pairie  et  aux  intérêts  sacrés 
de  riiuiiianité.  Il  rédigeait  encore 
en  1818,  année  de  sa  mort,  un 
journal  politique  intitulé  l'Amida 
peuple^  dans  lequel  il  donnait  un 
libre  cours  à  ses  seniimens.  Celte 
feuille,  conlinuée  quelque  temps 
par  un  digne  successeur,  qui  ma- 
nifestait les  mêmes  principes  li- 
béraux, a  été  supprimée  avec  la 
liberté  de  la  presse,  dont  les  con- 
grès de  Carlsbad  et  de  Vérone  ont 
jugé  l'Allemagne  indigne  de  jouir. 
Les  ouvrages  de  Wieland  ont  pas- 
sé en  grande  partie,  par  des  tra- 
ductions plus  ou  moins  heureu- 
ses, dans  toutes  les  langues  de 
l'Europe.  Plusieurs  écrivain»  é- 
trangers  ont  aussi  puisé  largement 
dans  cette  mine  féconde,  sans  in- 
diquer leurs  emprunts.  Il  existe 
en  français  une  traduction  de  l' A- 
gathon,  une  plus  estimée  encore 
du  Peregrinus  Protée,  par  M.  Grif- 
fet  de  la  Baume;  dans  celles 
A'Oheron  et  de  quelques  autres 
poëmes,  les  traducteurs  ont  eu  à 
lulter  contre  la  dilïiculté  presque 
insurmontable  de  transmettre  en 
une  langue  si  diiTérente  de  tours, 
de  construction  et  de  génie,  les 
beautés  originales  de  la  poé^^ie  teu- 
tonique.  Aussi  ces  imitations,  qui 
ne  donnent  qu'une  faible  idée  de 
l'original,  ont-elles  été  peu  re- 
cherchées. 

WIELHORSRI  (Joseph),  gé- 
néral polonais,  elc.  ,  était  déjà  au 
service  avant  1792.  Ayant  passé 
dans  les  légions  polonaijies  en  Ita- 
lie, il  devint,  au  bout  d'^  quelques 
années,  général  de  brigade,  et  re- 
tourna dans  son  p^iys  pour  y  vivre 
dans  la  retraile.  Il  reprit  du  sef- 


■37^ 


WIL 


vice  en  1806,  et  fut  nommé  suc- 
cessivement conseilier-d'état ,  et 
direcleur  de  l'admiiiislration  de 
la  {^lierre  sons  le  prince  Ponia- 
towski,  alors  mini-'-lre  de  la  guer- 
re, il  occupa  ce  poste  jusqu'en 
1814  >  el  fut  appelé  par  l'empe- 
reur Alexandre  à  être  membre  du 
comité  organisateur  de  l'armée 
polonaise.  Mommé  ministre  de  la 
guerre,  il  mourut  dans  celte  char- 
ge. Doué  d'un  esprit  vif  et  délié, 
d'un  caractère  aimable  ,  d'une 
grande  facilité  dans  le  travail ,  il 
sut,  comme  homme  public,  mal- 
gré ixne  maladie  chronique  qui-  le 
retenait  au  lit  une  partie  de  sa  vie, 
et  lui  causait  des  douleurs  affreu- 
ses, il  sut,  disons-nous,  se  rendre 
utile  et  nécessaire  au  gouverne- 
ment dont  il  était  toujours  un  des 
membres  les  plus  actifs;  coniuie 
homme  privé,  il  fut  toujours  d'un 
commerce  facile  et  agréable. 

WILBERFORCE  (N.),  mem- 
bre de  la  chambre  des  coramune.s 
du  parlement  anglais,  est  né,  en 
1759,  à  Hull.  Il  fit  ses  études  à 
l'université  de  Cambridge,  et  s'y 
lia  intimement  avec  William  Pilt. 
Dès  l'âge  de  21  ans,  il  fut  chargé 
par  sa  ville  natale  de  la  représen- 
ter au  parlement.  L'aimée  sui- 
vante, en  1787,  il  fut  réélu,  et 
commença  à  se  faire  remarquer 
en  proposant  l'abolition  de  la  trai- 
te des  noirs,  proposition  qu'il  sou- 
tint avec  une  grande  énergie  , 
qu'il  reproduisit  souvent,  et  qui 
enfin  triompha  des  plus  grands 
obstacles.  Approbateur  de  la  ré- 
voluticm  française,  il  mérita,  le 
26  août  1792,  sur  la  proposition 
de  lirissot,  des  lettres  de  citoyen 
français.  Il  justifia  cette  glorieuse 
adoption  par  le  zèle  et  le  courage 


WIL 

avec  lesquels  il  cornballit,de  i  fO* 
à  1  79b,  le  parti  ministériel,  si  for- 
tement prononcé  contre  la  France. 
Ses  discours  à  ce  sujet  et  sa  noble 
persistance  dans  la  cause  de  l''^ 
boliiion  de  la  traite  fixèrent  l'at- 
tention de  tous  les  amis  de  l'in- 
dépendance des  peuples  et  de 
l'humanité;  mais  il  perdit  beau- 
coup de  la  considération  qu'il  a- 
Vdil  acquise  lorsque  ,  en  1801,  de- 
venu approbateur  des  actes  du 
ministèrt- ,  il  s'éleva  contre  ce  qu'il 
appelait  les  vues  dominatrices  du 
premier  consul  Bonaparte.  On  le 
vit  ensuite,  non -seulement  ap- 
puyer la  suspension  de  l'acte  lia- 
beas  corpus,  mais  encore  réclamer 
le  renouvelleujent  du  bill  contre 
les  séditions,  et  accuser  les  mem- 
bres de  l'opposition  de  n'attaquer 
ces  me^ur•;s  ultra  -  ministérielles 
«  que  parce  qu'ils  en  craignaient 
l'eflet  pour  eux-mêmes.  »  Des  es- 
pérances trompées  ou  une  varia- 
tion trop  habituelle  aux  hommes 
d'état  qui  cherchent  la  fortune  ou 
la  célébrité  partout  où  ils  espè- 
rent raUeindre,le  raiiienèrrnt  sur 
les  bancs  de  l'opjiosition.  Le  3o 
avril  i8of»  ,  il  provoqua  la  révoca- 
tion i\u  bill  sur  les  forces  addi- 
tionnelles. En  1807,  de  nouvelles 
espérances  ou  la  même  mobilité 
d'opinions  le  rattachèrent  aux  mi- 
nistres. Il  combattit  la  motion  de 
lord  Percy,  tendante  à  donner 
graduellement  la  liberté  aux  noirs 
esclaves  dans  les  colonies  anglai- 
ses, déclarant  «que  telle  n'avait 
jamais  été  son  intention.  »  Dans' 
la  même  année  ,  il  soutint  le  parti 
des  ministres  contre  lord  Cochra- 
ne,  qui  accusait  les  homtncs  en 
place  de  cumuler  scaudaleuse- 
raent  les  traitemens  et  les  pen- 


^VIL 

slons.  Il  vola,  en  1810,  en  faveur 
de  la  résolution  qui  accordait  la 
ré{^ence  au  prince  de  Galles,  avec 
des  re^tri^•tions  dont  l'opposition 
deuiandail  l'anéanlissement.  Les 
niinislres  le  retrouvèrent,  en  1811 
etea  l^>l2,  parmi  leurs  partisans. 
Srs  attaques  contre  les  luddistes 
le  flrtnl  aoeuser  par  sir  Francis 
liiirdett  d'être  «  prêt  A  souscrire 
à  la  torture  et  aux  lois  de  sang  que 
l'on  avait  suivies  en  Irlande.  »  On 
le  vit  encore,  en  1814»  s'opposer 
à  la  proposition  en  laveur  des 
Norwégiens,  qui  réclamaient  leur 
indépendance  politique.  Depuis  ce 
temps,  considéré  comme  un  appui 
du  ministère,  M.Wilberforce  a  l'ait 
suspecter  injustement  sans  au- 
cun doute  sa  sincérité  pour  la  li- 
bi-rté  des  noirs.  Quels  qu'aient 
été  au  surplus  ses  motifs  dans 
cclli;  célèbre  cause ,  les  philan- 
llutqies  ne  voient  que  rbeureux 
résultat  de  ses  elforts,  et  leur  es- 
time est  en  propDrlion  de  l'im- 
portance du  bienfait.  iM.'Wilber- 
î'orce  a  pi\blie,en  \'^Ç)-,\xn  Exa- 
men pratiffue  (h's  sectes  religieuses 
admises  en  Angleterre,  et  contraire 
au léritahie esprit  du  christianisme. 
Cet  ouvrage  eut  du  suceès,  et  fut 
plusieurs  fois  réimprimé. 

WILKKS  (N.),  célèbre  aider- 
niau  et  ensuite  maire  de  liOndres, 
naquit  dans  celte  ville,  où  il  se  fit 
connaître  pardesécrils  énergiques 
et  parsim  oppo^^ition  aux  doctrines 
des  ministres.  Membre  de  la  cham- 
bre des  communes  en  i  ^O 1 ,  il  sou- 
tint avec  j)lus  d'éneigie  encore  ses 
principes  politiques.  Les  minis- 
tre-* aux(|uels  il  était  devenu  o- 
dicux  le  privèrent  injustement 
de  sa  librrté;  mais  il  lu  recou- 
vra,  et  attaqua   vigoureusement 

T.   XX. 


WIL 


275 


ses  oppresseurs  :  il  en  obtint  des 
dédommagemens  considérables. 
Long-temps  l'idole  du  peuple,  il 
rentra  peu  à  peu  dans  l'obscurité, 
et  mourut  dans  une  sorte  d'oubli 
en  1797.  On  trouve  dans  la  Cor- 
respondance de  La  Harpe  le  por- 
trait de  ce  célèbre  alderman,  tracé 
par  tm  de  ses  compatriotes.  Voici 
les  passages  les  plus  remarqua- 
bles :  «'L'histoire  a  fait  souvent 
justice  des  favoris  des  rois;  il  est 
peut-être  bon  de  faire  connaître 
un  homme  qui  est  devenu  l'itlole 
du  peuple  anglais.  Chez  lui  l'en- 
thousiasme est  plus  triste  et  plus 
dangereux  que  dans  un  autre  pays, 
et  un  homme  y  a  plus  de  liberté 
pour  devenir  méchant  et  factieux. 
Wilkes  le  sut,  et  conviul  souvent 
qu'il  n'eût  osé  être  ce  qu'il  était, 
s'il  n'eût  connu  son  pays.  Sa  nais- 
sance était  obscure  ef  sa  laideur 
célèbre  :  ses  porirails,  qui  sont  eu 
grand  nombre,  eu  donnent  tme 
faible  idée.  Il  était  louche,  ses 
dents  étaient  mêlées  et  crochues; 
son  rire  avait  quelque  chose  d'in- 
fernal ;  toutes  ses  passions  se  pei- 
gnaient avec  énergie  sur  son  vi- 
sage ,  mais  sa  phyyicmomic  faisait 
pardonner  ses  traits,  il  aima  beau- 
coup les  femmes,  et  il  se  sentait, 
disait  -  il  ,  capable  de  les  aimer 
toutes,  excepté  la  sienne.  II  em- 
ploya avec  succès  les  moyens  or- 
dinaires de  se  ruiner  vile  ;  la  né- 
cessité le  lit  écrire,  et  son  goût 
l'a  rendu  écrivain  factieux.  Il  a 
renoncé  avec  éclat  aux  grâces  pu- 
bliques de  lu  cour,  pour  être  plus 
sûrement  le  pensionnaire  du  peu- 
ple ;  d'ailleurs  il  était  trop  odieux 
au  roi  et  trop  avili ,  pour  qu'on 
pût  se  résoudre  à  l'élever.  Il  sup- 
pléa pur  ses  écrits  au  talent  de 
18 


a74  WIL 

parler  en  public,  que  la  nature  lui 
avait  refusé;  sou  style  est  clair, 
énergique  et  pur,  quoique  fijçuré 
à  l'excès.  On  dit  que  la  logique 
de  l'intérêt  est  courte;  c'était  la 
sienne.  Sou  intrépidité  brava  tous 
les  événeniens  .  et  il  s'est  inonlré 
avec  courage  dans  quelques  affai- 
res d'honneur.  Sa  conversation 
était  vive  et  spirituelle  ,  mais  il  y 
mêlait  sans  cesse  des  propos  au- 
dacieux et  des  bouflbnneries  ines- 
séantes.  Il  a  osé  taire  mettre  dans 
les  papiers  publics  un  parallèle 
de  lui  avec  Brutus,  libérateur  de 
IVome,  et  un  autre  de  sou  his- 
toire (  Introduction  à  l'histoire 
d'Angleterre)  avec  celle  de  Hu- 
me. » 

WILLOT     (  LE    COMTE    ÂMÉDÉB 

PE  )  ,  lieutenant  -  général ,  con»- 
niandeur  des  ordres  de  Saint-Louis 
et  de  la  légion-d'honiieur,  est  né 
a  Saint  -  Germain  -  en  -  La^'e  ,  et 
était  oiïicier  à  l'époque  de  la  ré- 
volution, il  lui  dut  un  avance- 
ment rapide  ;  car  dès  le  commen- 
cement d'avril  ijgS,  il  était  gé- 
néral de  brigade.  Pour  parvenir 
en  si  peu  de  temps  aux  premiers 
grades  de  l'armée,  il  fallait  avoir 
à  un  I  aut  degré  l'esprit  du  temps 
ou  posséder  de  grands  talens  mi- 
litaires. Nul  doute  que  ce  ne  soit 
à  ses  talens  qu-'il  dut  son  avance- 
ment; toutefois  la  mauvaise  for- 
tune l'emporta  sur  le  mérite.  Bat- 
tu à  Perpignan  et  accusé  d'impé- 
ritie ,  il  fut  suspendu.  Uemis  en 
activité, il  défit  Tenoemi,  au  mois 
de  juin  1795,  au  passage  de  là 
Deva,  et  au  mois  de  juillet  sui- 
vant, il  entraîna,  par  les  affaires 
des  14  et  1  5,  la  reddition  de  Bil- 
bao.  II  devint  général  de  division 
à  l'époque  où  la  paix. fut  conclue 


NVIL 

avec  l'Espagne  (1795).  Chargé 
d'un  commandement  sous  le  gé- 
néral Hoche  dans  la  Vendée,  il  se 
brouilla  avec  son  chef  pour  cause 
d  opinion  dans  les  affaires  de 
l'Ouest.  Kn  1796,  il  fut  envoyé 
dans  le  Midi,  où  .sa  conduite  est 
expliquée  par  la  lettre  (|u  il  écri- 
vait au  directoire-exécutif,  lettre 
dont  nous  citerons  un  passage  qui 
n'aura  pas  besoin  de  commentai- 
res ,  les  faits  sont  assez  connus  : 
«  Les  royalistes  qui  assassinent  les 
républicains,  disait-il  dans  cette 
lettre,  les  émigrés  débarqués  sur 
nos  côtes,  ne  sont  que  des  fan- 
tômes grossiers,  avec  lesquels  on 
veut  alarmer  le  gouvernement, 
pour  donner  une  fausse  direction 
à  sa  vigilance;  le  seul  parti  qu'il 
ait  à  combattre,  est  un  amas  d'a- 
narchistes ,  de  brigands  et  de  scé- 
lérats de  toute  espèce  qui  infes- 
tent ces  contrées.  »  Sa  haine  pour 
la  famille  du  général  Bonaparte, 
qui  combattait  glorieusement  en 
Italie,  si;  manifesta  à  cette  épo- 
que par  loutt-s  sortes  de  persé- 
cutions subalternes.  En  l'an  5 
(1797),  le  département  des  Bou- 
cheïi-du-Rhône  nomma  le  géné- 
lal  Willot  député  au  conseil  des 
cinq  cents,  où  il  fut  un  des  chefs 
de  la  faction  de  CUcliy.  Il  attaqua 
M.  de  ïalleyrand  ,  qui  venait  d'ê- 
tre nommé  ministre,  et  ne  cessa, 
pendant  quatre  mois,  de  harceler 
par  ses  dénonciations  le  direc- 
toire-exécutif, qui,  au  18  fructi- 
dor, le  comprit  dans  une  mesure 
de  déportation  contre  plusieurs 
raembies  du  conseil  et  tous  les 
membres  de  la  commission  des 
inspectems  de  la  salle,  dont  le 
général  W  illot  faisait  partie.  De  la 
prison  du  Temple,  où  il  fut  d'à- 


bord  enfermé,  il  fut  embarqué 
avec  ses  collègues  à  Rocheforl 
pour  la  Guiaiie.  Il  s'échappa  avec 
quelques-uns  d'enlre  eux,  et  ga- 
grïa  les  colonies  hollandaises,  d'où 
il  jiassa  en  Angleterre,  et  de  là 
revint  sur  le  continent.  Le  pre- 
mier consul  Bonaparte,  qui  n'a- 
vait point  oublié  la  conduite  que 
le  général  Willot  avait  tenue  en- 
vers sa  mère  ,  ses  sœurs  et  ses  frè- 
res, l'excepta  du  nombre  des  dé- 
portés .  qu'il  autorisa  à  rentrer  en 
i7f)<).  Le  général  >Villot,  au  rap- 
port des  auteurs  de  diverses  bio- 
graphies ,  chercha  pour  se  venger 
;i  allmner  b  guerre  civile  dans  le 
Midi,  et  se  fit  l'auxiliaire  des  Irou- 
pesautrichiennes  dans  le  Piémont. 
La  bataille  de  Marengo  détruisit 
toutes  ses  espérances.  Il  s'embar- 
qua à  Gênes  avec  un  corps  d'émi- 
grés suisses  et  français  à  la  solde 
de  l'Angleterre,  et  retourna  à  Lon- 
dres, où  il  se  fit  agent  des  Bour- 
bons. Lors  de  l'envahissement  de 
la  France  par  les  puissances  étran- 
gères, en  1814,  il  revint  à  Paris, 
tt  bientôt  partit  pour  les  Etats- 
Lnis.  De  retour  à  la  fin  de  i8i5, 
il  fut  nommé  gouverneur  de  la 
20'' division  militaire,  devenue  17' 
division  en  1818.  (Je  commande- 
ment lui  fut  retiré  en  juin  1818, 
et  rendu  eu  1819,  Il  «  ces?é  d'en 
être  revêtu  en  iHu'j. 

WILSON  (siH  Robert- Tho- 
mas), major-général  anglais,  né 
à  Londres  en  1777,  d'un  («ère  qui 
avait  acquis  de  la  célébrité  comme 
peintre  et  comme  écrivain.  Après 
avoir  fait  d'excellentes  étudi-s,  il 
entra  dans  la  carrière  militaire. 
Kn  mars  1793,  lorsque  le  duc 
d'York  eut  débarqué  avec  les 
troupes  anglaises  ù  U  elwo  et  Sluys, 


WIL  q;5 

lejeuneWilsonserenditen  Hollan- 
de auprès  de  ce  prince,  auquel  il  fut 
présenté   par   son  beau-frère  ,  le 
lieutenant  -  colonel   Boswell.    Le 
duc   d'York  agréa   l'olFre   de   ses 
services,  et  il  fut  nommé,  peu  de 
temps  après,  lieutenant   dans   le 
i5°  régiment  de  dragons.  Il  trou- 
va bientôt  l'occasion  de  se  distin- 
guer par  sa  ;aleur  et  ses  talens 
militaires.   Pendant  la  campagne 
de  Flandres,  en  1794,  il  eut,  le  24 
avril ,  en  accourant  bien  A  propos 
avec  plusieurs  de  ses  jeunes  ca- 
marades ,    l'avantage   insigne   de 
sauver  l'empereur  d'Allemagne, 
qui  s'était  Hventuré  loin  de  son 
camp  avec  une  suite  peu  nom- 
breuse, et  qui  allait  être  fait  pri- 
sonnier par  des  hussards  français. 
Une  médaille  fut  alors  frappée  en 
l'honneur  de  sir  Robert  Wilson, 
et  il  fut  en  outre  décoré  de  l'or- 
dre uulitaire  de  Marie -Thérèse. 
Peu  de  temps  après,  il  fut  nom- 
mé capitaine,  et  passa  avec  son 
régiment  en  Irlande,  où  il  servit 
pendant  les  troubles  de  ce  pays. 
Kn  1799,  il  accompagna  de  nou- 
veau  le  duc  d'York  dans  sa   se- 
conde  et   désastreuse   expédition 
de  Hollande.  De  retour  en  Angle- 
terre après  la  retraite    précipitée 
de  ce  prince  ,  il  entra  comme  ma- 
jor dans  un  régiment  levé  par  le 
baron  de  Hompesch,  et  s'embar- 
qua avec  ce  corps  pour  l'Egypte, 
où  il  se  fit  encore  remarquer  dans 
plusieurs  or;casions  importâmes. 
Le  commandant  en  chef  de  l'ar- 
mée anglaise  le  chargea  de  dilTé- 
rentes  missions  auprès  du  capiian* 
pacha,  dont  il  s'acquitta  ave(;  suc- 
cès. Après  que  le  général  Kléber 
cul  été  assassiné,  et  que  son  suc- 
<^esseur   au    cumiuandeineat  eut 


•.-;6  WIL 

conclu  la  capitulation,  ù  la  siiile 
de  laquelle  \ts  liuu[)es  JVariça!>t'S 
éyacuèient  l'Ejryptc ,  ^ir  Robert 
reviiit  tu  AnyleU'rio ,  et  y  f>"blia 
lin  jneiuier  onvraj^e  ,  iiilidilé  : 
Histoire  de  l'expédiliun  des  An- 
glais en  Egypte ,  à  laquelle  est 
joint  un  élut  présent  du  pays  et  de 
ses  moyens  de  défeme^  avec  cartes 
et  le  portrait  de  sir  Ralpk  Aber- 
cromhy.  l/auteiir  y  montre  une 
grande  aniniosilé  contre  Je  général 
en  chel' Bonaparte,  cl  rapporte,  t^ur 
ouï  dire,  quelques  tiiits  dont  l'exa.-- 
titude  a  été  contestée;  iiuiie  l'es- 
prit même  dans  lequel  cet  ouvra- 
ge, d'ailleurs  plein  d'intérêt,  avait 
été  conçu,  devait  à  cette  époque 
en  assurer  le  succès  en  Angle- 
terre ;  aussi  eut-il  cinq  éditions 
consécutives  qui  rapportèrent  à 
l'auteur  plus  de  i,5oo  liv.  sler- 
lings.  Le  régiment  de  Hompcscli 
l'ut  licencié  quelque  temps  après, 
et  sir  Robert  se  lr(jiiva  réduit  à  la 
demi-solde  de  lienlenant-colonel. 
Il  rentra  en  activité  de  service 
dans  le  20*  régiment  de  dragons, 
«t  passa  au  Brésil,  sous  les  ordres 
de  sir  David  liaird,  qu'il  &uivit 
au  cap  de  Bonne-Espérance,  et 
contribua  à  la  prise  de  posses- 
sion de  celle  riclie  colonie  par  les 
troupes  anglaises.  Au  mois  de 
novembre  r8o6 ,  il  accouipagna 
le  génériil  Hulscbinson  ,  que  le 
gouvernetnent  avait  chargé  d'une 
mission  secrète  auprès  de  l'empe- 
reur de  Russie.  Toujours  avide 
d'action  et  de  combats,  sir  Ro- 
bert Wilson  senit  comme  volon- 
taire dans  l'armée  russe  ,  prit  part 
à  toutes  les  opérations  delà  guer- 
re contre  la  Fiance,  et  déploy;- 
une  activité  et  une  valeur,  que 
l'empereur  Alexandre  crut  alors 


WIL 

doToir  récompenser  par  la  déco- 
ration ,  encore  peu  prodiguée,  de 
Tordre  de  Sainl-Georges.  Apre* 
la  paix  de  Tilsitl ,  il  séjourna  pen- 
dant quelque  temps  à  Péters- 
Innng .  y  fut  accueilli  avec  la  plus 
haute  distinction,  et  travailla  déjà 
à  réunir  una  partie  des  matériaux 
qui  lui  servirent  plus  lard  pour  la 
Composition  de  son  ouvrage  sur 
la  Puissance  po  ili^juc  et  niititaire 
de  ta  Russie.  Revenu  en  Angle- 
terre, le  gouvernement  le  ch.ir- 
gea  bientôt  d'une  iriission  impor- 
tante dans  ce  même  pays  où  on 
l'.ii  avait  témoigné  tant  de  bien- 
veillance, xMais  le  chel'  de  l'em- 
pire russe  venait  de  changer  tota- 
lement son  système  politique. 
Une  liaison  intime  s'était  établie 
entre  les  empereurs  Alexandre  et 
Napolt'on.  Sir  Robert  ne  put  ob- 
tenir aucune  réponse  satisl'aisantc 
aux  demandes  qu'il  avait  été  char- 
gé de  taire  ;  l'alliance  avec  la 
France  était  certaine,  et  une  guer- 
re entre  la  Russie  et  la  Grande- 
Rretague  ne  pouvait  manquer 
d'en  être  la  suite.  Sir  Robert  quit- 
ta en  toulc  hAte  Pétersbonrg,  fit 
une  diligence  extraordinaire  ,  et 
arriva  à  Londres  avant  le  départ 
d'un  convoi  de  brainiens  russes, 
dont  il  avait  déjà  eu  l'adresse  de 
retarder  la  marche  par  divers  obs- 
tacles. L'amirauté  anglaise  eut 
ainsi  le  temps  de  faire  saisir  la 
frégate  Lespectnoi ,  qui  se  trou- 
vait encore  à  Portsmouth,  et  toute 
une  flotte  russe  aurait  peut-être 
été  conquise  de  même,  si  les  vents 
contraires  n'avaient  empêché  sir 
Sidnry  Smith  d'arriver  à  temps 
pour  exécuter  ses  ordres  à  cet  é- 
gard.  Au  commencement  de  la 
guerre  d'Espagne,  sir  Robert  Wil- 


son  fut  chargé  de  se  rr.iulre  à  Lis- 
bonne, et  d'organii-er  une  année 
auxiliaire  portugaise,  qui  devait 
agir  de  concert  avec  IfS  Anglais. 
1!  s'acquitta  de  celte  missifui  avec 
un  grand  zèle,  et  les  Anglais  lui 
durent  parliculièrenient  la  forma- 
tion de  cette  légion  lusUaine  qui 
letir  rendit  bientôt  d'iniportans 
services.  Quand,  par  un  nouveau 
revirement  politique  ,  la  guerre 
fulre  la  France  et  la  Russie  fut 
décidée,  en  1813,  sir  Robert  Wil- 
son  se  hâta  de  retourner  en  ce 
dernier  pays,  et  d'offrir  ses  ser- 
vices à  l'enipereur  Alexandre,  qui 
les  accepta.  I!  fit  cette  terrible 
campagne,  dont  la  fin  devint  si 
luneste  à  une  armée  long-temps 
victorieuse  ,  seconde  toutes  les 
opérations  du  général  Kiitusnw, 
et  se  trouvait  à  son  quarlier-géné- 
lal  lorsque  l'aide-de-canip  de  Na- 
})oléon,  le  général  Lainiston,  vint 
proposer  un  armistice,  qui  fut 
refusé.  En  1816,  sir  Robert  Wi!- 
son,  qui  s'était  rendu  depuis  quel- 
ques mois  à  Paris, se  trouva  porté, 
])ar  un  simple  sentiment  d'hmna- 
nilé  ,  à  sauver  un  homme  qui  jus- 
que là  li'i  avait  été  entièrement 
inconnu.  Le  général  Lavalette  , 
condamné  à  mort,  s'était  miracu- 
leuseirit'nt  échappé  de  la  Concier- 
gerie la  veille  du  jour  même  où 
il  devait  être  conduit  à  l'échalaud. 
On  sait  quels  cris  de  fureur  cette 
évasion  fit  pousser  à  certains  hom- 
mes avides  du  sang  de  leurs  con- 
citoyens. Les  recherches  les  plus 
actives  eurent  lieu  ctintre  le  con- 
duumé,  encore  caché  i\  Paris.  Sir 
lioherlWilson,  MM.  Hulschinson 
«;t  liruce(?;()7. ces  rjom»), se  dévouè- 
rent pour  le  tirer  (1(1  péril  éminent 
qui  planait  toujours  surs.i  tête.  Us 


^VIL  277 

parvinrent  à  le  faire  sortir  de  la 
capitale  sous  le  déguisement  (\\\\\ 
olïkier  anglais,  et  sir  Robert  le 
conduisit  dans  sa  voilure  jusqu'en 
Relj,Mque.  De  retour  \  Paris,  la 
pari  qu'il  avait  prise  à  cet  acte 
fut  découverte  par  la  police.  Dé- 
noncé par  un  domestique  de  loua- 
ge ,  qui  depuis  a'^^ez  long-temps 
avait  remarqué  dans  l'hôtel  ha- 
bité par  sir  Robert,  mie  voilure 
donl  on  ne  faisait  aucun  n>>age, 
quoi(iu'elle  parût  destinée  à  un 
voyage  de  long  cours,  et  tenue  en 
état  de  partir  au  premier  besoin, 
il  fut  aussitôt  arrêté,  ainsi  que 
s<îs  deux  compatrioles,  et  conduit 
à  la  Conciergerie.  Après  une  as- 
sez longue  détention,  les  trois  li- 
bérateurs de  M.  de  La  validité  furent 
traduits  devant  la  cour  d'assises  de 
Paris.  Us  montrèrent  une  grande 
fermeté  pendant  le  cours  du  pro- 
cès. La  remarquable  extension 
flonnce  par  le  ministère  public 
dans  son  acte  d'accusation,  au  fait 
d'avoir  aidé  un  fugitif,  déjà  échap- 
pé de  prison ,  à  passer  la  fron- 
tière,  fait  traité  de  conspiration 
contre  la  sôreté  do  l'état,  et  les 
longs  interrogatoires  que  les  ac- 
cusés subirent,  qtti  furent  aussi- 
tôt produits  et  publiés  dans  les 
journauxde  Londres, excitèrent  un 
é  ton  ne  ment  général  en  An  gh;  terre. 
Les  militaires  téiT)oignèrent  sur- 
tout en  cette  circonstance  le  vif 
intérêt  qu'ils  portaient  à  leurs  frè- 
res d'armes ,  et  quelque  temps 
après  toutes  les  feuilles  publiques 
se  prononi'èrent  avec  indignation 
contre  la  pidjlicilé  donnée  dans 
tlie  Courier,  à  une  lettre  confiden- 
tielle écrite  par  sir  Robert  W'ilson 
à  un  de  ses  amis  à  Londres,  pu- 
blication qui  ne  pouvait  avoir  eu 


278 


WIL 


lieu  qu'après  la  violation  du  secret 
des   postes.    Sir    Robert    Wilson 
fut  enfin   condamné ,    ainsi  que 
ses    deux    compatriotes,    à   trois 
mois  de  prison,  peine  qu'il  subit 
i\  laConcier^'eric  de  Paris,  et  dont 
où  lui   aurait   probablement   fait 
remise,  s'il  avait  voulu  condes- 
cendre à  demander  cettr  grâct;  au 
gouvernement  français.  On  peut 
le    supposer    d'après    la    manière 
dont  le  roi  Louis  XVIII  envisa- 
gea depuis  lui-même  celte  cause. 
L'intervention    des     trois    étran- 
gers, de  quelque  manière  qu'on 
la  considère  ,  a  au  muins  fourni 
au  monarque ,  l'occasion  de  faire 
plus  tard   grâce  entière  à  M.  de 
Lavaletle.  Au  mois  de  juillet,  sir 
Robert  revint  à  Londres,  oi^ll  fut 
accueilli  avec  enthousiasme  par  le 
jieuple  et  par  ses  nombreux  amis. 
Un  ordre  du  jour  du  prinee-ré- 
gent,  daté  du   lo  mai,  avait  ce- 
pendant improuvé  la  conduite  du 
général-major  Wilson  et  du  capi- 
taine Hutschionon  ;  mais  IV Idgs 
et   Torys  se    réunirent   en   celte 
occasion   pour  fêler  ceux  qui  a- 
vaient  arraché  à  la  mort  une  vic- 
time intéressante.  En   1821,  sir 
llobert  Wilson  fut  nommé  par  les 
électeurs  de  Southwark  (Londres) 
membre  de  la  chambre  des  com- 
munes. Il  prit  rang  parmi  les  plus 
zélés  défenseurs  *\i:,i)  libertés  na- 
tionales, et  fit  preuve  dans  plu- 
sieurs circonstances  de  talens  ora- 
toires Irès-dislingués.  Le  4  juillet 
de  la  même  année,  il  parla  avec 
force  contre  l' alliert^bitl ,  et  cita  à 
l'appui  de  son  opinion  la  conduite 
plus  que  rigoureuse  tenue  envers 
le  général  Gourgaud,  M""  de  Mon- 
tholon  et  un  vieux  prêtre  arrivant 
de  Sainte-Hélène.  Mais  ce  qui  pa- 


WIL 

rut  surtout  lui  avoir  attiré  l'ani- 
madversion  personnelle  du  sou- 
verain, c'est  que  tians  le  procès 
de  la  malheureuse  reine  Caroline 
d'Angleterre,  sir  Robert  Wilson, 
qui  n'avait  point  d'abord  paru  fa- 
vorable à  la  cause  de  cette  prin- 
cesse ,  l'embrassa  avec  chaleur 
après  le  scandale  occasioné  par 
l'audition  de  quelques  témoins 
italiens,  que  les  ministres  avaient 
fait  venir  de  Milan.  La  reine  ayant 
succombé  peu  de  temps  après  à 
une  maladie  aiguë,  le  peuple  de 
Londres  voulut  rendre  à  sa  dé- 
pouille mortelle  tous  les  honneurs 
qui  dépendaient  de  lui;  mais  le 
ministère  avait  résolu ,  en  l'ab- 
sence du  roi,  alors  eu  Irlande,  que 
le  convoi  funèbre  ne  passerait 
que  par  des  rues  détournées  de  la 
capitale.  Le  peuple  indigné  se 
souleva.  Malgré  l'emploi  de  la 
force  armée  et  tous  les  efforts  des 
Life-Guards,  qui  tirèrent  sur  la 
multitude,  tuèrent  deux  hommes 
et  en  blessèrent  un  grand  nom- 
bre, le  peuple  l'emporta,  et  fit 
passer  le  convoi  h  travers  la  cité, 
où  le  lord  -  maire  se  porta ,  dès 
l'entrée ,  à  sa  rencontre.  Il  fut 
prouvé  que  loin  d'exciter  les  trou- 
bles, sir  Robert  Wilson  avait  cher- 
ché à  les  apaiser.  Se  trouvant  à 
cheval  (  dit  le  Times  et  antres 
journaux  impartiaux  )  à  côté  de 
plusieurs  gentlemen,  qui  étaient 
venus  pour  rendre  leurs  derniers 
devoirs  à  la  reine,  lorsqu'il  en- 
lendit  tirer,  il  voulut  d'abord  se 
rendre  à  l'endroit  d'où  partaient 
les  coups  de  fusil,  pour  connaître 
au  moins  la  cause  qui  avait  porté 
les  troupes  à  faire  feu.  Ses  amis 
cherchèrent  à  l'en  empêcher,  en 
lui  faisant  observer  que  sa  pré- 


scnce  pourrait  être  interprétée 
d'une,  manière  perfide.  Sir  Robert 
répondit  que  cflte  considération 
ne  pourrait  l'arrêter  tant  qu'il  y 
aurait  une  chance  de  sauver  la  vie 
d'un  seul  homme  ou  d'empêcher 
les  militaires  de  se  porter  à  des 
actes  de  violence.  Il  s'approcha 
donc  de  l'officier  commandant,  et 
lui  demanda  tout  simplement  si 
c'était  par  ses  ordres  que  les  sol- 
dats tiraient.  L'officier  répondit 
que  non. — Pour  rameur  de  Dieu, 
interposez-vous  donc,  et  prévenez 
l'effusion  du  sang,  lui  criait  le  gé- 
néral. Le  (eu  ne  tarda  pas  en  eff"*-! 
à  cesser  par  l'intervention  des  of- 
ficiers. «  Il  eût  mieux  valu,  dit  le 
journal  ministériel  t/ie  Courier, 
que  mille  hommes  eussent  péri, 
«t  que  l'autorité  n'eût  pas  eu  le 
dessous.  On  lui  répliqua  qu'il  va- 
lait peut-être  mieux  sauver  la  vie 
à  mille  citoyens  que  de  satisfaire 
à  l'orgueil  (l'un  ministre.  Le  gé- 
néral AVilson  n'en  reçut  pas  moins, 
le  17  septembre  suivant,  une  let- 
tre du  duc  d'York,  qui,  en  qua- 
lité de  généralissime  des  armées 
britanniques  et  de  chef  de  l'admi- 
nistration de  la  guerre,  lui  an- 
nonçait que  le  roi  n'avait  plus 
besoin  de  ses  services,  et  qu'il 
était  même  privé  de  sa  demi- 
solde.  Cette  rigueur,  jusque -hî 
sans  exemple  dans  les  fastes  mi- 
litaires de  la  (irande-Brelagnc,  fit 
une  vive  sensation  dans  le  ptiblic. 
On  rappela  une  autre  lettre  du 
duc  d'York,  bien  difTérenle  de 
celle-ci,  dans  laquelle  le  généra- 
li>isime  annonçait  à  sir  Robert 
qu'il  l'avait  recommandé  au  prin- 
ce-régent, non-seulement  comme 
méritant  de  ravancemenl ,  mais 
comme  candidat  pour  lecomtnan- 


dément  d'im  régiment  de  cavale- 
rie, poste  qui  rapportait  au  moins 
2,000  liv.  sterl.  (5o,ooo  fr.  )  par 
an.  Maintenant  rayé  des  contrôles 
de   l'armée   sans  examen    de   sa 
conduite  ni  jugement  préalable, 
sir   Robert   Wilson   adressa   plu- 
sieur=  lettres  au  prince  généralis- 
sime et  aux  ministres,  ne  sollici- 
tant,  il  est  vrai,  aucune  grâce, 
mais    demandant    instamment    à 
être   traduit   devant   un   tribunal 
comjiélent  pour  être  jugé  suivant 
toute  la  rigueur  des  lois.  Il  ne  put 
obtenir  qu'on  fît  droit  à  ces  récla- 
mations. Sir  Rol)crt  venait  à  cette 
époque  il'accompagner  en  France 
lady  Wilson  ,  dont  la  santé   lan- 
guissante réclamait  des  soins  et 
un  climat  plus   doux.   Le  minis- 
tère français  lui  fit  intimer  l'ordre 
de  quitter  immédiatement  Paris, 
et  sous  peu  de  jours  la  France. 
Pendant    son    absence    d'Angle- 
terre, ses  amis  et  un  grand  nom- 
bre de   personnes   auxqnellts   il 
était   entièrement   incormu  ,   s'é- 
taient concertés  et  avaient  résolu 
d'acheter   une   annuité   égale    an 
double  de  la  demi-solde  de  major- 
général,  afin  de  l'off'rir  ["i   sir  Ro- 
bert comme   un    témoignage  de 
l'estime  et  de  la  reconnaissance 
de  ses  concitoyens.  Une  souscrip- 
tion fut  ouverte  aussitôt,  (!t  l'on 
remarqua  une  personne  qui  déposa 
de  suite  5oo  iiv.  sterl.  Les  élec- 
teurs de  Southwark  se  réunirent 
dans  le  même  dessein  ,  sous  la 
présidence  du  dernier  lord-maire, 
i'alderman  Wood ,  et  avant  la  fin 
du  mois  d'octobre,  plus  de  0,ooo 
liv.  sterl.  (i5o,ooofr.   environ) 
furent  consacrée^  à  cet  acte  de  ré- 
munération nationale.  Le  2H  avril 
i8s3,  sir  Robert  Wilsou  publia 


28<y  WIL  >V1L 

une  adresse  aux  élccleurs  de  dont  les  Ircjupes  Tniiir  lises  ne  lar- 
SoiUinvark  ,  pour  leur  annoncer  dèient  pas  a  s'trii[);jr«T.  Vivement 
qu'il  se  rendait  en  Kspngne.  «  Cer-  ponrs.iivi  et  ;i  la  v«;iile  d'être  lait 
taines  circonstances  ,  leur  dit-il,  prisonnier,  il  n'eut  que  le  temps 
m'ont  autorisé  S  croire  que  ma  de  s'end)aiquer  n  la  liTite  sur  le 
jnésence  sur  ce  cliamp  de  bataille  yacht  anglais  le  Nassau,  qui  (il 
sera  vue  avec  plaisir  par  les  dé-  voile  pour  Lisbonne,  où  il  arriva 
fenseurs  des  droits  <  onsiilulion-  le  7  août.  Une  révcWution  rujuvelle 
nels.  Je  pars  donc,  non  pour  sa-  venait  aussi  de  s'opérer  en  Porlu- 
tisfaire  une  ambition  personnelle  gai.  Les  officiers  anglais  ne  pu- 
qui,  dans  l'élat  actuel  des  choses,  rent  obtenir  la  permission  de  dé- 
serait une  ambition  sans  gloire;  barquer  ;  il  fut  même  question  de 
je  pars,  non  pour  prendre  parti  s'emparer  de  leurs  personnes.  Dé- 
dans des  discordes  civiles  an  mi-  jà  des  soldais  portugais  envoyés  à 
lieu  desquelles  il  ne  convient  à  bord  du  Nassau,  comiricnçaient 
aucun  étranger  de  s'engager,  ex-  à  en  couper  les  cordages  ,  pour 
cepté  pour  y  jnuer  le  rôle  de  pa-  l'etnpêclier  de  remettre  à  la  voile; 
cificateur;  mais  je  m'attache  à  la  mais  les  Anglais  s'armèrent  à  leur 
jcirtune  de  l'Espagne ,  à  l'heure  tour,  et  résistèrent  vigoureuse- 
de  la  détresse  et  du  péril,  résolu  ment  à  celte  violence.  Il  fut  enfin 
do  partager  tous  ses  efforts.  »  Il  permis  au  yacht  Ir.  Nassau  de  par- 
offrit  d'ailleurs  en  cet  écrit  aux  tir  avec  ses  passagers  pour  Gi- 
électeurs  de  Southwark,  le  choix  braltar.  Indigné  des  Irailemens 
de  le  conserver  comme  leur  dé-  qu'il  avait  éprouvés  dans  la  rade 
pnlé  à  lu  chambre  des  comniunes,  de  Lisbonne,  sir  Robert  écrivit 
ou  de  passer  à  une  nouvelle  élec-  une  lettre  au  ministre  comte  Pal- 
tion.  Ceux-ci  ne  jugèrent  point  à  mella,  pour  lui  annoncer  qu'il  ne 
propos  de  lui  ôter  leur  confiance,  voulait  plus  êire  compté  au  nom- 
et  maigre  son  absence,  il  continua  bre  des  chevaliers  de  l'ordre  de  la 
à  être  compris  au  nondjre  des  Tour  et  de  l'Épée ,  dont  le  roi  de 
membres  du  parlement.  Arrivé  Portugal  lui  avait  auparavant  en- 
en  Espagne  avec  le  colonel  Lighf,  voyé  la  grande  cioix.  Le  ministre 
lord  Eskine  et  plusieurs  volon-  s'empressa  de  son  côté  de  publier 
taires  anglais,  il  fut  nommé  lieu-  qu'il  était  rayé  de  la  liste  des 
tenant  -  général  par  les  coriès  ;  membres  de  cet  ordre.  Aussitôt 
mais  la  cause  des  conslilulionnels  que  sa  blessure  le  lui  permit,  sir 
était  déjà  presque  efitiérement  [lobert  se  rendit  de  Gibraltar  à 
perdue.  L'armée  française  avait  Cadix  ,  voidant  encore  contribuer 
lait  de  grands  progrès,  et  quel-  h  h'  défense  de  cette  place.  Mais 
ques  places  fortes  se  défendaient  après  la  prise  du  Trocadéro ,  la 
seules  encore.  Sir  Robert  se  jeta  garnison  de  Cadix  et  les  cortès 
dans  celle  de  la  Corogne,  et  fut  eux-mêmes  reconnurent  que  toute 
grièvement  blessé  dans  une  sor-  résistance  contre  l'armée  partout 
tie,  le  16  juillet,  ainsi  que  le  co-  victorieuse  des  Français  devenait 
lonel  Light,  qui  lui  servait  d'aide-  inutile.  Sir  Robert  s'embarqua,  le 
de-camp.  Il  fut  transporté  à  Yigo,  11  novembre,  pour  l'Angleterre. 


WIL 

Aux  revers  d'une  campagne  si  fu- 
iVBSte  pour  lui  s'était  joint ,  pen- 
dant -SOU  absence,  le  plus  grand 
des  malheurs  domestiques.  Lady 
"Wilson  avait  succombé  .i  sa  lon- 
gue et  douloureuse  maladif  le  i5 
août  1825.  lin  autre  malheur, 
mais  qu'il  su})porta  ,  à  ce  qu'on 
assure  ,  avec  une  singiiliérc  ré- 
"Signation,  fut  celui  d'être  informé 
par  les  gazettts  que  l't'iopereur  de 
Russie,  l'empereur  d'Autriche  et 
le  roi  de  l'riisse,  venaient  de  le 
priver  du  droit  de  porter  les  dé- 
corations (les  ordres  divers  dont 
ces  monarques  l'avaient  autrefois 
gratifié,  lorsqu'il  combattait  C(tn- 
Ire  Napoléon.  Quelques  feuilles 
publiques  le  félicitèrent  même  de 
cet  événement,  et  le  Statesman  dit 
à  ce  sujet  :  «  Sir  Robert  pouvait 
s'attendre  à  ce  qui  lui  est  arrivé; 
il  n'aurait  jamais  dû  accepter  des 
marques  honorifiques,  autres  que 
celles  que  la  constitution  anglaise 
accorde.  Nous  le  félicitons  d'être 
redevenu  lout-à-fait  Anglais  ,  et 
d'avoir  fourni  un  exemple  salu- 
taire à  ceux  de  «es  conipatriotes 
qui  seraient  disposé»  à  recher- 
<her  des  décorations  étrangères.  » 
Il  continue  à  siéger  à  la  chambre 
des  communes,  et  à  s'y  montrer 
fidèle  aux  principes  qui  ont  dirigé 
sa  vie  entière.  Il  s'est  prononcé 
avec  chaleur  pour  la  cause  des 
catholiques  d'il  lande,  et  n'a  pas 
peu  contribué  à  faire  passer  dans 
la  chambre,  le  bill  en  faveur  de 
leur  émancipation  f  bill  rejeté  de- 
puis p  ir  la  chambre  des  pair».  Le 
i(j  mai  182.5,  (pnmd  le  ministre 
Canning  eut  déposé  sur  la  table 
de  la  chambre  des  connnunes  le 
traité  conclu  avec  les  républiques 
de  rAmériquc  méridionale,  des 


acclamnlions  retentirent  de  tous 
les  côtés  de  la  salh;,  et  sir  Robert 
"Wilson,  i)renant  la  parole,  félicita 
la  chambre  et  la  nation  sur  ce 
traité.  «  Cest  un  hommage,  dit- 
il,  rendu  par  l'ancien  monde  aux 
droits  de  l'homme  dans  le  nou- 
veau. »  Il  paya  «-nsuite  un  juste 
tribt:!  d'éloges  à  la  bravoure  et  à 
la  modération  (jui  ont  marqué 
tous  les  efforts  des  états  améri- 
cains, pour  conquérir  leur  indé- 
pendance; il  loua  surtout  la  con- 
duite du  président  de  la  républi- 
que de  Ctdombie,  du  général  Bo- 
livar, qui  «  mérite  non-seulement 
le  titre  de  libérateur  de  son  pays, 
mais  qui  doit  encore  être  regardé 
comme  un  des  plus  grands  bienfai- 
teurs du  genre  humain.  »  Père  d'u- 
ne nombreuse  famille,  sir  Robert 
a  eu  la  satisfaction  il'apprendre  que 
son  fils  aîné  s'est  distingué  en  plu- 
sieurs occasions  dans  l'Amérique 
méiidionale,  sous  les  ordres  du 
libérateur  Rolivar,  qui  a  pris  ce 
jeune  militaire  pour  un  de  ses 
aides-de-catnp.  Sir  Robert  Wilson, 
sous  un  extérieur  grave  et  froid, 
cache  une  âme  ardente.  Doué 
d'une  activité  extraordinaire,  dé- 
voué à  ses  amis,  nul  sacrifice  per- 
sonnel ne  lui  coûte,  quand  il  s'a- 
git de  les  servir,  ou  de  défendre 
mu:  cause  qu'il  croit  juste.  On  lui 
accorde  des  connaissances  très- 
étendues  en  mathématiques  ,  en 
physique  et  en  astronomie.  Outre 
l'ouvrage  sur  l'Egypte,  cité  phis 
haut ,  il  a  publié  :  i"  Recherches 
sur  l'étal  présent  des  forces  mi- 
litaires  de   l'empire   britannique  , 

18114  .  in-8°;  a"  Histoire  des  cam- 
pagnes de   Pologne,    en    1 8o(>   et 

iboj',  avec  des  remarques  sur  l'ar- 
mée russe ,  1811,  iu-/i"  ;  5"  Puis- 


a8a 


Vf  m 


satiçe  poUlique  et  militulrc  de  la 
liussie,  i^iy,  iii-S".  Ce  dernier 
ouvrage  a  eu  ciii.q  /'dilions,  et 
conlient  des  détails  exact*  et  aus- 
si étendus  qu'imporlans-,  sur  l'ac- 
croissement prodigieux  de  l'em- 
pire russe,  et  sur  les  dangers  dont 
cette  puissance,  dirigée  par  un 
prince  amhilieux  ,  pourra  mena- 
cer un  jour  l'Europe  entière. 

WILMPFEN   (te   baron  Feux 
de),  lieutenant-général,  meiribre 
di'  l'assemblée  conslituanle,  etc. , 
naquit,  en  ly^^y,  dans  nn  village 
sur  les  bords  du  Rhin.  Il  était  le 
plus  jeune  de  dix-huit  crifans  ,  is- 
sus d'une  f.uiiille  noble,  mais  pau- 
vre. Dès  l'âge  de  1 1  ans,  il  quitta 
la  maison  [)atern(;lle,  <  t  se  retira 
près  du  duc  de  Deux -Ponts  ,  qui , 
quelques  années  aj)rè'<,  ayant  levé 
un  régiment   pour  le  service  de 
France,  confia  au  jeune  de  >Yimp- 
len  une  enseigne,  honneur  dont 
il  se  montra  digne,  en  se  distin- 
guant dans  la  guerre  dite  de  sept- 
ans.  Il  passa  en   Corse  en  1768, 
étant  alors  capitaine  de  volontai- 
res. Ses  talens  et  son  courage  lui 
valurent  à  l'âge  de  aS  ans  le  grade 
de  lieutenant-colonel  et  la  croix 
de  Saint  Louis.  Nommé  comman- 
dant du  régiment  de  Bouillon,  il 
fit   la   guerre    de    l'indépendance 
américaine,  et  de  retour  en  Eu- 
roj-e ,  il  prit  part  aux   sièges   de 
Mahon  et  de  Cibraltar.   Sa  con- 
duite à  celle  dernière  affaire  fut 
des  plus  reuiaïquables.  Il  délendil 
pendant  treize  heures  les  lignes 
françaises,  que  les  Anglais  préten- 
daient brfder  comme   ils  avaient 
brOlé    celles    des    Espagnols.    Le 
brevet  de  brigadier  des  armées  du 
roi,  et  une  pension  de  mille  écus, 
furent  la  récompense  de  son  cou- 


WIM 

rage  et  de  ses  succès.  Il  vivait  re- 
tiré dans  SOS  terres,  avec  le  gra- 
de  de  maiéchal-de-camp ,   lors- 
que, en  1 789,  la  noblesse  de  Caen 
le  nomma  dé|tuté  aux  états-géné- 
raux.  La  minorité  ,  dont  il  faisait 
partie,  le  chargea  de  rédiger  la 
protestation    contre    la   majorité, 
qui  refusait  de  se  réunir  à  la  cham- 
bre dos  communes.   Cette  année 
même  ,    il    proposa    d'établir   en 
Franc»!    une    démocratie    royale. 
Membre  du  comité  militaire  qui 
fut  f(U'mé  sur  sa  proposition  ,   il 
fut   presque  toujours  chargé  des 
rapports   de  ce  comité,  et  rare- 
ment dans  l'assemblée    il  prit  la 
parole  sur  des  matières  étrangères 
aux  attributions  de  ce  mêiTie  co- 
mité. Lors  du  départ  du  roi  pour 
Varennes   (le  21   juin   1791)'  '^ 
demanda  et  l'assemblée  ordonna 
que  le  comité  militaire  serait  char- 
gé  de   la   défense   extérieure.    Il 
proposa  la  simple  suspension  de 
M.   de  Bouille,  prétendant  qu'il 
ne  pouvait  être  destitué  sans  ju- 
gement ;    réclama    contre   l'abus 
que  l'on  faisait  de  son  nom  pour 
proposer  des  mesures  ultra-léga- 
les, et  vers  la  fin  de  la  session, 
fit  adopter  tous  les  décrets  de  ju- 
ridiction et  de  code  pénal  mili- 
taires. Le  gouvernement  lui  con- 
fia, en  1792,  le  commandeu:ent 
de  ïhionville,  qui  fut  assiégée  au 
mois  de  septembre  de  la  même 
année  par  les  Autrichiens  et  les 
émigrés,  et  repoussa  vigoureuse- 
ment  leurs  attaques  durant  cin- 
quante-cinq jours.  Un  décret  dé- 
clara que  le  général  de  Wimpfen 
avait  lien  mérité  de  la  patrie.  Il 
refusa,  dit-on,  le  ministère  de  la 
guerre.  Devenu  commandant  de 
l'armée  des  côtes  de  Cherbourg  et 


■WIM 

de  la  place  de  ce  nom,  il  écrivit 
à  la  conA'cntion,  après  les  événe- 
mens  du  3i  mai  1795,  que  «  les 
corps  administratifs  de  Caen  a- 
vaicnt  fait  arrcler  comme  otage* 
lesrepréseiitans  Uommeel  Prieur, 
commissaires  à  l'armée,  pour  ré- 
pondre de  la  sûrelé  de  ceux  qui , 
détenus  à  Paris,  étaient  sous  les 
poignards  des  factieux.  »  Cette 
lettre  le  fit  décréter  d'accusation. 
Commandant  de  l'armée  départe- 
mentale qui  marchait  sur  Paris, 
afin  de  rétablir  la  véritable  repré- 
sentation nationale,  il  écrivit  à 
Custines  {voy.  ce  non))  pour  l'en- 
gager k  s'unir  à  lui  ;  il  adressa 
aussi  aux  dé[)artemens  méridio- 
naux une  lettre  imprimée  pour  les 
engager  à  seconder  ses  mouve- 
mens.  >Vimpfen  n'atteignit  pas 
son  but.  «  Sacrifié  par  M.  Pui- 
saye,  qui,  disent  les  auteurs  d'une 
biographie  étrangère,  avait  voulu 
s'emparer,  au  profit  du  royalisnie, 
d'im  mouvement  conçu  dans  le 
seul  intérêt  de  la  liberté,  il  fut 
défait  à  Vernon  ,  département  de 
l'Eure,  ù  la  tête  de  quelques  trou- 
pes,  peu  nonjbreuses  et  mal  dis- 
ciplinées, qu'il  avait  espéré  voir 
se  grossir  de  tous  les  ennemis  de 
la  tyrannie.»  Le  général  deWimp- 
fcn ,  obligé  de  prendre  la  fuite, 
trouva  un  asile  i\  Dayeux ,  oi'i  il 
vécut  entièrementignoré  jusqu'à  la 
rév(dulion  du  18  brumaire  an  8  (;) 
novembre  1799).  A  cette  époque, 
le  premier  consul  lionaparle  lui 
accorda  un  trailemenl  de  retraite, 
et  le  nomma  maire  de  la  commu- 
ne qu'il  habitait.  «  Il  existe  du 
baron  de  Wimpfen,  disent  les  au- 
teurs que  nous  avons  déjà  cités, 
des  ménïoires  manuscrits  très  cu- 
rieux sur  l'époque  du  3i  mai,  1" 


%IN 


a85 


et  2  juin  ,  où  il  démontre  jusqu'à 
l'évidence  que  le  royalisme  eut  la 
plus  grande  part  aux  événemens  de 
ces  journées  et  à  ceux  qui  les  sui- 
virent. » 

>VINDHAM  (William),  mi- 
nistre-d'état et  pair  de  la  (irande- 
Brelagne,  membre  du  parlement, 
etc.,  naquit  dans  le  comté  de  Nor- 
folk, fil  ses  études  à  l'universi- 
té d'Oxford  ,  et  passa  ensuite  sur 
le  continent.  De  retour  dans  sa 
patrie,  il  fit  partie,  comn)e  simple 
amateur  des  sciences,  de  l'expédi- 
tion qui  dt.'vail  chercher  un  pas- 
sage vers  leprdii  du  Nord.  N'ayant 
pu  résister  au  mal  de  mer,  il  re- 
tourna à  Londres  ,  et  y  maiiilesta 
avec  beaucoup  d'énergie,  ([uoique 
bien  jeune  alors,  son  méconten- 
tement de  la  guerre  que  l'Angle- 
terre faisait  à  ses  colonies  d'Amé- 
rique. Il  se  plaça  ainsi  parmi  les 
orateurs  populaires  et  les  IVi^hs 
les  plus  prononcés.  En  ijSS.  de- 
venu membre  du  parlement,  il 
s'y  lia  avec  le  célèbre  Fox  et  le> 
autres  mei-ibres  de  l'opposition, 
repoussa,  de  1789  a  1791.  les  doc- 
trines de  Pitt,  vota  «mi  faveur  des 
pouvoirs  illimités  demandés  pour 
le  prince- régent  [voy.  (iEORCES 
IV),  et  combattit,  en  1792,  ci>ntrc 
le  bill  de  la  loterie  et  la  traite  des 
noirs.  Ed.  Burke  déserta  le  parti 
de  l'opposition,  et  entraîna  avec 
lui  M.  AVintIham,  qui,  avouant 
li:uilemenl  sa  défection,  et  s'op- 
posant  à  la  réforme  parlementai- 
re, déclara  que  «quelque  étrange 
que  dût  paraître  sa  conduite,  les 
circonstances  étaient  telles  qu'il 
volerait  désormais  avec  ceux  dont 
il  avait  constamment  réprouvé 
les  opérations  ,  el  contre  ceux 
dont  les  opinions  avaient  été  jus- 


2  84  WIN 

qu'alors  en  harmonie  avec  les 
siennes.  »  Ministériel  Irès-pro- 
iioncé  et  ennemi  de  la  révolulion 
française,  ii  s'opposa  encore  et 
non  moins  vivement,  en  1793,  à  la 
proposition  de  Fox,  tendant  à  ce 
que  l'Anj^ltterre  fît  la  paix  avec  la 
France.  Il  termina  sa  motion  en 
protestant  que  «  l'intention  de 
l'Angleterre  n'élait  pas  de  donner 
à  ce  pays  une  forme  quelconque 
de  gouvernement,  mais  seule- 
ment de  renverser  son  adminis- 
tration actuelle,  avec  laquelle  il 
était  impossible  de  traiter.»  Peu 
après  l'ouverture  de  la  session  de 
1794,  il  devint  membre  du  con- 
seil privé  d'étal,  ayant  le  départe- 
ment de  la  guerre.  Il  ne  jouit  pas 
en  paix  de  sa  rapide  fortune.  On 
l'accusa  généralement,  et  avec  du- 
reté, d'avoir  «  déserté  le  parli  sté- 
»ri!e  de  l'opposition  pour  les 
wémoiumens  productifs  de  la 
«cour;»  leproches  qu'il  suppor- 
ta en  hon  ministériel,  c'est-à-dire 
en  continuant  à  toucher  ces  mê- 
mes émolumens,  et  à  déverser  la 
calomnie  sur  les  membres  les 
plus  marquans  de  la  révolution 
française,  entre  autres  le  général 
La  Fayette,  dont  Fox  prit  le  parti 
avec  toute  la  chaleur  de  sou  âme 
et  la  force  de  son  éloqiience.  M. 
AVindham,  en  ij^S,  fut  aus?i  en 
butte  à  des  reproches  d'une  aulre 
nature.  On  l'accu.sa  (l'êtie  l'au- 
teur du  désastre  île  Qi;iberon , 
pour  avoir  mi-  à  la  tête  de  l'expé- 
dition, au  lieude  M.  de  Son  hreuil, 
M.  de  Puisaye.  qui  n'était  pas  aus- 
si versé  dans  l'art  militaire.  En 
1797,  à  l'occasion  des  ciu)feren- 
res  à  établir  à  Lille  poiu-  la  paix, 
il  déclara  qu'elle  u'aïuait  jamais 
lieu  tant  que  la  royauté  ne  serait 


WIN 

pas  réiablie  en  France.  »  En  i^j)*}» 
il  reproduisit  A  la  chambre  des 
communes  son  opinion  pour  le 
rétablissement  de  la  royauté  en 
France,  «connue  étant  la  chose 
nia  plus  avantageuse  pour  les  iu- 
«térêls  de  la  Grande-Bretagne,  et 
«pour  l'exécution  parfaite  de  ses 
«projets.»  En  juin  1800,  il  de- 
manda qu'on  tolérât  le  papisme 
eu  Arigleterrre,  déclarant  qu'il 
craignait  moins  quatre  à  cinq  mil- 
le prêtres  français  que  les  doctri- 
nes républicaines;  en  novembre 
de  la  même  armée,  il  s'opposa  à 
ce  qu'on  prît  en  considération  la 
proposition  de  M.  Jones,  qui  vou- 
lait qu'on  mît  sous  les  yeux  des 
membres  de  la  chambre  une  co- 
pie de  la  lettre  de  l'amiral  Keith 
au  général  RIeber,  disant  que  «  si 
l'on  faisait  un  crime  aux  nïiuis- 
tres  d'avoir  donné  des  instructions 
qui  eussent  fait  rompre  la  con- 
vention d'Egypte ,  il  faudrait 
abandonner  toutes  les  conquêtes 
pour  ne  pas  arrêter  les  négocia- 
tions. »  Au  mois  de  décembre 
(1800),  il  essaya  de  justifier  les 
ministres  du  reproche  que  leur 
adressait  M.  Shéridan  de  n'avoir 
jamais  voulu  sincèrement  la  paix. 
En  180 1,  il  s'opposa  encore  à  tout 
traité  de  paix  avec  la  France.  Le 
parti  de  l'oppositioi»  triomphant 
enfin  des  doctrines  ministérielles, 
M.  Windham  et  ses  collègues  fu- 
rent forcés  de  donner  leur  démis- 
sion. Il  passa  à  la  chambre  des 
pairs,  «où,  disent  les  auteurs  d'u- 
ne biographie  étrangère,  il  dé- 
fendit avec  toute  la  chaleur  de 
l'intérêt  personnel,  le  bill  d'oubli 
{bill  of .indeinnity)  proposé  en 
faveur  des  hommes  publics,  quT 
auraient  pu  commettre   des  er- 


"WIN 

reurs  dans  l'aiTestalioa  ou  la  dé- 
icntion  des  personnes  suspeclées 
de  iiiauvaiscs  intentions,  et  prélen- 
dit que  celle  mfisiire  était  néces- 
saire pour  as«<urer  la  tranquillité 
et  inspirer  de  la  confiance  aux 
i'onclionnaires  qui  avaient  fait 
leur  devoir,  et  empêché  la  subver- 
sion de  leur  pays.  Les  approches 
de  la  pacification  avec  la  France 
semblèrent  raflerniir  encore,  s'il 
était  possible,  la  constance  de  son 
opposition  à  cette  mesure;  et  on 
le  vit  repousser  vivement  les  as- 
sertions de  M.  Tierney,  relalive- 
inent  aux  concessions  à  faire  à  la 
république  pour  avoir  la  paix,  en 
disant  hautement  que  sou  a^fran- 
di«>ement  devait  au  contraire  en- 
gager l'Europe  enlière  à  se  liguer 
contre  elle  pour  l'empêcher  de 
tout  envahir.  Depuis  celte  époque 
M.  VVindham  ne  laissa  passer  au- 
cuni;  occa-ion  de  dévelo[)per  les 
mêmes  princi|)e8,  et  sonna  cons- 
tamment l'alarme  sur  ce  qu'il  ap- 
pelait les  projets,  l'ambition,  les 
envahissemens  du  gouvernement 
français,  soulevant  sans  cesse  con- 
tre lui  les  cousidéralions  de  l'hon- 
neur et  de  l'intérêt  britarmique. 
Le  5o  octobre,  il  s'éleva  contre  les 
préliminaires  de  la  paix,  «{u'il  pré- 
senta comme  une  cause  de  deuil 
futur,  malgré  la  joie  universelle 
qu'elle  bemblait  exciter  alors,  et 
accusa  les  nouveaux  ministres 
d'iiuapacité,  en  répélaul  (|u»:  les 
vues  Je  la  France  étaient  d'en- 
chaîner la  Grande-Bretagne,  et  de 
la  réduire  à  l'état  d'impuissance 
dont  elle  avait  frappé  le  continent. 
La  conclusion  de  la  paix  ne  chan- 
gea point  les  idées  politiqties  de 
IM.  Witutham,  et  le  ministère  n'en 
fut  pus  mieux  traité  parlai.  Il  l'at- 


WIN 


285 


laqua  surtout  avec  la  dernière 
violence,  pour  avoir  proposé  la 
prorogation  du  parlement  dans 
un  temps  où,  selon  lui,  l'ambition 
démesurée  de  Napoléon  avait  pla- 
cé l'Angleterre  dans  un  danger 
jusque-là  sans  exemple;  et  à  la 
rentrée  du  parlement  (  le  4  "O" 
vembre  lîSoî),  il  se  livra  aux  pro- 
vocations de  guerre  les  plus 
pressantes  avec  toute  la  véhémen- 
ce de  son  caractère.  Il  continua 
d'êlre,  en  i8o5,  le  chef  de  la  nou- 
velle opposition,  et  la  guerre  s'é- 
tant  rallumée  dans  l'été  de  celle 
même  année,  ses  prédictions  sem- 
blèrent effectivement  s'accomplir 
et  ses  principes  trioiiipher.  Pitt 
nmurut  en  janvier  i8o6.  Le  por- 
tefeuille de  la  guerre  fut  rendu  à 
M.  >Vindham,  qui  aussitôt  propo- 
sa au  parlement  un  plan  de  dé- 
fense générale,  que  l'opposition 
atta(]ua  vivement,  et  qui  fit  naître 
une  grande  agitation  parmi  les 
militaires.  La  mort  de  Fox  entraî- 
na la  désorganisation  du  ministè- 
re. M.  Windham,  remit  son  por- 
tefeuille, et  simple  membre  du 
parlement,  il  signala,  en  1807,  les 
prétentions  exclusives  des  minis- 
tres, observant  «q^e  pour  moti- 
ver un  refus,  il  suffirait  au  roi 
d'invoquer  sa  conscience.  »  Il  at- 
taqua, en  1808,  le  u)inistëre  au 
sujet  de  la  conduite  du  gouver- 
nement relativement  au  Dane- 
marck  et  au  Portugal;  en  1809, 
il  signala  les  suites  funestes  de 
l'expédition  de  la  (]orogue.  L'an- 
névî  suivante,  au  mois  de  mai,  il 
succomba  à  une  opération  chirur- 
gicale. Les  auteurs  que  nous  avons 
déjà  cités  terminent  ainsi  leur 
notice  surce  ministre  :  <  M.^ind- 
ham,  disent-ils,  qui  passait  |^é-> 


a86 


WIN 


raleiuent  pour  exceller  duus  l'ar- 
guint'iUation ,  mettait  néanmoins 
tant  de  subtilité  dans  ses  raison- 
neintns  qu'il  mérita  le  nom  de 
métaphysicien.  Doué  d'une  sagaci- 
té remarquable,  et  d'une  grande 
lacilitc  d'expression,  il  maniait  le 
sarcasme  avec  une  rare  habileté, 
qui  le  plaçait,  sous  ce  rapport,  ù 
côté  des  athlètes  les  plus  redouta- 
bles de  la  chambre.  On  assure 
qu'il  jugeait  sévèrement  ses  com- 
patriotes, ou  du  moins  les  classes 
iulérieures,  qu'il  regardait  com- 
me inévitablement  condamnées  à 
une  brutalité  sauvage  ;  et  il  ex- 
primait cette  opinion  avec  la  vi- 
gueur et  l'originalité  qui  le  carac- 
térisaient. » 

WINSPEAllË  (David),  ex- 
avooat-général  à  la  cour  de  cassa- 
tion de  Naples  ,  né  dans  cette  ca- 
pitale en  1770,  fut  élevé  au  col- 
lège du  Salvatore,  et  apprit  les 
langues  savantes  sous  la  direction 
de  iMgr.  Rosini  (  voy.  ce  nom  ). 
Destiné  au  barreau,  il  s'y  serait 
perdu  dans  la  chicane  ,  s'il  n'avait 
puisé  en  lui-même  celte  sévérité 
de  principes  qui  est  le  préservatit'le 
plus  sûr  contre  la  corruption  de  ses 
propres  collègues.  Il  se  chargea  de 
quelques  procès,  mais  il  s'appli- 
qua surtout  à  examiner  les  sys- 
tèmes qui  avaient  enlanté  tant  de 
lois  souvent  contradictoires,  et 
rarement  d'accord  avec  les  be- 
soins réels  de  la  société.  Sa  ré- 
putation n'était  pas  encore  établie 
lorsqu'on  comptait  déjà  sur  ses 
talens.  Le  gouvernement  le  choi- 
sit pour  exercer  les  fonctions  d'a- 
vocat-fiscal auprès  de  l'adminis- 
tration des  postes.  M.  Winspeare 
répql^it  à  cette  marque  de  con- 
fiance, eu  assurant  les  intérêts  du 


WIN 

trésor  par  une  administration  sage 
et  éclairée.  Il  réforma  les  abus, 
punit  les  malversations  et  multi- 
plia les  expéditions  des  courriers 
pour  éviter  les  retards  toujours 
fâcheux  pour  les  particulier»  et 
pour  le  commerce.  Il  resserra  ainsi 
le  lien  des  provinces  avec  lu  ca- 
pitule, et  prépara  le  développe- 
ment d'un  pays  que  l'œil  du  voya- 
geur croyait  civilisé,  parce  qu'il 
y  aperc«ivait  des  ruines  iniposan- 
tes.  Tandis  que  M.  Winspeare  é- 
tait  occupé  de  ces  améliorations, 
le  royaume  de  Naples  fut  envahi 
(en  i7;)9)  par  une  armée  fran- 
çaise qui  venait  y  proclamer  la 
république.  Le  père  de  ce  ma- 
gistrat, qui  était  alors  préfet  en 
Calabre,  remplit  dans  cette  cir- 
constance les  devoirs  de  l;i  fidé- 
lité et  de  l'honneur.  Cette  con- 
duite lui  attira  les  éloges  des  hon- 
nêtes gens  ,  mais  elle  exposa  sa 
famille  à  la  persécution  des  exa- 
gérés. Son  fils  fut  arrêté  et  retenu 
comme  otage  dans  le  fort  Saint- 
Elme.  Au  retour  du  roi  de  Sicile, 
il  reprit  sa  place  dans  la  magis- 
trature, et  choqué  des  abus  qui 
régnaient  au  barreau,  il  se  pro- 
posa de  les  flétrir.  Il  fit  un  essai 
heureux  de  ses  talens,  en  publiant 
une  dissertation  sur  les  Confes- 
sions spontanées  des  coupables,  qui 
devait  être  suivie  par  d  autres 
mémoires  analogues.  AJais  en 
i8o(>,  le  royaume  passa  de  nou- 
veau sous  la  domination  françai- 
se, et  M.  Winspeare,  qui  vit  dis- 
paraître avec  les  anciennes  insti- 
tutions la  plupart  des  désordres 
qu'il  avait  voulu  attaquer,  renon- 
ça entièrement  à  son  travail.  Lors 
de  l'organisation  donnée  aux  tri- 
bunaux, en  1809,  il  fut  nommé 


WIN 

substitut  du  procureur-général  de 
la  cour  d'appel  de  Nnples,  avec 
le  titre  de  maître  de  requêtes  au 
con!<eil-d'état  ;  et  en  i8iu,  il  lut 
élevé  au  rang  d'à  vocat-géiiéral  de 
la  cour  de  cassation.  Profondé- 
ment versé  dans  l'ancienne  et 
dans  la  moderfie  législation  ,  con- 
naissant tous  les  ressorts  du  sys- 
tème judiciaire  et  administratif, 
il  ne  lui  fut  pas  dillicile  de  saisir 
l'esprit  des  nouvelles  lois.  Ses  con- 
clusions à  la  cour  de  cassation, 
ses  rapports  à  la  commission  du 
contentieux  et  au  conseil-d'état, 
pourraient,  s'ils  étaient  recueil- 
lis ,  être  mis  ulilement  sous  les 
yeux  de  ceux  qui  sont  appelés  à 
décider  de  la  fortune  et  de  la  vie 
des  citoy«;ns.  Mais  ce  qui  rend  M. 
Winspeare  digne  de  la  reconnais- 
sance publique,  c'est  le  zèle  qu'il 
a  njontré  dans  r«xéculion  des  lois 
relatives  à  l'abolition  delà  féoda- 
lité. Malgré  les  coups  portés  aux 
privilèges  vers  la  fin  du  dernier 
siècle,  les  seigneurs  n'avaient  pas 
moins  conservé  leurs  usurpations, 
et  opposaient  un  obstacle  invinci- 
ble aux  progrès  de  la  civilisation 
et  de  l'agriculture.  Des  propriétés 
très-étendues,  enclavées  dans  l'en- 
ceinte des  fiefs,  étaient  accablées 
de  dîmes,  de  corvées  et  de  toutes 
ces  cjiarges  onéreuses  et  avilissan- 
te* que  la  forée  avait  Imposées 
û  la  faiblesse.  Les  biens  commu- 
naux étaient  passés,  presqu'en  to- 
talité ,  dans  les  mains  des  barons , 
par  des  transactions  simulées  et 
quelquefois  frauduleuses.  La  prag- 
matique de  i65o,  qui  en  avait 
ordonné  la  réintégration  ,  était 
rotée  sans  efl'et  ,  cl  ces  grands 
propriétaires  continuaient  ùt  jouir 
du  Iruit  de  leurs  spoliations,  qu'ils 


>Y1N 


aS? 


ne  cessaient  d'augmenter  tantôt 
par  la  ruse  et  tantôt  par  la  violence. 
Lescbamps  et  les  forêts,  les  étangs 
et  les  rivières,  les  bestiaux  et  les 
hommes,  tout  était  devenu  une 
matière  corvéable,  et  bien  souvent 
une  propriété  exclusive  du  sei- 
gneur, qui  étendait  aussi  ses  droit» 
prohibitifs  sur  les  arrosemens,  les 
moulins,  les  marhines  hydrauli- 
ques, les  engins,  la  pêche,  etc. 
De  prétendues  créances  absor- 
baient le  reste  du  patrimoine  pu- 
blic, condamné  souvent  à  payer 
des  contributions  levées  sur  le» 
allodiaux  du  feudataire.  A  ces  dé- 
sordres,  déjà  graves  en  eux-mê- 
mes, et  qui  pesaient  presque  éga- 
lement sur  le  royaume,  il  faut 
ajouter  ceux  qu'une  longue  habi- 
tude avait  consacrés  dans  certai- 
nes provinces  Dans  la  terre  d'O- 
tranle,  par  exemple,  les  barons 
prélevaient  la  dîuie  sur  tous  les 
produits  naturels  et  industriels. 
En  plusieurs  endroils  des  Cala- 
bres,  ils  s'appropriaient  les  pâtu- 
rages des  années  vides,  dans  les- 
quelles les  terres  n'étaient  point 
cultivées;  et  comme  dans  les  pays 
stériles  ces  intervalles  de  repos  se 
prolongeaient  quelquefois  jusqu'à 
cinq  années,  il  en  résultait  que  le 
baron  possédait  un  fonds  pendant 
un  f/uiiH/uennium ,  et  ne  le  livrait 
au  propriétaire  direct  qu'une  fois 
tous  les  six  ans.  Plusieurs  colo- 
nies grecques  ou  albartaises,  aux- 
quelles on  avait  accordé  ur»  sol 
pour  s'y  établir,  étaient  peu  à  peu 
tombées  sous  le  plus  dur  escla- 
vage ,  et  on  aurait  dit,  en  le!) 
voyant,  que  c'étaient  plutôt  des 
ennemis  vaincus  que  des  hôtes 
paisibles.  Cesempiétemens  avaient 
donné  lieu  ù  un  grand  nombre  de 


288 


WIN 


procôs  ,  quelques  -  uns  desquels 
reuiorilaient  jusqu'au  berce. lU  de 
la  monarchie.  Les  représentniis 
des  coniujunes  invoquaient  la  pru- 
tection  des  lois  pour  être  A  l'abri 
de  ces  vexations;  ils  demandaient 
raffranchis.->emefit  de  leurs  pro- 
priétés, l'annulation  des  taxes  et 
des  délies  arbitraires,  l'autorisa- 
tion de  pouvoir  travailler  dans  b^s 
terres  communales.  Les  barons 
éliidaienl  ces  réclamations,  en  op- 
posant la  faveur,  l'inlrigue  ,  et 
surtout  la  prescription.  La  loi  pour 
l'abolition  de  la  ieodalilé,  procla- 
mée en  1807,  en  supprimant  les 
droits  seigneuriaux,  avait  statué 
de  ne  respecter  que  ceux  qui  pro- 
venaient d'un  titre  légitime  ,  et 
ne  s'opposaient  pas  à  l'émancipa- 
tion des  communes.  On  créa  une 
commission  de  jurisconsultes  char- 
gés d'examiner  les  prétentions  ré- 
ciproques des  barons  et  des  vas- 
saux, et  qui,  au  moyen  d'une 
procédure  simple  et  expéditive, 
devait  mettre  lin  à  leurs  débals, 
en  les  jugeant  définitivement,  et 
sans  appel.  M.  AVinspeare,  qui  l'ut 
nommé  procureur-général  «le  cet- 
te commission,  déploya  autant  de 
fermeté  que  d'intelligence  pour 
vaincre  les  difiicultés  sans  nom- 
bre qui  menaçaient  de  faire  avor- 
ter une  disposition  aussi  salutaire. 
En  moins  de  trois  ans,  tous  les 
procès  furent  terminés,  et  il  ne 
resta  plus  qu'à  exécuter  les  arrêts 
de  la  commission.  On  envoya  des 
commissaires  dans  les  provinces, 
et  pour  donner  de  l'ensemble  à 
leurs  opérations,  il  leur  fut  en- 
joint de  s'adresser  au  procureur- 
général  dans  tous  les  cas  qui  exi- 
geaient de  nouveaux  éclaircisse- 
meus.  On  investit  ces  agens  du 


WIN 

gouvernement  des  pouvoirs  le» 
plus  étendus  ;  on  imprima  ;'i  leurs 
ordonnances  le  caractère  des  bus, 
et  par  des  transactions  aussi  «qui- 
lables  que  nécessaires,  on  réussit 
à  soustraire  les  communes  à  tou- 
te dépendance  de  leurs  ancien* 
seigneurs.  Une  masr.e  considéra- 
ble de  biens  naiinnaux  fut  parta- 
gée entre  les  classes  les  j-.lus  indi- 
gentes ,  et  le  royaume  vit  s'élever 
sur  «on  sol  une  nouvelle  généra- 
tion de  propriétaires,  qui,  déga- 
gés de  tout  asservissement,  pro- 
mettaient de  le  fertiliser  par  leur 
industrie.  Le  gouvernement  dé- 
cora M.  Winspeare  du  litre  de  ba- 
ron et  de  la  croix  de  commandeur 
de  l'ordre  des  Deux-Siciles  :  vou- 
lant perpétuer  le  souvenir  d'une 
révolulion  aussi  utile,  il  le  chargea 
en  même  temps  d'écrire  VHis- 
loire  des  abus  féodaux  dans  le 
royaume  de  Naples.  Ce  savant  ma- 
gistrat, qui  avait  pris  une  part  si 
active  à  leur  destruction,  s'enga- 
gea à  rendre  compte  au  public 
des  principes  qui  avaient  présidé 
aux  travaux  de  la  commission.  Il 
est  à  regretter  que  cet  ouvrage, 
dont  le  premier  volume  parut 
en  181 1,  n'ait  pas  été  continué, 
malgré  l'intérêt  qu'il  fit  naître. 
Dans  une  introduction  remplie 
d'aperçus  heureux,  l'auteur  don- 
ne une  idée  générale  de  la  féoda- 
lité, et  s'arrête  à  déterminer  le 
caractère  de  celle  qui  existait  à 
Naples.  Il  en  marque  l'origine, 
les  progrès ,  la  décadence  et  la 
chute.  C'est  un  tableau  dessiné  à 
grands  traits,  et  qui  annonce  le 
mérite  su{)érieur  du  peintre.  En 
1814,  M-  Winspeare  fut  mis  à  la 
tête  du  ministère  de  l'intérieur  du 
gouvernement,  établi  provisoire- 


>V1N 

ment  pour  l'iidiuinistralion  des 
clals  romuin^.  L'année  suivante,  il 
s'éloigna  v olonlaiieiu«ntdu royati- 
me,  et  entreprit  un  voyage  en  Ita- 
Jie,  en  Frai. ce  et  en  Allenii(g!ie. 
Il  pasî'a  quelque  temps  à  Dresde, 
où  il  conçut  le  plan  d'un  ituvrage 
sur  l'Origine  des  nations,  qu'il 
n'a  pa«i  encore  publié.  Il  prtpara 
nm^ï  une  traduction  italienne  du 
livre  des  lois  tie  Cicéron  ,  qu'il 
enrichit  de  plusieurs  observalioiis 
sur  les  passages  lis  plus  diiUciles. 
ilappelé  A  Naples  vers  la  fin  de 

1819,  il  rentra  dans  l'ordre  des 
vocats  ,  et  ne  tarda  pas  à  couip- 

ler  parmi  ses  cliens  ceux  uiêtiie 
:|ue  la  défense  des  coinn)unes  a- 
\ait  aigris  contre  le  juge,  sans 
cesser  d'estimer   le   citoyen,   iin 

1820,  lors  des  derniers  événe- 
niens  de  N.iples,  il  fut  appelé  par 
le  [iriuce  héréditaire  <\  siéger  par- 
mi les  membres  de  la  junte  pro- 
visoire du  gouvernement  consti- 
tutionnel. Il  fut  aussi  chargé  de 
traiter  avec  le  nonce  du  [tape  pour 
mettre  en  exécution  If  concordat 
stipulé  en  1818.  Au  retour  du  roi 
«le  Laybach,  M.  AVmspeare  rou- 
vrit son  cabinet,  où  la  faveur  du 
public  le  dédommage  depuis  ce 
temps  de  la  disgrâce  du  pouvoir. 

WliNTER(N.  de;,  amiral  hol- 
landais, créé  maréchal  et  comte 
de  Hiiissen  par  le  roi  Louis  Na- 
poléon, mourut  en  i8i5,  à  Paris, 
au  service  de  France  ,  où  il  était 
depuis  1810,  par  suite  de  la  réu- 
nion de  la  Hollande  à  lenijtire 
français.  Né  avec  un  grand  amour 
de  l'indépendance,  M.  de  Winter 
manifesta  la  franehise  et  la  no- 
blesse de  son  caractère  dé»  sa  jeu- 
nesse, et  préféra,  par  goût,  le 
M-rvice  de  mer.  Il  concourut  ù  lu 


WIN 


289 


splendeur  de  la  marine  de  sa  pa- 
trie par  ses  talens  et  son  courage. 
Déjà  lieutenant  en  1787,  il  vit, 
comme  Hollandais  ,  sa  carrière 
bornée  par  suite  oe  la  contre -ré- 
volution qui  rétablit  l'autorité  du 
stathouder.  H  se  réfugia  dans  les 
armées  françaises,  où  il  >e  fit  re- 
maïqucr,  et  où  il  gagna  le  grade 
de  gênerai  de  biiga  i»-,  avec  lequel 
il  rentra  dans  ses  fiyns  en  179CJ. 
Le  gouvernement  balave  le  nom- 
ma vice-amiral  i\v  ses  flottes.  La 
position  de  l.i  marine  hollandaise 
était  alors  tnut-à-fait  critique.  i>J. 
deWi(»ler,  long-temps  bloq'ié  dans 
le  lextd  par  les  Anglais,  reçut,  an 
commencement  d'octobre  1797, 
l'ordre  formel  de  sortir  et  d'atta- 
quer l'ennemi.  Il  mit  à  la  voile. 
Le  1 1  de  ce  mois,  il  livra  bataille 
■\  la  flotte  angl.nse;  mai»  «n  bra- 
voure, ses  talens,  son  adresse,  ne 
purent  le  saii  ver  d'une  défaite  que 
lovitefois  il  fit  payer  cher  à  l'en- 
nemi, dans  les  mains  duquel  il 
tomba  de  sa  perscmne.  (Conduit  à 
Londres,  il  y  fut  traité  avec  dis- 
tinction, et  par  suite  échangé.  II 
conserva  une  grande  influence 
dans  la  république  batave,  fut 
cotnbléde  faveur;»  par  le  roi  Louis, 
et.  après  la  réunion  de  sa  patrie  à 
la  Frar)ce,  distingué  par  l'empe- 
reur Napoléon.  Les  re?tes  de  cet 
amiral  lurent  déposés  avec  tous 
les  honneurs  militaires  au  Pal)- 
tbéon  français,  redevenu  église 
de  Sainte-Geneviève. 

>VlNT/JNGEliODE  (le  comte 
DE  )  ,  général  et  aml'.assadeur  rus- 
se, naquit  dans  le  Wurtemberg, 
et  fut  admis  très-jeuite  encore  au 
service  de  Russie,  où  il  parvint 
rapidement  aux  premiers  grades 
militaires.  Il  devint  général  aide- 
»9 


aj)0 


WIT 


de-oamp  et  chambellan  de  l'em- 
pereur.  Ses  connaissance»  diplo- 
matiques le   firent  nommer,  au 
mois  de  juin  i8o5,  ambassadeur 
extraordinaire    près    du    roi    de 
Prusse ,   afin  de   déterminer   ce 
prince  à  prendre  pari  à  la  coali- 
tion contre  la  France.  Il  passa  en- 
suite à  Vienne ,  et  y  hâta  la  con- 
clusion du  traité  entre  l'Autriche 
et  l'Angleterre.  Les  hostilités  en- 
tre la  France ,  la  Russie  et  ses  al- 
liés ayant  éclaté  peu  après  (  sep- 
tembre i8o5),  il  suivit  l'empe- 
reur de  Russie  dans  le  voyage  que 
ce  prince  fit  en  Allemagne,  et  y 
dirigea  les  opérations  des  armées 
russes  dans  ce  pays.  Au  mois  de 
novembre,  après  la  bataille  d'Hol- 
labrun,  en  Moravie,  il  lut  chargé 
de  négocier  en  faveur  du  corps 
d'armée  commandé  par  le  géné- 
ral   Kutusow,  un  armistice  que 
l'empereur    Napoléon    ne    ratifia 
pas  ,  les  pouvoirs  de  M.  de  "Winl- 
zingerode  n'ayant  point  été  jugés 
suffisans.  Cet  oflicier-généra-!,  qui 
ne  quittait  pas  l'empereur  Alexan- 
dre, se  trouva  à  la  bataille  d'Aus- 
terlitz,  où  il  faillit  être  fait  prison- 
nier. Devenu  général  de  cavale- 
rie, il  suivit  son  souverain  dans 
la  campagne  de  France,  en  1814 
et   i8i5 ,  et  mourut,   le   17  juin 
1818,  à  Wisbaden,  près  de  Franc- 
fort, où  il  s'était  rendu  pour  y 
rétablir  sa  santé.  ^ 

^YITHBREAD  (  Samuel),  cé- 
lèbre chef  de  l'opposition  dans  le 
parlement  anglais,  naquit  à  Lon- 
dres en  1758.  Son  père,  l'un  des 
principauxnégocians  de  celte  ville, 
et  propriétaire  d'une  brasserie  im- 
mense, lui  fit  donner  une  éduca- 
tion très-soignée;  c'était  son  fils 
unique.  Le  jeune  Wilbbread  par- 


WIT 

courut  l'Europe  avec  son  précep- 
teur, l'historien  Coxe,  et  A  son  re- 
tour dans  sa  patrie,  il  épou!>a  ^a 
sœur  de  lord  Grey,  membre  dis- 
tingué de  la  chambre  des  pairs. 
Deux  ans  après,  en  1790,  les  élec- 
teurs du  bourg  de  Bedfort  l'élu- 
rent au  parlement.  Dès  son  dé- 
but, Samuel  Withbread  s'annonça 
comme  un  des  metnbres  les  plus 
prononcés  du  parti  anti-ministé- 
riel. La  traite  des  noirs  lui  fournit 
bientôt  l'occasion  de  montrer  le 
plus  grand  zèle   contre  ce  trafic 
odieux,  qu'il  parvint  à  faire  ces- 
ser. Ami  de  la  France   républi- 
caine, il  s'opposa  vivement,  en 
1795,   à   la   guerre  contre  celte 
puissance  ,  démontrant  avec  un 
rare  talent  combien  celle  guerre 
était  injuste  et  politiquement  inu- 
tile ;  dans  toutes  les  occaf^ions ,  il 
vota  ensuite  pour  la  cessation  des 
hostilités.   En  vain  les  arguties  et 
les  sarcasmes  des  appuis  du  mi- 
nistère s'efTorcèrenl-ils  de  l'éloi- 
gner do  la  cause  génére<ise  qu'il 
avait  embrassée;  il  fut  inébranla- 
ble et  non   moins  courageux  en 
combattant  en  faveur  des  malheu- 
reux déportés  à  Botany-liey,  qui , 
également  ennemis  de  la  guerre, 
avaient  en   outre   demandé  avec 
non  moins  d'énergie   la  réforme 
du  parlement.  Il  fut  chargé  ,  en 
i8o5,  d'accuser  publiquement  de 
malversations   lord   Melville.    Sa 
conduite  à  celte  occasion  étonna 
même  les  partisans  des  ministres, 
par  la  force  et  en  même  temps  la 
sagesse  qu'il  mit  dans  ses  nom- 
breuses accusations.  Jamais,  dans 
le  ministère  qui  succéda  à  celui  de 
"W.  Pitt,  il  n'approuva,  bien  que 
son  beau-frère,  lord  Grey,  fût  un 
des  directeurs  de  la  nouvelle  ad- 


ministralion  ,  que  les  principes 
qu'il  professait,  la  plus  exacte  jus- 
tice. Eh  1807,  il  s'occupa  de  l'a- 
tnélioratioti  des  lois  sur  les  pau- 
vres, et  toujours  l'ami  fidèle,  mais 
sage  et  éclairé  de  la  France,  il  se- 
condait de  tout  son  pouvoir  les 
n»';gocialions  de  paix  entamées  par 
Fox,  lorsque  la  mort  dece  ministre 
fit  évanouir  les  espérances  des  hom- 
mes sages  des  deux  nations.  Les 
successeurs  de  Fox  ayant  convo- 
qué un  nouveau  parlement,  M. 
Wilhbread  fit  une  adresse  énergi- 
que aux  électeurs  de  Bcdford,  où 
il  démontrait  le  danger  de  celle 
mesure,  et  rappelait  tout  ce  que 
le  parlement  précédent  avait  tait 
«  d'utile  et  de  mémorable.  »  Dans 
l'impuissance  sous  le  nouveau  mi- 
nistère de  l'aire  le  bien  qu'il  se 
proposait,  il  tourna  ses  vues  vers 
le  pian  d'instruction  de  la  classe 
indigente.  Il  ne  fut  pas  plus  heu- 
reux; toutes  ses  propositions  é- 
chouèrcnt,  quoique  généralement 
approuvées.  Partout  les  ministres 
repoussent  la  lumièie  dont  on 
veut  faire  jouir  les  peuples.  Cette 
même  année  (1S07) ,  il  combattit 
le  bill  de  port  d'armes  et  de  droit 
de  visite,  et  le  qualifia  <>  d'oppres- 
seur et  de  tyranniqiu;.  »  En  1808,  il 
fut  l'im  des  plus  véhémens  désap- 
probateurs de  l'atroce  incendie  de 
Copenhague  et  de  la  spoliation  de 
la  flotte  danoise.  C'est  ainsi  qu'à 
cette  occasion  il  apostropha  les 
ministres  :  «  Pour  avoir  voulu 
conquérir  quinze  mauvaises  car- 
casses de  vaisseau  ,  vous  avez , 
dit-il,  attiré  sur  la  nation  anglaise 
la  haine  invétérée  des  Danois,  ses 
anciens  et  fidèles  alliés.  »  L'année 
suivante  (1809),  il  attaqua  encore 
«ivec  l.i  même  indépendance  les 


WIT 


agi 


ministres  au  sujet  de  la  guerre 
avec  l'Amérique;  il  les  combattit 
de  nouveau  quelques  mois  après 
relativement  aux  malheureuses 
expéditions  de  Flessingue  et  de 
la  Corogne,  et  demanda  par  suite 
un  comité  d'enquête.  Il  blâma 
non  moins  fortement  l'arrestation 
de  sir  Francis  Burdett  et  les  meur- 
tres qui  avaient  eu  lieu  dans  cette 
circonstance,  rappelant  avec  la 
plus  grande  énergie  les  fautes  et 
les  mesures  arbitraires  du  gou- 
vernement. Du  parti  du  prince  de 
Galles  {voy.  Georges  IV)  dans  la 
question  de  la  régence,  il  fut  un 
des  plus  redoutables  membres  de 
l'opposition  contre  ce  prince  (de- 
venu roi  ) ,  à  l'occasion  de  la  con- 
duite de  la  couronne  envers  la 
princesse  Caroline,  épouse  du  mo- 
narque {voy.  Caroline).  Lors  do 
l'abdication  de  l'empereur  Napo- 
léon ,  en  i8i4j  il  censura  avec 
amertume  la  conduite  du  congrès 
de  Vienne;  plus  tard,  il  soutint 
Tindépendauce  des  Norwégiens 
contre  l'oppression  de  la  Suède , 
et  déplora  hautement  le  partage 
de  la  Saxe  et  de  la  Pologne.  Apre» 
b;  retour  de  Napoléon  de  l'île 
d'Elj^e,  en  mars  i8i3,  il  «  s'éleva» 
disent  les  auteurs  d'une  Biojrra- 
phie  étrangère,  contre  la  déclara- 
lion  des  alliés,  et  manifesta  le  dé- 
sir que  l'Angleterre  ne  rentrât  pa» 
dans  la  coalition,  etc.  ,  etc.  »  Une 
existence  politique  si  remarqua- 
ble fut  terminée  par  la  plus  dé- 
plorable catastrophe  ;  soit  qu'il 
nourrît  un  chagrin  profond,  dont 
la  cause  est  demeurée  inccmnue, 
soit  que,  commi;  on  l'.i  prétendu, 
ses  travaux  mullipliés,  tant  com- 
merciaux que  parlementaires, eus- 
sent altéré  sa  santé,  puis  sa  rai- 


uija 


wir 


son,  on  le  trouva,  le  6  juillet 
i8i5 ,  mort  dans  son  cabinet ,  où 
il  s'était  coupé  la  gorge  avec  un 
rasoir;  l'esprit  île  parti  n'euipêcha 
pas  les  ministériels  de  déplorer 
celte  perte  cruelle  avec  presque 
autant  d'amertume  que  le  fit  fop- 
positioii  elle-même,  qui  perdait 
dans  Wilhbread  l'un  de  ses  plus 
puissans  organes.  Si  en  effet  quel- 
ques orateurs  dans  ce  parti  le 
surpassaient  par  l'éclat  de  leur 
éloquence,  nul  ne  possédait  à  un 
plus  haut  degré  ce  grand  sens , 
cette  logique  mille  et  vigoureuse 
qui  n'entraîne  pas  sans  doute  avec 
autant  de  rapidité  que  les  presti- 
ges d'tme  élocution  brillante, mais 
qui  opère  une  conviction  durable, 
renforcée  d'ailleurs  de  toute  l'es- 
time qu'inspire  la  personne  de  ce- 
lui qui  parle.  II  emporta  surtout 
les  regrets  des  pauvres  et  des  op- 
primés ,  dont  il  s'était  constam- 
ment montré  le  défenseur  et  le 
soutien.  » 

WITHERSOON  (Jean)  ,  mem- 
bre du  congrès  américain  et  pré- 
sident du  collège  de  New-Jersey, 
naquit  à  Yester ,  près  d'Edim- 
bourg, en  Ecosse,  vers  1722.  Il 
fitses  études  à  l'université  d'Edim- 
bourg ,  obtint  dos  dispenses  fî'âge 
pour  prêcher  l'évangile,  prit  les 
ordres,  cl  exerça  successivement 
son  ministère  à  Dundee,  à  Du- 
blin et  à  Rotterdam.  Son  mérite 
l'ayant  fait  connaître  dans  les  con- 
trées éloignées,  il  céda  aux  ins- 
tances qui  lui  furent  adressées  de 
l'Amérique,  et  pnrlit,  en  1768, 
avec  sa  famille  pour  Prince-Town, 
dans  l'état  de  New-Jersey,  où  il 
se  fixa.  Dès  son  arrivée,  il  obtint 
ia  direction  d'un  séminaire  qu'il 
avait  rendu  florissant  et  célèbre, 


WIT 

lorsque,  par  suite  de  la  révolution 
au)éricain«,  il  fut  privé  de  cet  em- 
ploi; mais  ses  nouveaux  conci- 
toyens, qiu*  appréciaient  son  mé- 
rite et  sa  droiture,  le  nommèrent 
membre  de  la  convention  ,  où  il 
justifia  les  espérances  qu'il  avait 
données.  En  1776,  il  fut  envoy; 
au  congrès  en  qualité  de  repré- 
sentant des  Etats-Unis.  Les  nié- 
ujes  lalens,  unis  aux  mêmes  qua- 
lités morales,  attachèrent  hono- 
rablement son  nom  à  la  déclara- 
tion de  l'indépendance.  Ses  fonc- 
tions législatives  ne  l'avaient  point 
éloigné  de  l'enseignement  théo- 
logique, et  son  collège  ayant  été 
rétabli,  il  en  devint  le  présideni. 
Le  désir  d'améliorer  cet  établis- 
sement le  fit  passer  en  Angle- 
terre ;  sa  démarche  n'ayant  pa< 
eu  de  succès,  il  repartit  pour 
New -Jersey.  Entièrement  livré 
depuis  cette  époque  à  l'enseigne- 
ment et  à  l'exercice  de  son  minis- 
tère, il  a  continué  jusqu'à  sa  mort, 
arrivée  en  1794?  i  jouir  de  la  plus 
haute  estime.  Nous  empruntons 
la  fin  de  cet  article  à  l'auleur  d'une 
notice  sur  cet  honorable  citoyen. 
»  Le  collège  de  Witherspoon  ,  dil 
l'auleur  de  celte  notice,  lui  est 
redevable  de  services  signalés,  car 
il  a  rendu  les  études  littéraire^ 
plus  libérales,  plus  profondes  e> 
plus  étendues.  Il  était  fait  eu  tout 
pour  produire  une  importante  ré- 
volution dans  le  système  de  l'étiu- 
cation ,  et  on  croit  même  qu'il  fut 
le  premier  qui  porta  dans  le  Nou  - 
veau-Monde  le  germe  de  ces  doc- 
trines philosophiques  que  le  doc- 
teur Reid  a  développées  depuis 
avec  tant  de  succès.  Witherspoon, 
simple  dans  sa  manière  comme 
prédicateur,  orateur  grave,  nuble 


^V1T 

imposant ,  quoiqu'il  ne  fût  jias 
ircs-aDimé,  était  pourtant  entraî- 
nant, et  il  était  presque  impossi- 
ble de  l'ontentlre  sans  ntlenlion  : 
l'anecdote  suivante  donnera  aussi 
une  idée  de  la  tournure  de  son 
fspril.  «  Quand  l'armée  de  lîui- 
j^oyne  lut  prise  dan.«  Saraloga  ,  le 
}:énéral  Gates  en  envoya  la  nou- 
\file  au  congrès  par  un  de  ses 
aides-de-camp,  qui  s'amusa  en 
route,  et  n'arriva  à  Philadelphie 
qu'après  que  le  bruit  de  cette  vic- 
toire y  était  déjà  répandu.  Le  con- 
grès y  suivant  la  coutume  ,  voulut 
donner  au  messager  une  marqne 
lie  sa  satisfaction,  ei.  un  membre 
proposa  de  lui  otlVir  une  épée  ri- 
<  bernent  oruée  ;  mais  Withers- 
poon,  faisant  malignement  allu- 
sion à  sou  peu  de  diligence,  de- 
manda qu'au  lieu  d"une  épée  on 
lui  donnât  des  éperons  d'or.  » 
Comme  autour,  il  s'est  placé  au 
premier  rang  ,  et  a  écrit  sur  la 
politique,  la  morale,  la  littéra- 
ture et  la  religion ,  avec  un  talent 
remarquable  :  il  s'est  surtout  dis- 
tingué dans  ses  débats  polémiques 
avec  les  ministres  qui  soutenaient 
les  droits  des  seigneurs  au  détri- 
ment de  ceux  du  peuple  dans  les 
promotions  ecclésiastiques ,  et  les 
a  combattus  souvent  avec  avan- 
tage. » 

WITHWORTFI  (  LORD  Char- 
I.F.S  ),  ambassadeur  anglais,  che- 
valier de  l'ordre  du  Bain,  etc. ,  en- 
tia  de  bonne  heure  dans  la  carrière 
<liplomatique,  et  se  rendit,  en 
1^85  ,  :\  Varsovie  en  qualité  d'en- 
voyé extraordinaire  près  du  roi 
Slanislas-Auguste  {voy.  ce  nom). 
De  Varsovie,  il  passa,  en  17H8, 
il  Saint-Pétersbourg,  revêtu  des 
mêmes   fondions.     Ses    services 


WIT  293 

dans  ces  deux  missions  lui  valu- 
rent, au  mois  de  novembre  l'Qo, 
la  décoration  de  l'ordre  du  Bain  , 
que  l'impératrice  Catherine  II  lui 
remit  an  nom  du  roi  d'Angleterre. 
Cette  princesse  ajouta  à  celte  fa- 
veur le  don  de   l'épée  dont  elle 
s'était   servie    pour   lui   conférer 
l'ordre,  et  qui  était  estimée  4,000 
roubles.  La  faveurdonl  lord  Wilh- 
worth  jouissait  à  la  cour  de  Rus- 
sie aplanit  beaucoup  les  difficul- 
tés qu'il  aurait  j)u  rencontrer  dans 
la  négociation  d'un  traité  d'allian- 
ce entre  les  cabinets  de  Londres, 
de  Saint-Pétersbourget  de  Vienne, 
traité  qu'il  signa  en  i7<)5.  Deux  ans 
après,  il  obtint  de  Paul  I",  qui  ve- 
nait de  succéder  à  Calhrrine  II, 
la  ratification  d'un  Jrai(é*de  com- 
merce entre  ce  souverain  et  l'An- 
gleterre. Celte  même  laveur  dont 
lord  "WiihAvorth  avait  joui  à  Saint- 
Pétersboyrg     augmenta     encore 
sous  le   nouveau  règne,  et  l'em- 
pereur Paul  I"  sollicita  de  Georges 
III  la  pairie  pour  cet   ambassa- 
deur.  Il  venait  d'en  recevoir  la 
nouvelle  lorsque   l'empereur   lui 
fît  donner  l'ordre  de  ne  plus  pa- 
raître à  la  cour.  Il  obéit,  et  par- 
tit pour  Londres  presque  sur-le- 
champ.  En  1803,  après  la  conclu- 
sion du  traité  d'Amiens  ,  il  vint 
en  France  en  qualité  d'ambassa- 
deur.   Sa  mission   ne  parut   }»as 
long-lemps  pacifique;  quinze  jours 
après  son  arrivée,  un  échange  de 
noies  ofTicielIcs  inspira  de  viv«!S 
inquiétudes  aux  amis  de  la  paix. 
La  stagnation  du  commerce  forti- 
fia bientôt  ces  craintes,  qui  se  réa- 
lisèrent entièrement,  en  1 8o3,  par 
le  départ  de   l'ambassadeur  an- 
glais. liOrd  Withworth,  à  son  re- 
tour dans  sa  patrie,  fut  nommé 


2r)4  ^T  n- 

ionl-lieutcnani  du  vice-roi  d'Ir- 
liinde ,  fonctions  qu'il  cessa  en 
1817,  pour  épouser  la  duchesse 
de  Dorset.  11  revint  en  France,  en 
1819  ,  sans  caractère  apparent. 
Partisan  déclaré  de  la  note  secrète, 
il  inspira  de  nouvelles  inquiétu- 
des ;  mais  elles  cessèrent  bientôt 
par  son  départ  de  Paris.  Nous  ter- 
minerons cet  article  en  rappor- 
tant ce  que  dit  Napoléon  de  lord 
Withworlh  et  de  lady  Dorset  {voy. 
les  Mémoires  du  docteur  O'Méa- 
ra ,  tome  II,  page  98).  «Lord 
AVithworlh  est  un  homme  habile, 
un  peu  intrigant,  autant  que  j'ai 
pu  l'observer,  mais  adroit;  c'est 
de  plus  un  bel  homme.  Les  mi- 
nistres n'avaient  aucune  raison  de 
se  plairnlre  de  lui;  car  il  entrait 
bien  dans  leurs  projets.  Le  détail 
qu'ils  ont  publié  de  son  entrevue 
avec  moi  était  plein  de  menson- 
jres.  Je  n'ai  jamais  usé  envers  lui 
de  violence  dans  mes  manières  ni 
de  grossièreté  dans  mon  langage. 
Les  ambassadeurs  ne  purent  ca- 
cher leur  mécontentement  quand 
ils  lurent  un  tel  amas  de  faits  con- 
trouvés,  et  ils  les  démentirent. 
Les  Anglais  qui  habitaient  Paris 
étaient  très-mécontens  de  son  é- 
pouse,  la  duchesse  de  Dorset  :  ils 
disaient  à  haute  voix  que  son  or- 
gueil allait  jusqu'à  la  sottise.  La 
présentation  à  la  cour  fut  une 
pomme  de  discorde  entre  elle  et 
beaucoup  de  dames  anglaises.  Elle 
refusait  d'introduire  celles  qui 
n'avaient  pas  été  présentées  à  la 
cour  de  Saint-James;  or,  il  y  avait 
beaucoup  de  dames  qui  ne  vou- 
Jaient  ni  ne  pouvaient  y  être  pré- 
gentées,  mais  qui  désiraient  l'être 
auprès  de  moi,  et  qui  étaient  re- 


WOR 

fusées  par  elle  el  par  son  mari.  • 

WOHOlNZOW     (  LE    COMTE    A- 

r.EXATiDxiE  de)  ,  grand  -  chancelier 
de  Russie,  etc.  ,  d'une  des  plus 
illustres  familles  de  cette  contrée, 
suivit,  dès  sa  jeunesse,  la  carrière 
diplomatique.  Il  parvint  successi- 
vement au  poste  de  grand-chan- 
celier de  Russie,  qui  lui  fut  confié 
en  1802;  le  ministère  des  affaires 
étrangères  fut  ensuite  remis  dans 
ses  mains.  L'empereur,  qui  avait 
toujours  apprécié  ses  services  et 
son  attachement  à  sa  personne,  le 
décora  des  ordres  de  Saint- Alexan- 
dre. M.  de  Woronzow  obtint  sa 
retraite  en  i8o4»  et  fut  autorisé  à 
conserver  tous  ses  titres.  Retiré  à 
Moskow ,  il  mourut  dans  cette 
ville  en  1  806. 

WORONZOW  (N.  ) ,  frère  du 
précédent,  était  ambassadeur  de 
Russie  à  Londres  à  l'époque  oii 
éclata  la  révolution  française. 
Chargé,  en  1796,  de  notifier  au 
roi  d'Angleterre  l'avènement  de 
Paul  1"  à  l'empire,  il  reçut  peu 
après  de  ce  prince  le  grade  de  gé- 
néral en  chef,  et  conserva  néan- 
moins le  poste  qu'il  occupait  à 
Londres.  Ce  fut  M.  de  Woronzow 
qui  fut  chargé  de  négocier,  en 
1806,  avec  le  cabinet  anglais,  la 
troisième  coalition  contre  la  Fran- 
ce. Quoiqu'il  ait  montré  beaucoup 
d'habileté  dans  cette  mission,  il 
s'est  peu  fait  remarquer  depuis. 

WORONZOW  (  LE  COMTE  Mi- 
chel DE  )  ,  lieutenant-général  rus- 
se, etc. ,  neveu  et  fils  des  précé- 
dens,  a  rempli,  comme  eux,  des 
fonctions  diplomatiques,  et  s'est 
particulièrement  fait  remarquer 
dans  la  carrière  militaire ,  où  son 
avancement  fut  extrêmemcQt  ra- 


AYOR 

pidc.  Il  fil,  en  i8i5  et  iSi/ji  les 
campagnes  contre  l;i  Fronce.  Coin- 
m^odaut  l'avanl-garde  de  l'année 
russe  au  mois  de  juin  i8i5,  il 
«.hercha ,  par  un  coup  de  nnain 
hardi ,  à  s'emparer  de  Léipsick  , 
tft  se  porta,  au  mois  d'août  sui- 
vant, sur  l'Elbe,  où  il  occupa 
quelques  postes  pendant  que  les 
Français  opéraient  leur  retraite. 
11  se  fit  remarquer  aux  batailles 
de  Bantzen  et  de  Wurchen;  s'em- 
para de  Gassel ,  que  le  roi  Jérôme 
Bonaparte  {voy.  ce  nom)  fut  forcé 
d'abandoriVier  ;  fit  le  blocus  de 
Hambourg,  et  pénétra  en  France 
en  1814.  Dans  une  proclamation 
q'i'il  adressa  aux  habilans  des  dé- 
partcmens des  Ardenncs, de  l'Aisne 
et  de  la  Marne ,  il  les  menaçait  de 
les  réduire  par  le  fer  et  le  feu  s'ils 
prenaient  les  armes  contre  les 
troupes  alliées.  Cette  proclama- 
lion,  digne  d'im  chef  de  hordes 
sauvages,  était  en  outre  souillée 
d'tm  mensonge  qui  n'est  propre 
qu'aux  peuples  les  plus  corrom- 
pus :  c'était  au  nom  du  prince 
royal  do  Suéde  ,  de  Bernadolte , 
ancien  maréchal  de  France,  que 
le  général  russe  osait  parler.  Il 
jiéuétra  dans  Reims  le  19  mars, 
et  oreupa  le  bourg  de  la  Villette 
à  l'attaque  de  Paris.  A  la  suite  des 
cent  jours ,  en  i8i5,  le  comte  de 
Woronzow  commanda  le  coulin- 
pcnt  russe  pendant  l'occupation 
de  la  France  par  les  armées  étran- 
gères. Il  tint  son  quartier-général 
à  Maubeuge  jusqu'où  1818,  épo- 
que où  il  sse  rendit  au  congrès 
(l'Aix-la-Chapelle.  Outre  sou  ser- 
vice comme  lieutenant-général, 
le  comte  de  Woron/.ow  fait  aussi 
celui  de  chambellan  et  d'aide-de- 
camp  de  l'empereur  de  Uu.ssie. 


WRB 


agS 


"WRBNA  (le  comte  de),  grand- 
chambellan  de  l'empereur  d'Au- 
triche^ etc.,  est  issu  d'une  famille 
noble  d'Allemagne.  Il  était  com- 
missaire impérial  ;\  Vienne ,  en 
i8o5,  lorsque  les  Français  s'em- 
parèrent de  cette  ville.  La  con- 
duite que  tint  M.  de  Wrbna  pen- 
dant l'occupation  lui  concilia  l'es- 
time des  habilans  et  des  Français; 
et  lorsque  l'empereur  d'Autriche 
eut  été  remis  en  possession  de  sa 
capitale,  il  nomma  M.  de  Wrbna 
son  grand-chauibellan,  et  lui  con- 
féra la  grand'croix  de  l'ordre  de 
Saint-Elienne.  Un  peu  avant  cette 
marque  de  faveur  de  son  souve- 
rain, il  avait  reçu  des  habilans  de 
Vienne  une  marque  non  moins 
flatteuse  de  leur  reconnaissance 
dans  l'hommage  qu'ils  lui  avaient 
fait  du  diplôme  de  bourgeois 
honoraire,  auquel  est  attachée 
J'exemplion  des  contributions.  M. 
de  Wrbna  remplit,  jusqu'en  1 810, 
diverses  fonctions  diplomatiques. 
A  cette  époque  ,  il  devint  prési- 
dent de  la  commission  chargée 
de  l'amortissement  des  billets  de 
banque.  Le  roi  Louis  XVIII  lui 
conféra,  en  1816,  les  ordres  de 
Saint-iMichel  et  du  Saint-Esprit. 
Lu  1818,  M.  de  Wrbna  accom- 
pagna l'empereur  François  au  con- 
grès d'Aix-la-Chapelle. 

WRBNA  (  LE  COMTE  Ladislas 
de)  ,  fils  du  précédent,  était,  en 
i8iG,  capitaine  dans  le  régiment 
de  luilans  du  prince  de  Schwart- 
zerïberg.  Celle  année  même,  le 
roi  Louis  XVIII  lui  envoya  la 
croix  de  Saint-Louis.  En  1817, 
M.  de  Wrbna  partit  pourRio-.Ia- 
neiru,  afin  d'y  porter  la  nouvelle 
de  la  conclusion  du  mariage  de 
l'archiduchesse   Léopoldine  avec 


.96 


WRE 


le  prince  du  Brésil.  Cette  missr'on 
lui  valut,  de  ia  part  du  jeune 
époux,  la  croix  du  commandeur 
de  l'ordre  du  Christ  et  un»-  pen- 
sion de  45000  IV.  Il  rapportait  de 
riche»  présens  pour  IVnipereur 
François  et  pour  la  princesse  l.éo- 
j»oldine.  lorsqu'il  f'ul  attaqué  par 
des  pirales  qui  pillèrent  son  vais- 
seau ;  il  ne  parvint  pas  à  s'échap- 
per de  leurs  mains  sans  courir  de 
grai'd'î  dangers, 

Wi\ÈDE  (le  prince  Charles- 
Philippe  de)  ,  leld-tnaréchal  ba- 
varois, ent  né  à  Heideiberg  en 
1767.  Quoi(|ue  desliné  par  sa  fa- 
mille à  la  carrière  des  armes  ,  il 
ne  prit  du  service  qu  à  ITige  de 
35  ans  (1793)  ;  mais  son  avance- 
ment fut  rapide;  il  était  cnloucl  à 
28(1795).  Chargé,  en  1799,  du 
oommandemeut  du  corps  franc, 
que,  sous  les  auspices  du  prince 
Charles,  il  avait  levé,  il  obtint 
des  succès  assez  imp  Ttans  ,  et 
parvint  bientôt  au  {^rade  de  lieu- 
tenant -  général.  Comme  officier 
supérieur,  il  est  instruit ,  aclif,  et 
possède  au  milieu  du  péril  la  plus 
grande  fermeté  ei  un  rare  sang-r 
froid.  Napoléon  le  jugeait  très-fa- 
vorablement; néanmoins  il  ne  pa- 
raît pas  avoir  fait  mention  de  lui 
dans  ses  mémoires.  Le  prince,  de 
AVrède,  auxiliaire  des  Français  «a 
i8o5,  fit  celte  campagne  avec  une 
grande  distinction  ..  et  dans,  ime 
proclamation  qu'il  adressait  à  jses 
troupes  ,  il  leur  disait  :  «  Il  faut 
vaincre  ou  mourir  aux  portes  de 
Munich.»  Chargé,  après  la  paix 
dç  Presbourg,  du  commandement 
ùe  l'une  desprovinccs  bavaroises, 
il  reçut,  en  1806,  la  grand'croix 
de  la  légion  -  d'honneur.  Il  fut 
chargé,  pendant  les  années  1&08 


WRE 

et  1809  ,  de  différentes  opération» 
dans  le  Tyrol ,  et  battit  constam- 
ment les  troupes   autrichiennes. 
Celle  même  année  (1809) ,  il  eut 
ordre,  sous  le  prince  royal  de  Ba- 
vière, de  couvrir  la  capitale;  il 
occupa    d'abord    la    position    de 
Slraubing,  puis  celle  de  Neustad, 
où  il  fut  rejoint  par  la  2*  division 
bavaroi-ie,  sous  les  ordres  du  gé- 
néral l)eroy,à  la  suite  de  l'affaire  île 
Landshut.  Après  plusieurs  actions 
partielles .  qui  furent  en  général 
à  l'avantage  des  Bavarois,  s'enga- 
gea é,  le  20  avril,  la  bafaille  d'A- 
bensberg,  où  le  général  de  Wrède 
se  distingua  de  la  manière  la  plus 
brillante  devant  le  pont  de  Sie- 
genburg,ct  fut  cité  avec  de  grands 
éloges  dans  le  premier  bulletin. 
Huit  drapeaux,  12  pièces  de  ca- 
non et  18,000  prisonniers,  tom- 
bèrent au  pouvoir  des  trouj)es  ba- 
varoises et  wurtembergeoises,que 
Napoléon  commandait  en  person- 
ne. Le  surlendemain ,  le  général 
de  Wrède  se  dirigea   sur  l'Inn  , 
poursuivant  les  vaincus.  Le  27,  il 
reçut  ordre  de  se  porter  à  Lauffen 
sur  la  Lutzel,pour  tâcher  d'attein- 
dre le  corps  autrichien  stationné 
dans  le  Tyrol.  Ayant  en  effet  joint 
le  lendemain  son  arrière-garde,  il 
s'empara  de  ses  bagages  et  lui  fit 
beaucoup  de  prisonniers.  Le  jour 
suivant-  il  attaqua  l'ennemi  de- 
vant Saltz.bourg,«tà  la  suite  d'un 
combat  très-animé ,  les  Bavarois 
entrèrent  dans   cette   ville   pêle- 
mêle  avec  les  fuyards.  Le  baron 
de  Wrèdc  se  signala  de.  nouveau 
dans  celte  affaire.  Il  déploya  sur- 
tout de  grands  talens  i^  la  prise 
d'Ingpruck  et  à  la  bataille  de  Wa- 
gram,   où  il   reçut   une   blessure 
grave;  il  fut  alors  élevé  au  grade 


WRE 

de  feld-raaréchal.  Au  commence- 
ment de  1808,  Napoléon  ayant 
rendu  publique  une  correspon- 
dance sai-iie  sur  un  courrier  sué- 
dois ,  quoiqu'il  ne  fût  point  eu 
g'uerre  avec  cette  puissance  ,  et 
l'armée  bavaroise  se  Irouvant  si- 
gnalée dans  une  des  dépêches  de 
cette  correspondance  d'une  ma- 
nière peu  honorable  ,  les  ofliciers 
supérieurs  bavarois  déclarèrent 
qu'ils  se  rejçardaient  tous  comme 
personnellement  insultés  par  le 
ministre  qui  avait  signé  cette  let- 
tre, et  qu'ils  l'allaqueraieut  par- 
tout où  ils  pourrai»!nt  le  rejoindre. 
Vn  elTcl,  un  duel  eut  lieu  entre  le 
maréchal  de  Wrède  et  le  comte 
de  Duben  ,  chargé  d'affaires  de 
Suède  à  Vienne.  Aucun  des  com- 
ballans  ne  fut  tué  ni  blessé.  En 
i8i2,  le  feld-maréchal  de  Wiède 
commanda  dans  la  campagne  de 
lUissie ,  si  fatale  à  la  France  par 
les  désastres  de  la  plus  rigoureuse 
des  saisons,  le  contingent  bava- 
rois. Il  s'y  conduisit  avec  la  plus 
grande  bravoure,  et  les  bulletins 
français  rendirent  le  compte  le 
plus  flatteur  de  sa  conduite.  A 
Volontina  et  à  l*olo>k  ,  le  corps 
sous  ses  ordres  fut  un  de  vmux  qui 
souffrirent  le  plus;  sa  cavalerie 
presc^ue  tout  entière  périt  dans 
ces  deux  combats.  Nos  malheurs 
détachèrent  la  Bavière  de  notre 
alliance,  et  le  8  octobre  i8i3,  le 
j»rince  de  Wrède  signa  le  traité 
qui  rompait  cette  union.  Dès  lors 
il  cond>altit  avec  la  mt'ine  valeur 
les  armées  que  naguère  il  avait  si 
noble.ment  secondées.  Il  se  porta 
en  Franconie  à  la  tète  d'une  ar- 
mée de  Bavarois  et  d'Autrichiens. 
Vainement  cependant  il  voulut 
s'oppos«r  à  la  retraite  de  l'empc- 


AVR  È  307 

reur  Napoléon  ,  que  la  bataille  de 
Léipsick  forçait  à  la  retraite.  Le 
combat  de  Ilanau,  le  3o  octobre 
i8i5,  n'empêcha  point  l'armée 
française  d'opérer  cette  retraite  , 
où  le  prince  de  Wrède  fui  griève- 
ment blessé.  On  crut  même  cette 
blessure  mortelle,  et  les  journaux 
français  l'annoncèrent  officielle- 
ment. Ils  reprochèrent  même  à  ce 
général  d'être  le  principal  auteur 
de  la  défection  des  Bavarois.  le 
prince  de  Wrède  rétabli,  reprit  le 
commandement  des  troupes  ba- 
varoises, et  fit  la  campagne  de 
France  en  1814  ;  il  eut  des  succès 
à  la  bataille  de  Brienne,  le  i"  fé- 
vrier, ainsi  que  le  i5  et  le  i4  du 
même  mois  ,  en  marchant  sur 
Troyes  ;  mais  Ils  lui  coûtèrent 
cher.  Maître  de  cette  ville,  il  rem- 
porta encore  des  avantages  à  Bar- 
sur-Aube,  oti  le  maréchal  Oudi- 
not  lui  était  opposé.  Le  traité  de 
Paris  mil  fin  à  une  guerre  que  si- 
gnalèrent tant  de  malheurs  et  de 
délections.  Le  feld-maréchal  de 
Wrède  reçut  de  grandes  récom- 
penses, et  fut  élevé  au  rang  de 
prince.  Pendant  les  cent  jours ,  en 
181  5,  il  commanda  de  nouveau 
les  lrou[>es  de  Bavière  ,  et  pénétra 
en  F'rance  après  les  désastres  de 
Waterloo.  La  paix  de  nouveau  si- 
gnée ,  il  fut  chargé  de  missions 
imj>ortantes.  «  On  a  prétendu  que 
dans  les'  discussions  diplomati- 
ques, qui  eurent  lieu  peu  après, 
il  avait  soutenu  avec  beaucouj» 
d'énergie,  et  même  une  sorte  do 
rudesse  militaire,  vis-à-vis  des 
ministres  prussiens,  le  principe 
de  l'indépendance  des  états  qui 
avaient  formé  la  confédération  di» 
Bhin.  »  Le  prince  <le  Wrède,  qui 
jouit  de  toute  la  conûance  de  sou 


af)« 


WIU 


souverain,  est  membre  de  la  cham- 
bre (les  étals  de  Bavière. 

WlUGHT  (  N.  ) .  omcier  de  la 
marine  anj^laiso,  fut  chargé»  cri 
i8o5  et  1804, de  débarquer  sur  les 
côtes  de  France  le*  anciens  chefs 
de  chouans  qui  s'étaient  rendus  à 
Londres,  pour  y  organiser  de  non- 
veaux  iDoyens  de  «  rallumer  la 
^  guerre  civile  dans  leur  patrie,  » 
La  police  consulaire,  informée  de 
leurs  projets  et  de  la  mis^^ion  du 
capitaine  Wright,  prit  des  me- 
sures pour  se  saisir  des  conjurés, 
et  s'empara  d'abord  de  l'officier 
anglais.  Enfermé  au  Temple,  il 
parut  ensuite  comme  témoin  dans 
le  procès  de  Georges  Cadoudal 
{voy.  Cadoudal)  et  des  autres 
chefs.  Le  capitaine  Wright  ayant 
appris  la  nouvelle  de  la  défaite  du 
général  Mack  devant  Ulm,  se  li- 
vra au  plus  violent  emportement 
contre  ce  général ,  qu'il  traita  de 
lAche  et  de  perfide,  et  à  la  suite 
de  cet  accès,  se  coupa  la  gorge 
avec  un  rasoir  le  a^  octobre  i8o5. 
Les  ennemis  de  Napoléon  préten- 
dirent, sans  que  le  temps  ait  con- 
firmé ce  bruit,  qu'il  avait  donné 
l'ordre  de  le  mettre  à  mort,  «  parce 
qu'il  n'avait  pas  voulu  servir  la 
police  française.  » 

WRIGHT  (  Joseph  )  ,  peintre 
anglais,  naquit  à  Derby  en  1754, 
et  fut  élève  du  célèbre  peintre 
Hudson,  qui  comptait  dans  son 
atelier  deux  hommes  devenus  eux- 
mêmes  célèbres  depuis,  Reynold 
«;tMortimer.WrightalIa,en  1775, 
ù  Rome,  où  il  passa  deux  années, 
et  y  perfectionna  son  talent.  Il 
revint  dans  sa  patrie,  où  il  mou- 
rut en  1 797  :  il  avait  acquis  la  répu- 
tation d'un  artiste  distingué,  réus- 
sissant également  bien   dans    le 


WUR 

Iiaysnge,  l'histoire  et  le  portrait. 

WUITZ.  (Joseph),  général  na- 
politain, était  né  i\  Naples,  d'une 
famille  originaire  d'Allemagne. 
L'un  des  partisans  de  la  révolu - 
lion  qui  éclata  à  Naples  en  1799» 
il  fut  chargé  du  commandement 
général  de  la  garde  nationale  et 
de  la  défense  de  la  ville.  Son  lèle 
et  son  aciivité  se  déployèrent  dans 
cette  circonstance.  Les  officiers 
royalistes  ayant  refusé  de  servir 
la  nouvelle  république,  il  s'assura 
de  leur  personne  ,  et  afin  d'em|»r;- 
cher  les  nombreux  détenu*  de 
profiler  du  trouble  pour  ressai><ir 
leur  liberté  et  se  joindre  a>ix  en- 
nemis intérieurs  et  exlérieur«,  il 
fit  placer  des  barils  de  poudre  dans 
chaque  prison,  avec  ordre  d'y  met- 
tre le  ïe^u  au  moindre  motjvement 
d'insurrection  de  leur  part.  Il  or- 
donna des  mesures  non  moins  é- 
nergiques  contre  les  Lazzaronis, 
dont  les  dispositions  hostiles  l'in- 
quiétaient, et  se  prépara  à  repous- 
ser vigoureusement  l'ennemi  qui 
approchait  de  la  ville.  Toutes 
ses  dispositions  terminées ,  il  se 
porta  à  la  tête  de  sa  colonne  vers 
le  pont  delà  Madelaine,  où  il  se 
baltit  avec  la  plus  admirable  va- 
leur. Renversé  par  une  balle,  il 
fut  transporté  au  Châleauneof,  où 
il  mourut  au  moment  où  les  trou- 
pes rovales  y  pénétraient. 

WURMSER  (le  comte  Dago- 
BERT  SiGisMOND  DE  )  ,  feld- maré- 
chal autrichien  ,  elc. ,  naquit  en 
Alsace.  Ses  premières  années  dans 
la  profession  des  armes  furent  con- 
sacrées au  service  de  France.  Il 
passa  ensuite  dans  les  troupes  au- 
trichiennes, où  il  parvint  succes- 
sivement au  grade  de  feld-maré- 
chal,  récompense  de  ses   talcns 


WlJR 

pliJlôl  que  de  ?es  succès  à  In  tête 
des  armées.  Néanmoins  le  comte 
de  Wurmser  acquit  la  réputation 
d'un  général  brave  ,  pltiin  d'expé- 
rience et  très-humain.  Ce  sont  là 
de  véritables  litres  à  l'estime  gé- 
nérale. Chargé,  en  1790,  du  com- 
mandement de  l'armée  autrichien- 
ne, qui  devait  s'emparer  de  l'Alsa- 
ce, M,  de  Wurmser  passa  le  Rhin  le 
5  avril  de  celle  année,  prit  Spei- 
rerbach,afin  de  couvrir, de  concert 
avec  un  corps  prussien,  le  siège  de 
Mayence.  Cette  place  a3'ant  capi- 
tulé, il  se  porta  en  avant,  força 
Ils  Français  à  se  retirer  des  envi- 
rons de  Landau,  et  parvint  rapi- 
dement au  pied  des  Vosges.  Péné- 
trant ensuite  dans  les  lignes  de 
Weissembourg.  il  força  encore  les 
français  à  reculer  jusque  vers  la 
Haute-Alsace.  Hagiicnau,  Druns- 
heim  et  le  Fort-Louis,  tombèrent 
en  son  pouvoir,  et  le  conduisirent 
A  AVantznau,  sous  Strasbourg. 
C'est  là  que  s'arrêlèreut  ses  suc- 
cès. Il  ne  put  s'emparer  du  pont 
de  Saverne,  et  eut  de  très -vifs 
combats  à  soutenir  à  Wanlznau 
et  dans  la  forêt  de  Brumpt.  Les 
Français  s'étaient  aguerris,  et  leur 
.irméc  était  plus  nombreuse  et 
mieux  dirigée,  Pichegru  l'atta- 
quait avec  une  rare  audace,  et 
M.  de  AVurmser,  que  son  Age  et 
ses  iiinrmitès  forçaient  de  confier 
à  ses  lieutenans,  pour  la  plupart 
iucapables  ou  jaloux  de  son  nié- 
rilCjdes  opérations  qui  tournaient 
presque  toujours  à  son  désavan- 
tage, fut  bientôt  repoussé,  et  en- 
fin mis  dans  une  déroule  com- 
[)Iètc.  De  refour  à  Vienne  au  mois 
de  janvier  179^.  il  eut  la  conso- 
l.ilion  de  voir  son  souvçrain  ne  lui 
pas  imputer  ses  rêvera  et  lui  con- 


WUR  agg 

server  sa  confiance.  Il  lui  donna 
même  une  preuve  nouvelle  de 
6on  estime,  en  lui  remettant,  au 
inois  d'août  1795,  le  commande- 
mont  de  l'armée  du  llaut-Rhin. 
«  Ce  fut  alors,  dit-on,  que  le  ha- 
sard lui  ayant  fait  connaître  une 
correspondance  que  le  prince  de 
Condé  entretenait  avec  Pichegru, 
il  en  fit  part  à  sa  cour,  sans  pro- 
fiter néanmoins  de  tous  les  avan- 
tages que  lui  otTraient  des  dispo- 
sitions aussi  inattendues.  L'armée 
française  ayant  passé  le  Rhin  et 
s'étant  portée  sur  le  Necker, Piche- 
gru se  retira  toul-à-coup,  et  aban- 
donna Manheim,  qui  fut  pris  a- 
près  quelques  jours  de  bombarde- 
ment. »  Il  reçut  en  récompense  le 
grade  de  feld- maréchal.  Dans  la 
campagne  de  1796,  commandant 
de  nouveau  sur  la  rive  gauche  du 
Rhin,  il  f(Jt  battu  par  Moroau  à 
Rebach  et  à  Franckental.  Il  passa 
en  Italie,  afin  de  réparer  les  dé- 
faites de  Beaulieu  et  de  secourir 
Mantoue.  D'abord  il  culbuta  les 
postes  français  sur  les  deux  bords 
du  lac  de  Guarda  ;  mais  le  géné- 
ral en  chef  Bonaparte,  qui  assié- 
geait Mantoue  ,  quitta  brusque- 
ment ce  siège  ,  se  précipita  sur 
M.  de  Wurmser,  et,  le  l\  août,  le 
mit  dans  une  pleine  déroute.  Il  le 
baltit  encore  à  Roveredo,  et  de 
nouveau,  le  8  septembre,  au  dé- 
bouché des  gorges  de  la  Brenla. 
M.  de  Wurmser  persista  à  tenter 
la  forluue.  Repoussé  par  le  géyé- 
ral  Kilmaine  de  Vérone,  dont  il 
voulait  s'emparer,  il  longea  TA- 
dige  à  la  tête  d'un  corps  de  5, 000 
fantassins  et  de  i.fjoo  chevaux  , 
évita  de  tomber  dans  deux  divi- 
sions françaises  qui  croyaient  l'a- 
voir ccrnôt  et  arriva  par  une  mar- 


5i)o  WYC 

che  aii'^si  savante  que  pénible  de- 
v;inl  Mantono,  qu'il  dégagea,  et 
où  il  entra.  La  place  fut  cernée  de 
nouveau  ,  et  se  rendit  le  2  février 
1797,  «pi'és  la  plus  belle  résis- 
tance. Les  Français  traitèrent  M. 
de  Wurmser  avec  une  sorte  de 
vénération,  et  lui  accordèrent  des 
considérations  particulières.  Ren- 
du à  Vienne,  il  fut  nommé  par 
l'empereur  commissaire-  général 
en  Hongrie,  et  doté  d'une  pen- 
sion de  1/4,000  florins.  Cet  illustre 
guerrier,  que  son  souverain  ac- 
cueillit toujours  avec  la  plus  gran- 
de bonté,  mourut  au  mois  d'août 
de  la  même  année  (1797)-  Napo- 
léon ,  au  rapport  de  M.  O'Méara 
{voy.  ses  Mémoires,  t.  II,  p-  99), 
disait  de  Wurmser  :  «  Avant  la 
capitulation  de  Mantoue,  il  avait 
continué  de  m'appeler7VMn6  hoyn- 
me.  Il  était  très-âgé,  brave  comme 
nn  lion,  mais  tellement  sourd, 
qu'il  n'entendait  pas  autour  de  lui 
siffler  les  balles.  » 

WYCOMBE  ftoBD),  membre 
du  parlement  d'Angleterre, est  fds 
de  lord  Shelburne,  marquis  de 
Lansdown,  auquel  on  doit  la  paix 
qui  fut  signée, en  1783,  entre  l'An- 
gleterre et  la  France.  Lord  \Vy- 
combe  a  toujours  été  l'un  des 
membres  les  plus  inflexibles  de 
l'opposition,  et  les  ministres  ont 
eu  souvent  à  repousser  ses  vives 
attaques.  En  1794!»  •'  et  le  cou- 
rage, on  peut  dire  inouï ,  de  faire 
pi^jliquement  l'éloge  des  Fran- 
çais. Peu  de  temps  après ,  il  con- 
sentit à  ce  que  le  ministère  fît  des 
recberches  contre  les  sociétés  ja- 
fobines  de  l'Angleterre  ;  mais  il 
déclara  que  le  premier  il  pren- 
drait leur  défense  du  moment 
qu'elles  ne  réchuncraienl  qu'une 


WYL 

réforme  parlementaire.  Depuis 
cette  époque,  dit-on,  lord  Wy- 
combe  continue  à  manifester  les 
mêmes  principes  politiques. 

AVYLLYS  (Sasujel),  major-gé- 
néral des  troupes  de  la  république 
des    Etats-Unis    de      l'Amérique 
septentrionale,  naquit  en  1757. 
Il  était  fils  du  colonel  républicain 
Wyllys,  né    en    Amérique,    qui 
quitta  le    service  anglais    dès    le 
commencement  de  ia  guerre  de 
l'Inde,  et  qui  combattit  avec  la 
plus  haute  valeur  pour  la  cause 
de  la  liberté  de  sa  patrie.  Samuel 
Wyllys,  après  avoir  fait  de  bonnes 
éludes  au  collège  de  Y'alc ,  où  il 
prit  tous  ses  degrés  en  1759,  leva 
une  compagnie   d'infanterie,  qui 
composa   la    première    garde   du 
gouverneur    de    la    province    de 
Connecticut.   et  fut  nommé,  en 
1 775,  par  la  législature  de  cet  état, 
lieutenant -colonel   du   régiment^ 
de  Spencer.  L'année  suivante,  le 
congrès  le  nomma  colonel  d'un 
régiment  formé  dans  le  Connec- 
ticut, qui  se  distingua,  sous  les.or- 
dres  de  son  vaillant  chef,  pendant 
toute  la  guerre  de  la  révolution. 
Après  la  glorieuse  paix  de  1782, 
et  la  reconnaissance  solennelle  de 
la  république  des  États-Unis  par 
toutes  les  puissances  de  l'Europe  , 
"WyHys  fut  nommé  brigadier,  et 
peu  de  temps  après  major-géné- 
ral an  la  milice  de  l'état  de  Con- 
necticut. Il  remplit  aussi  avec  dis- 
tinction plusieurs  offices  civils,  et 
en  dernier  lieu  celui  de  secrétaire-      1 
d'état,  poste  qu'il  résigna  en  1809, 
pour  se  retirer  à  Hartford,  où  ce 
vétéran  des   armées  américaiiîcs 
termina  son  honorable  carrière,  à 
l'âge  de  85  ans,  le  9  juin  1820. 
WYNPERSSE  (Jacques  Thiens 


W  Y. s 

Vas-de),  célèbre  médecin  hollan- 
dais, naquit  à  Groningue  le  17 
novembre  1761.  Fils  de  Lonis 
^Yvnpei■sse,  professeur  de  jihilo- 
sojihie  à  l'universilé  de  Leytie  , 
auquel  on  doit  plusieurs  ouvrages 
élémentaires  souvent  réimpriinus, 
il  fit,  sous  la  direction  de  son  père, 
de  bonnes  études,  et  de  Irès-bonue 
heure  montra  une  vocation  parti- 
culière pour  l'exercice  de  la  mé- 
decine. Élève  des  prolésseur»  en 
médecine  et  en  chirurgie  les  plus 
célèbres  de  la  Hollande,  il  fut 
reçu,  en  1785,  docteur  en  l'uni- 
versité de  Leydc,  sur  sa  thèse 
doVa7ikytosle.]Ln  1784,  il  fit  ini- 
primer  la  traduction  en  latin  de 
1  Ouvrage  du  docteur  anglais  (iuil- 
lauuic  Hevvson,  sio'  les  vaisseaux 
lyrnplialiques.  Courotuié  en  1786 
à  Amsterdam,  pour  un  Mémoire 
sur  la  Jaunisse,  il  reçut,  en  1787, 
le  même  honneur  de  la  société 
royale  de  médecine  de  Paris  pour 
son  Mcinuire  sur  le  muguet,  le 
millet  et  le  blanchct;  cette  société 
l'admit  en  même  temps  au  nom- 
bre de  ses  associés  étrangers.  Une 
mort  prématurée  le  ravit,  en  1789, 
aux  sciences,  aux  pauvres  et  à 
l'amilié.  Auteur  laborieux,  habile 
praticien,  h(>mme  doué  des  plus 
belles  qualités  du  cœur,  AVyn- 
persse,  regretté  généralement,  a 
laissé  un  cabinet  important  par  le 
nombre  des  préparations  anato- 
miqucs,  parmi  lesquelles  on  re- 
marquait une  collection  com[)lèle 
d'os  morbeux.  Celte  précieuse 
collection  a  été  acquise  par  l'uni- 
versité de  Goi'ttingue. 

^VYSZKOWSM  (  N.  ) ,  m:«jor 
de  cavalerie  des  troupes  polouai- 
sus.  fut  un  des  plus  fidèles  patriotes 
à  l'époque  de  l'insurreclion  iiatio- 


^\Y^ 


5oi 


nale  dirigée  par  le  général  Kos- 
ciusko  en  1794-  Major  d'un  corps 
qui  s'était  formé  pour  secouer  le 
joug  des  Russes  ,  aussitôt  qu'il 
apprit  l'insurrection  de  ses  com- 
palrioleset  à  l'insude  son  colonel, 
il  décida  le  corps  entier  à  aller 
rejoindre  Ko!?ciusko.  Pendant  qu'il 
était  en  marche,  il  fut  attaqué  par 
un  corps  île  grenadiers  russes,  A 
la  tête  de  son  petit  corps  de  cava- 
lerie, il  se  précipita  sur  l'ennemi, 
le  culbuta  ,  lui  tua  et  blessa  beau- 
coup de  monde,  et  conduisit  fi 
Rosciusko,  avec  bon  nombre  du 
prisonniers,  sept  pièces  d'artille- 
rie dont  il  s'était  emparé.  Il  reçut 
de  l'emploi  dans  la  Volhinie,  et 
lors  de  la  retraite  du  10  juin,  après 
la  perte  de  la  bataille  de  Chelm, 
il  sauva  les  canons  et  les  débris  de 
l'armée. 

AVYTHE  (  Georges  ) ,  chance- 
lier de  l'état  de  Virginie,  fils  d'un 
fermier  estimé  pour  sa  probité  et 
ses  mœurs  pures,  naquit  en  1726. 
Les  bons  exemples  que  lui  don- 
naient ses  parens  ne  purefit  rain- 
.cre  ses  penchans  portés  à  la  dissi- 
pation. Il  ne  savait  encore,  à  l'âge 
de  21  ans,  que  lire,  écrire,  et  les 
cinq  premières  relaies  de  l'arilh- 
mélique.  La  perte  de  son  père,  et 
bientôt  celle  de  sa  mère,  qu'il  eut 
à  déplorer  vers  ce  temps,  ne  chan- 
gèrent pas  ses  di-positions.  Ce  ne 
fut  qu'à  l'SjTv:  de  5o  ans  que,  fai- 
sant un  utile  retour  sur  lui-même, 
il  chercha,  par  l'étude  et  une  con- 
duiliî  régulière,  à  faire  oublier  le» 
travers  de  sa  jeunesse.  Il  y  réus- 
sit au-delà  de  ses  espérances.  San:» 
le  secours  d'auctm  maître,  il  aj>- 
prit  le  latin  et  le  grec,  et  acquit 
en  peu  de  temps  la  parfaite  con 
naissance  des  lois  de  son  pays  et 


Stfît 


WYI 


(le  l'Angletirre.  11  s'iiislrulsit  éga- 
leincul  à  fond  dans  les  scieuc»!S 
morales  et  physiques;  il  devint 
aussi  un  très- habile  iiiuthémati- 
cien.   Repu  avocat,   il  obtint  de 
grands  succès  comme  orateur  et 
comme   savant  jurisconsulte;  et 
lorsque  rAmérique  voulut  con- 
quérir son  indépendance  ,  il   se 
joignit  avec  son  élève  et  son  ami, 
Thomas  Jefferson ,  à  un  corps  de 
volontaires,  qu'il  organisa  sur  un 
meilleur  plan,  et  qu'il  forma  à  la 
plus  exacte  discipline.  Wythe  fut 
nommé  à  la  même  époque  député 
dans  l'assemblée  de  la  Virginie; 
après  avoir  rempli  pendant  quel- 
que temps  et  avec  distinction  les 
fonctions  d'orateur  de  la  chau)bre 
des  communes ,   il   se   rendit  au 
congrès,    dont  il   devint   un   des 
principaux  membres.  On  sait  que 
le  congrès  ,  assemblé  en  1776  ,  ne 
se  sépara  qu'après  avoir  proclamé 
l'indépendance   américaine.  «   Il 
fut,  dit  l'auleur  d'une  notice  sur 
Wylhe,  un  des  signataires  de  celle 
mémorable  déclaration,   par  la- 
quelle! ces  héroïques  légi.^lateurs 
de  leur  pays  engagèrent  leur  vie, 
leur  fortune  et  leur  honneur  au 
maintien  et  à  la  défense  de  ses 
droits   trop  long  -  temps   violés. 
'Wythe,  après  avoir,  avec  un  zèle 
infatigable,    achevé    le    nouveau 
code  des  lois  qu'il  avait  été  chargé 
d'établir  avec  ses  collègues,  eut 
part  à  leur  exécution  dans  l'em- 
ploi difficile  de  juge  de  la  cour  de 
justice  :  il  fut  en  effet  l'un  des 
trois  juges  de  la  haute-cour  de  la 
<;hancellerie,  et  ensuite  chancelier 
de  la  Virginie  ,  place  qu'il  conser- 
va plus  de  vingt  ans,  et  qu'il  gar- 
da jusqu'à  sa  mort.  Ce  fut  surtout 
tlaus  l'exercice  de  cet  emploi  que 


WYT 

son  désintéressement  et  son  pa- 
triotisme parurent  dans  tout  leur 
jour;  car  les  honoraires  que  la  ré- 
publique lui  accordait  étaient  des 
plus  modiques  ;  il  avait  même  un 
tel  mépris  pour  les  richesses,  qu'a- 
près avoir  donné  en  pur  don  à  son 
neveu  la  moitié  du  bien  qu'il  aV^ait 
à  Elisabeth-Cyiy,et  vendu  l'autre 
moitié,  il  n'en  fut  payé  que  beau- 
coup d'armées  après.  Il  fut  aussi 
nommé  membre  de  la  convention 
de  Virginie,  qui,  en  1788,  s'oc- 
cupa de  la  constitution  proposée 
aux  Etats- Unis.  »   Son  âge  déjà 
avancé  et  ses  infirmités  le  déter- 
minèrent à  s'éloigner  des  affaires 
publiques.  Il  rentra  bientôt  dans 
lu  carrière,  et  en  1798,  il  com- 
battit la  loi  sur  les  séditions  et  la 
levée  d'une  armée.   Deux  fois  il 
occupa  la  présidence  du  collège 
des  électeurs  de  LixVirginie.   Sa 
santé  s'affiiiblit  de  plus  en  plus, 
et  il  mourut,  en  1806,  à  la  suite 
d'une    maladie    violente,  qui  fit 
croire  qu'ilavait  été  empoisonné. 
Une  enquête  sévère  détruisit  cette 
opinion.  «Le  chancelier AVylhe  é- 
tait  d'un  caractère  sociable,  et  dès 
qu'il  fut  revenu  des  erreurs  de  sa 
jeunesse,  il  se  fit  une  réputatioa 
intacte.  Sa  manière  de  vivre  était 
siuiple  et  modérée,  et  il  trouvait 
dans  l'art  de  diminuer  les  besoins 
celui  de  réprimer  la  cupidité  des 
richesses.  Comme  juge  ,  il  fut  re- 
marquable par  sa  rigide  impartia- 
lité ,  son  attachement  sincère  aux 
principes  de  l'équité,  son  immense 
érudition,  et  son  assiduité  infati- 
gable aux  soins  de  sa  place.  Su- 
périeur aux  préjugés  populaires  et 
à  toute  influence  corruptrice,  rien 
ne  put  jamais  le  faire  dévier  des 
roules  de  la  justice  et  de  la  vérité.  « 


XI  AI 


XI M 


8o3 


X 


XAVIER  (  Antoine  -  Marie  ) , 
violoniste  et  compoîiileiir  de  mu- 
sique, est  né  à  Paris  vers  1739. 
«  Fils  d'un  grand  seigneur,  disent 
les  auteurs  du  Dictionnaire  lùslo- 
rique  des  musiciens ^  M.  Xavier  se 
vit  forcé  par  la  révolution  à  vivre 
du  talent  qu'il  cultivait  pour  son 
agrément.  »  Ce  virtuose  ,  élève 
de  Berthaume  et  de  iMcstrino,  se 
fil  remarquer  aux  concerts  de  la 
rue  de  Grenelle  ,  dont  il  était  l'un 
des  administrateurs.  Il  l'ut  attaché 
pendant  dix  ans  à  l'orchestre  du 
théâtre  Fcydeau,  et  trois  ans  à 
celui  de  l'Opéra-IJufla.  M.  Xavier 
passa  ensuite  à  l'académie  impé- 
riale de  musique,  devint  profes- 
seur au  lycée  impérial,  et  fut  at- 
taché à  la  musique  particulière  de 
l'empereur  Napoléon;  il  est  au- 
jourd'hui (  1825  )  attaché  à  l'or- 
chestre de  l'académie  royale  de 
musique.  M.  Xavier  a  publié  en- 
Ire  autres  compositions,  un  œuvre 
de  duos  et  plusieurs  romances. 
M.  Kreutïcr  lui  a  dédié  un  œuvre 
de  sonates,  et  M.  Ilyacinthe-Jadin 
un  œuvre  de  quatuors  de  violon, 
comme  exécutant.  «  La  manière 
de  M.  Xavier,  disent  les  auteurs 
<|ue  nous  avons  déjà  cités  ,  est 
large,  et  l'on  ne  peut  tirer  un  plus 
beau  son  de  son  instrument.  » 

XIMKNÈS  (Augustin- Louis, 
MARQUIS  de),  doyen  de»  poètes 
fran(;ais,  d'une  famille  originaire 
d'iispagne,  naquit  à  Paris  le  28 
février  172^.  Il  s'était  for»né  à 
l'école  lies  honimes  de  lettres  les 
plus  distingués  du  18*  siècle,  et 


fut  intimement  lié  avec  VoltaiiT  , 
«qui,  dit  M.  Palissot,  par  ui.tj 
espèce  d'adoption  très-honorabie, 
fit  placer  plusieurs  fois  dans  ses 
éditions  des  vers  du  marquis  de 
Xinienès  :  témoignage  d'estime 
qu'il  a  renouvelé  depuis  en  favour 
de  M.  de  Aulhière.  »  Le  marquis  de 
Ximenès  n'occupe  pas  un  haut  rang 
sur  le  pâmasse  français,  mais  il 
n'en  est  pas  moins  digne  de  l'in- 
térêt des  amis  de  la  littérature  clas- 
sique, par  le  soin  avec  lequel  il  a 
conservé  dans  ses  ouvrages,  le 
goût  pur  des  Racine,  des  Boi- 
leau  et  des  Voltaire  ;  plusieurs 
passages  de  ces  mêmes  ouvrages 
ne  seraient  peut-être  pas  désa- 
voués par  ces  illustres  auteurs,  et 
pour  appuyer  notre  opinion,  nous 
extrairons  les  vers  suivans  du  dis- 
cours qu'il  présenta  au  concours 
de  l'académie  en  1  ySo. 


11  est  des  rois  sans  force  et  nés  pour  l'indolence, 
Que  la  njoUcsse  endort,  que  lintifrêt  encense; 
rantômes  élevas  sur  un  trône  avili, 
Ils  passent   comme  un  songe  et  tombent   dans 

l'oubli. 
Sous  ces  règnes  de  deuil ,  le  mérite,  inutile, 
Languit  décourage,  dans  un  obscur  asile. 
Et  des  hommes  divins  y  vivent  inconnus, 
Mais  laissent ,  en  mourant ,  un  nom  qui  ne  meurt 

plus. 
Illustres  malhenrcux!  vos  ombres  consolées 
Abandonnent  aux  rois  l'orgueil  des  mausolées; 
La  mort  y  foule  aux  pieds  le  faste  qui  les  siiir. 
Votre  empire  commence  où  leur  règne  est  détruit. 


Ce  discours  ne  fut  pas  couronné, 
«  quoique  Voltaire,  ajoute  M.  Pa- 
lissot, regartlTit  l'ouvrage  comme 
un  des  meilleurs  qui  cCit  jamais 
été  présenté  à  ces  concour,«^.  »  Il 
a  donné  les  tragédies  <VEpic/t(t~ 
ris,  d'Amalazonlef  et  de  Dun  Cut- 


So4  Ylill 

los,  un  poëme  de  César  au  sénat 
romain,  et  un  autre  poëme,  où  il 
développe  cette  idée  trè.s-']uàte, 
que  les  Icllres  ont  autant  contri- 
bué à  la  gloire  de  Louis  XIV,  que 
ce  monarque  avait  coniribué  à 
leurs  prog:rè.s;  deux  Discours  en 
vers,  l'un  à  la  louan|;e  de  Voltaire, 
et  l'autre  dont  le  sujet  est  l'iufluen- 
ce  de  Boileau  sur  son  siècle.  Par- 
mi ses  autres  productions,  on  elle 
des  Lettres  sur  la  Nouvelle  Héloise 
de  J.  J.  Rousseau.  11  avait  fait  pa- 


YtR 

raître  ses  œuvres  en  1772»  et  vingt 
ans  après,  il  en  a  donné  de  nouvel- 
les, sous  le  titre  de  Codicile  d' un 
vieillard.  Le  marquis  de  Ximenès 
fut  toujours  partisan  de  la  révolu- 
tion ,  mais  avec  un  désintéresse- 
ment parlait;  il  n'a  pris  aucune 
part  aux  événemens,  ni  occupé 
de  fonctions  publiques  ou  autres 
emplois.  Il  mourut  peu  après  la 
seconde  restauration  du  gouver- 
nen>.ent  royal  en  France  :  il  était 
alors  dans  la  86"" année  de  son  5ge. 


YKREGIJI(Joseph),  savant  ec- 
clésiastique espagnol  ,  naquit  à 
Vergara  ,  province  de  Guipuscoa, 
vers  1754.  Il  commença  ses  étu- 
des à  Malaga,  les  continua  à  Ma- 
drid, et  vint  les  terminer  à  l'aiis, 
où  il  se  perfectionna  dans  les 
sciences  physiques  et  naalhénia- 
tiques.  Son  goût  pour  l'étude,  un 
jugement  sain,  un  esprit  judicieux 
et  les  qualités  morales  les  plus  re- 
commandab les  lui  procurèrent  des 
relations  intimes  avec  les  savans 
et  les  gtns  de  lettres  de  Paris.  De 
retour  dans  sa  patrie,  il  prit  les 
ordres,  reçut  la  nussion  d'instruire 
les  infaus,el  fut  chargé, parson  sou- 
verain,de  composer  un  catéchisme 
dont  on  pût  faire  un  usage  géné- 
ral en  Espagne.  Ce  rcs[)ectablc 
ecclésiastique  vivait  retiré  à  Car- 
dahalzo,  près  de  Madrid,  où  il  em- 
ployait son  temps  à  l'étude  et  ses 
richesses  aux  bonnes  œuvres,  sur- 
tout à  l'égard  des  enfaus  et  des 
pauvres  ,  lorsqu'il  fut  traduit,  en 
J792,  au  tribunal  de  l'inquisition. 


Nous  citerons,  d'après  une  no- 
tice sur  ce  savant ,  les  principaux 
griefs  qui  lui  étaient  imputés.  «  Il 
avait  nié  rinfaillibilité  du  pape  et 
sa  supériorité  sur  le  concile  œcu- 
ménique ,  parlé  mal  de  la  cour  de 
lîome,  des  moines,  des  scapulai- 
res  et  de  l'inquisition,  en  disant 
qu'elle  fomentait  l'ignorance;  il 
avait  censuré  amèrement  les  prê- 
tres qui  célébraient  l'oHice  trop 
précipitamment;  prétendu  que  le 
jansénisme  était  un  fantôme,  et 
loué  Nicole,  Tilleinonl  et  les  Let- 
tres provinciales;  il  possédait  dans 
sa  bibliothèque  les  ouvrages  de 
MesetiguY,  et  doutait  de  la  sain- 
teté de  Marie  d'Agréda.  »  Mais, 
ajoute  l'auteur  de  la  notice,  ses 
véritables  crimes  étaient  de  pro- 
clamer, comme  le  clergé  français 
du  temps  de  Bossuet,  les  notions 
saines  su  ries  limites  de?  deux  puis- 
sances et  les  droits  des  évêques 
envahis  en  Espagne  par  l'ultra- 
montani^me;  de  montrer  en  tout 
uu  courage  imperturbable  à  sou- 


YER 

tenir  la  vérilé,  et  enfin  de  joindre 
à  l'étendue  des  lu  m  ières  des  iiiœur? 
auslères  :  pent-Ptre  aussi  avait-il 
trop  manifesté  sa  manière  tie  pen- 
ser sur  les  ecclésiastiques  émigrés 
de  France  en  Kspagne.  qui  se  pré- 
tendaient riches  en  principes  de 
foi,  mais  qui  étaient  réelltînîent 
pauvres  en  pratiques  de  charité. 
Afïligé  de  voir  son  pays  en  pnue 
i\  l'ignorance,  Yeregui  désirait  une 
nouvelle  Pentecôte  pour  le  régé- 
nérer. CI  II  y  a  trois  cents  ans,  di- 
n sait-il,  que  nous  avons  se<;oué  le 
«joug  des  Maures,  et  nous  soiii- 
n  mes  cdiirbés  maintenant  sous  le 
»jfMig  (]u  j)harisaï-.me  !  •>  Les  prin- 
cipes d'honneur  et  de  vertu  de 
"Veregui  Itii  avaient  fait  des  aniis 
nombreux,  zélés  et  puissans.  Le 
résultat  de  leurs  démarches  fut 
qu'après  cinq  mois  les  per'^é- 
cutions  dirigées  contre  lui  ces- 
sèrent. Sa  doctrine  fut  décla- 
rée pure  et  sa  conduite  iriéprn- 
chahle.  Par  un  acte  de  justice,  si- 
nr>n  inouï,  du  moins  trop  rare,  le 
gouvernement  le  nomnia  mem- 
bre du  tribunal  qui  venait  de  l'ab- 
soudre. c<  Peu  de  temps  après,  di- 
sent It's  auteurs  de  la  notice  déjà 
citée,  on  ré|iandit  par  milliers  des" 
exemplaires  de  l'ouvrage  de  l'ab- 
bé Grégoire  {vny.  ce  nom),  évê- 
(|ue  de  Blois,  contre  l'inquisition, 
traduit  en  espagnol,  ce  qui  enga- 
gea le  tribunal  à  essayer  de  ré- 
pondre par  trois  ou  quatre  voln- 
m«'3  composés  par  divers  inquisi- 
teurs. Ymtgui  prit  la  plume  contre 
l'inquiAition  dont  il  était  membre, 
et  composa  une  savante  apologie 
de  l'ouvrage  de  rév»'''que  d«;  Blois, 
qu'il  envoya  euFrance,  poury être 
publiée  ave(^  les  pièces  de  son  pro- 
cès, comme  un  monument  d'inep- 

T.    XX. 


Y01\ 


3o5 


tie propre  àcouTrirdehonte  l'infâ- 
me tribunal  qui  fui  heureusement 
supprimé  depuis,  et  qui  vient 
d'être  rétabli  par  le  trop  sévère 
Ferdinand  VIL  »  Yeregui,  étant  à 
Bagnères  en  i8o3,  fil  imprimer  un 
ouvrage  sous  le  tilre  de  :  Idea  de 
catecismo  nacional,  digne  des  prin- 
cipes qu'il  avait  toujours  profes- 
sés. Le  succès  de  ce  livre  l'avait 
déterminé  à  en  préparer  une  nou- 
velle édition  ;  mais  la  mort  l§  sur- 
prit pendant  qu'il  était  occupé  de 
son  travail,  l'année  même  où  il 
l'avait  publié  pour  la  première  fois 
(  i8o5).  Il  fut  regretté  à  la  fois  de 
ses  concitoyens  et  i\f%  Français, 
dont  il  avait  toujours  été  l'ami 
fidèle. 

YOllCK  (  Frédéric  duc  d'),  se- 
conil  fils  du  roi  d'Angleterre  Geor- 
ges III,  premier  pair  de  la  Gran- 
de-Bretagne .  généralissime  des 
troupes  de  terre  et  chef  de  l'ad- 
ministration militaire,  etc.,  né  le 
i6  août  ijGo.-A  l'âge  de  i6  ans, 
il  voyagea  sur  le  continent,  et  sé- 
journa long-temp-  en  Prusse;  il  y 
épousa  la  fille  ainée  du  roi  Frédé- 
ric Guillaume  H,  princesse  qui 
joignait  à  tons  les  avuilages  ex- 
térieurs, un  esprit  distingué  et  des 
vertus  dignes  du  sort  le  plusheu- 
reiix,  mais  qui  ne  jouit  pas  long- 
temps dn  bonheur  de  fixer  l'aita- 
chement  de  son  angu-te  époux. 
En  179'i,  quan<l  le  gouvernement 
anglais  eut  décidé  de  joindre  ses 
troupes  à  celles  des  arjnées  coali- 
sées qui  devaient  envahir  la 
France,  le  roi  Georges  III,  ayant 
une  prcdih.'Ction  Miar(piée  pour 
son  second  fils,  et  la  pins  haute 
opinion  de  sa  capacité,  Ini  donna 
[(^commandement  en  chef  de  Tar- 
inée  anglaise  destinée  à  agir  sur 


3oG  YOR 

le  continent.  Le  chic  d'Yorckfit  an 
moinâ  en  plusieurs  occiisions  preu' 
■ve  de  cour;if:;e  personnel.  Ch.irgé 
du  siège  de  Valenciennes,  il  par- 
vint, après  ?ix  jeinaines  de  tran- 
chées ouvertes  et  un  bombarde- 
ment de  plu>ieurs  jours,  à  l'aire  ca- 
pituler la  garnison  de  cette  jilace, 
qui  manquait  d<';ja  de  vivres  et  de 
muniliouïi  de  guerre.  Il  l'ut  moins 
heureux  devant  Dunkerque,  où 
toutc^  ses  attaques  lurent  vigou- 
reusement rcp'jussées  au  com- 
mencement de  septembre  1793, 
et  où  le  8  du  même  mois,  il  fut 
complèlement  di;fait  par  le  géné- 
ral Houohard.  Les  Anglais  essuyè- 
rent dans  cette  journée  des  perles 
considérables,  et  ne  furent  plus 
d'aucun  secours  aux  coalisés  pen- 
dant le  resle  de  la  campagne.  Le 
duc,  après  une  pénible  retraite, 
s'était  embarqué  pour  l'Angleter- 
re, afin  de  coni'érer  avec  le  gou- 
vernement sur  les  opérations  d« 
la  campagne  prochaine.  Elle  de- 
vint encore  plus  désastreuse  pour 
les  alliés.  Leduc  d'Yorck  avait  pris 
position  près  dcTournay;  mais  vi- 
vement pressé  par  les  troupes  fran- 
çaises ,  il  fut  obligé  de  se  retirer 
d'abord  sur  Anvers,  et  malgré  le 
renfort  de  10,000  hommes,  que 
le  lord  Moira,  qui  venait  de  débar- 
quer à  Oslende,  lui  amena,  il  fut 
encore  obligé  de  battre  en  retrai- 
te. Le  10  septembre,  il  prit  posi- 
tion sur  les  bords  de  la  Meuse, 
a  peu  de  dislance  de  Grave,  et 
ne  put  se  maintenir  dans  ce 
poste;  toujours  poursuivi  l'épée 
dans  les  reins,  il  fut  forcé  de  re- 
gagner à  la  hâte  le  lieu  de  son  em- 
barquement, qu'il  ne  put  attein- 
dre sans  éprouver  de  nouvelles 
pertes.  De  retour  en  Angleterre, 


YOR 

leducd'Yorck  fut  nommé, en  179.5, 
(^onnnandant  en  chef  Je  l'armée 
anglaise,  et  malgré  le  mauvais 
succès  de  ses  deux  premières  ex- 
péditions, il  fut  encore  chargé,  en 
1799,  de  celle  qui  devait  agir  en 
Hollande  de  concert  avec  une  ar- 
mée russe,  commandée  par  le  gé- 
néral Ess^n.  Le  duc  d'Yorck  dé- 
barqua, sans  éprou  ver  de  ré-^istan- 
ce,  avec  5o,ooo  hommes,  et  s'a- 
vança d.ins  le  pays,  i!  trouva  l'ar- 
mée galio-balave  dans  le  v(y>ina- 
ge  d'Alckmaar,  occupant  une  for- 
te posilittn,  qu'il  tenta  vainement 
d'enlever.  Après  plusieurs  com- 
bats [»arliels,  le  général  Brune 
remporta  les  deux  victoires  signa- 
lées de  Berghen  le  19  septembre, 
et  d'Alckmaar  le  18  octobre  sui- 
vant. Les  débris  d»;  l'année  aniflo- 
russe  se  hâtèreni  d  évacuer  la  Hol- 
lande, et  le  duc  d'Yorck,  pour  n'ê- 
tre point  inquiété  pendant  sa  re- 
traite ,  fut  forcé  d'accepter  la  ca- 
pitulation rigoureuse  que  lui  im- 
posa le  général  brune.  La  longue 
marche  dos  Anglais ,  obligés  de 
chercher  dans  le  nord  de  l'Alle- 
magne un  port  d'où  ils  pourraient 
se  rembarquer,  devint  d'une  dilïi- 
liulté  extrême,  vu  le  mauvais  état 
des  chemins  ,  les  rigueurs  de  la 
saison  et  la  rareté  des  subsistan- 
ces. Un  bien  petit  nombre  des 
guerriers  qui  composaient  naguè- 
re une  armée  brillante  revirent 
avec  leur  chef  le  sol  de  la  pairie. 
Celle  expédition,  dont  l'issue  fut  si 
désastreuse  ,  donna  lieu  à  de  vio- 
lentes attaques  dans  le  parlement 
britannique  contre  les  ministre» 
qui  l'avaient  projetée,  et  même 
contre  le  chef  chargé  de  la  condui- 
re. Le  duc  d'Yorck  reprit  néan- 
moins à  Londres  ses  fonctions  de 


YOR 

•commandant  en  clicT.  Depuis 
<|uelques  années  une  jurande  mé- 
sintelligenoe  régnait  entre  los  deux 
fils  aînés  du  roi  Georges  III.  En 
mars  iSo^,  pe'ndant  l'aliénalion 
mentale  de  ce  monarque  ,  le  duo 
d'Yorck  se  réconcilia  publique- 
ment avec  le  prince  de  Galles,  et 
ce  dernier,  appelé  à  la  régence  et 
plus  tard  au  trône,  n'aoe^sé  depuis 
de  donner  des  marques  de  confian- 
cc;i  sop  frère.  Placé  A  la  tête  de  l'ad- 
ministration militaire,  des  plain- 
tes graves  s'élevèrent,  en  1809, 
contre  le  duc  d'Yorck.  L'honora- 
ble iM.  Wardie  député  à  l.> cham- 
bre des  communes,  y  fit  le  27  jan- 
vier de  la  même  année  une  dénon- 
ciation formelle.  Après  avoir  long- 
temps parlé  devant  l'assemblée  du 
système  de  corruption  qui  préva- 
laitdans  ledéparlement  de  la  guer- 
re, il  accusa  directement  le  chef 
de  celle  administration.  L«!  duc 
souffrait,  disai(-il,  que  sa  maîtres- 
se, la  fameuse  mistriss  Clarke,  fît 
nu  honteux  trafic  det  brevets  d'a- 
vancement et  des  commissions, 
dont  il  partageait,  selon  l'accusa- 
teur, les  profits  avec  cette  femme. 
L'orateur  conclut  en  demandant 
que  la  chaiid)rc  procédiit  de  suite 
à  la  nomination  d'un  comité  pour 
examiner  la  conduite  du  prince, 
et  en  fiiire  son  rapport.  Après  d'as- 
sez viv«'S  discussions,  il  fut  résolu 
qu'une  enquête  sérail  faite  par  un 
comité  composé  de  lii  chambre  en- 
tière. Ce  procès  remarquable  oc- 
cupa la  chambre  des  communes 
pendant  plus  de  deux  mois.  On 
enlei)dit  une  foule  de  témoins,  et 
la  salle  ne  desemplissait  pas  de  cu- 
rieux, attirés  non  moins  par  l'inté- 
rêt de  la  cause  même  que  par  le 
scandale  qu'elle  occaeionait  dans 


YOR 


507 


h  public.  Il  fut  enfin  établi,  pai'V 
une  décision  de  la  chambre,  que 
mistriss  Glarke  avait  souvent  re- 
çu de  l'argent  pour  procurer  de 
1  avancement  ;  mais  que  le  duc 
d'Yorck  n'avaitpas  eu  départ  per- 
sonnelle aux  manœuvres  de  cette 
dame,  quoiqu'elle  eût  de  son  cô- 
té constamnitnt  soutenu  qu'elle 
n'avait  agi  qu'avec  l'autorisation 
du  duc.  Cette  décision  importan- 
te ne  .passa  cependant  qu'à  la  ma- 
jorité de  278  voix  contre  196,  et 
le  duc  d'Yorck  ne  crutpoint,  après 
l'issue  Je  l'enquête,  devoir  conser- 
ver plus  long-temps  ses  fonctions. 
Dès  qu'il  eut  annoncé  qu'il  don- 
nait sa  démission ,  lord  Althorpe 
proposa  à  In  chambre  des  comum- 
nes  de  déclarer  que  son  altesse 
royale  ayant  résigné  le  comman- 
dement, et  que  sélant  démis  de 
tout  emploi  public,  la  chambre  ne 
croyait  pas  devoir  donner  mainte- 
nant aucune  suite  à  cette  affaire. 
Le  mot  maintenant  devint  l'objet 
il'une  nouvelle  discussion,  et  les 
ministres  parvinrent  enfin,  après 
de  vifs  débats,  à  le  faire  suppri- 
mer. Knmai  1811,  le  duc  d'Yorck 
reprit  néanmoins  son  poste,  le  roi 
son  frère  lui  ayant  de  nouveau 
confié  le  commandement  en  chef 
des  troupes  anglaises, et  il  se  trou 
ve  encore  aujourd'hui  (i8a5)  à  la 
tête  de  ct.tle  administration  im- 
portante. En  i8i4»  il  accepta  le 
grade  de  feld-maréchal  des  ar- 
mées autrichiennes.  A  la  fin  de 
mai  1825,  le  ducd'Yorcks'est  pro- 
noncé avec  une  grande  véhémen- 
ce dans  la  chambre  des  pairs,  con- 
tre l'émancipation  des  catholiques 
d'Irlande,  en  faveur  de  laquelle  la 
chambre  des  communes  venait  de 
passer  un  bill,  que  ce  prince  a  eu 


3o8                    iOK  YOK 

satisfaction  do  \oir  rejeter  par  Dans  la  st-ancc  du  lendemain,  l« 
la  chambre  où  il  siég;;.  Le  discours  mCme  orateur  rendit  cepend^mt 
tenu  par  S.  A.  l\.  en  cette  occ;i-  sons  un  antre  rapport,  une  justice 
^ion  lut  \iveinent  atlnqué  dans  la  éclatanleau  duc  d'ïon  k.  «Leprin- 
chinnljrc  des  communes.  L'iiono-  ce,  dit-il,  nexicntpas  ternir»;  la 
rable  inen)hre  RI.  Brongliiira  main  au  parlenieul.  cotjime  d'au- 
prclendit  ruêtnc  qu'il  ne  pouvait  1res  de  ses  illu-tres  parens  ont 
avoir  été  prononcé  tel  qu'il  venait  coutume  de  l'aire  de  temps  à  au- 
de  paraître  par  la  voie  de  l'impres-  très.  Pour  ma  part,  je  dormerais 
sion.  «On  m'excusera,  dit  cet  plutôt  au  duc  d'Yortk  la  sonunc 
orateur,  si  j'entretiens  la  chambre  qu'on  demande  aujourd'hui  pour 
d'un  libelle  étrange  qui  aurait  dû  le  duc  de  Cumberland.  Les  rêve- 
donner  lieu  <i  des  poursuites  tant  nus  du  premier  sont  inférieurs  à 
en  Angleterre  qu'en  Irlande  :  c'est  sa  dépense;  sa  fortune  est  si  insuf- 
celui  qu'on  publie  ,  comme  étant  fisanle  pour  soutenir  la  di-rnilé 
le  discf)urs  d'un  illustre  pcrsonna-  de  son  rang,  il  est  si  accablé  de 
ge,  d'un  personnage  qui  occupe  dettes,  que  ses  biens  sont  tons  les 
le  rang  le  {)lus  élevé  et  le  plus  jours  frappés  d'exécution.  Il  ne 
près  du  trône.  Je  ne  doute  pas  peut  même  aller  à  une  course  sans 
que  mon  honorable  et  savant  ami,  voir  ses  chevaux  et  sa  voiture  sal- 
le ])rocurcur-g('néral ,  ne  vienne  sis  pour  dettes,  et  il  s'est  souvent 
demander  à  la  cour  du  banc  dn  vu  dans  des  embarras  dont  uu 
roi ,  d'insliluer  des  poursuites  cou-  simple  particulier  serait  honteux.» 
ire  rédileur  de  ce  libelle  ;  car  on  Peu  de  temps  a|>rés,  les  journaux 
ne  pourrait  rien  imaginer  de  plus  du  9  juin  annoncèrent  etVective- 
calomnieux,  de  plus  outrageant  ment  un  événement  pareil,  et 
pour  l'illustre  personnage  en  ques-  qu'aussitôt  que  le  duc  d'Yorck  eut 
tion ,  que  de  lui  faire  dire  que  mis  pied  à  terre  aux  courses  d'As- 
quarid  il  montera  sur  le  trône,  il  cot,  un  officier  du  shérif  était  ve- 
ne  gouvernera  pas  d'après  les  prin-  nu  saisir  le  cheval  de  S.  A.  R  et 
cipes  de  la  constikitiou,  mais  d'u-  celui  de  son  domestique,  en  exé- 
ne  manière  à  lui,  mais  d'une  ma-  cution  d'un  jugement  pour  dettes, 
nière  telle  que  Jacques  II  lui-mê-  Depuis  la  mort  de  la  princesse 
me  n'aurait  pas  imaginée,  ou  si  Charlotte,  le  duc  d'Y'orck  est  l'hé- 
jamais  il  y  eût  songé,  il  n'en  avait  rilier  présomptif  de  la  couronne 
au  moins  rien  laissé  transpirer,  d'Angleterre.  Il  n'a  point  eu  d'hé- 
quand  sa  conduite  provoqiui  le  rilier?  de  la  princesse  son  épouse, 
bill  d'exclusion,  ou  quand  elle  le  morte  en  1820,  mais  il  a  plusieurs 
fit  exclure  elfectivement,  pour  fai-  enfans  naturels, 
re  place  au  roi  Guillaume  et  à  sa  YORCR  DE  WATTEMBOL'RG 
famille.  Jacques  ÎI  n'a  jamais  dit  (le  comtk),  lieutenant- général 
la  millième  partie  de  ce  qu'on  at-  prussien,  était  peu  connu  par  ses 
tribne  à  S.  A.  1\.  dans  le  libelle  faits  d'armes  avant  la  campagne 
en  question.  Je  désire  donc  qu'on  de  1812  eu  Russie.  Il  corrtman- 
fasse  un  exemple  de  ceux  qui  ont  dait  à  cette  époque  un  corps  de 
osé  publier  ce  libelle  atroce....»  troupes  auxiliaires  que  la  Prusse 


TOR 

avait    fonnii   à  l'iinnéc  française. 
Après  avoir  coiiiUaîtii  los  IVusse*. 
sous  les  ordres  du  maréchal  Mac- 
donald,    qui  dans  ses  rapports  à 
i'em  pereii  r.cila  a  vt'C  do  j^rinds  élo- 
ges la  condtiilt*  des  Prussiutis  sous 
It-'s  murs  de  Riga,  lo  p;n<Mal  Yorck 
donna    le    premier   l'exemple    de 
passer  dans  L-s  ranî^s  des  eniiCTnis 
qu'il   venait  de  combattre.    Lors- 
«(tie  ce  g('^n«''ral  eut  appris  la  retrai- 
te de  Moskow  et  les  désastres  de 
la  grande-armée,  il  se  sépara  ino- 
pinément,  le  3o  décemln-e,  18  il?, 
dn  corps  du  maréiJial  Macdonald, 
qu'il  devait  suivre  à  nncj  journée 
de  distance;  capitula  au  inoiilin  de 
Poschiirnu,  près  Tauroggin,  pour 
tout  le  contingent  prussien,  arec 
le  général  Diebitsch,  et  se  réunit 
aux  Russes.    Il  écrivit  en  même 
temps  une  leltre  an  chef  qu'il  ve- 
nait d'al)andonni,'r,  pour  justifier 
cette  démarche.  Les  btdietins  oHi- 
ciels  et  les  journaux  français  reten- 
tissaient cnc<ne  «les  pompeux  élo- 
ges donnés  au  général  Yorck, et  aux 
troupes  qu'il  commandait,  lors- 
qu'on apprit  avec  le  plus   grand 
étonnement  cette  première  défec- 
tion. Le  roi  de  Prusse  crut  devoir 
témoigner  publiquement  son  in- 
dignation. Des  notes  oITicielles  an- 
noncèrent au  gouvernement  fran- 
çais, que  le>  ordres.étaienl  don- 
nés pour  l'arrestation  et  la  mise 
en  jugement   du  général   Yorck, 
ainsi  que  pour  son  remplacement 
inmiédint  dans  le  commandement 
du  corps  auxiliaire  prussien;  mais 
le  système  politicpie  de  ce  cabinet 
était  entièrement  changé   av«!c   la 
fortune  de  l'armée  française.  F^e  roi 
quitta  Berlin,  où  il  ne  se  croyait 
plus  en  sOreté,  pour  .se  rendre  en 
Silésie,  et  quoique  la  diplomatie 


YOR  3o(> 

conservilt  encore  des  formes  ami- 
cales dans  les  notes  que  le  miniv- 
tre  Hardenb'erg  ajre>sait  à  Paris 
en  février  i8i5,  on  apprit  bientôt 
que  ce  ministre  avait  signé  le  27 
du   même  mais ,   à   Breslaw,   un 
traité  d'alliance  offensive  et  dé- 
fensive avec  la  Russie.  La  com- 
mission, qui  fut  aussitôt  nomtnée 
pour  examiner  la  coiuluilc  du  gé- 
néral Yorck,  le  déclara  exempt  de 
tout  blâme.   Une  hante  faveur  et 
des   récompenses  suivirent   cette 
déclaratif)!!.  Il  eut  enfin  le  bonheur 
auquel    il    aspirait    depuis    long- 
temps, de  combattre  les  Français, 
et  il  fit  contre  eux  les  campagnes 
de   j8i5  et  i8i/|.  Le  2  mai  de  la 
première  année,  il  assista  à  la  ba- 
taille de  Luizen,  s'y  distingua  par 
son  cour.ige  persoimel,  mais  ne 
put  empêcher  la  perte  de  la  batail- 
le. Le  21  août  suivant,  il  déten- 
dait une  forte  position  sur  les  li- 
gnes de  la  Bober;    vivement  atta- 
qué par  les  Français,  il  ne  put  s'y 
maintenir  et  fut  forcé  de  se  retirer 
en  Silésie,  avec  une  perle  consi- 
dérablt!.   An    commencement    de 
l'année  i8i4»  après  la  reiraile  des 
Français,  il  passa  le  Rhin,  se  porta 
dans  les  environs  de  McAz.  péné- 
tra avec  son  corps,  à  la  suite  des 
aruïées  alliées,  en  Chatn[)a:,'ne.  et 
opéra  sa  jonction  avec  l'armée  ba- 
varoise,sous  les  ordres  du  général 
deWrède,  à  Joinvillc.  l\  assista  à  la 
bataille  de  Brienne,  et  essuya  mi 
échec  important  à  Montmirail.  Il 
Ht  ensuite  partie  de  l'armée  qui 
investit  Paris  le  5o  mars,  et  éprou- 
va des   perles  à  Saint-Denis.    Eji 
181 5,  le  général  Yorck  comman- 
da une  division  de  l'armée   prus- 
sienne. Le  iG  juin,  son  fds  unique 
fut  tué  ù  la  bataille  de  Ligny.  Le 


ïo  YIU 

voi  de  Pnisso  a,  depuis  la  ]),'iix,  don- 
né ail  général  Y(»r(  k  le  litre  de 
comtcdeWalteiTd)()iMg,  l'a  nommé 
gouvernt'iu-fiénéial  de  la  Silébie, 
et  lui  a  (ait  don  d'un  châleau  et 
d'une  belle  terre  dans  les  envi- 
rons de  Br(  slaw. 

YftIAKTE  (donTho;«as),  poète 
espagnol,  est  né  dans  l'île  de  Ca- 
iiarie  ,  d'une  famille  illustre.  Il 
suivit  la  carrière  administrative > 
et  occupa  l'emploi  de  chef  du  mi- 
nistère des  alTaires  étrangères  et 
de  la  1"  seorétairerie-d'élat.  Son 
goût  pour  la  poésie  se  manifesta 
de  bonne  heure ,  et  il  publia  suc- 
cessivement, entre  autres  ouvra- 
ges, un  poëme  en  cinq  chants  sur 
laMustquc,  et  un  recueil  de  fables. 
qui  ont  été  traduites  eu  français. 
Ces  dernières  productions,  géné- 
ralement inspirées  par  un  esprit 
de  philosophie,  fixèrent,  sur  la  fin 
du  règne  de  Charles  III ,  l'atten- 
tion de  ce  tribunal  odieux  qui  re- 
cherche et  interprèle  tout  et  ne 
pardonne  jamais.  Il  poursuivit 
don  Y'riarle  comme  philosophe, 
et  lui  fit  donner  la  ville  pour  pri- 
son, avec  l'ordre  de  se  tenir  pi  et 
à  paraître  devant  ses  juges  lors- 
qu'il en  serait  requis.  L'instruc- 
tion ne  se  fit  pas  attendre;  elle  fut 
secrète.  Yriarte  s'elforça  ,  par  ses 
soumissions,  d'apaiser  ses  impla- 
cables ennemis  ,  et  eut  le  rare 
bonheur  de  n'être  déclaré  que  lé- 
gèrement suspect.  Il  fit  abjurali()n, 
reçut  l'absolution  ,  snus  la  condi- 
tion expresse  d'accomplir  une  pé- 
nitence qui  n'a  poiiit  été  connue 
du  public.  Le  poëme  de  1 1  Musi- 
que, dont  il  a  été  question  plus 
haut  5  parut  à  Madrid  en  1779. 
«  Il  serait  à  désirer,  disent  les 
auteurs  du  Dictionnaire  historique 


YSA 

(les  musiciens,  cpie  nous  eussion?^ 
dans  noire  langue  une  bonne  tra- 
duction de  cet  ouvrage.  Celle  que 
(il  aiu  ville  a  donnée  fourmille  d'er- 
reurs et  de  contre-sens.  L'auteur 
d'un  piiëine  en  quatre  chants  sur 
la  musique,  pul)Iié  en  1811,  cite 
dans  ses  notes  des  fragmens  d'une 
tradiiclioti  en  \er^  français  de  l'ou- 
vrage de  Yriarte,  où  l'on  trouve 
de  la  facilité  et  du  talent.  0  Les 
deux  frères  de  don  Thomas  Yriarlc 
ont  rempli  des  fonctions  diploma- 
tiques. Le  premier,  don  Domini- 
que ,  a  conclu,  à  Bâie,  un  traité 
avec  le  gouvernement  républicain 
de  la  France  ;  le  second ,  do>  Beb- 
NARDO ,  était  conseiller  des  Indes 
et  chevalier  de  l'ordre  royal  de 
Charles  III,  lorsque  Josiph  Bo- 
najtarle  monta,  <.'n  1808,  sur  le 
trône  d  Espagne.  .S'élant  att.Tché 
au  nouveau  souverain,  il  fut  ntnn- 
iné  conseiller  -  d'état.  Don  Ber- 
nardo  Yriarte  mourut  peu  de 
temps  ajirès.  Il  s'élait  honorable- 
ment fait  connaître  dans  les  af- 
faires de  Tétat  et  dans  la  carrière 
des  lettres.  En  lui  s'est  éteint  le 
nom  célèbre  qu'il  portait. 

YSABEAlj'(C.  A.),  membre 
de  la  convention  nationale  el  du 
conseil  des  anciens,  appartenait  à 
la  congrégation  de  l'Oratoire  lors- 
que la  révolution  éclata.  Ayant 
adopté  les  principes  du  nouvel 
ordre  de  choses,  il  fut  nommé, 
en  1792,  [tar  le  département  de 
l'Indre,  député  à  la  convention 
nationale;  dans  le  procès  du  roi, 
il  vota  avec  la  majorité.  En  1795, 
il  fut  envoyé  avec  ïallien  et  Bau- 
dot, en  mission  à  Bordeaux,  où  il 
fut  accusé  d'organiser  la  terreur, 
tandis  qu'il  était  signalé  à  la  même 
époque  comme  un  partisan  du  m&' 


Y  VA 

dérantisme.  Le  coinilé  à%  :«alnt- 
piiblic,  adaptant  celle  (l«Tiiière  dé- 
nonciiitioM,  le  rapp»*lii.  Lr>  révo- 
lution du  f)  iheriTjidor  an  'i  (27 
juillet  1794)  ''  laquelle  il  prilpnrl, 
lui  fit  r«udre  la  ccintiance  de  la 
«onvention,  et  il  relourna  à  Bor- 
deaux, où  il  fit  restituer  aux  fa- 
milles de  plusieurs  coiidainués  les 
biens  de  ces  vicliuies  ",  il  fil  aus.*i 
nnettre  en  jugement  le  président 
du  tribunal  révolutionnaire.  De 
nouveau  dénoncé  pour  ces  faits, 
il  parvint  néxninuins  à  ?e  mainte- 
nir à  la  cduvenlioii  avec  les  autre!» 
membres  île  l'assemblée,  auteurs 
de  la  révolution  qui  renversa  Ko 
bespierre.  Lors  lies  mouvemens 
populaires  du  \-?.  germinal  an  7> 
(  I "avril  i7f)5),  il  indiqua  le^cliefs 
qui  les  dirigeaient.  Vers  la  fin  de 
la  même  annce,  il  signala  les  émi- 
grés et  les  prêtres  comme  les  deux 
plus  grands  Héatix  de  la  républi- 
que et  demanda  leur  déportation; 
au  i5  vendémiaiie  an  4  (^  octo- 
bre i^O'"')»  •'  !^^'  prononça  contre 
les  sections  insurgées.  Membre  du 
conseil  de»  anciens,  il  obtint  la  ra- 
diation de  Madier  de  la  liste  des 
émigrés,  et,  au  18  fructidor  an  5 
(  4  septembri;  1 797  )  ,  il  se  rangea 
du  parti  du  directoire-exécutif, 
qui  le  nomma  à  la  ce<isation  de  ses 
fondions  législatives,  le  substitut 
de  son  commissaire  près  de  l'ad- 
ministration des  postes  de  Bruxel- 
les. Lors  desévéfieinens  politiques 
de  i8i4*  il  perdit  un  modique  em- 
ploi qu  il  occupait  à  Paris  dans 
l'administration  générale  de  celle 
partie  du  service  public. 

YVAKT  (  Jeas-Aucustir-Vic- 
tob  ) ,  membre  de  l'institut  (ac  1- 
démie  dos  sciences),  professeur 
d'économie  rurale  ù  l'école  Télé- 


YVA 


5ii 


rinaire  d'Alfort,  est  un  de  nos  agro- 
nome!; hs  plus  distingués.  Digne 
de  succéder  à  Parnientier ,  il  la 
remplaça  en  effet  à  l'académie. 
Après  avoir  |>arcouru  la  france, 
la  Belgique  et  l'Angleterre,  pour  y 
comparer  les  différente;}  méllio  le» 
de  culture,  il  donna  son  Traité 
des  Assoleniens,  qui .  ainsi  que  sou 
établissement  de  Maisons  près  de 
Chai'enton  ,  fut  Jiontrableinent 
cité  dans  le  rapport  sur  les  prix 
décennaux.  Le  jury  s'exprime  ain- 
si :  «  Trois  cents  be(;tares  de  terre 
composent  cet  établissement.  Le 
s«d  en  est  sabbmeux  et  très  mé- 
diocre. Il  était  livré  régulière- 
ment i^  la  jaebèie  triennale  et  à  la 
culture  i\u  seigle  avant  M.  Yvart. 
Par  les  soins  de  ce  cullivaleur  et 
par  les  bons  assolemens  qu'il  asu 
introduire,  on  ne  voit  {dus  de  ja- 
cbères,  et  il  a  (jartout  subslituc 
avec  succès  le  froment  au  seigle. 
tl  entretient  un  très-beau  trou- 
peau de  i5oo  bêtes  à  laine  dépure 
race  et  améliorée,  et  il  e»t  le  pre- 
mier qui  ait  cultivé  en  grand  le 
topinambour,  plante  si  précieuse 
pour  la  noiirrilurc  d'iiiver  de  ces 
animaux.  Il  a  dcfeséché  des  terres 
et  il  entretient  conutammenl  la 
moitié  de  son  exploitation  en  prai- 
ries artificielles.  L'exemple  de  ce 
cultivateur  a  déterminé  la  plupart 
de»  babitansde  son  canton  à  subs- 
tituer le  froment  au  seigle,  à  cul- 
tiver des  praiiies  urlifirielles  et  à 
supprimer  les  jaclières.  Mais  cette 
iiiflicnce  a  pris  encore  plus  d'ex- 
tension :  la  bonne  réputation  de 
M.  Yvart  a  attiré  près  de  lui  des 
cidtivalcurs  et  dt"i  (iropriétaires 
de>  divers  points  de  la  France;  sa 
culture  a  servi  de  modèle  et  ses 
coDâeiU  de  guides.  11  a  d'ailleurs 


5i2                   VVA  YVE 

exposé  sa  pratiqii».;  vl  !cs  connais-  (lomt;  |^I),  ;'i  r;iriicl»i  Surressions 

sauces  positives   qii'il  a    aotpiises  fJo  culture,  sku   impoi  taiil  Iravail 

j>ar   différons    voyages  ,    (fans    ie  sur  les  Ast'oUiiuns. 

Cours  d' A p'icidlure  pratique (\\\^'\{  VVElliNOlS  (  SiK  Francis  n'), 

prol'esse  depuis  plusieurs  atinées  luiriislre  de  la  icpiiblirpie  de  Ge- 

à  l'école  d'AIIort;  et  le  Traité  des  jm;\';.   est  ne  duis  cette   ville  en 

Asaolemcns  qu'il  a  publié  feraépn-  17  Xi, d  une  faïuille  honorable,  aux 

que  dans  les  annales  de  l'agricul-  soins  'ie  laquelle  il  dut  une  Irès- 

ture.  »    Les  conimissaircs   tertni-  bonneéduealion.  Lncaractèretur- 

rient  ainsi  leur  rapport  :  «Le  jury  bulent  et  beaucoiij)  d'ambition  lui 

regrette  de  ne   pouvoir  proposer  firent  conslainnient  prer>dre  part 

un  second  prix  pour  récon)penser  aux  troubles  de  sa  patrie,  où  il  se 

M.  Yvart  des  Inivaux  é<  lairés,  ap-  fil  souvent  remarquer  parmi  les 

pliqués  à  un  douiaine  borné,  qui  linnimes  les plusdaiiffereux.  L'exil 

ont  servi  d'exemple  à   un  canton  l'éloigna  eu  17S2  ;  mais  il  rentra 

mai  cidlivé  avant   lui,  ainsi  que  bus  de  la  révolution  du  mois  de 

des  leçons  par  lesquelles  il  a  ré-  janvier  1789,  et  il  parut,  en  i7«»a. 

j)andu   dans  tout  l'enipire  les  lu-  dans  k-s  conlerences   qui  eurent 

niièreg  de  l'agrieuiture  perfection-  lieu  avec  le  général  tMontes(pjion, 

née.  »  Les  autres  ouvrages  de  M.  afin  de  préserver  Genève  de  l'ot- 

Yvart  sont  :    1°  Mémoire  sur  les  cupation    Irançaise.    IN'ayant    pu 

végétaux  qui  fournissent  des  parties  parvenir  à  jouer  le  nde  qu'il  s'é- 

utiles  à  l'art  du  cordier  et  du  tisse-  tait  proposé  ,  il  se  rendit  en  An- 

rand,  couronné,  eu  178S.  par  la  gleterre.  d'où  il  repartit  bientôt 

société  d'agriculture  de  Paris;   2°  avec  le  fils  de  lord  Eardley,  qu'il 

Rapport  sur  les  expériences  du  ci-  était  chargé  d'accompagner  sur  le 

ioyen  Houdart,   relatives  à  féco-  continent.  Après  plusieurs  voja- 

,  nomie  et  à  la  préparation  de  ta  se-  ges ,  de  retour  en  Angleteire,  où 

menée,    an  8   (1800),    in-8";  5"  il  te  fixa,  il  s'occupa  d'ouvrages 

Coup-d'œil  sur  le  sol ,  le  climat  et  de  littérature  et  de  politique.  Sa 

fai;riculture  de  la  France  campa-  haine  contre  la  France,  qu'il  ex- 

rée  avec  les   contrées  qui  l'avoisi-  prime  avec  violence  dans  ces  dil- 

nent^et parlicuHèremettt  avec  l' An-  térenles  productions,  lui  valut  la 

gleterre,  Paris,   1801,    in-8";   4"  bienveillance    du    gouvernement 

Objet  d'intérêt  puhlic,  recomman-  anglais,  qui  le  décoia  du  titre  de 

dé  à  l'attention  du  gouvernement  et  chevalier.   Les  événemens  poîiti- 

de  tous  les  amis   de  fagriculture ,  ques   de    1814  ayant  lenversé  ie 

sur  la  destruction  des  plantes  nui-  trône  impérial  de  France,  déter- 

sibles  aux  récoltes ,  courornié  (en  minèrent  la  répu])lique  de  Genève 

1817)   par  l'académie  de  Liège,  à  nommer  sir  Fiancis  d'Yvernois 

W.    Yvart  est  collaborateur  à  la  sou  ministre  à  Londres,  d'où  il  se 

nouvelle  édition  «lu  Théâtre  cCa-  rendit  avec  la  mCme   qualité  au 

griculture  d'Olivier  de  Serres,  au  congrès  de  Vienne.   11  retourna  à 

nouveau  Dictionnaire  d'histoire  na-  Genève  après  la  seconde  abdica- 

turelle,  et  au  nouveau  Cours  coin-  '  ti  )n  de  Napoléon,  en  i8i5.   «  On 

plet  d' agriculture f  où  l'on  trouve  lui  doit,  disent  les  auteurs  d'une 


YVO 

notice  sur  sa  vie  politique  el  lit- 
téraire, pliisieur.x  ouvraj^es  poli- 
tique? el  financiers  dont  quelques- 
uns  n«  sont  ;)us  snns  mérite  ,  et 
piirnn'  lesquels  ou  cite  surtout  des 
Réflexions  sur   la  guerre ,    où   la 
doctrine    subversive  de    l'Angle- 
terre,  ennemie  iuiplacable  de  tout 
g(iiiveruen)<;nt  français,  est  bien 
con^latée.  C'est  dans  cet  ouvrage 
quesir  Francis  d'ïvcrnf>is  déclara 
qu'il  ne  s'agissait  plus  de  d<  ineui- 
brer  la  France,  ni  d'exiger  le  châ- 
linienl  de  ceux  qui  l'avaient  bou- 
leversée, ni  de  rétabliriez  émigrés 
el  la  féodalité,  m;tis  bien  de  sau- 
ver I  Allemagne  d'un  démembre- 
ment, d'aï  radier  à  la  Fiance  ses 
conquêtes ,  et  de  la  repousser  daus 
son  enceinte  el  dans  ^es  limites 
établies  par  le  traité  de  Westjiha- 
lie.  Le  Tableau  des  pertes  que  lu 
révolution  et  la  guerre  ont  causées 
au  peuple  français^  contenant  le 
dévelo]>peinenl  des  paradoxe:*  ilu 
même  auteur,  démontre  aussi  la 
liaine  profonde  que  cet  écrivain 
avait  vouée  à  la  France,  pour  avoir 
t  ompriiiié  son  ambition  eu  i^Sa. 
On  doit  encore  à  sir  Francis  d'V- 
vernois  plusieurs  autres  écrits  de 
même    nature,    inspirés    par  les 
circonstances,  et  n'ayant  pas  ou 
plus  d«'  durée  qu'elles.  » 

YVON      (   iVllcaEL  -  DoMINIQlJE- 

Bf.r>abd)  ,  né  au  Hfîvre  le  28  juil- 
let 17(18,  d'une  famille  estimée  , 
mais  peu  avantagée  des  dons  de 
la  fortune,  prit  le-*  armes  dès  sa 
jeunesse.  Il  entra,  le  fj  seplembri! 
I  7'j'^  ,  comme  simple  soldat  dans 


YVO 


3i5 


le  bataillon  du  Havre,  le  9*  de  la 
Si  ine-Inférieure  ;  fit  avec  ce  corps 
toutes  les  premières  campagnes 
de  la  révolution,  y  passa  succes- 
sivement par  les  grades  inférieurs, 
et  parvint,  par  sa  bonne  conduite, 
son  intrépidité  et  ses  laiens  ,  à  ce- 
lui de  capifaine-adjudant-major. 
Lessoldal>deson  corps  l'appelaient 
leur  père  ,  et  il  consiicrait  plus  de 
la  moitié  de  ses  appointemen»  ik 
soulager  les  besfiius  de  ses  frères 
d'armes.  Cbaque  bnmmo  qui  sor- 
tait ries  bôpifcuux  tievenait  l'objet 
particulier  de  ses  soins.  Le  géné- 
ral en  clief,  après  une  bataille 
où  Yvon  s'était  éminemment  dis- 
tingué ,  lui  adressa  ce-»  paroles 
flatttui-es  :  c  Je  ne  connais  pas 
dans  tonte  la  grande  -  armée  de 
plus  brave  bomme  que  vous,  »  et 
le  surnom  lui  en  resta  ;  tui  le  dé- 
signa constamment  deptiis  dans 
l'a-ujée  sont  le  titre  du.  brave 
bomme  Yvon.  Après  avoir  com- 
battu avec  la  même  valeur  pen- 
dant neuf  campagnes  consécuti- 
ves, en  Belgi(]Me,  en  Italie,  en 
Pologne  et  en  Allemagne,  sans 
avoir  quitté  un  seul  jour  son 
corps,  <;e  brave  fut  tue  le  'i/j  dé- 
cembre, en  passant  à  la  tête  de$ 
grenadiers  le  pont  à  moitié  dé- 
truit de  Kolozombia.  Il  expira  en 
en;ouragtant  encore  les  siens,  et 
en  criant  vive  la  France!  dernier 
cri  de  tant  de  mouransaux  cliamps 
de  l'honneur  cl  de  la  victoire. 
Le  brave  Yvon,  regretté  de  toute 
l'armée ,  était  à  [leine  dans  la  58* 
année  de  son  A^e. 


3i4 


ZAB 


ZAC 


Z 


ZABIELLO  (le  COMTE  Micbei,), 
};énéral  polonais,  d'une  ancienne 
famille  do  Lithnnnie,  suivit  dès  sa 
jeunesse  la  carrière  des  armes,  et 
commandait,  en  179';!,  contre  les 
armées  russes,  le»  troupes  du  Pa- 
lalinat,  où  il  était  né.  Il  n'eut  pas 
seulement  à  combaMre  les  enne- 
n)i^  de  la  Pologne  :  il  eut  à  lutter 
contre  la  faiblesse  de  Stanislas-Au- 
guste {voy.  ce  nom),  qtii,  cons- 
tamment subjugué  par  la  ptdili- 
que  de  Catheiine  II,  céda  erdin 
aux  ordres  de  cetle  impérieuse 
souveraine,  et  abdiqua  à  Grodno. 
Le  comte  Zabiello  donna  aussitrtt 
sa  démission,  et  se  relira  en  Bohê- 
me. Quoiqu'il  ne  prît  aucune  part 
à  l'insurrection  nationale  dirigée 
par  Kosciusko  en  i704'  ses  sen- 
timens  patriotiques  bien  connus 
le  firent  persécuter.  Arrêté  à  Carls- 
bad  et  transféré  à  Prague,  il  ob- 
tint non  sans  peine  sa  liberté  et 
l'autorisation  de  se  retirer  à  Dres- 
de. Il  est  depuis  ce  temps  resté 
étranger  aux  affaires  publiques. 

ZABIELLO  (Joseph),  frère  aîné 
du  précédent ,  embrassa  contre  sa 
patrie  la  cause  des  Russe».  Pen- 
dant l'insurrection  de  i794i»  '1  l^"t 
arrêté  à  Varsovie.  Sa  correspon- 
dance avec  le  général  Igclstrone 
ayant  été  trouvée  dans  le<  papiers 
de  ce  dernier,  il  fut  traduit  devant 
le  tribunal  provisoire,  le  3  mai  de 
la  même  année,  et,  convaincu  de 
trahison,  il  subit  dans  les  vingt- 
quatre  heures  le  supplice  de  la 
corde. 

7.ABIRA  (Georges),  littérateur 


grec,  naquit  à  Sialista,  «"fi  Macé- 
doine, et  commen^-a  -es  étude:»  en 
Thessalonique  ,  qu'il  quitta  pour 
passer  en  Hongrie,  oi'i  se*  parens 
désiraient  qu'il  apprît  le  commer- 
ce. 11  suivit  quelque  temps  la  car- 
rière commerciale,  peu  convena- 
ble à  ses  gofits,  et  obtint  enfin  de 
sa  famille  la  permission  de  se  li- 
vrer à  d'autres  soins.  Les  langues 
vivantes  de  l'Europe  et  la  langue 
latine  l'occupèrent  exclusivement, 
et  bientôt  il  fonda  à  Colotscha, 
une  école  pour  les  Grecs  de  sa 
communion.  Elle  prospéra,  et 
tout  entier  aux  lettres,  les  fruits 
qu'il  en  retirait  servaient  à 
augmenter  les  richesses  de  sa  bi- 
bliothèque.Ce  savant  fit  imprimer, 
en  1795,  l'ouvrage  de  Canlemir 
sur  les  Cantaruzènes.  A  sa  mort, 
arrivée  le  19  septembre  i<So'|,  il 
laissa  un  nombre  considérable  de 
manuscrits,  parmi  lesquels  se  trou- 
ve au  noud)re  des  plus  importans, 
un  Théâtre  /lellénique ,  renfer- 
mant le  catalogue  et  la  biographie 
de*  écrivains  grecs,  depuis  la  pri- 
se de  Conslantinople. 

ZACH  (iS.  de),  feld-«narérhal 
autrichien,  d'une  famille  noble, 
suivit  la  carrière  des  armes,  et  é- 
tait  quartier-tnaître-général  de  l'ar- 
mée autrichienne,  sous  les  ordres 
de  M.  fie  Mêlas.  Il  fut  faitprisonnier 
à  la  bataille  de  Alarengo,  où  il  s'é- 
tait fait  remî^quer  par  son  coura- 
ge. L'archiduc  Charles  l'employa 
en  la  uiême  qualité  dans  la  campa- 
gne de  i8o5,  et  lui  donna,  après  la 
bataille  d'Auslerlitz,  que  suivit  le 


ZAJ 

fraiié  de  Presbouig,  le  gouverne- 
ment militiiire  de  Trieste.  En 
1806,  il  reçnt  d«^  reiupeienr  d'Au- 
triche le  comniandemcnt  du  régi- 
ment d'infanterie  de  Uièïie,  et,  en 
1808,  la  croix  de  coMunaiidetir  de 
l'ordre  de  Léopold.  En  180;),  il 
fut  employé  en  Italie,  en  qualité 
«le  feid-niaréchal,  sous  rarcbidiic 
Jean;  il  obtint  quelques  succès, 
mais  bientôt  il  fut  forcé  d'évacuer 
la  Carinihie,  et  de  se  retirer  pré- 
ci))ilammenl  sur  les  antres  corps 
d'armée.  Par  suite  du  traité  de 
Vienne,  il  fut  admis  à  la  retraite, 
d'ni"»  il  n'est  p:)S  sorli  d«?{»iiis. 

ZACH  (N.  de),  célèbre  astro- 
nome, frère  do  précédent,  se  livra 
exclusivement  à  l'étude  des  scien- 
ces, et  particjdièrcment  de  l'astro- 
nomie, où  il  fil  d<;s  progrès  si  re- 
marquables, que  le  duc  de  Saxe- 
Gotha  érigea  en  sa  faveur  l'obser- 
vatoire de  Sééberg.  iW.  de  Z,ach 
se  plaça  bientôt,  par  ses  observa- 
lions,  au  nombre  des  plus  célè- 
bres astronomes  de  l'Europe,  il  a 
publié  des  Ephéméridcs  astrofio- 
viKjues  et  géographiques  ,  qui  jus- 
tifient ses  vastes  coiutaissances  et 
l'importance  de  sa  corresjjondan- 
ce  scientifique. 

ZAJONC/.ECR  (le  Prince  i>e), 
vice-roi  de  Pologne,  est  issu  d'u- 
ne famille  noble,  mais  pauvre;  il 
suivit  la  carrière  des  armes  et  de- 
viol  aide-de-camp  du  général  Bra- 
nicki,  grand-général  de  la  cou- 
lonne.  N<mce  (député)  à  la  diète 
de  Pologne  avant  l'insurrecljiui 
de  1792,  il  se  montra  à  ce  poste 
ce  qu'il  ftit  constammenl  dans 
sa  carrière ,  lun  des  plus  ar- 
dens  défenseurs  de  la  patrie.  Il 
fit  la  campagne  contre  les  Russes, 
cl  envoya   sa  démission  lorsque 


ZAJ  5i5 

Slanislas-Auguste  eut  été  forcé  de 
recevoir  la  loi  de  l'impérif-use  Cn- 
ihrriiie  H.  L'insurrection  natio- 
nale de  1794  ramena  sous  les  dra- 
peaux jxdonais  le  brave  Zajonc- 
zerk,qni  avait  cherché  une  retraite 
à  l'étranger.  Kosciusko  lui  donna 
la  mission  de  s'approcherdes  fron- 
tières afin  de  jnger  des  dispositions 
des  habitans  de  l'intérieur  et  des 
moyens  de  défense  de  l'ennemi. 
S'étanl  avancé  jusqu'à  Varsovie. 
il  courut  le  danger  d'êlre  pris.  Il 
rendit    compte  à  Kosciusko  des 
résultats  de  sa  tentative .  cl  resta 
dans  le  pays  ponry  enlrel«!nir  l'es- 
prit de  liberté  qui  animait  la  plu- 
part de  ses  concitoyens.  Lo  géné- 
ral Madalinski   ayant  commencé 
l«!s  hostilités  coulie  les  Russes  » 
Kosciusko  se  rendit  à   Cracovie, 
accompagné  du  général  Zajonc- 
zeck,  auquel  il  donna  le  ctumnan- 
dcmenl  d'une  division.  Il  contri- 
bua   cllicacement    à    l'alfaire    d.e 
Raslavia,  où  les  paysans  polonais 
montrèrent  le  plusgrand('ourage. 
Envoyé  en  Wolhynie,  où  il  prit 
le  commandemenl  (\c'--  in>urgés, 
il  fut  battu  le  10  à  Cbclm  :  l«;  la- 
lent  et  le  courage  qu'il  déploya 
dans  celle  aif.iire  n'ayant  pu   ré- 
sister à  des  forces  supéri»;ures,  ni 
réparer  le  mal  que  produisit  l'in- 
capacité d'un    de   ses  généraux, 
celle  défaite  le  fil  injustement  ac- 
cuser de  trahison  par  le»  ennemis 
secrets  de  l'indépendance  natio- 
nale;mais  le  général  Zajiuiczeck, 
au-dessus  de  la  calomnie,  réunit 
ses  troupes  éparses,  et  avec  leurs 
débris,  dont  il  ranima  la  confiance, 
il  tint  la  campagne  et  marcha  an 
i<ecours  de    ko'^ciusko,    que  les 
Prussiens  refoidaicnt  jusque  sous 
les  murs  de  Varsovie.  Uc  concert 


5i(>  ZA.I 

avec  son  chef,  il  les  repoussa,  et  re- 
çut la  pré>i()ence  delà  commission 
chiiigée  (le  juger  les  |irévi'r)us  de 
trahison.  Kosciiisko,5'élîinl  ensui- 
te porté  en  Lithuanie,  confia  par ///- 
térim  le  coniinandcnieiU  an  géné- 
ral Zajoncze*  k  ,  qui  le  renut  an 
général  Wawzecki,  nommé  pour 
remplacer  Kosciusko,  fuit  prison- 
nier à  lYlaciéjovvice.  Le  général  Za- 
jonczoïk  conlinna  à  <ervir  avec  le 
njf'me  zèle  la  cause  de  l'indépen- 
dance. Il  occu])ait  le  faubourg  de 
Prague  lorsque  Suwarow  y  péné- 
tra. Le  brave  Polonais,  blessé  dès 
le  commencement  de  l'action,  se 
défcndil  avec  courage  et  ne  quitta 
la  ville  que  lorsqu'il  la  vit  au  pou- 
voir des  Russes,  lise  retira  en  Au- 
triche, où,  malgré  l'autorisation 
qu'il  avait  obtenue  du  e;énéral 
d'Harnoncourl,  il  fut  arrêté  contre 
le  droit  des  gens  et  conduit  dans 
ime  f(jrteresse  en  Moravie.  L'avè- 
nement dt;  Paul  I"  à  l'empire  lui 
rendit  la  liberté.  Il  pas«a  au  ser- 
vice de  France,  cl  fit  Javec  le  gé- 
néral en  chef  Bonaparte,  qui  le 
nomma  général  de  divisitm,  la 
cainpagne  d'Egypte.  <■  Il  s'opposa, 
dit-on  ,  jusqu'au  dernier  nmmeut 
à  ce  qu'on  traitât  avec  les  Anglais, 
prétendant  que  sa  fidélité  à  son 
général  l'obligeait  i\  mourir  au 
poste  qu'il  lui  avait  confié.  »  Re- 
venu en  France,  il  reçut  un  com- 
mandement au  camp  de  Boulogne, 
passa  avec  sa  division  à  l'armée 
d'Allemagne  en  i8o5,  et  fut  de 
l'expédition  funeste  de  Russie  en 
i8j2;  au  combat  de  Polotsk  il  eut 
une  jambe  emportée.  Les  événe- 
nemens  de  1814  rendirent  le  gé- 
néral Zajtmczeck  ù  sa  patrie.  Nom- 
mé, en  i8i5,  par  l'empereur  A- 
lexaudrc,  vice-roi  de  Pologne,  il 


ZAK 

reçut  encore  de  ce  monarque,  en 
18 18, une  faveur  non  veHe.  Alexan- 
dre lui  contera  la  dignité  de  |>rin- 
ce,  et,  en  terminant  la  diète  de 
cette  année,  fit  ainsi  l'éloge  du 
général  Zajonczeck  :  «  lin  de  vus 
«plus  dignes  vétérans,  le  général 
»  Zajonczeck  ,  «ne  représente  par- 
«ini  vous;  bîatichi  sous'vos  dra- 
"  peaux,  associé  constamment  à 
•)  vos  succès  et  à  vos  revers  ,  il  n'a 
«cessé  de  donner  des  preuves  de 
»  snn  dévouement  i  la  patrie  ;  l'ex- 
npérience  a  complètement  justifié 
»mon  thnix.  » 

lAKKZEWSRÏ  (N.  ),  nonce 
(député)  de  Poser»,  se  mfuitr.t 
constamment  dévoué  ù  sa  patrie, 
et  l'un  des  illustres  Polonais  les 
plus  prononcés  contre  les  Fvusses, 
leurs  oppresseurs.  Eu  1792.  il  usa 
de  toute  l'iniluencc  que  lui  don- 
naient sur  le  peuple  son  caractère 
personnel  et  son  patriotisme  ar- 
dent ponrie  porter  à  soutenir  avec 
vigueur  la  constitution  du  5  mai 
1791.  Son  zèle  reçut  sa  récom- 
pense; JM.  Zakrzewski  fut  desti- 
tué à  la  fin  de  l'année  «  comme 
eimemi  des  Russes.  »  Lorsqu'en 
1794»  Rosciusko  ressaisit  l'élen- 
dard  de  la  liberté,  et  que  les  Rus- 
ses eurent  été  chassés  de  Varso- 
vie. M.  Zakrzewski  fut  nommé 
de  nouveau  nonce  de  Posen.  Il 
devint  président  du  conseil  natio- 
nal, et  eut  la  charge  spéciale  de 
la  police  et  des  vivres.  Varsovie 
retomba  bientôt  au  {)Ouvoir  des 
tro*ipes  russes,  et  quoique  la  ca- 
pitulation ffit  revêtue  de  l'accep- 
tation du  feld-maréchal  Suwarow, 
l'implacable  Catherine  II  ordonna 
l'arrestation  de  ZakrzcAvski,  d'I- 
gnace Potocki,  de  Thadée  Mos- 
towbki ,  et  d'un   grand  oombre 


ZAM 

frautrcs  patriotes  distingués.  Elle 
les  fil  Ininslérer  à  Saint- Pélcrs- 
buurg,  où  ils  étaicDt  encore  dé- 
tenus lors  de  l'avènement  de  Paul 
I"  à  l'empire.  ZukrzeM'ski  ayant, 
parsjutede  cet  événement,  recou- 
vré sa  liberté,  se  retira  dans  ses 
terres  e«  Gallicie,  où  il  mourut 
en  1802. 

ZAMBECCARI  (le comte  Fran- 
çois ) ,  célèbre  aéronaule  italien, 
naquit  en  1766  à  Bol'igne,  d'une 
l'amille  ancienne;  il  appartenait 
pur  le  drnii  de  sa  naissance  au 
corps  des  quarante  sénateurs  de 
celle  ville.  î^on  éduralion  fut  très- 
soignée.  ïrès-ini«truit  dans  les  ma- 
thématiques ,  plein  d'ardeur  pour 
l'étude  des  sciences,  il  embrassa 
néanmoins,  par  égard  pour  sa  fa- 
mille, la  profession  des  armes,  et 
était  odicier  de  marine  au  service 
de  l'Espagne  lorsqu'il  fut  fait  pri- 
soimier  par  les  Turcs,  qui  ren- 
voyèrent au  bagne  de  Constanti- 
nople.  L'ambassadeur  d'Espagne 
réclama  fortement  et  obtint  la  li- 
berté de  cet  oflicier,  qui  en  pro- 
fita po»>r  voyager  dans  le  Levant, 
en  Afrique,  et  enfin  dans  les  prin- 
cipales \illes d'Europe.  cLe comte 
de  Zambeccari,  dit  l'auteur  d'une 
notice  sur  ce  célèbre  aéronaute, 
vonlut  trouver  la  direction  des  bal- 
l(ins'jérostali(|ues,  par  des  njoyens 
ingénieux  fdiidés  sur  l'existence 
de  divers  courans  d'air  à  différen- 
tes hauteurs,  sur  l'application  des 
rames,  et  enfin  sur  l'augmentation 
ou  la  diminution  du  gaz,  qu'il  opé- 
rait à  volonté  pour  de-cendre  et 
s'élevertour  à  tour.»  Leai  septem- 
bre 1812,  le  comte  Zambeccari 
ayant  voulu,  malgré  im  temps  peu 
favorable,  effectuer  une  expérieu- 
crqu'il  avait  annoncée,  il  j^'élevu; 


ZAM  517 

mais  en  cherchant  à  se  diriger,  son 
ballon  s'accrocha  à  un  arbre  et 
prit  feu.  Ainsi  péril  cet  infortuné 
aéronau  te  à  l'âge  d'environ  56ans. 
ZAMOYSKY  (le COMTE  André), 
grand-chancelier  de  la  couronne 
de  Pologne,  l'un  des  plus  illustres 
défenseurs  de  l'indépendance  de 
sa  patrie,  embrassa  d'abord  la  pro- 
fession des  armes,  et  après  s'être 
plusieurs  fois  distingué  comme 
odicier  instruit  et  brave,  il  suivit 
la  carrière  des  fonctions  publiques. 
Devenu  sénateur  et  grand-chan- 
celier du  royaume,  il  s'efforça  d'à-» 
paiserles  troubles  au  milieu  des-, 
quels  se  fil  l'élection  de  Stanislas 
Poniatowski  (roj.  Stanislas-'Au- 
Gi'STE  )  à  la  couronne  de  Pologne. 
Il  conserva  les  fonctions  de  grand- 
'chancelier  aussi  long-temps  qu'il 
crut  pouvoir  les  remplir  avec  in- 
dépendance et  utilement  dans  les 
inlérêls  de  son  pays.  (Jet  espoir 
perdu  ,  il  donna  sa  démission  en 
plein  sénat,  après  avoir  motivé 
sa  conduite  dans  un  discours  plein 
d'énergie.  Stanislas-Auguste  vou- 
lut lui  conserver,  et  plus  lard  lui 
rendre  les  sceaux.  Zamoyrky  fut 
inébranlable  et  rentra  dans  la  vie 
privée.  Lh  dièle  cependant  l'ayant 
choisi  pour  former  un  code  de 
lois,  il  remplit  cette  mission  ;\  lu 
satisfaction  de  ses  coiiciloyens. 
Toutefois  cet  important  travail, 
dans  lequel  le  tiers-état  avait  vu 
augmenter  ses  privilèges,  ye  fut 
sanctionné  par  le  roi  qu'en  1791. 
Zamoysky  mourut  le  12  janvier 
1792,  honoré  de  l'estime  géné- 
rale.. «11  fut,  dit  Tauteur  d'une 
notice,  philosophe  dans  toute 
l'acception  du  mot;  ses  mœur» 
publiques  et  privées  le  rendirent 
aussi  recommandable  que  aes  ta- 


3i8 


ZAN 


lens  politiques  ;  il  affrancliit  le 
premier  ses  vassaux  de  la  servi- 
tude, en  donnanl  ainsi  à  d'autres 
seigneurs  un  exemple  de  bienCai- 
sauce  et  d'humanité,  qu'ils  ne  tar- 
dèrent pas  à  suivre.  Placé  dans 
des  circonstances  moins  désas- 
treuses, il  aurait  occupé  un  rang 
distingué  parmi  les  grands  hum- 
lïies  de  son  siècle,  au  lieu  que 
sa  carrière  ne  fut  illustrée  en  par- 
tie (juc  par  ses  vertus  sociales. 
Lors  du  démembrement  de  la  Po- 
Jogne,  l'empereur  Joseph  II  ayant 
eu  en  partage  les  domaines  de  Za- 
moysky,  lui  avait  offert  le  titre 
de  prince  ,  qu'il  ne  voulut  pas  ac- 
cepter. » 

ZANGIACOMI  (le  baron  Jo- 
seph) ,  membre  de  la  convention 
nationale  et  du  conseil  des  cinq- 
cents  ,  conseiller  à  la  cour  de  cas- 
sation, conseiller-d'état,  membre 
de  la  légion-d'honneur,  exerçait 
à  l'époque  de  la  révolution  la  pro- 
fession d'avocat  à  Nanci,  où  il 
était  né.  Le  département  de  la 
Meurthe  le  nomma,  au  mois  de 
septembre  1792»  député  à  la  con- 
vention nationale;  dans  le  procès 
de  Louis  XVI,  il  vota  la  déten- 
tion de  ce  prince  et  son  bannis- 
sement à  la  paix,  M.  Zangiacomi 
n'occupa  guire  la  tribune  que 
pour  y  faire  des  rapports  au  nom 
du  comité  des  secours  publics  dont 
il  était  membre.  Il  passa  au  con- 
seil dgs  cinq-cents  par  suite  de  la 
réélection  des  deux  tiers  conven- 
tionnels, et  sortit  du  conseil  le 
28  mai  1798.  Devenu  membre 
du  tribunal  de  cassation  après  la 
révolution  du  18  brumaire  an  8 
(9  novembre  1799),  il  fut  con- 
servé dans  cette  fonction  par  l'em- 
pereur,  qui  successivement   lui 


ZIE 

donna  la  croix  de  la  légion  -d'hon- 
neur, le  nomma  baron  de  l'em- 
pire et  maître  des  requêtes.  Legou- 
vernement  royal  rétabli  en  181 4» 
conserva  k  M.  Zaugiacfuui  ses  ti- 
tres et  emplois,  et  le  comprit  en- 
suite au  nombre  des  conseillers 
d'état.  Il  mourut  en  jSaâi 

ZI ETH  EN ,  lieutenant-général 
prussien,  né  à  Berlin  en  1766,  é- 
tait  fils  du  fameux  général  de  ca- 
valerie de  ce  nom,  qui  contribua 
aux  victoires  du  roi  Frédéric  II, 
et  notamment  à  celle  de  Torgau, 
où  il  prit  sur  lui  de  charger,  avec 
son  régiment  de  hussards,  les  cui- 
rassiers autrichiens,  les  renversa, 
et  décida  le  gain  de  la  bataille.  Ce 
général  ne  s'était  marié  qu'à  1  âge 
de  près  de  80  ans,  et  le  roi,  qui 
avait  Ir.  plus  haute  estime  pour  le 
vieux  guerrier,  lui  annonça,  en  le 
félicitant  sur  son  mariage,  qu'il 
serait  le  parrain  de  son  premier 
enfant,  engag(;ment  qu'il  eut  à 
remplir  dès  la  première  année  de 
cette  union  tardive.  Le  jeune  Zie- 
then  reçut  au  berceau,  un  brevet 
d'o^fficier,  dans  le  régiment  de  hus- 
sards de  son  père;  mais  celui-ci 
exigea  que  son  fils  ne  prendrait 
son  tourd'ancienneté  que  du  jour 
où  il  pourr.'iit  rendre  des  services 
effectifs.  Il  fut  élevé  avec  soin 
à  l'école  militaire  de  Berlin  ,  qu'il 
quitta  à  l'âge  de  i5  ans;  il  se 
distingua  bientôt  par  son  courage 
et  ses  talens  militaires.  Après  avoir 
passé  par  tous  les  grades,  il  fut 
nommé  colonel  du  beau  régiment 
de  son  père,  et  bientôt  officier-gé- 
néral. Il  commandait  en  cette  qua- 
lité, un  corps  de  cavalerie  prus- 
sienne à  l'ouverture  de  la  campa- 
gne de  181 5.  Attaqué  par  l'armée 
française  près  de  Charkroi,  où  il 


zni 

avait  son  quartier-général,  il  es- 
suya un  échec  dans  les  premiers 
jours  du  mois  de  juin,  el  fit  »a  re- 
traite sur  Flcurus,  d'où  il  fut  en- 
core forcé  de  se  retirer  après  avoir 
éprouvé  des  pertes  considérables. 
Il  se  replia  alors  sur  l'armée  du 
maréchal  Blucher,  et  prit  part  à  la 
bataille  de  Ligny,  où  les  Prussiens 
furent  battus  par  Napoléon  le  16 
juin.  Apr^s  le  désastre  de  Water- 
loo, le  général  Ziethen  fut  chargé 
de  poursuivie  les  Français  en  re-' 
traite,  et  il  arriw  un  des  premiers 
sous  les  murs  de  Paris.  Lorque  la 
paix  fut  conclue,  il  fut  nommé 
commandant  en  chef  du  contin- 
gent prussien ,  qui  fit  partie  de 
l'armée  d'occupation  que  les  puis- 
sances alliées  laissèrent  en  Fran- 
ce. Il  établit  son  quartier-général 
à  Sedan,  où  il  résida  jusqu'û  la  fin 
de  1818,  quand  les  étrangers  éva- 
cuèrent enfin  le  royaume. 

ZIMMIRMANN  (Jeaîs-Geor- 
GE>),  célèbre  médecin  suisse,  na- 
quit à  Burg,  canton  de  Berne,  le 
8  décembre  1728.  Entraîné  par 
«n  pen<  haut  invincible  vers  l'étu- 
de de  la  médecine,  il  prit  des  le- 
çons des  plus  savan§  professeurs 
de  Goeltingue,  de  la  Hollande  et 
de  Paris.  Sa  réputation  comme 
praticien  le  til  nommer,  en  1768, 
médecin  du  roi  d'Angleterre.  Fré- 
déric-le-Grand  le  fit  appeler  dans 
la  maladie  à  laquelle  ce  prince  suc- 
comba, muis  dont  Zimmermann 
parvint  à  force  de  soins  à  adoucir 
les  vives  douleurs.  Catherine  II 
voulut  se  l'iitlachcr  comme  méde- 
cin, mais  il  refusa  de  se  rendre  à 
Saint-Péter?bourg,  et  néanmoins 
cette  souveraine  bii  envoya  l'or- 
dre de  Siint- Wladimir.  On  rap- 
porte qu'à  l'époque  où  il  publia 


El  M 


ÙIÇ) 


son  Essai  sur  la  solitude,  qui  a  été 
traduit  en  français,  Catherine  II 
venait  de  perdre  son  favori  Lans- 
koï,  qu'elle  aimait  beaucoup,  et 
elle  nourrissait  sa  profonde  dou- 
leur dans  une  solitude,  quand  le 
livre  de  Zimmermann  lui  tomba 
entre  les  mains;  elle  reparut  aus- 
sitôt à  la  cour,  et  ce  fut  à  cette  lec- 
ture qu'elle  attribua  sa  consola- 
tion. Zimiriermann  revint  dans  sa 
patrie  vers  1795.  H  y  devint  som- 
bre et  mélancolique,  état  déplora- 
ble qui  s'accrut  encore  par  une 
maladie  mentale  dont  son  fils  fut 
atteint,  et  par  une  maladie  de  lan- 
gueur qui  s'empara  de  sa  fille,  et 
la  lui  ravit  peu  de  temjjs  avant 
qu'il  cédât  lui-même  à  ses  propres 
souffrances.  Il  mourut  le  7  octo- 
bre 1795,  dans  5367"  année.  Sa 
vie  a  été  écrite  par  iM.  Tissot,  son 
aini  et  ancien  condisciple.  Outre 
l'ouvrage  que  nous  avons  déjà  ci- 
té, on  loi  doit  encore  une  Disser^ 
talion  physiologique  sur  l'irritabi- 
lité,  un  Poème  sur  le  désastre  de 
Lisbonne,  etc.  Zimmermann  a 
laissé  en  mourant ,  la  réputation 
d'un  homme  vertueux  et  d'un 
grand  praticien. 

ZIMMERMANN  (  Pierre- Jo- 
seph-Ccillaume),  professeur  à  l'é- 
cole royale  de  musique  et  de  dé- 
clamation ,  est  né  ù  Paris  le  19 
mars  1785.  Il  a  étudié  sous  la  di- 
rection de  M.  Boïeldieu,  le  forté- 
piano  au  conservatoire  de  musi- 
que, et  a  remporté  en  1 799,  ayant 
à  peine  atteint  sa  i4'  année,  le 
prix  de  cet  instrument.  Deux  ans 
après,  en  1801,  il  remporta  au'*si 
le  premier  prix  d'hartnofiie,  qu'il 
avait  étudiée  sous  M.  Catel. 
M.  Zimmermann  a  composé  un 
grand  nombre  de  romances ,  det 


r>20  ztN 

Sonates  et  des  concertos  pour  le 
piano. 

ZliNGARELLI  (Nicolas),  ct- 
IcLre  coiiJpo.'-ilcur  ilalitn ,  né  à 
Naples  en  i'y'^'2,  est  sorli  du  con- 
servaloire  de  Loretle ,  où  i!  a  eu 
pour  inaîlre  Fenaroli ,  et  pour  ca- 
marades Cimarosa  et  Giordanello. 
II  apprit  en  peu  de  temps  à  bien 
jouer  du  violon,  et  les  règles  prin- 
cipales du  chanl  et  de  ï\i  eoujpo- 
sition.  Avant  de  quitter  cet  éta- 
blissement, il  conjposa  un  inter- 
mède, intitulé  :  /  Quattro  pazzi, 
qui  l'ut  très-applaudi.  Il  réussit 
mieux  encore  dans  une  musique 
d'église,  où  son  style  grave  et 
soutenu  fixa  tous  les  suffrages. 
Malgré  ces  succès,  il  fréquenta 
quelque  temps  l'école  de  Speranza 
pour  se  perfectionner  dans  la  théo- 
rie de  son  art.  Speranza  était  l'un 
des  meilleurs  élèves  de  Durante  , 
et  presque  aussi  bon  contrappan- 
tistc  que  son  maître.  Il  obligeait 
les  jeunes  gens  à  refaire  trente 
fois  de  suite  le  même  morceau , 
en  variant  toujours  le  ton  et  la 
mesure,  sans  trahir  l'intention  du 
poète.  Mais  son  style  était  aride , 
recherché  et  ennuyeux.  La  musi- 
que de  Montezuma ,  que  Zinga- 
lelli  composa ,  en  1781,  pour  le 
théâtre  de  Saint-Charles  ,  se  res- 
sentit de  tous  ces  défauts.  Le  pro- 
fesseur ne  se  les  dissimula  pas;  et 
dans  l'.<i/si«c^û,  qu'il  écrivit  en  sept 
jours  pour  le  théâtre  de  Milan  ,  il. 
suivit  un  autre  système  d'harmo- 
nie. Cette  pièce  fut  très-applaudie; 
mais  ce  qui  mit  le  comble  à  la 
réputation  du  maître,  fut  l'opéra 
de  Juliette  et  Roméo,  qu'on  dit  ne 
lui  avoir  coûté  que  quarante  heu- 
res de  travail,  et  qu'on  ne  cesse 
pas  d'admirer  sur  tous  les  lhé5- 


ZIN 

très  de  l'Europe.  Parmi  ses  autres 
productions,  il  faut  rappeler //>/«<• 
f^riiie,  Artaxerce,  ApeLeset  Cuni- 
paspc,  le  Comte  de  Saldagna,  Pyr- 
r/ius,  I nés  de  Castro,  Clytemnes- 
tre ,  et  surtout  la  Destruction  de 
Jérusalem,  l'un  des  meilleurs  ora- 
torios iiali.  us.  E:i  i7t<9,  M.  Zin- 
garelli  donna  à  l'Aïademie  royale 
df  musique,  à  Paris,  l'opéra  d'An- 
tigone,  \u)ëiiiv  de  Marmonlel,  qui, 
à  cause  des  évéueniciis  politiques, 
n'eut  que  deux  représentations. 
A  son  retour  en»italie,  il  com- 
posa un  canon  à  huit  \oix,  pour 
un  concours  ouvert  à  Milan  ,  et 
qui  lui  valut  la  nomination  de 
maître  de  chapelle  de  la  cathé- 
drale. En  i8ot),  il  remplaça  Gu- 
glielmi  au  Vatican,  où  il  resta  jus- 
qu'à l'année  181 1.  S'etant  refusé 
de  prendre  part  à  un  Te  Deum 
pour  célébrer  la  naissance  do  roi 
de  Rome,  le  général  Miollis,  qui 
lui  en  avait  adressé  la  demande, 
eut  le  tort  de  l'envoyer  escorté 
des  gendarmes  à  Paris,  ^apoléon, 
qui  désira  le  voir,  lui  demanda 
pourquoi  il  n'avait  pas  voulu  qu'on 
chantât  pour  le  roi  de  Rome  ? 
Zingarelli  lui  répondit  en  souve- 
rain :  <:  Parce  que  je  ne  connais 
«d'autre  roi  de  Rome  que  le  pa- 
ope.  »  L'empereur  lui  haussa  les 
épaules,  et  le  lendemain  il  lui  fit 
remettre  douze  mille  francs,  avec 
l'ordre  de  composer  une  messe 
pour  la  chapelle  impériale.  Murât, 
sur  la  proposition  du  comte  Zurio 
(wj.  ce  nom)  ,  appela  ce  compo- 
siteur à  Naples,  le  décora  de  Tor- 
dre des  Deux-Siciles  ,  et  le  plaça 
à  la  tète  du  conservatoire  de  mu- 
sique, avec  Fenaroli ,  Paë?iello  et 
Tritto.  M.  Zingarelli,  qui  a  sur- 
vécu à  ses  collègues,  continue  à 


zou 

diriger  ocl  élahlii-semenl  ;   mais 
son  grand  âge,  et  certains  préju- 
gé.',  peu  dignes  d'un  si  beau  ta- 
lent, rendent  son  influence  pres- 
que nulle  sur  ses  élèves.  M.  Ziii- 
gareili  est  dévot  jusqu'à  la  supei"S- 
tition  ,  et  il  a  une  aversion  pro- 
noncée pour  l'école  uaoderiio.  Un 
jour  que  M.  Rossini  alla  visiter  le 
conservatoire  de  Naples ,  le  direc- 
teur lui  dit  :  «  J'ai  défendu  à  mes 
«élèves  de  s'exercer  sur  vos  pa- 
•  piers  ;  votre  musique  peut  plsir» 
»au  ihéiltre  ,  mais  elle  doit  être 
"bannie  des  écoles.  »  En  atten- 
dant, le  jeune  Jiercadante  ,  élève 
le  plus  di-tingué  de  Zingarelli,  n'a 
trouvé  d'autre  moyen  pour  plaire 
au  public  que  celui  d'étudier  les 
productions  de  Rossini.  Son  Jpo- 
théose  d'Hercule  est  tout-à-fait 
dans  le  stvie  du  Cygne  de  Pesaro. 
ZOUBO^V    (Platon),  dernier 
favori  de  l'impéralrice  Catherine 
II  ,  est  issu  d'une  famille  honora- 
ble  mais   sans    illustration.    Son 
édiicati(jn  fut  Irès-soignée;  il  par- 
lait bien  le  français,  avait  des  con- 
naissances littéraires  et  faisait  pas- 
sablement de  la  nmsique.  Il  eutra 
dans  le  régiment  des  gardes  de 
l'impératrice,  où  bientôt  il  devint 
lieutenant.  Un  pli_yi,ique  agréable, 
une   taille    moyenne  ,  mais  bien 
prise,  de  l'aisance  dans  les  ma- 
nières, !es  dons  ain).ibles  de  l'es- 
prit, Gxérenl  l'attention  des  dantes 
de  la  cour,  qui  ,  par  leurs  éloges, 
•ippelérent  l'intérêt  de  l'impéra- 
trice sur  le  jeune  lieutenant.    A 
cette  époque,  en  i78(),  Catheri- 
ne Il  etail  plus  que  sexagénaire, 
et  Zoubow  n'avait  pas  encore  at- 
teint SOI)  cin({uième  lustre.  Une  si 
grande  distant  c  entre  les  Sges  n'ar- 
rêta ni  l'amliition  de  l'un  ni  la  bicn- 


ZOU  521 

veillance  de  l'autre,  et  au  prin- 
temps decette  même  année, le  lieu- 
tenant des  gardes  sollicita  ou  reçut 
l'ordre  de  prendre  le  commande- 
ment du  détachement  qui  accom- 
pagna l'impératrice  à  Trarskoé- 
Selo.  Il  dina  seul  avec  S.  M.  ainsi 
que  cela  était  d'usage,  et  par  suite 
de  cette  faveur  il  reçut  un  présent 
de  cent  mille  roubles  ,  fut  installé 
dans  l'appartement  des  favoris  , 
et  vit  successi\enient  son  crédit 
s'accroître  ainsi  que  sa  fortune. 
«Veis  la  fin  du  règne  decette  prin- 
cesse ,  dit-on,  tout  l'empire  était 
aux  pieds  de  l'heureux  Zoubow; 
mais  la  mort  de  l'impératrice  le 
replongea  dans  le  néant  d'où  il 
était  sorti,  »  Quoique  le  favori  de 
Catherine  n'eût  point  fuit  un  usage 
tyrannique  du  pouvoir  que  la  fai- 
blesse de  sa  souveraine  lui  avait 
abandonné,  son  arrogance  natu- 
relle augmentée  par  une  aussi  hau- 
te fortune  lui  avait  attiré  un  grand 
nombre  d'ennemis;  et  peu  après 
ravènenient  de  Paul  1"  an  trône,  il 
dut  s'éloigner  d'abord  de  la  cour 
et  quitter  ensuite  la  Russie.  Il  se 
rendit  en  Allemagne,  où  se  reti- 
raient pre^que  toujoins  les  favoris 
de  l'impératrice  lorsqu'elle  les 
avait  disgraciés;  il  y  étala  tout  le 
luxe  et  les  prélenlions  qu'il  avait 
déployés  à  Saint- Péti;rsbourg. 
Bientôt  il  poussa  l'insolence  jus- 
qu'à vouloir  enlever  de  vive  force 
la  princesse  aînée  de  Courlande. 
Paul  I",  à  qui  le  duc  s'en  plaignit, 
rappela  Zoubow  en  Russie,  d'où 
il  l'éloigna  peu  de  temps  après. 
En  >8o2,  Zoubow  étant  à  Varso- 
vie, les  Polonais  indignés  de  la 
part  qu'il  avait  prise  dans  les  mal 
heurs  de  leur  patrie  {voy.  Catue- 

&IME,  STA.MSLiS-AlGUST£,REl>MN), 


Ô2  2  ZOU 

voulurent  le  chasser  de  leur  ville. 
Etanl  à  Carisbad ,  i>I.  do  (iiel{»ud 
lui  rcproclia  les  malheurs  de  la 
Pologne,  el  le  provotjna  en  duel. 
«Zonhovt^, disent  les  auteurs  de  dif- 
férentes biographies,  influa  aussi 
beaucoup  avec  ses  frères  sur  l 'évé- 
nement tragique  qui  amena  la  mort 
de  Paul  I",  etn'a  plus  joui  d'aucun 
crédit  sous  le  règne  d'Alexandre.» 
Celle  assertion  est  inexacte  en  ce 
qui  concerne  ses  frères.  Il  est  aus- 
si inexact  de  dire,  comme  le  font 
ces  biographes,  que  Plalon  Zou- 
bow  tua  en  duel  le  chevalier  de 
Saxe.  C'est  au  prince  ;>cherbatoff 
à  qui  ce  fait  doit  être  imputé. 

ZOUBOW  (Valérien),  frère 
cadet  du  précédent,  naquit  en 
1^60  et  suivit  lu  carrière  des  ar- 
mes, où  il  montra  du  courage  et 
quelques  talens  dans  les  grades 
inférieurs,  mais  une  entière  inca- 
pacité comme  général  en  chef. 
Valérien  Zoubow  partagea  avec 
son  frère  la  faveur  de  Catherine  II. 
Dans  la  guerre  contre  les  braves 
et  malheureux  Polonais,  Valérien 
ayant  perdu  une  jambe,  l'impé- 
ratrice lui  envoya  sur-le-champ 
«on  propre  chirurgien  ,  le  cordon 
de  Saint-André,  le  brevet  <le  gé- 
néral en  chef  et  une  gratifica- 
tion de  100,000  roubles,  qui  fut 
suivie  presque  immédiatement 
d'une  autre  de  5o,ooo  pour  payer 
ses  dettes.  Chargé,  en  1796,  du 
commandement  général  de  l'ar- 
mée envoyée  contre  les  Perses,  il 
n'obtint  aucun  résultat  important 
et  l'armée  «eut  également  à  souf- 
frir de  l'incapacité  de  son  général, 
de  l'insalubrité  du  pays  et  des  at- 
taques des  peuples  du  Caucase 
qui  la  harcelèrent  continuelle- 
ment. Campée  sur  les  bords  du 


ZLC 

Cyrus  ,  elle  était  depuis  long- 
temps dans  l'inaction  lorsque  Zou- 
bow reçut  la  nouvelle  de  la  mort 
de  l'impératrice  avec  l'ordre  de 
faire  prêter  serment  à  Paul  I",  et 
d'attendre  de  nouvelles  instruc- 
tions pour  agir.  »  Il  les  attendit 
peu;  trois  semaines  après  il  reçut 
l'injonction  de  partir  sur-le-champ 
pour  rentrer  en  Russie.  Aussitôt 
son  arrivée,  pour  éviter  une  des- 
titution, ildonnasadén)issionetse 
retira  en  Courlande,  où  il  était  pro- 
priétaire de  presque  tous  les  biens 
des  anciensducs.il  mou  ru  ta  Saint- 
Pétersbourg  le  4  juillet  1804. 

ZOUBOW  (NicotAs),  frère  des 
précédens,  eut  part  comme  eux 
aux  libéralités  et  à  la  faveur  de 
Catherine  II.  Après  avoir  parcou- 
ru la  carrière  militaire  où  il  par- 
vint au  grade  de  général ,  il  ob- 
tint une  place  de  sénateur.  Ni- 
colas Zoubow  mourut  l'année 
même  de  la  mort  de  son  frère  Va- 
lérien. 

ZUCCARELLI  (François),  cé- 
lèbre peintre-paysagiste  italien, 
naquit  en  1702  à  Pitigliano,  et 
mourut  à  Venise  en  178g,  dans  la 
87*  année  de  son  3gc.  Il  montra 
de  très-bonne  heure  un  goût  pro- 
noncé pour  les  arts  de  dessin  el  sur- 
tout dans  le  genre  du  paysage,  où 
ses  progrès  furent  rapides;  s'étant 
fixé  à  Venise,  il  acquit  bientôt  de 
la  réputation,  et  à  la  fin  de  sa  car- 
rière ,  il  jouissait,  parmi  les  pein- 
tres et  les  amateurs,  de  la  plus 
haute  renommée  pour  ses  talens 
comme  paysagiste.  Ses  moeurs 
douces  et  régulières  ajoutaient  à 
l'estime  qu'il  avait  acquise  par  ses 
talens.  Parmi  ses  protecteurs  il 
citait  avec  reconnaissance  M. 
Smith,  consul  d'Angleterre  près 


zuc 

du  gouvernement  vénitien.  Cet 
amaleur  t-clairé  des  aris  s'était 
pin  constamment  à  favoriser  les 
talens  de  Ziiccarelli,  et  l'avait  f.iit 
connaître  en  Angleterre,  où  Zuc- 
cart'lli  alla  passer  quelques  an- 
nées. Le  musée  du  Louvre  pos- 
sède pitisieurs  tableaux  et  dessins 
de  ce  ui.ùlre. 

ZLCC^HI  (le  bakon  Chables), 
<;x-général  de  division  au  service 
de  France  et  depuis  feld-niaré- 
chal-lieutenant  au  service  d'Au- 
triche, est  né  vtTs  1776  a  l\eg{»io, 
et  a  fait  toutes  les  campagtie»  des 
Français  df  puis  la  conquriede  l'I- 
l.ilie  par  le  général  en  chel  Bona- 
parte jusqu'aux  événemens  de 
1814.  M.  Z-ncchi,  sous  lieutenant 
en  1796,  était  chef  de  bataillon 
en  iHo.l.  Il  fut  nommé,  le  5  mai 
1807,  major  des  veilles  royaux; 
le  6  novembre  de  la  même  année^ 
colonel  du  1"  régiment  de  lif^ne 
italien;  le  aa  juin  1H09,  général 
de  brigade,  et  le  28  septembre 
1812,  général  de  division.  Cet 
utricier-général  a  montré,  dans  les 
difîerens  grades  qu'il  a  occupés, 
beaucoup  de  talent  et  de  courage 
et  a  été  cité  comme  un  général 
du  plus  grand  mérite  à  la  prise 
de  Laun  en  vSilésie,  le  18  août 
181 5  II  a  fait  les  campagnes  des 
année»  5,  G ,  7  ,  8,  9  de  la  répu- 
blique en  Italie  et  en  France;  de 
iSo5  dans  le  royaume  de  Naplcs; 
de  iMoO  et  1807  en  Dalmatie;  de 
1809  en  Aulriclie:  de  1812  et 
i8»r>  à  la  grande-armée,  et  d'I- 
talie en  1814.  L'em[)(reur  Napo- 
léon qui  avait  une  estime  [)iirti- 
culière  pour  le  général  /ucchi, 
l'avait  iion»mé  baron  de  l'empire, 
et  l'avait  décoré  des  dinéren>  or- 
dres de  France  et  d'Italie.  Il  lotiail 


ZUM 


à^o 


surtout  la  discipline  qu'il  avait  su 
maintenir  parmi  ses  troupes;  il 
lui  ténn)igna  publiquement  sa  sa- 
tisfaction pour  sa  conduitt  distin- 
guée dans  la  campagne  de  Saxe  en 
18 13,  lors  de  la  bataille  de  Leip-  ■ 
sig  et  de  la  retraite  qui  la  suivit. 
Le  général  Zucchi'  dégagé ,  en 
i8i4,  par  l'abdication  de  l'empe- 
reur Napoléon  ,  des  sermens  qu'il 
lui  avait  prêtés,  passa  à  cette  épo- 
que au  service  d'Autriche  en  qua- 
lité de  fcld-maréchal-lientenant. 
ZLMSrEEG  (Jean-Rodolphe), 
violoniste  et  compositeur  de  mu- 
sique, de  la  chapelle  du  duc  de 
Wurtemberg,  naquit  vers  17^0,  à 
Gausingen  dans  le  pays  de  Laut- 
fenbourg.  Il  commença  son  édu- 
cation musicale  à  Tacadéniie  du 
duc  de  Wurtemberg,  sous  la  di- 
rection du  maître  de  chapelle  Po- 
li, qui  le  prit  en  amitié,  et  se  per- 
fectioiuia  ensuite  par  l'étude  des 
ouvrages  de  Mattheson,  de  Mar- 
purg  et  de  d'Alembert.  «  Il  jouait, 
disent  les  auteurs  du  Dictionnaire 
historique  des  Musiciens,  non-seu- 
lement de  son  instrument  avec 
beaucoup  d'expres.-ion ,  mais  il 
était  aussi  excellent  compositeur 
tant  pour  le  violoncelle  que  pour 
le  chant.  Ses  compositions  se  dis- 
tinguant par  leur  gravité  et  leur 
dignité.  »  Zumsteeg  mourut  à 
Stuttgard,  le  27  janvier  1802;  il  a 
laissé  en  nianuscrit  les  composi- 
tions suivantes  :  la  Loi  Tartare , 
opéra  ;  Renaud  et  Armide ,  opéra; 
Tantira,  duodrame,  par  Huber; 
Schuss  de  Gœnseivifz,  opéra;  ZaU' 
lor,  opéra,  de  l.avaux  ;  les  chan- 
sons du  drame  les  Brigands;  la  Fi- 
te  du  Printemps ,  par  KIopstock  ; 
une  messe  et  plusieurs  composi- 
tions pour  instrumens. 


324      '  Z.UR 

ZL'RLO  (le  comte  Joseph  )  , 
ex  -  iniiiijir»;  de  rintérieur  à  Na- 
ph;s,  né  dons  cette  ville  ei»  1759, 
employa  acs  premières  amiées  ù 
l'étude  des  belles- lettres  et  de  la 
philoso])1iiie.  Son  déveIopj)«;ineiir 
fut  tellement  précoce,  qu'à  l'âge 
de  14  an»  ,  il  était  en  clat  de  com- 
prendre les  ouvrages  des  écrivains 
Jes  plus  profonds.  Un  jour  qu'il 
était  entré  dans  une  bil>lioth^que 
publique  pour  y  lire  les  œuvres 
postbuiues  de  Leibnilz,  le  conser- 
vateur auquel  il  en  avait  adressé 
la  demande  ,  frappe  de  son  ex- 
trême jeunesse,  lui  dit  que  le  li- 
vre existait,  mais  qu'il  n'était  jias 
fait  poui'  être  mis  dans  les  mains 
d'un  enfant.  Fiqué  de  ce  refus, 
M.  Zurlo  reprit  qu'il  serait  em- 
barrassé de  chercher  ailleurs  que 
dans  Leibnitz  lui  même  l'explica- 
tion d'un  passage  incompréhensi- 
ble de  son  Art  combinatoire ;  et  il 
se  mit  aussitôt  A  développer  avec 
une  étonnante  facilité  les  princi- 
pes les  plus  abstraits  du  système 
métaphysique  de  l'auteur  des  mo- 
nades. Le  vieux  bibliothécaire  , 
que  la  joie  transporte ,  prend 
par  la  main  le  jeune  philosophe , 
et  l'emmène  dans  l'intérieur  de  la 
bibliothèque  ,  en  lui  disant  que 
tout  ce  qu'il  voyait  serait  désor- 
mais à  sa  disposition.  M.  Zurlo 
usa  amplement  de  cette  permis- 
sion,  <.'t  eu  peu  de  temps,  il 
embrassa  un  espace  immense  dans 
le  domain»^  d«i  l'intelligence.  Il 
passait  de  la  lecture  à  la  médita- 
tion, et  de  la  méditation  à  la  lec- 
ture :  il  fréquentait  aussi  la  so- 
ciété de  gens  de  lettres,  et  eut  le 
bonheur  d'être  reçu  dans  le  cer- 
cle et  parmi  les  amis  de  Filan- 
gieri,  dont  il  a  toujours  révéré  la 


ZLR 

mémoire.  Obligé  de  faire  choix 
d'une  profession,  il  se  décida  pour 
le  barreau,  qui  était  alors  presque 
la  seule  carrière  ouverte  à  Naples 
aux  talcns  et  ù  la  fortune.  Mais  ù 
l'éloquence  près,  il  ne  possédait 
aucune  des  qualités  nécessaires 
pour  y  rdjtenir  de  grands  succès, 
qu'il  dédaignait  d'ailleurs,  n'ayant 
jamais  eu  l'ambition  de  devenir 
un  avocat  célèbre.  Ses  vues  étaient 
tournées  vers  un  but  plus  élevé  : 
la  science  du  gouvernement,  l'é- 
conomie et  l'administration  des 
états,  les  sources  de  la  prospériié 
et  de  la  grandeur  nationales  lui  pa- 
raissaient bien  autrement  impor- 
tantes que  la  défense  des  intérêts 
privés.  Il  s'était  adressé  à  un  per- 
sonnage puissant,  qui  lui  Ot  espé- 
rer une  place  dans  une  missiDii 
étrangère.  C'était  le  commence- 
ment d'une  carrière  qui  répon- 
dait en  grande  partie,  aux  vœux 
de  iVl.  Zurlo,  et  il  se  félicitait  de 
s'y  voir  engagé.  Il  allait  rece- 
voir sa  nomination,  lorsqu'il  ap- 
prit qu'un  de  ses  amis  ,  l'abbé 
Panzini ,  briguait  le  même  em- 
ploi, et  qu'il  y  fondait  toutes  ses 
espérances.  M.  Zurlo  ne  trouva 
pas  difficile  de  lui  faire  le  sacri- 
fice des  siennes  ,  et  il  employa 
tout  son  crédit  auprès  de  son  Mé- 
cène, pour  le  décider  en  faveur 
de  son  compétiteur.  Il  rie  tarda 
pas  j\  être  récompensé  de  cette 
généreuse  action,  lïn  1783,  le 
gouvernement  de  Naples  l'envoya 
dans  les  Calabres  ,  qui  venaient 
d'être  bouleversées  par  des  trem- 
blettiens  de  terre.  Le  chef  de  cette 
expédition  était  le  général  Pigna- 
telli  (  t'oy.  ce  nom  ),  honnne  dé- 
nué des  qualités  indispensables 
pour  remplir  dignement  une  pa- 


ZUR 

reille  commission.  M.  Ziirlo,qni 
gémissait  de  voir  doux  provinces 
livroes  à  la  cupidité  et  à  l'igno- 
•rance    d'un    tel    administrateur, 
cherchait  ù  en  balancer  l'influen- 
ce, en  représentant  au  roi  les  be- 
soins et  les  espérances  des  Cala- 
brais. Ses  rapports  doimèrent  une 
haute  idée  de  sa  capacité ,  et  s'ils 
ne  purent  opérer  le  bien  qu'il  s'en 
était  promis ,    ils    suffirent    pour 
le  faire  apprécier,  et  lui  obtenir 
une  place  èminente  dans  la  ma- 
gistrature. Il  fut  ensuite  (en  1798) 
appelé  à  la  direction  des  finances  ; 
elles  étaient  à  cette  époque  dans 
l'état  le  plus  fâcheux,  line  admi- 
nistration vicieuse  et  les  Irais  d'un 
armement  considérable  avaient  é- 
puisé  toutes  les  ressources,  et  créé 
tme  dette  de  plusieurs  millions, 
qui   avait  miné  le  crédit  public. 
M.  Zurlo  allait  proposer  des  re- 
mèdes énergiques  pour  guérir  de* 
plaies  aussi    profondes  ,   lorsque 
l'arrivée  des   Français  sur  le  ter- 
ritoire  napolitain    vint   traverser 
ses  projets,  et  l'exposa  «ux  plu» 
grands  dangers.   Le  peuple  ,  qai 
avait  chargé   le  dernier  ministre 
des  finances  de  toutes  les  fautes 
de  ses  prédécesseurs,  se  porta  en 
foule  à  l'hôtel  de  M.  Zurlo,  et  le 
saccagea  de  fond  en  comble  :  il 
n'aurait   pas    épargné  le  maître  , 
si  le»  chefs  du  gouvernement  mu- 
nicipal, qui  s'était  formé  i\  Naples 
•après   la  fuite  du  roi ,    n'étaient 
venus    retirer    le     ministre    des 
mains    de  celte   multitude  effré- 
née, pour  le  mettre  dans  un  fort 
à  l'abri  de  sa   fureur.  Dès  que  la 
républi«iue  fut  organisée,  M.  Zurlo 
quitta  son  asile,  et  alla  s'enfermer 
dans    une    mai->on    de    campagne 
non  loin  du  la  capitale.  Au  retour 


ZUR  3a  5 

du  roi  de  Sicile,  il  fut  replacé  à  la 
tête  du  ministère  des  finances, dont 
le   désorilre   n'avait  fait  qu'aug- 
menter. Les  perceptions  des  im- 
pôts étaient  devenues  presque  im- 
possibles ,   à  cause   des   troubles 
excités  dans  le  royaimie  par  l'en- 
treprise du  cardinal  Ruffo  ;  le  nu- 
méraire avait  disparu,  et  les  cof- 
fres de   l'état  élaient  surchargés 
d'inie  masse  considérable  de  pa- 
pi<'r-mnnnaie,  qui  n'avait  presque 
plus  de  valeur  dans  le  commerce. 
Une  somme  d'environ  trente  mil- 
lions de  ducats,  que  le  roi  avait 
emportés  en  Sicile,  aurait  été  plus 
que  suffisante  pour  réparer  en  un 
instant  taiil  de   maux  ;   mais   ce 
prince,  qui  n'avait  négligé  aucun 
moyen  pour  grossir  son  trésor,  ne 
paraissait  nullement  disposé  à  le 
verser  sur  se*  peuples  ;  et  le  mi- 
nistre Qc  vil  plus  de  ressource  que 
dans  son  propre  génie.  Son  pre- 
n)iersoin  fut  d'amortir  le  papier- 
monnaie,    qui   était  le   plu»  fort 
obstacle  au  rélaWissemeut  du  cré- 
dit public.  Sans  reoonrir  aux  me- 
sures ordinaires  deis  emprunts  et 
des  banqueroutes,  il  fixa  une  épo- 
que où  le  papier  cesserait  d'avoir 
cours  dans  le  royaume;  et  il  rapi- 
tatlsa ,  d'après  leur  valeur  nonn'- 
nalc,  le*  billets  de  banque,  dont 
le  gouvernement  se   chargea   de 
payer  les  intérôls  sur  des   fonds 
spécialement  hypothéqués  au  ser- 
vice de  celte  dette.  Par  ime  opé- 
ration aussi  simple  que  juste,  la 
nation  fut  délivrée  du  fléau  du  pa- 
pier-monnaie, et  elle  recouvra  son 
crédit  au  moment  où  elle  croyait 
ravoircoinplétenienlp(îrdu.Aprè5 
cet  important  service  rendu  à  l'é- 
tat, M   Zurlo  entreprit  des  réfor- 
mes utiles  dan»  toutes  les  bran- 


526 


z\m 


ches  de  l'adminislralion.  Le  roi 
voulut  récompenser  son  zèle  par 
«ne  dotation  en  leire.'*,  dont  il  ne 
iixa  que  la  valeur,  accordant  au 
ministre  la  faculté  de  choisir  les 
propriétés  qui  lui  auraient  le 
mieux  convenu.  M.  Zurlo  ne  vou- 
lut rien  acc«'pler,  et  il  poussa  son 
désintéressement  jusqu'à  renon- 
cer à  ses  appoinîeuiens  ,  disant 
que  les  grands  fonctionnaires  de- 
vaient donner  celte  preuve  de  dé- 
vouement à  leur  pays,  qui  me- 
naçait de  rester  écrasé  sous  l'é- 
nonnité  des  charges.  Mais  l'exem- 
ple de  M.  Zurlo  ne  trouva  point 
d'imitateurs ,  et  on  fut  même 
obligé  de  rapporter  une  ordon- 
nance qui  clasi^ait  le  paiement 
des  trailemens  les  plus  forts  à  la 
suite  de  la  solde  des  troupes  et  de 
celle  des  petits  employés,  pour 
mettre  fin  aux  clameurs  et  mê- 
me aux  invectives  de  quelques- 
uns  de  ses  collègues.  Lu  atten-  " 
dant,  la  nation  applaudissait  aux 
travaux  de  M.  Zurlo ,  qui  devait 
bientôt  ex|ner  ces  louanges  si  bien 
méritées.  La  dextérité  avec  laquel- 
le il  avait  retiré  son  pays  du  bord 
de  l'abîme,  vers  lequel  on  l'avait 
poussé,  réveilla  la  jalousie  d'Ac- 
lon  ,  qui  profita  d'un  moment  oii, 
par  un  excès  de  zèle  ,  le  minis- 
tre des  finances  avait  obéi  sans 
restriction  aux  ordres  de  la  rei- 
he ,  pourle  perdre  dans  l'opi- 
nion publique.  L'ordre  de  sa  des- 
titution lui  fut  communiqué,  lors- 
qu'entouré  de  ses  commis ,  M- 
Zurlo  signait  des  papiers  pour  le 
service  de  l'état.  Il  se  lève  tran- 
quillement de  son  fauteuil,  prend 
congé  de  ses  employés ,  et  entre 
dans  la  voiture,  en  ordonnant  au 
cocher  d'aller  tout   droit  au  fort 


ZLIV 

de  VOEuf.  C'était  la  prison  qui  lui 
avait  été  destinée,  et  où  il  resta 
jusqu'à  ce  que  son  innocence  fut 
reconnue  et  proclamée.  On  lui 
accorda  alors  sa  liberté  ;  mais  ou 
se  garda  bien  de  lui  rendre  sa 
place.  A  la  seconde  invasion  du 
royaume  de  Naples  ,  M.  Zurlo 
n'était  point  obligé  de  suivre  !a 
cour  en  Sicile  ;  mais  le  souve- 
nir de?  dangers  qu'il  avait  courus 
lors  de  la  première  révolution,  lui 
fit  prendre  le  parti  de  s'embarquer 
à  bord  de  l'escadre  qui  devait 
transporter  la  famille  royale  à 
Palerme.  Il  vécut  dans  celte  ville 
tant  qu'il  se  flatta  de  n'être  à 
charge  à  personne  ;  mais  lors- 
que la  cour  ne  fut  plus  en  état  de 
payer  la  pension  des  émigrés  ,  et 
que  les  parens  de  M.  Zurlo  furent 
nienacés  d'un  séquestre  général  à 
Naples,  il  sentit  la  nécessité  de 
rentrer  au  sein  de  sa  patrie.  Il  y 
arriva  en  1809,  au  moment  où 
le  roi  Joiichim  Mr.ral  appelait  au- 
tour de  lui  les  hommes  les  plus  é- 
clairés  pour  opérer  des  change- 
mens  nombreux  dans  toutes  les 
parties  de  l'administration.  M.  Zur- 
lo fut  désigné  pour  le  ministère  des 
finances,  qu'il  ne  voulut  point  ac- 
cepter :  à  peine  consentit-  il  à  faire 
inscrire  son  nom  sur  le  tableau  des 
conseillers-d'état,  espérant  échap- 
per ainsi  aune  plus  grande  respon- 
sabilité. Maison  avait  trop  besoin 
de  sa  coopération  pour  y  renon- 
cer. On  fît  de  nouvelles  démar- 
ches, on  mit  en  mouvement  tous 
les  ressorts,  et  on  ne  cessa  de  l'as- 
siéger que  lorsqu'il  se  laissa  em- 
porter. Joachim  lui  confia  d'abord 
le  département  de  la  justice  et  du 
culte  :  il  le  mit  ensuite  à  la  tête  du 
ministère  de  l'intérieur,  qui  devait 


ZUR 

remplacer  la  féodalité  par  les 
communes,  les  ordres  monasti- 
ques par  des  établissemens  de 
bienfaisance  et  d'instruction;  de 
ce  ministère,  en  un  mot,  qui, 
après  avoir  sapé  les  hases  de  l'an- 
cien édifice,  était  chargé  de  pré- 
parer les  matériaux  pour  la  cons- 
truction du  nouveau.  M.  Zurlo , 
embrassant  d'im  coup-d'œil  l'é- 
tendue de.ses  devoirs,  ne  fut  point 
découragé  de  la  grandeur  de  sa 
tûche.  Plus  il  apercevait  d'obsta- 
cles autour  de  lui,  plus  il  se  sen- 
tait d'énergie  pour  les  combattre. 
Un  jugement  sûr  et  une  grande 
pénétration  d'esprit,  une  activité 
rare  et  un  goût  pour  les  vastes 
entreprises  ,  telles  étaient  les  qua- 
litésde  M.  Zurlo,  qui,  fortifiées  par 
son  désintéressement  et  par  l'a- 
Jnour  du  bien  public,  en  faisaient  le 
levier  le  plus  puissant  pour  soule- 
ver le  fardeau  qui  lui  avait  été 
imposé.  Dans  un  pays  où  l'on  est 
habitué  à  voir  les  moindres  pro- 
jets passer  d'un  ministre  à  l'autre, 
sans  jamais  s'accomplir ,  chacun 
regardaii,avecime satisfaction  mê- 
lée de  crainte,  M.  Zurlo  terrasser 
d'un  bras  vigoureux  les  vieilles 
institutions, quidevaient  faire  pla- 
ce au  nouvel  ordre  de  choses 
qu'on  voulait  établir.  La  féodalité 
fut  abolie,  et  trois  cent  mille  co- 
lons vinrent  se  rHiigcr  au  nombre 
des  propriétaires  :  on  cessa  de 
persécuter  les  talens;  et  les  éco- 
les, les  collèges,  le»  lycée»,  les 
universités,  rivalisèrent  de  zèle 
pour  former  «les  citoyens  ver- 
tueux et  utiles  à  Tétai  :  la  fai- 
néaiitis<-  fut  proscrite,  et  les  rou- 
ven?.  furent  fermés  ,  le  nombre 
de»  irêlrcs  réduit,  le  commerce 
protégé,  le-»  Ateliers  multipliés, 


ZIR  32; 

les  efforts  de  l'agriculteur,  les  tra- 
vaux de  l'artiste,   les   veilles  du 
savant,  encouragés,  récompen- 
sés, applaudis.  Du  laboratoire  de 
chimie,  un  jardin  botanique,  les 
cabinets  minéralogique  et  zoolo- 
gique, des  collections  de  tableaux, 
de  vases ,  de  marbres ,  de  bron- 
zes, de  médailles;  le  magniâque 
observatoire  sur  la  colline  de  Ca- 
podimoute,  les  écoles  de  clinique 
et  le  théâtre  anaiomique  des  In- 
curables, la  maison  des   fous   à 
A  versa,  et  tant  d'autres  établisse- 
mens philantropiques  et  scientifi- 
q;u-squi  s'élèvent muintenant  sur 
un  sol  jadis  eiicoiubré  de  couvens 
et    d'églises  ,    déposeront    long- 
temps en  faveur  du  patriotisme  et 
des  lumières  de  M.  Zurlo.  On  en 
trouvera  la  trace  même  hors  de 
son  pays;  à  Uome,  par  exemple  , 
où,  en  i8i4j  il  employa  le  peu 
de  teu)ps  que  celte  ville  resta  au 
pouvoir  des  Napolitains,  pour  or- 
donner dilTérens    travaux,  entre 
autres  ces  grandes    cloisons  qui 
garan lissent   ;'»    présent   les    fres- 
ques (le  Raphaël  contre  les  acci- 
dens  de  l'atmosphère.  Les  Floren- 
tins se  rappelleront  aussi  d'«voir 
vu  un  ministre  de  Joachim  s'envi- 
ronner de  leurs  savans  pour  en 
accueillir  les  vœux  et  eu  honorer 
le  mérite.  Ils  n'oublierontpas  non 
plus  le  jour  où  M.  Zurlo  implora 
comme  une  grâce  auprès  de  son 
souverain   de   l'aider  à   payer  la 
rançon  de  Séralti,  capturé  sur  un 
bâtiment  sicilien  au  moment  où 
il  comptait    aller   achever   tran- 
quillement ses  jours  auprès  de  sa 
famille  en  Toscane  :  cet  homme 
;)Ourtant  avait  été  le  plus  impla- 
cable ennemi  de  M.  Zurlo,  dont  il 
avait  été  lu  successeur  au  minis- 


328  ZliR 

têre  dos  finances  en  i8o3.  Le  cœur 
«le  1>J.  Znrlo  se  montra  encore  pins 
généreux  lorsque  Joachiin,  préci- 
pité du  trône  par  les  soldats  des 
puissances  dont  il  avait  impru- 
demment épousé  les  intérêts,  lais- 
sa sa  famille  entourée  de  dangers 
et  à  la  merci  de  ses  persécuteurs. 
Dans  ce  changement  soudain  du 
sort ,  M.  Znrlo  s'attachant  aux 
personnes  dont  il  ne  pouvait  dé- 
sormais que  parta-çer  l'infortune, 
s'embarqua  sur  le  même  vaisseau 
qui  devait  conduire  la  reine  à 
Triesle.  Après  avoir  apporté  quel- 
que consointion  dans  le  cœur  con- 
tristé  de  cette  malheureuse  prin- 
cesse ,  il  lui  demanda  la  permis- 
sion de  la  quitter  pour  aller  vivre 
incognllo  à  Venise.  La  reine  crut 
devoir  lui  témoigner  sa  reconnais- 
sance en  lui  offrant  une  forte  som- 
me d'argent,  dont  elle  savait  que 
le  ministre  pouvait  avoir  besoin 
dans  l'exil  auquel  it  s'était  con- 
damné. M.  Znrlo  la  remercia,  en 
disant  qu'il  ne  s^  serait  jamais 
permis  d'accepter  d'une  famille 
tombée  dans  le  malheur,  ce  qu'il 
avait  constamment  refusé  quand 
elle  était  dans  la  fortune.  En  effet, 
il  sortait  presque  pauvre  de  ce 
long  et  brillant  ministère  qui  avait 
présidé  à  la  destinée  d'un  royau- 
me. En  arrivant  à  Venise,  il  fut 
attaqué  par  une  terrible  maladie, 
qui  faillit  lui  coûter  la  vie.  A  peine 
fut-il  rétabli,  qu'il  prépara  quel- 
ques notes  pour  une  nouvelle  édi- 
tion d'Anacréon  ,  que  son  ami ,  le 
général  Winspeare,  venait  de  tra- 
duire en  italien,  et  qtic  M.  Mus- 
toxidi  enrichissait  de  la  vie  du 
poète.  Le  désir  de  se  rapprocher 
de  sa  patrie,  dont  l'entrée  lui  était 
toujours  fermée,  lui  fit  préférer 


Zt'R 

le  séjour  de  Rome,  n\\  il  resta  jus- 
qu'à l'autoujne  de  1818,  époque 
de  son  rappel  i\  Naples.  Il  y  vivait 
dans  la  retraite,  au  milieu  d'un 
cercle  d'amis,  et  honoré  de  l'es- 
time publique,  lorsque  le  prince- 
régent  l'appela,  en  1820,  à  faire 
partie  du  nouveau  ministère  cons- 
titutionnel. M.  Znrlo  obéit  à  re- 
gret :  mais  une  fois  engagé  au  ser- 
vice de  l'état,  il  déplojia  la  plus 
grande  activité  pour  s'acquitter 
dignement  de  ses  nonrbreux  de- 
voirs. Il  reprit  le  portefeuille  de 
l'intérieur,  et  son  premier  soin 
fut  de  rassembler  les  collèges  é- 
lectora.ix  qui  devaient  procéder  à 
la  formation  du  parlement  natio- 
nal. En  butte  à  la  haine  incon- 
sidérée des carbonari f  qui  lui  re- 
prochaient des  mesures  sévères 
employées  sons  Joachim  pour 
arrêter  les  écarts  de  leur  secte,  il 
brava  courageusement  leurs  me- 
naces ,  et  ne  daigna  pas  répondre 
à  leurs  calomnies.  Lorsque  le  roi 
Ferdinand  reçut  l'invitation  de  se 
rendre  à  Laybach ,  M.  Zurlo , 
qui  craignait  une  émeute  dans  le 
royaume,  s'empressa  d'annoncer 
aux  préfets  le  prochain  départ  du 
roi,  avant  qu'il  en  eût  obtenu  l'au- 
torisation des  cortès.  Cette  infrac- 
tion à  un  article  de  la  constitution 
espagnole,  attira  sur  lui  la  rigueur 
du  parlement,  qui  le  mit  en  état 
d'accusation.  M.  Zurlo  se  démit 
de  ses  fonctions,  et  entraîna  dans 
sa  retraite  tous  ses  collègues,  qui 
voulurent  partager  sa  disgrâce.  Il 
parut  ensuite  devant  les  représen- 
tans  de  la  nation  pour  se  justifier 
de  l'imputation  qui  lui  était  adres- 
sée. Sa  défense,  remplie  de  digni- 
té, triompha  de  toutes  les  pré- 
ventions, et  M.  Zurlo  fut  acquitté. 


I 


ZUR 

11  restait  cependant  dans  le  cœur 
des  bons  citoyens  un  genliinent 
pénible,  en  réfléchipsant  que  le 
ministre  qui  avait  consacré  toute 
sa  vie  à  l'éiBancipation  des  com- 
munes, trouvait  dans  leurs  dépu- 
tés, ses  plus  implacables  ennemis. 
C'était  comme  un  tuteur  mal- 
traité par  des  pupilles  qu'il  se 
serait  efforcé  d'enrichir.  Avant  de 
soitir  du  ministère,  M.  Zurlo  a- 
vait  eu  le  temps  de  remettre 
au  roi  un  papier  contenant  ses 
idées  sur  le  rôle  que  ce  prince 
aurait  dû  jouer  au  congrès.  Ces 
conseils  étaient  marqués  au  coin 
de  la  grandeur,  et  ^lût  à  Dieu 
que  celui  qui  avait  juré  de  défen- 
dre les  droits  de  son  pays,  n'en 
eût  Jamais  écouté  d'antres!  La 
nation  napolitaine  n'aurait  point 
à  rougir  de  sa  faiblesse  ,  ni  à  pleu- 
rer la  perte  de  sa  liberté  et  de  son 
indépendance.  On  sait  ce  que  le 
roi  de  Naples  fit  à  Laybach  ,  et  on 
ne  doit  pas  s'étonner  si,  à  son  re- 
tour dans  ses  états,  il  n'a  plus 
jamais  voulu  se  rencontrer  avec 
M.Zurlo,qui  se  consola  facilement 
de  cette  disgrâce,  en  cherchant 
des  distractions  dans  l'étude  et 
dans  la  société  de  ses  amis. 


ZUY  529 

ZliYLEN-VAN-NIEVELT  (le 
COMMANDEUR  van),  est  né  d'une 
famille  noble  et  s'est  fait  honora- 
blement remarquer  dans  la  car- 
rière militaire  qu'il  a  suivie  suc- 
cessivement sur  terre  et  sur  mer. 
Lors  des  révolutions  de  son  pays, 
et  quoique  dévoué  à  la  maison 
d'Orange,  il  ne  repoussa  pas  néan- 
moins les  faveurs  dont  Louis  Bo- 
naparte [VOY.  BONAPARTE-LODIS)  se 

plut  à  le  combler,  lorsque  ce  prin- 
ce occupa  le  trône  de  Hollande  ; 
il  devint  alors  un  des  maréchaux 
des  armétîsdu  royaume.  Ln  1810, 
la  Hollande  ayant  été  réunie  à 
l'empire  français,  l'empereur  Na- 
poléon nomma  successivement 
M.  Van-Zuylen  c(unte  de  l'em- 
pire, gouverneur  du  palais  d'Ams- 
terdam et  grand'croix  de  l'ordre 
de  la  réunion.  Ces  faveurs  étaient 
plutôt  accordées  à  la  considération 
personnelle  que  M.  Van  Zuyieu 
avait  acquise  parmi  ses  conci- 
toyens, qu'atix  services  qu'il  a- 
vait  rendus  à  la  France.  Depuis 
les  événemens  politiques  de  1814, 
M.  van  Zuylen  vit  dans  la  retraite 
commandée  par  son  grand  3ge;  il 
jouit  d'une  pension  conuidtrable 
que  lui  a  faite  le  roi  des  Pays-Bas. 


FIN  DU  XX'  ET  DERNIER  VOLUME. 


SUPPLEMENT  GÉNÉRAL 

des  articles  omis  J.ins  les  20  vol.  de  cet  ouvrage,  avec  indication, 
suivant  l'ordre  alphabétique,  des  noms  des  personnes  qui  ont  des 
notices  dans  les  Supplérnens  placôs  à  la  suite  de  chacun  des  volu- 
mes précédens. 


ABBE  (Baron)  ,  voy.  le  Supp. 
du  I"  volume. 

ALSACl':-HÉNIN-LIÉTARD 
(Comte  de),  voy.  le  Supplément 
du  12'  volume. 

ANGELIS  (André  de),  com- 
mandeur de  l'ordre  de  Charles  III, 
ex-conseiller-d'étal,  estnéàNaples 
en  1^80.  Après  avoir  tait  de  bril- 
lantes études  à  l'académie  mili- 
taire, fondée  dans  cette  ville  par 
le  général  Parisi,il  lut  nommé  offi- 
cier d'artillerie  en  1798.  Il  servit 
successivement  sous  les  ordres  du 
chevalier  de  Saxe  et  de  Roger  de 
Damas,  et  se  fit  remarquer  par 
son  aciivilé  et  par  son  intelli- 
gence. Les  revers  de  l'armée  na- 
politaine le  dégoûtèrent  du  mé- 
tier de  la  guerre  :  il  demanda  et 
obtint  une  place  dans  le  ministère 
des  affaires  étrangères ,  dirigé  alors 
par  le  général  Acton.  Il  avait  été 
désigné  pour  une  mission  diplo- 
matique ,  lorsqu'on  1806 ,  peu 
avant  l'entrée  de  l'armée  fran- 
çaise dans  la  capitale ,  il  reçut 
l'ordre  de  suivre  la  cour  en  Si- 
cile. Le  vaisseau  sur  lequel  il  s'é- 
tait embarqué,  et  qui  faisait  par- 
tie de  l'escadre  royale,  en  fut  sé- 
paré par  ime  horrible  tempête  au 
moment  où  il  allait  jeter  l'ancre 
dans  la  rade  de  Palerme.  Après 
trois  jours  de  périls  et  d'alarmes, 
il  fut  enfin  rejeté  dans  le  port  de 
Naples,  oO  le  nouveau  gouverne- 
ment venait  d'être  proclamé.  Le 
dévouement  que  M.   de  Angelis 


avait  témoigné  à  l'ancienne  dy- 
nastie, ne  lui  nuisit  aucunement 
auprès  de  la  nouvelle.  Le  marquis 
de  Gallo  ,  en  prenant  le  porte- 
feuille des  affaires  étrangères  , 
confia  à  cet  en)ployé  la  division 
des  relations  politiques, la  plus  im- 
portante de  son  ministère;  et  il  en 
fit  ensuite  récompenser  le  zèle  par 
la  nomination  de  chevalier  de  l'or- 
dre des  Deux-Siciles  et  de  maître 
Citi  requêtes  au  conseil-d'état.  M. 
de  Angelis  resta  à  son  postfe  jus- 
qu'au printemps  de  l'année  181 5, 
époque  à  laquelle  il  fut  envoyé  à 
Vienne,  pour  prendre  part  aux 
travaux  du  congre*.  Après  la  chute 
du  roi  Joachim  Murai,  il  se  rendit 
à  Naples ,  où  ses  talens  et  son  ex- 
périence dans  les  affaires  vainqui- 
rent la  répugnance  du  marquis  de 
Circollo,  homme  entêté  et  médio- 
cre, qui  regardait  comme  ennemis 
des  Bourbons  tous  ceux  qui  ne  les 
avaient  pas  suivis  en  Sicile,  com- 
me si  une  nation  entière  était 
obligée  de  se  déplacer  pour  accom- 
pagner ses  princes  dans  l'exil. 
Malgré  ces  maximes ,  le  vieux 
ministre  ne  put  s'empêcher  de 
faire  connaître  au  roi  les  ser- 
vices rendus  par  M.  de  Angelis, 
qui  reçut  la  seule  croix  de  com- 
mandeur de  l'ordre  deCharlesIII, 
que  Ferdinand  VII  avait  mise  à  la 
disposition  de  son  oncle.  En  1820, 
M.  de  Angelis  était  allé  passer 
quelques  mois  à  la  campagne  pour 
y  rétablir  sa  santé,  lorsque  pressé 


presqn'en  même  temps  d'nccom- 
pagiitr  le  roi  à  La3'bach  ,  <le  rein- 
pliicer  1«  iDinistre  des  affaires  é- 
tranfrères  ou  «le  siéger  au  conseil- 
d'état,  il  hc  décida  pour  ce  der- 
nier, qui  lui  parut  un  a,*ile  sûr  et 
honorable  dans  des  temps  d'orage. 
Il  y  avait  élé  porté  par  les  vœux 
du  parleini-nf  et  par  le  libre  oboix 
du  monarque  ;  et  il  était  bien  loin 
de  supposer  qu'on  dût  un  jour  lui 
faire  un  crime  d'avoir  accepté  une 
place  qui  lui  avait  été  conférée  par 
décret.  Mais  le  roi,  qui  lui  avait 
envoyé  le  brevet  de  rouseilier- 
d'élat  à  l-i  veille  de  son  départ,  eu 
approuva  la  destitution  peu  après 
son  retour;  et  ce  n'a  été  qu'après 
deux  années  d'atleute  que  M.  de 
Angelis  a  enfin  obtenu  une  pen- 
sion de  retraite,  qui  a  réparé  en 
partie  la  preniière  injustice. 

ANGELIS  (  PiEBRE  de),  frère 
du  précédent ,  né  à  Na[)les  en 
1782,  et  élevé  comme  lui  ;\  l'aca- 
déuiie  u»ilitaire,  obtint  en  1801, 
uu  brevet  de  «ous-  lieutenant  dans 
l'aruiée,  qu'il  quitta  ensuite  pour 
se  livrera  l'étude.  Il  était  profes- 
seur de  l'école  pcdytechuique, 
lorsque  le  roi  Joachim  Mmat  l'ap- 
pela à  la  cour,  pour  lui  C(u»fier  I  é- 
ducation  de  ses  eufans.  Il  lui  en- 
voya eu  même  temps,  la  croix 
de  l'ordre  des  Deux-Sîciles,  et  la 
nomination  de  conseiller  cle  la  pré- 
fecture de  la  ville  de  Naples.  Tant 
de  bienfait;^  l'attachèrent  à  ce 
prince,  dont  il  suivit  la  famille 
jusqu'à  Giiëte,  dernier  asile  que 
le  royaume  de  Naples  ofiiait 
à  ceux  qui  lavaient  gouverné. 
Rentré  daris  se»  foyers,  M.  de  An- 
gelis,  qui  ava/t  perdu  toutes  ses 
places,  sentit  le  besoin  de  s'occu- 
per, et  il  accepta  un  emploi  sc- 


ANG  55i 

condaîre  dans  le  dépôt  de  la  guer- 
re :  mécontent  de  son  sort,  et 
n'espérant  pas  de  le  ^ir  amélio- 
rer,  il  prit  en  1818,  la  résolution 
de  voyager  en  Europe.  Il  avait  dé- 
jà parcouru  l'Italie  et  la  Suisse, 
lorsque  la  révolution  éclata  à  Na- 
ples, en  1820.  Il  en  apprit  la  nou- 
velle, sur  les  bords  du  lac  de 
Constance,  où  il  ne  larda  pas  à 
rerevoir  une  dépêche  de  son  gou- 
vernement, qui  l'engageait  à  se 
rendre  imiuédialem'""t  au  con- 
grès de  Tropp"  .  -  'ourner 
les  empereurs  de  tout*  -res- 
sion  hostile  contre  Naples.  'é 
Angelis,  qui  ne  se  dissimul.» 
les 'iiflicultés  de  cette  mission,* 
lut  s'y  soustraire.  Mais  de  nouv., 
Ics  instances  de  la  part  des  minis- 
tres ,  et  des  ordres  ennorc  plus 
pressaus  qui  lui  furent  adressés  au 
luuTi  d'un  personnage  auguste,  ne 
lui  permirent  pas  de  persister  dans 
sa  résolution.  Il  accepta  la  place 
de  chargé  d'affaires  auprès  de  la 
cour  impériale  de  Pétersbourg,  où 
il  n'a  jamais  été,  n'ayant  pu  dans 
le  temps  obtenir  «es  passeports  de 
la  légation  russe  à  Paris.  Il  regarda 
donc  de  cette  dernière  ville  le  nau- 
frage de  sa  pairie,  qu'il  lui  a  été  en- 
suite défendu  de  revoir.  Le  roi  de 
Naples,  en  sortant  des  conférences 
de  Laybach,  etavani  même  de  ren- 
trer dans  sa  capitale,  bannit  de  ses 
états  tous  les  agens  diplomatiques 
du  gouvernement  constitutionnel; 
et  son  ordonnance  n'a  pas  encore 
été  rapportée  sous  le  rèfçnede  son 
successeur.  M.  de  Angelis  viclime 
de  c«'t  acte  arbitraire,  a  cherché  h 
oublie|  l'injustice  des  hommes, 
dans  les  jouissances  de  l'esprit.  Li- 
vré entièrement  à  l'étude  et  aux 
travaux  littéraires,  il  a  déjà  pris 


53a 


BAI 


rang^  parmi  nos  écriv^ains,quî  le  re- 
gardent coitiîtic  leur  cuulrèic.  II  est 
un  de  nos  cq,Uahorateur.s,etil  tra- 
vaille en  même  temps  pour  la  JB/o- 
grnpliic  universeUe,où  il  a  remplacé 
Giuguené;  il  a  enrichi  ce  dernier 
ouvrage  de  plusieurs  articles  im- 
portans,  tels  que  Sahator  Rosa, 
Sunnazar ,  Servet ,  Spallanzani  , 
Spinoza ,  etc. 

ANSIAUX  ,    peintre,  roy.    le 
Supplément  du  tome   i5. 

ARRIGHI,  duc  de  Padoue,  voy. 
le  Supplément  du  tome  i". 

ARRIGHI   (Hyacinthe),  voy. 
le  Supplément  du  tome  1. 

ARRIGHI   (  Antoiise  -  Lovis  ) , 
voy.  le  Stipplén)enl  du  tome  I. 

ARRIGHI  (Joseph-Philippe), 
9oy.  le  Supplément  du  lomc  I. 

ARRIGHI  (Jean),  voy.  leSupp. 
du  tome  I. 

AUUREE,  général  de  brigade, 
voy.  TErraîa  du  tome  XIII. 

AURRÉE,  cheC  de  bataillon, 
vôy.  l'Errata  du  tome  XIII. 

AUBRÉE,  colonel,  voy.    l'Er- 
rata du  tojne  XIII. 

AURREE,  aidc-de-camp ,  voi/. 
l'Errata  du  tome  XIII. 

AUDOUIN,  graveur,  voy.  le 
Supplément  du  tome  XV. 

RACHEVILLE  (Les  frères), 
voy.  le  Supplément  du  tome  II. 

RAILLOT  (  Etienne-Catheri- 
ne) .membre  de  l'assemblée  cons- 
tituante, naquit  en  1768  ;  il  exer- 
çait la  profession  d'avocat  au  bail- 
liage de  Troyes,  lorsqu'il  fut  élu 
député  aux  états-généraux  en 
178g.  Sa  modestie  ne  lui  permit 
guère  de  paraître  à  la  tribune 
qu'illustraient  les  lalcns  Itf  plus 
remarquables;  mais  il  travailla 
beaucoup  dans  les  bureaux.  Après 
la  session  de  rassemblée,  et  dès 


BAS 

la  création  du  tribunal  de  cassa- 
tion qu'il  concourut  à  organiser, 
il  cessa  de  prendre  part  aux  évé- 
nemens  politiques ,  ne  s'occupant 
plus  qae  de  remplir  les  devoirs  de 
sa  place.II  pas-:a  ainsi  tout  le  temps 
de  la  terreur;  mais  en  1796»  épo- 
que où  le  directoireexéçulif  après 
avoir  renversé  l'hydre  révolution- 
naire ,  voulut  à  son  tour  gouver- 
ner décemviralemtnt  et  exiger 
d'un  corps  aussi  indépendant  que 
devait  l'être  la  magistrature,  une 
adhésion  servile  aux  systèmes  di- 
vers inspirés  tour  à  tour  par  la 
crainte  et  la  violence  ;  il  donna  sa 
démission  cl  retourna  dans  son 
pays,  où  ,  depuis  celte  époque,  il 
partagea  son  temps  entre  l'élude 
et  les  travaux  agronomiques.  Sa 
passion  pour  la  langue  latine  la 
lui  faisait  préférer  à  toute  autre. 
C'est  sans  doute  cette  passion  qui 
le  porta  à  traduire  entièrement  les 
Satyres  de  J uvénal  (  un  vol.  in-8°, 
i8.2'2)  ;  il  y  joignit  des  notes  plei- 
nes d'érudilion  et  de  gofit.  Il  a 
laissé  en  manuscrit  des  Recher- 
ches sur  rhistoire  de  la  Champa- 
gne, particulièrement  dans  les  gé- 
néalogies. M.  Baillot  était  un  hom- 
me de  bien;  il  mourut  générale- 
ment regretté,  en  i825,  à  Ervy, 
déparlenient  de  l'Aube. 

BARRAL  Cde),  voy.  le  Supp. 
du  tome  XVII. 

BARllAL,  colonel  du  génie, 
voy.  le  Supplément  du  tome  IX, 

B  ASC  AN  S  (Pierre-Prosper), 
capitaine,  né  à  Villeneu^e-de-Ri- 
vièrc,  départeuient  de  la  Haute- 
Garonne,  le  i5  janvier  1788,  se 
destina  dès  son  enfance  à  la  car- 
rière des  armes.  A  peine  ûgé  de 
18  ans,  il  s'enrôla  comme  volontai- 
re dans  le  /iS"' régiment  de  ligue. 


BAS 

qui  alors  fiiisait  partie  du  premier 
corps  d'année,  sous  les  ordre»  du 
maréchal  BernadoUe.  Le  jeune 
Ba«can«  ne  tarda  pas  à  se  l'aire  dis- 
tinguer par  son  aptitmle  et  sa  bra- 
voure. Lor^qu'en  i8u8,  il  fut  ap- 
pelé à  raraiée  d'Espagne,  il  avait 
déjà  passé  par  le  grade  de  sous- 
oUicier.  Bépondant  toujours  aux 
espérances  de  ses  chefs,  il  sut  se 
faire  remarquer  dans  beaucoup 
d'action.s.  auxquelles  le  117*  ré- 
giment dont  il  fe«ait  partie  prit 
une  part  active.  Il  rivalisa  d'ar- 
deur avec  ses  vieux  compagnons 
d'armes  à  la  bataille  de  Tudella, 
et  aux  sièges  de  Saragosse ,  de 
Torlose,  de  Sagonte.  de  Lérida  et 
de  Vairnce.  Dans  ce  dernier  siège, 
ri  fut  blessé  par  un  obus  en  défen- 
dant une  redoute  avec  autant  de 
sang-froid  que  d'intrépidité,  ba 
conduite  dans  la  prise  de  ces  pla- 
ces importantes,  lui  valut  siicces- 
sivemenl  les  grades  de  sons -lieu- 
tenant et  de  lieutenant.  Une  nou- 
velle occasion  de  se  signaler  se 
présenta  à  l'aflairc  du  12  avril 
1810,  près  Cobcntayna,  royaume 
de  Vidence.  Chargé  de  commen- 
cer l'atlaque  avec  une  section  de 
tirailleurs  d'élite  et  8  hussards  du 
4"'.  le  lieutenant  Bascans  abor- 
de l'ennemi,  le  charge  et  le  pour- 
suit vig()ureu^ement ,  ju-qu'à  ce 
que  celui-ci  renforcé  parSoo  hom- 
me» anglais  et  siciliens,  envelop- 
pe au  détour  d'un  bois  le  lieute- 
nant, et  réduit  à  très-peu  d'inmi- 
mes  les  braves  qui  l'accompa- 
gnaient. Loin  de  céder  au  nom- 
bre, le  jeune  Bascans,  par  un  nou- 
vel effort,  parvient  à  se  dégager, 
fond  avec  le  reste  des  siens  sur 
un  pelotfta  •imemi,  et  lui  fait  plu- 
sieurs priaonuiers,   après  l'avoir 


BAZ  553 

été  lui-Miême...  Mais  atteint  d'un 
coup  de  feu  au  bas  ventre,  il  fut 
laissé  pour  mort  sur  le  champ  de 
bataille,  d'où  il  ne  fut  retiré  qu'au 
bout  de  quelques  heures,  ayant 
les  intestins  à  jour.  Le  grade  de 
capitaine  fut  le  prix  de  cette  nou- 
velle rnar'que  de  valeur.  Lorsqu'a- 
près  plusieurs  mois  de  souffrance, 
le  jeune  invalide  se  crut  en  état  de 
reprendre  rang  parmi  les  braves, 
le  maréchal  Suchet  l'adjoignit  à 
son  état-major,  et  demanda  pour 
lui  rétoile  de  l'honneur  que  sa 
belle  conduite  lui  avait  si  bien  mé- 
ritée. Mais  les  événeoiens  qui  se 
succédaient  alors  vers  le  nord 
avec  tant  de  rapidité,  ne  permi- 
rent an  capitaine  Bascans,  d'obte- 
nir son  brevet  de  légionnaire,  que 
2  ans  plus  lard.  Dès  son  retour  de 
l'ile  d'Klbe,  Napoléon  le  nomma 
chevalier  de  la  légion-d'honneur, 
dont  il  n'a  porté  l'insigne  que 
quelques  mois,  ayantété  plus  lard 
compris  d^ns  la  liste  de  ceux  à  qui 
les  minislres  du  roi  enlevèrent 
cette  récompense  honorable  de 
leurs  services.  L'estime  publique, 
et  l'amilié  de  .«-es  anciens  compa- 
gnons d'armes,  ont  suivi  le  capi- 
taine Bascans  dans  ses  foyers. 

BA13DET-LAFARGE,  voi/.  le 
Supplément  du  tome  XII. 

BAZIN  (Rigomer),  né  au  Mans 
en  «771.  De  nouveaux  renseigne- 
mens  sur  31  Bigorner  Barin  nous 
mettent  à  même  de  rectifier  l'ar- 
ticle que  nous  lui  avons  consacré 
dans  le  tome  2  de  cet  ouvrage. 
Outre  les  fonctions  publiques  qu'il 
remplit  au  ftlans  dans  sa  jeunesse, 
il  partit  volontairement  pour  l'ar- 
mée lors  de  la  formation  des  pre- 
miers bataillons  en  179»;  Jnais 
bletsé  dés  la  première  affaire,  il 


334  BAZ 

fut  forcé  d'abandonner  la«carrière 
militaire.  R«'.vemi  au  Mans,  il  y 
soutint  très  jeune  encore  avec  »a 
plume,  la  cause  qu'il  avait  voulu 
défendre  avec  son  épéc.  La  jeu- 
nesse patriote  de  cette  ville  s'éiant 
ralliée  à  ses  opinions,  ces  jeune* 
gens  furent  irai  lés  de  Bazinistes  et 
considérés  comme  des  factieux. 
L'n  1790,  un  conventionnel  en 
mission  dans  la  Sarthe  ,  les  fii  ar- 
rêter comme  tels,  eux  et  leur  clief, 
elles  fit  conduire  à  Paris,  po»Jr  être 
traduits  au  tribunal  révolution- 
naire. Leur  tête  était  dévouée  à 
l'échafaud,  puisque  ce  député  dit 
un  jour  en  pleine  société  popu- 
laire du  Mans,  en  regardant  sa 
montre:  «  Il  est  (telle)  beure,  les 
»  têtes  des  factieux  baziîiisles  sont 
«tombées  surTécliafaud.  »  Il  n'en 
était  rien  heureusement,  le  g  ther- 
midor les  avait  sauvées.  Peu  de 
temps  api  es,  M.  Bazin  publia  au 
Mans  le  journal  intitulé  :  Chroni- 
que manc'dle.  Plus  tard,  il  publia 
à  Paris  les  Lettres  françaises  et  les 
Lettres  philosophiques;  il  l'ut.com- 
me  nous  l'avons  déjà  dit  dans  son 
article,  compromis  dans  la  pre- 
jnière  conspiration  de  ÎMallet,  qu'il 
prétend,  dans  son  Lynx.,  avoir 
été  entreprise  dans  les  intérêts  des 
républicains.  Après  la  retraite  de 
l'armée  française  derrière  la  Loire, 
à  la  suite  de  la  malheureuse  ba- 
taille de  Waterloo,  il  publia  à  Or- 
léans le  prospectus  du  Lynx,  jour- 
nal dans  lequel  ii  se  proposait  de 
relever  l'esprit  national  si  fort 
abattu  par  le  événemens  du  mo- 
ment. Libéré  de  l'action  judi- 
ciaire que  lui  avait  fait  intenter  la 
politique  des  souverains  étrangers 
pour  le  fait  de  cette  publication,  il 
revint  dans  sa  famille  au  Mans,  et 


BA7. 

y  vécut  dans  la  reir.iite  jusqu'à 
l  époque  où  l'ordonranee  du  5 
septcir.bre  offrit  l'auiore  d'une 
adrnini.?lrati(jn  frar-thcnienl  cons- 
titutionnelle. II  publia  alors  une 
suite  de  brochures  serni-p^riodi- 
qnes  qui  paraissaient  chaque  se- 
maine, et  dans  lesquelles  il  cber- 
chait  à  exalter  les  avantages  et  à 
signaler  les  conséquences  du  sys- 
tème C')n>tilutiounel.  Poursuivi 
et  enifirisonné  à  plusieurs  repri- 
ses sous  des  prétextes  fdn<  ou 
moins  vains,  sous  l'administration 
du  préfet  M.  Jules  Pasquier,  avec 
un  acharnement  dont  il  est  diffi- 
cile de  se  rendre  compte  en  lisant 
ces  brochuies  ,  des  jugemens  ho- 
norables.entre  autres  un  de  la  cour 
roy;ile  d'Angers  ,  le  rendirent  à  la 
liberté.  Il  en  profita  bien  peu 
de  temps,  ayant  été  tué  en  dufl 
par  un  odicier  de  la  légion  de  la 
Sarlbe,  à  la  suit»^  d'une  querelle 
dont  on  trouva  l'occasion  lors  de 
la  seconde  représentation  au  Mans 
d'un  mélodrame  que  M.  liazin  a- 
vait  lait  jouer  précédemment  à 
Parisavec  succès.  Il  avait  réuni  en 
un  vol.  in -H",  sous  le  titre  du 
Lynx  ou  Coit.p-tfœil  et  réflexions 
libres  sur  les  affaires  du  temps. 
Ses  brochures  semi-périodiques; 
au  moment  de  sa  mort  plusieurs 
'autres  écrits  étaient  destinés  à 
composer  un  second  volume.  Il 
avait  aussi  projeté  et  annoncé  la 
publication  d'un  journal  périodi- 
que; c'est  ce  f[ui  nous  a  fait  dire 
dans  son  article,  que  «  quelque 
temps  avant  sa  mort  il  avait  créé 
le  journal  libéral  de  la  Sarthe»;  il 
n'en  a  point  existé  de  ce  genre  de- 
puis la  restauration,  VAr<^us  de 
l'Ouest,  entrepris  dans  ce  dépar- 
tement, n'ayant  pu  y  être  publié. 


BAZ 

Il  a  été  dit  aussi  inexactement  dans 
cet  article  :  o  qu'il  voulut  conti* 
nuer  le  Lynx,  et  le  rendre  périodi- 
que sons  le  litre  de  Lynx  ou  Jour- 
nal des  ftdéièsii;  on  a  confondu 
les  époques.  Ce  dernier  titre  était 
celui  (In  journal  projeté  à  Paris 
et  qu'il  voulut  continuer  à  Or- 
léans lors  de  la  retraite  derrière 
la  Loire;  il  eût  été  ridicule  que 
plu(>  de  deux  ans  après,  en  réu- 
nissant en  volunoes  les  brochures 
publiées  au  Mans,  il  eCit  ajouté  au 
titre  de  Lynx  qu'il  donna  à  ces 
yoluines  celui  de  Journal  des  fé- 
dérés, puisqu'il  n'y  avait  plus  de 
lédérés  et  que  ce  titre  seul  l'eflt 
cotnpromiset  eût  été  séditieux  à 
cette  époque.  Outre  les  ouvrages 
ci-dessus,  M.  Rigomer  Bazin  a 
publié  :  Charlemagne,  tragédie 
(non-représentée)  en  5  acte;*  et 
en  vers;  en  mars  1817,  et  à  Paris, 
le  mélodrame  cause  occasionelle 
de  sa  n>ort.  Il  avait  écrit  une  his- 
toire de  France,  presque  achevée 
et  restée  inédite.  Né  avec  un  ca- 
ractère ardent  et  impétueux,  une 
âme  forte ,^  un  cœur  noble,  gé- 
néreux et  sensible,  il  sentit  son 
imagination  s'embraser  aux  espé- 
rances de  liberté  que  donnait  le 
commencement  de  la  révolnlion 
française.  «A  dix-huit  ans.  dit-il, 
•  je  crus  voir  Home  dans  la  Fran- 
»ce,  Catori  au  sénat,  les  (iracques 
»i\  la  tribune,  le  grand  peuple  au 
I)  Forum,  et  partout  de  vertueux 
»  citoyens.  Les  faux  Gracques  vou- 
«liinjit  me  traîner  à  l'échafaud 
»  en  riant  de  ma  simplicité.  »  Cette 
erreur  n'ayant  point  ahéré  ses 
principes,  il  paya  par  six  années 
de  détention  (laiis  des  prisons  d'é- 
tal et  par  des  persécutions  sans 
nombre   sou»  les  gouvernemens 


liER  355 

suivans,  leur  inflexible  ligidité  ; 
enOn,  il  fut  tué  d'un  coup  de  pis- 
tolet (c'est  le  duel  dont  il  a  été 
parlé  plus  haut)  en  haine  de  ses 
opinions,  le  19  janvier  1818. 

BERGER,  ex-sous -intendant 
militaire,  vot/.  le  Supplément  du 
tome  XVII._ 

BERTEZ.ÈNE,  ancien  membre 
du  corps-législatif,  voy.  l'Errata 
du  tome  X. 

BERTH  AU  LT,  architecte,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XII. 

BERTON  (  Jean  -  Baptiste  )  , 
maréchal -de -camp,  naquit,  en 
177/1,  :'i  Francheval,  près  de  Se- 
dan (Ardennes).  Sa  famille,  dis- 
tinguée dans  la  bourgeoisie  ,  et 
qui  jouissait  d'une  fortune  hono- 
rablement acquise,  hii  fit  com- 
mencer ses  études  à  Sedan  ,  et 
l'envoya,  à  l'âge  de  17  ans,  à 
l'école  militaire  de  Brieune,  i\  peu 
prés  à  l'époque  où  Bonaparte  en 
sortait.  De  l'école  de  Brienne  , 
Berlon  passa  A  l'école  d'artillerie 
de  Chrdons  ,  où  il  était  encore 
lorsque  le  territoire  français  ,  me- 
nacé parla  coalition  européenne, 
attendait  le  secours  de  tous  les 
amis  de  la  gloire  et  de  l'indépen- 
dance nationale  :  c'était  en  1792. 
Berton  entra  en  qualité  de  sous- 
lieutenaut  dans  la  légion  des  Ar- 
d(!nnes ,  qui  fit  les  campagnes  de 
l'armée  de  Sambre-et-IMeuse  ;  il 
y  gagna  le  grade  de  capitaine, 
Reujarqué  par  le  général  Bcrna- 
dotle  (aujourd'hui  roi  de  Suètle, 
sous  Ik  nom  de  CHARLEs-.TEAN),le 
jeune  capitaine  fut  attaché  A  l'état- 
major  de  ce  général  qiii,  devenu 
prince  rojal,  eombatlii  contre  son 
ancienne  patrie,  et  oublia  ses  an- 
ciens compagnons  d'armes.  Il  l'aé- 
eompagna  en  Hanovre  etcn  Prusse 


556 


B£R 


pcnduDl  les  années  180G  et  i8on, 
que  la  bataille  d'Austerlilz  a  ren- 
dues célèbres.  Le  général  Viclor, 
depuis  mHréchal  de  France  et  duc 
de  Bellune,  remplaça  Bcrnadolle, 
blessé  au  pont  de  Spanden  {et 
non  au  pont  de  S[)andau,  comme 
le  dit  l'auleur  de  la  notice  dont 
nous  parlerons  plus  bas  ;  la  guer- 
re se  taisait  alors  dans  la  l'russe 
ducale, et  non  dans  la  Prusse  roj/i  - 
le.)  Sous  le  général  Viclor,  Bertoo 
rendit,  particulièrcînent  à  Tried- 
land,des  services  si  iniporlans, 
que  ce  général  lui  promit  de  sol- 
liciter en  sa  laveur  le  grade  de  co- 
lonel.En  1 808,  Bertonsuivitle  ma- 
réchal Vicloren  Espagne, et  se  dis- 
tingua de  nouveau  à  la  bataille  de 
Spinosa.  Alors  le  maréchal,  en  le 
•])résbntant  à  l'euipereur  lors  de  la 
revue  de  Burgos ,  dit  à  ce  prince  : 
«C'est  le  premier  chef  d'escadron 
de  mon  corps  d'armée,  pour  la  va- 
leur et  les  talens  ;  je  vous  demande 
pour  lui  un  régiment.  V.  M.  peutê- 
tre  persuadée  qu'elle  ne  saurait  le 
mettre  en  de  meilleures  mains.  » 
Napoléon  répondit  :  «  Je  n'ai  point 
de  corps  à  donner  aujourd'hui,  je 
le  fais  major »  et  après  quel- 
ques instans  :  «  Je  n'ai  point  de 
régiment  libre,  mais  je  vous  fais 
adjudant-commandant;  vous  êtes 
un  bon  otiicier;  je  me  souviendrai 
de  vous.  •>  Peu  de  temps  après, 
Berton  passa  en  qualité  de  chef 
d'état -major  sous  les  ordres  du 
général  Valence  ,  et  de  là  sous  le 
général  Sébasliani,  commandant 
du  quatrième  corps.  Il  donna  de 
nouvelles  preuves  de  ses  talens  et 
de  son  courage  à  la  bataille  de 
Talaveyra,  et  surtout  à  celle  d'Aï- 
manacid,  où  il  fut  blessé  en  s'em- 
parant,  i  la  tête  des  lanciers  po- 


Bt:R 

lonais,  de  la  plus  forte  position 
«i'Ocana.  Le  prince  de  Sobieski , 
témoin  de  son  sang-iVoid  et  de 
son  intrépidité,  l'embrassa  en  pré- 
sence du  régiment ,  et  lui  dit  : 
«  Je  ferai  savoir  à  ma  nation  la 
manière  dont  vous  venez  de  vous 
conduire  à  la  tête  de  ses  enfans  ; 
je  demanderai  pour  vous  la  croix 
du  mérite  nu'litaire;  les  Polonais 
seront  Gers  de  la  voir  briller  sur  la 
poitrine  d'uii  brave  tel  que  vous.» 
Le  général  Sébasliani  se  porta  sur 
le  royaume  de  Grenade,  et  confia 
à  Berton  un  détachement  de  1,000 
hommes ,  en  lui  ordonnant  de 
s'emparer  de  Malaga,  que  défen- 
daient 7,000  hommes  de  l'armée 
espagnole.  Berton,  devenu  maître 
de  cette  ville,  en  fut  nommé  gou- 
verneur par  le  maréchal  Soult. 
Sa  c<induite  administrative  y  fut 
digne  de  la  bravoure  dont  il  avait 
déjà  donné  tant  de  preuves.  Il  eut 
à  repousser  différentes  ciltaques, 
où  il  eut  toujours  du  succès.  Mais 
par  suite  de  la  bataille  des  Ara- 
piles  ,  il  dut  suivre  le  mouvement 
d'évacuation  de  l'Andalousie. Dans 
la  retraite,  Berton  soutint  sa  ré- 
putation de  capacité  et  de  bra- 
voure, et  reçut  en  récompense, 
le  5o  mai  18 15,  le  grade  de  gé- 
néral de  brigade.  Il  justifia  la 
confiance  du  maréchal  Soult  à  la 
bataille  mémorable  de  Toulouse  , 
le  10  avril  i8i4-  Peu  après,  sous 
le  gouvernement  royal ,  il  fut  mis 
à  la  deiai-solde.  Napoléon  le  re- 
mit en  activité  au  20  mars  18 15, 
et  Berton  eut  sous  ses  ordres  une 
brigade  du  corps  du  général  Ex- 
celmans  :  c'est  à  la  tête  des  i4*  et 
17'  régimens  de  dragons  qu'il  se 
trouva  à  Waterloo.  Après  la  se- 
conde restauration,  il  fut  cnferiué 


BER  BER                  37.7 

à  l'Abbaye,  où  il  resta  détenu  tions,  et  enfin  ,  secondé  d'un  cer- 
pendant  cAnf[  mois.  II  recouvra  lu  tain  nombre  do  personnes,  s'em- 
îiberté  s  ins  avoir  subi  de  juge-  pare  de  l'iiulorilé  et  pourvoit  au 
ment.  Le  général  Berton  devint  reniplacement  ou  à  la  confirma- 
membre  de  la  société  des  amis  de  lion  des  fonctionnaires  publics. 
la  presse,  et  publia  un  Précis  ^wr  Bertou  annonçait  qu'un  mouve- 
les  batailles  de  Fleurus  et  de  Wa-  ment  semblable  devait  avoir  lieu 
terloo.  Ses  principes  politiques,  simultanément  par  tonte  la  Fran- 
ses  ouvrages,  ses  pétitions  aux  ce ,  et  prenait  le  titre  de  général- 
chambres,  déterminèrent  M.  le  commandant  de  l'armée  nationale 
marquis  de  Latour  -  Mauhourg,  de  l'Ouest.  Il  paraît  que  le  cri  do- 
ministre  de  la  guerre,  à  le  rayer  minant  fui  celui  de  vive  la  liberté! 
des  contrôles  de  l'armée,  et  Al.  le  quelques  personnes  y  mêlèrent 
baron  Mounier,  fils  iSo  rex-cnns-  celui  de  vire  JSapotéon  II  !  Enfin, 
tituant  de  ce  nom,  directeur  gé-  ime  coloime  formée,  selon  l'acte 
néral  de  la  {)olice,  à  faire  exercer  d'accus  ition  ,  de  i5  hommes  à 
contre  lui  une  surveillance,  dorit  cheval  »  t  de  120  hommes  à  pied, 
il  se  plaignit  vivetrient.  N«iiisem-  se  mit  en  marche,  tanjbour  bat- 
pruntons  à  un  N'  de  V Annuaire  tant  et  baïuiière  déployée  ,  vers  la 
nécrologique  le  récit  du  procès  et  ville  de  Sauuiur;  il-  furent  joints 
la  fin  déplorable  du  général  Ber-  en  roule  par  qmdtpies  personnes 
ton.  Cette  partie  de  la  vie  du  gé-  des  villages  environnan».  Malgré 
néral  nous  a  paru  rédigée  avec  le  grand  nombre  d'individus  qui 
mesure  et  im[)artialité ,  et  a  été  sont  entrés  dans  le  complot ,  dit 
d'ailleurs  empnuitée  aux  docu-  l'acte  d'accusation  ,  les  autorités 
mens  du  procès.  «  Parti  île  Paris  de  Sauniur  étaient  dans  la  plus 
au  mois  de  janvieri822,  le  général  profonde  bécurilé.  I/euncuii  elait 
Berton  se  refulit  à  Brest, à  Rennes,  déjà  arrivé  à  iMontreuil,  qui  en 
et  enfin  à  Saumur,  où  il  entra  en  re-  est  éloigné  de  trois  lieues,  qu'elles 
latjon  avec  plusieurs  personnes  de  en  ignoraient  la  nouvelle  ,  tandis 
ces  villes  et  clt-s  environs.  D.ins  la  que  de  distance  en  di^jtance  ,  il 
nuit  du  20  février,  Berton  quitta  tiouvail  des  émissiiires  qui  lui  fai- 
Saumnr,  et  se  rendit  à  Thonars ,  saient  conn  lître  les  dispositions 
où  il  avait  des  intelligences,  entre  prises  pour  le  recevoir.  C'est  de 
autre?  personnes,  avec  le  com-  Wontreuil,  où  la  troupe  de  Ber- 
niandant  de  la  garde  nationale  et  ton  arriva  à  trois  heures  a()rès- 
l'adjoint  au  mair(!.  I^e  2  j  février,  midi,  que  les  premiers  avis  furent 
à  quatre  heures  du  matin,  le  gé-  expédies  aux  autorités  de  Saumur, 
néral  Berton  ,  revêtu  de  son  uni-  par  le  brigadier  de  la  genrlarme- 
forme  ,  arbore  la  cocarde  et  le  rie.  Aussitôt  quelques  mesures  de 
dra[»eau  tricolore  dans  la  ville  de  défense  furent  prises  dans  celle 
Thoiiiirs,  proclame  un  gouverne-  ville.  Cependant  la  troupe  de  Ber- 
ment  provisoire,  où  il  place  les  ton  dépassa  le  pont  Fouchard. 
noms  do  cinq  membres  de  l'op-  Après  quelques  pourparlers  avec 
position  de  la  chambre  des  dépu-  le  maire,  le  général  repassa  le 
téS)  fait  vt  publie  des  proclama-  pont,  le  barricada  et  établit  des 
T.  IX.  aa 


358 


B£R 


postes,  afin  de  n'être  point  sur- 
pris :  les  choses  restèrent  dans  cet 
état  pendant  plusieurs  heures.  Des 
communications  eurent  lieu  entre 
les  insurgés  et  les  habitans;  Ber- 
lon  et  le  maire  eurent  une  confé- 
rence :  la  garde  nationale  demeura 
rangée  en  bataille.  Les  autorités 
de  Saumur  tinrent  un  conseil  de 
guerre,  où  il  fut  décidé  que  Ton 
attendrait  le   jour   pour  charger 
l'ennemi.  Berton  occupa  sa  posi- 
tion jusqu'à  minuit  environ.  Il  fut 
instruit   de  la   détermination   du 
conseil,  et  donna  des  ordres  pour 
effectuer  sa  retraite.  La  ville  de 
Saumur  est  munie  d'un  château- 
fort  où  se  trouvait  un  dépôt  d'ar- 
mes considérable;  il  était  occupé 
par  une  école  de  caralerie,  com- 
posée de  sous -officiers  de  touj  les 
régimens  de  larmée ,  qui  a  été 
dissoute  après  ces  événemens.  Le 
général  doima  le  signal  de  la  re- 
traite;  il   la,  fit  avec   ordre,    en 
montrant  uiie  sécurité  qui  ne  peut 
s'expliquer  que  par  la  confiance 
que  lui  inspira  l'inaction  de  for- 
ces bien  supérieures  aux  siennes. 
Berton ,    après    s'être    couché    à 
Montreuil,  s'y  être  rafraîchi  avec 
ses  troupes,  continua  sa  marphe 
jusqu'à  Brion.  Sou  intention  était 
de  se  replier  sur  Thouars,  mais 
déjà  on  y  avait  pris  des  mesures 
pour  y  eajpêcher  son  retour.   Il 
iallut  se  séparer  ;   plusieurs  des 
chefs  prirent  la  fuite  :  Berton  erra 
dans  les  départemens  des  Deux- 
Sèvres  et  de  la  Charente- Infé- 
rieure. L'acte  d'accusation  affirme 
que   cette    tentative   fut  l'œuvre 
d'une  société  secrète  appelée  les 
Chevaliers  de  la  liberté  ou  Carbo- 
nari;  que  celle  société  est  dirigée 
par  un  c<;Hiiit«  dont  le  siège  est  à 


bi:r 

Paris,  et  que  Berton  était  l'agent 
principal  de  ce  comité  dans  les 
départemens  de  l'Ouest.  Si  le  pre- 
mier complot  ourdi  à  Saumur  par 
Delon  ,  Sirjan  ,  etc. ,  eût  réussi  , 
il  devait  se  mettre  à  la  tête  de» 

rebelles il  est  désigné  dans  la 

procéduire  instruite  à  Nantes  con- 
tre les  carbonari ,  qui  avaient  pro- 
jeté le  renversement  du  gouver- 
nement, comme  devant  prendre 
la  direction  du  mouvement  aus- 
sitôt qu'il  aurait  éclaté.  C'est  en- 
core  lui   que   l'on   indiquait,  au 
mois  de  mars  1822,  pour  prendre 
le  commandement  des  militaires 
de  La  Rochelle  ,  qui  avaient  com- 
ploté une  révolte.  Cependant  Ber- 
ton avait  disparu.  Les  journaux 
annonçaient  qu'il   était  passé  en 
Espagne,  lorsqu'on  apprit  tout- 
à-coup  qu'il  venait  d'être  arrêté, 
le  17  juin,  au  lieu  nommé  Laleu, 
commune  de  Suint- Florent,  dans 
la  maison  de  campagne  de  M.  De- 
lalande  ,  notaire  du  lieu  ,  par  un 
sous-olficier  de  carabiniers,  nom- 
mé Wolfel   (  depuis  il  a  été  fait 
officier  ) ,  qui  s'y  prit  de  la  ma- 
nière suivante  :  Selon  lui ,  s;\  fidé- 
lité aurait  été  tentée  par  des  per- 
sonnes de  Saumur,  dans  les  pro- 
jets d(!squelles  il  feignit  d'entrer 
pour  mieux  découvrir  leurs  des- 
seins, dont  il  tenait  son  chef  (  M. 
le  colonel  Bréon,  aujourd'hui  ma- 
réchal-de-camp) informé.  Bientôt 
il  fut  mis  en  relation  avec  Berton, 
qui  se  tenait  caché  auprès  de  Sau- 
mur ;  il  lui  amena  successivement 
des  militaires  de  son  corps  ,  au 
nombre  de  trois.   Un  jour,  reve- 
nant de  la  chasse  ensemble ,   et 
rentrant   dans   la   maison   de    M. 
Delalande,  où  ils  devaient  dîner 
avec  quelques  autres  personnes, 


BER 

♦oui  -  à  -  coup  Wolfel  couche  en 
Joue  le  général  ,  en  lui  disant  : 
«  Vous  êtes  prisonnier.  «  Les  trois 
autrescarabiniers  en  firent  autant. 
Le  général  dit  à  Wolfel  :  «  Je  ne 
m'attendais  pas  à  cela  de  votre 
part,  vous  qui  venez  de  m'ein- 
brasser.  .>  Wolfel  le  menaça  de 
faire  l'en  sur  lui  au  moindre  mou- 
vement ;  ensuite  il  sortit  pour  al- 
ler chercher  t\n  détachement  de 
carabiniers,  qui  avait  été  aposté 
à  peu  de  dislance  de  la  maison. 
C'est  alors  qu'il  vit  arriver  un  in- 
dividu ù  cheval,  nommé  Magnan; 
il  lui  ordonna  de  s'arrêter,  lui  dé- 
clarant que  s'il  avançait,  il  tire- 
rait. Wolfel  prétend  qu'à  cet  aver- 
tissement, Magnan  parut  vouloir 
porter  la  main  à  ses  pistolets,  et 
à  l'instant  il  déchargea  les  sien<, 
«t  retendit  roide  niort.  Il  rentra 
aussitôt  dans  la  chambre  où  se 
trouvait  Berton ,  et  lui  ordonna 
de  déposer  ses  armes.  Le  général , 
continue  Wolfel,  sortit  de  dessous 
son  gilet,  un  poignard  et  un  pis- 
tolet, qu'il  posa  sur  une  table,  et 
lui-même  se  plaça  près  d'un  lit 
(jui  se  trouvait  là,  ayant  ;\  côté 
de  lui  Baudriitct  et  Delulande. 
Peu  après  ,  des  cuirassiers  arri- 
vèrent et  amenèrent  le  général 
Berton  prisonnier  dans  le  château 
de  Saumur.  La  cour  royale  de 
Poitiers  instruisit  une  procédure 
contre  le  général  Berton  et  contre 
cinquante-cinq  personnes,  accu- 
*èes  d'avoir  participé  avec  lui  à 
l'insurrection  de  Thouars.  L'n  ar- 
rêt de  la  cour  de  catsation  ,  rendu 
sur  le  réquisitoire  du  ministère 
public,  pniir  cause  de  suspicion 
légitime ,  transféra  le  jugement 
de  celte  aflaire,  de  la  cour  d'as- 
«is<?8  des  Deux-Sèvres,  i\  celle  de 


bi:r 


5:^0 


Poitiers.  Quelques  débats  préju- 
diciels eurent  lieu  :  l'accusé  récu- 
sait la  cour  d'assises  comme  in- 
compétente; et,  conformément  à 
l'article  33  de  la  charte,  deman- 
dait à  être  jugé  par  la  cour  des 
pairs  :  celte  prétention  ne  fut  point 
admise.  La  composition  du  jury, 
que  la  législation  actuelle  attribue 
aux  agensdu  gouvernement,  avait 
fait  imaginer  d'appeler  en  témoi- 
gnage quelques-uns  de  ceux  qui 
le  composaient.  Cette  manière  in- 
directe d'étendre  les  récusations, 
fut  repoussée  par  la  cour.  Le  gé- 
néral Berton  avait  choisi  pour  dé- 
fenseur M'  Mérilhou  {voy.  ce  nom 
au  supplément  du  18'  vol.  ),  du 
barreau  de  Paris  :  l'autorisation 
prescrite  par  le  décret  de  1810  lui 
fut  refusée  par  le  garde-des-sceaux 
{M.  de  Peyronel.  )  Au  défaut  de 
iM*  iMérilhou,  le  général  appela 
M'  Mesnard  ,  du  barreau  de  llo- 
chefort;  l'autorisation  lui  fut  éga- 
lement refusée,  en  même  temps 
qu'on  décidait  qu'elle  lui  était  né- 
cessaire, ce  qui  fut  contesté  par 
lui.  Berton  ayant  refusé  de  faire 
un  autre  choix,  la  cour  d'assises 
de  Poitiers  lui  nonuna  d'office  M" 
Dmult,  du  barreau  de  celte  ville. 
Le  général  Berton,  qui  ne  con- 
naissait point  cet  avocat,  et  qui 
surtout  ne  voulait  pas  le  recevoir 
des  maitjs  de  ses  juges,  refusa 
d'accepter  son  minislère.  La  cour 
enjoignit  néamnoins  à  l'avocat  de 
défendre  legénéral;  mais  M' Drault 
refjisa  énergiquement  celle  mis- 
sion, à  cause  dt^quoi  un  arrêt  le 
raya  du  tableau  :  cet  arrêt  a  été 
cassé  depuis  pour  défaut  de  for- 
me, par  la  cour  suprême.  Dans  le 
cours  des  débals,  l'accusé  articula 
les  plaintes  suivantes  :  «  On  m'a 


JliO 


BER 


mis  au  Sficret  le  plus  iignurf;ux; 
on  m'a  tenu  dans  des  léix'^bres 
continuelles,  comme  un  voya^jeur 
que  l'on  conduit  dans  une  caverne 
pour  l'assassiner.  Je  n'ai  pu  com- 
muniquer avec  M"  Drault  que  le 
10  de  ce  mois  (les  débals  s'ouvri- 
rent le  26).  liC  II  seulement  j'ai 
obtenu  la  permission  de  lui  pas- 
ser des  notes.  I.ors  de  mon  inter- 
rogatoire, M.  le  président  m'a  dit 
que  l'avocat  qu'on  me  nommerait 
d'office  viendrait  dans  ma  cham- 
bre conférer  avec  moi  ;  que  les 
gendarmes  se  retireraient  à  quel- 
que distance  ,  et  me  laisseraient 
maître  de  communiquer  avec  mon 
défenseur.  Malgré  cette  promesse, 
je  n'ai  pu  voir  M''  Drault  qu'à  tra- 
vers deux  grilles  dont  les  barreaux 
sont  très-rapprochés  ;  je  ne  l'ai  pu 
qu'assisté  du  geôlier  et  de  deux 
gendarmes.  M.  le  président  a  eu 
la  bonté  de  modifier  cet  ordre  et 
de  prescrire  à  mes  gardiens  de  se 
retirer  à  quelque  distance,  en  ob- 
servant toutefois  de  ne  pas  me 
laisser  recevoir  des  papiers.  Le  i3 
août ,  je  remis  à  M*  Drault  quel- 
ques notes  :  le  voncierge  Cham- 
pion était  ;\  côté  de  moi;  il  avait 
Ja  tête  placée  d  ms  la  porte,  pres- 
que sur  mes  épaules.  Comme  je 
l'ai  écrit  à  M.  le  président,  j'ai  le 
malheur  d'avoir  l'ouïe  un  peu 
dure  ,  et  M*  Drault  ne  pouvait 
dans  ces  circonstances  me  parler 
bas.  Jamais  on  n'a  interprété  le 
code  d'instruction  criminelle  com- 
me on  Ta  fait  à  mon  égard,  jamais 
on  n'a  imaginé  dte  pareils  subter- 
fuges. Le  29  du  mois  dernier 
(juillet),  M.  le  président  m'a  fait 
prévenir  que  mon  pourvoi  contre 
l'arrêt  de  la  chambre  des  mises 
en  accusation  devait  être  consigné 


BER 

sur  le  registre  du  greffe.  Le  5  de 
ce  mois,  M'  Drault  voulut  me 
passer  ses  notes;  le  concierge  s'en 
<!St  emj).iré  ,  en  disant  qu'il  avait 
ordre  d'en  agir  ainsi.  Ces  notes 
lurent  portées  chez  M.  le  procu- 
reur-général,  qui  défendit  de  me 
les  conuiiuniquer.  Je  fis  mon 
potu'voi  d'après  des  articles  de  loi 
que  je  ne  connaissais  pas  :  M* 
Drault  fut  obligé  de  venir  le  len- 
demain m'en  faire  changer  la  ré- 
daction  Je  déclare  à  la  cour 

que  jusqu'à  ce  jour,  je  n'ai  eu 
aucune  véritable  communication 
avec  mon  défenseur.  »  «  Le  geô- 
lier et  les  gendarmes  ,  ajoutait 
M°  Drault,  ne  se  tenaient  pas  as- 
sez éloignés  de  nous  pour  que  je 
pusse  parler  assez  bas  pour  n'être 

pas  entendu Je  dois  dire  en 

mon  âme  et  conscience  que  ce 
mode  de  communication  m'a  paru 
si  peu  propre  à  remplir  le  vœu  de 
la  loi,  si  dangereux  pour  moi  et 
pour  l'accusé,  que  je  n'ai  cru  pou- 
voir lui  faire  aucune  question. 
Tout  ce  que  je  lui  ai  dit,  je  l'ai 
dit  à  très-haute  voix,  parce  qu'une 
réponse  mal  saisie,  mal  interpré- 
tée ,  pouvait  compromettre  les  in- 
térêts des  accusés.  »  Ces  plaintes 
furent  l'occasion  d'un  débat  qui 
parut  en  constater  l'exactitude,  et 
que  M.  le  président  termina  en 
soutenant  que  le  mode  de  com- 
munication appartient  exclusive- 
ment au  président  et  au  procu- 
reur-général. Nous  devons  ajou- 
ter que  les  accusés  étaient  con- 
duits à  l'audience  dans  des  cha- 
liots  fermés,  où  ils  se  plaignaient 
de  manquer  d'air  ;  qu'ils  jetaient 
attachés  avec  des  cordes;  qu'en 
une  occasion  l'un  d'eux  en  fut  re- 
tiré blessé  ;  que  les  nombreux  sol- 


BER 

dats  qui  les  enlouniient  faisaient 
fermer  les  portes  des  maisons  qui 
se  trouvaient  sur  leur  passage  ; 
que  les  flls  du  général  Berton  é- 
prouvèrenl  des  entraves  de  plus 
d'un  genre  pour  obtenir  la  per- 
mission de  venir  à  Poitiers,  avant 
et  après  la  condamnation  du  gé- 
néral ;  et  enfin  qu'on  ne  leur  ac- 
corda pas  même  la  triste  faveur 
d'assister  chaque  jour  au  procès 
de  leur  père.  Dans  la  séance  du 
II  septembre,  W*  Drault  se  leva 
et  dit  :  «  M.  le  président,  je  suis 
chargé  par  le  fils  du  général  Ber- 
ton de  vous  prier  de  lui  donner  le 
moyen  de  pénétrer  jusque  dans  la 
salle  de  l'audience  :  ce  jeune 
homme  est  consigné  sur  la  place 
Saint-Didier.  —  M.  le  président  : 
Je  ne  le  puis ,  il  a  déj.\  assisté  à  la 
séance  d'hier...  !  »  Le  système  de 
défense  du  général  Berton  pen- 
dant l'audition  des  témoins,  con- 
sista à  soutenir  qu'il  ne  s'était  pas 
positivetiicnt  insurgé  et  n'avait 
point  fait  acte  d'usurpation  de 
l'autorité  souveraine;  que  son  but 
aurait  été  non  le  changement  de 
dynastie,  ou  le  ch.ingemenl  de 
la  forme  du  gouvernement,  niais 
seulement  le  redressement  des 
griefs  allégués  contre  l'adminis- 
tration actuelle.  Ce  système  peu 
soutenable,  laissait  beaucoup  do 
prise  à  l'accusation,  et  chargeait 
quelques-uns  des  co-accusés;  aussi 
le  général  se  vit  bientôt  réduit  ii 
r.ibandonner.  On  va  l'entendre  lui- 
même  présenter  sa  défense,  que 
sa  longueur  el  trop  de  digressions 
nous  forcent  ù  ne  présenter  que 
parextr.iil.  «  Messieurs  les  jurés, 
j'ai  été  huig-tcmps  le  maître  de 
ne  pas  parait re  devant  vous;  j'iu- 
rais  pu  m'cuibarquer^our  l'Es- 


BER 


341 


pagne  aussi  facilement  que  l'ont 
fait  les  oiTiciers  qui  étaient  avec 
moi;  long-temps  après  leur  dé- 
part ,  j'ai  eu  encore  à  ma  disposi- 
tion un  bâtiment  pour  m'}'  con- 
duire. Plusieurs  personnes  dans 
le  pays  01^  j'étais,  m'engageaient 
continuellement  à  m'y  rendre  , 
entre  autres  une  dame  qui  avait 
fait  d'avance  les  frais  el  les  prépa- 
ratifs de  mon  voyage;  mais  j'ai 
)^nsé  que  fuir  loin  de  la  France 
était  indigne  de  moi ,  et  que  je 
commettrais  une  iHcheté  en  quit- 
tant son  territoire,  pendant  qu'un 
certain  nombre  de  mes  co-accusés 
étaient  dans  les  fers.  De  grands 
intérêts  particuliers  m'appelaient 
j>ourlant  en  Espagne.  Ce  que  je 
dis,  messieurs,  ne  vous  étonne- 
rait pas  si  j'avais  l'honneur  d'être 
mieux  connu  de  vous.  J'ai  eu 
même  l'intention  de  me  consti- 
tuer prisonnier  avec  les  autres  ac- 
cusés, afin  de  pouvoir  faire  con- 
naître la  #érité  à  messieurs  les 
juges, et  je  l'eusse  fait,  si  un  autre 
homme  que  M.  Mangin  eAt  été 
procureur  général  près  cette  cour. 
On  n'a  rien  épargné,  messieurs, 
pour  tâcher  de  nous  avilir  à  vos 
yeux  :  les  épithètes  les  plus  offen- 
santes, peu  généreuses  envers  des 
accusés,  de  la  pan  d'un  magistrat 
revêtu  d'aussi  éminentes  fonc- 
tions, ont  montré  un  caractère 
irascible  et  peu  de  dignité.  Le 
courage  que  l'on  croit  déployer 
lorsqu'on  est  certain  de  ne  cqurir 
aucun  risque,  de  n'être  exposé  ù 
aucun  danger,  n'est  qu'une  fanfa- 
ronade  ridicule;  et  quand  M.  le 
procureur-général  s'est  cru  auto- 
risé, sur  un  faux  rapport,  i\  so 
servir  envers  nous  du  mot  de  tâ~ 
chuté f  nous  l'avoDs  méprisé...  M. 


342 


BliR 


le  procureur-général,  par  un  ju- 
gement anticipé,  m'a  qualiûé  d'ex- 
géncral  sur  son  acte  d'accusation, 
sans  connaître  la  catégorie  dans 
laquelle  je  me  trouvais.   J'ai  été 
mis  à  la  solde  de  réforme  au  i" 
août  de  l'année  dernière,  ce  qui 
ne  diminue  que  les  appoinlemens, 
mais  cela  n'ôte  pas  le  grade  :  on 
peut  même  être  mis  tout-à-coup 
en  activité...  Au  fond  de  ma  tran- 
quille retraite ,  où  je   gémissais 
sur  la  détention  de  mes  co-accu- 
.^és,  j*ai  eu  l'occasion  de  lire  des 
journaux;  et  n'ayant  pas  trouvé 
le  nom  de  Grandménil  parmi  ceux 
des  hommes  arrêtés  ou   fugitifs, 
j'ai  craint  qu'on   ne  chercli.lt  de 
■  nouveau  à  exciler  les  habitans  des 
campagnes   surtout ,   à   faire  des 
tentatives  inutiles  et  dangereuses, 
pour  délivrer  leurs  concitoyens. 
Je  désirais  pouvoir  revenir  dans 
le  département  de  Maine-et-Loire, 
dans  les  environs  de  Thouars,  y 
voir  quelques  citoyena»  notables  , 
afin  qu'ils  pussent  d'abord   faire 
connaître  aux  prisonniers  que  je 
ne  m'étais  pas  sauvé  en  Espagne, 
comme  l'avaient  annoncé  tous  les 
journaux;  et  le  premier  fut  celui 
des  Débats,  qui  m'avait  fait  em- 
barquer près  de  La  Rochelle.   En 
second  lieu  ,  je  voulais  détromper 
ceux  qui  n'étaient  point  compro- 
mis et  les  empêcher  de  se  com- 
promettre ,  et  c'est  ce  que  j'aurais 
l'ait;  j'aurais  rendu  un  plus  grand 
service  que  ne  l'a  fait  le  maréchal- 
des-Iogis  Wolfel,  en  devenant  un 
des  suppôts  de  la  police.  .î'ai  su 
que  Grandménil'avait  envoyé  quel- 
qu'un à  ma  recherche,  qui  n'a  pu 
«ne  trouver,  mais  qui  avait  pu  ac- 
quérir des  présomptions  que  j'é- 
lals  danj  lu  Sainlonge.  Il  y  est 


BER 

vftuu  lui-même  :  par  la  ténacité 
de  ses  recherches,  il  a  troufè 
moyen  de  n)e  faire  parvenir  une 
lettre,  par  la(|uelle  il  me  priait  de 
le  recevoir.  J'y  consentis;  il  me 
parla  de  suite  de  toutes  les  arres- 
tations qu'on  avait  faites;  je  ne 
les  croyais  pas  aussi  nombreuses. 
Il  vit  la  peine  que  cela  me  cau- 
sait; il  nje  parla  alors  de  l'esprit 
de  quelques  maréchaux-des-logis 
des  carabiniers  ;  je  lui  répondis 
que  tout  ce  qu'il  me  disait  ne 
m'apprenait  autre  chose,  ?inon 
qu'il  allait  au  moins  celte  fois-là 
se  faire  arrêter,  s'il  n'en  compro- 
mettait pas  d'autres,  et  qu'un  ré- 
giment qui  avait  à  peu  près,  com- 
me tous  les  autres,  cinquante  sous- 
officiers,  et  autant  d'officiers,  n'é- 
tait pas  à  Iii  disposition  de  quel- 
ques individus  ;  qu'il  devait  en 
croire  mon  expérience  militaire. 
Il  me  supplia  de  venir  voir  cela 
par  tnoi-même;  je  lui  répondis 
que  je  le  voulais  bien,  si  on  me 
promettait  de  suivre  mes  conseils; 
il  me  le  promit,  et  crt  homme 
avait  beaucoup  d'inffuence  dans 
les  campagnes.  Quelques  jours 
après,  j'entrepris  ce  voyage,  qui 
pouvait  me  donner  l'occasion  de 
calmer  les  esprits  s'il  était  néces- 
saire ;  d'empêcher  les  gens  trop 
crédules  de  se  compromettre,  en 
même  temps  que  j'aurais  pu  faire 
connaître  que  je  n'avais  pas  quille 

la  France Je  reviens  à  l'acte 

d'accusation  dressé  par  M.  le  pro- 
cureur-général, et  je  déclare  qu'il 
est  faux  en  principe  et  dans  ses 
conséquences,  et  par  les  supposi- 
tions et  inductions  qu'il  renferme. 
Le  mouvement  qui  eut  lieu  à 
Thouars  le  34  février  dernier,  n'a- 
vait pas  pour  but  de  renverser  le 


poiiverncment  du  roi.  et  était  en- 
core bieij  inoin^  dirigé  contre  S. 
M.  ,  puisqu'il  était  l'œuvre  des 
chevaliers  de  la  liberté,  dont  le 
premier  artticlede  leurs  statuts  est 
le  maintien  et  ta  conservation  du 
roi  et  de  l' auguste  famille  réi^nante, 
le  soutien  de  la  charte,  avec  l'en- 
{çagement  de  combattre  les  enne- 
mis de  la  liberté,  qui  sont  ceux 
dfc:  la  charte.  Je  ne  me  rappelle 
pas  bien  si  ce  sont  là  les  propres 
mots  de  ce  premier  article,  mais 
je  suis  sûr  que  tel  en  est  le  sens  ; 
il  m'a  été  lu  à  Saumur,  en  pré- 
sence de  beaucoup  de  chevaliers 
de  la  liberté,  qui  m'ont  juré  d'y 
persister  entièrement,  et  m'ont 
l'ait  promettre  d'y  adhérer;  per- 
sonne de  nous  n'a  dû  ni  pu  parler 
de  gouvernt'ment  provisoire  en 
France.  Il  n'est  pas  vrai  que  je 
sois  le  chef  de  celte  entreprise  ; 
il  ne  m'est  pas  plus  permis  de 
m'en  faire  les  honneurs  que  de 
in'attribuer  celui  d'avoir  fait  ar- 
borer les  trois  couleurs  nationa- 
les, que  S.  M.  Louis  XVIII  a 
portées,  qui  ont  di;puis  flotté  avec 
gloire  dans  les  quatre  parties  du 
monde,  et  sous  lesquelles  le  nom 
français  s'est  iumiortalisc  :  au- 
cune puissance  de  la  terre  ne  peut 
détruire  ces  vérités.  La  résolution 
était  prise  d'arborer  les  troië  cou- 
leurs, et  je  n'avais  pas  le  droit 
d'en  décider  autrement.  Le  n)ou- 
vcment  qui  a  eu  lieu  ù  Thouars 
n'a  point  été  préparé  par  moi  ;  il 
a  pu  être  déterminé  par  ni«  |)ré- 
sence;  il  aurait  pu  avoir  lieu  sans 
moi.  Je  n'y  ai  rien  organisé,  je 
n'y  connaissais  personne,  j'y  ai 
trouvé  ce  qui  y  existait.  On  ne 
crée  pas  de  semblables  choses 
dans  un  jour  ni  dans  un  mois  ; 


BER  54r> 

niai?  c'est  le  fruit  d'un  grand  et 
long  mécontentement.  II  faut  s'ê- 
tre commtmiqué  long -temps  et 
souvent  les  luécontentemens  ré- 
ciproques, pour  en  venir  au  point 
de  prendre  un  parti.  J'ai  laissé 
chacun  libre  d'y  participer  ou  de 
se  retirer,  ce  que  les  uns  ont  fait. 
Les  proclamations  dont  il  est 
question  dans  l'acte  d'accusation 
ne  m'étaient  pas  connues.  Je  ne 
les  ai  point  lues;  j'ignore  qui  les 
a  faites ,  qui  les  a  apportées  à 
Thouars,  ou  si  elles  ont  été  faites 
dans  cette  ville;  elles  ne  sontpoint 
signées  par  moi ,  et  je  n'en  suis 
pas  l'auteur.  La  plupart  des  accu- 
sés, ici  présens,  n'étaient  point 
sur  la  place  quand  on  les  y  a  lues. 
RI.  le  procureur-général  prétend 
en  outre  que  mon  nom  est  cité 
dans  une  procédure  instruite  à 
Nantes  contre  des  carl)onari ,  et 
dans  i]ne  insurrection  militaire  de 
La  Rochelle,  du  mois  de  mars 
dernier,  deux  choses  dont  je  n'ai 
eu  connaissance  que  par  son  acte 
d'accusation.  Oii  e-t  la  prenve  de 
ces  assertions  erronées?  quelques 
délations,  peut-être  soulHées  aux 
oreilles  de  quelques  malheureux 
inculpés,  afin  de  leur  faire  espé- 
rer leur  grSce,  qu'on  attache  pour 
les  tromper,  au  prix  honteux  d'une 
fausse  dénonciation  ,  dont  (m»  a- 
doucit  l'expression  en  l'appelant 
révélation...  Je  ne  suis  point  che- 
valier de  la  liberté;  si  je  l'étais, 
je  serais  loin  de  le  désavouer,  et 
j'ignore  Ce  que  c'est  que  les  car- 
bonaft,dont  M.  le  procureur-gé- 
néral m'avait  parlé  lors  de  mon 
interrogatoire,  et  que  par  son  acte 
d'accusation  il  semble  confondre 
avecles  chevaliers  de  la  liberté... 
Nous  avons  été  conduits  devant 


344 


BER 


vous,  messieurs,  dans  des  cages 
montées  -sur  quatre  roues»  eo- 
cliaînés  deux  à  deux,  traversant 
deux  haies  de  soMals,  précédés 
et  suivis  par  des  pelotiius  d'infan- 
terie et  de  cavalerie,  tandis  que 
les  rues  aboutissant  à  celles  qui 
conduisent  Je  la  prison  au  paîui-;, 
sont  t-n  outre  barrées  par  d^s 
troupes.  Vu  les  mesures  extraor- 
dinaires de  sûreté,  la  gendarme- 
rie, qui  voyait  sa  responsabilité 
très  à  couvert,  prit  sur  elle  de 
nous  ôter  les  fers  ;  le  général  Ma- 
larlic  ordonna  qu'on  nous  les  re- 
mît ;  on  fit  des  représentations  à 
la  cour  sur  les  accidens  qui  pou- 
vaient en  résulter;  elle  ordonna 
un  traitement  plus  humain.  On 
nous  ôla  une  second»;  fois  nos 
fers  ;  le  même  général  ordonna 
alors  de  nous  attacher  avtc  des 
cordes,  ce  qui  a  eu  lieu  jusqu'au- 
jourd'hui. M.  le  procureur-géné- 
ral Mangin  a  i"ermé  l'entrée  de  la 
prison  à  mes  enfans,  venus  exprès 
de  l'aris  pour  me  voir,  avec  une 
permission  du  ministre  de  la  guer- 
re, qui  1rs  autorisait  à  rester  trois 
jours  à  Poitiers  ;  tt  ils  étaient  par- 
tis ,  l'un  d'Avignon  ,  l'autre  de 
Nantes,  pour  aller  solliciter  cette 
permission  à  Faris.  On  m'a  refusé 
la  consolation  d'embrasser  mes 
deux  fils.  Veuillez  bien  remarquer, 
messieurs,  que  mes  fils  avaient 
une  permission  d'un  des  minis- 
tres du  roi  ,  spécialement  pour 
venir  me  voir  et  rester  trois  jour» 
à  Poitiers,  afin  de  pouvoir  juger 
toute  l'étendue  de  la  dictatifre  de 
M.  le  procureur-général  du  roi, 
qui  n'a  pas  voulu  permettre  que 
je  les  visse.  Celle  épieuve  ,  mes- 
sieurs, m'a  causé  bien  du  cha- 
grin; et  c'est  ce  que  l'on  voulait. 


BER 

Mes  enfans  ont  dû  retourner  de 
suite  h  Paris  ,  avec  une  douleur 
égale  à  la  mierme  ;  iiuiis  indépen- 
damment de  l'ordre  du  mini.-tre 
de  la  guerre,  ils  obtinrent  bien 
vite  celui  du  ministre  de  l'inté- 
rieur, tenant  le  portefeuille  de  la 
ju^tice,  pour  communiquer  avec 
leur  père.  M.  le  procureur-géné- 
ral n'a  pas  pu  s'y  refuser  cette 
fois -ci,  ni  leur  faire  faire  anti- 
chambre dans  la  cour,  comme  la 
première  fois;  on  s'est  contenté 
de  faire  prendre  des  mesures  sura- 
bondantes, des  précautions  de  sur- 
veillance, pendant  que  mes  deux 
fils  étaient  A  mes  côtés,  sous  les 
verroux.  M.  le  procureur-général 
n'a  pas  voulu  permettre  qu'ils  dî- 
nassent une  seule  fois  avec  moi... 
Je  oe  puis  répondre  à  tout  ce  que 
vous  a  dit  hier  tM.  le  procureur- 
général  ;  c'e?t  ce  qu'il  avait  déjiV 
dit  dans  î-on  acte  d'accusation.  Il 
m'a  de  plus  noté  comme  un  Ci)l- 
laboraleiir  de  ia  Miierve;  c'est 
m'accorder  trop  de  mérite  que  de 
m'associer  aux  écriv.tins  qui  ré- 
dige.îient  celte  feuille  périodique. 
Je  me  rapj)elle  d'y  avoir  fait  in- 
sérer trois  lettres,  l'une  pour  ré- 
futer des  injures  que  lord  Slan- 
hope  avait  voujie.'-  contre  la  na- 
tion française  ;  l'autre  eu  réponse 
à  l'Ermite  de  la  Pruvince ,  qui 
avait  rendu  compte  de  la  bal.iille 
(le  Toulouse  ,  et  elle  avait  pour 
but  de  faire  connaître  une  action 
d  éclat ,  la  j>lus  intrépide  ,  faite 
par  un  nommé  Vincent,  maréehal- 
des  -  logis  au  22*  régiment  des 
chasseurs.  J.a  troiï.ièuie  était  en 
faveur  du  général  Cambroune  , 
que  des  journaux  avaient  attaqué. 
Je  n'ai  jan)ais  eu  d'autres  rapports 
avec  la  Mina've;  chacun  pouvait 


BER 

y  taire  insérer  des  lellres.  M.  le 
procureur  -  g^iéral  vous  a  pré- 
senté le  prétendu  comité  direc- 
teur, sur  des  preuves  morales  , 
comuie  le  Vieux  de  la  Montagne, 
qui  Taisait  partir  du  mont  Lib.tu 
un  homme  pour  aller  assassiner 
Saint-Louis,  et  qui,  sur  d'autres 
rapports  avaut.igeux  à  ce  monar- 
que, envoya  un  second  émissaire 
pour  donner  contre-ordre.  Il  vous 
a  parlé  de  son  indulgence,  mes- 
sieurs, et  il  vous  demandt;  beau- 
coup de  «ang.  Si  votre  conscience 
vous  dit  qu'il  faut  en  verser,  je 
l'erai  l)i«  n  volontiers  le  sairifiee 
du  uiit;n;  j'en  IV-rais  surtout  le  sa- 
crifice a>ec  joie,  s'il  pouvait  ren- 
dre la  liberté  à  tous  ce  ix  (|ui 
m'ont  suivi  jusqu'à  Saumur.  Vous 
pouvez  les  éj»argner,  messieurs, 
aucun  sentiment  intérieur  ne  doit 
vous  en  faire  de  repr(»chc  ;  je  dé- 
sirerais, en  ce  cas,  pouvoir  four- 
nir ù  moi  seul  assez  de  sang  pour 
apaii-er  la  soif  de  ceux  qui  eu  pa- 
raissent si  altérés,  l'cndant  vingt 
ans  ,  j'en  ai  versé  sur  quelques 
champs  de  bataille;  j'y  ai  épargné 
celui  des  émigrés  lorsqu'il»  se  bat- 
taient comre  nous.  J'en  ai  sauvé, 
connue  bien  d'autres  de  mes  com- 
pagnons d'armes  l'ont  fait;  et 
celte  générosité  avait  ses  diuigers. 
Je  n'ai  jjuiais  fait  couler  une 
goutte  de  sang  français.  Celui  qui 
me  reste  est  pm- ;  il  est  tout  fran- 
çais. J'ai  exposé  loug-leuips  ma 
vie  avec  gloire  |>our  imm  p.tys. 
Si  je  devais  la  perdre  par  la  main 
de  mes  concitoyens,  je  leur  pré- 
senterais encore  ma  poitrine  avec 
le  même  eour.ige  que  j'ai  toujours 
montré  devant  les  ennenns  de  la 
France.  Nos  noms  ,  messieurs,  se- 
ront inscrits  ensemble  dans  This- 


BER 


54  r> 


toire  :  la  France  et  l'Europe  nous 
jugeront  sévèrement  et  sans  par- 
tialité. Quoi  qu'il  puisse  arriver, 
mon  cœur  n'a  rien  à  craindre,  et 
ma  devise,  comme  elle  a  toujours 
été  ,  sera  celle-ci  : 

Dutce  et  décorum  estpro  patriâ  mori,  • 

iM.  Mangin,  procureur- général , 
qui  avait  été  chef  de  division  au 
ministère  de  la  justice  sous  l'ad- 
ministralion  de  1819,  soulinl  l'ac- 
cusation avec  beaucoup  de  véhé- 
mence; il  inculpa  même  grave- 
ment plusieurs  membres  de  l'op- 
position de  la  chambie  des  dépu- 
tés, qui  avaient  été  nommés  dans 

I  s  débats.  Ceux-ci  demandèrent 
à  la  cour  de  cassation  l'autorisa- 
tion de  réclamer  une  réparaliotj 
des  tiily.maux;  ils  n'obtinrent  pas 
cette  autorisation  ,  njais  la  cour 
suprÇme  admit  dans  son  arrêt,  la 
possibilité  de  juger  peu  mesurées 
les  expressions  du  procur(;ur-gé- 
néral  de  l'oiliers.  Après  dix -sept 
jours  de  débats,  le  jury  fit  con- 
naître sa  déclaration  ,  A  la  suite 
de  laquelle  Bcrlon  et  cinq  de  ses 
co  -  accusés  furent  condamnés  à 
mort.  (Le  colonel  Alix  avait  été 
déclaré  coupable  de  complot  par 
le  jui-y,  à  la  majorité  de  s<;pt  voix 
contre  cinq;  mais  la  majorité  de 
la  cour  se  réunit  à  la  minorité  du 
jury,  pour  le  sauver  de  la  mort. 

II  a  été  cond«imné  à  cinq  ans  de 
détention  ,  comme  non  -  révéla- 
tt;ur.  )  Trente-deux  furent  con- 
damnés à  l'emprisonnement.  En 
dépeignant  le  tableau  qu'offrit  ce 
moment  terrible,  le  cjarrateur  des 
débals  nous  signale  la  circons- 
tance suivante  :  «  Sauzais  se  jette 
dans  les  bras  de  son  avocat,  l'eni- 
braise  le»  iarni(?s  nux  yeux.  M.  le 


546 


RER 


général  Malarlic  prévienl  aussitôt 
'es  dérenseurs  que,  par  ordr«;  de 
M.  le  président ,  il  est  détendu  à 
toutes  personnes  d'approcher  des 
prévenus,  ni  de  leur  parlt-r.  M* 
Bréc-hard  :  Quoi!  iM.  le  général, 
même  aux  avocats?  —  M.  de  Ma- 
lartic  :  Oui,  monsieur,  même  aux 
avocats,  par  ordre  de  M.  le  prési- 
dent. »  (M.  de  Malartic  a  été  nom- 
mé comte,  «  en  témoignage,  dit 
M.  le  duôde  Bellunc  (»oy.  Victor), 
ministre  de  la  guerre  ,  du  zèle ,  de 
l'activité,  de  la  prévoyance,  avec 
lesquels  il  a  dirigé  le  service  de 
la  place  de  Poitiers,  pendant  le 
jugement  du  général  Berton.  » 
(Lettre  du  ii  octobre  1822.)  Le 
général  Berton  se  pourvut  en  cas- 
sation contre  l'arrêt  de  sa  con- 
damnation. MiVl.  Isamhert  et  Mé- 
rilliou  plaidèrent  le  pourvoi.  Le 
premier  s'exprimait  en  ces  ter- 
mes :  «  Nous  avons  mis  à  profit 
le  délai  de  huitaine  que  la  cour 
a  bien  voulu  nous  accorder.  iM. 
Ch.  Berton  ,  fils  du  général ,  a 
obtenu  le  lendemain ,  i'«  la  préfec- 
ture de  police,  un  passeport  pour 
Poitiers.  Ses  premières  recher- 
ches sur  l'îîge  de  M.  Boisnet,  le 
septième  juré,  n'ont  rien  produit. 
11  les  continuait  avec  toiilft  l'ac- 
tivité qu'un  fils  peut  mettre  pour 
sauver  la  vie  de  son  père,  quand 
l'autorité  militaire  a  cru  devoir  le 
mettre  en  surveillaïkce,  sous  pré- 
texte qu'il  était  militaire,  et  que, 
s'il  exhibait  un  passeport  régulier, 
il  n'était  porteur  d'aucun  congé. 
M.  Berton  fils  est  présent  à  l'au- 
dience; il  nous  autori'^e  formel- 
lement à  articuler  les  fiils  sui- 
vans  :  M.  le  général  Malartic , 
commandant  le  département,  l'a 
consigné  à  domicile  sous  la  sur- 


BER 

veillance  des  gendarmes,  sous  le 
prétexte  qu'il  était  militaire,  avec 
défense  de  cnmmuniquer  au  de- 
hors. M.  Berton  répondit  qu'il 
avait  été  placé  en  congé  illimité , 
ce  qui  le- mettait  hors  des  cadres 
de  l'armée  ;  que  dès-lors  il  était 
rentré  dans  la  vie  civile,  et  qu'»! 
cette  fin  un  passeport  régulier  lui 
avait  été  délivré  par  l'autorité  ci- 
vile. Ces  dillicullés  ont  forcé  M. 
Berton  fils  à  revenir  à  Paris,  san.* 
avoir  pu  se  procurer  la  preuve  de 
l'uge  du  juré.  »  L'avocat  indiquait 
ensuite  les  moyens  de  l'accusé, 
qui  déclarait  s'inscrire  en  faux 
contre  le  procès-verbal  des  débats 
tenus  dcv.mt  la  cour  d'assises  de 
Poitiers,  et  porter  plainte  contre 
les  membres  qui  la  coinposaienl , 
spécialement  confie  M.  le  procu- 
reur-général, qu'il  disait  avoir  agi 
par  inimitié  contre  lui,  et  à  l'é- 
gard duquel,  ajoutent  les  coticlu- 
sions,  «  cette  inimitié  est  prouvée 
notamment  par  les  insultes  por- 
tées au  malheur  de  l'accusé  pen- 
dant la  durée  des  débats ,  et  par 
les  accusations  de  lâcheté,  tout- 
à-fait  étrangères  à  l'accusation.  » 
M'  Mérilhou  plaida  ensuite  avec 
beaucoup  de  chaleur  les  moyens 
de  cassation;  mais  la  plainte  ne 
lut  point  admise  ,  et  le  pourvoi 
en  cissation  fut  rejeté.  Celte  dé- 
cision parvint  à  Poitiers  par  esta- 
fette, dans  la  nuit  du  4  'lu  5  oc- 
tobre. L'arrêt  fut  lu  aux  condam- 
nés le  5,  à  sept  heures  du  matin. 
A  huit  heures,  on  commença  les 
apprêts  de  Texécution.  Le  grelHer 
s'elant  présenté  à  la  pri?on  pour 
donner  lecture  aux  condamnés 
Berton  et  Caffé  de  l'arrêt  de  la 
cour  de  cassation  ,  qui  rejette  leur 
pourvoi,  Berton,  après  avoir  en- 


BER 

tendu  les  premières  phrases,  in- 
lorrompit  le  grellier  en  lui  disanl: 
«  C'ost  !)on,  c'est  bon,  en  voilà 
bien  assez.  »  Il  se  plai-init  ao  geô- 
lier de  ce  qu'on  n'avait  pas  fait 
venir  un  barbier  qu'il  avait  de- 
mande pour  se  faire  raser.  L'exé- 
culeur  arriva  ensuite  pour  arrao- 
ger  les  vêleraens  et  la  chevelure 
du  {général ,  de  manière  à  facili- 
ter l'exécotion  :  il  coupa  tout  le 
collet  de  l'habit,  et  rasa  les  che- 
veux du  cou.  V  Ne  pouviez -vous 
»pas  ,  lui  dit  le  général,  vous  con- 
»  tenter  de  raballre  le  collet  de 
>»mon  babil,  sans  le  couper  ain- 
>»si.^  »  A  onze  heures,  on  le  fit 
passer  dans  la  cuisine  de  la  pri- 
son ,  où  l'attendaient  deux  mis- 
sionnaires. Dès  qu'il  les  aperçut, 
le  général  leur  dit  :  «  Messieurs, 
»  dispensez -voiis  de  m'accompa- 
>  gner.  Je  sais  aussi  bien  que  vous 

•  tout   ce   que   vous    pourrez   me 

•  dire;  )«  n'ai  pas  besoin  de  votre 
«ministère.  »  L'ne  petite  charrette 
découverte  l'attendait  dans  la  cour 
de  la  prison;  Berlon  y  fut  placé, 
les  Miains  liées  derrière  le  dos  ; 
un  missionnaire  était  à  sa  droite 
et  un  autre  à  sa  gauche  :  l'exécu- 
teur était  derrière  lui  pour  le  sou- 
tenir, lierton  l'avait  chargé  de 
ce  soin  ,  attendu  ,  disait -il ,  que 
n'ayant  pas  les  bras  libres,  le  mou- 
vement de  la  charrette  aurait  pu 
le  renverser.  Les  ecclésiastiques 
placés  à  ses  côtés  lui  adressèrent 
quelrjues  paroles  ;  mais  ,  d'après 
«on  refus  obstiné  de  les  écouter, 
ils  cessèrent  de  lui  parler,  et  se 
tinrent  jusqu'au  lieu  de  l'exécii- 
lion  ,  la  tftfe  appuyée  dans  les 
deux  mains.  Berton ,  qui  par  sa 
taille  élevée  dominait  les  deux 
missionnaires,  promenait  ù  droite 


BER 


347 


et  à  gauche  des  regards  assurés. 
Arrivé  au  lieu  du  supplice,  il  fran- 
chit avec  fermeté  les  degrés  de 
l'échafaud  ,  cria  :  Five  la  liberté! 
vive  la  France!  et  reçut  le  coup 
fatal.   Ses  deux  fds  étaient  partis 
de  Paris  aussitôt  après  le  rejet  du 
pourvoi  ,  espérant   pouvoir  em- 
luassrr    leur   père  ;    mais    lors- 
qu'ils sont  arrivés  à  Poitiers  ,  il 
avait  cessé  de  vivre.  Ces  jeune» 
gens,  qui  étaient  officiers  de  ca- 
valerie, ont  jugé  convenable  de 
donner  leur  démission.  Ou  leur  a 
refusé  la  permission  qu'ils  ont  sol- 
licitée ,  de  placer  une  pierre  ail 
lieu  où  reposent  les  osseiuens  de 
leur  père.  Le  général  Berton  était 
officier  de   la   légion -d  honneur 
et  chevalier  de  Saint-Louis.  Une 
note,  insérée  dans  quelques  jour- 
naux français  peu  après  sa  con- 
damnation ,  annonça  que  «  le  gé- 
«néral  Berton  ayant  cessé  d'afj- 
ftpartenir  à  l'ordre  royal  de  l'E- 
»pée,  de  Suède,  son   nom   vient 
«d'être  rayé  de  la  liste  des  cheva- 
nliers  de  cet  ordre.  »  A  peine  Ber- 
ton était-il  mort  que  l'dn  vit  pa- 
raître dans  le  Journal  des  Débats 
lu  lettre  suivante  ,  adressée  au  ré- 
dacteur, et  datée  de  Poitiers  le  i5 
octobre  1822  :  «  Monsieur,  j'ai  eu 
pendant  un  mois  de  fréqiiens  en- 
tretiens atec  le   général  Berton. 
Il  n'a  jamais  refusé  les  secours  de 
la  religion  ;  il  me   promettait  de 
remplir  tous   les  devoirs  qu'elle 
impose,  si  son  arrêt  de  mort  était 
confirmé  par  la  cour  de  cassation. 
Le  jour  de  l'exécution  de  Berton. 
je  me  rendis  de  grand  matin  à  l;i 
prison  avec  M.  Baudouin,  prêtre 
missionnaire.    Je   lui   exposai   \A 
nécessité  du  sacrement  de  péni- 
tence, el  lui  rappelai  la  proinessii 


34»  BER 

qu'il  m'avait  faite  si  souvent  de 
mourir  en  chrétien.  Il  in'écouta 
en  silence,  m'embrassa,  et  ac- 
cepta le  confesseur  que  je  lui  pré- 
sentai. Borton  s'est  confessé  deux 
fois,  avant  son  départ  de  la  pri- 
son. Lorsque  le  moment  de  mar- 
cher à  la  u)orl  fut  arrivé,  Berton 
devint  d'une  faiblesse  extrême  : 
,  la  pâleur  de  son  visage,  l'altéra- 
tion de  tous  ses  traits,  le  ren- 
daient méconnaissable.  J'ai  ac- 
Compap;né  le  général  jusqu'à  l'é- 
chafaud  ,  avec  M.  Baudouin.  Il 
ne  nous  a  point  dit  de  le  laisser 
tranquille,  ni  aucune  parole  dé- 
sobligeante. Je  suis,  etc.  Lambert, 
vicaire -général  de  Poitiers.  »  — 
Les  fils  du  général  Berton  y  ré- 
pondirent par  une  lettre  datée  de 
Paris,  du  19  octobre,  et  insérée 
dans  le  Courrier  français.  «  Mon- 
sieur, c'est  avec  un  profond  éton- 
nemeut  que  nous  avons  vu  ,  dans 
le  N"  du  Journal  des  Débats  de  ce 
îour,  la  lettre  de  M.  l'abbé  Lam- 
bert, vicaire-général  de  Poitiers. 
Nous  concevons  aisément  que  M. 
le  vicaire-général  cherclie  à  don- 
ner à  son  zèle  tout  l'éclat  et  toute 
la  publicité  possibles;  mais  il  est 
une  douleur  légitime  qu'il  aurait 
dû  respecter,  et  il  nous  semble 
qu'il  y  a  bien  peu  de  charité  chré- 
tienne dans  la  phrase  de  sa  lettre 
qui  tend,  en  démentant  la  voix 
publique  ,  à  faire  croire  que  le 
général  Berton  a  montré  une  fai- 
blesse extrême,  et  à  flétrir  ainsi  les 
derniers  momens  de  notre  infor- 
tuné père.  Dans  cette  circonstan- 
ce, il  ne  reste  pas  même  à  i\l.  le 
vicaire  -  général  l'excuse  de  ne 
point  nous  connaître,  lui  qui  nous 
écrivit  à  Poitiers,  le  6  octobre  , 
<  qu'il  faisait  des  vœux  pour  que 


BER 

la  justice  des  hommes  ne  fît  point 
retomber  tôt  on  lard  les  fautes  du 
père  sur  la  lêle  des  fils.  Agréer , 
etc.  ,  A.  Berton,  Ch.  Berton.  » 
—  Le  général  Berton  a  publié  : 
1°  Précis  historique ,  militaire  et 
critique  des  batailles  de  Fleurus  et 
de  IV aterloo  ^  dans  la  campagne 
de  Flandre,  en  juin  18 15;  de 
leurs  vianœuvres  caractéristiques  et 
des  mouvemens  qui  les  ont  précé' 
dées  et  suivies  ;  avec  une  carte  pour 
l'intelligence  des  marches.  Paris, 
18  18,  in-8°,  cinq  feuilles  un  quart; 
2*  Commentaire  sur  l'ouvrage^  en 
dix-huit  chapitres,  précédé  d'un 
avant-propos,  de  i\I.  le  général 
J.  J.  ïarayre  ,  intitulé  :  De  la 
force  des  gouvernemens  ,  ou  du 
rapport  que  la  force  des  gouver- 
nemens doit  avoir  avec  leur  na- 
ture et  leur  conslilulion.  Paris, 
1819,  in-8°,  douze  feuilles  et  ât- 
m\e  ;  "ù"  A  M  M .  les  membres  de  la 
chambre  des  pairs,  et  à  MM.  les 
députés  des  départemens  au  corps 
législatif.  Paris,  i82i,in-8°.  une 
demi -feuille.  C'est  une  pétition 
pour  réclamer  contre  la  mesure 
par  laquelle  le  général  avait  été 
rayé  des  contrôles  de  l'armée;  4° 
Considérations  sur  la  police  ;  Ob- 
servations touchant  les  bruits  qu'elle 
répand;  précédées  d'une  Lettre  à 
M.  le  baron  Mounier^  directeur- 
général  de  la  police  du  royaume. 
Paris,  1820,  10-8",  quatre  feuilles. 
La  Lettre  à  M.  le  baron  Mounier 
a  été  réimprimée  plusieurs  fois, 
savoir  :  deuxième  édition,  sous 
ce  titre  :  Lettre  sur  la  mort  de 
Napoléon  ;  troisième  édition ,  cor- 
rigée et  augmentée.  Paris,  1821  ; 
sixième  édition  ,  augmentée  d'un 
Avis  du  budget  du  baron  Mounier 
sous  l'empire,  et  d'un  extrait  du 


BUL 

Morning-Cfironide ,  du  ai  juil- 
let 1821,  in -8",  Irois  quarts  de 
feuille.  Le  gi;néral  Berton  adonné 
des  articles  à  la  Minerve  française, 
aux  Annales  des  faits  et  sciences 
militaires,  publiées  chez  M.  Panc- 
koucke  en  1819,  et  à  l'ouvrage 
intitulé  :  V ictoires  et  conquêtes  des 
Français,  depuis  1789,  publié  par 
le  même  libraire.  Son  nom  se 
trouve  cilé  plusieurs  fois  dans  ce 
dernier  ouvrage. 

BICQUELLEY,  général ,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XVIII. 

BL.\NC  HETON,  médecin,  vo^. 
le  Supplément  du  tome  V. 

BOIVIN  (  Anne-Victoire  Cil- 
lais, veuve  de  Louis),  voy.  le 
Supplément  du  tome  XV. 

BO.MBELLES  (marquis  de), 
voy.  le  Supplément  du  tome  VI. 

BRICHETEAU,  médecin,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XVL 

BLLLIAllD  (  N.  )  ,  botaniste 
distingué.  On  a  de  lui  les  ouvra- 
ges suivans  :  1*  Introduction  à  la 
Flore  des  environs  de  Paris,  i  fasc. 
in-4°,  Paris,  177G;  i'  Flora  par i- 
siensisj  5  vol.  in-S",  Paris,  1776- 
1780.  Les  planches  de  cet  ouvrage 
sont  fort  bien  exécutées.  Elles 
sont  fréquemment  citées  pnr  les 
botanistes.  S"  Herbier  de  la  Fran- 
ce,  Goo  in-fol. ,  1780  et  sequent. 
Ce  magnifique  ouvrage  est  le  plus 
beau  titre  (k:  gloire  de  Uulliard. 
11  représenle  dans  d«-s  planches 
pcrfailement  exécutées,  les  plan- 
Icsdc  France  les  plus  intéressantes 
à  Connaître,  soit  à  cause  de  leurs 
U5ages  dans  les  arts,  soit  k  cause 
de  leurs  propriétés  médicales  ou 
vénéneuses.  Au  bas  de  chaque 
planche  est  une  notice  abrégée 
contenant  ce  qu'il  y  a  de  plus  in- 
téressaiil  ù  connaître  sur  chaque 


CAR  549 

végétal.  4*  Plantes  vénéneuses  et" 
suspectes  de  lu  France.  On  a  deux 
éditions  de  cet  ouvrage  où  Bul- 
liard  passe  en  revue  toutes  les 
plantes  de  France  qui  jouissent 
d'une  action  délétère.  Il  indique 
pour  chacune  d'elles  les  moyens 
employés  pour  prévenir  ou  com- 
battre les  accidens  qu'elles  déve- 
loppent. La  première  édition  de 
1784  est  in-fol.  ;  la  seconde  de 
1798  est  in-S",  un  seul  volume. 
5"  Histoire  des  champignons  de  la 
France,  1  vol.  in-fol.  Paris,  1798. 
fiulliard  est  le  premior  botaniste 
français  qui  ait  cherché  i\  jeter 
quelque  jour  sur  cette  partie  de  la 
botaniq;ie  Ses  planches  sont  ci- 
tées comme  les  meilleures  en  ce  , 
genre.  G°  Dictionnaire  élémentaire 
de  botanique ,  i  vol.  in-fol.,  Pa- 
ris, 1783.  Cet  ouvrage  a  eu  trois 
éditions.  La  dernière  (i  vol.  in -8', 
Paris,  1799) ,  a  été  donnée  par  le 
professeur  Richard,  qui  en  a  fait 
un  ouvrage  entièrement  neuf. 

CARDENEAU,  maréchal-de- 
camp,  voy.  le  Supp.  du  tome  IX. 

CARION-NISAS,  ex-tribun, 
voy.  le  Supplément  du  tome  Y. 

CARON  (  AvGLSTiN- Joseph  ) , 
lieutenant-colonel,  était  fort  jeune 
encore  lorsqu'en  178911  entra  au 
service  en  qualité  de  simple  sol- 
dat. De  l'infanterie  où  il  servit 
jusqu'en  1791,  il  passa  dans  le  4* 
régiment  de  dragons,  et  fit  toutes 
les  campagnes  de  la  révolution 
jusqu'en  18 14,  époque  du  rétablis- 
sement du  gouvernement  royal. 
Sa  bonne  conduite  ,  sa  bravoure  , 
les  talens  qu'il  développa  lui  va- 
lurent successiveuienl  tt)iis  ses 
grades  jusqu'i'icelui  de  liiMilenant- 
colonel  et  la  croix  de  la  légion- 
d'honneur.   L'époque  la  plus  re- 


55o 


CAR 


marqiiable  de  sa  vie  militaire  e.«l 
«n  1814.  Le  'i.i\  février  de  cotte 
année,  étant  alors  major  du  17* 
régiment,  il  fut  chargé  de  suivre 
un  corps  ennemi  en  retraite ,  et 
le  poursuivit  de  Troyes  à  Bar-sur- 
Ornain,  à  la  tête  de  272  hommes. 
Un  régiment  de  dragons  autri- 
chiens et  un  corps  d'infanterie, 
placés  en  embuscade  dans  le  vil- 
lage de  Saint-Phaar,  l'attendaient 
dans  ce  village  et  firent  feu  sur 
lui  lorsqu'il  s'en  approcha.  Caron 
feint  alors  un  mouvement  de  re- 
traite, attire  ainsi  lacavalerie  dans 
une  position  favorable,  et  faisant 
brusquement  volte-face,  la  char- 
ge vigoureusement  et  lui  enlève 
plus  de  200  chevaux.  Retournant 
aussitôt  sur  l'infanterie,  il  force 
2,000  hommes  à  mettre  bas  les 
armes.  C'est  à  celte  occasion  qu'il 
fut  nommé  lieutenant- colonel. 
Perdu  de  vue  jusqu'en  1820,  il  fut 
impliqué  dans  la  conspiration  de 
celle  année,  jugée,  en  1821,  par  la 
chauîbre  des  pairs,  comme  coupa- 
ble de  proposition  de  complot  non 
agréée.  Défendu  par  M*  Barthe, 
avocat,  il  fut  acquitté.  Il  se  retira 
à  Colmar  (Haut-Rhin),  où  il  a- 
vait  son  domicile  habituel  depuis 
son  licenciement.  Le  2juilleti822, 
on  répand  le  bruit  ù  Colmar  qu'u- 
ne insurrection  vient  d'éclater 
parmi  les  chasseurs  de  l'Allier,  en 
garnison  dans  cette  ville,  et  l'on 
ajoute  qu'un  escadron  est  parti  se-- 
crètement  avec  armes  et  bagages. 
Le  lendemain  5,  vers  midi,  on 
vit  revenir  cet  escadron  ramenant 
prisonniers, liés  et  garrottés  sur  un 
char-à-banc,  le  lieiitenant-c»lonel 
Caron  et  son  écuyer  Roger.  Ils 
furent  déposés  dans  les  prisons  de 
la  ville.  Les  détails  de  cette  affaire 


CAR 

no  peu  vent  être  puisés  que  d.ins  les 
pièces  du  procès, et  nousallons  rap- 
porter ce  qu'il  y  a  de  plus  remar- 
quable, d'après  l'auteur  de  V An- 
nuaire nécrologique,  qui  a  extrait 
littéralement  ce  qui  suit  des  dé- 
clarations des  principaux  agens  à 
leurs  supérieurs,  entre  autres  le 
maréchal-des-logis-chef  Thiers,  et 
le  sergent  Magnien.  «  Il  (Gérard  , 
maréchaldes-logis  du  6'  régiment 
des  chasseurs  à  cheval)  s'appro- 
cha du  sergent  (Maguien,  sergent 
du4<>''de  ligne)  et  de  moi ,  et  nous 
dit  :  Mes  amis,  il  s'agit  d'une 
conspiration;  votre  bonheur  est 
assuré,  le  grade  d'ofïicier  v-jus 
est  assuré  et  la  croix.  Une  pareille 
ouverture  ayant  jeté  un  grand 
trouble  dans  nos  individus,  je  priai 
Gérard  de  vouloir  bien  s'expli- 
quer plus  clairement Gérard 

nous  embrassa  tous  deux  ,  et  nous 
dit  :  Mes  amis,  vos  colonels  é- 
taient  à  Brissac  :  je  les  ai  vus  et 
leur  ai  parlé  ;  ils  ni'otit  chargé  de 
venir  vous  voir  pour  vous  inviter 
à  feindre  d'entrer  dans  cette  cons- 
piration ,  pour  en  suivre  le  fd  et 
nous  mettre  à  même  d'en  connaî- 
tre les  moteurs,  pour,  dans  un 
temps  opportun,  les  faire  arrêter. 
Je  suis  ici,  à  HorboMrg,  avec  le 
colonel  Caron  ,  qui  m'attend  pour 
dîner,  et  lequel  est  à  la  tête  de  la- 
dite conspiration.  Vous  pouvez 
compter  que  l'argent  ne  manque- 
ra point;  et  si  nous  n'obtenons 
point  les  récompenses  promises 
par  ces  scélérats  ,  nous  aurons  au 
moins  fait  notre  devoir,  en  dé- 
jouant leurs  infâmes  projets — 
Ayant  entendu  cette  harangue 
faite  par  Gérard,  je  lui  touchai 
cordialement  la  main,  en  lui  de- 
mandant  pardon    d'avoir   pu   I» 


CAR 

soupçonner  un  instant;  mai*  que 
néanmoins  je  le  prévenais  que  je 
ne  demandais  pas  mieux  qire  de 
«econder  ses  intentions,  si  elles 
tout  pures ,  mais  qu'il  me  permet- 
trait de  douter  encore  jusqu'à 
l'instant  ou  je  pourrais  parler  à 

mon  colonel Au  moment  de 

mes  premières  ouvertures,  je  m'a- 
perçus que  M.  le  colonel  était  ins- 
truit de  la  démarche  de  Gérard  , 
ce  (|ui  dissipa  tous  mes  doutas.  Je 
reçus  du  colonel  les  instructions 
nécessaires  pour  me  conduire  dans 
cette  aflaiie,  et  l'ordre  de  rendre 
compte  tous  les  jours  de  mes  dé- 
marches et  de  ce  que  je  pourrais 
apprendre.  (Extrait  d'une  lettre  si- 
gnée TA/«r5,  du  26  juin  1822.  Pro- 
cès de  Coron,  jayg.   10 — 19) \ai 

porte  de  la  prison  n"  i,  qui  vient 
d'être  murée  ,  lui  a  donné  (  à  Ca- 
ron)de  forts  soupçons  contre  moi; 
il  n'en  fut  dépvrsuadé  (jue  par  les 
sermcns  qui  nous  liaient  et  que 
nous  jurfnnes  de  nouveau  de  con- 
server. (  Extrait  d'une  lettre  si- 
gnée Magnien ,  du  28  juin.  Procès 
de  Car  on,  p.ig.  aS)....  Il  fut  con- 
venu, comme  dan«  mon  dernier 
rapport,  que  Gérard  sortirait  de 
I.  Brissac,  avec  un  escadron,  à  cinq 
heures  et  demie  du  soir  ;  que  moi 
je  partirais  de  Colmarà  cinq  heu- 
res, et  me  dirigerais  sur  la  route 
de  Kounac  jusqu'à  la  montée,  où 
je  trouverais  le  colonel  Caron  qui 
m'y  attendrait.  Il  fut  convenu  en 
outre,  que  le  sergent  Magriien  se- 
rait chargé  de  prendre  l'habit  du 
colonel  et  de  le  porter  jusqu'à  cette 
montagne  pour  le  lui  donner,  afin 
de  s'en  revêtir  et  paraître  devant 
la  troupe  en  uniforme.  Comme 
je  citcrchais  à  le  tranquilliser  du 
côté  de  l'argent,  je  lui  annoopai» 


CAR 


5St 


de  ne  point  arrêter  notre  projet 
pour  si  peu  de  chose  ,  que  Gérard 
et  moi  nous  avions  quelques  pe- 
tits fonds  vers  nous,  et  qui,  joint» 
à  ce  qu'il  pourrait  se  procurer, 
nous  sufTiraient  pour  attendre.  Or, 
d'après  ce  qu'il  nous  jura  de  nou- 
veau,  un  millier  de  louis  devaient 
être  mis  à  sa  disposition.  iVou.«/?flr- 
vinmesàle  convaincre  ;  et  il  fut  déci- 
dé que  le  soir  du  même  jour  il  ver- 
rait Gérard  à  six  heures  du  soir, 
etc....  Toutes  les  instructions  don- 
nées, il  (Caron)  mena  le  sergent 
Wagnien  chez  lui,  auquel  il  remit 
son  sabre,  son  habit,  son  casque, 
qui  fut  porté  dans  ma  chambre, 
à  la  caserne,  jusqu'au  lendemain 
matin  ,  où  le  sergent  Magnicn  doit 
venir  les  chercher  pour  les  porter 
au  lieu  indiqué;  excepté  le  sabre, 
qu'il  est  convenu  que  je  porterai. 
Ce  dernier  article  exécuté  ,  je  me 
rendis  chez  le  général  pour  lui 
rendre  compte  de  mon  entrevue. 
(  Ex  trait  d'une  lettre  signée  T/jt>r.î, 
du  1"  juillet  1822.  Procès  de  Ca- 

ron ,  pag.  .5i-35) La  réponse 

déterminative  que  firent  les  sieurs 
Thiers  et  Gérard  de  la  nécessité 
de  leur  projet,  engagea  le  sieur 
Caron  à  ne  rien  reculer.  Il  est 
donc  et  fut  décidé  que  demain,  a 
courant,  à  cinq  heures  et  demie 
du  soir,  l'escadron  du  G*  prendra 
sa  marche  par  les  vilhgesde  Wals- 
heim  et  de  Mayenhciu)  (que  j'ins- 
crivis sur  mon  schakos),  pour  de 
là  se  rendre  à  Absheini  ,  lieu  du 
rendez-vous.  C'est  à  six  heures 
que  doit  se  faire  la  sortie  du  i" 
chas'setirs,  que  je  devancerai  pour 
remettre  au  lieutenant-colonel  Ca- 
ron son  uniforme  et  sou  sabre, 
dont  je  suis  porteur  depuis  hier  au 
soir.  Arrivé  au  lieu  d«  son  traves- 


."53  CAR 

tissement ,  il  doit  me  remeUrc  son 
habit  bourgeois,  et  moi  le  jetor, 
si  je  le  juge  à  propos,  dans  les  vi-^ 
gnes.  J'indiquerai  à  ma  séparation 
d'avec  le  sieur  Caron  ,  la  roule 
qu'il  aura  prise,  afin  d'en  préve- 
4iir  le  sieur  Thiers,  qui  le  suivra 
de  près.  Je  serai  porteur  de  ses 
habits  bourgeois  et  vous  les  re- 
mettrai, pour  en  disposer  selon 
qu'il  vous  conviendra.  Ne  pou- 
vant le  suivre  dans  celte  occasion, 
je  resterai  à  Colmar,  hors  h  porte 
de  RoufFac,  derrière  l'auberge  à 
droite,  de  huit  à  dix  heures  et  de 
midi  à  quatre,  afin  d'instruire  les 
affidés  de  Caron  ,  qui  ne  se  pré- 
senteront à  moi  qu'au  mol  et  si- 
gnede  ralliement  qu'ils  me  feront, 
des  démarches  qu'il  aura  à  tenir 
pour  sa  réussite.  Il  me  parla  d'un 
avocat  arrivé  depuis  peu  de  jours 
à  Paris,  qui  doit  être  possesseur 
de  fonds  à  délivrer,  etc.  (  Extrait 
dune  lettre  signée  Magnien,  ser- 
gent,  adressée  à  son  capitaine, 
du  )"  juillet.  Procès  de  Caron , 
p.  31  )...  Dans  le  dernier  rapport 
que  je  vous  adressai,  il  était  con- 
venu que  l'afTaire  aurait  lieu  le 
mardi  2  juillet;  en  conséquence, 
le  lundi  1",  à  dix  heures  et  de- 
mie du  soir,  à  la  suite  d'un  ren- 
dez-vous avec  le  sieur  Caron,  je 
le  suivis,  me  laissant  précéder  de 
quelque  pas,  jusque  chez  lui,  où 
sa  femme  me  remit  le  paquetcon- 
tonant  son  uniforme  et  son  cas- 
que. Ce  fut  M.  Caron  qui  descen- 
dit le  gabre  et  le  porta  jusqu'au 
détour  de  la  rue,  où  il  me  le  re- 
mit :  depuis  ce  moment,  je  n'eus 
pas  d'aulr-e  rendez-vous  avec  lui. 
Le  mardi  2  ,  à  trois  heures  et  de- 
mie, j'allai  chercher  chez  le  sieur 
Thiers  l'uniforme  que  je  lui  avais 


CAR 

déposé,  lui-même  se  chargeant 
de  lui  retnetlre  son  sabre...  L'es- 
cadrdn  du  1"  chasseurs  arriva, 
précédé  (In  fourrier  C  .rré.  M.  Ca- 
ron in  envoya  voir  qui  c'était.... 
A  l'arrivée  de  l'escadron,  il  pa- 
rut; le  sieur  Thiers  lui  remit  son 
sahre.  Il  harangua  alors  les  chas- 
seurs, et  termina  au  cri  de  vive 
Vemptvvwv, 1rs  fit  Jurer  par  ce  rnêm» 
cri ,  et  les  mil  en-;iiile  en  marche. 
Je  rentrai  de  suite  en  ville,  où  je 
trouvai  M.  le  préfet  (i\l.  de  Pny- 
maigre),  qui  fil  déposer  les  effets 
dont  j'étais  ptirteur  dans  le  corps- 
de-garde  de  l'odicier.  J'allai,  le 
mercredi  5  ,  à  sept  heures  du  ma- 
tin, chez  M""*  Caron  ,  etc.  (Extrait 
d'une  lettre  signée  Magnien ,  ù 
son  capitaine,  datée  du  5  juillet. 
Procès  de  Caron,  pag.  35-5^) — 
Mon  colonel,  j'ai  l'honneur  de 
vous  rendre  compte  qu'en  exécu- 
tion de  vos  ordres,  m'étant  tra- 
vesti hier  et  mis  dans  les  rang  en 
simple  chasseur,  avec  M.H.  les 
oflTiciers  de  l'escadron  qui  devait 
se  joindre  en  ap'parence  à  l'iu- 
surgé  Caron,  nous  partîmes  de 
Neuf-Bri.-acàcinqheures  un  quart 
du  soir,  SOU;  le  commandement 
des  sous-olTu  iers,  commandés  à 
cet  effet.  Après  une  demi-heure 
de  marche,  nous  trouvâmes,  près 
de  Weckel.sheim ,  le  domestique 
du  nommé  Roger,  écuyer  de  Col- 
mar, lequel  ne  parut  pas  encore: 
ce  domestique  nous  conduisit  à 
un  quart  de  lieue;  il  nous  quitta 
avec  le  maréchal-des-logis  Gé- 
rard, pour  aller  retrouver  son 
maîlre  qui  était  dans  la  forêt  : 
nous  profililmes  de  cet  instant 
pour  instruire  les  hommes  du  mo- 
tif de  notre  départ  deNeuf-Brisac. 
Nous  les  trouvâmes  pleins  de  zèle 


CAR 

et  anim»'?s  du  nirilleiir  esprit.  L«; 
iiiarticli.'il-(]»;s-Jogis  Gérard  élaiit 
i\o  retour,  nous  cniitînnâmes  no- 
tre, marche   sur  Dessenlieiin,   le 
dotnesti(|iie  ;\  la  tête  de  la  colon- 
ne, et  Roger  à  la  qiiene.  Roger, 
])arfaitement  rassuré  par  notre  at- 
titude, nous  conduisit  par  Rus- 
tenhard  à  Mayeulieim,  où  nousat- 
tendîines  environ  vingt  minutes, 
l'escadron  de  l'Allier,  à  la   tête 
duquel  se  trouvait  le  sieur  Caron. 
Il  déboucha  bientôt  de  ce  village 
en  tenue  de  lieutenant-colonel  de 
dragons.  Après  avoir  fait  Ibrmer 
son  escadron,  il  s'avança  vers  nous 
et  nous  harangua  en  ces  termes  : 
«  Braves  soldats  du  sixième  régi- 
»meut,   vous  avez  juré  d'obéir  à 
«vos  sous-ofliciers  :  les  militaires 
«français  n'ont  jamais  manqué  à 
»  leur  sermcînt.  Je  suis  envoyé  par 
«l'Empereur  pour  vous  coniman- 
»der  :  j'espère  que  nous  le  servi- 
»rons  avec  zèle.     Vive  l'Empe- 
»  rtMir  !  »    Ce  cri  fut   répéta  ainsi 
qu'il  en  était  contenu  :  on  fit  met- 
tre pied  à  terre.  Le  maréchal-des- 
logis'^)arantière  adressa  aux  chas- 
seurs du  régiment  les  paroles  sui- 
vantes :   «  Le  colonel  Caron   ne 
«veut  pas  que  les  chasseurs  tra- 
»  vaillent  sans  avoir  dn  profit;  il 
«promet  à  chaque  homme  5  fr. 
«  par  jour,  à  dater  de  ce  moment  ; 
Dînais  il  ordonne  que  tout  ce  qui 
»  sera  pris  chez  l'habitant  soit  exac- 
ntcmentpayé.  »   Les  cris  de  vive 
r Empereur  recommencèrent,  et  on 
y  ajouta  ceux  de  vive  le  colonel 
(laron...  On  se  remit  en  roule,  se 
dirigeant  sur  Ensisheim.  D'après 
les  ordres  repus ,  nous  refusHmes 
d'y  entrer.  A  l'entrée  de  la  ville, 
('aron  voyant  qu'on  s'obstinait  à 
ne  pas  vouloir  y  entrer,  fit  p.eri- 


CAR  5jj 

dre    à    travers   les  champs  pour 
tourner  la  ville  à  gauche.  Pendant 
ce  temps,  le  maréchal-des-logis 
Géi-trd  avec  son  ordonnance  (  lé 
capitaine  de    Nicol  )    entra   darij. 
cette  ville.  L'infanterie  y  était  sous 
les  armes  :  ce  capitaine  se  fit  re- 
connaître par  le  capitaine  Lafonl, 
sans  que  la  vigilance  de  celui-ci 
en  diminuât.  De  retour,  le  maré- 
chal-des-Jogis  Gérard  vint  dire  au 
colonel  Caron  que  l'infanterie  é- 
tait  pour  nous,  et  que  nous  au- 
rions les  prisonniers  quand  nous 
voudrions.    Néanmoins  nous    ne 
voulûmes  pas  y  entrer,  nous  dé- 
fiant en  apparence  des  bonnes  in< 
tentions  de  cette  infanterie.  Caron, 
qui  jusqu'ici  avait  été  dans  une 
sécurité  parfaite  ,  conçut  de  vives 
inquiétudes.    Il  se  plaignit  d'être 
un  peu  serré  par  les  sojjs-ofîiciers, 
qui  avaient  reçu  nos  ordres  pour 
ne  pas  perdre  de  vue  un  seul  ins- 
tant ni  Claron,  ni  Roger,  afin  d'ob- 
server toutes  leurs  démarches.  Ces 
sous-officiers  s'éloignèrent  un  peu; 
Caron  profita  de  cet  instant  pour 
aller  parler  bas  à  Roger.  On  n'en- 
tendit pas  ce  qu'il  lui  dit  ;  mais  un 
instant  après,  il  se  plaignit  de  ce 
que  l'argent  n'arrivait  pas.   Il  dit 
qu'arrivé  au  premier  village  (  Bat- 
tenheim)  il  se  mettrait  en  bour- 
geois, et  qti'accompài!>né  de  Ro- 
ger, il  irait  chercher  des  fonds. 
IJn  peloton  lui  fut  proposé  :  il  !« 
refusa  ;  après  des  instances  réité- 
rées, il  consentit  à  se    faire  ac- 
compagner par  deux  sous -offi- 
ciers. Nous  jugefimes  cette  escorte 
trop  faible;    nous   résolûmes  de 
l'arrêter,  convaincus  que  nous  ne 
trouverions  aucun  de   ses  com- 
plices A  Bail»nh»im.  Arrivés  j\  c<s 
village  dis  deux  lîcnrcs  du  malin, 


35  i  CAR 

nous  le  l.iijiàine»  entrer  chez  le 
maire.  Au  moment  oi>  il  s'occu- 
pait de  faire  [)ré[iar<;r  des  logc- 
mens  qu'il  comptait  dissûmiaer , 
on  le  saisit,  en  lui  déclarant  qu'il 
était  prisonnier.  Après  une  légère 
résistance,  il  fut  garrotté  ainsi  que 
ses  deux  complices.  Nous  le  fouii- 
lâines,  nous  lui  enlevâmes  ses  pa- 
piers, qui  ne  renfermaient  rien 
d'important  à  notre  connaissance. 

Il  en  fut  de  même  de  Roger 

J'expédiai  sur  Habsbeim  les  ma- 
réchaux-des-logis-chefs  Thiers  et 
Darantière,   et  le   maréchal-des- 
logis  Gérard  ,  avec  onlre  de  dire 
au  nom  de  Garon,  qu'il  attendait 
son  monde  à  Battenheim  ,  la  fati- 
gue des  chevaux  l'ayant  obligé  de 
s'arrêter...  Le  maréchal-des-logis 
Gérard   nous  joignit  à   Colmar. 
Toutes  les  recherches  furent  inu- 
tiles, sinon  à  prouver  les  bonnes 
ititentions  de  M.  le  maire  du  lieu 
et   les  bonnes  dispositions  qu'il 
allait   prendre  pour  faire  arrêter 
quiconque  ferait  mine  de  vouloir 
se  joindre  à  Caron.  Ces  disposi- 
tions, au  reste,  sont  aussi  inutiles 
là  qu'ailleurs,  où  tout  le  monde 
est  resté  parfaitement  tranquille, 
paraissant  beaucoup  plus  surpris 
qu'enchanté  de  cette  révolte  ap- 
parente. A  iVlayenheina  seulement 
le  particulier  qui  a  livré  le  four- 
rage et  le  vin  est  entré  très-chau- 
dement dans  les  projets  de  Ca- 
ron. iSouslui  avons  entendu  tenir 
des  propos  que  nous  avons  cru  de- 
voir rapporter  à  M.  le  procureur- 
jçénéral ,  qui  a  de  suite  lancé  un 
mandat  d'arrêt,  qui  doit  être  mis 
en   exécution  dans   ce   moment. 
(  Extrait  d'un  rapport  à  M.  Jolly, 
lieutenant-colonel ,  commandant 
le  régiment  des  chasseurs  à  che- 


CAR 

rai  de  la  Cliarente ,  «igné  H.  de 
Nicol,  daté  de  Neuf-Brif>ac,  5  juil- 
let I  Saa.  Procès  de  Caron  ,  p.  7)8- 

4'»-) Ce    lieutenant  -  colonel, 

(Caron  )  a  reçu  nos  chasseurs  aux 
cris  de  vive  ,  etc.  L'escadron  s'est 
formé  à  gauche  en  bataille.  Im- 
rnédiatenient  après,  le  sieur  Ca- 
ron en'a  pris  le  commandement, 
et  a  harangué  la  troupe,  à  peu 
près  en  ces  termes  :  «  Chasseurs  , 
«je  suis  envoyé  pour  vous  eom- 
>)  mander    par    ordre   de  Tempe - 

«reiir Je  vous  jure  de  vous 

•  suivre  jusqu'à  la  mort,  et  de  pé- 
»rir  à  votre  tête  :  jurez  aussi  de 
»me  suivre  partout  où  je  vous 
«conduirai  pour  le  bien  du  ser- 
«vice  de  S.  M.  l'empereur.  Vive 
»  l'empereur!  »  Ce  cri  a  été  répé- 
té dans  l'escadron  par  tous  ceux 
qui  avaient  bien  saisi  les  instruc- 
tions que  vous  leur  aviez  données 
à  leur  «lépart  de  Colmar,  et  par 
tous  les  autres,  au  signalque  nous 
leur  en  avons  fait.  Ensuite  il  a 
commandé  par  deux  au  trot,  et 
nous  a  conduils  jusqu'à  Rouffac, 
que  nous  avons  traversé  aif  pas, 
dans  le  plus  grand  silence,  sans 
queles  habitansaient  fait  le  moin- 
dre signe  d'approbation  ni  d'im- 

probalion Après  l'arrestation 

du  sieur  Caron,  le  maréchal-des- 
logis-chef Thiers  se  porta  avec 
d'autres  sous-otTiciers  vers  FLabs- 
heim,  qui  avait  été  indiqué  com- 
me le  rendez-vous  des  partisans 
de  Caron;  mais  ils  n'y  trouvèrent 
personne,  ce  qui  prouvait  qu'ils 
avaient  eu  l'éveil,  ou  qu'ils  avaient 
jugé  l'entreprise  trop  dangereuse. 
C'était  à  Habsheim  que  le  sieur 
Caron  disait  devoir  trouver  les 
fonds  nécessaires  pour  son  expé- 
dition. Le  maréchal-des-io"ris-chef 


CAR 

T/iiers  avait  pour  instruction  ,  en 
se  rendant  à  Habslieim ,  de  persua- 
der aux  personnes  qu'il  y  attrait 
trouvées  de  se  rendre  àBallenlieini , 
où  Car  on  les  attendait,  sa  troiipo 
étant  trop  fatiguée  pour  aller  plus 
loin  (  Extrait  d'un  rapport  à  Jl. 
Jolly,  lieuteunnt-colouel  des  chas- 
seurs à  cheval  de  la  Ghai'ente  ,  si- 
gné Borel  de  ta  Rivière,   lieute- 
nant; Aapêde,  sous-!ieutenant  ; 
daté  de  Colinar,  le  5  juillet.  Pro- 
cès de  Caron,  p.  43-46  ).    Telles 
sont ,  d'après  les  récits  de  ceux- 
là  même  qui  l'ont  conçu  et  eiïcc- 
lué,  les  circonstances  d'tni  évé- 
nement qui  occasiona  en  Europe 
une  étrange  surprise,  et  que  les 
rumeurs  publiques  ont  peint  sous 
des  couleurs  encore  plus  l'âclieu- 
scs.   J.e    i8   septembre   1822,   le 
lieutenant-colonel  Caron  et   son 
co-accu^é  Roger  comparurent  de- 
vant le  premier  conseil  de  guerre 
de  la  5*  division  militaire,  séant 
à  Strasbourg,  présidé  par  M.  d'Es- 
cordal,  colonel  du  25"  régiment 
de  ligne.    Une  décision  ministé- 
rielle, soutenue  par  un  arrêt  do 
la  cour  de  cassation  ,  avait  enlevé 
les  accusés  à  la  juridiction  ordi- 
naire ,  qui  persistait  à  les  retenir. 
On  s'appuyait,  pour  cet  effet,  sur 
les  lois  des  4  nivôse  an  4  «t  i.l 
brumaire  an  5,  dont  l'effet  devait 
cesser  avec    la   guerre,    et  qui, 
constituant  d'ailleurs  une  justice 
exceptionnelle,  semblaient  de  voir 
être  réputées  abolies  par  la  charte 
conslilulionnelle.    Cette   o))inion 
n'avait  pas  été  contredite  depuis 
la  restauration,   et  M.  Pasquier, 
ancien  garde-des-sceaux,  l'a  dé- 
claré expressément  à  la  chambre 
des  pairs ,  lorsqu'il  proposa  à  cette 
chambre  (mars  i8a3)  de  rendre 


CAR 


555 


aux  Iribunausortlinaires,  en  temps 
de  paix,  la  connaissance  du  délit 
d'embauchage,    imputé   aux   ci- 
toyeus  non  militaires.  Le  système 
de  défense  du  colonel  Caron  l'ut, 
comme  nous  l'avons  dit,  de  sou- 
tenir que  son  unique  but  avait  été 
de  procurer  l'évasion  des  prison- 
niers alors  traduits  devant  la  cour 
d'assises  de  Colmar.   Les  militai- 
res, principaux  témoins  à  charge 
dans   cette  affaire,  et  à  qui  leur 
conduite   avait  valu    dès- lors   le 
grade  d'officier,  ne  firent  pas  dif- 
ficulté de  convenir  aux  débats  des 
promesses    séduisantes   qu'ils   a- 
vaient  faites  à  Caron,  par  ordre 
de  leurs  chefs ,  et  des  instructions 
qu'ils  avaient  transmises  à  leurs 
soldats  de  pousser  des  cris  sédi- 
tieux   (  pag.   74,    81,   8(3,   8ç)  et 
passini).  Le  journal  duHaut-lÙiin, 
du  23  juillet,  rédigé  à  la  préfec- 
ture,  comme  l'atteste  M.  Sido  » 
conseiller  de  préfecture,  dans  une 
lettre  lue  à  l'audience  (  Procès  de 
Caron,  p.  108),  s'est  exprimé  en 
ces  termes,  au  sujet  de  l'affaire 
de  Caron  :  «  Ici ,  c'est  un  lieute- 
nant-colonel  assez  naïf  ipour  SK 
laisser  séduire  par  des  sous-olli- 
ciers.  »  La  déposition  de  M.   Rei- 
thinger,    maire    de    Battenhciin, 
renferme  quelques  détails  qui  mé- 
ritent d'être  rapportés,   t  Le  té- 
moin dépose,  que  le  2  juillet,  à 
une   heure  du  matin,  six  chas- 
seurs arrivèrent  devant  sa  maison, 
frappant  à  la  porte  pour  le  réveil- 
ler. Il  leur  ouvrit ,  après  avoir  fait 
de  la  lumière.  Ils  lui   annoncè- 
rent qu'ils  venaient  faire  des  lo- 
gemens  pour  deux    cents   chas- 
seurs, vingt  officiers  et  un  colo-i 
nel....  Sur  la  réponse  que  fit  l'un 
des  six  chuâseucs ,  qu'ils  n'avaient 


35G 


CAR 


pus  <le  feuille  de  roule,  le  témoin 
leur  déclara  que  t^aus   feuille  de 
roule  il  ne  donnerait  pa^  de  billets 
de   logeuîenl;  et  alors  ce  chas- 
seur répliqua  :  —  Nous  ne  som- 
mes plus  les  soldats  du  roi  ,  nous 
sommes  les  soldais  de  Napoléon, 
du  roi  de  Rome.   Que  dûcs-vous 
décela,  M.  le  maire...?  Si  vous 
ne  faites  pas  de  billets  ,  nous  nous 
logerons  mililairement.  »    Le  té- 
moin fit  chercher  alors  le  greffîer 
de  la  mairie,  pour  faire  des  billets. 
Arrivèrent    en   même  temps  les 
deux  cents  chasseurs  avec  unco- 
lonel  de  dragons,  qui  entra  dans  la 
chambre  ainsi  que  plusieurs  sous- 
ofluiers  et  chass^eurs.    On  se  met 
on  devoir  de  faire  les  billets  de  lo- 
gement... Mais  pendant  que  le  co- 
lonel est  debout,  devant  la  table 
où  le  greffier  écrivait  les  billets, 
un  chasseur  le  prend  par  derrière 
et  le  renverse  par  terre;  tous  les 
chasseurs  lui  tombent  dessus,  en 
criant  :  «  Jean  f. ....,nous  avons 
ocru  trouver  de  ton  monde  ici; 
«qu'on  sabre  ce  conspirateur,  ce 
»  scélérat.»  Le  témoin  entendit  en- 
core crier  :  «  Chasseurs ,  à  moi  o , 
ïnais  il  ne  sait  si  c'était  le  colonel 
ou  un  autre  individu  qui  était  ar- 
»  ivé  avec  les  chasseurs  et  qui  se 
iJ'ouvait  aussi  dans  la  chambre; 
et  on  demanda  des  cordes  pour 
les  attacher.  Les  domestiques  que 
le  témoin  avait  envoyés  à  l'écurie 
poui"  chercher  des  cordes,  furent 
ramenés  aussitôt  dans  la  chambre, 
par  des  chasseurs  qui  disaient  : 
«  Voici  des  conspirateurs.  »  On  les 
relâcha  pour  aller  chercher  des 
cordes,   avec  lesquelles  on  gar- 
rotta le  colonel  et  l'autre.  Des  offi- 
ciers déguisés,  on  des  chasseurs, 
demandèrent  ensuite  au  téuioia 


CAR 

unchar-A-bnnc  cl  u!i cheval,  pour 
jillcr  A  llabsheim.  H  leur  constill  i 
de  preudie  leurs  chevaux,  qu'ih 
y  seraient  bien  plus  vi.e;  ce  qu'il» 
(iront.  De  retour  deHabshcim, 
ils  vinrent  raconter  dans  la  cham- 
bre ,  que  s'ils  étaient  partis  un 
quart- d'heure  plus  tôt,  ils  au- 
raient trouvé  à  Haitsheim  dix  A 
douze  conspirateurs,  qui  ont  élé 
avertis  h  temps  pour  prendre  la 
fuite...  »  {Procès,  p.  io4-  )  C.t- 
ron  et  Roger  furent  défendu»  avec 
beaucoup  de  talent  et  de  dévoue- 
ment; le  premier,  par  M*  Liecli- 
tenberger,  avocat;  le  second  par 
M.  Marchand,  étudiant  en  droit. 
Après  une  demi-heure  de  délibé- 
ration, le  conseil  de  guerre,  A 
l'unanimité,  déclara  le  lieulenant- 
colonel  Caron  coupable  d'embau- 
chagf;,  et  le  condamna  à  la  peine 
de  mort.  Roger,  déchargé  de  l'ac- 
cusation d'en^.bauchage,  fut  ren- 
voyé devant  la  justice  civile.  (Dis- 
trait par  arrêt  de  la  cour  de  cassa- 
tion, de  la  juridiction  doses  juges 
naturels ,  pour  cause  de  suspicion 
légitime ,  l'accusé  Roger  a  été  tra- 
duitdepuis  devant  la  cour  d'assises 
de  la  Moselle ,  qui  l'a  déclaré  cou- 
pable de  conspiration  et  a  pronon- 
cé son  arrêt  de  mort.  L'autorité 
royale  a  commué  cette  peine  en 
celle  de  vingt  années  de  travaux 
forcés.  )  Le  conseil  de  révision 
confirma  la  sentence  du  conseil 
de  guerre.  Depuis  ce  moment  jus- 
qu'à celui  de  l'exécution,  il  ne  fut 
plus  permis  à  Garon  de  commu- 
niquer librement  avec  personne  , 
même  avec  son  défenseur.  Deux 
exceptions  furent  accordées  pour 
deux  ecclésiastiques,  dont  la  con- 
damné avait  reçu  les  premières 
visites,  durant  l'intervalle  de  quel- 


CAR 

qiies  jours  qui  sép^u'a  le  premier 
juj^eincnt  du  second.  Déjà  même 
el  durant  ce  court  espace  de  te:nps, 
<^aron  n'avait  vu  que  son  défen- 
f-vuv  eu  présence  du  concierge  et 
de  l'oincieL'  de  posie,  et  pendant 
une  heure  chaque  jour.  Deux  au- 
tres permissions  furent  encore  ac- 
C(u(Iéfts  pour  un  moment,  l'une  à 
un  ami  dr;  Garon  qui  venait  l'en- 
tretenir de  son  fils,  l'autre  au  dé- 
fenseur de  Roger.  Caron  reçut 
avec  calme  et  fermeté  la  nouvelle 
de  sa  condamnation.  Lorsque  le 
capitaine  rapporteur  vint  lui  en 
faire  leclure,  il  était  à  table  :  après 
l'avoir  entendue,  il  acheva  son  re- 
pa.-*.  Dans  la  matinée  du  i"  octo- 
bre (  jour  fixé  pour  l'exécution  ), 
le  défenseur  de  Caron  fit  faire 
traiij  tentatives  successives,  elpar 
diitérentes  personnes,  auprès  de 
l'aulorilé  supérieure  du  déparle- 
ini;nt.  Il  demandait  à  entretenir 
Son  client  au  nom  de  sa  femme 
et  de  son  enfant.  L'autorité  per- 
^i»ta  dans  ses  refus.  Dès  le  a4  sep- 
tembre, M""  Caron  ,  alors  déle- 
tuie  dans  la  prison  de  Colmar, 
comme  complice  de  8(m  mari  (  la 
chambre  d'accusation  de  la  cour 
royale  a  déclaré  depuis  n'y  avoir 
lieu  à  mettre  en  accusaliou  M"' 
Caron  ),  avait  éprouvé  le  même 
refus  de  M.  le  procureur  du  roi. 
Vdiei  la  loUre  qu'elle  adressa  à  ce 
magistrat, -pour  lui  demander  la 
grâce  de  venir  à  Strasbourg  rece- 
voir les  derniers  adicuxde  son  ma- 
ri.—  Des  prisons  de  Colmar,  le  a4 
si'pleriihrc  iSau.  «A  M. le  procareur 
du  roi  près  le  tribunal  de  premiè- 
re instaure  de  l'arroncjissement  de 
Colmar. — .Monsieur  le  procureur 
du  roi,  nvanl-hier,  mon  mnlheu- 
reux    ép(  u.v    a  été  condamné    \ 


CAR  557 

mort  par  un  conseil  de  guerre  ; 
il  ne  m'appartient  pas  de  qualifier 
celte  condanmation.  Depuis  trois 
moiî,  je  suis  moi-même  sous  les 
verroux,  el  j'ai  été  violemmci.t 
privée  de  la  triste  consolation  de 
rendre  plus  supportable  sa  capti- 
vité ii  Strasbourg,  et  d'être  pré- 
sente à  son  jugement.  Que  lu  n)a- 
lédiclion  divine  s'appesantisse  sur 
la  tête  de  celui  qui  en  est  la  cau- 
se !  Demain,  M.  le  procureur  du 
roi,  demain  peut-être....  Je  n'ose 
achever!  S'il  existe  encore  parmi 
les  hommes  quelque  senliment 
d'humanité  ou  de  piété,  on  ne 
peut  me  refuser  d'aller  recevoir 
les  derniers  embrasseincns  et  les 
ordres  toujours  sacrés  j)0ur  moi  , 
de  celui  qui  fil  mon  bonheur  pen- 
dant tant  d'années,  et  qui  servit 
sa  pairie  avec  tant  d'honneur  et 
de  courage.  J'ose  vous  supplier, 
M.  le  procureur  du  roi,  de  vou- 
loir bien  perniellre  que  j'aille  au- 
près de  mon  malheureux  époux  ; 
je  vous  en  conjure  à  genoux.  Qu'on 
me  fasse  conduire  à  mes  frais  ,  en 
poste,  par  deux,  par  quatre  gen- 
darfues,  les  fers  aux  pieds,  aux 
mains,  au  cou,  enchaînée  comme 
la  plus  dangereuse  créature,  s'il 
le  faut,  je  supporterai  tout  avec 
calme,  avec  plaisir  même,  si  je 
puis  encore  voir  et  embrasser  la 
maih(;ureuse  viclime  de  la  perfi- 
die la  plus  atroce.  Daignez,  mon- 
sieurle  procureurdu  roi,  m'houo- 
rer  d'une  très-prompte  réponse. 
Voire  respectueuse  et  très-hum- 
ble servante.  Femme  Caron.  »  M. 
le  procureur  du  roi  se  crut  dan» 
la  nécessité  de  faire  à  Rl""Carou 
la  réponse  siiivanle  :  —  Colmar, 
le  •if\scptetuhre  182a.  «Madame  ,  j« 
sens  vivement  tout  ce  qijc  votm 


558 


CAR 


l^orfiion  a  do  déplorable,  et  j'é- 
prouve un  véritable  regret  de  ne 
pouvoir  l'alléger,  en  vous  accor- 
dant la  douloureuse  consolation 
que  vous  réclamez,  par  la  lettre 
que  vous  m'avez  fait  l'honneur  de 
in'écrire,  sous  la  date  de  ce  jour. 
L'objet  de  votre  rlemaude  n'entre 
ni  dans  mes  attributions,  ni  dans 
celles  du  tribunal.  Vous  êtes,  ma- 
dame ,  sous  le  j)oids  d'un  mandai 
de  dépôt,  qui  ne  peut  être  annulé 
qu'en  vertu  d'une  décision  de  la 
chambre  du  conseil  du  tribunal, 
que  l'état  de  la  procédure  à  l'é- 
gard de  quelques-uns  de  vos  co- 
prévenus,  ne  permet  pas  de  faire 
intervenir  encore.  La  nature  de  la 
prévention  qui  pèse  sur  vous, 
madame,  ne  me  permet  pas  non 

f)lus  de  provoquer  votre  mise  en 
iberlé  provisoire,  moyennant  cau- 
tion ,  ni  même  une  simple  trans- 
lation d'une  prison  dans  une  au- 
tre. La  loi  m'en  fait  une  défense 
expresse,  que  je  trouve  surtout 
pénible  aujourd'hui.  Recevez  l'as- 
surance de  mes  regrets  et  de  la 
congidéralion  distinguée  avec  la- 
quelle j'ai  l'honneur  d'être ,  Ma- 
dame, votre  Irès-humble  et  très- 
obéissant  serviteur. — le  procureur 
du  roi;  sig?ié  VovcriET, substitut.  » 
Peu  d'inslans  avant  l'heure  fixée 
pour  son  supplice,  Caron  écrivit 
deux  billets,  l'im  à  son  épouse, 
l'autre  à  son  défenseur  :  Voici  ces 
deux  pièces.  —  Billet  à  madame 
Caron.  «■  C'est  aujourd'hui,  ma 
bien-airaée,  que  ton  ami  te  quitte 
pour  ne  plus  te  revoir  que  dans  l'é- 
lernité.  Oh,  ma  bien-aimée  1  qu-e 
celte  séparation  est  cruelle  pour 
mon  cœur!  aie  bien  soin  de  mon 
pauvre  Alfred,  ménage-toi  pour 
lui,  ne  t'abandonne  pas  au  déses- 


CAK 

poir;  il  a  encore  besoin  de  les  Cen- 
dres soins.  Pour  moi,  ce  soir,  je 
ne  pourrai  plus  lui  être  d'aucune 
utilité  ;  j'emporte  avec  moi  au 
tombeau  tes  deux  derniers  billets  ; 
ils  seront  sur  mon  cœur.  Adieu, 
ma  chère  amie,  je  t'embrasse  de 
toute  mon  âme,  ainsi  que  mon 
trop  malheureux  Alfred.  Cirok.  >» 
Billet  à  M'  Liecktenbcrger,  avocat. 
«Mon  cher  défenseur  et  dernier 
ami,  j'ai  reçu  vos  adieux,  receves 
ici  les  miens  et  mes  derniers  re- 
merciemens  :  consolez-vous,  j« 
sais  mourir.  Si  jamais  vous  voyea 
ma  malheureuse  femme,  dites-lui 
bien  que  son  souvenir  et  celui 
d'Alfred  ne  m'ont  pas  quitté  ur» 
instant.  Je  vous  prie  de  retirer 
mes  effets  et  de  les  faire  parvenir 
à  ma  femme.  Tâchez  aussi  ^|ue 
l'on  me  paie  mon  trimestre;  il 
servira  à  amortir  quelques  dettes 
que  j'ai.  On  vous  défend  de  me 
voir  encore,  mais  on  ne  me  défend 
pas  de  vous  aimer  :  je  vous  em- 
brasse une  dernière  fois.  Cakos.» 
Dans  cette  matinée  du  i"  octo- 
bre, Caron  reçut  une  visite  de  plu- 
seurs  heures,  d'un  prêtre  nommé 
M.  Schiltig;  il  remercia  cet  ecclé- 
siastique des  soins  qu'il  venait  lui 
offrir.  A  deux  heures  après-midi 
on  vint  le  chercher,  à  la  prison  mi- 
litaire où  il  était  gardé,  pour  le 
conduire  sur  le  glacis,  devant  la 
caserne  de  Finckmalt.  Il  monta 
seul  dans  une  voiture  de  place, 
qu'escortaient  des  gendarmes  à 
cheval  et  un  piquet  d'infanterie. 
Sa  mise  était  soignée,  son  main- 
tien ferme  et  assuré.  Arrivé  au 
lieu  de  l'exécution,  Caron  descer»- 
dit  de  voiture  sans  le  secours  de 
personne.  On  lui  offrit  encore  Ins 
soins  de  l'aumônier  :  il  remercia 


CAR 

(le  nouveau.  Carou,  parcourant 
des  ^eiix  le  lerrain  ,  uu-stire  lui- 
même  la  (lislauce  qui  doit  le  sé- 
parer des  ^oK^ats  dont  les  balles 
vont  le  percer.  On  veut  lui  faire 
une  seconde  lecture  de  la  sen- 
tence, il  la  refuse,  en  disant  :  o  Je  la 
connais;  c'est  inutile.  »  Un  officier 
se  présente  pour  lui  bander  les 
yeux  et  \e  faire  melti|p  à  genoux  ; 
il  s'en  défend.  Debout  et  dans  la 
plu»  ferme  attitude,  (^aron  d(mne 
le  signal  du  roulement  ;  il  com- 
mande le  feu  ,  et  le  jugement  du 
conseil  de  guerre  a  reçu  son  exé- 
cution. Cependant  on  se  débattait 
encore  devant  les  tribunaux  pour 
sauver  les  jours  de  Caron,  que 
déjà  il  avait  cessé  de  vivre.  Le  4 
octobre  Al'  I^ambert  se  présenta  à 
l'audience  de  la  cour  de  cassation, 
où  il  parla  en  ces  termes  :  «Nous 
avons  été  chargés  de  soumettre  à 
la  cour  le  pourvoi  du  lieutenant- 
colonel  Caron,  contre  le  juge- 
ment du  conseil  de  guerre  qui  le 
condamne  à  la  peine  de  mort.  Le 
37  septembre  nous  adressâmes  à 
Son  iixcellenco  Mgr.  le  garde- 
des-sceaux  une  lequcte,  dans  la- 
«pielle  nous  lui  dénoncions  le  ju- 
gement du  conseil  de  guerre,  o^in- 
me  vicié  d'incompétence  et  d'excès 
de  pouvoir;  et  nous  suppli.lmes  le 
ministre  de  le  dénoncer  &  la  cour 
de  cassation,  conformément  ii  l'ai- 
ticle44"du  code  d'instruction  cri- 
minelle..  l*ar  surcroit  de  précau- 
tions, nous  nous  |)résentâmcs  le 
lendemain  28,  au  greffe  ,  pour  re- 
présenter que  rarlicle  /j2'|  permet- 
tait aux  condanH)és  de  tléposer  di- 
rectement, soit  leur  requête,  soit 
leur  demande  en  cassation,  san» 
emprunter  la  correspondance  mi- 
nislériellft.  Legrcincrpersistadan» 


CAR 


'59 


ton  refus,  et  nous  invita  à  nous 
adresser  à  M.  le  président  de  la 
cour.  11  était  dans  la  limite  de  ses 
devoirs;  car  M.  le  président,  au- 
quel notre  requf'lc  ne  put  parve- 
nir {|ue  le  29,  api)rouYa  ce  refus, 
cl  daigna  nous  répondre  sur-le- 
champ  que ,  d'après  les  formes 
légales  et  les  formes  en  usage , 
la  requête  ne  pouvait  être  déposée 
au  greffe,  mais  devait  être  adres- 
sée nu  ministère.  M.  le  président 
eut  la  bonté  d'ajouter  que  si  j'in- 
fiistais,  il  m'accorderait  la  parole 
ù  la  première  audience.  Le  même 
jour  M.  le  g;irde-des-sceaux  nous 
renvoya  notre  requête,  en  nous 
faisant  connaître  par  un  exprés, 
qu'il  ne  croyait  pas  pouvoir  la 
recevoir.  Nous  fîmes  part  à 
l'envoyé  des  obstacles  que  nous 
éprouvions  de  la  part  de  la  cour 
de  cassation.  Nt)us  obtînmes  pour 
le  4î  *''ic  audience  de  son  excel- 
lence Mgr.  le  garde-des-sceaux , 
et  nous  eûmes  l'honneur  de  lui 
écrire  que  nous  nous  présente- 
rions aujourd'hui  à  la  cour,  et  que 
nous  auiioivs  1  honneur  de  rendre 
con)plc  II  son  excellence  de  l'arrêt 
qui  interviendrait.  Nous  avons 
dans  l'inlervalle,  écrit  une  secon- 
de lettre  à  Strasbourg;  nous  n'a- 
vons reçu  aucune  réponse;  nous 
ne  savons  pas  même  si  ces  deux 
lettres  sont  parvenues.  Nous  nous 
étions  préparés  pour  présenter  ce 
matin  à  la  cour,  A  l'ouverture  de 
son  audience ,  notre  recours  en 
cassation,  et  pour  la  supplier  «ren 
recevoir  le  dépôt  à  son  grelTe. 
Maisnuenouvellc,  transmise  com- 
me les  autres  par  le  télégraphe, 
insérée  dans  Jo  journal  du  soir,  et 
répétée  ce  matin  par  tous  les  jour- 
naux) aunoncc  que  Caron  a  tu\n 


5  m  Cil  A 

i»on  jugement,  h;  j"  octobre.  Il 
paraît  que  l'aotorilû  militaire  ne 
connaît  aucune  espèce  de  sursis, 
pas  même  pour  lu  recours  à  la 
clémence  du  roi,  el  que  l'arrêt  est 
mis  à  exécution  3ur- le -champ. 
Dans  cette  douloureuse  circons- 
tance, nous  demandons  à  la  cour 
si  nous  devons  plaider  pour  l'ad- 
mission de  la  requête.  La  nou- 
velle n'est  point  officielle ,  el  nous 
aimons  à  nous  persuader  encore 
qu'elle  n'est  pas  vraie.  »  La  cour 
de  cassation  déclara  n'y  avoir  lieu 
à  statuer  sur  la  requête  présentée 
par  M*  Isambert,  attendu  que  le 
pourvoi  n'avait  pas  été  régulière- 
ment dénoncé.  » 

CASTELLA,  lieutenant-géné- 
ral, voy.  le  Supp.  du  tome  V. 

CASTELLA,  maréchal -de- 
ramp,  voy.  le  Supplément  du 
tome  XV. 

GASTEX,  colonel,  voy.  le 
Supplément  du  tome  XV. 

CELESIA  ,  ancien  ministre  de 
la  république  de  Gênes,  voy.  le 
Supplément  du  tome  XV. 

CELLES  (Baron  de),  voy.  le 
Supplément  du  tome  XVI. 

CHAPTAL  (Père),  v<7y.  le  Sup- 
plément du  tome  VI. 

CHARRIN  (Pierre-Joseph).  On 
doit  ajouter  ù  l'article  qui  le  con- 
cerne {voy.  le  t.  IV)  ,  que  depuis 
1831  il  est  attaché  au  journal  an- 
glais publié  à  Paris  sous  le  titre  de 
Galignani's  Messenger,  en  qualité 
de  rédacteur.  Il  y  rend  compte 
des  ouvrages  français  de  littéra- 
ture et  des  objets  d'arts,  tels  que 
tableaux,  gravures,  etc.  En  1823 
vt  1823,  M.  Gliarrin  a  donné  deux 
nouvelles  éditions  de  son  Conteur 
fies  dames ,  ouvrage  qu'il  a  beau- 
coup auaélioré;  en  i8a4j  il  a  pu- 


CUA 

nlié  VU  ermite  rôdeur,  ou  obser- 
vations gur  les  mœurs  et  les  usa-, 
ges  des    Anglais  el^  des  Français 
au  commencement  du  19'  siècle, 

2  vol.  in- 12.  Ce  recueil,  où  l'au- 
teur s'est  efforcé  d'être  piquant 
et  «atirique,  a  été  suivi,  en  iSaO, 
de  V Album  lyrique i  choix  de  chan- 
sons et  de  romances  ,  1  vol,  in- 18, 
et  de  Conte^ct  conseils  à  mes  fils, 

3  vol.  in-12,  imités  librement  de 
Kolzebue.  La  vente  d'un  ouvrage 
en  annonce  le  succès,  et  M.  Ghar- 
rin  en  prépare  déjà  une  nouvelle 
édition.  Cet  infatigable  conteur  va 
incessamment  publier  les  Contes 
de  lliermite,  ou  les  Caractères,  2 
vol.  in-12. 

CHARÏRAND,   maréchal-de- 
camp,  voy.  le  Supp,  du  t.  XIII. 

CHAZEr  (  Akdré-Reké- Bal- 
TUAZAR  Aussan  de),G1s  de  M.  Alis- 
San  de  Ghuzet,  receveur  particu- 
lier et  payeur  des  rentes,  est  né 
i\  Paris  le  25  octobre  1774-  L'ar- 
ticle consacré  à  cet  homme  de 
lettres  dans  le  II'  tome  de  la  Bio- 
graphie des  contemporains,  con- 
tenant des  erreurs  et  péchant  par 
des  omissions,  celui-ci  en  sera  le 
complément  et  la  rectification. 
M.4^hazet  fils  quitta  la  France  en 
1792,  en  sortant  de  Juilly,  où  il 
avait  fait  ses  études;  fut  rayé  de 
la  liste  des  émigrés  sous  le  miais- 
tère  de  M.  Cochon,  depuis  comte 
de  l'Apparent;  revint  à  Paris  en 
novembre  1796,  et  fut  condamné 
le  18  fructidor  à  la  déportation 
comme  rédacteur  d'un  journal 
royaliste  intitulé  le  Dcjcûncr.  Il 
n'occupa  aucune  place  sous  le  di- 
rectoire ni  sous  le  consulat,  et  se 
livra  entièrement  à  la  carrière  di's 
lettres;  il  a  fait  seul  ou  en  société, 
un  grand  nombre  d'ouvrages  dra- 


cnK 

!iiali(juc6  dont  plusieurs  ont  ob- 
tt-nu  du  succès;  le  roi  le  nomma 
clievaiier  de  la  légion  d'honneur 
à  son  retour  de  Gand  ;  fl  dut  cette 
distinction  à  la  lettre  suivante  qu'il 
fil  insérer  dans  les  journaux  de  la 
capitale,  avec  sa  signature  :  «  Un 
honnns  qui  \eut  bien  me  recom- 
mander périodiquementà  l'estime 
publique  par  ses  injures,  m'a  fait 
1  honneur  de  me  dénoncer  dan*  le 
Pairiole  de  1789,  comme  auteur 
d'une  chanson  dont  le  refrain  est, 
dit-il,  Rendez-nous  notre  père  de 
Gand;  j'avais  le  projet  de  ne  point 
ri'îpondrc,  mais  comme  j'ai  reçu  un 
grarul  nombredelettres  anonymes 
plus  ou  moins  polies  et  cerlaines 
visites  que  je  ne  veux  pas  quali- 
fier, je  déclare  que  cette  chanson 
n'est  pas  de  moi  •  si  j'avais  eu  à 
traiter  une  question  d'une  telle 
importance,  ce  n'est  pas  par  un 
calembour  que  j'aurais  exprimé 
mon  opinion  sur  un  prince  aussi 
respeclable  par  ses  vertus  que  par 
ses  malheurs.  »  M.  Chazet  est  au- 
jourd'hui (1825)  bibliothécaire 
du  roi ,  receveur  jtarticulier  des 
finances  à  Valojaeset  censeur  dra- 
matique. 

CHLAPOWSKI(I)ÉsiRÉ),i;oy. 
le  Supplément  du  tome  WII. 

CilOPlCKI  (N.),  général  de 
division,  voy.  le  Supplément  du 
I.. tue  XVII. 

CHRISTOPHE  (Henri)  ,  plus 
connu  sous  le  nom  monarchique 
de  IIenbi  I",  roi  d'IIaîli  ,  naquit 
h  l'île  de  la  Grenade,  l'une  des 
Autillcs  françaises,  le  G  octobre 
i-;(ty.  Les  biographes  sont  peu 
d'accord  sur  l'origine  de  ce  célèbre 
noir.  On  trouve  dans  l'annuaire 
Ufcrologique  anglais,  que  (^hris- 
ioj»he  fui  amené  en  1780  au  Cap- 


CHR 


36i 


Français,  où  on  le  vendit  comme 
esclave  à  ITigedc  la  ans.  Le  colon 
qui  l'acheta  le  fit  instruire  dans  la 
profession  de  cuisinier,  où  par  la 
suite  il  excella.  Il  était,  en  «789, 
cuisinier  de  l'auberge  de  la  Croix, 
tenue  par  Al"""  Montgeon.  Chris- 
tophe servit  dans  la  guerre  dite 
de  l'indépendance,  et  fut  l.dessé 
au  siège  de  Savanah.  S'étanl  r jndu 
ù  Saint-Domingue,  il  fut  employé 
comme  commandeur  ou  surveil- 
lant de  nègres  de  la  plantation 
dont  Durcau-de-la-Malle,  traduc- 
teur de  Tacite  ,  était  propriétaire. 
Dès  le  commencement  de  la  guerre 
de  l'indépendance,  où,  comme 
nous  l'avons  dit,  il  fut  blessé,  il 
se  fit  remarquer  par  beaucoup  do 
courage,  d'activité,  et,  malheu- 
reusement, de  cruauté.  Nommé 
général  de  brigade  par  Toussaint- 
Louverture  {voy.  Locvertire), 
le  premier  chef  des  noirs  iudé- 
pendans  d'Haïti,  il  le  servit  avec  un 
grand  dévouement. Toussaint-Lou- 
vcrture,  homme  d'un  mérite  peu 
commun  et  le  plus  modéré  de 
ses  compatriotes,  désirait  l'indé- 
pendance de  sa  patrie,  mais,  au- 
tant que  possible,  sans  révolution, 
sans  effusion  de  sang  :  il  cherchait 
ù  rapprocher  les  blancs  des  hom- 
mes de  couleur,  et  à  leur  inspi- 
rer ses  sentimens  pacifiques,  que 
repoussaient  l'un  et  l'autre  parti. 
A  la  tête  des  noirs  était  son  neveu 
Moïse  ,  ennemi  implacable  d<;.s 
blancs,  et  très-prononcé  d'ailleurs 
I)Our  l'indépendance  complète  de 
la  colonie.  Une  violente  insurrec- 
tion suscitée  par  Muïsé,  détermina 
Toussaint -Louverture  ii  sacrifier 
cet  homme  dangereux.  H  chargea 
Christophe  d'apaiser  linsurr^c- 
lion  et  de  ?c  saisir  de  la  personne 


5(53 


Cil  IV 


do  Moïse.  Christophe  jiislifiii  bien- 
tôt la  confiance  de  hcm  chef.  Il 
lui  livra  Moise  dont  il  s'était  rendu 
maître  par  trahison  ,  et  reçut  en 
récompense  le  gouvernement  de 
la  province  du  JNord.  L'enlève- 
ment de  31i)ïse,  qui  l'iil  prompte- 
jnent  mis  à  mort,  et  la  nomina- 
tion de  Christophe  au  poste  de 
{Touverneur,  excitèrent,  au  mois 
d'octobre  1801,  un  soulèvement 
au  Cap  ei  dans  d'autres  lieux. 
Christophe,  prompt  et  terrible, 
se  porte  partout  où  est  le  danger, 
et,  par  les  plus  effroyables  châti- 
mens,  parvient  en  peu  de  temps 
à  éloufler  la  rébellion.  11  com- 
mandait la  ville  du  Cap  lors  de 
l'expédilion  du  général  Leclerc, 
en  1802.  Le  général  français 
le  somma  de  rendre  la  place. 
Il  s'établit  à  cette  occasion ,  dit 
l'auteur  d'une  très  -  bonne  no- 
tice d'où  cet  article  est  tiré,  une 
correspondance  sous  le  rapport  de 
la  générosité  des  sentimens  et  de 
l'originalité  des  expressions,  qui 
dépose  tonte  entière  en  faveur  du 
général  noir.  Nous  en  citerons 
quelques  passages  :  «  Si  vous  usez 
lie  la  force  dont  vous  me  mena- 
cez ,  je  vous  prêterai  toute  la 
résistance  qui  caractérise  un  ofli- 
cier-général;  et  si  le  sort  des  armes 
vous  est  favorable,  vous  n'entre- 
rez dans  la  ville  du  Cap  que  lors- 
qu'elle sera  réduite  en  cetidres, 
et  même,  dans  cet  endroit,  je 
vous  combattrai  encore....  Quant 
aux  troupes  qui,  dites-vous,  dé- 
barquent en  ce  moment,  je  ne  les 
considère  que  comme  des  châ- 
teaux de  cartes   que  le  moindre 

vent  doit  renverser Pour  la 

perte  de  votre  estime,, général,  je 
vous  assure  (pie  je  ne  désire  pas 


cim 

la  mériter  au  prix  quo  TOiw  y  at- 
tachez, puisqu'il  faudrait  agir  con- 
tre mon  devoir  pour  l'obtenir  (iT» 

pluviôse  an  lo) Je  n'attends 

que  la  preuve  qui  doit  me  con- 
vaincre du  inaintien  de  la  liberté 
et  de  l'égalité  en  faveur  de  la  po- 
pulation de  celte  colonie.  Les  lois 
qui  consacixMit  ces  principes,  v.l 
que  la  mère-patrie  a  sans  doute 
rendues,  porteraient  dans  mon 
cœur  celte  conviction,  et  je  vous 
proteste  qu'en  obtenant  cet  te  preu- 
ve désirée,  par  fj  connaissarvce  de 
ces  lois,  je  nj'y  soumettrai  immé- 
diatement.—  Vous  me  propo-^ez  , 
citoyen  général  ,  de  vous  fournir 
les  moyens  de  vous  assurer  du 
général Touàsainl-Louverture.  Ce 
serait  de  ma  part  une  perfidie,  une 
trahison,  et  celjjc  proposition  dé- 
gradante pourmoi,  est  it  mesyeux 
une  marque  de  l'invincible  répu- 
gnance que  vous  éprouvez  à  me 
croire  susceptible  des  moindres 
senlimen;-  de  délicatesse  et  d'hon- 
neur (2  floréal  an  10) 11  y  a 

douze  ans,  général,  que  nous  nous 
battons  pour  la  liberté,  pour  ces 
mêmes  droits  que?,  comme  vous, 
nous  avons  conquis  au  prix  de 
notre  sang,  et  j'ai  toujours  répu- 
gné à  croire  que  les  Français  , 
après  avoir  fait  de  si  grands  sacri- 
fices pour  les  obtenir,  viendraient 
un  jour  les  ôter  à  un  peuple  glo- 
rieux de  faire  partie  de  la  grande 
nation,  et  de  jouir,  comme  elle, 
des  avantages  qu'elle  a  tirés  de  la 
révolution  (2  floréal  an  jo).  » 
Les  talens  du  général  Leclerc  et 
la  valeur  des  troupes  françaises 
triomphèrent  des  noirs  indépen- 
daus.  Christophe  et  Dessalines 
{voj.  Dessalines)  se  défendirent 
avec  plus  d'intrépidité  et  furent 


GHR 

mis  hors  la  loi.  Chrislopho  forcé 
d'évacuer  le  Foil-aii-Priiici!,  livra 
cette  ville  aux  flaiiiiiies,  et  courut 
se  réunir  à  aon  général  eu  chef, 
Toussaint- Louvcrlure.  Ou  sait 
par  quels  moyens  ca  dernier  de- 
vint prisonnier  des  Français.  Le 
mouvement  général  de  l'indépen- 
dance parut  un  instant  suspendu. 
Le  funeste  climat  de  ces  contrées 
«>péra  ce  que  n'avait  pu  produire 
l'intrépidité  des  indépendans  :  il 
détruisit  l'armée  française.  «  Une 
assemblée  nationale,  convoquée 
le  1"  janvier  1804..  rendit  i\  l'île 
son  nom  primitif  d'Haïti.  Dessa- 
lines fut  procl.imé  gouverneur- 
général  à  vie.  Haïti  fut  divisé  en 
fcix  départemens  militaires  com- 
mandés par  des  généraux  de  di- 
vision. Christophe  eut  le  com- 
mandement de  la  division  du  Cap; 
il  se  trouvait  alors  le  plus  ancien 
des  généraux  de  l'armée  après 
Dessalines.  »  Le  gouverneur-gé- 
néral se  fit  élire  empereur,  et 
Christophe  devint  général  en  chef 
del'armée  d'Haïti(i8o5).  Péthion, 
homme  de  couleur  (vfy.l'KTHion), 
commandant  de  la  division  de 
Port-au-Prince,  s'élant  mis  à  la 
tète  d'une  insurrection  répulili- 
caine  ,  et  Dessalines  ayant  péri 
dans  la  lutte,  le  nouvel  empire 
fut  détruit  l'année  suivante^  «  La 
province  du  Nord  et  la  première 
division  de  la  province  de  l'Ouest, 
rapporte  l'auteur  de  la  notice  déji 
citée,  restèrent  soumises  à  Chris- 
tophe, tandis  que  la  province  du 
Sud  et  la  seconde  division  de 
l'Ouest  ohéissaient  ù  Péthion. 
Une  assemblée  composée  des  dé- 
putés des  deux  partis,  convoquée 
au  Port-au-Prince,  se  déclara 
«:n  faveur  do  Pélhiuu;  la  iiiino- 


CHU 


3C3 


lité  protesta,  et,  dès  les  pre- 
miers jours  de  1807,  la  guerre  ci- 
vile avait  éclaté.  Une  nouvelle  as- 
semblée fut  convoquée  au  Cap 
hous  l'intluence  de  Christophe,  et 
décréta  la  constitution  du  17  fé- 
vrier J807.  Elle  nomma  Christo- 
phe président  à  vie  de  l'état  d'Haï- 
ti, et  généralissime  des  forces  de 
terre  cl  de  mer.  La  plupart  des 
dispositions  de  cet  acte  étaient  cal- 
quées sur  les  constitutions  consu- 
laires de  la  France.  Vers  la  même 
époque,  la  province  du  Sud-Ouest 
he  constitua,  sous  le  titre  de  ré- 
publique il'Haïti.  »  Sa  constitution 
établie  sur  celle  des  Étals- Unis 
d'Aniérique,  institua  Pélhion  pré- 
sident pour  l'espace  de  quatre  ans, 
et  remit  le  pouvoir  législatif  entro 
les  mains  d'un  sénat;  Christophe 
qui  visait,  au  pouvoir  absolu,  ne 
négligea  pas  néanmoins  le  réta- 
blissement de  l'ordre  publie  et  de 
la  sécurité  individuelle.  Il  orga- 
nisa l'administration,  les  tribu- 
naux, la  marine,  l'armée,  fit  des 
réglemens  propres  à  favoriser  l'a- 
griculture, le  commerce,  tous  les 
genres  d'industrie,  et  parvint  en 
peu  de  temps  à  des  résultats  d'au- 
tant plus  admirables,  qu'il  agissait 
sur  une  société  qui  lui  o[)posait 
des  obstacles  de  toute  nature.  Ses 
armées  de  terre  et  de  mer  furent 
bientôt  parfaitement  organisées, 
ses  finances  atteignirent  nu  état  ré- 
gulier et  florissant.  Des  forteresses 
furent  élevées  sur  divers  points; 
entre  autres  la  citadelle  Henri,  re- 
marquable parle  luxe  de  ses  fortifi- 
calionset  desespalais;enfin, toutes 
les  côtes  furent  njisesen  état  <ie  dé- 
fense. En  même  temps,  Chris- 
tophe fournissait  des  secours  A  ses 
voisins  les  Espagnols,  pour  chas- 


5G4 


CHR 


scr  los  Français  de  Sanlo  Doinia- 
{;n,  t't  |K)ussait  la  guerre  contre  la 
jé|)tihli(|iie  sa  rivale,  avec  activité 
qiioiqu'avco  peu  de  succès.  Par 
un  acte  du  28  mars  181 1 ,  le  pré- 
siflont  (>hrislophe  se  fit  proclamer 
roi  d'Haïti,  sous  le  nom  d'Henri 
1*^'.  Ce  lilrc  fut  déclaré  hérédi- 
laire  dans  sa  famille,  et  entouré 
de  tous  les  prestiges  et  de  toutes 
les  décorations  des  royaumes  de 
l'Europe  moderne.  Aucune  trace 
de  gouvernement  représentatif  ne 
fut  conservée  dans  la  nouvelle  mo- 
narchie, si  ce  n'est  un  conseil- 
d'étal  nommé  par  le  roi,  et  com- 
posé de  ses  généraux  et  de  ses 
courtisans. Xlhristophe avait  épou- 
sé, le  i5  juillet  1763,  une  femme 
de  sa  couleur,  nommée  Marie- 
Lo.iise  ;  elle  fut  saluée  du  non)  de 
reine  ;  leur  fils  aîné  ,  Jacques-Vic- 
tor Henri,  né  le  5  mars  i8o4> 
devint  piince  royal  d'Haïti.  L'édit 
qui  avait  créé  la  noblesse  fut  suivi 
do  celui  de  création  de  l'ordre 
r  lyal  et  militaire  de  Saint-Henri 
(20  avril  1811),  avec  une  dota- 
tion de  3oo,ooo  livres  de  revenu. 
Un  édit  du  7  avril  érigea  un  siège 
archiépiscopal  dans  la  capitale 
d'Haïti ,  et  des  sièges  épisco- 
paux  dans  diverses  villes  du  royau- 
me; enfin,  un  édit  du  1"  janvier 
1 81 3  détermina  la  formule  des 
litres  royaux.  Mais  l'acte  le  plus 
honorable ,  comme  le  plus  utile, 
di!  règne  de  Christophe,  c'est  la 
pnidication  du  Code  Henri ,  pro- 
mulgué le  20  février  1812.  Il  est 
composé  de  neuf  lois  :  1°  loi  ci- 
vile- c'est  une  copie  modifiée,  prin- 
cipa'.ement  quant  au  premier  li- 
vre, de  notre  Code  civil.  On  y  re- 
marque avecsatisfaction  l'absence 
du  dixorcc,  et  le  maintien  de  Va- 


CEIR 

doption;  a'  lui  d«  commerce;  5"  loi 
sur  les  prises  ,•  4°  loi  sur  la  procé- 
dure civile  ;  5"  loi  criminelle  ,  cor- 
reclionnelle,  et  de  police  ;  elle  ad- 
met la  peine  de  mort  et  la  confis- 
cation des  biçns  :  les  bonnes  moeurs 
et  la  religion  catholique  y  sont  ef- 
ficacement protégées  ;  6"  loi  sur  lu 
procédure  criminelle,  police  correc- 
tionnelle ,  et  la  simple  police  :  elle 
n'admet  point  le  jury:  7"  loi  con- 
cernant la  culture  ;  8"  loi  militaire; 
9°  loi  pénale  militaire.  Le  Code 
Henri  pourrait  sans  doute  donner 
lieu  à  plusieurs  observations  cri- 
ti(jues  ;  mais,  tel  qu'il  est,  on  peut 
affirmer  qu'il  fait  honte  <\  la  légis- 
lation de  quelques  nations  des 
plus  civilisées  de  l'ancien  conti- 
nent. Une  époque  remarquable  de 
la  vie  de  Christophe  fut  celle  de 
son  sacre  etdeson  couronnement. 
Des  fonctionnaires  publics  de  la 
partie  espagnole  de  Saint-Domin- 
gue ,  et  des  officiers  supérieurs  de 
la  marine  anglaise,  se  rendirent  à 
l'invitation  d'y  assister.  La  cérémo- 
nie eut  lieuauCap,  le  2  juin  1812; 
on  y  essaya  d'égaler  le  luxe  des 
cours  de  l'Europe,  et,  d'après  les 
relations  officielles  qui  ont  été  pu- 
bliées,^ paraît  certain  que  ce  but  fut 
atteint.  M.  Corneille  Brelle,  préfet 
apostolique,  nommé  par  le  roi  ar- 
chevêque d'Haïti  et  duc  de  l'Anse, 
présidait  à  la cérémoniereligieuse, 
qui  fut  pratiquée  avec  toutes  les 
formules  indiquées  dans  le  Ponti- 
fical romain.  L'année  181 3  fut 
marquée  par  diverses  défections 
qui,  déjà,  présageaient  à  Chris- 
tophe sa  chute  prochaine  et  le 
triomphe  ultérieur  de  la  républi- 
que; mais  plus  belliqueux  que  Pé- 
ihion  ,  il  compensait,  les  armes  à 
h  inain ,  les  avantages  que  son  ri- 


CHR 

val  s'était  acquis  par  l'habilclé  et 
la  iiioci/'ialioti  de  son  goiivcrnc- 
iiicnt.  TuulcrDis ,  ces  (léleclions 
exaspérèrent  le  caraclère  'viulent 
«^l  soupçonneux  de  Christophe,  et 
le  portèrent  à  des  actes  de  cruau- 
té, que  ses  défenseurs  eux-iiiênies 
n'ont  pas  entièrement  dissimulés. 
liU  paix  rendue  à  la  France  par 
les  événemens  de  1814  >  établit 
une  sorte  de  trêve  lacile  entre 
les  deux  gouverneniens  d'Haïti. 
Christophe  apprit  d'abord  avec 
satir faction  la  restauration  des 
Bourbons,  espérant  qu'ils  sui- 
vraient à  son  éj;;ard  une  politique 
opposée  à  celle  de  Bonaparte. 
Mais  des  sentimens  tout  dilïérens 
ne  lardèrent  pas  à  prévaloir  dans 
son  esprit,  à  la  suite  de  la  négo- 
ciation dont  furent  chargés,  par 
M.  Malouet,  alors  ministre  de  la 
marine,  MM.  Dauxiou-Lavayssc, 
Franco-Médina  ,  et  Daverman. 
Les  instructions  de  ces  agens  leur 
prescrivaient  de  proposer  aux  cl  icfâ 
de  l'île  de  grands  avantages  per- 
sonnels, pour  les  déterminer  à 
abandonner  les  intérêts  de  leur 
nation;  il  leur  était  "  singulière- 

•  nient  recommandé  de  se  rappro» 
ncher  le  plus  possible  de  l'ancien 

•  ordre  des  choses  colonial ,  et  de 
«ne  s'en  écarter  que  là  où  il  leur 

•  sera  démontré  impossible  de  faire 

•  autrement.»  On  remarquait  aussi 
dans  leurs  instructions  les  dispo- 
sitions suivantes  :  «  .  .  .  5*  Alta- 
»  cher  à  la  glèbe ,  et  rendre  à  leurs 
n anciens  propriétaires,  non-seu- 
»lement  tous  les  noirs  qui  tra- 
»  vaillent  actuellement  sur  les  ha- 

•  bitations,  mais  encore  y  ramc- 
»ncr,  le  plus  possible,  de  ceux 
»qui  se  sont  affranchis  de  celte 
'«condition 7°  Restreindre 


CIIR 


505 


rtla  création  de  nouveaux  libres 
»de  la  manière  indiquée  plus 
»  haut.  »  Christophe  reçut  lescom- 
niunicalions  qui  lui  furent  faites, 
avec  r'intlignalion  qu'il  eftt  été 
facile  de  prévoir,  si  l'on  se  fût 
moins  aveuglé;  et  il  est  remarqua- 
ble que  la  nouvelle  situation  des 
a/Taire»  l'obligea  à  reKIchcr  quel- 
que chose  de  son  pouvoir  absolu. 
Le  21  octobre  181 4?  i'  convoqua 
à  Sans-Souci  un  conseil-général 
de  la  nation,  afin  de  placer  s'mis 
ses  yeux  tous  les  détails  relatifs  :\ 
ces  négociations,  et  de  leur  di)n- 
n(;r  ensuite  la  plus  grande  publi- 
cité. Cette  me-ure  obtint  un  suc- 
cès complet  ;  elle  exalta  ,  au  plus 
haut  degré,  l'enthousiasme  des 
insulaires.  «  Parmi  les  membres  du 
«conseil,  dit  i'hialorien  d'Haïti, 
»  il  y  en  avait  qui  avaient  j.orlé 

•  les  fers  des  Français;  les  mar- 
sques  encore  empreintes  sur  leurs 
«membres'  mutilés,  attestaient 
«leurs  longues  et  cruelles  souf- 
«franccs,  et  la  barbarie  de  nos  ty- 
«rans;  d'autres  se  souvenaient 
»  d'avoir  vu  pendre,  brftler,  noyer, 
«ou  manger  par  des  chiens,  pè- 
«res,  mères,  frères,  socurg  ,  pa- 
rt rens  ou  amis  ;  et  l'on  venait  pro- 
«poserà  ces  vieux  guerriers,  com- 
»  verts  de  nobles  cicatrices,  et  qui 
«avaient  vu  fuir  devant  eux  les 

•  hordes  sanguinaires  des  Lccbrrc 
«et  des  Rochambeau,  de  retour- 
»ner  sous  le  joug  de  ces  odieux 

•  tyrans,  de  choisir  entre  l'escla- 
«vage  et  la  mort  !  A  l'instant  tou- 

•  tes  les  haines  et  les  vengeances 

•  qui  avaient  été  comme  assoupies 
«parle  temps, se  réveillèrent  avec 

•  une  force  et  une  énergie  incroya 
«blés....  Chacun  prépare  des  tor- 
«ches  pour  iuccndicr  sa  propre 


36G 


CHR 


»  maison;  l'un  arguise  le  tranchant 
"de  son  sabre,  l'autio  la  pointe  du 
«sa  lance;  c«;!til-ci  nétoie  son  fii- 
»sil;  celui-là  pn';pai«;  son  sac  de 

•  campag-ne;  déjà  !a  femme  indns- 
»  trieuse  et  prévoyanle  met  de  côlé 
»  le  gros  linge,  les  objets  utiles  et 

•  indispensables  qui  doivent  ôtre 
»  conservés  ,  et  range  de  l'autre  les 
»  richesses,  les  objets  de  luxe  et  de 

•  super  jluités  ,  désormais  inutiles, 
«et  destinés  à  être  la  proie  des 
«flammes,  etc.  »  (  Essai  sur  les 
causes  de  la  révolution  et  des  guer- 
res civiles  d'Halte,  pag.  2i2et2i5.) 
En  même  temps  Christophe  flt 
publier  un  plan  de  défense  géné- 
rale du  royaume,  tout-à-fait  ana- 
logue aux  sentimens  dont  le  peu- 
ple se  montrait  animé,  a  L'art. 
»  1"  recommandait  aux  généraux 
»  commandant  les  provinces ,  etc. , 

■  d'avoir  à  se  munir  dès  à  présent 
»même,  de  bois  et  de  chandelle 
»en  forme  de  torches,  et  de  ma- 
»  tières  combustibles  propres  à  in- 

•  cendier.  L'art.  2  prescrivait  qu'au 

•  débarquement  de  l'armée  fran- 

•  çaise,  toutes  les  villes,  bourgs, 
»  habitations,  manufactures  et  tous 

•  autres  ètablissemens  situés  dans 
«les  plaines  fussent  incendiés  de 
»  fond  en  comble  ;  que  toute  la  po- 
«pulation  fût  retirée  dans  les  mon- 
«tagnes,  les  ponts  cassés  et  dé- 
atruits,  les  digues  des  fleuves, 

•  rivières  et  étangs  rompus,  etc. 
«L'art.  9  enjoignait  aux  généraux 
«et  ofliciers,  au  nom  de  S.  M., 
«de  ne  point  faire  aucun  quartier 

•  à  tous  les  prisonniers  que  le  sort 

•  des  armes  aurait  fait  tomber  en 
»  leur  pouvoir,  quels  que  soient  le 
«grade,  l'Sge  et  le  sexe;  qu'ils  se- 
»  raient  tous  immolés ,  sans  pitié 

■  et  sans  rémission,  dans  des  gcn- 


CHR 

«rps  de  supplice  les  plus  horribles.» 
(//vùAp.aySet  2;'9.)L'undesagen<« 
français,  Franco-Médina, tomba .a- 
vec  ses  iulructions, entre  les  mains 
de  Christophe.  Celui-ci  s'empres- 
sa  de  les  publier,   avec  la  lettre 
que  lui  avait  adressée  le  chef  de 
la  mission  française,  t\l.  Dauxion- 
Lavaysse.  Toutes  ces  pièces  étaient 
bien  propres  à  exaspérer  la  popu- 
lation noire  de  Saint-Domingue. 
Cependant,  il  ne  fut  point  fait  de 
iTud  à  Médina  ;  après  avoir  subi  un 
interrogatoire    judiciaire  ,   il    fut 
exposé  sur  la  place  publique,  afln 
qu'il  fût  loisible  à  chacun  de  s'as- 
surer personnellement  de  la  vé- 
rité des  faits  publiés  à  son  occa- 
sion.  A  la  nouvelle  du   mauvais 
succès  de  cette  mission,  le  gou- 
vernement  français  désavoua  les 
négociateurs  (^Monlteurdu  18  jan- 
vier 1 8 1 5  )  ;  mais  l'efTet  que  pou- 
vait produire  ce  désaveu  fut  con- 
sidérablement diminué  par  la  di- 
vulgation  de   la  teneur    littérale, 
des  instructions  ministérielles.  Il 
y  a  ,  du  reste ,  beaucoup  de  choses 
curieuses  dans  les  lettres  de  M. 
Dauxioo-Lavaysse  ,  et  qui  intéres- 
seraient directement  les  Français 
eux-mêmes,  si,  comme  nous  l'a- 
vons dit,   leur  gouvernement  ne 
les  avait  désavouées.  Les  événe- 
mens  qui  agitèrent  l'Europe  en 
181 5  et   les  années  suivantes,  a- 
journèrent  indéfiniment  les  pro- 
jets belliqueux  que  certains  colons 
se  flattaient,   en   1814  >  de    faire 
adopter  au  gouvernement  fran- 
çais. Cet  état  provisoire  permit  à 
Christophe  de  se  préparer  à  com- 
battre  l'ennemi  par  des  moyens 
fdus  convenables  à  un  état  civi- 
isé  ;  il  multiplia  les  imprimeries, 
et,  ù  leur  aide,  il  répandit,  avec 


CHR 

profusion,  lc«  écrite  contre  les 
vuns  et  les  i'iteiitions  des  anciens 
colons;  il  voiiUit  changor  la  lan- 
gue de  ses  peuples  ,  et,  A  celellct , 
.i[»iès  avoir  fuit  décréter,  par  le 
conseil  de  la  nation  ,  que  l'inslriic- 
tion  pubJifiUK  .lierait  gratuite  ù 
Uiûli,  et  donnée  aux  frais  de  la 
nation,  il  fil  vt-nirdes  prole^seurs 
et  arlisics  anglais,  afin  que  l'édu- 
oalion  fût  reçue  par  les  enfans  au 
moyen  de  la  langue  anglaise ,  et 
il  multiplia,  le  plus  qu'il  fut  pos- 
sible, d(;3  écoles  d'enseignement 
muluel  pour  cette  lan:^ue.  Le  20 
novembre  iSiO,  après  avoir  re- 
fusé de  recevoir  les  connnunica- 
tions  des  nouveaux  commissaire» 
du  roi  de  France,  MiM.  de  Fon- 
langts  etEsmangarl,  Christophe 
publia  une  déclaration,  dont  l'ar- 
ticle i*'  portail  :  «  Nous  ne  traite- 
«ronsavecle  gouvernement  fran- 
»çais  que  sur  le  même  pied,  de 

•  puissance  à  puissance,  de  sou- 
»  verain  à  souverain  ;  aucune  né- 

•  gociation  ne  sera  entamée  par 
«nous  avec  cette  puissance,  qui 
«n'aurait  eu  pour  base  préala- 
nble  l'indépendance  du  royaume 
«d'Haïti,  etc.  »  Les  commissaires 
IVancais,  également  éconduils  par 
Péthion,  mais  avec  toutes  les  for- 
mes de  la  civilisation  la  plus  ex- 
quise, et  de  la  diplomatie  la  plus 
lairméc,  ne  tardèrent  p;.'S  à  quit- 
ler  les  parages  d'ILûti  ,  sans  avoir 
mieux  réussi  que  leurs  prédéces- 
seurs. Une  trêve  tacite,  interrom- 
pue par  des  hostilités  sans  résul- 
tat, se  maintenait,  depuis  plu- 
sieurs années,  entre  le  royaume 
de  (".hrislophe  et  la  république  de 
l'élhion.  Les  négociations  avec  la 
France  avaient  fait  éclater,  d'une 
manière  irrécusable,  la  supério- 


CHR  307 

rite  personnelle  de  co  dernier;  et, 
néanmoins,  l'influence  salutair»; 
des  circonstanciés  agissant  sur  le 
roi  noir  lui-même,  l'avait  entrai- 
né ,  presqu'à  sou  insu,  à  adop- 
ter des  formes  de  gouvernement 
tnoins  absolues.  Ainsi ,  par  un 
édit  du  «4  juillet  1S19,  il  avait 
concédé  en  propriété  des  terres 
aux  ofiiciersjsous-olficiers  et  sol- 
dats de  son  armée,  tandis  que, 
jusqu'alors,  il  avait  réservé  cette 
laveur  pour  les  généraux  et  les 
dignitair^'s  de  sa  cour.  Péthion 
mourut  au  commencement  de 
18)8,  et,  conformément  à  la 
constitution  de  la  république,  le 
général  Boycr,  désigné  par  lui, 
prit  les  rênes  du  gouvernement. 
Il  réussit  d'abord  à  soumettre  à 
hi  république  ,  par  la  force  des  ar- 
mes, la  contrée  appt'lée  la(irande- 
Anse,  où  dominait,  sous  la  suze- 
raineté de  Christophe,  mi  chef 
militaire  nominé  Goman ,  ou  le 
comle  de  Jérémie.  Le  spectacle 
du  gouvernement  républicain  de 
Boyer,  à  la  fois  ferme  et  modéré, 
contrastait,  de  la  manière  la  plus 
étrange,  avec  le  régime  égoïste, 
sordide  et  barbare  de  la  royauté 
de  Christophe,  et  préparait  iné- 
vitablement la  ruine  de  celle-ci. 
La  garnison  de  Saint-Marc  en  don- 
na le  signal.  Vers  la  fin  de  sep- 
tembre 1820,  cette  garnison,  in- 
dignée des  mauvais  traiiemens 
que  Christophe  venait  de  faire  su- 
bir à  son  colonel ,  j)ar  l'intermé- 
diaire du  gouverneur  de  la  ville, 
se  souleva ,  coupa  la  tête  à  ce  gou- 
verneur, et  envoya  une  députa- 
tion  au  président  Boyer,  pour  lui 
porter  son  vœu  de  réunion  ;\  la 
république.  Celui-ci  rassembla  à 
la  hntc  UD  corps  de  plus  de  1 5,ogo 


T>iy^ 


ClIR 


hommes,  à  la  iCte  duquel  il  s'a- 
vança pour  sout<'nir  les  insurgés 
(le  Sainl-lMarc.  Clirisloplie  ,  relire 
dans  le  palais  forlirté  de  Sans- 
Souci,  où  il  fai'^ait  sa  résidence 
ordinaire,  s8  trouvait  encore  ma- 
lade d'une  attaque  de  paralysie 
qu'il  avait  éprouvée  au  mois  de 
juillet  précédent.  Obligé  de  déla- 
chcr  une  partie  de  son  armée  con- 
tre les  insur|;és  de  Saint-Marc, 
il  permit  ainsi  à  rinsurredion  de 
se  propager  dans  la  ville  du  Cap, 
capitale  de  son  royaume.  Dans  la 
soirée  du  6  octobre ,  le  général 
liichard,  duc  de  la  Marmelade , 
et  l'un  des  premiers  dignitaires 
du  royaume,  proclama,  à  la  tête 
des  troupes ,  l'abolilion  de  la 
ro^^'iulé.  La  population  accueillit 
ce  changement  avec  enthousias- 
me; on  mit  en  liberté  tous  les  in- 
dividus que  la  tyrannie  ombra- 
geuse de  Christophe  avait  fait  je- 
ter en  prison.  Quinze  cents  hom- 
mes environ  de  la  garde  de  Chris- 
tophe,  l'élite  de  son  armée,  lui 
restaient  encore  fidèles  ;  il  les  en- 
voya contre  les  insurgés  du  Cap, 
sous  les  ordres  de  Joachim  Noëlle, 
duc  du  Port  de  Paix,  frère  de  sa 
femme.  Lui-même  ne  pouvant 
marcher  à  leur  tête,  il  se  fit  porter 
dans  leurs  rangs  avant  leur  dé- 
part, leur  prodigua  les  éloges  et 
les  promesses ,  et  leur  commanda, 
dit-on  ,  le  massacre  des  blancs  et 
des  hommes  de  couleur,  ainsi  que 
le  pillage  de  la  ville  du  Cap.  Le  8 
octobre,  les  deux  armées  se  trou- 
vèrent en  présence  ;  quelques 
coups  de  feu  furent  échangés  ; 
mais  bientôt  la  défection  entraîna 
aussi  la  garde  royale,  qui,  mal- 
gré les  efforts  de  son  chef,  se  réu- 
nit au  reste  de  l'armée  pour  dc- 


ClIR 

mander    la  déposition   du  Chris- 
tophe. A  celte  nouvelle,  celui-ci 
se  voyant  réduit,  pour  tout  luoyon 
de  défense,   à  la  fidélité  de  (pje!- 
qties  satellites,    et   craignant   de 
tomber  vivant  entre  les  main^  des 
républicains,  se  tira  un  loup  de 
pistolet  dans  le  cœur,  dont  il  mou- 
rut sur  la  place,  leSoctobre  1820, 
ù  M   heures  du  soir  ,  âgé  de  53 
tins.  Son  corps  resta  pendant  plu- 
sieurs jours  exposé  sur  la  grande 
route,   sans    sépulture.    Son   fils 
aîné,  le  prince  royal,  fut  massa- 
cré; mais  sa  veuve  et   ses  deux 
filles  furent  respectées,  grâce  à  la 
généreuse  intervention  du  prési- 
dent lioyer,  dont  la  fermeté  ne 
tarda  pas  ù  rétablir  l'ordre  et  la 
sécurité.  Elles  vivent  aujourdhui 
reliréies  aux  environs  de  Londres, 
dans  un  état  voisin  de  l'opulence. 
Le  26  octobre,   la  république  fut 
reconnue  par  toutes  les  provinces 
de   l'ancien  royaume  d'Haïti  ;  la 
constitution    royale    fut    abolie, 
ainsi  que  les  litres  de  noblesse  et 
les  décorations.   Cette  révolution 
n'a  été  contrariée  que  par  les  va- 
nités conlrislées  de  quelques  cour- 
tisans de  Christophe  ;  mais   elles 
ont  été  réprimées  par  le  président 
Boyer,  qui  a  réuni,  en  1822,  à  la 
république  d'Haïti  la  partie  espa- 
gnole de  l'ile  de  Sainl-Dominguc, 
qu'il  gouverne  désormais  tout  en- 
tière avec  une  admirable  sagesse. 
Le  gouvernement  français  recon- 
naissant enfin  qu'un  peuple   qui 
avait  su  conquérir  sa  lib(;rlé  de- 
vait prendre  rang  parmi  les  états 
indépendans,  a  consenti  (182.5), 
moyennant  une  indemnité  de  1 5o 
millions  en  fiveur  des  colons  fran- 
çais dépossédés,  à  reconnaître  l'in  - 
dépendance  de  Saint-Domingue. 


COL 

CIIRISTOPHLE  DE  SAINT- 
JORIJE,  voy.  le  Supplcment  du 
lutnt;  XV. 

CIVIALE ,  médecin  {voy.  son 
article  au  suj)plément  du  i  2*  vol.) 
M.  Civiale  a  poursuivi  avec  un 
grand  succès  ses  intcressans  tra- 
vaux pour  le  broiement  de  la 
pierre  dans  la  vessie.  Il  a  lu  sur 
ce  sujet  plusieurs  mémoires  à  l'a- 
cadémie royale  des  sciences,  où 
le  célèbre  Peroy  fit  sur  les  résul- 
lals  obtenus  par  celte  nouvelle 
méthode  le  rapport  le  plus  flat- 
teur. Postérieurement,  M.  Civiale 
a  obtenu  une  mention  très-hono- 
rable dans  le  rapport  de  la  com- 
mission désignée  pour  décerner 
le  prix  que  feu  le  baron  de  Mon- 
thyon  avait  fondé  pour  récompen- 
ser les  perfectionnemens  de  la 
médecine  cl  de  la  chirurgie.  Ce 
prix  semble  destiné,  l'année  pro- 
(;haine  ,  à  récompenser  M.  Ci- 
viale, auteur  de  la  découverte  la 
plus  préciiMise  qui  ait  été  faite  en 
(hirurgie  ,  et  qui  a  déjà  obtenu 
dans  la  pratique  de  cet  art  les  ré- 
sultats les  plus  avantageux. 

CLAUZÈL  (le  comte),  lieute- 
nant-général, voy.  le  Supplé- 
ment du  loine  X. 

COLMN  (Pierre -Nicolas), 
;mcien  professeur  de  belles-lettres 
et  de  philosophie.  Depuis  l'impres- 
sion du  V"  volume  où  M.  Collin 
a  un  article  sous  le  nom  de  Collis 
(I'Amblt  ,  il  a  publié  :  i"  Une  Pe- 
tite gcograpfde  départementale,  ter- 
minée par  les  curio«ités  de  l'uni- 
vers. Elle  a  eu  deux  éditions  en 
deux  ans,  i  vol,  in- 12.  a'  Logif/ue 
fimpiifitie,  ou  le  Maître  de  logique 
élémentaire,  à  ru>age  des  deux 
pcxes,  1  vol.  in-12;  3°  Gram- 
maire française  de  Lhomond  aug- 

T.  XX. 


DEN  369 

raenlée,  1  vol.  in-12;  4°  jP^- 
tile  histoire  de  France^  i  vol.  in- 
>2,  contenant  les  choses  extraor- 
dinaires, plaisantes,  tristes,  gaies, 
sérieuses  ,  louables  ,  exécrables 
qui  ont  eu  lieu,  les  devoirs  des 
rois  et  des  peuples,  etc.;  elle  est 
à  sa  deuxième  édition.  5°  Pc- 
tii  Répertoire  î\Vnsiig;e  de  la  jeunes- 
se ,  I  vol.  in-12.  C'est  une  espèce 
d'encyclopédie  historique  très-cu- 
rieuse. C'est  par  erreur,  ainsi  que 
nous  l'avons  dit  plus  haut,  que  le 
mot  d'AMBLY  a  été  joint  au  nom 
de  CoLLiN.  Cullin  d'Ambly  (Fran- 
çois) est  auteur  des  trois  dernier» 
ouvrages  qui  terminent  la  notice 
qui  porte  son  nom,  laquelle  no- 
tice, A  part  ces  trois  ouvrages,  ap- 
partient à  M.  Collin  (Pierre-Ni- 
colas). 

COLANGELO  ,  évêque  ita- 
lien ,  voy.  le  Supplément  du  to- 
me XVI II. 

COUSIN,  professeur  i  l'acadé- 
mie de  Paris,  voy.  le  Supplément 
du  tome  XVI. 

DAMAS ,  lieutenant-général , 
voy.  le  Suppléaient  du  tome  V. 

DAMAS,  général  de  brigade, 
voy.  le  Supplément  du  tome;  V. 

DARCET  (Jean- Pierre -Jo- 
seph )  ,  voy.  le  Supplément  du 
tome  VI. 

DARCET,  chimiste,  roy.  le 
Supplément  du  tome  VI. 

DECANDOLLE,  botaniste,  tY-j. 
le  Su|)[ilément  du  tome  V. 

DECOUZ,  lieutenant-général, 
voy.  le  Supplément  du  tome  XI. 

DELAIÏRE  ,  maréchal  -  de- 
camp,  voy.  le  Supplément  du  to- 
me V.      . 

DENTZKL  (le  baron),  maré- 
chal -  de  camp,  voy.  le  S  ipplc- 
mcnldu  tome  XI. 

M 


3yo  DOU 

DERREY  (N.),  ancien  maire  de 
Toulouse,  voy.  le  Supplément  du 
tome  XV. 

DEVlSaiE,  voy.  l'Erratadu  to- 
me XIII. 

DEWAILLY,  architecte, »oj.  le 
Supplt'iment  du  tome  XVIII. 

DëWARENGHIEN  (baron), 
voy.  le  Supplément  du  tome  VI. 

DINCOUUT  UE  METZ,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XVI. 

DOIJRILLE  (Joseph),  connu 
sous  le  nom  de  Dourille  de  Crest, 
membre  de  l'académie  de  Bruxel- 
les, et  de  plusieurs  sociétés  litté- 
raires, est  né  à  Crest  (Drôme),  le 
3i  mai  1790.  Il  entra  au  service 
en  1808,  et  fit  les  campagnes  du 
Tyroi  et  de  l'Allemagne,  en  18^08 
et  1809.  Blessé  à  Trente,  et  à  Wa- 
gram,  il  revint  dans  ses  foyers 
avec  un  mémoire  de  proposition 
pour  la  retraite;  mais  le  duc  de 
Feltre  (?;oy.CLARRE),  alors  minis- 
tre de  la  guerre,  lui  assigna  une 
simple  gratification,  que  M.  Dou- 
rille  ne  voulut  point  recevoir.  En 
i8i4î  il  était  un  des  secrétaires  de 
M.  le  marquis  d'Escorches  de 
Sainte-Croix,  préfet  du  départe- 
ment de  la  Drôme.  Son  zèle,  son 
aptitude  et  sa  loyauté,  lui  acqui- 
rent l'estime  de  ce  digue  magis- 
trat, notamment  pendant  l'inva- 
sion de  la  France  par  les  troupes 
étrangères.  M.  Dourille  avait  don- 
né des  preuves  du  patriotisme  le 
plus  pur,  soit  en  secondant  les  0- 
pératious  du  sous-préfet  dans  ces 
momens  difficiles,  soit  en  contri- 
buant de  ses  propres  deniers  à 
l'habillement  des  braves  gardes 
nationales,  appelées  i  la  défense 
de  la  patrie.  Au  retour  de  Napo- 
léon, il  prit  une  part  très-active 
aux  événcmens  dont  la  Drôme  fut 


DOU 

le  théâtre.  A  la  seconde  restaura- 
tion, il  perdit  son  emploi,  et  fut 
proscrit  de  Valence.   Rendu  à  sa 
famille,    M.    Dourille   sollicita  et 
obtint,   sous  le  ministère  de  M. 
Decaze,  un  brevet  de  libraire;  mais 
peu  propre  au  commerce ,  il  l'a- 
bandonna pour  se  livrer  entière- 
ment à  la  littérature.    En   1822, 
il  fit  des  démarches  instantes,  au- 
près de  M.  le  général  La  Fayette, 
pour  l'engager  à  solliciter  du  gou- 
vernement une  permission  eu  fa- 
veur du  général.  Carascosa,  afin 
que  celui-ci  pût  s'établir  en  Fran- 
ce avec-sa  famille  ,  sans  courir  le 
risque  d'être  livré  à  ses  ennemis, 
mais   M.  de  La    Fayette   lui    ré- 
pondit   que    le    moment    n'était 
pas  favorable.  M.   Dourille  fut,  à 
la  même  époque,  le  rédacteur  des 
Tablettes  de  la  brome,  petit  jour- 
nal qui  s'imprimait  à  Valence,  et 
pour  lequel  il  fut  traduit  en  poli- 
ce correctionnelle,  condamné  par 
défaut,  et  ensuite  acquitté.  Il  fut 
aus^i  le  rédacteur  en  chef,  du  jour- 
nal l'Argus,   qui  parut  en  1824. 
Nous  avons  de  lui  les  romans  sui- 
vans,  qui  sont  d'un  genre  sombre  : 
Romalino,  2  vol.  in- 12,  i'aris,  Pi- 
goreau,  1821;  l'Espagnol,  2  vol. 
in- 12,  fig.,  Paris,  Lelerrier,  iSif); 
Holdar,  ou  le  tribunal  mystérieux^ 
2  vol.   in- 12,  fig.,  Paris,  Brian- 
chon,   1826;  le  Parricide,  ou  les 
Calabrais,  2  vol.  iu-i2,  fig.,  Pa- 
ris, Persan,  1825.  On  annonce  du 
même  auteur,  comme  devant  pa- 
raître   incessamment  :  Henri   de 
Lorraine,  ou  la  coursons  Cliarles 
IX  et  Henri  III,  l'Enfant  de  l'é- 
chafaud,  et  l'Obligeant,  roman  de 
moeurs.  Ces  trois  derniers  ouvra- 
ges forment  également  2  vol.  cha- 
cun dans  le  même  format  que  les 


DUC 

précédens.  M.  Dourillc  est  au??i 
connu,  par  diverses  poésies  insû- 
réesdiins  plusieurs  recueils, notam- 
ment dans  celui  des  Muses  du  Midi, 
années  1822  et  1825.  Lors  de  l'a- 
vènement de  Charles  X  au  trône, 
il  fit  paraître  une  épître ,  qui  eut 
deux  éditions.  La  seconde  est  sui- 
vie d'un  Songe  de  F^apoléon,  Paris, 
Trouvé,  1824.  Il  a  en  outre  publié, 
à  l'occasion  du  sacre  de  Charles  X, 
un  Chant  dithyrambique.  Ce'te 
pièce  a  été  réimprimée  dans  la 
Couronne  poétit/ue  de  Charles  X  , 
publiée  par  le  libraire  Bouquin  de 
la  Souche.  M.  Dourillc  est  aujour- 
d'hui (1825)  attaché  à  la  rédaction 
de  plusieurs  journaux. 

DRALET,  homme  de  lettres, 
voy.  le  Supplément  du  tome  X. 

DKOZ,,  graveur,  voy.   le  Sup- 
plément du  tome  XIII. 

DUCASSE,  médecin,  voy    le 
Supplément  du  tome  XIII. 

DUCHESNE  (Jean),  né  à  Ver- 
sailles, le  28  déceujbre  1779,  d'une 
famille  attachée  aux  bâlirnens  du 
roi;  il  reçut  chez  son  père  une 
bonne  éducation,  qui  lut  inter- 
rompue, en  I7<j5,  pur  le<  événe- 
mens  de  celte  époque;  il  vint  à 
Paris  i\  la  fin  de  »704i  cl  suivit 
plusieurs  cours  au  lycée,  depuis 
Athénée  des  arts,  seul  refuge  a- 
lors  de  rinstructii)n  publi(jue.  Il 
se  destinait  ii  entrer  à  l'école  po- 
lytechni(pJo ,  quand  le  hasard  lui 
olfrit  une  place  à  la  Bibliothèque 
nationale,  aujounrhui  bibliothè- 
que du  roi,  où  il  est  coasiamment 
resté  depuis  1795.  Quelques  an- 
nées encore,  il  se  livra  ù  l'étude 
des  mathématiques  et  de  la  chi- 
mie ,  ainsi  qu'à  celle  du  dessin  ,  et 
chercha  ii  faire  partie  de  l'expédi- 
tion du   capitaine  B.iudin;  mais 


DUC 


071 


sa  famille  s'y  étant  opposée  ,  il  cul- 
tiva pendant  quelque  temps  l'ait 
de  la  gravure  en  bois,  enfin  il 
abandonna  entièrement  ces  di- 
verses parties  pour  s'occuper  ex- 
clusivement de  la  connaissance 
des  estampes.  De  nombreuses  aug- 
mentations arrivées  au  départe- 
ment des  estampes  de  la  biblio- 
thèque nationale  pendant  larévo- 
lution  ,  y  avaient  été  seulement 
déposées,  et  il  devenait  difficile 
d'en  faire  jouir  le  public,  parce 
qu'elles  n'étaient  pas  portées  sur 
les  catalogues.  La  révolution  a- 
vait  causé  quelques  bouleverse- 
mens  dans  l'ordre  des  volumes 
d'estampes,  d'ailleurs  l'ancien  ar- 
rangement ne  pouvait  plus  con- 
venir pour  une  collection  aussi 
nombreuse.  M.  Duchesne  sentant 
la  nécessité  d'établir  un  ordre 
mieux  raisonné,  ciéa,  d'après  les 
idées  du  baron  de  Himecken  ,  une 
méthode,  an  moyen  de  hiquelle 
on  peut,  classer  facilement  les 
grandes  collections  d'estampes  et 
les  simples  recueils.  Tous  les  ou- 
vrages d'art  sont  divisés  en  vingt- 
quatre  classes ,  à  chacune  des- 
(juelles  est  attribuée  une  lettre  ma- 
juscule; chaque  classe  est  subdi- 
visée en  plusieurs  sous-classes, 
avec  une  lettre  minuscule,  un  nu- 
méro indique  la  place  du  volume 
dans  la  sous-classe  à  laquelle  il 
appartient.  Lorsqu'une  collection 
est  peu  nombreuse,  un  porte- 
feuille peut  suffire  pour  renfermer 
toutes  les  estampes  d'une  sous- 
classe,  ou  même  d'une  classe  en- 
tière. M.  Duchesne  fut  admis  au 
nombre  des  membres  de  l'athé- 
née des  arts,  el  parl.igua  les  nom- 
breux travaux  de  celte  société  lil- 
térairc  dans  les  diverses  commis- 


57  a  DUP 

sions  dont  il  fit  partie  i.t  dont  il 
fut  souvent  rapporteur;  ses  con- 
frères lui  donnèrent  un  témoi- 
gnage de  confiance  et  d'estime  en 
l'appelant  à  la  place  de  secrélaire 
de  la  classe  des  beaux -arts,  et 
plus  tard  à  celle  de  secrétaire-gé- 
néral. Plusieurs  notices  de  lui  ont 
été  publiées  dans  les  journaux, 
ou  ont  été  imprimées  séparément, 
telles  sont:  i".  Quelques  idées  sur 
l'établissement  des  frères  Pira- 
nesi,  1802;  2°.  Rapport  l'ait  à  l'A- 
thénée des  arts  de  Paris,  sur  la 
fonte  de  la  statue  de  Jeanue-d'Arc, 
i8o5;  3°.  Notice  historique  sur 
la  vie  et  les  ouvrages  de  Jules- 
Hardouin  Mansart  ;  4°-  Compte 
rendu  des  travaux  de  l'alhénôedes 
arts  dans  la  séance  publique  de 
marsi8o6;  5°.  Eloge  historique  de 
Pierre  Puget,  1807;  6°.  L'Opéra, 
le  Trésor  et  la  Bibliothèque  du 
lloi,  1819;  ç°.  Persiennes  et  Ja- 
lousies, 1823;  Notice  des  estam- 
pes exposées  à  la  bibliothèque  du 
roi,  1825.  La  première  édition 
avait  paru  en  1819.  9°.  Compte 
rendu  à  S.  Exe.  le  ministre  de  l'in- 
térieur du  voyage  fait  en  Angle- 
terre par  l'auteur,  1824  ;  10°.  Cou- 
pole de  Sainte-Geneviève,  peinte 
par  M.  Gros,  182^;  11°.  Essai 
sur  les  vieilles  gravures  des  orfè- 
vres Florentins  du  i5*  siècle,  1 
vol.  in-8». 

DUMONT  (André),  voj.  l'Erra- 
ta  du  tome  X, 

DUMOURIEZ,  général,  voy.  le 
Supplément  du  toine  VL 

DUPERRÉ,  contre-amiral, l'oj. 
le  Supplément  du  tome  VI. 

DU  PORT  (Adrien).  C'est  à  tort 
que  dans  le  vol.  6  de  cet  ouvrage 
nous  avons  dit,  d'après  des  ren- 
seignemcns  inexacts,   qu'Adrien 


FArU 

Duport  •  s'évada  des  prisons  de 
Meluu.  »  Voici  le  fait  :  A  peine 
Duport  était-il  arrêté,  qu'il  en- 
voya à  M.  Baillot,  membre  de 
l'assemblée  constituante  [voy.  ce 
nom  au  supplément  de  ce  vol.  ) , 
l'abbé  Juliette,  jeune  homme  don- 
nant à  celte  époque  de  belles  es- 
pérances, pour  l'instruire  de  la 
position  fâcheuse  dans  laquelle  il 
se  trouvait,  et  le  prier  d'obtenir 
de  Danton,  alors  mirn'stre  ,  qu'il 
serait  jugé  par  le  jury  de  Melun  , 
et  non  par  le  comité  révolution- 
naire. Danton  répondit  à  M.  Bail- 
lot  :  0  Si  je  puis  le  faire  seul ,  il 
sera  jugé  par  le  jury;  si  au  con- 
traire je  suis  obligé  do  le  deman- 
der, je  ne  m'en  occuperai  pas  dans 
l'intérêt  de  ma  popularité.  »  En 
effet  Duport  fut  jugé  à  Melun  par 
le  jtny  et  acquitté. 

DZIEWANOWSKI  (N.) ,  capi- 
taine, voy.  le  Supplément  du  to- 
me XVII. 

EBLE,  lieutenant-général,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XI. 

ECKART,  auteur,  voy.  l'Erra- 
ta    du    tome   XV. 

ESTEVE,  maréchal-de-camp, 
voy.  le  Supplément  du  tome  VIH. 

FABBRONI,  littérateur,  voy.  le 
Supplément  du  tome  X. 

FABVIER,  colonel,  voy.  le 
Supplément  du  tome  VII. 

FAGNANI  (le  comte),  voy.  le 
Supplément  du  tome  VIII. 

FALCK,  savant  hollandais,  r^j. 
le  Supplément  du  tome  VIII. 

FALKO^VSKI  (N.),  général 
de  brigade,  voy.  le  Supplément 
du  lome  XVII. 

FAREZ,  ancien  avocat,  voy.  le 
Supplément  du  tome  VIII. 

FAUCHER  (Les  frères),  voy. 
le  Supplément  du  tome  VII. 


FON 

FAURB  LA  JONQUIÈRE,  co- 

louei,  voj.  le  Suppléineiil  du  to- 
me XII. 

FITZ-GÉRALD  ,  voj.  le  Sup- 
plément du  tome  XIII. 

FLATÏERS  (  Jean  -  Jacqces  ) , 
sculpteur,  membre  de  l'académie 
des  sciences  de  Saxe-Weimar.  est 
né  à  Greveld,  département  de  la 
Roër,  sous  l'empire  français,  et 
maintenant  appartenant  au  roi  de 
Prusse;  élève  distingué  de  M.  Hou- 
don  sculpteur,  et  de  M.  David 
peintre,  il  venait,  en  18 15,  de 
remporter  le  second  grand-prix  de 
sculpture,  lorsque  les  dangers  dont 
la  patrie  était  menacée  à  cette  é- 
poque,  le  déterminèrent  à  voler  i^ 
sa  défense.  Nommé  sous-lieute- 
nant au  2*  régiment  d'infanterie- 
légère,  il  fit  la  glorieuse,  mais  fu- 
neste campagne  de  France,  qui  fut 
tL'rrainée  par  la  prise  de  Paris. 
En  1816,  M.  Flalters  fut  mis  à  la 
demi-solde;  il  rentra  alors  dans  la 
carrière  des  heaux-arts,  où  des 
succès  ont,  chaque  armée,  couron- 
né ses  eflorts.  Depuis  1819,  il  en- 
richit le  salon  du  Louvre,  de  ses 
productions,  parmi  lesquelles  nous 
citerons  :  une  statue  d'Hihà^  une 
statue  colossale  pour  le  tombeau 
du  général  Loyson,  une,  statue  de 
Ganimède,  enfin  une  statue  d^Eri- 
gone  dont  le  jésuitisme  du  jour 
voulait  défendre  l'exposilion  en 
182/1.  Dans  le  nombre  des  bustes 
échappés  à  sa  fécondité,  on  re- 
marque ctux  de  lord  Byron,  de 
Grétry,  de  Goethe,  de  MM.  iMa- 
nuel,  Méchin,  Lafitte,  etc.,  etc. 

FONTVANNE  DESJARDINS, 
ancien  maire  de  Versailles,  vox. 
le  Supplément  du  tome  XII. 

FONZI,  (hirurgien  dentisti!  , 
lojr.  le  Supplément  du  tome  VIU. 


GEN  575 

FODCHÉ,  duc  d'Olrante,  coy. 
lErrala  du  tome  X. 

FREY,  typographe,  voy.  le  Sup- 
jilément  du  tome  XV. 

GAFREIS,  peintre  saxon,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XII. 

GARNEREY,  peintre  dessina- 
teur, VOJ.  le  Supplément  du  tome 
XV. 

GARNIER  DE  SAIiNTES,  tv>y. 
le  supplément  du  tome  IX. 

GAULÏ  DE  SAINT-Gl'R- 
MAIN,  littérateur,  voy.  le  Sup- 
plément du  tome  XVII. 

GAUTIIEROT,  peintre  d'histoi- 
re, voy.  le  Supplément  du  tome 
IX. 

GAY  (M"*  Sophie),  voy.  le  Sup- 
plément du  tome  X. 

GENEVAY  (  Antoisk  -  Fran- 
çois), colonel  en  retraite,  ollicier 
de  la  légion-d'honneur,  chevalier 
de  Saint-Louis,  est  néàMoniflenr, 
département  du  Jura,  le  5o  dé- 
cembre 1776.  Il  entra  au  *ervice 
comn>e  volontaire  dans  le  lo*  ba- 
taillon du  Jura,  le  5  août  179-2,  et 
y  fut  nomn)é  capitaine;  il  fit 
aux  armées  du  Haut  et  Bas<-Rhin 
les  campagnes  de  1 792,  des  années 
2  et  3  de  la  république ,  et  passa  ù 
l'armée  d'Italie  en  l'an  4-  A  la  ba- 
taille de  Mondovi,  il  entra  un  des 
premiers  dans  la  redoute;  i\  celle  de 
(îasliglione,  avec  12  grenadiers, 
il  s'empara  de  2  pièces  de  canon  , 
•  et  fit  40  prisonniers.  Après  iv.  trai- 
té de  Campo-Formio,  étant  en  gar- 
nison à  Alexandrieen  Piémont ,  il 
obtint  le  25  germinal  an  (i,  un  con- 
gé d'un  mois,  qui  le  priva  de 
s'embarquer  ;\  Gênes,  avec  sa  de- 
mi-brigade; le  3  floréal,  8  jours 
après  son  départ  d'Alexandrie,  il 
se  rendit  S  Toulon,  d'où  devait 
partir  une  2*  expédition  pour  l'É- 


5;4 


GEN 


i^yple,  mais  qui  n'eut  pai<  lii!U.  La 
^jUerre  sur  le  point  de  recom- 
mencer cntr«;  la  France  et  l'Aulri- 
che,  les  délachemens  des  diff'j- 
rons  corps  de  l'armée  d'Oricni  se 
vendirent  à  Milan,  où  il?  furent 
organisés  eu  corps  d'infanterie  et 
de  cavalerie;  le  capitaine  Gcne- 
vay  y  cominanda  une  compagnie 
de  grenadier?.  Le  5  germinal  an  7, 
à  Tauffers  dans  le  Tyrol ,  avec  sa 
compagnie  et  une  de  carabiniers 
de  la  12*  demi-brigade  d'infante- 
rie légère,  il  coupa  de  sa  commu- 
nicalion  la  division  autriobienne 
commandée  par  le  général  Lau- 
don ,  s'empara  de  2  canons,  et 
contribua  à  la  ruine  de  celte  divi- 
sion ,  qui  en  tué?,  blessés  et  pri- 
sonniers, perdit  dans  celte  action 
5ooo  bommes  et  18  pièces  de  ca- 
non. Le  i5  floréal  an  7,  sur  la  rou- 
te de  Bellinzonna  à  Lugano,  il  en- 
leva 4  compagnies  de  grenadiers 
hongrois  retranchées  dans  un  ci- 
metière. Le  i3  prairial  de  k  mê- 
me année,  la  division  du  général 
Lecourbe,  dont  le  corps  d'expédi- 
tion infanterie  faisait  alors  partie, 
ayant  attaqué  le  corps  autrichien, 
qui  avait  franchi  le  Saint  Goihard, 
et  pénétré  dans  la  vallée  d'Urse- 
ren  ,  il  prit  le  colonel  autrichien 
commandant  l'avant-garde,  et  un 
capitaine;  après  la  défaite  des  ar- 
mées russe  et  autrichienne  en 
Suisse,  les  officiers,  sous-officiers 
et  soldats  du  corps  d'expédition, 
rejoignirent  à  Toulon  les  dépôts 
de  leurs  demi-brigades.  Il  com- 
manda la  compagnie  de  grena- 
diers du  bataillon  de  la  69*  demi- 
brigade,  faisant  partie  de  la  divi- 
sion du  général  Chabraud,  qui  à 
l'armée  de  réserve  dans  la  campa- 
gne de  l'an  S,  passa  le  petit  Saint- 


GEN 

liernard ,  et  força  le  fort  de  Bard  à 
capituler.  Au  passage  du  Mincio, 
le  5  nivôse  an  9.  le  capitaine  Ge- 
nevay  fut  cité  par  le  général  Seras 
pour  s'être  distingué  à  l'attaque 
des  hauteurs  de  Vallegio.  Il  prit 
part  <'i  la  campagne  de  l'an  10, 
dans  le  royaume  de  Napics,  et  à  la 
réorgani><ation  de  la  69*  denii-bri- 
gade,  après  son  retour  d'Egypte, 
il  commanda  ime  compagnie  de 
grenadiers;  il  a  fait,  à  Tarmée  sur 
les  côtes  de  l'Océan,  les  campagnes 
des  années  12  et  i3.  Au  camp 
de  Boulogne,  il  reçut  la  décoration 
des  braves.  Le  22  vendémiaire  an 
14»  il  se  distingua  à  la  bataille 
d'filchingen.  Le  i3  brumaire  de 
la  même  année,  la  brigade  du  gé- 
néral Roguet  s'empara  à  l'entrée 
des  gorges  du  Tyrol,  du  fort  de' 
Leutasch,  et  se  porta  à  Secfcid. 
Le  lendemain  14,  la  garnison  du 
fort  de  Scharnilz  se  voyant  tour- 
née, évacue  ce  fort  pour  se  retirer 
à  Inspruck.  Chargé  avec  sa  com- 
pagnie de  garder  à  Seefeld  la 
route  qui  de  ce  village  va  à  Schar- 
nilz, et  ayant  entendu  à  5  heures 
du  matin  un  mouvement  de  trou- 
pes sur  la  route,  il  se  porte  à  la 
rencontre  de  la  colonne  ennemie, 
que  ses  grenadiers  enfoncent  à  la 
baïonnette.  Huit  cents  prison- 
niers, un  drapeau  et  i3  pièces  de 
canon,  furent  le  résultat  du 
sang-froid  et  de  la  bravoure  du 
capitaine  Genevay.  Le  25  décem- 
bre 1806,  à  la  prise  de  Soldauw 
dans  la  Vieille-Prusse,  il  contri- 
bua à  enlever  un  drapeau  et  2  ca- 
nons. Nommé  chef  de  bataillon 
au  76'  régiment  d'infanterie  de  li- 
gne 6'  corps,  commandé  par  le 
maréchal  Ney,  il  reçut  la  croix 
d'officier  de  la  légion-d'hooncur. 


(JEN 

pour  s'Ctrc  distingtiéà  la  balaillo  de 
Friedland.  Envoyé  en  Espagne  et 
en  Portugal,  il  y  fit  les  campagnes 
de  1808,  180C),  1810,  i8i  I  et  1812; 
il  avait  été  blessé  en  iSoc).  Nom- 
mé major  le  28  janvier  18 15,  il 
passa  à  la  grande-armée,  au  140* 
régiment  de  ligne  division  Alhert, 
5'  corps,  commandé  par  le  prince 
de  la  Moskowa.  Sa  conduite  an 
combat  de  Wolseim,  le  19  août 
i8i3,  entre  la  division  Albert  et 
un  corps  de  20.000  Russes,  lui  va- 
lut le  grade  de  colonel  du  iSg" 
régiment.  Le  27  août  après  la 
malheureuse  affaire  de  la  Ratze- 
back  ,  le  i/<o'  et  une  compagnie 
d'arlilhrJe  légère  furent  envoyés 
sur  la  Buber,  pour  faire  passer  sur 
la  rive  gauche  de  cette  rivière ,  le 
grand  pure  d'artillerie;  ne  l'ayant 
pas  trouvé  au  lieu  indiqué,  il  se 
porta  sur  Kolbcrg,  où  il  avait  or- 
dre de  se  rendre,  mais  à  une  de- 
mi-lieue, une  forte  colonne  d'in- 
fanterie ,  de  cavalerie  et  d'artille- 
rie dirigée  vers  Kolberg,  s'é- 
tant  montrée,  il  rétrograda  sur  la 
Bober  où  il  arriva  à  G  heures  du 
soir.  Les  eaux  en  étaient  tellement 
grossies,  qu'il  de  venait  impossible 
de  tenter  le  passage  avec  de  l'in- 
fanterie ,  sans  l'exposer  à  une 
perte  certaine.  Un  paysan  dont  il 
s'empara,  refusant  de  lui  indiquer 
un  paîsage,  il  mit  pied  à  terre,  et 
entra  dans  la  Bober  tenant  le 
paysan  par  le  collet  ;  celui-ci  ef- 
frayé promit  alors  d'indiquer  un 
endroit  à  peu  près  guéable,  ;\  une 
demi-licue  de  là.  il  était  nuit  clo- 
se. Le  passage  s'elfeclue.  L'artil- 
lerie malgré  son  courage  et  sur» 
dévouement  perd  son  matériel; 
l'infanterie  perd  un  ollicier  et  i5 
hommes;  ainsi  par  l'aclivilû  et  lu 


GEN  575 

dévouement  de  son  m.-^or,  le  i4o' 
rejoignit  le  28  août,  sur  le  Zobau 
Wasser,  le  5*  corps  d'armée,  qui 
le  croyait  toudié  entre  le,s  mains 
de  l'ennemi.  Le  14  octobre  18 ij, 
le  général  Albert  ayant  ordonné 
au  colonel  Genevay  de  s'emparer 
du  village  de  Licbertwolkooell,  en 
avant  de  Léipsick,  il  y  pénètre  au 
pas  de  charge  à  la  lêle  de  son  ré- 
giment, tandis  que  le  j4>''  régi- 
ment l'attaquait  par  la  droite,  eu 
chasse  l'ennemi,  et  fait  beaucoup 
de  prisonniers  russes  et  autri- 
chiens. Le  16  octobre  à  la  bataille 
de  Waselnau,  il  parvint  avec  le 
chef  de  bataillon  Boarin  de  son 
régiment,  et  l'adiudaot-njajor  Ger- 
main du  iSâ*",  à  retirer  des  mains 
des  Un sseslcgénéral  comte  Maison; 
quelques  instans  après  le  colonel 
reçut  un  coup  de  feu  à  la  tête.  LeiQ 
juillet  i8i4î  le  roi  le  nonmia  che- 
valier de  Saint-Louis,  et  à  l'orga- 
nisation de  l'armée,  il  fut  placé  à 
la  suite  du  24'  régiment  d'infan- 
terie de  ligue,  dont  il  prit  le  com- 
mandement. Le  10  juin  181 5,  il 
a  fait  à  l'armée  des  Aljies,  sous  lo 
maréchal  Siichet,  la  campagne  de 
181 5,  et  fut  cité  par  le  maréchal 
pour  s'être  distingué  à  la  tête  de 
son  régiment,  le  i  5  juin,  à  Aiguës- 
Belle  eu  Savoie ,  où  le  régiment 
de  Savoie-infanterie  fui  pris  en 
entier.  Le  8  juillet  le  colonel  Ge- 
nevay couvrit  avec  son  régiment  la 
retraite  de  l'armée,  depuis  le  pont 
d'Ain  à  Molon,  et  de  là  à  Wexi- 
mieux.  Le  10  il  fut  placé  au  villa- 
ge de  Saint-Georges,  en  arrière 
de  Meximieux,  dangereuse  po- 
sition occupée  par  2  compagnies 
de  voltigeurs  et  100  dragons  du 
i8'.  Il  y  fut  attaqué  par  I'a\aut- 
garde    du    l'armée  autrichienne, 


570 


GKN 


qui  ne  put  le  chasser  de  »a  posi- 
tion ;  à  11  heur(;9  du  soir,  il  eut 
ordrt;  de  se  njtiier  et  de  se  rendre 
:\  Dagneux,  sous  les  ordres  du  gé- 
iiéial   comte   Mcynadier.     Le    1 1 
juillet,  le  2'['  régiment  l'ut  placé 
siïi'  les  bailleurs  eu  avaut  de  Da- 
fjneux,  un  bataillon  de  douani<;rs 
à  sa  droite,  et  un  du  67'  régiment 
à  sa 'gauche.  Au  jour  l'avanl-gar- 
de  autrichienne  parut,  «l  le  baron 
de  Frimonf,  Français  émigré  com- 
mandant en  chef  l'armée   autri- 
chienne, fit  ses  dispositions  pour 
chasser  les  Français  de  leurs  po- 
>ilioUs.  A  io  heures  le  baron  de 
Figuelmont  chef  d'état-major  de 
M.  de  Frimont,  et  un  colonel  au- 
trichien, arrivèrent  à  Dagneux  , 
pour   traiter  de    l'évacuation   de 
Lyon  ,  avec  l'adjudant-comman- 
dant  Ricci,   le  lieutenant-général 
f  acthod  et  M.  Jars  maire  de  Lyon; 
vers  les  2  heures  après  midi,  M. 
de  Frimont  impatient  sans  doute 
de  voir  que  ses  envoyés  ne  termi- 
naient pas  aussi  vite  qu'il  le  dési- 
rait, fait  marcher  ses  troupes  sur 
les  Français,  malgré  la  présence 
de  M.  de  Figuelmont,  et  d'un  co- 
lonel de  son  armée,  au  milieu  des 
troupes  françaises  ;  ces  dernières 
les  laissent  approcher,  et  font  sur 
elles  un  feu  si  bien  dirigé,  qu'elles 
sont  forcées  de  se  retirer;  elles  se 
rallient  et  marchent  de  nouveau 
en  avant  et  au  pas  de  charge:  la 
même  réception  lesattendail,  mais 
le  colonel  Genevay    reçoit   alors 
l'ordre  de  faire  cesser  le  feu,  et  le 
^     colonel  qui  avait  accompagné  M. 
de   Figuelmont   est   envoyé   près 
du  baron  de  Frimont,  pour  l'en- 
gagera ne  pas  renouveler  ses  mou- 
vemens    hostiles;    M.    le    baron 
irrité  de  la  résistance  qu'il  avait 


(.ES 

rencontrée  fait  marcher  fe«  trou- 
pes en  avant  pour  la  5' fois  ;  si 
les    troupes    françaises   n'avaient 
pas  eu  ordre  de  ne  point  faire  feu, 
M.   de   Frimont  aurait  encore  eti 
la  douleur  de  voir  ses  troupes  ré- 
trograder;   arrivées    à   cin(pianle 
pas,  les  Français  les  somment  de 
s'arrêter;  dtjs  oiTiciers  autrichiens 
répondent    qu'ils    ont    ordre    de 
marcher,  et  les  Français  leur  ré- 
pliquent qu'ils  ont  ordre  «le  gar- 
der leurs  positions  ;   pendant  ces 
pourparlers,  le  colonel   Genevay 
s'apercevant  qu'une  colonne  en- 
nemie est  sur  le  point  de  heurter 
la   gauche  de  sou   régiment,  s'y 
porte  au  galop,  met  pied  à  terre, 
se  jette  seul  au  n)ilieu  de  cette  co- 
lonne, et  demande  à  parler  au  gé- 
néral qtn"  la  commande;  un  olTi- 
cier  autrichien  l'accompagne  et  le 
conduit  au   général,  qui  était  à  la 
gauche  de  lacolorme.  «M.  le  géné- 
ral, lui  dit  le  colonel,  vous  pouvez 
disposer  de  ma  vie,  mais  si  à  l'ins- 
tant   vous  ue   faites   arrêter    vos 
troupes,  M.  le  général  baron  de 
Figuelmont,    qui    c-t    entre    les 
mains  des  Français,  dans  dix  mi- 
nutes a  cessé  de  vivre.  »  Le  géné- 
ral autrichien,  plus  humain  et  plus 
sage  que  M.  de  Frimont,  fait  aus- 
sitôt arrêter  sa  colonne,  donne  sa 
parole  au  colonel ,  que  ses  trou- 
pes passeraient  la  nuit  dans  la  po- 
sition qu'elles  occupaient  dans  ce 
moment,  et  fait  accompagner  le 
colonel  par  4  olficiers ,  pour  re- 
tourner à  son  régiment.  Les  Fran- 
çais et  les   Autrichiens  passèrent 
ainsi  la  nuit,  à  10  pas  les  uns  des 
autres.  La   convention  de  l'éva- 
cuation   de   Lyon    ayant    été    si- 
gnée, les  Français  quittèrent  leujs 
positions  le  12  à  midi,    pour    se 


GRE 

rendre  à  iMirebel.  Après  le  liceii- 
cieraent  de  l'uruiéc,  le  colonel  Gè- 
ne vay  se  retira  dans  le  Jura,  où 
pour  prix  du  sang  qu'il  avait  ver- 
sé pour  la  patrie,  il  fut  long-temps 
per?éculé;  enfin  il  vit  paisible- 
ment aujourd'hui  (iSa;)),  dans 
une  modeste  r<îtraile,  n'ayantpour 
toute  fortune  depuis  le  i"  janvier 
1823,  que  la  solde  de  retraite  à  la- 
({uelle  ses  services,  ses  campagnes 
elses  blessures  lui  ontdonné  droit. 
GEORGET,  peintre,  voy.  le 
Supplément  du  tome  X. 

(iILCHRIST,  orientaliste  an- 
f;lais,  voy.  le  Supplément  du  to- 
me XV. 

GOICOECHEA  ,    professeur, 
i"/.  le  Supplément  du  tome  VIII. 
GOUVION  SAINT-CYR,  ma- 
réchal de  France  ,  voy.  lo  Supplé- 
ment du  tome  XVI. 

GRANGENEUVE,  avocat,  voy. 
le  Supplément  du  tome  IX. 

GRAPPIN,  chanoine,  voy.  le 
Supplément  du  tome  XII. 

GREGORIO  (IlosAïKc),  naquit 
à  Palerjne  en  octobre  i^SS.  Il  en- 
tra dès  sa  jeunesse  dans  la  carrière 
ecclésiastique.  Doué  d'un  esprit 
prompt,  d'une  mémoire  heureuse, 
il  réunissait  à  une  imagination 
vive  un  jugement  sûr.  Il  ne  tarda 
pas  i\  se  faire  remarquer  par  ses 
qualités  et  ses  talens  ,  qui  le  tirè- 
rent bientôt  de  son  obscurité.  Suc- 
cessivement lecteur  en  théologie, 
chanoine  de  la  cathédrale,  abbé 
de  Sainte-Marie  de  Roccudia  et 
historiographe  du  roi,  il  s'est  li- 
vré avec  succès  à  des  travaux  his- 
toriques, et  particulièrement  sur 
riiisloire  de  son  pays.  Lorsqti'en 
•  784  parut  le  fameux  Codice  di- 
ptomalico  di  Sirilia ,  que  l'abbé 
Vtlla  prétendait  avoir  traduit  de 


GRE  5;7 

l'original  arabe,  c'est  M.  Gregorio 
qui,  le  premier,  en  1786,  com- 
mença t\  en  découvrir  et  à  en  faiie 
connaître  la  fausseté.  C'est  alors 
qu'il  s'appliqua  beaucoup  à  la 
langue  arabe,  dont  la  connais- 
sance lui  devint  aussi  facile  que 
celle  de  la  langue  grecque.  Il  pu- 
blia ,  en  1790,  dans  un  volume 
in-folio,  la  traduction  de  plusieurs 
morceaux  d'écrivains  arabes  qu'il 
avait  tirés  de  la  bibliothèque  de 
l'Escurial  et  de  celle  de  Paris;  et 
il  y  joignit  la  iraduclion  de  diffé- 
rentes inscriptions  arabes  ,  dont 
la  Sicile  abonde.  Il  parvint  ainsi 
à  lier  ensemble  les  travaux  que 
di  Giovanni  avait  faits  sur  l'époque 
byzantine  à  ceux  de  Cnruso  sur 
l'époque  de  la  domination  des 
Normands  et  des  Suèves  en  Si- 
cile. Cet  ouvrage  mérita  que  RI. 
Dacier  en  fît  mention  et  en  parlât 
avec  éloge  dans  son  rapport  à 
l'empereur  Napoléon  sur  l'état 
des  sciences,  etc.  On  ne  douta 
plus,  en  1795,  de  la  fausseté  du 
Code  de  l'abbé  Vella,  ce  qui  fit 
beaucoup  d'honneur  au  chanoine 
(iregorio  ,  qui  avait  dû  vaincre 
dans  celte  occasion  bien  des  dilli- 
cultés  et  des  ob>la(les.  En  atten- 
dant, on  avait  déjà  établi  dans 
l'université  de  Pnlerme  la  chaire 
de  droit  public  sicilien,  dont  M. 
Gregorio  avait  été  nommé  pro- 
fesseur. Il  eut  alors  devant  lui  un 
champ  vaste  pour  se  livrer  à  la 
diplomatie  sicilienne,  qui  était  en- 
core presque  dans  son  enfance. 
C'est  avec  beaucoup  de  peine  que 
visitant  les  archives  des  églises  et 
des  thancellerie? ,  et  fouillant  les 
lois  anciennes,  les  coutumes  (ro/j- 
siiàtudcfi)  des  villes,  les  chroni<]ue< 
et  les  vieux   diplômes  ,   il   réus- 


578  G  RU 

sit  à  ramasser  les  malciiaux  dont 
il  avait  besoin.   Le  premier  fruit 
de  SCS  recherches   fui  la  BibliO' 
tkcijue  aragonaise ,  qu'il  publia  en 
3  vol.  en  1793,  et  dans  laquelle 
il  fait  connaître  l'état  du  droit  pu- 
blic en  Sicile  du  temps  des  Ara- 
gonais.  Quelque  temps  après,  en 
1794,  parut  la  savante  introduc- 
tion à  son  grand  ouvrage  du  droit 
public  sicilien,  et  c'est  en  i8o5 
qu'il  publia  les  deux  premiers  vo- 
lumes de  cet  ouvrage,  sous  le  titre 
modeste   de   Considerazioni  suUa 
sloria  di  SicUia.  11  y  prend  pour 
point  de  départ  l'organisation  po- 
litique que  la  Sicile  eut  du  temps 
des  Normands,  et  il  montre  en- 
suite avec  beaucoup  de  sagacité 
et  de  finesse  tous  les  changemens 
survenus  dans  cette  île  sous  les 
différentes  dynasties  qui   se  sont 
succédé  depuis.  Dans  une  matiè- 
re qu'on  avait  tant  négligée  avant 
lui,  et  dans  laquelle  cependant  il 
faut  avouer  qu'on  devait  déjà  beau- 
coup aux  travaux  de  Moncilore  et 
du  savant  archevêque  monsignor 
Testa,  on  fit  en  peu  de  temps  bien 
des  progrès;  et  la  Sicile,  qui  était 
encore  restée  fort  en  arrière,  peut 
maintenant,  après  M.  Gregorio, 
ne  pas  envier  certainement  Hume 
à    l'Angleterre  ,    ni    Mably    à    la 
France.  Il  paya  cher,  par  le  ra- 
pide épuisement  de  sa  santé,  l'a- 
vantage d'avoir  entrepris  et  exé- 
cuté ce  que  rarement  il  est  permis 
de  faire  à  un  homme  seul  ou  à 
un  seul  âge.  II  mourut  en  juin 
1809,  sans  qu'il  eût  pu  voir  la  pu- 
blication en  entier  de  son  ouvrage, 
dont  les  deux  derniers  volumes 
ne  parurent  qu'après  sa  mort,  en 
1810  et  en  1816.  II  n'eut  cepen- 
dant pas  le  regret  de  voir  dans  la 


HAD 

même  année  1816,  avec  la  fin  de 
son  ouvrage ,  la  fin  aussi  en  Sicila 
de  cette  constitution  dont  il  avait 
tracé  avec  tant  de  peine  et  à 
travers  tant  de  siècles  ,  l'origine 
et  les  développemens.  On  lui  a 
reproché  d'avoir  peut-être  trop 
favorisé  les  prérogatives  de  la  cou- 
ronne sur  les  autres,  et  notam- 
ment sur  celles  de  la  classe  baro- 
nale.  Il  paraîtra  sans  doute  excu- 
sable, si  l'on  considère  sa  situa- 
tion et  l'époque  où  il  écrivait  On 
a  de  lui  plusieurs  mémoires  et  des 
articles  sur  différens  objets  de 
l'histoire  civile  et  littéraire  de  Si- 
cile, qui,  tirés  en  partie  de  ses 
manuscrits  et  en  partie  des  alma- 
nachs  annuels  de  la  cour,  où  on 
les  insérail,  ont  été  réunis  et  pu- 
bliés en  1821  ,  dans  deux  vol. 
in-12.  La  Sicile  honorera  toujours 
la  mémoire  du  chanoine  Grego- 
rio, et  son  nom  fixera  une  époque 
dans  l'histoire  littéraire  de  son 
pays. 

HADOT  (madame  Marie-Adé- 
LAÏuE  Richard,  veuve  de  Barthé- 
lémy ) ,  romancière,  naquit  en 
1769,  et  mourut  à  Paris,  en  182 1. 
Cette  dame  a  été  institutrice  pen- 
dant la  révolution  ,  et  a  composé 
quelques  ouvrages  sur  l'éduca- 
tion. Elle  fut  obligée  de  cher- 
cher dans  les  produits  de  sa  plu- 
me des  moyens  d'existence  que 
lui  fournissait  bien  incomplète- 
ment son  pensionnat  primaire. 
C'est  autant  à  cette  nécessité  qu'à 
son  penchant  pour  la  littérature 
que  l'on  doit  sa  trop  grande  fé- 
condité dans  le  genre  du  roman 
et  dans  le  genre  monstrueux  du 
mélodrame,  double  genre  où  elle 
obtint  du  succès.  Son  style  com- 
me romancière  est  très-négligé. 


IIAD 

Subjuguée  par  son  imagination  , 
elle  composait  rapidement  et  d'a- 
bondance, et  ne  se  relirait  pas. 
Estimée  dans  ses  relations  socia- 
les ,  elle  se  fit  de  nombreux  amis  , 
et  convenait,  avec  une  modestie 
véritable,  de  l'imperfection  de  ses 
ouvrages,  dont  nous  citerons  les 
principaux.  Ce  sont  :  i"  Zadig, 
ou  la  Destinée ,  mélodrame  hé- 
roïque, en  3  actes,  tiré  du  ro- 
man de  Voltaire ,  joué  sur  le 
théâtre  de  la  Gaîté ,  le  7  fructidor 
an  12,  i8oi,in-8°;  1°  Maclovie, 
comtesse  de  TVarberg,  ou  la  Peine 
du  talion  f  mélodrame  historique, 
en  Sactes,  i8o5,  in-S";  '5°  l' Homme 
mystérieux,  mélodrame  en  5  actes, 
joué  sm"  le  (héâtTe  de  la  Gaîté,  le 
i>2  avril  1806,  in-8°,  1806;  4" 
Jean  Sohieski ,  ou  la  Lettre  ,  mé- 
lodrame en  3  actes,  joué  sur  le 
ihéAtre  de  la  Gaîté ,  le  22  mai 
1806,  in-S"  ;  5"  Jules ,  ou  le  Toit 
paternel,  mélodrame  en  3  actes, 
joué  sur  le  thétilre  des  Jeunes 
élèves,  le  )5  juillet  1806.10-8"; 
6°Àlméria,ou  l'Ecossaise  fugitive, 
mélodrame  en  5  actes,  joué  sur 
le  théâtre  des  Jeunes  élèves,  le  8 
décembre  180G,  in -8°;  7°  Clo- 
tildc  de  Ilapsbourg ,  ou  te  Tribu- 
nal de  Neœstadt,  Paris,  1810, 4  vol. 
in-12  ;  S°  Stanislas  Zamoski,ou  les 
Illustres  Polonais  f  1810,  4  ^ol. 
in-12;  9*  les  Loisirs  d'une 
bonne  mère,  ou  le  Décameron  de 
l' adolescence  y  181 1 ,  2  vol.  in- 12; 
10°  l' Amazone  de  Grenade,  mélo- 
drame en  Sactes,  représenté  sur  le 
théâtre  de  lu  Gaîté,  le  27  février 
1812,  Paris,  1812,  iu-8*  ;  ii' 
Claricc  ,  ou  la  Femme  précepteur, 
mélodrame  en  5  actes,  représenté 
sur  le  théâtre  de  la  (iaîté,  le  3omai 
1812,  Paris,  1812,  ia-8";  12"  les 


HAD  379 

Mines  de  Mazzara,  ou  les  Trois 
Sœurs,  Paris,  1812,4  vol.  in-ia; 
1 5"  les  Soirées  de  société ,  ou 
un  Hiver  à  Paris,  Paris,  i8i5i, 
4  vol.  in-12;  14°  Anne  de  Russie 
et  Catherine  d  Autriche ,  ou  les 
Chevaliers  de  l'ordre  Teulonlque  , 
et  la  Mère  écuyer ,  Paris  ,    1 8 1 3 , 

3  vol.  in-12;  i5"  Jacques  I" ,  roi 
d'Ecosse ,  ou  les  Prisonniers 
de  la  tour  de  Londres ,  Paris , 
i8i4>  4  vol.  in-12;  ifi"  tes 
Deux  Casimirs ,  ou  Vingts  ans  de 
captivité,  Paris,  i8i4,  4  v'-  J"" 
12;  17"  tes  Novices  du  monastère 
de  Frémol,  Paris,  1814,  4  ^^1. 
in-12;  18"  les  Durs  de  Mos- 
covie ,  ou  le  Jeune  Ambassadeur , 
Paris,  1814,  5  vol.  in-12;  19° 
la  Tour  du  Louvre,  ou  le  Héros 
de  Bouvines ,  Paris,  i8i5,  4  vol. 
in-i  2;  20"  ta  Vierge  de  i'Indoslan, 
ou  les  Portugais  au  Malabar,  Pa- 
ris, i8iG,4  vol.  in-i2;  21''/^'*  Af<^- 
ritiers  du  duc  de  Bouillon,  ou  les 
Français  à  Alger,    Paris,    i8i6, 

4  vol.  in-12.  ;  22°  l'Honneur  et 
rÉchafaud ,  mélodrame  en  5  ac- 
tes ,  joué  sur  le  théâtre  de  la 
Gaîté,  1816,  in-8°;  23'  Guil- 
laume Venn ,  ou  les  Premiers  Co- 
lons de  ta  Pensytvanie,  Paris,  i8i6, 
3  vol.  in-12  ;  24°  Isabelle  de  Po- 
logne, ou  la  Famille  fugitive,  Pa- 
ris, 1817,  4  vol.  in-12;  25"  les 
Vénitiens ,  ou  Je  Capitaine  fran- 
çais,  Paris,  1817,  4  vol.  in-i2; 
2G'  Archambaud  et  Roger,  ou  le 
Siège  de  Metz,  Paris-,  1817,  4 
vol.  in- 1 2  ;  27°  Atelwood  et  Clara, 
ou  la  Montagne  de  fer ,  Paris , 
1818,  4  vol.  in  12;  28°  Ernest 
et  Vendôme,  ou  le  Prisonnier  de 
Vincennes,  Paris,  1818,  4  vol. 
iu-12  ;  29"  Fernand  d'Alcantara, 
ou  la  Vallée  [de  Roncevaux ,  Paris, 


58o 


HAL 


1818,  4  vol.  in-13;  7)0'  Laurence 
de  Sully,  ou  C  H  ermitage  en  Suisse^ 
Paris,  1819,  4  vol.  in-12;  5i° 
Arahelle  et  Matkilde,  ou  les  Nor- 
mands  en  Italie,  Paris,  1819,  4 
vol.  in-12;  52°  la  Jicvolte  de  Bos- 
ton ,  ou  la  Jeune  liospilaliére ,  Pa- 
ris, 1820,  3  vol.  in  12;  "ôo" Pierre- 
le-Grand  et  lesStrciUz,  ou  la  For- 
teresse dela'Moskowa,  Paris,  1820, 
3  vol.  in-12;  54°  Mademoiselle  de 
Montdidier,  ou  la  Cour  de  Louis 
XI,  Paris,  1S21  ,  5  vol.  in-12, 
ornés  du  portrait  de  l'auteur.  Gel 
ouvrage  parut  la  veille  de  la  mort 
de    l'auteur. 

HALEVY  (Léon).  Depuis  l'ar- 
ticle que  nous  avons  consacré  à 
ce  jeune  liltérateur  dans  le  Sup- 
plément de  notre  18'  volume,  il 
a  publié  deux  productions  nou- 
velles :  i"  un  recueil  de  poésies 
.sous  ce  titre  :  Trois  élégies,  sui- 
vies d'un  fragment  épique.  Ce  re- 
cueil a  obtenu  un  succès  mérité;  le 
Sommeil  de  la  mourante  a  surtout 
réuni  tous  les  suffrages.  2°  Résu- 
mé de  r histoire  des  Juifs  anciens  , 
un  volume  in -18;  cet  ouvrage 
manquait  à  notre  littérature  :  il 
est  écrit  avec  beaucoup  d'impar- 
tialité et  de  mesure;  l'auteur  s'est 
attaché  surtout  à  présenter  les 
faits  sous  leur  aspect  dramatique 
et  pittoresque.  Malgré  les  bornes 
étroites  dans  lesquelles  il  était  o- 
bligé  de  se  resserrer,  il  a  rendu 
son  travail  très-substantiel  ettrès- 
complet.  La  partie  de  son  i-ésumé 
où  il  traite  de  Jésus-Christ  et  du 
christianisme  naissant,  est  d'au- 
tant plus  (ligne  d'attention  ,  que 
M.  Léoif  Halevy  est  israélite.  «  La 
religion  juive,  dit-il,  par  son  dog- 
me de  l'unité  de  Dieu,  par  l'excel- 
lence cl  la  liberté  de  sa  morale , 


HAL 

était  destinée  à  devenir  ia  religion 
de  la  civilisation  moderne.  Mais 
il  fallait  pour  cela  compléter  sa 
morale  au  lieu  de  la  restreindre. 
Il  fallait  remonter  à  sa  source  di- 
vine, la  reprendre  dans  sa  pureté 
primitive,  pour  lui  faire  subir  une 
transfiguration  conforme  aux  be- 
soins et  à  l'esprit  du  temps.  C'est 
ce  que  tenta  Jésus;  il  remonta  ù 
Moïse,  comme  Luther,  dans  la  sui- 
te, est  remonté  à  Jésus-Ciirist.  »  Il 
faut  voir  dans  l'ouvrage  même, 
con)ment  l'auteur  développe  cet- 
te idée  par  une  analyse  tidèle  de 
l'Evangile;  et  comment  il  démon- 
tre en  même  temps,  que  d'après 
les  lois  juives,  Jésus-Christ  de- 
vait subir  la  peine  capitale.  M. 
Halevy  termine  son  histoire  à  la 
prise  de  Jérusalem  par  Titus;  et 
après  avoir  tracé  en  peu  de  pages, 
un  tableau  brillant  et  animé  des 
juifs,  pendant  la  dispersion,  et  de 
leur  état  présent,  il  adresse  à  ses 
co-religionnaires  des  conseils  que 
nous  voudf'ions  pouvoir  reprodui- 
re ici  en  entier:  il  les  engage  à  in- 
troduire dans  leur  culte  des  réfor- 
mes «  dont  l' urgence  est  reconnue 
»  par  tous  les  esprits  éclairés  ;  ce 
»  culte,  ajoute-t-il,  n'est  pas  euro- 
opéen,  il  est  asiatique;  il  gêne 
«dans  beaucoup  de  parties  l'exer- 
»  cice  des  droits  et  des  devoirs  ci- 

«viques La  religion  de  Moïse, 

«ramenée  à  son  principe  pour  su- 
obir  les  nouvelles  formes  qu'exi- 
Bgent  les  besoins  du  temps,  repro- 
«duirait  le  christianisme  primitif, 
»si  étrangement  déûguré  par  les 
«Pharisiens  du  catholicisme.  »  Si 
nous  nous  sommes  un  peu  éten- 
dus sur  cet  ouvrage,  c'est  qu'il  est 
doublement  important  et  par  la 
manière  dont  il  est  exécuté,    et 


IIEN 

par  la  position  partic«ili«;re  de  l'au- 
teur. 

HAMMER  (de),  orientaliste, 
voy.  le  Supplément  du  tome  XVI. 

HEIBERG,  littérateur,  voy.  le 
Supplément  du  tonte  XII. 

HENAULT  (Jean-François), 
négociant,  voy.  le  Sup.  ^du   t.  X. 

HÉNIN   DE  eu  VILLE  lis 

(  ÉtIEHNE-FÉLIX  ,  BARON  d'  )  ,    MM- 

réclial-de-camp,  tic.  [Voy.  sur  le 
même  nom  ce  qui  en  a  été  dit  au 
IX*  I.  qui  précède,  pag.  1 2.'j  ;\ 
128,  et  dans  le  XIII'  suivant, 
pag.  267  à  358.)  Nous  ajouterons 
ici  que  M.  d'Hénin,  auteur  de 
plusieurs  ouvrages  dont  nous  a- 
vons  déjà  rendu  compte,  a  pu- 
blié, i"  la  continuation  de  ses 
Archives  du  Magnélisine  animal , 
tomes  V,  VI,  VU  et  VIII,  dans 
lesquels  on  remarque  do  savantes 
observations  physiologiques  des 
plus  curieuses  ,  avec  des  ré- 
ilexions  très- piquantes  sur  la  fa- 
culté de  prédire,  attribuée  aux 
somnambules,sur  les  rêves,  sur  les 
illusions  et  les  visions,  sur  le  som- 
meil extatique,  sur  les  miracles 
de  la  phanlmiéxoussie-oniroscopi- 
que  ,  qui,  suivant  cet  auteur,  sont 
tous  purement  naturels.  On  v  lit 
aussi  une  discussion  profonde  , 
dans  laquelle  M.  d'Hénin  admet 
lin»;  transfusion  de  facultés  mo- 
rales et  une  atmosphère  de  sensi- 
bilité ,  qui  agissent  réciproque- 
ment parmi  le'K  êtres  animés,  et 
qui  servent  à  expliquer  les  guéri- 
sons  et  les  prodiges  du  magné- 
tisme animal  ;  mais  il  prétend 
qu'il  serait  inconvenant  de  la  part 
des  médecins  de  jouer  le  rôle  iu- 
signifiant  de  magnétiseurs  exal- 
tés, et  de  déposer  l'honorahle 
chausse  de  docteur,  pour  vêtir  les 


HEN  58i 

livrées  du  charlatanisme.  On  trou- 
ve enfin  à  la  pag.  97  à    129  du 
VHP  tom. ,  une  dissertation  vrai- 
ment théologique,  dans  laquelle 
M.  le  baron  d'Hénin  avance  que 
Jésus-Christ,  comme  fils  de  Dieu 
et  comme  fils  de  l'homme,  a  opéré 
également  des  miracles  surnatu- 
rels, ainsi  que  des  phénomènes 
très-naturels,  improprement  ap- 
pelés   magnétiques  f    mais    qu'on 
doit,  dit-il ,  désigner  sous  le  nom 
de    miracles   phanlaziéxoussiquea. 
Il  en  conclut  que  le   christ   était 
magnétiseur,  et  que  c'est  en  Egyp- 
te qu'il  a  été  instruit  dans  l'art  de 
magnétiser.  II  fonde  cette  asser- 
tion sur  un  passage   du    célèbre 
apologiste    de    la    religion    chré- 
tienne, Arnobe  l'ancien,  qui  a  dit 
que  les  païens  prélendaient   que 
Jésus-Christ  avait  dérobé  les  pra- 
tiques secrètes  des  prêtres  égyp- 
tiens,  conservées  dans  les  lieux 
les  plus  cachés  de  leurs  temples. 
Mgyptiorum  ex  adylis  remotas  fu~ 
ratus  est  disciplinas.   (Arnobius, 
lib.    I,    contra  gentiles.)    Cette 
matière  était  délicate  sans  doute, 
et  l'auteur  paraît   l'avoir  traitée 
avec  toute  la  convenance  que  ce 
sujet  a  dû  lui  inspirer.    a°    Une 
nouvelle  édition  de  la  Monarchie 
des  Solipscs,  in-S".  Paris,  182 îj, 
précédée  d'un  discours  prélimi- 
naire, dans  lequel  M.  d'Hénin  y 
attaque  avec  una  éloquente  éner- 
gie les  intrigues  ambitieuses  des 
jésuites  ou  pères  de  la  foi,  et  y 
dévoile    hardiment    l'immoralité 
jésuitique  qui,  dit-il ,  menace  au- 
jourd'hui l'Europe  d'une  invasion 
générale.  5"  Des  Comédiens  et  du 
Clergé.  Cet  ouvrage  contient  des 
observations  historiques    sur   les 
prêtres  autrefois   danseurs,  far- 


582 


HER 


cciirs ,  comédiens,  fauteurs  cl 
spectateurs  de  comédies  dans  les 
églises,  et  est  suivi  de  réflexions 
critiques  sur  le  mandement  de  M. 
l'archevêque  de  Rouen. 

HERMAND(E.  L.  J.  D'.),  an- 
cien diplomate,  voy.  le  Supplé- 
ment du  tome  IX. 

HERSENT  (Louis), membre  de 
l'institut,  voj.  le  Supplément  du 
tome  XV. 

HERVÉ  (Christophe),  colonel 
de  Pex-ôg'  régiment  de  ligne, ofli- 
cier  de  la  légion-d'honneur ,  che- 
valier de  Saint-Louis ,  est  né  à 
Cernans,  déparlement  de  la  Sar- 
ihe,  le  i5  avril  1768.  Il  entra  au 
service,  comme  simple  soldai, 
>en  1785,  et  n'était  parvenu  en 
178g  qu'au  grade  de  l'ourrier.  M. 
Hervé,  qui  était  rentré  dans  ses 
loyers  au  comuiencementde  1791, 
reprit  de  l'activité  comme  volon- 
taire au  5'  bataillon  de  l'Yonne, 
en  1792,  et  n'a  cessé  d'en  avoir 
qu'en  1816,  époque  où  il  fut  ad- 
mis à  la  retraite.  Les  campagnes 
de  la  révolution,  où  il  montra  du 
talent,  de  l'activité  et  du  coura- 
ge, le  firent  parvenir  successive- 
ment au  grade  de  colonel,  et  lui 
valurent  la  croix  de  la  légion- 
d'honneur  le  26  prairial  aii  1  2  ,  et 
le  brevet  d'oflicier  du  même  or- 
dre le  12  octobre  1812.  Il  a  fait 
les  campagnes  de  i  792  à  l'armée 
de  réserve  ,  et  de  1795  à  l'armée 
du  Nord;  celles  des  années  2,3, 
4  et  5  aux  armées  du  Nord  et  de 
Sambre-et-Meuse;  de  l'an  6  aux 
armées  d'Allemagne  et  de  Mayen- 
ce;  de  l'an  7  à  l'armée  du  Danu- 
be et  d'Helvélitt-;  des  années  8  et 
9  en  Helvélie  cl  en  Italie;  des 
années  12  et  i5  sur  mer  :  il  fut 
embarqué  a  Toulon,  sur  le  Sci- 


HER 

ino7i;  de  l'an  14  et  de  i8o5  à  la 
gramlc-armée  ;  de  1806  cl  de  1807 
en  Prusse  et  en  Pologne;  de  1809 
à  la  grande  armée  d'Allemagne  ; 
de  1812  en  Russie,  et  de  i8i3  et 
1814  en  France,  au  blocus  de 
Schclestadt.  Cet  officier  a  tou- 
jours montré  beaucoup  de  bra- 
voure, notamment  au  combat 
d'Audeffingeu ,  où  il  fit  400  pri" 
sonnirrs,  et  où  il  fui  blessé  d'un 
coup  de  feu  au  flanc  et  au  bras 
gauche.  Dans  la  campagne  de  l'an 
g  ,  il  eut  le  commandeuieut  d'une 
compagnie  d'éclaireurs  au  passa- 
ge du  tMincio;  il  fut  ensuite  char- 
gé parle  général  commandant l'a- 
vanl-garde,  de  différentes  excur- 
sions en  avant  et  sur  les  flancs  de 
la  division;  il  s'en  acquitta  de 
manière  à  justifier  la  confiance  du 
général  et  à  acquérir  son  estime. 
Le  5  nivôse  an  9,  il  chargea  à  la 
lêle  de  sa  compagnie  sur  les  hau- 
teurs de  Valegio,  et  s'empara  de 
5  pièces  de  canon.  Le  21  avril 
1809,  le  général  Priant  lui  donna 
l'ordre  d'enlever  avec  sou  batail- 
lon le  village  de  Pering,  où  il  fit  un 
grand  nombre  de  prisonniers.  A  la 
bataille  de  Wagrani,  il  comman- 
dait le  108'  régiment.  Il  se  fit  re- 
marquer par  sou  courage  cl  sou 
sang-froid.  A  la  bataille  de  Mo- 
saïsck,  le  7  sepleuibre  1812,  il 
entra  un  des  premiers  dans  la  re- 
doute armée  de  18  pièces  de  ca- 
non, que  le  So"  régiujent  enleva 
à  l'ennemi.  Il  fut  blessé  d'un  é- 
clat  d'obus  au  combat  d'Ygyate, 
le  1*' novembre  i8ji2,àla  retraite 
de  Russie.  Cet  officier  supérieur 
jouit  dans  la  retraite  de  l'estime 
générale  que  lui  ont  méritée  ses 
longs  et  honorables  services  et  son 
inviolable  altachemenl  à  sa  patrie. 


J-c  (     a<'  rU^(r/i<j('/H>^/i 


LAN 

HOUDON  (N.  ),  membre  de 
l'inslilut,  vcy.  le  Supplément  du 
touie  X. 

llUIiLIN,  lieulennnt-général, 
voy.  le  Siippléuient  du  (orne  X. 

HUPPÉ,  colonel,  voy.  l'Enata 
du  tome  X. 

JEUZMANOWSKI  (lr  baron), 
voy.  le  Siipplémeut  du  tome  XVII. 

JOURDAIN,  orientaliste,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XI. 

JOVEN  DE  SALAS,  conseiller- 
d'état  espagnol,  xoy.  le  Supplé- 
n)eiit  du  tome  XI. 

JUDICIS,  ancien  magistrat, 
voy.  le  Supplément  du  tome  X. 

^KELLERMAN  ,  duc  de  Valmy, 
voy.  le  Supplément  du  tome  XI. 

KIRCKHOFF,docleur  en  mé- 
decine ,  %)oy  le  Supplément  du 
tome  XVI, 

KLICKI,  général  de  caVale- 
rie ,  voy.  le  Supplément  du  tome 
XVII.^ 

KOSSAKOWSRI,  général, poj. 
le  Supplément  du  tome  XVII. 

KOZIETULSKI,  chef  d'esca- 
dron, voy.  le  Supplément  du  tome 
XVII. 

LAFITIIE  ,  coI-)nel  ,  voy.  le 
Supplénj(!nl  du  tome  XI. 

LAMARCK,  savanl  naturaliste, 
voy,  le  Supplément  du  lome  XI. 

LAMARTINIÈRE,  -.  n.  i  •!  de 
divisir)n  ,  voy.  le  Suppiément  du 
tome  XII. 

LAMBALLE  (princesse  de), 
voy.  h;  Supplément  du  tome  XI. 

LANCitRON  (le  comte  de). 
(  D.ins  le  tome  X  de  la  Biogra- 
phie nouvelle  des  Contemporains , 
nous  a  von»  consacré  une  Notice  à 
M.  le  comte  de  I/jngerou,où  nous 
avons  traité  avec  une  grande  im- 
partialité ce  général  on  chef  étran- 
ger (|ui,  né  eo  France,  a  eu  le  mal- 
heur, par  5uitc  de  sa  position  po- 


LAN 


38" 


lilique  ,  de  combattre  ses  anôiens 
compatriotes  et  de  leur  faire  beau- 
coup de  mal  à  des  époques  (i795- 
i^f)4'  ï8i3-i8i4î)  où  ils  étaient 
à  la  fois  assaillis  par  d'implacables 
ennemis  et  par  des  désastres  de  tout 
genre.  Un  ami  deM.de  Langerona 
jugé  noire  article  incomplet,  et 
nous  a  communiqué  sur  sa  vie  des 
détails  que  nous  avons  accueillis, 
quoiqu'ils  nous  aient  paru  sou- 
vent minutieux,  parce  que  nous 
nous  sommes  toujours  fait  un  de- 
voir de  montrer  noire  parfaite  im- 
partialité et  de  réunir  dans  cet  ou- 
vrage tous  les  rcnsei-^neniens  qui 
peuvent  servir  à  éclairer  l'histoire 
contemporaine.  Nous  n'hésitons 
pas  à  croire  ;'i  l'exacliludedes  faits 
retracés  dans  celle  nouvelle  notice 
sur  M.  de  Langeron ,  en  laissant 
néanmoins  ii  l'auteur  une  entière 
responsabilité  sousce  rapport. )i>l. 
de  Langeron  est  issu  d'une  ancien- 
ne famille  noble  et  illustrée  du  Ni- 
vernais. Ses  ancêtres  s'étaient  il- 
lustrés dans  la  carrière  des  armes; 
il  fut  aussi  destiné  à  la  parcourir,  et 
son  éducation  fut  dirigée  vers  ce 
but.  Le  désir  de  s'y  distinguer  l'en- 
gagea non-seulement  à  profiler  des 
occasions  que  le  liasiird  lui  offrit, 
mais  encore  à  les  faire  naître.  La 
guerre  entre  la  France  cl  l'Angle- 
terre, déclarée  en  1778,  lui  j)ro- 
cura  bientôt  ce  qu'il  souhaitait 
avec  ardeur.  Au  commencement 
de  1770,  ''  H"'^'*'*  '•^  régiment  dis 
gardes-françaises,  où  il  servait 
comme  enseigne  surnuméraire, 
pour  entrer  sous-lieutenant  dans 
le  régiment  deLimosin-infanterie, 
dontson  oncle, lecomicde  Damas, 
était  colonel  :  ce  régiment  faisait 
partie  du  corps  d'armée  comman- 
dé pur  M.  le  marquis  de  Langeron, 
cousin  du  jeune   tuinlc,   cl  qui 


584 


LAN 


était  desliné  A  opérer  une  descente 
en  Angleterre.  Cetic  descente 
n'eut  point  lieu  :  mais  le  comte 
de  Langeron,  fuyant  la  vie  de 
Paris,  qui  pouvait  n'être  pas  sans 
attrait  pour  un  jeune  homme  de 
19  ans,  maître  d'une  grande  for- 
tune ,  entra  en  qualité  de  sous- 
lieutenant  dans  le  régiment  de 
Bourbonnais  infanterie,  comman- 
dé par  le  marquis,  depuis  duc  de 
Laval  -  Montmorency ,  et  partit 
avec  lui  de  la  Rochelle,  au  mois 
de  juillet  1782,  sur  la  frégate 
l' Ai-gie  ,  pour  l'armée  du  lieute- 
nant-général comte  de  Rocham- 
beau,  qui  se  trouvait  alors  dans 
l'Amérique  septentrionale ,  réunie 
à  l'armée  des  Etats-Unis,  sous  les 
ordres  du  général  "Washington. 
Le  comte  de  Langeron  se  trouva 
(en  septembre  1788)  au  combat 
glorieux  que  les  frégates  françai- 
ses L'Aigle  et  la  Gloire  soutin- 
rent contre  le  vaisseau  anglais 
l'Hector,  de  74  canons,  et  à  ce- 
lui que  les  deux  mc'mes  frégates 
eurent  dans  la  Delaware  contre 
l'escadre  anglaise  du  commodore 
Elphingston.  La  frégate  l'Aigle, 
que  montait  le  comte  de  Lange- 
ron, échoua  et  fut  prise  ;  mais  à 
l'aide  de  radeaux,  il  gagna  la  terre 
avec  le  général  baron  de  Yiomes- 
ni'let  autres  officiers  :  ils  sauvèrent 
5  millions  d'argent  que  la  cour 
envoyait  à  M.  de  Rochambeau , 
et  abandonnèrent  tous  leurs  équi- 
pages. Débarqué  près  de  Phila- 
delphie, le  comte  de  Langeron 
rejoignit  l'armée  alliée  au  camp 
de  Crampon  ,  sur  la  rivière  d'Hud- 
son  ,  et  marcha  ensuite  à  Boston  , 
où  il  s'embarqua  pourrAinérique 
méridionale  sur  l'escadre  com- 
mandée par  M.  le  marquis  de  Vau- 


LAN 

dreuil,  lieutenant-général  des  ar- 
mées navales  :  il  fit  la  campagne 
de  1785,  sous  les  ordres  de  M.  le 
général  baron  de  Viomesnil,  à 
Porto-Cabello,  à  Caracas,  dans 
la  Terre-Ferme  de  l'Amérique  mé- 
ridionale ,  à  Curaçao  et  à  Saint- 
Domingue.  Au  mois  de  juillet  de 
la  même  année,  la  paix  le  rame- 
na en  France ,  et  il  obtint  le  grade 
de  capitaine  au  régiment  de  Con- 
dé-dragons  :  en  1786,  il  fut  nom- 
mé colonel  en  second  du  régi- 
ment de  Médoc,  et  en  1788,  co- 
lonel surnuméraire  du  régiment 
d'Armagnac.  La  guerre  ven  lit  d'é- 
clater entre  la  Turquie  et  la  Rus- 
sie et  l'Autriche,  et  entre  la  Rus- 
sie et  la  Suède.  Le  comte  de  Lan- 
geron ,  fidèle  à  ses  principes  et  à 
son  désir  d'acquérir  de  la  gloire, 
sollicita  long-temps,  mais  vaine- 
ment, la  permission  de  servir 
comme  volontaire  dans  l'armée 
autrichienne;  malgré  la  protec- 
tion que  la  reine  de  France,  Ma- 
rie -Antoinette,  lui  accorda  au- 
près de  son  frère  l'empereur  Jo- 
seph II,  ce  prince  se  refusa  à 
admettre  des  volontaires  étran- 
gers dans  son  armée,  et  ce  refus 
fit  perdre  au  comte  de  Langeron 
deux  campngues  brillantes  qu'il 
eût  pu  faire  dans  l'armée  russe. 
Le  prince  de  NassauSiégen  qui, 
entré  depuis  peu  au  service  de 
Russie,  avait  vaincu  sur  mer  les 
Turcs,  prèsd'Otchakow,  en  1788, 
et  les  Suédois  dans  la  Baltique, 
en  1789,  se  chargea  d'obtenir  de 
l'impératrice  Catherine  II,  pour  le 
comte  de  Langeron,  la  permis- 
sion de  servir  dans  ses  troupes, 
et  il  partit  pour  Pétersbourg,  où 
il  arriva  le  19  mai  1790.  La  ré- 
volution française  était  commen- 


LAN 

côe.  Le  comte  de  Langeron  se 
flattait  de  revenir  bientôt  consa- 
crer à  sa  patrie  des  connaissances 
acquises  par  l'expérience;  le  sort 
en  ordonna  autrement,  et  il  ne 
devait  la  revoir  que  24  ans  après. 
Admis  en  qualité  de  volontaire  au 
servicedeRussie,  le  comte  de  Lan- 
geron fut  d'abord  employé  à  la  flo- 
tille  commandée  par  le  prince  de 
Nassau  :  elle  était  destinée  à  agir 
contre  les  Suédois  dans  la  mer 
Baltique.  On  lui  confia  le  com- 
mandement d'une  division  de 
chaloupes -canonnières,  et  il  se 
trouva,  en  juin  1790,  au  com- 
bat du  détroit  de  Biorck  :  sa 
conduite  lui  mérita  la  croix  de 
Saint-Georges  de  la  4'  classe.  Le 
lendemain,  il  se  trouva  au  com- 
bat des  deux  grandes  flottes  com- 
mandées par  l'amiral  ïchitcha- 
gow  et  par  le  duc  de  Sudcruianie , 
avec  qui  le  roi  de  Suède  se  trou- 
vait. Ce  combat  eut  lieu  près  de 
Rogcl,  el  après  la  défaite  des  Sué- 
dois ,  le  comte  de  Langeron  s'em- 
para, avec  sa  division  de  chalou- 
pes canonnières,  de  plusieurs  bà- 
timens  ennemis.  Huit  jours  après, 
i!  commanda  l'aile  gauche  des 
chaloupes  canonnières  à  la  san- 
glante bataille  de  Rotchensalm, 
où  la  flotille  suédoise,  comman- 
dée par  le  roi  en  personne,  dé- 
truisit la  flotille  russe.  Le  comte 
de  Langeron  courut  dans  caUn 
bataille  les  plus  grands  dangers. 
Il  combattit  pendant  vingt-deux 
heures  ,  et  ce  ne  fut  qu'avec  peine 
qu'il  gagna  la  rade  de  Frédérick- 
sham  ,  où  le  prince  de  Nassau  ras- 
sembla les  débris  de  ses  forces.  Il 
s'y  maintint  tout  l'été,  et  fit  mê- 
me ,  au  mois  d'août ,  une  expédi- 
tion dirigée  contre  l'ilcde  Corgé- 

T.    XX. 


LAN 


385 


sari,   dans  laquelle  le  comte  de 
Langeron  commanda  dix  chalou- 
pes-canonnières.   Après  la  paix 
avec  la  Suède,  qui  se  fit  au  mois 
d'août  1790,  le  comte  de  Lange- 
ron demanda  et  obtint  d'aller  ser- 
vir contre  les  Turcs,  en  Bessara- 
bie,  à   l'armée  commandée  par 
le    feld  -  maréchal    prince     Po- 
temkin  :  il  fut  attaché  à  la  flotille 
sous  les  ordres  de  l'amiral  Ribas  , 
qui  bloquait  Ismaël.   Cette  ville 
fut  prise  d'assaut,  le  21  décem- 
bre 1790  (  1"  janvier  1791).  C'est 
un  des  faits  d'armes  les  plus  mé- 
morables du  siècle.   Les  Russes , 
au  nombre  de  25, 000,  comman- 
dés par  le  général  Suwarow,  for- 
cèrent et  détruisirent  40, 000  Turcs 
dans  des  retranchemens  très-éle- 
vés,    précédés  de  fossés  de  plu- 
sieurs toises  de  profondeur.   Le 
comte  de  Langeron  monta  à  l'as- 
saut à  la  tète  du  i"  bataillon  de» 
chasseurs  de  Livonie,  qui  faisait 
partie  de  la  colonne  du  général 
Arseniew  :  celte  colonne,  qui  tra- 
versa le  Danube,  supporta  le  feu 
le  plus  meurtrier  pour  atteindre 
le  rempart  de  la  vilh^.  Les  débris 
des  bateaux  turcs  coulés  pendant 
le  siège,  empêchant  de  parvenir 
au  pied  de  ce  rempart ,  les  Russes 
se  jetèrent  dans  l'eau  pour  monter 
ensuite  h  l'escalade  ;  mais  ils  fu- 
rent repoussés  et  rejetés  dans  le 
fleuve  :  dans  la  chute  que  fit  le 
comte  Langeron ,  il  reput  une  con- 
tusion în  la  jambe.  C'est  la  seule 
blessure  qu'il  ait  reçue  dans  plus 
de  crut  affaires  de   guerre  où  il 
s'est  trouvé.  Cependant  les  Rus- 
ses, plus  animés  que  découragés 
par  la   défense  qu'on  leur  oppo- 
sait,   attaquent   de   nouveau,    et 
leur  intrépidité  est  couroimée  par 
a5 


38(i 


LAN 


'la  victoire,  que  In  hivivotire  'U"< 
.'issiiigôs  qui  comballiiioiit  fii  (iù- 
sespérés  rendit  plus  éclalaiite  en- 
core. Il  y  périt  3o,ooo  Turcs,  et 
les  Russes  eurent  |)rès  de  i4,ooo 
hommes  tués  ou  blessés;  c'était 
beaucoup  plus  que  la  moitié  des 
assaillans.  Le  comte  de  Langeron 
reçut  pour  ce  l'ait  d'armes  une 
épée  d'or,  avec  cette  inscription  : 
A  la  bravoure.  En  mai  1791,  il 
servit  encore  en  Moldavie ,  sous 
les  ordres  du  prince  Repnin,  en 
qualité  de  colonel,  attaché  au  ré- 
giment de  Moscow  grenadiers. 
En  juin  suivant,  il  se  trouva  à  la 
bataille  de  Matchin.  Il  chargea  les 
Turcs  avec  les  régimens  d'Olvio- 
pol  et  deVoronèje  hussards  ,  sous 
les  ordres  du  général  Tormazow, 
et  reçut  une  lettre  de  remercie- 
mens  du  prince  Ilepnin.  En  juin 
1791,  il  se  rend  h  Mons  (Ilainault), 
et  obtient  du  prince  de  Saxe-Tes- 
chen  du  service,  en  qualité  du  vo- 
lontaire, dans  son  corps  d'armée; 
il  se  trouva  au  combat  de  la  Gri- 
suelle  ,  où  le  général  Gouvion  fut 
tué.  Au  mois  de  septembre  même 
année,  le  comte  de  Langeron  se 
joignit  à  l'armée  des  gentilshom- 
mes français  émigrés,  sous  les  or- 
dres des  princes,  frères  de  Louis 
XVI;  il  fit  en  Lorraine  et  en  Cham- 
pagne ,  avec  l'armée  prussienne  , 
commandée  par  le  duc  de  Bruns- 
wick,  une  campagne  pénible  et 
peu  heureuse,  et  se  trouva  aux 
combats  de  Verdun  ,  de  Scy ,  et 
au  siège  de  Thionville.  Après  la 
retraite  de  l'armée  prussienne  et 
la  dissolution  de  celle  des  princes, 
le  comte  de  Langeron  retourne  à 
Pétcrsbourg.  L'impératrice  Ca- 
therine II  l'envoie  avec  le  duc  de 
Richelieu  dans  les  Pays-Bas  ser- 
vir de  nouveau  à  l'armée  autri- 


LAN 

chletmc!,  commandée  par  le  ma- 
réchal prince  do  Saxe-Cobourg  : 
il  est  chargé  de  rendre  compte  à  Pé- 
tersbourg  des  opérations  de  celle 
armée.  Il  y  fit  les  campagnes  do 
1790  et  1794»  «-'t  se  trouva  aux 
batailles  de  Maubeuge,  de  Lan- 
drecies,  de  Lannoy,  deTurcoing, 
dcTournay,  de  Fleurus  ;  aux  com- 
bats du  camp  de  César,  deGifl'eldt, 
de  Lefferinkouke,  de  Ro/cndall, 
près  de  Duiikerquc,  de  la  forêt 
de  iMormal,  de  Vattignies,  de  Wa- 
terloo ,  de  Maësiricht;  aux  sièges 
de  Valenciennes,  de  Dunkerque, 
duQuesnoy,  de  Landrecies;  à  l'as- 
saut du  chemin  couvert  de  Valen- 
ciennes; à  deux  attaques  du  camp 
retranché  deMaubeuge,et  au  bom- 
bardement de  Dusseldorf.  Lors  de 
la  prise  du  chemin  couvert  de  Va- 
lenciennes ,  la  vivacité  de  l'attaque 
et  l'explosion  des  globes  de  com- 
pression ayant  forcé  les  assiégés 
de  s'éloigner  et  de  rentrer  dans  la 
ville,  le  comte  de  Langeron  s'a- 
percevant  qu'ils  avaient  abandon- 
né les  ouvrages  extérieurs,  les 
parcourut  tous,  d'abord  seul,  et 
s'y  établit  bientôt  avec  le  comte 
François  Diedrischstein ,  lieute- 
nant-colonel du  génie  :  la  ville 
capitule  le  lendemain.  A  l'affaire 
de  Lefferinkouke  et  à  celle  de  llo- 
sendall,  près  de  Dunkerque,  le 
comte  de  Langeron  fut  exposé  aux 
périls  les  plus  imminens  avec  le 
cotnte  d'Alton,  lieutenant-géné- 
ral autrichien,  commandant  l'a- 
vant-garde  des  alliés,  qui  fut  tué. 
A  l'affaire  du  camp  de  César,  il 
sauva  lu  vie  au  duc  d'Yorck,  qui, 
par  méprise ,  n'étant  qu'à  dix 
pas  d'une  colonne  ennemie  qu'il 
croyait  hanovrienne  et  qu'il  cou- 
rait rejoindre,  est  arrêté  par  le 
comte  de  Langeron,  et  échappe 


LAN 

ainsi  à  une  mort  certaine.  A  celle 
époque  on  ne  faisait  pas  de  pri- 
itonniers  par  ordre  formel  de  la 
convention.  Après  les  revers  de  la 
campagne  de  1794»  et  la  retraite 
des  Autrichiens,  derrière  le  Rhin, 
le  comte  de  Langeron  retourna  à 
Pétersbourg.  L'impératrice  lui 
donna  le  régiment  des  grenadiers 
de  petite  Russie,  qu'il  rejoignit  à 
Dubno  en  l'ologne.  Brigadier  en 
juillet  1796,  en  juin  1797  il  fut 
promu,  par  l'empereur  l*aul  I", 
au  grade  de  général- major ,  et 
nommé  chef  du  régiment  d'Uu- 
timsk  infanterie,  alors  en  garni- 
son à  Oufa,  gouvernement  d'O- 
renbourg.  Pendant  l'été  de  1797, 
l'empereur  se  trouvant  à  Kasan, 
y  passa  la  revue  de  sou  régiment, 
et  lui  donna  la  croix  de  Sainte- 
Anne  de  la  2'  classe;  il  lui  offrit 
le  gouvernement  militaire  d'Oren- 
bourg,  qu'il  refusa.  Il  fut  fait  lieu- 
tenant-général en  octobre  1798. 
Au  commencement  de  1799,  il 
fut  employé  en  Courlande  et  en 
Samogitie  ,  en  qualité  de  quartier- 
maître  -  général  d'un  corps  de 
a5,ooo  hommes,  destiné  à  agir 
contre  la  Prusse,  sous  les  ordres 
du  général  baron  Benkendorf.  A- 
près  la  retraite  de  ce  général,  il 
fut  chargé  du  commandement 
de  ce  corps.  Lu  guerre  n'ayant 
point  eu  lieu,  ^empereur  Paul 
I"  nouuna  le  comte  de  Lange- 
ron chef  du  régiment  de  Riagsk, 
et  inspecteur  de  rinfanterie,  de 
l'inspcxlion  de  Bricch  :  à  cette  é- 
poquc,  il  reçut  l'ordre  de  Sainte- 
Anne  de  la  1"  classe,  celui  de 
Saint-Jean  de  Jérusalem  ,  et  fut 
fait  comte  île  l'empire  russe.  Kn 
i8o5,  il  marcha  en  Moravie  dans 
la  seconde  armée  comu)andée  par 
le  général  comte  Buxowden,  et 


LAN 


387 


après  la  réunion  de  cette  armée 
avec  la  première,  sous  les  ordres 
du  général  Koutouzow ,  le  comte 
de  Langeron  commanda  la  secon- 
de colonne  à  la  bataille  d'Auster- 
litz.  Celte  journée  fut  fatale  à  l'ar- 
mée russe  :  la  défaite  et  la  disper- 
sion prévues,  mais  cependant  trop 
promptes ,  de  la  4*  colonne ,  com- 
mandée par  le  lieutenant-général 
Rliloradowickt  ,  entraînèrent  la 
perte  de  la  ?>'  colonne  et  de  la  se- 
conde ,  qui ,  étant  tournées  et  sans 
appui,  furent  presque  anéanties. 
Après  la  conclusion  de  la  paix 
entre  la  France  et  l'Autriche,  le 
comte  de  Langeron  ramena  sa  co- 
lonne à  Dubno,  en  Volhynie.  En 
i8o6,  la  guerre  ayant  éclaté  de 
nouveau  entre  la  Russie  et  laTur- 
quie,  le  comte  de  Langeron  fut 
employé  à  Bukarest,  sous  les  or- 
dres du  général  en  chef  Michel- 
son  ,  et  au  commencement  de 
1807,  il  fut  envoyé  en  Bessarabie, 
où  il  commanda  un  détachement 
du  corps  du  général  baron  de 
Meyendorf  :  il  se  trouva  au  con>- 
bat  de  Babilé,  près  d'Ismaël  ;  au 
blocus  de  cette  forteresse,  où  il 
commanda  la  flotille  et  le  déta- 
chement qui  occupa  l'île  deïsche- 
lal ,  et  à  cinq  affaires  contre  les 
Tartares  et  la  garnison  d'Ismaël. 
Il  reçut  la  croix  de  Saint-Wladi- 
mir,  de  la  3*  classe.  Dans  l'hiver 
de  1807  à  1808,  il  commanda  sur 
le  Pruth  et  observa  Ismaël.  Après 
la  mort  du  général  Michelson,  le 
baron  de  Meyendorf  prit  le  com- 
mandement de  l'armée  de  Mol- 
davie, et  fut  bientôt  remplacé  par 
le  feld  -  maréchal  prince  Prozo- 
rowski.  Le  comte  de  Langeron 
continua  de  servir  sous  les  ordres 
de  ce  prince ,  et  mérita  sa  con- 
fiance :  il  le  chargea  du  comman- 


588 


LAN 


tlement  do  son  aile  gauche  placée 
en  Bessarabie  ,  et  de  l'observation 
d'Ismaël  pendant  l'armistice,  qui 
dura  toute  l'année  1808.  En 
1809,  la  guerre  s'étant  rallu- 
mée ,  le  prince  Prozorowski  de- 
vant passer  le  Danube  avec  l'ar- 
mée agissante,  confla  le  comman- 
dement de  l'armée  de  réserve  au 
comte  de  Langeron  ;  le  chargea 
de  la  défense  des  deux  Valachies 
et  de  tout  le  cours  du  Danube. 
Après  le  passage  de  ce  fleuve,  près 
de  Galatz,  le  prince  Bagration 
succéda  au  prince  Prozorowski , 
décédé,  et  s'avança  le  long  de  la 
rive  du  Danube  sur  Hirsova  et 
Silistrie.  Le  grand -visir  était  à 
Schumla  :  il  n'attaqua  pas  le 
prince  Bagration  ;  se  porta  sur 
Rouschouk,  y  passa  le  Danube, 
vint  camper  près  de  Giurgevo  ,  et 
parut  vouloir  s'avancer  sur  Bu- 
charesl  ;  et  s'il  eût  exécuté  ce  pro- 
jet, il  dévastait  la  Valachie,  en- 
levait les  hôpitaux  russes,  et  for- 
çait le  prince  Bagration  à  une  re- 
traite précipitée  sur  la  rive  gau- 
che du  fleuve.  Le  comte  de  Lan- 
geron était  à  Bucharest,  il  avait 
40,000  hommes  sous  ses  ordres  ; 
mais  ils  étaient  disséminés  dans 
une  étendue  de  plus  de  800  wers- 
tes  (  200  lieues)  ;  depuis  Kilia  jus- 
jusqu'en  Servie,  où  les  Turcs 
avaient  alors  de  grands  ^ucoès. 
Près  de  la  moitié  de  ces  forces  é- 
tait  dans  les  hôpitaux,  le  comte 
de  Langeron  lui-même  était  at- 
taqué d'une  fièvre  tierce  très-vio- 
lente, et  si  affaibli  qu'il  lui  était 
impossible  de  monter  à  cheval. 
Il  ne  put  rassembler  que  6,000 
hommes  pour  défendre  la  Vala- 
chie; la  terreur  y  était  au  comble 
et  tous  les  habitans  fuyaient  eu 
'P'ansylvnnie.    Les  membies  du 


LAN 

Divan  voulaient  aussi  se  retirer  : 
le  comte  de  Langeron  les  rassem- 
ble et  leur  dit  :  «  Restez  ici  et  ne 
«craignez  rien.  Je  pars  anjour- 
«d'hui,  à  dix  heures.  Après  de- 
»  main  jeudi ,  à  pareille  heure ,  l'a- 
rt vant- garde  du  grand-visir  sera 

•  battue,  et  samedi  il  ne  restera 

•  pas  un  ïurc  sur  la  rive  gauche 
»  du  Danube.  »  Tout  se  passa  com- 
me il  l'avait  promis.  Il  ne  pouvait 
sauver  le  pays,  l'armée  et  les  ma- 
gasins que  par  une  entreprise  au- 
dacieuse :  il  la  tenta,  et  elle  lui 
réussit.  On  ne  peut  pas  dire  qu'il 
dut  ce  succès  éclatant  à  un  de  ces 
hasards  heureux  qui  souvent  jus- 
tifient des  entreprises  mal  calcu- 
lées :  le  comte  de  Langeron  avait 
tout  prévu  et  tout  annoncé  d'a- 
vance. Tout  autre  général,  qui 
n'eût  pas  eu  l'expérience  de  la 
guêtre  avec  les  Turcs ,  que  six 
campagnes  faites  contre  eux  a- 
vaient  donnée  au  comte  de  Lan- 
geron ,  n'aurait  pas  osé,  quelque 
parfaites  que  fussent  les  troupes 
qu'il  eût  commandées  ,  braver 
i5o  mille  hommes  avec  6000;  le 
comte  de  Langeron  l'osa.  Il  atta- 
qua,, à  Fracina,  l'avant-garde  en- 
nemie ,  forte  de  i5,ooo  hommes, 
le  jour  et  à  l'heure  qu'il  avait  an- 
noncés. Il  la  culbuta  et  la  pour- 
suivit jusque  sous  les  murs  de 
Giurgevo,  où  était  campé  le  grand- 
visir  :  il  le  défia  au  combat;  mais 
celui-ci  repassa  le  Danube  deux 
jours  après ,  et  la  Valachie  fut  sau- 
vée. Le  comte  de  Langeron  reçut 
pour  cette  brillante  action  la  croix 
de  Saint-Wladimir  de  la  a*  classe. 
Dans  le  mois  d'octobre  naême  an- 
née, il  est  chargé  du  siégede  Silis- 
trie  ;  repousse  les  Turcs  dans  deux 
sorties,  et  après  la  bataille  peu 
heureuse  de  Tatarilz,  livrée  par 


LAN 

le  prince  Bagralion  ,  il  repnsse  le 
Danube    an    commencement  de 
1810.   Dans  l'hiver  de  celle  an- 
née, il  commande  en  Moldavie, 
en  Bessarabie ,  et  établit  son  quar- 
lier-général  à  Jassi.  En  juin  1810, 
il  est  chargé  une  seconde  fois  du 
siège  de  Silistrie,  qu'il  prend  a- 
près  sept  jours  de  tranchée  ou- 
verte. II  reçoit  le  cordon  de  Saint- 
Alexandre.   En  juillet,  le  comte 
de  Langeronfituneexpédilionlrès- 
heureuse  à   Djumaya  et  dans  les 
monts  Ilœmus.  Il  fut  attaqué  près 
de  Dirikion,  n'ayant  que  2, 800  hom- 
mes, par  le  grand-visir  qui,  malgré 
son  immense  supériorité  ,  ne  put 
l'entamer.  L'ordre  de  Saint-Geor- 
ges  de   la    5'  classe-  lui  fut   dé- 
cerné pour   ce  brillant   combat. 
A[»cès   le   malheureux   assaut   de 
Roiischouk,    le   général    en  chef 
comte  Kamensky  lui  confia  la  di- 
rection du  siège  de  celle  place  et 
de  celle  de  (iiurgevo;  elles  capi- 
tulèrent au  mois   de  septembre. 
Dans  l'hiver  do  1810  à  181  1  l'em- 
pereur accorda  à  M"*  la  comtesse 
de  Langeron  la  croix  de  l'ordre  do 
Sainle-Catherine.  En  mars  18  n, 
le  comte  Rainenski  second  tombe 
malade:  l'empereur  confie  le  com- 
mandement général  de  l'armée  do 
Moldavie  au  comte  de  Langcron, 
jusqu'à  l'arrivée  du  général  Kou- 
touzow.    En  juin,   le  grand-visir 
s'avance  sur   Couschouk  ;  le  gé- 
néral Koutouxow  garde   d'abord 
la  défensive,    et  lui  livre  ensuite 
une  bataille,  pour  laquelle  M.  de 
Langeron  est  promu  au  grade  de 
général  en  chef.  Au  mois  d'août, 
le  grand-visir,  par  une  manœuvre 
imprévue,  audacieuse  et  couron- 
née d'abord  par  le  succès,  passa 
le    Danube  prés  de  Giurgewo  et 
s'établit  dans  uit  camp  retranché; 


LAN 


589. 


le  général  Koutouzow   l'y  tient 
bloqué  pendant  trois  mol»  ;    cha- 
que jour  les  deux  partis  ont  des 
engagemens  sérieux  et  opiniâtres  ; 
c'est  le  comte  de  Langeron  qui  a 
le    commandement  de    l'armée, 
sous  le  général  en  chef.   Un  des 
corps  de  l'armée  russe  passe  le  Da- 
nube et  enlève  le  camp  ennemi; 
l'armée  turque  enveloppée  se  rend 
à  discrétion   :    le  grand-visir  *e 
sauve  seul  pendant  la  nuit.  Après 
cet  exploit  éclatant,  le  comte  de 
Langeron  a  le  commandement  des 
avant-postes  le  long  du  Danube; 
du  corps  de  la  Valachie  et  de  l'ar- 
mée turque  prisonnière.  Pendant 
l'hiver,  il  est  employé  secrète- 
meut  par  le  général  Koulouzow, 
à  des  négociations  de  paix  avec  le 
grand-visir  Achmet.    Il  reçoit  le 
grand-cordon  de  l'ordre  de  Saint- 
Wladimir  de  la  i"  classe.  La  paix 
est  conclue  en  mai  1812.  Alors, 
l'empereur  Napoléon  avait  passé 
le  Niémen,  envahi  la  Lithuanie, 
et  s'avançait  vers  Smolensk.   Le 
comle  de    Langeron   commande 
une  colonne  de  l'armée  de  l'amj-^ 
rai  ïchitchagow,  qui  avait  succé- 
dé au  général  Koutouzow,  et  qui 
avait  marché  de  Valachie  en  Po- 
logne et  ensuite  en  Lithuanie.  Il 
se  trouve  à  plusieurs  combats  sur 
le  Doug,  près  de  Brecez,  ensuite  à 
la  prise  de  la  tête  du  pont  dcBoris- 
sowetau  combat  de  laBérézina.  ïl 
poursuitl'armée  française  parWil- 
na  jusqu';\  la  Vistule,et eslensuile 
chargé  du  blocus  deThorn.  L'em- 
pereur lui  donne  la  médaille  d'ar- 
gent de  1812.   En  mars   i8i3,  il 
est  chargé  du  siège  deThorn;  a- 
près  sept  jours  de  tranchée  ou- 
verte, cette  place  «e  rend.  Il  re- 
çoit de  l'empereur  l'ordre  de  Saint- 
George»  de  la  •!'  classe  ,  cl  du  roj 


og» 


tAN 


de  Prusse,   ceux  de*  Aigles  noir 
et  rouge.  Il  marche  ensuite  à  liol- 
le.n  :  A  la  bataille  deKœnigsvarta, 
il  attaque  ce  village;  s'einpaie  de 
cinq  pièces  do  canon  ;  fait  prison- 
niersplugieursgénérauxet  environ 
1200  hommes.   Il  se  trouve  à  la 
bataille  de  Baiilzen.    Il  se  relire 
ensuite  sur  Sweidnilz  ,  et  nprès 
la  conclusion  d'un  armistice,  oc- 
vnçc  les  bords  de  la  Sweidnitz- 
Vasser.     Pendant   l'armistice,    le 
comte  de  Langeron  repoit  le  com- 
mandement de   l'armée  de  Bar- 
dai :  il  e?t  ensuite  chargé  de  celui 
d'un  corps   de  5o,ooo  hommes , 
qui,  avec  ceux  du  général  Saken 
et  du    général   prussien  Yorck , 
composait    l'armée    de    Silésie , 
commandée  par  le   général  Blii- 
ker.  Dans  le  mois  d'août,  après 
la  rupture  de  l'armistice,  H  passe 
la  rivière  de  Bober  ;  son  avant- 
garde  est  au  moment  d'être  cou- 
pée; le  comte  de  Laugeron  vole  à 
son  secours  avec  deux  divisions  : 
le  combat  est  vif  et  sanglant;  son 
cheval  est  tué  sous  lui.  son  avant- 
garde  est  dégagée.  L'empereur  Na- 
poléon attaque  le  général  Bliicher 
près  de  Lœvenberg  en  Lusace,  et 
l'oblige  à  la  retraite  que  le  comte 
de  Langeron  soutient  jusqu'à  la 
nuit  contre  les  efforts  de  l'armée 
française.   A  la  bataille  de  Gold- 
berg,  le  maréchal  Macdonald  at- 
taque Bliicher;  le  comte  de  Lan- 
geron commande  la  gauche,  et 
obtient  d'ybord  des  succès;  il  o- 
père  ensuite  depuis  4  heures  jus- 
qu'à 9  une  retraite  par  échelons , 
qui  lui  mérite  les  éloges  du  géné- 
ral en  chef.  Il  contribua,  le  i4- 
36  août,  au  gain  de  la  bataille  dé- 
cisive de  la  Kazbath,  où  l'armée 
française,  contrainte  de  repasser 
la  Bober,  fit  une  perte   C'<jnsidé- 


LAN 

rable  en  matériel  et  en  prison- 
niers :  le  corps  du  comte  de 
Langeron  combattit  depuis  9  heu- 
res du  matin  jitsqu'à  9  heures  du 
soir  :  il  fut  le  pivot  sur  lequel  le 
i;entre  et  l'aile  droite  conversèrent 
en  exécutant  une  attaque  géné- 
rale. Le  lendemain,  ce  même 
corps  fit  mettre  bas  les  armes  a 
deux  bataillons,  près  de  Goldberg. 
Le  16-20,  la  division  tlu  gé- 
néral Puthod,  acculée  à  la  Bober, 
lut  obligée  de  se  rendre  au  prince 
Schterbatow  et  au  général  Rond- 
zewith ,  qui  faisaient  partie  du 
corps  d'armée  du  comte  de  Lan- 
geron. Dans  ces  journées,  le  comte 
de  Langeron  enleva  aux  Français 
un  matériel  nombreux  et  leur 
fit  beaucoup  de  prisonniers,  par- 
mi lesquels  étaient  le  général  i>u- 
fhod  et  presque  tou;  ses  officiers: 
il  reçut  le  chiffre  d'adjudant  de 
l'empereur  Alexandre  sur  ses  é- 
paulettes.  Il  soutint,  en  Lusace, 
«l'autres  combats  qui  furent  éga- 
lement avantageux  aux  armes 
russes  :  dans  le  mois  de  sep- 
tembre ,  les  trois  corps  de  l'armée 
du  général  Blucher,  commandés 
par  le  comte  de  Langeron  et  les 
généraux  Saken  et  Yorck,  passent 
l'Elbe;  après  un  vigoureux  combat 
ils  marchent  sur  la  Saaie  et  se  pla- 
cent derrière  l'armée  française. 
Cette  grande  manœuvre,  que 
les  /itrangers  regardent  comme 
une  des  plus  belles  dont  l'his- 
toire des  guerres  modernes  fasse 
mention,  contribua  beaucoup  au 
succès  de  la  campagne.  iUais  pen- 
dant cette  marche,  par  un  mou- 
vement habile  et  imprévu  de 
i'empereur  Napoléon,  le  général 
Blucher  et  le  comte  de  Langeron 
furent  au  moment  d'être  surpris 
dans  la  petite  ville  d'Uben.   JPeu 


LAN 

<le  jours  après,  Napoléon,  dont 
les  manœuvres  étaient  devenue? 
alors  Incertaines,  revient  A  Léip- 
sick  et  y  est  en  grande  partie  cer- 
né par  toutes  les  années  des  alliés. 
Le  4- •() octobre,  il  attaque  la  gran- 
de arméedcsetnpereurs  de  Russie, 
d'Autriche  et  du  roi  de  Prusse, 
et  est  attaqué  lui-même  par  le  gé- 
néral Bliicher  :  le  comte  de  Lan- 
geron  enlève  les  villages  deGross 
et  KleinWetlerilz, prend  plusieurs 
pièces  d'artillerie  et  fait  2000 
prisonniers.  Mais  il  eut  dans  cette 
affaire  un  moment  très-critique  : 
après  la  perte  de  ces  deux  villages. 
Napoléon  fit  marcher  «le  grandes 
forces  au  secours  de  son  aile  gau- 
che ;  le  comte  de  Langeron ,  dé- 
bordé par  sa  gauche,  et  obligé  de 
se  développer  sur  une  seule  ligne 
trop  étendue,  fut  vivement  re- 
poussé sur  lo  ruisseau  de  Wete- 
rilz,  qiii ,  étant  très-marécageux, 
lui  dorma  des  inquiétudes  fondées 
sur  son  artillerie  el  sa  cavalerie 
forcées  de  se  retirer  précipitam- 
ment. Il  fallait  payer  d'audace  et 
iurêler  l'attaque  impétueuse  des 
Français  pour  donner  le  temps  de 
passer  ce  ruisseau.  Le  comte  de 
Langeron  était  près  de  son  avant- 
garde,  il  savait  ce  qu'on  peut  ob- 
tenir de  la  valeur  et  de  la  subor- 
dination des  soldats  russes  qui  lui 
étaient  fort  attachés  :  il  comman- 
de au  régiment  de  Slunelbourg 
qui  se  retirait  :  «  halte  ,  front ,  en 
avant  0;  le  régiment  obéit,  quoi- 
(|ue.sous  une  grêle  de  balles  et  de 
mitraille.  Les  autres  suivent  son 
exemple;  les  Français  s'arrêtent , 
hésitent  tm  moment,  la  retraite 
se  fait  «ans  perte,  el  bientôt  le 
comte  de  Langeron  reprend  l'of- 
fensive. Le  6- 18  octobre,  à  la  ba- 
taille  de    Léiphick.    le  comte   de 


LAN 


^9' 


Langeron,  sous  les  ordres  du 
prince  royal  de  Suède,  passe  la 
Partha ,  attaque  le  \illage  de 
Schœnfeld  ;  trois  fois  il  le  prend, 
trois  fois  il  en  est  repoussé  :  il  le 
reprend,  s'y  établit,  et  contribue 
ainsi  sur  ce  point  au  gain  de  la 
bataille  ;  mais  il  y  perd  un  gêné 
rai  et  près  de  5, 000  hommes.  Le 
7-19,  les  corps  du  comte  de  Lan- 
geron et  de  Saken  forcent  la  porte 
de  Hall,  entrent  dans  Léipsik  à  la 
baïonnette,  et  s'emparent  de  5y 
canons.  Il  est  décoré  par  l'empe- 
reur de  Russie  de  l'étoile  de  l'or- 
dre de  Saint-Alexandre,  ornée  de 
diamans,  et  par  le  roi  de  Suède, 
de  l'ordre  du  Glaive  de  la  pre- 
mière classe.  L'armée  du  général 
Bliicher  poursuit  l'armée  fran- 
çaise jusqu'au  Rhin,  et  le  comte 
de  Langeron  est  chargé  d'obser- 
ver lu  tête  du  pont  de  Cassol ,  vis- 
à-vis  Mayence.  Le  1"'  janvier 
i8i4,  ''  P'is^e  le  Rhin  à  Raul, 
enlève  Rirrg(;n,  et  tient  Mayence 
bloqué  pendant  les  mois  de  jan^ 
vier  et  de  février.  Il  quitte  ensuite 
le  bldcus  de  cett(;  ville  ,  qu'il  re- 
met au  duc  régnarït  de  Saxe-Co- 
bourg,  cl  se  rond  en  France  au- 
près du  général  Bliicher,  défend 
.Soissons ,  et  combat  à  Laon ,  à 
GraoUne,  à  Glacy,  à  Vichi ,  etc. 
Il  marche  ensuite  par  Reims  et 
Châlotts  sur  Paris.  Son  avant- 
garde  force  le  passage  de  la  Mar- 
ne ;\  Triport,  .iprès  un  vif  com- 
b«t,  et  s'approche  de  la  capitale. 
Le  17-29 mars, il  occupe  le  Bour- 
get  et  repousse  les  avant-postes 
sur  la  Villelte.  Le  lendemain  18- 
3o ,  le  comte  de  Langeron  com- 
mande l'extrême  droite  des  ar- 
mées combinées  :  il  observe  Saint- 
Denis,  et  emporte  d'assaut,  ;\  4 
heures  du  soir,  avec  le  corps  du 


ùf)'i 


LAN 


général  Rondzcwitch ,  la  position 
retranchée  de  Montmartre;  prend 
29  canons,  et  le  soirmême  occu- 
pe les  barrières  de  Paris.  Il  reçoit 
de  l'empereur  de  Russie  l'ordre 
de  Saint-André,  et  de  l'empereur 
d'Autriche  celui  de  Marie-Thé- 
rèse de  la  3*  classe.  Après  la  prise 
de  Paris,  le  comte  de  Langeron 
marcha  sur  Lonjumeau,  et  prit 
ensuite  ses  quartiers  à  Châions  et 
h  Reims.  A  son  retour  en  Russie, 
il  eut  le  commandement  d'un  corps 
de  70,000  hommes  en  Volhynie. 
En  i8i5,  il  marcha  de  nouveau 
contre  la  France ,  et  après  la 
bataille  de  Waterloo,  il  prit  diffé- 
rentes positions  en  Alsace  et  en 
Lorraine,  dont  il  bloqua  les  for- 
teresses jusqu'à  la  conclusion  de 
la  paix.  Il  tut  ensuite  appelé  aux 
gouvernomens  de  Rherson  ,  d'E- 
katerinoslaw,  de  la  Crimée  :  il 
fut  encore  nommé  chef  de  la  ville 
d'Odessa  ,  des  cosaques  de  la  mer 
Noire  et  de  ceux  du  Boug.  Gou- 
verneur-général de  la  nouvelle 
Russie  (en  1822),  le  comte  de 
Langeron  fut  aussi  nommé  pro- 
tecteur du  commerce  de  la  mer 
Noire  et  de  la  merd'Asoph,  etc. 
Il  reçut  la  démission  de  tous  ces 
emplois  le  11  mai  1823,  et  il  en 
conserva  les  émolumens  coinme 
pension  de  retraite.  C'est  à  l'âge 
de  60  ans  que  le  comte  de  Lan- 
geron a  terminé  sa  carrière  mili- 
taire, et  a  voué  au  repos  une  vie 
jusqu'alors  fort  orageuse,  semée 
de  beaucoup  d'événemens  diffé- 
rens  et  de  quelques  succès  à  la 
guerre.  Il  a  quarante-six  ans  sept 
mois  de  service ,  savoir  :  un  an 
sept  mois  comme  enseigne  dans 
les  gardes-françaises,  six  ans  deux 
mois  comme  sous-lieutenant,  dix 
mois  comme  capitaine,  dix  ans 


LEB 

quatre  mois  comme  colonel ,  dix 
mois  comme  brigadier,  un  an 
cinq  mois  comme  général-major, 
douze  ans  dix  mois  comme  lieu- 
tenant-général, enfin  douze  ans 
sept  mois  comme  général  eu  chef 
d'infanterie. 

LAS  AMARILLAS  (le marquis 
de)  ,  voy.  le,  Sup,  du  tome  XI. 

LE  BARON  (N.),  procureur- 
général ,  voy.  le  Supplément  du 
tome  XII. 

LEBLANC  (Honoré),  chef  de 
bataillon ,  chevalier  de  Saint- 
Louis  et  de  la  légion-d'honneur, 
né  û  Chinon,  département  d'In- 
dre-et-Loire, le  24  décembre 
1770.  A  peine  entré  au  service, 
il  se  distingua  à  l'armée  des  Py- 
rénées-orientales, fut  grièvement 
blessé  en  montant  à  la  redoute 
de  Saint-Clément,  it  laissé  pour 
mort  sur  le  champ  de  bataille; 
c'était  le  27  brumaire  an  5,  jour 
où  le  général  en  chef  Dugom- 
mier  fut  tué.  Le  7  mai  1807» 
M.  Le  Blanc,  alors  capitaine 
dans  le  régiment  de  la  garde  de 
Paris,  qui  se  trouvait  au  siège 
de  Dantzick,  fit  partie  des  trou- 
pes d'élite  qui  durent  s'emparer 
de  l'île  d'Holm;  il  reçut  ordre  de 
prendre  une  batterie  qui  faisait 
un  feu  meurtrier,  il  y  monta  par 
les  embrasures;  les  canonniers 
ennemis  furent  tués  sur  leurs  piè- 
ces; il  se  dirigea  alors  sur  les  der- 
rières de  l'infanterie  russe  ,  et  le 
commandant  ennemi  ayant  re- 
marqué que  des  Français  avaient 
pénétré  dans  la  redoute,  voulut 
faire  résistance,  il  fut  tué  à  la 
baïonnette  ,  et  le  capitaine  Le 
Blanc,  n'ayant  avec  lui  que  20  ou 
25  grenadiers,  fit  mettre  bas  les 
armes  à  164  soldats  russes;  cette 
action    décida   la    prise   de    l'île 


LEB 

ù'Holin,  el  Danlzick  se  rendit 
vingt  jours  après.  Au  mois  de  mars 
1809,  le  caj)ilaine  Le  Blanc,  à  la 
têle  de  60  voltigeurs,  s'empara, 
pendant  la  campagne  de  Portu- 
gal, de  deux  pièces  de  canon, 
délènducs  par  5oo  Portugais.  Le 
16  mai  de  la  même  année,  le  co- 
lonel Dulong,  ayant  reçu  du  ma- 
réchal Soult  l'ordre  de  s'emparer 
du  pont  de  Ponte-Novo ,  de  la 
possession  duquel  dépendait  le 
salut  du  corps  d'armée  qui  opé- 
rait sa  retraite,  chargea  le  capi- 
taine Le  Blanc  de  cette  expédition 
très-périlleuse;  cet  officier,  mal- 
gré la  difficulté  de  passer  ce  pont, 
coupé  en  trois  endroits  et  gardé 
par  un  détachement  portugais, 
promit  au  colonel  que  dans  trois 
minutes  ce  détachement  n'existe- 
rait plus ,  et  que  le  pont  serait  au 
pouvoir  des  Français;  il  tint  pa- 
role, assaillit  avec  la  plus  grande 
impétuosité  le  poste  ennemi,  le 
tailla  en  pièces,  et  par  celte  ac- 
tion mémorahle,  mise  à  l'ordre 
du  jour,  il  assura  la  retraite  du 
corps  d'armée.  Le  même  jour, 
(  16  mai),  les  troupes  étant  arri- 
vée» au  pont  de  MisareUa,  le  ca- 
pitaine Le  Blanc  se  trouvait  à  côîé 
du  colonel  Dulong  [voy.  ce  nom), 
lorsque  celui-t;i  fut  atteint  d'une 
b.die  dans  la  tête  qui  le  renversa. 
Alors  le  capitaine  Le  Blanc,  ne 
prenant  conseil  que  de  la  circons- 
tance et  de  son  propre  courage, 
se  préci|)ita  sur  le  pont  barricadé, 
el,  passant  sur  les  morts  et  les 
blessés,  arriva  au  pied  d'un  ro- 
cher coupé  à  pic,  derrière  lequel 
l'armée  portugaise  était  reIran - 
chée;  le  capitaine  u'ayanlavec  lui 
qu'une  poignée  de  braves,  s'él.in- 
ra  à  la  baïouuelle  avec  inic  lelb; 
intrépidité  que  l'armée  ennemie, 


LEB 


393 


croyant  que  les  Français  étaient 
en  bien  plus  grand  nombre,  se 
retira  en  désordre,  el,  grâce  à 
cette  manœuvre  hardie,  le  capi- 
taine Le  Blanc  sauva  ,  pour  la  se- 
conde fois,  dans  le  même  jour,  son 
corps  d'armée.  Le  27  avril  1822, 
en  Espagne ,  le  capitaine  Le  Blanc 
commandait  la  placed'Aguilar  del 
Campe ,  et  n'avait  pour  toute  gar- 
nison que  73  hommes;  les  enne- 
mis, au  nombre  de  5,5oo,  com- 
mandés par  le  général  Mendiza- 
bala,  envoyèrent  un  parlemen- 
taire, mais  le  capitaine  lui  dit  do 
se  retirer,  s'il  ne  voulait  pas  qu'on 
tirât  sur  lui,  ayant  fait  serment, 
ainsi  que  les  braves  qu'il  com- 
mandait, de  périr  jusqu'au  der- 
nier plutôt  que  de  se  rendre  :  en 
effet,  les  Espagnols  firent  pendant 
dix-neuf  jours  la  fusillade  la  plus 
soutenue  et  la  plus  nourrie.  Tout 
vint  échouer  contre  le  courage  de 
la  brave  garnison  et  de  son  intré- 
pide capitaine  ;  l'ennemi  fut  forcé 
de  lever  le  siège,  et  un  ordre  du 
jour,  très-brillant  et  très-délaillè, 
lu  pendan'  trois  jours  de  suite, 
par  ordre  du  général  en  chef,  ù 
tous  les  régi  mens,  fut  la  première 
récompense  de  cette  résistance 
héroïque;  la  seconde  fut  la  nomi- 
nation du  capitaine  Le  Blanc  au 
grade  de  chef  de  bataillon.  A  Wa- 
terloo, M.  Le  Blanc  donna  de 
nouvelles  preuves  de  ce  courage 
intrépide  qui  le  caractérise  :  ayant 
reçu  l'ordre  de  s'emparer  d'une 
b.itleric  anglaise  de  5  pièces  de 
canon,  il  marcha  en  colonne  ser- 
rée; arrivé  à  cinquante  pas  de  la 
batterie,  \s\\  obus  éclata  prè<  do 
son  cheval;  M.  Le  Blanc,  ren- 
versé an  milieu  de  son  bataillon, 
conservant  tout  son  sang-froid  , 
fit  battre  la  charge,    -c  [ui'iipitu 


594 


LEG 


»ur  la  batterie  dont  il  s'empara, 
et  reçut  U's  plu?  grands  éloges  des 
généraux  témoins  de  cette  action 
d'éclat.  Tels  sont,  fort  en  abrégé, 
les  principaux  faits  d'armes  de  cet 
officier,  toujours  cité  comme  bra- 
ve par  l'élite  des  braves  ;  s'il  n'est 
pas  parvenu  à  des  grades  plus  éle- 
vés, ce  n'est  jamais  l'homme  qui 
a  manqîié  à  l'occasion  ,  mais  l'oc- 
casion qui  a  manqué  à  l'homme. 

LE  BORGNE  DE  BOIGNE  (le 
comte),  voj.  le  Supplément  du 
tome  XI. 

LECLER.C  ,  général  ,  voj.  le 
Supplément  du  tome  XVIII. 

LECOCQ,  licencié  ès-lois,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XVI. 

LECOINÏRE  DE  VERSAIL- 
LES, voj  le  Supplémentdu  tome 
XV. 

LEE  (Samcel)  ,  orientaliste  an- 
glais, îjoj.  le  Supplémentdu  tome 
XV.  ^ 

LEGIER,  conseiller  à  la  cour 
royale ,  voy.  le  Supplément  du 
tome  Xlïl. 

LEGRAVEREND  (Jean-Marie- 
Emmancel-François)  ,  né  à  Ren- 
nes, département  d'Ile-et-Vilaine, 
en  1776,  ancien  avocat  aux  con- 
seils du  roi  et  à  la  cour  de  cassa- 
tion, maître  des  requêtes,  cheva- 
lier de  la  légion -d'honneur,  etc., 
a  publié,  en  1808,  un  ouvrage 
sous  le  titre  de  :  Traité  de  la  pro- 
cédure criminelle  devant  l«p  tribu- 
naux militaires  et  marilimes  de  tou- 
te espèce,  2  vol.  in-8°,  et  en  1816, 
la  première  édition  de  son  Traité 
de  la  législation  criminelle  eti  Fran- 
ce, 2  vol.  in-4'',  qu'il  a  dédié  à  M. 
lé  chancelier  Dambray,  et  dont  la 
seconde  édition  a  paru  en  1823, 
avec  de  nombreuses  additions.  Il 
avait  fait  paraître,  en  1819,  des 
Observations  sur  le  jury  en  Fran- 


LEG 

ce,  in-S".  En  1814,  M.  Legrave- 
rcnd  fut  nommé  directeur  di;s  af- 
faires criminelles  et  des  grâces  à 
la  chancellerie  de  France,  depuis 
ministère  de  la  justice,  où,  sous  le 
gouvernement  impérial,  il  avait 
été  chef  de  division.  En  i8i5, 
pendant  les  cent  jours,  le  collège 
électoral  de-  Rennes  l'élut  à  la 
chambre  des  représentans.  En 
1822,  il  était  au  même  collège, 
le  concurrent  de  M.  de  Corbière, 
ministre  de  l'intérieur,  A  vocal  aux 
conseils  du  roi  et  à  la  cour  de  cas- 
sation, en  1817,  il  devint,  le  24 
mars  1819,  maître  des  requêtes 
en  service  extraordinaire,  et  fut 
appelé,  en  cette  qualité,  à  la  dis- 
cussion et  à  la  rédaction  des  pro- 
jets de  codes  militaires.  Le  i3  dé- 
cHimbre  1821,  il  prit  sa  retraite  et 
quitta  la  place  de  directeur  des  af- 
faires criminelles  et  des  grâces, 
pour  se  livrer  aux  occupations  de 
son  cabinet. 

LEGRAVEREND  (Giillacme- 
Marie),  conseiller  à  la  cour  royale 
de  Rennes,  et  membre  de  la  lé- 
gion-d'honneur, cousin  du  précé- 
dent, est  né  dans  cette  ville,  en 
1765.  Les  faits  qui  le  concernent 
sont  relatés  dans  l'article  de  M. 
Legraverend,  maître  des  requêtes. 
(  l^oy.  le  tome  xi,  page  276  et  sui- 
vantes.) Nous  nous  bornerons  à 
ajouter  qu'il  était  avocat-général  à 
la  cour  royale  de  Rennes,  et  pro- 
fesseur en  droit  à  la  faculté  de  la 
même  ville,  depuis  l'origine,  lors- 
qu'il fut  destitué  de  ces  deux  fonc- 
tions. En  1816,  il  fut  nommé  con- 
seiller à  la  cour  royale  de  Rennes, 
où  il  continue  encore  de  siéger  au- 
jourd'hui (1825). 

LEGUA  Y  (Etienîse-Chabies), 
l'un  des  peintres  les  plus  distin- 
gué? de  la  manufacture  royale  de 


LEG 

porcelaines  à  Sèvres.,  né  à  Sèvres 
en  17G2,  montra  très-jeune  enco- 
re un  goftt  trè.s-vif  pour  la  pein- 
ture.  Son  père  attaché  à  la  ma- 
nufacture en  qualité  de  peintre- 
doreur,  le  fil  entrer  dans  l'école 
de  cet  établissement,  où  les  des- 
sins des  Boucher,  des  Vanloo  ser- 
vaient de  modèles  aux  élèves  qui 
devaient,   quelques    années   plus 
tard,  être  témoins  de  la  régénéra- 
tion de  l'école  française  à  laquelle 
le  génie  et  le  pinceau  merveilleux 
de  David  donnèrent  un  si  vif  é- 
clat.  M.  Le  Guay  avait  reçu  de  la 
nature  avec  des  dispositions  heu- 
reuses, le  goût  du  beau,  et  les 
germes  d'un  vrai  talent.  Il  se  pro- 
curait des  gravures  .  des  dessins 
faits  d'après  de  grands  maîtres,  et 
se  perfectionnait  dannila  solitude, 
mieux  peut-être  qu'il  n'eût  pu  le 
faire  sous  les  professeurs  attachés 
à  l'établissement  royal.  M.  Foliot 
j)cintre  et  marchand  de  tableaux, 
faisait  à  la   manufacture   de   fré- 
quentes visites,  il  prit  le  jeune  ar- 
tiste en  amitié,  l'emmena  souvent 
avec  lui  dessiner  et  peindre  d'après 
nature;    aidé   de   l'expérience   et 
des  conseils  de  cet  excellent  ami,  , 
il  suivit   une  route  nouvelle,    et 
dès  lors  fit  présager  ce  qu'il  serait 
lin   jour.  A   ITige   de   19  ans,  M. 
Le  Guay  vint  à  Paris,    et   entra 
comme  élève  à  l'académie;  quel- 
ques portraits  à  l'huile  en  minia- 
ture, faits  dans  les  loisirs  que  lui 
laissaient  ses  études,  commencè- 
rent sa  réputation.   Kn  1786,   il 
peignit  en  pied  et  de  grandeur  na- 
turelle, les  chevalier  et  vicomte  de 
Labellinay.  M.  le  comte  Ducayla, 
premier  gentilhomme  de  S.  A.  S. 
le  prince  de  Gondé ,  vit  ces  por- 
traits et  pria  M.  Lcguay  <le  fair«* 
celui  du  prince ,  mais  à  la  condi- 


LIÎG 


595 


lion  qu'il  n'exigerait  poinldc  séan- 
ce de  S.  A.;  cette  singulière  pro- 
position surprit  l'artiste  qui  refu- 
sa craignant  de  ne  pouvoir  réus- 
sir; plusieurs  peintres  avaient  é- 
choué  dans  la  même  entreprise; 
cependant  surles instances  du  pre- 
mier gentilhomme,  M.  Leguay 
alla  à  Ghantilly,  où  d'après  les  or- 
dres du  prince,  il  pouvait  se  pré- 
senter dans  tous  les  lieux  que  fré- 
quentait son  altesse,  la  voir  à  tou« 
te  heure,  mais*  elle  ne  consentit 
jamais  à  s'asseoir,  ni  à  rester  im- 
mobile quelques  fninutes.  Grâce 
à  la  rapidité  avec  laquelle  M.  Le 
Guay  put  saisir  les  traits  de  son 
modèle,  et  plus  encore  à  sa  mé- 
moire, il  parvint  à  faire  un  por- 
trait si  ressemblant,  qu'il  réunit 
tous  les  suffrages.  Ge  succès  inat- 
tendu éveilla  la  jeune  ambition 
de  l'artiste,  il  suivit  les  chasses  du 
prince,  et  une  nouvelle  circons- 
tance aussi  imprévue  que  la  pre- 
mière, lui  ouvrit  le  chemin  de  la 
fortune  que  de  graves  circonstan- 
ces lui  fermèrent  presqu'aussitôt. 
Un  soir  au  soleil  couchant  et  par 
un  temps  superbe,  un  cerf  se  jeta 
dans  l'étang  de  Cometle,  qui  bai- 
gne les  murs  du  vieux  château  de 
la  reine  Blanche;  l'aspect  du  lieu 
était  magnilique  ;  des  collines 
couvertes  de  bois,  un  moulin  ados- 
sé à  un  antique  castel,  le  plus  ra- 
vissant paysage  animé  par  le  mou- 
vement des  chasseurs  et  l'aflluen- 
ce  des  curieux,  invitèrent  le  pein- 
tre à  saisir  ses  crayons.  Son  altes- 
^e^  l'aperçut  et  lui  dit  :  «  Voilii  un 
«beau  tableau  à  faire.»  Déjà  un 
croquis  informe  en  était  jeté  sur 
le  papier,  et  de  retour  an  château, 
M.  Le  Guay  I  acheva.  Le  lende- 
main il  soumit  le  proJL't  de  ce  la- 
l)l«!ju  à  M.  Du(  iviii.   i|'ji  lui  sur- 


396 


lEG 


pris  de  I;i  rapi.Iité  d'un  travail  si 
compliqué,  et  engagea  l'artiste  à 
l'exécuter  à  la  gouache;  il  se  mit 
à  l'ouvrage,  et  peu  de  temps  après 
le  présenta  au  prince  un  jour  d'au- 
dience. S.  A.  lui  témoigna  publi- 
quement sa  satisfaction ,  et  fut 
charmée  de  trouver  dans  le  même 
homme,  deux  artistes  qu'il  dési- 
rait attacher  à  sa  personne,  un 
peintre  de  portraits  et  un  peintre 
de  chasses.  Dés  ce  jour  M.LeGuay 
eut  son  logement  ïi  Chantilly.  La 
révolution  vint  détruire  toutes  ses 
espérances;  le  prince  partit,  et 
l'artiste  dans  ces  temps  orageux 
fut  obligé  pour  vivre,  de  consacrer 
son  talent  à  la  miniature  qu'il 
avait  abandonnée. Quelque  temps 
après  le  propriétaire  d'une  manu- 
facture considérable  de  porcelai- 
nes, M.  Dihl,  fit  choix  de  M  Le 
Guay  pour  diriger  ses  ateliers,  fai- 
re des  dessins,  former  des  élèves, 
et  exécuter  les  compositions  ca- 
pitales de  rétabhVsement.  Là  M. 
Le  Guay  rendit  d'importans  ser- 
vices à  cet  art  encore  dans  son  en- 
fance. Il  perfectionna  la  peinture 
sur  porcelaine,  créa  un  nouveau 
système  de  couleurs,  et  reinplaça 
le  camée,  les  grisailles,  seuls  gen- 
res qu'on  fît  alors  avec  succès  dans 
la  manufatlire  de  M.  Dihl ,  par  un 
coloris  aussi  vrai,  aussi  séduisant 
que  l'huile.  Son  premier  essai 
exposé  au  salon  ,  fit  une  sensation 
très-vive  surtout  parmi  les  person- 
nes qui  connaissaient  les  difficultés 
du  genre.  M.  Le  Guay  s'était  pré- 
paré une  palette,  qui  lui  pennel- 
tait  d'entreprendre  sur  porcelai- 
ne des  tableaux  du  plus  beau  co- 
loris. M.  Le  Guay  est  sans  contre- 
dit le  peintre  qui  a  le  plus  contri- 
bué aux  progrès  de  cet  art  diffici- 
le, par  des  innovai  ions,  des  per- 


LEG 

fectionnemens,  qui  en  facilitant 
les  moyens  d'exécution,  ont  per- 
mis à  d'habiles  artistes,  de  s'occu- 
per de  ce  genre  précieux  de  pein- 
ture, auquel  ils  ne  se  seraient  pas 
livrés,  sans  doute,  si  on  ne  leur 
eût  applani  les  premières  difficul- 
tés. Cette  émulation,  ce  concours 
de  talens  ont  tiré  la  peinture  sur 
porcelaine  du  néant  où  elle  était 
il  y  a  5o  ans,  el  l'ont  amenée  au 
degré  étonnant  de  perfection  où 
elle  se  trouve  aujourd'hui.  M.  Le 
Guay  eut  un  égal  succès  dans  la 
peinture  sur  verre,  que  depuis 
long-temps  on  regardait  comme 
perdue.  Il  fit  d'abord  de  petits  ta- 
bleaux qui  réussirent;  ensuite  il 
en  composa  sur  des  glaces  dont  la 
dimension  lui  permit  de  peindre 
les  figures  â^  grandeur  naturelle. 
M.  Dihl  pour  lequel  M.  Le  Guay 
exécutait  ces  peintures,  séduit  par 
la  parfaite  illusion  qu'elles  pro- 
duisaient, placées  au-dehors  des 
croisées  d'un  appartement,  vou- 
lut les  vendre  pour  orner  les  fenê- 
tres de  la  chambre  à  coucher  prin- 
cipale du  palais  de  Saint-Cloud, 
mais  le  prix  excessif  qu'il  y  mit 
en  fit  ajourner  l'acquisition.  Ces 
glaces  sont  maintenant  en  Angle- 
terre, M.  Le  Guay  attaché  depuis 
seize  à  dix-huit  ans  à  la  manufac- 
ture royale,  est  l'un  des  peintres 
qui  ont  le  plus  contribué  à  établir 
et  à  soutenir  la  réputation  dont 
jouit  cet  établissement  royal.  Il  a 
fait  de  nombreux  ouvrages  chez 
31.  Dihl,  et  à  Sèvres;  parmi  les 
principaux  nous  citerons  :  i"  une 
table  pour  le  roi  d'Espagne  Char- 
les IV;  elle  a  4  pieds  de  dimension 
et  représente  l'Histoire  de  Psyché 
d'après  les  dessins  de  Raphaël.;  a" 
un  vase  pour  S.  M.  Louis  XVIIl, 
représentant  Diane  au.  retour  de  la 


LEU 

chasse;  3°  un  vase  pour  S,  A.  I\. 
madame  ladauphine,  dont  le  sujet 
à  pour  titre  Un  hommage  à  la  ver- 
tu; 4"  un  déjeuner  pour  S.  A.  II. 
madame,  duchesse  de  Berry,  re- 
présentant les  Peines  et  les  Plaisirs 
de  l' Amour,  le  plateau  et  les  tas- 
ses ont  54  figures.  5°  \Jx\  très- 
grand  vase  représentant  Diane 
triomphante  des  Amours.  Ce  chef- 
d'œuvre  le  seul  de  cette  impor- 
tance qui  jusqu'à  ce  jour  ait  été 
exécuté  sur  porcelaine,  a  6  pieds 
de  circonférence,  53  figures  de 
onze  pouces  de  hauteur  y  sont 
habilement  disposées,  la  compo- 
sition en  est  à  la  fois  savante  et 
gracieuse,  le  dessin  pur,  le  coloris 
d'une  vérité  parfaite.  La  réussite 
d'une  pièce  de  cette  importance 
en  porcelaine  est  une  chose  mi- 
raculeuse. Ce  magnifique  vase  qui 
a  coûté  trois  ans  de  travaux  à  ftl. 
Le  Guay ,  a  été  exposé  au  Louvre 
en  janvier  1826,  le  prix  en  était 
fixé  à  5o, 000  francs.  S,  M.  Char- 
les X  en  a  fait  présent  à  l'époque 
du  sacre,  au  duc  de  Norlhumbcr- 
land,  envoyé  extraordinaire  du  roi 
d'Angleterre.  M.  Le  Guay  a  formé 
d'excellens  élèves  parmi  lesquels 
nous  citerons  madame  Jacotot 
dont  le  talent  est  l'un  des  plus  re- 
marquables pour  la  peinture  sur 
porcelaine. 

LëLAIIGE,  vice-amiral,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XIL 

LEMAZIRIER  (  Pierue- Da- 
vid), littérateur,  né  à  Gisors,  s'est 
occupé  pendant  plusieurs  année» 
de  travaux  un  peu  différcns  de 
ceux  auxquels  il  se  livre  aujour- 
d'hui. Il  passa  presque  immédia- 
tement du  collège  dans  les  admi- 
nistrations financières  :  c'est  pren- 
dre une  route  bien  détournée  pour 


LET  397 

arriver  aux  fonctions  de  «ecrélaire 
du  comité  d'administration  de  la 
Comédie-Française  qu'il  remplit 
depuis  long-temps.  Il  les  doit  en 
partie  à  son   ouvrage  publié  en 
1810  sous  ce  titre  :  Galerie  histo- 
rique des  acteurs  du  Théâtre-Fran- 
çais ,  1  vol.   in-8° ,  dont  La  se- 
conde édition  paraîtra  incessam- 
ment. M.  Lemazuriera  composé  un 
assez  grand  nombre  de  pièces  fu- 
gitives, imprimées  d;ms  VAlma- 
îiach  des  Muses  et  autres  recueils 
du   même  genre,  et  qu'il  a  lues 
tant  aux  séances  publiques  des  so- 
ciétéslittérairesdont^il  était  mem- 
bre, qu'à  celles  de  l'athénée  de 
Paris.  La  majeure  partie  de  ces 
pièces  se  compose  de  contes  en 
vers,  parmi  lesquels  on  remarque 
Tristan    et  Clodion   le   Chevelu  ; 
le  Diable  et  l' Avocat  ;  le  Roi  et  le 
Paysan;  \e  Roi  Dagobert,  où  l'au- 
teur sait  alliera  la  facilité  du  style 
beaucoup  de  gaîté  et  de  [)hiloso- 
phie.  Quelques  personnes  lui  at- 
tribuent d'autres  ouvrages;  niais 
il  est  douteux  que  ce  soit  avec  fon  - 
dément.  On  annonce  qu'il  va  pu- 
blier une  Histoire  du  Théâtre  et 
de  la  troupe  de  Molière.  Ce  tra- 
vail, qui  peut  être   intéressant, 
appartenait  de  droit  au  secrétaire 
du  Théâtre  qui  s'honore  d'avoir 
euMolière  pour  fondateur.  M.  Le- 
mazurier  est  un  des  collaborateurs 
de  la  Bibliothèque  dramatique  que 
publie  madame  Dabot-Butschert. 

LEPIC  ,  lieutenant  -  général  , 
voy.  te  Supplément  du  tome  XVI. 

LEGUA  Y,  voy.  l'Errata  du  tome 
XI  IL 

LETELLIER  (  Pieriie  -  James- 
HiPPOLYTE.  )  Depuis  limpression 
du  vol.  XI  de  cet  ouvrage,  où 
nous  avons  consacré  un  article  àï 


5i)S 


MAE 


M.  Letellier,  Il  a  pubiit;  un  nou- 
vel ouvrage,  intitulé  :  Tableaux 
historiques  de  Tacite,  le  texte  en 
regard,  avec  «les  notes  (  2  vol. 
in -8",  i8i5,  Paris,  Grimbert, 
libraire,  rue  de  Savoie.  )  Cet  ou- 
vrage, remarquable  par  la  par- 
laite  intelligence  de  l'original, 
l'beureuse  imitation  de  ses  for- 
mes ,  l't'jlégance  et  la  précision  du 
style,  a  obtenu  non -seulement 
les  suffrages  de  la  haute  littéra- 
ture, mais  encore  ceux  des  jom*- 
naux  de  toutes  les  opinions  ;  il 
vient  d'être  adopté  par  l'univer- 
sité, pour  être  donné  en  prix  dans 
les  collèges  royaux. 

LETOllï ,  lieutenant-général , 
vcry.  le  Supplément  du  tome  XII. 

LOUIS  XVIII,  voy.  le  Supplé- 
ment du  tome  XVII. 

LUlilENSRI,  général  polonais, 
voj.  le  Sup.  du  tome  XVII. 

LUGE  IV  avocat,  voy.  le  Sup- 
plément du  tome  XIII. 

LUC  Y,  conseiller  à  la  cour 
royale,  voy.  le  Sup.  du  t.  XVIII. 

MAGCARTHY,chefde  batail- 
lon ,  voy.  le  Sup.  du  tome XII. 

MAGON,  général  de  brigade, 
voy.  le  Supplément  du  tome  XII. 

MAELZEL  (Jean),  mécanicien, 
est  né  à  Uatisbonne  en  1782.  Il 
vint  fort  jeune  à  Vienne,  où  il 
étudia  d'abord  la  musique  et  la 
mécanique,  et  acquit  une  grande 
réputation  pour  la  perfection  où 
il  porta  l'art  de  piijuer  (noter)  les 
cylindres  pour  les  orgues  mécani- 
sés ,  et  reçut  le  suffrage  le  plus 
honorable  de  l'institut  de  France 
et  des  premiers  compositeurs  de 
Paris  et  de  Londres  pour  la  com- 
position d'un  pan-harmonicon, 
qui  réunit  tous  le!<  instruniens  qui 
peuvent   composer  un   orchestre 


MAE 

complet  d'harmonie.  Cet  Instru- 
ment exécute  seul  des  sympho- 
nies, des  ouv«'rture3,  au  moyen 
de  ditlérens  cylindres  qu'on  y  a- 
dapte.  Plusieurs  de  ces  inslrnmens 
ont  été  entendus  avec  intérêt  à 
Londres  et  à  Paris.  M.  Maëlzel  est 
aussi  auteur  d'un  secrétaire  de 
sûreté;  lorsqu'une  main  étran- 
gère veut  l'ouvrir,  elle  est  à  l'ins- 
tant saisie  par  deux  bras  factices, 
dont  la  force  s'accroît  à  raison  de 
la  résistance  qu'on  leur  oppose, 
et  deux  trompettes  à  l'instant  son- 
nent l'alarme.  La  musique  doit  à 
M.  Maëlzel  le  perfectionnement 
du  métronome  ou  régulateur  mu- 
sical, approuvé,  en  1816,  par  l'ins- 
titut, et  accueilli  par  tous  les  com- 
positeurs. Il  est  auteur  d'une  pou- 
pée qui  prononce  papa  et  maman, 
et  d'un  trompette  mécanique  qui 
exécute  avec  force  et  précision  les 
fanfares  les  plus  difficiles.  Il  a  per- 
fectionné le  joueur  d'échecs,  in- 
venté par  Kempel,  et  le  petit  dan- 
seur.de  corde  de  Enslen.  Il  a  ima- 
giné un  fourgon  et  un  brancard 
pour  transporter  les  blessés  et  les 
malades.  Un  honime  seul  peut 
transporter  un  blessé  et  le  dépo- 
ser sur  son  lit  sans  lui  faire  éprou- 
ver aucune  secousse.  On  doit  enco- 
re à  M. Maëlzel  la  voiture  à  moulin, 
un  fauteuil  roulant  pour  les  ma- 
lades, et  un  appareil  préservatif 
du  méphitisme,  pour  lequel  il 
a  reçu  de  l'empereur  d'Au- 
triche une  médaille  en  or.  M. 
Maëlzel  mettra  le  comble  à  sa  ré- 
putation en  exécutant  un  nouveau 
mélographe  ou  instrument  desti- 
né à  adjoindre  à  tous  les  pianos 
et  à  obtenir  la  musique  que  l'on 
joue  toute  notée  sur  un  papier  in- 
térieur, etc. 


MAK 

It-    MALEZEWSKI  (N.).  :»nf^'t''> 
■  •colonel,  toy.   le  Suppletnenl  du 
JomeXVII. 

MARANON  or  MARAGNON 
(don  Antonio),  plu?  générale- 
ment connu  sous  la  dénoniiuation 
<lu  Trapiste,  commandant  une  di- 
vision de  l'armée  de  la  Foi ,  est 
né  vers  1778,  daus  un  bourg  de 
^K  Navarre.  Il  s'enrôla  comme  slin- 
Hb  fie  volontaire ,  et  fit  ses  premié- 
Hb  res  armes  pendant  la  guerre  que 
■P  les  Espagnols  soutinrent  avec  quel- 
"  que  gloire  contre  les  vainqueurs 
<le  l'Europe.  Son  audace,  portée 
souvent  jusqu'à  la  témérité,  le  fit 
parvenir  au  grade  de  capitaine 
dans  le  régiment  de  la  princesse, 
mais  il  ne  paraissait  pas  réunir 
alors  les  qualités  nécessaires  pour 
s'élever  plus  haut,  ni  même  pour 
se  maintenir  dans  ce  grnde  ;  c'est 
ce  qu'il  prouva  bientôt.  Se  trou- 
vant à  Lérida,  une  ancienne  pas- 
sion pour  le  jeu  qui  semblait  l'a- 
voir abandonné,  se  réveilla  tout- 
à-coup  avec  fureur  :  il  s'y  livra 
sans  réserve;  perdit  d'abord  tout 
l'argent  qu'il  possédait,  mitàcon- 
Iribution  la  bourse  de  ses  amis, 
et  perdit  encore  les  sommes  qu'il 
en  retira  :  enfin  il  porta  le  délire 
jusqu'à  jouer  le  prêt  de  sa  compa- 
gnie, et  les  épaulettes  de  son  gra- 
de. Il  essaya  même,  à  ce  qu  on 
assure,  de  vendre  son  brevet  d'of- 
ficitr.  Une  pareille  conduite  de- 
vait lui  enlever  l'estiuje  de  ses 
chefs,  et  toute  considération  par- 
mi ses  égaux  :  il  perdit  effective- 
ment l'une  et  l'autre,  et  pour  se 
dérober  aux  reproches  de  tes 
chefs  et  à  la  honte  de  redescendre, 
il  se  fit  dévot,  et  dans  sa  ferveur 
de  circonstance,  il  quitta  de  nuit 
Lérida,  et  alla  s'enfermer  dans  un 


MAR 


•5y<) 


couvent  de  l'ordre  de  la  Trappe  , 
dont  il  endossa  l'habit.  On  pense 
bien  que  le  capitaine  IMaranon, 
devenu  fière  (luêteur  d'un  cou- 
vent de  tràpistes,  ne  se  plaidait  pas 
beaucoup  dans  son  nouvel  état. 
Ses*inclinations  belliqueuses  et 
son  amour  du  jeu  ne  pouvaient 
être  anéantis  sans  retour  :  on  sait 
d'ailleurs  qu'un  joueur  ne  se  corri- 
ge jamais.  Cependant  les  voeux 
qu'il  avait  prononcés  le  retenaient 
dans  sa  retraite;  mais  lorsque  les 
royalistes  de  la  Péninsule  poussè- 
rent un  nouveau  cri  de  guerre 
contre  la  constitution  des  Cortès, 
l'établie  par  suite  des  événemens 
de  l'île  de  Léon,  il  ne  manqua  pas 
de  saisir  l'occasion  que  le  prétexte 
de  la  religion  outragée  lui  fournis- 
sait,pour  tenter  de  devenir  un  per- 
sonnage important,  en  se  faisant 
le  défenseur  de  cette  religioruLes 
préjugés  du  couvent  favorisaient 
son  projet;  il  put  donc  sans  avoir 
Tair  d'en  violer  la  règle,  puisqu'il 
conservait  son  froc,  remplacer  la 
besace  par  l'épaulette,  comme  il 
avait  précédemment  remplacé  l'é- 
paulette par  la  besace;  et  par  ce 
moyen  se  retrouvcrencore  sur  les 
champs  de  bataille  et  dans  les 
maisons  de  jeu.  Il  commença  par 
jouer  le  rôle  d'inspiré,  et  parvint 
à  rassembler  sous  ses  ordres  un 
assez  grand  nombre  de  partisans, 
qui  tous  exaspérés  par  ses  dis- 
cours, secondèrent  merveilleuse- 
ment son  audace  en  s'emparant, 
par  un  coup  de  ujain,  du  fort  d'Ur- 
gel,  situé  au  versant  méridional 
des  Pyrénées-Orientales.  C'était 
au  moment  oi'i  les  chefs  de  l'ar- 
mée de  la  Foi  venaient  «l'établir 
ime  régence;  Mnranon  saisit  har- 
diment cette  occasion  pour  fairo 


4oo 


MAR 


hommage  de  sa  conquête  et  de 
ses  guérillas  à  ce  nouveau  gou- 
verneuient  à  qui  il  prêta  serment, 
et  en  recul  le  titre  de  général.  La 
régence  s'établit  alors  à  Urgel , 
dont  elle  pritlenora,  et  cet  exploit 
du  trapiste  est  peut-être  vérita- 
blement le  seul  à  qui  il  doit  sa 
célébrité.  Il  ne  fut  pas  aussi  heu- 
reux dans  une  entreprise  qu'il  fit 
sur  l'Arragon  peu  de  temps  après, 
et  dans  laquelle  il  échoua  complè- 
tement. Attaqué  le  19  août  1822, 
sur  les  hauteurs  d'Ayerbe,  par  le 
général  Zarco-del-Valle,  il  perdit 
toutes  ses  munitions,  ses  équipa- 
ges, son  drapeau,  trente  chevaux, 
un  grand  nombre  d'hommes  et  le 
seul  canon  qu'il  possédait.  Après 
avoir  été  successivement  battu 
sur  d'autres  points,  i!  fut  comme 
la  plupart  des  chefs  do  l'armée  de 
la  Foi,  obligé  de  se  sauver  en 
France  pour  éviter  de  tomber  en- 
tre les  mains  des  constitutionnels, 
alors  victorieux  sur  tous  les  points. 
Maranon  vint  chercher  un  asile 
dans  un  couvent  de  Toulouse  où 
malgré  ce  qu'en  ont  publié  cer- 
tains journaux,  il  trouva  peu  d'ad- 
mirateurs. Il  est  reparti  de  celte 
ville,  vers  l'époque  où  l'armée 
française  entra  en  Espagne,  pour 
commander  la  division  royaliste 
de  Biscaye,  sous  les  ordres  du  gé- 
néral Quésada.  Ce  fougueux  moi- 
ne ,  qui  hors  du  champ  des  com- 
bats, aff-iCte  de  paraître  doux, 
simple  et  modeste,  ne  se  montrait 
aux  soldats  qui  obéissaient  à  ses 
ordres,  qu'en  tenant  de  la  main 
gauche  un  crucifix,  qu'il  élevait 
en  l'air,  et  un  fouet  dans  la  droi- 
te. Sa  longue  robe  était  criblée  de 
balles,  qui,  selon  ce  qu'il  dit, 
n'ont  pu  l'atteindre.  Il  portait  par 


MAR 

dessus  de  larges  épaulettca  de  gé- 
néral, et  une  longue  carabine  sus- 
pendue en  sautoir.  L'aia  grotes- 
que que  lui  donnait  cet  accoutre- 
ment bizarre,  ne  contribuait  pas 
peu  à  attirer  sur  lui  l'attention  gé- 
nérale, sa  taille  est  d'environ  cinq 
pieds.  On  pourra  se  faire  une  idée 
du  style  et  de  l'éloquence  du  tra- 
piste, en  lisant  quelques  fragmens 
de  la  proclamation  qu'il  adressa 
aux  armées  constitutionnelles,  a- 
près  le  passage  de  la  Bidassoa  : 
«  Gloire  à  Dieu  I  soldats,  le  chant 
de  la  tourterelle  s'est  fait  enten- 
dre dans  notre  terre;  c'est  une 
preuve  que  nous  avons  passé  la 
mauvaise  saison  de  l'hiver,  et  que 
nous  sommes  maintenant  dans  le 
beau,  agréable  et  fleuri  prinlems. 
La  colombe-^»  quitté  l'arche,  et  el- 
le y  rentrera  promptement  avec 
la  branche  d'olivier  au  bec;  c'est 
un  signal  de  paix  et  de  sérénité, 
et  une  preuve  que  les  eaux  du  dé- 
luge ont  cessé.  Vous  avez  des 
oreilles  et  vous  n'entendez  pas  : 
vous  avez  des  yeux  et  vous  ne 
voyez  pas.  Je  vous  dis  donc  que 
bientôt  les  tempêtes  et  les  oura- 
gans qui  ont  aflligé  la  nation  espa- 
gnole cesseront,  et  qu'au  lieu  de 
ces  chants  patriotiques ,  produc- 
tions de  cervelles  frénétiques  , 
l'Espagne  sera  remplie  de  Jubi- 
lés, de  plaisirs  et  de  contente- 
ment, et  qu'elle  chantera  des 
hymnes  de  triomphe  et  des  allé- 
luia. Je  vous  dis  que  l'on  verra 
bientôt  voguer  en  paix,  avec  une 
brise  agréable,  le  vaisseau  de  Pier- 
re, qui  a  été  poussé  dans  les  flots 
par  de  violons  ouragans.  Je  vous 
dis  que  la  constitution,  cet  lior- 
rible  monstre,  conçu  par  l'enfer 
dans  l'Espagne  catholique,  et  dont 


MAR 

il  ravorlcment  a  coûté  laot  de  lar- 
P  mes  à  nutre  suinte  U)ère  église,  et 
aux  chrétiens  ses  chers  Gis,  va 
(ILsparaître  Ju  sol  espagnol.  Déjà 
les  armées  françaises  sont  entrées 
en  Espagne,  n'en  doutez  pas,  et 
vous  serez  enveloppés  avec  la  vi- 
le canaille,  qui,  profitant  de  votre 
docilité,  vous  a  mis  un  bandeau 
sur  les  yeux,  afin  de  vous  jeter 
pieds  et  mains  liés  dans  le  préci- 
pice dont  vous  ne  pouvez  sortir. 
Oui ,  soldats  et  frères  en  Jésus- 
Christ,  je  vous  appelle  par  ce  ten- 
dre' nom,  alln  que  sortant  de  la 
léthargie  qui  vous  rend  sourds 
aux  aiguillons  de  votre  conscien- 
ce, et  vous  fait  prêter  l'oreille  à 
ces  chefs  de  la  perfidie,  premiers 
nés  du  diable,  vous  puissiez  en- 
core sécher  les  larmes  de  notre 
tendre  mère...  Vousavez  vu  exter- 
miner le  saint  tribunal  de  la  Foi; 
vous  avez  vu  exterminer  la  com- 
pagnie de  Jésus;  vous  avez  vu  sup- 
primer les  monastères  et  les  cou- 
vens  ;  vous  avez  vu  voler  leurs  re- 
venus, chasser  les  ecclésiastiques; 
vous  avez  vu  la  maîtresse  des  na- 
tions esclave!...  Vous  avez  vu  vos 
chefs  politiques,  érigés  en  papes, 
chasser  de  leurs  cloîtres  celles 
qui  ont  pris  le  voile....  Vous  avez 
vu  ;  les  cieux  se  sont  obscurcis 
d'une  transformation  si  déplora- 
ble; vous  avez  vu  une  pierre  de 
marbre  respectée,  vénérée  et  déi- 
fiée !  O  mon  Dieul  le  respect  et 
l'adoration  qui  vous  sont  si  juste- 
ment chers,  vous  ont  été  arrachés 
par  des  tables  ou  des  pierres  éri- 
gées dans  une  place  publique 

Quel  triomphe  pour  l'impiétél  tel- 
le est  la  félicité  que  nous  promet 
une  race  maudite.  La  ualion  sans 


WAR 


401 


foi  et  sans  religion  qui  offenge  le 
fils  unique  de  Dieu,  peut-elle 
donc  être  heureuse?  mes  frères, 
ouvrez,  ouvrez  les  yeux;  vous 
pouvez  encore  éviter  le  gouffre  fa- 
tal qui  vous  attend  sans  remède. 
Abandonnez  ces  satellites  de  Sa- 
tan ;  venez  à  moi,  ou  courez  aux 
royalistes  qui  sont  le  plus  près 
de  vous;  faites-le  sans  délai;  votre 
humble  frère  le  Irapiste  vous  y 
invite.  »  (Cette  pièce  curieuse  est 
datée  de  Vittoria  le  14  avril 
1825.)  Nous  avons  omis  dana 
celte  proclamation  les  apostro- 
phes injurieuses  à  différens  mem- 
bres des  Corlès.  Dans  une  secon- 
de proclamation,  datée  du  même 
jour  et  adresnée  aux  soldats  de  la 
loi,  l'indulgent  Trapiste,  ne  coinp- 
tant  apparenmient  pas  assez  sur 
l'appui  des  Français,  appelle  ù  son 
secours  l'ange  exterminateur  pour 
anéantir  le  gouvernement  cons- 
titutionnel d'Espagne.  Au  surplus, 
Maranon  qui  ne  fit  absolument  rien 
de  remarquable  pendant  la  cam- 
pagne do  ibijj,  fut  l'un  des  chefs 
espagnols  qui  s'opposèrent  avec 
le  plus  d'énergie  à  l'exécution  du 
décret  d'Andujar,  Rentré  dans 
son  couvent  lorsqu'il  n'y  eut  plus 
d'armée  libérale  à  combattre , 
il  a  reçu,  dit- on,  du  roi  Fer- 
dinand une  lettre  de  félicitatioii 
sur  sa  conduite.  Là  sans  doute,  se 
sont  bornées  les  récompenses  ac- 
cordées à  ce  singulier  personnage, 
qui,  CD  raison  de  l'état  qu'il  a  em- 
brassé, a  dû  renoncer  aux  hon- 
neurs, aux  dignités,  à  toutes  les 
laveurs  de  la  cour  enfin,  comme 
aux  plaisirs  du  monde.  On  n'avait 
point  entendu  parler  depuis  long- 
temps du  rtivérend  frère  Mara- 
36 


/|0C 


MAR 


non,  lorsqu'on  uppril  d'iihord  par 
lus  leuillos  j)ubli(|ijt;s  (  iK'25  ) 
que  sa  révérence  accompagnée  du 
général  Santos  Ladron,  recru  lait 
dans  le  bas  Arragon,  et  faisait  long 
ses  efforts  pour  insiirrectionner 
cette  province  en  favenr  du  par- 
ti de  l'Infant  don  Carlos,  ce  qtii 
donnait  de  sérieuses  inquiétudes 
au  gouvernement.  Presqu'aussi- 
tôt  on  annonça  que  ce  révérend 
frère  avait  été  arrêté  à  Logrono, 
et  conduit  i\  Pampelune.  Remis  en 
liberté,  il  fut  arrêté  de  nouveau 
et  confié  à  la  garde  de  ses  suj)é- 
rieurs.  Le  général  Bessières  qui 
servait  la  même  cause,  ayant  été 
pris  et  fusillé,  on  assura  en  nïê- 
ine  temps  que  Maranon  avait  été 
trouvé  mort  dans  son  lit. 

MARGUEUIT  (le  baron),  voy. 
le  Supplénilnt  du  toiue  XVI. 

MARTTÙy  (Henry),  pieux,  sa- 
vant et  célèbre  missionnaire  an- 
glais, naquit  à  Truro ,  dans  le 
comté  de  Cornwall ,  le  18  février 
1781.  Il  montra  dès  sa  jeunesse 
les  plus  purs  sentimens  de  piété, 
et  se  détermina  d  aller  prêcher 
l'évangile  aux  peuples  vulgaire- 
ment nommés  païens.  Ce  fut  dans 
«es  dispositions  qu'il  fut  ordonné 
ministre  du  Saint-Evangile  Bien- 
tôt après,  il  partit  pour  les  Indes- 
Orientales;  là,  il  exerpa  avec  le 
plus  grand  zèle  ses  fonctions  apos- 
toliques. Après  avoir  traduit  le 
missel  anglais  en  hindostani,  il 
célébra  le  service  divin  dans  cette 
langue  ,  ce  qui  fui  un  spectacle 
aussi  nouveau  qu'attendrissant. 
Ensuite  il  traduisit  aussi  le  nou- 
veau testament  en  hindostani.  Le 
mauvais  état  de  sa  santé  l'ayant 
forcé  d'interrompre  «es  prédica- 
tions, il  se  détermina  d'aller  en 


MON 

Perse.  Arrivé  à  (^Iiircv,  il  se  mit 
à  Iniduire  le  nouveau  leslameiil 
et  le  jj'tautier  en  persan,  et  écri- 
vit trois  traités  de  cf)nlroversc  en 
persan  contre  la  religion  musul- 
mane (  qui  viennent  d'être  tra- 
duits en  anglais  par  M.  le  Rel. 
S.  Lee  ,  et  j)ubliés  sons  le  litre  de 
Persian  controversies).  Il  eut  de» 
conférences  publiques  avec  des 
docteurs  musuhnans,  et  avec  des 
sofm  (on  déistes).  Ensuite  il  quitta 
la  Perse,  et  mourut  à  la  fleur  de 
son  âge  dans  les  plus  grands  sen- 
timens de  piété,  à  Tocat,  le  i(> 
octobre  18 J2.  Ses  mémoires  ont 
été  publiés  en  anglais,  sous  le  ti- 
tre de  Me/noir  of  the  Rev.  Henry 
Mnrtyv.  Il  en  a  déjà  paru  sept 
éditions.  Ses  traductions  du  nou- 
veau testament  en  persan  et  en 
hindostani  sont  imprimées  et  ré- 
pandues en  Perse  et  dans  les  Indes. 

MARET,  duc  de  Rassano,^o)'. 
le  Supplément  d»i  tome  XIII. 

MAIUGNY,  chef  de  bataillon, 
t'oy.leSupplétnent  du  tome  XIII. 

MÉRILHOU,  avocat ,  rot/.  le 
Supplément  du  tome  XVI [I. 

WEUNIER  (N.),  général  de 
division,  voy.  le  Supplément  du 
lonie  XV. 

MÉVOLITON  (le  baron),  voy. 
l'Errafa  du  tome  XIII. 

MONDÉTOUR,  ancien  maire 
de  Paris,  voy.  le  Supplément  du 
tome  XV. 

MONGLAVE  (EcGÎîNEDE),toy. 
le  Supplément  du  tome  XVII. 

MOKRONOWSKI(Stanislas), 
tjoî/.le  Supplément  du  tome  XVII. 

lUONNERET,  capitaine,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XV. 

MONÏÉMONT,  homme  de  let- 
tres, voy.  le  Supplément  du  tome 
XV. 


MON 

faONTFALCON  (lb  cnETAUEB 
Jbih  de),  maréchal-dc-tamp,  ofli- 
cler  de  la  Icgion-d'honneur,  et 
chevalier  de  Saint-Couis  ,  né  au 
Pont  de  Beauvoisin  (Isère),  le  6 
février  1 767,  entra  an  service  le  3 
novembre  1786.  Cet  oITicier  géné- 
ral qui  fît  toute»  les  campagnes  de 
la  révolution,  et  donna  partout 
des  preuve»  du  plus  grand  dé- 
vouement, avait  dès  l'année  I703, 
signalé  son  courage  sur  les  champs 
«le  balaille,  et  mérité  fort  jeune 
encore  le  grade  d'adjudanf-géné- 
ral.  Nous  regrettons  de  n'être  pa» 
à  même  de  citer  tous  les  faits  d'ar- 
mes qui  illustrèrent  sa  valeur,  et 
de  ne  pouvoir  suppléer  aux  omis- 
sions involontaire»  de  l'histoire  de 
nos  campagnes.  Quelques  traits 
épars  dans  les  Victoires  et  Conquê- 
tes, et  dans  les  Fastes  de  la  gloire, 
recueillis  dans  cet  article,  servi- 
ront i\  faire  connaître  le  général 
Montfalcon.  Il  était  du  petit  nom- 
bre de  ces  Français  intrépides  qui 
se  rendirent  le  6  juillet  »8o6,  maî- 
tres de  Raguse,  après  avoir  tra- 
versé avec  la  rapidité  du  chamois, 
et  à  travers  les  rochers,  malgré  la 
chaleur  excessive  et  des  obstacles 
toujours  reriaissans,  un  pays  que 
les  Monténégrins  avaient  souillé 
de  cruautés  inouïes,  et  jonché  de 
cadavres  décapités,  et  de  restes  fu- 
mans  d'hommes  livrés  aux  flam- 
mes. La  retraite  de  l'armée  d'Ita- 
lie sur  risonio,  et  l'affaire  de  Saff- 
nitz  en  i8i5,  vinrent  ajouter  à  sa 
vieille  réputation  de  valeur,  et 
servirent  à  faire  briller  d'un  nou- 
vel éclat  les  talcns  militaires  de 
RI.  Montfalcon.  Le  grade  de  géné- 
ral de  brigade,  auquel  il  fut  promu 
le  I*'  janvier  1814,  ne  fut  pour  lui 
qu'une  récompense   tardive    des 


MON 


4o5 


plus  honorable*  services.  Il  com- 
mandait en  181 5,  le  département 
du  Cantal,  lorsqu'il  reçut  après  le 
retour  de  Napoléon,  l'ordre  de  se 
rendre  à  l'armée  des  Alpes,  com- 
mandée par  le  maréchal  duc  d'Al- 
buféra.  Chargé  par  le  lieutenant 
général  Desaix  d'occuper  Bonne- 
ville  en  Savoie,  il  était  dans  cet- 
te position,  lorsque  le  27  juin  l'en- 
nemi s'y  présenta  avec  dt!S  forces 
supérieures.  Le  général  Montfal- 
con l'attendit  à  bout  portant,  lui 
tua  beaucoup  de  monde,  le  pour- 
suivit et  lui  fit  un  grand  nombre 
de  prisonniers.  Le  6  juillet  suivant 
attaqué  de  nouveau  par  les  Au- 
trichiens et  les  Piémontais  ù 
Oyonax,  sur  la  route  de  Saint- 
Claude,  il  se  défendit  avec  sa  va- 
leur accoutumée,  et  les  battit  près 
de  Dorlans.  Le  général  Montfal- 
con dont  la  carrière  militaire  a  été 
trés-aclive,  n'a  point  été  employé 
depuis  celte  époque,  et  a  été  com- 
pris dans  rordonnance  du  l"  dé- 
cembre 1824. 

MONTIJO  (dohi  Maru-Fraw- 

ÇOISE  PORTOCARRERO,  COMTESSE  De)  f 

grande  d'Espagne  ,  etc.  ,  issue 
d'une  famille  dont  l'illustration 
remonte  aux  premiers  temps  de 
la  monarchie,  épousa  très-jeune 
encore  le  comte  de  Montijo,  grand 
d'Kspagne  de  première  classe  , 
l'un  des  seigneurs  les  plus  dis- 
tingués de  ce  royaume,  autant  par 
ses  qualités  personnelles  que  par 
sa  naissance.  Son  amour  pour  la 
bonne  littérature  et  ses  efforts 
pour  en  propager  le  goût  la  firent 
bientôt  connaître  sous  les  rapports 
les  plus  honorables;  elle  fit  ell«- 
méme  des  progrès  si  rapides , 
qu'elle  ne  tarda  pas  h  prendre 
place   parmi  lc«   savan»  le»  plus 


4«4 


MON 


recommanilables  de  l'Kspagne  ; 
sa  maison  devint  en  même  temps 
le  centre  de  réunion  d'un  grand 
nombre  d'ecclésiastiques,  qui  joi- 
gnaient les  lumières  aux  vertus. 
Des  prêtres  et  ilct^  moines  intolé- 
rans  et  fanatiques,  à  qui  ces  réu- 
nions portaient  ombrage,  parce 
qu'elles  tendaient  à  dissiper  les 
ténèbres  où  ils  voulaient  retenir 
un  peuple  ignorant ,  accusièrent 
de  jansénisme  ceux  qui  les  compo- 
saient et  particulièrement  la  com- 
tesse; deux  d'entre  eux,  don  Bal- 
thasar  Calvo,  chanoine  de  Saint- 
Isidore,  et  Antoine  Guerrero, 
dominicain,  portèrent  même  lu 
mauvaise  foi  jusqu';\  publier  en 
chaire  qu'il  existait  dans  la  capi- 
tale un  conciliabule  de  jansénis- 
tes, formé  sous  les  auspices  d'une 
dame  de  la  première  distinction, 
qu'ils  ne  nommèrent  pas,  mais 
qu'ils  désignèrent  de  manière  à 
ne  pas  s'y  méprendre.  Le  nonce 
de  la  cour  de  Home  ayant  informé 
le  pape  de  ce  qui  se  passait,  sans 
avoir  lui-même  examiné  les  mo- 
tifs qui  faisaient  agir  les  dénon- 
ciateurs, sa  sainteté,  prenant  pour 
un  vrai  zèle  ce  qui  n'était  réelle- 
ment qu'un  scandale  condamna- 
ble, adressa  des  lettres  de  remer- 
cîmens  aux  deux  prêtres  dénon- 
ciateurs ,  et  celte  approbation  de- 
Tint  le  signal  de  nouvelles  dénon- 
ciations contre  la  comtesse  et  sa 
société;  on  leur  reprocha,  outre 
le  jansénisme,  d'entretenir  une 
correspondance  religieuse  et  lit- 
téraire avec  l'abbé  Grégoire,  alors 
évêque  de  Blois.  Néanmoins  la 
toute  -  puissance  de  l'inquisition 
fut  obligée. de  fléchir  devant  le 
rang  et  la  naissance  des  accusés. 
La  comtesse,  invitée  à  s'éloigner 


MON 

de  Madrid,  eut  l'air  de  ne  céder 
qu'à  une  intrigue  de  cour,  et  le.l 
inquisiteurs  qui  avaient  mené  tou- 
te l'affaire,  "parurent  à  tous  les 
yeux  n'y  être  entrés  pour  rien. 
La  comtesse  de  Montijo  s'était  re- 
tirée à  Logronf);  elle  y  mourut 
en  i8o8  ,  et  malgré  la  persécution 
dont  elle  avait  été  la  victime,  elle 
laissa  une  réputation  de  vertu  et 
de  charité  envers  les  pauvres, que 
ses  ennemis  même  n'osèrent  pas 
lui  contester. 

MONTROL  (Fra^çois-Mowgin 
DE  )  est  né  à  Langres  en  aortt 
1798.  Son  père,  capitaine  au  ré- 
giment de  liourbon  au  commen- 
cement de  la  révolution ,  resta 
fidèle  aux  drapeaux  français  ,  et 
fit  les  premières  campagnes  de  la 
république  avec  les  armées  du 
Rhin,  de  San)bre-et-Meuse  et  de 
la  Vendée.  Il  était  devenu  un  des 
officiers  supérieurs  des  élals-ma- 
jors  des  généraux  iieurnonville 
et  Bernadotle,  lorsqu'il  se  retira 
du  service,  à  peine  âgé  de  aS  ans. 
Il  fut  nommé  quelque  temps  après 
inspecteur  des  eaux  et  forêts  dans 
le  département  de  la  Haute-Marne. 
Le  jeune  de  Montrol entra  aussi  au 
pervice  avant  l'ûge  de  16  ans,  et 
l'abandonna  plus  vite  encore  que 
son  père,  la  carrière  des  armes, 
après  les  événemens  de  1814  t^t 
i8i5,  n'offrant  que  peu  de  chan- 
ces à  l'avancement.  Il  se  rendit  ù 
Paris,  dans  le  dessein  d'y  étudier 
le  droit;  mais  ù  peine  arrivé  dans 
celle  ville ,  il  coopéra  à  la  rédac- 
tion des  Lettres  normandes.  Ce 
recueil,  qui  avait  précédé  la  Mi- 
nerve,  et  qui  se  montra  constam- 
ment aux  avant- postes  du  parti 
constitutionnel,  était  alors  rédigé 
par  MM.  Léon  Thiessé,  Bervilte, 


p 


MOS 

et  par  Mitt.  Bert  et  ChSteUin,  au- 
jounniui  rédacictirs  en  chef,  le 
premier  du  Journal  du  commercCf 
elle  second  du  Courrier  frariçaia. 
Quelques-uns  des  articles  que  don- 
na M. de  Moulrolfurentremarqué?, 
et  l'un  d'eux  intitulé  ,  des  Immi- 
grés et  des  nouveaux  Officiers  de 
l'armée,  lui  suscita  une  de  ces 
affaires  dans  lesquelles  les  jeunes 
Saint- Aulairc,  Saint- Marcellin  , 
David  et  quelques  autres,  perdi- 
rent la  vie.  Il  ne  fut  que  blessé. 
En  1831,  M.  de  Montrol  publia, 
BOUS  le  nom  de  M""  Luce-Aimée 
Mcerys  de  M...,  fille  de  l'uo  des 
membres  de  l'asscmbb'îe  consti- 
tuante, un  roman  intitulé  :  Saint- 
Léon  ou  la  suite  d'un  Bal  masqué, 
dont  plusieurs  journaux  nommè- 
rent le  véritable  auteur.  M.  de 
Montrol  a  fait  imprimer  depuis 
un  recueil  de  poésies  légères.  Il 
a  été  long-temps  le  principal  ré- 
dacteur du  Diable  boiteux,  qu'il 
a  concouru  à  fonder;  son  nom  est 
inscrit  sur  le  titre  du  Mercure  du 
nj*  siècle.  Les  journaux  politiques 
lui  doivent  aussi  quelques  articles. 
Il  vient  dans  ce  moment  (  iSaS) 
de  publier  une  Histoire  de  l'émi- 
gration ,  qui  a  eu  deux  éditions. 
M.  de  Montrol  est  un  des  auteurs 
de  la  collection  des  Résumés  de 
l'Histoire  de  /''rance  par  provinces; 
relui  de  la  Gbampagne  lui  n  été 
confié. 

MORAND,  général, rv>?/. 5e  Sup- 
pléuîfcnt  du  tome  XVIII. 

MOREAU  DE  COMMAGNY, 
auteur  dramatique,  roy*,  le  Sup- 
plément du  tome  XV. 

MOS  rOWSRI  (  Le  comte  Tni- 
i>ée)  ,  noble  Polonais,  moins  cé- 
lèbre par  stis  connaissances  lillé- 
raires  et  diplomatique»  quc'pnr  le 


MOS 


40  5 


rôle  honorable  qu'il  a  rempli  dans 
les  affaires  de  son  pays,  est  ne 
à  Varsovie  le  39  octobre  ij'Gô. 
Nommé,  en  1790 ,  castellan  et 
sénateur,  il  devint  dès- lors  en 
quelque  sorte  le  régulateur  de  l'es- 
prit public,  par  rinfluence  d'una 
Gazette  nationale  dont  il  était 
tout  à-la- fois  le  fondateur  et  le  di- 
recteur. La  Pologne  venait  enfin 
de  s'élever  au  rang  des  nations  li- 
bres en  }îc  donnant  la  constitution 
de  «791;  MosloAvski,  connu  par 
son  dévouement  à  la  cause  de  la 
liberté ,  fut  nommé  membre  du 
comité  constitutionnel  :  mais  ayant 
vu  bientôt  celte  cause  sainte  per- 
due par  l'adliésion  du  faible  Sta- 
nislas au  traité  de  Tergowitz,  qui 
rendait  de  nouveau  la  cour  de 
Saint- Pélersbourgarbitrc  des  des- 
tins do  là  Pologne,  il  quitta  sans* 
hésiter  unpays  où  l'on  ne  pouvait! 
plus  vivre  libre,  et  vint  en  FVnnce 
en  1792.  Lié  de  principes  et  d'affec- 
tions avec  les  Condorcel,  lesVer- 
gniaud,  les  Brissot  et  leurs  amis, 
il  prit  part  à  tous  leurs  projets  et 
eut,  au  commencement  de  179^» 
quelques  conférences  avec  les' 
membres  du  gouvernement  chez 
le  ministre  Lebrun  ;  mais  elles  de- 
meurèrent sans  effet  par  suite  de- 
là révolution  du  5i  mai  et  i\\x, 
triomphe  des  montagnards;  de-' 
venu  suspect  nu  parti  vainqueur,'' 
A  cause  de  ses  anciennes  relations' 
avec  les  girondins,  il  courut  les 
plus  grands  dangers;  la  mort  de' 
la  princesse  Lubomirska  {voy.  cû 
nom  ),  traînée  A  l'échafaud  parce" 
parti,  lui  fit  entrevoir  les  dangfM'!^' 
qu'il  courait.  Après  avoir  été  in-'' 
carcéré  trois  fois,  il  n'obtint  (pi'a- 
Vec  beaucoup  de  peine  |a  permis- 
sion de  retourner  dans  sa  patrie. 


4o(î 


MOS 


QutiiquH  inuiM  du  passeports  en 
règle,  il  fut  arrètù  une  quatrièuie 
fols  en  Iraversiiiit  le  département 
de  la  Marne,  et  traduit  au  tribu- 
nal révolutionnaire  de  Troyes.  Il 
aurait  infailliblement  succombé 
dans  cette  dernière  épreuve,  si  le 
hasard  n'eût  amené  sur  les  lieux  un 
membre  du  comité  de  salut  public 
qu'il  avait  connu  h  Paris  (HérauU- 
de-Séchelfes) ,  et  qui  le  sauva. 
Retiré  enfin,  après  tant  de  périls, 
danssaterredeTarkominen  Polo- 
gne, il  crovait  être  à  l'abri  de  nou- 
veaux orages  ;  mais  à  peine  habi- 
tait-il cette  retraite  depuis  quinze 
jours  qu'il  vit  tout-ii-coup  sa  mai- 
son inveslîo  par  un  corps  russe 
aux  ordres  du  général-major  Sie- 
vers,  qui  l'arrêta  au  nom  de  sa 
souveraine  et  le  laissa  chez  lui  sous 
bonne  garde.  Le  héros  de  la  Polo- 
gne, K.osciusko,  ayant  enfin  tenté 
au  commencement  de  1 794  un  gé- 
néreux effort  pour  relever  l'éten- 
dard de  l'indépendance,  le  conjte 
Mostowski  profitant  de  la  liberté 
qu'il  avait  recouvrée  peu  de  temps 
auparavant,  se  plaça  dans  les  ranjçs 
des  défendeurs  de  son  pays,  et  fit 
partie  du  conseil  provisoire.  Lors 
de  la  prise  du  faubourg  de  Pra- 
gue, il  était  membre  du  conseil 
de  guerre  sous  le  général  Wawre- 
ki,  que  la  captivité  de  Kosciusko 
Tenait  de  placer  à  la  tête  de  l'in- 
surrection polonaise  :  ne  voyant 
plus  alors  d'espoir  de  salut  que 
dans  une  résolution  désespérée , 
il  proposa  de  réunir  i\  la  hûte  les 
débris  de  Tarmée,  forte  encore  de 
a5,ooo  hommes  et  cent  canons  , 
de  faire  à  leur  tête  une  trouée  ù 
travers  l'Allemagne,  et  d'aller  re- 
joindre l'armée  française  victo- 
rieuse sur  les  bords  du  Rhin.  Dom- 


MOS 

browitki  chargé  d»;  l'exéculion  de- 
ce  plan,  fut  forcé  d'y  renoncer  par 
suite  des  mésintelligences  qui  «e 
glissèrent  parmi  les  autres  chefs; 
et  les  infortunés  Polonais,  après 
avoir  fait  tant  de  sacrifices  et  de 
si  héroïques  efforts  pour  secouer 
le  joug  étranger,  virent  encore 
une  fois  anéantir  leurs  dernière» 
espérances.  iMoslowski,  insensi- 
ble à  ses  propres  périls,  ne  vou- 
lut point  abandonner  ses  compa- 
triotes malheureux  :  resté  à  Var- 
sovie avec  Ignace  Potocki  et  quel- 
ques autres  compagnons  d'infor- 
tune, il  reçut  de  Snwarow  la  pro- 
messe que  les  personnes  et  les 
propriétés  seraient  respectées  ; 
mais  la  modération  n'entrait  pas 
dans  les  vues  de  l'implacable  Ca- 
therine :  non  contente  de  tenir 
déjà  dans  la  plus  dure  captivité 
le  brave  Kosciusko,  elle  fit  arrêter 
le  ao  décembre  1794»  le  comte 
MostOAVski  qui  resta  enfermé  par 
ses  ordres  au  château  de  Saint- 
Pierre- et -Saint -Paul  à  Péters- 
bourg  jusqu'au  mois  de  janvier 
1797.  Rendu  à  la  liberté  par  la 
générosité  de  Paul  1",  il  se  relira 
dans  ses  terres,  s'y  livra  à  l'agri- 
culture tout  en  publiant  une  col- 
lection des  classiques  polonais,  et 
devint  membre  de  la  société  lit- 
téraire de  Varsovie.  Au  mois  de 
janvier  i8ot),  il  eut  auprès  de 
l'empereur  Napoléon  une  mission 
dont  le  moîif  n'a  jamais  été  bien 
connu,  et  resta  c\  peu  près  étran- 
ger aux  afiaires  de  son  pays  jus- 
qu'à l'abdication  de  Napoléon. 
L'empereur  Alexandre  étant  de- 
venu souverain  possesseur  légi- 
time de  la  Pologne  par  les  décrets 
de  la  sainte-alliance,  chercha  d'a- 
bord à  s'entourer  d'hommes  re- 


OtJD 

vèhis  lie  lu  cotinniice  de  leur»  con- 
cituyeuâ,  et  confia  au  comte  Tha- 
clée  Moslowski  les  déparleniens 
(le  l'inlérieur  et  de  la  police  gé- 
nérale réunis. 

MObïOWSRI  (Joseph),  frère 
aîné  du  précédent, concouru t  coni- 
ine  nonce  de  lu  diète  polonaise 
de  1791,  ii  rélablissenient  de  la 
constitutwn  du  5  mai.  lin  1792» 
il  lut  député  avec  le  prince  Adam 
C  zarloriski ,  auprès  de  la  cour  de 
Saxe,  afin  d'olfrir  la  couronoe 
de  Pologne  ;\  l'électeur.  Dans  un 
voyage  à  Paris  qu'il  Ot  eu  1799» 
il  lut  compromis  dans  un  soi-di- 
sant projet  de  réunir  une  diète 
polonaise  i\  i^liian,  et  obtint  néan- 
moins l'autorisation  de  retourner 
Jans  ses  terres  situées  près  de 
^Vilna  en  Lithuauie,  oi'i  il  a  fixé 
sa  résidence.  11  parait  être  resté 
depuis  lors  étranger  aux  affaires 
dij>lu>iiatiq(ies. 

NANI,  professeur  à  l'universi- 
té de  Pnvie,  voy.  le  Supplément 
du  tome  XV. 

NICOLIM,  professeur  à  l'aça- 
«lémie  de  Florence,  voy.  le  Sup- 
plt'menl  du  tome  XV. 

ODKî'iKlO  ,  savant  Génois,, 
voy.  le  Supplément  du  tome  XV. 

OGlNSlvl  ,  grand-général  de 
Lithuanie,  voy.  le  Supplément  du 
tome  XVII. 

()GlNSK.I,grand-trésori(r, /(j//. 
le  Supplémctil  du  tome  XVII. 

OGlNSkl,  chef  de  la  garde 
d'Imnncur  de  la  Lithuanie,  voy. 
le  Supplément  du  lome  XVII. 

UKLOFF  (le  comte),  toy.  le 
Supplément  du  tome  XV. 

OUDAILLK  (  N.),  cultivateur, 
lut  nomnu';  déj>ulc  du  tiers -état 
>\n  l)iiiiliaj;-e  de  Leauvais  aux  élal,s- 
„f;nér.iui  eu    1789..  P/arUiaii  nio- 


PER  407 

déré  de  la  révolution  ,  il  montra 
constamment  du  patriotisme  ,, et 
parut,  en  1790,  à  la  tribune,  où 
il  demanda  lu  résiliation  des  baux 
à  louer  de  la  régie  des  traites  pour 
les  bureaux  établis  dans  l'intérieur 
du  royaume.  Après  la  session,  il 
retourna  dans  ses  foyers  et  ne  pa- 
rut plus  sur  lu  scène  politique. 

PAG  (N.),  général  de  division, 

voy.  leSupplémentdu  tome XVII. 

PASZKOWSKI  (N.),  général, 

de  brigade,  voy.  le  Supplément; 

du  tome  XVII. 

PEPOLI  (lb  comte),  voy.  le 
Sup|)lément  du  tome  XVI. 

PÉRALDI  ,  colonel  ,  voy.  le 
Supplément  du  tome  XVII. 

PERCE  VAL,  hotnuie  d'état  an- 
glais, voy.  leSupplémentdu  tome 
XVI. 

PERCIER(CHAnLEs),  membre 
de  l'institut  (académie  des  beaux- 
arts  )  ,    né    à    Paris    vers    177^» 
elk  regardé  connue  im  des  meil- 
leurs architectes  de  l'époque  ac- 
tuelle ,  et  l'arc  de  triomphe  qui 
décore  la  place  du  Carrousel  com- 
me son  plus  bel  ouvrage.  Associé 
à  tous   les   travaux  exécutés  par 
M.    Fontaine,    quV||bail  avec  luj^ 
architecte   de  l'empereur    Napo- 
léon, il  existe  entre  eux  une  soli- 
darité de  méiile  qui  permet  dilli-, 
cilcnjent  de  fixer  la  part  de  cha-. 
cnri.  C'est  en  counmm  qu'ils  uni 
publié  nn  miKnifique  ouvrage  sur 
l«;s  palais  de  Rome  et  les  maison» 
de  plaisance  qui  embellissent  Icâ 
envirolis  de  l;i  capitale  du  monde 
çhrélieii.  MM.  Percier  et  Fontaine 
ont  exécuté  ensemble  les  travaux 
d'aclièvcmcnl  et  de  restauration 
qui  ovt  été  faits  au  Louvre  et  aux 
Tuileries^  ensuitt,i!s  oui  nonsiruii 
(c  magnifupjc  cscalicrdui^MScuui-, 


4o8 


PEU 


enfln,  le  gouvernement  impcri;U 
n'a  rien  fait  faire  de  grand  el  de 
magnique  qui  n'eût  été  confié  aux 
lalens  de  ces  deux  habiles  archi- 
tecte,*. Personne  ne  dessine  avec 
autant  de  précision  et  d'élégance 
que  M.  Percier  les  détails  de  l'ar- 
chitecture. 

PÉRIER  (Casimir),  banquier, 
membre  de  la  chambre  des  dépu- 
tés ,  el  l'un  de.<  orateurs  les  plus 
distingués  de  l'opposition,  est  né  à 
Grenoble  le  la  octobre  1777»  do 
Claude  Périer,  négociant  et  pro- 
priétaire du  château  de  Vezilie  près 
de  Grenoble  :  nous  ne  citons  cet- 
te dernière  circonstance  que  pour 
avoir  occasion  de  dire  que  ce  châ- 
teau, où  se  tinrent  pour  la  derniè- 
re fois,  en  1789,  les  états  du  Dau- 
phiné,  doit  être  regardé  comme 
un  des  berceaux  de  la  révolution. 
Élevé  au  collège  de  l'oratoire  à 
Lyon,  M.  Casimir  Perrier,  au  sof- 
t4r  de  ses  études,  qu'il  fit  avec 
beaucoup  de  distinction,  embras- 
sa fort  Jeune  la  carrière  militaire, 
où  il  se  montra  avec  honneur.  Il 
fit  les  campagnes  d'Italie  dans  les 
années  7  et  8  (1799»  et  1800),  et 
fut  nommé  advint  du  génie  mili- 
taire. Il  était  attaché  à  l'état-ma- 
jor  de  celte  arme,  lorsqu'il  se  dé- 
cida à  quitter  le  service  pour  se 
vouer  au  commerce;  suivant  en 
cela  les  dernières  volontés  de  son 
père  qii'il  venait  de  perdre,  et  qui 
avait  laissé  d^ms  cette  profession 
la  réputation  la  mieux  nïéritée,  el 
les  plus  honorables  souvenirs.  RI. 
Casimir  Périer,  en  1802,  leva  à 
Paris,  avec  M.  Scipion  Périer  son 
frère,  une  maison  de  banque  dans 
la  direction  de  laquelle  la  péné- 
tration de  son  esprit  lui  fit  acqué- 
rir des  connaissances  très-éten- 


PER 

dues,  qui  devaient  un  jonr  lui  ser- 
vir à  éclaircir  les  questions  les  plus 
épineuses  et  les  plus  importantes 
sur  le  crédit  public  -el  les  finances 
de  l'élat;  égalcujent  habile  à  fé- 
conder l'industrie,  devenue  le  res- 
sort principal  de  la  civilisation 
moderne  et  lu  source  inépuisable 
de  la  prospérité  publique,  il  sut 
en  associer  les  travaux  dans  plu- 
sieurs branches,  aux  opérations  de 
la  banque,  dont  il  agrandit  les  ré- 
sultats. La  cristallerie,  la  filature 
du  coton,  le  rafinage  des  sucres, 
ont  été  plus  particulièrement  l'ob- 
jet de  ses  soins  et  de  ses  constan- 
tes invesliga!ions,dans  des  établis- 
semens  à  la  création  desquels  il  a 
concouru.  La  fonderie  de  Chail- 
lot,  rétablie  ou  plutôt  recréée  par 
son  frère  Scipion  ,  doit  aux  soins 
persévérans  qu'il  a  continué  à  y 
donner,  la  réputation  sans  rivale 
en  France,  dont  jouit  cette  tisinc 
pour  l'excellence  des  machines 
qu'elle  livre  à  l'industrie.  M.  Casi- 
mir Périer  vient  (  1826  )  de  fon- 
der à  Passy  dans  l'ancien  couvent 
des  bonshommes,  un  établisse- 
ment considérable  de  moulins  à 
blé,  mus  par  la  vapeur;  on  con- 
çoit de  quel  immense  intérêt  doit 
être  pour  Paris  un  établissement 
au  moyen  duquel  une  population 
de  neuf  cent  mille  habitans  cesse 
d'être  exposée  à  souffrir  de  l'exces- 
sive cherté  des  farines  dans  certai- 
nes années  par  l'effet  de  la  séche- 
resse, la  faiblesse  du  vent  et  con- 
séquemment  l'insuffisance  des 
moutures.  L'intime  alliance  des  in- 
térêts commerciaux  avec  les  finan- 
ces de  l'état,  dont  il  avait  fait  une 
étude  approfondie,  ne  permettait 
pas  à  M.  Casimir  Périer  de  rester 
étranger  à  la  grande  (jiieslioQ  du 


PER 

crédit  public,  quimeltall  en  mou- 
vement lous  les  esprits.  Il  fit  paraî- 
tre en  1816  un  écrit  contre  le  sys- 
tème (l'emprunt  ;\  l'étranger,  où 
la  cl;irté,  la  ju.-tesse  et  prinpipale- 
ment  la  nationalité  de  ses  vues  en 
finances,  s'unissent  à  une  noble 
hardiesse  de  pensées  exprimées 
dans  un  style  à  la  fois  éléj^aiit  el 
nerveux  :  cette  production  qui 
révélait  à  la  France  un  de  ces 
hommes  rares  dont  parle  Quinti- 
lien  ,  habiles  à  bien  faire  et  à  bien 
(lire,  fixa  sur  son  auteur  l'atten- 
tion publique,  qu'elle  avait  exci- 
tée, el  fit  pressentir  les  servii^es 
qu'il  rendrait  à  son  pays,  dans  les 
hautes  fonctions  législatives,  où 
il  fut  appelé  le  jour  mC'me  où  il 
eut  alleinl  l'âge  voulu  par  la  loi. 
M.  Casimir  Périer  élu  membre  de 
la  chambre  des  députés  en  1817, 
par  le  collège  électoral  du  dépar- 
tement de  la  Seine,  en  a  constam- 
ment fait  partie  depuis  cette  épo- 
que. Satisfaisant  dés  lors  à  des  de- 
voirs plus  rigoureux,  que  lui  im- 
posait rintért'l  général,  M.  Casi- 
mir Périer  n'a  jamais  cessé  d'ap. 
fiorter  le  tribut  patriotique  de  ses 
umièrcs  dans  les  grandes  ques- 
tions de  finances  qui  ont  été  dé- 
battues à  la  tribune  législative.  On 
l'a  vu  sous  le  ministère  de  M.  Cor- 
vetto,  s'opposer  de  toutes  les  for- 
cesdeson  talent  ctdesa  conviction 
au  système  désastreux  des  em- 
prunts à  l'étranger,  et  insister  avec 
la  même  énergie  sur  l'adoption 
de  mesures  A  la  fois  moins  oné- 
reuses et  plus  honorables.  Sous  le 
ministère  de  M.  Rny,  il  prononça 
dans  la  séance  du  12  février  i8ii, 
ini  discours  très  -  remarquable  , 
dans  lequel  il  combat,  comme  u- 
110  très- mauvaise  opérali(;n  finan- 


PER  4o\) 

cière,  la  création  des  annuités.  A 
propos  des  funestes  événemens 
du  mois  de  juin  1820,  M.  Casimir 
Périer  fut  l'un  des  députés  qui  si- 
gnalèrent avec  le  plus  de  cotirage 
et  d'indignationà  à  la  chambre,  les 
attentats  commis  contre  la  repré- 
sentation nationale;  il  s'éleva  avec 
une  patriotique  chaleur  contre  les 
mesures  imprudentes  de  l'admi- 
nistration de  cette  époque,  mesu- 
res plus  propres  à  perpétuer  le  dé- 
sordre, en  faisant  couler  le  sang  des 
citoyeus,qu'.\  maintenir  la  paix  pu- 
blique; peut-être  l'éloquence  delà 
tribime,  cette  éloquence  de  l'aine, 
dont  Démosthène  et  iMirabeau  of- 
frent les  plus  admirables  modèles, 
n'a-t-elle  jamais  été  portée  plus 
loin  que  dans  le  discours  qu'im- 
provisa M.  Casimir  Périer  dans  la 
séance  du  2  j  février  i8ii,  en  ré- 
ponse aux  accusations  réitérées 
du  garde-dcs-sceaux  (M.  de  Ser- 
re), tendant  iV  présenter  les  dépu- 
tés de  l'opposition  comme  des 
provocateurs  à  la  révolte,  et  com- 
me ayant  contribué  par  leurs  dis- 
cours prononcés  à  la  tribune,  à  fo- 
menter les  troubles  du  mois  de 
juin  de  l'année  précédente  :  «Non, 
messieurs,  disait,  en  terminant, 
M.  Périer,  il  n'y  a  point  de  cou- 
pables de  conspiration,  les  seuls, 
les  vrais  coupables  sont  ceux  qui 
ont  attenté  à  la  représentation 
nationale  :  si  nous  avons  conspire 
pourquoi  ne  sommes-nous  pas  on 
jugement?  quant  i  moi,  je  me  dé- 
pouille du  caractère  de  député ,  je 
repousse  un  odieux  privilège,  et 
vous,  ministres,  avant  que  nous 
quittions  cette  enceinte, ordonner. 
Il  vos  licteurs  de  se  saisir  de  notre 
personne  :  il  faut  en  finir  de  tant 
d'accusations  :  avci-vous  besoin 


4«o  MJtt 

de  nos  lûtes,  failes-les  lotnher; 
mais  qiio  ça  soit  dcvnnt  la  loi.  » 
M.  C.isimir  Péiier,  que  la  triste 
victoire  du  ministère  sur  les  élec- 
tions do  ï8i4  privait  de  l'appui 
de  presque  tous  ses  honorables 
amis,  a  redoublé  d'efforts  pour 
la  défense  des  droits  conslUulion- 
néls  et  des  intérêts  publics,  dans 
les  sessions  do  1824  et  i8a5,  et 
n'a  pas  perdu  une  des  nombreu- 
ses occasions  que  lui  a  offertes 
M.  de  Villèlc,  d'augmenter  ses  ti- 
tres à  la  reconnaissance  nationale, 
en  démontrant  jusqu'à  l'évidence 
les  malheurs  qui  devaient  résul- 
ter des  projets  de  loi  de  réduction, 
de  conversion  et  d'indemnité, 
qu'il  croyait  contraires  à  la  char- 
te et  de  nature  à  amener  de  nou- 
veaux bouleversemens  dans  l'état. 
La  religieuse  observation  do  la 
charte  constitutionnelle  lui  parais- 
sant surtout  inconciliable  avec  la 
loi  proposée  pour  indemniser  les 
émigrés,  il  a  prononcé,  à  celte 
occasion,  un  discours  de  la  plus 
haute  éloquence,  dont  nous  nous 
bornerons  à  citer  la  péroraison  : 
«  Dans  quel  intérût  cette  loi  est- 

•  elle  présentée?  ce  n'est  pas  dans 

•  celui  de  l'émigration,  quia  si  vi- 
»  vement  faitentendresesplaintes; 
■  ce  n'est  assurément  pas  dans  celui 

•  du  pays, si  éminemment  menacé, 
»  si  victorieusement  défendu  :  c'est 
ndans  l'intérêt  du  ministère.  Il  a 
«voulu  enchaîner  l'émigration, 
«seule  force  qui  pût  lui  résister. 
"L'émigration  n'étant  pas  une 
n fonction,  elle  a  fait  peur  au  mi- 
nnislère,  qui  ne  pouvait  la  dcsll- 
»luer.  Ne  pouvant  la  destituer, 
»il  a  voulu  la  payer.  C'est  à  von?, 
«mcsjiwurs,  de  savoirsl  vous  ac- 
x'Cepleret  de  passer  sous  les  four- 


PKR 

»chcs  dorées  du  ministère.  L'opi- 
»  nion  (|ue  nous  représentons,  uiu- 
«tilée  dans  ses  droits  politiques 
»pur  la  colère  et  la  vengeance  du 
»  ministère ,  volt  ses  défenseurs  ré- 
iduits   à  un   petit   nombre   dans 

•  celle  enceinte.  A  l'aspect  des 
»  dangers  qulmenacent  notre  pays, 

•  il  ne  nous  restait  qu'A  serrer  nos 

•  rangs  et  à  soutenir  ainsi  les  al- 

•  taques  dirigées   par  le  ministère 

•  contre  les   Intérêts  dont  la   dé- 

•  fense  nous  est  confiée  :  c'est  ce 

•  que  nous  avons  fait.  Nous  snc- 
»  comberons,  nous  le  savons  ;  mais 

•  du  moins  aurons-nous  la  conso- 

•  lation  d'entendre  dire  aux  coeurs 
«généreux,  aux   véritables  amis 

•  du  roi  et  de  leur  pays,  que  nous 
«n'étions  indignes  ni  du  combat, 

•  ni  même  ilii  succès,  filais,  que 
»dis-je?   notre  cause  n'est  point 

•  perdue!  J'en  appelle  à  vous,  no- 
»bles  chevaliers  de  l'ancienne 
«France,  qui  devez  nous  jugée. 

•  Il  n'est  pas  besoin  de  vous  rap- 
»  peler  que  les  lois  de  la  victoire 

•  et  de  l'honneur,    dans  tous  les 

•  pays,  sont  de  ne  se  partager  les 

•  dépouilles  que  de  ceux  que  l'on 

•  a  vaincus.  >  M.  Casimir  Perler, 
dans  la  force  de  l'âge  et  du  talent, 
voit  s'étendre  devant  lui  une  lon- 
gue carrière  de  gloire  et  de  suc- 
cès qu'il  parcourra,  soutenu 
par  l'eslirae  et  la  reconnaissance 
publiques.  Déjà  il  reçoit  la  douce 
récompense  de  ses  nobles  travaux 
dans  l'accueil  touchant  que  .lui 
font  les  habitaus  de  Grenoble,  sa 
ville  natale  ,  où  il  se  trouve  en  ce 
moment  (  juin  1825  ),  qui  lui 
prodiguent  les  témoignages  de  la 
plus  tendre  vénération. 

PERROT,  géograph»;,  voi/.  le 
Supplément  du  tome  XVIIl. 


I>IT 

PEIVVINQUIÈRES  (N.),  né  à 
Fontenaj  dans  le  bas  Poitou^  j 
exerçait  la  profession  d'avocat  a- 
vec  distinction ,  quand  il  lut  en- 
voyé aux  état:»  généraux  comme 
député  du  tiers -état;  il  n'y  prit 
qu'une  fois  la  parole,  ce  fut  pour 
demander  que  le  remplacement 
de  la  gabelle  fût  porté  à  cinquan- 
te-quatre millions.  PV  Pervin- 
quières  a,  dans  tous  h  s  temps  et 
?ous  tous  les  régnes,  professé  des 
principes  constilutiotmels.  A  l'é- 
poque 01^  le  gouvernement  impé- 
rial donna  une  nouvelle  organisa- 
tion à  l'ordre  judiciaire,  il  fut 
nommé  l'un  des  présidents  de  la 
cour  de  Poitiers,  place  qu'il  occu- 
j»e  encore  aujourd'hui  (iS'^S).  M. 
Pervinquières  est  le  beau-frère  du 
général  comte  Belliard ,  mem- 
bre de  la  chambre  des  pairs. 

PETIET,  ex -ministre  de  la 
guerre,  voy.  le  Supplément  du 
tome  XVII. 

PEYRONNET  (comtb  de),  voy. 
le  Supplémf.-nt  du  tome  XVI. 

PITARO  (  Amtoine)  nous  écrit 
contre  cette  a.»scrtion  de  notre  ar- 
ticle {f^oy.  le  tome  Wl)^  qu'il 
avait  quitté  Paris  en  18 j4,  pour 
rentrer  à  NapteSf  sa  patrie.  «  Je 
n'ai  jamais  eu  l'idée  de  m'expa- 
trier  de  Paris,  dit  M.  Pitaro,  et 
je  o'ai  pas  l'intention  de  quitter 
cette  ville  où  je  fus  nommé  mem- 
bre, en  180a,  de  la  société  gal- 
vanique et  des  sciences  physiques; 
en  1804,  de  la  société  médicale 
d'émulation;  en  1806,  membre  île 
l'institut  royal  des  sciences  natu- 
relles de  Naples;  enfin,  en  1807, 
correspondant  de  la  société  impé- 
riale d'agriculture  de  la  Seine.  An- 
Inrisé  en  t8o8,  par  décision  de  la 
faculté  de  Paris  et  par  décret  du 


POP 


411 


I"  octobre,  d'exercer  ma  profes- 
sion dans  toute  l'étendue  de  l'em- 
pire, j'ai  reçu,  par  décision  de  la 
même  faculté,  le  diplôme  de  doc- 
teur en  médecine  et  al  été  nom- 
mé membre  de  la  société  de  mé- 
decine pratique;  en  1809  je  fus 
nommé  médecin  légal  à  la  cour 
impériale  de  Paris;  en  1816  j'ob- 
tins des  lettres  de  naturalisation 
et  de  citoyen  français;  en  i8aa  je 
devins  corespondant  de  la  s(»ciété 
royale  de  Watmester,  et,  en  i8'i5, 
membre  honoraire  de  la  société 
royale  de  Londres  pour  la  propa- 
gation du  vaccin.  »  IVl.  Pitaro  a 
publié  les  ouvrages  suivans  :  1° 
Traduction  de  la  Théorie  de  la  vie, 
par  Andria,  180  5;  2"  Lettres  phi- 
lologiques et  physiques  y  1812;  3" 
Mémoires  physiologiques  et  chimi- 
ques,  même  année;  4°  La  science 
delà  sétifèrc,  ou  l'art  de  produire 
la  soie  avec  sûreté  et  avantage, 
i8i8;  5°  un  Poëme  de  trois  mille 
cinq  cents  vers  sur  le  même 
sujet. 

PIPELET,  médecin,  voy.  le 
Supplément  du  tome  XVIII. 

PONCE-CAMUS,  peintre,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XVIII. 

PONS  DE  L'HÉRAULT,  voy. 
le  Supplément  du  tome  XVII. 

POPULE  (  N.  )  ,  ancien  maire 
de  Roanne,  mérita,  dans  tout  le 
cours  de  la  révolution,  par  la  sa- 
gesse de  ses  principes  ,  la  modé- 
ration de  sa  conduite  ,  et  son  dé- 
vouen)entÀla  patrie  ,  l'estime  do 
ses  concitoyens.  Lors  de  l'invasion 
étrangère  ,  en  1 8 1 4 ,  il  ^"^^  '«*  •»">- 
mer  de  son  courage  ,  et  contribua 
ainsi  A  la  belle  résistance  qui  les 
couvrit  de  gloire  à  cette  époque. 
Le»  Français  n'ont  point  oublié  et 
l'histoire  répétera  que  cette  ville. 


4t2 


POU 


ù  peine  peuplée  de  gooo  habitans, 
et  n'ayant  d'autre  défense  que  la 
Loire,  porta  l'héroïsme  jusqu'il  ré- 
sister à  l'ennemi ,  même  après  que 
Lyon,  Moulins,  et  Nontbrisson, 
eurent  été  occupés,  malgré  leur 
immense  population ,  et  qu'elle  ne 
»e  rendit  que  devant  11,000  Au- 
trichiens. AI.  Popule  siégea  à  la 
chambre  des  représentans  pen- 
dant les  re«;_/c»ar.î,  en  i8i5.  Nom- 
mé à  la  chambre  de»  députés  en 
1818,  et  placé  au  centre  près  de 
la  gauche,  il  y  défendit  les  liber- 
tés légales,  et  soutint  les  intérêts 
du  département  de  la  Loire  qu'il 
représentait.  Il  réclama  avec  éner- 
gie contre  la  pétition  d'un  sieur 
Remy ,  du  Haut -Rhin,  qui  de- 
mandait que  les  préfectures  du 
Rhône  et  de  la  Loire  fussent  réu- 
nies et  n'en  formassent  qu'une , 
et  obtint  l'ordre  du  jour.  Il  s'ins- 
crivit aussi  contre  la  résolution  de 
la  chambre  des  pairs,  relative- 
ment ;\  la  loi  des  élections.  Dans  la 
session  de  1819,  M.  Popule  a  volé 
contre  les  deux  lois  d'exception, 
et,  avec  les  igS,  contre  le  nou- 
veau système  électoral.  Le  4  juil- 
let, il  demanda  et  obtint  un  con- 
gé; il  termina  ainsi  ses  fonctions 
législatives  et  ne  fut  plus  appelé  à 
en  remplir  de  nouvelles. 

POTOCKI  (Wlobimib),  voy.  le 
Supplément  du  tome  XVII. 

POLDRET  DE  SEVREÏ  (Re- 
né), colonel  d'infanterie,  cheva- 
lier de  Saint-Louis,  oUiiner  de  la 
légion-d'honneur  et  chevalier  de 
Tordre  royal  et  militaire  de  l'épée 
de  Suède,  né  à  Niort  (Deux-Sè- 
vres) ,  appartient  à  une  famille  es- 
timée dan?  la  magistrature.  Il 
entra  au  service  le  26  août  1792, 
comme  simple  soldat  à  la  forma- 


POU 

tion  da  %*  bataillon  des  Deux-Sè- 
vres, et  fut  nommé  sous-lieute- 
nant le  a4  octobre  suivant.  Il  ser- 
vit avec  la  plus  grande  distinction 
aux  difîérenles  armées  qui  se  sont 
succédé  depuis  1792  jusqu'en 
1816,  et  obtint  par  son  courage 
et  se^  talcns  tous  ses  grades  jus- 
qu'à celui  d(!  colonel  du  loG*  ré- 
giment de  ligne.  Il  se  distingua 
particulièrement  ;'i  l'armée  de  Sam- 
bre-et-Meuse  en  l'an  4;  ''»•'  2*  pas- 
sage du  Rhin,  le  14  messidor;  à 
l'affaire  de  Bamberg,  aux  combats 
de  Coning  et  Neumarck,  même 
année,  et  à  la  bataille  de  Vurlz- 
bourg  le  19  fructidor  suivant.  Au 
passage  du  ïagliamento ,  et  à  la 
prise  de  Gradisca ,  en  Italie,,  en 
l'an  5,  le  courage  dont  il  fil  preu- 
ve lui  valut  les  éloges  du  général 
en  chef.  Il  s'empara  à  la  bataille 
d'Austerlilz,  à  la  têle  d'un  déta- 
chement du  9:7*  régiment,  d'une 
batterie  d'artillerie  de  la  garde 
impériale  russe,  qui  lirait  à  mi- 
traille sur  la  division  du  générât 
Drouel,  et  y  causait  de  grands 
ravages.  Décoré  de  la  légion-d'hon- 
neur en  1 806,  il  fut  nommé  chef  de 
bataillon  à  l'élat-majorde  l'armée, 
le 5  mars  1807,  et  aide-de-camp  du 
prince  de  Ponte-Corvo(Bernadot- 
te)le  29  septembre  suivant.  Bles- 
sé à  la  bataille  de  "NVagram,  le  6 
juillet  1809,  d'un  coup  de  feu  à  la 
jambe  droite,  à  son  retour  de  Suè- 
de, où  il  avait  accompagné  com- 
me aide  de-camp  le  prince  royal, 
il  entra  dans  le  1 06*  régiment  d'in- 
fanterie. Dans  la  campagne  de  Rus- 
sie, en  i8i2,  on  lui  donna  le  com- 
mandement des  voltigeurs  réunis 
de  la  i5*  division,  commandée  par 
le  général  Deizons;  et  ce  fut  à  la 
lôte  de  ces  voltigeur*,  qu'au  coiu- 


i 


PRO 

bat  il'Ostrowno,  prr.s  Wilepsk,  le 
'/()  juillet  i8  la,  il  repoussa  le»  Rus- 
ses avec  la  plus  grande  vigueur  et 
«près  avoir  eu  la  moilié  de  ses 
braves  hors  de  combat  il  fut  atteint 
d'une  balle  qui  lui  traversa  le  cou 
et  la  tête.  Sa  brillante  valeur  etson 
cour.ige  ainsi  que  le  sang  -  froid 
dont  il  venait  de  donner  des  preu- 
ves multipliées,  furent  récompen- 
sés sur  le  champ  de  bataille  de 
Wilepsck  par  la  croix  d'oflicier  de 
la  légiou-dhonneur.  Il  fut  nommé 
en  même  temps  colonel  en  second 
pour  être  employé  à  l'état-major- 
général  de  l'armée.  En  18 15,  il 
reçut  l'ordre  d'aller  prendre  le 
commandement  du  U)6*  régiment 
en  Italie,  le  réorgani.^a  en  entier  et 
on  l'ut  nommé  titulaire  le  1 1  mai 
18 13.  Il  mit,  peu  après,  4  batail- 
lons de  guerre  en  campagne,  sous 
bfs  ordres  du  prince  Eugène  {voj. 
BEArnAB:*Ais- Eugène)  ,  prit  part 
avec  son  régiment  à  tous  les  faits 
d'armes  de  cette  campagne ,  fil 
toujours  preuve  d'une  grande  va- 
btur,  notannnent  au  combat  de 
(îastagnaro,  en  Italie,  sur  l'Adige, 
où  il  fut  encore  blessé  d'un  coup 
de  feu  au  pied  droit.  Nommé  par 
le  roi  en  i8i/|,  colonel  du  87'  de 
ligne,  et  chevalier  de  Saint-Lotiis, 
il  fut  licencié  avec  son  régiment  le 
i8  novembre  i8i5,  et  admis  à  la 
retraite,  quoique  jeune  encore,  à 
la  fin  de  1816. 

POUCET  (le  baron)  ,  vot/.  le 
Supplément  du  tome  XVI. 

PROTEAU  (  LE  vicomte).  Dans 
le  17*  volume  <le  cet  ouvrage  nous 
avons  dit  que  iM.  Proteau  parais- 
sait avoir  été  mis  à  la  retraite  de- 
puis la  seconde  ri:slauralion.  (]'est 
une  errcjir.  il  a  continué  rl'être  em- 
ployé. Il  commande  encore  au- 


PRO 


4i3 


jourd'hui  (iSaS)  à, la  résidence  de 
Limoges,  la  5'  subdivision  de  la 
21'  division  militaire.  Dans  une 
lettre  qu'il  nous  adresse  à  ce  sujet, 
il  nous  doime  des  détails  sursa  vie 
active  qui  ne  nous  étaient  pus  en» 
tièrementconnus  elque  nous  nous 
plaisons  à  rapporter  en  le  laissant 
parler  lui-même.  «  Il  est  très-vrai, 
dit  M.  le  vicomte  Proteau,  que 
j'étais  au  service  de  l'état  en  1 793, 
et  deux  voyages  successifs  aux  In- 
des orientales  et  occidentales  de 
1788  i\  1792,  m'avaient  valu  le 
grade  d'oliicicr.  Au  combat  du  1" 
juin  1794»  contre  l'amiral  IIoav, 
j'étais  chargé  des  signaux  sur  uti 
vaisseau  qui,  serre -file  de  l'armée, 
eut  les  honneurs  de  la  journée  du 
29  mai  ;  malgré  une  perle  de 
7)oo  hommes  et  quoique  le  vais- 
seau fût  désemparé,  il  se  présenta 
en  ligne  à  la  remorque  le  1"  juin. 
Cette  affaire  prépara,  avec  l'amour 
de  mon  pays, la  conduite  que  je  tins 
plus  tard,eni797,en  Irlande  et  dont 
vous  avez  rendu  l'exacte  vérité. 
Je  dus  mon  échange  et  mon  prompt 
retour  dans  ma  patrie  à  la  sol- 
licitude et  aux  démarches  empres- 
sées d'un  ministre  qui  m'accueil- 
lit avec  éloge  et  encouragement, 
et  qui  depuis  m'honore  dcsou  ami- 
tié :  il  siège  aujourd'hui  à  la  cham- 
bre des  pairs.  Dans  mon  grade  de 
lieutenant  de  vaisseau,  je  fus  cons- 
tamment embarqué  pour  cet  em- 
ploi et  celui  de  major  d'escadre  : 
lorsqu'en  ^98  je  débutai  dans  le 
oommandcment  par  celui  d'une 
corvette  d'une  marche  supérieure, 
l'aviso  VAt^ile  :  de  celle  époque 
je  ne  cessai  plus  de  commander. 
En  1 799,  dans  la  campagne  de  l'O- 
céan et  de  la  Méditerranée,  je 
commandais  le  Vautour^  cortrelte 


4 '4  PftO 

lie  communication  entre  les  ami- 
raux Bruix  et  Massaredo  des  ar- 
mécsnaTalescoinbinéesdc  France 
et  d'Espagne,  En  1800,  appelé  A 
commander  la  frégate  l'Indienne 
au  Havre,  je  fis  l'inaugnralion  de 
ce  bassin  militaire  en  sortant  la 
frégate  toute  armée  et  équipée  ,  et 
forçant  le  passage  contre  une  di- 
vision anglaise  qui  m'y  obst^rvait. 
Je  parcourus  sur  celte  frégate  les 
mers  de  la  Manche  et  de  l'Océan, 
les  côtes  d'Espagne  et  de  la  Médi- 
terranée,toujours  au  milieu  des  en- 
nemis; à  l'aflaire  du  détroit  contre 
l'amiral  Saumarés,  je  combattais 
à  l'arrièrc-garde  près  des  vaisseaux 
espagnols  VHerménégiUieel  le  San 
Caiios  de  110  canons,  lorsqu'ils 
prirent  feu  et  sautèrent;  plus  tard 
à  la  paix  d'Amiens,  je  poursuivis 
ma  course  de  Cadix  pour  Saint- 
Domingue,  où  continuant  d'être 
armé  sur  le  pied  de  guerre  je  fus 
chargé  d'observer  du  cap  Liba- 
ron  l'escadre  anglaise ,  avec  la- 
quelle j'eus  une  rencontre  qui  me 
mérita  l'éloge  de  l'amiral  Lalou- 
che-ïréville  et  du  ministre  de  la 
marine.  Je  fis  mon  retour  en  Eu- 
rope en  1801.  Le  commandement 
de  cette  frégate  me  fut  toujours 
continué.  Elle  eut  la  destination 
d'être  la  frégate amirale  de  la  flotte 
de  Brest.  Elle  était  à  l'action  de 
lîertheaume  contre  l'amiral  Corn- 
walis.  Au  renouvellement  de  la 
guerre,  en  1809,  elle  faisait  par- 
tie de  l'escadrequi  était  stationnée 
sur  la  rade  de  l'île  d'Aix.  Je  com- 
mandais l'avant-garde,  chargé  de 
1.1  défense  de  l'estacade  qui  cou- 
vrait l'escadre  et  sur  laquelle  j'é- 
tais mouillé  quand,  dans  la  nuit  du 
11  avril  1809,  l'amiral  Gambier 
laufa  ses  brûlots  pour  incendier 


PRO 

l'escadre  française.  Deux  machine» 
infi^rnales,  dites  catamarans,  fl»il- 
tant  entre  deux  eaux  précédèrent 
d'abord,  pour  rompre l'estacade 
et  ouvrir  le  passage.  Leur  explo- 
sion successive  se  fil  sous  le  beau- 
pré de  la  frégate;  alors  suivirent  de 
tous  côtés  uoinbrede  brûlots;  déjà 
accroché  par  deux  des  premiers, 
je  fus  obligé  de  manœuvrer  pour 
m'en  débarrasser  et  éviter  ceux 
qui  se  succédaient  dans  le  fil  du 
courant  que  j'occupais.  En  ma- 
nœuvrant avec  les  autres  bStimens, 
qui  tous  furent  dans  la  nécessité 
d'abandonner  leur  poste  pour  pen- 
ser à  leur  salut  dans  une  nuit  aussi 
efl'royable  que  désastreuse  et  au- 
dessus  des  forces  humaines,  j'é- 
chouai sur  l'île  d'Euet  en  voulant 
éviter  d'entrer  en  rivière  de  llo- 
cheforl  dont  je  voulais  laisser  le 
libre  passage  aux  vaisseaux  tirant 
plus  d'eau  que  moi  et  me  réserver 
comme  bâtiment  léger  pour  ré- 
sister aux  attaques  de  vive  force 
qui  devaient  avoir  lieu  après  un 
tel  désordre.  Demeuré  sans  se- 
cours et  exposé  aux  attaques  suc- 
cessives de  l'ennemi  jusqu'au  16 
avril,  je  fus  réduit,  malgré  tous 
mes  efforts ,  au  parti  extrême  de 
ravir  à  l'ennemi,  qui  n'avait  déjà 
obtenu  que  trop  de  succès,  le  fatal 
avantage  de  disposer  des  débris  de 
mon  bâtiment  que  les  vagues  dé- 
molissaient sous  mes  pieds,  en 
faisant  sauter  ses  restes  pour  sau- 
ver l'honneur  du  pavillon.  Les  lois 
militaires  m'obligeant  de  rendre 
compte  à  une  cour  martiale  de  la 
perte  de  mon  bâtiment,  ma  déter- 
mination fut  complètemenl  justi- 
fiée par  la  décision  de  cette  cour,  au 
nom  de  laquelle  l'officier-général 
quilaprésidait  me  remit  publique- 


PRO 

ment  cl  liOiioral)lemrnl  mon  t'ipéc. 
Je  suis  anivé  ;»u  pn&sagfi  de  l'ai- 
li^'^e  où  vous  (liles  que  je  perdis 
mon  etnpidi.  C'est  une  eireiu" 
eoniplèle.  Le  gouvernement  m'en- 
voya aussitôt  en  mission  en  Hol- 
lande. Cette  mission  remplie,  j'eus 
le  commandement  du  17*  équi- 
paçc  de  flottille  au  port  de  Brest, 
avec  lequel  je  passai,  en  1811,  au 
commandement  d'une  escadrille 
au  port  de  Houingne.  lin  iHia, 
j'eus  l'ordre  de  désarmer  la  flot- 
tille de  Boulognedont  j'avais  alors 
le  commandement  et  de  compo- 
ser un  corpsde  marins  d'élite,  avec 
leqirel  je  partis  le  21  mars  de  la 
même  année  "pour  la  campagne  de 
Jîussie.  Ce  cor])s  de  marins,  connu 
sous  la  dénomination  de  1  r'  équi- 
page, rendit  de  grands  services 
nautiques  et  militaires;  avec  lui 
j'occupai  les  cc'iles  de  Courlande 
et  la  Courlande  inférijMire,  dont 
iVJ.  le  maréclial  Macdonald  nie 
conlia  le  commamlemciit.  On  vit, 
dans  la  retraite,  la  belle  contenance 
*\v  ce  corps.  IMacéen  arrière-garde 
sur  lesliauteursdel'Aptaiilt,  coupé 
d.ms  cette  position  je  me  jeiai  dans 
la  forteresse  de  Pelow,  d'où  je  sor- 
tis le  9  février  ii>i5  avec  ce  brave 
corps  sous  mes  ordres,  par  suite 
d'une  capitulation  honorable  (ar- 
mes, bagages,  munitions  de  guerre 
et  la  faculté  de  faire  tête  h  l'en- 
nemi luie  fois  arrivé  sur  le  Rhin). 
Dans  ma  marclie  par  la  l'russe,  nu 
milieu  des  armées  russes  qui  s'a- 
viinçaient  vers  la  France  ,  cette 
capitulation  fut  rigoureusement 
observée  et  même  avec  des  égards 
militaires.  Le  5  avril  je  rentrai  i^ 
IMayence,  et  le  21  le  chef  de  l'ar- 
mée me  dit  lui-même  •  qu'on  ne 
naviguait  plus,  que  ma  présence 


PRO 


41-5 


était  inutile  dans  les  ports»,  et 
j'eus  l'ordre  do  suivre   le   grand 
quartier-général    li    la    campagne 
(l'Allemagne.  J'y  remplis  les  fonc- 
tions d'adjudant-commandant,  ca- 
pitaine de  vaisseau  employé  à  la 
reconnaissance  des  défilés,  du  ^\\k 
des  rivières,  au  jet  des  ponts  et 
passages  de  l'armée.  Je  me  suis 
trouvé  aux  batailles  de  Lutzen,  de 
Bautzen,  de  Dresde,  de  Leipzig  et 
aux  principaux  combats  de  celte 
campagne,    notamment   à    celui 
d'iiauau  contre  les  Bavarois,  cl 
qui  me  valut  le  grade  de  général 
de  brigade.  Je  commandai  en  cette 
qualité  le  grand  quartier-général 
dans  la  campagne  de  France,  et 
j'en  eus  le  commandement  supé- 
rieur \  Chartres  lors  de  la  restiui- 
ration.  Vous  avez  signalé  à  Popi- 
nion  ce  que  j'ai  fait  de  remarqua^ 
biedans  la  preuiiére;  ma  coa|)iuite 
en    Prusse    me    valut    dans    le 
Moniteur  du  i"   février  18 k*)  cet 
éloge  du  roi  :  «  Sa  Miijesté  a  bien 
I)  voulu  témoigner  au  général  Pro- 
ttteau  qu'elle  était  contente  de  ses 
«services,  et  que  par  la  manière 
»dout  il  s'était  acquitté  de  sa  mis- 
Bsion,  il  avait  bien  rempli  les  in- 
> tentions  paternelles  du  roi  pour 
nies  malheureux  militaires  qu'il 
»  était  chargé  de  consoler  et  de  se- 
»  C'iurir.ii  Due  omission  que  je  me 
plais  à  produire  parce  que  j'ai  tou- 
jours eu  la  résolution  d'être  hom- 
me de  mes  devoirs,  c'est  que  je  mar- 
chai sur  Lyon  sous  les  ordres  de 
Monsieur,  comte  d'Artois,  et  mes 
contemporains  connaissent  l'éncir- 
gique  dévouement  que  je  marquai 
au  prince  dans  celle  circonstance 
critique,  qui  me  valutoveo  des  ex- 
pressions obligeantes,  l'assurance 
d'être  attaché  à  S.  A.  R.  J'en  al  teiiilti 


4if; 


PI)  Y 


en  vain  l'ordrft  jusqu'au  20  mars.  La 
stîconde  restauration  me  trouva  à 
Cherbourg.  Vous  avez  (Fit  ce  que 
j'y  ai  ("ait,  elles  journaux  du  temps 
répétèrent  que  je  venais  de  con- 
server «par  la  fermeté  de  ma  con- 
»duite  cette  place  importante  et 
«son  arsenal,  contre  les  préten- 
»  tionsdes  alliés  et  celles  destronpes 
«prussiennes  qui  en  firent  le  blocus 
«rigoureux  en  août  et  septembre, 
«sans  m'être  écarté  des  ménage- 
«niens  qu'on  leur  devait.  » 

PUY  (  N.  ),  un  des  généraux 
espagnols  qui  se  sonb  le  plus  ren- 
dus fameux  par  leurs  cruautés 
dans  l'Amérique  méridionale  ,  et 
qui  ont  le  plus  nui  à  la  cause  qu'ils 
étaient  chargés  de  défendre,  na- 
quit en  Espagne,  et  fut  obligé  de 
l'abandonner,  poursuivi  pour  des 
délits  que  l'honneur  et  les  tribu- 
naux condamnent  également.  11 
passa  alors  dans  l'Amérique  du 
sud,  et  y  forma  des  liaisons  qui 
le  préparéient  au  rôle  qu'il  ne 
tarda  pas  à  y  jouer.  Il  avait  obtenu 
sur  les  esclaves  une  .«orte  d'in- 
fluence dont  les  royalistes  profi- 
lèrent habilement  pour  les  soule- 
ver contre  les  indépendans  et  ex- 
citer la  guerre  civile  dans  la  nou- 
velle république  de  Venezuela. 
Puy,  l'un  des  agens  secrets  de  la 
cause  de  la  métropole,  en  devint 
ensuite  un  des  généraux  les  plus 
entreprenans.  Après  avoir  repu 
des  secours  en  armes  et  en  muni- 
lions  des  gouverneurs  de  Puerto- 
Cabello  et  de  la  Guyana  ,  il  réunit 
les  troupes  de  Coro  et  de  Mara- 
caybo  ,  se  porta  avec  elles  dans  la 
partie  de  l'ouest  de  la  province 
de  Caraccas,  attaqua  successive- 
ment Barinas,  Mérida  et  Trnxillo, 
grossit  considérablement  son  ar- 


PLY 

méc  f  en  y  incorporant  tous  les 
esclaves  et  les  malfaiteurs  des 
lieux  où  il  passait,  auxquels  il 
donnait  la  liberté,  et  en  vint  au 
point  de  s'emparer  de  différentes 
villes  ;  mais  son  passage  était  par- 
tout signalé  par  des  flots  de  sang 
et  par  des  actes  d'une  férocité 
inouie.  On  peut  juger  de  l'esprit 
qui  l'animait  par  le  fait  suivant  : 
Puy  avait  perdu  la  bataille  d'A- 
raiire,  et  s'était  réfugié  dans  la 
ville  de  Barinas.  Au  moment  où 
Bolivar  marchait  pour  l'en  chas- 
ser, Puy  donna  l'ordre  d'arrêter 
cinq  cent  soixante-quatorze  per- 
sonnes qu'il  présumait  mécoi»ten- 
les  de  le  voir  au  milieu  d'elles,  et 
en  fit  fusiller  cinq  cents  sur  le 
champ, sans  aucune  espèce  de  ju- 
gement; cette  effroyable  exécution 
allait  continuer,  lorsqu'un  aidc-de- 
camp  vint  annoncer  que  les  répu- 
blicains approchaient  de  la  ville. 
L'atroce  général  espagnol  deman- 
da d'un  air  inquiet:  «Avons-nous  le 
temps  d'exécuter  les  soixante-qua- 
torze prisonniers  reslans  ?  »  Non  , 
dit  l'aide-de-camp ,  et  ce  fut  ainsi 
qu'ils  échappèrent  à  la  mort.  Mais 
sa  cruelle  vengeance  ne  fut  que 
différée  ;  ayant  surpris  quoique 
temps  après  cette  même  ville  de 
Barinas,  il  se  fit  un  barbare  plai- 
sir d'y  répandre  le  deuil  et  la 
consternation,  et  cette  fois,  il 
prit  SCS  mesures  pour  qu'aucun 
habitant  ne  survécût  au  massacre 
général.  Cet  homme  affreux,  au 
lieu  de  porter  à  l'échafaud  sa 
tête  qu'y  dévouaient  les  mânes 
de  tant  de  victimes,  mourut  de 
la  main  des  braves.  Il  tomba  quel- 
que temps  après  sous  le  fer  des  indé- 
pendans dans  une  affaire  où  son  ar- 
mée avait  été  complètement  bat  tue. 


KAV 

RAliBE,IiHéi  aleiir,  voy.  le  Sup- 
Jilt-uiuiil  liu  tome  WIl. 

RAIlBE,  ccloiiil,  wy.  îe  Siip- 
plruieiil  du  tome  XVII. 

UAVliNEL  (Louis  Gadd,  ohhtb 
de)  naquit  ù  Cran  ville,  {teùle 
ville  ni.iiitjtne  de  la  Normandie, 
le  iG  se()lr:ml)re  1747-  ^''  ""^^~ 
moire  apparlient  aux  Castes  de  la 
ui.irinc,  carrière  dan.s  laquelle  il 
&e  dislingua  de  bonne  heure,  et 
où  il  eut  un  avancement  rapide 
qn'il  ne  dut  qu'a  des  laleiis  mili- 
taires et  admini;itra(irs  de  Tordre 
le  plus  élevé.  Il  reçut  la  décora- 
lion  de  l'ordre  ro^al  et  militaire 
de  Saiul-Loui>  sur  le  chain|t  de 
bataille,  et  eut  la  jrloire  d'être  sur- 
nommé rincori'upUhle  par  lecorps 
auquel  il  appartenait.  iM.  de  Ra- 
venel  entra  au  service,  eu  i^Gj, 
en  qualité  de  volontaire  et  d  en- 
seigne sur  des  vaii'st'aux  de  com- 
merce, armé^  à  Saint-Ma!o  et  à 
Cirau ville  pour-J'île  de  Terre-Neu- 
ve ,  le  golplie'rte  Sjint- Laurent , 
l(îs  iles  de  Saint-Pierre  et  Mique- 
lon  ;  ei  pendant  la  durée  de  ce 
service  parlicnlier,  qni  lut  de  trois 
aii»,  il  lit  deux  iiauiVages  dans  les 
ineis  h}'perborées.  Il  s'embarqua 
ensuite  volontairement  ù  Saint- 
Pierre  de  Miquelon,  sur  une  flûte 
dn  roi,  ta  Pttite  fortune ,  com- 
luuudée  par  M.  de  Raveuel,  son 
père  ,  lieutenant  de  Iréj^ale.  l^e 
jeune  enseigne  fut  promu  ,  en 
1770  ,  au  grade  d'aide  de  port ,  et 
cinployé  comme  a-^pir.inl  dans  le 
port  de  Kocbefort.  L'année  sui- 
Tiuile,  il  reçut  onlre  de  la  cour 
Je  prendre  le  counnandemenl  du 
vaisseau  le  Vicomte  de  Clmisnil , 
pour  aller  approvisionner  la  f;ar- 
nison  des  îles  de  Saint- Pierre  et 
iMiquelou.  Ln  177.2 ,  il  a'euibar- 
T.  xn. 


lUY 


4'7 


qua  sur  la  flûte  du  roi,  la  Por- 
teuse, pour  le  Sénégal  et  Gorée, 
comme  oflicier  chargé  du  détail. 
Plus  lard,  en  1774?  ''  Ui  '«  voyage 
des  îles  du  Vent  eu  qualité  de  troi- 
sième olficier;  fut  nouimé  ensei- 
gne de  vaisseau  et  de  port  en  1 775, 
el  prit  succes-ivement  le  com- 
mandement des  gai)aies  le  Crsar 
et  l'Ours ,  pour  des  transports 
d'a[)prnvisionnemens  el  de  bois 
de  construction.  Dans  raonée 
1777,  M.  de  Kaveiu'l  fil  partie 
d'une  expédition  plus  importante, 
li  s  embarqua,  comme  enseigne 
de  vaisacau,  sur  la  livgate  la  Sub- 
tile, destinée  pour  l'Inde,  et  com- 
uiaudee  par  M.  Bidé  de  Maur- 
vill-,  capitaine  de  vaisseau.  La 
Subtile  ayant  mouillé  à  l'Ile-de- 
France,  :M.  de  Kavenel  fit  plu- 
sie4M-s  voy  iges  de  cette  colonie  à 
Marlagascar.  Il  faisait  partie  des 
(  roisières  établies  à  l'Ile  -  de- 
Frau'îeet  au  cap  <  e  Bonne-Espé- 
rance lorsqu'il  deint  licottnant 
de  vaisseau.  En  17SU,  il  fut  lieu- 
tenant de  port,  et  Tannée  suivan- 
te ,  chargé  du  détail  à  bord  du 
vaisseau  du  roi  le-  Flamand^  sous 
les  ordres  de  M.  d'Orves,  chef  du 
l'escadre  destinée  à  faire  la  gueiT<> 
dans  l'Inde.  M.  d'Orves  étant 
tombé  dangereusement  malade, 
remit  le  connnandein(;nt  de  l'es- 
cadre au  chevalier  ile  Sufl'ren.  Ce 
dernier  signala  stuV  début  par  dei 
succès  auxquels  M.  de  lUvenel 
prit  une  part  trè>-active.  Le  i*' 
mai  178.4,  il  reçut  de  Tamiral 
Suffren  Tordre  de  débarquer  di 
v.ii^seau  du  roi  le  Flamand,  et  de 
passer  ù  bord  du  Héros  ^  pour  y 
être  chargé  du  détail  géni:ral  de 
l'escadre.  C«!lle-ci  ayant  eu  quel- 
que temps  (le  relâche»  M.  de  Ra- 


4i8 


RAV 


vend,  qui  s'élait  déjà  t'ait  con- 
naître comme  un  administrateur 
aussi  vigilant  qu'il  ttait  liabile  ol- 
ficier,  t'.it  cboiî^i  pour  aller  à  Tran- 
quebar,  et  y  faire  des  approvision- 
nemens  militaires  de  tout  genre. 
Le   5   de  juillet   J^Sa,   l'escadre 
française  partit  de  GnuJiIour  pour 
aller  combattre  l'enuemi,  qui  é- 
lait  en  rade  de  Négap.itnani  :  M. 
de   Ravenel   coinmandait    la    se- 
conde batterie  du  Héros.  Les  deux 
escadres,  fort  iri.dtraitées,  après 
Je  combat,   relâ'hèreut,   l'une  à 
NégaïuUnam  ,  et  l'autre  à  Goude- 
lour.  Le  26  juillet,  M.  de  Rave- 
nel fut  du    noir)i)re  des   oiriciers 
qui  accompagnèrent  le  bailli  de 
Saffrcn  au  camp  du  N.djab  Aydor 
Ali    Kan.    Ce  prince   prodigua  à 
l'amiral  français  les  marques  de 
distinction  les  plus  flatteuses,  et 
fit  un  accueil  plein  de  grâce  à  tous 
ceux  qui  l'avaient  suivi.   Ce  fut 
peu  de  temps  après  que  l'amiral 
donna  l'ordre  d'appareiller  pour 
aller  assiéger  Trinquemaley.    Le 
25  aofit,  à  cinq  heures  du  soir, 
l'e-icadre  ,  après  avoir  essuyé  Iti 
feu  de  la  batterie  du  pavillon  en- 
neiTii,   mouilla  dans  la  baie  qui 
porte  le  nom  de  cette  place.   Le 
débarquement  se  fil  dans  la  nuit 
«lu  2.5  au  26.  i^L  de  Piavencl ,  pen- 
dant le  siège  de  1  riiiquemaley,  où 
il  se  distingua  également  comme 
officier  de  terre  et  de  mer,  signala 
sa  bravoure  de  la  manière  la  plua 
éclatante   dans  l'assaut   donné   à 
cette  place  dans   la  journée  glo- 
rieuse (\u  29  août;  il  eut  l'hon- 
neur de  mouler  le  second  sur  la 
hièche.   M.   de  Suffren  lui  avait 
confié   souvent  des   négociations 
délicates.  Il  le  chargea  Aexw  fois 
d'opérer  des  diversions  difficiles 


Î\AV 

et   périHeiises  ,  et   toujours  son 
sang  -  froid  ,  son  intrépidité,   sa 
prudence,  lui  méritèrent  les  suf- 
frages de  son  chef  et  les  applau- 
dissemens  de  ses  frères  d'armes. 
Il  pari  lit  au  général  avec  cette 
franchise  si   rare,    qu'un  homme 
supérieur  seul  sait  apprécier.  Au 
coud>at   naval  de  Trinquemaley, 
dix  vaisseaux  tiahissenl;  les  qua- 
tre autres  supportent  seuls  le  feu 
de  l'escadre  ennemie.   M.  de  Suf- 
fifu  {laiiit  d'élre  ent«uiré  ;  il  s'a- 
dresse à  M.  de  liavenel  :  «  Si  l 'en- 
nemi vire  vent  devant,  vous  pren- 
drez une    mèche,  et   vous   ferei 
sauter  le  Héros.  —  Général  ,    je 
n'en   ferai  rien.  — •  Croyez-voos 
que  je  sois  homme  à  survivre  à 
l'honneur  de  mon  pavillon?  —  Il 
n'y  a  pas  de  honte  à  succomber 
quand  les  forces  sont  si  dispro- 
portionnées; toute  la  honte  sera 
pour  les  lâches  qtii   nous  trahis- 
sent ;  mais  mon  devoir  est  de  con- 
server à  la  France  un  intrépide 
général  et  800  braves.  »  l'endant 
cet  entrelien  ,  on  s'aperçut  heu- 
reusement que  l'escadre  ennemie 
manquait  la  manœuvre  présumée; 
peut-être  aussi   l'amiral   Hugues 
n'avait-il  pas  osé  la  commander. 
Les   Français  se  signalèrent  en- 
core par  plusieurs  avantages  qu'ils 
reniportèrent  sur  les  Anglais  pen- 
d  1  tt  les  années  1782  et  1783.  iVI. 
de  Ravenel  était  alors  major -gé- 
néral de  Tesiadre.   On  peut    re- 
marquer, à  II   louange  de  M.  de 
Jîavenel,  qu"  le  baiili  de  SuflVen 
lui  ayant  d   .mé  Tordre  de  profi- 
ter de  toutes  ies  circon-îlances  qui 
se  présenteraient  de  faire  quehpie 
bénéfice  sur  le  change  des  mon- 
naies dans  les  dift'érens  bazars  de 
la  côte  de  Coromandel,  où  l'ei- 


RAV 

caJrc  avait  relâché,  M.  de  Ravc- 
/jel  fil  l'aire  une  recelte  de  plu»  de 
5oo,ooo  francs  à  la  caisse  de  l'es- 
cadre. M.  Dul'rêne,  iiilendaut  gé- 
néral de  (a  marine  et  des  colo- 
nies, en  rendit  compte  au  minis- 
tre, qui  acoord;i  à  ftl.  de  Ravcufl 
une  j^ratificution  de  6,000  l'ranos. 
Le  1 1  juin  1^85,  le  bailii  de  Stil- 
Iren  partit  de  Trinquemaii-y  pour 
aller  attaquer  l'ennemi;  l'escidre 
française  n'élait  composée  que  de 
.quinze  vaisseaux,  taudis  que  l'es- 
cadre anjflaise  en  avait  dix-huit; 
cependant  celte  dernière  avait  tou- 
jours cherché  à  éviter  le  combat, 
jyjais  le  21  juin,  M.  de  Suflren  , 
qnoiijii'il  n'eût  pas  l'avanta^ie  du 
vent,  commença  l'attaque,  et  força 
bieiilôt  l'ennemi  à  la  retraite.  M. 
de   ilavenel,  qui   commandait  la 
première  batterie  à  boni  du  jHn'os, 
i'ut  dangereusement  blessé  :  une 
récompense  aussi  noblement  ac- 
quise  le  dédommagea  promple- 
inent  de  ce  malheur;  M-  de  Suf- 
fren  le  décora  de.la  croix  de  Saiwf- 
Louis   t\    l'arrivée    de    l'escadre   à 
Goudelour.  Lu  paix  i'ut  annoncée 
le  '^9  juin  suivant.  Peu  de  lem[is 
après,  i\l.  de  ilavenel  accompagna 
le  bailli  de  Suffren  ,  qui  revenait 
en  France.  On  relâcha  A  l'Ile-de- 
Fraiice,  où  un  repas  civique  fut 
ofl'ert  à  M.  d«;  Suffrt  n.  Des  cou- 
plets y  sont  chantés  en  son  hon- 
neur; une  couronne   de   lauriers 
descend  sur  sa  tête;  il  la  prend  et 
la  p(»se  sur  celle  de  M.  de  Kave- 
n«-l  ,    en    disant    avec    vivacité   : 
a  Messieurs,  si  j'ai  eu  des  succès 
dans  l'Inde,  je  les  dois  à  Riive- 
nel.  »  Ces  mots,  que  la  postérilé 
doit  recueillifj  ne  font  pus  moins 
d'honneur  ù  l'illustre  amiral  qui 
les   prononça,   qu'à    celui   à  (j  li 


RAV  419 

il  rendait  ni}  si  ^datant  témoi~ 
gnuge.  M.  de  KavencI  resta  troij 
ans   en   France   pour   r,endre   les 
comptes  de  l'escailre  ;  et  d  ins  ce* 
intervalle,  il  fut  élevé  au  gradp 
de  capitaine   de  vaisseau,  il  rt;- 
lourn,i  ensuite  dans  les  colonies,, 
uù  il  continua  toujours  à  être  m 
activité  de  service.  Il  lut  chargé, 
en  179O,  du  connnandenient  de 
la  frégate  ta  i-rcniase ,  enira  dans 
la   baie  de   Lauront-Marqucz ,  el 
s'empara  du  fort  porlui^ais.  Après 
cette  expédilion,   plusieurs  mis- 
sions   lui    furent   successivetaent 
conGées  d;Mis  les  parages  de  Ma- 
dagascar :  il  rétablit  des  croisières 
à  la  pointe  de  cette  île,  dans  le 
cynal  Mozambique  et  à  Aujouan. 
Il  passa,  en  1797,  au  commande- 
ment d'ime  nouvelle  frégate  (/a 
Forte  ) ,  et  reçut  du  conlre-amù  al 
Sercey,  l'ordre  de  se  renJae  à  ia 
côte  de  Malabar,  pour  y  <:roiser 
pcndint  quelque  temps  ;  de  faii;e 
route  ensuite  pour  Batavia,  puis 
de  remellje  au  gouverneur  hol- 
landais, Oversiralen,  les  ij.o  hooji- 
nies  du  12*  bataillon,  destinés  par 
le    gouvernement   de    l'Ile-de- 
France  à  soutenir  nos  alliés  con- 
tre les  Anglais.  Le  lendemain  de 
la  sortie  du  Port-Louis  (Ile-de- 
France),  le  la*  bataillon  se  mil 
eu  révolte  complète,  et  M.  de  Ra- 
venel  fut  sur  le  point  d'être  fu- 
sillé :  plusiems  soldats  le  couchè- 
rent en  joue.  Il  réussit  par  sa  fer- 
uielé  à  leur  in)poser,  et  parvint 
à  suivre  en  grande  partie  ses  \\\^- 
Iructions.  Une  seconde  insurrec- 
tion éclata,  le  1"  brumair^  a»  Ç* 
relativement  au  retran(;hcii>enl,^e 
la  ritiion  d'e?:u,  devenu  j^b.sQlu- 
ment  nécessaii;e.   1^.  de  Raven.;! 
eut  à  soutenir  une  lulltt  crnelk 


420  RAV  I\AV 

avant  de  pouvoir  calmer  c»;Ue  dan-  »  voyées,  et  (.elles  qui  nous  sont  an- 
gtîreusc  effervescence,  mais  il  y  i)iioncées,prouvenlqiievousvouleï 
parvint,  et  sut  mainlenir  son  au-  «au^si  luetlre  la  fortune  à  la  raison, 
torilé.  Cependant  couiuie  l'hon-  »  Nous  vous  prions  de  prendre  lec- 
ncur  du  pavillon  pouvait  être  »lure  de  la  dépêche  que  nous  a- 
compromis  sur  la  côte  de  Mala-  «dressons  à  la  régence  sous  ca- 
bar,  où  l'ennemi  était  en  forces  ncliet  volant.  Vous  y  trouverez  à- 
très-supérieurcs,  il  était  prudent,  <>  la  fois  le  lémoif^na|;e  de  notre 
d'après  l'expérience  qui  venait  oco.ifiaiice  en  vous,  li  coiinais- 
d'êlre  faite  ,  de  ne  pas  i-'exposei-  «sauce  de  votre -itualion,  et  des 
à  un  désavantage  évident.  En  cou-  «pouvoiis  iliitnilés  ,  pour  faire  en 
séquence,  iM.  de  Ravenel  prit  le  »  notre  nom  lout  le  qui  pourra  dé- 
parti d'entrer  dans  ie  golfe  du  nttiininer  la  régence  de  Bal  i\ia  à 
Bengale,  où  il  fut  presque  tou-  »  venir  au  secours  de  l'Ile  -  de- 
jours  à  la  cape,  souvent  à  sec  et  «France,  etc.  »  La  régence  avait 
entre  deux  eaux.  Cette  position,  dv;mandé  que  la  (livi>ion  franpai-e 
qui  menaçait  de  devenir  dange-  séjournât,  eu  totalité  ou  en  par- 
rcuse,  détermina  le  commandant  tie,  dans  les  mers  de  Java  et  dans 
Gosson  ù  être  l'organe  du  repen-  les  autres  colonies  hollandaises, 
tir  de  ses  soldats,  et  de  l'exprès-  pour  les  défendre  contre  les  atlu- 
sion  de  leur  obéissance.  Après  cet  quesdes  Anglais.  En  conséquence, 
événement,  M.  de  Ravenel  alla  M.  de  Ravenel  partit  de  Batavia 
en  rade  de  Madras,  et  y  prit  une  pour  faire  une  croisière  dans  les 
corvette  de  la  compagnie,  qu'il  Moluqnes.  Lorsqu'on  fut  aux  en- 
cxpédia  à  l'Ile-de-France,  afin  virons  de  Baiijermassin ,  le  flux 
d'informer  le  contre-amiral  Ser-  de  sang  qui  se  déclara  avec  vio- 
cey  de  sa  position.  Pendant  ce  lence  dans  l'éqtripage  .  mit  t'uit- 
temps,  il  alla  croiser  à  la  pointe  à-coup  80  hommes  hors  de  scr- 
de  la  Galle,  puis  il  fît  route  vers  vice.  Une  voie  d'eau  parut  ensuite 
Colombo,  et  s'empara  encore  du  dans  l'avant  de  la  frégate,  et  ajou- 
viisseau  de  compagnie,  le  Lord  ta  à  cette  fâcheuse  position.  La 
Sigot.  Les  administrateurs  gêné-  mous.-on  s'opposant  alors  au  re- 
raux  de  l'Ile-de-France  (MM.  Ma-  tour  à  Batavia,  M.  de  Ravenel 
larlic  et  Dupuy)  lui  écrivirent  à  n'avait  d'autre  parti  a  prendre  que 
cette  occasion  :  «  Nousavous  ap-  de  se  rendre  à  l'Ile-de-France  pour 
«pris  avec  peine  tous  les  désagré-  recaréner  la  frégate,  et    revenir 

•  mens  elles  dangers  réels  aux-  ensniteavec  des  forces  pour  proté- 
»  quels  vous  avez  été  exposé  dans  ger  l'île  de  Java  et  les  autres  colo- 
»les  commenceraens  de  votre  ex-  nies  hollandaises.  11  arriva  ù  l'ile- 

•  jiédition.  Votre  courage  et  votre  de  France  dans  l'état  h;  plus  tléplo- 
»  prudence  ont  ramené  l'ordre,  et  rable  ;  mais  il  fut  vivement  afîligé 

•  cette  épreuve,   toute  glorieuse  en    recevant   l'ordre  du  gouver- 

•  qu'elle  est  pour  vous,  était  bien  neur-général  de  ne  faire  aucune 

•  inutile  à  votre  brillante  et  an-  manœuvre  pour  entrer  dans  le 
ucienne  réputation.  Deux  prises  port.  Cet  ordre  était  provoqué 
»que   TOU»   nous  avez  déjà  en-  par  un  arrêté  de  rassemblée  co- 


RAV 

loniale.  En  obéissant ,  M.  de  Ra- 
venel  aurait  exposé  la  frégate  à 
couler  sur  ses  ancres,  et  tous  les 
malades  auraient  péri.  I!  Ut  les 
représentations  les  plus  puissantes 
an  gouverneur,  en  l'assurant  que 
si  on  lui  refusait  encore  l'enlrée 
du  port  pendant  une  heure  ,  l'iui- 
manilé  lui  imposait  le  devoir  d'é- 
chouer la  frégate.  Celte  détermi- 
nation lui  fit  obtenir  ce  qu'il  sol- 
licitait avec  tant  d'ardeur.  M.  de 
Kavenel  avait  été  attaqué  de  fiè- 
vres à  batavia;  elles  se  renouve- 
lèrent à  rile-de-France  ,  ce  qui 
l'obligea  de  se  démettre  du  com- 
mandement de  la  Uégaie  la  Forte. 
Le  gouverneur-général,  en  rece- 
vant sa  démission  ,  lui  exj)rima 
des  regrets  dans  une  lettre  très- 
flatteuse.  Telle  fut  la  carrière  que 
parcourut  M.  de  Ravenel  dans  un 
intervalle  de  phis  de  f\5  ans  de 
service.  Lorsqu'il  y  entra,  la  porte 
de  l'avancement  était  étroile,  la 
concurrence  nombreuse^  et  les  fa- 
Teurs  étaient  accordétîs,  non  au 
plus  digne,  mais  au  plus  protégé. 
M.  de  Ravenel  triompha  de  tous 
ces  obstacles  par  la  force  de  son 
caractère,  parla  supériorité  de  ses 
lalens  et  par  l'évidence  de  son 
mérite.  Ses  amis  l'appelaient  le 
Catiiiat  de  la  marine.  Le  bailli  de 
Sufl'ren  et  les  (ifliciers  de  ce  corps, 
ses  compagnons  de  gloire,  sous- 
crivirent à  celle  comparaison.  Le 
bailli  de  Suiïren,  en  le  présentant 
à  Louis  XVI,  dit  à  ce  prince  : 
•  bire,  voilà  l'olTicifr  auquel  vous 
devez  la  conservation  de  mon  ar- 
.inée.  C'est  lui  qui  nous  a  nourris 
et  a  entretenu  nos  vaisseaux.  » 
La  réunion  la  plus  rare  des  talens 
militaires,  administratifs,  diplo- 
matiques, à  de  grandes  connais» 


REG 


4'ii 


sancesen  statistique  généra]e,est(;C 
qui  dislingua  particulièrement  M. 
de  Ravenel.  Ilfutrecommandablfj 
en  oulre,  par  des  principes  aus- 
tères, fermes ,  incorruptibles,  par 
son  courage  à  lutter  contre  des 
dilapidatenrs  pjiissans,  et  par  les 
services  qu'il  rendit  à  sa  patrie. 
On  ne  peut  lui  reprocher  avec 
justice  qu'une  inflexibilité  de  ca- 
ractère et  un  rigorisme  outrés, 
qu'il  apportait  jusque  dans  l'inté- 
rieur de  sa  famille.  Ce  fut  un  tort 
qui  venait  sans  doute  de  l'élat 
qu'il  avail  embrassé  et  des  em- 
plois difilciles  qu'il  avait  eus  à 
remplir;  et  c'est  en  quoi  il  ditVéra 
de  Câlinât,  qui  avail  su  joindre  à 
un  mérite  transcendant  les  mœurs 
les  plus  douces  et  les  plus  aima- 
bles.^ 

REAL  (le  comte),  voy.  le  Sup- 
plément du  tome  XVIIL 
,  REGNALLT  ( Jean-Raptiste- 
Etienne-Benoit-Olive),  médecin- 
consullant  du  roi,  né  à  Niort,  le 
i"  octobre  iy5ç),  fut  le  disciple  et 
l'ami  de  Vicq-d'Azyr,  qui  parvint  à 
le  fixer  à  Paris ,  dans  le  dessein 
de  l'associer  à  ses  travaux  et  à  ses 
succ(8.  Lorsque  la  révolutionécla- 
ta ,  M.  Regjiault  lut  nommé,  en 
1789,  président  de  la  seclion  de 
Saint -Ëustache.  Au  milieu  de  l'ef- 
fervescence qui  régnait  alors,  il 
se  n)onlra  constanunent  ami  de 
l'ordre,  et  sut  maintenir  la  tran- 
quillité publii|ue.  Il  devint,  en 
i^ç)'! ,  mendue  delà  première  mu- 
nicipalilé  constitutionnelle  de  Pa- 
ris, fui  nommé,  en  1791  ,  méde- 
cin «le  l'hôpitiil  mililaire  du  (îros- 
Caillou  ,  et  <'iifjn  médecin  ordinai- 
re à  l'armée  de  la  Moselle.  Sa  mo- 
dération fut  bien!/)!  r«;gardée  par 
des  hommes  exagérés  comme  une 


4^a  HrV  RtlY 

opposition  au  non  vcl  ordre  flcîcho-  ffs  premiors  grades,  ol  fut  nom 
«l'S  ;  il  lui  (Irnoucf- ,  e\  prév»^llll  nu;  [)ar  le  roi  t-n  ifî)2,  capitaifiR 
qi'  un  mail. I, il  venait  d  êirc  lamé  iuljoinl  à  l'élat-inainr  (te  l'armée 
c<uilielin'  )>ar  le  coutilé  de  .sfircté-  du  riidi,  toinmaiii.'i'e  par  le  p;éné- 
g;énérale,il  prit  la  fuile  pour  su  i\\\  Monlesquioii  ;  ii  servit  avec 
iousli  aiie  à  l'échaTaud  ,  el  s(>  ren-  di>linelion  à  l'armét;  des  Aljies  et 
dit  à  Hamltotng  ,  où  pendant  dix  d'Italie,  et  venait  d'être  promu  an 
ans,  qu'il  y  exerça  la  inéderine,  il  grade  d'adjudant-génèral  lorsqu'il 
y  trouva  des  Français  réfugii's,  fut  arrêté  aux  avant-postes,  parles 
fuyant  comme  lui  la  perséeulion,  ordres  du  représenlant  du  peuple 
et  crut,  avec  juste  raisi>n,  servir  Albitte,  sur  une  dénonciation  ile 
son  pays  en  leur  prodiguant  les  la  société  populaire  ;  mais  le  re- 
secours de  sop  arl.  Des  affaires  présentant  (iaslon  le  rendit  à  la 
d'inlérêl  l'ayant  appelé  à  Londres,  liberté,  sur  la  demande  du  général 
il  y  fut  précédé  par  la  répnialion  en  chef  Dumas,  et  d'une  dépiila- 
qu'il  s'éiail  faite  à  Hambourg,  et  tion  de  l'armée,  qui  était  venue  le 
ne  larda  pas  à  y  obtenir  la  même  réclamer  quelques  jours  avant  l'at- 
confiance.  Le  rétablissement  du  taque  du  mont-Cenis.  Nommé  gé- 
gouverneinent  royal,  eu  i8i4?ra-  néral  de  brigade  en  l'an  4»  ''  '"* 
mena  tVl.  llegiiault  dans  sa  patrie.  apj)elé  au  i8  fruclidor  au  com- 
Mommé  celle  même  année  méde-  mandement  supérieur  de  Lyon, 
cin-consultant  du  roi,  il  devint,  mis  en  état  de  siège,  el  des  dé- 
en  181 5,  méde(;iii  en  chef-adjoint  partemens  du  Rhône  et  de  la  Loi- 
de  l'hôpital  de  la  garde  royale  ;  en  re;  il  parvint  par  sa  fermeté  et  par 
J817,  médecin  des  pages  de  lu  de  sages  mesure-;,  à  l'arrestation 
cha. libre  du  roi.  et  chevalier  de  des  principaux  chef»  des  compa- 
l'ordie  de  Saint-Wiehel.  M.  Ile-  gnies  de  Jésus  el  du  Soleil,  qui, 
gnault  a  publié  à  Londres  :  Obser-  en  plein  jour  el  avec  la  plus  gran- 
tation  sur  la  phlhisie  pulmonaire ,  de  audace,  comnieltaient  dans 
et  sur  le  lichen  d'Islande ,  considé-  celte  malheureuse  ville  et  dans  ses 
ré  comme  médicament  et  comme  ali-  environs  d(!s  excès  atroces,  et 
»?6n^,  in-S",  ouviage  qui  aeu  trois  avaient  jeté  la  terreur  parmi  les 
éditions  à  Londres  et  deux  i'i  Paris,  habilans.  Ces  bandes  poursuivies 
Il  est  le  rédacteur  principal  du  et  détruites,  la  tranquillité  se  ré- 
Jour/uil  universel  des  Sciences  me-  t-iblit  el  les  communications  fu- 
dicules,  dont  il  paraît  un  numéro  renl  assurées.  Dans  ces  temps  dif- 
par  mois  depuis  i8i5.  ficiles,  le  général  Rey  sut  mériter 

REGiNlER  (ËDMEl,  vof/.   VEr-  l'eslime  et  la  reconnaissance  des 

rata  du  tome  XVIIL  Lyonnais,  par  sa  justice  et  sa  fer- 

REY   (Lodis-Emmaniel),  lieu-  meté.  Chargé  de  l'organisation  et 

fenanl-général  des  armées  du  roi,  de  la  formation  fie  divers  corps, 

grand-oflicier  de  la  légion-d'hon-  il  passa  en  l'an  10,  au  commande- 

neur,    chevalier  de  Saint-Louis,  menl  du  déparlement  de  Jemma- 

est  né  à  Grenoble  en  1768.  11  en-  pes,  fut  enjployé  en  i8o5,  à  l'ar- 

tra  au  service  après  avoir  termi-  mée  de  Boulogne,  où  il  comman- 

iié  ses  éludes,  passa  rapideiVient  da  en  1807  et  1808,  la  première 


REY 

division  de  cclUî  armée,  et  fut 
nommé  à  la  fio  de  i8o8,  chet'-d'é- 
tat-major  général  de  l'année  de 
(/alalng;ne,  lors  de  sa  l'ormation 
sous  lc>  ordres  du  maréchal  Gon- 
vinn  Sain[-Cyr;  après  le  départ 
du  maréchal,  il  remplit  les  mêmes 
Ibnctifàns  sous  les  ordres  du  maré- 
chal ABgereau.  ]l  passa  en  Espa- 
gne eu  iSio,  et  remplaça  comme 
gouverneur  génér.il  du  5' gouver- 
ncmeul,  le  général  Dorsenue  nom- 
mé au  commandement  en  chef  de 
l'armée  du  Nord.  Eu  juin  i8i3, 
lors  de  l'évacuation  de  Burgos,  il 
fui  chargé  par  le  roi  d'Espagne, 
du  commandement  d'un  convoi 
considérable  dirigé  sur  Saiut-Sé- 
baslien,  où  se  trouvaient  les  mi- 
nistres et  les  principaux  olîiciers  de 
la  maison  de  ce  prince.  A  son  arri- 
vée le  22  juin  dans  cette  place  qui 
avait  été  en  partie  désarmée  pour 
former  un  équifiage  de  siège,  et 
privée  de  ses  approvisionnemens 
de  resserve,  qui  avaient  été  dirigés 
sur  Santona,  le  général  Key  n'y 
trouva  qu'un  dépôt  de  conscrits 
de  .")5o  hommes,  commandés  par 
4  ufliciers.  Il  s'occupa  aussitôt  du 
réarmement  de  la  place  ain«i  que 
de  ses  approvisionnemens  et  des 
travaux  extérieurs.  Après  la  mal- 
heureuse atîaire  de  Vittoria,  le  gé- 
néral Foy  qui  avait  réuni  ù  sa  di- 
vision une  partie  <les  débris  de 
l'armée,  jeta  des  troupes  dans  la 
place  qui,  dès  le  38  juin,  se  Irouva 
cernée.  Le  général  (îraliam  avrc 
deux  divisions  anglaises  et  une  di- 
vision portugaise,  fut  chargé  de 
l'altnque  de  Saint-Sébastien.  Les 
Anglais  échouèrent  dans  h-s  as- 
sauts livrés  le  25  juillet  et  le  5i 
août,  où  ils  ûrenl  des  pertes  énor- 
mes, auxquelles  on  attribue  la  des- 


RKY 


423 


trnction  de  la  ville.  Ueponssé  aux 
divers  assauts,  le  général  Grahani 
avait  donné  l'ordre  de  la  retraite, 
lorsqu'un  obus  ayant  éclaté,  mit 
le  feu  aux  artifices  qui  se  trou- 
vaient sur  la  brèche,  et  causa  de 
grands  ravages  dans  les  rangs  fran- 
çais. Dn  chef  de  bataillon,  4  olîi- 
ciers et  un  grand  nombre  de  trou- 
pes d'élite  furent  victimes  de  ce 
malheureux  événement.  Le  géné- 
ral Rey  accourut  sur  la  brèche 
avec  des  troupes  de  réserve  ;  on 
s'y  maintenait  avec  la  plus  gran- 
de opiuiâlrelé,  lorsqu'un  bataillon 
portugais  ayant  eflectué  le  passa- 
ge de  la  rivière,  parvint  sous  la 
protection  des  batteries  de  brèche 
et  après  avoir  éprouvé  de  grandes 
pertes,  à  s'établir  au  pied  de  la  mu-, 
raille  de  mer  près  de  la  petite  brè- 
che, et  dans  les  décombres  adja- 
cens,  d'où  l'on  ne  put  parvenir  i 
le  déloger.  Alors  la  retraite  fut  or- 
donnée et  la  ville  défendue  pied  à 
pied.  Le  général  n'abandonna 
qu'à  4  hetires  la  principale  traver- 
se en  avant  de  l'église,  lorsque 
toutes  les  troupes  eurent  eflectué 
leur  retraite  sur  le  fort  parles  deux 
communications  qui  y  abotilis- 
senl.  Du  i"  au  8,  les  troupes  dans 
les  diveises  po>ilions  qu'elles  oc- 
cupèrent au  bivouac,  eurent  beau- 
coup à  soulfrir  d'une  pluie  conti- 
nuelle, et  éprouvèrent  de  grandes 
perles  par  le  feu  non  interrompu 
de  20  mortiers  et  de  i3  obusiers. 
Le  8  au  matin,  les  Anglais  ouvri- 
rent le  feu  sur  le  Mirador,  et  le  fai- 
ble mur  qui  entoure  lo  rocher  ù 
mi-cftte,  avec  une  batterie  de  20 
pièces  de  24  qu'ils  avaient  établie 
sur  le  terre-plein  de  l'ouvrage  ù 
cornes*  et  qui  était  soutenue  par 
le  feu  do  tuulei  les  batterie»,  les 


4ai 


REV 


troupe?  n'ayaiil  pas  d'abri  la  per- 
te riilcûii:ii(l.  r3l)le;  à  unehenr»;  Ifs 
brèchts  «ita.erit  pratiiablcs.  Le  g<'- 
néral  Rey  fil  une  convention  pour 
renif  lire  le  cliTilean  qui  «'titit  d.ios 
un  étal  (le  coniplèle  d»  .strnclion. 
Il  ne  restait  plus  une  seule  pièce 
en  étal  (le  tirer  iJans  les  diverses 
batterie.^  :  les  Anglais  lurent  éton- 
iu':s  de  la  situation  dans  laquelle 
ils  trouvèrent  cette  position,  et  en 
tcuioiguèretït  !eur  surprise.  Pen- 
dant la  dur-  e  de  (C  si»!gc  niémo- 
ralile  (loul  l'inveslissenu  nt  C(un- 
lueuçu  le  28  juin  ,  le  général  Key 
et  sa  brave  garnison  «e  couvrirent 
d'une  gloire  immorteMe  dans  les 
nombreux  combats  qu'ils  eurent 
à  soutenir.  L'empereur  en  maui- 
fesl.i  baoteuieut  !-a  satisfaction, 
confiirua  tous  les  avanceinens  faits 
pendant  le  siège,  et  accorda  des 
récoiripensex.  Il  éleva  le  général 
Rey  au  grade  de  général  de  divi- 
sion ,  le  nomma  grand  ofïieier  de 
la  lëgiou-d'hoi.iieur ,  et  par  une 
faveur  spé<  iale  et  très-rare,  il  lui 
accorda  la  totolité  de  se*appointe- 
meus  pendiuit  la  dmée  de  sa  capti- 
Tité.  Le  général  Rey  rentré  en  Fran- 
ce aprèslarestatuationen  i8i4»fut 
nommé  chevalier  de  Saint-Louis. 
Ali  fin  d'avril  181 5,  il  reçut  l'or- 
dre de  se  rendre  à  Valeuciennes 
en  qualité  de  gouverneur  de  cette 
place  imporiaute,  qui  fut  attaquée 
après  les  désastres  tie  AValerloOt 
par  un  corps  d'armée  commandé 
par  le  prince  Frédéric  d'Orange. 
Malgré  tous  leurs  elVorîs  les  alliés 
ne  purent  entrer  dans  Vaiencien- 
nes,  qu'après  la  signature  du  trai- 
té qui  déterminait  la  ligne  que  de- 
vaient occuper  les  divers  corps 
d'armées.  Le  général  Rey  a  eu  la 
catisfactiod)  après  avoir  défendu 


RFY 

vaillamment  une  place  sur  la  fron- 
tière ennemie,  d'en  conserver  ime 
à  la  France.  Il  a  été  mis  jeune  en- 
core à  la  retraite  par  l'ordonnance 
de  181 5,  et  s'est  retiré  à  la  cam- 
pagne où  il  s'occupe  d'agricultu- 
re, «  l  jouit  de  l'estime  de  ses  con- 
citoyens. ^ 

REYMOND  (Geobcf.-Mabie")  , 
dont  le  nom  est  écrit  Raymokd 
duus  plusieurs  recueils  litlér  tires» 
est  né  à  chambéri,  vers  »7<>0-  '^ 
est  ré  lacteur  du  Journal  de  Sa- 
voie, et  principal  du  collège  de 
Chambéri,  où  il  est  aussi  profes- 
seur de  mathématiques.  On  lui 
doit  les  prodii'^tions  suivantes:  i* 
A  l' auteur  de  ta. Chaumière  indien- 
ne, ou  Réfutation dusyifème  de  M. 
Bernardin  dt  Saint-Pierre^  s  ir  la 
figure  de  la  Terre ^  Chambéri  , 
1792,  in-8*;  2"  De  ta  Peinture  con- 
sidérée dans  ses  effets  sur  les  fiotn- 
mes  en  général,  et  son  influence  sur 
tes  mœurs  et  le  gouvernement  des 
peuples,  1801,  in-S";  1804,  in -8°; 
3°  Essai  sur  l'émulation  dans  l'or- 
dre social  et  sur  son  application  à 
l'éducation;  cet  ouvrage  a  été 
mentionné  honorablement  par 
rin>ititut,  1802.  in-8°,  Genève;  4* 
Mctapliysique  des  études,  ouReclier- 
cties  sur  l'état  actuel  des  métfiodes 
dans  l'étude  des  tettreset  des  scien- 
ces, et  sur  leur  in  (luencerclalivcmcnt 
à  la  solidité  de  C érudition,  Paris, 
i8o'(,  in-8°;  5°  Manuel  métrotogi- 
que  dadépartement  duMont-Blanc, 
Chambéri,  i8o5,in-8";G''De«j;  let- 
tres à  M.  Millin,  sur  l'usage  delà 
musique  dans  tes  églises,  181 1,  in- 
f^';  •;"  Let/re  à  M.  Villoteau,  tou- 
chant ses  rues  sur  ta  possibilité  d'u- 
ne tliéorie  exacte  des  principes  na- 
turels de  musique,  Paris,  1811  ,in- 
8":  8"   Essai  sur  la  détermination 


a» 


RTB 

des  hases  physico-mathématiques 
de  l'art  musical,  i8i5,  in-8°;  <)" 
Notice  sur  tes  Charmettes,  Genè- 
ve, 1811.  in-«S"  (insérée  dans  le 
Magasin  encyclopi'ffique  de  1 H 1  i); 
10"  Notice  sur  r  Institut  d'Y  Ver- 
dun, iSiZj,  in-8";  w'  Analyse  du 
bioniètre,  instrument  pour  mesurer 
ta  vie,  ou  Mémorial  horaire  de  M. 
Jullien,  181 5,  in-8';  ii"  Eloge  de 
Biaise  Pascal,  qui  a  reiuporlé  i'é- 
^bndne  d'or,  à  l'académie  des 
Jeux-Floraux  de  Toulouse,  en 
18  iG;  2*  édition,  1817,  in-8".  iM. 
Keymond  a  foiunibed'ioup  d'ar- 
ticles à  la  Bihliolhet/ue  française 
de  M.  Pougcns,  ;ui  Magasin  en- 
cyclopédique de  feu  Millin,  aux 
Annales  de  mathématiques  pures 
et  appliquées,  parM.Gergonne,eto. 
Il  est  membre  de  la  société  phi- 
lotechniqne  de  Paris,  des  acadé- 
mies de  f.yon.  de  Dijon,  de  Nî- 
mes, de  Turin,  etc. 

KEYMOND  (J.  B.),  capitaine 
au  corps  royal  des  inJjéni«'urs-géo- 
jfraplu'S  militaires,  membre  de  dif- 
('ér«'ules  académies,  Jrère  aîné  du 
précédent,  est  né  à  Chatnbéri  en 
I7<>(>.  Il  a  publié  :  i*  en  1795, 
et  diî  n :>uveau  en  i8o5,  avec  des 
c\\vin^ttn\en9„\\nv.Carte  génrrale  du 
département  du  Mont-Bianc;'i  ',  en 
181 5,  dessinée  et  gravée  pu-  lui, 
une  Carte  physique  et  rninéralogi- 
que  du  Mont-Blanc  et  des  vallées 
qui  l'avoisinent.  Elle  avait  été  le- 
vée pendant  les  années  1797, 
1798,  et  1799.  Il  s'occupait,  il  y 
a  quelques  années,  (Vune  grande 
Carte  topographique  et  militaire  des 
Alpes,  en  l'i  feuilb;». 

RI':///.ONIC(>,  liltéra'eiir  ita- 
lien, rntf.  le  Sup.  du  t.  XVIII. 

RIUÈ.S,  médecin  .  toy.  le  JSup- 
piément  du  tome  XVIII. 


ROE 


4a5 


RIQUET  (  COMTE  DE  Caraman, 
PRINCE  DE  Chimay),  voy .  le  Sup- 
plément du  tome  XVIII. 

KOBIÎKT    DE    SAINT-VIN- 

CENT.  père  etûls,  conseillers  au 
p;irlemeut  et  à  la  cour  royale, 
voff.    le    Supplément    du     tome 

xvni. 

KOliERT  (Hcbert),  peintre, 
voif.  le  Supplément  du  tome 
XV IH. 

UOBERT,  peintre  de  paysa- 
ges, voy.  le  Supplément  du  tome 

xvni. 

KO  DE,  célèbre  violoniste,  roy. 
le  Siij>plémeiit  du  tome  XVIII. 

ROEST  d'ALREMADE  (An- 
Toi>E-JosEpn  BARON  de),  né  à  Dor- 
dreohl  en  Hollande,  le  i5  avril 
1782.  est  entré  an  service  comme 
lieutenant  de  bussards,  sous  le  rè- 
gne du  roi  Louis  Napoléon.  Nom- 
mé Capitaine,  écuyer  et  chevalier 
de  l'ordre  royal  de  l'union,  en 
1807,  lieutenant-colonel  des  gar- 
d»'s  à  pied  en  1808,  colonel  du  5* 
régiment  de  hussards  eu  1809,  et 
blessé  Irès-dangenuscment  le  27 
mars  de  la  même  année  à  Ciudad- 
Réal  en  Espagne,  il  fut  fut  en- 
suite général-uiajor,  grand-maré- 
chal de  la  cour  du  roi  et  grand- 
croix  di;  l'ordre  de  l'Union.  Apre» 
l'abtlicaliun  du  roi  Louis,  il  resta 
au  >erviiede  l'<Miipercur  Napoléon 
conune  général  de  brigade.  Eu 
1810,  il  fut  nouuné  chevalier  de 
lu  légiou-d'honncur;  en  1811,  il 
commandait  le  dé[iartemcut  du 
Paiiaro  à  Modène  :  il  mourut  le 
17  décembre  de  la  même  année. 
Il  s'était  trouvé  à  plusieurs  actions 
d'éclat,  dans  lesq  .elles  il  avait  dé- 
ployé la  bravoure  la  plus  brillan- 
te :  et  mi  rapport  olliciel  consa- 
cra le  souvenir  de  sa  belle  cou- 


/r'6  ROS 

diiilK  à  r;tn';iir»!  do,  CiinKid-Ilô:»!. 
ROSKN.VlULLJ<:R(J*:nNEST-FRÉ- 
dÉric-Charles)  ,  oriciilitlisfe  alle- 
mand, est  ne  à  Heisberç,  le  lo 
décembre  1768.  Son  père ,  pas- 
teur ilislingiié,  lui  fil  donner  une 
éducation  soignée,  et  approuva 
sn  vocation  pour  les  sciences.  M. 
Rosenmijiler  devint,  en  ijqS, 
profe-^seur  de  langue  arabe  à  l'u- 
niversité de  Léipsick,  où  il  avait 
terminé  ses  études ,  et  fut  nom- 
mé ensuite  bibliolbécaire  de  la 
même  université,  «d'est,  dit-on, 
un  savant  orientaliste  et  exégete 
hardi.  On  lui  doit  un  grand  nom- 
bre d'ouvrages  utiles  sur  plusieurs 
parties  des  antiquités;  d'excellens 
morceaux  de  critique  et  de  litté- 
rature de  l'Orient  ;  enfin ,  un  com- 
mentaire latin  fort  étendu  sur  les 
principaux  livres  de  l'ancien  Tes- 
tament ,  travail  qui  a  le  plus  con- 
tribué à  sa  réputation  ,  et  qui  n'est 
pas  encore  achevé.  »  On  cite  parmi 
les  principales  productions  de  M. 
Rosenmuller  :  i'  Zolialri  carmen ^ 
tempU  meccani  foribus  appensum, 
vanc  primum  ex  cod.  Leidensi  ara- 
birè  edit.  »  lat.  conversum  et  notis 
illustr.  ,  Léipsick,  1792,  gr.  in- 
4°;  2°  Selecta  quœdam  Arabum  a- 
dagia  ,  nanc  primum  nrabirè  édita, 
lat.  versa  atque  illustr.,  ib.,  1797, 
gr.  in-4°  ;  5°  Abulfedœ  MesopotU' 
rnia,  arah.  primum  édita  (  dans 
le  3*  tome  du  liépertoire  bibl.  et 
orient,  de  RI.  Paulus  ).  4°  Com- 
meiilatio  de  Pentateurhi  versione 
persicâ,  gr.  in-4°«  Léipeick,  i8i4; 
5"  Manuel  bibliographique  de  cri- 
tique et  d'exégèse  biblique  ,  4  ^o\., 
Gœttingen,  1797-1800,  in-8°; 
0°  Recueil  et  analyse  des  passages 
de  l'Ecriture  sainte,  qui  servent 
de  preuves  dans  Cexposition  des 


ROS 

dogmes  de  la  théologie  chrétienne  ; 
i"  vol.,  Léipsick,  1795,  gr.  iti-8*, 
La  suite  de  cet  ouvrage  n'a  })as  pa- 
ru. 1^°  Grammaire  et  Chrestomalhie 
arabes, \h.,  I7;)(),  in-S'',  S' Histoire 
des  prétendus  envoyés  de  Dieu  et 
fondateurs  de  sectes  religieuses , 
parmi  les  inahométans  (  insérée 
dans  le  1'  vol.  des  iMélanges,  pour 
l'Histoire  des  religions,  par  M. 
Staendiin  ,  1797  ).  9°  Poésie 
des  Arabes  ,  avant  Mohammed, 
dans  les  Supplémens  à  la  Théorie 
des  beaux-arts ,  par  Sulzcr,  vol. 
5,  1798.  lia  traduit  et  accompa- 
gné de  notes  les  Mœurs  des  Bé- 
douins,  de  d'Aryieux;  le  Timon, 
de  Lucien  ;  l'È pitre  de  Saint- 
Jacques  ;  les  Supplémens  à  l'in- 
troduction de  J.  D.  Michaëlis , 
aux  livres  du  iV.  T,  publiés  à  Cam- 
bridge, en  2  vol.  gr.  in -4°,  par 
M.  H.  Marsh;  Gœttingue,  2  vol. 
in-4''j  1795-1803.  M.  Rosenmul- 
ler a  trois  frères,  qui  se  sont  dis- 
tingués par  leurs  ouvrages  :  Jeai»- 
ChbÉtien,  né  en  1771,  est  pro- 
fesseur d'anatomie  et  de  chirur- 
gie à  Léipsick  :  il  a  publié  plu- 
sieurs écrits  sur  son  art  ;  Jean- 
JÉRÔME-CoNRAo,  né  en  1776,  cul- 
tive la  littérature  historique  ,  et  a 
donné  différens  ouvrages  dans 
cette  partie;  enfin  Philippe,  né 
en  1776,  exerce  les  fonctions  de 
pasteur,  et  a  mis  au  jour  des  poé- 
sies ,  des  traductions  ,  etc. 

ROSSIM  (JoACHiMo),  un  de 
ces  hommes  qui ,  libéralement 
dotés  pnr  la  nature  ,  opèrent  dans 
les  arts  une  révolution  violente  , 
et  changent  le  goût  de  leur  siècle, 
en  croyant  eux-mêmes  n'obéir 
qu'à  leur  caprice.  Les  chants  gra- 
cieux de  Cimarosa,  la  musique 
légère  etbrillantede  Paër,avaient 


ROS 

')uvert  la  route  ;  M.  Rossini  osa 
ilavanfagc  ;  et  sans  autre  systcmc 
que  celui  de  se  plaire  à  lui-même, 
il  créa  une  école  nouvelle,  qui 
lera  de  mauvais  inn'luteurs,  mais 
dont  le  style  original  pt  vif  doit 
l'aire  «poque  dans  l'histoire  de 
J'arl  musical.  Né  à  Pesuro ,  en 
1789,  de  pareils  villageois,  il  ap- 
prit à  chanter  avant  d'apprendre 
à  lire,  et,  ajuès  avoir  été  enfant 
de  chœur,  il  entra  au  conservatoi- 
re de  Naples,  c'est-à-dire  qu'il 
suivit  la  route  ordinaire  ,  demi- 
sacrée  ,  demi  -  profane,  qu'ont 
suivie  dans  sa  patrie,  tous  ces  gé- 
nies néssans  fortime,  qui  devaient 
un  jour  briller  au  premier  rang, 
*»t  faire  retentir  d'hymnes  saints 
et  d'accens  voluptueux  les  vofites 
des  temples  et  les  salles  des  jeux 
scéniqiies.  Beaucoup  d'étourdeiie, 
de  dissipation,  d'inconséquences, 
marquèrent  ses  premiers  pas  dans 
la  carrière.  Il  ;ij)pril  la  composi- 
tion,  comme  un  homme  qui  de- 
vine l'art,  et  qui  s'embarrasse  as- 
sez pt;u  des  règles.  Ses  premiers 
opéras  n'eurent  que  de  légers  suc- 
cès. On  le  vit  parcourir  l'Italie , 
comme  c'est  la  coutume,  à  la  solde 
des  impresarii  ;  toujours  en  relard 
dans  les  engagemensqu'il  contrac- 
tait, toujours  cité  pour  sa  pjrcs- 
se,  son  goût  pour  les  plaisirs,  son 
dédain  de  l'avenir,  et  sa  facili- 
té à  se  jouer  du  public,  de  son  ta- 
lent et  de  sa  gloire.  A  Veiii>c,  où 
il  fut  retenu  par  un  imprésario  de 
mauvaise  humeur,  et  où  le  pu- 
blic avait  sifflé  une  de  ses  ouv(;r- 
tures,  ilimaginad'interrompre  par 
des  poses  l'ouverture  nouvelle 
qu'il  fut  obligé  de  composer,  et 
de  marquer  chacune  de  ces  poses, 
d'un  coup  donné  par  chaque  mu- 


KOS 


427 


sicicn  avec  le  manche  de  son  ins- 
trument sm-  les  chandeliers  de  fer 
blanc  qui  éclair.;nl  les  pupitres. 
Les  exéculans  soumis  par  devoir, 
et  forcés  par  une  discipline  exacte 
à  exécuter  toutes  les  volontés  du 
compositeur,  remplirent  cette  sin- 
gulière liU'he;  et  l'harmonie  qui 
en  résulta  fut  si  extravagante,  si 
singulière,  et  mit  les  spectateurs 
vénitiens  dans  une  toile  furetir, 
que  l'aKenlion  publique  s'éveilla, 
et  que  bientôt  on  ne  parla  plus 
que  do  l'audacieuse  espièglerie  du 
june  Kossini.  Son  talent  se  dé- 
ploya tout  entier  au  moment 
nn'me  où  son  étourderic  occupait 
les  oisifs  de  l'Italie.  Il  doima  le 
Barhiere  di  Siviglia ,  et  le  Nozze 
di  Figaro.  (>'était  entrer  en  lice 
avec  Faësielloet  Mozart.  On  trou- 
va chez  31.  Rossini,  avec  moins 
d'étude,  moins  de  perfection,  une 
verve  entraînante,  une  rapidité 
d'expression  étonnante,  et  un /«Wo, 
pournousservirdu  mot  technique, 
que  personne  n'avait  encore  porté 
si  loin.  Dès  lors  l'enlhousiasmc 
italien  proclama  Rossini  le  gio' 
7>ane  U'ingcnio.  En  effet,  il  a  ce  qui 
constitue  principalement  le  génie 
dans  les  arts ,  de  l'imagination  , 
<le  la  verve,  et  une  fertilité  mer- 
veilleuse. Il  a  pressé  tous  le?  mou- 
V);mensmusi(^'nix,i>t  sou  vent, pour 
obtenir  de  relTel ,  il  a  préféré  des 
motifs  brillans,  des  thèmes  vifs, 
dès  inspirations  gaies,  rapides  et 
riantes,  à  ces  combinaisons  dra- 
matiques, à  ces  compositions  ?a- 
vammcnt  expres-ivcs,  que  l'on 
admire  chez  Gluck  ,  iMozart  et 
Sponlini.  Ces  défauts  se  sont  re-. 
produits  avec  plus  de  force  dans 
ses  autres  ouvragtîs,  et  lindolen- 
cc  <jle  son  caractère  a  joint  à  ces^ 


reprO(hcs   méiilt'js   celui    de  dé- 
daigner trop  souvent  le  choix  de 
ses  motifs  ,  de  négliger  l'encîhaî- 
nemetït  des  parties,  et  de  repro- 
duire larnêiDe  j)ensée,  on  (ce  qui 
est  plus  inexcusable  )   le   uiê'ine 
morceau    aj^pliqué    à    dilïérentes 
paroles,   dans  deux  ou  trois  ou- 
vrages de  genres  différens.  Sa  vie 
aventureuse  et  épicurienne,  et  sa 
manière  de  composer,  sans  justi- 
fier ces  dérauts,lesexpliqnent  suf- 
fisamment. M.  Uossiai  n'a  besoin 
ni    de  la  solitude,   ni  du  silence 
pour  trouver   l'inspiration.   C'est 
au  milieu  des  fêtes,  parmi  le  bruit 
et  le  fracas,  au  sein  des  plaisirs,  à 
table ,    en  voyage  ,  que  sa  verve 
négligente  laisse  échapper  ces  tré- 
sors d'une  mélodie  vive  et  élégan- 
te, mais  souvent  incorrecte,  dont 
les  accens  ont  charmé  l'Europe. 
M  ose  inEgltlo,  la  Donna  del  tago, 
Otello ,  la  CenerentoUt,   la  Gazza 
ladra,  portent  de  fréquentes  et  de 
brillantes  traces  de  son  génie,  qui 
ne  s'est  montré  que  par  intervalles 
dans  VElisahetta,  la  Semlramide , 
le  Tarco  in  Ilalia,e\  quelques  au- 
tres  ouvrages   plus   faibles.    Il  a 
épousé   M°"  Colbran,  et  s'est  re- 
posé depuis  celte  époque.  A  Pa- 
ris et  à  Londres,  aucune  produc- 
tion n'a  encore  signalé  l'existence 
de  son  génie.    Noirirné  directeur 
du  TbéAtre- Italien  de    Paris,  il 
jouit  aujourd'hui  d'une  juste  ré- 
nommée, qu'il  sait  mettre  à  pro- 
fil ,    sans  la  soutenir  et  l'agran- 
dir :  au    moment  où  nous   écri- 
vons  (1825),   il    s'occupe    d'un 
grand  ouvrage  pour  le  théâtre  de 
l'Académie   royale  de    Musique; 
^ses  admirateurs  et  ses  rivaux  l'at- 
tendent à  cette  grande  épreuve  , 
qui  a  mis  le  sceau  à  la  réputation 


se  II 

de    Sacchini  ,    de   Piccini   et    Je 
Gluck. 

IIOSNAY.  général,  voy.  le  Sup- 
plément du  loine  XVIII. 

SABATIKR  ,  célèbre  chirur- 
gien, roy.  le  Supplément  du  tome 
XVIII. 

SCHIl.T  (JEiN- Jacques),  ma- 
réchal-de  camp,  commandeur  de 
la  légion-d'houneur ,  né  dans  le 
département  du  Bas-Rhin,  le  i5 
mai  17^1,  s'enrôla  le  26  janvier 
177g,  comme  simple  volontaire 
dans  la  légion  de  Nassau,  devenue 
par  suite  de  différentes  incorpo- 
rations, 24""  régiment  d'infante- 
rie légère.  Celte  légion  faisant 
alors  partie  de  l'armée  des  côtes 
de  Bretagne,  M.  Schilt  se  trouva 
îi  l'attaque  de  l'île  de  Jersey.  Il 
était  quartier-maître  trésorier  en 
1791.  A  cette  époque  il  passa  à 
l'armée  des  Pyrénées-Occidenta- 
les, où  il  servit  successivement 
sous  les  ordres  des  généraux  en 
chef  Servan,  Muller  et  Moncey. 
Employé  constamment  à  l'avant- 
garde ,  il  participa  aux  brillana 
succès  que  les  Français  obtinrent 
en  Espagne,  et  se  distingua  parti- 
culièrement à  l'attaque  des  lignes 
formidables  d'Iruu  ,  à  la  redditori 
des  forteresses  de  Fontarabie  et 
de  Saint  -  Sébastien ,  et  à  la  prise 
des  villes  de  Vittoria  et  de  Bilbao. 
11  obtint  le  grade  de  capitaine  le  6 
novembre  1792,  celui  de  chef  de 
bataillon  le  26  juillet  1793,  et  fut 
nommé  général  de  brigade,  le  19 
vendémiaire  an  3  (10  octobre 
1794).  Après  la  paix  avec  l'Espa- 
gne, le  général  Schilt  passa  à  l'ar- 
mée de  l'Ouest,  où  il  contribua 
aux  succès  qui  forcèrent  les  der- 
niers chefs  de  l'insurrection  à  se 
soumettre.   Employé  sous  les  or- 


m 


scn 

arts  des  généraux  en  chef  Hoche , 
Moulin,  Hédoiiville  et  Brune,  il 
acqiiit  successivement  leur  esti- 
me et  sa  conddite  honorable  lui 
valut  de  la  part  du  directoire-exé- 
cutif, une  lettre  très- flatteuse.  Il 
resta  dans  les  dépinleinens  d'Ile- 
et-Vilaine  et  du  Morbihan,  jus- 
qu'A  rentière  pacificatiou  de  ces 
contrées.  Le  général  de  biigade 
Schih  fit  en  Tan  8,  partie  de  l'ar- 
niéf  de  réserve,  formée  à  Dijon; 
il  se  trouva  à  l'affaire  du  Tessin  , 
au  coirïbat  de  Turbigo,  an  blocus 
du  châle. lu  de  Milan,  et  a  la  cé- 
li-bre  bataille  de  Marengo  :  dans 
colle  journée  il  donna  de  nouvel- 
les preuve?  de  talent  et  de  coura- 
ge. Le  combat  était  eng;igé  depuis 
six  heures;  le  l'en  le  puis  violent 
se  propageait  sur  toute  la  ligne,  et 
de  part  et  d'antre  les  charges  les 
plus  audacieuses  se  renouvelaient 
sans  cesse;  un  corps  ennemi  qui 
hc  prolongeait  du  côté  de  Gaslel- 
Ceriola  ,  menaçait  l'aile  droite  de 
l'armée  française  :  pour  ne  pas  se 
1  lisser  environner  on  fut  oblige 
d'abandonner  Marengo,  et  de 
prendre  position  en  avant  de  ce 
village.  Ce  mouvement  indispen- 
sable fut  exécuté  avee  une  préci- 
sion remaripi.ible,  sans  qm:  le  feu 
se  trdUvHl  interrompu  un  seul  ins- 
tant. En  ci;  moment  la  division 
dlonnler  arrivait  sur  le  champ  de 
hatailh;  ,  les  généraux  Schilt  et 
C.arra-Saint-Cyr,  à  la  têle  des  19' 
légère  et  70*  demi-brigades,  mar- 
chèrent aussitôt  sur  la  droite,  et 
reprirent  une  partie  du  terrain 
que  les  circonstances  avaient  fait 
abandonner  aux  troupes  françai- 
ses. Le  général  Schilt  dont  la  ma- 
noeuvre habile  pour  se  dégag«:r 
<iv$  forces  nombreuses  qui  l'envi- 


SCR 


^29 


Tonnaient,  fut  admirée  des  trou- 
pes, reçut  les  éloges  des  généraux 
en  chef,  et  sa  conduite  obtint  une 
mention  honorable  dans  le  rap- 
port du  chef  d'état-major-géné- 
ral. Emj)loyé  en  l'an  9,  à  l'armée 
d'Italie,  sous  les  ordres  de  Brune,  il 
se  distingua  au  passage  du  Mincio, 
à  celui  de  rA()ige,et  à  la  prise  des 
positions  de  Rivoli  et  de  la  Cora- 
na.  La  nature  du  terrain  ,  une 
nombreuse  arlillerie  et  les  forces 
imposaiites  de  l'ennemi,  rendi- 
rent l'attaque  de  ces  positions  des 
pins  dangereuses  ;  le  général 
Sehilt,  avec  sa  brigade,  composée 
des  premier  et  deuxième  batail- 
lons de  II  12°  légère,  et9i*  de  li- 
gne, It  s  tourna  landis  que  la  bri- 
gade du  général  Seriziot  les  atta- 
tpjait  de  front,  et  elles  furent  en- 
levées :  «Il  ne  fallait  rien  moins, 
disait  le  général  Oudinot  dans  soi» 
rapport,  que  l'intrépidité  des  Fran- 
çais, pour  gravir  ces  montagnes 
sous  une  pluie  de  feu,  et  empor-« 
ter  un  succès  aussi  complet  que 
rapide.  »  Après  avoir  parlicipé 
aux  succès  de  l'armée  d'Italie  jus- 
qu'à la  paix,  le  général  Schilt  fut 
appelé  des  bords  de  la  l'iave  au 
commandement  de  la  ville  de  Mi- 
lan, d'.jù  il  passa  su.xessivement 
au  rommaiidement  de  Nice,  et  à 
celui  des  Alpes  maritimes.  Ce  gé- 
néral qui  n'a  dft  son  avancement 
(ju'à  sim  mérite,  a  aussi  développé 
les  talensd'unsageadininistrateur; 
en  faisant  d'une  part  respecter  la 
discipline  militaire,  il  a  de  l'autre 
réparé  les  maux  de  la  guerre,  et 
soulagé  les  peuples  dont  l'admi- 
ni>tratinn  lui  était  confiée.  Il  a  ces- 
sé de  faire  partie  des  cadres  de 
l'armée  en  iH  iG. 

SCRIBE  (Kugèhe)  ,  houioïc  dq 


k:, 


SCR 


lollrc's  ,  ruii  des  plus  féconds 
cotnine  des  plus  iiij^fMiiciix  et  spi- 
ritiiel-s  auteurs  de  hgcis  ouvrages 
dramatiques,  a  enriefii  les  lliéû- 
tres  du  Vaudeville,  des  Variétés, 
de  rOpéra-Coniiqne  et  du  Gym- 
nase (aujourd'hui  théâtre  de  iMa- 
DAME,  duchesse  de  lierry),  d'une 
l'oide  de  productions  qui,  presque 
tontes,  ont  ohlenu  un  succès  de 
vogue.  Le  non.hre  des  pièces  que 
M.  Scribe  a  composées,  soit  seul, 
soit  en  société,  se  nionie  à  plus 
de  cent  trente;  nous  ne  citerons 
que  les  principales.  (Au  Vaude- 
ville) ,  le  ISouve-aa  Pourceaugnac; 
le  comte  Ory;  la  Nuit  de  la  Garde 
nationale;  une  Visite  à  liedUnn;  te 
Fou  de  Peronne;  la  Sonmainhulc; 
Frontin  mari.  -  garçon.  (Aux  Va- 
riétés) ,  le  Solliciteur  ;  les  deux 
Précepteurs  ;  le  comte  WErforl, 
ou  l'Ennui;  l'Ours  et  le  Pacha; 
l'Intérieur  d'une  Elude.  (Au  Gym- 
nase dranialique)  ,  te  Secrétaire  et 
le  Cuisinier  ;  le  Parrain;  le  Gas- 
tronome sans  argent  ;  le  Colonel; 
la  Petite  Sœur  ;  te  Mariage  enfan- 
tin ;  le  vieux  Garçon;  Michel  et 
Christine;  Philibert  marié;  lu  De- 
moiselle et  la  Dame;  C Ecarté; 
r Intérieur  d'an  Bureau;  la  Loge 
du  Portier;  l' Héritière  ;  le  Coif- 
feur et  le  Perruquier;  la  il/ailrcsse 
au  Logis;  la  Partie  et  -liccanclte; 
un  Dernier  Jour  de  fortune;  la 
Mansarde  des  Artistes;  les  Gri- 
settes;  Rodolphe;  Coralj;  la  Qua- 
rantaine; la  Haine  d'une  Femme; 
le  plus  Beau  Jour  de  ta  vie.  (A  l'O- 
péra-Comique), laChambre  à  cou- 
c'ja*,  mnsi(piede  Guénée;  le  Valet 
de  Chambre,  musique  de  Carafîa; 
Leycester;  ta  Neige;  le  Concert  à 
la  Cour;  Léocadie;  leMûçon.  (^os 
derniers   ouvrages   ont    été    mis 


en  nnisique  jiar  M.  Auher.  com- 
positeur plein  do  ver^e  et  d'origi- 
nalité, qui  s'c-'t  ac«('iis  Une  juUe 
répulaii  11.  (ArOdéon),  le  V O" 
ht  de  son  Rn-al.  (Au  Théâtre- 
Français],  Valérie,  comédie  en 
trois  actes  et  en  prose.  Cette  piè- 
ce, on  M"'  >jars  remplit  le  princi- 
pal rôle  d'une  manière  inimita- 
ble, a  l;iit  courir  tout  Paris,  et  est 
restée  au  courant  du  ré|>ertoire. 
Dans  tous  les  ouvrnges  cités  i(  i , 
iM.  Scribe  a  fait  preuve  d'ime  par- 
laite  en  ente  de  la  scène.  Si  l'in- 
trigue est  eu  général  légère  ,  les 
flétails,  en  revanche,  sont  pleins 
de  grâce  et  d'intérêt.  Les  pièces 
de  cet  auteur  ob'iemieut,  si  l'on 
peut  s'exprin.ei'  ainsi,  un  sufc<;S 
de  bon  ton  ;  au^si  est-ce  habituel- 
lement dans  la  bonne  société  qu'il 
puise  ses  inspiratimis.  Jeune  en- 
core, il  a  déjà  beaucoup  l'ait  pour 
sa  fortune,  et  plusieurs  ouviages 
importans  qu'il  prépare,  dit-on, 
ajouteront  sans  doute  encore  à  sa 
gloire. 

SÉGUAIN  (Jérôme),  capitaine 
de  frégate,  chevalier  de  la  légion- 
d'houneur,  est  né  à  Lyi>n  ,  dépar- 
tetnent  du  ilhône ,  le  28  juillet 
içG').  Dès  sa  plus  tendre  jeunesse 
il  se  montra  passionné  pour  les 
voyages  et  pour  les  études  de  la 
marine.  En  i7;'i  il  partit  pourlVo- 
chelort,  où  il  arma  en  course,  si^r 
des  vaisseaux  de  ct;  port,  jusqu'à 
la  fm  de  la  guerre  de  1776.  La 
paix  laite,  il  offrit  ses  services  à 
la  couipagnie  des  Indes,  qui  l'em- 
ploya en  qualité  d'oflicier  depuis 
ijîS/j  jusqu'en  179"^;  à  cette  épo- 
que, revenant  de  la  Chine,  il 
quitta  le  service  de  la  compagnie 
pour  monter  ini  corsaire,  nom- 
mé le  Cilojen^doiil  les  dilfcrenies 


SE  G 

courses  n'oflVirent  aucune  chance 
favorable  à  son  avancement  ni  à 
sa  fortune.  Dans  un  vovajje  qu'il 
fit  de  Lurienl  à  Toulon,  en  pas- 
sant par  liordeiux  il  y  fut  retenu 
pour  prendre  le  couwnandemrnt 
«le  la  lV<'j|[atc  la   Citoyenne  fran- 
çaise, C«;  choix  fut  approuvé  par 
le  giMivernenient ,  qui   venait  de 
nonunt-r'IU.    Scgtiaiu  lieutenant 
«le  vaiivsoau.  Pendant  Tespacc  de 
vingl-dciix  ujuis  (pi'il  cimserva  ce 
coiniiiaii(ieuient,  il  e^C!)rta  et  pro- 
tégea p!u«ifur-j convois,  triompha 
d'un  grand  noniUrc  de  diin.nillé?, 
et  les  succè?  qu'il  obtint  ne  furent 
dus  qu'à  sou  expérience  et  à  S(!S 
talens.  De  coiirert  aveu  la  Tamise 
et  la  Républicaine,  il  fit,  dans  une 
croisière,  plu;?  de  cin(|uante prises 
qui  ne   IVnricliirenl   [las,   car  ne 
s'en  considérant  que    coinine    le 
dépo'ilaiie  fidèle,  il  ne  lui  resta, 
après  la  reddition  de  ses  compte», 
que  l'espoir  d'un  nouvel  eud>ar- 
quement.    Il   fil,  sur  le  vaisseau 
les  Droits  lUl'  tiomnte,  la  première 
expédiiiiin    d'Irlande  ,    dans    la- 
quelle, assailli  par  des  forces  in- 
finiuii'ut   supérieures,    il   soutint 
pendant    iliuize    heures   l'un    des 
ctunbats  qui  honorent  le  plus  la 
marine  française.  Au  retour  d'Ir- 
lande sou   vai'-seau  fut  battu  par 
la  tempête  vX  vint  s'échouer  dans 
la  baie  d'Audicrue.  l'Iaoé  en  qua- 
lité d'adjudant  clans  l'élat-innjor 
du  contre-amiral  iMorard  de  Gal- 
les, il  renon^M  à  celte  place  pour 
prendre  l'armement  de  la  fiégate 
la  Résolue^  en  l'absence  du  capi- 
l;une  ,  et  la  conduire  jusqu'au  dé- 
part pour  la  «econde  expéditi(W) 
d'Irlande  ,  dans  laquelle,  pendant 
la  traversée,  il  essuya  trois  coni- 
buls.  Après  les  tleux  jiremicrs,  la 


st(; 


L\J\ 


frégate  désemparée  et  faisant  eau 
de  toutes  parts,  s'elïorçiit  d'arri-, 
ver  en  Italie  ,  lorsque  attaquée  de 
nouveau  elle  fut  obligée  d'ame- 
ner. Le  capitaine  Séguain  revint 
en  Fianctî  sur  parole,  et  servit 
dans  l'état-major  jusqu'au  mo- 
ment où  il  put  être  échangé.  Il 
sollicita  ensuite  de  l'emploi  sur  la 
flolille,et  obtint  le  commandement 
delà  première  division  dans  l'Es- 
caut. Il  exfiça  continuellement 
SCS  marins,  et  tint  dans  le  meil- 
leur état  ses  équipages.  A  la  paix, 
le  gouvernement  lui  doinia  le 
commandement  de  la  corvette  te 
Festin,  avec  laquelle  il  fut  en- 
voyé aux  île-  du  Vent.  La  paix  ne 
l'ut  pas  de  longue  durée  et  le  ca- 
pitaine Si'guain  se  retrouva  e» 
présence  de  l'ennemi.  Des  péni- 
ches angl.iises  essayèrent  vaine- 
ment d'enlever  la  corvette  qu'il 
montait;  il  déjoua  lem'  projet  en 
ejuployant  Vestacade  ^  moyen  ex- 
traordinaire de  défense  qu'avant 
lui  aucun  bâtiment  n'avait  mis  en 
usage.  De  rctom'  en  Europe,  il  se 
signala  par  un  acte  triulrépidilô 
remarquable.  Depuis  (juelqucs 
jours  il  attendait  à  LaberAvzach 
un  ujouienl  favoralile  pour  pas- 
ser sans  se  c<>mpron»ettre  à  Brest, 
oi'i  le  gouvcrnemt.nt  lui  avait 
d  inné  l'ordre  de  se  rendre  malgré 
la  croisière  emjcmie.  Son  lou- 
voyage  ne  p(MiTait  guère  être  fa- 
vorisé [lar  les  flots  dans  une  baie 
où  les  vents  de  iN.  E.  ne  soufilcot 
que  sur  les  cinq  heures  du  matin. 
Cela  ne  l'empêcha  pas  «l'appareil- 
ler le  la  vendémiaire  sur  les  trois 
heur<:sde  la  nuit,  cachant  ses  feux 
afin  de  filer  la  côte  en  approchant 
la  terre  de  très-près.  Il  avait  fait 
prévenir  quelques-uns  des  forts 


432  SEG  SHE 

qui  se  trouvaient  sur  «a  route  et  guahi.  mais  apr^s  l'échinge  rVti- 

leur  ré(M)u(lail  au  |)orltvoix  pour  ne  soixantaine  He  <'oups  tirés  »lu 

éviter  toute  iiiépri!»»;.  l'euHiiut   le  part  et  d'autre  la  goélette  anglaise 

jour   il   coiïipta  trois    vaisseaux,  l'ut  oitligée  de  «e  retirer ,  et   vers 

deux  frégates  et  quatre  corvettes  neuf  heures  la  frégate  française, 

à  la  surveillance  desquelles  il  de-  dont  le  capitaine  et  Téquipa^e  a- 

vail  se  .soustraire  et  qui  éraieot  à  vaient  fait  preuve  de  la  plus  gran- 

unc  distance  d'environ  une  lieue  de  intrépidité,  trouva  un  refuge 

et  demie.  Il  avait  réussi  à  doubler  a>*suré  sous  le  fort  de  fierthauuie. 

le  fort  du  Conquet,  mais  le  fort  M.    Séguain,   pour   prtt   de   ses 

Sainte-Barbe,  qui  ne  le  reconnut  itavaux,  oblintla  récompense  des 

})oint,  lui  lira  trois  coups  de  canon  braves.  Armé  d'abord  sur  le  vais- 

donl  un  l'atfeignil  vn  plein  bois.  La  seau  le  Cassiird^  en  radoub  à  Brest, 

récidive  était  à  craindre  et  le  fort  il  se  distingua  depuissur  diversbâ- 

Saint-Mathieu  pouvait   imiter  ce  timens,  j>ar  plusieurs  actions  d'é- 

funeste  exeu)ple  ;  le  capitaine  Se-  olat.  lia  cessé  d'être  compris  dans 

giiain  fut  obligé  de  se  couvrir  de  les  cadres  des  officiers  de  marine 

ses  feux  de  nuit,  au  ri-que  de  don-  en  181O. 

ner  l'éveil  à  l'ennemi.   En   don-         SHl'lLLEY  (  Percet-Bisscre  ) , 

blant  le  cap  Saint-Malbieu  il  cou-  t^crivain   anglais  très  -  distingué, 

rait  le   danger    d'être   coupé;   il  un  des  derniers  amis  de  lurd  By- 

force  audacieusement  le  passage;  ron  ,  a  acquis  de  la  célébrité  par 

mais,  comme  il  l'avait  prévu,  ses  l'origioaliie  de  ses  ouvrages,  tant 

signaux  de  nuit  attirèrent  les  vais-  en  prose  qu'eu  vers,  et  par  les 

seaux  ennemis  à  sa  poursuite.  Il  malheurs  de  sa  vie,  qu'il  termina, 

les  aperçut  dès  le  point  du  jour,  il  y  a  peu  de  temps,  dans  les  flots 

courant  bord  sur  bord   pour  loi  delà  Méditenanée.  Son  père,  sir 

couper  la  retraite.  Il  pa^^se  au  mi-  John  Shelley,  riche  baronnet,  fit 

lieu  d'eux  et  se  dispose  au  combat  pendant  long-temps  partie  de  lu 

avec  sou  équipage  d'élite   formé  société  intime  du  prince  de  Galles 

sous  son  coimnaudement.  Déjà  il  (  le  roi  actuel.  Georges  IV  )  ,  et 

avait  doublé  plusieurs  vaisseaux  donna  de  grands  soins  à  l'édiica- 

ennemis,  qui  croyant  sa  fuite  im-  tion  d'un  fils  qui,  dès  Tenfance, 

possible,  n'avaient  point  fait  feu.  annonçait  les  plus  heureuses  dis- 

Lientôt  la  snpériorilé  de  sa  ma-  positions,  et  semblait  promettre 

nœuvre,  la  célérité  de  ses  mouve-  une  illustration  nouvelle  à  sa  fa- 

mcus  d'évolution  lui  firent  dépas-  mille.  A  l'âge  de  i5  ans,  Shelley 

ser  les  frégates,  et  par  sa  marche  fut  tiré  d'une  pension  renommée, 

peu  ordinaire  il  évita  les   bricks  et  envoyé  au  collège  d'Eton.  Il  y 

qui  le  poursuivaient  de  plus  près,  développa    bientôt    im    caractère 

Une  gi'ëlettc  prétendait  encore  lui  assez  bizarre,  ne  |)renait  aucune 

couper  le  passage  :  elle  était  armée  part  aux  ainusemens  naturels  à 

de  caronades  dé  seize  que  les  ca-  son  âge,  recherchait  la  solitude, 

nous  de  la  frégate  française  de-  et  se  montrait  aussi  réservé  que 

vaient  faire  taire.  Le  combat  fut  mélancolique.  Il  aifectail  un  graod 

commencé  par  le  capitaine  Se-  mépris  pour  les  travaux  habituels 


SlïK  SIÎK                   455 

Oes  classes,  los  amplifications  He  ft  coiilie  tons,  il  fut  renvoyé  ave»; 
collège,  <;t  surtout  pour  les  vers  éclat  de  l'université  d'OxforJ.  Uiiu 
Iritius  modernes  ;  mais  il  fit  des  pareille  rélég.ilion  ,  si  tïieheusc 
projpès  rcniarqnnbles  dans  les  pour  un  jenne  homme,  a  ordinai- 
scleiices  exactes.  In  physique  et  rement  en  Angleterre  ime  grande 
la  chimie.  La  liliératiire  étrangère  innui^nce  snr  sa  destinée;  mais 
iMit  aussi  pour  lui  de  grands  al-  Slielley  ne  parut  nullement  afTectô 
traits,  et  la  k'ctnre  des  ouvrages  d'une  disgrâce  qui  détruisit  ce- 
allemands  lui  donna  de  bonne  pendant  presque  toutes  ses  espé- 
heure  cet  esprit  romanesque  qu'il  rances  pour  l'avenir,  et  tievint  si 
montra  dès-lors,  et  qu'il  a  ton-  fatale  à  son  bonheur.  Klle  le  priva 
jours  conservé.  A  l'âge  de  1  5  ans,  immédiatement  de  l'objet  de  sou 
il  publia  «es  deux  premiers  m-  premier  amour,  et  aliéna  à  jamais 
inans  intitulés  :  J mtrozzi  et  le  de  lui  sa  lamiMe.  Son  j)ère  refusa 
Rossicrucicn ,  dont  on  parla  beau-  pendant  long- temps  de  le  rece  • 
coup,  et  qui  parurent  fort  au-  voir  dnns  sa  maison,  et  quand  il 
«Icssns  des  moyens  d'un  auteur  y  consentit  enfin ,  ilie  traita  avec 
tie  cet  âge.  Quelques  journalisles  une  telle  froi<leur,  que  le  fils  crut 
})rélendirent  y  découvrir  déjj  des  lui-même  devoir  r<'noncer  an  toit 
piÏMcipes  irréligicuxet  blâtnables.  paternel,  II  se  rendit  à  Londres, 
iShelley,  après  avoir  achevé  ses  01^  il  se  ]>rit  bienlôl  d'une  grande 
cours  à  Eton  ,  se  rendit  à  l'tini-  passion  pour  la  jeutiecl  belle  miss 
versité  d'Oxfnrd.  Depuis  quelque  Vestbrook,  qui  consentit  à  partir 
temps  il  s'était  lancé  dans  les  «vec  lui  pour  l'Ecosse  ,  et  qu'il 
cliamps  arides  de  la  plus  abstruse  épousa  à  Grelna-Grecti.  Les  âges 
inélaphysiquo,  et  avait  entrepris,  ieuni»  di;s  deux  époux  ne  se  mon- 
sous  le  u«m  supposé  d'un*?  fiun-  laienlqii'à  .'5T)anv.Cemariageexas- 
n^e,  une  controverse  théologique,  péra  le  pèie  i!<!  Slielley  au  |»oint 
avec  utï  haut  dignitaire  de  l'église  qu'il  cessa  loule  comnmuication 
anglicane.  A  la  fin  de  son  second  avec  son  fils.  Celui-ci,  après  avoir 
lame  à  l'université,  il  composa  passé  quelque  temps  à  Edim- 
\u\  ouvrage  dans  lequel,  sans  res-  i)onrg,  se  rendit  en  Irlandi;.  Toute 
jiect  pour  les  opinions  les  j)lus  l'île  élail  alors  agitée  par  des  Iroii- 
pénérulemenl  établies,  il  attaquait  blés  politi<|ues  très-graves.  Slul- 
mêmc, la  doctrine  révérée  des  eau-  ley  publia  ù  Dublin  un  pamjddel 
SCS  finales,  et  joignant  à  cette  té-  qui  eut  un  grand  débit.  11  chcr- 
mérilé  une  jactance  extravagante,  chaii  à  cabner  l'elTervePcence  po- 
il envoya  l'écrit  signé  de  son  nom  ptdaire,  et  reconunandail  une  fer- 
à  tous  les  évêques  de  l'Angle-  nielé  modérée  aux  Iil.mdais,  leur 
terre.  La  conséquence  naturelle  prédisant  qu'ils  n'obtiendraient 
d'un  acte  au^si  insensé,  fut  une  jamais  par  la  révcdte ,  les  libertés 
citation  devant  les  maîtres  du  col-  qu'ils  réclamaient.  Il  parla  dans 
lége,  et  comme  il  ne  voulut  point  le  même  stuis  à  quelques-unes 
désavouer  son  écrit,  ni  rétracter  des  assemblées  publi(|ues ,  et  fit 
se*  opinions  ,  se  préparant  ,  au  preuve  de  talens  oratoires  Irès- 
conlrairc,  ù  les  souiciiir  envers  distingué^.  Uevctiu  en  Angleterre 
T.  XX,  .       vS 


4'î  SUE 

a  In  fin  tic  rannée  1812,  il  com- 
posa le  poëmc  de  Queen  Mal)  (!■» 
IVeine  Mab),  qu'il  envoya  h  plu- 
.•iicurs  litlérateurs  connus, «*t  entre 
iuilres  à  lord  Byron.  «  C'c^t  un 
ouvrage,  disait  celui-ci ,  dans  le- 
«]ncl  il  y  a  beaucoup  d'imagina- 
tion et  de  talent.  Personne  ne  sait 
mieux  que  l'auteur  que  ses  opi- 
nions et  les  miennes  sur  la  partie 
métaphysique  de  son  poëme  dif- 
l'èrent  essentiellement ,  quoique 
nous  soyons  d'ailleurs  d'accord 
avec  tous  ceux  que  la  bassesse  et 
Ifi  bigoterie  n'aveuglent  point. 
J'admire  la  poésie  de  Quoe»i  Mab 
«;l  des  autres  productions  do  Shel- 
Itiy.  »  Plusieurs  années  après  ,  le 
poëme  de  Queen  Mab  tomba  en- 
tre les  mains  d'un  libraire, 
qui  le  publia  pour  son  pro- 
]>re  compte,  ce  qui  donna  lieu 
à  (les  poursuites  judiciaires,  qui 
procurèrent  à  Shelley  l'occasion 
de  désavouer  quelques  opinions 
(le  sa  fougueuse  jeunesse.  Son 
mariage,  dont  il  eut  deux  enfans, 
ne  fut  pas  heureux.  En  i8i(),  une 
séparation  eut  lieu  d'un  consente- 
ment mutuel,  et  il  partit  pour  le 
coiilinent.  Pendant  un  long  séjour 
vM  Suisse,  ce  pays  enivra  son  âme 
d'une  nouvelle  passion  pour  la  na- 
ture. Il  se  lia  d'une  étroite  amitié 
avec  lord  Byron  à  Genève,  et  cette 
amitié  a  duré  toute  leur  vie.  On 
a  dit  que  lord  Byron  ,  qui  en  con- 
venait lui-même,  était  en  grande 
partie  redevable  des  beautés  de 
tout  ce  qu'il  a  écrit  à  la  Villa  Dio- 
dati  (  le  troisième  chant  de  Cliild 
Harold^  Maiifred  et  le  Prisonnier 
Je  Chillon)  y  aux  critiques  judi- 
cieuses que  son  ami  faisait  des 
imperfections  de  ses  divers  ou- 
vrages et  aux  conseils   qu'il  lui 


SHE 

donnait.  Shelley  composa  à  la 
même  époque  son  églogue  de  Jlo- 
salind  et  llclen  et  une  Ode  aux 
monlagJies  Eaqanéennex  ,  où  il  y  a 
de  grandes  beautés.  Il  fit  ensuite 
son  premier  voyage  en  Italie,  re- 
vint en  Angleterre  ,  et  après  la 
mort  de  sa  femme,  il  épousa  en 
secondes  noces  miss  Mary-Wol>- 
tonecraft  Godwin  ,  fille  de  la  cé- 
lèbre Mary  AVolstonecraft .  défen- 
seur éloquent  des  droits  des  fem- 
mes, et  d'im  écrivain  non  moins 
renoînmé,  M.  Godwin  ,  auteur  de 
plusieurs  écrits  politiques  et  du 
roman  de  Caleh  J-VilUam.  Shelley, 
insouciant  sur  tout  ce  qui  tenait  à 
l'argent  et  généreux  à  l'excès  , 
éprouva  quelque  temps  après 
cette  union  ,  des  embarras  ex- 
trêmes ;  l'héritier  du  titre  de  ba- 
ronnet et  d'une  fortune  assez  con- 
sidérable, se  trouva  à  la  veille  de 
n^ourir  de  faim.  Quand  il  eut  enfin 
alleint  sa  majorité,  apprenant  qu'il 
avait  droit  à  quelques  propriétés 
tenues  en  fief,  il  vendit.ces  droits 
à  son  père  pour  une  rente  viagère 
de  1,000  livres  sterling,  et  alla 
s'établir  à  Jlarlow,  où  il  se  livra 
entièrement  à  son  goût  pour  la 
poésit'.  Ce  fut  pendant  son  séjour 
dans  le  comté  de  Buckingham  , 
qu'il  composa  son  beau  poëme 
iV Alastor.  on  l'Esprit  de  la  soli- 
tude, un  des  plus  parlaits  modèles 
d'harmonie  que  possède  la  langue 
anglaise,  ouvrage  plein  de  verve 
et  riche  des  tableaux  que  l'imagi- 
nation du  poète  avait  ébauchés 
d'après  nature,  créés  ou  embellis 
pendant  ses  excursions  dans  les 
Alpes.  Ses  revenus  étaient  loin  de 
suiïire  au  train  de  vie  qu'il  avait 
adopté  en  Angleterre  ;  toujours 
brouillé  «Ytc  sa  famille,  qui  avait. 


SHE  SHE  435 

même  obtenu  que  le  chancelier  dcvirit  sujet  à  des  accès  de  mélan- 
lui  rclirilt  la  lulèle  de  ses  enfans  colie  et  d'ahalteincnt.  Quoiqu'il 
ilu  premier  lit,  sous  prélexle  des  contiuuiit  d'écrire  pendant  les qtia- 
oniiiions  hétérodoxes  du  père  ,  tre  dernières  années  de  sa  vie,  il 
Snelley  résolut  de  quitter  à  jamais  avait  pris  la  résolution  de  ne  pli  s 
sa  pairie.  Il  repassa  alors  pour  la  rien  publier,  et  ne  s'en  écarta 
dernière  fois  les  Alpes,  et  s'éta-  qu'en  deux  occasions.  Son  ardent 
hlit  d'abord  à  Venise.  Sa  liaison  amour  de  la  liberté  lui  inspira  le 
avec  lord  lijron  y  devint  enccire  poëme  iVHcltas  ou  le  Triomphe 
plus  intime.  11  y  Jiubiia  le  poëme  de  la  Grèce,  qu'il  dédia  à  son  anu 
allégorique  de  la  Rcvollc  d'Islam,  le  [>rinc^  Maurocordalo ,  et  qui  a 
dont  plusieurs  journaux  anglais  été  traduit  en  grec.  Son  ainilié" 
parlèrent  ravoral)lemeMt,maisque  pour  le  poète  Keats,  qui  mourut 
le  Quarlcrly  Rewiew  critiqua  avec  à  Rome,  l'engagea  à  publier  une 
amertume,  mêlant,  selon  son  ha-  élégie  (|u'il  intitula  :  Adoinm. 
bitude,  à  ses  critiques  littéraires.  C'est  peut-être  la  plus  parfaite  de 
des  personnalités  injurieuses  con-  ses  productions.  Pendant  les  der- 
Ire  l'auteur.  Sheljey  com[>osa  en-  niers  temps  ,  il  voyait  tous  les 
suite  le  poëme  des  Amours  de  jours  lord  Byron  ,  à  qui  son  ama- 
LaonetCyfltera,ettltePrometheus  bililé,  sa  douceur,  l'élégance  de 
uiihonnd  (  Promélhée  délivré  )  ,  ses  manières,  ses  talens  et  l'éten- 
(ju'il  donna  comme  la  traduction  due  de  ses  connaissances  l'avnient 
d'une  tragédie  retrouvée  d'Ks-  rendu  cher.  Connue  lord  B3'- 
chyle.  Personne  n\ivait  en  eiret  ion,  Shelley  dédirait  mourir  jeu- 
une  connaissance  plus  parfaite  des  ne,  et  ce  fut  à  peu  près  le  seul  de 
jïoètes  dramatiques  grecs  que  ses  \oeux  que' le  sort  exauça.  Il 
Shelliîy  ;  c'étaient  avec  IMaton  ses  aimait,  aius^quc  son  ami,  à  l'ain; 
auteurs  favoris,  et  il  en  parlait  des  courses  eu  mpr,  et  11  périt 
toujours  comme  des  plus  admi-  dans  un  de  ces  voyages  à  l'âge  de 
râbles  modèles  de  style,  en  poésie  29  ans,  entre  Livourne  et  Lericé, 
et  en  prose.  Pendant  un  séjour  à  le  bateau  ouvert  dans  lequel  il  sV- 
JVome  ,  au  milieu  des  ruine>  cmu-  tait  embarqué  ny:i\M  ,  dit-on,  cha- 
vertes  de  fîtuirs  des  bains  de  Ca-  viié.  On  ne  retrouva  son  curps 
racaila,  il  mit  en  tragédie  l'his-  que  quinze  jours  après,  et  il  fut 
toire  des  Cc«c/,  et  lord  Byron  pré-  brftié  ,  selon  le  désir  qu'il  avait 
ferait  cet  ouvrage  à  la  plupart  des  souvent  exprimé.  Lonl  IJyr(»n  ^ 
tragédies  modernes.  Aprrs  avoir  fidèle  :\  remplir  l'ollice  d'exécu-^ 
passé  quel(|ue  temps  à  Naples,  teur  testamentaire  et  les  devoirs 
Shelley  se  fixa  enfin  avec  sou  ai-  de  l'amitié, '])résida  à  cette  triste 
niable  toujpagne  euToseuie.  Ca-  cérémonie.  Les  cendres  du  jeun«î 
lomiiié  en  Angleterre. oiV se;.-,  écrits  jmète  ,  qui  avait  gorilé  si  peu  de 
et  sa  personne  étaient  en  butte  à  tranquillité  et  de  bonheur  Sur  la 
des  attaques  journalières,  aban-  terre,  furent  ensuite  déposées  prè"» 
donné  de  sa  famille,  éjirouvant  des  restes  de  son  ami  Keal>«, 'dîiiis' 
souvent  des  be-^oins,  et  iiiartvr  le  cimetière  situé  près  de  !{•  pyra- 
d'une  infirmité  douloureuse,    il  mile  d-    ('aïrts'Sextlis ,  A  AOinc. 


"  Cq  lii'ti  esl  si  hcaii ,  avait  dit 
Slirllcv,  rjti  il  fi  raie  presque  iiiiinr 
ht  mort.  ')  Eiil!ii;iiï'ia.-;tc  de  bonne 
l\)i ,  cet  Iiomnic  exlrnordiniiire  é- 
l;iil  dominé  par  une  idée  fixe, qu'il 
;n;iil  iidopléc  dès  sa  jeunesse.  Il 
<  l'iiyail  à  !a  perlectibililé  presque 
infinie  de  l'e,«pé<  e  humaine  ;  il 
préJi.'^ail  un  nouvel  h'^c  d'or,  dans 
le.que!  tontes  les  croyances  et  Ions 
les  5yslèuu:s  des  hommes  seraient 
réunis,  où  toutes  les  incerlitudes 
(!isparaîtraient;nn  âjje  d'or  qui 
délivrerait  ses  semblables  des 
«.baîn-'^s  imposées  par  le  despo- 
lisiiie  n\i  la  superstition ,  et  dans 
le.quel  «  lâmc  humaine,  de  sou 
tiônc  (îtaccessible  à  la  crainte,  ne 
s'humilierait  point  devant  une 
jMiissance  inconnue.  »  L'objet  de 
toute  la  vie  et  de  tous  les  ouvra- 
i^es  de  Sîiclley  semble  avoir  été 
de  dévelopiïcr  les  moyens  d'at- 
teindre à  une  réforme  qu'il  croyait 
nécessaire  ;  et  quelque  erronés 
ou  visionnaiies  que  doivent  pa- 
raître ce5  iTioyens  dans  Télnt  ac- 
tuel do  la  civilisation,  soîi  esprit 
exailé  ne  formait  d'autres  vœux 
que  pour  le  perreclionnemcnt  de 
la  société  et  îe  bonheur  des  hom- 
m::s.    ' 

SHIPLEY  (sir Charles),  jrou- 
v^'rneur  de  la  Grenade,  où  cet  of- 
ficier distinp;ué  mourut  en  i8i4» 
dans  la  Sc)"  année  de  son  âge, 
était  major- général  et  le  pJus 
ancien  colonel  du  génie  :  ce  fiit 
dans  ce  corps  qu'il  reçut  son  bre- 
vet d'officier  à  l'âge  de  i4  f»ns.  Il 
passa  trente-cinq  ans  de  son  ho- 
norable carrière  éloigné  de  sa  pa- 
trie., .Sir  Charles  Shjpley  avait  oh- 
tenu  plusieurs  l'ois  des  mentions 
honoi'ables  de  la  chambre  des 
communes,  pour  ses  nombreux 


sni 

et  importans  «crvicc?.  Ddus  Tex- 
pé<lilion  rontre  la  Giiad(  loupe,  il 
commanda  en  second  sous  les  or- 
dres de  sir  James  Leilh.  Comme 
ingénieur,  sir  (yharle?  Shipley  a- 
vait  beaucoup  de  science  et  d'ha- 
bileté; comme  militaire,  sa  bra- 
voure, son  zèle  et  son  activité 
étaient  au-dessus  de  tout  éloge. 
Comme  citoyen,  il  a  toujours  mé- 
rité l'estime  et  l'amitié  de  tous 
ceux  qui  l'ont  connu.  Il  a  laissé 
trois  filles.  Lady  Slupley,  morte 
en  1820,  avait  obtenu  ,  il  y  a  bien 
des  années,  par  les  efforts  les  plus 
héroïques,  l'élargissement  de  son 
mari,  prisonnii  r  en  France. 

SIMON  DE  LA  MORTIÈRE 
(le  chevalier),  colonel  d'état-ma- 
jor, et  premier  aide-de-camp  du 
maréchal  duc  deTrévise,  était  ca- 
pitaine, an  mois  d'avril  1702» 
lorsque  le  désir  de  concourir  d'u- 
ne manière  active  à  la  défense  de 
la  patrie,  le  fit  renoncer  aux  pré- 
rogatives de  son  grade,  pour  en- 
trer, en  qualité  de  sous-lieute- 
nant, dans  le  ci-devant  régiment 
d'Auvergne,  devenu  7"*  d'infa'î- 
teiie  légère,  qui  déjà  se  trouvait 
en  présence  de  l'ennemi.  L<;  dé- 
vouement de  cet  onicier,'et  le  sa- 
crifice qu'il  faisait  à  sa  patrie,  fu- 
rent appréciés  p:ir  le  général  en 
chef  Rellermanu,  et  lui  valurent  le 
grade  de  lieutenant  peu  de  ttnnps 
après.  Au  combat  de  Torfou,le  19 
septembre  179J,  les  Vendéens  qui 
ne  laisaient  alors  aucun  prison- 
nier, avaient  repoussé  l'avant- 
garde,  commandée  par  Rlèber, 
malgré  les  prodiges  de  valeur  de 
ce  général,  et  des  braves  qui  l'ac- 
compagnaient. La  brigade  Yi- 
menx ,  dont  le  lieutenant  Simon 
faisait  putio,  reçut  l'ordre  de  ve- 


S1.U  SIM  4": 

IHT  se  joindre  à  l'avanl-ganle  :  dès  capitaine  ,  ne  faisait  point  pariio 
qu'ellti  parut,  le  cri  £/i  aca/i// par-  de  ces  bataillons  ;  mais  un  de  t^rs 
li  du  premier  Iciiaillon  du  81°"  ré-  amis  ,  aussi  capitaine  ,  père  d'une 
ginieiil,  se  prolongea  sur  toute  la  ramille  nombreuse  qui  n'a  de  res- 
ligne.  La  brigade  s'ébranle,  Ira-  source  qu'en  lui ,  est  destiné  à 
\erse  un  marais  faiigetix,  enirc  s'embarquer.  51.  Simon  s'olFse 
dan?  le  village  où  elle  balaie  l'en-  pour  le  remplacer,  et  n'y  parvient 
nemi,  avec  une  impétuosité  qui  pas  sans  peine.  La  Dellone,  ài>v>id 
ne  lui  donn»;  pas  le  temps  de  se  re-  de  laquelle  fn  trouvait  le  capital - 
connaître.  M.  Simon  qui  avait  ne  Simon,  cssuva  bientôt  un  com- 
parlicipé  à  ce  mouvenienl  propo-  bat  terrible,  et  l'ut  forcée,  après 
sa  au  capitaine  Teste,  de  se  por-  avoir  perdu  tous  ses  nirtts,  d'amc- 
ter  imntédialeTiient  sur  la  roule,  ner  son  pavillon;  M.  Simon  lut 
avec  qiselqiies  liommcs  de  bonne  conduit  sur  les  pontons  de  l'An- 
V(donté,  aliu  de  couper  la  retraite  gîelcrre.  Vax  février  1800,  il  coiu- 
aux  Vendéens.  Ils  partent  au  pas  n)an(lait  dans  les  départcmens  de 
de  Course,  suivis  d'une  poignée  l'Ouest,  conj(jintcnient  avec  Fa- 
de liraves,  qui  tous  sont  tués  ou  verot  ,  l'avant-gurde  du  généra! 
blessés  avant  iParriver  au  but  dé-  Merle.  A  la  hauteur  d'une  chajtel- 
siré ,  que  les  deux  olfieiers  allci-  le.  prés  de  Mauves, on  reinonlie 
gnent  seuls.  A  rinslaut  une  fusil-  uu  poste  ennemi,  et  bientôt  iiui^ 
iade  terrible  est  dirigée  cijntre  vive  fii.si!lade  s'iîugage.  Le  ca])i - 
eux;  une  pluie  de  feu  les  couvre,  taine  Simon  à  la  tête  de  sa  Irotipe, 
mai»  !e  danger  qui  les  menace  ne  dans  un  chemin  creux,  voit  sur 
lait  qu'ajoutera  leur  courage.  Ils  la  hauteur  un  soldat"  qui  rajuste; 
opposent,  en  rij>o.stant  avec  leurs  bien  qu'il  on  soit  séjhiré  par  un 
carabines  cl  leurs  pistolets,  la  fossé  fuurré  de  bioussaill(;s',  il 
meilleure  contenance  ,  lorsque  paie  d'andaco,  dirige  la  poiiile  ;Ic 
Te?l<;,  frappé  d'une  bulle,  tond)e  son  sabre  vers  ce  soldat,  et  lui  cr!;- . 
A  quel(|ues  pas  de  »wn  intrépide  d'une  v»»ix  forte  :  •  Si  tu  tires,  tu 
lieutenant  q»i'U  apj»ellc  à  son  se-  es  mort.  »  Le  Ion  dont  c<:s  piro- 
otMirs.  Celui-ci  y  voie.  Tandi.s  qu'il  les  furent  proMoncecs  intimida  tel  • 
j>rodiguaît  ses  soins  au  com[ia-  Icment  le  Vendéen  qu'il  ne  lir.i 
^ofu»  de  su  valeur,  l'ennemT  vive-  pas,  »,'t  la  présence  d'.,>pfit  du  lu.t- 
inisnl  poursuivi  COJilihuait  du  ve  capilaiue  Simon  lui  i>auva  la 
iriîr  l'Eure  essuyer,  dans  j>a  retraite  vie.  Il  fil  avec  distinction  la  plu- 
précipilée,  la  dilcharge  de  loute  part  des  eunipagnes  qui  eurent 
sa  mou.<(quelerie.  A  force  de  »oins,  lien  juscpi'en  i8i/|,  et  parvint  an 
il  i.ippelj  bOn  capitaine  à  la  vie  au  grade  de  cotunel.  Il  reçut  le  i(i 
moment  où  la  victoire  se  décla-  j.uivier  de  cette  année,  le  com- 
laiteu  faveur  des  républicains,  mandement  delà  place  de  Lau- 
liu  I7<)8,  la  S»"*  deud-brigade  fui  grès.  Cette  ville  m.nnptait  ab^olu- 
ch  ngée  de  fournir  d«:ux  bataillons  ment  de  (oui  ce  qui  était  néoessai- 
pour  l'expédition  d'Irlande,  sou»  re  à  sa  défense,  aucun  ouvragi; 
l.».  ordres  du  général  Hardy;  M.  n'y  était  terminé;  elle  avait  \\i'> 
'jiii  vcj.ait  J'Olic    nommé  caiio^:?;  Uiuis  poiul  Je  v.aao;nn(.  1  <, 


:^ois 


SLM 


]><)iiil  (le  muiiilions ,  jioinl  de  vi- 
vres :  eiinn  t^a  garuison  >e  coiiipo- 
.<iiit  (le  quarante-huit  grenadiers  et 
chasseurs  delà  vieille-garde,  et 
de  vingt  conscrits  du  i53°"  régi- 
ment d'infanlerie.  Il  fallait  donc 
avec  soixante-quinze  baïoiineltes , 
garder  cinq  portes ,  des  brèches 
praticables,  et  une  demi-lieue  de 
développement  intérieur.  L'em- 
pereur, trompé  sur  l'état  des  for- 
ces qui  se  trouvaient  dans  la  place, 
et  sur  le  dévouement  de  ses  habi- 
tans,  avait  donné  l'ordre  formel 
de  la  défendre  jusqu'à  l'extrémité. 
La  nuit  du  16  au  17  fut  employée 
par  le  colonel  Simon  à  faire  ses 
dispositions  ;  il  établit  des  postes, 
organisa  un  conseil  de  défense,  et 
se  prépara  à  la  plus  vigoureuse  ré- 
sistance. Dès  sept  heures  du  ma- 
tin quarante  mille  autrichiens  pa- 
rurent sous  les  murs  de  Langres; 
Simon  donna  l'ordre  au  chef  de 
bataillon  Delcet,  commandant  la 
garde  nationale,  de  faire  battre  la 
.'jfénérale ,  en  indiquant  la  place 
Champeaux  pour  point  de  réu- 
nion. Il  était  enjoint  à  ce  com- 
mandant de  venir  ensuite  partici- 
per aux  délibérations  du  conseil 
de  défense,  où  lui  et  le  vieux  capi- 
taine Logerot  furent  les  seuls  des 
babitans  qui  parurent  en  unifor- 
me, et  n'y  furent  que  les  organes 
du  découragement  général.  Le 
colonel  en  leur  adressant  les  plus 
vifs  reproches,  essaya  en  vain  de 
leur  rendre  quelque  énergie.  11  se 
dirigea,  accompagné  du  lieutenant 
de  gendarmerie  Isgnard ,  sur  la 
place  Champeaux,  pour  y  attendre 
que  la  garde  nationale  se  rassem- 
blilt,  mais  personne  ne  parut.  Les 
tambours  avaient  été  injuriés  par 
les  femmes  de  la  ville.  Des  hoin- 


sni 

mes  J'en  capabUs  d'apprécier 
riionncur  d'être  appelés  à  la  dé- 
fense de  la  patrie,  colportaient  de 
faux  avis  daus  les  difl'érens  poster», 
pour  les  prévenir  que  la  retraite 
était  ordonnée.  Induits  en  erreur 
quelques-uns  de  ces  postes  se  re- 
tiraient lorsque  le  colonel  Simon 
courut  à  eux,  et  les  ramena  aux 
portes  de  la  ville;  quelques  sol- 
dats lui  dirent  :  a  Quoi!  colonel, 
»  vous  voulez  que  ïious  conibal- 
«tionsî  malgré  notre  couriige, 
»,pNOurrons-nous  tenir  contre  toute 
»  une  armée?»  «Grenadiers,  leurré- 
»  pondit-il,  nous  saurons  mourir!» 
Eh  bien,  nous  mourrons!  s'écriè- 
rent ces  braves.  Vers  une  heure 
après  midi,  un  billet  du  général 
autrichien  Fresnel  fut  remis  au 
maire  de  Langres  par  un  paysan. 
Le  colonel  Simon  ne  permit  i>as 
qu'il  fût  fait  de  réponse  à  ce  bil- 
let, et  consigna  aux  postes  le  mai- 
re et  le  paysan.  De  forts  partis  de 
cavalerie  poussèrent,  quelques  ins- 
tans  après,  une  reconnaissance  au- 
tour de  la  ville,  mais  ils  furent 
immédiatement  éloignés  à  coups 
de  fusil.  Alors  le  commandant  lit 
mettre  en  batterie  une  pièce  de 
quatre  :  ce  n'était  qu'une  feinte, 
puisqu'il  n'avait  rien  pour  faire- 
usage  de  cette  pièce.  Aussitôt  mil- 
le voix  s'élèvent  contre  lui  et  sa 
troupe.  En  vain  le  colonel  Simon 
rappelle  que  six  jours  auparavant, 
ils  ont  tiré  sur  un  parlementaire 
ennemi:  qu'ils  n'ont  d'autre  res- 
source que  de  courir  aux  armes  et 
de  faire  bonne  contenance,  afin 
d'obtenir  une  capitulation  hono- 
rable. Le  nombre  des  nui  lins 
augmente,  une  partie  d'entre  eux 
commence  déjà  à  démolir  le  mur 
d'une  poterne,  et  le  colonel  est 


SIM 

if      dhligt;  d'employer  la  force  {lOiir 
P    Jus  contraindre  à  se  reliier.  A  trois 
heures  on  reçut  un  nouveau  billet 
adressé  au  ninire ,   de  la  part  du 
j^énéral  autrichien,  conile  de  Oyu- 
liii  ;  le  colonel  Simon  écrivit  au 
lias  du  billet  même  :  «  Un  ancien 
"Colonel    commande   dans    cette 
n}dace;   il  a  avec  lui  pour  gar- 
»  oison,    des     grenadiers    de     la 
X  vieille    garde;    il    se    défendra 
njusqu'A  la  dernière  extrémilé.  >i 
Une  heure  après,  un  quart  de  di- 
vision   ennemie    prit    position  à 
7)00  toises  de  la  ville,  et  dressa 
«les  batteries  qui  commencèrent  à 
battre   la   place;   plusieurs   esca- 
drons de  cavalerie  s'en  approchè- 
reiil;  enfin  trois  colonjies  débou- 
chèrent en  même  temps  par  di- 
vers points.  Le  baron  de  Selbilz, 
major  au  régiment  de  Kleneau, 
chevau-légers,  se  présenta  à  qua?- 
tre  heures  et  demie  en  parlemen- 
taire. On  t'introduisit  un  bandeau 
sur  les  yeux,  auprès  du  comman- 
dant français,  qu'il  somma  de  ren- 
dre la  place  à  discrétion  :  «Je  ne 
la  rendrai  qu'à  des  conditions  ho- 
norables, »  et  sur-le-champ  il  se 
mit  à  rédiger   les  articles    d'une 
capitulation  qui  fut  transmise  au 
général  Gyulai.  Celui-ci  renvoya 
son  ultimatum  que  le  brave  colo- 
nel  fut  en  quelque  sorte   obligé 
d'accepter  à  brûle-pourpoint;  mais 
il  avait  fait   tout  ce    qu'il  fallait 
pour  l'honneur.  Le  comte  Gyulai 
cuira    dans  la    ville  ù  la  tète    du 
(  orps  d'armée  qu'il  commandait. 
A  la  joie  qu'il  maiirî«ait  à  peine, 
il  était  facile  de  voir  qu'il  s'imagi- 
nait avoir  fait  mettre  ba-  les  ar- 
mes à  une  division  de  la  vieille 
;;.irde.  11  revint  eo  elTel  dilTicile- 
tneiit  de  sa  surprise,  lorsque  ayant 


SUR  fiZç) 

demandé  où  était  le  reste  de  1'' 
garnison,  le  colonel  Simon  l'assu- 
ra qu'il  la  voyait  toute  entière  dans 
ses  soixante-quinze  hommes.  Le 
lendemain  il  fut  présenté  au  prin- 
ce de  Schwartzemberg  ,  <|ui  , 
instruit  de  sa  bravoure,  le  rerut 
avec  la  plus  grande  distinction. 
Quoique  c^tte  glorieuse  défense 
n'ait  pas  été  couronnée  d'un  plein 
succès,  elle  eut  néanmoins  K:  ré- 
sultat d'empêcher  dans  la  journée 
du  17  janvier,  la  jonction  de  Ww' 
mée  du  prirjce  de  Schwartzem- 
berg avec  celle  que  commandait 
le  prince  de  Wurtemberg,  et  de 
préserver  la  ville  de  Langres  du 
pillage  auquel  elle  aurait  été  né* 
cessairement  exposée,  si  quarante 
mille  hommes  l'eussent  empoilée 
de  vive  force.  Le  chevalier  Simon 
de  la  Mortière  a  été  admis  i\  la  re- 
traite depuis  la  restauration. 

SU  REM  AIN  (FrançoisAlexan- 
DBE  de)  ,  né  à  Auxonne  le  lO  juil- 
let 1755,  d'une  famille  noble  de 
la  ci-devant  province  de  Bourgo- 
gne, olïicier  de  génie  A  l'époque 
de    la  révolution,   devint   maire 
d'Auxonne  en  1790,  et  vice-pré- 
sident de  l'administration  du  dis- 
trict de  Saint-Jean-de-Losne.  On 
l'arrêta,  en   I705,  comme  noble 
et  parent  d'émigré,  à  Luxeuil,  où 
il  était  à  prendre  les  eaux.  Un  ma- 
nuscrit trouvé    dans   son    porte- 
feuille, intitulé  :  Reflexions  sur  la 
nouvelle  constitution   donnée  à  la 
Franee ,   dans  lequel  il  attaquait 
fortement  l'acte  constitutionnel, 
le  fit  conduire  à  Paris  devant  le 
tribunal  révolutionnaire,    et   fut 
cause  de  sa  mort;  M.  de  vSure- 
main  périt   le  ai   mai  1795.  Il  a 
laissé  trois  fds,  dont  l'un  est  mort 
lieutenant  de  vaisseau;  les  deux  uo 


:|40 


TAL 


trc8  servonl  dans  la  gai  ùc  royale. 

SUllEMAIN(jEAN-nAPIISTEDE), 

liciitenant-gériéral,  ficicdu  pré- 
cédcul,  était,  au  coiniTiencenicnt 
de  la  révoliilion.  capitaine  au  i" 
régiment  d'arlillcrie  à  pied.  Il 
émigra  en  1792,  cuira  en  ij^^fau 
service  de  Suède  ,  où  il  devint,  un 
1811,  général  d'artillerie  et  pre- 
mier aide-de-camp  du  roi  Char- 
les XïII.  M.  de  Suremaiu  a  lait 
avec  l'armée  suédoi.-e, soit  comme 
officier  supérieur,  soit  comme  gé- 
néral, les.camp.'igues  de  Finlande, 
d'Allemagne  et  de  Norvège,  el  a 
commjindé  en  chef  le  siège  de 
Frédericshall.  Ce  général  ayant 
eu,  eu  i8»5,  quel'|ucs  démêlés 
avec  le  prince  royal  aujourd'hui 
rai  Utt  Suède  {wj.  Berisadotte  ), 
donna  b  démir^siou  de  toutes  ses 
places,  obtint  un  congé  honovahlc 
et  partit  pour  Gaïul,  où  se  trou- 
vait le  rai  Louis  XVI II ,  près  du- 
quel étaient  déjà  ses  deux  neveux, 
l'eu  après  la  seconile  restaura- 
tion ,  il  fut  nommé  lieuleuaut-gé- 
néral  et  lieutenant  de  rui  à  Metz; 
ila  depuis  demandé  et  obtenu  sa 
retraite.  On  dit  que  M-  de  Sure- 
»nain  a  rédigé  des  mémoires  eu- 
vieux  sur  les  principaux  événe- 
«jens  arrivés  en  Suéde  pendant  le 
long  séjour  qu'il  y  a  l'ait. 

TALLEYRAÎSD  (Charles  Mau- 
rice    DE    PÉRIGORD,     PRINCE    De). 

L'histoire  complète  de  M.  de  Tal- 
leyrand  serait  rhiî^toire  secrète  de 
notre  époque.  Non?  ne  nous  en- 
gagerons pas  à  remplir  cette  tâche 
immense  ;  c'est  de  M-  de  Talley- 
land  lui-même  que  l'Europe  doit 
attendre  les  révélations  nécessai- 
res à  l'accomplissement  d'une  œu- 
vre aussi  compliquée  qu'elle  est 
importante.  Issu  d'une  famille  an- 


T.VL      . 

cii.niu;.  qui  régna  dans  le  moyen- 
age  sur  le  Qutrcy,  iVI.  de  Talky- 
raud  eut  pour  aïeule  nrKiteruclle 
cette  célèbre  princesse  de,s  Lr- 
sins,  qui  joua  im  si  giiirul  rôl«: 
j)endaiil  la  guerre  de  la  succession 
à  la  (our  de  Philippe  V.  On  sait 
que  toutes  les  ressources  de  l'es- 
prit, asservies  aux  manœuvres  de 
l'ambition,  élevèrent  au  faite  du 
pouvoir  Celle  favorite,  exemple 
fameux  de  l'inconstance  des  cours. 
M.  de  Tallryraud  sut  profiler  de 
celle  leçon  uiaternelle,  et,  à  force 
d'esprit,  de  taL-nt  et  d'adresse, 
on  le  vil  toujours  maître  de  gou- 
verner à  son  gré  sa  destinée,  et, 
plus  d'une  fois,  celle  des  empires. 
Il  naquit  à  Paris  en  1754.  On  le 
destina  de  bonne  heure  à  l'état 
ecclésiastique,  et  il  entra  au  sé- 
minaire de  Saint -Sulpice.  Des 
railleries  fines,  un  commerce 
plein  de  séduction,  l'esprit  des 
affaires,  la  péaélratiou  des  hom- 
mes el  de  leurs  faiblesses,  ne  tar- 
dèrcnit  pas  à  f;iire  remarquer  l'ab- 
bé de  Pérjgord  ,  qui  avait  à  peine 
vingt  six  ans,  lorsqu'il  fut  nommé, 
en  1780,  agent  général  du  clergé. 
Les  taluns  admiiiistrilifs  ne  furent 
pas  les  seuls  qu'il  déploya  darw 
ces  fonctions:  lîvêijue  d'Aulun , 
lorsque  la  révolution  éclata,  il 
avail  déj;'»  laissé  apercevoir  celte 
aptiliide  à  saisir  les  fils  secrets  des 
grandes  affaires  ,  et  Mirabeau  , 
dans  sa  correspondance  secrète 
avec  Berlin,  le  signalait  comme 
un  dos  esprits  les  plus  déliés  et  les 
plus  puissans  de  l'époque.  Ce  ju- 
gement est  devenu  une  prophétie, 
A  peine  M.  Tallejrand  eut-il  fait 
les  premiers  pas  dans  la  carrière 
politique,  qu'on  y  reconnut  la  su- 
périorité de  son  esprit.  Elu,  ea 


'^-     *■, 


tnTttft/  l/l/uc  . 


fi-emu  i/ci .  fl  Sfii/ii 


TAL 

i^8f),  député  du  clergé  de  son 
diocèse  aux  états- généraux  ,  il 
pressentit  de  bonne  heure  ,  ou 
plutôt  il  dirigea  et  bâta  le  mou- 
vement généra!  des  esprits,  et 
Vf)la,  dès  le  19  juin  de  la  même 
année,  en  faveur  de  la  réunion 
ÙH  clergé  aux  communes  qui  ve- 
naient de  se  constituer  en  assem- 
blée nationale.  Ce  fut  lui  qui, 
dans  la  séance  du  7  juillet,  pro- 
posa de  déclarer  nuls  les  mandats 
impératifs,  de  n'admettre  aucune 
protestation  à  ce  sujet,  et  d'im- 
poser aux  bailliages  l'obligation 
de  se  soumettie  aux  décrets. 
Nommé,  le  lendemain,  membre 
du  comité  de  constilutioD ,  il 
n'hésita  pns  à  proposer  la  sup- 
pression dei  dîmes  du  clergé,  et 
demanda  en  outre  qu'il  fftl  décla- 
ré que  ce  vote  avait  été  unanime. 
Membre  du  second  comité  de 
constitution,  après  la  dissolution 
du  premier,  il  prit  encore  l'initia- 
tive dans  k'S  mesures  les  plus  im- 
portantes de  l'assemblée  ,  et  pré- 
senta un  rapport  et  un  projet  de 
décret  sur  l'application  dos  biens 
du  clergé  au  houiagement  du  tré- 
sor, public.  Sourd  aux  vaines  ré- 
clamations de  ce  corps  ,  et  parti- 
culièrement A  celles  des  prCtres 
du  diocèse  d'Autun ,  qui  écrivi- 
rent à  l'assemblée  pour  désavouer 
des  principes  trop  élevés  pour 
eux,  M.  de  Talleyrand,  toujours 
dans  le  secret  des  variations  de 
l'esprit  public  «  toujours  poussé 
par  le  mouvement  général,  et 
s'y  allaelunt  avec  assee  d'adresse 
pour  le  diriger  vers  des  réformes 
si.tlutiiires,  fut  nommé  président, 
le  16  février  1790.  Le  premier,  il 
proposa  d'établir,  sur  nn  sys- 
tème  uniforme  ;  la   théorie    des 


TAL 


4|i 


poids  et  mesures;  il  présenta, 
dans  les  premiers  jours  du  mois 
de  juin  ,  un  projet  de  décret  à 
ce  sujet  f  et  fit  aussi  décréter  de 
quelle  manière  serait  célébi'ée  la 
fédération  du  i4  juillet.  Ainsi, 
mêlé  à  tous  les  évènemens  ma- 
jeurs, il  acquit  une  grande  popu- 
larité, et  fut  vivement  applaudi 
par  le  peuple  dans  une  cérémonie 
où  l'on  célébrait  l'anniversaire  de 
la  constitution  de  la  chambre  des 
communes  en  assemblée  natio- 
nale. On  le  vit,  pendant  la  céré- 
monie religieuse  de  la  fédératiou 
de  1790,  officier- ponlificalemcnt 
sur  l'autel  de  la  Patrie,  assisté 
des  abbés  Louis  et  Desrenaudes. 
Un  grand  nombre  de  rapports  l'i 
l'assemblée,  sur  l'état  des  finan- 
ces, témoignèrent  de  son  habileté 
à  faire  l'application  des  théories 
politiques.  L'un  des  premiers,  il 
prêta  serment  d'obéi,>sance  à  la 
constitution  civile  du  clergé,  et, 
par  une  adresse  du  23  décembre 
1790,  il  en  instruisit  les  eci  lé- 
siastiques  du  diocèse  d'Autun , 
qu'il  invita  ;\  suivre  sou  exemple. 
Assisté  des  évêques  de  Lydda  et. 
de  Babylone,  il  sacra  les  premiers 
évêques  constitutionnels,  et  fut 
excommunié  par  le  pape  Pie  VL 
Les  évènemens  se  pressaient,  et 
la  marche  de  l'esprit  public  so 
portait  rapidement  vers  la  réor- 
ganisation comi)lète  de  toutes  les 
instilutions,  quand  iM.  de  Talley- 
rand se  démit  de  son  évêché,  et 
fut  élu  n)end)re  du  directoire  du 
département  de  Paris.  Mirabeau 
mourant  déposa  ses  secrets  dans 
le  sein  d'un  ami  qui  avait  parla- 
péi  s<;rvi  et  peut-être  modifié  ses 
dernier,';  elVorts  et  ses  tlernieh'». suc- 
cès dans  la  carrière  politicpie.  €'«•» 


4'|3 


TA  L 


lai I  le  sort  de  M .(]«  Talleyraïul  ih;  se 
Iruuver  coiislaiiinieiit  à  la  têletlcs 
idées    {lorninantes ,    sacis   en   ar- 
borer la  bannière.  Nommé,  avec 
M.  le.cotule  de  La  Marck,  exécu- 
teur testarnenlaire  de  Mirabeau, 
ce  lui  lui  qui  vint  lire  à  la  tribu- 
ne l'opinion  de  ce  grand  homme 
sur  le  droit  de  tester.    Il   soumit 
ensuite  et  discuta  un  projet  d'é- 
ducation  publique  et   nationale, 
dont  les  vues  éminemment  phi- 
losophiques attachent  à  son  nom 
un  écl^t  immortel.   Il  avait  con- 
çu, (les  cette  époque,  l'idée  d'un 
institut  des  sciences  et  des  arts  , 
qui  ne  fut  créé  que  cinq  ans  après 
par  un  autre  gouvernement.    Il 
lit  adopter  plusieurs  dispositions 
pour    l'encouragement   des  arts. 
Dans  les  [)remiers  mois  de  1792, 
il  se  rendit  eri  Angleterre,  char~ 
gé    d'une    mission    secrète     sur 
laquelle  on  fit  beaucoup  de  con- 
jectures, et  qui  semble  avoir  eu 
pour  but  l'établissement  des  deux 
chambres  en  France.  D'abord  très- 
bien    accueilli    par    le   ministère 
anglais,  il  commençait  à  s'enten- 
.  dre  avec  M.   Pitt,  quand  un  ac- 
cord singulier  de  tous  les  partis 
arrêta  ses  démarches  et  neutrali- 
sa ses  efforts.  En  même  temps  que 
les  jacobins  de  France  le  décré- 
taient d'accusation  comme  un  é- 
rnissaire  de  la  cour,  les  émigrés 
d'Angleterre  le  signalaient  com- 
me un  émissaire  des  jacobins;  et 
le   ministère   anglais  lui   donnait 
ordre,  ainsi  qu'à   M.  de  Chauve- 
lin,    ambassadeur   accrédité,  de 
quitter  les  îles  britanniques  sous 
vingt -quatre    heures.    Ce    fut, 
nous    le  crojfons    du   moins ,    le 
seul  échec  diplomatique  que  l'ex- 
trême irritation  des  esprits  ait  fait 


TAL 

subir  à  M.  de  Talleyrand.  Il  écri- 
vit vaineipent  pour  se  justifier, 
et  partit  pour  les  États-Unis,  où 
il  s'occupa  de  spéculations  com- 
merciales.   Les     passions    com- 
meuçaietit  à  se  calmer  en  Fran- 
ce ,     lorsqu'il     sollicita    la    per- 
mission    d'y    rentrer.     Le    rap- 
port de  M.  J.  Chénier,  etles  vives 
instances   de  madame   de  Staël, 
lui    en    rouvrirent    les     portes. 
En  septembre   1795,  la  conven- 
tion cassa    le  décret  lancé    con- 
tre lui,  et  bientôt  on  le  vit  ûgurer 
parmi    les  fondateurs   du  cercle 
constitutionnel  qui  s'établit  à  l'hô- 
tel de  Salm  à  Paris,  en  1797.  Il  y 
lut  un  mémoire  sur  les  avantages 
que  procurerait  à  la  républiciue 
française  rétablissement  de  colo- 
nies   sur   les    côtes   de   l'Afrique 
jnaintenant  occupées  parles  puis- 
sances barbaresques,  et  un   mé- 
moire, aussi  remarquable  par  les 
vues  que  par  le  style,  sur  le  com- 
merce des  Etats-Unis.  On  ne  tar- 
da pas  à  s'apercevoir  que  M.  de 
Talleyrand  était  à  Paris  ;  son  in- 
fluence toujours   secrète  et  tou- 
jours puissante  se  faisait  sentir; 
nommé,  en  juillet  (1797),  après 
le     18    fructidor,    ministre   des 
relations    extérieures,   il    se    vit 
en  butte  aux  accusations  de  tous 
les  partis  qui  redoutaient  sa  pré- 
sence et  connaissaient  son  pou- 
voir. Ce  déchaînement  produisit 
une  suite  de  pamphlets,  de  saty- 
res et  d'épigramiues, auxquels  M. 
de  Talleyrand  répondit   par  des 
Ectaircissenieiis  donnés  à  ses  con- 
citoyen» ,  et    par    sa  démission, 
donnée  vingt-cinq  jours  après  la 
publication    de    cette    brochure. 
Cette  conduite  ne  désarma  point 
ses  ennemis.  Dénoncé  à  la  tribu- 


TAL 

ne  lies  jacobins  on  1 799,  partir»  cer- 
tain Muqiiet;  à  la  tribun»;  des  cinq- 
cents  par  Briot,et  par  Lucien  Bo- 
naparte ;  dans  dos  pamphlets  par 
Charles  Lacroix,  qu'il  avait  rem- 
placé au  ministère  des  affaires  ex- 
térieures ;  enfin,  par  Quatremère 
Uijonval,  il  se  vit,  avec  un  im- 
perturbable sang-froid  ,  harcelé 
de  toutes  parts,  jusqu'au  moment 
où  le  général  Bonaparte  revenu 
d'Egypte,  conçut  le  hardi  projet 
de  changer  la  forme  du  gouver- 
nemtMit,  et  de  se  mettre  à  la  tête 
<les  aflaires  publiques.  Il  est  vrai- 
semblable que  l'audace  du  jeune 
héros  des  pyramides,  tut  puissam- 
ment secondée  j>ar  l'adresse  de 
l'héritier  de  Mirabeau.  Il  fut  d'a- 
bord question  de  le  placer  avec 
Cand)acérés  au  directoire ,  en 
remplacement  du  général  Moulin 
et  <le  Gohier,  pour  en  rendre  lu 
renversement  plus  facile  :  Sieyes, 
uu(|iiel  on  s'adressa  dans  cette  cir- 
constance, ne  fit  rien  pour  que 
M.  de  Talleyrand  devînt  son  col- 
lègue. Alors  fut  résolue  la  révo- 
lution rlu  18  brumaire,  dont  la 
force  des  armes  fut  l'instrument 
visible,  etdofit  M.  de  Talleyrand, 
)tar  des  préparations  habiles,  et 
l'emploi  des  combinaisons  d'un 
esprit  toujours  fertile  en  ressour- 
ces, fut  l'arlrsan  le  plus  actif.  Rap- 
pelé, fb's  le  premier  frimaire, par 
b'S  consuls  prOTîsoires,  au  minis- 
tère des  affaires  étrangères,  et  con- 
firmé le  4  nivôse  dans  ses  fonc- 
tions par  le  général  Bonaparte 
«levenu  premier  consul,  il  s'as- 
socia à  toutes  les  pensées  secrètes 
du  nouveau  gouvernement,  et  de- 
vint l'âme  de  toutes  les  négocia- 
i'.nns.  (>elles  qui  s'entamèrent  a- 
vvc  l'Autriche  i\  Lunéyjllc  et  qui 


TAL 


H'w 


furent  suivies  de  la  paix,  avec 
l'Angleterre  à  Amiens,  et  succes- 
sivement avec  toutes  les  puissan- 
ces, n'eurent  pas  d'autre  agent 
que  lui.  Un  bref  du  pape  Pie  VU 
avait  rendu  M.  de  Talleyrand  à  la 
vie  séculière;  il  épousa  madame 
Grandt,  qu'il  avait  connue  à  Ham- 
bourg, à  son  retour  des  États- 
Unis.  Admise  à  la  cour  naissante 
du  premier  consul  ,  cette  dame 
ne  paraît  pas  avoir  joui  de  la 
même  faveur  que  son  époux. 
La  lutte  de  Fouché  et  de  M.  île 
Talleyrand,  dont  l'habileté  rivale 
se  disputait  un  pouvoir  secondai- 
re ,  fut  à  la  fois  vive  et  secrète  : 
M.  de  Talleyrand  l'emporta  long- 
temps sur  son  adversaire.  Fou- 
ché mit  sous  les  yeux  du  premier 
consul  la  minute  littérale  d'un 
traité  secret  aveO  Paul  1",  qu'il 
avait  reçue  de  se8  agens  à  Lon- 
dres. Il  espérait  que  cette  pièce, 
qui  n'avait  pu  être  commimiquée 
que  par  le  niinistre  des  relations 
extérieures,  amènerait  la  disgrâce 
de  M.  de  Talleyrand,  mais  il  fut 
trompé  dans  son  attente  :  on  dé- 
couvrit que  celte  minute  avait  été 
soustraite  du  cabinet  où  elle  était 
déposée  ;  et  Fouché  paya  liii- 
'  même  plus  tard  de  sa  disgrâce 
la  tentative  qu'il  avait  essayée. 
Quanti  Bonaparte  échangea  son 
titre  de  premier  consul  contre  ce- 
lui d'empereur,  M.  de  Talley- 
rand fut  nommé  grand-chambel- 
lan de  l'empire,  et  le  5  juin 
1806,  élevé  à  la  dignité  de  prince 
souverain  de  Bénévent ,  il  conser- 
va le  portcrcin'ilc  <lcs  affaires  é- 
trangères.  A  la  fin  de  mars  de. 
cette  même  année,  il  ouvrit  avec 
M.  Fox  des  négociations  pour  lu 
paix,  qui  demeurèrent  sans  ré- 


Wi 


TAL 


suhat.  IVomn,  le  g  aoftl  1807, 
à  la  di^iihé  de  vicc-grand-élec- 
leiir,  il  l'iil  remplacé  dans  son 
ministère  ))ar  M.  de  ÇJinuipa^ny. 
Quand  Na|>oléon  conçut  le  pro- 
jet de  placer  un  membre  de  sa  fa- 
mille sur  le  trône  d'Espagne,  le 
prince  de  Béné  vent  parut  condam- 
ner unt;  entreprise  dont  son  esprit 
clairvoyant  prévoyait  l'effet  né- 
cessaire. L'opposition  du  prince 
irrila  l'empereur,  elles  premiers 
revers  de  nos  troupes  en  aug- 
mentant cette  irritation,  décidè- 
rent la  disgrâce  du  ministre.  Eloi- 
gné des  affaires  el  du  conseil  im- 
périal,  M.  deTalleyrand  se  trou- 
va pour  ainsi  dire  placé  dans,  un 
état  de  surveillance,  où  la  suite 
pi  ouva  que  son  esprit  ne  demeura 
point  inaclif.  A  peine  l'astre  impé- 
rial commençait-il  use  couvrir  de 
nuages,  que  le  prince  de  Bénévenl 
s'occupait  déjà  secrètement  des 
moyens  de  changer  la  politique 
de  l'Europe.  En  vain  l'empereur 
le  ra[)pela  pi  es  de  lui  :  la  tra- 
îne était  ourdie,  et  M.  de  Talley- 
rand  lui-même  n'aurait  pu  >'op- 
poser  t\  l'accomplissement  des 
destinées  qu'iT  avait  préparées, 
de  concert  avec  le  mauvais  génie 
q!ii  enliaîiia  le  chef  de  la  France 
dans  ses  dernièies  expéditions, 
^'ous  passons  ra})idement  sur  les 
événemens  où  nous  ne  saurions 
indiquer  avec  précision  l'inlhien- 
ce  qu'exerça  M.  de  Talleyrand. 
ISonimé ,  le  1"  avril  ibi4i  i'^n 
des  membres  et  président  dti  gou- 
vernement provisoire,  il  gouver- 
-na  la  Fiaucc  jusqu'à  l'arrivée  du 
comte  d'Artois.  L'eiu[)ereur  de 
Knssie  habitait  l'hôtel  du  prince 
dtîBénévent,  qui  dut  exercer  à 
cette  époque  la  plus  haute  in- 
fluence sur  le  soil  de  la  France 


TAL 

cnliére.  Nommé,  le  12  mai  18  i», 
minirtre  des  affaires  étrangères  . 
et  pair  de  France,  le  4  juin  sui- 
vant, sons  le  nofn  de  prince  de 
Talleyrand  ,  il  fut  «:n  voyé  au  cou- 
grès  de  Vienne  ù  la  fin  de  celle 
année,  en  qualité  de  plénij»i*ten- 
liairc  français.  Napoléon,  de  re- 
tour en  France  en  i8i5,  lenla 
vainement  de  rattacher  à  sa  for- 
tune celui  qui  semblait  faire  I.» 
fortune  des  empires.  Miis  trop 
habile  pour  se  fier  à  des  prome.— 
ses  que  la  nécessité  dictait  cl  f)ar 
suite  de  cet  instinct  merveilleux 
dont  il  semble  pourvu,  il  resia 
cette  fois  fidèle  aux  derniers 
sermens  qu'il  avait  faits  :  de  tous 
les  plénipotentiaire?  au  congrès 
de  Vienne  ,  ce  fut  lui  qui  sollicita 
avec  le  plus  il'ardeur  le»  déclara- 
tions du  i5  el  du  25  mars  181  ;i, 
contre  l'empereur  Napoléon.  Le 
prince  de  Talleyrand  rentra  à  Pa- 
ris avec  S.  M.  Louis  XVllI,  et 
reprit,  le  8  juillet,  la  diiecliou 
des  affaires  étrangères  avec  le  ti- 
tre de  président  du  conseil  ;  m;iis, 
l'histoire  recueillera  ce  fait  ho- 
norable, il  donna  sa  démission 
après  trois  mois,  ne  vaulant  pus 
attacher  son  nom  au  bas  d'uu 
traité  dont  les  dispositions  lui  pa- 
rai.-saient  consommer  la  honte  et 
la  ruine  de  la  France.  Le  tiirede 
chambellan,  qu'il  recul  ua  roi, 
le  tint  auprès  li^i  prince  sans  le 
rapino^îicr  des  affaires.  Celle  dis- 
grâce palliée  l'exposa  de  nonvein 
à  de  nomi)reuses  attaques-,  el  ic- 
veil'a  les  bruits  caloumieux  qui 
lui  altribuèrenl  une  pa*rl  acùve 
ù  la  mon  du  duc  d'Enghiea.  Il  ne 
répondit  à  cette  absurde  attaque 
que  par  le  silence  du  mépris.  i\L 
de  Talleyrand  a  lini  par  se  placer 
à  la  lète  Je  lu  noble  opposition  de 


TAL 

la  chambre  drs  pair*.  L'iic  vie  si 
rcinpiic  <le  délaiîs  iinpor'.ntis  et 
si'crcl!*  «'-liippe  nrci'S.sairomosit 
aux  aiueurs  d'une  biographie, 
qui  ne  peuvent  en  dessiner  que 
!&<■  masses  principales.  Si  Napo- 
léon eut  en  partage  le  génie  de 
la  victoire,  M.  de  Talleyrand  eut 
celui  de  la  politique:  et  l'histoire 
n'oflVe  pas  deux  exemples  aussi 
élonnans  de  l'influence  exercée 
sur  les  révolulions  d'une  longue 
époque,  par  les  facultés  d'une 
seuli:  intelligence.  Le  pouvoir 
passa  dans  les  mains  de  M.  de 
Talleyrand,  qui  le  donna,  sans 
le  gjirder,  et  qui  ne  conserva 
pour  lui-mC-mc  que  deux  puis- 
sances supérieures  à  toutes  les 
autres,  celle  de  l'or  et  celle  de 
l'esprit.  Mêlé  sans  danger  à  tou- 
tes les  catastrophes,  planant  tou- 
jours ina|)erçu  sur  les  évènemens 
qu'il  |iréparnit,  mobile  comme  la 
forlune  elle-même,  il  ne  faut  le 
CDUip.ircr  ni  à  Sully,  ni  à  Riche- 
lieu, ni  ù  Mnr.arin,  ni  à  Colbert , 
iii'à  aucun  des  ministres  dont  on 
gardf  le  souvenir.  Il  ne  ressemble 
(|u'à  lui-même,  et  lui  seul  peut 
se  peindre.  Il  est  inutile  d'ajouter 
que  cet  esprit,  dominateur  par 
adresse,  est  délicat,  exercé,  dé- 
lié, fécond  en  saillies  piquantes  et 
eu  railleries  de  bon  goftt.  Nous 
avons  signalé  les  eiTcls  :  l'histoire 
remontera  aux  causes,  et  jugera 
l'homme  en  dernier  ressort. 

TAl.LEYRÉdD  (BAB05  de), 
cousin  du  précédent ,  and)assa- 
deur  i\  Napîes,  en  1789,  murt  dans 
ré'uigration,  père  de 

TALLEYRAND  (Accoste,  com- 
te de),  né  à  Paris,  en  1770,  avait 
suivi  son  père  îi  "Napics.  où  il  re- 
cul avec  ses  frères,  Alexandre  et 


TAL 


4'|5 


Anatole ,  une  éducation  distin- 
guée. Il  rentra  en  France  en 
1800,  fut  nommé  chambellan  de 
Pcmpercur  Napoléon,  et  son  am- 
bassadeur en  Suisse,  fonction 
qu'il  a  continuée  souS  le  roi,  jus- 
qu'en 182:),  époque  à  laquelle  il 
a  été  remplacé.  La  conduite  du 
comte  de  Talleyrand  en  Suisse  a 
été  constamment  appréciée  par 
les  deux  nations,  et  attache  à  sa 
vie  d'honorables  souvenirs.  Nom- 
mé pair  de  France  après  la  secon- 
de restauration,  il  remplit  digne- 
ment, dans  celte  haute  magistra- 
ture, les  devoir.^  d'un  bon  Fran- 
çais et  d'un  homme  éclairé  sur 
les  grands  intérêts  de  son  pays. 

TALLEYRA  N  D  (  Alexandre  , 
BARo:»  de),  son  frère,  né  à  Paris, 
en  177O,  fut  d'abord  destiné  à 
l'état  ecclésiastique,  dont  il  suivit 
les  éludes  dans  le  royaume  do 
Naplcs.  Naturalisé  Napolitain  , 
ainsi  que  son  père,  il  se  crut  obli- 
gé de  servir  sa  nouvelle  patrie  : 
au  moment  du  danger  et  à  l'épo- 
que de  la  déclaration  de  la  guerre 
entre  Naples  et  la  république 
française,  il  prit  parti  dans  l'ar- 
mée napolitaine,  où  il  servit  jus- 
qu'en 1802.  Il  obtint  le  rang  de 
major.  Mai*  la  paix  ayant  rap- 
proché les  deux  pays,  il  profita 
avec  empressement  de  la  loi 
d'amnistie,  et  revint  en  France 
chez    son    frère    Auguste ,    alors 

Eropriétaire  à  la  Firté-Saiul-Au- 
m,  drpartemeMi  du  Loiret.  Il  fut 
nommé  maire  de  cette  commune. 
Ce  fut  là  qu'il  prit  ses  pn;mier3 
dégrés  a<lniiMistratifs.  Au  retour 
de  la  fatnille  royale,  il  fut  nom- 
mé préfet  du  L  tiret.  Les  circons- 
tances étaient  difficiles;  sa  nomi- 
nation date  de  l'cnlrée  de  Mon- 


440 


ÏAL 


sieur,  alors  lieutenant-général  du 
ro3'^aume.  Il  lïil  assez  heureux  ce- 
pendant pour  maintenir  les  habi- 
tans  et  l'armée,  par  sa  fermeté  et 
sa  mofléralion,  clans  la  plus  gran- 
de tranquiUilé.  Pendant  les  cent 
Jours,  il  suivit  le  roi  à  Gand,  en 
reçut  uuG  mission  pour  Vienne, 
et  revint  occuper  sa  préfecture. 
Les  temps  se  trouvèrent  plus  ora- 
geux. Les  Prussiens  lui  deman- 
dèrent une  réquisition  de  quatre 
millions,  qu'il  refusa.  Il  fut  arrê- 
té par  eux  pour  être  conduit  à 
Spandau  ,  et  fut  mis  au  secret 
à  Saiui-Cloud.  Pendant  celle  cap- 
tivité momentanée,  le  roi,  pour 
le  récompenser  de  sa  résistance 
aux  exigences  prussiennes ,  le 
nomma  conseiller -d'état.  Il  re- 
tourna à  Orléans,  et  fut  nommé 
député  du  Loiret  en  181  Set  1816. 
En  1817,  il  fut  appelé  à  la  pré- 
fecture de  Vaucluse,  qu'il  refusa. 
En  1820,  il  fut  nommé  à  celle  de 
l'Aisne,  où  il  a  continué,  jusqu'en 
1822,  à  mériter  l'estime  et  la 
confiance  de  ses  administrés;  il 
convenait  à  ce  déparlement  ainsi 
qu'il  avait  convenu  à  celui  du 
Loiret;  cependant  il  en  fut  ôté 
pour  passer  à  la  préfecture  de 
l'Allier,  où  le  même  motif  ne  lui 
permit  pas  de  rester  plus  d'un  an. 
Le  baron  de  Talieyrand  est,  de- 
puis ce  temps,  en  disponibilité 
administrative.  Il  a  laissé  dans 
ses  trois  préfectures  la  juste  re- 
nommée d'im  homme  de  bien, 
d'un  administrateur  intégre,  la- 
borieux ,  essenliellemenl  conci- 
liateur, d'un  UKigi^lrat  enfin  qui 
n'oublie  ni  ce  qu'il  doit  à  son 
pays  ni  ce  qu'il  doit  à  son  sou- 
verain. Lesdeuxannéesde  son  ad- 
ministration dans  le  département 


TAU 

de  l'Aisne,  ont  été  marquées  par 
un  grand  travail  ;?tatistique,  pu- 
blié en  1823,  sous  les  auspices  de 
son  successeur.  Sic  vos  non  valus. 
TALLL'YUANU  PÉRIGORD 
(Bezok,  comte  de),  frère  du  prin- 
ce de  Talieyrand,  lieutenant-gé- 
néral, gouverneur  de  Saint-Ger'- 
mainen-Laye. 

TALLEYRAND  PÉRIGORD 
(Archambauld,  duc  de),  frère  du 
précéfleut,    lieulenant-iiénéral. 

TALLEYRAND  P^KIGORD 
(nue  DE  Dixo),  fils  du  précédent, 
maréchal-de-camp,  a  servi  sous 
l'empereur  dès  sa  première  jeu- 
nesse. Il  a  gagné  tous  ses  grades 
sur  les  champs  de  bataille. 

TALLEYRAND  (  le  cardinal 
de),  oncle  du  prince,  mort  grand 
aumônier  de  France  en  1820. 

TALiNAY  (  Charles-Auguste)  , 
statuaire  disliugué,  fils  du  pciulie 
dont  l'article  suit,  naquit  à  Paris 
en  1768.  Entraîné  par  sa  passion 
pour  les  beaux  arts,  il  parvint  r;  - 
pidement  à  la  connaissance  d<  s 
premiers  secrets  de  l'art  du  sta- 
tuaire, et  il  gagna  le  prix  de 
sculpture,  qui  devait  le  conduire 
à  Rome  aux  frais  du  gouverne- 
ment. jMalheureusemeul  les  trou- 
bles politiques  de  l'époque  ne  lui 
permirent  pas  de  faire  ce  voyage. 
Les  conquêtes  des  armées  fran- 
çaises, qui,  à  la  suite  de  traités, 
valurent  à  la  France  les  chels- 
d'œuvre  de  la  Grèce  et  de  Rome 
en  tableaux  et  et>^culptmes,  le 
dédommagèrent  bientôt  de  celle 
douloureuse  privalion,  et  il  put 
compléter  au  musée  du  Louvre, 
à  Paris,  son  éducation  comme  ar- 
tiste. Taunay  obtint  par  de  nom- 
breux ouvrages,  la  confiance  du 
iïouvernemeut.    Les    événemeiis 


TAU 

politiques  de  1814  et  ï8i5,  ravi- 
rent à  la  France,  par  le  droit  de 
la  force ,  les  richesses  immenses 
de  notre  musée  [voy.  Casova  , 
LEBRrsTOx  et  "Wellington).  Dans 
son  désespoir,  il  s'expatria  avec 
Lebrelon  et  plusieurs  artistes  dis- 
tingués, et  alla  chercher  dans  un 
pays  vierge  de  révolutions,  de 
lâchetés  et  de  barbaries,  un  ciel 
paisible  et  la  gloire  d'être  l'un 
des  fondateurs  d'une  colonie  d'ar- 
tistes. IVofcsseur  de  sculpture  à 
l'académie  des  beaux  arts  de  Rio- 
Janeiro,  il  y  exécuta  plusieurs 
ouvrages  dignes  de  son  talent, 
et,  entre  autres,  la  statue  du  Ca- 
iiiitëns.  Il  mourut  à  Rio -Ja- 
neiro au  commencement  de  i824' 
\aEntreUa  Brasileira,  journal  qui 
se  publie  dans  cette  ville,  donna 
quelques  jours  après,  un  article 
nécrologigue,  qui  est  terminé  par 
ce  jugement  plein  oe  goût  et  de 
justice  :  «  Outre  le  mécanisme  de 
son  art,  il  possédait  à  un  haut  de- 
gré ce  qui  forme  le  véritable  ar- 
tiste^ une  critique  judicieuse,  une 
érudition  variée  et  un  excellent 
gofit  littéraire.  C'était  un  homme 
dont  le  talent  était  supérieur  aux 
ouvrages  qu'il  laisse  après  lui,  et 
qui  fut  presque  toujours  contrarié 
par  les  circonstances.  » 

TALNAY  (  Nicolas -Ahtoine), 
peintre  de  genre,  membre  de  l'ins- 
titul  et  de  la  légion-d'honneur, 
père  du  précédent,  et  élève  de 
Casanova.  M.  Taunay,  l'un  des 
artistes  les  plus  distingués  dans 
le  genre  qu'il  cultive,  enri- 
chit depuis  5o  ans,  de  ses  agréa- 
hies  compositions,  les  expositions 
du  musée  du  Louvre.  On  a  re- 
marqué au  salon  de  l'an  <),  son 
tableau    du    général    Bonaparte 


TIS 


4^7 


recevant  des  prisonniers   sur  le 
champ  de  bataille,  après  une  do 
ses  victoires  en  Italie  :  ce  tableau, 
qui  est  un  prix  d'encouragement, 
fait  partie  de  la  galerie  du  Luxem- 
bourg, ainsi  que  le  Passage  Ue  la 
Guadarama,  pari' année  française, 
en  Espagne^  et  une  Messe  à  une 
chapelle  de  saint  Rock  y  dans  une 
campagne  d'Italie;  au  salon  de  l'an 
to,  le  Trait  de  courage  d' un  en- 
fant de  12  ans,  qui,  au  mois  de 
fructidor   de    l'an  G,    à    Saint - 
l*ol  de  Léon,  était  parvenu,  a- 
près    des  efforts   inouïs,  à  sau- 
ver de  la  mer  deux  en  fans  à  peu 
près  de  son  âge,  qui  s'étant  trop 
avancés  ,  étaient  eujporlés  parles 
flots;  au  salon  dt;  l'an  12,  un  In- 
térieur d' hôpital  militaire;  Henri 
IV  et  le  paysan;   une  Scène   de 
carnaval;  au  salon  de  180S,  l'^;»- 
trée   de   l'empereur  des  Français 
dans  la   ville  de  Munich;  le  Ci- 
mabué  et  Giolto  ;  V Impératrice  re- 
cueillant  les  ouvrages  des  artistes 
modernes;    au   salon   de   ï8i<)  et 
de  1822,  parmi  une   suite   assez 
nombreuse  de  tableaux,  plusieurs 
paysages,  vues,  etc.,  du  Brésil  , 
entre  autrcsdeThabitation  de  l'au- 
teur, à  cinq  lieues  environ  de  Rio- 
Juneiro;  erjfin  au  dernier  salon 
(t824),£/'ez6r,  la  Bergère  des  Al' 
pes,  Henri  IF  et  le  paysan,  etc. 
TISSOT  (  Pierre- François  )  , 
lomme  de  lettres,  né  à  Versaille» 
(Seiuc-et-Oise),  le  10  mai  1^68. 
Il  commença  ses  éludes  dans  cette 
ville  avec  un  succès  remarquable; 
dès  l'âge  de  neuf  ans,  il  rempla- 
çait sou  maître  pour  des  leçons 
que  celui-ci   donnait  à  iliverses 
personnes.    Plusieurs  artiîlus  cé- 
lèbres   fréquentaient    la    pension 
dans  laquelle  il  était  élevé;  il  prit 


448  TIS 

dans  leur  coinuicrc  e  lu  goût  des 
arts  el  une  véritable  passion  pour 
le  dessin,  qu'il  cultiva  pendant 
plusieurs  atwiées,  avec  la  secr^:te 
intcnlion  de  devenir  peintre.  Arri- 
vé à  Paris  en  1782,  el  placé  dans 
une  pension  qui  conduisait  ses 
élèves  au  collège  31ontaijii,  il  fut 
singulièrement  remarqué  de  deux 
lial)iles  professeurs  du  temps,  qui 
s'appliquèrent  à  développer'  ses 
dispositions  et  à  cultiver  son  goOl; 
il  fit  des  progrès  rapides,  et  ob- 
tint de  brillans  succès  sous  ces 
deux  maîtres,  ainsi  que  sous  M. 
Sélis,  qui  pi'otessait  la  rhétorique 
au  collège  de  Louis-le-Grand.  Ses 
premiers  vers  français  datent  de 
Ct  Ite  époque  ;  ils  sont  consacrés  à 
retracer  les  derniers  momens  de 
sa  mère,  qui  avait  assemblé  tous 
ses  enfans  autour  de  son  Ut  de 
mort  pour  leur  donner  sa  béné- 
diction. Au  sortir  de  ses  études, 
il  entra  chez  un  procureur  au 
Cbâlelel;  rebuté  d'abord  par  les 
dégoûts  attachés  à  un  travail  aride, 
il  s'appliqua  ensuite  avec  ^èle  à 
l'étude  de  la  procédure,  et  sur- 
tout à  celle  du  droit;  mais  il  n'a- 
biiudonnail  pas  les  lettres,  Virgile 
el  Tibullo  ne  le  quittaient  pas;  il 
était  passionné  pour  Racine  et  les 
autres  grands  écrivains  du  siècle 
de  Louis  XIV.  Ceux  du  18"  siècle 
eurent  leur  tour  ;  il  devint  en- 
tliousiaste  de  J.-J.  Rousseau.  Ces 
liavaux,  le  commerce  de  l'anli- 
qtiité  dont  il  avait  été  nourri,  et 
jihis  encore  le  niouvcuncnt  géné- 
ral des  esprits  dans  la  suciété,  le 
disposèrent  à  aimer  les  |)rincipes 
sur  les(juels  s'appuie  la  révolu- 
lion  française.  Jeune  encore,  ct 
n'élanl  initié  dans  aucun  secret 
politique,  il  étail  témoin  des  évé- 


nemens  et  non  pas  aolenr.  Le  14 
juillet  1789,  il  iiiarchait  dans  Ta- 
ris avec  celte  légion  du  Châlefet 
qui  contribua  tant  à  rassurer  les 
habilans;  envoyé  ensuite  en  déta- 
chement pour  assurer  les  subsis- 
tances ,  il  revint  au  bout  d'un 
mois,  et  resta  tranquille.  Au  mois 
de  rnai  1790,  il  se  relira  à  31eu- 
don  avec  un  ami  pour  se  livrer  à 
des  études  sérieuses.  Il  ne  venait 
à  Paris  que  pour  assister  trois  fois 
par  semaine  à  des  cours  du  col- 
lège de  France,  ne  voyait  per- 
soime  dans  cette  ville,  el  retour- 
nait de  suite  à  la  campagne  ,  où  il 
ne  recevait  aucune  visite.  Comme 
tout  était  objet  d'alarmes  dans  ce 
temps,  la  cour  s'inquiéta  du  sé- 
jour des  deux  jeunes  ermites  dans 
une  résidence  royale;  on  apprit 
qu'ils  vivaient  dans  une  parfaite 
solitude  et  occupés  seulement  de 
leur  inslrucif.>n.  Une  année  s'é- 
coula ainsi  ;  en  1791.  il  fut  admis, 
ain-i  que  son  ami.  à  la  société  des 
amis  de  la  conslitulion  de  Sèvres. 
Dans  le  cours  de  celle  année,  il 
fil  des  voyages  et  quelque  sé- 
jour à  Versailles,  toujours  alta~ 
ché  aux  principes  de  la  révolu- 
tion, mais  ne  jouant  aucune  es- 
pèce de  rôle  politique.  En  1792, 
il  était  de  la  société  des  amis  de 
la  constitution  à  Versailles,  où  il 
se  fit  remarquer  par  une  grande 
franchise  d'opiuions  ,  unie  à  i\i\ 
esprit  conciliateur  dont  il  donna 
souvent  des  preuves  au  milieu 
des  deux  partis.  Il  apprit  à  Meu- 
don  l'événement  du  10  août,  dont 
il  n'avait  pas  même  de  soupçon, 
ne  venant  qu<;  très  -  rarement  à 
Paris,  el  n'y  connaissant  aucvm 
homme  influen!.  M.  Tissol  arriva 
à  Versailles,  où  sou  cnactère  é- 


lis 

lait  tellement  connu  ,  que  leà  ad- 
versaires prononcés  de  la  liberté 
lui  montrèrent  leur  satisfaction  de 
son  retour.  Ils  eurent  plus  d'une 
fois  à  se  louer  de  lui  au  milieu  de 
l'eflervescence  générale;  ils  n'ai- 
maient pas  ses  principes;  mais  ils 
ne  pouvaient  s'empêther  de  ren- 
dre justice  à  un  jeune  homme 
dont  le  cœur  était  exempt  de  tou- 
te haine,  et  naturellement  disposé 
il  la  tolérance  politique,  quoique 
incapable  de  transiger  avec  ses 
principes.  W.  Tissot  était  à  Versail- 
les secrétaire  de  sa  section,  alors  en 
permanence  aux  termes  d'une  loi, 
au  moment  où  l'on  apprit  les  mas- 
sacres de  septembre.  A  cette  cruel- 
le époque,  il  n'a  point  quitté  un 
seul  moment;  il  n'aurait  pas  pu 
quitter  alors  cette  ville  ,  car  il  i'al- 
lait  lin  passe-port,  qu'on  ne  lui 
aurait  pas  donné.  Dans  l'état  des 
choses,  ni  les  corps  administra- 
tifs, ni  sa  section  (c'était  la  pre- 
mière section  de  la  ville),  où  la 
conû;ince  des  uns  et  les  in<]uiétu- 
des  secrètes  d(.s  autres  voulaient 
impérieu-eineat  sa  présence  ,  ne 
lui  auraient  pas  permis  de  s'ab- 
senter; elTectivement ,  il  eut  sou- 
vent à  faire  preuve  de  zèle  pour 
empêcher  ou  prévenir  les  divi- 
sions et  les  querelles  entre  les  ci- 
lo_yens;  aussi  obtint-il  l'unanimité 
deâ  suiVrages  au  moment  où  cette 
section  très-nombreuse  fut  trans- 
formée en  assemblée  électorale. 
A  Celte  époque,  il  eut  occa>ioii  de 
condamner  hautement  les  massa- 
cres de  septembre  devant  la  so- 
ciété populaire  de  la  ville  ,  qui 
approuva  ses  sentiniens.  ÎVommé 
par  elle  membre  du  collège  élec- 
toral du  département,  qui  s'as- 
sembla  dani>  la  ville   de   Saint- 

T.   XX. 


lis  vm 

Germain  ,  il  se  trouva  secrétaire 
j)rovisoire  comme  le  plus  jeune 
d'ilge  ;  il  eût  été  nommé  à  la  con- 
vention nationale  s'il  eût  fait  le 
plus  petit  effort;  l'absence  de  tou- 
te andiition  le  préserva  des  dan- 
gers d'un  si  redoutable  honneur. 
La  cause  de  la  faveur  générale 
d'une  réunion  d'hommes  dont  la 
plupart  ne  le  connaissaient  pas 
même  de  nom  ,  vint  de  la  pré- 
sence d'esprit  avec  laquelle  il  ras- 
sura ,  par  une  simple  adresse  des 
volontaires,  le  corps  électoral  a- 
larmé  de  la  nouvelle  subite  de  la 
prise  de  Verdun.  Revenu  du  corps 
électoral  de  Saint-Germain  ,  dont 
il  avait  été  exclu  sous  le  prétexte 
du  défaut  d'âge  habilement  saisi 
par  de>  ambitions  particulières 
dont  il  pouvait  réfuter  les  scru- 
pules intéressés,  il  reprit  sa  place 
à  sa  section  ,  et  eut  le  bonheur  de 
montrer  un  périlleux  courage  en 
contribuant,  le  9  septembre  1792, 
au  salut  des  prisonniers  de  la 
Geôle,  Il  n'était  que  simple  ci- 
toyen ,  et  n'avait  de  guide  et  de 
pouvoir  (jue  son  zèle.  Toute  la 
ville  fut  témoin  de  sa  conduite  ir- 
réprochable dans  cette  journée  du 
massacre  des  prisonniers  d'Or- 
léans, où  le  maire.  iM.  Richand, 
dont  il  a  conservé  l'esliine  et  l'a- 
mitié,  se  conduisit  en  héros.  Ver- 
sailles, à  quatre  lieues  de  Paris, 
cette  ville  où  il  était  sans  cesse  en 
vue.  où  il  était  c(mnu  de  tout  le 
inonde,  où  il  n'aurait  pu  échap- 
per un  moment  aux  regards,  no 
fournirait  pas  un  Ixunme  qui  osHt 
et  pût  élever  et  soutenir  er>  «a  pré- 
sence et  en  face  de  la  justice,  une 
accusation  contre  lui  sur  celle  af- 
freuse journée.  Nous  l'avons  cn- 
teuducentfoisen  particulier  com- 
29 


/,r)<. 


TJS 


nie  en  public,  porter  lo  tléfi  à  la 
Ciiloiiiiiic  elle-mêine,  soit  à  l'é- 
gard de  celte  journée,  soit  a  l'é- 
gard de  toute  antre.  Ce  fut  lui 
qui,  sans  aucun  autre  intérêt  que 
celui  de  la  justice  et  de  l'huinani- 
lé,  se  chargea  de  réclamer  pour 
tous  les  serviteurs  de  la  famille 
royale,  que  la  chute  du  trône  lais- 
sait sans  pain. Tontes  les  personnes 
attachées  au  roi ,  à  la  reine  et  aux 
frères  de  ce  prince, le  regardaient  a- 
lûis  comme  leur  défenseur,  et  le 
comblaient  de  bénédictions. Son  a- 
ini,son  beau-frèie,  le  jeune  et  in- 
fortuné Goujon,  qui  a  ])éri  avec 
tanlde  courageau  i'^' prairial,  était 
■procureur-syndic du  département, 
ot  toute  la  faveur  qu'il  en  avait 
reçue  était  une  place  dans  un  des 
bureaux  de  l'administration  dé- 
partementale. Il  les  quitta  en 
mars  i^qS  ,  presque  immédiate- 
ment après  son  mariage,  pour  al- 
ler dans  la  Vendée  avec  un  batail- 
lon de  volontaires  qui  contribua 
beaucoup  au  salut  de  la  ville  de 
Nantes.  Il  n'exerça  aucime  fonc- 
tion dans  cette  ville.  Mais  un  hom- 
me qui  portait  le  même  nom  que 
lui,  sans  être  son  parent ,  par.ùt 
avoir  eu  dans  ce  temps  une  mis- 
sion importante  du  comité  de  sa- 
lut-public  dans  la  Vendée;  sui- 
vant toute  apparence,  on  Faiira 
confondu  avec  cet  individu  qu'il 
n'a  jamais  ni  vu  ni  connu.  Goujon 
ayant  été  appelé  à  la  commission 
de  commerce  et  approvisioiuie- 
mens ,  M.  ïissot  en  devint  le  se- 
crétaire -  général,  (j'est  dans  ce 
temps  qu'il  plaça,  non  sans  cou- 
rir des  dangers,  ()lusicurs  person- 
nes d'une  autre  opinion  que  la 
sienne,  et  notamment  un  prêtre 
poursuivi  en  celte  qualité.  Il  sor- 


TIS 

lit  de  celte  commission  pour  se 
préj)arcr  à  suivre  son  beau-frère, 
nommé  à  l'ambassade  de  Cons- 
tantinople.  Celui-ci  ayant  été  ap- 
pelé comuie  suppléant  à  la  con- 
vention nationale,  à  la  place  de 
Hérault  de  Séchelles ,  M.  Tissot 
fut  nommé  adjoint  de  la  commis- 
sion d'agriculture  et  de,>  arts, dont 
M.  lierlholet  était  membre;  il  y 
rendit  beaucoup  de  services  en  se- 
condant avec  autant  de  zèle  que 
d'activité  l'exécution  de  tous  les 
ujoyens  de  perfectionnement  a- 
doptés  par  un  comité  composé  des 
hommes  les  plus  distingués.  C'est 
alors  qu'il  s'empressa  de  donner 
asile  dans  les  bureaux  à  un  magis- 
trat distingué  ,  M.  Savoye  Rollin, 
avocat  -  général  du  département 
de  Gren(d)le  ,  qui  avait  besoin 
d'appui  dans  ces  momens  diffici- 
les ,  et  qui  a  loujunrs  conservé 
une  vive  rec(ini)ai!..-auce  de  ce 
service.  M.  ïissot  eut  aussi  le  dé- 
vouement d'aller  demander  la  li- 
berté d'un  ancien  se.'iétaire  de 
M.  de  Malesherbes,  employé  dans 
les  bureaux  de  la  commission,  et 
arrêté  pour  cause  d'opinion  par 
(me  autorité  jalouse  et  redoutable 
et  dans  un  moment  terrible.  Il 
suivit  bientôt  son  beau  -  frère  , 
nommé  commissaire  de  la  con- 
vention auprès  des  armées  de  la 
Moselle  et  du  Rhin.  Cette  mis- 
sion à  laquelle  il  ne  participait 
que  comme  secrétaire  des  repré- 
sentans,  ifura  quatre  mois,  ne  vit 
que  des  succès,  ne  fit  point  verser 
de  larmes,  et  ne  coûta  que  4«;'>oo 
francs  à  la  république,  y  compris 
les  frais  de  voyage.  De  retour 
après  le  9  ihermidor,  il  reprit  sa 
place  d'adjoint,  et  la  garda  jus- 
qu'au mois  de  geroîînal  de  l'an- 


TIS 

liée  suivante.  Arrêlé  ù  bette  épo- 
<]i\e  sur  des  snupoons,  ou  plutôt 
parce  que  son  beau-frère  avait  des 
ennemis,  il  fut  relâché  au  bout 
de  vingt  jours  sur  les  bons  témoi- 
gnages des  députés  de  S<ùne-et- 
Oise,  qui  I«;  défendirent  comme 
un  citoyen  dont  la  conduite  était 
<;xemple  de  tous  reproclics.  Le 
maire  de  Versailles,  M.  Riohaud, 
avait  signé  avec  ses  collègues.  On 
ne  pouvait  faire  de  reproches  à 
M.  Tissot  pour  sa  conduite  à  Ver- 
sailles, à  moins  de  lui  faire  un 
crime  de  ses  opinions  ;  à  Paris  ,  il 
n'avait  pas  eu  d'autres  occupa- 
lions  que  de?  fondions  admiiiis-M 
tratives  qui  ne  permettaient  pas 
nn  ujorniHitde  partage,  au  milieu 
d'une  disette  qu'il  fallait  combat- 
lr«!  sans  cesse  par  la  vigilance. 
Aussi  ne  le  vo_yail-on  dans  aucune 
assemblée  politique.  En  rendant 
la  liberté  à  M.  Tissot,  on  ne  lui 
rendit  pas  sa  plaC(;  ;  il  resta  tran- 
quille jusqu'au  I"  pr.uiial,  épo- 
que où  Goujon  fut  envdioppé  darjs 
»nie  mesure  de  prc^crlirtion.  Ils 
n'apprirent  tojis  deux  le  soulève- 
meni  que  sur  1rs  dix  hem'es  du 
malin.  Goujon  conçut  des  s^xip- 
(îons  sinistres  sur  ^.el  évémMncnt 
où  trempèrent  elTectiveinent  qiiel- 
qncs  hommes  vendus  aux  comi- 
tés du  gouvernement  ;  ce  dernier 
voulait  une  jf)avnée  pour  en  pf-o- 
liter,  il  parvint  à  son  but.  Goujon 
avait  exigé  de  sou  beau-frère  la 
promesse  et  mr-me  le  se^  ment  de 
ne  se  mêler  en  rien  dans  U'ue  cho- 
se si  suspecte.  iM.  Tissol  ne  revit 
son  hcau-frère  qii'i  la  commission 
militaire,  où  ce  dernier  rtcul  de 
lui  ions  les  secours,  tous  les  avis 
fl'un  ami  fidèle.  M.  Tissol  savait 
]>ourtnnt  qa'on  n'attendait  qu'une 


TIS  45i 

occasion  pour  le  perdre  en  même 
temps  que  Goujon.  On  a  voulu 
ajouter  la  calomnie  au  malheur 
qu'il  éprouva  dans  cette  fatale  cir- 
constance; et  long- temps  après, 
c'est-à-dire  depuis  la  restaura- 
lion,  on  a  répandu  des  atrocités 
à  ce  sujet  eu  se  servant  du  nom  de 
RI.  Boissy  d'Angla»*.  Aussitôt  que 
ce  respectable  citoyen  a  été  ins- 
truit de  ce  tait,  il  s'est  empressé 
d'écrire  à  M.  ïissot  la  lettre  la 
plus  flatteuse,  qui  est  eti  même 
temps  le  démenti  le  plus  formel 
des  suppositions  et  des  menson- 
ges de  la  calomnie.  Après  la  mort 
l«le  Goujon,  iM.  Tissot  reéla  seul 
et  sans  aucune  fortune  |)our  sou- 
tenir deux  familles.  Tune  aflligée 
par  une  perle  irréparable,  et  d'ail- 
leurs sans  fortune;  l'autre  entiè- 
rement ruinée  par  la  révolution, 
ïl  s'imposa  alors  la  retraite  l.i  plus 
austère;  mais  aprè"?  la  jorn-née  du 
iT»  vendémiaire,  il  se  jeta  dans 
l'industrie,  devint  simple  ouvrier 
dans  un  établissement  qu'il  avait 
contribué  à  fonder  étant  adminis* 
traleur,  et  finit  par  élever  une  fa- 
brique spéciale ,  seul  moyen  de 
fournir  à  tant  de  besoins  réunis 
autour  de  lui.  Les  circimstances 
changèrent;  avant  le  i8  fructidor, 
il  fut  appelé,  comiiu!  rédacteur, 
dans  un  bureau  administratif  au 
ministère  de  la  police  générale. 
Il  demeurait  alors  au  faubourg 
Saint  -  Antoine  depuis  quelques 
mois.  On  ne  le  prévint  pas  de  la 
journée  qui  se  préparait;  et  quand 
il  reçut,  pendant  la  nuit,  l'ordre 
verbal  de  se  mtder  du  mouve- 
ment, il  refusa  positivement,  en 
répondant  (|ucce  n'était  pas  \i\  un 
devoir.  Le  malin,  il  se  rendit  à 
son  bureau.  Les  députés  arrÊlé» 


/|52  TIS 

eurent  bien  à  se  louer  de  sa  cou- 
(liiile;  il  fit  en  leur  laveur  tout  ce 
qu'on  pouvait  atlcndre  d'un  ami 
de  l'humanité  qui  avait  vu,  une 
année  auparavant,  sa  famille  dans 
l'état  où  il  voyait  la  leur.  La  nièce 
«le  Pichegru  ,  la  sœur  de  Gilbert 
Demolières  ,  et  toutes  les  femmes 
des  proscrits,  eurent  à  se  louer  de 
lui.  Averti  du  projet  qu'on  avait 
formé  d'égorger  les  députés  arrê- 
tés ,  il  contribua  à  leur  salut  par 
ses  conseils  el  par  l'autorité  de  ses 
courageuses  paroles;  il  décida  le 
ministre  à  se  transporter  .-^ur  les 
lieux,  et  celui-ci  ne  revint  que  le 
matin,  .après  avoir  pris  toutes  les 
mesures  nécessaires.  Parmi  les 
députés  arrêtés  éîait  Bourdon,  de 
l'Oise,  qui  avait  fait  en  germinal 
des  menaces  afiVeuses  à  M.Tissot, 
et  demandé  qu'on  fusillât  Goujon 
dans  le  salon  de  la  liberté.  Il  res- 
ta sept  înois  chef  du  bureau  par- 
ticulier du  ministre,  n'ayant  d'au- 
tre pensée  que  de  veilier  sur  les 
divers  partis  pour  les  empêcher 
d'en  venir  aux  mains;  prévenir 
fut  toute  sa  doctrine.  Il  reçut  le 
prix  de  sa  conduite  et  de  son  éloi- 
gnement  pour  toutes  les  mesures 
violentes  dans  la  nomination  de 
député  de  la  Seine  aux  élections 
de  l'an  6.  Toutes  les  opinions  con- 
coururent à  son  élection,  qui  eut 
lieu  à  une  immense  majorité  dans 
une  très -nombreuse  assemblée. 
II  était  secrétaire,  et  Cambacérès 
président;  celui-ci  ne  fut  nommé 
député  qu'après  M.  Tissot.  Sa  no- 
mination ayant  été  cachée  par  un 
indigne  abus  de  pouvoir,  il  ne 
daigna  pas  même  la  défendre,  et 
se  retira  dans  une  campagne  près 
de  Tours  ;  c'est  là  qu'il  commença 
à  devenir  homme  de  lettres,  en 


TIS 

traduisant  les  Bucoliques  de  Vir- 
gile en  vers  français.  Au  i8  bru- 
maire, quoique  convaincu  que  le 
général  en  chef  Bonaparte  était 
nécessaire  el  même  indispensable 
en  ce  moment,  il  ne  crut  pas  de- 
voir se  présenter  à  cel'ii  qui  avait 
renversé  la  représenlalion  natio- 
nale, et  resia  dans  l'obscurité, 
occupé  des  lettres.  Au  5  ni\ôse, 
ii  fut  ail  été;  il  avait  prévu  que 
les  anciens  ennemis  de  Goujon 
saisiraient  iinu  occasion  de  se  dé- 
faire d'un  homme  qui  avait  eu 
déjà  les  moyens  de  se  venger,  et 
qui  aurait  pu  .  il  est  vrai ,  devenir 
=^chef  de  parti  ,  s'il  l'eût  voulu  ; 
mais  il  refusa  de  fuir,  tant  il  avait 
horreur  du  crime  auquel  on  vou- 
lait l'associer  par  une  mesure  de 
proscription  qui  était  un  coup  d'é- 
tal. Bonaparte  sut  celte  circons- 
tance; des  hommes  peu  bienveil- 
laiis  pour  iM.  Tissol,  d'autres,  tels 
que  Monge  et  Bertholet,  interro- 
gés parle  premier  consul ,  répon- 
dirent qu'il  était  sans  reproches. 
M.  Bourienne ,  qui  avait  à  son 
insu  nue  grande  obligation  à  M. 
Tissot,  M°"  Bonaparte,  qui  avait 
un  cœur  admirable  ,  se  joignirent 
à  eux ,  et  M.  Tissot  fut  rayé  de  la 
liste.ialale.  Le  premier  consul  ré- 
sista fortement  à  des  tentatives 
faites  par  la  haine  secrèle;  mais 
il  voulut  savoir  ce  que  l'homuie 
que  l'on  voulait  déporter  sans  ju- 
gement avait  fait  pendant  la  ré- 
volution; i!  ordonna  un  exauien 
sévère  ,  et  cet  examen  n'ayant 
produit  aucun  grief,  même  aucun 
soupçon ,  il  promit  paix  et  sûreté 
à  M.  Tissot,  et  a  tenu  parole.  M. 
Tissot  respira  enfin  ;  car  on  lui 
avait  tendu  toutes  sortes  d'embû- 
ches pour  le  perdre  avant  l'arri- 


TIS 

▼ée'de  Bonaparte,  auquel  il  dut 
vraiment  la  vie,  les  déportés  étant 
tous  morts  en  exil.  La  publica- 
tion d'un  ouvrage  d'un  genre  aii.s- 
si  innocent  que  le»  Bucoliques , 
ÉVappa  beaucoup  le  premier  con- 
sul. M.  Tissot  avait  recouvré  la 
liberté  ;  mais  chef  d'un  établisse- 
ment, il  eut  une  peine  extrême  à 
réparer  le  mal  que  lui  avait  causé 
une  arrestation  dans  des  circons- 
tances si  graves.  Appelé,  en  i8ofj, 
dans  les  bureaux  de  M.  Français 
de  Nantes,  qui  lui  avait  accordé 
toute  son  amitié,  il  rendit  des  ser- 
vices à  tous  les  gens  de  lettres, 
artistes  et  savans  ;  il  Ct  beaucoup 
pour  les  autres,  et  ne  «lemanda 
rien  pour  lui.  C'est  alors  qu'il  re- 
prit avec  plus  d'ardeur  que  jamais 
le  commerce  des  muscs.  Il  leur 
dut  la  connaissance  et  l'amitié  de 
l'abbé  Delille,  qui  le  choisit  d'a- 
bord pour  bon  remplaçant,  et  en- 
suite l'indiqua  pour  son  .succes- 
seur. Deliile  avait  reconnu  dans 
M. Tissot  une  vo(;alion  réelle  pour 
l'enseignement  littéraire;  l'expé- 
rience a  prouvé  que  ce  célèbre 
poète  ne  s'était  pas  trompé.  Pen- 
dant onze  années  ,  M.  Tissot  a 
remplacé  son  maître  avec  un  bril- 
lant succès,  mais  non  sans  se  li- 
vrer à  un  travail  immense.  Ses 
leçons  étaient  suivies  avey  em- 
pressement par  la  jeunesse ,  et 
jamais  aucune  d'elles  ne  fut  trou- 
blée par  le  plus  léger  incident. 
On  aurait  craint  de  [)erdre  quel- 
(|ue  chose  en  l'interrompant.  La 
jeune  génération  qui  brille  main- 
tenant dans  les  lettres,  a  presque 
toute  profilé  des  leçons  de  M. 
Tissot;  >li>L  Casjniir  Delavigne 
et  Lamartine  ont  suivi  son  cours. 
Tout  à  coup,  sans  avoir  été  cn- 


TIS 


i53 


tendu  ,  sans  môme  avoir  été  pré- 
venu ,  le  successeur  de  Delille 
s'est  vu  révoqué  sans  qu'aucun 
reproche  lui  ait  été  l'ait  par  les 
ministres,  soit  sur  la  révolution, 
soit  sur  sa  conduite  présente,  soit 
enfin  sur  ses  leçons;  l'un  d'eux 
lui  a  dit  seulement  :  «  Nous  n'a- 
))vons  aucun  fait  à  vous  imputer, 
»mais  vous  n'êtes  pas  notre  hora- 
nme:  la  jeunesse  est  dans  vos 
0  mains,  nous  ne  voulons  pas 
«qu'elle  y  soit;  voilà  tout  notre 
»  secret.  •  M.  Tissot  a  perdu  sa 
place  sans  avoir  même  une  pen- 
sion ,  après  tant  de  travaux.  Cette 
injustice  a  été  suivie  de  beaucoup 
de  malheurs  domestiques;  il  a  per- 
du successivement  sou  père,  sa 
fdic ,  sa  femme,  son  gendre  et 
deux  pelits-enfaiis  ;  c'est  au  mi- 
lieu de  ces  chagrins  que  sont  ve- 
nue* le  surprendre  de  nouvelles 
persécutions.  Tout  Paris  se  rap- 
pelle encore  comment  iM.  le  pré- 
fet de  police  usa  d'un  pouvoir  ar- 
bitraire envers  ce  citoyen,  en  se 
faisant  un  mérite  et  même  une 
gloire  de  sa  partialité.  L'entretien 
de  M.  Tissot  avec  Al.  le  préfet  de 
police  restera  comuje  una  pièce 
du  temps.  On  sait  encore  par 
quelles  manœuvres  il  a  été  spolié 
d'un  journal  qui  éliiit  sa  proprié- 
té, et  qu'on  lui  a  fait  enlever  de 
vive  force  ;  ce  dernier  événement 
a  causé  une  perle  énorme  ;'i  M. 
Tissot.  Et  pourquoi  tout  cela  ? 
parce  qu'il  n'a  voulu  n:  se  laisser 
acheter,  ni  trahir  les  intérêts  de 
ses  commanditaires.  Tant  de  pei- 
nes accumulées  ont  failli  le  con- 
duire au  tombeau.  On  ne  devine 
pas  les  motifs  de  l'acharnement 
avec  lequel  on  a  poursiiivi  M.  Tis- 
sot. .S'il  a  toujours  aimé  sincère- 


454  lis 

rnenl  la  liberté,  sa  conduite  poli- 
tique n'offre  «aucun  fait  que  l'on 
puisse  accuser,  l'an  un  hasard  as- 
sez étrange,  cet  homme,  qui  a 
toujours  6uivi  ouvertement  la  ré- 
volution, n'a  pris  une  [)art  active 
à  au(i»me  de  ses.  journées.  Il  n'é- 
tait pointa  la  prise  de  la  Baslille; 
on  a  vu  ce  qu'il  faisait  le  i4  juil- 
let. Aux  5  et  6 octobre,  une  mala- 
die grave  le  retenait  dans  son  lit. 
On  ne  peut  trouver  son  nom  dans 
aucun  événement  politique  depuis 
cette  époque  jusqu'en   «792;   au 
10  août,  il  était  à  iMeudon;  au  2 
septembre  et  jours  suivans,  à  Ver- 
sailles ;  au  9  septembre,  loin  de 
mériter  même  un  soupçon, ils'est 
montré  courageux  dans  cette  ville 
et  à   la  face   de  tous  ses  conci- 
toyens ;   au   5i    mai,   il  était  au 
camp  de  Saint-George-sous-Nan- 
tes; au  9  thermidor,  à  l'armée  du 
Rhin  ;  au  1"'  prairial,  sous  les  ar- 
mes avec  la  section  de  Grenelle, 
venue  pour  protéger  la  conven- 
tion, et  qui  n'a  pris  aucune  part 
au   mouvement;    au    4   pi'iiirial  , 
dans  les  plus  grandes  inquiétudes 
sur  son  beau-frère,   et  occupé  à 
consoler   une   mère,    une   soeur, 
une  épouse,  désespérées  ;   au    i5 
vendémiaire,  sous  les  armes  pour 
la  convention  ,  mais  étranger  aux 
combats  livrés  pour  sa  défense, 
il  n'eût  jamais  consenti  à  tirer  sur 
ses  concitoyens;  au  18  fructidor, 
n'ayant    voulu    prendre    aucune 
part  à  un  mouvement  qu'il  avait 
ignoré;  au  18  brumaire,  renfer- 
mé dans  l'obscurité  de  sa  retraite. 
C'est,  armé  de  tous  ces  souvenirs, 
que  nous  l'avons  entendu  dans  le 
procès  qu'on  lui  a  intenté  comme 
rédacteur  du   Pilote,    porter  en 
plein  tribunal,  à  tous  ses  conlem- 


TIS 

porains,  le  défl  de  trouver  même 
la  trace  la  plus  légère  d'une  ac- 
tion coupable  de  lui  dans  la  révo- 
lution. De  son  aveu,  il  y  a  du 
bonheur  dans  cet  assemblage  «le 
circonstances  ,  qu'on  ne  soupçon- 
ne guère  ;  mais  ce  qui  n'est  point 
du  hîisard  ,  c'est  que  depuis  tren- 
te-six ans  on  ne  j)uisse  pas  trou- 
ver de  lui  un  écrit  qui  l'accuse. 
Et  certes,  on  ne  dira  pas  qu'il  a- 
vail  prévu  le  temps  où  l'on  pour- 
rait lui  demander  compte  de  ses 
opinions  et  de  ses  actes  pendant 
une  révolution  qu'il  n'a  jamais 
désavouée  un  moment.  On  publie 
chaque  jour  des  mémoires  sur  la 
révolution  :  M.  Tissot  n'y  est  pas 
même  reconnu  une  seule  fois.  iVl. 
Tissot  a  été  censeur  de  la  Gazette 
de  France,  et  s'est  montré  avec 
beaucoup  de  modération  dans  cet- 
te fonction,  avec  de  la  pudeur 
dans  ?a  manière  de  servir  l'hom- 
me auquel  il  devait  tout.  Aucun 
homme  de  lettres  n'a  eu  à  se  plain- 
dre de  lui  alors;  deux  traits  mé- 
ritent d'être  cités.  Napoléon  vou- 
lut savoir  le  non)  de  l'auteur  d'un 
article  qui  lui  avait  singulière- 
ment déplu  :  M.  Tissot  en  prit  la 
responsabilité  eu  refusant  cons- 
tamment de  déclartir  l'auteur. 
Quoique  très  -  éloigné  des  opi- 
nions de  M.  de  Châfeaubjiand ,  il 
ne  voulut  jarnais  attaquer  cet  é- 
crivaiu  pour  complaire  -h  l'autf»- 
rité.  «  Je  ne  contribuerai  pas,  dit- 
»  il  ,  à  avilir  un  homme  de  lettres, 
»ou  à  rabaisser  son  talent.  >>  Na- 
poléon approuva  ces  sentimens. 
On  a  reproché  à  iM.  Tissot  son 
dévouement  pour  l'homme  ex- 
traordinaire qui  fut  son  bienfai- 
teur; il  répond  :  «  Celui  qui  gou- 
vernait l'Europe  me    témoignait 


.> 


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y/y. 


y)'v,rj'c/it'tt/'e    nr/iw  f 


A'/f^/ti/  t/e/ f/  ./;v//^. 


TIS 

(le  resliinc;  il  est  venu  au-devant 
(le  moi  par  ses  bienfaits,  enfin  il 
m'avait  sauvé  la  vie;  jo  l'ai  servi 
avec  d'autant  moins  tie  scrupule 
que  sous  son  gouvernement  j'ai 
trouvé  mille  occasions  de  servir 
et  de  défendre  les  amis  de  la  li- 
berté qui  avaient  besoin  d'appui  y 
et  enfin  de  faire  entendre  avec  un 
courage  qu'un  dévonemcnt  connu 
De  rendait  pas  suspect,  des  véri- 
tés utiles  quelquefois  à  toute  la 
France,  quand  les  ministres  con- 
naissant ma  sincérité  ,  m'inter- 
rogeaient sur  quelques  matières 
d'administration  ou  de  gouverne- 
ment. »  On  a  de  M.  ïissot  une 
traduftion  en  vers  des  Bucoliques 
de  Virgile,  parvenue  à  la  qua- 
trième édition,  et  que  le  jury  des 
prix  décennaux  proposa  comme 
digne  d'en  obtenir  un.  Une  tra- 
duction en  vers  des  Baisers  de 
Jean  second^  suivie  de  qnelqties 
poésies  erotiques;  di'^C fiants  pour 
le  mariage  de  Napoléon  et  pour 
la  naissance  du  roi  de  ilomc;  un 
volume  d'Introduction  aux  fastes 
civils  de  la  France  ,  abrégé  re- 
marquable de  riiistoire  du  monde 
jusqu'à  nos  jours.  Il  est  auteur  de 
beaucoup  d'articles  liltérair«!S  qui 
lui  ont  valu  une  juste  réputation 
de  critique.  M.  Tissot  se  propose 
de  donner  successivemerl  au  pu- 
blic ses  travaux  au  C(»l!ége  de 
France,  et  publie  en  ce  moment 
dt:5  Etudes  sur  f^irqde,  qui  at- 
testent de  longues  méditations. 
Le  talent  de  M.  Tissot  ,  comme 
poète,  est  apprécié  depuis  long- 
temps ;  c'est  la  griîce  unie  à  la  fttr- 
ce.  Comme  prns3l(;ur,  il  réunit  le 
mérite  de  la  pensée  à  riiarmonie 
du  langage  et  au  bonheur  de  l'cx- 
prcsiiion  ;  connue  critique  ,  il  est 


VAL' 


/,5r> 


d'une  impartialité  rare  ,  et  ses  ju- 
gemens  sont  dictés  par  une  raison 
solide  et  un  goftt  tiès-pur. 

VALKENAKR  (Jexn).  Le  der- 
nier paragraphe  de  sa  notice^  re- 
tranché par  erreur,  doit  être  réta- 
bli ;  il  porte  :  M.  Valkenaer  mou- 
rut en  1822. 

VALQUKLIN  (Nicolas- Lotis), 
célèbre  professeur  de  chimie, 
njembre  de  l'iiistilut  (académie 
des  sciences)  ,  chevalier  de  la  lé- 
gion-d'honneur et  de  Saint-Mi- 
chel, professeur  honoraire  de  la 
faculté  de  médecine  de  Paris,  et 
membre  de  presque  toutes  les  aca- 
démies de  l'Europe ,  est  né  eu 
17G3,  dans  la  ci-devant  province 
de  Normandie.  Il  commença  ses 
études  de  chimie  et  de  pharmacie 
i\  Rouen,  et  les  vint  terminer  à  Pa- 
ris, en  1780.  Dès  «785,  le  j)rofes- 
seur  Fourcroy  se  l'associa  comme 
préparattîur  de  ses  travaux  chimi- 
ques, et  bientôt  s'en  fit  un  émule 
et  un  ami.  Cette  honorable  asso- 
ciation dura  hm't  années  consécu- 
tives. Il  y  avait  à  peine  trois  mois 
que  M.  Vauquelin  était  membre 
de  l'académie  royale  des  sciences, 
lorsque  par  suite  des  évènemens 
de  la  révolution,  les  corps  acadé- 
miques furent  supprimés  (  i^f)''^)- 
A  cette  épo(pie  il  alla  occuper  la 
place  de  Pharmaci(;n,  à  l'hôpital 
militaire  (lelMelun;mais  dèsl'année 
suivante,  il  fut  rappelé  à  Paris  où 
le  gouvernement  le  nomma  ins- 
pecteur des  mines,  et  le  chargea 
d'établir  en  faveur  des  élèves  de 
l'école  des  mines,  im  cours  de  do- 
cimasie,  qui  lui  valut  pres«|u'i\  la^ 
ujfme  époque,  la  place  de  prnfes 
seur  adjoint  de  chimie  à  l'école 
polytechnique.  Dès  la  formation 
do  l'institut  national,  il  fut  cum- 


45(j 


VAt 


pris  au  nombre  des  meinbres  de 
oe  corps,  et  dès  l'établissement  de 
la  légion-d'honucur,  il  en  reçut  la 
croix.  Devenu  par  la  mort  de  Dar- 
cet,  professeur  de  chimie  au  col- 
lège de  France,  il  donna  sa  démis- 
sion de  la  place  d'inspecteur  des 
mines,  et  réunit  à  son  professorat 
l'emploi  de  directeur  de  l'école 
spéciale  de  pharmacie,  du  mo- 
ment qu'elle  fut  créée,  llron- 
gtiiard,  professeur  de  chimie  au 
Jardin  des  Plantes,  étant  mort,  RI. 
Vauquelin  fut  nommé  pour  lui 
succéder,  sur  la  présentation  una- 
nime de  l'institut,  de  l'adminis- 
Iralion,  et  des  inspecteurs  des  é- 
tudes.  L'importance  de  celte  nou- 
velle chaiie,  le  força  de  donner  sa 
démission  de  professeur  au  collè- 
ge de  France.  Après  la  mort  de 
Fourcroy,  en  181 1  ,  il  se  présen- 
ta au  concours  pour  le  remplacer 
comme  professeur  de  chimie,  à  la 
faculté  de  médecine.  Ses  concur- 
rens  par  un  juste  sentiment  d'esti- 
me et  de  respect,  refusèrent  de 
lui  disputer  une  chaire,  dont  il  é- 
tait  reconnu  universellement  di- 
gne de  prendre  possession.  Moins 
favorablement  apprécié  sous  le 
ministère  de  1822,  il  a  été  ainsi 
que  ses  illustres  confrères  à  la  fa- 
culté, MM,  les  profesi>eurs  de  Jus- 
sieu,  Dubois,  Pellelan,  Pinel,  Des- 
genettes,  Chaussier,  Lallomant, 
Le  Roux  et  Moreau,  mis  à  la  re- 
traite, c'est  à  dire  classé  parmi  les 
honoraire?.  Mais  la  haute  considé- 
ration dont  il  jouit,  n'a  reçu  aucu- 
ne atteinte  des  rigueurs  du  pou- 
voir. M.  Vauquelin,  dit  l'auleur 
d'une  notice  biographique,  n'a  pu- 
blié ex  professa,  que  le  Manuel  de 
l'Essayeur ,  1812,  in-S";  mais  il 
doit  sa  haute  réputation  aux  belles 


VAU 

analyses  qu'il  a  faites,  soit  de  con- 
cert avec  Fourcroy,  soit  en  parti- 
culier; à  ses  expériences  publi- 
ques ,  et  aux  mémoires  qu'il  a  pu- 
bliés d.ius  les  Annales  de  chimie, 
dans  le  Journal  des  mines,  dan'< 
les  Annales  du  muséum^  dans  le 
Journal  de  physique  et  dausT^HQ'- 
clopédie  méthodique, un  qu'il  a  lus  à 
l'académie.  Ces  mémoires  sont 
très-nombreux;  voici  les  titres  des 
plus  remarquables  :  1"  Sur  la  na- 
ture de  l'alun,  [Annales  de  chimie 
•79/)»  2°  iV«r  la  nouvelle  substan- 
ce mclallique  contenue  dans  le 
plomb  rouge  de  Sibérie  (  chrome  ) . 
ibitl.,  1798;  3°  Notice  sur  la  terre 
du  Brésil,  ibiLl.  Cette  terre  (la  Glu- 
ciue),  éliiit  inconnue  avant  M. 
Vauquelin.  4°  Deux  mémoires  sur 
l'urine,  en  société  avec  F'ourcroy; 
ibid.,  1799;  5"  Surl'fuu  del'am- 
nios  des  finmes  et  des  luœhes;  ibid. 
1  Soo;  Ci"  Sur  le  verre  d'antimoine; 
ibid.  7°  Observutions  sur  l'identité 
des  acides  pyro-muqueux ,  pyro- 
tariareux,  pyro-ligneux;  et  sur  la 
nécessité  de  ne  plus  les  regarder 
comme  des  acides  particuliers ,  en 
SMciété  avec  Fourcroy;  ibid.  8" 
Sur  les  pierres  dites  tombées  du 
ciel;  ibid.,  i8.)5;  9°  Sur  le  platine, 
en  société  avec  Fourcroy  ;  ibid. , 
i8o4;  1 0°  Sur  la  présence  d'un  nou- 
veau sel  phosphorique  terreu.v,  dans 
les  os  des  animaux,  etc.;  en  ?ocié- 
lé  avec  Fourcroy;  ibid.,  i8o5;  1 1' 
Examen  chimique  pour  servir  à 
l'histoire  de  la  laite  des  poissons; 
en  société  avec  Fourcroy;  ibid., 
1 807;  1 2'  Analyse  de  la  matière  cé- 
rébrale de  l' homme  et  de  quelques 
animaux,  ibid.,  1812;  \ô"  Expé- 
rience sur  le  daphné  alpina;  ibid.; 
i4°  Analyse  de  l'urine  de  l'autru- 
che,  et  expériences  sur  le^  excré- 


VIA 

Ik  mens  de  quelques  autres  familles 
"'  d'oiseaux;  en  société  avec  Foiir- 
croy  ;  [Annales  du  muséum  d' his- 
toire naturelle ,  Paris,  1811.)  iM, 
Vauquelin  est  l'un  des  fondateur? 
(1788)  de  la  célèbre  société  phi- 
loinaliqjie. 

VALGIKAUD  (Pierre -René- 
Marie).  On  a  omis  à  la  fin  de  ,«a 
notice  ces  mots  :  Il  mourut  le  i3 
mars  i8iq,  dans  la  78*  année  de 
»on  âge. 

VERNINAC  DE  SAINT-MAUR. 
La  date  précise  de  sa  mort  est  du 
I"  juin  1822.  (Voirsa  no/<>c  à  son 
ordre  alphabétique  dans  ce  20» 
vol.  ). 

VIALA  (Joseph-Agricol)  na- 
quit ù  Avignon,  et  était  écolier  de 
cinquième  en  1792;  son  profes- 
seur eut  souvent  occaxion  d'ad- 
mirer son  esprit  et  son  caractère. 
Jin  1793,  il  était  commandant  de 
la  petite  },Mrde  nationale  d'Avi- 
gnon. Il  y  avait  à  cette  époque 
des  gardes  nationales  de  cette  es- 
pèce dans  presque  toutes  les  villes 
de  France  ;  elles  portaient  sur  leurs 
petits  drapeaux  celte  inscription  , 
Espérance  de  la  Patrie.  Au  mois 
de  juillet  1795,  les  adrrjinistra- 
•  cursdu  déparlement  des  Bon  clies- 
<lu-Rhône  arborèrent  l'éler.dard 
de  l'insurrection  contre  la  con- 
vention. Ils  levèrent  une  armée 
à  Marseille,  qui  se  mit  en  mou- 
vement pour  marcher  au  secours 
des  Lyonnais.  A  cette  époqu»'.  la 
ville  d'Avif^non  ce^^sait  d'être  le 
chef-lien  du  district  de  Vaucluse, 
incorporé  dans  le  déparlemrnt 
des  IJouches-du-RhAne  ,  cl  deve- 
nait le  chef-lieu  du  nouveau  dé- 
partement de  Vaucbise.  Le  direc- 
toire du  déj)artementdes  Boucbes- 
dii-Rhônc  avait  placé  à  côté  du 


VIA  457 

général  de  l'armée  marseillaise 
quelques  comtnissaires  civils,  les- 
quels donnèrent  ordre  aux  admi- 
nistrateurs du  district  d'Avignon 
de  faire  préparer  les  vivres  et  les 
logenieus  pour  l'armée  marseil- 
laise. Les  administrateurs  du  dis- 
trict de  Vaucluse  répondirent  qu'A- 
vignon ne  faisait  plus  partie  du 
département  des  Bouches  -  du- 
Rhône,  et  que  si  Marseille  mé- 
connaissait le  décret  de  la  con- 
vention qui  créait  le  département 
de  Vaucluse,  Avignon  saurait  le 
faire  respecter  à  coups  de  canon. 
Sur  cette  réponse,  les  Marseillais, 
au  nombre  de  ^,ono  homtnes , 
ayant  avec  eux  ao  pièces  d'artil- 
lerie la  plupart  de  gros  calibre, 
vinrent  occuper  le  villnge  de  No- 
ves,  sur  la  rive  gauche  de  la  Do- 
rance,  rivière  qui  sépare  le  dé- 
partement des  Boucb.es-du-Rhône 
de  celui  de  Vaucluse;  les  Avi- 
gnonais,  au  non)bre  de  800  hom- 
mes, occu pèlent  la  rive  opposée; 
ils  n'avaient  que  deux  vieilles  cou- 
leuvrines  de  trois  livres.  D'abord 
on  se  caoonna  de  part  et  d'autre. 
Le  lit  de  la  IJiirance  est  très- 
large,  et  SCS  eaux  en  changent 
50uv«;nt  ;  elles  coulaient  alors  sous 
la  chaussée  de  Noves;  le  ponton 
èlait  du  côté  et  au  pouvoir  des 
Marseillais  ;  déjà  on  les  aperce- 
vait y  entrant,  quand  le  comman- 
dant des  Aviguonais  demande 
quelqu'im  <.'e  bonne  volonté  pour 
aller  couper  la  cnrde,  à  l'aide  de 
la(|uelle  le  ponton  allait  ^Ire  di- 
rigé sur  la  rive  droite.  \,k  jeune 
Vinla  se  présente;  le  ctunniantlant 
le  repousse  et  .sourit,  l'enfant 
s'indigne;;  il  s'élance  sur  une  ha- 
che, et  part  coujme  l'éclair;  un 
de  *C9  coMili«r,ipU>s  court  après  lui; 


458 


VIL 


arrivé,  au  milieu  de  plusieurs 
décharges»  au  pied  du  poleau  où 
la  corde  du  bac  était  allachée ,  il 
^lait  déjà  parvenu  à  la  hacher  à 
moitié,  quand  il  fut  atteint  d'une 
balle  qui  lui  traversa  la  poitrine. 
Il  tomba,  en  disant  en  provençal  : 
Qu'on  ne  le  dise  pas  à  ma  mère  ;  je 
meurs  pour  la  liberté!  Ces  der- 
nières paroles  furent  entendues 
par  son  condiscijde,  appelé  Gui- 
uaud,  qui  s'était  hlolli  dans  un 
ravin.  Les  Marseillais  passèrent 
la  Uurance  ,  et  jetèrent  dans  les 
flots  le  corps  de  cet  illustre  en- 
l'aût,  à  qui  la  nature  n'avait  rien 
épargné  du  côté  de  la  beauté.  La 
convention  nationale  décréta  que 
s.on  buste  et  celui  du  jeune  Bar- 
ra seraient  portés  au  l'authéon. 
Eu  attendant,  ils  lurent  placés 
dans  la  salle  de  ses  séances,  l'un 
à  la  droite,  l'aiilre  à  la  gauche 
du  bureau   du  président. 

VILLELE  (le  COMTE  Joseph  de), 
ministre  des  finances,  président 
du  conseil  des  ministres,  cheva- 
lier des  ordres  du  roi,  est  né  à 
Toulouse,  en  1773.  ftl.  le  comte 
de  Villéle  doit,  comme  tant  d'au- 
tres, au  nouvel  ordre  des  choses, 
sa  Ibrlune  et  son  élévation  ;  ce- 
pendant il  s'est  prononcé  avec 
beaucoup  de  chaleur,  contre  les 
principes  qui  ont  produit  la  révo- 
lution ,  et  sur  lesquels  la  monar- 
chie actuelle  est  fondée  ;  il  est  du 
nombre  de  ces  enfans  ingrats  qui 
maudissent  leur  mère  ,  car  «ans  la 
révolution,  MM.  de  Corbière  ,  de 
PeyronnetetdeVillèle,  ne  seraient 
jamais  sortis  de  leur  obscurité  pri- 
mitive. Il  a  fallu  un  mouvement 
extraordinaire  dans  les  choses  et 
dans  les  hommes  ,  pour  les  pous- 
ser sur  les  hauteurs  de  la  société. 


VIL 

Ce  sont  là  de  ces  jeux  de  la  fortu- 
ne qui  surprennent  tout  le  mon- 
de, excepté  ceux  qui  en  sont  l'ob- 
jet. (]e  n'est  qu'après  des  recher- 
ches très-pénibles,  que  nous  avons 
rasseut.blé  quelques  détails  sur  la 
première  partie  de  l'existence  de 
M.  le  comte  de  Villèle.  Il  paraît 
qu'il  fut  admis  de  très  bonne  heu- 
re dans  la  marine  militaire,  qu'il 
fit  une  campagne  à  Saint-Domin- 
gue, et  revint  dans  sa  patrie  en 
1791.  Peu  de  temps  après  il  ac- 
coiripagna  dans  l'Inde ,  M.  de 
Saint-Félix,  qui  venait  d'être  nom- 
mé commandant  d'une  station. 
M.  de  Saint-Félix  devint  vice-a- 
miral, et  fut  forcé  en  1793,  de  se 
réfugier  à  l'île  de  Bourbon.  Son 
attat'hemerjt  à  l'ancien  régime  fut 
la  cause  ou  le  prétexte  de  celte 
persécution.  M.  de  Villèle  suivit 
le  sort  de  son  protecteur,  fixa  sa 
résidence  dans  l'île  de  Bourbon  , 
et  y  devint  membre  de  l'assemblée 
coloniale;  c'est  là  que  M.  de  Vil- 
lèle entouré  de  nègres,  a  étudié 
l'îul  -de  gouverner  les  hommes, 
dont  il  fait  depuis  quelques  an- 
nées, une  si  heureuse  application. 
C'est  là  qu'il  a  puisé  ses  notions 
de  liberté  civile,  ses  idées  du  jus- 
te et  de  l'injuste,  et  ses  théories  fi- 
nancières. Cette  éducation  finie, 
il  revint  en  France  en  1807,  et  se 
fixa  à  Toulouse  ov'i  il  resta  inaper- 
çu jusqu'en  18 14-  La  société  se 
trouvant  alors  fortement  agitée, 
M.  de  Villèle  se  jeta  dans  le  mou- 
vement, et  fit  paraître  une  brochu- 
re que  nous  avons  eue  sous  les 
yeux.  L'auteur  de  cet  écrit  de  cir- 
constance ,  composé  de  verve  et 
sans  arrière-pensée,  développe  ses 
principes  politiques,  et  repousse 
avec  force  le  système  de  gouver- 


i^ 


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^/iCJe  W</<' 


I 


VIL 

nemetU  n-prcsenlatif ,  «ont  il  est 
aujourcJ'hiii  ministre  ;  il  s'y  élève 
avec  véhéiueiice  contre  l'établis- 
sement d'une  charte  constitulion- 
nelle.  I.e  pou  voir  ab'^olii  dans  ton- 
te son  intensité,  lui  paraît  le  seul 
mode  de  jçonvernemcnt  convena- 
ble à  la  France,  elilnen'pugr.epas, 
pour  y  parvenir,  à  l'emploi   des 
moyens  extrêmes.  L'ouvrage  qui 
renl'ermait  ces  principes  de  légis- 
lation africaine,  eut  peu  de  succès, 
et  il  ne  doit  qu'à  la  célébrité  inat- 
tendue de  son  auteur,  de  n'être 
pas  entièrement  tombé  dans  Tou- 
bli   qui  paraissait   sa   destination 
naturelle.  En  i8i5,  M.  de  Villéle 
fut  élu  par  le  déparlement  de  la 
Haule-Garonne ,    membre   de    la 
chambre  des  députés  apj>elée  avec 
trop  de  précifMlation ,  la  chamh'e 
introuvable.  La  session  s'ouvrit  le 
1"  octobre  d«î  la  même  année.  Ce 
fut  aussi  le  commmencement  des 
nouvelles  deslmées  de  M.  de  Vil- 
léle. 11  fit  constan'iment  partie  de 
la    majorité  de   cette  assemblée, 
qui,  sous  le  prétexte  d'anéantir  la 
révolution  ,     ne     tendait    à    rien 
moins  qu'rt  b^idrverser  enlièie- 
ment  la  société,  et  à  élever  sur  les 
ruines  des  libertés  publiques    et 
privées,  le  monstrueux  édifice  d'u- 
ne royauté  surmontée  d'aristocra- 
tie. C«'8  nouveatjx  aristocrates  aus- 
si turbulefis  et  vindicatifs,  qu'ils 
s'étaient  montrés  jus(|u'alors  pai- 
sibles et  résigné}»,  voulaient  eflVc- 
tuer  en  un  jour,  ce  qui  ne  jxiuvuit 
être  sar»s  doute  que  l'œuvre   du 
temps  et  de  In  pali(!nce.  W.  de  Vil- 
fèlc  plus  confiant  dan?  l'avenir,  se 
fit  reniarquiT  par  un  ton  mesuré 
et  une  espèce  de  modération,  qui 
contrastaient   fortement  avec  le 
langage  souvent  fréu'-tiquc  de  ses 


VIL 


459 


collègues.  Il  avait  compris  qu'une 
irruption  trop  soudaine    et    trop 
vive  sur  les  libertés  nationales, 
pouvait  compromettre  la  faction 
des  privilèges,   mais  l'iinpulsi<)ij 
élait  donnée.  La  majorité  se  pré- 
cipitait de  plus  en  plus  vers  l'abî- 
uie  ouvert  sous  ses  pas,  lorsque  la 
célèbre  ordonnance  du  5  septem- 
bre 181G,  la  força  d'ajourner  ses 
sinistre?  projet>.  iVI.  de  Villéle  re- 
tourna dans  se»  foyers;  mais  une 
nouvelle  nomination  le  ramena  en 
1817,   dans  la  chambre  élective, 
où  la  faction  dite  ullra-tiwnarchi- 
qufl,  se  trouva  en  minorité.  M.  de 
Villéle  fit  partie  de  celte  minorité, 
et  c'était  un  excellent  calcul.  Cette 
fraction  de  l'assemblée  ne  comp- 
tait dans  son  sein  nucim  talent  di- 
i^ne  d'être  cité.    M.  de  Villéle  qui 
énonce  assez  facilement  des  cho- 
tes   communes,   parut    un    aigle 
dans  son  parti,  et  telle  élait  la  di- 
sette  d'orateurs  ultra-royalistes, 
qtie  M.  de  Coibièn;  lui-même  y 
acquit  une  espèce  de  réputation. 
M.  de  Villéle  par  une  sorte  d'ins- 
tinct qui  l'a  bien  servi,  s'attacha 
aux  matières  de  finances;  et  depuis 
cette  époque,  tous  nos  budgets  ont 
porté  les  stigmates  do    sou   élo- 
quence. Cependant  le  crédit  de  la 
faction     continuait    à    s'aiTaiblir  , 
lorsque  la  fin  tragique  de   M.  le 
duc  deBerry,   vint  réveiller  ses 
espérances.  Il  fallut  un  crime  aus- 
si odieux  à  tous  le»;  Français,  pour 
donner  de  l'importance  au  parti 
qui  recoimaissail  alors  ftLM.  de  Vil- 
Ule  et  de  Corbière  pour  ses  chefs. 
Une  nouvelle  loi  d'élection  ayant 
assuré   au  pouvoir  le  monopole 
des  nouveaux  choix  de  députés, 
et  un  nouveau   ministère  s'étnnt 
formé,  iVJ.  de  Villéle  fui  élevé  eu 


46o 


VIL 


i8'io,  à  la  vicn-présidence  de  la 
chambre;  cette  nomination  attes- 
ta les  pro{jrès  fie  l'influence  du 
parti  opposé  aux  libertés  consti- 
tutionnelles, et  il  l'ut  permis  à  M. 
de  Villèle  d'aspirer  sans  témérité 
an  maniement  du  pouvoir.  Le  mi- 
nistère surnommé  indifTéremment 
Pasquier  ou  Siméon,  crut  pou- 
voir enrôler  sous  ses  dr.ipeaux  le 
côté  droit  de  la  chambre.  Il  s'i- 
magina quec'élaitlàleseul  moyen 
de  se  soutenir.  MM.  de  Villéle  et 
de  Corbière  reçurent  le  titre  et  les 
appointeinens  de  ministres;  ils 
assistaient  aux  conseils,  mais  ils 
n'avaient  point  de  département. 
C'étaient  des  ministres  à  la  suite, 
des  espèces  de  doubles  tout  prêts 
à  remplacer  les  chefs  d'emploi. 
Un  tel  ministère  ne  pouvait  con- 
venir à  [)er5onne,  aussi  fut-il  bien- 
tôt renversé  aux  applaudissemens 
de  tous  les  parti;*.  Mi\l.  de  Villèle, 
de  Corbière  et  de  Feyronnet  de  vin- 
rent ministres;  le  parti  respira  et 
fut  au  comble  de  ses  vœux.  Mais  des 
événeinens  extraordinaires  le  for- 
cèrent à  ralentir  sa  marche.  Le 
pouvoir  absolu  miné  de  toutes 
parts,  s'écroula  en  Espagne,  la 
commotion  se  fit  sentir  à  Naples 
et  dans  le  IMémont;  la  sainte  al- 
liance en  frémit.  Les  rois  absolus 
accoururent  à  Vérone  ,  et  chargè- 
rent le  gouvernement  français 
d'éteindi'e  en  Espagne,  la  fermen- 
tation populaire,  et  d'y  rétablir 
l'ancien  ordre  des  choses.  M.  de  Vil- 
lèle ne  goûta  pas  d'abord  la  [)ro- 
position  ;  mais  il  se  trouva  forcé 
d'y  souscrire.  Cent  mille  Français 
se  montrèrent  dans  la  péninsule, 
sons  les  ordres  de  S.  A.  R.  iM.  le 
duc  d'Angoulème.  La  discipline 
des  troupes,  cl  la  magnanimité  de 


VIN 

leur  auguste  chef,  jetèrent  sur 
celte  expédition  tout  l'éclat  qu'el- 
le pouvait  recevoir.  Les  généreu- 
ses espérances  du  prince  furent 
trompées;  il  voulait  vaincre  pour 
le  bonheur  de  l'Espagne;  mais  la 
faiblesse  et  rinca[;acilé  du  minis- 
tère français  a  dùrangé  tous  ces 
projets ,  et  l'anarchie  dévore  le 
fruit  lie  nos  victoires!  cependant 
il  fallait  satisfaire  aux  engage- 
mens  contractés  avec  le  parti  do- 
minant, qui  se  subdivise  en  plu- 
sieurs fractions,  dont  les  pins  im- 
portantes se  coujposent  de  l'émi- 
gration, et  de  la  faction  ullra- 
montaine  :  il  était  dilficile  d'y  par- 
venir; de  là  est  venue  la  nécessi- 
té de  ces  manœuvres  odieuses  pra- 
tiquées à  l'époque  des  dernières 
élections,  si  fortement  improuvées 
des  honnêtes  gens  de  tous  les  par- 
tis ,  que  les  ministres  »ux-mê- 
mes,  et  en  particulier  i\l.  de  Villè- 
le ,  ont  cru  <levoir  les  désavouer 
publiquement,  tout  en  en  recueil- 
lant le  fruit.  C'est  (le  cette  source 
que  sont  jaillis  le  jésuitisme,  la 
septennalilé,  le  milliard  de  l'émi- 
gration et  la  conversion  des  3  pour 
loo.  C'est  ici  que  nous  quittons 
M.  de  Villèle  très-embarrassé  de 
ses  mesures,  n'osant  mesurer  l'a- 
venir, vivant  au  jour  le  jour,  et 
prêt  à  f.dre  bien  d'autres  sacrifices 
pour  conserverie  pouvoir,  auquel 
il  est  si  péniblement  monté.  Mais 
la  France  e.-père  dans  la  bonté  et 
la  sagesse  royale  :  sou  attente  ne 
sera  pas  tromnée. 

VINOT  (le  baron  Gilbert-Ju- 
lien), maréchal-de-camp,  né  à 
Soissons  le  17  juillet  1772,  fil» 
d'un  avocat  au  parlement,  com- 
?nença  sa  carrière  militaire  dans 
le  i"  bataillon  de  Paris,  où  il  en- 


VIN 

Ira  comme  grenadier  le  5o  juillet 
irga  ,  à  l'époque  où  loule  la  jeu- 
nesse française  se  portait  sur  les 
frontières  pour  défendre  le  sol  de 
la  patrie.  Il  quitta  son  bataillon 
pour  le  26'  régiment  de  cavale- 
rie,  où  il  fut  nommé  successive- 
ment fourier,  maréclial-des  logis, 
sous  -  lieutenant ,  puis  incorporé 
dans  le  22'  régiment  de  chasseurs 
à  cheval ,  le  9  phiviôse  an  3  ;  lieu- 
tenant au  même  régiment  le  28 
brumaire  an  8,  capitaine  le  25 
pluviôse  même  année,  chef  d'es- 
cadron le  i4  mars  1806,  colonel 
à  la  suile  le  2S  août  1808,  colonel 
titulaire  du  2'-t*  régiment  de  hus- 
sards,  ci-d«tvant  Chamborand,  le 
3  mars  i8i3.  il  a  fait  les  campa- 
gnes drt  I  7f)2  à  l'année  du  Nord, 
de  1793  à  l'armée  des  Pyrénées- 
Orierjtales ,  enfin  de  1791,  '7'.P, 
1796,  à  l'armée  d'Italie.  Il  fil  par- 
lie  de  l'armée d'iigypte,  et  fut  em- 
ployé aux  armées  do  Pologne  et 
d'Allemagne  en  180G  et  1807,  et 
à  l'armée  d'Espagne,  depuis  1808 
jusqu'à  l'évacuation,  lin  iSi.^j,  il 
était  employé  comtne  comman- 
dant au  corps  détaché  prés  de 
Paris.  M.  Vinot  s'est  distingué 
particulièrement  à  la  bataille  de 
IVio-Seco,où  il  commandait  une 
brigade  de  cavalerie,  quoiqu'il  ne 
fût  que  colonel.  11  a  contmandé 
le  2*  régiment  de  hussards  pendant 
quatre  ans,  vt  se  trouvait  à  la  tête 
de  ce  régiment  en  Espagne.  Nom- 
mé gouverneur  de  la  l'.onda  «-l 
des  pays  environnaus  ,  il  s'y  main- 
tint avec  /j5o  hommes  pendant 
plus  de  Irois  mois,  contre  les  ef- 
Ibrls  d'une  pop(dation  insurgée  et 
les  attaques  réitérées  de  plusieurfl 
corps  nombreux.  A  Fuentès  de 
Canlos ,  en  Ëstramadure  ,  le  colo- 


WAL 


util 


nel  Vinot,  à  la  tête  du  2*  de  hus- 
sards, contribua  puissamment  :\ 
enlever  une  batterie  de  i5  pièces 
de  canon.  Il  se  distingua  à  la  ba- 
taille de  Gébora,  sous  les  murs 
de  Badajox.  A  la  bataille  d'Al- 
bucra,  il  chargea  à  la  tête  de  son 
régiment,  et  protégea  l'arlillerie 
commandée  par  le  général  Bou- 
chu  ,  qui  ne  se  retira  qu'après 
avoir  épuisé  toutes  ses  munitions. 
A  Yerumana ,  il  surprit  un  esca- 
dron anglais.  Dans  une  décou- 
verte sur  la  place  d'Elvos  ,  il  défit 
entièremeiU  un  régiment  hano- 
vricn.  Dans  la  campagne  de  181 5. 
le  général  Vinot  commandait  une 
brigade  de  cavalerie;  à  la  bataille 
de  Fleurus,  il  fut  blessé  danj^e- 
reusemenl.  .4près  avoir  versé  son 
sang  dans  plusieurs  occasions  pour 
son  pays,  cet  ofïieier-général  s'est 
retiré,  eu  181 5,  dans  le  départe- 
mejit  des  Basses  -  Pyrénées,  où 
M.  de  (^lermont -Tonnerre  ,  mi- 
nistre de  la  guerre  ,  lui  a  fait 
connaître  son  admission  à  la  re- 
traite. 

WALCKKNAER  (Charles- 
Athanase],  membre  de  linslilut 
(académie  royale  des  inscriptions 
et  bellt's-letires  )  ,  rhevalier  de  la 
Itgion-d'honneur,  l'im  d(;s  maires 
dr  Paris,  et  secrétaire-général  do 
la  préfecture  du  département  de 
la  beine,  est  né  i\  Paris  le  25  dé- 
cembre 1771.  II  a  con)mi'noé  ses 
éludes  dans  cette  ville,  et  par  suite 
des  premiers  évédemens  de  la  ré- 
volution ,  voya^'eant  dans  les 
Prty»-Bas  et  en  Aujïletcrre,  il  les 
a  continuées  à  Glasf;ow  en  Ecosse, 
et  les  u  terMjinées  a  Paris  A  l'école 
des  ponts-et-chaussées  et  à  l'école 
p(dylechnique.  Sans  ambition  , 
ami  de  l'étude  et  indépendant  par 


46a 


WAL 


sa  fortune,  il  paraîtrait  n'avoir  bri- 
gué îiucune  place  ;  et  durant  huit 
années  de  la  révolution,  loin  des 
affaires  publiques,  il  aurait  vécu 
dans  une  de  ses  terres  à  huit  lieues 
de  Paris  "On  prélend  même  que 
nommé  professeur  d'histoire  à 
Montpellier  à  la  formation  de  l'u- 
niversité, iln'accepta  point.  Safor- 
tune  littéraire  et  administrative 
date  de  la  fui  de  18 13,  époque  où 
le  gouvernement  impérial  succom- 
bait insensiblement  sous  les  atta- 
ques de  ses  ennemis  de  l'intérieur 
et  de  l'extérieur.  Ce  fut  au  mois  d'oc- 
tobre de  cette  année  que  M.  Walc- 
kenaer  devint  membre  de  l'insti- 
tut impérial,  classe  d'histoire  et 
de  littérature  ancienne.  Une  or- 
donnance royale  le  nomma  che- 
valier de  la  légion-d'honneur  le 
Î9 octobre  181 4;  »'tie  autre  ordon- 
nance royale  du  ai  mars  1816,  qui 
réorganisa  et  épura  l'institut,  le 
nomma  membre  de  l'académie 
royale  des  inscriptions  et  belles- 
lettres;  une  troisième  ordonnance 
royale  du  27  du  même  mois,  le 
nomma  maire  du  cinquième  ar- 
rondissement de  Paris,  place  qu'il 
occupa  peu  de  temps;  enûn  une 
quatrième  ordonnance  du  i5  mai 
de  la  même  année,  le  porta  aux 
fonctions  de  secrétaire-général  de 
la  préfecture  du  département  de 
la  Seîne.  La  place  de  maître  des 
requêtes  et  L-  titre  de  baron  ,  eu 
1825,  augmentèrent  le  nombre 
des  faveurs  ministérielles.  Nous 
empruntons  la  liste  des  travaux 
de  M.  Wxdckenaer,  liste  que  nous 
abrégeons  un  peu,  à  une  notice 
biographique.  Ce  sont  :  1°  Essai 
sur  l' histoire  de  l'espèce  humaine , 
in-8°,  1798;  2"  l'Jle  de  Wight 
ou   Charles  et  Angelina ,   2   vol. 


WAL 

iu-i2,  1798,  181 3.  Ce  roman  a 
été  traduit  <'n  allemand,  Magde- 
bourg,  i8o5  ;  5°  Faune  parisienne 
on  Histoire  ahri'gre  des  insectes 
des  environs  de  Paris  ,  classés  d' a- 
près  le  système  de  Fabricius.  Pa- 
ris, 1802,  2  vol.  in-8".  L'ouvrage 
est  précédé  d'un  discours  sur  les 
insectes  en  général ,  qui  a  été  re- 
marqué. Ce  qui  concerne  les  arai- 
gnées et  certairfs  hyménoptères 
offre  des  observations  entièrement 
neuves.  4°  Géographie  moderne , 
rédigée  sur  un  nouveau  plan^  tra- 
duite de  l'anglais  de  Pinkerlon , 
augmentée  d'un  tiers  par  les  no- 
tes du  traducteur,  6  vol.  in-8°,  et 
allas  in-folio,  Paris,  i8o4;  id. , 
nouvelle  édition  tôt. dément  re- 
fondue, tom.  I  et  II,  1812.  Le 
troisième  volume  a  été  imprimé 
aux  trois  quarts,  mais  n'a  pas  été 
publié.  L'abrégé  du  même  ou- 
vrage en  un  gros  volume  in-S" , 
avec  cartes,  a  eu  trois  éditions, 
i8o5  ,  i8o6,  1811.  5°  Tableau  des 
Aranéides.  Paris,  i8o5,  grand 
in-S"  ;  6°  Histoire  naturelle  des 
Aranéides.  1807.  1808.  L'ouvrage 
devait  avoir  trente  livraisons  ;  il 
n'en  a  paru  que  cinq,  tirées  à  pe- 
tit nombre,  et  avec  cinquante  fi- 
gures. L'auteur,  dit-on  ,  se  pro- 
pose de  publier  cet  ouvrage  sous 
une  autre  forme.  7°  Dicuili  liber 
de  mensura  orbis  terrée ,  nunc  pri- 
murn  in  lucem  editus,  1807,  in-S"  ; 
8°  Voyages  dans  l' Amérique  m.éri^ 
dionale,  par  don  Félix  d'Azara , 
recueillis  et  publiés  par  C.  A. 
Walckenaer,  avec  des  notes  de  M. 
Cuvier.  Pari^^,  1809,  4  "^'o'-  Jf^-^" 
et  atlas.  Il  y  en  a  doux  traductions 
allemandes.  M.  Walckenaer  a  tra- 
duit une  grande  partie  de  cet  ou- 
vrage de  l'espagnol.   Il  a  mis  de 


AVAL 

i'ortJre  dan««  l'ouvrage  «  el  y  a 
ujoiité  (les  noUîs.  Les  ihjiix  der- 
niers •volume*,  qui  concerneiif  les 
oi>eaiix,  sont  de  ftl.  Sonnini.  La 
Notice  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de 
don  Azara,  par  M.  AVaIckenaer,  a 
été  imprimée  à  part,  iii-S".  Ç)'  Cos- 
mologie Ou  Description  générale  de 
la  terre ^  etc.  Paris,  i8i5,  in- 8° 
de  800  pages  ;  9°  Mémoires  pour 
sertir  à  i'fiistoire  naturelle  des  a- 
heilles  solitaires  qui  composent  le 
genre  halicte.  Paris,  in-8*,  1817; 
10°  Carte  de  l'Egypte  et  Carte  du 
Delta,  sur  lesquelles  on  a  tracé 
les  ilint'-raires  anciens,  1812.  Cor- 
sica  antiqua  ex  antiquis  monumen- 
tis  eruta.  Ces  cartes  ont  été  gra- 
vées et  distribuées  en  assez  grand 
nombre  à  des  amis  de  l'auteur, 
mais  elles  n'cuil  jx)int  été  pu!)liées; 
elles  font  relatives  aux  ouvrages 
suivans  ,  dont  l'impression  est 
commencée  depuis  loug-len)ps. 
1 1'  I  tinéraire  de  l'Egypte  ancienne, 
précédé  de  recherches  sur  le  mille 
romain ,  in-4''  de  5oo  pages ,  avec 
trois  cartes.  Itinéraire  des  Gaules 
cisalpine  et  transalpine,  in-4°  de 
600  pages.  Géographie  historique 
des  Gaules  cisalpine  et  transalpine 
jusqu'à  la  chute  de  l'empire  romain 
en  occident,  in-4".  •2°  Divers  Mé- 
moires lus  à  l'institut  sur  les  Pyles 
caspiennes;  sur  les  itinéraires  d'A- 
lexandrie et  de  l'Inde  ;  sur  l'Apu- 
lie  Peucétieune;  sur  Anderilum, 
capitale  dés  Gabali  (  voy.  les  liap- 
por/s  des  travaux  de  la  classe  d'his- 
toire cl  de  littéralurc,  par  M.  Dau- 
nou ,  I"  juillet  1814).  H  ■'»  déjà 
paru  un  «xlrait  des  découvcrlefl 
de  l'auteur  sur  la  géographie  an- 
cienne d'Orient  (c'est  le  plus  im- 
portant de  tous  SCS  travaux),  dans 
le  Classical  journal;  (XVI ,  4^*7)- 


M'AR 


46:s 


Cet  extrait,  dont  on  attend  la  $ui- 
ti;,  et  que  l'on  croit  de  la  main  de 
RI.  W.  Onselej,  est  plus  anjple  et 
mieux  fait  que  celui  du  rapport 
dt;  l'institut.  iS"  Mémoires  sur  les 
progrès  des  connaissances  géogra- 
phiques à  l'est  et  au  sud  de  l' Asie, 
et  sur  l'origine  du  peuple  mn'ais. 
Un  extrait  a  élé  lu  par  l'auteur  à 
la  dernière  séance  publique.  14° 
Le  Monde  maritime  ou  Tableau 
géographique  et  historique  de  l'Ar- 
chipel d'Orient ,  de  la  Polynésie  et 
de  l'Ausiralasie.  Pari'*,  1819.  Cet 
ouvrage  s'imprime  sous  deux  for- 
mats, chez  Firmin  Didot,  in-8" 
et  in-18.  Il  aura  3  vol.  in-S"  et 
13  vol.  in-  18.  Les  quatre  pre- 
miers volumes  ont  paru.  iS"  No- 
tice historique  et  gé;ographique  sur 
l'itinéraire  de  Jérusalem  (  d.ms 
V Histoire  des  Croisades  ,  de  M. 
Mifhaïul  ) ,  tirée  à  part  et  donnée 
en  présent.  16°  Dissertation  sur 
l'or  et  l'argent  considérés  comme 
marchandise  et  comme  monnaie. 
(  Dans  le  Journal  d'économie  po- 
litique de  Rœdercr).  17'  Une  No- 
tice sur  les  UjaUu-icrits  de  Montes- 
quieu, et  une  Lettre  sur  la  Ta- 
rentule, dans  les  Archives  litté- 
raires. 18"  Diverses  dissertations 
ou  extraits  raisonnes  de  livres 
dans  le  Magasin  encyclopédique , 
dans  le  Mercure  étranger,  dan»  le» 
Annales  des  Voyages.  19"  Notes 
sur  la  géographie  de  Virgile,  in- 
sérées dans  lu  seconde  édition  de 
la  traduction  de  l'Enéide  de  De- 
lille.  M.  Walekenacr  a  donné  ime 
Histoire  de  la  tie  et  des  outrages 
de  La  Fontaine,  a  vol.  in-8",  avec 
portrait,  etc. 

>VAIIUKN  (sin  JouN  Boriase), 
amiral  anglais,  de  l'ancienne  fa- 
mille des  UoRLASB,  originaire  du 


m 


WAR 


pays  de  Cornouailles,  est  né  eu 
1754.  Il  commença  .«es  éludes  à 
Bicesler,  au  comté  d'Oxford,  les 
continua  à  l'école  de  AVinchesler, 
et  les  cessa  tout-.'»-coup  pour  s'en- 
rôler dans  la  marine.,  Sa  liitnille, 
informée  de  cette  brusque  déter- 
mination,  loin  de  lui  en  montrer 
du  mécontentement,  s'employa 
pour  lui  faire  obtenir  l'emploi  de 
midshipman  ,  et  il  fit  en  cette  qua- 
lité un  voyage  dans  la  mer  du 
Nord,  sur  le  sloop  l' Alderney.  De 
retour  en  Angleterre ,  il  reprit  le 
cours  de  ses  éludes,  qu'il  termina 
à  l'université  de  Cambridge;  il  y 
reçut,  en  1776,  le  rliplôme  de 
maître-ès-arls.  Membre  du  par- 
lement, où  il  représenta  pendant 
deux  années  le  bourg  de  Grcat- 
Marlow,  il  fut  créé  baronnet,  et 
passa  en  Amérique  sous  les  or- 
dres de  ramirul  Howe.  Peu  après, 
en  1779.  il  obtint  le  commande- 
ment d'un  sloop  de  guerre;  en 
1 78  I ,  le  commaudement ,  comme 
capitaine,  de  l' Ariane ,  dont  il  se 
démit  pour  prendre  celui  de  la 
Cléopâlre.  Dans  la  guerre  contre 
la  France,  au  commencement  de 
la  révolnlion,  il  eut  sous  ses  or- 
dres la  Flora  y  sur  laquelle  il  ar- 
bora son  pavillon  en  qualité  de 
«omniodore  d'une  escadrille  em- 
ployée dans  le  canal.  11  s'empara, 
en  1794»  de  la  frégate  française 
ta  Pomone.  Chargé,  en  1795,  de 
porter  des  secours  aux  insurgés 
de  la  Bretagne,  il  fut  an  mom«;nt 
d'être  fait  prisonnier  par  l'amiral 
Villaret-Joyeuse.Le5juilIel(i795), 
avant  le  jour ,  il  débarqua  un 
corps  d'émigrés  prés  de  la  baie  de 
Quiberon,  lieu  que  la  conduite 
des  Anglais,  et  les  désastres  des 
royalistes  franc  a  is^,  ont  rendu  cé- 


>VAR 

lébre.  Sir  John  Warren  ,  lorsque 
les  dangers  furent  passés,  vint  en- 
core au  secours  des  émigrés , 
moins  malencontreusement  cette 
fois,  et  leur  livra  une  quantité 
considérable  de  poudre,  d'armes 
et  de  munitions.  A  l'époque  de 
l'insurrection  des  Irlarrdais,  en 
1798,  il  eut  le  commanden)enl 
d'une  forte  escadre,  et  parvint  à 
empêcher  les  vaisseaux  fratiçais 
de  secourir  les  insurgés  d'Irlande  : 
je  combat  des  deux  escadres  fut 
long  tt  sanglant;  mais  les  forces 
anglaises  étant  bien  supérieures  à 
celles  des  Français,  elles  parvin- 
rent à  leur  enlever  un  vaisseau 
de  ligne  et  trois  frégates.  Nommé 
en  récom])ense  contre-amiral,  il 
se  réunit  à  la  flotte  du  canal,  et 
croisa,  en  1801,  sur  les  côtes  de 
France.  Néanmois  l'amiral  Gan- 
thaume,  à  la  poursuite  duquel  il 
se  mit,  parvint  à  lui  éeîiapper,  et 
se  retira  vers  les  côtes  d'Egypte. 
Ambassadeur  à  Saint-Pétersbourg, 
à  la  suite  de  la  paix  d'Amiens,  il 
eut  bientôt  une  mission  relative 
à  l'île  de  Malte,  et,  à  la  reprise 
des  hostilités  avec  les  Élals-Lnis, 
lecommandeinentde  l'escadre  en- 
voyée contre  eux.  Peu  après,  il 
fut  remplacé  par  lord  Cocbrane. 
Sir  John  Warren  a  publié  un  ou- 
vrage qui  a  obtenu  beaucoup  de 
succès  dans  sa  patrie ,  c'est  ua 
Aperçu  des  forces  navales  de  la 
Grande-Bretagne ,  etc.  Cet  amiral 
a  été  nommé  successivement 
grand-cordon  de  l'ordre  du  Bain  , 
chevalier  du  Croissant,  et  con- 
seiller privé. 

WABREN  (JiCQrEs),  raajor- 
général  américain,  naquit  en  i7-i6. 
11  était  descendantdeRichardWar- 
ren  qui ,  un  des  premiers ,  s'établit 


à  IMymouth,  en  1620.  Jacques 
Warreii  fit  >es  éllHle^^  au  collège 
<rHiiward,  et  suivit  avec  honneur 
et  succès  la  canière  Ju  commerce. 
A  lu  mort  de  son  père  ,  arrivée  en 
I  ;-57  ,  il  lui  succéda  dans  la  place 
de  haut-shérif,  dont  il  resta  pour- 
vti  jusqu'à  l'époque  de  la  j^ucrre. 
«  Malgré  la  part  active  qu'il  prit 
dans  l'opposition  aux  mesures  du 
gouvernenient  anglais,  dit  l'au- 
teur d'une  notice  sur  AVarren ,  il 
fut  néanmoins  nommé,  en  1761, 
membre  de  la  cour  générale  ,  où 
il  soutint  parfailement  les  droits 
de  9011  pays.  Le  ministère  britan- 
nique, qui  connaissait  son  habi- 
leté et  qui  le  redoutait  dans  l'op- 
position, essaya  vainrement  de  le 
gagner  par  des  promesses  et  de 
l'intimider  par  des  menaces;  il 
résista  aux  unes  comn>e  aux  au- 
tres ,  et  rien  ne  put  altérer  son  in- 
corruptible intégrité.  En  «775,  il 
proposa  des  plans  pour  l'établis- 
sement de  comités  de  correspon- 
dance, qui  furent  généralement 
;)doptés  ,  et  refusa  ensuite  de  sié- 
ger au  premier  congrès.  Mais  a- 
près  la  mort  de  son  parent  le  gé- 
néral Warren,.il  accepta  la  prési- 
dence du  congrès  provincial,  qu'il 
garda  jusqu'au  naoment  où  les 
troupes  vinrent  à  New-Yorck ,  et 
qu'on  eut  établi  trois  déparlc- 
mens.  Deverm,  en  177C,  major- 
général  de  la  milice,  (|uoiqu'il 
n'eût  jamais  été  militaire  et  qu'il 
ne  connût  presque  rien  dans  coite 
partie,  il  s'acquitta  de  ses  fonc- 
tions avec  zèle;  fut  élu  ,  après  la 
foruiation   de   la  constitution   de 

I        l'état  de   Rlassachussetts,  orateur 
K    de  la  chambre  des  représentans  ; 
•     ft,  préférant  ensuite    servir  son 
pays  d'uue  manière  plus  active  ,  il 

T.   IL. 


AVAT 


^5 


accepta  dans  la  marine  un  emp!i)i 
dont  les  fonctions  étaient  lrès-l;i- 
borieuses.  »  W'arren,  à  qui  ses 
longs  et  utiles  services  avaient 
rendu  la  vie  privée  nécessaire, 
donna  sa  démission  des  difléren» 
emplois  qu'il  occupait;  mai.tbien- 
tôt  cédant  aux  instances  de  ses 
concitoyens,  il  accepta  une  place 
au  conseil  doïit  il  devint  prési- 
dent. Il  mourut  en  1808,  dauH 
la  8a*  armée  de  son  âge  ,  généra* 
lement  regretté. 

WATSON  (  Richard),  lord- 
évêque  de  Landafl",  meuibre  de  la 
société  royale  de  Londres,  etc., 
naquit  à  Éversham  ver»  i''5y,  et 
commença  ses  études  sous  la  di- 
rection de  son  père,  ecclésiasti- 
que instruit,  mais  que  sa  pauvreté 
avait  réduit  à  l'ob.scure  condition 
de  maître  d'école  à  Kendal.  Les 
heureuses  dispositions  de  Richard 
le  firent  envoyer  au  collège  de  la 
Trinité  de  Cambridge,  où  il  se 
distingua  par  un  grand  amour  de 
l'élude,  et  fut  bientôt  en  état  de 
prendre  tous  ses  degrés.  Nommi» 
directeur  d'un  collège,  il  donna 
des  soins  particuliers  au  duc  de 
Rutland,  l'un  de  ses  élèves,  qui, 
plus  tard,  devint  son  ami  et  son 
protecteur.  Richard  Watson  ayant 
été  pourvu,  eii  17O4  »  ''*!  I»*»  chair* 
de  chimie  !\  ruiuver>ilé  de  Cjun- 
bridge  ,  s'efforça  par  des  expé- 
riences qui  ne  furent  pas  sans  dan- 
ger pour  lui,  et  par  une  étud» 
constante,  à  remettre  en  honneur 
cette  science  qui  y  était  h  peu  près 
uiconnue;  succès  qui  lui  valut,  ea 
1771,  sa  nomination  en  qualité  d« 
membre  de  la  société  royale  do 
Londres.  Ses  connaissances  pro- 
fondes en  théologie  l'uvalcnt  por- 
té quelq«)C  temps  aiipar.ivant  aux' 

3w 


/ica 


WAT 


fVmcîions  de  iirofcssenr  roya!  de 
théologie  à  Cninbridge.  lin  lyrii, 
il  fui  r.liiirgo  de  prêcher  devant 
l'université  le  discours  anniver- 
snire  de  la  ro«l<niriition  anglaise, 
qu'il  fit  imprimer  sous  le  litre  de 
principes  de  la  révoliilion  juslifiés. 
EriirSo,  il  obtint  rarchidiaconat 
d'Ely,  et  snoces-sivement  la  cure 
de  Norlliwold  et  cHIe  de  Knap- 
loft.  Richard  Wat.son  donna  à  cette 
époque  son  J potogie  (di.  chrislia- 
Tiisme,  qu'il  dédia  à  Gibbon,  et 
qui  respire»  toute  la  douceur  (]'un 
ynx'ï  chrétien  et  toute  l'urbanité 
d'un  1  omme  bien  né.  »  Ses  Es- 
sais chimiques  parurent  en  178». 
L'année  sui?ante,  lord  Rutiand, 
son  ancien  élève,  lui  obtint  le 
siège  épiscopal  de  Landaff.  Celte 
distinction  et  l'estime  qu'il  avait 
j;énéra!ement  inspirée,  le  firent 
élire  ou  parlement.  Il  y  seconda 
Jes  ministres  qui  proposaient  un 
traité  commercial  avec  la  France, 
t't  se  réunit  à  l'opposition  pour 
détendre  les  droits  du  prince  de 
Galles.  Ami  de  la  France  cl  ap- 
probateur modéré  des  principes 
de  lu  révolution  française,  il  com- 
battit avec  force  le  ministère  qui 
voulait  intervenir  dans  les  af- 
l'airos  de  ce  pays.  Long -temps 
après  cependant,  et  par  un  senti- 
ment (le  palrioiistne  qu'aurait  dfï 
inodérer  le  caractère  (ionl  il  était 
revéhi,  il  approuva  publiquement 
Lt  {guerre,  et  soulinl ,  cii  »  7îX)  ' 
dans  une  brochure  intitulée  ; 
Adresse  au  peuple  anglais ,  f|ue 
la  guerre  devait  être  coulinuée, 
et  qu'il  fallait  à  cet  elTel  s'imposer 
lie  nouveaux  sacrifices.  «  Celte 
adresse,  dit-(>n,  valut  à  àon  au- 
teur des  reproches  très-ylfs  de  la 
part  de  plusieurs  écrivains  poli- 


>VAW 

tiques  ,  notamment  de  Wake/reldy 
qui  s'indigna  avec  raison  qu'un 
prélat  osât  dire  que  le  gouverne- 
ment pouvait  préle.ver  le  dixiè- 
me de  la  fortune  de  chaque  parti- 
culier ians  blesser  les  lois  divines 
et  humaines.  »  Le  savant  et  mo- 
deste ecclésiastique,  depuis  sa  pro- 
molion  ù  l'épiscopat,  avait  insen- 
siblement oublié  et  la  pauvreté 
béréditiîire  et  la  niodéralion  qui 
accompagne  rarement  la  fortune. 
Les  favuirs  du  pouvoir  le  sid>ju- 
gucrent  entièrement,  et  les  mi- 
nistres le  comptèrent  au  nombre 
de  leurs  partisans  intéressés.  Ses 
richesses  considérables  lui  permi- 
rent d'acheter  le  château  de  Cal- 
garlh,  dont  il  augmenta  les  reve- 
nus en  se  livrant  aux  soins  de  l'a- 
grfcullure  ; /es  lrava(jx  dans  ce 
genre  bu  firent  décerner  une  mé- 
daille d'or  par  la  société  des  arl«. 
Richard  Watson  mourut  le  5  juil- 
let 1816,  presque  octogénaire.  On 
doit  ajouter  à  la  liste  des  ouvrages 
que  nous  avons  cités,  un  Traité 
de  théologie^  à  l'usage  des  étudian» 
de  Cambridge,  pid)lié  en  1786, 
une  Apologie  de  la  Bible  (1796)  ; 
(c't'stune  réfutation  du  Siècledela 
Raison,  de  Thomas  Payne),  et  une 
Histoire  manuscrite  de  son  temps, 
«  dont  on  attend  avec  impatience 
la  publioalion  en  raison  des  docu- 
mens  qu'elle  doit  contenir.  » 

WAAVUZKCKT  (le  comte  Tho- 
mas), ministre  -  d'état  polonais, 
fl  %  ,  naquit  d'une  famille  distin- 
guée, et  devint,  en  1788,  mem- 
bre de  la  ilièle  chargée  d'amélio- 
rr^r  la  forme  du  gouvernement.  Il 
prit  une  pari  honorable  à  la  cons- 
titution de  1791  ,  qui  devait  sous- 
traire la  l*ob»gue  -^  l'anarchie  où 
la   plongeaieul    les   inuigues    de 


quelques  hoiniue^i  amhîtieiix,  et 
la  politique  des  gouvernemens  é- 
trangers  (|ui  voulaient  envahir  et 
se  partager  ce  malheureux  royaii- 
iniî.  Tant  d'efforts  réunis  mirent 
la  Pologne  au  pouToir  des  Russes. 
L'insurrection  de  «794»  ■"''^"S  h' 
direction  de  Kosciu>ko,  compta 
un  grand  nombre  de  partisans,  et 
avec  eux  le  comte  Wawrze<^ki. 
Cet  honorable  patriote,  qui  {«^lis- 
sait d'une  popularité  méritée, n'hé- 
sila  pas  dans  ce  danger  pressante 
renoncer  à  des  emplois  civils  qu'il 
avait  constamuieut  exercés,  pour 
prendre  les  armes.  Il  se  réunit  à 
(îiedroye,  cl  pénétra  avec  lui  en 
OourUnde.  Kosciusko  ayant  été^ 
lait  prisonnier  <\  la.  bataille  de  Ma- 
cijowice,  il  lui  succéda  dans  le 
commaiulement  général.  Se  por- 
tant aus^rlôt  dans  la  Lilhuanie,  il 
y  obtint  des  succès.  Il  fortilia 
Prague,  établit  un  conseil  de 
guerre,  institution  nouvelle  pour 
sescompatrioles,  et  réunit  tous  les 
moyens  dont  il  pouvait  disposer. 
Malheureusement  ces  moyen»  fu- 
rent insnflisans,  et  malgré  ses  ta- 
lens ,  son  activité,  8f»n  couraiçe, 
il  ne  put  défendre  le  faubourg  de 
Prague ,  que  Suwarnw  attaqua 
avec  des  forces  supérieures,  et 
<l(int  il  s'empara  le  4  novcuibre. 
Une  grande  partie  du  corps  qu'il 
commandait,  animé  de  son  esprit, 
ne  voulut  pa<  se  rendre  aux  Rus- 
ses, et  il  se  ri'lira  en  faisant  bonne 
rontenaru'e.  ^Vawrzi'cki  se  dirigea 
sur  le  palatinat  de  Sandomir,  où 
la  division  du  général  Giedroye 
(-ombalt')it  bravement  les  Prus- 
siens :  mais  bientôt  ses  troupes, 
épuisées  par  la  faim  cl  dépour- 
vues de  uMjuilirm»,  Tahandonnè- 
renl,  et  il  se  vil,  avec  un  petit 


WER 


467 


notnbre  de  braves,  pressé  par  le 
général  russe  Denisow  et  une  forte 
division  de  Prussiens.  Sou  courage 
ne  l'ab-uidonna  pas;  mais  écrasé  par 
le  nombre,  il  tomba  enfin  au  pou- 
voir du  général  russe ,  qui  l'en- 
voya prisonnier  à  Varsovie.  Inca- 
pable d'une  lâcheté,  cet  intrépide 
patriote  préféra  les  prisons  de 
Saiut-Pétcrsbourg  à  la  honte  do 
prêter  serinent  de  fidélité  à  la 
Russie.  L'avènement  de  Paul  I" 
à  l'empire  lui  valut  sa  liberté.  Il 
se  nttlra  et  Lilhuanie  ,  01^  il  vi- 
vait dans  la  retraite,  entouré  dî 
l'estime  générale.  En  i8i'j,  le 
général  Wawrzecki  voulut  donner 
aux  Frauçais  nue  preuve  de  l'at- 
tachement qu'il  pijrtail  à  leur  na- 
tion, l'amie  filèle  de  ce  peuple 
généreux.  Il  leva  A  ses  irais  un 
régiment  et  le  commanda  en  per- 
sonne. C'était  de  part  et  d'aulro 
le  dernier  soupir  des  braves.  Les 
malheurs  de  la  France  étaient  irré- 
parables, et  les  puissances  étran- 
gères envahirent  Paris.  1/empe- 
reur  Alexandre,  devenu  paisible 
possesseur  de  la  Pologne,  voulut 
s'attacher  sa  nouvelle  conquête 
en  couiblant  de  faveurs  ses  plus 
illustres  citoyens.  Le  général 
Wawrzecki  devint  sénateur  et  en- 
suite ministre  de  la  justice,  et  fut 
un  des  rédacteurs  de  la  dernière 
constitution  polonaise.  Le  général 
Wawrzecki  mourut  le  5  août  18  «6, 
regretté  égniement  des  Polonais 
et  des  Français. 

WERNEC.Kl  (le  BAnoiH  dk  )  , 
feld  -  maréchal  -  lieutenant  autri- 
chien ,  issu  d'ime  famille  noble, 
suivit  dès  sa  jeunesse  la  carrière 
de.s  armes,  et  commandait,  en 
1793,  dans  le  Rrnbani  en  qualité 
de  général-major.  11  prit  pari  au 


46B 


AVER 


siépe  de  Valericiennes,  et  fit  celui 
cit;  Duiikerque  sous  les  ordre.»  du 
général  comte  d'Alton  L'année 
suivante  ,  il  se  distingua  à  l'alfaire 
de  Cateau  -  Cambresi.*  ,  et  peu 
après,  il  fut  fait  t'eld-aiaréchal- 
lieuletiant.  En  177G,  sous  les  or- 
dres de  M.  de  SVarten»leben ,  il 
rendit  des  services  très-itnportans 
à  Welzlaer,  à  Limbourg,  à  Atn- 
berg  et  à  Wurtzbourg,  où,  après 
avoir  retardé  la  marche  du  gé- 
néral Jourdan,  il  parvint  ensuite 
à  précijtiter  sa  retraite.  Ces  succès 
lui  valurent  le  commandement  en 
chef  des  forces  autrichiennes  sur 
le  Bas-Rhin.  Il  était,  en  1797,  à 
Francfort,  où  son  invincible  pas- 
sion du  jeu  le  retenait,  tandis  que 
le  générai  Hoche  franchissait  le 
Rhin.  M.  de  Werneck,  qui  s'était 
reposé  sur  ses  généraux  du  soin 
de  défendre  le  front  de  sa  ligue, 
apprenant  les  succès  du  général 
français,  arriva  précipitamment  à 
»on  armée;  mais  il  était  trop  tard  : 
il  fut  le  témoin  de  sa  déroule  en- 
tière, déroute  qui,  dit-on,  fut  la 
plus  complète  qu'ait  offerte  la 
guerre  de  la  révolution.  Traduit 
à  un  conseil  de  guerre  comme 
«uspect  de  trahison,  il  fut  hono- 
rablement acquitté  sous  ce  rap- 


port;  mais  son  souverain  lui  or- 
donna de  prendre  sa  retraite,  qu'il 
reyul  avec  une  demi-peusiou.  Il 
fut  cependant  employé  de  nou- 
veau, eu  i8o5,  dans  l'armée  au- 
trithit-nne  de  Bavière.  L'incapa- 
cité du  général  Mack ,  sous  les 
ordres  duquel  il  était  devant  Llm, 
le  détermina,  ainsi  que  l'archiduc 
Ferdinand,  à  quitter  ce  général 
qui  sacrifiait  ses  troupes  par 
son  iaconcevable  impérilie.  M. 
de  Werueck  ne  put  cependant  évi- 
ter le  général  Murât,  qui  le  pour- 
suivait H  outrance  au  moment  où 
il  se  rôtirait  par  la  Franconie.  At- 
teint, défait,  il  fut  obligé  de  sa 
rendre.  Plusieurs  généraux  refu- 
sèrent de  se  soumettre  à  la  capitu- 
lation qu'il  ajrait  signée ,  et  s» 
réunirent  à  l'archiduc  F^dinand- 
{]n  nouveau  con-eil  de  guerre  fui 
appelé  ù  prononcer  sur  sa  con- 
duite. Il  n'y  put  comparaître  à 
cause  de  la  maladie  qui  le  rete- 
nait à  Koenigsgratz.  Tant  de  mal- 
heurs en  altérant  la  santé  de  M. de 
Werneck  lui  causèrent  peu  aprèi 
une  attaque  d'apoplexie, à  laquelle 
il  succomba.  Ce  général  fut  plui 
à  plaindre  qu'à  blâmer;  il  avait 
des  talens  et  beaucoup  de  cou- 
rage. 


FIN  DU  SUPPLÉME:^!'  GÉNÉRAL. 


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