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BIOGIAAPHIt:
UNIVKRSELLE
ANCIENNE ET IV^DKHNK
SI l»l»LÉME>r.
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JA— Kl.l .
imprimerie de f\ DCfX>NT ei Cwnp.,
rae JeGreoeJie-St-floooré, 5f».
bio(;raphie
UNIVliRSELLi:,
ANCIENNE KT MODKKNE
SUPPLÉMENT,
%T fRIVtK DR T(>L'> LRS MOMMKS <>ri »B »OJ«T FAIT IIEMAR«^UB» f*B
I.RUES icaiT^, I.KL'KH AC:TIoM> . ItLRS T4I R!«T's , IRIKx \tllTt:> OU
OCTtAOI EjrrtÙlKMIVT VBOV.
RCDIG£ par une SOr.lETC DE GF.NS DE LETTRES ET DE SAVANTS.
TOME SOIWNTK-lll IIII.Mi;
A PARIS,
CHEZ I„-(;. MICHA>Un. KDIIKI'R,
RtTR nu HASABD-RICBELIflU , W* I "î
\^i\
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W«L*OTHl''
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University of 0t]f^a
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http://www.archive.org/details/biographieuniam68mich
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Bior. UAPiiii:
UNIVERSEiJ.t.
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Kiri»I?«aM> , ffifbrr |»rrdiC4lrur. na-
auil à l'arnif, en I7M0, de |iarriit«
françait qui »*> rlairiil riablit |K>ur
ftercrr le foramrrcf Jrunc f ncof r , il
fut rn^o^ a rani«fr>ilé àr celle ^ille ,
où il ne *r fit d'abortl reauraoer que
par »on eilrèroe ti^acilé et V ai;;re«r
Je M»n cararlere. Mai» les Mtin» d'an
Nocre rii*rciicmep1 ri suitoul le* pra-
' ' ' ' ■ • ' :i
t pen-
I (irdre Jf "^
daill s<in H(t\ if :jl ijtir. t! ,' j'j i;ii mil-
Irr ili)u\ et pj'irut , il < !i-iii^rj rnt r:f
ment de rarartere, et qu'il ^ prépara a
la carrière de la chaire quM devait par-
courir a^ec tant d'eclal. Ix>rM]u*il eut
terminé %ei éluder de philmopnie. on
ren>o^a a lloroe au courent de la Mi-
nerve pour > faire son cour* de théolo-
gie. C*r^^ là que, doue d'une inlelli-
't d une excellente mémoire,
, .a a l'étude des langues
o. icjiulc* et surtout dr l'hébreu, a6n
de se bien pénétrer de l'f-prit de l'K-
criture et de li e biblique
appuvée sur le^ i. v _, iiaux. Vou-
lant dc>-lors se consacrer a la prcdira-
lion, objet spécial de la rè;;le du saint
ïoné^nrét Ma ordre, il fît nne eliMic
I de la l>elle et harwo-
II <* italirnnr n^^fim bien-
.1 fut
rr . , : . , pr».
ljt« et par de ;;rand« «ou^erams pour
!>rnnoarrr de» oiaisont funèbres et
aire des stations du carême dans leurs
cathédrales NousTavont entendu deui
foi% a Turin, en présence de la coui et
de la famille rotale, et noas avons en-
core présentes a la pensée toute IV-
le^ance de ses eipressions et la force
de ses raisonnements. I)e si ^^rands
talent% lui ouvrirent les portes de plu-
sieurs académies , notamment de celle
d'archeolo;;ie à Kome , de la liber*
tine et de l'Arcadie Dans les clia-
pitrcs de son ordre il obtint les pre-
mières di^^nites et fut nommé maître*
{jeneral et con^ulteur de la con;;réj;a-
tion de l'Index et des indul^enceN, en-
fin examinateur dr^ évéques. Ge fut
lui qui perfectionna la d<^ripline dans
les couvents, et qui \ établit de^ chaires
de philosophie et de théologie. Toutes
ce^ occupations ne lui Grcrtt pas ne^h-
J:f^Ja preiliration, et il continu.i de s y
distinguer jusqu'à la fin de sj mc. Ja-
balot mourut subitement a Horne le 9
nurs1834,frappcd'apoplexie.Onade
LXVIll
JAB
JAB
lui : I. Dcgli Ehrci nellororapporio
colle mizioni crisflune, Borne, 18:2."),
m-l"2, ouvrage intéressant où l'auteur
démontre que le Talnuid , qui con-
tient la loi orale, la doctrine, la mo-
rale et les traditions des Juifs, est en
opposition avec les lois sociales de no-
tre civilisation. II. Orazîonc funèbre
in morte del conte Antonio Cerali{\),
deita in Parnui net 1816, in-4".
La mort du père Jabalot fut déplorée
par la plupart des savants italiens, no-
tamment par le comte Antoine-Louis
Cagnoli dans une pièce de vers impri-
mée à Be^f^io en 1835, et par le père
Maurice Oiiveri dans un élo^e (unèbre
Iule 4 juin 1833, à une des séances
de l'académie d'archéologie, et imprimé
dans le journal arcadique de Uome.
G G Y.
JABLOXOWSKI (Vladis-
LAS), i^énéral, issu d'une maison illus-
tre dans les annales polonaises, né en
1769, (ut envoyé à l'école de Brienne
pour y achever ses études. Il s'y trouva
en même temps que Napoléon Bo-
naparte avec lequel il eut une dispute
d'écolier fort légère , mais que le
Corse vindicatif n'ouhlia jamais. En
1789, Jahlonowski entra comme lieu-
tenant dans le régiment de royal-al-
lemand au service de tVance. Les évé-
nements de 1791 le rappelèrent en
Pologne; et, dans les guerres de 1792
et 1794, il coMiballit pour l'indépen-
dance de la patrie dans les rangs de
l'armée polonaise. le 4 nov. 1794, à
l'assaut de IVaga, il défendit courageu-
sement avec SulLowski l'île de Saxe,
que l'on appelle kampu-Saskd ^ suv
la Vistule. Oésespérant du salut de la
(i) Le comte Ceiati est auteur de pliisiedrs
oarrages ifn|>ri<iiés ùtnn sa viHe natale p;ir
Bu<Ioui , uoU'nuteiit : t'^ J^ ville Luclirsi, cou
opu rnli in verii rd m firoia, l'ariiu-, 1-85, in-j'';
l" i'.l'i^^io dr( .yfniiHra Prot^rro, con averlenz*
tulle 'ue fjotiie, i'iiiute, 1801 ; l'-" f-'ila di (,re-
gorio ('rrati , veuoio di Piateiifa, coii aniiota-
tioni 0 corretioni a//a Gtneti, cic. , ihiJ. 1S07,
10-8* ; 4^ Oputcoli, ibid., 1809, 4 ▼ol. im-4''.
Pologne, il revint en France. Après
avoir servi dans l'armée républicaine
en Italie, il commanda une des légions
levées par Dombrowski. On le trouva
dans tous les postes difficiles, jusqu'à ce
que la paix d'Amiens eût terminé la
guerre dans cette contrée. Le premier
consul ayant résolu, en 1802, de sou-
mettre Saint-Domingue, Jablonowski
fut mis à la tête de la légion polonaise
qui s'embarqua à Toulon. On sait com-
ment ce chef et presque tous ses com-
patriotes périrent dans cette malheu-
reuse expédition où Napoléon n'avait
guère envoyé que ceux dont la présence
l'importunait en Europe. G Y.
JABLOXSKI (Charles-Gus-
tave), naturaliste allemand , né en
1756, était secrétaire particulier de la
reine de Prusse, ce qui ne l'empêcha
pas de s'adonner avec beaucoup d'ar-
deur à l'histoire naturelle, et particu-
lièrement à l'entomologie, genre dans
lequel il s'était formé une collection
considérable. Il entreprit de traiter
cette science dans un ouvrage étendu qui
devait faire suite à celui de liuffon. Mais
il ne vécut pas assez long-temps pour
pouvoir exécuter entièrement son plan ;
car il mourut en 1787, à l'âge de
trente-un ans; heureusement il eut un
continuateurzélédanslepasteur Ilerbst
{Voy. ce nom, XX, 240) à Ber-
lin, qui, étant lui-même entomologue
et possesseur d'une collection d'insec-
tes plus considérable que celle de Ja-
blonski, réunit ?près la mort de celui-ci
lesdeuxcabinetsets'en servit pour con-
tinuer le grand ouvrage entomologique
commencé par le jeune savant, et in-
titulé ; Nutur System , etc. , Système
naturel de tous les insectes connus,
indigènes et exotiques. La partie des
papillons , publiée à Berlin > 1783-
180G, forme 10 vol. in-8" avec gra-
vures enluminées ; et la partie des co-
léoptères , Berlin, 1785-1804, se
compose de 1 1 vol. in-8°, ornés éga-
JAC
Irmmi *\f ,;rafur« coloria. Jahlon<li
n'j [>nM-r ijuf le* foin. I fl II «lu pr-
mier Je ffN oinrjijr», *f un •*al %o-
I — »<• ■'- Tâufre A»»iil le* Itifatx
I te ei de M l>4^i*«ii , rrlle
iiir lir lififfon jTai! une (;rande va-
Irur »oenlifi<jiie. ei elle ne l'a fO* m-
: r rinrnl |ier.ltie, p«i*qa« le* Jem
N ont m Miiii de fimirer e! de dr
• t-rr» d'apre* le*
I *ou* le* \tn\
\jt re*te, |»ri«
ri, est nn Ira-, ni
.'- . tiion Ij partie
J it>;-!i k pèrlie par une r\ _ .
Iitile et une ledarlimi lourde ei lali-
pante. Ser »e% in'>lanre«, «on père étaJ
aile dan* la Tiniane pour dm f lier de*
objets d'l»l»foire naturelle l.e premier
envoi arriva peti de jour* âpre* la mort
du jeune naliirriltsle. I>— «.
4 ArJvS1>\*'\Viui4«\ e«m|»o-
«teur et liuéraleur an«lai* . 61* d an
marrhand dK^eter. ni»|»i»t en 17 M
Comme il mon'
aition* pour la r^
tuirre son inrlinatmn. il >e rendit a
Londre* , où *on ^''iiie *e développa
sous la direrlion de Trater*. rompo-
siletir habile et or^aniMe de la cha-
pelle du roi. Jark*nn , rentra dan*
M rite natale , y fut nommé , en
1777, *oii*-chantfe et organiste de
la cathédrale. Parmi *e* rompn*i-
tion* musicale*, on dislin'/ue pjtiirn-
lièremcnt «-es sonate* et *e li
ont lonij-tenip-^ charme *i' .
tes. Il aval «iirlnut Ir ^etrrl df ilui(>
ner à la poé^ir elr^i.ique une mélodie
élégante et plainlne, maiN à laquelle
on a reproché de pouvoir *'appliq'ier à
t(»ute espèce de *er* de ce penre. NN'il-
liam Jackson s'est aeqois aussi de la
réputation par quelques productions lit-
téraires, publiée» de 17S2i 179H,
^BS lesquelles on reconnait un es-
prit original , mais porté ao paradoxe.
CalfiNant presque tous les beaux arti.
JAC i
il a laanié Ip pinre.iu, ^an* remon-
ter ju iiTàiui ni.MJ, le de la nature,
et *e liornaiil a ropiir le* maîtres. De
nieinequ'eii musique I rappelait VMivent
la manière de rra%ers, de même il a
reproduit aeee ouelque »»rre* la coiih
fionlion et le roloi i* de ^on ami (tain*-
•ofoii^h II e^i mort a K*eter, !<• f 'J
jinlln lMO:l Se» nii\ra,:e^ *oiit : |.
l rente lettrfn sur Jù'rrs tu/rf.f, ^
fol. in li. ITMi r édit , atecle
non de l'auteur, 17Hi: une V édf-
tion , att -mertre de l»eaoeo*r]> , parut
en I7'' Il l.riifuotrnlgrf,
*»«■ dr mr lies sujets VO'
rtrs , 17'JH, im'H\ On » trouve ,
rnnMne iiaii\ le préeédent, du ««Toir,
de rmlerét. da ^o^t, et même du *értie.
Dan» le morceau principal, Tauteitr
s es! pro|>osé de démontrer que l'anti-
que repre*enlation ^Tr'
node« dn monde pjr .• ^
ve lealiM- |. ' ,,». le
*en« tn\er»r , •nnê :
^ n'ont pa* été
f . - \.'à^f^ d'or,
^ue nou* »\on% rrn être derrière nom,
e»l de.»ntnott*. » III Traite ntr Ce-
Inl ftresent de la musique à hmàres,
171)1. in-^^ IV. Di,-htfit rruvre*
moMcale* , con^i*1aat en Hymnes ,
f k Elégies , nne OJe a Ci-
" ' . des Fantnisies (Fairr
I-" ■ ■ « nies, el qui
""' I • . 1 . .' -A de .*es
fomp.i. I ,;I^ (pi! ,,nt \o le jinir. On
pcoi consulter d'atllem^* le [U'^ement
que le docteur Rurnev a exprimé <ur
le rarritr de cet artiste d.ins la (iyf/n-
petlia de I très L.
JA<:KS0.\ ^Joiin\ célèhre
peintre de portrait*, naquit en 1778
i Lxslin;;ham, petit Tilla«^ sitin- «l.ins
la partie septentrionale de rYoïlsIiirc
éîv Anjjleterre. Kil> d'un pauvre tailleur
et destine par sa position à manier lui-
même rni^uille, m:>is entraîné par un
goùl naturel pour le dcs5in, il donna
I.
JAC
JAC
de très-bonne heure des preuves d'une
singulière aptitude à reproduire les
traits des personnes qui passaient sous
ses yeux. Quelques essais en ce genre
frappèrent tellement le maître d'école
de l'endroit qu'il s'empressa de les
présenter à la famille du comte de
Mulgrave; et, de ce moment, la car-
rière du jeune Jackson fut changée. Le
comte et sir Georges Beaumont devin-
rent ses protecteurs, et lui donnèrent
les moyens de vaincre les premiers obsta-
cles qui l'empéchaleut de suivre sa vo-
cation. L'apprenti tailleur, après avoir
fréquenté l'école de dessin de l'Acadé-
mie royale, s'établit dans la capitale
comme peintre de portraits. Ceux qu'il
fit à l'aquarelle furent généralement
admirés, et lui valurent beaucoup d'ar-
gent ; mais ses débuts dans la peinture
à l'huile ne lurent pas très-heureux :
onlui préférait les ouvrages de Beechey,
Hoppner, Ople et Lawrence. Son ta-
lent finit cependant par acquérir ce qui
lui manquait, et il put alorsse montrer
sans désavantage à côté de ses émules.
Le portrait de Canova fut un de ceux
qui commencèrent sa réputation, et il
la soutint par un grand nombre d'au-
tres, entre lesquels on a remarqué :
Ic^Jportraits en pied du marquis de
Chandos dans le costume d'officier de
hussards ; du comte Fllz-Willlam ; de
laiJy Anna Vernon (femme de l'arche-
vé(jue d'York), et de miss Vernon : les
portraits en buste des artistes Th. Sto-
thard et JohnFlaxman, ce dernier sar-
loul dont Lawrence fut tellement char-
mé qu'il dit que Vandick se fut fait
honneur de l'avoir produit ; le portrait
de Robert l'eel, du sculpteur Chan-
trey, et le sien. C'est d'après ces des-
sins qu'ont été gravées un grand nom-
bre de trtes dans la splcndide piibllra-
tlon de Cadell : Par traits dr person-
nes illustres du XI ïW siècle.
Jackson a été considéré comme un des
meilleurs élèves de Reynolds: « Moins
« élégant que Lawrence, dit le Jour-
« nul des artistes, mais copiant plus
«< fidèlement la nature , il saisissait
« avec une admirable facilité les traits
<c caractéristiques de la physionomie et
« les reproduisait avec un rare bon-
« heur. Il travaillait avec rapidité, et
« cependantses tableaux sont d'un fini
« précieux. Son coloris avait du relief,
« de l'éclat et de la vérité. » Cet artiste
avait une âme noble et des mœurs dou-
ces: il vivait dans les meilleurs termes
avec ses rivaux de gloire, et se plaisait
à favoriser les premiers pas de ceux qui
entraient dans la carrière ayant d'heu-
reuses dispositions. Bien qu'il fût de
la secte des méthodistes , et très-zélé,
dit-on, il n'était pas cruel envers l'é-
glise établie :1a petite éghse de son petit
village reçut de lui pour orner le maitre-
autel un tableau du Christ dans le jar-
din des Oliviers, qu'ilavait fait d'après
le Corrége. John Jackson avait été
admis à l'académie royale en 1817 ; le
titre d'académicien de Saint-Luc lui fut
donné lorsqu'il se rendit à Rome en
1819, accompagné de son ami Chan-
trey. Il est mort à Londres le l'^'^juln
1831. Une partie des détails qui se
trouvent dans cette notice a été em-
pruntée à la Bihliothècjue des Beaux)-
Arts (Llbrary of the fine arts). L.
JACOB-KOLB (Gérard), lit-
térateur, naquit à Reims, le 15 oct.
1775. Son aïeul avait été grand bailli
de l'archevêque de Talleyrand-Pérl-
gord [Voy. ce nom, XLIV, 436). Son
père, Simon, d'abord avocat , auteur
de quelques mémoires et de quelques
poésies, se livra ensuite au commerce
des vins, et mourut à Reims en 182G.
Le jeune Jacob, destiné à la carrière
commerciale , commença néanmoins
'f s éludes dans sa ville natale, et alla
les continuer en Allemagne, où il se per-
fectionna dans la langue allemande; il
se maria à Strasbourg et revint à Reims
vers 1796. Associe dès-lors à la mai-
J\<
JAC
«on Jf Min prrf , il >oiia;;M dan". If^
certlfs d'\llrma;;ne : t'r^l ^lJll^ un
de >r* \(M jgf> aur »e trouvant a N\ f i
mar, en 1H0| , il cul l'a^anla^r Je con-
naître le célèbre Schiller qui mettait u
Jrttnnftt Art aa tlirafre. Kainiliariié
awc \ts poètes françai^ et déjà lié arec
les hommes de leitrn de la capitale, il
lai fut facile de donner de bon* atis à
ce {jrand poêle. V\\\\ lard drvcnu chef
de5kafnaiMin, Jacnl)f;t pluMeur%vnia;:e«
en Knj^lrlerre, alla en \\u
rut \r\ r\x\\A\% Nnrd et iri! i
le roi ("' T m , qui l actu«»ll:l
d'une niJ! .:uée. Né avec un
caractère ai drnl ri d'une activité pro-
di{;ieu4e, il Irmna encore, malgré Ir*
»oin^ qu'il donnait à son commerce
tre^-étendu, le temps de *r livirr à l'é-
lude de riiistoire naturelle, des atiti-
ouité4 , de la numismatique et de la
littérature. Son inconstance dan^ tes
fronts pour lesquels d'ailleurs il ne ne-
^ii^ea jamais aucune drpense , nuisit à
sespro<luction>. l'assionned'abordponr
l'histoire naturelle, il *^ composa un
rabinrt de tout ce qu'il put reunir sur
cette intéressante partie. I^ ;;é<do;;ie
le fixa ensuite ; et, d'aptes de lorts in-
dices aue la monta;;ne de Keims re-
celait de la houille , indices qu'il rrut
reconnaître par les li;;nites et le» sour-
ces d'eaux ferruj;ineu5e« qu'on v ren-
contre, il appela dans sa belle maison de
Monchenot, commune de Viller»-Alle-
raud, des savants instruits sur cette
matière, et, suivant leurs avis, il 6t
fouiller à Pendroit dit les Vauzillons ,
terroir de Killv-la-Montaijne ; au lieu
de houille, il ne relira qu'un lignite
schisteux, qui brûle à la vérité, mais
en répandant une odeur tellement dé-
sa;;réaUc qu'il n'eût jamais etf possi-
ble de s'fn servir dans les habitations.
De l'h slolre naturelle (icrarJ Jarob
passa à la numismatique : il rechercha
avec axidiie les médailles grecques, ro-
maines, françaises et autres, en forma
un beau et riche médailler, et s'en défit
qiiriqiies annérs après, pour quinze à
vin^l mille fiants. |)r^ médailles à la
connaissance des monuments des an-
ciens peuples la lranMtH)n était naturel-
le; ils t livra avec ardrur ri fit un recueil
de près de 30 vol. m i ' dr tout ce qui
avait été écrit sur les antiquités ^rec-
floes, romaines, {gauloises, etc. Il y a
dans ce recueil deux volumes sur l'his-
toire de Ue'ms qu'il eut un moment
y ' iiiion de faire imprimer L'abbé
< r» (Tof. ce nom , L\ V, IM'»)
voulait aussi faire imprimer sa Drs-
rription historii^ur rt stotistitfur lir
lu villr ilrHrims M l^balard, a qui
ils s'étaient adressés tous deux pour l'im-
pression de ces ouvrages, leur proposa
de 1rs fondre en un seul. I.'idrr leur
parut bonne, et ils se di>pos4>tent à la
réaliser; mais, ne pouvant ensuite se
mettre d'accord , iU 6nirent par se
brouiller. L'abbe Ctértuei fit imprimer
son livre ï (^hàlons, et Jacob-Kolb pu-
blia à Ueims, sous le nom de son père,
ses Sittrs histnriqurs rt rritufurs
pour servir ï rou%ra|;e atant pour
titre: Drsrription hislorit^ur rt stti-
tistiqur dr la villr dr Hrims Jacob-
Kolb aurait bien ^oulu placer ce volu-
mineux recueil, qui n'est pas sans méri-
te, au cabinet du roi , mais, ne pou^ant
? parvenir, il l'échanf^ea asec un libraire
qui le vendit à M. le marquis de Fortia.
Les autographes l'occupèrent ensuite ;
et, s'elant mis en rapport avec beau-
coup de personnes de distinction , il
en rassembla à grands frais une belle
collection. Il jouissait à peine de cr
trésor qu'il le vendit à un An;;laiN
qui lui compta vin^^t-cinq mille francs
Alors a>anl ouitté le commerce et
s'étant fixé à l'aris , son ardente ac-
tivité se porta sur un nouvel objet ,
ih-rechercha les livres, mais plus
particulièrement les belles éditions
C'était le moment où les libraires
de la capitale publiaient avec luxe
JAC
JAC
les ouvrages de nos meilleurs au-
teurs^ Jacob se les procura, mais
voulant encore enrichir ce qui élail
déjà si beau, il se composa àes exem-
plaires uniques, soit en \ ajoutant ou
changeant les gravures, soit en y joi-
gnant des lettres autographes des au-
teurs. Celte collection qui lui coûtait
plus de dix mille francs eut bientôt
le sort des médailles et des autogra-
phes ; il venait d'en retirer trente
mille francs avec une réserve de neuf
cents volumes, quand la mort le frappa
le 15 janvier 1830. Suivant ses inten-
tions sa dépouille mortelle fut déposée
au cimetière du Père-Lachaise , dans
le lieu qu'il avait fait disposer lui-même
dès le 11 juin 1827 , peu de temps
après son arrivée à Paris. Voici son
épitaphe telle qu'il la composa , en
laissant à ses enfants le soin d'y ajou-
ter la dernière ligne :
A la fin de ce rêve
Qu'on iioinine !a \\c ,
Ici repose (icrazd .I.Kob ,
Écuyer, chevalier de la Logioij-d'Honneur,
Membre «le la société pliiîh'll^niqoe ,
Correspondant des socn tés royales
Des antiq'i.iire<i de France,
De Cbàlonb.siir-Ma-ne,
Né à Reims le i5 janvier 1775.
Jacob-Kolb a publié les ouvrages sui-
vants : I . Recherches hislorif/ues sur
les antiijuités d'/îugst, ancienne co-
lonie romaine, située près (le Bùle
en Suisse, traduites de l'allemand et
augmentées de notes et observations
critiques, etc., lieims, 18*23, brochure
in-8" avec des jil.tnches. il. Descrip-
tion histori<jue de lu villrde Reims,
ibid., 1825, brochure in-8". Ce petit
ouvrage sur uut grande et ancienne
▼ille n'a satisfait personne, pas même
son auteur qui pouvait mieux faire;
mais on le lui demanda quelques jours
avant le 29 mai 1825 et absolument
pour ce jour (où le sacre de Charles X
eut heu). Ce travail précipité \alut ce-
pendant à l'auteur la croix de la Légion-
d'Honneur. 111. Traité élémentaire
de la numismatique ancienne^ grec-
que et rumainc, composé d'après celui
d'Eckhel, Paris, 1825, 2 vol. in-8°
avec planches. IV. JSoticesur lu ra-
reté des médailles antiques^ leur va-
leur et leur prix, calculés par approxi-
mation , d'après Jean Pinkerton et
Jean-Godefroi Lipsius, avec des notes
et observations du traducteur, ibid.,
1828, brochure in -8". Cet opuscule
peut servii d'appendice au Traité élé-
mentaire. V. Recherches historiques
sur les croisades et les Templiers,
ibid., 1828, in-8°, orné de gravures
au trait. Ce livre auquel son auteur pou-
vait donner un tout autre titre, puis-
qu'il a fort peu de rapport avec les
croisades, n'est cependant pas sans in-
térêt, et c'est, comme l'a fort bien dit le
rapporteur de la société d'agriculture
de Chàlons-sur-Marne ( séance de
1829 ), un recueil curieux de do-
cuments déjà connus, qui se trouvent
disséminés dans plusieurs historiens
et dans quelques livres français et
allemands, quon n'est pas fâché de
trouver réunis dans un seul volume.
VI. Voyage philosophique dans
l Amérique méridionale , rédigé par
l'éditeur de l'An 2440, Paris, 1829,
in-12. VII. Le Frondeur, ou Obser-
vation sur les mœurs de Paris et
de la province au commencement du
A7A" siècle, ibid., 1829, in-12. Ce
petit ouvrage, quoique inférieur à ceux
que plusieurs auteurs ont publiés sur le
même sujet, se ht encore avec plaisir.
Jacob était un des collaborateurs de
la Biographie universelle, à laquelle
il a fourni, entre autres, les articles
Burigny ^ Coulin , Lin guet , etc. Il
avait t e I m i II é u n Traité des participes
de la langue française, et il s'occu-
pait d'un ouvrage sur l'astronomie et
la géographie physique ; mais la mort
l'empêcha de publier l'un et de ter-
miner l'autre. L — c — J.
JA(X>15. Voy. Jakob, ci-après.
JAC
JAC
jAcon f:i s ;j»AN Ai»oi.-
PHi), vitjnt iIjiioin, iiJifuii à (^|>«n
hj{;ur \t 21 mai IG'JH. Il rui pour
|>ric le conisrillrr de )u»licf Oh^rr Ja-
robxu» ( l'uy. ce nom , X\l. .i27).
Aprr» 4\uir trrminr von ^ilucjlion au
rollr;;r dr liorrli, il fut nommé rurr
dr U paroisse dr l.idoe et Sin<trum en
Sriande, rt mouiul le 3 août 177:2.
On a de lui : I. Thèses ptt y sint ,
Cnpenl.a-ue. I7IH. 1719, in-i" 11.
Si hetlion Je planitirum strui furu et
vegettifione , ilud., 17*27. in-H' III.
l'heses mist rllitnnr , ibid. , 17iiO ,
in-i". — J\<nH«iN Jonitées), frère
du prérrdeni, naquit ronimr lui a Co-
penhague et fut r\r\t auvNi au col-
leur de lUtrrli. De même que >on
frère il entra dan> la rainereerrleMasli-
qiie.fut nomme en 171()rutede Ka\oe,
eii>uite pré\(\t , et mourut en 17-IH.
Il a publié : I. Disp. Je tirte t.hristi
merhtinira , (^penii., 1703, in-i".
II. l)e Sthythir priT iiarfH/ru petr
ro^atù'H , ibid., 17t»V, in i". III.
De velerum gnimmotii itrutn cen-
sura, ibid., 170.'i. IV. Ur muteria
et forma lihrurum ap. vftrres, ibid ,
ITtK» — J \« •II,».! s ( Miilhian , *ur-
noininr ir Ji une, pour le diNliii^uei
d'un autre rrirlitr ni'^iierin danois ap-
pelé ccunme lui ^I.l^l:u^ Jaroli-fu*. dit
i' Ancien. Ne a .\arliuuN dans le Julland
le 1'^'^ mai 1637, re sa\ant était fils
du dorteur Jarnb Maltliia^en , é*é-
que d'Aaihuo^. Il termina en ICiB
ses éludes à l'ccole de .va \ille natale,
vo^aJfa pendant quatre ans, de IGGO
à HUiV, dans les pavs élranfjers M
fut nommé à son retour profe^^eur
d'histoiieet de »;éo graphie à riini%er-
sit«* deG)penljai;ue. Kn ITitiS il de-
MMt professeur de langue j^recque el
enfin professeur de minlecine. Il mou-
rut le 'l:^ janxier 16HH. On a de lui :
Oftsercutionrs medinr , npuscule in-
jiéré dans les Jrla meJica de Co-
penhague, l) — z — s.
JACORI (CiimsTiAW -Fbkdé-
mci, sa\ant daooiv , naquit i K.sm\n-
derôd danv Tife de Selandc, le 12
mars 1739. Son père, appelé Pierre
.lacobi, était prêtre du (Château de
tredensborp, etOiarlolte Slielfer, sa
mère. de\int pla% tard dame de U
chambre de U reme JulianeMahe.
.\pre« avoir étudie la jnriNprudrnce,
Jacubi fut nomme en 1770 astesseur
au tribunal de la cour, l'année suivante
il deriat SM^^seur au Inbanal de
la CMT et it l'état sie^^rant à (Co-
penhague. en 1772 lecteur chei U
toi, et la même année av»e<vsrur a la
cour vuprérae. Nuaimé en 1774
roaseiller de ju^lice, il eiail en 1776
»ic^-»eerelaire de la siKiele de* ^eien-
ce» de C«peuha;;ue. et ron*eiller d'é-
tat. Kn 17H0, la inrme <M»f lele le rhoê
»it ponr »on seerélaire, et le roi l'eleva
en 17K1 an ran^ de conseiller de con-
férence. Il était aii**i membre de la m>-
fiéte de» sciences de Trondhieni , M
Norvège , et de la société d'économie
dome%tique de (^penhagae. Il avait
occupé penilant plusieurs années le
povte de grand-mailrc des pa^es de la
reine .luliane-Marie. Il a publie : I.
t.lo^e Je r arches èifite AbsuUm, qui
obtint le phi propo-e par la «-ocieté de»
bel le>- lettres et sciences utile* de Co-
penhague , et fot insér.- dans ^on re*
cueil. Cel éloge a ele ausM imprimé
à part , Copenhague , 1769 , iii-8**.
11. IHsp. Je mnralitate rnusiT mo-
ralis aJ physirain reiatir, G)|»enh.,
1759, in 8 . III Ut/rr de Sapho
à l*hatm, troJuite J'(ktJe , in>«erée
dans le recueil de la société des belles-
lettres, G^penh , 1770. in-H". |V.
Oraison Junr lire Je llrnri llie/ms^
iierne, lue a la sim iete Jes sciences,
le 3 novembre 1780, Copenli , 1 780,
iii»>8". — Ja<.»»«I {Utiltlur), savant is-
landais, après avoir fait ses éludai k
Copenha;:ue, obtint en 1757 la place
de préfet ou sjsseiroaod du district de
J/VC
.l.\C
Westmaniîùe en Islande. Quelques;
années plus tard il passa en la même
qualité dans le district de Strande dé-
pendant de la même ile. Il a publié :
I. Ixelroé rnmplet des montagnes
tf Islande qui jettent des flammes,
Copenhague, 1757, in-8", en da-
nois. II. Vie de Bi'arne Ilalt/ior-
sen, iliid., 1777, in-S", en islandais.
111. Gratiantm actiu Frid. / ', no-
mine patriœ persoluta, uh naoes
cihariis onusfas sub hiemcm in Is-
landiani famé lalntraniem missas ,
Copenh., in-fol., sans indication d'an-
née. IV. Chronolugiœ tentamen ,
Hrappsôe, 1781, in-i'\ en islandais.
D— z— s.
JACORI (FRKDhRIC-IlF.NRl),
philosophe allemand, naquit à Dussel-
dorf le 25 janvier 17'f3.Son père,
avant fait de bonnes affaires dans le
commerce, destina ce second fils à la
même carrière, en laissant suivre au
fils aine, Jean-(feor;!;es, son f;oùt pour
la littérature dans laquelle il s'est en
effet distinû;ué (/oj. J.-G. Jacobi ,
XXI , 327). Le cadet , n'admettant
et ne retenant dans sa mémoire que
ce qu'il concevait clairement , parais-
sait un e<pril Ires-borné , et le père
crojait qu'on pouvait en faire tout au
plus un marchanil; il l'envova à l'à^e
de seiie ans d'abord à Francfort, puis
à Genève pour l'initier dans la prati-
que commerciale. Le séjour de Genève
produisit un effet contraire sur le jeune
Jacobi. Au lieu du commerce il étudia
les sciences physifjues, se fit expliquer
par Lesa;;e V Introduction a la jilii-
losopliie de s (ira\esande, et se pro-
po'^a d'embrasser la profession de mé-
decin. Il se lia avec le philoso[)he
lionnet , et alla visiter Voltaire à
Ferney. Cependant \\ fallut renoncer
aux projets d'avenir , et retourner
dans la maison paternelle pour s'oc-
cuper des affaires commerciale.s. Il
n'avait que vingt-deux ans quand il .se
maria avec Bettv de Glermont, des
environs d'Aix-la-Cliapelle. Il se
trouva alors dans une position bril-
lante que d'autres lui auraient enviée ;
quant à lui ce n'était pas la prospérité
du commerce qui pouvait faire son bon-
heur; aussi n'aspirait-il qu'à une si-
tuation qui lui permit de suivre sou
penchant pour les études littéraires.
Il fut enfin nommé conseiller de la
chambre aulique de Julieis et de iîerg,
puis conseiller intime à Dusseldorf.
Dcs-lors, abandonnant le commerce, il
passa le temps que lui laissaient ses
fonctions, d'ailleurs peu importantes,
soit dans la société i\(tS' hommes in-
struits de la ville, soit dans le sein de
sa famille à Pempelfort , maison de
campagne aorréable , située à peu de
distance de Dusseldorf. 11 s'était adon-
né à l'élude de la philosophie, et il se
mit en rapport avec les hommes qui la
cultivaient en Allema^',ne, surtout avec
Kant , Fichte et I\einhold. Les litté-
rateurs aussi l'intéressaient : il corres-
pondait avec Goethe , AVieland, I\ich-
ter, Lavater, etc. Possédant une for-
tune qui s'accrut beaucoup , après la
mort de son beau- père (en 1776), il
était à même d'exercer une noble hos-
pitalité envers les savants et les litté-
rateurs qui venaient le visiter. Son
bonlieur ne fut pourtant pas sans
mélanj^e de contrariété. Des irri-
tations nerveuses déranf];eaienî fré-
quemment sa santé; une mauvaise
spéculation de son père le foira d'y re-
médier par des .sacrifices d'argent con-
sidér.'ibles. Ayant franchement exposé
à l'électeur palatin ce que le sy.stème
douanier avait de vicieux , il fut éloi-
f;né des affaires ; enfin la mort de .sa
femme troubla son bonheur domesti-
que. Des voyages à Londres et à VVei-
mar, .séjour de quelques hommes célè-
bres , lui servirent de distraction.
D'autres chaj^rins vinrent éprouver sa
philosophie : les armées françaises en-
JAC
JAC
Yahlrent ie* pTopr'téiés anprf^ d'Ait-
la-(!hap^Hf , lamli» que Im émi^ré^
franrais inomiaifnt iVmpelfort. Pour
it UMi^lnve aux <)• qu'il
^prou\ail jur Ip* hor.l il alla
^'rlalilir dans \e Hi> nt s^s
ciifanli dans »rs dm. ^ ■ rnanl
allrrnati^rmrnt a ilambour;; et a Ku
tin , il enirrtinl* drs liaisons avrc \rs
hommrt 1rs plu« remarquablrs du
f»av», leU oaeSlolbrr^, Vovk, Hfin-
lold , et Draucoup d'autre*, aut-
queU %e joignirent de* Kranrai» que
1rs rirconslan'-e* axaient conduits sur
les bfirds de l'Klbe ; notamment
les »;rn«'raux Dumouriex et Dumas.
y.n 1H01 il reMUt soir ses enfants
à l)us>rldorf , rt fil de là une ri-
cursion à Paris , pour ju^er par sei
firopres veut des rfTrts de crMc réso-
ution à laquelle il s'rlail \ivrment in-
téressé dès le rommenremrnt , mais
dont il a\ait sésèrement rondamné les
eicès. De retour à Kutin, il fut appelé
à faire partie de l'arademie royale de
Munirh, que le nouveau ministre ,
Montjjelas , Toulait rr<^pnrrer. Jarobi
\int s'établir dan<i la capitale de la lia-
▼ière , où il fut porté à la prévidenre
de l'arademie en lWt7. Four donner
à cr corps une impuUion toute nou-
▼elle, il désirait v appeler plusieurs
nommes di>lin^ur> par leur r>prit plii-
losophiquc , particulièrement son ami
Ke:iiliold, auquel il destinait la place de
secrttaire perpétuel ; mais il trouva
des obstacles imprévue qu'il ne put
vaincre, et lui même eut de la peine à
se faire pardonner son esprit investi-
gateur , étant mal vu des Bavarois
de la vieille roclie, qui le re-^ardaiont
comme un ré%olutionnaire. Jacobi se
résif;na quand il vil srs rfforts para-
Ivséspai les ennemis de la philosophie;
et, ajMes avoir rempli les fonctions de
sa place pendnnl environ douze ans,
il alla passer dans la retraite les der-
nières années de sa vie qni, malgré
se5 infirmités, ne furent pas sans char-
me; car sa maison était le rendei-\ous
de tous lr> hommes éclairés , et les
étr3n;;ers qui xeuainil à Munirh s'em-
prev^ienl de préNfutcr 'rurs homma-
ges au philosophe. Il mnuiut le 10
mars 1H19. Jacobi élail un parfait
honnête homme, pinii de candeur et
de sincérité . il recherchait la vérité avec
un c(Tur droit et reli;;ieux , et pour y
parvenir il prenait le seul chemin qui lui
lût propre. On a dit de lui qu'il avait
de la dévotion pour un Dieu inconnu.
Il voulait arriver par la conna'ssanre
de la nature à celle de la divinité ; écri-
vant toujours V1US l'infltiencede ses sen-
timents momentanés i\tc une {grande
al'ondaiirr «l'idérs, il n'a pas toujours
été d'acrord axer lui-même, ou plutTil
il a modifié qiielquefiMN ses opinions ;
et il a combattu omertenirnt celles des
philosophes qui lui paraissaient s'écar-
ter de la vérité. Aussi une partie de
ses ouvrages, empreinte d'un carac-
tère pnirmique, a été provoquée par
des publications d'auffes penseurs. Il
avait sur plusieurs d'entie eux l'avan-
ta;;e de la lucidité des idées et de la
netteté de l'expression. Son [tremier
o!i\r.i^r fut It'oltlrttmr, 177î>, 2 vol.,
espère de roman philosophnjue, qui eut
quatre éditions. Les Lrtlrrs tfAll-
av'il . en '2 vol. , dont il publia d'a-
bord des fragments, ont la im-me ten-
dance. Kn ITSii il fit paraître Our/-
ques mots de Lessing smuint de
cominrntaire aux voya^^rs des pa-
pes. Jusque-là il n'avait pas encore
pris ran;; parmi les grands philosophes
de r.\liema;;ne ; mais en 1"8.'> il pro-
duisit une grande sensation par son
ouxra^e sur lu doctrine de Spirutsti,
en forme de lettres adressées à Moïse
Mend«'|s<o!.n, dont il donna en 1789
unèéd-lion plus ample avec des sup-
pléments. I.e but de cet érrit était de
prouver à Mendelssolni . qui se propo-
sait de composer un ouvrage sur Les-
10 JA.C
sing, que cet écrivain avait fini par
adopter le s\slème de Spinosa. A ce
sujet Jncohi examina à fond les opi-
nions de ce philosophe qu'il reo;arila
comme méconnu par la postérité, et
s'eflorça de le présenter comme un
des {iénies les plus profonds et des es-
prits les plus judicieux qui aient existé.
L'étude des œuvres de Spinosa, disait-
il , l'avait convaincu qu'il y a des
choses qu'on ne peut expliquer , et
qu'il faut prendre connue on les trouve;
de là la nécessité d'une foi et d'une
dévotion substituées à un savoir fondé
sur le néant, et qui lui paraissent le
seul et véritable fondement de la phi-
loso[)liie ; de là une révélation de la
nature qui force tout le monde à
croire et à admettre par la foi certaines
vérités élerncllcs. Jacobi convient que
personne avant lui n'a prolessé pour
Spinosa la même vénération. Elle trou-
va des contradicteurs au nombre des-
quels fut .Mendeissohn même : aussi se
crut-il obli^'jé de publier une Réfuia-
iion (hs inculpations de Mendeis-
sohn^ 178G. Il faut dire pourtant que
Jacobi ne partageait point l'opinion
de Spinosa sur la nécessité à laquelle,
selon le philosophe d'AmsIeidam,
l'action de Thomme est soumise, et
qui reujpcche d'être libre. Selon Ja-
cobi, la conscience précède l'action au
lieu de la suivre comme le soutient
Spirio>a. 11 n'admettait pas non plus,
avec ce philosophe, que le monde sub-
siste éternellement sans Dieu ou comme
Dieu; d'un autre côté il combattait
l'opinion de l'école de Leibnilz et
Wolf sur l'origine du monde , comme
procédant naluiellement de Dieu. Pour
répondre aux att.tqiies auxquelles il fut
en butte, il alla chercher dans les Es-
sais de 1 1 lime, des preuves de sa manière
de considérer la révélation , et il [tublia
en 1787 : David îliinie, sur la foi ,
ou l idralisme et le réalisme, avec wn
supplément destiné à eomLaltre le s)s-
JAC
tème de Kant sur l'idéalisme transcen-
dant, lîeaucoup de personnes ne lui par-
donnaient pas d'avoir soutenu que, par
la seule raison, nous ne pouvons parve-
nir à la connaissance de l'existence de
Dieu. Plus tard, il attaqua aussi les
dées philosophiques de Fichte, avec
ilequel il entretenait néanmoins une
correspondance amicale ; sa brochure
Jacohi à Fichte parut en 1799 : ce
dernier de son côté déclarait, dans ses
lettres particulières, que la doctrine de
son adversaire lui paraissait affreuse.
Cependant Jacobi justiûait son ami du
reproche d'athéisme que plusieurs sa-
vants adressaient au professeur d'iéna ;
selon Jacobi , la philosophie transcen-
dante n'est pas plus athée que la géo-
métrie ou l'arithmétique. Sa doctrine sur
le libre arbitre, ajoutée à l'ouvrage sur
Spinosa, sous le titre de Propositions
préparatoires sur la contrainte et la
liberté de l'homme , parut en 1799,
séparément, avec le titre : De rinsépa-
rahilité de tidée de liberté et de
providence , et de Vidée de raison.
Il y admet une résistance qui empêche
le libre arbitre de vaincre tous les ob-
stacles, et d'être par conséquent par-
faitement libre. Cette lutte qui, selon
lui. règne dans la nature entièi e , lui
paraît être un mystère impénétrable de
la création. On a atlatjué ces idées
comme insuffisantes, et l'on a a|)jn ouvé
davantage d'autres endroits de ses
œuvres où il définit la liberté morale
comme étant la faculté de régler, se-
lon les exigences de la vertu , nos dé-
sirs sensuels, nos penchants et nos
passions, et où il regarde le libre ar-
bitra à la fois comme la cause el comme
l'effet de la vertu xwîimt. Kn 1811,
Jacobi publia un ouMage Des choses
divines et de leur révélation , dans
lequel il soutient que ce n'est que par
révélation el par intuition que nous
pouvons nous convaincre de l'existence
de Dieu , et que, s'il ne se révélait pas
JAC
JAC
II
m nou» , rien df ce qui e»t hors ile
uous ue pourrait uuus le faire rou-
luiitr A\ant alljqur ^aiu cet érril la
pliiluM)pltie lie SclieUiii^, il »*atlira
une réplique de la paît de re phtloNO-
plir ^1 , et d'aulir» eiri\aiii> piireul
part a la di^euvMon ['2) Jacobi publia
niruie dan» di\ei5 recueils périodi-
ques de» ninrrraux remarquableN, faut
s\u b pliiiosiipliie spéculative que »or
la pliiloMtpliie morale, llans la der-
iiif'ie époque de sa vie il rerueillit lui-
inème >ca ( ^m\ re$, et fil précéder celle*
qui liaileiil delà pliilosopliic , et qui
en forment la plu^ grande partie ,
d'une introduction ou il pre%enle le>
résultat! des pensées qui ont eie I ob-
jet de se« méditation^ pendant toute
»a Me. C^tte édiiion, publiée a l^ipx'^
sous le litre de t'ritdriih Utinruh
Jiiruhis Wfrke , et conimenree en
iSi'2 M»u> ses }eux, ne fui arlie\ée
qu'api e> sa mort, et forme mk \oluuies,
«ans lesquels on trouve drs lellre.s a
llcider, Furster, Jean Mullei.kanl.
l^vater, ain»i que sa coriespondanre
a\rr llaiiMiin. On a encore publie un
ciiuii de la r(nres|>ondaiire de Jacobi
(^lusn lisnitr lirir/wn fisrfj , I^ipuf;,
1Hiâ-*i7, '2 vol. in-8", inti-ressante
pour riiistoTf lilleraire de l'époque.
On > trouTe les lellie^ qu'il a rcli.in^res
avec (luilie, Scliiller , (niillaiiine de
lluiuboldt, Necler, madame de !«lacl ,
Clliailes Villns, If coiule d'An^ivil-
lers el d'autres pei>oiina;:es leniarqiia
bifs. Apres fra mort , l'acailenne de
Mumrli atnsacra une séance à la lec-
ture de trois éloges composés par ses
anciens collègues Scliliclitej;roII ,
^^ ciller el 1 Inersch ; ils ont été pu-
blies ensemble sous ce titre : F.- II.
Jmolti, sa vie, srs doririnrs ft ses
allions, Munich, iHlî». in-H''. Une
bonne aiiaiNse de ses ouvies pliiloso-
1 l'r k ai Jrr Stiui/i ««a J„i ^i,:Uirkfj
Dr,: fi, i»ii.
1 Fui, *on deutichtr Pkd»$9fki« . Jrt uitd
KuHii , ilia.
phique* a paru dan» les Annales liUr-
rairts de Uriilelherg, par \\v^t\ ,
IH17, et dans le recueil peiiodique al-
lemand Ilermes . I.eipii^, 18*iÛ, \o\.
XIV, pai un anonvuie. 1) — g.
J A<:4l|tl (\>l»lM-UnlM)LPtir),
juii^nnsulte, ne a llaiioMr m 17 iG ,
était fiU d'un nirmlxe du coiULsIoire de
()elle. I)'ab4>rd auditeur, il fut élu, en
17711 , secretaiie, et deux ans âpre»,
»>ndic dei etal.s de l.unebour^. Il prit
une pari active a l'e&eculion du parla;;e
des vaines pâtures, ainsi quau» travaux
de b société d'économie rui aie de Celle
dont il était membie lior^de l'occupa-
tion du Hanovre par les Fran<;ais en
iHOCi, Jacobi lui nomme subdele;;ué de
la roniinivsion admiiiisliative pour le
pav>de {.unebour^;, el, après l'organi-
sation du rovaume de W esiplialie , il
fut diieclrur des contribiiiioiis indirec-
tes a I.unrbotirj , ptirs «l-^fteur des
douane^ ' iiiswick.
.\u irt.>i , rndance
du Hanovre, il eul la direction des im-
pôt^ pour le pavs de Lunebour^;. Au ju-
bile de sa carrière administrativre, en
lMl23, il re^ul du roi la décoration de
Tordre des (îuelfes, el de l'université
de (firttin;;ue le dipUmr de docteur en
drt>il. Il mourut le -i*i |uilirt \H'2h.
Farmi ses ecntson remarque: I. tas-
sai tf une afMi/oitie des peines tapi»
taies, i.erouo, 177(1. II. Sur fulilitè
des i luis. Celle. 17«2 , iii-i". III.
Expose drs droits du fHNii^oir su-
prême jHtr rapport a la liberté riiùle,
Dessauel Leipui, 1783, in-8". |V.
Ptè' es re/atii'es a la runstitutiun des
états de iMnebourg, Hanovre, 1794-
93, rivol. Il a publie pendant dix ^ns
avec Kraut el IlenecLc les .innales
du pays de Urunsaiik , Lmiebourg
et Hanovre, 1780-179."): et avec
KmJeil a commencé un linueil/HJur
f/iistoirr dr.f ptiy s dr l)run.<m'irk et
LuneUmr-. Celle, 1802 , dont il n'a
paru que le 1*"^ vol. D— C.
12
JAC
JAC
JACOBSEX, JACOBS ou
JA(X)PSEX (Michel), marin cé-
lèbre , naquit à Dunkerqiie vers le
niilied du X^ I^ siècle , d'une fa-
mille noble et ancienne, originaire de
la Brille en Hollande , et dont une
branche s'était élablie dans la Flandre
maritime lors de la révolution des
Pays-Bas. Use sio;nala héroïquement
au service d'Kspao;ne; en 1585, il fut
élevé au grade de capitaine de vais-
seau, et il en montait un en 1588 dans
la fameuse armée navale de Phi-
lippe II , dite y invincible. Ce fut à
son courage et à son intelligence que
l'Espagne dut la conservation des dé-
bris de cette llolte malheiueuse. En
1595 il commanda une escadre es-
pagnole , piit , brûla ou coula à
fond tous les bâtiments hollandais em-
ployés à la pèche. \]nt continuité
d actions éclatantes lui procura succes-
sivement le grade d'amiral-général et sa
nomination à Tordre de Saint-Jac-
ques. En 1G32, il amena d'Espagne à
l)unkerque sa flotte avec quatre mille
hommes de troupes; sans s'effrayer du
nombre des vaisseaux anglais et hollan-
dais qui défendaient l'entrée du port.
Retournant ensuite avec cette même
flotte en Espagne pour y chercher d'au-
tres troupes, il battit dix vaisseaux
turcs , et ramena tous les siens à
IJiinkerque. 'J'elle fut sa dernière ex-
pédition ; mais, dit Faulconier, histo-
rien de IJunkerque, « il ne jouit pas
« long-temps du bonheur de son
< voyage , et mourut quelques jours
« après son arrivée , en 1633. Il y
« avait cinquante ans qu'il servait le
« roi d'Espagne, et toujours avec tant
« de valeur, de conduite et de for-
« lune, que les Hollandais le surnom-
« mèrent le Jienard de la mrr.»
Le roi catholique fit transporter son
corps à Séville : il y fut enterré dans
l'église où reposent les cendres de
Christophe Colomb. Z.
JACOBS EX (CoRNiL-Guis-
lain), arrière-petit-fdsde Michel, naquit
aux environs de Dunkerque, le 11 sep-
tembre 1709, et fit d'excellentes études
à l'université de Louvain. Il était près
d'entrer dans l'état ecclésiastique lors-
que le baron de Reutlitsch , ami de
sa famille, l'en détourna et lui procura
un crédit considérable pour entrer dans
la carrière du commerce. Il l'eng^o-ea
à s'établir dans l'île de Noirmoutier où
Jacobsen se maria peu de temps après
son arrivée. C'est lui qui , le premier
dans cette île, en faisant des dessèche-
ments, força la mer à reculer sur elle-
même. En 1755 il y renferma les lacs
de mer de la Fosse, qu'il avait obtenus
m concession et sauva de la misère ,
dans cette année de disette, toute la
popidation indigente, par des grains
qu'il fit venir de l'étranger. Avant
lui , le commerce de l'île de Noir-
moutier se réduisait à quelques échan-
ges avec le continent ; c'est par l'ac-
tivité seule de son génie que les bâ-
timents du nord sont venus dans ses
ports. Il fut le créateur et fondateur
de l'île de la Crosnière qu'il gagna sur
la mer. Ce fut le 1*"" avril 1767 qu'il
déroba cette île à l'Océan avec l'aide de
onze cents hommes qu'il avait rassem-
blés de dix-sept paroisses du conti-
nent voisin. Il avait commencé celte
grande et belle entreprise par une pe-
tite clôture où il fit construire, en plan-
ches , une immense cambuse qui porte
encore son nom, pour y loger ses
travailleurs. Avant de commencer ses
vastes travaux, comme ses mœurs anti-
ques rappelaient celles des patriaîches,
il fit mettre tous ses ouvriers à ge-
noux et entonna lui-même le Veni
Creator^ en leur disant : Ici, mes en-
fants, sera bâtie une église. En ef-
fet , cinq ans après, au mois de février
1772, il obtint l'érection d'une cure
dans l'île de Pé, dite la Crosnière ;
mais l'église et le presbytère qu'il
JAC
JAL
avait tait bâhr ont rté «létniils p«n<bnt
la r^oluhoii. Il conslrui»it Mir cellt
rie Irrule mjiM>ii5, ri rrllc pelile coli>-
ni« roiilirnt aujourd'liui Irrnlr-tJrui
leu\ (Vr»f uiir tlo bciirt couqyrirs
qii \n <kur U mrr , car, intlr-
\u- tir rarrroiv>curiit il'uii
I, . .VI ju r ■ . .1 |j Kranre, ce àe*-
rif.r.iiriii .i| (nir uiip rommuiiica-
lion pai irirc amer l»aN*r , «le N«ir-
moulifr au coiiliurol. l'rrMiniir n'avait
encore o%é t pa»»«r à dictai ; c'est
Jacobfteii qui ca 6l l'c^vai le premier
avec des '^uitic* , et »a fille, KliNal>el)i>
N irtoire, ^ pa\»a en voilure. Il nou-
rat en 17K7 , à Noir mou lier, ou il
elait établi ilepuiv cniquanle an» , et
ou M»^ vef liiv le fui^aJrut rr^p^firr rom-
nu ' lie. D'ap! - • rr»
\i> Il corps fut : •Ijim
le ciiurlieir ilr l'ile tle L (.roMiirir. Il
lais^^a cinq rufanl», qualrr Llirs et un
l'argon. Sa qualnrme ù\:e, KliNil>rtli-
Vicluire clout on a lirfa parle . lut
condamnée a niorl et fuMllee à Noir-
raoulier a\ec madame d'Klbee dans le
lemps de la Irneur. Elle s'elail mariée
a%ec lui >et-irlaiie du roi, Mourain de
rilerbauilirre. qui fut au^i condamne
à mort par le liibunal re\olu(ionuatre
de> Sables. Z.
JA<:OTl.\ le colonel l'iinni .
naqtit \r 11 a\ril ITG.'idanste village
di- ' . u> près I^n^res , d'une
fj: > .iu\aieurs respectable, mais
peu (avonsee de la fortune. Il fui de
Douiie lieure destine par .son oncle ,
l'un des directeurs du terrier de la
Corse, à la profe^ion de géomètre du
cadxslre, et son éducation fui dirigée
vers ce but. Sa principale étude fut
celle des mathématiques pour le>quel-
les il montra des sa plus tendre en-
fance une (;randc aptitude, lue pro-
fondeur de réflexion cl une pc rNpicacilé
remarquabh- . "'li ne se demciiiirent
jamais, lui firent taire des pro^ie> ra-
pide> et triomphèrent de l'obscurité
des démonstrations de soa précepteur,
iiuitre d'école de Mlla;;e peu iustniil
et routinier. Il ne se li\ra que tard à
Pétude de la lan^^ue latine, et quinze
mois lui »uf!iienl pour élte en elal de
bien traduire le<» oraivms de Cliceron.
A\ec de paieillr» dispnvtîntt^ . aidé
par le% circonttancrt , >' ,ie
bonne heure par le ;:rnri .■ I. . <:ie
qui ne resva de lui donner dr> leinoi-
;;Da^es d estime, même depuis >on avè-
nement a l'empire , il eùl pu parcourir
une plu» brillante carrière m une mo-
destie etce>>Mve ne l'eût retenu. .\r-
ri«é eu (x)rse «ers la fin de l'année
1781 , il fut d'abord emploie dans
les bureaux du terrier, soit au drvsin
de la rarle, soit à la tenue des écri-
tures : ensn>e ensuite en campagne en
qualiie il'r'nr et sous la direction
u'iih r du cadastre, tout le
Ira^ < t devint utile au terrier,
et pM àe icaips apre% on le chai -ea de
le«er «m des parties les plus dilliriles
de l'île. I^rs difficultés du terrain, le
chmat, les maladies, d'injustes préven-
tions qu'un dévouement sans bornes
ne put vaincre entièrement, rien ne le
rebuta. I^ cadastre etaii a peine ter-
mine, lorsque la capitulation de Bastia
du 2 praiiial an '2 i'2\ mai 17'.)i) en
livra lc% plans aux .\n^lai>. I^> con-
sentions en réservaient uiie copie aa
(^ouwrnement français Jacotin fiit
clur^e de la dire. Sa miv>ion fut dif-
ficile; il eprou\a une %i\e opposition
de la part de l'amiral an;:lats llood
qui, malgré les termes formels de la
capitulation , refusait opiniâtrement de
laisser prendre aucune communication
du terrier. Ijl fermeté et la patience
de Jacolin triomphèrent a l.i fin de
ces obstacles : il quitta la Gjrse dans
le quiis de jiars 179G, après quatorze
ans u un travail pemhle, et re\int en
France rapportant une copie complète
de tout le travail du cadastre. \
peine avait-il revu >a pairie que, déjà
i4
JAC
apprécié, il lut désigné pour faire
partie de la mémorable expédition
d'Eo;Apte, sous les ordres de M. Teste-
vuide, son oncle, directeur des opéra-
tions topographiques. Débarqué à
Alexandrie avec l'armée le 5 juillet
1798, il n'y avait que trois mois qu'il
était en Egvle, lorsqu'il fut appelé à
remplacer son oncle qui avait péri assas-
siné dans la révolte du Caire. Bien-
tôt Texpédition de Syrie se prépara :
Jacotin, qui déjà avait été remarqué par
Caffarelli et par le général en chef, fut
désigné pour en faire partie. Il déploya
un zèle infatigable pendant cette campa-
gne, où Ton eut continuellement à lutter
contre l'ennemi, la famine et la peste ; d
reconnut ou leva hii-mème la presque
totalité de la partie de cette contrée
parcourue par l'armée française. A son
retour en Egypte, on organisa le corps
des ingénieurs -géo2,raphes ; il en fut
nommé directeur. Dans cette position
il redoubla d'activité ; non content de
diriger les ingénieurs qu'il avait sous
ses ordres, de provoquer, de rassem-
bler les matériaux qui lui étaient four-
nis par j)lus de cinquante ofticiers de
toutes armes, il parcourait lui-même le
pays au milieu de tous les dangers île
la guerre et du climat. Dans une de
ces pénibles excursions, comme il pas-
sait un pont sur le canal de Moès, son
cheval effrayé .«e renversa dans le ca-
nal, l'entraîna dans sa chute et lui
cassa la jambe en deux endroits. Cet
accident le (orra de renoncer aux opé-
rations de campagne pour se livrer en-
tièrement au travail du cabinet. I.e 23
janvier 18(K), il avait été nommé mem-
bre de l'institut formé au Ca-re : il qmtta
l'Egvpte l'un des derniers, vers la fin du
mois d'août 1801 .De retour en France,
promu au grade de colonel à l'époque
de la formation des ingénieurs-géo-
graphes en corps militaire, personne
n'eut la pensée de lui disputer l'hon-
neur qui lui était dû de diriger Tem-
JAC
ploi des nombreux matériaux qu'il
avait rapportés, et qui lui appartenaient
en grande partie; il fut chargé de la
rédaction de la carte d'Egypte et
nommé chef de la partie topographique
du dépôt -général de la guerre. Pendant
les guerres nombreuses qui se succé-
dèrent presque sans interruption , les
travaux dont il fut chargé se multi-
plièrent à l'infini; chaque campagne
nécessitait une carte et des plans nou-
veaux : l'impatience du chef du gouver-
nement ne permettait pas de retard.
Jacotin fit face à tout, et cependant il
ne négligea pas les travaux de l'atlas
de l'Egypte et de la Syrie; le travail
était achevé, les cuivres étaient gravés,
mais Bonaparte, qui sans doute par des
raisons politiques ne voulait pas que
cette carte fut publiée, les fit mettre
sous les scellés, défendit qu'on en ti-
rât aucun exemplaire, et en rendit le
directeur du dépôt-général de la guerre
responsable. Ce relard qui ajournait
la gloire de Jacotin lui donna l'occa-
sion d'enrichir l'atlas de tous les ren-
seignements qu'il obtint des voya-
geurs qui avaient parcouru cette
antique contrée depuis le retour de
l'expédition. Ce bel ouvrage aurait
suffi pour lui assurer une réputation
durable ; Jacotin ne s'en tint pas là :
on avait rassemblé les matériaux du
cadastre de la Corse, auquel il avait
puissamment coopéré dans sa jeunesse
et qu'il avait sauvé des mains des An-
glais : il en rédigea la carte , travail
d'autant plus important qu'il contient
les détails iVun pays jusqu'ici peu
connu et appelé à grandir en indus-
trie et en civilisation. Dans le cours
de ses nonïbreiises occupations, il en-
couragea les artistes employés sous ses
ordres, et forma au dépôt-général de
la guerre une école de gravure et de
dessin. Etranger à l'intrigue, il ne pro-
tégea que le mérite, et c'est à ses soins
et à son amour pour la justice que l'on
JAC
doit ane pfpini^re d'ajintn (|tti avu-
rent à la !■< • lè djii« la
^a«urr ln(> un le té-
11' r
a' . . i
t' If lie L iioinrilr rai le Je
I iJif immeiisf et vraiment
luiioriai. qui (n 'rra riirore de ijoin-
hreu>rN aii'irc ilr Ira^ail au mrp^ dV-
iJl-major auquel rexêculion en r^t
rnn(\ée depuis la fuvon, operj'e dan»
in sein , du savant et regrettable
«<iq>5 des in^én î- '- Il
tiresva pour la ra I, et
parlr^. \ < . une
carte <: nui
fut ariirwr a^n
pieuse, (l^itnmaml.
avait rtr (Irriilrr , elle lut t(lll^ttulle,
dessinée rt >^ra\pr en moins d'un an
et remise k relal-major de l'armée
avant d'entrer en carapajjne. (^tle
première carte pr^ntait de» imper-
fertions qu'on ne pou\ait attribuer
3u'au dei.iut de matériaux , .laroliti
epuis la lin de la carapa^nr s'ornuait
d'en rr«ii;;rr une nou\cllf sur une
éclieiie plus étendue. Il avaj i
cet eiïrl 1rs matériau\ ra;
les officiers «le l'arriirr ; il ■
lr> \n\a;;eur>, il consultait
■ par la persévérance de son Irawil il
• rail parvenu à donner à celle carte
le cachet de perfrriion que portent
tous -tes ouvrages ; elle était conçue
dans la profondeur de sa pensée, mais
l'exécution en était à peine commencée
loiM|iie la mort le frappa, le ï avril
1H27, après trois mois de souffrances
1 î^ës causées par une «jan^ienc $é-
nile , résultat d'une \ie excevvivfment
Ial)(»rieu>e. Nul liommc , peut tire ,
n'a porté i un plus haut point le
tèle pour l'accomplivsement Je ses de-
▼oirs, rabni.:ation de ses intérêts et le
dévouement pour ses amis. Son carac-
tère et ses travaux ont été peints, avec
autant de sentiment que de talent ,
JAC
fS
dans deux discours prononcés, le pre-
mier sur sa tombe par M. Joraard ,
l'un de »es compa.;nons d'K-^tpte, eî
le second dan^ unr sranre solennelle
Jr h ^or.éié de '."Nv.fjplnp^ J,,„t j|
éi.i \i I jrenaudière.
Sf ont ; la nirte
ijr i or%r tn \\m\ ieuiiir^, publier par
le dep«\l de la ;:uerre en IH-JV. le
^rand ifini ilrC h.iiYi>tr rttir ht .Syrie
en .'>3 fr-. ■'• V t l.jie avec la Drsrrip-
lion dr ar ordre du gouver-
nement . im <i> ' nuire *ur la construc-
tion de cet atla« , un antre sur la
sopei6rie del'K^vpte; enfin \à rurte
trh'tfuiarir en H feuilles qu'il devait
• r par une plus parfaite en 20
J !<
.IA<:OTOT I né à l)i.
|on en l?.*».'), étu i la théo«
lo^ie ; mais , ne se sentant pas de
vocation pour l'état ercle»ixNtique , il
dirigea se-v vues ^ers la carrière de
rensei;::nemenl. A l'époque de l'or-
;.in -jiion de l'h^ole polytechnique,
apprire alors eco!e centrale des tra-
vaux publics ( 'i6 nov. I7î*i) , il en
fut nommé ) ' > e. Il était en
mrmr trmp^ u conseil d'ad-
:ii. tuteur pour l'ad-
. Le *2() avril de
I aniire suivante, désirant retourner
dans sa ville natale, il donna sa démis-
sion. Successivement professeur de
phvsique, de chimie, de mathématiques
et d'astronomie à l'école centrale, puis
au hcée de Dijon, où il faisait des
cours publics auxquels les dames se
pressaient pour l'entendre, il devint
plus tard proviseur de ce Ivcée, et fut
enfin nomme recteur de l'académie en
en ix(>9; mai> les événements politi-
quei.de lHir> lui firent perdre sa pla-
ce [V . Celte mesure fut vivement cri-
tiquée dans le temps, car P. Jacotot ,
(i Un neh#prticolirrrJ* Pion l'en ëedoiB-
iBafc^ ra l'iiMliluant brnuer da tou M* bien».
prodaiMiil »S à 3o.ooo fr. d« reTeniu.
x6
JA.C
aussi remarquable par son immense sa-
voir que par sa douceur et sou urba-
nité, avait rendu de j^rands serNices a
Dijon, en y fondant un cabinet de phy-
sique et de chimie, ainsi qu'un obser-
vatoire d'astronomie. Il mourut dans
cette ville le 14 juillet 1821, j;i''nérale-
ment regretté ; les étudiants de Tacadé-
niie assistèrent à ses funérailles. On a de
lui un Cours de jjliysique expérimen-
tale et de chimie, a f usage des écoles
centrales, et spécialement de l'école
centrale de la Côle-d'Or, Paris ,
1801, 2 vol. in-8°, et atlas, m-4'' de
61 pi. Il en donna une seconde édi-
tion , totalement refondue et aug-
mentée de plus d'un tiers, sous ce
litre : Éléments de physique expéri-
mentale, de chimie et de minéralo-
gie, suii^isd'un uhrégé lï astronomie,
à l'usage des lycées et autres éta-
hlissements d'instruction publique ,
Paris, 1805, 2vol. in-8^ et atlas
in-4" de 73 pi. V Abeille, tom. IV,
pa^. 71 , contient une notice sur
P.'jacolot. D— z— s.
J A COTO T (Joseph), cousin
du précédent, s'est rendu célèbre par
une mélhode qui a reçu de lui le nom
è^ Enseignement universel ei d'éman-
cipation intellectuelle , méthode qui
a excité de vives controverses et que
ses admirateurs croient destinée à ame-
ner une révolution dans l'enseigne-
ment. Né à Dijon, le 4 mars 1770,
de Henri Jacoiot, d'abord boucher et
ensuite teneur de livres de son beau-
père Joseph Tardy, njaître chaipen-
tier , le jeune Jacotot fut placé à l'à^e
de neuf ans au collèf^e de sa ville na-
tale , par !iOn ^raiid-pcre maternel
qui se charj;ea de tous les frais de son
éducation. Dès sa plus tendre enfance,
il se fit distinf^uer par un désir insatia-
ble de savoir, et surtout par une vo-
lonté forte à laquelle il dut la supério-
rité qu'il ne tarda pas à obtenir sur la
plupart de ses condisciples. Ce fui sous
JAC
l'abbé Bertrand , connu par ses tra-
vaux sur les aérostats (f^oj. Ber-
trand, LVlll, 104), qu'il étudia les
mathématiques. Sorti du collège, troi-
sième insit^ne en rhétorique, à l'à^e de
quatorze ans, Jacotnt continua ses étu-
des aidé des conseils de son cousin
[J^oy. l'article précédent) qui lui servit
toujours de père. Il obtint à dix-neuf
ans la chaire d'humanités au collèj>e
de Dijon , suivit simultanément des
cours de droit et se fit recevoir avocat.
Il embrassa avec ardeur les principes
de la révolution , et figura dans la so-
ciété populaire de Dijon. Il exerçait
encore les fonctions de professeur d'hu-
manités , lorsque, en 1791 , il aban-
donna ses paisibles occupations et s'en-
rôla dans un bataillon de la Côte-
d'Or, où ses talents le firent nommer
par ses camarades capitaine de l'ar-
tillerie. Ce fut en celte qualité qu'il ser-
vit à l'armée commandée par Dumou-
ricz, qu'il se trouva aux sièges de Va-
lencienues et de Lyon, et qu'il prit une
part active à diverses affaires, entre au-
tres à celles de la Montafi;ne-de-Fer près
Louvain et de Pellemberg. Au mois de
nov. 1793 , les ministres des contri-
butions et de la guerre lui donnèrent
l'ordre de se rendre à Paris , où il fut
placé dans le bureau central de la ré-
gie des poudres et salpêtres. L'année
suirante (août 1794), il était se-
crétaire de Pille , commissaire de
l'organisation et des mouvemenis des
armées de terre; et il n'avait pas
encore alleint vingt- cinq ans lorsqu'il
fut nommé substitut du directeur des
études de l'école ceritr.'ile des travaux
publics, appelée depuis Ecole poh tech-
nique. ^Fitré dans cet établissement
le l'^'^ déc. 1794, Jacotot remplis-
sait depuis six mois les fonctions de
substitut, lorsqu'il crut devoir donner
sa démission le 29 mal 179.5. Le con-
seil d'instruction de l'école ,• où l'on
voyait figurer les hommes les plus il-
JAC
l« »« if ncfN, If 1* que Mon
f«, VMMfurliii, Vron\ , fie, ii'a>ant pu
iairr changer sa détrrmination, fxpri-
nu, par un \o!r «pfcial , l« rej;rels
qu'il éprouvait df \t voir »*rloif;ner.
Jarolot iif sVlail tlrcitlë à quillcr l'K-
co\e |»ol^lfrhniqiir qu'après avoii ap-
pri» que le jur^ li'in^lrurhon publique
leiiail lit" \r nnmmrr piofi*%srur ilr lo-
•.M.jijr rt il'.iii.iKvf »lr» 4rll^JtlOll9 ri t!r>
i.;.r> .1 I j pr riiurre cfolc rrnirale tir l)i
M»ii. Kn 17îM» il occupai! Jam la nèroe
rrole la cliaire Je^ lan^uri anciennes,
h jiiiiliahséavec presque \ou\ les^enrr»
(le G|pnai»vances, Jacnlol elail propre à
tout enseigner; dès lors ou l'appelait
partout où il fallait or;;aniser une cliaire
nouvelle, ou donnera d'ancirnries élu-
ilc> unr dircflion meilleuie. Ce fut ainsi
(ju'ru l'an \ll (18()!ïj il passa de la
« ' I •• des langues anriennrs à celle t\r
r rinatiqurs Iramtendanirs du h-
.., ,i,- I) n qu'en iSfMi on le
iMMi.iu.i pi..', cur «iupplr.iiil a l'école
«le droit , et en IHt)*». profrsNfur de
mailirroaliques pures a la faci.llr des
^ciences. I^ même année , il obtint
le r,!ade de docteur e^cienccs : il était
df|.i docteur ès-lettre* et docteur en
droit. Ix)r^ae les Autrichiens occupè-
irnt Dijon, en ISI V, .lacotot, natu-
iclirment frondeur rt caustique, dont
lc> idées libérales étaient connues et
qui passait pour exercer beaucoup
li'iiilluence sur la population , fut en-
lc\c par eut pour servir d'ota-e.
Kendu peu .iprés à la liberté, il re-
Mnl à Di|oii , où , pendant 1rs cent-
jours de 1813 , ses compatriotes l'é-
lurent député à la chambre des re-
présentants. Il réussit à faire échouer
es amis au collé{;e d'arrondissement ;
mais ils courureql le laire nnmmr-- au
collè>;e de d»-partcment, ou il ne poci-
vail entrer. Klu ainsi maljjre lui à
une grande majorité , Jaroîot consi-
déia celle persévérance Je volonté
comme un ordre auquel il devait
JAC
»7
obéir. 11 accepta en disant aax éler-
tetirs : •« .le n'approuve pas voire
m choix, mais puisque vous l'avez vo:ilu
m fti obstinément, je le veux aavsi, et
m ne puis maintenant que vous féliciter
m de l'éiiergir et de l'inllexibilité de
M votre vouloir, l'uissent rtre ainsi
•• xoul-jes toute* les représrnialion.s
•• nationales ! •• Jacolol prit une
patt active aux débats de la rham-
biedrs représenlatil- Il fil adopter le
20 juin la II il'unr commis-
sion , pour I •-: les constitu-
tions françaises dans un seul et inrme
cadre. CJiar^é avec quelqurs autres
de rédiger unç adrev^e au peuple fran-
çaiH, il déclara, le 2*J du même mois ,
an «^and élonnement de se^ collr;;ues,
3u'il n'avait eu aucune conna.ssance
u projet que ManurI présentait au
ii<<ni de la comm1^Mon dont il était
r.ij'porteur. •« Je ni" serais tu , ajouta
« Jarol«>t , si ce pri»jet n'eût été tive-
« ment attaqué n Deux jours après ,
ce f-jt lui «j ta la commis-
sion, et «a M t adoptée a l'u-
nanimile. Comme dans toutes les cir-
conslanrrs il s'rtait prononcé avec
beaucoup de violence contre les ?ionr-
bons , il crut devoii quitter la France
a\ec sa famille, lors de la dissolution de
celle assemblée, et se relira voloiilai-
renieiil à Kruxelles. Il v vécut dans
I intimité de plusieurs roii\entionne|s,
et chercha dans le prnd-j;! de «jticl-
ques leçons à éc»)nomlsrr \c^ faibles res-
>ources qui formaient toute sa fortune.
Les premières ne lui furent pa\ccs
qu'a raison d'un demi-franc ; mats
on lui proposa, en 1S18, la chaire
de littérature françai.se à l'uiiiverité de
lx)uvain. Klle avait été olTerlc d'i-
bujd à l'académicien Arnaiill qui fa
refusa en dé>i;;nant Jacotot comme
valant heauroup mieux que lui.
Dès-lois celui-ci se dévoua tout en-
tier à ses élèves avec un zèle et un
désintéressement au - dessus de tout
LXv iif.
i8
JAC
l
éloge. On accourait en foule à ses le-
çons, qu'il savait rendre aussi instruc-
tives que piquantes, et auxquelles il ad-
meltait indistinctement tout le inonde
sans exiger la moindre rétribution.
Mais 11 ne savait pas le hollandais ,
et les trois quarts de son auditoire
ne comprenaient pas le français. En
réfléchissant aux moyens de vaincre
cette difBcuhé , le hasard offrit à ses
yeux une traduction hollandaise du Té-
lémaque de Fénelon. Il mit ce livre en-
tre les mains de ses élèves en leur fai-
sant dire , par un de leurs camarades
ui lui servait d'interorète, ^l'appren-
re par cœur le français de ce livre, et
de s'aider, pour le comprendre, de la
traduction hollandaise en regard. Il les
invita ensuite à répéter sans cesse ce
qu'ils auraient appris pour ne pas
1 oublier, à lire le reste pour le racon-
ter, en ayant soin de le rappoiter au
petit nombre de pages qu'ils savaient
imperturbablement , puis il les engagea
à écrire ce qu'ils pensaient de tout
cela. Quelle ne fut pas sa surprise
quand il vit que, sans qu'il leur eût
rien expliqué, les élèves mettaient l'or-
thographe et suivaient les règles de la
grammaire à mesure que le livre leur
devenait familier par la répétition ,
et enûn qu'en Irès-peu de temps ces
étrangers écrivaient purement le fran-
çais ! Jacotot en conclut que les maî-
tres explicateurs n'étalent pas indis-
ftensables ; et quand il eut appliqué
a même méthode à l'écriture , au des-
sin, à la peinture, aux mathématiques,
à l'hébreu , à l'arabe, etc., et que ses
expériences eurent réussi , il s'aperçut
qu'on pouvait V^ut enseigner aux au-
tres, même ce qu'on ne connaissait pas
soi-même. La méthode fut trouvée, et
Jacotot lui donna, le 15 ocl. 1S18, le
nom à' Enseignement uniifersel. Ap-
prendre, rèpèler et comparer à une
seule et mêmecliose^ sont les trois
principes qui lui servent de fondement.
JAC
Apprenez un Ihre et rapportez-y
tous les autres , c'est là toute ma
méihode , dit Jacotot. Les heureu-
ses applications qu'il en fit à Lou-
vain, où plusieurs institutions de gar-
çons et de filles avaient été étabhes
d'après son mode d'enseignement ,
attirèrent l'attention du roi des Pays-
Bas. D'après ses ordres, l'adminis-
trateur de l'instruction publique in-
vita , le 6 juillet 1826, un savant
hollandais, M. Kinker , professeur
à Liège , à examiner la méthode de ^
V enseignement unii>ersel dans les éco-
les établies à Louvain sous la dlrç^tion
particulière de Jacotot , pour être en état
de présenter au département de l'inté-
rieur un rapport détaillé et motivé sur
la nouveauté, la nature et la tendance
de cette méthode. Il fut également pres-
crit à M. Kinker de spécifier ce qu'il
pourrait y avoir de bon ou de défec-
tueux dans le nouvel enseignement, et
d'indiquer les branches d'instruction
auxquelles on pourrait le mieux l'ap-
pliquer. M. Kinker, après avoir exa-
mnié la nouvelle méthode avec l'at-
tention la plus Hicrupuleuse, ce sont
les termes dont il se sert, dans les éco-
les mêmes dirigées d'après ïenseigne-
ment universel) àéclârâ , dans son mé-
moire du 26 sept. 1826, qu'elle était,
sous tous les rapports , digne des
recherches ultérieures des savants, aux-
quels leur impartialité et leurs vues
élevées donnent le droit de juger une
expérience nouvelle faite sur l'esprit
humain. Elle lui parut plus propre
que toute autre à faire faire aux élèves, en
un espace de temps bien plus court
que celui que Von emploie ordinaire-
ment dans la plupart des objets des
connaissances humaines, des progrès
frappants et qui paraîtraient tenir
du prodige, si la nature même de cet
enseignement n'expliquaitcelte marche
rapide. M. Kinker reconnut que la dé-
nomination d'enseignement universel
I
JAC
JAC
lii appartenait incontf^taMfment .
puis</u'rlir potuHiit s'
toutes lr% l>rutuhe% iJ'
suncrs humtiinrs, m fmfUan! I opi«
nion qu'une dénominiitou qui fipri-
ner^it re qar Irt (irrc) noromaifnt
auto^h'JtfTi.1 • rusn^utntrnt qu'où ie
donne a soi-même^ rn frrait niiem
Cftnnaitre le rararlèrr di>ltnclir. \je
mailfc de ren^e^nrinriil univer%el
^*r^t en riïe! <) ' '»• qui montre
à I rle^e Ir fin ilnit suivre;
c'e^t à fflui n à iniir» Iter srul.rt à sr
rrniirr lui tnètnr AwAi/r dan» la bran-
rlir qu'il rulii\e, en regardant, en
refleihisumt, et surtout en répétant
$ans cesse ce qu'il a drrrwnert et
trouve ptir ses propres efurts dans la
science a laquelle il s'est voué, et en
comparant ce qu'il veut apprendre à
ce qu'il Mit d)-)i. La mrtlinde dr Vrn
seignenunl utn\'rrset, ri Jarntot ntn
a jamais divon^enu , n'e«l pa« entière-
ment neiwe il), ma.s re qui doit la
faire prrfrrer au& autres, crsi que. dans
ces deinieirs, finstrurtinn t/r sui
même n'e^t qu'arcevsoire, cl souvent
purement accidentelle , tandis qu'elle
constitue au contraire le caractère prin-
cipal de l'en^ri^nement universel.
Quant à la tendance de cette mé-
thode, elle consiste surtout en ce que
le^ elr\es se forment une idée claire
de ranalo;:ie , plus facile à sentir qu'i
expliquer, qu'il v a entre les diflrrcntes
branche^ de> cuiinais>anrrs Immaines ,
de mrrac qu'entre \rs diffrientes modi-
fications que subit l'enseignement dans
ces diverses brandie-*. Comme il est im-
portant dans son apprécialinn de faire
attention à la manière d'en introduire
l'usage, il esl à craindre, dit encore le
rapporteur, qu'on ne trouve pas beau-
coup d'instituteurs qui sachent l'appli-
quer aussi bien que M. Jacolot, qui
(i) « L'emrico«"ii»«-nl uoiirr^l u'rtt pa* moc
•oavuaie . • dit Jacotnt ^Ltmgm* matemtdi»,
Louvaio, 3* édilioo, p. 79).
jo«nnent comme luii de» connaissances
ides cl xaréf*. et au ta'ent de
j irer dr I4 ronfianre de» élevés en
leui inspirant dr la cnnfiance en eux-
mémrK, celui dr leur adres^ser les qoe»-
lions exploratrices convenables, de ne
jamais deiaiwer leur ju;;eraenl, et de
•'occuper enfin plul(\t à <^cartrr les ob-
stacles et a faire éviter les écurils qu'à
montrer la route. Toutes les methodrs
.' ' rllrment de
I < ar ,dan^ ces
r ne et inter-
j _ ' .Ir^ de Tari
ou de ia •< tandis
que dans I . ^ srI ai
contraire, le maître, pénétré de la mé-
thode d'apprendre par soi-même, ne
doit être considéré que comme un rom-
pa;;non de «ova^e qui fait le chemin
avec l'élese, attire son attention sur
chaque root, sur chaque •->llabe, sur
chaque Irtire dont une phrase e^t com-
posée; lui fait trous er des rapprnrhe-
mrnts, Ir force de repéter «^n» cesse et
t' de «a mémoire (2). On
I utétre reprocher ï la mé-
thode. a)oi]le M. Kinler, de trop exi-
ger de l'attention et de la mémoire , et
critiquer les efforts qu'on fait pour ob-
tenir des résultats rapidrs qui ne se-
raient pas toujours durables, ijUtn'tpt'on
puisse plutôt applitjuer lette critique
a Cahus rt a Iriagrration de la nir-
t/iude ipi'ii la méthode ellr-mèmr.
H conclut enfin, de ces rrilexions ,
3 lie y enseignement uni^^ersel s'alliera
ifliciienirrit avec les autres methodrs
qui procèdent en sens inserse. l'our
le faire prospérer, pour en connaître
mieux la nature, la tendance, Va-
*tiiritage durable et la juste valeur,
il conviendra de l'isoler des inslitu-
{%•) On p..«rr.it •»priii.*r crli»- diffAr^n*»
d'Mn# »UTr tnart^fp rn diMnt : jifprindrt et
r^tantr .il. on ri 1' c mpar-'i»©!»,
TOlli . un.r*'<fl : •pprtudr* et Ml -
^l,f, (, .Mclioairc dcf collcfet cl
de la plui'jr-.
ao
JAC
JAC
lions d'instruction inférieure el njo) en-
ne déjà existantes, et de l'inlroduire sé-
parément, en énc;eant, par exemple, un
institut, qui serait en même temps une
école normale pour de jeunes maîtres,
et une école pour des élèves ordinaires,
où l'on s'appliquerait à maintenir l'en-
seignement universel non mélangé, pur
et sans communication avec les autres
modes. A peine le rapport de M. Kin-
ker eut-il été mis sous les yeux du roi
que ce souverain, qui avait déjà décoré
Jacotot de l'ordre du Lion des Pays-
Bas, lui fit écrire par l'administrateur
de l'instruction publique (11 nov.),
pour savoir quelle serait la voie la plus
facile et la moins dispendieuse d'ap-
pliquer sa méthode d'enseignement à
une étude plus générale de la langue
hollandaise dans les provinces wallon-
nes, et de quelle manière il pourrait
coopérer à établir cet enseignement et
en diriger la marche. Quelques lettres
avaient déjà été échangées entre cet
administrateur et Jacotot; et celui-
ci avait fait connaître qu'il devrait être
spécialement chargé d'organiser l'ensei-
gnement d'après sa méthode sans au-
cune espèce d'intervention étrangère,
qu'il était au surplus aux ordres du roi,
lorsque le 1*^*^ mars 1827, le prince
Frédéric , commissaire-général de la
guerre, lui écrivit au sujet d'une école
normale d'instructeurs, à établira Lou-
vain d'après sa méthode, et dont il
le priait de surveiller les opérations.
A)ant accepté cette tâche, Jacotot .se
mit à l'oeuvre, et bientôt, malgré tou-
tes les entraves que les nombreux et
puissants partisans des anciennes mé-
thodes lui suscitaient, il réussit si com-
plètement {\\x après deux mois eiwi-
ron (renseignement, il put mander au
roi, le 22 mai, que les ojfu.iers ries di-
vers corps de F armée réunis en école
normale à Louvain étaient suffi-
sammrnt instruits. Il fit, le 14 juin
suivant, la même communication au
prince Frédéric, qui s'était déclaré le
protecteur de V enseignement wmersel
et de son fondateur, en lui mandant
que désormais toute prolongation serait
inutilement dispendieuse. Cependant
comme ces officiers exprimèrent le plus
vif désir de continuer leurs études d'a-
près la méthode appliquée à la fortifi-
cation passagère et permanente, à
r histoire , à la géographie , aux
sciences physiques, aux langues et
aux mathématiques^ Jacotot, sur la
demande du prince Frédéric (26 juin
1827),. approuvée par le roi, consentit
à donner encore ses soins à l'école
normale, en déclinant toute espèce de
responsabilité, si l'on introduisait en Û
quoi que ce soit l'ancienne méthode. ^
l)ès le 8 du même mois , il annonça
au prince que les soldats wallons ,
dont le gouvernement lui avait confié
l'instruction, savaient lire, écrire et
compter, et commençaient à appren-
dre le hollandais. Le 12 juillet , il
adressa au roi des Pays-Bas, d'après
le conseil du prince Frédéric , un
mémoire communiqué préalablement à
ce prince qui y retrouvait /ùw/c/« doc-
trine du savant dijonnais, à Uégurd
de la méthode de l'enseignement
universel , exposée sans feinte ni
réticence aucune , avec franchise
et abandon. Jacotot y proposait
les moyens d'établir Venseigncmcnt
unii'crsel dans le royaume; mais il
ne voulait se charger de la direction
ou plutôt de l'inspection (]ue sous la
condition <pL il n aurait d'autres in-
termédiaires entre la puissance et
lui fjue ceux (pi il indic^uerait ,
qu'on ferait tout ce qu'il dirait ,
et rien que ce qu'il dirait. Du
reste, il ne demandait pour lui per-
sonnellement, ni titre ^ ni argent,
et désirait être considéré, non comme
un fonctionnaire qu'on emploie, mais
comme \\\\ phih)sophe qu'on croit avoir
besoin de consulter. Enfin , il deman-
JAC
tbit ronfuifice entih-e twer responui-
hilitr, ou M l'on ne voulait que l'cvsa^er
il promrllait uirisiunce fMtsswf, mais
sans rtre respunsaUe. Mjl^r^ loole
la protrclion de la famille ro>ale, on
ne revvait de lui susciter des entraves.
Alorrt, ne voulant point que l'on pill
dire que l'esvai tente par le roi de« l'ai s-
Rat n'a>ait pas réuvsi, il rrul devoir
faire re qu'il appela un nmp d'rtat
dans sou prlit empire, à l'ocraMon de
rinslallatiun de l'école noimale de
Lnuvain , qui eut lieu le 17 oct.
1827 II v prononça un discours \é-
hénent dani lequel il attaquait tant
aocone espèce de mena;^ement s^s ad-
Tersaires , en rappelant arec amertume
les obstacles nombreux qu il lencon-
trait. I>e 1 V f^\iier de l'annre Nuisante
(lHâ8), il expo&a au prince les Ira-
CMMries qu'on faisait subir a l'rcole des
Cxlels auxquels on refusait les instru-
ments qui leur étaient nécessaires ou qui
n'ea recevaient que d'incomplets, el le
99 èm màmt mois, il écrivit au roi
loi-Même qu'il avait souvent dit ï sa
Majesté yu'iV rtoit imfHissihU (tria-
Uir renseignement um%*ersei dans
tordre social, à cause des ftrr juges
et des intérêts opposes. Il déclara
en même temps qu'il devait ie retirer
et qu'il se retirait avec respect , bien
qu'il restât toujours aux ordres du
souverain, si jaraaiî; S. M. crovait que
le moment fût \enu d'écarter a^Hjnt
tout les conseillers de la vieille mé-
tbode pour faire jouir ses peuples de
V enseignement uni^'er sel . On ne voit
pas que depuis celte époque Jacotut ait
entretenu 'le cor-espondance soit avec
le prince rwal, soit avec le toi des
Pays-Bas, nî qu'il ail été char -é de la
surveillance d'auc-an établissem^t d'in-
struction publique. Vendant les deux
années qu'il resta encore à I^uvain,
il continua de donner ies conseils aux
élèves des institutions qui avaient
adopté sa mëlhoJc ; et, njalcrré la dé-
JAC
%t
faveur attachée i ce titre auprè*
des rxaintnaieurs officiels , un {;iand
nombre obtint eut de biillant* succès
dans les examens publics qu'ils eurent
à soutenir. Il ne se pa^sait pas de jour
que Jacolot ne reçût h >isile des
hommes les plus di^liii;;iiéN, non seu-
lement du royaume drs l'a>s Ua-. et de
Kraure , mais encore d*.\llfina«^ne ,
d'An>;le!erre, et mrine de Hussie et
des ktals-lnis d'Anirrique. Presque
"tous rentraient dans letir patrie enthou-
siasmes de la méthode et de son fon-
dateur (3V Vivement attaqué, tourné
en ridicule dans quelques journaux
et dans des écrits publiés par des
personnes envers lesquelles il s'était
montrr Irès-commumcatif, Jacotot n a
jamais \oulu repondre aux critiques,
mais il était devenu extirmeroent sus-
ceptible. Cette susceptibilité disparais-
sait néanmoins quanti il t'apercesait
qu'on désirait vrntablement connaî-
tre sa méthode et les meilleurs moyens
de l'appliquer il l'enseignement. Il
11
1
•••'". •'-■ r— -• I — '--■- -
Ui xrtvait I» Il <«*rirr 1*19 ■ t« ••»-
. phr.i* 4*« M'.vrM ••! I« coaikH d« l'art
, ' ■ V • "r»; ro«« »rtt . »r--n-
•■ |»o«r l«» cb. >' •
■ : inti ripr'K . Ij
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rt liu t'm-
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4 ).;ut u..."i »u i.iuiut» .... 1 '
■ qu- U »««-,rir vont d««H |>niiA«t
■ t»fu% rrt lU-i* ft bMt.>r«ra à ,
• Dom. • M. Kro«i»i«r^ fjit un «'t.ne »■
lii« a« c*U* MclWoJ*. quM •«'Il •
p«iMlanl ton fjoar » |.»o»-mi. tl*n» m,j !■- ,
^ft « /• fottt 4*1 arlVWfj d* l'*n$ , «n
il n!^ «if-r .n.illilud» lU f«i'« k l'appoi it«
l . ru fjrrur «U Jatolul •id"
, i.roi. M. l'.andouin. j»o<al
!«'< rap|. . i » -r U u.. •I...J1 ^ e i r . ". ""''^
mmf*ri*t «lu |l lr"u»« •«liuiraUlc pjr »•» »' "'* ' "
<.l#. qui nalirrga r-** ••««<«"•"' Ir trmp» d«
i-, ,,irucu..«. ma» fouro.l au ,.."»rc le mojM
u.nun.>n.U,^m.,*nf .. rtc MM. de l-*.l'yne.
< lemrol D.»orn.e.. Bo..t«r. elc . • aocortienl
d.u» leur «,..n.ou en fateur du mode d.ii.e.-
gurmeut de Jacwtot.
23
JAC
JAC
montrait alors une extrême bonho-
mie , souffrait sans impatience les
contradictions, et s'empressait de ré-
soudre les difficultés qu'on lui sou-
mettait. Le 9 août 1830, il quitta
pour toujours la Bel}:;ique et se rendit
à Paris. C'est là que nous avons eu
l'avantage de le voir et de nous en-
tretenir avec lui sur la méthode de
V enseignement universel , dont nous
avions déjà pris une idée dans les ou-
vrages du fondateur, dans ceux de ses'
partisans et de ses adversaires, et en
visitant les institutions où celte métho-
de est suivie. Nous bornant en général
au rôle de rapporteur, dans l'aperçu
que nous en avons donné il y a dix
ans (4) , nous reconnaissions cepen-
dant avec M. Duiiveau, l'un des ad-
versaires les plus prononcés et les
plus habiles ^e V enseignement uni-
versel , « qu'en adoptant pour l'in-
« struction de la jeunesse des métho-
« des radicalement nouvelles, on a
«< toujours contre soi une masse énor-
<f me de probabilités (5). » Mais nous
ajoutions, et sur ce point nous étions
d'accord avec M. Kinker, « que sans
détruire de fond en comble l'ancien
mode d'enseignement qui a pour lui
l'expérience et la sanction des âges,
et sans faire table rase pour con-
struire à la place un édifice tout nou-
veau , un gouvernement sage et
éclairé ne devait pas rester toujours
H^ Bulletin «le» sciences ^«fograph., ëconoinie
puhliqtif, etc., i83o, in-8o.
(5) Hn partagi-aiit ropuiion de M. Durivean «nr
!«' inc»)iirr'ni»-iits prf'Siiiiiiihles dr- méihodes d'in-
ilrurlioii rtidir-ilemcrtl uoiioell^i, nous avions loi t
de supposer qu'on pouvait class^^r dans te nom-
bre celle «1«- .la< olol ; car, outre <pic ce deriii«T
d^Ure lui-ni^iiie que 1-» printipr» qii> !>rrvenl
de base i Vfitr'giiemml uniyrne/ ne sont pan
noiiTeau», on saii qu'ils ont été prorlainés ;i»ant
lai par des buuiti;ex superi<'iji s. (.f qui cnnsit-
lue le mérite de Jacr)tot, c'^-st l';q>plicaiion et
la |;énéruli»aiion de r^-.s |»rintipe> ; c'eM d'jvoir
indiqiir un objet d'eiiide pour terme Ue mmpu-
rmixon, et de f iire rapporter ions In aiitrei ob-
jets à celui qu'on a éiudié ;re r|ni est raJicaiemetil
nouveau, t'est à' usnir ^xtbiii qu'on pouvait truei'
fn.tr c# ifu'on ignorait.
statlonnaire. Nous disions qu'il pou-
vait et devait même, non seulement
profiter des améliorations dont l'uti-
lité est démontrée , mais encoura-
ger les essais que désiraient ten-
ter des hommes offrant toutes les ga-
ranties nécessaires par leurs talents,
leur caractère et leur moralité, surtout
lorsque des essais semblables avaient
déjà produit d'heureux résultats. Après
un court séjour à Paris , Jacotol se
retira à Valenciennes ; et, pendant
les sept années qu'il resta dans celte
ville , il répandit sa méthode dans
beaucoup de familles. De retour dans
la capitale de la France au mois de
mars 1838, il continua de l'habiter et
de consacrer tous ses instants, jusqu'à
sa mort arrivée le 30 juillet 18i0 (6),
à mettre les pères de jamille pau-
vres et ignorants , c est-à-dire ne
sachant ni lire ni écrire, en état
d'enseigner à leurs enfants la lec-
ture, l'écriture, les sciences^ etc.,
en un mut ce qu'ils ignoraient. sSes
obsèques furent célébrées sans osten-
tation ; mais quatre à cinq cents per-
sonnes accompagnèrent sa dépouille
mortelle jusqu'au cimetière du Père-la-
Ghaise. Plusieurs discours furent pro-
noncés sur sa tombe par des professeurs,
des élèves, et même des femmes. M.
Gannal a embaumé son corps d'après la
demande de ses disciples, sans vouloir
accepter de rétribution, s'estimant heu-
reux, leur a-t-il écrit, d'avoir été choisi.
Un monument doit être çlevé à sa mé-
moire, et M. de Cubières, minist»-e de
la guerre, son ami et son disciple , a
souscrit des premiers , et accepté la
présidence de la romuiission de ce mo-
nument. J. Jacotot arail épousé, au
mois de* juin 17î)'l<, une fille de M.
Defacqz, receveur principal des doua-
en i87.8 une littiogiajihie
l^fe p<i'cln*e Mir son
(6j On a pubi
représentant J.irolot
éfiaulD par sniti- Wc l'nifinnité aj>peléc torticolis
dont il Tut affi ctc peudaut le« viugl deruières
années de sa rie.
JAC
Mi à Tovrnjv, dont il a f« pln-
timn riifjiit» l.'r&trait df%rlo|>pé
da rapport dr M. kiiiLrr t\ ïrs nla-
tiom qui prrcrtlrni ont fa t ^tilBvJin-
ramt ronnailrr b m< I jrotot.
Nous allons eianinr rut aael-
qim onn 6ts princtpain ob|frltun«
qu'on a faite« rontrr rlle. On a il'abord
c/il'qu^ la i<>noini liai ion «lonnee à la
mHliodr À i'.nsrignrmmt uniorraei,
à' t nui nt if Hit ton inlrlln turUf. Nous
a\onft %u rommrni M kinlrr justifie
celle première qoalifirjitinn ; quant k
la serunde, on ne -
qtie f'fHf rmaiiri|»er n •
•>i le^s pf orticNN*^ ilr J*<n!
f-e», que de tuiifiin\%rr pf
ainsi dire la irienre, de metlre loul in-
dividu en état de »'invlruire sans re-
courir à une intellioenre étrangère. 1^
proposition que toulrs lr$ intrlUgm-
ers sont eguirs, et l'adage que tttut
est dans tout, et que rirn n'est tians
rirn, ramenés par Jarotot à rliaqiie
page de ses ou^ra-^e*. ont é\r ^i«rmrnt
critiqués par MM. )>uri»eju, le dor de
I>Ms, lx>rain, etc. 1^ proposition re-
lative a Tesalite de» inielli^enres chea
kNB les liomme« bien conformes, c'est-
à-dire le fait qu'ils nai.N<«ent tous avec
la faruhe de comprendre , de voir , de
saisir des rapports n'est pa> nouvelle^
elle a ^é émise par Descartes. New-
ton, Cousin, etc. An surplus, Jarotot
ne la reproente que comme une
opinion qu'il <>nonre, comme une lit-
pothése qu'il cKerclie à veiifier, et à
laquelle il raitaclie cependant touv le^
actes inlellettueU. Il ne prcinid point
que tous les bomm«- . nt dans
Ifurs actes la mcint- . i-, puis-
que la plupart de ces actes sont irré-
llechis et sans but ; mais il attaque la
distraction comme un vice et non
comme une incapacité. Arme de ce
principe essentiellement moral et en-
courageant, il ju-e les individus , non
i' après la somme des maoïfesUiioDS
JAC
i3
acquises, nais d'après l'esKenee même
de tonte manifestation inlellectuelle II
ne conteste m la snj.éhonté de la
scienrr . nt la stipérmiitedu talent,
bien «, < l'opinion de i'inr^a-
liie m ■ <- rommr fausse et im-
OMinle. >ui^ant lui. apprendre c'ert
fociprendie, comprendre c est rap-
porter, lier, efabraaer ; ici l'anaKse
et la »>ntbrse se to«cbent . re»prii,
touioan pr^ à tsccooiber, a besoin
d'un levier, d'un appui, d'in principe
vivant, intente, profond; ce pnnctpe
égaille des intelli-enres 1 oute
ri^ de .Isrotf-t Comme prnfes-
rur. s'> raitacbe
' I irr l'amonr -pro-
pre, abaisser I op^neil, élever le mé-
tal, »eniner et lourneiiter l'esprit par
des quesMons inattendues, purs l'abaii-^
donner à lui mené et le lancer se dere>
lopper librement dans le rtiamp qu'il
lai avait ouvert ; tel était le résuhat de
l'opinion qu'il avait soin d'inculquer à
»es elr\eset qui le caractérise C^tte
OjMiiion de l'e^alité des intelli;;enre»
mériterait, si elle n'était pas vraie, d'ê-
tre considérre comme telle dam nos
collèges ou , sur cent élevés, une ▼mj;-
taine tout au plus sont cla^sé5 par-
mi les intelligents dont on s'occupe,
tandis qne les autres jo;;és incapables
d'acquérir l'instruction, ou supposés do
moins engourdis par la paresse, sont
liv rés à eni mêmes et abandonnés à letrr
triste -oit. L'ada{;e que Jaroiot mpsi-
dére comme un axiome, si;:i!ifie que
tout est (tnulii^fr dans les actes in-
tellectuels, qu'il n'en e^t aucon qu'on
ne puivse rom/n/rrr a un autre sous
plus ou moins de points de vue.
M. KiiiLer, comme M. Durirau , a
^it qu'il ne fallait pas juf^er la méthode
seulement par .son fondateur , P^^ce
qu'il serait difficile detrou%er des insti-
tuteurs qui sussent Tappliqu"" comme
lui, el le dernier a ajouté qu'elle n'é-
tait bonne que dirigée par lui ; qu'on
^4
JAC
ne devait se prononcer qu'après des
expériences auxquelles l'inventeur eiit
été tout-à-fait étranger, et qui eussent
été suivies pendant un certain temps
par des hommes exempts de toute
prétention. Il a demandé enfin qu'on
lui montrât les hommes distiiijj;iiés pro-
duits par l'enseignement universel, les
chefs-d'œuvre dus à cet enseignement.
Qu'on les lui montre , et il se déclare
le partisan de la méthode. On a ré-
pondu : Depuis vingt ans environ que
V enseignement universel est appliqué,
non sans heaucoup d'entraves, des ex-
périences ont été faites non seulement
à Louvain où Jacotot a résidé jus-
qu'en 1830, mais à Bruxelles, à An-
vers , à Verviers, à Cambrai , à Cler-
mont-Ferrand, à Paris, à Civray, etc.
Dans toutes ces villes , les élèves ont
fait des progrès rapides et conslatés
par des examens ; ainsi que cela ré-
sulte de rapports , dont plusieurs ont
été publiés, sur les résultats obtenus
dans les institutions y^coif/Vf^ qu'on
y a établies. Si les noms d'un très-
grand nombre d'enfants élevés d'après
cette méthode ne peuvent être cités, 11
est facile d'en Indiquer les motifs. D'a-
bord les universités en absorbent la
majeure partie au fur et à mesure de
leur sortie des instituts de l'enseigne-
ment universel. 11 y a, d'un autre côté,
très-peu de parents destinant leurs en-
fants à suivre une carrière quelconque
qui ne craignent de nuire à leurs
succès futurs en osant avouer qu'ils
les ont lait élever par la méthode de
Jacotot ; il en est encore moins qui
se déterminent même à tenter l'ex-
périence. Quelques-uns cependant
agissent différemment ; mais Ils sont
rares , par suite de la défaveur qu'on
a cherché à jeter sur celle mé'.hode.
Des musiciens célèbres , parmi les-
quels nous citerons de Derlot et
Ourry , premier violon de l'opéra de
Londres , attribuent une partie de
JAC
leurs progrès aux leçons de Jacotot
qui a provoqué en eux, disent-ils , de
sérieuses réflexions sur leur art , etc. ;
Albert Grisar, d'Anvers , auteur de la
Folle, de VOpèra à la cour, etc. ;
Polydore Devos, planiste distingué ,
ont été élevés d'après la méthode pure
par M. de Séprés, qui ne sait pas une
note de musique; le jeun^ Bertera,
aujourd'hui premier élève de l'école
pol\ technique, a appris de son père ,
suivant la même méthode, les hautes
mathématiques, le dessin, etc., que
ce dernier ne connaissait pas (7) ; le
père de M"*^ Descos lui a enseigne
plusieurs langues étrangères , l'alle-
mand et l'arabe, par exemple, la pein-
ture, etc. , dont 11 n'avait pas la moin-
dre notion. Il serait facile de multi-
plier les faits, sans parler de ceux dont
M. Kinker a été témoin, et qu'il cite
dans son rapport (8) . Nous dirons ,
en terminant cette notice, qu'on pour-
rait se demander, et cette question ne
serait pas étrangère à'I'enseignement
universel , ce qu'on apprend dans
nos collèges, à l'exception des langues
anciennes que même si peu d'élèves
ont bien retenues , après huit ou dix
des plus belles années de la vie tris-
tement consacrées à l'élude (9). La
(7) M. Hcrtcrn ptTC nous a assuré qu'il avait
ëîevé de la même manière .sa fille et son fils
aîné , aujourd'hui avocat à la cour royale de
Paris.
(8) Il en est un que nous ne devons pas ce-
prndanl passer sous silence , c'est celui «le huit
soldais ilielirés du i3>^^ de ligne qui , sous les
yeux d'un ofli'iir , aujouid'hui capitaine îii-
.Mrucli'ur de l'école pulylecbnique, ont npprii
en qu.iUfi mois, en trav;iill.-int cjunirc luurrs
par jour, d'.iprès I,-» niétiiode de .I.icolot , !a
Ifcture, récriture, l'orthographe, la f;rammairc,
la comjiosition. le calcul et le dessin. li <loit
exister au ministère <lu la guerre un rapport .^
ce sujet de feu M. le lieuteuant-géuéral Damre*
mnnt, qui avait passé ciij(| beuic? a examiocr
ces soldais pendant l'iuspcctinn gémrale de
i833.
(g) M. Hoffmr.n , proft-fseur de langues à
Paris, d'ailleurs antagoniste très-prononcé de
Venseigiiement unirersei , a eu Ja pensée «le réu-
nir les lémoigiioffis de Loïke, Montaigne, Eras-
me , Roliin .Condiilac , etc., contre le système
suivi dnas nus collèges. Cet ottvriige , curienx
JAC
JAC
i:>
néc«f«ilé et b p<wiibilil^ à'uppren-
drt mieux et plus tU thusry m
moins de temps , que personne ut
>juiuil coiitMlrr , imcuera uns tlniile
un jour l'adoption , sinon tic IV/i-
^riffnement unit^rsri lui-même , du
iiiuiiis lie l'un At ^ri principes fon-
t)jmrnlau& : la rrftrtition lunlutuelle
ri iu t umfxiraisun. Jarotut a piiblif :
I. / ,nt utîi%'rriri , hin-
^ur I . I^u\ain, tH:i'J, 1
\i>l. iii-^ , G rUition^. Il ^ rn a ru
•Iruxlrjiitirt. m allrroand. Il Jjtn^ur
'.'r^m^rrr. I.ou^ain, iH^.'i.t xol.iii
S , (» rtiiion^. 111. Malhrniiitupirs,
ibij., XH'li, 1 >o\. in H', \ e»l.Jion*.
la «lernirre est suivie d'un é(>itonte de
malhemaliques par M. Jacolot GU.
IN . Musique, dessi i et peinture ,
ibid.. IhiV, 1 vol. in-H , V editmns.
^ . Droit et philosvpfiie fhtnei usti'
yu^.l'ari*. IH.IT. 1 vol. m H", ei-
tiait du journal de l'hi' ii
iittellccluelle , avec reitt
• J'ii dts élevés qui impru«i>titt ii^us
àti \àngiÊti que j'ignore. »• N 1. Let-
tre du Jonduteur de renseigne-
ment uniifersel uu gênera! La-
layette, lx>uvain, 18*29, brochure de
7 pa^es in 8". On a publie sur, pour
ou contre reii>ei;^nement universel, un
^rand nombre de brochures; voici les
liliesdes principales: 1" litipport sur
lu methotJe de M. Jarotut, pié-^eolë
au inini>tere de l'intérieur du roanroe
des Pavs-IUs, le 8 sfpirmbre I82G,
par M. kinLer, commissaire nommé
par le roi pour l'examen de celte mé-
thode, Faris, 18-2»), 2" édition, m 8",
sui\i d'un mémoire au roi des l*a>s-
lias au sujet de ce rapport parM.de
Séprés ; 2" Examen ru. sonne de ren-
seignement unii>ersel. Ce, par Dun-
?eau, ex-directeur de* éludes à l'école
^r l«« citation* qa'il coaiWnt. • po«r liir« :
Lf$ w^eet Ji t'i.i'lrycliom pti/ijm* érmom-r^i par
h rm>$Mut*m*nt, pmr It ttmo'gnmgt en mn/Zenn
mmUurt et fv i'tsptnemc; P«m. ilia. ,m-f.
pol> technique, etc., IJruxolles. 1827,
in-K" de 72 pu^. ; ^ rdit. . 1821».
iu-8 ' de |0:J pa^. ; :j" Ht'/utatiitn de
h methotle Juiutut , cunsideiée dans
ses principes. se% piocedes et ses résul-
tats , par M. Lorain, ptofekseur aa
coll.^e I^uis-le-(îraud, Paris, in-8**;
V " Lettre a M. JuUien [ Mure-
Inlvine) de Paris, sur l'applir-vilon
et Iri développements de L mrthode
de l'en^i^neiuent unnervci, par J. l*.
( Mtailiede pension à ^ er-
^ ■ . . 1827. in8 . .V Hnp-
p^u i .%ur les résultats , l'esprit et
fiii/lurnre morale et intellrt tuelle
de Lt metfiOiJr de .1/ Jutotot, pré-
sente a ^l. de Naltmesnil, roini^lre
de l'instruction publique, le ô août
t82*J, par Baudouin, avocat à la cour
rovalede Paris, l'aiis, 18*29, in-8'*;
G' (Ainsiderations sur les résultats
impartants iftiiJtlient en lielgii;ue le
nou%'rau moile {fediuatittn ins-enté
ptjr M. JatutiU,pii K. IJoulmv. sui-
vies d'une instruction normale et tliiiie
lettre de M. le duc de I r-, nr l.nloc-
U me de {'égalité inte! i'r
1829. in-8"; 7" 1. . 'fi'.
uni%'ersrl de Jacotoi en ftresenee de
renseignement uni^^ersitaire , par
Kenjamin Ijroche , Paris , 1829 , in-
8 ' ; 8" De la méthode Jatotot, par
Joseph Kev de Grenoble, (irenoble et
!'.• «laie d'impre»it«ii,\ in-8'\
'.I >ui b méthode d'ense!;;ne-
mciil universel de M. Jacot<»t, extrait
du Huile tin de la sotiète tC agricul-
ture. Itelles lettres, srienres et arts
de Poitiers. VoxùtM s 1829, in-8";
10' Enseignement universel t\ Iraiié
complet de la méthode de -M. Jarolot
rendue accessible à toutes les intelli-
^^ces, etc. ; par Durielz, Paris, 1829,
in-ïi", V éditions ; U" Simple exposé
de la méthode naturelle selon Jaco-
toi, etc. ; par (iuillard. L>on , 1829,
in-8" ; 1 2" liésume dr la méthode
de M. Jacotot , par Souvestre , avo-
26
JAG
cat, professeur à Nantes, 1829 ; 13°
Résume d'un cours normal (T ensei-
gnement unwersel appliqué à Hn-
struciion primaire, prolessé devant
MM. les instituteurs du canton de
Mulhausen; par A. Penot, docteur ès-
sciences , professeur de chimie appli-
quée, Strasbourg;, 1829; \'i^ Anna-
les de renseignement universel, etc.;
parM.deSëprés, 1829-1830; 15°
Résumé de la méthode de M. Jaco-
iot, Grenoble, 18-29, in-12. C'est la
réunion, faite par un libraire de Gre-
noble, des articles que M. le comte de
Lasteyiie avait publiés sur la méthode
dans le Journal de C éducation ; 1 6°
Journal de l'émancipation univer-
selle, dédié aux pères de famille, rédi{2;é
par plusieurs disciples de J. Jacotot et
publié sous ses auspices par ses fils;
17'^ Manuel complet de l'enseigne-
ment universel, par P. -Y. de Séprés,
1 vol. in-12; 18" Une visite à
Louvain , suivie des considérations
d'un père de famille sur Timportante
découverte de M. Jacotot, etc., par
E. Boutmy, Paris, in-8°, 2 éditions;
19^^ De la metliode et des métho-
des , par E. De.shouillieres in-12;
20" Rapport à la société des mé-
thodes de Paris , sur le mode d'en-
sei»neme!it de M. Jacotot, par Frous-
sard, Paris, iii-8" ; 21'^ l'imancipa-
tion intellectuelle, ou Méthode d'en-
seignement universel, etc., par M. le
comte de Lasteyrie , in-8" ; 22" Ré-
sumé des principes de renseigne-
ment universel , etc. ; par M. Des-
houillières, directeur de l'institut Ja-
cotot, in-8"; 23" Observations sur
la méthode Jacotot . son origine, son
esprit et son vérifahje mode , par
M. Amondieu, professeur au collej^e
royal de Nantes, in-8'' ; 2^ L'Hom-
me-machine, ou (j(msé(jurnccs fu-
nestes de la méthode Jacotot sur
l'intelligence des enjants , in -S";
25° La Jacotomanie, ou Le pour
JAC
et le contre de la méthode Jaco-
tot , et conclusions sur cette mé-
thode, précis indispensable aux adep-
tes du fondateur, aux établissements
d'instruction publique, et aux pères de
famille , par Chompré, ancien profes-
seur , in-8'^ ; 26" Nouvelle exposi-
tion de la méthode de M. Jacotot,
parB. Gonod, Paris, 1830, in-8";
27" Ce que c'est que la méthode
Jacotot , lettre du docteur Ratier ,
avec cette épigraphe : Qui veut peuty
Paris, 1834, in-S** ; 28" Jacotot
et sa méthode, etc., par Auguste
Guyard , 1840 , in-8°, 2 éditions.
D— z— s.
JACQUARD(Joseph-Marie),
né à Lyon, le 7 juillet 1752, était fils
d'un simple ouvrier à la ^rand-tire,
c'est-à-dire en étoffes brochées. Sa
mère , Antoinette Rive , était li-
seuse de dessin. Lire un dessin c'est
disposer les fils de chaîne d'une étoffe
dans l'ordre indiqué par le dessina-
teur sur une carte divisée par petites
cases , de manière à élever tour à
tour un certain nombre de ces fils au
moyen de ficelles, pour composer et re-
produire sur une étoffe un dessin sem-
blable à celui qui est tracé sur la carte.
Ses ancêtres étaient de pauvres culti-
vateurs du petit villaoje <le Couson, si-
tué sur la rive droite de la Saône, à
deux lieues de Lyon. Son père qui le
destinait à suivre sa propre carrière ne
lui fit donner aucune espèce d'instruc-
tion , mais le jeune Jacquard apprit
pour ainsi dire de lui-même à lire et à
écrire. Dès sa plus tendre enfance il
av.iil montré le »oùt le plus marqué [)Our
la mécanique; tous ses moments étaient
employés à faire des machines propres
à diflérenis usaj^es. Il construisait de
petites maisons en bois, des tours, des
éj^lises , de petits meubles. Ces divers
ouvra;];es étaient remarquables par
l'exactitude des proportions. Airivé à
sa douzième année, il fol placé par son
JAC
JAC
père tiani an atelirr tir relirur de li-
>rc*: puis riiMuie ilatH relui iJ'un àrs
nirillrur» foudrur^ de L\oii. Kaplo>^
à là (uiidrrie dft caraclrre^ d'imprimé-
rie, il montra 6e l'Iiabilrif . et, lou-
jour» ;;iiidé par »oii t:;oiii pour b rarra-
nique, il fil plu^ieut^ outils à l'usage
de5 couIrlieM, lonjoars avec le même
iurrf*. Sa merr eiaiil morte, il rennl
auprr« de vin \>tte dont il reput la
protection (.rJOHCi étant ninri auv«i quel-
ques jiiiirrs après, ri ne lui a> jnl laiv^e
qu une 9urre«5ion lres-mudM{ue, il rn
employa une partie à monter un
atelier d'étoffes façonnées; mais «on
f;énie ne se prèiait point k diriger
un etabii^^emenl semblable ; son en-
I reprise ne fui pas lieurru>e , il (ut
oblif;!* de trndrr ^r^ mélirr» pour pa>er
ses dellr>. Feu de irtnp<« api rs il rpo'.i-
&a la fille d'un aimunrr nomme Hm-
chon dont il espérait obtenir une dot,
mais son espoir fut de^u : et dans la
grue r.à il »e trouvait, il fut obligé
de vendre sa maison paternelle. Jar*
3u3rd était doue d'un caractère si
oux et si pe« intere>sé , que ,
mal;;ré les désagréments qu'il es-
su\.i dttJj part de la famille de sa
Irniinr , il n'en ronser\a pas moins
pour cellr-ci le plus tendre attarlie-
mriit. Il est viai qu'elle riait un mo-
drlr de pahence, de douceur et d'acli-
vile: il n'en eut qu'un fais. Jacquard,
sans fortune, >an.s arnbiltmi, sans pré-
vision pour son a\eiiii , ne refait
qu'inventions ri peHfClioiinrm^nf«i tïn
mrtirrs pour le tivsaf;e des elolïes la-
çnnners , la coolellerie rt l'art tvpo-
lirapbique ; mais , comme il ne ga-
j;nâit pas une obole , il fut réduit k
se ineUre au service d'un chaufour-
nier de la Bre&se. Sa femme resta à
Lyon pour faire valoir une petite fa-
brique de c'iapeaux de paillr qu'elle
aya t établie. I/élat àt pénurie et
d'obscurité ou Jacquard vécut jus-
qu'au momcQl ou sa priaupalc inten-
tioM rofllfln^^lire connue, sa limi-
diir naisrelU, m mode^tle , ont laissé
i>^ioiei 1rs cit constances de sa vie ,
et même celles qui se raitaclient à cette
invention. ()u sait ftrulrinrni qu'il fit
une élude particulière du mriier à
sampirs, que de|a birii axant 1790 il
a«ail con^u I idée de la supprewion du
tir des lacs; on trouve la preuve de ce
fait dans l'eipose de »a demanile du
brevet d in«eutioii qu'il obtint Ir '2'.\
6tr. \H0\. V.n \1'J'2, Jacquard em-
brassa a\ec ardeur la cause «Ir la révolu-
tion, il retint a l.ynn en ITUilrt fut un
des drfensrurs de cette ville duiant le
sie^e mémorable qu elle MMitint contre
l'armée de laC^nxeniion, alors qu'on
vit une polluer de Lyonnais, jeunes et
sans evpenriice dans 1rs aimes, lutter
pendant soiiante-six jours contre la
lamine et contre une année de soixante
nulle liommes de troupes aguerries.
.Nomme >^)ns ofhrier. Jacquard com-
battit presque toujours aux postes
avances , ayant a ses ctVtes son fils
à;;e de qmnie ans. Api es la reJ<li-
ton dr |.\na, la terreor y amena l'é-
chafaud et les mitraillades : Jacquard,
dénonce et poursuivi, s'enfuil avec son
fils qui a\a I alors dix-sept ans. Toui
deux s'enrèierrnt dan* le preniu r ba-
taillon des volontaires du departrinenl
de KbAiir-rt-Koire; et ils partirent
pfMjr l'arnire du Klun. Noinnir mem-
bre du conseil dr discipline , JaCtjuard
axait en celle qiralite la siir%eillanre
d'un certain nombre de disciplinaires
prisonniers dans un petit villa;;e près
de lla^iienatj. lout-a-coup on en-
tend le canon. «' Camarades, s'écria-
" t-il , qui m'aime me suive ! Je pro-
* mets remission à ceux qui iront de-
«* 4Bander des fusils pour >e baitre. »•
Quelque temps après , le fils fut blessé
à mort sur le cham[» de baïailir , et il
expira dans les bra, de son pcie. Jac-
quard, désespère de la perle de son fils
unique , revint à L/on. U chercha yai-
a8
JAC
nement la maison qu^il avait habitée ;
elle avait été la proie des flammes. Il
ignorait le sort de sa femme qu'il n'a-
vait pu ni prévenir de sa fuite, ni in-
former du lieu de sa retraite; il la re-
trouva enfin dans un orrenier, occupée
à tresser.de la paille pour les cha-
peaux. Il se vit d'abord réduit par le
besoin à partager ce travail ino;rat. Ce-
pendant Lyon commençait à se relever
de ses ruines , et déjà plusieurs de
ses fabricants , qui s'étaient réfup;iés
en Suisse, en Allemagne et en An-
gleterre , avaient rapporté dans leur
patrie leurs pénates et leur industrie.
Jacquard , poursuivant son idée pre-
mière de trouver un moyen mécanique
capable de remplacer la tireuse de
lacs, se mit à y travailler de nouveau,
et il parvint à fabriquer une machine
qui remplissait assez imparfaitement ce
but. Il la présenta en sept. 1801 à
l'exposiiion des produits de l'industrie
nationale, dont le jury lui accorda une
médaille de bronze. La même année,
il obtint pour cette machine à laquelle
il donna le nom de lireuse di'. lacs,
un brevet d'invention pour dix ans.
Il fit un métier sur ce modèle , et , en
1802 , à l'époque où la ((msulla se
réunit à Lyon pour l'élection du prési-
dent de la république cisalpine , la
machine de Jacquard fixa l'attention
de celte assemblée dont les me»nbres
allèrent, avec le ministre de l'intérieur
Carnot, la visiter dans i'humble do-
micile de l'inventeur , lUe de la l*é-
cherie. Cependant les sociétés des
arts de Paris et de Londres mi-
rent au concours un prix considérable
pour l'invention d'inie machine propre
à fabriquer des filets pour la pèche
maritime et le baslinijaiie des vaisseaux
de guerre. Jacquard entreprit cette
œuvre extrêmement difficile; il y réus-
sit; mais tels étalent son désintéresse-
ment et sa modestie, qu'il se borna à
s'entretenir avec ses amis de sa dé-
JAC
couverte, sans avoir la pensée d'en ti-
rer parti ; et, négligeant les perfection-
nements dont son invention était sus-
ceptible, il la laissa de côté. Le préfet
de Lyon, informé de cette invention ,
envoya Jacquard et son métier à filet
à Paris : l'essai en fut fait, et la société
d'encouragement lui décerna la grande
médaille d'or le 2 février 1804. A
cette occasion, Carnot, qui ne conce-
vait point ce mécanisme, lui dit brus-
quement : « C'est donc toi qui pré-
« tends réussir aune chose qu'il n'ap-
«< partient pas aux hommes de faire ,
« c'est-à-dire un nœud avec un fil
« tendu ! » Jacquard , sans s'intimi-
der de celle interpellation , répondit
au ministre avec la simplicité de lan-
gage qui lui était naturelle , et le
laissa pleinement convaincu. Placé
au conservatoire des arts et métiers ,
sous les ordres de Molard , il y fut
employé à restaurer et à mettre en
état les machines et les modèles; il
y inventa les métiers tisseurs pour
fabriquer des rubans de velours à
double face et d'autres pour des tis-
sus de colon à doubles et triples na-
vettes. Il monta le fameux mâtier de
^ aucanson, destiné à remplacer le ti-
reur de lacs que Jacquard recher-
chait depuis quinze ans, et le mit en
état de fonctionner. Mais celte ma-
chine, très-compliquée, opérait lente-
ment; c'était une espèce de cylindre à
serinette dont les effets étaient trop
restreints : elle n'aurait pu servir que
pour des dessins de deux pouces au
plus, et elle aurait coûté dix mille
francs, somme infiniment au dessus
des moyens d'un ouvrier. C'est pour-
quoi elle fui mise au rang des machines
curieuses , mais inutiles. Jacquard ,
rap[)elé à Lyon en 180i, fut placé à
l'iiospice de l'Antiquaille, pour y éta-
blir un atelier d'étoffes façonnées et de
tapis façon des Gobelins par les pro-
cédés dont il était l'inventeur. Dès-
JAC
lors ii ft'oMup^ des Bio>eiu de (aire
adopter dans 1rs maoufarlurei de \.\ot\
%es deux iineiilioiis, celle du métier à
fabriquer les fiieU et le mecjiiiMne
|iour U s(l|»|lrr^^iotl des lue-. H fut
|iuiNk.itninrii( scrondr par l'inllueiire
du i.rlie fjbiirjiit (limille Peiuoti, qui
il* mil en rappuit a\rc le conseil inuui-
d(ul et |j ciurabrr de roniiiififc «le
Lvoii l iif (ommiNikiOP, com|Mi»rf dr*
pluN liabile/ fabricants, fut chargée de
rrcunnaitre les a%anta^es de ce der-
nier inrrjnisroe ; et leur témoi(;na^e
fut unjniiue en faveur du procède de
JjcquAid. Kiifjn un derrel impenal ,
dair de Ilerlin, le 27 ocl. IHOG. m-
toiisa r^dMiini^lr Jtifin municipale de
K>oii à aciirtri de Jacqujid le pii\i-
Ir^c de son procède, iini\ennanl une
rente viagère de trois mille Irancs, re-
MfNible par moitié »ur la tète de sa
fciuiue en car» de sur»i\ance. Sm bre-
\rl tomba ainsi dans le domaine public.
Jjrquaid axait en outre demande au
gouvernement quM lui fût arcorde une
piiiue de niiquaiite francs poui riiaque
métier de son invention. Napoit-on, en
si<;iiant Ir drrrrt qui assurait ce droit
au modeste fabricant , s'écria : Kn
voila un (jui se tontrntr de fteu !
Cette mèrac année , l'académie des
scieuces et arts de Lvon lut décerna
la médaille du prii fuiiiie par le con-
sul I.ebrui). Jacquard s'occupa de:>-
lois à introduire sa machine dans les
ateliers d'étoiïes façonnées et bro-
chées , mais il n'y reuxsil que diffici-
lement , malgré la prime que lui avait
accordée Napoléon pour chacune de
celles qu'il placerait. Les ouxners tis-
seurs, craignant de manquer de travail
par cette invention, s« liguèrent con'rc
lui, gâtèrent des elofl'es afin de faire
croire que ce mécanisme fonctionnait
mal, et en hrùicrenl même sur les places
publique^. Tradiiil devant le tribunal
lies prud'hommes , Jacquard eut plus
li'uiic fois à essuyer des outrages et des
JAC «9
scticcs. l^n joor m^e , près de la
porte Saint-Claii , on le relira des
mains d'un ^^upe «Ir furieux qui vou-
lait le jrter dans le KliAne. Heureuse-
ment que quelques fjbiicantN srii>és lui
firent construite unr iiou\rllr machine
dont ils tireient un parti m a\ juij^eux,
que bienlAt de toutes part» on s'em-
pressa de 1.1 mettre eu usa^e. (^uiinue à
\,\on rti IKO.'i, mise en pratique en
1809. elle lut ^éoeraJemenl adoptée
en IHli, il > avait alors di\*liuii mille
métier» ballant à la Jacquard; et deput»
leur nombre v'e>l rieve au delj de tienle
raille. Sou invention s'est rrpandaesuc-
cevsiveincnt en Suisse, en .\llrma;;ne,
en Italie, en Amérique, et le* (ihinois
même commencent a s'en servir, mal;;ré
leurs pieju-es et leur vieille routine.
Jacquard fut sollicite par de^ fabri-
cants lie Kouen et de Saint-Ouenlin
d'aller itc^aniser cliri eui des ate-
liers de lisva;;e pour des étoffes de co-
lon et de batiste. Ij ville de Man-
chester en .\n^leterrelui fil ollm pour
le même objet une somme considé-
rable, et un traitement capable de lui
procurer une eiisience opulente. Mais
son patriotisme lui fil refuser ces bril-
lants avantages, et il resta à Kvon.
Quelques années après , Jacquard fui
décore de l.i croix de la l,e;;ion-
d'Ilonneur. Ce biave homme, avant
perdu sa femme , ^e retira à OuOins
joli village situe a une lieue de Lyon,
dans une petite maisrn dont on lui
avait lé^ué la jouis^sance durant sa
vie. C'est là qu'il passa ses derniè-
res années , partageant son if mps en-
tre la culture d'un petit jaMin et les
exercices de la reli;;ion catlio!i(juc. Jl
termina sa carrière paisiblement le
7 ^il 18'H, à l'a^^e de quatre-\iii^t-
deux ans , et sa cendre repose dans
le cimetière d'Oullins , a côlé de
la tombe de l'académicien l'homas
[l'oy. ce nom, \L^ , 466). Les
habitants de cette commune lui ont
3o JAC
consacré, dans leur église, l'cpitaphc
suivante :
A la méiiioi^
De Joseph- Miirie Jacquard,
MéoiiliiciOi célèbre.
Homme de bi«ii et de gcnie,
Mort à Oulliiis , dans sa iiiai.on ,
Le vu auùt m dccc xxmv,
Au ■'>ejn de< consol.ilious religieuses.
Au Doin des babiianis de la commune,
lloiiim.ige
Du conseil luunic'pal
Dunt il avait fail partie.
Le corps municipal de Lvon a fait,
exécuter, par le directeur de l'école
de peinture de cette ville et du vi-
vant de Jacquard , son portrait en
pied, vrai chel-d' œuvre, qui a été placé
au Muséum. On organisa ensuite une
souscription pour lui élever une sta-
tue. Ce monument, ouvrage de M.
Foyatier, auteur du Spaitacus , a été
inaugu'é, le dimanche 16 août 18 VO,
sur la place Sathonay où était déjà
placé le buste de Tabbé Uozier ( Koj.
ce nom, XXXIX, 206). Un con-
cours immense de curieux et toute la
population manufacturière de î>yon se
pressaient à cette cérémonie, à laquelle
assistaient les autorités civiles et mdi-
taires. Des discours à la mémoire de
Jacquard out été prononcés par le
maire de la ville, par le préfet du dé-
partement , et par le président de la
commission du monument. Le nom de
Jacquard est devenu , pour ainsi dire,
technique dans les deux mondes. Heu-
reux continuateur des efforts de N au-
canson, qui comme lui a perfectionné
à Lyon les midiines à tisser , Jac-
quard a inventé une machine bien sim-
ple et peB coûteuse, à la portée de la
classe paifvre des tisseurs, qui a for-
mé une époque mémorable et une nou-
velle ère dans Tart des tissus. Cet art
a éprouvé une révolution complète ;
l'ouvrier n'est plus qu'une machine à
mouvement qui produit sans peine ,
promptement et à bon marché, des
étoffes ornées des dessins les plus ri-
ches et les plu» compliqués, que leur
JAC
prix modéré met à la portée de toutes
les classes de la société. Celte machine,
loin de diminuer le nombre des ou-
vriers employés au tissage des étoffes,
l'a au contraire décuplé; elle a fait
élever d'innombrables manufactures de
tissus dans toute l'Europe et donné
au commerce de ce genre une activité
et une extension inouïes. M. de Fortis
a publié , au moment où nous termi-
nions cet article, un Eloge historique
de Jacijiiard , suivi d'une Notice sur
la Èlatue élei>ée à Lyon à sa mé-
moire et les mamifactures d'étoffes
de soie de cette ville , 1 vol. in-8".
Jacquard a , dans V Anmiaire des
ho!nme<i utiles , un article que M. de
Fortis qualifie de roman.
Oz — M et 1) — R — R.
JACQIJELIX (Jacques- An-
dré) , littérateur et chansonnier, na-
quit à Paris, non pas en 1773, com-
me on l'a dit dans la plupart des Bio-
graphies contemporaines, mais le 18
mars 1776. Fils d'un valet de chambre
du dernier prince de Conti , il fit de
bonnes études dans un collège où il
eut JJésaugiers pour condisciple et
ami, et il apprit si bien le latin qu'il
était en état , chose assez rare en
France, de soutenir une conversation
dans cette langue. Privé de toutes res-
sources par l'éloignemenl de son père,
qui avait partagé la détention du prince
de Conti à Marseille et sa déportation
en Fspagne où il le précéda au tom-
beau, peu d'années avant la rentrée
des nr)urbons en France , le jeune
Jacqiifilin se livra à la littérature dra-
matique et donna aux théâtres secon-
daires, seul ou avec quelques collabo-
rateurs, une cinquantaine d'ouvrages
dont la plupart ont été imprimés. Ce
fut à celui des Jeunes-Arlistes, rue de
Bondy, qu'il obtint ses premiers suc-
rés. Il y fit représenter, en 1799 : \.
Jean La Fontaine, vaudeville anec-
dotique. II (avec Philidor, pseudo-
JAC
omeJr Ilochfllc) (1). LEnjunt dt
fo/nour , tiA^rJic uurlrM|ue en un
actr, CD verN, kuilc des t'ureurt d*-
Cumitur, U3^t<\<t burlfMfue en \tïs
t\ rn un arle, ou^ra^e île mmi colUlio-
ralrur. ixWt \ut(t a rrpaiu ni tH(hî
souN un nuu^rau lilii* : Lrs Hrrus dr
cuisine , ou fLii/uitt dt i'untuur.
111. Jeun liuiine et ses en/unis ,
vauJrullf anrcdoliqur. IV. LAnti
<fitunniftie , ou /r Mariage sous la
cheminée t atle4fuiaa(lf fii \audc«ille».
V. Im (Je jurée. o\x les fjuiitre au
teurs, roDirdic anrrdutique en vaude-
▼lllfi. VI ^avec Ufcrlclle) Lr Pein-
tre dans son nie'nii/fe , comrdie en
deux jcle*. VU (a\ec IVoclwlIf'. /V<i
dori ùffle. battu et content, comédie-
vaudexille. tu 1800: Vlll. le Prê-
teur sur gages, ou f Intérieur d une
maison de prêt , conédi^vaudr^iiie ,
imprimée >ou> ce tilre : I^ l'aldeau
de liapha'el , ou A trompeur, trtuu-
peur et t//-//ii, comédie proverbe , re-
mise au iheilreel leirnprinirr, en 1820
cl 1821, sous Ici lilrci de Le Prê-
teur sur gages , ou A trompeur^
trompeur et demi , et de Le Tuliruu
de liaphaël , ou le Préteur sur ga-
ges. 1\. Ar Hasard corrigé par
C amour, ou la t ille en luit rie, aile-
qiiinade en \jiide\illes, 1801 . \ ^avec
Ui^jaud). Molière a^'ec ses amis, ou
le Souper d'Autcuil . comédie hus-
tonque eu deux acies el en \aude»illes,
1801, remise au Oiéalre de- ^ .i<s
el réimprimée en 18(^6 sous le lilre de
Molière, ou le Souper di AuieuU.
naturel J'un pri>c<irriir au |i4rlciiirnl , ujquit
i P»rif le S oriiibr» i-»i, n y mnurwt |r i- mii
i8J4. Avocat «us cun*#il* du roi el a la c«>«ir
Je cas-.>t'On . il I..I un àr% inrinh-et le» |> u% .!i»
imifii.v (hi barrra* 4e Pari,. Ootrr U. (i.ce»
«•e.» cLiii» cet art cU et outra^'t de la jeu
De<-»e. il a Honiie etv-ore au lUiire dr. Jruu'»-
Artote», «Trc Serri^rrt , U htrr mal^- t tui «o-
Kedie Taod-.ille. iê..i. Oa ■ «k«^ de .«• I«
Cde <- »// m,i en ^r,, a»ec l« UxU en regard .
li.re I". Pari», iSoS, ia-il. et <{o«Jqoea écnU
d« jMTiaprudaaee.
140
11
\1 \>ev\). (Jn(f et deux foni trois ,
comr«l:ep' t»\ci l>« eu un acte el «u vao-
de\ille». 1802 C^ fui dans cette ao-
oer , cl non pa» \er% iKO'i ou 1806 ,
comme l'a dil IWazier dans ^oullistoire
des petits tlietUres, que le Diau\ais état
des aliaircs du lltealir àts Jeunes Ar-
li»te.> awnl pro%oqué la dispersion
Biomenljnee de se^ adeurs et le drpari
àe\ principaux pour MarNeilie, hrvau-
f;ierN fut du \o>a^e a\cc »on ami Jac-
quelin , le premier comme directeur et
cltef d nrrlieslie de la lioupe arobu-
Lnle, el le »erond comme re^ia»cur et
ftouOleur. lu campagne ne fut pas bril-
Uule, el quoique, eu retenant a Paris,
Ur>au^ier» eut fait re>*tKiice de »un
talent sur le niolon, d se lui restait
plus qu'un sou lorsqu'ils arri^ereiit à
la b^iiierc. Il adiela un petit pain
qu'd partagea avec Jacquelin en lui di-
MUt : iJioims l'atle ou la cuisse.
Himl(\t l'existence des deux anus dé-
tint plus lieureiL^. I)evau;;iers la dut
au succès de ses ouxra;;es dramatiques
el suiloui de ^e^ cliansoos J o» . Dk-
SAtGlIlR!^, lAll, :i57). Jacquelin ob-
tint un modeste emploi au ministère
de la guerre , ce qui ne l'empéclia pas
de continuera travailler pour Je théâ-
tre. Il a\ail donne ^seull a celui des
Jeune>-Kle\es de la rue Daupliine :
\11 I^ Mort de Arrort, folie en an
acte, en >aiide\illes. 1801 ; il y donna :
XI U (avec l(ou:;euiont). L'Amour
a i .iiiglai.se , 180;i. \IV ^seul). iL^
A /<•* e de ma tanie Aurore . ou la
Manie tlts romans, opera-\aude*ille,
180.1 \V (avec l)e^u|;iers). U Ma-
gisUr et Li Meunière, ou les E^co-
barderies villageoises, 1803. XV|
(seul). Le Jaloux de village , ou U
P^it bo nrui jaune, \S{)\. A u t héa-
Ire des N arides (avec Dcsauj^iers ) :
XN 11. Gilles rn deuil , opcra-comi-
?ue, 1802. XVIII. Cric -crac y ou
Habit de Gascon, 1803. XIX
U?ec lUgaudj. Piron aifcu^U, 1804.
3a
me
XX (seul). La Parenté de contre-
bande , ou Id Pauvre diable , sifflée
en 1806. XXI (avec Rochelle). Pe-
lisso'i , ou C'est le diable, 1807. Au
théâtre du Vaudeville : XXII (avec
Rigaud). Lejaux Lindor, ou t Ha-
bit ne fait pas tliomme, qui fut mal
accueilli en 1807. Jacquelin ayant
été «lésif;né pour suivre à Tarmée le
maréchal Berihicr, fut nommé à son
retour sous-chef de bureau. En 1810,
il signala sa reconnaissance en publiant:
XXlll. Ode , stances et pot-pourri
sur lu naissance du roi de Rome ,
1811, in-8°. Mais bientôt il célé-
bra la restauration par des hommajjjes
poétiques. XXIV. Henri IV, les
Bourbons et la paix, 1814 , in-8",
où se trouve une Ode contre lu guerre
dont une strophe est absolument la
même, sauf deux mots, qu'une de celles
de son ode au roi de Home. 11 donna
aussi, avec M. Rouf^einont : XXV, Le
Chansonnier des Bourbons , précédé
(fiMie dédicace à la duchesse douairière
d'Orléan^ 1814, in-18. Il obtint
alors la croix de la Légion-d'Honneur
et une pension , soit pour prix de ses
chansons , soit en récompense du dé-
vouement de son père. Quelque temps
après, il fut nommé inspecteur des
tliéàtres secondaires de Pans. Bien
qu'il n'eût été admis qu'en 1812 dans
la société du Cateau moderne, et qu'il
n'y eîil donné que deiw chansons , il
en fut nommé secrétaire-général en
1815, et dès l'année suivante ses chan-
sons y furent beaucoup plus nombreu-
ses que celles de ses confrères , sans
être meilleures, quoique plus longues ;
car il y en a de soixante et quatre-
vingts couplets. Cette société s'étant
dissoute en 1818, Jac(juelin n'a rien
donné dans le Réveil du Caveau.
Membre de la société des sciences de
Paris, il mourut dans cette ville, le 1 9
aoùl 1827, dix jours après son ami
Désau^iers; et M. Ourry, son con-
JAC
frère et son collaborateur, prononça
un discours sur sa tombe. J.es autres '2
ouvrages de ce littérateur sont : I. Ho- 1
norine, ou Mes vingt-deujo ans, his- I
toire véritable de M"" D***, Paris, !
1803, 3 vol. in-12, fig. II. Histoire
des Templiers, 1805, ln-12. III.
Mujemme, mes amis et moi-même,
pot -pourri en trois actes et en vaude-
villes, pour la fête de M™® Jacquelin,
1812, in-8°.IV. La petite Galerie
dramatique , dialogue entre un An-
glais et le libraire Martinet , Paris ,
1813, iu-4" de 20 pages. V. La Ga-
lerie des badauds célèbres, ou Vi-
vent les enfants de Paris, chanson-
nette biographique, 1816, in-lS, in-
sérée aussi dans le Caveau. VI. Ijc
Sang des Bourbons , galerie histori-
que des rois et princes de cette fa-
mille, depuis Henri IV jusqu'à nos
jours, Paris, 1820, 2 vol. in-4° et 22
planches. L'auteur fut admis à présen- |
ter à Louis XVIII un exemplaire de
cet ouvrage. VIÏ. Manuel biographi-
que , ou Dictionnaire historique
abrégé des grands hommes, depuis
les temps les plus reculés, sur le plan
de celui de Chompré, 1825 , 2 vol.
in-12. Jacquelin termina sa carrière
comme il l'avait commencée , par des
ouvrages dramatiques. Il donna au
théâtre du Vaudeville : I (avec M. Our-
ry). Thompson et Garrick, ou l'Au-
teur et facteur, 1822.^ II (avec MM.
Ourry et Chazet). V Ecarté, ou le
Lendemain du bal, 1822, pièce
qui eut moins de succès que celle
qui fut jouée la même année , et sous
le même titre , au (iymnase drama-
tique. A l'Ambigu- Comique (avec
M. Coupart) : III. Levez la toile ,
vaudeville épisodique, 1820. IV. La
Fête des Halles , on le Retour des
braves, 1823, après la campagne du
duc d'Angoulème en Espagne. W . Le
Passage militaire, ou la Désertion
par honneur, pour la fête du roi.
lAC
IS>3. A* te MM. Coupait ci Nufcz
M. Iaj ïète diiutomnr, IHii. Vit.
If HrUHu-itun hnur, IK'ii VIII
I r Vrtii postillon tir t'imrs , ou
Drui fftrs fHtur une ( le ronronne-
mpnl fl la {t\e de (^l^arlf^ X), 1825.
IX (avec MM. (xîuparl t\ Overna)).
l.'Kntrre à Hfirns. \H'2:t. X (*eiil).
Lr /VA tir Phurtimonti, ou la For^t
fiichanire , ^audeviile-fwrif tn Iroi*
acln, \H'23. XI ^s«ul), aui CJiarops-
Kl>$^, pour l« funambuirs : /Int
^ourr et ilrmeiur, ou 1rs \ rrtus tir
llrnri Jl , pantomime en lrol^ actes,
1 H'Jô X 1 1 . / Vi trait tir (Jutrlrma
ffir, ou F.gintirJ rt Immn . tir a ne
heroVaue m trois actr*, repre>enlé aui
fète> de l'aris, pour la Saint-Charles
1K2.'». V.w société, au lliéàlre de la
lianlieue : XIII. Lr lirurniiis ^ ou
n-Mitincr tir llrnri //.IH-Y.. Au
théâtre de Comte : XIV. Iai Saint-
Charlrs tiu collrgr , lH'i6. On ^oil
<jue peu d'auteurs ont été plus cons-
tants et plus féconds dans leur re-
connai.vsance pour les Uourbons. Il
a^ail présenté à l'Opéra, en 1S17,
r Originr drs Oriurs . pièce imitée
des Grtlcrs de Sainl-Foix , mais oui
est re<.tée dans les car tons de l'adminis-
tration. Il a été éditeui de VAlmu-
nai h drs Gnlrrs, ou F.trrnnrs a lu
hrautr, de 180Va tKOS,:> %ol. in-lH;
de YAlmanai h tir C Amour rt tir
rjmitir, 1H()9, in-lS, fi^.; de la
Lyrr nuiçonniifur, de 1809 à 1813,
5 vol in-18; du Chtinsonnirr tir Li
Lourrt tir la villr, 1811 et 1812,
2 vol in-18, et du (Jiojisonnirr
franr-maçon, 1816, in-lS. II a in-
séré des pièces de vers dans V.llma-
ncirh tirs Musrs et autres recueils pé-
riodiques. A — T.
J VCQUEMARD (Ktienne),
ffraramairien , né le 2V sept. 1772 ,
à Paris, était (ils d'un >alel de pied
du comte d'Artois. Il fit d'excel-
lentes études au collège de Louis-le^
JVC J3
Cirand , w)u> la direction de Qiaui-
Dâgne if'o) . ce nom, LX, 392), pour
lequel jl conserNa toute sa vie une ten-
dre afTection ; et sui\it les levons de
Tabbé Delille, qui lui inspira le ^nût des
ters et lui en enseigna le mécanisme. Ses
éludes terminées, il apprit l'italien et
ran(;lats, et se perfectionna dans la
rauMQueet le de^sln. Quelques person-
nes haut placées qui lui portaient de
l'intérêt jugèrent qu'il pourrait être
employé à I éducation des princes, et le
firent, en attendant, attacher à la sur-
veillance du palais et des jardins de
Saint-Cloud. 11 a«ait alors dix-huit
ans, la révolution était commencée,
maison ne penvait pas nue le lr<1ne eAt
rien à en redouter. La journée du
20 juin 1792 détruisit cette sécu
rite; congédié de Saint-Cloud, il re-
vint à Paris; mais, atteint quelques
mois après par la loi sur ta réquisition,
iLfut incorporé dans un bataillon et
dirigé sur l'armée du Nord. 1^ délica-
tesse de sa santé, et suilout son ex-
cessive rovopie !e rendaient impropre
au service actif. On le plaça dans
le bureau du quartier maître, et il fut,
pend.mt près de deux ans, char;;é de la
comptabilité du bataillon. Des qu'il
eut obtenu son con,;e de réforme, il
décida ses parents à quitter Paris, pour
venir habiter liourj^uifjnon le-Morejf,
petit villaj^e de Franche-Comté dont
ils étaient originaires, et où ils avaient
conservé un modeste domaine. Pré-
voyant bien qu'il v serait tout-à-(âit
isolé, Jacquemard avait eu soin de se
précautionner de musique, de crayons
et d'une bibliothèque choisie; mais, ces
ressources nr lui suffisant par» pour
combattre l'ennui, il imagina de se créer
une occupation en s'imposant la tâche
de donner des leçons de grammaire à
Quelques jeunes gens de son village,
ans lesquels il avait reconnu des dis-
fiosiiions. I>a rapidité de leuj s progrès
'atuchant de plus en plus à ses élèyes,
LXV111.
34
JAC
il rédigea pour eux des Eléments de
grammaire française, qu'il soumit à
des juo;es compéleiits, notammenl à
Boiiivilliers; et, encouragé par leurs siif-
fraoesjillesfil imprimer en 180.'), in-'i-",
avec une dédicace à Champagne, tribat
tardif mais sincère de sa reconnais-
sance. 11 avait été nommé, l'année pré-
cédente, membre correspondant de la
société d'agriculture, sciences et arts
du département de la Ha!ite-*aône, et
il lui communiqua successivement des
traductions en vers de la première
Eglogue de Virgile; da Vieillard de
Vérone de Claudien ; de la Maison
de campagne d'Ausone ; et d'un épi-
sode du Prculium rusticum de Va-
nière (1). En 1811, 11 donna une nou-
velle édition améliorée de son Abrégé
de grammaire française, in-12, qu'il
dédia à Fontanes, alors grand-maître
de l'université. Les événements de
1814 a^ant ramené le comte d'Arfois
à Paris , le père de Jacquemard ne
put résister au désir de revoir le
prince qui l'avait honoré de ses bontés.
Admis à lui présenter ses hommages ,
le vieux serviteur , à qui son ancien
maître tendait la main , fut saisi
d'une telle émotion qu'il s'évanouit.
Les soins qui lui furent prodigués le
rappelèrent à la vie, mais ne purent
lui rendre la santé, et dès ce moment il
ne fil plus que languir. Jacquemard
reçut alors de pressantes Invitations
de se fixera Paris; mais, exempt de
toute ambition, content d'une fortune
qui suffisait à ses besoins, il ne voulut
pas quitter son village dont il fut nom-
mé maire, charge qu'il se h.ita d'abdi-
quer dès que les circonstances le lui
permirent. La poésie avait conservé
pour lui le même charme que dans .sa
jeunesse; mais 11 s'occupait d'hisloire,
de géographie, de statistique, et il pré-
(i; Ces différrute» pièces sont iiii|)riiiii'es dam
Jc'l Mdiuoîm ii* Im 40». lU U Haute-Smôn», tom .
II «t III.
JAG
parait une troisième édition de ses élé-
ments de grammaire, quand arriva la
révolution de 1830. Privé de journaux
et ne pouvant ajouter fol aux bruits qui
circulaient, U allait s'informer des nou-
velles à Morey, sépare de Bourguignon
par une roche élevée, lorsqu'il tomba
dans un abîme où 11 fut retrouvé mort
le 3 aoiit 1830. Ainsi (et c'est une
chose digne d'être remarquée) , le
retour des Bourbons en France avait
hâté la fin du père, et leur expulsion
coûta la vie au fils. Indépendamment de
la Grammaire française et des diffé-
rentes pièces de vers déjà citées, on doit
à Jacquemard un Centon composé de
vers de Virgile , adressé à Bonaparte
en 1802, et Imprimé dans la Décade^
tom. XXXII, et des Essais de fables
(Besançon, 1820,ln-18), opuscule
tiré à un très-petit nombre d'exem-
plaires (Voy le Calai, de la biblioth.
de M. Nodier, 1830, n" 394). Parmi
les livres qui traitent des principes de
la langue française, la Grammaire de
Jacquemard mérite une place dislln-
guée. On y trouve une nombreuse sé-
rie de locutions et de constructions
vicieuses avec leur corrigé, travail bien
fait et très-utile aux commençants. La
théorie des participes y est développée
avec beaucoup d'étendue. Enfin , cet
ouvrage, en général exact , et où les
règles sont appuyées sur des exemples
choisis dans les meilleurs écrivains ,
atteste beaucoup de recherches et d'ob-
servations de la part de l'auteur; mais
cependant les notes dont il est sur-
chargé, et qui parfois sont plus lon-
gues que le texte, des répétitions fré-
quentes et peu utiles , y jettent une
sorte de diffusion. \V — s.
JACQIEMART (l'abbé Ni
COLAS-TiiinRRi) , né à Sedan, vers
1730, après avoir été novice chez les
chartreux, puis chez les bénédictins^
fut successivement curé de Tahure, des
Grandes-Loges, puis d'Epernay, de
SAC
JAC
^ ilIrry-Omay r\ de ViUfri-devani-
Mri.cre*. i.r •'•• •! .. .-ffienij indM|uriil
ass«i l'iiisl.! .11 urarlrir;il
ëlait plus pfuj' r .1 ii^urer sur dr> Irc-
trjui qur daii> la duiic r%aii^rliqur.
(Ja^plliallt le leoips cl juuaiil avec la
vir, il laisviil a ^on \iraire ht* deuiirN
à remplii (I iir Mni^eail qu'à ^on {>Uj-
«ir. Son rxlnicur rlâft peu a\antj-
Îeux et >a nuve plo^ que ne^ljjrr
.ui-mrme a drcnl >a G^nre daiik "dr^
\risin»ero parmi Ir» Mrin'i^rs ilr
/xiTjiW pul lir> en I7KJ, pji Ficmni
Woa de Sloane J)
I r
II , '
Om .. ,.r.„..r... . .
I our ua li »rur à'
l.'r»! %<» 1 purtrail ij..| .. .. ;•.- ■ -- -^
I/abbé Jacquemart portail dan^ I9 *o-
cirlé un r>c'it ran-^liqur «t '
dunt IfNN.iiliir^ irlj'^^K-m I .
Sa fijurlii-r boufionne ne f •
à aucun dr^ lra\e(» qui Ne Irn
son c)iem*n 11 amuit à fine de^ nto-
nurinws connue ou peuj en )u;;rr par
la citation ri dcs»UÂ, et le plu>>ou>en(
5a rime portait sur le nom de la per-
sonne a qui il les adit*»sait. Se» >er>
étaient $i)u^ent fnrt «raxcleux. 11 mou-
rut en 1^03, a N illerA (.erua\ dont il
a\ait repri- la cure, aprr> a\uii quitte
celle de ViUrrs-de.artt-Mozièies. 11
a publif : / i>\it^r en vrrs a rublHtye
de La^iil liru l.ie;;e , 17ô(» , m-^",
pitco !■ l'fsijue, et laite >ans doute,
dit un liio^taplie, i^uu d lii iurir rtuit
en 4^coitrs. IJ — 1\ — 1\.
Di V:,,, >■ ,T DU Ataoïtai rt •.«',.! <'«?»«,
I i-mp «t ch«» . - I <iHi« ,
u»r.l i;^^, le la
> . fui k U I .t.i...
l J^natile. KmXwrr u
. u , il fut lie «««c .
(t ...1 lnJUCOOp de »rr- ..r -..'.rlr
doot las pr«iuicr> rcuioalciit à r«aa«e 1767. et
lu ucnucr* M>at da iSjj). Il a 9sltii«, omu a
ja<:(,»m:\iaki (Nio>la$-
FRA>n»|s , tirir du piiTédcyt, ué à
Sedan le "1 o»i..l.if 17:).'», y exerça la
Eiofovon de libiatic ri > iiut uu ca-
inet liltetaire pendant niutorze ans.
l/e>poir de faite de mrillrure^ afTatre»
Taltifa à Pari^. en l77t , niai> il ne
prospéra pa» «: birn qn il réu-
nit à la pr< libraire rellf
d'li<immr> de IclUc^. Nlaibeureux ju»-
qu'a la tin, il w<Mintt ibits rrtie capi-
tale, à riio^pire <! r , le 2
auil I71MJ. lia « le %nile
de ranuu\me : 1. Éirfiriiiuis ttun
LUÙù'ij/eur um/Ti'tatii uir U projet
iTabolir teulu^nige et ta truite des
nr-^rr^ . ntl^f3;:r traduit de Tan^lai* ,
I : . I .. . 17110. in li. Il
Hrnuiri^ur.s J ' • ' ' '■/urs
sur 1rs trriU' fa-
les de I*uris,d lifjti i lu iiuu^'cUc lir-
cuiiurifttion An \ fc\rier I7'JI ^ pur
urtJre nuiurrit^ur , Paris, 1791 ,
tri-K". III Hrniiirt;ttr^ liisturiijues et
) r5 , / oUrgiu-
.}>rtlrs .\uppri-
mre» duits lu vdU et juul^ourgs de
Paris, d'après le dètret de fusseni
Uèe naiiorutle du '2 fè\frier 1791,
Paris, ^lIM, in-H" ; réiiiiphnié sous
ce titre :T^j liuines parisiennes de-
^tuis tu rri'otiétiun de 17K'J et années
suieuntes. u%'er des renia rifues ftis-
turit^ues, Paii» , 1702, in-S". IV.
l.lrennes aux èmi^rrs, ibid.. 1793.
in- 12. N . Le tlieophîtantrvf*e de-
iW/^.pMFr.J*»*.ib., I79«,in8".
Cet ouvra;;e fut saisi |»ar la police. Tou-
tes ces production-^ sont dignes d'un au-
teur famélique. M.Quéraid [Frane
tin., toni. IV) lui attribue: 1" Les
ttummages et les vorux de la nglion
fru- '■rsentèsà LL. MM fl
u i royale, Ji'er un I)is-
«• f<»rl prlil ilOWbrr d't-iriwpljtïe*. lilrndu--
lion «n »rr. rr.iu(ai* de U CJtutt de RuJJin de
CUudrn'I./.n.lrr».!!' f.în-"> : M celle de/'.Vrt
pwi*fM à llo. «ce vl^ii<lrr*(P«fU), •««*.»•»•;.
dediwau roi Lr«uU XVlll
3.
"i6
JAC
JAC
cours, 177-1, iiî-8**, dont l'auteur est
l'abbc Jacquemln du Valdaon, d'après
le Suppl. à la France litt. (h 1778,
tom. 111, par La Porte; 2** Le nou-
veau Mississipi , ou les Dangers
d'habiter les bords du Scioto, par
un patriote voyageur, Paris, 1791,
in-8°, ouvrac;e publié à la librairie de
Jacquemart, mais qui, suivant Bar-
bier [Dict. des anonymes , tom. II),
et suivant M. Quérard lui-même
{France litt. tom. Vlll), a pour au-
teur Roux, sergent-major du district
des Prémontrés. D — R — RetP — rt.
J A C Q l E M I \ (Jean-Ber-
nard), p;éomètre du chapitre métropo-
litain de Tours, naquit à Amboise en
1720. Durant le lonp; exercice de ses
fonctions, l'église de Tours ne lui pré-
senta aucune occasion de développer
ses talents comme architecte dans un
ouvrage de queliquc importance , et sa
scrupuleuse délicatesse lui interdit, plus
encore que l'engagement par lui
contracté, de rien entreprendre d'é-
tranger au chapitre qui le salariait ;
mais du moins il consacra ses loi-
sirs à des travaux utiles à Part, Ira-
vaux que sa modestie l'empêcha de
rendre publics. Il a laissé^anuscrits :
I . Essai sur la structure, percus-
sion et suspension des cloches, ac-
compagné de. tables et de douze plan-
ches dessinées par lui. Cet ouvrage ,
huit de longues méditations et d'ex-
périences réitérées, rectifie dans ses
bases les plus importantes, et par une
thqorie complète, celle qu'on trouve
dans l'Encyclopédie. Les démonstra-
tions en sont si. solides et si claires qu'il
eût pu devenir un guide sûr pour tous
ccîtjx qui s'occupent de la fonte des
cloches. II. Traité de géométrie pra-
tique, remarquable par sa concision,
sa lucidité et la simplicité des procé-
dés imaginés par l'auteur, au moven
desquels, pour les plans levés à labous-
«ole, on rapporte en deux heures, sur
une seule méridienne, ce qu'on rap-
porterait à peine en huit heures par
les méthodes connues qui exigent au-
tant de parallèles que de côtés. IIL
Traité de constructions de diverses
espèces , accompagné de figures , ta-
bles et tarifs; ouvrage plein dfe vues
neuves et remarquable aussi par son
extrême concision. IV. Un Traité de
charpenterie contenant, entre autres
objets , la comparaison des combles,
suivant la méthode de Philibert De-
lorme , avec ceux des meilleurs con-
structeurs modernes ; ensemble le nou-
veau système perfectionné de l'auteur
qui, outre l'avantage de l'économie
sur les deux précédents, concilie la lé-
gèreté de l'un avec la solidité de l'au-
tre. Le trjivail de Jacquemin est ac-
compagné d'une série d'excellents pro-
fils de formes de charpentes retroussées
suivant ce nouveau système. Il mourut
à Tours en 1786. L — s — d.
JACQUEMIX (Jacques -
Alexis), évêque de Saint-Dié, ne à
Nancy, le .4 août 1750, entra de bon-
ne heure dans la carrière ecclésiasti-
que. Il remplit d'abord les fonctions
de vicaire dans une des paroisses de
cette ville, montra du talent pour la
prédication et un grand zèle pour assis-
ter les criminels condamnés à moif.
En 1778, il fut nommé professeur de
théologie à l'université de Nancy; mais
à l'époque de la révolution , ayant re-
fusé de prêter serment à la constitu-
tion civile du clergé, il se retira en
Allemagne où il rejoignit M. de La
Eare(Koj. ce nom, LXIII, 53i),
évêque de Nancy, qui le fit son vicaire-
général. C'est en cette qualité que
l'abbé Jacquemin rentra en France,
où il courut de grands dangers sous le
règne de la terreur. Lors du concor-
dat de 1801 , M. de La Fare ne don-
na pas sa démission, mais s'abstint de
tout exercice de juridiction épiscopale
dans son diocèse, et il chargea encore
JAC
>on vicairc-f;énèal tir reniire publique
une JrrUialioii à rr hU]e\. IMu« lard
Jjrquriniii piofc^sa h pliilo>op)iic au
l^cet Je Nauru II re^ut, en ISJ!), la
croif Je la I.r-^inn il' Honneur ri fut
nommé à I ' ■ Saint -Die . mais
l'i^e cl Ir le runtrai;;nireiiâ
au bout Je nurli|ur> anuee> Je se Jrmel-
tre Je son sir^e. Il maorul le 15 juin
1832 Jans «a \ille natale, où il «'était
retiré avec le tilrc Je chanoine é^éque
du chapitre Je Saint Denii. Outre un
traité imprimé Jr Imarruitionr l'rC'
bi liU'ini. faisant partie J'uii r«>urN J^
théoloj^ie qu'il se proposait Je publier
a\ec l'abbe MeziH, son collègue a l'u-
niversité Je Nancy, projrt »jne les évé-
nements politiques l'cmprc hrient Je
réaliser, on a Je lui un .ILrffirtUs
mémoires Je l'abbé Bairuel/^oiir a/t-
i^ir a Chistuirr Wu jitt oùinismr ,
Hambourg (Nano). IKOl. Paris,
18!7, 2 vol. in-'l2. Dans les pre-
■ières années Je la révolution , Jac-
quemin fut un Jes coljaborateur^ Ju
journal intitulé : le (ÀitliuJuiue de
ffaïUY' l* — HT.
JAC(,>1 EMI.XOT (Jfan-
Ignace), comte Je l'emi le, né à Nai-
>'es-<levant-Uar en Lorraine, en 1758,
était avocat au parlement Je Nanrv lors-
que la révolution cnmmenra. Ainsi que
la plupart Je ses coiifrciCN, il s'en Jé-
dara partisan, mais avec moJeration, et
défenjit avec courage, Jcs le commen-
cement, plusieurs Je ceu\ qui s'r mon-
trèrent opposés. Ce fut lui qui en
1790 sauva J'une mort inévitable. le
général Malsei;;ne, envové par le roi
pour répi inier Hinsurrec'.ion Je Nancv ,
et que les solJals révoltés voulaient
massacrer. Plus larj , Jacqueminot
sentit le besoin Je se faire oublier, et
par la il échappa aux périls Je la ter-
reur. Le département Je la Meurlhe
Pavant nommé en 1797 l'un Je ses
députés au conseil des cinq-cents, en
mém£ temps que lioulay Je la Meur-
JAC 37
tlie, il \ suivit i p«u près U alac h-
i;ne politique que son compatriote, et
jouit comme lui J'unc «^ranJe faveur
auprc. Ai\ Directoire, surtout après la
révolution Ju 18 frucliJor an V, oè il
se ran^^ea avec beauruup de xèle da
parti Jes prescripteurs. Du reste il ne
s'occupa ^uere Jans celte assemblée
que J'alTaires juJiciaires et aJminisira-
tives, et il se fit reraarc^uer Jans Jeux
occasions par sn opinions contre la
librrte Je la presse. J'aborJ quanj il
s'agit Je mettre les joumaui sous le
pouvoir Ju Directoire , ensuite en
combattant un projet Je Kerlier qui,
seloîi Im) , laivsait trop Je latituJe aut
1 S'elant montré l'un Jes
I' parll^ans Je Itonaparte ï
lepoq'ie du 18 brumaire, il fut nom-
me >enaleur peu Je temps après, et
obtint Miccessivement la senalorerie Ju
Jépariement Ju NorJ , et les titres
de comte de Haro et de commandant
Je la Le;;ion J'Ilonneur. C'est au mi-
lieu Je ces honneurs qu'il mourut à
l'aiis. le 13 juin 1813. Il fut inhumé
Jan» les caveaui Je l'e^lise Je Sainte-
(feQevtève,alor> nommée le Panthéon,
et consacrée par un Jccret impérial à la
sépulture Je> ^ranJs iiomnies. Son con-
frère [.JcépeJe^rononqa m\\\ oraison
funèbre. M — l»j.
JAC(,>LK.\IO\T (Victor),
uaturalisle et vrova^eur fiançais, était
né à Pans le 6 août 1801. Doué
J'une grande lacililé et d'une intelli-
gence remarquable, il fit de très-bonnes
éludes. Il les avait terminées à (|uinze
ans; son pcre , homme instruit (1),
souhaitait ({u'il se destinât à la méde-
cine. Victor, emportf par l'arJeur Je
cultiver les sciences qui ont pour objet
l»<onnaissance Je la nature, se livra
Jes ce m.)uient avec pas>ion à ce pen-
chant, l 'n acciJent qui manqua Je lui
lion pabUqu». H membre t\>\ LribanaU»»! mort
le 9 norcmbre ■ f 36.
38
JAC
être funeste ne put ralentir que passa-
o;èremeiit ses progrès sans nmnrlir son
zèle. Dans le laboraloire de chimie où
il travaillait, un vase plein de cyano-
gène (acide prussiqne) se brisa entre
ses mains; il respira quelques parties
de ce fluide si délétère, el fut sur-le-
ciiamp atteint d'un commencement de
phthisie lanngée. Les médecins dé-
sespéraient de sa vie. 11 fallut qu'il
renonçât à suivre les cours, et qu'il
allât passer le temps de sa convalescence
à la campagne. Accueilli à la Grange
par le général Lafayctte, ami de sa fa-
mille, il dut au séjour des champs le
dévelopement de son amour pour la
botanique : « C'est à la Grange , dit-
« il dans une lettre datée de l-SSS,
« que je commençai à former mon
« herbier au mois de mai 1818, »
Ce goût, quand sa santé fut un peu ré-
tablie, lui fil roinier des liaisons avec
plusieurs hommes éiuinents dans les
sciences, et le mit particulièrement en
rapport avet Raruond dont la conver-
sation était exliémement attrayante et
instructive. Il puisa dans ses entretiens
avec ce savant un goût très-vif pour la
géologie, et dej)uis cette époque l'élude
des plantes et des roches l'occupa prin-
cipalement. Il V con<^ra les instants
qu'il passa chez M . de Trac) à Para) en
Bourbonnais, chez M. le comte Jaii-
bert à Ilerrv dans le Berry. Il fit en
1821 , avec ce dernier à qui ces scien-
ces sont familières, des excursions dans
les montagnes de l'Auvergne el du Vi-
varais, dans les Cevennes, les Alpes du
Dauphiné el de la Suisse. Vers 1824,
ses rapports avec M. Jauberl avaient
cessé: " Mais, dit il, je lui ai pardonné
'« de .s'être séparé de moi, et les sou-
« vcHirs de notre amitié me sont re-
" devenus bien doux aussi, •» Quel-
que temps après des chagrins plus sé-
rieux le déterminèrent à quif'er la
France: « J'étais alors, écrit-il plui
" lard à son frère , M. Porphyre Jac-
, JAC
«< quemont, au faîte des malhews de la
« vie. » Ce frère l'accompagna jusqu'au
Havre où, le 3 novembre 1 82G, il s'em-
barqua pour les Etats-Unis de l'Amé-
rique du Nord. Il allait y joindre un
îîlitre de ses frères, M. Frédéric Jac-
(fïiemont. Il parcourut une partie des
élats du Nord et du Canada, vit le
Saut du Niagara, manqua de se noyer
dans la rivière de ce nom, et navigua
sur le lac Erié. A Philadelphie un in-
cident inattendu le décida à un nouveau
vo\agc. Un Français avait tenu des
discours qu'il jugea offensants pour les
siens et pour lui même; les lois des
Etats-Unis ne lui laissaient pas la possi-
bilité de l'appeler en duel 11 lui donna,
par une lettre, rendez-vous dans l'ile
d'Haïti où il arriva le 18fév, 1827; son
frère Frédéric étalt^lors au Port-au-Prin-
ce; Victor Jacquemont passa trois mois
dans ce pays, attendant inutilement
son adversaire, mais ne négligeant pas
rhistpire naturelle. Il rapporta en
France de belles collections de plantes
et de roches. Ce séjour dans une partie
d'Haïti, mal famée parmi les Européens
pour sa .salubrité, lui fit prendre con-
fiance dans sa santé qui n'avait nulle-
ment été altérée; el, résolu de profiler
de cet essai, il 'rédigea un plan de
voyage aux Indes-Orientales, qu'il sou-
mil aux professeurs du muséum d'his-
toire naturelle. L'intelligence qui
avait présidé à la formation de ses
collections, connues de plusieurs d'en-
tre eux , détermina l'approbation de
son [)lan ; il est nommé voyageur na-
turaliste du gouvernemçnl. Aussitôt il
se prépare à son départ, et, muni de
leltre.sde lecommandat'rons de ses amis
de Paris, il court à Londres. Quelques
semaines passées dans cette capitale
suffirent pour faire apprécier ce qu'il
valait; il s'assura ainsi d'avance dans
l'Inde de puissantes proteriions aux*-
quelles il dut plus tard de pouvoir
poursuivre , sans obstacle , se» re-
JAC
JAC
rlierrh«« dans àes rouuètt où U p\a-
; . r .î. !.. .. rr»4 l'All-
• M «lutïnl» lies
iitrt ne »uiil pa» Atliii:<. in-
• ni. l)*u^ aii> a* aiii M»ii dé-
part puui l'indr il it^nural ran;;lai»; il
l'a\ail appiuk au& Kuis-l nis. 11 i'rn-
harqua mit la roi «cl le Aj ZrUr qui
jpparrilla de IWesl le 'ift aoàt 1S2H :
' Je &UIS cuuteiil, éeril-il à ftou (lère
" Poiphue ; le (lire que au .^lisfAc-
lionne »oil ^ra^eel >enrusr, rc!ae»t
X laulile. Il > a lutte au tlrdaii^ de
" mm. Ma rrllrMoii do'l fonihaHre
" ineN \m\<
" M\e*, lli.i • 1. • r
n Bêles fait laiie... Manilriiaiilru re-
« i^ardanl l'axenir de\aot moi, je vims
M uue penle plus ou luuiiis c<^ale,
•• mais ruiDlanle, qui me ronduil né-
•« cessairemenl vrr> une position liouo-
« rableel Nali>fu»»aiite dan» ce monde.
M C'est loi, l'orplnre. qui m'a» jeté
N daos celle pro;;ie«>i<)n nmMclle de
n bonheur. Tu e- lu cjum* de ce que
M je serai, de ce que jr Irrai a présent;
«< je ne rej^relle plu^ rien du pa>>e. m
I^ navire n'arriva qu'en mai 1h29 à
Calcutta. Durant relIrtra^erxT de neuf
mois, il avait relaclie à Tenenfle, à
Uio de Janeiro, au cap de lumne-hls-
péraoce, à Uourbon, à l'ondicliért.
1.AS lettres de Londres et de Fans, dont
Jacqueronnt était porteur, lui valurent
un accueil bienveillant et ihlleur de la
part des pnncipaux per&onna^e^ de
rinde-An;;lai5C. Cet accueil ne se dé-
mentit jamais. « l)esreroniiiiandaliuns
« honorables que j'ap|H)rtai^, échl-il
«« à M. \ tclur de Tracv, m'ont ou-
«' rert toute& le* maisons respectables.
«< J'ai choisi celle où je pensais devoir
«« être le pluj libre pour me livrer sans
« partaje à mes études; telle atait été
« la prevovance de mes amis, qu'il
« n'est pas un seul homme m ce
« pav$, que je n'y aie vu avec plaisjr et
« profit, auquel je ne nac fusse adressé
.< directement d'Kurope. » Pami le»
pf ' nt deTaml-
tit il ciici lord
W lUiJiu l««iiîiiKà, ^uuNciiieur |;éné-
lal àf l'Inde Jaruncinont se montra
reconnaissant : •« C est, dit il, l'homme
•• oui fail |>eut être le plus d'honneur i
•• 1 Kuropc«t a l'Asie. » San» %c lais-
."^er distraire par les passe-temps agréa-
bles que lui mena;;eait l'obli^rance de
^«s hôtes, il profila des m* moi* qu'il
resta a Calcutta pour prendre coniiaiv-
sauce des collection» d'hi^^toue naturelle
qui s'> irouvrni, pour cunviillrr tous
les ou\- •^ sur l'Inde, dans
relie V > u<ba) , k Mad^a^, et
1rs volumineu» lecueiU impnme.s en
Vnj;leterre, pour appiendre l'hindous-
tao et le persan, pour se familiariser
avec les mtrurt et les usages du pajs.
Ses prepaialifs terminai, il se mil ea
route le 'JO novembre, avec un traio
qui est indispensable dans ces contrées
ri dont il est le premier à plaisanter.
Il marchait vers l'ouest : le iil décem-
bre ri filtra dans r»riiarès, la cite sainte
des HiridiMi'. . le 2.J janvier 1H30, il
^isiiaii <!r diamant de l'anna,
en Boi Ir 20 frNrier il était
a A;;ra . le tO mars a Ddili où il fut
présenté au ^raml-mo^ol, qui aujour-
d'hui est, comme cliacun sa-t, un sim-
ple pensionnaire des .\nj;laii. (Jiemi-
nant rns<iile au nord, il ajleint Her-
douar, heu de pèlerinage célèbre, i
l'endroit où le Can::e sort des monta-
gnes ; I ' • 'renU gra-
dins d. .-à Djam-
nautri, au& souicc> de la l),emiiali; le
iô mai il était entouré de .commets
C'iuvcrl.s de nei;;es perpétuelles, l^ 10
juin il eut la bonne fortune de rencon-
tra, k l'erali, Jamcj (ierard, depuis
lono;-temps accouluraé aux courses dan^
ces raonia^nesiraj. CtBvBD, LXV,
•292). Le 21 juin il fut fêté à Simlah
par M. kenuedv, ofGcier d'arllllerie
anglais, qui commandait d^ns ces can?
4o
JAC
tons. Le gouvernement britannique y
laisse l'apparence de la souveraineté à
une quantité de roitelets qu'il empêche
de se nuire réciproquement, et de pres-
surer leurs sujets. Ces ombres de po-
tentats rendirent de grands honneurs
à Jacquemont, qui, avançant toujours,
franchit le 13 juillet le ghat ou col de
Borendo, et descendit le long des
flancs septentrionaux de rHimalaVa ,
dans la vallée du Setledjc supéi ieur. Il
s'approchait de la frontière de l'empire
chinois ; il ne put aller vers l'est au-
delà de Bekhar dans le Tibet , où, le
15 août, un officier de cet état lui en-
joignit de retourner sur ses pas; il
essaya en se dirigeant vers l'ouest
d'être plus heureux. Au milieu de ces
cantons reculés il éprouva un plaisir
bien réel en recevant une lettre du
général Allard qui, de Lahor, lui faisait
des offres de services auprès de Rendjit
Singh, maharadjah des Seikhs; c'était
d'un heureux augure pour les projets
futurs du jeune vovageur. Toutefois sa
tentative pour entrer sur le territoire
chinois, dans le voisinage de Lari,
échoua le '2 sept. ; le village de Ka-
naour, d'où il érr!\!t , est à 3700
mètres d'altitude, il avait cause à Ka-
nem, autre village de ce pays , avec
M. Csoma de Kœrœs, Hongrois, qui
a passé plusieurs années dans le Ti-
bet pour eu étudier la langue. Re-
tournant alors vers le sud, Jacquemont
repassa l'HimalaVa ; le 23 oct. il re-
vit Simiah , le l^'^ nov. Sabathou; le
21 un m?ssager lui remit à Chahran-
pour, dans les plaines de l'HindousIan,
une Gazetic de Calcutta qui annon-
çait les événements de juillet. Jacque-
mont les avait prévus : il se hâta d'arri-
ver à M'rat, grande station militaire
entrele Gange et laDjemnah. Tous les
officiers civils et militaires se réunirent
pour lui donner une fêle : à cette occa-
sion il y prononça en anglais un dis-
cours qui prouve une grande facilit»? à
JAC
s'exprimer dans cette langue ; Il témoi-
gna convenablement sa reconnaissance
et enleva les suffrages de ses auditeurs ;
puis il se rendit à Dehli, et, en mars
1831, entra dans la Pendjab. Rendjit
Slngh prit en amitié le jeune Français
avec lequel il pouvait causer des scien-
ces, de la philosophie, des arts et des
usages de l'Europe. Ce souverain, peu
tempéré dans ses habitudes, voyant
que Jacquemont était aussi sobre que
laborieux et instruit, conçut pour lui
un intérêt qu'il nianifesta par des dons,
des largesses, des témoignages d'affec-
tion. Jacquemont eut la permission
d'aller où il voudrait : des lettres-pa-
tentes recommandaient de le bien trai-
ter ; des escortes lui furent données.
Sans la protection et la munificence du
maharadjah, Jacquemont avec des fi-
nances très-bornées, et hors des limites
de la domination anglaise, n'eût pu
poursuivre ses recherches dans cette
partie de ITnde ; comblé des bienfaits de
ce prince, il lui fut possible de les con-
tinuer. Toutefois le gouverneur d'une
forteresse, dans les montagnes au nord
du Pendjab , eut le tort de l'arrêter
et d'extorquer de lui une somme de
cinq cents roupies ( douze cent cin-
quante francs) : il lui eût même fait un
mauvais parti sans l'assurance et le
sang-froid du jeune voyageur qui finit
par lui inspirer du respect. Rendjit
Singh, instruit de ce méfait, dédomma-
gea Jacquemont de ses pertes ; et, à sa
sollicitation, se contenta de chasser le
bandit et de lui enlever tout ce qu'il
possédait ; dans le premier moment il
avait ordonné qu'on lui coupât le nez
et les oreilles s'il se présentait à Lahor.
« La manière dont le roi parle de moi
« dans ce firman, dit notre jeune com-
<( patriote, exprime une grande consi-
« dération, une bienveillance réelle et
« a produit ici \\\\ effet merveilleux. »
C'cst.du Cachemire qu'il écrivait ainsi à
son pire ; il ëtait entré dès les premiers
JAC
jour» et Mai dan» celte contrée ciue
dnii Kuropérns ««dUment avaient ilr-
crileaxaiil lui: KrançoU llrtnin en
166i, (tcof|;e Forslrreu MH'2 j^/ ny .
Ur.R7iiKn , IV, 30.'», ci VurvsTtn,
XV, -i^JO). I^ gouverneur remontra
trè»-cropre*»é à le servir en tout, et
JjcquemonI (liiit;ea cumroe il voulut
&e> luvesii^ilious i il remonta ver» l'est
jusqu'aux »ource^ Jm l)|aleai. 11 aurait
bien \oulu tiaverser les muuia;;iie» de
ce côlé pour iletcemlie daii> le bassin
(lu Srlledje . If« obsladrs pliv^ques
rcinpèclieiciil d'effetUicr ce drsveiu.
Il Gl «ne excursion ver> le nord, revint
a Seniu^oi , capitale du ( ^clieimre, M>r-
lit de ce pav» en seplrmbte, par le col
de l'\r-l*anlial, ri p4i>a prr» du ;i«-nc-
ral Allaid liutl )Oui« à \aiiit»ii, \ille
sainte des SeiLii»: il eut ii une audience
particulière de Kendjit Sin^ii (|ui lui
offrit la \ice-ro\aute du ClacheoiHe:
«• Je ae moquai beaucoup de lui et
H 4e sa propoMiion, qui n'éiait sans
« doute qu'un pie^e pour connaître
M ma peni4*e. Il me plut davantage
» encore qu'a mon payia4;e a I^lioi ,
•* sans doute par 1rs caieeœs qu'il me
•< fit >' ^lettre a son père du 19 oct.'.
InMté par ce prince a raccumpa<;ner
dans l'entrevue qu'il allait avoir avec le
^ouverueur^eneial de l'Inde, à Kou-
pour sur 1rs riveN du Setledje, il mon-
tait un élepliaul (^ui marchait cùte à
cote avec celui de Uendjit Sin^li, et
discourait comme un oracle avec lui.
•' Gimme il n'y avait pas la plus petite
•< herbe à raraasNrr dans les plaines
•« sablonneuses cl brûlées que nouslra-
" versions, je ne rej;rettais pas de ne
«« pouvoir m'arrèler selon ma fanlai-
" s'c Le 21 octobre j'ai pris de
« mon cher Ucndjil Sinuliraon con^é
M deljnitif. Notre dernieic entrevue
M fui longue et infiniment amicale.
" l'iciidjil me fil mille caresses; il me
«< prit el me serra les mains plusieurs
" fois, aux bordées les mieux servies de
JAC
4i
« flatterie, ou, sans le cbcrtber, je
« roeitaiK un pru de senriment; je ne
« laiNsai le roi qu'a la nuil noire, lui
M laix^ant tous ^lr^ virux itour sa gloire
• et sa pro»pef lie ; ri emportant, tn
- échange de ces paroln dorées, m
•< klielal ihabil d honneur magnifi-
M que. Kn levcnant a ma lente, je
M trouvai que le roi > avait envnvé en
M CMlre un présent Je cinq cent» rou-
« ^les. '• Muni d'un firinan de Heiid-
jit Siiighet d un autredu colonel \N a-
dc, af^Mil d iienent britanni-
oMpréftdr ^KtmddMidaatt,
Jaiquemonl, se driubant ■OitUfint
aux pompes qui l'ailendaicat tmr la
bords du Sel led|e, prit lai outr de Mon-
di, ou il vitila les mines qui prevnlent
beaucoup d'intrrrl groh»;;iqur ; le rad-
jah que l(eiid|il luia^aildi-pemt comme
le plus récalcitrant de >es vassaux des
moulagnes fut pour lui tres-anical.
1^ \i i.ovembre Jacquemont repassa
le Setledje. et à sa grande satisfarlion
se trouva de nouveau sur le lernloire
britannique. Son nombreux équipage
lui devenant mutile , il renvoya cliex
eux tous le-s Seiklis qui formaient son
e&coite, et qui a sa recommandation
furent lecoropensr». il rencontra ses
anciens amis a Sabathuu. a .Simlah, à
Drhh ou il revint le IGdereinbre. Il y
vit M. .Viexandie Hurne>, j qui nous
devons un Vo>agc lutérevant dans les
pav> de l'Asie compiis entre l' Indus
et la mei (^pienne, et qui fait de lui
une mention honorable. (Ve^l a>sez
à temps pour rejoindre à^^el<|ues
lieues le camp du gouverneur -gênerai
qui venait de quitter la ville impériale:
« J'ai passé, dit-il, deux journées
•« charmantes avec lord et ladv ^^ il-
« liam UenlincL. - Ueveou ensuite
pour quelques jours à Deli^ afin de
faire embaïquer sur la l)|emnah ses
collections de tout genre , il expri-
me , dans SCS lettres , l'espoir de
terminer heureusement le vo)a^c
JAC
JAC
qu'il va entreprendre dans les contrées
raéridlonaies de Tlnde. Il quitta cette
ville le 14 février 1832, passa par
Firouzpoiir, Djevpoiir, la ville la plus
magnifique de ri nde, Adjmir, Tchit-
tore, Oudjein, Indore, Mondleisir;
il avait ainsi traversé le Radjpoutana,
le Mevar, le Mulva, le Kandeïclie ; à
iNIondleisir, ville la plus chaude de
rinde, il rentra dans la zone tor-
ride, et au-delà .d'Assir^our, fameuse
forteresse, il fut bientôt dans. le Dek-
han, qui est la partie de Tlnde au sud
de la Nerbeddah ; il y "\lt successive-
ment Adjintab, Aurenpabad et Daou-
letabad;il visita les ruines merveil-
leuses d'Elora, Le 22 mai, il écrivit de
ce lieu célèbre à son père : « Entre les
« montagnes de \ indhia et celles
« d'Adjintah,ddnslesvalléesdelaNer-
« beddah et du Tapti, je m'étais ha-
« bitué parfaitement à 4-2 et 43 degrés
« de chaleur ; j'avais presque fini par
«f trouver qu'il n'y avait rien de
(( trop. » Jusque là, malgré ses gran-
des fatigues, sa santé n'avait pas été
altéiée;il avait su par un traitement
que lui suggérait son jugement droit,
et en faisant usage des ressources que
les lieux lui fournissaient, se débarrasser
des atteintes de quelques maladies.
Mais il n'en fut pas de même quand,
après avoir passe le Godaveri et s'être
approché des sources de la Kistnah ou
Chrichna, sur le revers oriental des
(jhàtf, il eut séjourné quelque temps à
Pouna,^ns la saison des pluies. Tout
dans ce V^nde est mêlé <le bonheur et
de malheur, il venait d'apprendre le
16 juillet q^i'il était nommé chevalier
de la I égion-d'Honneur ; peu de jours
après; une attaque violente et soudaine
de dysien^rie le retint plusieurs jours
dans stn iX et lui causa des doulein-s
cruelle* . Après sa guérison, il visita l'île
de Salsette pour en étudier les roches,
et fut lorcé d'aller beaucoup au soleil,
sur cette côte insalubre, dans la saison
la plus malsaine de l'année ; il en résulta
du malaise dont il se plaint dans sa der-
nière lettre; il arriva épuisé à Bom-
bay le 29 oct., et dès le lendemain il
fut obligé de garder le lit. Il reçut de
M. J. Nicol, négociant anglais qui
l'avait logé chez lui, des soins qu'il
n'aurait pu attendre que d'un vieil ami'.
Cependant, au bout de. quelques jours,
il quitta la maison de ce négociant pour
se faire transporter dans un apparte-
ment commode et spacieux, au quartier
des officiers malades. Il avait connu
tout de suite la nature de son mal, il
en prévit l'issue. Dans sa dernière let-
tre adressée à son frère , M. Porphyre
Jacquemont , en date du 1*^' déc. ,
il s'exprime ainsi : « Il y a trente-
a deux jours que je suis arrivé ici fort
« souffrant et trente-un que je suis
« au lit. J'ai pris dans les forêts em-
<f pestées de l'île de Salsette, exposé
« à l'ardeur du soleil dans la saison la
« plus malsaine , le germe de cette
« maladie , dont au reste j'ai reçu
« souvent , depuis mon passage à
« Adjmir en mars, des atteintes sur la
<f nature desquelles je m'étais fait illu-
« sion ; c'étaient des inflammations du
« foie. Les miasmes pestilentiels de
<f Salsette m'ont achevé. Dès le début
« du mal, j'ai fait mon testament et
« réglé mes affaires...... Tu devras
" trouver quelque consolation dans
«f l'assurance que je te donne que ,
« depuis mon arrivée ici, je n'ai cessé
K d'être comblé des attentions les plus
'< afiectueuses et les plus touchantes
« d'une quantité d'hommes bons et
« aimnblcs. Ils viennent me voir sans
<f cesse, caressent mes caprices de ma-
« lade, préviennent toutes mes fantai-
« sies... L'excellent Mac-Lennan (son
« médecin) a presque compromis sa
« santé pour moi... ; la maladie heu-
» feusement lire à sa fin qui peut
« m'étre fatale, quoique ce soit plus
« probable ainsi ; » puis il dit adieu à
JAC
sM Mm , l*nieN(C i caatoUr )«w
p^c. ri finit aiit»!: •< Adieu ! o)i ! que
M vous rtr^ «iinr> «Je volt r p4u>re \ ic-
•• lor ! — Adieu |)Ottr la lier iiirtr fols !
•« éirndu sut le dos. |« iir puis eci ire
M qu'avrr un cra^nn . dr peur que ret
•« caiarleres ne s'rlfarrnl. l'eicellmt
« M. Nicol ciipirra celle lelUr a la
«• pJuBe, afin que )C soi» sur que lu
«< pmuM lire n«s dernières pcnsm. •
Il »i(*ne el ajoute: « J'ai pu M0iier ce
« que l'admirahle M. Nicol a biea
- voi4u fi>piei \dieu eurore. me»
•« aa^ ! 1^ :^ décembre m iVinbiil
loul le temps de va malaiie. Jjcqur-
mont ton»ena une Iianquillile el un
ronleulemrnl pa i;i Is. Le 7 drc. , a
SIX lieure> du mim , il empira eiilouié
de M. Nicoi el de M. >br l.«-^naii,
el ^arda jusqu'au drniier iiioinenl l'u-
sage de ses lacul les. Le lendemain ai
soir, il fui enterré avec Irt lioiineHit
inililaires, ctuiime rlievalier do k Le«
^loiid' Honneur : le& oiemlireN du ;;ou-
▼ernemenl el l»eauroup d aulie^ per-
sonnes asj»isierenl à son convoi, l'ne
épilapKe 1res simple, qu'il a^ait indi*
qoee la veille a .M. Nicol. fui ^avee
sur b pierre qui rouvre sa tombe,
('■race aux toins de cet exreiient
homme, lou* les objets d'Iiistoire na-
turelle laisses a Koioba) par Jarque-
mont, set papiers el d'autres objet»
fareni exped:e& en t'rance. On a dt
lui : I . A otr sur le ftisemeni du
Gypse dans les Alftes ^insérée daiii
les Annales des sciences naturelles,
IH'ii, tom. III). O petit ecnl an-
nonçait deia. 3U jiitii iiiriil «1rs ^rnlc-
pues, beaiuoiipde va^mHi' e: »i insina-
tion. 11. Lurrespondanre de l ùtur
Jarquemont aver sa Ju mille et fUu-
sieurs de ses amis . pendant' son
voyage dans Finde ilH^H 18:12 >,
Paris. iKiii; i'^edil., |K:i.-,, 1 vol.
in-8", avec le poriraii de l'auletir et
une carte litlio^raphiée de l'Inde. Ces
deux Tolumes renferment cent lettres.
JAQ
43
Oa y lit «Uc détails piqiants mit mo
vo>a^e', sur sev a\enlurei avant de
piller la Kianrr, mu tout ce qui le
concerne pei»oiiitellemrnl. Klles unt
ol»»"!»!! (Ml l^f^ ./.iiiii i,incis cbcx
'iicnl de >cience
l'oui ne pas en-
un \ei les |;eus du monde . iiraninuins
rlir> MMit lUNtroctives. (^lle» uicnic
aui M>at adievNee.s à de» Kav.iMi<» ne
s appesantissent pas sur les ub|cls de
leurN éludes. riuMettr> de ceux-ci en
uni reçu qu'iU n'ont \ ' .t Tim-
pie^Moii Stinprie. < onde
4 ua-iiii quille* lui pji 4f liaient ;
M. l'uiplnie Ja<quemont romballit
celte idée. > iclor l'en (cmemc Je 1 1
auil 1831 ; « lu as eu rai!»ou de top*
M po»er à ce qu'un piibLal aucune
•* fMirlie de mes lettres. 1 1 est iropus^t-
« Ue qu'elles ne »oicot pas érnic»
X ^\t< trop de ne^li^^ence pour plaire
« a d'autres qu'a de>aaiis. » Il ajoute
que ces I ' u^ >oul prématu-
rées. Ninur ' . C^ li\re a été
ju^e trop ^ irierie
pat de^ Imi com-
pris : \\s uni cru que J4ii|uriNi>iit se
posait coiuiiie un lionime a bonnes
lortuues, el »e vaaiail «le ncs succe«
aupie:» de* dames ties-re>peclabies.
Tout liomme rai»onuable n') verra
que refiusiou de senlimenls bien ua«
lurelle à quiconque éprotve une vive
satisfactioB, (|uei quej»oil son à^e. Il
ne tarit pa> «'ans les leinoi;;na;^c.s de
^.l ;_f.iii;utlt- (>our !(*^ bt>iit«-> dont lurd
et 1.1. i\ \\ ni. .1111 iW-m iuL, ainsi que
d aulics Arij,iaiN iiâbilauls de I Inde
l'ont comble. M. Hurnes, dont nous
3voiis cite If nom plus haut, rend jus-
lice à J.icquemont. 11 parie de lui
comme d'un homme tres-atiréable en
société; il ajoute qu'il était très-réservé
sar tout ce qui concernait son expédi-
tjon, mais si bien au fait âe toutes jcs
44
JAC
nouvelles de Tlnde-Supérieure, qu'on
aurait eu de la peine à le prendre pour
un étranger. « Ce jeune Français, dit-il,*
« a laissé dans l'Inde beaucoup d'amis
«c pour pleurer sa perte. Je ne crois
« pas que les lettres publiées peut-être
« prématurément par sa famille, de-
« puis sa mort, sulfisent pour le faire
« connaître convenablement. Atten-
« dons le résultat de ses recherches
« savantes » (tom. I*^' de son Voyage,
2® édit., pag. 183). On reconnaît, en
lisant la correspondance de Jacque-
mont, qu'il a pour son père un profond
respect et une vive tendresse ; ses frères
ont une part égale à son affection ; tous
ses amis lui sont chers, son attachement
pour eux est ardent et ne se ralentit
dans aucune occasion ; il regrette que
quelques-uns se soient éloignés de lui.
Un point est blâmable dans cette cor-
respondance, nous y reviendrons plus
tard. III. Voyage dans l'Inde pen-
dant les années 1828 à 1832, in- fol.
avec planches, Paris, 183.>, et années
suivantes. Au moment où nous écri-
vons cette notice (juillet 1840), il a
paru vingt-sept livr?isons de cet ou-
vrage ; il doit en avoir cinquante. Le
texte imprimé s'arrête au jour où
Jacquemont est repoussé de la fron-
tière chinoise. Ce livre contient des dé-
tails précieux sur la géologie et la bo-
tanique, sur l'aspect physique de l'IIin-
doustan , du Cachemire et de quelques
cantons du Tibet , des observations
sur l'etlmograplne, des remarques sur
l'état moral et polilijjue des pjys et
des peuples. Si les jugements de l'au-
teur paraissent parfois hasardés , du
moms sa franchise lui sert d'excuse,
mais on ne peut qu'applaudir dans des
occasions nombreuses à sa sagacité; il
la manifeste de même dans sa Cor-
respondance. Ses opinions sont dé-
mocratiques; mais il trouve que l'af-
franchissement des anciennes colonies
es{(agnoles a été un malheur pour elle:;,
JAC
'parce qu'elles n'étaient pas préparées
à un régime d'indépendance et de
liberté. Haïti, quelque grossière que
soit son organisation politique, lui pa-
rait encore la république ou plutôt le
gouvernement modèle parmi tous ces
nouveaux états : c'est le seul où l'on ne
se tue pas sans cesse. Il dit que la dorai-
nation des Anglais est bienfaisante pour
les contrées où ils l'exercent dans l'O-
rient, et se moque cordialement des
rêves que l'on débite à Paris sur ce
sujet. Il dit ailleurs : «« J'ai ri et^beau-
« coup, et d'autres Européen^aussi
« ont ri des grandes phrases orienta-
« les du général Lamarque sur la Kus-
« sic, le Dalkhan, le Caucase, la Per-
« se, la Chine et la cruelle oppression
« qu^ font, peser sur cent millions
« d'Indiens, prêts à se révolter, les
« perfides insulaires ; je souhaiterais
« que l'ordre légal allât son train à
« Papîs, comme du cap Comorin aux
« cimes de l'HimalaVa. » Ses ré-
flexions sur la révolution de juillet
sont remarquables. Il demande ce que
ses amis, qui ont regretté son absence
dans cette circonstance, eussent pu faire
raisonnablement de lui, qui se sent
incapable d'occuper convenablement un
emploi politique. Il fait preuve de bon
sens en littérature; l'annonce des spec-
tacles, au bas des gazettes de Paris, lui
apprend comment la scène a été envahie
par des pièces monstrueuses : « Tout
« cela est de bien mauvais goût. En
« mettant sous la remise les Grecs, le s
«< Uomains et les marquis de notre
« vieux théâtre, nous n'avons pas été
« heureux dans le choix de leurs suc-
« cesseurs. » Il les appelle Messieurs
de l'horrible. Dans toute sa corres-
pondance on ne lit pas une seule phrase
désobligeante pour qui que ce soit. 11
s'exprime très-gaîment sur quelques
actions de Hendjit Singh; c'est que ce
prince se permettait en public, dans sa
conduite, des éc^u'ts par- trop scanda-
JAC
Irux. — I^ plaisir que l'on éprouve i
U Irdurf dr^ Ifllrr» dr Jar(|urnioiit
est |>eiiiblcmcnl interrompu pai *on
septiciMTir pou^^r jusqu'à rinrredulilf
la plus pruiinnrrr. Ce» nirnic> senli-
roeiils se rflruuvmt dans >on {^rand
ouvraf;e. rrol>jl>lrnirnt il eût cUànf^é
ces passades a\aiit de pré%eiiter »on
livre au public. — M. Adrirn de Jus-
sieu, di;;ne succeaaeur de* ;:iand> bo-
tanistes de ce nom , a fait imprimer,
dans les \ou\'rlUs .(imulrs du mu-
séum iffusiturr tuiturellt (tom. Il,
pa|;. 300] , une notice sur Jarque-
roont , dont il fut l'ami. F.lie nous
a rté utile pour la rrdartinn de rrt ar-
ticle: nous en emprunterQn> encore
quelque? trait* : «• l'eisonne ne savait
<« mieux que VidorJacquemont inspi-
H rer l'amitié: les souvenirs qu'il a
•« laissés partout l'attestent : son es-
•« prit original, prompt à saisir les ri-
« dirule^, et à soutenir en |ouant le
•« paradoxe, son caractère trop indr-
«< pendant pour se soumettre toii)our> à
«« tous les mena|;ements minutieux im-
B posés par la société ont pu sans doute
•« effrayer quelquefois et éloi;;ner mo-
« menlanement de lui ceux qui lecon-
« naissaient mal: on ne <e sentait en-
•< suite que plus attire vers lui , on lui
•« savait plus de ^ré d'une bonté et
•« d'une sensibilité vraies qui ne se tra-
« hissaient jamais sans se montre'
•« d'une bienveillance qui n'était ja-
« mais banale , mais >ouveir in^é-
« nieuse ; surtout on était llatté de
•< son amitié, parce qu'on le sa>aii
«« juo;e éclairé et diflicile. Son instruc-
« tion variée et solide, avec son ori-
*« {finalité d'aperçus et d'expressions,
«« donnait à sa conversation un piquant
«« intérêt, que se rappellent tous ceux
•' qui en ont joui. Il a\all le vrai cou-
« raf;e , celui de tous 1rs moments,
« oui retléchil et agit vile en présence
.« du danger , qui ne le recherche ni
'< ne le craint. >» Les %ure$ des cou-
JAC
45
pes de terrau» , les vues de villes , de
villa»;eN, de montagnes et de pa)sa^es,
le» portraits, sont j;ra\es d'après le>
devsins de .lacf|uemont. Kn reconiui;»-
sance des sernce* qu'il a rendus à la
science, deux ^enre* de pLntrs ont été
établis sous le nom de Jut tiurnwntia,
l'un appartenant à la famillr des com-
posées, tribu des .SenecionideeN et mm-
pienaiit nue!llue^ espèces dr l'Inde
publiées ùjiii I histoire de xon N o> j^e ;
l'aiitie. faisant partie de la Uiuillc des
convolvulacées, est composée d'espèces
américaines. K— *•*.
JAr.V>rKS{M*TMiKi Joskph).
l'un des plus' savants théologiens du
\Nlir <>ierle, naquit en 1 Tilt» à .\rc-
Sous - Monteuot , bailliaf;e de Sa-
lins. Ses heureuses di.sposilions déci-
dèrent .ses parents, quoique pauvres, il
ren\o>er continuer ses études à l'uni-
versité de llesançon ou il les termina
d'une manière tre> brillante, \vaiil
embrasse l'elat ecclésiastique, il rem-
plit d'abord les modestes fondions de
Mcaire de campagne; maisil fui appelé
peu de temps après à Ixjns-le-Saulnier
pour ^ pr()feiNer la philosophie et les
mathemalique>. Au bout de deuv
ans il obtint la chaire de mathé-
matiques nouvellement établie au col-
le<;e de Besançon, et ne tarda pas à
justiGer la haute idée qu'il avait fait
concevoir de ses talents. Un mémoire
sur une propriété des courbes qu'il
avait découverte lui valut des élo;;esde
d' Alembert; et tes nombreux élèves qu'il
présentait chaque année aux examens
pour l'admission aux écoles de l'arlille-
rie et du pénie lui méritèrent l'estime
de l'abbé Bossu t , avec lequel il en-
tretint long temps une correspond.mcc
.^cientiGque. Nommé membre de l'aca-
démie de Besançon, en 1773, il y lut,
le jour de sa réception, un précis de
la vie des mathématiciens francs-com-
tois (1 ; enfin, à la mort du savant
(OC«o«>raçe. •>"»' q^e le» différent mr-
46 JA.C
Bullet (Voy. ce nom, VI, 253), il lui
succéda comme professeur de théolo-
gie à l'université, et se montra (lio;ne
d'occuper une cliaire que la réputation
de son prédécesseur avait rendue très-
diftîcile. Quoique o;rand mathématicien,
l'abbé Jacques n'avait pas su calculer
ses dépenses de manière à les combi-
ner avec ses ressources. Sa bonté na-
turelle lui avait fait contracter quel-
ques dettes qu'il était assez embarras-
sé d'acquitter. En refusant de prêter
le serment exi^é des fonctionnaires
ecclésiastiques , il se priva de tout
moyen de payer ses créanciers. Il sortit
de f rance en 1 79 1 , et se retira d'abord
à Fribourt;, puis à Constance où il ne
vécut que du faible produit de quelques
leçons de p;ramrtiaire. L'un de.sescom-
pao;nons d'exil, l'abbé Lambert, était à
Constance lorsque Jacques y'arriva.
«< Ce me fut, dit-il, une chose pénible
« devoir un tel honimedansune cham-
« bre sans feu , vêtu d'un mauvais ha-
« bit râpé, et oblipjé à sorixante ans
tf de colporter par un temps très-froid,
te de maison en maison, son français
u et son allemand ; il avait appris par
« cœur, non-seulement la f:;ranimaire
w de GoltsThed , mais encore l'énor-
« me dictionnaire de la lanf!;ue alle-
« mande en deux f^ros \oliimes in-4** ;
« et, à quelque ligne qu'on le nut, il
u continuait sans manquer ni dépla-
« cer un seul mot; qu'on ju^e par
ce là de sa mémoire prodigieuse. Ses
« talents n'étaient point inférieurs :
« av^c un mérite aussi extraordi-
K nalre, il était la modestie même , et
<( ne se plai;;nait pas d'une posr-
« tion dont tout le monde p;émissait.»
{Mémoires de Jurnille , 192). Heu-
reusement l'abbé Jacques parvint à
se placer chez un riche particulier
de Munich, qui lui confia l'éducation
moires lus par l'abbé iacqnes à l'aeadcmie de
Besancon , aont cob— rr^ «t— 6 les regittres de
celte compagnie.
JAC
de ses enfants: Après le concordat de
180t, il se hâta de rentrer en France,
et s'établit à Paris oii il s'occupa de
rédiger les observations que son ex-
périence l'avait mis à même de faire
sur l'enseignement des langues. A la
création des académies en 1810, il fut
nommé doyen de la faculté de théolo-
gie à Lyon. Il passa le reste de sa vie
dans l'exercice de cette place , et mou-
rut le 16 février 1821, à l'àgç de
quatre-vingl-cîiKj ans. On a de lui : I.
Prœlectioiies iheologicœ, Besançon,
1781-86, 7 vol. in-12. Ce cours de
tliéologie devenu rare est assez recher-
ché. 11. Preuves convaincantes de
la religion chrétienne, en forme de
dialogue à la portée de tout le monde,
Neufchatel, 1793 ; Paris, 1804; Dole,
1812, in-12. La première édition est
suivie d'une rp/i//rt//o« des principes de
l'église constitutionnelle, que l'auteur
supprima depuis par amour de la paix.
ÏIl . Nouvelle grammaire allemande,
d'après les principes de Gotlsched et
Juncker, avec un petit Dictionnaire
français-allerrtand, Strasbourg (1795),
petit in-8" de 134 pag.; elle areu plu-
sieurs éditions. IV. Eléments de la
grammaire française, Paris, 1804,
in-12. V. Démonstration simple et
directe des propriétés des parallè-
les rencontrées par une sécante , ibid. ,
1804, in-8". VI. Moyens de dou-
liler au moins les progrès de la lan-
gue latine , ibid., 1804, in-12. VIL
Moyen peu dispendieux et générale-
ment applicahle de mettre les enfants
en état de traduire la plupart des au-
teurs la'insà l'âge où l'on a coutume
de les envoyer aux premières écoles de
latinité, ib'id. , 180."), in-12 VIII.
La logique et la métaphysique rap-
pelées à leurs principes, ibid., 1805,
in-12. IX. Les traits les plus inté-
ressants de l'histoire ancienne et
de l'histoire romaine, tirés des au-
teurs latins, et liés par des «oRimaires
MC
des antres Ciits hi)tonq«e« , ibul ,
182(),â vol. in- 12. CVl une indue
lion dr* Siirrationes e.uerpUt, rlc,
d« Dumnurhrl (/'<«> . ce Dura, I.V11>
142). L'abbé Jarqur» a\ait, liit on,
romposé un ouvrage >ur le» il ren-
iions At !V^! c Je France à la 6ti
du Wlir sirtir; mais il le ieia au
feu, parce «jur \ts principes qu'il v de-
fendait nV'.i'fiii point m \^^:nv^n^r
a^f^'
Ollf ^
diie. L'y a éie
prononce .1 : . . : 1. r on par
J.-ll. Rrchet {Vu}, ce nnra, LV||,
4!)2). On trouve ue« notices $ur cet
écrivain dan« Wimi de la rrli^ioti
XXMI , I4i7 , cl dans V Annuiitrr
Jirrrutugi^ue At M. Maliul , IHJt,
1>I0 i:l W— $,
4AC\>l'i:T(Pin»nn.n*àr,re
Bohie dans le* d»"
XVII'^ siècle, se liM.
du droit et fut re^^u a^utjt ju pat le
tnent de Paris ; mais, sur la fin de sa
vie, il eit)bras>a l'elat rcrl«->ia*lique et
fut promu aux ordres sacre> Il mou-
rnt dans sa ville natale en 176G. On
a de lui : I. Ahrègi^ du (ummentairr
de ta coutume de Tuarame. etc.,
Auxerrre, 1761, 2 vol in-V°. I)e^
exemplairi> de cet ou\7a;;e son! intllu-
léi ; Ibrrgf général du tomnirn-
taire de toutfs les coutumes et des
autres lois munin'pttles en usage
dans les dijférentes ftriH'inces de
France, Paris , 176V , *J vol in-i'' ;
mais ce n'est qu'un ciian^ement de
frontispice. II. Traité des fiefs. Pa-
ins, 176>, iu-1-2. III. Traité des jus-
tires tie seigneurs et des de^'oirs en
dépendant , ibid . , 1 7 ti i . i n- 12 . I V .
Ui rlef du paradis, on Prières clwe-
tiennes , extraites des meilleurs li-
bres d'église, ibid., 1766, in-1-i. —
Jacquet de Maizet ( Louis-Sebas-
tien), prêtre, né à Naocy en 1716,
fut bibliothécaire du prince de Paar i
JAC <,
\ ienne en Autriche ; obtint un cano-
nicat au cidlè^r de Saint- Jtan à Var
iovie, etre\iuia Vifime uù il/ut nom
mo professeur d*hi-.limc et dr ;;éo^ra-
pllie à l'aradcmie militairi- dr cette
>ille. Il niuuiut le 17 août ISOO. ()n
a de lui : I lltHirs de - ^
Virnne, in-8". II. hArmr
/' /'. tion ul'i f^rr dr
I terrestre, ibid.,
.111. Eléments de fliis-
ine, ancienne et mo<lerne,
ibid., 17.'>*»-.'»6, iii-8 ' C^es deu» der -
oirr% ouwa^es sont anoinmei. IV
Le militaire citoyen, ou tlmploi des
hommes, Vienn», 1759 , in K" ; Pj
ris, 1760, in 12. V. Eléments de
r histoire antienne , Vienne, 1763,
in S". VI. Eléments de F histoire
d* lllenmgne. ibid, 1760-70, in-xS"
VII Prrtis de rrlntririté, ou Ex-
f- intentai et thét trique des
s électriques, \\)\A., 1776,
m S . \ III. lettre tPun abhr de
] ienne a un de ses amis a Pres-
Ifourg, sur Félei trophore fterpétuel,
ibid., 1776, in-S** (anonyme).
P-RT.
JA(:<0i:ET(JEA5-CLAir>E),
pamphlétaire obscur, qui ne peut être
omiN d^ns la liiographie, pui^fjue «-on
norp ligure dans le^ mémoire^ du temps,
éuilnftvers 17:îO, à I^ns-le-Saul-
nier. Fils et neveu de magistrats ho-
norables, après a\oir achevé ses étu-
drN à ruiii>ersité de Fiesanron , il
exerça d'abord la profession d avocat ,
fiuis acquit, en 1763, la charge de
irutenanl particulier au bailliage de sa
ville natale. Il avait épousé quelque
temps auparavant la fille du greffier en
chef du parlement de Doinbe.s, qui lui
av'ilit apporté urte dot considérable.
Tout semblait lui promettre un sort
heureux; mais il dis^pa protnptement
sa fortune par sesprodij;alilés, et pour
soutenir son luxe cul recours à des
moyens que réprouvait la déhcatesse.
48 JAC
Forcé de vendre sa charge, il laissa sa
femme à Lons-le-Saulnier , et vint en
1772 à Paris, où il vécut d'abord des
bénéfices qu'il faisait sur la vente des
livres prohibés. Il parvint à se f^ire
donner le titre d'inspecteur de la li-
brairie étrangère, et prit alors d'un fief
près de Salins, possédé par sa famille,
le nom de La Doye. On lit dans les
Mémoires secrets (XXII, 181) qu'en
1777 il s'offrit d'aller en Hollande
arrêter le comte de Mirabeau , et
qu'ayant gagné sa confiance, en se don-
nant pour un officier que des malheurs
obligeaient de s'expatrier, il s'empara de
sa personne et le ramena lui-même pri-
sonnier au château de Vincennes. Mais
on voit dans les Lettres de Mirabeau
à Sophie que l'exempt de police chargé
de son arrestation se nommait Brugniè-
res. Si Jacquet y concourut, ce ne fut
donc que comme agent subalterne. Plus
tard il reçut du comte de Maurepas la
mission d'aller en Angleterre à la re-
cherche d'un libelle qui s'y imprimait
contre la reine; et , sous prétexte
d'en prévenir la circulation, il tira du
ministère à plusieurs reprises des som-
mes assez fortes. Mais convaincu d'être
lui-même l'auteur du libelle qu'il avait
dénoncé, et de s'entendre avec Mo-
rande (^o/. ce nom, XXX, 69)
pour tromper le ministère, il fut en-
fermé 4 la P>astille (déc. 1781), Les
Mémoires secrets disent que, jugé par
une commission secrète. Jacquet fut
condamné à mort, mais que cette peine
fut commuée en une prison perpétuelle.
Ce qu'il y a de certain, c'est que depuis
on n'en entendit plus parler. Jacquet
peut être regardé comme un des au-
teurs ou collaborateurs des divers pam-
phlets anonymes publiés contre la
cour de 1 775 à 1 780. Suivant Barbier
il eut part à l'ouvrage intitulé: Les
Joueurs et M. Dussaulx , 1781 ,
in-8°, dirigé contre les maisons de
jeux. W— s.
JAC
JACQUET (Louis), littérateur,
né à Lyon le G mars 1732, fit ses
études sous la direction des jésuites et
fut admis dans l'institut à l'âge de dix-
sept ans (1749), puis envoyé par ses
supérieurs au collège de Dole, oîi il en-
seigna successivement les humanités et
la rhétorique. Il remporta un prix à
l'académie de Besançon, en 1760, par
un discours sur /:ette maxime : La
candeur et la Jranchise sont- com-
munément plus utiles dans le ma-
niement des affaires que la ruse et
la dissimulation. L'année suivante
il se mit sur les rangs, et ne fut pas
moins heureux en traitant cette ques-
tion : Le désir de perpétuer son
nom et ses actions dans la mémoire
des hommes est-il conforme à la
nature et à la raison ? Cette fois il
avait pour concurrent son compatriote
et son ami le P. Philipon , connu
depuis dans le monde sous le nom
de La Madelaine {Voy. Philipon ,
XXXIV, 61). Le P. Jacquet qui
s'était prononcé pour l'affirmative ob-
tint le prix, et Philipon l'accessit. Les
deux rivaux s'entendirent pour faire
imprimer leurs discours qui parurent
sous ce titre : Le Pour et le Contre
sur cette question proposée par Va-
cadémie de Besançon , etc., Lyon,
1761 , in-8". Deux ans après, le P. Jac-
quet partagea le prix avec mademoiselle
de Bermann O^'oy. ce nom, LVIII,
49), pour un discours sur ce sujet :
Combien les mœurs donnent de prix
aux talents! (1). A la suppression
des jésuites, le P. Jacquet revint à
Lyon, où il fut nommé chancelier de
l'église Saint-Jean, et s'étant fait re-
(i) L'académie de Besançon, ayant cette annét-
(l'jôi) dçox prix d'éloquence , décerna le pre-
mier à l'al)b(* Bergicr, hi connu depuis par «es
ourraget en faveur de la religion, et partagea
le scconl tiiirc uindciuoiselle de lîcniiaai c: lu
P. JacqiiPt, qui témoigna le désir de n'être
point nommé dans la &^nce (Uegitlr. de l'a-
ead., II, (éanceda i4 août).
arotat il panage^ «on \em\»^ eu-
tr« Ifs lra\au\ Ju rab iirt ri la culture
«le son c^pnl. Admis eu ITlil» a l'aca-
driiiir (Ir l.>on, il t prononça le jour
de sa rrrrptinn un distuurs fort re*
njirquable , dans lequel il eiiamine
Tintluenre de-» Ifllrrs >ur les miriirs,
et déride rommr l\oiisteau qu'elle ne
leur a pas rir r^\oiable. Il reîlescendit
en ITti'Jdan» la lice acad^iq»f, et
fut couronne a Marseille pour un di»-
foui4 sur cette question : l^s lois
soinptuiiires rorn'irnnrni-ri/rs aux
vumarrhies ['1^ .' Jacquet prenait une
paît très-arti^e aux traçant de l'ara-
drniie de I.\on dont il etail Cun des
mrmhrrs les plus distingués ^U\ ef lui
communiquait frequemmetit le résultat
de ses recliercbes archéoioj^iques ou de
iti excursions dans le domaine de la
poésie. C'est lui qui fut clurf^é du rap-
port sur les concours auxquels l'abbe
Ha\nal avait donne lieu, en fai^^ant les
fonds d'un prix qui de>ail être décerné
à l'auteur du meilleur mrmoire sur
l'intluence de la décou\erle de 1' \mr-
rique [f'oy. IUynu. WWII,
IT.J. Ce ruftfHirt .(\\\r Delandtne cite
comme un modèle en ce ;;enre , fut
imprimé en 1791 {\). I/abbe Jac-
quet travaillait depuis plus de dix ans
i un ^rand ouvra^^e dans lequel il se
proposait de rechercher Torifiine de la
société, celle du lan-ac^e, des arts, etc. ;
il en a\ait lu plusieurs fra;;menl> à ses
confrères dont les suffra^ies l'encoura-
geaient à poursuivre la tache difFirile
qu'ils'élait imposée. La révolution l'obli-
gea d'mlerrompre ses paisibles études ;
forcé bientôt de chercher un asile con-
;>^ C* <li«roar« «tt iaipnna* djri> 1« Rremrtl
de rjcjdrmic d' MartnlW puar l'«ui.«« .;-o
5 Cet aii'si ({Qc le qu«lifie I>«Und>nV r«
46*.;.
(4) Soiu ce titre : Co%f d'mil tmr ht ^^mrr,
emaromttifmi oml eu li*n m l'mtméimt» en ititmtn .
Miet-Uurtt *t mrli de Ljom . ^omr U prix offir't
fr fa!>b* fimrmml. sur la dee»urrru d^ t' Amt-
n^m», Ltoo. BnijiPt. 1791, in-l*.
JAC
\\\
tre la l>iafinie dans le voisina'^e de
h\on, il \ mouiul en 179 V. Outie ir^
divers morceaux di-jà cites, on a de
lui : Parallèle des tragiques grrts^
et fraiii^ais, \,\ox\, I7G(), in- 12. On
conservait ï la bibliuthrque de cftte
▼ille \tat. des munuycrits, n" 1 V'.M)),
sept disrour» de l'abbe Jacquet sur la
|>errrctibilite de l'homme, sur les nururs,
.sur l'elat de nature , etc., qui de\airiii
être autant de parties ou de <
son ;;raiid ou\ra;;e dont 1
est probablement perdu. (>C9 di«iei->
écrit» offrent, suivant Delandine, soit
par le fond des idées, soit par 1rs for-
mes du st>le, comme un reflet des ou-
xra;;eA de Housseau dont il était un
admirateur pavAionne. M. (,)uerard en
attribuant dans la France littéraire,
à l'abbé Jacquet , une part a la bro-
chure intitulée : lys Joueurs et M.
DussuuIj. , l'a confondu i\fc un a^enl
subalterne de la police, son hnmoiiMue
(lu), l'art, précèdent). \V — s.
J Ar\>l KT Kl OJî«K VlMCENT-
Sr^MSi as), orientaliste l>el;;e, naquit
le 10 mai IKII à Bruxelles. Ses pa-
rents, mieux parta;;és de sentiments
honorables que des biens de la fortune,
l'avant amené des l'aide de deux aiu
à Paris , avaient tache d'assurer sou
avenir en lui procurant l'instruction
que le développement précoce de son
intelligence [laraissait exiger Au col-
léj;e Louis le-<irand . il obtint des .suc-
cès et en sortit avec une connaissance
sufJLsante des langues anciennes. Bien-
tôt il entreprit l'étude des langues
orientales ; et ce fut avec une ardeur
qui ne >e ralentit pas un seul instant
qu'il suivit les leçons d'.\bel Bémusat
pour le chinois, celles de Chézv, et
plus tard de M. Kugene Burnonf, ()0ur
le sanscnt ; celles de S>lvestre de Sary
pour l'arabe et le persan ; celles de
M. Amedee Jaubert pour le turc.
Dès l'année 1829 il devint membre de
la société asiatique, et ne tarda pas à
LXV11I.
5o
JAC
lire dans les séances de celte compa-
gnie, et ài Insérer dans son journal, des
mémoires et des disseilatlons qui at-
testaient des recherches persévérantes
et une sagacité remarquable. 11 em-
brassa aussi dans ses investigations le
malais et les Idiomes des peuples de
l'ancien monde les plus reculés vers
l'orient; 11 portait en même temps son
attention sur la géographie et l'his-
toire des nations. Plusieurs savants ,
frappés de l'imporlauce des travaux
d'un homme , si jeune encore, lui ma-
nifestèrent leur estime et correspon-
dirent avec lui. Les deux langues les
plus célèbres de l'Asie orientale , le
sanscrit et le chinois, avalent spécia-
lement fixé son attention ; mais, de-
puis 1833 surtout , il avait concentré
presque tous ses efforts sur le sanscrit ;
il le lisait avec la plus grande facilité,
et l'avait suivi dans les dialectes qui en
dérivent. H était déjà préparé pour
riiiterprélation des monuments épi-
graphiques que la société asiatique de
Calcutta met chaque jour en lumière.
Il avait entrepris de publier un re-
cueil d'inscriptions indiennes , et ce
projet, pour l'exécution duquel il n'a-
vait trouvé d'encouragements que hors
de France , l'avait conduit à des élu-
des très-profondes sur la paléographie
sanscrite qu'il possédait peut-être à un
plus haut degré qu'aucun autre giiilo-
logue du continent. 11 connaissait à
fond les insciipllons précédemment tra-
duites dans divers recueils publiés en
Angleterre et dans les Indes , et avait
commencé l'examen de plusieurs monu-
ments du même genre, encore inédits,
dont il (levait la comnuinicaliOL* à la
libéralité des savants de Calcutta; car^
de tous les pays où les lettres orien-
tales sont cultivées, il recevait des té-
moignages de l'intérêt qu'il Inspirait.
La douceur de son caractère , relevée
par une délicateàse d'esprit que ne dé-
parait pas un peu de malice sans inal-
JAC
veillance , lui avait acquis l'amitié
de toutes les personnes qui le connais-
saient ; sa courtoisie, sa conduite exem-
plaire lui méritaient les égards de qui-
conque avait des rapports avec lui.
Mais tous ces avantages ne le rendaient
pas plus heureux. 11 avait commencé et
poursuivi ses études avec un dévoue-
ment complet à la science ; • les diffi-
cultés de sa position ne le rebutaient
pas : pour sortir de l'état de gêne où il
se trouvait , il consacrait à un travail
opiniâtre les heures qu'il aurait dû lais-
ser au sommeil. Vainement ses amis le
recommandèrent à la bienveillance des
hommes qui disposaient des grâces et
de ceux qui pouvaient attirer sur lui
l'attention des grands. Le résultat na-
turel de cet excès d'application se ma-
nifesta : Jacquet , qui avait la poitrine
faible, commença dès 1837 à dépérir
d'une manière sensible ; sa pâleur, son
amaigrissement signalèrent le délabre-
ment de sa santé. Néanmoins sa gaîté
ne l'abandonnait pas. Nous le vîmes,
au milieu de juin 1838, étendu sur son
lit de douleur, et cependant calme et
enjoué; il parla très-spirituellement des
affaires, de la littérature; et, quand nous
nous retirâmes, il promit que nous au-
rions sa visite aussitôt que ses forces lui
permettraient de quitter la chambre.
Nous sortîmes le cœur navré, car tout
indiquait qu'il ne guérirait pas. Il mou-
rut le 7 juillet. Quelques amis accom-
pagnèrent son convoi. Presque tous ses
écrits sont contenus dans le Nouveau
journal asialiijue'. l. Noie sur lu lil-
tr rature du Ni pal, t om . i v . 1 L Notice
sur hs accouchements au Japon.
111. ()ljser\)alions ^grammaticales
sur un spécimen du dialecte abyssin
du Tigre, tom. v. W . Le lii^re du
grant-caan. V. Notice sur la col-
lection des manuscrits palis et sing-
halais de Copenhague , traduite du
danois , t. vi. VJ. Légende d'Eson
selon le chin - sian - ihoung-kian.
JAC
JaC
5r
VII. So4ice sur tfuelques relations
ilipJftmotitfUfs tirs niungois tir iJiinr
ih'ri /r-i f*^iftr% (T Imunom , l. vu.
NUI M' Lm^r% ni.il.i. \ . ja^tinuis
rt fHtlyittyirtis f otiimor-v (Un« \t loin.
i\, ,x H XI ^.. l\. .\utiir .wr utir
niri/ij:'.' 'V (fhacA/n Khon,
traiin ni \. h.t)niu-
!■■ if Us
.1 \\
/ I II m it un ntunu.^
inlr li l:.:inn tirs 1/
iiu^ il.iiis |.liiMi tirs \oi iiir» MtlVJnl^ .
\ll. Ur.u rifitiun tirs llrs iniptt rt
I rtjnunrr , t om . v 1 1 1 . \\\\, 4)ritiinr
tir i un tirs ntjm% stius Irsifurls frnt-
pirr ntnitiin a rtr connu a tu (.hinr.
\ I N . St»ticr sur la srrir tltt thsinsf
tthhti ou liu t tir pur, \. IX. \N.
Imftrrssiun ri tlUtrit/ulittn tir htttis
lurrs tt la (Jiinr. l. ix. W I. Stt-
titr sur 1rs (tninii It/oun^ . I. xii
\\ M. (Àtn/r« turrt sur fftrix'inr tir
la tlrnitntinntiiin tir l'.ilriijur , lom
Xill. \NIIl. t'uiistm iilU^urr futr
1rs rntitnjmrfans poiw rr/rtrr l h-
ottngitr , I . M V . \ I \ . \ lotir tCr i -
prrssittn sym/juJi.iur tirs nomhrrs
rmpluyrs par trs Inrlirns, 1rs J'ittr-
tains rt trs Jtnunuiis , t. X.vi. X\.
JN utirr tir tu rullrttnm tirs mrduit'rs
batirirnnrs et intlosryht^urs rup-
porirrs par tr ^rnrrtit Utttnl. \\\.
îSotirr sur trs dn uuorriry tin i%rn-
lo^iqurs fatlrs par M. H '■
dans r .Ifglumistttn vf""'
les toluiit» suivants), t. I" ilr U .t ■«•-
rie. WII. Exanirn tir tu traJur-
tion tlu Fo-kour4xi. Wlll. i^n'/rr-
turrs sur Irx ntttrrhrs tl'.itrtandrr
tJans la Itartrianr , par tr ^rnrraJ
Court. WIV. Examrn t^itiqur tir
foui'roîjr intitulé : Die Ail pf r>i$f lien
Keilin^scririltcn von Pfrsfpolls, von
Chr. LasNen. C«s trois arliil«, qu'on
lit dans le> tora. Il , IV, V et V| ,
sent restes incomplets. XXV. Lé-
gende de C esprit tlu foyer, traduite
do rliinAi» et publiée dan^ un journal
bel)»e M. K humour a in»ét^ d^nt le
tom. N 1 du Juurtuit usiatiqur vite
courte iioliee sur .l4ei|uet. Kite iiom
a été atile poir la redariion de rel ar>
licle. Il dit avec v<^rile i^ue ce jeune
lioinmr t rniiiru de^ inrdailles
(jiie M lui avait ap|M>(lée<i
de Ia|i4!l du ^rur .1 (^..nl; \t% re-
niar(|ue% dfint tl .)• ; i laii |c mé-
uiuiie «il- •' r , , I ..' • t|ijienl en-
core a -^r .;-• I» r- . ( .111. •!!'%. V. — 5,
J.\4:<^M I.VO'I dr HamfPrtune
CiM i»f -Kn\^«,tns-Jo<rpn (Athk-
niH»\ neiDir^Mien 1771 .«niourul
j l*an> en 1M:J.'>. l'roeureMr-uéo^ral
dq•ul^ lS-2i; |u«<|u'en IH^iO, il fu> avec
Uellarl et M jrrlungv, M M. de V*-
lime^nil el de Kroe, la |>emonni(Ka-
lion (le l'aulonle )udirijire qui eot
Mnt lie liiiie* ««onienir dan« rel inler-
talle. \ '- avoir ne l'organe
du fn r dm* Il fnn-*pira-
I ' I la
f^' 1 - . . «een
iM.tl d avoir oinnire de la partialité
pour L Ctuzrttr, aux dernier* |oursdu
replie de (^llarle^ \. Ce m<'fne hom-
me ménla pourtant que le bâtonnier
de «41» ofare, en 1H3.S , fn sur sa
Imnhe cet élo-^e, qu'il n'avait pa* en
d ennemi*. >l«trl «iniplr aroe.al, après
av«»ir eie viii^t an< mat^i'^tral el députe,
Jarquinof de H^mpeimie avjil mm-
mené»* pai celle meute profe**»oii d*a-
vocnl. Il iVxerra dam »a ville n:itale
de ITIM» a 1811. .Vcfueilli par ses an-
ciens, les Bouchard, les i^acoste, les
Miiri%<)t, Ic' Ki^ercl de Bciuvais, qui
tenaient le premier ran*». il pril bien-
tôt une place luxiorable el devint
l'émule des tro'S premier.^ , qin for-
maT^nl alors l'ëlilc des avocate plai-
dants. Son père avait été aussi un
avocat cmineiil du barreau de Dijon,
où il était professeur de «'roit (1).
(i I. ni ..ateur du Comf1 yuntùe-it, i toI.
13- S»
01
JA€
Pendant la ten eur , Jacquinol dé-
fendit, avec talent et coiirao;e, des vic-
times de la violence révolutionnaire,
entre autres les membres de Tancien
parlement de Dijon, au nombre des-
quels était le président Richard. L'ho-
norable carrière qu'il allait parcourir
dans la magistrature eut son com-
mencement sous l'empire. 11 fut nommé
avocat général en 1811 , à Dijon même,
puis procureur-général à La Haye (2).
Les désastres de 181 3 le rappelèrent en
France. 11 ne remplit aucune fonction
publique pendant la première année
de la restauration ni pendant les
cent-jours , bien qu'il eût été nommé
procureur-général impérial à Colmar.
Au second retour des Bourbons ,
il fut appelé au poste de procureur
du roi du tribunal de la Seine, et le
titre de maître des requêtes en ser-
vice extraordinaire accompagna cette
nomination. L'année suivante 11 alla
présider le collège électoral de l'Yon-
ne, fut porté à la députation, et à cha-
que nouvelle législature il remplit les
mêmes fonctions et obtint le même
honneur jusqu'au-delà de 1830. Lors
de l'installation de la cour prévô-
tale à Paris, en janvier 1816, Jac-
quinot de Parapelune justifia ainsi la
création de ce tribunal exce[)tionnel :
« La publicité des débats , dil-11 , la
« liberté eJ le respect dus à la défense
«€ des accusés, la moralité des juges
«< nommés par le roi,onriront unetri-
(2* L'introduction de la ligisljtioii friirrç.iis»;
exigea îiliirs un travail iinineiise. Le» peines de
détiniioii |>r<'ni)uci;i8 d'ajfiès hi Jo:s ijr ces
proviiici-h réunir» étjirnt d'une excessive .Jurée ;
iDais defc tOinniisMOns en provoquaient la ino-
dérjtion d'année à autre, en ;.yaMt é^'ard a la
conduite de* « on'laiim»'» Le» cb.iiifjeimnis (|iii
«urvinient dans l'administration rend reiit iitv
C'SBiire la révision dé loule» les tond.iiii'ia-
tion$ alors subies. Cette crande lui-Mon fut
abando< née a la sagesse et à la conscience du
procureur-général. Il lu remplit di(;!iein'<nt , et
peu laiil longtemps on a vu a la cUnncellerie,
dans 1« cahiuL-l du gardc-des-!.C4.Miix, la n-niiion
de ce» acte» de révision regardés comme un
de» inunuments judiciâicca qui honorent la
Franae. G — a — 1>.
JAC
« pie garantie aux accusés. La cour
«c prévôtale était nécessaire dans une
« grande cité (^ le méchant clierche
<c un associé à ses projets criminels,
«( ou un refuge quand il les a exécu-
«( tés. » A la chambre des députés ,
Jacqulnot se posa comme juriscon-
sulte : aucune discussion importante
n'avait lieu qu'il n'y prît part, aucune
session ne s'écoula sans qu'il fut nommé
membre des commissions chargées de
l'examen des plus graves projets de loi.
Il ne se lançait point dans les luttes
brillantes de la tribune, mais on trou-
vait toujours chez lui, dans la prépara-
tion des lois, le secours d'une vaste
expérience des affaires et d'une facilité
de travail extrêmement remarquable.
Les lois sur la presse étaient surtout
son domaine ; c'est là qu'il cherchait à
pourvoir l'ordre social de tous les
moyens de préservation dont il con-
naissait mieux que personne la juste
portée. Dès la session de 1816, Il
parla avec force dans la discussion sur
les journaux. « Si les livres, dlt-il, ont
« leurs destinées, les journaux ont
« aussi la leur, et elle est bien diffé-
« rente. Un livre est-Il utile, sa pu-
« blicité augmente à mesure que sa
« réputation s'étend : ne présente-t-U
«< qu'une production réprouvée par la
<f morale et par le goût, l'opinion en
« fait une prompte justice; est-il dan-
« geieux, incendiaire, il est arrêté et
« les auteurs poursuivis. H n'en est
« pas ainsi des journaux: leaial qu'ils
« peuvent produire est aussi prompt
«< qu'infaillible ; en peu d'instants, le
« journal à peine sorti de la pres<»e
« est connu dans le palais des grands,
o comme dans le réduit des. pauvres. »
En 1817, Jacqulnot fut nommé maî-
tre des requêtes en service ordinaire.
En 1818, il fit partie de la commis-
sion du projet de loi ayant pour objet
d'organiser la défense de la France.
La proposition relative à la puissance
iAC
patern^ie lui revenait clément ilr
droit, tbn' U mrmr »fk^ioii df IHIK,
comme jiiri'rnusullc ri comrnr rlirf i\f
par(]iifl. On le rrirniiNr, ni \H\0 ,
mrrrihre tif la romn)i>%iun du projrt
Hf loi sur la pt e^^ ; ce qui rsl digne dr
r«narr|ne, rar les temps de IHI9
étaient fort différents drreatde 1K16;
nars les rolle<;ues de Jarquinol con-
naissaient sa modération ri ne vou-
laient pas se primer de se\ lumit-re>. i j
rcminiission du prn|rt sur l.i ri-lurmr du
jurv le rompla parmi ves m- is
celte session de 1819. I^z< jI
D<;ura, la même année, parmi Irv signa-
taires des slaluls dr la sorieir pour l'a-
nélioration dr* priM»ns(3). Kn 1820,
les luttes rrrommencent sur laque^llou
de la liberté individuelle, snr la rensure
des|ournau\ et écrits périodi«pir«, et il
T prend la part la plus vive. Dans la dis-
cussion, le magistrat, le savant lé;;ixte
se monire, la passion (.iinais. l/ma-
leur lai.«>e de côtr la question poliii
3ue même, pour ne von que les règles
'éirrnrilr moi aie. Il fui nommé con-
seiller d'élal en service ordinaiie en
IN'JI ; on a vu qu'il a\ait passé soc-
cessivrmriil par tous 1rs j^radrs ; on
I atiarlia au comilr dr Ir^islation rn
lMi2. lians Ir coûtant de la session
dr crilr année, il parut à la tribune
pour discuter de nouveau la loi sur 1rs
délits de la presse. L'n membre de
la chambre , dans celle discussion ,
allrniia qu'à l'occasion drs troubles
du mois de juin 1820 , des tribu-
naux avaient refuse dé faire dioit aux
plaintes des députés qui avaient été
outraoés, mallraités , on allait jus-
qii à dire a&sAssinés , en sorlanl du
lieu de leur séance. M. de ( .irardin
affirmait positivcraenW qu'un individu
qu'on avait pris pour Manuel axait
reçu trois coups de poi;;nard , que le
(3; Il jTa.t ce»- \r ^,,,1 pnr^m,! , i„,i„ol.on
leiiJjutà faire ii.ifrrnjrr diiu lr« «ingt^nuatr*
* tonte p«r»ouii« arrêter. r_»__,.
JAC M
fait a\aii été constaté iudiciairemenl ;
Jacquinot , défenseur- né du tribunal
dont il riajt mrmlnr , ri*pondit qu'il
adjurail se» collrj;uc> dr la cliambre qui
avaient elé insulles dr dire s'ils n'â-
taienl pas etr rntendiis par la justice
et requis de furuirr leurs plaintes, ft'il
en existait de fontiee^. 11 n'apuartraait
pas au pouvoir le^' latif, ajoutait l'ora-
teur, de critiquer liti lu^rrnenl émané
d'un tribunal. Celait la un épisode
de la discussion. Dans la ilisrussion
mène. Jacquinot demandait que tout
les corps constitués fu-iMnl prote;;e4
contre les a;;re»sions de la pres>e ,
amsi que 1rs membres de% drux cham-
bres cl lesliibunaux : et il voulait que
celle drnomiiialion dr corps consti-
tues s'élrndil jusqu'aux conseils de l'or-
dre de^ avocats, comme étant, eux aussi,
revêtus d'un pouvoir public, c'est-à-
dire reconnu par la lui : rien n'était
moins oflensii*. 11 n'en fallut pas da-
vaiiLi^e ce|>endant pouré\eiller la sus-
repiiliihlé mquiele et soupçonneuse
de la gauche dalor>. I^ gênerai Foj
cria aux corporations que l'on ten-
dait a rétablir; et en cela il fut secon-
dé par Manuel et II. (^instant. .Ma-
nuel déclarait pour sa part qu'il ne
reconnaissait de corps constitues que
les ministres, parce que seuls iU étaient
respun>ablr^; docliine plus exar^érée
et moins admissible ()ue le système lie
l'orateur qu'il citmbatlail. Nlauuel fai-
sait planer au-des^sa%de la tribune le
speclre aiena<;ant du pouvoir absolu.
Dans la di:>cuvMun du même projet de
loi, Jacquinot dr l'ainpelune soutint
que l'article de la charte qiii prrinrîlait
la libre mariire>l.ilion des o|Miiion<> nr
pouvait s'entendre de la publication
dè^ gravures, des dessins, Jes carica-
tures ; que ce n'était pas là un nio\en
de manifoter une opinion. La loi de
1819, à la vérité, avait permis la
publication préaJable après le dépôt de
cinq exemplaires, mai-s tl en était ré-
54
JAC
suite de grands abus. On pouvait se
rappeler les caricatures io;nobles qui
avaiei)*. outragé les mœurs, la majesté
royale et tout ce qui devait être un ob-
jet de respect. Daunou demanda que les
expositions n'eussent point lieu piihll-
quemeni ; cet amendement fut rejeté
et l'article adopté dans son entier. >»ous
en resterions là de cette discussion, si un
mot, prononcé par BenjaminConstant,
ne se rattacbaità des débats parlemen-
taires bien célèbres dans ces derniers
temps ; il s'agissait de régler le mode
de défense des accusés cités devant la
chambre élective : la question était de
savo'.r si la chambre serait maîtresse
d'accorder ou de refuser un défenseur à
l'accusé, suivant les circonstances. Aux
raisonnements de Jacquinol dé Pam-
pelune, lîenjamin Constant opposait ,
avec quelque raison, que c'était bien
assez de distraire un citoyen de ses juges
naturels, sans laisser encore ses juges
d'exception, maîtres de lui enlever le
droit qui ap{)artient à tout prévenu :
celui de se choisir un di'fenseur ; et il
ajoutait avec indignation : <c Cela seul
« suffirait pour faire condamner la
« reute dans laquelle nous entrons,
« V horrible roule de l'omnipotence
« par lewent aire. >» Ainsi l'omnipo-
teuce parlementaire, proclamée en
principe depuis, par U majorité de
la coalition victorieuse de ISliS, était
rejetée comme u»* objet d'exécra-
tion par ro[tposition impuissante de
1822: « .levons dira- continuait lîen-
w jamin Constant, comme un orateur
«< céh'bre , je suis impatient de dé-
« pouiller' la portion de tyrannie
« dont vous voulez m'investlr. » i)e
son c<^lé , le général Foy rappelait
« l*exécruhle loi du 22 prairial an
« 2, qui disait dans un de ses arti-
« des : la loi refuse des défenseurs
<f aux accusés; ils en trouveront parmi
« les jurés patriotes.» Vax 1825 ,
Jacquinol proposa, ï la loi d'indem-
JAC
nité des émigrés , plusieurs amende-
ments et un article additionnel. Par
deux ordonnances (12 juillet 1826) il
fut nommé procureur-général près la
cour royale de Paris , et promu aux
mêmes fonctions près la cour des pairs.
En 1826, il fut présenté comme can-
didat à la vice-présidence de la cham-
bre, et obtint un grand nombre de
suffrages. Il fut chargé de porter la
parole à la chambre des pairs dans la
discussion du projet de loi sur les dé-
lits commis dans les échelles du Levant,
et fit partie, à la chambre des députés,
de la commission du projet sur les sub-
stitutions. Son rôle ne fut pas moins ac-
tif dans la session de 18i7, où les lois
sur la presse furent de nouveau mises en
question. En 1828, la discussion s'en-
gagea encore sur cet inépuisable sujet ,
et il lut nommé membre de la commis-
sion d'examen du nouveau projet de loi
qu'il défendit toutefois avec une sage
mesure. D'après le projet , tous les
écrits périodiques paraissant plus d'une
fois par mois étaient soumis au cau-
tionnement. Jacquinot de Pampelune
pensa qu'on pouvait en dispenser les
journaux scientifiques et littéraires
qui ne paraîtraient pas plus d'une fois
la semaine. Dans la même discussion,
il posait comme règle , en matière de
délit de la presse, que le délit n'était
imputable qu'à l'éditeur qui publiait;
que l'auteur ne devait être considéré
que comme complice, ayant pu com-
poser l'écrit incriminé sans inten-
tion de [lublicité. Envisageant la mê-
me question sous un autre point de
vue, il admettait que des cas pouvaient
se présenter où l'éditeur aurait agi
sans intention criminelle. La discussion
devint fort curieuse par les regrets
manifestes à cette époque de 1828,
au sujet du ministère Villèle. « Il
y a six mois, un an, dit un des ora-
teurs , les journaux répétaient unani-
mement : Otez-nou8 M. de Villèle ,
JAC
JAC
5n
IHM» allom mtrfr dan« nnê ère de
joie r\ âf bonheur ; et l'on parlait
jtrr un tel arcent de ron^irtion que
moi-même , comme le loup de la fa-
ble, je m*" fori^eai^ une friirité qui me
faixaif pleurer de tendresse; eli bien!
re mmislére e*t t(im!<e, rt le* journaux
continuent dr «.♦• pLiindre.» Kn tH2*J.
nou< retrou>onN .1 rnuinot de l*ampe-
liinr dan^ les débats lé'^i^latifs, tant de
la rliambre élerli^e que de la pairie où
il se présentait encore en qualité de
commissaire du roi, i l'occasion de
detu proiel"., l'un sur le« crimes et dë-
Its de l'armée, l'autre sur la contrainte
par corps. Il v <outrnait la lutte contre
MM. Decazeset de Hro-lie Puis il
retenait à la rhambre des drpulés pren
dr e part à la disrii«i<ion C(»ncrrnanl l'or-
;;ani*ation des tribunaux miliiaires. A
la fin de la même srv«.n>n, il ftit nommé
membre de la ronim!'>-^inn
I examen du prn)r| dr loi n
slilution des |ii<:^rs et con^eiliers audi-
teurs. Il s'a^isvail de les supprimer en
1829. et l'on parle en IHVO de le«
rétablir. Mais il restait pour Jacquinot
de Pampelune à subir une épreuve plus
déci^Tc que toutes les autres , la réso-
lution de 18:iO. Lorsqu'il avait tra-
versé celle de ITH*», quarante ans au-
paravant , il a;;issait dans la liberté de
sa profession d'av-ncat : la résolution
nouTelle le trouvait dans la plus dif-
ficile position de la raa;;istrature. Sa
conduite nous donnera la clé du ca-
ractère de l'bomme politique, des <irn-
tiraents intimes de l'homme privé.
Ceux q'ie les révolutions renversent
comme ceux à qui elles profitent, ceux
que le pouvoir élè\e comme ceux qu'il
abandonne , se montrent à peu près
invariablement le lendemain de leur
chan;;ement de position le contre-
pied de re qu'on les a vus la veille Les
mêmes qui ne trouvaient jamais a-^sez
de liberté pour eux , et % qui semblait
tonjoun trop forte la part de Tautointéf
parlent et a;;iss«nt aloi^ en vertu de
sentiments contraires, et réciproque-
ment I.es absolutistes du 2.*) judiet
1H30, d'après cett» rèj;le, sont devenus
des ullra-lil>^ranx au mois de septem-
bre suivant. Celte rèj;le ne fut pas à
rosai;e de Jacquinot de ^.impelune;
de I autre c^^^é de la révolution , il j
eut pour lui les m^rees principes i
défendre, b même i.atrie i servir. Il
^arda le poste qu'il occupait dans la
ma;;istrature jusqu'au ^ août 1H3(), et
suivit la même li^ne qu'auparavant à la
chambre des députés où il avait *lé
réélu en juin. I)ans la discussion de la
loi sur les rrirurs puhtii s. le parti de
l'opposition ne manquait pas d'étendre
la puissance du jurv , de substituer
l'omiiipotenre mobile et passionnée du
tribunal éphémcf à l'impassibilité du
iy::e inamovible. Jacquinot de Pampe-
'' mandait au contraire qae la loi
il aux tribunaux et aux cours, k
l'exclusion du jurv, le droit d'appré-
cier s'il existe des circonstances atté-
nuantes. Kn 1H31, l'homme de fjou-
«erneroent ««e prononçait en termes
explicites , je député déclarait •« que
« son vote était assuré à toute mesure
> a>ant pour but le maintien de la di-
•« f^nilé de la France au dehors, de
■ l'ordre et de l'exécution des lois ai
« dedans.» le caractère d'ancien pro-
cureur .général le con^-tituait cepentlanl
en élat de susoicion auprès de ceux
qu'on appelait alors le paiti du mouiv-
mrnt. I^ j;auche, qui l'aurait cru 'ap-
prouvait les visites dominha:reî>, même
dans leurs excès, et elle interrompait
Jacquinot de Pampelune quand il de-
mandait des restrictions î cette me-
si^e. On en vint un jour il lui repro-
cher sa partialité pour la GauUr de
Fnirtcr, mise en accusation pour un
délit delà presse, dans les premiers
mois de \H'M Une telle inculpation
était fjrave, car elle impliquail une
complicité quelconque du ma^stnt
S6
JAC
JAE
dans la direction politique, par laquelle
la restauration s'était perdue : aussi
s'en defend-il par la voie mcme du
Moniteur. Si M. de Geuoude n'avait
pas subi sa condamnation, c'est que le
condamné s'était pourvu en cassation.
Or, il n'avait été statué par la cour
sur son pourvoi que le 19 août 1830.
« Le 3 août, écrit Jacquinot de Pam-
« pelune, j'avais cessé mes fonctions,
«c j'étais remplacé.» En 1832, il es-
suva pour la première fois un échec
aux élections de l'Yonne ; c'est le
seul, car il fut réélu en 183i. Il ne
lui arriva pas à son retour à la chambre,
comme à d'autres députes, d'être
éclipsés ou de s'éclipser tout-à-fait ,
parce que leur temps est passé ; la
mission d'un savant lén^islateur n^est
pas soumise aux oscillations de la fa-
veur publique, elle dure autant que sa
vie : aussi y reprit-il son ancienne
place. La dernière fois qu'il y parut,
ce fut dans la session de 1835, pour
proposer un amendement au projet de
loi sur la responsabilité des ministres.
La mort le surprit dans le cours de
cette session. Il avait eu la douleur de
voir tous ses enfants torttl)nr succes-
sivement autour de lui. Marié à la
fille du marquis de Genouilly de Pam-
pelune (4) , écuyer commandant des
écuries de la reine ^larie-Antoinette,
une ordonnance de Louis XVI II lui
avait permis de joindre à son nom ce-
lui de sa femme. Repoussé de la magis-
trature, Jacquinot de Pampelune avait
cherché un refu^^e au barreau, d'où il
était sorti vinj^t ans auparavant. Ce fut
un avocat qui déposa sur la tète du ju-
risconulte la couronne méritée fiarune
vie si honorablemrnl remplie. Un
questeur de la chambre des députés
acquitta la dette de ses collèf^ues. Les
(4) C«^te fpBime «listiiigu«';e \e vit lor«qii*il
plaidait pour le malh» ureiix pn-sift'-nt Ricliard ;
chanii'c ei eniraiiK^'^ pur son ilorpiPiice pj-
llictlqne , elle lui voii.i diA-lorii un l<'n<lre alta-
cbemenl fr — » — n.
deux voix qui se firent eutendre s'u-
nirent pour proclamer la modération
du caractère de l'homme politique et
du maf];istrat. « C'est dans notre or-
«' dre, dit avec orgueil M. Philippe
« Dupin, qu'il a commencé sa carrière
«f avec succès et avec éclat ; c'est dans
« notre ordre qu'il l'a terminée avec
« honneur et dignité. La révolution ne
« lui ôta que ses places; l'estime pu-
«< blique et ses vertus d'homme lui
« restèrent.» L'orateur, non suspect,
qui portait la parole, n'eut rien à ajou-
ter après lui avoir décerné ce magnifi-
que éloge : « Que nul ne l'avait soup-
« çonné d'ajouter aux rigueurs de ses
« fondions l'aigreur du caractère ou
« le ferment d'un sentiment haineux. »
M. Philippe Dupin racontait qu'il
avait été témoin des travaux opiniâtres
de celui que regrettaient le barreau et le
parlement, ^ans le cours de la session
de 1831, à l'occasion de la nouvelle
loi sur la contrainte par corps ; il qua-
lifiait cette loi d'une des meilleures
qu'on ait faites, et la disait empreinte
de celte philantropie véritable , de ce
progrès utile qui servent la liberté sans
troubler le pays. M. D — Y.
JAC(JȕJbT (Rlaise). Voy. Ja-
QuoT, XXI , 405.
JJ^CK (Michel), jurisconsulte
allemand, né en 1783 à Piamberg ,
exerça d'abord l'état d'avocat auprès
du tribunal royal de sa ville natale ,
puis, en 1808, au tribunal d'appel du
cercle du Ilaut-Mein. Dix ans après,
il fut nommé assesseur au tribunal
d'appel de lîambcrg, et enfin, en 1829,
à celui d'Anspach, où il était à peine
depuis un an , lorsqu'une aliénation
mentale le força de quitter ce poste. 11
mouiut dans une maison desantéàSon-
nenstein, près Pirna en Saxe, le 25
janvier 1833. Les rapports qu'il fit
comme assesseur furent remarqués à
cause de l'érudition judiciaire qui y est
répandue. Outre une Théorie de la
JAB
JaC
re. qo'ii pabiia en 1803 avant tie
prrnilrv sf* dt^rr* dr dofirur a l'uni-
^ri^:lr,nn lui duit un ^rand nombre
dr lirtM-liurrt ^u^ la intispmtirnrf ri
iadminisliatinn |>ubli({ur, ainsi qu'une
Statistique du r«> uumr Jr lut^irrr
stHis Ir mpptirt tirs iuis i nulrs ,
lHi8-lH2*». _ Jmxk ( Churirs ) ,
^ra^ear rrirbrt, ne à I^dwig^bourg
dans ir NN urlember^ en 176:1, mou-
rul à Berlin en 184M», aprr« s'eirc di*-
tin^uepar la gravure d'eirelieules car-
ies gro'^rapliique». I) — ii.
J .L \ iSr. Il ((^iDKrROI-JAC-
^IM), mrderin dr lla^^nri;, na(|uif
en celle nlle le 17 octobre 17.'»1.
Kie\r atrc soin par un père «jui ctrrrait
Taii de ^néni de la manirre la plus lin*
rioraliie, et dr^^lnr de* ses plus jeunet
ans a une raiiiere dont touirs les rir-
W)nslanre.s ie reuiiiv.saient pour aplanir
irt difl'icullés , il 6i »e5 eludef meilica-
les à (fffllin^ue. ^ u^el, Krxieben ,
IMurrar, NVrisber^ , Kirliler, Osian-
der et Raldin;;er brillaient alors dans
cette univefNite célèbre. Il profila lia-
bilement des levons de ces grands maî-
tres, et, après avoir termine toutes »e*
clauses, prit le ^rade de docteur. Sa
ihèse de rrcrption roulait sur un sujet
de la plus hautr importance, mais qu'il
n'était pa<i donne a un débutant u'a-
prolondir et d'eimsa^^er sous tous le*
rapports qui le lient d'une manière si
intime avec les ;;randes questions de
réconomif politique. Klle a pour litre:
Dissrrta/io sistens phtJiistxts ex ul-
cère niratioftrs iirUiquas , (icettin-
pie, 177.'>, iii-V '. Jf niscli retint alors
dans sa ville natale, ou il .se fit une clien-
tèle fort étendue. Nomme médecin de
1 IWpilal des pauvres, il rédigea, de con-
cert avec ses collè]p;ues, un tableau des
mé«lifatnents usités dans cet établisse-
ment, «ious le litre de PharmarupiTa
p'iuprrum, in usum inslUuti i liniii
ilumbur^rnsis, Hambourg, 1781 ,
in-S*^ ; réimprimé en 1785. Aucun au-
tre écrit n'est «orti de sa plnme. Le«
ocrupations incessantes de la pratique
ne lui pfi mirent p.is de rninm.iniquer
au public les obsrrxalions qu'il dut
reunii pendant ciiKjnante - cinq ans
d une vie passée dans l.i rontempla-
limi des misrres liumtnirs || suc-
comba le 18 noN. iKiiO, re;;reitë
d^ s^s compatriotes, dont il a\ait la
confiance rt l'affection. J — 1» — î«.
JAC;t:i.LO.\. l oy. ALF.X4N-
niii J\(;iLLoK, I, 531.
J AliOT r.Rir.oinr.-MAiiiF) .
conventionnel, ne djns le r.«i;;ev. en
1751, était, a\anl 1781>, nn a\ocat
obscur de la petite *illr de Nantua.
S étant montre fort rliaud partisan de
la révolution, il fut nommé, en 1791,
l'un drs députes «iu drparienieni de
r Vin a l'assemblée ie^^islative , on il se
Gi peu remarquer. Il n'v prit qu'une
seule fois la parole dans la séance du
\ février 1792, à l'occasion d'un rap-
poitdefîorgueranqMi atail b'amr.avec
quelque raivon, l'usage abu«if que l'on
faisait du droit de pétition, .lagnt pré-
tendit que ce rapport n'était qu'une
diatrUte t outre le pruftir. ce qui lui
valut de Irès-vifs applaudiisemenls de
la part des tribune^. Nomme par le
nieine département depntr a la (',on-
venlion nationale, il fut un drs com-
missaires que celte assemblée envova
dan* le ^lont-hlanc peu de jours avant
le procès de Louis \N I, et il signa en
cette qualité la fameuse lettre datée de
Cliambérv le 1 \ janvier 1793 ( yoy.
(îKi.i.oinK, K\V|,70\ Revenu à la
%»nvention , il continua de s'y mon-
trer parmi les plus ardenJs révolution-
naires et fut nomme secrétaire , puis
membre du comité de sûreté générale.
L^é pa: liculirremenl avec Amar, il prit
comme lui une part trè^-ac live à toutes
les arrestations, a tontes les proscrip-
tions de cette horrible époque; mais
il eut toujours grand soin de s'effa-
cer et de se tenir caclié dans les dr-
58
JAG
constances critiques. Ce fut pour ce
caractère de faiblesse que Merlino ,
député du même département , le dé-
nonça à la tribune quelques jours après
la chute de Robespierre. « ...Jese-
« rais coupable, dit il, si je vous tai-
« sais une lâcheté d'autant j)lus con-
«< damnable qu'elle vient d'un homme
« qui est chargé de fonctions impor-
« tantes. Je vous dénonce Jaf!;ot qui ,
«« dans toutes les circonstances péril-
ce leuses de la législature et de la Con-
K vention, a eu le soin de se cacher...»
Il avait terni la même conduite dans
la nuit du 9 ati 10 thermidor, quoi-
qu'il fût du comité de sûreté générale.
« Je dois ajouter, dit encore Merlino,
« que dans ce moment mon dépaite-
« ment géniiî sous l'oppression la plus
« tyrannique des hébertistes et des ro-
n bespierriens soutenus par Jagot....
« Je demande qu'il soit remplacé au
« comité de sûreté générale »>
Cette dernière partie de la motion de
Merlino fut à l'instant décrétée , et
l'on expulsa Jagot du comité de sû-
reté générale en même temps" que
David et Lavicomterie. IMus tard on
produisit contre lui une lettre par la-
quelle il reprochait à un comité révo-
lutionnaire de ne pas indiquer la for-
tune des personnes qu'il faisait arrêter
comme suspectes; et il fut décrété d'ar-
restation sur l'accusation de Gouly,
qui prétendit qu'étant chargé de la
correspondance au comité de sûreté
générale , Jagot avait soustrait des pa-
piers à la charge de quelques scélcrals
du département de l'Ain qu'il prot0
geail. Amnistié par la loi de brumaire
anl^, il n'osa point retourner dans
son département, et il dénaîura sa for-
tune pour aller s'établir à ïoul , dans
la Meurthe, ou il est mort en janvier
183S, sans avoir été exilé en IHIG ,
son vote dans le procès de Louis \V|
ayant été considéré tel que celui de
Grégoire. M — D j.
JAH
J Aï J IV (Frédéric), médecin al-
lemand, né à Meiningen en 1766, prit
le grade de docteur à léna en 1787,
devint ensuite médecin de la cour du
duc de Saxe-Meiningen et médecin
des eaux de Liebenstein. Il mourut le
19 décembre 1813. Ses ouvrages
sont : l. Dissertatio inauguralisme-
dica de utero retroQcrso, léna, 1787.
C'est la thèse de l'auteur pour le doc-
torat. Elle a été réimprimée dans le
Delectus opusculorum de Frank ,
t. YI, p. 133. II. Essai d'un Ma-
nuel de médecine populaire , léna ,
1790,'in-8A(en allemand). III.
Clioix des médicaments les plus sa-
lutaires, ou Matière médicale pra-
tique (allemand), Erfuit, 1797-1800,
2 vol. in-8" ; bon ouvrage, utile pour
un praticien. Après une introduction
qui contient les généralités de la ma-
tière médicale , l'auteur traite de tous
les médicaments par ordre alphabéti-
que. Il a paru en 1807 une deuxième
édition de cet ouvrage qui est fort esti-
mé en Allemagne. On est étonné qu'il
n'ait pas été traduit en fiançais, ni en
aucune autre langue, que nous sachions.
Une troisième édition a paru en 1814;
enfin, en 1818, le docteur H. -A. Er-
hard en a publié une quatrième, corri-
gée et augmentée par lui, en 2 vol. in-
S'^. IV. Essai sur le système de
Z^roa'rt (allemand), léna, 1799, in-S"*.
V . Essai sur la coqueluche (allem.),
Riidolstadt, 1805, in-8". VI. Nou-
veau système des maladies des en-
Jiiiils d'après les principes de Hroam
et l'expérience (allem,), Uudolstadt,
1803 , in-8"; une troisième édition a
paru en 1 81 9. V 1 1 . (jlinitptr des nm-
ladies cUronitpies^ ^rfiiith, 18*-
1821 , 4 vol. in 8" (allem.). Cet ouvra-
ge a été continué, depuis le second
volume, par le docteur H.-A.*Erhard.
On trouve encore plusieurs articles de
Jahn dans différents journaux de mé-
decine allemands. G — T — r.
JAU
JAk'On (b>rf<-HK!«lll dt\ i na
àiê prinripaiit |>liiio«o{4m aileroanfl»
àe VéxuAe lir k^ni. na*|uit \t 'Ht ir-
▼ner 17.'»9a Wfllin. prtitr^iUe du
durhr tir Ma^debourç; Son (irir, pait-
vrr pa^«Mnrnlirr ruin^ , alla ie ^er
à Mer»*^ur;4, alors an posToir dr \'t-
irclcur OT Sa\p Nj «Irlff»**, qui «lura
II! .mien^a melirp \on
f relui fi nrût mon
!ir un ^.»ut Ji<î.-mI pmir l'rliiHr II le
lais«^ donc alUr il'ahonl 4 l'ernle gra-
tnilr du rlupilredr ^l^( -rlmnr^. De li.
le jeune I.(hii«- Menr i r itm! ' .m ;m m
naw luthérien «Ir H a
puide par une de r^^ mn
autquellen il dut <^e% Miere«, cl dn re^le
comptant plu« »ur la HroMdenre ou»nr
&a propre énergie que *ur va Koar»e à-
peu-presvide, el nur le-^ sec ou r% de *on
père, las de l'entretenir à ne rien faire.
lleiireu<>emeRt il arail un p^u de Toix,
et res liabitudes ivusirales rummii-
■es a tous les Allemand^ : il >«• mit
four vivre au nomUir d<* rr* «"mllants
chorùtC5 qui, dan* les \ilii \ n-
pne, vont chantant et qn- -ut
le* maisons et 1rs «"^li<es li Im reve-
nait ain»i de sept à linit ou ne».f ;;ias-
cl»en par semaine, arec lesquels d g'a-
chelatt du pain et des livres , formant
du reste un contraste parfait avec ses
nomades ami< et déployant autant d'ar-
dew pour l'étude, autant de constance
el de régulante, qu ils trouvaient de
charmes, eux . à la xie décousue, vaga-
bonde el licencieuse : un de ses pro-
fesseurs , Jani ( l'oy. ce nom , n-
*prrs\, remarqua sa honne conduite et
apporta quelipie soulagement à son
sort. Ayant ainsi alteinl dix -huit ans
et la fin de ses études décollé;:?. Jakob,
possesseur d'une somme de six ihalers.
ne balança point à suivre les coiirs des
facultés (1777r. U lui fallait du cou-
rage, lîn an encore il vécut au jour le
jour et d'expédients. Knûn des leçons
particulières et une place as séminaire
JAl 59
le mirent an-^les^as àfê prCHMT* be*
«•ins. On crotâit qu'il se vouerait à
la carrière pasmrjlr , el la tlir(»lo;;ie
sembla d'abord son rtiide île pretii"
leclion; mais in»en%iblrmrnl la philo-
logie, l'érudition proionde, balancèrent
les attraits dr la théologie, et outre le»
leçons de .Semler el de N<r4»elt , se»
professeurs de critique biblique et de
do^ie , d allait entendre ceilns de
Vhtiix sur 1 1 lu*' cl celle» de
Irapp s^l l'étlitcalion, \i-
saiit a se rcudo •• au
pfoirssnral ri au 1 «)'ic,
et dispoM" a s'ai' .'nr'i . ■ .1 r : '••
dans l'une ri l'auir < .• . r \.i .1,
l'hrmorait de <4>n anilié; mais c est
Semler qui eterça sur lui la plus grande
intlurnce , ou plutôt c'est avec le nenic
d« Semler que le sien svm|>alhisail le
niieoi : c'nt à l'école de celui-ci el
sous se> auspices qur se développèrent
en lui celle indr|»enilaiicr d'esprit ,
cet amour du vrai , du positif, du
précis . crtte anlipalliie |m>ui le mys-
ticisme , pour les solutions liasaideu-
ses qui furent comme U* carliel de
son eri»ei^neinrnl ri de ses ouvra-
ges. Kn 17MI. il débuta dans la car-
rière srliolislique en remplissant par
inlérim, nevfniots durant, a l'orcasion
du départ de Jani |mur KiJeben, les
fonctions i\e co-recleur du ^vranase lu-
thérien. <>and l'arrivée ilu recteur
Sflimietler raffiaiichit de celle charge
f17K|), il fut nommé adjoint de la
chaire de troisième, pvs, en l7H"i, il
obtint le litul: lî île sixième qu'il cu-
mulait avec le poste d'ancien f^f/iiur)
du séminaire. Désormais a l'abri d in-
quiet uiies matérielles et a même de se
livrer à sa voc.Tri.»o. il se mit avec son
atni Koth à travailler avec ardeur sur
les philosophes anciens et modernes,
tnquatreans, de i782à 178.>, illut
dans leur laiif^uc, d'une pari , Ions les
philosophes latins el grecs el quelquc»-
nns de leurs commentateurs, de Taotre
6o
JAK
JAK
tous les ouvrages philosophiques re-
marquables écrits en anglais, en fran-
çais, en italien, en allemand; il les lut
la plume à la main, et remplit ses car-
tons d'une prodigieuse quantité d'a-
nalyses, d'extraits ou de réilexions soit
sur les passages, soit sur les sujets qui
s'offraient à lui : les histoires de la
philosophie , au reste peu nombreuses
à cette époque, passèrent aussi soi|| ses
yeux, avec les articles biographiques
des philosophes célèbres, t^^n il en
arriva aux contemporains. L'étoile de
Kant venait de se lever sur l'hori-
zon. Jakob fut un des premiers à la
saluer de ses acclamations. On ne peut
imaginer quel eflet produisuent sur lui
la Critique de l<i raison pure récem-
ment sortie des presses de Kiga (1781),
les Prolégomènes de métaphysi-
que et la Base d'une metaphycique
de la morale qui l'avaient suivie
(1783). Plein d'enthousiasme pour le
miraculeux professeur de Kœnigsberg,
il crut avoir enfin trouvé ce que depuis
long-temps il avait en vain cherché, du
certain, de l'inattaquable. Kant rayait
beaucoup dans les solutions et les pré-
tentions de la métaphysique ancienne,
mais il ne rayait que des erreurs; il
renvoyait les chimères au ijéant, il n'a-
néantissait point le vrai : il enrichissait
la métaphysique en lui faisant re-
jeter des richesses imaginaires, il affer-
missait le champ de la science en le ré-
trécissant, (^e qu'il laissait debout dé-
fiait le douterai! moins selon Jakob.
Kri effet, pour un esprit de la trempe
du siefi, mélhodifjiie, scrutateur et po-
sitif, mais peu flexible et peu apte aux
svnthèses , le criticismc satisfaisait à
tout. Il ne fallait au svstème pour réu-
nir l'approbation universelle qu'un peu
plus d'élégance, un peu plus d'art d'ex-
position. L'aridité, l'obscurité de Kant
rebutaient le vulgaire des lecteurs. Sur
d'esquiver ces défauts en écrivant com-
me en s'expriroant de vive voix, Jakob
résolut dès-lors de se faire le vulga-
risateur de la philosophie nouvelle.
Son premier soin fut de prendre le
grade de maître ès-philosophie (mai
1785) ; puis il «jommença des lectures
qui d'abord roulèrent alternativement
sur la philologie et la philosophie ,
mais où bientôt il s'occupa*xclusive-
ment' de la dernière de ces deux scien-
ces. Le nombre des auditeurs qui
se pressaient autour de lui dépassa
tout ce qu'on avait vu jusqu'alors en
Allemagne. La précision, la netteté,
la méthode qu'il apportait dans l'ex-
posé des principes et qui les rendaient
aisés à saisir étaient pour plus de moi-
tié dans ce succès, et nul doute qu'à
Jakob ne revienne l'honneur d'avoir
popularisé la doctrine de Kant à Halle.
Le professeur de philosophie à la fa-
culté, J.-Aug. Kberhardt , en fut ma-
lade de désespoir : il détestait le kan-
tisme, et jusqu'à cette époque il avait
joui de quelque renom : l'éclat avec le-
quel débutait son jeune rival blessait sa
vanité; le succès du criticisme révoltait
ses convictions. Il fallut pourtant qu'il
bût le calice jusqu'à la lie : chaque jour
lui ravissait des auditeurs, et non con-
tents de déserter sa salle, les traîtres
passaient à l'ennemi ; ils allaient étu-
dier Kant et applaudir son interprète.
Chaque jour aussi Jakob agrandissait
le cercle étroit d'abord de ses lectures;
et de la logique son premier objet , il
passa aux éléments delà métaphysique,
à la psychologie empirique, à la morale,
au droit naturel , trouvant toujours
moyen de rattacher ces sciences aux
principes féconds posés par Kant ,
et dont au reste cet illustre penseur
avait lui-même fait application à la mé-
taphysique et à la moiale. Au bout de
deux ans, l'université de Halle l'admit,
mais sans titulariat, à la chaire de phi-
losophie de la faculté, qu'il cumula bien-
trk avec sa place de prédicateur à la
maison de correction de Halle. I^oin
JAR
JAR
6i
iJe M rjlriilir aprrs ce pronirr pai, il
irJouhIa «l'acli\ilé : peuseur prufoiid,
IMfirur luiiile , il lrou\ait vans crv>r
d«o |iuiiils (le >ur, (Je> ai^umeiilN, d»
rj|i|iorls iiou\ejii\; la Joriniir dans sa
IxHiilir dr\ciiail plu> aUtJ^jiilr, plu%
iircM:>lible; rlr;;jiit el rapide écrivain,
il la rt^pandait au-delà des limiles de
l'uni^erkile. Ses re>urae» et se» manurU
di* lo^i()ue et inelaplnsuiue , de p.v-
rliolu^if, de morale , de «Iroil natuirl,
elaieiil adupln dan» le» universités et
dans les folIr^f>. inrrae par des admi-
iii>traliuiis ralliul-(|i»rs , el avaient 1rs
liuniieurs de la lrlln))rr^^uln et de la
cuiilte-fa^un. l/arjiiwiiiir de Lexie le
(ouionnait ilTSU) , celle de llarlem
lui décernait un acrr»Mt ^ITUl . Sa
Doctrine phiUnuftlnt^ue. du lirait
(1795\ mise au juur a\ant l'ouvrage
de.kant sur le mrme sujet, a>ail piuu-
\e qu'il était capable d*ou>rir le pre-
mier le champ d'une science et d'en
parcourir toute Irlendue. Son ^raiid
ouvrage de la lu'li^iun uuix'rrsfUt ,
bientôt sui\i des priiuiftrs de lu sa-
gesse et de lu rie humaine ^1802 ,
mil le sceau a >a réputation. Au iiii-
lieu de ces succès il a\ail Piiftti rie
noiniur en tilie a la chaire <'
phie de Halle , aptes a\oir < .•
de (liessen ITîM . (^pendaut le s>s-
trrue auquel JuLub >'elait \oue a\ec
tant de zèle était dqà depa^M*. Comme
toutes les impulsion» puissantes, l'ap-
parition de la Critique de la raison
puie a\ait été le si;;nal d'un immense
essor dans tout le monde iulellecluel ;
et, roinme après toutes le> révolutions
QUI donnent le l)ranle aux maxses, il
> était bicnlôt pose deux partis, le
mou\emenl et la rcsi>tanre. Tandis
que quelques intellij;eiM:e>, s'attarhant
rigoureusement, ou peu s'en faut, à la
lettre de kaiit, juraient toujours par
ce philosophe , rej;ardaient ses livres
comme une bible, ses formules comme
sacramentelles, et ne voulaient ni plu*
ni moin» nue lui ; d'autre» plu» hardie»
ou moin» lacileN a contenter restaient
en deçà ou »'j\eniuraieiit au-delà, ^ra-
citant \ei» le scrpiiriMue ou aspirant
au »ceplicisme . quelques une» même
>'elanraienl ùan* le-» values relions du
mysticisme ou tendaient a ieab»orber
toutes le» antimonie» dans un s\ncrë-
tisne qui n'est pas loin du panlliei>me.
Jakob était des premier». Il a\ait eu
faim et («iif de certitude, lon^ lerop\«a
barque a>ait ele a la dérive, jouet des
vents et des systèmes; enfin il avait jeté
Panrre dans Ir^ eaux profondes de
Kant : il voulait rester en place. 11
s'indi^nait qu'on prétendit ramener la
phil<»ophie sur le sable mouvant, ^lai»
quelle force au mitnde eut comprime ce
lessoit dcN intelligences m vij;oureu»e-
ment tendu par kant C'est comme »i
l'on eût, apie-i le triomphe de Luther,
demandé que le protes'.anlisme ne con-
tint ^mais deux nuance» dans son »ein.
Déjà Kevnoldel Ueck avaient, ciiacuii
a sa fa^on , modifie le critici>mc qu'il»
prétendaient |ji>ser intact dans >nn es-
sence; Fichie transformait le subjectif
de kant en moi et l'objerlif en non-
moi , et , tirant le second du premier,
neo-seiileiucnt elabhvsait un idéalisme
à la place de la ^henomenalitr , mais
dans >on ideali»nie ne niftiait en relief
qu'une de^ face» de sa substance;
Schellin;^ préludait a l'idéalisme Irjii:»-
cendenlal, a la doctrine de l'absolu en
publiant ses Idées sur une fthiloso-
phie de liP nature (179'>), en élabo-
rant son ûmr du monde , dont il
émettait de|a de vive voix les proposi-
tions fondamentale». Les deux der-
niers surtout vov aient déjà se «rouper
autour d'eux nombre de disciples : ils
avaient leurs chaires et leurs jour-
naux, ils devaient le Ion en maîtres, et,
oppuse> entre eux sur des points hni-
damenlaux, n'en étaient pas moins unis
contre les fidèles adeptes de kant, trai-
tant leurs principe» comme une doc-
63
JAR
trine surannée, et eux comme des par-
tisans de vieilles idées. Le cnlicisnîe,
débordé par ces nouveaux venus, ne pou-
vait pourtant se laisser évincer sans dé-
fense : les kantistes purs se déterminè-
rent à fonder un journal pour «uerroyer
contre leurs adversaires : Jakob en
fut le rédacteur en chef. Mais l'entre-
prise ne tarda point à devenir onéreuse.
Jakob d'abord s'était chargé des frais
(1*795); le libraire Kleefeld se substi-
tua ensuite à lui pendant deux ans
(1796 et 1797) et le mode de publi-
cation changea en même temps (aux
numéros hebdomadaires d'une demi-
feuille in-4'^ furent substitués des ca-
hiers trimestriels). Ni l'un ni l'autre
mode n'étaient ce qu'il fallait pour eni-
pêctier l'oubli et la fati|^ue, pour te-
nir les esprits en éveil et en ^oùt. I^
rédaction ne fut pas non plus à l'abri
de reproches : la partialité, l'acrimo-
nie prenaient souvent la place de la
justice et de l'urbanité, que les savants
ne devraient jamais bannir de leur
polémique : départ et d'autre, l'irrita-
tion s'en mêla : à l'arDjumentation tran-
chante, étroite et raide des kantistes,
les amis des Visbek , des Schelli»^,
répondirent par des épif^rammes plutôt
grossières que spirituelles : les Heures
surtout, quoique rédi<2;ées sous les aus-
pices de deux grands hommes, Schil-
ler cl Gœlhe, se signalèrent dans cet
échanj^e de personnalités et de sar-
casmes, le plus souvent dardés sur Ja-
kob, bien qu'ordinairement*les articles
qui mettaient ses anta^^onistes en fu-
reur, notamment les analyses des ou-
vrages d'Ilh, de Reil, de Fichte, de
Visbek , fussent de ses collaborateurs
et non de lui. Il n'en avait pas moins
un peu de tort de laisser les collabora-
teurs prendre un ton trop haut et trop
acerbe : les purs kantistes d'ailleurs
avaient mauvaise f^rare de vouloir immo-
biliser la science, et, quand l'ebn était
donné, de l'eachaîner parce qu'ils nt
JAK
pouvaient le suivre. Leur cause eût-
elle été la bonne, elle n'eut pas été la
plus populaire, il eut fallu pour en balan-
cer l'impopularité un o;énie transcen-
dant. Mais c'est aux hommes du mou-
vement qu'appartenait alors le }^énie, et
non à ceux delà résistance. Après trois
ans de guerre, Jakob fut donc harassé
de la lutte; et, désespérant du criticis-
me, un peu chagrin de le voir déserté
du public qui courait aux novateurs,
ne voulant ni soutenir ni abandonner
l'cdince qui tombait, de la philosophie
pure il se réfugia dans les applications
de la philosophie, se réservant de les
subordonner autant que possible aux
principes très-légèrement modifiés du
maître et non à ceux des écoles récen-
tes. C'est en 1798 que commence cette
seconde période de sa vie scientifique.
11 n'arrivait point sans préparation à
ces nouvelles études: depuis long temps
des écrits sur la législation, l'économie
politique, les finances et la science ad-
ministrative, avaient été au nombre de
ses éludes favorites; et souvent à la
suite de ses méditations sur la morale
et la métaphysique de la morale, il ar-
rivait au droit, à sa loi : il avait même,
nous L'avons dit, entamé ce sujet avant
Kant. Lors donc qu'en 1800 il com-
mença des lectures publiques sur l'é-
conomie sociale, il vit les élèves affluer
derechef à son cours, et avec les élè-
ves des hommes Aw monde, un vérita-
ble public. L'année suivante (1801),
il fut élu pro-recteur de l'université ;
et par une exception sans exemple jus-
que-là il fut prorogé dans ce poste
jusqu'en 180i. Déjà il avait employé
son activité administrative, soit comme
membre du .sénat académique, soit en
s'occupant des finances de la faculté de
philosophie. Son pro-rectorat de trois
ans fui signalé par deux grands évé-
nements. L'université de Halle était
fort pauvre et fort gênée: sor la demande
de Jakob, le roi de Prusse lui accorda,
JAK
JAK
63
avec MilHMi provenant de la Mi>t«
lies bien» ^ jéMiitc» de ia l'rujk»e |»o-
lnn:)txr . une aHgmenUiion de liuii
I! > par an que des au«;inf'iit)-
I iiirlle* |K>rlèrenl à quinze
mile. 1^ rèKleoicnl de l'univerMlé
olfrait beavccMip de défauts : .laLnb ,
sur i'invitatioii du culimet, en éla-
bora un autre qui iatisfai^ait aui con-
ditions voulues , et qui , bientul miu-
ini> au ministre Massow , fut ^anr-
tionne pai l'aiiprobalion royale. Il
s'appliqua ju.vm à fatre rr^>er m fait
beaucoup «I aluis que lu leiinr^s*» »|pi
academio ' Mnmr de:( pnvi-
iè^t». l iK vlrifie rrpnma
les de>ordie» JuisqueU plusietii^ ^e
lieraient ; plus d'elr>e« qui v?n^vent
peidre leur temps rt rar;;enl «ir leurs
parents, sans mcltre les pirtU dan«
les salle:> de la faculté : stirtoal il
ne voulut plus entendie parler de det-
tes d'eludiaut>. (^es ioe>ure5, pour les*
quelles il fallut de la ferrorir rt du rmi*
ra;;e, escilereiit dr> inetoiileiilrmrnis.
A \\ longue, la nia|onle de^ rlr^es
lui rendit plu^ de justice , et i^ot bien
remarquer que, daii> les orfa*i«»n> ou
les eVMdaiiIs étaient lèses et a>a'cnt
raison, il prenait leur défense avec vi-
gueur et dignité, sans reculer d'un pas;
mais Timprcssion première était inef-
façable. On l'estimait et le redoutait ;
on ne l'aioiait pas. JaLub était rede-
venu, simple professeur , quand la
guerre avec la Fiance ecbta m 1H(^H.
I.a bataille d'Iena ouvrit K*s {»oites de
halle, l'ius heureuse que le reste de la
ville, la maison de JaLob etliappa au
pillai;e et à la dévastation ; le ;;f néral
Dupont Y logeait : mais le court séjour
de ce protecteur lui conta en un clin-
d'œil toutes ses provision-, et cinq
cents thalers. Pour a)[obie de maux,
runi\ersité de Halle avait déplu à
Napoléon : en vain Berthier «l'etait
porte garant des bonries iulenâions d*
l'empereur. Laitier conquérant parut
en personne à I Lille le 19 oct : et
ses brèves r>
durent fjirr ) ,
de l'univer^iie un sim tre dénoue-
nieiiî. •• Vh' 1.1 ttii-nl,.' ,• ,.st votre
'" . e sait se
1-» I - I ' •i'' : "Vo-
tre unoersité est belliqueuse ! vos étu-
diants ont voulu former un regmenl
de housards. ■ Kl enfin, comme pour
passer l'éimn^e ior tout ce que la
Ville avait souffert à l'enirée des Fran-
çais : " C'est fait ! - di^ne pendant
du mot qu'il avait prononre à jena :
' (l'est la ;;uerre! - Ja\ob était de la
drputation, et jufjea bien que «e* mo-
nasvllables, ces coup* de boutoir,
riaient des indices plus sûrs de fa
pensée de Napoléon , que la {^ràce
a\rr Uqurllr il prit leur pétition, et
promit d*\ répondre. Kn efTei, la ré-
ponse fut ordre à l'université de se re-
garder comme dissoute , et aux étu-
diants de quitter Malle <
quatre heures. |^ sénat >
lit un inutile rïïort pour flrrl..; Napo-
léon : il en fut pour cent louis donnés
* ^ille, afin d'ob-
• • • ' "t répondit bien-
tôt par cette note laconique : « Sa Ma-
jesté n'entend pas que l'université se
rétablisse.»» Klle se rétablit icpendant,
mats «ous Jér(^me, et après l'organisa-
tion du rovaume de ^^ rstphalie. Ja-
lob n'eût point voulu alors ^ occuper
nn emploi. Les profes.seurs s'étaient
eloi;;nes la [ilupart. Il suivit leur exem-
ple, et après avoir fait faire, par Schiilz
et Niemevrr, des démarches pour une
des chaires académiques de llerlin , il
accepta celle d'économie politi(jue que
Km oITrit l'université russe de Kliar-
kow (1807), et qu'il avait dedai;;iiée
deux ans plus tôt. Bien que ses appoin-
tements fussent satisfaisants (di.\ raille
roubles) et qu'il pût se prometire du loi-
.^ir dans ce poste, il ne s'v rendit que
comme a une terre d'exil. La nécessité
64
JAK
de faire son cours en latin, puisqu'il ne
savait pas le russeet que ses auditeurs ne
savaient pasTallemand ; l'inimaf^inable
ignorance de la population russe, le
spectacle d'une société de dominateurs
et de serfs aussi vicieux les uns que
les autres, l'esprit mesquin et tracas-
sier de presque tous ses collèj^ues ,
qui le ialousaieiit parce que le comte
Potorli , curateur de l'université, lui
marquait plus d'éj^ards qu'à la plupart
des professeurs, enGn le mépris et les
préjun;és qu'affectent les Russes du
commun pour les Allemands, dont le
nom chez eux est une injure, lui ren-
daient le séjour de Kliarkow pénible.
Il arriva même qu'il se prit de que-
relle avec le comte Po^oçki à l'oc-
casion de son ami Rotli qu'il souhaitait
avoir pour collègue à Kharkow, et en
raison des lenteurs du comte à remplir
les formalités nécessaires. Aux avis de
Jakob qui s'évertuait à le stimuler, il
répondit qu'il n'avait que faire d'un
vice-civaleur, et qu'un professeur, que
toute une université même pouvaient en
Russie être brisés d'un souffle : Ja-
kob répliqua en offrant sa démission.
Cette fermeté calma les transports du
j;rand seip;neur, et l'harmonie renaquit.
Cependant Jakob était toujours mé-
content de se sentir au fond d'un dé-
sert, de faire en vain retentir sa voix
parmi des Cosaques, de ne plus pnrli-
cipcr au mouvement intellectuel, de
ri;;norer en quelque sorte, éloigné qu'il
était du foyer et du centre des lumiè-
res. Il tachait de se distraire en ap-
prenant le russe, qu'au bout de peu de
temps il posséda au point de causer en
cette lan|;ue, en revoyant la nouvelle
édition de ses Principes d'économie
nationale, en publiant se^, Principes
de législation pénale , enfin en rédi-
geant à l'usar^e des gymnases russes
des manuels de logique, de morale, de
métaphysique, de grammaire générale,
d'esthétique , de droit naturel et d'é-
JAK
conomie politique. L'éducation en
Russie est ambitieuse et encyclopédi-
que : on veut, on croit possible que les
élèves d'écoles secondaires aient des
notions de toutes les sciences. Mais
les professeurs et les livres à l'aide
desquels pouvait se réaliser le pro-
gramme étaient rares. Jakob voulut
au moins combler la seconde lacune,
et , à cet effet , il présenta au mi-
nistre de l'instruction publique un
plan , faisant sentir qu'il fallait en
même temps des manuels à l'usage des
élèves et des commentaires à l'usage
des maîtres, et offrant de se charger
des uns et des autres. On l'approuva,
et il reçut ordre de se mettre immé-
diatement à l'ouvrage (1808) : on lui
expédia même de St-Pétersbourg un
Russe , Ourpenski , lequel aurait pour
fonction de traduire en russe à mesure
qu'il écrirait en allemand. Telle fut la
rapidité avec laquelle il y procéda,
qu'en moins de trois ans et au miliiru
des travaux de sa chaire, de l'élude du
russe, et d'autres occupations encore,
il acheva les sept manuels et trois des
sept commentaires. Il trouvait encore
moyen pendant ce temps de remplir les
fonctions d'inspecteur des écoles de la
couronne, et celles de membre du co-
mité des écoles. En 1808, lorsque les
assignations de la banque impériale
tombèrent tout à coup, il jeta rapide-
ment ses réflexions dans une brochure
que peu de personnes pouvaient com-
prendre, et que Potoçki ne lui conseil-
lait point d'imprimer, répétant: « Nos
finamciers sont des imbécillcs, ils n'y
entendront rien , vous en serez pour
vos frais. » Jakob alors fit parvenir di-
rectement, par son ami Wiirst, son
opuscule à l'empereur Alexandre, qui
le communiqua au ministre de l'in-
struction publique, Spcranski. Ce der-
nier en fit un rapport favorable à
l'empcr^ir ; et au mois de septembre
1809 une estafette vint trouver Jakob i
JAk
JAK
NoaTeaa-Tcherkasl, dont il inspectait
\ts Croies aver son auii Stoiko^itrh, rt
lui donna l'ordre df vr rrndre >ans delui
à Saint iVlcrsbour;;. Sj>rranski If rrçut
lrr*-birn , lui 6t dncrjf^ qiic<>tron* ft
fut émerveille de sr* rr[M»n>c*. Jalob,
s'il faut l'en croire sur ce [>oinl, devina
à peu de chu^e pro la Mimine d'a^^i-
enalioni mi^c en rirrulalion par la
banque, romme 5'il eût eu le^ procr*-
verbaiu de cette adinini^lraiion : celte
suinine montait à plu< de quatre cent
ciuquante milliont. l)es-lors il fut
tre^-bien dans l'esprit de Speraosli,
et Alexandre , sur sj rrrommandatron,
lui conûa plu>ieurN tra>ati\ important).
Iiientc\t il fut nommr membre du co-
mité de Gnanrrs, destine a 1 ele\er le cre^
dit : deux auties membre» y siégeaient
a%ec lui , \N urst et lïalou^ianski
( 1809 ). Trois seroaineN après , il
rédigea le MrniiHrr en réponse
aux questions lie Sprrunski , mé-
moire ou, après avoir liacé le tabieaa
des fautes commises par la pfété-
dcntc adminiNlration , il exposait les
piiiicipes j;nirrau\ il'apies lesqueU le
comité opereiait, pour lrllau^ser j^ra-
durllemeiit les valeurs decreditées et
ré;;ulariser le s> sterne monétaire de la
Russie. Pour les détails, il les remet-
tait au temps ou le ministre aurait
fourni au comité de plus amples do-
cuments. Alexandre témoigna sa sa-
tisfaction à l'auteur, en le nommant
chevalier de Sainte-Anne, et enjoi-
gnant au don d'une ba^iie en bril-
lants l'assurance d'une place dans
la commission législative et d'un em-
ploi au ministère des finances. Sur cet
espoir , JaLob manda sa famille de
Kharkow à Saint-Pétersbourg. Les
promesses de l'empereur ne tardèrent
peint à se réaliser; mais auparavant il
eut le cha<îrin de voir, par suite d'une
révolution miiiisiérielle qui porta Gou-
riev aux finances, avorter le s>stème
qu'il regardait comme le meilleur, et
qu'appovait Speranski. Des deux «>«-
téme^ en prrsrnrr, celui- de Speranski
et celui de ( »o ji u-v , rn apparence c'est
bien le premiei «jui fut adopté ; main
c'est (touiiet qui eut mivsion de le
mettre en pratique, et l'on ne s'éton-
ne pav qu'il s'y soit pris de manière
à l'emprclier de produire des rrsultals.
Jakob re^^ardait cet çchec comme per-
soniirl : dégoûté des cabales et de l'Ii^-
pocnsie de la cour, il songeait à .se
rendre a N ilna où l'université lui of-
fi ait une de ses chaires académiques,
Speranski le retint. (^ dernier rtait le
chef de la commission législative nou
tellement instituée pour donner des
codes au« liasses et divisée en cinq
sections. Il Bt nommer Jakob chef de
la section criminelle. I.es travaux d'a-
bord marchèrent a merveille. Speranski
donnait carte blanche au philosophe
qui, familiarisé d'avance avec les prin-
cipes (généraux du droit et avec les
lr " spéciales de r.Mlema;;oe,
d( \ lire, de l'Italie, nous ne
diM>n>p4»de la France, car il professait
pour les codes napoléoniens un dédain
e\aî;éré, n'avait qu'à passer en revue
les lois criminelles de la Uussie et les
ouv rafles écrits pour les développer et
les éclaircir. Jakob, après ces études
premières, dressa comme base du tra-
vail définitif trois traites en forme de
grands tableaux, présentant :1e premier
les principes de droit d'après jesquels
il juj;erait les délits et graduerait les
châtiments, le second les crimes oui
emporteraient la mort, le troisième les
autres crimes avec les peines corres-
pondantes; puis, approuvé complète-
ment par l'ex-ministre, il rédi;^ea en
deux ans un code dont la mansué-
tude n'excluait point la sévérité , et
qui décelait, avec les méditations du
savant, l'expérience de l'homme d'é-
tat, nuis qui froissait trop les habi-
tudes et les préjugés russes. C'était la
faute de Speranski, dont l'esprit éle?é
Lxvm.
66
JAK
JAK
méprisait les :nénaji;ements. Malheu-
reusement pour Jakob, Speranski ne
put (léfeiulre ses idées jusqu'au bout.
L'aristocratie russe le haïssait, la plèbe
et la.cla.sse nioycniie ne Taiinaicnt pas;
on le regardait comme le repré.--entant
des idées étranj^^ères, et les idées étran-
gères étaient considérées comme la
cause de la dépréciation du papier, de la
gêne du commerce, de la famine, de la
guerre qu'on allait avoir avec Napoléon,
Le pauvre Speranski ne put tenir con-
tre cette explosion de la nationalité
russe qu'il fallait bien contenter au
moment d'une lui le qu'on voulait ren-
dre nationale (1811). Uelé<;ué à Nij-
ni-Novgorod , il ne recouvra la faveur
d'Alexandre qu'en 1816. Pour Jakob
on le traitait mieux, mais on eût aussi
voulu l'éloigner. On lui proposa la di-
rection supérieure des douanes de
Radzivllov : c'était une de ces places
où cinq ans sufGsent pour faire fortune
pour peu qu'on sache fermer les yeux,
mais où, si l'on n'a pas cette complai-
sance, on court risque d'apoplexie ou
de mort subite. A son refus , on se ra-
battit sur une chaire au couvent de
Saint- Alexandre-Nevski ; ce n'était
point une chaire d'enseignement su-
périeur, il la rejeta. Il le.sta donc dans
la capitale comme chef de la section
criminelle. Mais évidemment ses tra-
vaux précédents étaient h appés de mjl-
lité*: son plan de code était le contre-
pied de l'esprit russe , et cet esprit
depuis la guerre de France était deve-
nu plus superstitieux et plus étroit que
jamais : on vo}ait dans Napoléon le
fléau de Dieu levé contre les péchés de
la Uussie, et le retour à l'ancienne sim-
plicité, à l'ancienne foi pouvait seul dés-
armer le courroux de Dieu. Les grands
étaient aussi engoués de ces idées que
le peuple. On conçoit que ce n'est
point à de telles dispositions que de-
vaient plaire les principes de Ikccaria
et de î'eucrbach. Novoslizow se saisit
du ministère : la commission de légis-
lation eut pour chef le prince La-
poukin : un favori du prince fut chargé
de recevoir les projets des chefs de sec-
tion et s'empara bientôt de tout le
travail : le bouleversement du person-
nel facilita cet accaparement d'attribu-
tions. Bientôt pourtant il fléchit sous
un faix que personne n'eût pu porter,
et pour le criminel au moins il appela
Jakob à l'aide, lui prodigyant les flat-
teries et les promesses. Sans trop le
croire Jakob se mit à l'œuvre : il fut sti-
pulé qu'il refondrait son plan de code ,
l'harmoniserait avec les lois et coutu-
mes russes, et que, après l'avoir sou-
mis à la révision du favori, il aurait en-
core droit d'examiner les changements
faits à son travail avant qu'il fût ques-
tion d'en soumettre l'ensemble au con-
seil impérial. Mais l'expéditif mosco-
vite trouvait cette marche bien longue;
le plus souvent donc 11 négligea de
renvoyer à Jakob les passages qu'il
amendait, intercalait ou défigurait par
des suppressions; et soumettant au jour
le jour, et chapitre par chapitre, le re-
cueil législatif au conseil impérial, il
rendait toute modification ultérieure
impraticable. Le code, ains ibaclé, ne
pouvait manquer d'oiirir des fautes et
des lacunes. Jakob perdit l'envie et le
courage de s'en mêler, et n'y travailla
plus que matériellement, sans illusion
et sans espoir de faire le bien ou de s'il-
luslrer. En 1816, la commission fut
réor^j^anisée ; ainsi que \\ lirst et Ba-
lougianski , Jakob perdit le titre de
chef de section , sous prétexte qu'il
avait trop d'occupation au ministère
des finances pour remplir ses fonctions
à la commission ; mais il fut nommé di-
recteur de la rédaction des lois crimi-
nelles. Las depuis long-temps de cette
fausse position, las d'être inutile et infé-
rieur, Jakob ré.sôlul de dire adieu à la
Russie et de revoir sa patrie délivrée
enfin du sabre de Napoléon. 11 notifia
JAK
sa dAfrminalinn 3uinii)i>-lrr(bnstr nid
weni on «|ufl(jur> artlclc^ ciu'il \etiait
de |Mi|.i r! (onirf la prohiKiliui i!c4
iin|><.t ijtioii^ m Rui^irratioirnl la plus
j;i.iinlr «rnsation ronlrr If* faiiletir*
miMie de et s>*lfmf , a«imi» ileptti»
iHll par le raliinft russe el prorogé
il'......-.-.-, .• ., .•
I..- ru , ,
■' 1 lie le rcleiiii |-
I' '>ns : rien ne pm I
l'as ifirme la prr*perti\r du posir l»nl
lanl lie ron^ul-^^neral île Hii*^ie dan>
la Pm^M" polonaise , ce qui pourtant
l'eûl rapprtM-lir île sa Yille natale et
replacé au miHen des Allemands, f^
pleine que ces regrets étaient sincères,
c'est que l'emperenr, en lui accordant
•lans les termes I
I II conféra la nnl
II < . .c ixn^ déconseiller rt une peu
M<'i! innuelle. .laLob rennl à ll:ille, où
M ire l'attendait el on il repi it la %ie
1 1 Me et unifotiue dn «j\aut. Ses
lectures .i celte le de «a \ie
ne roulèrent que inces adm:-
nislrati\es et politiques. Il ne retrou-
va point l'aflluence el les succès de
ilH^ : la voit iki vieillard ne fit pin,
écho , el puis on était bien familia-
risé en Allemagne aver les objets dn
nouveau cours. 1^ solidité, l'ordre,
là piéci-ion s*v retrouvaient toujours,
mais la noureaiité. l'erlal, la M*e n'î
étaient plus. D'ailleurs h jeunesse se
souvenait du ri;;ide pro-recteur de
ISOI. Elle ne s'en souvint pas seule.
Les troubles de la Vrtitoniu, en 1S17,
lui firent décerner par le ministère
prussien le titre de rominissaire rora!
pour la répression des pertarbateui-s,
et pe;i après il échangea ce titre contre
le pro-rectorat. Sa vigilance, rautorilë
de son cararlère ramenèrent bientôt le
bon ordre. C'est encore à lui qiie re-
courut le oouvernement en 18:2i, lor-;-
qne les menées de h fhirsrhrnsrhaft
devinrent voisines du complot et de la
JAK 67
réM Ile : y.w Mil ordre ro\al du cabinet,
Jalo!» re^'it alors pour troi« ans la
di'^niîë deco-rerteur. Il eut d'abord à
\aincre de ;:rand^ obstacles, maix tous
pustiiie s'aplanirent devant son san*-
ff' ' \\*rc et sa prudence. Fré-
il' me II! recoinpfTiNa ses
par la d. le l'Ai^le-
. et en ml ^a no-
Kenlre dait-» U vie privée , il
i'4il par or»lre .1 1 roi don nou-
\eaii statut po m I de Iliîle,
lorsqu'une crise ■ I enleva le
'il lu.llet 1H-27. :i l^ucb.ta-dl où il
s'était rendu pour prendre leÉ eaiix.-^
On a va ce qu'était Jakdli comme
homme et comme penseur : le carac-
tère reflétait le :;enie. et le pénie le
• e : rectitude dans les idées et
•' dans la conduite, ténarilé i\:kns
le. v.xiémes è) constance d.ii' ^ -
sions piiM^, clarté dmts 1 1
scientifique el fran
lion^ t!'^ '1 ^ ie, • _ •■ i . : .•
b ires des principes et in-
\< . : : ti»ujprimer le< aberrations
lie b jennesse ; il olfre un l>pe où tout
r»Ven rapport el toul en relief, comme
la médaille qui sort du balancier. Du
reste peu d'ori,;inalité, point de flexi-
bilité, mais de l'ap'itude i tout com-
prendre, à tout souineltrc à la forme,
a re^run'-r rt commenter tout. Comme
I • romine écrivain, il a icn-
d v> éminents : Si' ;'récis et
manuels, ses tradtictions, ses ouvra{;es
de recfieiciies nnl tous été utiles et
peuvent l'être enrore; tous brillent par
des qualités qui leur sont propres.
Comme Jarisconsultc , il .s'écarte xm
peVde Kant.et tire une li^ne de dé-
maicntion moins profonde que lui en-
tre (a lé-^alité el la moralité. Cirume
criminaliste, il appartient à l'école de
Feuei barh; et.qiel que soit le juj^ement
que l'on '>or te sur rà-propos du code
dfMit il voiilait rrratHier la Russie , on
ne peut mcconnaitre que pour l'ap-
5.
68
JAK
préciatlon des délits ou crimes, de même
que pour rapplicalion des peines,!! n'of-
fre beaur.o'jp de traits curieux. Comme
économiste, il fut un des premiers à
distino;uer l'économie sociale d'avec
l'économie politique : ses principes
sont sains et larges ; en orénéral il im-
prouve les systèmes restrictifs : il a
traité de main de maître les questions
de papier-monnaie, non pour la Rus-
sie seule, mais pour la Prusse ou plutôt
pour tous les pa\s : à côté de chaque
idée théorique , il avait un événement,
un fait à mettre en avant , joij^nant
ainsi à la démonstration la preuve em-
pirique et convaincante du mouvement
par la marche. Enfui il a porté ses re-
gards sur la science administrative et
sur la police, déduisant le prouverne-
ment et sesroua»esdes principes philo-
sophiques, jugeant ce qui est et souvent
l'approuvant, souvent aussi le blâmant
et disant ce qu'il faut mettre à la place,
homme d'expérience dans Vu-priori,
homme de pensée dans l'empirisme et
dans l'histoire. Voici la liste de ses
ouvrages. I. Prolégomènes de phi-
losophie pratique, Halle. 1787,
in-8". H. Fondements de la logique
universelle et éléments critiques de
métaphysique universelle, Halle,
1788, in-S"; 2® édition totalement
refondue, 1791; S''', augmentée, 1793;
4*', refondue et augnjcntéc, 1800 :
contrefaçon à Francfort-sur-le-Mein,
179i,în-8^. m. Fondements de
la psychologie expérimentale, Halle,
1791, in-8"; 2*" édition totalement
refondue, 1793; 3'', augmentée,
1800; 4°, augmentée, 1810. IV.
Morale philosophique, Halle, 1794,
in-8o, (Je traité se compose de trois
parties : 1'' la critique de la raison
pure; 2^" la morale générale on dé-
monstration de l'existence du devoir ;
3'^ la morale spéciale subdivisée en
deux sections, le mode d'action de la
liberté, les oblif^ations et vertus spé-
JAK
c'ales. V. Doctrine philosophique du
droit, Halle, 1795, in-8"; ^ édition,
1801. C'est un des ouvrages les plus
profonds de Jakob et un de ceux où il
y a le plus de vues à lui (/^oj. plus haut),
lien donna l'année suivante un abrégé
à l'usage des élèves qui suivraient son
cours; cet abrégé a pour titre: Extrait
du droit naturel du professeur Ja~
koh. Halle, 1796, in-8". VI. V La
religion universelle, Halle, 1797,
gr. in-8° (dont plus de trois mille
exemplaires s'enlevèrent dans le cours
d'une année); 2" Les principes de la
sagesse et les règles de la vie hu-
maine, ibid. , 1800, in-8". J.es deux
ouvrages réunis se vendirent ensuite
«ous le titre de Philosophie pratique,
ibid. , 1800 et 1801 (le 2"' volume,
celui de la religion universelle, était
vraiment une réimpression). Vil.
Principes d'économie nationale, ou
Théorie de la richesse nationale ,
Halle et Leipzig, 1805, in 8"; 2^'
édition, Kharkow, Halle, Leipzig,
1809, in-8"; 3*^, Irès-augmeutée et
corrigée, 1825, 2 volumes grand
in-8o : contrefaçon, Vienne, 1814,
in-8". VIII. Principes des lois et des
institutions de police ^ Halle et Leip-
zig, 1809, in-8o. IX. Introduction
à l'étude des sciences administrati-
ves. Halle, 1819, in-8". X. Théo-
rie et pratique des finances , ou les
principes de la science financière
é( laircis par des exemples tirés de
l'histoire moderne, Halle, 1821, 2
vol. in-8" (contrefaçon à lleutlingen,
1824, in-8"). Cet ouvrage est un
chef-d'œuvre : l'idée en est heureuse,
l'exécution en est parfaite ; la lecture
en est commode et instructive. Les
faits démontrent les principes, les prin- É
cipes rehaussent et font comprendre ^
les fails. XI. Les sept petit manuels:
Principes de logique et métaphy-
sique, de psychologie empirique^ de
grammaire générale y de morale^
JAK
/ /■ ptifitii/ur. iPi^slhrlitjur ,
«; : iiturrl;r\ \rs l'.rluirris^r-
mrnts ri mnimentairrs sur Irs trois
prrtnirrs Ja Ps\chulu$(ir et la (irarn'
maire grnrralr s^ulr», f I Ifur» rcUiir-
ti<:<irwrnts nous sont tnmh^ entre les
in.iiii*. le tout en Allemand, Ri;;a ,
ISIi.in 8" Ir. \ vol.). Ona »u plu<
haat ()ue 1oti<; (r% manuel» Hrvairnt
4enir a rr«liiration ilr^ jeunes Kn^sr»
de^ rolle^es : aprè* la rliiilr »lr S|»e-
ran^Li , le iiou^ernement rrMnl *nr
relie déri«>ion , l'amiral (lliifliloT
a>ant déclaré que ces opu^nile^ élaient
en désaccord avec le fhfi*liJn!^me, el
tartout a»ef la doclnne de l'éj^li'**
fjree que. XII. Projet tir rtnJr rrinti-
nri pour t empire russe. Il aile,
IHIK, I11-8". (^1 oH\ra«^e e».t acrom-
pa;;né de remarquer sur les lof* cnmi-
iirllts artuellement en vij;uenr en
Wus r, ri dr rriliqiie* «iir le code
erjminrl pnMie à S.i' -irjj et
que la rommi^'^ion \r. s Ijt-
pnuLin <c pteparait a sulr.tiiurr an
ilen. (^ drmirr fut puldie en alle-
mand, a I Lille la mi me année, par le
fiU de Jalnb. \ll!. fisrpji^se ifune
' ncycluf}r/lir des srienres el des
.jrt's , Halle, IH(M), in-8°. XIV.
F. i amen des Heures du matin de
Mendeissufin, ou Discussion de tou'
tes tes preui'es sp rulutices île Cexis'
tenre- de Dieu \\\rc une ptefare de
Kant\ I^ipzi-, ITSfi, in-8". XV.
Ij'.4nti'Mtirhio\*el , ou des Homes
de Cofirissance cis'ile '\ l'of ration de
deux articles du journnl vrrnsurl de
Berlin, lept. el tiéc. 17U3; par kanl
cl par Gcnli^, Halle, 1T0V. in 8" ;
•i" édition , 17*»6 : la V était ano-
nvme. XV|. Des traductions : 1' de
l'IIistoirr desapfitres. Halle, 177î>,
in-8"; '2 ' des traites de Hume Mur A*
nature humaine. Halle, 1700 el 01, ♦
3 \a\. f;r. in-8"; 3° De la liaison du
physique et du moral de Cabanis ,
Halle et Leipiiiî, 180i. 2 vol. ln-8"
JAK 6f)
(ixer nn traité sur le< borne» de I.1
pb\*tolo;;te el de rantbropoln^ie) ; V*
de Vh.tonomie p<di tique de Sav ,
Halle, IM)7, 2M)l.;;r. in-8« (contre-
façon à Vienne, I8n, o >„1. h» 8")
avec remarqnr^ el ad«lilion<; .'ï" de
Vhuropr en 1821, d'K\eiett , Leip-
lij» el r»aml»erj;, 1823, '2 vol. gr,
in-8", axrc renurqnr^ et rectifications
dans le «rhs monarrliique. XVjj. Des
traduclinn<i bbres et (»ii 1rs on^ra«;es ori-
ginaux clian<^ent complrlement d'as-
pect; *a\oir : 1" les (lonsiilrrations sur
les formes de gtMi'ernement , d' Al»».
Sidne^, Krfurl. 17î>.'>, in-8"; 2" un
Dictionnaire philosophique tiré de
Hayle ou Dictionnaire biographique
de* philosophes, abré«;é des articirs dn
Dit tionnaire historique et critique
dei;a>le>,llalle,170f».in8'M"vol.:
3'* les (.onsiderntiftns de .Ins. F.onr
siir Cètal actuel de t agriculture, thi
commerce , des finances de r.-fn-
gleterre, Ir-^'V.' , 18-J3. ^'r. in-8".
X\ III mges inrm\ lesquels
noii^ «I IIS : 1" des Traités
phihisophiques sur la throhtgie, la
fto/itique. le droit, la religion , la
morale. Halle, 1707. in 8"; 2** la
lU'monstrtition de Cimmortalitè de
tiime fHir tidèe du decoir 'qui eut
le prix a La Ha>e et que l'auteur tra-
duisit du latin en allemand avec clian-
{jernenlO, /;ùllich.iu, 1700, in-S" (2*
édition au;;inenlée, 170i ; 3*^ la Dé-
monstration morale de Ce.ristenre
de Dieu (qui eut l'accessit à Harlem
eu 1701 et qu'il traduisit aussi du la-
tin en allemand), Liebau, 170 V, in 8" ;
2* éililion, mmiifiéc el au^mcnlée,
17<)8 ; V^ \m Mémoire 'couronné par
la société libre économique de Saint-
Petersboiirr;) sur le travail des pay
sans lihres comparé à celui des
serfs relativement au fruit quen re-
tire C agriculture, 181 V; 5"" Courte
instruction sur le papier-monnaie
en Prusse, Halle el Leipzig, 1806,
70
JAK
111-8°; 6" Du pupier-iuoundir ru
Russie et du moyen de lui donner
une rmleur inaltérable, Halle, 1817;
7" De la liberté et de la discipline
académique, aoec des vues spéciales
sur les unipersités prussiennes^ Leip-
zig, 1819, in-8*^ (publié à l'occasion
des désordres de la Teutonia) ; 8" De
Allegoria homerica , thèse que Ja-
kob soutint en 1783. XIX. JJcs re-
cueds périodiques dont le piincipal ,
Annales de la pJiilosop/iie et de
r esprit philusophicpie ,\):mi\\ trois ans
de suite, 1795-97 [Voy. plus haut).
Les autres furent 1" un Journal men-
suel pour les dames (en collaboration
avec Rothj, Halle, 1786, in-8", 1
vol.; 2" la Feuille de Jlagdebourg
et llalberstadt (avec Barckhausen),
janv.,fév. elmars, 1801, in-8''; 3°les
Annales (T économie polilique et de
statistique en Prusse {à\ec Kru<;;),
Halle et Leipzig, 1804, 1' ' vol. Nul
de ces derniers ne se .soutint. XX.
Beaucoup d'articles dans V Hermès
(àun''\n au n'^ XXVlil), dans la
Gazette universelle, littéraire, dans
la Feuille de conversation , dans
le Journal de psychologie empiri-
que, etc., etc.; le bel article Nathu-
sius dans les Zritgenossen ; une col-
laboration importante aux articles
d'économie politique du Dictionnaire
(allenjand) ^y^ la conversation. XXI.
des Mémoires (manuscrits) sur sa vie.
]| a aussi donné une édition de Phè-
dre, Halle, 1785, in-8^' (2' édition,
1799; :r, 18:>:{), et consenti à pu-
blier des Essais pliilosopliiques sur
r homme [en français], Halle, 1819,
in-8"; 2' édition , Paris, 18:>3, ou-
vran;e très-faible qui, bien qu'on l'ait
soupçonné d'en être l'auteur , n^cst
pas de lui, et doit être .sorti de la plume
de quelque grand sei^^neur polonais ou
russe. Au reste, nous ne connaissons
de traduction française d'aucun ou-
vrage de .Jakob. P — ot.
JAL
J ALABERT (Jean-François-
Joseph), orrand-vicaire du diocèse de
Paris, naquit à Toulouse le 29 août
1753, d'une famille honnête, mais
peu aisée. Il fit d'excellentes études
dans l'un des collèges de sa ville natale
sous le patronage de M. de Brienne ,
alors archevêque de celte ville ; mais
lorsque la révolution commença , sans
se nrontrer ingrat envers son protec-
teur, il ne suivit pas la même ligne d'o-
pinions. Plus tard il entra au grand
séminaire , prit ses grades universi-
taires, et reçut les ordres sacrés. Joi-
gnant à des manières affables beaucoup
de douceur et de vertu , Jalabert ,
après avoir exercé pendant quelque
temps le ministère ecclésiastique à
Toulouse, fut placé à la tête du petit
séminaire de celte ville. C'est là que
le trouva la révolution. En 1791 , il
fut obligé de quitter ce poste, à cause
de son refus de prêter le serment exigé
par la constitution civile du clergé.
Alors il se rendit à Paris où il
se lia particulièrement avec Emery,
supérieur-général de Saint-Sulpice ,
chargé de l'administration du diocèse
pendant la persécution et l'exil de mon-
seigneur de Juigné. La connaissance
profonde qu'il avait des canons de l'é-
glise le fit admettre, quelque temps
après !a terreur, d?ns le conseil del'ad-
ministiation diocésaine. A l'époque du
concordat, il fut promu chanoine ho-
noraire au chapitre de la métropole, et
lorsque ]M. de Mons, décédé arche-
vêque d'Avignon, fut nommé à l'évê-
ché de Mende, l'empereur Napoléon
dit « qu'il voulait que l'homme le plus
« beau, le plus gracieux et le plus ai-
«' mable i\u chapitre de la métropole,
« ) remplaçât, comme chanoine titu-
^ îaire, le plus pointilleux, le plus
/' spirituel et le plus mal fait (1). »
(i) M. i]e Mons t;l.iit bossu, mai» plein d'es«
prit , de luencff et ite tnlenl.
lAL
JAL
("Vlait «lr>vii«'i .l.tl.'l»rit iloiil If*
jv.ihti,:» « vl' ■ . ' .-. 'iJl u :;i t! .|Ua-
blr». 1^ rjriiiiul tic lirlto\ , jrrlir^r-
3ur de Vins , rtjiil moil ni 1H4M,
alaltrri fut nomnir )(raiiil-% irait e ca-
pitiilaiir, ri ce fut rn irtic quaiii^ (|u'il
prononça, (lan« la hi^ilique de \olrr-
Damr, le 'Xt iinn, l'oraison funèlirc liii
pontifr, ibns laqurllc il avait inlrr-
(i\ 1rs W^ues >uiYanm atlrrs>^« à
N 'oleon , quoiiiu M ne fût pa* pré-
scnl ; « IVince ! piii<quf ton» è\e%
" aimant, \o\is a^ex ilu comprenJic
" combirii IVtait aiKsi le vertueutpre-
•< bl dont nous (li-,>li>tt»n« L mort ri
M rombirn c'eluil \ou\ >iii tout qoM
« aimait. Je me pbis a \i>:u dire, et
•« vous rroirex qur \oiis eussiez rté
•< plus délicieusement emu dr> eCTu-
•< sions de son dénouement piiur vons,
•< dont nou5i étions témoins dans sa
<• MMielé intime, que \ous ne l'anei
" peut-rire encore rté des «iiMoar»
« pompeux que dicte l'amoDr ^0 vos
" peuples pour votre au^nisie prrr
« sonne » Ce fut encore dans le
iiirmr discours que Jabberl harangua
(lambacéies, arclM-cliancelier de l'em-
pire . qui aNsistait à la cérémonie :
" SéreiiiN>ime prince ! lui dit-il , no-
« tre >eitueux prélat part^eait a>ec
« Tempire français la tres-liaiitc ci»n-
<• sidéralion publique qu'eut attachée
« à votre personne la lontiancr si;;na-
« lée du monarque, et la sa^evie avec
•« laquelle voik dit iiiei Ir- rène> de
« l'état si souvent déposées dans >os
<c mains. Mais il aimaJ surtout j pe-
«« ser sur celles qui sNmpathi"» lient le
«« plus avec les siennes. >» C>elte ma-
nière de parler plaKjii beaucoup a Na-
poléon, qui fil plusieurs dons -énereux
à Jalaliert et qui tenait à le conserver
i Paris, au sein du chapitre métropo-
litain , où ses bons ofTices lu; éla-cnt
nécessaires Ku efTet, le crédit de l'abbé
Jalabert était très puissant dans ce
corps , tant à cause de son amabilité,
aa'à cause de la vénératio» q«i s'alt.v
chaii a sa %eMu ri a l'mTiobbibté de
%e* principes uiibodoies, reftlen talacU
dan> toutes le> cirroii%ijncc3k orageuse*
qu'il anail lra\ei%ées. F.n iHO^t, le«
biles de la cliante a^ant rerbmc con-
tre des cban^eroent» que le ))()u\«ri)*-
uwnt voulait faire aux statuts ôc leur
con^re)*aI on, Jabbert, pre%sr par le
■inistre des coller, Hi;;ot de Fréame-
■ea , \e* eiborta à b soumission , et
pabba Meiae à ce sujet une bi'ocbure
de iiO pa;^ m V'\saus poumon toutetnis
partentr jtriminrr ce différend, qui »ub-
M.sla ius4}u'en \X\ i. Le iiaviil \H\ f ,
.labbrrt tut eun)re appelé a pronon-
cer I oraison funebie de monÀri;>neur
de Jui^né, ancien arcl»e\éque de Harx,
dans b ba.sili«pie de Notre- Dame : il U
6i avec onction, et contrnta toat le
monde, ce qui était avsex d>fiirile avant
a parler deN rxcis de la rrvoluiidn eu
présence des lévolutionn.^ires enrichis
il titrés aoi l'ennirounaient. Ij même
année, M. d' Vslros, aLis < •
oéral de Pari», a\ant corn j
M. Portails, le Irrf de P»e \ Il ,
adresse au cardinal Manrv J uy. ce
nom, XWII, .'>7I , pour lui enjoin-
dre de quitter l'administi ation d*i dio-
cèse de Paris, Napoléon en fot irrité
au point de se déterminer à faire ar-
rêter en pleine cour M. d'Aslros ,
le jour ou il viendrait le compbmen-
ter a l'occasion du premier de l'an.
Les hommrs de Tempire i ' t
la démarche de ce digue ■
que comme une félonie: lU t.isaienl
que , par l'acte courageux qui lui
était reproché, il avait, en s'entendant
arec un sou>erain étranger, forfait à
ses devoirs vis-a-vis du souverain «le
la France. Sans contredit c'était de
rexaf»rralion; cependant, le chapitre
mélro|)oHliin de Paris, excité par le
cardinal Maurv, «on archcvèque-nom-
raé, iuj;ea que M. d'Astros a>ail agi
contrairement aux libertés de l'édise
72 JAL
gallicane, et lui retira les pouvoirs tle
vicaire-i:;énéral qui lui avaient été précé-
demment conférés ; alors le chapitre en
corps, conduit par le cardinal Maury,
se présenta de nouveau le 6 janvier à
l'empereur, pour l'assurer du dévoue-
ment de tous ses membres et désavouer
la conduite de M. d'Astros : « Sire » ,
s'écria l'abbé Jalabert , chargé de
porter la parole au nom de ses col-
lègues, « nous sommes catholiques et
« nous nous glorifions en même temps
« plus que jamais, sous votre règne,
«< d'être français (2). » Dans le même
temps les prêtres de la congrégation de
Saint-Sulpice ayant été obligés d'aban-
donner la direction du grand séminaire
diocésain de Paris, l'abbé Jalabert fut
appelé à les remplacer. « On le vit, dit
« ÏAmi de lu religion, s'arracher à
« toutes ses habitudes et se ployer aux
« assujétisseraents de sa nouvelle pla-
ce ce. » En effet , Jalabert rentra
dans cette carrière, par laquelle il avait
débuté, avec tout le zèle et le dévoue-
ment d'un homme mûr, qui apporte,
pour la directioïi d'une jeunesse stu-
dieuse , l'expérience puisée dans les
fréquentation du monde et dans la
rapports continuels avec les diverses
autorités d'un étal constitué, comme
l'était alors l'empire français. Lors-
que Napoléon eut été détrôné, Ja-
(ï) L'.-idrrss<; du chapitre métropolitain à
l'empereur fut rf-digi-e par le cardinal Maury;
niait il parait bi> m certain que, au moment
même oii l'abb'* J.ilahcrl, comme prisident du
chapitre, allait en faire lecture , le carclin;il lui
remit la copie d'une adr» sue difri-renle de celle
qui avait été consentie par le cha|.ilrf . I.'abbë
Jalabrrt , pris au dépourvu, intimid»-, n'osa ré-
clamer devant rnnpfreur contre celle »uj)er-
cberie. H s'« n plai^-nit ou sortir d»- l'audicncf ;
mait on lui conseilla <!c ue p.is f.iirc d'éclat et
de ne pas s'exposer au rc-srntlni» nt de Napo>
Jéon. Il dévora donc v\\ silen<e l'Iinuiiliation
d'avoir présente- une adresse remplie «le choses
ba'-ardées, inexactes et ejmperees Celle même
adresse fat bieutrit publiée el envoyée aux évc-
ques el aux chapitres d'ilali»- , «pie l'on sollicita
d'y adhérer. l'Iusieurs cédèrent m effet aux
instances et aux menaces qui leur furent faites,
et leur» adhésions ont été imprimées. V — c — t.
J\L
labert fut encore nommé grand-vicaire
capitulaire par les chanoines de Paris,
et il eut la plus grande part à l'admi-
nistration du diocèse. Pendant tout le
temps de la vacance du siège et après
que lé cardinal Maury eut été mis à
l'écart , il publia plusieurs mande-
ments , entre autres un dans lequel
il s'attachait à prémunir les fidèles
contre les sophismes des philosophes
du derniei siècle , et combattait la
facilité que le gouvernement laissait
au libéralisme de propager d'une ma-
nière effrayante les écrits les plus mau-
vais de J.-J. Rousseau et de Vol-
taire. Ce scandale , dénoncé par le
courageux vicaire-général , n'est pas
l'une des moindres fautes de la restau-
ration. Toutefois, quelque dévoué que
Jalabert eût été à l'empereur Napo-
léon, il était dans son cœur d'être éga-
lement soumis et gracieux à la race
des Ijourbons remontée sur le trône
de France. En mai 1816 , il disait au
roi à la tête du chapitre : « Sire, du 3
« mai 1814, dont le 12 avril futTau-
« rore, jusqu'au 3 mai 1816, nous
« retranchons cent jours et no js comp-
« tons des siècles de félicité publique
» et de bonheur personnel. » Le 3
novembre de la même année Jalabert
harangua Louis XVI H , lorsque ce
prince ^e. rendit à la métropole pour
assister à la messe du Saint-Esprit, à
l'occasion de la session des cliambres.
En 1819, le cardinal de Périgord ,
grand -aumônier de France, ayant pris
l'admiiii.stration du diocèse de Paris,
nomma Jalabert archidiacre de No-
tre-Dame et premier grand-vicaire.
Monseigneur de Quélen, succédant au
cardinal, lui montra la même estime
et le continua dans sa dignité, profi-
tant avec empressement des conseils de
son expérience, et l'honorant de son
amitié, jusqu'à ce que les infirmités
vinssent terminer sa carrière si pleine
de vertus et de travaux vraiment ec-
lAM
rlcMOiliquw. Tou* %es mon > ni
pjrta^és rnirc racromi >
te* dfvoin el unr rorrrsjunwlai.fc de
pifir qu'il fntretcnail i\ec iiiir dr sei
MTtiTi, fondainrf ri prcmific ^upé-
rirurp d'une communauté ron^ijcree à
l'edurjlion des jeunrs filles dans la pe-
tite ville de Saint-( ienirz ^.\%cuon).
li mourut le 17 mai iHJ.'i, aprr> une
coiiile maladie , muni dr* ^wours de
la religion , qui lui furent adminiMréi
pai monseigneur de <^)uelen |iii-mfro«.
1^ mérite réel de ce dit;iie erclé»ias-
lique a\ait elë parlirulierrnieiit appré-
cie par Napoléon et par le% hommes
de tant de couleurs qu'il a^ait groupés
autour de lui ; par rinii aiclie«éqnes de
Paris ave^ lesquels il avait parta«;é
Tautorilé spirituelle sur la capitale de
la France ; par les prmres tle la maison
de Kuurbon auxquels il n'avait inspiré
aucun omhrage mal;:ré.se$ liaisons avec
Napoléon ; enfin par le cierge de Pa-
ris, qui trouva toujours en lui un pro-
tecteur paternel , un appréciateur ju-
dicieux, un zélateur intrépide de l'ob-
ser\-alion des rè^^les protectrices, éta-
blies par les canons de l'ej^liNe en fa-
veur de tous. Outre les opuscules de
circonstance mentionnés dans le cours
de cet article, on attribue à Jalabert
deux écrits en faveur du gouvernement
d.» l'époque , et qui parurent sous le
voile de l'annovme: I. t.xuwrn des
difjnullès qu'un oppose a la pro-
messe fie fui fit le a la constitution,
Paris, 18()<) et 1H(H, in-8''. II. Pro-
jet lie charger les ecclésiastiques
d éclairer les fidèles sur leurs droits
contre les entreprises du despotisme ,
et de propager la doctrine de la sou-
l'eraineté des peuples par Feni^oi de
missionnaires en pays étrangers ,
aoec un aperçu dr C reprit actuel
de fcolise constitutionnelle . ibid. ,
1801 , in-8°. Z.
JAMERAV DL'VAL. J'oy.
Du\AL, XII, 413
JAM 7:^
JA.\it:s(i\ ^wiuiA^o, tiie«.
lof^ien anglais, était profe«seur dliis-
toire à l'aradrmte de Tilascovk dans la
première moitu- du W UT siècle. Il
e^t principaleninit comiki par l'ouvrage
suivant : Spii ilegia tinliquilatunt
.hg)/>ti utque et virlnarum gen-
/i//m,<»la5Cov» , IT'iO, pet. in-8"raie.
L'auteur annonce que son but dans
cet ouvra;;e est de faciliter l'étude de la
llible, et de montrer que les récits en
•ont constamment d'accord a?ecreux de
l'iiistoire. Les dev\ premiers chapitres
tout consacrés à la ^ro^raphie ancienne
de l'K^vpte. Y.n indiquant les villes 1rs
plus ceiebres , l'aiileiir rapproche les
pass:i;(es de la HiUe de ceux d'ilérn-
dole et de Dimiore ou il en est pailé.
Dans les chapitres suivants il traite ra-
fiidemeiit de l'empire d'.\Nsvrie, i\r ce-
uide Uabyione. des Med«>-Perses, des
Scvthes et eniin des Hébreux avant
l'avènement du Messie, en ne s'ap-
puvant que sur l'autorité des histo-
riens. Il revient ensuite à l'K^vpte, el
après avoir établi que lac)uunolii*;iede
ses rois, tellequenous l'avons, e^l trés-
defrctueuse, il s'efforce de prouver que
cet empile n'a pas la haute antiquité
qu'un lui allribue^énéralemenl. Il pré-
tend queloth, re;;ardé comme l'inven-
teur de l'écriture alphabétique, e.sl \f
même ner^onnaj;e que le patriarche Jo-
sepli auquel il fait lioniieur ùe l'intro-
duction de l'écriture en K»vpte. Ce fct,
suivant Jameson, pour avoir rendu cet
immense service que Joseph fut revêtu
des piemieres dif;iiit«-s de l'état, et non
pour avoir expliqué les son;;es de Pha-
raon. Parvenu à l'histoire j»articulière
de cliaque roi, il examine la liste cliro-
nolo;iique que Svncelle en adonnée
d'après Manethon, et v si;in3le[>lusienrs
mépriie.s; il soutient que Sésostris (1),
est le même que Sciiisak ou Scsac ,
prince contemporain de lioboam. Celle
(I) Suivant (iu^r.B du Kochcr, Séiostris esl
l« patnarcbc j4cob.
74 JAM
opinion avait été déjà soutenue par Mars-
ham* et contredite par Périzonius à qui
Jameson reproche de n'avoir fait qu'em-
brouiller IMiistoire de ce prince, en
cherchant à l'éclaircir. On voit que le
système de Jameson se rapproclie beau-
coup de celui de Tauteur de V His-
toire véritable des temps fabuleux
{Voy. OUÉRIN DU ROCHIR, XIX,
27, et Baer , LVll , 45). Tous
les deux ont trouvé des partisans ;
mais aussi de nombreux contradic-
teurs. Le temps n'est sans doute
pas éloigné où Ton saura ce qu'il faut
croire de la haute antiquité de TEojvpte
et de son état florissant à une époque
qui précède de tant de siècles les plus
anciens monuments de Thistoire. On
connaît encore de William Jameson :
Sum of ihe episcopal cuntroi>ersy ,
Glascow, 1703, in-8". Mais c'est pro-
bablement un autre écrivain du même
nom qui est l'auteur des Essais sur la
vertu et V harmonie morale, trad. de
ranij;lais (par Eidous), Paris, 1770,
2vol.in-12. W— s.
JAM ET (Lyon ou Léon), l'un
des plus chers amis de Marot, était né
vers la fin du XV^ siècle à Sanzay,
dans le Poitou, d'une famille noble ,
dont une branche, établie depuis en
^ormandie, a fourni plusieurs hom-
mes de mérite. Etant venu de bonne
heure à la cour, il se lia pi omplement
avec Marot que sa conversation pi-
quante et spirituelle faisait rechercher
de tous les jeunes ;;ens. ALirot, enfer-
mé dans les prisons du Cliatelet pour
avoir mant^é du lard un jour maigre,
eut recours pour en sortir à la protec-
tion de Jamet. Ce fut alors qu'il lui
adres.-.a cette êpître, si connue, dans
laquelle il se compare au rat de la fa-
ble, qui débvré par un Lion (1) lui
(i) Marot dut s'applaccJir b(>aiicnii|i d'avfiir
Irouvé celle occasion dVquivo(|iirr ; nr le nom
à*-. Jamei, genre d'esprit ^liors fort a la mode,
et qui s'y laaiiitiiit auez long-temps.
JAM
rendit peu de jours après le même ser-
vice. Si Jamet ne fut pas as.sez heureux
pour délivrer Marot, il obtint du moins
sa translation dans les prisons de Char-
tres, et ne né^^lio^ea rien pour adoucir
sa captivité. Jamet partageait les opi-
nions de son ami sur les moines, et ne
laissait guère passer l'occasion de se di-
vertir à leurs dépens. A cette époque il
n'en fallai t pas davantage pour être soup-
çonné de protestantisme. Obligé, vers la
En de 1535, de quitter la France, il
trouva dans cette même cour de Fer-
rare que Marot venait d'abandonner,
un asile honorable, et le repos dont il
commençait à sentir le prix. La du-
chesse Renée de France [i'^oy. ce nom,
XXXVII, 35Y), si bonne , si géné-
reuse envers tous ses compatriotes, le
choisit pour son secrétaire. Plus pru-
dent ou moins étourdi que Marot, Ja-
met parvint à dissiper en partie les pré-
ventions du duc de Ferrare contre les
Français. Ce prince l'honora de sa
confiance, et le chargea d'aller à Rome
réclamer du souverain pontife une di-
minution sur les droits d'investiture de
quelques domaines (Voy. la 14^ let-
tre de Rabelais).* Quoique Marot pa-
rût l'avoir entièrement oublié , Jamet
ne cessa de prendre à son sort le plus
vif intérêt. Il lui adressa, en 1543, une
Epître, en vers redoublés, pour l'en-
gager à venir partager le repos dont il
jouissait à la cour de Ferrare. Cette
invitation arrivait trop tard. Marot,
alors fugitif, mourut l'année suivante
(15i4)àTurn(r.MAROT,XXVlIÏ,
2i2), et son fidèle .ami lui fit élever,
dans l'église Saint-Jean, un tombeau
de marbre qu'il décora d'une touchante
épitaplie en vers de huit syllables.
Jamet revint en France avec la du-
chesse Pienée, sa prolectrice, et mourut
dans la Normandie vers 1561. ]1
comptait encore parmi ses amis Me-
lin de Saint-Cielais, et DoUt qui lui a
dédié son édition, devenue très-rare^
\M
JAM
tiç> (J:Ui'r.r.s dt Marol , Kvon, l.'*V;i,
iii 8". On n'ajr .Kiiuol qu uii lies |kIiI
nombre il (- ; i\e>; mai^ elles
sonUrnt (>•> rr un nu;, pjiint
les |*ur(c% (lu \\ l'^ Nièflr. Imirj.cu-
tlamuiriil dc^Jeux mdnruuv ilejj cilr»,
on trouve eucotr de lui, dans les ^Au-
iT^J de M.ïinl 11 1> / o/i//- 111)1 iitiiiiniMtrr
par ce ver ^
Dn autre:
¥tÀt* L«bia r««r»«al ilr
Une Inulutiun J' Aust.nf, ci itii Utuim
sur Alii. Dieux du lUdui j {udilir
àiUs sts Jirrnaiiuris histuriqurs, I,
l().i, une A<;/iii// de .lamel jur /u
Saillir- 1 iergr , lirçe d un inanu.srrit
de luuceiul, que l'on cr<iii exerulepar
Geoiïiav rot> . La notice que du Kadier
a dounee dans la liiUiuth. du Poitou,
Il , H8, fit inc()in(>lrte. W - s.
JA.\li/r lame |Pit:nRL Char-
Lts], liUcialem niudr>ir el laborieux,
était de la même famdle que I ami de
MaruI ^1): et descendait par le» fem-
mes de l'historien Meierav. Il naquit
en ITOl , a Loiiui-te5. près d' Alencoo
el lerniiua ses éluder à l'université de
Caen; ila^ouelui mènie,'dan<^ une let-
tre à s<jn fière, qu'il fit peu de pro|»rés
dans la langue ialiiie dont les con»! lut-
tions lui paraissaient birarres ; mais il
excella dans toui les exei cicr^ du corps.
A dix-neuf ans il fut admis dan<( les
bureaux derintendancedesA province,
où il se forma prompleraent aux affai-
res ; tt en 17*J."l, il ulitint la place de
preni^ commis de M. ()rr> de Ful-
vy, frcre du contrùleur-»;pneral des fi-
nances. En arrivant à li^aris, son pre-
mier soin fut de rechercher la société
des gens de lettres, et il <e lia d'une
manière assez intime avec (lueulletle
{Voy. ce nom, XIX, 38). auquel il
^i) L}'oii J'ioet rt.-iitrnii«tn-grri»ain du tria-
•icak de IVcrirain qui fait Ir f^j«t d« cet ar»
fournit dfN ■ >on édition des
hsMiis de ' I o) . railiilc
sui\aiil .1 lit .< . .,Mt .i-.iiiie de Tiavle,
qu'il se tlallaii d.- ^.o^ nlei /Htr/ui/e-
miiit, tourna ses ctudeN vers la méta-
plntiqur, rt il perdit dan» des discUA*
Moos oi^usr> un temp!^ qu'il aurait
eaplo>c plus utilement a sou projet
de perfectionner le dictionnaire de la
langue Iran^aisc. K.n ITii.'i, il fut tn-
vo>épar»es protecteurs a L<irienlouil
i<i:i|lt |>endatit plusieurs années la
I >■ de piemier commis de la roropa-
^isie des ludr». De retour a l'ans, il
rrpnl *nti emploi dans le» bureaux du
r lierai , et continua de don-
II' s à la culture des lettres.
Suu|H;oni)e d'a,«oir paii a la publira-
lion de i]urlque% pamphlets de.va^r râbles
à U cour, il fut mis a la lîasiille en
IT'}.'». Ce fut dan.s celte prison qu'il
arheva de recueillir et de mettre en
ordre se» Dbsrrs^atiuns sur les diction-
naire» fraii^ji», particulièrement celui
de'l ieM)iix. Il Gt ce travail, qui »uppo$e
d'iinmeii>es rerheichei, n'a\ant pas à
sa di>pu ittoii un seul volume, même
le dictioiiii.^ire de Botulni ; mi\s,com-
rae il en fait la remarque, on n'est
pu.nt i \i UasliUe pour lra>aiher com-
modément i une pareille composition ;
on V est pour pleurer ses pèches [Lon-
srr%HJtrur, décembre, 17'>7, p. 144).
II est puibable qu'en obtenant sa li-
berté Jamet perdit sa place, et reçut
l'oidre de quitter Paris. Du moins il
est certain que depuis cette époque ,
il disparut eut t-r«.iDent de la scène
du monde. On sa:l qu'il vivait encore
en 1770. Comme il était alors dans
H(i à^ea\ancé, on peut conjecturer
qu'il ne poussa pas heii au-delà sa
carrière. Jamet a fourni des notes à
l'ediMon de Rcihrltiis . publiée par
(iueollette en 173:2 rJ), et un assez
(i; S«\ Aj.v/ *ur Rjb. Uis . iju'- Jamet ap-
pelait Ml j>lji<anUnt le» pi<d» d« mouche,
ont été trai»»foriiie«a, d»"» 1* ^>o«*« htltnin
76
JAM
^rand nombre d'articles au Diction-
naire de Trévoux, 1752 [f'^oy- 1>er-
THELIN, LVIII, 99). ainsi qu'au Dic-
tionnaire de droit et de prati(juc par
Fcrrière. Enûn, on a de lui les opus-
cules suivants: I. Essais mctaphy'
tiques (Paris), 1732, in-12. ÎI.
Lettre en forme de dissertation sur
la création, 1733 , in-8". Suivant
M. Quérard, elle a été traduite en
latin par Lancelot, et en vers fran-
çais par Martin de lîussy (Voy.
France littéraire). lïl. Idée de la
métaphysicjue , traduite de l'anj^lais
d'Atjem (anagramme de Jamct), Nan-
cy, 1739,iii-12; réimprimée dans
le Conservateur, septembre 1758.
IV. Daneclie-men-kan y philosophe
mogol, avec des remarques, 1740,
in-12. V. Lettres di M. Lancelot sur
Vinjini ou l'unité de substance , et
sur l'auteur de h philosophie des jeu-
nes gens (Miron), 1740, in-8°. VI.
Lettres critiques sur le goiit et sur la
doctrine de Bayle , 1740, in- 8".
VU. Prowptuaire de la métaphy-
sique du Dictionnaire de Bayle ,
1740, in-12. Vin. Lettre à M. le
chevalier de P. (Pacaroni), sur la
métaphysique et la logique , Paris,
1742, in-12; réimprimée dans le Con-
seroateur, septembre 1757. D'après
la France littéraire , elle avait déjà
paru sous le litre de Lettre sur les
caractères de différence de la mé-
taphysique et de 1(1 logique y 1740.
IX. Lettre sur le lieu et r espace,
17i2, in-12. X. I^ettre sur le prin^
cipe de saint Augustin : Sub Deo justo
nemo miser, nisi mere.itur, 174!i,
in-8''. XI. L'épilaphr du liihliothé-
caire. Ce badina;;e, de dou7.e .î treize
cents vers sur la rime en in, fut im-
de 1778, en un ouvrago intilnlé : Lei Pieds de
mouc/ie, ou les Noces de Hubelais , 6 %ol. in- 8".
C'iie singulière bi-Tun se rnrouve dnn» la
France litterair» de M. Quirard , ouvrage dont
personne d'aillrurs n'apprécie mieux que nous
l'exactitade et l'utilité.
JAM
primé par extrait dans le Couscnya-
teur du mois d'avril 1758 sur le ma-
nuscrit de Jamet le jeune. Cependant
tous les bibliographes en citent une
édit. de 1747, in-4". XI. Troislcttres
aux imprimeurs du Dictionnaire de
Trévoux , 1748-50, in-4". XIII.
I^ettres aux auteurs de t Encyclopé-
die,i7ô0, in-8°. XIV. Petit écrit sur
les devoirs des gens en place, 1753.
XV. Lettre au sujet de ses mémoi-
res manuscrits concernant le com-
merce des Indes, 1754. XVI. Ob-
seroations sur les moyens de perfec-
tionner les Dictionnaires de Trévoux
et de Moréri, in-12. Cet opuscule
daté de la Jjastille, 25 mal 1756, a
été réimprimé dans le Conservateur,
décembre 1757. W — s.
«1A3ÏET le jeune (François-
Louis) , célèbre bibliophile , frère du
précédent, naquit en 1710 à Louviè-
res. 11 fut fort jeune attaché comme se-
crétaire à M. de la Galaizière , qui
passa de l'intendance de Soissons , en
17-37, à celle de Lorraine. Il demeura
vingt ans à Nancy, partageant comme
son frère tous ses loisirs entre les de-
voirs de sa place et la culture des let-
tres. Il se lia d'une étroite amitié avec
Lancelot ( Voy. ce nom , XXIII ,
322) , envoyé par le gouvernement en
Lorraine pour dresser l'inventaire des
archives de cette province. Il était en
correspondance avec Louis l\acme , à
qui , par le moven de M. de la (ialai-
zièi e, il eut le bonheur de rendre quel-
ques services ; et il visitait assez fré-
quemment , dans son abbaye iLSe-
iiones, I)om Calmet, qui lui donna les
premières leçons de biblioi!;raphie. Pa.î-
siormé pour les livres, il profitait pour
en acquérir de toutes les occasions ,
malheureusement assez rares alors en
province; mais, grâce à sa persévé-
rance , il possédait cependant une as-
.sez jolie collection lorsqu'il vint habiter
Paris. Déjà connu des libraires et des
.lAM
prinrt|>iti\ amalfur* , il df\in! birn-
l6l i'oraric des \rritrA Je li\rf<, ou il
ne M (l'slin^uait |>a% moins par reten-
due et la variété de ses connaissances
que par la délicalev^ de son ;;oùt. (aI
homme aimable et >pii iluel mourut à
l'aiisle M) aotil t77M. Les liues qui
lui ont apparîniu , presque tous enri-
chis de ()url(|urs noirs de sa main et
d'une pji faite condition, sont tirs-re-
cherchrs des curieux. On a de lui ,
dans V.inrur litlrraire, tians les >//•-
tmtirrs lit Irr%'ouA et dans \f (priser •
valeur, quehjues morceaux d'histoire
ou de littérature. Ilebrailet après lui
M. Querard en ont donné l'indira-
tion. Avant 176*» , il s'occupait déjà
d'une nouvelle édition du Manuel
leiitiue de l'ahbr iNevost, qui devait
être auijmenice d'un -r.unl nombre
d'articles; mais il n'a pas fini ce tra\ail.
Il avait déposé sur les Miar;;es d'un
c\< : ; ' '.• de l'édition de Montaigne
p.ii ( . iniilrlte (/ <i)-. l'art, précèdent^
une multitude de notes hl^lon•]ues ,
morales et littéraires, qu'il se proposait
d'emplover dans une nouvelle édition
des l.s.uu's. liarbier, dans son Dirtion-
naire des anonymes, 2*" éd. , n" ôS.'iU,
parle de cet exemplaire comme d'un li-
vre trés-precieux. Dés l'ane devinât
an% Jamet avait contracte l'habitude
de tenir une e5pece de journal dans le-
auel il inscrivait, sans choix et sans or-
re, avec la hste de ses dîners et de ses
soupers, de ses vova;;es , de ses rhu-
mes, et même de ses a\entiires valan-
tes, toutes les pièces rares ou bin^uiio-
res qui lui tombaient entre les inainii.
Ainsi l'on V trou\p pele-mele des ar-
rêts du parlement, des fxintphlets jan-
sénistes , avec des ciiansons orduriè-
res , des épio;rararaes , le^ Priapres
de Illot et de Grécourt , la Char-
treuse et les Ornhres de Gressel , le
Paris riilinile de Petit, et des ex-
traits des ?sou\'rUrs ecrlèstastiques.
Cet ouvrage, qu'il a judicieusement
JAN
77
nommé lui-même un chaos, fait au-
jourd'hui patiip des manuscrits de la
bibliothèque du roi. Il est parta{;é en
deux volumes in- i" , ensemble de 21 36
pa^es. I^s bibliographes le citent tan-
tôt »ous le litie des Stromatrs , tantôt
»ous relui des MisreJ/anra dr Jamet.
Il porte encore ceux de l\)/yaiithea
et de ( htion l.e premier volume lom-
mence a l'année 173<let Gmt .i 1736;
le MTCond a 17M>. Mais l'auteur n'a
pas revsé jusqu'à .sa mort d'v faire des
additions et des rorreclioiis. .\insi |.i
note suivante se trouve pa^e ri.'i.'i , à
la mar^e d'un mandement de l'evéque
janséniste de Saint-l'apoul : ** J'étais
M bien jeune quand je m'amusai à co-
« pier celte pauvreté. Je cro> ais que
« cela était beau et bon.\)ue l'édu-
•• cation nous rend niais! Décembre
.. 1772. « NN— s.
4 A.\l Cl! ni.sTi\N-l)AMi>), savant
philolo;4ue allemand, et l'un des plus
célèbres rommenlateurs d'Hornre, na-
3uit le 10 dec 17i3à (ilaiiflia. ^es
Impositions naturelles furent dévelop-
pées par l'éducation que lui lit donner
son père , pasteur d'une e^hse de sa
ville natale. Non seulement il suivit
dans l'école du N\ aisenhaus (la maison
des orphelin*) le cours des éludes ordi •
naires, mais il apprit encore le fran-
çais, l'italien et l'anglais. Ses pen-
chants l'enlrainèrent vers l'élude de la
littérature ancienne. Il fut reçu doc-
teur en philosophie, à;;c de vin^t-neuf
ans, et s'adonna à l'ensei^^ncmenf.
Après avoir ele rép- titeur dans l'école
ou il avait fait .«^es éludes, il suppléa le
recteur TaiLst, qui alors était fort 3{;i*.
Ku 17H0, Jani fut mis, en qualité de
recteur, a la tète du collège d'Kisleben,
petite ville d'environ 6,I)(K) habitants,
qui fait partie actuellement des états
prussiens comme rhef-lieu du comté de
Mansfeld, dans la province de Saxe.
Jani axait été investi de la place qu'il
occupait par le comte de Mansfeld.
78
JAN
Mais ce comte mourut ; son fils unique
le suivit de près clans la tombe , et en
eux s'éteignit leur illustre lamille. Le
comté (le Maiisfeld retourna comme
héritage à Télecleur de Saxe qui cou-
firuja Jani dans le poste qu 11 occupait.
Le collège , ou , comme on dit en Al-
lemagne, le gymnase d'Kisleben, sous
la direction du nouveau secteur , ac-
quit une renommée qui y augmenta
promptement le nombre des élèves.
Non seulement Jani y établit un or-
dre parfait et des cours d'études as-
sortis aux intelligences des difforeuts
âges , mais dans ses instructions 11
développait avec un admirable savoir
tout le génie des langues anciennes, et
faisait ressortir avec goût les beautés
des auteur9»grecs et latins. Par un heu-
reux mélange de douceur et de fern»elé,
il savait se faire obéir des écoliers,
qui le chérissaient comme un père et
comme un ami. î^our faciliter leurs
éludes , il publia divers traités dont
nous donnerons les titres. Mais ce fut
son édition des Odes d'Horace qui le
plaça au premier rang des critiques et
des philologues ; il avait préparé des
éditions de V elléius F^aterculus, de Sl-
llus Italiens et de Lucrèce, ainsi qu'un
Dictionnaire de la langue grecque. Des
maladies et des chagrins domestiques le
forcèrent d'lntcrr()m[>re ses fonctions
de recteur, et la mort rem[)echa de ter-
miner les ouviages qu'il avait entre-
pris. Il perdit dans la Heur de l'âge ses
deux premières femmes, toutes deux
jeunes, toutes deux sœurs et [jortant le
nom de Caipzov; 11 fut pleuré de la
troisième femme qu'il avait épousée, des
filles qu'il a\ait eues de ses trois fem-
mes, et d'un fils (pil récompensa tous
les soins de son père et fut à Gœttln^ue
un des plus brillants élevés du célèbre
Heyne. Jani mourut le 5 oct. 1790,
âf!;é seulement de quarante-.sept ans.
Cet auteur laborieux a donné les ou-
vrages suivants : I . Recueil (ïépilhr.'
JAN
tes , de substantifs , de verbes et
d\idi^erbes, avec un Index, alphabé-
tique des dieux et des héros citez les
anciens, Halle, 177i, en latin. II.
Principes de dialectique , aoec un
Tableau de l'histuire de la philoso-
phie à C usage des gymnases, Halle,
1770, en latin. HI. Obseroations
critiques , trois parties, 1784-1786.
I V . Sur l'art poétique chez les La-
tins, 1774, ln-8", en latin. V. Courte
notice sur la poésie latine , Halle ,
177'2, en latin. VI. V Ami de T éco-
lier, programme, 1776-1778, in-4°,
en allemand. Y 1 1 . L'Knélde de Virgile,
traduite en allemand , Halle, 1784,
in-v". VIH. Une édition des Odes
d'Horace, avec des variantes tirées des
manuscrits; un commentaire et une sa-
vante préface, Leipzig, 1778- 1782 ,
2 vol. ln-8". C'est l'ouvragé le plus
important de Jani. Aucun éditeur ou
commentateur latin d'Horace n'a ,
suivant nous, développé dans ses argu-
ments et dans ses notes, avec plus de
goût et de savoir, les beautés poétiques
et les intentions historiques des odes
d'Horace. Il y a eu une seconde édi-
tion de cet ouvrage en 1S09; mais ce
n'est qu'aine réimpression de la pre-
nïière. lîaumgartner a publié, après la
mort de Jani, un ouvrage en alleniind,
Intitulé Eclaircissements et observa-
tions sur les Satires et les Eptlres
d' Horace, d'après les leçons de Jani,
en trois parties, Lelpzi^i; , 1705.
W— R.
JAIVIÇOX. Voy. Gavin,
LXV, 184.
.1 A\I\ (le V. JosF.PH), religieux
du monastère des (irands Augnstlns de
Lyon et vicaire provincial de son or-
dre, naquit dans cette ville vers 1715.
La bibliothèque de son couvent était ,
après celle des J émîtes , la plus consi-
dérable qui fût à Lvon. La direction
en fut donnée vers 1753 au V. Janln,
qui avait de vastes connaissances en
JAN
hi&loirv, et *ur!ool en nuinÏMoalique.
('Vvt lui qui atail fait placer 5ur la
pniiri|ulf porte de celle bibliullièque
rin>crtption sut%aate, conipo>rc par le
Mic bnoiÎBr^ v»«unl •! p«»»lilr« Mbi
Hic iMrnI «I ail«'>«l.
Ric lo<|»uu ur cl «b»anl.
Le F. Janiii ne voulut jaraai» être
inotnbir traucune afatlémif , niJ% il
roi t^•^pomlail a%ef un -rand nomlwr
tle Njvaiit.<^. On fon>er\r daiiN le» bi-
bliothèque* de ^<me^ le> Irllre* qu'il
écrivit à J-F. Se;;«ner. Cn lettre» ont
trait à pluîkieur» ob)rl> d'anliquilc>, no
tamment à la jambe d'un rhetal dr
bitinze trouvée dans la Saune en
ITtitj, et à une planne de même m.tal
découverte pré* de L>on.
$e trouvait une suite de c.i
5(ilumenl di^eten^^ dr l.» i, K .i ; .1
bels cunnu>> / c» . ^n.ii»:!. \l.l,
472). A^anl de se liuer à M)n ^où!
pour ranliquitc, le I*. Janin Nelail t\c-
ciipé d'un iravad a^sez im(Mirlant: il
a\ait réduit en abrégé le* Annulrs de
Ut (Jiirtr sur la ver>ion française du
tongl*in{i'TthingSi\\t par le jes-jiie
Minria dr Mailla, version i|ui furni-iit
doute \olume> in-V", et (|ui fut ceilc^
en 177'), par les l'I*. de l'Oratoire do
^^on, à l'abbé (ilo^ cr qui la pullia
en 1777 i Vov. K- calaioui.r de* ma-
nuscrits de la bibliulliequr dr l.>on,
t. r^ p. li, ett. Il, p.H8).guanlà
Wi/fTfi^r, Ir IV J.iiiin en a\ait lait
liomma;;cen 17G9à ^I. de Moiitaiel,
archevêque de L>on,et aux administra-
teurs du bureau des colle;;es, qui le dé-
posèrent dans la bibliothèque dr crtlc
ville où il est resté inédit. F.ors de la
uppresMon drscouxents, le l*. Janin
ne Cl îîl point devoir adhérer au srhisme
ron^tilulionncl; et, quoiqu'il lût par-
venu à un .ii;e très-avancé, il ne voulut
point quitter sa ville natale ou son mi-
iiivttre pouvait encore être utile aux
fidèles. Pendant le fort de la lerreur,
JAN
79
il ji'él*it ré(u|;ié chez un ourrier en
soie. Veifc la fin dr drceiubie 17U3,
on lui apprit qu*un pav^n venait de
dérou\rir pf rs dr Fourrière un certain
nombre de metlailles Irès-biçn conser-
vée» ; il ^e rendit auNMlùt clirt le pro-
prielj rr, et .idirla un inédnllon de
J) 'liais. a\aul dr 1 entrer
d.i . il fut rrniniiu par
d. rti! m pri-
MH I la rham»
bre dr 'I -^ liie on Mr^e main-
tenant i< ' de rnuiiuerce, il s'y
lrQii«aa\ec (eu Delandine, qui fut de-
pui^ bibliothécaire de la ville de Ljou.
m (Combien de foLs , »*écrie cet écri-
vain, j'admirai m vaste mémoire , les
faits intéressants qu'il } a\ait déposés,
n. va touchante sim-
1 r^ de quatre\ino|s
.i::<. ..,.;«<( DiLiidine, et il pailait lil-
It-raliirr asrc Ir frii dr L jruiieNsc ; «a
':.vil( riait inaltrrablr , et cependant il
allendait la mort, elle arri\a. Inter-
roge la veille et condamné futur iwair
rrlusr df rendre ses lettres de prê-
trise et prêché \i contre-résolution),
il causa t a«ec calme lorsque les bour-
reaux vinrent le saisir et inirrrom
pre ses intrres>.ants entretiens catalo-
gue des manuscrits de la bibliothèque
de \.\o\\^ t. V\ p. 26 . 1^ l,a lèle du
P. Janin tomba sous la hache révolu-
tionnaire le 1.') mats 17î>V (Vov. /rv
Martyrs de lu fui , par l'abbé (iuil-
lon lie Montleon , t. III, p. 3iG, où
sa mort est placée par erreur au 3 jan-
vier, jour où périt un aiilr^ Lyon-
nais portant aussi le nom de Joseph
Jitnin , qui n'était à^é que de vinj^t-
lrdi« ans, et qui était maître de pen-
sion ; vov. eurore Prudhornme, l)ic-
tionn. des individus condamnés à
mort pendant la rè^'ulutiun , t. 11 ,
p. 6). A P.
J A \ I X de Combe- blanche
(Jean\ chlruriiien et oculiste, né à
Carcassonne le 11 juin 1731 , s'ap-
8o
JAN
pllqua spécialement à l'étude des ma-
ladies des yeux. Dès Tàge de vingt-huit
ans , les nombreuses opérations qu'il
fit soit dans les hôpitaux , soit sur des
personnes distinguées de Montpellier,
lui méritèrent les éloges de l'université
de cette ville. Il n'eut pas moins de
succès dans tous les lieux oij il fut ap-
pelé, notamment à Paris , à Toulouse,
à Milan. S'élant fixé à Lyon, il obtint
le titre d'oculiste de la ville , et devint
prévôt du collège de chirurgie. De
toutes parts on venait le consulter ou
réclamer ses soins. Le cardinal de I\o-
han, qui joua un si grand rôle dans
l'affaire du collier, se rendit exprès à
Lyon pour faire examiner ses yeux par
cet habile praticien et se logea même
chez lui. En 1777, le duc de Modène
(François III d'Esté) , âgé de quatre-
vingts ans et affecté de la «ataracte ,
invita le docteur Janin à venir l'opé-
rer; la cure réussit complètement, et le
prince recouvra la vue. Pour luitémoi-
pïcr sa reconnaissance il le nomma
son médecin oculiste, et lui assura une
pension viagère de 2,400 fr. L'uni-
versité de Modène se l'agrégea comme
professeur honoraire , et l'impératrice
Marie-Thérèse lui adressa une lettre
de félicitation accompagnée d'un riche
présent. Thomas, l'auteur de VLloge
de JMarc-Aurèle , qu'il avait guéri
d'une ophthalmie, lui conserva dès-lors
beaucoup d'attachement et lui adressa
une Kpître imprimée dans ses œuvres.
Lorsque, dans lin voyage en Savoie ,
Ducis fit aux Echelles une chute très-
grave, Thomas, alors à Lyon , s'em-
pressa de lui amener Janin dont les
soins contribuèrent au prompt réta-
blissement de son ami. Thomas a ra-
conté l'accident arrivé à Ducis dans
une lettre à M™^ Necker du 27 juin
1785. Sa correspondance en con-
tient quelques-unes adressées à Janin.
En 1787 il reçut de Louis XVI le
cordon de Saint-Michel. Janin s'oc-
JAN
cupa aussi à rechercher les moyens
de combattre les exhalaisons méphi-
tiques, et fit, en présence de commis-
saires, diverses expériences à ce. sujet.
Il résidait à Paris dans les dernières
années du XVIIP siècle; mais nous
ignorons la date de sa mort. Outre plu-
sieurs articles relatifs à son art impri-
més dans différents recueils , on a de
lui : I. Traité sur la fistule lacry-
male, in-8°. II. Ohseri^utions sur
la maladie des yeux , 1767, in-
12. III. Mémoires et Obsenùitions
anatomiques , physiologiques et phy-
siques sur l'œil et les maladies qui
ajfectent cet organe, Lyon, 1772,
in-8° ; traduit en allemand par Selle
( Voy. ce nom-, XLÏ, 540) , Ber-
lin, 1776; ibid., 1788, in-8". IV.
Réflexions sur le triste sort des per-
sonnes qui, sous une apparence de
mort , ont été enterrées vivantes, ou
Précis d^un mémoire sur les causes
de la mort subite et violente, etc. ,
Paris et La Haye, 1772 , in-8''. V.
U anti-méphitique, ou Moyen de dé-
truire les exhalaisons pernicieuses
et mortelles des fosses d'aisance ,
r odeur infecte des égoûts, celle des
hôpitaux, des prisons , des vais-
seaux de guerre , etc. , imprimé par
ordre du gouvernement, Paris, 1781,
1782 , in-8°. VI. Détail de ce qui
s est passé dans les expériences fai-
tes par M: Janin les 18 ^/ 23 mars,
en présence des commissaires réunis
de f académie royale des sciences
et de la société royale de médecine,
concernant l'anti-méphitique , Paris ,
1782, in-8". VII. Dissertations et
Lettres sur le méphilisme et Vanti-
méphitisme, adressées à M. Cadet,
ibid., 1784, in-8". VIII. Réponse
il M. CyRyan (professeur de méde-
cine à Lyon), sur le magnétisme <7n/-
/77<y/, (ienève et Lyon, 1784, in-8°.
IX. La vérité mise en évidence ,
Paris et Lyon, 1785, in-12. On at-
JAiN
JA.N
bi
- î Janin n
àkti a< i llulfl i).- . I :.. CI4U;
»'<KCUJUit at;-' il • • ^\CtlI,
iolilule : / iun tUs
morts fhir I' .rui,uu
\ifur Gurnn . 1 7 b'J , 1 n - 1 2 ( )j: — M .
JAM.N ^^K^ MAnir-Mu-Y).
Iiilrrjlrur rt )• itiulisic, né à IVi«
en 1777 , G( àt bonoM é\nàt% an
collr^e Je Saiule-IUrix , rt , quoi-
que il'un rarjrleie fort doai rt fort
ino«Jr«lr . drbiili Jan« la lilt^alare
.;.. i ■,'!
Du. uMi . 11 .11, dr
ifiiilic fniiipir -• litiéra-
turr. Drs Ir c< ' lU ilr U rr»-
tauration, il p.i nal la Ouo-
tidiftme^ ou il lut ^pcculrmrnt ciurj^é
de rrnsrroblr i'-- » ■^'•Ilri rt de b
rédaction du. l>our 1rs ar-
ticles des ^raii... M publia
rn 1H17 uu rrrticil uiiilulr
lettres ' ' ■ I il
rxprima *! rt
qui rut l*. ' ia
p!'.l*•rM^^ . tie
ia ùii de 1 annre
I " fit impriinrr m>«s
U roiai'ialion un ^rand nombrr d'o-
des pour crlrbrrr Ir* di\rr« r\mr-
mrnts des règnes de I^ais W 111 et
de Qiailes \. Il est Tautrur d'une Vif
de La Harpe, qu'il a composée poor
nnr nourrllr rd.tiun du Cours tle iii-
trraturr ^ publur par A. Co^lr , édi-
tion à laqurlir il a ajouté un volume
conlrnant l l'iurnrn irithfue et rai-
sonne dr^ ilrainrs r! t::^r i rs i!.* l'au-
irur qui ne sont \m> u les au llicjlrr.
On lui doit encore plusirurs éditions
dr rou>ra^r Inlllulc : Paris, l'er-
suillrs et /es pru^inces {f'uy. Drr.AS
DE lioiN Saint JtsT, lAIII. 71 .
En 18 Jl ^16 juin) » il fit rrprésrntrr
au srcond 1 hcatrr-Français une tragé-
die à'OresU qui , avant d'être rnlen-
! '• iiMuljinnée par 1rs rlrve» dr^
lie nirtiffinr et de droit, foc!
oppuvr^, rummr l'on iiait , au j;ou\ri
nemrnt dr rr irmpli, dont Jamii
' !f pailivan.
\ ' , . Il lU firent
nrrulrr dan» ir paitrrrr dr\ billrli q«i
port air ni ; l^s ècuJes Je li.uù et dr
metlecine sont menacées : union et
forte. K la troisirmr rrpré^rniaiion ,
le mini%irrr mt la (aible^ke d'rn or
donner lui-rornir L n. Kn
iH*27 tl'» fr^nrr^ M. I lit re-
II In au Tliralrr ! l.itui\
rritnnr, roni-
triomphr, rn drc 1H27, ut
Janin, laivuut inarhrtét \ .u-
«ra;;r«, jnrmi leuiurls s« Irouvrnt unr
Vie dr I^ui» Wl rt une tra;;rdir rn
xet* {hjirnne ^lanel), dont 1rs qua-
tre prrmirr\ actes u>nl Irr rainés. /^.
J.WKOWSKl. général polo-
nais. I : irt aclne à l'insuirec-
tion ' 1 Si . rt commanda an
Corp^ Jju^ljtmrr poignaisr qui fut
oppfHcr atit Kll"«•^, rt que comman-
I Slr^necLi. Au
< . • n, le corps d'ar-
■re ruvse du r;eneral kreulz s'riait
porté dr Lublm sur la Podiacliir ; Ku-
di^rr Ir suivit de la Vollnnieà Lubliu.
SLr^necLi conçut le liaidi projet d'é-
craser successi\eroent 1rs dirux corps
ennemis. Tandis que U\binsli dr\ait
tomber sur le qénnal kiruU, Ir rurp»
< r, ' rr dr%ait rirr rn-
:au& polonais, sa-
>••<{ . Liiii^iiu\k^Li ;tirivant dr/jmosc,
Kimonno ornant de Pulawi, et
JanlowsLi arrivant de Luk.o\« . De
faus>es démonstrations faites par 1rs
Uuises sur SieroL troraprrciil le ^n-
raandant en chef polonais, cii lui faibanl
concevoir des craintes pour la sûreté
de la capitale de la Pologne, d'autant
plu> qup .TanLow.sLi , malgré les forces
6 .
t^ JAN
considérables mises sous ses ordres ,
ne repoussait point les Rosses , quoi-
que, le 19 juin, un colonel de son corps
se fut battu avec avantage, auprès de I.i-
sobyni, contre toutes les forces de l'en-
ïiemi. Pour couvrir Varsovie, l'ordre
fut donné à Rybinski et à Jankowski
de revenir sur leurs pas. On pense que
dans ce moment encore Jankowski au-
rait pu attaquer avec succès et battre le
corps russe. Il n'en fit rien. Son inac-
tion indigna la nation polonaise : la
plus belle occasion d'arrêter l'ennemi
était perdue. Il fallut se résigner à la
retraite. On demanda la mise en juge-
ment des chefs ineptes qui, ayant laissé
échapper des circonstances favorables,
compromettaient la sûreté de la capi-
tale. Skrynecki fit arrêter |e 29 juin
Jankov'ski et Cakowski, ainsi que plu-
sieurs personnes accusées de complot
en faveur des Russes. Traduit devant
un conseil de guerre extraordinaire
sous l'accusation de haute trahison, au
commencement du mois d'août , Jan-
kowski se défendit avec chaleur et indi-
piation , fit une déclaration solennelle
de son patnotisme, et demanda à com-
battre dans l'armée comme simple sol-
dat, pour prouver à ses quatre fils, di-
sait-il, que leur père n'était pas traître
ik la patrie. Le conseil de guerre ex-
traordinaire ne vit pas dans la con-
duite de ce général un caractère de
trahison ; mais il le renvoya devant le
conseil de guerre ordinaire pour répon-
dre de sa conduite stratégique vis-à-
Tis l'ennemi. En conséquence, il fut
ramené en prison. Ce jugement irrita
le club patriotique dans lequel sié-
geaient les hommes les plus exaltés, et
q|Ul ne voyait partout que compIcHs et
trahisons. Le 15 août, après une
sél^ce très-orageuse de ce club , des
furibonds se portèrent ^nr le château
où Jankowski était détenu avec des
compagnons d'infortune ; les portes
furent forcées Sans que les troupes et
JAN
la garde nationale fissent beaucoup
de résistance. Jankowski et les autres
prisonniers furent cruellement mutilés,
puis pendus par des brigands que sou-
tenait toute la populace. Les mas-
sacres continuèrent le lendemain ; et
ce mouvement démagogique ne fit que
hâter la chute de la Pologne. D — G.
JAXXEQLIjV (Clément) est
plus connu sous le nom de Cle-
meris non pupa. On ne sait pas quel
pavs lui a donné le jour; M. Fétis
croit qu'il habitait Lyon, où la plupart
de ses ouvrages ont été publiés ; mais
il avait été auparavant mailre de cha-
pelle de Charles-Quint. La musique a
eu en lui son Rabelais, puisqu'il est au-
teur d'une foule de morceaux curieux,
tels que le Caquet des femmes, la
Bataille de Marignun, ou la Défaite
des Suisses en 1515, le Chant des
oiseaux, et les Cris de -Paris. Il laissa
en mourant sept livres de motels et une
messe des morts. Ses chansons fran^
çaises, publiées in-4*^ en 1559, ont
un meilleur st}le et un chant plus
agréable que celles des autres maîtres
du même temps. Choron, qui a ressus-
cité parmi nous le goût de l'ancienne
musique, a fait exécuter avec succès de
1830 à 1832, par ses cent cinquante
élèves de la rue de Vaugirard, la Ba-
taille de Mariffnan, et les Cris de
Paris. Ces deux ouvrages décèlent un
génie supérieur. Le second a été giavé
dans la Gazette musicale de Paris,
du 22 août 1839. F— le.
.TAWE^t'IX, sieur de Ho-
chcfort (Claude), voyageur français,
était né à Ciialons-sur-Mame. 11 avait
accompagné M. de lîellièvre , ambas-
sadeur de France en Angleterre pour
renouveler l'amitié entre les deux pays;
mais sa jeunesse lui faisant désirer de
courir un peu le monde , il quitta
Londres et le service de l'ambassadeur,
après avoir assez bien appris la lan-
gue anglaise, et alla à Dieppe. Le ca-
JA!f
JAxN
as
pitaine d'à* iia\ire prit k partir le
reçvt à %on bord comme soldât dans
■■e conpat;nie qu'il pmbar(|uait , et ,
\m Couvrant quelque rapariu , le fit
Mil éaiiain On mit à la xiiie le 5
■•«embre 1637; api>5 une iraver»ée
pénibit, on arn\a »ur la céte de Bar-
MTÏe que Ton ^ui%it jo^qu'au rap
Blâar, où l'on drbarqna, afin d'r con-
flruire des barque* •• qui sont ncres-
• aaires, dit Taiiteiir, pour entrer dans
« la rivière du Senr^a , 1rs narires
« étant ronlraifx 'rr à
« la rade. «• i.r- •'» *i
(arottche» q»« Ton ne pou^.i
•▼et eua qu'en depmant à q'.>
teste les ol.jets que l'on >oulaii don-
ner en eclianpe de leurs poivrons; il»
les venaient chercher , lais»aient ce
qu'ils apportaient, puis s*enfu\ aient an
plus vite. Quand on fut entré dans le
ileuve , on s'as-ança jusqu'à Hieurt , i
trois lieues de son embouchure; on bi-
lit une maison par \e secours des nè-
gres, et l'on s'occupa de commercer «Tec
eux. hnsuilc le capitaine rt une partie
de son monde remontèrent le Heure
jusqu'à 'lerrier-l\on;;e , à soixante-dix
iienes de distance , en continuant i
traiter a\ec le» indif^énes, des cuirs,
de l'noire, de la pomme, des plumes
d'autruche, de l'ambre pris et de l'or.
L'insalubrité du climat décida les
Français à quitter le pa^s ; ils allèrent
aux lies du cap Vert, > prirent des ri-
rres, et en6n revinrent à Dieppe en
163H. Janncquin publia le récit de ses
courses sons ce titre : l'oya^r de Ij-
l>yr ou royaume de > '■- long
du \iiitr,ai>n fn n 't drx
luiiilunts qui sont le long ^e ce
Ji/uoe , leurs coutumes et jnçims de
n\re, 1rs particularil'^s les plus re-
miir,;mi/jlcs de ce pays, Paris, 1 6 H,
in-lii. Il cA évident qne par le nom
de Libye. Iannequ;n entend le Sahara ;
liii-inéme , dans sa préface, convient
qtté ce pays est fort éloigne de ceux
qv'il a Tos. Suivant les idées de son
temps, il penNP que le Ni^er, aprè»
avoir arrogé le royaume de 'lombouf-
tou, qui doit être le Ilambara , se di-
vise en trois bras, dont l'un tombe
dans la mer entre le déseit et la con-
trée dç Sénéiial , et le troisième, dont
le roors est plus luo^ que le> d< ux au>
très, se décharj;e près de la côte dt
Guinée. On «oit que ces opinions
avaient la lér' ' ^ ^* .îanl
la plupart dr^ j lin
SOI c> . il ne lient ao-
cuii' nal,et l'on ne ton-
nait la dalr de »ua retour nnr d'aptes
celle qu'il énonce dans le titre de *on
livre. Mais ses observations sur les
mœurs et les iisa;jes des nèj;res sont as-
sei instructives, souvent très-exactes et
très judirieuses, quoiqu'il montre par-
fois une ;;ro^sière crédulité. Ceux qui
ont exploré la contrée où coule le Sé-
négal reconnaissent que beaucoup de
cin :;ime il'é-
po , . L— s.
j A .\ O I) , Jl \N Ji».sIPH-JOA«
cHiM), ma^iitrat, ne en 1761 à Clair-
vaux, petite ville du Jura , était neveu
de Vernier, mort pair de France en
1818 (roi VihMHi. XLMII ,
252). Il aclieva ses études à l'univer-
sité de Besancon, el fil en 17R6 sei
débuts au barreau de cette ville sous
le patronage du professeur (^urvoiiier
il oy. ce nom, X , \22) , dont il
avait mérité l'estime par son amour
pour le travail, et qui lui portail nn vif
intérêt. Mal^^ré l'éclat de se premières
plaidoiries , il quitta Besançon pour
alUr s'établir à l.ons-le-Saulnier où il
ne tarda pas ï jouir de la réputation
d'un bon jiinsconsnlte. S' étant montré
dans le principe favorable à la rrvolu-
tjon, il fut , en 1790, élu membre du
conseil-oénéral du dt-paitemenl da
Jura. 11 était un des coura^eox admi-
nistrateurs de ce département qui ten-
tèrent, au mois de mai 1793 , d'orga-
6.
8i
JAIS
JAN
niscr des moyens île résistance à la tv-
rani'.ie de la Convention, et fut comprij
dans le décret du 27 juillet qui les
mandait à la barre de celle assemblée
pour rendre compte de leur conduite.
Ayant, ainsi que ses collègues, refusé
prudemment d'obéir à ce décret, il dut
s'éloit,ner et se tint caclié jusqu'après
le 9 thermidor. Lors de la mise en ac-
tivité de la conslitullon de l'an 111 , il
fut envoyé par son département au con-
seil des Cinq-Cents où il se fit remar-
quer par sa modération et la sagesse
de ses vues. Après le 18 brumaire , il
fit partie du corps législatif qui Télut
un de ses secrétaires ; et, lors de l'ex-
piralion de son mandat, en 1809, il
lut continué dans ses fonctions qu'il
remplissait encore à la restauration.
Nommé, en 1804, juge au tribunal de
1^^ instance de la Seine, il en fut fait vi-
ce-président en 1814; passa en 1829
conseiller à la cour royale de Paris ,
et mourut au mois de mal 183G.
W— s.
JAXSSEXBOY ou JA\S-
SEXS, en hùn Janscnius , est le
nom de cinq frères qui se distinguèrent
dans le même ordre religieux. Ziriczée,
petite ville de l'ile de Schowen (Zé-
lande) fut leur patrie. Cette ville
ayant été reprise par les Hollandais
sur les Espagnols , qui s'en étaient
emparés en 1575, la famille Jans-
senbov , ainsi que d'autres, clieriha
un asile plus favorable à l'exercice de
la religion catholique, à la propaga-
tion tt à la défense de laquelle se
consacrèrent les personnages dont nous
allons parler. — Nicolos Jansskn-
itOY naquit dans la seconde moitié
du XVr siècle et prit l'habit des
dominicains à Anvers. Aux éludes or-
dinaires il avait ajouté celle des lan-
gues orientales et du grec, parce qu'il
était persuadé que cette connaissance
lui serait utile dans les discussions avec
les miuislrcs de la nouvelle secte qui
comnieni^ait à devenir nombreuse. D'a-
bord régent, puis supérieur du collège
de Lière, dans le Brabanl, il forma ses
élèves aux lettres et les fortifia sur le dog-
me, pour les mettre en état de ne pas
craindre les vaines subtilités des minis-
tres protestants. Professeur de théologie
à Louvain, il prit ses degrés dans l'uni-
versité de celte ville. Ce fut là aussi
qu'il publia ses premiers ouvrages, ce
qui ne l'enipécha pas de travailler avec
zèle à la conversion des hérétiques et
de s'opposer de toutes ses forces aux
progrès de l'erreur. Le succès de ses
travaux dans les Pays-Bas porta le
nonce apostolique ( Jean - François
Conti) à l'envoyer, avec le P. Jacques
de I>ro\ver , dans le Danemark, pour
essayer de ramener les luthériens au
sein de l'église. Après avoir parcouru
avec un zèle prudent et généreux le
Uolstcin, la >iorvège, cl quelques au-
tres provinces du Nord, il alla à Uome
rendre compte à Grégoire XV et à la
congrégation de la propagande de tout
ce (ju'il avait fait dans ces contrées
et proposer les moyens qu'il jugeait
convenables. Ses vues furent goûtées,
et muni de nouvelles instructions, de
nouveaux pouvoirs, il partit pour les
mêmes provinces en 1G23. La con-
grégation des cardinaux voulut qu'il y
fût accompagné de deux de ses frères,
Corneille et Dominique. Frédéric III,
roi de Danemark, leur permit de prê-
cher la religion catholique dans tous
ses états. Les zélés missionnaires su-
rent profiter de cette liberté, et Nico-
las Jansscnboy ne se laissa déconcer-
ter par aucune des entraves et des
persécutions dont ne purent le ga-
rantir* ni la protection du roi , ni la
conversion de plusieurs sectaires. Il
obtint de Frédéric le libre exercice
de la religion catholique à Frédé-
rjkstad, ville nouvellement bâtie par
ce prince dans le Ilolstein. Ln consé-
quence des Lettres que donna Frédé-
JAN
JAÎ1
8S
rie III tn 1G*i.'>, plusieurs famille
àkpenéti dans If7> l'ro\inccs-I nie!» >e
réfugièrent dans la nouvelle %ilie, pour
y exercer leur relipon. Noire fervent
religieux v établit une paroi»se el fut
le |Memiri . ' ' • - lU nais-
«anl. I^s ut p:\4
i-3 ilu irlour à la
^1 la \if;ibiife ilu
piMiir lr> niijiriiijit d'éclater, ils l.i-
cliairnt de se drdnmmaper par queltpie
autre voie ; et, n'osant plus atiaquer le
pasteur, ds e»<va>èreul de séduire adroi-
tement au moins unepaitie du trou-
peau, en répandant un écrit récemment
composé par Jean Muller, ministre
à Hambourg, sous c<^itre: .Icrrtis-
srrnnit ntrrssm'rf. Nicolas Jansen-
bov motirul le 21 nov. ItiilV. l'arini
Cfux qui l'ont fait connaître, on doit
ciler Jran-Adolp**e, auteur des .-In-
nulfs des évéques de Sles\ick, qui en
fait le plus grand elo^e. Il a laissé:
I. Pu.it'^yritfur de saint l humas
(FA (juin, I. ou vain, 1021, m-8". II.
/ ie de saint Duniinitjuc, Anxeis,
1622, i n - 8" . III. - //i imadi'rrsio-
nés et schulîa in apolugiam niq)rr
éditant de vita et nwrir Jtnjnnis
DunsS(oti,adi,'ersus II. P. F. .lira-
Juimiun HuAÙum. urd. Prit die. Jk
T. M. rt List, ertirs. srn'fttureni, Co-
logne, 1G22. IV. Defemio Jidci ra-
iholicœ et a/tostuliiit rvnianœ uppo-
sita admonitioni necessnriiz Jo^innis
Mullfri,lutherani prceditantisllam-
fmrgensis, .\nvers , IGiJl , in-H".
C'est la rcfulalion de V.ti'rrtissemrnt
nécessaire que nous avons mentionné
ci-dessus. V. Bénéficia FF. Pnzdi-
caturibus a dixui i^ir^ine rollaîa ,
Anvers, 1632, in-t2. Nicolas Jans-
senboy publia aussi une traduction en
latin de V Instruction des prêt ers. de
Molina , cliai Ireux espagnol. (^)ucl(|iies
personnes attribuent celle IraJuriion
au P. Raymond de Ladesou, mais il pa-
rait que c'est à tort, et la iS oui'fi/e Ai-
fdiothèque r^fHi^nole (tom. 1*^, pag
114 la donne formellement au V.
Janssenboy, disant qu'il la traduisit sur
la septième édition f>pa;;nole, et la pu-
blia a C^lo:înf , i An\eis, etc. Nie nias
.Il ' . a aussi donne une Iraduc-
I tli s lias de cun science de
l'icru* i.cdrsraa, dominiraiii. K.nfin,
on conservait jadis maiiuscnte au cou-
rent des dominicains d'.\nxers une
apologétique qu'il avait faite des note^
et scbolies indiquées ci-dessui , sous
le n" III. — llurneille Ja!««s$» MioY ,
après avoir fait ses études à Kouxain.se
rendit en Italie «ers le roromencemrnl
du Wir siècle. Il avait pris l'babit
des dominicains au courent de Kois-
le-I)uc, lorsque cette sille était encore
sous la doiiiiiialion du roi d'Kspagne.
Ouoique étranger dans la Péninsule, il
se mit bientôt en état d'exercer le mi-
nistère de la parole dans les villes dr
Ix)mbardie, et il enseigna dans les éco-
lo de llologne. Ij Propagande , in-
struite de .va capacité el de la \i\acilé
de *a foi, le fil partir, eu 1623, pour
les provinces du Nord, où il arriva ai ec
son frère Nicolas, et ce que l'un faisait
dans le llolstein poui le rétablissement
ou l'accroissement du catholicisme ,
l'autre tachait de le faire dans la liasse-
Saxe. Les tra\aux, les dangers mêmes
pour sa vie, ne purent ralentir le zèle
de Corneille Janssenboy , qui ne fut
pas toujours couronné du succès qu'il
méritait. Ses supérieurs l'ayant rap-
pelé en Flandre , il s'arrêta quel-
que temps à Moniclendam, petite yille
àfs Pays- lias , où il eiil quciijUC'
consolalion'i et beaucoup d'épreu-
ves. S'eJ.int embarque pour aller à
Home instruire le Saint-Sicge lie l'é-
tat de la religion dans les Provinces-
t^iiies, une tempête siolente assaillit
If bâtiment qu'il montait, cl il périt le
I I octobre 1637. lu de sts frères, Ici
passagers cl tout l'cijuipage furent avec
lui la proie des liol.<;. Pendant le se-
te
lAN
jour que Corneille Jan&senboy fil en
Hollande, il écrivit plusieurs ouvrages
de piete ou d histoire qui n ont ete im-
primés qu'après sa mort. Jean Muller
avait répliqué à la réponse de ISicolas
Janssenboy dont nous avons parlé au
commencement de cet article ; comme
Nicolas était mort, son frère Corneille
crut que c'était à lui de venger la mé-
moire de Tauteur outragée par le mi-
nistre luthérien ; il fit donc l'apologie
de l'ouvrage intitulé: Défense de la
foi catholifjue, eih publia en 1635.
— Dominique Janssenboy, troisième
frère, avait aussi pris l'habit des do-
minicains au couvent de Bois-le-Duc;
et, envoyé par le Saint-Siège dans les
provinces du Nord, il poussa plus loin
que les deux précédents ses jours et
ses travaux. La ville de Hambourg fut
le théâtre de ses combats et de ses
disputes avec les docteurs delà réforme.
Ce fut en 1623 qu'il arriva comme
prédicateur et pasteur apostolique dans
cette ville où il eut à souffrir beaucoup,
mais où il eut aussi le bonheur de ra-
mener plusieurs apostats au sein de l'é-
glise. Le plus ardent de ses ennemis
fut encore Jean Muller, qui publia
contre lui un libelle, et fit tant que le
sénat ordonna au P. Dominique de
sortir de la ville, sous deux jours. Cet
ordre néanmoins fut révoqué avant son
exécution; mais, en 163i', notre reli-
gieux fut contraint d'aller ailleurs, et
se retira d'abord à Cologne , d'où ,
après un fructueux apostolat, il crut
devoir entrer au monastère d'Anvers.
Vers 16 4-3 ses supérieurs l'envoyèrent
à Amsterdam, où il mourut le 14 mars
1647. Pendant son séjour à Colo-
gne , il avait publié quelques ouvra-
ges en latin et en allemand pour expli-
quer les pratiques de l'église romaine
attaquées par les luthériens, et montrer
que la doctrine de ceux-ci n'était pas
moins o{ posée k l'Ecriture-sainte qu'à
toute la tradition. A Anvers il fit im-
JAW
primer, en 1643, une traduction fla-
mande de l'ouvrage italien sur les mi-
racles qui s'opéraient tous les jours
devant l'image de saint Dominique,
dans l'église deSoriano. Son but était
d'opposer ce témoignage public aux
impiétés des nouveaux iconoclastes.—
ico/ia/Y/ Janssenboy, frère des précé-
dents, avait fait profession dans le cou-
vent des dominicains de Bois-le-Duc.
Il était dans cette ville quand elle fut
assiégée et prise par les Hollandais sous
la conduite du prince d'Orange (1 629).
Les conditions de la capitulation furent
que tous les ecclésiastiques et religieux
sortiraient de la ville à la suite de leur
évéque, MichelT)pnovius, dont le P.
Touron a donné Thistoire. Mais Léo-
nard Janssenboy ne tarda pas à y ren-
trer par ordre de ses supérieurs, qui
confiaient cette mission à sa haute pru-
dence, en lui permettant de porter
l'habit séculier. Il y exerça ce fructueux
et obscur ministère pendant trente-
quatre ans, et y termina sa carrière le
21 février 1663. Dans ses moments
de loisir, le fervent missionnaire com-
po.ftit de petits ouvrages de dévo-
tion. Ses cantiques spirituels, écrits
en flamand, furent imprimés à Anvers
^fi 1635. Il a aussi donné une histoire
abrégée de quelques saints personna-
ges de l'ordre des dominicains, qui
fut imprimée en 1644. — Ambroise
Janssenboy, cinquième frère des pré-
cédents , entra aussi dans l'ordre de
Saint-Dominique et s'y distingua éga-
lement par son zèle et sa piété; mais
sa vie est moins connue, et il ne pa-
raît pas qu'il ait écrit. Il se rendait
en Italie avec son frère Corneille ,
lorsqu'il périt sur mer, avec lui et
tout l'équipage, le 11 oct. 1637. On
peut consulter sur ces religieux célèbres
les œuvres du P. Echard, du P. Tou-
ron, et le Dictionnaire de Richard ,
tous auteurs de Perdre des Domini-
cains. B — D — E.
JAN
JA\SSK\S (Jaîi-NN lUvnsK
^éu^r^l liuliatiibu , or \r X'À oct.
I76i à Niiur^iue , ou son ji«re , of-
fiper au rr^iuiciil J'.ViUa, clait en
f^arniHin , cnlia, a i'^-^r de quiuxc
«a», couime cadcl ilaus re mciae ré-
pBcnt , ou il (loml bienlùl oUicicr.
A)aut montré du dooueroent au parti
oran^isle , il fui rtcom\ycuu par le
gra<k (le capitaine Jau> le rr^i-
OMOl de NN'arirnJcbcti, et 6t la cam-
pagne de ITDit coiiire Ir» bran-
cà\*. ((richement blessé le 15 septem-
bre devant Meuia , il continua de
scnir l'année >ui\ante , même en
179Ô, nial;;rc les rlian;;rmenls poli-
tiques qui t'opcrrrent en Hollande
et renverseren* le slalliouderat loule-
fui $es l)le»5ure* rol( (;uerie5 le forcè-
rent de demander m retraite, qu'il ob-
tint A>ec une pension : il a\ait à peine
trente-trois au»; mait «es talents, qu'il
n'atail encore déploies que sur un
théâtre bien circonvcrit , ne devaient
pas rester inutile» pour U patne, et
J^nssens était destine a fournir encore
une longue carrière d'activité. Km-
plové, .vous les au>pices du nouveau
gouverneroeut balave, dans l'adiuinis-
tratton des troupes françaises a la solde
de U Hollande, il fut promu, en
mars 17^J7, aui fonctions de coramis-
uirc -général de cette administra-
tioo , et pendant cinq ans qu'il le«
exerça , il fut à diTerses reprise en-
toéà l'aris, aGn de prévenir des chan-
f^emcnt» vexaloircs et onéreux que le
gouvernement français prétendait ap-
porter aux stipulations arrêtées entre
ces deux elals pour Tenlrçlien des trou-
pes. Il s'acquitta de cr. missions avec
autant «^intelligence que de probité.
On avait misa sa du*posi«ion des som-
mes considérables dont il n'était pas
obligé de rendre compte : son gouver-
nement le Ml avec surprise les remettre
à son retour, sans retenir autre cliose
que ses frais de voyage calculés avec la
JAIS 87
plus stricie économie. En 1802 , ton
adffl iioiration avant élc supprimée, il
fut ii'iriime ^^••l>e!^eu^ et ^éucial en
cbei ilr L culoiiir du (lap de Uotee-
K>|ieijiice. Aium:.>i (),ir .ipieenreau
rliel-lieu de cri rtjltli riiicnl ce^sa do
fiarailre indispenvable , il alla visiter
'intérieur des terres, pénétra jusqnS
dant U Cafrerie, et conclut un traité
avec un roi ou clief nommé (îaVka. U
aurait pénétré plu?^ loin et recueilli une
plus ample moiMon de connaiN^ancet
Mir l'intérieur de cette partie de l'Afri*
nac. si la rupture de la paix avec 11
Ctrande llretj::T)r ne l'ar.-t-t rappelé aa
Cap dont Ir ' . rut la con-
quête. \ I j^ . er, le» co-
lons,oubliant leur divisions,
secondèrent avec t._^ - . icnt les dis-
positions lie défense prises par letir goa
verneur. Janstens ne désespérait point
d« mettre la colonie à l'abri de toute
atteinte, lor>qtt'il reçut de son gouver-
nement l'ordie de diriger la meilleure
partie de ses troupes europécDoes sur
batavia. Cet ordre , néCMté par la
fdns grande imnoi lance de Batavia re-
ativement au Cap , ne pouvait avoir
d'autre re»ultat que la reddition de
cette dernière colonie, des que Iw An-
glais s'y présenteraient en force. Aussi
le débarquement de dix mille des leurs,
sous les ordres du général Baird, dans
les premiers )oui» de janvier 1806,
rendit impuissants tous les efforts da
gouverneur Janssens qui n'avait plus
sous s« ordres que din-neuf cents hom-
mes, presque tous colons et Hotten-
tots. il es>ava néanmoins de resi>ter ;
mais trahi par un bataillon étran;:ei
qui faisait partie de son corps, et qui
lâcha pied au commencement de I at-
taque laite le 8 janvier par les Anj^lais,
Xan:»6eii5 obtint du moins une capitu-
lation honorable. 11 fut stipulé que les
braves restes ûdcles au gouverneur hol-
bndais .seraient transportés dans leur
patrie avec leur chef, et qu'Us ne se-
88
JAN
JAN
raient pas considérés comme prison-
niers. Il demeura encore quelques se-
maines au Cap avant de s'embarquer,
et trouva l'approbation de sa conduite
dans les témoignages uuaniyies de res-
pect et de regrets que lui donnèrent les
habitants de la colonie, sur laquelle il
n'exerçait plus aucune autorité. De re-
tour en Hollande, il fut accueilli de la
manière la plus flatteuse par son nou-
veau souverain Louis-Napoléon , qui ,
comme on sait , s'était fait Hollan-
dais, et manifestait à ses nouveaux su-
jets la préférence la plus marquée sur
les Français. Janssens se fit d'ailleur§
un titre particulier à la bienveillance
de ce prince qui s'occupait très-spécia-
lement de sa cave , en lui faisant hom-
mage, à son débarquement, d'une pro-
vision très-précieuse de vins de Cons-
tance et du Cap (l). Il fut, au mois de
juillet de cette même année, nommé
secrétaire-général du ministère de la
guerre avec le titre de conseiller d'état.
11 présida en cette qualité les sections de
la guerre et de la marine, fut intendant
de l'armée du lihin, directeur-général
de l'administration de lagucn e,et enfin,
en 1807, ministre de ce département;
niais il ne conserva pas long-temps ce
poste. L'instabilité du roi Louis dans
le choix des hommes était égale à ses
bonnes intentions ; et la faveur dont
Janssens paraissait jouir auprès delà
reine Hortense détermina sa disgrâce.
Il conserva néanmoins le grade de lieu-
tenant-général et le titre de conseiller
d'état avec une pension de 8,000 flo-
rins. Après avoir visité la Suisse et
l'Italie, il reparut à la cour du roi
Louis qui , revenu de ses préventions ,
lui aurait confié le gouvernement des
Indes-Orientales , si son abdication
(i) On peut coiMuIler, ^iir les soins particu-
liers que Louis Bonaparte donnait à ses celliers,
■ es mifiuoires intitulés /a Cour Je Hollande sous
I» règne de Louis- Napoléon, par un auditeur, Pa-
rii, i833, r vol.in-l".
n'eût empêché l'exécution de ce-projet.
Chargé par le gouvernement provisoire •
de Hollande d'aller porter à l'empe-
reur cette nouvelle, et d'apprendre ses
intentions à l'égard de ce pays, Jans-
sens eut un entretien de plusieurs heures
avec Napoléon qui , après avoir écouté
attentivement ses réponses à une foule
de questions qu'il lui avait adressées
sur la situation intérieure de la Hol-
lande , garda d'abord un long silence
qui laissait le général Janssens dans
une pénible incertitude, puis finit par
rédiger lui-même le décret qui réunit la
Hollande à l'empire fiançais (9 juillet
1810). Dès celte époque l'empereur
ne cessa de témoigner son estime à
l'ancien ministre de son frère; il le fit
d'abord porter surle tableau des lieu-
tenants-généraux en activité, et le nom-
ma gouverneur-général des anciens
établissements de la Hollande dans les
Indes-Orientales , en remplacement du
général Daendcls ( Koj. ce nom ,
LXII ,10). A son arrivée à Bata-
via , après une traversée de près de
quatre mois (1811), Janssens trouva
une armée d'une force nominale as-
sez considérable, mais où l'oii ne comp-
tait qu'un petit nombre d'Européens,
la plupart invalides ; le reste se com-
posait de nouvelles levées javanai-
ses, mal disciplinées et mal comman-
dées. La désertion et les maladies
(une épidémie régnait alors à Batavia )
achevaient de rendre les moyens de
défense insuffisants en cas d'attaque
des Anglais ; enfin, de trois mille sol-
dats aguerris que l'empereur avait l'in-
tention d'envoyer dans la colonie ,
troi . cents seulement parvinrent à celte
destination. Ainsi Janssens élait pour
la seconde fois condamné , malgré son
dévouement et sa capacité, à céder de-
vant la supériorité numérique des An-
glais. Ce fut au mois de septembre
1811 qu'ils parurent devant Batavia.
Lord Minto, gouverneur-général des
jAn
JAW
)Bs an<;biNrs (lan> Ira Indrv ,
i|»a{;njil cti pcr^minf rcilf «!>«•-
Alion. La ré^i^tanrr tic Jatis>rii% fut
Msti brillanle que maDirtirrusr. I,or»-
qof , dam la journrc du '26 »q)trml*re,
il se «il iraprlucu»riiiriit attaqué dans
Ms rftranrlirn)rnt> , une forte e\plo-
aion M fit eiitriidre. C^ait une re-
dovle que le major Muller avait juré
|j veille , en quittant son <;enéral , de
faire |i!utÀt vauler en l'air arer lui et
toute »a troupe, que de la rendie à
Tennemi : il Imt parole et trouva une
mort i^lorir-ise >(mi% 1rs drlu:^ de celte
redoute, »jiii en*e\elit a la foiN vf* braves
coropa;;iH)ns d'armer et le^ a«< ailiaiit».
Tanl d heriiÏMnr fut inutile; le* Java-
nais , frappa d'une terreur panique ,
prirent la fuite de toutes parts. Jairv-
sens , obli<;é d'ordonner la retraite ,
faillit être tué par un détachement de
raralerie an;;lai>e ; il ne dut la vie qu]à
la gcnéroMte du commandant ennemi
qui , n'aspirant qu'a le faire pM^on-
nier, le protégea contre scn troupes,
irritées de la rf*>istancc des llollau-
dais. Fanenuà Buitonzor^, aprrs avoir
incendié sur sa route des roa^.i<ins
d'epicene, J.in>sens refusa la capitu-
lation qui lui lut olfcrte par lord Minlo.
Comme il ne pouvait tenir dans cette
position avec le peu de troupes qu'il
conservait encore, il se porta sur Sa-
maran;;, où il reçut dt<. princes indiens
quelques renforts qui l'altandonnèrent
à la première attaque. Ne se trouvant
entouré que d'un petit nombre d'ufB*
ciers, il fut oblijjé de capiîult'r avec l'en-
nemi qui alors lui imposa de dures con-
ditions. 11 f;ii transporté comme prison-
nier en .Kn^lclerre avec son état-ma-
jor, tandis que ses autre, oftîciers fu-
rent reléj;uesau Uen;;ale. Au mois de
novembre 181-2, il lui fut permis de
se reiKÎrc ni France, sur sa parole de
ne point suvir contre la (irande-Iire-
tagne qa'il ne fût échanp;é. Kn arri-
vant à Paris, il demanda que sa con-
doile fût )u{;ée par un conieil de (guerre.
•« J'ai moi-mcme rx.iminé votre af
« faire, lui dit \apolroii ; je vous ai
•• justifié coropleti-mrnt , et je vais
•' \ou^ rmplo>er a l'intérieur. »* lui
effet, il fat nommé au commandrinent
de la '.W^ division militaire, dont le
cbef-liru était à (ironin{;ae; il fut en
cotre indemnisé de ses pertes] et créé
baron d'empire. 1^ «^éfféral Jans^en^ ^e
signala par la sa.'e>»e avec laquelle il
reprima, v' ' " i
siiirerlion ' '
Kri^e; il ; ne fonire le ic--
sentiment . l . lis le comte de
nmtinrl Hoon , qui était tombe dan»
leurs mains à la suite du soulèvement
de ses anciens vas aux. Des frégates
anglaises avant paru devant Ham-
bourg, Janssens, qui prévoyait la pos-
sibilité qu'un ordre lui enjoi;;nit d'agir
contre ce» forces, rajipelaau pouverne-
menl français qu'il n'était pas encoir
échangé , et que par con<e.)ueiil l'Iinn-
neur s'oppONail à ce qu'il fut emplo\p
de ce ciite. l.'einpeieur app:i)ii^a re
scrupule , et fit passer sur le rluinip
l'honorable général a b *i* dniMoii
militaire, à Mézeres. C'est la qu'il re-
çut enfin l'acte de son échange au mois
de février 181 J. L'année suivante, au
mois de mars, sur l'ordre qu'il en avait
reçu, il ne laissa dans les places- fortes
de sa division que le tier.s des trrîupes ,
et vint avec le reste , qui se montait à
six mille hommes, joindre l'empereur
à Heims. Napoléon voulut alors lui
donner le commandement d'une divi-
sion d'infanterie sous les ordres du
marerhal Nev; mais Janssens alle;;ua
son peu d'c\périenc#poiir faire mou-
voir de r;randcs mas>es devant des en
nemis si nombreux. CjC refus tnoJcste
TIC parut point déplaire ; et l'enipcieur
voulait le renvover à >Iozières avec des
pouvoirs trcs-elcndus. 'Nouveau refu.s
du général, qui objecta que, dans celte
position, il aurait sans doute les Hol-
9^
JAN
landais à combattre, et qu'il ne pourrait
s'y résoudre : alors l'empereur lui dit
d'aller attendre à Pans que les cir-
constances changeassent. Il y resta
jusqu'à l'entrée i\eS' alliés , en conser-
vant toujours SCS appoinleujents , et
donna ensuite sa démission du ser\ice
de France. Rentré dans sa patrie en
avril 1814, il offrit ses sersices au roi
des Pays lias. Ce prince, oubliant que
Janssens avait scr\i le parti opposé au
sien, p(tur ne se rappeler que les blessu-
res qu'il avait reçues en 1793 en com-
battant sous ses ordres , lui conserva
le njrade de lieutenant-général et le
chargea de coopérer à l'oroanisalion de
l'armée du nouveau royaume des Pays-
Bas. Janssens y fut ensuite chargé de
l'administration de la guerre , avec le
titre de commissaire-général et le rana
j , . j, "^ . , "
de secrétaire d ciat ; mais, sur sa de-
mande réitérée, le roi accepta sa démis-
sion de cette place ; et depuis lors ce gé-
néral a vécu dans la retraite. 11 est mort
le 1^*^ juin 1S35, laissant peu de for-
tune à sa famille , mais la réputation
la plus honorable. 11 avait à (les épo-
ques antérieures été successivement
nommé commandant et grand'croix
des ordres de l'Union et de la Réu-
nion , officier , puis commandant et
grand -officier de la Légion -d'Hon-
neur, grade dans lequel il fut confirmé
par Louis XVI II ; enfin le roi des
Pays-Ras le créa grand'croix et chan-
celier de l'ordre militaire de Guillau-
me , et lui conféra le titre d'écuyer
pour lui et ses descendants. D — r — r.
JAWIKU (Antide), célèbre
horloger, né à Saint-Claude, le 1*^^
juillet 17.j1, étai#fiis d'un simple la-
boureur qui s'était fait de lui-même
horloger et qui contribua beaucoup à
étendre cette branche d'industrie dans
les montagnes du Jura. Son père,
dont il a parlé plusieurs fois avec en-
thousia^rae dans ses ouvrages, lui don-
na les premières notions de la raécani-
JAN
que. Il eut ensuite pour maître l'abbé
Tour nier {J'^oy. ce nom, XL\ ï, 375),
qui lui enseigna les éléments du calcul
des rouages par une méthode dont il
était l'inventeur. Doué d'une mémoire
prodigieuse, en quittant cet homme ex-
traordinaire Janvier écrivait ses leçons,
qu'il a publiées textuellement bien long-
temps api es dans la deuxième édition du
liecueû de ses machines. L'éclipsé
du l^"^ avril 176^ lui inspira un goût
irrésistiblepour l'astronomie ; et, avant
sa quinzième année, il avait exécuté,
d'a^^rès le système de l'abbé ïournier ,
une sphère mouvante qui reproduisait
toutes les révolutions des corps célestes.
Il présenta cette ingénieuse machine,
en 1768, à l'académie de Besançon,
dont les éloges fixèrent l'attention publi-
que sur le jeune artiste. Les magistrats
de celte ville l'accueillirent surtoutavec
une distinction inusitée, et pour l'enga-
ger à s'y fixer lui accordèrent des let-
tres de citoyen qui lui furent expédiées
au nom de son père (1), parce qu'il
n'avait pas lui-même l'âge nécessaire
pour qu'elles pussent l'être au sien.
Après avoir passé à Besançon quelques
années qui furent sinon les plus heu-
reuses, du moins les plus calmes de sa
vie, il se rendit à Paris, pour s'y per-
fectionner par la fréquentation des ar-
tistes et des savants ; 11 s'y lia particu-
lièrement avec Ferdinand Bertlioud et
Lalande dont les ouvrages avaient recti-
fié ses premières idées (2), et en reçut
de sages conseils qu'il sut mettre à pro-
fit. Fn 1771 , il avait construit un
grand planétaire de trois pieds de dia-
mètre, représentant les inégalités des
planètes, leurs excentricités, la rétro-
gradation des points équinoxiaux, avec
des rouages en racine de buis. Il per-
(i) Claid-'I-Jimnc Janvier.
(ï ) « L' Eisai dr l''iT«l. lierlhoud et Y Astronomie
ôf Lal.iiidc filleul les preiniers livr<stjni r«-c -
lifit^rcnt iiics idcos < r/oiu-es et .Tchrvirtnt dr
développer les g-rnies d'un talent dont les pro-
ductions sont uiijoiiifi'hui la proie de la ciipi-
dite.» {Dts réfoluiions dtt torpt céU$Ui, p. 3ti.)
iah
fetti^nni H circula en rui>rc relie
■achine« rêtiuile à dit pouces de dia-
■être, et eul riioniieur de h prr>eiilu
an roi l^ui» W, au mois d'ociobrt
1773, a Koulajuebltau ^3). (]cl te de-
marche ii'a\anl )>:>» ru le rcMillat quM
cneif^ail. il ne i.iida pa»aayiller Va-
ut, el sVljLlit a \ erduQ où il M loana
•n f77V. Il V demeura dia am ,
tuer^anl l'eiald horloger, mais au fond
l'occupant rnoin^ de «ou rommercc t|ue
^ Mt narliine^ a^lronomtques et det
nojeacde lei petfrciionnrr. Ilie\inlâ
Paris en 17k4 , apportant de petite*
•phércs que Ijilande ût arlieler pour le
rei par ^1. de I^ Ferle, inirndant des
Menas- plaibirs ; rt la mrite aiinre ,
Mr la recommandation de son rrirpio-
lecteur, il obtint le brevet d'horloger-
nécanlnen du roi »\tc un lof^emeut au
Louvre. \\u 17N(), il rompo^a une pe-
tite hotlot;eà équation el a remontoir,
laprrniieiede celle e>prce. Au moi»
dcleuior 17^9, il prrseiila a l'afaile-
nie des sciences une fi^randr horloge pla-
nètaiie, la plu^ complttequi eût encore
pini; elle fut acquise par Louis \V|
pour \in>^t quatre millr francs et placée
dantsa petite bibliothèque a Versailles.
C'est celle que l'on voit aujourd'hui au
palais des Tuileries ^i .Knl7'Ji, il 1er-
(3) 1^ jnHM Jaa«i«r, qui triait la t««)r peur
la prr*ni«Te foi» , rui l'i"" r,,M, ^, .1.- .( n^tf
«• dnurali an «i««t ma »■
prr»«u(« <lu rui. L« coar «na
pain« r».r Ir* UV'ifrnnrr j j i>.- ;r i arii«(a
l««iér«ir* ; in*it U liroiriunt <!•• | <• ic*, M. <!•
Sariiiir», |« fct a«rr'ir «ir quiiirr l'â<i». m lui
arcor«iaiil quisM joan |>ouf «i«it*r Ij cjpiulr.
(4| J*ii»irr, i{u« >wn vrrt < t r J'Lor logrf «rtli-
•••""• roi, con-
■•'■ '•, rsvru'a
»'"' , , - ,- u» IU.ur.
"»" Jilr-,i,.-iii. .1- , ,|,, ,| J rut une
•**• ■ l*" c«dr«a.ifiii ir|>r\ wMtJil une
cati. . 1 ^ (l'uB<- |ira|riUou |iarli< «livre.
Crue m.cliiue , ttrofiiéa au UiOit d'cKl-Ure
1791. (Ht por(r« auK Toilerie* f,.^r Mrf j.r*
••aléa au n>i i^ui . iJrpMu Ir 6 - j
fai«ait ta rr^iilriiic. Au jnar i ,,,
hist«NU avant qur I.oaia Wi |. r %r
Cr4a«4Ua rt dcMia vuir U machiitr \l . .|, Uittr
roaJuilil prrs t.'r l'artijtr qui , lui parljiu
>•• •• priaîtèra foM . «'MapratM 4« Ui «ipli.
JAN
9»
nina sa pendule planétaire qui fut pla-
cée au Musée (liiUioéh. asirunumia.^
pa^i- \'ÀkJ. Quoitju'il fut partisan de»
piiiicipcs de b rt-^uluiion, Jan\ier n'y
prit aucune paît Mis à la trte d'une
école d'horlo^rrie dont il a\ait solt^té
la création, loais qu'il fut ohli^r de
6outrniràse»frait,il parta;;rason lempi
enlic le« soins qu il tle\ait à se^ elr>es
dont pluMrurs lui Gient hoiinnii, rt
la ron»lruclion ou le perffriioiinrinrnt
des Machinée qu'il imaginait. Il dut
s'occuper êMei aes questions soulevées
par le nouveau si sterne horaire proposé
à la (Convention. Ct fut à la suite de
lon«:nes discussions qu'il eut à ce »u|rt
a\er Frrd. lirrthouil qa'ili adoptrrrnt
en^elllh!e Irplan de 1 horloge publique
pour le» fonimuîies de campa;;nr, que
Janvier publia phi.s lard. Kii IMU), il
soumit au ju|;rmrnt de ITnslitut une
|>endiile à la(]urlle ii ttavaillait depuis
plu^ dr douieaiis, ou ila repré^^enlr les
inri;alile> de la lune, le c)ian;;rnienl de
l'escentricilé et le mouvement de l'a-
pot(ee. Celte pendule, qui surpasse de
beaucoup tout re qui avait été lait jus-
qu'alors en ce (;enre, a été d«*crile par
Lalande dans la (Àmmiissuncr tirs
q<irr >i>n <>u«r«fr. la pr'nrro* rc
triit iiii , |iiiit ilrinjnjj roiiiiDrni
rr«uta arrc al-
|iiiii ilrinjnj4 roiiiiDrnt ou «ovait
l'b'Mfr. Jaaiirr lui il «l'altoril remarquer la
nom tir la «rUa àe Part >ur U carte. et ul>««r-
vrr «■tiauilp que l«> inrrid m tiui la travmait
4»a<en<l*U. k«r i'rrbrlle «ira lt>ng>ln4M «Molii-
Ira, à la ■mala •clurlla ■ §«i|i|M>»o«« , <iil-il,
iMjil.>uia , que ruu» «eulrt tonualtre Itirura
qu'il ni ilaii* an aairr lia >. a Mri(. par rvm-
i,ir .. u ' \ Cr :rol . !a rr nr . qoî rt tl bii^»«^
euf...U .1 M. I.: i..a. JjiniT
reale inlrrdit ; m «e rappelle ••
vo}af«il« Viril, . u , . U »• reiiJrr ao
fuj .iil Je Vrrt'illr», le >i jun», tôt -(fr dont
la projal n'avait p« *lra mi» i e»éc«i on; rt il
ba d -ot* plo* «lue la rcnertii pri» T'H licalioo
\f«ite ao lia.ard dr la Tillr de Mctx |Hiur une
aliuxon luordanlr. Deoi ibioule* «prcf Louis
XVI entrj. Il ».t *»». pljinr la p-ndulc, ri »>«
fct ripl quer le in« ra.ii me rt luaac.-. il dr«lara
l«i-iu< ui< rii (j rr lac.juuition; iiiaia deui Yi<:\t-
f^t ri ' •cuuice* que Durai, lii'iniBa
^ (en 1 . *>"' aoaoBcar qua la rat
ne prtii • iâ paudule, F—M.
9^
JAN
temps Tpoui'WnXll ; et Janvier a don-
né lui-même les détails de sa construc-
tion dans V Histoire (Je la mesure du
iemvs par Ikrthoud, II, 207-41.
A l'exposilion de 1802, il présenta
et^lut à son auteur la méd.tilie d'or.
Janvier mit à l'exposition de 1819,
trois pendules que le jui y déclara « re-
« marquables parla précision du tra-
« vail et par les combinaisons qui ser-
« vent à indiquer les diNisions du
« temps, » et à celle de 1823, son
horIo;2,c à secondes et à poids qu'il re-
gardait lui-même comme le plus parfait
de ses ouvrai;es. II obtint dans ces deux
expositions le rappel de la médaille d'or;
et dans la deniiére le jury termina son
rapport sur les machines de Janvier en
disant « que personne n'avait plus
<f contribué à porter riiorlojrerie fran-
" raise à Télat de prospérité où elle
«f est parvenue. }> Cet appel à la y^iné-
rositéduf^ouvernement ne fut point en-
tendu. Aucun ministre n'eut la pensée
de venir au secours d'un artiste dont
les productions étaient , depuis long-
temps, comme il s'en plaint énergique-
ment, lu proie de la cupidité, et qui
s'était trop occupé de son art pour
avoir pu songer à la fortune. Réduit
pour subsister à vendre pièce à pièce
ses livres, ses dessins, ses meubles et
puis ses machines, il ne lui restait d'au-
tre ressource lorsqu'il tomba malade que
de solliciter une {«lace à l'Hôtel-Dieu.
11 y mourut le 23 .septembre 1835, à
l'âge de quatre-vingt-quatre ans Ci). Dès
le lendemain les journaux annoncèrent
qu'une souscription était ouverte pour
élever un monument à sa mémoire ; mais
cet élan laidif en faveur d'un vieillard,
qu'il eût mieux valu secourir pendant sa
vie, n'a pas eu de suite. Lu des com-
{■j I Quelques jours uVJiit ta inorl, il tlm.iit :
J'ut heioin de v vre encore Jriii nui /j ntr ailirver
tlti ouvrages commeneét. Voilà <loric ua hoiniiie
d>: génie rjui, faute de «ecoiirs, lai<>.se , coiniiie
tant d autres, des oarragcs iinparr^it , cl meurt
darii la misère, après b«aucou|> de peinM et d«
satrUicei. F — l%.
JAIS
patriotes de Janvier, M. Huguenin ,
jeune statuaire dont on a déjà vu dés
Quvrages à diverses expositions, a mo-
delé son buste. Précédemment son
portrait avait été lithograpliié. Janvier
qui, dès qu'il l'avait pu, s'était occupé
de compléter sa première éducation,
avait des connaissances très-variées ; il
se délassait de ses études sérieuses par
la culture des lettres ; et on a de lui
quelques pièces de vers très-agréables.
Son compatriote Gu^étand (Voy. ce
nom, XIX, 24G), avec lequel il avait
ététrès-lié dans sa jeunesse, lui a adressé
une épitre sur le doute, l'une de ses
meilleures productions. Reconnaissant
des bontés qu'avait eues pour lui La-
lande, il fit giaver à ses frais le por-
trait de ce savant que l'on voit en
tête du quatrième volume de V His-
toire des niathéniutiijucs par Montu-
cla. Ce fut le même sentiment qui lui
fit payer un dernier tribut à Ferdi-
nand Berlhoud en publiant , dans le
Moniteur, une notice sur ce grand
horloger. Naturellement bon et ser-
viable, le malheur avait, dans ses der-
nières années, changé son caractère
bienveillant en une sombre misanthro-
pie. Va\ composant son dernier écrit,
la Description de ses machines, il
eut évidemment pour but de se relever
à ses propi es veux et de se rendre une
justice que ses contemporains sem-
blaient lui refuser. La première plan-
che de ce volume représente la pendule
astronomique qu'il avait exécutée avant
sa quinzième année: « C'est par cet
« essai, dit-il, que j'ai ouvert une car-
«f rière inféconde, où dans le pénible
« cours de soixante années de travail,
« après avoir sacrifié vingt-cinq mille
« francs à mon instruction et au p'ai-
« sir de la répandre gratuitement, je
« n'ai rencontié qu'un peu de gloire,
« l'abandon, la misère et l'oubli. »
Plus loin il se compare à Pascal :
t> Enfant grématuré comme lui, d'une
• auifti faibif romple&inn , on ne sera
•• pa« étonné nue j'aie u>é mou cerveau
M a *' ' ' ' 'ri |ienvec-i ou qu'elles
« a:< 1 nia \ie ipa^. 31 ). a
Aillcu{:>, tl Jil eiicuie: •• 1^ nature
M m'avait dutleii'uitr fur ce (le telerare,
« d'un c^piit fccuiiil en rev&ourres et
M dune patience à toute épreuve, puis-
M que,nrdc pjtcnls Mn-kroilanetie n'ai
m rien pu acquei tr que par mes pi upres
« fi'ices (pa;;. 57^. •• Janvier était
meniKre dea académies de Kouen el de
Uesançon et de plusieurs autres socié-
tés scientifiques et littrraires. Comme
écrivain, on a de lui: I. Etrennes
rhrofionirtriifurs pour Cun 1 8 1 1 ,
ou Précis dr le qui loncrrnr le
temps , ses di^ùsions , ses mesures ,
leurs usages, t\c., l*aris, 1810, in-
1:2. (^t ou>ra;;e a été rniiipi une sous
le titre de Manuel throimnietri-
que,tlc., 181 :> cl 18J1 . iu-li. avec
5 plancli. C'r>t, roinine il en prévient
dans l'avertissement, une reproduction
de rupu:»cule publié en ITâ'J.parl'ierre
Leroy (/o). ce nom, X\IV, :ii.'>},
avec le> chanj^eroents qne le progrès de$
arts rendjil iiidiNpen>ables. I^ frontis-
pice représente la ruionne de b place
N enilôtue, dont Janvier aurait voulu
faire un mi; ' recon-
nut que la <. , .culs de
la nouvelle lue leiuiiiil cepiujct impra-
ticable. On V trouve Jpa^. 11» de la T"
éd.) des réilexions lies-reinarquables
sur la iiéceN>ile de rnb5ervatiundu di-
manche, indépendamment du piécepte
reli»ieu.\. II. Essai sur les horloges
publiques pour les runiinunes de la
catnpagne, l'aris, 1811 , in-8 ', û^. Cet
opu.'icule utile mérite d'élic lil par les
personnes auxquelles il e.sl adresse. 111.
Des re%'oluiions des corps célestes
par le mèranisme des rouages , l'a-
ris, 1S12, in-4° avec 8 plancli. I.a
première partie de cet ouvrage se com-
pose de la description du planétaire
uuiomute du célèbre Clir. lluy^ens ,
JAR
95
traduite du latin par Janvier lui-m^me
qui. comme on l'a déjà dit, s'était, dés
qu'il l'avait pu , occupé de compléter
son éducation littéraire; il se plaint des
horlo^^ers qui s'api.rn|.i i,-nl ses dérou-
terlesel nnmmr rrn\ qm Utui leur pro-
fit de le*. IV. rjoge des
wathr. . l'an'', ISI ^ ,';„.8*».
V. Preris des calendriers iis.'il et
ecclésiastique, ibid., I8:ji, iM-8'\
\ 1 . Du /H}UK'itir des sciences sur le
honluur des hommes, ibid., 182.'»,
in-8' de 16 pa;; V||. Recueil de
machines , composées et exécutées
par Janvier, ViTti, 18*27, in-V de
39 yi». de tetle avec 12 planrli. ; re-
produit en 1828, in-i" de Gl pa^.
avec l.'l plancli. Olle seconde n' i
est au;;mentec de« leçons de I ^ >■•
lournier >ur le calcul de» roua;^e^. I.e*
macliines de Janvier demies dans ce
volume vont, outre la pendule astrono-
mique dtmt on a drjà parlé, une [ (Mi-
dule repré>erilant le niouv mirnl \ ' r
soleil, exécutée en 1766. et l'hoi!.. . j
fécondes et à poids admise a l'expo»!-
tinn de 1823. Il v a joint la quadrature
et la description de rii4>rlo;;e du car-
dinal de (iranvelle qu'il avait vue h
rildtel-de-VilJe de Bevan(;on ou elle
est encore, et qu'il remanie comme un
des ouvra;;es les plus pai laits qui aient
elc exécutés à Nuremberg; au \N l*
siècle. NV— s.
4. \ lu: III l oyc- lUsdll ,
X\\N II. los.
JAKU-PAWILMKK
(Loi IS Al.E\ANt)RK) , né le 7 MON.
17."»7, à Ui{;onnay près de Niort ,
exerça d'abord la médecine d.iiis celle
dernière ville dont il fui, en 171M), le
premier maire conslitulioiincl. Il «tait
procureur-syndic des I)eux-Se>res ,
niiand ce déparlement le iiomm.T dé-
pute à l'assemblée lé;;islari\e en 1 /'Jl,
puis en sept. 17'J2 à la Convenlion
nationale. Voici ses votes dans le pro-
cès de Louis XVI : U détenliou jus-.
94 JAR
qu'à la paix , le bannissement et en-
fin le sursis à l'exécution. Il risqua
aussi une démarche éminemment cou-
rageuse à cette époque de terreur et
de lâcheté; ce fut lui qui entraîna le
député Duchàtel, alors presque mou-
rant, jusqu'au sein de l'assemblée, le
soutint dans ses bras à la tribune, et le
mit à même de voter en faveur de l'in-
fortuné monarque. Celte action , qui
les honore tous deux , les vouait aux
venojeances révolutionnaires ( Voy.
DucHATKL , XII , 105) , et bien-
tôt elle servit de prétexte à Marat,
lorsque , dénon(;ant Jard-Panvillier
comme modéré, il provoqua ainsi son
rappel d'une mission qu'il exerçait au-
près de l'armée des Côtes et de la Ro-
chelle. Du reste, les paroles qu'il pro-
nonça à l'occasion de la loi sur les em-
ployés de la liste civile téinoit^nent suf-
fisamment de sa probité politique, de
son respect pour les droits acquis.
«< Les règles de l'équité, dit-il, sont
«< immuables, en vain voudrait-on re-
« procher à ces hommes les abus du
« régime auquel tenait leur existence ;
« on ne saurait les blâmer d'être en-
a tiés dans une carrière oiî le sort a
« (ait naître la plupart d'entre eux. »
Après le 9 thermidor, Jard-Panvillier
lutta encore avec énergie contre le sys-
tème mal comprimé du terrorisme.
Membre du conseil des cinq- cents,
en 171).'), il en sortit en 1797, mais
il fut immédiatement réélu. 11 combat-
tit dans cette assemblée la loi du '\
brumaire an IV, qui déclarait les pa-
rents d'émigrés incapables d'exercer
aucune fonction publique. Sa voix dans
la discussion sur le rétablissement du
cultt (an V, juillet 1797) retentit en-
core en faveur des prêtres rentrés en
France :« Lorsqu'on apprend, s'écrie-
« t-il, qu'ils sont dénués de tout ; on ne
« voit plus en eux que des hommes ac-
«c câblés d'âge et d'inlirmités, ou expo-
« ses k toutes les horreurs du besoin. »
JAR
En l'an VII (juillet 1799), il s'é-
leva contre la loi des otages et con-
tre la motion de déclarer la patrie en
danger. S'étant montré favorable à la
révolution du 18 brumaire, il fut nom-
mé commissaire du nouveau gouverne-
ment dans les départements de l'Ouest,
puis appelé au tribunat oiî il remplit
successivement les fonctions de secré-
taire, de président et de questeur. Il
vota ensuite pour la proposition de
Curée tendant à porter le premier con-
sul au trône impérial. Rapporteur de la
commission qui avait été chargée de
l'examiner, il fut aussi le président de
la députation qui alla présenter aux sé-
nateurs le vœu du tribunat, et il obtint
les titres de commandant de la Légion-
d'Honneur et de baron de l'empire;
enfin son département le nomma pre-
mier candidat au sénat appelé conser-
vateur. Lors de la suppression du tri-
bunat en 1808, Napoléon l'éleva aux
fonctions de président de chambre à
la cour des comptes. C'est en cette
qualité qu'il lui adressa , en décem-
bre 1812, après la retraite de Rus-
sie , un discours dans lequel il s'ex-
prima avec indignation sur la conspi-
ration du général Malet {Voy. ce nom,
XXVI, 367). Plus lard, le 5 avril
18îi,il adhéra à la déchéance de
l'empereur. La chambre des députés
le vit toujours sous la restauration au
nombre des membres dont la modéra-
tion réglait la conduite parlementaire.
Il mourut à Paris, le 13 avril 1822.
Jard-Panvillier , dans le commence-
ment de la révolution pava sans doute
quelque tribut à l'effervescence du
temps, mais aucun excès, aucun acte
odieux ne pèsent sur sa mémoire. Il a
pu répéter à la fin de sa tie ce qu'il
disait au conseil des cinq-cents en fa-
veur des émigrés rentrés : « Moi aussi,
" j'ai essuyé bien des larmes et n'en
« ai jamais fait répandre. » Rarbé-
Marbois. premier pi^sident de la cour
Ar' mmpfr' , ^nalJn( prrtrdrr Hi^nr-
fTirn» \r rnlir.'ir Hont 41 rOTOpS^mr
;l M'.i't h ^>frlf, >f fonlenta de ciirr
(r*^ I iiulrs de Jir«J l'an\illirr a un fonc-
tionnaire qui lui «Innandjit mmmrnl
on |ioovait prf*cr\er la >rlle de MeM
des fanions qni la désolaient alors :
« Noos sommes, lai dit il , dans le
«• trajel qni d'an étal anti-^of ial con-
« daim ii>1 ou lard i la courorde et à
« la paix. Nom t\on* rnfure des lois
« eruelles et «•"
« un pen Air tern
« tAt sans forre. I.r
« sions n'ont point .
« totijours par reprendre Irut empire.
■ faites-les exémier, ne «.ouffrcz ao-
• cune inju%tire, et tous prrierrerez
« totre rommone des fléaux dont tant
« d'antres sont victimes. »» — Jard-
Fanvillrer a lai«é nn %U, ancien sotts-
préfet et maintenant conseiller maître
à la cour des comptes 1.— -ii — E.
J.\KIH:L ( . . . V ftnmme
dVsprit et de {;oul et $."^^
phile, oublie dans tous le>^ .
rr.T, et sur leq lel on re^rrHr île ne
jnfi trouver une notice Ain^ la slatlsti-
(fur du département de l' AiMie, était
né, ^ers 17*20, dans le ^•oi^sonnais à
Braine , de parents qui tenaient dans
le paTs on ran» honorable. Arrivé a
ràj»e de prendre on état, il acquit une
(^arpe d'ofBcier dans la maison du
roi, et put facilement continuer de se
li>Ter a l'étude li. a pro-
rince. Il s'était . r heure
ierassemblerdcb lisiCsiareoel des ma-
nuscrits principalement sur l'histoire
au moyen-à;;e; et il > joi;^nit un cabi-
net curieux d'histoire naturelle et
d'antiques troutés en jurande partie à
Brame ou dans les ciiviron'^^ de cette
Tille,qu'il habita près qne constamment.
D'un caractère oblif;eant, Jardel «^'em-
pressait de mettre à la disposition dc^
savants le résultat de ses recherches.
C'wt ainsi qu'ayant trouvé près de
Rraine une pierre é^\ptienne , îï l'en-
\o\y it ^,.1^Iu^ qui la fil graver dans
le t«)me IN de ses ititKjuitfS , pi.
21 , et en donna l'cvpliration pa«.
6*2. Kontetle lui dut la notice de
quantité de nianuscritN préripiu pour
son édition de la liihlittthtijur de
riiisloire de France , el l'abbe C^r-
lier, d'utiles renseinnement* dont il a
fait ttsj * n ■ ' '. Va-
iois , \ (du
^ Icl^liara-
't fn par-
wr
1 . ■ ' 4 se
deiaire dr sesli\res rares et de ses ma
nuscnts. Il en fit imprimer, cette an-
née, le cnUiloi^ur à quarante eiem-
plaires qu'il distrilnia dans les pars
étr3nî;ers, espérant > trouver pins fa-
cilement un acquéreur qu'en France
( l'ei ^ n ot . /^/-/vr/ . f>tblin::r . . t Or»' .
Vjt fut un I' ' r lui de ne pas
r^us^sir à \< alitr de ses li-
: de sa biblio-
t-TM^t ans. I^
nufiir do lofe> , 11 lui res-
taient à sa mort ii<'e a Paris
en 179'J, in-8". Jardel a\aii composé
sur firaine et ses environ^ plu.ieurs
ouTra;;es dont on trouve les titres
dans la fîiUiofhrtfur de Font et te. Il
suffira donc d'indiquer ici le* princi-
paux : I. Mrnuiir- circonstancié
pour pnjucrr que Bl\EriNATrsi ou
brainr est situé sur Vnuplacemrnt
du ÎJinr.AX lirs t.ommmtairrs dr
C'rsiir, in-i". ('• 11 u'a point
été adoptée par !• .us plus ré-
cents du Soissonnais. Suivant M. de
Russv, Ribrax est Fisme^ sur la Vesic
(Statist. du dépurtrrunnt dr r.îis-
tif , I, 136). 11. Lrttrr sur Li ville
ifti li'aine; elle est imprimée dans les
SouK'rllrs rrchrrrhfs sur iti France
piiblipes par Hérissant en 1700, lora.
l", p. rV) m. Mémoire surThis-
laire nalurelU du Soi s sonnais, ibid.,
96 JAR
II, 310. IV. Lettre sur quelques
antiquités trompées près de la Fère
en Tardenois {Mercure, 1766, janv.
74-85.) W— s.
JAi\DIX (César) , naquit à Li-
sieiix , en 1772, de parenli. qui le-
naicnt un des plus beaux hôtels f^aniis
de la ville , et qui donnèrent à leur fils
une éducation soignée, dont une mé-
moire heureuse et des dispositions na-
turelles le firent profiter. Ses sentiments
répondirent à son éducation. Atteint
par les lois de la réquisition, il entra
dans le cinquième bataillon du Calva-
dos, qui avait été envoyé dans la Ven-
dée. Avant vu chez ses parents quel-
ques-uns des chefs contre lesquels on
l'envovait combattre, il quitta bientôt
les républicains pour passer dans les
ranos opposés. Il avait quelque tein-
ture du mécanisme de l'imprimerie,
et s'offrit comme pouvant travailler
à la composition des écrits royalis-
tes et des proclamations qui se fai-
saient au quartier-général des Ven-
déens. Les firconstances avant changé
les idées après la révolution du 9 ther-
midor , il vint à Paris , et fit dans les
journaux divers ai ticles , où Ton re-
marquait de l'esprit et de la facilité,
liientot il fut attaché à la rédaction
du Courrier républicain , journal qui
n'avait de icpublirain que le titre ,
4ti qui professait les opinions roya-
listes les plus prononcées en atta-
quant les républicains et ce qu'on
appelait alors les terroristes. Barras
fut surtout l'objet de ces attaques, et
il s'en irrita au dernier point. C'était,
si l'on peut le dire , la mouche qui pi-
que le lion comme dans la fable de
La Fontaine ; car liarras en rugissait
dans son palais du Luxembourg. Il
attribua ces sorties, dont tout Paris
s'amusait, à l'abbé Poncelm, pro[»ric-
taire de cette feuille. Soit qu'il se
trompât sur l'auteur véritable, soit qu'il
voulût sevenger de la liberté que celui-ci
JAR
laissait à Jardin, Barras ne recula pas
devant un odieux guet-à-pens, Ilapos-
ta des alguasils qui s'attachèrent
aux pas de Poncelin, et saisirent une
occasion de s'emparer de sa personne
pour le conduire au Luxembourg dans
les appartements de Barras, qui lui fit
donner une correction des plus san-
glantes et telle que jamais écolier n'en
avait reçu de pareille ; puis on le re-
jeta tout meurtri dans la rue. Les
journaux parlèrent longuement de cette
indignité, pour la flétrir comme elle
le méritait ; mais l'auteur, alors l'un
des membres les plus influents du Di-
rectoire , échappa à toute punition.
Les royalistes eux-mêmes ne purent
s'empêcher de rire entre eux de cette
bizarre vengeance. Barras n'en fut
que plus mal traité; car dans ce temps,
qu'on a justement appelé Vâge d'or
de la pensée, tout se disait : on n'a-
vait pas besoin de cet entortillage ,
de ces circonlocutions auxquelles on
est obligé de recourir aujourd'hui. On
disait sans le moindre détour Merlin-
potence, juges bourreaux, lâches légi-
cides, et ceux qui étaient ainsi désignés
ne pensaient pas à demander des répa-
rations aux tribunaux, qui d'ailleurs ne
leur en auraient pas donné. On recevait
et l'on se renvoyait les épitliètes les plus
blessantes, sans se mettre plur en peine
des suites que de la vérité; c'était l'es-
prit du temps. Quand, en iSO'î, (kor-
ges Cadoudal appelait Thuriot Tueroi,
il ne faisait que répéter ce que les jour-
naux avaient dit librement à une autre
époque. C'est à la faveur de cette liber-
té, on peut diro illimitée, qu'on vint
à bout de renverser le Directoire, dont
au reste peu de personnes voulaient. Il
tomba sous les coups de la presse bien
plus encore que sous ceux de Bona-
parte , qui trouva les esprits préparés à
la chute de ce gouvernement. Mais
avant son renversement , cette puis-
sance directoriale , devenue ridicule ,
JAR
fn un Jfrnifr ciïort pour prolonj;fr %a
•Irplorable fxislrnff , il ret rffor! fut
\r 18 friirliJor. Harrax n'oubli» ni
Ponrflin niJarilin, t\ \nus deux furciil
rompri*. à\ec uiif \in^laiiif de Jrpulc*,
<)am le Jécrrt dr déportation à la
r.uianr. Jardin fut assrx heureux
pour écltapprr ib rrtte mesure , il se
rarha ; mai* lorsque le temps eut ralmë
les irritation^, et que Ronapatte eut
pris le pou\oir, il lui fui permis de se
rendre il l'ilr d'Olemn avec les Si-
mëon , les Dumniard , 1rs Villjret-
.loxeuse, les Hoi^^\ -d'An^Lis, les Mu-
rait e, les Doiimerr, etc., dans la so-
ciété desquels il ne pu! qtie trouver de*
arantajjes et perfectionner une éihira-
tion qui n'axail pas toujours eu une
irès-honne direction. On assure qn'il
rxisie de lui une correspondance où la
biof^aplue des hommes avec |p^qt>els il
» passé le temps de sa déportation à
lile dOieron e<t prrNentrr d'une
manière fort piquante, et où il ju^e
a\er assez de hoolieur et une t;rande
fmesse ses compagnons d'infortune.
Si elle paraît nn jour, on y serra
que ceux à qui la reiionitii'^ a donné
un certain ccl.it sont sii)elN aux mêmes
faiblesses que le vulgaire. Mais repor-
tons-nous à une époque anténeure à la
résolution de brumaire qui fit de Bo-
naparte un premier consul et bientôt
un empereur, à une époque antérieure
néme au IH fructidor. Jardin, dont
les opinions n'étaient pas équivoques,
désira (^e les républicains lui donnas-
sent eux-mêmes un certificat de roya-
lisme. Dans cette vue, il pria l'auteur de
cet article de faire insérer dans \\^n.i
des lois, journal rédigé alors par un
ancien morne devenu députe, nommé
Vouitier, une lettre où furent supposés
divers actes de royalisme qu'on attri-
bua à Jardin, qui pouvait bien en avoir
fait quelques-uns, mais non pas ceux
qui renfermaient en eux-mêmes une
sorte de honte. La lettre parut dans le
|uurnal que nous venons de ritei , le f»
avril 1797 .1 n.! H la trouv.» trop forte,
e! à cette orra ..n rô|irta le mol du ré-
f;ent : •« 'lu me .l.-^ui>»'s trop. •• Après
e 18 fructidor. J-iidin s'était rendu
librement a l'île d'Oleron comme le»
autres déportés à qui cette ile fut as-
signée pour lieu d'exil : il en sortit avec
eux, et revint à Paris. Mais il >urvécut
peu à ce retour. Des maladies, raiiitées
par son .-. le forcèrent d'en-
treràl: (lapucins, ou l'ait fut
impuissant puui lui rendre la santé.
Apres %\x mois de soufirances , il r
moaiut en IKO'J. Cjtux qui l'ont
connu rendent justice i son courage et
i^ ses talent! qui auraient fait de lui un
bon écrivain et uu lelé défenseur de la
monarchie. M — T.
JARJ.IYKS (KnAî»çois-At
r.rsTiN-IUlMKR i>Fj, né à (irenoble,
le 2V oct. 17ir>, d'une ancienne fa-
mille du Daupliiné , était neveu du
lieutenant-«éuéral de HoQrcet (1 uy.
ce nom, N , '.\'ùh, connu par ses .Vfr.
iniiires sur lr% fruntirrrs drs Al-
f>rs.ei(. D'abord élevé , puis coopé-
rateur de son oncle dans ses travaux
topoi^raphiques, il servit sons lui com-
me aide de-ramp de I7f»9 à 1779, et
passa en qualité de capitaine à l'état-
major de l'armée. Il tut adjoint à la
direction {;énérale de la ;;uerre, décoré
dt l'ordre de Sainl-l.oiis et nommé
maréchal de-ramp par Louis WI en
179*2. De J.ii i.i>es avait épousé une
des premières femmes de chambre de
la reine Marie-.Kntoinelte , que crtle
princesse honorait d une bienveillance
particulière. Celte circonstance le mil
à portée d'être personnellement connu
de la famille ro>ale, et lui fournit |>1us
d'une occasion de témoigner son dé-
vouement. Voici ce qu'on lit, à son
^/)et, 4»ns les Mrmoirrs dr inuiiame
Compan 11, 1-29) : «♦ M. de Jarjayes,
«« colonel, attaché ï l'élat-major de
<• l'armée, eut le bonheur de rendre
LXVIll.
98 JAR
K plusieurs services à la reine, et de
« s'acquitter avec la discréllon et la
«< Jif^^jjité convenables de plusieurs
« missions importantes. Leurs 'Vlajes-
« lés avalent la plus grande coauance
« en lui, quoique souvent la saj^esse
« de ses craintes, quand II s'agissait
<» de projets inconsidérés , Teùt fait
« taxer, pai' des imprudents et des en-
« nerais, de suivre les principes des
«( constitulionnels. Envoyé à Turin,
« il eut de la peine à dissuader les
u princes du projet qu'ils avaient for-
«< mé à celte époque de rentrer en
« France, avec une très-faible armée ;
«c et, lorsque dans un conseil qui se
« prolongea jusqu'à trois heures du
«c matin, il eut fait voir ses instructions
« et démontré que cette démarche
u exposerait le roi, le comte d'Artois
«< seul se prononça contre le plan qui
<c était du p'ince de Condé. » Plus
tard, selon Jes mêmes Mémoires^
M. de Jarja) es fut le premier intermé-
diaire des relations qui s'établirent en-
tre la reine et Barnave , Duport et
Alexandre de Lameth, pour affermir
le système constitutionnel contre les
projets des républicains. « Après le
« 20 juin , dit encore M^"' Campan,
« la reine mit dans un portefeuille,
« qu'elle confia à M. de Jarjayes, ses
«< lettres de familJe, plusieurs corres-
«» pondances qu'elle jugeait nécessaire
« de conserver pour l'hiitoire du temps
il de la révolution, et parliculière-
»c mont des lettres de liainave et ses
« réponses, dont elle avait fait des co-
« pies. » On verra qu'il ne dépendit
pas de la fidélité du dépositaire que ce
but ne lut rempli. Jaijavcs se trouva
aux Tuileries, le 1 0 août 1 7!):^, comme
officier d'état-major : le roi lui ayant
fait connaître le plan de défens^quele
baron de Vloménil avait préparé, il ne
se dissimula pas que, vu la faiblesse
des moyens, la défaite était cerlainL'.
Bientôt H fut du petit nombre des
JAK
serviteurs fidèles qui accompagnèrent
le monarque dans la traversée, depuis
le château jusqu'à l'assemblée. Lorsque
la famille royale fut confinée dans la
loge du LogograpJid , Jai jayes parvint
jusqu'à Louis X\ I dont il prit les or-
dres, et fut forcé de s'éloigner. On sait
qu'à la fin d'août des visites domici-
liaires très-sévères eurent lieu chez
toutes les personnes qui avaient eu des
relations avec la cour ; elles furent je-
tées dans les prisons et presque toutes
y périrent aux journées de septembre.
Ce fut en ce moment d'effroi général
que Jarjayes ne pouvant confier à au-
cun autre le portefeuille de la reine,
se vit réduit à le brûler et à chercher
un asile hors de chez lui. Néanmoins,
depuis que la famille royale avait été
transférée au Temple, il était parvenu
à entretenir quelques relations avec
elle. La mort de Louis XVI ne lui ôta
pas toute espérance de manifester en-
core son dévouement à la reine et à son
fils ; en effet une occasion périlleuse se
présenta. Toulan (Voy. ce nom,
XLVI , 323) , l'un des plus exagérés
des commissaires chargés de la surveil-
lance Intérieure de la tour et qui s'é-
tait montré sous les formes les plus
acerbes, n'avait pu voir la magnanime
résignation du roi et des princesses
sans en être touché. De concert avec
Turgy el Cléry ( Voy. ces noms ,
XLVIL86, et LXI, 134), ilavait em-
ployé secrètement tous les moyeps pour
adoucir la captivité de ce prince el de
sa famille. Ajnès le 21 janvier, s'aper-
cevant que la vigilance des autres com-
missaires devenait moins rigoureuse, il
conçut le hardi projet de faire évader
Louis XVII et les princesses, projet
qu'il ne faut pas confondre avec la ten-
tative d'enlèvement qu'essaya plus tard
le baron de Batz ( Voy. ce nom ,
LVII, 299). La reine à qui Toulan le
soumit voulut, avant tout, que ce pro-
jet fut examiné par le chevalier de Jar-
JAR
jatf^, et lut remit un billet àt sa m en
podr fccénérjl: le mnnifipal ^e rentirl
aapr^ de lui. liitroiiuil, son vêtement,
se% manièm, tout ins|Mre()f la ilrfianre
à Jjirji^n qui le eoii^iilere atec in-
(jiî «tude et craint d'apptendrt Tabjet
tir a tisitf. Il reptjussjjt les ronfiden-
re?i de l'incotinu. loîvqtjerrîuifi. pDur
pr»>f!vrrvi m-- nn, p-e^rnlr l«« liilirf,
- ' ' (jui a
Il poa-
n >et prendre cniitianre en l liomroe
« qui Tnu5 parlera de ma part en «out
« remettant ce billet. Se* sentiments
«• me 5ant connus; depuis cinq mois
•« il n*a pa» Tarie. Ne vous fiex pas
•< trop à la femme de l'homme qui e-.t
<« enfermé ici a^ec nous: je ne me fie
« ni à elle ni i son mari (1' » C'é-
taient Tison et sa femme. Revenu de
1 'l'j r, Jarja\ei s'empre sa de
ilciii m.!.- a Toulan par quel* mo>ens
il se proposait d'arriver i^on but , el
s*il ne pourrait pxs l'introduire an
Temple afin d'en conférer avec la reine.
Le commissaire ne ref^arda pas celte
difficulté comme insurmontable, el sur
un mot que le général lui donna pour
la prince<ise, il lui rapporta ce billet :
«« Maintenant, si vous êtes décidé i
« venir ici, il serait mieux que cela fût
•* bientôt. Mais, mon Dieu! prenez
«< bien garde d'être reconnu el>»i tout
•« de la femme qui e>t en!erméc ici
- avec nous. » Sous un déguisement
qui le ; rii.i:l niéconnaisahle , la: |.i\e5
fut intiudiiii dans la tour par I t)ul.iii :
il discuta devant la reine le plan d'é-
vasion imaginé par le municip il, r re-
J.\R
99
!\
1 Tf Inllr
t ri lei .
■ 1.»..
1 rrfairn
if» iJc- ce
"MT
i xrii
/- rf«- r.-'
' •"
■!T
ei <iii« ji.!« ii<
i\ tr»n«cr»-
• ut le
d-
connut 1.1 p'isNil ilif é de réussir ; mais il
iB;;ea qu 1 . laa m.liprn^.iblc de mettre
un second commissaire dans le secret
I.epitre qui, par sa conduite, avait in-
spiré de la conlianrr a Louis XV| et
procuré t!e^ coiiMilalions à Marie- .\n-
to. nette, fol d-M^^ne \ peine le Ȏnr-
rat eut-il quitté la tour que criir prin-
cesse , loiiiourt frappée de l'idée des
pou-
ciots:
- l'rr' Klle
•• me j ' me et
« la femme dont je vous parle dans
«< l'autre billet. lirliez de voir ma-
« dame Th. ; on tous expliquera
•« pourquoi. Comment est votre lem-
•• me :' Klle a le co-ur trop bon ponr
" n'être pas malade. » Jarjaves avait
répondu par écrit aui demandes que
la reine lui avait (aiteNde \ive \t»ix, lor»
de l'entrevue an Temple. Bientôt il
reçut de cette princesse une lettre plus
importante, la voici: •« Notre billet
«< m'a fait du bien. Je n'avais aucun
« doute sur le Ni\rrnois, mais j'étais
•« au désespoir qu'on pût en penser
u du mal. Kcontezbien les idées qu*on
•« vous proposera; eiaminex-les dans
" Totre prudence : ponr nous, nous
•• (nous) lierons a^ec uneconfianceen-
«» tiére. Mon Dieu ! que je serais heu-
•« reu<e, et surtout de pouvoir vous
•« compter an nombre de reui qui pen-
«« Aent nous être utiles! Nous verrex
•« le nouveau pci"sonna^e : son exté-
« rieur ne prévient pas, [2', mais il
« est absolument nécessaire, et il faut
« l'a.oir. T... vou.s dira ce qu'il faut
«« faire ponr cela. Ticliez de vous le
«« procurer et de finir avec lui avant
•« qu'il revienne ici. Si vous ne le pou-
« vez pas, vovez M. Delaborde de
««Nna part, si vous n'y trouvez pas d'in-
a conxénients ; vous savez qu il a
« de rati;cnt à moi. »» Le t;cnérai vit
le commissaire, lui donna une connais*
{%'. Kuurr co:ncmiij»-. r -plet rt le» |>icd} bola.
("!'
;LîOTH£CA ;
100 JAR
sance entière des projets, et convint de
tout avec lui et avec Toulan ; mais il
craii^nit , en s'adressant à M. de La-
borde, de mettre quelqu'un de plus dans
la confidence. Au risque de sa vie,
Jarja^ es voulut joindre celui de sa for-
tune; il en écrivit à la reine, qui lui
répondit: En effet, je crois qu'il est
« impossible de faiie aucune démar-
.» che dans ce moment près de M. de
ce Lab... Toutes auraient de Tincon-
« vénient. Il vaut mieux que ce soit
« vous qui finissiez cette affaire par
« vous-même, si vous pouvez. J'avais
« pensé à lui pour vous éviter l'avance
« d'une somme si forte pour vous. »
L'avance fut faite. Le commissaire tou-
cha la somme, et prit rengafi;eraent de
concourir de tout son pouvoir à la
réussite de l'entreprise. Le lendemain
Jarjaves reçut la récompense la plus
dicne de ses soins dans ces mots :
<« T... m'a dit ce matin que vous aviez
« fini avec le comm... Combien un
« ami tel que vous m'est précieux ! »
La reine eût désiré que ïoulan fiit
récompensé ; elle le îémoif;na au '^éné-
ral par ce billet : « Je serais bien aise
«c que vous pussiez aussi faire quel-
«< que chose pour T... ; il se conduit
« trop bien pour ne pas le reconiiai-
«( tre. » Aussi désintéressé qu'il se
montrait dévoué, Toulan ne voulut rien
accepter de cette princesse qu'une ta-
batière en or, dont.elle faisait q'ielque-
fois usar^e: cette boîte fut, dans la
suite, la principale cause de sa perle.
Dès que le chevalier de Jarjayes eut
arrêté les premières bases du plan d'é-
vasion et qu'il eut fait préparer des
liabils d'homme et d'autres vêtements
pour la reine et M""'* Tlibabeth , les
commissaires introduisirent sous leurs
manteaux ces effets dans la tour. Les
princesses auraient ceint des écharpes
Incolores, et, munies de cartes d'entrée
telles que les municipaux, elles seraient
sorties sous te travestissement. Il pa-
JAR
raissait difficile d'enlever de la tour
madame Royale, et surtoutle jeune roi,
qui était le plus surveillé : on en trouva
le moyen. Chaque jour, l'homme char-
gé de nettoyer les quinquets et les ré-
verbères venait le soir les allumer ; il
était accompagné de deux enfants qui
l'aidaient dans son travail, et il sortait
du Temple bien avant sept heures.
Après son départ et lorsque les senti-
nelles auraient été relevées, un ami de
Toulan, Ricard (3), royaliste éprouvé,
serait entré dans la tour au moyen
d'une carte semblable à celle des
ouvriers employés au Temple : arrivé à
l'appartement de la reine, sa boîte de
fer-blanc au bras, il aurait recules en-
fants des mains de Toulan qui l'eiit
grondé de n'être pas venu lui-même
arranger les quinquets, et il se serait
éloigné avec eux pour les conduire à
l'endroit convenu. Trois cabriolets
étaient disposés pour le voyage. La
reine, le jeune roi seraient montés
dans le premier avec le général ; ma-
dame Royale aurait été conduite par
Lepitre, et madame Elisabeth par Tou-
lan. Les dispositions et les incidents
étaient calculés de manière qu'on ne
pouvait se mettre à la poursuite des
prisonniers que cinq à six heures après
leur départ. Des passc-poris bien en
règle ne laissaient aucune inquiétude
pour la route. On avait d'abord pensé
à chercher un asile dans la Vendée qui
- commençait à se soulever; mais la dis-
tance parut trop grande et les difficul-
tés trop multiitlites. 11 semblait plus fa-
cile de gagner les cotes de la Norman-
die et de s'assurer les moyens de pas-
ser en Angleterre. C'était même à ce
dernier parti que le général s'était
arrêté; il avait sur un point de la côte,
près du Havre, un bateau que son ami
intime, Amaberf, premier commis des
finances , tenait à sa disposition.
« M. de Jarg ***, dit Lepitre, qui
(3) I.fpitie le noiiiine Guy; c'est ù tort.
jAi;
JAK
loi
• Tmll Imijours *in>i, ht chargeait Je
« poai\oira loul ; il atjit i'ai^rnt
m nétc\sji\i f , e\ nnu^ pouvions rtwiipler
■ sur sey taifnis rt sut >on zrle i
« loutr éprfu«e. •» I.e* diffrrciilcs me-
»um ilunl il est inulilf d'euumricr 1rs
drtaiii a\anl clc arirlers, l'cxéciilion
ilii ptojrl a\ait clé iotiiaoée aui pre-
inifi* )oiir> «le roars; h le succès, au
•» dire encore de l.epitre, paraivsail
M assuré. >* Mais le^ irrésolutions, les
fft^eurs de ce commissaire tirriil difîc-
ter le départ d'un jour a l'autre . mal-
f^ré les vivei instances deJarjays rt
de Toulan, et quoique la reinrciU dai-
gné lui donner une nirclie de »es (lie>
veuK et de ceux de «es enfants, avec
celle devise : Poiu ama th' il mûrir
trmr . Tien ne put \a;iirrr m pusilla-
nimité; enfin, 1rs drualMiui sVlr»i-rciil
dans la (lonsenlion sur 1rs mesures a
prendre contre 1rs Bourbons rendi-
rent aut mrmlirrs de la commune
toute leur sescntr, l'évasion dr louir
la Camille rovaie dmiit dev4)(mai> im-
pouible , et principalrniml celle du
jeune roi, sur lequel on exerçait le plus
de surveillaace. Le même inipo>Mbilité
■'exLNlait pa^ encore pour fane èsadrr
la reine seule ; c'est ce qui détermina
le chevalier de Jarjaves à supplier
crlte princesse, dont les jours étaient
le plus mcn.ufs, de profile/ des res-
sources qui lui restaient cncoïc pour
se soustraire à ses bouri^u\. Toulan,
dont le courage et le tè!e étaient au -
dessus de toute crainte, mit sous les
veux de Marie-Antoinette les détails
du nouveau projet, auquel I-*pilie ne
fui aucunement initié. Pour celte fois,
Toulan se char^jeait de faire sortir la
reine et de la conduire dans un lieu où
elle aurait trouvé le ^énéial, qui avait
fait des dispositions telles que le salut
de celle infortunée priucesse était assu-
ré. Elle approuva en entier le nouveau
plan. Mais, b veille nicme du jour
Exe pour le départ, ne pouvaia sop-
uortei l'idce de se séparer de ses en-
fants et de madame Klisabetli , elle
écrivil auclievalirr de Jarja\esce billet,
éternel monument de sa tendresse
maternelle: •< Nous avons fait un beau
M rrve, voilà tout, mais nous t avon>
•< beaucoup ;;a^ne en trouvant encore
M dans celte occasion une nouvelle
M preuve de votre entier dévouement
M pour moi. Ma configure en vouse^t
M sans borne}, voun Irouvriex dans
M toutes les occasioiis en moi du caiar-
M tere rt du coura|;c: mais rutt^rèt
M de mon Glse%t le seul quime^uide,
*- et quelque bonheur que j'eusse
•• éprouvé à être bur%d'rri, je ne peux
H pas consentir- à me séparer de lut.
•« .Vu re>te, je reconnais bien votre
M ailaclirment dans tout ce (]ue vou^
- m'avex dit li ei . G>mplez que )e sens
M la bonté de vos raisons pour mon
•• propre inter et , et que cette or ca
M sibii peut ne plus se rencontrer :
> roai> je ne pourrais jouir de iien en
« laissant mes enfants, et celle idée
•• ne molaisse pa^ inrme de regret . >»
D'après sa résolution et la crainte que
la reine a^ait de se voir à chaque m
liant privée de loule communication,
celle princes>e et madame Klisabelh
char;;errnt le ciievalier de Jarja>es de
la mission, délicate en ce temps de ter-
reur, de traiiMiietlie à Maiisifur et au
couile d'Ailoi<> le racliet , l'anneau et
le paquet i enfermant des cheveux de
la Ltmille lovale que l.ouiN XVI, peu
de mumenls avant son dcpail du tem-
ple, avait remis à Clerv pour les porter
à la leine. Les municipaux s'en étaient
empalés et les avaient mis sous les
scellrs, mais, par une pieuse frauda,
Toulan , pendant les préparatifs du
projet d'évasion, était parvenu à les
N'étirer, en les remplaçant par d'autres,
et il s'était empressé de les remettre à
la reine. O fut vers la fin de mars
1793, (lue Marie-.VnloinclleconGa ce
précieux dépôt au clievalierde Jarjaves;
JAR
JAR
il alla d'abord à Turin remplir une
mission dont madame Elisabeth l'a-
vait chargé pour la princesse de Pié-
mont, sa sœur. Le roi le retint auprès
de lui, adressa lui-même à Monsieur
les dépêches (lesprisonniers du Temple,
par un courrier extraordinaire, nomma
le général son aide-de-camp et lui con-
féra l'ordre militaire des SS. -Maurice
et Lazare. Peu après, Jarjayes reçut de
Monsieur une lettre autographe que
nous avons lue, datée de Hamra, le
14 mai 1793, et dont nous avons co-
pié ces expressions : « Vous m'avez
K procuré le bien le plus précieux que
« j'aie au monde, la seule véritable
« consolation que j'aie éprouvée de-
«« puis nos malheurs. Il ne me manque
" que de témoigner moi-même aux
« êtres plus chers que ma vie dont
« vous m'avez donné des nouvelles,
« combien je les aime, combien leur
f< billet et l'autre gage de leur ami-
«< tié, de leur confiance, ont pénélié
fc mon àme dcsplusdoux sentiments...
c{ J'aurais désiré vous voir, vous parler
« de ma reconnaissance, m'entretenir,
« avec vous deux , des moindres dé-
« Jails, des services que vous leur av£z
« rendus. Mais je ne puis qu'approu-
«f ver les raisons qui vous font rester
« en Piémont. Continuez à y servir
« notre jeune et malheureux roi, com-
te me vous avez servi le frère que je
« regretterai toute ma vie. » Après
l'invasion des troupes françaises en
Piémont, Jarjayes trouva le moyen de
rentrer en France, où, dépouillé de
ses biens, il soutint sa famille par ses
travaux. Une ordonnance du 4 fév.
1815 l'avait élevé au grade de lieute-
nant-général. Sa capacité et son ca-
ractcre le firent appeler par le minisire
dr:> finances, sur la j>résentation des
5.ociélaires des salines de l'est , aux
fonctions de vire-président de celte
ronjpagnie. Il les exerçait, lorsque, âgé
de «soixante dtx-sppt ans, il mourut à
Fontenay-aux-Roses près Paris, le 11
septembre 182'2. 11 n'a manqué à son
honorable entreprise que le succès pour
immortaliser son nom. — Jarjayes
( Louise-Marguerite - Emilie Quet-
pée de Laborde, madame de) , femme
du précédent, obtint de la reine Ma-
rie-Antoinette la plus entière confiance
et s'en montra digne dans toutes les
occasions. Pendant les plaidoiries au
tribunal révolutionnaire , Chauveau-
Lagarde qui avait parlé le premîér,
était déjà en arrestation , lorsque la
reine remit à Tronson duCoudray, son
autre défenseur, une boucle de ses che-
veux et deux anneaux d'or qui lui ser-
vaient de pendants d'oreille depuis sa
captivité. En fouillant cet avocat, qui
fut aussi arrêté, on trouva sur lui c*es
précieux objets ; il fut aisé d'en con-
naître la destination, puisque le nom
et l'adresse étaient sur l'enveloppe.
INladame de Jarjayes fut incarcérée aux
Madelonnettes pour avoir reçu cette
preuve touchante du souvenir de celte
princesse; elle y resta six semaines.
Mise en liberté , elle fut arrêtée de
nouveau pour la même caise et avec la
plus grande partie de sa famille , et ne
recouvra la liberté qu'au bout de neuf
mois, après la chute de Robespierre.
Cette dame mourut à Paris le 23 juin
1837. E— K— D.
JAROPOLK ou JARO-
P E L K l^*^, cinquième grand-duc de
Russie, succéda à Snn ientoslas 1 *^^ ( Voy.
ce nom, XL1V,278). S' étant laissé
entraîner par des insinuations perfides,
il déclara la guerre à son f/ère Oleg,
dont il déplora sincèrement la mort ;
quand il vit sous ses yeux son corps en-
sanglanté {Vuy. Olig, XXXI, 564),
peut-être éprouvait il un pressentiment
secret du .sort qui l'attendait. Son au-
tre frèr? , Vladimir-le-Grand {Voy.
renom, XLIX, 3i7), réfugié chez
les Vaiègiies ou ^iormands, desquels
descendait la famille régnante de Rus-
JAR
Aif, i'iumt ivanc^ à la (c(« d'un corps
de troupe* jusqu'à Km^, proposa a
JaropolL de \riiir Ir truu\rr pour m*
roucritrr. lu bra^e »er\itcur appelé
Variajlo employa tous le> mu^ens
pour en JéCouruer le in iure : •• Crai<;nex
•• celte entrevue , lui dirait il : vous
M D*cn retiendrez point ; rëfu^iet-
« vous près des Pies^rngowiens ou
« Pclfhéné^ues, renlrei à la tèle de*
« troupes qu'ils vous donneront , et
« vous ferez la loi à ^ ladimtr »* Mal-
gré re conseil •<>a<;e, Jaropolk alla trou-
ver le \ainqueur, et il (ut r^or^é par
luiiiwn. r.-v
J AUOSMF II. d
tvitili, Iroisii-ine fil* de \ 1 1 1
[\ oy. ce nom, \I.IX, 5hh , succéda
en 1238 à <ou fn-re aine, (îeor^e II
[f'uy.ce nom, \ Vil, H7), dans le
^raud-duclié de Russie. I^ bataille de
Site a>ant été perdue, les Tarlares qui
ne rencontrèrent plus d'ol>s;arlcs s'a-
vancèrent surSouzdalet kuzelsL, tout
fut pillé et massacré. Ualu klian {f uy.
Bati', III.ÔJI), rassasie de ramage ,
se retira pourquelqttr (enipssur le Don,
et Jaroslaf quitta kio\» afin de pien-
dre possession du ^rjnd-durlie dont la
ville capitale était Vladimir ^l^ilS, ;
peu après on apprit que Ilatu s'avan-
çait de nou>eau pour de>a>ter les
Î provinces méridionales de l'empire,
'éréiaslafet Tclierni^ow furent pillées,
bridées ; de là Halu marcha sur Kiow
qui , ap: es une défense coura;;cu»e ,
éprou\a le mrrae sort. Ainsi disparut
pour jamais celle antique capitale, que
les annales du temps appellent la mcrr
des villes russes. Uien n'> fut épar-
gné, pas même l'asile sarre iks tom-
beaux. Lesé<;lis€s, construite^ par des
architectes {;recs, furent miiu-es jus-
qu'aux fondements. Le piince Déraé-
trius, qui par ordre du -raiid-duc avait
défendu Kiow, fut pris Us arme* .i la
main et amené de\ant IJalu, qui, con-
tre 6on ordinaire, lui dit : Je t\ii -
J.VR
lo^
corde lu vie. De kiow, lialu i'avança
sur llalirxet sur lespro\inces que nous
appelons aujuiirdMiui la (lallirie; de là il
se jeta sur la lloii^ilr .« Il semljait,
" disent les annalistes du temps, qu'un
•■ neu\e de feu »e fût luulé ^ur la IVus
« $ie, deuuis les ri\rs de l'OLa jusqu'à
•• celles uu San. Vared à une béte fé-
M roce, Ikitu décorait les provinces et
« en déchirait les restes a\ec kCs grij-
« fes. Les plus vaillants parmi I«
•• prinres russes étaient morts dans 1rs
M cnndiats, les auIre^ erraient sur des
•« terres élranj;ere». Les mrrrs pleu-
«• raient Ir'jrs rnfanis qu'elles a%aient
• \\x écraser sous les clie\aux des Tar-
u lares, ou e\|»oser à àes traitements
« ignominieux." Hatu ajant conduit
les dépouilles de la Uussiefur les bords
de la mer Caspienne , en>o>a de là à
Jaroslaf l'ordre de \enir le reconnaître
pour souverain. Le >;rand duc obéit, et
du camp de Uatu il fit partir Cons-
tantin, le plu jeune de Ke> fils, pour
aller en Tar'.arie se prosterner aux
pieds du ^rand Ihan , Oltaï-klian,
{iny. ce nom, WXI, 5J9] qui cé-
lébrait les victoires que s« armées ve-
naient de remporter en (>hine et en
Kurope. J.iro>laf, accuerlli par Halu
avec distinction, fut nommé chef des
princes russ«s ; et, deux uns après ,
Constantin re\in( de la Tarlarie ap-
portant avec lui l'ordre intimé à son
père de se rendre à la r;rande Iior-
de. Jaroslaf n'était point en mesure
de déM)bcIr. \\anl fait ses adieux à
la Russie qu'il n'espérait plus rooir,
il .irri\a 4;r les bords du ncu>e Vrnoui ,
et là il subit une nouvelle humiliatiort.
Contraint de se prosterner de\ ant le trô-
ne du ^rand khan, il rnoiirut de douleur
.ÎOsrpt. |2V6)cn re\enaiitdcre!:on-
^^ux voyage. Il fut le père d Alexan-
dre Newsli, si céltbro dan^ les annale.*;
delà Russie ^/oj. Ai.kxam.ke, J,
.'riS;, et d'Andic Jaro.<lawilfh ^Vo) .
Andrk, LV|,2v2v G— y
io4
JAPx
JARRIC (Pierre DU), jcsuiie,
né à Toulouse en 1565 , professa
pendant quinze ans la théologie nio-
nh au collège de lîordeaux , avec
beaucoup de réputation , et mourut à
Saintes en 1616. Il est auteur de
Wllistoire des choses juénwrahles
adoenues tant es Indes orientales
que autres pays de lu derom^erte
des Portugais , «Uc. , Bordeaux ,
1608-16I0'-1614, 3 vol. in-V. Cet
ouvraoje, rare et recherché , a élé
traduit en latin par le P. Ma!h. Mar-
tiiiez , Cologne, 1615, 3 vol. in-8".
Dans le principe, Jarric s'était seule-
inen! proposé de mettre en français les
relations publiées par lesjésuites italiens
et espagnols sur les établissements que
la société venait de former en Améri-
que. Mais chaque écrivain , n'ajant
traité que d'une province , donnait
des détails omis par les autres ; et, à
moins de lire toutes ces relations, on ne
pouvait avoir qu'une idée incomplète
des travaux des missionnaires dans le
Nouveau-Monde , et des pays dont
Ils avaient , pour ainsi dire , fait
une seconde fois la découverte. Jar-
ric renonça donc à son projet , et ,
prenant dans la relation de chaque
missionnaire ce qu'il y avait de plus
intéressant, en coniposa rouvrafi;e dont
il s'af^it. JJien qu'il n'ait pas été ,
comme on le dit dans la Biographie
Idulousuine (1), témoin oculaire des
faits qu'il rapporte , son ouvrage
n'en contient pas moins sur les mœms
des Indiens et sur l'histoire naturelle
de l'Amérique une foule de détails dont
les récits des nouveaux voyageurs ont
confirmé l'cxachlnde. La bibliothèque
de Toulouse possède quelques manu-
scrits de Jarric. W — s.
(t) Le 1*. du Jar.-ic a deux article» dari% la
li'ogtuphie loulouiaint. C'est dans l<; setonil (I ,
45G , quesr trouvant le» moU soulignés. Uiin» !<•
preiiiHjr (I, 334), 1<-' redjcleur dit que rouvrd;;c
de Jarri'' , «lonl il change le titre m celui de
Tr,tor de l'hntoire des fndes, ne iiicriloit pas
l'hunncur d'être traduit en latin.
JAR
J A R R Y (Pierre-François-
Théophile) , chanoine de Liège et
écrivain ecclésiastique , était né en
mars 1764, à Saint-Pierre-sur-Dive,
en Normandie. Il commença ses études
en province et vint les achever à Pa-
ris ; mais il n'eut point le temps de
faire sa licence en Sorbotine, la révo-
lution avant fermé celte célèbre école.
Nommé curé d'Escots, paroisse voisine
du lieu de sa naissance , il ne fit que
prendre possession de sa cure et fut
obli".é de s'éloiîrner immédiatement,
par suite des persécutions qui tu-
rent dirigées contre le clergé. Non
content de refuser le serment , il le
combattit par quelques écrits. En
1791 il se retira à Jersey d'où 11 passa
en Angleterre l'année suivante, et de là
en Allemagne. Nous croyons qu'il sé-
journa quelque temps dans l'évcché de
Liège et à Maestricht. On lui attribue
une instruction pastorale du prince-
éveque de Liège sur les causes de la
révolution et sur les moyens d'en arrê-
ter les progrès ; celte instruction est
datée de Burgos, mais cette date n'a-
vait élé imaginée sans doute que pour
dérouter les persécuteurs , car ni l'é-
vêque ni l'abbé Jarry n'étaient allés en
Espagne. L'évéque d'Auxerre, M. de
Cicé, qui connut l'abbé Jarry en Alle-
magne, lui donna le titre de son grand-
vicaire en 1798. Pie W , alors exilé à
Florence, le nomma archidiacre et cha-
noine-1 réfoncier de l'église princière de
Liège; mais les événements, qui devin-
rent.de jour en jour plus funestes, ne
permirent pas à l'abbé Jarry de jouir de
celte prébende. Il demeura long-temps
à Munster, enWestphalie, où plusieurs
évéqiics français et un grand nombre
d'ecclésiastiques étaient réfugiés. Son
esprit cultivé , sa conversation pi-
quante et ses manières aimables lui
concilièrent l'estime de plusieurs sei-
gneurs allemands. Il eut part à la con-
version du célèbre comte de Stolberg,
JAK
pl dans lr> dftiiirrs (rinp« ^e %* >ip
il entrrirnait rncuir unr rorre^^oii
dancf avec M« anii^ dr NVe>i|tlialip. Il
•e rcnira point en Kranre »prrs If con-
cordai, ^ (il veulrinrni un rourt «o>j^e
en 1H07, el ne rr\inl loul-a-fail au'a-
ptr^ la rf5lauralion. Ketiré â Falaise
aoprès d'une parente , il va pas*e se-,
der nirres annrrs, parta^^eanl M)n lpinp>
entre |« fxfifire^ de piete cl IVludr.
Avant écrit en 18! (> une lellrr dr fr-
lirilatinns à l*ie ^ Il «nr »nn retour
dan^ <es ^tat», ce pnnlifc lui adressa le
29 juin un bref lionnralde. l/eȏque
de Ha\eux lui donna le litre de vicaire-
^éoéral. I.'abbé Jarrv s'aDli^^eail vive-
ment de^ maux de la religion ; il s'ef
frayait du délire des opinions et de la
lirenre de la presse. \jk mort du duc
de Berrv fit sur lui une ^i%e imprei-
sion. Il t'était rendu a l.i^ieiii pour
assisler k une retraite erriesiastiqur,
lorsqu'il fut atteint de la maladie qui
remporta, le M août iH-Jit. On a de
lui un avsez ^rand nombre demis qui
montrent autant de talrnt que de
tèle. I. Questûm sur Ir serment,
1791, in-8". II. L\Me t'uuchet
peint par lui tnème, Jersev, 2 août
1791, in-H" de 62 paoes! III. lie
de tahltr Faw hrl . Jersev, 1791.
in-8o jj. 30 pjj. |\ Cxintruste en-
tre un tfuakrr et fu/pôe taurhet,
Jersev, 1791 , in 8° de Ô9 paj;.
Ces opuscules , publiés sous le nom
de l'abbé de N alméron , sont diri»;rs
contre Kaurlict , é>équf fonslilution-
nel du CaUados. V. Discours sur ta
délivrante de Muestrirht , 1793.
^I. Oraison Junehre du cardinal
de La Hurhe/uucauld , Munster,
18(»1,in-r de 51 pap. V||. (trai-
suri funrhre de la comtesse Antoi-
nette de Kaunitz-Ricthiurg, 1803,
in-8". \j|j. Dissertdliun sur /V-
piscopat de s/iint Pierre a Antio-
chr, Paris, 1S()7, in 8" de 103 pa-.
C'est une réfutation d'un religieux al-
JAR
o5
temand, MnlLenbulii , qui avait pu
bbe, de ITHô a 1801, plus de vin^l
dissertations critiques ou il niait les
faits le» plu» avérés dr l'iiistoire ec-
clrsiaslique. L'abbé Jairv a%ait rédi|;é
un ou«ra|:e latin pour lui repondie,
niJiN il ne l'a |M>iiit publie: !>i disser-
tatittn est un eiliail de crt oii\ra^e.
I \ . i.tunien dune dissertation sur
la mitigation des peines des tia/n
nés, l^ipxi^. 1810, in-8" de 200
pa{>es; c'est une réponse à une di.\.srr
tation de l'abbr Kmer> qui n'a point
ele publiée, mais dont on avait eiivovr
Îuelques exemplaires a !^!unsler. X.
)u retablisxrment de C empire fier-
maïuifue tel tfuil était avant 1792,
fMir un tre/ontirr de Liège, l*aii>,
181 i, in-8". XI. Discours sur lit
catastrophe du 2t> mars et Mtr U re-
tour (/u ro/. ibid., Ihl .'), in-8". XII.
Discours prttnoni e a Houen a la .S7-
Louis, 1816. l'aris, 1817 XIU.
Sur uiint Hermenegtlde,ftnr l . A .
T. I). L. ton ancien trefoiirirr dr
l.ié^e, Paris, 1817. iu-8 ' de G8 pa
ges ; c'est une réponse à un arlirir de
Malle-Brun dans le Journal des Dé-
bats du 7 mars 1812; à la 6ii il Y a
deux notes, l'une sur V Essai sur fo-
raison funehre de .M. N illemain ,
l'autre sur VUistuirr du lias- Empire
de Kovou. XIV. Orai.utn fuiuhre
du prince de (.onde, l'aiis, 1818,
in-8"; ce discours ne parait pas avoir
elé prononcé ; il renferme des considé-
rations élevées sur nos niallieuis et
sur leurs causes. W. De la Uiei té
de la presse, ibid. , 1819, 111-8"
de 52 pa^, XVI. Sur la petite
église, ibid., 1S20, in-8" de i6
pa^es. Il V a des choses curieuses daiLS
cet écrit, qui est une^poiise à des ec-
désiastiours du Mans, l/abbe J^rry
était un homme de mérite et de tale|^.
Plu-ietirs des écrits ci-de,>5us sont re-
marquables par les pensées et par la
vene du si) le. P— t — T.
i<»6
SAS
JASIXSKI (Jacques), général
polonais, né en Lithuanie, était lieu-
tenant d'artillerie pendant la campa-
gne que les Polonais soutinrent en
1792 contre les Russes. En 1794 se
trouvant presque seul au milieu de la
Lithuanie.- occupée par les Kiisses , 11
courut et exécuta le dessein de délivrer
la ville de Wilna et de soulever la pro-
vince. Dans la nuit du 2:î au ^ï avril
1794, n'ayant avec lui que cinq cents
hommes , il tomba sur la garnison
qui était de trois mille Russes, en fit
prisonniers plus de deux mille avec
leur générai Arsenlew, et son état-ma-
jor, et répandit au loin la terreur de
son entreprise. Kocluszko appela au-
près de lui ce chef entreprenant et le
plaça dans le conseil national. Ja-
slnski fit, mais bien inutilement, des
prodiges de valeur à l'assaut de Praga.
Il tomba après avoir vendu chèrement
sa vie. La veille de l'assaut, Il avait dit
à ses amis que si les Russes n'étaient
point repousses on ne le verrait plus:
il tint parole. G — y.
JASOX, frère d'Onias III,
grand-prêtre des Juifs [f^oy. Onias,
XXXH , 14), dépouilla celui-ci du
souverain pontificat qu'il obtint à prix
d'argent d'Antiochus-t^piphane , roi
de Svrie, sous la domination duquel
était alors la Judée (175 avant J.-C).
Loin d'imiter la piété de son frère, il
s'efforça d'introduire parmi les Juifs
les mœurs et les coutumes des païens.
Quelques années après, Ménélaiis, que
Jason avait envoyé auprès d'Antio-
chus, gagna les bonnes grâces de ce
monarque et en acheta à son tour la
dignité de grand-prètre. Revenu à Jé-
rusalem, il en expulsa Jason qui se ré-
fugia chez les^mmonites , mais qui
h^ntôt, sur un faux bruit de la mort
^u roi de Syrie, ra sembla mille hom-
mes, et pénétra dans la capitale de la
Judée, où il commit toutes sortes de
violences, sans pouvoir néanmoins res-
JAS
saisir l'autorité. Contraint de prendre
la fuite, il erra successivement en Ara-
bie, en Egypte et se retira enfin à
Lacédémone, où il mourut misérable
et méprisé. Tel est le récit de l'auteur
du second livre des Machabées ; celui
de Flavius Josèphe (Antiq. jud.) est
moins étendu et diffère sur quelques
détails généalogiques. — Jason de Cy-
rène écrivit en grec l'histoire des
persécutions exercées contre les Juifs
par les rois de Syrie. Son ouvrage est"
perdu ; mais il en reste un abrégé,
écrit aussi en grec par un auteur dont
le nom n'est pas connu. Cet abrégé
forme le second livre des IMacha-
hées. — Jason de Thessalonlque, cité
dans les Actes des apôtres (chapitre
xvii), et dans VEpitre aux Romains
(xvi), était parent de saint Paul et
le logea chez lui avec Sllas, son com-
pagnon de voyage. Les Juifs de la
ville, étant venus assaillir la maison de
Jason pour se saisir de ses hôtes et ne
les ayant pas trouvés , le conduisirent
lui-même devant les magistrats qui le
renvoyèrent absous. Suivant les Grecs,
il fut d'abord évêque de Tarse et en-
suite d'Icône. P — rt.
JASOX de Phkres, un des prin-
ces les plus célèbres de la Grèce, dut
naître vers le temps de l'expédition des
Athéniens en Sicile, c'est-à-dire de
41 G à 41 3 avant J.-C. Sa famille, la
plus noble et la plus opulente du pays,
■ faisait remonter son origine aux an-
ciens rois de Thessalie, et ne le cédait
point en illustration aux fameux Alé-
vadcs de I>arisse. Lyrophron son père,
était le premier personnage de Phères
où il joua un grand rôle politique, fai-
sant alliance avec Sparte, baîlani à la
tête de l'armée phéréenne les Laris-
séens et d'autres peuples de Thessalie,
vers le temps de la grande éclipse so-
laire du \\ septembre 404 avant J.-C;
et probablement il couvait des plans
très-vastes, lorsqu'il mourut vers 396.
JAS
11 UfHJI 9lttl8» projfti de ^^rand^s
rirWt» à M* trois ftU, Jison, I'ol> -
pliroji , Put) dore. JA<ion reuiiii^sait
toutes les qualil» qui peuvciil don-
ner la popularité dans uue cilr ^uer-
rièrr : uue (;énrroMle saus boroe», un
Corp» de fer, un courage invincible ,
la liardie.v»e à ritiirooK , la circou>pec-
tion et la rapidiic dji)« Tr^iruiion;
qu'on V joigne i'adie»^»* mre,
1 art de coordonner • les
mo>rii>auii rao^rn^pitui jumci jubul,
enfin unearti\ile qur ui lr>oliNljrles m
même les «ucrr» nr pomairiil paraU ser,
on comprendra combien Ja.son de%ai(
a^ir sur l'imagination mobile et \ite,
kur Taudace va^aUmde et a%eniareu>e
de la (iicre. 11 est vrai que seuls
rilcllade et le IVIo|N>Hè^ a\ aient
).i(lis prétendu au liire de (irece et
qu'à lllUrie, àl'Kpire, à la Ma-
cédoine qualiijées de barbares, l'or-
i;ueil des Donen» et lonirns du sud
avait joint la 1 brvs^iie. .Mai» ce* ana-
thrmc» burannes ne truairnl point
contre les rait> : presque toute la clas^e
duminanle de 1 liCN>alie participait à la
civilisation «grecque; et , à mesure que
l'on s'éloignait des premières tjuerres
mcdiques, les lumières se répandant de
proche en proclie projetaient leurs
ra>ons sur les peuplade> restées en ar-
rière. D'autre part la^ueire du l'elo-
ponese avait uié li'> iorces des deux
grandes républiques méridionale^, et
déjà se dessinait ce ;irand phénomène
de l'or^ani^e social en (Wece , l'iin-
pui-ssanrc asecenUaliser. Allu-nes avait
inemedublemenl perdu sa suprématie,
et la victorieuse Sparte, mal;;re ses ef-
forts pour en hériter, allait reculer mé-
mo en Pcloponèse. C'est en ce mo-
ment et pendant les tenlaiivcs des
Thvmbion, des Derollidas, des A;;é-
silas en Asie que Jason parut sur la
scène, l ne suite d'artifices et d'intri-
i^ues, sur lesquelles nous n'avons point
de ren»ci^iiemenis, lui valut la totalité
JAS
107
00 peu s'en faut de l'héritage paten»el
au préjudice de >ehdeui frt-res, et biea-
tdt au sein de sa ville natale la souve-
raine autorité , autorité illégitime et
usurpée, il est vrai, mais qui n'empor*
tait pas essentiellement par elle-méoie
l'idée odieute que les modernes atta-
chent avec raison à l'uMiipation. Kn
effet, à peu d'exceptions pre^, le^ pe-
tits^als de la (îrece étaient »anN cevse
a^ilX par de* roolniioiM qui faisaient
passer le^ pouvoir ratieà la
démocratie, et rer:j '.et qui,
M elles n'euNsenI ele en pai
la ferocile ;;eiKrale du lu , , nent
offert une pande analogie avec ces brus-
ques chan,;eroents de roini.vlère qui »em-
blent devenir l'elal normal du gouver-
nement représentatif : l'aristocratie, l'es-
prit dorien, reprr^ntaient la résistan-
ce, le parti conservateur ; la démocra-
tie, l'esprit ionien au contraire, aspirait
au mouvement, à l'innovation, i.e mal
de la (iiece fut que généralement les
deux svNiemes »e balancèrent eiacte-
menl, et qu'aucun n'eut asseï de su-
périorité |>our terrasser l'autre et se
sentir de l'énergie de reste. 1^ bien des
guerres civiles, c'est qu'un partr écrase
l'autre proroplemenl, sans que du cMc
du vainqueur la déperdition de forces
amene-la prostration, de sorte qu'avec
ce qu'il se trouve de forces libres et
disponibles exerrees par la lulte et
exaltées par le triomphe, le maitre du
chjin|> de bataille les applique iramé-
di.ilenient et a l'aise ^ quelque u-uvie
utile et grande. C'e>t ce qui ne pouvait
>e léali.ser en (irèce que sur les ruines
des deux parti.s , en d'autres termes,
ce qui ne pouvait se réaliser que par un
tvran. I,e t\ran au milieu de ce flux et
rellux des deux partis, c'était au roi-
lielrdes ministères au jour le jour lecoi
qui rè^ne et gouverne, indiflerent et
supérieur aux devises des partis , usant
des forces des uns et des autres, les
haraoniant et les faisant converger en-
io8
JAS
semble. Malheureusement le aéniesrec
était antipathique àcerégimesahitaire :
nulle tyrannie ne naquit viable en (iiè-
ce. Il lui fallut, pour qu'elle a^it coinine
corps unique, des princes qu'elle re<^ar-
ilait comme élrano;ers, un Philippe, un
Alexandre: encore Sparte, TEtolie et
bien d'autres contrées prolestèrent -
elles par une malveillante inertie; et l'u-
nion factice des Grecs sous le Mkîtec-
torat macédonien fut-elle aussi rapide-
ment dissoute que péniblement établie.
Peut-être eût-elle eu plus de chances
de durée si le centre de l'autorité eût
été la Thcssalie, si le généralissime de
la Grèce eût été Jason : le cri » à bas
l'étranj^er ! » eût eu moins d'écho ; la
répulsion n'eût point été si vive : la
ïhessalie était le berceau des Grecs du
s-id, elle touchait aux Ioniens , elle
avait encore une Doride, elle avait les
l^liermopvles ; sa cavalerie était la meil-
leure connue; ses ports, son commer-
ce lui donnaient quelqu2 ressemblance
avec Athènes. Telles sont les considé-
rations qui, graduellement , amenèrent
Jason aux plans fiiQ;antesques qu'il finit
par concevoir, mais qui n'eussent été
que de la démence s'il eût débuté [)ar
y sonj;er. Ce qui classe cet usurpateur
parmi les grands hommes , c'est que
son bon sens n'était pas moindre que la
largeur de ses vues , c'est que ses idées
s'agrandirent par le succès comme ses
succès par ses idées, c'est qu'il ne tenta
jamais que ce dont il était sûr, et par
conséquent qu'il ne manqua pas une
de ses entreprises. Une fois maître ab-
solu à Phères (390), il mit ses soins à se
former un noyau de troupes d'élite, il
le porta en peu de temps à six mille
hommes , tous choisis parmi les plus
robustes et les plus braves, bien exercés,
bien payés, ne respirant que la guerre,
ne connaissant que Jason. Sans cesse
au milieu d'eux, souvent vêtu comme
eux, mangeant comme eux, jeûnant
comme eux et plus long-temps qu'eux,
JAS
Jason était leur type et leur mo-
dèle, leur idole et leur espoir. H
récompensait libéralement leur va-
leur ; aux blessés, aux malades il prodi-
guait des soins; des obsèques lionora-
bles accompagnaient les morts à la
tombe. A quiconque se dégoûtait du
service ou ne s'y portait qu'avec peu
de zèle, il accordait facilement son
congé. C'était le temps oii les mer-
cenaires commençaient à fourmiller en
(jrrèce. Jason peut-être fut un de ceux
qui contribuèrent à introduire celléau;
mais ses mercenaires étaient la plupart
Thessaliens : ceux-là au moins étaient
presque des nationaux; et, si ses plans
se fussent réalisés , ils l'eussent été
complètement. Les mercenaires, d'ail-
leurs, étalent les seiils éléments alors
possibles de troupes permanentes, et
des troupes permanentes étaient la
condition essentielle de toute puissance
durable. Avec l'augmentation de son
armée Jason faisait marcher de front
les mesures politiques, et amenait par
d'habiles préparatifs l'instant de frap-
per les grands coups. Il étendait en
pleine paix son inlluence sur tous les
points de la Thessalle; son hospitalité
magnifique attirait les notabilités voisi-
nes à Phères et lui valait d'utiles liai-
sons; il affectait du goût pour les arts,
pour l'éloquence, et ses flatteurs le re-
présentaient comme se livrant lui-mê-
me, ainsi que Denys, à la composition
d'oeuvres littéraires : il charmait les
Athéniens en venant sA gardes dé-
fendre en personne, devant les tribu-
naux démocratiques d'Athènes, son ami
le général Timothée, Ce mélange de
force et d'adresse lui soumit de bonne
heure diverses peuplades de l'ouest et
du sud, les J)olo[)es, habitants des
Callidiomes, les Maraces sur les fron-
tières de l'Etolie, les Énianes et les
Drvopes répandus sur les versants de
rcAlla, tous intrépides montagnards
qui ne demandaient pas mieux que
JA>
JAS
i«o
il ilie coniluii . j-ai un cliff lubilr fl
lieurrux. au |»iilj,;e •!'' coiilrcf-» \oi*i
nr*. (iii^T i u)u srcour», Nf();icne,
tu<n J'Ili t rr . en recolle mnlre
Alhriir ( son jiuloiilr en ^te-
nant L < ' iiinnr (ui\int a do-
miner (hu^r. luuinanl ruNuile au
nord, il profila i\e^ lii seasiou» lie la
maison ro> aie i^sur de Caranu*. pi»ur in-
tcr^enii dans lf> aiïairc* de la Marédoi-
ne. Annnla^ III, en av5a*»inanl l'u^ur-
paleur ^ausaniai.n'axail (oni{u:><|u'uii
trône clianrelanl (.JlMi) ; les HlMiolei
is'élaient abattu» sur la Macrdoine et
après a^oir réduit le pau\re monarque
à fuir de sa capitale, a céder dr» cilr%,
dei di>trict» i()l>ntlte. et finalement
à te réfu;;ier en llir^Hilie à peu près
^aiu terre, avaient d«)nné la couronne
à rinsi^uiGant Aif;ee 11, fantôme de
roi qui n'eût ose ri*>ister a la moin-
dre de leur» volontés ^390). JaM)n
rhanj;ea cet étal de clio*«^ ; le roi dé-
possède trouva un a»ile i m cour , et
bientôt à la tète des troupes tiie^»a-
lirniifs que conduisait Jason en per-
>oiine, seconde par ^in^urrecllon des
Maredonuiis que Ici \iolences et les
rtpines des llUiiotc:» a'a\aient que trop
iati^uès, il \it I éprendre ra|>idemrnt
à ces deinier> la plupart des pro\:Qces
qu'iU possédaient, el fut rétabli a l'rlla
(388). On comprend combien un tri
événement dut au>;mcntei la puissance
et Tinlluence de Jason. I^ Macédoine
dès-lors lui pava un tribut et lui four-
nit des auxiliaires robustes et aptesaux
fatii^ues militaires. On peut s'étonner
de ne pas le voir i ester en Macédoine
pour aider Am\ntûs on lutte a\ec ()l\n-
the : c'est Sparte qui, à la sollicitation
des cil es grecques menacées dans leur
indépendance par celte reine de la pé
nlnsule chalcidique, entreprit la ;iuerre
«ontre elle. Jason resta inactif en
celle occasion. C'est probableracnl qu'à
la suile de l'expédition macédonienne,
il al taqua par ses armes ou par l'or et par
I iiiifi^ne les tiio oputi*ntes et popu-
leuse» du centre et de l'est : I^iiv^e et
l*li.i * furrent son attinlion.
lia , «micicsaii .;iandi*sdif-
ficulirs, il lui obbtie d'ajourner l.i con-
quele iW la srton«li-. \ ers le même
temps d enlia.t eu iLt'.e arec Atliènet
au sujet de l'Kubec qu'il eu: voulu sou*>
traire a la domination allii'u.rtii^, et k
laquelle il se laisait prc»enicr de loin
comme un libérateur: jl rnn^o.iait
au»si le sud de l'Kpire et fomeutait
parmi les Nfolov^es l'emeulc qui ron-
trai);nil Mfela% à s'evpalrier. l.ri Mo-
loises s'allièrent avec lui, et de pro-
té;;és il comptait bien en Cane des su-
jets, quand l'intervention atlienienne
arrêta ses projets. .Kiretj» letinl et le*
Itistieotes, à lavoii de Tliérippide qui
prit sur tu\ un amendant vans bornes,
ouvraient leurs portes et acceptaient de-
recbef le jou^ d'.Vtheiiei. Qiabrias,
à la tète de ces detniers, s'avança en
'Hies^lie, prit Metropolis, 377 u\ant
.l.-C.. et mena(;ail de soulever le, |)o-
lope», les Kuiu>u-,rl lesMaraces. Ipli.-
crate vint rusui'.r, puis Timntliit-. Ce
dernier était plutôt là iK'^ociatem ^i:i*
^énesal. Jason, depui> lon^-tem;>s «oii
ami, traita volontiers a\ec Athènes par
son intermédiaire. .Mais on ne sait
point exactement quel fut le traité.
Suivant les uns, Jason abandonnait
complètement l'Kpiie, selon Us au-
tres, il se bornait à l'évacuer ; Alcétas
en i^^rdalit le trône était son tribu-
taire, et le maitre de Plieres. obei de-
puis la mer Ionienne jusqu'à la mrr
Kf;ée,élrei^uail l'Ilrllade comme d'une
ceinture. Sur ces entrefaites, Tlu-bes,
qui venait de se délivrer de la tvraiinie
de Sparte, osait, ^ràce à l'elopulas et
Kpaminondas, ^ràce aussi à l'.ippui
d'^lliènes, entrer en liceaxec la 'j.. amie
cilc du Péloponese, et la lutte se -oute-
iiail -^ans d«'savaiita:,c. L'occasion pa-
rut favorable à Ja^on pour attaquer
l'iijrsale. Battu en plusieurs rencon-
lO
JAS
très, enfin Polydamas de Pharsale, le
plus tenace des antagonistes de Jason,
le plus ferme coryphée du système
aristocratique , demanda un armistice :
Jason y consentit et eut avec lui une
conférence, où lui dévoilant sincère-
ment ses vastes plans, soit pour la réu-
nion des ïhessaliens en une nation et
un empèse, soit pour la destruction de
l'empire médo-persan , et promettant
de lui donner, le premier rang après
lui dansses états, il terminait en ces ter-
mes : « ïu le vois, seul et par tes forces
« tn ne peux me résister , et tes efforts
« n'ont pour résultat qu'une inutile
" effusion de sang. Va donc chercher
« tes alliés les Spartiates , j'y consens.
« S'ils veulent, s'ils peuvent t'envoyer
« des secours, nous continuerons la
" guerre, je combattrai et Sparte et
« toi; mais si tes alliés ont trop de
« leurs propres affaires pour se meltie
«f encore les tiennes sur les bras, s'ils
« te laissent isolé, alors renonce à
« soutenir une cause insoutenable, ai-
« de-moi à devenir le généialissimede
« la Grèce et sois le pi-^mier en Thes-
« salie après Jason. » Polydamas se
rendit en effet à Sparte, déjà peut-être
converti par la parole puissante de Ja-
son, et souhaitant que ses alliés du Pé-
loponèse l'abandonnassent. Si tel était
son but, il dut être satisfait. Les Spar-
tiates avouèrent leur impuissance et
n'offrirent (jiie des renforts insignifiants.
Polydamas, de retour, ne balança plus,
il convertit la trêve en paix définitive,
ouvrit les portes de Pharsale à Jason,
ne se réservant que la citadelle, et le fit
reconnaître dans toutes les villes qui
dépendaient de Pharsale. Une diète «le
toutes les cités tliessaliennes s'assembla
par ses soins réunis à ceux de Jason;
Jason y fut proclamé piinre de Ihes-
salie. Il s'occupa dès-lors de régler
les contingents des citfs en argent et
en troupes. Bientôt il eut sur pied vingt
mille hoplites, ce qui supposait qiia-
JAS
rante mille hommes , et plus de huit
raille cavaliers. A celte armée régulière
il pouvait à volonté joindre un nombre
proportionné de peltastes dont les ré-
gions limitrophes lui offraient les élé-
ments. Avec ces forces, Jason, pour
peu qu'il maintînt son autorité sur ses
Thessaliens , ne craignait aucune puis-
sance grecque et pouvait en faire trem-
bler beaucoup. L'Epire barbare était
divisée; la Macédoine affaiblie n'était
un royaume que de nom , et lui payait
tribut ; les Odryses étaient trop loin, et
Sparte s'acharnait en pure perte sur
Thèbes, qui bientôt allait lui ravir sa
renommée et sa prépondérance mili-
taire. La vaste puissance d'Athènes,
éparse en tronçons par Lysandre, avait
tenté en vain de se recomposer. En de
telles circonstances, nul doute qu'avec
de l'unité , avec un homme de gé-
nie pour chef , la Thessalie ne pût
sous peu de temps devenir la puis-
sance dominante de la Grèce ; et quel
champ immense s'offrait à elle ! Puis-
sance navale en même temps que puis-
sance continentale (car elle dominait
la Macédoine d'où Athènes tirait ses
bois de construction ; ses nombreux
esclaves étaient une pépinière de mate-
lots, et elle n'avait besoin d'aller de-
mander du grain et de l'argent à per-
sonne) , elle s'annexerait successivement
l'Eubée, les C)clades, les îles de
Thrace et d'Asie dont est semée la
mer Egée, et prendrait dès-lors pied
en Asie. Tel était le plan de Jason.
Il le méditait depuis long-temps, il
s'en était ouvert à ses amis , Poly-
damas l'avait apprécié. La partie la
plus chimérique de ce plan , l'ex-
pédition contre les Achéménides n'é-
tait pas si dépourvue de sens qu'on a
semblé le croire. N'est-ce pas ce que
Philippe voulut, ce qu'Alexandre exé-
cuta un tiers de siècle après Jason ? et
l'Anabase et Agésilas n'en avaient-ils
pas démontré la possibilité à certaines
JAS
«ms. qui louin auTiient He bien-
lit truuirs par JjNon .' ouaiil a la réa-
lité du proirt lui-iiirii;r, lurn quf l'ac-
rt'!:i. ' lit ru fût elui^iir, un it'rn
M.. .r. Oulre qut \e Innoi-
^lu^uc lu:iucl lie \rinn»lioii l'ulIrNle,
il tsl a irniirqurr «jMr I inxaNton lir U
l'cfc pji Ifâ (il» ;» le Ifile
Ir plu-» rréqiiriit .. nitiook dr*
M>plii^lr\ : aioM ic ^raiiil liMinnif au-
quel rt Jil rc>er\r l'hoiinrur dr {>i cndrr,
au liuui de la ( àrece , crite ecblante
re\auche dndoasialioii» de Daiiu* et
de Xer&é» , ne pourrait prétendre k
riionneur d*eu a^nr conçu l'idée. Or
.lavou. atec Min t;oùt rrcl ou fruit pour
Ir ' ' . declama-
t e en *u^-
;;r;a.l plu^ U utic l'iuilanl rr teuipt
les r\eneraenl^ marfli.iient. Spailr, de
moins rn m '.i<^ , avait enùn
perdu la b.it > I ' .cires, mai» dis-
posait toute» in ioicts pour réparer
ce coup terrible dont elle ne >e re- .
leva pas (:)7U). Tliebes, i la foii ra-
\ieet comme épouvantée de &on écla-
tante victoire, clieicliait paitout des
alliés. Tandis qu'.Vllirnes décline im-
poliliquemeut sa demande, et rarme
s'unit a Sparte, Ja^ion souscrit a\ec
erapressemriil »ux %«rui des Tlirbains,
équipe noml rs comme pour
prcscrvrr la i' attaque> man-
times, puis rapide cuinrae l'eclair arri-
ve aux environs de l'Iiebes avec sa ca-
valerie et son infanteiie soldées, lon<;-
temps avant que les 1 liebains aient ea
le temps de rassembler des forces.
Cette précipitation cachait des vues
ambitieuses. I/a>tuce profonde dont
l'Iiilippede Macedo'^e usa pendant la
j;urrie sacrée , Jason se piei'atait à la
deplover. Quand les Spaitiates |uru-
rent, il les m«'na;;ea: il n'eût tenu qu'à
lui, s'il eût voulu par exemple lumber
avec sa ca^ale^le du haut d'un coteau
sur 1 ennemi, de l'écraser et d'en faire
une épouvantable boucherie. 11 se ^arda
lAS III
bien Je rendre lesThébains si heorfox
«l M puissants ; et sou» des prétextât
fmolc» il refuia de combattre. Il eut
soin en même IrropN de faire savoir aux
Spaitiates que Iruis ennemis n'élaient
pJ ' t que quelques-
un a em. Son
;;rai)d but, en Icuaul ausi la balance
riitie la puissance nouvelle qui ;;ran-
dissait et la puiv^anre ancienne qui s'en
allait mourante, riait de prolonger la
lutte entre elles deux et de les affaiblir
l'une par l'autre. 11 avait aussi un but
secondaire : c'était de faire, k Paide des
corps nombreux qa*il amenait Comme
auxiliaires, quelque coup de main heu-
reux et lucratif. Il n'v manqua pas.
Dès qu'il eut fait conclure avec le roi
dr Sparte Cleombrole un armistice, il
roinitjrfiiJi »a retraite sur CVeusis, puis
sui I r, et retourna par llvaro-
j»o! 1 'cide, s'empara des fao-
bour^ de la ville qui lui ferma set
portes, dévasta le ua«s, puis tout i coup
sij;na la paix avec (rx Phocéens, subor-
nant à démanteler Freinée sur son pas-
sa|;e, aGn de pouvoir toujours à son f;ré
s'avancer en llellade sans laisser der-
rière lui de place fortifiée. H envahit
ensuite le> deux [.rendes oponlienne
et épicnemidienne qui ne firent pas
plus heureuvement ré>istanrr. Hrpas-
-sanl les roonls, il mit le sie;:e devant
lleradrcde Trachinie, colonie larédé-
monienne fondée pendant la >;uerredu
Peluponcse. Soit par suite d'accord
secret avec Sparte , soit simplement
parce que, auxiliaire nominal des Thé-
bains, il était en guerre avec Sparte, il
détruisit cet étliblisseroent dont la dé-
cadence, au reste, était déjà marquée, et
qui après avoir jeté un ;^rand éclat à sa
nai^saoce aNait faibli subitement. Il en
acheva la ruine: quelques habitations
seules survécurent au pas^a^c de Ja-
son: le tcriitoire colonial fut partagé
entre lc> ORlhéens et les Méllens. De
là en 6 11 il marcha en Perrhébic, où^
m JAS
probablement il n'eut pas moins Je
succès. Ainsi le pouvoir de Jason en
Tliessalie devenait, par la contestation
même, plus incontesté de jour en jour ;
les résistances à main armée ne ser-
vaient qu'à consolider et à étendre sa
suprématie. Chef des ïhessaliens, su-
périeur à la Macédoine et à l'Kpire ses
tributaires, protecteur àes Eubéens,
médiateur en Béotie, invoqué par les
uns, redouté par les autres, respecté
de tous, il ne voyait encore dans tout
ce qu'il avait fait que les premiers éche-
lons de sa grandeur. Il méditait une
expédition prochaine contre la Phoci-
de, dont évidemment la possession au-
rait été pour lui du plus haut intérêt :
par elle il eût coupé en deux la Hel-
lade , il eût occupé les positions les
plus fortes, les pluscentralesdecepays:
il eût toujours été à même de prendre
à revers la Béotie qui n'eût dès-lors
agi que par ses ordres ou swis ses or-
dres : un an plus tard les ïhébains
avec les alliés du Péloponèse, mais sans
concours de la part des Thessaliens,
envahissaient la Laconie et achevaient
de briser sans retour la puissance de
Sparte; que n'eussent-ilspoint fait avec
Jason ? 11 est vrai qu'il venait de signer
la paix avec la Phocide. Aussi ne don-
nait-il son expédition que comme un
voyage pieux au temple de Delphes,
et telle avait été la pensée de la paix
qu'il venait de conclure. Les jeux py-
îlii(jues approchaient. 11 voulait s'y
rendie et offiir en personne un sacri-
fice au Dieu, mais avec toute son ar-
mée. 11 avait réuni à grands frais, et tii
proposant des primes à qui lui fourni-
rait les plus belles têtes de bétail, des
milliers debœufs, de brebis, d'agneaux,
de chèvres , il avait requis de toutes
les villes deThessalle leurs contingents
pour construire cette colossale héca-
tombe ; il multipliait de tous cotés les
préparatifs, les revues, les messages
patents et secrets; outre son armée, il
JAS
voulait avoir à Delphes et autour de
Delphes de nombreuses créatures, Kn
un mot il occupait de lui toute la Grè-
ce. On se sentait à la veille d'un im-
mense événement, mais qu'on ne de-
vinait pas : suivant les uns il voulait
[•iiler le temple de Delphes; d'autres
le soupçonnaient de viser à se faire
déférer, par les Grecs réunis pour la
solennité , l'intendance des jeux et
celle duterfiple. Cette supposition était
sans doute vraie : ce titre qui en d'autres
mains était un hochet ou un instrument
inutile, ce titre tout-àfait légal eût investi
Jason d'autant de considération mo-
rale qu'il avait de force matérielle ,
l'eût introduit au nom du ciel et paci-
fiquement dans les affaires générales de
la Grèce, eût mis en ses mains le ma-
niement des sommes énormes dépo-
sées au temple de Delphes ; enfin
il n'eut point eu besoin de le piller,
et quant au contrôle exercé par 1 Am-
phictyoniesur la gestion des intendants,
il n'y avait pas là de quoi faire peur au
maître de cinquante mille hommes.
Les Phocéens ne firent rien pour écar-
ter leur entreprenant rival ; car tel avait
été, ils eurent soin de le répandre, l'or-
dre d'Apollon qu'ils avaient consulté,
et qui , en vrai style d'oracle , avait
répondu <f j'y pourvoirai, » ou quelque
chose d'équivalent. Il y pourvut eu
effet. Jason venait de passer en revue
sa cavalerie dans la plaine de Plières,
et commençait à donner audience : sept
jeunes gens approchèrent de lui, et,
feignant de se prendre de querelle, tirè-
rrnt leurs cpées qu'ils eurent le temps
de plonger dans son sein avant que les
gardes vinssent au secours (369). Ceux-
ci tuèrent sur plact deux des assassins,
un troisième fut percé de coups en
montant à cheval, les quatre autres s'é-
chappèrent au galop et se réfugièrent
dans la (irèce méridionale, oîi ils furent
accueillis avec honneur, loin d'être li-
vrés par voie d'extradition, il ne paraît
JAS
|-.T «rjillrur. que Ir ^ouvmKmmi île
riièreileiAitirclaiiiês. Ilirii qu'un n'^it
jaauft ru e\artrni«Mil quri fut le nio!/ile
iic>meuiliu'(i Je Jx\nii, ilnr dou.s sein-
l)lr {as tloulriu qiiele^ vrais coupables
élaiciit &es lieux fier es: ce fut une des
mineurs qui rouiurenl ; tout autre
Iruit, s'il eiil rtr fonde, ^e serait vé-
rifié avec le l«-in|'-> : la facilité avec la*
quelle sejit lioinmrs arnim a|qirocliè
rent indique quelque connivence de la
pa.'t des ;;ardr> ; la pruin|>litude a\ec
laquellr furent lues ceux qui probaMe-
incnt avaient le secret du complot en
ri une autre preuve. Knfin Tol^dore
<t Polvpliron nr venj^rifnf point la
mort de leur ficre. TtiUtefois il est à
croire que les clicCs de la Phoc de ne fu-
rent point ctiAnj;ersàrévènrnjrut. Ins-
truits du incronlentement ja!i)ux des
frorc> «le Jason, ils durent <e mettre en
rapport a\ec ces princes liaineu\ . les
animer, leur fournir des roovens , leur
répéter que jamais occasion ne serait
plus fa\orable [»our frapper que celle
ou la mort de leur frère préviendrait
un sacrilège, et semblerait! œuvre d'A-
pollon l'vtliien lui-même. I^s grandes
>ues de Jason finirent avec lui, bien
que son empire fut de force à sub-^ister
même sous des princes médiocres. Mais
l'incapacité, les discorde.^ iio lardèrent
point à les ruiner. D'abord l*ol>pliron
et l'olvdore s'emparèrent de tout, au
prëjuilice de leurs ne\cu\ [Lycophron,
TiMplione , l'ilholas', tous trois fils de
Jason; puis Pol\p!iron tua Polvdore
pendant son sommeil en se rendant i
I^riise: lui-nièrae il périt assassiné
par le fils de Polvdore, Alexandre, si
connu par ses querelles a\ec Pélopî-
das, par son abominable t>rannie et
par sa mort non moins affreuse. Il
avait épousé Tbébé sa cousine, fille de
Jason, et Thébé força ses trois frères à
lui donner In mort. Pendant ce temps
la M.ic«l ne, TKpire, diverses cités
de Tlic-- .Viu* s'étaient soustraites à la
LXVIll.
JAU
u3
domination de Fhères : sous Ut troi«
fiU de Ja>on ce fut encore pis. Phéres
m^rae se souleva contre les Ja^onides ;
Philippe de Macédoine intervint pour
l'aristocratie ou, comme on disait, pour
le parti de la liberté contre les Jaso-
nides,Tlia.ssa trois fois le jeune I.yco-
pliron et soumit i rinlliienre macédo-
nienne le pa>v qui semblait devoir de-
venir le premier de la (dcce. P — ot.
JAS<).\ lu). MviNo. WVI,
JAmEïlT^UcowieFRAî^çois),
né en IT.'jH , commença , ainsi que
tant d'autres illustrations de notre
époque , par la profession d'avocat,
qu'il eierça à ISordeaui ; et , dans un
a^e encoie peu avancé , il enseigna
le droit. Kn 1789, il fut iiommé mem
bie de la municipalité, puis commis-
saire auprès du tribunal civil, et mem-
bre de 11 co'nmi'vion fedérali'^te qui
s'' 's cette ville en IT'J.'l,
i><> 1 la Convention nationale.
Il eut , avec un ^rand nombre de
ses amis et compatriotes , l'iionneur
d'être mis hors la loi par un décret.
Celte proscripïion ne lui permit de re-
prendre sa profession d'avocat qu'en
1795. Nommé, en 1790. membre du
conseil-général du département de la
Gironde, il fut appelé, en 1802, à faire
partie du tribunal ou il fut clu [ilusienrs
fois secrétaire, et président en 180^.
H prit beaucoup de p.irt à la rédaction
de nos codes et concourut à plusieurs
projets de loi oii dominaient les consi-
dérations politiques les plus impor-
tantes , notamment sur les colonies.
].e discours qu'il prononça dans cette
occasion est plein d'idoes et de vues
non moins applicables dans les cir-
constances actuelles qu'au temps où il
fuf^écrit : " I/crrcur politique est à cMé
•« delapiilianthropie, dit-il; l'effcl de
«« la loi présentée sera de conserver ii
«« la France ses colonies qui l'avaient
•« élevée à un dej^ré de splendeur , le
8
tt4 JAU
« désespoir de ses rivaux. Le com-
« merce des colonies portait des sorn-
« mes immenses dans le trésor public ;
« il était un des principaux moyens
tt d'accroissement pour la marine du
« commerce, et conséquemment pour
« la marine de Tétat : toutes ce*s véri-
« tés sont reconnues. Dans un temps
« où la fureur d'innovation a fait met-
« tre en question les choses les plus
« positives, ajoutait-il, on a pu de-
« mander si la France ne pouvait pas
« être ramenée à la seule qualité d'a-
« gricole ; mais aujourd'hui toutes ces
« abstractions sont bannies. Nos voi-
« sins ont des colonies riches, nous
• devons recouvrer, nous devons con-
« server les nôtres, autrement plus
« d'équilibre. Ce. ne sera pas en vain
« que nous aurons fait tant et de si
« grands sacrifices pour reconquérir
« ces colonies que nos aïeux avaient
« formées. » L'orateur terminait en
demandant que la loi conciliât les in-
térêts des propriétaires avec les ména-
gements que méritaient les hommes de
couleur; que l'homme ne fût point ou-
tragé, mais que la culture non plus ne
fût point sacrifiée. La question de l'é-
mancipation donne à ces réflexions
tout le mérite de l'opportunité. La
France y devra regarder à deux fois,
avant d'adopter cette opinion de cer-
tains esprits, que nos intérêts se sont
transportés de l'Atlantique dans la
Méditen anée ; elle y regardera à deux
fois a'ant d'abandonner les fruits de
cette guerre d'Amérique, qui, en faisant
germer chez nous les idées de liberté,
et les fatales illusions du républicanis-
me, nous a du moins donné un allié
dont la puissance maritime a ébranlé
celle de nos rivaux. I\.ipp()rteur du
projet de loi sur les donations et les
testaments, Jaubert proclamait les prin-
cipes de la propriété , compromis par
des sophismes dans le cours des précé-
dentes législatures. Il réfuta aussi les
JAD
objections de ceux auxquels répugnait
l^unité de législation. Enfin il ne crai-
gnit pas de reconnaître qu'il n'avait
rien moins fallu qu'un mouvement d'en-
semble, auquel la nation entière avait
pris part, pour arriver à ce désirable ré-
sultat d'une même loi pour tous les en-
fants de la même patrie. Le jour vint
où il put dire, avec sa part de joie et de
juste orgueil, dans son rapport du pro-
jet relatif à la réunion des lois civiles
en un seul corps (23 mars 1804) : « Il
est donc vrai que nous sommes parve-
nus à cette époque si intéressante dans
l'histoire d'une nation, si ardemment
désirée par les amis de la morale et de
la philosophie, si vainement attendue
pendant plusieurs siècles , oiî il est
permis, aux législateurs du plus bel
empire, de dire avec la certitude d'a-
voir rempli dignement le plus noble
ministère : « Français, le code de vos
« lois civiles est complet. La diversion
« qui régnait dans la législation accu-
« sait la raison humaine. » Il est cu-
rieux d'entendre le même orateur re-
procher à Louis XIV, devant Bona-
parte, d'avoir trop aimé la guerre, et
par là empêché la législation de s'as-
seoir uniformément sur un sol sans
cesse ébranlé. On ne s'étonnera pas
que Jaubert ait appuyé la proposi-
tion de confier le gouvernement de
la république à Napoléon Bonaparte,
avec le titre d'empereur. Il fut nom-
mé membre de la commission char-
gée de l'examen de cette question.
Quelques mois auparavant, au moment
où la conspiration de Pichegru fut dé-
couverte ^19 février 1 soi), il avait été
chargé au nom du tribunat d'exprimer
au premier consul la part que cette
assemblée prenait à ses périls. Dans son
discours il accusa l'Angleterre de per-
fidie, et ce n'est pas la seule fois qu'on
le verra atteindre cette puissance de
ses invectives. Pour Bonaparte , ce
temps était encore celui d'une appa-
JAU
JAU
ni
rente iMMl^tion : «• Jr ne pni«, d'il- il,
M me ilcfciiilre ti'un »«ulimeiit pémliie
•< lorsque je soii|;e à la MtuatiiMi (Un»
M laquelle st lrou\erait au|(turd'livi
« le ^iind peuple, ù le ilernirr atlen-
« tatasait pu i eu ^ir. C'est coiilrt U
gloire, la lilurtr, irs lUstinèes do
peuple fraiir lis qu'un a cuntpiré. . . •
l)*autrei» |mo|cI> île loi eurriit eii-
(oir Jaubrtt pour rap|>orieur , no
Uniment ior^Ani^^ation du notariat
cl le contrat (le lnn.i;:r 11 fui un
lies secrétaire» ; <lu pioces-
^rrbal du Code >:' ^ rr ci>ile, et
fut ensuite nommr in*^perleur^énéral
«les éeoles de droit dt l^lltier^ et de
Toulouse. Le corp» législatif alors
rtait le seul conseil du gouvernement,
car les plu> haute» question» de la po
lilique, même celles qui rr^.irdaient la
paix et la guerre, étaient Ar miu do-
maine. Napoléon fut . 'u'à la
Gn le soiuei.Tfi vn t- m»u-
vent en cof cn«-
seillers sut i . ique,
sauf à ne tenir conipleque dr ses pr opre*
dessein*. Nous \o\ons .laultert , com-
me or{;anedu tnhuuat, s'cspliqner,sur
la rupture avec l'Autriche, danit un div-
rours qu'il prononça IcliH .^epl. IHO.').
Il V dit que la France a\ ait eicnilé !i-
dèfcment lei traités, qu'il n'en étail
pas de même des c.ibiiirls de Londres
et Je ^ ieune : que, laiiJ s que l'.Vn^jle-
terre aNait donnr osleiusihlrmejr aux
Hollandais l'ordre de rendre le cap
de lionne r.spei.i lire , serrètem^nl
elle leur avait jucm i it de le retenir.
L Autriche ronger \ee dcui fois sur <hs
trfhies par la France a^ait o^é. d'ac-
cord avec TAn^lelrrre , dep!i)\er de»
bataillons et occuper la Bavière. I/eni-
percur rcrul les félicitations de l'ora-
teur du tribunal, qui le loua d'a\oir
tout fait pour éviter la f^uerre, pour
conquérir la liberté des mers et la
paix du monde. L'année suivante ,
Jaobert, qui était commandant de la
I>lOon- d'Honneur, fut
srdlrr d'élat et aiiache à la section des
finance», llpiesenlaau corps lé^isla
tit, entre a«trefl pn))cl>. de loi , criai
des finance». JuriM-on^ulte et lioramt
d'étal, il était en même Irnips écono*
nii»te et financier ; cet en rpilr der-
nière qualité qu'il fut nnmiiie ;;ou\er
neur de la Banque, kr 9 août lHt»7 I >e
Blême qi»** N*|M.|nin , .Isnbeil eiail
alors A ' • .jur.
A la p:< de«
aelionnaire» lir la ikaninir, li mani-
festa avec beaucoup de force l'e^pnir
qo'il mettait dans U [tait générale :
•• 1^ paix continentale, dit-il, réjouit
• tontes les itnr\. Ce doit élie le ré-
« »ultat ile.N immenses travaux dr l'em-
M pereur. Drja les tranftactinnt de
• venaient plus nombreuse , tl le
■ commerce rept ruait une uoM\-ellt
• vie... «• If.f ' I tient
que ne l'aN.i . • . «, il
exf>»«a an r. .%\%{ ^i.'t août
iKtiTj I*» lu .'»!'• de loi liur
riiitêréi de i'ar^rnl. et auui bur le«
droil.s du lii^Nor public, sur le?» biens
des comptables, »ur le mode de re-
couvrement drs frais dr JMt^ticeau pro-
fit du trésor. N'imnié |ilus tard mem-
bre du loinite d k cniileiilieuv de la
liste civile , créé comîe et comman-
deur de l'ordre d*- ii, »1 pré-
siila deux foi» le . rrtoial du
iiers, et dn.x luis il lui ehr premier
candidat au sénat, parle rolle^^e éler-
loi al de la (liitinde : mais de tels suc-
cès furent niêléi de quelques infortu-
nes. Au retour de I Vesde, Jatiberl eut
à subir, en présence de la cour, des re-
proches amers sur la Banque, sur le
conseil de régence. Ces reproches
étaient surtout diriojés contre M. Uo-
dier, l'un des «Hif-^ouverneurs. Il
répondit avec coura;;e . se justifia
sur tous les points , et jusqu'à trois
fois défendit son collègue avec bean-
couf de force Dans les plumiers
8.
ll(i
JAU
jours (le 1814, il fut nommé chef de la
4^ légion de la garde nationale pari-
sienne; mais, ainsi que Talleyrand et
d'autres grands personnages dont Na-
poléon craignait l'influence, il reçut
l'ordre de quitter Paris le 30 mars au
soir, aussitôt après la capitulation.
Quand la déchéance fut prononcée,
le comte Jaubert- vint reprendre le
commandement de sa légion, à la tête
de laquelle il se trouvait lors de l'en-
trée du comte d'Artois dans la capitale.
Louis XVI 1 1 ne manqua pas de le com-
prendre dans la promotion qui eut lieu,
le 6 janvier 1815, en faveur de la garde
nationale. Il fut nommé grand-offi-
cier de la Légion-d' Honneur, et, au
mois de février suivant , remplaça
Sieyes en qualité de conseillera la cour
de cassation , oii il fut installé par le
TâOuveau président de Sèze, son compa-
triote et son ami . Il reçut en même temps
le titre de conseiller d'état honoraire.
Les actionnaires de la J>anque profitè-
rent de la première restauration pour at-
taquer la constitution de cette société et
demander des changements ; mais M.
Lafûte, gouverneur provisoire, parlant
au nom du conseil-général, dut vanter
la conduite de Jaubert, et reconnaître
qu'il avait atténué, autant qu'il était
en lui, les inconvénients de la loi de
1806. Lors du débarquement de Bo-
naparte en mars 1815 , le comte Jau-
bert signa l'adresse de la cour de
cassation au roi , ce qui n'empêcha
pas Napoléon de le nommer, le 2i
mars , directeur-général des contri-
butions indirectes et de le rappeler
au conseil d'état. 11 marqua son pas-
sage dans cette administration en y in-
troduisant la division territoriale qui a
été maintenue depuis , et qui com-
mença l'essai du système des abonne-
ments pour les boissons, en remplace-
ment des exercices. A la même épo-
que, il soutint contre lîonaparte, en
présence de plusieurs témoins, une
JAU
nouvelle lutte en faveur de Laine et
de Sèze qui avaient été^ comme en
1814, traités de factieux. Jaubert les
défendit courageusement, et parla avec
éloge de l'un et de l'autre. Au second
retour du roi, il conservason comman-
dement dans la garde nationale jusqu'au
mois de novembre 1815. A cette épo-
que, le duc de Ueggio lui appliqua le
règlement qui s'opposait à ce qu'il fut
officier d'une légion qui n'était pas celle
de sa résidence; mais il accompagna
cette décision d'une lettre flatteuse, et
le comte d' Artois le nomma colonel
honoraire. Depuis cette époque jus-
qu'à sa mort, qui eut lieu le 17 mars
1822, le comte Jaubert paraît s'être
occupé uniquement d'agi'onomie. On
le retrouve en 1821, apportant ses
soins à la naturalisation des chèvres
du Tibet. Le Moniteur du mois de
mars 1822, dans un article nécrologi-
que qui lui est consacré, dit qu'il s'était
particulièrement attaché un neveu qu'il
avait jugé digne de devenir son fils
adoplif, et qui promettait de porter
avec honneur le titre dont il venait
d'hériter. Si le choix du père adoptif
a honoré le fils , celui-ci fut loin
de se montrer indigne d'un tel choix,
et les prévisions du Moniteur de
1822 ont été justifiées en 1840. L'é-
ducation du ministre actuel (1) a été
large, sérieuse, complète , et c'est à
son (Wcle qu'il la doit. M. 1) — T.
JAI'BEIIT (le comte Louis
dk) , né à Thionville, le 10 février
1704, suivit d'abord la carrière mili-
taire, quitta le service en 1794 avec
le grade de capitaine d'artillerie, et se
retira en Allemagne, llentré en Fran-
ce sous le consulat, il fut nommé en
1804 bibliothécaire de la ville de
Metz, et, de 1810 à 1819, il fut pro-
priétaire-rédacteur du .fournal de, la
Moselle. Il mourut à Metz, le 27
septembre 1828. Outre plusieurs piè-
JAIJ
JAt
CM àê poésies m$itét% (Uns le Sf*<i
tuUur du \uril , on a de lui : I.
.4prri^u d'un plan d'rdumlion ^ a
ruMige d'un jrunr sri^nn.r, N leaiie,
1796, in-H'. II. l iihlfuu historiijuf
lies costumes . dfs nururs et des
usages des prim ifntui peuples de
rautiiiuitè et du tnoyen-ùfie, lutluil
de l'alicnianil dr Kul>ert de SpalUrl ,
Meli, IKOVlHOy, 7 vol. in-H" a\ec
7 uliicrs in-i" de (i|(ure5. (^t ou-
vraf;e n'a pas été continué : il devait
avoir di\ volumes de leile et dii ca-
hiers de fi-iures. \* — IIT.
JAI rKIlKI (.sm'aivi»-Jfvn-
ANl»l\h-JuM ni , f\è(jur de Melz,
était uc le 1.J drccinbie 173'J, à la
Ko(|ue-r»iuvNaue en Trovence. Aine
d'une fainilie nouibieuse, il rtudia au
collège de louhuise, puis à l'unnerMlé
é'Aix, et fut fait, jeune encore, cha-
noine de la cullr^iale d'Aulps. 1^ dé-
sir de se fortifier dans les coniiai>san-
ces propres à son état , ren;;j;;ea à
venir à Paris. 11 suivit les prédicateurs
les plus di.sliuf;u«> de ce terapN-la, se
lia entre autres avec l'abbé houlo;;ne,
son compatriote, et monta lui-même
dans la cliaire. Il s'attacha au clergé
de Saint- lloch, puis à celui de Saint-
Sulpice. AucomuiencemrnI de la révo-
lution, il publia quelques écrits. Un
journal qu'il entrepiit, sous le titre
d'. liuiales de lu religion et du sen-
timent, parut depuis le commencement
de 171U jusqu'à la moitié de 17'J2.
Après le 10 août, l'auteur fut obligé
de se cacher , et ^e retira à Or-
léans , puis en IVovence où il passa
plusieurs années , et ou il exerça le
iiiinislère après la terreur. Klant re-
venu à Paris, il fut un des premiers
rcdadeurs des Annales religieuses,
qu'il abandonna ensuite à l'abbé r>ou-
loj;ne pour s'occuper de la composi-
tion de divers écrits. Kn 180"i, après
le concordat , l'ancien é\èque d'An-
{;ers, de Lorrv. avant été nommé évre-
que delà Rochelle, et ne pouvant >'>
rendre imniedulrment à cause de sa
mauvaise sanle , l'âbbé Jauffict fut
char;;é d'v aller a\ec la qualité d'admi-
nistrateur; mais avant son dépail il
fut chuiM pour ^rand -vicaire de l.von,
et .se rendit dans celte ville ou ie clergé
constitutionnel awit Misriie des divi-
sions, il se ttouva même bientôt à la
télé de l'administration du diocrM- ,
l'archevêque deL>on avant été nom-
mé amUb»adeur à Home. (^ dio-
cèse lui lut redevable d'etablis-semenls
utiles, ce fut le premier où l'on foi ma
de» séminaiir» , et où furent réta-
bli» le» firrrs de» écoles chrétien-
ne-* qui de là se répandirent dan» le
centre de la France II contribua auvsi
au rétablissement des sururs de Saint-
Charles. Ap|>elé à Paris comme vi-
caire-;;énéral de la grande- aumùne-
rie,il provoqua des mesures utiles et
fit revivre des instituts recoramanda-
blcs ; différentes con^ié^alions fuient
autorisées, les missions etranj^ères re-
çurent quelques encouragements, les
a>>ociations d'hospitalier e» et d'institu-
trices obtinrent plus de protection.
I.es dames de Saint-Maur, celles du
reiu;;e, dites de Saint-Michel, durent
beaucoup entre autres aux soins de
l'abbe Jauflret. !x)rsqu'on forma la
chapelle des huileries, il fut iioKimé
un des chapelains. I/évèque de Metz,
Hienaimé, étant mort au commence-
ment de ISOG , Jauffret fut nom-
mé à sa place le 15 juillet, préco-
nisé à Komc le *JG août, et sacré par le
cardinal Fesch le S décembre ; >oii
titre de chapelain fui alors cluTrij^c «ii
celui d'aumônier. Le, nouvel evèque
trouvait tout à faire dans son diocèse ,
l'à^^e et les inGrraités de son j»rcdece5seur
ne lui avant pas permis de former les
, établissements indlspensabes. Ses pre-
miers soins se portèrent mii les sémi-
naires ; le c»rand>emiiiairede Metz sor-
tit de ses ruines, et trois petits sémiuai-
iB
JAU
res furent établis. L'évéque exhorta les
curés dans une lettre pastorale à favori-
ser les vocalioiis ccrlcsiastiques. Lui-mê-
me logea quelque temps les jeunes gens
dans son palais et obtint du gou>er-
nement les bâtiments nécessaires. II
parcourut avec soin son diocèse qui
alors comprenait trois départements ,
la Moselle, les Forêts et les Ardennes.
L'autorité civile s'était crue obligée peu
auparavant d'interdiie l'exercice du
culte extérieur, aGii de prévenir des
révoltes fâcheuses ; le nouvel éveque
fit lever cette défense sans qu'il en
résultât aucun inconvénient. Il prêchait
dans les églises et procura des missions
dans plusieurs cantons; on lui dut le
rétablissement de quelques anciennes
congrégations; en outi'e, il en institua
deux nouvelles, les dames de Sainte-
Sophie et les sœurs de Sainte-Chré-
tienne, qui se livrent à l'instruction des
jeunes personnes de (iiiïérenles classes;
il leur donna des règlements et se plai-
sait à diriger ces instituts naissants. Les
sœurs de Sainte-Elisabeth à Luxem-
bourg et celles de la Providence établies
par un pieux ecclésiastique près For-
bach furent encouragées par ses soins.
Son titre d'aumonier le forçait de temps
en temps de venir à Paris pour son ser-
vice au château. En 1810, il fut dé-
signé pour faire partie du cortège qui
devait aller au devant de l'archi-du-
chesse Marie- Louise ; il fit donc le
voyage de Rrunnau et revint à Pa-
ris avec la princesse , dont il fut le
confesseur en quelques circonstan-
ces. La même année il fut du nombre
des dix-neuf évêques qui écrivirent à
Pie ^ II pour demander une amplia-
tion de l'induit sur les dispenses de
mariages. L'archevêque d'Aix, de Cicé,
étant mort le '22 août, l'empereur avait
d'abord nommé à sa place l'abbé Du-
voisin, éveque de Nantes; maisrelui-ri
fit ag étr les motifs de san refus, et le
^janvier iHii i'è^êque de Metz fut
JAU
nommé à Aix; il fit quelques représen-
tations, mais le moment n'était pas
favorable pour résister à celui qui ve-
nailide frapper d'une éclatante disgrâce
l'abbé d'Astros et le comte Portails.
Le prélat n'osa refuser sa translation,
se prêta aux arrangements qu'on pre-
nait alors, et reçut les pouvoirs conférés
par le chapitre d'Aix, tandis qu'il don-
nait à l'abbé Laurent , nommé éveque
de Metz, des pouvoirs de grand-vicaire
pour administrer ce diocèse. Cependant
il ne se pressa point de se rendre à son
nouveau poste, et passa près d'un an à
Paris, attendant les événements. Arrivé
à Aix, il n'exerça aucune fonction épis-
copale, n'usa d'aucun des droits réser-
vés aux piélats canoniqueinent institués
et ne prit d'autre place dans le chœur
de la cathédrale que celle d'un éveque
étranger. Sa modération et sa rései'fe
le firent aimer dans ce pays. Il s'oc-
cupa d'y former des établissements re-
ligieux, et eût souhaité y Introduire les
deux congrégations qu'il avait créées à
Metz. Il fut du nombre des douze évê-
ques qui, le 27 avril 1811, écrivirent
au pape, alors à Savon e, pour le prier
d'accueillir une députation de trois évê-
ques français; il ne prenait dans celte
lettre que le titre d'évêque de Metz.
Quelques jours après, il adressa en son
propre nom une lettre à Pie VJl; dans
celte lettre datée du 1*^*^ mai , il parlait
de sa nomination au siège d'Aix, et ex-
posait le besoin des églises et les raisons
qui devaient, selon lui, engager le pape
à donner des bulles aux évêques nom-
més. Le prélat assista au concile de
l-Sll, où il ne se fit pas remarquer.
Se trouvant à Paris à l'époque de la
restauration, il se hâla de renoncer à
l'administration du diocèse d'Aix, et re-
prit le gouvernement du diocèse de
Metz, où il retourna peu après. Le re-
tour de Napoléon, en 1815, replaça
M-Jaiilfrel dans une situation difficile.
Instruit que l'abbé Laurent , qa'il avait
JAU
de Sedan , s'était rendu
précipitaminrut » l'aii!» ri iirrlrmUii
faire rr> 1*1 e !.a iiuin nul iui i ^^li, .1
crul devoir >■ 'u> U c^
piUie |»our • V, Ou as>
Mire qu il niamloia 1 iiilruliuii de ne
|)luj> quitter Mclx, uuis L |>rur le til
«ksuler au (^liamp de-Mai. A{>rr> le
Mfond retoui du rni , il reluurna a
Meti. Un profrvseur du collège de
l.uKerabour^, l'abbé Muiiriien , a>aul
(ait M>ulenir, le 8 août iMlti, une iliesc
pleine deprnpojiilions liardir>rl dange-
reuses, Te^'êque ddut la |undirli(in s'é-
tendait eurure sui le ^randdurlie dr
Luxembourg, qui était l'aunrn drpar
tement des Foi ris, rondainiia la llii-ke
par une ordunnaïue du 1 *J mnrmbre,
et défendit aux cirées en de
»ui>re les cours du pioi Muii-
chen se retira i (îaud uu il mourut peu
après. I/é\è(|ue de NJeU concourut a
former dans celte ville un établi s»einent
de (r ères dcN écoles clin-tienne»; il le^
rc^ul même d'abord dans son palaL». Il
établit des retraites anuuelles pour le
clergé, et remit eu vigueur ruiticialité,
ce qui lui attira des critique^ de laii-
juinais dans la iJironitjue religieu-
se. En 18*i(), il coinoqua le» arclii-
prètres de >oii duKof, ei poblia des
statuts svnodaui qui ont été imprimes.
L'érection de i'arclievt'clie de ileiras,
en 1821, retira le departeinrnt de>
Ardennes de la juridiction de rr\rque
de Metx, qui non-seulement \it cette
soustraction sans peine , Mais s'em-
pressa de rendre au nouvel archevêque
de Ueims tous les services qui étaient
en son pouvoir. Le con-s«il-;;eneral des
Ardennes lui témoigna de la recon-
naissance de son administration par
des lettres tlalteuses acco9|>a^net>s de
l'oflrande d'un calice, de burettes et
d'uu ba>>in en vermeil. Kn 18J3, Te-,
vèque a>ait tenu sou svnode; étant
venu à l'aris, il mourut subitement chez
SOI frère, dans lanuitdal2au 13Bui
JAU
»»9
11 laissa de vifs rep-ets \ Metx où sa
douceur et >on c>|<iii conciliant eiaieul
jtiNleœent j(.|'ici «•> Son corps, dénosé
provisoirement dans l'e^li^e des (lir-
nie> a l'an», fut transporté en juin sui-
vant à Meti et inlinnir iIaiin \t caveau
de3 évêt|ue>. l ne orais^tn funèbre fut
prononcée en son honneur; elle est
courte et contient peu de faits. Nous
terminerons en donnant la lute de»
écrits du vertueux prélat: I. De la
religion ^ à iassrtuhUe natiunuU ,
distiturs phitoiuphiijur et poittitjue,
171M), ra H" ; plusieurs fuis réimprimé
sous les titres tie la rrliffiun aux lé-
gislateurs , et de la religion uus.
t ran{t tis W. / rtna Ir v de la religion
et du sentiment , loiirnal liebdoroa-
daiie, IT'Jl 17«>J. IlL Du tulle pu-
Llii , ITU.'), in-8 '. (^l ou\ra|;e parut
d'.iboid p.ir extraits dans les An-
nales religieuses et fut ensuite im-
primé i part. IV. Annales religiru-
ses , les dix- huit premiers numéros
seulement. V. Des tonsolaiions, ou
Un ueil de le tfue la raison et la re-
ligion peui'ent uffrir de consolation
au.1 malheureuA , \'t96. l.'ivol. in-
IH ; on en a extrait : V 1 . lUrnsoiatii^ns
des divines écritures, 3 vol. in- 18 ;
MI. Du iuitide, 'J vol. in 18. MIL
/:, I amen critiifue du nout^eau calen-
drier, 1797, in-8". IX. O-.Wrw
choisies de tenelun ^ 1800, ti vol.
in- 12. X. iKui'res spiriturlies de
J-enelon^ ^ yo\. in-l'i. XL L'Ado-
rateur en esprit et en ver lit, 1800,
in- 18. XII . Dessers ices tfue lesjem-
mes peuçi'iU rendre a la religion ,
1800, in-l*i ; la 2^ édition qui a pour
titre: f ies des dames françaises,
181G, in-12, estd'unaraidel'e^èque.
X 1 1 1 . Ejcamen fHtrtiiulier pour des
saurs, in- 12 XIV. Lettres sur la
religion et lu met a pli) siuue, de Fé-
nelon, in-12 XV. Méditations sur
Us sou/f ronces de N.S., avec une
Instruction] sur Us [indulgences,
lao
JAt
JAU
1800, iii-18. XVI. Mémoires pour
servir à Vliistuire de la religion ii
lafin (lu XVIIl'' siècle, 1803, 2
voL in- 8*^'; ce devait élre le commen-
cement d'une collection de pièces re-
latives à la persécution contre les
prêtres pendant la terreur. ]M. Jaufiret
avait réuni un grand nombre de maté-
riaux pour cet objet et, ne pouvant plus
s'en occuper, avait engagé des amis à
continuer son plan. Différentes cir-
constances s'opposèrent à l'exécution
de ce projet. XVII. De la vraie sa-
gesse pour senur Je suite à Vhnitu-
tion, 1804, in-12. XVIII. Entre-
tiens sur le sacrement de confirma-
tion, 1809, in-8°. XIX. Recueil
clioiside mandements , 1820, 2 vol.
in-8^\ XX. Instruction sur T esprit
du sacerdoce chrétien, 1821. XXI.
Autre sur la morale de Véoangile,
1822. Nous aurions pu citer encore
quelques écrits publiés par cet évéque
avant son épiscopat. Il donna une édi-
tion du Paradis de Vâmc, traduit du
latin d'Horstius, 2 vol. in-12, et des
Eloges des é<j>êques français, par
Godeau, in-8°. La Biographie des
vivants lui attribue les Illustres vic-
times vengées des injustices de leurs
contemporains, 1802, in-8". L'///-/
épistulaire, 1793, 3 vol. in-18, et les
Paroles mémorables des grands hom-
mes, 1802, 2 vol. in-18, qui ont paru
sous le nom de Louis-Franrois Jauffret ,
frère de l'évêque, sont, dit-on, de ce
dernier. En6n le prélat s'étailbeaucoup
occupé dans ses dernières années d'un
ouvraj^e auquel il attachait une pjrandc
importance. Cet ouvrage était destiné
à montrer comment on peut séparer
les dogmes primitifs reconnus par tout
le genre humain, des erreurs (juc l'i-
gnorance et la passion y ont mêlées, et
comment on peut arriver ainsi à la
religion véritable. L'auteur voulait don-
nera son travail le titre de Jiecherches
de la vraie religion. Il l'avait fait
imprimer en épreuve pour le commu-
niquer à quelques amis, et profiter de
leurs reuiarques et de leurs avis. Celui
qui écrit cet article a eu dans le temps
connaissance de l'ouvrage pour lequel
l'évêque s'était beaucoup servi du Pa-
rallèle des religions, de l'abbé Bru-
net, 1792, 5 vol. in-4''. Mais il ne
s'était peut-êlre pas mis assez au cou-
rant des recherches historiques faites
dans ces derniers temps par des savants
français et étrangers, j^a famille de
Jaufiret avait formé le projet de pu-
blier cet ouvrage , mais elle parail y
avoir renoncé. Nous croyons d'ail-
leurs qu'il serait nécessaire de soumet-
tre le travail du prélat à un nouvel
examen , et qu'il y aurait beaucoup à
ajouter. P — c — t.
JAUFFRET (Jean-Bap-
tiste), frère du précédent, naquit en
1771. Il quitta la France de bonne
heure, et se fixa en Russie. Nommé
directeur de l'institution des sourds-
muets à Saint-Pétersbourg, il mérita
l'estime et la confiance de l'empereur
Alexandre , qui le créa chevalier de
l'ordre de Saint-\ ladimir. Les iion-
neurs qui lui furent accordés après sa
mort, arrivée en 1828, parlent hau-
tement en faveur de sa longue auMi-
nistration. Son portrait, demandé à sa
famille, a été placé dans u«e des salles
d'honneur de la n)aison des sourds-
muets de Saint-Pétersbourg , et l'em-
pereur Nicolas a voulu lairc lui-mcnie
les frais des obsèques de l'ancien di-
recteur. F.
JAUFFRET (Joseph), le
dernier des quatre frères de ce nom,
naquit à la lloque-Brussane le G
décembre 1781. Dès l'àgc de vingt-
un ans , il entra , en qualité de chef
du secrétariat, à la direction des cultes
dont Portalis était chargé. C'était l'é-
poque où se préparait le concordat
entre le gouvernement français et la
cour de Home (1801). Jaufiret fut té-
JAt
^JAL
lai
raoïn tlv tuttt ce qui se fit à ccllr oc-
casion; rl rrllr circon&lanre ronlnlMia
braKCOiip à tJr\rlopper en lui le {»«ii-
rhatit pour l*rlu(le Jn <|iie^lions ec-
t\rn2>\H\ues ({ui Ta di.stiii;;iié plus tard.
H iir (itiilla point le miniMcre des
cultes à la mort de Porlalis, en 1807,
rt conliittu d'> remplir diverses fonr-
lioii«,uolantinrnl rrlir<dr ■ r-
néial. .\dnii>rn |H1 Vronn <•*
rri|U( '.cn au ronseil dVtal, il ^ \ Ul une
lépulalinn de sa\oir et d'iropadiaiité.
ilepuM lor», lout en se coniarrant aux
devoirs de sa rliar;;e, avec une avsi-
tlnitr fatale, peul-èlre, à sa com|<lrxiun
drlicatr, il .^'occupa jusqu'en ii^'M't tVé-
crils&élieuK, la plupart touchant les ma-
tières dont il avait fait l'objet de ses
plus habituelles inedilattons. A celte
dernière époque, il était le do>cn de4
maîtres des requêtes, et à la veille
d'occuper la piemioie paraître parmi
les rniisriilers délai, loixque la nuirt
le frappa le *J mars iH.'tÔ. On a de
lui. I. l'immrn tirs artt'rirs organi-
qufs, fuihlifs a la suite du ronrttr-
tiiil Jr \m)\, iUtns Ifurs rapports
iwrr nos lihrrtrs. Us règle: géné-
rales tie f église et Lt police de
l'état . 1 M 1 7 , I n -«" . II. Hutmen du
projet de loi relatif au nom'eau ron-
curditt, 1 H 1 7 , I n -8". 111. Mémoi-
res historitfues sur les affaires «--
clesiastiijues de F rame , ftemlani
les premières années du \7.\*
siircle, 181 y, 3 vol. in-8". Jauf-
frcl a\ait préparé, avant sa raori,
une nouvelle édition de celle curieu>e
relation hisloritjue. IV. hes missions
tn France, 18-2(), in-8 '. V. De la
juridiction episcoptile , ii C occasion
tfun rrrit de lumjuinais contre les
noui> elles ofjicialités , 18 il, in-8".
W. Des recours au conseil tfétat,
dans les cas d'abus en matières ec-
clésiastitjucs, 182ô, in-8°. Cet ou-
vraj^e a eu une deuxième édition en
1830. VU. Du célibat des prêtres
a rotrasiun d'une ordonnance ren-
due fHtr le prrsiilrnt du trihumil de
première instani r du flrfHtrtemrnt
de la Seine . 18JK, in^'" ; réimpri-
mé, dans le mois qui sni\it sa publi-
cation, avec le jugement du tribunal.
Les talents de J. Jaufirrt ne se bor-
naient point an\ ronnaisNanrcs spécia-
les a ses (onctions. Il était membre
des académies ou sociétés savantes de
l' \illes de Fiance, l'ari< ,
1 nlle, .\bbe\i|le; et il culti
\ait 3k\^ distinction l'art île la pein-
ture, qu'il avait étudié sous Da^id.
X.'.-lmi de la religion, dan^ le n" du
30 a^ril 1836, contient une nolice
sur J. .laufTret. F.
«9.\rSSArn (bu is m ^ na-
quit à \ zès, le îi'J mars l.'>80, de pa-
rents calvinistes. Il fit d*e*cellenle»
rludes, et devint si liabiie cbiis les
lant;ues latine et -recqiio , qu'il pu-
blia à Vxjs de ^\\^:^ ans une traduc-
tion de I ltu( ydide. qui fut iinpiiniée à
l.e>de en KitHI. (^Ite ti.iduiliori lui
fil beaucoup d'honneur, et peut soute-
nir la comparaison avec toutes celles
qui avaient paru a\aiil celte époque.
Plus tard, a>ant obtenu une place de
conseiller i la chambre mi-partie de
Castres, il lémoii^na au roi sa recon-
naissance en publiant un opuscule
puitii
de C
sous le titre de Carmen île rébus
gestii iMdoKHci \lll. Il fut un des
membres les plus irles de racadéinie
de Cis'.res, et mourut le l.'» juillet
1(iG;j , lais.sant un Gis héritier dr son
nom , de ses talents et de s.i place.
Vje fils, qui portait aussi le préii(»tn «le
lAHiis, était né le 13 jan\ier \iV.\0,
et avait reçu une édticatimi tn'>-soi-
^née. Il mourut le 1.'» jaiivitr iJiSS ,
après avoi.'- eu le chagrin de voir s'é-
teindre l'académie de Castres dont il
était membre. Les re^^islres de cet utile
établissement, rédi;;és par M. de Spe-
randien , et qui sont encore manu-
scrits , contiennent la liste des nom-
132
JAU
JEA
breuses productions de Louis de Jaus-
sautl fils. Voici les principales : 1" Epi-
tuphes , epign/mnies. e\c. y sur la mort
de Balzac, 16 nov. 1658; '2^ Disli-
(futs latins sur la paix avec rF.spa^ne,
5 décembre, 1659; 3" Epilaphes ,
épigrammes , etc. , sur la mort de
Mazarin, 21 juin 1661; hr"^ Vers
latins sur la conquête de la Franche-
Comté, 8 janvier 1669; 5" Dix Re-
marques sur le quatrièuie livre des
Annales de Tacite, 9 juillet 1669;
6" Douze Reinurques et coSeclions
aux Epilrcs critiques de Leièvre de
Saumur, 13 août 1669. C — L — B.
J ArSSl\ (Louis- Am and), apo-
thicaire, suivit en cette qualité les trou-
pes auxiliaires , commandées par le
maréchal de Maillebois (Voy. ce nom,
XXVI, 240), que la France envoya
en Corse afin d'y comprimer Tinsur-
rection des habitants contre la répu-
blique de Gènes, à laquelle cette île
appartenait alors. Il profila de son se
jour dans ce pays pour y recueillir des
documents historiques et scientifiques
qu'il publia plus tard sous différents ti-
tres, mais dont le plus o;rand nombre
n'a jamais paru. Jaussin mourut à Pa-
ris le 25 mars 1767. On a de lui : I.
Ouvrage historique et chimique oii
fan examine s'il est certain que
Clcopâlre ait dissous sur-le-champ
la perle quon dit quelle aoala dans
un festin, Paris, 1749, in-8". II.
Mémoires historiques, militaires et
politiques sur l'Ile de Corse^ avec
f histoire naturelle de ce pays, Lau-
sanne, 175H, 2 vol, in-12. III. Mé-
moires historiques et militaires sur
les principaux événements arrivés
dans file de Corse , depuis 1738
Jusquen 17 VI, ibid., 1759, 2 vol.
)n-12. IV. Lettre à M. l'ahhédela
Porte, Paris, 1759, in-12. V. Let-
tre au sujet des nouvelles formules
de pharmacie. VI. Mémoire sur le
scorbut. P — RT.
JEAIV VI ( Marie - Joseph -
Louis), roi di' Poitii;;al, était le se-
cond fils de Pierre lll, roi titulaire,
oncle et époux de Marie- Françoise-
Elisabeth, reine de Portugal. Il nac^it
à Lisbonne le 13 mai 1767. La reine
sa mère lui donna pour précepteur le
savant vénitien Franzini (1), dont il
reçut les leçons pendant l'espace de
dix ans. Il étudia le latin, l'histoire,
la géographie et les langues française
et italienne. Ce fut sa mère qui le con-
duisit à Badajoz, où, en présence des
deux familles royales d'Fspagne et de
Portugal, il épousa, le 8 mai 1784,
Charlotle-Joachime de Bourbon, fille
du roi Charles IV (2). A la mort de
son frère aîné le prince Joseph, arri-
vée en 1788, Jean VI, alors Infant,
devint héritier présomptif de la cou-
ronne. Pour apprécier sa poHtique
comme souverain et les insurmontables
difficultés qu'il eut à vaincre pendant
tout le temps de son règne, 11 faut
avoir égard aux circonstances et aux
événements qui survinrent alors en
Europe. Il faut se rappeler que les plus
grands empires, tels que la Russie,
l'Autriche et la Prusse, fléchirent devant
le colosse révolutionnaire ; que l'An-
gleterre elle-même n'échappa au sort
des puissances continenlales que par sa
position insulaire , par la puissance de
son aristocratie et de ses nombreuses
flottes , et que ce ne fut pas sans de
grands sacrifices d'argent. Il faut .se
rappeler aussi combien de souverains
(i) Fr.'iliziiii ni.iil un iiiatliéiiialicicii prc^roiid,
un |>li}sicien et iiatiiniiislK disiiiiguc , eiiriii un
littérateur très-ci iidil. Vouliiiii insiiiiire ses .-lu-
gitste . élèves et leur inspirer du Roûl pour les
sciences ft les arts, il fot'iua dans le palais royal
dt- lUdlein un cal)iiicl d«' |ili\ !ii(ju.: et une riche
collection de inodi'lcs d'.iris ft de métiers, où
il exposa aussi en relief le système général de
forlification <rAiit<>iii!i et un grand nombre de
ma hines hydrauliqiu s.
(ï) Voy, Mtm. Uist. de lot Desposorios , etc.
Pleins pouvoirs donnés à l'ambassadeur mar-
quis de I^uriral, le i5 mars 1784 , et par le
roi d'Lspague au comte de FloriJaBlanca , le
aS mars. — Le traité de mariag« iiU sigaé le
10 mars 17$$.
JhA
IBA
iftS
it de leur» irâaes , tan-
liit ^ Jean VI , après a\oir tié
la pTMNei inuiiarijue f|ui ait oȎ tia-
fcner rAlljnli<nie , ^au\a \>n rcl?f
détcrraiualiou cour^i^ruNe, m rouioiiiie
et Aa famillr , qu'il déjoua ainsi 1rs
projetas (lu dominateur de rKiirn{>e.
Il faut ron&idcrci que re prinrr ,
^race à reltr ir>449liun, de\int le fon-
dateur d'un \astp rmpire, et qu'il vit
lors de la pais ;;rnriale le l'ortu^al
élevé au raii;^ de puissance du premiei
ordre, et -es ainlia nfr \r>
traites dr \ iennr et .. . .* mrmr
titre que reui des autir^ italutn». Jean
VI commenta a ;:i»u\eiiirr au nom dr
u méte le t() œar- 1703, a l'occasioN
de la maladie de crttr pnnreNNC . mai*
le retient ne rlian;^ea eu rien la politi-
que exiéf ieure suivir par sa mrre, sru-
lenent il la moditia selon les cirron
stances et les e%enerorat s; il ne toucha
point non plus aux mesures adinmi^
trati\es ihtriieure». Il conw^.ta lr>
mêmes raiiii>ties , qui appartrnairiil
presque tous [W] a l'école politique du
rr;;ne de Josrpli. I^ canali^^ation du
Mo»déf;o distingua le» ptennrio an-
■ëct de ton re^^ne ainsi que l'ouxn luit-
àê plnâcvs grandes roules, nolam-
■ent ceiic de Li>bunne a Coïinl>re, et
dr crlte ville à Porto. Il créa dans la
même année ^1 79 i l'établisArnirnl im-
portant de l'école de fortification pour
les eirvrs qui se destinaient au coq>s
du t^énie rt à l'arlillrne. Kn l'aniier
17*J6, l'armée subit aussi de> rérorme>
im|»ortantr<ï rt vit créer le corps de la
léj;ion sous Ir commandrmeiit du mar-
quis d'Alorua. 1^ marine eut égale-
ment sa part d'amélioration. Le ré-
gent fonda , m t7*J7, une académie
nautique (academia dos ;;uardas ma-
(j> Chi decrs minittm. BalMaiao. rtait oiffoi-
We *• \* ïociHr myale <1« l>ond»«« «i 4'a«trv«
aradrniir* Il rait m corrvtpoodaBC* «vrc p|a-
«irurt MiTaiiU riran^rr» 4n piOTUiar «
tr* ««tr«« a«cc Linnr. Il fournit ét%
■MaU à Rob«rUon et à l'abbé Raynal.
de Banne
cupa aus^i
rinhis) , et dans U a^ne année
Ir tribunal de l'amirauté et un rorps
^ bri-ada irai ). Il s'oc-
dr la réformr drs ordres
rrli^ieui. K cri rf:et, il institua une
coinmiskion avec les pouvoirs les plut
élrndus. I*ar cette mrsurr 1rs admis-
sions furrnt diminuées, H m pru d'an-
nées cette reforme ;;raduellr dr\iiit irrs-
sensible. I<< récent amrliora rnrore
le »>stemr des études piiiiiatres, rt
fonda dan» les \illr> et communes du
rn^«iime un ;;rand nnmbir d'écoles
publiques rt {;ratuites. l'our la direc-
tion dr ces établissements , il créa la
juntr tir Iti liirn tittn t!r\ rtudrs, rt,
afin dr faciliter da«anla;^e la culture
dr^ lettres , il fomia la bibliotbrque
publique de Lisbonne (179K), et nom-
ma pour son premier biblintbécairr
un des plus savants académiciens, lequel
établit nue admirable classification dans
cet immense dépAi des connaissances
humaiitr- Il donna aus>i une nouvelle
oi^anisation au nrlir musée d'histoire
nalurrllr . rt au jardin botanique, rt il
choisit à cet rfTrt plusirurs indivi-
dus qui, sous la dirrction dr l'acadrmir
des Kinirrs, furrnt chargés de visiter
le'* pi itjripaies ailles de l'Kuinpe pour
s'enrichir dr connaissances scientifi-
ques, tandis qu'il en envoya d'autres
en Amérique dont les talents avaient
été mis à l'épreuve dans 1rs travaux
de l'univrrsité, dans 1rs sciences ma-
tlKiiiatiques rt naturrlles, et qui avatrnt
o' irnu 1rs suffrages de celte savante
académie. Il créa encore l'rcole des
cliarles aui archives du ro>aume, insti
tution qui deiint, en quelques années,
aussi brillante que celle qui avait
été créée en France , et bientôt
les résultais les plus utiles en fu-
rent obtenus (i). Les soins du retient
"•V portèrent aussi sur les mines du Por-
(l' V..J. Ir» in^uioirri publié» par le» rlAvei
«i« IVoIf' Ar% ch^rtra de Litbonne , oolamiarQt
c»tn qui pararent en iSï4 *<• «8*5 , impri-
■keria royale.
124
JEA.
tugal déjà si leiiommces au temps des
Phéuicieiis et des Carlhanjinols, et il
créa l'administralion des mines. 11 fil
exploiter la mine d'or d'Adiça, qui,
ayant élé en exploitation depuis le
XIP siècle sous Alphonse F' jusqu'au
XVI siècle sous Jean 111, avait depuis
été abandonnée. D'autre part lesbcsoins
de l'armée inspirèrent à ceprinceTidée
de rétablir de nouveau les maf;;nifiques
forges de 'i liomar , de Figuelro et de
Machuca. Il fit en outre leprendre, en
1802, les travaux àe Jazd/l/ge, qui à
elle seule pourrait suiure à tous les be-
soins du pays et des colonies. Il fit de
même exploiter les mines de charbon
de Ijuarcos et celle de S. -Pedro da
Cova, découverte en 1802. Il confir-
ma, par une loi du 4 fév. 1802, celle du
20 août 1721, sur la conservation des
monuments de l'antiquité et dumoyen-
agc , détermina le local où devaient
être exposés les marbres, statues, in-
.scriptioiis, et voulut que le conserva-
teur de la bibliothèque publique ouvrît
une correspondance avec les différentes
municipalités du royaume, sur les anti-
quités qui seraient trouvées dans leurs
arrondissements. Lors de la découverte
faite à Lisbonne, en 1799, du théâtre
romain, dédié à Néron, le prince char-
j>ea rarchilecle Fabri d'en lever le
plan, et c'est à cette mesure que la
science doit la curieuse dissertation qui
a paru plus tard sur ce beau mon;i-
raenl (5). Le récent encouragea aussi
l'agriculture, le commerce et l'indus-
trie ; il créa plusieurs fabricpies, fonda
une chaire de métallurgie à l'université
de Coïmbre, l'académie de marine et
de commerce à Porto et quelques au-
tres établissements littéraires. J>a ma-
ladie de la reine Marie ne laissant au-
cun espoir, le prince, en 1799, prit le
titre de régent qu'il garda jusqu'à la
(5) Voy. la dissertation sur ce monument pu-
bliée à Lihbonnc en i8ib par L. Antonio d'Aze-
Tedo.
JEA
mort de sa mère, malgré l'opposition
d'un de ses ministres, Seabra , savant
publicistc qui avait soutenu que Jean
VI devait convoquer les Cortès, afin
d'obtenir la sanction des trois étals,
d'après les exemples de l'histoire na-
tionale, et selon la constitution de la
monarchie. Mais la crainte inspirée
par les événements <jui se succédèrent
en France lors de la convocation des
états-géiiéraux fil rejeter cet avis ;
le prince se déclara régent, et fit passer
tous les actes en son nom. Il fut re-
connu par la nation sans le moindre
symptôme de mécontentement , et la
ville de Porto, qui à toutes les époques
remarquables de la monarchie avait
joué un grand rôle, fil frapper une
médaille en l'honneur de cet avène-
ment. La sollicitude éclairée du régent
ne se borna point pendant la première
période de son administration à ses
étais d'Europe, elle s'étendit encore
aux colonies et surtout au Biésil, où
il fonda treize villes nouvelles avec de
nombreux établissements dans l'intérêt
de l'agriculture et des sciences géogra-
phiques. Aux archives de la marine et
des colonies à Lisbonne, on possède
un grand nombre de projets formés
d'après les ordres de ce prince sur les
riches établissements d'Afrique et de
l'Inde. Il faisait rédiger par des hom-
mes spéciaux des mémoires qu'il Usait
attentivement et qu'il faisait soigneuse-
ment conserver dans son cabinet (6).
L'administration active et ferme de
Jean VI , dit un écrivain français qu'on
n'accusera pas de flatterie envers les
rois (7), « procura au Portugal une
tt véritable prospérité qui malheu-
((j) Nous en avims iu plusieurs, entre autres
un travail de M. Vicira T»v;ir, secrétaire et ai-
chiristc de Goa , sur les colonies de l'Afrique
orientale v.l sur les possessions de l'Inde , (|ui
malbeniciisement resta inédit , de uiiine que
son Catalogue dos n)anu^crils des arcbivis de
Goa , depuis la coïKjuélc jusqu'à nos jouis.
(7) Riibbe. — Résumé de l'histoire du Vor-
tngaf.
J|{A
J£A
1)5
« rtMÉMMlt 4iira p^ d'années. C«
M priuri* enrotirA^^rait tou^ les grnrr^
« île travaux, levait ton» \ts obstacles,
« comhlail tous lr> >\6ei d'une or;;a-
« ■isation éronnioiqiif imparfaite. ( 'ne
« ère nouvelle lie tli*\elo|>|\f>menl pour
«« le j;énie national -^cmlthit se prcpa-
« rer lofîiqiie L ;;iici re miiI .ijouiiirr
« le rciullal tic tous se* elforts. »• Kn
efTel, quoique re pi incepjrimr politique
sa^e ne voulût pas prendre une part
bien active à la f^ueire que les puis-
unce« roaiiirrs firent à la Fr.ince en
1793, il >e nul repenilanl ol)li;,r, «l'a-
près le traité «le fMsus ttuirris qui
existait entre le Portugal et rKspa»ne,
(le mettre i la disposition ^e retle
puissance un corps de troupes qui ne
devait servir qu'en qualité d'auiiltai-
res (S). Kn 17UV, il s'oppova même
à ce que ses troupes pénétrassent sur
le territoire français ; et, lorsque par le
traité de llàle (1795i IF-spa-ne eut
s'gue la paix (91, les troupe> de terre
rentièrent dans leurs fov ers, et les vais-
seaux qui avaient joint les escadres an-
glaises dans h Méditerranée reçurent
ordre de revenir dans les ports portu-
^ai.;. Celte conduite, qui annonçait de
la part du prince une ;;rande modéra-
tion, attira sur lui, à IVpoque du traité
de 1797, l'inimitié de l'une et de l'autre
puissance. i'Ius tard Konaparte ayant
décidé l'Kspa^ne à laire la jjuerrc au
l'ortu^al ^ envova une armée de quinie
mille itommes sous les or*lres de I.e-
clerc. L'arrat-e espa;;nole commandée
par le prince de la l'aix commença les
liostililés. D'autre part, le cabinet an-
glais qui avait reconnu la nécessite de
faire une Irève avec la France ne four-
nit au Portuf;al que trois cent mille
(8; VoTrx , outrr le trait.- cl"*lli»nor mire
l'Espai^ne ei le l'ortu);a! , la convruttou pntvi-
•oire do ij juillet 170Î. lur le* lecour* qua
l'Etpaçnc rt le r»rtu;al devaient »• prêter
m ca» de guerre a»ec 1j France.
(cj) Vov. Martriis , Hetutil drs tmin \\
6S*>
ItflH sterling de subsides (!0j, et qiuv
Ire ré'^iinenls d'infanterie. Ke récent,
qoid'abotd avait piis le parti de se
mettre à la tête de l'armée portu-
gaise (11), résolut alors de tr.iiter sé-
parément et envoya l'inlo, ministie des
affaires étrangère*, à Badaiox .tfm de
ni*;orirr, avec luicien Hoii.ipat le et le
ptinreile la Paix, le tiaiie du (i inin
IHOl I l'i) qui (ut bientôt ^utvi de celui
de Madrid du •-i9 septembre. Par suite
de ces malheureux traiirs. irs marcban-
di'.es fiaiiraises fuient pla.ées sur le
mri:ie pinl que les anglaises pour les
droits d'entrée , le Portu«;al con*en-
tit .1 feimer ses ports aux vaisseaux
anj^lais, et s'obligea de plus à payer à
la France une somme de tingt-cinq
millions (1!)). Enfin le Portii<;al céda
»«ni l^f
la lo *.
ire la
Ml .
(■ail i »a r<iur I» i<
Itr <i*a~a e»p»r»il»«'
a'avaiit pat rie ratifié iaia*«^l)at<-ii,< ni pjr la
cour de Litboane, fat d^lare nul pjr ir ll.r<<-
loira le a6 octobre (Voj. .t/a/feau. Ml, to-).
(il) Nout avoof prit rnanautanie <le co fait
•Ijiix une rtirieu»« cormpoodaoca inédite de
1 r! l..>brrt Ftii-Uerald, alar» iiahattaJeur à
I ..b..t.ne.
;it; VoT. Mmneni. Siipp.. Il , 34o.
X(il) Voi. la note ilr l.Muni R..n.ipartr da «7
Mpl. tSoi , adrctcf au pt inre de Ij l'.iix , rt Li
Irllre J'i priiica à C. nibeiro Freire . ininivtie
de l'..rlu|:al il Madrid, d^tce du uiLinejour.
V..y. une autre noU d« Lucieo Buna|>arte du a8
•r|i'ieiiil»re, adr«*»é« au prince de l4|l>jix, decla-
ii6
JEA.
à l'Espagne Ollvenza et son territoire,
et à la France un territoire de soixante
milles d'étendue dans la Guiane portu-
gaise. Ces conditions onéreuses furent, il
est vrai, modifiées par le traité d'Amiens
du 21 mars 1802; mais, l'année sui-
vante, le renouvellement de la guerre
entre l'Angleterre et la France exposa
le Portugal à de nouveaux dangers.
Napoléon, qui avait fait arrêter et dé-
tenir comme otages tous les Anglais
qui vovageaient en France, exigea du
prince-régent qu'il fermât ses ports
aux Anglais , menaçant le Portugal
d'une invasion immédiate si cette ré-
clamation n'était pas accueillie. Dans
une conjoncture si critique, le gouver-
nement britannique envoya à Lisbonne
lord Roseling , le général Simcoe et
Saint-Vincent chargés d'offrir tous les
secours en troupes, en armes et argent,
aussi bien que des flottes, dans le cas
où le prince-régent serait disposé à
résister à Napoléon, ou de fournir à ce
souverain tous les moyens pour se re-
tirer au Brésil , déclarant en même
temps que si la cour c'e Lisbonne re-
fusait ces propositions , les Anglais
s'empareraient de vive force du port
de Lisljonne, et captureraient tous les
vaisseaux dans les ports. Le régent, si
souvent accusé, par des écrivains mal
informés, d'avoir toujours cédé à l'An-
gleterre , rejeta ces propositions avec
beaucoup de fermeté, et il obtint de
Napoléon une promesse de neutralité
qui fut stipulée dans la convention
entre le Portugal et la France, signée
le 6 octobre 1803. Cette neutralité,
achetée il est vrai par de grands sa-
crifices, tourna cepeniiant à l'avantage
du Portugal. Car on doit dire à l'hon-
neur du régent qu'il obtint dans de si
rant qu»- n, dans IVspacp de dou/,»- licurps , il
ne receriil ane réponse ^aiisfai^aiile , l'armé»;
française entrerait m l'oilD(;al. l.<- prince d«^ la
Paix , par une autre nol«* d.iiée du imine jour,
aniion< e à Lucien , auiba^sadeur de France , la
conclusion de U paix entre le Portugal et la
France.
JEA
pénibles circonstances ce que des états
plus puissants ne purent obtenir. Par
suite de ce traité on vit le commerce
portugais se rétablir de nouveau, mal-
gré la reprise des hostilités entre la
France et l'Angleterre, et le Portugal
jouir au moins pendant quelques années
de tous les avantages de la neutralité.
Mais lorsque le dominateur de l'Eu-
rope eut porté les derniers coups à
l'empire germanique , lorsqu'il eut
triomphé de l'Autriche et de la Rus-
sie à Austerlitz , de la Prusse à
léna , et qu'après s'être fait empe-
reur et roi, il eut audacieusement dé-
claré que les Bourbons de Naples et
d'EspagA avaient cessé de régner, le
Portugal ne put pas se flatter de conser-
ver encore celte bienfaisante neutralité.
C'est alors que Napoléon, prêt à l'en-
velopper dans ses plans d'usurpation
depuis longtemps médités sur la Pé-
ninsule , ne manqua pas de prétex-
tes pour rompre le traité de neutra-
lité qui lui faisait ombrage. Il ac-
cusa d'abord le régent de s'être lié
plus intimement avec les Anglais ,
et de leur avoir accordé des secours
lors de l'armement de leurs flottes par-
ties du cap de Bonne-Espérance pour
aller conquérir Buenos-Ayres (14) et
Montevideo. Les avantages que la
France devait tirer de son alliance avec
le Portugal ne purent satisfaire Bona-
parte qui était alors dans tout l'éclat
de sa puissance. U annonça hautement
que, de concert avec l'Espagne, il fe-
rnit marcher une armée sur Lisbonne ;
et cette menace, dont l'effet ne fut un
mom«it suspendu que par la guerre de
Prusse, se réalisa après le traité de
Tilsitt. Ce fut le 14 octobre 1807 que
Napoléon déclara, dans l'audience qu'il
donnait au corps diplomatique, qu'il
ne permettrait plus aucune relation
(ti/ Les Anglais s'empan'^reiit de Buenos-Ay-
res le 2 joitlet i8o6» et de Haldonado le 37
octobre.
JEÀ
conracrriile ou p«litM|M &• cmiti-
nfiit a»«f l'Annleierre, cl que, n\ lUii^
dfu& nois Ir pnnre i^^nit de l'orto-
pA nj renonçait pa* entièrrinent, ta
maison tir firugam e nu mit rrssr r/r
rrgnrr. Drs re jour il i\f fil plu* i la
cour de Lisbonne qur de» proposi-
tions loul-.i-fail inadmi*Mlil« KoMute,
par une noir <|nr rommut> m-
ce M. de Uavnrval. fl'
res de tVanre, il enjoisini uu ir^rul
de fenner aui An;;lais dan* \r driai
de trois semaine* lou* Ir* port* du
Portugal, d'arrêter Inu* les «ujeU bri-
tanniques résidant dans ses état* ; en-
fin, de confisquer toute> le« propriété»
an;;laises. Dans cette déplorable situa-
tion le prinre fit encore tous se* efforts
afin de prolon;:er son séjour dans la
métropole el d'éloi;;ner nue rupture
avec la France; et, croyant i^e tirer
dVinbarras, il accepta la première de
ces propositions , en demandant du
temp5 pour 1rs deut autre*. Mais un
tel sacrifice fail au bonheur de son
pavs, loin de satisfaire Ir dominateur,
excita son mécontentement el ne satis-
fit pas davanta;;e l'Angleterre' I>e mi-
nistre de Portugal à lx)ndre« obtint
cependant du cabinet britannique l'as-
surance que Ir l*ortn;;al ne serait point
inquiété pour le fait de la clAture des
ports, po , ',at pas
aux propi ' dès re
moment sa^ilual.onil»", ;i,t lii-^plus dnn-
Hereuse* ; pour sp soiisi:.iire à tant de
périlslépriiice H .:enl c ' br-^ »in drto-il
soncoura;;e el de toute «.a présence d'es-
prit. JiLsque-là il n'avail jias <érieu>e
ment pense à se retirer au Brésil , el il
n'était question que d'v envoyer >on fils
aine domi^edro,avec le litre de connéta-
ble, et une desesscrurs(t.V; mais alors
^lacé entre une armée franco-e>pa-
(i>) Tout avait rif pr.j.jrc |.our 1* .1. pjrl .Ir
doin r«'<!r<>, ItN .ifriiirr» d» ta nuiton riairnt
Doiuuir» , rt le cii'i<l< «ir BrLuooIr Kfut drt
Wttrespatrtite* de gouverneur da princa, ta-
pk>i de U ploj luate importance, q«i n'avail éW
HA
117
S «oie, qui enraliissait lePortupI, et la
otte anglaise, qui tenait bloqué le port
de sa caiiiiale, Jean Vi n'eut pas d'au-
tre parli ï prendre Ouiltanl le pa
lais de Mafra, il vintbabiler celui d'\-
)uda , ï IjNbonne, où il réunit plu-
sieur* foi* le conseil d'riat pour lui
faire part de celte grande drirrmina
tion que le célèbre Pombal a^a-t •
fois su;;i;érér au i(»i Josepli. \, .
avoir établi une ie,;eiice pour ailinuiis-
trrr les affaires du pa\s pendant son
abM-nce, il annonça son départ par un
décret qui fut publié le iifi novembre,
et il déclara (|ue son intention éta*t
de ne prolonj;er «m séjour au Brésil
que jusqu'à la paix générale. I^ord
Stran-fort , ministre d'An^^leterre ,
avant fait connaître il la cour ce que
Napoléon venait de déclarer publi-
quement , que /// imtium dr lira'
gutur Ui'ait rrsxr tir rr-inrr , cet
averlt* rm»*n* .irreléra le départ 'If»)
I^ I' ' . sa famille et leur
suite ^ 'enl.le*27 novembre
ISO", sur une flotte portugaise criin-
poM-e de huit vaisseaux de premier
raii;;. quatre fré<;ates , douze nricks ,
un schooner et beaucoup de navi-
res du commerce. 1^ nombre total
d .enta bord
t' de quinze
roiiic. luule |j cj|.ljle était dans
la consternation, F,a fotile •;? pressait
autour du prinre, r" lit ses
L;enoux, et le* pleur* < • !•• tous
le*. >eux Lèvent, étant (le\enu con-
traire, emprrbn la flotte de sortir de la
barre pendant toute la journée du '27.
•crurd^ è |>er«oiiot! d>pui« la minoriir dr Se-
brurii. au \VI* tti^-lr. tort ilr la uoinutaliou
i'
■ al qui eonle-
•lu avait «'(é
^iiiitli qui I tiit
rMrwir* an-
^ riugjl à Lon-
dr»-», il'Mn iJnininRii» ic >^>ul*, »'ttait Jll^^^ tiu-
fire»»r dg Ir faire parvenir au prioce-régent.
Vou- »ar cela l'écrit publie par ce diplomaU,
•oua ce litre : L*é juatn coincidtiut .)
1?.8
JEA.
JE\
Leregeiit, qui se tenait sur le pont, dit
alors à Tamiral Cuiilia ; J'ainirrais
jjiifux périr par un naufrage (pic de
tomber dans les mains de Jiona-
purle ; car ce malheur serait plus
grand pour moi que celui fjue-
prouoa François j''*' prisonnier de
Charles V (17). La flotte n'entra dans
rOcéan que le 29. Elle avait à peine
dépassé la barre qu(* l'avant-o^arde de
Junot arriva au bouri^ de Sacavem, à
deux lieues de Lisbonne. Le prince
fut reçu au sortir du Ta£;e , avec les
plus éclatantes démonstrations d'allé-
f;ie>se, par le brave amiral sir Sidnev
Smith qui commandail une immense
flotte anj^laise, et qui, à la tête de ses
officiers, se rendit en t^rand uniforme à
bord du vaisseau amiral, pour comj»li-
menter le récent. La flotte portugaise,
assaillie dans la traversée par deux
tempêtes violentes, arriva le 21 janvier
1808à J>aliia accompagnée du vaisseau
de ligne anglais le Brdjort. Le prince
fut reçu avec les plus vifs transports
d'allégresse par le peuple et par le ca-
pitaine-général, comte da Tonte. Le
28 du même mois, une ordonnance
rovale ouvrit les ports du Brésil à tou-
tes les nations amies, et permit Tim-
porlation de toutes les marchandises
étrangères moyennant un faible droit ,
ainsi que la libre exportation de presque
tous les produits de la colonie. I^cs
habitants de la grande ville de lîaliia
firent tous leurs efforts pour décidci" le
régent à fixer sa résidence dans cette
ancienne capitale du ]>résil, et ils offri-
rent de lui faire bàlir à leurs fiais un
somptueux palais. Mais le prince avait
ré>^olu de s'établir à l»io-.Ianeiro. Il
s'embarqua le 26 février et arriva le 7
mars. j3ès-lors, unicjuemcnt occupé
d'améliorer les différentes branches
d'administration de cette vaste contrée,
il y fonda un grand nombre d'institu-
tions utiles. Après avoir permis aux
Brésiliens d'exercer toute espèce d'in-
dustrie manufacturière, il établit des tri-
bunaux civils et militaires, des conseils
d'administration , wwq. préfecture de
police, VxWft gendarmerie, un trésor, \m
conseil des finances, une banque, une
imprimerie royale, une fabrique de
poudre à canon; enfin il Institua à
Minas-Gcrrcs une junte sous la pré-
sidence du capitaine-général, pour la
civilisation des Indiens sauvages et
pour la navigation du Kio l)ol<;e. H
fonda des prix en faveur de ceux qui
introduiraient au Brésil des arbres et
des plantes utiles. Il fit établir un hô-
pital militaire, des écoles d'anatomie,
de chirurgie et de médecine. Il créa
l'académie royale militaire pour l'en-
seignement des mathématiques, de la
physique, de la chimie, de la métallur-
gie, de l'histoire naturelle et des scien-
ces militaires ; enfin il ouvrit au public
sa bibliothèque particulière et fonda
la bibliothèque publique de Bio-Ja-
neiro. Il augmenta encore le jardin
botanique de Lagoa (18), y envoya
un grand nombre de plantes trans-
portées de Cayenne et de l'Asie.
C'est encore aux soins de ce prince
qu'on doit la prodigieuse quantité
d'arbres à thé plantés dans et jardin,
cl à Santa-Cruz (19). Ce fut par les
moyens mis à la disposition du savan|
minéralogiste Napion, d'après les or-
dres du régent, qu'on dut les premières
expériences faites au Brésil sur la ré-
sistance , l'élasticité et la dureté des
métaux et des principales espèces de
bois de celte vaste région. Il fit de
(ioa un port franc, y permit la liberté
des cultes , cl proclama égalcmci<
(17) L'antcur (le cpfnriiclc sclrouv.iit .iiiprrs
(lu prince quand il {iroiioriçu «rs parolcf. rcni.ir-
qii.-ihlcs; d'autres témoins encore viTarils jicu-
vcrit ans^i les atlcsl'T.
(18) Ln crcalicn de cet «•tabli-'seinciit dalc du
replie du roi Josi j)li.
(k,) I,;i rrcolte du thé'Cn 1810 monta 5 (rente
millo livres pisant.
la loïenute TfU^ttw^ Junsioui \« Hié-
Nil, il f nroura^ra h rdluiii^at.iiii du non
\rl rmi'iic m (aivAnl vriur tli-^ A(;uir>
df4 colons AuiqiicU il arconla îles Irr-
rrs, de l'ai^eul, ilf% ustensiles rt toute
sotte lie secours pour la culture et l'ë-
(liiution ()c5 Ue.>tiaii\. 11 exempta ces
colons et leurs enUnt^ ilu sertice mi-
litaire , declaiant que tous ceux qui
viendi aient se fixer an lin^il joui-
raient des mêmes a^jnla>;r^. Il éta-
blit des colonie* daiM rinterieiir , re
qui contribua 1
tion des jieujiL.
à prands frais une ctilun.c >tii.sve, et
transpniter ce*il fanjàlie* auxquelles
on d:.lrib:ia Hca terres, e.i pr »|.rie!é,
avec exctnpliou d'iinpAts y'20 . Pour
encourager Ta^ricullure . le rr^enl ac-
corda aux habitants du Hic^il Id* pii«
^ilè^e que leur> propriété!*, noiamuient
lersucreries et les récolte*, ne pour-
laienl être saisie;» en luljlilé , tuai;»
seulement dans une partie t!e leurs re
\rnus. Il donna une foi te iinpiilsion
aux cominunication> interienr^•^. A ret
effet il lit ouvrir dc5 ^nndes routes
dans l'inlf rieur décelable continent,
el conlinuer cilles qui n'elaien^ point
achevées vil). Il ordonna d'explorer de
nouxeau les grandes liviercs Sladeira,
Tapajoz, Xin^u et Arinox ; el, par ces
dispositions, la navigation depuis Villa
Bella par les ri^ ière^ ( iuaporv*, .Marno-
réelMadeira jusqu'à l'Aniizoïie, el par
ce orand Ueuve jusqu'au l*ara, comme
aussi la navi;iat on du (!u!aba par l' Ari-
not el par le lapajoi furent ou\eites;
el des courriers furent établis sur toutes
les roules. Knfin le prince Jean ne fon-
da pas moins de Irenle-une villes noj-
(lo) Cctie colonie fut appclO« Km^^tlU-Fn
h»mrg.
{■»*) C-S routM tont V^^^\^ p,r« jo»quà
Rio Janeiro ; d.'pai» le Tocniin» jutqu'a la
«ource (le l'Ilapicuru ; p«r l'iuUrirar dr* fore-»,
(iepais la province (l'M|iiriio S«niu juwju'à }A't.
■«« G^rrrs; depuis Campo» de Goiucasc» jm-
qa'à Minai ; en6n par l'iiitcrirur d«-j forfli.
LlVIll.
ji:a ijç,
^ellc». Sv>i \iir% cVtendiient aussi à
rrxpluraliiii des mine<t, et il accorda
de i^ranJo pn\ilo;;es aux explorateur:^
Il londa 1.1 l>r1le fonderie de fei du
iMoiro do l'ilar , )uu> la diiertion du
savant mHallut;4i>te Feireiia da Cama-
XÀ, et celle d'ipanrma ^ou<> la direction
de Varnhacen. Voulant eiirouiagn
des consirnctions à Hio-Janeiro , il
exemp'a pendant vin^t ans de toute
conlnbuiioii les pioprietaire> dcN mai-
sons de plus ilun elaj»,e, el celles d'un
• ndant dix ans. Il fit con^lruile le
\-f thr.4ire lie Sainl-Jean, un im-
wen-tc baliinent pour le trésor et la
inonnai'* , «If magnifiques caser nr;.
Il ajniiln a tous ces enibelli^vnnen: ■
la création d'un tre^- beau laulm poui
la promenade publique ï Kahia , ou
il m éle\er une place de commerce ,
la bourse , et dota celle belle cile
d'une riche bibliothèque. .V Fer
nambonc, re prince fit e\écnter des
travaux coiuidérables poui emprrher
|j ruine du poitde Kerife. lUonlinua
en inéhjc leu*p-N a encoura;;«r le rom-
inerce et les fabrique^, en réduisant
1rs droils d'entrée , et en supprimant
entier ement ceux qui étaient peiçus sur
tes niaicha!idi-es de la (>hine venues
par la vole de Macao daits de^ vais-
seaux portugais; de même que sur les
matières premières employées dan-> les
manufactures nati«nale>. Ainianl pas-
sioiiTiement la inusi({ue , il ht \enir de
Lisbonne cinquante chanteurs, près
3ue tous Ilaliens, el porta l'orchestre
e la cour el de la chapelle ro>alc a
cent in^lruinettlistes. Il appela auprès
de lui le célèbre Maicos l'orlu^al, dont
plusieurs pièces ont été données au
Théâtre- Italien de Paris. Si celte me-
sure eut une ;;rande inihience sur le
perfeclionnemenl du talent qu'ont en
l^néral les lirésilieiis pour la musi-
que, il en fui de même de celle que le
prince adopta en 181G, de faire venir
de France une colonie d'artisles a la
ijo
JEA
tête de laquelle élaient Lebreton, de
racadéinie des beaux-arts , Debret ,
peintre d'histoire , Taunav , paysa-
{;iste , etc. G est à toutes ces déci-
sions du récent que le ]>résil doit
une école des beaux-arts , un grand
nombre d'édifices remarquables , et
l'espoir d'un avenir plus brillant en-
core. Après ce coup d'œil rapide sur
la politique administrative de Jean VI,
quant à l'intérieur de ses états trans-
atlantiques, nous signalerons ses actes
de politique extérieure pendant son sé-
jour au Brésil. A peine arrivé à Rio-
Janeiro il déclara, par un manifeste
du i^^ mai 1808, nuls et non avenus
tous les traités conclus par le gouver-
nement de Portugal avec le gouverne-
ment français, et nommément ceux de
lîadajoz et de Madrid, en 1801, com-
me aussi la neutralité de 1804. 11 se
reconnut l'ami et l'allié de la Grandc-
Iketagne, déclarant qu'il ne poserait
les armes que de concert avec cette
puissance, et qu'il ne consentirait ja-
mais, quelles que fussent les ind'emnités
qu'on lui proposât, à la cession du Por-
tugal. Au mois d'août de la même an-
née, en réponse à un mémoire que lui
avaient présenté son épouse et son ne-
veu , l'infant dom Pedro Garlos, et
dont l'objet était d'implorer sa pro-
tection pour le maintien de leurs droits
à la couronne d'Espagne, que Napo-
léon venait de placer sur la tête de son
frère, le prince-régent, par une décla-
ration solennelle, promit de coopérer
de tout son pouvoir au maintien de
ces droits, <c oubliant, ajouta-t-il, mon
« juste ressentiment contre l'Espagne,
« qui a donné passage aux troupes
« françaises, et qui s'est jointe à la
« France pour l'invasion du Portu-
« gai. » Dans les années suivantes ,
le régent fit occuper la Guiane fran-
çaise par une expédition envoyée du
Para , et qui avait forcé le gouverneur
de cette colonie , V^ictor Hugues ,
JEA
à capituler (2-2). En 1810, pen-
sant que le Portugal avait lieu de
craindre une nouvelle invasion, le ré-
gent signa avec l'Angleterre un traité,
qui garantit de nouveau la couronne
de Portugal à la maison de Bragance ;
et, pour obtenir cette alliance , le
négociateur conclut le fameux traité
de commerce qui a été l'objet de
tant de controverses de la part des
économistes. Ge fut à la même épo-
que que le régent obtint de l'Angle-
terre trois cent mille livres sterling
d'indemnité pour les vaisseaux né-
griers, capturés par les croisières bri-
tanniques , et appartenant pour la
plupart à des négociants de Bahia.
Pendant ce temps, les provinces de
l'antique royaume de Portugal, enva-
.hies successivement par les armées de
la France et de l'Angleterre , étaient
livrées à toutes les calamités de la
guerre, sans que leur souverain pût les
secourir ni même communiquer avec
elles. Le désordre et l'anarchie y fu-
rent portés à tel point qu'on a dit
que plusieurs lieutenants de Napo-
léon voulurent s'y faire proclamer
rois.. Mais ces bruits, il faut bien le
dire, ne reposèrent jamais sur aucune
preuve. Gependant l'imnjense majorité
de la population portugaise, fidèle à ses
anciens princes, s'était soulevée con-
tre les Français ; des troupes s'étaient
organisées, et long-temps réunies aux
Anglais et aux Espagnols , elles com-
battirent avec autant de courage que
de résignation pour une cause qui sem-
blait dçsespérée (23). Ge ne fut qu'en
fîî) Victor nugdfs capitula le t?. janvier
i8oq. «I Durant h-s huit a'iiicfsdo la doiiiinatioii
« poitugiise , il ne se jjussa rien de r<iu-irqua-
« ble dans la coloni».". l.o (ioJe civil demeura
« en vigueur, à l'exception de la inîse en s^-
«< (|ucstre des l>i«Mi8 des absents ; le pays fut
« tfiiité avec asser de miriiagi menlj. » (Notice»
statistiques sur les colonies françaises, l'a ri s ,
Imprimerie royale. 2*= partie, p. i54.)
(l'i) Voy. J/isloria da Jnvasao dos Francescs,
par J. Acurcio das Ncves. — NAriex , Sur la
guerre de la Péninsule. Hehtiou liistoiique des
}t\
JLA
i3i
1811, aprèi If Irionipf:» lie h Ci*ali-
lion, que If pr incf-réj^r ni put sf remet-
tre m romnitmirnlion sui\iea\rf Lis-
bonne. Son autcntc > fut alois plei-
nement reconnue, et ilse luta J'en>o>er
au rouvres «le Vienne troi> miniilie*
pIcni|'otriitiaiirN (ji.. nlitinreiit la resti-
tution delà |>larr il()li\eiiu, et pri-
rent ren;;a.;fmcnt «le rendre a la
Franrr la portion de la (îuiane qui
jadi^ avait appartenu à cette puis^nre
jusqu'à r(hapocL. f/K>pa;;ne ne s*c-
lant pas lialee de remplir cette condi-
tion qui lui était imposée par le con-
gru, ce fut par repré»aille% que le
prince-té^ent fit occuper ^' '• o
ainsi qu'une partie de^ p'
pa.;nolrs sur la ri\e ^ptt iitiuMiale
de la IMata , allr^uant aussi la né-
cessite de les i^ardrr tant que duie-
rait la contestation entre rK5pa;;ne et
ses colonies m»urj;ées, et au*M comme
garantie de la reslittitinn d'Oli-
▼enzaÇ2i). I«a cour de Madrid, nul-
fjé les nouvelles alliantes de famille
qui eurent lieu à cette époque, apal
voulu retenir la ville d'()li>enza con-
tre la deciNion tlu congrès, il réclama
la médiation des cours de France ,
d'Autriche, de IWissie et d'An};Ie-
tcrre. Le tiO mars iSlO , après
la mort de la reine «^a nicrc , le
prince-récent prit le litre de roi du
rovaume-uni de Po(tu;^al, l(ré:il et
Al^arves, a\er le nom de Jean NI ; et
en cette qualité il fut reconnu par
toutes les puissances qui s'empressèrent
d'envo)ef leurs ambassadeurs pour le
complimenter. Dès- lors , possesseur
d'un vaste empire, il ne né;;lif;ea rien
pour en assurer la prospéi ite a l'aide de
riiidustrie et du commerce ^2')). l*ro-
tccteur des science*; et des arts il cnnti-
f*u€mntti <iui tmrt
rmsi»n tin t'rai.rai
(l4 Cr fot l'.o.r .. . ^...i „^ ,,,„r
de Poriucal unr di»:Miin de tmu^t compotrc
des r^i;iijuciiu qui s roivot le plus diktioguM
dam la guerre de \» Prniosule.
\a5) Vo)-. l'ouTraçc du sarant rcoDonistc
nna de le^ fau e lleiirir. Knlin, par un df^
fret puldi le 17 déc. ISI,"», il éle\a le
lîféMl a'i 11' ' iiuie. Toutes les
puu><>anre> ■ ' re muiveau ti-
tre, et par Icu. . !s félicitè-
rent le prince siii ,1, fçiie „,ç.
sure. Mais, par une xii le de fatalité,
Jean N i devait toujours \oir son "ou-
Tenieroeiit enlra>epar des révolutions
et par des obstarles imprévus, l'eu de
temps après ^n a^ ènement au trAne, un
fait de la plus lilnte importance fut
près d'ebianler l'empire brésilien jus-
que dans ses fondements. Lue conspi-
ration dont l'objet était l'elablissemenl
d'un cou%erneme! ' '' : '
par un cei tain M i
nambouc. .Vu preniiir btuil, le cliel de
la judire .t>.iiiI sotilri f.nre arrêter ceux
qu'il Si '«, auteurs,
fut tur _ \ice qui se
trouvait au nombre des conjurés. Hien
alors ne >eniMait devoir comprimer la
révolte qui menaçait de s'elendre jus-
qu'à Ualiia : mais la cour de Uio Ja-
neiro , instruite à temps par le «gou-
verneur, que les insurp«s a\aienl len-
\o>é à l>oid d'un [»elit calxjleur, prit
des me>ureN si vi;;oureuses que l'in-
surrection fut étouffée à sa naissance.
I^ roi, au moment où il rerut la nou-
velle (îr rrfte réxolle, assistait aux fu-
I sofi ne\eu, l'infant dom
r ' de l5ourb.>n. Il conserva
un calme panait , et , à*:^ que la cé-
rémonie fut terminée, il alla expédier
les ordres nécessaires ; plusieurs fois
dans la même journée il se transporta
aui arsenaux pour hâter par sa pré-
sence les armements, et il prit encore
d'autres mesures dont ses ministres
n'euient connaissance qu'après l'exé-
cution. Il envo>a mémo des ordres à
I 1 une pour que la régence expédiât
.' • !i côlé quelques bâtiments afin de
bloquer les insurgés. Pendant que le roi
SrUa LUl>oa. inlilul^ = Memonoj d*j btnefieto$
pilélicot dj> gartrno d,l rtf D. Joao FI
i32
JE A
JEA
prenait ces inesujcsà Uio, le comte ilos
Arcos avait fait imcsllr Fcrnainhoiic
par terre et par mer, et tandis que Ton
battait et dispersai! Icslnsiir-;és(lai»sune
soi tie, les troupes de la marine s'em-
parèrent de la ville. Ainsi Tordre fut
bientôt partout rétabli. Vers le même
tenjps, on découvrit à Lisbonne une
autre conspiration dont le but , qui
n'a jamais été bien connu du pu-
blic , était certainement aussi le ren-
versement des anciennes institutions
monarchiques. L'autorité royale ob-
tint le même succès dans cette occa-
sion (26), et plusieurs chefs du com-
plot furent arrêtés. Cependant le roi
fut profondément affecté lorsqu'il ap-
prit qu'on avait fait fusiller le général
Frelre. Dans celte même année , il
conclut par le ministère du marquis
de Marialva , son ambassadeur à
Vienne, le niarlofî;e de son fils, dom
Pedro , avec rarchiduchcvsc Léopol-
dine, fille de l'empereur François H.
Ce mariage se fit par procuration à
V ienne, et la princesse s'embarqua sur
le vaisseau de ligne portuf^ais le Jean
VI, le 13 août, à Llvourne, d'où elle
fit voile pour Ulo-Janeiio, où elle ar-
riva le ô novembre. Le roi s'étanl i en-
du à son bord reçut cette princesse
avec de grandes démonstrations de
joie, et depuis il ne cessa de lui don-
ner des preuves du plus vif iiîlérêt.
J)e son coté, la priiicesse prit si bien
les habitudes de la cour portugaise, que
Jean VI répétait souvent : Il seinhle
qu'elle soit w'e par mi nous. Les fê-
tes qui eurent lieu à cette occasion
touchaient à peine à leur terme, lors-
que le (> février de l'année suivante
(1818) Jean VI fut couronné roi à
Kio-Janeiro avec tout le cérémonial
n«lté dans les premiers âges de la mo-
narchie. Le prinre , contre l'usage
ancien, avait retardé celte cérémonie
(af,) Voy. Mail, sur In ciinjnniliin du gcierai
C f'rfirr. publié h Loiidrcs m i8io, inb".
de près de deux ans, par égard poin' la
mémoire de sa mère qu'il honora tou-
jojHs du plus profond respect (27).
Tant qu'elle vécut, il se rendait deux
fois par jour dans SL^s appartements; et
quand il la rencontrait dans ses prome-
nades il descendait immédiatement de
sa voiture, et n'y remontait que lorsque
la princesse s'était éloignée. — Pendant
que cela se passait au Brésil, d'autres
événements bien graves se préparaient
en Portugal. L'émigration (28) de la
famille royale au Brésil , cet événe-
ment sans exemple dans l'histoire ,
avait laissé en Portugal les gerbes
d'une révolution prochaine. L'école
philosophique du XVIII*^ siècle avait
fait de nombreux prosélytes dans ce
royaume. Dès l'année 1808, les cory-
phées de cette école avaient rédigé un
projet de constitution que le comte da
Ega, ancien ambassadeur de Portugal
à Madrid, devait présenter à Bona-
parte, à Bayonne, au nom d'une dé-
putation portugaise; mais cette école
n'avait point les sympathies des masses.
Cependant les événements de la guerre
de l'indépendance (1809 à 1815)
donnèrent à l'armée victorieuse une
grande importance, et rendirent à la
nation portugaise toute l'activité et
l'énergie des temps antiques, A la
même époque , les maximes des cortès
de Cadix retentirent en Portugal; mais
le peuple, qui aimait réellement sou
roi, en attendait patiemment le retour.
Après la chute de Napoléon, la cour
de Saint-James manifesta plus d'une
fois le désir de voir Jean VI revenir à
Lisbonne : elle envoya dans ce but à
(y.-]) A son r«tonr du Urcsil , Jean VI nitiaiis-
j)ori'r <ljns un v.iiss<au de sa Hotle les restes
inoric-ls de sa nnMc. Sur le vaisseau qui It-s
poila flottait ri-iciidard royal. Il leur fil rendre
Ici )>lii!> grands honneurs lors de leur transla-
tion dans l'cglisc du (^œnr de .lésas à Libboiine
ou «"'t érigé xm louiljeau inagninqnc.
(28^ Je.in \I n'.iduii liait jamais io mol d'<''/n(-
i;ralion; il disait toujours : << Je n'ai pas f'migré;
j';ii transféré ma cour d'une put lie d<: mon
royaume à une autre.»
ji:a
Il A
33
Kio-Jineiro, fn IMf r>, ramirni mi .1
l>rre>ford ; mais If jirincc s'v irfiiNa
t< par riJéc du bien qur va
I Mailfaiicatix peuple^ ilr «on
i.».>.\il (iiipirf, et au si, il faut le «lire,
l'otii nvrut se soustraire au\ e\'^enr«
• ' ; . ' ; r ;;ran(lcs pui.ssanrrsiJr rK#
i.'pr (J:mi qu'il eu »oit, 011 iK^eut
*e dissimuler que le méronletilement
quVpiuiiva la nation tle s« voir forcée,
rianl mrlropole, (l'a\oir recours à une
rolonie pour atlendie plus de six mois
« t quelquefois un an la décision d*af-
Ijiios pressantes, n'ait é\é pour beau-
rnti|. «luis les causes ue bouleversement
<: «(laieient plus taij. O ne fnl ce-
1 • I l.inl qu'en présence des ié\oluliori
dKspa^neeldc Naj>lrs, en \H'20, que
les premiers desordres se manifeirrentà
l'orlo le '2\ août. Ij régence sentit aus-
sitôt le danger de ?;a position, et prit
toutes les précautions que la piudenrc
lui su^i;éra. Le maréclial lieresford, in-
-Iruit de tout ce qui se passait en Kspa-
^ne et en l*ortu;;al, résolut d'aller lui-
même à Uio-Janeiro pour informer
!•• roi et le solliciter d'euNover de Tar-
uenl et des instructions . Knibai q.e dans
les premiers jours d'avril sur la fté-jate
an;;laise la Spurtùite, il arriva a Uii>-
Janeiro le 9 mai. Le roi fil pailir aus-
sMAi un vaisseau chargé d'arpent pour
paver la solde arricjéc des troupes, et
il chargea la rr-rrirc lîe Lisbonne d'o-
pérer dans l'administration intérieure
les cban{;ements qu'elle croirait néces-
saires. Mais déjà le mal avait fait de
grands pro;;rès. Dirigés par quelques
officiers et par les socié'cs >errèles
répandues sur toute la surface de la
Péninsule, les conjurés, mettant
i profit l'absence du maréclid, s'é-
taient assemblés dans la nuit du '2'S
au 2V août chez le colonel Sepulveda ,
fils du brave général de ce nom, qui
atait rendu de ;;rands services à la
restauration ['2[>) : là ils préparèrent
(19) Oo prut cgiijultrr »ur ce c<'o<ra! : .V».
des piorlaniiiious et des plans de ré-
volte; puis »i> »r réiin'ient à leurs
quartiers, liaran;;urrrni les troupes, et
se poiierent a l'iioirl -de ville où il>
convoquéient les antoiilcs et créèrent
une iunledegouvernciiieiil composée de
seize membres, qui se liala de publier
un manifr^ie. Dans cet acte mémo-
rable, la junte accusait le roi de l'a-
néantivsement du commrire, de la dé-
cadence de l'agricultu'e, enfin de ton-
tes le« cabmilén qui avaient suivi M>n
départ (30). Bientôt plusieurs clieb.
militaires envovnent leur adiiesion à
la 'unie qui eut sous »ei ordie> vingt
deut mille boinines , dont une pariK:
mairba >ur la capitale. Ij régenre de
Lisbonnre instruite de celle insurrec-
tion voulut en atrêler les progrès. F.lle
réunit i'iimed .«len:enl un grand con-
seil auquel assi>lcrent presque louiez
les principale^ autorités. Klle doniu
l'ordre au général Victoria et au comte
d' \maranle de maicber »ur Porto,
mais ces gént':aut »e virent abandon-
nés de leuis propres soldats. I^es gou-
verneurs d.j royaume prirent des me-
sures pour empêcber les communica-
tions; ilsrr»' ' r une pro-
clamation ai mêle dans
fes princ pe> d t>l»»tvsjjMe au roi et a
la re-^ence, seule depositaiie de son
poMvoT ; mais c'est en vain qu'une
nouvelle proclamation fut publiée le
i"^ septembre, proinellanl , au nom
du roi , la convocation des (^rtès ou
du congrès national suivant l'ancienne
conslilulion. C'est en vain qu'elle fu
paraître d'autres prcclamation> le jour
suixanl. accordant i.ne amnistie géné-
r, ■' u- .>» rr • r. Ju p'-rr»/ Srpu.'rfJj , paf
I . \. (. ■ . r^. ;..il. I. en ifog. Lornn»* le jcunr
cv.' ticl >t j.'.Ui 'j . < .1 il e«« «|uc.r»oii lui foicé
<r«ii>(:.rr. .|»ic» la rr»iaur3iioii «le lîiii .
J^a M l«ti fi! i.f-- |.rii»ion donl il * jo"" P*»'
fî»î\ loul l« ieuij.1 qu'il a luih.ie Pan», iiu^u'a
J., VoT. n»t»i . Mnmi iUlitlique tw U rojmu-
-/ -iV /' ^<■cu^ I . 84. Otlr pi^e p«ul donner
au lectrur «':rjn;rr » la natioo porta;ai$- m.»
idrr dr «un amour |o«r Ja»n VI.
.34
JEA
raie aux ofticiers, soldats et citoyens
qui reviendraient à l'obéissance ; c'est
en vain que le 9 sept, les lettres de
convocation pour les Coitès furent ex-
pédiées par les gouverneurs au nom du
roi, et qu'ils adressèrent à la junte de
Porto une lettre qui enji;ao;eait ses
membres à se dépouiller d'une autorité
illéi>ilime, puisque la convocation du
congrès national leur ôtait tout motif
de la conserver. Les gouverneurs du
rovaume avertirent enfin que le roi
seiait supplié de revenir en Portugal,
ou d'y envoyer le prince son fils aîné.
Mais la révolution avait déjà acquis
une grande force , et le plan de ses
autetns était bien différent de celui
qu'ils avaient indiqué dans leur mani-
feste. Les événements se précipitèrent
tellement que, le 1 5 septembre, le i G^
régiment s'élant insurgé à Lisbonne,
la révolution s'effectua dans cette ville
et la régence fut retirée à ceux qui
l'exerçaient au nom du roi. La junte
de Porto, réunie à celle de la capitale,
dessina bientôt son caractère en décré-
tant que la constitution des cartes es-
pagnole s serait immédiatement procla-
mée. Dès-lors l'autorité du roi n'exista
plus que de nom. Lorsque ce prince
fut informé de ces événements, croyant
encore pouvoir arrêter l'insurrection,
il .sanctionna la convocation desCortcs,
et accorda une amnistie générale ;
mais on sait assez que ce n'est pas par
de telles concessions que les révolu -
ions s'apaisent. Celle du Portugal
fit donc encore de nouveaux progrès ;
et ce qu'il y eut de plus faclieux pour
Jean VI , c'est qu'ell*" menaça bientôt
ses états du Brésil. A Kernambouc, à
Lahia et même à Rio -Janeiro, le peu-
ple parut tout à coup s'agiter, et les
troupes prenant part au désordre, le
10 février 1821 , une nouvelle consti-
tution fut demandée. J)ans ces cir-
constances funestc-s le roi réunit plu-
sieurs fois son conseil sans que rien
JEA
de convenable put y être décidé. Le
24 février, il fit publier une déclara-
tion annonçant la résolution d'en-
voyer le prince héréditaire dom Pedro
à Lisbonne, pour y entendre les plain-
tes des Portugais et les rapporter au
pftd de son trône , afin qu'il ju-
geât ce qu'il convenait de faire et don-
nât à ses peuples du Portugal et du
Brésil une constitution selon leurs be-
soins et leurs mœurs. Mais rien de
tout cela ne put contenir l^esprit de
rébellion. Jean VI s'étant rendu à la
maison de campagne de Saint-Christo-
phe, où il se plaisait beaucoup, le 26
février au matin , des troupes de toutes
armes, conduites par des sous-officiers
sur la place du théâtre de Saint-Jean ,
s'emparèrent de toutes les avenues, et
un conseil , formé des chefs de l'in-
surrection, se réunit dans la salle du
théâtre, où bientôt ils réclamèrent im-
périeusement la promulgation de la
constitution. Le prince royal dom Pe-
dro , revenant de Saint-Christophe ,
lut alors aux troupes un décret dans
lequel Jean VI acceptait la constitu-
tion telle qu'elle serait faite par les
Cortès en Portugal. Alors les insurgés
se transportèrent à la maison de plai-
sance du roi pour le ramener, ainsi
que sa famille, à son palais de Rio-
Janeiro. Plusieurs d'entre eux s'atte-
lèrent à sa voiture et firent de cette
marche une sorte de triomphe. Rentré
dans son palais, le monarque parut au
balcon où il fut encore fort applaudi.
Il renouvela ensuite : on ministère et
rendit plusieurs décrets dont l'un, du 7
mars, fut la nomination de neuf députés
aux Cortès de Lisbonne; et dans la soi-
rée, accompagné de toute sa famille, il
se rendit au théâtre, où de nombreux ap-
plaudissements raccuellllrent. Voyant
cependant à quel point son autorité
s'était affaiblie par suite des événe-
ments que nous avons rapportés ;
considérant aussi que , par la conti-
JEA
miation de KMit^oor au Rrf^iUnvi-
ronné de nou\flle^ rrptibli'nirt, il ne
fiouvait arrfler les |»rn;;té^ d une ré*o-
otioD, et pensant d'tilleim que 5on
retour à Lisbonne produirait <ur la
nation portu^ai^e non-'^culement une
j;rande rvplosuni ^^*CIltllmlMa^me, mai*
enrnrr cjur o ptrNriirr da^^ l'aiifienne
f ' tilri>er l'esprit (ic-
I. .iil, en outre, que
le^ ;;i4iiilr^ puis^aiM^s de TF-iirope ne
larderaient pat à rétjhtir r^nrirn or-
dre de choses, d'après 1rs p^i^ripe^ qui
avaient dirte le traité de la Sainte-
Alliance (1)1) , Jean VI 6t publier
an décret pour annoncer sa dëler-
mination de retourner à Lisbonne.
Mais cette résolution , dont la née e^s!té
était sentie par toutes les personnes
raisonnables, rv ' '' <•-
tnde sur les il.n l
du roi l.i!^«>ait Ir 1J:« il rvju» r, tlc'c>t
en consi-qurnce qu'il fut conxeiui dans
iu\e a-v>efnb!re t\ rirrteurs réuni» à la
Bourse de s'oppoNrr à ce départ et
d'en\over au prince une dépuUtion
pour lui demander un •;ouverneroent
provisoire, dont son 6K aîné dom Pe-
dro serait le régent pendant l'absence
du monarque. Mais il leur fit décla-
rer qu'aucun cban;:j^raent n'aurait lieu
avant que la constitution du Portu-
f;al fut terminée. Pendant ce temps
es préparatifs de départ se trouvant
terminés , le monarque , avec sa fa-
mille et se< mmi 1res , s'embarqua le
26 avril 18*21 , i bord du vaisseau de
li;;ne , le .han f^I , commandé par
le contre amiral de Vianna (3*2). Pln-
(Ji) (!eqtii proavr q«« la p«n«^ du roi. au
JEA
i35
».
q« il« nr (
Uil dire : -, ^
drvnt-rllr; j>u.i:i (>our riuUiir > ..uvtrtt «t«irv
de cbosr< * m
(ij) Cet ofbcirr rrfut U otraM Uu« qa« ton
aïeul, 1« famcui duin Pedro d« Mrneto, prr
autres bâtiments l'accompa-
gnaient avant à leur bord toute la suite
da roi , composée d'environ quatre
mille per«onnes. Il paiait que dans
la travetsée on lui conseilla de dé-
birquer i une des ilex de Madrra ou
des Açores,*d*où il adresserait à la na-
ti(»n porlo;;ai*eune proles?al-nn contre
tout ce qui avait été fait, d\ec l'exposé
do svsN'me de ;;<»uvernemeiil qu'il vou-
lait ailopter; mais le roi s'v refusa. ïj
(lotie arriva , le 3 juillet IH'il, en vue
de Lisbonne, et mouilla dans If port :
des saivrs d'artillerie tirées des forts
et des vaisseaux de la manne rovale si-
gnalèrent sa présence. l.e»Corlé», crai-
gnant que la popularité de Jean VI
n'amenil une conire-iétolution spon-
tanée, sedéclarèrent en permanence, et
donne ' .«nce des pouvoirs illi-
mités I riit. en outre, que reut
qui fera eut «.uicnd e d'autres cris que
ceiM de vi,'r f/t rrlii^inn, /rr Corfrs,
I 'tnrf,
f: ,1 . ,■ , .itmnr
perturbateur s, et que, jusqu al'et.iMi < •
menldelarnnotitulion, leroi nepontr.iit
donner d'emploi àaucun étranf:er sans le
consentement des(^rtès; enfin, qu'il
ne pourrait destituer ni changer les
commandants militaires de Lisbonne
et de Porto , non plus que le surin-
tendant de la police. Cette cbam-
bre démocratiq e ne se borna point
à de telles mesures , elle fit intimer
au roi qu'il ne serait pas permis de
di^arquer }k quelques personnes de la
cour, et e!Ie envova ^ bord de l'e^ra-
dre une dépulalion qui v re<ta en
permanence. Malgré tout ce qu'il y
avait d'injurieux pour le monarque
dans de telles mesures, il y consentit
sans hésiter, et il attendit a bord jus-
!. \\\'.t.
- Mon-
ne. lui
l'ariKUrd r. »" »"•• ^"» vi'.^Ma.i
mtMAMui U w... -l^*- l*- «>"«•»/ "t"»
pjrril CT^aeincni »« coiucrtit dani sa fanjinr
i36
JEA
.)EÂ
qu'au lendemain. Après plusieurs mes-
sages et différentes expiitalions, .Jian
VI et les princes débarquèrent le i,
\ers midi, et se rendirent à la ca-
thédrale suivis de toute, la cour dans
des carrosses, ensuite à la salle des
Corlès où le monarque prêt* serment à
la constitution décrétée par elles le 9
mars. Craignant que toute tentative
de ressaisir son autorité ne fut suivie
d'une guerre civile, Jean VI prit son
parli, et il affecta une jurande sécurité
au sein de celle assemblée qui venait
de lui dicter de si liumiliantcs coîidi-
tions. Le présidcnî prétendit néan-
moins daiis ie discours qu'il adressa au
monarque qu'à compter de ce Jour
son nom devait eli e placé à coté de
ceux d'Alphonse i*"', de Jean T"'' et
de Jean IV, qui avaient restauré la
monarchie. Le roi se borda à remettre
une réponse par éc il , et sortit de
la salle au bruit de nombreuses accla-
mations. Puis , co'itinuanl à se mon-
trer plein de confiance comme s'il
eût joui de la plénilude de son pouvoir,
lors de la créalion de la garde natio-
nale , il parut au tiiéàtie de Sain'-
Charlcs avec runifoime de ce corps,
et il ordonna a toute la cour d'y pa-
raître de la même manière. Nous
ne ferons pas ici l'histoiique des
circonstances qui préparèrent la con-
tre-révolution du mois de mai 1823.
Les faits qui eurent lieu depuis le re-
tour de Jean VI jusqu'à celte époque
appartiennent plus à l'histoire géné-
rale qu'à la bio;;raphie de ce prince.
Ne prenant aucune part aux événe-
ments, il se tint tellement en dehors
de toute influence, qu'il refusa obstiné-
ment les offres qui lui furent faiîcs à
plusieurs reprises pour I." rétablisse-
ment du pouvoir royal. Noyant tou-
tes les difficultés et les périls de pa-
reilles tentatives il disait quelquefois
dans son intimité, quand il voyait les
Certes et les ministres débordés par les
circonstances et près de succomber :
« C'est à ceux qui ont fait tout cela,
<' qu'il appartient de s'en tirer. » 11 en
attendait le dénouement de la manifesta-
tion bien prononcée de la majorité de U
nation cl des événements extérieurs. Ce
dénouement ne se fit point attendre. Le
18mai,latroupedelignes'étantmiseen
révolte contre les Corlès vint au palais
de Bcmnosta sous les fenêtres du roi,
et s'élant réunie aux masses du peuple
cria : viW le roi, à bus la constitu-
tion. Jean VI se montra au balcon
entre les deux princesses ses filles, et
on foula aux pieds la cocarde consti-
tutionnelle aux cris de vive le roi. Ce
lut alors que, cédant au vœu populaire,
ce prince se rendit à Villa-Franca. Dès
ce moment le pouvoir démocratique fut
renversé , et dans le trajet de Villa-
Franca à Lisbonne , pendant quatre
grandes lieues, Jean VI se vit l'objet
d'un véritable triomphe. Toute la
population sur son passage pous-
sait des cris de joie , et à son en-
trée à Lisbonne l'enthousiasme éclata
encore davantage. L^ne sorte de fré-
nésie s'était emparée de tous les es-
prits; on porta le prince en triomphe
jusqu'à la cathédrale. Cependant, doué
d'une grande pénétration, connaissant
la force relative des partis politiques, et
craignant que celle explosion d'enthou-
siasme ne produisit des vengeances, il
fit tous ses eflorls pour en modérer les
clans; et voyant bien que les choses
ne pouvaient rester dans le même état
qu'avant la révolution, il nomma une
commission chargée de lui proposer
un projet de constitution suivant les
formcj nouvelles. Après plusieurs séan-
ces , Stokler, l'un des membres de
cette commission, de concert avec plu-
sieurs Af* ses collègues, fit un rapport
d'après lequel non-seulement une com-
mission n'avait pas d'autorité pour pro-
poser le moindre changement à l'an-
cienne constitution, mais encore que le
JbA
loi lui'inrntr ii'jivait pa> le iliini ilVii
oclio\rr vm» !c ».>»i>cfiUMiKMil Jr* trm*
orilrr» iëu:»> aux (!.•'- ^-lt»M les au
Cieui u%a};e». (.rllc •' ni prë-
\alu, la coiumivMuii ' ■ <■, ri ie
roi promulgua, le V|uiii lH:ii, une lui
drcUrant que Paiii eiine coiutilulion
(lu royaume était la seule I '^ale, qu'elle
(Jcmeuiait en xi^neur, puisqu'elle a\ait
ëié ^anclionllee par lui à son aTènrmciit
au Irdjie, et par le» roi* ses prrjcre%-
teur.s; il orJjiinail eiiGii que les (^irle»
composées îles troi> otJte» du ro\ amue
fuv^eiil convoquée» aiisMtùl que le cnu-
^eii de^ miiii»tres auiatl teiminr les
Iraxaux preparatoiies. l ue nouvelle
riunmiv&ion , rompo>er tic mlni^tre»
d'état, du ^rand cluiirelier et de quel-
ques juriscunsnltes, fut cliar;;ée de ré-
oi;;er, d'apiès les anciens usa^e> , les
in&truclioiis relatives au« élections;
mais les craintes qui furent expiimees
par le cabinet de Madrid, de conrcit
avec d'autie> pui>sances, »ui le iliu-
ccr de pareilles réunions , décidèrent
le roi à ajourner iinléliiiitnent celle
roe5ure. \ji position do Jean N I était
alors ^182ij extrcniemenl etubarras-
unte. I^ parti inonarcliique se divisait
en exaltes et en moderé.>, et les révo-
lutionnaires, quoique vaincus, étaient
fort nombreux. Le roi, toujours dis-
pose à de-» voies de modération, fit de
TainseTtorts pour maintenir l'équilibre;
et les affaires du I>ré.>il vinrent ajou-
ter aux difficultés de sa position. I^
perte de celle riclic colonie auj^menta
la détresse des finances iX\ . \jc ;?ou-
vernenient an;;lai.s. voulant amener une
conciliation, avait obtenu du roi que
son ministre à Londres fut autorise à
entre: en négociation avec les com-
mL^aiies brésiliens qui >c t roux aient
en Angleterre. C'est alors que Jean
VI, fatif^ué des dissentin:ents qui ré-
• ii] Vuur le* <li-{3il> ftor l'bi»(o«rr «]• la trpj-
r.ilio>i tia Brr^il, <>m ncnl rr.iuuUrr Iti,i»ir of
Brmiil fr«m the Mr,.r«i of Br^gmuM f*mdj, hr
JfcA
i3-.
puaient au s»in de son ministère et
vujilant prouxer qu'il ne cédait à I in-
fluence d'aucun p.Mti, con;;éJ»a tous
ses mint>lres a la fot>. Sir Charles
Sliiail, enxo'ie biil.ii.mque, étant ar-
rixe à Lsl'oniie , Ii* tUinla cependant
à teconnaitie l'indepetuluice du Itrr-
sil, et même sa séparation du Portugal
(!el!res- patent es du 13 mai iS'iô). Ce
roxauut^ était, comuï" l.i!.,..t de.
étals de rKnrope , grevé d'une dette
considérable , encore au^menlie de
trois einpinnls faits soiu le i<
des (^/4Hles. I^ roi, |N)uisuixant
duclleroent un NV-teuie Ai- ie:i' .
Co::jbiné de nuninr a nr pa«. f> -
trop biusqiieinenl le
lieis, fit au lanfdcs d
céments faxo:abies au devrlopjiemenl
de l'indusliie.à l'expoil^tion dr> iitîies
produits dn lirésil ; et. par suite de
celle mesuie, des expéiii'iuns considé-
rables furent faites. On peut encoie
roellie au ran^ des dérisions aduiinis-
tralives lei plus &a;;es qui furent alors
exécutées, la crcalion d'unç l'itn/t des
erap.'unts rovaux, chargée de rcclici-
cber les mn>ens les plu^ etûcaccs pour
ramort:v>ement de la dette et l'exlinr-
l.on du papier-monnaie, er.liti poui Ir
réiablisement du crédit pnlLc cbranlr
par les dernieies cn.>es. Tout c foi s ,
malice cei opérations salntaiies, le mé-
contentement s'accrut d'autant plus
3ue l'on voyait le monarque approcher
e sa fin. I.,orsqu'il s'agit de signer le
traité de la séparation du Hrésil, i*im-
pression que Jean N 1 éplou^a fui telle
qu'on le xil plon;:^é dans la plus pro-
fonde tristesse. 11 a dit souvent depuis,
à ceux qui rentouraieiil, qu'il ne pou-
vait pas se faire à l'idée qu'un tel éxè-
uement se fût passé sous son n%;ne.
Néanmoins, d'après l'étiquette com-
mandée par la politique, toute la cour
fut mandée ce jour-là à Mafra pour
une grande réception, en romniémora-
lion du renouxeliemcnt des relations
i38
JEA
avec le Brésil et du nouveau titre d'em-
pereur dont le roi venait d'être investi ;
mais les serviteurs de ce prince n'o-
sèrent se présenter devant lui en
uniforme que le troisième jour et à
l'heure même de la grande réception.
S(Mi chagrin était si notoire que , de
plus de trois mille personnes qui se
rendirent à Mafra, deux seuleujerit le
félicitèrent à cette occasion , ce qui fit
dire au monarque après la cérémonie :
« J'ai bien pensé que ces deux hommes
« seraient les seuls qui m'adresseraient
<* un pareil compliment. » Dès lors il
ne mena plus qu'une vie lanj^uissanle
et il éprouva à cette époque encore d'au-
tres chagrins que le temps n'est pas
venu de révéler. Le traite de sépara-
tion était d'autant moins fait pour
tranquilliser les esprits des Portugais •
et des Brésiliens , qu'ils n'y voyaient
aucune stipulation relative à l'événe-
ment qui malheureusement semblait
trop prochain, la mort du roi. Acca-
blé de tant de chagrins, Jean VI fut
atteint, le 4.mars 1826, d'une maladie
que les médecins désignèrent d'abord
comme des attaques nerveuses, mais
qui offrait aussi des svmptômes d'a-
poplexie et d'épiîepsie. Le 5 et le
0, les accidents reparurent avec une
nouvelle violence, et les médecins té-
moignèrent plus d'inquiétude. Le roi
connut très-bien lui-même son^ état, et
il voulut recevoir les derniers sacre-
ments. Le même jour il rendit un dé-
cret parleqtuîl il confia pour la durée
de sa maladie le gouvernement de l'élat
à la princesse Isabelle-Marie, sa fille,
qu'il affectionnait particulièrement.
Cette princesse dut être assistée d'un
conseil de régence, composé du cardi-
nal patriarche de Li bonne, du duc de
Cadaval, du marquis de \ allada et du
comte dos Arcos. A ce conseil dut
être appelé successivement chacun des
ministres pourles affaires de son dépar-
ment, et tout dut y être décidé a la ma-
JEA
jorité des voix, celle de la princesse
devant cire décisive en cas de partage.
Pendant toute la maladie, le peuple et
toutes les classes de la nation montrè-
rent le plus vif intérêt pour leur roi ;
on les vit se porter en foule auprès du
palais pour s'informer de la santé du
monarque , et les temples furent rem-
plis de fidèles priant pour son réta-
blissement. Le 9 au soir une crise se ma-
nifesta, et le lendemain il expira à qua-
tre heures du soir. La princesse régente
ordonna aussitôt que les derniers de-
voirs lui fussent rendus avec la plus
grande magnificence. Le corps resta ex-
posé durant trois jours; et lepeuplevint
en foule lui rendre les derniers devoirs.
Il fut ensuite transporté au couvent de
Saint-Vincent de Fora, sépuhure de
la maison de Bragance. Les tribunaux
et les administrations furent fermés
pendant huit jours, et le deuil fut porté
par toute la nation pendant un an.
Jean VI était doué d'une mémoire pro-
digieuse,il citait souvent et à propos des
faits historiques, notamment ceux de
l'histoire de son pays. Il se plaisait à
faire des questions aux officiers de sa
marine, sur des points de géographie, et
nous l'avoift eijtendu plusieurs fois dé-
ployer dans ces entretiens de vastes
connaissances. Il parlait avec une gran-
de facilité, et sa conversation était tou-
jours empreinte de dignité et de modé-
ration. Un écrivain étranger, l'auteur
des /hinales hio^raphiques^ qui est
loin de lui être favorable, a été forcé
d'avouer que -i les personnes qui ont eu
« des occasions fréquentes d'étudier le
« prince régent, ont été fra[>pées de
«' sr-s progrès dans les sciences , et
« qu'elles lui ont reconnu un esprit
« loin d'être aussi borné qu'on l'avait
« supposé très-gratuitement. Le fait
«< est qu'il avait acquis beaucoup de
'< connaissances pasiiioes sur Vélat
'( de. riùirupc, et sur les principaux
« personnages qui dirigeaient les ca-
JEA
•• binfl». Il ^tait parfailrment an rnu-
«< rant df loiilr« 1rs intii;;urs df
M *e» rnurli5an> et valait ju«qu*au\
•• iDoindir^ driails de Inir >if prixrt.
« Dan» millf nr^on^tancM , Il mon-
« tra une ^^ande ju<'lf*.*e de fai^onne-
•» inrni, pt unr |»ënélralion pfucom-
« muiie »• Nom qui l'avons appro-
ché , fl qui avon* entendu pluMeur^
liommM d'rlat qui fai*.iienl parlie
de v)n ronsell , nous pouvons assurer
que son opinion était toujours l.i plos
*a«e ; qu'il était doue d'une profomle-
fonnaiwanre des hommes eJ dr^ .iOai-
res , ft qu'il étonnait souvent par la
farilité aver laquelle il saisissait les
questions les plus diffiriles. (> prinee
se fil aimer de tous les souverains de
son temps, et il reçut d'eux des preu-
ves multipliées d'e<time et d'amitié.
Ce fut le premier prinre de la dy-
nastie de IJra^.inre aumiel l'Angle-
terre euvoM l'ordre de la Jarretirre.
l.'empereHr de Uu^^:e, le roi de Fran-
ce et celui de Hanemark lui en\o\è
renl »-;;alement leurs ordres. Jean VI
.icciieiilatt les éîran;;ers i\er beaucoup
d'affahililé et il les comblait de pré-
sents magnifiques. Morier?, dans son
Voyage en Prrse, parle ainsi dn sé-
jour que les ambassadeurs an;:riis et
persan tirent à la cour de IVio-Janei-
1^ : «« I.e récent du lN>r1u.;al témo»;;na
«« i Ï-L. KK. avec une ;;rande poli-
« les>e son dé ir de les recevoir pen-
- dant leur séjoin- dans cette ville, et
" il fil préparer pour cela une maison
« très-convenable. ï a cui<ine de S.
• \. !\., sa cave, ses domestiques et
" ses équipa;^es furent mis à leur
« disposition. Ce fut le ministre de sa
« majesté britannique à la cour de
« Hi(t-0wn'ro, lord Stran;;ford qui
« nous conduisit à l'auJience, et la ré-
« ception nous flatta infiniment: /r
« prinre ntppela à tanihossaflrur
« persan que ses am êtres a\,>aienl
« ètè autrefois les alliés de son
IRA
i3q
M fMi)s, et lui manifesta tout le plai-
•« sir quil rprou^uiit à pinu'oir , par
« son canal, offrir au munaniue
•• persan le renouvellement tle la-
•« mitié qui a\*ait jadis existé entre
" les deti î nations. » C^ fut encore ï
la bienxeilhnce de ce prince et à >on
désir d'enconra^ei les sciences, que le
%o^a:;eur ^l.i\«e dut les secours qu'il
trouva au lUesil pour ses excursions
dans l'inlerietir de ce continent, et ce
fut par son appui qu'il publia les rr-tj!
lats de sr\ decou^eitrs, d»»nl le i
a;;réa la ilédirare. .Iran N I ne t.
;ina pas moins d'intérêt au pnnrc
Maximilien de W'ied-Neu^ietl, savant
naturaliste qui s'était rendu au Brésil
pour V faire un %o]»a,ie scientifique, et
qui , arrivé à Kio .laneirn , s'associa
les naturalistes Keloni et Fre\reiss.
I.e roi fit e\pé«|ier des ordres à toutes
les autorites brr>ili<-nnes de leur fournir
des escortes, des bêles de «omme pour
le transport de leurs rollections, et c'est
à cette faveur que l'on doit le bel ou^ ra;;e
qui en fut le résultat. (Vesl malpré
tous ces faits qu'un détracteur a public
dans une binj^iaphie étran(;ère aue ce
prince ne prole>;eait pas les gens de let-
tres. H combla aussi de politesse le célè-
bre Storll-r. lorsque ce mathématicien
lui fut présenté à Hio-Janeiro, qiioi-
qu'en iHOTil fui allé au devant de Ju-
notpouric complimenter au nom de l'a-
cadémie rov.ile des sciences dont il était
secrétaire Jean VI ne l'en nomma pas
moins commandeur de l'ordre du(>!insl
et ;::)!iverneiirdes \rores,a>eclc ^radc
de lieutenanl-^énéral. 1^1 ;;rand nom-
bre d'.iutres hommes di>tin;;ués dans
toutes les branches des sciences et de
la littérature reçurent des marques de
sa bienveillance. Ce prince ne man-
quait jamais d'assister a>ec toute sa fa-
mille aux séances publiques de l'acadé-
mie des sciences (le Lisbonne; et il y
causait famUièrement aNCcles différents
membres sur toutes sortes de sujets.
i4o
JEÂ
Quand II fut question de nommer des
préccjUeurs pour ses enfants, son cIioÎk
se poila sur trois hommes émincnls: le
i;éomèlre Montciro da lioclia , pro-
fesseur à Tuniverslté de Coïuibte et
dont les ouvrages ont été publias à
Paris en 1808; le clieralier llade-
nfiakcr,qul savait presque toutes 'es
lanf^ues vivantes; enfin le docteur R.
llaymnndo Nogulera , recteur du col-
lège des nobles. rrotco;eant les arts
avec le même zèle, ce prince fit tout ce
qui fut en son pouvoir pv)ur cncouraf^er
les artistes an lircsil comme en Por-
tugal. C'est à lui que Ton doit la con-
struction du beau palais dWjuda, orné
de statues, de trophées scnlptcs cl de
pei;:tures faites par des artistes natio-
naux. Ce fut aussi lui qui chargea le '
c:'l{;l-.rc peintre Cyrilo et d'autres de
peindre les plafonds du palais de Ma-
fra, cl des tableaux d'imuiense dimen-
sion pour y tracer les hauts faits de
l'histoire nationale. iSaturelieincnt la-
borieux, il se levait dès l'aube du jour, et
passait plusieurs heures à lire des rap-
ports sur les affaires du f^ouvernement ,
écrivant en mar^e son opinion ou sa
décision. M. Torlade, qui savait pres-
que toutes les laiio;ues de l'Europe ,
était chargé de lui faire des extraits de
tous les journaux étrangers, ce qui ne
l'empêchait pas de lire lui-même les
rapports d'une foule d'agents secrets
qu'il avait partout. Il travaillait régu-
lièrement avec ses ministres , et quoi-
quM leur laissât une grande latitude, il
lui est souvent arrivé de briser leur
existence par une décision subite. On
lui a faussement reproché de l'irrésolu-
tion ; car, de même que Charles V, il
n'hésitait que jusqu'au moment du
péril (3V). 11 récompensa largement
tous les militaires nationaux ou étran-
gers qui commandèrent l'armée portu-
(i4) Voy. la relation île Tir|><>lo tilri- j>or
Ranki; darw son fslimable c)iivrj;;e iiililul»? :
Histoire des osnianln et de fa monnirhie etpa-
gnol* pendant In XTP tt XrH' tiriUi.
.lEA
gaise dans les guerres de la Pénin-
sule , cî les personnes qui l'accom-
pag'ièrenl au Drésll et qui avaient
abandonné leurs biens en Portugal.
]Soiis savons que ces témoignages de
gratitude ont élC taxés de prodigalité
par les détracteurs de ce prince, et que
les mêmes écrivains ont blâmé les dé-
penses qu'il fit à Piio- Janeiro. Ces dé-
penses furent, il est vrai, considéra-
bles; mais il nous suffira de dire, d'a-
près un auteur étranger très-bien in-
formé des choses de ce pays, que la
dette de la seule province de Rlo-Ja-
neiro, qui élail au temps de Jean VI
(1821) de douze millions, s'est élevée,
après son départ jusqi'à 1831 , c'est-à-
dire en dixans, à (leuxcentsmilHons(35).
Ce prince était fort accessible, et il don -
naît chaque semaine une audience à
laquelle tout le monde était admis.
Souvent il y accordait des secours, et
il y recevait des plaintes même contre
ses ministres. 11 recevait aussi une
fols par semaine les ambassadeurs des
cours étrangères, et il causait avec
chacun d'eux. 11 s'était fait dans la
diplomatie un grand nombre d'amis,
au nombre desquels nous citerons
le maréchal Lannes dont on connaît
la réponse à Napoléon , qui voulut
l'envoyer nne seconde fois à Lis-
bonne en 1805, pour y opérer le ren-
versement de la monarchie : « Je ne
« veux traliir, dit ce loyal militaire, ni
.< les Intérêts de la France, ni ceux de.
« mon royal ami. » {Voy. pour le
complément de cette notice les articles
AiîHATSTKS, LVl, 47; Charlotte,
LX , 494 ; CiiAVi s , LX , 576.
S— M.
JEAIV , moine de Marmoutlers,
né vers la fin du XV siccl^, vécut
sous les règnes de Louis-le-Gros et de
Louis-le-Jeune. Il est auteur d'une
Histoire de GeoJfroi-lc-Bel ( Voy.
(3;)) Voy. Hislor^ of Brasil ùj yérnilagr, t. Il ,
P ««7
JlwV
Jl A
..• nom , wn , n;i) , tiu* ,if
.\ ftrmaritiir , lomir tie Jauni inr ,
d'.Jnjou ft lin \fiiinr, que 1*011 lrou\e
à la li:i lie ri-Jitii).'! ili- (i.r-i.''c «le
Tour5, ilonnée (lar I.Aiiiriil rimlicl ,
et Jonl \on I- lilir : Jotinnis mo-
luichi nia/uri ^ niumistrrli , i.ui lirgr
J.iuithu'iu .iuniurr vi.tit , htsturitr
Otiii0rcilt. I)ui is Sormannurum rt
corttîtis . in'lr^iiK'untm , J'urunuruin
et Cirnomunrtorum , liLri duo, elf . ,
Paris, Nicolas DufosM-. H» 10, in H*.
IVaprrs (>lusieur^ pavwa$;M de celle liis-
loirc qui »« ln)u\rnt répété* mot pour
mot daiis/rj (irstrs drs ntmtrs d An-
j(H4, il est évident que ce moine est
aus^i Tauteur de cft autre ouvrage et
At V llixtnirr iL' il rnnstrurtinn du
thùlrau d\lnthoisf. l>'ailleur>,^ans
son prolo'^uc dr i'lli>loiie de (ieof-
froi , qui est une sorte de dédicace ï
(îu:llaume , e\éqiie du Man» , Jean
s'annonce comme a>ant dcjà écrit ou
recueilli plu.sieurs autres histoires :
H Kt cum multorum aliorum'princi-
« puin liistorias colli^erimus , circà
•« hune .ifTectuosius immoramur. »» —
(^ derni»Ts mois peuvent expliquer la
différence de ^t\lc qui se remarque en-
tic riliNtoiri* lie (ieoffroi cl celles des
comtes dWnjoH rt de la con>liuctinn
du chàteiu d'Ambuï^r. Si celui de la
première est plus élevé, il faut en attri-
buer la cause au sujet ; ctA une espèce
de panégyrique; les deux autres , au
contraire , ne sont que de «impies
narrations. Klles ont été insérces par
dora Luc d' Xchéry dans son Spiri-
lège , tom. X de l'édition in-V", sous
ces litres : Gesiu cunsuluni .tndr-
gaoensium ft Amiasicnsium^ uutore
mutuicho hrnediftino ntajoris mit-
nasterii,
gem.
Amlmsiœ et ipsius dominorum ges-
tis. — l'ne tratliiçtion en a été don-
née par l'abbc de Marolles ; mais elle
■*est ni élégante ni fidèle. — C'est en-
ad Uenrirum .triglùc rc-
Liber decompositiunr fustri
fore au m^me religieux que l'on tloit
attribuer la pii*mieic p.irlie au manu-
scrit anonvme , calalo,;uë à la bibiio-
thrfjre d 1 roi n.mh rr iii,v : (ùiriuttiii
t liirtiiii rfironi-
♦ fii pn'ori/'iis ,
dans i . lmp!isM$im icllritio de Mar-
lène et Durand . I. V. p 017 ,] oy.
M\RltM. \\N l|,J7i; Ci- Ir.lnn
nniiir .! ffinimcnce a |j ii3i?.>.i rr d»«
.1 ' f, ne finit qu'à I'jii liJT,
d M, «iotl infi'ier qu'ellearlr kihIi-
nuée par un chanoine du célèbre clu|ii-
tre de Saint-^lartin de Tours, cli.î; 1. .•
qui existait et llorissait a une r
bien plus reculée, l.nfin on e^t ;
à croire qu'il fut l'auteur de l'o .
intitulé : 'Vrartotu% dr Conimctuiu-
tionr i uroninr proi'inn'it , etc., (pii
»« trouve r^alemcnt dans l'édition de
(iré^oire de TouLs^le Laurent noclirf.
L'éditeur a judicieusement remar(]ur
que cr traite commence de la mrnie
manière que l'Histoire de (îeoffroi-
lehcl, ce qui indique que ces deux
ouvrages sont dus a la même plume:
toutefois le traité r/<r f '.''■■■
a é>idemmenl eu un '
l'a
enlViil.. L
41- •. \ irien polonais \i\.-»il
en Sile>ie souj. le rè^ne de Ca.s'inir-le-
(*rand, dans le \IN *" siècle. H a écrit
une chronique de Pologne, que Som-
mer>ber;; a publiée dans le premier
volume de sa collection. L'auteai
y prend le nom de Jean /sans ajouter
d'autre caractère pour se faire ctMin.ii
tre , et il termine ainsi son onvr.i n« :
« 1^ chronique des I^cchile> a ck*
•< achevée par les mains de Je.iii, I'.mi
« du Seigneur 13.')'J, le samedi .■i\.iril
•< le Dimanche rti«/<//r DomiiKt.» —
(j'est aussi pendant ce siècle qu'a clé
çcrile la Chruniqur anonunc des
princes île Polugnr iwrr leurs ac^
tiuns. Sommersber^ l'a publiée immé-
diatement après celle de Jean. Klle
l'emporte sur celte dernière par l'iu-
i/^l
JEA
lérct des détails et la manière dont ils
sont présentés. G — y.
«lEA^ , roi de Hongrie, f oj.
Zapoly, lu, 13i^-139.
JEAA - CIJRYSOSTOME
(le Père). Voy. Iji-iimères-Louvi-
GNY, LVIII, 68, note 1.
JE AXA ET (Louis-François),
général français, né le 5 nov. 1768
d'une famille obscure, s'enrôla dès le
commencement de la révolution dans
un bataillon de volontaires natio-
naux , où il fit toutes les campa-
gnes des armées du Nord et d'Italie.
Parvenu au grade de général de bri-
gade, le 25 novembre 1813, il fut mis
à la retraite en 1814 par le gouver-
nement de la restauration. L'empereur
Napoléon lui rendit son emploi après
le retour de Tile d'Llbe , en 1815,
et le nomma convnandant du dépar-
tement de l'Ain. Les journaux annon-
cèrent peu de temps apics qu'il s'était
fait inscrire sur la liste des fédérés.
Après la bataille de Walcrloo, lors-
que l'armée impériale se fut retirée
derrièie la Loire, Jeannet se liàta de
la rejoindre, espéi-ant y être em-
|)lo}é; mais le licenciement le fil bien-
tôt rentrer encore une fois d;ins la
retraite, où il mourut en 1832. —
Jeaknet {Oudi'n), neveu du fameux
Danton , était né à Arcis-sur-Aube
dont il fut le maire en 1790. Nommé
en 1792, après la chute du gouverne-
ment royal , commissaire du conseil
exécutif à Thionville, il se trouva dans
celle place pendant le siège, et y mon-
tra de la ferniclé. Envoyé peu de temps
après comme commissaire de la Con-
vrntion nationale à Cayenne, il ftit
chargé d'v proclamer la liberlé des
noirs. Ayanl appris la uioit de son on-
cle , il craignit d'éprouver le nirme
sort , et se sauva aux Ltals-Unis ,
après avoir vidé les caisses de la colo-
nie. Etant retourné en France un peu
plus lard, il fut envo)c de nou-
JEA
y eau , en 1797, commissaire du Di-
rectoire exécutif à Cayenne ; et ce fut
alors qu'il y établit, sur l'habitation
nommée la Franchise, une maison de
correction où les nègres libres et
exempts ^w fouet servile, mais soumis
aunerf de bœuf constitutionnel, étaient
corrigés de leur penchant à la paresse.
Jeannet se trouvait encore à Cayenne
lorsque les déportés de fructidor y ar-
rivèrent à la fin d'octobre 1797. Il se
montra fort sévère à leur égard, et les
mémoires de Ramel et de Larue con-
tiennent des plaintes très-graves sur
lui. Destitué en 1800 par le gouver-
nement consulaire , pour concussions
et abus de j)ouvoir, Jeannet revint à
Paris où il publia un mémoire juslifi-
cat^. Il se retira ensuite dans sa patrie
où il mourut dans les premières an-
nées de la restauration. M — d j.
JEANAir^' (jEAN-r>APTISTF.) ,
général français , était né en 1771 à
Laneria en Franche-Comté, d'une fa-
mille de cultivateurs; il embrassa avec
beaucoup de clialeur la cause de la ré-
volution et s'enrôla, dès le commen-
cement, dans un bataillon de volon-
taires du Jura avec lequel il fit toutes
les campagnes des armées du Rhin et
d'ilalie. Parvenu successivement au
giade de général de brigade (1808) et
à celui de général de division, il obtint
aussi le litre de baron, et devint le
gendre du célèbre peintre David. Louis
XVIII le conserva dans son grade et
lui donna la croix de Saint-Louis en
1814. Mais ayant i épris du service
lorsque Bonaparte revint de l'île
d'KIbe, en 1815, et ayant commandé
une division au sixième corps de la
grande armée, il fut de nouveau mis à
la retraite après le second retour du
roi. IJienlôt atteint d'une maladie gra-
ve, il ne fit plus que languir. Ce géné-
ral se rendait aux bains d'Aix, en Sa-
voie, dans le mois de mal 1830, lors-
qu'en passant par Saulleu il s'étrangla
JEB
lui-ro^in«ilin>uiiarri>^ d'aiïrria^Ct doii-
itw*. l'oilc II- 'rii<!f'tMaiii au cimclirrr
J<* rrllr xllr, il > fut enterré a%cc loo>
le» iioiiiiciii!» ({u'il fui poksiblr tic lui
rrnJie. IVl— !• j.
J K A X \ I \ l'oy. J ANKI» ,
\\I. 'MK\, fl .1 NMN , Jaiis n- \ol.
«I i:ii U ^.h vNt, llu-clo^ien an-
^l.i , «é à I.<»iultc* en 17.i(>, oc-
cii^'.i plusicui > riiipioi'» pi^iirs à l'u-
nie iisitc lie Caoïiiridfie et juuit tle
(|uei<)ucs beiic(jce3 errlr»ia.sli^ues ,
DOlamment du do>enné de Cachet I.
Diverse» opinions religieuses qu'il ma-
nifola iUus un cours ile leçon» llieo-
lopques , et qui s'ccaitdiiriil de la
doclrine leçue, lui aniinnil en ITTO
une mtcrdicUon publique On le pré-
sente (oiuine un des plu^ >iolenls
champions de la liUrle illiiiiïtre tant
religieuse que pdlilique, ce qtii parait
peu con^équenl >*il est vra^ qu'il pro-
voqua et (iefendil a\ec ardeur l'rla-
blis5einent d'examens aniiueU dans
runiver>ilé. Ce fut piobaulcment le
mauvais résultai de ses rfrot:» qui le
détermina en 1775 à res,;ncr ses
fonctions minislrrielles, et à étudier la*
médecine qu'il pratiqua ensuite à Lon-
dres. 11 ne ces>a point cependant de
s'occuper de politique et de théologie,
soit comme jouinali>te, soit comme
orateur de cIuIk. Il mourut en 17S(i.
C*elait un homme plein d'aiti\ité et
4'inslruction , qui reuni^^ait la con-
nai>sance des sciences exactes et autres
à la connaissance des langues, même
de l'arabe et de l'hébreu. Ou doit re-
gretter que tant de mérite ait été ab-
sorbé par le ^oùl de la controverse. Ce-
tait un brouillon, un fanatique, mais un
fanatique de bonne foi, et qu'il faut se
contenter de plaindre. Ses ouvra;;es ont
été publies en t7«7, 3 vol. in-8", par
Disney, et contiennent principalement
une hurmunii'Jrs Esfangiles, un traite
sur la paralysie et divei s écrits de po-
litique. Il composa, en société arec
JEB
\l\ô
4en <lc ses amis, un volume in-i" in-
titulé • Exterpta tpunhim e. ArtWo-
nii prinripih philusuftliiit. naturalis,
ttitn notis varit>ruiu, ouvra;;e qui fut
*•! l'usa^e de Tuniversité de
C- S-i>.
JÏAIU .Itv> . iM..',i ai.Jais,
né le '27 septniibu- 177'», à I)ro-
gheda en Irlande, a{q)arleiiail à une
faioiile tres-distinguee dans le> .scien-
ces, la philosophie et les lettres. Son
étfucatiou fut ti es- soignée et il rn pro-
fita. .\u sortir des collèges de Cel-
bhd;;e et de l^odondetry, il rint
étudiera l'université de Dublin, sous
les auspices de rarclie\êque de celte
Ville, le vénérable Ma.;es, qui l'hono-
rait d'une affection puiticulieie. C'é-
tait Tepoque où celle université comp-
tait dans son sein ••ne foule de jeu-
ne» talents; les iJovd . les Daven-
port, les W rav, les Sandes, 1rs Sad-
lier, les (ieorje (^oi>, les Malurin.
Jebb brilla dans c?lte pléiade, tant
f>ar l'ele^^aMte de l'élocutioii que par
a sobdité et la variété des Ct)nnaissan-
ces. Kn 1797 il remporta deux des
trois prix fondés par le docteur Do«-
II '' le époque, S.1 rocation re-
I . it pionoiicee. Cependant,
asauiu tuiierdan^la canièie ecclésias-
tique, il bit obligé de faiic quelque
temps un service miliiairc, on ne peut
moins eu harmonie a\ec >es goùls :
ainsi le voulait l'état de li oublc et d'a-
gitation de la pauvie Irlande. Mais,
dés que le calme fut un peu rétabli ,
il se hâta de jeter l'uniforme aux or-
ties, et en janvier 17î»9 il reçut les
ordres. Presque aussitôt il se vit re-
cherché par deux éveques, Cleaverde
Feriis et JîroiiehcL de kiimore, q'.ii,
chacun uii iiéiit'lice àlamiin, se di^pu-
Vaieiil le jeune diarre. Jebb se décida
en faveur du dernier , et alla en
conséquence gérer la rare Je Swanli-
bar. Dans les fondions délicates qi'il
avait à rempbr au milieu d'une popu
i44
JEH
lalioîi iloiU la majorité catliolique se
re;;arilalt cotnine opprimée, et avait !>liis
«le tlisposJlion à délcsler qu'à tolérer
les miiiistn's imposés par riiitoiéraiice
de rép,lise établie, Jebb non-seule-
ment inl supporté par ses paroissiens,
il sut encore conquérir leur estime et
leur affection. Ainsi qu'Heber à Ilod-
uett, il ne prècba que les vertus et la
cbarité,ne dit mot du dogme, évita
tout ce qui ressembiail à la contro-
verse, et, par ses elforls comme par
son exemple, répandit l'esprit de paix
et d'union dans une partie du pays.
Aussi l'époque de son passage laissa-t-
elle à Swanlibar un souvenir profond; et
trente années après son départ de
cette paroisse , son nom y était-il pro-
noncé avec l'accent de la vénération.
De Swanlibar, Jebb fut appelé à Ca-
shel, en qualité de lecteur i!e la cathé-
drale , par son protecteur, le docteur
Broderick , au moment où ce prélat
fut transféré de son évéclié de Kil-
raore à la ville archiépiscopale du
Leinster.* 11 v resta plusieurs années; et
le rectorat d'Abinp;don étant venu à
vaquer il le sollicita et l'obtint. C'é-
tait un des bénéfices les plus lucratifs
de l'Irlande , wn de ceux qui lais-
saient le plus de loisirs à leurs opulents
titulaires. Jebb put s'y livrer à son
j^oût pour la littérature, et' quelques
ouvrages furent le fruit de ses médita-
tions dans cette belle solitude, lîien
<iue rien no lui maïujtiàl dans son heu-
reuse po-ilion, un nouveau don de
l'archevêque vint encore l'y trouver; il
fut nommé archidiacre du diocèse, et
à cette occasion il prit les degrés de
bachelier et ensuite de docteur en
théologie à l'université de Dublin.
P^nfin, en 18*23, lors de la translation
d'EIrington au siège de Ferns, il fut
promu à l'évêché de Limerick. Sa
conduite dans ce diocèse, un des plus
misérables comme un des plus vastes
de l'Irlande, fut celle qu'on devait
.ii:i;
altendie de lui apits les actes de
toute sa vie. Attér.uer Ie3 difliculfés
de tout genre (jui s'opposaient au bien,
au lieu de vouloir les surmonter de vive
force, stimuler rindilTcrer.ee religieuse
des uns, répriuier la tendance fanati-
que ou l'intolérance des autres, adou-
cir les animositc.^ politiques, chercher
partout la misère pour appliquer un
remède et won de vains pailiatils à ses
plaies, réformer les habitudes, les pré-
jugés et l'imprévoyance de l'Irlandais,
préparer la réparation de tant de maux
physiques et autres sous lesquels suc-
combe l'de , qui prouve si énergi-
quement la vérité des idées de Mal-
thus , tel fut le programme que se
proposa le vertueux évcque et dont il
remplit du moins une partie. Sous
d'autres rapports encore , l'épiscopat
de Jebb mérite une mention à part :
contraireyient à l'usage en vogue, il
n'eut aucun égard pour la collation
des bénéfices aux recommandations de
l'aristocratie ; le mérite, la vertu, les
lumières furent à .ses yeux les seuls
titres; patronage était pour lui un
mot vide de sens. Beaucoup de gran-
des dames, de riches seigneurs com-
mencèrent par jeter les h.auts cris : le
prélat contimia impassiblement sa
route, et peu à peu on s'habitua à ses
façons de faire, on en vint à les louer.
Jusqu'en 1824 pourtant le nom de
Jebb n'avait guère eu de retentisse-
ment que dans sa patrie : le biil de
lord \Vellingtor, sur les modifications
à introduire dans les dnnes irlaudai .; s
lui fournit une occasion de se faire
connaître en Angleterre. C'était au
moment de la troisième lecture du
bill : la chambre haute reçut de l'éve-
que de Limerick une adresse où il ré-
clamait contre les assertions exagérées
de ceux qui, pour faire passer plus ai-
sément la mesure, enflaient des deux
tiers le budget de l'église anglicane en
Irlande, mais où du reste il appuyait
JEU
ilo luutfi »r« fortft if projfl minûtr-
jicl fl traçjil à ^raiui% roups «Ir jjin-
ituauKs (JcN If r\|»liM!fius
•fcl'IfLnilr Je: l.»rs,undc4
iioni> |M)|uii4irrs ilr 1 An^lrlrrre : od
^'rn(]llll de *rs «uxta^r-i, dt »n ant^
crdeiiii : on fut ëlminé d'avoir igno-
ré cel orateur parfait, ce grand évo-
que, ce solide théologien. Indubila-
Mrineiit ses destiné** fu'^%ei»t drveiiae^
hrill.uiles, si iiiir |u:.ilTvir suinte ne
l'eût lijppé dans l'ete tic 1827, et si,
depuis re temps, il n'eût langui m
depit «lu *rro!ir^ de la mrtlecinr, juv-
qu'a rr i|ii cntin la mott \uil mettre un
' ri nie a ce «iin ioi rr.U l d'c\: trnc*, le
; diccinl)!!- lS;i3. On a Jr .IcU» : 1.
Dos St-rmuns lemaïquable* par U
lieaute du .vt>le, l'cie^anfe de la dic-
' on et un heureux emploi de l'Kcri-
iire^la plupart out elc réirii« en un
\olume, pnhiie pendant qiiM vivait au
pre*b>tète d' Khin^i!nn). H. l n A'.«-
.%<;/ sur la littt'ruture S4trrè(. (Vt
ouvr.ij;e est plein de vues fine' et iii-
péniruses ; .lebb > déploie une érudi-
t lin ptototide; c'est lui qui a décou-
\c\\, lijiis les Inrones et les discours
<|ue nous ont coii<ervcs les évanj;é-
listes, lies vesti;;es d'une lédaction roc-
tiiqiie, précieux non seulement comme
curiosités, mais comme ollrant un nou-
veau reoven de prouver l'authenticité
des Kvan;;ilcs et d'en épuier le texte.
III. Une f/irvlof'ir pratùfue qui ne
Ml le jour qu'aprcs sa moit, mais dont
il avait jeté les premiers linéaments
pendant sa jeunesse et qu'il élabora
Je nouveau dans les couds interval-
les que lui laissait ^a p.iralvsie. IV.
On lui doit encore dc^ tilitions de
divers ouvra{;es , tels que : l" les
Discours de To^vuson^ '2" les Œu'
Krrs de l'iielan, 3' les lies de liur-
nct , 4"" un choix de traités rcli{;ieux
de différents auteurs , intitule : l^iété
siM'i t/sre/ismr. P — ot.
JEl
H-'
ji:rrr.uso\ Jhomas), un
des foiid.neiis de l'indépendance an-
^loaméricaiiir, et IplioiMrr^e président
lies Klats l lus, naquit le 2 avril 1713
à Shadv»all, au comte d'Alhemarle en
Vir};inie. Sa faTuille, évidemment ori-
pnaire d'Angleterre , était établie ea
Amérique depuis trois ^én«>rations.
Son père avait été chargé, avec le co-
lonel Krv, de déterminer les limites
entre la ^ irj;inie et la Caroline sep-
tentrionale. L'éducation du jeune
homme fut auvsi soignée qu'elle pou
vail l'élre en Amériaue a cette épo<]ue
où les colonies , toujours soumises au
jou;; britannique, ne se développaient
qu'avec l'auteur , bien que ravéuement
de la maison de Hanovre au ti une eut
donné un vaste essor au commerce et à
la marine de la métropole. Ses pre-
mières éludes terminées , il résolut de
se faire avocat, et dans ce but il suivit
les cours de droit du ch.mcelier
^^>the, dont il se concilia des -lors
l'estime et l'affection. Il cultivait en
même temps les mathématiques, l'astro-
iiom-e . 1.1 i^r-i^^raphie, la pinsique; il
* ' • peinture; en un root , il
Si i a des tendances très-en-
rvrlop^iques, et rerhetchait celle vi-
riété de connaissances qui plane sur
chaaue science en parlkulier et qui fé-
conde si puissamment la faculté com-
parative. L'éclat avec lequel , mal^é
ce surcrcît de travaux , il acheva les
études pre'.criles et debiila au bar reau le
fit nommer, à vinjt et un ans, membre
de la législature provinciale (17t>V^ ,
cl quelque temps après ju;;e du comté
d'Albemarle. I>ientdt éclaU-renl les
dissentiments entre les colonies et la
métropole à propos de l'acte du tim-
bre (,171».")), surtout après la fameuse
déclaration par laquelle se terminait
IVje de révocation de l'acte du tim-
bre 1766). Grâce à cette déclaration
impolitique , la querelle d'intérêt se
changeait en qnestion de droit. De tout
10
i46
JEF
temps les avocats, avec et sans cause ,
mais surtout les derniers, se sont éver-
tues sur ces problèmes. Jeflcrson , qui
pour le moment n'était que jufî;e, n'y
manqua pas. Son opinion fut celle que
dictait la théorie stricte, ici d'accord
avec le besoin et le vœu des colo-
nies , celle que devait indubitablement
vouer à l'anathème le parti qui s'inti-
tule gouvernemental et conservateur :
les colonies , à son avis , ne pou-
vaient être légalement frappées d'im-
pôt que par un parlement où siége-
raient leurs députés. On sait comment
les débals ainsi maladroitement en-
gagés par le gouvernement britanni-
que s'envenimèrent chaque jour , et
comment la faible taxe du thé, éta-
blie par le ministère de Grafton pour
sauver le principe et non pour en
retirer un bénéfice, amena la ferme-
ture du port de Boston et la révo-
cation de la charte du INIassaclius-
sets. Piientôt se réunit à Philadelphie
le congrès des représentants des douze
provinces (5 déc. 1774) ; Jefferson
a\ait été clioisi membre de la conven-
tion virginienne, qui nomma les repré-
sentants de sa province natale; et, trop
malade pour prendre part à l'élection ,
il s'était signalé en rédigeant pour les
mandataires des instructions qu'il
transmit à l'assemblée et qui furent uni-
versellement approuvées non seule-
ment en -Virginie , mais dans toute l'é-
tendue des colonies. La substance de ces
instructions [lortait «< que les actes du
pailcmenl britannique contre Massa-
chus:iets étaient o[»prcssifs, inconstitu-
tionnels; que les colonies devaient re-
pousser la force par la force; mais
qu'en attendant il serait présenté une
adresse au roi et une pétition à la cham-
bre des communes. » Lord North, tout
en continuant à traiter en rebelles les
colons de l'Amérique , envoya au con-
giès une proposllfun de ronr.iliatinn.
C'est Jeffenson qui fut cliargé par la
JEF
législature de répondre à ce document :
il montra l'insuffisance des conces-
sions faites par le gouvernement, l'im-
possibilité de se fier à ses protestations,
l'iniquité , l'inconstitutionnalité des
principes dans lesquels persévérait le
cabinet , et que les colonies ne pou-
vaient plus feindre d'admettre , depuis
qu'on les avait débattues au grand jour.
L'énergie et la franchise de cette ré-
ponse achevèrent de décider la métro-
pole à la guerre. La chambre des lords
y préluda, en comprenant Jefferson
dans les mises hors la loi et l'exceptant
de l'amnistie générale qu'offrait le mo-
narque à tous ses sujets rebelles. La
même année vil s'assembler le deuxième
congrès de Philadelphie ( 20 mai
1775) ; et cette fois les treize provin-
ces y concouraient par leurs représen-
tants. Jefferson fut un de ceux qu'y
envoya la Virginie. Là il vit pour la
première fois les Washington , les
Franklin, les Jay, les John Adams et
les autres coryphées du mouvement. Il
jouit bientôt d'une considération mar-
quée parmi ces hommes illustres, et ,
sans le céder à qui que ce fut en sang-
froid, en circonspection, il se fit remar-
quer par la hardiesse de ses décisions.
Sans contredit, personne plus que lui
n'eut part à cette résolution aventu-
reuse qui d'un coup brisa tout lien en-
tre l'Angleterre et ses colonies , la ré-
solulion (f inih'priidance. Egalement
inaccessible à la séduction, à la crainte,
aux arrière-pensées, il dédaigna tou-
jours ces partis mitoyens qui, en révo-
lution, ne sont bons qu'à tout perdre ;
et, une fois la lutte entamée, il comprit
qu'il fallait fermer*la porte à toute idée
de transaction, hormis après le triom-
phe. J)u haut de cette grande pensée,
il pulvérisa tous les arguments que les
timides opposaient au parti de Téman-
cipatioii : conjointement avec son ami
Lee, il l'avait proposé formellement ;
conjointement avec Adams , il le 4it
JEF
pr^loir (lan^ b >lL»cu>&tun, el il s'tn
remii à la \icluirc tiu »oiit île lë^iliiiiei
JEF
«4-
iif iiV
'- eul volé roronie il renlciiiljit ,
lu! i iiiiiiiltre Je la rnmmisMoi) rlioi^ie
|.o,i !r,l^rr la *lrt luratiun d'iiule-
fi( Uilittue ; el c'c^l i lui qoe »es
follr .lie* à leur lour ilrfcrèrent celle
' t le niumle a lu ce celc-
tr, également rrmarqit.ible
par une ^^ul^^ance de «IrJurlion irieMx-
titii', par la force du Ht\le, |ur b ma-
jeilé de l'accenl. Le con^re^ *e iiala
de la sancliunner telle que Jeiïer»on la
lui, i une clause prè5 : celie-ci était
une pioteilalinn éloquente contre l'es-
rla>a^e et la traite des noiri. I^s lé;;i«-
latrur> ne crurent pa-» de\«iir donner
suite à ce qu'ils re^ardinent cororoe
une utopie, el rei»cU>a;;e re>la en vi-
gueur et en honneur .m «nt» d'un y»y%
qui en ce moment rc< ' me un
droit imprescr-plible i jucr :
il > existe encore, au moins dan< quid-
que« elat5 , et le temps est loin ou
on le pioliibera. Peu de temm après,
JeHerson quitta la place qii il avait
dans le congrès, mais pour en accepter
une dans le nombre des drlé^^ue^ de
\ ir^iiiif octobre 1776). Sa connais-
»ance approfondie du droit r\ lit cliar-
;;er, a\ec NN vllie et IViuilcton , de la
réMsion des anciens statuts bntanni-
3UCS, des actes des deux contres et «le
irrrsrs parties des coninion /uivs : le
tout de\ait être modidc de manière i
s'barmoniser a>ec le nouvel ordre po-
litique et réuni en un code unique. Jef-
ferson se mit sur-le cliamp à rou\rase,
et il y travailla deux ans entiers sans
interruption. Ainsi la jeune Amérique
procédait en masse à une rénovation
complète. L'émancipation, la codifica-
tion marchaient ensemble : toutes deux
devaient se reproduire encore ailleuis.
Le code fut adopta. Le dr»it d'aînesse,
les substitutions étaient abolis ; l'impor-
Ution des enclaves fut interdite^hieo que
l'ctrlava^ fût maintenu ; plus de reli-
f(ion dominante, tolérance absolae . O»
idées, plutôt politiques et constituantes
3ue puirroent relatives aux détails du
roit ci\il, ne pasM-ient pas sans op-
t>iïsition; mais Jelierson le* soutint à
a tribune, et iimt par les voir adoptées
(177S). L'année sui\anie il leçut ,
pour un an , le gouxernrmrnt de U
N ;ri;iiiie; et, continue dantcetle charge
à l'expiration de -i première commis-
sion, il remplit a>ec honneur ces fonc-
tions alors aussi pénibles que dan;;e-
rcuses. La seconde année surtout fut
lernble pourles Vir^iniens. I«a Virgi-
nie, perpétuellement menacée par les
troupes an;;laisrs, finit par être enva-
hie (17H1) par Gunmallis qui s'em-
para d'N ork-Toi^n , de (iioiicesler ,
et qui fit de^ incursions ju.%4)tie dans le
ctrur de la pro\ince , tandis que le
transfuge \mold t portait la dévasta-
tion, la fermeté de Jeiïerson et les
a\is qu'il tut laiiiAt transmettre, tantôt
ouvrir dans ses communications avec
les Français qui se proposaient la déli-
vrance du pa>s, furent pour l>eau^oup
dans les événements qui suivirent, el
contribuèrent à produire les fausses
mesures de Clinton , l'isolement de
C<irnwallis et la capitulation d'^ork-
lown. n^nv fois le con;;rès lui vota
des ren pour sa conduite en
ces;;raw .inre.s. (^s soins de
tous les|uiii.> ne t'einpéchaieiil pas de
s'adonner à des travaux de cabinet ; el
cette même annre 17S1 , si riche en
crises déchirantes, et finalcmeut en
avantages décisifs |>oMr l'émancipation
américaine, le vo\ait mettre au jour ses
admirables Soirs sur la yirginir. En
fin la paix de Versailles vint consolider
l'ouvrage des armes el fit reromiaitre au
cabinet de Sailli-James lui-ménip l'in-
dèpendaoce de la nouvelle république
fedéralive du Nord 17H3 . lleélu dé-
puté de la Virginie au conjurés de cette
année , Jefferson y présenta un projet
10.
^8
JE F
JEF
^iC. constitution pour cet état , projet
sans (ioute élaboré tle concert avec les
notables ses compatriotes. Mais son
but n'était pas de se si<;naler comme
législateur et comme orateur : il aspi-
rait à un poste diplomatique. Il fut au
comble de ses v(i:ux quand Jay, alors
ministre des affaires étranf;ères , le fit
partir pour l'Europe en même temps
que Franklin et Jobn Adams (1784),
qu'on envoyait pour sio;ner des traités
de commerce, pour former des commu-
nications diplomatiques avec les puis-
sances européennes appelées à jouer un
rôle vis-à-vis des États-Unis. Frank-
lin, déjà connu en France, y retourna.
John Adams et Jefferson devaient d'a-
bord se rendre en Espagne ; des dépê-
ches qu'ils reçurent chemin faisant leur
apprirent que leur présence désormais
V serait superilue, et ils tournèrent vers
i'Anf^leterre. Bientôt Adams l'y laissa
seul. Jefferson n'y fut point heureux :
toutes ses tentatives pour obtenir des
ministres anglais un traité de commerce
avantageux aux deux peuples, et basé
sur des libertés larges , échoiièrent
moins encore peut-être contre les pré-
juc^és des Pllt, Cower et Camarthen
que contre les défiances et la rancune
des An{];lais. \\ emporta de cet essai in-
fructueux de négociations une antipa-
thie pour l'Angleterre qui fut aussi du-
rable que sa vie. C'est donc avec plai-
sir qu'après le retour de Franklin en
Amérique il passa de l'ambassade de
Londres à celle de France (1780).
Reçu, fêté à Versailles comme à Pa-
ris, des ministres comme des j^ens du
inonde , il s'acquit bientôt une in-
iluence considérable, et parvint, en
dépit des ressorts multipliés que firent
jouer les fermiers-généraux , à obtenir
la liberté du commerce du tabac, et di-
verses autres concessions d'imp)rtancc.
i^endant ce temps la révolution fian-
çaise germait à bruit sourd, i^lle eût
éclaté un peu plus lot, un peu plus tard,
grâce à la faiblesse da la ro\auté. Mais
qui pourrait nier que quelques circon-
stances qui eussent pu ne ppint avoir
lieu n'aient accéléré l'explosion ? Au
nombre de ces circonstances figurent ,
on n'en saurait douter, le parti qu'avait
pris Louis XV î de soutenir l'émanci-
pation coloniale, parti qu'au reste con-
seillait la politique anti-anglaise, et les
relations de tous les jours qui s'établi-
rent entre les coryphées de la philoso-
phie, tout-puissants alors dans les sa-
lons, et quelques-uns des chefs de cette
révolution américaine, première réali-
sation des doctrines nouvelles. Lié sur-
tout avec les sociétés d'Holbach et
d'Helvétius, Jefferson eut donc sa part
d'action dans cette espèce de mouve-
ment fébrile qui emportait si vite la
France vers une rénovation. Mais il
faut lui rendre cette justice qu'il ne
coopéra jamais de près ou de loin aux
actes. Nous ajouterions même que les
meneurs de la première assemblée ,
s'ils eussent tenu compte plus sérieuse-
ment de ses avis, auraient épargné à
leur patrie bien des commotions , si
nous ne savions que , lorsqu'une fois
l'arène s'est ouverte aux passions , ce
n'est pas une circonstance qu'il faudrait
ou supprimer ou introduire, c'en est
des milliers. Au moment où l'Assem-
blée constituante agitait la grande
question : « La législature doit-elle ou
non former une seule chambre? »
Sleyes , ]>arnave, JMounier et autres
membres influents de l'assemblée se
rendirent auprès de lui, et semblèrent
s'en remettre à sa décision. Jefferson
leur recommanda le système des deux
chambras , non comme système an-
glais , mais comme système sage.
« C'est, dit-il , celui qui offre plus de
garanties contre la précipitation , à
laquelle on est encore plus sujet en
France qu'ailleurs, et aussi contre la
tendance d'une chambre législative
unique au despotisme. » Ces considé-
iitionNiic furciil pa» inj irruïs ilf-,
ttiiiMiilanlNi maisrllc'; ur (luiriil tnuiii
pher à ^i^^rlnlllre ; cl Uiiu|oi:lo rc-
jfla b «liMMoii de |j lr-i>bluic.' li
s^mpallnvait ib\jnta;;e a\ec une aalre
doctiiiie (lu temps, qui, re^lreinle eu
(le M^es limites et lui «qu'il rr^iie uu
bon esprit clirz uiir nation , est apte à
produire (le grandi atanta;;e9, le jun :
il n'axait pas tnil, au moins, lurxqu'il
en apprériail l'impoi tance , et quaiid,
•il une Icllrc il l'ahbé Arnaud, il di-
• jn'appliqner et réalitfr les lois sont
clioses pluN ^ra\es que de le» faire, et
que si une iialion i\Ml t rliuisir riilie
le >arriGre de va puissance judiriaire
ou de sa puissance U*^i>lati\e, c'ot à la
dernière qu'elle dexiail renoncer. Ce
principe, que JclTcrMui énonçait dans
rii>polluse alors reçue d'une rénova-
tion democrati(iue, e^l pluN di^ne de
inrditaliun qu'il ne le semlde au pre-
mier in^t.1llt , il iluiiiic droit de con-
clure qu'une raoïiiirli'c peut être forte
encore en se d« Tune Injune
partie de sa pui tlive , mais
qu'il n'y a point de »uiut pour elle si
elle laisse einaliir ia juridiction; et
dt>-lors on voit a\ec comliien de pié-
cautions il faut admettie le jurv, si en-
\aliisseur de sa nature, et qui alïiclie bi
audacieusement sa souveraineté. Au
total donc, Jefferson ne se fai>ait point
lUiL^ion sur la marche de la révolution
française, el >o\a'.l fort lnen qu'elle ne
tournait point a 1 KIdnrado. I<e> intri-
gues du Pala:s.Ku>al surtout étaient
claires à ses veux. Sa position lui fai-
sait une nécessité d'en être in>lruit.
L'avènement de la maison d'Orléans
Jht
»4î)
au trAne de France à celle er
que eût
entraîné un revirement dans la poliliqi
extérieure. L'Angleterre, en appuyant
même le|;èrcincnt les prétentions du
chef de celle maison , lui vendait cher
ses promesses amlii^uës : Jefferson eut
vent d'une transaction ou d'un projet
de transaction d'après lequel le duc ,
poji obtenir de l'argent du cabinet an
(;Iais , aurait plulul^ la cession de lotit
ce dont la France eijit encore nantie
eu Amérique; et qui eût pu ;;arantir
que, le ca^ échéant, la noinelle royauté
u'eùt pas lai&%é l'iiiion à la merci de
r An;;leterre ' Ce (lui , du i e>le, rassurait
l'anb^ssadeur , c est qu'il ne voyait
DM que ces menées dussent réussir ,
les agents du prince n'rtant ni dé-
voué» ni sincères , rt lui - mrme
n'ayant pas les qualités de son rôle.
Le séjour de Jcffeison en France
dura ainsi jusque vers la fin de sep-
tcmbie 17h*', époque à la(|uelle il
fut reiuplacr pai Morris. Lui-même
a\ait xdlicilr son relour. Il venait en
ce roomcnl d'obtenu du cabinet de
Versailles la liberté d'iropurialion des
salaiNonsan;;lo-améiicainesen France,
el l'autorisation de prendre de^ mesures
eificaces )H)ur Ir paiement des officiers
élraii^eis qui avaient ' l.lals-
I ii;> dans la ^uertc de . mce.
C'e»t durant l'ahM-iicc lîc JtlJerson
qu'avait élr ledi^re la constitution dé-
bnilive dcN Lia s l ui^ 17S7 . <^>uoi-
que loin de sa pairie, l'uiubavsadeur
n'élail point ic.-lo >.ius influence sur
\cs débals élèves à cette occasion dans
la convention extiauidinaire appelée
pour la voler. C/ot de lui que vinrent
originairement les ainendemcnts, a«
nombre de dit , qui restreignirent le
pou\uir du con;;rc5 sur radmini:>tration
des états particuliers. De iclour en
Amérique, il fut chargé par \\ ashiui;-
lon du portefeuille de> aflaiics étran;;c-
res, dit vulgairement sccrélaiierie-d*é-
tat ^avril ITUO). Ma!;;ré les efforts de
son pjcdéce^eur Jav, tout était encore
à créer dans ce département. Les con-
naissances positives qu'un séjour de
q«(Jquc5 années en Liiropc av.iit don-
nées au ministre le mettaient à même
âc réparer vile celte lacune, et d'oUc-
nir de ;;rauds lésullals en évitant de
-rands abus : bientôt, en effet, le ser-
i5o
JEF
JEF
vice diplomatique fut organisé réguliè-
rement et sur le pied européen , quant
à retendue et à la célérité des commu-
nications, mais non quant à la dépense :
la capacité prouvée, les services el non
les grands noms, les grands airs, les
prétentions folles, ou les habitudes de
prodigalité, furent les seuls litres de pla-
cement. En dépit de l'exemple de l'Eu-
rope , Jefferson ne comprit point la
nécessité des profusions el des frais de
représentation : l'argent ne manquait
nullement aux ambassadeurs et autres
agents du gouvernement fédéral ; mais
il fut réservé pour d'autres objets que
la satisfaction de leurs caprices per-
sonnels cl de leur vanité. Il faut dire
aussi que la crise pécuniaire dont se
remettaient à peine alors les États-
Unis obligeait à une stricte écono-
mie; et d'autre part, les modestes ha-
bitudes de la plupart de ces colons ,
devenus à l'improviste citovens d'un
grand état, rendaient praticable le sjstè-
' me de simplicité. Jefferson n'en eut pas
moins beaucoup île mérite à continuer,
ériger en quelque sorte en loi , ce qui
jusqu'alors n'avait été que nécessité ,
hasard. Les mauvais exemples pren-
nent encore plus facilement que les
bons: il n'eût tenu qu'à lui de mettre
aux afiaires des hommes à fracas, et de
les envoyer au loin faire des folies di-
plomatiques et leur fortune ; quant à
l'argent, on en eût bien t^uvé pour
l'inutile, quitte à en manquer dans les
afiaires essentielles, à désorganiser les
services, à grossir on peu cette dette
publique, signe, dit-on, de la prospé-
rité des états. Nous ne voyons point
que cette simplicité ail nui en rien au
respect de-. FLuropéens pour la nouvelle
république; et qui peut dire à quel
point elle a servi :' La lovauté, la fran-
chise, à l'ordre du jour dans les léga-
tions américaines, formaient aussi un
parfait contraste avec la duplicité qu'af-
fecte quiconque en Europe a respiré
huit jours l'air d'une chancellerie ; et
bien que cette loyauté d'un côté ne dé-
génère point en indiscrétion et en dupe-
rie, que de l'autre clic n'ait pas toujours
été sans tache , la renommée en sub-
siste et produit toujours certain effet
moral, qui ne nuit en rien aux effets
■ matériels de l'habileté : c'est être ha-
bile quelquefois que de passer pour ne
pas l'être. Dans ses relations avec
les deux grandes puissances occiden-
tales de l'Europe , Jefferson donna
toujours carrière à sa prédilection pour
la France. C'était en effet la seule li-
gne politique avantageuse à l'Union ;
et il fallait de l'aveuglement ou de la
mauvaise foi pour proclamer que la
puissance commerciale, la plus jalouse
qui ait jamais été, se réconcilierait cor-
dialement avec ses sujets échappés à
son joug; verrait de bon œil leurs pro-
grès et aiderait à leur développement.
Sans doute « la reconnaissance ne doit
pas être la règle de la conduite politi-
que d'une nation ; » mais l'inimitié et
les mauvais services ne prouvent pas
non plus qu'on a des intérêts communs,
et surtout que l'ennemi de la veille
sera le lendemain un allié sincère.
Toutefois il eût été absurde , dans la
lutte qui bientôt s'éleva entre l'An-
gleterre et la France, de prendre ac-
tivement parti pour cette dernière.
Mais telle n'était pas là politique de
Jefferson : le maintien de la neutra-
lité, voilà ce qu'il voulait. Ces diver-
gences relativement aux affaires étran-
gères tenaient à d'autres dissensions,
relatives, celles-ci, au régime intérieur
de l'Union. Là encore deux systèmes
étaient en présence , le système fran-
çais et le système anglais. Suivant ce
dernier , réiémcnt aristocratique eût
dû, comme en Angleterre, prédominer
dans la constitution ; les adhérents du
.système français, au contraire , don-
naient la préférence aux institutions et
aux formes démocratiques. A celte pre-
JEP
JEF
i5i
rm^î4^f'en joignait une aolre, celle
<!< ! I ^^e^ à chaque eiat «a <>ouverainelé
..i.iu.lre. entière, île Irlle Hirte qu'il»
o'eus«ent entre eux (l'autre;^ relations
nue relies qui unissent drs nations iii-
ile(>riiii.intes qui ont forme alliance en-
rml I. I. ;ir l.^er^JiIe.^,au rcmtraire,
\ .-i>!; . . rlal« par un lien \i-
^oureu\ et ttl»!i^.iioire qui en fil un
fat^ffiM uni et l^^ll^i^ible. On le» nom-
iliites; mais tandis que les
I «le France voulaient reli-
riier la centralisation, ceux deirnion,
lU contraire , voulaient l'établir, et,
jn» lui «lonner la force evtrème , e%-
«essive peut-être qu'elle a chei noas ,
\U voulaient pré>enir cet rparpilleincnt
«le forces, cette absence de concert et
«l'unilë que provoquaient les démocra-
i(> m |Mrroiii>ant sans ccvsr , comme
!<• |>iliiiiiirii de la pro««p«*i île ararn-
r.iinr, l.i -.rpiL^iion des clals, en ré-
[•:.ni..iiii iiMiif armce permanente, en
drni.iiidant rabolilioii de tout impAt
^«'iirial, et, pour moven d'éteindre
les dettcN contractées pendant la fjuerre,
la banqueroute. Knfin , et c'est là son
dernier Irait, différent encore de tout
ce que nous voyons en Kurope. les ^
déralistes tenaient surtout au dévelop-
pement de la pnssance maritime et du
commerre ; Icn di-inocrates vouliienl
surtout le développcuient de h rirlir^se
agricole, la mise en valeur d'un sol un-
nense et fertile, l'activité de la produc-
tion, et par suite l'accroisvement de la
population sur une surface qui pouvait
nourrir vin;;t fois ce qu'elle avait d'Iia-
bitanls. Jofîerson était démocrate ,
^V ashinj^ton fédéraliste; du reste ni
l'un ni l'autre n'admettaient le« exa-
gérations de leur parti. Uéuiiir les deux
systèmes d'économie politique aurait
été leur vœu et celui de toos les bom-
mes sa^^cs ; mais dans le moment où
reffcrvescence de la polémique est au
comble, et où chaque parti in>crit sur
son drapeau plusieurs devises , dont
l'une ts\ di^ue d'élo«es ou de tolérance,
mais dont l'autre semble snbversiveet
odieuse, s'entendir e-t iropos.sible , et
le temps de la conciliation n'est pas
venu, l/amliassadeur français Gtnet
voulut profiler de ces drluts et des
svmpatlne< du parti démnrr.-itique en
faveur de la révolution fraiirai>r. pour
exciter \r>, .leffri soinens à une révolte
contre le président, qui tenait alors de
proclamer la neutralité de l'I'nion
dans la ;;uerre entre la coalition et la
France Jelfer»on, d'accord au reste
avec \> a»liin;:ton sur l'excellence du
»nteme de neutralité, •'> refusa ouver-
lement, et 6t avorter amsi de* projets
qui euvsent mis l'état en feu. Cette ab-
ne<;ation pourtant ne put le maintenir
au poste ou l'avaient porté ses amis :
la dissidence du président rt du minis-
tre aH;;MieMt.iti dr jour en iour : le sys-
tème ji liant
du teii.. I iois-
sion le 1" janvier I7'.»V et >e retira
dans »a terre de Monticello où . au
sein de «a famille, il parta;;ea ses loisirs
entre de4 travaux scientifiques ou litté-
raire* et l'exploitation de ses propriétés
rurales. Bientdt ses compatriotes le
choisirent pour les représenter à la
chambre supérietire du con;;res fednal,
en d'autres termrs, au xnal ; |»uis il se
porta, en 17i»7, compétiteur de John
Adams pour ta présidence ; mais quel-
ques voix lui manquèrent. Il fut alors
vice-président de droit , et en cette
analité il fut diar-é de la présidence
u sénat. I^ situation dos démocrates
élail toujours difficile ; les adhéreuls
du système an;;lais étaient en énorme
majorilédanslesdeux chambres, et y ma-
nn-uv raient avec la morgue et l'outre-
cuidance familières aux majorités par-
lementaires : la niinorilé, par un de ces
eïhips de tête dont l'An-leterre , en
ITH'J, avait donné l'exemple , et que
le libéralisme français imita tn 18-26,
se retira en masse , criant à Toppres-
i:>2
JEl
JCF
sion, et proleslaut contre l'iisui jMliv)u
(le pouvoir des anf^loiuanes. Celle bou-
derie du désespoir ne déplut point aux
dominateurs du jour ; leur joie eut été
au comble si Jeflerson eut pris le mouie
parti et eût résigne au moins sa place
de président du sénat, car sa ^ice-pré-
sideuce était paralysée tant que le pré-
sident était là. Mais il n'en fit rien ,
et, intrépide en dépit de son isolement,
en dépit des tracasseries qu'on lui
suscita pour le dcf];oûler, il tint léle à
ses antagonistes, tajidls que, seul aussi,
Gallatin, à la chauibre Inférieure, ré-
sistant avec la même opiniâtreté, ne
négligea nulle occasion de faire écla-
ter les injustices ou les fautes du
parti dominant , l'cmpccba de com-
pléter sa victoire , cl , rcslant ainsi
comme une tête de pont- , donna le
lemps à ses amis politiques de se re-
connaître et de se reformer, d'api-
toyer sur leur position et d'irriter con-
tre leurs adversaires. Tout parli en
général s'use par l'usage qu'il lait de la
victoire , s'expose aux traits de la criti-
que par cela même qu'il est au pouvoir,
et se dépopularise parce qu'il a joui de
la popuiarllé. Tel fut le sort de la fac.-
tion anglaise. l*eu à peu les afiancesa-
dos d'Amérique rallièrent à eux des
mécontents, se remirent de leur décou-
ragement , acquirent une supériorité
décidée dans quelques états, comme la
Virginie, le Kentucky, etc.; et, moyen-
nant des efiorls inouïs, se Irouvèrent
de force à recommencer la lutte quand
le lemps fut venu où expiraient les
pouvoirs de la législature. Bientôt il
s'agit de nommer, en remplacement de
Wasbington, qui depuis dix ans occu-
pait la suprême maglslrature, un nou-
veau président et un vice-présldenl.
La présidence fut conférée à Jobn
Adams , le corypbée des fédéralistes ;
mais Jefferson, son indomptable ad-
>ersaire, fut porlé à la vice-présiden-
c Ce premier pas était de bon augure
pour les Jelïersoniens, Toutelois l'on
ne pouvait se dissimuler que le partage
du pouvoir était inégal, et qu'à moins
d'une persévérance continue, secondée
par d'iieureux événements en Europe,
cet ascendant du parti français ne
pourrait se soulenlr. En celle occasion
même, il avait fallu le contre-coup des
victoires de Bonajiartc en Italie et du
traité de Caiiipo-Foimio pour amener
le résultat dont se félicitait le parli.
On pressent donc que les années sui-
vantes furent pour les Etats-Unis com-
me pour l'Eurofic une période d'indé-
cision et de liralllements. Cependant
la sagesse qu'on ne peut méconnaître
dans le caraclèrc des bomuKs d'état
anglo-américains et l'esprit modéré,
laborieux et positif des populations
qu'ils ont à régir, atlénucrent ces incon-
véiiienls. Nulle collision n'éclata entre
les adhérents de systèmes divers; et,
bien que les vues continuassent à di-
verger au suprême degré, la guerre de
plume et de paroles fut la seule dont
on eut à se plaindre. Les deux syslè-
meslultèrent d'une uianlère digne d'eux
à qui l'empoileiail : l'agricullure dou-
blbses[uodiiils, le commerce multiplia
ses transactions et ses ricliesses, la po-
pulation suivit toujours son mouvement
progressif. Pendant ce temps liona-
parte, revenu d'Eg)pte, s'était saisi du
pouvoir en France et, tout en commen-
çant la réoi ganisation d'un pays las de
l'aiiarcbie et de la révolution , avait
])orlé un coup moi lel à la seconde coa-
lition par la victoire de Marengo. Le
conlre-coup du Iriompbe de la France
en Europe fut en Amérique la prépon-
dérance du parli Jeffeisonien. Quand
les quatre années de présidence de
.iobn Adams furent achevées, en vain
ses amis s'évertuèrent pour le faire
iéélire : grâce aux événements euro-
péens, et grâce au concours des états
du Sud et de TOuesl, ou si l'on veut
grâce à quatre noIx de majorilé, la can-
Ji-1
JLl
ii3
(lulalurc tle JcilciMiii rcu ni| , m iiiar..
1H4)I. Aiii>t rr\rtu tic h supiriuc »u-
lunlr |*our ()U4lre aii>, iiou5 pouuMi:»
{•ar 4iilt(i|)Jlioii dur )»uui limt , c»r
biruquc la [HCMileucr fui t{uailnciiuaic,
il (u( rrooiumé (IcrrclirT rt j une
^1 aiiilr ina|uritc en 1 N().'», et roiiiiiirnça
aiiiM la li^lc des prcMilriib Je liuil ans
(JefTer-MM», IHOl-lHOÎI, Madijoii ,
18(nMHl7, Juliiiguinrv Adams
1S21-I82U, JaclKon, IHiD-lSllT;,
il lit marcher lie front, a^ec i'applica-
tion Je sci principe» et la realiNalion
Je sc> plans, les améliorai ion» male-
nrllcs qui Je\aient Jjns ra\enii por-
ter les fruits le> plus nchcN ri rrciNici-
lier les systèmes depuis longtemps en
prr>ence. I/adniini^lialion Je Jolin
AJanis axait cte signalée par la roi^
soliJaliou Ju >\sti'iue fcdeiatif : il n'v
touclu ppint et respecta la centralisa -
(ion uporre; mais il redui>it inimedia-
lemcnt rarinee à trois mille hommes,
la tlolleà six ù>^ales à peine capables
de tenir la mer ; il annonça (|u'ai'ei-
[tiralion Ju pri\ile^e de la hanipie ^c-
neialc d llanullon, conlie I institution
de laquelle il s'était elc%e, cet établis-
sement ce>oeiait d'exister; il 6t rejeter
un projet d'université ualionale et des
plans de C4iuli.sation >;eui.*iale. Mais,
en diuiiniiant ainsi l'action centrale, il
ne ptetcndait pas aiirler les d(*velo(>-
peineut» locaux , et même il montra
qu'il avait des pensées d'ei^emble.
11 tenta de res*er|er les iicrud> entre
les étals du Noid et ceux du Sud ,
en rendant de plus en plus nécessaires
à ces republiqu«*s commerçantes du
Nord, placées comme des avanl-postes
de l'Amérique sur l'Aliantif^ue, les pro-
duits des Caroliues, de la(icori;ie, de
la Per.iisvlvanic et de la Vii^inie;à
ccilcs-ci les débouchés que l'active
manne du Nord offrait aux riches-
>ti de leur sol , à l'exubérance de
leur culture et de leur industrie. Il
mit s<!^ i-uinsa eieerà colé des élaU
maiitiuies et occidenlaiix des terri-
îbires nouveaux, i|ui donnaient à la
politique ^enn air de l'I'nion de su-
peibe> acclol^ «•inciits en superficie»
de nouveaux ciciii;.iii-. de nche.vte agri-
cole et manufuitunrrc , un debou-
clir imlrlîniment ouveit à l'exccs Je la
popu uiioii, et offraieul à la politique
pailiiulière des .lefTer^nnirn» h per-
spective delà formaliuii d'une niavsc
J'iDtérels continentaux qui loi ou tar^l
feraient équilibre aux intérêts mariti-
mes. Kn attendant que ce^ acqui>iliDii&
nouvelles parvin>>ent a l'impoilancc
nece^^aire pour leur vaUnr le titie d'é-
tals, lU enirevovaient le pnvfti-^e de
le» ro^ir direclrmenl comme Jc% pio-
vinces ^ car il est de principe aux
Klal* l ni* que Te» di>liicls p.iilicu-
liers dont la population n'aiiive pas à
soixante mille âmes ne soient point
qualifies étals, et des-lors te>tent ^ou-
veines par l'aulorile cealrale jusqu'à
re qu'ils allei^nent avec ce cliillrc
leur adiuiNsion dan> la fédération com-
me lépubliques a pai1. JennsAin dé-
buta tbns celle caniere par oblenir
de la Fiance, muvenuant quatre- vingts
millions, la Louisiane. l<e traite Ju 'M)
avril 1803, qui liansportail celle ma-
;;niûque posv.>Mon a la {grande répu-
blique de rAmeiil|lie du Noid fut uu
coup de foudre pour l'Aii^lelerrc el
pour rKspa;;ne : pour l'An^lelerre
avec laquelle semblait devoir se con-
clure un traité commencé sous l'in-
llueiice du parti fédéral ; |four TKspa-
;;ne qui, non seulement eu cédant la
J.ouisianr a la France par le Irailé se-
cret de Saint- lldefonsc du l*^"^ «jclobrc
1801, avait stipule la rétrocession en
cas de non-occupation du pap par les
Français, mais qui , de pi» , vovail
l'Luion par celte eii)ambee Ki;;an-
lesquc se poser entre les Florides et
le Nouveau- Mexique , ses domai-
nes, et les menacer é;;alement. De
plus, par celle translation d« proprie-
i54
JEF
té, avantageuse en même temps à la
France, qui n'eut pu protéger la Loui-
siane, et à rUinoii, si bien [)lncée
pour se défendre envers et conlre
tous, le cabinet de Saint-James per-
dait à la fois et le droit de s'empa-
rer d'un immense pays, qu'il se fut at-
tribué comme dépouille de la France, et
le moyen de prendre à revers les Etats-
Unis qu'alors il nourrissait l'espoir de
faire rentrer sout< sa domination. Grâ-
ce à l'admirable traité de 1803 et à la
haute sagesse du président, l'Union se
trouvait avoir ainsi non-seulement un
dévelopoemenf, mais une barrière: son
existence comme état indépendant ne
date vraiment que de ce traité. Aupa-
ravant l'indépendance existait, mais
précaire et peu viable : la frontière
était trop près et la France trop loin.
Tout cliangea dès que la Louisiane vint
donner à la fédéralion trop exclusive-
ment maritime , trop éparpillée sur
l'Atlantique, une base inattaquable; et
les illusions dont le ministère bri-
tannique s'était bercé rentrèrent pour
jamais dans les brouillards de la Ta-
mise. Ce n'est pas tout , un autre
grand résultat de l'acquisition de la
Louisiane devait être l'adjonclion- des
Florides dès lors pressées entre la nou-
velle province et la*^éorgie, puis l'en-
vahissement de tous les déserts occi-
dentaux entre le Nouveau-Mexique et
les possessions anglaises jusqu'à la mer
Pacifique. Jcfferson ne se borna point
à deviner ces résultats dans l'avenir, il
en accéléra beaucoup l'instant ; et, peu
après la fin de sa présidence, les évé-
nements s'accomplirent au moins au-
tant par suite de ses mesures que par
celles des hommes sous lesquels ils
eurent Mu. Son premier pas fut, en
prenant possession de la Louisiane, de
prétendre qu'elles'étendait à TK^t, non
jusqu'à la branche Ibcrville du Missis-
sipi seulement, comme le voulaient les
Espagnols, mais jusqu'au llio-Perdido,
JEF
petite rivière à Test de Pensacola.
C'était s'attribuer la Floride occiden-
tale à peu près entière. L'Espagne ré-
clama; plaintes inutiles. Finalement
on en vint à une rupture. Jefferson
l'avait prévue et souhaitée , il était en
mesure : la Floride orientale fut occu-
pée sans grande peine ; puis la Pénin-
sule , bouleversée par l'ambition de
Napoléon et devenue le théâtre où
l'Angleterre et la France luttaient
corps à corps, eut bien assez de son-
ger à elle-même. Qu'était-ce que Saint-
Augustin et Pensacola, quand Madrid,
Saragosse, Valence, quand toute l'Es-
pagne , sauf Cadix , était en feu r*
Jefferson quitta le pouvoir avant que
le sort de l'Espagne eût été décidé;
mais le sort de la Floride l'était ir-
révocablement : Jefferson avait for-
mulé à huis-clos ce qui deux aas après
(en 1811) fut notifié par le pré-
sident Madison à qui voulut l'enten-
dre ; «c La Floride occidentale est à
« nous par le traité de 1803; la Flo-
« ride orientale, nous la rendrons sitôt
« que l'Espagne aura payé au gouver-
« nement fédéral ce qu'elle doit pour
« les frais de guerre et aux particuliers
« les indemnités qui leur sont dues ;
« jusrjiie-là nous l'occuperons comme
« nantissement: quanta l'hypothèse
« d'une cession des Florides par l'Es-
«< pagne à un tiers qui paierait les
« somntes par nous réclamées , les
ic Etats-Unis ne le souffriront jamais.»
Ce tiers si prompt à payer, c'eût été le
cabinet anglais, qui eut eu là, en effet,
une [)osilion commode, comme Mahon
ou Calais, lorsqu'il possédait Mahon ou
Calais, conftne (iibrallar, puisqu'on
lui laisse toujours Gibraltar. MaisJel-
ferson avait pénétré cette politique,
et la (irande-liretagne en fiit encore
pour ses frais de négociations avec
l'Espagne. Jl ne mit pas moins de soin
à jeter les jalons de futures conquêtes du
côté de l'Ouest. Le ilom de Louisiane
rml)ra«sait d« f^parw immrn^rt.raai*
mal connus r\ mal ppuj»lé> ; *ruK <]ttr\
quw rha*%*ur^ , qarl(|iifs inlrrpitlcs
mivif)iinairf5 «'y értîent a»rnluré< ,
s.ân% fn Irourer la fin : taijufnifnl on
"^entait que rommf r^^ion nalurrllr ce
|»a>s cmhra^sf tout le ha«'>ifi Jii ^Ii^^i*-
-ipi: unf fois cf ba^^in dflfrmin^, il
iMferail cnrorf une autre r<';;ion en-
tre les monta^^nes qui encai^^ent le
bassin (lu Mi^siv^ipi à l'OiirM rt la
cMr lir r()rr.in Pacifique. .)rUfrson
rr>«»lut «Ir ptrlmler par unr exploration
^cieIltitlque en rè»le i l'ocrtipation ;;ra-
duelle 4e ces larges solitutles où ja-
mais cof^née ne frappa l« \ieax tronc»,
où jamais di^ae n'enchaîna le boni At*
fleu\e5. l*ar se^ ordres, le* To>a;;eurs
llunter et Diinb-ir reconnurent les
liords dr la ^^ arliita ; le colonel Free-
m.m chercha la >ource de la ri>iére
Kon^e; le major IMe <ui»it le cours
du MivM-<Nipi et de TArLan^at jusque
leur origine; le« capitaines ï^enis et
(liai le dans une rour?e de plus de
douie cent5 lieues remontèrent l'énor-
me Missouri, et, après avoir franctii les
grands murs basaltiques du pa^s des
Mandanes et les Isles mi<souiSennes
des monta;;Ties Kocheuses , arri%erent
dans ces parafées où le plu> ^rand fleu\e
du monde n'est plu-s qu'un filel qu'en-
jamberait un enfar^t. Trois menues ri-
rières forment j»ar leurs réunions le
Missouri : l,enis et Clarle leur impo-
sèrent les noms de trois ^ands hom-
mes américains, (lall.itin, Madi-^on et
Jeiïerson : la branche sud-oneNt , la
plus lointaine des trois, celle qui sem-
ble fuir le plus dans la profondeur du
désert et aspirer à l'autre mer, reçut le
dernier nom. Ces To>af^es qui ouvrent
une ère nouvelle dans l'histoire de la
découverte de l'Amérique ne restèrent
pas ton;;- temps sans être utilisés. .Iff-
ferson avait prescrit aux explorateurs
de nouer partout des inteHi;;erirTs avec
les hôtes du désert. Pike, en 1805, ré-
JEF
i55
roacilia les Chipiouais et les Sious; les
Mandane^ 5e montrèrent disposés en
fa>eur des blanrs Kn 1S0H, il fil
adopter par le congrès un traité entrt
ITnion et les chrfs Oiks. Fn 1804,
Tï ptf», il reçut il di\eiNes reprises des
envoyés des sauvages, notamiurnt des
cl ' ' , et, en se conciliant leur
bi • par queb|ufs pté^rnls,
en lit tlr^ jiii .mon pour tou-
jour», au m < n temps. Ilirn-
\M la ri^ilratinn plaça ses postes
avancée dans ledé;ert, et tonr-i-tour
douce ou menaçante, bienfaitrice oa
fane<te, elle commença cet envahisse-
ment progressif qui n'a point encore
atteint sa limite, et qui sans censé \a
refoulant le sauvage et déboisant la »o-
h'ude pour la mélamorphoNcr en rian-
tes cultures et en >illa^e%. l ne chaîne
de lieux babines relii* ainsi les mes des
detjx océans, et le poète a pu dire de
rCnion: « > ^ande républi-
M q'ir qui r i monde, salut,
•« Occident rii»
1 ' i." but, .lefferson
fil de la l,oritstane deux parts di>tincles,
la Basse- Louisiane qii bientôt prit
rang d'état ,' la IIaute-T.ouisiane ou
Arkansas qui fut et reste encore un
territoire. Il sépara de même l'Ohio
du ('onnecticut : ce territoire, aujour-
d'hui état, reçut de lui des statuts pro-
>i«oires, et conformément à la doc-
trine qu'il a\aif ém'-e des ITT.'», et à la-
quelle il éla ! ' !<-Ie, quoi-
que tolérant 1. . les états
di%ersement constitues, I esclavage j
fut prohibé. Indiana aussi cessa de
faire partie de l'Illinois. Fin même
temps il tentait de plier les peuplades
indiennes voisines des états les plus an-
ciens de l'Union aux habitudes et aux
travaux de la vie civilisée: il eut la
satisfaction de voir plusieurs d'entre
elles renoncer à l'existence nomade et
k», U^il. o gre-t republik. of lUe worid,
Tbuu r'tuug eiupirc of the >»«»t.'
i5b
JEF
précaire hérilée de leurs pères, pour
adopter le régime européen : les Tclic-
Tokls surtout se laissèrent f^uidcr les
premiers dans celte vole oà aujourd'hui
encore ils précèdent tous les indigèncj
de l'Amérique ; un cinqulcnie seule-
njenl de la nation a persévéré dans les
préjuj^és de ses aïeux et s'est retirée
sur les bords de l'Arkansas : le reste
forme sous la protection des Etats-Unis
une république Indépendante qui
compte quatre-vinf;;ls villages et qui a
une blLtiiothèque, des écoles, un jour-
nal en salan}2;ue et en anglais (/." Phr-
nix ichcruki). Ce chanf;cnient, qui exé-
culjé sur tous les Indiens supprimerait
pacifiquement les ennemis qu'a pu pen-
dant un temps redouter la civilisation,
niéritc, certes, des élofies à l'iiomme
d'(il.';l (jui en futleprinclpal auteur: lien
mérite d'autant plus- que pour le produire
il eut recours, non comme on l'a fait
souvent, à la face corruptrice de la ci-
vilisation, mais à la relij^ion et à la mo-
rale : des missionnaires baptistes et
moraves furent les principaux argents
de cette noble politique. Ea li^ne suivie
par Jefierson dans les autres branches
de l'administration ne fat pas moins
sage et pas moins utile à l'état . Mettant
de côté de vaines déQances, il rapporta
la loi conlie les étrangers, comme
incompatible avec les vrais intérêts d'un
pavs commerçant. Dans la gestion des
finances il apporta des améllorallons
graves, réduisit les dépenses de l'état
et diminua la dette publique de trente-
trois millions et demi. Il abolit les droits
intérieurs d'état à état , ne voyant dans
les demi-prohibitions, que des théori-
ciens étroits api)cllent protection, (ju'un
sur moven de tarir la prospérité pu-
blique. Dans ses stipulations com-
merciales avec les puissances étrangè-
res, il mit de mcnie en avant les prin-
cipes les plus larges et se montra prêt
à favoriser les Iraportatlons du dehors,
mais en exigeant la réciprocité. En6n
JEF
il fonda la célèbre académie militaire
de \\ cslpolnt, imitation de l'Pkole po-
lytechnique de Paris. Celte modéra-
tion, ce libéralfeme, ne l'empêchèrent
pas de déployer, quand les circonstan-
ces le requéraient, toute l'énergie né-
cessaiie pour conjurer le péril , pour
comprimer la résistance. Impartial et
tolérant à l'égard de ses antagonistes,
il étoufl'a par sa vigilance et par des
mesures décisives rapidement adoptées
deux tentatives d'insurrection des
noirs (1801 et 1803). Des corsaires
de Maroc et de Tripoli s'étaient per-
mis quelques déprédations sur des vais-
seaux marchands de l'Union : ne pou-
vant obtenir satisfaction, il déclara la
guerre aux deux puissances et bientôt
il les réduisit à implorer la paix (1801-
1804). On a vu plus haut comment,
après un échange de notes au sujet des
limites entre la Louisiane et la Floride,
il fil marcher des troupes sur la Flo-
ride orientale, et sous prétexte d'indem-
nités se saisit de ce gage pour ne plus
le laisser échapper. 11 lui fallut encore
plus de vigueur pour préserver sa na-
tion du fléau de la guerre pendant la
lutte colossale des coalitions salariées
par l'Angleterre contre laFrance: les
deux nations rivales prétendaient éga-
lement l'entraîner à prendre parti :
Insinuations, notes impérieuses , sé-
ductions , menaces , tout fut mis en
oeuvre ; il resta inébranlable. En-
suite ce furent des armateurs des deux
nations qui capturèrent les bâtiments
américains, en dépit de la neutralité et
en dépit du principe que le pavillon
couvre la marchandise; il fit rendre par
la législature un décret qui mettait
l'embargo sur tous les vaisseaux de l'U-
nion : «< mieux encore vaut la stagnation
que la mort, »» disaient les fauteurs de
cet acte (1805). Enfin, après avoir né-
gocié le désistement des prétentions de
la France, n'ayant plus pour ennemie
que l'Angleterre, il leva l'interdiction.
Ji:i'
m
ij'
l ne iommaiion imp^riru>r liu r.il)inri
tir Sjinl-Jjmr« ordni ii.iil la r.lfilitrr
lie lnu* If* na\irr» dr^ KlatN-l 111%
clurp^i de «lenrcr* élran;;orr< à Irtir sol
el \i pte^Nr df%maIfloU qui %'* lniu\e-
rjiritt, rt de plu^ .libil ju^qll'j dé*
rlaicr qu'il nr iortirail |diisiirr barrique
de sucre drs roionir^ennrmie^ «ur quel-
3ue vais^ran qur cr fût à moins que, ron-
uite dan« Ir^ |>or(^ britanniques, elle
n'v fùl suumise a des ta&es : JefTer^on
rép4)ndil en faisant prendre à la lé-
gislature amrriraineune ri>5oliilion por-
tant que tout preneur sur un bâtiment
araérirain serait puni de mort, que tout
matelot aurait le droit de tuer qui-
conque tenterait de presser, et rornte-
rail ainsi récompense , que toute Ticti*
me de la pre>sr serait déilomma^i^ée ,
enfin que Union exercerait comme
représailles sur 1rs b.-iliments anglais
une presse é^ale à celle qu'auraient su-
bie les Américains. 1^ réponse pro-
duisit l'effet piévu, et les rodomonta-
des anglaises se bornèrent à quelques
pirateries le long des cAles et a des
ij\.i;;ps dans la Caroline. Cependant
le pied de paix ne fut point rétabli, et
la manne dr> deux pa\s préludait de
loin en loin à U guerre q:ii de\ait finir
par éclater <ur les frontieics septen-
trionales en \H\:i. Au total (ienr, la
situation de II nioii clait montée au
plus haut point de grandeur et dj pro-
spérité qu'il fût possible d'atteindre au
milieu de la gran4e guerre qui boule-
Tersait le monde en Iném^ temps que
rturope, lorsque Jolïer>ou quitta les
insignes de la présidence. H n'eût tenu
qu'à lui de rester a celte haute place
au moins quatre ans encore. I/assem-
bléc de la Pennsylvanie lui a\ail oficrt
de le réélire: beaucoup d'élats avaient
toujours été favorables à son sv terne,
les états nouveaux l'étaient encore
davantage, cl les événements v avaient
de plus en plus donné de la force.
On peut donc croire que peu dVf-
ioris lin en s4Mit suffi pour emporter
sa troisième nnmin.>tion. H ne ^ou-
lut point essayer; (f c'est depuis ce
temps qne rtt^.i^r semble a\oir sanc-
tionné . •ii'.ioii de toute troi-
s'cfîie • à la présidence ,
ap!i-s iiiiit .T.M dr pn*<rssion. Mnnti-
cello re<lexint »on i-iie. l'Itis que sexa-
génaire à cette époque , il semblait
vouloir pavser le reste de set jour!» en
fiaix entre le sonvenir de ses artcs et
es loi^ir» d'nfie existence liltna.ic ou
dourement occupée, il n'Hait pas ri-
che : ces hommes qui pendant des an-
nées avaient géré les alfaires d'un pav*
renommé par la richesse el le mercan-
tilisme réalisaient au pied de la lettre
ce qu'on a dit des Gncinnatus, des
l^riciiis, et sortaient des affaires plus
pau\res qu'ils n'v étaient entres; c^^
leurs appointements modestes avaient
suffi tout juste à leur entretien, et leurs
propriétés ne s'étaient point améliorées,
loin de l'fr 1 dn maître, (^tte insou-
ciance sublime fut jusqu'au bout tn
malad-e de .Icfferson , mal iJ-e pe«
contagieuse de ce cAtë-ci de l' V-^
tiantique. Keudn à la vie pri^-e,
au lieu de songer à régui.iriscr s.i for-
tune, il consacra son iniluence et S!*s
\eilles à créer l'université de N irgiiiie.
Hien que seconde par quelcpips collè-
gues, c'est lui que ce bel étauli sèment
regarde à juste titre comme son fonda-
teur: il eût pu inscrire avec son nom, sur
la façade, Krrgi. Mais tandis qu'il s'é-
puisait à doter sa patrie d'un dernier
monument, l'abandon de ses propres
intérits, une hospitalité dispetidieuse,
des m.iiheiirs imprévus le r«'ilu!sirenl
insensiblement à la gène, à la détres-
se : il fut oblige p<»ur vi^re ira\oir
recours à des expédients qui dm eut coû-
ter à sa délicatesse, el de Ihiiirbien
cruellement ses illusions, s'ilo-l encore
des illusions à soixante douze ans: ce
fui d'abord sa belle et riche bibliothè-
que qu'il offrit de vendre âu congrès k
i58
JEF
des conditions très-avantageuses pour
Tacquércur ; on accepta; plus tard ce
furent ses propriétés qu il demanda,
par une requête lonf!;uement et for-
tement motivée, Tautorisation de met-
tre en vente sous forme de loterie.
Triste faveur ! et le produit n'en fut
pas même suffisant pour se débarrasser
des créanciers, bien que la reconnais-
sance publique s'empressât de faciliter
la vente, et que tous les billets eussent
été pris par (!es comités spéciaux lormés
dans ce but. Il était sans cesse aux
abois, sans cesse à la veille d'être dé-
pouillé, par autoritéde justice, des seuls
moyens d'existence que lui eussent valu
ces mesures, lorsque enfin la mort vint
le délivrer de ces hideuses poursuites,
le 4 juillet 1826. Il y avait cinquante
ans jour pour jour que l'indépendance
américaine avait été proclamée. Que
d'événements dans ce demi-siècle ! 1 1 les
repassait souvent dans sa mémoire ; ma-
lade et pressentant à ses fréquentes dé-
faillances une mort procbaine, il expri-
mait le vœu de \ivre jusqu'à cet anni-
versaire : son vœu lut exaucé. Une
foïticldence frappante, c'est que John
Adams, jadis son adversaire politique,
avec lequel depuis il s'était réconcilié
et auquel il écrivait fiéquemrhent, mou-
rut le même jour que lui. J-,es canon-
nades, les réjouissances publiques l'a-
vaient réveillé d'un engourdissement
avant-coureur de sa fiti : « Pourquoi
ce bruit?» dit-il. On le lui apprit,
«c Voilà un bien beau jour , » reprit-
il , et il expira. Jefferson réunissait
des connai.ssari(es très-\ariées : droit,
histoire, langues tant anciennes (|ue
modernes, économie politique, mathé-
matiques, astronomie, chimie, physi-
que , liisloirc naturelle, technologie et
arts mécaniques, lllléralure, rien ne
lui était étranger. Il était depuis 1801
membre associé de TI nstilut de France ;
depuis 1809, associé étranger de celui
de Hollande, première classe. I^ même
JEF
année il avait reçu le titre de membre
honoraire de la société royale des
sciences de Varsovie. Les principales so-
ciétés savantes des Etats-Unis le comp-
taient aussi parmi leurs membres (2).
— 11 a été dit plus haut que Jefferson
au milieu de ses travaux politiques et
administratifs avait encore trouvé le
temps d'écrire. On a de lui : I. Les
Notes sur tctat de Virginie (déjà
citées), 1782, in-8°; 2' édit., 1788,
in-8°, carte. C'est un excellent tra-
vail. L'abbé Morellet l'a traduit en
français, 1786, in-8" : il a souvent été
réimprimé. II. Manuel du droit par-
lementaire,'WdiûxxnoXoiï, 1802; trad.
en français par Pichon, Paris , 1815,
in-8", et en espagnol par JoachimOf-
tega, Paris, 182G, in-12. III. Vues
sommaires sur les droits deVAmé"
riqueanglaise.ill^ij'm-S". IV. Beau-
coup de pièces politiques importantes,
parmi lesquelles figurent en première
ligne la Réponse à lord North, la Dé-
claration d'indépendance^ le Projet
de constitution pour la Virginie ,
trois célèbres Rapports (1° sur Vu-
nilé des poids, mesures et monnaies,
14 avril 1790 ; 2° sur fêtai des pê-
cheries de la morue et de la haleine,
1791 ; 3" sur le commerce extérieur
des Etats-Unis, ses privilèges et ses
restriction s, 1 7 9 3 ) ; et 1 es Discours
pour l'om'erlure du congrès. V,
Plusieurs Mémoires scientifiques ,
dont un sur un os Jossile gigantes-
que trouvé. en Virginie; un autre sur
la mémoire, le Jugement et V imagi-
nation des nègres (il combat ce qu'on
a dit de l'infériorilé des intelligences
éthiopiennes) ; un troisième sur une
charrue de son invention (dans les
Annales du muséum d'histoire na-
turelle de Paris, d'où il a été trans-
porta avec de nouveaux détails et avec
'i , l.a SDCiel*^ |>lliloHn|tlii<iiie de l'IiiliKlnlpine
a fait iuiprimer, en iH?'], r«'log« de Jt-ffcr.son,
prononcé «levant elle le ii avril de celle inèiiie
• nbé«, par Nicbolaa Bidale. D — z— «.
f».;iirf li.iMH i« .\«»m»v.;m luiirs t n/rt
ft/rt ira'^rirulltirr ru 17 vol. in-H ').
J.e (' • r ilrs arU rt m^tifiN
df r.i • un niodrle tlf relie
rliinuf t}ut lâil liraucnup il lioiiiieur a
I ii'iiiiinr délai son invriileur, ri qui
I nr avcr rombirn de ∾artlé li
.<j ; .i]iiail à Ats |irobirme5 usurU les
cairuls les pliK anius. Il faut joindre à
ces ouvraj^es le» Mémoires tir .Irffrr-
stm . publiés par Kandttipli Jeflferson,
IH-J!», i \ol. in H ", Lue foule de lo-
calilrs aui KlaU Unis s'appelleni ou
du nom de JefTerson ou d'un nom qui
en der>\e. Ainsi il v a au kenlucLv un
conté et une ville tie JefTervonlovin .
la Vir-^une, laC^rnlme du Nord onl
• «M*; la N ir^inie el Indiana
I lie ; on compte Ireae romtr^
' I ' tii ; enfin il \ a des villes de
.1 . : 1 tlans Nrw Jersey, dans New-
llampsliire, dans New-York, dan« le
Maine, dans la l'cnnsjvaoir , dans le
Tennessee, dans le MiîMïuri, dans la
(îcort^ie ou même on en distingue
deux : mais l'Oliio l'emporte sur tous,
«•I eti 1S-J7 cet étal ne compiail pas
moins dequato(zevillr>, nous ne disons
pa> se dislin^uanl, mais se ronfondant
par le nom de .IrOVr-ion, l* — nr.
.IKFKKin' (Jy.KS), iliéolof^ien
anglais, né en 16i7 à IpswicI», fui sue*
ce>M\emeiil cure de Dennin^ton dans
le fomie de SufiolL, mini>tre d'une
cj^llse de Norwicli, râleur de> deux
petites cures de kirlon et de FalLen-
iiam, et archidiacre de Norwich. Sa
modestie aurait laissé son mérite igno-
ré , SI quelques hommes célèbres el
puisants ne l'eussent mis à portée de
>e faire conuaiire. Sir hUlouard Atlvns,
premier baron de Ttrliiquier, lui don-
na un apparteraenl dans son h(Hel, el
le mena avec lui dans le monde où
il se lia avec plusieurs personnages dis-
tinguos dans l'église el dans les lettres.
Ennemi de la controverse religieuse, il
aTait coutume de dire quelle produi-
JEl
»^
%ait plus (le rlmlntr f/ue tIe lu-
mière. Il mounil en 17JtK ii;é de
soi&ante-douie anN. On a de lui un
voltmir de K^rmoii" publ-é en 1701,
•I 1 quelques
Il . ^ 1 iiii-s en>em-
ble en 1 i.'tl , 2 vol m H lia publié
en outre la Moralr rhrrfirrme de sir
Thomas llrowne; .tphurisntrx mo-
raux et religieux , lirA des papier»
du docteur Whirhcole, el trois volu-
mes de sermons du même auteur. 11 a
laisse plusieurs volumes de manuscrits.
S— D.
JKFFKHVS Tiio%iAs1,céo»r%-
phe anglais . doul |r sont
plus rounuN que Ir» «! x vie
laborieuse, était né ver* 1720. Ses ta-
lents lui mi'iitrimt le litre honorable
de ;;ro^r.iplie du roi; el il mnuiiit
après 17H(>. Outre une belle carte de
Vfrltuule en quatre feiilles. on lui
doit les caries dr la Deitmiferte (le
la h'ioride. compilation de Wil. Uo-
betl, l^ondres, 176:1, in-i", el celles
de la traduclion an<;laise des l' ora-
ges des Russes pour découvrir un
passade au nord-e>l delAnuTique, pu-
blies en allemand par S. ^lulll'r. ibid.,
17Gi, in-V'; enfin : I. In lirrueil
des haltillements des différentes na-
tions , anglais el fraiirais, Londres,
17.'>7, '1 vol. in-V. II. ihr mitu-
rai, etc., c'esl-à-dtre Histoire naturelle
politique de l'Amérique so;is 'a domi-
nation française, ibid., 1761, in-fol.,
fi^. IVulcI-Dumont en a extrait :
Conduite des Françitis par rapport
à lu rupuoelle Ecosse , !/)ndies J*a-
ris), 176.'>, m- 12. III. Avec L;ine et
Morris : Le iSlitte de l' .Imrri'pie
septentrionale, 177<i, ^r. m -fol., re-
produit à Paris en 1778. IV. ït^est
inditin, c'est-à-dire Allas ou Descrip-
tion ;;énéralc des Indes occidentales
d'après les relations les jLis récentes,
178Ô, ^r. in-fol. Cet Atlas et le pré-
cédent sont estimés. W — s.
itk)
JlitJ
,IEH
JEFFREYS ((itORGK), auteur
an^^lals, nn en KiTS à Weldrnn (com-
té (le Norlîiainplon), clait parent des
tlucs (!e Chandos; 11 occupa divers
•emplois publics à runiversilé de Cam-
i)ndû;e, cl fut quelque temps secrétaire
<lu docleur Ilarlstrongc , évéque de
.Oerry en Irlande. 11 mourut en 1755,
À^é de soixantc-d'.x-sept ans. On a de
lui des JMdcm^es en lyers et en prose,
1754, 1 vol. in-4", où Ton trouve
Jeux trap;édles , Edivin et j\lcrupe,
•qui ont été représenlées sur le théâtre
ide Llncoln's-ln-Fields et le Triom-
^\e de la Vérité, oratorio. C'est de
Jeffreys que sont les vers anonymes
imp{iraés en tcte de la tragédie de
Caton , ce qu'Addlson ne sut jamais.
S— D.
JEIÏABEXTAFUF, seigneur
maure, né dans le royaume de Maroc,
vécut, dès sa plus tendre jeunesse,' au
.milieu du tumulte des camps. 11 possé-
dait une rare force de corps, un grand
<:ourage et fut doué de toutes les ver-
tus qui font le bon capitaine. Après
avoir long-temps combattu contre les
Portugais, il fut chassé par eux de la
ville de Sapliim, en 1508. C'était le
tempsoù régnait Emmanuel, \\^ roi du
Portugal. Jehabentafuf s'engagea au
service deVe monarque. Quels furent
les motifs de cette conduite:^ l'intérêt
ou l'estime qu'il portait aux Portugais.
Quoi qn'il en soit, le guerrier maure,
quand il eut passé sous les drapeaux du
l'ortuL',.'.!, ?er\il celle nation avec une
inviolalile lidclilé. Le premier service
qu'il lui rendit fut la piofnpie e' en-
tière défaite des habitants de Xlatime,
contrée du royaume de Maroc. En-
voyé peu de temps après (151:^) contre
une troupe de rebelles retranchés au
village d'Arèsc, près de la montagne
de Fer, il les surprit pendant la nuit ,
les tailla en pièces, et revint chargé
de butin. Il se distingua encore dans
la guerre que Ferdinand d'Ataïde avait
déclarée au roi dt? Maror ol nu shériU
des Arabes d'Afrique. Neuf compa-
gnies de Sarrasins lurent écrasées par
lui au pied du mont Atlas, et le shérif,
malgré son courage et le nombre de
ses- troupes, ne put l'empêcher de ra-
vager tout le pays de Xialime. Pa.r les
périls qu'il bravait chaque jour, par ies
fréquentes victoires , par ses mœurs
simples et sa conduite désintéressée ,
Jehabentafuf donnait continuellement
d'irrécusables preuves de son zèle pour
les Portugais. Cependant ils vinrent à
soupçonner sa fidélilé et se séparèrent
de lui ; tant il est difficile de croire à
la sincérité d'un guerrier qui com-
bat sa propre patrie ! le Maure ,
profondément affligé if^ Injurieux
soupçons dont il était l'objet, courut,
pour les dissiper, porter la guerre et
le ravage au sein du royaume de Ma-
roc. Cetteconduile ouvrit enfin sur son
compte les yeux des Portugais, et ils
lui rendirent leur confiance. Charmé
de ce retour, 11 marcha avec le gouver-
neur de Saphim à la conquête de Ted-
nest, ville de la province de Héa, dans
le royaume de Maroc. Commandant
l'avant-garde, il se jeta avec son au-
dace accoutumée sur les troupes du
shérif, et leur enleva un butin consi-
dérable. Tednest fut conquis presque
aussitôt. L'ardent et terrible Maure
ne rêvait que la gloire des armes; tou-
jours dévoré (k désir d'en acquérir,
il adopta avec enthousiasme la propo-
sition qui lui fut faite d'aller (aire des
courses jusqu'aux jtorlcs de JMaroc. \]f\
de si's iitics d'armes, offusqué tlo >a
gloire, fit mainiucrce projet. Attaqués
(1513) dans la province de Ducala, par
un corps de troupes maures, les Portu-
gais en firent une horrible boucheiie.
Jehabentafuf eut encore une part écla-
tante à cette victoire. Nacer, roi do .Mé-
quinez, ayant appris la défaite des Mau-
res auxquels 11 venait se joindre ,
s'empara d'Ahnedine , ville occupée
Ji:ii
JIL
lOi
jar l« clirétirrw. Noire hrr<M , liop
fjiblf pour |»iiuioir lui rrsisirr, se re-
lira - N , , ,;r fjii
coml' i.fr )e<
cilerucr». .\\aiii il «niici 4 .Sjj>liiro, il
rencontra un dcLirlinnciit coiiMilrra-
ble lie l'arméf ruiirniic, quM liallil et
mit en fuite. Il montra Jaii^ rette cir-
consiauce une valeur, une prudence,
■ne rapiilité de coup d'tr.l qui inspi-
rèrent une rive admiration et une
haute idée de ses talent> mililairci
Nacer (pou\anlé n'osa le poursuivre.
Sorti de Saphiin |>enda:it la nuit, Je-
liabentjfuf a<.a \enir insulter le camp
de ce ladie luonarque, et y porta la
terreur. Ilicnlôl le* si>1tials de N.irrr,
Indigné» de sa lun' it
leurs armeN à relie > •,
et raillèrent à mettre leur r(»i eu finie.
Kn t.'»ir>, Jcliaheulafuf '«ui^i d'un
> aillant officier pnrtu;;ais, ilom Topès
Ilarri;;ue , et d'un petit nombre de
troupes, attaqua un parti maure campé
prè.s du mont Allas ; il en ma&sacra
une ;;rande partie. Celle rapide vic-
Ictlre le rendit maître de cinq cents
privimiiers , de vin^t mille bêtes à
Liiiie, de mille bœufs et de quatre cents
chameaux. Après tant île biiiianls ex-
ploit, Jeii.ibenlafdf -^e rejidit a Lis-
bonne où Kmrnanuel rarciieillit avec
lionneur et le combla de félicitations.
\\ant appris jl.'ilG que quelques sei-
;4neurs Xerqoois s'étaient révoltés con-
tre les Portu|;ai< et les avaient chassés,
il offrit à ce prince d'aller les faire ren-
trer soun son obéissance à condition
qu'ils obtiendraient leur pardon. Son
intervention acceptée, il partit pour
l'Afrique, et à sa voix les rebelles ren-
trèrent dans le devoir. Depuis quelque
temps , d'intimes liaiso:is î'pfaienl for-
mées entre le héros raaare et un chef por-
tuo^ais, NiinezMascaré^nas.CeJiai^ons
firent ombra;;e à ceux qui les appro-
chaient. On chercha Ions les moyens de
les rompre , et l'on y parvint. Nlasca-
1 raillas poussa SI loin la haine contre le
Maure, qu'il o.a l'accuser de trahison
ai?prè* du roi de l'orlu^al. Jehaben-
laluf se justifia el recouvra la confiance
d'F.mmannel : Masraré^nas reçut l'or-
dre de continuer a lui fournir le^ se-
cours nécc^^aires pour L ;;ucrre. Je-
habcntafiif combattit de nouveau les
ennemis du l'ortu;;al, et, uar ses bril-
lants sucres, força tout le monde à
reconnaître en lui un guerrier aussi
fidèle que bra\e. Toujours iufati;;able,
toujours li\ré à son ardente passion
pour la gloire, il forma le projet d'aller
attaquer le roi de Maroc dans sa capi-
tale même, et en fit part aux .Maure^
de Dabibe , de (tarubic et de Ledei-
hambre, qui, effravés d'un pareil des-
sein, et crai,;nanl d'êlre subjugués à
leur tour , conspirèrent en secret sa
perle. Il leur fournit lui-même, par
um imprudence, les moyens d'eiécuter
leur oilieux complot. Il avait perdu
^521) un de ses capitaines. Un ban-
quet eut lieu pour célébrer , selon
la coutume des Niaures, les fanéraille»
du défunt. Jehabentafuf y vint sans
défiance, suixi seulement de trois de ses
officiers. Au milieu du festin, trois des
conjurés >e précipitèrent sur le héros,
et lui portèrent plusieurs coups de poi-
gnaid dont il mourut à l'inïttant. .\in.si
périt , victime de sa trop ^énéreust
confiance, ce guerrier célèbre, modèle
de courage, de sagesse, de modestie et
de désintéressement. \^ nouvelle de sa
fin tragique se répandit dans son camp
et v [K)rta la douleur et la consternation.
On résolut de venger ce meurtre détes-
table. I.es Portugais se joignirent aux
Maures de Jehabentafuf, el massa-
crèrent un grand nombre d'infidèles.
JKMOTTK, JKLVOTE ou
(iKLIO TK f|*iKRRK\ la plus belle
haute-contre que Ton ait entendue à
l'académie ro>ale de musique, s'il faut
en croire les anciens amateurs, naquit
LWin
II
161
JEL
dans le Béarn, d'une famille obscure,
vers 1710, et fut d'abord ciifaiit de
chœur à Toulouse, d'où le bruit de sa
réputation le fit appeler à Paris, aux
frais de l'administration de l'Opéra. Il
débuta sur ce théâtre avec le plus
brillant succès, au mois d'avril 1733,
et fut aussitôt en{:;ao;é aux appointe-
ments de douze cents francs. On les
^augmenta proc;ressivement jusqu'à àeu\
'mille cinq cents francs, en 1740, non
'CïOTiipris trois cents francs pour pain
et vin. En 1741, on les porta à trois
raille francs, et on y ajouta deux mille
francs de ojratîfication tant annuelle
qu'extraordinaire, outre les trois cents
francs de pain et vin. Jfeliotte créa un
gramd nombre de rôles, tels que ceux
de harchmus, de Zoi'oastre, de Ti-
tan, de (lastor, dans des opéras com-
plètement oubliés aujourd'hui , mais
qui furent très-suivis dans un temps où
l'art musical, malgré le génie de Ra-
meau, ne laissait pas entrevoir les pro-
grès qu'il fit sous Gluck, Piccini et
Sacchini. Aucun acteur, peut-être,
n'a eu en France une existence plus
heureuse et plus honorable nue Je-
liotte. On tressaillait de joie ilès qu'il
paraissait sur la scène ; on l'écoutait
avec l'ivresse du plaisir, et toujours les
applaudissements marquaient le repos
de sa voix remarquable par le volume,
la plénitude des sons, et par l'éclat de
son timbre argentin. Comme il était
bon musicien, et qu'au talent de chan-
leur il joignait au suprême degré celui
<!e cohiédien , son état ne lui coûtait
aucune peine et ne lui causa jamais de
'désagréments. Chéri, considéré parmi
SCS camaradps qu'il traitait avec une
politesse amicale, mais sans familiarité,
il vivait en homme du monde. \Jn es-
■prit cultivé, Mn caractère gai, complai-
sant, doHX, simple et modeste, plus en-
core que sa voix et sa guitare, le faisaient
accueillir, désirer partout, cl il n'était
'déplace nulle part. Quoique Jéliotte
JEL
ne fut ni beau ni bien fait , il s'em-
bellissait en chantant, et charmait les
veux autant que les oreilles. Homme à
bonnes fortunes, il était renommé par
sa discrétion; et, de ses nombreuses con-
quêtes, on ne connut que celles qui
voulurent s'afGcher. -Le premier usage
qu'il fit d'une petite fortune, fruit de
ses talents, de son économie et des
grâces de la cour, fut de procurer de
l'aisance à sa famille. Il jouissait dans
les bureaux des ministres d'un grand
crédit qu'il employait à rendre des
services essentiels à la province où
il était né. Tous les ans, il lui était
permis d'y faire un voyage, et de Pa-
ris à Pau son passage était marqué par
des fêtes continuelles. Il avait à Tou-
louse deux amis qu'il préférait à tous
les autres , son ancien maître de musi-
que et le tailleur chez lequel il avait
logé. La noblesse, le parlement se dis-
putaient le second souper que Jéliotte
faisait à Toulouse ; mais le premier
était réservé à ces deux amis. Le 15
mars 1755, il parut pour la dernière
fois sur le théâtre de l'Opéra. 11 ob-
tint sa pension de retraite et continua
de jouer aux spectacles de la cour jus-
qu'au 9 novembre 1765. Il y avait
fait représenter en 1740, pour le ma-
riage du Dauphin, Topera de Zclisca
dont la musique était de sa composition
et les paroles de La Noue. De retour
dans son pays où il jouissait de U plus
grande considération, même auprès de
son évêque, il fit encore quelques voya-
ges à Paris, et mourut presque octogé-
naire , en 1788. Jéliotte inspirait le
bonheur dont il portait l'empreinte sur
.sa physionomie, et sa prospérité qui ne
.se démentit jamais fut à l'abri des traits
de l'envie et de la haine. Il a composé
la musicjue de beaucoup de chansons
qui , suivant Laborde , paraissaient
charmantes , même quand elles étaient
chaulées par d'autres que par lui.
• A — T.
JFN
JEN
iG3
JKMIXA (MARC.A!«Toi:«r\
!• MÎ*, n^a Villa-Nova ,
f » l'an
«' ut du
l\|.Mi >. \r « • ! llc-t I7'>V. On a Jr loi
1rs oii\r.i}:r"i siiiNnnts : | . Dr Jchre rpi-
{inriiru, MoTnlt)\i, 178'), în-8". CTr^l
la li^Nfription rl'im'* >-u't\, nve de ficuc
|»rfifliiale qril rr. < ville ri la
)• ■•■ -- 'rMon.ln, ... 17.S|ftl7Hr>.
( .• a ^t^ r^lmf»rinié «lan» let.
\ ' clrBma.
11/ ( irmmm ,
(fiirr^^ii.r: iJuujiu i vallr
l'tmfiri fhrminis $Htt :,t in
/ :n 17«7, Moml,Ai, 17H').
I If tn-^nir voltiuir, Jrmina
ut* antres opus-
«: I" Drnir-
fnmr sicr éurhunnitit hucitfu ; 2" Ad
mrvni Hr frhrr rpiilrmiru opusruhim
<if ;-'}(H.t ; 3" l)f gangrrnnsis htm-
hurum ufrrrifnis ; i** Dr mUinrium
rrssatwnr vri sa lient rarîtatr. On
trouve l'anal > se dr ce^ divers ouvra;:e^,
nîn<i ryin» la nntr de qiielqne^ m:>nii-
^i : i Bri\5.\Ri» baron PK\
nvant orientaliste, naquit en M'^\ à
N icnne, où çon père ren^li^isail une
jlare dans les bureaux de la clianrelle-
"" • ••^ '" *^<» destinant à la rar-
e, après avoir termine
—s (,.,i- ; ,1 iii-t(»ire et de philo>op!iie,
il étudia les lan;;ues de l'Or'ent et s\
rendit bientôt très-habile. Il fut, Cfl
1705, attaché comme serrrtaiie 4
ranibnssade d'Autriche à G>nst2nli-
nople; et deux an> aprè> il rfv::it i
Temeswar arec le litre iT
EnTOvé siirressivement d.i . -i
résidences , il montra en plusicars oc-
casions des talents qui lui procurè-
rent un avancement aussi rapide qu'ho-
norable. Secrétaire du cabinet en
1770. il fut, on 1772, accrédilc pré*
dr ' '' ottomane comme chargé
d IVmprreiir. A son retour
i' Ml dr< fioiiliè-
T' , MMiire acquise
1. Vuiiiilic. l'.u 177G,
il ! ' r aulique; rn 1791,
cnnse llfr a la chancellerie intime ; «,
en 17'J8, directeur de la chancflJerie
italienne. Il mourut à Vienne le 13
fé%rier 1H(»7. Des 1772 il axait suç-
tét\i au célèbre Vao-Swieten daiv^ la
place de con erratcir de la TV '
nur impérialr. (^ fut JrmM .
pnala-
natrr i^
rvr : / , . . ^\\ II| .
:ifs I . ,. H,' . •• : _ ._ t ane
curietise dissertation : Ife /utis lin-
ptaritm orientutium nimirum ftrr-
sirijf rt furdcit, dont il existe des
exemplaires tirés i part , Vienne,
1780, in-lol. -de 161 pa^;. On lui doit
encore : llisiitria priorum rrgum
Prrsarum ftost finuatum in rrgnu
i-'^ ■■! ri ytohunietir Mir-
t ' r rt Itit.^ riini iiotis gru-
'■iis, Vienne, 1782,
^^ll;KH(^^!) ,X\1\,
l^.i', cri ouvrage est date de 1792
par erreur tvpo^raphique. AV — s.
.TFA'Kf.V ;\Vniu>i\ théolo-
gien an;;lais, non conformihte, naquit
en 1(>12, i Sndburv où son père était
ministre. Après a\oir fait de Driilaales
études à Canibrid;;e, il reçut les or-
dres et fui successivemeot attaché à
plusieurs églises comme prédicateur.
Il fut nommé en IGil ministre de
Christ-Qiurch, dans New^ate-St.ccl.
à Londres, et prédicateur de Saintc-
'^nne L/ark friars (les l'énilcnts
noirs). Mais lor.<qMe la révolution eut
éclaté, le refus d'obéir aux injonctions
«bi parlement lui coûta ses bénéfices;
et il fut même plus tard enfermé dans
la Tour , comme .lyanl trempé dans la
conspiration de Love qui avait pour
i64
JEN
but la restauration du trône. Cepen-
dant le pouvoir dominant lui pardon-
na ; il put rentrer dans son é;^lise, et
ce fut précisémeut celte restauration
qu'il appelait de ses vœux qui fut
inexorable pour lui. Le refus de con-
formité lui Gt de nouveau perdre sa
position, et sa persistance à prêcher
de côté et d'autre moliva, en 1684-,
son arrestation. Détenu dans New-
sate, il V fut traité avec une f'rande
• •'i II • • • •
rio;ueur, laquelle jointe au mauvais air
de la prison, mit bientôt son existence
en danger. Une pétition, appuyée par
des certificats de médecins , trouva
Charles II sourd à la voix de Thuma-
niîé. On ne put obtenir de lui que cette
réponse inconcevable, eu égard au dé-
vouement antérieur du prisonnier :
« Jenkin restera en prison le reste de
« sa vie. » Le malheureux mourut
quatre mois après son incarcération, le
lî) janvier 1G85. Calamy rapporte
qu'un seifi;neur, avant été informé de
cet événement, l'annonça au roi en
ces termes : « N'en déplaise à votre
«« majesté, Jenkin vient de redcvemr
« libre.» — « Et qui lui a donné la
*t liberté '.' » demanda Charles —
« Quelqu'un qui est plus o;rand que
« votre .majesté , le Hoi des lloisl »
reprit l'homme de cour qui ne faisait
pas sa cour en ce moment. Cliarlcf II,
ajoute Calamv, parut frappé de cette
réponse et {:;arda le silence. Le défunt
fut enterré avec une grande pompe, et
«n 1715 un monument lut élevé à sa
mémoire. William Jenkin a publié
quelque^ érrits de controverse , des
sern:ons, et une Exposition de fK-
pitre de Jude, 2 vol. lu-ï" et in-fol.,
ouvrage qui a conser\é de la répu-
tation. L.
JKXKI\ (RoiîKRt), théologien
anglais, né en lG'>f> à Minstor dans
l'île de Thanet. fut princi[ial du col-
lège de Saint -Jean à Cambridge, pro-
h— fpi de théologie , chapoiniu (!u
JEN
docteur Lake , évêque de Chichester,
et précenteur de cette église. Il perdit
ces bénéfices à la révohition de 1(>88
comme réfractaire au serment, et riiou-
rut dans un état d'imbécillité , en
1727, âgé de soixante-dix ans. On a
de lui plusieurs ouvrages qui furent
bien accueillis du public, entre autres :
I. Examen liistoi-ique de V autorité
des conciles généraux, 1688, in-4°.
II. Defensio Sancti yiugustini ad-
' versus Jo. Phcrepununi, 1707, in-
8". 111. Une traduction anglaise de
la Vie d'Apollonius de Tyane, du
français de Tillemont, 1702, in-8".
IV. Remarques sur quatre livres
récemment publiés, savoir : V His-
toire des Juifs de lîasnage ; huit
sermons de AV histon ; la Paraphra-
se et les notes de Loke sur les Epi-
ires de saint Paul, et la Bibliothèque
choisie de Leclcrc. V. V excellence
(leasonablcncss) et ta certitude de
la religion chrétienne, ouvrage dont
il parut en 1721 une cinquième édi-
tion corrigée. S — D.
JEXKIXSOX. Voy. Liyer-
pooL, XXIV, 576, etauSuppl.
♦ÎEXKS (1jKiNJ\:\iin), théologien
anglais, né en lGi6 d'une ancienne
lauîille du Shropshire , fut recteur
d'Ilarlay et de Kcnley dans celte pro-
vince, et (^apelain du comte de lirad-
ford. 11 est auteur de quelques ouvra-
ges dont le plus connu e. t intitulé :
Prières et ofjices de dévotion^ dédié
à Williams , évoque de Chichester ,
avec lequel Jenks avait un degré de
parenté ; ce livre a eu un grand nombre
d'éditions, la 27'', en 1810, retouchée
par le révérend (jli. Siméon. On cite
de lui des Méditations sur dioers
sujets importants , reproduites en
1756, 2 volumes in-8", avec une pré-
face de J. Hervey. Une de ces mé-
ditations roule sur son cercueil qu'il
avait préparé , qu'il tint près ilc lui
(tendant plusieurs années, et dans le-
JEN
(lucl il atait pbré deux crâne», dont
1 uu ^ait celui iriiii de »es prorlir>.
JriiLs e>t mori a Ilarla> en \ i'2\. !..
JK\kS (>>iiNfSTnK), naquit
tlan% le Srliopsliire. A|»rrs avoir fait
&nn cour» il'etuJrs r\ pr(ifr«.<r |irn(laiit
MX ans la philosopliir dan» le rollr;;e
anglais lie Doiu; , il (ut renvoyé rn
Angleterre comme missionnaire, et en
eierra le« fonctions avec beaucoup de
iucces ihns le comté de NNotce^ler.
l/e roi .lacnue> II, in^tiuit de »es ta-
lents |>our la prédication , l'appela i
Londre>, et lui dni;iia le titre de son
prédicateur. Lors de la révolution qui
«envers ce prince lii trône, il le sui-
vit sur le continent. pJlsa le rc'te de
va %ie, partie en Flandre, pat lie en
An;;letene, et mourut a l^ndies en
171*). Doué d'une conception facile,
d'un esprit net, Jrnks avait une con-
versation a^realile, et qui le tendait
inteiessant dans la société. Il joi|;nait
i ces qualités un (;rand fonds de re-
ligion qui lui attira le respect et la
confiance de tous se* compatriotes ca-
tholiques ; ils lui en donnèrent lies
preu\es non équivoques en 170:l ,
en le pri>po>^anl pour être éle>é à
l'episcopat et pour remplir le> fonc-
tions de vicaire apostolique en An;;le-
lerre. Mais, malj^té les soUicitalioiis
de rinternoncc de Bruxelles, qui le
pressait de se rcmlie aux vtrux de
ceux qui le (lemanJaienl pour leur pre-
mier pasteur, il s'y refusa constam-
ment par liumilité. Ses ouvra;;e$ rou-
lent presque tous sur de* sujets de
morale, et attestent combien il était
occupé des devoirs de son état : 1.
fermons, iiiS^. \\. Lrftrrs ou Trat-
iè concernant U cuncilr dr Trrntr.
III. Obéissance Oifeugle d'un hum-
ble pénitent , comme le meilleur
remède contre les scrupules, 1G90,
in-12. ï\ . Sécurité d'un humble
pénitent, en ferme de lettre adres-
sée a H. S., 1700, in-12. V Le
JEN
i60
raur humble et contrit, twec le y
mttiifs et les cwisidérations propres
ùle/itrmer, lti«JH, iu-12. V|. Jous
les dexHjirs du chrétien , en troi.s
parties, 1707, in IJ C'est un fidèle
jkr^è du ( Jitéclitsmr du concile de
Trente. V||. Essai sur C amour de
Dieu VIII. Abref^é du précédent
ou^ra^e. I\. (.ourte atuilyse du
lii're de Jansenius. 1710, inliî. \.
Distours sur la soumission u la
pttissanre dii'ine . manuscrit. T — I».
•IKWKli (Cm AiiLKs). littérateur
ançlai<», né en 1737, fil «es Téludcs
dans l'ani^ersité de (Iarohrid;;e, et
obtint en 1767 et fi'J , les pri\ fondé)
p.ir Sealon. Il fut depuis recteur de
qiiri'].ies pami^ses en di(Terent> comtes.
el mourut en 1771. I^s ouvraj;es qu'il
a jiroduits en plusieurs ;;enres, tant en
prose qu'en vers , n'ont pas eu un
j;rand succès, et ne sont plus ;;uère lus
aujourd'hui. Ce sont : l.ouisa, conte,
poésie, in-V, le Ihm des langues,
poème ; la Destruction de A intime ;
des Eglogues urbaines ^Town eclo-
Ruesl ; lettres de Jxtthario it Péné-
lope. 2 vol.; quelques comédies, etc.
JFWKR (F.iM)rAr\t»\ médecin
an;;lais, qui a allaclir ;:lor icii^cmnil :>oii
nom à la découverte et à \\ propn;;atioii
de la vaccine, naquit le 17 mail 7 i9,
■». PeUlev, comte de<ilore.ster. Il était
fort jeune lorsqu'il perdit son pèie ,
mail:e-ès-arts de l'uniAersitc d'Oxford,
lecteur de UocLhamplon et vicaire de
Ilerle!e\ ; mais les soins affectueux de
Jean .lenner, son frère aîné, adouci-
rent le malliem de celte perte. Apiès
avoir terminé sa première éducation
xCirce.-ter, Kdouard fut mi«; entre les
mains ile Daniel Kudlow, chirurgien
distingué à Sudburv, qui lui servit de
maître j'ispjn'en 1770. C'est là qu'il
fut atteint d'une affection hypochon-
drianuc, d'où résulta une susceptibi-
lité morbifique qu'il conserva toute sa
i66
JEN
JEN
vie. A celte époque (1770), il vint
demeurer à Londres chez le célèbre
Jean Ilunter qui, frappé des iieureu-
ses dispositions de son élève, Tassocia
bientôt à ses travaux. Les progiès
qu'il fit sous cet h.ihile maître, psrt%-
culièrement dans l'étude de l'anatomie
comparée, lui valurent la proposition
d'accompap;ner le capitaine Cook dans
son premier voyao;e autour du monde,
mais Jenner refusa les conditions avan-
tat^euses qui lui furent offertes. Un peu
plus tard il refusa én;alement une place
lucrative dans l'Iude, par attachement
pour son frère et pour son pays natal.
Après être resté chez Hunter deux an-
nées environ , Jenner alla s'établir à
Berkclev, pour y pratiquer la chirur-
gie. C'est là que, malo;ré les devoirs
pénibles de sa profession, il trouvait
encore le temps de cultiver l'étude de
la ph)sioloo;ie et de l'histoire naturelle.
11 est parvenu spécialement à éclaircir,
par des observations exactes et variées,
un point d'ornithologie, jusque-là très-
obscur pour la plupart des naturalistes.
Ce point est relatif aux mœurs du cou-
cou, à la ponte de la femelle dans le
nid d'autres oiseaux , et au moyen
qu'emploie le petit à peine éclos pour
expulser, du nid où il a élé couvé, les
œufs ou les autres petits oiseaux, et
usurper ainsi non-seulement leur de-
meure, mais encore la tendresse de
leur mèie. Voici comment Jenner ex-
plique la manière très-remarquable
dont s'y prend l'usurpateur: « Le
« jeune coucou, peu d'heures après
" sa naissance , en s'aidant de son
• croupion et de ses ailes, tache de se
« glisser sous le petit oiseau dont il
« partage le berceau, et de le placer
« sur son dos, où il le retient en éle-
« vant ses ailes. Alors se traînant à
« reculons jusqu'au bord élevé du nid,
<f il se repose un instant ; puis, faisant
« un eflbit, il jette sa charj;e hors du
" nid, et îate ensuite avec l'extrémilc
« de ses ailes, comme pour se con-
« vaincre du succès de son entreprise.
« Quelquefois en grimpant sur les
« bords du nid, il y laisse rçtomber
« sa charge; mais bientôt il rccom-
« nience son travail, et ne le disconti-
« nue que lorsqu'il en est venu com-
« plètement à bout. On est surpris de
« voir les efforts réitérés d'un coucou
« de deux ou trois jours , lorsqu'on
« met à coté de lui un petit oiseau
« déjà trop lourd pour qu'il puisse le
« soulever. 11 est alors dans une agita-
it tion continuelle et ne cesse de tra-
it vailler. Mais quand il approche du
« douzième jou» de sa naissance , il
« perd le désii- de jeter ses compa-
« gnons hors du nid, et ne les y.in-
« quiète plus. La configuration part-
it ticulière du jeune coucou est très-
« propre à lui faire exécuter cette ex-
« pulsion. Différente de celle des
« autres oiseaux , la partie supérieure
« de son corps, depuis la nuque jas-
« qu'au croupion, est très-large, et
« on aperçoit dans son milieu une
« dépression considérable : il semble
« que cet enfoncement soit fait pour
« placer plus sûrement les œufs ou
(( les pelits oiseaux que le coucou veut
« rejeter ; car dès que le jeune oi-
« seau a atteint à peu près son dou-
« zième jour, cette cavité est entière-
« ment effacée , et son dos ne diffère
« en aucune manière de celui des au-
« très oiseaux. L'obligation qu'a le
<« jeune coucou de rejeter les œufs ou
« les petits oiseaux de leur nid corn-
et mun, rend raison du soin que la
<t femelle de cetle espèce prend de
« pondre dans les nids d'oiseaux À%
't petite taille » (()hseroatiorts sur
r histoire twturelh du coucou , extrait
des Transaclioiis philosophiques de
Londres^ année 1788). Ces nouvelles
et intéressantes recherches excitèrent
Taltention des naturalistes, et valurent
à Jenner l'honneur d'être reçu raem-
JEN
JI.N
hre (Je la > jle »!< I^mlri- .
liifll qu'il •• pMfil «If rlt:-
fii I'.
|.|U>I.M ,
pour obienir du l.ulir iiuciique |;ur.
Il patajl auNM aMur ilccou\ril, ai l'un
en croil le docteur rarr>, dr 1\mU, U
rausc de l'an^riif de puiliiiie, quoi-
qu'on attribue tommun^mriit relie
roiina;<isanre an docteur llebndcu.
^i.l:^ rp qui détail iinuiurlalisri le nom
de .irnner, re »• .< rs ri
le* ol>«er\aiion.s ; >-« li-
>ter a>rc uiir j. .
pour rLililii d une m
ble la pro|»iir[r li < .
nne. .\\anl nr.iuiiio !
de gloire qm lui retient a lorc^ion
de cette dccou\erte, il n'est pa» liois
de propos d'en tracer rbi>tori(|ue ,
et pour cela nous ne pouTouA micui
faire que d'emprunter à M. le docteur
llu»5on une partie de l'etrelleut aili-
c\e iHirnnr . \ni\Att dans le Uiciiun-
nnire tirs siien' rs mrtJùuIts, timie
I.NI.On \ienl de derouMir lh21 ,
dans le SiituU\a granlliuiit, ouna^e
aij>fnl Im-amii-n , atudiue a l)liaii-
>aiitaii, des preu%e& que linocuLlion
de la \accine était connue des auteuis
induus, qui, dans le> temps reculi-a,
ont écrit sur la médecine. L'auteur
décrit neuf espèces de petites ^croies,
dont \\ reconnaît aue trois sont iucù<
râbles. 11 indique les relies siii\ante$
a observer pour l'inncuialion ; « l're-
« nrz le lluide du bouton du pi> d'une
« vaclieou du bra'.d'un liomnie entre
« 1 épaule et le coude jusqu'à ce que
•« le sans» paraisse, b* lluide >e inél.int
« avec le sanu, il en rtsiiUeia la lj«\re
« de la petite \érole. Cx-iie ci, produite
« par le iluide tiré du boulon du pi^
« de la \arhc, sera aiis.si be tii^nc nue
N la maladie naturelle. Elle ne doit
« pas occasionner J* alarmes, cta^exi-
« géra pas de traitement médical. Le
« malade suivra la diète qui lui con-
« «iendra . il pourra «Uie inoculé urit
'< fefilr f.'s, (i!j driiï, trois, quatiC»
i.«* bouton, pour elle
c tl une bonne cou-
• leur, rempli d'un liquide clair el
•« eulourc d'un cercle iuU|;e: oa n^
H doit ua5 aaindre alors d'clic alla-
•■ que (M U petite \erole pendant tout
« jeie>ledesa >ic. Quand l'niuculao
« tiou a lieu par le l! ' ' t du
m boulon du pi> d une i^iica
•• pcrsonue* ont I ^iiiprii-
•• dani deiit nu : et qurl-
acco de
.Kcom-
au&
- de
» la pcl Ile \ noie, mais dune nature
*. tie3-beiii^ne. Il U) a aucuQ dan-
a ^cr, et le tout disparaît en Iroi*
•• jours. » Ce» piécieux détails sonl
conliiniés par d'autres, <|ui oui ctë re-
çu i i lus rapprocbée
di '•>. Le nabab
M . eu
1. c de
(ii.aX.p.iUt , d.4l.ll lie Lciiu.i., Gl
vriir un brauiiiie iiomnie Vlrp-( )iob>,
qui s occupait pliu pari l de
cette maladie. Arrivé u- ' |Our
dererupltoB, ce bramine t('iuui;;ua le
re^rel de n'avovr pas de appelé plus
lui, et ajouta qu'il eut pu la pie\eoir :
« .le (^arde, dit -il, un lit trempé -dans
•• la matière qui découle de la pu^lule
« de la vaciic, et ce dl me donne le
•< nioMo de piocuier à volonté une
M éruption lacile: je pa.'se dans une
<' aiguille le Ijl iniprr^^iié, que j'insiuue
« entre l'e^-îderme el la cliair de Teu-
« faut dan.i la pai iiesupei ieure du bias
« ou je le laisse. Ce til procure tou-
" jours une éruption facile; il ne sort
M qu'un ti €>-pclil nombi e de puilules,
« et jamais aucun eiifaul ne lueurt de
- celte maladie. » \.ti A mut Us déchût
mie el de physit^'te (lom. X, mai*
1819 ^ conlienuenl une lettre de
i68
JEN
M. W. Bruce, consul à Bushire ,
adressée à M. W. Erskine, de Bom-
bay, au sujet de la vaccine, et conçue
en ces termes : « Dans mon dernier
« voyage à Bombay, je vous annonçai
« que la vaccine (the roiv-pov) était
« connue en Perse parmi la tribu no-
« made des Eliaats; depuis mon re-
« tour à Bushire, j'ai pris à ce sujet
« les plus exactes informations auprès
« des individus de cette peuplade qui
" y viennent l'hiver pour vendre de
« la laine , des tapis , du beurre , du
« fromage, etc. Les troupeaux, dans
« celle saison, descendent des monla-
« gnes, comme vous savez, et se réj»an-
«< dent dans le pays plat Tous les
« Eliaats auxquels je me suis adressé,
« quoiqu'ils appartinssent à sept ou
« huit tribus différentes, m'ont, d'un
« commun accord , assuré que ceux
« d'entre eux qui sont employés à
«' trai'-e les troupeaux gagnent une
« maladie qui les préserve parfaile-
«< ment de la petite vérole : ils ajou-
« taient que cette maladie régne par-
« mi les vaches, et a principalement
« son siège sur les pis ; mais que les
« brebis y étaient encore plus sujettes,
« et que c'était d'elles surtout que les
•< beigers la prenaient. Ce fait , je
« pense, n'était pas connu jusqu'ici.
« Je ne conserve toutefois aucun doi'te
•« sur son exactitude : car il m'a été
" assuré par quarante ou cinquante
«' personnes diiï/'renles, et il faut re-
<' marquer qu'elles n'avaient aucun
«« intérêt à me tromper. Tour être
** plus certain encore, s'il était pos-
<' sible, je m'adressai à uu feimier
« très-respectable, nommé iMalalla,
« dont la dcmeuie est à quatorze milles
« d'ici, et qui m'a quelcpies obliga-
*t tiens. Cet individu confirma non-
«' seulement tout ce que j'avais appris
« àe.a FJiaats , mais il ajouta (pie la
" maladie est fort commune dans le
" pays qu'il habite, et que ses propres
JEN
M brebis l'ont très-souvent. » Le pas-
sage suivant, tiré de V Essai politique
sur le royaume de la Nouvelle- Espa-
gne,\>u M. de Ilumboldt, montre que
les habitantsdelaCordillière des Andes
avaient aussi remarqué l'eflet préserva-
tif du vaccin : « On avait inoculé (en
« 1802) la petite vérole dans la mai-
« son du marquis de Valleumbroso à
« un nègre esclave; il n'eut aucun
« symptôme de la maladie. On vou-
« lut répéter l'opération , lorsque le
«' jeune homme déclara qu'il était
« bien sûr de ne jamais avoir la pe-
« tite vérole, parce que, en trayant
« les vaches dans la Cordillière des
« Andes, il avait eu une sorte d'érup-
« tion cutanée, causée, au due d'an-
« cicns patres indiens , par le con-
« tact- de certains tubercules que l'on
« trouve quelquefois aux pis des va-
« ches. Ceux qui ont eu cette éruption,
<f disait le nègre, n'ont jamais la pe-
«< tite vérole. » A ces documents nous
pouvons ajouter d'autres faits qui ne
nous paraissent pas moins importants,
et qui prouvent que la vaccine était con-
nue et propagée long-temps avant les
premières expériences de .ienncr. 11
est certain que dans différentes parties
du Devonshire , du Sommerset , du
Leice.stershire , du Slaffordshire, du
Midlesex , on sait par une tradition,
dont il est impossible de fixer l'origine,
que les individus qui, en trayant des
vaches , contractent des pustules aux
mains, sont, par la suite, exempts de la
petite vérole. La même opinion existe
dans la Carinthie , le Holstein, le
Mecklembourg et aux environs de Ber-
lin. Le chirurgien Fewster, de Thor-
nebury, et le docteur Sulton, célèbre
inoculalcur de la variole, trouvèrent ,
en 17()8, un grand nombre de paysans
auxquels ils iiioculèrent la petite vérole,
.sans pouvoir la leur faire contracter.
Ces paysans les assurèrent que celle
résistance à la contagion provenait
Ae ce qn'iU avairni ru la rarcine. Lr*
«Ifu» pralinriis firriit alors de."» irclirr-
rlir> ri ronslalrreiil la |u»lr.v&c(le rrllc
oli-«r\ Jlion Krwiler en parla inrinr
Jjri> une «ociHé nirdicale lioni il riait
locnibre; mai* re premier aperçu tomba
roRipIrleroent tians l'oubli. Il parait
que c'est en France , clan» l'annre
1781 , que l'idée prrmirre de la possi-
bilité du transport d'une éruption i\f
la \arlie sur l'honme a eu lieu; que
crtir idri". rmisr par un Kr.i'i i
un mrdrriii anglais, a rir r«i <•
par rr drrnirr au docirur Jriii.ri , qui
ensiiitr, appliquant toute »on attention
a re fait , aurait ronsulte les traditions
populaires du pa>5 ou il exerçait la
nieilrnne, et aurait appris que depuis
lon;;-temp» on v coniiuissait cette pro-
priété qu'avait la maladie de la >ache
non-seulement de se communiquer a
l'homme, mais encore de le préserver
de la petite \rrole. C^ fut Qiaptal ,
aiois ministre de l'intérieur, qui trans-
mit an comité central de \accine, établi
à Paris, les faits suivants qui ne lais-
sent aucune espèce de doute sur l'on-
;;ine vraiment française de la vaccine,
et méritent consrqunumrnt d'rtie lap-
f>ortes avec tideitle. llabaut-l'ommirr,
ministre protestant à Montpellier a\ant
la révolution de 17h9, fiappe de ce
que , dans le Midi . ou confondait,
sous \t nom i\e f/iruttr , la petite vé-
role de l'homme et le claveau des mou-
tons, en demandait un jour la laison
à unajiriculteur des environs de Mont-
pellier: celui-ci répondit que cette ^Z-
lotfr atteignait aussi le lra>on des va-
«iics, et il ajouta que le cas était rare, et
la maladie lres-beni|;ne. Acetteépoque
(1781), il y avait à Montpellier un
riche négociant de Biiklol, nomme Ir-
laiiii , qui, dt'puis plusieurs anne.s ,
venait passer Thivcr dans cette ville
a\ec un moiloiiri anglais, le docteur
Vcv,. Kabaut-Pornmier s'était intime-
ment lié avec ces deux messieurs: un
Jlî^
»09
joarqiie la conversation roulait sur Tr-
noculation, il leur lit observer qti'iV
serai/ prolnélilmuiit tumititiifux d'i-
iHMuUr a l huiuntf lu fjicutte drs
Viuhes , iMine tfu'elti- rtail cun-
stuniment sans Jutifirr. On disserta
lon;;ueroeiit sur cet ub|rt, et le docteur
Vt% j;outa que. • il6t ijn* ' . ■ .< i ùc re-
tour en .\n;;icterrc, il proposerait ce
nouveau ;;enrT d inoculation à Min ami
le docteur Jeûner. I)iv-liuil au» après,
c'est-a-diie en 17l>9, Uabaul enten-
dant parler de la derouvrite de la vac-
cine crut voir realiri va prévision,
et écrivit à M. Iiland pour lui rappe-
ler leur C(>nversation a ce sujet, i^liii-
ci répondit par deu\ lettre> , doiit
Chaplal lut l'orij^inat : i|u'il se soute-
nait fort bien de tout ce qui avait été
dit à Montpellier, ainsi que de la pro-
messe de M. lVv« d'en parler au doc-
teur Jenner , mais qnM ignorait ce
qu'avait pu faire M. l'e« à ton retour.
Tous ces détails ont été raconi«-> plu-
S4euis fois a diverse^ personnes p.ii
Habaut-l'oraniier, qui a1ou|ouis eu la
modestie de ne pas revendiquer l'idée
première de la decouveite. rcimiiiuiiN
cette esquik.se historique en coiicliiai.l
avec M. Ilu.sson •• que la vaccine elail
" connue avant que Jenner s'en fiil
« sérieusement occupe, et que, saus
•« lien ôter au mérite du dorleur au-
" ^lais , qui a étudié , approfondi ,
« e&périmenté et fait conn;titie tout
•< ce qui est relatif à la vaccine, notie
« patrie peut réclamer sa part dans
•« cette heureuse invention , qu'elle
« doit en revendiquer l'idce rucre el
« pieroière; cl que les Anglais qui
« ont enlevé à t'ascal sa presse hy-
« draulique, à Dalesme sa pompe à
« feu, à Lebon son tliermoLnipe, à
u Montalcrnbeit ses afliîts de ruanne,
M à (iuvton-Morveau .ses moyens de
.< désinfection, à Curaudoau .sa théorie
«« du chlore, au chevalier l'aulel sa
- méthode d'ensei^inement mutuel ,
170
JEN
« qu'ils ont appelée méthode à la Lau-
« castre, se sont é>^alement approprié
« tout le mérite d'une découverte
« dont la première pensée leur a été
«< donnée par un Français, et dont
« l'élude et la juste appréciation ont
<c été, même de leur aveu, plus rlgou-
<( reusement suivies parmi nous que
« parmi eux. » On pourrait ajouter
qu'ils ont aussi voulu enlever à Papiu
sa machine à vapeur aqueuse et à pis-
ton, et tout récemment à Dao;uerre son
intéressante découverte. Mais suivons
les travaux de Jenner. Il avait observé
que, dans les (i^randes inoculations de
variole que l'on pratiquait alors en
Anolelerre à certaines époques de l'an-
née, plusieurs individus lésistaient à
l'infection varlollque. Il interrogea ces
individus, consulta les gros proprié-
taires, et, après avoir rassemblé les tra-
ditions populaires du canton, il fut
naturellement conduit à étudier un
phénomène aussi nouveau. Il trouva
que les sujets réfractaires à 1 inocula-
tion étaient pour la plupart occupés
dans les laiteries et qu'ils avalent con-
tractédesboutons aux mains, en trayant
les vaches dont le pis présentait une
éruption connue sous le nom de coiv-
pox, fréquente surtout parmi celles
qui habitaient des pâturages humides.
Ensuite, voulant remonter à l'origine
de cette maladie , il fit de nouvelles
recherches, et il acquit la certitude
qu'elle était produite par la matière qui
suinte des talons des chevaux attaqués
des eaux aux jambes [greiise)^ laquelle
matière portée par les garçons de fer-
me sur les trayons des vaches, était
ainsi inoculée à ces dernières, et leur
donnait le rotv-^o.u; que, de plus, si les
personnes chargées de les traire n'a-
valent pas eu la variole, et si elles por-
taient des excoriatiops aux mains, elles
contractaient des vaches la maladie
(jiie, pour celle raison, il nomma 7v/-
riolœ vnccinœ. Après avoir poursuivi
JEN
en silence pendant plusieurs années,
c'est-à-dire depuis 1792, ses observa-
tions sur Telfet anti-variollque de la
vaccine, Jenner pensa que l'on pou-
vait propager celle-ci, en la transmet-
tant de la vache à l'homme, puis d'un
homme à un autre, suivant le procédé
de l'inoculation varlollque. Ses tentati-
ves, commencées le 14 mai 1796, fu-
rent suivies de succès, et c'est ainsi
qu'il parvint, deux ans plus tard, à
substituer pour toujours à la plus af-
freuse maladie une éruption bornée à
quelques boutons. Dans le premier ou-
vrage qu'il publia sur ce sujet (1798),
il donne les détails de toutes les expé-
riences auxquelles il se livra pour s'as-
surer positivement de la propriété inhé-
rente à ta vaccine de préserver de l'in-
fection de la variole, et il ajoute avec
satisfaction que ses observations furent
confirmées par le témoignage concor-
dant de M. Dolland, chirurgien, qui
avait entrepris les mêmes recherches
dans une province éloignée. Par suite
de cette découverte, Jenner fut obligé
de quitter la vallée de Glocester, et de
se rendre à Londres, oii il consacra
tout son temps à donner aux médecins
les instructions dont ils pouvaient
avoir besoin pour le succès de la vac-
cination, et à entretenir avec l'étran-
ger une Immense correspondance, la-
(juelle devint même tellement étendue,
qu'il fut forcé d'en demander l'inter-
luption, à cause des frais énormes qu'el-
le lui occasionnait. Dès que la décou-
verte jennérlenne fut bien constatée
par la répétition d'expériences multi-
pliées, elle valut à sou auteur d'una-
nimes applaudissements. Toutes les
sociétés médicales de l'Kurope s'em-
pressèrent de se l'associer et de lui
délivrer des témoignages flatteurs de
leur assentiment. Une Soci(^l.é jcnné-
rienne fut créée à l>ondres pour l'ex-
tinction de la petite vérole. Tous les
médecins rivalisèrent de dévouement
JEN
pour propat^rr la pri^ifuse iiuuvrautf».
L.1 Fiaiire fut la prcmicie à l'ac-
I .- iiii b>oi4l)lemciit par Ir^ Miins
lij dur (le 1^ lîoclirfuucaulil , <]ui ,
i de iJu docteur '1 iiourrl, ou\iil une
Miuscdptuiii pour lcljbli>>rineiil d'un
comiltf ceulral de vaccine, charge de
répandre paitout le bieniait de La
iiuu\clie inoculation. Le» aoiuies de
la sriciirc n'offrenl pas dVxrmple
(lu 11 (iiii(uur>« aijvsi unanuur qur rc-
lui qui rut lieu a celle épot|uc pour
anVanrlMr Chuaanile rnlirir du tlrau
\ iji IHOI, lr> mrdrciu> cl
de L nurine inhale au-
^lai>e iii eut frapper en 1 ikonuet.i de
Jeuiicr une médaille qui repre»ciile
Apollon, dieu de la nirdenne, rendant
à rAn^lelerre un malelul •^orri pjr la
>accinc: la ligure alle^^oi ique de l'An-
'--'-- retient a la main unerouroniie ci'
. iu centre de laquelle r>t le nom
cette face a pour le^^ende
I. < str/Ud rrfuLsit. I.ere%ei»
olhf uuc autre , .iii-de*U4 de laquelle
on lit (irorgio IJI rr^r, etau-dessoDs
^' ■' rr tiurr. V.n iKOL.l'impiMatrice
li l'ière de Kussie écrivit à Jen-
iirr une lettre trc>-llalteu5e , qu'elle
arrompa»iia d'un diamant de ^r.iiid
prix, l'our donner à ce médecin d'ecla-
lautstémoi^na^e-i delà reconnai.^^ancc
nationale, le parlement d'AnoIrterre
lui vota drox fois des remerniuenl«
publics et unanimes, lui accorda le '2
juin 1K02 une somme de di\ mille
livres sterling, et en 1H(>7, one autre
de vin^t mille livres , à quoi il faut
ajouter cinq cents lé>'r<. dont le roi
lui fit cadeau ^lotal 7' iiics^
A l'occasion de cette i >■ n na-
tionale, leiameux l'itt, alors chancelier
de l'ecliiquier, proiionra les paioies
uivantes : «« La chambre peut voler
•< pour le docteur Jenner telle récom-
«< pense qu'elle jugera conveuable :
«< elle recevra l'approbalioti Ranime,
«< parce que cette rccomjÉhse a ponr
JEN
171
m objet la plus grande on Tune des
•• plu^ iinport.iulr> dfiouvertes que la
H -.ociete ait laites depuis la création
- du monde. >• Kn 1K(»V, Jenner fut
nomme maire de (Iheltenham , bour<;
célèbre pai se% eaux minérales. Au
mois de tlecembre iKO.'i, le lord maire
et \naliiermrii de l«ondres, lui dë-
cernrreiit les droits defianchise et de
ci(f , et lui en orfi^nt \v diplôme dans
une boite eni « iii<-™#«! .uiiauts , hon-
neur dont il II, car il ne fit
que quelque lurs dans celte
capitale. A>aul (k-iJu sa femme en
iHi.j, li se retira à IterLelev, lieu de
s3k Dai»«ance, avec son fils rt sa lille.
1^ il ne ces^ de consacrer à l'étude 1rs
dernièrej années de sa vie: il cherrliait
spécialement à étendre le-^ applications
préser^alivr^ de la vacrine à certaines
afTections eniptix es, à la en(|uelurhe,etc.
(Convaincu dc^ eiïels avanta;;eut des
irritations artificielles firitées a la sur-
face de la peau, il publia, en lH'i'2,
une lettre adressée à son ami le doc-
letir Parrv. de H:ï|Ii, dsM« hq'iflî.* il
lui conir-
retiT, n
s ration «le
1 «i , .»ns men-
tales, et dans plusieurs autres maladies
des or{;anes internes. O fut là le der-
nier travad de Jenner. Occupé dans
sa bibliothèque , il fut soudainement
frappe d'apopletie, et il expira le 26
janxier 1S*2:1, à Tige de ^oixante-qua-
tone ans. Voiii la liste de ses ouvra-
^: \. The nalunil history of the
tttrkoo : Histoire naturelle du coucou ;
imprimée lians les rraniarti<ms(if lu
siHritti' nntih' tics srirnrrs de Lon-
Mrrs. 178 S. II. ./ prucrss for prr-
purin^ pure emrtir tarlnr hy re-
rristallisalion: IVocédé pour préparer
le tartre emétique par la recrisîallisa-
tion. O mémoire a été inséré dans le
1"^ volume des Trtinsartions delà
société établie par Htuiter pour ta-
mi
JEN
JEN
vunr.ement des sciences médicales cl
chirurgicales , 1793. III. /în in-
(juiry info ilie causes and effccls oj
ihc vciriolœ vaccinœ, etc. : Recher-
ches sur les causes et les eftets tle la
varlole-vaccme, maladie dccouverle
dans piusleurs comtés de l'oiicsl de
rAii^ielerre,notamiîieul dans lecomlé
deGlocester, et connue sous le nom
de vérole de vaclie, Londres , juin
1798, in-r ; 3iWit., 1801. Cet
ouvra(;c que Jenner dédia à son ami
C. Pairy, médecin à Tjalh, a été tra-
duit en latin par Careno sous ce litre :
Ed. Jcnneri disquisitio de causis et
cjfcctilms variolarum vaccinarum^
^ icnne (Autriche), 1799, in-4°,avec
fi:',urcs coloriées; en français par M. L.
C. d(; L^-^** (M. le chevalier de la
Roque), Lyon, 1800, in-8". IV.
Furthcr obsrroalions on ihe variolcc
vacciiiœ: Autres observations sur la
vaccine, Londres, 1799, in-4". A''. //
continuation of jacts and ohseroa-
iions relative to ihe variolœ vacci-
nœ or coiv-po.v : Suite des faits et
observations relatifs à la vaccine, Lon-
dres, 180.0, in-4". VL The origiii
(tf lltc rxiccine inoculation: Orif^inc de
l'inoculation de la vaccine, Londres,
1801. VIL On the varirties and
modifications oj the vaccine pustule
occasionned hy an herpetic statc of
ihe skin: Sur les variétés et les modi-
fications des pustides de vaccine occa-
sionnées par l'état dartreux de la peau,
Cheltenham, 1819, in-V. Cet ouvra-
ge avait déjà été itnprlmé en 180G,
dans le 12** volume du Médical and
physical journal. VI IL Oùsenfa-
l ions on the distrmprr in dogs : Ob-
servations sur les m.ilndies des chiens.
— Tivo cases of sniall-pox injection
communicatrd io ihe fœtus in utero,
under peculiar circunistaiu es, u^ith
additional remarks : Deux cas de pe-
tite vérole communiquée au fœtus dans
la matrice, avec des circonstances par-
ticulières , suivis de remarques. Ces
deux écrits ont été publiés dans le 1^'
volume des Transactions philosophi-
ques de la société médico-chirurgi-
cale, année 1809. IX. Factsfor the
mosi part unobseroed or not duly
noticed respecting variolous conta-
gion : Faits relatifs à la contagion de la
variole, la plupart non observés jus-
qu'à présent, ou du moins sur lesquels
on n'avait point de notions exactes,
1808. X. In référence io ihe influen- .
ce of herpès in modijying the vac-
cine pustule : \)c l'intluence des dar-
tres pour modifier les boutons de vac-
cine. Cet écrit iiil envoyé par Jenner
au docteur W illan , qui le plaça dans
son traité sur V inoculation de la vac-
cine. Des observations analor;ucs, com-
muniquées par Jenner au docteur \'V il-
son Philip, de Worcester, se trou-
vent dans l'appendice de l'ouvrage de
ce dernier sur les maladies fébriles.
Jenner avait encore appelé l'attention
des médecins sur ce point , dans une
lettre publiée en 1821. XL A- Leiler
to Cil. Henry Parry, D. M., on ihe
influence oJ artijicial éruptions in
certain diseuses, etc.: Lettre à Ch.-
H. Parry sur l'influence des éruptions
artificielles dans certaines maladies du
corps humain , avec des recherches sur
les avantages probables qui doivent ré-
sulter de nouvelles expériences, 1822.
Enfin on trouve dans un ouvrage pério-
dique, intitulé V Artiste, plusieurs arti
des de Jenner sur des sujets étrangers
à la médecine. M. le docteur Amédée
Dupau a publié ^\\c Notice histori
(pie .sur Jenner dans la Revue ency-
clopèdiquc ,]!iu\\cr 182i, notice tirée
ensuite à part sous formode brochure.
R— D— N.
JENMNGS (David), théolo-
gien anglais, non-conformiste, né en
1 091 , à Kibworth en Leicestershire ,
fut, en 1718, élu pasteur d'une église
de sa cong#galion dans le quartier de
JBN
\N jppin^, à lAjntfrri, et (;ai(la ceVf
position |)Cii()ant quarante années. Il
cousacra une pu: lie de sa vie à l'en-
sei^neinenl, et exerça sa plume sur
(liOei cul'' «iijrls. Il mourut en 17ti2.
On a de lui : i. licuu/f ri Uititi-
fiigcs li'iinr ftirir /trri wf ^en une
suite de sr: i.Kiti .\ ITJO. 11. Intru-
tluitin'i II i u.mge tirs gU)i>r%, I7i7,
livre i]ai a rié populaire durant plus
d'un demi-sierle. III. Apprl tt in rai-
son et fiu srns rurnmun tutu iuntt in
vrritf (If s Saintrs- Ecritures. \\ .
Introiiui tiun a ta runnuissam e des
metiailies . V . , tntiquites /uu^es^ ou
>>uite lie ie^uns sur ies trois pre-
miers irx'res de M dise et .iuron, de
f^oc/tviVi, auxquelles est [ointe une i)is-
sertutiun sur la ioriffue iieiiràiifue,
176fi, '1 vol. in-8". (^t ouxraje, pu-
Idié sur le manuscrit de Jennin^^ par
le docteur t unieaux, jouit d'une juste
irpulalion. L'édition en était épuisée,
et l'on en dnirait une nou\elle, elle a
[laru \rrs l'année IHI 1 . L.
JK.\\I\C;S HF.Nni-(>»l«STAN-
tin\ antiquaire anglais, aussi fameui
par >e$ bizarreries et les vicissitudes de
sa fortune que par $es collections, était
natif du roitité d'( )\rord. SliiplaLe , où
il vit le jour en I7ii2, clail un ma^ni-
fique douiaiiic depuis loii;j-lfmps ap-
paitenaiil a^faiu<!!L> (pu ti^ii:.tit par-
mi 1rs plus riche:» e( même parmi le^
plus nobles du comté, s'il e:^t Mai que
les marqi:is de lla^tin^s, que le> foni-
tes de liuntin^ton en lus^nl des
branches. Outre cei a\anla^es, Henri
Jenninj;> ii'avatl m fierc m sceur.
On devine aisément que ce jeune
héritier ne fut point victime de maî-
tres trop sévères cl qu'il eut la li-
berté de se livrer à ses j;oûls. lu heu-
qu'il amiÀ
de l'esprit
il étudiait au ha-ard et sans choix ,
ne suivant que l'inspiration du nio-
ment, et ajoutant sans cesse à l'exceii-
tourisle, le>i»eletiiia^fsqu'il a\ait com-
mences le sabre au cùté. (^ pelerina-
reux liasard voulut qu'il amiÀt assez
l'étude et <ju'il eût de l'espi
JEN .173
tricité, %m èànma de .1^; \Att*. Il ne
poussa pM méove ft es loin rtducalion
du collège. Au soi tir de l'ccoie de
^^ estroinster, où il a\ait eu pour coi>-
disciples lla<tin^s, lmpe\, (ihurcliiU
et nn comte de lUcLin^liam , il entr«
comrar iiilirirr dans le premier re^i-
m' .lc> .1 picdtl7VH). Mm
q .. r qu'il eût à porter l'élé-
gant umiorme chamarre de bioderiet
d'or, il ne tarda pAs à tiouver les lau-
riers de ^lar» un peu nionotones , et
le duc deCumbetland, de 1 r^lciiicnlaiit
némoire, un peu chan;;eanl. L'épau-
letle alors perdit de «on cliarnie, il r^
signa sa commission après l'alfaire de
klasler Sexen, et il continua, pacifique
isie, lopelei
ices le sabre
fjes furent lon;;s : pendant le temps
qu'il T consacra, il eût pu à l'aise aller
en Chine, pousser a la terre de Die
inen , à la Sou\elle-/>lande, et rete-
nir par l'e^t en .Vn;;leierrc en s'arre-
tant vini^t fois et plus en route II eût
du moins pu \isiter l'Kurope entière,
de la llussie à l'Ilspa^ne, et des elats
Scandinaves à li Turquie, ^lais tl
n'en fit rien, quoiqu'il s* te fût proposé
pe»il-^tre. \u bout d'un couil «cjonr
en France, il passa huit ans de suite en
Italie, dont trois à Home dar:s la so-
ciété de lord Mount llermor, habile
amateur d'uruvres artistiques. La con-
versation de cet inimitable llairenrd'an-
tiqiiesfut contagieuse pour le dr.(ru\ re-
ment de Jennin^s, qui bientôt, a^ant
tant d heuies et de ;;uinéfs de reste, se
mit à faire collettioii d'objets il'arls et
de curiosités et qui, lors de son relotir
dans ses foyers, en emporta une p.icotille
«i^nsidérable. 1^ vent était alors aux
aiittijuités. Les monomanes de 1 espèce
deJennin^sabondaient parm; lt'> riches
de la(irande lirrtaj;ne elenchti i>s3ient
Ui uns sur les autres en lait de lolies
et de prodigalités. Devenu l'heriliei de
^hpiake, Jenmn^s fil de la résidence
174 JEW
délicieuse de ses ancêtres un musée , où
trônait surtout, pai^i les statues et fi-
gurines, un chien sans queue en marbre,
qu'il assurait être la statue iconlque du
chien d'Alcibiade, ce qui lui valut pen-
daut lon»-temps le sobriquet de J)og
Jennings, lequel ne tomba en désué-
tude que pour faire place à celui de
Chillahy Jennings. Chillaby était le
nom d'un cheval venu de Bombay et
qu'il avait payé trois cents j!;uinées ,
croyant béni^nement, sur la foi du ma-
quirrnon, que ce coursier s'était vendu
aux Indes plus de treize fols ce prix.
C'était un noble quadrupède, agile et
plein de feu, bien qu'il ne descendit
sans doute pas en droite ligne, comme
Jennings se l'était rais en tête, des
chevaux cappadociens , qui gagnaient
les prix aux cirques de Piome et de
Constanliiiople, mais fier, fantasque,
et ne se laissant manier commodément
par personne. Jennings, comme s'il
n'eût point eu avec les bronzes, les toi-
les, les bas-reliefs et les médailles assez
de moyens de mener grand train sa for-
tune, n'eu eut pas moins la malencon-
treuse idée de se faire recevoir membre
duJockey-club et de spéculer sur l'agi-
lité de Chillaby aux courses d'Epsom
et de Newmarket. La haute et la basse
aristocratie, qui trichent plus qu'elles ne
jouent à ces tripots d'équitation, ei.cou-
ragèrent le débutant et eurent soin de
le faire martingaler dans cette voie de
ruine ; il y perdit des centaines et des
milliers de gulnées, notamment. contre
un comte d'Abingdon et un vieux duc
de Queensburv dont tout le club, sauf
lui, voyait à jour les roueries éhon-
técs; mais personne n'avait la charité
de les lui dévoiler. 11 n'y eut pas cru
d'ailleurs, et à peine y niil-il quand
ses créanciers survinrent, eux aussi,
pour fondre la cloche. Tout fut vendu,
les trois ou quatre mille acres de terres
patrimoniales, le manoir, les collections
interrompues pour Chillahy. Chillaby
JEN
lui-même, cause de tapt de désastres,
alla piaffer hors de l'écurie de Ship-
lake et s'assouplir sous la cravache du
célèbre écuyer Hughes au cirque de
Salnt-Georges-rield: seul, le chien
d'Alcibiade resta fidèle à son infor-
tuné maître et le suivit à l'hmnble
maison de campagne, où quelque temps
encore il esquiva les poursuites de ses
créanciers. Ceux-ci pourtant le déter-
rèrent dans sa retraite ; impitoyables,
ils le traînèrent devant le tribunal du
banc du roi , et obtinrent sentence con-
tre lut. Jennings subit ainsi plusieurs
mois de détention en 1777 et 1778,
sans se désabuser complètement sur
Queensbury et Chillaby, sur les che-
vaux et les jockeys, mais sans se sentir la
folle envie de recommencer. Le célèbre
Horn ïooke était son compagnon de
captivité ; la politique vint faire diver-
sion à ses ennuis, mais il en trouva
bientôt l'argot plus ennuyeux que celui
de Newmarket ; et il se mit alors à
rêver de nouveau collections et anti-
ques. Enfin les affaires s'arrangèrent,
l'écrou fut levé, ou pour employer le?
expressions dé Jennings lui-même, les
fers que faisaient peser sur lui ses
créanciers furent rivés par l'hymen.
Ces nœuds pourtant étaient plus riants,
d'autant plus que sa deuxième femme
(car Jennings était veuf) lui apportait
en dot de quoi réparer les brèclies faites
à sa fortune par Chillaby. Ainsi revenu
sur l'eau, Jennings, bien que regar-
dant toujours le vieux Queensbury
comme le roi des Jockeys, n'alla plus
parier à l'hippodrome, résolu, s'il per-
dait son argent , de ne plus le perdre
qu'en objets au moins visibles et pal-
pables : du reste tout lui fut bon ,
antiquités, chefs-d'œuvre modernes et
moven-àge, statues et tableaux, nielles
et médndies, imprimés et manuscrits,
ustensiles et objets d'art , échantillons
minéralogiques et coquilles. Les auto-
graphes seuls lui manquaient, ils n'é-
JEN
Uieot point imauiiir^ à celle
Deshoome» tr!% tjur Jfiiiiin^ttont tn
Anglefei re (Irrorc^ du uoiii de vu iuu-
Sts, et le* raretr» (|u'il» lutli^^nt ^rii-
coir un mol technii]tte et qu'il Caul se
Radier île ra\er) &onl Je» ob|cl« lie
i irtu. \\oir ce q«e ue posWdc m!
que iir pa\»ed«iil que<|Ml-
(|.. «lofit on viit Ir uon et
le imiiiiiir, • lair-«enirN,^oila
U ^li>:rr fl . r Mjpieuie pour
crN nnina^.is^iirur» lie cuiiusilrt. Jra-
Mui;;^ i^Uit .ml^l à ra|>»>^re du l»oii-
heur, n'fpinufant ^iieie d'autrei cou-
lrjrieté> (|ur quelques reproche» de m
femme qui lai demaudiit a quoi bon
tant de inoiliisque^ , et de temps en
lemp* le lir<>oiii de recourir a L hocuse
«Ir *r^ .. . . .
irtlur.
e\t>neiuciil iiii|t;i.\u %tnt iciuci>ci nj
frltcite rrnai>^.i|Me r\ (mi ravir drrr-
rlirf va liLrrlr •
dr. cointrs nif m
iialles >enait de iiioiinr. C>e conipia-
lile, bui^ant l'uva;;e commun a lou:> le-^
hauts agents de tinanre quand on ne
restreint pas «etèrenent leurs tendaiH
ces, faisait la banque et Pescoiopte ,
usant des .soronie> qu'il avait en caisse
au nom du «jou \ernemeiil coninie do
^^ Cent autres en fai-
^ ,Tl laroiilnin*'. rVtait
eu qucli^uc
autrement t
licatesse, une uccu>.iii»tii m
ice loutre des conlreres.
coup le ministère s'avise do vouioir
rr|. rimer cet elal de rhosfs. I*ri«e (c'é-
tait le nom du comptable) lais.«ait an
mince déficit. Stîodain on en recherche
lo> causes a^ec fracas, on fait sonner
haut les (grands mots de inaUr i
traite comine cnmplicos cei,
Irjtiivo comniodi' de >< ' c\ de
l'ar^fut par le recevc Jtn-
inn_':, le duc de Portiand cl une foule
d'autres étaient daoscecas. Le «irand
JEN
^ échappa. 'Alurs, avec lear i»-
ptrtiwlé ordinaire, les i^ens de justice
M rabattirent »ui Jenniii;;s, et iustru-
mr; •: • : halnleraciit qu'a propoA
d 'bel de l^oi^ cents |>uiné«
t7,.iwii h :, ri\ ^ iuteirt»,
le* frai « deiu.f , li'uvucat,
•e ■ • r , d mil liiuuluiie, do
plii TTetîtlr. j|- lut drtTTiTidè-
m
*' '
ses coitrriioiiN en vcnle. (.elle luis fo
chien d'Alcibiade nr ci i m- Nou>liaire
à la griffe du « •--priMuir.
l/inforlune JciiiMi.. ........ .« et âu lit
ne |iou\ait pjrler ohvucle a rica. Il
eût ete iieureuv pour lui d'en Cire
quitte a m bonauiche. Mai>»oilquelc-
' • :ii' ;. . vi^ee,
ime
et. ijOlC
)t IlOII
setrie I iie-
ujfiit. . i «^r*!
une : !> 1 it Laite et un acte vule
au ; . :' it pour prévenir doaornuis
dr . : .1. .-. Violence. Mais la réi^o-
hitiiMi u. > deuk diamhies, en le réliabi-
lilant, ire lui reslittujt point ce qu'on
kl ■ ' iiir lon*^-
Iri' eu pour
le -. ^ . .,.j/ la jUiiRf ilc-^ liomme.«.
Il" ' Il et le fi r ne l'avait de-
I appartenait :
•^ biens à elle ;
li était encore riciie, malgré ses pertes
et maigre la di>perMon des trésors
qu'il avait si Lborieusement surveillés.
Il se remit à foruvre ; et bienlàt co-
quilles, hvres , minéraux, manuscrits,
brontes et portraits, statues, tableaux
at raretés de toutes sortes s'ainoncelé-
renl deiiauve.-iu dans sa demeure. Sa
^mmi' raouml, la nioTiomaiiie de I an-
tiquaire f^ développa pour lors dans
totil «on luxe: sa maison deChelsea,
jadis demeure du comte de l>uclin-
gham, son condisciple , prit l'aspect
«Vuiie oralcrie '- nuîubles, chemiiices,
cartons, ravons, aruioires vitrées, mé-
liaiUlcrs élaler.t ^ijix-^és de ces trésors
si ch.-'rs à sou cœur-; chaque jour Ten-
combrement rétrécissait l'espace; on
ne pouvait se mouvoir dans son appar-
tement qu'en courant risque de fractu-
rer la jambe d'Achille ou de faire tom-
ber la boîte à rouc^e dç Marie -Antoi-
nette. Sexag;énaire à cette époque, il
\iécut lonû;-temps encore , ses collec-
tions, ses détiances augmentant tous
les jours, tandis qu'écornée par les ac-
quisitions et les emprunts, sa fortune
disponible allait sans cesse se rédui-
sant. Cependant il avait et il eut jus-
qu'à sa mort de quoi vivre commodé-
ment, s'il eût voulu. Une part de pro-
priété à la Jamaïque lui valait par an
de quinze à vingt- cinq mille francs, et
on le payait exactement. Sa mort eut
lieu le 7 février 1819. Son corps ne
fut pas brûlé suivant son vœu : 11 s'était
brouillé avec celui qu'il avait désigné
pour son incinérateur , en Ije priant
de lui prêter la modique somme de
7,500 fr. Ce faux ami n'avait-ll pas osé
lui dire : « Klle est à votre service, si
vous la voulez pour des choses uti-
les. » Mais si cet argent eût dû ser-
vir à des chflils utiles, est-ce que Jen-
nlngs l'aurait souhaité.' C'était l'Inutile
quU'enchanlait. A mesure qu'il vieillis-
sait, il s'entichait davantage de ses ri-
chesses, et il en perdait de vue le boire
«t le manger. Acheter, placer, classer,
éliqueller, cataloguer ses acquisitions
accaparaient tousses instants. C'était
4încore bien pis lorsqu'il s'agissait de
nettover," de brosser, de limer, de po-
lir, de faire luire riris aux mille cou-
leors d'on coquillage. Mais la magni-
ficence du contenu formait un rislble
contraste avec la simplicité du conte-
nant. D'épaisses couches de poussière
où un géologue eût distingué des pre-
mière, seconde et troisième lormalions
et la couche alluvionelle , couvraient
JEN
les fastueuses armoires vitrées, les ri-
ches rayons d'acajou, et le magnifique
iricliniuni (Voy. plus bas). Arachné
tendait sa toile du nez au menton de
Pallas; des cendres qui encombraient
le foyer et qu'il ne permettait d'oter que
lorsqu'elles menaçaient de toucher la
vfîntouse, volaient par toutes les salles :
rarement le domestique avait le droit
d'entrer dans le sanctum sanctorum:
sonvieux maître, plus soupçonneux que
Tibère, craignait toujours qu'un doigt
crochu ne lui dérobât un de ses joyaux.
On pense bien que sa tenue était en tout
digne de celle de sa maison. Nous ne
nous amuserons point à les décrire.
Mais ce qu'on ne saurait imaginer,
c'est la bizarrerie de ses faits et gestes,
c'est la singularité de ses idées, de ses
réparties ! on en ferait des volumes.
Ainsi, par exemple, s'il déjeunait com-
me les vulgaires mortels de nos jours,
il ne dînait qu'en trlclinlum. Devenu
propriétaire d'une ravissante statue de
Vénus, pendant les six premiers mois
qui suivirent l'acquisition, il la lit placer
chaque jour au haut bout de la table
où deux laquais en grande livrée, gants
blancs et l'épingle de diamant au jabot,
servaient devant le beau marbre des
plats choisis fumants, qu'on remportait
ensuite. L'idée d'aller pourrir en terre
après sa mort lui semblait anti-poéti-
que; et un de ses désirs les plus vifs
était de pouvoir compter, au lieu d'in-
humation, sur la concrèniation. Kn
attendant que quelque àmc charitable
voulût lui promettre de satisfaire ce
caprice, il fit dioix et de l'urne où
devait être recueillie sa cendre, et d'un
grand pocle (jiii devait serylr débucher;
et finalement il trouva un gai et brave
gentleman du voisinage qui s'engagea
cordialement à lui rendre ce sei vice,
fût-ce sur le pont de ]>attersea et à la
barbe des actionnaires du pont, bien
qu'il ne fût que de bols. L'incompara-
ble Vénus devait être la récompense
JEU
èe cti Mploii. IVniUnl lon^-IfffifM
.iriiniii^s fit iiii ra^ |).iiliciilirr ilu •^^•
noul IWinaparte ri mi*mr au^M <ie
lempereur .Napoléon : Ir Ion! pour-
quoi.' cVst que, Miivaiit lui, Napoiron
ii'ol>rivs.iil pa^ à celle i;;noblr ambition
qui fait (i'orJinairr 1rs runqiirrants, et
qup $on luit ftail de rrtinir dan* »a ca-
pitale ce qne le monde a\ait de plus
rare en tableaux, srulplure^ , livrer,
m.iniKcrils et curio»ite:t de tout gfnre :
NapolcNMi.Mm //rr55«.«'lait un vu Iuom>!
l'armi les obielti que Jennin^s aimait à
voir «'entasser autour d^lui rliirnt
auvM lesiiislrumenis deprrnNioti ; nom-
bre de rhionomelres exécut»% par le*
ui.Tilie» défait orn.ii<ul c pièces;
nuii toutes codaient au pciidide-moii-
stie, dont ra>ait ;;ratiGe le feu comte
Stanhope el «Jortl il compl.iit pen-
dant des heures entières les >ibralion$.
Sa joiii nre se passait ainsi à courir les
tentes, à cll&ser ses acquisitions, i dé-
crasser, à liislier el à faire riialover ses
coquilles, puis à le> montrer. 1^ nuit
il clunj;eai« de diverti«sspmrnt ; el per-
ché nul;;rc décembre au jdiis haut de
la niai>on, puisque llerscliel cl Olbers
ne le l.ii^viient point dot mir, il s'éver-
liiait à découvrir une douzirme planète,
que sans doute il eût noinuiee /f t hieti
(£ Ah iltiadt. Il avail toujours près de
lai ouvert sur un pupitre un Horace
ud usum l)rlpl}ini en maroquin vert,
el il sedeleclailà v lrou\er des à-propos
pour toutes les phases de la vie. S'il in-
vitait à partager el la table el le Iricli-
nium, « Si potrs archaicis, cornfi\*a,
« rerumberr Irrtis. » était le prélude
oblii^e de l'invitalion. Un noble duc
louaif-il ses mollusques, ses Van l)\ck,
Prinripiius plaruissc viris non ul-
tima laits est. tn prison , la captivité
lui pesail moins s'il affublait inopiné-
ment le créancier de Tépilhcte Son
missura rutenu... Mais pour rien au
monde il n'eut dit Doruircm patrras,
bien qu'il se ren^nr^eàt en lisant la fin
JRT<
«77
Je la phrase iliiufe nir srilirrt ar/iutn
Il était •;rand «-iNmido^iste aussi, mais
ses étvmolo^ies riaient soiixent àssn
grotesques : ildrri\ait, par exemple, sa-
lade de l'italien sitllulu, casque, et il
le démontrait en ajoulanl (pi'au moyen-
i;;e les her«»s à court de \i\te) etde
xisselles dans leurs courses lointaines,
se contentaient de maigres laitues sau-
Tl<;es ou autres herbes qu'allait cueillir
pour eux leur Dulcinée, et que Te casque
servait de saladier. Ses connaissances
sur tout autre sujet étaient de même,
variées, ma's incohérentes , superficiel-
les, incomplètes. On le trompait en
fait de tableaux , il se trompait lui-
nirme en fait de ^culptui e>, de mnlailles;
il ne savait que trr!»-mal l.i mnrlnlio-
lo;;ie, bien que sa collection conchvtio-
lo;;ique fut digne d'un roi el l'empor-
lat sur tous ses autres trésors. Il était
principalement bien assorti en cônes.
Venaient ensuite les genres Murex ,
'l'npiex , Hustelhtria , liulimus ,
Stromhus, Artuleu, Hua inrlin. Je-
reLeUum,t\ d'admirables Ilarfui lionl
une seule avait coûté trois mille francs.
Il eut le [daisir de voir Perrv dans sa
Conchvliolo^ic citer sa superbe Jrga-
uiiuta vitreii , et faire «raver >a tii-
plei f*eria, son Herupiei fitsca.i^
Melaniii tiurun/iu, son ()Ii\'a suUirt-
dis : une de ses Cv pi ées reçut du grand
conchvliologiste le nom du (^ypriza
Jenningsea. Tout en poursuivant
les stroinbes au fond de la mer et les
étoiles au ciel , Jennings écrivait de
temps à autre. On a de lui : I. Li-
hres réflexions sommaires, ou Ls-
(fuisses impartiales et franc examen
de divers oh jet s intéressants . Lo n d r es ,
17-^)8. Grand admirateur de Montai-
gne, Jennings prend a tàrlie d'imiter
l'allure libie, disinvolle ^-ce célèbre
écrivain ; mais il ne le reproduit guère
que par le manque de liaison el par ses
paradoxes : « Que le mahométisme ,
« dit'il quelque part , eiJt été glo-
LTvin.
la
178
JEN
tf rieux et beau , s'il eût été ce que
« probablement il fut dans la con-
« ceplion de Mahomet , s'il n'eût
« point été dominé par les arrière-
« pensées de conquêtes, s'il n'eût pas
« été souillé par ces pieuses fraudes
« qui sont un bon calcul pour attirer
« la multitude et assurer le rapide éta-
it blissement du système, mais qui lui
« méritent un juste renom de cliarlata-
« nisme et d'imposture ! » II. Essai
sur les preuves de la religion , ou
Démonstration de cette thèse que la
raison donne de la religion une dé-
monstration solide et que la foi ne
la démontre que fort mal (an En-
deavour to prove that reason es alo-
ne , etc.) , Londres, 1771. L'auteur
insiste sur trois points, l'utilité de la
vertu, l'existence d'un être éternel et
tout-puissant, l'attrayante perspective
d'une vie future. La seconde partie pré-
sente quelques arguments à peu près
neufs , sinon par le fond , du moins
par la forme et le détail ; ils sont tirés
de l'astronomie et de l'histoire natu-
relle. Dans un post-scriptum ajouté à
l'ouvrac^c en 1783, il admet que poli-
tiquement il est nécessaire d'établir un
mode de culte public. IH. Recherches
physiques sur le pouvoir et les pro-
priétés de r esprit, et sur la possibilité
qua Vintelligence humaine du.^oir
une conception delà Toute Puissan-
ce. Cette conception de la Toute-Puis-
sance, Jenninfi;s la déduit des phéno-
mènes de la nature et de l'expérience;
il s'élève contre la philosophie fran-
çaise qui a prétendu nier les attributs
de Dieu et toute existence à venir ; il
montre combien, au contraire, de no-
bles et hautes Intellif^ences doiventsou-
haiter cette existence, au sein de la-
quelle ell«l|)ourront continuer leurs
méditations , pénétrer plus profondé-
ment k; merveilles de la création et
comprendre le Créateur. W . Remar-
ques curieuses sur C enfance et l'édu-
JEW
cation. Ce livre écrit sous l'influence
des Idées de Jean-Jacques ne contient
rien de capital ; Jennings y traite sur-
tout de la nécessité de commencer de
bonne heure l'éducation de l'enfant,
de donner à l'esprit et à l'àme l'amour
du vrai, l'horreur du faux ; en d'autres
termes, la rectitude au jugement, la
sincérité au cœur. V. Pensées sur le
progrès et la décadence des beaux-
arts. Notre antiquaire passe en revue
les diverses écoles de la Grèce et de
Rome ; puis il s'appesantit sur l'égalité
présumablefles siècles entre eux, relati-
vement au nombre des hommes qui
naissent avec le génie ou avec des dis-
positions au génie, mais que l'avarice
des parents détourne de l'art et jette
dans les métiers lucratifs. Passant en-
suite au contraire, il^ighale le ridicule
de ces institutions ou de ces habitudes
d'après lesquelles le fils d'un artiste sera
livré à l'art, tandis qu'il n'est propre
qu'à manier le mètre, le code ou le
carnet de l'agent de change : « Les
" Egyptiens, dlt-11, grâce à leur or-
" ganlsaîlon par castes n'ont point eu
« d'art, et bien qu'ils aient produit
« une innombrable quantité de sta-
« tues, de bas-reliefs, de médailles,
« d'instruments de toutes sortes , je
« ne vols chez eux que métier et rien
« de plus. » Quoique l'assertion soit
tranchante, elle a du vrai ; et indu-
bitablement la cause qu'as.signe Jen-
nlngs est pour beaucoup dans le sta-
tionnement, dans l'imperfection et dans
la médiocrité de l'art égyptien, une
fois qu'on a mis à part l'aichitecture.
VI. Traduction (envers) à\i cinquiè-
me chant de IKnjer du Dante, Lon-
dres, 17.')''^. C'était se mettre un peu
tard à versifier: aussi la traduction en
resta-t-elle là. Cependant H est possi-
ble que quelques-uns des vers datent
de sa jeunesse. Elle est en vers blancs,
ce qui peut être le plus commode, mais
ce qui, certes, n'est pas le mieux choisi
pour rfodrf l'ipre et puiuintf hinno-
mie de \» irrui rinid. Fcut-rlre Jfn-
iiin^< ne voulut- il qur pouvoir dire a Min
aai le ^enilcman char;;é liemritiele
fea i ^a (iepouille mortelle, Ihbita
s/htr^rs Ituryma Juiùtlam I atis
amiri. VII. <i/tser%'iitiu.'ts sur tes
Ui^antages ifunr position Wr»v> ei
sèchr. Jeiiuiii^s > conseille, eonlrairr-
■ent à l'usage le plu^ smW\, de baiir m
Maison de rampa^ne «ur le» rolline^,
tant pour la beauté de la vue que pour
la uuté; et il v indique, d'après re qu'il
a remarque en Italie, divers moven^
d'avoir commodément de l'eau lim-
pide, de la i^lace, de» silos. V|||.
Lilirr eiwuflr sur fenormr accrois-
seinent ars hommes df lui , etc.
Jenntn^<> aimait beaucoup à dire qu'il
avait confiance en ia mrdecine, mais
non aux médecin* ; qu'il respect*»! la
relijjion, peu les mini^tre< ; qu'il es-
timait la justice, mais point du tout
les gens de justice. Sa IMtre m-
qu/U se sent beaucoup de cette anti-
pathie et de cette épi;;rammalique tour-
nure d'esprit ; sans aller au fond da
problème, elle se fait lire a^ec inté-
rêt el provoque de sérieuses réile&ions.
F— <)T.
JEIMISOX (HoiïEnT), littéra-
teur, né en Mande en 1736, fit de
bonnes etades classiques , puis entra
dans la carnère des armes ; il était par-
venu au ^radf de capitaine dans le
1\V d'infanterie, lorsqu'il fut mis à la
demi-solde en 17(»3, par suite de la
réduction que subit ce ré;;iment. L'a-
vanta{;e qu'il eut vers ce temps de se
trouver en contact avec sir (irrard Ha-
milton, et de vivre dan^ son intimité,
lui ouvrit une carrière nouvelle et fa-
vorisa son avancement. Déjà connu
par des succès au théâtre, il fut bicn-
t«U lancé dans h société des hommes
les plus influents de l'époque, Kdra.
Burke.SamuelJohnson, GarricL, etc.;
nuis il dut se dérober à ces brillantes
JEP
179
relations pour aller occuper en Irlande
la place de premier eruver sous le nou-
veau gouverneur . lord vicomte Town-
shcnd , place temporaire où il parvint
toutefois à se maintenir sous douze
gouverneurs sacce^ib: Il eut en njéme
temps un sie^e dans la chambre des
communes , où , s'il ne déplova pas
d'éloquence , il savait réveiller l'as-
sembler par les saillies de son esprit.
Jephson avait époasé en 17G7 une
de^ Gllesde sir Kdward IJarrv, méde-
cin celrbre, auteur de quelques ou-
vrages. Lui même s'e«t lait un nom
par des productions dans des ^n-
Tt% divers: I. liraganret tragédie,
l7Tr> , qui eut beaacoup de succèi
dans la nouveauté. Horace Walpolc
exprima son admiration pour cette
pièce dans des termes qui parurent
fort exagérés, et adressa au poète des
réilexions sur la tragédie, en trois let-
tres qui ont été insérées dans le recueil
de ses cruvres. Kn retour. Jephson
emprunta au roman dr ^^ alpole, Ir
(Ihùtrau (il)truntr. l'idée d'une au-
tre tragédie: II. />• comte dr Sar-
bonne, qui, représentée en 1781, sur
le théâtre de Covent-(«arden, eut un
succès encore plus éclatant que la pré-
cédente. FJle a été traduite en fran-
çais par M""" la baronne de \\'as<;e ,
el fait partie du 'l'hràtre anglais^
publié par cette dame. III. Im
loi des lAtmhards , tragédie, 1779.
IV. IJlhUrl, o^év^ bouflon, 1783.
\ . Im (Mwptignr, opéra, 178,'). VI.
Julio, ou rimant italien, tragédie,
1787. Cette pièce oui fut repré;.entée
à Dnirv-Lane offre de grandes beautés
de détail. V|I. L\-imuur et la guer-
/•<. 1787 ; Deux cordes à votre arc,
l'TÏ)!, opéras bouffons. VIII. Iai
Conspiration, \r^^éX\t. IX. Portraits
romains , pocme en vers héroïques
avec des remarques et des illustrations
historiques, Londres, 170i, in-4° de
280 pages, avec un portrait deTautcu^
1.
i8o
JEK
€t tVautres fjj];ure.s. C'est uii(* suite »le
portraits , faits avec autant (rclé::,aur.e
que (le vip.ueur, des hommes illustres de
la république romalue. Je[»hson, en
traçant ces caractères, paraît avoir eu
pour objet principal de faire apprécier
ol chérir davantage, par comparaison,
la forme du ojouverncnienl de son pays,
qu'il n'a cesse d'exalier, et il ne man-
que pas d'exprimer son horreur pour
ce qui se passait en France au moment
où il tenait la plume, i^'impresslon de
ce livre, dont Êdm. Malone fut l'édi-
teur et qui lui est dédié, est magnifique,
'ît l'on ne regrette pas un tel luxe en 11-
sant l'ouvrage. \.La confession de J.
B. Couteau, citoyen /rançais, 1794,
production dont le titre et la date peu-
vent faire juger la couleur. R. Jephson
mourut en mal 1803, dans sa mai-
son aux environs de Dublin. L.
JERXllVGHAM (Edward) ,
littérateur anglais , issu d'une ancienne
famille catholique du comté de Nor-
folk, et né en 1 7:27, reçut sa principale
instruction dans le collège anglais de
Douav, et acheva ses éludes à Paris.
Rentré dans son pays, il y exerça sa
muse sur diflcrents sujets, et fut généra-
lement inspiré par des sentiments d'hu-
manité et de bienveillance. Un de sos
premiers poèmes eut pour objet un éta-
blissement de bienfaisance [t/tr Ali/g-
daJen charity], ouvert en 1758, en
faveur des fdies repentantes, asile qui
ne put recevoir d'abord que huit de
ces malheureuses, mais qui prit par la
j!iite de l'extension. Le philanthrope
Howard, qui s'y intéressa efficacement,
se plaisait à reconnaître que les vers
de Jernlngham avalent beaucoup con-
tribué au succès obtenu en celle occa-
sion. La i^alrric s1iuksp!'iiriciinr, an-
tre poème publié vers 171)1, et dans
lequel l'auteur eut pour but , non de
porter desjugcrncnls sur les tableaux
exposés en ce moment, mais de siig-
gérei de nouveau'; '^'l'fî •• jionr enrichir
JER
les expositions futures, offre de grandes
beautés , et reçut du célèbre Edm.
Rurke des éloges exprimés dans le lan-
gage le plus poétique. Les divers ])oè-
mes de Jernlngtiam ont été recueillis
pour la première fois en 3 vol. in- 12 ,
puis en 179G , en deux seulement;
nous avons cette édition sous les '^ eux.
iSous y remarquons : les Madeleines;
la Religieuse, ou Adéldide à son
amie; le Comment; le Déserteur ; les
Funéî-ailles d'Arahert , moine de
la Trappe ; la Galerie shakspea-
rienne; Ahailard à Hélo'ise ; l' En-
thousiasme. Le caiactère de ces poé-
sies est la tendresse du sentiment, l'é-
lévation de la pensée, l'élégance du
style. Ayant de la disposition à la mé-
lancolie, Jerningham réussit particu-
lièrement dans le genre élégiaque. Peu
de m^ois avant sa mort, il chantait en-
core , et son Adieu du vieux Barde
n'est pas dépourvu de mérite. Il se dis-
posa à subir la dernière épreuve de
toute existence humaine, ens'imposant
une étude tardive de la théologie ,
supporta avec courage les douleurs
de la maladie, et mourut le 12 no-
vembre 1812. Voici la liste de ses
ouvi âges ; J . Poèmes et pièces de
théâtre, O*" édition, 1806, 4 vol. II.
Oraisons funèbres et sermons choi-
sis, traduits de ]>ossuet, précédés d'un
Essai sur l'éloquence de la chaire^
3" édition , 1 80 1 . 11 ï . Le doux ca-
ractère fmild tenour) du christianis-
me, essai, 2'' édition, 1807, I\ . Lu
dignité de la nature humaine^ essai,
180.J. V. L'Ecole alexandrienne^ on
les premiers (pd professèrent le
christianisme dans Alexandrie, 3*^
édition , 1810. Vi. Adieu du vieux
poète, 2^' édition avec des additions,
1812. L.
.ÏERPBIAXIOX (Gabriel-Jo-
.SF.iMF, baron de), né au Puy, le 15
mars 17.")S, d'une famille noble, fut
nommé, en 1785, syndic du VeUv ,
MA\
JKK
iHi
place qve >c» jncetre» avaient occupée
depuis un siècle, rt sié-^ea aux etjls de
I^ii<;uednc a\aiil la re\olulioii. Arrrié
pendant la terreur , il re^la dix-liint
mois en prison. Appelé, en IHOO, jla
préfectuic de la Lizrte, il pa!».-a, en
1H(I2. a celle de la Haute Marne, et
fut désigne, en ISO'J, candidat au sr-
nat, par le dépaileinehl de la lijule-
Loire. Louis W 111 le nomma oftiner
de la Lésion 'd'Honneur et le cira la-
ron. 1/empereur Alexandre, en IHlè,
lui conféra l'ordre de Sainte-Anne, se-
conde clas^, pour les soins qu'il a\ait
pris des militaires ru>Nes qui, l'année
précédente, se tiou\ aient dans la liau-
te-Marne. A>aiit obtenu sa irtraite,
il habita d'abord >a terre de Juzenne-
court dans le même département , plus
tard il se relira a Lu>ii. ou il mourut le
13a\rillH.Ji.()nadelui : 1. Mr/noirr
sur la suri fuirf^r iju'tfjroui'e le tir-
partrmrnt t/f lu llautr-Loirr aans
la rrpurtitiun ^rn fruit- tits cuntriliU'
tions dirrctes, le l*u>, iT'JT, in-H".
11. SUitistique du JrfHjrtrnirnt tU
la Locrr<', Mende, 1«()1, in-8". Jer-
pliamon cultivait auvii la nuioismati-
que, et s'était furnic une riclic collec-
tion de monnaies et de médaillcb anti-
ques. V !\T.
JKUVIS .In UN , comte de. SViiVi/-
Vimrnt . amiral .m^laia, naquit le 9
janvier 17:»V, a Meaford, comte de
Staiïord. Kiilré au service dès r.if^e de
dix ans, il na\if;ua acli\cment et fruc-
tueusement. Les expéditions diri;;ees
en 17r>9 contre (^)uebec, et eu 17(i2,
contre Terre-NeuNe, lui donnèrent l'oc-
casion de se dislin;;uer. Kn 1772, il
commandait V Alurme, de 32 canons,
le premier bâtiment de la marine an-
glaise qui fut double en cuivie. l'a->é
sur le Foudroyant, de 8i, il fil pûilie
de la ilolte de la i^Ianclie jn<qu en
1778; captura la fréj;alc française la
Fa lias .et se trouva au coi|ibat
d'Oue^saut livre pai le comlc d'Onil-
liers a rainu al keppet ^T. ces nom»,
XXII. :»00, et \X\II. 187). Dans
ce combat, dont l'Iionneur resta au
pavillon français, Jrnis seconda avec
autant de valeur son amiral qu'il mit
de loyauté à Ir • l'accusation
(|ue lui intenta . Jannique de
n'avoir pav vainru. Il nioiitûil encore
le yuudru) aiit lor>que, le 20 a\nl
17H2, au moment ou la guerre d'A-
mérique allait finir, il captura le vais-
seau franl^ais le Pégase, de 7i ca-
nons, commandé par le clievalier de
Ctllart. 1^ récit cmpliatique de ce
combat in- ' t mieux que lou^
lesiaisoiii iibien, à celte épo-
que, la I ' f pou\ait peu
!»ellatler«l •'.i.ince a laquelle
plu. lard elle pittcndit avec plus de
raison. .lervis arrompaî^na lord llov»t
c!iaif;é, en 17M2, de secourir la forle-
ressede (îibraltar, et prit paît au com-
bat livre en tlel.ors<!iidtlroit. I^s élec-
tion* de 178V ren\o>erent »iej;er au
parlement, ou son exprr icnce des cho-
ses de ta marine ne Ict point perdue,
l'romu au |;radc de contre-amiral en
1787. il fut invc li en 1790 du com-
mandement de l'e-odre blaoclie. Au
début de la loii;;iie lutte niarilime en
trepri>e par la république contre I .\n-
};lelerre, Tamiral Jervis fut cîiar^e, de
concert avec le j;éneial sir Charles
Cirev. d'aller ^'emparer de nos élablis-
semenK de> Indes-Occidenlales qui .
excepté la Maitiniqiie dont la leddi-
tlon eut lieu le 2ti avril 179 V, érhap-
pèrenl à cette altaque imprévue. .Nom-
mé au commandement de l'escadre
birtie, il succrda, en 1793 , à l'amiral
Holhiui dans la Méditerranée. Jervis
s«4)orta ensuite avec seulement quinze
vais>eaux, trois frégates et trois bâti-
ments lci;crs contre la flotte espa-nole
auxordios «le Girdova; l'aMeiiinil le
1 i- fe^i^ 1797, sous le cap Saint-
Vincciit, et lui enleva qiulrevai|^tx
aptisiai comlat prolonge. Les deux
i8a
JOB
chambres du parlement lui volèrent des
remercîments; il fut créé comte de
Saint-Vincent y et reçut, avec la chaîne
d'or, une pension de trois mille livres
sterling qui, après sa mort, fut inté-
gralement continuée à sa famille. La
formidable émeute qui venait d'éclater
dans la flotte de la Manche s'étendit à
celle de la Méditerranée. L'amiralJer-
vis parvint à la contenir par sa vigilance
et sa fermeté. Prévenu de la prochaine
sortie de l'expédition que le gouverne-
ment français préparait dans le plus
grand mystère, et dont le but, en effet,
demeura secret jusqu'à ce qu'elle eût
abordé la terre des Pharaons, il déta-
cha aussitôt Nelson dans la Méditer-
ranée. On sait qu,'après avoir passé à
toucher h flotte française, qui lui resta
cachée par un brouillard, Nelson vint
lui livrer le désastreux combat du l*""^
août 1798, au mouillage d'Aboukir.
En 1800, Jervis prit le commande-
ment de la flotte de la Manche. L'an-
née suivante, appelé au poste éminent
de premier lord de l'amirauté, il s'ap-
pliqua à extirper des abus qui trouvè-
rent des défenseurs intéressés , mais
assez habiles pour rendre impopulaire
son administration. Toutefois l'amiral
Jervis semble n'avoir quitté ce poste
qu'en 180i, et pour faire place à lord
Melville, intime ami de Pitt.En 1806,
sous le ministère de Fox, il prit encore
une fois le commandement de la flotte
de la Manche. Il fut nommé général
des soldats de marine [marines) en
1814 i puis, l'année suivante, mem-
bre de la société royale. Enfin, le 19
juillet 1821 , jour du couronncnftnt
de George IV , il fut élevé à la dignité
d'amiral de la flotte. Le comte de
Saint-Vincent était d'une petite sta-
ture, mais d'un caractère imposant. 11
mourut le 26 mars 1823, dans sa qua-
tre-vingt-dixième année. ^ — u.
. 4É^I^> premier patriarche de l'église
russe, fut élevé à cette dignité le 23
JOB
janvier 1589. Jusque-là l'église grec-
que ne connaissait que quatre patriar-
ches, ceux de Constantinople, d'An-
tioche, d'Alexandrie et de Jérusalem.
Boris Godounoff(Koj. Godounoff ,
XVII, 570), qui sous le tzar Fédor
commandait en maître et qui, après ia
mort de ce prince, monta sur le trône,
résolut de chercher un appui dans Job
qu'il avait fait nommer métropolitain
de Moscou. Le patriarche d'Antioche
élént venu (1586) dans cette capitale,
pour y recueillir des aumônes, Boris
lui témoigna le désir d'établir un pa-
triarche en Russie. Cette proposition
fut agréée par le clergé grec; Jérémie,
patriarche de Constantinople, se ren-
dit en 1588 à Moscou, et chargé, com-
me il le disait, de pleins pouvoirs de
l'église grecque, il sacra patriarche le
métropolitain Job que le tzar avait
choisi. Api es la cérémonie, le tzar re-
mit à Job sa crosse patriarcale en lui
ordonnant de se nommer U chef des
évé(fues, le père des peres^ et le
patriarche des pays septentrionaux,
par la grâce de Dieu et la volonté
du tzar. Afin de consolider la préten-
due suprématie de l'église russe, on
dressa une charte, dans laquelle il est
dit: « L'ancienne Rome est tombée
« par l'hérésie d'Apollinaire ; la nou-
u vclle Rome, Constantinople, est au
« pouvoir de la race impie des Sarra-
« sins ; la troisième Rome est Mos-
« cou. Au lieu du faux chef de l'é-
« glise d'Occident, le premier prélat
« œcuménique est le patriarche de
« Constantinople; le second celui
et d'Alexandrie ; le troisième celui
« de Moscou et de toute la Russie;
« le quatrième celui d'Antioche, et le
a cinquième celui de Jérusalem. En
« Russie, on priera pour le patriarche
«< de la Grèce, et en Grèce pour le
« nôtre qui dorénavant et jusqu'à la
« fi/i du monde sera choisi et consa-
« crc à Moscou, sans que l'on ait be-
JOB
JOB
t83
• 50III àe ipriiunr iu cootentcment
« ou à l'jpprultali.tn du clcr^c j»ief .
« Il V aura 5UUS le palrurrlie quatre
•« luelropnlitaiii^: à No\»;^oro«l, a ka-
•< tan, à Uo>t«>iï et a k.ruulil>L ; six
• atclie^rques, a N olo^tla, àSou^tdal,
• À Ni^tP;;uro(J, àSmoleii&k, à Krua
« cl .1 Iwcr ; huil évèqufi, à l*»koff,
" a \\\t(, àOustiou^, a Hidozero, k
- Kniomna , à Droilref, et dan» le
■ pa>s de Siéwiecx (I). ■ Job, éle-
vé par Horis , fut reconnaissant. Il
approuva Tls^ssinat du jeune prince
Demcirius [l'uy. ce nom, lAll ,
.'Utij ; après la mort de Kcdor, il pro-
clama lloris tur de Moscou et de la
Uuvsie. et le '20 feuier i:>'J9 il le sa-
cra et le rouroniia en prrsence des
grands de Tempife. Le faui Drinetrius
étant eiitréà Moscou (lt»0.')', le pa-
triarche Joli lut saisi au moment ou il
célébrait la messe dans l'i-i^iise de l'As-
somption ; dépouille de ses babils pon-
tiàcaui , il fut re\étu d'un manteau
noir, traîné, insulte dans le temple,
jeté sur un chariot et conduit dans un
couvent. In prélat ;;rec, Ignare, ar-
chevêque de Chypre, nomme patriar-
che par l'imposteur, sacra et couronna
le nouveau tzar. Job, tres-a\ancc en
à;;e. mourut dans son couvent, (i — Y.
•lUBKK 1 ^V.-CiAURiti) , né-
gociant à i'aris, embrassa avec beau-
coup d'ardeur la cause de la re\olu-
tion, fut surcesslxement clecleur, offi-
cier municipal de cette ville et a;;eiit de
police. Il déposa contre la reine Marie-
Antoinelte dans le procès qui lui fut fait
par le tribunal révolutionnaire de Pa-
ns. Quelques jours auparavant, il a>ait
été chassé de la municipalité pour vol;
mais Kobesplerre l'avait fait reinlé-
f;rer. Au 9 thermidor an II ^27 juillet
(i) O ncuTel ordre Ar cbotrt 4<>r« r«>f<t «lu
au». l'irrrr-lc-Crand rnlouldit 1« ■ "i
jKjtrijrvhr rt, Toubiit rrj^ncr ni ><
.ibulit le litrr de pairurcbe; > ut
supprimé celui de uetropnlitaiii , % tl n'c:! axjit
irouTc qu'uM stul à la leie de régli»« ruM*.
1794), il prit part i la révolte de la
commune en faveur At son protecteur,
fut mis hor» la loi avec ses collègues,
et comme eui eiecute le surlendemain,
11 iherinulor. /,.
J O ï\ W Z (KmmaW! rj.) , membre
de la chambre des députes, naquit en
177.*>a Morei, petite ville du Jura,
qui date de moins d'un siècle , et dont
le rapide accroissement est en partie
rou^ra(;e de %on père, mort il v a quel-
3aei années , laissant la réputation
\n habile négociant ^IV Après avoir
achevé ses éludes i Besançon , il alla
rtuiser à l'aris dans les leçons des plu»
labiles professeur» celte pureté de goût
qu'on remarque dans !ves e^»ais litté-
raires. Atteint par la conscription, il
fut incorpore dans un régiment ; mais,
peu propre au service, il ne tarda pas a
solliciter et a obtenir son congé. Dès ce
temps-la (luehjues vers dans lesquels il
conbait a l'amitie ses innocents projets
furent inséré» a son inso dans les jour-
naux fi), et lu: valurent des éloges qu'il
n'avait pas rectierchés. Aussitôt qu'il
fut libre, il revint à l'aris ou il passa
fdusieurs années dans la société de»
ittrrateurs les plus distingués de l'é-
poque, l'alissot conçut pour lui beau-
coup d'e>time; et, dans une nouvelle
édition de ses Mrn.itirts, lui prédit
•• des succès brillants dans la poésie,
" s'il continuait de s'y livrer avec cette
« émulation courageu.se qui annonce à
«< la fois le vrai talent et qui en assure
« la gloire » [Œuires complètes^
IV, 3î)6). Mais Jobez, soumis aux
désirs de son père, retourna dans sa
'i) Avant 1734, l'etnitlaceniriit de la priits
«ille de Morei o'rtait qu un drtcri , ellr a maïu-
^^B*nl One pnpuUliao da jooo iiiJlTidua.
J.B. I>olard de ^aini-(.laude. cjui le pr«i»iier y
cou«'tui«it un« nainr, cti fut le rrritable fnii-
dateur. Ko iliq. (.laude Jobci. père du depolé
qui f4il le »t.|ei dr tel ar. icic. y f. nda un hos-
pice auquel il a»«i|;na 1800 franc» de raveunt
(Vos. \r% J»'mtii«mj. par D. Monoirr. «ij, t-'i).
(à) t'r^gmemti d'une Efùr* a Au^. Cad/,
Moailanr, ao l\. 4?
i84
JOB
famille; et dei-lors, oblige de s'appli-
quer au commerce, fut forcé d'ajourner
l'exécution des divers ouvrages qu'il
avait ébauchés. Devenu maire de Morez ,
11 donna ses soins aux établissements
que réclamait Tinduslrleuse population
de celte ville. En 1815, il fut élu pen-
dant les cent-jours membre delà cham-
bre des représentants; mais il ne se fit
point remarquer dans cette assemblée.
Après le second retour du roi, il fut
nommé par ordonnance président du
collège du département du Jura, et réélu
député. Dans celte session, il se réunit
à la rainoMlé qui vola pour les projets
du ministère, attaqué par le côté droit.
N'a>ant pu prononcera la tribune son
opinion sur la loi d'amnistie qu'il vou-
lait telle que le j^ouverneraent l'avait
présentée, il la lit imprimer. Le 5 mars
1816, il parla contre le projet d'attri-
buer au roi la faculté de faire des ad-
jonctions aux collèges électoraux quand
il le jugerait convenable. L'ordonnance
du 5 septembre ayant pronoiicé la dis-
solution de la chambre, Jobez, con-
tinué par le roi dans la présidence du
collège de son département, fut réélu
député. Dans la session de 1817, il
attaqua vivement le budget du ministre
de la guerre (Clarke, duc de Fehre),
auquel il reprocha plusieurs illégalités;
et, quoique son discours n'eût été en-
tendu qu'avec une extrême défaveur
par le coté droit, la chambre en vota
l'impression. Il fui réélu député pour
la quatrième fois en 1820 ; mais, celte
fois, malgré le mi.'jiitère qui fit tous ses
efforts pour Técarler. Lors de la dis-
cussion de la no;:vclle loi électorale,
il soutint que le gouvernement n'avait
pas le droit de uioJificr le svsteme d'é-
lection établi par la cliarte, et i epoussa
dx même l'ainendement de M I>oin,qui
cependant fut adopté. Le 7 avril Î82I ,
il comballilla proposition de ALSiricvs
«Je Mavrinhac, qui deniandait qf:c b's
oral CUIS r^poelés à l'ordre fusienl obli-
JOD
gés de quitter à l'instant la tribune.
Les collèges électoraux avant été con-
voqués d'après la nouvelle loi , Jobez
cessa de faire partie de la députatioii
du Jura; mais, en 1828, il fut élu par
le collège de l'arrondissement de Be-
sançon. Après la session, il s'empressa
de retourner dans sa famille. Le 9 oc-
tobre, il était allé visiter un de ses amis
à quelques lieues de Lons-le-Saulnier ;
en revenant, le cheval qu'il montait
s'emporta, et quoique excellent ca-
valier il ne put s'en rendre maitre.
Lancé rudement contre un mur, tous
les secours qu'on s'empressa de lui
porter furent inutiles , et il expira
quelques instants après, à l'âge de cin-
quante-trois ans. Sa mort fur un sujet
de deuil pour le Jura. Tous les partis se
réunirent pour le pleurer. Ses restes ,
transportés de Lons-lc-Saulnier à Siam
où il venait d'élabiir une dc^ plus bel-
les fo' ges de la province, furent accom-
pagnés par une foule immense. I>a
description fit; ses obsèques a été
imprimée in-S'\ Jobez était un hom-
me de mœurs douces , faisant le bien
sans ostentation et cachant sous àts
dehors simples et modestes des con-
naissances étendues et variées. Outre
des discours et des opinions imprimés
séparément ou recueillis dans les jour-
naux on ad elui: Epilreà Palissot
pur un habitant du Jura , Paris ,
1806, in-8". Le sujet de celle épilre,
dans laquelle on reconnaît un écrivain
nourri de la lecture de Boileau, est
Valliunce d'un esprit satirique et
d'un hon cœur. Il a laissé manuscrit
un poème intitulé : les Eléments;
le chant àjjcu qui contient une des-
ciiption t.^es remarquable ^cs forges,
est imprimii dans le Recueil de i'aca-
déniio de Besançon, année 1808. L«
purtrtiil de Jobez est gravé iii-i°.
W— s.
JODOC5 S SIXCEKl S. T
Zi.%zrr,Li>G, Llf, 370.
JOD
jon
i85
JOIIRKLL ' Ki(:h«iii>-Faii ,
litirrjirur iUji^lâitN, na<]Uit i)an« Ir ronile
-ir s , • ,1, If \:\ no%. 1715. Sa fu-
i: • ^^iiaiffiuciil établie ilaii» \e
riiiiilc (le l)rtb> , fiait a rai%r. Son Lis-
jiVul [lalrnirl a\ait rrm|ili, qiiaranlr-
Irois ans durant, les fonctiou^ de clerc
de la riiambre des coinrounes; M>n pete
rlail >olliciteur-;;eneral du prince de
iailei, fiU de (ieor^e II el père de
(teor;;e III, et à ce titre fut initie aut
Mitri^ues du parti de I^ire«lerliouse.
^a mort prématurée, en 1701, laissa
.lodrell en posse^jion d'un riche hé-
ritage, lont;-lrmps a«ant (fu'il eût at-
teint Si majorité : il a\ait i\tu\ frères,
mais ronformement a l'usa^iede* pran-
dr laiiiillc> en Aiif;leterre, c'est a lui
(]iir loi.t lui dr\()lu m sa ijualile d'aine.
(>eu\-ci, du reste, firent lieureusemenl
leur clirraiu : l'un, sir l*aul, après a\oir
rti^u if tilre de Lni^lit en 17K7, de*inl
incdetin du nabab d'Ai rot '•t mourut en
1K03 a Madras; l'autre, qui se nom-
mait lienn, suivit la rairirre des loi» à
l'e&emple de son père, et Gnit par join-
dre a une place dans la commission
de» banqueroiiies un sif ^f a la chambre
des communes. Pour Hichard, aranl
aclievé^ev éludes aux col|i*ues d'Kloii et
de llnlfotd, il se li\ra aux letlies,
n)èlaiilen>eniblepariin amal;;ame assez
elran;;e la se\ere philohipie et le théâ-
tre. Ainsi, eu 1778, on le vil fournir
des notes a V Esihylr de Potier, cl en
1779 il donnait à HavmarLel une
comédie en trois aciei, la l eu\'c qui
a enrure son muri (a W idow and
no Widow). En 1781, il faisait pa-
railiede lon;;ues etutJrs>ur deux pièces
d'Kuiipide; cl, en MH.i, on le >owil
se rabnllre de nouveau sur llaN marlet
et \ ofîiir au pablic sa binette en un
arli-, / air c'est croire. 11 continua
aiUM l'Ciidanl plusieurs années , nuis
e/ideuiiiieiitetu Jiîdsc::;iicur, ncchcr-
iImiiI dans la bllcialuie cl l'élude
qu'un pjr>c-lcmps et ne ^c berçant
point des chimrres de gloire , ajoutant
à son lilre de mombrr de la sociftr
rovale àr Kondies qu'il avait depuis
1772, et que tout If monde peut avoir
pour son ar«;eiil, rclm de membre de b
socielédes aiiliquairr» 178^1, et de
membre du club d'tUsex llead pour le
soula;;ement des vieux jours de John -
•ou. sr faisant ircrvni. i! n Iftîrrs-loi*
à (Hford en 17U.'), et nommer jn;;e de
paix pour Irt comtes d'Oxford, de l)er-
bv, de NorfolL, de Middlrsex; et, au
milieu de tout cela, songeant de temps
à autre a jouer un ri\le politique et .i
entrer au parlement. Il parvint en ef-
fet, aux élections ;;enerales de 1790,
à se faire nommer reprrsentant pour
Seafurd; mais il ne ve;;eaqne provisoi-
rement, et (inalemeiit un concurrent
jalons parvint à le faire exclure comme
indûment élu, le 19 mars 1792. Ses
commettants cependant le irnninmé-
rent en 179i, et cette foi* il fut admis.
Mais la disMilution du parlement, en
1796, le replaça de nouveau dans la
foule ; il recula devant les frais énormes
d'une réélection, et des-lor>il annonça
(|u'il préférait son repos, il eut pu due
son argent, aux asitatioiis de l'arène
politique, qui probablement ne l'eussent
point indeiniiisr de^ drUiurs nécessai-
res pour voilurer, heber/,er et tenir en
bonne humeur ses parli.sans, pour ho-
kussrr el faire verser en route .ses an-
tagonistes. Celle vie paisible et lé^^ère-
ment occupée prolongea ses jours, mais
insensiblement ses facultés mentales
bais>crent : en iH'I'I il fut chéciaic en
enfance, et Ton nomma un curateur
pour veiller à sa personne et à ses biens.
Il vécut encore ainsi neuf an*. Sa
mort eut lieu le 2G janv. 1831. On a
de lui : I . Etudes ^o\x Kc!airr!sscnienls),
sur CI on et sur les IUicl hantes
tV Euripide ^en anglais. Illustrai ions
of Euripides on the Ion, etc. , Lon-
dres, 1781. 2voI.iii-8'. W. Etudes
( ou Eclaircissemenls ) sur Alceste ,
i86
JOH
Londres, 1790, in-8°. III. Quatre
lettres sur un manuscrit d'Euripi-
de, anciennement en la possession de
Milton (dans les Mémoires de Cra-
dock, tora. IV). IV, Diverses piè-
ces de théâtre (outre les deux dont il
a été question plus haut ; la Veuoe
qui a son mari; Croire c est voir ^
ùnpriraées en 1780 et 1786), sa-
voir : une tragédie intitulée : l'Hé-
roine persane^ 1786, in-8*^ et in-
4° ; Qui a peur, farce en un acte ; la
Pension de demoiselles , comédie ;
Un et tous, farce ; le Traoestisse-
ment , comtà^xt ; le Musicien, hvce (les
cinq dernières réunies en un volume ,
sous ce titre : Choix de pièces dra-
matiques). La trao;édie n'avait jamais
été représentée^ bien qu'offerte succes-
sivement aux directeurs de Covent-
Garden et de Drury-Lane. Dans sa
première comédie, la Veuoe, Jodreli
avait dépeint des personnages réels et
connus. V. Le chevalier et les moi-
nes, conte tiré du rjvausTov de Th.
Hevwood. P — OT.
J01IA\\0T (Charles Hen-
ri-Alfred), graveur, dessinateur et
peintre distingué de Técole française,
naquit le 21 mars 1800, à Offenbach-
sur-le-Mein, dans le grand-duché de
Hesse, de François Joharmot, riche
négociant de Francfort , et dWnne-
INIarle-Klisabeth Gevss, d'une famille
riche , alliée aux liethmann, célèbres
banquiers de cette ville. Il descendait,
du coté paternel, de l'une de ces famil-
les de religioFinaires que la révocation
de l'édit de Nantes força de chercher
un refuge à l'étranger. Johannot, un de
ses ancêtres, avait porté en Allemagne
cette fabrication des beaux papiers
d'Annonay qu'il avait été contraint
d'abandonner en France, et que con-
tinuent aujourd'hui encore, au même
lieu, les descendants d'une branche d<.' la
même souche. Envoyé de bonne heure
à Lyon pour y étudier le commerce, et
JOH
appelé à jouir, un jour, d'une immense
fortune, le père du peintre voulut, à l'i-
mitation de son aïeul , consacrer de
grands capitaux à la création d'une
nouvelle industrie dans la patrie adop-
tivc de sa famille. N'ayant encore que
vingt-deux ans, il enrôla des ouvriers
lyonnais , acheta des métiers, et alla
fonder , en Allemagne , la première
grande manufacture d'étoffes de sole
qui y ait été établie. Inventif, indus-
trieux. Instruit, Il aimait à s'entourer
d'artistes et de gens de lettres, et don-
nait même à la culture de la littéra-
ture et des arts plus que ses loisirs.
Il peignait les fleurs avec beaucoup
d'agrément , et , à l'àg* de quatre-
vingts ans, 11 reprit ses pinceaux et
produisit encore des œuvres d'une fer-
meté rare et du sentiment le plus heu-
reux. Bien avant Sénefelder, il avait im-
primé lithographiquement de la musique
à Offenbach, et, le premier, il Importa
la lithographie en France. Ce fut au
milieu du cercle éclairé dont s'entourait
son père, que s'éleva la tendre enfance
d'Alfred ; et ces premières impressions,
qui laissent à l'esprit et au cœur des tra-
ces si longues et si profondes, ne furent
pas étrangères^ la vocation qu'il an-
nonça, dès avant l'âge de raison, pour
la carrière où l'attendaient de si bril-
lants succès. L'enfant artiste le plus
heureusement doué , s'il grandit au
sein de toutes les aisances, de tontes
les aimables distractions de la vie, rare-
ment parvient à la renommée. Le plus
souvent il mollit et s'éteint dans une
sécurité lmpui.%anle, et ne sait pas
payer assez cher une gloire qui ne se
donne jamais. Celle d'Alfred lui coûta
cher, car son père, ayant essuyé des re-
vers de fortune, se vit contraint de
venir se fixer à Paris, en 1806, avec
sa famille ; et ce ne fut qu'après les
j>lus longues épreuves, les plus pénibles
luttes, que le jeune Alfred conquit une
position digne de son courage et de ses
JOU
latents natureU. Il n'était alors qu un
enfant plein d'intrlll^ence. Sa roere,
personne Je (;ranJ mérite, d'un e^jn il
^érieul et cultivé, voulut se livrer veule
à son eduralion comme a celle de ses
quatre autres en(ant^ : tout ce qu'ils
Mirent , ils le tinrent de ses lumieies et
de Nj IendIe^^e. Oprndant on était à
celle cpotiuf de splendeur où toutes les
nrlif veNdrs rausrf* de l'Italie s'arcu-
iiiuljieiit au muNce du I^uvre. in ou
deui ans après l'enfant v fut conduit.
A la vue de tant de trésors, il est saisi
d*une indicible émotion. Sa jeune ima-
gination s'allume, son admiration de-
vient un culte, une M)rte de fanatisme.
II n'a plus désormais d'autre rêve
aue de pavseï sa vie devant ces cliefs-
il'iruvre, que de boire, pour ainsi par-
ler, la poéiie à sa source ; que d'être
admis à imiter ces monuments du ^é-
nie. Dès lors, icncclii, feime, énergi-
que dans sa volonté, comme depuis il le
fut toujours, il dit : •« Jr srrui ur-
tistf ! M prit un ciavon, et, dans tous
les instants de liberté que lui laissaient
les leçons de sa mère , il se livra à
l'étude du dessin avec une ardeur inex-
primable : sa vocation était fuéc. On
sait que les galeries du Louvre sont,
durant la semaine, transformées en un
vaste atelier où se réunisxcnl les jeunes
artistes pour copier les tableaux des maî-
tres. Muni d'une carte empruntée à son
frète aîné, Charles Jolianiiot, j;raveur
habile, enlevé, depuis lors, aux beaiii-
arts, au moment ou il s'v était fait un
nom, Alfred obtint, malgré son exlièrae
jeunesse, la faveur de travailler dans
les salles. Un jour qu'absorbé tout
entier dans son travail , il ne voyait
que son modèle, et demeurait étran;;er
à tout ce qui se passait autour de lui,
soudain il sentit une main se poser
dourement sur son épaule ; il détourna
la tète et vil un homme dont les traits,
l'œil et le inaintien lui inspireront un
sentiment indéfinissable de respect:
JOH 187
M Coora^e, mon ami ! » lui dit celui-
ci , en lui souriant affectueusement et
lui touchant la joue de sa main. C^t
homme était Napolron qui semblait,
dans les premiers evsais de l'enfant,
avoir devinr l'avenir de l'artiste. Mal-
heureusement, .\lfred fut obligé de sus-
pendre ses travaux pour suivre à liam-
bour;;, ville alors lran<;ai^e, son père
que la protection d'un Ar srs patents,
le vrnérable comte de lloiw d'.Vn^las,
avait fait nommer, par l'empereur, in-
specteur de la librairie. O* fonctions le
mettaient, de nouveau, en rapport avec
tout ce qui tenait aux lettres et aun
arts. I^ vocation du jeune artiste s'af-
fermit du retuur de ce» circonstances.
Des collection^ précieu.se> de gravures
furent mises à va disposition . et , ^rà-
ce aux oxrelirrils modèles qu'il j puisa,
bien plus qu'aux lc(;ons infécondes de
quelques fjibles peiiities d'Ailema;;ne
qu'il eut alors pour maîtres, il lit dans
le de<sin de rapides propres que mal-
heureusement encore vinrent interrom-
pre les éveneinenl poliliuues. 1 out le
monde connaît le roemotable siè^e que
soutint, en 1813, la ville de Ham-
bourg, et les horribles assauts inté-
rieurs que la famine et la contagion
livrèrent à ses habitants. I.,es priva-
tions, les cha^iins, le tvphus, les an-
goisses de tout genre auxquels fut alors
en proie l'infortuné Alficd, portèrent,
à sa constitution déjà délicate, une at-
teinte dont il ne se releva jamais. De
là, cet aflVcux mal dont le sic^e est la
fiuitrine. qui le mina sourdement, et
e conduisit , pas à pas, de douleurs
en douleurs, à la mort. Après avoir ac-
compagné son père, nommé par la res-
tauration inspecteur de la librairie, à
Lvon et à d'autres ré>idcnrcs, il revint
eriGn avec lui, en 1818, ^e fixer de
nouveau à Paiis. Là, il retrouva son
frère aîné, Charles Johannol, qui péni-
blement et de tout son courage fondait
sa réputation de graveur. Charles des-
i8«
JOH
sinait avec f];oiit , {gravait avec chariiK*,
ft Ton a de lui de fort jolies vlgneltes
au pointillé d'après Desenne, powr l'or-
iierneiit de livres , notamment pour
l'Ermite de la Guyane, et une f;rande
planciie fort bien exécutée, le Trom-
pette hlesséy d'après Horace Vcrnct.
Le laborieux artiste devint la ressource
e\ l'asile de celte famille errante, bat-
tue àc tant d'oraf2;es ; mais ressource
insuffisanle à laquelle vint couraf^euse-
ment s'ajouter le jeune Alfred. Celui-
ci, dont les éludes, tant de fois inter-
rompues, n'étaient point achevées, se
mit à ^aver sans relâche, sous la direc-
tion de son Irère, tout ce qui lui tom-
ba sous la main. Ce furent, d'abord,
des lma2;es de confiseur, puis des saln-
telés pour les Jean et les Bulia, puis
enfin de ces suites de légendes sacrées
ou populaires dont la reproduction n'est
livrée qu'aux burins inexpérimentés.
Ces travaux Ingrats dévoraient tout
son temps, et retardaient l'essor de ses
dispositions natives; mais jamais un
murmure ne s'échappa de ses lèvres ;
et le bonheur de contribuer, pour sa
part, au soutien de ses parents, lui fai-
sait oublier l'interruption d'études ce-
pendant si chères. Bientôt son dévoue-
ment devait être mis à de plus rudes
et plus solennelles épreuves: en 1825,
Cliailes mourut à trente-sept ans, et
celte mort fit peser sur le jeune Alfred
tout le poids qu'à peine tous deux suf-
fisaient à supporter. Le jeune homme
se montra é^al à sa noble tâche; 11
l'acccpla comme un devoir pieux, avec
cette dignité simple, celte sérénité d'un
esprit ferme cl (11111 rœui bien placé, et
il trouva dans .son aficttion la force de
Paccomplir jusqu'au bout. Ucspf)niable,
si jeune, du soil d'une nombreuse fa-
mille, il se recueillit reli;;!CUsenienl ; et,
.sentant qu'une volonté soutenue pour-
rait seule faire face aux difficulté", sans
nombie qui l'entouraient , 11 adopta,
de:, ce moment, nue règle inflexible de
JOH
conduite à laquelle il soumit la moin-
dre de ses actions. Ainsi s'écoulèrent
ses plus belles années dans l'accom-
pllssement sacré des plus Impérieux
devoirs ; ainsi sa vie fut sans jeu-
nesse , et il passa , d'un même pas,
de l'adolescence à l'âge mûr; ainsi, son
caractère déjà naturellement sérieux,
la tournure déjà naturellement médita-
tive de son esprit, empruntèrent, de
cette époque de sa vie, une teinte de
gravité plus profonde; et toutefois jamais
sérieux ne fut plus aimable , jamais
solidité d'esj)rit ne fut accompagnée
de plus d'égalité d'humeur, d'une in-
dulgence plus exquise, d'une plus en-
tière bienveillance. Mais revenons à
ses premières années. Le germe du
talent était là : il cherchait à se faire
jour malgré les obstacles. Alfred gra-
vait, gravait jour et nuit : une planche
parut enfin : les Orphelins, d'après
Sclieffer, laquelle signala le jeune artiste
aux peintres de cette époque comme
un traducteur plein d'intelligence et
de sentiment. Les peintres sourirent,
en effet , à cet heureux début où le
jeune Alfred avait habilement marié le
pointillé, genre agréable, mais de peu
de ressources, aux lignes plus sévères
du burin. Gérard, cet homme de tant
de talent et d'esprit, qui savait si bien
qu'un des moyens de popularité pour
un peintre , c'est d'être gravé , et qui
ne s'en fit faute, encouragea les dispo-
sitions du débutant et lui confia la gra-
vure en taille-douce de quelques-uns
de ses tableaux : d'abord une scène de
la charmante nouvelle à'Ourikuy et
plus tard Louis Xllprese/itufii Phi-
lippe K aiiv (imlnissadeurs (ï Es-
pagne. I/habllelé qu'il déploya dans
cette dernière planche pour laquelle 11
s'est fait beaucoup aider, mais à laquelle
il a donné le coup d'œll du maître et
la dernière main, la place à \\\\ rang
honorable à côté des œuvres d'un ordre
plus élevé qui ont principalement con-
JOH
JOH
i.so
iriUié à l'fitfQ&ion dr o réputstioti.
(^pendant, lifpuis \in;;l-ciiiq anncr»,
l'Aii^Iflrrr* a\ail imprima un r%^nrf\-
Iraordinairr j la librairie, fit aNsonanl
l« art^ (lu (lc<.^in au «sucrés i\e ccllft
branche d'iniltistrif . Alors que la paix
3\.i:l r(iu>frt le rniitiiicnl, les merveil-
les (lu biiiiii .iii^la ^ avaien! fait leur
entrée Irioinpli.iiile en France, el «ou-i
deMunies leN (nbnlaires de la (trande-
Brela;;ne |>our ses ^ple^dide!> édilion*
i Ulustratiuiis. La \i(;neUe de nos
voisins tourna Inites les téies, devint
le point de mite, l'objet d'étude et
dVmulalion de quiconque tenait le
luirin et la pointe. Alors naquit un
^nùt passionne pour les édilion> de
luxe qui nous valut de beaux ou\ra;;es
t>po^rapiriques et chalco;;rapliiques.
Déjà, il e>l vrai, les Didot, lr> Ke*-
nnuard el les (Vapelet avaient produit,
en ce penre, des monuments immor-
tels ; mais rien n'avait encore paru qui,
sous le point de vue de la delirate'^ie
et du fini des embellissements, pût ri-
Taliser avec les MiUr et une .\uits,
dont les ravissantes compositions au-
raient suffi pour placer le peintre
Smirke au premier ran;; parmi les ar-
tistes. \x (jil IjUix et le Don (^uixote,
d'après le même peintre, vinrent ajouter
encore à l'enllion^ia^ime comme aa
désespoir de nos ilcs>;n.-iteurs et de nos
j^raveurs de vignettes, à qui cependant
le Gîrrej;e de la France, l'admirable
l'ierre IVudhon, avait donné des lc(;ons
lieureuses. Jusque là, Moieau le jeune,
M peu puissant dans se*; efieLs,mai> si fin,
M spirituel, si supérieur, si admirable-
ment habile à reproduire les scènes du
-iorle de Louij XIV et surtout de celui
de Louis XV, était le modèle désespé-
rant des artistes qui cuhiv aient le même
^cnre. Seul di°;ne d'être cité, Alexandre
Desenne avait succédé à Moreaii sans
le remplacer , et tenait alors le sceptre
de la vit;nette. Alfred Johannol, en
attendant qu'il prît un plus haut vdl,
nf pâH\aii rester étranger à ce mnuviv
ment de l'une des branches les plus ti-
vaces de l'art. Il rtaî^, eneiïet, de ceux
que les succ^ de la vi;;netle aiif;lal*c
empêchaient de dormir ; il iravaillaà l'é-
{i;aler, et nou« allons le voir, m ce ;;enre,
marquant forlrmrnt son époque du ca-
chet d*" son talent, soit qu'il ait reçu,
soit qu'il ait donné l'impul ion comme
graveur, dessinateur ou peiitre. D'a-
bord, il se ran;;ea smis la bannière du
timide nnvaeur Devenne, et {:rava, ib
la manière an;;laise, bon nombre des
compositions de ce talent un peu froid,
mais plrin de ;;oût et de ^race. Desen-
ne, homme* instruit, orné d'une ;;rande
lecture, doue d'une justesse exlréme
d'idées sur les arts . apprécia vivemeat
le caractère mm, l'esprit droit el le ta-
lent fécond de Johaniiot. Il lui donna
des directions et des conseils, et, sou*
les veux itnis de ce maiire indul^ent,
Alfred, d'abord timide, plus confiant
ensuite en ses propres forces , essava
ses premières compositions; et, tandi.*
qu'il préludait ainsi dans le silence à
ses grands succès en ornement de livres,
dessins,aquarelles. gravure de vignette,
gravure de grande planche, tout mar-
chait à la fois el sans se nuire, et prou-
vait la merveilleuse souplesse de ce ta-
lent multiforme. Grpendant, .^iir les
traces de Desenne , avait apparu, de
pnme-saut, un homme pourvu de la
plus heureuse or;;anisation, sachant
d'un tour de main triompher de toutes
les difficultés de l'art au ^\é d'un caprice
improvisateur, Achille Devéria; et seul,
en elTet, à la mort de cet artiste aima-
ble, Achille demeura un instant en pos-
session des illustrations biblio;;raphi-
^es. Alfred voulait se soumettre en-
core à de nombreuses épreuves, avant
ilcnlrer dans la lire et de disputer la
palme à l'heujeux siirresseur de son
ami ; mais la lilho;;rai'Mie ne tarda pas
à rendre celui-ci infuiele à sa première
vocation; vint Jolannol qui dnnita
igo
JOH
par terminer quelques vignettes laissées
inachevées par Desenne, et quelques
jours encore, et il régna seul. Seul ?non,
car à côté de lui s'élevait un plus jeune
frère , Tony , artiste aussi, plein d'es-
pérance et d'avenir, l'un des membres
de cette famille que la jeunesse d'Alfred
avait adoptée. Tony avait grandi à côté
de son frère, plein d'une respectueuse
déférence pour le savoir, pour l'expé-
rience précoce, pour la vertu bienveil-
lante et sans faste. Il avait grandi en
âge et en habileté ; et bientôt, côte à
côte avec Alfred, il marchait de con-
cert , d'une même allure, aux mêmes
luttes, aux mêmes triomplies : graveur
avec le graveur, dessinateur et peintre,
avec le dessinateur et le peintre ; spec-
tacle unique et touchant d'une triple
fraternité du sang, de l'esprit et du ta-
lent. Nulle affection n'était plu.s sin-
cère, nulle plus pure, nulle plus entière.
Alfred et Tony, Tony et Alfred, deux
talents jumeaux , une seule et même
existence , une seule àme en deux corps.
Dès-lors, à ce période du moins^ l'his-
toire de l'un est celle de l'autre. La
part qu'eut celui-ci dans les composi-
tions de celui-là, qui le saurait dire?
ils ne l'auraieFit su dire eux-mêmes,
tant leur vie d'intelligence était mise
en commun ! Interprètes d'abord des
oeuvres d'autrui, après avoir prêté à
d'autres le passeport de leur burin, ils
volèrent bientôt de leurs propres ailes,
et gravèrent les dessins dont ils étalent
les auteurs. L'eau-forte, cultivée d'une
façon si brillante, par les maîtres an-
ciens et par quelques modernes, devint
leur procédé favori, comme répondant
mieux par la promptitude de l'exécu-
tion à la promptitude de leur pensée;
et des collections de vignettes pour les
fiîuvrcs de VValter Scott, de l'améri-
cain Cooper et de lord liyron virent
le jour. Presque à la fols ils trouvaient
le temps de publier encore une raulli-
lude d'autres vignettes où l'imaglna-
JOH
tion, l'esprit et la grâce se disputaient
le mérite de l'exécution. Il n'est pas un
grand nom littéraire en France qui
n'ait travaillé avec les deux frères, pas
une édition de luxe que n'aient enrichie
leurs dessins. C'est alors que le plus
jeune des frères orna tant de livres
de dessins sur bois que grava Perret,
et que son crayon spirituel lutta de
verve et d'originalité avec l'auteur du
lirre bizarre du Roi de Bohême et ses
sept châteaux , débauche d'esprit ,
mais d'un esprit supérieur. C'est donc
plus particulièrement le jeune Tony,
et avant lui Achille Devéria , à qui
l'art fut redevable de la restauration en
France de la gravure sur bois, que son
mode expéditif d'exécution et d'impres-
sion appelait à de si importants résul-
tats réalisés aujourd'hui. Mais Alfred a
pris en ce genre une grande part aux tra-
vaux de son frère, et l'on a eu de lui
un certain nombre de dessins sur bois.
Toutefolsquclque brillants et populaires
que fussent ces succès, les deux frères,
l'aîné surtout, rêvaient une ambition
plus élevée , celle de se livrer à la pein-
ture. Il fit, avec son courage ordi-
naire, de premiers essais auxquels bien-
tôt vint s'associer le plus jeune; et le
fruit de ces communs efforts fut l'appa-
rition, au salon de 1831, de deux ca-
dres 011 leurs productions confondues
décelaient une origine fraternelle. C'é-
taient encore des illustrations de li-
vres : vingt-quatre petits tableaux des-
tinés à être gravés pour les œuvres du
romancier écossais. Cette forme nou-
velle du facile génie des deux frères
intéressa vivement. La vérité du cos-
tume y était le moindre mérite. Jus-
tesse de pantomime, esprit des têtes
qui signalait parfois la plus heureuse
imitation delà finesse d'Ilolbein unie à
l'expression, au jeu de physionomie,
au laisser-aller d'Hogarth; harmonie
séduisante et parfaite, telles furent les
qualités auxquelles on prit plaisir à
JOH
donner «Jm ëloge< ; et l'on oublia
qu'une critique ;;ronilfU4e réfl.imail un
roloris plus >i;;oiirriit, un (le^Mn |)lii^
^ère , un mndeir plu^ fernfe, el plus
de relief. Ouelque clio^e, en cITrl , dé-
celait enroie la set:here<«e de main du
praveur. Mai* à me\ure qu'Alfred prit
l'habiludedu pinceau, ce» défaut» 9'at-
ténurreiit ou dispai urent, et le< qualités
restèrent. Tandis 4|ue Tonv continuait
à rr^iier seul en maître dans le domai-
ne de la librairie de luxe, et ne pei
{^ail que de loin à loin quelque toile,
Alfred se lirait presque e\clusi>ement à
la peinture. Vers la fin du mrine salon
de lH!n , il exposa son premier ;^rand
tableau de rbetalet, \ Arrestation tie
Jean de l.respirre sous Hit lirliru ;
et, dan» sa defianre de lui-même, il at-
tendit sur son œurre le jugement do
public avec toute l'anxiélé du poète
dramatique, le jour de l'épreuve su-
prême de\ant ses juj^es. I>e ju;:;ement
fut favorable au modeste artiste. L'in-
térêt de la scène, la facilité d'exéru-
tion, la séduction de l'harmonie géné-
rale firent le plus ^rand honneur aa
bonJohannot. On se demand.nl ou
donc ce jeune artiste , qui n'avait tra-
vaillé dans aucun atelier, avait trou>é le
secret de ces qualités solides et brillan-
tes. C'est que les natures d'élite sup-
pléent par l'instinct a ce qui leur man-
que du cAté de l'étude et du métier ;
c'est que le sentiment e<t comme un don
de seconde vue, comme un de ces éclairs
de rintcllif^ence d'en haut. Alors, une
arène nouvelle s'ouvrait, vasleet libre, ï
l'ardent repard de l'heureux .\lfred. Il
s'y élança avec toute l'énergie du cour-
sier généreux qu'ont retenu les entra-
ves. Pour se jeter tout entier dans l'é-
tude (le la peinture, ce beau idéal de
ses jeunes années, ce culte rélléchi de
son à;:;e mur, il n hésite pas ï sacrifier
les bt'nétice> considérables et actuels
que lui assurent des travaux moins éle-
▼és; et les progrès de sa palette rf-
JOH
«9»
pondent à l'artive pers^érance de se$
effort». N oilà donc rnfinsa viearran;;ée
à u f;lli*e ' l/aisanre sourit à tout ce qui
lui est cher. \x public lui continue ses
applaudissements. |j princesse Marie
d'Orléan», cet anr;e aux aile» pures,
une admirable artiste sur les marches
d'un trAne, a voulu posséder le» deux
cadre» de sujet» de \V. Scotl î \.t roi
lui-même le distingue, le décore, jjoûte
un talent si plein de fine^^ à la lois ^
de sentiment , se plait dan» »a conver-
sation, honore la dignité de ce carac-
tère d'riM iri'e'r» dr h rnvedlance qui
va i lion ! Alfied
est ' I rrait, s'il était
donné de l'être ici-ba» , et »i mériter le
bonheur était en jouir. Mais il e»l aux
f>ri»e» intérieurement avec un mal qui
e déchire. Sa (dithi»ie pulmonaire étend
»e» ravage». Trop habitué i 4'ob»erver
pour se faire illusion, il connaît le dan-
ger, mais il parde pour lui seul cette
angoisse de tcius les instant», et son
travail ne perd rien de son ardeur.
î,a fondation de» {galeries historiques
de Versail'es vient ouvrir un nouveau
débouché i ses cruvres. Il accepte de
préférence, entre les travaux qui lui
••ont offerts, ceux dont les proportions
devaient lui permettre d'atteindre les
points les plu» élevés de son art. Le
plus f;rand de» (luise, François de
Lorraine, présentant, aptes la ba-
taille de Dreux , les officiers de
son armée à Charles l\, fut (1836)
son début dans la {;rande peinture
(au chiteau d'KuV Cette toile, d'un
mérite distinf;ué , est certainement
l'une des plus éclatantes nianifesta-
\ions de la forte volonté qui caracté-
n^ait Alfred , dont la faiblesse sem-
blait devoir succomber sous la hù^ue
d'un si prand travail. Kt de fait, son
mal empirait et le forçait, de temps en
temps, de poser ses pinceaux. Une
lueur de santé revenait-elle, vile il les
reprenait. C'est ainsi que, dans les
192
JOH
comls luiersalli^<î de trompeuses ronvn-
lescences, il trouva le temps de décorer
nue chapelle de l'c;^li>ede Notre-Dame-
de-Lorelte où il exécuta deux sujets pui-
sés dans la vie de saint Hyacinthe.
C'est ainsi qu'indépendamment des pe-
tits sujets tirés de \\ alter Scott, et du
tableau de l'arrestation de Crespicre,
il avait peint, en 1831 , Don Juan
naufragé trouvé sur le rioage pur
Haïdée, et une scène du roman de
Linq-]\larsy de M. de Vigny; en 1 833,
V Annonce de la victoire d'Hasten-
beck (Palais-Royal) : V Entrée de ma-
demoiselle de Montpensier à Orléans
pendant la Fronde (au Luxembour^^) ;
en 1834, François r^ et Charles-
Quint (au comte de Lariboisière) ; en
1835, le Courrier Vernet pansé par
le roi; enfin, Henri H, Catherine
de Médicis et leurs enfants ^ et, dans
les trois années suivantes jusqu'à sa
mort, Marie-Sluart quittant l'Ecos-
se; Anne d'Est, duchesse de Guise,
se présentant à la cour de Charles
IX; Saint-Martin et la bataille de
Bratielen , dite de Saint-Jacques.
Ici la nature vaincue succomba sous ce
dernier effort. Dès long-temps, il le
savait, un repos presque absolu eut pu
seul arrêter les ravages de la consomp-
tion. Mais le mal, tout en l'abattant,
semblait lui donner un feu nouveau, des
inspirations plus vives, un amour plus
ardent pour son art, comme si le fléau
cruel eijt voulu parer sa victime avant de
la frapper. Coiiilnmné à mourir jeune,
et résigiié à sîdiir rct arrêt, il voulait,
du moins, mcttie à profil cliatuie jour
de grâce qui lui était accordé, tant le
sacrifice de son art était le seul qu'il
ne pût consentir à ajouter à tous ses
sacrifices! Kt c'est une activité aussi in-
cessante qui peut seule expliquer com-
ment, avec ses œiivres capitales , il a
pu, dans ce qu'il appelait ses moments
de repos, produire cette quantité pro-
digieuse de vignettes, d'aquarelles, de
JOH
stpja, diMliP.'îstiisau crayon, à la plume,
à l'encrede Chine, qui ont tant contri-
bué à populariser son nom. Le nom
des Johannot est, en effet, avec celui de
Charlet, en des branches différentes
de l'art, l'un des plus populaires de la
France. Alfred mettait, du reste, à ses
œuvres les plus fugitives, à celles-là
que n'eût pas déparées un peu de né-
gligence, le même, soin, le même
amour, la même correction qu'à ses
grands tableaux. En tout il portait la
même conscience. Il est même quelques-
unes de ses aquarelles qui, par la belle
entente de composition et l'exécution
pittoresque, ont acquis, jusqu'à un cer-
tain point, l'importance de tableaux à
l'huile, notamment les Adieux de
Charles P^ à sa famille, et Olivier
Cromwell lisant la Bible à ses en-
fants assemblés, deux pièces qui ont
eu les honneurs de la gravure. ]/a pein-
ture de la Bataille de Brattelen, exé-
cutée pour le Musée de Versailles,
avait, disions-nous, été sa dernière
lutte contre son progressif épuisement.
11 se préparait à se reposer et à se dis-
traire de ses rudes travaux par quel-
ques petits tableaux de chevalet, quand
des affaires de famille vinrent réclamer
sa présence à Manheim, où s'étaient re-
tirés son père et sa sœur. En vain, son
frère et ses amis le conjurèrent de ne
point entreprendre un voyage si pé-
nible, dans son état de faiblesse; .sa
conscience lui représentait ce voyage
comme un devoir indispensable; il par-
tit,laissant tousceuxqui l'aimaient dans
une anxiélé que vinrent bientôt aug-
menter les plus alarmantes nouvelles. Il
était tombé tout-à-fait malade à Man-
heim. Une légère amélioration étant
survenue, il voulut en profiter pour
revenir en France; mais les forces lui
manquèrent à Baden , et ce ne fut
qu'au bout de plus d'un mois qu'il put
entreprendre la route de Paris, il y
arriva enfin après d'incroyables difb-
JOU
cuJté»; Buii , à vrii dire, àé)k il n'éUit
plus: MNi ime »«ulf torrivait , et le
vulbevreui ar(i»lc ne revit li rapiule
que pour oITrir a vr» ;troi% une Lien
liMlernnsoljilioo.celledelrui »rtrer une
dernière fou la main avant de les quit-
ti*r pour jamais. Il vit %rnir »on heure
suprême avec toute la résignation qu'on
devait attendre d'un homme dont la
vie avait eie un perpétuel vacriGce.
Mai^ rinfoftuné ne put tenir jusqu'au
^rnier moment à la petisee poignante
de se«MravaukMi«{>eiidu5; et nul «pec-
larle ne fut glas touchant et plu^ dou-
lovcfu que »es adieai a la peinture,
•OB ioic . M)n ruite , von idolâtrie. Il
empira le 7 defemhre 1H!J7, et cette
perle fut vivement drjjluK-e par lev ar-
tistes et par un ^laud nouibre d'écri-
vains et d hommes d'eiite, qui avaient
en sa personne ^oùte le talent de l'ar-
tiste, aimé et respecte le caractère de
l'homme de bien. Toute la vie, chet
Alfred Johannot, semblait s'être réfu-
giée dans rinlelli<;ejice. Chez lui l'hom-
me manquait à l'artiste, et sa factice
fiisteuce a ele unlon^; problème lesolu
par la force de volonté, par le calme
et la tenue de l'esprit , par la vages^e in-
tiolahledu régime. Son àrne dominail
sa «>ante : il voulait, et sa volonté ren-
dait la nature en quelque >orte obéis-
sante. S'il ne parvenait pas à faire
passer dans ses (ru\ rr» toute l'énergie
dont sa tète était douée; s'il v deroen-
lail un coloriste plus harmomeui que
puisr.ant, il les marquait du moins d'une
lorte empreinte de merveilleuse adresse
et de constante originalité. Ce senti-
ment fin et délicat qui sait ciiolsir et
mettre chaque chose a sa place et qui
constitue le f^odi ^ don plus rare en-
core que le talent, il le possédait a un
depré supérieur; et toutes ses truvres
respirent 1«* i:oût. I^ tact d'Alfred lui
avait appris de bonne heure à se gar-
der des exagérations en tout genre.
Jeté dans les arts à une époque on s'agi-
LTTIII,
JOH
193
tait avec fureur la question tant débat-
tue, si peti éclairrie, du ch.fsitfue et du
ro/nuntnfur ; vivant incevsaniinenl au
milieu des plus jidenl% sectateurs de
ces snleme» evcluNiN. i(Mi|>)uts le pied
uir les charbons ardenu dr l'amoor-
propre, il ne prit les couleurs de per-
sonne, et M* réfugia an srm dr l'é-
lude, indulgent pf>ur tous, é^alrment
chéri dans les deux camps. I^ fureur
d'embellir ou d'etagérer la nature ré-
pugnait également à sa manière de
sentir. Dans les aimables épancheroits
de l'aleher où il se montrait, cooHM
toujours , ingénieui , calme , jndi-
cient et simple , il aimait à répeter
qu'il vient, pour les esprits droits et
sûrs, un temps où l'on trouve la na-
ture M belle, si uue, si lire m^me
dans ses défauts, qu'on penche i la
rendre telle qu'on la voit : et c'est l'ei-
trétae difficulté qu'on rencontre à être
asset vrai pour plaire, en la suivant de
près , qui seule peut détourner d*ea
suivre la route. Il vovait sainement
en tout? chose, et son bon sens exquis
I aurait rendu propre à toutes les
carrières, même les plus dissemb'ables.
Son organivalion était merveilleuse
ponr tous les arts. A Hambourg, la
musique lui devint une passion ardente
comme la peinture; il apprit le haut-
bots et la (lûie ; et , ne pouvant em
rien demeurer médiocre, il v devint
de force de maître ; mais la nature de
son affection organique le força d'v
renoncer bientôt. A Lvon , il s'é-
prit aussi de science , et tour-à-tour
il étudia avec son frère Ton> l'or-
nithologie , la botanique , I anato-
roic ; et tel est le secret de Iha-
tHeté qu'ils montrèrent, depuis, tous
deux à peindre les animaux. Alfred
était sensible à l'éloge; non qu'il fît
cas de cette critique, simplement spi-
rituelle et si peu spéciale, des feuilles
publiques: mais l'éloge le touchait, loi
<.! bienveillant, comme une expression
i3
»94
JOU
de bienveillance. Ce mot qui fit for-
tune au XVI II* siècle, et qui pel^^nalt
si bien Tétat des esprits à cette époque:
« C'est aux muNiciens à faire de la mu-
sique et aux philosophes à en parier, »
il l'appliquait plaisamment à la pein-
ture ; et cet axiome, si peu axiomatique,
devenait la critique la plus juste de la cri-
tique elle-même. Sagement il laissait
de côté toute délibération, toute discus-
sion d'école et de secte sur les beaux-
arts, se bornait à produire; et, comme
cet ancien, pour prouver le mouvement,
il marchait. F. d. C.
JOfiX (Jean-Denis) . médecin ,
né à Tœplllz en Bohême, le 18 jan-
vier 1764-, exerça d'abord l'art de
guérir à Prao;ue, puis dans sa ville na-
tale, où il mourut le 14 mars 1814. Ses
écrits sont : I. Sur les abus qui exis-
tent dims r exercice de la médecine,
pour servir de supplément à l'ouvrage
de Tissot sur les moyens de perfec-
tionner les études de médecine (allem.),
Prague, 1786, in-8". II. Diction-
naire des luis médicales de /' 4uiri-
che , depuis 1.3i8 jusqu'à l'époque
actuelle (allem.), Praj;ue, 1792-1798,
6 vol. ln-8". Les deux derniers volu-
mes de cet ouvrage ont pour titre :
Police médicale et médecine légale
des états héréditaires (F Autriche.
III. Les bains de Tœplitz en Bohê-
mCy considérés sous le rapport de la
physique, de la médecine et de la po-
litique {dWtm.], Dresde, 1792,in-8^\
John a encore publié d'antres écrits sur
les eaux de Tcrplitz. IV^ AJémoires
de médecine de dioers savants de
Bohême (allem.), Prague, 1798,
in-8°. Ou trouNe dans ce recueil plu-
sieurs mémoires de John : les uns sont
sur les eaux de Tii'plltz , les autres sur
divers sujets relatifs à la Ilohéme. Il
a aussi ajouté des notes à la Médecine
légale de Sikora , et il a [niblié le 2*^
volume des Disse.rtaliones medicœ
Pragenses. O — T — R.
JOH
JOHXES. Voy. Jones, ci-apri*.
JOH XSOX, aventurier allemand,
au X V 1 1 1*^ siècle, fil quelque sensation
par ses efforts pour opérer des réfor-
mes dans la franche-maçonnerie. En
1763 , il s'annonça comme envoyé
d'Ecosse par des supérieurs succé-
dant sans interruption aux grands maî-
tres des Templiers , et inconnus aux
chefs même des loges maçonniques
d'Allemagne. Il soutint que la vérita-
ble franche-maçonnerie n'était qu'une
suite de l'ordre du Temple, et «qu'en
conséquence, le rit templier était le vé-
ritable. Il tint à léna un chapitre de la
stricte observance de ce rit. En même
temps il déclara faux et erroné le sys-
tème adopté par la mère-loge de P>erHn,
dite desTrois-Globes, et fil brûler les
écrits publiés par un autre novateur
nommé Rosa, qui se disait député par
le maître de la loge des Trois-Globes ,
soutenant que la franche-maçonnerie
était l'alchimie et conservait le secret de
la pierre philosophale el de la véritable
cosmogonie. Celui-ci avait adressé des
circulaires sur sa doctrine aux autres lo-
ges d'Allemagne. Johnson, après avoir
livré ces écrits aux ilammes avec un
grand fracas, et au bruit d'une musique
guerrière, fit part à son tour aux lo-
ges d'Allemagne de la condamnation
de la doctrine de Rosa, et les engagea
toutes à s'affilier à la loge d'iéna, com-
me enseignant seule la vraie doctrine
maçonnique. Un grand nombre de
loges se rangèrent de son parti, et
abandonnèrent le rit de la mère-loge
de lierliii pour celui du temple d'Iéna.
Non content de cette réforme, John-
son s'arrogea le droit de nominerseul
des cbcvaliers, s'appuyant toujours sur
les pleins pouvoirs donnés par les pré-
tendus su{)érieurs invisibles pour la ré-
forinr de l'ordre maçonnique. Ses pré-
tcnlions ne purent manquer d'offenser
les chefs de ces loges. Le baron de
Hund, ardent promoteur de la fran-
lOH
cbe-iaafÉawii, vint, en 1 764, aMiiter
au consent de Joliiison Jan<. rmlrn-
lion de Ir drina«qucr. Il drc(>u\iit que
le soinliMiit templier éfov!»ais amÏxX
d'aliurd rir allaclir au sen ice d'un >;en-
tilliomiD« rourlandais ftous le nom de
Leurlil qu'il a\ai( ecliangé ensuite ron-
Ire celui de HerLrr, en entrant comme
secrclaire cliex le duc de llernbuur;;.
qu'enfin il a\ait fait de la faus>e mou-
naie , et s'elait approprie de» l«»nd>
pubiiCN, elr. Dénonce pour sesmahrr-
Mlioi!5, JulinMinfut arietr par la police
pi ii«.>ieune, et enfrtpie d'alturd a Ma;;*
dcbuur^, pui5 à ^^ artrnbur^ ; nous
i|i;nui uns M ce fut en sertit d'un )n;;e-
Rient rr^tilipi ou d'après la nulorielé
de .<e> driils. Il mourut en prison l'an
1775. Ses partisans ré[>andirent le
bruit qu'il avait été as.$asMiié ( 1 ) . mais
comment aurait-il pu l'être en prison:'
À moin> qu'on ne suppose, ce qui n'est
pas >ra!>einlilable, que le ^ou\efne-
ment prii>sien l'ait fait mourir >ecrt*te
ment. Son ennemi, le biron de lluiid,
a\ail pris possession des papiei > de
Johnson, et s'eiail fait nommer t;rand-
maître des loges du rit du Temple.
D— G.
JOII\STO\ JArgiFi), liifé-
riteur écos>ais d'j WUI* siècle,
descendait d'une ancienne et noble
famille. Après avoir étudié à Kdini
bour^, à (ilascow cl à l^rabrid^e, il
acriimpa^ina en DanemaiL, comme
tli-neLin , Morten Hden , eii\o\é
extraordinaire d'An^ilelerre près la
tour de Copenha;;ue. Kn 17H;iii re-
tourna dans sa patrie avec le même
envo\é, et revint la même aiince en
Danemark pour y exercer les fondions
de chapelain de la lé{;alion anj;laise.
Nous ignorons Tepoque de sa nais-
sance et celle de sa mort. On lui doit
les écrits suivants : 1. Anecdotes oj
(« BoitnrTn.e. /« Jriaittt ckmjttt, p*ri. a
y. «9 — jii a J^lJtHiirum , ou Or»j»j/»^»* ^
tUtêt. ^ Im /rmJK-imeitntrtt, ton. | , p. ,,|
JOL
•94
Oùii^ the ùàick, king uf Alun, and
the liehridian priai es, islandish and
en^itsh (Anrctiolrs d'Olave-le-Noii ,
roi de Man, et i\rs piinces hebnb-
dien», en i^lalldai^ cl en an;;lais\ Co-
peobac^ue. 17Ht>, m-lJ. II. Noive-
giun accouni uf kin^ Il ut us expc
dit ion ugainsl Siutlund, l^tiJ, is'
lundi sh and euglisit wit/i noirs (Ké-
cit nor^p^ien de l'expediiiun du roi
llacun contre l'KcosNe eu l'JtiJ, en
islandais et eu ^n^lal^, avec de» no-
tes , lUid . t78J. inlJ III. Lo4j-
irukur (Js'id*i, ur thrdealU wng uj
l.uiibruk /éO»»' Ursi turmtly priiUed
frutu varitus manust i ipi% lu ivhich
are adtled the various reudings ; a
iitenii latin versiun , an islundo-
latino glussary , and rxplaruitury
notes (Lodbrokar Qvida, ou le ( .liant
de mort de l.odb, imprime aujourd hui
correct emeni , d'après divers manu
scrils, auquel on a ajouté les diiïé-
renles variantes, version lillrrale en la-
tin, avec un ^lo^^ai^e islando-lalin et
des notes e&plicativcd), ibid., 1782,
in 12. IV. A Jragment ol an tient
h i.^ tory uj Sttttland and Orkiieys
^^Va^raent d'une ancienne histoire de
rKrov5« et des Orcades), ibid., 1783,
in-12 l>— z— s.
4<nJVKAr de Segraix (Ma-
nu- .MAi»nnNK-Niroii - Alixah-
niiiNF. (iKIIIKK,* femme), cornue
dans le monde littéraire sous les noms
à\4dine Joliveau I), est une des
femmes qui se sont le pjufi distinguées,
de nos jours, dans la poésie. Née le
16 novembre 1756. à l>ar-sur-Aubc,
où son père était ai 4^1 du roi et sub-
'^.«léoué de l'intendance de Chainpa-
j^nc, elle re^ut une éducation soi;;née
et vint se fixer il Paris , après avoir
épousé, fort jeune encore , Nicolas-
Claude Jolive.iu, l'iiii des administra-
teurs dea me>sa;'enes royales. Vou-
(i| Aétnt «s( probrfbiruirut UD djm uutif
d'ÀtrxAaiiriac.
l3.
196
JOL
lant suppléer aux maisons d'ensei-
o;nemciit détruites pendant la révolu-
tion et diriger elle-même Tinslruction
de ses enfants, M"**^ Jollveau s'assiijé-
til à apprendre le latin, l'italien et
Taîiglais. Le talent de la poésie fut la
récompense de ses soins maternels.
Klle devint fabuliste en étudiant les
beautés de La Fontaine pour les faire
sentira ses cbers élèves. Mais les en-
couragements de l'abbé Aubert, de Du
Tremblay et de Le Bailly échouèrent
long-temps coi^re sa modestie. Elle se
refusait toujours à publier, même dans
les recueils périodiques, ses premiers
essais qui avaient été applaudis à la
société des belles-lettres dont elle était
membre. M'"*' Jollveau avait enfin
consenti à tji insérer quelques-uns
dans VAlmanach des Muses , les
Etrennes (T Apollon, et le Petit ma-
gasin (les (lames , lorsqu'elle donna
la première édition de ses Fables nou-
velles en vers, suivies de quelques
poésies, Paris, 1802, in-18. Ce re-
cueil est le premier dans ce genre
qu'ait publié une femme française, en
lie comptant pas V Herbier w(jral de
j^pie j^ Qpnlis, Ce ne fut que quatre
ans après que parurent les fables ras-
semblées de M™*^ de La Ferandière,ph.s
anciennement connues en détail. Cel-
les de M*"^ Joliveau, divisées en six
livres, furent porfées à neuf dans une
seconde édition, en 1807. La trol-
.sième, publiée en 1814, et dédiée à la
duciicsse d'AngouIéme , est partagée
aussi en neuf livres. Sur les 175 fables
qu'elle contient, l'auteur en retrancha
environ 70 de la^précédenle édition ,
les remplaça par un pareil nombre de
nouvelles, et en abrégea plusieurs au-
tres. On a encore de M""" Joliveau
Suzanne, poème en quatre chants,
suivi du Bepentir, poème en deux
chants et de poésies fugitives, Pans,
1811, in-18. Quoiqu'elle ait traité le
sujet «;rabrenx deSnzanne avec la grâce,
JOL
la décence et la délicatesse qu'une fem-
me seule pouvait y mettre, c'est sur-
tout a ses fables qu'elle devra sa répu-
tation ; plusieurs sont imitées de Les-
sing, de Llchtwehr, de Desbillons,etc.
Les éloges qu'elles obtinrent dans neuf
journaux, entre autres dans les Peti-
tes Affiches, rédigées par l'abbé Au-
bert, ne sont pas dus uniquement à la
complaisance et à la galanterie. Elles
ont mérité leur succès par d'heureu-
ses inventions, parunegrande connals-
.sance du cœur humain, par des idées
fines et spirituelles., par des moralités
qui décèlent une belle âme et dignes
d'une tendre mère, enfin, par un style
simple et naturel qui , malgré quel-
ques négligences , est loin de manquer
de grâce et de charmes. Ces fables
conviennent surtout pour l'éducation
des jeunes filles. Quelques-unes ont eu
l'honneur d'être traduites en italien.
M"^*^ Joliveau en avait annoncé ou
du moins fait espérer depuis long-temps
une quatrième édition plus soignée,
plus correcte et plus complète, dans
laquelle seraient entrées les fables
qu'elle avait publiées plus récemment
dans divers recueils , celles qu'elle
avait imitées de Krilof, dans l'édition
française de ce fabuliste russe, donnée,
en 1825, par le comte Orloff, et
d'autres inédites. Son poème d'Alfred-
Ic-Grand, roi d'Angleterre, en qin'nze
chants et en prose mêlée de vers, s'était
fait avantageusement connaître par
quelques morceaux remarquables, tels
que la Description d'un tournoi, et
V Indmdie de la flotte d(moise à la
suite d'une tempête. Mais cet ouvrage
impatiemment attendu ne paraîtra pro-
bablement jamais, l'auteur ne l'ayant
ni terminé ni corrigé. Les chagrins
les plus cuisants empoisonnèrent le
dernier tiers de la vie de M*"* Joll-
veau, étouffèrent sa noble émulation,
et glacèrent sa verve poétique. Elle
perdit son époux en 1812. Des cinq
JOL
Wi qn tue en avait eus, et qui fji-
il sonc?|>oir elionofjjueil, sou lioi-
t'tème ù\s , qui terrait dans la ma-
nne , (ut tue en 18UÔ ,^u combat
de Trafal^ar. I^s deui aines, dont
Tun suivait la Carrière adminislratixe,
et l'autre était déjà un \ioloni>le dis-
tingué, moururent d'une aiïeclion de
roiinne ainsi que leurs deux s<rurs ;
urie d'elles seulement avait été mariée
et lais>a deux enfants sur qui se repor-
tèrent les afTectiuni et les somt de leur
aïeule. I.e lempN et ces douces occupa-
tions aui aient adouci l'anirilume de
ses regrets, »i des revers de fortune
éprouves par sa famille n'ru\sent re-
nouvelé ses angoivses. M""" Joli veau
avait été une des plus belles femmes de
sontemps : elle l'était encoieà soixante
ans ; et à soixante-douze sa figure ne
paraissait nullement atteinte des rava-
ges de la \ieille$se. (^pendant «on
moral était aiïecte , et l'affaiblissement
progressif de ses organes la rendait in-
capable de toute occupalion sui\ie, de
toute contention d'esprit, l neafiection
d'e>lomac , occasionnée par l'ancien
abus de boissons rafraichissante.s, lui
causa alors des attaques de paraKsie
dont la dernière l'emporta, le 27 dec.
1830, dans sa soixante-quinzième an-
née. M"** Joliveau était membre lio-
noraire de l'Allieuee des ails de Pa-
ris, de la société d'émulation et d'agri-
culture du ilépaitcment de l'Ain et de
noclques autres académies de proNince.
M. Uossignol a érigé à son aïeule un
tombeau sur lequel il a fait graver une
épitaphe latine qui rappelle ses talents
et ses vertus. Héritier des manuscrits dç
M™' Joliveau, parmi lesquels doit se
trouver le Tombeau d Adonis, imité
de Bion et lu i l'Athénée, au nom
de l'auteur, par M*"' Pipelet (aujour-
d'hui princesse de Salm ) , M. Uos-
signol prépare une édition compicie
et soignée des fables de M'"'^ Joliveau,
ornée de son portrait. A — T.
.loi
"17
«IlILLI J. -(«.), duileui eu mé-
decine, litléialeu! et historien, est,
iunant llaibiri linun.rrit.^ 468),
l'auteur de la litl>!ntthcque volanU,
ou Elite df pinrs /u^di^^rs (en vers
el en prose), AmUndjro (Pari»),
1700 et 1701,in -l'i, m cinq parties,
ou\rage qu'«>n a attribué à Ua^le [T.
ce nom, III , G11;. Jolli a aussi
publie une Uistoirr de Potitffrte et
du ffrand-iJurhr de Lilhuunie, de-
puis la fondation de la monarchie jus-
qu'à pré>rnt, nu l'on «oit une relation
fuleir de ce ipii s'rst passe a la dernière
élection, Am^'cdam, 169S, iii-12;
ibid., 16U9, -i vol. in-1l>. Cet ou-
vrage a été réimprime dans V Histoire
des rois de l*tdofirte, par .Massuel
(/ o).cennra, \\N H. ViU). G-\.
JOLLI VKT (Jl VN-IiAPTISTK-
MoïsK , conseillri d'état, né vers 17r)()
àl'uiuj pies Joignv, était notaire à
Nemours a^ant la résolution , et ,
comme beaucoup de ses confrères ,
s'en montia paili^aii , mai> avec roo
deration. 11 fut nommé en 1790 un
des admini>trateuts du dépaitement de
Seine et- Marne , puis député à l'A -
semblée législative, où il »iégea con
stamment à côté des gens de bien
teU que Vaublaiic, Dumas el Pa>toret.
11 parut rarrniciit à la tiibune, et sa
moijon la plus lemarqnable fut celle
qu'il fit la veille mcuie du 10 août
1792, ou il eut le courage de signaler
les projets du club des Jac«ibins à une
séance duquel il avait as-i>lé secrète-
ment, et ou il avait entendu \oner à
y cxci ration puldiqur et à la mort
tous les députés qui avaient voté pour
Lara>elte. KcUappc comme par miracle
aux rnaisacres qui eurent lieu lo lende-
main, il se retira dans sa famille, espé-
rant s'v faire oublier; mais, arrêté pen-
dant la terreur, il ne sortit de prison
qu'aptes le 9 thermidor. Les talents
qu'il avait montres comme adininislra-
icur le tirent nommer en Pan MI
198
JOL
(1795) conservateur-général des hypo-
thèques ; et , lors de la suppression de
cette place, après le 18 brumaire, il fut
adjoint à la comuiission du conseil des
Anciens , section des finances , puis
nommé conseiller d'état. En Tan IX
(1801), désigné préfet du départe-
ment du Monl-Tonnerre, il remplaça
Shée dans les fonctions de commissaire-
p;énéral pour l'organisation de? quatre
nouveaux départements de la rive gau-
che du Rhin. Rentré dès l'année sui-
vante au conseil d état, il fut chargé de
présenter au corps législatif différents
projets de loi, et d'y soutenir la dis-
cussion sur les titres du Code civil re-
latifs aux privilèges et hypothèques et
à l'expropriation forcée. En 1805, il
fut nommé liquidateur-général de la
dette des départements de la rive gau-
che du Rhin ; et , en 1807, ministre
du trésor du nouveau royaume de
Weslphalie. Créé la même année
comte de l'empire, il fut, en 1811,
présenté candidat au sénat par le col-
lège électoral du département de
l'Yonne. Admis à la retraite en 1815,
avec le titre de conseiller d'état hono-
laire , il mourut à Paris le 29 juin
1818, et fut inhumé au cimetière du
Père La Chaise. Un de ses amis pro-
nonça sur sa tombe un discours qui
fut imprimé dans le Moniteur du
3 juillet. On a de lui : I. Princi-
pes fondamentnux du régime social
comparés avec le plan de ronsti-
fution présenté à la Convention na-
tionale de France, 1793 , in-8".
II. De V impôt progressif et du mor-
cellement des patrimoines , 1 798,
in 8". m. De VimpAt sur les suc-
cessions, de relui sur le sel et com-
paraison de ces deux impôts, soit
entre eux , soit aiuc les contribu-
tions directes, 1798, in-S". IV. Du
Thalivrg du Rliin, considéré comme
limite entre la France et t /lllema-
gne; des péages et des douanes éfa-
JOL
bits sur les deux riçes du Rhin, et du
droit de relâche forcée, appartenant
aux deux villes de Mayence et de
Cologne, Mayence, 1801 , in-8°. V.
De C expertise, 1802, in-S'*.— On
l'a confondu quelquefois avec Jollivet
Baj'allère , qui rédigeait en 1797 le
journal intitulé : le Gardien de la
constitution^ pour lequel il fut con-
damné à la déportation par la loi du
19 fructidor an V ; mais il réussit
à s'y soustraire. Il alla plus tard habi-
ter à la Martinique où il est mort de-
puis quelques années. — Un autre Jol-
livet fut nommé en 1815, par le dé-
partement du Morbihan, membre de la
chambre des députés où il vota con-
stamment avec la majorité.
M— T)j. et W—s.
JOLLY (Toussaint-Félix),
écrivain ecclésiastique, né le 30 mai
1759, à Moivre, diocèse de Chàlons-
sur-Marne, fit ses études à Chalons et
entra à vingt ans dans la congrégation
des chanoines réguliers de Sainte-Ge-
neviève; il prit l'habit dans l'abbaye
de Saint-Quentin de Beauvais, et y fit
profession le 15 février 1781. Ses
succès dans les études théologiques
donnèrent une idée favcrrable de ses ta-
lents, mais sa piété et son bon juge-
ment parurent surtout en ce qu'il se
préserva de la dissipation et de l'esprit
de nouveauté qui, malgré d'honorables
exemples, s'étaient insinués dans sa
congrégation. On le chargea d'ensei-
gner la théologie, d'abord à Reauvais,
puis au Val des écoliers, autre abbaye
dans le diocèse de Langres. Nommé,
en 1788, prieur de Chàtillon-sur-
Scine, il s'y fit aimer par sa prudence
et son esprit conciliant. A l'époque de
la fédération du 1i juillet 1790, les
autorités le prièient de dire la messe
et de prononcer le discours. 11 parla,
en effet, sur la sainteté du serment et
sur les obligations qu'il impose. La
constitution civile du clergé n'était
JO!.
tn TÎpifw, et (If bon< fff l«^
prétèmit aior« if ^frmf ni Jf
6Hfliif à la nitinn, a la loi ft au roi.
Mmïs la rf\olution Mii^ait «on rour<.
Loiii^ \N I »anrlionna pfu aprrs la
ronsiiliilion riulf du clrr^f. I j «iijp-
prf*.*lon «If s alil>a\f^ fl df* mona^lfrr*
était reioliif. On fut quflquf tfm|>*
Tf^prianf df con^r^ff ral>lia\f df
Chatillon. 1^^ rfli;;ifUY «ouliailairnl df
ronlinurr à vi%rf fO rommnnanlf ; la
tillf de (.hatdion témoi^na-t If d^ir
df Ifs ron\fr\fr. I^ consfil ;;énff al de
la rnnimunf prit à re sujet. If ^fmter
1791. la dflil>éralion la plus eipre^e
et la plu» honorabif pour If^ rfii^irui.
Une pfhlion dan» le mrme seus , <i-
Ç^îiff If 3 avril par If*. anIonIfA ft lr^
hahitant<v , fut fnvo\ff à l'A^Nfinhlff
nalionaif, mais rmllftildf Camus la
fil rfjfler. Cf-I alor* cpif If \*. JiiHv
rédi;:fa unf dfriaralion daiff df juin
1791 , fl si^iiff df Ini, df se^ reli^ifux
el de ses ftudiants: il v ftprimait »f5
i^eprels de nt pouvoir suivre sf< fn;;a-
pements ei adressait sfs ffmfrrimf nt«
et sfsadifux aux habitanls df la \illf.
Il rf<^ut d'fux à ffltf fpoquf dfs tf-
■ioi;;na5^fs d'iiilfrél fl dVslimf, Il fn
étail di^ne par ^f s procrdfs gfnfrfux.
Dans un lemp» de lii^rllr, il avait fait
tfndte tout le bif de Tabbave à un
pri\ modique ptMir soulager les pau-
vres, el en se reliranl il rérompfnsa
lar^fmfnt Ifs domfNliqiifs , sans s'oc-
cuper de ses besoins personnels. Ij
famille de Mes^rigny s'empressa de
lui offnr un asile. Il se rendit mile pour
Téduralion des enlanls de la maison,
mai* (>endanl la terreur il fui obli;;é
de la quitter. Il se earba dans le bois
de Hoiiloone.el il se réfugiait la nuit à
l'assv La rhule de Hobespierre lui
perwit de reparaître; il rentra dms la
famille de Mesj^ricjry, el \ vécut dansîa
retraite, connu se«jiement de quelques
amis qui appréciaient son bon esprit.
Après le concordai de 1801 , il ne
JOL
«99
rrut pas pooToir rester oisif, et alla
profe^jcr la théologie et rÉcriture-
Niinte au séminaire de Trojres; il rem-
plissait celle fonction avec autant de
désin'éressrmenl que de zèle , car ja-
mais il nevnidul rrcrvoir de traitement :
IVvéque de 'l'rnves le nomma chanoine
honoraire Pendant lr< tronhlr* de ce
diocèse en IHII rf snnfr-- suivantes,
la conduite de ! ' ^ fui con-
slammenl pleinr . -• et de fer-
meté llres'a lou)ours aiiafhé h l'au-
torité de IVvéque enfermé à Vmcrn-
nes ou exilé k Kalaise, et dit franche-
ment son ati$ sur ce qui t était con-
traire. I.e séminaire avant élé fermé
par sni'e de la persécution, l'abbé Jollj
vint i Paris ou il resta jusqu'après les
Cent-Jours. Mais l'intérêt qu'il portait
à ses élevés et Ir désir de $e rendre
utile ren;:a2èrenl à retourner à 1 rojes
et à > reprendre ses fondions au sémi-
naire Au boni df deux ans, sa santé
qui déclinait le força de rerrnir à Pa-
ris. HienlAl ses inlirmiiés rempèrhé-
rent de sortir, mai* l'aclivité de son
esprit ne lui permellait pas d'être O'sif.
On a de lui deux ouvraî;es qui suppo-
sent beaucoup de lecture: ie IMrmo-
rial sur lu rr^oliition française,
IH-ii. inl'J. réimprimé en 18*J8, S
vol. in-12 : et U Mrmnrialfir t Krri-
turr-Siiinfr, en *J parties, la 1*^* en
18:J.î, en 2 vol. in-l*2, pour l'édition
latine avec la traduclion el en 1 roi.
pour l'édition fr.inraise ; la 2* partie
en 1826, aussi en 2 vol. pour l'étli-
lion lai i ne et en 1 vol. pour le fran-
çais seulement, l/auleur avait fixé un
prix très-modique pour son ouvrage,
et de plus il l'envoyait nratuilemenl
dans les séminaires ; peul-êire aurail-
il rendu ses livres plus utiles en em-
brassant moins d'objpts, m.'^is il ne sa-
vait pas se restreindre. Ou a encore
de lui : Brrc>e dr rrVgione catho-
liro, etc., roniprnditim, avec une tra-
duction française en regard , 1*25,
100
JOL
in-12. C'est un extrait de la seconde
partie de son Mémorial de l Écri-
ture- Sainte. II devait publier un
Mémorial sur r éducation, qu'il n'eut
pas le temps d'achever. L'abbé Jolly
avait vraiment l'esprit de son état. 11
menait une vie austère, et était toujours
occupé ou de la prière ou de ses tra-
vaux. Il faisait des extraits de toutes
ses lectures. 11 mourut le 14 octobre
1829, après quelques jours seulement
de maladie. Ses obsèques eurent lied
le 16, au milieu d'un grand concours
de confrères et d'amis. L'abbé Jolly
était aimé et considéré ; on le consul-
tait souvent sur les études ecclésiasti-
ques et sur des affaires qui intéressaient
la religion et le clergé. Plusieurs pré-
lats lui donnèrent des témoignages
d'estime. Son testament offrait beau-
coup de legs pieux. Ce que nous ve-
nons de dire de lui est extrait d'une
notice qui a paru àdiUsV Ami de la
religion, du 3 avril 1830, t. LXIII.
P-c— T.
JOLLY ( Adrien -Ji:an-Bap-
TiSTE MUFFAT, dit), auteur dra-
matique et comédien, naquit le 22
octobre 1773, au château du Raincy,
où son père était contrôleur de la
bouche. La famille de sa mère était
aussi depuis long-temps attachée au
service de la maison d'Orléans. Il reçut
une éducation soignée dans un collège;
mais la révolution et la chute de ses
protecteurs minèrent sa fortune et ses
^pérances. Atteint parla loi de la pre-
mière réquisition en 1793, il servit
quelque temps dans la cavalerie, obtint
son congé pour cause de blessures, et
revint à Paris, sans argent, sans ap-
pui, mais doué d'une merveilleuse apti-
tude pour les arl>. Comme il savait
dessiner, il apprit facilement à graver,
et il se serait enrichi à faire dei^ mé-
dailles en or sur un fond noir, que les
femmes portaient alors en collie's, en
bagues et en boucles d'oreilles, si son
JOL
insouciance, son goût pour les plaisirs
et la société des artistes ne lui eussent
fait dissiper tout ce qu'il gagnait. Des
dispositions naturelles pour la comé-
die, un talent extraordinaire pour l'i-
mitation, et la fréquentation de Vo-
lange, de ïhiémet et de Fitz-James
procurèrent à Muffat des rebsources
momentanées. Admis dans les meil-
leures sociétés, il y improvisait des scè-
nes de paravent où il savait allier la
bouffonnerie au bon goût et au piquant
de l'à-propos. Ses succès dans ce genre
et son état de gêne le déterminèrent
enfin à entrer dans la carrière drama-
tique. Il débuta, en 1802 , sous le
nom de Jolly, au théâtre Molière,
rue Sain\-Martin, par un rôle de niais
où il remplaçait un acteur malade ,
dans la Petite Jieoue, un des premiers
ouvrages de M. Dumcrsan , et il y
révéla le talent original dont il était
doué. Il entra ensuite au théâtre du
Marais, puis à celui des Délassements-
Comiques , boulevarl du Temple, où
il fut très plaisant dans le niais de la
Mère (Àimiis , de ilougemont ; il
y donna en 1803, avec Brazier ,
Viorogne tout seul j, ou S ai ma
cassette vide^ monologue en vaude-
ville, où il fut si applaudi comme ac-
teur et comme auteur, qu'avant passé,
en 180i, au tliéatre des Variétés, il y
transporta cette pièce qui lui valut le
même succès. Il y créa les rôles d'Ar-
doise dans V Intrigue sur les toits ;
de l'xVviron dans le Pont des Arts;
de Dercault dans les (jhevilles de
maître /iduni;ào. Scudéry dans Cha-
pelle et Hachaumont, etc. Il se fit mê-
me remarquei à côté de Brunet dans un
des Trois Innocents. La démence et
la mort de Carpentier rendaient Jolly
nécessaire au théâtre du V^audeville
dans l'emploi vacant de premier comi-
que. Il y débuta le 10 avril 1808 ,
et vit bientôt croître sa réputation
par la manière originale dont il créa
un >;iaiid uombie Je i(^lr>, |>aiiui Ir^-
ÎurU nous cil«ron> nira|>(int ilaii»
iay uni au Piutt • \ru/ ; Bf 1 1 r jnil
lUns \i liciie nu Uiis ilornuint ; le
S«né<:lijl (Jans Jrunnr tf.én , on le
Sicj^e tC Orléans ; Drrlindimlin iljns
le» Adieux Je lu Sumaritaiiie ; mai»
surtout lAinUiru, ou le Peintre uu tu-
ùurti ; Qopiieau ilaiis le PrtM'és ilu
t uniîun^u ; le^ériiable KiimonJ Jjiis
les Deuc lùhnuitd ; le nirJrnn tians
les Mines de Heuujon , ou Ils sont sou-
i»es; le pli>sjcieii (ihï dius le Mariage
et tracagtint ; Gaspiinl Cotise , elc
Joli> a^all Je la vei\e , Ju morJanI ; il
eicellait Jaiu les caricatures et se pri-
mait J'urve manière piquante; mais,
toujours \ rai Jans son coutume, Jans
•on masque, Jans sa tournure, Jans
tes Jivers lan^a^es, il n'atait jamais
recours à la charge , aux (;r.maces , à
la trivialité II savait nuancer 1rs Jif-
feiences J'un vice, J'un riJicule, sui-
vant la profes>ion et le caractère Jes
personnages qu il repr reculait. C'est
ainsi que , Jan> Tivrcs^e Je I^ntara, il
laissait eulrevoir les senlimenis noble>
de Tarli^te, et Jans celle J'KJmonJ la
naïve franchise et la bonhomie Ju mi-
litaire. Dans l^nlara , il traçait lui-
même, sur le Jos de son modèle, un
portrait qui, pour toal autre acteur, eût
é:é préparé d'avance. Il jouait aussi
les rôles de tra\e>tis5.froents avec une
promptitude et uue devtenie admira-
bles, comme il le prouva en 1816, dans
la Rosière de Hurtatll, ou il rem-
plissait deux rôles d'Anglais, mUord
Spleen et ^ir Scott d'une manière si
contrastée, qu'on ne pouvait croire que
ce fût le même acteur. Dans (nirrirk,
ou les (Comédiens françijis , il prenait
tous les visages, toutes les formes, fous
les caractères. A celte époque entrè-
rent au théâtre du Vaudeville deux
comédiens qui se concilièrent bientôt
U faveur du parterre : l'un, (lonlier,
par un véritable talent, l'autre, Philip-
î()(.
î<»t
pe Houvian, pai une phvMoiioroie jo-
viale et uue ^i.iiidc vuliil'i!il'*delaugue.
I^pietinrr, «ciant pas piécisenient
chargé Je^ mè-uf-x r .le', que Joli), ne
pouvait lui potier oi.jbra^e; mais le
second, le Joublant Janv l'emploi des
comiques, devint son rival. Ils paru-
rent néanmoins ensemble dans lr%
DeuA Cuspurd , en l > l T . J oii ,
joua dans une scène dr C^^sandie et
l'aillasse qu'il avait arrangée, il créa
encore le rôle de lord .\rlhur dans L
Maison de Jeanne (C .lrr,t\ l'un ibs
Deux ralentin , en INIS. .1/,,
sieur Tout lie a tout, en 181'.). M .i i x
déjà le dr^oùt t'était emparé de lui et
ajoutait à sa paresse naturelle. Il fai-
.sait de fréquentes absences, »oiu pré-
texte de sa mauvai.se sanle , ce qui ne
l'emprcha pas, en 18:i!0, d'aller passer
un an à Ix)ndres où il fit une ample
moisson de lauriers et de ^uiiiers. el
il n'en revint qu'en sepleuibrc 18*21 .
Il obtint uii^rand succès dans Pierre,
Paul et Jean, où il établit !e rôle de
Faul, et pat ut ensuite dans uu proverbe
arrange par lui el .Vuberlin. doniier
avant p4lé au (ivinnaoe Diamalique,
Jollv semblait toujour> deNliné à etie
une des colonnes du ^ audevilie : mais
ce ihéilre, en décadence sous la direc-
tion de Désaugiers, ne se releva pas
sous celle de M. Cvprien Uéiard.
Lorsqu'elle eut été rendue à D(!sau-
giers, Jollv crut échapper a la rivalité
de Philippe en suivant M. Béraid au
théâtre des Nouveautés, que celui-ci
venait de fonder sur la place de la
Bourse. Il V donna, en 18:iT, avec
MM. Arm. Darlois et Biiv^cl: Paris
et Londres, vaudeville en "2 actes, el
V créa quelques rôles peu impoiiants;
mais se voyant poursuivi par Philippe
qui entra a ce thealre, en 1828, il
prit définitivement sa retraite que son
reposel sa >ante lui rendaient néces-
saire. I)ev.inateur et mécanicien , il
avait commencé et fort avancé la cqI-
20Î
JOL
lection des caricatures d'acteurs , pu-
bliée par Martinet. Il construisit un
petit théâtre portatif, avec lequel il
amusait, au château des Tuileries, les
enfants du duc de Berrv. Il fonda
ensuite , dans le passap;e de l'Opéra,
un petit spectacle qui porta son nom,
et qui tenait le milieu entre les ma-
rionnettes perfectionnées et le spec-
tacle mécain'que de Pierre. 11 di-
sait plaisamment : •« J'ai été assez
« ioiif^-teraps marionnette de direc-
«' teurs, je vais être directeur de ma-
« rionnettes. » Ce théâtre, dont l'ou-
verture eut lieu le 26 octobre 1829,
et où Jolly prouva qu'il joii!;nait
au talent -de comédien ceux de pein-
tre-décorateur et de machiniste , et
qu'après avoir fait rire les pères il
pouvait amuser les enfants, n'eut pour-
tant qu'une vor;ue momentanée. Il
manquait à Jolly l'esprit d'ordre et
l'expérience des affaires ; il tranchait
du grand seigneur par ses prodiga-
lités. Il fut forcé de vendre son en-
treprise et son privilège , en 1830 ,
à un ancien courtier de commerce qui,
abusant de sa confiance, lui fnleva par
une faillite, en 1831, la somme qu'il
s'était obligé de payer (1). Jolly avait
épousé, en 1812, Alexandrine Saint-
Aubin, seconde fille de la célèbre ac-
trice M'"*" Saint-Aubin, et qui elle-
même avait obtenu des succès à l'O-
péra-Comique, surtout dans le rôle de
Cendnilon. Se voyant à peu près
ruiné, il se relira avec sa femme et sa
fille, dans le déftartement de la Nièvre,
espérant que l'air et la trancpiillité de
la campagne adouciraient ses maux et
ses chagrins. H sut, par l'économie
qu'il n'avait jamais connue, s'y créer
des ressources et des occupations ho-
norables. Dans sa dernière maladie ,
II Ce tbf^ire», qui a reçu le nnin «le djin-
pnse enfiitiiii , a ji.isw* |).ir |>lii»i«urs iiiiitiH : il
ap;>a>ti<nl .lujoardhiii à MM. Mo i\ d»» Vindé
et Arcbdt-acnn, et et dtrii;é, depuii 18M, par
M. Moriral de Saiot-llilaira.
JOL
il eut la satisfaction d'embrasser sa
belle-mère qui était plusieurs fois ve-
nue à son secours et qui, malgré son
grand âge , brava , pour le voir, les
fatigues d'un long voyage , dans une
saison avancée. Il mourut à Grand-
Pré, près de Lormes, le 28 oct. 1839.
Le plus ancien de ses amis, M. Du-
mersan, lui a consacré une notice dans
le Monde dramatique ^ et lui a fait
une épitaphe. Carie Vernet a peint
Jolly dans plusieurs rôles. A — t.
J O L V de Broy ( Lo u l s- P H i Li-
bert-Josf.ph), né à Dijon le 23 mars
1736, fut président à mortier au par-
lement de cette ville. Très-versé dans
la jurisprudence, il avait fait une étude
particulière du droit canonique. Non
seulement il se montra fort opposé aux
changements politiques qu'amena la
révolution, mais il improuva même la
réorganisation de l'église de France
d'après le concordat de 1801 . Il mou-
rut à Dijon le 21 février 1822. Le
Journal de la Câte-d'Or, du 23
février de la même année contient une
Notice d'Amanton sur Joly de Bévy.
On a de lui : I. Le parlement ou-
tragé, in-i" de 29 pag. Cet écrit pu-
blié à Dijon en 1762, sous le voile de
l'anonvme, était dirigé contre les élus
généraux du duché de liourgogne, et
en particulier contre Varenne {^oy.
ce nom, XLVII, 498). Le chancelier
ayant ordonné au parlement de Dijon
d'en poursuivre l'auteur, Joly de Bévy,
dans la séance de cette cour, du 3 mars
17(52, déclara que lui seul avait com-
posé le mémoire incriminé, et donna la
démission de son office (Voy. le l)ir-
iiormaire des rinnnymes de lîarhier,
tom. III, n'^ 13Si9). 11. De la mm-
velle relise de France, \)'\']on et Pa-
ris, 181 6, in-S". L'auteur attaque le
concordat, blâme la conduite du clergé
cl du pape Pie Vil. Il ya bien de
l'amertume et de l'exagération dans
cet ouvrase. M. de La Mennais en fit
JOL
alor^ nne criiiqoe trf5-jii«lf "m^r<'^
(i'ibord daiK une fruillr pfriodiqur ,
ft rrj^^oiluilf clam jcs lirflrxiuni ri
Mrlanfirs , IHlî» . in-H". p.i;;f JIM.
l'.-tmi lie lii rrllgion , du 1S tirrrm-
bre IHIfi, si;;nala au*«.i bien ci?* as-
sertions oulr^es ft i!f faut raÏMinne-
menls ilans IVrrit de l'anc'rn pré-
sident ï morlirr. III h' nwirn Jrs
npfuiriliuns et r de Cange
Huphaël a I hi '•- 'fin , srr-
citeiir lie Dieu, dans tr% mois de
/finoier, fr^rier, murs et iwril 1816,
Dijon, 1H17, in-8", deut éJilinns.
IV. / V r ordre de la mt/desse et de
ton nntiijiiite chri tes Frnnrs. il»id ,
1HI7 . .n 8'. V. Sur Imh's Ml',
<bi«l , IK'JO, in-8". Ce-! une apologie
dr ff monarque. VI. \niii'f'ltr tra-
duction du JiiTe de rimifatiim de
JetuK Christ, ibid., IHIfi . in- 1*2 ;
*2* edil., a^rc les textes de rFrrilure-
Sainteen ia:in.ibid., tH51,in-8";
3* édil., avec le^ mêmes texte* en
français, ibid., 18->*2, in 8". VU.
Prières h /• • • • dc^ Jidèîes dans
1rs temps tl . et de ralami-
trs, tirrrs ur.'s i Mrtmes de Ihn'id et
des runtiijurs compris dans 1rs divins
ofjïrrs dr fèg/isr, Iradur'ion de J . F.
I^iharpe, etc., l)i)on, 1817, in-1^.
I )'a|»rf > Ifv intentions de Jol> de lîetry,
relie rnin|Mlation ne fut pa> mise dans
le commeiTc. VIII. Instrurfinns ftour
un prrhrur tnurlir dr Diru .ipfirrut se
tnn\}rrtir, tirrrs du commentaire des
Psaumes de Diu^id . par le P. Ber-
/A/>r; suivies du lirrit motii'rde tu con-
vrrsion d'un incrrduir [ Laharpr^ , qui
fut longtemps un drs plus renommes
dans la secte philosophiqur. et au-
trur dr ce rèril. \[}\A., ISiit). in-l*2.
I\. Hrruril d'auforitrs ^rn^^rs pro-
posrrstt la méditation res fidèles, et
prinn'ihiJivnrnl à la jnmrssr inrx-
prrinirut'f , puur son inslrtution ,
ibid.. 18-21, iii-8". X. Kxirail du
li*^e de M. Burke, sur la rex>oùi-
jm.
noî
tion française, ibid., 1819, in-8**
(l'oy. liinkî.N I. :\2X. Knfin, Jolj
de i\é\y a donné une nouvelle éditioa
du l'raitr de la péremption dtin-
stanre de Melenrf, au^nirntée d'un
Traité du président Itoiiliirr sur la
même matière, Di^on, 1787, in-8°.
Il ke proposait aussi d'éditer \rs (Eu-
cres de jurisprudem e A\x pré^ulent
lioabier. dorit il n'a publié que '2 \ol.
in-fol.. ibid , 1787 88. et un X vol.
NUppIrntentaire en 1789 Poy. Bol-
lilfR. V, :107' - I/abbéJ(>i.Y,qu*oii
a quelquefois confondu avec le précé-
dent et avec d*autre« bnmoni mes, na-
quit à Dijon en 171.'», fut président en
la chambre des comptes de îîourpnpne,
et mourut vers 177.'). On a de lui :
I. l'ruilr du mal et de la rrporw
tion, Dijon, 17.''»7, 1770, 2 vol. in-
12. II. Traite des anges Itons rt
mau%Hiis.\\uA , 1770.3 vol. in 12L
III. ht rrlii^iiin chrétienne èilairêe
fHir le dogme rt fuir ta prufJirtie ,
ibid, 1770, 4ïol.in-r2. Ces trois
ourraj^e* parurent son* le voile de l'a-
non\me. P — nT.
JOL V , cbef rendéen , né d'une
famille obscure à Bordeaux, vers 1700,
fonna des les premiers jours de m.irs
1793, entre l^motte \rl.ard et S.iinl-
(•iileN, une di\ision d'iii^ui^és q:ii fut
d'abord ap^telée \\>rrurr des Sa/des.
Trois de ses fils combaltaienl avec lui.
Apres plusieurs avaMtu;:es, il attaqua
deux fois les Sables-d'Olonne , et fut
repoussé avec perte Dans le mois de
juin, il fi» sa jonction avec Cliaretlc
pour Taliaque de Nantes, # rentra
^ians la Vendée après cette expédition
qui fat sans succès. Il se joi;;nit encore
à (^harette, lorsque Parméede Mavencc
pénétra dans le pavs vendéen, et il se
tiouva aux batailles de Torfoii , de
Montai;;uetdeS,i;iit-Viii;;pnf. Il Ct en-
suîtela ramp.i:;ned'hiver de 1 79 V, après
le passade de la Loire par la grande ar-
mée vendéenne. Denxàt ses fils furent
20',
JOL
JOL
lues à ses côtés dans la même action ;
un troisième, quiavait passédu côté des
républicains, fut aussi tué le même jour.
C'est à cette époque qu'ayant demandé
au chef de l'artillerie Leblanc de la
poudre pour ses soldats qui en man-
quaient , et n'ayant pu en obtenir, il
lui brûla la cervelle d'un coup de
pistolet. D'un caractère violent et
ambitieux, Joly, pendant cette campa-
o;ne, disputa le commandement en chef
du lias-Poitou à Charette qui l'em-
porta sur lui. Dès-lors sa haine contre
Charette ne connut plus de bornes ;
elle lui devint funeste. Lors de la réu-
n'on des armées de Stofflel et de Cha-
rette à la Beziliairo, en avril 1795, on
accusa Joly d'avoir détourné les ap-
pjuvjoionnements. Abandonné par une
partie de sa division qui se rangea sous
les drapeaux de Charette, il fut pro-
scrit et massacré par les chasseurs de
Stofflet, en voulant passer la Loire à
Saint-Florent. B — P.
JOLY (Joseph), littérateur, na-
quit vers 1770, à Salins, d'une famille
honorable. Après avoir fait d'excellen-
tes éludes au collè^^e de sa ville natale, il
fut admis dans la conp;ré{:;alion de TO-
ratoire et envoyé à Juilly où, dès l'âge
de seize ans, il professa les humanités
avec un succès qui lui valut les encou-
raj^ements les plus flatteurs. A la sup-
pression de ce collège, il vint à Paris
dans le but de s'y perfectionner par la
fréquentation des savants; mais, atteint
bientôt par la loi de la réquisition, force
lui fut de rejoindre un des bataillons du
Jura, dans lequel il fit les premières
campa;;ncs sur le l\hin. Une fois dé-
gagé du service militaire, il se hâta de
regagner Paris, résolu de se livrer en-
tièrement à l'élude. Vivant dans la
retraite au milieu du tourbillon de la
capitale, 11 se familiarisa bien vile avec
les principales langues de Thurope
dont la connaissance pouvait devenir
pour lui une ressource, et passa plusieurs
années à étudier les chefs-d'œuvre
des poètes de l'Italie, de l'Angleteufe
et de l'Allemagne. En 1804, i'Insti-
tut ayant proposé, pour le prix de
poésie, V Indépendance de t homme de
lettres, Joly voulut traiter un sujet qui
convenait si bien à ses Idées. Il n'obtint
pas le prix; mais il n'en fit pas moins
imprimer son Epître (1), dans laquelle
les critiques remarquèrent l'épisode
sur la mert de Socrate. Il n'avait pas
mis son nom à la tête de sa pièce ; et ce
fut de même, en gardant l'anonyme,
qu'il publia différentes traductions dont
le succès ne put le déterminer à s'en
avouer l'auteur. Il avait refusé, dans
les premières années de l'empire, un
poste diplomatique, qui l'aurait obligé
dje résider en Allemagne, et par con-
séquent aurait dérangé ses habitudes.
Plus tard, sous la restauration, 11 refusa
aussi les différents emplois qui lui
furent offerts, préférant à toutes les
jouissances du luxe et de la vanité,
cette indépendance précieuse qui lui
permettait de disposer de son temps à
sa fantaisie sans avoir de compte à
rendre à personne. L'âge ne changea
rien à ses habitudes et ne modifia point
son caractère naturellement fier et
morose. Il mourut à Paris le 1*^' août
ISiO, laissant un fils qui s'est fait une
réputation dans les arts du dessin. In-
dépendamment de ï Epître dont on
a parlé, on connaît de Joly les tra-
ductions suivantes: I. Les aventures
d<! Sapho, prêtresse de Mytilène ,
trad. de l'italien (du comte Verri),
Paris, 1803, ln-12. IL Les Fables
de Gay, trad. en vers français, Paris ,
1811, ln-18, fig., précédées d'une
notice sur l'auteur. ÎII. Vivian, ou
C Homme sans caractère, trad. de
l'anglais de miss Edgeworlh, Paris,
1813, 3 vol. ln-18. IV. Traduction
en vers français des fables complètes
(i) Epilre sur V iudfipendanrt dvt gens de Id-
Ires, ttc, Paris, i8oJ, in-S" de t4 pages.
JOL
JOL
2o5
lie Phèdre, t\ J« Irentc d«oi nou-
*flle5 fâblr* publicrN ci'aprf* le manu-
•icril àe l'rroti, avrc le Irtie en tr-
^anl f! tle^ notes, l'aria, \H\'\, in H".
1^ Iradurteiir a ie|>tnduil, dans rette
^ilioit, le tetlc de Schwab pour les
anciennes fables, et celui de Jannelli
pour les nouvelles. La préface et les
notes ^ont d'un bommedef^nùt et d'un
littérateur exercé; et la Tcr*ification ne
manque ni d'aisance nvde facilité. I«a
traduction des anciennes fables de
Pheiire reparut la rarme année ,
in- 18, précédée d'une Epitre du tra-
ducteur à un écolier de si.iieme. V.
L'Italie ttiUtnt lu Rumination des
Humains, U^à. de l'italien de Micali,
sur la inédit.. l'aHs, IKii, \ %ol.
in-8' avec atlas. Jolv a eu M. Vauriei
pour collaborateur dans cette traduc-
tion oui a été revue par Gence,el M.
Kaoul-Kochette dont le nom seul pa-
rait sur le frontispice. NV — s.
JOLV de Maiieruy. l . M\iZF.
ROY, \XVl, \W.\.
JOLV-CLEllC ;NicoLvs , na-
turaliste, né à Lvon, se consacra fort
jeune encore à l'état ecclésiastique ainsi
que son frère, et entra dans la conjuré-
dation de^ béncdiclins de Saint -Maur;
reais il s'occupa moins de théologie et
mrme d'histoire, celle étude fax orile de
l'ordre de Saint-lienoil, que de bota-
nique el, par suite, de l'fnstoire natu-
relle en f^énéral. Ces travaux* on peu
profanes, s'ils ne lui tirent prendre un
peu en dé^oùl I'cIaI monastique, ne
contribuèrent pas a ranimer sa voca-
tion. Aussi vil-il sans cha;;rin la révolu-
lion séculariser les couvents el condam-
ner, en e\ia;eanl le serment à la consti-
tution civile du clerf;é, la plus i;rande
partie des ecclésiastiques à résilier ou
à perdre leur position. On a dit que
son frère, ^ràce à ce bouleversement su-
bit, devint, de chanoine de Saint-Paul
à Lyon, évèque constitutionnel de cette
ville, et se hâta de nommer son frère
grand-ficaire. Mais IVr^ue constitu-
tionnel de L>on, de 1791 àl7i>i,fnt
l^mourette, et quuid I jmourelle ce>*a
de l'être, en mourant >ur l'echafaud, la
terreur ne lui donna pa> dr teniplaçant,
et probablement Jolv-dirrc riait leduit
à se cachet . Lorsqu'il fut possible de re-
paraître sans danger pour sa vie, mais
sans vicariat comme sans canonicat,
force lui fut de chercher des ressources
eilraordmaires. Il sollicita et obtint
la chaire d'histoire naturelle à l'écnlf
centrale de l'Oise. I<a, non content de
l'auditoire masculin obligé qu'il entre-
tenait des beautés des trois rè;;ne&, il
iroa,;ina de faire au\ dames de Beauvais
un cours public de botanique. Tout
alla bien tant qu'il ne s'a<;it que de
ti^es, de racines, de colvledons et de
pétales: mais quand le bon béncdictin,
3ui ne possédait sans doute pas Tart
e ^aier assex la nudité des descrip-
tions et de Bler délicatement une phra-
- ' ■ diaphane pour les uns, inin-
• pour les autres, en fut \enu à
i aiutuiuie du pistil, et au rôle des hou-
pes qui couronnent les étamines, et à
rabsorptiondu pollen, et aux pohian-
dries de Linné, etc., etc., la trans-
parence des détails effaroucha la pu-
deur des Bières, toujours craintitcs pour
lriir« filles, et Jol>-Clerc, à la séance
suivante, n*eut à débiter del'or^ano^ra-
phie qu'aux banquettes, llcontinua en-
core quelques années ses fonctions à
l'école centrale, y mêlant des travaux
de librairie et contribuant non par
des découvertes, mais par des réiumés,
par des compilations bien faites, à la
propafjalion de la science. Kn 1S02,
son frère et lui obtinrent du saint-siè^e
une cédule qui les rendait à l'état bVque.
Celait en quelque stM-te un bill d'in-
demnité pour le premier, qui s était
marié. Notre naturaliste n'élail pas
dans ce cas. Il survécut àcefrère, mort
vers 1812, et ne mourut qu'en 1817,
le 6 février, à Sainte-Périne de Chail-
ao6
JON
lot. Outre une nouvelle édition des
Eléments de botanique de Tourne-
fort, Paris, 1797, 6 vol. in-8*\ ou-
tre un tratluctioii, qui est la prediicre
en français, du Système sexuel des
végétaux àt Linnée , 1978, in-8",
S'-'édit., 1810, in 8"; outre la Cryp-
togamîe complète du luénie auteur,
traduite aussi pour la première fois du
latin en français, sur l'édition de Gme-
lin, et enritliie de notes, notions prelé-
minaires , etc.) , on a de lui : 1. Un
Cours complet et suivi de botanique ,
1795, in-8'^ (ouvraf);e qui devait avoir
plusieurs volumes, mais qui en est resté
au l*^'^). 11. Principes de la philo-
sophie du botaniste, ou Dictionnaire
interprété et raisonné des princi-
paux préceptes et des termes que la
botanique, la médecine, la physique
et f agriculture ont consacrés à fé-
tude et à la connaissance des plan-
tes, 1798, in 8". 111. Phytologie
universelle, ou Histoire naturelle et
méthodique des plantes^ de leurs
propriétés, de leurs vertus et de leur
rii////r^, 1799, 5 vol. in-SMV.CùM/-^
de minéralogie rapporté au tableau
niétliodifjue des minéraux donnés
par Daubenton, 1802, in 8". V.
Dictionnaire raisonné et abrégé
(f histoire naturelle par d'anciens
professeurs, Paris, 180C , 2 vol.
in 8°. Pour ne rien omettre des œu-
vres de Joly-Clerc, nous mentionne -
j ons cnfm son Apologie des prêtres
mariés, ou Abus du célibat prouvé
aux prêtres catholiques par le ci-
toyen J*^'*'^ , Paris, 1798 (an VI),
in-8'\ P_OT.
JOX/E ou JOXSE\(G..si.E),
savant islandais , évèque de Skalliolt ,
n.'iquit en 1513, à ÏIrauii;^erde. Jon
Gislesen son père, prêtre de la paroisse
de r,aiilverjaljan, diocèse de Skalliolt,
lui fil donner l'instruction eléiiiciitaire
par Alexio , devenu depuis atibé de
Viber; il continua ses études dans la
JON
maison de Tévéque 0°;mund qui, ayant
pour lui beaucoup d'attachement, l'or-
donna prêtre et le nomma peu de temps
après curé de l'église cathédrale de
Skalliolt. Le père de Jonsen était
brouillé avec lui, parce qu'il prétendait
que son fils deviendrait un jour le chef
de ceux qui voulaient détruire l'an-
cienne religion et en introduire une
nouvelle, c^ qui arriva comme il le di-
sait. En effet Jonsen s'étant lié avec
Gissur Einarsen et Oddar Gottschalch-
sen apprit d'eux à goûter les écrits
de Luther, qu'il n'osait cependant lire
qu'en cachette et surtout à l'insu du
vieux évêque Ogmund. Lisant un jour
une traduction du Nouveau-Testament
par Luther, l'éveque le surprit et exigea
la remise du livre ; et, comme Jonsen
cherchait a le cacher, Ogmund fut si
mécontent qu'il le lui arracha des mains
et le jeta dans la rue, en disant que c'é-
tait des hérésies de Luther. Jonsen fut
curé de Skalliolt jusqu'en 1540. En
1 546, il fut pourvu de la prébende de
Selardal, devint ensuite officiai de l'é-
veque Gissur Einarsen, dans le district
deliardastrand,el,pluslard, remplitles
mêmes fonctions auprès de l'éveque
Morlen Einarsen. Ayant été excom-
munié en 1550, par l'éveque Jon
Araesund, il partit pour Copenhague ,
aûn de faire casser la sentence, liien
accueilli dans cette capitale, Jonsen
parvint -à se justifier et ne tarda pas à
retourner en Islande. Lorsqu'il y arriva,
il apprit qu'une sentence prononcée
contre lui le privait de son emploi et
ordonnait ki confiscation de ses biens.
Mais comme Jon Aiacsund qui l'avait
rendue fui lui-même mis à mort bien-
tôt après, Jonsen rentra dans sa pré-
bende et lui élu, en 1556, évéque de
Skalliolt. L'année suivante il fit wn
second voyage à Copenhague, et, après
y avoir élé sacré, il retourna, en 1558,
dans son diocèse où il mourut le 30
août 1587. il avait été marié deux fois,
la prfmi^re à (^nuine, fille trKjolf,
iaqurile auparavant a\ait eu, linM que
^a MFur, dn enfanU de »on propre
irère, re qui rau^j un ^ranH »rjndale
el fut ^o'netil rrprorlir à J(»fl^cn, qui
rpnii^a i-iiNcrondr^ noces Dtoi ili^p, (jllc
de Jt)ii. il a pulilie: I. 1^ i inquiiiiir-
trttisirnir iliiiftitrr ti Isu't'^, a»rc une
rntirtp e»|>lir.ilinTi r\ tinp prelare ilu
V 1' ( i:>.'.7. 11.
lii^ti'iir- i.f i.i ,'■ .'i itr Jeru-
salrm , ibid . , I .'ï.'»7 . i 1 1 . Mtir^urita
ihrtilu^ira, lradu>lrenis|jndaiN, ibid.,
1558. IV. Psaumes, en i>landai<,
ibid., t.')58. V. Traduction àt Jrsus
Sirmh (le litre àt\'F.itlfsiiistitfur\
en islandais, llolum. l.'iSO. V|. Hfùs-
tnla ad Juh. Hemiii hiuni ptistitrrm
llatuliurs;. . dan* le JuntSi (.olrri li-
brllus rpislutarum, tVanrfort, l.'iH?.
D— z-s.
JOX.Kou JOXSKX (SvriN .
errlé»iaNlii;iie i^l.indai», né en 1 (>().'),
alla , suivant rusa>;e de »e4 compa-
IriotCN qui se destinent au ^aretdo^e,
faire ses éludes à l'univerMle de ^-
penlia;;ue, et renat eiercer dans son
lie diverses fondions du ministère rvaa-
:;éli(]ue. Il fut un des collaboralrur<i de
la \er>ion islandaise de la iiiblr, iin-
primce a lloluin en IBiV, par l'evè-
()ue'Hiorlaciui SLuleson. Jon>en tra-
«iul^Mt dans la mriiie langue le Udif/ni-
lia l)ri d'Ilei bercer, le l fntaitit
christianisme d'.Vrnd, etc. ; mais il
parait que ces version» sont drnipurées
en manuscrit, il mourut en 16H7, à
Tige de qualre-via|;t-qualre ans.
C. M. l».
JOX^E ou JO\SE\ (Stf-in),
savant prola: islandais, ne dans la pa-
roisse d'Iiialtrbalke , diocèse d'Iio-
lum , descendait d'une pauvre fa-
mille de preires Sa raère s'appelait
Gudriina Slem^nm, et son père qui
portait le nog^ de Jon 1 bor^eirsen
avait eu trente-quatre enlants de ses
<)iulrc mariages. A dix-huit aiu il fut
JON
•^
CiiTOfé i iVrole de Holum et U
••« études a (>»penl:a:iue. En 1688,
il fui nomme rlij|icljin à llilerdal,
et appeir, en 1ti*)-J, a la calliedrale de
SLallioll l/anuee %ui\anle il obtint
la cure d'Iliiernes, ou il rrsta jusqu'en
16*18, et passa ensuite à relie de
.Sribrri; Il fut enfin rlu. en t" 1 1 , éf^
que d' lloluin , ou il mourut \r '2 dé-
rembrr ITII'J. On a de lui: I. D.f.
ferentfs traduclims en i»landais : 1"
d'un l\iaunie.l\n\um , 1713; 'J" de
Wtnt/tropohjgie de l^^ssrniu^, ibid.,
17111, in-8"; 'A" de» Caare- Perse
de hacbU. ibid.. 1719. in 8" ; i**
de» Prt'dii utiims sur la /Mission de
l<a^<enins, ibid., 17'J:l 17iO. in-8'^;
.*»" tXdlearii Munaths wui It ih hen-
Ueder ; 6^ de la /<//»//-. llolum. 1 728,
in-fol. Kntrrpnse par l'ordre du roi
Frrdrric IV, crile traduction, calquée
ti op Gilrlement sur l'édition danoise, ne
salisGt pas le< amateurs de la pureté de
l'idiome i\ijn(lais, rt ils donner eut la
préférence a la version de 1 lioi iacius*
Skuleson,quoiqueleseKera|>laire»en fus-
sent devenusextrèmemeiit rares. Vn^ex
l'Iiistoire des bibles jklandaises par liar-
boi*'. dans la iKtnitt hr bihiiothik ,
tome VIII. 11. Ahrr^ê liu licrr
li heures i\e I*assénius, Holuiu, t7.i3.
111. Psatleriuni trium pha/e, i]it\tfn~
ba^iie, 17iil. in S". I V. iislordrh^
lompose de méditations spirituelles.
I.,e tome 111 de l' Histoire ecclésias-
tique d'Islande contient l'indication de
quelques autres ouvra;;es de Joiisen
impniné< a llolum ; il est éditeur du
Diarium christianum, publie dans la
même ville, de 1719 a 17:23, in-S",
et qu'on lui a quelquefois attribué ,
quoiqu'il soit réellement de llal^rim
Peter^ien. D — z— s.
JO.\AS, religieux «le l'ordre de
Saint- Benoit, né vers 599, à Suse,
dans la Li:;urie, embrassa la vie mo-
nastique en ois. dans l'abbaye de
Hobio,fuudéeparsajutColoinbau,lor6-
:a8
JO!^
JON
que, pour se soustraire à la colère de
Brunehaut, il vint chercher un asile en
Italie. Ses talents précoces lui méritè-
rent la conGance de saint Altale, alors
abbé de ce monastère, qui Templova
comme secrétaire. 11 accompagna le
nouvel abbé saint Kertulfe à Komc
en 628 ; et depuis il fit avec sa per-
mission diflérenls voyages. On prétend
qu'à cette époque il se rendit en Irlan-
de pour s'instruire, dans la conversa-
tion des vieillards, des faits relatifs
aux premières années de saint Colom-
ban dont il avait déjà formé le projet
d'écrire la Ki>. Attiré par la réputa-
tion de saint Amand, abbé d'Elnone,
il visita ce monastère, qui dès-lors eut
constamment pour lui un attrait parti-
culier. 11 habita quelque temps Evoriac
(Faremoutier), diocèse de Meaux. En-
fin il se trouvait à Pvéomé , diocèse de
Langres, lorsque le roi Ciotaire III et
Bathilde, sa mère, l'envovèrent, en
659, à Chalons pour y régler quel-
ques affaires. Jonas avait alors le ti-
tre d'abbé; et les auteurs de Y His-
toire littéraire de France conjectu-
rent qu'il était abbé d'Elnone. iJes
faits que l'on vient de rapporter on
peut conclure, avec assez de vraisem-
blance , que Jonas ne retourna pointa
iiobio, ou du moins que les séjours
qu'il y fit furent de courte durée. Il
vivait encore en 605 ; mais on ignore
la date de sa mort. Ses contemporains
louent son éloquence, son érudition et
même son talent comme écrivain. On
a de lui : les Fies de suint Colom-
ban ; de ses disciples saint Altale et
saint Berlulje, abbésdeBobio ; à'Eus-
tase , abbé de Luxeuil ; et de sainte
Fare^ abbeised' Evoriac. Ces vies, in-
sérées d'abord dans le tome III des
Œafr^5 du V en. Bède, ontpassédepuis
dans les différents recueils des /^<?/^j<f<?5
5'û/Vî/5, notamment dans celui desliol-
landistes, et dans les Acta sanctur.
ord, S. Benedicii de D. Mabillon,
11,5-449. Elles sont assez exactes,
mais le style en est dcilguré par des
expressions emphatiques qui le ren-
dent souvent obscur. On doit encore à
Jonas une révision de la Vie de saint
Jean de Tieomé, à laquelle il joignit
un Dialogue sur les miracles de ce
saint, écrit d'un style plus simple et
plus naturel que ses autres ouvrages.
Cette Vie ainsi retouchée est imprimée
avec le Dialogue dans V Histoire de
Vahhaye de Kê.omé au Moustier^
Saint-Jean^ par le P. Rouvière, Paris,
1637, In-i"" ; et lesBollandistes l'ont
reproduite dans leur Recueil au 28
janvier, après l'avoir revue sur trois
anciennes copies. On trouve une Vie
de Jonas dans V Histoire littéraire
delà France, III, 603-08. C'est la
source où l'on a puisé pour rédiger cet
article. W — s.
JOXCOrRT (Pierre de), pré-
dicateur protestant, quitta la France
quelque temps avant la révocation de
l'édit de Nantes et se retira en Hol-
lande. Il devint ministre de l'église
wallonne à La Haye, où il mourut vers
1725. On a de lui : I. Entretiens sur
les différentes méthodes d' expliquer
t Ecriture et de prêcher de ceux quon
appelle Coccéiens et Voétiens dans
les Proi>inces-lynies , Amsterdam,
1707, in-12. Cet ouvrage amena une
polémique entre l'auteur et les Coc-
céiens: ceux-ci l'attaquèrent dans deux
écrits auxquels Joncourt répondit par
de y ouocaux éclaircissements, et par
une Lettre aux églises ivallonnes des
Pays-Bas, U Haye, 1708, in 12.
1 1 . Pensées utiles aux chrétiens de
tous les états, La Haye, 1710 , in-8"
(anonyme). III. Quatre Lettres sur
les jeux de hasard, et une sur l'usa-
ge de se faire celer pour éviter une
visite incommode, 1714, in-12.
L'auteur publia la nysme année une
nouvelle Lettre, pour seroir de ré-
plique à la dêjense de M. de la Pla-
JON
!/•//<', qui ptfiendiit. ainM qor liir
Itfuar, qiir Ir» \ru\ de hiiaij nr «Mit
pA< toujours riifuiiir!^; Ji-nrourl ue
pjrljs^rail pi* cfllf opiniou (I oy.
l\%nnt\^\t , III, 3V6, r\ Ti.*» im.,
\ \ \ V . 1 (» I V . l.rttrrs rriinfufs sur
Jù'crs sujets imftortiints dt rhcritU'
rr-Suin/e , ArnNtrribm, tTlJ, in- 1:1
janoninic). V. Entretims sur tetmi
ftrrsrnt tU la reilgiun m truntr,
où Con traite umpiemrnt de t auto-
rité des pitpes et de ses /uiJrments,
Iji llavr, il"!'», in-l'J Joncourt j
Jonné une étlilion àts Psaumes de
Ikjx'id, mis en rime française par
(dément Marot et T^ '
ttoUk'eUemeni retiHi, \ . \
ITHi. in-lJ r— hr.
JO\t:iH U r (t^LiE m), nrà
Iji Ha>r, «Uns In dernirm anntrs da
Wll'iicclf. profrvvi lon^-lfmpt U
pliilosopMe à Uots lr-l)ur, où il t\tr-
çait au^i le» iuactioni de pa»trur. Kn
1729, ilcoucourut avec Mira\Mjndr,
Prosper Marchand el a'ilres, à la ré-
daction du .Jimrrml littéraire de 1^
IIa>e. et à la conlinuation de relie
même feuille ^ou$ le litre de Journal
historique de la rèftuhlit^ue des let-
tres, i'npriraé à I^ide IMu» lard il
fut un drs collaborateurs de \^ Uihlio-
thèt^ue des siirnres et des beaux-
arts, aulie journal qui »e publiait à la
lla>e. Joncourt mourut dans celte
Tïlle \eri 1770. Il a composé quelques
écrits, roais c'est surtout a la traduction
d'ouvrages anglais en français qu'il
consacra sa plume. Ou a de lui: I.
^oui^elle hihli,}thrque anglaise, La
Ila>e, 17:)f), 3 ^ol. in 8". Celait
une publication périodique dont il pa-
raissait un cahier tous 1rs deux mois.
II. Tniité sur la nature et .sur les
prim ipaux usages de la plus simple
espèce des nombres tri^onau r, ibid.,
176-2, in-V. L'auteur avait d'abord
compose ce traité en latin; il le tra-
duisit lui-même en français. lU. Œit-
JON
»o9
^m di,rr%es, ibid., ITlik, m iH .
177G, si loi. in 12. Toiilei !es pircrs
Je ce recur I nr %ont pa* dr Joi.oouil ;
il y en a pîuMrui* qu'il .i ruirnient
tradailetde l'an 'Lu»!-! d-;
Farai le« noal)reu^e5 irat!i i|
à pabliert sou* le voile dr lanotMne,
(Mire àt% lraiie% lhét>lo>;ii|urx el de^
•tnWHM àêia. SlierlorL et de I uca«,
BOtts fi I fTon» : 1 " .y /. i pJtntn . ou le
Petit philosophe, traduit de l'an^Uii
de Berlelev / o» . ce nom, |V, *Jti.'>),
U Haie.' 173^, 2 toI in.l2 2
Introductiitn à tu phdosttphie, Ir da
latin de **(ira*rtjndr, l^vde, 1737,
l~»s,inK". 3*edit., I7ÔG, au^-
.rparMhmand Tov re nom,
L\l.217 3 /
trad. du la!in li i i . » .. ,
2 toi. in-i'. Oiie lrad«ir!iou Ijjle,
a:n«i que la précédente, sou^ les veoji
de l'auteur, est pref..néc à celle de Ho-
latui le-VirloTt. l'aris, 17 i7, 2 *ol
ia-8*' (ro/.'(>nAVC5\!«Dk. WIII.
3'>2>. 4" l'nyage tfjnson autour
du monde. UiA. del'ant^lus. .Vm^ter-
dam, 1719, 17.'il, in-i'.(>l!r tra-
duction, revue par l'abbé de <iiia de
Malves /o>.(;l^. XVIII. Ô7G\ a
rlé réimprimée à Paris, 17.'iO, in-i"
ou \ \ol. in 12. 5'^ Joncouit a en-
core traduit de ran>;lais: i. intenta
de la philosopliie neu'tofu'en/ie de
Femberlon. Amsieidam. 17â.">, iu-8*'.
— Eléments de philosopliie mo-
rale de David Kordvce, Ïj Ha\e,
17. "if», in -8". — Eléments iF.ilgehre
dr Saundersnn(l), .\nistrrdam, 17.'»6,
2 vol. in-i". — Dialogues des morts,
de Lvltlcton. Ij Ila>e, 17tiO. m N .
«—Le 7*" et le 8' volume du Specta-
teur anglais, ibid., 1730-.>V, m-12.
Il travailla, en société a\ec Oiauiriiié,
Robinet et autres peus d^ lettres, à
l'édition de {'Histoire umWrselle ,
■|) C'r«t pir *rr»ur ^"t . k l'*rtirlr S4u»-
»«kM>» \\l.. 461 , oa a écrit B»HC«mr »u lira if«
Jjme^mrt.
'4
3IO
JON
trad. de l'anglais, Amsterdam, 1742
et années suivantes, 46 vol. in-4° ; à
celle du livre de Job, trad. du latin de
Schullens [Voy. ce nom, Xï.l, 253),
en société avec Âilamandet Sacrelaire,
Leyde,1 748, in-4'\ Enfin il publia une
traduction des Œuvres dh^erses de Po-
pe^ à laquelle il avait coopéré, Amster-
dam, 1754, 7 v. in-12 ; ibid., 1763,
>vol. in-8^ ibid., 1767, 8 v. in-12.
Suivant Barbier [Examen critiq.,
p. 472), c'est à un autre Joncourt,
professeur de langues étrangères à Pa-
ris, que Ton doit un Essai sur la dif-
férence du nombre des hommes,
dans les temps anciens et modernes,
trad. de l'anglaisde R. Wallace, Lon-
dres (Paris), 1754, in-8" et in-12.
Plusieurs bibliographes donnent même
à ce dernier quelques-unes des traduc-
tions anonymes mentionnées plus haut
et qu'on attribue ordinairement à Elle
de Joncourt. Il est possible que l'homo-
nvnile des deux personnages ait causé
quehjues méprises. P — rt.
JOXDOT (Etienne), né en
1770, à Montcénis , près d'Autun ,
après avoir fait au collège de Sainte-
Barbe, à Paris, de bonnes éludes, se
liv a avec passion à la littérature, et
n'adopta point, quoique bien jeune, les
principes de la révolution. Loin de là,
il s'attacha en qualité de secrétaire à
un général vendéen ; tout dévoué à la
cause qu'il avait embrassée, il inséra
dans un journal monarchique, \e Cour-
rier unii'erscl, un article apologétique
sur l'armée catholique et royale. Après
la première pacification des départe-
ments de rOuest, il revint à Paris et
donna une nouvelle preuve de ses sen-
timents politiques en publiant un Pa-
rallèle de Louis XV 1 et de Tsorig-
Ching, empereur de lu Chine , Pa-
ris, 1797. Vivement ému des mal-
heurs de ce prince, il en traçait le pa-
négyrique sous la forme d'une compa-
raison avec l'un des meilleurs monar-
JON
ques de l'Orient. Ce courageux écrit
fut suivi d'une production , I'jB^-
prit de la révolution Jrançaise ,
qui attira à son auteur des éloges
et des critiques également exagérés.
Il ouvrit à la même époque dans le
faubourg Saint-Germain une pension
oii il n'admettait pour sous-maîtres que
des hommes connus par leurs princi-
pes religieux (1). Il coopérait en même
temps au Véridique, journal destiné à
les propager. Cette feuille ayant été
supprimée, Jondot fut admis au nom-
bre des écrivains qui , dans le Jour-
nal des Débats , s^attachaient à ré-
pandre des idées saines en politique,
en morale, en littérature. Il fut spécia-
lement chargé de la partie des voyages
etdeshvres d'histoire. On remarqua le
soin af ec lequel il rédigeait ses articles :
il ne se bornait pas à faire un extrait sec
et aride des livres qui lui étaient confiés ;
chaque ouvrage lui servait de cadre
pour offrir aux lecteurs des rapproche-
ments utiles et des aperçus neufs. Si
depuis il a été surpassé dans cette car-
rière par les Dussault, les Geoffroy,
les Iloffman , les Féletz , ses collabo-
rateurs, il n'en est pas moins juste de
rappeler que Jondot eut le mérite
d'être un des premiers à former cette
croisade lilléraire et religieuse qui
contribua si puissamment à la réor-
ganisation de l'ordre social. On dis-
tingua dans le temps ses articles sur
le Musée de la rue des Petlts-Augus-
tins; sur la foret de Fontainebleau,
sur les tombeaux de Saint-Denis , et
sa réfutation de l'ouvrage éminemment
antl-cîl\hollque de Cli. Villers sur la
réformation de Luther. Cependant la
précipitation du travail le fit quelque-
fols donner dans d'étranges bévues:
ainsi, en rendant compte du Traité
sur la grande tactique de M. le
général Jomini, il débutait dans son
article en louant l'auteur d'avoir dit
(i) Voy. les /innales Cal/>oli'jues, juip 1797.
f»rfcis^ent le conlraire d« ce que rc-
ul-ci irait énonce et prouvé dans ^on
liire, relativement à la lactique (!e> an-
rien^. A ses fondions de journaliste,
Jtiiulitt joi;;nait celles dr : ' i
tl'i idire dans quelques ël.i.
tl'mstruction puliliquf. Ku IT'J'J, jI
publia des ()l>srr\.Hitions critiques sur
1rs Irions tt histoire du (l. l'oinry.
Dans rel uuvia;;e Jniidol indiquait une
SouK'elle methoiU iC apprendre Hii s
tuire: on > remarquait un cliapitre
contre Tallirisme. Celait un vrai ma-
nifeste contre le philosophisme , ainsi
que l'annonçait IV|)!;;raplie: ^îihiltam
absurde diri ftotest tjuud non dii utur
ah aiitfuo phiiouiphu. 1^ Dnade phi-
iusophirpie attaqua vixement Jondot
au sujet de cette Lrocliure, et entre au-
tre^ ;;rief5 lui reprocha d'rVrr chrétien.
C'était alors un titre aux >eux du ^ou.
vememrnt réparateur de Ilonaparte ;
aussi fut il nommé, en IKdV , pro-
fesseur d'histoire à l'école niililalre de
Fontainebleau. ()uelqnr> années après,
Jondot publia le plus important de tes
ouvrages sous ce titre : Tableau histo-
rique des nations , ou ïiupproche-
ments des principaux è%'enewents
arrik.'rs à la même rpo<fue sur la sur-
face de la terre (1809, \ vol. in -8*').
Dans ce livre l'auteur ne se sert de
l'histoire que pour venir à l'appui de
ses doctrines politiques , mais son éru-
dition est souvent >uperGciclle. Trop
souvent aussi il tombe dans la décla-
mation. En 1810, lors de la création
des facultés dans la nouvelle université
impériale, Jondot fut nommé à la chaire
d'histoire à Uouen, d'où il passa deux
ans après à celle d'Orléans ; mais il
donna sa démission en 1813, pour se
livrer avec plus d'indépendance « ses
éludes historiques. Il est vrai de dire
qu'avec son extérieur peu avenant, son
élocution pénible et sa parole assez
commune, Jondot n'était pas fait pour
renseignement oral. C'est ce qu'il fui
JON
11 1
forcé de reconnaître lui-rorme, lors-
que nommé en 1S18, par M. Uo>er-
Collard, profe.oteur d'hisloire au col-
lège Hourbon, il dut , faute de pou-
voir tenir ses élrxes, se reiiier après
quelques scènes de désoidre. Depuu
celle époque , »ans renoncer à ses
f;oul» littéraires , il s'occupa pres-
que eiclusivement de faire valon des
propiiélés en ^ ignobles qu'il povNédait
dans le département de ta >Iarne. Il
mourut à Taiis le 10 mars 18.')V, et
»es restes furent, »ui\ant une disposi-
tion de son testament, transportés i
Rieui, près de Montrnirail, où élaient
situés ses biens. Jondot a\ ait publié, ou-
tre les ouvra;;es dont nous avons parlé,
une Histoire de r empereur Julien,
tirée des auteurs idolâtres et t otifir-
mèe par ses propres écrits ; suis'ie du
Récit dr la drstistreuse retraite des
levions romaines (l'aris, 1817, 2 vol.
in-8"). Cet ouTrai;e, écrit d'un st\le
déclamatoire , offre des recherche^
d'érudition , mats on n'v trouve
qu'une critique peu uine. C'est une
satire contre Julien que Tauteur
cherche par des allusions forcées i
comparer à Honaparte, surtout à l'oc-
casion de la retraite de Kusâie ; en-
fin l'ouvrage de Jondot n'a pa^ fait
oublier celui de l'abbé de I^ Itlet-
terie. En général il manquait de la
qualité la plus eNsentiellede riiistonen,
1 impartialito; sou st\le, qui u'ctait pa&
dépourvu d'un certain éclat, péchait
sou\ent par le défaut de justesse et de
raesme. On lui attribue : lettres
trojennes, ou Ol/seryotiufts critiques
sûr les oui'rages iThistoirc qui con-
courent pour le prix décennal, \a 8**
de 9:2 paf;es (I8IO1. On peut croire
que le dépit de n'avoir pas obtenu une
mention du jury , pour son Tableau
des nations, ne fut pas élranj^er aux
motifs qui en^a^èrent Jondot à publier
ce pamphlet, dans lequel, du reste, il
ne manqua pas d'attaquer les ten-
>4
212
JON
ilances anll- religieuses des rapporteurs
«le l'Institut. Après avoir passé sa jeu-
nesse et son acre mûr à couibatlre les
philosophes incrédules, Jonilot fniltpar
entrer en lii'.te avec un ecclé.^iaslique
dont les écrils, empreints d'un véritable
radicalisme catholique, ont causé tant
de perturbation au sein de la société reli-
gieuse. Dans le second volume del'iiV
sai sur ïinâifjérenrc en matière de
religion, M. de Lamennais avait avan-
cé des propositions qui sembleraient
sorties de l'école de Pyrrhon. A ces as-
sertions menant droit au doute et à Tin-
crédu!ité,Jondot opposa un écrit intitu-
lé : Winti-Pyrrhonien, ou Réfutation
complète desprincipes contenus dans
le deuxième volume de l'Essai, etc.,
principes subversifs de toute croyance
religieuse, de toute mora'.e, et con-
traires aux notions de la saine phy-
sique ainsi qu'à V expérience de l'his-
toire (Paris, 18-21 , 1 vol. in-8''). L'an-
nonce seule d'un titre si hostile excita
dandes journaux une violente polémi-
que. Avant mênie que l'ouvraf^e eût paru,
les amis de M. de Lamennais, entre au-
tres ^l. le comteO'Mahony, prirent fait
et cause contre Jondot dans le Drapeau
Idanc et dans d'autres journaux roya-
listes, où Ils ne lui épargnèrent pas les
injures. Lui-même répondit dans la
Gazette de France, avec une modé-
ration dont il n'avait pas donné l'exem-
ple dans son Anti-Pyrrhonien, où.
selon l'expression d'un critique, il est
aussi vif et aussi amer que saint Jérô-
me écrivant contre le moine Vlf^i-
iance. D'ailleurs, la critique de Jon-
dot était diiïuse, embarrassée d'une
loulc de propositions incidentes , et
surcharf^ée de traits d'une érudition
indi'^este. Aussi sa Réfutation, dont
l'aTinoncc avait produit tant de scan-
dale, fut-elle complètement oubliée peu
du' semaines après son apparition; et
de toute cette polémique il ne reste
peut-être pour les connaisseurs que le
JON
souvenir de deux très-piquants articles
de M. de Féletz sur l'écrit de Jondot.
Depuis ce temps, celui-ci se retira de la
lice, uniquement occupé de préparer
une seconde édition de son Tableau
historique des nations, qui est snoins
une réimpression qu'une refonte pres-
que entière de l'ouvrage- (1829, 4 vol.
in-8"). Il avait encore publié en 1801,
avec Mutin et Salgues : la Philoso-
phie rendue à ses premiers princi-
pes, ou Cours d'études sur la reli-
gion, la morale et les principes de
{'ordre social, pour l'instruction de
la jeunesse (2 vol. in-8°). Tous ceux
qui ont connu Jondot estimaient son
caractère plein de franchise et de
loyauté. Chez lui la simplicité des ma-
nières allait jusqu'à la naïveté; témoin
ce trait de sa jeunesse. Il venait d'être
arrêté comme secrétaire par un géné-
ral : toutes les conventions étaient sti-
pulées; mais le lendemain, de grand
matin, Jondot se rendit près de son
futur patron : « Monsieur, lui dit-il,
« il est un fait que ma conscience dé-
« fend de vous celer, c'est que j'ai de
« fausses dents. » On juge aisément
de l'effet d'une pareille confidence.
Jondot, outre sa pension de retraite de
l'université, jouissait d'une pension sur
les fonds destinés aux gens de lettres.
Il a revu la 3'' édition d;i Précis de
r histoire unioerselle d'Anquetil, pu-
bliée en 1807, un an après la mort
de cet historien (12 vol. ln-12).
D— R— R.
JO\ES ou JOHXES (Tho-
mas), savant anglais, né vers 1749,
fut député de Cardigan à la chambre
des communes et lord-lieutenant de
ce comté. Possesseur d'une fortune
considérable, il en employa une par-
tie à décorer d'une manière pittores-
que sa résidence d'IIafod, et à y réu-
nir de précieux objets d'art et de
littérature ; mais sa passion pour les
monuments anciens n'absorbait pas
JCI>
JÔ.N
iil
toute son »me, et il ron&jcriii iiiie
portion de ses re\fnn* a :oula»;er le*
mtiitts qui rljieiil ^ou^ %ts >eu\. Iho-
■as Joliiie5 a traduit en anjjis plu-
sieurs Je nos anciennes r)iiunii)ues :
celle* de troissuni, 1803-1807. 4
>ol. in-i"; a\rrun supplrment, 1810;
Monstrrlri, ISO«J, i \ol. in-i', lire
au&si in-fol., et I^ondre^. 1810, 12
\ol. in-8"; Ijiutquirrr, 1807. ^rand
in-8', avec fi;;uie5; \'2 eieinplaires
seulement ont éir tiré* in-V". ijti tra-
ductions , a\ec un ^rand
liite de f\| . sont «oiiiesde»
presses que 1 autrui j\ait rtoblies dans
sa propre maison, à Hafot). 11 mourut
le 'i3a>ril 1816. i^é de soiiante-sept
ans. — JoMS '^Ju/m , jurisconsulte
et littérateur, naquit dans un xilla^e
da comté de Caermatthen i Irlande ,
en 1772 , de parents pauvres qui,
Toxant son ardeiT pour s'instruire,
le laifserenl se \\\icr à son penchant .
II (it de bonnes éluder, et pas<a sa
jeunesse dans les fonctions de l'ensei-
gnement, tant dans «on pa\s qu'en
Allemagne. I\entie dans sa patrie, il
se tourna >ers le ban eau; mais quel-
ques sarcasmes qu'il se permit «ur les
abus de la chicane nui>irent à ses suc-
cès, et il chercha d'autres rCNSources
pour subsister dans ses talents litté-
raires. I.es ou\raj;es suivants, qui sor-
tirent successivement de sa plume , ne
purent cependant le mettre toujours
au-dessus du besoin , et il mourut «
à peu près dans l'indigence, à Islin^-
ton, en 1838 : 1. l oyugfs dans lu
république française, traduits du da-
nois du docteur l^uj:f;e, 1801, in-8".
II. De libellis fawosis, ou /*/ Lui
du liUllc, 1812, in.8^ 111. Les
Kcangiles traduits m gallois, 1818,
in- 12. IV. Histoire du pays de
Galles. 1 vol. in-8", laquelle lui at-
tira des inimltic^ dans le pays dont il
se faisait T historien. Il avait laissé
manuscrit: The J^orthiesoflfales^
ou iBéaotrr^ sur d anciens personaa-
gM bretons et (gallois depuis Cassi-
velaanns jusqu'à nos jours. L.
JO.XKS (i;ioiu;r..MATiiir.i ),
marin an;;lais, qui %'rs\ acquis de la
réputation comme v(.\a;'pur et statis-
ticien, était le fieie de 1 officier du ^i-
nieJ.-T. Jone* qui cnn»lrui.tit les 11 -
f^nesde Torres Vedra* et dirigea l'atta-
que de Uerp-op-/oom. Ne ver» 177t>,
il entra de bonne heure dans la marine
ro\ale nou^ le lUic d'Yorl . reçut va
première ci>niniiN>ion en 1 802, et, après
a\oii f ,;iirc .i\ec iumnei r dan* Ir^ ciot-
sieres et dan^ diterv ei avec
les navires danrais, pi II , ni sur
lescAtes d'islrie et d.»iis le> eaux de
N enise, il fut promu au tirade de capi-
taine du bricL le l'osian, et en celte
3ualite coopéra, durant le sie^e de IMe
e Léon, à la défense de Cadix, en
1811. Après la paix, il mit un soin
particulier à inspecter ions le^ arsenaux
maritimes et \t> p«rts de la France et
de la Hollande: et bientôt l'amirauté
le char{;ea de diriger de* observations
sur les établissements de même f;enre
des puissances septentrionales et de
l'empire ottoman. Il publia le résultat
de ses recherches sous le titre de \ oya-
ges en .\or\'rge, en Surdr, en t in-
lande, en Hussit\ en iurifuir, ainsi
que sur les côtes de la wertr.'îutsf et
de la mer \oire, Londres, 1827, 2v.
in-8°. Cet ouvra;;e est un.iniinement
re{;ardé par les hommes «oéctanx eom-
roc un doriiinent des plus précieux
pour l'exattilude des chiffres, pour
l'étendue et la solidité des recherches,
-pour la justc^'e desappréciations. Tous
les éléments, tous les résultats qu'y
coniif;ne l'auteur sont contemporains
ou peut s'en faut. 11 fil surtout une
{grande sensation à la cour de Iiussic;
et l'empereur ié;;nant en dl marquer
sa satisfanion à rauleur. Très-fai-
ble de sanlc , Jones avait quitté la
Grande-Bretagne pour unclimat tbaud:
!ll4
JON
arrivé à Malte, il eut le malheur d'y
faire une chute grave, ne fut relevé
qu'avec trois côtes cassées et l'épaule
démise, et trois jours après mourut des
suites de cette secousse, en 1830. —
Un autre JoNi:s [Guillaume], né en
176-2, mort le 17 février 1831, s'é-
tait signalé comme mathématicien et
astronome: savant profond, observa-
teur habile, professeur élégant, écrivain
laborieux, il s'était montré l'émule des
grands analystes et astronomes de sou
siècle, les Maskeline, les Priestley, les
Hutton ; ses indications avaient aidé
les opticiens et constructeurs d'instru-
ments de précision à perfectionner leurs
produits. \j Encyclopédie hritanni'
que et celle de Kees [liées' s Cyclo-
pœdid) contiennent de lui beaucoup
d'articles. De plus il a donné séparé-
ment des descriptions à' un instru-
ment solaire , à' un étui de mathé-
matiques, du quadrant d'Halley, et
soigné une édition des Oùiores com-
plètes de George Adauis. P — ot.
JO\GE (Nicolas), écrivain da-
nois, fils de Pierre Nielsen, réviseur
de la chambre royale des comptes qui
était en racFue temps jaugeur de navires
{skihs-mualer), et arrière-petil-fils de
Nicolas de Jonge, célèbre négociant
d'Amsterdam , naquit à Copenhague
le 29 août 1727. Après avoir reçu
une bonne éducation scolaire , il em-
brassa la carrière ecclésiastique, et fut
nommé prêtre ou curé de la paroisse
d'Ailislov, en Sélande, où il mourut
dans un àgc très-avancé. Il a publié
un grand nombre d'ouvrages : 1. Sy-
nopsis geof^rapliiœ universalis cap-
tui discentium arcomtuodata , Co-
penhague, 17.ji, in-8". Il en a été
publié une seconde édition corrigée
et augmentée , accompagnée de 5
cartes géographiques, Copenhague et
Leipzig, 1758 , in-8". II. Vie du
vice-amiral Just Juil , Copenha-
gue . 1755 , in-8"; traduite en al-
JON
ieraand par Mongel , ibid. , 1756,
in-8°. III. PJiœdriJabularum Mso-
piarum libri V capiui Tironum
accommodati , par N. Philomusum,
ibid. , 1756. IV, Histoire univer-
selle de Louis Ilolberg, traduite en
partie d'après le compcndium latin
de cet écrivain, mais néanmoins consi-
dérablement améliorée, et en partie
augmentée, avec les histoires de plu-
sieurs états européens, et continuée,
Copenh., 1757, in-8°, avec une in-
troduction du conseiller d'état Kall.
V. CoUegium bihlicum , continens
historiam sacram veteris et novi
Testamenti , cum prœfut. , Johun,
Otton. Bangii, ibid., 1760, in-8".
VI. Voyage .d A vieux, traduction,
ibid., 1759, 6 vol. in-8°. VU.
Géographie de Wœrner ; traduction,
ibid., 1753, in-8"; 2^ édition, ibid.,
1776, in-8''. VIII. Géographie de
Louis lîolberg, ou Description du
monde, d'après le petit compendium
latin de cet écrivain , mais considéra-
blement augmentée et ornée de cartes
géographiques, en trois tomes, ibid.,
1759, 1761 et 1763, in-4°. IX.
Archivarius homileticus. Recueil de
dispositions sur les textes évangéliques
des dimanches et fêles , extraits des
écrits des hommes les plus célèbres, en
six parties, ibid., 1763, 1767 et
1769, in-8"; la 4" partie a paru en
1774, in-4°, et la 5^ partie, égale-
ment in-4", en 1777. Cette 5® partie
a paru séparément la même année,
1777, sous le titre de Géographie
de la patrie, et la 6*"' imprimée en
1779, in-4", est intitulée : Descrip-
tion géographif/ue du royaume de
Norvège, des /les L'œroe, de l'Is-
lande et du Groenland. X. Nupiia-
lia, ibid., 1762, in-8"; 2^ édition,
ibid., 1770, in-8". XI. Funeralia,
ibid., 1769, in-8°. XII. Vies des
èvrques évangéliques du diocèse de
Sélande , avec leurs portraits, publié
JON
JON
par Jona5 Hjh, ihid , 1761, in-i*
l-a Vif i\ts huit ilfrnifr» e*l l'ouxra^e
et Jonpe : mais Cflle «Îm seyt pre-
■irrs c»l de (^p.-Frl. Uoliif. \III.
j4t/as tirs écoles, ibid., 177J, In-S**.
XIV. Kwai d'un I.riiron siholas-
tirum latino-danii um. ibid., 177.*l.
XV. iirponsr au noiwel e.nirnen
critique dr la description thoro-
graphitfue du royaume de hane-
mark, ih-d , 1777. \V|. Drsrrip-
tiitît Ir la résidence royale
de ( .r , V partir, ibid-,
17s;i,',n V I) 7.— V
JO\l\ riiinrnT^ nédan^ l'Ao-
Ter(;nf en 1.'»96, et mort à Tnurnnn
le 9 mars 16!)K, Hait entré rhei les
jésuites de cette tille en lOl'l, el »'y
était rnj3t;é piu«tard par la profeuion
solennelle. On a de lui: \. Lyricu,
Lvon , 1630, in- 16; atec queb^ue^
addition*, l»ari<, \i\Xi , in-li. II.
///!// ra. Iib I; Musit et
Grui .UT, lib. I ; .inarreun
ehristiunu» , lib. 111 , L^on , Pierre
Halllv , 1()3i , in-12. LWnacréon
du 1*. .lonin est plus chaste que \\-
nacréon de Tros, mais il manque de
goât, et ne .«^aurait une seule fois ri-
taliser avec le >oluptueux vieillard.
Non content d'avoir christianisé Ana-
créon , rude et pénible tâche que
tenta plus tard le IV d'Aquino {l'oy.
ce nom , II , 3.')0) , Joniii publia
bientôt: III. Uiim christianus, Tou-
louse, Colomier, 1()36, in-S'. Cette
fois il joua de bonheur, et, pour la poé-
sie comme pour le.s sujets, il fit un ou-
vrage qui mériterait d'être plus connu.
Il est étonnant qu'on ne parle jamais
du Bion chrétien^ quand on publie le
Bion profane, le liionclassirptr. IV.
Elr^iiz , ïlendecasyllahi , Scaznn-
tes, lamhi, L\on, 1634, in-l-J. V.
Porwatïim lihri duo, Lvon, 1637,
in -16. VI Kthira puesis , L>on ,
1637, in-16. VII. Moralis Mjtlm-
y>gia, Alphaheto gncnvira, en vers
iambes prers , Lton , 1637,in-16
VIII. Moralis institutiu , epit^ram-
matum centuriit trrs, disticlut gnib'
frt.L'^on, 1637, in 16. I.,e> verser ecs
sont expliqués m latin , comme dan»
V Anai reon et le ///o/i. Ouoique le
V. Jonin n'ait ibinne que des poé^iesi,
il avait cependant en«ei;;né la pluln o
phie et la théologie , puis eip; ,ur
rKcnlure-Sainte. Dans ^es ^erv {;urs,
dans ses vers lalins, on remarque une
grande \i\acile dV^prit, beaucoup de
le^ance et de facilite l.e I' Sanadon a
peint en deui mots le caractère des
poésies de Jonin :
NcrUrv p#rplu«a«
Le p. Théophile Uavnaud, qui décou-
vrit le véritable nom de V ldit*t {t'oy.
Ravmond Jof\nAN 2), X\ll , 4),
fut sin;:ulièrement aide dans ses recher^
ches par le I*. (lilberl Jonin, comme
il le dit lui même 3). C— L — T.
jo.\sK.\. rv»/. jo»»;, XXI,
6H^61-2, et dans ce vol
JO.\STO.\ (\Minn). roy.
.1<)MNM..>. \\I. 597.
JOWILLK (AicrsTiw-JrAW-
Fratiçois Uuiillun de\ l'un des qua-
tre dovens des maîtres des requêtes,
à l'époque de leur suppression, naquit
ï Ilruielles, en 1733. .\ peine ànr de
dix-neuf ans, il fut admis au parlement
de Paris, comme conseiller de ^rand'-
chambre. Il eut entrée au conseil en
17<»"J, et fut, troii ans après, l'un des
douze commissaires désioné^ pour tenir
le parlement de Kennes et ju»er en-
suite I^ Chalolais , à Saint-Malo. On
sait que la procédure fut assoupir par
une déclaration du roi [Voy. Cumo-
T.\IS, \II,6VJ . Il continua de siéger
au conseil du roi, jusqu'au 17 aoîil
1780. Alors il émij/ra, en témoignant
le regret de n'avoir pas pris ce parti
(i Nuiijd..f.i. Ca'mi, a. ut. i.
(>) L«> p. ba>i>au(l kc ooiuine constaniin<nt
Ravuiond JorJaii.
f'j) reufttt du F. Raynaad, tom. W, p. \\.
2l6
JON
plus tôt, quoiqu'il possédât plus de cent
mille francs de rente. Il ne rentra en
France que par suite de l'acte d'am-
nistie qui rouvrit aux Français fuoitlfs
l'entrée de la patrie. Le grand âge de
Cliaillon de Jonville ne lui permit
pas de jouir long-temps de celte faveur.
II mourut à Paris à la fin de l'année
1807. Il avait publié beaucoup d'écrits
et de pamphlets dirigés contre les prin-
cipes de la révolution, notamment : ï.
Apologie lie la constitution françai-
se, ou Etats républicains et monar-
vhiqves compara
les histoires
de Rome et de France, 2 parties, Pa-
ris, 1789, in-12. II. La vraie philo-
sophie adressée aux états-généraux^
Paris, 1789, in 12. III. Français,
soyons Français, 1789, in-12. IV.
Création de deux chambres haute
et basse, 1789, in-12. On assure que
cet écrit encourut la désapprobation
àe Monsieur, frère du roi, qui depuis
consacra cependant , par sa charte de
1814, l'attribution du pouvoir législa-
tif à deux chambres , en réservant au
souverain la proposition et la sanction
des lois. V. Ultimatum de la saine
partie (désarmée, quant à présent)
aux provinces et surtout aux bail-
linges , Francfort, 12 dcc. 1790,
in-12, imprimé par ordre des princes
qui récompensèrent l'auleur, en lui
conférant le titre de conseiller d'état.
VI. Révolutions (ie France prophé'
Usées, Sîrasbourg, 1791 , 1792 et
1793, W parties in- 8^. Cet ouvrage
lut imprimé à l'Jteiihcim, aux frais du
cardinal de Rolian. Cliaillon de -Ion-
ville élait un ami éclairé des ails. H lit
plusieurs vovagfs en Italie d'où il rap-
porta un assez grand nombre d'objets
précieux , notamment de très-belles
mosaïques qui furent confisquées par la
nation. Elles ont servi depuis à former
le pavé de l'enceinte où avait été placé
l'Apollon du belvédère, au musée du
Louvre. \j — M — X.
JOR
JORDAX (Claude), dit de Co-
lombier, né dans la seconde moitié du
XVII''' siècle, voyagea pendant une
douzaine d'années en diverses contrées
de l'Europe, et s'établit, en 1G86, li-
braire à Leyde. Plus ta-d s'élant retiré
dans le Rarrois, il rédigea et publia
ses Voyages historiques de V Europe
depuis 1092 jusqu'en 1700, Paris,
1692-1703, 8 vol. in-12. Cet ou-
vrage, qu'il dédia au roi de France dont
il était pensionné, contient, outre les
observations recueillies par Jordan
dans le cours de ses voyages, des mé-
moires que lui avait laissés un de ses
amis sur le même sujet, et fut réimpri-
mé plusieurs fois en France et à l'étran-
ger. En 1704, Jordan fonda, sous le
titre de la Clef du cabinet des princes
de l'Europe, un journal mensuel, con-
sacré aux matières du temps, c'est-à-
dire aux nouvelles de la politique, de
la littérature, des sciences, etc., qui
parut d'abord à Luxembourg et fut en-
suite imprimé à Verdun; mais, quoi-
que depuis 1717, l'impression s'en fit
à Paris, il esl resté connu sous le nom
i]e Joui n(d de Verdun. Les publica-
tions de ce genre n'étaient pas alors
aussi nombreuses qu'elles le ioul main-
tenant ; le rncucil de Jordan eut un
succès immense; et , pour en agran-
dir le cadre , il donna un Supplé-
ment où il rapporte les événements
remarquables arrivés depuis la paix
de Risivicli , en 1 697 , jusqu'en 1 70 i,
Verdun, 1713,2 vol. in-8". Il con-
tinua, jusqu'en 1727, la rédaction de
cet ouvrage périodique, auquel travail-
lèrent succestiivement les académiciens
La Ijarre, Egl)', IJonamyet Ameilhon
(f oy. ces noms, tom. III, V, XIÏ,
LVI), pt qui cessa de paraître en 1776.
La collection complète en 120 vol.
in-8", assez lare aujourd'hui, est en-
core recherchée à cause des détails cu-
rieux et vraiment utiles qu'elle renfer-
me. Dreux du Radier, auteur de la
I
JOB
7 uhlr' gnierttlf dit Jimrnal Jt" l 1 1 •
ilun (^depuis I6U7 jusqu'en 17.')6, U
\ol. in-8" «après avoir, dans sa pir-
farf, dfxi^nc commr le fondateur de
rellr|iiiltl irai ion (.\\à\ les Pliiii|)pc Jor-
dan lie l)urand. la rrNiilur, dnns la
'i ohlr inrme, à (Jande Jordan. Celul-
n, d'après le Jourmil littrrairr, qui
parul a Soleuie en 170.'», aurait des-
avoué 5a pailiripjtion à la i.Uf du
calunet des primes ; mais on »ail que
le^ «irsaveui d'écrits qui tout lient a la
|Mtliii(]ue ne tirent point à ronse-
qurnrr. (^aude Jordan mourut proba-
blement en 17 VG, année ou les itii-
tules de son nom, (\. J. qui, depuis
1717, »e lisaient sur le frontispice du
JiMtriuil dr l rrdun . cesseient d'>
ijf;urer, quoique d'ailleuis il n'v tra-
vaillai drjà plus. On lui doit encore
un (J.oix de bons mots ^par oidre
alphabet iquei, ou Pcnsrrs des grns
(P esprit sur timte sorte de sujets,
Amsterdam, 1709, in-l*J ; nouvelle
édition, consideiabicment au|;mentee,
ibid., 171G, in-8'. C'est à tort que
Tromper Marchand, dans son édition
des I^-ttres ihaisics de lia) le, attri-
bue à Claude Jordan \' Histoire ahrc-
fée de fKurofte. qui se vendait cliei
lui loisQu'il était libraire à l^vde, mais
dont I auteur est Jacques Bernard
(No>. Vh.mifien crit. de llarbier).
P— ni.
J01U)A\ CAHiia.F.^ naquit à
Lvoii, le 11 )an\!er 1771 , d'une
recommandable famille de nc^orianls.
Il avait dix-sept ans et sortait du
séminaiie de Sainl-lrénée , où il
n\ail achevé ses études comme élève
Inique , lorsqu'il se trouva au châ-
teau de Viiille chci son oncle ,
M. Pcrier (1;, où s'a<$emblaient, sans
c.invocalion royale , de hur propre
droit et autorité, les éiats de Dauphiné.
.loi;
717
^ijl'Lrr Je Casimir Firirr, iloiil t.. JoicJjn
fut \« ci-clttciiiir, /ami. t\ dont on «jit <|<i« irt
e|i>n>on« influèrc, t iKaucoop »ur les airnnr» .
(urtoot à ré|NHjur de la roUuratioo. X — o j.
Il a.s>i>ta ani^i a ce |ii entier acte de la
révolution. Telles fuient les piemic*
re» impressions qui pénétrèrent son
esprit et influèrent sur ses opinions.
'Jout Jeune qu'd était, il se lia avec
les hommes importants ri honorables
de celle réunion, avec Mouniei sur-
tout. Des \iv . s'erir^rii 4 en lui rrt*
amour de la liberté et de la justice, (ju>
et confondu avec un invariable senti-
ment dedroitureetde modcialion.l^r>-
qu'uii discutait à l'assemblée ronst'H-
tuante la conslitulinn c.Mle du clergé,
Camille Jordan publia quelques écrits
contrairesàcetteuruvreimprutlente.S^
éducation au séminaire lui avait donné
une pielé vive et sincère ; il eiait alors
un vrai sulpirien, plein d'aversion pour
les doctrines jansenistev, qui, abâtar-
dies, médiocres et exagérées, tentaient,
à la faveur de la révolution, une pilo\a-
ble réforme de l'K^lise de France, tn
1793, la viilcdeL>on se souleva contre
la Convmlion, qui, a^re» le supplice de
liOuis \N I. préludait au ré;;imc de U
terreur par la proscription de» niion-
dins. Camille Jordan prit, avec éner;;ie
et chaleur, «^a part dan» celte luroïque
résistance, et se ût remarquer par son
éloquence et >on coura;;e. Avant reru
au commencement du siè;;e une mis-
sion pour le département du Jura, il
dut son salut à cette circonstance, et
se réfugia en Suivse, puU en .\nj;lr-
terre. \À , il devint l'ami de quel-
,qucs émigrés français qui , comme
lui , ne connaissaient point de liberlé
sans riuimanité , la justice et la rai-
son : Malouet , I^llv-Tollendal, Ca-
zalès. Il s'attacha aussi aux hommes
distingués de l'Angleterre dont les
opinions étaient conformes aux sien-
nes : Fox , ErsLine , Markinlosli ,
lord Holland. Il suivait as>idument
les séances du parlement, s'instruisait
des loi.s de toutes les circoiistarices
politiques, des opinions, de la littéra-
ture de l'Angleterre. Son esprit était
ii8
JOR
actif, ses sentiments élevés , son âme
candide , sa vie pure. Il rentra en
France après la révolution du 9 ther-
midor. En 1797, il fut élu député au
conseil des Cinq cents par le départe-
ment du Rhône. Ce fut alors que le
public commença à connaître son nom ;
il débuta avec éclat à la tribune, et
prit place parmi les hommes qui , la
plupart sans arrière-pensée, voulaient,
à cette époque, faire profiter la liberté
constitutionnelle au rétablissement de
l'ordre social, et l'égalité à l'abaisse-
ment de cette aristocratie de crime et
àê médiocrité, née des mauvais jours de
la révolution. La lutte était vive;
ceux qui tenaient le pouvoir voyaient
quels périls il y aurait pour eux et
peut-être pour la France à s'en laisser
déposséder. Un rapport relatif à la po-
lice des cultes attira l'attention sur
les débuts du jeune député de Lyon.
L'intolérance irréiif^ieuse du XVIIl®
siècle était encore dans sa verdeur ; la
persécution du clerojé, l'oppression du
culte catholique , passaient , aux yeux
du parti dominant, pour des conquêtes
de la révolution, essentielles à conser-
ver. 11 s'éleva, parmi cette opinion, une
clameur {2;énéiale contre un orateur
qui osait parler avec respect et affec-
tion de la relipon où il était né : ce
fut un feu roulant d'épi^rammes vul-
gaires et de lourdes plaisanteries con-
tre le député qui réclamait pour la
majorité de la nation la liberté d»
pratiquer son culte. On ne tarissait
pas de moqueries sur les cloches, que,
suivant le rapporteur , il devait être
permis de sonner. Dans une autre dis-
cussion, Camille Jordaii encourut quel-
ques reproches plus fondés : le midi
de la France, et surtout la ville de
Lyon, étaient le théâtre d'une vive
réaction; des meurtres, des massacres
de prison , des actes de violence
avaient été commis, des sociétés secrè-
tes s'étaient formées, elles exerçaient
JOR
de sanguinaires vengeances sur les ré-
volutionnaires, elles menaçaient le gou-
vernement et troublaient la sécurité du
pays. Le Directoire exécutif en rendit
compte par un message; il lui conve-
nait, ainsi qu'au parti révolutionnaire,
d'exacrérer ce <renre de désordres. Ca-
mille Jordan chercha trop à les atté-
nuer ; on était alors à une époque où
les plus vertueux citoyens ne savaient
pas s'élever avec calme et fermeté au-
dessus de la domination de l'esprit de
parti. D'ailleurs, il y avait quelque
chose dans le caractère et le talent de
Camille Jordan qui l'entraînait facile-
ment trop loin dans ses opinions et
son langage. La pureté de son inten-
tion, sa candeur, sa bonne foi, la cha-
leur qui venait animer cette àme douce
et pure, une sorte d'aveuglement pres-
que involontaire l'empêchaient sou-
vent de juger l'esprit de parti et de
prévoir ses œuvres ; alors il s'empor-
tait fort au delà de sa modération ac-
coutumée. Toujours uni aux gens de
bien , toujours en sympathie avec tou-
tes les pensées sages et morales, il in-
quiétait sans cesse ses amis par ce
penchant à une exagération sincère.
Le coup d'état du 18 fructidor devait
l'atteindre plus que tout autre ; il se
déroba à la déportation et se retira en
Suisse, où il publia, contre la tyran-
nie directoriale et contre la révolution
du 18 fructidor, une protestation qu'il
envoya à ses commollaiits. La Suisse
allait être envahie par les Français : il
passa en Allemagne et y vécut long-
temps près de son ami .Mounicr à
\V eirnar. Le temps de ce nouvel exil
ne fut point perdu pour lui : il étudia
la langue, la littérature, la philosophie
allemandes. C'était un de ces esprits
nul ne manquent jamais une occasion
d'agrandir le domaine de leurs con-
naissances, de leurs pensées. Le 18
brumaire fit cesser sa proscription, il
revint en France et ne conçut aucun
JOR
dcsir de s'attacher aa ^miirernemcnt
roRMibire ; il se félicitait du retoar de
l'ordre , mais il était de reax c^ui re-
grettaient la liberté ri qui nr xowirnt
rien d'heurrui ni de tue pour la
France, tant que ne serait pas trou-
\ée une pn»ilion ou le pouvoir serait
fort, en même lemp^ que le* libertés
seraient garanties. Ses opinions et ses
sollicitudes lui dictèrent, en iKO'i, un
écrit intilulr : Ae vrai srns du î««/f
national sur Ir conjmUtt il vif. qui
parut à l'époque où Napoléon, par un
nomma<;e dérisoire à la souveraineté
du peuple, consultait les assemblées
piituaires sur cette prive de possession
du pouvoir absolu. I^ brochure fut
saisie : un ami de Camille Jordan
qvi l'avait remise ï l'imprimeur fut ar-
rête; alors le véritable auteur déclara
son nom, M. Ducliesne fut mis en li-
berté, et nulle poursuite ne fut eiercée
contre Camille Jordan. — Il se retira
à l.^on, se tint à l'écart, se maria,
vécut dans le silence et rob>curilé
parmi toute la ploire du règne impé-
rial. — I.orsque I^uis WIII fut re-
monté sur le IrAne, en 181V, Camille
Jordan fut un des députés que la
ville de Lvon eu\ova au souverain
ramené par la restauration {'!). Sa re-
nomm«*e de fructidor, son éloi;^nemenl
constant pour Napoléon , étaient de
^ands titres à obtenir faveur auprès
des opinions ro>alistes; le pouverne-
menl des Bourbons pouvait > \oir les
preuves d'une lonj^ue fidélité. On ima-
gina de récompenser Camille Jordan
par des titres de noblesse : il s'étonna
de cette façon de l'honorer, mais il
1 Qurlqn« irmpi anpjravant, C. Jordjn
aiait lait partir d'une ilrput^tion qve la «illc
de l.yn ayait en«OTr« auprès de IVnip<T««r
d'Ai-trirbr à Dijon, afin dVn obtroir d-» aHoa-
cistrmml) aux irquititinn» doat rllr était frap.
prr. On ^Ji! qup les drputr*. qui ay«ieni eir
fhr.;M< pa^mi Ir* bninines I»* pin» connus pour
!i royali-te», sai^irriit rrtte orca-
• le monarque aotrichirn «or la
pr. ' rctablitsenient des Bourbons , et
JOR
^"9
ëUit ai loin de toute vanité qoM ne
s'en offensa pas , et souriait douce-
ment de cette complète méconnais-
sance de la resoliiiion sociale qui
avait changé la France ['X . Il ne mon-
tra aucun désir d'entrer dans les af-
faires : »es habit uties domestiques, sa
santé, l'absence de toute ambition, le
retenaient dans \fs fovers. Pendant le»
cent -jours de 1K1.'>, sa maison fut
insultée ; les révolutionnaires retrou-
vèrent leur vieille haine contre lui,
comme il avait retrouvé au^si son aver-
sion pa<sionné« contre eui. lorsque,
après la seconde restauration, de nou-
velles élections furent faites, (.imillr
Jordan, nomme par le j^ouvernemenl
président du colle;;e électoral de l.von,
ne voulut pas être élu députe. A
cette époque il accepta du conseil
municipal la misxion de se rendre en
Anf;leterre pour v re-^ler la succession
du majoi Martin, qui avait lé^ué plus
d'un million aux hospices de I>>on, sa
ville natale. Il revit ses amis d'.Knj^le-
tcrre, et reçut toutes les marques d'une
1"'
qu
' (or
u«e«
>|u'i(
protiable. .Viou» peutna» au rontrairr qnr (.. Jor-
daa, qoi «rail Irarrra» La re*olu'u>it rn«imna*
d'buniaM «(nie« à la caa»« de* Bouilxint, n'^'
«ait point ignore |ri>rt pri>j*lt (I leur* vcr-is, tt
qi.e tn«^t»e tl l»t (•»n»îr»'« »nu»cnt. M. Roytr-
C - %on aipi et arii
<< >!•« è l'an» k'a^ent
»• . t:nr • f r,rc mo>
t duii* U (...(i.crc \
^ Jana une li lonsi
Lt.^^e. <i p_» uti *(ul jour.
■ nmte , tioa^ n'^Ton» ci«
désunit : airme bu:, mrmti f^nstri, mr'mti tf-
m fmrtt, mimr furtnmt .' ■ 51 — o J.
(J) Roo» ^ons llrtt de crolr« qne cette idée
de rrTrtin|»en*er le» service» que C. Jordan arait
rendue a U cause dr» Rourlx-n^ par des lettres
de rîohi*>4^e. Tint de M. Royrr-Collar.l; car
trt , t .le la caii«e royale fit à cetla
é,-.'i irioineiit où il rtait .lu pouvoir,
la II iicn i [<tu»ieurs personnes qoi
»r t'..ii> j. '1' ...j.ru prèïdaii» 1«- ujc.ne cas, et qai
en sourire-. t en »a présence, à-;ieu-prè» comme
avai\ faite. Jordan. *• — oj-
220
JOR
grande consldcralion. Eu 1816, après
i oiilonnance du 5 septembre (i), Ca-
mille Jordan céda euiin aux instances
de SCS amis et du ministère ; il fut élu
Hcpiilé par le département de TAln ,
dont il présida le collèf:;e , et en
même temps par le département du
Rhône (5). Il reparut après vingt ans
sur la scène politique, entouré de l'es-
time publique et du souvenir de ses an-
ciens succès. Sa place était marquée
d'avance près de M. Uoycr-Collard,
son ami , son collèo;ue de h uclidor,
celui qui avait juf^é comme lui le des-
potisme impérial ; qui, comme lui ,
cherchait des garanties pour les liber-
tés dans 1.2 nior.aich'e léf];itime. Ca-
mille Jordan s'associa avec chaleur et
siiicérilé à la cause de justice et de
modération qu'il fallait dès lors défen-
dre contre les attaques de deux partis
opposés, en demandant à la seule rai-
son et à l'intérêt public bien entendu,
appui et force contre les vieilles pas-
sio!is politiques. Il tarda peu à retrou-
ver cl à accroilre sa renommée d'ora-
teur : il défendit le projet de la loi des
élections, de cette loi constitutive de
la monarchie actuelle, qui accorde les
suflrao;es aux citoyens, seulement quand
ils offrent présomption de lumières
et d'indépendance, et qui les refuse à
ceux qui pourraient voter par in-
fluence ou sugf2;estion aveugle. Ses amis
et lui comprirent que delà devait sor-
tir la représentation véritable de la
société finnraise telle qu'elle est. Dans
un autre discours, il répliqua avec un
f;rand éclat aux orateurs qui, voulant
donner au cli'ii:!: une dotation doma-
(i) On a (il I <|ue (',. Jori^an .irail eu qii(l(|iic
part i ccltç ortl«>nr.a:itc \i.n- l.i(jiii:|le rutprniioii-
i:cc I.T cJissntiitiiui «Ir la cluinlire ùJlrouvabfc. Ci;
<|u'il y a dcsur.t'cst (pii* .!rs lors il seran^ea du
parti iiiinUlcri'-i (|uir.jvait f;iii rrmlrr, et qu'il !«
kerrit jusqu'à t-c^ dcruirrs uioriieiits. M — d j.
(j) Il op'.a pour le <l^parti-mi ni de l'Ain, oii
sou clertion .ivait #Hé fortrini-nl coulesléc par l«;
parti roy.iliMe, ri très chaudement appuyée par
Je ininibtére auteur et produit de rordunnancc
do 5 s>;pteinbre. M—» j.
JOR
iiiale, s'opposaient à ce que le j2;ouver-
nement consacrât ce ^â<^e au paiement
de la dette publique (6). En même
temps, il ne refusait pas au gouverne-
ment les moyens de se défendre contre
les factions déchaînées : il consentait,
pour un an, à la censure des journaux
et à la suspension de la liberté indi-
viduelle. A la session suivante , en
1818, Camille Jordan et ses amis po-
litiques ne se séparèrent pas complè-
tement du ministère ; ils lui concédè-
rent encore les lois d'exception, mais
ils devinrent plus exigeants sur les ga-
ranties de la liberté. Ils demandèrent
le vote annuel du recrutement et la
juridiction du jury pour les délits de
la presse. Camille Jordan prononça
dans cette dernière discussion un dis-
cours d'un grand effet; il peignit d'une
façon pénétrante les tergiversations
d'un ministère qui ne savait trouver au-
cune force dans l'opinion publique; et
qui , dans sa timidité, montrait au
pays une méfiance injurieuse ; il af-
fublait cette politique du nom de
constilutionalismc Initard. Ce fut
aussi un beau discours que celui où
il signala le régime de terreur que la
cour prévôtale et les autorités locales
intimidées ou passionnées faisaient pe-
ser sur la ville de Lyon, so;is le pré-
texte d'une sorte de conspiration. En
cette occasion encore, il alla bien plus
loin que n'eût voulu le ministère , con-
traint par sa situation à ménager, tout
en la réprimant , la faction contre-ré-
volutionnaire. On ne put faire consen-
tir Camille Jordan à épargner par
son silence quelques embarras au gou-
vernement : il voulut dire la vérité (7).
(6) C'est dans celte occasion que C. Jordan ,
ayant inroqiic le témoignage des inagisirnts qui
se trouvaient à la chambre, M . Ctau&el de Cous-
icrgues lui répondit : « Je suis magistrat , et je
ne vo'is approuve pas.» M — uj.
(7) Voulant que la liiographi*; resie fidèle à
son rjtigraphe , et toujours persuadé qu'elle ne
doit aux mort! que la vérité , nou^ diroiM ici que
tous les témoignages, et surtout ce qui a été rc-
JOR
JOR
aai
\ la Cil df fetir vs»ioii, il attre?fj auT
cl«cl(urs df l'Ain ri ilii l\liorir un
rcfil où il rendait fom{»le dw molif^
Je sj conduite politi.]ue et dri difii-
culln df ^a situation. Sa Ininne foi,
son indrpfodancc, la pureté lU ses
n)otir>, crUteul dans rclte publication.
Il fut réchi, et re\int encore à la *e»-
sJousui\:inle. I.cmini&t ère était ciian;;^.
I.e duc de l\irlirliru et I^ainé s'étaient
retirés, .M. de Cazr» dui^eait la poli-
tique intérieure; de Serres propo>ait
les lois qui aiïrancliisuient la pres<^e.
Camille Jordan, dont la sanir se dé-
truisait de plus en plus, qui portait le
uerme incurable du mal auquel il de-
^ait succomber, proGla de cette con-
formité du ministère a%ec ses opinions
et SM tues, pour prendre quelque re-
pos ; il vota silencieu>ement pcnilant
cette sesvsion. Après quelques mois, la
situation des affaires deunt plus ^rave
qu'elle ne l'avait encore ete. I,e parti
contre-té\ulutionnaire, \aincu et mé-
content, conservait de profondes ra-
cines dans le j^ouvemcmcnt. Son inté-
rêt au maintien de la d\nastie ne
pouxait être douteux , la bincérilé de
son afleclion n'était pas contestable,
il voulait user du poit\oir roval à sa
^uise et selon .«es passions ; roai>, au
\rai, il ne son;>e.iit ni à le detniire,
ni à l'affaiblir. Kn nuiiie temps, un
fond de méfiance réciproque existait
entre la majorité de la nation et la dy-
nastie : l'une \ovait toujours la ré\o-
lutinn prête à renaître, désordonnée et
sanf;lante , l'autre aperce\ait très-bien
que ses liberléi étaient un objet d'in-
quiétude ; que ses sou\enirs récents
étaient antipathiques, que ses mœurs
ceminenl r«vrlé par Pcacliel «t pir le gcnrral
Dnaadicn. riabli>.rnl tjns rr^.liqqp «^/ni iSi6
1m cooipir. tion» qui rciattrent a Giraoblc n a
LyoQ cuiitrR le poutruir Jet Bourbon^ n'eia.mt
que trop rrellrs, ti qu« la rrprcstion fut loin d'en
élt* •éfèrr. Ce tout de* qaesiions qae o«at trai-
teroQiplus ainpleiDcnt a l'ariicle Loun Xfljf.
Noos ne pooTont poar le inomeot <{o' j renvoyer
le Wctear. M— nj
acthellM evritaient une invincible ré-
pu;;nance. H \ a\ait de patt et d'autre
une ceilaine ron\irliun intérieure
qu'on était incompalibir . Jrs opinions
révolutionnaires, les ambitions déçue«,
les vanité» ble^^sées, les entliousiasoies
irréfléchis , le fanatisme des esprits
faut puisaient dans cette dispositioa
du public une force vraiment roena-
Sante. Les élections de \H{'J, le chuii
e (iré^oire, élu évidemment comme
iéf;icide, l'uvj^e a^resMt de InutfN jr.
libertés ntn^tttutionnellr^ , luJMi^e^-
taient le pénl au\ >eu\ lu moins ciair-
vovants. Ourlque>-uns peavaient qu'il
fallait fairr réMstance ouverte au parti
qui cherchait à renverser la d> nantie {>ar
une révolution nouvelle; mais en mrme
temps ils voulaient qu'on donnât toutes
les garanties réclamées par les gens de
bien et les hommes éclairés. Ij possi-
bilité actuelle d'une telle marclie pa-
rut généralement douteuse, les esprits
n'étaient pas asseï murs, assez rassis
pour qu'on pût espérer l'appui de l'o-
pinion publique. Hestaient deux réso-
lutions à prendre : emprunter l'appui
du parti coiitre>rtvolutionnaire, sauf à
le modérer, s'il riait p(>»sible; ou bien
attendre que les fautes e' les exa;;'*ra-
tions de l'autre parti lui lUsent per-
dre sa popularité et alors, seulement,
commencer à lui résister. Camille Jor-
dan et la plupart de ses amis virent
plus de dan;;er au premier projet qu'au
second, ils résolurent de s'opposer de
toutes leuis forcesau\ entreprises d'un
ministère qui se rapprochait de la f:^r-
tion cotitre-rcvolutionnaire. Ils s'\ dt-
rnièrent encore bien davantage Ioi.mjuc
1 assassinat du duc de lîern fut de- onu
l'occasion de la chute de M. de Cazes;
lorsque M. de llithclieu fut rentre au
miiiialere , déterminé dans son trouble
à faire alliance avec les rovaiistcs. Ce
fut pour soutenir celle lutte solennelle
que Camille Jordan sacrifia le repo> de
ses derniers jours; il repari.t à Ucham«
212 JOR
bre et se plaça ouvertement dans cette
opposition où le général Foy et Casi-
mir Périer formaient la limite et la
transition entre les deux opinions li-
bérales. Le grand combat s'engagea
sur la réforme de la loi électorale. Ca-
mille Jordan proposa un amendement
qui n'est autre que la loi rendue de-
puis 1830. Chaque arrondissement
devait élire un député ; on échappait
ainsi aux influences trop actives de
l'esprit de parti et de l'intrigue, et l'on
accroissait les influences locales plus
calmes et moins menaçantes. La prio-
rité de discussion fut obtenue pour l'a-
mendement, son adoption eût été la
chute du ministère, ou du moins la dé-
faite du système politique qu'il adop-
tait. D'incroyables efforts et même ,
dit-on, des suffrages achetés procurè-
rent une majorité de cinq voix con-
tre l'amendement. Aussitôt après la
session , le ministère de M. de Ri-
chelieu consomma son alliance avec
le parti contre-révolutionnaire, se sé-
parant de tous ceux de ses anciens
amis qui s'étaient opposés à la nou-
velle loi d'élection et à la marche sui-
vie par le gouvernement. C'était con-
tre Camille Jordan que l'irritation
était la plus vive. 11 connaissait peu
l'art des ménagements ; sa bonne
conscience ne lui laissait pas de scru-
pule; il allait toujours au dernier terme
de son opinion. Pendant les troubles
du mois de juin 1820, les députés
étaient insultés par les gardes-du-
corps et les jeunes gens royalistes, tan-
dis qu'en m«'me temjis l'émeute popu-
laire menaçait le gouvernement. De
vives discussions reproduisaient à la
chambre ces scènes de guerre civile.
(Emilie Jordan y fut sévère pour la
police; le ministère lu! reprochait d'a-
voir moins songé à l'ordre public qu'au
respect du à la r.eprésen!aiion natio-
nale. 11 fut rave du conseil d'état où
il avait été appelé en 1817; on vou-
JOR
lot même donner à ce qu'on avait la
prétention d'appeler sa disgrâce , quel-
que chose de plus marqué que pour
M. Roycr-Collard et les autres con-
seillers d'état de l'opposition. Il reçut
cette atteinte avec un grand calme ,
regrettant seulement que M. de Ser-
res, son ami, son compagnon d'opi-
nions, se fut chargé de cette mesure. A
la session suivante, en 1821, Camille
Jordan était devenu si faible et si souf-
frant qu'il ne pouvait suivre les séances.
Il n'y parut guère qu'une fois pour
effrayer Louis XVIII, ou plutôt pour
fournir au parti, alors dominant, Toc-
casion d'exiger des mesures de police
et de persécution. D'officieux valets
avaient fait éclater un pétard d'arti-
fice près de l'appartement du roi ; le
secret de cet ignoble complot ne fut
pas connu tout de suite, et il fut ques-
tion à la chambre des députés de pré-
senter une adresse. Camille Jordan se
fit transporter au comité secret où elle
se discutait : ce fut son dernier dis-
cours, c'est la dernière fois que sa
voix a été entendue en public; il fut
aussi éloquent, aussi convaincu, aussi
énergique que jamais. Dès lors il dé-
clina rapidement ; ses souffrances
étalent cruelles; il les endurait patiem-
ment et se résignait avec calme à sa fin
qu'il voyait approcher. La conversation
de ses amis, les soins de sa famille,
étaient le seul allégement de ses maux.
Il mourut, le 19 mai 1821, d'un
squi'rre intestinal. — Ses funérailles
furent touchantes : son convoi était
sans pompe, conforme à sa médiocre
fortune; mais l'élite de la France, sans
distinction de partis ni d'opinions, for-
mait son noble cortège ; un sentiment
commun et profond se lisait sur toutes
les physionomies ; c'était un hommage
universel à une vertu, à un talent, à
un caractère honoré de tous. Les jeu-
nes gens des écoles, la foule popu-
laire se joignirent au convoi. Sur le
JOR
JOR
ii3
boid de la {ùut où l'on allait déposer
If fftfueii , M. Ko>ef-(^llard , le
ro^^lallt ami de (Emilie Jordan, e^-
sa>a de pronoiirn (}urlt|Qf4 parole^;
le« hrmr* rloufTaifnl la voi», il ne
put proirrrr qu'un dcchiraiit adiru.
.M. dp Saint- \ulairr, au nom de la
«liamhredf* depiilM ; M. Kainhaud,
maire de l.^nn, au nnm dr la %ille,
lendiirnt liommas^f a une rie »i re>'
pfdablr et si pure. Plus tard, nn mo-
nument lui fut é\e\é par souscription.
Nul n'a laissa des re;;rels plu* pro-
fonde dane le Miuvenir de ceai qui
l'ont rnnnu ; nul ne fut plii> aimé de
ses amis. Son caraclere elait plein de
rliaiine, dr dnureur , d'une naïveté
p!r>(|ue enfantine , mèlee à la force et
à l'életation , la pens^ du mal lui riait
étrangère, et il ne savait pas la suppo-
ser dans les autres. Son esprit était
délicat et fin , ses impression» promp-
tes et faciles , tout ce qui était Leaii et
noble produisait en lui une Msible
émotion. Sa physionomie était d'une
douceur et d'une grâce particulières.
Il vécut sans ennemis, .sans en\ieux,
environné d'estime et d'affection. Ca-
mille .Inrdan n'a laissé aucun ouvrage
considérable : ses discours et »es opi-
nions ont été réunis et publiés en un
\olume. Voici une liste a^sez cora-
plèle des divers écrits de circonstance
qu'il a fait imprimer : I. Ltttre à
M. lAtmourrtte Sf disant r\*fi^ue
df Lyon. II. Histoire dr la t um'er-
sion d'une damr parisienne, sous le
pseudonyme de Simon. III. La toi
et la religion vengées. (^ trois
brochures se rapportent à la contro-
verse sur la constitution civile du
clergé. L'auteur y réclame énergique-
menl contre l'intolérance a\ec laquelle
on traitait alors les catholiques qui ne
Toulaient pas reconnaître les lois qu'ils
crovaient contraires à la religion. IV.
Ai'is (i mes commettants. V. C. Jor-
dan, députe du Wiône, à ses com-
mettants sur lit re^'olution du 18
Jructidor. NI Le vrai sens du vote
national sur le nmsulat a vie. N 1 1 .
Im sessittn //<? 1H17 . aui habitants
de lAin et du UhAiie Il a laissé
en mann^ci it : lUscours sur C in-
fluente reriprotfue de l'rliHjuence
sur la rex'olution et de la re^'olulion
sur fehnfuenre — Kloge dr f avo-
cat - grneral Serx'un. — Llogr de
.M. t'a y de Sathonay, maire de
Lyon. — Hssai sur Klopstoïk. Oii
trouve des fragments de kiopsiock et
de Schiller, traduits en pro^e français
par C Jordan dans WiheiUe de IH-JU
et 18-il. rédiges par M'"' Dufrenov,
qai a publie dans Ir mrree joarnal ,
tom. III , pag. 131 , une notice «or
C. Jordan. A.
JOKhKXS ((.EiiitiT on <;<{•
nAiu>-I)\Mi)),ne le lU fesrier 1731,
i l>e\eaier (non pas en 171 i, comme
ledit Sax), étudia la jurisprudence et
devint un des magistral» municipaux de
sa >ille natale en 1771. Il fui député,
en 1786, aux états-généraux: ses en-
nemis politiques parvinrent à le priver
de ses emplois où il ne fut rétabli qu'en
1795. Celle année et les deux suivan-
tes il siégea une seconde fois dans cette
assemblée. Les partis déchiraient alors
les IVosmreslJnies ; à la grande sur-
prise du public, Jordens fui emprisonné
et conduit à Ilondshoired^L. Mais il
ne tarda pas à sortir de captivité, et
continua de prendre pari aux afTaires
publiques; entre autres fondions il
remplit celles de trésorier de rOver)s-
$el, jusqu'à ce qu'^fin il fût, en 1S02,
miinmé conseiller de la cour batave
suprême. Comme homme de lettres,
Jordens a mis au jour deux disserta-
tions académiques qu'il avait soutenues,
dans sa jeunesse, sur les bancs de l'uni-
versité: 1. Dr differentiis artionum
bonœjidet. strict i/'u ris eturhitraria-
rum , Devenler , 17.i3, in-i°. IL
Ad Icgem unicam codicis de Nili
^4
JOS
iiggcrihiis non runipemh's , Leyl*',
1750 , in-i", Parvonii à l'à^e imV,
il se mit à ciillivcr les muses latines
cl ]M. lloeiiffl Ta loué sous ce rap-
port dans son Paniassus hitino-Bd-
giciLS. paj];. ii29. Il publia en 1795,
à Devcnler : III. Josephus , car-
mine heroïco célébra tus. On sait que
ce sujet, traité ici en huit livres, n'a-
vait pas inspiré d'une manière fort
heureuse Fracastor et Elle Corsinl.
On lui doit encore: IV. Gellia, lusus
poellcus, accedunt cjusdeni eclogœ et
epigrammata, Leyde, 1 795. Sax rap-
porte quelques vers qu'il laissa dans sa
prison, au moment de sa délivrance et
qui ne valent pas ceux qu'avait com-
posés Grotlus à Lœwestein. Jordens
mourut en 1803. M. Scheltema lui a
donné place dans sa Hollande politi-
que [Staaikundig Nederland , II,
553), et M. Hofman-Peerlkarap,dans
sa Galerie de poètes latins. Celui-ci y
marque la naissance de Jordens com-
me l'avait fait erronément l'auteur de
ÏOnomasticonlilterarium, espèce de
méprise qu'il est si facile de commettre,
surtout pour les contemporains, que
Ja critique aurait tort de se montrer
trop sévère à cet é^^ard. 1\ — F — G.
JOUGE JIAX. Voy. Jui^N y
Santaciua , XXÎI, 80.
JOSE (Antonio), auteur drama-
tique portugais, naquit au commence-
imentdu X VHP siècle. Accusé de ju-
daïsme, 11 fut jeté dans les cachots de
^'inquisition où il subit d'horribles tor-
iures, et n'en sortit qu'en 1745, pour
<lrc livré aux llammes. Il est évident
«que cet Infortuné entretenait au fond
rfie l'âme quelque pressentiment de la
«i£|)lorable fin qui l'attendait ; car 11
avait eu soin de terminer chacun des
volumes de la première édition de ses
<£uvres, par une espèce d'acte de foi,
portant qu'il ne crovail à aucune des
divinités qu'il avait mises en scène. Il
avait dans le célèbre comte d'Eryceyra
JOS
un protecteur chaud et zélé, qui, s'il
eût existé à l'époque du terrible sacri-
fice qui termina sa vie, n'eût sans doute
pas manqué de s'employer pour le
sauver. Ce qui caractérise le génie co-
mique de José, c'est une bizarrerie in-
concevable et une invincible indépen-
dance. Il se faisait un jeu de violer
toutes les rèf];les, heureuses inventions
du goût et de la raison. On rapporte
qu'après avoir vu la représentation
d'une des pièces de cet auteur, le comte
d'Erycevra le pressa de lire Molière et
de chercher à l'imiter. Il est probable
que José ne fit ni l'un ni l'autre; car
il continua de suivre les impulsions de
son imagination déréglée. Son génie
était d'une fécondité sans exemple. Il
aimait à s'abandonner aux plus triviales
plaisanteries, et ne pouvait réussir à
peindre les vices et les caractères. Ce-
pendant il est certains abus de son
temps qu'il osa fronder, et certains ri-
dicules qu'il peignit avec une malicieuse
gaîté. La contexture de ses pièces est
généralement négligée ; on en peut
dire autant de la plupart de ses cou-
plets. Tout imparfait, tout extravagant
qu'il est, il ne laisse pas de plaire par
les traits piquants de son dialogue et
la vivacité originale de son esprit. Les
Mémoires de l'académie des sciences
renlcrment sur le théâtre portugais une
notice où après avoir indiqué les défauts
de cet auteur, on dit avec raison qu'il
savait entraîner l'Imagination par .^a
folle gaîté. JjC théâtre de José est très-
considérable. La plupart des pièces qui
le composent sont regardées comme
des espèces d'opéras comiques à grand
spectacle. I>cs meilleures de ces pièces
sont Incontestablement J). Quixote,
Esope, les Enchanleincnts de Me-
dee. Antonio José exerça sur les es-
prits plus d'influence qu'on n'aurait pu
s'y attendre. Il a souvent été imité;
mais H est à observer que ses imi-
tateurs ne lui ont guère emprunté
JOS
qot tméifzuti. On distin|rM parmi
eux un cfrtaiii S^lxrio da Silvera t
Sviraqui.ic piquant dVlrc pliL* réj^nlier
dans \n pirrrs qiir «on iiioiifir, publia
du temps de Jo^e une empire de Irau'"
COOlédie intitule*: C. inunir Jait tirs
choses îmfHJSsililes, ou Inrs tJr (ms-
tru, rrinr de Portugal, ouvrage qu'il
terminait par le couronnement il'I-
Dés »ur la scène, et qui ne roénle
qu'une simple mention T. 7..
JosÉmiM-: Marip JdSKPH
Hosk-Taschfh dk xj^ I'ackhik , im-
pératrice des Français, sous le nom de ,
naquit aux Trois tiets, à la Martini-
que l),le 2i juin 170!), lejour même
ou fut si;;ne a\ec l'Angleterre le traité
qui tendit cette colonie à la France.
S)n père, Tasclier de la Paierie, elaii
capitaine déport dansb manne i ovale.
Klle reçut dans la colonie la mauvaise
éducation des créoles, mais l'Iicureu-se
naiure de son cœur et de son esprit
eu a\ait fait, à moins de treiie ans,
la créature la plus séduisante. Kile
a\ail de)a donné toute sa tendiesseà
un jeune créole lorsqu'elle fut amenée
en France avant à peine quinte ans.
vSes parents la placèrent à 1 abba\e de
l'anlliemont en attendant son mariage
a\ef le vicomte de Beauliarnais, né
comme elle a la Martinique. Otie
union ne fut pas heureuse, les deux
époux ne s'etant pris que pour com-
plaire à leurs familles et alors que tous
les deux avaient déjà le cœur occupé
, I \** ain«teun du thriirr por(u(;ai% p«o-
V. Ht cuiitultar le volume que M. Kerd. Dmii a
donii, daat la iraductioa de> CÂtfi J-<xu.r^ d* i
th'\iiret etrmngtri. |U j trooTeront l'ciaaeti do
^>>Uinc (irainatiqu* ii«qaclqu««-uns de» pritici-
pjin auteurs portogai».
1 l-i fauiilk Tascher de la Pa^ierir Hait
or,-.n.iirc du Blaisoii. l^ maoqua de fortune
o») . -ri I,- |v>re de Joséphine à »olliciier Ij ;.'ace
de pcrant Jatis unehabiuiion de la Mariitnque.
I: iji->j a Hloi» quatre »«art et un frcre. Troi»
de c< •> »<r.irs »e fiienl religieusu, une jo» Cr-
»ulin.i «-t une au courent de la Bourlilière. à
• iuc-i,|ui» liruei du lA>cbc». La qoatrirme Mxur
nt i,i>rte à Blois depuis que madame Bouaparle
cuit deveaue impératrice. L->» — ■,
LIVIU.
108
tiS
d*on premier amour. Reauharnais ron-
BOt bienliU rindination de Joséphine
pour le jeune croie qui était venu en
France; et celle-ci n i;;nora pas non
plus la liaison de son mai i a\ ec une au-
tre femme. Delà des scènes de jalousie
fréquentes. 1^ naissance de deux en-
fants. Kui^ene (/ o». Hk\i H\nîiAlS ,
LVn . 373) et llorlense ( T'o/.
LWII , 31H), ne reconcilia point
les deux époux. Tandis que Ueau-
liamais aOichait une j^ramie passion
pour la femme qui troublait son mé-
na'^e, la jeune vicomles*e se précipi-
tait dans mainte aventure calante. Ce
fut surtout après sa présentation à la
reine Maiie-Anloinelte. qu'enivrée des
hommages d'une foule d'hommes du
plus haut ran^, elle prit complètement
sa ri-vanrhe des inGdelites d'un époux
qu'on n'appelait à la cour que A* ùeuu
danseur. Les chcxses en vinrent à un
tel point que lleauharnais , persuadé
qu'Hurtense n'était pas de lui, songea
à une vépar.ition. 11 fit un voyage a la
Martinique pour établir une enquête
sur la conduite de sa femme avant son
arrixee en France, et à sou retour il lui
intenta un procès. I/afiaire, évoquée
au parlement de Paris, prit, ^rare aux
pui.Nsaiits protecteurs de Jo>cphiiie ,
une tournure tellement favoiable que
le mari fut condamné à reprendre sa
femme, si elle voulait revenir a\ec lui,
ou a lui faire une pension de dix mille
livres; enbn le parlement permit à cei-
le-ci de ne point habiter le même hôtel
que son époux. Durant son procès elle
s était retirée à l'abbaye de l'anlhe-
mofit. Kede\enue hbre, elle céda au
désir d'aller à la .Nlartiuique avec sa
fille Hortense, revoir sa mère à^ëe et
infirme ^1787). Elle y demeura trois
ans. Alors les troubles éclatèrent si su-
bitement dans la colonie, qu'elle fut
oblij^ee de fuir sans avoir eu le temps
de faire ses adieux à i-a famille. Tou-
jours brouillée avec son mari, d'ail-
ii6
JOS
leurs sans ordre et sans prévoyance, elle
était aux expédlenls : le prix de son pas-
sage avait absorbé la plus o;raiide par-
tie de ses ressources, et il ne lui restait
pas de quoi acheter des souliers à sa fille,
lorsqu'un contre-maître du bâtiment lui
en fit accepter une paire. Devenue im-
pératrice, elle aimait à se rappeler cette
circonstance , et disait à ses femmes ,
en leur montrant ses diamants, qu'elle
avait été plus contente de recevoir
une vieille paire de souliers, que tous
ces joyaux étalés devant elle (2).
A son arrivée en France , elle des-
cendit à Paris, rue du Sépulcre (au-
jourd'hui du Drao;on ) , à l'hôtel des
Asturies, chez un fameux baio,neur qui
logeait des personnes de première dis-
tinction. M"^®de Montmorin, épouse
du gouverneur de Fontainebleau, se-
condée par !e marquis de Beauharnais,
père du vicomte, qui aimait beaucoup
sa belle-fille, entreprit de réconcilier
les deux époux. Une explication très-
vive eut Heu : Eugène et Hortense se
jetèrent entre les bras de leur père; le ser-
ment d'oubli pour le passé et d'union
pour l'avenir fut fait de part et d'autre.
Hortense fut présentée à son père sous le
costume d'un jeune américain: « C'est
«€ moi, s'écria le vicomte ! Je me re-
« connaissons ces traits; telle était
a ma ressemblance à l'âge de sept
«f ans. » Il embrassa sa fille plusieurs
fols, parut enchanté de la petite sur-
prise qu'on lui avait ménagée et dit en
riant à son père et à M"**^ de Mont-
morin : Verum putes haud œgre,
quod valde exspetus (On croit sans
peine ce qu'on souhaite ardemment).
Cependant la France commençait à
être livrée aux orages révolutionnaires.
Beauharnais, devenu l'un des princi-
paux appuis du système constitution-
nel, jouissait d'une grande influence ;
sa maison devint le rendez-vous des
(ï) Mémoires iur Joiépfun* , par mademoiselU
JOS
hommes politiques. Joséphine , for-
cée d'entendre d'interminables dis-
cussions , se mit bientôt à la hauteur
de pareilles matières, et ne tarda pas à
partager le crédit de son époux. Fi-
dèle au caractère qu'elle a déployé
constamment depuis , elle se montra
dès-lors toujours favorable aux victimes
des événements. Parmi les malheureux
à qui elle sauva la vie, on peut citer
M''^ de Béthlsy. Le moment vint où
le vicomte de Beauharnais lui-même
fut arrêté. Sa femme lui rendit, dans sa
prison, les soins les plus affectueux.
Elle alla Implorer les hommes les plus
puissants de l'époque ; mais ils ou-
blièrent l'accueil que la plupart d'entre
eux avaient reçu d'elle dans d'autres
temps, et, pour se délivrer de ses sol-
licitations , ils signèrent l'ordre de son
arrestation. Conduite à la maison des
Carmes de la rue de Vaugirard, oii se
trouvaient déjà quelques femmes de
qualité, elle se rendit agréable à ses
compagnes de captivité par la sérénité
d'àme et l'aménité de caractère qu'elle
conserva dans l'infortune. Elle faisait
assez habituellement aux nombreux dé-
tenus la lecture des journaux qui n'an-
nonçaient alors que des accusations et
des supplices. Chacun se groupait au-
tour d'elle; on respirait à peine; mais
le cri de douleur échappait quelquefois.
Qu'on se figure le trouble et le déses-
poir de Joséphine lorsque, le 7 thermi-
dor (25 juill. 1794), elle vit le nom de
son époux inscrit à la colonne des guil-
lotinés. Elle tomba sans connaissance.
Dans cette position, où elle n'avait
d"autre perspective qu'un sort sembla-
ble, elle ne tenait plus à la vie qu'en
pensant à ses deux enfants, et se rap-
pelait aussi avec une lueur d'espoir la
prédiction qui , avant son premier
mariage , lui avait été faite à ia
Martinique , par une vieille mulâ-
tresse nommée Euphémle : « Vous
« serez unie i un homme blond
JOS
" Voire étoile rous promet dtux al-
«« lianres. \.r premifr de tos rpout
«« tsl né i la ^la^lllllqur, mau il li.i-
•« bilera IKurope ft réunira l'epée;
M un pritcè?» fâcheux voua ilé>iiiiira . il
« périra d'une manière trafique
•< Voire *erond mari sera !r«*N brun,
• il <>t .; iir ri;ri>}'.-. une, peu fortuné;
•< (rpcmluiit il r < iiij.lira le inonde de
«« sa gloire et de sa puiv'anie- Vou*
•< de>iendrexalor» une dame émmenle,
•« %ou» ierex plu^que rrine ; pui» aprb
n avoir étonné le monde, %Hmt mour-
*' m malhrurruse. »» \jt lendemain
du jour où elle apprit la mort de soa
mari, on lui apporta son acte d'&ifu-
-aiiim I.r ;:i*'ilier, entrant dan<i la
(li.iinlrr nu (lie rourhait avec la i\\X'
clics>e d'\i;;uillon et deux autre» da-
mes, lui dit qu'il venait prendre son lit
de san>;le pour le donner à un autre
prisonnier : «< car, ajouta cet liomme
•• avec un atroce sourire, vous n'en au-
•• rezpas besoin, puisqu'on va \ousrlier-
« cher pour vous mener à b Concieij^e-
« rie et de là à la;;uillotine.» Aces mots
ses compa;;nes d'ttifoitnne poussèrent
les hauts cris ; mai> M*^** de Beatihar-
nais, pour faire cesser ces lamentations,
leur dit que cette douleur n'avait pas le
sens commun, que non seulement elle ne
mourrait pas, mais qu'elle serait rrine
df FruHif. — « Que ne nommez- vous
m votre maison? lui demanda avec co-
« 1ère M"** la duches»e d'\!;;uillon.
« — Kh ! bien, ma chère, je vous nom-
« merai dame d'honneur , je vous le
» promets. » Kt les oleur-^ de ses com-
pa^ines coulèrent de plus belle :car elles
la crovaicnl folle. On était au nruf
thermidor. Le hasard fil qu'au même
moment les prisonnières s'approchè-
rent de la fenêtre, et qu'une femme du
peuple leur annonça par ses ^e^stes, en
prenant sa rohe et en jetant une pier-
re, que le Icroce dictateur venait de
monter sur l'echafaud. l*eu d'inslanls
après, le geôLer vint conârmer cette
JOS
a»7
nouvelle, et rapporta 4 M™* de Beau-
liai nais son lit de sangle: «< Vous le
« vovex. dit elle, je ne serai pas ^uil-
•• lotinee et |e serai rrine de Fraife. »
Ce qui la confirmait dans ses idées,
c'est que, du sein même de la prison,
elleavail trouvé movrn d'in'rrro^er par
écrit une leune pe* 'ir depuis
si criehre comme «1 ■ . ^1 ' l^e-
normand, alors deienue a la Petite-
Force, pour a^oir prédit malheur à l\o>
bespicire el ï Saint-Jusl. I. 'oracle
atail répondu i M'"* de Reauhamais
par une prédiction tout i-fait analo-
gue ï colle qui lui avait été faite en
Amérique I )<•!!% rée de prison par le
crédit deTallien, le lendemain de la
chute de I\obespierre , Joséphine s€
h.\ta d'aller consulter lasvbille du fau-
bour»; Sainl-(iermain, qui venait au.«i
d'être rendue à la liberté; le plaisir
de s'entretenir fréquemment avec elle
devint un besoin pour M™*" de Reau-
hamais, dont riina;;ination caressait
comme des réalités les paroles arobi-
^ui^ de c^s prétendues prophétesses.
Dans sa prison elle s'était liée d'un*
vive amitié avec M"* de Fontenaj,
Îui fut bientAt après M™'' Tallien.
JL s>mpathie , la conformité de f^oûts,
rendit ce sentiment plus durable
qu'on n'aurait pu le présumer de deux
femmes aussi légères l'une que l'au-
tre. Lorsque le 11 thermidor M"*
de Fontenay fut amenée à la barre
de la Convention, elle était accompa-
{jnée de M"" de lieauharnais. Leurs
malheurs parurent attendrir l'assem-
blée ; on leur prodigua des consolati'vns,
liçs promesses, et, comme c'est rusa;;e
en révolution, on n'v pensa plus le
lendemain. Heureusement, M"** Tal-
lien n'oublia pas M"'" de Beauhar-
nais. Toutefois, alors, commença pour
Joséphine une époque de misère et de
détresse qu'elle aimait à se rappeler
au temps de sa prospérité. Elle vivait
pour ainsi dire au jour le jour. Au
i5.
228
JOS
JOS
moment de la dlselle qui ne tarda
pas a se faire sentir, elle était heu-
reuse de trouver chaque jour à dî-
ner chez M™* Dumouhn , femme
fort riche et fort obh^eante, qui réu-
nissait chez elle un petit nombre d'a-
mis, ruinés par la révolution. Chacun
apportait son pain, qui était alors une
denrée bien rare; >r"^ Dumouhn, sa-
chant que Joséphine était plus pauvre
encore que les autres, la dispensa de
cet usage, ce qui fit dire à celle-ci
qu'elle recevait positivement son pain
quotidien. M"^® de Montmorin, qui
était aussi de cette société, donna de
nouvelles preuves d'intérêt à M"'^ de
Beauharnais qu'elle avait protégée lors
de son procès avec son mari, et lui pro-
cura des robes et jusqu'à des jupons
dont elle manquait. L'unique distrac-
tion de la pauvre vicomtesse était de
se rendre à Challlot, chez M™^ de
Fontenay, qui réunissait dans son sa-
lon les députés les plus Influents de
l'époque, et même plusieurs de ceux
qu'on appelait alors des ci-deoant.
Quelques semaines après le 9 thermi-
dor, invitée à un grand dîner chezTal-
lien, M'"'^ de Beauharnais arriva un
peu tard : elle s'excusa en disant que,
privée de voiture , elle avait eu re-
tours à celle d'une de sesamles, ets'étalt
vue forcée de l'accompagner au fau-
bourg Salnt-(iermain. On avait formé
le projet de passer la soirée au specta-
cle ; Joséphine, contrainte de calculer
avec elle-même, allégua pour se dispen-
ser d'y aller que la santé d'un de ses
enfants exi;;eait sa pi ésencc à sept heures
du soir. Tallien lui offrit de la ramener
dans sa voiture. \)ks qu'elle y fut mon-
tée avec lui ; « Vous vous êtes plainte,
« lui dit-il, de la rigueur du sort qui
« vous contraignait d'aller à pied.
« Celte voiture vous appartient, m,)-
«< dame ; elle vous tA rendue par les
c( comités; déplus j'ai obtenu en votre
« faveur une ordonnance pour que
« Tadministratlon des doraalne*s fasse
« effectuer tout de suite la levée des
« scellés sur votre mobilier. Quant au
« séquestre de vos biens vous pouvez
« demeurer paisible. Provlsolrementre-
« cevez ce mandat sur le trésor (3). »
Ce fut chez ïaUien que Joséphine
rencontra Barras, qui, sans cesser d'être
lié de la manière la plus intime avec
-[yjme ^j^j^^jen ^ attacha à son char la
vicomtesse de Beauharnais; et toutes
deux, satisfaites d'avoir à leur usage
le crédit d'un tel protecteur , sup-
portèrent sans se brouiller une ri-
vaHlé qui était parfaitement dans les
idées et dans les mœurs de celte
époque. Barras fournit généreusement
aux dépenses de Joséphine , qui ve-
nait de rentier dans quelques débris
des propriétés confisquées sur son mari.
Dès-lors elle commença à jouer un
rôle politique, en réunissant chez clic
les députés thermidoriens. Bientôt on
rechercha de toutes parts son appui,
et ses' services n'étalent pas tou-
jours gratuits. Au reste, à celle épo-
que de dissolution , tout était vénal.
Le général Hoche, qu'elle appelait
dans l'intimité le modeste Lauiro ,
était un de ses plus assidus courtisans ( t
passait pouî- intéresser viveiiient son
cœur (4). Cependant rinsurroction du
13 vendémiaire éclata. Barras, charrié
(3) Madame de Beatiharn.iis , taxée à .jo.unn
francs <laiis un emprunt forer qu'on (U en 1796,
ne put trouver celle sonuiic, lualjié la dépré-
ciation du signe niontt.iire.
(4j On lit danii les noie, des Mémniret de Jo-
liphine, par niadeujoiseile Leiioruiand : « Quel-
ques heures avant qu'il rondil le «lernier sou-
pir, il écrivit à madame llonaparle; // Uu révéla
un secret fameux, cl l'invila à ne point négliger
d'en faire usage (|uand les circonstances pour
raicnl le lui pirmcitre. La mémoire de llocUe
était précieuse à .losépliine ; elle n'en parlait
jamais qu'avec le sentiment d'une profonde
tristesse; elle était convaincue que cet ancien
aini avait bu à la c;ouj)e de ISéron; mais jamais
elle ne déclina dev;int jtersnnnc le nom ni les
qualités de l'auteur du crime. » il est assez re-
marquable (jiie, selon M. de Las Cases, Ronn-
jiarte disait à Sainte-Hélène: « Si Moche avait
« vécu , il aurait fallu que le cbar de l'uu de
w nous deux brisât celui de l'autre.»
JOS
du roaiinanJnnriit ilrs troupes de la
Coineulioii contre 1rs vcctums .soulr-
vm, s'adjoignit Bonaparte Celui-ci,
après sa \irloiiC5urlrs Parisiens, fut in-
troduit par son protecteur cliez M*"'*
Tallien et de Cluîtrau lUnaud qui ,
a>ec M""" de Beauliarnais, ré<;naient
dans l'espèce de cour déjà formée autour
de Uarras. Ces djmes donnaient alors le
ton à une société qui se jetait tète bais-
sée dans le touiliillon des plaivirs.
I/intimité de M'"" de Ueauharnais et
de M""" Tallien était pubiicjue: toutes
deux affectaient de ^e montrer au bal,
au spectacle et môme aux promena-
des , dans la toilette la plu» eitraor-
dinaire et souvent la plus indécetile.
Ce furent elle- qui essayèrent de met-
tre à la mode ce costume d'une nudiic
apparente qui consistait à montrer
sous une robe de j;aze toutes les for-
mes dessinées par des pantalons de soie
couleur de cliair. Ij lettre suixante
adressée par M™" de Beauharnais k
M""* Tallien fera connaître toute la
frivolité des pensées qui les occupaient ;
« Il est quc^•aon , ma chore amie,
« écrivait Joséphine, d'une ma^nifioue
« soirée à Tliéiusson ; je ne \ous de-
« mande pas si vous y paraîtrez. Ijt
«< fête serait bien languissante sans
« TOUS. Je vons écris pour vous prier
« de vous V montrer avec le surtout de
« fleur de pêcher que vous aimez tant
« et que je ne liai:» pas non plus: je
«« me propose de porter le pareil.
« Comme il me paraît important que
« nos parures soient al)solumcnt ks
« mêmes, je vohs préviens que j'aurai
«* sur les cheveux un mouchoir rouj;e
«« noué à la créole, avec trois crochets
•« aux tempes. Ce qui est bien hardi
•< pour moi est tout naturel pour
« vous, plus jeune, peut-être plus jolie,
« mais incomparablement plus fraî-
« che. Vous voyez que je rends jus-
«< lice à tout le monde. Mais c'est an
l< coup de parti ; il s'agit de désespé-
JOS 139
« rer le frais liirhuns et les liretel-
n 1rs (trifliiisrs ^.'>). » Par suite de
se» elepenses de toilette et de son dé-
faut d'ordre, M"" de Beauharnais fa-
ti;;uait Iiarras de ses coutinuelles de-
mandes d'arjjent. Klle puisait en outre,
sans façon , dans la bourse de ciuelques
amis intimes, entre autres du ci devant
marquis de Caulaincourt, père chi duc
de ^ icence (f>). K.nfin (et I histoire im-
partiale est bien obligée de le reconnaî-
tre) la vie de celle qui devait plus tard
occuper, non sans dignité, le plus beau
trône du monde, n'était Téritablement
alors que celle d'une courtisane de
haute volée. I^ moment vint où elle
de>ait sacrifier, pour contracter un se-
cond h>men, sa liberté dont ellesavait
si bien user. Quelques jours après le 1 '\
ventlémiaire, elle rencontra chez M'"*"
de (^Jiàteau-Benaud le général Bo-
naparte, qu'elle avait jusqu'alors à peine
remarque dans la foule de> courtisans
de Barras; et même telle était le
peu de considération dont il jouissait,
que ceux qui l'avaient si utilement em-
ployé ne 1 appelaient que A; prtitr ru-
lottr tir fxau. M'"" de Beauharnais
condescendant à lui adresser la parole
lui dit: « H me semble, cito>en ^éné-
'« rai, que ce n est qu ï re<^ret que
« vous avez jeté la consternation dans
« la capitale. — C'est très-possible ,
«« répondll-il ; mais que voulez-vous,
« madame :' les militaires sont des au-
'« tomates que le «ouvernemeut fait
« mouvoir à son grc; ils ne sasent
«c qu'obéir. Les sections sont trcs-
«« heureuses, je les ai ménagées; la
«« plupart de nos canons n'étaient char-
« c^és qu'à poudre... >» Quelle fut la
surprise de Joséphine lorsque, trois
fS) Sobriquet* de »<ci*tc Jonnu i des feiuines
qui riTalisaicDt atrc mr-dauie* de Ueaubaruais
et Talliea.
(6) Il cootioaa d'être fort assidu che* ma-
dame Bonaparte iou» le consulat . et lui donnait
d. ^ con^eilt qu'elle ccoutait sans !•$ siiirre, dit
«nidjined'Abranlc» dûn» tt^ Mtmoirts. W finit
par drplâire I oa o« lappeUil que k» ndoltur.
«3o
JOS
jours après cet entretien, B^uras loi dît:
• Je veux vous faire épouser le petit
« Bonaparte, que je fais général en
« chef. Je lui ménage la conquête de
« l'Italie. En vous épousant il se crée
« un nom dans le monde ; et, de son
« côté, vous trouvez en lui un sou-
« tien. » M™** de Beauharnais re-
poussa long-temps celte proposition.
Plus elle étudiait le caractère de Bo-
naparte, plus elle y remarquait des
biiarreries et des prétentions dont elle
pe pouvait se rendre compte. Enfin,
il lui inspirait une telle aversion qu'elle
cessa pendant quelque temps de fré-
quenter la maison de M™^ de Giàteau-
Ilenaud où il venait passer toutes ses
soirées. Mais elle le rencontrait encore
chez Tallien; et plus elle évitait la pré-
sence de Bonapaite, plus il semblait se
multiplier sur ses pas. Ce n'est pas qu il
pût ignorer la conduite plus que léc^ère
de M*"® de Beauharnais : ce motif,
qui eût arrêté un prétendant tant soit
peu scrupuleux, fut au contraire ce qui
le décida. Calculant sa position avec
sagacité , il se flattait de s'assurer à
tout jamais la protection de Barras
par sa condescendance à lui sauver les
ennuis d'une passion usée. Toutefois
il est sûr que captivé par les manières
gracieuses et distinguées de Joséphine,
Bonaparte l'aima plus qu'on n'aime
une femme dont on n'a fait choix que
par des vues d'ambition. Barras, qui te-
nait beaucoup à ce que ce mariage se
fit, engagea M*"*^ de Château-Renaud
à en être la médiatrice ; mais M™* de
Beauharnais aimait véritablement le vé-
nérai Hoche. On imagina de faire inter-
cepter pendant un mois sa correspon-
dance avec ce dernier ; et Jcséphine, pi-
3uée de se voir ainsi négligée, consentit
e guerre lasse à recevoir la main du
protégé de Barras. Son premier maria-
ge n'ayant pas été heureux , elle crai-
gnait de s'engager de nouveau. Tout
l'eOrajait chez le général ainsi qu'elie-
JOS
mérae Ta exprimé dans une lettre
publiée par M^'^ Ducrest : « Je suis
« effravée de l'empire qu'il semble
« vouloir exercer sur tout ce qui l'en-
« toure. Son regard scrutateur a quel-
« que chose de singulier et qui ne
« s'explique pas , mais qui impose
« même à nos directeurs ; jugez s'il
« doit intimider une femme î Enfin ce
« qui devrait me plaire, la force d'une
« passion dont il parle avec une éner-
« gie qui ne me permet pas de douter
« de sa sincérité, est précisément ce
« qui arrête le consentement que je suis
« souvent prête à donner. Ayant passé
« la première jeunesse, puis-je espérer
« de consener long-temps cette ten-
« dresse violente, qui chez le général
«€ ressemble à un accès de délire ? »
Rappelant ensuiteles promesses de Bar-
ras au sujet du commandement en chef
de l'armée d'Italie, elle ajoutait : «< Hier,
K Bonaparte en me parlant de cette
a faveur qui lait déjà murmurer ses
« frères d'armes, quoiqu'elle ne soit
« pas encore accordée : Croient-ils
« donc, me disait-il, que f aie besoin
« de protection pour parvenir f lis
« seront tous trop heureux un jour
« que je veuille bien law accorder la
« mienne. Mon épèe est à mon coté
« et Oi^ec elle f irai loin. » Le Mé-
morial de Sainte- Hélène rapporte
d'une manière bien différente les pre-
mières relations entre Bonaparte et
M™*" de Beauharnais, et ce récit tout ro-
manesque se trouve suffisamment réfuté
dans cette Biographie kV aiTilcle d'Eu-
gène de Beauharnais {Voy. ce nom,
LVH, 37.3). Leur mariage civil fut cé-
lébré au deuxième arrondissement de Pa-
ris, le 19 ventôse an W (9 mars 1796),
i dix heures du soir. Sur l'acte qui en
fut dressé , la mariée parmi ses pré-
noms prenait celui àt Joseph et non pas
de Joséphine; puis, ce qui est bien plus
important à remarquer , elle se rajeu-
oksait de quatre ans , tu plaçant sa
JOS
JOS
Sll
■aunnca k l'ann^r 17G7 (7^. Bona-
parte, dans srt rausrim df Sainte ll<^
Ifne, l'accuse d'avoir produit l'e&trait
baplUtrrr d'une scrur cadclte, morte
depuis lon^-Ifrups. « I ^ pautre José-
•> phinc, ajouiait-il, s'etpnsait à de
« l^rands inconvénients, ijt pouvait
« être la repliement un n-s de nullité
« de mari.t^f » I ouleloiv lui-ra^me,
il M reii' re de ce men-
songe de I ; r , car W Il/nu-
nai h itnitrnai , ou ne s'imprimait
pan une ii^nr qui ne fût auton»^
par lai , fa vait naître Jtnépliine le
24 juin I7HH. Il n'y eut point de
nariage religieux entre Bonaparte et
u future : et lor:>que plus tard il fit cé-
lébrer par an prêtre, dan;» \a maison de
la rue de la Victoire, le mana;;e de son
frère l.,ouis avec Horteii»e de heau-
harnais, il profita de l'occasion pour
Caire bénir l'union de sa strur Caroline
avec Murât, qui n'avaient pas été ma-
riés à l'é^^lise. « Quant à lui, observe
« le duc de Bovif;o dans ses Mémoire-*,
■ il s'en abstint, ce qui nous 6t faire
m quelques redeiions... Il ne se trou-
« vait ainsi lie à Joséphine que par
« Tactecivil, lien susceptible d'être a n-
« nulé conformément aux dispositions
« de la loi sur le maria^^e. 1^ disci-
« pline ecclésia>lique n'avait donc rien
« à Toir à son divorce quelles qu'aient
M été ses prétentions m \H\i). »
Ici Kovi»o s'est placé volontairement
(7) Cck^rl , <!« Il* *» brn. bur<- inlilMlr« : Quti-
/«•* é'tlml <•■ - * Bmmma-
fmrt»ttl-il w . ,ij»* i;6J
»• trOVTUt . r . -. qaw-
tion ; OtJIS qur \r II... / , t
surrbargr du mot ir-^t • - \
« dit-il , j'ai r II rr« .1 ;«■. re
« trait que , Je jr^(. hour Ui'ru
« conraiocr' t , j'ji prit le pjrti
« d'aller *rr ur le rrjuire luriu*
■ dr \i paroi>»e «ic .\o.»>.|r Grand, oa !• pre
- mier mariaire a eU célèbre le i3 d^crmbre
■ '779' re|fiftre actuelletnent d^|>osé au jr.fie
« da Iribanal ciril dr Tontuisc Or, l'acte d« c«
« mariage, eotiéremfnt intact, contiate qn* .
■ aaiTint son acte de baptême, dûment Tia4 ,
« àlmrf-J»t«fh-RoM Tascher wt Ma l« a3 jaia
ï cAié de la vérité , tftwmt il Ta si
souvent fait dans ses Mémoires; car il
eit peu probable <]u'admis dan» l'inlirae
confidence de Bonaparte, il ail ignoré
que la bénédiction nuptiale (ut donnée
aux deux époux, trois jouis avant le
sacre, à minuit, dans la cliapelle des
Tuileries, en pré>ence d'un très petit
nombre de témoins, par le cardinal
Kesch, d'après la demande formelle da
pape. Ja^epliine toulot avoir son ex-
trait de mariage qui lui fut délivré.
Dan» la crainte que cette pièce im-
portante ne fût égarée oa soustraite,
car Napoléon ne s'était prêté qu'avec
répu|;naiice à l'acte religieux, elle la
remit a son £ls K.ugene qui l'emporta
en Italie l'Ius tard, quanti, après le dh-
vorce, il fut question du mariac;e de
Napoléon avec Marie- lx)ttise , cette
princesse fit demander à Joséphine
si elle avait ete mariée à Te^li^e )
ajoutant que , dan< ce cas , elle
ne pourrait se décider à one vnion
qu'elle regardait romme sacrilège. Jo-
séplime, toute rè»i;;née au plus dou-
loureux sacrifice, lui fit dire de s'en
rapporter au Moniirur. C'était éluder
b venté, sans la trahir: car elle sa-
vait parfaitement que Napoléon n'a-
vait pas voulu que le journal officiel
publiât une si tardive cérémonie ;8).
I.^s conclusions motivées données par
l'ablte (^rpet, promoteur de l'officia-
liie de Paris, le H janvier IHK), sur
la validité du maria^^e, le déclarent nul,
faute de /<; présence du propre pas-
teur et de celle des témoins voulus
pur le concile de J Vente et les or don-
liijnces. Klles portent en outre qae Bo-
naparte avait allégué n'avoir pas réel-
lement donné son consentement a la
célébration, mais ne s'y être prêté que
pour céder aux instances de l'impéra-
[è) Cri d^Uili »onl tire» de» yftmotrtt <U Jo-
tifktmt, par madriDoitell* Ducre»t , qui , r« le*
rapportant dan» le» lennes qur nom aron» re-
prodmiu, ajoale : «VoiU du moin» ce qa. j'ai e»-
> fliniiBn foi» d« U booeh* d« 9. M. •
2^1
JOS
JOS
trice. Ces particularités, fondées sui-
des pièces officielles et des récits au-
thentiques, prouvent combien l'auteur
du Mémorial de Sainte-Hélène était
mal informé lorsqu'il a prétendu que
dès l'origine Joséphine avait été mariée
au général Bonaparte par un prêtre
insermenté, mais qui avait négligé, par
pur accident, de requérir l'autorisation
obligée du curé de la paroisse. Quoi qu'il
en soit, les premiers temps de cette
union ne furent pas aussi lieurcux qu'on
l'a dit généralement. Si Bonaparte
était passionnément amoureux de l'é-
pouse dont les grâces l'avaient subju-
gué , malgré ses trente-trois ans et
l'infection de son haleine , elle ne
laissa pas de lui donner de graves su-
jets de jalousie. D'abord leur mariage
resta secret pendant quelques semaines.
Douze jours après, Bonaparte était
parti pour l'Italie. Demeurée à Paris,
Joséphine dissimula même vis-à-vis de
ses amis, ne voulant poiiîl leur avouer
qu'elle avait contracté des liens indisso-
lubles avec le petit Bonaparte. Cette
union en effet fut désapprouvée for-
tement par sa famille et par la plupart
de ses amjs de l'ancien régime; mais
Barras, ïallien et son épouse, applau-
dissaient hautement au parti qu'elle
avait pris. Elle se livra tout entière à
leur société, vivant d'ailleurs très-froide-
ment avec la mère, les frères et les sœurs
delîonaparte, qui lui témoignèrent tou-
jours beaucoup d'cloignement. A cette
époque une fièvre de plaisir et de dissi-
pation régnait dans Paris à peine sorti
de la terreur révolutionnaire. Il n'y
avait pas encore de sociétés, mais des
réunions brillantes telles que les bals
de Thélusson , de Piicliclieu et i\çs
étrangers. Là, toutes les classes, toutes
les opinions se mêlaient sans se con-
fondre. On sait qu'alors une foule d'é-
migrés étaient rentrés; et, dans ces soi-
rées consacrées à la danse , quelques
lâaraes du faubourg Saint-Germain s'a-
rausaient comme les autres, mais en se
croyant le droit de mépriser celles de
leur caste qui fréquentaient la société
des directeurs ; témoin ce mot d'une de
ces pures aristocrates , qui refusa de
s'asseoir à côté de la ci-devant M^^ de
Beauharnais , au bal de Thélusson ,
en disant : « Je ne veux pas me lier
« avec une pareille femme. Je n'aime
« pas les gens qui déshonorent leur
« malheur (9). » Cependant chaque
courrier apportait à Joséphine une
lettre de son époux : quelques-unes
de ces épîtres ont été imprimées :
elles sont brûlantes d'amour et em-
preintes d'un sentiment de jalousie.
On en jugera par ces passages :
« La nature m'a fait l'àme forte et
« décidée ; elle t'a bâtie de dentelle
« et de gaze... Femme, tourment, bon-
« heur, espérance de ma vie... Tes
« lettres sont froides: la chaleur du
« cœur n'est pas pour moi ; je suis le
« mari, un autre doit être l'amant:
« il faut être comme tout le monde. »
Il désirait la faire venir en Italie ; elle
ne se pressait pas: « Tu devais partir
« le 5 prairial, lui écrivait-il encore;
« bon que j'étais! Comme? si une pe-
« tite femme jjouvail abandonner ses
H habitudes, ses anns, sa M"'^ Tal-
« lien, un dincr chez Iiarras, une re-
« présentation d'une pièce nouvelle et
« Fortuné, oui. Fortuné (10) . Tu ai-
« mes tout jdus que ton mari, car tu
« n'as pour lui qu'un peu d'estime et
« une portion de celle bienveillance
«< dont Ion c(L'ur abonde. » On voit par
cette correspondance que Joséphine
f'iotivaiî ses relards sur un prétendu
commencement de grossesse : elle sen-
tait, disait-elle, l'eAt/^Ai/ rcrnucr. Cc-
{ij) On attribue ce iiiol à iiiacluine de n.-iin.-x.
(u)) (;'étail un chat Tavori : .fosi--,>biiiu , qui
BT.-iit lu pu&sioi) (les iiiiiinaux , lui donna pour
iiiccesscur sous l'rinpire un autre cjiot iioiiiiiié
Monsieur l'apiii, {\\\'\ j'aisuil le du; epoir des da-
ines d'honneur et que ^a|>uléon poursuivit un
jour ik coups de piucett^'S.
JOS
JOS
ÎÎ3
Marat, premier alde-Jê-eamp
de Bonaparte, >int apporter au Ditrr-
toire le» premiers ilrapeaui conquis en
Italie; et M"*" lîonjparte, de concert
a»ec ^I'"'^Tallicn, le fit nommer géné-
ral de bri;;ade. De retour en Italie,
Murât fut a*sei mal reçu par le général
en chef auquel riaient revenus quel
ques propos sur l'inliinité rapide de
ses relations avec Joséphine. Néan-
moins il le conserva pntir .iit)«--de-
ramp; mais, .vu sirçe •! ^1 -,
Nlurat a>ant montre de > n ,
lionaparle le dis;^racia tnul-a-tail, ce
qui n'empêcha pas les deui amies d'ol>-
tenir plus tard pour lui, du ministre de
la {guerre, qu'il ferait partie de Parmcc
d'K};>pte. Après Mnrat, Junnt, autre
aide*de-camp de Bonaparte, vint ap-
porter au Directoire les féconds dra-
peaux pris en Italie. M"" Bonaparte
parut dans cette crrémonie avec son
inséparable amie, M*"*" Tallien. Vue à
quelquedistance,Josép)iine était encore
charmante, et rien n égalait la heauie
de sa compafjne. Toutes deux étaient
inise^dans ce i^oùt antique qui rappelle
les statues «recques. La foulcseprev^ail
pour Irtvnir. Junot était chargé de con-
duire M""" Bonaparte en Italie. Dans
la route il eut la maladresse de faire la
cour, sous les veux de va maîtresse, à
M "" Ix)uise, simple camériste. I*a co-
quetterie des femmes ne p.-)rdonne
point ces choses- là ; aussi NI"'" Bo-
naparte témoigna toujours depui) beau-
coup de froiileur à J unot . (^lui-ci devint
son ennemi acharné, et ce sentiment
d'hostilité le poussa par la suite à des
démarches peu di;;ne5 d'un militaire, et
qui lui ont été reprochées dans plusieurs
mémoires. A Milan, Joséphine se vit
entourée des honneurs que l'on rend à
une souveraine. Klle lo^ea au palais
Serbelloni, où elle menait un train de
princesse, faisant des dettes comme par-
tout. VMe p.irlil de lîrescia avec son
mari, e< commença pour ainsi dire la
campagne contre VVurmser. A Vé-
ronr, rllr fut irmoin des premiers coups
de fusil. Be\rnur à (^slcI-Novo, et
tovant le passade des blessée, elle vou-
lait ;;a;;ner Brescia ; mais elle fut ar-
rêtée par l'enneini qui était maître de
Ponte- Marco. Korrre alors de ipiilter
l'arrore, elle traversa le l^^, B<.
F'errare, et ^'a;:na l.ucque», po'
par la rramlret par les bruits snui.o
que l'on r<-panJait Nur le sort de l'ar-
mée française qui n'aviit pas encore
été daiiH une position si critiipie
(/'«>. N\p«ilionV Toutefois elle
fut bien .icctieillie par le sénat de l.uc-
ques, qui vint la complimenter et lui
présenter le* huiles d'hor neur comme
à une prinresfte. I<es Lucquois eurent
bientôt heu de s'applandir de ce bon
procède. Bonapaite , ^ainqueii. leur
fit, à la prière de Joséphine , 1rs plus
;;randes concessions. Depuis lors les
fêtes et le* plaisirs de toute e>pèce
l'enuronnèrent en Italie. Klle se mon*
Ira succesviveinent à Livourne et à
Florence ; puis elle fiva son séjour à
M:iaii. l*er;i!.int que Bonaparte p(»iir-
suivail le "^le^e de Mantoue, José|>liine
se rendit à l'avie, à Crémone, .î Plai-
sance, etc. Kiant à .Milan, elle n'a-
vait pas peu contribué , par l'ascen-
dant de ses larj^es^es envers le peuple,
à repousser des partis de T^roliens
qui s'étaient montrés aux portes de
cette \illc. lîonaparte lui en sut°ré:
«« l'ne autre (ois, lui dit-il, je pourrai
M vous condor .sans crainte les rênes
n d'un état...; puis alors, Joséphine,
« continua-t-il en riant, tu aur.ts une
«« voix delibérali\e d.ins mon conseil ;
«^ mais pour la clé de mon Irrsor, tu ne
« l'auras jamais. » Lorsque le ;;énéral
en chef reçut du Directoire l'ordre de
renverser la pnissiince poniificalr, il se
contenta d'envover à Borne le <;énéral
Victor, et se porta de sa personne .«^or
Faenza et Ceseiie. Joséphine l'ac-
compa;:;nj juiqu à Imola, où tous deux
234
JOS
furent reçus par Tévêque, depuis pape
sous le nom de Pie VII. Elle supplia
Bonaparte de se montrer généreux en-
vers lui ; il ménaj^ea la ville, mais il
prit l'argenterie et les diamants qui se
trouvaient au palais épiscopal. De re-
tour à Milan, elle ne s'en éloigna plus,
et si l'on en croit la clnonique scanda-
leuse de l'armée, consignée dans les
Mémoires àt M'"® d'Abranlès, elle
conçut un très-vif attachement pour un
aide-de-camp du général Leclerc. M.
Charles (c'était son nom) déjeunait
avec elle sitôt que Bonaparte partait
pour quelque expédition. Ce qui pa-
raît certain , c'est que ce fut alors
que commencèrent les défiances de son
mari. Un de ses aides-de-camp, Le-
marrois, lui rendait un compte fidèle
des moindres actions de son épouse.
Quelques lettres qu'elle recevait furent
dénoncées; et Bonaparte les jugea cri-
minelles. Dès ce moment la discorde
se mit entre les deux époux. Dans un
accès de colère , il tua d'un coup de
pied un jeune carlin qui avait été don-
né à Joséphine par le général Iloche.
Quelques jours après, il eut honte de
son emportement et, pour le réparer,
il fit élever un monument à la victime
dans les jardins de Mondeze, près de
M ilan. Du reste les deux époux s'enten-
daient lort bien pour les intérêts de leur
ambition. Bonaparte accablait d'impôts
les premières maisons de l'Italie, non
qu'il eut rintention de les ruiner entiè-
rement, mais il voulait les tenir dans ..a
dépendance. Il leur faisait eniendre de
s'adiesser à son épouse. Alors José-
phine promettait beaucoup, et , quel-
que temps après, comme si elle eût
échoué dans ses sollicitations , el/e di-
sait avec une feinte tristesse : le général
ne le veut pas. On la .suppliait de re-
doubler ses efforts; elle profitait habile-
ment de cette confiance pour pénétrer
tous les secrets ; elle finit même par
obtenir ie& archiver de l'état que le^ au-
JOS
torités avaient fait disparaître à Tentrée
des Français. En public, Bonaparte
désapprouvait Joséphine de s'intéres-
ser à la noblesse italienne. « Elle
« n'obtiendra rien de moi, disait-il à
ce ses généraux; je ne puis favoriser
« les grands; leur fortune me répond
« de leur soumission. » Par ce ma-
nège concerté, Joséphine était adorée
dans les provinces conquises, et sa po-
pularité servait merveilleusement les
desseins de son époux. H ne faut pas
omettre que ces services, qui lui coû-
taient si peu, lui valurent une immense
qurinlité de diamants qu elle accepta
toujours sans scrupule. Quand Bona-
parte était éloigné de Milan, il lui en-
voyait tous les jours un courrier ; elle
était instruite à point de tous les mou-
vements de l'armée, et les principaux of-
ficiers recevaient les bulletins de samain;
mais elle cachait avec soin les défaites.
Après la prise de Vérone, son inter-
vention ne fut pas inutile pour préserver
celte ville du pillage : « Le prétendant
« de Frantt, écrivait-elle à Bonaparte,
« a trouvé dans cette ville asile et pro-
« teclion; c'en est assez pour vous et
« pour moi ; vous m'entendez, géné-
« rai. » Quand le vainqueur de l'Italie
se rendit à Bastadt pour négocier la
paix, il s'y fil précéder par son aide-
dc-camp Mural et par Joséphine, qui
devint dans celte ville la reine du
cercle diplomatique. Elle se con-
duisit avec beaucoup de réserve et de
dignité ; les diplomates étrangers
étaient charniés de retrouver les formes
de l'ancienne cour dans la femme d'un
général, (jui, personnellement, aflèctait
avec eux la hauteur et quelquefois la
grossièreté d'un parvenu. Joséphine ne
prolongea point ce séjour à Bastadt
aussi lon^-temps que son époux, et de
retour à Milan elle reprit ses intimités
avec l'aide-de-camp Charles. Quand
Bonaparte revint à Paris, ses (rères,
espéraut détruire i'iaûueace de leur
bellf-«niT, chfTf hfrent à exciter «a ja-
ioiisif par Irur^ rapports. Son amour
encore trrs %if pour sa froime, cl ses
trataux coiiliiiurl» pour l'expédition
d'Kp^pte, ne refn|»À: lièrent pas de piê-
ter quelque attention à ce* propo». Il v
eut quelques di>putes conjugale*, qui $e
terminaient lou;t>urN a l'axanlai^ede l'a-
droile JoNrpliiiic. Le roelier Anloinr,
espion »errrt du mari, lui déiioii«;a en-
core les aMuliiites de lV<»ltol, seeietaire
de Harras. 1^ (ait était vrai; mai%
M*"* Honaparte se serrait adroite-
ment de crtle inlimile pour con
naiire les *ecret< du dirrrteur. I*ar
cemo>en elle découvrit que les ri/iy
sires desiraient foilcment la démis-
sion du vainqueur de l'Italie. Alois
elle en<;a^ea Koiiaparte à faire moinen»
tanémeiit quelques li';;ères concessions
pour mieux parvenir à son but. Mais
le {^enrral fut in>liuit que, sous pré-
texte d'aller au maiu,;c, son e(M>u«e
allait voir en srriet llarras. C/eiail,
51 l'on en croit M' " Leiiormand, pour
sauv*er les jours d'un émi^ire conJani-
né à être fuMlIt-. Ouoi «ju'il en s»)it ,
Donaparte lui fit au retour une via-
lente querelle et la chassa de son \u\-
tel, à onze heures du soir , en don-
nant ordre à sm rr^ ,„ de rem[»écher
de rentrer. Joséphine, se trouvant à
minuit dans la rue, alla chercher un asile
chez M'"" de Château- Heiiaud qui la
ramena quelque'^ heures plus tard au-
près de son mari , el s'v pril avec tant
d adre>.se que le même jour elle accom-
{•a^na les deux époux dans une prome-
nade au bois de lîoulomie. Depuis son
retour à Paris, Jo>e|.hiiie partageait
tous les horamaj^es dont son mari était
l'objet, et, ce qui ne plaisait pas tou-
jours à celui-ci, c'est que nuine dans
le public on parlait de la reconnais-
sance qu'il devait à sa femme. Non
seulement .M'"'' Bonaparte ne fit rien
pour détruire celle opinion, mais elle y
donna de la consistance par sei coun-
JOS
a3S
à des flatteurs. On peut ju^er
combien l'ame alliere de Bonaparte
était blesser quand il entendait leprler
?\xtcrtiiH le crrUit de stt femme qui
uçaii e/rve et qui le suuienuii. Mais
son amour pour Jusephine et peut-Àre
ausêi son intérêt politique lui lai:>aient
diisiniuler son depit. Mairie ces scènes
d'inlriieui, en public il etail tuuiours
aux petits soins pour elle. On put ie re-
marquer, le *J ianvier 17U8, a une frtc
doonrea M'"" Beft-V'jf t^ p.vr Irminii-
Ire lallevrand i •• llo
M naparle , dit ai dm
M dan> ses ^Stmi'emrs, a toujours ctc
M près de sa lemine pendant toute la
« durée du souper. Il paiait rtie fort
M occupe d'elle. On dit même qu il en
« est amoureux et exce»sivenieul ja-
» lonx. .M""^ Bonaparte n'est ce-
« pendant plus jolie, ellr a pré» de
M quarante ans, et les païait bien ; elle
M conserve une taiiie ele;;aiite et un
<t bon curur qui ne veillira |amais. >•
C'était le monietit ou NI""' de SlairI
|io(tr>(inai' > < -qucs
le li'Tos (jii pour-
suivie de ses virulentes satires, hlle lui
avait écrit de loiu sans le connaître;
elle le harcelait présent. K l'en croire,
c'était une monstruosité que l'union du
peine à une petite insi\!,nijntnie errole^
indi;4iic de l'apprécier el de l'enten-
dre, etc. Bonaparte jetait au feu ses
lettres, en les Iruissant et en les dértii-
raiit a^ec debout ; puis il disait à Buur-
neniie : •< .Vh bien oui î une femme
«< bel esprit, unefai:>euse de sentiment
M se comparer a Joséphine! Bour-
« rienne, je ne veux pas repondre à
M de pareilles lettres, i» Depiii.s son
retour à Paris, il fut importune du
même empiessernent, auquel il opposa
la rneriie froideur et le même silence.
M'"" de Staël ne se derour-i^ca poiut,
el , résolue de tirer de lui quelques
paroles, l'interpella publiquement à
celle même fcte donnée par Talley-
!i36
JOS
rand : « Quelle est, demanda-t-elle à
« Napoléon, la première femme du
« monde, morte ou vivante:' — Celle
« qui a fait le plus d'enfants, répondit
« le o;énéral. « .M™*^ de wStaël, un peu
iléconcertée d'abord, essaya de se re-
mettre en lui disant qu'il avait la répu-
tation d'aimer peu les femmes : « Par-
^f donnez-moi, reprit-il, j'aime beau-
<«< coup la mienne , madame. » Les
•dépenses exorbitantes de Joséphine
^donnaient pourtant lieu à une (j;uerre
intestine entre les deux époux. Etant
encore à Milan, elle avait écrit à Paris
pour qu'on meublât (we/: tout ce qu'il
y avait de mieux sa maison rueChan-
tereine qu'elle avait achetée de Talma
quarante mille francs. Quelle fut la
surprise et la mauvaise humeur de Bo-
naparte , quand on lui présenta le
^'ompte de ce mobilier qui ne montait
pas à moins de cent vin^t mille francs !
Il eut beau se défendre, tempêter. L'en-
trepreneur montrait la lettre de José-
phine; or, tous les meubles étaient
'd'après des modèles faits exprès. Il
•fallut en passer par là. « Elle avait
•" à l'excès, dit liourrienne, le goîit
■•« du Juxe et de la dépense. Ce pen-
•« chant , né de l'oisiveté , était de-
«r venu une habitude et presque tou-
« jours sans besoins réels. De combien
'< i-de scènes n'al-je pas été témoin
« lorsque le moment de payer les
« fournisseurs était arrivé ! Elle ne dé-
«t »clarait jamais que la moitié des mé-
« înoires, et cela renouvelait les repro-
« ches. Que de larmes elle répandait
«c qu'elle aurait pu s'épargner si faci-
«« lement! » Lors du départ de lîona-
partepour l'expédition d'Egypte, Jo-
séphine l'accompaj^na jusqu'à Toulon ,
et témoi{i;na le désir de le suivre en
E^vpte. Aux objections du {!;énéral ,
elle répondait que, née créole , la cha-
leur du climat lui serait favorable. Par
un sinf^ulier rapprochement, c'était sur
]a Pomone qu'elle youlait faire la tra-
JOS
versée, c'est-à-dire sur le même bâti-
ment qui dans sa première jeunesse l'a-
vait amenée de la Martinique. Bona-
parte, ayant fini par céder au désir de sa
femme , promit de lui envoyer le na-
vire, et l'engagea , en attendant , à
aller aux eaux de Plombières, Elle
y consentit d'autant plus facilement,
qu'elle croyait à l'efficacité de ces
eaux pour lui rendre une fécon-
dité devenue impossible. A Plombiè-
res , elle faillit devenir victime d'un
grave accident. Comme elle était un
jour avec sa société sur le balcon de
son hôtel, ce balcon s'écroula : toutes
les personnes qui s'y trouvaient tom-
bèrent dans la rue. L'une d'elles eut
la cuisse cassée. M'"^ Bonaparte en fut
quitte pour des meurtrissures. Sans
cet accident, qui prolongea son sé-
jour à Plombières , elle serait deve-
nue prisonnière des Anglais ; car la
Pomone fut prise pendant la traversée.
Comme d'ailleurs Bonaparte , dans
toutes ses lettres , détournait sa femme
du projet d'aller le rejoindre, elle re-
vint à Paris, où elle s'occupa, d'après les
recommandations de son mari , de lui
acheter une maison de campagne. Après
avoir hésité long-temps entre la terre de
Bis et la Malmaison, ellese décida pour
cette dernière qu'elle acheta de M. Le-
coulteux d'i Moley, moyennant cent
soixante mille francs , bien que son
mari lui eut déclaré ne vouloir y met-
tre que le tiers de cette somme. II y
avait une foule de réparations à faire ;
et la ferme rapportait tout au plus
douze mille livres de rentes. Mais
quand Joséphine achetait, rien ne
l'inquiétait moins que de payer : sa
profusion irréfléchie perpétuait le dé-
sordre et la détresse de sa maison.
Les quarante mille francs de revenu
que lui avait assurés Bonaparte avant
son départ ne lui suffisaient pas ; et ce-
pendant deux envois extraordinaires
d'argent s' élevant à pareille somme lui
il
avaient Mé faits d'Iil^pte en raoiiiN
d'uiir aiin^. 1)<> plus , à U reconi-
inaiiiialinn i\e Karra», le lllltli^I^e Je
la polirr touché la rnm|irenait dans
\es li.siribulions claiiilr&tiiies sur le
|iiO(iuit des jeui. Il lui retint même,
(le Ij main à la main , mille louis,
galanterie ministérielle qui lui ^a;;na
pour jamais le cœur de Joséphine. Il
sa\ail par elle beaucoup de choso :
car elle voyait tout l'ari». mais liams
mt'ins souvent qu'autrefois, fréqoen-
taiil plutdi Gohier, pré>idrnt du Di-
rectoire; elle était aussi fort liée a\ec le
munilionnaire Ouvrard, qui plu.s tl'une
fois lui oinnt >a caivse pour de prét>
dont il ne fut jamais rembourse. Du
re^te, elle \i\ail fort mal a>ec ses beaux-
frères Joseph et Lucien, qui ne ces-
saient de décrie) sa conduite. Le direc-
teur (îoliicr désapprouvait sa liaison
avec l'aide-de-caïup C.harles, bien que
Joséphine s'eiïuirat de la lui faire envi-
sager comme de pur sentiment : •« S'il
M \ou-< est impossible de la rompre ,
M lui disait-il , et qu'elle vous tienne
•« tant au coeur, dworcri. »» Cette
parole fit d'autant plus d'impression
sur elle, qu'alors précisément le bruit
courait que Konaparte était perdu
et qu'il ne reviendrait jamais. KUe
alla jusqu'à Caire rédiger sa demande
en divorce; puis, avant d'aller plus
loin, ayant con:»ultéLccoulteu\deCan-
teleii, cet homme prudent lui lit sen-
tir toute l'incoineiiaiire de ce projet :
«< En supposant véritables les bruits
«« sinistres qui courent sur lo général,
« lui dit-il , son nom seul est pour
«< vous une auréole qui vous entoure
« d'une considération que yous per-
«c drez aussitôt que vous y aurez re-
i< nonce. » 11 la persuada si bien
qu'elle déchira devant lui sa demande
en divorce, dont il ne fut jamais ques-
tion depuis; car, an retour de son époux,
elle n'eut {:;arde de s'en vanter. Ce-
pendant en tf^ypte, Juiiot, qui depuis
jas i-Kj
le foya;;e d'Italie était devenu l'ennemi
de Joséphine, profila du libre accès qu'il
avait auprès «le son -cneral pour lui
faire sur les intrigues de sa femme des
rapports dans lesquels malheureuse-
ment trop de vérités se mêlaient à U
calomnie. Après cet entretien, Bona-
parte apostroplu yivement mjii secré>
taire Bourrienne.raccu&antdclui avoir
caché les inGdélitn de sa femme :
•« J'e&lerminerai , s'ccria-t-il , cette
m rare de blondms et de freluquets.
M (,)uant a elle, le diyorce, oui, un di-
« yorce public, éclatant ! » Il youlail
écrire à Joséphine pour commencer le
jirocès. Bourrienne, sincèrement atta-
clié a celle-ci , fit sentir au général
toute r indiscrétion de Junot (11), el
combien il serait imprudent de lu-
sarder une lettre qui pourrait être in-
terceptée par les Anglais. Bonaparte
se calma , et quelques jours après il
se plaignit à Bourrienne du mal que
Junot lui avait fait par des révéla-
tioBS que la mali;;nili* pouvait bien
a^uir inventées. Depuis il ne par-
donna jamais à celui-ci, et l'on a dit
que c'est un des motil> pour lesquels
Junot n'a pas été maréchal de France.
On doit penser que Joséphine, à qui
son mari lui-même lacouta plus tard
ces indiscrets propos, les a encore moins
pardonnes. LUe plaisantait souvent sur
les manières de Junot qu'elle trou-
yait, avec raison, fort communes. Dans
le premier accès de son mécontente-
ment, Bimapane avait écrit une lettre
de reproche^) à Joséphine qui > fît une
réponse tres-adroite : ««Je vois en ef-
«" fel beaucoup de monde, disait-elle,
«( et c'est à qui me complimentera sur
«c \os succès; el j'aNoue que je n'ai
« pas la force de fermer ma porte à
(ti) « Sans que Bonaparte me l'ait dit. j'ai eu
-t bfjucnap de ralion» de pcnsrr que le nom d*
« Mural ruit Kjrti avec celui de Charles de U
« bouclic «le Jufioi, lors de »tv> iiidtscrelioot
■< aux soirKs de Meisoudiab (.V«/n. de Bout'
« rt*mA«, toai. m, p- »«7)- •»
238
JOS
« qui me parle de vous. Les honi-
« me? sont en grand nombre dans
« nia société; ils comprennent mieux
« que les femmes vos hardis projets ;
« ils parlent avec enthousiasme de ce
« que vous faites de £;rand , tandis
« que celles-ci ne savent que se plain-
« dre de ce que vous avez emmené avec
« vous leur époux , leur frère , leur
« père!... Cependant il en est dont
« j'aime le cœur, Tesprit, de préfé-
« rence à tout, parce qu'elles ont pour
« vous une sincère amitié. Il faut
« avant tout placer ici les noms des
« spirituelles M™^^ d'Aiguillon, Tal-
« lien et ma tante. Je les quitte peu
« et elles vous diront, ingrat que vous
« êtes, si j'ai pensé à faire des coquet-
« tcries à tout le monde, etc. >» Plus
loin , elle ajoutait : « On me rend ici
« des honneurs qui quelquefois m'em-
« barrassent; car enfin je ne suis paslia-
« bitiiceà ces hommages qui, je le vois,
« déplaisent à nos autorités toujours
« ombrageuses et craignant de per-
V dre leur pouvoir de la veille. Lai's-
« sez faire fous ces gens, me dites-
« vous; Il ai?, mon ami, ils tacheront
« de vous nuire; ils vous accuseront
« de chercher à diminuer leur ouis-
« sance ; et je serais désolée de contri-
« buer en rien à une humeur que vos
« triomphes suffisent pour justifier.
« Lorsque vous reviendrez couvert de
« nouveaux lauriers , que feront ils ,
« mon Dieu, si déjà ils se tourmen-
« tent :' » A cette époque Bonaparte,
qui s'était un peu radouci, envoya à.Io-
.séphine deux châles cachemires. ]\1'^*^^
lîourrienne, Hamelin et Visconti en
eurent aussi. Ces châles qui depuis ont
fait fureur n'eurent pas d'abord l'avan-
tage de plaire. « Ils peuvent etretrès-
»( beaux et très-chers , écrivait José-
« phine à son fils Eugène ; mais ils me
« paraissent fort laids. Leur grand
<c avantage est dans leur légèreté. Je
u doute que cette mode prenne.
JOS
« N'importe , ils me font plaisir
«f parce qu'ils sont extraordinaires et
« chauds. » Cependant, depuis lors,
les femmes ont voulu toutes se parer de
ces châles si laids , et Joséphine, sur-
tout, eut la passion des cachemires;
elle en ^gosséàaii cent cinquante d'une
beauté remarquable et qui, en 1814,
furent vendus bien au dessous de leur
valeur. Les indiscrétions de Junot,
après avoir causé chez Bonaparte une
explosion de fureur jalouse, n'avaient
pas laissé de traces apparentes; mais
il n'en était pas moins en proie à
des soupçons que ses frères et ses
sœurs ne manqu»Ment pas de con-
firmer, par les rapports les plus en-
venimés, lorsqu'il revint d'Egypte. Ils
le firent avec d'autant plus de facilité
que M"^^ Bonaparte était absente.
Comme elle n'était pas sans inquié-
tude sur la manière dont elle serait
accueillie par son époux , elle était
partie pour aller au devant de lui
dès qu'on apprit son débarquement.
Elle eût voulu , en le revoyant ,
être accompagnée d'une personne qui
put la protéger; elle crut que Lecoul-
teux de Canteleu, entouré comme il
l'était de l'estime générale, serait le
meilleur appui qu'elle pût avoir; mais
celui-ci ne se souciait pas de se faire
son chevalier dans une circonstance
aussi délicate. Il lui représenta qu'elle
ignorait par quelle route Bonaparte
arrivait ; (|ue sans doute elle le man-
querait, et qu'il était préférable de l'at-
tendre à Paris. Elle ne fut pas de cet
avis ; mais, comme elle n'avait pas
d'argent pour faire ce vopge , elle
demanda cincjuante louis à lîarras qui
les lui donna d'assez mauvaise grâce.
Elle pai tit donc seule et prit la route
de Bourgogne, tandis que Bonaparte
arrivait par le Bourbonnais. Lucien,
plus heureux, avait pris la bonneroute.
11 profita de ces premiers instants pour
prévenir son frère qui, ne trouvant
105
plus sa ftmmf i son arriv^'f , accneillii
t(>u5 In propos qui lui furent trnus
contrf fllf par sa famillr, entra <lan«
une j;raniJe fureur el pron(»nra enrnre
le mot lie ili\'ori e. I/errrur de roule
ne lui parut qu'un prétexte. iVe5olu
de ronipre à tout jamais, il fit i\r\
rhrx le portier tous les effet s dr ^1
Hnnaparle avec ordre de
•1 entrer lorNqu'eile se |' <
Mais quelques ami< , et surtout le
fournisseur Collot . lui représenlet enl
l'infonvenance d'un tel éclat alors
«jue la France entière a\ail le-i yen» sur
lui. " C^ n'est pas le moment, dit-il,
M de débuter par un ridicule et de
« jouer le r«Me d'un mari de Molière.
« laissez là les torts de votre femme.
•« Si vous n'en êtes pas satisfait , vous
«« la ren\errei lorsque vous n'aurez
" pas autre chose à ''aire. »• l*eu ébranlé
par ce sa;;e corvseil, lionaparte déclara
qu'il ne pardonnerait jamais. •« Vous
« me connaissez bien, ajouta-t-il ; si
«< je n'étais pa^ sur de moi, j'an-aclie-
«« rais ce cirur el je le jetterais au feu. »»
Kn disant ces mots sa main déchirait
»a poitrine. Cependant Joséphine, qui
était allée au devant de lui jusqu'à L> on
sans le rencontrer, revint dans la nuit
qui suivit cet entrelien. Bonaparte ne
\oulut pas la voir, et pendant deux
jours il lui tint rigueur ^1 2^ ; mais il ne
put résister aux prières d'Ku^ene et
d'Ilorlense ; en6n , après de lon-
gues supplications, ils allèrent cher-
cher leur mère et la ramenèrent
dans les bras de son époux. K!le at-
tenda'.l sa décision au bas d'un pe-
tit escalier déiobé, presque couchée
sur les marches et souffrant de froid el
de chagrin. Après cette réunion , les
efforts qu'elle fil pour se jusliBer et
pour repiendre son empire sur lui
trouvèrent dans le cœur de lîonaparte,
(n ronflant, d.in'i »f^ Mfin..irr«, aTfiupqa«
Im tjpLcuiioiu qu'eurent alors Us drux époux
M M terwuhàrtmt fat toujours s»mj cru tt tm/u m»-
JOS
i39
tonjoim épris de m femme, un poisiant
auxiliaire Dans maintes circonstances
elle^ul profiter adroitement de sa fai-
blesse superstitieuse : m On parle de
« ton étoile, lui dixait ellr (juelquefois,
- mais c'e^l la mienne qui l'influence:
c'est à moi qu'il a elé prédit de hautes
destinées. » Du reste, un de^ mo>ens
les plus puivsanl^ qu'elle eiiipln\a pour
le ramener fut d'user habileinent de
représailles. Pendant son séjour en
K;;>pte, lionaparle a^ait eu assrz pu-
bliqtiemrnt pour maltresse une M'"*"
Fuurès Joséphine s'empara de celte
arme pour repousser les attaque» de
son époux . et elle ne lui laivsa ni
paii ni trêve jusqu'à ce qu'il eût éloi-
gné celte femme, qui était rexenue à
Paris. Après ente bouderie conju;;ale,
leur union ne fut plus troublée. José-
phine, il faut lui rendre cette justice,
sentit la nécessité de raellre enfin de
la régularité dans sa conduite, et elle
ne s'attira plus dequeielles que pour
ses folles dépenses. Klle s'attacha vé-
ritablement a Honaparte et sut iui
(lunnrr Ir honhrur : elle se montra
constamment son amie la plus tendre,
professant en toute occasion la soumis-
sion, le dévouement , la complaisance
la plus absolue. On peut lire dans les
Mrmuirrs de Constimt avec «juelîc
sollicitude elle soij;nail son mari lors-
qu'il éprouvait quelque indisposition.
Klle avait une mémoire prodi;;ieuse,
que Bonaparte, qui l'appelait son
a^rniia , se plaisait à mettre à contri-
bution. F^lle faisait sans pédanterie des
citations qui prouvaient ui:e lecture
variée ; el la défiance qu'elle avait tou-
jours d'elle-môme rerapèchait de par-
ler de ce qu'elle ne savait pas. Klle
était excellente musicienne , jouait
très-bien de la harpe, chantait et des-
sinait avec o;oùt. Sans être réguliè-
rement belle, elle avait un charme in-
dicible dans son regard presque tou-
jours voilé par ses longues paupières.
a4o
JOS
Aucun peintre, pas même David, n'a
pu exprimer reffet que produisait Tcn-
semble de sa personne ; car la grâce,
si difficile à saisir, était ce qui la dis-
tinguait par dessus tout. Elle avait un
tact parfait, un sentiment exquis des
convenances, un jugement sain, avec
une douceur qui ne se démentait ja-
mais. « Je n'ai vu, a dit l>ourrienne
<f dans SCS Mémoires, aucune femme
« apporter dans la société de tous les
« jours autant d'égalité de caractère,
« autant de cet esprit de bienveillance
« qui €st la première condition de
« l'amabilité. » Il faut reconnaître
aussi que, sous le rapport politique, elle
avait par sa dextérité préparé les bril-
lants succès que Bonaparte obtint à
son retour d'Egvpte. Aux approches
du 18 brumaire, elle sut traiter adroi-
tement avec quelques hommes in-
fluents , et ménager à son mari des
intelligences jusque dans l'armée du
Rhin. Il est connu qu'elle inspira à
Gohier, alors président du Directoire,
et à sa femme, une confiance toute favo-
rable aux desseins ambitieux de ]>ona-
paite. Par son habileté à rester toujours
maîtresse de la conversation dans son sa-
lon, elle prévint de fâcheux démêlés entre
son époux et Dernadotte qui voulait à
tout prix maintenir le J)Irectoire. Dans
cette fameuse journée, espérant rallier
(johier à la cause de son mari, elle
l'avait invité à déjeuner; mais il ne vint
pas. l*endanl que Bonaparte était au
conseil des Anciens, on peut juger des
inquiétudes de .Joséphine (jui resta
seule avec Bourricnne. Remplie d'une
bienveillance véritable pour M'"*'' Go-
hier et son mari , elle envoya dire à
ce dernier de ne pas faire d'éclat ,
et de se reposer sur l'affection de
Bonaparte, dont l'intention était de
faire tout pour Gohier. Quand, à
trois heures du matin, iionapartc re-
vint de Sainl-Cloud, il passa une par-
tie de la nuit à causer avec Joséphine
JOS
des événements de la journée. Bientôt
iî s'établit , connue premier consul ,
au Luxembourg , où elle le suivit.
Dès-lors elle ne vit plus que les per-
sonnes qui convenaient à son mari ,
et rompit toutes celles de ses ancien-
nes liaisons qui rappelaient le temps
des saturnales du Directoire. Plus de
visites chez Barras , alors en pleine
disgrâce , ni chez M'"^ ïallien qui
ne fut pas exempte de cette déla-
veur. Bonaparte ne voulut jamais per-
mettre à Joséphine de la recevoir au
Luxembourg, ni plus tard aux Tuile-
ries. Ce fut pour celle-ci un cruel
crève-cœur, car elle était tendrement
attachée à M"^''" Tallien , qui dans
d'autres temps lui avait rendu, ainsi
qu'à Bonaparte, des services impor-
tants. Il paraît cependant que Joséphine
la voyait quelquefois à la Malmaison ;
mais Bonaparte n'en sut jamais rien, ou
bien, satisfait du mystère qui présidait
à ces entrevues, il fit semblant de n'en
rien savoir. Joséphine conservait avec
soin une collection des lettres de M™^
Tallien et de plusieurs personnages mar-
quants. C'est elle qui de nosjoursa mis
à la mode les collections d'autographes.
Quant à Tallien il aurait terminé ses
jours dans le plus entier dénuement, si
Joséphine n'eût pourvu à ses besoins
par une pension que lui continua Eu-
gène , après la mort de sa mère.
Joséphine fournit aussi aux frais de
l'éducation de M"''' Tallien dont le
prénom était Thermidor , et qui a
épousé depuis le comte Pelct. Bona-
parte voulant appuyer son nouveau
gouvernement sur un système de fu-
sion, profita habilement des ancien-
nes relations aristocratiques de José-
fdiine pour attirer à lui le parti roya-
iste. « Sans ma femme, disait-il à
« Sainte-Hélène , je n'aurais jamais
'< pu avoir avec ce parti aucun i a()[»ort
<' naturel. » A celte époque le salon de
M'"*^ de Montesson était le seul où se
chez V0U4. J'aurai brM>iii de quel-
ques IraJitiuns. Vous \ouJrex
JOS
ti uu\ii>iriil léunis le'» rini^iv» iciii.t ^,
leN graatU sei;;neurs le^Xei en Fraiire,
le< panenus nu Iclii» de leurs drpouil-
lei, fl 1^5 liomnirs cclrbrcs tbiu tous
1rs ;riires. Au»mIAi qu'il fui r\e\é aa
i(ui>-ilal, Bonaparte fil \enir M'"'" de
^Iollles^oll, H Je serai riiarmède vous
" être utile, lui dit il, mais aussi je
« coropic sur vous. 1^ Ion Je la bonne
•« compa;;nie e^t à peu pu*i perdu en
•« France; il faut qu'il se rrliou\e
quel-
bien
•< les donner à ma fciniue; et lorsque
•« quelque élran;;cr de marque vien-
«« dra à Paris, vou» lui oiïriirz des (è-
•• tes pour qu'il soit convaincu que
•• nulle part on ne peut avoir plus de
^rare et d'amabilité. »• A cet eflcl
.! leiidit à M"" de Moi.te^son la
peiiMOii de cent suivante mille francs
que lui avait assi;;née le duc dOr-
leans , son époux. Jojépliine té-
moigna toujouis la plus vive amitié
à celte femme remarquable par les
^râce<i de son esprit. Etant impcra-
tricc , elle venait souvent déjeuner et
passer des journées entières à Homain-
villc, on M'"" de Montesson avait une
iiabitâtion charmante. Les pauvres du
pa>s se ressentaient toujours de ces
\isiles; •« car, dit M"' Ducrest, l'im-
«• péralrice voulait que tout le monde
«( fût heureux là où elle paraissait >•
Ce fiit au I.uxcmboui;;, dans les sa-
lons dont elle fai>ait si bien les hon-
neurs , que, dès le commencement du
consulat, le mot de madame redevint
en iisa^ç. Ce premier retour vers l'an-
cienne politesse française ne laissa pas
d'effaroucher quelques su.sceptibililés
républicaines; mais Bonaparle s'en
souciait peu. Déjà il tranchait du maî-
tre. Ce fut pendant sa résidence au
Luxembourg qu'il voulut faire arrêter
le fameux lournisseiK Ouvrard, qui
avait été l'ami intime de M'"*^ de Beau-
harnais. Prévenu par Bourricnne, Ou-
LXVIII.
.ÎOS
211
Maul Cul il- irmps de roeltre ^ Tabri
ceuK de ses p.ipirrs qui auraient pu
coroprumetlre qiielqu'un. I.^s scellés
fuient ce|>endant appo:>és chez lui;
mais on n'v trouva que la preu-
ve de« emprunts que lui avait faits
M"" Bonaparif. (Juaiid le pieniiei'
consul et ses deux collègues vinrent
s'in«laller aux Tuileries ^1') février
1 800^, Joséphine, placée modestement
à l'une des lenètres de l'appartement
assigné au troisième consul l^lirun,
se contenta d'élre simple spectatrice
du corle;;e brillant dont son époaz
était le principal personnage. Elle s'é-
tait, des le malin, rendue sans éclat
au château où elle occupa les appaite-
menis du rez-de-chaussée sur le jardin.
Celaient ceux de l'infortunée Marie-
.\nloineile. Lorsque Josrphine s'^
installa, elle se troubla et des larmes
s'échappèrent de ses veux. •« Je pré-
•« férerais habiter la .Nlalmaison, dit-
«• elle à Bonaparte, ce palais me dc-
" plait , je tremble sur la sdlidité
•• d'une SI haute élévation. Que di-
'« ront tes soldab .' — Que je uc
« marche point sur les traces d'un Fa-
« bricius , madame. Le petit caporal
M français, mieux avisé qur !e consul
«< ronnin , veut recueillir les fruits
« d une victoire où il ne lui a fallu
•« que de l'audace pour réussir. J'ai
« joué mon rôle àSaint-Qoud ; maiu-
<« tenant c'est à vous à prendre l'es-
« prit du vôtre.» Quelques jours aprè<
celte installation, il > eut chez Joséphi-
ne léceplion du corps diplomatique A
luiil heures du soir les salons étaient
encombrés par la foule des personnes
invitées (ambassadeurs, sénateurs, mi-
nistres , f;énéraux , colonels , dames
élran;;ères, femmes de généraux); et,
3uand après beaucoup de peine et
'embarras le cercle fut formé , un
domestique en livrée vert et or
annonça Madame, femme du pre~
mier consul. .Après elle, venaieiit la
i6
l4'2
J05
mère et les sœurs de Bonaparte ; puis
quatre dames qui, sans avoir de tilres,
accompaci;naient ordinairement José-
phine. Celle-ci, entrant de prime abord
dans le cérémonial des reines, fit le
tour du cercle, conduite par le minis-
tre drs relations extérieures, Talley-
rand, qui lui donnait la main et qui
lui nomma les membres du corps di-
plomatique. « Ses oreilles, dit Cons-
K tant dans ses Dlémoires , durent
u être ap;réablement frappées du mur-
« mure ilatteur qui Taccueillit à son
« entrée.» Cette première réception
d'étiquette produisit le plus heureux
effet dans Paris; le commerce se ra-
nima en voyant reparaître les habits
brodés et les équipages. On peut
même ajouter que le luxe et les dé-
penses de Joséphine eurent la plus
heureuse influence. Déià elle avait pris
une attitude de souveraine; les fem-
mes se levaient toutes lorsqu'elle en-
trait ou qu'elle sortait. JJepuis lors,
toutes les fois qu'un ambassadeur ou
quelque corps de l'état sortait de
l'audienre des trois consuls , il allait
chez M"'^ Ironaparte comme autre-
fois chez la reine. Les républicains
continuaient de murmurer. Carnot ,
ministre de la f!;uerre , ne cessait
de faire des remontrances au premier
consul sur la pompe de sa cour et
sur la propension de Joséphine à
jouer le rôle d'une reine, en réunis-
sant autour d'elle des femmes dont le
nom aristocratique flattait son amour-
propre. Ces représentations fatif:;uc-
rent lîonaparte, et il fit demander à
Carnot sa démis.'^ion. L'orgueil du pre-
mier consul était flatté de la {^ràce et
de la dignité que déployait José()hine
dans ces réceptions d'apparat : en cela
elle secondait parfaitement ses vues, et,
comme mari, son amour-propre eût été
blessé s'il l'eut vue remplir ce rôle offi-
ciel avec moins d'aisance et de tact.
Habituée de bonne heure à la haute
J05
société, elle connaissait parfaitement
cette convenance de lano;ao;e qui mé-
nage tous les intérêts, tous les amours-
propres; et M™® Junot,dansses î\lé-
ijioires, s'est montrée souverainement
injuste envers elle , en prétendant
qu'elle eut besoin de recevoir à cet
égard des leçons de sou mari. Ce retour
de l'étiquette dans le palais consulaire
produisit des effets importants. La
bonne compagnie commença à se divi-
ser. Une partie essaya de faire de l'op-
position, l'autre se rapprocha du pre-
mier consul. Joséphine attirait, encou-
rageait à merveille ces ambitions un
peu honteuses ; elle avait été femme
de qualité, elle en conservait les ma-
nières , et l'on pouvait la voir sans
déroger. Les anciennes amies qui l'a-
vaient oubliée dans la tourmente ré-
volutionnaire se rappelaient leur atta-
chement d'autrefois, et trouvaient très-
agréable de le lui rappeler à elle-
même au milieu des magnificences
renaissantes des Tuileries. Ces dames
concoururent, avec la nouvelle maî-
tresse du lieu, à introduire auprès du
consul les usages de la vieille cour.
Toutefois , tant que le cérémonial ne
fut pas réglé, Joséphine eut à ses ré-
ceptions officielles peu de femmes de
l'ancien régime ; elle.se contentait de
les recevoir dans l'intimité des visites du
matin. Bonaparte lui faisait craindre de
se voir compromise par les prétentions
que pourraient élever quelques-unes
de ces dames ; et elle-mi-me craignait
de les blesser par l'étiquette que lui
imposait son rang d'épouse du chef de
l'état. Aussi n'y avait-il rien de plus
monotone alors que le château des Tui-
leries. Le premier consul ne quittant
pas son cabinet, M"**^ lîonaparte était
obligée, pour tuer le temps, d'aller tous
les soirs au théâtre avec sa fille. Après
le 'Spectacle, dont le plus souvent elle
n'attendait pas la fin ;, elle revenait ter-
miner sa soirée par un whist, ou, s'il n'y
J05
atait pli lisct de monde, par une
partie de piquet qu'rllc fai^Ait a^er le
>ccond roiiMil ou quelque autre iiri -
*onna -e de ceMc ^rauic. — ï.c% icm-
nes des aide>-de-rainp du piemirr
consul >eitaient lui tenir rompapiie.
C'étaient chaque )uur Ici rortnes per-
sonnes , les mêmes jeux. Mai« il eu
était autrement à la Malmaisnn, qui
fut comme le Trianon de la cour
consulaire. La société j était d'une
élégance .simple, également eloij^nce
de la cro>5ifrelé lepuliliraine et du
faste de l'empire. Lj iloiiapa:te me-
nait pa^5e^ ce qu'il a|>pelail irs jours
de /o.'/^/'', et lorvque plus tard il eut
Saint Cloud, il ne crva point d'afTec
tionner la Malmai$on. Tout le monde
jf était admis par M'"* Uonaparte sur
un pied d'égalité qui mettait cliacun à
M)n aise. Outie la lauiille Heauharnais,
et celle du prcLiier consul, il v \enail
des personnages distingués par leur»
fonrtioiis ; des savants, des artistes,
enfin «juclijur. nobles de l'ancieu ic-
j;'me, entre autres le prince de Toii.
Cette société, dont la plupart des mem-
bres étaient jeunes , se lierait sou>
rent à des exercices qui rappelaient
les jeux du collo|;e : entre aulics les
barres. C'était ordinairement après dî-
ner que Joséphine, Hortense, Rona-
parte et leur société se di\i:»aient en
deux camp> et vaquait à ce jokax exer-
cice. Pour complaire à Ju?»ephine, le
ftremier consul a\ait fait construire à
a Malmaison une jolie petite salle de
sprctacle, dont \^ comédien.^ ordinaire*
étaient Euj;ène, liortcuse, M'""' Mu-
ral, Junot, le^énéral I.aurû.ton, Bour-
rienne, le préfet du palais Didelot, etc.
Talraa et Michot présidaient aux répô
tilioiis. Après le spectacle on causait
jii:;qu'à minuit dans les salons du rez-
de-cluussce. Joséphine se plaisait en-
core à rassembler à la Malmai^nn des
objets d'art, ce qui l'exposait à des
boutades de son mari : «< car lorsqu'à
JOS
^43
m la faveur de mon nom , dit-il dani
M le Mtinurial , rlle était parvenue a
• s'emparer de quel«|ues chefs-d'iru-
« \re, bien qu'ils fussent dans mon
« palais , sous mes jeux , je me
m iruyais intle; ils nelaiimt pus au
• Muséum. •' Ce fut encore à la .Mal-
maison que Joséphiuc commenta celte
belle collection de piaules exntiqur^,
dont laplupart (M.' '• iulde
Kianre et l'uni -i iv«\4
liclé de nou\ellei iJcu; i. 1.
qu'elle donnait a celte ma
sanie, et qui se cuntim. ic
sous l'emplie, étaient ai , j,
Bonaparte, pour fa\urisri ion oMeme
de fu>ion. Il n'| ai ait jamais d'hom-
mes , beaucoup de femmes y étaient
incitées qui, dans roii;;ine, n'etaienl
pas admises aux graniU cercles de U
cour. l'Iu» tard elles ont fi^uicdans
\\4lmanachiinperial; mais alors elles
paraixsaieiit ne vouliur se laltacher
qu'a W"*^ lU Uruu/uirnais 4 umme à
une des leurs. Au surplus celle-ci ne
pouvait rece\oir personue ni acceptei
aucune inMtation , sans rauton>.tliun
de sou mail. Il lui fit uu jour une
Uès\erte mercuriale d'au»ir eli* tle
jcuuer chez une femme pour laquelle
lui-même prufcs^ail la plus hanle es-
time, M'"*^ de Vaines, veuve de l'an-
cien piemier commis des finance».
C'était une raison de prudeuce qui le
faisait a^ir ainsi ; il connaissait i'ex-
Iréiuc facilite de Joséphine à accueil-
lir toutes les sollicilalions. tnfin il
se mêlait de> détails de sa toilette ;
et sur ce point aus>i elle fut sou-
vent oblijjée de se conformer à son
^oûl. yjn jour de cérémonies, elle pa-
rut avec une robe qu'il n'aimait pas ;
il jeta violemment son ccriloiie sur
elle, pour la forcer d'en inetire une nu-
ne. Une autre fois, la veille «le la cé-
lébration du 14 juillet (180:2), il lui
dit : i< Joséphine, je veux que tu sois
« éblouissante de beauté et de parure,
1^1
JOS
« et richement habillée, entends-tu •' »
,< _ Oui, répondit-elle, et puis ensuite
«< tu fais des scènes, lu cries, tu rayes
« mes bons à paver sui mes niémoi-
« res. '» On peut dire qu'elle était alors
à l'époque la plus heureuse de sa vie ;
elle venait de conclure le mariage de
Caroline , une des sœurs de Bona-
parte, avec Murât. Nous avons dit
avec quelle chaleur elle avait contribué
à l'avancement de celui-ci. Convaincue
qu'elle se l'était attaché par les liens
de l'amitié et de la reconnaissance ,
elle avait souhaité ardemment de le
voir uni à Bonaparte par une alliance
de famille. Le premier consul qui sa-
vait que Caroline était recherchée par
le prince de Santa-Croce, hésita long-
temps avant de donner son consente-
ment en fa' eur de ^ïurat, le fils d'un
aubergiste ! s'écrialt-11 ; mais José-
phine mit en usage tout ce qu'elle avait
de moyens de persuasion pour lui
faire changer d'avis. 1! céda enfin ;
et , quand le mariage fut décidé , il
se montra d'autant plus satisfait que,
dans l'empressement de sa femme à
le faire conclure , il croyait voir une
preuve de la fausseté des rapports
que Junot lui avait faits sur l'in-
timité qui régnait entre Murât et
Joséphine. Ce mariage fut célébré sans
pompe au Luxembourg. Le premier
consul n'avait pu compter à sa sœur
que trente mille francs de dot ; pour la
dédommager, il prit à sa femme un col-
lier de diamants et le donna à la fu-
ture. Joséphine, fort peu satufaite de
cette soustraction , .«^'en indemnisa en
se faisant donner par les fournisseurs
des hôpitaux de l'armée d'Italie une
somme de deux cent cinquante mille
francs au moven de laquelle passa, dans
son écrln , des mag.islns du fameux
bijoutier Foncier , une magnifique
collection de perles fines , qui avait
appartenu à Marie-Antoinette. Tout
cela se fil à l'insu de Donaparle. Mais,
.105
la parure de perles ainsi acquise ,
la difficulté fut de s'en servir ; car
le premier consul connaissait tous les
bijoux que possédait sa femme. Se-
lon son habitude, elle s'en tira par
nn mensonge dont Bourrienne se ren-
dit complice , et persuada à son mari
que c'était le collier de perles qu'elle
avait reçu de la république cisalpine.
« M"'*^ Bonaparte , dit Bourrienne
t' dans ses Mémoires, joua son rôle
»c avec une dextérité charmante ; je ne
« me tirai pas mal non plus du rôle
« de compère, et Bonaparte ne se
« douta de rien (13). » Joséphine
n'eut à se louer dans aucune circon-
stance de s'être donné Murât pour
beau-frère. Cet homme, si brave à la
tête d'une charge de cavalerie, était le
plus faible des liommes dans toutes les
relations delà vie civile; et Caroline sa
femme , acariâtre , coquette et despoti-
que,ne laissait échapper aucune occasion
de mortifier sa belle-sœur. Cela n'empê-
cha point celle-ci de lui rendre un de
ces services dont les femmes apprécie-
ront surtout l'importance. M'"^ Mu-
rat, étant à la Malmaison, fut surprise
d'un évanouissement. Toutes les dames
présentes s'empressèrent de lui porter
secours , et Joséphine ne fut pas la
dernière ; mais en la délaçant elle
trouva dans sa robe une lettre qui
n'était assurément pas de son mari.
Sans faire semblant de rien , elle
la lui mit dans la main qu'elle tint
fermée dans la sienne tant que dura
l'évanouissement. Joséphine avait été
aussi mal avisée pour le mariage de
Murât qu'elle le fut plus tard pour
celui de sa fille Ilorlense ; et Ca-
(i3) Ronaparte , dnns ie Mémorial, explique
aiiioi la tendance de sa pmnièie A mine ou
mensonge : «i Une iinlrc nuance caractéiisliq<i« de
u Joséphine, c'élail sa constante dénépalion.
■( Dans quelque iiioin»'nt que ce fût, qnrhjne
« qucsiio'i ()iic j',! lui Csse, son premier niouvc.
« inenl t-t.iil la négation et »a picmière parole :
'< non. Ce n'était pas préciséim-nl nn mensonge,
" c'était une précuutioo, nue simple défensive.»
JOS
roline exerçait sur »on é^oux \e Ao-
potisror le |>lu> intolrrablr. Joséphine
ht tout ce uu'rile put pour lui ii^pi-
rer plus de tlouceur et Je souini\»iun.
•« Quoi, lui écrivait elle, xous faites
« pleurer ce pauvre Mural ! Passe en-
« corc pour tlé|»o<^fr k vos pieJi ses
- armes victoririJse> , Hercule filait
« aux pietK (l'Ompliale, mais il n'y
« pleurait pas. Avec tant Je m<)>eii>
« Je plaire , pourquoi préfrrei-voiiN
•• Je commanJer ' » CepniJarit le
pni J'arquisilioii Je la Malmaison
n'était pas pavé, et ce reliquat coiisi-
dérable n'était pas la seule Jette de
Joséphine. I^es erobellissemenls , les
constructions qu'elle avait fait faire
dans cette résidence s'élevaient k Jes
sommes itumrnsrs. J'."séphine ni Hour-
rienne , son intime ronfjJrut , n'o-
saient affronter la colère Ju premier
consul en lui parlant Je rrs Jettes. Ils
furent ptrvcnus par TallevranJ. qui,
toujours assez Jisposé à Je^seivii José-
phine auprès Je son maii, Jit à celui-ci
qu'un ^raiiJ nombre Je créanciers ex-
halaient leur mécontentement. Bona-
parte sentant que sa position exigeait Je
tarir promplement L source Je pareils
propos, orJonna sur-le-champ à Hour-
rjenne Je Jeman Jerà Joséplnnr !r mon-
tant exact Je ses Jettes. «« Qu'elle
« avoue tout, ajouta-l-il, j'ai Tardent
•« Je Hambourg ,1 i); j'en veux finir et
•< ne veux pas recommencer ; mais ne
« pavez pas sans me montrer le^ mé-
•« moires Je tous ces coquins-là. •» José-
phine fut J'abord ravie Jes dispositions
de son mari , mais cela ne Jura pas : elle
craignait d'avouer qu'elle Jevail Jouze
cent mille francs ; et, malgré les repré-
sentations Je Rourrienne , elle n'en
'ti) C'était qnatre million* qnr le %inH
de Hambourg aviit iiitot*» a* pirmier eoiitui
poar prévenir une a^reMinti inoïivee mr l'et-
iradi'ion i)e Naper Tandy et de Blackwril ,
rèfaçiéf irlanlait. Ces quatre millinrn furrnt
«iutribart en vratiScati-viu, et le treaor publie
nVn re^t r m.
JOS
a{6
a«oua que su cent mille, lu somme
était encore xsset forte pour Jonner Je
rhuraear à Rinapaile, J'autant plus
qu'il !>oupçoniiail -a fnnme de Jissimu
1er quelque chose. •< Kh' bien, Jil-il,
" prenrz six cent nulle francs ; mais
• liquiJez 1rs Jettes avec cette somme
M ri que je n'en ente nJc plus parler. »•
M"" Uonaparle lemit ses mémoires à
Bourrienne L'exaj;eration Je^ prix et
même Jrs fourniluies etatt inconie\a-
Lle. In marrliand rrrut tiente-cinq
mille (lancs au lieu de quaire-vin^t
mille, et eut l'impudence de dire qu'il
T j;a^nait encme. .^ur le mémoire du
marchand de mmies , étaient portés
trente-huit chapeaux neufs , seule-
ment pour un mois. !j trop facile Jo-
séphine se récria sur ce qu'elle appe-
lait simplement une erreur. Bref,
Bourrienne raconte qu'il réussit i
tout terminer avec les six cent mille
francs; et il est probable qu'il v eut
encore quelques petits profits. Mais
Joséphine retomba bientôt dans les
méme5 écarts. Heureusement , l'ar-
gent devint plus abondant. Otte in-
concevable manie de dépenser était
pour elle une cause incessante de cha-
grins , sa profusion irréfléchie rendit
le désordre permanent dans sa mai-
son ; il lui était impo»sible de jamais
fixer ses comptes ; aussi c'était con-
stamment de grandes querelles avec
son mari, quand le moment de paver
arrivait. Klle allait jusqu'à envoyer dire
à ses marchands de ne déclarer que
la moitié de leur; fournitures. Pour
en finir tir cet article , nous rap-
porterons encore une anecdote. Un
matin l'empereur entra, sans être at-
tendu , chez sa femme : il y trouva
quelques dames qui formaient le con-
•çil secret de sa toilette ; puis la fa-
meuse modiôte De^peaux faisant un
erave rapport sur les modes nouvel-
les. C'était précisément une des per-
sonnes à qui il avait défendu d'ap-
246
JOS
piocher de l'impératrice qu'elle ruinait.
Toutefois il ne fit pas d'éclat, et José-
phine, qui le connaissait si bien, fut la
seule qui comprît l'ironie de son rcp;ard
lorsqu'il se retira en disant : « Conti-
" nuez , mesdames , je suis fâché de
«' vous avoir dérangées. » Il donna
quelques ordres inaperçus ; et, lorsque
la marchande sortit , un agent de po-
lice la pria de monter en fiacre et la
conduisit à Bicétre. Cette affaire fit
grand bruit dans tout Paris. Beaucoup
d'amis de l'impératrice allèrent rendre
visite à la prisonnière. Bonaparte s'a-
musa beaucoup de cet intérêt excité
par une marchande de pompons{ib).
[[ est un aspect plus honorable sous
lequel , pendant le consulat comme
sous l'empire, Joséphine s'offre à la
plume impartiale de l'historien. C'est
la constante sollicitude qu'elle mit à
adoucir les malheurs auxquels le gou-
vernement réparateur de son époux
venait mettre un terme. Une foule d'é-
migrés lui durent lour radiation, leurs
biens, des pensions ou des setours.
Elle encourageait les arts et l'indus-
trie, elle se montrait généreuse envers
les artistes , comme envers les plus
humbles artisans. Si Je gagne les ba-
tailles, c'est toi qui gagnes les cœur s ,
est un mot que Bonaparte adressa,
dit-on, à Joséphine. Toute espèce de
malheur, sans distinction de parti, avait
accès auprès d'elle. Elle faisaitune pen-
sion à la nourrice du dauphin, et le Iré-
(ri»).Stani.'.las<:cGirar'Jin,qui raconte Janii sei
Souftniri critf anecdote, «'•f,';ileunf'nl rapportée
par f^on't.iiif, «t «Im» le Mémorial, ajoute cedc-
ijil plaisant: « Ce fut Sjvary que Bon^iparta
chir^ea de l'.in pslat on. Comme il se mettait
^n devoir d'obéir, Uuroc l'engagea à laisser
•-cli.ipper madpinois'Ilc Ucspeaux : «Non,par-
m bleu, j« n'en frrai rien, r<^plir|na S^ivaiy : tu
•( xtf %f.TJt\s pas aub&i indulgent si clli fourni><sait
•« dfs modes à ta frmuie. C.'e.si elle qui me
« ruine jjt* trouve une ocrasioii dir m'en venger,
«f je ne serai pas assci sot pour la perdr. . V.i ,
« mon cber, tu en ferais mitant si , a<i lieu de
« inadeinoi>ili'; Dispeaux. <:'<l;iil Lfroy !'■ i»o-
« diste ; car c'est cheï lui que ta femm» achète
" ses cUiffuiu. »
JOS
sor de ses libéralités n'était pas même
fermé à des personnes que leurs anté-
cédents révolutionnaires semblaient en
rendre peu dignes. Par suite de cette
bonté qui s'étendait à tout , elle se
chargea de l'éducation d'une fille na-
turelle que le vicomte de Beauharnais
avait eue au temps de leur mariage ; elle
la dota généreusement en la mariant
avec un préfet de l'empire. Depuis
plusieurs années, les artistes persécu-
tés, comme les riches et les nobles, se
contentaient de travailler dans la soli-
tude. Pour leur rendre l'inspiration, il
fallait non seulement bien payer leurs
ouvrages , mais encore entourer les au-
teurs de tous les égards dus au talent :
c'est ce que savait faire admirablement
Joséjhine, Excellente musicienne ,
connaisseuse en peinture , aimant la
lecture et la poésie , elle était digne
d'apprécier les artistes et les gens de
lettres. Sous ses auspices, Gros, Giro-
det, Guérin, et surtout Kedouté, le
peintre de Heurs dont elle fut l'écolière,
reprirent leurs pinceaux; Spontini ,
Paer, Boïeldieu leur lyre ; Fontanes,
Arnault, Andrieux, J.emercier leur
plume. M. Turpin de Crissé, lorsqu'il
venait à la Malraaison, s'y rendait dans
un cabriolet plus que modeste ; José-
phine le sut, et, sans le prévenir, elle
en fit acheter un fort beau avec un ex-
cellent cheval ; et cet amateur devenu
artiste fut agréablement surpris lorsque,
en donnant ordre à son domestique
défaire avancer son humble équipage
pour retourner à Paris, il vit appro-
cher l'élégant cabriolet qui lui était
destiné par l'impératrice. Une autre
fois en payant à M. Turpin un ta-
bleau au prix convenu elle y ajouta
un diamant do six mille francs, en di-
sant: <f Ceci est pour votre bonne
<« mère ; mais si je n'ai pas deviné son
« goût, diles-lui bien que je ne serai
«< pas choquée qu'elle change ce faible
« gage de mon amitié pour ce qui
JOS
« poarra lai convenir. " Protectrire
WmieàtVàtl Jnnuliqur, qui dr\iiil ù
fltnssaiii soui Ir ruri»uLl ri suun IVm*
pire, tWt rniilnbua ltrjiirnii|i a faire
obtenir à M '' |)iicl)r>iiuiN Min orJie
(le cJcliut, et lui fournit de brillants
coutumes pour paraitre. Klle lémoi|>nait
aov>i une vive aOection à M"' Kao-
court. A l'époque de son inrarréiation,
Jo^pliine avait eupo(irrnm|>a;;ne relie
comédienne, qui, devenue Mtrr, ouvrit
fdusieurs fois &a bourse \ ^I""' de Heau-
iarNais;eirelleci s'en souvint toujours.
Après son divorce, elle la reçut plu-
»ieurs fois à Navarre et à la Malmai-
son ; elle la faisait asseoir auprès d'elle,
et s*en occupait beaiicoup. Dans une
de cesviMte», Josèplune lui fit voir ses
serres, lui expliqua les moyens de cul-
ture ; et, bien qu'elle fût fort avare de
ses nouvelles planirs , elle en fit em-
pailler plusieurs, afin que l'actrice pût
les emporter comme un souvenir de re-
connaissance {\i\). Irriublante devant
son mari lorsqu'il s'agissait d'avouer
une dette , ou de soiliciler une ^^ràce
ordinaire , Joséphine montrait , dans
les occasions décisives, une énergie
dont la mollesse toute créole de son
caractère aurai» semblé la rendre inca-
pable : témoin la vi^ucir de ses rrpré-
senlalions malliru^eusement inutiles
lors de l'arrestation du duc d'Fln^liien.
Bonaparte, en cette circon>tance, la
repoussa avec une dureté 17' dont il
n avait pas donné d'exemple depuis sa
pre.Tiière entrevue au retour d*K;;>pte:
« Melez-vous de cr qui vous regarde,
• i61 On doi( k Joftrphioc l« uluraluiiion ea
Fmiic* iIq emm»ltm
(■: r . . ,.
• du )
• Ir» ir-'î- \f
m larinr* <
m non* rfr^.^^ ^
m «Tait qu'un- i.iiun latc.- riir.>..i«lu>Airr qui
m rùt pu 'ni»zfT m >danf |U>naparie i torlir df
• rhrt rilc dao* rr m.'tuiae. rt avant J'atc.ir
• pria 'ou»rn !• $ prrranlinns nrreasairei p-iar
« diMÎmulrr te tort qti* pouv;iit lai faire la
■ nunqua da toilctlp. •
JOS i47
M lui dit-il avec fureur ; ce ne sont pas
u la des afl'aires de f^inme. Laissei-
" moi. •• Klle fui plus lirurrii^edans son
intercession en faveur dt MM.de Po-
li;;nac,de Hiviere elCIiarlfsd'Ilozier,
impliqués dans la conspiration de
(àror^es Cadoudal. Knfin on peut dire
sans e&a^eral ion qu'elle cont i ibua beau-
coup a rendie populaire le gouver-
nement de son mari , en tempérant
les accès de colère auxquels Honaparte
était trop sujet à s'abandonner. Per-
sonnelle pouvait coroprendie comme
elle tous les necrels de ce caractère si
d.fljnle a dompter, et mrroe à définir ;
personne n'osait comme elle s'exposer
a son méconlentenicMl plutôt que de
ne pas bii donner un avis qu'elle
crovait utile; personne enfin n'aurait
su mettre plus de sa;;acilé, plus de
bienveillance il profiter de l'occa-sion ,
et , ainsi que l'a dit N\ aller Scott :
« Bonaparte violent par tempéra*
•• ment, «oldat par éducation et doué
« par la fortune du pouvoir le plus
« de>|iolique, avait besoin plus qu'au-
« cun prinre, d'un esprit tel que celui
<« de Joscpliine, qui pouvait intervenir
" sans importunile rt faire une remon-
«« trance sans offense. » Ixirsqu'elle
demandait une ^rire pour une faute
comini-e dans l'inlérieur du roénaf;e
impéiial, il était rare que Napoléon,
après avoir beaucoup tempêté, ne l'ac-
cordât pas. Dans ces moments il était
plein d'abandon pour Joséphine, et
le fidèle G)nslant le montre alors
embrassant sa femme au cou et à la
figure, en lui donnant des tapes d'a-
mi lie, et l'appelant ma grosse ht te.
Non moins obri;;eante pour ses enne-
mis que pour ses amis, elle ramena plus
d'une fois la paix dans la famille de son
ejhiux. Lorsque Bon.ip.irte se fâchait
contre ses frères ou contre ses sœurs ,
et les unes et les autres lui en donnaient
fréiuemment sujet, Joséphine disait
quelques mots et tout s'arranp;eait.
248
JOS
Le début d'une lettre adressée par elle
à sa belle-mère offrira la preuve de
cet esprit conciliant : « Usez , ina-
« dame et très-honorée mère, de Tas-
« cendant que vous donnent votre ex-
*' périence, votre dif;;nlté, vos vertus et
•« l'amour de l'empereur, pour rendre
« à sa famille la paix intérieure qui en
« est bannie. J'ai craint de mêler ma
« voix à ces discordes intestines , dans
«< la crainte que la calomnie ne m'ac-
«« cuse de les irriter en m'en mêlant.
«< C'est à vous, madame, qu'il appar-
« tient de les calmer ; et , pour cela,
<« dites seulement que vous en êtes
« avertie. Votre prudence aura com-
«« mencé l'ouvrage en signalant le mal;
« la leur en trouvera le remède. Je ne
« nomme personne, et voire sagacité
« devinera tout le monde, etc. » Bo-
naparte ne pouvait résister aux pleurs
de Joséphine qui, par un privilège assez
rare, donnaient un nouvel attrait à sa
£gure. Il ne résistait pas non plus à la
séduction de sa voix (18). Cest ce qui
Et dire au premier consul, de retour de
Marengo, quand il sévit partout ac-
cueilli avec enthousiasme : « Le bruit
« de ces acclamations est aussi doux
** pour moi que le son de voix de Jo-
" séphine. » 11 aimait à en faire sa
lectrice , et elle s'en acquittait avec
le charme qui se mêlait à toutes ses
actions. <C'est ainsi que , grâce à sa
soumission , à son dévouement , à ?a
complaisance sans bornes, elle finit
par subiuguer un époux qu'elle avait
été près de perdre à jamais Ni fa-
tigues ni privations ne la rebutaient
pour être plus souvent avec lui. Daus
les fréquents et rapides voyages qj'il
faisait , elle emplovait l'impcrlnnilé ,
la' ruse même pour le suivre. Quel-
que subit que fût le départ, elle était
toujours prêle ; « Montais -je en
« voiture au milieu de la nuit:* di-
" sait Bonaparte ; à ma grande sur-
fis; M< moire'' »!<• rcni«?nn».
JOS
« prise j'y trouvais Joséphine établie,
« bien qu'elle ne dût pas être duvoya-
« ge...., et la plupart du temps il fal-
« lait que je cédasse. » Une fois ce-
pendant il était parvenu à lui cacher
son départ, qui devait avoir lieu à une
heure du matin ; mais, en dépit de
toutes les précautions, une indiscrétion
avertit Joséphine au dernier moment.
Soudain, sans atlendre ses femmes, elle
saule à bas du lit, passe le premier vête-
ment qui se trouve sous sa main, des-
cend,en pantoufdesetsans bas, les esca-
liers d'un pas ra[iide, et se jette dans les
bras de Bonaparte au moment où il allait
monter en voiture. En vovant couler
les pleuis de sa femme, il s'attendrit ;
elle s'en aperçoit , et déjà, à peine vê-
tue, elle est blottie dans le fond de la
voiture. Bonaparte la couvrit de sa pe-
lisse, et partit en donnant ordre qu'au
premier relais elle trouvât tout ce qui
lui était nécessaire. H faut bien le re-
connaître , sous peine d'être injuste,
cette influence qu'elle conservait sur
son époux par ces petits moyens dont
les femmes seules ont le secret, elle ne
l'employait que pour servir les vérita-
bles inlén'ls de Bonaparte, et pour dé-
tourner les effets des résolutions préci-
pitées et prises dans un moment d'hu-
meur. I,a parlialilé de Joséphine, et
même de Bonaparte, pour les nobles
donna quelque temps l'espoir au parti
rovalistc de lui voir jouer le rôle de
Monck. Quand le 20 février 1800,
Louis XV III lui écrivit une lettre
dans ce sens, il fut sept mois sans faire
de réponse, tant il était encore incer-
tain sur le p.'ii li qu'il devait prendre à
l'égard ile:^ iiourbons ! Joséphine et
Ilortcnsc le conjincrent de donner de
l'espérance an roi. Les instances étaient
si fortes , qu'il dit à Bourrienne :
« Ces diables de femmes sont folles.
«< C'est le faubourg Saint-Germain
-' qui leur tourne la tête Je
" ne leur en veux pas. » Ce fut à
J05
rrllc rpoque que U iliitlir$i»r de (iiii-
flir, cliargre d'une mivsion du comte
d^\rlOl^, ^inl à Paris négocier ^efrè-
lemenl en fa\eur de^ Bourlioiis. Tiès-
eapablr par les {priées de s.i fi;:iire de
rnrlei leaucnup d'allrails i l'impor-
tanre de la nê'^ofialion , celle dame
p^nrlra facilement auprès de José-
pliin**, avec laquelle elle déjeuna à la
Milmaison. Klle lui parla des brill.inu
a\ar:ia^f^ que les princes étaient du-
po^r^ a offrir au premier consul , s'il vou-
lait rétablir le« Bourbons. Il devait être
connétable, recevoir la terre deCham-
bord, enfin sa statue serait ^rij;ée sur
la place du (arrousel. Joséphine de-
vait avoir le tabourel des duclievsw, six
cent niillr livres de rente et pour deu\
millions de diamants ; KM;;ene, être fait
grand d'K>pa;;ne; llorlense épouser
un duc, etc. 'I rotnani ces conditions
mjj;niGques , Joséphine «e liàta d'en
parler à Bonaparte qui répondit 3L\er
beaucoup de sens ; « Grite colonne
« dont on vous parle aurait pour base
« le cadavre du premier con>uI (19).
•« ^ ous imaj^inezvous que rrs revr-
•• nufiis ine laisseraient vivre un an,
•• un mois, une semaine ' Je serais
•« pour eux un objet de haine el d*c-
'« pouNanle.' Sépare de mes compa-
«« {inons d'armes, où serait mon appui
'• dans cel isolement :' Ma chère amie,
•« tu es une bien bonne femme, mais
•« tu manques de ^ens. Va, laisse-moi
«• fjire, tu auras ainsi que les tiens
" mieux que l'on ne t'offre el tu le
«' conserveras a\cc plus de sûreté. »*
Comme Joséphine el Ilortense insis-
taient, Bonaparte leur dit à moitié fâ-
che : «< Puisque vous êtes louiez deux du
o faul^otirg Sainl-(^iermain, allez vous
•♦ le;;er rue de Grenelle (-JO). » La jo-
■|<j^ A celU o<va»ior>. Louapartr ditail rocor*-^
à Laraynie : • il» Di'i.ffrcni une lutue ; maii
« i;jrr .m piolmul : ils |.ourrai«nt bien m'en
« r.4irc t<Oe pruon »
(jo) On peut hrc J^ns Ifi ittatoirwt de M. de
Clrnnmil-G«lleraii()r <{r« d«'iailt «Mn rurieut
JOS i49
lieduche^Ne était encore là; lesdiannes
de u figure, ses )eux, ses paroles,
étaient din;;r^ au succès de sa mission :
M elle ne sauiail jamais as%ez reconnaî-
tre , disait elle, le bonheur (|ue lui pro-
curait M"'" Bonaparte, de voir el d'en
tendre un (;rand homme, un héros, w
Mai%lt.ul fui iimlile: lad
reçut
dans L nuit l'ordre de quitter Paris.
Le secrel n'a\ail pas été si birn ;;ardé,
sur celle négociation avortée, que la
famille de Bonaparte n'eût eu con-
naissance des avanla;;es offetts exclu-
sivement i Joséphine el k ses enfants.
Ce fut pour M"** Ij'lilia et pour se*
filles un prétexte de se fadier sérieuse-
ment et d'accuser leur belle-fille el
scrur d'indiflricnce pour elles. |/avi-
dilé des Bonapai te, pour le pouvoir et
pour la .grandeur, formait un contraste
frappant avec la persi-taiice de José-
phine à éIoi;;ner louie idée d'eléxation
nouvelle poui son époux. Ces senti-
ments d'abné^alion politique qu'elle
cherchait à lui inculquer étaient in-
spirés chez elle par des craintes que
les événements justifièrent trop bien
plus lard. Klle se désolait d'avance
de voir de\ant elle les apprêts d'un lr(V
ne , et elle pleurait s()u\enl sur celle
idée avec sa fille : <« Nous mon-
M tons à une hauteur d'où la chute
«« sera terrible, di-ail-elle, quelquefois
** aux personnes de son intimité. Je
" voudrais que mon mari *.e contentât
«« de ce qu'il a, et de moins encore,
M pour que nous vécussions avec nos
<' amis dans une douce familiarité.
« Avant peu tout cela va disparaitrc
« et un espace immense nous .sépa-
« rera de vous. »» Des crainte^ super-
stllieuîcs bc mêlaient à ces picvisions.
Une pvlhonissc alors célèbre, la Vil •
lencuve , nui demeurait rue de Lan-
crv, avait dil à Joséphine pendant le
•or le ro)>li»iu« Jr Joié(.bine dé» I- M.irtiiiiqae.
linti que TrloRi; que fit d'elle L' m» XVill ile-
• ant r»m^ne M. dr rieruiopt-GBlleran.l»-.
35l
JOS
séjour de son mari en Egypte : « Vous
« êtes la femme d'un p;rando;énéral qui
« deviendra plus grand encore. Vous
K occuperez la première place de
« France ; mais ce sera pour en des-
« cendre. » L'attentat du 3 nivôse
("24 déc. 1800) vint lui prouver com-
bien toutes ces grandeurs étaient pé-
rilleuses. Le hasard qui sauva Bona-
parte préserva aussi Joséphine ; car
elle eût été atteinte par la machine
infernale , si sa voiture , qui devait
suivre celle du premier consul, ne se
fût trouvée assez loin en arrière. Elle
allait y monter lorsque liapp, chargé
de l'accompagner , critiqua gaîment
la couleur de son chale. De là une pe-
tite discussion prolongée une ou deux
minutes, durant lesquelles le piemier
consul qui n'attendait jamais paitit en
avant. L'explosion eut lieu comme la voi-
ture de Joséphine arrivait. Toutes les
glaces furent brisées et tombèrent sur
le cou et les épaules de M"^ de Beau-
harnais. Après cet événement, Bona-
parte assista au spectacle avec autant
de calme que si rien n'eût menacé sa
vie. Sa femme ne fut pas aussi maîtresse
d'elle-même. Rlle pleurait, et, quelque
effort qu'elle fit pour dissimuler ses lar-
mes, on les vit couler avec abondance.
Plusieurs mois après elle montra beau-
coup d'empressement quand don Louis
de Bourbon, roi d'Elrurie, et la reine
sa femme, vinrent à Paris. « Il nocs
« arrive un roi, s'écria-t-elle, et un
«« Bourbon encore! Je suis tout émue
« à la pensée que je me trouverai en
« prése/ice de ces grandeurs ! Je ne
«< saurai comment m'y prendre pour
" faire vis-à-vis d'eux la femme du pre-
«' mier consul. >» Toutefois, le res-
pect pour un sang ro\al n'<:touffa
pas riiez elle le désir de l'emporter sur
la reine d'Etrurie, p.ir Pélrgancecl l'é-
clat de sa parure. Cette princes<ie pa-
rut enfin. Quel désenrhaiitemcnt !
nulle grâce dans son maintien ; nulle
/OS
élégance dans sa mise, oii il n*y avait
pas même de la propreté ! José-
phine se plaignit d'un Iriomplie trop
facile. On ne saurait exprimer, en
effet , quelle importance elle mettait
à la toilette. Presque journellement
elle admettait auprès d'elle le marchand
de modes Leroy, pour parler bonnets
et chapeaux, et elle n'aurait sacrifié ces
entretiens à rien au monde. La violente
envie d'avoir un nouveau cachemire la
fit un peu déroger à sa bonté ordi-
naire. M'"*^ IMurat était convenue d'a-
cheter ce chiffon moyennant quatorze
mille francs. Joséphine alla sur le mar-
ché de sa belle-sœur et obtint le ca-
chemire. Grande querelle: Napoléon
intervint vainement pour la termi-
ner ; il fallut se fâcher. Il décida que
Joséphine ne porterait plus le chàle
et donna un collier de perles à sa sœur.
Dans cette circonstance, M'"^ Laetitia,
la mère de Bonaparte, témoigna le
plus vif ressentiment contre sa bru.
C'est alors que, sentant plus que jamais
le besoin d'avoir un appui dans une
famille où elle n'avait que des ennemis,
Joséphine amena par ses intrigues le
mariage de sa fille Ilortense avec Louis
Bonaparte. Le premier consul voulait
donner sa belle-fille à Duroc; les
frères du consul poussaient à ce ma-
riage , afin d'isoler Joséphine d' Ilor-
tense ; mais .ïoséphine l'emporta, et si
Louis Bonaparte fut toujours dévoué à
.sa belle-mère, celle-ri ne dut pourtant
pas se féliciter de son succès en voyant
à quel point ce mariage fit le malheur
de sa fille ainsi que de son mari. Ici se
place une grave inculpation qui fut ré-
pandue dans le temps par toute l'Eu-
rope, et (jui fondt-e ou non pèsera tou-
jours, en raison de cette publicité, sur
la mémoire de Jo-^éphlne, de lîonaparte
et d'IIortensc. On adii (jue le premier
consul avait eu pour sa belle-fille d'au-
tres sentiments que ceux d'un beau-
père; que Joséphine ayant la certi-
JOS
tuJf Jle ne lîonner jamais d'hérilifr à
son ^poiii favorisa cfllr liaison iiiccs-
lurusr, ft qne , quand l'arbre porta '•es
frttiu, elle \ou\u\ masquer par un ma-
riaî;e subil une inlri^ue qui Jejà se dé-
celait aui >r(ii des courtisans; nu'llor-
tensc eût volontiers épousé Uuroc ;
mai* que Napoléon songeant à l'avr-
nir, et ralrulanl dès-lor> la possibilité
d'une adoption voulut rourenlrer dans
sa prhprelamille. par un double infe^le,
rintri;;ue à laquelle il allait devoir l'a-
vantage d'être père. De l.i l'union si
malbenrrusr de Louis et d'Ilortense;
delà rnfin la naissance de l?ur fils aîné.
I-e$ Méraoiro de Ginsiant, ceu« de
Rourrienne ont repoussé ces bruits
comme un ii)en>on;;e. Napoiron , dans
le Mrmoriiil tir Suinte-Il < Irnr. en
se défendant contre celte imputation,
avoue du moins que son frère 1/Ouis
connaissait ces rumeurs, et que leur
publicité ct)nt(il)uait à le rendre en-
core plus mallieiiicux. Ouant à nous,
notre devoir rtait de ne point pas-
ser sous silence des bruits qui eurent
tant d'iiinucnce sur les dcïtinées de
cette famille, f.e lendemain de ce ma-
ria{;e, Josépliine partit avec le pre-
mier consul pour Lvon , où il fut
proclamé président de la république
cisalpine. Kllr parta:;ea les honneurs
et l'enlliousiasme dont il était l'objet
dans ceîle citéeju'il se plut à relever de
ses ruines. De retour k l'aris, Bona-
parte dressa toute> ses batteries pour
se faire déclarer consul a vie. On ne
parlait plus autour de lui que d'iiéré-
dilé et de d^ nastie ; rnai^ tous ces mots
d'ordre politique cachaient la lutte in-
testine à laquelle était en proie la fa-
mille consulaire ; ceux qui les mettaient
en avant y vov aient un moveii d'écon-
duire Joséphine par un divorce; et
c^lle-ci , en s'opposanl constamment
à l'influence de ces consed>, défendait
sa propre cau>p en même temps qu'elle
croyait servir le^^ intérêts de son mari.
JOS
i5i
Bonaparte lui parlait très-rarement et
avec peu de ronfuince de politique et
des affaires publiques. OurUcJi/r,
yuV//^/riV-o//'.'diNail il souvent. Joseph
et surtout I^cien étaient les plus ach.ir-
nés des cnnrmis de Josrphine. l'ieoc-
cupfs de la pensée de cniircnircr le
j '.r»>|ps mains de leur frrre,
lit trois mo>ens pour at-
ttiiidie ce but ; l'hérédile, le divorre
et l'empire. Dès Tannée 18(K) ^déc.) ,
Lucien avait fait paraître un petit
pamphlet intitule : Paralli-lr entre
i^sar, tlroirtiVeUrt lioiuifHirtr^ dans
lequel l'hérédité monarrhique rtait ou-
verleroent prechée. On peut voir dans
notre notice sur Fouché comment le
premier consul se crut obli;;é de dés-
avouer cette publication intempestive,
mais qui ne porta pas moins à José*
phine un coup bien sensible. Bour-
rienne, dans ses Mrmuirrs, rapporte à
celle occasion une anei dote qui d'ail-
leurs nous montre Bonapaile et sa
femme en déshabille. <• Je n ai pas
oublie , dit-il , qu'étant un )our en-
trée dans notre cabinet .sans être
annoncée, Joséphine s'approcha de
Bonaparte doucement, s'assit sur ses
j^enoux, lui passa légèrement les doigts
dans les cheveux et sur la figure ,
et, jugeant l'instant favorable, lui dit
aver une exprevMon de tendres >e : «• Je
«< t'en prie, Bonaparte, ne te fais pas
M roi. C'e-st ce vilain Lucien qui te
« pousse; ne l'écoute pas. »» Bona-
parte lui répondit sans humeur et
même en riant : «< Tues folle, mapau-
•• vre Joséphine. Ce sont les vic-llos
« douairières du fanbourj» Samt-Cier-
< main, c'est ta La Rochefoucauld
«« qui te fait tous ces contes la...; tu
«« m'ennuies, laisse-moi lranf)Hille. »•
\Ce jour-là, ajoute Bounienne, la meil-
leure intellifjencp ré;;nait dans le ména-
{;e;maisje me rappellequ'alorsia néces-
sité d'être témoin de quelque^ tendres-
ses affectueuses n'était pas la fonction la
25?
J05
plus n^rcable da secrétaire intime (lîl).
Cependant Lucien n'en poursuivait pas
moins son idée fixe. Lui, qu'on avait
vu naguère si ardent républicain ,
affectait déjà une morgue princière.
M'"^ Bonaparte lai demandant un jour
pourquoi il n'était pas venu dnier chez
son frère: «< l'arce que, répondit Lu-
« tien, il n'y avait pas de place niar-
»f quéc pour moi. Les frères de l>o-
« nartarte doivent avoir les premières
« places après lui. — Qu'entends-jei'
« lui répondit Joséphine; niais si vous
*« êtes le frère de lîojiapai te, rappe-
« lez-vous ce que vous étiez; chez
« moi toutes les places sont égales.
« Eugène ne rnc <li,':iit jamais une pa-
« re'lle sottise. » l»econnaissant que
toutes ses insinuations auprès du con-
sul ne pouvaient détruire rinfluencede
Joséphine, Lucien paraissait quelque-
fois se rapprocher d'elle. Ce fut dans
un de ces moments de feinte réconci-
liation qiM lui fit cette ouverture per-
fide: « \ ous allez aux eaux de Plom-
i( bières (août 1802), il faut avoir un
<' enfant d'un autre, puisqu'il ne peut
« pas ^ous en fan e. » Joséphine ac-
cueillit avec indignation ces paroles
qui pouvaient bien n'être qu'un piège.
Lucien insista : « Si vous ne voulez pas
« ou si vous ne pouvez pas , reprit-il,
« il faut que Bonaparte ait un enfant
« d'une autre femme, car il faut assu-
ff rer l'hérédité. C'est dans votre in-
" lérét, vous devez savoir pourquoi. »
Plus tard Joséphine devait se montrer
raoins scrupuleuse, et, après avoir vai-
nement employé tous les secours de la
médecine pour vaincre sa stérilité (22),
mettre son époux sur la voie ffune
grande superrlirr},' polilifjue H lu lui
proposer même dirertenient (23).
(21/ Mmioiin J- nourn,„..r, t. V, p. ^3.
(21; Ro'i'rifiiiic, dwi» <«•* Mimuot-s, r.iiin'-llc
lo joie «rfaiiliin- «iii'r|M ouv .1 I(i'nn|t;jrle, lot»-
quc, j)ar un tour cJc force me i ni, Ci-rn ail Cl
inoincntanoinent reparailrc olu-z }i>yt^i\\\nr: c^r-
t«iDt signes nieoiUKlt (le la fécondité.
'7V) .Vrmorii/ rfr Sainti'-Hilini'.
■lOS
Bourriennc a beau nier ce fait : sa dé-
négation motivée seulement sur ce que
Joséphine, qui lui (waii confié tant
d'autres choses, ne lui avait pas parlé
de cette communication extraordi-
naire, n'est d'aucun poids devant le
témoignage si positif de Napoléon.
Cette partialité poussée si loin par
Bourrienne , en faveur de M'"® Bo-
naparte , s'explique par la protection
constante qu'elle lui accorda auprès de
son mari ; et Bourrienne lui donna
en maintes occasions des conseils uti-
les. De tous les enneuiis de Joséphine,
celui qui sans aucun doute lui fut le
plus nuisible est Tallejiand. Son ini-
mitié datait de loin. Pendant l'expé-
dition d'Eg^-pte, alors que bien des
gens ne croyaient plus au retour du
général en chef, il s'était, dans plusieurs
circonstances, montré très-impoli en-
vers M'"^ Bonaparte. Unjour, particu-
lièrement,dînant chez Barras, et se trou-
vant placé entre elle et M"^ Tallien,
il mit tant de grâce dans les soins dont
il entoura celle-ci, et si peu de politesse
envers M'"*^ Bonaparte, qu'elle jugea
qu'il fallait que son époux fut mort, pour
qu'un courtisan du pouvoir aussi avisé
que Tallevrand la traitât si mal.
Cette idée, jointe à l'amour-propre
blessé, lui fit quitter la table en pleu-
rant. Tallevrand, qui n'avait pas oublié
cette circonstance et qui craignait le
ressentiment de Joséphine, employait
dès celte époque tous ses efforts pour
engager Napoléon à divorcer. Trois
mois avant L proclamation de l'empire,
il lui conseilla d'éjiouscr la princesse
Wilhelmine de liade, alléguant l'appui
que ce mariage lui ferait trouver dans
les cours de Btissie et de liavièie. Bo-
naparte balança ; mais l'ascendant de
Joséphine l'emporta encore cette lois,
et elle devint impératrice. Elle avait
alors un soutien dans Fouché qui lui
donna plus d'un bon avis ; mais, tou-
jours porté à l'intrigue pour tc rendre
JOS
.105
1$^
iiccri>4ire, il au^menlait le> (erreurs
de Joséphine par île rauN4c> confuJen-
rrs, menant en avant jusqu'aux Ji^eu
»e$ de bonne aventure, entre anlre^
M"* 1^ Normand que Joséphine con
stihait journelleiMcnt. Mais Kmtché fut
rrnvo\r. IWilerer, qui était rat;enl le
plu^ actif «le la faction des frère* de
Bonaparte, a\.iit travaillé avec ardeur
à la dis-race de ce iuini'>tre. I n jour
il «^emporta avec tant de violrnce
contre lui en pré>enre de M""^ n<ina
parte, que celle-ci lui répliqua avec
une exlrcme vivacifé: * I.c% Nraisenne-
«< mis de mon man sont ceui qui lui
rt donnent des idées d'hérédité, de dv-
«« nastie, de divorce, de maiia;;e.» Ce
nVlait donc pas à tort aue Fourhé
avait dit lors de son renvoi : « M"*'
«« Bonaparte me regrettera. »• Cepen-
dant Ilortense, devenue M""" l.onis
Bonaparte, était enreinte, et .-avançait
dans sa grossesse. Quelque tendresse
qu'eût Joséphine pour ses enfanis ,
elle ne vovait pas arriver, st l'on eu
croit Bounienne, l'époque île la dell-
rrance Je sa fille avec le plai>ir >i na-
turel au cirur d'une raere. Klle n'i-
gnorait pas les bruits répandus sur la
iiiison d' Ilortense avec le premier
consul, et celte rumeui lui faisait ver-
ser des larmes. Toutefois cette lutte,
entre les Bonaparir et les lieauhar-
nais, se termina à ra\anta;;e de ces
derniers. IjCs deux seuls hommes d'état
qui servaient alors Bonaparte, Tallev-
rand et Kouché, quelle que fut l.i dif-
férence de leurs sentiments personnels
pour Joséphine , sentirent (pic, dans
l'intérêt de la marche et de l'unité du
pouvoir, riiifluencc douce et bénigne
des Beauharnais était préférable aux
empiétements excessifs et impérieux de
Lucien, qui à lui seul aurait voulu ré-
genter l'étal el ne laisser à son frère
que la conduite de l'armée. Tout fut
politiquement concilié par les deux mi-
nistres; et, à la suite d'une scène vlo-
leuleenlie le» deuv frères, Lucien se
mit en route pour Madrid, avecle litre
d'ambassadeur extraordinaire. Ainsi
Joséphine se >it dclt\iée des obses-
sions de son beau-frère. Au milieu de
ces petites inti igues de palais Ifs grands
ré>ultat>> poliliqiirs s'accomplusaienl.
Le concordat fui pioclamé (I8()J); et
quand te jour de l'jqur^ le pirmier
consul alla assister au J't Drtim qui
fut chanté a Notre-Dame, .M"**" l»o-
naparle »*) rendit de >nn ci^té en
grandr pompe. Soixante ou qiiilrc-
Vfinits dame> furent déM;'néf> pour
l'accompa^nei . Klle n'avait pa» meure
de daiiir> du palais ; seulement , dit
M'"'' d'.Vbrantès, quatre dame< de
cumpa;;nie s'étaient presque volontai-
rement mises en possession de cet em-
ploi. Un scnalU!»-cotisullc du V août
1802 avant proclame Bonaparte con-
sul à vie, il V eut ce jo'irla réce|)iio:i du
corps diplomatique et des aulonlr^i.
Tout dans les giaiids appartemens des
Tuileries aval un air de fête et d'ap-
parat ; mai^ Joséphine ne vovail pas
moins dans ciia(]ue pas du {iicmier
consul vers le trAiie un pas qui l'eloi-
gnait d'elle. l'iiste, dévorée dp cha-
grin, il lui fallut faire les honneuis de
la réception du soir: elle s'en aru titta
avec ià grâce accoutumée. Immédiate-
ment après le concordat , elle insista
non sans succès auprès de son mari
pour qu'il fil pavser une loi d'amni:>tie
en faveur des émigrés. Au mois d'oc-
tobre de celte même année, elle l'ic-
coinpagna dans son vovage eu Nor-
mandie. Partout elle reçut les honneurs
réseï vés aux tètes couronnées, et lais>a
des souvenir^ de on affabilité tt de ses
bienfaits. Peu de temps après sou re-
tour, une décision des consuls accorda
i M"" Bonaparte quatre dames pour
lui uiiUr à faire les honneurs du
palais : c'élaicnl M""'' de Kéinusat,
de Talhouet, de Luçay cl de Lauris-
ton. F^ Malmalsoii ne suffisant plus
254
JOS
au premier consul, dont la maison, ainsi
que celle de Joséphine, devenait de
jour en jour plus nombreuse, il s'était
établi à Saint-Cloud au printemps de
cette même année (1802). On recon-
nut Tinfluence de Josépiiine au soin
que Ton eut de rendre aux anciens
serviteurs de Marie-Antoinette , les
places qu'ils occupaient dans celte ré-
sidence. Ceux qui étaient trop âp;és
pour les reprendre reçurent des pen-
sions. Au mois de juin 1803, elle visita
avec son mari les côtes du Nord et la
liel^ique. A Anvers elle fut haran^^uée
par l'archevêque de Malines, Roque-
laure, qui lui dit entre autres flagor-
neries : « Après vous être unie au
u premier consul par les nœuds
« sacrés d'une alliance sainte ,
« vous vous trouvez aujourd'hui envi-
<f ronnée de sa gloire, etc.» On se
demanda dans le temps si ce n'était
pas manquer aux convenances ecclé-
siastiques de parler ainsi d'un mariao;e
qui n'existait que sur les registres de
l'état civil ; ou bien le prélat avait-il
seulement recouru à cette formule pour
engager les époux à accomplir ce qu'il
les félicitait d'avoir fait. C'est vers
cette époque (6 nov. 1803) qu'eut
lieu le mariage de Pauline, sœur de Bo-
naparte et veuve du général Leclerc,
avec le prince Borghèse. La nouvelle
princesse avait toujours été l'ardente
ennemie de Joséphine ; elle pleurait de
dépit chaque fois qu'elle la voyait cou-
verte de diamarjls, environnée de tonte
la pompe royale. Aussi ce fut un vrai
triomphe pour elle de se faire annon-
cer comme princesse JiorgJièse dans
le salon de sa belle-sœur qui n'était
encore que W"^ Ihiiapartc. Le com-
mencement de l'année IHOi , qui de-
vait donner un trône à Joséphine, fut
marqué par des événements qui l'af-
fecterenl d'une manière sensible. L'ar-
restation du général Moreau, impliqué
dans la conspiration de Georges Ca-
JOS
doudal, excita d'abord dans la famille
de Bonaparte un sentiment de joie.
Joséphine elle-même ne fut pas in-
sensible à l'humiliation de l'épouse et
surtout de la belle-mère de ce général.
C'était pourtant elle qui avait rnarlé
Moreau à M"^ Hulot, son amie, créole
comme elle. Bientôt l'élévation de Jo-
séphine excita la jalousie de la mère
et de la fille : c'étaient des propos ,
des caquets perpétuels contre la nou-
velle habitante des Tuileries. Ce fut
bien pis quand l'étiquette empêcha
jyjme jyjQpggy d'être admise chez la
femme du premier consul aussi libre-
ment qu'autrefois. Un jour qu'elle
s'y présenta sans être aussitôt re-
çue, sa mère qui l'accompagnait dit
assez haut pour être entendue que
la femme du vainqueur de Holien-
linden n'était pas Jaite pour atten-
dre. Ce propos arriva à son adresse et
rendit plus froides et encore plus rares
les relations de Joséphine avec M/"^
Moreau. De là ce premier mouve-
ment d'une joie maligne après l'ar-
restation du général ; mais Joséphine
revint bientôt à de meilleurs senii-
ments : sa fille, les sœuis de Bona-
parte en firent autant , et Joséphine
plaida la cause de Moreau auprès de
son mari. Elle intercéda vainement
aussi en faveur de Toussaint- Louvcr-
lurc et désapprouva la désastreuse ex-
pédition de Saint-Domingue. Nous
avons dit plus haut quelle fut sa noble
conduite lors de l'assassinat du duc
d'Knghien. Ce grand crime fut commis
le 21 mars 1804 ; et le 18 mai suivant
Joséphine était impératrice. Ce jour-
là Cambacérès et le sénat, après avoir
félicité le nouvel empereur , allèrent
donner pour la première fois à l'impé-
ratrice le titre de majesté. Peu de
jours après, elle fut haranguée par Fabre
de l'Aude, au nom du tribunal. U lui
adressa ces paroles qui , malheureuse-
ment pour elle, n'étaient pas une pro-
J05
ph^tif. ■ hti feronifs r(|>rrnnrDt fn6u
•• leur ring dont nnr ^ros ii'ipcifunrilc
M cJ. '. > a>i'l cloi{;iiee'. ; /joiij
m ni . V film irfxtuse dr tr-
•I poux.** Ia- bnlLnif'» re\crir^ iloiil
«'était ber ce re>{)ril suprr^kl ilirui de Jo-
s^hiiie étalent enfin réalisées; mais elle
n'en était pas plus heureuse. Klie ne
pouxait délarlier l'idée de son éle\alion
de la sanglante tra^rilie qui l'avait pré-
cétire. Dans un entretien ronfidenliel
qu'elle eut alors avec lloui tienne, elle
lui disait : m I^ titre d'impératrice ne
M m'éblouit pa>. J'au;;ure mal de tout
« cela pour lui , poui mes enfants et
« pour moi. \jf> misérables doivent
« être contents! vovez ou ils l'ont
« poussé ! (^tte mott empoisonne ma
« vie. *• Elle ne dissimulait pas ses
craintes devant Ijonapaite. •• Lessouve
« rains ne s'accoutumeront pis à fra-
« terniver avec nous, lui dit-elle uu
« jour ; on nous traitera de parvenus.
M — Certainement , répliqua Napo-
■ léon ; mais si avant dix ans ma dv-
M nastie était la plus ancienne de
•I toutes ! M Jamais Joséphine n'avait
été moins satisfaite qu'à celte époque
où sa haute fortune excitait l'élonne-
ment du monde. Bonaparte s'était af-
franchi peu à peu de l'avyujétis^eraent
d'un ménage bourgeois : Il avait cessé
d'avoir la inrme c!iaiiibre el le mrme lit
que sa femme. <« Tant que dura celle
« habitude, a dit N.ipoléon à Saiiile-
«• Hélène, aiicnne de mes pensées, au-
•« cunc action n'échappait à José-
« phine ; elle suivait, sal>i>sait, dévi-
er naît tout ; ce qui parfois n'était pas
« sans j;èue pour moi et pour lei af-
« falres. >» Puis il raconte qu'avant
été obli{;é, i l'époque du camp de
Rouloj^ne, en 18or>, de prolonf;or son
IraNail forl avant dans la ouït, José-
phine, quand il revint se coucher, lui
fit une scène de jalousie. Il se Ticha à
son tour, s'évada, et ne voulut plus
reprendre son assujélisscmcnt. II y a
JOS
^5
Îuelqae ineiactiiude dan& ce récit.
)n voit dans les ^!éraoires de Con-
stant, qui devait être mieux informé,
que, dès le consulat, chacun des deux
époux ava t eu sa chambre à cou-
cher. " Celait une j^iaudejoie pour
« M"" Ilonaparle , dit le minutieuK
M valet de chambre , quand elle re>
M cevail la visite de son nuii; toute
M la maison en était instruite le len-
M demain. Je la vois encore dire à
« tout venant, en frottant ses petites
« nains : Je me suis U%>ée tard
e uujiMirifhui ; mais, voyei v>ous ,
« cest ifue lluruipurte est venu
*> piisser la nuit Ui'ec mut. etc. ■
On peut concilier les deux versions eu
disant qu'à l'epoijne du camp de Bou-
logne ces visites conjugales cessèrent
toul-à-fait , et avec elles s'évanouit
presque toute rinflucnce de Joséphine.
Devenue impératrice, l'orgueil de son
nouveau titre n'avait rien chan;;é à
l'aménité de son caractère; mais au-
tour d'elle commença i se déplover ce
faste, cette sévérité d'étiquette aux-
quels Napoléon attachait une si haute
importance, et qui étalent si forl antipa-
tltique>au caiactrre plein d'abandon de
Joséphine. Il lui donna, pour dame
d'honneur, la comtesse de l.a l\oche-
foucauld, femme remarquable par tes
qualités du citur el de l'esprit , el
qu'il chargea de tout ce qui tendrait
à enviionner l'impératrice de con-
sidération et d'éclat. •« Informei-
« TOUS, lui dit il, de ce qui se faisait
M à la cour de Marie-. \nlolnelle ,
H quels usa;;es , quelle étiquette y
« étalent observées, el accouimoJez-
M vous aux habitudes pré.senl<*< ; ne
«« craî;;nei pas de renlrer dans les an-
<« cienncs coutumes, etc. >» Joséphine
aura't cependanl fait un aulr»* choix :
>^ulant tenir la parole qu'elle avait
donnée en priion à la duchesse d'Ai-
guillon, devenue M""" Louis de Girar-
din, elle l'avait demandée pour dame
af)6
JOS
d'honneur; rempercjr ne le voulul
pas, parce qu'elle élalt divorcée. Ce
fut un vrai clia^rln poiir Joséphine.
A celle occasion elle écri\il à son an-
cienne amie. « L'impératrice do France
« est la première esclave de Tein-
« pire et ne peut acquitter la dette
« de M'"^ de Beauharnais ! C'est là le
« supplice de ma vie , et c'est ce qui
« vous expliquera pourquoi vous
« n'occupt^z pas une place près de
<t moi ; pourquoi je ne vois pas
«c M*"* Tallien, etc. » Outre sa dame
d'honneur, Joséphine avait une dame
d'atours et trente-six dames du palais,
dont vingt-quatre françaises et douze
jtalieniies; elle eut aussi des chambel-
lans, des écuyers , etc. Dans ce per-
sonnel, un pe'lit nombre de noms nou-
veaux se mêlaient aux noms les plus
aristocratiques de l'ancien régime : c'est
ce qui faisait dire quelquefois à Joséphi-
ne qu'elle était très-malheureuse de res-
ter assise , lorsque des femmes qui
avaient été ses égales ou même ses
supérieures entraient chez elle. Parmi
les dames du palais était M'"^ de Che-
vreuse, qui eut le tort d'affecter des
airs de supériorité à l'égard de l'im-
pératrice. Napoléon l'exila de Paris,
et Joséphine sollicita son rappel à
plusieurs reprises , mais sans pou-
voir V obtenir. L'empereur disait tou-
jours : « Je ne veux pas d'imperli-
« nente chez moi.» On avait donné
à Joséphine un assez grand nombre
de femmes de chambre qui devaient
faire leur SiSrvicc par quartier. Arrivée
à cet .Tge où l'on a besoin de tout
l'art, de tous les mystères de la toi-
lette, elle pria l'empereur de lui lais-
ser seulement ses anciennes femmes de
chambre ; et , à la réserve de l'une
d'elles (M"**" Saint-llilaire), qui, sous
l'ancien régime, avait exercé les mê-
mes fonctions auprès de M"'^ Adé-
laïde , on fjl des dames d'annonce de
toutes les nouvelles femmes de cham-
J05
bre. Elles se tenaient d.uis Tenlrée des
petits appartements, cl n'avaient d'au-
tres fonctions que d'annoncer l'em-
pereur, lorsqu'il venait chez l'impéra-
trice. M™*^ de Lavaletle , dame d'a-
tours , s'était persuadée qu'elle de-
vait avoir la direction entière de la
toilette ; mais Joséphine pour qui
cet objet était la plus sérieuse des
occupations, et qui trouvait d'ailleurs
que sa nièce manquait de goût, lui si-
gnifia qu'elle entendait choisir elle-
même ses élofies et ne céder ce soin à
per.«onne. 11 existait une grande ja-
lousie entre M'"'^ Saint-Hilaire , sa
première femme de chambre, et M"^
Avrilloii qui, attachée depuis longues
années au service de M™^ Bonaparte,
conservait avec elle le ton de la fami-
liarité. Jamais les piérogatives des am-
bassadrices entre elles n'ont occasioné
autant de débats qu'il s'en élevait
quelquefois entre les femmes de José-
phine. Un jour les deux rivales avaient,
chacune de son côté , réclamé le re-
dressement de leurs griefs respectifs
près de leur maîtresse , qui , com-
me d'habitude , donna raison à celle
qui lui parlait. Il en résulta que le
désordre devint plus grand , ciiaque
partie se trouvant forte de l'approba-
tion de sa maîtresse. 11 fallut que
M'"*^ de La Rochefoucauld intervint;
et désormais il ne fut plus permis aux
femmes de l'impératrice de venir l'en-
tretenir de leurs débats. Ce fut le di-
manche, 15 juillet 180i, jour choisi
à dessein par Napoléon, afin d'éluder
l'anniversaire du 14 juillet , que fut
déplojée pour la première fois, aux
)oiix des Parisiens , la pompe im-
périale. Pour la première fois , l'im-
pératrice Joséphine eut son cortège
distinct de celui de l'empereur. Re-
çue à la porte de l'Hôtel-des-lnvali-
des par le maréchal Serrurier, gouver-
neur, et à l'entrée de l'église par le
cardinal de Belloy, elle {ut conduite
JOS
J;iin nne inbune lli«po^cc potii elle
en face du I^^^ne Je rKupcreur, qui
reçu! ce jour-la le ^errnrnl tie i)i\-neuf
cents chevaliers de la Lr^ioiwl' Hon-
neur. Trni> jours aprè^ il se reiidil au
camp de Boulogne. »an>e:nmcner l'im-
përalrice qui dut ie préparer à faire un
%o\ar;e en Belj^Kjue, où elle devait re-
trouver son mari au clialeau de I^-
ken. Bien qu'elle fût en proie à de
cuisants chagrins ^rar, san< pailerdes
suites trafiques de la run<piiaiion de
Georjjes CadouJ.il . plus que jamais
la craiule d'un divorce ri cerla-nes in-
fidélités de son époui lui drci;iiairnt
Tàme) , elle était trop femme pour
que rien lui fil né-^li^rr les affaires de
toilette : et ce fut pour elle une °ra*e
question de li. ctder l(*s parures qu'elle
emporterait dans ce voTa;;e. Au mi-
lieu de ces préparatifs qui se faisaient
k Saint-Cloud, elle alla pendant un
jour respirer plus librement à la Mal-
maison, où il lui était du moins per-
mis de se soustraire a réti(|uelte.
Elle V reçut la visite de lio:irrienne,
qui n éta;l plus secrétaire de Njp'dcon;
et comme il la saluait du titre de ma-
jesté : - Ah! Boiirrienne, lui dit-elle,
« laissex-moi oublier ici que je suis
M impératiicc ! » Puis, dans la suite
de l'entretien, el'e se félicita d'axoir
contribué à sauver la vie de MM.
de Poli;;nac et de Ui^ère : elle dit
encore : h || v aura du moins quel-
M ques familles qui lui devront de la
« reconnaissaiire; il i>'e<il pas mécliaiit,
«« ce sont ses conseillers qui lui font
« commettre de vilaines actions. »
Dans ses vova^es, Jo>épliiiie n'était
pas plus libre qu'aux Tuileries. C*
qu'elle devait faire, ce qu'elle devait
dire était ré^lé d'avance par l'empe-
reur ; chaque malin elle était obli-
gée d'.ipprcndre son rôle de la jour-
née. Ce vova^e eu r»elj;ique et dans
les provinces Rhénanes dura trois
«ois. Alors se préparait la confédéra-
t.win.
X)S
rb
Ijuti du lUtiii duut Napoltun allait \e
déclarer le protecteur. Joséphine tint
sa cour a\ec beaucoup d'éclat à Aix-
la-Chapelle. atten«l.-)ul son époux qui
était enrore au camp de Uoulo;;ne. Le
l.'ï août elle fit dans la cathédrale ,
au nom de l'empereur, la distribution
des décorations de la ï>^tnn-d'llon-
neur ; mais, au milieu de tant d'érlat et
d'adulations, elle eut plus d'i.ue fois k
souiïrir de l'humeur despotique et ja-
louse de son époux qui, bien qu'eloi-
f^né, était informe de ses moindres ac-
tions. Dans une réreplion, un vieil of-
ficier (;éne!al, peu au fait de relii|iirtte,
s'assit sur le même divan que l'im-
pératrice; et celle-ci, pour ne pas hu-
milier un militaire honorable, parut ne
point s'apercevoir de cette inconve-
nance. Bonaparte, qui vint la rejoin-
dre k Aix-la-Chapelle, lui fit un cri-
me de celte condescendance et lui
adressa de vifs reproches. I-a ville de
Mavence oflril à rimpéralrice un bal
le 25 septembre. Klle était malade
ce jour- li. Napoléon la força de se
lever en la tirant brusquement du lit
par un bras. Joséphine, a\ec sa sou-
mission ordinaire, s'habilla et parut
une dem- heure à la fêle. Mais cette
abné;;ation d'elle-même faisait place
à une résistance persévérante, lorsque
les intérêts de ses enfants étaient com-
promis. Quelques jour^ auparavant, en
recevant les instructions de son mari
pour la présentation des princes de
B.ide, elle lui demanda l'étiqurlte qu'il
fallait suivre pour son fils. Ijonaparte
répond t sèchement qu'il ne serait pas
présenté. Joséphine lui remontra (ju'il
n'était pas convenable que le fils de
l'impératrice ne fùl rompic pour r en ;
qu'elle n'avait jam.-ïis rien d«>m.Tndc
riour elle, qu'elle nacait pas pleuré
pour être princesse {'2\) , mi\9> (\\it^
(il) .VUu» on lU» «Œur» «le Itowa[>ari.' aux-
qullf» on n'⻫ii p»» ytn*é Amn% le premier
inofM'nt qatl'oo cré« l'eaipire. et qui »inr*i>«
'?
i5i>
JOS
son fils devant dîner chez elle avec lei
princes allemands, il fallait bien qu'il
lût présenté; que, dans l'ancien régime,
si M. de Beauharnais eût voyagé en
Allemagne il aurait été admis partout.
Ces derniers mots excitèrent la colère
de Napoléon : il répondit qu'elle ci-
tait toujours son impertinent ancien
régime; et que , après tout , son
fils pouvait ne pas dîner ce jour-là
chez elle. Pendant que cette scène
avait lieu avec l'empereur, Talleyrand,
toujours disposé à susciter des con-
trariétés à Joséphine, prélendit user
des prérogatives de sa place pour dé-
signer le prince Eugène parmi les
grands-officiers de la couronne qui de-
vaient aller prendre les princes à la
portière de leurs carrosses. Kugène
conla cette nouvelle malice à sa mère,
et convint avec elle qu'il n'accom-
pagnerait pas les princes, qu'il se ren-
drait le soir dans le salon un peu
avant six heures , et que Joséphine y
serait pour le présenter. La chose se
passa de cette manière ; Bonaparte ,
qui n'arriva qu'après six heures, et
dont la colère était calmée, ne s'in-
forma pas même si la présentation
avait eu lieu. Cependant il avait pour
Eugène Beauharnais une véritable af-
fection, il lui en donna même de gran-
des preuves Et c'est ici que Joséphine
mettait en pratique, avec un tact ad-
mirable, la connaissance parfaite du
caractère de son époux : « Jamais, a
«« dit -Napoléon à Sainte-Hélène, il
u ne lui est arrivé de rien demander
«c pour Eugène, d'avoir jamais même
M remercié pour ce que je faisais pour
« lui; d'avoir même montré plus de
tt soin et de complaisance le jour des
*t grandes faveurs , tant elle avait à
u cœur de se montrer persuadée et de
« me convaincre que tout cela n'élait
«« pas son affaire, mais la mienne. »> Elle
!• iRiiii nidin <^u,>|ilier iiv*c l.irm» leur frir*
poar obttoir i« titre <!• princ«t>rt.
JOS
avait sans doute la pensée que Napo-
léon viendrait à adopter Eugène pour
son successeur. Deux naois après le
voyage en Belgique, eut lieu la céré-
monie du sacre. Trois jours aupara-
vant, le cardinal Fesch, d'après la
demande formelle du pape, avait donné
la bénédiction nuptiale aux époux, à
minuit, dans la chapille des Tuile-
ries, en présence d'un petit nombre de
témoins, au nombre desquels étaient
Eugène et Duroc. Joséphine voulut
avoir son extrait de mariage qui lui
fut délivré. Elle le remit à son fils
qui l'emporta en Italie, dans la crainte
qu'il ne fût égaré ou soustrait. Le pape
Pie VII aimait beaucoup Joséphine
qui lui écrivit alors pour lui confier
ses sentiments secrets. Le premier ,
celui qui dominait tous les autres était,
disait-elle, la conviction de sa faiblesse
et de son incapacité; puis elle ajoutait :
<f Mais que d'autres écueils environ*
« nent le rang où il me fait monter!...»
Le jour du sacre, elle reçut l'onction
sainte de la main du pontife et la
couronne de celle de son époux. Ce
jour, en apparence si brillant, fut à ce
qu'elle dit depuis à ses intimes le plus
triste de sa vie , tant elle était préoc-
cupée de l'idée que cette couronne
chancelait déjà sur sa tête ! Mais, à
ne juger que l'extérieur (2.5), qui ne
l'eut regardée comme digne d'envie
en la voyant éclatante de parure et
chargée de plus de diamants qu'aucune
souveraine peut-être n'en a jamais
porté? L'armoire aux bijoux qui avait
appartenu à Marie-Anloinette et qui
n'avait jamais été tout- à- fait pleine,
était trop petite pour l'impératrice;
et lorsque plus tard , après son di-
vorce , elle voulut faire voir toutes
ses parures à plusieurs dames qui en
(i5) Ainsi on lit <lan» cerlains iiiéinoires
qu'au iiKiiiii-nt où NupoléoK couronna Jo.séphina
à ^'oriiiux (It-viiiit lui, elle clait ravistantt dt
bonheur tt d* beault.
JOS
tMnoignaifut le dr^ir, il fallut fiirr
drevver une «'normr taMc pour \ «!'-[. tv
ur 1rs éfrin*; cl, b uIjIc iif ^uftisjul
Ea*, on ni couvrit fiirorf d'autrcsmcu-
les. Après a»oir joui «!r raiîmiration
muflle Ae rr« damrs, JoMphine Irur
dit: « CroNrx moi. n'rinirz ^uct luxe
« qui nr fait pu le bonheur. Sun;;ez
« que j'ai été très- malheureuse en
« possédant des bijoux «i rares. Dan»
•• le rommenremetit de mon flon-
« nanle lurlnne. je me Mii-i .imu*ée
* de ces folifirlift* l'eu a peu je m'en
« suis »i bien «lé^dùlée, que je n'en
« porte plu>. D'aillfiir* mille événe-
• menls prineiit pri»er île ces super-
« be^ inulililés: n'ai-je pas les Ari-
« ^«o/r//rî de la reine Marie Anloi-
« nette \j2Ct) :* m Celait après son di-
vorce que Joséphine parlait ainsi ; mais
elle n'axait pas toujours pen«.é si sa;;e-
inent. Son ^oùt pour les bijoux s'ëten-
dil pendant quelque tempN aux ru-
rio- rs , aux métiailles , aux
pif Dec on fl.ili.iil celte fan-
taisie, tl huit par lui persuader qu'il lui
fallait a\nir i la Mahnaison un cabinet
d'antique>, avec un conservateur, (le
projet «'accomplit, et le nouxeau cabi-
net s'enrichît proniptemenl aux dépen.s
èt<- autres palai.s; mais ce ;;nAt venu su-
bitement se passa bientôt ; le cabinet
fut pris pour faire un s.ilon de compa-
gnie, et les antiques reléj;ués dans une
antichambre. A quelque temps de U ,
on mil dans la trie de l'impératrice de
se faire monter une parure de pierres
grecques et romaines. Klle eu Ct la
demande à l'empereur qui refusa d'a-
bord, mai^ il finit par coder ; et I hir oc,
charrié d'aller au cabinet des antiques
choisir ce qui était nécessaire, mit la
main sur les plus belles pierres de la col-
f i6 le» ùngio.'eiirs »nol <Jrs poim d'an tral
diam'Kt •all^ jkiiii > niftra-Z'-. C.rWrt dnnt il
•»( qur*iio» i> i nul cl.- racbrtrrt , a la vente
après lir cet <ie JuM-^bioe, p«r ■tadam* U d««
•ht»»« il'ADgooU'in*.
J05
a »i)
lection l.e joaillier delà couronne les
munta ni.i.u Tw|uemenl; mais cette
pamir riail ^i hnirde que l'imprra-
trice lie la porta jamais. (Quelques
rotiis après le »arre ini|»rrial , Napo-
léon 'oii^ea k se faire couronner roi
d'Italie. Dans un entretien conGden-
tiel avec Uourrienne, récemment nom-
mé par lui ministre résident i Ham-
bourg, il lui dit : « Il faut qu'axant
• mo'i départ pour l'Italie vous me
m reudiex un service Allez viiir
m ma femme, tachei encore une fui»
•• de lui faire entendre rai»on sur se»
« folles dépenses; chaque jour )'en
« découvre de nouvelles, (^uand )e lui
« en parle, je me farhe, je m'emporte,
m elle pleure, je lui pardonne, je paie ;
•• elle fait de belles promeA>es , mais
m le lendemain c'est la même chose,
« et c'est toujours à recommencer. Si
M du moins j'avais eu un eulant d'elle !
« c'est le tourment de ma vie que de
« n'avoir pas d'enfants. Je comprends
** que ma position ne sera assurée
t que quand j'en aurai un. .\ucun de
•« mes frères n'est capable de me rem-
m placer ; tout est commencé , rien
•• n'est achevé ; Dieu sail ce qui arri-
1 verail. »• I/impératrice, par «es pa-
roles pleines d'abandon, facilita sin-
gulièrement à l^ourrienne la mission
délirale dont il était char;;é. •« Si vous
M étiez encore avec lionaparte, mon
•I cher Ilourrienne, lui dit-elle, vous
- lui feriez entendre raison. Je ne
t< sais qui se plaît à lui faire des rap-
w ports, mais, vraiment, je crois qu'il
«va des ^ens occupés partout à clier-
m cher quelles sonl mes dettes pour
« aller le lui rapporter. Que \oulez-
«« vous :' on m'apporte de belles rho-
m ses , je les achète : on ne nie de-
^ mande pas d'sr^ent, et puis on ré-
« clame le paiement quand je n'en
- ai pas. Quand j'en ai , vous savez
m l'emploi que j'en fais ; je le donne
« en p;rande partie à des malheureux,
*7'
a6o
JOS
i( à de pauvres émigrés (27). Allons,
« je vais tacher d'être plus économe ;
« diles-lc-lui, si vous !e revo} ez. » Ces
paroles mettent à nu le caractère de
Josc^ihine, sa lacililé, son imprévoyan-
ce. i}ourrienn<f s'était bien gardé de
parler des regrets que lui avait té-
moignés Bonaparte de n'avoir pas
d'enfant. « La pauvre femme, dit-il,
« je l'aurais mise au désespoir; car
K elle portait en elle un invincible
« pressentiment de ce qui devait lui
« arriver un jour. » Plus que jamais
en effet les hommes d'élat intéres-
sés à soutenir l'édiGce impérial son-
geaient au divorce. Dans ce temps-
là Fouché dit au même Bourrienne :
« Il serait à désirer que l'impératrice
u vint à mourir; cela lèverait bien des
«c difficultés. Tôt ou tard, il faudra
« bien que l'empereur prenne une
« femme qui lui fasse des enfants, car
« tant qu'il n'aura pas d'héritier di-
« rect, il y aura à craindre que sa
« mort ne soit un sujet de dissolution.
u Ses frères sont d'une incapacité ré-
« voilante ; et l'on verrait surgir un
«c nouveau parti en faveur des Bour-
«( bons; c'est ce qu'avant tout il faut
« prévenir.» Lorsque Napoléon p.r-
tit pour se faire couronner roi d'Italie,
Joséphine l'accompagna, bien qu'elle
ne dût pas partager ce nouveau dia-
dème. Partout elle reçut les hommages
dus à sa souveraineté; mais elle eut de
cruels déboires. A Milan , où il passa
un mois, Napoléon renouvela la liai-
son qu'il avait formée cinq ans au-
paravant avec la célèbre cantatrice
Grassini. Joséphine en fut instruite;
de là des scènes de jalousie qui un
peu plus lard amenèrent la sépaialion
définitive des deux lils. A Mauloiie ,
{^^) Elle disait vrai. Klle r<p.'ndaii beaucoup
daumonr» ; ePr entrK.-nait nue co. r. ponda.ice
l-«;satlivf avrc le> sœurs de thjril»- qui soi-
priatent Us nial.idi.s, tt leur tnvoj ;iit une foule
de clioses. Ses valrl» claienl charge» d'aller
paroiit porter «les te<Oiir<. hux pauTir».
JOS
une circonstance particulière lui rap-
pela douloureusement les torts de sa
vie passée. L'empereur engageait Lucien
à rompre son mariage avec M"'*' Jou-
berlhou,pour épouser la reine d' Et rurie
qui venait de perdre son mari. Lucien
repoussa toutes les instances de son
frère: «c Vous voyez, lui dit celui-ci,
« où vous conduit votre entêtement
« et votre sot amour pour une . . .
« — Au moins, répliqua Lucien, la
« mienne était jeune et jolie. »> Cette al-
lusion mit le comble à la fureur de Na-
poléon, qui jetant sa montre avec force
sur le parquet s'écria: « Puisque tu ne
« veux rien entendre, eh bien! jeté
« briserai comme cette montre. » Au
nioisdeseptembredecelteannée 1805,
Bonaparte partit pour la campagne
qui se termina par la bataille d'Aus-
terlitz. Joséphine reçut alors de son
époux, sur les suites de cette vic-
toire, une longue lettre qui finissait
ainsi: « Je te renouvelle les assuran-
ce ces de mon amour sans terme. Ton
<( fils fait des merveilles, je le récom-
« penserai. Embrasse ta tille, ses en-
« fants, mes frères et ma mère par qui
« j'aurais dû commencer; tous les
e nôtres enfin. Il y aura bientôt une
« couronne de plus dans la famille. >»
Ces mots réveillèrent toutes les ambi-
tions. Joséphine se figura que celte
couronne tomberait sur la tête de son
fils, et elle écrivit dans ce sens à son
mari ainsi qu'à Eugène, llortense ,
forte de l'alTeclion que son beau-
père portail à ses enfants, ne douta pas
que Louis Bonaparte, son mari, ne fût
choisi; enfin Joseph, se fiant sur son
droit d'aînesse, conçut un espoir qui
fut bienlôl justifié. La lettre où José-
pliifie remerciait par anticipation l'em-
pereur du trône qu'il destinait à Eu-
gène le mécontenta vivement : il ne
voulait pas donner au fils de Joséphine
une indépendance absolue, mais il vou-
lait le tenir en tutelle. L'impératrice alla
JOS
JOS
161
son iniri à Munich ( janvier
1806'',oùcllr rut U vati»r>clion de M)lr
son liU Jctniir le ^entlrr du rui de
Bavière. A .Municli, puis à Slull^aid,
un ;;rjnd noiiibre de |)iiiirrs rt de
princevies lui furent presenires. Klle
eut be4iirou|i de peme à ne pas rire,
quand on lui aniioiira la princesse Cu>
nr^onde. Klle dit mrrae le soir, aux per-
5011110 de »on intérieur, que lorsqu'elle
Vit la j»rinceN*e a^^i^e, elle s'imaginait
la voir ftrnrhrr tir càt^. •« AsAuré-
•« ment, observe na'n entent Oui'^lant,
" rimperalrirc avjii lu le> aventure»
N de (landidr rt '\e l.i lille du très no-
•« ble bai ttti licilnindcr'! en IruncL. »
Au pnntriiips de cette même année,
Paris fut témoin d'un roarlane non
moins satisfaisant pour Joséphine. Sa
cousine Stéphanie de l»eauharnais
épousa le piinre héréditaire de iSa-
de (:2SV 1^ 25 sept, suivant, au mo-
ment où la ;;uerre allait éclater avec la
Prusse, Jo>éph:ne pjriit p<iur Ma> en-
ce avec Napoiron. iViidant cette cam-
pagne elle eut à s'afth^rr de la ma-
nière inconvenante dont il s'expri-
mait dans ses bulletins sur les fem-
mes, et particulièrement sur la briie et
malheureuse reine de Pru:>5e. Klle té-
(38) Bon>|>art« »«r«it «tr p^r« k c*li*jriin«
parvMl* 1.1». .r- n.ra-.l ri;, ««aii p rJu »«
nmtt* .ni ■'■■ ^^ttr
Iiou > tl'aiM ju-
ban. N'jpo . ru
Icnd'i Ju • .,r .
•t Cainiui itl ,.. . k . . , ■ . V , . ■ ,, . .^..., . .luri-
■ qu'un de luii no u 4 l« ih rgr d'un* Ait, l«i»#.'
« Me cr^iii^iu |i«» qur la tt>r-it'>irr iiVn *• uffi*
« ua ji.ur » a ti «it..||. ; .- fui r»p«.
dir pour raiMrnrr .st. ma • aui
Tuilrrin; uuis trt r- voulurml
point t'«>idrvat»ir. >Ji 1 ;■ 1 *..tur »j
llOli« nicrisjirr». rt b» 11 o. il f.i; e i|,«^ l.c i;..
•«Cl od courrir-r aupr-fridu lipu . -»pt: oniie
d<r »* fain- rrtii-itre a riiitianl. au no.u .fr la
loi, l« ji-tiii'- riifjnl , qui . placir clin niaU 'me
Campan, prc£ia lrp<-lieMr«-u«eiiieni d« la br I-
laolr r<lucjli''ii qui lui fui donnrr. Ma<i. »i l'on
en croit .Njpii éoii djué \<e .l/rworia/ d* StMmtt-
Hriét* , cl.c vcnit avec son uiari »-|teo.pr^
coam.- la reinr Ifort^nse a«rc le si>>n , mot^ttmut
dt emor.tet, oJJScUojU iU ritHtptndmmct, c* qae
I— épL— éiëmmit/cn.
moi;;na iiumuc son mécontentement a
s<in mari, qui lui répondit sur ce ton
de ;;jLnlerie et de .^cnsillllitc qu'on
retrouve dans loult-N ses Irllres à José-
phine: •• J'ai reçu ta lettre où tu me
«• païais larh(*e du nul que je dis des
■ frmmes. Il est vrai qur je hais les
« femmes intrigantes au-drlà de tout.
«• Je SUIS accoutumé à des femmcNdou-
• ce4. bonnrs rt conciliantes: ce sont
" elles que j'aime. .*^i elles m'ont {;até,
m ce n'eNt pas ma faute, mais la tien-
•• ne, etc. « i'Iuv lard, lors du traité
de liUilt, il lui marquait : •• Ij reine
•• de Prusse e I réellement cliarmjn-
- te; elle est pleine de coquetterie
** pour moi ; mais n'en sois pas ja-
•« louse ; je suis une toile cirée sur la-
•• quelle cela ne fait que glisser. »
Joséphine était alors en proie à la
douleur la plus amére : le fils aine
de sa (ilte llorlense , cet enfant
que Napoléon semblait dé5i;;ner pour
son . venait de mourir. I^
cho ier qui lui tenait de si
piès a tl.c-i:ii Mir aurait avsuré l'm-
tluence de Jovepliinr atiMnt qu'elle
pouvait Te -prrri , y Mit pri-
vée d en donner iki lit i' <an{;.
Napoléon fit ériiler le plus profond
chaj;r;n; Josépliine, dé.>ol»-e, s'enfer-
ma pendant trois jours, pleurant , ne
vovant per.sonne que ses femmes et ne
prenant pour ainsi dire aucune iiouf'
riture. Pour ne pas se di-traire de sa
douleur, elle s'entourait de ce qui pou-
vait lui rappeler xm m-illicnr sans remè-
de. Klle obtint non san^ peine delà reine
Hortense la chevelure blonde du jeune
prince qu'elle fit encadrer sur un fond
de velours noir. Cependant Najinlcon
songeait de nouveau au divorce: tous
les ministres, toute .sa famille, à I ex-
'^eption do Montalivet el du rârdina
Fesch , étaient d'accord sur ce point,
et, comme nous l'avons dit a l'article
Foudié (lAIV, 327), cet homme
d'état, jusqu'alors si dévouéà Joséphine
162
JOS
prit néanmoins l'initiative à cet é^arcl.
Irulépendaminentdeses Insinuai ions au-
près de l'empereur, h'ouciié, si Ton en
croit une conversation de Joséphine
rapportée dans les Soucenirs (leStanis-
las Girardin, avait foi rné avecTalley-
rand et Junot, gouverneur de Paris, une
sorte de triumvirat pour faire passer le
trône à Murât au détriment d'Iiu^ène
Beauharnais, dans le ras où Napoléon
eût ététué dans la campagne de Prusse.
Ce projet avait pris tant de consistance
que Caroline, l'épouse de Murât, osa
s'adressera Joséphine elle-même pour
lui demander si son mari n'avait pas
raison de s'y prêter. A ses douleurs
comme aïeule , à ses inquiétudes
comme mère et comme épouse ,
se jolo;nirent alors de nouveaux sujets
de jalousie. On avait cité deux femmes
de la cour, entre autres M"^^ D 1,
comme étant honorées des homma^^es
furtifs de l'empereur. On parlait encore
d'une belle Italienne qu'il avait connue
^ Gènes. Cette liaison dura un an, et
donna lieu de la part de Joséphine à
plusieurs scènes de jalousie, dont on
peut lire les détails dans les Mémoires de
Constant. Enfin elle avait, selon W^^
d'Abrantès, une vie empoisonnée par
les rapports que lui faisaient chaque jour
une foule de femmes de sa maison ; car
c'était pour elle un besoin d'écouter ces
caquets : le compte vrai ou faux qu'on
lui rendait de toute la conduite des
personnes de la cour lui fournissait un
bulletin qu'elle rédigeait, et qui passait
quelquefois sous les yeux de l'empereur.
Pendant un voyage que Napoléon fit en
Italie (nov. 1 -lOT), il voulut, en com-
blant Eugène de ses faveurs, le préparer
aux idées de divorce. Le décret de
Milan, par lequel, à défaut d'enfants
maies et légitimes de la descendance
directe, il adoptait Flugène pour son
fils et son successeur à la couronne
d'Italie, donaa, à ceux qui savaient lire
les pensées secrètes de Bonaparte
JOS
dans ses actes patents , la preuve qu'il
l'avait exclu de toute hérédité pour la
couronne impériale de France, et qu'il
songeait sérieusement à une nouvelle
alliance pour lui-même. Il eut aussi à
Mantoue une entrevue avec Lucien qui,
dans son inimitié toujours vivace contre
Joséphine, autant que par ambition
personnelle , consentit à donner .sa
tille au prince des Asturies , depuis
Ferdinand VII , mariage qui devait
empêcher ce dernier d'épouser M
Tascher, parente de l'impératrice. Ce
projet d'une alliance espagnole ne
s'effectua pas comme on le sait ; et,
au mois de janvier 1808, Joséphine
eut la satisfaction de voir M"® Tas-
cher , élevée par Napoléon au rang
de princesse française , épouser le duc
d'Aremberg. Durant ce même hi-
ver, qui fut remarquable par la grande
quantité de fêtes et de bals, elle se
donna le plaisir d'intriguer toute une
nuit l'empereur au bal masqué de
l'Opéra , qui était alors le rendez-
vous de la haute société. Le moment
était venu où Napoléon devait par-
tir pour les frontières d'Espagne avec
l'impératrice, qu'il laissa à Bordeaux.
Son intention était que celte partie
de la France si maltraitée depuis la
guerre reçût au moins de bonnes pa-
roles. Joséphine eut donc l'ordred'être
aimable pour les Bordelais, qui furent
enchantés d'elle. A la fin du mois d'a-
vril elle alla rejoindre l'empereur à
Bayonne. Quelques notes qu'elle a
écrites sur ce voyage prouvent combien
elle voyait juste en politique. Elle
avait conçu les plus sinistres pressenti-
ments de l'odieuse agression de Napo-
léon contre l'Espagne. Sans se mê-
ler beaucoup des affaires publiques ,
elle était douée d'un instinct tellement
perfectionné que rarement elle s'est
trompée sur les choses qui devaient
tourner à bien ou à mal pour son
mari. Durant son séjour au château de
I
JOS
»6J
Marrac, elle fil par lei manières une
iseiaiiis
^iia lei
piàâs luuti . Cull^iJlil noiu
a|i()rrnJ •{ >ij a la rriuc il'K>-
pa^ne ties levons de luilrilr française.
l)an% la suite, rluièmr a|>re<kle ilource,
elle rendit «l'impurlanls »enices ires
prince» e&ilé>, !>ui tout lorsque, eu l'ab-
sence de Tempereur, les pairment»
de leurs pensions étaient en letard.
Alor> elle faixail toutes le^ drmarclies
ueressaire.^, >oit aupre> des mmislies,
soit auprr» Je Nj^xilrou. Ju^r^jlnnc
avait eu a >e plaiiidir d'une reieiUe in-
ijdrlite de l'cmiirieur, mai% elle fut
bientôt délivrée de sa nouvelle rivale.
C'était M '*" (i u , cjue Napoléon
a\ait remarquée au bal de l'Ilotcl de-
\ ille, qui ne le fit pas soupiier lon^-
tea>p5 et qu'il nomma lectrice de i'im-
pdatrice. Knivrée de sa nouvelle faveur,
elle prit pendant levo>a^ede Ka>unne
on ton d imprrlinriice fort déplace vi\-
à-vis de M""* de lîassanort de Mont-
morency que l'impeiatrire a\ait ame-
nées a\ec elle. Kllc» se plaignirent à
Jo.sepliine qui fit a la délinquante quel-
ques douces repre>ent.ttioii>. 1/enipe-
reur, instruit de cette tracasserie, ren-
TO)a à Fari» M" (■ u, qui
depuis ne reparut plus a la cour, l/im-
f)éralrice quitta le cliateau de Marrac
c 20 juillet, parcourut avec l'emprteur
quelques départements, cl tous deux
revinientà Paris assister aux fêtes du
1 3 août. (^)uelques jours après, se trou-
vant à Sainl-Cloud, Napoléon, José-
pliine cl leurs familiers jouèrent aux
barres pour la dernière fois. C'était
la nuit. Des valets de pied portaient
destbmbeaux. L'empereur tomba en
courant , il fut fait prisonnier , mais
rompit bientôt .son ban , se remit
à courir et, quand il fut las, il em-
mena Jo>e[dnne , malgré les récla-
mations de> joueurs. Jamais , depuis ,
cette intimile bourgeoise ne se ma-
nifesta entre les deux époux. A cette
époque appartient la proposition de U
pail de Ju>epliiiie à son mari de la
grandr suprn firrir polilit^ue a la-
Îuelle nous avons deja fait ailu>ion
uns cet article. Qu'elle ait ou non fait
cette ouverture, il est certain qu'alors
ou disait dans tous 1rs salons de l'aris
qu'une certaine dame était enceinte du
fait de l'empeieur ; qu'en même teinp»
Joséphine allait leinure une ^ros^es.Ne et
Îu'au moment de l'accoucttemenl de la
ame, elle se ferait passer pour la mère
de Iriifant. Murât, qui n'était pas des
derniers à accréditer ce bruit, disait :
M Oroline et moi, uous ne soufTi irons
• jamais cela, et je me déferai du ba-
M tard. »» (^pendant Napoléon paitit
pour l'enlrevued'lMlurt, sans emmener
Joséphine: il en fut de même lors du
second voyagea IU>onne(oct. 1808).
1^ jour uu départ , elle fit appeler
Constant, et lui renouvela des rerum-
mainUlions qui manifestaient tonte sa
sollicitude. Le caractère vindicatif du
I ' " , • .pour
I. il fu-
nu: diiuluuicux. Lilc \<>uL.l partir;
l'empereur eut mille peine.^a la retenir.
Tandis que, dans son astucieuse poli-
tique, il convoquait à Iî.i>onne une
réunion de^ cortes et leur dictait une
conslituiion illusoire , undésa\eu offi-
ciel qu'il donna à certaines paroles de
Joséphine, par la voie du Moniteur
du l:i décembre, révéla aux esprits ob-
servateurs toute rinpocrisie de celle
vaine dcmoiisUation en faveur du sys-
tème représentatif. Kn répondant à
une haian^ue du président du corps lé-
gislatif, l'imperaliice, ne sori;;earil (ju'à
énoncer une expression bienveillante,
avait dit: « Le premier scritmieiit de
«^ l'empereur a éle pour le corps lcr;is-
«« lai if qui repmente la mit ton. >»
Cette phrase excita la colcri de Napo-
léon. ilen\o)a de Madrid un article
rempli d'aijjreur, dans lequel il décla-
a64
JOS
rait que l'empereur était le seul repré-
sentant de la nation. Cet article était
écrit lie sa main; et en eiïet, quel au-
tre eût osé donner une réprimande
publique à l'impératrice? Au surplus
celle-ci ne se fit pas répéter deux fois
cette leçon ; et lorsque au l^'^ janvier
1809 elle donna audience aux auto-
rités, en l'absence de l'empereur, elle
tint un autre lan<];af;e. Revenu d'Ks-
par^ne, le 23 janvior. Napoléon resta
à peine deux mois à Taris, et par-
tit le 13 avril pour aller comballre
l'Autriche. L'impératrice l'accompaf^na
jusqu'à Strasbourg, où la reine de
Westphalie, la reine de Hollande et
la grande-duchesse de Bade ne tardè-
rent pas à venir la Joindre. A son re-
tour à Paris son existence ne fut plus
la même. Les bruits de divorce, de-
puis deux ans répandus par la police
de Fouché et par certains amis de
Napoléon , prirent plus de consis-
tance. Toutes les fois que Joséphine
avait voulu s'en plaindre à lui , il
en avait paru presque aussi irrité
qu'elle-même ; et , sur ses assuran-
ces , la malheureuse femme , sa fa-
mille et ses amis s'efforçaient de dé-
truire de leur cote des bruits que la
police ne cessait d'accréditer. C'était un
conflit de caquets et d'intrif^ues dignes
des plus tristes règnes du Has-Em-
pire. Le moment arriva enfin où le
coup que Joséphine redoutait depuis
tant d'années vint la frapper. Napo-
léon pendant sa ré idence à S(hœn-
brunn s'était déridé. Kbloui de sa
grandeur , il s'abandonnait à tout
l'enivrement du pouvoir. Jadis il s'é-
tait cru trop heureux que la vicom-
tesse de Beauliarnais daignât l'accep-
ter pour mari ; maintenant il trouvait
que la bonne Joséphine était bien
heureuse d'avoir été quatre ans impé-
ratrice, et qu'elle devait céder la place
à une autre. Depuis longtemps le comte
de Narbonne l'excitait adroitement
JOS
à se relever aux yeux de l'Europe
par un second mariage; et , cepen-
dant, c'était Joséphine qui, sous le
consulat , avait mis ce courtisan en
rapport avec son mari. Il est constant
aujourd'hui qu'une alliance de faujille
fut une des conditions secrètes de la
paix accordée, le 14oct.,à l'Autriche.
Ce fut après cette convention que Bo-
naparte arriva, dans la journée du 26
octobre , à Fontaineleeau, quoiqu'il
eut annoncé qu'il n'y serait que le len-
demain. 11 témoigna beaucoup d'hu-
meur de n'y pas trouver l'impératrice
qui, même en devançant ses ordres ,
n'arriva qu'à six heuics du soir. « C'est
« bien heureux ! » dit-il, quand on lui
annonça que la voiture de Joséphine
était dans la cour ; puis, sans aller au-
devant d'elle comme d'habitude, il se
remit à écrire ; et lorsqu'elle accourut
auprès de lui, il ne se dérangea pas.
« Ah! vous voilà, madame, lui dit-il
« avec un regard sévère; vous faites
« bien : car j'allais partir pour Saint-
es Cloud. » Puis il reprit sontrava-l.
Joséphine voulut s'excuser ; il lui ré-
pondit si durement qu'elle en pleura.
Aussitôt il s'en repentit et demanda
pardon en convenant de £on tort. La
querelle finie, les deux époux s'em-
brassèrent^ et dtwant toute la soirée
qui fut marquée [lar une réception
peu nombreuse , Napoléon se mon-
tra gai et aimable. Son séjour à Fo«-
tainebleau se prolongea jusqu'au 14
nov., et fut fort triste. Tous les gens
de service purent s'apercevoir que
l'empereur , lorsqu'il était avec José-
phine, paraissait contraint, préoccupé.
Le incnie embarras se peignait dans les
traits de celle-ci. Pour la première
fois lîonaparte fil interiompre les com-
munications qui avaient toujours existé
entre leurs deux appartements. José-
phine ne se lii point illusion sur les
funestes pronostics q'i'elle devait ti-
rer de cette disposition nouvelle : elle
JOS
JOS
i65
Manda auprès dVIle I)ur»c , qui la
trouva loui rn Ijrmci. •• Je >ui» prr
m due, luidil-rlle! tout r»t fini pour
« moi! rommrnt cacher ma lioulf."
• ^ ous , Duroc, >(>us a^rz toujours
•• élé bon pour moi, \nus e\ Kapp.
M Ce irr>l pa> \ou* qui ra»ex en;,a;;ë
" à «e srparer de moi. Ce *onl me*
« ennemis, c'est Sa\arj, Junol, que
« sais je? Ce font encore plus se» en -
*• neoiu que les mien^. Kl mon pauvre
« Ku(;rne , quand il Mura que ]e suis
- répudiée par un in;;rat . oui , Du-
•• roc , un in^ral î •• Napoléon des *a
rentrée à l'aii^ ^e montra inipalient de
terminer une aflaire dont il était d'au-
tant plus douloureusement preorrupé,
3t:e |iisqu*.iu dri uier moment il flotta
ans une incertitude peu compatible
a^ ec son caractère, et qui atteste la con-
stance de ses sentiments pour José-
phine. On peut croire même que, mal-
ère l'envie qu'il axait de se donner un
uénlter , il n'eût jamais rompu les
nirud^ qui l'unissaient à elle, si parmi
les per^onn3;;es influents qui l'entou-
raient (|url({ue> uns eussent bien voulu
plaider la cause de l'impéiatrice ; mais
elle les a\a)t presque tou> contre elle,
tant ces hommes d'état s'a\eu;;laient
sur les suites d'une alliance royale
pour Na(>oléon. Cambacrrès, qui fut
toujours l'ami de Joséphine, n'était
pas d'un caractère à la servir chaude-
ment. Duroc, qui avait tant de crédit
sur l'esprit de Napoléon, ne poussa
certainement pas au divorce; mais,
se rappelant qu'autrefois Jo;ep[iine
l'axail refusé pour ;_endie , il se tut
lorsqu'il aurait pu parler pour elle.
Toute la famille de Napoléon , ses
sœurs piinripalemenl , ne cherchaient
qu'à l'éloigner du tronc. C'est alors
que Napoléon tint un conseil .««ecrel
auquel furent appelés Pierlhier, Tal-
Icvrai'.d, liei^naull de Saint-Jean d'An-
f;elv «l Cânibatérés. Ce dernier fut le
seul qui parla contre le divorce ; mais
il le fit avec celte mesure qoi réglait
toutes ses actions •• Je \ois, dit il,
« de grands obstacles, soit au divorce,
« soit au mariage qui doit le suivre.
•• Celui qui e\i>te maintenant a été
« sanctionné par la loi ci\ilc et la bé-
•« nédiction religieuse ; >ous axez fait
• sacior l'impcratrire , \ons l'axez
m pendant quinte ans con6rmée dans
m ses druils de femme lé;;ilime; il
• n'esi^te entre vous aucune inrom-
« patibilile d'humeur; sa conduite e>t
m irréprochable, elle vous est clière.
■ A quel Mie demanderez-xous le di-
■ TOfce:' I.'imperatiice \ donneia-t-
« elle son conentrmeni ** lauiha t-il
« recourir a la force, à la raison d'é-
M tal .' les difliculles m'rffi aient ; elles
m viendront de toutes paris, etc. >•
L'axis du dixorce préxalul cependant
dans ce conciliabule, comme on dexait
s*> attendre, .\ucun obstacle ne de-
vait s'opposer à la rupture du lien ci-
vil, mais il n'en était pas de même
du lien relipeux. Napoléon consulta
Cambacérès pour laxoir s'il dexait
s'adiesser au pape, démarche a^sez dif-
ficile dans les termes où l'empereiT
était alors axec I*ie V||. (jinbaceiès
lui rrpondit, plus en lé^i-te qu'en ami de
Joséphine, que ce n'était pas le saint-
siè;.e que cette affaire re;;ardail, mais
seulement l'officialité de l'archexéché
de Taris. - Vous n'êtes, lui «iit-il,
" dexaol rKj;lise qu'un simple paiti-
« culier qui xienl demander l'annu-
M lation d'un mariage pour lequel on
« a tran»;;res*c les rej^les canoniques;
t et, comme il dépendra de xos ^ens
w d'affaires de duc à ce sujet tout ce
■ qu'il vous plaira, l'officialité sur le
« vu des pièces inë^u'irres et sur la
« déposition des témoins vous (!rcla-
«« rera libre.»» N:»poléoii, eiiiiunté
de cet avis, pria Carnbacére.s de s'a-
boucher axec les membres de ce tribu-
nal ccclésia^stiquc. L'archi-chancelier,
pris par ses propres paroles, ne put se
266
JOS
défendre de cette démarche ; il se re-
fusa du moins a la triste mission d'an-
noncer à JosLvliine la résolnlion de
son époux (f^oy. CAWDACÉr.ts, LX,
14), et conseilla d'en charger le prince
Eugène. Napoléon s'empressa d'écrire
a celui-ci une lettre où la fatale com-
munication était adoucie par l'exjjres-
sion des sentiments les plus paternels.
« Ma mère et moi, dit Eugène dans
« sa réponse, nous devons en cette
« circonstance donner au monde un
M grand exemple de courage et de ré-
« signation. Je le donnerai, c'est tout
« ce que je puis vous dire, et assuré-
« ment tout ce que vous pouvez exiger
«' de moi. Fils respectueux et sujet
« soumis, je n'oublierai jamais que
m vous êtes mon empereur et mon
« père. » Malgré ce langage noble,
dès qu'Eugène fut arrivé d'Italie, il se
prêta à toutes les démarches que lui
imposa son beau-père avec une docilité
sans doute excessive [f^oy. Beauhar-
NAis, LVII, 385). Il n'en fut pas
de n)eme d'Ilortense. Mettant de côté
la timidité qui la retenait en présence
de Napoléon , elle lui reprocha avec
énergie son ingratitude envers José-
phine. L'empereur lui répondit par des
raisons de politique; elle les rétorqua
contre lui ; mais cette scène pénible ne
changea rien à ce qui avait été arrêté.
Horlense dut finir par obéir comme
les autres , et elle éclaira sa mère sur
la possibilité du divorce, sans en pré-
ciser le moment. Joséphine la comprit
dès les premiers mots; mais il lui pa-
rut que Napoléon, en ne fixant pas de
terme, l'éloignait indéfiniment. Celte
Ineur d'espéiance fit bientôt place à
des alarmes de plus en plus vi\es. C'é-
taient des pleurs , des plaintes dont
elle ne cessait d'entretenir ses femmes.
'J'anlôt elle formait le projet de refuser
tout consentement, de soutenir devant
les tribunaux la validité de son ma-
riage; tantôt elle se flattait d'attendrir
JOS
par ses prières le cœur de Napoléon,
qui aurait bien souhaité qu'elle eût
supporté sa chute sans impatience, et
surtout sans explication ; mais « il lui
« était impossible , disait-elle. Je se
« laissa' égorger, sans avoir fait une
« tentative pour se soustraire à ce sort
« cruel. » Laissons-la raconter elle-
même celte scène qui eut lieu le 30 nov.:
« Nous dinàmes ensemble comme à
« l'ordinaire, et il me fallait étouffer
« les larmes, qui, malgré moi, s'é-
« chappaient de mes yeux. Je ne dis
« pas un mol pendant ce triste diner,
« et lui ne rompit le silence que pour
« demander à un de ses serviteurs
« quel temps il faisait (29). Pour
« moi, je vis bien que le temps était
« à l'orage, et l'orage ne tarda pas à
« éclater. Aussitôt que Bonaparte eut
« pris son café (30), il congédia tout
« le monde et je demeurai seule avec
« lui. Quel air, (juel regard il avait !
« je lisais dans l'altération de ses
« traits le combat qui se passait dans
« son àme ; mais enfin je voyais bien
« que mon heure était arrivée. Il
« était tremblant, et moi, j'éprouvais
« un frisson universel. Il s'approcha
« de moi, me piit la main, la posa
« sur son cœur, me regarda un mo-
« ment sans rien dire, puis enfin laissa
« échapper ces paroles funestes :
«» Jusefj/iine ! ma bonne Joséphine !
« tu sais si je t'ai aimée!... Cest à
(29 Constant, dans S' s Mémoires, décrit ainsi
ceilr st»-ne • « Les nffi. ier., kW nrvice, immobi-
les comm>' des r»-riiips , obienraient loiit avec
un»- imniicliidi' cuiuusr ; |)fridaiit Hiut le r«'|>as
qui fut !><rvi pour la foriiif, c-.r lenis nujestés
ne tiiiM'hèrPiit » rirri. on ii'entriidit que le bruit
uniforme de^ assiettes .>|),ioilees el reporters ,
trisieiuent varie par la voix monotone des offi-
ciers de bouche et par le tintement queproilui-
sait l'empereur en f. a|>|)aiit muchinaleniint ii^in
couteau sur \tt\ parois d. son verre.»
(Jo) Il On apporta le café, et, selon l'iisiige ,
un page presenia le pi;ite.iu à l'imperalrice pour
qti'elle verSîit » Ile même la liqueur; mais l'em-
j)ereur le prit lui-m<ine, versa le café dans la
ti^^e, fil loiiJre le sucre, en icgard.inl toujours
l'impératrice qui restait dibout comme frap|yéc
dfl stupeur [Conslant, ibid.). »
JOS
« toi, à toi sruU, que faithi les seuls
t instanti de Imnhrur que fui ^fti-
m tés dans re mornJe. Jus^pliine ,
m ma tiestinee eut plus furtr que ma
m \Hiiimte. Mes ajf ri lions les plus
■ chères doiWni se luire Jr^unt les
« interèls de la t ratu e, — AVn
«« dite^ fhjs fdus, eus- je la force de
• lui te|)ondte , je m'y utlendais ,
« je iHHts comprends ; mais le coup
m nen est ptis moins mortel. Je
M ne pus en dire davanla^^e, je ne »ai&
« ce qui se pasva en mni; je rroi» que
m je proférai des cris ; je rru* ma rai-
« ton à jamais perdue ; je demeurai
m sans ronnaisNaiice ; et, quam) jr rr-
« vins k moi, jr me lrou\ji dans ma
u chambre. M Kn elTel, elle rial loro-
bre commr exaimine aux pieds de
l'empereur oui appela M. de Kauvset,
prrfft du palais, alors de ser\ice. Aidé
par lui et par le gardien du porte-
feuille, Napoléon transporta Joséphine
chrx elle par Tescalicr intérieur qui
conduisait a son appartement, aGn de
lui faire donner les soins qu'eiigeail
»on étal. « Je tenais l'impératrice
M dans mes bras qui entouraient sa
M taille, dit M. t!v Ilau^ el dans sm
« Mémoires ^ son dos était appu\é
« sur ma poitrine. I^)rsqu'ellr sentit
« les efforts que je faiiais pour m'tin-
« pécher de tomber , elle me dit
m tout bas : \ vus me serrez trop
« Jurt. Je \is alors que je n'a\ais
« rien à craindre pour sa santé et
« qu'elle n'a\ait pas perdu conuais-
« sance un seul instant. » l'eiidanl
que les femmes de l'impératrice lui
prodi{;uaient des secours , Napoléon,
ému jusqu'aux larmes, laissa écîiapper,
ens'adre.ssantàM.deIiausset,queiqucs
paroles entrecoupées sur la malheu-
reuse néces-sité du divorce, qui, disait-
il, était dcNenu un devoir déplorable,
rigoureux. La reine Hortense et ie
médecin CorNÏ.sart ne taidèrent pas à
se rendre auprès de 1 impératrice. Bo-
JOS
167
naparte revint la voir dans U soirée.
M Non, dit-elle dans le récit qu'elle
« fit à Bnurnenue de toute celle
M sctiie , non , \ous ne sauriez vous
m peindre l'horreur que sa \ue ra'in-
« spira en ce moment. L'inieret ménie
« qu'il a^ait l'air de prendre à ma
*< souffrance semblait une cruauté de
« plus.»» Cependant la jjiaiide afiaire
du di\urre occupait tous le\ courli-
.san» : chacun était a l'affût de ce
qui se passait entre les deu& époux.
Napoléon, après a\oir rompu la ^lace,
espérait déterminer Joséphine à le de-
mander elle même. (]ela fut impos<>ible.
Elle ne regrettait pas, disait-elle, ce
tn^ne qu'elle a\ait toujours redoute ;
"on seul cha-rin était de s'eloi;;ner de
l'empereur; et ces explications n'a-
vaient jamais lieu sans de nou\elles lar-
mes. « Ne cherche pas à ro'emou\oir,
•• lui disait l'empereur; je t'aime tou-
« jouis : la politique n'a pasdecirur,
" elle n'a qtu- de la trie. Je le donne-
» rai cinq millions par an, et unesou-
•• %erainete dont lUroe sera le chef-
« lieu. M l/imperatrire insista beau-
coup pour re>lrr en France et conti-
nua de \tT^r des larmes. •« .Sawi-
•« *ous , dit l'empereur, que ce di-
•« \orce .sera un épisode dans ma
•• \ie. (^)uelle '•rené dans une tra;;é-
•« die ^31 ! — Kt qui en serale tuanf
« demanda Josep ine. — Le lyran,
" reprit Napoieon déconcerl.» , eh
« bien , ce sera Fouché ou Talley-
•' rand. »• Cependant tous les rois de
la confédération du lUiin et de la fa-
mille impériale, à l'exception de Jo-
seph, étaient arrivés à Paris pour as-
sister aux leles qui devaient s'> célé-
brer à l'occasion de l'annixeisaire du
couronnement. On eùl dit quel'em-
fTtfeur \oiilail placer son divorce sous
la sanction des Irtes couronnées. Il
fallut que Joséphine fut présente à
'3i) Journal rt «oaTCiirs de Staniilat Ci-
ra rdiD
a6>>
JOS
toutes ces solennités, au Te Druni
chanté à Xolre-Dame (3 décembre] ;
mais Tempereur lut seul {)/ ce sur le
trône et sous le dais; 'impéralrice
dans une tribune. Pendant cette lon-
gue cérémonie elle eut tout le teoips
de faire de tristes réflexions. Cinq
ans auparavant elle avait été cou-
ronnée dans cette même én;lise. Le
soir il y eut banquet aux Tuileries.
^ oici comment un témoin oculaire,
Stanislas deGirardin, dans ses Suiwe-
Tiirs ^ peint la contenance des deux
époux. <' L'empereur en;;raiid costume,
« chapeau à la Henri IV toujours sur
« la tête; l'air soucieux, mann;eant
« pliis qu'à l'ordinaire. L'impératrice
«f richement parée, beaucoup d'éclat,
« grâce aux pinceaux d'isabcy;
« l'air triste.» — « Le visaa;e plus
« souffrant encore que le matin , »
ajoute Constant dans ses Mémoires.
Le lendemain il y eut fêle à Tllôtel-
de-^ ille. L'iuipéralrice eut assez de
pouvoir sur elle-même pour y déployer
sa grâce et sa bienveillance ordiiiaiics.
Le préfet Frochot adressa à l'em-
pereur seul le discours d'usage ; il
lui fut défendu de proiioiicer celui qu'il
avait préparé pour l'impératrice. Ce
fut la dernière fois qu'elle se montra
en grande cérémonie. 1 1 y eut le surlen-
demain (6 décembre) bal à la cour, elle
n'y parut point. Ce jour là, elle écri-
vit à Napoléon, pour tacher de fléchir
sa volonté, utie lettre qui se terminait
ainsi : « Ah ! mon ami , que vous avez
« tort dans ce que vous faites ! Pour-
« quoi ne songez vous pas aussi, dans
« cet avenir qui vous occupe tant, aux
« douceurs d'une société intime avec
« une personne qui est de votre rang,
<f de votre âge, qui sait respecter vos
« goûts, vos habitudes, et qui appar-
ie parlient par elle et ses enfants à
« votre famille, qui a su vivre en paix
« avec voire mère el vos sœurs, devant
" qui vous pouvez parler du passé sans
JOS
«t embarras,quiyousentendau moindre
" mol. Trouverez vous ces avantages
« avec une femme étrangère aux vôtres
« qu'elle a déjà peut-être appris à juger
« avec dédain ; qui ne voudra voir en
« vous que l'empereur Napoléon et
« point le général Bonaparte; qui, igno-
« rant lesparticularilé-^de votre vie, se-
<f ra toujours une étrangère pour vous ?
« Tout, jusqu'à son accent, vous pri-
« vera du charme de la vie intime.
« Vous garderez vos souvenirs sans
«< oser les lui confier, el ce ne sera
« pas sans honte que vous prononce -
« rez tel mot dont le sens ne lui sera
« que désagréable, etc.» Joséphine
chargea Cambacérès de porter celle
lettre à Napoléon, qui s'écria avec une
expression singulière de chagrin :
« Joséphine m'écrit : ah ! mon Uieu,
« pourquoi faire? ma résolution est
<f piise; je la rends malheureuse, je
« le sais ; mais qu'elle sache que je me
« suis immolé avant elle. » — Puis,
après avoir lu la lettre : « Dites à Jo-
a séphine que je lui répondrai, que je
" la regarde comme la plus excellente
«< des femmes : elle vaut mieux que
« moi, je vous l'allesle : c'est une
«« créature angélique ; le courage que
« je mets à l'abandonner me sur-
« prend ; mais il le faut : vous en
" sentez la nécessité : tachez de la lui
a faire comprendre. » Une heure après,
elle reçut la réponse de Napoléon,
a Je ne me remarie pas pour moi, lui
«< disait il, je chcrclie à maintenir ce
«< que j'ai fondé. Ton fils ne peut me
« succéder au détriment de mes ne-
« veux, et la Fiance voudrait-elle de
<• ceux-ci pour ses maitres... :' Qu'ar-
«< riverait-il à ma mort ? Des déchire-
« menls affreux, le partage de la suc-
«« cession d'Alexandre, la guerre ci-
« vile... Je sais que tu vaux mieux
«< que tu ne le sais toi-même ; je t'ap-
" précie à la valeur... Tu es sans re-
« proche , et je serais san» excuse, si
JOS
M je n'étais l'rmpcrrur en nièioe lempi
•< que ton mjii... Tadie de le mi-
M ener, en«isa<;e notre divorce du calé
M iionorablr, associe toi à cet arte de
M mon abné;;alion ; sois eu me qiiit-
« tant la prenurre mère de ii!o:i pru«
M pic, ric. •• Jiisrplriir avait écrit ^ns
lifviri'iip tlr.poii : cille rrponse fit
cv jiioiiir .sa diTniére illu>ion ; et deN lors
rlle .s'arma de celte force pasMve que
donne la iYM;;nalion. (^pendant Flu-
;;e(ie arrixa d Italie. Il apprit de la
iiourliemrme de l'impéiatiice combien
le divorce ciail prochain, .\ccable de
celle confidence, il alla trouver l'em-
pereur et lui dit : •* Sire, permettei
•« que je vous quitte. — Comment '
•« — •• Oui, sire, le fiU de relie qui
" n'est plus l'impératrice ne peut res-
♦« ter vice-roi : je suivr:ii ma mère
<« dans sa retraite. — Tu veux me
« quitter Ku^ènc:* loi! «h!... ne
•« sais-lu pas combien sont impérieuses
•« les raisons qui me forcent à pren-
•< dre un tel parli.' Kt si je l'obtiens
'< ce Gis, objet de mes plus cbers dé-
« sirs, ce GU qui m'est nccevsaire ; qui
« me remplacera auprès de lui lors-
•« que je serai absent :' qui lui servira
H Je pète, si je meurs ;' qui l'élèvera ?
« qui fera un lioinine de lui :' *• Na-
poléon a\ait les larmes aux veux en
prononçant ces mots. Lii;;ène ne put
resi^te^ a un pareil lan^a^e, et ;l se
conforma .i toutes le> démarches que
lui dicla son beau-pere. Joséphine,
d'ailleurs , au milieu de sa doiileur,
essavail de rendre moins amere celle
(le <^es eiifaiils; les en;;ai;eant à ne
point s'occuper d'elle, mais d'eux ; à
ciaiiidie surloul de mécontenler Na-
poléon lorsqu'elle ne serait plus là
pour veiller à leurs intérêts; et, quand
il fut question de son établissement en
Italie, elle fut la première à les dissua-
der dii projet de l'y suivre. Joséphine
donna une preuve non moins grande
de sa résignation , en assistant aux
JOS ySg
fêles que Berthier offrit k toute Ja
cour dans sa terre de («rosbois. Pen-
dant ces fêtes l'empereur parut beau-
coup occupe d'elle. Il y eut comé-
die. \je lu^ard > produisit une scène
plaisante : on jouait iluilrt Iwussel
maiire dr ilnltintatiun. (^<lci l\ous-
sel liinui;;ne a un de ses amis \e désir
de divorcer : celui-ci l'y in;;a^e. Ca-
det Koussel change ensui;e de n^olu-
tion en dl^ant : •• Je sais ce qu'est ma
•< femme, je ne sais pas ce que serait
•• celle t|uc je prendrais. » l.es corn ti-
sans ont ri m tJrJuns , dit dans ses
Situx'rnirs Slani.slas de (*irardin , nui
était présent. Knfm arriva le jour fa-
tal : c'clait le 16 décembre. Tou^ les
liunaparle.tous le» i»eauliarnais étaient
réunis. Cambaceies et He;;naull de
Saint-Jean d'.Vn^ely recurent , en
oualile d'officiers de l'elat civil de la
faratlle impériale, l'acte de divscdulion
du raaria;;e entre Jo<.éphine et Napo-
léon Bonapar'e. Klle ne put pronon-
cer le discours qui avait été préparé
pour elle et qui n'en fut pas moins
inséré le surlendemain dans le Mo-
niteur (Sl^. \jes larmes étouffèrent
sa voix et elle ne proféra « au mi-
lieu des sanglots, que ces mots .Mitrc-
coiipes : M Vous voyez une femme
•« bien malheureuse... Je peuls tout
•« le repos de ma vie. Je mourrai bien-
•« tôt. Ce divorce me tue... (Jue l'oa
«« lav.e ce qu'on voudra, je me sou-
•« mettrai à loul. »» ^/'oj. C\MU.\-
r.KRK>i, LX, H et 15). Pendant celte
triste séance, l'empereur ne dit pas un
mot, il était immobile comme une sta-
tue. 1^ soir, lorsqu'il venait de se
mettre ao lit, la porie s^ouvrit 'oiità-
coup, et Joséphine, la fij;ure ; .«nver-
sée, les cheveux épars, s'avanri d'un
p»5 chancelant vers le lit de l'empe-
reur , il V eut entre les deux époux une-
.ta' Ce di-iourk ri Ir» aulr.'k actes lus dans
I. tiiiiril il« ainille »'.iii un cher-d'iruvre d«
r 'l^ii <><«, dit Starii«la> de «jirardio, qui les aV-
tr.h •• a IVm^rvor lai-mèiB*.
a7<
JOS
scène déchirante et un long entretien
dont le secret n'a jamais transpiré. Le
lendemain , Joséphine quitta pour
toujours les Tuileries, et se relira avec
ses enfanis et son gendre à la Mal-
maison (33). Ce jour-là le sénat prit
plusieurs décisions relatives à la dissolu-
tion du mariage civil. Il v eut cependant
plus de bulletins négatifs que de cou-
tume, et quelques bulletins d'évêques
furent conditionnels, entre autres ce-
lui de l'archevêque de Tours, de Bar-
rai, qui vota en ces termes : Oui ,
quant au mariage cii?il. W ne res-
tait plus à obtenir que la dissolution
du mariage religieux. Cambacérès s'en
entendit avec Tofficialité, qui rendit la
sentence mentionnéeau commencement
de cet article. Les témoins entendus
dans cette procédure furent Berthier,
Talleyrand et Duroc. Les nullités n'é-
taient pas inventées, et certes, l'Eglise
a cassé des unions bien mieux éta-
blies que celle-là. Toutefois, on peut
supposer, sans injustice, que ceux qui
furent si empressés à prononcer que
le mariage de Napoléon et de Jo-
séphine était nul , eussent déployé
au besoin la même science cl le même
dévouement pour le déclarer légiti-
me (34). Napoléon ne tarda pas à for-
(33) Elle dit .-liors à la cointP^>e de I a Roclie
foucnuld : « Hfurtiix M. et ni.ditmf de TiiscLer
« «le n'avoir pas ^té ii moins de la dist;r.^ie di;
w leur Glle ! » M. de Tu.'-cber était innrt dc>
pui« loig-tnups. Sa veuve vécut n .simple par-
ticulière aux Trois Ileis, à la Maitiniqu*', «i.iDs
Touloir Jtcepl<r Its bonn>ur.s que lui offrait
son gendre. Klle ei;,it dei < d»e en 1807.
(34) Le divorce fui condamné à l'ari» par
tous les espnl^ iri(le|.end "iiis. (^nclq'ie.s jours
• vaut qu'il fui prononce, l'avoué Desrez , an-
cii-n procun-ur au parlement et doyen du b.ir-
re<n , qui av^il occupé pour madame de Keau-
liarii.iis avant l;i revi'Iuiion , lors d« son procès
avec son pn ini< r mari , >inl la voir aux Tuile-
ries pour I instnnr)' que l'acle qu'elle iillait si-
gner eliiit nul, p-r(»- <|u'«)n u'observer.iit pas
toutes les fornidlités légales II lui prr>po<i;iit d'en
appeler comme d'abus, et lui olfruit à cet égard
son ii.inisière «l le contours de ses amis du
palais. .Napoléon, qui ne «onnjissaii pas De^-
re/. , snirinl siibieinent. Il voulut d'abord in
imposer au vieillard; uiais , subjugue j)ar .son
éa«r|^ii tranquille, il s'adoucit , et Giiit par lui
JOS
mer la nouvelle maison de Joséphine.
Sa surprise fut grande de voir la com-...
tcsse de La Rochefoucauld le supplier
de la maintenir dans sa charge auprès
de la nouvelle impératrice. L'empe-
reur indigné la destitua pour donner
sa place, auprès de Joséphine, à la
comtesse d'Arberg , femme d'un mé-
rite sérieux. Elle devait correspondre
directement avec l'empereur pour le
tenir au courant de ce qui se passait
à la Malmaison ou à Navarre (beau
domaine près d'Evreux dont Napo-
léon fit alors présent à Joséphine).
L'impératrice avait été long-temps ,
et à juste titre, jalouse dcM"^*^G i,
une de ses lectrices , et la traitait
assez froidement. Celle-ci s'en était
plainte à l'empereur, qui engagea
Joséphine à avoir plus de bienveil-
lance pour celte dame , sur l'alla-
chement de laquelle elle pouvait
compter , et avec laquelle il n'avait
plus la moindre liaison. L'impératrice,
sans être bien convaincue de cette der-
nière assertion, avait cessé de bouder
M™* G i, lorsqu'un matin l'empe-
reur, qui avait apparemment quel-
que crainte que la belle Génoise ne
reprît sur lui quelque empire, entra
brusquement chez l'impératrice, en lui
diî>ant : « Chassez M"*^ G i : il faut
« qu'elle retourne en Italie. » Celte
fois Joséphine prit la défense de sa
lectrice. Il courait déjà des bruits de
divorce, w Vous«:avez bien, mon ami,
« dit -elle à Bonaparte, que le meil-
« leur moyen que vous ayez d'être dé-
'< livré de la présence de M"'^ G i,
« c'est de la laisser avec moi. Souffrez
«< que je la garde. Nous pleurerons
« ensemble ; elle et moi nous nous
offrir une place dans la magistrature; Desres
refusa et se retira. II est murt en i8a6, laig.
>ant d's sommes considérables en or cachées
dans II» rayo s de sa bibliothi^que. Il avail en
sa possession un giand nombre de lettres auto-
gra|)hes d^ Joséphine, fl était ami intinie dt
BeHart. '
JOS
•• entendrons bien.» Dès re monienl
Josrphine fui |»Ifine de honte j»our
j Irctiice qui \jk suint à L Mal
maison cl i Sa^jrre, M""" d*Arl>ei^,
«)i.r J(i»e(iliine appelait su f^ramle
' rssr, a\ail tout pouvoir bur les
de la maison. F.lle > étaldil un
tiidir parfait, et c'rst bien cerlame-
iiiriil a elle que rimprralnre a dû la
>ali>farlion de poii\oir continuer à ré-
pandie de nombreui bienfaits, sans
diminuer autour d'elle re lute qui lui
était de\enu si nécessaire. I*oin de
s'oiïenscr des remonlraiiccs de M"**
d\\r!)er>; , elle lui donnait toujours
raison; cédait a^ec une Rràce cbar-
manle aux obsei>alions justes qui lui
el.iirnt faites, et l'en aimait dj\anla^e.
\.i petite rour de la M^linai^on fut
d'abord fort liiNtr, bien que durant Ir
mois de janvier IKK) L fouir des vi-
siteurs s'> portât, avec la rerliliidr de
ne pasdeplaiie à l'emprreur qui con-
serva toujours pour Joépliine les de-
hors de la plus tendie affection.
• Cette habitation, jadis si brillante,
offrait alors,» selon (liraidin, dans ses
Suucrnirs, » lecaractèie d'une pro-
fonde tristesse... I/ennui était peint
sur toutes les Goures... Une heure
après notre arrivée , l'impératrice en-
tra : elle avait les. veux rou;;en, et de
grosses larmes roulaient encore sous
ses paupières... Klle affecta de parler
de l'eiupeieur, du dt'sir qu'il lui témoi-
gnait de lui Toir habiter Taris... C*
3u'clle disait eût paru simple le mois
ernier ; aujourd'hui on n v voit que
l'envie de faire croire il un crédit per-
du. » Toutes les majestés, toutes les
altesses d'ancienne ou de iiouv elle date,
3ui se trouvaient à Paris dans l'hiver
e 1810, allèrent àla Malinaison s'in-
cliner devant Joséphine. Ces visites lui
étaient pénibles et douces en même
temps, parce qu'elles lui raonlraienl
que la volonté de l'empereur était
qu'elle fût toujours honorée. Quand
J05
*7«
la belle saison arriva, elle se rendit
i (lenève, vova;;eant sous le nom de
la comtesse u'.Krbrr^. Son but etail
de voir Kuj;ènc ri nj femme , qui
vinrent de Milan pour passer qurhiuet
jours avec elle. l)ans ce vo>a;;c elle
parut au<>>M calme, aus>i satisfaite qu'à
aucune autre époqur de »a vie. De re-
tout en Fiame, elle reprit un train
de vie soums a unr etiqurtlr ai»sez mo-
notone C/cpeiidant sa cour ne fut pas
aussi triste au'on aurait pu le pensrr.
I^s plaisirs de Navarre et de la Mal-
maison étaient peu bru>ants; c'étaient
des conversations spirituelles, des lec-
ture», des promenadrs en calèche. \a
dessin des llrurs, l'étude de la botaui-
aue , le soin d'un superbe troupeau
e mrrinos occupaient tous les loisirs
que Joséphine ne consacrait pas au
^oût de la parure, et l'on a dit qu elle se
fit faire alors plus de chapeaux et de
robes, peul-rire, qu'au temps où elle
régnait à cAté de s<in époui. Les Mé-
moires de M' ' Ducrest font connaître
combien eiait régulier l'emploi de cha-
Que journée. Joséphine avait appris
leiactiludeà l'école de Napoléon, si
minutieux dans ses habitudes d'inté-
rieur. Dans ses proniriiadrs, elle de-
n piqu
^rand
tiime, etc. Knnu>ce de celle étiquette,
el'e permit à l'ecu>er et à roHirier de
la suivre en frac, el onlonna que l'es-
corte ne sortit «jtie les jours de céré-
monie. L'emperrur en fui instruit; il
écrivit à M"** dWrber;; , •« qu'il fal-
lait qu'on se souvint que l'impératrice
axait été sacrée; que tout devait se
pa>ser loin des Tuileries comme si l'on
y était encore; qu'il avait oublié les
pa^es dans la formation de sa maison,
dv'il allait en nommer douze ^ce qu'il
fil en effet^ ; qu'il ne voulait pas de
frac; que c'cîait manquer essentielle-
ment à ce que l'on dcN.nt a S. M. » Il
fallut donc reprendre l'habit brodé, el
vait avoir pour escoilr un piquet de
cavalerie, un écuver en ;;raiid cos-
l'JI
JOS
se soumettre iVailleurs à toutes les i !
guenrs tle la rcprésPiitalion. Ce n'était
qu'à onze heures Ju soir, qu'enfin dé-
barassée de ce jouo;, elle pouvait causer
avec ses intimes et se livrer à sou o;oût
favori pour tirer les cartes. Dans ces
causeries, elle déplo\ait tout l'apure-
ment de son esprit. Quelquefois elle
parlait de reunui qui l'avait dévorée
aux Tuileries. Il lui arrivait de s'inter-
rompre subitement au milieu d'une
narration , en disant que tout ce
qu'elle contait était redit à l'empe-
reur ; elle n'avait de sonpçon sur au-
cune personne de son intimité : ce-
pendant 11 est certain qu'il -^ avait au
moins un espion. F^es visites d'Hor-
tense, et surtout d'Eugène Beauhar-
nais, lanimaient un peu la monotonie
de cette petite cour. Lorsque Joséphine
était à Navarre, sa fête se célébrait
avec solennité à Evreux ; elle avait
mérité l'amour de la population de
cette ville en répandant des aumônes
considérables, en fondant une école
pour les pauvres orphelines, en agran-
dissant la promenade, en faisant con-
struire une salle de spectacle , etc.
Chaque année elle donnait plus de
cent mille francs à l'évcque Bourlier,
pour les pauvres du diocrse. Ce fu-
rent pour elle des journées bien tristes
que celles qui précédèrent le second
maria;^e de Napoléon. Elle demeura
complètement seule, réduite aux per-
sonnes de son service, et à deux ou
trois visiteurs fidèles. « Je voudrais ,
■^ disait-elle, faire montre de fouraf;e,
■u cela m'est impossible : je voudrais
« être aujoind'hui à la Nouvellc-Zem-
« ble. » Ce qui la consola fut d'ap-
prendre que la nouvelle impératrice
ne la faisait pas oublier. Cependant
les écrivains de police épuisaient, pour
faire valoir Marie-Louise, toutes les
formes de l'adulation. Dans Vo\>é\3 du
Triomphe de Tnijuti, se trouvaient
des allusions très-flatteuses pour José-
JOS
phine. dont on avait peint le caractère
sous le nom de Plotine ; on les suppri-
ma, et certains journaux donnèrent à
cette bassesse le nom de chanf;;cments
heureux. Si l'on en croit les conver-
sations de Sainte-Hélène , Joséphine,
lorsqu'il fut question du mariage avec
l'archiduchesse , « se serait conduite
« avec beaucoup de grâce et d'a-
rt dresse; elle aurait désiié que le vice-
« roi (Eugène) fût mis à la tète de cette
« affaire, et aurait fait elle-même, à cet
« égard, des offres de service à la
« maison d'Autric'.e (35) Joséphine
« eût vu volontiers Marie-Louise; elle
« en parlait souvent et avec beau-
« coup d'intérêt, ainsi que du roi de
« Rome. Quant à Marie-Louise , elle
« traitait à merveille Eugène et llor-
« tense ; mais elle montrait une
« grande répugnance pour Joséplilne,
« et surtout une vive jalousie. Je
« voulais la mener un jour à la Mal-
« maison; elle se mit à fondre en lar-
« mes. Elle ne m'empêchait pas d'y
« aller, disait-elle, se contentant de
« ne vouloir pas le savoir. Toiite-
<f fois, dès qu'elle en soupçonnait l'in-
« tentlon, il n'est pas de ruse qji'elle
ce n'employât pour me gcner là-des-
« sus. Elle ne me quittait plus ; et;
« comme ces visites srinblaieiit lui
« faire beaucoup de peine , je me fis
<c violence et n'allai presque plus à la
« Malmaison. » Marie- Louise n'était
pas moins jalouse de la popularité de
Joséphine : elle avait en horreur tout
ce qui pouvait lui rappeler celle dont
Ci5) C.rXXe .is.seriion parni't f|ii«'l(nie p»ii in-
Trois«nilil;)l)l<- quand on songe aux It-rnit-s d'une
l.Miir (|iic Jo^<|iliiiic' ;lllre•<^a à Napoléon, six
jour'; .Tpi es que \v. divorce fut pronorxf : « Atcc
« qui roirn<zvou.s allinin e ? avt-c l'tnin'inie de
« la France, cpII«" insidieuse niaisL-n d'Antri-
« che , qui déleste notre pay» par sfntiinpnt ,
« par syslrnie , par m ci-ssil*'. Je r;e \:\\s que
" vous léprler ce qnc vous m'avez «lit niiilr
« fois; mais alois vtre .Tinbilii'n se bornnit A
« huniilirr unt- puissance qu'il vous envient de
« r< lever .Twjourd'lini Croyez moi lai. l <|ue vou»
« serez maître de l'Kurope , elle vous sera iou-
" mi»t ; mais n'ayez jamais dertver». m
JUS
cll« ocrapail la plare. Oujnt) elle ai-
Uil à Siiut-Cfriroain, rllc faiNait pren-
dre la route lie ('.liatou, afin de ne
point passer de\aut la ^]ai^uiso^.
•• Cecaractere, obier^c M *^ Ducresl,
a dû lui causer de ;;ran(ls chagrins :
car, malj;ré sa faveur, elle n'a pu affai-
lilir les sentinientN de son époux pour
Joséphine ; il ne prenait pas la peine
de les cachet, parlait d'elle souvent, et
ne né;;li^eait aucune occasion de la
faire \alnir.» Lorsqu'il lui arrivait d'al-
ler à la Malmaison, «< c'étaient, disait-
*» il encore, c'étaient alors d'autres
« larmes et Ar- \ • '" . '• e
« espèce. Josr, ''.>'-
» Tant les veux, cl duu> :>i-. mU mUdiis,
M l'exemple de la le-iime de Henri
«< IV, qui a\ait vécu a Faris après son
M divorce, avait assiste au sacre, etc.»'
Qiaque semaine il lui énixa.t des hil-
lets courts, mais aimables, et toujours
reças avec reconnaissance : souvent
elle les lisait à s« darnes. Klle trouvait
une consolation encore plus réelle dans
la réprobation dont l'opinion publique
avait frappe le divorce de I>onaparte et
son maria;;c avec une Autrichienne,
(l'était une crovance populaire que la
bonne fortune de Napoléon tenait à
la prc>ence de Joséphine auprès de lui;
et il faut convenir que les e\èiieme;il$
qui suivirent son :>ccoiid nuiia^e étaient
bien de nature à jusiiher ce préjugé.
Toutefois elle faisait les vcrux les plus
sincères pour Bonaparte , et vovait
avec douleur l'horizon politique s as-
sombrir autour de lui. Mais tel était
encore , dans l'esprit de la pauvre ré-
pudiée , Teropire des diiffons , qu'a-
près avoir pleuré un quart d'iieure, on
la voyait oublier ses lannes pour don-
ner audience à des marchandes de mo-
des et à des inventeurs de paiiircs nou-
velles. A l'aspect d'un joli chapeau elle
n'était plus qu'une lemiiie ordinaire;
et , si l'on avait retranché de sa vie
tout le temps quelle passait à pieu-
JOS
a-'î
rer et it su toilette , la durée en eût
été bien courte. \u moment du di-
vorce elle avait \ersé une telle abon-
dance de larmes, qu'elle fut plus de
six mois sans voir clair : ses veux
étaient dans un élat aflieux. Open-
dant , à la naivance du loi de Home,
elle eut a*-^cz de force sut rlle-mème
pour que l'on pût croire qu'elle prenait
part à la joie commune. I^ lendemain
Napoléon lui écrivit : «« Cet enfant, de
M concett avec notre Ku;;ène, fera mon
« bonheur et celui de la Kiaiice. >• Kn
remettant sa réponse au pa|;e de l'em-
pereur, elle lui fit présent d'une épingle
de rimf mille friim s. Klle donna un
bal ma;;nitique ou elle .se montra en
;;iande loileltr, et , pour la première
fois depuis sa dis;;race , parée de st%
diamants. Klle n'a\ait porté que rare-
ment le riche diadème tlu sacre, qui
pevait trois livres, et qu'elle ne quittait
jamais sans avoir au fiont un profond
sillon avec une cruelle migraine. KHe
était fort sujette à ce mal aux Tui-
leries, où rien ne pouvait l'exempter
des fatigues de l'étiquette. Napoléon
ne lui permettait pas m<'ine de se plain-
dre. Pour la iiuerir il lui faisait faiie
•i- •■M calèche ; et souvent
• ûo faire arrêter pour se
I ' ijur> heures dans une mau-
\. • I .,r. Depuis ledivorce elle n'é-
prouvait plus cette indispositKMi, ;;ràce
à la vie paisible de la Malmai->on et de
Navarre : aussi avait-elle pris beau-
coup d'embonpoint. Dans ces deux
résidences, son appartement particu-
lier était joli , mais sans luxe, et paré
de celte simplicité élé;;ante qui n'est pas
moins coûteuse que la ma;;niGcence.
(x)nservaiit pour Napoléon une sorte
de culte et d'adoration, elle n'avait
pNnt permis que l'on déranf;eàt rien
dans le lof;ement qu'il avait occupé à
la .Mainnison. Un livre d'histoire
posé sur son bureau clait encore mar-
qué à la page où il s'élait arrêté ; qael-
^74
JOS
ques pièces de ses habillements se trou-
vaient éparses sur les meubles. Elle
seule se charf];eait d'ôter la poussière à
ce qu'elle appelait ses reliques, et ra-
rement elle donnait la permission d'en-
trer dans ce sanctwaire. Les apparte-
ments d'honneur étaient restés d'une
extrême magniticence : le meuble du
salon en tapisserie était l'ouvraf^e de
Joséphine elle-même. Bien qu'elle fut
alors un peu mieux rét;lée dans ses
dépenses, le gaspillante alla d'abord si
loin à Navarre qu'on y comptait
chaque jour vingt-deux tables servies
séparément, parce qu'il y avait dans
la domesticité de l'antichambre une
hiérarchie aussi sévèrement observée
que dans la haute domesticité du sa-
lon. M'"^ d Arberg, que Joséphine
chargea de mettre ordre à cette rui-
neuse étiquette, ne put obtenir que la
réduction de six tables ; et avec cela
les valets de pied et les gens de l'écu-
rie n'étaient pas nourris. Le château
était foit incommode : on devait en
construire un autre, et l'empereur avait
promis d'en payer la moitié , mais
Joséphine y renonça par économie.
Aimant les fleurs avec passion , elle
voulut avoir des serres qui pussent lui
en fournir en t(!ul temps; et pour suf-
fire à cette dépense , sans diminuer
les sommes consacrées au soulagement
des pauvres, ou aux présents destinés
à ceux qu'elle aimait , la ménage-
rie de la Malmaison fut supprimée.
Des arbres étrangers, des fleurs par-
tout, des gazons d'une beauté rare,
faisaient l'ornement du parc. José-
phine, qui favorisa spécialement l'in-
troduction des mérinos en France ,
avait fait bâtir une ruperbe bergerie.
Elle avait aussi établi à la Malmaison
une école d'agricnliure à l'instar de
celle de Rambouillet. Toutefois l'em-
pressement que , dans les premiers
temps , les courtisans avaient cru de-
voir témoigner à Marie-Louise s'était
JOS
bien ralenti dès qu'ils virent le rôle
de nullité qu'elle remplissait aux Tui-
leries ; et déjà Ton s'empressait de
retourner faire sa cour à Joséphine,
qui savait pardonner à qui l'avait né-
gligée ou oflcnsée, et près de laquelle
on se trouvait aussi à l'aise qu'on l'é-
tait peu devant la seconde impératrice.
A Navarre elle avait reçu beaucoup
de lettres de personnes attachées à
l'empereur, qui désiraient passer quel-
ques jours auprès d'elle. Craignant
que ces vovages n'offusquassent Marie-
Louise, elle dut refuser ces demandes,
à quelques exceptions près en faveur
de dames qui avaient été dans son in-
timité. 11 n'en était pas de même à la
Malmaison. Les sénateurs, les conseil-
lers d'état, les personnes attachées aux
maisons de l'empereur, des princesses
et même de Marie-Louise, affluaient à
cette résidence si voisine de la capitale.
Deux des plus assidus étaient le cardi-
nal Maury et surtout Cambacérès.
<« C'est un homme que j'estime, dit-
« elle un jour à ses femmes, lorsqu'il
« fut parti, parce que c'est un de
<f ceux qui ont le moins flatté Pempe-
« reur ; il m'a souvent donné de bons
« conseils, et ce n'est jamais en vain
»< que je les lui ai demandés.» Per-
sonne, en effet, n'aimait moins la flat-
terie que Joséphine; et, quand elle
demandait des avis, c'était pour être
éclairée et non pour être approuvée :
ainsi, M"^^ d'Arberg avait avec elle
son franc parler aussi bien qu'avait pu
l'avoir son ancienne dame d'honneur,
Al"'® d^ La Rochefoucauld. Joséphine
désapprouvait la servilité du sénat , et
y voyait la cause de plusieurs mesu-
res qui n'eussent jamais été proposées
par Napoléon, sans la certitude qu'il
avait de ne rencontrer aucun obstacle
aux actes les plus tyranni(jues. *< Mal-
« gré cette soumission, disait-elle un
« jour à ses daines, Napoléon n'estime
« ni n'aime les sénateurs, et je l'ai tu
J05
« t*AMNV WhK9UP ^c c^ qu'il ap-
« pebit BM niche faite à ers nin-
m ftirur>. u Puis elle racorili coroinent ,
en 1807, iiuiruit que le sénal a\di.t
en réserve une somme ile quinze cent
luille francs , rrmpereiir amena ce
corps ^ 1rs rm|ilo\er a la re»lauialiou
Je VOiléun^ qui recul alors le nom de
ThrtUre dr iimurrutritr. l)an> l'an-
nce 1811, le calnir de sa prlile cour
fut IruuLie par le^ embarras quV-
pruu\a dans ses aiïaiies le bjni|i.ier
rirrlûl, son in(endanl-(;entrji. Klle
intercéda vainement auprès de Na-
poléon pouj quM ne peidit pas sa
place : le comie de Monllitault lui
lut donné pour succe.»eur. lorsque
Napoléon venait la \oir quelquefois à la
Malmaison, elle parai^^ait heureuse.
Dans ces entretiens, comme dans ses
lettres, il lui parlait toujours du roi de
liome et du plaisir qu il aurait à le lui
amener quand il serait plus grand.
Klle TTirmr dr^irail voir cet enfant
qu si cher ; tuais elle était
pei _ < jama s Marie-Loui>e ne
le permettrait, 'i'rndremenl attachée à
M*"' de Montesquiou, •;ou>ernante du
roi de Rome, elle entretenait a\ec
elle une correspondance qui dura jus-
qu'à s^ mort. Ln jour M"** de
Montesquiou reçut ordre de l'empe-
reur de conduire le petit roi à baga-
telle: Josc^)hine s'\ tiou\ait; elle avait
enfin obtenu la Lveur de voir cet en-
fant : « Je ne sache rien au monde,
dit Constant dans ses Mt-rnoires, de
plus touchant que la joie de celte ex-
cellente femme à la vue du fiis de Napo-
léon, u Elle le couvrit de caresses, le
baigna de ses larmes. Ces visite5 secrè-
tes se renouvelèrent quelquefois ; mais
l'enfant {;randi5sait ; un mot indiscret,
bé^a>é par lui, pouvait porter ombrage
il Marie Louise. L'empereur, pour s'é-
pargner cette contrariété , qui eût pu
porter atteinte à son bonheur domesti-
que, ordonna que les visiter deviiàiscnt
JOS
175
plat rares : on finit par les suspendre
lout-à-fait. Le roi de Naplcs, Murât,
qui, ainsi que sa fennue, s'était con-
staninienl muntic liusiiJe à Joséphine,
fut, de tous le« membres de la famille
impériale, le dernier à lui rendre visite
à la Malmaison , et encore fut-il as-
.sez ^' ' ' lui dire qu'il ne lenait
que lion expresse de Napo-
léon. A celle occasion, elle dit à ses
femme- ; •< Il e^l trop servile a\ec l'em-
•• pereur pour lui être sinfèrement
«* dévoué; s'il se troiite jamais en
m position de le trahir, il le fera.» Jo-
séphine à vécu as^ex pour voir réali-
ser ses prévision*. Au commencement
de 1812, Honaparte étant venu la
▼isiter eut a^ec elle une conversa-
tion qui dura deux heures, et dont les
courtisans ne purent pénétrer le rars-
tère. Klle répéta plusieurs (ois que ja-
mais il n'avait ete plus aimable, et
t un vif regret de ne
i :e pour rrt hrurrux
lie la trrrr. (^>uelques mnr. obis lard,
cette epithete ne convenait plii> à Na-
poléon. Son étoile palis«ait, et le trcp
fameux vingt -neutième bulletin de la
grande-armée vint jeter la conster-
nation par toute la France. Le pu-
blic ne manqua px^ de remarquer que
l'élonn.inle prospérité de Napoléon
semblait a\oir fini a>ec l'elo'gnement
de Joséphine. IVndant celte fatale
campai^ne de Kussie , elle était allée
en Italie assister aux couches de la
rifc-reine, sa belle-fille. Ce furent là
pour elle les derniers instants de bon-
heur. L'année suivante, les resers des
armées françaises rendus irréparables
par la défection de l'Autriche affec-
tèrent profondément Joséphine, qui
reconnut combien son dnorce avait
^<té inutile pour la France, et combien
Napoléon avait été déçu en espérant
que le litre de son beau-pere porterait
Icmpeieur François il à abandonner
sa politique et ses intérêts comme sou-
18.
l'jS
JOS
veraln. Durant la lullc sanglante qui
marqua la lin île 1813 et les premiers
mois de 1814, les soirées de la Mal-
maison ne se passèrent qu'à faire de
la charpie pour les blessés : Joséplil-
ne se livrait activement à cette pieuse
occupation, et ses libéralités se répan-
dirent , par les mains des sœurs de
la charité, dans les hôpitaux. Tou-
chée de commisération pour tous les
malheurs , elle prenait un vif intérêt
au sort du vénérable Pie VII, alors
prisonnier à Fontainebleau. Elle pro-
fita de Téloignement de l'empereur
pour envoyer dans cette résidence un
agent fidèle , chargé de lui rendre
compte, dans les moindres détails, de
la situation du saint-père. Pie VII
fut singulièrement touché de ce bon
souvenir de Joséphine ; 11 reçut son en-
voyé de la manière la plus affectueuse,
et, dans une lettre adressée à celle qu'il
regardait toujours comme l'épouse lé-
gitime de Napoléon , 11 s'exprima
ainsi : « ^Madame, les gouvernements
« ont toujours montré si peu de scru-
«< pule dans la manière dont ils ont
<f satisfait leur haine, qu'il n'est pas
« encore permis de prononcer sur la
« conduite de votre époux envers
« mol.» Au mois de janvier 1814,
elle reçut la dernière visite de Napo-
léon. Le 29 mars suivant, lorsqu'elle
eut connaissance des préparatifs de dé-
part que faisait l'impératrice Marie-
Louise pour lilols, elle réoolul de se
retirer à Navarre, et durant ce voya-
ge elle eut à craindre d'être enlevée
par quelque parti de Cosaques. Ce-
pendant les événements se précipi-
taient ; lionaparte lui avait écrit de
iirienne une lettre des plus tendres.
t( J'ai cherché dans plusieurs combats
« à rencontrer la mort, disait- il ; je
« ne puis la redouter, elle serait au-
«< jourd'hui un bienfait pour moi...
«< Mais je voudrais revoir une seule
« fois Joséphine... » Klic ne de-
JOS
meura que peu de jours au château de
Navarre, les souverains alliés l'ayant
invitée de la manière la plus pressante
à quitter cette retraite pour revenir à
la Malmaison. Ce fut alors qu'elle re-
cueillit de toutes parts des témoignages
d'estime et d'intérêt, juste récompense
de la modestie et dç la bonté qu elle
avait conservées sur le trône. Le duc
de Berri arrivé à Caen, et songeant
aux circonstances qui pouvaient alar-
mer l'ex-impératrice à Navarre , en-
voya le comte de Mesnard pour lui
offrir une garde d'honneur; mais Jo-
séphine en était déjà partie. A son re-
tour à la Malmaison, elle vit que ses
propriétés avaient été respectées ; une
garde d'honneur veillait autour d'elle ;
enfin elle se trouva au milieu d'une
nouvelle cour , formée des person-
nages les plus marquants de l'Eu-
rope. Le roi de Prusse et l'empereur
Alexandre lui témoignaient les égards
les plus respectueux ; mais c'était un
faible dédommagement pour un cœur
navré de tant de douleurs. Elle dé-
plorait d'avoir perdu ses droits à ac-
compagner Napoléon à l'île d'Elbe.
« 11 est malheureux, s'écrlalt-elle, et
« je ne puis être avec lui ! » Elle n'é-
tait pas moins inquiète du sort de son
fils et de sa fille. Cependant l'intri-
gue s'agitait encore dans la petite cour
de la INIalmaison. On conseillait à
Joséphine d'écrire à Louis XVIII
qu'elle, jie savait ce qu elle élail (36),
ce qu'elle avait été, et qu'elle le
priait de fixer son existence. L'em-
(36) Ivlle vcii.iil (IVlr^ viveinenl ofCenstie de
ce parasijplie insirr dans le Journal des Dé-
bats : « L'friiipcieur de Russie s'est rendu il y a
<leux jouis iiii <li;Ue.iu d<; Saint-Leti, près de
Montmorency. S. M. y a dîne avrc le prince
Eugène , ta nirre et sa sœur. » — « Ne pouvait-
on pas parler de moi avec nn peu plus de res-
pect, disait Joséphine; doisje élre ainsi à la
suite de mon fils ? J'ai un nom , je sui» montée
»ur le trône, j'ai été couronnée et sacrée;
l'empereur Alexandre m'a protégée spéciale-
ment; aussitôt qu'il a été inaitre du pont de
Neuilly, il a envoya une sauvegarde à la Mal-
uiai'nn. »
JOS
txreur AlnanJie t'opposa foiniri
ement i ceUc démiTchf : •« (^Ite
M Irltie, lui tlit-il, ilr\ifn(lrait votre
■ opprobre ; le cur Je Uu^^ic saura
« voiii pioié^er en\er5 el contre
« lous.» l).ins une autre occasion,
ce prince lui dit : «< Hr^ardex-moi ,
«< madame , pour \ous ain^i que
« pour %o4 rp.r.iiits , comme un au-
•« tre Alexandre pour la famille de
« Darius. •• Malgré c« puissantes con-
solations, le coup mortri était porté.
Ce fut en revenant de Sainl-I^u, où
la reine llorten e a%ait donné un
grand dîner aux souverains, que Jo-
scpliine éprouva un malaise univer-
sel. Son mcdrcin (M. Iloreau) lui
ordonna l'émrtique ; elle parut un in-
stant soul.i^re , rt reprit ses h.il)!-
ludes ; mais il ôJait facile de s'aper-
cevoir qu'elle souffrait. I.e 10 mai,
l'empereur .\le\andre vint dîner ib la
Malma!<on ; elle rest.i dans le salon
mal}:;ré les vi^es souf.rances qu'elle
éprouvait. On fit une partie de barres
après le dîner, .sur la belle pelouse qui
était devant le palais; elle essaya d'y
prendre part, mais ses forces la trahi-
rent, elle fut contrainte de s'avenir.
L'altération de sa fi-ure alarma tout
le monde, bien qu'elle s'elforç.U de
sourire. Le lendemain elle voulut en
vain faire sa promcn-ide arrotitumée.
Depuis ce jour- la elle nr Gt plus que
languir. Cepend.int, le *JV, m.-»I;;ré la
défense de son mrdecin, elle se lf\a
pour recevoir le roi de Prusse et
l'empereur Alexandre , qui dînèrent
à la Malmaison. Llle se mit à ta-
ble ; mais la violence du mal l'obligea
de se retirer et de charf^er sa fille
Hortense de la remplacer. Des ce mo-
ment sa malndie, qui était une esqui-
nancie cancéreuse, prit un caractère
de plus en plus sérieux. Dans la nuit
du 27 au '28 , elle reçut les secours
de la relipon , el mourut le '29 i
onie heure:^ du matin. L'empereur
JOS
ni
Alrxaiidf se promenait triplement
dans les allées du jardin , tandis
Su'Kugène el llortense recefaienl le
emier soupir de Irur mère. Klle avait
conservé jusqu'à la fin sa pri- <iii<-
d'esprit et même toute son arii< i
Apprenant ravant-veille qur le \)c\n-
tre hedouté s'était rendu à la Mal-
maison pour dcNsiner deux belles
rdantes de sa serre, elle Ir fit wnir,
ui tendit la main, puis le repou^sa
doucement en lii disant qu'elle avaii
peur que »a maladie ne se ;;a^n.ii
Son corps fut déposé dans l'r-i -e
de Kueil , et tinivi d'un nombreux
1 I l'empereur Alexandre se
i lier p.ir le général Sack.en.
I. arclicM-que de Tours, Barrai, pre-
mier aumAnier de la défunte , et qui
lui était totijouTs resté drvoué , pro-
nonça l'orai.son funèbre, qu'd fit impri-
mer ^:ï7. Kn 1K22 *ps enfantsobtin-
rent la |>ermision d'élever dans celte
église un monument (38) à leur mnr,
qui, à son lit de mort, pul d;re dVilr-
raème avec vérité : « I^ première
« femme de Napoléon n*a jamais lait
« verser une larme. » On doit re-
connaître que Joséphine mourut i
propos : car sa présence eût été fort
I lule en France : au<si son-
i se retirer en Suisse. I^s
biuiuU^ plus sinislrcs counirent sur
cet événement : on parla d'cmpoison-
nemeiil , m.iis l'autopsie du corp>,
qui fui embaumé, prouva que sa morl
ét.iit naturelle Maints auteurs de
Mémoires se sont exercés sur la
\-ie de la première femme de Bo-
naparte , à laquelle WallCT Scott a
consacré les meilleures pa;;es de son
Ulstoire (ir ^'uftolrun. Sans par-
>i^r «les Mrmoirrs dr .1/"'" lu dif-
ftrtmmt
r. F. c
j0 ->.
' («r Je«^hine y «i représentée en inarbr.-
blinc . k fMioax, Aatu ftmiode de U pnére.
178
JOS
chesse d'Ahrantès , qui , à l'éf;;ar(i
de Joséphine, ne sont qu'un libelle ;
sans s'arrêter davantage à ceux de
M' * Avrillon qui sont de purs bavar-
dages de femme de chambre, on peut
citer ceux de M"* Ducrest sur José-
phine et ses contemporains. Ils con-
tiennent des anecdotes intéressantes ,
et sont terminés par des lettres qui pa-
raissent authentiques. Les Mémoires
de Bourrienne, de Constant , de M.
de Bausset, etc., font également bien
connaître cette femme dont la place
est marquée dans l'histoire. Quant aux
Souvenirs de M"*^ Lenormand et aux
Mémoires qu'elle a publiés comme
étant de cette impératrice , on doit ne
les lire qu'avec précaution ; mais il
est juste de reconnaître que ces deux
publications (39) offrent des particula-
rités curieuses et des pages véritable-
ment écrites de la main de Joséphine.
En 1820 le prince Eugène s'était cru
obligé de désavouer, par la voie des
journaux, un autre ouvrage publié à
Paris sous le nom de Mémoires et
correspondance de l'impératrice Jo-
séphine. <« Je remercie l'auteur, di-
sait-il, de la justice qu'il lui rend et,
dans les lettres qu'il lui attribue, des
sentiments français dont elle fut tou-
jours animée. Je déclare cependant
qu'd n'y a pas dans ce livre une seule
ligne qui soit réellement de ma mère,
de ma sœur ni de moi ; pas uneanecdote
sur ma famille qui soit conforme à la
vérité. » En 1827, on a publié Les
lettres de Napoléon à Joséphine
pendant la première campagne d'I-
talie, le consulat et f empire, et les
lettres deJoséphine à Napoléon et à
.sa fille, Paris, 1833 , 2 vol. in-8".
J)_n— R.
(ig) Voici lo'S titre* de ces d<;ux publications ;
X* Souftntrt prop/icli'juei d'une tibrtle sur let
tauiti fcrilei de son arretlation en 1809, Pari» ,
i8i5, i vol. in-8*; a" Mémiiret /iiilon</uei ei
Mereti de Joiep/iine (Maric-I\'><,e T.ischpr de in
Pagerie), première épntise de Napoléon Dona-
parte, a* édition. Pari», 1817, 3 toI. in-S".
JOS
JOSQUIIV DEPREZ, regardé
comme le plus grand compositeur de
son temps, et comme le plus habile de
l'école Uamande, naquit en Belgique
vers 1450. Il fut élève d'Ockenhelm,
sur la mort duquel il composa une
Déploration en contre-point et canon,
à cinq parties, sur le plain-chant de
V Introït de la messe des Morts. Cette
pièce savante et singuHère se trouve
dans \' Histoire de la musique de
Burnej , et Choron l'a fait graver
dans sa belle collection des classiques.
Adami da Bolsena dit que Josquin
fut chanteur à la chapelle pontificale
du temps de Sixte IV, c'est-à-dire de
1471 à 1484. Il fut ensuite maître
de chapelle à Cambray, où du moins
il séjourna; enfin, il fut maître de
chapelle de Louis XIL Glaréan, dans
son Dodécachorde, imprimé en 1547,
le nomme le Primarium des chan-
teurs du roi, et raconte quelques anec-
dotes qui prouvent qu'il le fut en effet.
Ce priiice lui ayant promis un béné-
fice oublia sa promesse. Josquin ,
pour la lui rappeler, composa un mo-
tet sur ces paroles : Memor esto
verhitui. Le roi n'y ayant pas fait atten-
tion, Josquin en composa un autre sur
ces paroles : Portio mea non est in
terra viventium (Je n'ai point de
partage sur la terre des vivants). Cette
fois, le roi comprit le sens du motet,
et donna un bénéfice à Josquin, qui,
pour le remercier, composa un troisième
motet sur ces paroles : Bonitatem fe-
cisti cum servo tuo, domine (Vous
avez usé de bienfaisance envers votre
serviteur, etc.); mais Glaréan remar-
que que le désir l'avait mieux inspiré
que la reconnaissance, et que son der-
nier motet ne valait pas le précédent.
Tous les écrivains de cette époque s'ac-
cordent à reconnaître en lui les dons de
la nature et de l'art : riche invention ,
connaissance approfondie des règles et
de toutes les ressources de la corapo-
JOS
plo>rr. // est, tlift^nl-iU, U mailre
des note %; il en fait te tfuil vrut^
et tes autres en font ce qu'il.i prU'
K*ent. .M>is;rf «An talent ri sa fjrilité,
Jn«quin soignait Mn:;itltrrrmenl %e\
< ' t ne s* |»rrs>ail point de lei
, I r*! i U n limon île taiil i!e
c^uM-i t^îi •?«!!*
snlMlîfft!- ^ f on-
à i<H
I . aj»|»utr
leurs prereples de son auionir et de
ses eKpmplet. F — LK.
JtISSAX (DitDRT de), inln-
);ant adroit et •^iritnel, néàSlrasbour;;
en I7H3, dall, »'il fanl s'en rappor-
ter auT chrnniqnes du temps, fils na-
turel de M'"" I*efou\reur et «l'un rere-
▼eur •' ' t
Il p.
JOS
^79
i^ui5 de iuitiaii, li • e
heure ce.» manirresi;'" s
qui tiennent lieu de ineriie a plus d un
homme du monde. Il ^ut pa^^ver, satis
effort, des valons de Strasbourg dans
les cercles brillants de la capitale : son
esprit naturel et rulii\(* le fit admettre
dans la société des ;;rands et de quel-
ques dames qualifiées qui le prAnrrent.
Parmi ses protecteurs les plus chauds,
il compta le duc de (jliarires, le duc
d'Ai^utlIon , et suttoul le prince de
^lontbarre>. Il devint le négociateur de
l'union projeti-e de b filio d** ce minis-
tre avec le prinre lié: rdilaire de Nas-
sau-SarbrucL Le mini>tre l'en récom-
pensa en le faisant nommer s>ndic-
adjoint de la ville de Strasbourg, pour
remplacer Gérard qui tenait d'être
chargé d'une mission diplomatique.
Cependant le prince de Monibarrev
a fait , dans ses Mémoires, un por-
trait peu flatté de Jn<;san. «« Vu nom-
(i) P^u* €U Paru dttoiUe, par Manu'l, Pa-
n*. 1791,1001. I.p. iS^.
« bre de mes affidés était un hoim-
« rae plein d'esprit et de connais-
« sances, né en .Vlsace, dont l'edu-
« eaiion avait été treN-cultivée, mats
M dont les besoins (ournaliers et les
«• fantai^iies avaient toujours excédé Ict
« reniens réels, et qui pour les satit-
« (airr s'était voue a l'intri^ae... Cet
« liommr, > • •-
« blei et h i
■ intéressant, a^^ii l».tn oufl<jur, ju
• con\enient« procrdanl de l'inimora-
« l.ir dr son carartrre et de l'rspecc
• de liaisons qu'indifféremment et
« soccrs*i\fment il avait entretenues
« avec toutes les classes, sans distinc-
« tion. Mais ces le^er» défauts étaient
m rachetés par une ileiibdité de priii-
« ripes qui le rendait propre à tous
rAles. »• Il parait que celte
té fut portée fort hun ; car
le pi tnce , dans la confession qu'il
fait de son p«^r'tant po ir les femmes,
avoue que fri lui ménagea
quelques r» ^ a:^réables dans
ce {jenre. I^r-iqne M. de Montbarrey
quitta le ministère , Jossao , que le
corps municipal de Slrasbourp avait vu
avec peine, ne conserva pas son em-
ploi. Il alla se fiier à Parts où il devint
l'agent des princes de Nassau , de
IIcssr-Darmstadt, etc. Il selia a\ec les
pens de lettres et i^a^na surtout l'affec-
tion de lieaumarcliais. Toute l'Kurope
a retenti du scandale qu'orcasionna
le procès en adultère qui lui fut in-
tenté par le banquier Kornmann, cliei
lequel il avait été présente par le baron
de Spon. premier président du ronseil
souverain d'.Klsace. Notre liio^rafliie
a rendu un compte détaillé de celte
afTaire [Voy. Berga-VK , LVIII ,
4J l.'). Kornmann perdit son pro-
cès , après avoir amusé le public ^
ses dépens , pendant plusieurs an-
nées. Ouoique l'avocat , dans ses
facturas " eût tracé un tableau hi-
deax de la vie privée de Jossan, le
:>8(
JOS
JOS
inonde continua de ne voir que
l'homme aimable dans le séducteur
de M"''" Kornmann , et sa réputation
ne soufirit que médiocrement des atta-
ques qui lui avaient été portées par
un si rude adversaire. Bientôt Téclat
de ces débats scandaleux alla se perdre
dans le retentissement de nos premiers
orages politiques. Dès ce moment
Jossan semble s'effacer ; mais il y a
lieu de croire qu'il partagea le sen-
timent de répulsion de ses protecteurs
pour une réoénération sociale. Ce
qu'il y a de remarquable, c'est qu'à la
même époque, Kornmann, sa partie
adverse, fut porté au nombre des pre-
miers représentants de la commune de
Paris. La haine de Jossan contre
Necker avait d'ailleurs éclaté, quel-
ques années auparavant, par la pu-
blication d'une prétendue Lettre du
marquis CaraccloU à M. d'Alem-
hert, Londres, 1781, in-4° et in-8^
Cet écrit, dans lequel Necker était cruel-
lement maltraité, avait été composé
par le général Grimoard ; Jossan y
fil quelques additions , pour le ren-
dre plus incisif. Il s'était d'abord
fait connaître par des critiques fort
ingénieuses sur le salon (i2). Mais ces
succès éphémères n'ont laissé aucune
trace. L'esprit d'intrigue étouffa chez
lui des germes de talent qui, dévelop-
pés par la culture et le travail, eussent
pu lui procurer une célébrité moins fâ-
cheuse. Outre les défenses qu'il publia
dans son procès en adultère, on a de
lui une Lettre a M. liergassr, i7S7 ,
in-4". Ce fut lui qui fournit, en partie,
les matériaux dont lîeaumarchais se
servit pour son Mémoire en réponse
au libelle dlffdmaloire , signé (iuil-
laume Kornmann. L — M — x.
JOSSE (Louis) , né à Chartres,
vers la fin du XVII'' siècle, fut pourvu
'2) M*inoir«s lacreti pour stin'r n /'IJntoue J»
la ripubl'qat ii*i htirt* , toin XIV, iS crtobrt
d'un canonicat à l'église cathédrale de
cette ville. S'étant rangé parmi les
opposants à laconstitution Unigenitus,
il fut frappé, en 1729, d'une lettre de
cachet qui l'excluait du chapitre ca-
pitulaire, avec le doyen et quelques
autres chanoines. Le motif apparent de
cette mesure était l'appel qu'ils avaient
interjeté de la bulle au futur concile^
mais la cause réelle était leur résistance
aux entreprises de l'évêque (du Mous-
tiers deMérinville), qui voulait s'empa-
rer de l'administration de l'Hôtel-Dieu,
aupréjudicedes droits du chapitre. Dans
sa retraite forcée, l'abbé Josse tradui-
sit en français VArgenis de lîarclay ,
roman allégorique dont la vogue extra-
ordinaire commençait à se passer. JI
fit paraître cette version nouvelle à
Chartres, 1732, 3 vol. in-12. Par une
impartialité bien rare, les journalistes
de Trévoux , qui avaient suivi d'au-
tres bannières, n'en firent pas inoins
l'éloge de ce travail : « Le traducteur
« a certainement du génie, de la vi-
« vacité et de l'élégance dans son
« style. Parmi les vers français qui
« rendent la poésie de Poriginal , on
M en trouve un grand nombre qui nefe-
« raient point déshonneur aux maîtres
« de l'art (1). » Tout en rendant
justice au traducteur , le caustique
Lenglet JJufresnov observe « qu'il
« aurait été à souhaiter que M. l'abbé
« Josse, homme d'esprit, eût exercé
« ses talents sur un ouvrage moins
« ennuyeux et plus généralement
« utile. » On doit encore à Josse
unt Dissertation sur l'état du com-
mère, en France , sous les rois de
la première et.de la seconde race ,
Paris, 1753, in-12, qui obtint
l'accessit au concours ouvert sur cette
question par l'académie d'Amiens.
On a cru qu'il avait eu quelque part
à des pamphlets contre Téveque de
(1) lifiimoires pour l' histoire tff s srtincfs ri rlt^
htaui-ott'. avril, 17?», p. S55.
JOU
(.luiirf^, entre aulrfs au Mandr-
mrnt m vrrs fiurlrsifurs sur lu mi.^-
uon ilr Miinlrs, 1717, in-l*i. Mais
>4 f(wpriallnn à df parnl* rfrils e^l
au rooint (loulrti<^f . I.r nrrroli)(;f de
la Kiatire lilirraire nefailpatcdiiuailre
la «latr ilr s.i innri. \. — M — \.
JOriiMUT losKPii\ ir^ulte.
ne à l.«on, e^t ronnu yir son Diffinn-
nnirr français- Iii/iti^ iirr tirsouirurs
oriffinau.i rt ctassitjues lif Tunr rt
<lr Cautrrlangur, I,>on, 1709, i»-i",
ilud , 17'i:i. Clet ouKrape, autrefois
rsliiné et dipne de l'être, n'a plu« co«r\
»lrpuis Ifs travaux plus complets de
N ' !, (le \N aillv , etc. Jouhcrt com-
; <Mi Dictionnairr au collè^i^e de la
l ifde I^\on, où il fut longtemps
M t des basses classes et où il mou-
lul, suixant (x)lonia, le î20 février
1711», suivant Feller et Sahatier,
▼ers 172i. N ov. sur ce Dittumnairt
les Mrinttirrsdr '/rr^oii-r. avril 1710,
pa^ li'iltetsuiv On a du l*. Jou-
bert quelques panê;;vriques imprimés
sous un autre nom ipie le s rn. C'est
une chosf asseï sini;ulière que ce père,
3 ni excellait pour le choix des roots et
e la plira.se, eut un as:,ei mau\ais
stxle dans ses compo>itions .Coloma ,
llist iitt., tom. XI . p 7-2(»V C'est
Joubert qui sut inspirer l'amour de la
poésie laline à l'auleur dit Prtrhiun
rusfirum (/'o>. VATtiFRE, XI.VII,
451). C-i-T.
JOl'BKUT l'abbé Fw^wçoi^
de\ i peine mentionné par un petit
nombre de bio^raplies, naquit à Mont-
pellier le 12 orl. 16S1), aîné des qua-
tre fiis d'André de Joubert ^1), sjn-
' I André fie Jnul>«rt était priitTiU d'Itasc «t
•rrir-rr-priit-filtdc l^nreni (^'•r. Jntatir. XXM.
44 On (•«•«t au«*i (oo^ulier. Han* U» rrcari'a
tir l'jt .«demie my^Ir de« «riencr« dr Montpel-
lier. \'' l'-"* de Rrne-(;.i«panl dr Jnabert, »yil.
, l'un dci frères puî-
. prononcé en i»8r ,
. . ddiis le» ÉlogtB dit
t^\dt-ui fu dt '/" .t^'iiitr publiéi »n ilii par
l'harnn de» Oerei't». f ta! il »».
JOt'
iRi
dic-général des états de Ijïn;;uedoc.
Dés l'i^e de cinq ans , la survivance
de cette charge lui fut accordée ;
plus tard il fut admis à m partager les
lonctions. mais venu à PariN, en 1710,
avec son père qui était de la depulalion
des états, et frappé de la mort très-
Iiioiiij'tr d'un de «es ami', i! t retira à
'Oratoire, puis, trois ans après, il re-
nonça à sa cbar,;e pour entrer au sé-
roinaiie de Sainl-^iaploire. C'e»t par
les conseils et soa* la direction de
l'abbe Du^et qu'il avail pri» et «oiii
cette destination. Oidonné prêtre en
17*iH, il fut cliar;;é des conférences
sur rKcriliire-Sainte qui se faisaient ï
Sainl-Ktienne du Mont. C'était après
l\olliti qu'il s'acquittait de cet emploi,
expliquant les Kcrituir» avec lumière et
onction, et donnant les premiers essais
de l'ouvrage qu'il publia il.ins la sufe
sur les prophéties dc.lérémie, F.rérhiel
et Daniel \'ï\ l'ne maladif, puis un
événement impréxii mirent fin à ces
eiercices. I.'abbé de Joubert était
ont à des amis et à on cler;;é suspects
de jansénisme ; il mena't nne rie oc-
cupée et retirée ; enfin , pendant sa con-
valescence, il s'amusait i ran;er ?es
papiers et à brûler ceux qui lui étaient
in'itilcs : ces diverses circonstances,
nnl.immenî la dernière, rapportée^ au
lieutenant de police Hérault, exci-
tèrent ses soupçons. On faisait alors
d'aclives rtcherches pour découvrir
l'auteur des Xoucrllrsrrrlrsiastiqttrs.
fnterro;;é s'il connais^sait cet auteur,
Joubert répondit né;;ativement, et n'en
fut pas moins conduit h la liastille le
1 % nov. 1730. Il en .sortit le '21 dcc.
suivant par les sollicitations dc> amis
de sa famille; mais le '27 on lui si-
^fia une lettre de cachet qui le ren-
(>) Ô^|>eut lire ace »ujel une lettre adre*»ee
«o 1-44 à Vuhbé de Jo.il^ri par Jrao-Charle»
deSëcur l'or ce nom, XI. I . 474:, ancien e»*-
qne d.- Saint'Pjpoul. et iiiprimee en 1740 «'an»
l^^A-e^fe é, I» M# de ce prcUt. connu par »on
oppoiilion à U bulle Imgtwtus . opinion qae
I ait>g'*tt l'abh • 'ojl)ert.
282
JOU
voyait à Montpellier. Son séjour n'y fut
pas long- Tair du pays ayant affai-
bli sa santé, il obtint la liberté d'aller
où bon lui semblerait, pourvu qu'il se
tint éloigné de Paris de trente lieues.
11 choisit la ville de Troyes où nombre
de ses amis vivaient en paix sous la pro-
tection de révéque Dossuet. Après y
avoir séjourné trois ans, il eut enfin la
permission de retourner à Paris, et il y
passa le reste de sa vie dans la prati-
que des vertus de son élat. Trois an-
nées de souffrances précédèrent sa mort
qui' arriva le 29 déc. 1763. Quatre
ans après , les iSoupelles ecclésias-
tiques , cause indirecte de ses dis-
grâces , lui consacrèrent un long ar-
ticle auquel nous avons emprunté
plusieurs détails: nous y joindrons la
liste de ses nombreux ouvrages telle
qu'elle se trouve à la suite d'une œuvre
posthume imprimée en 1786, parles
«oins de sa famille A. De la connais-
sance des temps par rapport a la
religion : « le soir vous dites , iljeî-a
beau,e[c.j » 1727. II. Explication
de l'Iiistoire de Joseph, selon les di-
vers sens que les saints pères y ont
aperçus, avec une dissertation pré-
liminaire sur les sens figurés de l'E-
criture, 1728, in-12. III. Traité
des caractères essentiels à tous les
prophètes (la 3^ partie renferme des
Eclaircissements sur Job] , 1 74 1 , in-
12. \\ . Trois Lettres sur L'interpré-
tation des saintes Ecritures, 1744,
in-12. V. Explication des principa-
les prophéties de Jérémie, d'Ezé-
chiel et de Daniel, disposées selon
tordre des tetnps, Avignon (Paris),
1749, 5 vol. in-12. VI, Critique
sommaire de CAhrégé chronologique
de f histoire ecclésiastique, imprimé
chez Hérissant , 1751. VU. Com-
mentaire sur les douze petits prophè-
tes, Avignon, 17r>V17r>9, 6 vol.
in- 12. Vill. Commentaire sur l'A-
pocalypse, ibld., 1762, 2 vol. in-12.
JOU
IX. Les Psaumes des vêpres du
dimanche , 1786 , in-12. Tous ces
divers ouvrages dont plusieurs furent
estimés dans leur temps attestent une
grande connaissance des Ecritures,
mais la plupart sont empreints des opi-
nions que l'auteur avait embrassées.
J.'arlicle déjà cité des Noui>elles ecclé-
siastiques parle en outre, mais sans
détail , de publications que l'abbé de
Joubert crut devoir faire à propos de
Véoènement des convulsions : de ce
nombre était sans doute la Disserta-
tion sur les effets physiques des con-
vulsions , paiticulièrement indiquée
dans quelques dictionnaires — Joubert
de Beaupré (l'abbé Jean-Baptiste
de), le plus jeune des frères du précé-
dent, né en 1701 à Montpellier, et
qui y mourut en 1791 avec une grande
réputation de vertu et de savoir, avait
eu la principale part à la composition
de deux ouvrages de piété fort répan-
dus dans le diocèse: l'un est intitu-
lé : /e Propre des saints de f église
cathédrale et du diocèse de Mont-
pellier, et a été réimprimé plusieurs
fois, format in-12, notamment en
1773, avec des prières chrétiennes en
forme de méditations sur les princi-
pales fcles du diocèse. L'autre, inti-
tulé: Office pour la fcfe des mi-
racles de Notre-Dame des Tables,
qui se célèbre dans l'église pa-
roissiale de ce nom (à Montpel-
lier) le 31 août, fut imprimé eu 1172,
à Montpellier , 1 vol. in-12. Pios-
set , conseiller à la cour des comptes,
connu dans la littérature par le poème
de l'Agriculture, composa une prose
et deux hymnes en vers latins pour
la messe de cet office. C'est ce qu'in-
diquent les initiales suivantes P. F. R.
(par Fulcrand Piosset) qui marquent
ces trois morceaux. Le même auteur
avait également fourni des hymnes et
des proses pour le Propre des saints,
mais sans les indiquer par des initiales
JOU
JOU
«m
ni d*auciia« luIre manièrf . — Joibfiit
[P/n/ippr-lMtiirrnt df ^ . baron df Soin -
nicrcs fl de Munlirdon, el ue\tn de*
précc«Jent5, sticcrda d'abord i »on p«re
(I«jurenl-I;;nare) (J), dan* la char|*e
dr [irnident en la rour des comptes
ri hnanres de Montpellier, pui& , en
1777, oblinl celle de tr^^orier des
riats de I jn^urdoc vacante par la mort
d'un de ses oncles materneU. I/opu-
Irnce (]u'eile lui procura fut favorable
a son ^oût pour les sciences et 1rs artt.
On peut voir à Tarltrle (Juiptal lora.
I.\, p. %'\\)\ ce qu'il fil pour le* dé-
buts de ce célèbre clumisle. Ce fut éga-
lement lui qui prépara les succi-s da
peintre Fabre , de Montpellier, en-
vové et élevé par ses soins à Koroe, et
revenu avec de riches collections dont
son pa^s natal a profité, llien d'autre*
artisle.N durent à .loubert les .secours et
les encouragements les plus utiles. Il
emplo\a \\ icar à dessiner les rbefs-
d'ieu\re de peinture et de sculpture
que I enfermait le palais Pitti , et
c'est ce qui donna origine à la col-
lection connue sous le nom de (mlrrie
tU Fiarriirr. publiée en i8 livralsont.
Les 23 premières, eiposées en 1H()2,
obtinrent la nieilai I le d'ori. l'or- Mas-
nrmtR, XWII, 397), et le junr
motiva celte distinction sur la Iteuutê
lie Foucntpr , fun des />///t cunsi'
deruiilrs de la lihrairie et le plus
parfait dr rruv du mè/nr ftrnre.
Ce (ul en 1813 , par les soins de*
lieriliers de Joubert, que se termina
celle belle entreprise qui remontait à
1787, et dont il n'avait \\i (|ne les
commencements, étant mort à Paris le
30 mars 179*2. Il élail des acadé-
(3) On doit à ce maxiatrat t Jmfrmemi im^mr-
lis'
M
UU« de Jm
f^r^f 4- kr^f
blie à
0114 le
•r-'
nies de Montpellier , de Toulon -
se , et correspondant de l'académie
des sciences de l'ans. Ou trouve, dans
les mémoires de celle dernière (années
177ieti779' trois dissertations de
Joubert sor des sajets d'bistoire na-
turelle. C— h — K.
J (H H K K T (JmF.PiO, ancien
in . ^ . "rr de Tu-
n 'i (dépar-
lerocitl de 1a Doidti^itc), le (> mai
17.'ii. V quat-'-rr in-, tl a\3-t trrm-rîé
ses études. I
V étudier les i
des lettre^, et entra d abord dans la
con^^ie^aiion de la ïhtctrine ^ où,
sans prononcer de vcrux, il professa
quelaues classes avec distinction. Mais
la délicatesse de sa constitution l'ayant
forcé de renoncer i l'enseignement, il
>iiil à Paris, à r.i^e de *in'^l-deux ans,
et ne larda pas à être introduit et re-
maripié d.vns la soceté drs hommes de
lettres du temps. Il connut Diderot,
d'.Membert , Marmonlcl , I^liarpe ,
Uivarol , et contraria avec Konlanes
une liai>»on que la mort seule a pu
rompre. 'rou> \t\\\ vécurent , jtuqu'en
1790. dans une étroite communauté
de sentiments et d'idées. A cette épo-
que, Joulierl élu par ses compatriotes,
et sans l'avoir sollicité, juc;c de paii
du canton de Monli;inar , ne crut pas
pouvoir refuser ce temoijna^e d'estime.
Il exerça pendant deux .ins celle ma-
;;istrature a\rc le lèle et l'ardeur qu'il
apportait dans ^accomp!l^sement de
tons ses devoirs. Ce ne fut qnapres le
9 thermidor qu'il re>inl à Pans. Oiiel-
qiies années plus tard , Fontancs qui
s était lié, à Londres, avec .M. de Cha-
teaubriand, voulut qu'à son tour Jou-
b«Ql devînt son ami. Plusieurs passades
des rruvres de notre ^rand écrivain
témoijinent de la tendre et profonde
affection qui l'unit en eflel à Joubert.
iJi ne se bornaient pas les amitiés il-
lustres que celui-ci comptait dans la
284
JOU
vie. Le charme de sa conversation, les
aperçus pleins de finesse et d'éclat
qu'il y répandait avec une profusion,
une urbanité dont les modèles com-
mençaient à devenir rares, attiraient
autour de lui les hommes les plus dis-
tingués et les femmes les plus spiri-
tuelles. Personne, depuis J)iderot, n'a-
vait porté à un plus haut dc;;ré l'art
de captiver son auditoire : Joubert
avait toutefois sur Diderot de o;rands
avaiilaf^cs , une haine constante pour
le sophisme et un culte religieux pour
la vérité. Sa mort, arrivée le 4 mai
182i, fut pleurée par tous ceux qui
l'avaient connu. La nature de son es-
prit et l'extrcme délicatesse de sa santé
semblent lui avoir interdit les longs
travaux. Il n'avait publié, pendant sa
vie, que quelques articles non signés
dans les journaux. Mais il a laissé un
nombre très-considérable de réflexions,
de maximes et de pensées écrites au
cravon, et, pour ainsi dire, en courant,
sur de petits cahiers qui se sont heu-
reusement conservés. En 1838, M'"^
Joubert, sa veuve, sentant sa fin ap-
procher , confia à M. de Chateau-
briand, qui voulut bien l'accepter, le
soin d'extraire et de faire imprimer
quelques portions de ces matériaux en
désordre. Malheureusement elle ne les
avait réunis qu'en partie, et les pro-
grès rapides de la maladie faisaient à
l'illustre éditeur la loi de terminer ce
travail à la hâte. Le volume qui ren-
ferme les P
de Joubert, tiré à
un très petit nombre d'exemplaires, et
distribué seulement à quelques amis ,
suffit pour donner une haule idée de
l'esprit et de l'àme de son auteur.
Mais on y trouve un grand nombre de
fautes typographiques, d'erreurs, d'ob-
scurilés ou de redites, (|ui seraient de
nature à compromettre son succès ,
.s'il était livré à une véritable publicité.
On .s'occupe en ce moment d'une édi-
tion plus complète et plus châtiée de
JOU
ces Pensées. J^e travail en est achevé,
et quelques lectures entendues par ce-
lui qui écrit ces lignes l'autorisent à
prédire que Joubert prendra bientôt
un rang très-élevé parmi nos écri-
vains spiritualistes. F — le.
JOUFFROV (François-Gas-
pard de), évêque du Mans, de la même
famille que l'inventeur des bateaux à
vapeur {Voy. l'article suivant), mais
d'une autre branche, naquit en 1723,
au château de Gonsans près de Besan-
çon. Après avoir achevé ses études
théologiques d'une manière brillante,
il entra dans les ordres et fut pourvu
d'un canonical au chapitre noble de
Saint-Claude. Nommé, en 1774, à
l'évêché de Gap, il fut transféré, en
1778, à celui du Mans, où, dit un
biographe, il fit beaucoup de bien. Il
s'occupa d'abord de rétablir l'ordre et
la paix dans son diocèse; mais il ne
put y parvenir qu'en unissant à la pa-
tience une grande fermeté. Désirant
ranimer le goût des fortes études dans
son clergé, il institua des concours
pour les cures qui ne furent plus don-
nées qu'au talent et au mérite. Député
aux états-généraux en 1789, il fut du
nombre des prélats qui protestèrent
contre les décrets de l'assemblée con-
stituante, et se retira, vers la fin de
1792, à Paderborn en Wesiphalie,
dont le chapitre était uni par des liens
de confraternité avec celui du Mans
depuis plusieurs siècles. Il fut accueilli
par les chanoines de Paderborn avec
les égards dus à son rang et à sa
position. Un revenu de douze cents
florins lui fut assigné sur la mensc ca-
pitulaire; et, comme il était naturelle-
ment économe, il se trouva assez riche
pour venir au secours de ses compa-
triotes plus malheureux que lui. Ce,
respectable prélat mourut dans l'exil en
1797. M. P, Renouard lui a consacré
une notice à la fin du 2" vol. de ses £"5-
sais historiques sur le Maine. W — s.
JOU
.ica FFIIOY itAhlnins (Cl^i-
l>r.F«ANÇoisl)iinoTiii.l, marquis àr ,
rminnu ju|uiiril'liui pour l'un tirs
lionimrs qui ont po^scJé au plu« luut
drf;ic le ;;emc de la mfcaDiquc et pour
le véritable inventeur de* p>io&raptiej,
bateaui à vapeur, était, ainsi que l'in-
dique mn titre, d'une des meilleures
fainillrs de son pays natal, la Kranclie-
(^role. Il naquit vers \l'y\ , et des
son jeune a;;e montia pour les applira-
tiens des sciences exactes uiir ûpiilude
de laquelle on faisait parmi les mciis
fort peu de cas, ou qui mrme semblait
tendre à dn o;;rr. Kiitre au re;;iment de
Hourbun, infanterie, en 1772 , il eut
avec son colonel une affaire d'Iionneur
dont le résultat fut une lettre de ca-
chet qui l'exila deux ans en Provence.
A la faveur de ce loisir forcé, il eut le
temps de recueillir les matériaux d*un
ouvrage sur le> manœuvies des galères
à rames. Redevenu libre, il se rendit à
Faris qu'il vil alors pour la première
fois (1770). C'était le moment où
les frères Perler venaient de créer, au
;;rand éba)ii>5ement des Parisiens, la
fameuse machine à vapeur dite pompe
à Jeu de Cluiillot. \jt jeune marquis
de Joullrov s'erapie^sa d'obtenir son
entrée particulière cher Perler, où il
étudia sérieusement le nouveau méca-
nisme, et où bientôt il sut se faire dis-
tinguer de la foule des visitants par U
justesse et la profondeur de sa conver-
sation. IMein encore des matenaux
qu'il avait recueillis sur les galères ï
rames, il ne fut pas lon;;-tcmps sans
pensiT que le nouveau moteur pouvait
avcr avantage s'appri«juer à la navl|;a-
tioii, et il en émil l'idée en petit co-
milé devant Perler lui-même, devant
le marcdial-dc-camp chevalier de Fol-
len.iv. devant le marquis Ducrest, Irèie
de M'"" lie Genlls, el devant M . d' .Vuxi-
rou. On applaudit à l'idée ; il y a plus,
on l'embrassa avec ardeur; mais, quand
il s'agit de la réaliser, il se ûl une scis-
JOU
a85
slon dans l'assemblée qui se divisa el sur
le mode de mécanisme qu'il fatulrait
adopter, et surtout sur la base des cal-
culs a vaincre et de la force motrice à
employer. Suivant Parler, ces éléments
devaietil se supputer d'api rs l'eipé-
hence d'un bateau de hala;;e remor-
3ué par de* chevaux; Joulfrov srntit
e prime abord et dit fout haut (|u'il
fallait au moins trois fois autant de
puisvince motrice des que Ton prenait
le point d'appui dans l'eau. Humi q le
d'.\u\iron et Follcnav se declara^srllt
pour celte façon de voir, on coni|>:end
que le jeunr gentilhomme , en pré-
sence d une renommée industrielle
semblablr à relie de Perler, dut s'ef-
facer. Cependant il ne renonça point
à son projet ; et , tandis que !•* riche
capitaliste, dans ses rastes ateliers et
sous les auspices de l'académie des
sciences, cherchait à réaliser sa chimère,
Joulfrov à cent lieues de Paris, au
milieu d'obstacles de tout genre, .sans
autre secours qu'un chaudronnier de
\illa;;e, parvenait en juin et juillet
177G, c'est à-dire un an avant que
Perler reconnût la vanité de ses essais,
à faire naviguer un bâtiment à vapeur
sur le I)oub>. Ce prrmler bateau avait
quarante pieds de long sur six de
large : l'appareil nageur consistait
en tiges de huit pieds de longueur sas-
pendues de chaque côté vers l'avant, et
portant à leur extrémité des cliàssis ar-
més de volets mobiles comme nos per-
siennes , el plongeant de dix-huit pou-
ces dans l'eau : les châssis pouvaient
décrire un arc de huit pieds de ravon
et de trois pietls de corde : un levier
muni d'un contre poids les maintenait
au bout de leur course vers l'ivant.
Le moteur était une pompe a feu on
machine à simple eflet, dont le piston
communiquait aux liges par une chaîne
el une poulie de renvoi. I).*- que la
vapeur soulevait ce piston, les contre-
|)oids ramenaient en avant les volets
a86
JOU
qui faisaient alors fonction de rames et
qui, dans cette course rétrograde, se
fermaient sur eux-mêmes afin d'oppo-
ser la moindre résistance possible ; puis,
quand le filet d'eau froide opérait le
vide dans le cylindre, le piston en re-
descendant retirait ses rames avec une
grande rapidité, et alors les volets se
trouvaient ouverts pour offrir toute
leur surface et choquer le fluide. Quel-
que imparfait que pût être cet ingénieux
appareil, construit au fond d'une pro-
vince où il était impossible de se pro-
curer des cylindres fondus et alésés, il
est certain qu'aucun de ceux qui jus-
qu'alors avaient proposé des moyens
d'appliquer la vapeur à la navigation,
n'avait émis d'idées semblables à ce que
Jouffroy venait de concevoir et d'exé-
cuter réellement. L'année suivante ,
Ducrest décrivit la tentative infiuc-
tueuse de Périer, qui semble depuis ce
temps avoir été un peu hostile à celui
qui paraissait plus près du but. L'étroit
esprit de province et aussi l'esprit de
caste nobiliaire servaient cette sourde
opposition: on eût dit les parents de
Jouffroy de complicité avec ses jaloux.
11 eut vers ce temps l'envie d'entrer dans
une armespêciale, comme l'artillerie ou
le génie .-tous les gentilshommes du pays
se récrièrent contre cette idée ; et lorce
Itit qu'il rentrât dans l'infaiitene. On
ne le désignait dans la Franche-Comlé
que par le sobriquet de Jouffroy-la-
Pompe. Le ridicule blesse en tout pays,
il tue en France. Jouffroy pourtant
persévéra encore. Il vit des défauts à
son premier bateau , défauts tenant
surtout à ce que, lors du ret our des volets
à charnière de l'arrière à l'avant, l'eau
formant un courant rapide empêchait
les volets de se rouvrir, dès que le bâti-
ment allait vile, notamment en re-
montant, et que la pompe à feu n'agis-
sait que par intervalles, tandis qu'il eût
fallu un mouvement continu. De ces
deux défauts, un seul, le premier, ve-
JOU
nait de lui ; le second était du fait de
l'inventeur de la pompe à feu. Le but
spécial de Jouffroy , c'était non pas de
perfectionner la machine à vapeur ,
mais d'appliquer la machine telle quelle
à la navigation. Telle est la force du
génie pourtant que, non content de
changer son appareil nageur , il ima-
gina un mode nouveau de machine à
vapeur par lequel la vapeur agissait
sans discontinuer. Cette machine se
composait de deux cylindres de bronze
accolés, ouverts par le haut, placés à
bord selon le sens de l'arrière à l'avant,
en faisant avec l'horizon un angle d'en-
viron 50". En bas les cylindres avaient
leurs fonds réunis par une boite de
métal , renfermant une tuile ou tiroir
qui ouvrait ou fermait alternativement
le passage de la vapeur dans chaque
cylindre et celui de l'eau d'injection.
Un parallélogramme, formé de deux
tringles et de deux traverses, poussait
alternativement le tiroir à droite et à
gauche chaque fois qu'un des pistons
arrivait au bout de sa course vers l'em-
bouchure des cylindres. Au lieu d'être
munis de tiges, ils portaient fixés à un
anneau central des chaînes qui, après
s'être enroulées sur un barillet à encli-
quetagc, étaient tirées vers le fond du
bateau par un contre-poids. Cet appa-
reil, très-médiocremenlexécuté(178U),
surtout pour sa chaudière et ses acces-
soires, produisit pourtant l'effet voulu;
évidemment les imperfections de ce
mécanisme tenaient plus à la con-
struction qu'à l'idée ; et des ingénieurs
modernes se sont fait un nom en trou-
vant moins bien. Revenons à présent
à l'appareil nageur. De nos jours, sans
doute, un médiocre mécanicien aurait
trouvé le moyen de corriger le défaut
des volets à charnières, en les forçant à
s'ouvrir à un moment fixe. Mais la
science était alors trop peu avancée
pour que Jouffroy s'égarât dans cette
recherche : il renonça donc, en le re-
JOU
^rrttaut amèrement, à ^r^ châssis pour
li'ur substituri If> roup^ à aubfi ^«lr
Tarbre «J» ruurs rtiil pbcr le barillet à
enrlM|uet j<;c autour duquel s'enruulairnt
les rliaiiies »oi tant de^ pi!>loiis. I .orsque
la vapeur, ai rivant delà cliiuilifre daos
la buite à tiioir,&e d)stnbu.iit d'abord,
|)ar excmplr, aur>liiidie de droite, à
lOïtanl même tuute communication
de la vapeur au rvlnidre de gauche a^ait
cessé, et le toi'irirf tl'itt;«»t-!!oti s'elait
o ;>(•: t .le ( '^
baiv^ait ^vA. . _ -
eiitf amant &a cbaine qui lai>ait (aire a
l'arbie une révolution, tandis que le
p!>lon de droite recevant la vapeur re-
montait vers le haut du c)lindre en-
trainé par le pouls Gié au bout de sa
rliatne que rencliquelar;e lai5>ait libre.
Parvenu à ce point, le tiroir se drpla-
rA;i it le ptslon de droite continuait
idiiii'iliairinent refTnrt que relui de
< i :> : saiuii^utur atâ.iii j (cnt
j i f«U, sa lar^fur à quatorze:
ii-s roues avaient quatorze pieds de dia-
irirtre, les aubes étaient de six pieds
Je longueur et plon<;eaienl à deux pieds
dans la rivière. Le tirant d'eau du pv-
roscaplie était de troi> pied>, le poids
total de trolscenl vin;;l-$ept milliers., .su-
Toir : vin;;t-sepi pour le navire même,
trois cents de charge, (^el éiionnc ba-
teau maniruvra ptiuilant à diverses re-
prises : il remonta, de L)oo a l'île Harbe,
le courant de la Saôiie.en juillet 1783,
en préseiKc de milliers de témoins par-
mi lesquels des acadt.-miciens île L)on :
procès-verbal Je la reu>-ile fal dreisé
par ces derniers. Apres un succès
si incontestable il n'y avait plus, à ce
qu'il semble, qu'à eiploiler une dé-
couverte admirable. Mais qu'on 5on(;e
que toutes les parties du p\ro capbc
avaient clé construites avec parcimo-
nie, qtie les bordâmes étaient de min-
ces feuillets Je sapin, que la chaudière
JOU 187
au bout d'une heure d'ébdlition se
crevassait, se fendillait de toutes parts!
qu'on solide qu'a celle époque reunir
des capilaui par artions n'était point
chose facile comme de nos jours !
JouiïroT arail encore bien d'autres
obstacle» à vaincre. Il en trouva un in-
vinrible dan> la lé;ièiele, dan-» les ha-
bitudes du roiiiistrre lran(^ai> d'alors.
La première condition pour arri\er à
eon»l'iijer une sorirté d'actionnaires
litentinn d'un privilège pour
. annrr>. Il en demanda un
pour trente ans a M . de (Jalonne. Ce-
lui-ci renvoya la requiie à l'académie
des science>, afin de savoir s'il r avait
lieu d'accorder le privilège, c e>t-à-
dire s'il ) avait invention. L'académie,
à laque le d'ailleurs Joulfroy preseoU
en même temps un Mnnuire sur //•#
pomprs a Jru^ nomma commissaires
puur l'examen du mémoire I>orda ,
l>os6ut, Otusin et l'erier ; pour l'eia-
raen du pYroscaphe même, llorda et
Perier. .\insi Jouiïrov retrouvait pour
ju^e celui que nous avons vu son anta-
goniste et son mal. Au lieu de dire
d'une part que nul encore n'était venu
à bout d'engendrer la navi;;ation par
la vapeur , ce qui était incontestable
et ce qui était la première partie da
verdict demande à l'académie , et
d'examiner de l'antre si la cessation des
vo>a;;es du bateau de Lvon, vova^e
dont plus de dix mille temoinsat testaient
la réalité, était due au vice d'exécution
des ouvriers ou au vice de conception
de rinj;enieur, l'académie ne voulut
point se prononcer ; et l'on supȎra au
ministre d'écrire la lettre suivante à
l'inventeur du premier pvroscaplie qui
ait remonte des rivières : «« Je vous ren-
« voie, monsieur, ralleslation du suc-
•»y^cès qu'a eu à Lvon , etc. Il a
« paru que réprcuve ne r<'inplissalt
« pas sulljsamment les conditions re-
•< qui^e5. Mais si , au moyen de la
« pompe à feu, vous i'éu:>sissez à faire
28«
JOU
JOU
« remonter sur la Seine, l'espace de
« quelques lieues, un bateau charf^é de
« trois cents milliers, et que le succès
« de cette épreuve soit constaté à Paris
« d'une manière authentique qui ne
« laisse aucun doute sur les avantacres
« de vos procédés, vous pouvez comp-
« ter qu'il vous sera accordé un privi-
« lège limité à quinze années (31 jan-
« vier 1784). » Il n'est aucun besoin
de commenter cette fin de non-iece-
voir. Jouffroy en fut abasourdi , et
cette fois il n'essaya plus de se roidir
contre les difficultés qu'il ne pouvait
vaincre. Il vit d'un coup d'œil qu'il
n'y avait plus rien à faire pour l'in-
stant ; il n'avait pas et il ne pouvait
pas trouver les capitaux nécessaires
pour la construction d'un bâtiment
solide et qui pût braver la mauvaise
volonté de sesjuo;es. Il n'essaya pas
même d'entrer en lutte avec ses détrac-
teurs : un gentilhomme ne se donnait
point en spectacle dans les journaux.
Toute sa venp;eance fut d'exécuter sur
la proportion d'un vino;t-quatrième, un
modèle de son pyroscaphe et de l'a-
dresser à Venierreur de sa demande, à
Périer lui-même (178 Y). Quelques
amis lui conseillèrent de porter son
invention en Anf;leterre, où dès ce
temps Watt et Wast-]jrou;2;h venaient
de faire subir à la pompe à feu les «gra-
ves changements qui en ont fait la ma-
chine à vapeur : il ne put s'y résoudre.
Puis vin! la révolution: Jouffroy fut
un des premiers à émif^rcr, et il ne
rentra qu'au bout de dix ans sous le
consulat. Deux hommes alors, Dcs-
blancs et Fulton, s'occupaient l'un à
Trévoux, l'autre à Paris de réaliser la
navigation à la vapeur : le premier de-
vait ne pas réussir parce qu'il opérait
sur des bases fausses et qu'il ne copiait
personne. Desblancs entama dans les
feuilles publiques une polémique contre
son rival en réclamant la priorité de
l'invention . L'ingénieur américain ré-
pondit en substance, non sans une dé-
daigneuse ironie : « Que M. Desblancs
« se rassure! est-ce d'exploitation, de
« lucre qu'il est question? je ne fe-
« rai point concurrence en Europe,
<( ce n'est pas sur les ruisseaux de
«c France , c'est sur les grandes ri-
if vières de mon pays que j'exécuterai
« ma navigation ! Est-ce d'invention
« qu'il s'agit ! Ni M. Desblancs ri
« moi n'imaginons le pyroscaphe. Si
« cette gloire appartient à quelqu'un,
« elle est à l'auteur des expériences
« de Lyon, des expériences faites en
« 1783 sur la Saône, » En s'expri-
mant de cette manière, Fulton ne se
doutait pas que l'auteur de la décou-
verte vivait encore, et le lisait. Il eût
pu ajouter que le bateau d'essai qu'il
faisait naviguer près de l'ile aux Cy-
gnes n'était vraiment que la repro-
duction en grand du modèle de Jouf-
froy, modèle qu'on savait avoir été
construit à peu près sur l'échelle d'un
25^. Mêmes roues à aubes , même
lien de la machine à vapeur aux roues,
même rapport de la force motrice
avec la résistance des aubes et la
vitesse qui en résulte, mêmes dimen-
sions,mêmesproportions, à moins qu'on
ne prétende que cent cinquante-qua-
tre pieds sur quinze diffèrent essen-
tiellement de cent quarante sur qua-
torze. Seule, la machine à vapeur était
tout autre. Mais encore une fois, l'in-
vention du pyrorcaphe ne consistait
point à perfectionner la machine à va-
peur, mais à imprimer, avec la machine
à vapeur telle qu'elle existait, un mou-
vement à des navires remontant le
courant. L'imperfection de la machine
nuit sans doute à la perfection de la
marche, mais elle n'ôle rien au mé-
rite de l'inventeur de ce genre de
marche , elle le rehausserait plutôt ,
lors même qu'il n'aurait pas, comme
Jouffroy, créé lui-même un perfec-
tionnement à cette machine. Du reste.
JOU
il rtail éciit que ju»iirf nf ^erait \>oiul
rrittlur k Jond'itM Je sou m\jiiI :
IVifiijjrc Je irlour Je b lerre J'exil
n'a%ait que quel(|urs iiiincrs Jrbns Je
fortune, il ne \i>ubit rien implorer Ju
ronsul. Je l'empereur ; la liaule police
impéiialele 5ui\nlbll. le ^ènail ; ré-
cijinei à b nou^rlle Je> »uccès de
Kullon en Amniquc, icrbmer aulre-
niriil qu'a\er un nouxeau pyoseaphe
pliiN pjibit s'il riait povvible que ceui
Je se^ copistr», lui eût semble oi^eux ,
suranné et inJi^ne Je lui. Il se tut Jonc
M)us l'eropiie. Seulement en arrnant
il était aile rendre \isile à De^bbncs, et
à l'aspect Je son bateau, qui au lieu Je
roues po( tait sur 1rs lbiir> Je lon^uei
cliaînes munies J'aubrs en {;uise Je
ctiaprIeK, il lui pri-J:t que le na\ire
ne niaicherait pas et lui en expliqua les
la'sons, I/e\(iirnienl justifia «-a pro-
phétie. Knfin Itunapailc tomba, et b
re^lauralion sembla ouMir une rre nou-
\elle à riiommc Je ^énie m lonj; temps
méconnu. .V b faveur Je b paix, b
rupiJité mercantile uDrit à Jouffro^ ce
que ropiiiion , les acatlriines et les
ministères lui axaient refusé . il Miit se
fixer à Paris, et ) \it se former une
rompa;;nie pour eȎcuter .>es plans ; il
...thnbiexetr23a>.etlOjuill. 1816),
lit- rari;cnt, îles protecteurs. I.e comte
J'.\rlois ^Jipui> ('liarles \) encoura-
gea sespiemiers tffull^ et lui permit
Je Joiiiier le nom ^tihurUs-Philiftpr
il son premier bateau à \apeur construit
au l*etit-Heic) , et qui fut lancé à l'eau
le '20 août peu Jant les fêtes qui sui% ii ent
lo mariage Ju Juc Jr I»err\ . Mallieuieu-
t menl la compagnie Jouffro> a\ait Jejà
imo concurrence J'imporlatcurs à su-
l>ii , relie Je b société l'ajol et compa-
gnie. Celte concurrence fut fatale à
toutes les Jeux: les énormes Jépenses
que nécessitait b mise en train J'opé-
lation-. colossales absorbèrent en peu
Je temps les fonJs Jes actionnaires ; et
Jes spéculateurs venus plus tarJ, mieux
JOU
189
a\i>é. et piofiiant Jes tâtonnements de
leors pieJrceNseurs, réalisèrent a leur
profit les bénéfices, (^tte lueur Je
bonlieur qu'axait un instant entrevue
.louffio> ne fut qu'un éclair : il re-
tomba Jans l'oubli , n'a>ant pour
vivre qu'une roeJiuce pension et
les secours Je son GL , le comte
Achille Je JouiïroT , et mourut en
XWX'l aux lii\aiiJes, Jo>rn Jes capi-
taines J'inbnterie Je son époque, et
frappant exemple à joiiiJre à ceux qui
piouxenl la xerite Je la Jexise iiU
vus non iHjhis ! Tel est au rooinv le
résultai Je b réponse Jr Fulion à
DrsUaius , bien que par b suite
Fullon se soit laissé donner, sans tou-
tefois o.«er le prenJre, le titre Je créa-
teur ilu pxrnvcaphe. Tel est le sens d'un
ju;;ement Jes tnbunaux an;;lo-jmeM-
cains sur la question Je piiorilé de
l'invention de la naxi;;ation à \apeui ;
telle est l'opinion qui résultera intiii-
ciblement de la lecluie de la brorhuie
de M. \c\i. de Jouiïrox , intitulée
Des Initraux a viif}rur, etc. , Paris,
1839, et des pièces justificatives au-
nexées à l'appui des faits qu'elle re-
late ; tel est le sentiment qu'a émis
M. Ara^o dans Wlimuuirr ut 1837,
comme si par l'organe Je son savant
secrétaire t'acaJémie eut voulu réparer
l'iniquité impolitique qu'elle avait com-
mise il v a un Jemi siècle. Knfin, l'acaJé-
mie, Jans un .savant rapport de sa sec-
tion Je mécanique, réJi^é par l'illustre
Cauchv, et qui a Jonné lieu à Jes Jis-
ciissions prolon«iees penJanl Jeux séan-
ces consécutives , vient Je constater le
l**"^ novembre iH'iO, Je la m.inierc b
plus solennelle: 1" que l'invention Jes
bateaux à vapeur appartient à feu le
■jarquis Je Joiiffrov ; '2" que les py-
r^caphes qui existent ne sont que Jes
copicN, plus ou moins serviles, Ju ba-
teau qui a navi;;ué sur b Saune en
1783; 3" que le plus important, ou,
pour mieux Jire, le seul perfectinnne-
r \ V 1 1 1 .
'9
ago
JOU
ment radical apporté à cette invention,
appartient à M. Achille de Jouffroy
fils, quiatrouvé le moyen de substituer
aux roues à aubes un appareil palmi-
pède applicable à toutes sortes de na-
vires , qui leur procure une vitesse
égale avec une dépense de combustible
moindre de moitié , sans priver les
navires de leurs agrès, voiles, artillerie,
ni rien changer aux formes de leur
carène. Ce rapport, appuyé des expé-
riences nombreuses faites en présence
des commissaires de l'académie , est
une justice tardive, mais éclatante,
rendue à un homme de génie dans la
personne de son fils, qui s'est fait le
continuateur de ses travaux et l'émule
de sa gloire. Désormais, ni les Amé-
ricains ni les Anglais ne contesteront
plus à la France la priorité de l'in-
vention de la navigation à vapeur ;
mais ils lui seront encore redevables
des perfectionnements de cette inven-
tion. La France en a la gloire; quant
au profit, elle le négligera probable-
ment, suivant son habitude. P — ot.
JOUIX (Nicolas), poète satiri-
que et janséniste, naquit à Chartres en
1684. On ne connaît rien de sa vie;
on sait seulement que, après avoir
exercé le commerce de la joaillerie, il
s'établit banquier à Paris, où 11 mou-
rut le 22 février 1757. 11 était lié avec
l'abbé Grécouit, et pendant près de
trente ans 11 publia des satires et des
libelles contre les jésuites et contre les
prélats qui voulaient que dans leurs
diocèses les curés se conformassent à
la bulle Unigenitus. La foule de petits
pamphlets en vers et en prose que l'on
doit à ce poète théologien se fait re-
marquer par un ton [)hi3 que grivois, et
en même temp^ par l'érudition mal em-
ployée des notes explicatives. T^a mé-
disance et la calomnie prennent dans
sa prose un caractère sérieux qui con-
traste avec le ton burlesque de ses
^ers. Son début poétique avait été
JOU
une cantate sur les Tuileries , im-
primée en 1717. En 1729 , l'ar-
chevêque de Paris, Vlntlmille, ayant
suspendu de l'exercice de ses fonctions
le curé de Sarcelles, DuUuel,qul avait
refusé d'accepter la constitution Uiii^c-
nilus^ le parti janséniste prit fait et
cause pour cet ecclésiastique ; et, à cette
occasion, Jouin composa, sous le nom
de Sarcelles, des harangues en vers
et en patois, qui étaient censées adres-
sées par les habitants du village de ce
nom à M . de Vlntlmille. L La première,
qui parut en 1730, est dirigée contre
les prétendus désordres introduits dans
les paroisses gouvernées par des prê-
tres dévoués à la constitution. II. La
seconde, quiestd'avril 1731, développe
V esprit et le caractère que les jansé-
nistes attribuent aux jésuites, et porte
pour premier titre : Les habitants de
Sarcelles désabusez au sujet de la
constitalîonViû^en'ûus. Elle est suivie,
dans les premières éditions, d'une épi-
gramme ordnrlère contre le P. Girard ;
puis, dans toutes, d'une lettre du cardi-
nal deTournon écrite de la Chine, le 0
oct. 170G, àM. Conon, vicaire aposto-
lique d'une des provinces de cet em-
pire , sur les procédés dont ce dernier
avait eu à se plaindre de la part des
jésuites. 111 , IV, La troisième (mal
1732) et la quatrième (juin. 1736) pré-
conisent les prétendus miracles qui s'o-
péraient sur le tombeau du diacre Paris,
et attaquent l'ordonnance de l'archevê-
que contre ces ridicules momeries. V.
La cinquième (août 17i0)estun remer-
cînient adressé à M. de Vlntlmille
dans un style non moins Irrévérencieux
que les précédentes satires, au sujet de
la réintégration du curé Du Huel. VI,
\ II. Jouin composa aussi deux Sar-
celles contre Languet de Cergy, ar-
chevêque de Sens, au sujet de son man-
dement du 6 avril 1739, ordonnant
d'enseigner le nouveau catéchisme qu'il
avait donné à son diocèse; elles sont
JOL
d'iTrilelJeroii 17\0. Mil, IX. X
Des Sarcrllrs furrut auj.si atlressccsau
I oi ; la prrmlcre, sou* ce tilrc ; Les très-
humilrs rt très-resptcturuxn retnun-
franrrs des habitants du village de
SarcrlU^ aujw/, au sujet des arai-
res prrsentes du purlrrnriit de Pa-
ris ; rlle n'a pjs rtc reimpriinrc dans
réJilioii JclTG » ' 1 -.iiililul^:
liaranfur (!><: dr A» /v/-
r visse dr > i
1733;. csii
a\eu Je la jucretlcnl»', ainsi (|iic ilu re-
racrrimnit a M. de Vinlnmlle; latioi-
sicmc contient l^s 1res humides re-
meri Iwents des hahitants de Sarcel-
les au Jiuy , au sujet du refifur du
pdrUmenl de Paris (1733). L« car-
dinal de FleuiT, premier ministre, est
furt nialtiailc dans la premièie de ces
satires. On en ju^fra par ces vers:
Ociabaad
Q«* j« «nti4rrinn« mii lecbafltut
Si »« tubiiU bi|M>ci»>i«
R« veu* cacboil %* pyilidir.
\I. \.:kOT\i\fmc San elle ts\ adrc>srcà
l'atchevèqucdc Cambrai, SainlAlbiu,
qui avait donné à i'aris, le 'l'i juillet
17 VI, un maadeœent contre une con-
sultation d'avocat<^ de l*aris en ia\eur
t.'e certains janbcnistes de Cambrai,
(^ette pièce virulente éiail précédée
d'une épigraphe doublement injuiieuie
pour les mirur:> et l.i nai-sance illf;,i-
iime de ce prélat : Spurii non suntad
"rdinrs udrnittendi rt ii uni nés qui
tx Irgitimis nuntiis non sunt pru-
rreaii. \\\. L aiclit\êquc de Pari^
Clinstophc de lîeaumont, ne fut pas
moins que son prédécesseur en butte
à la verve de Nicolas Jouin, qui com-
posa contre lui sa donziéme Sarcelle,
particulièrcmenl dirigée coulre les jc-
<ujte<. Dans les noies se trouve une
Requête du bourreau d^ Orléans con-
tre les jesuiits de cette ville , qui
avaient usurpé sur ses droits^ en dé-
cblrant solenuelleoieut plusieurs livres
JUL
191
de Vutt - lîo)al dans la chapelle
de leur raai>on, le S beplembre 1710.
Celte pièce de vers ne parait point
rire de Jouin. XIII. Harangue
des habituais de la paroisse de
Sarcelles a monseigneur Christophe
de Beaumont de lie par font , etc.
(Ait. KTjV, in-12). I.'autri.r de
celte pièce fut mis à la I>aslillc , et
l'on a prirml'i que c'était par la tra-
hison <! \ I N . I j qiiatoriiéme
et dei ! le a pour titre : le
Voyage de Oroslf (( iroilav, villa^r
aut environs dr l'aris ,ou la Surprise
des habitants de Sart elles ( Aix ,
1740, in-12), uoo reimprimée, aio>i
que la précédente, dans l'édition dr
176i. Toutes ces pièces sont accom-
pagnées de noies ou l'abus de rerutH-
lion lli' ' .r c mêle au\.Viecdoles
les plu . aux ininiiuiions les
p ' ' rn patois
d. • en fran-
Ç' iic lisible.
aii; * it pas la
vo^ue qu eurent les Surreiles (1) ,
si l'on ne savait avec quel entliou-
siasroe l'esprit de parti accueille tout
ce qui le (laite. I^urs de l'abolition de
la sociclé de Jésas, ces Sai celles fu>
renl réimprimées avec une .sorte de luxe
sous ce titre : le l rai reraeildes Sar^
celles, mémoires, notes et anecdo-
tes intéressantes sur la conduite de
Carrhe^^'éque d' Paris et de quelques
autres prélats Jron^ais ; le Philo-
tamts et le Portefeuille du diable,
oui'rage absolument nécessaire à
ceux qui veulent prendre une juste
idée des matix que fhglise a sou/"
ferts pendant le règne de la ci -dé-
fiant soi-disant société de Jésus
i\fi>terJain, 17(ii, 2 vol. in-12).
/avertissement qui préct*t!e le Philo-
tanus annonce que ce poème, qui n'est
\\ < • >t i '• rt f;ij. routeur «lu Dict. de» Lvra$
jtn.f\ i:f: \rs . p .rjc Sunelaurt, el que Bar-
bier, d*i>\ llxamia crii., et M. (^>urrjrl, «lant
la t'rance luttrmm, \n iiummeot Saixeiadtt,
«9-
agî
JOU
point de Jouiii, mais bien de Gréroiu t
(Kf>^. cenom, WIII, 273), a [jonr
objet (!e montii^r que la constitution
L iii£;eriitus ts[ l'œuvre des jésuites {2).
Déjà le Portefeuille du diable, ou
Suite de Fhilotamis, poèuie dédié à
:\r"® (lalpin (femme d'un néf^ociant
de Paris), avait été public séparément
en 1733, in-12. Dans ce recueil se
trouve encore le Dialogue (en vers)
entre deux bourgeois de Paris, ou
sujet de V enterrement de M. Cof-
fin (21 juin 1749). On avait re-
fusé les sacrements , mais non la sé-
pulture ecclésiastique , à cet ancien
recteur de l'université qui passait pour
janséniste. Vient ensuite une satire fort
licencieuse (texte et notes), dirigée con-
t re dame Robin , veuve du sieur Herbert
de Mojsaut, que l'ancien évêque de
Mirepoix, Bo^er [Voy. ce nom, V,
424), et l'archevêque de Beauraont
venaient de nommer supérieure de la
Salpêtrière. On a encorede Jouin : i°
Chanson d'un inconnu, nouvellement
découvei te et mise an jour avec des re-
marques critiques par le docteur Chr.
Matanasius (3), sur !'///> des pendus,
ou Histoirevéritafde et remarquable
arrivée à l'endroit d'un R. P. de la
compagnie de Jésus (le P. Couvrii^iiy),
Turin (Rouen), Alétophile, 1732,
yn-12. Cette pièce a été réimprimée
;i) Knrhirr, clans le JJclioi>naire des mony-
mes. 11* i-i«93, aitiibue à Joiiiii le P/ii/oInnus ,
<iiioii{u'il dise tout le contraire au u" 14218 ,
ou il restitue à (irocourt c<; qui est liien son
oeuvre. H adopte la même cireurd;ins \' Examen
critique des Dcituiiuai'es, se fondant sur ce que,
dan'* la collection des Sarcelles de Jouin , se
trouve un avis portant «[u'cn donne le poème
de l'/titutaiius plus exact (jue dans toutes If.s
e-Jiiion^ pncrdentes. « C'est donc pour ainsi
M dire, obsefw: le bibliographe, une édition
<e avouée et reconnue par l'auteur. » Il nous
send)ie tjtie «ette conclusion, répétée par M.
Qiieiard , dans la fiance litlrraire, est forcée et
ne coiivieiii pris moins a l'iditeur cju'à l'auieur
d'un ouvrage. D'.iilleurs, sur If frontispice de la
»'" édition du Philotaum, jiubliée en 1720, on
voit le» initi.Ues. par M. L. U. G, qui doivent
ngnifi^r />«r !\l. l'ahié de fjrrcourt.
j) On siil que l«î pceudonj me Chrjrsoslome
MaiaiM .in av.'it déjà été empl..yé par .Saint
lt_vuc.nll.e(/'V- «^«^ «"'"' X^^l^.iJy?)-
JOU
depuis avec des augmentations sous ce
titre: iMœurs des jésuites, leur con-
duite sacrilège dans le tribunal de
la pénitence, avec des Jleniarques
critiques, elc. (Turin, Alétophile,
1756); 2" les Regrets des jésuites
au sujet du nom>eau Bréiuaire de
Paris ; la Réponse de l'archeoéque
aux jésuites, en vers avec des notes,
1736, in-12; 3" Chanson sur le
P. Couorigny {\19.1 , in-12); 4°
Nouveaux dialogues des morts ,
cantctmnt un dialogue du jésuite
Varade et du régicide Barrière
(1739, in-12) ; o"" le Philotanus mo-
derne, 1740 (3 vol. in-12). Cette
production est bien de Jouin , et c'est
ce qui a sans doute porté quelques
critiques à lui attribuer le Philota-
nus; ; 6" Procès contre les jésuites
(celui du P. Ambroise Guys) , pour
servir de suite aux causes célèbres
(Brest, 1750, in-12); T Pièces et
anecdotes intéressantes, eic. (Utrecht,
1755, 2 vol. in-12). C'est une réim-
pression de la plupart des ouvrages
déjà cités. On a attribué à Jouin -et
aux frères Qticsiiel de Dieppe: le Vé-
ritable almanacli nouveau pour Van-
née 1733, ou le Nouveau calendrier
jésuitique, extrait de leur martyro-
loge, mené loge et nécrologe, Tré-
voux pour la plus grande gloire de
la société. — Jouin avait composé
des mémoires pour servir à l'histoire
du cardinal de 'J'eiicin , dont il laissa
le manuscrit au maréchal de Noailles.
D— R— R.
JOURDAIN , d'origine alle-
mande , (ut le deuxième général de
l'ordre des Frères- Prêcheurs. Il naquit
en Palestine \c,':>, l'an 1200. Ses pa-
rents qui habitaient le village de Wol-
tei bourg dans le royaume de Saxe, sui-
vant la pieuse coutume du temps étaient
allés à Jérusalem visiter les saints
lieux. Il fut baptisé dans les eaux du
Jourdain et reçut le nom de ce fleuve.
JOt
jor
i»V^
Im Mmalr* de sj wt ne nou4 ont
point tranoini^ critii tie sa famille. An
retour de son pèlerinage, »on père di-
rigea sa première enfaiire a\ee une
relipeu>e >olltrtlude. Il lui fil doiinrr
une éducation trè* chrétienne dan»
une savante uui\rrsii<« de rAlieroa^îne;
et, dès que *mii |iis rut Ifiunné ses hu-
inanitrs.ill. fi jeune encore,
eludirr la | cl la llieolojir
dans un collt-^r ilr V^\t^. l.e piemier
jour de carême de l'Année i*2*20 , il
irrul en celle >ille l'hal'il mon.istitjjr
drs mains du 1*. Ua\naud, qui prè« I .ut
aiois avec u'i prand »urcrs au couvent
de Saint Jacques. Ses talents, sti ver-
tuv, raal(;re sa jeune <e, le firent ^lire
dans la mmie année provinci.il de
Kombardie. I.e jr\r qu'il montra dan«
le ^ou\erncmei:t ilc sa province, le fil
unanimement clmi^T, le (î août l'ilM,
pour sucrrdrr à saint Dominique, pa-
triarche de l'ordre de> Frère* l'ié
cheuis. Kn peu de tempN il panmt à
établir sa reli;;ion en France, en Ita-
lie, en (irèce, en Kspa;;ne, et même
en Asie. Kntrainé par j^es exhoita-
tions , Albert-le-Grand entra dans
son ordre, dont il fit la pinire par sa
science et iia sainteté, l'n célèbre pro-
fesseur , (îaultier , r)ui ensei^'ii i t la
philosophie à Verceil , aprr> l'avoir
entendu, vint se r.inticr au nnmhie
de se^ enfants, et fui depuis un saint
religieux. Jourdain unissait étroite-
ment dans son co-iir l'amour de la
prière à l'amour do l'élude. (Vesl
pourquoi souvent on l'entendait dire
que si l'oraison est la nourriture de
1 .ime, l'élude en est le breuva;;e déli-
cieux. Quelqu'un lui demandant quel
était le meilleur moven pour arriver à
la perfection ou de toujours jeûner
ou de toujours prier : •« Fl moi , je
« vous demande, répondit-il, quel est
« le plus profilable au corps, ou de lou-
« jours man;^er ou de toujours boire. »»
l^succcï'scur «le saint Dominique, dans
tout ce qu'il entreprit reçut l'appui des
papes llonorius 111, qui lui portait
une profonde affection, de drépoirc
IX, et de plusieurs pi inces catholi-
ques. 1/ascendant de s.i \rrtu lui con-
quit l'esiime de l'empereur Frédéric
11, à qui il n'hrsita pas d'adresser de
prare» reproches, narce que ce prince
trouhijit la paix de l'F^lise, et qu'il
tendait a en détruire la pui^^ance dans
son empire, l/eiopereur non-seule-
ment l'erouta s.ins colère , mais lui fit
la promesse, qu'il oublia bieutrtt pour
son propre roalhenr, de tenir dans la
tuile une fond. nie plus WÊoàérét.
Après avoir travaillé quinte ans à
gouverner et à étendre son ordre ,
Jourdain voiJut aÏWt vtsiiet le tombeau
Au Sauveur', près du(|uel il était né II
remit, eu pailanl, son autorité entre les
mains d'.\lbeit le-(irand qu'il nomma
vicaire- général, pendant .son jbsence.
I.e cnmmencemnil de sa navigation fut
irès-heureax. Il était en vue de Saint-
Jean d'Acre, lorsqu'une tempête bri^a
le vaisseau qui le puilait. Il péril
dan»' ce naufrage, avn- cent autres pas-
sagers, le 13 février 1*J37. Jourdain
a écrit nue histoire de ^on ordre inti-
tulée : l)r initiis orjinn Pnzdirtito-
rum. (''est lui qui composa l'office
propre de la fêle de .SainI Dominique,
ainsi qu'un chapelet nivsièneux de
psatimes, de cantiques, il antiennes et
d'hvmnes redoublée. 1^ premier il a
intrc.duil rusa;;e de chanter le Suhr
Hrfina après compiles. Il a fait en ou-
tre des cominentaiies sur l' Apoca-
lypse, sur le petit Pri-cian , un to-
liirne tte sermons au peuple, et un li-
vre d'exhortations et de lettres à ses
relifjieux. — Tous ces faits sont ex-
traits des ouvra-es de saint Anionin,
de Himibert. df Malvenda, de Winnèt^
liominiminc par Fi-uillct, dcTouron,
dans >a Vie de saint Dominique , et
enfin deTrilhème, dans son traité des
écrivains ecclésiastiques. C — T — .«i.
294
JOIÎ
JOURDAX ( Andrk-Joseph ) ,
né à Aubagne en Provence, se pronon-
ra avec beaucoup d'énerji;ie coulre les
premiers excès de la révolution. Con-
traint bientôt de quitter son pays, il
fdi d'abord inscrit sur la liste des émi-
grés, puis emprisonne peinlanl la ter-
reur. En 1795, il fut dé[i.!lé par le
département des Bocclies-du-Khône
au conseil des Cinq-Cents, où il s'op-
posa aux lois contre l'craigration et
parla en faveur de la liberté de la
presse, de la liberté des cultes et des
prêtres insermentés. Rapporteur dans
Taffaire des naufragés de Calais, il eut
le bonheur de les arracher au supplice,
et fit décréter par le conseil qu'ils se-
raient déportés dans un état neutre.
Cette conduite lui attira l'animadver-
slon du Directoire, qui l'enveloppa dans
la proscription du 18 fructidor {sept.
1797). Alors Jourdan se réfugia en
Espagne, et n'obtint la permission de
rentrer en France qu'après le 18 bru-
maire. D'abord rais en surveillance à
Orléans, il fut rétabli dans ses droits
en 1S03. Bientôt le collège électoral
des ]jOQche5-du-Pthône le ncmma can-
didat au sénat conservateur , et plus
tard Napoléon lui donna la préfec-
ture du département des Forets, dont
le chef-lieu était Luxembourg. En
1814, Louis XVIII l'appela au con-
seil d'étal en service ordinaire, et lui
confia ensuite l'administration géné-
rale des affaires ecclésiastiques, avec
les attributions de l'ancien ministre des
cultes. Jourdan se tint à l'écart pen-
dant les Ceot-jours, reprit ses fonc-
tions au second retour du roi, et donna
sa démission en 1816; il venait de
présenter au monarque un Mrmoire
où il émettait le vœu d'être remplacé
par un évéque, et il rédigea l'ordon-
nance qui investissait le grand-aumô-
nier de la direction des affaires ron-
ccrnant le culte catholique. Il mou-
rut, le 6 juillet 1831, à Marseille, où
JOU
il s'était retiré avec le titre de conseil-
ler d'état honoraire. P — RT.
JOrUDAX (Jean-Baptiste) ,
maréchal de France, fut un des géné-
raux de notre époque qui eurent le
plus de renommée , sans qu'on doive
le considérer comme un des plus ha-
biles. Son nom est attaché aux plus
grands événements des guerres de la
révolution , et par là sa biographie
doit offrir un des cotés les plus inté-
ressants de notre histoire militaire.
Ayant sei vi dans les armées qu'il com-
manda, l'auteur de cette notice fut té-
moin de la plupart des faits ; il les a
ensuite étudiés, comparés; il a recueilli,
consulté tous \t?> témoignages et, ce
qu'il n'avait pas compris d'abord, ce
que peu de personnes comprennent
encore aujourd'hui, les causes et les
secrets moteurs de ces grands événe-
ments, tout s'est expliqué, aucun doute
ne lui reste. D'un autre côté , placé
dans une situation indépendante , c'est
uniquement pour l'exactitude de l'his-
toire qu'il écrit. Ne demandant, ne
devant rien à aucun parti ; aucune il-
lusion , aucune crainte ne peut l'em-
pêcli2r de voir la vérité et de la dire.
Et cette profession de foi qu'il fait à
l'occasion de la notice du maréchal
Jourdan, il peut l'appliquer hautement
à tous ses travaux dans cette Biogra-
phie universelle, où depuis trente ans
il inscrit ses pensées. — Né le 2 avril
1762, à Limoges, fils d'un chirurgien
obscur, Jourdan ne fit que des études
incomplètes, et il s'enrôla, dès l'âge de
seize ans, comme simple fantassin dans
le régiment d'Auxerrois. D'abord en-
voyé à un dépôt de Tile de Ré, puis
transporté dans l'yVméiiquedu Nord,
il y fit nxii'. partie des guerres de l'indé-
pendance. Après avoir obtenu un con-
gé, en 1782, pour cause de santé, il
revint en France ; et rentra dans le
même corps dès qu'il fut rétabli. Ré-
formé définitivement en 1784, il rc-
JOt
luuriu (Um u Cunillc. Sca ^o«b et sa
%aiiténe kcmlibieiit point alur% \r poi-
Irr \crs la raiiirrr d<^ arror^ H %c Gt
luarciijiiil tnctcirr ; rt, s'rlant marié
avrr une niuùi%lc , ils rfuniirn! leurs
iiuiii:>tiirs analogues. Tamlis que La
femme lenail son iiu^asin de modes,
le mari, |>orlji]l sa marciuiidise sur ses
épaules, allait la \endie de fuire en
foire. On conçoit que dai<s une lelic po-
sillon les promesses ou le> illusion» de
la rt-\olution durent admirablement
lui sourire. Drsla fin de IT'Jl , il s'en-
10I.1 dans les volontaires dont l'^sscm-
blre ronstiluanle venait de drcreler la
foinulion; et comme dan> la France,
M peu militaire de celle rpixjiie, c'é-
lail un litre imposant que d aMiir porté
le mousquet pendant quelques an-
nées , ses compagnons d'armes le
itonunrrrnt , par acclamation , clief du
second batadlon de la Haute-Vienne,
qu'il conduisit à la frontière du Nord,
DU il fit les premières campagnes de
nos i^uerres sous l..arA\etle et Dumou-
liez. 1^ bonne tenue de celle tiuupe,
et sans doule aussi riiilrlli;;ence , le
courage du commandint , lui tirent
quebpie réputation. Il fut nommé t;é-
iKN-al de bii^.ide, le '21 mai 17Uil, et
di-u\ mois après ^«-ni-ral de division.
Cj c>l en celle qualité que, le 8 sep-
leml>re suivant, il comnur:da, sous les
rauis de DunLerque , l'avant ^arde
d'Iloucbard qui, par une des b xarre-
rics de celte époque si méconnue et si
peu comprise, porta sa tête sur l'echa-
faud, après avoir remporté une vic-
toire sur les Anglais, tandis que son
lieutenant, qui avait montré de la bra-
voure, il est vrai, dans celte journée
do llondsclioote, où il reçut une lé-
i;ère blessure , m.iis qui n'avait fait
qu'exécuter les ordres du ^éncial en
chef, fut porte au premier ran^; de
l'armée. Il se rendit aui>sitol hur U
Sambre, pour y prendre le cominamle-
ment des dilTcrents corps que le co-
JOU
•9S
ailé de salut public destinait à faire
lever le blocus de Maubeu(;e, formé
par le prince de Gibour^, déjà nuilie,
sur celle frontière, de (|uatie de nos
plus fortes places. Dans celle làclie
diifirile, Jiiuriian fut d;ii;;éou surveillé
par le représentant du pmple Carnot ,
qui, selon rusa;;e du temps, lui ilonna
non seulement des instrurlions et des
ordres, mais au^si l'exemple du cou-
rage, en se mettant lui-ménr à la tète
des troupes. On se battit pendant trois
jours, et deux fois l'aile droite et l'aile
^audie furent obl»;;ées de rétni^rader.
Kn6n le centre, après avoir pris et
repris trois fois le village de \\ ati^nies,
en resta définitivement lemaitre; 1rs
albé-s se retirèrent derrièie la Sambre,
et le drbloquement de .Maulie'i;;e fut
opéré; ce qui était un siirrèN immense
dans les circonstanics ou se trouvait la
république. ]..es représentants du peu-
ple Carnot et Duque^no? furent Irrs-
satisfaits de la conduite du (général en
cbef, et ils écriviient à la Convention :
•« Il est impossible de se conduire avec
•« plus d'intrépidité et »le s,i;;eN.N«
«< Son coup d'essai est d'avoir battu
'« (x)bour(^ ; voila l'clo^e de ses talents;
•« celui de son patriotisme est dans la
•< bouche de tous ses compagnons d'ar«
« mes. >• Dès lors Jourdan se trouva
placr au premier ran^ de nos;:;éni-iaux,
et le comité de gouvernement l'appela
auprès de lui pour recevoir ses avis sur
les mouvements des quatorze armées,
alors si importants et si multipliés.
Selon les nécessités de l'époque , il
ne manqua pas , pendant son séjour
à l'aris , de se présenter à la société
des jacobins, et il v fut accueilli par
de longs applaudissements. Mais il
eut moins de sucres à la (x)nvention
nationale, où des intrigues malveillan-
tes l'avaient devancé. D'un aulre c«V.c,
il d'I avec trop «le franchise, dans
les comités, qu'il ne fallait pas faire de
campagne d'hiver, et que l'on devait
19*
29<J
JOU
employer cette saison a iustrulrc , à
discipliner les nouvelles lésées, (^ette
pia(lonre(léj>laf ; et, ilatis un de ses rap-
ports, fiarère , riiiévitable or|;ane de
toutes les pensées du comité de salut
public , déclara hautement qu'il te-
nait Jourdan pour un fort honnête
homme, pour un excellent républicain,
mais qu'il le croyait dépourvu de l'é-
nergie nécessaire au commandement
en chef; que, du reste, il avait des
droits incontestables à une honorable
retraite. C'était alors pour un gé-
néral une véritable faveur qu'en pa-
reil cas on ne l'envoyât pas à l'écha-
faud. Jourdan le comprit fort bien;
il se retira sans mot dire dans sa
chère Limoges, et l'on a dit qu'il y re-
prit son modeste commerce. Piche-
gru , qui lui avait succédé dans la
faveur du comité , fut aussitôt mis à
sa place. Mais cette disgrâce dura peu ;
les hommes de commandement étaient
rares à cette époque; le mouvement des
partis était d'ailleurs si rapide, et les
caprices de ceux qui les dirigeaient si fré-
quents, qu'au bout de deux mois levain-
queurdeWatignies fut tiré de sa retraite
pour remplacer, à la tête de l'armée de la
Moselle, le jeune Hoche qui, six mois
auparavant, avait été sous ses ordres
à Dunkerque, et qui, ainsi que lui, de-
venu subitement général en chef, ve-
nait de tomber à son lour dans la dis-
grâce de Saint-Just et de Robespierre,
l^eu de jours après son ariivée sur la
frontière des Ardennes, Jourdan ob-
tint à Arlon, sur l'Autrichien lieau-
lieu, un succès d'autant plus impor-
tant que le résultat fut d'écarter l'en-
nemi de sa route à travers l'épaisse
for»H des Ardennes. Cette marche
fameuse, qui eut sur les événements
une si grande iniluence , fut exé-
cutée avec beaucoup de piécision et
de bonheur. L'armée de la Moselle
passa la Meuse à Dinant ; et le !î juin
elle parut sur la Sarabre, où, depuis
JOU
di'Mx mois, quelques divisions du Nord
et des Ardennes, sous les ordres de
Charnoimier et de Desjardins , fai-
saient d'inutiles elforts pour rompre
l'aile gauche des alliés et s'emparer de
Charlcroi. La veille de cette appari-
tion, ces divisions après un nouveau
revers avaient été , pour la seconde
fois, obligées de repasser le fleuve. On
conçoit de quelle importance fut pour
elles l'arrivée d'un pareil renfort. En y
ajoutant quelques corps venus de l'in-
térieur , l'armée qui se trouva alors
réunie sur la Sambre, et qui un peu plus
tard reçut, par décret de la Convention,
le nom d'armée de Sambre-et-Meuse,
n'était pas composée de moins de qua-
tre-vingt-dix mille hommes, qui furent
placés sous les ordres de Jourdan. Six
représentants du peuple furent chargés
de la diriger. A leur tête on remar-
quait le confident et l'ami de Robes-
pierre, Saint-Just, qui, contre l'usage
des membres du comité de salut pu-
blic, avait quitté momentanément ses
hautes fonctions pour des motifs qui
ne pouvaient qu'être de la plus grande
importance. C'était le temps où se sui-
vaient à Bruxelles des négociations en-
tre le cabinet de Vienne et le fameux co-
mité dont Saint-Just faisait partie [Voy.
])oHM, LXII, 517). Tout indique que
ce confident de Robespierre était le
seul de ses collègues à l'armée qui fut
dans le secret de ces négociations, et
que le général en chef lui-même n'en
était pas instruit. Cependant on ne
peut douter que ce ne soit en con-
séquence des décisions de cette espèce
de congrès (1) que l'évacuation de la
lielglque ait été airr-tée et convenue
dans un conseil de guerre tenu à Tour-
nai , le 2i mai, par les généraux de
II; L'A iil riche avjil chargé de ces urgocia-
tioiis son ancien aiiihassadeur à l'aris Mcrcy
dAiRenteau tl le couile Trautinansd(Mff. M ett
pruh.Thle que ce fut le principal inotil «lu
voy.ig"' (jue le jeune empereur François II iil
alors dans les Pays-Bas.
JOU
laroalilinn. rt dan^ ifquri \e pnnrr
d'Orange fil d'inutiles fffort* pour
que Ton triardàt au moin« de quelques
■ion une retraite qui devait amener la
ruMie lie la llollaiide. Ainvi les .illiês
avaient drridé qu'iU ahandunneraient
les Pa^s-Ila*, lorvitie .lourdaii parut
sur la Sanibre, à la Irte de quatre-
rinp! dix mille FrançaiN, et Saint Ju»!
qui dirigeait ou surveillait ses mouve-
ment», de la part du romitë de salut pu-
blic, ne pouvait pas l'ic^norer ; mais ee
drpiili' savait aussi qu'il n'> avait rien
d j(rrté pour unr suspension d'iiostili-
tés , et que les deux partis prétendaient
bien enrnre profiter «le leurs a\anla;;es.
I.a Hollande seule était vouée à une
ruine lertaine et <ans ronipeiisation.
Quant aux Autrichiens et aux An;:lais,
ils n'ignoraient pas «les lors que d'am-
ples drdomnia;;emeiits leur étaient a^su
res. Mais, pour le piinre dr (>»bourfj,
la marrlie qu'en ce moment il s'a^^i^saii
d'opter en présence des nombreuses
armées de la république était une
affaire délicate, et rlle pouvait le de-
venir encore davanla;;e si Jourdan fai-
sait de nouveaux progrès. Ca' fut afin
de l'en em[>ëctier et dVIoigncr les hVan-
çais de Iliuxelles et de Tirlemont ,
seul point de retraite qui lui restât,
3ue le ^cncialivsimr «le la coalition se
ecida enfin à tenter de nouveaux ef-
forts pour secourir ("liarleroi, et que
son lieutenant Heaulieu. après avoir
réuni quelques forces à Nivelles, se mit
en roardie, le 1G juin, pour attaquer
Tarmée fran<;aise. Mais ce jour-Ii
même, Jourdan, qui venait de passer
la Sambte avec toutes ses divisions,
tomba inopinément sur les colonnes
antrirliiennes qu'un épais brouillard
lui avait carbces. On combattit avec
beaucoup d'arharncment et des chan-
ces variées de part et li'auîre pendant
la plus ma'idc partie de la journée; et
ce ne fut que vers cinq heures du soir
que, h' rrntr»' de* Français ayant éprou-
JOU
'•r
vré quelque desordre, toute leur aimee
fui obl'f;ée de repas>er la Sambre, en
abandonnant encore une fois le siège
de (.harleroi si imprudemment coiti-
mencé. Mais on ne se rebutait poiitf
alors pour un premier échec , et
Saint -.lii>t n'était pis homme à vou-
loir que r«n en re»tat la. il >c
mit en fureur conlre les généraux et
les soldats, et fut près d'en mvover
une /oi/r/i/r. comme ce'a«e disait a'ot»,
avec le général en chef lui-même, .m
tribunal révolutionnaire de Paris; rr
qui était un arrêt de mort inévitable II
ne changea de résolution que lorsqu'il
reçut des avis inquiétants sur le snil
de ^on parti aux approches dn îl iher-
midoi . Mais de)a beaucoup de virli-
mes avaient été sacrifiées i la colère
du proconsul par le tribunal de l'ai -
mee. l/auteui de cette notice sr sou-
vient encore d'avoir vu, sur le* bords
de la Sambre, condu-re à la mort, en-
tassés pèle mêle dans des four;;oiis dr
rivres, officiers et soldats que venait de
condamner un de ces tritiunaux nn'li-
fnirr.s , rxtraortiinairrs rt rrra/u-
tionnairr.i que la 'invention natio-
nale avait envovés à toutes les arnii-e*.
(.elui qui opérait alois sur la Sam-
bre , compose d'hommes au«si féroces
q<ie Dumas et Fouquier- l'ainville, ne
prononçait pas des arrêts moins nom-
breux ni moins cruels. Cet horrible
svstèine était d'autant plus odieux <]u'il
pesait sur de jeunes soldats arrachés la
veille à leurs familles , et qui , apn-s
avoir élé comme autorisés à l'indisci-
pline et aux plus affre:!x désordre- par
tous les exemples de la révolution, et sur
tout dans l'invasion du Palalinat et d'au-
tres contrées, étaient ensuite immolés
pour les moindres fautes, sans transition
et sans pitié. Ceux-là connaissent bien
peu celte époque de san^ct de terreur,
qui pensent que les armées en furent to-
talement exemptes, et que l'on put s'y
rcfut;ier pour se - ' aire à roppressiou
29» JOU
universelle ! Mais ce n'est pas le général
en chef deTarméede Sambre-et-Meiise
qu'il faut accuser de ces infamies. Jour-
dan n'était certainement pas un homme
cruel. Lui-mcme n'échappa, dans plu-
sieurs occasions, que par une sorte de
miracle, à la férocité des proconsuls,
et, parfois, il eut beaucoup de peine à
lenr arracher quelques victimes. Il ne
faut pas croire non plus que ce fut à de
tels moyens que la France dut les suc-
cès que ses armées obtinrent alors sur
différents points. Partout oîi les soldats
français ont été bien conduits, partout
où les moyens de vaincre ne leur ont
pas manqué , ils ont fait leur devoir
beaucoup plus par des sentiments
d'honneur et de patriotisme, que par
àe^ pensées de crainte et d'une avilis-
sante terreur. S'ils éprouvèrent des
revers, il ne faut les attribuer qu'à l'i-
gnorance , à l'impéritie des chefs et
surtout à celle des stupides représen-
tants, qui se mêlèrent trop souvent de
les conduire. Dans cette circonstance,
par exemple, c'était Saint-Just lui-
même qui avait voulu que l'on recom-
mençât, en présence d'un ennemi vic-
torieux, le siège de Charleroi qu'il fallut
lever encore une fois le 16 juin avec
de grandes pertes. Mais, pour les gou-
vernants de cette épo{|!U', tout cela était
peu de chose ; le lendemain on recom-
mençait avec de nouveaux sacrifi-
ces. On a vu que , depuis quinze
jours, les alliés avaient formellement
décidé l'évacuation des Pays-lîas ;
ainsi, il ne pouvait y avoir désormais,
de leur part, pour s'y maintenir, aucune
entreprise sérieuse. Il ne s'agissait plus
pour eux que d'assurer et d'exécuter,
sans perte, une retraite devenue indis-
pensable. Il est donc évident que ce fut
dans ce seul but que le prince de Co-
bourg , leur généralissime , dirigea
vers Charleroi , le 2G juin, la plus
grande partie de ses forces. On a dit
qu'il ignora jusqu'à la fin de la jour-
JOU
née la reddition de cette place; mais
cela est peu probable dans un pays
découvert, où les deux armées étaient
en présence dès la veille sur une ligne
très-étendue, lorsque déjà les avant-
postes en étaient venus aux mains sur
différents points, et qu'il y avait eu des
prisonniers de part et d'autre. D'ail-
leurs toutes les dispositions et tous les
mouvements de l'armée autrichienne
furent évidemment combinés dès le
matin, sur la certitude que Charleroi
était au pouvoir des Français. S'il se
fût agi de le délivrer encore une fois,
comme lîeaulieu l'avait fait quelques
jours auparavant , le principal effort
devait être dirigé vers le centre sur la
route de Gosselies , et non pas sur
les ailes, à une grande distance. Et
ce qui prouve encore mieux que ce
mouvement sur les deux ailes , or-
donné par le prince de Cobourg, ne
devait être qu'une simple démonstra-
tion, c'est que la plus grande partie de
ses équipages et des réserves d'artillerie
serait en marche, le même jour, dans
la direction de Liège, et qu'il prescrivit
à tous les corps de son armée, qui s'a-
vancèrent vers la Sarabre, de ne point
engager d'action sérieuse. Vers le
milieu de la journée, lorsqu'il apprit
que plusieurs s'avançaient plus qu'ils
n'auraient dû le faire, il leur envoya
l'ordre de se retirer ; mais cet ordre
ne put être exécuté que sur le soir par
les corps de Beaulieu et du prince d'O-
range qui avaient fait le plus de pro-
grès. Le centre de l'armée française qui
ainail pu profiter de ce mouvement
imprudent des deux ailesaulrichiennes,
en manœuvrant sur son front, resta au
contraire pour la plus grande partie ,
dans une complète immobilité. Kt ce-
pendant la position des Français, quoi-
que défectueuse sous quelque rapport ,
leur donnait de grands avantages pour
la facilité et la célérité des mouvements,
I>ien que fort étendue, celte position
JOU
IVlait «oins qDP celle des alliés, pai»-
que la li<;nr française a«jit la forme d'un
arr,donll.iSarol)ree(ail la coide, et que
relie des Aulnrliiem, qui faisaient en
■^e temps des drmonsli.ition* sur
lou< les point*, en dchms de re demi-
eercle , embrassait nn fNpafc beaucoup
plosTa'.le. Certes, si Joiinlan avait eu la
pensée de renforcer rapidement ^on
centre par s^ réserves, et d'v faire un
fH'andcflort, on ne peut pas douter qu'il
n'eût séparé sans peine les différents
corps des alliés. Kn se portant ainsi droit
sur Brutelles, ilponvait en un moment
changer la fare des choses ; mais il n*v
avait là.tl faut le dire, personne qui (ùt
capable d'une conception auNM forte et
pourtant tris >mi.lc. D'ailleurs, il est
bien sûr qu'à relie époque, dans l'une
et l'autre armrr, on ne voulait en ve-
nir à rien de sérieu* ni de deci>if. Le
prince de G)bour<; avait reçu de l'em-
[>ereur, qui était retourné a \ ienne qoel-
3ue$ jours auparawnt, l'ordre formel
e se retirer, et il ne songeait qu'à
éracoer la Ilel^iqoe sans pertes ; tandis
que Sainl-Ju>t, assuré d'occuper bien-
t(U cette contrée sans coup férir, ne
Toulait rien hasarder. Aussi, dans celte
journée fameuse, il n\ eut réellement
qu'une partie des dea» armées qui com-
battit ; encore ful-ce sans ordre et sans
utilité. L'aile droite des Français ,
que coromaiidaii Marceau, fut re|etée
derrière la Sambre , et ce succès
inattendu 6l oublier à Heaulieu les
ordres qu'il avait reçus. 11 éprouva en-
suite une vigoureuse résistance de la
part de I^febvre, qui occupait Lambu-
sart, et lorsqu'il fut séiieusement cn-
j:a<;é, ce n'est qu'aNcc beaucoup de
peine qu'il put revenir sur ses pas. Dans
d'autres circonstances, et avec des ad-
versaires plus habiles , il aurait pavé
celte faute bien cher : d'autant plus
qu'au même moment le prince «l'O-
range en commellail une pareille à
l'aile droite, ou il avait force kléber de
JOU
»w
»e retirer jusqu'à Marchienne*. Comme
noos Pavons dit , pendant tout ce
temps, c'est-à-dire pciid.intune longue
journée du mois de juin, le centre
des Français resta immobile ; et nous
ne savons pas ou M. Ihiers a trouvé
que la di\ision de Moilut, qui for-
mait recentre, en a\anl de Cosselies,
sr tnrsura long-trmpi avrr ir grnê-
ral autrii hirn (JuasilnniHii h , qui
rssuya plusirurs nwnirtn'res pnur
la tournrr , rt finit par l'être ^sic)
lui-mrme, que cette division se replia
aussi sur (iosselies après lei plus ho-
noriîbles efforls, etc. ^J). L'auteur de
cette nolice se trouvait ce jour- là mrme
au centre de la <! ""T >rlot, ou il
commandait uru c d'infante-
rie ; et il affirm.- , i^u^ crainte d'rtre
démenti par les témoins qui existent
encore , qu'à l'exception de quelques
a>ant-poste», celte division ne fil pas
le moindre effurt, pas un mouvement,
que 1 on n'\ tira, q'.ie l'on n'v e.ssu>a
pas un coup de fusil, pas un coup de ca-
non ; que le villai^edeCiOSselies qui était
derrière elle immédiatement, et que l'on
pouvait re;;arder comme la cle de la
fiosition, à cause de la roule de llnivel-
e$ qui le traver.se, ne fut pas orciipe un
instant , m même altaqué par l'en-
nemi, qui son tint à plus d'une derni-
lieue; qu'entin le ballon dont on a tant
parle, et qui manœuvra toute la jour-
ij>j>-r ; iiiaU «lé rai»ie, on o*- d«'ii nm m cwn-
ur'. I cr iieil «ïu# p«rloul r\ dan» tou* lr«
.\i,-'
' m.' u \ d»»r. I tir
Kl. t. l)a:it crl'.r '
inirr i^flrsion i
,p,v
.p eu Franc* . on a
>rtt mililairr».
mira* «boirir
ix «|i;'il.'» tiii-
. f\rm\t\t, la
ip poar faire
co.i.,>r.ndrc iM. "Ilii.r> qo. . »i Oosieh*» ,
|.la.r drrrirrr lirrnlredr l'afuii >, -■» vail pu «Ure
ml in. Util par IVnnc mi , toute U
M"
et toutes les di-
li.r,. lr.infji>r cul rie P'Oipue
»l^ ...>^ tourn<>«3 cl coup, r* de Uur retraite »ur
« liwrlrroi, la »eule qui leur fùl re»tee.
3oo
jor
liée sur ce point n'y rendit d'au-
tre service que d'égayer les soldais,
qui s'amusèrent beaucoup de voir des
gendarmes le tirer par des cordes, et
donner une espèce d'ovation au re-
présentant Guyton de Morveau, qui
y était monté par injonction de Saint-
Jusl , et qui s'y mourait de peur.
Nous pouvons affirmer encore qu'à la
fin de la journée, avant enlcndu aux
deux ailes et presque sur leurs der-
rières quelques détonations d'artille-
rie, les troupes de la division Morlot
crurent à un revers pareil à celui du 16,
que même elles avaient déjà reçu l'ordre
de retraite, qu'elles l'exécutaient et que
la tète de leur colonne entrait dans Gos-
sflies, (;;!;iiid il leur vint un contre-ordre
avec la nouvelle d'une victoire à laquelle
elles ne pouvaient croire. Elles n'y
crurent pas davantage , huit jours plus
tard, lorsqu'il leur en vint un récit
ofticiel piononcé à la tribune de la
Convention par le député Barère. De
tous ces rapports du temps qu'on appe-
lait des curma^jwles, de tous les bul-
letins du directoire, du consulat et de
l'empire, nous ne craignons pas d'affir-
mer qu'il n'en est point de plus men-
songer, de plus radicalement faux que
ce discours prononcé au nom du comité
de salut public, sur la bataille deFleu-
rus , dans la séance du 1 1 messidor
an H (•29 juin 1794). D'abord le nom-
bre des combattants dans les deux ar-
mées y est fort exagéré, celui des morts,
des blessés l'est encore davantage, et
es mouvements, la position des trou-
pes y sont tout -à-fait imaginaires.
Quant aux prisonniers , on pourrait
croire , quelque invraisemblable que
cela paraisse à cAté des autres circon-
stances, que l'armée française n'en fit
réellement qu'un seul; mais il est ab-
surde , et c'est un des mensonges les
plus impudents que Tiarère ail faits, il
est absurde de prétendre que ce fut à
cause du décret de la Convention, qui
JOU
ordonnait le massacre des prisonniers
anglais, et que sitôt que nos soldats vi-
rent des habits ronges ils se ruèrent sur
eux et en firent un effroyable carnage.
La vérité est que de toutes les troupes
que commandait le prince de Cobourg ,
à Fleurus, il n'y avait pas un seul ba-
taillon anglais , et que toute l'armée
britannique sans exception était restée
dans la Flandre orientale sous les or-
dres du duc d'York, qui se dispo-
sait à la reconduire en Angleterre
comme Cobourg se préparait à rem-
mener les Autrichiens au delà du Rhin.
Par les mêmes causes de dissension
qui agitaient alors les alliés, les Prus-
siens n'y avaient également pas envoyé
un seul régiment [Voy- Kalckri: ut ,
dans ce vol.) , et Barère ne l'igno-
rait pas ; cependant il y en fait figurer
vingt mille ! Tous les membres du
comité de salut public savaient la mé-
sintelligence, les divisions qui paraly-
saient, qui annulaient d'une manière si
honteuse, les efforts de la coalition ; ils
avaient tout fait pour exciter, pour
entretenir ces divisions; c'était leur
devoir, et ils s'en acquittaient merveil-
leusement. Ils n'avaient donc pas be-
soin pour cela de mentir si impudem-
ment à la face de l'Furope, ni d'in-
sulter à ceux dont ils triomphaient
avec tant de facilité. Dans ce même
rapport, les rois et leurs généraux fu-
rent traités de hrigands, (V assassins,
par des gens avec lesquels dans ce mê-
me temps ils négociaient et transi-
geaient ! Mais , chose plus odieuse et
plus ridicule encore, Piarère osa y dire
sérieusement que le .sang répandu nu
même instant à trente lieues delà sur
les échafauds d'Arras, par le féroce l.e-
bon, avait aussi aidé, contribué à la vic-
toire de Fleurus. Et tout cela fut applau-
di, admiré par la stupidc, par l'horrible
assemblée ; tout cela se trouve encore
dans ses procès-verbaux, dans ses ar-
chives ; et c'est dans ces amas d'i-
JOU
JOU
iifpli^ ri J'iinposlum que vont (uii-
»ri les foOUMblrur» , lr> liiNlorien^ ri
Irt oraleur:> cltarUlall^ qui sont loul
prét:i à recommencer l!arere(I)) l^iio-
rjnls et credulrs qu'ils sont , ils ne
\oieut pas, ces historiens, que %i Jour-
tlA.'i eût léellemcnt oltteiiu a Fleuras
une \irtoire aussi conipietc, ausM dé-
cisive (]'mI roinint aux orateurs de la
CfJii \ eut IoimIc le dire, le crucial eût elé
sans excuse de n'atoirpas, drs lemrrae
jour, poussé jusqu'à Bruxelles, de n'a-
voir pas sui-le-cliamp rejele au-delà
du lUiin les drbris de i'armée autri-
chienne, tandis que l'iche>;ru aurait
forcé de >e rembarquer ou rejrlé dans
la mer ceux du duc d*^orl, alors si
pressé de s'enfuir et d'abandonner ses
allies. M. de Jomiiii, qui est roslé en-
core bien loin de la venté, dans le
récit qu'il fait de la balaillo de Fleu-
rus, a cepcmlaiit compris la |M»ition
ou dut se trouver Juurdan aussitôt
après; mais a>antcté, ainsi que les
autres historiens, induit en erieur sur
la plupart des faits, les conséquences
qu'il en lire ne peuvent qu'être égale-
ment erronées. (>omine nous, il s'é-
tonne que .lourdan et INche^ru n'aient
pas reçu, a l'instant même, de> comités
de la G)u\ jnlion, l'ordre de faire su-
bir à I ennemi toutes les conséquences
de ses défaite», et de lerueitlir de
leurs victoires tous les avantages qui
devaient en résulter; mais l'auteur de
notre histoire militaire, pour qui >esoiit
ouvertes les archive:» du ministère de la
guerre, n'a pas connu celles de la diplo-
(j) M. dr Jotnitii r»l \r »rul Sl^loflen qui
• il |>rfru iuiiii>i«n(lrc ce »>»trin« tir Jtrrpliua
rt <!•• ni«a«'jiige rrlaki«i- ii.-ut .> K ruru* . I>ir«-
<|u°il 'lit que fitlfrl d'urne '«r/i<>« mu'mtmlm
Ut Impitret el tet rttuUatt 4t ttilf halaHe. Il
Ml évitiriit que, djos Im «.irioosUiuci uu il sa
trooTsii )>rii île trinp« avant •• thuu, 1p rutuile
il- aalulpui'lic, diri^-c|t<r Rnbrspirrre. «Tait un
l^râii'i intrrri à au^-iirntcr :oa (rt-di( et »ou in
flaeoce, en rsaf^iTjnt le» «ocrrA que »rs pUiit
avjiicnl oliteuu*. Nous ue com|>rrnoi)« donc rira
à la rrruiatioo que M. Thier» 3 faitr. daus cet'«
occasion, d'un ecrivaio qu'il • d'aiiiears ti toa-
«•al et ^i *«r«ilriDciil copié.
matie, et moins encoiecelle^di^ la diplo-
raaiieocculte,uu d'ailleurs nous pensons
aaM n'eut pas trouvé beaucoup (V).
Mais nous sommes surpris qu'il n'ait
pas soupçonne, dans cette occasion,
comme il l'a fait dans son ncit de
la campagne de IT'JJ, «jue des intri-
^ue^ du même ;;enre > avaient eu une
grande pjil (/'u>. l)t Moi iwi /. ,
lAIII, 1 V») ('.'r-\ ;.ir là UM.qinnient
que peuvent s'cvj lh):.r( les lenteuis ri
les lie.>iijiions de l'aiinée dcS.iili;.
et-^Ieuseaprès la balaiiie et la |> '
Ciiarleroi <^)u'on prenne bien ^aido
que ce fut seulement trois joui * plus
tard que Jourdan mit en mouvement
ses divisions, et qu'au lieu delesdui^cr
vers sa droite, afin de couper la letraile
dei Autrichiens sur Namur el sur
Lic^e, il en dirigea la plus;;rande pai-
tie du rAté de Mons. I^ centre vint
camper aux Quatie-r»ras, où il resta en-
core huit jours, attendant probaiileitieiil
que les Autrichien^, qui sav.tieiil bieti
qu'ils ne reviendi aient plus à Bruxel-
les, en eussent enlevé les aichives il
tous les magasins. I^s |-Van(;ais n'v
enlrirent que le fO juillet, qiiiniejou: >
après ta bataille; et ce fut a!or% seule-
ment aue se 6t la jonclioD de l'année
deSamure-et-Mcuse avec celle d:i N)r«!i
Joui dan campait à cette époque ^\cc le
^ri\s de se- troupes sur les hauteurs de
NVavres, d'où il ne partit qu'au bout de
huit jour s, pour lejcler deânitueincnlles
Aulrithiensile l'autre cAlé de la Mcu>e,
el investir MaeNlricht. S'et.inl établi
à TonL;res et sur les hniteiirs de
Liè;;e, il resta encore près de deux mois
immo'ùile dans celte position, lorsqu'il
(4 <lu *-'>t bien jujuurU'bui qur le* p'uf ini •
|>ort.>uU *icrri> Jr :j d'plotojtir ir»uluiii>ii-
»airr u'o;it pat étr depo«i> Jjd* il » jrtlii%r\,
^X^que d'.iillrar* le» Jep'l», qui- l'.-'i t^mlritr
i i;ran<i* fi Ji^auj.iurd'tjui iiju>chj.|H'-'iiiiiitl«ic
p«jur l'oiage aeuleiiiciit Jet j>iii» d«-ij iiUMinou
du p:iti .lo.iiiuao'.,r«-»»iujbltnta$s«/. .ijirè^ Uni
de coaiigi-mcnlt et <le vicisMtcdrt, à c<l Uouime
dont une femme arr^rlMit !»•» che»r.i» >>lanc« el
rentre le» n llr^ , m bien qu'il linil pir éirc
tout-, rail ch.<ii«e.
302
JOU
lui eût été si facile d'aller jusqu^au
Rhin. En cela il fit la même faute que
Dumoui iez deux ans auparavant ; mais
elle n'eut pas les mêmes conséquences;
les circonstances avaient bien chanf^é !
Le motif apparent d'un aussi long
repos fut qu'il fallait attendre la red-
dition des quatre places de notre fron-
tière qu'occupaient les Autrichiens.
Cependant il est évident qu'en éloi-
gnant davantage l'ennemi il n'eût fait
qu'assurer bien mieux encore le siège
de ces forteresses, qui d'ailleurs se ren-
dirent assez promplement et presque
sans combattre , après avoir coûté aux
alliés tant de dépenses et de sang ! Dès
que Schérer, qui était chargé de cette
opération, revint avec les vingt mille
hommes qu'il y avait employés, il fut
envoyé à l'aile droite , pour atta-
quer les Autrichiens à leur gauche sur
les bords de l'Ourthe. Cette attaque
eut bientôt le résultat que l'on devait
en attendre. Latour, qui avait succédé
au prince de Cobourg (5), se retira sur
la Uoer, et tout le centre cl la gauche
de l'armée que commandait Jourdan
s'étant portés sur la rive droite de la
Meuse, marchèrent à l'ennemi sur une
même li"ne, et lui livrèrent dans les
(5) Le prince dn Coliouig, qui, depuis le mois
de février 1793 , commandait l'année autri-
chi'iine, avait débuié d'une inanière Irèsbril-
l;into, par le puss;i{;e de la Roer et la balaiite de
Nerwinde; mais il avail ensuite méconlenlé le
caliinet de Vienne et surtout le macliiavc lique
Thiigut par ses négociations av<c Dmiioiinez,
aur|ii--l il avait promis loyalement de ne pas
touibrrà riiitéfrrilé du territoire français et de
s'«ii tenir uu rôl>; d':iuxi!iaire pour le rélablis-
kpuient de la inonarcliie. (;<t t-ngagcniriit fut
o:inulé par le cabinet aulricliitn aussitôt qu'il
rn cul co;in li'sniicr ; et, si dès lors on u'ilta pas
.lU priinedc Cobour»; le coiniaandement général,
c'rst parée «pie 'fs su; ri-s étaient tiop récent».
On attendit pour cela u'autrcs circonstances, et
quand la Bel^jiquc fut alundonriée, le moment
paraissant con»eiiable, ou lui env«iya sesleities
lie rappel; et il alla san^ murmure et s.ms plainte
cacher dnns la retraite t.on cha-rio et les mv
crels de toutes les bouteuscK intrigues qu'il avait
vu«-s se tramerions ses yeux, et auxquelles il
avait refusé de prendre pirt. 11 fit ses derniers
adie'ix à l'année autrichienne par une procla-
liulioa lr«»>digiie et véritableiucnt touchante.
JOU
plaines de Juliers, le 2 oct. 1794,
une des batailles qui ont fait le plus
d'honneur au général en chef par la
bonne disposition des troupes, l'ordre
et la régularité des mouvements. Mais,
par une bizarrerie dont on trouverait
beaucoup d'exemples à cette époque de
charlatanisme, c'est une de celles dont
on a le moins parlé. Huit jours après
la victoire de Juhers, toute l'armée de
Sambre-et-Meuse était campée sur la
rive gauche du Rhin, depuis Coblentz
jusqu'à Clèves. Elle occupait encore
les mêmes positions, trois mois plus
tard, lorsque Pichegru envahit la Hol-
lande , si honteusement abandonnée
par ses alliés. Réduite à ses propres
forces, cette riche contrée, qui depuis
long-temps excitait la convoitise de
ses voisins, devait évidemment succom-
ber sous les efforts des armées françai-
ses, alors si nombreuses, si aguerries et
que tant de victoires rendaient encore
plus redoutables. Jourdan fit un mou-
vement vers le Bas-Rhin , pour ap-
puyer les opérations de Pichegru ,
et ses divisions de gauche allèrent
jusqu'au delà du Wahal à Arnheim
et Doesbourg. Elles revinrent , au
mois de mars , dans leurs premières
positions qu'elles occupèrent encore
pendant six mois , livrées à toutes
sortes de besoins , manquant de vi-
vres , de vêtements , et ne recevant
pour toute solde que des assignats tom-
bés dans le discrédit le plus complet.
On conçoit qu'il résulta de cette pénu-
rie beaucoup de désordre et d'indis-
cipline. J)c nombreuses désertions en
furent la conséquence, et cette armée de
Sambre-et-Meusc, qui , à la bataille de
Juliers, avait compté plus de cent mille
hommes, se trouvait réduite à moins de
soixante mille, lorsque, dans le mois
de septembre 1795, elle reçut l'ordre
de passer le Rhin. Comme on man-
quait d'équipage de pont, laplus grande
difficulté de cette opération fut de trou'
JOU
JOU
5o3
\er (lei balraui. On fit fit vffiir Je la
Hollaiiilr et de riiiti-neui par la Mo-
selle; et ce fut par ce mo\en c|ue le
paN'-aj^e >'eiïrclua prés de Neuwied cl
de l)u&.«eldorr, en présenre île quel-
i| < rorp» aulrir)iirii<i, qui tiienl peu
tlo - iNiance el furent auMilAi rejrlM
ili'incrvle Mein. Jourdju Nétahlit sur
rrlle ri\ière, a>ant sa droite %er<i
^1 -nce , dont il devait former le
de concert avec l'armce de la
Muselle, et sa «gauche à Fiancforl on
il la crut suflisaroment ^.itanlie par le
lordon de neutralité qu'> avait éla-
iili la Prusse. Mais déjà Jourdan avait
Iminéroe violé cette neutralité, et
(dairfa)t, qui commandait l'année au-
trichienne, ne devait pas se montrer
plus scrupuleux. Dès que ce ;;rneraleut
!iioin|>lie de Ficlie;;ru \er> Manheim,
il injrrlia contre l'armée de Sambre-et-
Meuse avec toutes ses forces, et ne vou-
lant pas l'attaquer de front, en passant
Ir ^Irln de>aiil elle, il tourna son .lile
l'u" sous les murs de Fiancfort.
ht ( se> tiouprs lr;;eres étaient sur la
l^lin, quand Jourdan restait encore fort
paibilileiuent sur le Mein. On se récria
beaucoup sur celte violation de la neu-
tralii»* prussienne; on cria même à la
trahison, à la perfidie; mais il n'en fal-
lut pas moins faireuneproinple retraite ;
cl quelque diligence que l'on y mit ,
ouelque> [«récautions que l'on pùi pren-
dre, on lit de glandes peitrs en équi-
paf;e> ; mais non pas en ai t:llei le, com-
me l'a piétendu, dans se^ Mémoires,
le mai cthaKiouxion Saint Cvr, qui a
beaucoup exa{;éré, dans cette occasion,
les torts du {;énéral en chef de l'armée
deSambrc-et-Meusc (G). Un malheur
beaucoup plus grand , mais dont on
(6) Le maréchal Goutiod-Sj nt Cy-, qui. djn*
ses Memoirti, a cratarc arrc braacou|< il'aurr-
tunir W\ opératiuna As l'arme»? <!« Sdinbrr-<'t-
Meu«e àjtns cettr cainpaçn>* d'outre-Rbiu, criti-
que surtout |r^-»rT^r»iui lit Ij conduite -lu pc-
néral en chrf a l'occJkion «Je sa rflrjii»", et,
comine l'ava.! fait avant lui l'archidac Chai les.
1 lui reproclic «l'avoir abaodooavies é<{uipa(«s
n'aurait pu accuser personne, fut près
d'arriver à l'aile droite, qui dut se reti-
rer par le pont de Neunied. (Juand
le» Iftes de colonne se présentèrent
devant ce pont, elle^ le trou\ère!it
rompu par de« bateaux enilaiiiiné^ que
la diviMon de Marroau >enait de lancer
imprudemment sur le ileuve en le\ant le
blocus d'KliienhreitNlein. Il fallut toute
la pre enre d'esprit et le saii;; fiod de
kleber qui conduisait ces troupes, pour
les sdtistraire a nu aussi ^rand péril,
sans le leur faire contiaiire et surtout
avant que l'ennemi put s'en aperce-
voir. L'armée de Saml»re-et- Meuse fui
à peine arrivée sur la rive^auclie, qu'elle
se vit nhlii^ée de marcher au secours
de celle du lUiin qui venait d'être
forcée, par le même Clairfavt, dans
les li<;nes que, depuis près d'un an,
elle gardait devant .Ma>ence. Kn
moins d'un mois, le général autrichien
avait ainsi rots en fuite trois armées
françaises. Cette opération est sans
contiedit une des plus brillantes de
cette rpoque. .Mais si elle fit beaucoup
d'honneur à (.la!ifa>t, elle lui profita
peu ; et, comme il arrive trop sou-
vent dans les cours , l'envie qui le
poursuivit a\ec plus d'acharnement en
core aptes son triomp'.ie, l'ace ibla dans
le moment nit-nie où il entrait àN ienne,
au milieu des applautlivseinents de la
populace. Le prétexte de rette dis;;ràcc
fut un ai mi^tice qu'il venait de conclure
avec Jourdan sans v être autorisé.
'1 ; à quoi J.iurdan a ré]>oiida par
u i ip Ituu» avuus «ou» Irt yrui, et
« il jiro.ite aorx him «|uc l'un
J ' ••■•■•■ . I.'aulrur de c»lti' hoIkc.
I Ir r. i f^iii croit «ievoir rendre
• ^ 1 II "11. JfC d'autant plu* dicte do
foi qu li e«i cotapletrmrnt detinier»»»é. Il cora-
maiidail preiitriumi djn» cetir rrfaite la d-r-
nirre co i>pai;aip lie la »--' deini-hri^ade qui fit
l*W'>ére-garde d« l'annrv et qui »aue» par sa
Itonne rou enanre une parti*- de« équipages.
Qurlqurt unt furent en elle! alundoiilirs et •!•••
«inreut la pruie de l'enueini ; inji% il ne lui fut
pat lai>»e une »eule pine «le cinuri , el i'oii
ii'ciit pa» meioe be oui dVti fairt- traitirr, faute
de rbevaux, par les ioldals de cette demi bri-
gade, coranie le dit Jourdao dan* »« brocburt .
3 /
0^
JOU
Sans Joule qu'après des combats si
rapldci et si iniihipliés , les troupes
autrichiennes devaient avoir autant be-
soin de repos que les nôtres. Ce qu'il
y a de sur, c'est que pour Tarniée de
Sanibre-et-Meuse, ce repos était de la
plus urgente nécessité. Son chef en
profita pour lui faire prendre des quar-
tiers d'hiver dans un pays déjà ruiné
el fort malheureux, il est vrai, mais où
du moins il put s'occuper de rétablir
l'ordre et la discipline. C'était le temps
où une affreuse disette avait désole l'in-
térieur de la France , et se faisait
également sentir dans les armées
qui occupaient le territoire ennemi.
Vivant à discrétion chez les habitants,
soldats et officiers ne recevaient abso-
lument aucune solde. Le gouverne-
ment directorial, qui venait de s'établir,
sentit bien que les choses ne pouvaient
rester ainsi ; mais la difficulté de payer
tant de monde était insurmontable dans
la situation financière où se trouvait la
France. Les soldats avaient diminué de
moitié , mais en oHiciers les cadres
étaient encore les mêmes qu'à l'époque
de la grande réquisition et des quatorze
armées. Il fallut en i^iîpprimer une grande
partie et reunir deux bataillons en un
seul. On fit encore d'autres suppres-
sions dans les administrations , dans
les états-majors si inutilement accu-
mulés pour les levées de 1793 , et
il en résulta de grandes économies ;
mais les réformes d'officiers ne pou-
vant être faites que d'après l'ancien-
neté , elles atteifinirent les plus jeu-
nes , et par conséquent ceux qui of-
fi aient le plus d'e.'^péranccs. C'est
une perte que l'on regretia plus
tard; mais, à tout prendre, cette nou-
velle organisation fut utile, et elle était
devenue indispensable. L'armée que
commandait Jourdan resta cette année
(179G) plus long-temps que les autres
dans les positions où l'avait placée l'ar-
mistice; et, bien que cet armistice eût
JOU
déplu à la cour de Vienne, le Jeune
archiduc Charles, qui avait succédé i
ClairfaNt , ne le dénonça (]u'au mois
de mai, lor>(jue déjà s'étaient mises en
campagne les armées du Khin et
d'Italie , pressées qu'elles étaient de
trouver des pays neufs à dévaster ou
à manger , comme disait T-urenne
en pareille occasion. Il est évident
que le besoin de faire subsister les
armées, ou comme cela se «lisait
alors, de nourrir la guerre pur la
guerre^ fut à cette époque uw des prin-
cipaux obstacles à la paix. Bona-
parte , qui parut alors pour la pre-
mière fois sur la scène, le comprenait
fort bien, quand \\ dit à ses soldats
presque nus et mourant de faim, en
leur montrant, du haut des \lpes, les
fertiles vallées de la péninsule italien-
ne : « Ces contrées vous appartien-
« nent ; c'est là que vor.s trouverez
« tout ce dont vous a\ez besoin...»
Poussée par la même nécessité, l'armée
du Rhin , que commandait Moreau,
s'était déjà répandue dans la Franco-
nie et la Bavière, lorsque la fin de l'ar-
mistice fut dénoncée à Jourdan. Resté
dans les mêmes positions de la rive droite
et delà rive gauche du Rhin, ce général
tenait ses deux ailes à plus de vingt lieues
de distance l'une de l'autre; et elles
étaient séparées par un grand lleiiveet
un pavs couvert. On conçoit tous les
avantages d'une telle position pour les
Autrichiens, dont les connnunications,
par le point central de ALnence, étaient
aussi sûres que faciles. L'archiduc en
profita pour diriger subitement toutes
ses forces vers la Lahn, où il a«:cabla
le général Lefebvre (17 mai), qui
s'était avancé jusqu'à Wetzlar. il
eut ensuite quelques succès contre le
corps de Kléber, qui couvrait ])us-
seldorff; mais Jourdan avant fait
passer le reste de son armée sur la
rive droite, et se trouvant à la têle «le
forces supérieures , le contraignit de
JOl
%e r^fufjier ^tir le Mfin, fl Ir pownii-
«it jusqa'jiiK portes de !\ati^bonne ,
jprr* N'rlff emparr lie N\ urtibour;;,
de Bamberj; et dr qllelque^ autres for-
tere**e». Celte mar rlie a\ enlureuse était
enrore la conȎqiienrr de^ plans ima-
^tné^ par le* faiseurs de ce lemp«-U,
et surtout par Cjrnol qui, après a\oir
dirigé la guerre au comité de salut
public , la diri;;fait encore au Direc-
toire dont il faiNjit partie. On ^ait que
le plan favori de ce ^rand slrair|;i»ie
était de faire partir en mrme temps
deux années, dr points ricanes, pour
1rs réunir 5ur les lianes ou 1rs derrières
d'un riinrmi qui, se trouvant ainsi forcé
de concentrer se* forces, pou\ait atta-
quer séparément, et l'une après l'au-
tre, ces deux armres, comme il était
arrivé Tannée précédente. I. 'archiduc
Charles ne profita pas moins habile-
ment que ClairfaU d«* r.ivanta;;e éri-
denl que lui donnèrent ain^i les Fran-
çais. Apres a>oir arrablé Moreau sur
les bords »lu Danube, en l'attaquant
a\ec la plus niandr partie de ses fur-
ces, il donna le soin de le poursuivre
avec (]uelques divisions, au <;énéral 1^-
tojir, et se hâta de revenir au secours
de \\ arlensleben qu'il avait laissé en
présence de Jou.dan. Lorsqu'il eut
contraint de se retirer avec beaucoup
de perte la division Piemadolte qui
s*était fort aventurée à Nureniber;^ ,
il tomba sur le corps principal , qui
fut écrasé à llamber;; et à \N urli-
bonrg, puis forcé «le se retirer dans le
plus ;;rand désordre jusqu'au IVhin.
Dans son rapport au Directoire, le î;é-
9 ncral en chef déclara que, attaqué par
un ennemi dont les forces étaient as-
sez consrqurnirs (sic\ pour le couper
de ses communications, il avait tra-
versé à' horrible s drfdés , quil était
resté sept jours sans noticelles^ et
qu*il ne retournerait plus dans de
pareils pays sans un ordre formel...
C'était sans doute en l'absence de son
i.xvni.
JOU 3n".
chef-d'étal nujo» , Krnnuf, que Joiir-
dan avait rrnl lui-nirme , un lap
port, où 1rs fautfs Ar langue ne >onl
pas ce qui doit Ir plus rtunner. On ne
comprend pas que le Directoire Tait pu
blie dans son inlégri'é, %'il n*v fut pas
etcllé par les ennemis du f^énéral.
Ce qu'il V a de stlr, c'est que ce revers
porta un coup funeste à \\ réputation
de celui-ci : et que, persuadé lui-même
qu'il ne lui était plus possible de con-
server le commandement , il demanda
sa démission qu'on se liala de lai ac-
corder , et »e retira dans sa chne
Limo;;es , où il fut encore heureux
pendant plusieurs mois , au milieu
de sa famille et dans son ancienne
simplicité. Ce ^enre de vie conve-
nait mieux que 1rs •;randrur4 du ^i-
iiéralat à cet homme de sens et de
Î>eu de prétentions. Il reconnaissait
ui-mrme son insuffisance à la trte des
armées ; rt on l'a entendu phisieurs
fois dire naïvement qu'il eût mieux
aimé passer sa vie à poiter la balle.
Sa fortune était restée à peu près
la mrme ; et si des exactions, des désor-
dres avaient été commis dans ion ar-
mée, personne n'avait le droit ni la
pensée de les lui imputer. Au mois de
mars de l'année suivante ^1797), ses
compatriotes de la Haute-Vienne le
nommèrent député au conseil des Cinq-
Cents. Aucun antécédent bien caracté-
ristique ne le liait à l'un ou à l'autre
des partis qui div isaient alors la France;
seulement on se rappelait qu'à l'épo-
que du 13 vendémiaire, il avait écrit
au président dr la C/onvontion natio-
nale que ses mesures étaient prises
pour marcher à son secours, .i cria eût
été nécessaire ; mais on pouvait ne voir
iJans cette démarche que la manifesta-
tion obligée du général en chef; ainsi
il ne tenait qu'à lui, en sa nouvelle
qualité de législateur, de voter comme
il eut voulu et de s'asseoir où cela
pouvait lui convenir. S'il alla se placer
lo
366
JOU
ail côté gauche, ce fut surtout paire
qu'il vit au côté droit Pic!;c^rii ,
son rival de gloire et de coiiiman-
dement , celui que , sans beaucoup
de raisons, les comités de la Conven-
tion lui avaient souvent préféré. Les
journaux dirent même alors ou-
vertement qu'il s'était fait jacobin ,
parce que le vainqueur de la Hollande
était royaliste. Du reste, il ne se mon-
tra d'abord que rarement à la Iribune,
et il ne prononça dans les grandes oc-
casions que des discours écrits, et sans
doute convenus ou arrêtés d'avance
avec les meneurs du parti auquel il
s'était attaché. De ce nombre fut évi-
demment une longue et intolérante dia-
tribe qu'il prononça , dans une séance
du mois de juin, contre la religion ca-
tholique à laquelle la majorité voulait
alors rendre quelques uns des avanta-
ges que lui avait fait perdre la révolu-
tion, entre autres l'usage des cloches
et celui des églises non vendues com-
me bien nationaux. On se rappelle que
le député Camille Jordan parla avec
beaucoup de force en faveur de ce pro-
jet ( Voy. Jordan, dans ce vol.).
Le discours du général orateur ne fut
sans doute pas aussi éloquent; mais il
reçut les applaudissements du parti
révolutionnaire , qui censura avec
beaucoup d'amertume celui de son
adversaire. Jourjan concluait par de-
mander que l'on exigeât des ecclésias-
tiques une déclaration de soumission
aux lois de la républi(jue, ce qui ne
pouvait que donner lieu à de nouvelles
persécutions ; mais cette proposition fut
rejetée. DanslesdilTérenlcs motion ; que
le député de la Haute-Vienne lit à la
même époque sur l'organisation de la
garde du corps législatif, en faveur des
officiers réformés que l'on voulait ex-
clure de Paris, et de quelques fournis-
seurs ou administrateurs des armées,
que l'on accusait de concussions , il se
montra plus sage et plus modéré ,
JOU
bien que toujours fort zélé pour la
cause de la révolution. Ce zèle éclata
surtout dans le discours emphatique
qu'il prononça pour la commémora-
tion du iO août 1792 , et à la suite
duquel il fit décider, par la majorité
d'une assemblée qui, un mois plus tard,
devait être décimée et dissoute comme
royaliste, que l'anniversaire du renver-
sement de la monarchie serait un jour
de fête pour la France ! On pense bien
que le général Jourd.m ne fut pas
étranger à cette révolution du 18 fruc-
tidor, qui rendit au parti révolution-
naire son iniluence et son pouvoir. Le
lendemain, il demanda par un long dis-
cours, dont le conseil ordonna l'im-
pression , qu'on rédigeât une adresse
au peuple français et aux armées, dans
laquelle on établirait qu'il n'était pas
vrai, comme le préiemlaicnl les en-
nemis de la république, que la li-
berté eut été opprimée et la consti-
tution violée. Et quand il s'agit de
prononcer le serment de haine à la
royauté qui, d'après une nouvelle loi,
dut être prêté par les députés du nou-
veau tiers , il s'écria : Je le jure sur
mon sabre. Depuis ce moment, Jour-
da'.i , que ses défaites et sa démission
avaient éloigné du Directoire, rentra
dans sa laveur, et il ne parla plus que dans
les intérêts de ce gouvernement et dans
ceux des soldats, surtout ceux de sa
chère armée deSarnbre-et-Meuse, qu'il
appela toujours res frères et ses en-
fant.s. Animé d'aussi beaux sentiments,
il prenait toul-à-fait au sérieux le fa-
meux milliard promis aux défenseurs
(ic la patrie, et il fil décréter un jour
que ce! te promesse, faite solennellement
par la Convention nationale, ne pou-
vant être acquittée en terres aux ter-
mes du décret , serait payée e:i
une rente viagère à la paix générale.
Comme cette paix générale n'est ja-
mais venue , on sait ce au'il est arrivé
de cette promesse,. sur laquelle, d'ail-
JOU
JOU
107
leurs, Mt loldaU n*onl jamaU l>«aurnu|
roraplé(7). i'.c ftil avec la mèmf can-
deur el la mcnie comiclion t^u'il prè-
seata un {>cu plus l.ird rrtte terrible
loi de la cunsrnption, qui devait ron-
trasiidre pour loujour* ati »er»ice mili-
taire ruiiiTer>alilc des citoyen* fran-
çais; et il ne ciai-nil pas d'affirmer
que ce code de servitude, le plus dur
qui ait jamais nesé sur l'e.ji^re hu-
maine, qui a urvoré en ; "m
derai-siéde plus de dix ni! 1-
nies , serait un bir
maiiité ; nue cVlait 1
de la re\ol<ituin, dr la iiljcrir . ht loiil
cria. ^11 \ri t !i, n..^ de rrjaq'ie, fut
,ues et rtdicules
• ' ' la tyrannie, que
Jourdan l)>ait de très-bonne foi, que
certainement il n*a\ait pa<t rorapo-
sée» , et dont il n'est pas Lien sur
qu'il comprit toute la portée. Il
avait alors dépassé de braiirnup la
limite des opinions que l'on ap-
F>elait constitutioiinellrs; et lorsqu'à
a fin de l'année IT'JH le Diri,-
toire s'efforra d'inlhipiicer b'< élec-
tions , pour en exclure les dcmaj^n-
t;ues que l'on appelait dr< anarchis-
tes , le député de la llatile Vienne
l'accusa hautement de vouloir faire an-
nuler, sous prétexte d'une conspira-
tion dont il ne donnait pas la preuve,
de très-bons choix , faits très-lé-ale-
raent et très ré^ulièrcnunt. Mais tous
ses efforts furent inutiles , et il ne
réussit pas même à faire valider les
élections de son département , qui
avaient clé annulées sous le même
I préle«le hans plusieurs autres orca-
glrrÏM d« \» revoUii.uo, »Vcii<>rt.'ia pUiv^iu-
u>«M : « Voi.à eofi'i Ifs oxpriil! ilc lerfe «jui noui
»om promis. »
t ' «iju lie montra pas moins
«11- - '«-nt à attaquer le Direc-
toire ; et il est a**r.' pt^ibable que ce
fui autant pour se déliai ra^ser d'une
opposition importune, que pour met-
tre i profit son expérience et sa répu-
tation, que ce faible (;ouvernrmont le
nomma alors général en rhef de l'ar-
mée d'i Danube, (tétait au moment où
l'on ro;.,it «^r fori ' . Mide coali-
tion contre la I us les pre-
en l^^ypie. 1 ♦•, cl
Moreau, Imn , 'i'-dis-
price , à cause de ses liaisons a^er
Piche«ru , n'était plus emplové que
dans les insignifiantes fonclirns d'in-
specteur. Knljn, la république, qui al-
lait a«oir à combattre TKurope pres-
que tout entière , ne pouvait lui op-
poser un péfirral de réputation , ni
mettre en - de deux
cent mille I r< ^ur une
I ' lo fond delà
! Mil 'au Aiivder-
/ .fourd m de
1.1 ' pour ar-
fpptcr le commandement d.ins de pa-
reilles circonstances. Il quitta repen-
dant sans hésiter le fauteuil de la pré-
sidence, qui venait de lui être donné
pour la seconde fois ; envo\a par écrit
^a démission à l'assemblée, et après
un banquet patriotique où il reçut les
adieux de ses amis, au nombre des-
quels se trourait Lucien lînnaparte,
<|ui y fit un pompeux elo^e du vain-
queur de Fleonis, il partit pour les
bords du Rf:in. F.ncnre nnc fois il
tHii\a de\ant loi l'arrliidnc ('Jiarles ,
à la Itte d'une armée que l'on por-
tait à soixante mille hommes. Lni-
méme en a^art à peine quarante mille ;
et cependant, il fallait qu'il prît l'i-
nitiative , afin de prévenir la jonc-
tion des Russes que l'on annonraîl
ao,
3o8
JOU
JOU
comme très-procbaliie. S'étanl mis en
luouvement dans les premiers jours
(ie mars , il n'eut de rencontre sé-
rieuse que vers la fin de ce mois, au
villat!;e d'Ostrach où il éprouva un
premier échec , puis à Stockach où ,
assailli par des forces beaucoup plus
nombreuses que les siennes, et mal
secondé par ses lieutenants , notam-
ment par le «énéral de la cavalerie,
d'Hautpoul , il se mit lui-même à la
léte des troupes, et commanda plu-
sieurs charges dans lesquelles il dé-
plova un très-grand courao;e. Mais ces
efforts furent inutiles ; il fallut céder à
la supériorité du nombre, et faire re-
traite sur le Rhin. Ijien qu'à cette ba-
taille de Stockach la victoire eût été
long-temps disputée, que la perte des
deux armées fût à peu près éf^ale, et que
Jourdan s'v fut montré fort brave, elle
porta un coup funeste à sa réputation,
«léjà fort compromise par les retraites
de 1795 et 1798. Les journaux qui,
dans ce temps-là, jouissaient d'une en-
tière liberté , le décrièrent, le persi-
ilèrent à qui mieux mieux. On alla
jusqu'à le mettre en caricature; et quel-
(jues habitants de la capitale se sou-
viennent encore del'avoir vu représenté
à cheval sur un écrevisse, avec cette
inscription tirée des psaumes : VIdit
et fugit ; Jordanis corwersus est re-
frursurn. On conçoit tout le clia^^rin
(ju'il en eut. 11 tomba malade et fut
()bri;;éd'aller se rétablir dans sa famille.
Mais, bientôt réélu député au conscd
des Cinq-Cents, il revint à Paris, et y
fit paraître une brochure pour se dis-
culper sur la bataille deStockach, dont
il rejeta tous les torts sur d'Hautpoul,
qui ne lui avait point obéi , et sur le
Directoire, qui ne lui avait pas donné
assez de troupes. Il se lia alors de
plus en plus avec l'opposition déma-
</oc;ique , et parut comme l'un des
principaux meneurs à la société du
manège et à toutes les r»'unio?is de ce
parti. Dans une de ces réunions qui
fut consacrée à un banquet patrio-
tique il porta le toast suivant :
A lu résurrection des piques ;
puissent-elles dans les mains du
peuple écraser tous ses ennemis !
Jl manifesta encore, en plusieurs oc-
casions , à la tribune législative, des
opinions non moins énergiques, no-
tamment dans les discussions sur
l'emprunt forcé , sur la garde natio-
li.-le, sur la proposition de supprimer
du serment des fonctionnaires les mots
de haine à VanarcJiie^ et enfin dans
le long discours qu'il prononça pour
faire déclarer la patrie en danger. On
se rappelle que cette proposition fut
rejetée par la majorité, après trois jours
d'une discussion très-orageuse, et dans
laquelle Jourdan se montra l'un des
orateurs les plus acharnés. Et cet achar-
nement redoubla encore quand il vit
que son projet allait être définitive-
ment repoussé. Ce fut alors que, crai-
gnant ou feignant de craindre un coup
d'état de la part du Directoire, il s'é-
tria du ton le plus pathétique : « Ju-
« rons qu'on ne nous enlèvera de nos
« chaises curules qu'après nous avoir
«t donné la mort... Représentants du
« peuple, dans une telle crise que rien
« ne vous effraie... La liberté ou la
« mort...» C'était le 28 fructidor an
Vil de larépubl-que (sept. 1799),
cinquante jours avant le 18 brumaire,
que Jourdan pai lait ainsi à la tribune
du conseil des Cinq-Cents. Tous ses
collègues jurèrent comme lui de mou-
rir sur leurs chaises curules, et l'on se
rappoJle qu'Augereau , dans son gros-
sier langage, fit ce serment d'une ma-
nière eucore plus burlesque. Cepen-
dant nous n'avons pas ouï dire qu'Au-
gereau, ni Jourdan, ni un seul de leurs
collègues, soit mort sur sa chaise curiile,
à la fameuse séance de Saint-Cloud ,
où Ronaparte entra dans leur salle
pour les en expulser.... Après cette
JOl
)(iuriire rarinuruble , ruiiiiue Juuriijii
tétait montre l'un (lr^ |>liu arJrntN,
sinon à coml)Jtlrr, du moins à préve-
nir le fntij» il'fUl qui rlian^^ra Icn tlfs-
linérs de l.i Kranre , le nnuxeau coiisul
riii5cn\il, le lendemain de >on triom-
phe, sar une liste de pro^iiption ;
mats on sait c]ue relie sentence ne fut
que comminatoire. Condamne ensuite
à se rendre en surveillance dans le
département de la (Jiarente , il ne
quitta pas mi-nie Paris, et fut auto-
rise i se I étirer dans une maison de
ram|ia;;ne, a dix lieiirs de cette \ille.
l*ujs il rentra complrtem.^nl en ç,i^cc,
et fut nomme , liuit mots plu<i tard
['2i juillet IHOO , raiiiistie extraordi-
naire de la république française en
I*iéniont ; faveur dont il remercia le
premier consul par une lettre trcs-
liumble et trcs re.spectueuse. SVtant
aussitôt rendu à Turin, il s'v acquitta
de ses importantes fonctions avec lele
et probité, et reçut le titre J'admini-
strateur-nénéral. Ce fut en celte qua-
lité que, pour préparer la réunion à la
France , il organisa ce pavs en dé-
partements , et V fit régner l'ordre
et la justice dans toutes le» parties de
l'administration. I..e5 i'iémontais de
tous les ran^s et de tous le> partis lui
ont rendu ce temoij^iia^e ; et, quinte
ans plus tard, lorsqu'il tut remonté sur
son trdne, le roi Charles- Kmnianuel le
remercia d'une conduite ausM hono-
rable,en lui envovan*. .«^on portrait en-
nclii de diam.iiit5 , a\ec une lettre
très-llatleu<^e. Mais rexrellcnlc admi-
nistration du ;;éncral .lourdan, en Pit*-
mont, ne put le raettie à l'abri des
intn;;ues et des vicii^itudes qui agi-
taient la nouvelle cour des Tuileries,
et surtout des prcvenlious du premier
consul, qui avait toujours eu pour lui
un secret eloi^nemenl. Il le remplara
par le j;énérnl Menou , liomme dur et
cupide, qui le fit bientôt vivement rc-
f^reticr par les Piémontais^. Revenu en
lot
3o<)
t'ijiKi', Jourduii V leçul le titie de
conseiller d'état, et un peu plus tard,
il eut pendant quelques mois le com-
mandement de l'année d'Italie. Mais
Bonaparte, vovant la ^ueirejirès dere-
commenrer, et n'avant point lieconfian
cedans l'ancien romniandant (lel'armée
de Sarobre el-Meuse, le remplaça par
MxMena. Jourdan passa alors plusieurs
années sans être emplove. Cependant, à
la création de l'emplie, en IKOV. Napo
léon le fit m.trécliaict ^rand-ofiicierde
la I.é^ion-d'Ilonneur. rommetousreux
qui a\a;ent commande en chef. S'il ne
le créa pas comte «>u duc, c'est pro-
bablement parce qu'il craignit d'elle
refusé Cjc fut en vain que le coile-r
électoral de la Haute-Vienne le pu
senta ensuite à pliisieuis repri>es com-
me candidat au sénat conscnaleur ;
llouaparle le repouvsa toujours à cause
de ses anciennes opinions , et sans
doute aussi parce qu'il ne voulait
pas établir, dans le sén.nt, un cen-
tre d'oppo>ilion qui aurait pu deve-
nir redoutable. Ixs frères de Napo-
léon , moins scrupuleux ou crnvant
avoir moins de rai>ons de rranidie,
n'oublièrent pas bs rapports qu'il>
avaient eus avec .lourdan, lor.squ'iU
étaient ses collègues au conseil des
Gnq-Cents. Joseph, devenu roi de
Naples, en IHOG. remmena dans son
rovaume ou il le fit t^rand dignitaire
de l'ordre des Deux-Siciles , f^ouvcr-
neur de sa capitale , etc. Il recul
aussi dans ce temps-là les décorations
de l'uidre de Saint-Hubert de Ba-
vière, et l'on vit le vieux républicain
s'arran<ier à merveille de tous ces hon-
neurs. Il passa trois ans à Naples
dans cette brillante position , et quanti
Joseph dut chaii'^er de couronne, et
^u'il se rendit en Kspaj;ne (;1808) ,
Jourdan l'v suivit encore en qualité
demajor-cncral. Celait de. fonctions
asscr difficiles ; car, pour ce nouveau
roi , il ne s'a{;issail de rien moins
3io
JOU
que (le conquérir un royaume contre
le vœu de la populalion tout cntièie.
On sait comment Joseph Lonapai te,
après être entré si péniblement dans
Madrid, en fut expulsé, puis y rentra
pour en être expulsé une seconde fois.
Jourdan l'accompagna , ri fut son
conseil dans toutes ces vicissitudes.
Comme, dans tant de revers et de dé-
sastres qui survi;irent on eut besoin
d'une espèce de bouc énnssairc au-
quel on put imputer tous les torts ,
sur lequel on put rejeter toutes les
fautes, Jourdan parut fort propre à
jouer un aussi triste rôle ; et bientck il
lut acciisé de tous les revers, de tous
les malheurs que les Français éprou-
vèrent dans ce pays, malheurs , qui,
certes, on le sait assez maintenant ,
avaient une origine bien autre que
Tinsuffisance du maréchal. Abreuvé
ainsi de toutes sortes de dés^oûts cl de
tracasseries, il demanda sa déiiiission
qiu lui fut accordée, et il revint en-
core une fois à Limoges, où il revit,
avec la même joie, le toit paternel et
sa modeste épouse. Ce ne fut que deux
ans plus lard qu'il retourna en Es-
pagne, lorsque le «jouvernement impé-
rial, réduit à ladernlcie extrémité, et
manquant à la fois de généraux et de
soldats, fut contraint de recourir aux
hommes qu'il avait autrefois traités
avec tant de rigueur et d'injustice.
Jourdan n'arriva guère à Madrid, en
18l.'i, que pour assister aux der-
niers moments de cette rovauté expi-
rante. Obligé encore une fois de quit-
ter sa capitale, et sachant bien qu'il
n'y rc^iendrait plus, le frère de Na-
poléon voulut emmener avec lui tout
ce qui était Iransportable. Le ba-
f'àf^t et rartillerle formaient ainsi un
convoi immense, et dont I escorte était
aussi insuffisante que mal dirigée.
Jourdan ne put faire admettre aucun
de ses avis, et même on repoussa avec
une sorte de mépris des pressenti-
JOU
ments trop fondés qu'il avait mani-
festés quelques jours auparavant. Dès
les prcîniers pas de cette déplorable
retraite, l'armée anglo-espagnole, que
commandait Wellington, pressa très-
vivement les Français, dont la marche
ne pouvait être que fort lente et fort
pénlb'e, chargés comme ils l'étaient de
toutes sortes de bagages. Le général
anglais les atteignit à Vitloria,et il les
attaqua avant même qu'ils eussent pu
se former. Le revers qu'ils éprouvè-
rent dans celte journée du 21 juin
1 S 1 3 est un des p!us funestes qu'aient
essuyés nos armes. Cent cinquante piè-
ces de canon avec un grand nombre
de prisonniers, tout le bagage et tou-
tes les dépouilles, tous les débris de la
royauté déchue, tombèrent au pouvoir
de l'ennemi. Jourdan y perdit même
son bâton de maréchal, que l'infanterie
anglaise prit dans un fourgon de vi-
vres : ce qui l'^ournit aux journaux de
Londres un sujet de plaisanteries plus
grossières que spirituelles. Un fait
plus fâcheux pour Jourdan, c'est que
ceux qui avaient réellement causé ce dé-
sastre par leur impéritie firent, comme
toujours, ce qu'ils purent pour lui en
imputer toutes les conséquences. En-
core une fois on accusa de toutes les
fautes celui qui n'avait eu aucun pou-
voir de les empêcher, qui n'avait pas
donné un seid ordre , m mT'me pu
faire prévaloir un seul de ses avis. Ce-
pendant il ne fut pas entièrement re-
mercié. On l'envoya en Norman-
die , où il était gouverneur de la
15* division militaire, lorsque la mo-
narchie napoléonienne tomba en avril
1814. Ainsi que tous les généraux
mécontents deiJonaparte, Jourdan ne
se montra pas fort altligé de sa chute,
l'révcnu, des le 2 avril, par des agents
rovalistes, qui s'étaient rendus à Rouen,
il les accueillit assez bien, et le lende-
main, il envoya son adhésion au gou-
vernement provisoire. Le 8, il adressa
JOl'
JOU
3ii
iux troupes dt son commanileuient un
orJr« (lu jour trriniiic |)ji cc^ rourte^
ftexpre^nrs |)ji()lfs : m . . . Juroit^
w ol>*''<53nrp ri fulrlilé à T.f»'i;^-Sl.i
•« I '' r, cl ai!
« À un e%riirmenl i|iii airclr rctiti^iort
M du &an^, nous donne la imia rt »jii-
« ve notre pallie. m I/>uis XVIII
Buiitra r- ^".inl d'une au- .
prompir , en continuant le
nuréci.jl ti.iri. s n pm\ernrmeiit cl
en lui donnant le titre de pair de
IVanre. V ' 1 Ir Gl conjlr, far
Jourdaii . . oblnui de Tcm-
pire une d43i.iiii,oii à tant
d'aulrc t;- i :^r \r -. ; rt !c
\ieii
la vanité fcktdaie. Mais au retour d«
Pile dTIbe, eu 1^15, le maréchal,
qiiid'al>oid s'cUit retire 2i la campa -
f;ne, reparut au champ de mai, où il
oiïritsessenice&àNapdIcon. C^lui-ci le
nom; ' .ichainlired.-^ p.iiri
et r< lier la G*" ir.»l>ion
milita;: c a Ijc -ui,uii. lUoqiié bientôt
dans celte place par rarméi* autri-
chienne, et 5omioé par des parti > iu>a-
listes d'en ou\rT lr$ porte- :n dia-
peau blanc, il ^ celte
circonsiancr d I 'lepru-
dence et de modération ; et celte fois
encore, il fui un des premiers che£»
de l'armée à reconnaître Ta-itorilé
ro)aIe. Le roi le nomma, le 10 jan-
vier suixant, gouverneur de la T*" di>i-
sion à Gienoble ; mais le lilic de pair
ne lui fut rendu qu'en ISID. Chargé
au coinmencemeiil de 181 G de prési-
der le co'iscil de guerre qui de\ait ju-
ger Ne)-, il n'eul pas, ain;i que ses
toIlej;ucs, asseï de courage ou lie pré-
vo\.ince, pour se déclarer coiupéJent,
et sau\er le maréchal en prononçant
un arrêt d'acquiltemenl, sur lequel il
eût été impossible de revenir. Jourdan
traversa ensuile , d'une oianiére assez
paisible, lei quatorie années de la res-
tauration. (!e|)eiidant on ne peut pas
douter qu'il n'ait \u a\ec plaisir la ré-
voltitioit de IKÎO On lui contia aus-
lille des alTaires
irJa que peu de
jours, a>ai: >* a (1e% fonctions
«iii Iiii coi. 1 Muriiup mieux ,
de j;ou\erneur de rh<\tel des In-
4>,ei' t -••••'! ><-f tuent du ^énéial
de I^lour I^ il trou\a en-
core des nj'Mii. -rti\ , et put
s*entreteriir q' i\ef de ce>
s' ■' ••i!)re ef
ler. II
lUii ..((.; le et fut
k , UU Mllll <!
I iirenne , de V.n
et ceux de Napol^n. I^ maréchal
Jourdan a pi.hlié : î. Ofx'ratiun.s Je
r année du Danube sous les ordres
<' •' I '■•■^■;n; extrait des
. s de ce gMrrul,
l , I < .• », m rv , a>ec faite. 11.
Mrinuires pour ser^'ir <> Chistoirr
sur !a canifHJgne df ITDG, tunte-
nunt les opérations de Farnirc de
Sand>re-rl-Mrtise, l*.iris, IHIO, pu-
blia, sou>lc \o:iedr l'anonuiie, en ré-
ponse à tj ert ions des Mê'
moires st:. , de fan hitluc
(Ihartes^ \o\. in-îS". Il a lai<i^^é des
Mémoires manuscrits dont on annonce
la publication comiuc prochaine. — Sa
veuve e>l morte à LimOj;es l'année der-
nière,à l*a;,e de quatre-Mnf;l IroiN an>.
M— Dj.
.lOrUDAV (Athanask JiAN-
I.K(iKU) , juri.^consuUe fiançais , né le
21) juin 1701, à Saiiil-Aubin-des-
Cliamps (Nunre), ne >iiit à Taris
qu'après avoir fini ses études, en pro-
vince, aux écoles centrales ; mais il y
sui\il les cours de droit avec plus
3'a->.iiduilé que n'en inonUeiil les élè-
ves ordinaires, et non content d'a-
voir reçu les deux degré» indispensa-
3l2
JOU
blés et le titre d'avocat, il prétendit
AU doctorat et l'obtint (30 août 1813).
On sait que ce j^rade, qui semble su-
perflu aux praticiens, n'est ambitionné
le plus souvent que par ceux qui as-
pirent à une chaire de faculté. Tel
*»tait effectivement le vœu de Jourdan :
il ne parut que rarement au barreau, il
ne chercha que mollement à se créer
une clientèle. Il n'était cependant pas
destiné à professer en public : il ne
donna jamais de leçons qu^à l'auditoire
bénévole qu'il rassemblait dans son
cabinet. Voulant s'initier à la marche,
à la stratégie du concours, il suivit les
examens, puis il s'exagéra les diflicul-
tés, puis il préluda en quelque sorte
aux travaux de la lutte prochaine eu
traçant le tableau de celle qu'il avait
vue ; mais, quand on prélude ainsi ,
souvent il arrive qu'on prélude toute sa
vie ; de nouveaux travaux surviennent,
l'attention s'éparpille, les grands plans
s'ajournent. Xul doule pourtant que
Jourdan, place dai.s une chaire, n'eut
donnéà l'enseignement du droit un essor
utile et vifen mfime1em()s. La science,
à l'époque où il étudiait et sortait des
bancs , subissait en Allemagne une
transformation préparée par les tra-
vaux de législation de la France, de
rilalie , de l'Angleterre , mais peu
connue et mal jugée en France où le
commentaire et la routine avaient re-
pris leurs droits. Pour sortir de cette
ornière, il fallait démontrer à l'insou-
ciance française que tout n'était pas
dit en législation et que nos voisins
avaient leur tour, .louidan fut un des
premiers à proclamer celte vérité.
Proûtant de la lacilifé (pi'ofTiait la
paix européenne, pour communiquer
de peuple à peuple, il entia en com-
munication avec les Gœsche^, les Nie-
buhr , les Clossius, les Ilaubold, Ns
Mai; suivit de l'œil Ics.iccherches de
ces heureux érudits, et tantôt repro-
duisit en France plusieurs de leurs
JOU
travaux, tantôt les fit connaître, soit à
l'aide de conversations, de conféren-
ces qui avaient de l'écho, soit par l'in-
lerniédiaire du journal la Tlœrnis ,
qui devint rapidement un magasin
précieux de notices et d'analyses rela-
tives à toutes les branches de la
science du droit. Cette consciencieuse
revue de tout ce qui se faisait en juris-
prudence, tant à l'étranger que chez
nous , ranima au sein des écoles de
droit, en France, le goût des fortes
éludes et y créa un nouvel esprit. On
revint avec ardeur aux antiquités du
droit romain, aux sources, aux textes,
liien que secondant cet élan et ad-
mirant les trouvailles de Niebulir, les
lésurrections opérées par Mai, Jour-
dan n'était pas tellement épris de
l'antique qu'il ne comprît pas que la
France, qui marche à la tète et ne se
traîne point à la remorque de la civi-
lisation, doit au monde quelque chose
de plus que la découverte d'un vieux
texte cl la lecture d'un palimpseste. 11
suivait, avec la plus grande attention,
les progrès de la science législative, et
surtout le système de codification tel
qu'il se développe depuis une trentaine
d'années dans plusieurs états de l'Eu-
rope et du Nouveau-Monde; il appar-
tenait à l'école qui veut que le législa-
teur comme l'économiste s'éclaire des
lumières de la philosophie; et, comme
base de toute justice, il adoptait les
principes larges et généreux qu'a lor-
mulés le dix-luiitième siècle et que
doit développer le dix-neuvième, en en
prévenant les périls par de sages res-
trictions el en ne se méprenant point
sur leur véritable sens. Le garde-dcs-
sceaux, de Serre, lui donna mission d'al-
ler étudier en Angleterre l'organisation
des justices de paix : Jourdan en pro-
fila pour acquérir des notions approfon-
dies sur toutes les branches des
institutions politiques et judiciaiics de
la (jiandc-Bretagne, et pour se lier
afcc Blwieurs juriicou>uilck tenuin-
Oléft dt ce pa>». 11 fut auMi dési-
gne merolirc dr la cominii»ion cli4r;;re
d'uu pru|rl d'ur^JiniMliun iiuliciauc
pour \ti rolonir», et &c fil rriiurqiier,
dans le* >c4i)ce>, par se^ offorl.s pour
raNcr delà loi Ionien fts eiilra\e> par
leM|uellc-« les coloineN el la métro-
pole se ^riieiit muliicllement sur Ir
terrain «le la loi rointur mit celui de la
production el du rouiinerce, et poui
elriidre aux Kraiiçats de no^ po^vr>-
»ioiis inarilimrs les garantir» dont
joiii^^^ent Ir-. Krançai* en France. i]e%
eflort» ne |K)uvaient triompher : tout
»e lient dans le 5\)teme colonial ; les
e&i»ciircs des colons qui veulent bien
qu'on leur accorde beaucoup, nuis qui
n'aci'ordrnt eux que |»cu de clio>e ou
lien , ajournent encore poui long-
temps \e^ amrlioialions ;;i?nrralrs et
graves. Jourdan au ie>le ne connais-
sait qu'imparfaitement . et par des li-
vre>, ce qui se pavsc aux colonies, ce
qui rvplujue cl amené pre>quc né-
ces-vatieinenl les abeiralion» f)uc la
France reproche au sv>lemc colonial,
et pour bien ju^er pouilanl il fjut
avoir vu. 11 ie sentait, et s'il eût. vécu,
s'il eut pu se fa<re donner une mission
en ce sens (>ar le ;;ouvrinemeiit, il eût
de (;rand cœur entrepris un vo>a^e à
nos pONsesston^d'oiitre-mer. Kn atten-
dant, le ministre dr la marine l'envoNa,
en t8*2'>, en An<;letenc, ou il s'initia
aux piiiicipes, tels tju'iU ^ollt. de la Ir-
<;i»lalu)n coloniale. Il > recueillit d'am-
ples matériaux sur >oii sujet; car, ni
lali;;iie ni tra\aii ne lui coûtaient
lorsqu'il s'a;;issail de l'objet de sa
mission ; mais sa santé ni souf-
frit. Maladif déjà depuLs plu:>ieurs
années , il aurait dû fuir le ciel
brumeux de la Grande-Urcla;;ne :
bientôt il sentit son mal ) doubler
d'intensité, puis une (îèvrc ardente le
saisit; il reprit à la liàte le chemin de
la France, mais à peine put-il ^.i^ner
JOU
3i3
Deal, pir. de Douvres, où l'arrueillit
rhosjMijl.lr ;;eneieuNe du p3>leiii du
lieu, l ne coll4e^llon cerebiale l'em-
porta rapideutriii , et se» paieuls, trop
tard avertis, ne drbarqueient a i)ou-
vres que quelque^ lieuies après »on
dernier soupii , le 27 août 18'JG. l.c
seul nu\i ' r romplr'rinrnl d' \. .I.-L.
Jourdan e^l la liriaiiun tlu iuiiiuur.9
i*Ui>rri u lu fui uiie lie lirait t/r i*urix
fMJur iti I httirr de droit romniii
(l'aiis, IMG. '1 vol. lu-H), que noii>
avons ineiitioonee plus haut comme
annonce el cuiiime pirpaialii d'une
candidatuir qui n rut p-)tiit lieu, ^>all>
être inutile au|ouid'liui , il serait nu
|>eu suraune. On pe saurait en dire
autant des arlirles qu'il a fournie a la
J'firmis, et dont beaucoup .sont foi l ic-
marquabU», bien que cullaboialcur as-
sidu de ce reiueil tt n'ait pu se mtin-
trer parloiit l'r^al dr lui memr, et qu'il
ail parfois laissé courir un peu la-
pidemenl sa plume, (^s ai licier», lela-
tifs les uns aux piincipe>, les anii- i
l'histoire, quelques-uns a la biblic. i
phie de la science du dioil, mcnlc-
laient d'être ieimiMimé> .» part. De
plus, Jourdan, tr<»-pcude lemp^ apus
ladecouxettedeGaVuspar Nicbutir, dr-
couxei te qu'il fut unde> premier» a pio-
damei dan> Ai J hriiiis^ donna, coii-
joinlemeut a\ec Ulondeauet Ducau; io> ,
le Juris cn'Uis etiugti, volume qui
contient, a l'usage des ele\csde «Iroil,
les InstiluU'i deCtaïus celles de Ju->li-
nien, les Srnleiufs île Paul, les Fntg-
nu'iiis d'I l[»ien. Seul, il publia une
réimpression de.-i Fragmenta juris
romani ViUicaiia qui u-produil b^ne
pour li^ne l'édition «le lîume, doui.fc
oar Mai , sur des paliinpsesles de la bi-
miutheque du Vatican. Ce^ fragments
ne contiennent que des textes .^"'^.~
rieuis a Juslinien. hnfin on lui doit
une édition des Taùulœ rliruiiulugi-
<a de liaubold, un des plus utiie.s ou-
viu c.> de tc savant. 1'— <JT.
^i4
JOU
JOURDE (Gilbert-Amacle) ,
conseiller à la cour de cassation, na-
quit à Rioni en Auvergne, le 17 fé-
vrier 1757, d'une famille honorable
et qui exerçait dans cette \ ll'e des fonc-
tions municipales. Après "avoir reçu sa.
première éducation dans la maison pa-
ternelle, il fut envoyé à Clermont-Fer-
rand, nuls à Paris pour v éludicr le
droit , et prit le ^raile de docteur en
1788. A rao;e de vino;'-quatic ans,
ayant terminé son star!,e, il obtint ie
titre d'avocat au parlement , et retour-
na dans sa patrie, où il exerça près
de la sénéchaussée et du présidial , et
se fit remarquer par son savoir et son
élociition. Il embrassa la cause de la ré-
volution avec modération, et fut nom-
mé en 171)0 Tun des administrateurs
du district, puis substitut du procureur
syndic, et en 1791 accusateur public
prèsletrlbunalcriminel. DansTexercice
de ce ministère, Jourde se renferma
strictement dans le cercle de ses devoirs,
et se fit estimer pour son caractère con-
ciliant. Après le 9 thermidor , il fut
envoyé, par le département du Puy-
de-Dôme, comme député suppléant à
la Convention nationale, et passa, en
1795, au conseil des Cinq-Cents où,
pendant quatre ai!s, il prit une part
très-active à tous les travaux léj^islatifs.
La ville de Kiom lui dut la conserva-
tion de son tribunal de commerce qui
avait été établi le 20 nov. 1790,
et même de sa cour d'appel, qui con-
tinua d'y sié{;er, bien que Clermont-
Ferrand fut le chef-lieu du départe-
ment. Sorti du conseil des Cinq-Cents
en 1798, il fut nommé le premier des
sept subsliluts du commissaire du o;ou-
vernement près le tribunal de cassa-
tion, et bientôt piomu aux fonctions
tle commissaire en chef à la place
d'Abrial , q«il fut envoyé à jNaphs,
pour y organiser le (;;o!ivpinernent et
la majMstrature; mission qui échoua à
cause de l'invasion de l'Italie par les
JOU
Austro-llusses, en 1799. Au retour
d'Abrial à Paris , Jourde se hâta
de donner, à l'insu de celui-ci , sa dé-
mission de commissaire en chef, et
il reprit sa première place de substi-
tut : exemple très-rare dans les annales
de la magistrature, et qui ne fut pas
oublié par le même Abrlal, devenu
ministre de la justice sous le consulat.
La bataille de Marenp;o ( 14 juin
1800), nyant reconquis à la France le
Piémont et la Lombardie, le premier
consul retourna à Paris le 2 juillet,
et il médita l'organisation des six dé-
parlements de VEridan, de la Stura,
de la Doirn, de la Sésia, de Murcn-
go et du Taiiaro. A la fin de cette
année, sur la proposition d'Abrial^ on
désigna le substitut Jourde pour or-
oaniser la magistrature dans la 27^ di-
vision militaire, sous la sanction du gé-
néral Jourdan [Voy. ce nom dans ce
vol.), nommé administrateur général à
Ttnin. Tout y était à faire. 11 s'agis-
sait de remplacer par un tribunal d'ap-
pel , un sénat et une chambre des
comptes, qui prononçaient des décisions
énigmatiques en langue latine; de
rempiîicer les juges-mages dans les pro-
vinces [)ar des tribunaux de première
instance ; de réformer les abus de la
procédure éternelle, et d'organiser les
justices de paix et le notariat. Jour-
de, appréciant les difficultés de cette
mission , se fit aider par son ami
Tixicr qui fut nommé procureur-
général du tribunal d'appel, et par
Carnier qui fut iînsuite procureur-gé-
néral du tribunal criminel à Turin.
Une nuée de jeunes avocats descendi-
rent les Alpes pour être placés. ]\lais
.louide , homme juste et incorrup-
tible , les renvoya, en leur disant
(pie son devoir était de rendre justice
à de vieux magistrats qui avaient
illustré le sénat et la chambre dos
comptes de Turin, comme aussi à de
jeunes docteurs dans les deux droits,
JOt
JOU
Juin..
f»éaéraui
jcoars ra.
. élaienl %o-
rlr< a\ocals
il, ton
pas en-
core été corruin|tus par la cliiranr du
barreau. A la tête du tribunal d'appel
fut place le ronite Ilottone de Ca«irlla-
muote [i'. IloTTONK, Ll\. T)?), l'une
des premières illustrations dr la cour àc
cassation ; et d ' n^iituts
furent appelé luinaiix
ciimineU. Nou>-uiu;ic, uuu> dûnien a
cet intèi^rr n-;an'*.î!P'!r la plare dr
commU^.
tiibunal I.
di-isemenls d A^tl et d'Acqui, >
cent \iii^t-cinq niillc anies dr ; , ^,^
tiim, établi a A»ti, clief-lieu du départe-
ment du 1 anaru,foorli(>ns auxquellcsil
nous Gt noiumer après avoir lu le livre
par nous ('ublie >ous le titre de t ormu-
irs drs actes nuliciaires pur-dr\Htnt
les trihunttux tit prrmirrr instttnrf
et (Cappel, Turin , 18t)l , in H". \jts
piemiers omia^e» que Jourde com-
posa à la l'ir-ne épo'i'ir fiirrt»! : I.
Instruci :ue
sur fat. lire
criminelie . rurrettiorineiJf et de
sitnpU fM}iire , imin, 1801, in-8',
ou>raj;c pratique très-utile. 11. liulU-
Uns de l'udminîstratwn tit Piémont,
contenant les luis de f enregistre-
ment et de Curganisatiun judiciaire,
et 1rs luis relalices , in-S '. Celte
grande collection, qui fut portée ensuite
àplusde\in^t ▼oluinc>, roiiiicnt re tria-
ge detoisà partM de ITS'J, roiilnr dejujs
lon<;-temps a une roNi.nission a l'.iri».
Avaiildequittci le l'iciuoiil. Jourde sol-
licita en \i[n l'ordoinuiire pour la réu-
nion derepa> sala Iraiice.ariiid'a^urer
les nominations provisoire» et de don-
ner conGance à la mac^istrature, d'au-
tant plus que. à dater du:2l mars 1801 ,
la cession des états de Parme et de Plai-
sance aNail été sanctionnée, il ignorait
les secrets de la politique du prcniiei
coii.>ul , qui oK'naveait l'aaitié de
Paul 1"^, rmpeiriM de l(u<sie, pro-
tecteur de la maison de Savoie ,
alors continue m Sardat^ne, Après
la ttiort du czji , la politique au-
plaise avant j;a^ne Alexandre, cette
nouxelle roalition , ainsi que Teiitre-
vur de Mrmrl avec le roi de Prus*e,
décida Napoléon sur le soit du
Pirtnt)nt ; et il remit au minislio dr^
ûnaiirr*. ( Hidui, li* décrrt de »rii-
nion qii (ut sanctionne par \c •«•ii.it
foM^^, %.vfrur le 11 sept. 18<)*2. \
(*, Jourde avait termi-ié sa
> : le4 tribunaux du Piémont
I sur le même pied que ceux
'•ur de la France. Il fut
nomme commandant de la l>;;ion-
d'Iioniieur des laciration de cet or-
dre. Maintenu dans sa place de suUti-
tut de cassation, il en continua les
fonctions ; et, quand le nom de tribunal
fut cban^r en criiii de com , A passa,
par ordre d'anfimneté, premier ado-
rât ^i-neral piésde la cour supréiiie.
(/pst Jourde qui donna , d.'>ns l'af-
faire des agents de clian^e contn*
M. de Forliin J.in nn. Ir- mémora-
bles conr ! on mit
au ran;; < relies
qui se cuiilractent par )ett\ de bonrse,
conclusions qui furent adoptées dans
l'arrêt de la cour du 4 août \H-2Ï, qui
fixa la jurisprudenre sur la matière.
Nommé con>eiiler à la luemc cour, pat
ordonnance du 6 août suivant , son zèle
et son a^sidiiiié ne diminuèrent point ,
il appo:>a dans les deLbér .liions les
Itiminc; et l'expérience que lui aNaienl
acquises trente annérs «le serxires
d.iiis les fondions difliriles du minis-
tère public, et ses opinions furent
toujours respectées par ses rollci^iies.
Il mourut a Paiis, le 13 G'vrier 1N37,
laissant pour unique de'=cendant M.
Mai^ne-l-a;^raviète , son petit-fils ,
maître des requêtes flu conseil d'état.
G«-G— Y.
3i6
JOU
.101)
JOL'KDEUIL (Didier), l'un
des révolutionnaires les plus fougueux
de notre époque, se montra aux pre-
mières émeutes qui éclatèrent dans la
capitale, en 1789, sous la direction de
J)anton, et devint ensuite membre
du comité dit de salut pnhlic de la com-
mune de Paris, qui n'était guère alors
qu'un comité d'insurrection perma-
nent. C'est par ce comité que fut pré-
])arée la révolution du 10 août 179:2.
Jourdeud fut aussi un des principaux
directeurs des massacres de septembre ;
et il signa la fameuse circulaire qui fut
adressée à ce sujet par la commune de
Paris à toutes celles de France. 11
fut bientôt employé i)ar son ami Bou-
clioltc comme adjoint du ministre de
Ja guerre, et devint, en 1793, l'un des
jurés du tribunal révolutionnaire où il
concourut a la condamnation de la
reine Marie-Antoinette. Arrêté après
la chute de la Montagne , comme
partisan de Robespierre, il fut, après
la journée du 1*^' prairial (juin 1795),
envoyé par-devant le tribunal d'Eu-
re-et-Loir. Les événements du 13 ven-
démiaire an IV (5 oct. 1795) pré-
vinrent son jugement, et le firent am-
nistier ainsi que lîoucliotte. On le
comptait encore en 1799 parmi les
Jacobins de la capitale, et il fut un de
ceux que les consuls condamnèrent le
1 7 novembre à la déportation à Cayen-
ne, peine qui fut bientôt commuée eu
des ûiréls à garder dans leurs commu-
nes. Depuis ce temps 11 vécut miséra-
blement à Paris, et mourut dans les
premières années de ce siècle comme
la plupart de ses pareils, sans que l'on
s'en aperçût. M — DJ.
JOU iu;m Ac: Sauu - Méurd
( le chevalier V hanmjis de ) , né à
iiordeaux en 174.'), d'une ancienne
famille noble, originaire du Limou-
sin , seivll dans le régiment du
roi Infanterie, depuis 17()G jusqu'en
1790, époque de la dissolution de
ce corps. Il était alors capitaine com-
mandant et chevalier de Saint-Louis.
Le 31 août 1790 , quand l'insur-
rection éclata parmi les troupes de
la garnison de Nancy , il joua \\\\
rôle qui pensa lui devenir funeste.
Très-aimé des soldats, parce que , sans
partager leurs idées révolutionnaires,
il les avait toujours bien traités, ceux-
ci crurent n'avoir rien de mieux à faire,
pour assurer le succès de leur cause,
que de le nommi'r général de l'armée
insurgée qui marcha sur Lunéville.
Forcé d'accepter cette étrange mission,
Saint-Méard ne fit rien de ce que les
insurgés attendaient de lui, et sut se
ménager assez adroitement avec tous
les partis pour se donner le temps de
ineltre sa vie en siireté. Cette conduite
irrita les révoilés; ils crurent à la tra-
hison; et, trois jours après cette prise
d'armes, Salnt-Méard fut condamné à
mort par ceux-là mêmes qui l'avaient
nommé leur général. Fixé à Paris à la
suite de ces événements, 11 devint un
des principaux rédacteurs du Journal
de la ville et de la cour, connu sous
le nom de Fetil Gautier^ et qui jouis-
sait alors d'une grande vogue pour sa
gaité soutenue et presque toujours pi-
quante. Celte feuille, où la critique et
la satire s'exerçaient sans ménagement
contre les ridicules des meneurs révo-
lutionnaires , obtint le plus grand suc-
cès, mais fit en même temps à son
auteur de puissants ennemis. Doué d'un
enjouement intarissable et d'une grande
présence d'esprit, ces dons de la na-
ture l'ont sauvé plusieurs fois des cir-
constances péiilleuses dans lesquelles
il s'est trouvé souvent engagé pendant
les orages <le la révolution. On en voit
U preuve dans sa brochure intitulée:
Mon agonie de trente-liait heures^
ou Récit de ce (fui ni est arrivé, de
ce que j'ai vu et entendu pendant mu
détention dans la prison de l'ahhayc m
Saint-Germain, depuis lc22 août jus- m
JOU
</ii*i/M ♦ septemftre 1792. (londuii au
romil^ i\t va sM'tlon (la lUIif aubir ,
il fut intfrrofjr romiDf prr\rnu il'rlir
If rfciarlfiir li'un jouriuil tmti-ittnsti-
iu/iitnnri, tl tl'avoir (l^s liaisons a\rr
Durtnoiet l'rllin, r^lartntr i!ti journal
//■« , îrtrs tirs ofxUrrs. Sr* rcponsw
iraTaiit pa-i paiu !Witiifai*antes, trois
^cillais 1(1 iitrnt l'onlrp lir Ir rondiiire
à Vhôlrl liit faulMMtrg Suint-itrr-
main ; cV>t ain>i que le prrsulfnl Je
la sfftion a|>|»rlait retir prison dr l'Ab-
bave qui pru dr jnur^ aprr^ allait rire
ensanglantée par le plu^ r|>ou«anlabie
nuA&acre. Ijts journaux réuilulionnai-
res. en annonçant l'an e^talion de Saint-
Mcard, ajoulrient par Iruis propos
mensongers aux perds qui menaçaient
sa tète. Suivant eux, il était pioprielaire
de la terre que le fameux Montaigne
avait possédée près de liordeaux, et
jouissait, en outie, de plus de quarante
mille libres de renies. Or, la terre de
Monlai;;nr appartenait a la famille de
Sé«îur , et Sainl-Meard n'axait pas eu
la moitié de ce revenu, même avant les
décrets de la con>titunnte qui \rnaient
«le faire perdre aux nobles leuri renies
féodalei. Au surplus, il faut lire dans sa
brocliuie même la manière presque
miraculeuse dont il é\ita, lors des mas-
sacres des 2 ï t !l septembre, une mort à
peu près certaine. Son calme im-
perturbable, la netteté, la fraiirliisede
ses réponses en imposèrent à Maillard,
le chef des ésor.;eins ; et celui-ci. après
l'avoir entendu, dit en se di-rouvrant :
«« Je ne vois rien qui doive faire sus-
« prêter monsieur ; je lui accorde la
«« liberté. >• \ peine ces mots furent-
ils prononcés que les mêmes hommes
qui l'eussent massacré sur-le-champ, si
Nlaillai d l'avait condamné, l'enlevèrent
dans leurs bras et l'escortèrent jisjie
chez lui. Uien de plus touchant que le
récit de Saint-Meard ; sa brochure
peut être considérée comme l'un des
monuments historiques de cette épo-
JOt
3i-
que de sauvante mémoire. \.\'i^unir
a eu dix-huit éditions imp^imée^ cher.
Desenne, dans la seule année 17î>*J.
Trois ont rte puhlu-es en iSti; sans
parler de lrente-4i\ contre laçons dans
1rs dfparlnnrnis ri à l'étranger. Sainl-
^1 ' 'in exemplaire de cha-
• iM. Knfm cri rcrit a
ele iMscir d^tis Ij rollection des )/r-
moirrs Hr lit rr^niluliim. l'eu de inoii
avant qu'il vînt se lixer à Paris, S.iiii;-
Meard avait fait imprimer chez llirnn
à Nancv plusieurs pamphlets, entn an-
tres une tra;^i-comédie en trois actes
sur son étrange affaire de Nanrv. Il
avait coropove dans la ro^me ville en
17H.-,,avec MM. de Kortia de l»ilrs
et I^uis deHois^elin, ses camarades au
régiment, une brochure satirique a>ant
pour titre : (Mrrrspomiunrr tir M .
Mrsmrr .vtr 1rs trois tlrium>rrtrs tlit
/Mttfurt futoijonr, tir fhonimr htn^url
rt tlu Uitfurt munil (1 %nl. in-l'JV
Ilien que la publication de son .■f^nnir
tir trrntr-huit hrurrs fût un acte de cou-
rage, et l'on peut dire même une sorte de
bravade contre les instigateurs des mas-
sacres deseplembre,Jourgniac .ieSainf-
Méard ne lut point inquiète depuis ; et
les journalistes «p:i , dans le temps ,
rendirent compte de celte brorlmrr,
se sont tous accordes à 1.1 louer, rjuelle
que fût la couleur de leurs opinions, il
n'y dissimulait pourtant point les sien-
nes, pas même dans Wii'rrtissrmrnf
ou , après avoir justement llétii
NecLer, tir tirsastrruse fnrnwirr, il
parlait de ceux qui , noyant snùtiliu-
la ronjîancr tir la nation tfiir ptmr
la tromprr, avaient tontrilnir a lairr
coulrr Ir sang drs Français. C/C qui
d^ailleurs faisait respecter «le tous les
partis ce franc et invariable rovaliste,
c'est que dans ses relations sociales il
montrait toujours la plus grande tolé-
rance pour les opinions qu'il com-
battait dans ses écrits par les traits
incisifs d'une apparente bonhomie.
3i8
JOU
Au surplus, il s'était peint lui-même
dans ces paroles adressées aux jno^es-
Lourreaux de T Abbaye: « Je n'ai ja-
« mais été inscrit sur la liste civile ;
« je n'ai si^ué aucune pétition ; je
« n'ai aucune correspondance répré-
« hensible; je ne suis pas sorti de
c< France depuis l'époque de la révolu-
« tion. Pendant mon séjour dans la
<c capitale, j'y ai vécu tranquille ; je
« m'y suis livré à la ^aixé de mon ca-
« ractère, qui d'accord avec mes prin-
« cipes ne m'a jamais permis de me
« mêler sérieusement des affaires pu-
ce bliques, et encore moins de faire
ce mal à qui que ce soit. » C'est dans
cet esprit qu'on le vit aux réunions
déshabitués de la boutique du libraire
j)esenne ( Palais-Koyal) revendiquer
la qu2^i\é àe président et générai en
chef (le la société des gohe-nioucJies.
La restauration , qu'il accueillit avec
crtlliousiasme , trahit ses espi^ances
aussi bien que celles de tant d'aulres.
Peu curieux d'honneurs et de place,
il pensait pourtant que les dan^eis
qu'il avait courus à Nancy, et le dé-
vouement qu'il avait constamment mon-
tré, méritaient bien le titre de colo-
nel ; mais les ministres de Louis XV J I [
et de Charles X en jut^èrent autre-
ment. Toujoui serai malgré ses soixante-
dix-huit ans, il publia sur les dénis de
jtiblice dont il croyait avoir à se plain-
dre plusieurs brochures très-piquantes,
et qui finirent par amener entre lui et
l'autorité une sorte de transaction par
suite de laquelle une pension lui fut
accordée sur la liste civile, llcureuse-
mcnlSaint-Méaiddont lesf^oùlsétaient
fort simples avait conservé quelques
débris de sa fortune patrimoniale. On
aura une idée de l'esprit des brochu-
res dont nous venons de pailcr, par
leurs intitulés que nous donnoFis tcx-
tiieilement: \. Ordre du jour, ou
Salmigondis ministériel et hureuu-
cratiifuef pour serç>ir de supplément
JOU
et de consolation à mon Agonie du
2 septembre 1792, Paris, chez l'au-
teur qui enjait présent, et chçz le li-
braire VeUi,fjuile vend, 1822, in-S"".
Dans le même temps il fit imprimer
h pétition qu'il avait présentée au duc
de Bellune , ministre de la guerre
(Paris, 1822, in-8^'). IL Ainsi soit-
il, ou Nec plus ultra du vieux roya-
liste Juurgniac de Saint-Méard, Pa-
ris, 182i^, in-8°. IlL Mon épitaphe
en vers (1824, in-8" de 2 p,). H était
digne du joyeux auteur qui avait com-
mencé par son agonie de terminer sa
carrière littéraire par son épitaphe.
Il est mort à Paris le 3 février 1827.
Dans les dernières années de sa vie , il
passait presque toutes ses journées au
café Valois (l*alais-lio)al). Là, comme
au temps de la république et de l'em-
pire, il se targuait encore du titre de
général des gobe-mouches ; et il avait
lait graver sous la forme d'une ruclie
de mouches à miel, des brevets qu'il
distribuait à tous ses amis. Grimod de
la Reynière, dans la IV*^ et la V® an-
née de VAlmanach des Gourmands,
fait un grand éloge de Saint-Méard ;
A remarque qu'entre ses divers mérites
« il gobe autre chose que des mou-
<' clies, et qu'il présente en sa per-
« sonne l'exemple d'un des plus vastes
« et des plus robustes appétits que
«f renferme en ce moment la gour-
(f mande ville de Pans ( année
1807). ). D— R— R.
JOURXIJ - AÏJBER ( Bfr -
nard], comte de liistal, naquit à lior-
deaux en 1748 ; fils d'un négociant re-
commandable, il se voua à l'état de son
père, et, comme lui, cultiva en même
temps les sciences naturelles et les
beaux-arts. Il s'était formé une riche
collection de tableaux et d'histoire na-
turelle , dont il partageait libérale-
ment la jouissance avec les amateurs.
Il encourageait les artistes et leur
procurait d'utiles travaux. Les désas-
JOU
\rt* de S4inl-1)omiii;;ue. comoifitr^
nvcc la rc\('!if'on, I n ciiIcTcrenl une
puntie juilie ilc *^ rd-iiirif : rnmme
elle ne lui prrm-nait plii% d'arnoitre
*nn ridieraltinrt, il en lit Joii i «a Mlle
naljile. rt \r Mu^rc |uil)lic di* llnrdraux
i:ii esi redevable lie l.i"' •' ^ ■'♦• pai lie
dc«e<ornemrnl5. A ri Jntir-
nti-Aiibrr prit un >:i>>ii i.o uc pour
rj^iiniilure; il forma et eteciila le
prn)ct d'une fcin; ' '• I/u-
liliti- dr ses .ini' « e*l
.c tia:i> le pav«
iilf.-» sM?!oul un
^j4ii\l irltf puui U II lïfs
nier iMO« ; et il retnpoi ' ri, un
prix d«rrrn<' par la >oririe de* sriencr*
ri aris de U4)rdcaiix. Il ér i\it aussi
Mir le medleiir parti à tirer dc> lande*
i|ui se tcouvent entre cette \ille et
Bavonne. il fut snrceviivetnent appelé
ati\ fonctions de membre et de prési-
dent de la rliarobre de rommi-rre de
)) iidraux, d'adiniiiistraleur du di-par-
tiii;.iit, pi dr presxicnt du tiibtin.il de
Aufit éic élu députe k
le"-l.il!\r. il o;'r'> 1 jinr
raie, l'ro-rnt en IT'.'ii, pour son dé-
vouement à la cauie de Louis XVI,
il demeura lon:;-temps caclié. A la
suite du 18 brumaire, il fut nomme
membre du sénat conservateur, de-
vint un des censeurs de b Kanqsie de
France , après avoir contribue k la
form.ition de cet ctab!is<eniefit, et plus
tard il fut créé comte de l'cinpire. I.e roi
lui fonléra la dignité dep.Hrde l'iaiicc,
au mois de juin 181 i; ii'ais il ne
jouit pas lon{;-temps de celfe faveur,
élaiiJ mort le 19 janvier 181"). /.
40I SSOL'F. yor. Yoisoip,
LI, Ô1J.
JOrVAXT /Nicolas-Louis),
magistrat , né à Ucims le 15 sept.
1730 , se distingua dans ses études
qu'il alla finir à Paris , où il fit son
JOt
3i9
droit et fut le condisciple de Tlioroas,
•tec le(^u»-l d entretint pendant lon^-
lefnp< Ar-^ Ira- nn. iudaips. Krvrnu
»' t drbuta dan»
1.» I ., , ■ > Itai^i? d'avocat
du roi auprrt du (irMii al; il v fut en*
suite lieutenant pattindier, et député
avec M. Sulaiue-l>uvi\ier, le 17 sept.
I7S7, auprès du parlement rxiie à
Troves, pour \e complimenter au nom
de la nij(;iurature dr Keimt. (îmc par
de* levers dr foMunr qui I obliquèrent
d'en^a^'rr unr partie de mmi patii-
moine, il sollicita ri «bdnt la cliar<;e
dr profrAseur en dioit a l'unncr^ile de
Keims. Il en avait joui a peine drus
an<> quand la résolution la lui enleva
et le dépouilla au5si de ses aulies cliar-
f;ei. Toutefois il n'éprou\a aucun
clia^rin de ces perte*. Comme beau-
coup d'autre» , il salua Taurore de
cette ié\olution dont il espérait de
l^rands asanlairs , et il > prit une
paît l . ' 1 di*.
trictd. delà
roinnuiic. Mai;> .1 uc: iul pa» lonr;-
fem;»^ «n^ ^'apercevoir qu'au licj du
! ut et dr la «uppre<-
I . rt de beaucoup
«1 s f\ demandée*
t'd. ! i_ ordres, lors de
a convocation dr^ étal>-:;enéraux , il
n'en arriverait qu'un bouleversement et
des maux incalculables. ICii;;a}^é dans
ce roau>ais pas, il ne pouvait en sortir
sans déplaire à sa famille, qui crai^^nait
qjieparcrtte démarche il ne s'exposât
et ne l'expo .•♦l elle même au plus
f^r.-^nd danger. Ju^e au tribunal crimi-
nel du département de la Maine,
établi à Cii.ilons en 179i{, et ensuite à
mims, il eut beaucoup à oéuiir de la
rioiicur et de l'injusticedes lois révolu-
tionnaires qu'il lui fallait appliquer
à d'infortunés pro5crils , entre au-
tres au jeune l)eu de Moiitigny et au
respectable abbe Musai l , curé de
Sonime-Vcsle, accusés d'émi;^rationet
3io
JOU
JOU
comme te!s roiuîamnés, le preFiiicr le
3 mars 1796 et exécuté le lende-
main, le second le 10 du même mois
et exécuté le 1 1 sur la place de la
Couture à Reims. Les pieds sur l'é-
chafaud , et quelques minutes avant
de livrer sa tête à Texccuteur , ce
saint prêtre (1) entonna le Saioe, re-
gina, que le peuple , tombant à ge-
noux, continua en fondant en larmes.
Deu de Montij^ny et l'abbé Musart
pouvaient se soustraire au sort trop
certain qui les attendait ; des person-
nes charitables leur en facilitaieni les
movens, mais ni l'un ni l'autre ne vou-
lurent en profiter. Après ces deux ju-
gements, poursuivis et soutenus par l'ac-
cusateur public ïburiot , surnommé
2ue-roi, à cause de son vote dans le
procès de Louis XVI , Jouvant , qui
s'était prononcé pour leur acquitte-
ment, ne pouvant plus y tenir, donna
sa démission. Retiré à Rilly-la-Monta-
^ne, à deux lieues de Reims, il se remit
des peines et des tribulations que son
cœur avait éprouvées depuis 1790, et
médita sur les grandes vérités de la re-
lif^ion, dont il remplissait les préceptes.
Il réfuta rouvra<:;c que l'abbé Servant,
vicaire épiscopal de révèque constitu-
tionnel (le la Marne, ^sicolas Diot {V.
ce nom LX II , 499), avait fait imprimer
à lieims, 1791, in-8", sous le titre de
Réponse à l'ouvrage intitulé Petit
r.atrihimie pour le temps présent,
Reims, in-18; dans lequel cet abbé
prétendait prouver que le serment
jf.wf^é: de- piètres par la constitution
-civile du clergé était dans les règles,
et que lesectlésiaftiques qui le refusaient
étaient des rédaclaires. C'est aushi
Jans cette retraite qu'il fit V llxawen
critique de la Théorie de V imagina-
Hun , (\\\t Jean-Simon Levcsquc de
'i. La vi«- Hp r.il)h«- Musart a ct^ puSlif-e
«ous cr titre-/.* MoJtle drt pnsleitri, i>\i Fit
de M. jVuiarl , lure i/e Somme- y elle , diocts»
de C/irifont-iur~Mar,ie, mort t'i lieimi, pour la foi,
le ir mor» 1796, I.yon, 18*7, iri-n.
Pouilly donna au public en 1803
(ro).'PouiLLV, XXW, oiG). Le
séjour de la ville convenant mieux à
Jouvant à cause de son grand âge, il
se retira à Reims, où il mourut le 31
déc. 1808. L— c—j.
JOUVE (Josr.î'H) , jésuite fran-
çais , né à Embrun le 1^^ nov. 1701,
mourut le 2 avril 1750. Il s'engagea
jeune dans la société, y remplit pendant
un temps les fonctions du professorat,
et sur la lin de sa vie se mit à écrire. Il
avait du goût pour l'histoire, et les cho-
ses de rOriènt ; mais, comme à tant
d'autres de ses ingénieux confrères , le
sérieux, la persévérance lui manquaient.
Il n'avait pas cet indomptable besoin
de vérité, premier caractère de l'his-
torien , et croyait trop que le style ,
que l'imagination peuvent la sup-
pléer ; il ne connaissait pas les lan-
gues orientales, le chinois, le mant-
chou , en aucune façon. Ces pe-
tits inconvénients ne l'empêchèrent
pas d'écrire , à l'aide des relations
tant imprimées que manuscrites des
missionnaires jésuites à la Chine, et
principalement à l'aide des //«nrt/<?5r/^
la Cliinei\nV. Mailla (encore inédites
alors), une Histoire de la complète
de la Chine par les Tartares IVJant-
chouXj Lyon, 1754, 2 vol. in-12.
Cet ouvrage, publié sous le pseudo-
nyme de Vojeu de Ijiunem, était utile
et se recommandait de lui-même,
par l'actualité du sujet, puisque la dy-
nastie des 'iVi'-tsirig ou Mantchoue,
élevée en 1()()2 au trône du céleste
empire, régnait alors et règne encore
aujourd'hui. Jouve y ajouta une table
chronologique des événements anté-
rieurs à cette grande révolution, table
rétablissant la concordance entre les
supputations chinoises et celle de l'An-
cien-Testament, depuis le déluge jus-
qu'à notre ère. Passant ensuite de
l'extrémité du continent asiatique à
l'Asie antérieure , il réunit ce que les
JOU
JOl
iai
anciens, en ^rcc et en lalin, ont écrit
NUI Palm> ( c cl ïur la grande reine, puui
coropusci une Uistiàrr Jr Zmoiiie ,
Farii, tT'iS, in- 12 O iiiorreau, pu-
kJié sou« le |>!»euiion>me (l'K.u>u> «Je
Ilautcvillr, fut accurilli tir» fa>orable-
mrnt. Cependant, s'il est vrai quelalec-
tuie en soit facile et altacliante, il faut
(liie que lest\te en e^t prolixe et lâche;
que Jouve vise à l'efTet et ne rachète
pa^ le vice de ses prrlrntion» par ce
hiillant, par cette vigueur qui doivent
rendre la critique indul^riile, que auel-
qacfuis il se luisie entiainer j l'ab-
strait du romaneNqur, qu M v a souvent
clici: lui iiiiiitrlli^encc du >ens des
faits, et cela, pji ce qu'il ne pénètre
pas assez ce que criait que le inonde
loniain, quelle opposition profonde il
> avait entre les deux mondes romain
et oriental, et jusqu'à quel point pitur-
tanl le second avait a^i sur le pre-
mier quM voulait achever de se su-
bordonner ou de s'a^Àimiler , et qui
rea^Usait de toutes ses forces contre
cette action. Nous ne répéterons pa^
ce que nous avons dit plus haut, qu'il
eu: fallu de plus pouvoir lire le> au-
teurs orientaux , non pas qu'aucun ait
trace riiu>toire de l'alm>re, mais parce
que de leur lecture résulte une multi-
tude de notions dont l'ensemble fait
comme respirer une atmosphère syria-
que et arabe, l'atmosphère du dwert
et du bazar, et que mèiue ne compre-
nant que les rois de Chassan et d'I-
lah du V siècle, on remontera par-
faitement par la pensée, aidée d'un peu
d iina<;ination et de repères histori-
ques, a la Palmure dusiecK* dcGallien.
Ou peut ajouter qu'il est laclieux que
le No\a^e de Voliiey e;i S\rie n'ait eu
lieu qu'après la publication de l'ou-
vrage de Jouve. Mais, pour être juste
et pour tout dire, on doit ajouter que
Jouve, avec son ouvra;;e, a contribué
à tixer rallcnlion tur Palmyre, à ins-
pirer le désir d'en visiter les ma^ni-
fique> debiii. Kn tout cas, noospiu-
rbmerons qur, comme idée de librai-
rie, d lit un heui eux choix en s'empaiant
de Zéaobie. Sm livre paraissait au mo-
ment ou coiniiirnrait, avec la ^ueire
de Sept ans, la deuxinuc lutte d'une
souveraine comparable à /x-iiobie i Ma-
rie-Ihrrrse' contre un antagoniste
au moins 1 e^al d'.\urelien , et il
ne manqua point d'appeler sa /^
nobie riin(>éralrice-rcinc. J* <rr.
J4)l V (LotivFnANçois de) ,
avcKat au parlement de l'aris, naquit
en celte ville le 2 mai 171V. Il s'a-
donna surtout a l'étude des matières
canoniques, et il acquit dan« ce ;;enre
une SI haute réputation de uvon que
le cler'^é de France le choisii p. nu un
de se* conseils. Il mouint à l'aiis au
mois de février 1771 . On a de lui : I.
Arrêts (le rrgirmrni rrrueiUis ri
mis m urtJrc , Vil li , 1702, in-V''.
11. PrinrifM's ri UMiges corner -
nant Its dîmes, ibid. , 17ô2 et
177G, in-12. 111. Confèrent es des
ordo/muntes, èdits , etc. , sur les
matières eci iésiustitfues^ ibid. , 1733,
in-i . \\ . Suftftlemeiit uuc luis ci-
v'iles dans leur ordre naturel (de Do-
iiiat) , ibid., 17.>G, in-fot. de 12(1 p.
Ce suppliineiil, ptibhr d'aboid a part,
fut ensiiiie refondu dans les éditions
subséquentes des l^tis ci\^iles. Ln cer-
tain nombre de diTinitions el de règles
de droit qui avaient échappe à Domat
ont été réparties dans les divers titres
auxquels elles se rapportent, et sont
distinguées par un si;;iie particulier. V.
Primipes sur les droits et obliga-
tions des gradurs. Fans, 17Ô9, m-
12. On doit aussi à Jou) une nouvelle
édition des lutis ect lèsiastii^ues de
d'iléricourt, Paris, 17.j(», in-fol. S'il
faut en croire le Dicliinmaire de Fel-
ler, il préparait une nouvelle édition de
la Coutume de Meiiux, ouvrage qu'il
a\ait déjà mis au jour. Mais il y a lieu
d'en douter. L — M — X.
LXVIli.
21
311
JOY
JOVAUT(A.-A.-A.), aita\/f.-
sas à cause de son dévoiienienl héroï-
que à la cause des Bourbons, naquit à
Lénac, en Brela£;ne, eu 1778. Son
extrême jeunesse rempéclia de prendre
part aux premiers troubles de la Bre-
tagne. Il vivait à Rennes dans rolsi-
veté, et y prit le parti des Chouans. Le
gouvernement le fit arrêter et conduire
au Temple en Tan Vil (1798); mais
il obtint sa liberté en rejetant ses écarts
sur sou jeune à^e. Lors de l'insurrec-
tion de l'an VIII, il recruta publique-
ment pour Georo;es, et devint son aide-
de-camp. L'amnistie lui lournit l'occa-
sion de venir à Paris ; il y resta sous
prétexte d'aifalres de commerce et con-
tribua à l'explosion du 3 nivôse. C'était
lui qui suivait la machine , déguisé en
charretier. Recherché pour ce fait , il
erra en différents endroits et parvint
enfin à s'embarquer pour Jersey, d'où
il gagna Londres. Ses anciennes liai-
sons avec (jeorges l'engagèrent à l'ac-
compagner en France, dans les premiers
jours d'août 1804. Ils débarquèrent
ensemble, et arrivèrent dans la capi-
tale, où la police le fit arrêter et con-
duire de nouveau au Temple. Joyaut ne
larda pas être mis en jugement, et fut
condamné à moitié 21 prairial an XII
(10 juin 1804). Au moment de l'exé-
cution, il cria vwe le roi, à plusieurs
reprises, et mourut, comme son intré-
pide chef, sans montrer la moindre
altération dans ses traits. B — P.
J OYCE (le révérend Jéuk.miau) ,
savant anglais, s'est distingué surtout
par son aptituile pour l'enseignement ,
et a su mettre dans les ouvrages qu'il
a publiés les connaissances naturelles
à la portée de la première jeunesse. Il
fit l'éducation de quehpies jeunes gens
de qualité ; et, ayant adopté les senti-
ments religieux des unitaires, fut long-
temps secrétaire de leur congrégation.
11 mourut le 20 juin 1816, âgé de
cinquante-deux ans. On remarque par-
JUB
mi ses écrits : I. Education systê-
mati(jue, on Insfructioii élémentaire,
par les révérends W. Shepherd , J.
Joyce, et Lant Carpenter, Londres ,
1815, 2 vol. ln-8". II. Dialogues
scieniifuiues. ou petit cours de philo-
sophie naturelle et expérimentale, à
l'usage de la jeunesse ; traduit en fran-
çais sur la 9''' édition, par Eug. Nio-
gret, Paris, 1827, 6 vol. in-18, avec
12 planches. Z.
JUBÉ (h la Cour (Jacques),
zélé janséniste, né le 27 mai 1674, à
Vanvres près Paris , d'une famille
obscure (son père était blanchisseur),
fit ses premières études sous un ecclé-
siastique nommé Doyen, retiré dans ce
village et qui se plaisait à former gra-
tuitement des enfants pauvres à la piété
et à l'étude. Les dispositions remar-
quables de Jubé engagèrent ce bon
prêtre à l'adresser au P. Jouvenci, qui
professait la rhétorique au collège des
jésuites. Telle était l'ardeur du jeune
rhétoricien qu'il venait tous les jours
en classe de son village à Paris, n'ayant
pour asile entre les deux classes de la
journée que des dessous de porte ou des
allées, c'est là qu'il faisait ses devoirs.
Après avoir achevé sa philosophie, il
fut reçu maître ès-arfs, et, après avoir ob-
tenu une bourse à Saint-Maglolre, par
la protection de M'"® de Lamoignon,
supérieure de la visltallon du faubourg
Saint-Jacques, il étudia la théologie
en Sorbonne, en même temps qu'il
suivait au collège royal un cours d'hé-
breu, d'ar.nbe et de syriaque. Ces étu-
des lui valurent Pamitié de l'abbé de
Ijongncrue, qui était fort habile dans
les langues savantes. Élevé au sacer-
doce, il fut d'abord curé de Vaugri-
gneusc. Dèslors il se jeta à corps
perdu dans les querelles qui divisaient
l'église de France, prit parti dans l'af-
faire du formulaire, et composai ce su-
jet un livre Imprimé par les soins de
ses amis, ayant pour titre : Pour et
JUli
JUB
u^
imtrf Jansrnius totu hant les ma-
tir r es dr la grnre (pai M . J , Pari*,
1703, in-l^V Cet uu\ia';[e fut si\ù et
supprima. Jubé avait éle appelé deui
années auparavant i la rure ti'Asnièrcs
par lerardinai de Nuaille^. Sa paroicsc
et M maison i!e\tniriit l'asile dt quel*
qHM e(cle>iaslique& de l'arii ri de«i
pronucct, qui a> aient des rai5on* de
a* ttnir rarliés. I.e diarre Harit et
Ti»art , eiilre autres , .^•
quelque temps rhez lui. .1
>tt de 4on ^jli^c let images , le» ti^urrs
de taillis, rt toute espère d'ornement,
nrnie»ur l'autel ; il avait )ra.i:;iné une
■ouvellc manirre de céU-brer la mesM ,
récitait tout a liante voii, ri he dirait à
Tautel lien de re qui s« rliaiitait aa
rKirar. Il avait changé toute la liturgie
cipréleadait ainsi re\enir aux anciem
■ta||M dt régli>e. Kiitre autir^ iiino*
valioni:, il rrfusail de laisser rlianter
VO salutarîs hastiti pend.int I éléva-
tion, et ctmimi l'abbé l)uboi% drjiuis
cardinal, b.i en faif^it reproche. Jubé
s'eïcusa sur ce que cette prière u'é-
tait point fondre dans son éolise, et
sur son respect pour le pape, « ne tou-
« lant pa-s disait-il, rappeler par ce
« chant le Kou\enir de* enlreprife* de
i< Julefi II. M Otte réponse excita b
^ailé de Dubois, qui promit d'en réga-
ler le nome du pape. Au re-leJubé,
malgré son fanatisme janséniste, ne la>s-
»ait pas dette un homme d'un >rai mé-
rite et d'une piété sincère. Il répanda't
d'abondantes .•îJimAnes, et uvait de la
manière la plu- austère. Il ;;a^na tel-
lement ralleclion de ses paroissiens
qu'ils se seraient tous fait éj^or^er pour
lui. Dans celte disjKîsition des esprit»,
il lui en coûta peu pour rétablir la ri-
î;aeur de l'ancienne discipline ; il met-
tait en pénitence publique \t!> prdieufs
publics , obligeait de rester pendant
trois moi> sous I* porche de ^cî;t'^e,
pendant le senice divin, toute 611e qui
avait manqué à l'honneur, llnecrai-
conlre ce décret, ce oui le f.l traiter
avec quelque raison de hrtmiUott par
pià pu lU faire sortir de son é|;lise,
en rernsant de commencer la messe,
la marquise de l*arabe>ie , qui vi-
vait publiquement avec te duc d'Or-
léaMs ir^riil. Cependant Jubé était
aine et e>tiiaê de re prince qui, un
jour, lui 6l l'honiiriir de se mellie
à la table d.i curé d'Asnierrs. /àU
pour la tn^sc de Tapprl, on vit cet
errlé^iaitiipie. il r.i%encment drl.^ bulle
/ ...e de
partm
le» rares, et lecuetliii dr» (rnioignagm
qui le f.l I
dr hriÂiilhi
le cardinal de IVohan. Son paiti le
chargea d'nne commis^ioii iinpoit.inle
auprès du pailrraent siégeant à Vow
loi*e : en cf>rmin il fit une chute dan-
f(fre«se , ce qui ne l'empêcha point
0*accnmplir sa mission . il re-. inl eiivuile
chex lui se «citre au lit. .\pres son
retublis'emrnl il fut obli^;r de quit-
ter sa rure, en ITîil. Mandé alors
par le lieutenant de police, il avoua
que c'était à lui qae l'on envoyait des
ballots d'imprirues saisis à houen, à
l'adresse de l'ablté Anthon qui, en j»rrc,
5!;;nific un Jubé. 11 convint encore
d'avoir fait impriiacr betneoup d'écrits,
mais jam.ni> rien contre la religion dt
l'état. Maigre la prolrctioa de la piin-
ce<se de (>»nli et de la duchesse de
IWtinsvtirL, ses amis lui coiiseillrieiA
de se cacher. De »a retraite au\ envi-
rons de Pari.N, il écrivit à différentes per-
sonne* des lettres qui, venues à la co»f
nai.ssance de l'evct^ue de Kréjtis, depun
card nal de (leurv, firenl prendre au
conseil de conscience que présidait ce
prélat, le parti d'arrêter l'abbé Jubé.
n«-lor$ celui ci s'eloi'j,!ia tout i-fait
de l'aris. Hienlôt l'évèque de Mont-
pellier , u« des chefs du p.irli jan-
séniste , l'envova à l\ome , à l'oc-
casion du concile que lîenoîl XIH y
avait convoqué, l.es intri;;ues qu'il y
menait avec Tabbe d'Ktemare attiré-
21
3a4
JUB
rent l'attention, et il fut forcé de reve-
nir en France, où son zèle ne fut pas
moins actif. On le chargea d'accompa-
*jner en Hollande des Chartreux qui
sortaient de leur cloître ; il fit ce voya-
ge sous le nom de La Cour. L'archevê-
que Barchkman , établi récemment à
Utrechtparles appelants, donna Jubé
pour aumônier à la princesse Dolgo-
rouki, née Gallitzin, qui avait renoncé
au schisme des Grecs, en Hollande, et
qui retournait en Russie. On le cbar-
oea de suivre lesnéo;ociations commcn-
cées par Boursier, docteur de Sorbon-
ne , en 1717, pour la réunion des
deux églises. Barchkman conféra , le
"20 octobre 1728, à Jubé , les pou-
voirs les plus amples , tels que d'ap-
prouver les prêtres en Russie, d'é-
tablir des pasteurs, etc. Arrivé à Pillau,
en Prusse, Jubé apprit, par la Gazette
de Leyde, que le cardinal de Noail-
les avait enfin accepté la bulîe Uni-
genitus. Sur cette nouvelle, il crut de-
voir renouveler son appel comme pour
attirer les grâces du Seigneur sur sa
mission : « J'appris, dit-il dans sa
« relation manuscrite, V affreuse chute
c< du cardinal de Noallles et le corn-
ai lie de toutes ses faiblesses. »Ilse
proposait à ce qu'il paraît, dans ses
prédications, de faire les Grecs appe-
lants; mais le succès ne répondit pas à
ses efforts. Il trouva beaucoup d'obsta-
cles à Saint-Pétersbourg; en vain le
duc de Liria, ambassadeur d'Espagne,
qu'il parvint à mettre dans ses inté-
rêts , le protégea de tout son pou-
voir , et lui donna le titre de son
aumônier. Jubé , qui avait cherché
à gagner les évêques russes et qui
d'ailleurs était désavoué par l'ambassa-
deur de France, devint suspect ; et la
princesse Dolgoroiiki, à laquelle il était
attaché, étant retournée à la commu-
nion de l'église russe, son aumônier fut
contraint de se cacher, puis de prendre
|a fuite. Il quitta la Russie au com-
JUB
mencement de 1732, et ne put fran-
chir les limites de cet empire qu'en se
faisant envelopper dans un ballot de
marchandises. De retour en Hollande,
en mai 1733, Il y dressa la relation de
ses voyages, revint à Paris vers 1740,
et y vécut caché. Etant tombé malade,
il se fit porter à l'Hôtel-Dieu, oii il mou-
rut le 30 déc. 1745. Dans son testa-
ment, du 14 juillet 1738, il renouvela
encore une fois son acte d'appel, et
adhéra aux miracles du diacre Paris. Il
fut inhumé dans l'égHse de Saint-Séve-
rln. On trouve les détails de sa mission
en Russie à la fin du 3^ volume de
V Histoire et analyse du liçre de
l'action de Dieu sur les créatures,
1753; et feu M. Emery en a inséré
un extrait dans les Annales philoso-
phâmes, morales et littéraires y 1800,
tom. 1^', p. 161. Son récit est appuyé
principalement sur la relation manu-
scrite de Jubé. On peut voir encore
sur cet appelant les Nouvelles ec-
clésiastiques du 23 oct. 1746 , et
V Examen critique de Barbier , pag.
477. On a de lui , outre une foule
d'écrits anonymes qu'il serait presque
impossible de signaler aujourd'hui :
Lettre d'un curé de Paris à M. Sau-
rin, au sujet de son écrit intitulé :
Etat de la religion en France, en lui
adressant le mandement du cardi-
nal de Noailles et deux lettres d'un
médecin, touchant le miracle arrivé
dans la paroisse Saintc-Margue-
rite, 1725, in-12. — On trouve, dans
la Table raisonnée et alphabétique
des Nouvelles ecclésiastiques , une
courte Notice sur Juiii!; [Claude-Ro-
bert]., frère du précédent, lequel mou-
rut en 1740, à Fumichon, diocèse de
Lisieux, après avoir refusé les sacre-
ments plutôt que d'aquiescer à la bulle.
D— a— R.
JUBE (Auguste), baron de la
Perelle , général et écrivain fran-
çais, arrière-neveu du précédent, na-
JUb
quit le 12 nui 1765. Apre» avoii
fait de brillantes études , il entra
dans ^ad^lini^t^ation dr la marine ni
17H6,el fut em^doyéen ITS'J, sur Ifs
côle.s de l'Océan par \c\ généraux I)u-
noanez, Soncv et NN iinpfen. H em-
brassa les ptincipes de la révolution el
fui nommr, en 171)2. chef delà pre-
mière lésion des ;>ardes nationales de
b Manrlie , obtint l'année suivante
l'iiL^pertinn des côtes de ce département
el fui éle%é, en 1704, au ^rade d'in-
specteur-f;énéral. Kn 179G, il était
passé dans l'armée de terre a\ef le
litre d'adjudant -f;énéral , et fut em
plo^c datis 1.1 N endoe auprès du géné-
ral I loche dans les fonctions de chef
dViat-major. Au mois de brumaire an
^ III, il était command.inl de la ^arde
du Directoire; mais, tout dévoué à la
fortune naissante de Uonapaile, il lui
répondit, des le l.'>,dei dispositions fa-
>or.ibles de cette troupe qui, dans les fa-
meuses journées du IK et du 19, ne 6t
aucune démonstration pour défendre
les directeurs et contribua au con-
traire à l'arrestation momentanée de
(johier et de Moulins. Bonaparte, de-
venu chef de l'état, cliar;;ea Jubé de
l'organisation de la (;arde consulaire ;
mais là devait s'arrêter sa carrière mili-
taire, liemplacépar I^nnesdans lecom-
raandeincnt de ce corps de prétoneiis,
il en f'it dedoroma;é par sa promo-
tion au Iribunat ; et, pendant les dif-
férentes sessions de celte assemblée, il
prit une part asseï active à ses tra-
vaux. Ijf 3 mai 18()i, il adliera au
vœu émis par cette assemblée pour
l'élévation de Bonaparte à l'empire.
Lors de l'élirainallon d'une partie des
tribuns, Jubé ne manqua pas d'ètie
maintenu par le nouveau monarque,
pour lequel en toute occasion il témoi-
gnait son enthousiasme et son ad
miratlon. Pans la séance du "2G .sept.
1805, il s'exprimait ainsi : « I^ terre
« s'est tue devant Alexandre qui vou-
JDB
SiS
H lait l'asscnir. Devant ^iapoleJn , la
«< terre, les mers (ju'il veut franchir,
M l'univers qu'il remplit dc son nom
N parlent haulemeiit de la grandeur
M de son ime, de l.i ;;loire de ses ar-
«« mes, des merveilles île son re'^ne,
>• de la reconnaissance des peuples. »
lîn tel dévouement ne resl.i pas sans
récompense Déjà, lors de l'in^tilution
de la I.e^ion-d'lloiinciir, Jub<* en avait
été nomme commandant ; après la dis-
solution du tribunal, il fut nommé pré-
fet de la Doue en Piémont, enfin créé
baron de l'empire. Kn 181 2, il pavsa à
lapiefeclure du (ier, qu'il conserva
jusqu'en 181 V. .\pres la restauration ,
Jubé qui avait écrit sur l'histoire mi
litaiie, el qui s'était hàlé de publier en
l'honneur du ciar .\lexandre une bro-
chure ùe> plus Ludalives, fut attarhé
au drpAt-;;énéral du ministère de la
guerre avec le titre d'historio;;raphe
IMus tard il fut rois à la retraite, mais
avec le titre de mirécîial de camp et la
croix de Saint-Louis. Il est mort à
Douribn (Kure-el-ïx)ir) le 1"^ juillet
1821. Depuis 18IS, il coopérait très-
activement à la rédaction du Jouriml
grnrral fir Frum e qui, de ministériel
qu'il avait été d'abord, était devenu
liès-libcral..tJne anecdote assez pi-
quante se rapporte à la collaboration de
Jubé à cette feuille. Dans un .irliclc
sur la surveillance des prisons publié au
mois de janvier 1818, il faisait un ma-
t;nifique eloj»e de l'.incien préfet dc la
Doire; un journal ro\aliste remarqua
que cet ancien préfet était M. Juhé
lui-wémc. On a de lui : 1. Histoire
drs gurrrrs des Gaulois el des Fran
f«/5 en Italie depuis lielloi'èse j us-
ina'à la mort dc Louis \II . ^^r-
vant d'introduction à l'ouvrage du
général Scrvan qui a continue ce su-
jet depuis François 1" jusqu'au traite
d'Amiens (180.") , ln-8"). Quoique
l'ouvrage de ce deinlor soit loin d'être
inéprochablc, rintroductloo de Jubé
3î6
JUB
qui foriHe le premier volume laisse en-
core plus à désirer. 11 ne paraît point
avoir porté, dans Thistoire des siècles
antiques, le flambeau d'une critique
impartiale et judicieuse. Ses récits sont
sans ao;rément pour les lecteurs ordi-
naires et sans utilité poi'> les savants.
On peut relever surtout des décla-
mations usées contre les prêtres , les
moines et les papes, ainsi que des di-
{^ressions assez values sur les finances,
la législation et les mœurs de tous les
pays , sans en excepter la Chine, le Ja-
pon et l'Amérique. II. Hommage âr.s
Françms à V empereur Alexumîre.
De la nécessité de transmcUre à la
postérité le souvenir des hic.njaits de
V empereur Alexandre et de ses au-
gustes alliés, et des moyens de signa-
ler la reconnaissance des Français,
Paris, 1814, in-8° d'une feuille. Le
litre seul de celte brochure indique
que Jubé professait alors en faveur de
la restauration des opinions dont l'exal-
tation ne tarda pas à se calmer, III.
Lettre du citccalirr de C Union à
M. de Chateaubriand, 1816, in-8^
Cette lettre, entièrement dans le sens
libéral , fut bientôt après suivie d'une
seconde. IV. Lettre d'Emile Fade
à jyr^^*' Duchaume, à l'occasion d'un
mandement, 1817,in-8°. Ce mande-
ment concernait la réimpression des œu-
vres de Voltaire. V. J^ettrc d'un Fran-
çais à lord Stanhope, ou Réflexions
sur réi}f'nement arrivé à lord IVel-
lington dans la nuit du 1 0 au 1 1 fé-
vrier, Paris, 1818, in-8". Il faut se
rappeler que cette nuit-là, au moment
où le noble duc rentrait dans son botel ,
une arme à feu avait été déchar<:;ée à
bout portant sur son carrosse, quoique
aucune balle n'eût atteint ni lui, ni ses
gens, ni ses chevaux, ni sa voiture, ni
même les murailles d'alentour. Une in-
struction juridique eut lieu, sans pro-
duire de résultat ; et l'on vit générale-
ment dans ce gaet-apens^ une affaire de
JUD
police. Jubé dans sa brochure insinue
que l'auteur du coup avait trouvé un
asile dans l'hôtel de Wellinf^ton; puis
il en prend occasion de réfuter par
quelques déclamations , mais surtout
par des citations historiques, la dia-
tribe qu'à cette occasion lord Stanhope
s'était permise en plein parlement con-
tre la France. VI. Le Temple de la
Gloire, ou les Fastes militaires de
la France, depuis Louis XIV jus-
quci nos jours , Paris , 1829-21 ,
2 vol. in-fol. Les deux volumes de
cet ouvrage qui ont seuls paru furent
publiés en quatorze livraisons, ornées
de trente-sept gravures; ils embras-
sent les guerres de la république. VII.
Histoire générale militaire de la
France, depuis le commencement du
règne de Louis XlFjusquà tannée
1815. Ce dernier ouvrage, qui n'est
pas dépourvu d'intérêt , devait avoir
trois vol. ; deux seulement ont été pu-
bliés du vivant de l'auteur. Le troisiè-
me est resté manuscrit. D — R — H.
JUDDE (le Père), né à Rouen,
le 21 décembre 1661, entra de bonne
heure dans la compagnie de Jésus, et
se fit remarquer par ses talents pour la
prédication. Le célèbre Bourdaloue
avait pour lui une haute estime, et il
voulut même qu'après sa mort on re-
mît tous ses manuscrits au P. Judde ;
mais les soins mi'ltipliés dont celui-ci
était alors chargé s'opposèrent à l'ac-
complissement de ce désir. En effet,
après avoir dirigé le second noviciat
des jésuites à Rouen, il fut envoyé à
Paris comme supérieur du premier no-
viciat, fondions qu'il remplit iusqu'en
1721. Il passa ensuite à la maison de
retraite d« ce noviciat, puis à la maison
professe de l'ordre, où il mourut en
1735. On a imprimé séparément les
ouvrages suivants du P. Judde : I.
Retraite spirituelle pour les person-
nes religieuses , Paris , 1746, in-12.
II. Réflexions chrétiennes sur les
Jlii)
JUl)
gramUs vérilcs tir la fin et sur Us
principaux niy stèrrt lir la Passion ,
l'jris, 17Ô7, iii-lU- l/abl>« l.rniA><:ner
C /'«//. te nom, XXIV, .Vt)l4il l'i-iL-
tmr «le ce li%re, qui parut mmi» le
voile «le Tanoinme. 111. l^.iJiorta"
tiuns sut In firirn ifmu-r. tl^^uirs Je
Irtut rrli^ini.i , ( •{«!'.
(^Iieion, ilirahtt. 1 . 1 toi.
in-12:ibi(i , i .M-li IV.
ir ailés sur // n, a C usage
tles séminariste» et des rummunau-
tes reltgiruses , IWv^n^oii; 18i5,
111-18. Lftbbé Ir.'ooir-Duptic à doD-
n^ U (AtUectittn rump/ete des um-
vres sfiintuelieâ du l*. JiuJde ,
l'an», t781-h*i, 7 tul. iii-li; nou-
velle éililion, l)c»aiiçuii. Ihi:>-n'>. 7
vol. in- 112. Il en a |««iu m
tion, moins ruinplelr, l'a
ô vol. iit-l;2. 1
i*. Juiiilc liii i
parnii les omm
Jl l>fc\ M
proteManl, el le |ireuucr auleor qui ait
écrit ftor la libelle de la pre^e, elait né
en 1318, à DippoU»alil, daiu la Mi*'
nie. Son perc , quoique Irét-pautrr,
ne >oulanl pas contrarier sfj^ itirlina-
lions, lui prriait d'aller éliidici a l>re»-
de. De cette >ille il ht rendit a Vii-
teniber^ , puis a Ma^drbour^ «m il
arriva naïade cl dans le démirment le
ploft absolu. Pendant quelque-, semai-
nci il > vécut des f(*rou(squ il rerevait
de la charité publique; iiiaii, ^'ëtant
fait promi'lrnciit connaitre d'uHC ma-
nière avanta^^eute, il fut place comme
précepteur. A>ant accompagné ton
élève à VliiemLeiff, il v prit, en lôW,
le f»rade de auilrc és-ails, et revint à
Ma^debourp, o«, après aNoir rrnenlé
les humanités au ;;vrona e , il fut nom-
me pasleur on prédicateur de l'c^lise
Saint-Llrich. Ses talents lui méritèrent
Teslinic de Francuwitz Fiaccius lHy
rius], qui radjoi^nit aux rédacteurs
4ts Centurèartttàgdehurgenses. Ea
1060, il pa^^ pioCcftseur de théologie
à racadémie d'iéua. Entové U mèmt
ainre an colloque de \'teiroar, il a'j
prononça furteutent contre le» Syner-
fflstes,wi paiti>aiis de L liberté iiiiroi>
Uc de l'homme , dont le professeur
Slii);ebi.s etaii le chef O parti, que
i'elecienrd. ivail seci élément,
chcuha II' e >eii;;cr de Ju>
de« el la lruu«a biriilui. Judcx avait,
atcc plu.'tieui* de «es rullr^ues, souscrit
une supplique auk prince^ de la confev
*IOII d AU;: ln)L -» I OUI Ir» (.iiff tl'a^i-
•cr auv mi i fanr
cesser les ut.. ..,,. .j,,. -.: i...... m >tairnl
parmi le* lulhénriis. Cette démarche
u'.i>aut pioduit ••icuii résultat , il
adreis^a celte pièce au coDfteil eccleua»-
i r ; et , sans attendre
il la fit imprimer avec
' ' une infi action
' r-e ^\^lI^3llle, au
• libel.
' ^ iiia|^iie.
On 1 en putnt avec une M\erile presque
incrovable. Dépouille de •« chaire , il
lut en outre force de quitter lena, pei»-
daul l'hiver le plus rude. 11 .«^e retira
d'abord à Ma;;del>our^ où il lui restât
des amis; liaison iecontrai^nit d'en sor-
tir sur-le-cltamp, et, maigre la ii;;uetii
delà i^auou, ti fui ohli;;é de se remettre
en route avec .«a femne et cinq en-
iants dont le plut .q;ë n'a\ait pas
huit aus, et le cadet trois mois. H par-
vint, non »ans peine, à ^af;ner \A ih-
raar où >eà enneniis con&eutiient a le
laisA^r en rrpoi». Son exd cessa deux ans
•pré», et il lut élu pasteur à l\ostock ;
maie, à peine arri\é dans cette tilir, il
V tonba malade et mourut le 1 1 juin
. i it)i, â^é<ieulement de trente-six ans.
Outre quelques //Vrcj de lht-ulot;ie, ou-
bliés depuis lonj; îeiups, on a de Ju-
dex: De typugraphiiz incenliune ri
de pnrlormn legilinm inspettiune
Wieiius hrcK>is et uiilis , Copenha^^ue,
1566, petit in-8". Celte édiliouori-
328
JUD
(finale est très-rare; mais l'oiivraf;c a
été recueilli par Wolf dans les 3Ionn-
virnta ty pograph. ,1, l'I-ilO. Le
titre annonce suffisamment que Ju-
dex n'est point un partisan de la li-
berté de la presse sans restriction.
Quoique, dit-il, par sa nature la presse
soit libre, il n'est pas un seul écrivain
qui refuse de soumettre ses ouvrap;es
à une commission de censure, établie
légalement ; car il n'en est aucun qui
veuille refuser à l'église et à l'état l'o-
béissance qui leur est due. Mais il se
plaint que les consistoires aient usur-
pé le droit de nommer, sans le con-
cours des magistrats, des censeurs qui,
par ignorance ou mauvaise volonté, re-
tardent la publication de livres utiles,
tandis qu'ils en laissent paraître de
dangereux pour la fol et pour les mœurs.
J3'aillcurs Judex, zélé protestant, ne
cesse dans cet ouvrage de déclamer
contre l'église romaine, qu'il appelle
le royaume de l'antechrist ; et, remar-
quant que la découverte de l'imprime-
rie n'a précédé que de soixante-sept
ans la prédication de Luther , il en
conclut que Dieu, en accordant l'im-
jtrjiuerie aux hommes, a voulu donner
un moyen de combattre l'antechrist,
c'est-à-dire le pape , et d'en triompher.
Judex ne parle qu'en passant de la de-
couverte de l'imprimerie; et il connais-
sait si peu les procédés typographi-
ques qu'il est persuadé que les Aides
s'étaient servis de caractères d'argent
pour imprimer les œuvres de CicéroH;,
et ulia philosophwa , et que c'est à
l'emploi de ces t vpes qu'est due la beauté
de leurs éditions. On peut consulter
pour plus de détails : Dr. vita Miil-
thœi Judicis. par André Schopp (1).
Crenius a réimprimé cotte harangue
funèbre dans ses Aniifi(i(h^r.rsionrs
' i) Ati'lri- .Scbo|),') jvoit tpousc la vruTn Ar.
•lu'Iex, et par ioti«ei|ucnt derail pT»- bim in-
struit de toiitP5 les particul^ri'é* de &a vie si
courte el si agilre.
JUÉ
philologicœ, VI, 49 ; et Bayle en a
donné, dans son Dictionnaire, une
analyse très-intéressante ; mais il ne
connaissait pas l'ouvrage de Judex
dont on vient de parler, et qui seul
peut garantir encore quelque temps sou
nom de l'oubli. W — s.
JTJÉNIIV (Pierre), historien
de la ville de Tournus, né à Bourg-
en-I»resse le 11 décembre 1668, em-
brassa l'état ecclésiastique et fut pour-
vu, en 1691, d'un canonicat à la col-
légiale de Saint-Philibert de Tournus.
Il profita de sa positlo.n pour faire une
étude approfondie des chartes de celte
abbaye que Pierre de Saint-Julien et
Chlfflet n'avaient examinées que su-
perficiellement. Ses recherches le con-
duisirent à jeter les bases d'une nou-
velle histoire de l'abbaye et de la ville
de Tournus. Il en amassa les maté-
riaux pendant près de quarante ans, et
la mit au jour sous le titre de Nou-
velle Histoire de VAhhaye royale et
collégiale de Saint Fhilihcrt et de la
ville de Tournus , enrichie de figu-
res, avec une table chronologique, des
remarques critiques sur le tome IV de
la Nouvelle (^aule chrétienne ; les
preuves de l'histoire , le pouillé des
bénéfices dépendant de l'abbaye, et un
essai sur l'origine et la généalogie de
Chàlons , de Màcon, et des sires de
lîeaujeu, par un clianolne de la même
abbaye, Dijon, 1730 et 1733, 2 vol.
in-V\ Le savant auteur a donné au
développement de son sujet toute l'é-
tendue que ses laborieuses recherches
justifient. Kn vain lui a-t-on reproché
des détails trop minutieux. 11 n'y a
plus rien de trop dans les histoires de
nos vieilles cités. Depuis que la plu-
part (les monuments quMles rappellent
ont dispai u , c'est là seulement qu'on
peut retrouver encore des traces de
leur existence. Les négligences de style
sont aussi une imperfection qu'il faut
se garder de relever dans ces sortes
JUG
H'ouTra^o. L'historirii de Tournu:»
Irjtle, par ocrxMon, de quelques pniiilN
CutieuK de I lii»loire dr tunce qui se
r Jll jrlienl » »on >uiel . < )ii lil avec heau-
rnup d'iiilnêt le détail de> ho>lilile>
qui rrlaleieut enlie la «ille et l'abbave
peiulaitl la ii^ur (Iliarune (l'elle> a\ait
son armée qui eikcrçail lour-à-lour \ei
pluN ^raiidN ra\a;;rs dans la conirée.
1^ seroiiil \uiume roinprend les litres,
les actes et \ts autorités qui servent de
pièce» justificati\es »u rorpr. de l'Iii^-
loi'e. l/abbc I^beuf a>aiit critiqué,
dans le Mercure de 173i, quelques
av«ertion> de l'auteur relati>e^ au niar-
l>ie de sailli Nalérien, l'aLhe Jur
mil V répondit par une leltie inse-
rér liaiLs le volume du même |ouriul,
qui parut au mois de juillet suivant.
Succexvivement diantre et doyen du
diapitre , il mourut le 17 novembre
I7i7. L— >i--\
jrtiK dr Saint-Martin i J m -
QiKS-JtKSFPii), né le 16 septembre
1743 , ï Limo|;es , oii sou père
était conseiller au présidial de cette
rille, exerça lui-même pendant quel-
que temps des fonctions de raa;;is-
trature. l'Iuî tard , il piofessa l'his-
toire naturelle à l'école reiiliale du
département de la Hautc-N lenne.
Mais un penchant irrésistible l'en-
trainait \ei . l'arronomie: il j consa-
crait tous ses loisirs et 6iiil par s'y
livrer exclusivement. Il existait à l.i-
rooees nne société d'agriculture , à la-
quelle l'urf^ot {Voy. ce nom, \LN II,
69), lorsqu'il était intendant du Li-
mousin, avait donné de praiiiis encou-
ragements. Jut;e de Saint-Martin en
fut, des rorif;iiie, un des membres les
plus actils cl les plus inllueiit>. Par
ses conseils, ses exemples et m« me ses
secours, il contribua beaucoup à l'a-
melinration de l'art agricole, et sur-
tout de la culture des arbres, dans
cette contrée. I^a sociclé centrale d'a-
,;riculture de Taris, dont il devint en-
JUG
3iq
(Mille coït espondant , lui décerna une
métlaille d'or , m pour avoir mis les
cultivateurs de son voi.Miia;;e à portée
de se procurer, chaque année, de»
milliers d'arbres de diflei entes espères,
qui n'avaient jamais ete cultivé» dai'f
hnn canton. •• l^i-inême a\ait établi
de belles pépinières sur deux cents
hect.ir. dr* mauvaises terres qnM pos-
sédait ; et il attachait à ce> planlalion»
les noms de ses enfants , de ses amis,
ou d'illustres compatriotes : ainsi, par
exemple , on v vovait le bois r/'.V-
gufssniu, le bois lurgvt, le bois .V/V-
Krstre. il mourut le 'i*! janvier IH'JV,
à Kiino^rs, avec le titre de président
honoraire de la société d'a^ricultuie,
des sciences et des aris de cette ville.
D'après ses intentions, son ceiru''»!
fut lait avec le premier sapin qu'il a\ail
planté. Dans des stances dr ^a compo-
sition, il rap(>elait agréablement (pie
l'amnal Nelson voulut aussi que son
cercueil fût creusé dans le tronçon d'un
niél. Ju^e de Saint-Martin a publie :
I. Traitr lif la ctiUurr ilu thénr ^
Taris, 17W*, in-8", avec 6-. Ot ou-
vra;;e, ^n jugement des agronomes, est
encore le meilleui qu'on ait publi*" sur
cette matière. 11. Sotite tirs arhrrs
rt (ir/>ustrs qui rroissrnt naturtlit'-
mrnt int qui pru\'rnl rire rlrx'fs rn
pleine tfrrc flans le Limousin , Limo-
ges, 171M), iii-H' . IIL Ohsrn^utinns
météorologiques et eronomiques, fai-
tes pendant Cannée 17*M dans le
defHirtemenl de la llaute-l ienne ,
in-H". IV. Proposition tT un congres
de paix générale ^ Limoges, 17ÎMJ,
in- 12. V. Théorie de la pensée , de
son afti\'ité primitix^e et de sa con-
tinuité, Tans, 1806, in 8", avec gra-
vures. C'est un livre élémentaire des-
tiné a l'instruction de la jeunesse. NI.
Description pittortS(/ur d une métai-
rie dans le département de la Hau-
te-lienne , Limoges, 1806, in-12.
\\ï. Changements sun^enus dans
33o
JUL
les mœurs des habitants de Limoges
depuis une cinquantaine d'années ,
2*^ édition , anr,!nentée, îbid,, 1817,
in-8". La l''^ édition, imprimée en
1808, ne fut tirée qu'à cent exemplai-
res. Cet ouvrage renferme des détails
intéressants sur Thistoire, les monu-
ments, les usages, etc., du Limousin.
VI II. JjU vie champêtre , en vers
libres ei simples comme elle^ ibid.,
ln-4*'. Dans la séance du 5 mars
182i de la société d'ap,riculture de
Limoges, M. Ardant lut une Notice
nécrologir/ue sur Juge de Saint-Mar-
lin, imprimée in-8°, et M. Alluaud ,
secrétaire de la même société, a pu-
blié sur cet agronome un Essai his-
torique, Limoges, 1827, in-8°. On
y trouve les stances intitulées : A mon
Seau sapin , âge de cinquante-cinq
ans. P — RT.
JULIEl^, %\xiT\ommt Antecessor
(en grec ÀvTixzv^Mp), vécut sous Tem-
pereur Justin-le-Jeune, vers la fin du
Vj*^ siècle. Outre quelques épigram-
mes que l'empereur Julien {Voy. ce
nom, XXII, 136) a fournies à l'An-
thologie grecque, ce précieux recueil en
contient quatre qui sont attribuées à ce
Julien, et dont le genre facétieux con-
traste avec son titre à' Antecessor^
jurisconsulte ou professeur de droit.
C'est ainsi qu'on appelait encore à
cette époque les maîtres qui initiaient
la jeunesse (quia antecedehant) aux
études de la législation. 11 avait traduit
du grec en latin les Nooelles de Justl-
nien et rédigé la Collation des loismty
saïques et romaines .On n'a pas s!»r lui
d'autres notions. — Julifw, d'Egypte,
fut proconsul de cette province et Ho-
rissait sous le rè,;ne de Jnslinien, rers
le milien du VI* siècle. Son épigramme
K>:'.v'-ç twavvr.: {/innlerta de lirunck,
II, 509; Anthol. pnlat.. Vif, 5Î>0)
mériterait, am jugement de Vincent
0ps9|)œns , d'éirt ^rite en lettres
dW et eonscrtée ^i» toatf» les mé-
JUL
moires [aureis litteris est scribenda
et imis omnium reponenda sensi-
hus). — Nous signalerons aussi une
autre petite pièce du genre anacréon-
tiquc qui se trouve dans le fameux
manuscrit d'Heidelberg , parmi lea
odes du poète de Téos. Elle eiit
certainement passé pour être d'Ana-
créon, si l'Anthologie de Planude, qui
nous l'a aussi conservée , n'avait pas
nommé son auteur, Julien d'Egypte.
En voici une très-ancienne et naïve
traduction :
« Un jour, un bouquet tissant
«t À ma gentiUc aniuurée ,
«< Pariny je trouvai gissant
«c L'aisléfils de Cylhéree.
M Loi'i je le plonge en mon vin
« El le bus. Quelle adventure !
« Depuis mon cuear eu enduro
« Des uiaux qui n'ont pas de fin. >»
— Il ne faut pas confondre ce Julien
d'Egypte avec un autre Juliew, éga-
lement poète anthologisle , *qul est
connu sous la désignation de àirô
brAo'/(y>^ Atp-TTTO'j, c'est-à-dire ex-préfet
d'Egypte,ou,comme traduit M. Jacehs:
ex génère prœjcctorum Mgypti.
Celui-ci était un oncle de Tempereur
Julien, qui, vers l'an 360, à l'exemple
de son neveu , apostasia , devint l'im-
placable ennemi des chrétiens, et laissa
dans son gouvernement d'Egypte le»
plus odieux souvenirs (Voy. Théodo-
ret , liv. III, ch. 12; et Sozomè'
ne, liv. V, ch, 8). Ces deux Julien
ont été victimes d'une telle conlu-
siort qne , parmi les soixante- onze
épigrammes qui appartiennent à l'un
ou à l'autre , il serait impossible
d'assigner à chacun d'eux la part
«xaete qui lui revient. Ce qui est cer-
tain , c'est que leur poésie est char-
mante, qu'elle rivalise avec celle des
poètes primitifs, et qu'en osant refaire
des é[)igrammes, même citées comme
de» chefs-d'œuvre, ils ont quelquefoi.s,
d»n8 cette lutte, partage le prix de la
gr^e, de l'énergie et de l'enjouement.
D— H— K.
JLL
JDL
ni
4\ LLÎV:M Jth i)rtimr[y\Kiu
ANToiWf.l, fonvcnlionml, nr au iV-i./
Hf H«inaii« , dan* Ir l>au[>hiii«f, m
17 VI, A'ant fariiillc oUrurr et «ans
forfuiie, se rern\\\ à Faii« Aè^ l'.i^p He
4i\ huit an», rt y rniitinua dr-> Hudn
à peine rninmrntées i\»n% 5a patrie.
Ne sarhant pa» niénie le^ premiers
ëlétiients du latin, il «uirit un rniirii de
rhétorique umt le cH^lMe i^ebmn, et
6t àc tel» propre», au à la fin de l'.in-
née il obtint un prix d'amplifiralinM
Il ne fil ensuite connaîlrr ' ' îta
per^innna^e^ en fre«l!t, i ^r^
rëUbre abl»ë de Mablj. (]n. le pré-
*enta .^ l.i d-rhe^^e de Dantille, fem-
mt ' . cliei laquelle 5e rëu-
nivN.i jiies ^fn^ de lettres et
piiiiiK^tphr.i, ou sapr* de IVpoque,
as>ei aten^lcs pour dé^irrr et préparer
Mne révointinn qui de^ait bienlAt les
perdre. A la reenmmaiidafioi: de Ma-
blf , M™* de Dantilie rhar^ea Jullien
de rëdiiration du jrune prince de
l.ëon, son peiit-fiU; et il eut A^n> le
inéino teinp5 encore d'autres éh-ve^ i
diriger ; ce qui lui fil ime av<rï bcl'e
exl^lenre. Mais tout cela ne pouvait
lui >nff!rr; \ntj!.Tn1 sVIever encore , il
se lu icemeni, nn
d,.,
«I: la réro-
Inlion. N)n enlliou^ia^me éclata sur-
tout daui la cf>i respondance qu'il eut
alors t\ec ses amis dn Danpliiné , oè
Ton sait que l'exallttion r«^olution-
naire fui esce-wire. Ses lettres répan-
dues dans le départ cineiil de la I)rAme
lui firent une irpnlation, et il fut
nommé en 1791 dépiîlc «uppiéanf i
rassemblée lr-islat'\e on il ne *ié;;ea
pas, puis député i la CoiTrntiofl n.i-
linuale oà il siét;ea t\ rmmot de la
monla;;ne. Sa prr Mon fut
contre le p;énéral ^: .ti, qu'il
prétendit que tous les soidnis de son
armée regardaient comme im ti-ailre.
Dans la séanre du 26 décembre 17î>5,
qui fut très-wâfjense, il prononça ati
rtilieu Afs cris et du plus ^rand tu-
■nlte, nn •! cément pour ap-
puTcr la ; dp IVuhein, qui
itâit .1 \Vlfùtju;;é
sans «»• ' te li's hau-
* trurs que l'on désigne sous le nom
• de Mn'ttugne, dit-il ; c*e<t à cet
« TbernH»p\les que les Spartiates naB-
•• ront mourir pour sau\er la lî-
« bené..." Il attaqua ensuite Defer-
inon qui présidait ; Paccuo d'une
piirtifilH/' rfK'offiwtf pour la tausr
(1rs h " ir eu des entre-
tien^ . Fuis il ajouta :
m Je tlcciaiiJc que la sonnette Im voit
•• arrachée , et qu'il aille se carhfr
«♦ dans l'un des cotn> le* plus (
•• de la -^alle .. >• Defermon i
dit a\er beatiroup de calme , et l'as-
semblée pa-sa i l'ordre du jour. Jul-
lien vola ensuite pour la mort de
Louis XVI, *ans appel et sans sursis i
l'exécution, déclarant qu'il «ivi/V /ou-
jofir.i haf frs rois, et que son huma-
riifr t'ifa/rrr. nxmt r'routr la voix
<' ' lie [sir*, lui ur-
•r la mort Dans
' i!;i 2 juin 1703, lor«que
I attaquait avec tant de cou-
ra;;c et d'énerjp» le^ auteurs de la ré-
volution d:i 31 mai qiii \enait de se
consommer, Jullien I accu>a de ca-
loniiiier les habitants de Pari<. T.e len-
demain de la ré\olution du 1) thermi-
dor qui avait renversé Robespierre,
le député de la DrAme, suppliant, do-
! ^rp pour son fils à peine â;;c
:is, dit-il, et que Tallîen et
i'.A-...:: li.'nnnçaienl siraMitanéincnl
cofTimc l'aj^i-nl et le protégé du t\ran
qui l'avait nii> à la tête de Pin^rurtion
^•tibiiiiue. Jullien déclara que ni lui ni
son fifs n'avaient demandé cette place;
et la G)nvention passa à l'ordre du
jour. Après la ses>ion conventionnelle,
Jullien ne remplit plus de fonctions
pni>liques, et il continua d'ha!)iler la
capitale sans faire parler de lui, même
332
JUL
quand il publia, en 180*2 et 1803,
dans le Mercure, quelques morceaux
de poésie , entre autres, la Nouvelle
Rufh, qu'il réunit, en 1807, dans un
recueil de ses œuvres sous le titre à'O-
fjusrules en verà\ vol. in-8", de 107
|)aj;es. En 1814 il se retira dans ses
propriétés du Dauphiné , oii la loi
d'exil contre les votans ne l'atteignit
point, parce que n'ayant pas rempli de
fonctions publiques dans les Cent-
Jours de » 8 1 o , il n'avait pas signé l'acte
ad.lilioiinci, 11 mourut, par accident, le
27 septembre 1821, laissant deux fils,
dont l'un est M. Jullien de Paris, dési-
gné ci-dessus. — Jullien ou Julien
(le loî'.louse (Jean) , autre conven-
tionnel qui, dans le procès de Louis
XVI , vota également pour la mort
sans a{)[!e] et sans sursis à l'exécution,
cl ait né à Nîmes dans la religion
protestante dont il devint ministre.
Comme son homonyme , il siôgea sur
la montagne; et, dans différentes mis-
sions ainsi que dans tous ses discours ,
il manifesta des opinions très-exaltées ;
ce qui n'empêcha pas qu'il ne fut dénon-
cé par Pvobespicrre cl mis hors la loi.
Persécuté encore après la révolution
du 18 brumaire à laquelle il s'était op-
posé, il se réfugia à Turin d'où il ne
revint qu'à la restauration. 11 s'établit
alors à Kmbrun, où l'on présume qu'il
est mort, — Jullien de Paris fut, dans
les premières années de la révolution ,
l'un des plus ardents Jacobins de la
capitale. 11 était ami de Tjouchotle et
de Marat ; et, après la mort de ce der-
nier, il annonça qu'il allait élever un
autel à son cœur. Il se plaignit que
l'on ne jugeât pas assez promptement
Brissot , % ergniaud et la reine Marie-
Antoinette. 11 est mort au commence-
ment de ce siècle. M — d j.
JULLIEX (Andhé) , né en
176(), à Chàlons-sur-Saone , s'est fait
remarquer par ses découvertes et par
ses écrits, dans la carrière industrielle.
JUL
Négociant en vins, il ne se borna pas à
l'exploitation de son commerce. L'œ-
nologie, cette branche importante de
l'économie rurale et domestique, fut
l'objet spécial de ses recherches et de
ses travaux. Ses premiers essais en ce
genre obtinrent le suffrage de Chaptal,
ancien ministre de l'intérieur ; et plus
tard la société d'encouragement l'ad-
mit au nombre de ses membres. Atteint
du choléra, il mourut à Paris en 1832.
Outre divers procédés aussi ingénieux
qu'utiles , tels que des cannelles aéri-
fères, pour transvaser les vins en bou-
teilles, et une poudre pour leur clarifi-
cation , inventions qui méritèrent à
Jullien des médailles à plusieurs expo-
sitions des produits de l'industrie, on
lui doit les ouvrages suivants : L Ap-
pareils perfectionnés , propres à
transvaser les vins et autres liqueurs
avec ou sans communication avec
Vair extérieur, Paris, 1809, in-12,
et une planche. Cet article est extrait
de la Bihliothèque physico-économi-
que, où il fut d'abord inséré [Voy.
Sonnini, XLÏII, 97). II. Manuel
du sommelier, ou Inslruciion prati-
que sur la manière de soigner les
vins, Paris, 1813, in-12, avec une
planche. Cette première édition est
dédiée à Chaptal; la 2*^ parut en 1817.
L'auteur y ajouta, en 1820, un sup-
plément qu'il refondit dans la 3' édi-
tion, Paris, 1822, ln-12. avec 3 pi.;
la 4*^, publiée en 1822, est augmentée
d'un chapitre sur la litharge ; enfin sa
veuve en a donné une 5*' en 1836. Le
succès de ce manuel en prouve suffi-
samment l'utilité, m. Topographie
de tous les vignobles connus ; con-
tenant leur position géographique,
Vindication du genre et dr la quali-
té des produits de chaque cru, les
lieux où se font les chargements et
le principal commerce de vin , le
nom et la capacité des tonneaux et
des mesures en usage, les moyens
JUM
tir transport ordinairement nu-
l»loyès^ elc; suùir tfunr classifua-
tiim grntraU des vins^ Paris, iSI6,
XH'l'l, in-8"; .rc.lilion, ibid., 1H32.
C'est un ouvrage «|ui a eM^«* bcaïunup
i\f mhcrclàcs , cl qui rciiicniie des
di-U;!s exarts cl curieux. Ainsi, par
cxrmple, d'après le* calcuU de l'au-
leur, 1 ,7r>V,ri7:i hectares du sol de la
France sont culli>«*<i en >i^ne» el don-
iu'iil annuelleiuriit un produit inn>en de
:U,(>t:2,V.')2 lieft..lilir^. Otte '-.taliv
ti(|ue de loiLs le» > ignoble» de>> dn erses
contrées de la terre (ut accueillie fa-
Miiablomeiit , et valut à Jullien une
médaille d'or que lui décerna la so-
ciété d'encoura;;eineiit. P — RT.
41 MKL Jr.AN-CiiARiKs\ né à
l'an-i \e\<> le milieu du XN lil*^ Niècle,
rtudia d'abord le droit et prit le ^rade
de licencie. Avant embrassé l'état ec-
clésiastique, il s'adonna à la prédica-
tion, fut pourNU d'un canonicat au
chapitre de Saint-Marcel à Paris, de-
vint ensuite chanoine du ^lans, puis
curé de Houilles près VeiNailles. l'Ius
l.ird il professa les humanités dans un
rollèt;f, el mourut en 1S2V dans une
petite cure qu'il desier>ail aux euvi-
loni d'\\allon. On a de lui : I. Klos>e
lie Su^er, Paris, 1779, in-8". C'e>l
un di>cours nui concoorut pour le prix
piuposé par l'Académie franca.^e. II.
/ . /( >^r (If .) /< I rie - 1 herès^ , i m fier a -
trùe, reine de Hongrie, etc., ibid.,
1781, in-H". Lonf;-temps après, l'au-
teur reproduisit cet cloj;e sous le litre
de }f(irie-Thérèse,inifM-rtiirire^ etc.:
.1 riions de counige et (tt tes de Itien-
fuisame de celte auguste suiu^eraine,
Paris, 181(>, in-18. III. Petit ca-
rême prêché en 1782, iii-S". IV.
Eloge de (Jiarlemagne, 1810, in-8".
V. Introduction à C éloquence , ou
Eléments de rhétorique, Paris, 1 8 1 2,
in- 12. VI. Galerie des enfants, oa
les Motifs d'une noble énnilalion ,
Paris, 1813, in-12; ibid., \' édit..
JL.M
Z^Z
18'iô, m 12, avec G-. VIL Caterie
des jeunes f ter sonnes , ou les (Juu^
litès du curur et de r esprit. Paris,
1813, in 12; ibid . .V édit., 1826,
in-12, a\ec G;;. N III. lien^ey-, ou
Le meilleur des hommes de son siè'
de, drame en trois actes et en prose.
Pans, I8IV, m IS. 1\ Ornements
du cuur humain, ou / arietes iiiw-
rales et historiques, ibid., I8|.'i,
in-18, avec fi^. Junicl a étf l» .1 leur
de quatre lecueilsde l'a/iie.\[i* l..>ope,
de l,a Koiitaine, de Kénelon cl de tlu-
rian\ ptrcedé^ de notices sur les au-
teurs, Pari>, 1813, V toi. in-18, plu-
sieurs fois réimpnmi's. P — ht.
«M'MELIX (Jlan-IUptijtf.).
f avant français, naquit le 12 septem-
bre 17V.'>, et %i?it de bonne heure i
Paris étudier l'analomie et la clinique,
la pathologie cl la matière nu-ilicale.
IVeçu docteur à l'ancienne Faculté, il
se répandit dans un mondt* assez bril-
lant sans toutefois s'v piocurer une
bien lucrati\e clientèle. Aussi n'eut- il
aucune peine à quitter Paiis pour faire
un tour en Orient à la suite du romlr
de Choiscul-Gouffier , ambassadeur à
la Porte, et re^atda-t-il comme une
partie de plaisir cette excuiMon à
Conslaniinople et en (ircce. Il est
inutile de dire que ce n'est pas la di-
plomatie qui l'attirait. L'ambassade
qui a produit le / Oyage pitiorcique
en (jrèce est plus celèbie dans les
lastes de la littérature que dans ceux des
chancelleries; ce qi.e nous ne disons
pas, certes, afin de déprécier l'illustre
ciuiJle, pas plus que nous ii.» croirions
diminuer le lenom de Kusbeci], en
rappelant que si sa mission près de
S^iman-le-Grand n'eut p.is ^raiid
succès , du moins elle valut i l'I'.urope
el le superbe maniiscril de Dioscoride,
accompa^^né de deux ou trois cents
autres, et nombre de belles plantes
parmi lesquelles le lilas et la tulipe.
Kn se trouvant si près delà terre clas-
3:^.4
JUM
sique de la grande poésie et des beaux-
arts, et à la suite d'un explorateur dé-
terminé d'antiquités, le docteur delà
faculté de Paris devint antiquaire à
son tour, et se mit à visiter curieuse-
ment les beaux débris seniés sur le sol
de la péninsule ottomane. Il traversa
la Thessalie, rHeliade et le Pélopo-
nèse, et dans un coin de laLaconie,
à l'extrême sud, il eut le bonheur de
retrouver les ruines , de fixer l'empla-
cement précis de G^thium, ce port de
Sparte dévasté par Ëpaminondas, mais
qui redevint florissant quand Thèbes
fut retombée dans son obscurité. Vers
la même époque, le hasard jeta sur sa
route Spallanzani que des vues toutes
différentes guidaient en Grèce, et qui
allait achever ce long voyage qui fait
époque dans l'histoire de la zoologie
et de l'anatomie comparée. Jumclin
qui venait de bien mériter de l'érudi-
tion voulut de même bien mériter de
la science. Il aida Spallanzani dans
quelques-unes , peut-être dans beau-
coup de ces belles expériences microsco-
piques qui sont un de ses litres les plus
réels à la gloire. lîicn que la collabo-
ration de J umelin ne puisse le mettre sur
la ligne de l'immortel naturaliste, mil
doute que l'adresse manuelle et l'apti-
tude de l'un n'aient été une bonne
fortune pour le génie de l'autre , et, du
leste, Spallanzani ne le méconnut pas.
.1 umelin était de retour en France
vers les commencements de la révolu-
lion. 11 passa silencieu-sement ce temps
d'orage entre les travaux de sa pro-
fession et l'étude des sciences physi-
ques pour lesquelles sa prédilection
élait devenue plus grande peut-être que
dans ks premières années de sa vie.
il expérimentait et décou\rait ; il ex-
posait et décrivait. Kt c'est vraiment
à ce moment de sa vie que se rappor-
tent la plupart des ingénieuses inven-
tions qui doivent sauver son nom de
l'oubli. Nous mentionnerons, entre
JUM
autres modèles exécutés de sa main ou
sur ses indications , une machine
pneumatique d'une construction parti-
culière, et une pompe à feu dans la-
quelle le mouvement du pi.ston n'é-
prouvait point d'interruption. Il ima-
gina aussi un moyen de prendre l'eau
au bout d'un siphon recourbé , sans
interrompre le courant établi dans le
siphon. On lui doit de même diverses
recherches intéressantes en médecine
ou en physiologie. Il essaya de déter-
miner expérimentalement les effets
que produit l'électricité sur l'économie
animale, et les résultats de l'usage
des styptiques sur l'irritabilité humai-
ne, et l'action des liqueurs enivrantes
sur la même faculté. Peu de temps
après la réorganisation des acadé-
mies, il lut à la troisième classe de
l'Institut un mctnoire contenant la
relation de sa découverte des ruines
de Gythium. Nommé ensuite profes-
seur de physique et de cliimic au Ly-
cée impérial , il fit preuve dans cette
chaire d'une grande lucidité d'expres-
sion, d'un grand talent de déduction ;
et probablement il eût fini par être de
l'Institut, s'il n'eût payé le tribut à la
mort un peu plus tôt qu'on ne s'y at-
tendait. Cet événement eut lieu le 25
septembre 1807, à Visigneux près de
Boissons. Il venait de publier le pre-
mier tome d'un ouvrage alors néces-
saire pour les collèges et hors des col-
lèges ; c'était son Jrciilc (Hémentaire
de physique, de chitine et des scien-
ces physico-mutiièmntiijues, Paris,
IHOO, in-8'^ : il ne put en donner le
second, que pourtant ses amis firent
quelque temps espérer au public, di-
sant (ju'il était piét pour l'impression :
probablement il n'en était point ainsi;
far comment croire qu'on l'aurait
laisse en portefeuille? Ce traité se re-
commandait à l'époque de son appa-
rition par l'élcgance et la clarté par-
faites du style et aussi par la conci-
JLM
3SS
tin«: s'il Ml paru dt ciaq à tii jim
piM lA(, il eût i^é le preaiier, il eftt élé
U t^«l. (^e n'riail t^urre , on *tn
i . quo la rétUclion
«! . pour »a cIma«.
L^uUut > p^**e eu re\ur tapidcment
Inote» Tn sommité» de b pintique et
i\e la rhmie, telles qu'on 1 m Apprenait
de son temps dans les rollè^e* : depuis
CHi r^t devenu un peu plu* e&igeint,
et aujnurd'liui que les sricnees ont
pris lin immente développement , qoe
sur les bancs rarme on les ruitive
comme •périiiité ; que , comme |>our
dupenser d'un maître, les livres soHt
iongt et pleins de délai!» , on trouve-
rait le manuel de Jumrlm trop aai<>
gre, trop sec : on >r plaindrait de la
sobriété a\rr laquelle il donne des
ciemples , on du ait que ses explica-
tions sont supei liciclles et vai;ues ; on
regretterait qu'il ail semble reserver
toutes les inathématM]uespour un deuxiè-
me volume qui devait ne point paraî-
tre. Nous ne parlons pas d'imper-
fections involontaires tenant à i'etat
d'imperfection de la science, roni.nc la
classiBcatiou des sels de potasse, de
soude, de barUe, etc., sous la nibri-
qiie des composés teinai.e^, et d'au-
tres faits de ce ;;enre. (les erreurs se
trouvent au&si dans Fourcrov, et tout
traiié de chimie, à celte époque, les
eût ir|»etees. Outre le volume qi;e
nofjs venons d'apprécier , on doit en-
core a Jumelin de* iru\>res dioersfs
ronrrrnani 1rs srirnrrs et U3 arts y
179'.). in-8'. F— OT.
JtAIlLIlAC (N Chapiilf,
baron de), né le 3 septembre 1753,
issu d'une famille très-anci'nne et al-
liée aux plus illustres maisons Je
France, embrassa, dès son plus jeune
iof. , la carrière militaire ou il et ses
premières armes dans le ré^^iment
d'Artois, cavalerie. Il fut ensuite cliar-
gc de missions diplomatiques auprè
de plusieurs cours du Nord, et séjourna
MMlqif temps à celle du (trand Vr^
àkk. De letour en France, il fut
promi au grade de rolonri et part il «
avec l« litrt di* rnn^iMJler d'ambassa-
de, pour l.isboiiiir on il ne ro»la q'ie
deux ans, revini ik l'ans et obtint la
survivance du nonvernemnit di* la
Bastille, dont était titulaire l'infortuné
roarqnis de l^nnav , ntn bean-péte.
Peut-être eiit-il péri avec lui le li
juillet 17H<J, si celui-ci, par un acte
de prérovance à la fois triste et heu-
reuse, n avait pourvu d'avance au ^a-
lut d« son cendre en l'éloignant dt
lui. I.e baron de Jumilhae n'éni^ra
point et vécut dans l'obscurilr j(uu|n'eii
IHli: il rr 'elxKtis Wlll
la croix de .'^ ^ avec le brevet
de m»ré<-}»al d*-f.ïmj». 1^ collo{;e élec-
toral du d*'(iirtein«nt de Seine et-
C)ise,ii » en septembre 181. ■»,
l'élut r •• la chambre des dé-
putée. H T appnva, en avril iKlft, la
propmition de M. de I*aclie>e .Murel.
tendant à replacer entre les mains du
rleroé catholique le^ registre» de l'étal
civil. Tout en insistant sur cette né-
ce**ilé sous le rapport des principes
r.4tgietjx, il ajoutait : « IVul-élre n'e^l-
■ il pa> une seule commune en Fran-
« ce, ou, par la ne^lijjrnee avec la-
■ natlle «^onl tenus ■ d •
« I état civil , on ne lir^
« fautes grossières qui rninpromettent
«• les intérêts privés; d.ins celle que
•• j'habite, qui n'est fom|>osée que de
« cinquante feux, j'ai élé obli;;é de
« faire rectifier un acte de décès qui
«( enterrait la femmo au lien du mari,
■ et deux acte* de naissarKe on l'on
« désii^nait une jeune personne cora-
« a>e appartenant au sexe masculin ,
« tandis que son frère était censé du
M senre ft^niinin.» Après la dissolu-
tion de 1.1 r; nnibie de 1815, le ba-
ron de Jumiliiâc pr«î>ida encore le
collège électoral de Seine-ct-Oise qui
le réélut député. Dans les quatre ses-
336
JUM
JUM
sions auxquelles il assista , Jnmllhac
vota habituellement avec la minorité
du côté droit. Il mourut dans son cliâ-
teau de Gui^neville , près Arpajon ,
le 7 juillet 1820. — On a de lui : I.
Réflexions sur tétat des finances ,
sur le budget de 1816 et sur les
moyens les plus propres à fonder le
crédit public, Paris, 1816, in-8°.
II. Opinion sur la proposition de
M. de Lachèse-Murel , tendant à
supplier le roi de vouloir bien Jaire
proposer un projet de loi pour
rendre aux ministres de la religion
les fonctions de l'état civil, Paris,
1816, in-8". — Le baron de Jumilliac
a donné quelques articles dans les Mé-
moires de la société d'agriculture et
des arts du département de Seine-et-
Oise. On trouve dans ces mémoires
une notice sur lui par Duchesne
(XXr année, pages 92-97), et dans
le Journal des Débats du 16 juillet
1820. L-s— D.
JUMILIIAC (Antoine-Pier -
RE-JosEPH Chapelle, marquis de), né
le 31 août 1764, parent du précédent,
était fjls du comte de Jumilliac, lieute-
nant-général et commandeur de Tordre
de Saint-Louis, petit-GIs du marquis
de ce nom qui commandait les mous-
quetaires gris à la bataille de Fonte-
nov. Il entra au service en 1777 dans
le régiment du Roi, infanterie; il con-
sacra ensuite quatre années à ^isiter
les principales cours de l'Europe, où il
reçut des souveraini Taccueil le plus
flatteur. Nommé en 1788 major de
coloncl-géuéi al hussards , ;l se livra
tout entier à l'étude de la science pro-
pre à celte arme , et fut bientôt cité
comme un excellent officier de cavale-
rie. En 1791, Louis XVI le nomma
lieutenant-colonel de sa garde consti-
tutionnelle. Arrêté après le 10 août
1 792, puis échappé au massacre des pri-
.sons, il émigra et servit dans les armées
des princes. Il fit partie de rexpédjlion
de Quiberon , reçut , à l'affaire du 6
juin 1795 , de graves blessures dont il
se sentit toute sa vie, et obtint à cette
occasion la croix de Saint-Louis. Il
avait publié à Londres un récit inté-
ressant de cette expédition si désas-
treuse dans les annales dei'émfgration.
Rentré dans sa patrie, il reprit du ser-
vice après le 18 brumaire. Il fit en
1812 la campagne de Russie et mé-
rita d'être décoré à Moscou de la croix
de la Légion-d'Honneur. Il avait
épousé depuis son retour en France
une sœur du dernier duc de Richelieu.
Après la restaurai ion, il (ut nommé lieu-
tenant-général de cavalerie, comman-
dant de la 16** division militaire à Lille,
en octobre 1815, et commandeur de
l'ordre de Saint-Louis, le 3 mai 1816.
Au mois d'octobre suivant il présida
le collège électoral du département du
Nord, et le présida encore en août
1817. 11 mourut à Lille, le 19 fé-
vrier 1826, des suites d'un abcès sur-
venu à une ancienne blessure reçue à
Quiberon et de plusieurs attaques suc-
cessives d'apoplexie, laissant le meil-
leur souvenir du commandement qu'il
y avait exercé. — Son fils aîné, Odet
de Jtimilhac, avait obtenu, en 1821,
du roi Louis XV III, de si;ccéder au
nom et à la pairie du duc de Richelieu,
son oncle maternel, qui venait de dé-
céder sans postérité. L — s — d.
JIIMO.WILLE (GouLON de),
officier français, célèbre par sa mort
déplorable, était né vers 1725, d'une
familie originaire de Picardi.", dont
liiic branche subsistait honorablement
depuis le XVII*^ siècle dans l'Ile de
France et la Rrie. Son frère aîné,
Coulon de Villiers, capitaine en 1747,
fut blessé cette même année dans m\
combat contre les Anglais au Canada.
Jumonville rejoignit peu de temps
après son frère en Amérique, et ne
tarda pas à se faire estimer de ses chefs
perses talents militaires. Les Anglais,
JUN
JUN
.Gi-
flant reiilrrsfn 17.')J >ur ic^ IfrrM
CfdfTS à L France, s'avancèrent jus-
que »ur les bords de l'Oliio et y jelè-
ren! Ir* fondement s d'un fnit. 1^ com-
mandant français, M. i\r (^uilrrcœur,
instruit de rctir infi action atit traités,
mais craignant de rallunier la ;;uerre,
$e contenta d'rn>o\fr aux An;;lais un
ofljcirr |*o(ir le^ sommer d'abandon
ner Irur entreprise et de se retirer. Ils
promirent de satisfaire à cette injonc-
tion; mais, au lieu d'> obtempérer en
effet , ils n'en |»oursui\irenl qu'asec
plu5 d'ardeur l'aclièvement du fort
3u'ils avaient commencé , auquel \\s
onnrrent le nom de Ai NècrssiU.Su-
monville, cliar^e parle commandant de
s'assurer si les Anglais se sont éloignes,
part le "IW mai pour remplir cette mis
sirn, a.ec une escorte de trente hom-
mes. Arrivé pies du fort, il est eii\i-
ronné tout à-coup d'An|;lais qui font
feu sur sa petite troupe ; il fait x,h^\\c Je
la main, montre les depèdiei iloiil il
est porteur et demande à les communi-
quer; mai» i peine en a-l-il commencé
la lecture qu'il tombe lâchement assas-
siné (/ t/J. ^^ ASIIINGTON, L, 238).
Sa mort fut vengée par scm frère de
V'illiers qui chassa peu de temps après
les An;;lai5, et détri:isll le fort dont iU
avaient cru s'assurer la posse>sion par
un crime. JurnorwilU cA le sujet d'un
poème de riiomas , que Ijiharpe, en
convenant qu'il s'v trouve de beaux
Ters, ref;ardail comme l'ouvrafje mo-
derne qui rappelle le plus la manière
de Claudien (Vqv. la (Àtrrrsportd.,
I, 139, et V, W). Le poète Lebrun a
flétri ce crime des Anglais dans une
staiice de son Odf nationaU contre
C Angleterre- W — 5.
JIJXG. Voy. Stilling, XUn,
559.
J UNKE R (Gf.orgfis-Ai.am ) ,
lillér.itpiir , n»* à Hanaii, en 17 Ifi, fut
d'aboid prolciseur , puis recleui du
collège de sa ville natale, sur lequel il
publia, en IT.'iO, un écrit (ai»ant con-
naitre l'eiat de cet établissement. H
coopéra aussi a la traduction allemande
de Vîiistoirr unn'erseiir. qui avair
paru avec suices en .\n^letorie. Il
quitta ensuite le C(»lle^e pour 5e char-
ger de i'é<lucation oude la direction de
deux )eune> n«ible> qui allaient ache-
ter leui» études a G(rtliii|;ue. l'eut -
être ne cheichait-il qu'une occasion
de visiter cette université celebie 11
Y suivit des cours de droit , et de-
Lula dans cette science par un traité
qu'il publia sous ce titre : Lrges XI J
tiifiuiurum, in usum lertionum ura-
(iemùarum, (•irttin;;ue, 1760. Kn
même temps il fournit des morceaux à
un ouvrage périodique, intitule Sie-
iriund (Personne). S'clanl familiarisé
avec la lan;;ue française, il se livia en-
suite aux occupations de traducteur et
de maitie de langue, se fit connaitrc
de pluMeurs ofGcierN de l'armée fran-
çaise envoyée en Allemagne , et dut .i
leur recommandation , en 17()*2, la
place de profcvseur d'allemand à l'é-
cole mlitaire de l'aris. Dès-lors Jun-
Ler traduisit et publia un ^rand nom-
bre d'ou\ra^es de la littérature aile
mande, dont il contribua beaucoup à ré-
pandre le goût en France. Après avoir
profevsc peudatit près de vinj;l ans, il
«ibtinl sa retraite avec une pension, et
fut nommé censeur royal. Mai>, privé
de ces ressources par refTel de la révo-
lution, il alla s'établir à Fontainebleau.
Pluii tard il se chargea d'ensei;;nci la
lé;;islatlon à l'école centrale de cette
ville ; mais il put à peine commencer-
cet enseij;neraenl, à cause de la nou-
velle organisation de l'instriirtioii pu-
bHque. JiiiiLer mouiul à Fontaine-
bleau en 180.'). Outre les produc-
tions déjà indiquées et i:ne traduction
allemande du FJiibsuplie pmcci , de
Foiinev , Francfort , 1761 , 3 vol.
in-H"^ , on a de lui : I. JSuui^eaux
principes de lit grammaire allc^
LXVIII.
22
338
JUN
iimntlc, Haiiau, 17G0, in-12; nnu-
velleéiillion, Paris, 17()2. Celte ;i,rani-
niaire , ado{.>tce |jour iccolc liiililaiie
et pour d'aulres insliliitlons (i'ensci-
f^iieinent , eut un giaïul succi's. On
la considéra lonj^-îcnips comme la meil-
leure grammaire allemande, et on la
réimprima plusieurs fois. Elle n'a
même pas entièrcmcnl perdu son an-
cienne autonlé en France : il y en a
une édition piildiée à Paris, 1809,
in -8". L'a::'c:ir en fil aussi un
y4hrê£^é à l'usajj^e de l'école loyale
militaire, Paris, 17()9, in-l2. II.
Iiiirodurtioli à ta Irriurc des au-
it'urs aUenuau/s, en allemand et en
français, Pari.s 1763, iii-li. III.
Prnsi'c.s libres :^ur âiffcrcntes par-
ties de la guerre y ihid. , 1764, in-
\'l. IV. Cliuixiwric de pof^siesphi-
hisophiipies et agrènhles, traduites de
l'anglais et de ralleinand, /Vvijijrion et
Paris, 1770, 2 part, in-12. V. Choix
de philusupliie murale, ihid., 1771
2part.in-12. Ce recueil se compose
de nrorccaux de Pcrnclly , Rurlama-
qui, Vattel, Diderot, etc. VI. T/ieâ-
fre alleniund (trad. par .lunker et
Lichaud), Paris, 1771, 2 vol. in-13.
VII. ],es (j rares, et Vsychè entre les
Grâces, poc'mc traduit de Wicland,
ibid. , 1771, 2 vol. in-12. Diderot
dit de cet ouvra^i^e : « Cela n'est pas
« mal traduit du tout; mais je dc-
«< viens vieux, très-vieux apparemment,
« puisfpie je ne saurais plus iiie rcpai-
« trc de ces haf^atelles... Pcul-èlre
« cela est-il délicieux en vers ; mais en
« pro^^c, ce n'est pas tout-à-fait la
« mcdie chose.... Le fra^^ment intitulé
M Psyché entre les Ordres n'est
•« rien, du moins en liaduction. »
VI M. Louise, ou le Pouvoir de la
vertu du sexe, conte moral traduits de
l'allemand de Zacchari»', Paris, 1771,
in-1 ST. I X . Contes connnues ,\r7n\n\\):>àc
l'allrmand de Wielaiirî, rmnrfort et
Paris, 1771 , in-ft'*. X. Phrddjn, ou
J13N
Entretiens sur la spiritualité et T im-
mortalité de V âme, Xv^à. de l'allem.
dcMosès Mendelssolin , Paris, 1773,
in-8". XI. liccucil historique, ou
Choix de pièces morales et amu-
santeSy en allemand et en français ,
Slrasbour-, 1774, in-S''. XÏI. La
découverte de t Amérique , trad. de
l'allem. de Campe, Hambourg, 1783,
2 vol. in-8". XIII. Leçons de droit
public, Vs^ns, 1786,2 v. in-8". Junker
a revu deux traductions de l'alle-
mand, l'une des 12 preuiiers chants
de la Mcssiade de Klopslock, publiée
par d'Anthelmy, 1769, el l'autre de la
Dramaturgie àe. Lessin^, par Cacault,
1785 , 2 vol. in-8". « Toutes ces
« traductions, dit Grinim dans sa
« (Jorrespondance , nous viennent
« des professeurs de la lanfi;uc alle-
« mande qui sont à l'école royale ini-
« lilaire. Celle du Messie a successive-
« ment passé en deux ou trois mains
« (iirférenlcs. » Junker possédait bien
les deux lanj];ues, cl il était loul-à-fait
propre aux fonclinns de traducteur.
L'académie de Gœtlingjie l'avait admis
au nombre de s^s membres. D — G.
Jï'IVOT (1) (Laure Permon,
i\r'^''j, duchesse d'Ahraiilès, naquit à
Montpellier le 6 nov 17Si. Son père,
le sieur Permon , ori^^inairc de Metz,
était simple commis aux vivres; sa mère
était une Comncr.e. Le comte de Vcr-
f^ennes, qui avait épousé une Grecque de
celte même famille, dont les débris s'é-
taient lixéjà Ajaccio, lit ('onncr à Per-
mon, lors de la guerre d'Amérique ,
toute l'entreprise des vivres de l'ar-
(i) .luM)r [Jenii-liiipiiite), cor'elier, s.ini
il(>ul<« (!•• In mntu- f:nii»llr i\M>- U\ griiéral {t'oy.
.FtïiOT, XXIl, f!>7) , iiiiquil à Cli.^lillon-stir-
Sfiiie fil »iO|ii<iiilirc i<i5.S, el y mourut le 9 00
tohr<! I 7 > 4 ■ H coi)i|i()s,i, 8i)il i-ii rrHiiraiii, soil
m latin , |.liisii'iir.s f>raisuris fui)<M)r<fS , «lis-
<•ou^^, «■le. On a t-ncorc (l« lui » Le Chemin du
ctcl OIIV&I-I ii(.t rimri qui a.tpir/r if à la pcifec liait,
Autun, i6;<i, in-»4- U tli>dia cet ouvrage au
fiinciix (l.iljrici fl lU)i|ijitl<', «'Vt'que U'Aiiluii ,
k i„éitif i^'ii avilit (oui m ù WaiWlr le modèle
de bMi KarUifc. U— b— ».
JUN
111^ de Roclianbe^ii. I^es Coiniiriie
«le Curse olilmient hïss'ï ^ par le cie-
«iil (le ce iniiii>tre, en 17HJ. 17S;J
ri 178V , des leU" • nui
recoiiiui usaient Icui <! •- de.<
rinpereur& d'Ontiit. Dc^ia^ tt ;eiitpi,
l'eriiiau qui avait fait finiuiie ml un
^raiid train dr iiuison dont sa ferniue
faisait fort bien les liuiineur»; il elart
même sur le point de traiter d'une
cliar^e de ffr.i.ier-génëral, lorsq«;f la
ré\olulu)n éclata. Ixiin d*en adopter
le-, principe», il désapprouvait, comme
d in^^erriike et inopportune, la convo-
cation des rtuts ^rnéiaut. Ou peut ju-
i;er de ses opiiiion> rovalistes par «^on
intime liaiMtn avec I infortune Du-
lo^oi {rvy. ee nom . \ll . !Î^O\
TiiulefiMs ,
lions, il eu'' < il
'<• Pans, d'ft happer pendant la ler-
: l'ur au SOI t f.i! jl i|iii II. ( Lirait a!«)r» let
iiclie» ans li<>-
l'^p^ric, da. ... ).;»/i/#s
// .'*, »*e»t ^auft doute «c'vi d'une
r\i)ir^sion impropre en qnaliûanl de
^ru . fcrmi r le ^rand-prre de la dn-
rlii* se d'Abraniè^ : ce C^nslanlin
('."iiiiiéue était drjÀ bien ai>ez decliu
>.ini qu'il fût b«' • .:erer sur ce
point. Après av> laincdcca-
N.i oie d.ins le u-^inieni de Vallière-
li.»\al Corse , il mourut jeune, en
ITT'J, dans sa modeste habitation
d'Ajûccio : mais il faut convenir aussi
que sa petile-Glle, la duclie^sed'Abran-
tès, poussait jusqu'au ridicule l'or^iieil
et Icn prétentions de -a naissance. C'est
ce qui rend assez ennuvcnse la lecture
du premier volume de ses Mt'rnuirrs,
on les moindres parlicuUiilés concer-
nant .ses aïeux sont relevée-^, amplifiées
avic une prolixité ridicule, comme si sa
uière t(»ute la première n'a- ait pas com-
meiiré n Jrrugrr, en se trouvant heu-
reuse d'épouser, parce qu'il était riclie,
UN obscur roturier! I.riure f ermon avait
une saur ainée nommée Cécile, qui
JUN
33c
fut «sa ni.iMjine et «tui épousa, .m inois
d'otl. 17'.' V, un « .«.al noiii-
i.»é d»* (ic'îifric . «le-ix .ui»
ap-< :c il.>.-iiuit an5. 1^
pc: do l.aure l'enmiii
lui lutl a;;>tcc, ioiui i' devait Irtrcav
re»le toute m vie. l.ile avait linit an»,
lorsque lev dan^cr% (|ue couraient M)n
|téie ri sa mcre à l'an» les fnrrèrenl
d'aller n'établir à Toulouse : elle fut
laisvée i l'ari.%, ainsi que sa s<rur, et tou-
tes deux furent mises dan» une petite
pension au fauboiii;; Saint-Anloine.
Jusqu'à rrttr ep.».|'je , Uure Hermon
ct.i II- , I, . ,,„ f\ élevée
sr' de Uou>-
SC4U. lîiciilol a iKcie la lit venir à
Touluase. Aprè^ la terreur, sou prre
>e fi&a à Bordeaux et M"'" Termoii
revint a\ec bCs ileui fillr. à Paris, à
riiolel de Ai y'r.//<//ii//y//r, rue dr»
Fillo-Saint- Thomas, mener la vie as-
sei équivoque d'une femme isolée de
sonro.iri, «lui ne reçoit iiue de» hom-
mes* et qui donne à jouer cliezelJe. i>o-
naparte devenu général depuis le »ié^e
de Toulon, mai» alors en dis;;race,
ctail fort asNtdu rKex elle, ainsi que Ju-
not, son aide-Je rainp (r'o)'JiNOT,
Wll, 157). La duchesse d'Abraulés,
dans Nés Mfrnui'rrs, insi^le »iir l.i po-
sition piecaire dans laquelle fut lon;;-
temps le jeune (^rse destine a une si
haute fortune. A l'en croire, M. et
M'"* Termon avaient été sc-^ premier»
et ses uniques protecten.» a Fans,
lorsqu'il était à l'école «ilitaire ; et il
ne cessa tiepuis de voir a^sidàuienl la
iamdle l'erinon, qui ne lut pis moins
utile à ses nombretix parents qu'a Ho-
naparte lui-même [2;. A cette époque
ef^ju qu'au 13 vendémiaire, il était
dans un étal voisin de la mi>ère, man-
;;c;tnt très-souvent cliez M"" IVrnion,
et s'eutretenjut aux dépeus de Junot
! ) M . a...r l'Abrinir- ra.ni r tl .in «e» Mé-
Il .,1 ^] ,. le père de Ronajor i- uiiiiriit à
Mt. . , ; .cr «Un» la luaixoii •!< inad..iiia Penaoi^.
<jui r< \ul VI s J«riiicrï «ouiurs.
22.
34 o
JUN
qui recevail une assez modique pension
de sa famille, mais qui possédait le ta-
lent de la d(n;b!cr par son bonheur au
jeu (3). Loin de son;;er à l'ainée des
filles de M"'*" Permon , Junot était
épris de Pauline, une des sœurs de
Bonaparte, et voulait Tépouser. «< At-
« tendons, lui disait celui-ci , elle n'a
« rien, tu n'as rien : quel est le total?
« Rien. Nous aurons peut -être des
" jours meilleurs, mon ami. Oui, nous
« en ainons, quand je devrais les aller
« chercher dans une autre partie du
« monde.» A la suite du 1^^ prairial,
M™® Permon, intimement liée avec son
compatriote Salicetti , l'un des pro-
scrits de cette journée, le cacha au pé-
ril de ses jours dans son appartement,
à Paris ; puis, comme alors elle dut al-
ler, avec ses deux fdies, rejoindre son
époux à Bordeaux, elle emmena ce
député qui prit le nom et le passe-
port d'un valet avec lequel il avait
beaucoup de rersemblance. Arrivé au
terme de ce périlleux voyage , Sa-
licetti demanda à M*"*^ Permon la
main de l^aure. En vain la mère refu-
sait. Salicetti, si l'on en croit les iliV-
tuoircs de M'"° d'Abrantès elle-mê-
me, répondait à toutes les objections :
« Klie est trop jeune ! Pas du tout ;
« son esprit est foi iné comme celui
« d'une personne de viiit;t-cinq ans ;
« rt puis son caractère est ce qui m'a
« séduit. Cette jeune iille-là serait ca-
« pable d'être une seconde Charlotte
u Cordny, si on touchait un cheveu à
« (juehpi'un de nous trois. » Lors-
qu'on fut arrivé à Cette, Salicetti s'ein-
(3) C'rst ici If cas de rniurquer que le [n re
(le Jiiiio! n'était p.is cullivatrur : il exerçuil des
fondions ji-licisires à Biissy-Rahuliii. Le jeune
.lu'iut aciiev.i ^ct études au colli-ge de (Jli^tlllntt ;
il fiai» plein de facilite rt d'e.iprit , Liais 1r<'s-
maiivais sujet, et faisait f..iie ses devoirs p.ir
des CHiiiar-'d»*-, dont il était fon aimé, quoi(|ii'il
fi'U ïJiLH cesse jirét à ex'ircer sur eux son talent
pour la lu'te 1 1 le puuil.it, laleiil .|u'il rulliv.i
•.i Iji iireoseii en) depuis sur ses crésiiciirs. il
faisait son dro<t (|uaiid lu rcvululiuii k- jrla
d.ui!> l'état niililairc.
JUN
barqua pour Gènes, et la jeune Permon
fut à la fois délivrée des importunités
de cet homme et de l'appréhension des
dangers que sa position appelait sur
j^jnie pe,.(j,Qn Après un court séjour à
Bordeaux où elle trouva son mari pres-
que mourant (sept. 1795), celle-ci re-
vint avec lui et leur fille à Paris , où
Permon succomba à ses longues souf-
frances , la veille de la fameuse journée
du 13 vendémiaire; il était tout-à-
fail luiné par la révolution. Néan-
moins sa veuve alla se fixer dans une
belle maison de la Chaussée-d'Anlm ,
et continua de vivre entourée de luxe
et des plus coûteuses fantaisies. Sa
fille raconte sérieusement que les re-
grets de M'"*^ Permon furent 5/ vijs^
que, cédant aux conseils de son mé-
decin qui lui ordonnait la distraction,
elle loua une luge à Feydeau, quel-
ques semaines après la mort de son
mari. Au surplus, l'esprit de dénigre-
ment le plus hostile n'aurait pu re-
présenter celte dame sous iha traits
moins favorables que ne l'a fait ÎM'"®
d'Abrantès, en voulant préconiser
comme des perfections tous les défauts
de sa mère. Elle en fait une petite
maitressc surannée, d'un caractère ab-
solu, capricieux, vindicatif. On sent
qu'à pareille école la jeune Laure dut
prendre de bonnes leçons ; et l'on ne
s'étoiine plus de ce qu'a été la lillc, en
lisant le portrait que celle-ci a tracé de
sa mère, tout en ne parlant d'elle que
sur le Ion de la plus aveugle admira-
tion. Jîonaparte continuant à voir
beaucoup M""^ Permon et sa fille,
celle-ci raconte qu'alors le générai ,
vouUinl unir le nom de Comnène à
celui de Qdomeros (car elle préten-
dait aussi que les Bonaparte sont une
branche des (^omnène), avait formé le
triple dessein de marier son ùiiQ
Louis à la jeune Laure, sa sœur Pau-
line au fils de M""^ Permon; enfin de
devenir lui-même l'époux de celle-ci ,
bien qu'elle pût l'ire \a mitre de Jo-
^f|»!i , l'ainff tle> Boiiaparlr. M"""
l'ennoii nr répondit à crilr dernieir
piopo> lion que par det ét\i\> de rire.
(^r rcfui et la nii;li;;riife que mit le çjé-
iinal à placer un prolej;é de M"" Pér-
ir.ou rail erent entre eux un refioidiste-
iiirnl tirs piunonré, re ijui n'emprrlia
f>as Uonapûitc de Icnioi^ner loup)ur^
r plus \i( intéiêt à M'"*" IVrroon et à
^e<> fnfjiils, quoique crlIr ci rrpomlif
l.i pliipait du lrnip> par dr> duretés a
>rs a\anres. Dans ces anecdotes d'in-
térieur, comme dans une fouie de
mémoires publiée par Ie5 serviteurs de
Napoléon, on reconnaît cjue cet hom-
me, si inlraitable en politique, était ;;é-
iiéralement, dans la vie privée, aussi
f-iriie qu'il affectait d'i-tre brusque.
M"" Tri mon et &a Glle , après a\oir
fait un vo>a;;e aux eaux, revinrent à
Paris, où elle-» se jetèrent dans la dis-
sipation, M"" Perraon continuant de
recevoir nombieuse société, et M"'
l^ure, rlrve dt's danseurs De^piéanx ,
Saint-Sauveur et de Trénis , faisant
1rs beaux jours des bals do l'Iiàtel
r}iéiu»on et de rhotrl Uicliclieu. A
la fin de l'hiver, elle dut un instant
>'arracher à ces plaisirs, pour faiie sa
première communion. M. de Maillé,
(-\eque de Saint Papoul, le seul prélat
non sermenté qui exerçât publique-
iiiciit les fondions épiscopalcs en
France, lui administra ce >jrremrnt.
Elle vante beaucoup, dans ses Mr/imi-
res , les pieuses dispositions qu'elle
apporta à cet acte leli^ieux. Le mo-
ment vint où Junol, nommé gouver-
neur de Paris au rclour de la cam-
paf;ne de Maien^o, demanda et obtint
la main de M * Permon, qui ne man-
que pas cette occasion de faire, sur les
moindres circonstances qui précédè-
rent cette union, un lon^ et insipide
roman dans lequel on démêle que
M'"* Permon, loiil en jetant >a fd!e à
la tète du favori de Bonaparte, eut le
JUN
34.
talent de lui faire bien sentir l'honneur
de »'allier à une ('x)mnène. Ouanl à la
future, effia^ee sans doute des manie'
res brutalement communes et du ca-
ractère impétueux de son prétendu,
elle ne donna son consentement qu*a>
près beaucoup d'hésilalion , ou si Ton
veut do simagrées : car, dans tous ses
récits, on remarque si peu le ton de la
conviction, qu'on ne uit vraiment si
elle ^e ino(|ue du lerlrui ou d'ellr-
roémr. l.r premier consul en donnant
son appiobation à ce roana;;e , ) joi-
gnit une dot de cent mille francs et
une corbeille de quarante mille francs.
On conviendra que c'était f;énérfuse-
ment reconnaître les servicei qu'il avait
pu recevoir de M'"' Permon. Junot
qui , si Ton s'en rapporte aux Mémui-
rrs de sa veuve, était sincèrement ré-
publicain et avait même la bonliomie
lie supposer le premier consul animé des
mêmes sentiments (V], rrut devoir à
son opinion et à sa position officielle,
comme couimandant de Paris, de ne
pas célébrer son mariage à l'église ;
mais M™'' Permon et sa fille tinrent
bon et, après la célébration civile à la
municipalité du neuMeme arrondisse-
ment, la bénédiction nuptiale eut lieu,
san^ pompe et à minuit, dans la petite
éj^lise de Saint-lx)uis en IMe. (}c ma-
riage, à ce qu'il paraît, réjouit fort la
fami'le du premier consul , comme une
espèce de victoire remportée .sur M'""
H inapaile : car une hostilité tacite
existait entre celle-ci et M'"* Permon.
Tout en faisant trè-assidùment la
cour à sa prétendue, Junot ne né^li-
^cait pas SCS devoirs comme chef d'une
dt$ polices particulières de lionapai le.
On peut voir dans le-. Mrmuires de
la duilic.s>e d'.Vbraiilès qu'avant pé-
nétré le secret de la conspiration d'A-
réiia et de Ceracchi. il fut l'insli^ateur
(4 . Je «iiu républicain pjr goot et p«r lys-
. i«roe. .nji»jji horreur d» s....? , etc. « Tel
r»l U laii- .-• 'l«ie inaJjme d" Vivantes prèle à
,-.„ miri djn» '.e 4' ▼"• «1- ^«"^ Mémoires.
34a
JUN
de Tespècc de f;uct-apens qui donna
lieu à rairestation des conjures. Ce
ne fut mètne qu'après cette aireslation
qu'il s'occupa de terminer son rnaria-
^e ; et, à cette occasion, Bonaparte lui
dit : « Sais-tu bien que ton mariage
« a tenu à peu de chose, mon pauvre
« Junot ? car je crois que si ces co-
« quins-ià m'avaient tué, ils ne se se-
« raient guère occupés de ta noce et de
« ta dot. »> Ce r()lc de scidc, ces fonc-
tions de police, lui altirèroiil des inter-
pellations sévères de la part de quel-
ques-uns de ses compagnons d'armes.
Jtinol eut aussi de (réquentes querelles
avec Fouché et le préfet de police Du-
bois, qui, infiniment plus habiles que
lui, le firent plus d'une fois tomber dans
des piè<Tes. Son zèle de dénonciateur ne
s'arrêtait pas même devant les rela-
tions intimes de la société; et M"'®
d'Âbrantès ne craint pas de rappeler
que, dans certaines ciironstances, elle
et sa mère cherchùent à détourner Ju-
not d'un rôle si peu dif^nc d'un mili-
taire. Elle raconte encore que lors de
l'explosion de la machine infernale, au
3 nivose, il fut tellement fiappé de
cet événement, qu'il tondra pendant
les nuits dans des soufres effrayants. Sa
femme s'étanl alors approchée de son
lit, d se réveilla en sursaut, et, sans sa-
voir ce qu'il faisait, d'un coup de pied
dans la poitrine il l'envoya tomber â
l'autre bout de l'appartement. Au mo-
ment du vote à vie pour le consulat, le
colonel Foiirnier Sarlovèse, ami de
Moreau, se déchaîna si ouvertement
contre Ronapai te , et affecta même de
l'insulter si publiquement à l'Opéra,
que le premier consul, se retournant
vers Junot placé derrière son fauteuil,
lui ordonna d'arrêter sur-le-champ le
colonel. Junot se présenta en consé-
quence à l'entrée de la lo^^e où se trou-
vait 8arlovè.=ie, et de l'air le plus {Gra-
cieux lui fit si^ne qu'il désirait lui
parler. Le colonel se lève et sort dans
JUN
le corridor. «Qu'est-ce? demanda- 1 -il.
— Un devoir bien pénible que je dois
remplir; le premier consul veut que je
m'assuf e de ta personne. — Tu fais là
un vilain métier : est-ce que passer
mouchard est augmenter de grade?»
Junot, à ce propos désobligeant, entre
en fureur, et, sans plus songer à son
devoir, propose au colonel de se bat-
tre; mais les deux ofticiers de gendar-
mené dont il s était tait accompagner
lui déclarent qu'il ne peut agir ainsi, et
qu'il doit conduire Sarlovèse, non sur
le terrain d'un combat singulier, mais
chez le ministre de la police. Junot
cède en ajournant le duel, et conduit le
prisonnier devant Fouché. Cependant
le premier consul eut lieu de se repen-
tir d'avoir confié à un tel homme
un poste si important. Ses bévues en
matière de police , ses indiscrétions
avec les diplomates étrangers , entre
autres le ministre prussien Luchesini,
ses violences, ses scandaleuses orgies,
tendaient à déconsidérer le gouverne-
ment. Il fut envoyé à Arras pour
commander la réserve des grenadiers
de l'armée d'Angleterre. La conduite
de M"^*^ Junot n'était pas beaucoup
plus sage ; elle jouissait avec délices des
prérogatives agréables attachées à la
qualité de conirnuiidanle de Paris,
loges à tous les sjieclacles, bals, bril-
lantes réunions. Prodigue comme son
mari , elle dépensait des sommes
énormes pour sa toilette, inventait cha-
que jour de nouvelles modes, et faisait
de son côté des dettes qui ne fu-
rent jamais payées. Inconséquente
dans ses discours et dans ses démar-
ches, elle s'exposait souvent à des mor-
tifications. Son esprit caustique et mé-
disant lui attirait beaucoup d'ennemis;
elle-même raconte que Bonaparte lui
dit un jour : « Vous avez de l'esprit,
«' petite peste; mais vous êtes mé-
« charité; ne le soyez pas : une
«< femme n'a jamais de charmes lois-
JUN
•< qu'elle se fait craimlrf >• Il lui le-
prochait encore tîe voir trop intime-
inen! If» l\u•^^e.<l el Icn ' i
ruirnt alniN à Taris, et de
r. 'lit robjel de tes coijuctiiiic?.
\ . I. est ce a\ec raison qu'on a dit
de \à diitln'^sc d' \l)ranlès : Kilr rluit
fiilir ri spinliirllr ; mais, ftiilr fnHir
ètrr hrurnisr . rilf ne tu jtiiiuiis
rtr. Oiiand Itonaparte .allait pa-ser
les licaiix joui > d«* lVl<' à la Ma'nui-
;>on,elleY était rréqurniment incitée;
rlle \ jouait la rorocdif a>ec Miccr^ ;
rllf y mettait même une telle prêlen-
lion (juVlIr j>reiiait des Icçoîin Av l'ac-
teur I^ Hi%e. \ celte é|»»>que(lH01),
si Ton en croit ses Mrniuirrs , elle
captixait TaUcntion du premiei consul
de manière a inspirer (juehpie jalousie
à M"*" r.onapaite. Klle raconte même
que pendant un xova;;e de cille-ci aux
eaux de l'Ioinliicres, elle p.i«.>.i quinze
jours à la M.ilmaixui. Itona; a;te s'in-
troduisit à cinq lieure> du matin daius
la chambre à couclier de M""' Ju-
not , s'assit modestement dans un
/autruil au pied du lit , pour lire
des dépêches et des gazettes , puis ,
pour toute primauté , lui pin^a Ir
pied àtnj^^rrs ses t aucrrturrs en s'en
allant, (^-ette scène rid"cu!e se renou-
vela le lendemain a\er lr> mêmes circon-
stances; mais le tr(M>icmt jour M'"** Ju-
not drfcndit à sa femme de chand>re de
le laisser entrer. Il entra pouilant ï
l'aide d'un passe-partoul , fut froide-
ment accueilli et s'en alla d'as-^cz mau-
vaise humeur. Apres ce départ elle s'a-
bandonnait aux plus amères réllexions,
regrettant de n'avoir auprès d'elle ni
Duroc pour la conseiller , ni Junol
dont la pré>ence l'aurait soutenue, lors-
que celui-ci survint toul-à-coup, sinon
trop tard , du moins assez à propos.
Malgré les protestations de l'héroïne
de celte ancc oie, il e>t bien difficile
de croire qtie I>onaparle, s'd a jamais
poiséi M Junot, se soit arrêté en
JTJTS
343
si beau chemin. Ir uiemier fiuit de
son maria-ic fut une fille, aujourd'hui
connue dans la littérature sous le
nom de M"" Juiiol - d'Abrantcs.
I^ premier consul et sa femme U
tinrent sur les fonts de baptrnie, et
elle lut nommée Jo éphine. Les ca-
deaux de baptrme fuient, de la paît
du premier consul, une maison ma-
piifique , rue de» (Jiampv-Klxsêes ,
et cent mille francs pour la meubler ;
Joséphine donna un collier de perle»
des plu» riches : c'est ain^i aue le cou-
ple consulaire affectait dêji la j;énéio
»ilé des souverains. Ver» le même
temp<, lors du Te Ihiini pour le (en-
cordai, M"'* Junol fut du nombre dcN
dames qui accompa^nêient l'épouje du
f)remier consul à la métroptjle. Les
axeuis pleuraient alors sur la famille
de Junot el tsWt de sa femme, m-
dé;»eni!amment d'énormes |;ralifira-
tion>, d«int une «eule monta à trois
cent mille frano. I.'abbé l>ienaime ,
(mcle de M'"* Junot, fut nommé chè-
que de Metz, son bciu-frère (ieouffre,
rece\ eur-;iénéral du département de
Lol-el-Ciaroune, son fière IVrmtui,
commissaire-général de p«d;ce à Mar
seille, enfin le père de Junot, con-
servateur des eaux el forêts à l)i
jon. fj moit de M "* Permon sur-
vint au milieu de tant de prospérités
(ISOl) : mais ror;;ueil de sa fille el de
son Pendre troti>a une coiisolalion en
élalaiit surleceifuel les armes de U
maison de Comnènc. Ricntùt vint le
départ forcé pour \rras, à la suite d'une
scène scandaleuse que Junot , étant
j>risdevin,fit chei(iarclii, placier, où
^ réunissait la bonne compagnie. Fou-
ché ne fut pas ctrant;er à cette disj;ràce
de l'cx commandant de Taris, mii fut
remidacé par Mural (5;. M"'* Junot,
après un court \o>a*;e en r>our^ot;ne,
i8Ô3) oar IriUr d'êdiru au prefri tt aux maire»
i?e ta »ill« de Pjri', S"' y repoiidirrut par le
dou d'un» magnifique cpée.
■W\
JUN
alla rejoindre son mari à Arras ; et
sa vanité ne manque pas de rappeler
dans ses Mémoires qu'elle sVl.iblil
dans la même maison où avait \o<^é le
Grand Condé. Elle assista aux so-
lennités du camp de lîoulof^ne, et se fit
remarquer par les éléj^anles profusions
de sa toilette. Junot se morfondait de
dépit et d'ennui à Arras, lorsque le 14
février 1804, sur l'avis confuleutie! que
lui donnait Duroc delà découverte de
la conspiration de Moreau, il se rendit
à Pans à franc élrier pour manifester
son zèle. Les pjemiers mots qu'il
adressa à Bonaparte furent pouj- l'eii -
«;a^er à laisser la justice aojir contre
Moreau, à étouffer toute pensée de
clémence, etc. : «Eh! malhe;:reux ,
«< s'écria le premier consul , veux-
« tii donc que l'on dise que je
« l'ai fait assassiner parce que j'en
« suis jaloux (6):' » Après cot entic-
tien Bonaparte le renvoya à Arras, où
il s'occupa excinsiveinent de perfec-
tionner l'instruction militaire des gre-
nadiers confiés à son coiiimandement.
le n ai janiais vu, (
lit ^V
d'A-
« brantès dans ses AIrnioires , de
« mère plus co(pielte (iour :;;i (ille, de
*f femme plus coquette pour elle nn'iiie,
" (pie Junot ne l'était pour ses ^re-
« nadicrs, Icj;- toilette et sinliiul 'eur
» coiffure, etc. (7). » Lorsque Na-
poléon devenu empereur lil i\n voj.'i^e
a Arras, il admira la belle tenue des
gienadiers de .Junot, le nomma, le
iT) août 180i , f^rand-officier d-i la
Léj^ion-d'IIonneur, et bientôt après co-
lonel-f^énéral des hussards: «' J'ai été
«' un peu sévè/e en t'envoyanl ici, lui
" dit-il; » puis, il ajouta à toutes ces
faveurs une pension de treiit;; mille
francs sur sa cassette; mais Junot ne
(t>) Mémoires «Je iiiadjiine la diicliesAn <J'A-
ijrantès, t. IX, p. j.\.
(7) Ce fut lui (|iii contribua in plus à r.iirr
■sobstituer ir. schako au chapeau à (rois cornes
si incoiD'no'Jfr pour l.i Iroupc, et à f.iirc ri non-
' «T le soldat à la coiffure pondrrn pour juloptfir
la tilus.
JUN
put se consoler de n'avoir pas été com-
pris danslapromotion des maréchaux de
Fiance. A coté^ard on ne peut qu'ap-
prouver Bonaparte ; car, avant comme
après cette époque , cet officier ne
commanda ianiais en chef sans faire
des fautes qui compromettaient l'ar-
mée. Il n'était qu'un brave soldat ,
un redoutable sabreur , un excellent
instructeur, mais point du tout gé-
néral. Napoléon fit alors quelques lois
somptuaires pour sa nouvelle cour. Il
ne voul.'iit pas que dans cette cour,
composée d'une foule d'officiers ho-
norables, mais la plupart sans fortune,
la folie d'une jeune femme compromît
le repos de son mari ; et, à cette occa-
sion, il dit à Junot, dont l'épouse dé-
pensait plus de deux cent mille fiancs
par an en parures : « C'est à nous à
« donner l'exemple de cette modes-
« tie, et à ne pas écraser, par un faste
« ridicule, la femme d'un ofiicier paii-
«f vre ou d'un savant respectable. »
M'"*' Junot était peu d'humeur à
goûter cette morale ; elle avait aussi
son sujet de mécontentement : elle n'a-
vait {)as été noiiiiiîée dain:î du palais de
la nouvelle impérnliire. lîonaparte fit
comjjrendie à Junot (pi'il n entendait
pas faire un double emploi de grâces
dans sa maison, et que quand le mari
.serait de la maison militaire, la femme
jie pourrait être dame du palais. Bona-
parte, que Junot obsédait .<ans cesse
de ses demandes, et qui au reste ne
pouvait trouver un agent d'un dévoue-
ment moins scrupuleux, jeta lesyeux sur
lui lorsqu'il voulut envoyer en Portugal
un ambassadeur, moins pour entretenir
de bonnes relations avec cette puis-
sance que pour donner lieu à des
motifs de rupture et de contprele II
était en même temps bien aise de
l'éloigner de Paris, à cause de ses in-
cartades. Cet homme, qui n'avait per-
fectioîiné que dans les camps et les
mauvais lieux une éducation nianqiiée
dins sa première jeunes^, était pié-
soinplueux rominr la force hrutalr ,
tranrltiDl ctjioinr l'ignorance, rasluciix
sans ^out , jMoili^uc «^aoîi ^éneru&ité,
mai» (lu moins bon rt fnielc ami ; il eût
sjcriGé tout à »on maître, hors ceiiK
aiuquelsil rtaitalljir)ir;ria:iccamaratie
enûn , mais fier d'une faveur dont il
abusait, orgueilleux avec ses inf^'rieurs,
pointilleux avec les ministre» sur le rei
pecl (]u*il croyait dû i ^s di{;nités.
C'élail le personna<;e le plu< ron^ens-
bie au rAle ()ue Napoléon lui destinait ;
nnis le \irii de .lunol était de re>ter à
Pjris pour faire le service de premier
aide de camp de l'empereur, et repren-
dre le rominandrment de la première
l'ivision militaire qu'on avûit séparée du
>;oitveNiciuent de Paiis. Il liésila lon^
temp:> a\ant d'aiceptei : <* Je ne ferai
«« que des sottises, disait-il naïvement
«* à Cambacérc:^; comment ima;;ii:er
• que je pourrai me plier à tous les
« ^^rlJd^cment^, à toute la duplicité
M qu'exige la diplomatie ' >• On ne lui
en demandait pas tant : on ne voulait
que mettre eu jeu sa franrliise lirutale
!)oi:r io'it brouillera Ij!>bonne. D'ail -
eurs M'"*" Junot le pressait d'accepter;
elle biùlail de rernplicer 5on titre de
gitUi'rrruintr pnr celui tïairibtissU'
t'rire ; et Napoléon ne dédaigna pas
de donner ses instructions verbales à
celle femme non moins léj^èie qu'ambi-
tieuse." Soyezrircon'^pecle, lui disait il,
« c'cst-à-diic point bavarde, point cail-
•« lettc. IVenex j;arde surtout de vous
n moquer des usa^jes du pa>5, lorsque
«« vous ne les comprendrez pas , ni de
« l'intérieur de la cour. Iiappeiez-
n vous que les souverains ne pardon -
«« nent jaraa . la raillerie. » Si l'on
veut avoir une idée dr la conduite de
M'"*^ Jnnot à Lisbonne, il faut pren-
dre le contre- pied des sa^es avis que lui
donnait l'empereur. Ce fut au milieu
du carnaval de 1805 qu'elle quitta,
non sans regret, Paris, lai.ssant aux
JUN
345
soins d'une nourrice G)nstance (de-
puis M""^ .Kuberl) , sa seconde fille.
AfficlianI partout le titie d'ambassa-
drice, clle-mèinr laconte qu'elle tra-
versa la France a\ec l'appareil d'une
princesse. A Ilau)nne. Juiiot la quitta
pour se rendre à Madrid. Trois jours
aprb, elle partit pour rKApa};ne avec
unr urmèf de mules qui poilait ses
ba^a^e^b et tiainait ses cinq voiture* et
un four,;on. Arrivée le 10 mars 1H06
à Madrid , où elle s'arrêta quelque
tenip^, elle fut reçue par l'ambasodeur
lieurnoinille, rt fut obligée de ne pa-
raître à la cour qu'en fMtniers, selon
l'anliiiite ceiémonial. Klle dit que la
reine d'K*pjf;ne lui trouva une pbvsio-
nomie CNpa;;nole Le 2'.) mars elle .se mit
en route pour Lisbonne, où Junot fit .<^on
entrée avec tout le céré.-nonial qu'on
avait observé en 1789, à l'arrivée du
comte «le Cbalons, ambassadeur de
Louis Wl a.ipiès de S. M. T. F.
M"" Junot, dans ses Mémoires, rap-
porte que Junot se permit, en traver-
sant le Portujjal, des scènes de violence
et de brutalité qui justifient tout ce
que l'on a pu dire de lui à cet é^ard.
Dans un accès de fureur il aurait tué
un miileliei sans l'interveiitioii de
MM. de I.jbordeet de i\a\ne\al, nui
l'accompagnaient dans son ambassade.
G)rome il arri\a le jour du Vendredi-
Saint, un nsaj;e respecté interdisait de
faire tirer le canon de la tour de
îielem po:ir sa réception. Junot, en
cette occaMon du moins, se condui-
sit avec convenance. I-ors de sa pré-
sentation au prince - ré{;cnt , il se
conduisit d'une manière assez ca\a-
lierc. La présentation de M""' Junot
eut lieu ensuite ; dè> ce moment elle
ouvnt sa maison , recevant tous les
jours, donnant sou\eiit de ^rauls dî-
ners et des bals, en un mot clieichant
tous les raosens possibles d'effacer par
son lu\e ladv Fjtz-Gérald, épouse de
l'ambi^sadeiir d'Ani^leterre. Klle-roê-
346
JUW
me dit dans ses Mémoires^ avec une
forfanterie passablement ridicule : « La
« France femme était représentée
« par moi. J'étais la seule femme con-
« sidérable du corps diplomatique. Il
« y avait bien lady Filz-Gérald....,
« rélève de M"**^ de Genlis , mais ses
«< mauvaises manières étaient en tout
" opposées à celles de son mari, n
Junot remit au prince-réj;ent la ratifi-
cation du traité de neutralité entre la
France et le Portuf^al, conclu le 23
Janvier 1803, par le maréchal Lannes,
et la manière dont sa femme raconte
cette scène donnera une idée de la
sinjiulJère diplomatie de ce lieutenant
(le Jîouaparte : « Oui, oui , dit alors le
« prince ; c'est à cette même place
« que j'ai donné ma parole royale au
« général Lannes. C'est un homme
« qui est un peu » Junot fit
ses j^ros yeux ; le pauvre prince rentra
dans sa coquille et dit aussitôt :
« C'est un brave homme , oh ! un
« brave homme ; il avait un grand
« sabre qui faisait du bruit dans l'es-
« calier lorsqu'il venait. » Peu de
jours après, le prince de Brésil offrit le
^rand-cordon de l'ordre du Christ à
Junot, qui le reçut avec la permission
de l'empereur. Au mois d'oct. 1805,
sans attendre l'ordre de Napoléon, il
alla le joindre quelques jours avant la
bataille d'Auslerlilz , laissant à Lis-
bonne Piayneval et M""' Junot. Mais
le désir de se .signaler n'avait pas
été le seul motif de cette proniptitude
à rejoindre l'empereur, il picuait ,
ainsi que sa femme, un vif intérêt à
la belle M'"® Pu-camier dont le mai i
venait de faire faillite. Kn pas;;ant par
l'aris , il avait promis d'intercéder
auprès du maître, afin d'obtenir un
prêt de deux millions pour ce financier.
Cette demande indiscrète porta sans
doute Napoléon à éloi;;ner Junot en-
core une lois de la capitale, il l'envoya
dans les étals de Parme et de Plaisance
JUN
pour calmer une insurrection. Regar-
dant cette mission comme un nouvel
exil, Junot chargea sa femme de de-
mander à l'empereur s'il fallait qu'elle
partit pour aller le joindre à Parme:
« C'était, dit-elle dans ses Mémoires,
« une petite ruse pour savoir s'il de-
« meurerait long-temps en Italie. »> Na-
poléon répliqua par quelques paroles
évasivcs ; c'était tout ce qu'elle voulait ;
les plaisirs de l'hiver de 180G la rete-
naient à Paris ; et d'ailleurs Junot, qui
ne se piqua jamais de fidélité conjugale,
avait trouvé à Parme des consolations
telles que sa femme, comme elle le dit
elle-même 2iWm\)tTtnv^ y eût peut-être
été de trop. A la fin de l'hiver, la santé
de ses filles devint pour elle un prétexte
à de nouveaux délais ; bref, elle était en-
core à Paris, lorsque, au mois de juillet,
il fut permis à Junot d'y revenir. Quel-
ques joui's après* (le 19), il était de
nouveau nommé gouverneur de Paris
et commandant de la première division
militaire.Tantdeprospéiitéstournèient
lattte aux deux époux. Les dépenses
extravagantes recommencèrent, et bien
que Junot eût un traitement de plus
de trois cent mille francs, et (jue l'em-
pereur ne ces.<;àt de donner de l'ar-
gent, il n*avait que des dettes, et dissi-
pait des trésors sans profit, sans discer-
nement, souvent même dans des excès
grossiers. Il voyageait avec la vitesse
de l'empeicur : il avait ses propres re-
lais, des centaines de chevaux et autres
folies semblables. « Plus d'une fois
« dans son bel hôtel à Paris , disait
« Napoléon à Sainte - Hélène (8),
« après avoir fortement déjeuné, on
<' l'a vu entrer eu fineur aux moindres
*' réclamations du plus petit créancier,
« et prétendre le solder à coups de
« sabre. » La femme n'était pas moins
prodigue pour des fantaisies; et tous
deux à qui mieux mieux fourni-jaierit
ample matière à la critique par les gia-
(8) Mémoriul de 5ainlt- Hélène,
JUN
Tp> infonNr,ji:rnrr» de leur roiiduitf
Napolron, iti.iiiiirnminrM»u«riain que
roinme anrieii âini de Junol, ri , qtunl
i \i frminr dp re dernier, guidé p^ir
le ru il de la (.'orsr dont
rllr ' . mire t'J), la fil \enir
un jour poui lui donner des avis pater-
nels sur le* driordres de 5on mari, sur
ta profu-siuii de lilamants quViie même
avait elaiéA inron«^idëi<fmcnl i son re-
tour de l*i»rlut;al. sur scn intimes rela-
tionsaver M. de Mellernitli, lesquelles
pouiuiient inquiéter lu polit tifue.
•« Klle se fâcha, dil encore l'empereur,
« el j'en fus Irailé comme un petit
« garçon ; alors il ne rac resta plus
« cjii'à l'envover promener et à l'aban-
** donner à elle niiine. » L'ncquisitinn
coûteuse du domaine du liaincv, que
Jiiuol ne pul paver et dont il fut
ol)li-é de se défaire plus tard , d'après
l'ordre positif de I empereur , n'e^t
pas une des moindres fautes qui fu-
rent reprochée> i ce couple si peu
modéré dans «es désirs. Junol en-
tretenait avec M'"*" Mural, qui n'était
encore que grande-duchesse de Kfrg,
des relations fort intimes, non qu'elle
eût pour lui un ^oùt véritable, mais
elle e-pérail, en V enchaînant par se»
faveurs, l'amener à servir ses vues am-
bitieuses. En eiïel, elle ne songeait à
rien moins qu'à ménaj^er à son époux
rhérila{;e de l'empereur dans le cas où
il aurait été tué dans une de ses cam-
f»a;;nes. Mural se llatlail d'avoir pour
ui l'armée. De son côlé, l'impératrice
Joséphine songeait an même héritage
pour son Gis Eugène Heauharnais;
et les deux belles- crurs ^entaient ré-
ciproquement de quelle importance ,
le cas échéant de la mort de Na-
poléon , il serait d'avoir pour sol le
gouverneur de Paris (10). Lorsque
10 Si l'on en croit madame d'Abranirs, nu-
dame Mur^t a«ail rti- jucqu à Tooloir, dans m*
àmt fiil-jiit, que let cuuirur* de la litrre <J«Ju-
Bol •( d« là tieoiic fu5»«ot r x.irtrinent l«rs niroMi.
JIN
347
Ronapaitr était i Tilsitt , Joséphine
invita Junol i déjeuner, elle ron-
ds pour >.i.Mii re qu'il ferait. Ju-
nol, embarra« c parle nom d'Ku^ène
que mrtlait en avant Joséphine, fit
une rîj'dîi'.p évas'^p t!e manière à ne
|> . mai» s'il lui fut
a nations timides
de la pauvre nnperatricc, qui n'était
plus d'a^e ï séJuiie personne, il n'en
fut pis de môme de la grande-duché vse
Caroline qui était la plus ap-éable,
sans contredit, des «trurs de Ilona
parte. •• Klle était foit élevante, dit
« M"** d'Abrantès , ouvrait toujours
« le bal avec le j;o iverneur de l'a-
« ris, jouait au vkisl avec lui , mon-
« t.vt à cheval avec lui, le recevait >eul
* de préférence à tout autre ; enfin ce
« pauvre gouverneur de Taris qui n'é-
* tait pas un an;;e ri dont la tête et
« mêineleccrur, pour être bien i moi et
« i ses enfants, n'en étaient p.isniuin«
« accessibles i des impressions passa-
« erres, ne pul résister aux séductions
« qui naturellement s'offraient à lui..;
« il dcvli.t amoureux avec pa<>ion...
« I.es résultats de celle malheureuse
« affaire otil été la mort et le mal-
« heur de Junol....; il fut exilé: car
« le gouvernement ou vice-royauté de
« Portugal n'élail autre choso qu'un
M exil dore. » M'"' d'.Kbraiilès ne
dit pas tout : elle aurait pu ajouter
une scène scandaleuse entre elle et
son époux à propos de M. de Met-
lernich , qui faisait marcher avec au-
tant d'habileté que de bonheur une
double in!rij;ue avec M'"* Mural et
M">«» d'Abrantès. Chacun? des tleux
s^crovail la seule aimée. L'empereur,
voulant mettre Gn à cc.^ désordres, fil
saisir par le mo)en de sa police et
tomber entre les mains de sa sœur
une lettre que le galant diplomate
adressait à M""" Junot. M'"* Murât
envo>a au mari la lettre fatale. Junol,
non content de traiter militairement
34fc
JUN
son épouse infidèle, voulait appeler en
duel son heureux adorateur. Marniout,
son compatriote el son ami, lui repré-
senta que ce serait jouer trop gros jeu :
«« L'empereur, lui dit-il , a le plus
« grand intérêt à bien traiter M. de
«« Metternicl). II n'est déjà pas trop
« satisfait de toi, je te conseille de
« ne pas l'irriter par une démarche
« peu sage. Les toris de Melternich
« sont de ceux qu'un homme d'esprit
« ne venge jamais directement. » Puis
il lui conseilla d'user de représailles à
l'égard de l'ambassadrice. D'autres
amis tinrent à Junot le même langage
et finirent par le persuader; mais s'il
se dirigea vers M""" de Metteriiich, ce
ne fut que pour donner une preuve au-
thentique de son ignorance des formes
de la bonne compagnie. Il envoya un de
ses aides-de-camp complimenter l'am-
bassadrice et la prier de passer chez lui,
ayant, disait-il, une communication à
lui faire. M""' de Melternich renvoya
l'aide-de-camp avec la réponse que mé-
ritait l'insolence d'un pareil message.
Junot comprit la leçon; mais marchant
de sottise en sottise, il ne se rend chez
l'ambassadiire que pour lui dénoncer
platement l'inGdélité de son mari, et lui
porter sa tendre correspondance avec
M'"*^ Junot. ï.es lettres étaient sans si-
gnature ; iM""^ de Metternich affecta
de ne point les connaitre, et congédia
Junot en lui reprochant d'avoir man-
qué de délicatesse el d'égards. Llle se
plaignit à Napoléon, qui envoya sur-
le-champ chercher Junot, et lui repro-
cha sévèrement son peu de savoir-vi-
vre. Le général , toujours brusque , el
ne se soumellant qu'avec peine aux
habitudes de respect qu'exigeait le nou-
vel empereur, répondit : » Vous allez
* voir qu'il faudra me laisser faire
« sans me plaindre. Je voulais assom-
« mer le beau-fils, et lui passer mon
« sabre au travers du corps. Marmont
« qui se mçle de me donner des avis
JUN
« m'a retenu. Il fallait pourtant le
« punir. J'ai montré ses lettres à sa
« femme. J'aurais dû prendre ma re-
« vanche avec elle. — A la bonne heure,
« répliqua l'empereur, la vengeance
o eût été selon les règles de la bonne
« compagnie; celle que vous avez prise
rt ne convient ni à un galant homme,
« ni à votre rang. » Puis il ordonna
à Junot de lui apporter toutes les let-
tres avant la nuit, ce qui fut fait ; et
le général, qui sans cet incident n'au-
rait peut-être pas emmené sa femme
en ambassade, n'eut garde de la lais-
ser à Paris. Au surplus , ce départ
était une véritable disgrâce; Bonaparte
n'ignorait pas la publicité de la liaison
entre Junot et IM '"'' Mural ; il avait
eu avec lui sur ce sujet une explication
des plus vives, dans laquelle Junot s'é-
tait permis de répondre en matamore
à l'égard de Mural. Bonaparte repro-
chait encore à Junot de ne voir (/ne
(les ennemis^ parce qu'il cédait à une
rtianie de sa femme, qui était de se fau-
filer dans toutes les sociétés du fau-
bourg Saint-Germain, même les plus
hostiles au nouvel établissement impé-
rial. Enfin, et c'est là ce qu'il y a de
plus honteux pour Junot, Bonaparte,
dans sa politique odieuse envers le
Portugal, avait besoin d'un instrument
servile el audacieux pour envahir ce
pays, el s'emparer du trésor, delà
flotte, ainsi que de la personne du prin-
ce-.'-égenl. Il jeta d'abord les yeux sur
Lannes; mais, dès que ce péiiéral sut
qu'il s'agissait de se présenter en ami
pour abuser un prince qui l'avait com-
blé de biens cl d'égards, il repoussa
avec indignation une mission sembla-
ble. Un tel scrupule n'arrêta pas Ju-
not, qui cependant était absolument
dans la même position à l'égard du
prince de Portugal. Ce n'est pas
qu'il n'eût quelque regret de quitter
les plaisirs de la capitale el l'avan-
tage de rester auprès de i'empe-
JUN
rctir, «|ui lui ilonnait toujours sans
coiuplrr. .\ ce propo» M'"* d'Abran-
lr<» a^our que Jiinot élail liu tuMiilitc
drs faxoriN qui, iniir|t«ni]ainnient lic
Irur» nrlifs rmolumrnlN , ipcevairnt
lous lr% nioi> du mailrr une ^ratt6-
ralioii i\r huit ou dix mille lianes;
puis elle ajoiitr crilc irllrxioii di^ne
de remarque dans la bouche d'unr
frmmr : •• Plusieurs étant jeiiiir^ ,
H dil-rlle, aimaient le plaisir, peut-être
•« même le fasle. Pourquoi non i* une
m cïistfiice -somptueuse, peut - ^tre
*i même un peu >\bante, leur paraîs-
M sait doubirmriit doure , etr. •* \.e
-0 août, au moment du départ de son
niaii, M'^'^Junot, apirs a>oir fait le>
honneurs de la frie du l.'i aoùl,à l'HA-
tel-dc-N il'e, fut cliar^ee par Napoléon
de rrce\oir, à son domaine du Uaincv,
la princesse de NN uilember^.' (|ui ve-
nait epou^er Jrrome-.Na['oléon ; et,
par les détjils qu'elle donne de celte
réception , on \oil que la princeN»e fut
a\ ec elle plii> froide que gracieuse Junol
par lit euBn de l*ans Ir 28 août 1807.
Arri\c aux pied> des Pyrénées, il quitta
son poste pour entreprendre un \o>ai;e
do plaisir à lJa;;ncresde Bi^orre. Cette
excursion dans laquelle il perdit un
bracelet de clie\eux blonds déplut à
l'empereur, qui lui fil écrire le 12
octobre, par le ministre de la guerre
ClarLe. \ celaJuruit répondit selon
sa coutume , d'une manière fort in-
convenante, ce qui lui attira une nou-
velle réprimande. Dans cette dépêche
du iiitnistre, daté * du 29 octobre, et qui
est un monument précirui pour l'his-
toire, en ce qu'elle ilô\oile la politique
astucieuf.e de Napoléon, il était ordon-
né à Junot de marcher de Ciudad-l\o-
driwo ^ur Lisbonne du 20 au 3() du mê-
me mois, et de ne point s'arrêter, que le
prince récent déclarât ou non la :;uerre.
Si quelque chose choqua .limot dans
CCS insirudions, ce n'est point le rôle
odieux qu'elle^ lui imposaient à l'égard
JUN 349
d'un prince dont il avait reçu l'accueil
le plus gracieux, c'est que le ministre
de la pierre ne lui donnât point le
litre d rrrr//r«/r. Il lui enxoya un
cartel ; pui*, Ne plaij;nit à l'empereur
qui , tenant à ce que l'invasion du
Portugal n'éprouvât aucun retard ,
pavsa encore cette incartade à Ju-
not , et enioi^nil au ministre de lui
donner ce tilie auquel il tenait tant.
Enfin, M'"' d'Abrantés, qui fr,u^e
Miperbes toutes ces forfanteries de son
époui , ajoute que Bonaparte manda
Clarke aux Tuileries pour lui tioimrr
un sa%Htn ; circonstance qui pourrait
bien être un mensonge. Quoi iju'il en
soit , on sait que Junot exécuta ses
instructions axec une impito\able
ponctualité. Il arnva le 27 novembre
à Lisbonne, où il fit son entrée plu-
t«\t rti fiisiitif que comme un homme
qui xenait dire à tout un poiiple : Jr
prends ftossrssion du /mys (11). Son
armée était décimée par les privations
et les marches forcées; et les (juatorie
ce. .ti hommes qu'il con«er\ait autour
de lui avaient les pieds tellement déchi-
rés, qu'ils pouvaient à peine se soute-
nir ; la moindre tentative de résistance
eût arrêté, détruit entièrement une
armée inconsidérément lancée depuis
Alcantara dans celte course aventu-
reuse. -Mais le prince-récent était in-
capable d'aucune résolution énergique.
•« Lorscju'il apprit «piune armée se
«< ra>somblait à SaUmanque, dit la
«« d:irlie>sc d'Abrantés, il palit ; lors-
« qu'il sut que son chef était celui-là
•< même qui avait pris le titre d'am-
«« bassadeur, il sauta de joie. >» L'in-
sensé ne vovait pas que le choix de
ce tnéme homme le coiniainiiait (juand
bien même Napoléon n'aurait pas dit:
« Lu miiisori dr Hru^unce a cessé
M de régner (12). » Dès ce moment
,11 Mrmjirr, Je /u i/uc/>ei>e aylb'anlei.
Il) Toin. M, ;»a?. 9 <*• »'"' M'-U'oires. Per-
»oiiue, 00 eu couTicndri, n'a accosé plus trvèrc-
35o
JDN
J13N
la terreur se mit dans le conseil an
prince; il chassa les /inglais, comme
il l'écrivit à Teiupereur, son honjrcrc.
l'ci sonne, excepté (loin Rodrigue de
Suiiza et le comte de Linarcs , n'osa
ouvrir l'avis de se défendre contre
une armée si peu redoutable. Après
avoir envové prè.î de Junol deux am-
bassadeurs qui ne purent suspendre sa
niarcbe , le prince s'embarqua pour le
Brésil. Le dernier bâtiment de la llut-
lille qui emmenait la famiile royale, avec
les trésors de la couronne, était en-
core en vue du port de j^isbonnc ; Ju-
not s'empressa de montera la tour de
l»élem; et, avec une brutalité sauvat^e,
11 chargea lul-inoine un canon du fort,
le fit pointer et tirer par M. de Tas-
cher, son aide de-camp. Le boulet passa
dans les a^rrès du bâtiment, et le con-
traignit d'amener; mais il ne. pariait
aucune personne de la famille roya-
le^ ajoute M'"*' d'Abrantès, qui dans
ses Mémoires semble s'associer, par la
manière dont elle les présente, à tou-
tes ces indignités. Ce coup de canon
était au reste , de la part de Junot,
une bravade gratuite et spontanée ; car
ses ordres secrets, écrits de la main
même de /Vm/>^rrj/r, portaient spécia-
lement de tout faire pour s'emparer de
quelques personnes désignées, mais
non pas du prince de Brésil, Et
qu'en aurais-je fait? dit plus tard
cet aveugle séide , quand l'année sui-
vante sa femme, qu'il retrouva à la
Bocbclle, rintcnogea avidement sur
les moindres détails de son séjour en
Portugal. Pendant qu'il se gorgeait de
plaisirs et de pillage dans ce beau
rovaume, sa lemme qui avait déjà eu
cinq filles, dont deux seules ont vécu ,
s'écartant enfin de cette fécondité fé-
minine (c'est toujours elle qui parle),
le rendit père d'un fils, aujourd'hui
riiPiil Junol qne sa f«inrne clans ce pai-sose le-
ui:\T(\\iA)U.. Qui'l coi.ira»le il j)r»'-(i<-nte avec I«s
a|)ologies qui {(recèdent et qui suivcul !
héritier du titre ducal d'Abrantès.
« Je te remercie , lui écrivait Junot ,
« à cette occasion ; enfin je pour-
« rai donc laisser à l'empereur un
« autre mol-même... » Napoléon et
l'impératrice Joséphine tinrent le nou-
veau-né sur les fonts de baptême.
A peine délivrée des précautions que
lui imposait la maternité, M"^® Ju-
not se jeta plus que jamais dans le
tourbillon des plaisirs de Paris; et l'on
peut lire dans ses Mémoires tous les
détails qu'elle donne sur les fêtes de
cette brillante époque de l'empire (13).
Continuant à jouer son rôle de gou-
oernantc de Paris, elle s'entourait de
gens de lettres; mais, peu sensible à la
cour assidue qu'ils lui faisaient, elle
immole, dans cette partie de son livre,
toute la litlératui e du temps de l'em-
pire à ces talents vraiment remar-
quables, qui ont pris bien jeune (sic)
encore leurs degrés dans f avenir.
Ce fut alors que Na[>oléon s'appro-
pria le Raincy, que Junot ne pouvait
payer et dont la possession l'en-
traînait à de trop fortes dépenses. En
effet , depuis cette acquisition, M. et
M™^ Junot avaient pris une livrée
assez ressemblante à celle de la mal-
son d'Orléans, à qui avait appartenu
le Raincy , et Junot , selon les pro-
pos des courtisans , faisait le petit
duc d'Orléans, après aooir voulu sin-
ger le comte d' Artois à Longchamps.
Ce fut Napoléon lui-même qui voulut
bien annoncer à M'"'^ Junot qu'il se
chargeait du Raincy ; [luis à la fin
de cette conversation il lui dit : «< S'il
«f vous plaît d'aller en Portugal faire
« la petite reine, je vous léponds
ti que vous trouverez votre mari dans
« une bonne attitude. » Quelque
temps après. Napoléon qui avait con-
féré à Junot le titre de gouverneur-
général de Portugal, qu'il cumidait
(i3; J'avais alors dix- sept loges, une à tiia-
que spectacle*
JUN
JUN
35i
avec celui de (^nuYcnicur de Pari» ,
lui p«. * ' iidre encore le lilre
«le ilu« A relie uou^rllr
fa\cur. M"" Jurmt uc se
lie j»»ie: «"Ile rrnrle «le \i; .
telle |Ui:.c de
•• a>ail U pius
joii nom tir la tr*éUftf. •• Je vou
M Ui& le nommer duc de N:iuret)i,
• 'ut dit ï celte ocraiiiun l'eiiipeieur;
« niaiN on raut.i't appelé Junut dr
Snzureth^ comme on dit Jrsus de
Sauirrth; et c*c>t ce qui m'en a
eiupèrlié. » Toute la vie de la nou-
\ l'Ile iluclie
lii^uei de
|K)lili(|urs. A tt
une culcie de I •
leçii plu&ieui>» fui» uu e< >
qui appoitait en t tance >
ilu hrri d'ritummunù utiuit iauce
i.inire Napoléon pai le pape Pie Nil.
(>iinnicnl donc ^r hit il , dirait
celui-ci , que toujour» elle »oit
liée avec des cuaemis .' » Tant
•le fjules finirent par a\oir leur sa-
laire. Au coraroenroracnt de raniiéc
ISOO , Junol, (lui était encore eu
l'ortut^ai, reçut I urdre d'upu i entie
la place de ;;ou\erneur de Fan» et
celle d'aide-dc-camp de l'empereur
comme incompatibles. Toujouin mau-
vai^e lèle , il répondit par la dé-
m' -.ion de lotîtes ses places liona-
naparte. cédant aux sollicitations de
M"'^ Junot , se contenta de lui oler
la place de premier aide-de-camp.
(Juant à celle de gouverneur de Paris,
il Kii eu conser>a le titre jusqu'en
1Si:î, sans cesser de lui confier des
mis<ions au dehors qui l'empêchaient
(l'eu TvMnpIir les fonctions. Napoléon
a\ait pciiélré le but .'^ecret de l'iiitiuic
liai>v>n de M"'" Mural et de Junot.
On en doutera d'autant moius que
dans un eiiticticn trèsMf qu'il oui
avec ia duchesse d'Ahranlès, il lui «lit :
« Il e^^t impo>sible tuie l'homiue qui
« peut à toute heure entrer sous ma
• tente ou dans mon palais, a^er Ir
•• litre de mon aide de camp , >oit en
1 ' ir de Pari», et
<■ nulle hom-
•• Ww.- Lfi'CUiLui Junot trônait â
|,isbr>nne rj qtial'ff t\r ;r -f i • nrur-
^e: ml
d'i iiirs,
et de dou^e renl» ci'uzade> pa. mois
pour ^a table, dont \\ ne fai a t paii
mène leA frais , con* errant d'ud leurs
»es énorme» émolument» de Pari».
Quoii;u'd eût alur» une irinifr de mai'
. comme le dit la duchesse, il
< ; \}^s d'a>oir pour elle de pre-
«)iiN : car, de» le moment
.tion 1-2 février 1808). il
lié une ca<.^lle remplie
; «le pieires précieuses, rc
3 ni ne iaisvj pas de causer da scan-
ale. .M""^ d'Abranlé> a\oue dan» ses
Mémoires que la boîte ne contenait
que cinq cents carats de diamants
bruts, ce qui est encore bien honnête.
Rient At api es, apprenant nue sa fem-
me était accouchée, il lui fit enNO>er,
par le comnieice de Lisbonne, un col-
lier de diamants qu'elle-même estime à
trois cent c!u({uante mille francs. Kn
ineuic temps il reo^a;;eail à lemplacer
le Kaiiio par une autre maison de cam-
pagne ; et file loua la Fuite Jf Suint-
Jiinin, ^ es NeuilK.îj, elle eut un
théâtre ; elle joua la comédie, couronna
des rosières, et continua de recevoir des
étrangers, et surtout dts Kus&es, ce qui
était pour Napoléon un sujet continuel
de mécontentement. Cependant tout
allait de mal en p\s dans le Portu<:ral ;
dppuis deux mois Junot n'a>ait pas
dohuc de ses nouvelles, même a l'era-
pcreur. Klle deuiaixla à ne pas faire,
eu sa qualité de j^ouveriian'.e, les hon-
neurs des fêtes de l'Hôtel de-VilJe,
alléguant (;ue les personnes qui devaient
\ assister tiouveiaient extraordinaire
(}u'elli> se mit en évidence , tandis
352
JUN
qu'elle devait avoir pour son mari des
motifs d'inquiétude. « Eh ! pourquoi
« ces personnes savent-elles que vous
« éles inquiète , s'écria Napoléon
« courroucé;' Voilà le résultat de vos
« conciliabules de salon, de tous vos
« bavardages avec mes ennemis. Vous
« déclamez contre moi ; vous attaquez
« tout ce que je fai« ! » L'entretien se
prolonfjea sans que l'allière duchesse,
qui connaissait trop bien le faible de
1 empereur pour ses vieilles connais-
sances , baissât le ton ; mais enfin le
maître se montra et coupa court à l'en-
tielien par ces mots qui ne souffraient
pas de réplique : « Tout ce qu'on dit
« sur Junot est faux ; Junot capituler
« comme Dupont ! Tout cela est
« mensonge ; mais précisément parce
M qu'on le dit vous devez aller à l'Hô-
« tel- de- Ville. Vous devez y aller,
•c entendez-vous ? et si vous étiez ma-
«< lade, vous devriez y aller encore.
« C'est ma volonté. Bonsoir.» Il
n'était (jue trop vrai; Junot, après s'ê-
tre battu en héros à Vimieira, avait
été forcé d'évacuer le Portugal (30
août 1808), en vertu de la capitulation
de Cintra; mais après sa retraite, si
l'on ne pouvait accuser sa bravoure,
ce fut un cri ^^énéral contre son impé-
ritie, ses déprédations, ses débauches ;
et les journaux ant!;lais firent grand
bruit du sérail de l'ex-gouverneur-gé-
néral que l'escadre fut ohligêe de ra-
mener à La Rochelle avec le corps
d'armée française. M'"^ Junot alla re-
joindre son mari dans cette ville, et
bien qu'elle n'ignorât pas ses dé-
bordements , elle fit tout pour le
consoler. Cependant Napoléon pas-
sait par Angouléme , se rendant à
Rayonne. Junot partit à franc étrier
pour le voir. L'empereur ne lui adressa
aucun reproche : «< Un homme tel que
H vous , lui dit-il, ne peut revenir à
<* Paris qu'en passant par Lisbonne."
Tandis qu'il repartait pour la péninsule,
JUN
M'"'' Junol retournait à Paris , rap-
portant encore une immense quantité
de diamants et une caisse qui renfermait
des sommes immenses en or , et si
lourde que, quand il fallut la monter
dans l'hôtel, elle tomba sur le pavé qui
fut inondé d'une pluie d'or. Selon
M'"*' d'Abrantès , il n'y avait que
quatre cent trente mille francs en or,
et il ne fallait pas, dit-elle, faire tant de
bruit pour si peu... Mais l'affectation
avec laquelle elle ne cessait d'étaler
ses pierreries donna heu à bien d'autres
commentaires, et encore plus la mala-
droite forfanterie de Juiiot qui, pen-
sant mystifier le duc de Rovigo qu'il
n'aimait point, se vanta devant lui
d'avoir rapporté de Portugal, dans un
grand sac, douze mille diamants d'une
telle grosseur, que dans l'un on avait
pu tailler un petit verre pour son fils. ;
Aussi, pendant l'hiver de 1809, la
toilette de M""® d'Abrantès était-elle i
constamment un objet de curiosité ; et
elle-même rapporte dans ses Mémoi-
res que Napoléon avait charge d'une
espèce d'enquête à cet égard José-
phine, qui, dans cette occasion, comme
toujours , montra beaucoup d'indul-
gence. Néanmoins Junot, qui comman-
dait le 8* corps en Aragon et en Na-
varre, eut pendant deux mois la direc-
tion du siège deSaragosse. L'empereur,
peu content de ses services, le remplar.i
par le maréchal Lannes. C'est à ce
siège que se révélèrent les premiers
symptômes de sa maladie mentale. Déjà
sa correspondance avec sa femme était
empreinte de tout l'affaissement de
son âme, et il parlait de suicide. Rap-
pelé en France après la prise de Sa-
ragosse, il ne demeura à Paris que le
temps nécessaire {)our rétablir sa santé,
et partit au bout de trois semaines avec
un commandement à la grande armée.
« Alors, dit la duchesse, tout redevint
« joie et bonheur autour de lui.»
Tandis qu'il se rendait en Allemagne,
JUN
Jl)N
353
où il ne prit part qu'à «In o|>^raliniis
5^fon(lairr^, rllr mrtnr albit aui raui
(ir Cautfrfis rrlablir »oii r^tomac dr~
ijbr<'. A i^on rrlour rllc reprit ^nn scr
lire aiiprc". «Ir maHanif-nicrc, ri fi{;Mra,
rominc (gouvernante de Pans, aut fè-
tn de i'll(\lel-de-Villc , données i
l'oecasion de la virloire de Wj^rani.
Selon ru.<a|:;e elle «e disposait à rece-
voir, à la tele d'un rorlè^e de dames
rlioisies, l'impératrice, lorsqu'elle re-
çut rontre-orJre ; et Joséphine ne fut
irnie que par le préfet Froehol.
I, 'empereur, en refu«an! cet honneur
.1 relie qtii allait birntAt rrvser de par-
! »•: Ml •■ ■ :r . \ ■ 'j ! )p|fr au mi-
1 . M ilr criir 'rir j. >|. .l.ir r la première
pensée que le divorce était fait. Il v
eut à ce bal une telle colme que M'"*
d'Alirantés s'évanouit dans la foule;
elle fut portée dans la clianibrc du
pîffet par >oii mari (|ui, tout occupé
de la desserrer, jeta sur le païquet
tous ses diamants ; mais, ;;r^ce à la pro-
bité des {.fns de service à rH«\tel-de-
^ 'Ile, ils furent rapportés le lendemain
à la ducbe<.se .uinstjuii y nuinquiit un
ifuitun. Cependant les personnes de
la cour impériale se perdaient en con-
jectures sur le nouveau clioix que mé-
ditait l'empereur. « Qu'il épouse
« M"* Masséna , » dit avec son
fianc-parler ordinaire M'"" d' Abran-
tès au cardinal Maury qui la votait
tous les jours I.e propos revint à
Napoléon. «« Comment ! M'"* .lunot
« s'avise de toucher à ces questions
t« là ! dit-il ; qu'elle prenne garde
«« qu'elles ne lui brûlent les doigts.»
A quelque temps de là, Junot alla re-
prendre le ronunandecncnt du S' corps
en Rspaiîne: sa femme avant tcmoif;né
le désir de le suivre, il n'y consen-
tit qu'avec peine ; et il en fui de même
de l'emperctir : mais rien ne pouvait
alors faire céder la volonté de cette
heureuse duchesse, dont le malheur
même ne devait mûrir ni la raison
ni l'esprit II faut lire dans ses .1/r-
moires (li^ avec quelle complaisance
elle décrit l'élégant covtuine d'amazone
qu'elle inventa pour rette campagne.
On doit lui rendre crtte justice qu'elle
supporta toujours avec courape les fa-
iiçues, les privation^ et même les dan-
gers. Cependant elle n'en fut pas
moins, souvent, on embarras pour son
époux. IMu* d'une fois elle sr montra
fort imprudente; en se promen.int près
de Valiadolid, elle pensa être enlevée
par leN ;;uérillas. Dans cette ville elle
ouvrit <^on *alon comme j l'ari . et
donna des bals où ellr dan-<a malgré
son état de ;;rosseN>e avancée. Ses
Mrnwirrs offrent ici le récit détaillé
et souvent fort ennuveut des commé-
rages de l'armée et des dissentiments
qui éclataient journellement entre Ju-
not, le maréchal Ney et Masséna nui
était leur chef. A Salamanque, M
d'.\brantès adopta une jeune orphe-
line abandonnée par sa mère et assura
son «^ort. Klle voulut se prévaloir de
cette bonne action auprès du corrép-
dor qui recevait les actes nécessaires.
•• Votre mari tue asseï d'Kspa;;nols,
•< lui répondit l'austère ma;;rsirat ,
«< pour que vous en sauviez un.» Klle
ne quitta point Junot jusqu'à (^iu-
dad-l\odrif^o. Forcée de s'arrêter dnns
cette ville entièrement ruinée par la
{;uerre, elle v fit ses couches le 25 no-
vembre 1810, au milieu des décom-
bres , des privations de toute sorte et
d'une affreuse épidémie. Junot aurait
voulu que le fils qu'elle mit au monde
s'appelât Kodri;;o ; mais ce nom df-plut
à la duché se qui le nomma Alfred.
I.orîl \Vellin};ton , apprenant à la fois
l'accouchement «le la duchese et la
blessure que Junol avait reçue au nez,
lui offrit toute espèce de secoui s, et ter-
mina ainsi sa lettre : " Je ne sais si
" vous avez eu des nouvelles de raa-
« dame la duchesse ; elle est accou-
354
JUN
«< chéeàCiu(lad-l\odrio;o. » Kn même
temps le cjénéral ani>;lais signifia au
chef Je guérillas, don Juiian, (j'ii s'a-
charna't à poursuivre M"^*^ Juiiol,
qu'on ne faisait pas la guerre aux fem-
mes , et qu'il entendait que la du-
chesse ne courût aucun danger. Huit
jours après son accouclieuient , il
lui fallut quitter Ciudad-Uodrigo pour
revenir à Salamaiique. Là, en atten-
dant son mari , elle continua à faire
de la maison où elle résidait le centre
des bruyants plaisirs de l'hiver. Ce fut
pendant que les deux époux étaient en
Espagne , que Napoléon , qui n'ac-
complissaiL plus celte cérémonie que
quand il avait une fournée de douze
ou quinze filleuls , tint sur les fonts
de baptême le fils aîné de Junot.
Ayant rejoint sa femme à Salaman-
que , le 23 avril 1811, Junot la ra-
mena en France. Après avoir été pré-
sentée à la nouvelle impératrice qui la
reçut fort gracieusement , elle se ren-
dit aux eaux d'Aix en Savoie , où
étaient réunies beaucoup de dames
de la cour de Napoléon. Il parait
qu'au milieu de la grave étiquette de
ces cours improvisées, M™^' d'Ahran-
tès crut pouvoir conserver ses libres
allures et afficher la plus bruyante
gaîté(15). La chose alla jusqu'à lui at-
tirer cette semonce de la princesse
Borghèse , qui , pourtant , n'était rien
moins que sévère : « Savez-vous ,
*f M™^ Junot, que l'empereur serait
« très-mécontent s'il apprenait que
« l'on fait chez vous des farces com-
•< me celles qu'on y joue ': cela ne
« convient pas à votre digi:ité. —
•< lionlé du ciel, madame, répondit la
«' duchesse, quelle est donc ma di-
«< gnité :' Mais s'il en est une qui m'em-
" pêche de rire, je déclare d'avance
(i j, « A«U4 fiiap Jch rif s tel» m»»' iKjus m
Il rùiiirs rérHcrncut iiialidr-s, >i cliti;ll«- dans se:-
Me'iunirei; al o'Iâ Ics ftné\r*$ oavtitts sur la
plate de tiIU.
JUN
« que je n'en veux pas.» Quelques
semaines après, elle choqua les mêmes
susceptibilités en souffrant qu'on tirât,
le jour de sa fête (10 août 181 2), un feu
d'artifice dans un endroit où se trou-
vait la famille impériale. Cette fois elle
reçut une leçon de madame-mère qui
n'avait pas voulu qu'aux eaux M"'^
d'Abrantès fit son service auprès
d'elle. Enfin , en revenant à Paris, la
duchesse eut l'imprudenced'aller voir à
Lyon M'^*^ Récamier qui y était exilée.
Ces nouveaux griefs, joints aux fautes
militaires de Junot dans la campagne
de Russie, portèrent au comble le mé-
contentement de Napoléon. A son re-
tour de Moscou , il reprocha à M""^
d'Abrantès de faire la malade pour
avoir an prétexte de s'exempter de son
service auprès de madame-mère ; il lui
parla aussi de sa visite à M"^^ Réca-
mier. ce Que comptez-vous , ajouta- 1-
« il, qu'il vous adviendra en conti-
«' nuant à me braver?» Cependant il
finit par permettre à Junot de revenir
en France, mais .seulement pour qua-
tre mois ; ce fut vainement qu'elle
intercéda pour son frère Albert Per-
mon, destitué de la place de commis-
saire-général de police à Marseille.
Junot arriva en France : rien ne pou-
vait soutenir son âme découragée ;
le reproche d'avoir manqué de ré-
solution, qui venait de lui être adressé
à iâ face de l'Europe dans un bul-
letin, lui avait porté un coup dont
il ne se releva jamais. Il voulut voir
l'empereur; il n'en reçut qu'un ac-
cueil indulgent, et vit bien qu'il avait
pour jamais perdu son amitié. La du-
chesse , quoique gravement malade ,
donnait des soins à son mari, qu'elle
représente dans ses Mémoires, « se
«< couchant à ses pieds, posant la tête
« sur ses genoux et versant des larmes
«< amères ; » ce qui n'empêche pas la
maligne duchesse de rappeler qu'alors
même son mari était en état de flagrante
JUN
infiiWIif^ , aiiiM qu'il If lui avait rë-
vdf lui-ni^rnp liuiaiit un rourt %o\3'^e
qa'il fit PII houri;o;^n«' , en mptlinl à
I adrp&ve de ^ frinnir la Ifitrp q>ii rtail
Je^liiife pour une maîlif^*f . Au r«»cn-
mencrmfiit <ie 1H|.), quand la du
che&se annonça a Junot quVIle ëlait
eufore enrpinlf. cfl liominr, san«rf^^e
ob«rdf par \'u\ée de rrj;a;:;iier l'amilié
de rrlui dont il a>ait ^Ir Ir téu\e, lui
dit »\ec une r&pmbion dërhiranlr :
•« l«auie, M c'e*l un ;^ai çnn, proinels-
•« moi df IVIevrr dans l'amour el la
•« rrainSe de l'empereur." Ke^enanl
sans cesNe sur le^ eïpre\sioii.-i injurieu-
ses du bulletin , il ileblairrail rontre
r homme aux millr ptiniK hrs. Murât.
quM accusait de ra\oir calomnié ; et
di>ait à sa femme : «« Je n'ai qu'une
•« réponse à leur faire , t'esi de me
«< faire tuer : alor.« quand un boulet
•« ou une balle me rei»\er>era, je leur
« demanderai, a^ .< .iir,.<i/\i/
•« niantfiif' tir i ' •• Mans
celte vue il soliiciU de laire la ram
fia|>ne de Dresde ; mais horiaparte
e nomma po'iverneur de ^ mise et
{;ou%erneiir-{»énéral des procures ilK-
riennes. Pendant que dans ce poste
Junot ne prou\ait que trop bien qu'il
était un iiomiue fini . sa femme conti-
nuait a déclamer contre Napoléon et
à voir les étrangers les plus suspects à
son gouvernement : aussi le ministre
de la police, Sa\arv, eut il plusieurs
fois ordie de la réprimander. Ce fut le
même qui ar.itonça à la duchesse que
.lunct, tombe dans un accès d'aliéna-
tion mentale, avait été, par l'ordre du
prince Ku;;ene , dirij^é sur la France.
L'empereur, en engat^eant M'"" Junot
à aller aii-de\ant de lui , exi^t'a qu'on
ne l'amenai point à Paris ni dans ses
environs. Cette injonction mit la
duchesse dans une grande colère :
elle fit à Savarv une scène et v
traita l'empereur de bourreac et d'as-
sassin. Arrivée à CencTe, elle apprit
jrit
3*)'
qne son mari avait étr conduit à ^!ont-
bar, où d trou\a .sa fin. Celte nom elle
et l'ordie qn'elle reçut de l'empprfur,
de ne i»as s'approcher à plus de cin-
quante 1 rues delà capitale, lui causè-
rent des imprevsionv tellement doulou-
reuses iprelle fit une fausse couche. De
(tenéve elle écri\it i Napoléon une
lettre qui tomba entre les mains de
l'empereur Aleiandre et ne parvint
jamais à mmi adre^NC. Bradant les
ordres de l'empereMr, elle revint i
Pans (17 sept. 18 m. •• Je suis
• retet^ue dans ma maison , dit-elle i
•• Savar», parce que ma plare est au
« près de mes enfants, dont je suis la
• tutrice lé;;ale et naturelle. J'ai ensuite
■ des intérêts personnels aiixquelt je
• dois veiller. »• A cette déclaration
si précise , Sivarj répondit un peu
militairement; mai», bien que ^l'"•
Junot lui eût dit des injures , il la
mena<;ea encore cette fois et n'in-
sista pas avec trop de ri^eur sur
les ordres de l'empereur. Dans celle
année 1HI3 , M'"* Junot perdit
snccesnivement deu\ amis , dont l'un
lui avait été bien précieux , Duroc
qui lui avait constamment donné de
bons conseils . et le roralc Louis de
Narbonne. (^pendant , malgré son
deuil et l'imminence de sa ruine (car
Junot n'avait laissé que des dettes) ,
sa maison était encore le point de réu-
nion de la plus haute socié;.'. Aussi
était-elle i\r<' premières informée des
désastres de Napoléon, contre lequel
elle déclamait alors norr lu mhne
franchise , dit-elle dans ses Mrrnoi-
rrs, qu'elle avait inlse auliefois à pu-
hlirr son ndniiration. Il est vrai
3u'elle ajoute avec une rare flexibilité
'esprit : «< J'ai ensuite abjuré depuis
«« loncj-lemps ce m^me resst.itimenl
•« pour revenir à mes premières ad-
«' mirations." Mais à la 6n de 1813,
tout eiilicre aux inspirations de son
frère Albert Permon et de «on vieil
i3.
356
JUN
oncle Dcmétiius Comnène, zélé parti-
san des lîoiirbons , elle entrevit l'es-
poir d'obtenir de Louis XNlll les
avantages que Napoléon ne paraissait
plus disposé à lui accorder. Dès ce
nionienl elle £ut tout aux intrigues
qui accélérèrent la première restaura-
tioii : on la vil (et elle-même le ra-
conte) donner le moyen à un ancien
officier suisse, M. de Wildermelz,
agent du comte d'Artois, de parvenir
auprès de M. de Metternicl] pour ac-
complir sa mission. Le 30 mars au
soir, son salon était rempli, comme à
l'ordinaire, de personnes empressées
de savoir ce qui allait arriver. Sa posi-
tion particulière ne lui faisant envisager
que des désastres, elle avait caclié ses
diamants dans une ceinture qu'elle
avait sous son corset. Elle se décida
à écrire au duc de Raguse qui, venant
de signer la capitulation , lui donna le
conseil de ne pas quitter Paris , « qui
u serait certainement le lieu le plus
•f tranquille à vingt lieues à la ronde.»
L'entrée des alliés amena dans la mai-
son de la duchesse d'Abrantès d'an-
ciennes connaissances , entre autres
Czernicheff qui, ainsi que Metternich,
avait , au temps de la puissance de
Napoléon , courtisé toutes les belles
dont les maris pouvaient avoir des
secrets diplomatiques. Le premier ser-
vice qu'il rendit à la veuve de Junot,
fut de la délivrer de l'Iiote le plus in-
commode par sa voracité, le fils de
riietman Platow, pour le faire rempla-
cer par un homme qui à cette époque
mérita l'estime des Parisiens, M. de
Wolkonski , premier gentilhomme de
l'empereur Alexandre. Bientôt Thôtel
d'Abrantès devint le rendez-vous des
plus illustres chefs russes et allemands.
Alexandre lui-même l'honora plusieurs
fois de ses visites et eut avec elle de lon-
gues conversations. Mais ce fut en vain
que le czar et le prioce de Metternich
s'entremirent, auprès du roi de Prusse,
JUN
pour faire rendre à la duchesse d'A-
brantès le majorai d'Acken , rappor-
tant cinquaute mille francs ; elle re-
fusa, dit-elle, cette grâce, parce qu'on
y mettait la condition que ses deux
fils se feraient Prussiens. Elle ne man-
qua pas de se présenter à la cour des
Tuileries. La duchesse d'Angouléme,
qui est du très-petit nombre de per-
sonnes dont W^^ d'Abrantès parle
avec convenance dans ses Mémoires,
lui fit l'accueil le plus obligeant. Dans
l'audience qu'elle ootint de Louis
XVm, qui fut également fort gracieux
avec elle , la duchesse , d'après ce
qu'elle rapporte, demanda beaucoup de
choses; elle réclama pour son fils ce
méchant majorât de deux cent mille
francs qu'il avait sur le grand-livre ;
pour son frère Albert Pcrmon (16)
une place, et pour elle l'achat de son
hôtel par la liste civile, afin d'y pla-
cer le garde-meuble de la couronne.
Louis XVIII accorda tout, et en défini-
ti?c ces promesses ne se réalisèrent
point. Seulement, en 1815,1e roi luilil
payer assez richement la fameuse Bible
de Portugal du Xlli® siècle, avec les
miniatures de Lelio Clavio , que Ju-
not avait enlevée de Lisbonne, dont
Napoléon lui avait fait présent, et que
la cour de Portugal prétendait alors
ravoir sans bourse délier. A cette oc-
casion Louis XVI II dit avec fermeté :
« M'"® d'Abrantès est veuve et je
«« dois prendre sa défense.» Pendant
les Cent-jours elle n'eut aucun rapport
avec Napoléon ; et dans ses IMcnioires
elle parle convenablement de la cata-
strophe qui condamna Louis XVIII à
un second exil. C'est là qu'elle les
termine ; elle avait promis de les faire
suivre d'une Histoire, de la restaura-
tion qui n'a pas paru. Depuis 1815
jusqu'en 1834, c'est un triste specta-
cle de voir, après une existence si
brillante, la duches.se d'Abrantès ré-
(i6) Mort en tSii.
JUN
(luilp , k ri»;e Je Iiriilr an« , par stm
(lefjut de prévo>ance et d'économie,
k vendre jnrre à pièce les débris de
&a (uilune J7 ; ^ ùwt d'emprunts
el de riédils qui ne furent jamais ac-
quittés ; el , pour dfrnierc re>^ource ,
à ic rortire à la solde d'un libraire,
moyennant que , dan*, des Mrmoi'-
rrs publiée Ac son \i\anl , elle i>-
Ncleij lis !.efirl>. dévoilera les fai-
blcvses de louiez Ie< per^ontjes qui île
prés ou de loin ont eu des rapports
a\ec elle! Mlle luèiue dans ce liue
élran;;e ne se ména;^e pas plus que les
autres : car, pri\ée de tout sens moral,
de tout e^prit de convenance, elle ra-
conte le mal avec les mêmes couleurs
et le!, mêmes rio«;es qu'elle dirait le
bien. ToMlefois , le Ion d'abandon
qu'elle aflecle ne l'empeclie pas, quand
elle le veut, de pallier la \crilé. On a
be.iu jeu de fauc dix \oluroes lorN<|ue,
comme elle, on descend dans le Un in-
térieur, ou que l'on rapporte des con-
fer>ationN de quarante pa^es avec des
indnidu> qu'on peut faire parler à sa
f;uise, puisqu'ils 5ont presque tous des-
cendus dans la tombe. Hue dire des
appréciaiiorii morales et polili(]ues
d'ujie femme qui se f.iii r.i|M)lo 'isfe «le
Josepli Kebori ^IS , (jji prcsnitc les
séides de llonaparle romiuc dci répu-
blicains purs, qui médit de tout son sexe
et qui paile avec lé^rielo des vertus
qui le rendent re-peclable? Ses opi-
nions littéraires ne sont pas plus judi-
(17) JuDot. cornu;* oo I'j <lil d»i%\ ^oa arii'
clr, •tait r ' ftr.b .■ un*' •■ rt \,,\'.. .0 !. i.,,,
de litr. .
uar; c. :
enllcctiou , i..,itjue r.j Lur \^t . 4 r;e ù.«|>rr-r«
pir %x »<•«»». 11.1 y To)aii &ci>i«r «•> |>rnni(-r«
ligne (nul \r^ BuJ«>ni. lou* |p« ItiJol avrclruis
rseinplairrs aniqup» . cl co ouirc lr Puuknn n
CUo« imprime tar To.in en cirartrrrs «l'or, >s
avec les dt%»\a% de Gérard «t de l'ruilbon; Irt
F<bV«"I. Lï Fontaine a. te l«» dessins de Per-
cirr. 1,4 ra»# de Junol étiit h l'i.nitson de fa
bit>Ii 'brquc ; «lie Talail 100,000 Trj un.
( fS, <!iii<j j'ages sont con$ u ret-s à telle l>cil«
tàch* dan« le Wli* toI. do 5m Mèm»irn,
JUN
35'
cieuse^ , témoin ce parallèle où, exal-
tant l'école romantique aux dépens de
tout ce qui l'a precéilee, elle nie avec
le dernier mcpiis le> œuvres du bril-
Jant auteur des Jardins et de V Imu-
ginatiun llîh. Oaanl au bl\le des Mr-
muirfSf il e>l queljuefois pittoresque et
animé, car on voit qu'elle écrivait com-
me on improvise; mais il est plus souvent
incorrect , diffus et <le fort mauvais
ton. 1^1 révolution Ae IKDO la trouva
à rAbbayc-aux-Bois, où la perte en-
tière de sa fortune l'avait forcée de se
retirer : elle-même affirme qu'en
voyant le retour du drapeau tricolore ,
elle Jut saisie tfune Je tes joies sans
mesure qui rrxclrnt le ciel. Sans
doute, elle espérait que le nouvel or-
d»e de clioses relèverait les espi-ran-
ces du parti bonapartiste auquel elle
s'était ralliée; mais rien ne fut change
i sa Iriste destinée. Kn 1831 elle
commença la publiralimi de ses Mé-
moires dont le dix-liiiilième volume
a paru en 183.'». \,'.l mirante Je
Castillf, publié en 1H3-J, ofire une
esquisse de l'K^pj^ne et de la rour de
Madrid sous Qnr le» 111. M"' d'A-
branles a composé p'usieurs autres
romans et fourni de nombreux articles
i diflerenls écrits périodiques, entre au-
tres à la Hei'ue Je Paris : on a sur tout
r«niarquf, pour la vivacité des peintu-
res et même pour la nudité des dé-
tails, certains tableaux de la cour de
Russie au temps d'l''.li>alelh el de
Githcrine II. Klie est morte à Chail-
lot , le 7 juin 1838 , réduite à la
plus extrême rai<ère , deux jours après
avoir elé admise dans une obscuie
maison de santé , voisine d'une nuire
plus adialandée , dont le niailre avait
refusé de la recevoir, faute de paie-
ment d'avance. Abandonnée de tous
ceux qu'elle aimait , elle ne manqua
pas du moins des derniers accours de
la religion qu'elle reçut des mains de
(lu) T..in XMI. ^ *
388
JUN
M. de Quelen , archevêque de Pa-
ris (i20). Les journaux annoncèrent
que le roi Louis- IMiilippe lui avait
envoyé un secours de mille francs ;
mais il parait qu'il arriva trop tard.
(Quelle fin pour une Comnène , pour
celle qui avait été pendant huit ans
guiwernante de Paris ! M'"^ d'A-
brantès a laissé quatre enfants. 1° M"*
Junot d'Abrantès qui, après avoir été
admise en 1825 dans la cono;réfîation
des sœurs de la charité , rentra dans
le monde en 1827, et comme sa mère
s'occupe de littérature. 2*" M"'^ Cons-
tance Aubert qui publie dans différents
journaux des articles modes et varié-
tés. 3° M. le duc d'Abrantès , au-
teur de quelques romans. 4** M. le
marquis d'Abrantès, officier distingué.
J U IV TERBUCK (Jacques),
écrivain ascétique, dont les bibliogra-
phes trompés par les différents noms
qu'il a pris à la tête de ses ouvrages ont
fait sept ou huit auteurs différents (1),
était né en Pologne vers la fin du
XIV® siècle. Entré jeune dans la con-
grégation de Citeaux, il s'y distingua
par ses talents et fut (ait abbé de Pa-
rade ou de l^aradiso, diocèse de Posen.
Depuis il résigna cette dignité pour em-
brasser la règle des Chartreux , et alla
professer la théologie à Erfurt. Il y
mourut en 1465, à l'âge de quatre-
vingts ans. Le nombre des ouvrages
qu'il a composés est très-considérable.
Ëabricius en a transcrit les titres dans
la Biôl. med. ri infiin. latin. , IV,
8 et suiv. I). Bernard Pez en avait
rassemblé la plus grande partie, et il
se proposait de les publier avec une
dissertation sur la vie et les écrits de
(20) On peut lii**; le rctit (lét.iiUé de toutes
ci-s rirciiiislanct's (Lius un «îcril intitulé; Let
dernifrt mnmeitlt de la diiehrtse d' /4brui,lis, par
A. <le Uoosmalcri, laiis, i838, iii-V".
(1) JaiqufS (le CH'.tiix, J.ir(|iies le Cli.ir-
tre'ix. Jacques Junlerbiick, Jrf<(jiifi Hf Polo-
gne, Jacques de l'aradiso , de Clusa, d'Erfnrl.
Cet »«pt noms (l<'si|;n>-nt le même écrivain.
Jnnterbuck ; mais ce projet est resté
sans exécution. Le savant bénédictin a
cependant inséré dans sa Bihliolh.
ascetica, VII, 351, un opuscule de
Junterbuck , intitulé : De causis mul-
iarum passionum prœcipue iracun-
diœ et remediis earumdem. Ses au-
tres ouvrages imprimés sont: I. Ser-
mones dominicales notahiles et for-
malcs, Ulm, 1474, in-fol., goth.,
première édition , rare et recherchée ;
il en existe plusieurs autres du XV®
siècle, in-fol. et in-4" , mais sans
date et sans indication de lieu. II.
De valore et ufililate missarum
pru defunctis (Essling), 1474, in-fol.
III. Tractatus de apparitionibus ani-
maruni post exitum earum a cor-
porihus, de earumdem receptaculis,
Burgdorf, 1475, in-fol., goth. (2),
1^° édit., très-rare. Cet ouvrage cu-
rieux a été réimprimé dix fois au
moins dans le XV® siècle. ÏV. De
errorihus et morihus christianorum,
Leipzig, 1488, in-4°. V. De arte
henc jnoriendi, ih'ià.y 1495, in-4".
VI. Quodlibetum statuum humano-
rum (Essling), sans date,in-4°. VU.
De veritate dicenda aut tacenda.
Sans (\3i\e,'m-{o\.y\\\ . De arte curandi
vitia, Leipzig, sans date, in-4". Cet
opuscule ne diffère peut être que par le
titre de celui que D. Pez a publié dans
la Bildioth. ascetica. IX. Deconfrac-
tihiis (pii fiunt ciim pacto ad vitam
(Cologne) , sans date , iu-4°. W — s.
JUPPIX (Jeaw-Baptiste), pay-
sagiste , naquit à Namur en 1678.
Son père, négociant de cette ville ,
ayant remarqué ses heureuses dispo-
sitions , lui fit apprendre le dessin
chez un peintre namurois et l'envoya
ensuite à Bruxelles, où il étudia plu-
sieurs années. Ayant fait d'assez grands
(ï) c'est jusqu'ici l'.; seni oiîvrapc que l'on
co'in.iis-p , imprimé à Burgdorf, dans Je XV'
siècle, l'anzpf m cite deux autres, sans date ,
qu'il croit imprimés avec les mêmes curactères,
(Voy. Annal, typogniph., fV, 26λ.)
profit, Juppin, dan^ If luit «Ir prr-
(rrlionner noh talml , rtitrrpril un
\n>a;;r d'ila'ir. Il «'fiablil irahoril à
Home , où il «ui>i? pendant un an
«1 demi Iw four^ de Taradéniif ; il vi-
sita ensuite les principales villes des
aris, telles que Mndene , Bolo;ine. Na-
plei, où il pei;;nit plusieurs tableaux
qui lut avaient été rommantirs par des
»ei;;nrurs de la mur. Il profila de son
séjour dans cette dernière ville pour rx»-
miner avec attention le cratère du Vé
suve qu'il reproduisit sur la toile avec
une {*rande vérité. {\e beau tableau
fut détruit lors de l'iiirendie du palais
des évé«|ues de Lié^,e, avec quehjMes
autres productions de ce peintre qui
ornaient la salle des étals. De retour
de son vovape , .luppin babita Na-
mur et n'alla se fixer à l.iè;;e qu'en
1717. C'est dans celte ville qu'il pei-
gnit la plupart de .«es tableaux : ceux
qui se trouvaient dans le iliiror de
I é<;lise des Chartreux étaient re«;ar-
dés comme ce qu'il avait fait de plus re-
marquable; ils furent détruits en 179i
par le vandalisme levolutlonnaire.
I^s é<;li$es de Saint-Denis et de Sainl-
Martin, à I.iè^e, conservent encore
des tableaux de Juppiii ; on remarcpie,
dans la deinière, de-v pavsa^es qui
ont pr es de viiifjt pieds carrés, (x- pein-
tre travailla encore pour le prince-évé-
que, (îeor^es- Louis de Iier»;}ies, pour
les comtes d'Oullreinont et pour le
couvent des Croisiers à Iluy. Re-
tourné à Namur pour y vivre prés
d'un frère qu'il aimait teiidiemcnt , il
y mourut peu après, eu 17"J1>. .luppin
a un pinceau ferme et large, son fe«iillé
est soij;né, sa couleur est vive , sa
perspective est bien entendue ; on re-
marque également, dans ses tableaux,
que le.s diflérentes parties des pa>saT
f;es sont harmonisées avec boolieur.
Plumier fut l'auteur des personnages
que Ton rencontre quelquefois dans
les toile« de Juppin. L — l — l.
JUK
359
Jl HKT ( Kn.iwçoi.H) , critique
érudit et consciencieux, né en IT)').!,
k Dijon, était fils d'un greffier au bail-
lia{;e de cette ville. Il alla tei miner
ses études a l'université d'Orléans, où
bien jeune encore il prit srs de«;rés en
droit. Lorsque parut le 1"' livre des
Uignrrum de Tabourol '/'. ce nom,
X M N\3.'>H^, son cousin, il fil une pièce
de ver*, en réponse aux crnseuis que
choquaient les bouHonnerirs par trop
licenrieuses accumulées dans ce sin^u-
lier volume (1 . Plus tard, avant em
brassé l'elat ecdesiasiique. il fut pour-
vu d'un canonicat au chapitie de I^n-
Rres ; et des lors il consacra tous ses
loisirs ï l'étude de l'histoire et à II
culture des lettres. Dans le moment où
parut la V///Vj de Pa^qtiier (Tce nom,
XWill , »»;î), il se permit, en ladi
nani, une rpi^ramme dont le sens était
qu'il lui restait des mains pour prendre,
maiv non pour donnei . Plus sensible &
ce jeu de niotsqu'il ne l'aurait dt), Pas-
quier ^ répondit par un distique fort
^r«>ssici , mais avant reçu, quelque
temps aprè>, des xers latins et français
que Juiet lui envova pour une se-
conde édition de la Mam, il i'em précisa
de s'e«cusei des deux vers qu'il avait
insérés dans une letlic A Tabourol:
•« lesquels , dit-il, je condamne comme
•« champignons, voulant que leur mort
•• soit aussi prompte que leur nais-
«« sance. »» (Vov. les Lrttrrs de Pas-
quier, liv. V|(l, 12 et HV Jurel
f tarait avoir renoncé de bonne heure À
a littérature légère pour se livrer ex-
clusivement à l'élude des anciens mo-
numents de notre histoire ; mais il ne
composa aucun ouvrage suivi , et se
borna toute sa vie aux modestes fonc-
tions d'éditeur. Pendant les troubles
de la ligue en Bourgogne , «< quoicju'il
«« fût periilpuxd'aller au contraire d un
(1) Celle pièce est iiuprimée cl«n« la* Bigar-
rurrt, édition de 1661, p. 35o. et dans te» thh-
•fca po^tmr, fniler.
^6o
JUR
« parti qui, en apparence, s'établissait
« sur la religion et qui était appuyé
« de l'autorité du gouverneur (le duc
u de Mayenne), il ne laissa pas de
« suivre le parti du roi, et ne se put
« tenir en diverses rencontres de té-
« inoigner combien il estimait vain le
« dessein de ceux qui voulaient, au
« préjudice des lois fondamentales
« de l'état, donner entrée à l'élran-
« ger (2). >» Cette manière de penser,
jointe à ses talents, lui valut 1 amitié
de plusieurs personnes considérables,
notamment de Gillot, l'un des auteurs
de la Satire Ménippée [Voy. Gillot,
XVII. 383) , des Dupuy , des Pitliou
et du président de Harlaj qui voulut le
fixera Paris, en lui faisant obtenir une
place de conseiller-clerc au parlement,
mais ne put l'y décider. Exempt d'am-
bition il vécut tranquille au milieu de
ses livres, et mourut le 21 décem-
bre 1626. Outre un très-petit nom-
bre de pièces recueillies par Gruter
dans les Deliciœ poeiarum gallor. ,
II, 383-85 , on a de Juret des édi-
tions, avec des notes, des Lettres de
Symmaque, Paris, 1580, in-4°;du
Jonas, poème attribué à Tertullien,
revu sur un manusci It des Pilliou, dans
la BihliutJiecu Putriim de Marg. de
la Ijigne; de la Vie de S. Martin, de
Tours, en vers , par S. Paulin, Paris,
1585, in-8" ; des Lettres d'Yves de
Charlres,\\i\à., 1585 et 1620, in-8"
(foj. SoucHET, XLIII , 168; et
Yves de Chartres, LI , 545). Les
notes de Juret sur les Œuvres de
Sénèfpie , dans l'édition de Paris,
1602, in-fol., ont été reproduites dans
l'édit. Fa/'/or. , Amsterdam, 1672, 3
vol. in-S". Celles qu'il avait laissées
sur les Lettres et le Traité àe Cassio-
dore. De ratione animct, font partie
de l'édit. de Cassiodore, publiée par D.
Garet en 1679, in-fol. On en trouve
(a) Ce patsaf^e est extrait «le la Notice sur
Joret indiquée à la Cn do cel article.
JUR
encore de lui dans les Panegyrici
u^/fî/'^i; mais ce n'est là qu'une partie de
ses travaux. Les savants Bouhicr et La-
mare, de Dijon, possédaient les notes et
les corrections de Juret sur cinquante-
cinq auteurs, anciens ou du moyen-àge,
dont Papillon a donné la liste détaillée
dans la Bibliothèque de Bourgogne ,
I, 355-61 (3). Ce judicieux critique a
été combléd'éloges partons les savants,
entre autres Saumaise, Scaliger, Colo-
miès, La iMonnoie, et tout récemment
par l). Ijrial qui rend une pleine jus-
tice à ses notes remplies d'érudition
sur Yves de Chartres, dont il a le pre-
mier éclairci le texte (Voy. les Méin.
de Vacad. des inscript., nouv. série,
III, 60), Une courte iV6»//r;e sur Juret
par un contemporain, que Chardon de
La Rochette avait communiquée à M.
Amanlon , a été publiée dans le Jour-
nal de hi Côte d'Or, au 7 janvier
1813 (4), et reproduite par Barbier
dans son Examen critique des dic-
tionnaires. L^porlrait de Juret était
dans la bibliothèque du président liou-
hier. W — s.
JURGEIVSEN (Guillaume),
avocat et poète allemand, naquit le 5
mars 1789, à Slesvig. Son père qui
n'avait pour tonte fortune qu'un [Mîtit
emploi au tribunal siipériem- de cette
ville et qui était chargé de sept enfants,
voulait qu'ils n'apprissent que des mé-
tiers: Guillaume fut le seul qui par ses
supplications obtint pour lui la révoca-
tion de cet ariet. Il lui fut permis de
mener ses études jusqu'au bout, et en-
suite de se rendre à l'université de KicI,
et même à celle de Gœttingue. Il y
suivit avec ardeur les cours de droit et
revint à Slesvig muni de [)lus de connais-
sances que la plupart àa, jeunes gens
qui sont censés avoir pâli sur les Pan-
dectes et la Cai olinc. Là il débuta par
[i) LfS livres ;iunot<s j);ir.luict cl <(iii se Iroii-
vaiciil «l.nii% le c.il>iiiel ilr Luuiaro ioiit aujour-
d'hui à l;i Hihiinllièque ni) aie.
(4; lieu eïi^lf un timgc «épiri, 4 p. iii-8».
JUR
entrer roamr secirlairr au ser\ife
|)articulicr ilu cutii^rillrr de jiutice
Wariirnbour^, subit hiriilùl avec éclat
un e&aiiirii sprrial île droit ou puur in-
terrogateur il eut le savant Micliaelis
(1812), et te fit recevoir avocat. On
peut être surpris, après ce début, qu'il
Noit toujours re&té sans clientèle. Il e>t
bien vrai aueSle-^\i^ avait un nombre
eiïia>ant d avurats.touss'anachanl 1rs
causes et la plupart faisant fort peu d'af-
faires et d'ar;;enl. Jiirj^ensen d'ailleurs
avaitencore bien .iit!;erl;')>c contre lai :
le inallieuieux rrs ! des co-
médies!! des r^ '!! Mais une
bonne eipiopnation vaut plus a l'avoué
^uit poursuivant, soitco-licitant, qu'une
épopée ne rapporterait au plus r^rand
poète de nos jours : que serait-r<* ^i ce
ptièle était domicilie à Slesvij; :' Le spi-
rituel, l'excentrique Jur>;en5en nej;ros-
sissait donc que ses dossiers poétiques,
tandis que ses rivaux en robe et bon-
net carré péroraient pro>aVq'iement au
palais; et plus d'une fois, sans namdie
rirécisément de voir son nom enûei la
istedes ;;rands poètes morts de faim ^
l'inslar du divin .Melé,si;;ène, leur pa-
tron, il sentit la main de ;;lace de la mi-
sère élreindrc son front et comprintei sa
pensée. Ces douleurs matérielles, join-
tes aux souiïiances de vanité blessée,
aux mille émotions du poète tantôt
ivre d'un succè>, lantùl furieux des cri-
tiques et souvent en proie aux spasmes
ft^brilci tle la rompo^tion, n'alloti'^enl
pas la vie; et Jur^ensen n'clail point
né a\ec un corp> de fer. A mesure que
sa santé déclinait il travaillait plus ac-
tivement. Au lit de mort, quand sa
main lui refusait le service , il dic-
tait à sa femme. Mais au fond, c'est
qu'il ne se croyait pas malade ; il
avait la vertu théologale du poète,
Tespérance , même quand tout autour
de lui désespérait. C'est ainsi qu'à
son dernier anniversaire , le 5 mars
1826, un mois jour pour jour avant
ju;
36 1
son décè-t , tandis qu'un cercle ami
fêtait sa naissance en disant tout bas :
X II e>t in(.rl ! i> lui >eul comptait ;;ue-
rirelpeM^alt aux beaux bites qu'il vi-
siterait convalescent. J'iir^ensen n'eût
probablement été , maigre ses soins ,
qu'un médiocre juriste et un avo-
cat inégal , mais sa pué>ie a de la
valeur. I.r. beaux et nobles sentiments
i'y e*lial<*nt, comme de la lleur \ier;;e
un ai Ame : le vrai, Ir bon le subju-
guent et le fascinent. De la, sa sensi-
bilité, sa verve. Kn même lempt il a
du cidoris, du mouvement ; il est vrai-
ment dramatique dans Ir dtanie et iiurs
du drame, surtout s'il s a^it de peintu-
res malicieuses, de délicates et fine.s
observations. Ses épi^ramroes ofrent
ce caractère au plus haut de^ré: aussi
peut-on les préférer à ses comédies
mêmes, et ne doit on pxs craindre d'en
placer le recueil à coté ou bien peu
au dessiius ilo te qui exi>tede mieux eu
ce ^enie. (x)mparati\ement à ces pi-
quantes cl fugitives étincelles, sc-s poé-
sies lyriques semblent xiu peu ternes.
C'est à notre a\is ce qu'il a fait en vers
de plus faible. Ses Œui'rrs rumplrirs
n'ont jamais été imprimées ensemble ,
et ni( me plusieurs des p eces qu'il
donna au tliéatre ne l'ont point cte .-é-
parément. Celles qui l'ont été sont au
nonibie de quatre : 1" Orgueil iTur-
tiste (voir les Hiiinrs et fleurs de
VVinfricd) ; 2'' Puunjuoi ;dans 1'///-
miinui h Jrama/itjue de Lebrun pour
1 S-Jô I ; 3" ^7 .' (dans les Fruits de lec-
tures . 1 826 , t . 1 1 1 ) ; i"" Sultan Mu/i-
Ttioud, ou les Deux viJrs, 1827.
Toutes ces biuettes sont en un seul
acte ; la quatrième est mêlée de chants
comme nos vaudevilles ou plutôt comme
les lies courts opéras-comiques d'il y
a quatre-vinj;ls ans. Knsui'.c viennent
une tragédie, également en un acte,
intitulée les Frères, 1821 ; des Poè-
mes u mes enfants, 182G ; les verset
stanres , les èpigrummes ri-dessus
362
JUR
appréciées, et enfin des articles en prose
disséminés dans la Gazette du monde
élégant, dans Eudora, dans [\î-
beillc nordalhingienne, etc., P — ot.
JURIXE (Louis), médecin et
naturaliste disîinû;ué , naquit à Ge-
nève, le 6 février 17r)1,cty mou-
rut le 20 octobre 1819. Après avoir
terminé son éducation médicale à Pa-
ris, il s'empressa de revenir dans sa
ville natale, où son temps fut partagé
entre l'art de guérir, qu'il exerçait avec
beaucoup de succès, et l'histoire natu-
relle, vers laquelle l'entraînait un goût
très-décidé. Retenu dans cette cité par
tous les genres d'intérêt et d'aff»iction,
il s'en éloigna rarement, et l'une de
ses excursions les plus éloignées fut
celle qu'il fit à Paris, où M'"'' de Staël
l'avait mandé dans les derniers temps
de la maladie à laquelle elle succomba.
Son genre de talent et la tournure de
son esprit le portaient surtout vers les
expériences délicates, vers les observa-
tions de détail. C'était le caractère
de l'école de Bonnet, à laquelle il ap-
partient par le genre de ses travaux
relatifs à l'histoire naturelle. Ses ou-
vrages sont peu nombreux, mais assez
remarquables. I. Mémoire sur cette
question : Déterminer quels avanta-
ges la médrcine peut retirer des dé-
couvertes modernes sur l'art de con-
naître la pureté de l'air par les dif-
férents eudiomètres. Ce mémoire ,
qui remporta le prix proposé par la
société royale de médecine, a été pu-
blic en 1798, dans le dixième volume
des actes de la compagnie. On ne peut
nier que Jui ine y ait fait preuve d'un
rare esprit d'analyse et d'une ingénieuse
patience dans l'exéculion d'expériences
délicates et difficiles. Mais, malgré ses
efforts, il n'a pu arriver qu'à des résul-
tats négatifs. La pureté et la salubrité
de l'air sont deux choses tout-à-fait
différentes. Les proportions des prin-
cipes constituants de ce tluide peuvent
JUR
varier beaucoup sans qu'il nuise à la
santé des êtres vivants, tandis que, bien
que très-pur aux yeux du chimiste , il
devient souvent délétère par des causes
que l'eudiomètre ne nous fournit aucun
moyen d'apprécier. Les épidémies de
choléra l'ont bien démontré. On n'est
pas encore parvenu à saisir les condi-
tions spéciales de sa salubrité, et sous
le point de vue hygiénique , nous n'a-
vons jusqu'ici d'autre eudiomètre que
l'état de santé des hommes vivant dans
l'atmosphère de telle ou telle région.
IL Mémoire sur V allaitement arti-
ficiel, Genève, 1807, in-4°. IIL
JSouv elle méthode de classer les hy-
ménoplères et les diptères , Paris,
1807, in-4°, avec 14 pi. color., ou-
vrage parfaitement exécuté et indispen-
sable pour l'étude des insectes compris
dans ces deux ordres. Jurine avait
trouvé dans la disposition des nervures
des ailes, de bons caractères auxiliaires
pour la distinction des genres, et beau-
coup de ceux qu'il a créés avec ce secours
correspondent exactement à ceux de La-
trei^le, concordance qui prouve com-
bien son point de départ était juste.
Il a surtout profité de l'absence, de la
présence, du nombre, de la forme et de
la connexion des cellules placées près du
bord externe des ailes supérieures. IV.
Mémoire sur le croup , Genève ,
1810, in-8". Ce mémoire a partagé
le grand prix de douze mille francs
fondé par le gouvernement impérial.
C'est une excellente monographie que
l'on consulte encore avec fruit. V. Mé-
moire sur l'angine de poitrine,
Genève et Paris, 181.5, in-8". Ju-
rine, qui devait être la victime de
cette cruelle maladie , l'attribue à
un état névralgique des principaux
nerfs de la poitrine. VI. Histoire
générale des Monocles qui se trouvent
aux environs de Genève, Genè\e,
1820, in-4", avec 22 pi. color., ou-
vrage capital et vraiment classique,
JUS
dans Ifqufl Pinteur a comi^^ d« rf-
marqiifs du |»lu* haut intérN, et relr\p
quflqufs cricur* {;rave*, depuis Ion <;-
temps arrrcdilées dans la scienre. I.a
noinrnriaturr dont il fait u^a^e diffire
notaldemenl ilc rrlie qui a été adoptée
depui-^, re fini rend la lerture du livre
un peu fali;;ante On doilfncore à Ju-
rine plusieurs Mrmoi'rrs \n%hé^ dans
le Journal des mines, dans la liihliotliè-
que uni\erselle de (lenere et les Me-
nioire> de la sociëlé d'histoire naturelle
de relie %ille. l'n eicellent Mémoire
sur l'arguir foliiuè. qui a paru dans
les Annales du muséum, lui est fausse-
ment attribué par quelques biblio-jra-
fihes. il appartient à son serondfiU, dont
a mort a été é;;alenienl une ^rantlr perte
pour riiisloire naturelle. J — 1> — N.
JrSSlEr de Montlurl (Fran-
çois Josfph- M amfiit PK^ . conseiller
i la rour des monnaies de l.\on,
né dans relie xille, le 11 mai 17Jλ,
est auteur d'un ouvra^^e auquel il n'a pas
mis son nom et oui eut un ^rand suc-
cès lois de sa publication. C'est une In-
strurtiun Jacile sur les roni>entwns,
ou \otions yimples sur les divers
engagements qu'on peut prendre
ditns la société, I.von, 1760, in 1*2.
Il offrait pour ainsi dire un cours de
droit usuel ï la portée de toutes les in-
telligences cl (jui pouvait mettre cha-
cun en état de ^érer ses -affaires, >ans
l'assistance d'un conseil. La clarlé
des définitions et des exemples, la pré-
cision du sl^le contribuèrent beau-
coup à le populariser. Aussi fut-il
souvent réimprimé a\ant 1789, sans
les contrefaçons qui s'en firent en
France et à Tétran^er. On doit encore
à Fr. de Jussieu des Réflexions sur
les principes de lu justice. Paris,
1761, in- 11*. Files ont élé placées en
tète de quelques éditions de rouvra;;e
précédoiil. Fa rour des monnaies avant
été supprimée en 1771, il se livra
tout entier à la culture des lettres. Il fut
JL'S
363
reçu, en 1777, \ Paradémie de Fvon.
Mais, quelques aiuice» apiè«», il aban-
donna sa ville uutalr pour s'établira Pa-
ris, où il mourut en 1797. L — H — \.
Jl'SSIIir [ Antoimk-Laurf.nt
de), neveu des tio s fcicbres botanistes
Antoine, llernardrt Joseph de Ju^sieu,
nui commencrrrni rillusIratiMU dccettc
famille a laqioili* on i donné le nom de
Dynastie fHtttinitjue, naquit romnie
eut à Fvon, qu'hab lait loujour» son
père Christophe , l'ainé de seize en
fants. Venu au monde le l'iauil 17VS,
il n'avait que dii-sept ans lorsque, du
collège de sa \ille natale, il se rendit à
Paris, dans l'intention d'> »ui>re les
cours de médecine !176.'>). Ilernard
son oncle, alors un d«'SCor\phées de l.j
botanique et qui ne comptait de rivaux
qu'.\daiison en France, et en Suède
Finné. le lo;^ea dans >on appartement
[•rés du Jardin-de-Plantrs. I.e jeune
lomme et le vieillard travaillaient le
f>lus souvent dans la même chambre :
es journées se pavsaient studieuses et
silencieuses; le soir Antoine lisait,
Bernard causait : l'objet habituel de la
conversation, de la lecture, ce n'elail
plus la médecine, c'elaienl les plantes;
étude liée si intimement d'ailleurs a la
médecine, soit k cau>e de l'organisme
Tital commun au xe^étal el à rêlfo
loolit^iqiie, soit paice que la ph)to-
p^aphie fournit moitié au moins des
éléments à la matière médicale. IJer-
nard n'avait que rarement écrit ; pres-
que septua|;'"naire alors , il écrivait
bien moins encore. Mais son inlel-
lii;ence était aciive, sa puissance de
méditation avait j^randi avec l'aj^e.
A mesure que ses veux lui refusaient le
service, il penélrait plus intimemenl
par la pensée au fond des m\ stères de
1*^ nature et delà science, il poursuivait
plus oLstinémeiit les hauts problèmes
qui les dominint. Parmi ces problè-
mes, un des plus iuleressants à cette
époque était celui de la méthode natu-
364 «^US
relie. Linné lui-même l'avait cherchée
et la préconisait, la recoramaudait en-
core tout en s'en éloignant, et après
avoir paré de tous les prestiges la fa-
meuse méthode arlificielle à laquelle
est identifié son nom. Mais personne
encore n'avait posé les bases de cette
méthode naturelle tant souhaitée, bien
que quelques t;rands botanistes les eus-
sent en partie devinées , ou s'y fus-
sent conformés tacitement. Sur la fin
de sa vie, Bernard de Jussieu fut cer-
tainement de ces derniers ; et ses Or-
dres naturels, dits vulgairement Ca-
talogue de Trianon, en font foi. Fa-
milier depuis sa jeunesse avec tout ce
que l'on connaissait alors de plantes,
doué de la plus heureuse mémoire et
de la plus rapide faculté comparative,
habile à force d'habitude à saisir
d'un coup d'œil et l'ensemble des ca-
ractères et leur degré de permanence,
ce qui est presque le degré d'impor-
tance, exempt d'ailleurs de cette impa-
tience, de celte pétulance d'imagination
qui si souvent égare les hommes de gé-
nie, il était plus que qui que ce fut au
monde sur la voie de la métliodc natu-
relle ; et l'on ne peut douter que réduit
par la vieillesse et l'affaiblissement des
facultés physiques à penser plutôt qu'à
voir, à combiner les résultats de ses
observations plus qu'à observer, il n'ait
sans cesse été préoccupé de celte mé-
thode. Chaque soir donc il communi-
quait à son neveu des réflexions, des
vues qui la plupart se référaient à cette
question, de sorte que ce qui pour l'un
était le terme , le couronnement de
toute une vie passée à examiner curieu-
sement les plantes, était pour l'autre le
prélude et l'introduction à la science.
C'est à force d'empirisme et de prati-
que que Bernard, comme les botanistes
ses prédécesseurs immédiats et ses con-
temporains, s'élançait vers la théorie ;
c'est la théorie qui devait amener An-
toine-Laurent à la pratique de la bo-
JUS
tanique. Insensiblement ses idées pre-
naient uneautredirection, et sansencore
abandonner la médecine, qui aux yeux
mêmes de son oncle restait pour lui un
en-cas, un pis-aller, il se laissait vo-
lontiers distraire de cette étude. De là
sa thèse yîn œconomiani animalem
iiiLer et vegctalem analugia, soute-
nue en 1770, et à la suite de laquelle
il fut admis au doctorat en médecine.
Cette thèse, exposé concis et net de ce
qu'on savait alors de plus positif sur
la structure et les fonctions des végé-
taux comparés aux phénomènes de la
vie des animaux , n'apprendrait rien
aujourd'hui à quiconque connaît les
premiers éléments des sciences natu-
relles : mais, en 1770, elle contenait
des énoncés, sinon tout neufs, dumoins
très-peu démontrés pour une foule
d'hommes instruits ; et la maturité, la
plénitude que décelait l'ensemble des
vues et des déductions, prouvait de
reste qu'il y avait là autre chose qu'un
jeune homme de talent, borné à lui-
même, à ses livres et à ses cours.
C'était le fruit d'une communication
intime, d'une assimilation quotidienne
et graduelle entre deux esprits, l'un
parvenu par ses propres forces aux
sommités de la science , l'autre s'y
laissant transporter et commençant à
saisir plusieurs détails de l'ensemble
enjbraf.sé par le premier. A peu près
au même instant, le professeur de bo-
tanique Lemonnier, quv? ses occupa-
lions comme premier médecin de
Louis XV empêchaient de remplir ré-
gulièrement ses fondions, trouva com-
mode d'avoir un suppléant. Bernard
présenta son neveu, Buffon l'agiéa, le
roi n'y mit pas d'opposition ; et com-
ment en eût-il mis, lors même qu'i! fût
sorti de son insouciance habituelle? il
connaissait personnellement et goûtait
beaucoup Jîernard de Jussieu avec le-
quel il s'entretenait en quelque sorte
tous les jours, lors delà plaritation du
JUS
irjliri dr Trianon. CVlail le temps
ou tout ^rand nom pouvait prétendre à
un rér;iment, une roropa(;nie du moins
jii sortir du collège : le neveu Jr Ju^-
sieo avait bien droit sous ce lé^'me à
uue rliaire de liolanique. Aujourd'hui
l'on crierait au népotisme; et de fait
il e*t certain, selon Antnine-IjurenI
lui même, (jue la science ne lui \int
qu'après la place. Mais elleMnt. Porté
si \ite et presque à l'iroproviste à une
des cli.iires de haut enseignement de la
capitale, sans savoir de la botanique
autre chose que quelques éléments et
des ;;éné:alites, il étudiait avec ardeur
la veille ce qu'il de\ait professer le
lendemain. Pour uu esprit vulgaire et
sans Ifs ressouires que lui présentait la
profonde érudition de son oncir, dic-
tionnaire vivant qu'il pou\ait feuilleter
a toute heure, cet enseignement au jour
Icjoureùtété bien snperlicic! et qnelqic-
foi> fautif. Hieiitol, au rcitr, il fut au
pair de sa tache, et quelques années
plus tard il la domina. Dès 1773,
c'est-à-dire à \inj;l cinq ans et a\ant
d'avoir encore rien publié , hor-
mis sa thèse, il se mit sur les rangs
pour l'académie des sciences ; mais il se
hjîa de remplir cette condition essen-
tielle, et son Mrmotre sur la Jumil-
Ir drs Rrnunntlrs , 1778 (dans les
Mémoires de l'académie de> scicnce>\
s'il ne précéda sa candidature précéda
son élection et la justiGa. C'est en ré-
digeant cette importante monographie
que, pour la prcmicrc fois, le jeune
savant se sentit , dit il , vroimnU
hotdnisU. Jusqu'alors il avait ba-
lance entre les désirs de son oncle et
sa propension à se lancer dans une car-
rière lucrative où son nom ne pouvait
manquer de lui faire bicnlf^t une riche
clientèle, l'ne fois son mémoire publié,
-a >ocation se déclara, et il se dévoua
[.resquc exclusivement à sa spécialité
iiofivelle , qui devait lai valoir une
}>o;;ition plus haute. La cécité de
JUS
365
Bernard At\\\\\ complète : le neveu se
chargea de du i;;er a sa place ta plantation
du jardin, que >enaieiit à chaque instant
enrichir deN espèces ignorées ; et lorj»-
qu'en 177 V il eut été résolu, sur le
rapport de RufTuii à lx»uis XV, de
doubler le Musée et de replanter la
partie consacrée à l'école ptopiement
dite, organe et porte-voix de >on oncle,
il 6t prt>aloir l'idée de dispuseï le$
plantes suivant an ordre nou\eau
qui ne serait ni celui de Touriiefort,
suivi jadis au jardin, ni celui de Lin-
né, ni une combinaison de l'un et de
l'autre, mais dont les bases seraient
celles du (^talogue de Trianon, mo-
difiées d'après des vues ultérieures et
aavsi d'après les espèces récemment
connues. Ces bases furent annoncées
au public ùimV Expositiurtilun rum-
i'ri (trdrr dr plant r s ndupfr dans la
drmonstriilion du jardin royal
(177i , dans les Mémoires de l'aca-
démie des sciences' , qui n'est qu'un
développement ex professo des idées
générales de méthodes déjà émi«>es, mais
comme occasionnellement, dans son
iMrnwirf sur 1rs Hrnonrulrs. Tandis
qu'il précisait et prouvait ainsi les prin-
cipes fondamentaux de la méthode na-
turelle, le jardinier en chef André
Thouin exécutait sous ses jeux la nou-
velle distribution : ce ne fut pas ,
sans tâtonnement, sans changements
dans l'ordre et dans le groupement
des familles. Il n'en pouvait être
autrement : non-seulement des e>pè-
ces récentes apparai.ssaient . impor-
tées par les vo>ageuis, mais encore
la subordination relative des caractères
décidément érigée en principes offrail
souvent des doutes dans l'application,
car souvent c'est la permanence du ca-
rasïère qui en détermine l'importance,
et il e^t clair que pour nous cette per-
manence est une notion empirique sus-
ceptible de varier à mesure que nous
apercevons des faits nouveaux. C'est
366
JUS
JUS
justement un mérite de Jussleu d'avoir
compris que sa classification n'était
encore que provisoire , et de s'être ré-
servé d'en retoucher long-temps en-
core les détails. C'est ce qu'il ne cessa
de faire douze années durant, de 1775
à 1787. Pendant ce temps Bernard
en France, Haller en Suisse, Linné
en Suède, étaient morts (1778 et 79),
et avaient laissé vacante la première
place. Tout en coopérant activement
à la formation de la société royale de
médecine, dont il fut nommé trésorier,
et en secondant les efforts de Vicq-
d'Azyr pour soutenir l'existence de
ce corps contre la jalouse susceptibilité
de la faculté, à laquelle insensiblement
il devait se substituer, Jussieu perfec-
tionnait l'application des principes
constitutifs de la méthode annoncée
dès 1773. Enfin, en 1778, n'ayant
en quelque sorte rien écrit à l'avance,
il entama la publication de son Gêne-
ra jAaiitarum scrumhim ordines nu-
turalcs disposita, etc. L'impression
en dura quinze mois. Ainsi qu'à tant
d'autres, il fallait lui arracher feuille
à feuille la copie que le typographe
était impatient de mettre sous presse.
Nous n'in>isterions pas sur celte cir-
constancesielle ne prouvait qu'Antoine-
Laurent fut bien réellement l'auteur de
son livre, et qu'il ne s'est point borné à
transcrire ou même a traduire en latin
les idées de son oncle. Sa famille, du
reste, conserve encore les cahiers de
démonstration, base de ses leçons, et
(le petites caries manuscrites datées,
sur lesquelles il inscrivait les caractères
des groupes qu'il reconnaissait; et ces
brouillons souvent chargés de ratures
attestent bieii évidemment une élabo-
ration progressive d'idées premières
qui , quelque heureusement conçues
qu'elles fussent, étaient sujettes à beau-
coup de difficultés dans l'application,
l/illustre Cuvicr sans doute a bien exa
géré en disant [liapport hislori(jue
sur les progrès des sciences naturel-
les depuis 1789) que l'ouvrage de M.
de Jussieu fait, dans les sciences d'ob-
servation , une époque peut-être aussi
importante que la Chimie de Lavoi-
sier dans les sciences d'expérience. A
coup sûr, la méthode naturelle n'était
point inattendue, et ne porte point ce
sceau d'originalité, d'invention exclu-
sive qui classe si haut la brillante dé-
couverte de Lavoisier ; et, celte mé-
thode même eût-elle été aussi complè-
tement nouvelle qu'elle l'était peu,
elle ne révélait pas, comme la théorie
de i'oxigène, des phénomènes, des mo-
des d'actions complètement ignorés
jusqu'alors, et qui pourtant dominent
toute la science : enfin, aux Jussieu ap-
partenait au plus la mélhode, mais non
la nomenclature, dont l'idée et sou-
vent les détails étaient empruntés à
Linné. Il n'en est pas moins vrai que,
s'il faut restreindre , il ne faut pas
rayer l'éloge donne à Jussieu par no-
tre grand zoologiste. Le Gênera plan-
iarum résumait et appliquait enfin
d'une manière satisfaisante les idées
depuis long-temps en circulation sur
la méthode ; il les posait en système
suffisamment élahoré, il les faisait sor-
tir d'un vague qui, jusqu'alors, avait
jeté de l'ombre sur leur légitimité, leur
fécondité ou leur importance ; il invi-
tait à les vérifier et aussi à les recti-
fier. Sous tous ces rapports, il a rendu
des services qu'on ne saurait mécon-
naître. Les houleversements auxquels
la France fut bienlôt en proie empê-
chèrent qu'en ce pays le livre ne fût
étudié comme il le méritait. Mais à
l'étranger on l'apprécia , on l'employa
sur-le-champ : l'idée qu'avait eue l'é-
crivain de rédiger son ouvrage en latin
liàla cette prompte popularité. Outre
l'influence directe que le Gênera eut
sur la botanique, peut-être en excrça-
t-il une autre, moins sensible , mais
tout aussi réelle, sur la zoi)lo(^ie. Dans
JUS
cette sricscc ao-ui , la riawfiraiion
fiait fQCOre (ort imparfaite, ri il fst
rritain que Cuvirr, qui en a fixé riirm
\rs véritables baseï, avait lon:;-trin[is
médité les principes de la metlimie b<i-
tanique. Tandis que le nom de Jus<iieu
grandissait ain^i au drlinis, lui-même
ati dedaps >'en>rl<t|injil le plu^ pnv^i-
Mr dr silence et d (iliNCtirité pour tra-
.• M iVpi>que terrible qui suivit le
tH loùt. Il avait été prrsrntr i Louis
\\; il aimait les finurbnns. \}f%
1790, il se laissa roufirr le plus inof
lensif des déparinnents de la mairie
Ac Pans, criui des liApitaux ; et plus
lard, rnrome cliar;;ë d'un service pu-
Mic, il s'exemptait ainsi de paraître
.1IIX fêtes civiques, aui décades, au
• orps-<ie-^arde lx)rsi|ue, en ilM'A, le
.lardin to\al dr» plantes fut réorganisé
nus le titre de Muséum d'il <\-
I elle , et que le> profcssrii:
•»«)us Ir nom de conseil i!
t:on, uTip petite oli^arcbif
!)( ! . iiion en fut le premier nora-
tnr il i«-. leur, c'est Jusmcu qui eut
ri>onneur de le suivre immédia«eme.«t
IT'JVl; el rannée de son administra-
tion fut signalée par la création d'une
l'ibiiothèque consacrée spécialement
aux sciences naturelle*. Non content
• fax oir fait décréter en principe cet
< !.il.iiNsement , Jussieu lui-même alla
tr:cr, dans les vastes bibliotlièjjues en-
ie\é«*s aux couvents, tout ce qui se re-
ferait aux études de ses colle^ue> et aux
> eiiiies. Il jela auisi les bises d'une col-
lection qui , depuis liuit ans, sous les
mains d'un bibliographe émincnl^l),
est devenue le modèle de toutes les
bibliothèques scientifiques, et qui pour
le clioix, la suite, la distribution des
ouvratres, comme pour la facilité des
recherches, n'a point de rivale, même
en Anjileterre. Du reste, Jussieu, bien
qu'honorairement charge de la haute
(i) M. I^m rcier, doctevr-mèdeciD «ie la fa-
catlade Paris.
JUS S67
«oneillance de la bibliothèque , ne
s'en occupait jamais. Trop d'autres
travaux »e disputaient ses moments.
H avait repris, à la première classe de
l'Institut, le fauteuil perdu par suite
de la destruction d^s académies , et
il la présida ; puis il fut xirr président
l'année même ou le vainqueur d'Ar-
colr, iiieinbie, lui auvsi , de l'académie
des sciencr*, en rece\ait la présidence
(I79K ; et, comme on va le >nir plut
bas, il lut à celle savante société un
(;rand nombre de mémoires. H don-
nait d'ailleurs aux savants, .ses con-
frères, l'exemple trop fidèlement suivi
du cumul des char;;es. Indépendam-
ment de sa chaire de botanique, bien
avant IHOV, k la mort de IV>rilhe,
il s'arrangea pour obtenir celle de
matière médicale à la farult'* de mé-
decine de Paris : comme tout était
dendé à l'avance , dès que sa candi-
dature fut annoncée, les concurrents
se retiierent. Kn 1H08, il invoqua
par un billet les sou\enirs de l'empe-
reur, avec lequel son titre de vire-pré-
sident, en 179H, l'avait mis à même
de s'entretenir : il obtint ce qu'il avait
demandé, une nomination de conseil-
ler à vie de l'université impénale
(10 sept. 1K08). Cette inamovibilité
|>ourtant ne dura qu'autant que l'em-
pire, liien que Jussieu eût mis la
même célérité que ses rollèj;ues k
reconnaître la déchéance , Louis
\\III, en transformant l'université
impériale, rava le nom de Jussieu de
la liste des conseillers, et ne le réta-
blit pas sur relie de> membres du con-
seil roval de l'instruction publique
(1815). Sept ans après, lors du licen-
ciement et de la réorganisation de
l'école de médecine, il fut de ceux qui,
co|nme V'auquelin, Chaussier , Pinel,
I)e\eux et Ues-eiiettes, ne retrouvè-
rent point leur chaire. I) eut sans
doute été plus profondément regrette,
si son enseignement, d'abord posé sur
368
JUS
JUS
une base féconde et riche, l'accord
des propriétés des plantes avec leurs
aftînilés botaniques, n'eût point fini
par être monotone et pâle. Trop af-
faissé à celte époque, et privé depuis
lonf];-temps de rusaf];e d'un œil, il ne
pouvait que suivre de loin, cl f;ràce à
des lectures qui, bien que mullipliées ,
élaient rares el insuffisantes , les ra-
pides progrès Hc. la science clianf^ce de
face par d'admirables découvertes en
crg,anof:,rapliie et par la prodigieuse,
exubérance des espèces nouvelles.
Probablement il le sentait lui-même :
car, en 1826, il se démil de la seule
chaire qu'il eût encore, celle de bota-
nique au Muséum, en faveur de son
fils, M. Adrien de Jussieu; et quand,
en 1830 , la révolution de juillet
prétendit réparer les torts de la res-
tauration , il ne se mit pas sur les
langs. 11 avait prompîement achevé
de se casser; et son activité intel-
lecluelle se bornait à se faire rendre
compte des travaux des autres, et à
rédiger , en latin , les principaux ré-
sullats acquis naguère. Il s'imagi-
nait pouvoir ainsi donner une nou-
velle édition du Gcnera pluniariim
au pair de la science. Mais, comme
on le devine , il n'avançait que len-
tement dans une œuvre infmiment
au-dessus de ses forces et, du reste,
peu utile au point où la science en
élail venue. Long-temps encore pour-
tant il s'entretint de cette dernière
illusion du vieil âge. Complètement
aveugle enfin, 11 s'exerçait à reconnaî-
tre les plantes au tact; y réussir élait
pour lui une espèce de petit triomphe. II
passait alors la plus grande partie de
son lemps à la campagne. Sa mort eut
lieu le 17 sept. 1836. M. Adrien
Ijfongniart s'empressa de faire paraî-
tre une notice historique sur Ant.-L.
de Jussieu dans les Annales des
sciences natur elles, ]3iïï\. iS'M ; et,
Tannée suivante, M. Flourcns pro-
nonça son éloge à la séance pnbliquc
de l'académie des sciences (13 août
1838). Le caractère de M. de Jussieu
s'est soutenu constamment le même :
les habitudes sévères de Bernard avaient
donné, à ce caractère, une maturité
précoce; il avait, comme son oncle,
une piété sincère. Quoique d'un génie
supérieur, il eut l'art de se ménager
une carrière paisible : quand on l'atta-
quait, il laissait dire. Outre les ouvra-
ges signalés dans le cours de cet arti-
cle, Ant. -Laurent de Jussieu a publié,
de 1799 à 1820, beaucoup de mé-
moires dans les Annales et les Mé-
moires du Muséum. La plupart se ré-
fèrent aux années 1804-09. De ces
mémoires, quinze roulent sur des ca-
ractères généraux de familles ou de
groupes supérieurs aux familles tirés
des graines, quinze sur des familles ,
dix-huit sur des genres ou sur des es-
pèces. Ceux de la première série ont
pour objets les nionopétales hypogynes
{Ami., tom. V, 180'(), les monopéta-
les périgynes (V, 1804), les monopé-
tales épigynes, tant à anthères réunies
(VI, 1805; VII, 1806; VIII, 1806)
qu'à anthères distinctes (X, 1807), les
arlstolochiées plumbaginées (V^, 1804;
VII, 1806), lescaprifoliées-loranthées
(XII, 1808), les araliacées ombellifè-
res (XVI, 1810), les renonculacées
malpighlacécs (XVIll, 1811), les hy-
péricées-guttifères (XX, 1813),lesau-
rantlacées-théacées {Mém., II, 1815),
les méllacées geranlacées (III, 1817),
les mélidcées tlliacées. \j(is familles
dont il traite dans sa seconde série,
sont celles des amarantacées (Ann.,
II, 1803), desnyclaginées(ll, 1803),
des onagralres (111, 180i), des loaja
et mentzella (V, 1804), des passi-
florées (VI, 1805; VI, 1805), des
verbenacées (VII, 1806), des monl-
mlées (X!V, 1S09), des lobcllacées el
des stylidiées (XVI 1 1 , 1 81 1 ), des po-
lygalées (Mém., I, 1815), des paro-
JliS
.lis
in,
,^ 1, IhiO), i]c> |«niuulacce5, iluii.ni-
llicM, evlanlli^ca, jjMiiinfes, bbifc> cl
|»erM)ncc» \,.inn , \l\, IH(K»K des
.^oUiirr^, bon j^iitrr», cuii\ul\uUce?b,
(/ulcuiuinaceo, Li^iioiiirf.'^, ^ciitianécs,
&apotccs et aiiilisiacrr» (XV, iHlO) :
il faut > joiiiJre le Mé/ruire sur
ifuelifuei genres anciens de plantes
non t'itissrrs iinttrieurement , et
inainteiuint ro/^fMjrtm a leurs fu-
tnillrs. Kiitin, la liui.sième iéùc de
iiirniuire>, celle où il est que>tioii de
^rnies el d'e>|>eres, nous présente »uc-
n- si\emeiit Xericu lUiliati {.inn., I,
1802 , qu'il croil neces-vaire de rap-
poiler à un aulie ^enie el a une autre
famille, le p.tunia JI, 1803), l'aci-
carplia et le boopis ,11, 1803\ le
cantua ^ili, IKOij, le Milanuro cornu-
tum ^Ili, ISOV), d;tci$es e>pece> du
jjenie h^pericum (XII, 180V), di\ er-
ses espèces HDUxrlIpi d'anrmones (ill,
ISOV), lc;,r v,l.. JV, iSUV, le -mh-
noNl>le(lV, IhOV , le pauiinia \\ ,
18()'V), l'upercularia JV, 180V). plu-
>ieurs ^euic> réuniN dans L laimlle
(les laurinëe> (^l, 180.'>), le ditlip-
tcia et le blechum ^iX. 1807), Tli)-
dropilium de Gartner liU, le pliilipca
de Tlmnber- ^XII, I8()8i, divers
genres de la flore de Lu( Iwuhine de
J.oureiro(\l, XII, XM, 1808-10),
une nouvelle espèce de iuarc;;ra>ia
(XIV, I80y), le melicocca Ment.,
ill, 1817,. Les Amiides du Mu-
séum contiennent ausM, d Ant.-I^ur.
de Jusiieu, des Mémoires sur Ir Mu-
séum ifhiiluire naturelle de l^aris
depuis sa fotidation, en 1(>-I5(i. 1,
il, III, |\, VI, M, 1S0J-18(^),
ri il a donne, dans les Mémoires de
la société royale de médecuie. 178"i,
un extrait d'un mémoire de M . Cus-
son, sur les oinbelliferes. Ces travaux,
dont (juelques-uns sont Ires-courls el
portent le simple litre ti' Observations
ou même n'en portent aucun, ne sont
LXVlll.
|ia% lou^ de iiiL-me valeui el de nu-ni;'
uupor;ance. MaiN pris dans Irui eii-
seoible, il» icliclciil bien le ;;cnie de
talent de leur auicui, la science piu-
fonde, le &rnlimcnl intime des \r.ii>
rapports, la ljne^^e d'observation, la
»af;acilé de ju-ement, la (eimcle d'es-
pnl, la patience : tous oui .servi a
constituer la science, el quelque peu
br.lianU quMs puissent sembler, toun
uni contiibué au pro<;res et tous se-
raient lionoiable^ pour dr> bolani^les
ordinaaes. lU >unl lenurqiiables pjr
le parti que lira Juv^ieude Wtnat
de la graine, pu (î^i tuer, p.uir i< .m
dre un jour nouveau >ur le calcul de»
caractères, sur la furmaliun de> fa-
iniUe.N. On eut peut-être attendu da-
vantage de Tauteur du Gênera, mais
c'eût été à tort. I>e Gênera et tous les
mémoires particulieis sont marqués au
iiieine cachet, et , pour qui sàil bien
riii>toire du premier, accasenl bien la
uuiiie hauteur d'e>prit. i^e sujet du
Iteiiera, .^ans doute, est plus va.sle cl
plus élevé, maU v' ,rst Irailé de la
même façon que les .<^jets des mrinoi-
les; Tauieur de l'un ne vaut |ias moins
que l'auteur des autres, mais il ne
vaut pas plus. C'est ici le lieu de s'ex-
pliquer, san5 ambi^uile, >ur le meule
de Jussieu en tant qu'auteur du Gê-
nera. Ce ménle a ele Irés-fortenieiil
contestédan> ces derniers temps par des
savants, dont un surtout mérite le phi.s
haut ran^daii^la .science; ce savant est
pourtant aile beaucoup trop loin.
Commeiiçon-. par convenir que, î\A\\^
les détails, la cla^sltii:atlon du Geneia
a subi des inodilJcatioii> nonibieu:>e.^ ;
qu'au heu des ccnl faiiiillo «IWiil.-
Liurent, on en compte aujourd'hui
au-delà de trois cents ; que le- familles
nouvelles n'ont pas toujours ctc eta-
tîlies sur àti> sections, sur des coupes
annoncées par l'auteur du Gênera ;
que trois des anciennes familles ont dû
être poitee, loul entières dans des
'4
3^0
JLS
<;roupes voisins ; (jue cinq ne se sont
tronsccs naturelles que par fi'aj];înenls ;
iiu'il a trop souvent disposé ilcs <;rou-
j>es d'après les formes de la corolle ;
cjinl a semblé méconnaître lui-
même riinporîance de la famille, en in-
titulant son ouvra;;c Gênera: qu'en-
fin, s'il a souvent su réunir des ^enres
en familles , il n'a point abordé le
problème des grotipcs supérieurs à la
famille, en d'autres termes, qu'il y a
lacune entre les familles et les classes.
(Quelques-uns de ces reproclies sont
très-wrave^. 'j'outefois il ne faut en
exap;ércr aucun; et surtout la justesse
même des reproches ne doit pas faire
oublier, d'u'i côté, que des inexacti-
tudes, des Insuffisances étaient vrai-
ment inévitables , de l'autre, que les
principes , les caractères fondamen-
taux sont inattaquables. Ceci posé, et
pour peu qu'on ne se fasse pas une
trop liaute idée du mérite des méthodes
et des classifications, lesquelles sont
un utile auxiliaire dé !'a science, mais
non la science elle-même, on peut voir
que la valeur du rivr"è est grande, bien
(ju'aujouru'hui il soit dépassé. A pré-
sent quelle est la valeur de l'auteur i*
Ici, de même, notre impartialité re-
connaîtra que tout ce qui fonde la
méthode de Jussieu, c'est-à-dire la
nécessité d'avoir ép;ard à l'ensemble
des caractèlfes , rinéf;alilé, en d'autres
termes, la >ubordinallon et la hiéiar-
chie des divers caractères, l'importance
supérieure des lobes de l'embryon ,
d'abord, et ensuite de l'insertion des
étamines , avait été aperçu et signa-
lé par d'auties. Mais , de ces consi-
df'rations fécondes, les unes n'avaient
été aperçues que coiiime en passatit, et
presque comme tout autre rappori,
bans être suivies avfcc tétl^cilé dans Icj
détails de iilAfiièrC i opérer la démon-
stration , et sâtt.-i ^,lre proclamées à
gr;ind bruit avec 'cèl actenl qui force à
faire atlfciitiôti H à ri^gligei le reste ;
JUS
les autres, tout en étant énoncées et
prouvées de manière à prendre rang
dans la science (la nécessité d'avoir
égard à renscmble de caractères), l'a-
vaient clé seules ou avec un cortège
d'idées fausses qui viciaient les conclu-
sions. Que ces erreurs mêmes aient
servi la science, qui ne pouvait man-
quer d'en faire d'autant plus prompte-
ment justice , qu'elles se succédaient
plus rapidement; qu'Adanson, en im-
provisant les soixante-^inq systèmes
artificiels (desquels il tire un soixante-
sixième qu'il croit naturel), et en épui-
sant ainsi, de prime abord, la méthode
ariificielle qu'il secoue par toutes ses
faces, ait peut-être abrégé de cent ans
la durée de cette méthode ; qu'il
ait eu dans ses fautes bien au-
trement de génie que ses rivaux, que
ses vainqueurs, nous l'admettons et le
croyons; mais enfin il a méconnu, le
fait est trop certain, lia méconnu, non
par quelques phrases de loin en loin
semées dans ses ouvrages, mais dans
l'ensemble de sou grand ouvrage sur
les familles des plantes, la subordina-
tion des carnctères. S'il eût fait ce
dernier pas, si facile pour un hom-
me de sa force , si simple après tous
ceux qu'il avait faits , ses résultats
auraient été à la hauteur de son gé-
nie, il aurait été aussi complet qu'oii-
ginal, et nul nom en botanique n'ose-
rait se placer auprès du sien. Mais, dès
(ju'il n'en a pas éié ainsi, rendons
justice à des travaillôi'.rs qui, loin de
lui .sans doute pour l'originalité, pour
l'éclat, ont eu le mérite de réunir des
vérités, et le bonheur de les faire re-
connaître en les proclamant. Ces tra-
vailleurs, ce sont les deux Jussieu,
lîernard et Ant. -Laurent. Ni ïwn ni
raulic lie peuvent revendiquer la décou-
verte de la méthode; mais des quatre
grands faits qui la constituent, trois ont
été par eux reconnus plus pleinement,
plus hautement du mrtins que par tous
JLS
leurs deranrifrH, des faiu dominants
rt de«tiné> à doniir bi>rs de mrllio-
de; If qujtriiinr ils l'ont admis, sans
If ra^onnailip , parrr qu'il avait flr
inscrit sous un autre nom : si Cf nVsl
pM là nnf rrcation, c'f>t qurli]uf ^^lo^f
poQiiant ; ft rfrirs on nf pful dite ni
que la m^tlinJe lirs famille'*, naturelles
existât avaiil le (jtalo^ue de Triauon,
ni qu'elle n'existai pas (jnand on eut
if (ienrra. Ufste maintenant ï faire
le départ de ;;loire entre l'onelf ft le
neveu. A notre avis, qu'un doit pressen-
tir après ce qui s'est lu beaucoup y\\x%
haut, ft ' IIS,
c'e>t l'on les
trj • 0 :
son " iio-
mei eil %iai, et lesfaÉ.«rl*-
rf> '. --^ n'f sont pa=; décrits :
qu'iinpoilf. peiNoniit* ne «la
que Bernard de Jus>icu i ^ >. .
re qui importe ici, c'est l'ordre dans
lequel elle:» >e suivent, et pour qui-
conque \ jettera an coup d'iril, il est
cUir que Hrrnard a\a:t f^ard a i'^-
semble des caractères, et en reconnais-
sait la suboidination, et qu'une fois re
principe admis, il pl.irait en pri'inié re
li^ne la prr->rnre i . l'uniie
ou la sîini'lfit • ilr >. en Ne-
coii ' ivpo- èpi- oa
péi . sur le pistil.
Il forma ainsif sept classes qu'Anl.-
l.aurent porta depuis à quatone, en
établissant dans chacune des trois der-
nières trois coupes qui prirent rant;
de classe, et en réunissant en une seule
classe (la qoaioriieme' toutes le^ di
ciines. Que ces dédoublements et, en
général, les moditiratioiis par lesquelles
les cent familles du Grnerti se uislin-
j^ucnt du Catalogue de Trianon. soient
en tout ou seulement en partie l'ariivic
dri neveu, la différence est lé;;ère : sans
doute, il fallait que les bases de la
métliodt' naturelle la^settl poursuivies
dans les applicaliofis de détftil. M,
JUS
37.
dans cette élaboration, re^us»cnt di«
verses modifications , mai^ le haut mé*
rite e>l à relui (|iii ir. .ippli(|tie le pre-
mier aux «oiiiiniics ilf lu science. -- H
ftKl<* «lu tt.nriii pluntaritm trois
Il l'-del'ari., ITHyJaa"
. . 17*H. par Tsteri, avec
«1 ri '.' '• ' peut la rc;;arder
minirir 1 h. . ., : • iron) ; la W île
I*eipiif;, 171)2, ui-K". I/mtroduction
en latin, comme le reste de l'ouvraije,
a été réimprimée à\cf diverses addi-
tions , après la moil de l'aolrur, d.inH
le» .Inimln tles Sfirnrrs tuiturrttfs,
IKJH, par If > Miiiis de M. \dfieu de
.lirsMeu. Il en existe des exemplaiies
tirés i part.-'P«>ur ne nen omrii ri-
fle îfMt» ce qui est sorti de la )>tuiue
Mirent de Juvsiru, nous men-
encore : I. De nombieux
artuie» dans le ;;iand liit fiiminiirt
Hr* $nriu-r\ naturellts, en Ht) v«d.,
lHlt3-;iO. Cesârlicle> ronlent 1rs uns
sur les familles des pLnte.s, les antres
s«r les noms vulgaires des vé*Hau«.
II. l>i%efs - )- savoir: 1" Hnp-
port fir C luissttires char-
nu (if l'riiimen ilu tnu-
tinimtii , Paris, ITKi; 2"
l)ti* iturs à rrriti,' de inétirvinr ,
l'arus, 18416: :i" Mrmoirr sur fes
riipports rxAStinit rntrr A-.t laruc-
terr% àrs plantas et ieurt vertus
(Mémoires île la société rovalf de mé-
decine, ITHC»! : V" 'StAe nurïr nlict
et lii rontl'e ^^Ann.ile^ du M.i<étini,
XIX, 1H1J): y StfOresterCev/fe-
Hilùtn à ta 'Sou^'rile-Uohkfrttle, en-
treprise pimr des mhrrrhtx tir
géographie cl (f histoire lutfurelfe
(Aim.le. \ . 1H(lV>. r— oT.
«Il SSOW liK>Ri Cmrktophk>,
architecte aileinan»! , né à ('>assel en
-^T.^i, et.xrt de>tin" à la carn<-e de
la JMri>|.'-ii.{ nce . et quoique, d^us les
écoles , il cuf [»3<^e <oii temps à des-
siner sans iimtre. et à faire des modè-
les de er.n.lr(Klion> <ft d'outih, <;fs
2.,.
37^
JUS
parents n'en persistèrent pas luoms a
l'eiivoNer aux uiiiversilés de ^lîaiboiir^
el (le (.îœllin^iie. pour faire tle lui nu
jurisconsuile. Dans la dernière de ces
uuiversllcs , il suivit les cours de ma-
thématiques prolessés par Kaestiier, et
celte science fut ce qu'il apprit le
mieux. De retour à Cassel, il ne put
dissimuler à sa famille sa répugnance
pour la carrière du droit, et on lui
permit enfin de se préparer à rarchilec-
ture , état que pratiquait aussi son
père. Il passa deux ans à Paris dans
1 atelier de Wailly , architecte du
roi, et se rendit ensuite en Italie, où
il fit un très-grand nombre de dessins
de monuments et d'objets antiques.
A la demande de Télecteur de Hesse-
Cassel, son souverain, il visita encore
l'Angleterre pour prendre connaissance
des châteaux et des parcs. Vers 1790,
étant revenu à Cassel, il fut employé
par l'électeur à le seconder dans ses
vastes projets de constructions et dans
sa manie de bâtir. Ce fut surtout au
château de ^Yilhelmshœhe , dont une
des ailes avait presque été achevée par
l'architecte du roi, que Jussow put si-
gnaler son talent ; il fit plusieurs pro-
jets parmi lesquels, cette fois, le plus
simple , mais non le moins dispen-
dieux, fut choisi. C'était probablement
pour satisfaire les goûts bizarres de son
maître que Jussow avait proposé de
bâtir le château sous la forme d'une
grande ruine ou bien d'un immense arc
de triomphe. L'électeur se contenta du
projet d'un grand et imposant corps de
logis; mais il se dédommagea en fai-
sant bâtir par Jussow le Lœvsenburg,
dans le style des chàteaux-forts du
moyen-àge, avec chapelle, salle d'ar-
mes, salle des chevaliers, et même une
lice pour les tournois. Jussow construi-
sit encore de petits temples et autres
fabriques pour le parc de Wilhelms-
ha;}ie. Quand Napoléon eut installé
son frère Jérôme, comme roi à Cas-
JLiS
sel, le plan primitif du château de
Wilhclmshœlic fut un peu dérangé ;
mais une partie de ce qui avait été
ajouté fut jeté à bas après le retour
de l'électeur Guillaume. Celui-ci nnt
Jussow à la tête de la direction
des bâtiments , ainsi qu'à celle des
ponts et chaussées, et le nomma com-
mandeur de l'ordre du Lion-Hessois.
Jussow construisit encore à Cassel une
caserne avec une place d'exercices
couverte , l'église de la Ncustadt ou
Ville-Neuve , et plusieurs malsons
particulières. L'électeur le chargea
de construire un grand [)alais. L'é-
difice fut commencé : mais l'architecte
et le prince moururent sans avoir pu
l'achever. Une dernière construction
de Jussow fut la porte de la ville, Sip-
fe\ée FriecJrîchsthor. Il mourut le
26 Juillet 1825. D— g.
JUSSY (Paul), né à Montier-
en-Der, fut bénédictin de la congré-
gation de Saint- Vannes , en 166^-,
et devint son président pour la neu-
vième fois en 1728. Dom Calniet
faisait un très-grand cas de ce respec-
table et savant religieux. Il nous ap-
prend que dom Jussy, « étant procu-
« reur-général de la congrégation à
« Paris, en 1686, fit toutes les pièces
« d'écritures concernant le procès
« d'entre les supérieurs et religieux de
« la congrégation de Saint-Vannes,
« d'une part, et les religieux et supc-
« rieurs de l'ordre de Cluiil, d'autre
i< part. » Ces pièces nombreuses, mo-
dèles de style et de raisonnement, firent
triompher la cause de Saint- Vannes.
Dès 1680, Jussy avait publié à ce su-
jet un Juclum qui fut très-recherché.
La collection de ses lettres, probable-
ment perdues par suite delà suppres-
sion des monastères, annonçait un ju-
gement solide, de la sagacité dans les
affaires les plus épineuses, et beaucoup
de capacité dans leur conduite. Il mou-
rut le 29 juin 1729. D— li— s.
JIS
.1 rSS V (JACQUr5pHILIPPK),
cliiiurfîieii, naqull vers 1716 il iJfsaii-
çon. Après V a^oii aclitM* nm éludes
fla*<iquf* a\cf sucres, il fut envoyé à
Paris pour v suivre les cours de la h-
cullr de tncdeciiie. Son goûl i'étani
déclare pour la rliirur^ie , il fréquenla
pendant plusieurs années les hApi
taux et les ainpliiiliéàlres ; et, pourvu
d'un dipl<\ine de licencié, revint exer-
cer sa pi ofe.vNinn dans sa \ille natale,
où il ne tarda pa<;à avoir une clienlrle
àssn nombreuse. Appelé dans le cou-
rant da mois de novemhre 1 T.'ii) à I li(\-
pital pour y tailler un malade de la
pierre , il se ser\it du lilhntoine nou-
vellement imaginé par le frcrr (^'une
(/'(>). ce nom, X. lîil) ; et, l'oprralion
avant réussi, le chiruriiicn- major Fcr-
rier, qui en a\ait été témoin, crut de-
voir écrire a ce sujet une Lrltrr au
frère CAmf, dont un eiitrait fut im-
primé dans le Mrnure de janvier
1754. l^ne seconde opération laite
quelques jours aprrs par .lusr>v, avec le
même instrument, n'avant pa% été cou
ronnée du même succès, l^e\acher /'.
ce nom, \\|V, 'M\\\ cliirur^ien-
major des ln^pitaux militaires de lie-
sançon, et partisan de l'ancienne mé-
thode de la taille quM pratiquait (le|itiis
trente-cinq ans, écrivit a Kerrier une
Lettre [imprimée dans le Merrure de
juin), dans laquelle, en convenant que
le lithotome du frerc ('^\me paraît être
utile en certain cas, il cherchait à dimi ■
nuer le mérite de l.i première opération
de Jussv, et rejetait le mauvais succès
de la seconde sur l'i^nonnre ou la
maladresse de ce chirurj;ien. Ouoiqiic
Juiîv ne fut pas nommé dans retic
lettre, il y avait été dcii;;ii(' d'une ma-
nière si claire «ju'illui était impossible de
garder le silence dans cette discussion.
Il adress.T donc à Levacher, sous le
nom de Ferrier, une Réponse très-
piqoante qui parut dans le Merrure
du mois de septembre (*2-iO-*28i. Mal-
JUS
:i73
^ré le \ ode transparent dont il s'était
enveloppe, Kr\arherne pouvait |ias ^e
mépreiuîrr sur son véritable adver-
saire; aussi lui irpliqua-t il directement
par un pamphlet intitule : l,etlre'a
M. Ju!f\y sur su reftonsed une lettre
de M. I uifier [\\ etc., par .MM...,
étudiantb en médecine, in-8" de "20
pa^. Jussy, dans sa réponse, ne s'était
pas un seul instant écarte de la ques-
lion : la Irlt'^r de l^var lier est au con-
traire pleine de prrMJiinalités injurieu-
ses, que la colère même n'emplova
jamais qu'à défaut de bonnes rason..
l'Ius jeune, plus \il et maniant mieux
Ir sarcasme et b plaisanterie, .lussv
mit lin à la querelle p.ir une Lettre <i
M. l'acher, etc., au w/et Je relie
tjuil a écrite sous le nom de ses
elè\*es, etc., ptir S. 7'., maître tfè-
rtde du viiia^e de Saligny ['!) dans
ie liituritofuuiis (17.'>i^, in -4" de
5 pa;;ei. (^ opuscules dont les
titres ont été dénaturé, par tous
les bibliowraplies, sont depuis long-
temps introuvables, l'ort-d déclare,
dans son llisUùre de Canalomie ,
qu'il n'a jamais pu s'en procurer un
seul c\empla-re. Cette vive discussion
contre un de ses maîtres ne nuisit
point à .lussv. Kn 17r)(>, il avait le
titre de lieutenant du premier cliinir-
;:ien du roi à Besançon; plus tanl il
fut nommé professeur démonstrateur
roval au colleur de chirur<;ie «le cette
ville; il remplit cette place avec autant
de zcle que de talent jusqu'à -a sup-
pression en 170.3. Il passa dan; la
retraite los dernières années de sa
vie , conservant toujours sa i;.iîté, et
recherrlié des jeunes jjens. Il mourut
ler'avi.l 17i)S, à l'j'^f de .|r.alre-
vin^-t deux ans. Outre les opuscules
(.) Ce.t ai
qu II
il aviil d'abor.l <• ril »on
nom ; mais il pri'l clui de l^rachrr, a|>rrs
qu'il f^ut rrçu c!m lettre de i»ol>le»se en r. r...n-
pmtr drses wrtice».
(ïi Cr Ti;i»gr r.t \f lieo de nai^îonc- ât>\^'
vacljer.
^74
JUS
déjà cilés, on connaît de lui deux ob-
servations importantes, pjibliées dans
le Journal de médecine : l'une svr
Voiwerture d'une artère guérir sans
ligature (nov. 177i, tom. XLII);
l'autre 5///* les plaies pénétrantes du
Ifas-ventre {dtoùi Mil, t. XLVIII).
La première est citée avec éloge par
Sue le jeune dans son Mémoire sur
Vanéorisme de F artère crurale (ibid . ,
août 1776, loiu. XLVI). W— s.
•lUSTI (Amklir Hoi^t, née de),
fille du second lit du célèbre Jean-
Henri-Gottlob de J;:.sti, mort prison-
nier d'état à Custrin [Voy. JuSTi ,
XXII , 1G9 et 170) , vit le jour
en 1758. K^qç. de treize ans à la mort
de son père , aux tristes scènes dont
avait été témoin son enfance, elle vit
succéder la gène et l'isolement. Les
leçons du malheur élevèrent son esprit
et fortifièrent son caractère. Son père,
malgré ses fautes, malgré cette excen-
tricité qui fut la cause vraie de ses
malheurs, était l'objet de son admira-
tion : elle eut l'idée d'écrire sa vie. Sa
mère, dont l'union avait été si dou-
loureuse et dont le bon sens aurait
épargné tant de maux à son époux, s'il
eût su l'écouter, l'en empêcha : un tel li-
vre eût et d nécessairement une apologie,
par conséquent un manifeste non-seu-
lement contre les médiocrités jalouses
qu'avait froissées l'orgueil de Justi ,
mais même contre le gouvernement
prussien, puisque Frédéric avait puni
Justi, non pour ses mensonges, mais
pour ses révélations et sa manière
d'argumenter. D'ailleurs, à quoi bon
réveiller de pénibles souvenirs et re-
venir sur l'irrémédiable passé.' Amélie
condescendit à la répugnance de sa
mèie et sacrifia un sujet de biographie
merveilleusement dram.'iti(]iie et fécond,
même sons une autre plume que celle
d'une fille à qui le lecteur pardonne-
rait volontiers la partialité. I^lus tard
elle se maria au docteur Hoist dont
JUS
elle eut un fils et deux filles, et après la
mort duquel elle dirigea un pension-
nat de jeunes demoiselles à Jîoitzen-
bourg, ensuite à Hambourg, et finale-
ment à Parchim. Ses éludes et ses mé-
ditations habituelles la rendaient par-
faitement apte à tout ce qu'elle entre-
prenait. Quelques juges superficiels
peut-être lui eussent reproché de trop
pencher du côté des études sévères ,
solides et savantes: elle possédait la
philosophie et l'histoire de la philoso-
phie à un degré remarquable. Pour
nous, ce défaut n'en est pas un. Vers
1819, elle abandonna son établisse-
ment et se retira chez son fils , dans
cetie petite presqu'île de ïeldau que
forment l'Elbe et la Sude près de
Boitzenbourg. C'est là qu^elle mourut,
le 6 janvier 1809. Ses Remarques
sur les vices de l'éducation moderne^
par une institutrice qui pratique
(Leipzig, 1791), publié sous le voile
de l'anonyme et dont long-temps on
ignora le véritable auteur, est un ou-
vrage modeste, mais éminemment utile :
le bon sens a tenu la plume, mais sans
s'exagérer lui-même ; en mettant à leur
véritable rangl'imaginationjle brillant,
les arts, M'"*^ Justi ne conteste ni
leur existence ni leur charme, mais
elle veut des murs avant des décors et
la solidité avant l'agrément. Si la femme
doit savoir, sa sciencedoitétresérieuse et
positive: si elle doit développer et cul-
tiver son esprit, c'est par la morale
surtout. Le livre de M"'^ Holst est un
de ceux qu'on a le plus relus en Alle-
magne et l'on devrait aussi le lire en
France : mallieureusement il n'a pas
été traduit. On a encore de M'"^
Holst : I . Si et en quel sens la femme
est destinée à une haute culture de
t esprit (Ueber die Bestimm. des Wei-
bes, etc.), Berlin, 1807. ÏL Juge-
ment sur Eli sa, ou la Femme comme
elle devrait être (dans le Musarion de
J.indemann , Altona, 1799). P — ot.
JUY
jrVE\AL(lii'iJ»Hj\».miFAVx
ouJ^n^^^'• 'tu ronua sous le
nom tic). . rt ffri\ain asccti-
MC lrr»-f* I iiiiM. , cuil ne %rr^l4(»0,
dans IcMaiiir, r( sr\vn toutrnpparrnre
au Mans, di- |>a'ctits |Mii\n-s. Son
rnnipalnolr Ni. !.«!.♦• Trllriirr. r'iar-
mr lie \e.s «lis] »• ,.
lui |ilOrill J ll's i: iri
se» èlulir» à Pau», l.c l'rileiirr l'eo^^a-
;;eail ensuite a pa>«ber en Italie, pour
S) perfectionner par la fréqueutation
des savants, se tliar^eant de tous les
Crais du ^u^a^e ; mais Jutenal ne put
|ainai$ se xr>4
ttr de France.
I)e* ijuil eut iliide*. il en-
tra dans la cair rn- •«• i < :ii.
Il donnait, rn 14U<), • • e
lilleralurr a I*aris ; et indt pi luLuiMnrtit
du fonr^ jMiM'r qd'il fat-.tit, dans un
deN ' r. il avait en-
rot < i"t rn p;«r-
liruiiiT. i lui en
promeita - , „ . se lass.t
bientôt el de I ensei^neineni et du
monde. 11 se retira dans l'altbavf de
Qiezal-r>enoi( en l»erry, qui venait
dVtre réformée, et, aprèi le temps or-
dinaire des eprenvo, v embrassa la >ie
r«ii. '" talents et s.i piete l'ele-
vèi • 'icnt aux prrnneies di-
^niti>. Liu , en 1497, abbe de Saint-
Sulpice a Uour^es, il > ijl ievi\re l'an-
cieniic di>r*pline , et donna l'exemple
de la souoiivsion à la rr;;le. Il niuurut
en I50Ô.L1 i>. Jeanne de tVanre, fon-
datrice de l'ordredes Annoncia«lcs, l'a-
vait clioisi pour son du ecteur cl l'Iiunora
de sa conbance. On a de Ju\cnal : I.
Commrniurii in Lerentii ru/mrJias ,
imprimés pour la première fois dans
rédilion de Teience, l'aris, 1492 ,
in-fol., el reproduits assez fréquem-
ment pendant le WT siècle. 11. Inter-
prctiitio in Litimv linginr l'Jrgantiits
Limr. \ iilUz , l'ans , 1 i9 V ,' l i9(i ,
1497, in-V . Ces irois éditions ne
diflerent probablement que par le fron-
litptrc; mais rouvra{;e a été léimpri-
mt plusieurs foiN an cninmenrrmrnt
du XVr kiecle. 111. Grammutica,
I i:>18. iu-r.Ottc édition,
' - citent les bibliographe!»,
I (irarr, piiis(|iic aiirun n'en
I ir I a>ant \uv, rt n'cndonne
la ilt'.fiiption. IV. hftistula, Paris,
1 V99, Ml H" ; filer* pai l'jiiirr, An-
milrs fyf» « . d'apré» quel-
3ues autre „ iplies. J). Liron
il que. mal);re lonleN ses rerberc lies, il
n'a%ail jamais pu parvenir à s'en pro-
curer un exemplaire. V. Jm rrffe tir
saint //r/roiV traduite en français. Pa-
ns, lôtM), in-i'. Il existe de celle édi-
tion des f\. ' iir vélin. Cetielra
dnrtiona* iiec, Paris, 1. '>!).'>,
petit in-h ^o !i., cl concc pour le
*t>le. ibid , !:)73et l'iHO. V| hi
rrglr tU tir^'n/itm dr suint Hirruinr
a srs siTurs friitrru, llrs dr rrli^iun,
pans (vers l.'io ii-4" p»tli.,
Ires-rarc. J^ t , <• royale en
povsede un exemplaire sur vélip.
Nil. lirfornuitiunis numaslinr rin-
diiiir, Sfu dr/rnsin urdin. sonrli He-
nrdirti, Paris, 1503, petit in-8'\
Otie édition est la seconde; on n*a
pu découvrir la date de la première.
On trouve une notire assex éten-
due sur Ciui Juvenal d.ins \ei Singula-
ritrs tiisiuritfurs, pAf I). laron, 111,
41-.')1. l/arlide que l.e Pai;;c lui a
donné dans son Jh'r/ionnairc du
Mainr^ 11, 50, manque d'exactitude.
NV— S
.irVEXFL dr (AirhnnislVv-
Li\ «le , né à Peiénas en l(i79, .se pré-
tendait issu ilelafamilleJou\enel ou Jn-
vénal des l rsins ( 1 ) qui, depuis le rè^c
I Hjrbirr Etamrn fili'jne dri lirlinn-
nairri , p. 4*4 , •» rrlrvani l'onii.MOii de Jo-
»«»»L iljn» la flioi:rtph,rÊ,m,r,'te//f,(>l>ser*e,
Ntaiit »o<iiti«> e«p«:r <\r raiMiti . qu'on « «an»
ao.,tf rrjrrT.- l.iir ii(i«l« P"«'r 'a Ift-r»- C
B^rL.. r .. u .1^.1 e r^ d-uln m^r.ie ».ir ce
point (»i ii.rr. I- il v •) que d*«»oir copie te»-»
lurllriurnt un Mrmitie sur la famillt de Jiifenet
in»rrc d«ri^ l'Année Iitlérnira de Fréron, 1761,
tom. Il . |<. Jui-jg^.
\-h
JUV
JUV
i]e Charles \ I, avait donné à IVc^iise, à
radnnnislration et à la inaj2;lst rature
plusieurs personnao;eséminen1s, cl qui,
retombée dans l'obscurité sous le vè'^De
de Louis XI , était venue s'établir dans
le Languedoc. Félix Juvenel ('ij, ayant
fait ses études chez les Oratoriens de
Pézénas, alla se perfectionner à Paris.
Etant retourné dans sa ville natale, il
épousa Anne de Micliel-Marlelly, seul
rejeton d'une famille ancienne alliée à
celle de Gnmaldi. Comme cette union
le fixait à Pézcuas, il consacra tous ses
loisirs à l'élude de l'histoire. Il com-
posa pour l'instruction de son fds les
Prindprs de Phistoirc qui furent pu-
bliés en 1733 (Paris, in-12). 11 s'oc-
cupait de rassembler les matériaux d'un
ouvrage plus étendu sur l'orij^ine et
les progrès de toutes les connaissances
humaines. Il ne le publia d'abord qu'en
un volume, sous le titre à' Essais sur
l'histoire des sciences, des helles-lei-
Ires et des arts, Lyon, 1740, in-12.
Le succès qu'il obtint engagea l'auteur
à le revoir et à l'augmenter. La seconde
édition parut en 1744, 2 vol. ln-12;
la troisième en 1749, 4 vol. in-8^, et
la quatrième en 1757, 4 vol. in-8".
Il fallait un esprit éminemment analy-
tique et une érudilioi. peu commune
pour embrasser l'immensilé des ma-
tières que comportait un pareil sujet.
Sans rester tout-à-fait au-dessous de
la tâche qu'il s'était imposée, Juvenel
(jj Son aiciil , nomiiH' aii-si l-'elix, laissa un
grand nombre de traductions et d'autres écrits,
dont deux seulement ont été imprimés: i "
Don l'flage, ou i Entrée des Maures eu Espa-
gne, 1645, ï vol. in 80, roujan historique, a»
Portrait de la Cjquelle, ou la Lettre d' yinstundre
a Ttmogene. l'aris, 1(09, in-i>. U y a des exem-
plaires avec un nouveau frontispice , qui por-
tent la date de i'<85.
de Carlencas semble ne l'avoir qu'ef-
fleurée. C'est d'un vol rapide qu'il par-
court toutes les branches de nos con-
naissances et qu'il les suit depuis leur
origine jusqu'à l'époque de leur entier
développement. Mais chacune d'elles
se détache isolément et rien ne fait
apercevoir leur point de jonction ou
leur enchamement. Une œuvre appro-
fondie ne pouvait donc résuUer d'un pa-
reil plan. Quelques vues ingénieuses,
un style en général clair et précis, sans
pallier le vice radical de l'exécution,
expliquent le succès de l'ouvrage et
riionneiir qu'il eut d'être traduit en
allcm.'ind et en anglais. On a remarqué
que l'art de la cuisine et de la pâtisserie
(tom. IV, pag. 265 et 2G6) n'y avait
pas été oublié, mais que l'auteur avait
passé sous silence l'art admirable des
Roscius et des Baron. Juvenel de Car-
lencas mourut à Pézénas, le 1 1 avril
1760, âgé de plus de quatre-vingts-
ans. Il était membre de l'académie dey
belles-lettres de Marseille. — Juvenel
(Henri de), père du précédent, avait
été mousquetaire et capitaine au régi-
ment de la marine. 11 mourut à l'âge
de vingt-sept ans (Félix Juvenel était
encore au berceau), dans les sentiments
d'une piété exagérée. Il portait sur lui
une ceinture de fer hérissée de poin-
tes qui étaient entrées si profondé-
ment dans les chairs qu'on ne put l'en
tirer dans sa dernière maladie. Il avait
publié trois roman? historiques, genre
alors fort en vogue, comme il l'est au-
jourd'hui : 1 " /e comte de Richemont,
Amsterdam, 1680,in-12; 2'' jfcV/^arr/,
histoire d'Angleterre, Paris, 1695,
2 V. in-12; 3" /^/ hardie Messinoise,
1697, in-12. L— M— X.
KAK
KAF
k
KVItorS. To). Cabois. I |\.
:»io
K.KMPF (Jrah), ronseillfr et
rordrciii du j;ranil-<ltif de Hfs.se-Hom-
boîir^, ne » I)fiix-!*onls, le IV mai
ITJ.l, fil ses éltidr^ métlirale* à Haie,
où il soutint, en 17'>i), pour u ré-
rrjition au dnctoraf, une lllr^^ qui eut
un a^sez ^rand releiilissrmenl. lla^ait
choisi pour sujet la mrlhode suivie par
son pèredans le traitement de^ oUtrur-
lions abdominale>. (^tte mélhoUe ron-
si>le exclusivement dans radministra-
tioii de lavements qui, aujourd'hui en-
core, portent le nom de liu-rnirtits de
K.tinpf. l/ideeneu\e et fondameiitale
de re travail , c'est que, d'après l'au-
teur, presque toutes les maladies chro-
niques ont leur source dans \ei obstruc-
tions drs >isceie^ ;<l)dominau\. Il est
curieux de constater l'analoj^ie Irap-
panle (jui existe entre celte opinion et
celle de lîroussai» ; remplacez le mot
oi'Struction par infUwiniaiiun,t\ vous
aurez fidèlement résumé en une seule
proposition toute la doctrine du méde-
cin physiologiste. Apres sa réception,
Kj-inpi ^e rendit à la cour du prince
de liesse- Ilonihour^, ou il srjoiirna
sept ans. Kii 1770, il devint mc«lecin
du prince d'()ian;;e- Nassau, puis mé-
decin pensionne de la ptincipaulé de
Dielz et médecin des eaux d'Kms. Kn
1778, il fut nommé conseiller supé-
rieur et premier médecin du prince de
Ilesse-Hanau. Il quitta ces fondions
en 1787, pour retourner à Hombourj;
où il reçut le litre de conseiller intime :
mais il ne jouit pas longtemps de cette
nouvelle position, car il mourut le 29
octobre de la même année, daiis un
vova^e qu'il fil à Hanau. Ses écrits
sont : I. Dissertatio de infructu va-
sorutn verUrùuJiy liàle, 1753, in-4''.
1 1 . Considrrations sur Irs tmifirra-
mr///5,.Schalhouse et Francfort, 1700,
m H". III. J'ùrreSiiurni, iiu ir Mon-
tir i'rii///rr/rom///'.romrdie médicale.
|j bonne édition e>l relie de t lancfort-
sur-le-Mein, 177H, in-K'; l'auteur
n'axant jamais avoué l'édition de (fies-
sen, 177.'», in-H'. IV. l'.iuhiritliiim
ifir/Jiruni, Francfort et Leipii;;, 1770,
in H ; 2' édition corri|»éc » Franc-
(«:l, 17HH, in-8" ; V édition, ror-
i!.:re ri augmentée par (Charles Jean-
Iheo.i. kiiituin, ibid , 1792, in-K";
tiaduit en allrm.ind par(f.-F. Durrr,
C.liemnitz, 179V, in-l*i; par J.-(^.-
F !t.rhreiis, I)nrlmun<i rt Leipzig;,
179(i, in-H". V. l'niifr destinr
OUI rnrtJm'ns rt aux niulmlrs, sur
unr nuu^'rHr nuinirrr dr ^urrir riiiii-
rulrniriit 1rs iiffrrtions lr> plii^ fnwrs
qui li.'if Irur sirs^r dtins Ir Imis vrnirr,
surhtut i ItYftoihutuirir , Dessau ,
17HV.in-S"; l^ipzig, 17S:>, in-H";
nouvelle édition, COI ri;;é« et au(;mentée
d'une réfutation des objections Mui ont
été faites, l^eipzi^, 17H(>, m-S'; ex-
trait par (v.-4i.C. Muller, llanau,
1788, in-8''; Auesbour^; , 1790,
in-8'; ibid, 1791. in-8"; trailuit en
holl.indais par (i.-J.-l). konin;;,
Iti relit , 1787, in-S"; V|. l'ariiz
uhsrr\uitionrs mrdicit ulans 1rs Actes
de l'acidcmie de (iiessfii, 1771, pa^.
\'i'l). Vil. iraitr dr f/êydrop/io-
//:'*'. twrr f indication drs nio) rns 1rs
plus rffuiurs a rmpluyrr nmirr
irtte trrrihir maUtdir 'dans le Maga-
sin de Manau, 1778, et a part, 1780,
in-8"). Karmpf a fourni encore d'au-
Ues articles au même journal et à
celui de Haldinser. j)_D— R.
K.EI FF'EU (Chrktirn-Théo-
PiiiLK , surintendant et pasteur à
Ueichenbach ^Prusse), auteur de plu-
37B
KAE
sieurs ouvrages historiques assez im-
portants, naquit à Zodel près Gœrlitz,
le 24 avril 1757. Son père était ori-
ginaire de la Poméranie ; à son retour
de l'université de Leipzig, il fut nommé
pasteur à Zodel qu'il quitta en 1768,
pour le village de Ludwig, où il mou-
rut le 3 mai 1796. Sa mère, Jeanne
Hélène, née Bruckner, était fille uni-
que de Daniel liruckner, édile dans
l'église de Saint-Pierre à Gœrlitz. Jus-
qu'à l'âge de trois ans C.-T. RaBulfer
était si délicat que, plus d'une fois, on
désespéra de ses jours: cependant, à
cette époque, sa constitution se fortifia,
et, depuis lors, sa santé fut bien rare-
ment altérée. Jusqu'en 1770, il reçut
de son père les premiers éléments de
la religion ; plus tard il lut guidé par
lui encore dans l'étude du latin. Son
père était pénétré d'un profond respect
pour la Bible; il croyait d'une ma-
nière inébranlable à la manifestation
de Dieu dans cet ouvrage, et mémo il
avait suivi l'exemple de plusieurs de
ses contemporains qui cherchaient dans
l'Apocalypse de saint Jean la prédic-
tion des événements à venir. Ses pieu-
ses intentions, sa constance dans tout
ce qu'il entreprenait exercèrent sur son
fils une grande et heureuse influence.
En 1770 , le jeune Ka^ufler entra au
gymnase de Gfi-rlitz , où il fut admis
aussitôt en seconde ; l'année suivante
il fit sa rhétorique dans ce brillant
établissement qui avait pour recteur
iiaumeister. C'est surtout à ce sa-
vant maitre qu'il fut redevable de
l'excellente direction imprimée à son
esprit. A cette époque le grec était peu
cultivé; Xénophon et le iSouveau-
Testamenl étaient à peu près les seuls
ouvrages qu'on lisait dans cette lan-
gue. Mais on se livrait avec d'autant
plus de zèle à l'élude du latin. Les exer-
cices journaliers et l'exemple du rec-
teur Iiaumeister excitèrent dans beau-
coup de jeunes gens de l'école une telle
KAE
ardeur qu'ils étaient parvenus à parler
et à écrire le latin avec la plus grande
facilité. Il arrivait fréquemment au
professeur de donner un sujet à traiter
ou à discuter sans préparation : Kaeiiffer
se distinguait toujours dans cette sorte
d'exercice. Il avait un tel amour pour
l'étude qu'il forma, avec plusieurs de
ses condisciples, une petite société lit-
téraire; il lisait aux membres qui la
composaient les classiques latins, sur-
tout Cicéron, les Lettres de Pline, les
Odes d'Horace, les Tristes et les Méta-
morphoses d'Ovide, lesEglogues, les
Géorgiijues et les six premiers livres de
l'Enéide de Virgile. 11 leur faisait cha-
que jour une dictée allemande qu'ils
devaient traduire immédiatement en
latin, etc. En 1776, il se rendit à
l'université de Leipzig pour se confor-
mer à la volonté de son père; et là il
étudia la théologie jusqu'en 1771). Il
suivit avec exactitude les cours du doc-
teur Biirscher sur l'histoire de l'église,
des docteurs Petzold et Morus sur la
philosophie, du docteur Jiébenstreit
sur la symbolique, du docteur Morus
sur l'exégèse. L'excellent Morus paraît
surtout avoir exercé une profonde in-
fluence sur ses croyances et sur la di-
rection de ses études théologiques.
Kacufler fut et resta toujours lidèle
partisan de la révélation , mais ce-
pendant il se sentait obligé , par sa
conscience , de se livrer à un hbre
examen de tous les dogmes impo-
sés par la foi. Pendant ses années
de candidature, de 1779 à 1783, il
habita successivement Althornitz et
Bautzen. l'^n 1786, il fut appelé au
rectorat de Beichenbach, charge qu'il
remplit seule jusqu'en 1789 : mais de-
puis lors et jusqu'en 1795, il fut, en
même temps, vicaire du premier pas-
teur. Il était pénétré du plus prolond
respect pour la religion, cniieini du
mal, ami du bien, ne supportant pas
facilement la médiocrité^ regardant en-
KAi:
cnre, cependant , la vertu duBCriantf
cominc un duii de Dirti, ^rirui a IV-
tuile, ^ai ft hiniTrillaiil dans If corn
nirrrc lie la \ir, Ires-chanlaMe rn>rr>
Ifft pamrrs qui rurrnt loujotirs pour lui
un ardrnt amour cl uiif |trof«»n«lf té-
nrralion. Kn ITKV de 1H aoùl^. il
*'clail uni àFirdrri(]i • ' -
berii, fille de Jean i , i ,.
bf r;i , paslfur à ArnMjml. 1^ 1(1 lev.
il\Ki, il fut nnmmr iliarre. et il rem-
plit cet emploi jusqu'en iHt^'J, rpo.jne
a laquelle il devint pa>teur de Keirlien-
baril. Il donnait alors lui- m^me à %n
enfant» le» premières iiotiims du lalin,
de la lo;^iqiie, etc. Uient(\t il fut roro-
plèlement absorbé par de* travaux
liolonques, surtout sur la Haute- Lu-
sace. Il les coinmenra, en 179(1, par
une rliionique de iîetrlien'jarli. Il pu
blia d'abord une i:otiresur les inrenilies
remarquables qui avaient ru lieu dans
Ic^ petites mIm's de la ll.iute-Lu>are,
l>udisse, 171**'; il Gt ^ui\re cet opus-
cule d'une courle eN<|iiiisr de Vllis-
tttirr dr Mrn^r/sdur/, commune uc-
ciirsale de iUiclienbacli , (iœrlili.
1S0(K Hientôl,aprèsil livra à l'impres-
sion son plus^^and ou%rat:e : Estfuissr
tir ilnsdnrr dr la IIuiUr-Lusurr,
(iurl.lx , 1802 iSOti, h vol. ^il en
fit un abrét;é qu'il de>liiii aux éco-
les et qui parut sous le tire suivant :
(îuidt pour servira l'enseisnrmrnt
r/i» r histoire de la Haute- Lusare,
(iu-rliti, \Hi)H\ Il travailla a>ec une
ardeur infatii;able à reumr les m.ile-
naux de cet o!i>ra^e qui lui coula des
peines infinies : en elfei , il eraplov a qua-
tre années à transcrire seulement les
documents qui servirent à sa réilartion.
Il rappelait souvent avec une sorte d'or-
gueil la confiance avec laquelle les ar-
chives deCiœrlitz et de Kœni{;sbrueck
avaient été mises à sa disposition. Il
avoua plusieurs fois que cttte histoire
n'était pas présentée comme il l'enten-
dait, et il désirait pouvoir en retoucher
KkE
^79
U première partie. Cet outrage a un
mérite qui sera lon^-!enips apprécié;
c'est le soin qu'a pris l'auteur de bien
préciser les dates et de les puiser à
des ftou^ce^ certaine^. Il aurait >oulu
y joindre une i.ible ; plusieurs fois
même il a\ail roinmrnré ce travail
pénible; mais il fut arrête par les
dé^a^rémenls qu'il éprouxa peinlaiit
I et surtout par le demein-
li la l.iisace qui eut lieu en
iMl i. Il écrivit un awei (;rand nom-
bre d'articles historiques dans le|our-
nal publie par la société des scienccN
de la l^sjce, dont il fut, pendant
trente ans, un des membres les plu>
actifs et i laquelle il laissa, aprrs .a
mort, un manuscrit tre»-impurl.iiit :
lirrueil de dtnuments sur les n
reitrs ronuiirts et sur les rois li' . .
tJiarlemugne /usrju'a Maxiniilun
V^ ^ 't vol. in-fol. Kn 1H14, aprts les
guéries qui axaient répandu le deuil
dans sa petite ville et dans sa famille,
il eut la douleur de perdr»* M»n époUM? ;
et il chercha des distractions dans
ses travaux historiques et dans les
fleurs de son jardin qu'il cultivait avec
une sorte de passion. I«a religion
devint aussi son i tude journalière :
« Je lis, rliaque jour, drui clia(utres
« dans ma IJible hébraïque, écri> ait-il
M à un de ses amis ; je traduis main-
•« tenant trois programmes du docteur
n 'Izschirner : Desarrisraute emen-
« darulis ; je les trouve fort de mon
« f;oùl. •• Il envova rar-me à Tzsrhir-
•er celte t;ai!uction qu'il accompaj^na
de quelques observations. Le:iia\ril
18'Jl, il fut nommé surintendant du
roi de Pru.vse , et jusqu'à sa mort il
remplit avec zèle les (onctions assi;;nées
à celte place. En I8'i9, il fut atteint
é!une attaque d'apoplexie qui laissa
des traces fâcheuses ; ses facultés in-
tellertuelles et pluslques s'en res^^cn-
tirenl profondement. La traduction
de Tite-Live l'occupait uniquement j
^o
KAl
mais ses forces diminuaient chaque
jour : il finit par s'éteindre doucement
et sans souffrance le 8 août 1830,
laissant après lui cinq fils, une fille et
dix-l)uit petits-fils. D — D — u.
KAI-KAOUS II (AzzcDDYN) ,
dixième sultan de la dynastie des
Turcs Seldjoukides de l'Anatolie, suc-
céda , l'an G42 de Thé^. (1244 ou 45
de J.-C), à son père Kaï-Khosrou H
(Joy. ce nom, ci-après). Sommé, Tan-
née suivante, d'aller rendre hommage
au grand-khan de Tartarie, il se dis-
pensa de celte démarche humiliante,
en prétextant le danger de laisser ses
états exposés aux ravages des Grecs et
des Arméniens ; mais il eut l'impru-
dence d'y envoyer son frère Uokhn-
Eddyn Kilidj-Arslari qui, avant as-
sisté en 645 (1246) à l'élection du
grand-khan Kaïouk (Fo/. ce nom,
XXII, 215), enobtint letitrede sultan
et la déposition de son frère. Comme
il revenait avec une escorte de 2000
Mongols, le vczirChams-T^ddyn entre-
prit de lui livrer Kaï-Kaous ; mais le
«âge Djelal-Eddyn Cortaï, ancien es-
clave grec et gouverneur de ce prince,
déjoua le projet du perljde \ezir, le fit
périr et prévint la guerre entre les deux
frères par un partage du royaume.
KaV-Kaous eut la capitale , Konieh
(Iconiuni), Angoura et toute la partie
occidentale de l'Asie-Mineure , qui
portait déjà le nom de Turquie ; Ki-
lidj-Arslan eut Césarée, Sivvas, Mala-
thia, Arzroum et toute la partie orien-
tale. Leur jeune frère, Kaï-Kobad,
eut aussi des apanages , et les noms
des trois princes furent gravés sur les
monnaies et prononcés dans la kholh-
hah ou prière publique. L'an 652
(1 25i), Kaï-Kaous, mandé à la cour du
grand-khan [f^oy. Mangou, XX VT,
488) , se fit remplacer par son frère Kaï-
Kobad qui mourut en route. Craignant
alors que son silence ou son absence
ne lui attirât quelque fâcheuse affaire
KAl
avec les Mongols , il voulut se délivrer
d'une partie de ses inquiétudes en fai-
sant périr Kilidj-Arslan : celui-ci , in-
struit de son dessein, marcha sur Ko-
nieh , fut vaincu et fait prisonnier.
Mais l'année suivante , le sultan ,
battu à son tour par le général mongol
Baïdjou-Nowian, se sauva à Sardes,
auprès de l'empereur Théodose Lasca-
ris qui , de peur de se compromettre
en le gardant ou en prenant ouverte-
ment sa défense, lui envoya de riches
présents et quatre cents hommes. Avec
ce faible secours, Kaï-Kaous recouvra
une partie de ses états, en 655 (1257),
sur Kilidj-Arslan que lîaïdjou avait
créé sultan de tout l'empire seldjou-
kide. Kaï-Kaous envoie une and)assade
au Mongol Houlagou (^^o/. ce nom,
XX, 609), pour se soumettre à ce
nouveau souverain de la Perse, et se
plaindre de son général. Houlagou or-
donne un nouveau partage entre les
deux frères, et l'aine rentre dans sa
capitale. Voulant prévenir de nouvel-
les hostilités , il leva une nombreuse
armée de Kurdes , d'Arabes et de
Turcomans , prit l'initiative et rem-
porta de grands avantages sur Kilidj-
Arslan. Mais Baïdjou fit tourner la
chance, et rendit à celui-ci plusieurs
places enlevées à Kaï-Kaous. Une fa-
mine horrible suspendit la guerre, et
les deux princes seldjoukides, mandés
par Iloidagou, en 657 (1259), firent
encore un partage ou plutôt un échan-
ge de leurs états, et se séparèrejit en
assez bonne intelligence. Mais bientôt,
fatigué de la tyrannie des Mongols,
Kaï-Kaous se retira, en 659 (1261),
avec sa mère, ses femmes et ses en-
fants, à la cour de Michel Paléolo-
gue, et lui demanda, soit des troupes
pour recouvrer ses états, soit des ter-
res pour résider dans ceux de son hôte.
Le perfide empereur, oubliant l'accueil
qu'il avait précédemment reçu du sul-
tan, l'amusa par de belles promesses;
et, ^uulaiit roriia<;rr IIuuIaj;ou, il ie\è-
j;iu lo 1*1 lire mIiIjuuLiJc djus une fui -
IcrcNSc où il le faisait surveiller par nue
piiie d'honneur. kaV-Kaou« ttou\a
iu(Men ce)>(-n(lant de faire alliance
a\rr Ir rui i\cs nul;;are5 et le Lliaii
niiin;;ul du KapIcliaL, et tenta vaine-
ment de les icndre maitrrs de Con-
»lantino(dc. 11 ne reuvsit pa^ mieux dan>
le |>r(iict de leur livrer Michel qu'il avait
obtenu la permis&ion de rejoindre.
r.MvrIoppé par ces soldats étrangers ,
iViit|»fieur parvint à se sauver, en en-
traînant KaV-Kaous qu'il Gt rentrer
dan^ .sa prison ; mais il l'en fit sortir
pour le livrer aux rnnemis qui étaient
venus» is.sié;;er la place. Kminenr à Se-
laV, sur le Vol^a, le prince ^eldjou-
Lidc s'v remaria et mourut en 677
(1J78). Son fils fut le dernier sultan
••Idjoulide de r.\Nic-Miiieure Jo)'-
M ASoi I. 1 1 , tom . \ \ \ 1 1 , J8G . Sui-
vant le siie de Joinville, kaV-k.aous
était un des plus riches souverains de
r.Vsie. Il avait fait fondie sept ou huit
^rand> vase» d'or qui contenaient cha-
cun trois ou quatre rouids de vin. C'esl
lui qui avait donné le riche pavillon
que le roi d'.\jroénie envoya à saint
I.OUI-S. .\- T.
KAI klIOSIlOrr^C.AlATH-
KDDYN), sixième sultan ^eld)oulide
d'AnatuIie, maître de koineli, dans
les dernières années dr son père kilidj-
Vrslanll (/'.ce nom, Wll, i\2\
s'v maintint après sa mort , l'an r>88
(ll'J'i de J.-C), ainsi que dan> la
Lvcaonie et dans la Pamphv'ic, et
put le titre de sultan, à l'exemple de
x's frères dont il n'avait pas imité l'iu-
^ratitude et la rébellion , et qui, s'étant
parta;;é tout ce qui n'appartenait pas
aux drecs dans l'Asie-Mineure, eurent
des ;;uerres continuelles , soit entre
eux, soit contre l'étranger. I.e plus
puissant et le plus ambitieux, HoLn-
Kddvn Soleiman, ennemi de kaV-
kho^rou dont la merc était chretieune,
KAI
38 1
lui demanda konieh, capitale des Scld-
jouLides, et sur >on refus il .s'en em-
para, l'an .l'JG (1200). kaï-kho5roii
alla vainement mendier le secours du
sultan d'.Viep, tjls de Saladin, et de
Ix-on, roi d'.Ximènie. 11 fut mieux ac-
cueilli a Cunstanliiiuplc par l'empereur
Alexis l'Ange, qui le lit baptiser et l'a-
dopta pour son (ili, il acrornpa^iia ce
firiuce dans sa fuite, lorst|ur, ni 1 20 V,
escroiseslalinv se furent rendusmaitres
de celle capitale. Kokn Kddvn étant
mort, I année suivante, kaV-khosrou
sortit de sa retraite, retourna en Asie,
leva des troupes, s'empara de konieh et
fit pinonnter .son neveu kilidj-Arslan
III, fiUet successeur du défunt. 11 de-
vint alors trés-putssant, réunit sous .sa
domination presque tous les riats des
Seld)ouk.ides dans l'AsieMineuie, et
re^na en j;rand piinre. H s'unit à son
beau peie Maiiurl .Mauro/mnrs qui as-
pirait a l'empire, pour faire la ;;uerrc à
Baudouin, empereur de (^onslantino-
pie, piii.N à ihrodoie I^scaris, qu'il
avait aidé à se faire empereur de Nicée.
11 venait de prendre Allalie dont il
avait traite les habitants avec cruauté ,
lorsqu'il y vil arriver le vieux .Klexis-
r.\n;;e qui, échappe des mains du
roaiqui> de .Monlforrat, venait récla-
mer son appui pour recouvrer au moins
la partie de ses états dont I^ascaris,
son cendre, était en possession. Le
sultan, plus sensible .i la reconnaissance
qu'à l'amitié, séduit d'ailleurs par les
brillantes promesses d'Alexis, envova
des ainbas^sadeurs à l.ascaris pour le
sommer de rendre l'empire à son beau-
père. Sur son refus, il se mit en cam-
pafiiie avec Alexis et vint assiéger An-
tiocliesurle Méandre. Lascariss'avanra
pour secourir celte place importante;
et dans un combat, ou tout l'avantage
était d'abord pour les musulmans, kaV-
khosrou , avant jtti- La^cans à bas
de son cheval , ordonnait à ses {^ens
de l'emporter , lorsque l'empereur
38-»..
KAI
kAi
coupa los' jarrets du cheval du sullaii
et en.vaile la tête à celui-ci , avant
qu'il eut eu le temps de se relever.
Ainsi périt , Pan 607 (1210) , Kaï-
Khosrou dont les historiens i^recs font
à tort un personnage différent de
^iaïa^h-£dd^n qu'ils nomment Jalha-
tiiie. Il laissa deux fiis qui réo^nèrent
après lui, Azzeddjn Kaï-Kaous V^ et
Ala-Eddvn KaïKohad(K. KaÏ-Kaous
r^t. xxii,f>i4,etALADiN, t.r^
370) (1). A— T.
KAI-KÏIOSROU II (Gaïatii-
Eddyn) , neuvième sultan de la même
dynastie, succéda, en 634 (1237), à
son père Ala - Eddyn Kaï-Kobad.
Ayant fait périr un des chefs des trou-
pes kharizniiennes qui étaient à son ser-
vice , il irrita tellement celte milice
étran^rère qu'elle sortit de ses étais
après les avou' rava^^es et envarnt ceux
du roi d'Alep, Melik el-Nasser You-
souf , qui fut forcé de lui donner des éta-
blissements au delà de TEuphrate. La
mésintellij];ence ré^;nait alors parmi les
descendants du arand Saladin [Voy.
ce nom, XL, 115). Malc^ré les sollici-
tations d'Achraf, roi de Damas, Kaï-
Khosrou refusa de faire la guerre au
sull..n d'Egypte Melik el-Kamel [Voy.
ce nom, XXVllI, 215), et préférant
s'allier avec le roi d'Alep, par un dou-
ble mariage de leurs sœurs, il acquit
ainsi le droit de suzeraineté dans Alep.
Une armée mongole a)'ant pénétré en
Arménie, Pan 637 (1239), le sultan
s'avança contre elle avec ses troupes
parmi lesquelles se trouvait un corps
de deux mille chrétiens, et la força
(i) Ce dernier |<riiicf, don» ou n'a pas mis les
HOU15 vériiables et enliiis au tome 1"^', avait
f.iit la guerre à son frère AzE<"dyii KuiKaons \' '
j.our le dépouiller. Il fn dis conqintfS en Géor-
gie, en Arménie «l en Mésopolaniie, cl publia
dis lois sages qu'il .sut fair.- «x.ciilfr. Tour •.:
venger du régent de la P. t;l«-Arniénie chi z le-
quel il avait envoyé i>a mère cl »a sœur, que ce
prince, .'on vassal, livra aux Mongols, AlaKd-lyn
K;.i-K..bad assiégeait Tarse, qoi ipparlenait n»
rr,yaanie d'Arménie^ lorsqu'il mourut en 6J4
(1237 et non pas i7.36).
de s'éloigner de cette frontière sans
coup férir. Il put alors apaiser
les troubles excités par un Turco-
man nommé Baba qui, se disant pro-
phète, éaoreeait indistinctement les
I . • ^ 1 1 • r
ciiretiens et les musulmans qui refu-
saient d'embrasser sa doctrine. KaV-
Khosrou, secondé par son corps de
Francs, tailla en pièces, prèsd'Araasie,
les partisans de cet imposteur et lui fit
trancher la tète ainsi qu'à son premier
disciple. L'an 639 (1241), les Mon-
gols rentrèrent en Arménie, la rava-
gèrent et prirent Arzroum. Moins heu-
reux cette fois, et abandonné par ses
troupes auxiliaires, sur le champ de
bataille, dans les environs d'Arzendjan,
le sultan fut forcé de s'enfuir avec sa
femme et ses enfants à Angora. Les
vainqueurs étendirent leurs ravages
dans l'Anatolie, prirent Siwas, ainsi
que Césarée de Cappadoce que ce prince
avait rebâtie, et y commirent d'horri-
bles cruautés. Kaï-Kliosrou demanda
la paix en 642 (1244), et ne l'obtint
qu'en ;-e rendant tributaire du grand-
khan. Il faisait assiéger Tarse en Cili-
cie, lorsque la nouvelle de sa mort fit
décamper son armée. Ce prince dé-
bauché et livré aux passions les plus
déréglées prenait le titre de grand
sultan , r appui du monde et de
la religion , et pourtant il avait
violé l'islamisme en faisant graver sur
les monnaies l'image de sa femme,
princesse géorgienne, dont il était éper-
dument amoureux. Par suite de son
amour, il protégeait les chrétie.is et
leur faisait espérer la j)ermission de
bâtir olusieurs églises et sa prochaine
conversion à leur religion. Il eut pour
successeur Kaï-Kaous II, l'aîné de ses
troisfds. — K aY-Kkosrou m {Ga'ialh-
Kddyn) , douzième sultan de la mê-
me dynastie, n'avait nue miatre ans
lorsqu'il fut substitué, l'an 665 ou 66
(1266 ou 67), par les Mongols à sou
père Kilidj-Arslan IV (Ko)-. ce nom ,
KAI
RAI
383
Wll, 415), qu'il» avaient (ail pcrir.
Il i/ciil qu'un >ain titre ^.l;
rt tut mi^ .1 nioit par ot Jri
KliJii, l'un
^(»M fil l'i,
Cf \>Af MIU C' ij 11
« «• nom. \\ ^ 1 1 , - — T.
1 Mi»^ ^). ri .Mian, était A
Il (le naissance et fut d >
^^^, r-rl -- • ■• \î..li-,ff, li,.. .
t-plicme L {f^**X- f<
.(•m, X\I\. -« *)■ " •> jvança par
•i »<nice» et jilu> encore par *e> in-
Iri^jues, et il par
puissance soun I
l'tl, iiU et >uccc»rui Je M.i^uU,
i'il fi.i't le prrinlrr émir ti« h
t, il avait ro.ine ses
_-. V , . .1 jiaux émir-^ M . I
ivail pour ennemi le \ezii <
•Un Ibn-al-Kaiadj qui n<* m .. .i .:.
[►irer des craintes au Llulife sur le
ptmMiir sans bornes et 1rs proiets tle
«iM ainlulieux. Mo«.lanil;eiI oi l». iia
.iv .i:i eiu^*iuiiie la lita^
.> liip au >ezir, le coc.
I kaVraaz, afin de n
l )n pfut %oir à Ta ' !
\\\, :î'>\) ijuci fji le ..
iia_.iini«» dcrrtie aftaiie po„. .^ - c,
l'an 56«> ^1170). Les auteurs de ce cri-
me , aiïertant une M\e douleur, reci>n-
nurent Mo^tadv, fiU de ce prinr* ;iour
Mui >uCcesseur à condition qiiM don-
nerait la charf;e de vezir à Adliad-
Kdd^n \boul-Faradj, et celle de com-
mandant-i^enerai des troupes à kaïmaz
[roy. M«)STAi>Y, XXX, 2iH\ Le
nouveau khalife coiiseï vait le souvenir
du crime de Kaïmaz, et, dissimulant «;on
dessein d'en tirer venj^eance, cherchait
à re^a^ner insensiblement son auto-
rité, en témoignant plus de confiance
à MW Tcsir qu'il jugeait moins coupa-
ble. Kiïma/. était informé de ce qui se
tramait toi. lu- Im par le médecin à qui
le droit d'entrer à
le khalife. Fati;;ué
d inent à se défier des
C' taitres, Mostadjf
m I !'cin sous pré»
le .1 1: .. Il V a un
homme dont l'aspect me blesse, je
veut m'en défaire »ans éclat, sans
«• honte pour lui et sans que ta mort
1 puisse eiciter des troubles. » Le
docteur propose de lui donner «ne po*
r et va ch?z lui pour la
V peine est il de retour
(,uc le Uulde regardant le poi.>on :
•• ('*r^l sur toi, dit il, que je veux
Ter ce breuvage, et je t'or-
e de l'avaler. »» I^ méderin
rhetciie Tamement k s'en défendre;
M . .i.!\ lui reproche sa perfidie et
• le percei de son epée s'il
.. .^.. . . .. . ..tstaut. \jt >célérat avale le
poison ; mais, pour que sa mort ne soit
pas utile à son >ouverain , il sort aussi-
tôt du palais et se hâte d'écrire k
t ■ uour l'informer de son mal-
• l'avertir de prendre ses pré-
•itsalellre.
lort de son
anneicita une sediîion dans lta;;hdad,
et se porta d'abord avec ses troupes et
ses partisans vers la maison du vezir,
qu'il sa\ait être l'auteur de toutes les
mesures ri«;oureu9cs méditées contre
lui. Le vezir, abandonnant sa maison
an pillage de la soldatesque, se sauva
au palais du khalile. Kaïmaz l'y suivit
aussitôt, à la tele des mutins, dans
l'espoir d'obtenir par l'intimidation
que son ennemi lui fût livré. .Mais
Mostad\ avant paru à son balcon :
«NMes amis, »lit-il au peuple tumul-
•• tueii-'iMnent assemblé, vous vo\ez
«' l'insoiiiue de Kaïmaz qui attente
« chaque jour à mon autorité. Je
•< vous abandonne tous ses biens, et je
384
KAl
«< me réserve le droit de le punir. »
La populace courut souilaln à la maison
du général qui, bien que seconde par
ses troupes, fit de vains efforts poui- la
garantir du pillage. II ne put même en
sortir qu'en faisant brèche à la nuirallle.
Forcé lie quitter ])aglulad , il se ren-
dit à Hlllah, d'où il envoya offrn' ses
services à Saladln. Ce grand prince
avant eu horreur d'un pareil traître,
celui-ci prit la route deMoussoul, en
traversant le désert (jui sépare la Sj rie
de la Mésopotamie. Mais, accablé de
chagrin, malade, pressé par la soif et
abandonné par ses gens , il expira
presque aux portes de cette ville, et son
cadavre y fut enterré, l'an 570 (1 174-
75). Ce ministre portait si loin les re-
cherches du luxe et de la propreté,
qu'il avait fait attacher an plancher de
sa garde-robe une chaîne d'or à la-
quelle il se suspendait pour satisfaire
aux besoins de la nature (car c'est une
impureté légale pour les musulmans
de se servir d'un siège élevé pour
cet usage). Il avait mis aussi, dans le
même lieu, un grand arbre d'or, ainsi
que ses fruits, qui contenaient les par-
fums les plus exquis. A — T.
KAISER (Fri-dkric), graveur,
ne à Clm en 1779, annonça, dès sa
première jeunesse, un goût décidé pour
le dessin. Ayant perdu son père à l'âge
de treize ans, il fut mis par sa mère en
apprentissage chez un graveur dt lià-
le. Chrétien de Mcchel, qui jouissait
d'une réputation peu justifiée par ses
travaux. Au bout de quelque temps, le
jeune Kaiser, persuadé de la mauvaise
instruction qu'il recevait, retourna dans
sa patrie. Afin de se procurer des
movens d'existence, il se rendit à Wei-
mai , et se mit au service de la librairie
dcBertuch qui portait le titre singulier
de cornjjloir ifindustrit'. Il y grava
beaucoup de planche.-» pour les ouvra-
ge» publiés par ce libraire , ainsi c^iie
pour des almanachs ; il fréquenta 1 é-
KAI
cole de dessin de \N eimar qui était
florissante alors, et il v gagna une mé-
daille d'argent. Sentant qu'il lui fallait
un lieu plus riche en chefs-d'œuvre de
l'art et en artistes habiles pour per-
fectionner son talent , il se rendit à
Paris, prit des leçons de Berwick et
d'autres artistes, suivit même un cours
d'anatomie, et obtint, en 1811, une
médaille d'argent au concours des élè-
ves de l'école des Beaux- Arts. Ce fut
sous la direction de Berwick qu'il gra-
va , pour l'ouvrage intitulé Galerie
de Florence , plusieurs bustes anti-
ques et une Melpomène couronnée par
Calllope. Au Musée i! dessina quel-
ques tableaux de Raphaël, entre autres
celui de la Sainte- Vierge, dite aux lin-
ges, qu'il se proposait de graver, lors-
qu'il se trouverait dans une situation
plus heureuse ; espoir qui ne fut jamais
accompli. Il fut obligé de quitter Paris,
malgré tous les agréments que lui of-
frait cette ville, où il pouvait facile-
ment visiter des musées et fréquenter de
grands artistes français et étrangers. Il
alla , en 1811 , rejoindre son frère
à Naples , où il espérait trouver la
fortune pour tous les deux. Cet espoir
fut encore trompé; Kaiser, contraint
de renoncer aux travaux qui auraient
pu le rendre célèbre, fut réduit à don-
ner des leçons de de.ssin, et à graver
et colorier des vues de Maples et des
environs. Il fit aussi douze dessins as-
sez remarquables, formant un recueil
de scènes de la vie populaire dans
celte ville ; mais 11 n'en grava que qua-
tre. Millin, qui le vit à JNaples , le
chargea de copier pour lui les objets
antlcjucs que l'aichéologue français
voulait faire connaître en Kraïuc. Ce-
pendant, faute d'occupations assez lu-
cratives, Kaiser, au bout de cinq ans,
quitta Naples pour Vienne où on lui
promettait des travaux. Il y publia,
avec Knelpp, sous le titre A Eléments
(lu dessin du paysage, un recueil de
KAI
nuinxr plinrlir. qu'il axait {;r4*rr^ 4
I fau-forlr priiiljnt »oii rjnur .i N.i-
K\l
%H'^
II
;;ra\a 4Uvm nuciqiir. p
ilaiicl)
i\r\ inoiuiroriilN de 1 jrcliilrciurr go-
thique en Auliiche, publiée par le
prince I.irlinowslx , et , loujouik
!orcë par \e l>e.>oin Je *ivrr, ^e rliar-
;.(*a (le r;raxnres ronlns impurlanle^.
\ii chagrin «le n<» pouxoir •**illu*lier
\'i\ lies oinia^e^ cii;;nfi de »es Roûh,
-*■ joij;nait le dépéiiseinenl de ^a
.\u\6. Aprr* être \eini pleurer sur la
i<-inl*e de sa mère i ( Im, il retourna à
N ic.Mie et V mourut d'une maladie de
l">itniie, le '.\ frxrirr IKfJ. Son por-
ii.jil. de>^irje par Klein, a é\é ;;ra\ë
l'ir .Iran TaNsitii, et une notirc sur ^
Mr a été «lonnéc par J.-(,. Sclimtdl
d. s!eK///i./AA///.lS-20.n"8.I)-G.
K.\ISKIUJ\(; (DiKmRUM ou
liiiiRnY, comte de\ était né au cora-
mrnrrment du Wlll' siècle, d'une
ancienne famille de Courbnde. Kniré
jrtine au sei\ice de l*russe, il de-
\ i]\ l'ami du drand Frédéric, alors
prince roxal , et fui impliqué dans
In fameuse affaire de kall [f oy.
Fr.rni i\n.-(*.i iilm mk i'^ tom. X V,
y.^ft). I*ar\cnn au trône, Kiédéric ac-
co:da des distinctions ilatleu>es au
comte de Kaïserlin^, et le rendit confi-
dent de ses travaux littéraires. Dans sa
correspondance , il le dési<;nait ordi-
nairement par le nom de Crsurion,
traduction latine de celui de Kaï<.er-
lin^. H lui donna une place à l'acadé-
mie des sciences et belles-lettres de
Iierlin, qu'il avait repou>elée et con-
<idérableinent étendue depuis son a\è-
neroent an Irc^iie. Le comte de Kaï>er-
lin;; enrichit la collection de celte
société savante de plusieurs mémoires.
Il mourut dans un àf;e peu avancé, en
17 V), et le loi chargea Mauperluisde
composer son éloge, qui est imprimé
dans les Mémoires de l'académie. —
Plusieurs autres personnages du même
nom et de la même famille ont jou^
un rdie dans I.1 politique el la littéta*
ture. l'n nnn/r lîf Kaï.seriin^, .un-
l>a55adeur de Prusse eu HusMr, tous
le lègne de Piciic-lc-(iiand , epoii>a
une sirur de Munsde [jk (^roix, dont
la fin fut si trafique. M' ** Mon. de
\jk Goix axait inspiré la plus forte
passion à Pierre, qui lé^ulul de l'é-
pouser, quoiqu'il (ùl dt;à lié avec Ca-
iherine. ^IJis MrnliiluM fil tuui :>e&
cfforK pour écarter la nouxclle faxo*
rite qui, d'ailleurs, refusait d'ecoutn
le» xirux du rxar, parce qu'elle eljil
'ng*r^^ secrrteroent i\tc Ir romle de
kaïserling. Pierre en a\ant été infor-
mé, par une lettte interceptée, entra
m fmeur. Poui prrxfnir les suites de
l'empoiienient du monarque, l'ambas-
sadeur de Pru-^se se décida à rpouser
aussilAt publiquement M"" Mous de
la Croix. Il ciait malade, el bientôt
ses souffrances le conduisirent au tom-
beau. Mais il avait avsuré une existrnce
honorable à celle qui, pendant plusieurs
années, avait rté l'objet de son atta-
chement et de s*)» e>time. M"'* de kaV-
scriing xécul long temps encore loin de
la cour, à Moscou, où elle se fil chérir
par les grâces de son esprit el la dou-
ceur de M)n caractère. C — Al.
KAISSI AlU NASSAIIAL-
FKD.VII , auteur arabe , né à Sé-
ville , mourut à .Maroc en 327) de
riiég. ou 1 1 iO de J. (^ Parmi ses
dix ers oux rages , on cite ses elugrs
(1rs hummrs illuurcs par Irur rru-^
tlitiim et Irurs taltnts fHtrttffues ,
qu'on trouve manuscrits à la bibliothè-
que ro>ale de Paris, n " 1 Vlô. Kos:>i
croit que c'est le même ouvrage que relui
(trs primes, jugrs et gens tir liltres
célèbres, qu'on voit manuscrit à la bi-
bliothèque de l'unixersité de Le>dc,
n*^l(H)2, ou celui qui a pour titre :
Bihliathèque des hommes Illustres
dans la pi>èsie, qui ont fleuri en
Espitgrte, dont Casiri fait l'éloge sous
le rapport de l'élégance et de l'érudi-
a5
386
KAL
tlon, et dont il donne des extraits
dans le 1^"" vol. de ?n Biblhtheca ara-
/)i(:o-lils/)aria, p. 103. Z.
KALCÎÎBERG (Jfan Npo-
MOUK de), poêle allemand, naquit le
14 mars 1765, en Haute-Styrie, au
château de Pichl, domaine et demeure
habituelle de ses pères. Ses parents
étalent des plus riches du pays. Il re-
çut sa première éducation à Pichl même
ou aux environs de Pichl, au presbytère
de Hohcnwanp;. Mais, orphelin de père
et de mère à Page de quatorze ans, il
alla terminer ses études au séminaire de
Graetz. Les lanj^ues anciennes et en gé-
néral toute réducatlon classique avaient
eu peu de charmes pour lui : à Ho-
lienwang parliculièrement, soit invin-
cible antipathie pour les objets de
renseignement, soit manque d'adresse
ou de patience du maître, il s'était re-
gardé comme souverainement malheu-
reux, et le souvenir de cette trisleépoque
le poursuivait encore dans Tàge mûr.
Ceux-là ne s'en étonneront pas qui
comprennent ce que c'est que l'instinct
poétique ; l'enfant Kalchberg l'avait à
un très-haut degré, et tout ce qu'il
voyait autour de lui, ces hautes cimes
des Alpes styriennes, ces jeux de lu-
mière dans les lacs et les ruisseaux des
vallées, ces arcs-en-ciel au milieu de
l'humide poussière des cascades, les
quatres énormes tours, les sombres ga-
leries, les vitraux du château de Pichl,
chamarré ici de vieux tableaux de la
Passion, la de vieux portraits de che-
valiers du Temple ou de l'ordre teutoni-
que, tous ces sites et ces aspects ro-
mantiques avaient développé en lui le
sens et le besoin de la poésie. Des
langues mortes, une antiquité morte et
dont nous n'avons rien, ni les croyan-
ces, ni les mœurs, ni l'organisation so-
ciale ou politicpie, ne pouvaient captiver
un esprit saturé de tout autres idées et
qui, s'il eut dâ être engoué d'un temps
plutôt que d'un autre, l'aurait été du
KAL
raojen-âge dont le culte commençait
à renaître. Au reste, ces heures de
souffrance et de contrariété avaient été
utiles au jeune homme : elles lui avaient
appris à se taire, à se replier, à se con-
centrer sur soi-même, à chérir, à re-
chercher, à peupler d'images, filles de
son cerveau , la solitude. Kalchberg
à Gratz fut moins malheureux ; ses pro-
fesseurs lui plurent, il plut à ses pro-
fesseurs. Royko, le plus célèbre d'entre
eux à cette époque, fut son commen-
sal et lui ouvrit sa riche bibliothè-
que. Le jeune élève s'y familiarisa da-
vantage avecl'hlstolre des siècles obscurs
qui suivent la chute de l'empire ro-
main et qui précèdent la renaissance,
et avec la versification , cet auxiliaire
presque inséparable de la poésie. Sur
î'entrefalte, un ami lui remit un extrait
de quelques pièces des archives de la
maUon de Stubenberg : ces pièces
étaient le récit d'une aventure vérita-
ble ; il en fit un drame qui, publié d'a-
bord avec le titre ^ Agnès de Habs-
bourg, 1786, le fut ensuite sous celui
de JVolfang de Stubenberg. 11 n'avait
encore que vingt-un ans , et un mur-
mure général d'approbation salua cette
œuvre dramatique, une des premières
où fût suivi l'exemple donné par Gœthe
dans Gœtz de Berlichingen^ et où, avec
la naïve peinture des mœurs, de l'esprit
du moyen-àge, se trouvait la plus grande
vérité locale. Deux ans après parurent
les Templiers. Ce drame avait été
versifié au milieu des détails prosaïques
de la carrière administrative. Kalch-
berg, en 1785, avait été nommé à je
ne sais quel emploi de la banque; ce
qui faisait envie à d'autres : il s'en
plaint amèrement dans la préface des
Templiers ; et peu après il résilia sa
place, pour être à même de se livrer
entièrement à la littérature , dans son
château. Un poète en renom, Schram,
l'y accompagna, et ne fut pas peu utile
à son patron qu'il habitua insensible-
KAL
mfiil k Vfu\>hon\e des exprf^Mons, à
|j d^^mblioii lia!>ilr clr> nuances, à la
cofTfftion -rjmmalicale. Scirain,
kalchber^, S.}ic!;;fr, Ktrni», d'I'u-
nUt pt <|tirl«jtK«^ aiilrr* roinpofèrfnl
birnint tir Irtir^ {nH*^i« , é(».irpill<^*
dans unr Omlf «)<• rmiriU ou c n^fVfliM
au fon<l-' Hm, tiiirrfuril
en dru\ .itjlf : fruits
tU la musr tir la putrir, 17H9. ('^
recueil produisit en Slfiie une *riisa-
llon ptodt^irusp. Dr Ij>u* Cf^les on se
mit à improviser des poèmes a la plus
grande gloire dr la Sluie. I.e comte
deOlie^ tout prompt qo'il était à se
lancer dans cette voie, n'\ parut oue le
second; Kalrliber^ a>ec M^ami% I avait
précédé. L'usa<;e si éminemment pa-
triotique que celui-ci faisait ainsi de
son talent ne ponsait roanqurr dr
le mettre en répiil:»fion parmi 1rs
Stvinens, ses compatriotes. Aussi, dfs
1791, les ttats (i:i p.ns i'clurrnl-ils
aune forte majoii'o coiretller i\f dé-
pntalion, ce quM accepta, rlouidimen!
peut-être, car peu après il envoya «^a
démission sans qu'il \ eût riendr fonda-
mentalement chan;;ë à son sort. Il
n'avait cli.in;;é que de terre et de châ-
teau : Piclil avait été vendu, et à sa
place il avait acquis \\ iMbacli qui lui
produisait un fort revenu et qui, outre
l'ai^rément de voisins civiiisrs, lui pré-
sentait l'avantage d'être tout près de
(irarlx. C'est dans cette moins a;;reste
retraite qu'il composa sa Hr\'oltr des
rhr\'alirrs, 179*2, et qu'en 1793 il
6t paraître Mûrir Vhrrhr. Knsuitc
vinrent les Che\.uilirrs trntoniqurs à
Suint- Iran iFirrr, 179(5, que l'on
peut re;:^ri!er comme son rlief-d'oruvrc.
Hien mieux que cette pièce ne prouve
non-seulement combien Kalchber;;
était faraud poète, mais combien son
pénie poétique allait ^a^nant en pro-
fondeur. Aussi ne peul-on que rej^ret-
ter anièrrmciil la détermination qu'il
prit alors de ne plus regarder la littéra-
RAL
1«7
tore, et surtout la poésie, que comme
nn dr!i arment. (X- afTaiie^ a.lm-
nistratives dont la monotonie cl l'a-
ridilé ava'riit na;; lèrr eiïaronclié >rtn
ina;.ination , éln de nouveau et non
raal^rrlni <ans do ite consnllrr de dé-
putalion, il s« mit à 1rs étudier arec
amour. (,)M*il nous suffi^r dr l'aperce-
voir tantôt faisant partie de députa-
tions spéciales d'état ou ilr commis-
sion», tantAt chargé de la direction de
la tlianrrllriie provitinaie , o» dr la
sarinirndanrr ou surveillance supiéme
du théâtre en Stvric , ou enfin de la
censure théâtrale Dans cliacone de
ces missions. Kalchber^ fit preuve d'une
connaissance profonde, soit des rir
ments qu'il avait a manier, soit de la
constitution ancienne et moderne de
son pa\s, et plus encore de celle ira-
mTialiJe voiidilé de crur et d'espri
q'M ry'yr\^r'*r l'homme d'état autri-
«. les circonstances
i 7'>7, llonapa-'le,
a la tetr drs I -^^inns victorieuses d'Ita-
lie, laisoant derrière lui le Frioul véni-
tien et la Cirniole, ne s'arrêtait qu'à
l<ék>ben en pleine Sivrie, dans ta vallée
de la flaute-Mui-z, et ne rétrogradait
qu'après avoir sx^xié avec Cobentil les
préliminaires du traite de (^mpo-Kor-
mio. De mrme , en 18(10, le contre-
coup de-, événements de l'Italie srptrn-
trionalr et de l'AlIrmaf^ne antérieure se
fit sentir en Sh rie par le perpéiurl pas-
sade de troupes, de vivres, que le cabinet
de Vienne envo\ ait à ses armées. Ce
fut bien pi^ en IHO.'): tandis que Na-
polton était vainqueur à Austcililr,
Kupène, aidr de M asséna, traversait la
Stvrie entière, évacuée par l'arrhiduc
Jean, et avançait jusqu'au Sctuimennf;
au delà de la frontière du Nord. Tant
.^Tiiivasions étaient bien faites pour
jeter le déconra^^emenl dans tontes les
âmes. Mai*: Kalchbero; était de ceux
dont le rnitt.i;;r r raidit en pré>encc
des obstacles. De lon^e main il haï:.-
a5.
38»
KAL
sait coitlialcMioiil la Fiance ; sa liaiiie
s'acciiil ilc\aut ce^ tentatives et rcs
succès réitérés ; mais sou intrépidité
aussi. jMcine en cette désastreuse année
1809, où la perte des provinces ill)-
riennes vint couronner celle du Mila-
nais, celle des anciennes possessions
de Venise, il eut au moins le bonheur
de voir toute la Stvric avec un tiers
de la Carinthie restera l'Autriclic: il
ne devint pas, ce qu'il eut pu craindre
un instant, sujet français, sujet de Na-
poléon. Ces services, au milieu de crises
si fréquentes et qui semblaient ne devoir
finir que quand définitivement toute
la monarchie autrichienne, moins la
Hongrie, aurait été incorporée à Tera-
pire français ou à ses dépendances,
étaient d'autant plus dip;nes de la re-
connaissance publique que jamais, du-
rant quatorze années qu'il remplit les
fonctions de conseiller (1796-1810),
il ne voulut recevoir la plus lé|;ère rétri-
bution. Les états lui témoip;nèrent leur
estime en le nommant second commis-
saire de l'ordie des nobles (1810), et
le zèle heureux avec lequel il s'acquitta
de ce mandat, auquel il fut réélu en
1810, lui valut, à partir de 1817, le
titre de premier commissaire, t/archi-
ducJean, en instituant le Musée na-
tional de Stvrie, l'avait aussi choisi
pour un des curateurs de ce bel établis-
sement; et en 1820 il devint référen-
daire près la commission provisoire de
finances. On ne s'étonnera pas qu'ai-
mant sa province natale autant qu'il
l'aimait, il ait porté à ces diverses ^es-
lions l'ardeur la plus vive. Voulant ré-
pandre et populariser les mêmes idées
parmi la jeunesse st_)nennc, il fit avec
l'archiviste \Vartin^er les fonds d'une
médaille de cinquante florins que cha-
que année une commission décernerait
au jeune homme qui aurait écrit le
meilleur morceau d'histoire relatif à
la Styric. Il enrichit aussi de ses dons
le cabinet rie médailles, le, archives,
K\L
la bibliolhèijue. Ce n'est point là ce
qui pouvait l'appauvrir. H eut été heu-
reux pour lui qu'il eut restreint son
activité à ce cercle d'occupations mo-
destes et utiles. Mais, leurré par de
vaines espérances, il s'avisa de vouloir
exploiter une mine de plomb aro;enti-
fère : la mine engloutit tout, château,
sei^^iieuries, maisons, contrats, et le
propriétaire de Wildbach fut réduit
dans ses derniers jours à payer loyer.
Pour comble de maux, sa santé, floris-
sante jadis, vint à se détériorer. 11
traîna encore ainsi sa vie deux à
trois ans, au bout desquels il expua,
le 3 février 1827. Kalchber^ faisait
partie de douze ou quinze sociétés ,
tant littéraires qu'économiques ou sa-
vantes, qu'agronomiques ou musicales.
Ses Œuvres complètes ont paru en
neuf volumes. Vienne, 1810. Elles se
composent: 1" de six drames dont cinq
ont été déjà nommés (//^//É-i-, co/ntesse
de Habsbourg, 1 78G ; les Templiers,
1788; la Révolte des chcvcdiers ,
1792; Marie-Thérèse^ en 5 actes,
1793; les Tcutoniques àSaint-Jcaii
d'Acre, 1796; la Mort d'Attila,
1806); 2" de sa part des Fruits de
la muse de la patrie ; 3'^ de deux vo-
\\\mcsiS!Ks(juisseshistori(juesy\c.\\\\Q,
1800 ; 4" d'un Traité de forigim: et
de l'organisât ion des états de Styric ;
5" de diversopusculcset brochuiespar-
nii lesquelsnotisremarqueronscellc qui a
pour titre les Français datent pspassé.
On devine que les Français du temps
présent ont plus occupé la pensée du
fidèlesujel deFrançois 11 qucics Fran-
çais du temps de Charles-Quint et des
croisades, et que ce qu'il recherche
chez les arrière-^rands-pères de nos
pères, ce sont les traits des ambitieux
envahisseurs de la Slyrie, de ces détes-
tables étourdis qui enjambent des Alpes
{grecques aux Alpes cai niques, bivoua-
quent dans la vallée de la Mur/-, boivent
le tokai de l'archevêque de Salzbour^,
KM.
^i^nfnt t1^ pr^liminair !^ i IjftAtcu uu
tir j /naVin. Le Frjii^Mis
a I)' nii Mtirur tir |Mti\iiir«*<<,
il but lui rrj»iriulie l'Alijrr, elc, rtr.
1^ Français d'ailleurs n'a |ioinl d'àme,
point de \er>e, point d'élan : il cioit
«voir du Roût, d vent imposer son poût
à toutes les nations et turtnut, mlieiix
bla^plirme ! i l'Alleinar^ne. MaU l'Al-
lemagne .s'e>t émancipée de ce jou;;
intrllerluel et sVmancipera auvsi de
l'autre, elle rc dépêtrera de Napoléon
comme lie l\acine.kalclil)rr;;en e(Trt est
par exrrllenci* de ceux qui se débarras-
sèrent des entraves de la ^allomanie.
Lessin;; et (itrtiie étaient a la tête de
reltr ;;rande réaction, il fut un de leurs
nombreux suivants ; mais citez lui
c'était spontané. Li :;allomanie axait
surtout ro^né en IVussr ou dans les
environs : ne fut-ce que comme anta-
goniste de la IVusse , l'Autriche devait
pencliei du roté d'une nationalité en
littiTalure. Or. quoi de plus proiondi-
roent autrichien que ces dm es provin-
ces,T^rol, C>arniole, C^riiithie.Slvrie,
hérissées partout de pics , d'ai;;uillr> et
de placiers, moins après encore (|ue
leur population de [Ȉtre^ et de chas-
seurs d'ours .' (^est là que naquit, que
vécut Kalchhci^. Sans être, comme ses
rustiques r ompatrioles, étranf^er à la ci-
vilisation, il était tout aussi imperméa-
ble qu'eux à l'esprit d'imitation et d'in-
novation, il était £;ermain, styrien, en-
iin lui-même. De la, dans ses œuvres, un
cachet d'originalité que jamais ne pré-
senlera poète lancé dans une ^lande
capitale et pénétré par la centralisa-
tion. I/éduralion première avait laissé
profondément son empreinte dans l'àmc
dekalchber^; tout chez lui se résu-
mait par quatre mots , qui s'harnio-
niaicnt niei\eillea<cincnt ensemble,
patrie, chevalerie, nioven-àj;e, immo-
bilité. Ce> quatre impressions domi-
nent toute sa poésie et lui donnent une
individualité profonde : c'est de la
KAL
2^9
poésie prov inciale, montagnarde : c'est ,
SI l'on veut, dr la palavinité, mais c'est
quelque cho c de naïf, de spontané,
qui a du charme et qui se fait croire.
Son élan est circon>crit , son vol
étroit et raidr , mais il a de la fraî-
cheur et de la vérité. Cela ne peut
provenir que de l'assimilation ou de la
.Mroilitude parfaite qui existe entre le
poète et les sujets de sa poésie : il sait
à ravir le* sites, les mtrur ., les croyan-
ces, la vie externe et intime qu'il veut
peindre; il sait l'an'-ien et le moderne.
i'jT talent se «nontre au plus haut de^r^
dans «.es poésies fugitives ou truiis tir
Ai itiusr Jf St)rir\, et dans le.s Tru
tuniqurs à Suinf-Jntn tFArrr, véri-
table Inmne à rhéroï>me du che?alier
en l'alestine. I^ sujet e>t heureuse-
ment choisi, le plan sape et fécond en
situations, en péripéties, ledialo^ue na-
turellemeut filé, lira aussi beaucoup
de ce caractère dans la lir^'oitr drs
t hr>.u:lirrs. et dans le sujet si éminem«
ment patriotique, quoique si moderne,
dt Morit- l'hrrrsr, qu'on peut re^ar-
der comme le pendant de la Hr^HiUe.
Ses deux premières pièces sont moins
parfaites, bien qu'elles décident , la
seconde surtout , un haut f;énie :
l'auteur, tout jeune, n'est pas comme
imprègne intimement de ce <|u'il
exprime ; puis ce sont des incorrec-
tions, des lautes même contre la «gram-
maire, enfin des fautes contre l'harmo-
nie. Kl que l'on ne croie pas qu'ellei
sont clairsemées , elles se reprt-senteiit
à cliaquc itniuite comme les cailloux et
les ronces à chaque pas pour qui <;ravit
les Alpes. Siliram le corri;;ea de ce
défaut. Depuis ce temps, les pièces de
Kalchhei^, toutes, à l'evreplion de la
première, rii iambiqnes de cinq pieds,
rt';:rdt^eiit phi> l'oreille que par de pe-
tites traces d'apreté qui ne blessent pas
l'euphonie, et l'on peut sans exagéra-
tion le placer parmi les classiques au-
trichiens. ^ — <^T.
39©
KkL
KALCKREUTH (le comte
Adolphe -Frédéric) , feld-maréclial
prussien , né en 1737, de la noble
famille d'Arensdorf dans la Nouvelle-
Marche, fut destiné dès l'enfance à la
profession des armes et y débuta, sous
le grand Frédéric, dans la guerre de
sept ans. Il était alors officier de ca-
valerie et il passa bientôt à l'état-ma-
jor du prince Henri, dont il devint
l'adjudant. On a dit qu'il eut beau-
coup de part à ses succès par d'u-
tiles avis ; mais dans la suite il en-
courut sa diso;râce par des torts si
jijraves que le prince ne lui pardonna
jamais. L'avancement de Kalckreuth
dans l'armée continua cependant à être
rapide , et son crédit augmenta même
eRCore sous le successeur de Frédéric
H ; ce qui ajouta beaucoup au mécon-
tentement du prince Henri contre la
nouvelle cour. En 1787, Kalckreulh
faisait partie de l'armée qui , sous
les ordres du duc de }>riinsvvick , en-
vahit la Hollande pour y rétablir l'au-
torité stathoudérienne , en présence
des Français qui restèrent immobiles,
après quelques vaines démonstrations,
et il fut nommé à son retour inspec-
teur-général de la cavalerie et colonel
du régiment des dragons d'Anspach,
qui, après la mort du margrave (1 805),
devinrent les dragons de la reine.
Avant été envové, en 1789, comme
gouverneur de la partie de la Pologne
qui venait d'échoir à la IVusse, les
hahitanls de ce pays, très-contents de
son administration et des principes
qu'il manifesta , le demandèrent au
roi pour généralissime ; ce qui ne
leur fut pas accordé. Le célèbre Mi-
rabeau, qui l'avait connu à lîerlin et
lux revues de jVIagdeboiirg, en fait un
grand é!oge dans sa Correspcnf/finre
secrète, où il trace du prince Henri
un portrait peu fl.itteur, et aiicjiiel on
pensa dans le temps que Kaickreuth
n'était point étranger. Le diplomate
RAL
français écrivit alors à son ministère :
« Je me suis lié aux revues de Mag-
« debourg avec Kaickreuth que j'ai
« passablement conquis. » 11 est pro-
bable que c'est par suite de cette con-
quête ou de cette liaison que celui-ci
montra, dès le commencement, quelque
penchant pour la révolution française,
et qu'en 1792 on le vit très-opposéà
la guerre et aux conséquences du traité
de Pilnitz. Cependant, quand tout fut
décidé, il n'hésita pas à prendre un
commandement dans l'armée qui dut
opérer l'invasion de la France sous
les ordres du duc de Brunswick, dont
il était resté l'ami et le confident.
Il se trouvait en Champagne , dans
le mois de septembre , à la tête d'un
corps de l'aile droite des alliés , et
ce fut ce corps d'armée qui , avec
une division autrichienne, sous les or-
dres de Claiifayt , força à deux re-
prises le défilé de la Croix-aux-Bois,
où fut tué le jeune prince de Ligne.
Les troupes de Kaickreuth montrèrent
à cette attaque beaucoup de zèle et de
valeur. Mais ensuite il les tint en repos
lorsque, profitant d'un premier succès ,
elles auraient pu se porter en avant et
fermera Dumouriez sa dernière retraite,
ainsi que ce général le reconnaît lui-mê-
me dans ses Mémoires (Koy. Dumoij-
Ritz, LXIH, 15.>). Kaickreuth était
alors parfaitement bien a\ec le duc de
Brunswick, et l'on ne peut pas douter
que le généralissime delà coalition ne
lui ail lait connaître au moins une partie
de ses plans et de sa politique. Ce qu'il
y a de sûr, c'est qu'il concourut de tout
son pouvoir à les exécuter, que dans le
conseil de guerre qui fut tenu avant la
retraite il opina fortement pour cette
retraite, et pour qu'il n'y eût point
de bataille. Il assista ensuite à toutes
les conférences, à toutes les négocia-
tions ostensibles et secrètes qui eurent
lieu avec les agents de la Convention
nationale et les généraux Kellermanii
KAL
KAL
Sqi
e\ Dillou (l'o)'. kli.i.EltMA1«l«, dans
ff \o\.) , et Cf fui lui qui ré^la la capi-
tulation Ar Vprdun e\ qui remit rrltf
plarr aux Kraiirai^. Il ntiitinu.-! il mm-
mjiuirr uiif iliMMnfi lir l'armrf prus-
siriinr »ur la nve droite du Kliin ; el,
lorsque cette armre marcha contre
Castine, il riait à la tète de i*a»anl-
^arde, cl ce fut lui qui s'empara de
Francfort. Il cnndui5it entoile le siè'^e
de Mavence, où plusieurs fois il ^e mit
en rapport avec les ^ènéraui fran-
çais et le> commi'^saite^ de la (^n\en-
tion nationale, ('e fut encore lui «jiii
dressa les article^ de la capitulation .
el certes les répulilirains n'eurent pas
à se plaindie des rotidilions de ce
Iraitè , puisqu'elles mil ent à leur dis.
f>osilion vin;;l mille hommes d'excel-
entes troupes restées lon^- temps i
peu près inutiles sur le Uhin, et qui,
allant aassilnl combattre les rovalistei
de la Vendée que rien alors sans
elles n'aurait pu empèclier d'arrl\er
il Paris , furent la cause imnirdiate
de leurs premiers re>crs, et par là chan-
f;èrenl complètement les destinées de
la France 1 ). Après la prise de Maven-
ce Kaickreuth commanda un corps
d'armée sur la rive p.iurfie du Rliin ,
d'abord entre Rlie^rastel et Sarre-
Hruck, où il combattit pendant quatre
jours de suite, puis i^ Bisin;;eii, et en-
fin, le 30 no%embre, à Morlautcrn, où
il reçut une blessure {;ra\e. Il n'iut
aucune part à l'expédition des Autri-
(i) On doit rrinarqurr qu'il «Uil iiup..»»ibU
qoe le« rrui«irni, qui . djits un parvil uiotncoi,
accord^rvat à la Ktrni*on de Mayenr» c«>li«> ca-
pilulation si ataiitagcu^r. i|;iiur jm< ut l'ciaplvi
que la Coovrntion iij|i«.n4;< «oul^ol lairr de
€r* belle» truapt*. qui a«ai<-nt pea pertfu pm-
dant le »ir|;e ou clic» k'rtaienl .-'(■terne» et
parfdllrmriit ditciptinecs. Tar la t jpiiuljiion ,
rllr« «'eogagrrrni à n« pa> tcrrir peitdani un
ao roalre les alii^ -, et elle» allrr< al a«ia>iu>(
roinbatirr le* rt)yalt>lPt de la Vrniirc qur le*
Pru»^irn« ne rr<;ardaient pa» »aii« dot.lr «omme
leur» alliei, maigre 1rs ùrclaralious le\ | lus
formelles. El il en fut alisolummt de iiièiiie à
Mlle cponue de la garnison de Valencirnnc*
qui re\ut des .Kutricbiens une capitulation tont-
l-fait Mmblable et qui eut les mtees r«fnltaU.
chiens sur Trèvts k celte époque, et
par conséquent il n'eut aucune dis-
cussion el ne publia aucun mrraoire à
celte occaMtjn , romnic «)n l'a pré-
tendu. Il l'a nié lui-même dans une
lettre qu'il nous a lait l'honneur de
nous écrire quelque temps avant 2»a
mort. .An mois de février 1794 , il
se trouvait i Francfort, pour s'y réta-
blir de ses bleMure» , lorsnue Irois
a;;ents du comité de salut public, nom-
roésOchel, Paris el Fittermann, paru-
rent dans cette \ille sous prélevie de
ré;;lcr i\rc lui quelaues comptes rela-
tifs à la garnison «le Ma>ence, mais
que l'on a cru*, avec plus de piobabilitr,
remonter aux cnnventun.s du camp de
la I.ane(r«j. Dimoi nit/, ÎAIII).
Comme ces a{;ents venaient de Ma\rn-
ce, d< la part du maréchal Mirllendorfr,
i qui ils s'étaient d'aboid adressés, et
qui leur avait donné une e»curte de huv
sards pour !e^ conduire à Francfort, où
ils entrèrent dans un beau carrosse cn-
levr des écuries de Versailles , sur le-
quel ils axaient substitué le boniu-t
rouj^e à l'écusson de Franre , et que
sur l'impériale flottait un lar;;e dia-
peau tricolore, le peuple de Franc-
fort prit toutes ces démonstrations
pour une bra>ade et une insulte. I!
était près de se jeter sur eux el de les
massacrer, lorsque KaIcLrcutli %int i^
leur secours et apaisa la multiludr. Il
fit poser des .sentinelles à leur porte,
les reçut plusieurs fois à sa table et eut
avec eux pendant quinie jours des
conférences fort lon;;ue>, et dont les
véritables motifs n'ont pas été con-
nus du public. Cet éxènemcnt fit
^rand bruit en Allemagne , et l'on y
conçut de ^ra>es soupçons sur les se-
crets ! apports que la Prusse entretenait
avec la république française. Quand
ces conférences lurent tt-rmintes et que
Kaickreuth se trouva rétabli de ses
bles-sures, il retourna à l'armée que
MœllendorfT commandait sur la rive
3q7
KAL
(lanche du Rliin, où elle re:l.i dins
rmuiivobililc la plus absolue pciiiiant
loute celle cainpao;ne de ITOi, qui eut
(le si grands résultats y)ar rcv.tciiation
des Pays-lias cl celle de la Hollande,
que les Prussiens auraient pu empêcher
en faisant lin mouvement à leur droite.
MœUendorfr persista à s'y refuser mal-
gré les réclamations de l'Anç^letcire et
de la Hollande, qui cependant payaient
amplement son armée. Celte dernière
puissance avait nicme fourni Tarlil-
Jerie et les munitions pour le siè;j;e de
INIayence. On ne peut ^uère douter
que Kalckreutb n'ait été sur ce point
parfaitement d'accord avec MœUen-
dorff, et qu'il n'ait eu une parfaite con-
naissance des motifs qui le délerminè-
rent dans cette circonstance décisive.
On le lui a publiquement reproché, et il
s'en est défendu avecune irritation et
une aigreur qui prouvent assez que l'on
avait touché la corde sensible : « Jecon-
« nais , a-t-il dit , ceux qui peuvent
*( l'avoir osé dire , et je ne leur de-
*( mande que de le dire en ma pré-
« seiice. ») Kalckreutli ajoute, dans la
letlre dont nous avons parlé, que
d'ailleurs il élait en sous-ordre et que
Mœllendorff ne poi;vait que se confor-
mer aux instruclioiis de sa cour; ce
qui est très-vrai. iNIais ce qui ne l'est
pas moins, c'est que celte cour, qui
avait donné les ordres el les instruc-
tions, se montra fort satisfaite de la
manière dont Mœlleiidorff et Kal-
ckreutb les exéculèrcnt, en nommant
le premier gouverneur de liei lin et le
second gouverneur de 'J'borii et de
Dantzig, tant il e>t vrai qn»*, ni Alle-
magne comme en France, ce n'est j»as
toujours en gagnant den batailles que
les généraux ont eu de ravanremcnt.
Dans cetteoccaslon ce fut au contraire
pour n'avoir voulu ni marcher ni com-
battre que les àeu\ chefs prussiens ob-
tinrent les plus honor^tbles distinctions.
Kaickreutli fut même nommé plus
KAL
tard gouverneur de UresloW , puis
de lîerlln , et enllii feld-marcclial.
11 était dans nne très-belle position
et jouissait d'une fortune considé-
rable , lorsque la guerre contre la
France éclata en 1806. On a dit
qu'après avoir fait tous ses elfoil^ pour
Pempécher en 1792, il Pavait au coi.-
ti aire désirée à celle époque; mais il
s'en défend également dans l'écrit dont
nous avons parlé. 11 commandait la
réserve de l'armée prussienne à la ba-
taille d'Averstacdt ; ainsi il y eut peu
de part, et il ne se trouva point à celle
d'iéna. Nommé le lendemain comman-
dant de l'armée prussienne , il fil de-
mander à Napoléon, par un de ses ai-
des-dc-camp , un armistice qui fut
refusé. Alors il conduisit les débris de
l'armée à IMagdebourg, puis sur TO -
der. Charge ensuite de la défense de
Danlzig, il résista pendant quatre mois
avec beaucoup de vigueur aux attaques
du maréchal Lefebvre, et iieseicndit,
le 27 mal 1807, qu'aoïès cinquanle-
un jours de tranchée ouverte. Sa capi-
tulation .^ut la même que celle qu'il
avait accordée à la garnison de Mayen-
ce (juatuizc ans au;>aravant : sa troupe,
réduite de moitié, sortit aNCC tous les
honneiMS de la guerre ; et elle promit
également de ne pas sei vir pendant un
an contre les alliés de Napoléon. Api es
cela Kalckreutb vécut dans la retraite,
et il ne reparut qu'à Tilsitt où son sou-
verain lui confia une mls>lon très-hono-
rable sans doute, mais bien pénible
pour un bon l'russien, celle de signer
le traité de paix le [dus désastreux
qu'eut jamais subi la monarchie du
grand Frédéric. Il se rendit ensuite
dans son gouvernement de Breslaw,
puis dans celui de lierlin, et lut chargé,
en 1810, d'aller complimenter Napo-
léon sur son maiiage a\ec nne prin-
cesse autrichienne. Il vint à Paris dans
un très-modeste équipage, et l'on s'y
appiçiit à pf'ine de sa présence, ce
qui le luoililia lM>aur(iup , m \r foiui .
tir NOii raiarlcir cUil une t\ct^->\\e
\jnilc. Urtournë dans %i (uttir , alor^
M liumiiirr sons |« jiiu^ lit* Nj|u>1coii,
ii s*\ roiiiluiAit A\cr uiir c\li(iii«pru
ilciicf et ne fui pas Jrs derniers à
riinsniier au loi de f^e su'MnetIre.
ll(tourMM\il nirnie a\«*c une exffs»i\e
I 'inir reii\ des luililaiies de soncoin-
I . *-ineu( qui sVniAlaient dan^ la
'..<•<- «eciêtc \^J'uf;rml ùumff, dont le
I)!il notoire était de di-ii\rei la k'russe
de i'op|ire>sion. Cependant, âpre» le*
ilf'^a.^lies des Fiamais et ^utlont apir.
I.i \i<loire de I^ipzi;;, il se monlr.i
plus franc et plu» sinn-renimt dispose
à roncnunt aux plan» de reslaiiialion
pour sa patrie. Le p)usernement de
IutImi ne cesva pas de lui être confié,
( ! il iiioui ul d.)iis ces liaiilcs fi)!)ction.s
l<* 10 juin 1818, à l'a^e de quatre-
\ui;;t-deu\ ans. C'était un j;énéral
Wave et fort liabile, mais d'un carac-
tère Intrigant et dissimulé. Iji carrière
iliploinati(|ue lui eut mieux con\enu
que celle des aunes. — In paient de
«♦• {'.t'iiéral, Jean'iJiristophr-l I rirst
«Ir KM.i;klifcrTii, né le '1rs juin 17 H,
ci:tr£ au service a quinze ans, se dis-
tingua par sa valeur et son san;;- froid
à diver!»e> affai.eN , notamment au dé-
li!i' de Domstadcs ^17.'>8) où, souf-
flant d'un ervsipclequi ne lui permet-
tait de puiler ni linlles ni souliers, il
coinbatiii iicannioinN, et , clio>e etran-
t;r, améliora son étal par ce remède
liémït|ue. lUc fil remarquer aussi pen-
dant la courte Guerre de la succession
de Haxière; puis, en IT'Jii, dans la
iaiiipa;;ne «lu lUiin , principaleinenl à
( •iiiitcr<l)lum, NOUS le ^cnéinl Sclial.
S. m souverain, à celle occa>ion, le dé-
cora de l'ordre du Mérite. H fut en-
suite cliaii;é de p-eiulre liilclicà la tète
de irois cents volontaires pour courir
la retraite de l'armée prus.siennp; et il
s'acquit* a de cet le mis>ion avec la pliLs
grande > loueur Quand la ^neire de
K\L
■\^\
ISOC érlala, il fut nuium^ adiwtel du
régiment d'iufanleric de Ilolienlolie el
pi il paît, j 1.1 trie dt* ce Cinp^, à la
bataille d'Iciia. Il rut le iiiallieur d'>
elreble^é au pied ^.mclie et à l.i main
dmite el dVlie fait pti>uiiiiler. C'e^l
laque finit .sa lon;;ue rjtrièremililalie,
en <|uelque soi le romnir elle a\a.l rniih-
nience. i^endu à la libellé , il ne prit
plu» {;uérr part aux opei allons mililai"
ie« , que suspendit d'aiileur» la paix
de Tilsill, el il jouit, lantAt à Berlin,
lanlitl a IWe^lau , d'un lepos que lui
reodaienl néces>aiie ses nombreu.^rs
blrss(ire>. H mourut dans celte dernière
%ille le V nnv. 18*2.'). Fiedéric-4 iull-
lauiiie III a^ail bonoré sa vieillesse du
lilie de mainr-nrnnal. M — D j.
KALKHUKX.NKU (Ciinis
TiAv), ronipositenr , mort à l*aris le
lu ao'jl iMiti, (Ijit juif, et naquit en
17.').'), à Munden, dans le laiid;;;ra-
vIjI de Ile se. H eut pour m.illre le
rrirbie Kmmanuel Uach , et <« div
lii.oiia p.trmi se> nombreux rlè%M ,
au point d'être reçu, tiès-jeune en-
core, à la cliapellc du land^i.i\e. Il
quitta Hesse-Ca«sel pour se rendre à
la cour de Berlin. Atlacbe au piliice
Henri, fière du prand Fiedrnc, il
composa pour son tliéàlre les opéras
suivants : Iai vrUi'r du MultiUir; lir-
tiKèiritr; tu Frinme it Ir serret ^ elr.
Kn 17U6. il parcourut l'Allemn^ine ,
visita ensuite l'Italie, et de là se n-ndil
en France. Paris fut le Ici me de ses
vo>r.;',cs et de ses sutcès. Kn 1799,11
y devint maître de.^ cbœurs â TOpéia,
rt en 180 V, accomp.');>n.')teiir an piano.
Il «'tait membre de l'académie ro\ale
de StocUudin, de la soriéu- plnlbar
inoiiiqiie île Bolo{;n(, et de l.i société
philoterliniquc , «lont il dirigeât les
concerts dans les séances publiques. H
a donne a l'Opéra : I. Lhunt triom-
phal, 1797. II. Olyrufiie , en trois
actes, 179S, pièct* ijui n'eut qu'une
repnsenlaiion. III (avec Lachnitli).
394
KAL
Saiil, oratorio arrangé avec la musi-
que des compositeurs les plus distin-
gues de rAliemaf];ne, de la France et
de ritalie. IV (avec le même). La
Prise de Jéricho, oratorio arrangé
comme le précédent , mais qui n'eut
point de succès. V. Don Juan, opéra
en quatre actes, arrangé, avec la mu-
sique de Mozart, sur des paroles fran-
çaises. VI (avecLachnith). Les Mys-
tères d'Lsis, opéra en trois actes, imité
de la Fiu/e encJniniée de Mozart.
^'^. La descente des Français en
Angleterre^ 1798, opéra non repré-
senté. VI II. Œnone, en trois actes,
paroles du fabuliste Le Bailly ; ou-
vrage reçu en 1800, et dont il prépa-
rait la mise en scène en 1806 , lors-
qu'il fut surpris par la mort. Ce n'^
tait d'abord qu'une Cantate, exécutée
avec succès dans plusieurs concerts.
L'opéra, joué en 1812, fut retiré après
deux représentations. Kalkbrenner a
composé aussi quelques ouvrages sur la
théorie de l'art musical. Il a publié à
Berlin un Traité d'accompagne-
ment , et à Paris , un Traité de la
fugue et du contre-point, d'après le
système de Richter. On lui est encore
redevable d'une Histoire de la mu-
sique, en 2 vol. in-8*\ publiée à Pa-
ris en 1802. Ce qui est digne de re-
marque, c'est qu'elle est écrite assez
bien en français par un Allemand.
Comme il était juif, il ne s'attache
guère qu'à la musique des Hébreux.
L'auteur n'a pas eu le temps de l'ache-
ver. La partie la plus importante, celle
qui s'étend depuis (iuido d'Arezzo jus-
qu'à nos jours, reste à faire. F — le.
KALL (JF.AN-Cnni.sTiAN), sa-
vant prussien, naquit le 2i novembre
1714 à Charlottenbourg près Berlin.
Son père, Abraham Kall, premier pas-
teur d'une église de Flensborg,.«;'est fait
un nom par ses connaissatices dans les
langues orientales. En 1732 Kall se
rendit à runlversité d'Iéna; trois ans
KAL
après, il fut nommé précepteur des pa-
ges du roi à Copenhague, et en 1738
il occupa le même emploi auprès du
prince royal Frédéric , devenu depuis
roi de Danemark sous le nom de
Frédéric V. 11 obtint la même an-
née la place de professeur des lan-
gues orientales à l'université de Co-
penh.igue, fut nommé, en 1753, con-
seiller de justice, conseiller d'état en
1768, et enfui conseiller de conférence
en 1774. Il mourut le 6 novembre
1775 , laissant plusieurs enfants de
son mariage avec la fille d'Andréas
Woldicke, évêque de Wiborg. On a
de ce savant : 1. Vispp. II de voce
hehrdica, Copenhague, 1739-1741,
in-4°. II. Obsenmtiones ad Prooer-
hiorum loca 4 obscuriora , ibid.,
1742, in-4". III. Observationes ad
loca 5 Proi^erbioruin, 1743, in-4°.
IV. Rab. M. Maimonidis de servis
et ancillis tractaius , ibid., 1744,
in-4°. V. Bispputationes III in
cantico Deborœ , ibid., 1751 et
1752, in-4". VI. Spécimen philoso-
plnœArabumpopularis,\h\à., 1757-
1760, in-4". VII. Obsermtiones
ad loca quœdam V. 2'., ibid., 1758,
in-4". VIII. Prolrgowena commen-
tar. inJerem. cap. 30^/ 31, ibid.,
1759, ln-4*'. IX. Fundawenta lin-
guœ arabica , ibid., 1760, in-4".
X . Comment atio I ad Ilebrœœ lin-
gu(e gramnuiilcam Danzianam ,
ibid., 1763, in-8". XI. Prodromus
examinis criseos Iloubigantianœ in.
codicem Ilrbrœum, ibid., 1763,
in-4". XII. Examen criseos Iloubi-
ganfiamn , sprcimen /, 176i; //,
1765; ///, 1767; 7^,1769; V,
1770, Copenhague, in-4°. XIII.
Philosophia Arabum popularis, en
arabe et en latin avec des notes, Co-
penhague, 1764, in-i°. Cet ouvrage
comprend les quatre dissertations ou
thèses sur la philosophie des Arabes,
déjà publiées parKali. XIV. Descrip-
tut êeptem codùrum V. T. as /iru6iu
jum in liihliuihria re^iti, i^y9n\\i-
Hur. ITtiJ», iii-lol. D — z — s.
KALL ^^la)LA-v(!»l»ls^^>^'n^) ,
fiis ilii prrredfiil , n^ à ( i()(irnlij;;up le
2.* >fjjlembre 17i*.J, Irtniina <« |»re-
micrci eiuiles m 176.'» a IVcole de
Kaiitlers; il fui ensuite allariir au
roiir^r lie Knrrii, puis diMeii et en-
fin maille en |)liil(»»o|iliie en 1775.
Il entreprit la mrme année un tota>;e
dans les pars étranger*, où il rrNla
jusqu'en 1777 qu'il rentra en hane-
mark, pour s'appliquer spenalenirnt
à l'élude des lait:;urs orientales, et il
oerupa la rhaiie que la mort de son
péie avait laissre \arante. il a pu-
wlié : I. Disp. fie Mutottio ejus-
ffur rultu , C.nprnliaj^iie ,176*J, in-
■\" II. ht) nittiofi'ir nonn'num auo-
i umthjni ftri^ftriorum in S. S. oc-
lurrrntiu/n , ilud. , 1770, in-4*.
III. (iommenlationes rriticu philo-
/oficit m firophetam Uapg»rum ,
ihid . 1771-1773, i«-i\ iV. De
ilupliri pianlurum se ru, Aruhitms
lii^nito, proframmuttt //, ibid.,
l7S-i, 178:{. — Kaii {Marnis-
Il oldicke], frère du précèdent , naquit
à Copen^a^ur le 19 septembre 17.'»:2,
et fut également rirve à l'école de
Uanders. Kn 177 V il fut nommé
membre de la société metlicale doni la
dernirre séanee «^e tint \r 1"^ mai 1779,
et détint licencié en médecine en 1 78 1 .
On a de lui : I. Histoire Je Iti vie
de Jesus'Christ , par Mess, Oopen-
bamie, 1773, in-H"'. Il en a traduit
le< quatre premières paities. II. Disp.
dt' freijuentissima ar pnrripua os-
rittilioms causa , ibid., 177.'>, in-8°
III. De dijudirandti ussium purium
sifti in dextro out sintstro tarporis
humani ititere, ptirtiruiii prima ,
ibid . , 1776, i n - 8*^ ; Ejusdem dis'
s^riationis piirtirula sttunda, ibul.,
1 777, in-8". W . Ik vitiis tonforma-
tiunis in superiori pehis apertura,
KAL
I95
tfint dystoi tant priniurere iHiUnI ,
ibid., 1778. in-8". Il a encore fait
païaitre plusieurs traduction;» dâii» la
llibliotiieque des écrivains utiles ,
1771, in-4 , quelques morceaux on-
c^inauK dans la IliMmilu-que générale
danoise, in-8", et quclipip. re\uescri-
ti<]ues dans le Journal de la littérature
danoise. I) — 7.- -s.
K.AI.L Mm ^lUM', savant danois,
de la même tamille que le.s précédents,
naquit en 17i.'l à Aarhuus, dans le
.lulland . ou, ^ui>ant d'autres bio;;ra-
pbf*, à CiOprnlia^ue. Api es avoir reçu
dans la maison paternelle sa première
eduralion , il fréquenta l'nniNersité
de (icrltinmie , puis celle de Copen-
li.i;;ue , ou il obtint le i^rade de maî-
Ire-es-arts. Kn 17(»7, il fut nom-
mé professfur de «^rec à cet etabiissr-
nieiil, et l'année sui\ante, membre de
la commission rovale de l'instruction
publique. Celte rommission faisait
alors déchiffrer et analv^^er les riche*
collections de manuscrits islandais que
posu'de la bibliothèque royale de i/y
penha^iie ; et Kall, qui avait ciillité
avec succès les anciens idiomes Scandi-
naves, prit une grande part à ce lia-
vail. LoiNque, en 1778, lepouxerne-
ment foiula une chaire d'histoire et de
mvtholo;:ie du Nord, il la donna i
Kall, qui, par suite, réîii{;na ses fonc-
tions de professeur de grec. Nommé,
en 178:*, membre de l'académie "ovale
des sciencîs de (!openhaj;ue , dont le
célèbre historien Suhm [l oy. ce nom,
XLIV', 180) était président, il se lia
intimement a\ec lui, et plus tard il
devint conservateur en chef de sa ri-
che bibliothèque, qui, après la mort
de ce savant, fut incorporée à la bi-
bliothèque royale. Kn 178.3, Kall
établit une société de littérature étran-
gère , et une société patriotique qui
avait pour objet de fournir gratis, aux
étudiants pauvres, les livres les plus
indispensables à leurs études. A peu
396 KAL
près à la même époque, le gouverne-
ment le chargea de faire un cours pu-
[ilic de i^éograpliie commerciale, et un
cours d'histoire mmlalre spécialement
destiné aux officiers de rélat-major-
{];cncral. En 1808, il fut nomme his-
toriographe des royaumes de Dane-
mark et Norvège , et en 1811 il
fonda une caisse hvpolhécaire pour les
propriétaires d'immeuhies de Copen-
hague, établissement qui devint pour
eux d'une si haute utilité que le roi ,
voulant en témoigner sa satisfaction au
fondateur, lui conféra le titre de con-
seiller d'ctat. En 1817, Kall célébra
le cinquantième anniversaire de son
entrée en fonctions à l'université de
Copenhague, dont il fut deux fois rec-
teur ; et, à cette occasion, il fut nom-
mé chevalier de l'ordre de Dannebrog
(4^ classe). Il mourut en 1821. Kall a
publié un grand nombre d'ouvrages,
parmi lesquels nous citerons : I. Spe-
clmen nooœ editionis Sciiteuiiarum.
Tlieognidis Megarrnsis, Gœttingue,
17G6, in-4". 11. Plusieurs éditions
classiques : 1" des Dialogues choisis
de Lucien, Copenhague, 1773; 2°
du Traité sur r éducation^ dePlutar-
(]ue , ibid., \11^\ 3" du Manuel
d'Epictkte, 177.5, 1781; ^''à'Eu-
trope , 1776-81; .V àllérodote .
1778. Ces éditions, soit en grec, soit
en latin, auxquelles Kall a ajouté des
notes et commentaires importants,
étaient spécialement destinées à l'usage
des écoles. II I. Histoire uniorrsel/e ,
(Copenhague, 1777-80, in-8'-\ Cet
ouvrage, rédigé sur le [)lan de ce-
lui «le Schioekh , est très-remar-
quable , à cause du grand développe-
ment que l'auteur y a donné à la
partie qui concerne les pays du nord.
IV. Analyse des Annales islan-
daises manuscrites de la biblio-
thèque royale de Copenhague, Co-
penhague, 1792, 4 vol. in-8". V.
Histoire de la noblesse et des ordres
KAM
de cheimlerie du Danemark, ibid.,
1790, in-8*\ avec planches. \ 1. Une
édition revue du Noui^eaufestajnent,
ibid., 1799, in-8". Kall a fourni des
notes pour l'édition anglaise du Thé-
saurus grœcœ linguœ de H. Estienne.
11 a laissé manuscrit un ouvrage in-
titulé Monuments septentrionaux
du moyen âge , auquel sont joints
environ cent dessins, dont une ving-
taine ont été gravés, mais non publiés.
Il était un des plus actifs collabora-
teurs du Recueil de l'académie
royale des sciences de Copenhague,
et du Magasin Danois. Dans le pre-
mier se trouve, entre autres écrits de
lui, un jNiémoire fort remarquable sur
les renseignements donnés par Ptolé-
mée au sujet de la Chersonèse cimbri-
que. C'est Kall qui a publié le 8^ et
le 9^ volume de \' Histoire de Dane-
mark que Suhm avait laissés manu-
scrits. M — A.
KAMEIVSKY (le comte), géné-
ral russe, né d'une famille noble, vers
1735, reçut une éducation toute mili-
taire et entra dès sa jeunesse dans la
carrière des armes. Il fit successive-
ment la guerre contre les Suédois, con-
tre les Turcs et contre les Polonais.
Du même âge que le fameux Souwa-
row, il combattit long-temps dans les
mêmes armées, se signala par les mê-
mes exploits, et obtint un avancement
à peu près pareil. En 1774, ils étaient
tous les deux lieutenants-généraux, et
ils commandaient chacun wnt division
à Kosludje, où ils remportèro; ! une
vi.:toire importante contre les Turcs.
Mais, bien que mieux élevécjueSouw.'-
row, Kamensky était d'un caractère
plus bizarie encore, et quelquefois il
se montra d'une rigueur que l'on eut
quelque raison de qualifier de fé-
rocité , au point qu'il déplut même
à Catherine, qui cessa long-temps de
l'employer. Cependant, en 1789, il
combattit encore contre les Turcs à
KAM
côle lie M)ii Aitcien coiupa>;iiuii il'ai-
tn(>, Souwaïuw , qui le connaissait
birn, qui C5tii.iatl son in.slrurtion un-
iitaiic. roji> qui faisait |»ru «Ir cxs Je
>un e&peiienci. •• kameii>L> roitiiait la
•• ;:iierre. <lt«j>t-il, mais la ^urire ne
•< le connaît ^Ai. l'our raoi je ne
( oiiuais |iasla guerre ; mais la «guerre
•■ me connaît. >• \\s obtinrent en-
semble , le :i2 septembre de celle an-
née , la fameuse \ictoiie Je Uimnick.
Kn IT'Ji, ils combattirent encore
ensemble 1rs in«ur^es |M)lonai»; mais
à ra\enenienl de Faul T^ , K,a-
mcusLv tomba dans une complète dis-
j;iace , et il ne recouvra son acliMté
3 n'en IHUii, sous le rè^ne d'Alrian-
re« qui le créa feld-mareclial et lui
donna le commandement d'un corps
d'armée à Krasno Selo, où il n'eut
rien à (aire de remarquable, mai> où
il sut du moins s'attirer de plus en
plus la faxeiir du jeune ciar. N ers la
fin de ISUG , il alla prendie le
ccmmandeiueiit en chef de l'armée
russe qui combat lait les Français en
l'olo^ne , et il eut alors sous se» or-
dies l)u5iho\*den et liennii^Nen. Na-
poléon lui-même commandait l'armée
française. Le 23 décembre il pa^sa
l'W Lea el forra les KuNses a se retirer
jusqu'à PuIiuncL où, trois jouis après,
le corps d(* lîenni^sen a^ant obtenu
un succès important sur une des ai-
le^ de l'armée française, se disposait à
attaquer le centre a\ec une grande
probabiîiltf de succès , lorsque ka-
mensLj) lui envo\a l'ordre de se reliiei ,
et se retira lui-même de sa personne
sur les derrières sans que l'on ait ja-
mai-^ pu sa\oir le* motifs de cette
étrange détermination. La retraite
dura plusieurs jouis, el elle semblait de-
voir se prolonger jusqu'au Niémen,
qujiitl I>enui^>en , qui a\ait pris 1<>
commandement en rab>cnce de Ka-
men»k\, lequel continuait à fuir sur
f- derrières, reçut de l'empereur
KAM
^9?
Alc&andie une lettre aulo<;raplie Irès-
llatteuse, et qui le nommait ;;éneral en
chef. Dans l'impossibilité où l'on a ete
d'expliquer la conduite si extraordi-
naire que tint kamenskv dans cette
occasion, on a dii que de>-lors sa tête
conimeocail k s'affaiblir. Ce qu'il y a
de sur, c est qu'il di»parut enlieiement
de la scène publique pendant plusieurs
années, et que ce ne fut ipren tKO'.l
qu'il ie\int aIa tète d'une armer de
cent mille hommes qu'Alr»andie des-
tinait à raccoroplivsrmenl de» consen-
tions secrètes de ItUitl, relatives à
l'empire ottoman, tandis que Napo-
léon accomplissait de son côlé les
mêmes consentions ur la Péninsule
hispanique. karaensLy pavsa le Da-
nube le '2't mai, et il attaqua simulla-
némeiit TurtuLai, Silistria et Hazard-
jik , qui se fendirent successivement.
Les Turcs demandèrent, a la lin de
juin, un armistice qu'il ne voulut ac-
corder qu'à condition que les forte-
resses de Varna et Schoumia lui se-
raient remises; ce qui ela.t r\idemrnent
s'ouvrir le chemin de Con^tantinoplr.
N'avant pu obtenir de pareilles comli-
tions, il attaqua Sclioumia où les Turcs
avaient forme un vasle camp rrtranci.é
défendu par quarante mille hommes.
Apres avoir échoué dans plusieurs
attaque» de vive force où il fit de ;;raii-
des pertes, il essavasans plus de succès
d'en former le blocus. Il manœuvra
ensuite pour attirer hors de son ramp
le ;;raiNl-visir qui commandait les Ot-
tomans, et ne put y réussir. Alors il
se reporta sur Uoulchouk , el cette
place se rendit au comte de I^nL:e-
ron, qui etail sous ses ordres. Api es
cette reddition , la saison se lioii-
vant a\ancée et les opcraliniis devenant
impassibles , le maréchal kamenskv
repa.v-a le Danube, ne laissant (].ie trois
divi>ion> sur la rise droite, el il établit
son juarticr-;;éneral à Bucliare,t , ni;,
après une campa;;iie au>-si saiif;lanteqiie
398
KAN
malheureuse, il mourut de fatin;ue et de
de>esi»oir. D'autres disent quM lut as-
sassiné. Son ijls, qui était reld-niaré-
clial iieutenaiit, commandait alors une
armée en Finlande. Koutousofl rem-
plaça le feld-maréchal dans le com-
mandement de l'armée (^oj. Kou-
TorsoFF, XXII, 558). M — 11 j.
KAMPEXIIAUSEX (le baron
Balthazardf.) naquit en 1772 dans
le district de Ulga en Piussle. Après
avoir exercé diverses fonctions publi-
ques, il fut nommé directeur de l'écoie
de commerce à Saint Pétersbourp;, et
mourut ilans cette ville le 13 septem-
bre 1823. On a de lui : I. Principes
fin droit politique russe, Gœttln^ue,
1792, in-fol. H. Essai d'une des-
cription géographico-statisti(juc des
gouvernements de l'empire russe;
V^ cahier, contenant la Description
du gouvernement d'Olonetz, ibid.,
1793, in-8". 111. Objets renuirqua-
hles de la topographie du gouverne-
ment de Saint- Pétershourg, V^
partie, 1797. Ces deux derniers ou-
vrat^es n'ont pas été continués. IV.
Magasin de Livonie, Golha, 1803,
tom. V^. C'est le seul qui ait paru ;
le manuscrit du second volume n'a
pu être retrouvé à la mort du li-
braire-éditeur Ettinfî;uer , auquel il
avait été remis. V. Histoire généalo-
gique et chronologique de la dynas-
tie des Romanof y I^eipzlcr^ 1805,
in-8'\ Tous les écrits de Kampenhau-
sen sont en allemand. Meusel [Alle-
magne savante^ tom. \^^] lui attri-
bue encore un recueil de poésies
publié à lUvel, 1788, en un vol.;
mais il parait que cette production
est rouvraf;e d'un homonyme.
P— RT.
KAWE (Jfan-Arnolt>), poly-
f^raphe allemand , remarquable sur-
tout par son caractère excentrique et
.•,a mobilité d'esprit, naquit à Detmold,
en mai 1773, et, après avoir couru d'é-
KAN
cole en école, finit ses premières étu-
des à Mcidenoldendorl, où il eut pour
maiîres Drevcs et Kœler. Ce dernier,
ayant reconnu en lui d'heureuses dis-
positions pour les éludes p;raves et par-
ticulièrement pour la philosophie, lui
donna le conseil de publier un travail
critique qui le classât s{u-le-champ, et
comme sujet d'un tel labeur lui indiqua
le texte du de Lingua latina de Var-
ron. Kan ne effectivement se mit à l'œu-
vre et plusieurs des corrections et resti-
tutions qu'il risqua furent envoyées à
Heyne. Nous ne saurions trop dire
jusqu'à quel point ces communications
eurent rassenliment du célèbre hellé-
niste: mais la promptitude avec laquelle
Kanne se dé^joiita de la tache entre-
prise n'est point une preuve de la dés-
approbation de son ju^e : son incon-
stance explique de reste son change-
ment de résolution. Epris d'un zèle
ardent autant que subit pour la théo-
logie, il prétendait ne pouvoir servir
deux maîtres à la fois ; mais, dès qu'il
fut à (iœttingue pour y suivre les cours
qui devaient lui ouvrir la carrière ecclé-
siastique , l'exégèse du premier livre
de Moïse par Eiclihorn le reporta aux
études philologiques proprement dites,
et 11 sentit faiblir en lui le sentiment
de la religiosité ; non qu'il le perdit en-
tièrement encore, mais 11 ne le voyait
plus comme devant remplir exclusive-
ment son être; et, plein d'une exalta-
tion juvénile, il croyait que l'homme
devait se circonscrire dans un genre ,
dans un travail, dans une idée. Il se
remit donc à l'œuvre plus ardemment
(]ue jamais et donna une édition des
Narrations mythologiques de Conon,
une mythologie et diverses autres com-
pilations. Eort jeune encore à cette
époque, il attendait ainsi le moment
de prendre ses grades académiques.
Mais ses parents, assez à l'aise pen-
dant un temps pour qu'il put comp ■
ter sur quelque fortune , moururent ,
KAN
fl ne lui lalsirrent riei». Il s€ ren-
dit à Lcipxi^, (ruu\a rii>uite <le Trin-
|ilui (bus unf ctiAc Je llal.e , |iui>
triila de 5e G\cr a Ueilm comme
liumme Je lettres; lnJt^ quoique Jcs
bluetles spirituelles l'eiiNsent lait re-
niai quer Ju iiublic, il eut bientôt à coni«
battre, Jans cette capitale, la misère et
le^ pri\atiun$. Il se replia Jonc &ur la
province, et léna. où il établit provi-
soirfineDt ses pénates, lui fournil av»ei
J'elr\es pour .sortir Je la Jetre&»e pro-
fonJr à laquelle l'avait reJuit sa tenta-
tive sur Ileilin. Mais à prine eul^il un
peu secoué le poids Ju malheur, que,
comme impatient Je le reprendre, il
quitta la xlir prussienne potir remm-
inenrer le cour> Jr ses p<
Meininj;en le retint assez ^ ^ ■:
il s'^ concilia les bonnes prares Ju Juc
ré<;nant oui le mit quelquefois Je ses
parties. Il était à N\ urzbouif( au com-
mencement Je t8()'>. \À peut être la
fortune eût cessé Je le persécuter s'il
eût l'té sa^e, s'il eût su ne pas se met-
tre en hostilité avec les Joctrines re-
çues. Leslibraiie» llreilkopfet Hfitel
Je I^ipzi^ venaient Je lui faire reJi •
^er , en le pavant bien, une Mj-
ihulogie dfs lirecs. Mais en reli-
sant l'Anc-eu-Teslament pourlara>-
tholo^ie {;iccque , kanne s'ima^me
qu'il faut enlenJrealh'^oriquemrnl une
roui*; Je passades que vulgairement
on prend dans le sen> matériel ; et , à
la tele de la deuxième partie de sa M>-
tholo^ie, il imprime qu'un jour nou-
veau vient de luire à ses veux, que la
vérité vient de le frapper, de l'inonder
tout *i'un coup. Ouelques mois après
il écrit ses Siturres priiuordinles de
f histoire ^i\\x\ doivent paraître à Leip-
zig, mais auxquelles la censure refuse
sou assentiment. 11 court alors à Leip-
li^, le^er d'argent et laissant crier se«
nombreux créanciers qui, à la nou-
velle de celle fu^ue, voient bien qu'il
faut renoncer à l'e&poir de se fair« ja-
KAN
399
roai.s p^ver, et il se présente au Juc
.Kuijuste Je.Saxe (iotha.son manuscrit
à la main,>e 1 et lamjiitJu célèbre Jean-
l'aul. Le duc le lei^ul avec é^ard, et
consentant à ne prononcer sur le sort
du volume qu'après examen , lui dit :
M Eh bien ! Jean- Paul sera votre
M juge(l). M Mais ni Jean l'aul qui
ne pouvait , Jans son rapport , ca-
cher le vrai caractère du livre, ni le
professeur N\ asner de NN uribourg
que kanne vit alois à Leipzig; et qui
tacha de lui rendre de bons ofljces, ne
purent empêcher que la censure per-
sistât dans sa dcciMon : tout ce que
put faire pour lui Jean- l'aul m reite
occurrence fut de le recommaiidei a
l.ubecL de llavreuth qui l'imprima,
mais ne lui donna que cent vin;;t tha-
1ers. Ce n'était pas là de quoi stddrr
ses dettes, défrayer ses vova^esetcom-
pen.ser le& améres tribulations qu'il
avait éprouvées. Son roman Je Jruri'
nelte lui valut encore moins. iK-sespr-
lé, ne sachant où Jonner Je la trie,
nepouvaut trouver de plare qui lui don-
nât de quoi vivre, il s'en^a^ea au ser-
vice de l'ruvse, dans l'été de ISOC).
Celait le moment où s'ouvrait la fa-
meuse campa:;ne d'iena. (À)mme Ni le
malheur *e fut fait un jeu de frapper
toujours sur lui, il fut pris des pre-
miers et, pendant le peu de jours (jue
dura sa captivité, il fut en proie à toutes
les misères. Heureusement il s'échap|ia
près de Vach en passant dans une fo-
rêt : nu, inouianl de froid, craignant
toujours de retomber dans les mains
des Français, il arriva ainsi aux por-
tes de Darm^tadt ou il eut besoin de
beaucoup mentir pour n'être pas recon-
nu, et continua sa marche en men-
diant jusqu'à Meinin^eu où, quelques
fl' II T a ici rn allemand un cair tiV i
<|.i'il «I i>ii|>o«»ibl« de Truérr en noir* l.i _•
X Drr Kttbier m>II hirr Ricbicr scyc. a IWcb > r
«<ai dirr juge, et Ricbter ^tail le nom de fa -
nuit* d« iein-Paai.
KA]N
4oo
années auparavant, on l'avait vu faire
partie de la société du duc dans les pro-
menades publiques. Celte position ne
pouvait durer, et pourtant il n'y avait
aucun moyen de lejoindrc les armées
prussiennes alors si loin de la ftonîicre
saxonne. Kanne, ainsi que plusieurs
camarades dont il fit rencontre à Ijild-
hsnLjliausen , se décida sans peine
à prendre du service en Autriche.
Mais tant de fatigues et de privations
qu'il avait eues à supporter ne tardè-
rent pas à développer chez lui le germe
d'une maladie grave: son corps était
alors en marche sur Eger; il fut obligé
de s'aliter, puis on Tévacua sur l'hôpi-
tal de Linz où d'autres affections se
joignirent à celle qui le minait déjà.
Knfin ses amis , Wagner , Jean-
Paul, Jacobi, le tirèrent de cet enfer :
en même temps que sa convalescence
avai.-rait , ils le rachetèrent du ser-
vice autrichien, ils lui donnèrent de
l'argent , ils le firent venir à liay-
icuth , où son libraire le gratifia «le
cent florins. Ils s'occupèrent de lui
chercher une position , et après avoir
échoué à Gœttingue, après avoir es-
péré pour ^Moscou , ils lui découvri-
rent et lui firent donner la chaire
d'histoire à T Institut des connaissances
réelles de Nuremberg (1809) ; enfin
ils le marièrent à une jeune femme
distinguée sous plus d'un rapport
et qu'il aimait. S'il était besoin de
prouve pour se convaincre que ses mal-
heurs venaient de lui-même plus que de
la fortune, c'est ici qu'il est aisé de le
reconnaître. Loin de se trouver heu-
reux à présent qu'il avait à la fois,
calme, sécurité, argent, considération,
un intérieur agréable et le droit de se
livrer aux travaux de son choix, il ne
tarda pas à se regarder comme un
des hommes le plus à plaindre qui
fussent sous le ciel : il était méconnu,
incompris, même de sa femme; il était
en querelle avec ses collègues, les plus
KAN
simples et les meillcnis dc> hunitnes ;
il avait, en mettant la dcrnicie main à
son Pangloss, ou Syslcnic de ioiifes
les /lingues, demandé à l'cmpeicur
Alexandre de prendre cette œuvre sous
son patronage, et la requcîe était restée
sans réponse. Dans cet état d'agitation
lierpétuello, il revint au chrislianismc;
dégoûté de la science, du raisonnement,
de l'humanité, il en vint même à dire
que croire est tout, que développer des
arguments à l'appui de la croyance est
inutile et puéril! Un zélé mystique,
élève de Hahn, avait fait fructifier en
lui ces nouveaux principes dont cerlai-
nement sotr adolescence avait dcjàsciili
les germes. Cependant, ni le mysti-
cisme , ni la misanthropie ne le ren-
dirent assez étranger aux affaires de la
vie pour qu'il ne trouvât aussi moyen
d'avancer. En 1817, Il passa comme
professeur de philosophie au gymnase
de Nuremberg, et en 1818 il obtint
à l'académie d'Erlangen la chaire de
littérature orientale. Il en remplit les
fonctions avec talent et assiduité, mais
hors de ses cours il était rare de l'a-
percevoir ; sa singularité , sa défiance ,
son amour de la solitude augmentaient
avec les années et dégénéraient à la fin
en sauvagerie. Ce n'élait point timi-
dité, ce n'était point [)eur des homma-
ges qu'on eut pu rendre à son méiite :
c'était plutôt indignation secrète de
n'être pasassezadmiré, mécontentement
de lui-mêm;"" qui avait manqué sa vie,
qui avait deux ou trois fois changé d'o-
pinion religieuse, qui s'était usé en
travaux peu remarqiiables ; et mécon-
tentement des autres, qui n'avaient pas
même coté ses travaux à leur juste va-
leur, ou qui, en lui refusant les encou-
ragements, l'avaient empêché d'accom-
plir les grandes choses qu'il avait rêvées.
Ne pouvant ni faire croire sur parole
à ce haut génie qu'il prétendait porter
en lui, ni consentir à donner, comme
la mesure de son mérite , ce qu'il fal-
K\N
KA^
Vm
sait rt ce i|)i'il Jk\3\[ fail cti icjliir,
nou->euleuiriit il se cachait dan» \r
|ir«^<ul , inaiN il rùl ^oulu ^t taciiri a
iatruir, rt il ancanli.^vait quaiililr de-
<iil5, de [>iects (|ui cuisent |iu jeler du
jour »ur *on carat lèrr, sur ^ >ie iiilrl-
ircluelle et iiilcriic. Sa mort rut liru
le 17 drc. tH2V; il ira>.iit que ciii-
«jitaule un ans. f.c» nomUeUA uuvra^es
de kannc décrient un talent trèvhaul
et tiè5-varië: il était plu» qu'orienta-
liste, il était lin^ui»lr (trofond : à l'éru-
dilioii il joignait la |»er5picacilé : s'il
(•oxsrdait une facilite uir, il axait en-
core à un |duà liaut dr;;rr le [uquanl, le
feu, la saillie. 11 ui>ait en ;;éQéral plus
Uin, plu» MSe ou mieux que mille au-
tres n*eu.s^riit \ii à sa placi*. Mais louirs
ces belles qualités ne plodui^ent qu'un
ciïrt restreint. Il les applique à des
»ujels peu faits pour être compris de
tous ou pour saisir énergiquement
l'attenliou: on dirait que, serré par le
temps, par la ^ène pécuniaire, il sent
qu'il ne pourra mener à dn un ^rand
^ujet, et qu'rn consrqupnre il en rnf.i-
iiie de incdiocrr^ qui coniinninqucnt à
sa manirie quel«,ue clio^e d'inoppor-
tun, dr dissonant. Delà cet air tantôt
d'emphase, tantôt de lechrrche que
présente son si > le. (^e qu'il liaite n'est
point ce qu'il pourrait traiter, et l'on
sent en secret que ce talent qu'il met à
traiter un sujet, c'e^^t un talent qu'il
.■ïl>ais5e et qu'il fausse. C>eci poié , voici
la liste des principaux ou^ra^es de
kanne: 1. Dr la ftarentr drs iun-
fiues ^rer(fuc rt aUrniaiidr, Lrip-
zi^, lîSU4, in-8". (,c trailé, quoique
un peu sTstemalique , ronttent une
foule de clioses frappantes, qui sont
tombées aujourd'hui dans le domaine
public, niais qui alors étaient enroie
neuves. 11. S ouK^rllr r.i position Je
hi mythoU^ir ilrs (irrrs et des Ko-
iu inSy Leipz.ij;;, 180.'), in-S". 111.
Sourrrs primordiales de Fliistoirr^
ou Mythologie unii'frselie (avec un
diicouij pieliiiiinaire de Jean- l'.ml ,
Baurulh, ISOS, 2 vol. in K '. IV.
Panihron de la philosophie imto-
rrllr primitiie , ou de la Helii{ion
commune a tous les peuples, '\\\-
bin;;ur, 1811, in-8". (> tilir piomrl
dr> discussions on nr prut moins or-
thoduxrs, et le li\re tient toutes les
promesMs de son titre. Kanne vers la
IJn de sa \ie se reprochait anièrrmrnt
cet ou\ra;;e. V. Système du mythe
ùidien, ou l.ntnos, rt f histoire de
fhi/mmr-diru dans la période des
r%'olutions sw ressi^>rs des rtrrs en -
i'eloppesde tenehrrs ,avec un .Iper^u
du système mythitjue en ;;uisr d'aj»-
prndire, par Ad. Wagner), I.eipii^,
I8l;|, in-8'*. Il m est «lu .Système
roinmc du Panthéon, et tous deux
appar'.icnnrni à la même ph.ise de la
ppiisrr de kanne. \ I. Feuilles it\l-
leph à houph ^sous le pseiidomnio de
\N aller Ilergius.I^ipzijî, IhO'l. \ II.
Petit vityage ii la main (même p<ru-
don>mei, l'eni^, I8(>:r 11 > a dans
ces deux opuscules be^iucoup de in.ilire
et de traité; l'auteur pourtant manquait
parfois de pain en les écri\jiit. V|II.
Histoire du jumnm a prdr , ou 1rs
iMuan^rs dr ma hottr, Niiiembrr;^,
1811, in-8" . \\. f ingt pur.igrcphrs
crititpirs rt notrs historiques sur Ir
te.itr le l'emps (sous le pseudonyme
d'Antoine de lVu$se\ Leipzi;;, 1814,
in-H°. X. Hlrpsidème y drame en
cinq actes , Leipzig , 1803 , in-
8". XI. Iai Comrdir humaine, ou
1rs l\orrs de Ulrnsidème et les bap-
têmes de ses enfant i, comédie ni '1
actes, liaxreiith, iSll. XII. 1rs
V oyages de Sahmundi (rorn.Tii l-rrdc
V liistoirr des /nnu s-mo^ons), Nii-
lemberp, ISlfi.XIII. Deux Mrmoi-
rrs pour f histoire drs trnèhrrs. ou
. li'rnfnrrs dr Pliilippr (Mwrrarius
m Italie tl' après son maniisrrit. et
martyre d'.id. (Jarenharh, Franc-
fdrt-sur-le-Mein , 1822, in-8". XIV.
26
402
K\0
RecJierchcs bibliques ai>ec ou sans
polrtuiijut' , Ella:»- -il, 1819, 2 vol.
in-8'*. X.V. lirruril (l histoires véri-
tables et intéressantis tirées des ar-
chioes du christianisme , etc., Nu-
remberg, 1815-17, 2 vol. ln-8°;
3" vol. eu 1822. XVI. Vie et traits
choisis de la vie de chrétiens re-
marquables , riambero; et Leipzig ,
1816-17, 2 vol. XVII. Suite de
(ou Supplément il) cts deux ouvrao;es,
Francfort->ur-le-Meiu , 182i, grand
ln-8". XVIII. Le Christ dans C An-
cien-Testament, ou Recherches sur
les^figures qui annoncent le Christ
et sur les passages relatijs au Mes-
sie , Nuremberg, 1818, 2 vol.in-8°.
XIX. Diverses brochures {/Inalecta
philologica , Leipzig, 1803 , etc.),
et divers articles épars dans des recueils
périodiques, par exemple : Ne prends
pas les vessies pour des lanternes ,
et V Arbre généalogique des rois de
France, dans la Feuille allemande
de la (jonK^ersation. XX. Des édi-
tions estimables, savoir: 1° Cononis
Narra tiones quinquag. ex Pliotii
Biblioth. (avec lettre préliminaire à
He) ne et noies de Heyne à la fin du
volume), (iœttingue, 1798, in-8";
2" Anthologia minor, sioe florileg.
epigrumm. grœc. ex AntJiol. Pla-
nud. et Brunskii Analectis selecio-
rum (avec la version latine de Gro-
tlus), Halle, 1799 , grand in-8".
P— OT.
KAO i SOU OUTI, onSoung-
Outi, preuiier empereur chinois de la
d)'nastie des Soung, s'appelait aupara-
vant Lieou-\u et avait été lieutenant
de l'un des chefs de la révolte contre
la dynastie des Tcin, auquel il succéda,
et qu'il elTaça par sa valeur et son habi-
leté. Il triompha, depuis l'an de J.-C.
40 V, de plusieurs autres rebelles, arra-
cha des mains de l'un d'eux l'etnpereur
1 cin-N;;aiili, prisonnier, 4époudla les
princes de Tcin des villes et des dis-
KAO
tricls qu'ils avaient enlevés à Tem-
pire, et fit périr, en il 6, le dernier
d'entre eux. ^la:s peu satisfait de la
dignité de prince du troisième ordre,
que l'empereur lui avait décernée, il le
fit étrangler en 418, et mit à sa place
son fils Tcin-Kong-ïi qu'il força
d'abdiquer, en 420. Ce fut a' ors qu'il
s'empara du trône et prit le nom de
Kao-Tsou-Outi. Il distribua les prin-
cipautés les plus coTJsidérables à sa fa-
mille, et les charges les plus impor-
tantes à ses plus dévoués partisans.
Après avoir vainement tenté plusieurs
fois d'empoisonner le dernier empe-
reur, il le fit étouffer sous ses couver-
tures, et mourut lui-même en 422,
dans sa soixante-septième année. Ce
prince, doué de toutes les qualités poli-
tiques et guerrières , n'avait que les
dehors des vertus morales. Il eut sept
successeurs, la plupart indignes du
trône, déposés et assassinés. La d}^-
nastie des Soung qu'il avait fondée
fut détruite, en 479, par celle des Tsi.
— Kao-Tsou V^\ empereur de la
Chine et fondateur de la dynastie des
Tang, était prince de ïang et portait
le nom de Li-Yuen, lorsqu'en 616 il
fut au nombre des principaux rebelles
qui renversèrent la courte dynastie des
Soui. Le fantôme d'empereur qu'il
avait mis sur le trône, en 617, le lui
ayant cédé, en 619, il y monta; et,
des la première année de son règne ,
il anéantit les principautés de Leang ,
de Tein et d'Oueï; enfin, au bout de
six ans, il resta maître de tout l'em-
pire par la destruction des autres prin-
ces qui pouvaient le lui disputer. Il
dut la plus grande partie de ses suc-
cès à son fils Li-Chimin en faveur
duquel il abdiqua, en 626, et qui de-
vint célèbre sous le nom deTaV-Tsoung.
L'empereur démissionnaire avait alors
soixante-deux ans et ne mourut qu'en
635. Ce fut Kao-Tsou qui agrégea
au conseil suprême la fameuse acadé^
KAO
KVO
Ul
mit foiid^ [tir vïn 6(<, df reruif la pr-
pini^r^ d'une foulf ii'homm« cclr-
br« en \ous c^tnre^, i^oirTfrnenr*, na-
;çwtrat>, mandarin^, <aN..nt<, etc., et
qoi subsiste encore <ou» If nom de
llan-Un-Yorn. — K \o-Tw)f II,
fondatfar ùe la dTna^lie rliinoise âe%
llMu-Triii , s'appelait Clie-Kin^;-
Tan», avant d'rlre empereur. Derenu
par «a bra\oure et >es talenl«i militai-
re» f^endrr de l'emperenr Min;^- 1 ^on^;
et «joinerneur de Ho-Ton;;, il »r ré-
Tolt.i, m 935, contre son beau (rc^c
l«oa-()ajn;;, qui avait uiurpé If tr(\ne
en faisant périr %on propre frère.
Soutenu pir Ir» Tartarrs Kbitan^ nui
le proclamèrent empereur en le pla-
çant sur un trAne formé de nmtte- de
terre, il leur céda seire placer impor-
tantes , et poirrsuivant ses !inccès il
réduisit Lou-Ouan;; i se brûler avec
toute 5a famille. Hr«té seul maître de
l'empire, en P!17, il n'en jouit pas
paisiblement. Plusieurs pouterneurs
refusèrent de le reconnaître ou ne lui
rendirent q l'une obéi <s.ance simulée,
notamment ceux de quelques-unes des
places nii'il avait cédées aux Kliifans.
Forcé de chan;;er de résidence ponr
surveiller les autres, Ka(>-T*on ne put
cependant préseiiir des révoltes, dans
lesquelles un de ses (ils fut tué et un
de ses frères fait prisonnier. Fier du
secours des Kliitan< qui, depuis la con-
quête «lu Leao Ton«, avaient pris le
nom de Leao, et auxquels il prodi;;uail
les présents les plus précieux et les
plus basses soumission*, il rejette les
f propositions du cbef des rebelles, riont
a tête est mise à prix. Mais, en 9 W,
pour récompenser son courage et sa
noble résistance, il lui offre son par-
don et lui permet de se retirer dans
son pays avec ses richesses, (n minis-
tre, jaloux des faveiu-s accordées au
rebelle, le fait assassiner, et l'crape-
reur, pour se débarrasser de cet ambi-
tieux, l'éloigné de la conr en lui don-
nant le f;ouvernement d'une provi.ice.
Une nn4\rlle révolte écL^le, niji> dni-
Ȏe principaiemrnt contre le roi de
l^ao, dan^ 1rs pa>s qui ne Toulaient
pas M.'bif sa domin.Tion. Ce prince,
irrité de ce que le î;»^iifral Lieou-Tifii-
Yuen avait reçu les soumissions des
rebelles, adresse a l'empereur des re-
proches si outra;;eants que Kao Tsoa
en meurt de chagrin, m 9i'2. Il avait
dési;;ne poiir son successeur un de ^rs
fils en bas à^e ; mais on mit sur le
trône son neveu Tsi-Ouan;; qm. a>ant
voulu secouer le joii;; des Tartares,
ftit, aprrs quelques «nerf», assié;:;é dans
sa capitale , mit le feu à son palais ,
força ses femmes \ se jeter dans les
llanimrs et y aurait péri lui même, si
un traître ne l'eût livré aux vainquotirs
qui respectèrent ses jours, et le retin
renl prisonnier — 1^ dynastie des
Heou-Tcin étant étein'e par celte ca-
tastrophe, LieotiTchi-Yuen, prince du
sans, ** fi' proclamer empereur, en
9i7, sous le nom de K^o-Tsoi |||,
et fonda la drnastie des Ileon-Man.
Il délivra la Cfilne de l'oppreNNion des
Tai tares î.eao ; mais il mourut l'an-
née Mi-vanle. et 'on fil* Vu l'i s'eiaiit
rendu odieux et mépnsable, par ses
cruautés et ses débauches, fut détrôné
et tué en 9.'»1, et fil place à une noa-
relie dvnastie. A — T.
KAO-TSOr.Xi; r. troisième
empereur de la Chine, de la dynastie
des l'anfj, avait porté le nom de f.i-
Tchi, avant de .succéder, l'an OVH de
J.-C, a son père le ^rand Thaï-
Tsoun« [^oy. ce nom, XIA', '2'M].
Aussitôt après son avènement au trô-
ne , il convoqua une asseuiblr^e des
{grands et des pnuverneurs «les provin-
ces pour s'informer exactement «les
besnirîs du peuple, «l il s'occupa sans
relâche «les mo\rns de les soiila-^er. Il
rainquil l.>Unn «les Turks orientaux qui
avait refusé de lu' rendre hommage et
tué un de ses ambassadeurs, et, l'ayant
!l6.
4o4 ^^'>
fait pili.on:iicr , il se conlcnla <îo le
présenter en ollVande au temple lio ses
dieux, el le ieiivo\a dans le Tiirkos-
tan avec des titres pompeux, mais sans
autorité. Kao-Tscun^!; ré;;nait depuis
six ans, chéri de ses sujets et respecté
de ses voisins, lorsque étant devenu
amoureux, dans un concert, d'une des
femmes de son père, il IV'jJOusa mal-
çjé les plus sa2,es observations sur l'in-
décence d'un paroil mariage, et devint
l'esclave des volontés de celle femme
adroite et ambitieuse, qui parvint à
supplanter l'impératrice et à la fane pé-
rir. Elle se défit aussi des grands qui s'é-
talent opposés 'a son élévation, et con-
tralf;nit même le prince héréditaire à
se donner la mort. Odieuse par sa ty-
rannie, cette princesse sut contenir le
mécontentement général et employer
utilement l'armée qui conquit la Co-
rée et quelques états des Tartarcs sep-
tentrionaux. Tel était son ascendant
sur Kao-Tsoung, devenu aveugle, que
ce prince, mourant, en 6SV , ex-
horta son fils Li-Tché ou Tchong-
Tsoung, qui allait lui succéder, à con-
sulter l'impératrice dans toutes les
affaires. C'est Kao-Tsoung qui, ayant
reconnu roi de Perse Firouz, fils du
dernier monarque Sassanide {Voy.
Iezdkdjerd m, t. XXI, 175), lui
donna a^lle en 674; mais au lieu de
lui fournir des secours contre les Ara-
bes, pour l'aider à remonter sur le
troue de ses pères, il le nomma capi-
taine de ses gardes. — Kao-T-Soung
H , dixième empereur chinois , de la
deuxième dynastie des Song^ quitta le
nom de Kang-Ouang, lorsqu il suc-
céda, en 1127, à son frère Kin-
Tsoung qui, vaincu par les Tartares Kin
ou Nlutchin, avait été déposé et em-
mené par eux en captivité avec le précé-
dent empereur [Voy. IIoi.i-'J'song,
rXVII, 2-29) el plus de trois mille
personnrs de la famille impéiiale. Le
prince qu'ils avalent mis sur le trône
KA.0
rc h:iîa d'en de>-rer.d.o, pour v faire
monter le jeune Kao Tsoung qui était
absent. Il s'empressa aussi de rappeler
l'Impératrice Mong-Tsi , qui ayant
échappé à la captivité, parce qu'elle
avait été répudiée, fut déclarée régente.
Kao-Tsoi»g fut le chef de la branche
des Song qui ne régna que sur la par-
tie méridionale de la Chine, les Kin
étant maîtres de celle du nord dont
ils lurent chassés depuis par les Mon-
gols de la race de Djenguiz-Khan
( Voy. ce nom , XI , 438). 11 s'é-
tablit d'abord à Nanklng ; mais il
fixa bientôt sa résidence à Yang-
Tchou. Ce monarque élait doux , af-
fable ; 11 aimait sincèrement ses su-
jets ; mais 11 avait l'esprit faible , in-
dolent et ne surveillait pas assez ses
ministres. Dès la seconde année de
son règne , les révoltes que provoq;ia
leur mauvaise conduite bicnl mourir
de chagrin le plus fidèle et le mcilledr
général de l'empire, qui venait (i'cmpè-
cher les Tartares de prendre kai-Foiig-
Fou. Sa mort leur facilita la con-
quête de plusieurs autres places qui leur
furent livrées par trahison ou par lâ-
cheté, li'empereur lui-méine aurait été
enlevé dans sa capitale, en 1129, s'il
n'eut traversé le Klang dans une bar-
que, pour se retirer à Tchln-Klang.
Dans l'espoir de meltre i\n terme à la
tyrannie des eunuques qui s'étaient
emparés des affaires, el aux soulève-
ments qu'elle avait excités , Kao-
Tsoung en abandonna deux des princi-
paux aux mécontents qui les mirent en
pièces. Il n'en fut pas moins forcé de
céder le trône à son fils, encore enfant,
el la régence à l'impératrice : mais il
fut réintégré par le chef des rebelles
vaincu cl soumis. Les Tartares, qui
s'étalent retirés avant ces troubles, y
revinrent bienlôl après, et leurs con-
quêtes furent si rapides dans la partie
méridionale <le la (îliine, que l'empe-
reur, chassé de place en place cl con-
KM'
train) J»» p r/diJÎfr, avw vi rmn , il.ins
tir (lori tl. 'I 1 irou.en 1 Do, iiV-
chap(0 j V . . qii'fii ;;aii;unl b
pleiiif mer où lU nr puiriit l'aitein-
irt. \jtu> retraite et le* revei s qu'ils
éprouvèrent lei années suivantes per-
mirent à kao-T^oun;; tie prendre
terre et «le rentier dans ses élal*.
Mais les Tarlares lui i>ppoM>renl un
rompriileur, l.ieoii-\u, qui pteiiail le
tilre d'nn;»rreur et réj;nait sur une
partie de la Chine. I/armée impériale
triompha, eu ll.'Ul, de ce maniirquia
qui fut dépixr, l'année suivanir. par
se* propres partisans. Le roi drs Kin,
devenu plus trailable, acrorda la paix
à Kao-Tscui»};, lui ren%oo le corps de
son père et celui de son aïeule, et lui
rendit les provinces de llonan et de
Chen-si : maii, en ratifiant le traité, il
stipula qu'il était souverain de tous les
pavs au nord du Kian;î, et que l'empe-
reur de la Ciiine ne posséderait 1rs
provinces au «.ud df re lleuv e que foraine
son vassal, kao-l^oun,; n'eut pas honte
d'afceplci cps r()iuli!ion< , et dr pu-
blier une amnistie ;^oné[ale pour si;^na-
1er rette paix humiliante. Cemonat.^ue
indolent muait pu relever ^a puissan-
ce, tandis que celle des kin s'affaiblis-
sait par leurs lon^ue^ {guerres avec les
Monpols; mais Kao-I^ouns, si facile
lorsqu'il s'a{;issait d'abandonner ses
droits et se» provinces, était très-sus-
ceptible sur rétiq.jeUe, chose très-im-
portante chez les Chinois. Piqué de
quelques diffuullcs qui s'élevèrent pour
le cérémonial entre le nouveau roi de.s
kin et lui, plutôt que de réder, il roni-
prl la paix et alulicuia l'empire, l an
1101, en faveur de son fils Tchao-
Oueï , qui prit le nniu de IliaoTsong
(/ oj.ceiioiu. FAV1I,18G). A— T.
KAl»MST (Vasili Vasiiik-
vitch), un des poètes lyriques les phis
illustres do la Russie, naquit en 17ôG.
Bien qu'appartenant à la classe
moyenne de la société , il rerul une
K\V
AoO
exfrlli'iile éducation. I^s classiques la
tins cl ;;rec» surtout le caplivèieiit
forlemciit. Aus^'. manifesta- t-i! de
bonne heure un vif penchant pour la
poésie. H ftait encore jeune quand sa
traduction des Otlrs d' llorutr fixa
l'attentinn sur lui. Sa comédie de
Al Uiinnif Jabéda en 17*J') aciieva
de dén.h-r l'opinion en sa faveur et de
te placer au nombre des hommes qui
connaissaient le mieux les secrets dr la
lan;;ueetde 1.1 versifiration. Kerherrhe
λar sr\ conlrniporains les plus crlè-
)re» en tout ;;enre, il se lia intime-
ment avec les hommes de lettres , te»
hoinnii*) d'elat et les pen^onna^es les
plus remarquables de la Uuvsie. Il
eut surtout pour ami , son parent et
son rival de ^énie , le lyrique Derja-
viue. H fut reçu membre de l'académie
impériale de Saiiit-I'etersboiir;; , puis
nomme coiiN-'iller d'état. Kniin. plus
que sexa;;rnaire , il prit sa reiiaite et
alL passer ses derniers jours à son do-
maine d'OloMLhovLa en petite Russie,
C'e.sl là qu'il niouiut le 'IH octobre
181. J, se dl^travant encore souvent i
versiGer, et parfois s'elevant à des in-
spirations dignes de sa jeane>se. On
publia une édition de »e.s (Kiwrrs
complet f s sous le titre de Pttrsifs
lyritfues tie V . Kapnist , à Saint-
IV'tersbourj; en IHOG. .Mais depuis il
fil paraître une tragédie, .lntigont\
181.'». Ce n'e>t point son meilleur ou-
vra j;e , et pourtant la punie, le fini
de sa vjrrsifiralion v retlètciit si j er-
suasivement la sérénité d'àinc du poè-
te, qu'une fois le livre ouvert on ne le
quitte plus. Tel est aussi le de;;ré du
mérite de sa comédie de hi Chicanr.
C'est ce que le théâtre moscovite pos-
sède de mieux avec le Mineur et le
Brigadier de Von Vic>cn. Il existe
encore de lui un Essai sur CO-
dysscr , où il se montre in<;énieux ,
ori;;inal et savant , mais où la justesse
des vues est loin d'être au niveau de
4o6
KAR
la finesse des observations. Au total,
c'est comme poète lyrique qu'il l'em-
porte. Son style est large, pur, pitto-
resque, très-varié. S'il n'a pas l'essor
liardi , l'inattendu, le pindarique de
Derjavine , sa pensée pourtant se dé-
roule richement . naturellement et
d'elle-même; une philosopliie saine en
est la souice et la clé, une douce teinte
de mélancolie l'empreint d'un ciiarme
intime et profond. Sous tous ces as-
pects, le géuiedeRapnist présente un
frappant rapport avec celui d'Horace;
et, soit que cette analogie de talent
et d'esprit ait précédé la traduction,
soit que la traduclion ait développé
chez le versificateur moscovite cet esprit
et ce talent , on ne s' étonnera plus
qu'il ait si bien réussi à faire passer
les beautés du modèle latin dans l'imi-
tation russe. P — OT.
KARAMZIXE (Nicolas-
MikhaÏlomtch), littérateur et histo-
rien russe, dont le nom est devenu eu-
1 opéen , naquit dans le gouvernement
deSimbirsk, en 1765. Il paraît que ses
parents pouvaicnl passer pour nobles,
mais de cette noblesse qui, dans la vaste
Russie, où les rangs sont si positive-
ment fixés, ne se dislingue qu'à peine
de la movenne bourgeoisie. Comme no-
ble, il fut donc résolu qu'il embrasserait
la carrière des armes. En effet, à peine
eut-il achevé ses études à Moscou, dans
la maison du professeur de philosophie
Schrader et quelque temps suivi les
cours de l'université, qu'il prit du ser-
vice. Admis dans la garde impériale, il
eut occasion de voir de près l'illustreCa-
iherine II, qui delà pelitecour deZerbst
était montée au trône de toutes les
Russies et l'occupait avec tant d'éclat.
Karamzine était né poète et enthou-
siaste : son àmevive et impressionnable
fut élect risée à la vue de celte fem-
me qui faisait jouer un rôle si haut à
la Russie , et il se sentit comme un be-
soin d'entonner le panégyrique de la
KAR
grande impératrice et de la grande
nation. Cependant son talent était
trop peu formé encore , et la litté-
rature moscovite présentait trop peu
de modèles pour qu'il osât voler de
ses propres ailes. Ecolier en poésie,
il ne voulut risquer un premier pas
qu'appuyé d'un guide. Ce guide fut d'a-
bord Shakspeare. 11 mit en vers russes
les vers, en prose russe la prose de Jules-
César : peut-être était-ce ce mélange
même qui l'avait séduit. Il s'exerça en-
suite sur un Allemand, et traduisit Emi-
lie Galoili de Lessing. Après quoi,
passant au genre didactique, il fit con-
naître à ses compatriotes par une ver-
sion ï Origine du mal de Haller. De
petites poésies originales le délassaient
de temps en temps du mécanisme de la
traduction, et paraissaient dans \e Jour-
nal de Moscou, qu'il composait à peu
près lui seul. Bientôt ayant abandonné
le service, il se mit à voyager (1789 et
années suivantes) : il vit la Suisse ,
l'Angleterre, la France où commen-
çait à rugir la tempête révolutionnaire,
mais qui, pleine de mouvement cl de
vie, offrait un spectacle enivrant au
curieux arrivant des pays du Nord.
L'opinion européenne était encore en
extase devant le matéiialisme de Vol-
taire , devant la sape politique de
Jean-Jacques; et les disciples de ces
grands hommes étaient adorés à leur
place. (3n les recherchait , on vou-
lait les entendre, on eût cru ne point
avoir vu la France , si l'on n'eût au
moins échangé quelques paroles avec
eux. Xaramzine n'omit point cette for-
malité, et il eut le bonheur de voir les
Condorcet, les Marmontel, les Lahar-
pe, les Sieyes. Il faut dire toutefois
que ce ne fut guère pour lui qu'un
spectacle curieux, qu'un tribut payé à
la mode. L'imminence d'une guerre,
d'une coalition peut-être, contre le
système révolutionnaire lui fit quitter f|
la France plus tôt probablement qu'il
HAR
M Paviit totthi, en 1791,ouau cont'
infiicfflirnl de l'^'J. Il revint par
rAllfina;:iie cl la lN)lo;;ne. De ir-
lour à Mfv^nu, il ^e remit à la lillé-
rature lej;ète, »i peu pieocnipé drs
éirènemenli du jour qu'il ioupirail l'e-
légie, et poétisait le fonte, au moment
où TKurope était en feu, où la l'olu-
gne achevait de périr, où Bonaparte
conquérait l'Italie. (l'était l'année de la
fuorl de T^allierine : il publia le nané-
prrique de cette Sémirarai* du Nord ,
panégyrique auquel le% ami* de l'au-
teur et de l'impéiatrire \oulureiil bien
attnbuet le^ qualité-, de l'Iiistnire ;
mais où l'on rompreiul que Karainime
l^ardail sur la moi I de l'ieire III et
d'Ivan IV , et sur les re^^orls de
la faxeur de l'otemlin et de Platon
Zoobov un silence prudent. C'est
alors qu'il crut se sentir de la voca-
tion pour le f^enre historique , mais
sani l'embrasser encore dans toute sa
sévérité. Il débuta par deux nouvelles,
dont une notamment sur un sujet émi-
nemment dramatiijue [Marlhr tu po-
çadnitsuy ou la Vrise tir ^ Oi'gorotf' .
iles petits ouvrages d'ima^^mation lui
valurent la place d'historioj;raphe de
l'empire russe (180!i\ ce qui au besoin
démontrerait que le gouvernement du
tzar tenait moins a la miiiutieu>e vérité
qu'i la manière d'agencer et de colo-
rier les faits. Lon^-temps, du reste,
cette douce place d'hi>loi io;;raphe fut
une sinécure dont l'acte qui revenait le
plus fréquemment était l émarf^enient.
Kn6n survinrent les;,ravesé\ènemcnts
de 1812, suivis de la chute de Napo-
léon. Karamrine, à qui la flamme de
Moscou et les -^.laces de la Hérésina
taillaient de la besogne , résolut de
narrer cette maf^nifique épopée. Puis
naturellement son plan s'agrandit : il
pensa au rè^ne entier d'Alexandre , il
remonta au\ Bomanov, il se dit qu'il
fallait tracer rhistoire entière de la
Russie depuis son berceau. Kt ses en-
KAH
4o:
loar9 d'apblaudir, et l'opinion publi
que, à qui les récentes victoires avaient
rendu plu^ nf le sentiment de nationa-
lité, d'en arriifillir l'annonce avec la-
veur et de prendre en (jiielque sorte
l'historiographe au mot. Aleiandre
lui-même n'hésita point à la confirrot-r
par cette parole en quelque soi te of-
Bcielle : •< Kepeunle russe est dij;ne de
m connaître son nistoire, rt notre his>
« toire sera dij;ne du peuple russe. »»
De lar;;es promesses de subventions et
l'autonsation de fouiller les archives,
toutes les archive», dit-on, achexèrent
de stimuler Karamzine I.e f;ouverne-
menl russe ne pava pas moins de
soitante-deux mille roubles en douxe
années pour l'impression de son ou-
vra;;e. I*our lui, depuis l'auji^uste invi-
tation, il n'avait ce^se de mettre à pro-
fit les sources précieuses et quelquefois
uniques placées à sa disposition: sla •
vonnes ou grecques , bosniaques ou
russes, polonaises ou mon;;oles, il les
avait toutes interro{;ées , combinées,
contrôlées les unes par les autres.
Tout préoccupé de la beauté de la
forme littéraire , il s'appliqua sur-
tout à fondre ses matériaux en un tout
harmonieux, à être poète en même
temps (]ue narrateur, à peindre comme
Tacite qu'il proclamait Ir modèle éter-
nel et le desespoir des hi>toriens ; et
cependant il ne manquait pas tout poète
et tout romancier qu'il eùlété,d'i sens
historique le plus indispensable. l'amour
de la vérité. Il voulut aussi, et là on re-
marque en même temps le eoûl du
vrai et l'instinct littéraire, que sa nar-
ration revêtue de couleurs locales, re-
produisit l'allure , exhalât le parfum
de la légende : enfin , il voulut, afin
de se mouvoir à son aise, donner
à son livre des développements un peu
vastes Mais, ainsi qu'il arrive souvent,
ces développemenis en vinrent au point
lie l'effraver lui-même, et surpassèrent
toutes its prévisions. Arrivé au hui-
4o8
KAH
liètne tome , il n'en était encore
qu'au lè^iic J'ivan IV, règne dont au
bout (lu volume on n'a encore vu que
la portion antérieure à la mort d'A-
naslasie Sabourof. Le onzième ne nous
mène que jusqu'à Ivan Y; et en conti-
nuant sur ce pied, il est clair que vingt
volumes ne suffiraient pas pour raconter
la politique et les actes si nombreux des
trois premiers Romanov, qui surent
voir si nettement ce qu'il fallait pour
relever la Kussie de l'état de délabre-
ment et de prostration auquel l'avaient
réduite quinze ans de révolutions et de
guerre civile , le glorieux règne du
grand Pierre , les ignobles saturna-
les d'Elisabeth , la grandeur et les
crimes de Catherine, puir. les événe-
ments contemporains. Quoi qu'il en
soit , Karamzine n'eut pas le temps de
mettre la dernière main à son ou-
vrage, il n'en put achever que onze
tomes : quant au douzième, qui con-
duit le récit jusqu'à 1613 et qui con-
tient de bonnes tables analytiques , il
n'y avait travaillé que pendant les
deux dernières années de sa vie, et une
Îartie en est due à la plume d'Œrtel,
ia publication de l'ouvrage de Karam-
zine commença en ISIO : les huit pre-
miers volumes étaient prêts. L'empe-
reur voulut qu'ils fussent publiés sur-
le champ et fit les frais de l'impression
qui montèrent à soixante mille rou-
bles. On avait à l'avance et au son des
thuriféraires requis partout des sous-
cripteurs. Ceux-ci pourtant ne furent
pas très-nombreux lors de la première
édition , le chiffre n'en dépassait pas
six cents; mais les acheteurs abondè-
rent, et les 3,000 exemplaires qu'a-
vait tirés la presse impériale furent en-
levés en vingt-six jours. Pour la Rus-
sie et pour un livre russe, c'était uu
succès extraordinaire, sans exemple.
Du reste , ce livre avait été depuis
long-temps extraordinairement prÂné.
Karamzine, à mesure qu'il écrivait et
KAR
avant d'avoir livré à l'impression, en
faisait des lectures dans les soirées.
Nous ne saurions dire si ces anticipa-
tions sur la publicité ajoutèrent à la
véracité de l'iiistoire : à coup sûr elles
ajoutèrent au renom de l'historien. On
se plaisait, dans les élans d'un patrio-
tisme peu dangereux pour l'autorité ou
provoqué par l'autorité même, à faire
du nom de Karamzine le synonyme
de Vhistorien de la Russie. Karam-
zine en effet possède plusieurs des bel-
les qualités de l'historien, nous le ver-
rons, et des qualités plus élevées que
celles dont il est doué auraient peut-
élrc moins plu à la haute société, au
public peu difficile qu'il avait à con-
tenter. Ce qu'il y a de certain, c'est
que dès 1818 , on procédait à la réim-
pression de ses cinq premiers volumes,
et que deux Français établis à Saint-
Pétersbourg en commençaient la tra-
duction qui parut en 1820. En 1824,
Alexandre nomma Karamzine conseil-
ler-d'état en service réel: déjà il lui
avait conféré l'ordre de Sainte-Anne ,
et, en 1816, il l'avait obligé de quit-
ter Moscou pour un logement au palais
de Tauridc (une des maisons de plai-
sance deCatiicrine II). I^n mai 1826,
l'empereur Nicolas, en l'autorisant à
passer dniis la Russie méridionale au-
tant de temps qu'il le jugerait à propos
pour le rétablissement de sa santé, lui
témoignait , par une lettre qui fait
autant d'honneur au souverain qu'au
sujet , sa satisfaction de voir avancer
son grand travail, et lui envoyait l'ou-
kase d'une pension de cinquante mille
roubles réversible après sa mort à sa
femme et à ses enfants. Karamzine
n'eut pas le temps de goûter les résul-
tats de cette spicndide munificence:
malade depuis long-temps , il avait
baissé encore depuis la mort inallendiie
d'^Mexandre à Tagnnrog : il mourut
quelques jours après avoir reçu la let-
tre Impériale, 3 juin (22 mai), au pa-
KAi;
laii il« TauriJf , «l'une 3(Trclion Je pol-
liinr, au uKiinrnt ou, sut ra\i!i Jc)
iuriJerii:s qui lui cniiNeillaifiil non
plus Ir rliinal lic U Ciimci*, mais relui
(Je r Italie, pour le guérir, il allait
partir avec ^a famille et a>ec son ami
le poète (^lio(iLoH>li pour Ks ri«es de
l'Arno. Déjà la Irc^ate V llrlrneï'^X-
tendait dan» le port de Cron«tadt ,
qjand sunint son heure dernière. Il
a\ait rtè marie deux foi^. Des ou-
vrages de karamzine, le plus impor-
tant San» doute , ou même \c seul
important , c'est sa grande llis-
taire de Russie. Nous a\ons dit com-
ment, par qui, à quel point elle lut
préconisée ; à relran;;er, et Mirloul
en France, on a nn peu trop fidèle-
ment été l'éclio de l'opinion russe,
l'ii-n que q(jel(]ues cnli(|iip> un peu
nioin<i adniiratif> aient commencé à
faire la part du bien el tlu mal. Kn
réalité, l'histoire russe de karamiine
e>t un monument m^)e^lueux. la Kus-
sie ne possédait point d'historien re-
marquable a\ant lui ; il est donc le pre-
mier et jusqu'ici le seul .iu(|uel ses com-
patriotes puissent décerner ce titre.
l)'autre part, l'histoire russe par un
Husse el dans l'esprit russe ne peut
3 ne tlatter la vanité russe: il n'est
onc pas étonnant qu'une acclama-
tion publique ait salué rou\ra;;e; il
> a là quelque chose (i'.inalo;iue a l'en-
thousiasme ;i\ec lequel les (ircrs enten-
dirent pour la pteinière fois leurs hauts
fail.s bien contés. Hérodote a des
qualités; on s'en engoua, on lui sup-
posa la perfection. Si, pour être un
parfait historien, il suffisait d'unst^le
;;rave, larj^e et harmonieux , de ta-
bleaux animés, de narrations qui ont
du charme, d'extraits assez fidèles des
chroni(jiic> el de l'envie de représenter
compii'lenicnt les mœuis, les coutu-
mes l<î mode d'existence des vieilles
population>,Karamzine serait le modèle
du génie; mais, avec ce que nous avons
aujourd'hui d'expérience et d'inirl-
licence des faits, nous sommes pins
diflicilei et nous a\ons laisoii de l'être.
'Iile-Live, Tjtilr mrme, quelque haut
qu'il faille le* placer, ne sont plus,
comme karamiine l'ima^^ine, l'idéal
du beau en hi>li»iie. Naiicr el peindre,
nari er el sentir ne sont point ajiez dans
m\ siècle ou la polit fiue ri le laison-
nemriit, où l'habitude de scruter les
causes Lteiitcs et de saisir desensenibles,
on la complication de» civilisations et
des événements enche\rtr^ les uns
dans les autres demandent tant de per-
spicacité pour démrler le \rai, tant de
nellcte dans la distribution de faits
iioiiibreux, et dans les manières de les
grouper ; et il s'en faut bien que ka-
ranuinenaire comme lite-ljvr, et il
s'en laut i>ien plus encore qu'il sache
peindie rt sentir ainsi que Tacite. Lit-
térateur et orateur, il est trop ora-
loiie, trop académique : son stvie i^tave
et plein tA uw peu monotone , il v a
delà sonorité dans sa voix, mais pas
d'iiiilrxiuns ; l'ampleur et la nia;4niii-
cence, voilà ses vrais caractères, il les
a au suprême de^ré et les outre, car
il les a toujours. Il offre tous le> dé-
fauts , toutes les insufljsànces de ses
qualités. Il est diffus, il est pesant ,
il e>t superficiel, il est indécis : les
trois quarts An temps il >emble ne pa-s
se douter des ressorts et des causes ; il
prodi^tjc les épithèles, mais il ne lie-
viiie pas l'éveiicmeiit, il ne f;iit pa>
vivre et se mouvoir la personne ; il
ne sait point échelonner les détails de
manière à ce qu'on saisisse les phases,
les nuances, en quelque sorte les états
divers par lesquels passe un mi-mc
^raiid fait ; à plus forte r.nison i^^nore-
t-il l'art d'échelonner ces grands faits
et les ensembles ilc faits. Chez lui nulle
division naturelle, nulle p( riode, une
lonj;ue roule sans jalon. Il coud les
règnes aux règnes, les événements aux
événements, comme si en commençant
Hio
KAR
il ne savait pas ce qui suivra. Procédant
par sMilhèse , marche majestueuse et
grandiose, il n'a pas l'art d'éclaircir
ce qu'elle a d'obscur par des noiious
analytiques ou préalables ou jetées
chemin faisant. De là une confusion
extraordinaire, surtout dans toute l'é-
poque des apanages et dans celle oîi, à
côté des princes de la maison de
Rourik, co-existent des i\lono;ols ; el
nous défions la mémoire la mieux or-
ganisée de retenir, les ayant lues une
seule fois, la substance de cent papies de
karamzine. l,es tableaux généalogiques
placés à la fin du tome huitième pèchent
également : ce ne sont que de sèches no-
menclatures sans un mot d'explication
placé au-dessous des noms, la plupart
inconnus ou peu connus, des princes is-
sus de Rourik. On a beaucoup vanté
le soin qu'il prend de faire connaître
les mœurs , les lois, en quelque sorte
l'atmosphère intellectuelle de la Rus-
sie: il y a du vrai dans ces louanges,
mais Karamzine ne donne que des
traits et ne compose pas de tous ces
traits réunis un tableau, lacune grave
chez un historien qu'on veut classer
au premier rang; puis eût-il su fondre
tous les traits en un tableau, toujours
est-il qu'il n'eût point, en les liant les
uns aux autres, déroulé une série de ta-
bleaux résumani la vie interne et intime
de ces populations slaves et finnoises,
varèques et bulgares , khazares et mon-
goles, outzes et petchenègues. Quant
au mécanisme qui engendre les événe-
ments, quant à la politique qui les
domine ou en cote à l'avance les résul-
tats, il y songe encore bien moins.
Ainsi Karamzine n'est pas irrépro-
chable lorsqu'il expose , il ne l'est
guère plus lorsqu'il s'agit de consti-
tuer l'histoire. Nul doute qu'il n'ait
souvent remonté aux sources , qu'il
ne les ail étudiées, qu'il n'ait voulu
en faire la critique d'abord et ensuite
l'analyse : nul doute même qœ dans
KAR
ces analyses il ne nous offre souvent
des traits précieux et caractéristiques
très-peu connus, que plusieurs de ses
pages n'exhalent comme un parfum de
vieille et naïve légende, qu'il ne fasse
sentir les aspérités et la rouille, l'aspect
sauvage et la nudité des vastes lieux et
des âges reculés qu'il raconte; nul
doute enfin que les notes jointes à
ses volumes ne soient la plupart très-
bonnes. En revanche, reconnaissons
que fréquemment sa discussion est
légère, sa critique fautive. Disons sur-
tout, et c'est de tous les reproches le
plus grave, qu'il a peu d'indépendance
d'esprit. D'abord il est partial et il ne le
nie pas : Hérodote , Thucydide sont
pleins de sève et de vie, dit-on, parce
qu'ils ont de la partialité l'un pour
rionie , l'autre pour Athènes. Aux
yeux de Karamzine , il n'est rien
de si beau que d'être né sur les bords
de la Neva, du Dniepr ou du Don,
et en conséquence il amplifie les hauts
faits , il atténue les hontes ou les
crimes de ses compatriotes. Ensuite
on peut assez deviner que si telle est sa
manière de voir à l'égard des sujets,
les tzars, les princes et les nobles
russes le trouvent encore de bien meil-
leure composition. Il est de fait que les
abominables ruses de quelques-uns de
ses héros ne sont ni contées avec indi-
gnation ni qualifiées avec rigueur.
C'eût été bien pis encore si la mort
n'eût empêché l'auteur de mener son
œuvre jusqu'au bout du XVIIP siècle
et même jusqu'en 1814. Que de véri-
tés tronquées ou passées sous silence!
A un rouble par mensonge ou par ré-
ticence, cela peut-être eût surpassé les
cinquante mille roubles de pension que
lui assurait son souverain. L'histoire de
Karamzine en russe a paru à Saint-
Pétersbourg de 1807 à 1824. Saint-
J'homas et Jauffret la traduisirent sur-
le champ en français, sous les yeux et
sous les auspices de Karamzine lui-
KAK
r, c« qui^ârintjs»ait U GilélilëJe
la traduction d'autant mieaK que ka-
ramziiir .va\ii( Ir fi aurai . Aussi M.
A. Jullirii de l'aiu, qui it priipuMit
dVii duniier une tra«iuiiiou et qui
rarnie ra\ail di*)à rouii<ienrte, s-inifia
«00 lra\ail aussitôt qu'il iut inluioié
de rrtle nouvelle. |j Iraductioii de
Saiiit-Tlioma» et Jiuiïrct \il le jour
à Faiis eu 18:20, et se continua lei
aunées suivantes. Nou» uerouiiais-
son.^ pas de traduction du douiiraie
\olurae. I.^ (iriucipales iiatiuii» de
l'Europe au&si pos>riIcnt karàinzine
traduit. Nous nous Lonieroii^ à ci-
ter pour rAlleiiia^iu la traduction de
Ilauenscliild lODliiiueo pai t Ji ricl. Les
aulrr> ou\ra^rsde kjramzine a%aient
ctc publiée Mius le titre ili Œuires
to//i/>/Wrj, St-l'elfisbonr^;, IHOi; iU
ont eu riionncur d'une lioisirine édi-
tion, 1815, y \ol. (^> ou>ra^es, qui
pour laplupait avaient d'abord etr don-
nes séparéoieul, :-r coaïpo>cnt : T* dcNa
traduction des troi» pièces anglaise
et alliniandes ci-dessus ; 'i" de Mes
lnigalrllcs, pDr>ies lr;:èiT> qui virent
le jour à Mo>cou eu ITU'i. et où se
lruu\ent beauœup de luntes tlutr-
munis (traduits en allemand par Kicli-
ler), et Atpufsies irgrres. d une .sen-
timentalité banale cl iiuillc; 3 ' df deux
l'fiitres^ l'une jui le bonlieur, a \\ let-
clicf, cl l'autre à un poêle indigent ; 4"
de lieu» nou\ellei, SUirllie (Marpha)
ta Po^iidiiitsu, et Sutliulie, ou lu
t iUe ifun ùo'ùiid ; 5" d'un Entrrtifii
sur ir lionhnir, de V Eloge de (ÀJtf te-
rme lu Grunde ; de SoUi'em'rs histo-
riques sur le chemin de Moscou à la
'IroUsa ; 6*^ des Lettres (fun voyu-
gfur russe, \ vol. in-8" traduit en
allemand par hicluer, 17y*)-18(>ij.
li fjul joindre à ces écrits deux recueik
intitulés: Puntheon de lu littérature
russe; et Punthrun de la littérature
rtrariftre. qui l'un et l'autre ne sont
que des compilations, et ensuite plu-
KAK
4ii
sieurs recueils péritMiiques, savoir: \**
Lectures pour les enfants (en so-
ciété avec Prirof; 2" Journal de
Musiou , 171*0 et 91 ^c'rst la que
furent, pour la preraietc fois, places 11
plupart de se> conies et poésies léf;eres);
3' Aglué, 17*Ji, 'J \ol. , qui n'esl
autre chose qu'un recueil de contes dont
beaucoup, de|u connus a celle epoijue,
•nt etr leunis plus lard dans les (h.u-
vres < onipletes ; V" le lourrier de
r Europe , 1802 et années suivan-
tes (1). I'— OT.
K AU .\ KOWSKI et non
(>7\llNki)NN.Nkl ^ SrAM.SLAS ) , fa-
meux prélat pulouais, né vers lô'iO ,
riait e\eque de (^u|a\ie ou de NN la-
(lislan depuis 15(iit,et s'\ était signai**
par son zèle à rétablir 1.* discipline
trop ne;;lij;ee par son prédécesseur ,
ainsi que par d'utiles re^lnnriils s> no*
daut adressés a son cler;;', quand la
mort de Si^i»raond 11, en qui s'eiei-
^nail la postérité niàlc des Ja^ellons,
ouvrit une ère de discordes et de cor-
ruption à la Folo;:ne, eu rendant la
couronne francbeuient et à toujours
élective (107:2). Il v avait Ion»; temps
déjà que les deui grandes secies pro-
testantes, le luthéranisme et le calvi-
nisme s'rlairiil répandues en rolo<jiie;
mais une heré-ie b en autrement pro-
fonde \eiiaild'> prendre pied, eu 1ÔG3,
;i1 Oulrr rHiv'uirr dp [Vuitir . on a Ira luit
m frâiif»'* qurtq' r« oinrj;'* d' Riraniiin»- :
, uuuvrilr. traUiMic |..ir M. Je BuutUrr',
M, .m; .-g-, t:, * J» Murpka.nu U Pn
./ j.ar J B I'. .«<•• M. •T.. Il
;. Tiir Iradiulioii lit- «> tir
A liriétf , »So5, l'i-l J ,
j .!r>- Il mriup que celle «l"*" iioii*
\ .|ucr II y ra a un* aniirf par
NI ^ - I lli|>|>oi/r. Paru. i»»». in iJ.
j« H ,„un, uu ,\'ord, iiiiilra tlu ru»«e ri du <lj-
noi% d. kjr.>in<iiir rt dr Shutn. j.ar M. dr C<.if-
Grr-lkinorcl , Tar » , !>..«, J »ol. iii-i». le
traduit.ur Ir» avait d'alj»r«l inséré» d.ms la
Kou«rlle ■•blîoihéqa* art roio»n» ; de- trou
vulu.iir- un ri,' r i coii»jcrr à I etri»:.in russe,
rt ...1,1. i.r >c ,'. -•. ou la tiitt du tt'lnrl : la
i'Mu.r, h„. r J J.r. — M. Bowni.Kafaii cod-
u^iti -ui Viii;iJi> . da"» 'e re< ucil inlilulé
Huniat a-.t'ij: .- • 'i8iï , quelquM-unef dfS
production» po«uque»de Karauixine. L.
4 12
iïÂR
et faisait tl«\^ proo;rès inattemlus; c'é-
tait celle des anti-trinitaires qui re-
nouvelait en partie rarianisme. Au
milieu de cette anarchie dos esprits
à laquelie les prédications de Luther
avaient donné l'essor, Karnkowski, bien
(jiie catholique zélé et opposé aux opi-
nions au moins suspectes du primat
ITchanski , crut qu'il ne dépendait
plus du ;î;ouvernement séculier de ré-
piimer des écarts do^^ujatiques , en
d'autres Ici mes, que le pouvoir devait
tolérer ce que la théologie réprouverait
et blâmerait de toutes ses forces. Un
fort paiti lut du mànc avis , mais l'é-
pisco{)at polonais ne l'approuva pas, et
Uclianski était en mi'uie temps odieux
et déconsidéré. Karnkowski ne crai-
j;nit point de se rapprocher du prélat qui
gouvernait daiis l'interrègne; il eut la
gloire et le désagrément d'être presque
seul, parmi ses pairs, à poser des maxi-
mes peu goûtées de son temps et que
les siècles suivants ont fini par réali-
ser, avec i\n peu d'exagération peut-
être et d'une façon trop exclusive ,
mais avec raison dans bien des cas.
C'est lui qui, préliminairement à La ca-
pitulation de 1573, antérieure cUe-
jnêmc à la nomination de lîenri de
Valois à la couronne polonaise, dressa
le fameux formulaire dit Paix des dis-
sidcnls. Cet acte qui garantissait pro-
tection égale à toutes les opinions reli-
gieuses dissidentes [dissidents éiail
alors synonynje de divergents, héréti-
ques et catholiques étaient les uns et
les autres dissidents), ct\ acte, disons-
nous, fut signé par tous les sénateurs
et par boat;coup de nonces , c'est-à-
dire par tout le parti du grand maré-
chal Firley ; mais, des dignitaires de
l'église polonaise , un seul voulut y
souscrire, ce fut l'évêque de Cracovie
Krasinski. En même temps se débat-
tait une question politique : qui serait
élu roi de la répubbquc de i'ologne .'
llchanskl, bien que favorable aux dis-
KAR
sidenfs, s'était posé TantagoTiiste du
grand-maréchal ; et ce que le grand-ma-
réchal résolvait le primat par cela
même le désapprouvait, l'éloignait de
toutes ses forces. Il voulait que le
choix tombât sur un prince de la mai-
son d'Autriche : Firley, uni à Karn-
kowski , eut soin de faire insérer dans
les Pacta commenta que le roi qu'on
allait élire serait tenu de jurer l'acle
des dissidenls. Nul prince autrichien
n'y cul consenti, au lieu que Monthic,
l'ambassadeur français alors à Varso-
vie, promit, au nom de son gouverne-
ment , que cette paix des dissidents
non s(îulement vaudrait en Pologne,
mais exercerait son inlluence en Fran-
ce, et que la cour du Louvre, qui ve-
nait de f;iire la Saint-Barlhéîemi , to-
lérerait les h;!g;jenots. Aurait-on fait
honneur à la parole de Montluc ? N'im-
porte , Henri vint pendant quelques
mois jouer à la royauté en Pologne, où
il plut un moment , où bientôt il fut
méprisé. Karnkowski le complimenta
lors du couronnement par un panégy-
rique dans le goût de celui de Pline-
le-Jeiine à Trajan, et où pourtant nous
remarquerons que sous la forme de
l'éloge il se glissait des demandes et des
avis. Mais Henri avait fort peu des
goûls de Trajan : il ne tint compte
des avis et peut-être ne les comprit pas
bien, quoiqu'il répondit en beau latin
au latin des Polonais. La prompte fin
du règne de Henri donna bientôt oc-
casion à Karnkowski de prendre part
à de nouvelles intrigues. Conl: ;.'i\:;nent
à ce qu'on tût pu attendre, on le vit
se rapprocher d'abord du primat et
des évêques qui , dans les dissensions
de celte époque, tenaient pour l'Autri-
che, c'esl-à-dire pour le fils ou le frère
de l'empereur Maximilien 11, ou pour
Maximilien H lui-même, tandis que
les nobles en général portaient Etien-
ne Jjattorl ; et dans la diète du 12 dé-
cembre 1575, lors de l'élection schis-
iiuiii^uc, il \t*ijcti fa^cdi clfce ilriiiitr.
NI -, ■ -'l'icllcinfiil , il (Mtia l'oifillc
.r.\ |>iot(>Ulions des adiu'-
i cii.Mir lijlltni.ouplutâl ilcoin^tiil que
iijttoii. (Icjà prnrli.^nl \ei5 !c luliiéu-
liiMPC rt rintroiiiit* lie •;rand>, les uns
lics-opposrN, les autres un peu iiuliiïë-
iciits aux iilres ratlioliques, puunait, si
rr|iisro|)al cniilinuait ^J rrsl^tallce, se
«ieleroiiaci cunlre Ir^ oilliuiio&rs. Il
uu\ril ra\i.s il'eii\n}er SuiiLov^ ilriiian-
der .Tti 'lraiis>|\aiii queU seiiliniriiti
ierii;ieux il professerait, ou plutôt lui
(lire à quelles conditions une forte
fiartion de rrpiscopjl se drclaierait
pour lui : il ne t^rda pas à rere\uir so-
Iniiiellcmctit le ^e^mtllt de r<all()!i, de
lie point abardonner la foi lomninc, et
« ouronna cr pnocc ri Aune Jaj;rllon,
ni, le Irndeinain, dc\ait doniirr ^a
ruiin au nouM-au inonanjuc. ^lai^iele
f redit que di? .«-emMabliN sci\.i.> «îo-
>.iirnt doiiiuT à KarnLo\%>Li , ou p<*ut-
rliL* parce qtiM a\att rendu de scmbla-
Mes !»er%ires, l'année sui%anie , il
liii^ua inulilemnil re\èclié de Craco-
\ie (lôTT . (^)uoique appuvé de la
protection du monarque, il vit 5e ^lis-
>tr un ri\al à la coadjutorrrie de
(■tienne, quM ambitionnait et où il eût
foiméun rontie-poids à la puissance de
rarflKxcque-piiniat l'clianski. il n'en
dc\int pas moins, à la mort i\n prélat,
(»n successeur surTcxprcNse recoinman
d.i(ion de Hatlori. drc^oire \I11 lui
«Mivo\a SCS bulle>. Placi* ainsi à la Jcle
du clci};é polonais (1Ô81), Karn-
LowsLi se trouva dans une fausse posi-
tion, suspendu entre ses précédents cl
la nécessité de marcher d'accord avec
scn évèques, entre ses opinions tolé-
rantes et un secret pressentiment de
tout le mal que causeraient à la Pologne
les dissidents. Aussi le vit-on étaler un
grand zèle poiir réformer son diorr<c,
d'après les décrets du concile de Treil-
le, convoquer un synode, aller de pa-
roisse en paroii^^e prcclicr lui-mcmc, et
km; 4i3
lépandre painii ses subordonnés les li-
vres utiles à rinsiritction des iideles ; et
aussi à la moi t de Itailori ^lôSU), fut-il
avec le palatin Kticniie et le slaroste
Nicolas laslo» ier Li , à la tète du pai ti
des Zboro\v.>ki qui favorisait l'Autri-
che. Kn sa qualité de primat, il était
alors char;;é de la présidence du
royaume. C'ri inlrrrè^ne fut «le plus de
SIX mois, pendant lesqurls la farliuii
autrichienne résista vigoureu>einent ,
mais perdit toujours du terrain. A la
diele de convocation (*i février l.'»H7 ',
les nobles laïque» ayant voulu obstiné-
roen: que la paix des dissidents fil par-
tie de» nouveaux Porta lumcnta, le*
évrques en corps, à l'exception de celui
de kaminiec, se retirèrent; àcelie d'élec-
tion ^iU))uin), les deux partis soils forme
d'armées restèrent six semaine, en pré-
sence l'un de l'autre, n'aitend.int que
le signal de la mêlée. Li diploinalic
électoi aie pendant ce lemp> allait son
train , et de chaque cô:o on cher-
chait à gagner des transfu;;es. I.es en-
nemis de l'Autriche furent les plus
heureux à ce jeu constitutionnel : ils
attirèrent à eux le primat qui, le IH
août, proclama Sigismond 111, et .i la
suite du primat beaucoup de prélats et
presque tous les nobles leurs adiiérents.
Il n'en fut pas beaucoup mieux vu des
corvphées du paili suédoi<<. Jean Zj-
moiMi, grand chanci-liei du rovaiime
de Pologne et clicf de cette faction,
■;ranil homme d'elat au reste et grand
général, voulait dominer sans rival, et
la faveur dont l'entourait la chevale-
resque noblesse laïque lui facilitait re
lôle. Puis l'incursion des Tatars de
Crimée, la prompte victoire de Z.i-
moïski à I^iv^orow sur ces brigands,
porta aucomble sa puissance et sa gloire
qu'il consolida en même temps que il
tranquillité de la Pologne, par laconsti-
tulion de ITiHOà l'égard des (Cosaques.
Kanikowsli alors se fille cliainpion de
ces pauvres G)saqucs opprimés dans
4'4
KAR
eiirs libertés politiques , «lans leurs
opi riions religieuses : il convoqua , e;i
1.300, une assemblée à Kiev [tour dé-
rlarer abolie, ou nulle, la coîistitiition
récemment élaborée ; et ces manifesta-
tions, légales peut-être dans un rovau-
me tel que la Pologne, mais qui ailleurs
eussent été séditieuses , allaient sans
doute dégénérer en rokoss quaj)d les
Zàmoïskl transigèrent. Karnko\Nski
parut à la diète de Varsovie, et tra-
vailla sincèrement à produire une paci-
fication qui eut mis tin à tous ces dé-
sordres et réduit les Cosaques à l'obéis-
sance. La paix religieuse devait en être
l'élément nécessaire. Pour arriver à ce
but, il fallait, suivant les amis de Karn-
kov,ski , unir les chrétiens grecs aux
catlioliques, en d'autres termes fondre
les deux grandes églises d'Orient et
d'Occident. Dans sa bonhomie, car
nous n'oserions dire dans son inexpé-
rience, il croyait cette fusion possible,
et, en décembre 1594, il tint à cet
effet un synode à Brzesc. On y signa
l'union des deux églises d'après les
pnncjpes posés au concile de Florence.
Du reste plusieurs clauses s'y remar-
quaient, qui rendaient les évèques in-
dépendants de la puissance séculière
et ordonnaient la restitution des biens
aux églises. De \ï mille difticultés :
d'une part Constantin Ostrowski, un
des provocateurs de l'union, n'en vou-
lut plus dès qu'il vit quel pouvoir se
réservaient les prélats; de l'autre plu-
sieurs évêques rétractèrent leur adhé-
sion et se plaignirent qu'on la leur eut
arrachée par force. Ces actes furent à
peu près les derniers grands évène-
mens politiques auxquels piit part
karnkowski. Il ne vit ni la guerre de
Kussie de 1 OOÎ), ni le rokoss de IGOT).
Il était mort le 18 juin ( 20 mai )
1()()3, à son château de Kowiez. La
fin de ses jours avait été signalée pai"
la protection qu'il accorda aux jésuites,
bien d'accord avec lui sur la (usion des
KAR
églises latine et grecque. 11 leur bàlit up
collège à Kalisz (c'est là qu'il fut in-
humé). Il éleva deux séminaires, l'un
à \Vladislaw, l'autre à Gnesne. Indé-
pendamment de son rôle comme
homme politique , Karnkowski a une
haute importance comme historien.
Voici la liste de ses principaux ou-
VI âges : L Jlis/oria interregni post
discessum e Polonia Henrici Ande-
gaoensis (qu'on peut regarder comme
fondamental sur ce sujet). H. De
modo et ordine electiojùs nooi régis
(wud Vnrsooiam hahïtœ cinno 1 573,
Cologne, 1589, infol. (frontispice et
complément de l'ouvrage précédent
qu'il aide à comprendre, comme la
théorie aide à comprendre les laits).
Il I . Epistolœ Jamiliares illustriuni
■virorum, Cracovie, 1578, in-4". Ces
lettres forment trois livres. Toutes, on
le devine, émanent de grands seigneurs
ses contemporains , toutes sont d'un
intérêt inappréciable pour l'histoire de
1565 à 1577. Malheureusement les
exemplaires en sont très-rares. IV.
1 ^ Constitiii'wnes synodorum ecclesiœ
Gnesnensis, Cracovie. 1579 , in-4° ;
2" Constitntiones synodales di'œ-
cesuTiœ cum cutechesi , Prague ,
1590, in-4*'. V. Sermones ad paro-
chos et divers panégyriques parmi
lesquels on remarque celui de Henri
m, en latin (Cologne. 1589), traduit
en français sous le titre de Harangue
puh ii(jue de bien - venue au roy
Henry de Valois, roy esleu des Po-
lonnes , prononcée par Stanislas
Czarnkoivski, Paris, 1574, in-8", et
une lettre aussi sur l'élection de
Henri III dans le i)e origine et ges-
tis Polunoruni chroniron de Mari.
(jrotnnr [QvtW^nf^., 1589). P — ot.
KARPIXSKI (François), né
vers 1760 , dans le palatinat de
lîrzesc-Litewski, est connu en Polo-
gne par ses poésies, surtout par ses
pastorales , qui sont devenues des
KAR
fhanfs popa)airf«. On a de loi : Jiulilh,
tra{;cJie; le (Irns, coniéilie ; iirr^fr,
opiTi; unelratljrlinn, moitié en pn)«.e.
moitié en • fur insdc
Delitlr ; il ' '-^ l'saumcs
(fr Diicitl, une pàflte ile« (Kucres
îlr Pluttirtjur, et il éfriv't sur l'état
«le la l*ol(«^ne, et snr la manière de
raniéliorer. Arcueilli à Piilawv, cliex
Ie5 (aartor\$Li, il faisait le charme
de<i réunions que le prinre Adam v atti-
rait. Stanislas* Au;;u$te lui offrit rfe^pla
r« honorable» et le prince San;;ii4iko
le pria de «e charj;;er de l'étlucalidn de
se* enfant*. Il refusa ces avanta;;e^ ,
pour aller >ivre paisiblement dans
<wi maison de campagne de Karj»incr\n
que le foi lui a>ait donnée. I.i, il j»ar-
la;;eait ses moments entre l'étude, l'a-
priciilture et l'éJucaiion des pauvres
enfants de la cami)a;;ne II publia en
181*1, a Wilna, wn ouvrage intitule' :
Aux enfants pour Irur umusrment
Atant sa mnit il lé|;ua à son ami
Charles Pr>zor un manuscrit qoi con-
tient l'histoire des hommes a\ec les-
quels il avait eu des rapports. Il mou-
rut dapN Ir palatinat de Kublin , le 1 1
septembre \X'1\\. Ses (Ku\.'rrs ont
paru en quatre volumes in-8", i ^ ar-
sovie. 1808 ; à Breslau, 182G; à Var-
sovie. 18-2S r.— Y.
KARSTK\(Wf!<cf.<;iasJkan
Gi'stavf), dit vulgairement Karstem
/r mathrmntirien ou K\rstfn Ir
prre,é\i\l né le .'> décembre 17J2, au
Noilveau-Rrandebourg dans le duché de
.Mecklerabour{;-Slrelili. Ses parents le
destinaient au ministère ecclésiastique.
Ses études terminées (17.')0,, il alla
passer deux ans à l'université mecUem-
i)Our|;eoisc de l\ostocL, qu'en 17.'>2 il
quitta pour celle d'Iéna. Dans l'une
et l'autre, il suivit de front les cours de
théologie et de mathématiques. Mais
peu à peu il donna la préférence à
celles ci dans la pratique, bien qu'il
n'abandonnât pas tout-à-fait ses vues
KAR 4i5
piiniitives. f.tabli à Rostock par 1rs
ronseils d'un ami, et décoré du ;;ra(le
de maître (pii revient à celui dp licen-
cié (1755^, il se mit à donner des le-
çons de m:»fhér)iliqiies , iJe lo;;i(iue ,
de raé* < de morale, de droit
naturel i après, il remplisvait
les fonctions de ptofrvNeur de lo"iqtie
à l'université. Kn 17r»0, le gouverne-
ment de MetLIerabourjj - Schwérin
vo'dut aussi avoir son école supérieure
et fonda l'universllé de Rillzow.
Karsien v fut nommé ï une des chai-
res dès la création. Il n'y resta que
jusqu'en 177.1, époque à laquelle il
passa au\ fonctions de professeur de
m.iilirinatiques et de pinsiqueà Halle.
(",«llr> ci étaient bien pfus dans la na-
ture de son talent. Cependant il avait
{;ardé de bonnes relations avec sa pa-
trie : le gouvernement de Schwérin
l'avail chargé, en 1770, de surveiller
la constmction des pompes à feu , qui
devaient être distribuées aux petites
villes du duché. î^es services qu'il ren-
dit à celte occasion lui firent donner
par le duc le titre de conseiller d'état.
Il V joIf;nit ensuite celui de conseiller
aufique de l'rusNe Sa mort eut lieu le
17 avril 1787. On a de lui plusieurs
ouvrages qui indiquent la vaste éru-
dition , la patience plus que le ;;éiiie
créateur. Cependant ses contempo-
rains le rej^ardairnl comme une des
tètes mathématiques les plus fortes
de l'Allemagne. Les principaux sont ;
I . fdre iFun tours complet de ma-
thrnuitiijut'S , 2* édit. , Greifswal-
de, 177S, 2 vol. in-8'*; réimpri-
mée plus tard avec une i" partie tirée
des papiers de Karstcn par son fils ,
Oeifswalde, 1791, in-S*» , et aug-
mentée encore depuis par divers sa-
vants Mollweide, par exemple, l'enri-
rhis-ait en 18l8 d'une ')" partie).
II. Des Dissertiillons de physique
e^dr chimie, Halle, 1787, 2 livres
in-8<». P— OT.
4i6
KAR
KARSTEX (Fkançofs-Curk-
TitN-L.M'nKNT), agronome nicrklcm-
hoiii-ficols , élait le frère cadet du
précédent et naquit à IViilzow le 3
avril 1751. Sou éducation fut fort
néf;l)gée. Tout jeune, il avait perdu
sa mère, ses sœurs. Son père, petit
propriétaire et fermier , ne pouvait
veiller sur lui ; on sait les plaies pro-
fondes faites à ces contrées par la
■;uerre de sept nus. Karsten , à dix
ans, savait tout juste rabéccdairc elle
catéchisme. Le collè;2;e du chapitre à
(Vustrow où on le plaça avait de bons
maîtres, mais était fort mal tenu : les
élevés s'y rendaient ou ne s'y ren-
daient pas, suivant leur bon plaisir.
Lors donc que Karsten reparut à
(|uinze ans dans la maison paiernelle,
il ne savait qu'un peu de grammaire
et de latin. Son père le mit à sa comp-
tabilité ; mais comme celle occupation
ne lui prenait que peu de temps et qu'il
donnait onze heures sur douze à la
chasse, à la pêche et à l'aviceptologie ,
on l'envoya comme commis à Riga
dans une maison de draperies et de
soieries. Karsten ne tarda pas à y
trouver ou à s'y créer des tribulations
amères qui firent pour lui de Rij^a
une véritable Sibérie; et il en revint
chétif, malade, mais un peu plus rai-
sonnable. Placé chez un noble de
campat;ne qui faisait valoir ses terres,
il s'appliqua sérieusement à l'exploita-
tion rurale, puis se concilia 'es bonnes
<;ràces de son maître par la facilité
avec laquelle il tournait les lettres
d'affaires, devint ainsi le factotum, le
secrétaire de la maison, et eut la per-
mission d'aller secouer la poussière de
la bibliothèque du château. Les classi-
ques latins ou ^recs qu'il y trouva ne
lui firent qu'un médiocre plaisir, njais
les livres d'histoire naturelle piquèrent
sa curiosité : il sentit que l'exidoila-
lion rurale pouvait et devait être ^u-
tre chose qu'une pratique routinière;
KAU
il devina qu'aux travaux réels devait
présider une science, cl toutes ses viies
se portèrent instinctivement de ce
côté. Reconnaissant tout ce qui lui
manquait, il résolut de réparer le temps
perdu, et il alla suivre à l'académie de
Riitzovv un cours de malhématiipics ,
de sciences naturelles, de géographie.
Il entra ensuite, à l'exemple de son
frère, dans le professorat à l'école des
orphelins de Biitzow, suppléant à la
modicité de ses appointements par la
composition ou la traduction de quel-
ques ouvi âges; el , au bout de quel-
ques années , il fut promu au doc-
torat , et chargé des fonctioris de
professeur de philosophie à la facjdté,
fonctions qu'en 1783 il troqua con-
tre le titulariat de la chaire d'écono-
mie rurale. Du moins il était dans
sa spécialité; il s'y voua décidément et
se fit un commencement de réputation
qu'accrut beaucoup sa translation à l'é-
cole des hautes études Je Rostock,
lorsque l'académie de Biitzow fut sup-
primée en 178y. Rostock, plus animé,
plus varié, plus commerçant, était un
centre plus agréable pour l'écrivain et
le penseur. Ce qu'il y voyait le por-
tait naturellement à réfléchir sur les
rapports de la navigation, du com-
merce, de l'industrie, avec la base de
toute richesse transformable ou trans-
portable , l'agriculture ; et ses idées
sur le.-: moyens de mettre en valeur, soit
la propriétéparticulière,soit rensemble
des terres que possède une même nation
et d'arriver au plus haut revenu possi-
sible, KS^nèrcnt en étendue comme en
profondeur. Acquéreur de vastes ter-
rains marécageux et en friche, situés
aux environs de Rostock sur les bords
de la Warnow, il en opéra le dessè-
chement cl les métamorphosa en riantes
prairies, couvertes de bestiaux, mettant
ainsi en pratique les théories de la
science et démontrant par son exem-
ple ce qu'il recommandait par ses le-
KAR
r. Eu 179K, aidé de quelque:» unes
Dotabililes Ju pa\s, eiilre autres
du comte de Sclilix, qui plus tard créa
le magnifique villa^^edcScliliz si counu
par ses environs delicieui, il fonda la
Socirteit Agrutioniir Je liosfoik, la-
quelle rendit des ^rl^ices éininents k
I a|;riculture du MecUrinbour^ et par
rufitre-cuup à rrlle des relions voisines:
il en fut i'ame tant qu'rlle dura, ainsi
que de celle qui , eu 1^^17, lui succéda
sous la denoininatiou d'( niHn fHi-
triotiijur, et qui n'en rtail qu'un dr-
xeloppemenl. Il eu était secrétaire, et
le secrétariat sous sa direction fut com-
me un centre où con\er>;eaient de tous
les points de l'hurope, par sa corres-
pondance, les recueils périodiques ou
les envois d*ouvra;;e> savants , toutes
les llienries , toutes 1rs applications
de la science a>;ronomique. Ce cen-
tre, il eit vrai, n'rlait pas le seul,
et le MecUeinbour^ n'avait point eu
l'initiative du mouvement scientifique
qui s'était drveloppé si lar;;enient
dans Texploitaiion de la propriété ter-
lienne. Mais c'était beaucoup pour
lin si petit état d'avoir été des pre-
miers à parta<;er « des plus actifs à
propager ce mouvement. I^epavsavait
trouvé à cette coopération proGt et
ploire : profit en doublant 1rs produits,
en exportant bien plus , en ^a^nant
par les retours infiniment d'aisance in-
térieure; {gloire en df venant en quel-
que sorte pavs-m»dele pour la dessicca-
tion et le déboisement, la formation
des prairies arliBcielles , l'élève des
bestiaux. Karsten eut une part essen-
tielle à CCS améliorations, fut de ceux
(]ui (ioiiiicrent (impulsion; et, quand
elle fut dans toute sa force, il continua
de l'activer cl de la ré{;ir. Son à^e ,
pourtant, lui donnait droit de se re-
poser ; mais, d'une part , sa prédilec-
tion pour la science, objet de toute sa
vie, de l'autre, la nèccs>ité de pourvoir
aux besoins d'uue trop nombreuse fâ-
KAK 417
mille le retenaient dans cette voie d'é-
tudes persévéïantes et de labeur. 11
n'avait pxs moins de dix enfants qui
lui survécurent, et il en avait eu jusqu'à
tretu: on comprend que ni les quel-
ques centaines de tlorinsque lui valait
S3L chaire, ni les menus profits du se-
crétariat, ni le revenu de se> bruvere>,
landes, moulins, cabarets cl marais
passés à l'état de pi aines, iiun sant
absorber beaumup de fonds pour roni-
mencer.ne suffisaient pas à leiidre opu-
lent le chef de cette tribu des karsten;
mais tous enfin reçurent une éducation
complète, solide, et entreient dans
des carrières libérales, où plusieurs
à leur tour se distinguèrent. Pour
leur père , sa mort eut lieu le 'JK fé-
vrier 18*29. Le ^rand duc son sou-
verain l'avait nommé conseiller sé-
riel. Il appartenait à un {>rand nom-
bre de sociétés savantes d'histoire na-
turelle, d'aji^rononiie, d'éronomie poli-
tique, et , bien que cette dernière srien-
re ne tînt que par une de ses face» à
l'exploitation rurale, il n'avait tenu
qu'a lui au moins deux fuis de quitter
le MecLlembour^ pour des chaires plus
avantageuses en un sens, la première
pour aller professer â l'université de
kaun, la seconde à la mort de liecL-
roann qu'il eût remplacé à (jd-ttin-
gue. Mais il trouva (îrettiiii^ue trop
haut et Kazan trop loin, et il faut
avouer qu'a cinquante-deux ou trois
ans qu'il avait eu 1><()3, ileùt été un
peu tard pour s'expatrier. Les écrits
de Kari.ten sont nombreux. Ils le
seraient bien autrement encore si
l'on publiait la volumineuse corres-
pondance dont >a place de secré-
taire de 1'/ nion fHitriuli(jur était
l'occasion, et dans laquelle se reprodui-
sent fréquemment les noms des Tliaer,
des N o;;ht, des Schvverr, des Fclleii-
ber^, des \N estfeld, des Laviilz. Dé-
falcation faite de cette masse de docu-
ments inédite, les ouvrages de karsten
»7
4iB
KA.R
se distino;uent en»deux classes, traités
particuliers, recueils périodiques ou ar-
ticles fournis à ces recueils. Voici la
liste dei livres : l. Arithmrlique ,
1775, 2® édition, 1778, T, auj^men-
tée et remaniée (par son fils aiiié), ou-
vraj2;e éléineutalrc, où Karstcn eut le
mérite de substituer aux rèû;les sèches
jusque-là olfertes aux commençants une
exposition claire et raisonnée à la por-
tée du jeune à^e. il. Le commerce
(le r Europe (wec les Deux-bides,
1780. C'est un abré<;;é de V Histoire
pliilosoph.ique de Raynal. III. Traité
(le Véidi (u titel (le la science agro-
nomique et (le son utilité pour U éco-
nomie rurale prati<pie , Roslock ,
1783. IV. De C étude ihéuri(pie de
r économie rxir(de , ibid. , 1789.
C'est en quelque sorte le récapitule
des leçons qu'il se proposait de faire à
RostocL en prenant possession de sa
chaire (de 1789 à 1790). V. Les
académies agronomiques sont-elles
honnes à quelque chose F ibid. ,
1793. On se doute assez de la réponse
du professeur d'ao^ronomie, du fonda-
teur en per.-pective de la Société agro-
nomique de Mecklemhimrg.yi. Pre-
miers éléments de l'économie rurale
applicable à l' Allemagne, Roslock,
1793. VII. Histoire des essais de
plantations faits depuis 1797 pour
arrêter les dunes de If^arnemiinde,
1801 (insérée aussi dans les liostock.
gemeinniitzl. Aufsœze, ou Mémoires
utiles el à C homme d état et à V agri-
culteur, ann. 1801). VIII. Divers
opu>cules tels que: \" Appréciation
par la théorie et l'expérience de la
machine ahattre en grange deliess-
ler, Zcll, 1799, une fi<^. -r Des-
cription de la méthode de llundt
pour la construction des hâtiments
ruraux, , Lie;^nitz , 1811, une figure.
Karslen y donne de faraudes iouanj^es
à ces procédés éminemment économi-
ques et simples, qai réduisent la dé-
KAR
pense en bois de charpCHte et de me-
nuiserie, sans rien ôler à la commodité
ou à la solidité des constructions né-
cessaires pour une bonne exploitation
rurale. 3" Préjace et remarques
pour l'introduction à l'agronomie
expérimentale de Lanqulst , Berlin,
1800. L'auteur y montre comment il
est possible de tirer un revenu consi-
dérable des métairies en y semant du
trèfle et des fourrages analogues , et il
émet ses pensées sur l'utilité dont peut
être pour l'amélioralion de l'agricul-
ture, de l'horticulture, de l'industrie
vif!;nicoie , de l'élève d'abeilles et de
bestiaux , l'institution d'écoles spé-
ciales d'agronomie. 4° Comment
d'un domaine rural qui n'est point
propriété commune faire une ter-
re à rotation et à prairies artifi-
cielles}' 1809. 5° Solution du pro-
blème: quels sont les moyens sûrs de
se préserver du retour de l'épizootie
sur les bœufs? Rostock, 1813. 6"
Programme contenant quelques con-
sidérations sur le développement
progressif de t espèce humaine au
point de vue agronomique , ibid. ,
1800. 7° Examen des moyens re-
commandés et employés jusqu'ici
contre l'épizootie parmi les Ihku/s,
vaches et taureaux , Gœltino;ue ,
1815. 8° Des colonies de pauvres
sont-elles possibles , seront-elles uti-
les en Mecklembourg? 1823. IX.
Une traduction de rouvrao;e de iNu";ei)t,
intitulé : Voyage en Allemagne^
principalement dans le Mecklem-
bourg , 1791,2 vol. Cette traduc-
tion est accompagnée de remarques
étendues el qui en rendent la lecture
instructive. Quant à la coopération
de Karsten au mouvement de la presse
périodique, en première ligne se pré-
sentent ses Annales de la société
agronomique du Mecklembourg ,
1803-1809, 3 vol., et ses Nouvelle,^
annales de la société agronomique
\ol. (^Ilf |>uhliralinn. rcmplif de no-
lices, il'an\KNf<i cl tlf il^ifripiioTi* in-
lërei*antr<, n'a puiiil r!»- le
par ij ino't «!r I't'!!-:^, -r
i'cn orrii;
soupir. I
dans If Muniitsrhrift du Mnklrm-
f>ourg {l)fu\ de la h\ènf Inrhetrr,
juin et juill. i7*»l); liiogrnphie du
printrr tindraff.x\u\ 179i; Hlun
(Tun toit rnmmo<lr, sotidr r( à fr-
prem*r du fru pour 1rs Mtimrnts ru-
raur, 17'JG. Mi;»pl ; Prtisres sur un
pnssagr t! n dr Su^mt , ii i » v .
179.'); 7 "tmairr drs dom-
mages causes fi,ir Ir drrtiirr tour hit-
Ion aux rrh'iruns des durirs dr sa-
hl" de If^arnemilndr, 179."), 5uppl. ;
J*/an pour arrrtrr fessur du sahie
des dunes de If'arnemunde.r^pnr
suite pour consolider et utiliser ces
ilunes, mai 1796 ; Kssui d'un toit
en plaques argileuses pour se ga
rantir des ristfues du jeu, décembre
1797; Description de queipies es-
pèces de Irmnetons du Mrcklem-
Itourg, 1797, siippl., etc. Aux Ros-
tork. Aufscttze, il a donné une (m^ji-
puraisnn dr la toiture en pfarjws
if argile aux toits de ihautne et a
ceux de pierre, ISO'J, pa^. iJ-|."»,
et un .-ipftel il tous les pti triâtes, ou
Hrunissezvous pour planter les du-
nes de If'arnemiinde , 1799 ; aux
Anrutlrs de Zell, aux Feuilles li//é-
rales du soir de Scfnvêrin , aux
/ \iferhrn'l. Vnterhaltungshiœtter
de Sellier , aux DundeMalenden de
Mecklemhourg - Scluverin, beaucoup
de peîils articles; an (Calendrier tri-
mestriel de Mecklemlfourg-Scluvèrin^
près d'une douzaine d'article<^ dont les
plus importants sont : des f)ii>ers sys-
tèmes dr culture, 1803; Description
du pn}rêdc suisse pour préparer le
foin, tSlV; ri pour faire pâturer
les vache s, bœufs et taureaux, 1815;
KAR
i'9
Fautii désespérer de trom^rr en
Mrcklenifjourg des carrières de gyp-
se ' \H22
KAIIS rE\ (I)ii>iin-rn'i^-
(ircrWK', dit K.\nsii N le minèralu-
l'j KvUMiN Ir fils, avait pour
r savant mailu'nnlirien dont l'ar-
ticle prérètie. H riaqaii le 5 avril 17(18,
à IJulEow, (»ù Wenresla* avait alors la
chaire de lo;;ique. Sa vie présente peu
d'é\enenient4. Ilacheva ses études aca-
démiques a Halle, se ruua aa profes-
soral et à la science, finit par avoir en
tilrr la chaiie de ininrral();;ie et d'or\c-
tn^rajdiie V- ide .1 l'école des
mines de 1'- '>\ reçut l'an n^e
suivante le liîic Ac ioii^*iller et a-fv-
scur votant près «le l'administialictn
dei mines et rorf;ci, et rendit dans cette
double situation de* fervires positifs
à la science et au pars, m formant un
;jr.iii.l ii.imt>re de minéralogistes et de
I rs utiles, et en inventant ou
jM.j-u.ai 1 .lUl dei procédés plus expé-
ditifs, plus certains : plus tard il devint
un des conservateurs du cabinet ro^a^
de minéralo^^ie de lîrrlin. Sa mort pré-
maturée, le '20 mai IHIO, fut une perte
réelle pour la Pnis<e. Il était membre
de 1.1 soriéir de-» sciences et arts dp
Francfort-sui-l'Odrr, de celle des cu-
rieux de la nature de Berlin, et corres-
pondant de la société économique de
Leipzig. Cétail un minéralo^islc dans
la plus haute acception du mot. Au cou-
rant de tous les pro;;rèsdela science, lui-
même il la faisait avancer : il savait, il
pressentait et devinait. Ses descriptions
sont d'une exactitridii parfaite; il saisit
admirablement les caractères qui domi-
nent. Ses discussions sont lumineuses,
ses appréciations justes. Jamais surtout
il ne s*é;;are en llicorie^ vaines, et s'il
tente on d'embr.ns-er oude circonscrire
un ^enre, un ^^roupc, toujours c'est en
s'appuvatil sur des bases non-seu-
ffrment ir.tureiicN , mais qu'un couit
examen rend évidentes. Son premier
»7'
4io
KVR
ouvra^^c fut le Muséum Leskeanuw,
l.clpzli;, 17S0, 2 vol. , fi{!;. Karstcn
\ a ilcciil, I années dans un ordre sys-
iémati(jnc, les pièces du riche cabinet
d'Iiistoire naturelle laissé par Leske:
le tome 1^' contient les animaux, le
2^ les minéraux. Beaucoup de remar-
ques scientifiques , qui sortent de la
lii];nedes descriptions vulgaires, rendent
ce livre précieux. Celles qui accom-
pagnent les fossiles surtout décèlent
chez l'auteui , alors à^é de vingt-un
ans seulement, une science et une sa-
gacité rares. Le second volume du
Mui,eum Leskeanum a aussi été pu-
blié (en allemand), sous le titre de
Cabinet de Natlum-God. Lcske, mis
en ordre et décrit^ etc., Leipzio;,
1789,2 vol. ln-8". Karsten , donna
ensuite un Tableau synoptique des
fossiles minéraux simples, Berlin,
1791, In-fol. ; tableau qui, quoique
destiné uniquement à ses élèves ou au-
diteurs, fut enlevé rapidement et eut
dès 1792,àlkrlin, une deuxième édi-
tion corri^î^ée et auo;mentée. Il traduisit
divei s ouvrages du français en allemand,
par exemple le Traité du baron de la
Pevrouse sur les mines de fer et les
forf[es de fer du pays df: Faix, Halle,
1789, in-8", avec des remarques; le
Journal du dernirr voyage de l)o-
loniieu au travers de la Suisse^ Ber-
lin, 1802, ln-8"; \t Manuel de mi-
néralogie deHaiiy, Leipzig, 1804,
ln-8*'. il édita, toujours avec des re-
marques ou des additions, les Obser-
vations minéralogi(jurs et métal lut*-
gi(]urs de Kiess sur (juehjiies cantons
montagneux de I fesse, I ierl i n . 1791,
In 8*^; la quatiiètne partie de Vidée
d'un cours rompt/ 1 de matliémati-
qucs iGrelfswalde , 1791 , in-8'\ 2^*
édit.), par son père le mathématicien
Wenceslas, ainsi (jue Y Extrait des
principes élémentaires des sciences
matlif'inali.jues, parle même, (jreils-
Asaldc, 1790, 2 vol. in-S''. Mais les
KAR
plus importants travaux de Karsten
sont ceux qu'il a disséminés dans des
recueils scientifiques de l'Allemagne.
Comme tels nous signalerons d'abord
ses Descriptions ou (Mractéristi<pies
d'une nouvelle espèce de feldspath
(Journal des mines de Kœhler et Hoff-
mann , 1^*^ année , 1788 , tome H) ,
de V Ecume de mer (Observations de
la Société des Curieux de la nature ,
1793 , tom. V) , de la Lépidolithe de
liotzna en Moravie (même tome), de
la IVewclite (Magasin de la Société
des Curieux de la nature, l'^^ ann.,
1807, 2*" tri m.) ; des Sels (pn se
trouvent indubitablement et à Cétat
de sel dans la nature (Mag. helvéti-
que, etc., 1789), Ensuite viennent
ses Remarques oryctognostiques sur
Tapathite^ le prase et le wolfram.
(Obs. de la Soc. des Curieux de la nat.
deBerhn,tom. HI, 1789 et 90) ; Ifs
Remarques sur une montagne de
serpentine en Silésie, ï Essai oryc-
tognostique pour aider à traccrl his-
toire naturelle de Curane , V Essai
oryctognostique pour l'histoire natu-
relle de l'étain (même recueil, t. JV);
deux articles sur F exploitation des
mines en France dans les temps an-
ciens et modernes (Journal des mines
de Kœhler et Hoffmann, 1789, t. li,
1793, t. II); un beau Mémoire cou-
ronné sur l'ardoise argileuse , elc.
(Magasin helvétique d'histoire naturelle
de Hœpfner, lom. III, 1788); des
Observations sur la montagne ba-
saltique de la petite ville d'/lmœne-
bourg dans l'électorat de Mayence
(Journal de Kœhler et Hoffmann ,
1788); autres sur les mines d'ar-
gent de Kongsberg avec un tableau
de leur rendement en argent fin de
\(\'i:\ à 1791 (Journallle Kœ-hler,
1793). Knfin se placent des exposés
ler.hnologKjiies divers, tels (|ue salra-
duclion de la Théorie des machines
a feu de Maillard (Magasin d'orycto-
KAT
fnosirdf ljtm[>e, 3*" partie, 17811. i*
partir, 1787^ ; Je la Mrthoir ,iu
comte Dutn/umiitI de imiter le t hur-
6on à briiier [ Journal de kœhler,
1789.; Henmrques sur la tnitlur-
tiutt (le rtnti>rugr de Rome de Liste,
inliluié: df". (.orui tirres rtterirurs
des foisilei ^Maj;. d'orvcl. de l<empr,
1786, '1" I arl \ Drstriptiun de la
prefM/riitioti du rui%*re aux mines de
Freyhrr^, opjHirteuant a l'elet teur
Frédéric lii,;uste mtm. rec. , 1 786^ ,
et de% discii«.M«*ii^ Mir quelques |>oiiits
srieiilifique$, ronime: Justfu'a tfuel
point liergmann a-til raison de
plarrr le diamant ftarmi les corps
inflummoUes rnêine recueil, l'*part.
178.')]; des Principes élémentaires
de la minéralogie de Kirauin (nirme
recueil, 1787 et 1790); des Parties
constituantes de la lepidolithe selon
Klapruth Journal de Ktrîiler, 179*i).
Nous ajouterons encoie à celle liste
d'articles les trois suiNanIs : de la né-
cessité de la chimie pour Celude de
la mineraltt^ie et de l'influence t^ue
la première de ces sciences exerce
sur la sen/nde (Append. aux Ann. de
chimie d'Kiell, 1788, T part.), a\ec
(Juelijues remarques sur la liaison
les maladies internes ont Oi'ec
'es recherches cliimiques ( même
recueil et mrroe tome); de V.lge des
métaux {\\\\\. des min. et forj^es de
Moll, 180:i 1 ; de !'. tmhre et du gise-
ment actuel des plus f^ros morceaux
de c'tte suit f tance (Journal mensuel
de Berlin, ISO.'), déc. . l' — OT.
K A T A .\ C:S l C 1! (Matiii vs-
PiF.RRK), ^avanl hongrois, né le 12
août 1750, à Valpo (comte de Vé-
rœcz) en Siavonie, entra dans l'ordre
des Franciscains à liaci, reçut les or-
dres le 17 avril 1775, puis, se desti-
nant à rinstruclion, alla suivre à Itude
les cours de l'iinixersité rovale hon-
groise. I^ ic>uile Szerdaheht, profes-
seur d'eslheiique en cet établissement,
KA'i
4^ I
l
goûtahcaucoup son jeune auditeur ; et,
%MT sa ipcoinmaiidalion, Kalancsich
fui nommé profes!>eur d'humanités au
gymnase d'Kssek, d'où, en 1789, il
pa&&a au pmiiase supérieur d'Ai;ram.
H n'a\ait encore mis au jour que deux
opuscules a celle époque, mais de si-
lenrieases rludes l'avaient rendu pro-
fond en nuiiii.smatiqur et m {;éo;;ra-
phie. Il Ir prouxa hirniAl par une de-
mi-douxa<n>* irouvra;;es remplis de dé-
tails neu^ ri importants. I.a rrputation
2ur lui \alurrnl srs prrrairrs travaux le
l nommer profrsseur d'archéoloj^ie et
bibliothécaire a l'eslh en remplace-
ment du savant Sch(rn>«iesner. Nom-
mé directeur de labihliothrque de Tu-
nivrrsité, Kalancsich mil à ces fonc-
tions dn erses ce zèle consciencieux l'un
des liiils fondamrniaux dr son carac-
tèrej; d lorsque, rn 1800, la faiblrsse
de sa sanlé Ir contrai;;ntt dr drmandrr
sa rrirailr, qui lui fui accorder avec une
pension dr cinq rrnis florins, à la
rhar;;e de laisser à la haute école de
l'r:>lh tout ce qu'il avait écrit et tout
ce qu'il relirait désormais, il tint ï
honneur dr faire plus que raison -
nablrmrnt on ne dr\ait altendir dr
lui pour une si modiqur annuité. ^ in^l-
dru\ an> durant (à l'eslh d'aboi d,
1800 1809. ensuite à llude, 1809-
182'J),il ne sortit point de son appar-
tement, cl aux personnes de service,
aux viNileiiis ordinaires, il n'adressait
que quelques brèves et rares réponses
qui Miclljient rapidement fin à la con-
^ersalioll. (^Ite parcimonie de paroles
fil croire ou fil dire à quelques person-
nes que Kalancsich avait perdu l'usage
i\t> facultés mentales comme de la lan-
j;ue. Mai. quand il se trouvait avec
des savants, et qu'il était question des
objets de ses éludes, la richesse et le
feu de son lan"ai:e démontraient assez
rpmbien son indifférence en matière de
frivolités éiail loin d'être l'impuissance
d'un esprit usé. Ce n'est qu'à la fin de
4^1
KAT
sa vie, et quand il fut plus que septua-
génaire, qu'il se permit de sortir parfois
de sa chambre pour se ranimer en respi-
rant le o;rand air. Il mourut à Bude, le
2i mai 1825. Ratancsicli était alors le
Nestor de la littérature honp^roise et
son nom était l'objet d'une vénération
universelle. Ses manuscrits furent dé-
posés, suivant la promesse qu'il en avait
faite, à la bibliothèque de Pesth d'où
malheureusement il ne semble pas qu'ils
doivent être exhuuiés. On ne peut
douter pourtant qu'ils ne contiennent
une (ouïe de renseio;nements précieux.
En effet, la plupart roulent exclusive-
ment sur la géographie ancienne ; et,
comme l'auteur ne se mit à les rédi-
ger qu'à l'âge de plus de cinquante
ans, c'est-à-dire après toute une vie
passée à cette étude , comme d'un
autre côté il embrassait des époques
et des régions diverses , ce qui , en
lui donnant l'habitude de la géogra-
phie comparée , fournit un terrain
solide et vaste aux recherches spé-
ciales qui gagnent dès-lors en certi-
tude et en profondeur; comme enfin il
)• traite beaucoup de points relatifs aux
pays qu'il habite, aux races dont il fait
partie, points qui la plupartsonl encore
environnés d'une obscurité profonde,
les fruits du labeur opiniâtre d'un
quart de siècle ne peuvent guère mériter
le dédain et l'oubli. 11 serait à souhai-
ter du moins que quelques-uns des nom-
breux critiques dont l'Allemagne abon-
de eussent connaissance des legs iné-
dits de Katancsich, et en donnant de
nouvelles éditions des auteurs qu'il
commenta y joignissent l'analyse des
opinions émises par lui sur chaque
détail de quelque gravité: on ex-
trairait ainsi la substance de ses ma-
nuscrits sans qu'il fallût les publier en-
tièrement. Voici la liste méthodique
de ses ouvrages, dont plusieurs sont
très-volumineux: I. Mosis geogra-
pliia commentario illustrala. II.
KAT
Homeri geographia commentario
illusirata. 111. Ileruâuti geographia
commentario illusl rata. IV. Straho-
nis geographia commentario i/hisira-
ta.\ . Plinii geographia velutpromp-
iuarium anti(piœ geographiœ singu-
lari studio eUthorata. Cet intitulé seul
explique à quel point un tel travail doit
être intéressant : les quatre livres consa-
crés par l'encyclopédiste romain à la
géographie sont peut-être, de tous les
traités géographiques que l'antiquité
nous a transmis, le plus riche en noms
propres ; et , quoiqu'il n'y manque ni
fautes, ni doubles emplois, ni lacu-
nes, il n'en est pas qui prête mieux à la
science du commentateur. D'ailleurs il
s'y trouve des parties traitées de main
de maître et sur des documents offi-
ciels ; enfin par le temps il se trouve placé
entre les dernières modifications de la
géographie ancienne et la géographie pri-
mordiale, mais beaucoup plus près de
celle-là que de celle-ci, autant de rai-
sons pour donner matière à -de riches
développements, à des rapprochements
féconds. VI. Geographia Ptolemœi
ad grœcum exemplar commentario
iUustrata. VU. Istri adcolarum il-
lyrici nom i ni s geographia vêtus. Le
sujet est un des plus épineux qui puis-
sent être abordés, et un de ceux qui ne
peuvent être traités avec succès qu'aux
enviions ou au sein même de l'illyrie.
VIII. Adversaria philologica varia
itinerum prr Jlungariam , Slavo^
niam, Croatiam susceptorum. IX.
Memoria Belgradi olim Singiduni.
X . Memoria l^alpo arcis oppidiy dy-
nastiœ,scriptoris. XI. Tabulœ geo-
graphicce , chorographicœ propria
manu depictœuna cum tabula TheO'
dosii s eu Peutingeri. XII. Prolusio in
litteratiirani œvi medii ; de Denario
hanali, Cyrilli char act ère insigni ;
de tilteratura (Cyrilli ; de litteratura
(AagoUtica ; de casula Dioi Stepha-
ni liungariœ régis; de cruce aurea
KAl
Giseta rtgimr , nunnnis , tigillis , aliis •
ifue ' tulis. Mil.
t.t) r I ad Irgis
ftlululu^iir i:u^,i.iii /usurnsi e.nii-
tufu. \{\ . ])e /w»» w' ///) Hi II lihriUiS.
\V. luf iru.! u (le la
Grugrup/n'r ar , j. vuri-
ius gnrn's ri vunctute trt tiunis ' .
X\ 1. l lie tiadurtiiiii en bmiiiaque
(le la Hihle sur l'rjilion Je la \ ul-
fiale ( adhih. gratis et heiirttuis
Juniib.), (JiMiit à tes ou%ia^r^ iinpi i>
mes, (ijusieurs ont trait au&»i a la ^to-
grapliie, mai& trois se rerrrrnt à la nu-
nii>maiu|ue ou aui anliijuiie^, et, cl)u>e
qui pouna surpiriiilre, un quatrième >e
compose de por^irs tant latines que
sla\onnes. C'r^t relui qui a pour litre:
t ruitus auti4mruiUs in jugis J\ir-
nassi fHumunii Irtti, A^ram , ITIM,
in-H '. Knsuile viennent : 1. lenlu-
mrn puUiium dr numisnititua
utrius(fur srmestrit, IVtli , I7*J7,
in-8". ll.7o5. Ekkel Elcmeutu nu-
misinutint grnnuniio srrmcnr in
latinum pro ustt uuditoruin ittins-
LUa, lluile, l7Uy, in-8 . 111. liis-
srrtatio de rttiunirm niilliuriu ad
t.ssfkum rrftrrtu , lUsr L , 1 7 H 1 , i n -
\"; !*• édil.. Apam, 179V. in-V .
1V\ Orlis antitfuus e.x iaiuLi iti-
nrruria J'hriMiosii inifKrtiliins sru
Peutingeri ad sy.sitnta grugra/fJtiœ
redaitus et cotnnirntariu illustra-
tits^ liude, lS2i-*2'>, 2 \ol., ouvrage
clasMque pour Irtuile «le la ^eo°iapliie
ancienne, et à Toccasion d(i(|ui'l plus
tard il composa les cartes dont nous
avons trou\é la mention dans $e5 ma-
nuscrits. N . Dr Istru ejusijue adrolis
tommentutiu, liude, 17HK, in-V".
Katanrsirh Neul v démontrer que les
indigènes de TllUrie appartenaient ï
la famille tlirace et il suit le développe-
ment deselran;;ersqui postérieurement
Tinrent se Gxer en IIKrîe, depuis leur
établiNsement )us(prà nos jours avec
des détails sur la langue et la littéra>
RAT
4i3
ture de ces nouveau-venus. VJ. ïilri
Il ' ' illyriti nuiiiinis get^gra-
f. iphua^ i.udr. ISJÔ, m
\ , qu li \.\\: laiit pas ronfiuidio avec le
n" VII «le- nviiiMMr'is. VU. Spécimen
f ' Itnr l\iununio-
/, ^ , ..-V V|||./,i
veterem Lroaiaruin fhitnutn inda-
gaiiu philtdu^ita^ A^fani, 17 '.M) , m-
8**. On lui doit ausM un ou\ra^e en
langue »lavonne lotilulc : Poskunitsa
l'ana i ihalic, l'Use k, 17H8, in-8*'.
V—iYl.
KATIIH (le capitaine) , roatlie-
malicien an;ilais, était né à lUi^lid. le
Iti a\rii 1777. On lui doit un liv-
^lomelrc très-sensible dont il a donne
la descr:plioii dans Ir* Asiotic re-
seanhes. Se» expénencfv pimr dé-
terminer la lon;;ueur du pendule à
secondes, m^ operati<»ns tnj;nnoi«e-
Iriques, etc., S4)nt Itien conllue^. Il
réunissait au plu» haut de'^re la pa-
tience qu'e\i;ie la mécanique prati-
que, la finesse d'observation, à une
force de raisoBBcment peu ordinaire.
1^ plupart dctaoïiènies de TAuj^le-
teire et du continent le comptaient
parmi leurs membres, et l'empereur de
UuNsie le décora de l'ordie de Sainte-
Anne, dans le ^o>a^e qu'il fit à Lon-
dres en IKI V. 1j |.lupart des tra\aux
dekaleront rlepiiltlie>dan^ les Tram-
arliuns philiisupJiiijues de la soriété
ro>ale de Londres. Il mourut dans
celle ville le 'iC. a%ril IS'iô. Z.
K.V'IO.XA (Ktifnnk), irès-l»on
historien lion^rois . était de Papa,
dans le comilat de Veszprim. Ne en
173J, de parents catholiques, il fut
élevé au collè;;e de sa ville natale par
les jésuites, et jeune encore il entra
dans leur ordre dont bienlùt il devait
voir la siip|»ression : mais la dissolution
de la société ne Tempèclia d'obtenir ni
la diaire d'éloquence sacrée ni celle
d'histoire a 'r> mail, ni d'être ch.inoinc
de Colocza et'abbé de Badrog Monos-
4M
K\T
sor. Il inoiinit en 1811. Ses ouvra^Cr-,
à l'exception de quelques discours de
cérémonie, sont tous en latin. Ce sont
I. Synopsis chronologica Instoria-
riini ad suhleoandam memoriam
historicophi/arum, Tyrnau , 1757,
1773, 2 vol. in-8°. II. Jlisforia
critica primorum llungariœ (hicum
exfide d OUI estîr arum et exteronim
ronrinnnta, Pcslli, 1778. lil. His-
toria critica rrgum Hiingariœ sfir-
pis Àrpadianœ , Pcsth , 1779-80,
3 vol. I\ . lïistoria critica rcgiim
stirpis /jusfriacœ, 2'2 petits volumes,
le r' et le ^"^ à Kolosvar, 1790-97,
les 20 suivants à Kude, 1792-1801.
Ainsi que Pray, Kaloua dans ces ou-
vrables s'est trop laissé dominer par le
plaisir de prouver que les Madjiars
descendent des Huns d'Attila. Ce n'est
pas que l'opinion soit complètement
fausse à notre avis, mais elle a besoin
d'être précisét» et restreinte. Il fallait
d'ahord bien dire ou bien comprendre
que le fond de la nation des Huns n'a-
vait rien à démêler avec l'Asie, comme
trop long-lemps on Ta répété, et que
les II ins ne sont autre cliose que les
Finnois orientaux. Ceci posé, bien des
objections faites outre la parenté des
noms Jfiin et Hongrois, à cause de
l'aspect iinnois de la langue madjiare,
s'évaporaient d'elles-mêmes, ou plutôt
se convertissaient en ai-^uments favora-
bles à l'opinion de Kalona. Il fallait
ensuite ne pas tant s'appesantir sur
Attila même, et discuter plus fondamen-
talement les caractères par lesquels se
différencient les unes des autres les di-
verses peuplades bu n niques <*t fin ;ii(jues,
et biei; saisn , bien suivre de siècle en siè-
cle l'individualilé de la lioidc madjiare
parmi les autres. V. Kpitotne chrono-
logica rerum hungaricarum , trans -
syhanicanim et illyricaruni, Hude,
179G-97, .3 vol. in-8°. VI. IHs-
toria metropolitanœ colociensis ec-
clesiœ, Kolocza, 1800, 2 vol. in-8''.
KAT
VII. Une édition de la Ilungaria
cum suis regihus de Tburotz, augmen-
tée et continuée jusqu'au milieu du
XVIir' siècle, Tyrnau, 1758, ln-8^
L'histoire des rois de la race d'Anjou,
de Luxembourg et de Jagellon, qu'on
s'attendrait à trouver ici, n'a pas été
traitée par Katona. Il a publié sous le
voile de l'anonyme : Vindiciœ cirri
Jlunguriœ contra suppliceni lihrlluni
Samuelis iV^oy, Bude, 1790, in-8**;
Lan^i pseudo-catholico detracta ,
(p4i declarationem statuum catho-
iicorum Posonii commentus est ,
anno 1791 , in-8°. — Un autre Kato-
na [Eméric d' Abaujoar ou Vijalu),
né vers 1572, n'est connu que com-
me controversiste protestant. Nommé
au sortir du gymnase luthérien de Pa-
tak recteur de l'école de Szepsi, malgré
sa jeunesse, il quitta ce poste en 1595,
pour aller demander à l'Allemagne une
instruction que sa patrie ne pouvait
lui donner, et il passa deux ans et demi
à l'étude de lathéolo;^!e, soit à l'univer-
sité de Witlenberg, soit à celle de
Heidelberg, allant ainsi puiser tour à
tour à la source luthérienne et à la
source calviniste : il s'y concilia l'amitié
de ses maîtres Keckermann et J. -Phi-
lippe Parée. De retour en Hongrie,
tout en acceptant la direction du gym-
nase de Patak, il entra dans le ministère,
parut en qualité de prédicateur à la
cour de George V^ Hagoczi, prince de
Transilvanip, mais s'en dégoûta bientôt
et revint à S/.epsi où il fut pasteur
adjoint. Nommé ensuite premier pas-
teur à Cœncz, puis à Keresztes , il ve-
nait de se rendre à cette dernière des-
linalion, lorsqu'il expira en octobre
1610, dans sa trente-huitième année.
11 promettait à l'église protestante un
de ses plus fermes champions. Ses
co-religionnaiies, entre autres David
(y/.iiinltinger, dans son Spécimen Hnn-
gariœ litlrratœ, lui ont donné les plus
grands éloges. On a de lui : I. Un
KF.A
\ri\\é du libre arltitrr en .'> \\\., tw
lioit^rois (c'en! une répon>r à des
tlieies de Saro«i). II. l ne disser-
lalinu tir l*atrum , lonciliarum et
iratiitionum iiurton'/air rira /iiJri
(iognmla^ ruitus iJrm, morrstfiir tu-
%'rndi , où il pa^se en rexiie le dot^me,
riiitloire, b disripline et la morale, et
où snu\ent les injures se mêlent aux
raisonnement con^reTaiiloriir papale.
III. \.'.lnli)nif)ismus.Vrinf(oT\ sur-
le-Mein, 1(»1 I , où l'inxectivr déborde
encore da\.inlaj;e et qui n'en a mo!>-
soniié que pl'i- dr Imianpes de5 enne-
mis de !'■ 1 ne. A !a trte de
cet ouvr.i^ , rne) setrou>entun
Dîsrours prrtiminaire t\ une ^sotirr
sur lu vir tir ftmtrur par Daniel (et
non p.ir Je.in Plolippe! l'arme. V — OT.
K K A .\ (KniioNn), artenr an-
ffm, naquit à Castle-Court dans le
romié de F^ire^ter , suivant l'opi-
nion la plus commune, en 1787 ,
mais, selon quoiqur.-uns , en 1700.
Il était peiieiré de l'idée qu'il pou-
vait être fjls naturel du duc de Nor-
folk. Oliii qui (lait connu pour «on
père fut loin de produire la mrme
.«sensation d.ins le monde qu'un fn-re
tailleor qu'il avait, et qui, plus lard,
re lit remarquer comme venlnloque ,
grimacier, etc. Kdinond Kean fui em-
plové, dès son plus jeune a^e, au lliéâ-
tre de I)nir>-I.ane et v joua dans
des pantomimes les r(\les d'enfant. Il
en fui chas. é pour une maladresse qui
excita contre lui la colère de Kemlde;
mais il avait eu le temps de concevoir
du ;:;oùl pour le ihéalrc , d'ap|»ren(lre
même à reciter des scènes, de manière à
faire augurer favoral>lement de son
futur talent. Sa mère que, seule, il
avait conservée, pensa que c'élail le
cas de lui donner les premiers éléments
de l'éducation; mais à bien dire, le
lhé.ilre fut presque sa seule école , et
Shalspeareson unique lecture. Knnuvé
de ce qu'on voulait le forcer à faire
KEA
4i'i
d'autres études, et pressé de se sous-
traire aii\ .is^ujétissements, aux sévéri-
tés scolasimurs, il s'embarqua, comme
mousse, à imrd d'un vaisseau qui se
rendait k Madère ; mais soit maladie ,
soit dé«^oùt, il eui l'adresse et la vive sa-
tisfartion de se faire ienvo\er au bout
de fort peu de temps. Kevenu en ,\n-
pleterre , il cherclia un peu plus sé-
rieusement à s'instruire. .A sa consti-
tution débile en apparence avait suc-
cédé une xi^ueur assez grande. S'a-
baiidonnant à ^t\ penclianis et à ses
li.ibi!iides d'indépendance , au lieu de
piendre un état utile ou honorable,
il s'exerça à des tours de force à pied
et à c)ie\al et il v réussit fi>rt bien";
il > .irqiiit même de la rrputation. in
acci«!ent qui lui fractura les deux jam-
bes renoiMela ce qui l'avait afiaibli
physiquement dans ses premières an-
nées, ei il trouva qu'il n'avait rien de
mieux à faite désoimais, après avoir soi
fjné sa «ianté, que de s'attacher entière-
ment aux jeux de la srene. Il n'élail en-
core, à vrai dire, qu'un enfant ; mais,
protégé par une actrice de Drurv-f.ane,
il fut recommandé au directeur iVun
pelil théâtre du comté d'Nork, et ne
se tira pas mal de quelques rôles peu
importants de comédies et de tra;;.'-
dies dont on le char;;eail. Il chanj^ea
bienlAt de troupe et en ^int même h
s'essaier dans pi; sieurs villes comme
acteur el comme chanteur, car il avait
appris et bien appris la musique. Des
diflirultés de plus d'une nalure, la mi-
sère, le désespoir se rencontrèrent
quelquefois sur son cliemin ; mais l'en-
ihou'iasme de sa profession dominant
tout riiez lui, lui faisait tout surmon-
ter. Il n'y avait pa;, .î celle époque,
dans le voisinage de Londres, un vil-
la;:;e qui ne possédai sa troupe de co-
médiens, kean devint membre de
ce qu'on appelait tarrowlissemenl
thrtitrtil; el , dans sa part des pro-
duits , il avait tout juste trois scheU
4^6
KEA
llngs et six pences par semaine, somme
sur laquelle il lui fallait vivre et se
roiiniii de tout sans exception. Il a
souvent répété, lorsqu'il était arrive
à être tout à la fois riche et célèbre,
que jamais il n'avait été plus heureux
que dans cette première période de son
existence ; et cependant il eut encore
à subir toutes les épreuves de la
pauvreté, de la faim, du décourao;e-
ment. Userait trop lon^ et peu intéres-
sant de le suivre partout où il exerça,
avec des chances diverses, sa profession
favorite. Ce fut à Cheltenham qu'il
s'eno;a^ea dans les liens du niariac^e ,
unissant son sort à celui d'une actrice,
Irlandaise de naissance, et qui , soit
qu'il y eût ou non de sa faute, soit que
sa part fût plus ou nwins grande dans
les torts du ménage, ne le rendit ja-
mais heureux. 11 était alors âgé de
vingt-deux ans. Au mois de novembre
1790, il se trouvait à Waterlord en
Irlande ; là, sur un théâtre qui n'était
pas à beaucoup près du premier or-
dre, il fit partie d'une troupe d'ac-
teurs nomades , et y fut tout à la fois
chargé de la mise en scène, auteur de
pantomimes, premier chanteur, pre-
mier acteur tragique, premier mime et
premier arlequin. 11 dansait même en-
tre \ps deux actes sur la corde tendue.
De plus, il donnait en ville des leçons
d'escrime et deboxage. Mais dans la tra-
gédie il se distinguait déjà par des po-
ses, par une altitude Gère cl au besoin
par de la grandeur. Sheridan Know-
les,qui devint depuis un auteur dra-
matique distingué , était aussi mem-
bre de cette association misérable et
ignorée de pauvres comédiens, pour
lesquels il composait même des pièces.
Les officiers de la garnison de Wa-
terford, que Kean contribuait à désen-
nuyer, trouvaient en lui un bon gar-
çon, spirituel, sans prétentions et sans
malice. Un médecin qui habitait Ilar-
row lui conseilU de se rendre a Londres
KEA
et lui fournit les moyens de s'y faire
connaître, car on avait eu le temps d'ou-
blier l'acteur enfant qui avait figuré dans
quelques pantomimes. Petit de taille ,
ayant une figure assez régulière, mais
sans noblesse caractéristique , seule-
ment, et comme par compensation,
une physionomie mobile et expiessive,
enfin possédant un organe qu'il avait
besoin de travailler, il ne prévenait pas
au premier abord par ses moyens ap-
parents. Ce fut en janvier 1814 qu'il
passa des théâtres de province sur celui
de Drury-Lane. Il était obscur et
fier : il croyait à son génie et dédai-
gnait d'en parler. Il débutait sans
laveur anticipée du public. Les an-
goisses de l'indigence , le désir de la
fortune , une espère de rage concen-
trée , le pressentiment d'une haute
réputation dans l'avenir, tout concou-
rait à rendre cette soirée une grande
époque de sa vie. Depuis le jour qui
avait été fixé par le directeur pour
le faire paraître, on avait vu un hom-
me petit, massif et musculeux, errer
conmie une âme en peine dans les
corridors et dans les galeries de la salle,
saluer ses futurs camara(ies avec une
feinte mais noble humilité , écouter
avec une modestie affectée son chef
qui lui conseillait de se tenir dans les
coulisses pour étiidier-4e jeu des autres
acteurs, lesquels, en attendant, ne lui
épargnaient aucune raillerie. Il se
renfermait dans un silence obstiné, et
dans un genre de politesse hautaine
qui ne disposait personne de la troupe
en sa faveur. Elle était médiocre ,
cette troupe, et une vieille pièce de
Shakspeare , le Murcliand de Ve*
nisc^ n'offrait jias un bien grand inté-
rêt à un public peu nombreux, dans
une soirée froide par elle-même. Kean
devait entrer en scène à huit heures
et demie, dans le moment où ceux des
spectateurs qui paient à moitié prix
viennent remplir les galeries et y ap-
porteoi leurs habitude» de \i rie On
clicrcltait inuiilriuciit denirrc le fuiul
du llirâirc rt dans s^ \o^t, Slnlorl
itu )dul(^t kcûu, déjà d t\n\ eu scriir.
Il s'ruil tenu prr5 de» rouliN5C>, at
tendant la i relique. <• OuOn me
M laisse seulement me placer devant
M la rampe « avait- il dit au dincleur,
m et je muntierai ce que c'est que
« Shakspeare et ShvlucL >» Kn ef-
fet , celait, dit le romancier Tho-
mas (îratlan, un de se> biographe»,
le véritable juif du rooven a;;f qu'il
a\ait reproduit , tel q:ie le ^r.iiid
peintie *1 l'axait eropiuiile
au& Iradit ire^ de >nn temps,
un juif seli il Un ui<rur» asuliques et
selon le» idee> de l'Oiient, ou le sanp
et la vie de l'homme ont si peu d'im-
portance. Il ofirail un »\mbole vi\ant
de l'anathème et de la honte qui frap-
pent les Israélites sous la loi chié-
tienne, un reprc»etilant de l'usure vo-
race, un l^pe de la r.i^e atroce que
font naître duns l'Orne de longue» et
iropLcahles persérulions. Des Ion, ou
ne devait plus s'elouner de la férocité
de sa vengeance , et de celte once de
chair d'un jeune sei;;ueur endette qui,
étant placée dans la balanrr comme
garantie d'un en^at^ement pecuniare,
ne devait même paiailre qu'un contre-
poids à peine ^ufti>ant au& opprobres si
lun^-teraps souifeits par la nation
juive, kean \enait donner à ce per-
sonnage une phvsionomie qui , seule,
pouvait rendre la (grande pensée du
poète créateur. Les auditeurs vulgaires
assemblés pour jujier le nouveau tra-
gédien furentsaisi» d'admiration quand,
d'une voix tonnante et profonde, il s'é-
cria : « lia.Nsanio, Uassanio , que je
•« puisse seulement te trouver en défaut ,
M et ma vieille haine s'assouvira. >» Bien-
tôt la tri\ialitc du ton et de la \oix, l'ac-
cent à demi burle>que et à demi tra-
f;ique de l'usurier israélite, excitèrent
e rire général , et firent éclater dc«
KEA
417
applaudissements < >an& fin. De la,
i;rande Mirpii>< des acteurs qui ^'c-
laienl tant 1110 |ue> du petit comédien
de province, et qui n'avaient nulle-
ment coni|ile sui l'enthousiasme tou-
jours croiNsanI du public, dans cette
circonstance. Il» ne négligèrent rien
(>our amortir l'effet produit. 1^ second
début de Kean n'eut heu qu'une se-
maine après ; mais iUrhanI 111 ,
iUlifltu , liumro, Madirlh, asMirè-
rent sa popularité. Toutefois , il n'a*
vait pas cessé d'éprouver quelque
«qipoMiion, parce qu'il ap|>orlail dans
.sa manière de jouer de^ innu>aliuns
très-remarquables et une véritable ori-
ginalité. Mais avant peu il eut ren
verNé la vieille école de kemble. I.a
nii|r^le fut remplacée par la passion, la
di^nilc par I rlan. par la vigueur ; le
calme un peu froid par une énergie
prononcée. Il avait ouvert un nouxeau
monde aut veum des amateurs éclairé»
de l'art, l/emotion causée par une fa-
çon de sentir et d'exprimer si peu
commune , par un talent tellement
hors de ligne , vainquit tous lex obsta-
cles. Il reus>it dans la comédie comme
dans la tragédie; enfin le |>auvre acteur
qui na.:uère portail si tristement son
petit paquet dans les rues d^ Londres,
passade d*ux livres sterling de paie
par .semaine, sur le théâtre de llav-
.MarLet, à cinquante livres sterling
par représentation au même théâtre,
et recueillit , quelques années après ,
dix mille livrfs sterling par année.
Il triompha pendant de longues années
sur la scène ; il eut des valets en li-
vrée, des armes antiques et des meu-
bles incrustés d'or. Il est peu d'eni-
Trements d'amour - propte coin[>ara-
bles à celui que procurent une grande
existence théâtrale, l'admiration , l'a-
mour même du public, et les jouissan-
ces de la fortune qui s'ensunent.
Cependant au fond Kean était resté
le même , toujours bon compagnon ,
4iH
KEA
bon vivant et plein de reconnaissance
pour ses bienfaiteurs. Nous n'entre-
prendrons pas de raconter quel usao;e
il fil do ce que l'on pourrait appeler
ses trésors, par besoin d'excitations
journellement renouvelées , et de ces
sensations violentes qui devaient plus
tard le conduire à l'état d'insanité de
ses dernières années. Sublime comme
acteur, il avait toutes les prétentions
des talents qui lui manquaient, et il y en
eut peu où il ne s'essavât, sans succès le
plus souvent. L'instinct dramatique
des caractères passionnés était en lui ;
mais sa supériorité inteilectnelle n'al-
lait pas plus loin. Il vivait parle pu-
blic et pour le public. Toutes ses ac-
tions n'avaient qu'un but , étonner.
La rè»le générale de sa conduite était
de faire précisément le contraire de ce
que l'on attendait de lui. Il prit mal-
heureusement du goût pour la vie des
tavernes et pour les réunions libres.
Ces mauvaises habitudes et le goût
de l'étrange , du bizarre , détrui-
sirent pour lui talent et moyens de
suffire à ses dépenses. Ce n'était pas
qu'il n^aimàt encore à recevoir chez
lui quelques hommes de la bonne com-
pagnie; mais, aussitôt qu'il avait franchi
Icseuildcsa demeure et quittésa famille,
il n'avait plus de rapports qu'avec la lie
du peuple, se souvenant toujours qu'il
avait commencé par être peuple hil-
niéme. lise plaisait toujours à boxer;
enfin il :-e déclarait protecteur de tout
ce qui est exiraordinaireen fait d'exer-
cices corporels. C'était, à huit heures
du soii-, un héros, le représentant des
pensées et des sentiments les plus éle-
vés. A minuit il devenait l'homme de
la taverne, des contes grivois, de la
bacchanale grossière. J.e lendemain
matin , il admettait à son lever les
voyageurs étrangers, les ducs et princes,
et puis il retombait de nouveau dans les
jeux d'athlètes de bas étage; ce qui ne
l'empêchait pas d'appeler à sa table, le
KEA
soir, des gens de haut parage que sa
femme adorait, et dont il refusait néan-
moins les invitations , ne voulant pas
de ces salons où les hommes de talent
sont montrés comme des bêtes curieu-
ses. Sa femme , qui avait fait à Wa-
terford, dans le même jour, son pre-
mier et son dernier début théâtral ,
était une des curiosités de la maison
de Kean à Londres. Toutes les fois
qu'elle parlait du temps qui avait pré-
cédé leur arrivée dans la capitale de
l'Angleterre, elle disait : « Avant que
« mon mari fut grand liomme. >»
Il y avait dans Kean quelque chose
de cette farouche susceptibilité qui
fit tant de mal à J.-J. Rousseau.
Son principal travers était l'instinct
démocratique , qui finit par l'entraî-
ner comme acteur dans la vulgarité ,
le conduisit à sa ruine complète, et
amassa sur sa tête nn mépris qui n'é-
tait pas juste en tous points. C'est
que ce qu'il y avait de mal entendu
dans sa fierté lui donnait la crainte
d'être coudoyé par d'autres amours-
propres. Il n'aurait consenti pour
rien au monde à être confondu avec
quelque célébrité contemporaine. Par
degrés , l'excès de son ambition dans
ce genre devint insoutenable , extra-
vagant. Faute de pouvoir se distin-
guer par de grandes actions, il voulut
de la gloire au prix du scandale. Une
originalité forcée , des vices d'em-
prutit , des folies contrefaites , une
fausse énergie, lui fournissaient rlinque
jour les moyens de faire parler de lui.
S'il cessait d'être l'objet des entretiens
publics, 11 se croyait perdu. Enfin il
abusa de l'enthousiasme, des succès et
de la richesse, au point que le ridicule
succéda pour lui au mépris. Sa plus
grande renommée avait duré dix-huit
ans ; et le moment était venu où
les écarts de sa conduite exigaierjt qu'il
s'éloignât, non pas de la scène , mais
de l'Angleterre. Aux Etals-Unis, où
KEA
I ^rioiiroa liu mois d'octobre IH'iO
A ceiiii (le |uiii 1H*J1 , il fui {^uùic
sur la »cnie jil^si birn que ilans >()ii
yiy>, mai^ m. brau joui il iiuill.i biiis-
«mrnii'iit Uo^ton, laissant \c ilnrctrur
UaiiN rriiibanao. \|»rè<> riiiq moi^ il'ab-
Nfiife, il rfxint à I.oinirf> el > rcriicil-
lit nicoie uiio ain|ile inuis>oii d'a^tplau-
(ii>!»«infiils f t «If ^uinces. L'iic inti i;;tie
a\cc la feiiime de son priiici|Ml bien-
faiteur, qui eut beaucoup île publicité,
le contraignit à retourner en Améri-
que. Il fut, cette fois, assailli de pierres
sur le théâtre de Boston, et partit pour
New-^orL ou 1rs bravos l'empititerent
&ur les sifllrts. Il joua auvsi à IMiiladrl-
pliie et À Ikalliinotr, tiainant les dé-
bits d'un bf.iu talent qui s'affaiblis-
sait de jour en jour. l*rul-rtie est-ce
ici qu'il faut placer l'anecdote de
(•rattan, qui prétend que l'on vit ce
^rand actrur s'eiifoncei dans les bois
du Canada et rallier une bande à demi
sau\a;;e, sur laquelle il exerça une forte
iiillueiice. K.iifin il re^a^na Londres
ou le public oublia encore une fois les
toits de rii()ininepri\é pour ne s'occu-
pci que du mérite de l'artiste drama-
tique. En \H'2H il vint à l'aris, et il ^
parut sur le théâtre Favart où jouait
alors une troupe de comédiens anglais.
La représentation était annoncée pour
>ept heures, et M""" la duclir^se de
lierry arriva une des premières. Le
parterre, apiés a\oir passe en re\ue
toutes les anecdotes qui couraient sur
le L;rand acteur, finit par s'ennuNer et
se mit i siffler. Fendant ce temps,
Kean était au café an^^lais occupé à
boire ; il reçut à coups de bouteilles un
garçon de théâtre qui vint le cliercher.
Kn vain on le supplia de ne pas faire
attendre une princesse du san^; ro>al;
ce ne lut qu'au nom de sa {gloire, et des
roarliinistes, des fi;;uranls, qui allaient
pertire leurs emplois el mourir de faim,
qu'il se leva de table el cuiisenlit, par
pitié pour ces pauvres prres de Ja-
KEA
419
mille, ï paraître devant un public fran-
çais. Il entre en scène à peu près ivre,
mais pas assez pour ne point s'aper-
cevoir dn dc-i,ùl qu'il inspire à l'audi-
toiie , qui, en vu>ant sa démarche
chancelante, son air trivial , ses lèvres
avinées , pousse un cri d'horreur.
Mais, après les premières Nceiies, où
on le trouve pit()>able , il s'elexc con:-
me par instinct, et graduellement, à
une hauteur telle que beaucoup de
spectateurs crurent qu'il s'était étudié
à reproduire avec le plus de \erité
possible le rrMe de l\it luird /// dont
il était chargé; el il reçut de nom-
breux applaudissements. Au reste, il fut
f>lus ^oiitr dans la comédie que dans
a tra{;edie. C'est en An«;leterre qu'il
devait terminer sa vie aveiilureuse.
Kean aurait pu être l'honneur de sa
profession et laisser, outre sa réputa-
tion , des richesses à sa famille. Sa
constitution était robuste : une heu-
reuse vieillesse lui semblait destinée ;
mais la monotonie de l'ordre el du
bon sens lui était insupportable, il
aima mieux la ruine et un celai ignomi-
nieux, couronné par une fin misérable.
On serait re;;arde comme fabuleux en
décrivant l'intérieur de s.i maison, el
tout ce qu'embrassait l'emploi de son
temps et de son argent, qui, bientôt, le
laissa sous le poids de dettes énormes. Il
lui arriva, un soir, à la suite d'excès
de toute espèce, de se trouver hors
d'état de jouer un de ses rôles les
plus importants. IVès d'entrer en
scène , il fallut l'emporter et faire ,
sur ce qui empêchait l'acteur favori
de paraître , une sorte de roman
dont heureusement la salle entine
fut dupe. Kevenu à lui d'un état dui.t
il ne s'était pas même douté , il
fut obii;;é de feindre la maladie (jue le
directeur de Î)rur>-I>ane lui avait prc-
loe, et -e laissa entrevoir ( 'icz lui, dans
ufj lit DU il t'iail arraii-é de manière à
persuader entièrement le public. Au
^U KEA
bout du temps présumé nécessaire pour
sa convalescence, ramioncc de sa ren-
trée lui valut un triomphe très[)rolital>le
à la bourse de l'iiomine qui l'avait si
bien servi. Une suite de dissipations,
de désordres ; des actes qui teiiaient
à sa vanité insatiable , finirent par
déranf];er la tête du pauvre Kean.
Voulant s'essayer dans des rôles qui
ne pouvaient plus lui convenir , il se
livra, sur la scène, à des bouffonne-
ries , à des impertinences qui auraient
mérité le bâton. Son talent s'anéantit
avec sa raison. Avant ce temps,
connaissant par sa propre expérience
les vicissitudes de la fortune et les ca-
prices de la faveur publique, auxquels
l'acteur le plus heureux est exposé en
courant après la célébrité, il avait fait
ses efforts pour détourner son fds,
Charles Kean , de se lancer dans la
carrière théâtrale. Il lai avait en con-
séquence procuré une instruction plus
que suffisante, et il s'occupa sérieuse-
ment de le placer, comme cadet, au
service de la compagnie des Indes ;
mais il éprouva de l'opposition de la
part de mistriss Kean. La mère et le
lils sentaient le besoin qu'ils pouvaient
avoir l'un de l'autre, en cas de chan-
gement tout-à-fait fâcheux dans la po-
sition d'Edmond Kean. Celui-ci en étant
venu à quelque mésintelligence dans
ses rapports avec le directeur deDrury-
Lane, conclut au théâtre de Covent-
Garden un arran^^ement en vertu du-
quel son fils pût suivie sa vocation et
paraître avec lui dans la même pièce.
L'idée de faire jouer Othello par le
père et Jogo par le lils sourit tellement
au directeur , qu'il en fit le sine (juâ
non du marché. Ce fut le 25 mars
1S33 que les deux Kean se montrèrent
ensemble : la salle élait pleine, et les
disposiîions du public étant des plus
favorables, l'effet fut en réalité pro-
digieux. Le r^enre d'intérêt que pri-
rent les spectateurs à cette repré-
KEA
senlalion mémorable était complexe ,
car personne n'ignorait ce qui l'avait
précédée dans riutcrieur de la famille
Kean. INIais la sensation fut bien au-
trement profonde lorsque Kean père ,
avec l'accent d'une âme affectée jus-
qu'au désespoir , exprima ce qui était
dans son rôle , le renversement de
toutes ses espérances , de tout son
bonheur ; lorsqu'il dit le dernier adieu
à l'ambition du héros, à la gloire du
soldat, à la tendresse de l'époux, à la
faiblesse humaine, et finit comme l'é-
clair qui, sortant d'un sombre nuao;e,
précède un violent coup de tonnerre.
Il fut près de s'évanouir après ces
mots : « Il n'y a plus rien à faire pour
« le pauvre Othello, » et il tomba
épuisé dans les bras de son fils. Tous
les cœurs sentirent que c'était le der-
nier effort du grand tragédien, et que
le théâtre anj^lais allait perdre un de
ses plus beaux ornements. Charles Kean
arracha son père de la scène sur laquelle
il avait triomphé , et le déroba aux
reo;ards attristés de ceux qu'Edmond
Kean avait si souvent amenés à l'ad-
miration, à l'enlhousiasme, à la pitié
et aux larmes (1). On le transporta
dans sa maison de Richmond où les se-
cours de l'art médical furent impuis-
sants. 11 ne fit plus que languir jusqu'au
15 mai de la même année 1833, où il
expira avec tranquillité. On a calculé
que les sommes qu'il avait touchées
depuis 18Î4 pouvaient se monter à
cent soixante-seize mille livres ster-
ling; mais ses affaires étaient tellement
dérangées qu'aucun des exécuteurs
testamentaires ne voulut s'en charger.
(i) Il «-st reinar(|ii.Tl)l(; <jnc l'hotnas Gr.iiian,
fils de l'oralfiir irlandais «lo ce nom, dans une
notice tiès-intciessanle sur Kenii , m; p.ule pas
(l'nne représentation où cet acieur voulut repa-
raiin; à li fin de sa vie, dans le rôle principal
d'une pièce de (iratlan lui in(^ine, iiitilulie Heu-
Nazir. Il liésitu, dit-on, loutaconp an troisii^-rne
acte, s'arrèla < t poussa «les gi'nii.'-si int-nls alfr< ux
j>endant quelques minute"!.,. Il élait devenu fou.
Otte anccdolc a été rapportée par M. .hiIcH .la-
nin, dans le Journal des Débats, en i8i6.
KEA
Il avait eu de» rapp^irt» intinif* de
Mtcirlé avec lord B\rou, t|u'ii aimait à
)ijr(»dirr , el a%rc Ucjiirnup d 4utir«>
l'rrMinnes di>liii^u»'C'». M .\lr&4iidrr
Dumas a r(iiii|>o>é, sur crt acirur, une
pièce iiitituire Kriiri , ou lirmrdrc
rt Ifcttir , «jui a été joiièe au lliéjtre
dei Variété» de Paris, en»e|it. 1836.
KKA'l'Sisir l\ir.liAHi>(ioi»wi?i),
amiral aii;;l.iis, naquit a (>lidl(on djri»
le hainpNhire, le 16 jantier 17.ï7.
^on prre, rerieur de Hidclord dan» le
! )etuutliire el direeleur de l'ecule de
liverlon, le tit entrer danois manne
«les l'a^e de treize ans, ci Ir plaça a
l»ord de la HeUona, dr iouanlr-qua-
toiie canons. Kn 1771, John Mon-
tagne, capitaine de ce na\i(e, a\aMt rte
éle^é au ^rade île cnnlre-aïuiral, el
nomme commandant en rlicf de la stv
lion d Halifax, rmmrna krals sur le na-
Mre qu'il montait lui même. O'ioique
les )io»liliie« ne fuosent pat comnicn-
cres , cette «talion était tré*-occupee et
l>ien propre à former uu jeune olfiner
i]ui débutait dans la carrière ; aussi
K.eats fut-il tre>-activeroenl employé
iiaiii le service 4es canots : il en rom-
mniMiait deux. \u mois de fe»rier
1776, Pàmiral Monta^uf étant de-
\enu commandant en clief à Terre-
Neine. kral* l'accnrapa^na el rc*la
a^ec lui jusqu'au 7 a\ril 1777, qu'd
fui nommé lieutenant du limiullirs.
l)an« l'afTairedu *J7 |iii'lel 177S, en-
tre la iloite anglaise commandée par
kepprl el la floUe française aui ordres
«le d'Orvilliers, le Hitmillifs eut doure
hommes lues et vin;;t-un Messes,
l/lionorable l\oberl l)it;bv, .son ca-
pitaine, promu au ran«^ de contre^aroi-
rai, invita Tannée suivante Keats, dont
il avait disliii;;ué la conduite, à le suivre
ur le Hoyul-Ot'orgr. C'était à bord
de ce navire que le prince \N illiatn-
Henrv , devenu depuis roi d'Vn^le-
terre(yoX. Guillaume IV, t. LXVl,
KEA 41t
*264), commençait ta carrière de ma-
rin, et c r^l keats qui pendant plu^
de trois ans lut oflicier du quarl daiii
lequel S- \. il. était placée. 1( avait
été clioi«i comme un oflicier capa-
ble et eipenrornte auquel on pun-
vait contjef en toute •«utcie la surinteu*
dance de redurjiion na\jle du jeune
prince, el il «acquitta a\ec di!>linction
de ces font tloll«llonorable^. 11 se trou-
vait e;;4lemenl ji\cc lui sur la llolle
commandée par sir iieor^e^ Kodnev,
eiivu\ee, en 178t) , pour ravitailler
(iibiallar; et , en 1781 , on le voit
li^^urer, ain&i que le prince, parmi le.i
officier* de la llolle du vice-amiral
Darby, partie d'Angleterre dans le
miine but. Ce fut lui qui commanda
1rs bateaux charge» d'immen.se^ appro-
viMonnrmeiils pour cette place , ou il
par>iiil a les introduire malgré la plut
ternble canonnade. Vert le mois
d'août de la même année, le contre-
amiral Di^b^ avant reçu le comman-
dement dr la liotle anj^laise en Amé-
iique , emmena avec lui Keats dont
les talents et le courage l'avaient
frappe. Il lui confia la conduite de la
partie navale d'une expédition con-
tre les nombiru\ ri formidables ba-
teaux de l'ennemi , >tationnés à en-
viron quatorze milles au-dessus de
Jersev , el le succès avant couronné
les efforts du jeune officier, il obtint, le
\H janvier 17Hi, une commission de
tunimandt'r avec le coininandeinenl
du lihinoirros, de douze canons. Bien-
tôt après on lui confia la lionelta, de
quatorze canons, excellent croiseur avec
lequel il re^la à la station d'Amérique
jusqu'à la paix de 1783. Crois.inl sous
les ordres du capitaine (i. keith El-
phinstone à la hauteur delà Delaware,
il prit une part acli\o .ti combat du 1 1
aa 1.') ^eptembre 178-2, qui fit tom-
ber au pou\oir des An^^lais la fré-
f^ale française 1' ligle, de quarante
canons commandée par le comte deLa
43a
KEA
Touche, el h Sophie, de vingt-deux
canons. Keats servit encore en Améri-
que jusqu'en 1785, sans obtenir aucun
avancement. Ce ne fut que le 4 juin
1789 qu'on l'éleva définitivement au
rang de commander , et cette promo-
tion, il la dut surtout aux vives sol-
licitations du duc de Clarence. Peu
après il prit le commandement du Sou-
ihcimpion , de trente-deux canons ,
d'où il passa à bord du ISigcr, autre
frégate de la même classe attachée à la
flotte qui devait agir contre la Russie
(1791). Les différends survenus en-
tre les cours de Londres et de Saint-
Pétersbourg s' étant arrangés à l'amia-
ble, le iV/g'^r croisa dans les canaux
d'Angleterre et d'Llande , jusqu'à la
guerre de la révolution française. A cette
époque Keats fut chargé de disposer le
London, de quatre-vingt-dix-huit, à re-
cevoir le pavillon du prince, dontil avait
été jadis l'officier de quart ; mais, com-
me il ne fut pas élevé, ce trois-ponts
fut désarmé au mois de mars 1794,
et le capitaine passa sur la Ga/athea,
de trente-deux canons, l'une des qua-
tre frégates de l'escadre aux ordres
de son ami sir Edouard Pcllevv. [\n
179.!;, Keats se trouvait avecla Gala-
ihca à la malheureuse affaire de Qui-
beron; il ) fut chargé de la direction
des bateaux del'escadre de sir J.War-
ren, et ce fut grâce à ses bonnes dis-
positions que Puisaje, onze cents sol-
dats et deux mille royalistes français
purent échapper au général Lemoinc.
Au mois de mars de l'année suivante,
Keats soutint avec la Giddllica m\
violent engagement contre les Fran-
çais à la hauteur du iiec du-Uaz, et se
fit particulièrement distinguer au mois
d'août de la même année où, après une
chasse prolongée, il brûla la frégate
française VAndrumcnjue à l'embou-
chure de la Gironde. Kn 1797, il passa
au commandement de la (régate la
BoadiceUy de trente huit canons, et ce
KEA
fut lui qui, au mois de septembre 1798,
donna à lord l»ridport la première
nouvelle de la sortie de l'escadre de
Bompart, Il commandait, au mois de
juillet 1799, les frégates delà division
de sir C. M. Pôle faisant partie de la
flotte du canal, chargées de couvrir
une attaque contre une escadre espa-
gnole qui s'était réfugiée sous les bat-
teries de Pile d'Aix. Ses autres servi-
ces à bord de la Boadicea se bornè-
rent à la prise de quelques corsaires
qui s'étaient rendus redoutables, parmi
lesquels on doit distinguer \eZephire ,
le Hailleur, V Immiciblc Bonaparley
le Milan, le Requin, et enfin V Utile.
En mars 1801 , Keats devint comman-
dant du Superbe, de soixante-quatorze
canons, et il resta à bord de ce même
bâtiment comme capitaine , comme
Commodore et comme contre-amiral,
jusqu'en 1810. Placé d'abord sous
sir J. Saumarez , il ne put se trou-
ver au combat d'Algesiras (6 juil-
let); mais, ayant perdu tout espoir de
joindre l'amiral, il se décida à retour-
ner devant le port de Cadix avec la
frégate la Thames et le brick Pasley
pour y observer les mouvements de l'en-
nemi. Le 9, à la pointe du jour, la
flotte espagnole ayant levé l'ancre dans
l'intention évidente d'escorter l'esca-
dre de Linois jusqu'à Cadix, Keats
mit toutes voiles dehors pour les pré-
céder. Dans la soirée l'ennemi jeta
l'ancre dans la baie d'Algesiras et le
capitaine anglais devant Gibraltar. A
midi, l^inois parut avec deux vaisseaux
à trois ponts, sept autres vaisseaux de
ligne , trois frégates , un lougrc et
queltjucs canonnières. A une hetii e, le
Gœsur, vaisseau de pavillon anglais,
sortit du Mole où il avait reçu de la
poudre, des boulets et des munitions,
et fit le signal de lever l'ancre. Aussi-
tôt que l'ennemi eut quitté la baie de
(iibraltar, l'amiral anglais donna le
signal et ordonna au Superbe de diri-
^fr une attaqiif conirf rarTièri^-{;ar(lf .
loiilwlw \oi|psfuifnl misf^ drliori
rn unin«iant,cl iir|ia<>.sjint hirnlAt le
i itjur, KeaUaltei;;iiil re5caclre espa-
^iKtle A onze lieurr> tlu soir, ce navire
liait le \eu\ des an;;laisqui fût en \ue et
a plus de trois milles en arrière. Vingt
minutes après, Keats s'approcha avec
le Supfrhr à une couple de cibles du
liral'(Mtlus, vaisseau e>pa^nol à trois
ponts, et il ouvrit sur lui un feu si terri-
iilr, que quelques uns de ses boulets al-
tn^nirent le Siin-Uermrnrgildu, au-
I; e vaisseau dr la même nation, et le se-
cond en lit;ne, par letra^ersdu premier.
Il en rè>ulta une exirème confusion à
liDfd de ces deux vaisseaux qui, pen-
dant quelque trraps, lirnent l'un sur
l'autre, et bientôt le lirai- Carlos loi
cri tlammes. keati l'abandonna alors
pour attaquer le San-Antunio , de
7i canons, qui en était le plus voisin;
et ce vaisseau , portant le pavillon
du commodorr Le Uov , se rendit ,
après un enf;a^en»ent de trente mi-
nutes. C'est ainsi qu'avec un seul na-
vire , keals a\ait cause tant de pertes
à l'ennemi. Dans le même temps le
llful-Lurlus étant tombé sur le Saii"
Iltrrnrtir^iliJu, tous deiii sautèrent
a\ec un bruit e(Tro\able, et, de deui
mille hommes composant leurs équi-
paj;es, trois cents à peine purent être
sauxés. Le Superhf resta à (libraltar
avec sa prise, et le rej-te de l'escadre
tontiiiua la poursuite de l'ennemi. Au
rcnou\ellement des hostilités en 1803,
le capitaine Keats, placé sous les ordres
de Nel'oii, fui char;;e par cet amiral de
demander satisfaction au de> d'Aller
qui avait renvové de ses états M. Fal-
con, vice-consul anglais, mission dont
il s'acquitta a\ec succès. Le Superhc ac-
compa{;n.i ensuite ce ^rand marin aui
Indes occidentales, pour j suivre let
flottes combinées de France et A'V.%-
pa^ne. Cette mission accomplie , le
Viciory et le Superbe jetèrent l'an-
LTVllI.
KEA
4^
creàSpithead, le 18 août 180'). Le
faisseau de Keats, qui avait suiu les
croisières de Nel><»n depuis le commen-
cement de la ^ueire, fut mis en répara-
tion ; et, quoique nen n'eût été ne;;ligé
pour accélérer son équipement, il it
put être prêt à temps pour rejoindre la
flotte et prendre part à la dernière ba-
taille où péril ce héros. Le liuyal-
Gtorge i bord duquel sir J. Duck-
«orth devait hisser son paMlloii n'étant
point dispose, keats reçut le^ire-ami-
ral à son bord, et le 15 nov. ils arri-
vèrent a la hauteur de Cadix, peu de
jourN après la bataille de Trafal^ar.
l)ucLworth ne tarda pas à quitter la lia*
tion avec su vaisseaux de hf;ne et une
couple de frelates pour chei cher l'es-
cadie de Kochefort qui axait mis à la
voile, et qu'on supposait destinée pour
les Indes occidentales. Le *J.') déc. ils
euient vue de l'ennemi à la hauteur des
iles du cap Vert, et ils le chassèjcnl,
le Superbe formant l'avant-^arde ;
mais le mau\ais état des na\ires déter-
mina DucLhoiiIi à abandonner la
f>oursuile et a rassembler son escadie;
a flotte française , qu'on sut depuis
être aux ordres de l'amiral Willau-
mei. fut bientôt hors de vue. A>arit
depérhe dans l'Inde, le Voafrfull i\t
soiiante-quatorze, DucL.worth se diri-
gea à pleines voiles vers les Lides occi-
dentales où, a^ant appris l'arrivée d'une
autre escadie fnnçaise, il se porta
avec la plus grande célérité sur San/it-
Dominf^d. Le ti fe\rier 180G, on dé-
couvrit les Français dont la force se
composait de cinq vaisseaux de ligne,
de deux (régales et d'une corvette. Les
dispositions nécessaires pour l'atlaque
furent faites immédiatement , et les
Français se mirent sous \oile pour
accepter le coml'at. L'action com-
mença par le Superbe qui formait
la tête de la division du \ ent. Il at-
taqua WUexandre de quatre-vingts
canons, qui était à la tête de la li-
i8
434
KEA
^nc ennemie, jusqu'à ce qu'il ne fût
plus en état de f;oiiverner, et fut obli-
f;é (le baisser pavillon, lorsqu'il plaça
auJacieusement son vaisseau par le
travers de VImpériul de cent Yinf!;t
canons , «< le plus beau et le plus
<f fort vaisseau qui eût jamais été con-
ct slruit dans aucun pays du monde. »
Le trois ponts était à portée de pisto-
let et avait probal)!ement réservé une
bordée choisie pour le Superbe ;m:i\s,
dans ce moment critique, le contre-ami-
ral Cocluane plaça vaillamment le
Nort/iumbrrland dans l'espace étroit
qui existait entre les deux vaisseaux, et
reçut toute la décharp;e, plusieurs des
boulets arrivant au Superbe à tra-
vers le Nortliumberland. L'engage-
ment devint ^;énéral et se termina en
faveur des Anglais , qui en moins de
deux heures prirent ou détruisirent à
l'ennemi qui était, les documents an-
glais l'avouent, inférieur en force, un
vaisseau de premier rang, deux vais-
seaux de quatre-vingts canons et deux
de soixante-quatorze. Le vice-amiral,
dans son rapport à l'amirauté, donna
les plus grands éloges au système de
discipline et au bon ordre qui régnaient
à bord du Superbe, et il attribua une
partie du succès aux excellentes dis-
positions de Keats. Quoique le Sn-
nrrbe eût pris une part très-aclive à
l'affaire, sa perte ne fut pas très-con-
sidérable, car il n'eut que six hommes
tués et cinquanie-six blessés. Le capi-
taine Keats, qui avait été nommé colo-
nel des Royal-Marines , à la pro-
motion de Trafalgar, reçut alors, ainsi
que les autres ofBciers ses camarades,
les remercîments du parlement ; et le
comité du fonds patriotique lui vota, à
son choix, une épée ou un vase de la va-
leur de cent livres sterling. \.q Superbe
joignit ensuite la (lotte du canal com-
mandée par le comte deSaitit-Vinoent,
mais il fut bientôt détaché avec .six
vaisseaux de ligne pour relever l'ami-
KEA.
rai Stirling et croiser à rouest de Belle-
Isle. Au mois d'août, il eut connais-
•ance de quatre frégates françaises ;
mais, après une chasse de cent cinquante
railles, le ]\Jars qui tenait la tête ne
put s'approcher que d'une de ces fré-
gates qui baissa pavillon ; c'était le
Rhin, de quarante canons et de trois
cent dix-huit hommes. L'année sui-
vante, Keats fut employé comme Com-
modore d'une division de la flotte de
l'amiral Gambier dans son expédition
contre Copenhague, et fut détaché avec
quatre vaisseaux de ligne, trois fréga-
tes et dix brigs-canonniers pour assu-
rer le passage desBelîs. II bloqua aussi
Stralsund et eut à remplir les devoirs
les plus difficiles de toute la flotte. Le
2 octobre 1807, il fut promu au rang
de contre-amiral et hissa son pavillon
à bord du Superbe, comme l'un des
vaisseaux de la flotte de la Bahique,
sous les ordres de son vieux comman-
dant sir J. Saumarez. Le 10 mai
1808, il quitta la rade d'Yarmouth
avec l'expéditio'i de sir John Moore
pour la Suède, et arriva à Gottenbourg
le 7 {Foy. Moore, XXX, 58). 11
fut ensuite chargé de veiller au sort de
l'armée espagnole commandée par le
marquis de la Piomana que Napoléon,
sous prétexte de l'employer i la dé-
fense du Hanovre , avait fait sortir
d'Espagne , afin qu'elle ne pût contra-
rier ses projets contre ce pays. Keats
remplit sa mission avec beaucoup d'a-
dresse ; il parvint bientôt à se mettre
directement en relation avec le mar-
quis, et à le transporter en Espagne
avec dix mille hommes de ses troupes
{Foy. RoMANA, XXXVIII, 501).
Pour récompense , il fut créé à son
arrivée en Angleterre chevalier de l'or-
dre du Bain. A la fin du mois de mai
1809, le gouvernement anglais réso-
lut d'attaquer les forces navales que les
Français avaient dans l'Kscauf, et sir
K. Keats fut nommé commandant en
KEA
sffonJ et l'immeMM ariiiif nt qui mit
à la voile ilaiis rrlte intention , rt qui
eut Je si troles ir>iillats pour l'hon-
neur britannique. •• H ne non» a|»p.Ti-
tient pas , ilil naïvrinent un lii(i;;ra-
phe an^Lib, de nous appesantir sur
cette afljtre raailieui euse. • keats quitta
ensuite le Suprrùr pour passer à bord
du M il /uni, de soi5iante-<|ua!f)ne, et
cominandrr les forf ei na\aleNeraplo>ée$
à la dcff use de C^dix. alors av»ié;îe par
les FrançaiN H j établit unrllottdle, et
resta dans cette station jusqu'à l'au-
tomne de ISl t , mais, les cramiesqu'un
a\ait coni^ur-» pour la >àrete de (.adix
ëtant di-Nipres, il joignit sir K.douard
Pelles a la liaiiteur de Toulon, roro nie
commandant en second de la llolte de
la Méditerranée. H était à cette épo-
que vice-amiral et avait son pavillon i
bord de V Hihrrnia, de cent wn^X ca-
nons. H resta dans cette position jus-
qu'au mois d'or'obre lHt2, où le
mauvais état de vi ^anlé le força de
rentrer en An'^leterre à boid du (len-
tuurf. A>aiit repris quelqiies l.uces
dans le printrmp> de l'anni-i* suivante,
il fut noinmi' commarniant et ;;ou-
verneur de Terre-Neuve, avec ^a^^u-
rance(|ue *i sa santé se rétaldissail on
l'emploierait d'une manière plus ac-
tive. Il fit voile pour cette station a\anl
son pavillon ji bord du lielleropiion ,
et dès son arrivée se li^ra tout entier
aux devoir» de son i;ouNernement. En
181 G, Il se retira dans le comté de
l)evon, ou il épousa la fdie ai née de
sir Francis H art, et obtint, en 181 S,
le poste de maior-;;on»^ral des Koynl-
Marinrs. \ommé, tn 1821, ;;ouver-
ncur de l'hôpital de (treenwich, il r
introduisit d'utiles améliorations , et
mourut d'une attaque de paral\sie, le
5 avril 183i. Les funérailles de Keats
furent célébrées avec pompe par les or-
dres exprès du roi, qui accorda cinq
cents livres sterling; (12,300 fr.)pour
|ul élever un monument 1) — z — s.
KEI
435
KKiril ((lEoncK Klphiiistonp,
lord \icomir) , amiral an{;lais, d'une
noble famille d'Fcosse qui fait re-
monter son origine à un j^entlemau
allemand, tlu nom d'Klvini;ton, établi
dans re in>aume au commencement
du XIV" Mcfle , était allie par les
femmes au maréchal Keith ( roy.
ce nom, XXII , 27'i), et naquit
en 1716. Malgré le sort fnne^te de
son frère aîn»* , qui périt en 17'j8. à
bord du navire le Vrintr itrorgr. \t
jeune J -e résolut de parcourir
la can me; et . .^près avoir reru
une ediit ai on convenable à rilasenv» , il
s'embarquaaii moin de fe\ . 17fi2, sur le
(/ii.ifmrt , commandé par le capitaine
Jer^is, devenu depuis lord Saint Vin-
cent. Il servit succe>Mvrmcnt jusqu'en
17r>7, sur dixer^en frégates, acrom-
pa;;na en ('.hiae son frère (imllaume
KIphinstone , el se rendit, en 17<i!>,
d.vns rindeavecle rommodore Ijnd-
say qui le fit nommer lieutenant de
vaisseau. Après son retour en An;;le-
teire, où il .i\ait été en\ovéaver des dé-
pêches, le jeune FJphinstone fut atta-
ché au vaisseau portant le pavillon «le
sir Pierre I>ennis , Ciiraraandant en
chef ilans la Méditerranée. En 1772
il fui promu au ran;; de rummundrr,
« t rerjt au mois de mars 1775 la
cotamission de capitaine de vaisseau.
I.e Marl/poruugh , de soixantc-qua-
foize canons , fit le premier vais-
seau qu'il commanda en celte (jualité ;
il passa depus sur la Pearl et M;r la
fré|;ate Prrseus, aver laquelle il ser>!t
sur la c6fc d'Amérique sous lord
Howe et sous l'amiral Arbulhnot.
C'est à cette époque que le comté de
Dumbarton , où sa faiinlle .i\ait de
grandes propriétés et exerçait beau-
coup d'influence , le nomma son re-
présentant à la chambre des Com-
mîmes. A l.T prise de Charlestown ,
le capitaine Elphinstone comman-
dait un dclacliemcnt de marins qui
28.
436
KEI
furent déharqucs, et la bravoure qu'il
montra <ians cette circonstance fut lio-
norablcnionl citée dans les (.léjièclies
ofticielles île sir Henry Clinton, {géné-
ral en chel (les troupes de terie; El-
phlnstone fut aussi présent à l'attaque
du Mud Island , le 15 nov. 1777.
Revenu en Angleterre avec des dépê-
ches de Tamiral Arbutlinot, on lui
confia le commandement du Jf^arivick,
de cinquante canons, et en 1780 il
fut élu de nouveau pour représenter le
comte où il avait pris naissance. Il
était un des membres indépendants
qui se réunirent à la taverne deSalnt-
Alban, dans le but, qu'ils n'atteigni-
rent cependant pas, de réconcilier Pitt
avec Fox et le duc de Portland, pour
former par l'union des partis une admi-
nistration vigoureuse et assise sur une
large base. Au mois de janvier 1781,
il captura, après un engagement de peu
de durée, le vaisseau de guerre hollan-
dais le liulerdam, de cinquante ca-
nons et de trois cents hommes d'équi-
page. Pendant tout le temps de la
guerre , il fut employé à la station
d'Amérique sous l'amiral Digby. Il y
commandait le IVarœick à bord du-
quel le prince Guillaume-Henri, de-
puis duc de Clarence, désira faire son
apprentissage de marin, sous ses or-
dres. Le 11 sept. 1782, ce navire,
de conserve avec le Lion , la V es-
tai et la Bonetta , captura , à la
hauteur de la Delawarc, quelques na-
vires français, entre autres la frégate
V Aigle, (le quarante canons, com-
mandée par le comte de La Touche,
qui se réfugia sur le rivage avec le ba-
ron de Vioménil et plusieurs officiers
supérieurs. A l'élection générale de
1786, le comté de Stirling choisit El-
phlnstoiie pour son représentant au
parlement, et en 1793, la guerre ayant
éclaté avec la France, il obtint le com-
mandement du Robuste, de soixante-
quatorze canons, et se rendit dans la
KEI
Méditerranée sous les ordres de lord
Hood. Il l'accompagna à Toulon lors-
que les habitants, trompés par les An-
glais, leur livrèrent cette ville. Elphin-
slone eut dans cette occasion le com-
mandememt du fort Lamalgue, et quand
l'escadre anglaise fit sa retraite , il fut
chargé de faire embarquer les royalistes
français qui voulurent quitter leur pa-
trie, ce dont 11 s'acquitta fort mal, car
on sait comment la plupart de ces
malheureux furent abandonnés à la
férocité des républicains. A son re-
tour en Angleterre il fut promu , le
12 avril 1794, au rang de contre-
amiral de l'escadre Lleuc , et créé
chevalier de l'ordre du Bain, Nom-
mé le 4 juillet contre-amiral de Tesca-
dre Blanche, il hissa son pavillon à
bord du Bar/leur, de quatre-vingt-
dix-huit canons, dans la flotte du ca-
nal. Jusqu'à ce moment, Elphlnslone
n'avait agi qu'en sous-ordre ; nous le
voyons maintenant occuper un poste
plus élevé. Au mois de janvier 1795,
les hostilités s' étant déclarées entie
la Grande-Bretagne et la république
batave , il fut envoyé avec une flotte
au cap de Bonne-Es[iérance et par
des dispositions convenables il aida le
général Clarke, commandant des tiou-
pes de débarquement, à s'emparer de
cet important établissement qui tomba
le 1G septembre au pouvoir des An-
glais. Pendant le cours de cette cam-
pagne sir George Kelth, nomme vice-
amiral dès le 1*"*^ juin, soumit Icscolo»-
nies hollandaises de Ce^lan, Cochin,
Malaca et les Moluques, et força une
escadre hollandaise de deux vaisseaux
de ligne, de cinq frégates ou sloops, etc.,
à baisser pavillon, il fit ensuite voile
pour l'F^urope, arriva à Spithead le 3
juin 1797, et fut élevé, le 7 mars sui-
vant, à la dignité de baron du royaume
d'Irlande, sous le titre de baron Kelth
de Stone Havcn-Marlschal. Au mois de
mai il dirigea les préparatifs faits k
MI
Shwrnw f«>nlic lr\ nisur^^ ilf lall(.lie
stalioniK'f au \orr. \prr> que rritc
ré«ollr fui Ole a|iji>èf , lorJ Knlli (c'rsl
$ous ce liorii qu'il riait alors connu)
coinmanila un (Irtariinncnt àe la llotle
du canal, ri fut rnsuitc atlarliérn (]ua-
lilr lie cominanilantrii second à la sla-
lion dria Mrillicrranéf ,soii$ le* ordres
du coiule deSaint-Vincent qu'd ini^^nii
àlàibrallar, au mois de dfcerobrel7D8.
Comme ce dnnier ^lail à celle époque
sérieu^emenl indisposé, Keilli fui rhar-
f[é de bloquer dans le port de (lïdii
a flolle e5|»a^nole composée de *in{;t-
deu\ taisseaui de ii^ne. 1^ i mai
1799, a>ant drcouveit la flotte de
Breit consislani rn Mn^lqiialro vais
seaux de li;;ne et neuf \ai%seaui de moin-
die dimeiiMon, il n'iiésila pa-, nul;;rr
un veni tieN \iolenl et la supériorité nu-
mérique de Tennemi, à lr>er l'ancre
ctàluiofTiir le combat que celui-ci
évita soigneusement, l/amiral ilruix,
qui commandait cette flotte française,
renonça mrme à se joindre à ses amis
de Cadix, quoique ce port ne fût pas
à plus de se|)t à liuit milles aous le
vent. \a tempête devint si violente
pendant toute la nuit suivante (uie ce
ne fut qu'avec la plu-^ >;rande dildculie
que les vaisseaux purent être réunis.
Le lendemain malin n'avant aperçu que
qaatre >a>^callx français auxquels il
donna vainement laclia<'Se,et apfèsétre
resté dans la même station jiusqu'au 9,
Keith supposa qu'ils avaient passé le
détroit. H se rendit i Cibraltar ,
croisa i la hauteur du cap Dell Mell,
et, apprenant que les Irançais avaient
jeté l'ancre à la baie de Vado , il
allait les y attaquer, lorsque le comte
de Saint-Vincent lui donna l'ordre
de se rendre iniinéiliatcmcnt à Mi-
norque où le< Espa;;nols parais.saient
avoir rintentlon de faire une descente.
Pendant ce temps , l'amiral français
allei^iiil Caillia^i'ne où il fut joint
bienlnt par Tamiral Maisaredo, avec
KFl
4Î7
cina vaisseaux décent douie canons,
un de (jiiiire vin;;ts, et onze de soixan-
te-quatoize, sous les ordres deCravi-
na, (trandillana, Corduva, Nava et
Villavinrensès. 1^ vice-amiral an;;lais,
dil l'un de s« bio^raplie>, a\ant réuni
tou> se» vaivseaux, se proposait de
suivre les flottes combinées , lors-
qu'il apprit par les croiseurs qu'elles
étaient entrées dans le port de Krest,
et il se rendit alors lui même en .\n-
plelerre. Vers la fin de nov. 1799,
keitli fit voile de IMvroouth sur la
lirinr iJuirlntlr, de cent dix canons ,
pour prendre 1» commandement de la
flotte de la Méditerranée que le mau-
vais état delà santé An comte de "^aint-
\ incent l'avait forcé de reAi;;nei . On
le voit, au comenriirement de IHOO,
croiser devant IMe de Malte, à la hau-
teur du port l.a Valette, pour inter-
cepter les secours qu'on pourrait v en-
vover; pendant ce temps, Nelson croi-
sait au vent par ses ordres. Ce fut par
ces dispositions judicieuses qu'il s'em-
para du Crttrrfu.i , de soixante-qua-
torze, portant le pavillon du contre-
amiral IVrrée, chargé de troupes de
dfbarqiiemeiit.el d'un t^rand transport,
l'eu aptes, Keith déclara en état de
blocus Toulon, Marseille, Nice et tous
les ports de la rivière de (iênes ; et le
vaisseau la lirinr (Ihariittr avant été
entièrement consumé par les llainmes,
pendant qu'il était à terre, il porta
son pavillon à bord de VAudurieux et
ensuite du Mino/tiurr. et parut avec
une partie de sa flotte devant le port
de (lénes que les Autrichiens assié-
geaient et qui était défendu par Mas-
séna. Il diri;^ea le blocus avcr tant de
vi;;ilance, qu'aucune provision ne put
entrer dans la place qic la famine
força enfin de capituler. I.e 4 septem-
bre suivant, l'île de Malte se remlit à
un détachement de la flotte de lord
Iveith. Le même mois, le ;;oiiverne-
ment anglais avant résolu de frapper
438 KEl
un coupmortél à l'Espagne, lord Keilh
se dirigea sur Gibraltar, et de là dan»
la baie de Cadix avec la flotte et les
transports, ayant à bord sir Ralph
Abercromby et environ dix-huit mille
hommes de troupes sous ses ordres.
Quoiqu'une maladie contapeuse en-
levât chaque jour un grand nombre
d'habitants de cette place , le gou-
verneur , don Thomas de Maria , fit
connaître sou énergique intention de
périr avec toute la garnison plutôt
que de capituler. Une correspon-
dance réguhère s'étant établie entre ce
gouverneur et lord Keith , le projet
de descente fut abandonné. C'est vers
cette époque que l'armée française, en
Egypte, se trouvant dans une position
critique, le général Kléber, qui la
commandait, conclut avec sir Sidney
Smith la convention del Arisch, par
laquelle il consentait à évacuer ce pays
sous la condition que ses troupes se-
raient transportées en France, avec
armes et bagages. Déjà, en exécution
de ce traité, il venait de livrer aux
Turcs tous les forts de la Haute-Egyp-
te, ainsi que Damiette, et il se dispo-
sait à évacuer le Caire, lorsque lord
Keith, sous les ordres duquel Sidney
Smith se trouvait placé, refusa de rati-
£cr la convention , déjà exécutée en
partie par les Français , et exigea qu'ils
missent bas les armes et se rendissent
prisonniers de guerre. Cette proposi-
tion fut mise à l'ordre du jour de l'ar-
mée française, avec cette courte et éner-
gique proclamation de Kléber: « Sol-
«c dats ! on ne répond à de telles inso-
« Icnces que par la victoire! préparez-
i( vous à combattre. » L'indignation
des soldats fut excitée au plus haut
degré; et la victoire les accompagna par-
tout, suivant la noble assurance de leur
général (Fo/. Klébkr, XXII, 463).
Au commencement de l'année 1801,
le gouvernement anglais, déterminé à
enlever l'Egypte aux Français, y ren-
KEI
Toya une flotte formidable commandée
par lord Keith, avec dix-sept mille
hommes de troupes sous les ordres
de sir Ralph Abercromby. Le 1"
mars (1) , on jeta l'ancre dans la
baie d'Aboukir, et du 7 au 8 le débar-
quement des troupes s'opéra sous la
protection des batteries de la ilotle.
Les événements ultérieurs et par suite
desquels l'armée française fut obli-
gée d'abandonner l'Egypte ne con-
cernent que secondairement le com-
mandant de la Hotte anglaise, quoique
les rapports qui furent publiés à ce su-
jet prouvent qu'il seconda puissamment
l'armée de terre par ses bonnes dis-
positions et par ses conseils (Voy.
Abercromby, T , 77, et Menou ,
XXVIII, 319) (2). Lord Keith, qui
avait été nommé amiral de l'escadre
bleue à la promotion du l***^ janvier
1801 , reçut les remercîments des
deux chambres du parlement , lors-
que la nouvelle de la conclusion des
opérations en Egypte parvint à Lon-
dres. Le 5 déc. 1801, il fut créé ba-
ron du Royaume-Uni ; la corpora-
tion de Londres lui présenta les privi-
lèges de la cité dans une boite d'or
avec une cpée de la valeur de cent gui-
nées, et il fut autorisé à accepter l'or-
dre du Croi.ssant que le grand-seigneur
établit pour perpétuer le souvenir des
services rendus par les forces anglaises
à l'empire ottoman . A la paix de 1 802,
Keith revint en Angleterre, et cessa d'ê-
tre employé activement jusqu'au renou-
vellement des hostilités en 1803, oii il
fut nommé commandant en chef de tou-
tes les forces maritimes delà Grande-
Bretagne dans la mer du nord et dans
le canal jusqu'à l'ouest de SelseaRill.
La nature de ce commandement, aussi
étendu que compliqué, consistant à la
(i) c'est par rrrenr que 11- rôd.K leur anglais
i!e l'v4,iiiual hiograj,/tical Oùituar/ p\acti cetiwè-
neincnt au a5 innrs.
(ï) On a rcprocLé à lord Keith <î'a*oir traité
avac ptu d'égards 1« brava g«n«ral Dssaix.
KF.I
Jois fil piu« ilr rciit Mil;;! \oilf>, l'o-
bli^rail à s'eulilir sur le ri\a^e ilans une
ktJlioii roinriiahir, pour uuintriiir s;i
currr^ponibiirc à\ec \ci, loriis ile l'ami -
raule et le* oflif.riN cominamlants rni-
plo>n M)U> Nfj (ti (1res dans \t^ Diiiirs,
à I)un»;fMfv-i, Sliccriirs , Yarinoutli,
I^icl, el tlaiK Ifs différentes Malions
placées 50u« snn inspection, ainsi qttr
pour la di.sltibulion el 1rs stalions île»
navirei , qu'on a\ait ju^e nécessaire
cl'emplo>er à la défense de IVnIrre de
la laniise. Ce fui à hlasl Cliff , près
de Kams^ate , ipi'il liia sa ré^idenre ,
mais , de temps cm lemps, il se ren-
dait à bord de son \ai se.)u pavillon,
ioit pour rernTJtnitT U ^ r ip-, dr Fran-
ce, soil j>. contre
lalloltilie. .{.-l'An
t^lelerre. Au commencement d'ofl.
1H0:{, il Gt l'essai d'un nouveau mode
d'attaque contre les chai oupe.> canon-
nières de Boulo;;iie, qui ne réusil
qu'en partie. Kieve.à la fin de 1805,
au ran^ d'amiial de l'escadre blanche,
lord Keilli continua de diriger son
important commandement jus(]u'au
mois de mai 1807, que l'amiiauté
ayant cru devoir le divist-r en trois, il
se retira. En ISIJ, il succéda i sir
Charles(^»lion comme commaiiiiant en
chef de la Hotte du can:il, et fut créé
vicomte au mois de nui 181 i. Tes
ëu'nemenis de la campagne de France
ayant chanr;é la face des affaires, il
accéda avec empressement à la propo-
sition qui lui fut faite au mois d'a^riI,
au nom du fi;«»uvernement provisoire,
f>ar le contre-amiral .laroh, de cesser
es hostilités. Ce fut à bord «le l'un
des navires sous ses ordres que Napo-
léon se rendit après la désastreuse cam-
pa;^ne de Waterloo 11 posa , le ti3
mai 1815, la première pierie du pont
de Soutliv^arl , renit, en lS-22 , la
grande -croix de Saint -Maurice de
Sardai^ne , et mourut à Tullialan-
Houâcle 10 mars 1823. Lord Keith
KEL
i.^0
ne laissa que deux filles des deux ma-
riages qu'il avait conti actes. Sa bile
aiaée iMar;^aret Meicer Kl|>)iiiistoiie
épousa, en 1817, le comte i\c Flaliaut,
qui avait seivi comme aide-de camp de
I eni|>ereur Napoléon à la bataille de
\Valerlt»o. 1) — z — s.
KKLLKli tie comte Douuth^k-
I/)UIsChmstophf. de\ ministre d'é-
tat pru.vsien , était né à (iotha le
ll> février 1757. Son père, le ba-
ron de Keller, a\ait été ministre du
di.c de Wurtemberg!. Sa mère , née
Maucttenheim \\ ' ' ' n lui fit don-
ner une excellri n *ous ses
veux, après quoi clic 1<- laissa partit
pour le> universités de (»(rllin;;iie el de
Strasbourg. I.e jeune keller voulait se
vouer à la carrière diplomalicpie : il
entendit le célèbre l'iitter professer la
statistique, le savant Schlosser tour à
tour résumer et développer l'histoire.
Fort de ces études pi éparatoires , il
passa bienlAt de> cours académiques
dans une de ces petite; chancelleries
qui fourmillaieat en .Kilema;;ne, et tra-
vailla dans le cabinet du baionde Dal-
berf», alors à Frfurt, d'où il administrait
l'électoral de Ma>enre. Mais sa mèie
faisait solliciter pnîT hit .t lierlin. I,c
résultat «h- ■ une nomi-
nation deco .'.on au dé-
partement des allaires elran;;ères de
Prusse , et peu après le titre de cham-
bellan. Ces bienfaits le pénitrcrent de
reconnaissance. Il ne s'en livra qu'a-
vec un 7.èlc plus vif aux travaux pro-
pres à lui rendre familières toutes les
matières diplomatiques, administrati\es
et judiciaires. 11 traduisit en fiançais la
savante déduction que le baron de
Herzher;; avait rédii:;ée sur la surces-
sion litigieuse de Bavière (1778). Il sut
également se concilier l'amitic' du j^rand-
chancolier, le comte de Fmkenher;^.
Aussi, malj;r.- sa jeunesse, fut il nom-
mé char^^éd'affaircs de Prusse en Suède,
dès 1 779 . Celte destination , pi us avan-
44o
KEL
taf;euse que ce qu'il demandait quel-
ques mois auparavant (le litre de secré-
taire de légation en Russie) , lui four-
nit les moyens de débuter avec honneur
dans la carrière. C'était le moment où
l'ambition britannique voyait avec ef-
froi Catherine imaginer la neutralité
armée. En dépit des intrigues et de
l'or du machiavélique cabinet, Keller
obtint de Gustave 111 l'adhésion de la
Suède à l'acte si juste et si heureux qui
liguait toutes les puissances maritimes
contre la tyrannie de l'Angleterre, et
qui, si la révolution fran(;aise ne fut
venue brouHler toutes les relations,
toutes les alliances, aurait élc fécond
en grands résultats. Il eut ensuite le
bonheur de contribuer à la réconcilia-
tion tardive, il est vrai, de Louise-
Ulrique, sœur de Frédéric-lc-Grand,
avec le roi son fils (1782). Les affaires
de Suède, au reste, n'exigeaient pas une
présence continuelle; et , en 1783 et
1784, tandis que (lustave, sous un
diaphane incognito, faisaiten Franceet
en Italie un de ces voyages alors à la
mode parmi les souverains, Keller
passait la plus grande partie de son
temps à Ikrlin. Il était do retour à
Stockholm quand le vieux Frédéric
reconnut ses services , en le nom-
mant son représentant à Saint-Péters-
bourg; et Frédéric Guillaume II, qui,
quelques mois après, ceignit la couronne
de son oncle, ne revint pas immédiate-
ment sur cette mesure. JMais on appro-
chait du second partage de la Polo-
gne : les deux cabinets s'aperçurent
bientôt que pour préparer des événe-
ments de cette importance il fallait un
ambassadeur plus mûr. Keller fut donc
un peu cavalièrement nanti dn titre
d'envoyé extraordinaire aux Pays-Bas
où venaient d'éclater des troubles assez
analogues à ceux qui naguère avaient
failli ravir le stathoudérat à la maison
d'Orange, et qui avaient donné à la di-
plomatie comme à l'armée prussienne
KEL
une si belle occasion d'intervenir. Ce-
pendant, avant de quitter le Nord ,
Keller eut part à la médiation de la
Prusse entre le Danemark et la Suède
alors en guerre avec la Russie et par
suite avec Christian VII. Arrivé à sa
destination , il assista aux conférences
de Hamm entre les puissances qui s'in-
téressaient à la révolte de la Belgique
(la Prusse, l'Angleterre, la Hollande,
TAutriche) , et signa la convention
de La Haye du 10 déc. , en vertu
de laquelle les trois premières garantis-
saient à la quatrième l'obéissance des
provinces rebelles , à celles-ci le ré-
tablissement de leur constitution ,
convention que Léopold II , quel-
que différent que fût son système de
celui de son prédécesseur, .losepli, ne
voulut ratifier qu'en le modifiant. L'as-
pect menaçant de la révolution fran-
çaise avait peut-être accéléré cette
transaction; et les cabinets ue Vienne,
de Dresde et de r>errin ne tardèrent
pas à concerter ensemble des plans tout
autres, en vue des prochaines éventua-
lités que des troubles un peu plus gra-
ves que ceux de P)riixelles et (rAmsIer-
diim leiM" laissaient apercevoir. Tou-
jours chargé d'affaires de l*russe à La
Haye, Keller n'eut rien à faire dans
cette premine partie delà lui le contre
la démag();;ie française. Il venait d'é-
pouser à Aix-la-Chapelle une sœur du
général russe comte de Wlttgenslein-
Rernebourg (1790): Frédéric-('nil-
laume l'avait crée comte et, dès 1788,
l'avait gratifié de l'expectative d'un
canonicat à Cammin. 11 est vrai que
l'expectative ne se réalisa jamais, et que,
lorsque le chanoine dont il attendait
la mort décéda, le chapitre n'existait
plus. iSous le retrouvons en mouve-
ment , dans cette fameuse année
1793, si fertile en franches horreurs
sur les échafauds de Paris , si fertile
eu duplicités diplomatiques sur le théâ-
tre de la guerre. Déjà la Prusse et
KtL
l'Autriche, m d^il Jr rautucilfs pro-
Irslalioni de iif^in(érei<fment r( d'u-
nioii, iiijircliairtit i |ijrl . le jruiir rm-
ftereur rljit a Uruirllrs nr^ocunl avcr
e «;ou\frnemrnl de KubfApifirc , el
la l*rii*4f ne rombatlait que nmlle-
nirtil dans \rs clcrtorats ccclf>ia<klii]UC4.
1/ Vii^lelerre, pour rc^>crrer Irs niruds
làrlirs de la rnalilion, indiqua un ron-
ptCN à AiMffs. Sur l'ordre du duc de
hninsvkirl. Keiler s'v rend:!. I,e duc
d'^orcL el le prince de Sate-(.4ibour^
\ riaient. Kn \ain ce dernier lenla de
donner aux deu\ puisvances allemandes
un peu de \i;;Meur. Au lieu de prendie
ro(Tcn>i\e ainsi qu'on le pouxail si fari-
Irmenl à celle époque, au lieu de niar-
clier sur Paris, on modifia le plan de
rann»aj;ne comme hasardeux , • omme
téméraire, et (^l)our;; adoucit les fx-
f tressions de son manifeste qui euisent
roissé les oreille» •le^ révolutionnai-
res. (}ette polilii]ue , aussi timide que
fallacieuse , n'avait point l'approba-
tion de keiler , et il ne pressentait
que trop à quoi elle aboutirait. I/an-
née suivante, dès que les Fiançais eu-
rent traxersé le \N alial sur la ^lace,
il ilépériia une eNiafetle à Berlin, pro-
pliélisanl que, m par une prompte et
dériNixe mantru\re la Prusse ne se hâ-
tait d'> metlie obstacle, la Fiance
allait sous peu se trouver maiiresse
et d'Am-terdain et de toute la répu-
blique des l*rovince5-l iiies. I.a pro-
pliélie se léalisa plus Mie encoie qu'il
n'rùl osé le penser. I.a conquéic delà
Hollande destituait Keiler., On sait
a\er combien d'impassibilité le cabinet
de Keilin voyait marclier des événe-
ments qui ne le touchaient point imroé-
dialemcut if'oy Kalckiiei TH, dans
ce vol.^ : la clairvovance , l'animosilé
de Keiler contre la France n'étaient
point des titres péremploires en sa fa-
veur près des favoris de Fiédéric-
liuillaume 11 On lui laissa donc am-
plement le temps de voir les pa-
KFL
44'
rents de sa femme dans le Ilolstein, et
d'aller en Tluirinj;e visiter ses pro-
pnétr». l II iiioMient on le dciij;na
pour iepii->ciilcr la l'russca .Masence,
c'est-à-dire pour réclamer cl faite ren-
trer les sominc> auxquelles la INusse
prétendait comme protrcirirr des cer-
cles expoȎ> qu'elle nr pruic^rail pas.
Mais (iirlli, ciiar-é de cel offuc,
continua de l'exerrei , ri kellrr resta
encore en rep«»s )us(|u'en 17U7. .V
celle époque l'Autriche vaincue en
Italie semblait à la veille de faire la
paix avK le Diiecloire, unis la l'rusNe
qui lui en a>ait donne l'exemple ap-
préhendait, nonsans raison, qu'elle ne
se samat en sanifiant l'empiic ilont
elle a\ait la présidence, cpi'elle nr stipu
ht en même lernps que M>n a;;iandisse-
menl le stu/u ifuo» re;;.inl des aiilies,
et qu'elle ne \iiit à boul d'olcr au cabinet
de Ue'liii l'amitié du ;;ou\ernrnii-nl
français, keiler, envo\é à Vienne
pour éventer ces intrigues, n'y réus-
sit qu'en partie; car rhu;;ut el les
deux Cobentzl ;;arderent bien leur se-
cret, el ce n'est ^uére que par les jac-
tances de la France que l'on sut a lîer-
lin lescIauNCS secrètes de ("anij'o-For-
mio Le jeune comte pouiianl n'i;;iio-
ra pas tout, et ses lellies mirent bien
son ;;o:i\crnernent sur i.i xoie, mats les
é\ènriiieiil>eui-iiieiDi'scii diicnl bienir'it
pluN que loul le lesle; l'occupaiion «le
Ma\ni(e suituiil fraj>pa de stupeur
touie r.Vlleina^ne. Sur cc> eiiticfaites
Frédéric-Ciuillaume II inouiut cl il eut
pour successeur Fie.loric-Ouillaiiiiic
III, son GU. Ce dernier appréciait le
comte de k'eller ; il lui donna «le sa
main à Nci^s la croix de rAi;;le -
!^ou;;e. Mais comme tout alors sem-
blait s'acheminera la paix, et comme
la Pru>se allait avoir besoin de la
Franre, pour s'arrondir par les scculari-
salions en perspective, il ne lui donna
qu'un traitement de disponibilité. I^
recrudescence de la guerre après le
442
KEL
guet-apens deRastadt ne modifia point
CCS arrano;ements. Il eût fallu pour
rendre Keller à l'activité un chanf^e-
menl complet de système. Ce change-
ment fut près d'avoir lieu en 1805, et
Keller était désigné pour entrer au
ministère : mais les partisans de la
France révolutionnaire triomphèrent
encore une fois, et amenèrent enfin
la crise dont peu s'en fallut que la
Prusse ne revînt jamais. Keller vit
avec la plus amère douleur les catastro-
phes de 1806. Après la bataille d'Iéna,
il se rendit à Vienne pour y réclamer
le concours des hommes d'état , pour
provoquer quelque diversion , quel-
que manifestation utile aux provinces
prussiennes encore vierges du contact
de l'étranger. Peut-être aussi eut-il
mission de voir l'eiiipereur en per-
sonne , de le sonder, de lui communi-
quer à lui-même les sentiments du mo-
narque prussien. La paix de ïilsitt,
si brusquement conclue, coupa court à
ces communications, et Keller ne fut
plus admis ostensiblement au service
prussien. Ainsi le voulait la prudence.
Ses biens étaient situés la plupart dans
l'Eichsfeld; et l'Eiciisfeld venait de
passer sous la domination de Jérôme-
Napoléon. A la lettre par laquelle il
donna à Frédéric-Guillaume ces tris-
tes informations , ce prince répon-
dit en l'engageant à éviter tout ce qui
pouvait inutilement le mettre mal avec
la prépondérance française ; et plus
tard, le comte étant venu à Berlin lui
exprimera quel point lui pesaient ses
relations involontaires avec la cour de
Cassel, il lui fit dire par le chef de son
cabinet de se tranquilliser, de prendre
service chez quelque prince allemand,
et d'être sûr qu'il lui serait tenu
compte de ce temps passé en service
étranger. Le monarque assura même ,
en attendant des jours plus lieureux, à
M™*' de Keller une pension qui réel-
lement était donnée au mari pour ses
KEL
services et sa fidélité (1808). De
1807 à 1810 pourtant, le comte de
Keller passa la plus grande partie de
son temps dans le royaume de West-
phalie. Deux fois élu membre des états
du nouveau royaume , il assista aux
deux sessions de ce corps à Cassel, et
deux fois il fut porté par une forte ma-
jorité à l'une des cinq places du comité
des finances, ce qui le fit nommer par
Jérôme membre de ce comité. Ce frère
de Napoléon le décora ensuite de l'or-
dre de la Couronne de Westphalie, et
le nomma conseillei-d'état. Keller, qui
évitait de toutes ses forces les bienfaits
d'un régime qu'il voulait haïr, et qui,
lors même qu'au nom des états il pro-
nonçait l'adresse usuelle au monarque,
ne le louait que de son désir de bien
faire, se trouva fort heureux lorsque un
jour enfin le grand-duc de Francfort le
manda pour lui confier ses affaires liti-
gieuses avec la France, et l'envoja les
plaider à Paris. Il s'acquitta de celte
mission en négociateur consommé, et
fit rabattre deux millions cent trente
mille francs des cinq millions huit cent
quatre-vingt mille (]uc la France pré-
tendait sur le grand-duché de Franc-
fort ; et il fit admettre au prix de six
millions le réméré (ou si l'on veut la
résiliation de la vente) des biens do-
maniaux du comté de Ilanau et de la
principauté de Fulde. Napoléon signa
ces clauses, et Keller envoya ce traité
presque inespéré à son nouveau maître.
Il se trouvait encore en France en
1813, quand les événements d'Alle-
magne commencèrent à faire pâlir
l'étoile de Napoléon. Soudain il de-
mande ses passe-ports que l'autorité ne
lui délivre ni ne lui refuse : il part alors
sans plus attendre , il arrive , puis se
rend à Francfort-sur le-Mein et de là
dans Aschaffenbourg. Le grand-duc eut
l'air d'improuver ce brusque retour, cl
Keller alla donner un coup-d'œil à ses
terres de Thuringe. 11 reparut après la
REL
lijlûillr dr I f, tout radifui,
^ola ;iu uuj j1 «if NN itlj^rri-
stnri, sou brau iirrr, frlirila \e rui dr
l'rus%« du I rtour de ^J iurtune, et reçut
•uinpluriixinfnt cliez lui rei-élrcleur
df liose-C^uel, si frucllcracnt dé
puutlié après la campagne de IHOG,
et (lui à présent \enait du fond de
Texit repreiidie possession de ses états.
! ourlié dr l'arrnfil <lr kcller, ii le
nomma son en> o> r auprès des trois mo
nar(|ues allies, el luiptopnt la prrmirtr
place de son cabiiiel. C'est a^er ce-,
assurances que Krilrr »ui>it les allies en
France et revit l'tns un an aptr> l'a-
voir quille fuilixrmenl. Il n'eut au-
cune peine à faire admettre pro>isoi-
(ement que l'électeur administrerait
les étais soumis asant 1807 à sa do-
mination; le même principe s'éten-
dait à tous les princes dépouillés de-
puis huit ans. Il alla ensuite à \ ien-
ne, accompagné d'un second plrinpo-
irntiaire J.rprll , ri dans les ariange-
menls tlrfiniiifs du celélur conjures, il
stipula liabilriiienl 1rs inti-réls de l'é-
lecteur, ainsi que ctux de la maison de
lirunswick dont il riait aussi charge.
Il si^na au nom des deuK princes
l'acte Gnal du congrès et , quelques
jours après , l'adhésion à la quadruple
alliance îles quatre ;;randes puissjnres
contre l'echauffouree de Bonaparte,
re\cMiu de l'île d'IJbe. Il >it enGn
mrablés tous les vœux de son cœur.
Le roi Krédéric-(iuillaume , au.ssiiAt
que le conjurés de Vienne fut fini,
I en>ova réorganiser, sur un plan con-
venu a l'avance, le cercle «l'Urfurt
qu'avait si lont;-tem[>s occupé l'admi-
nistration française centrale , puis le
nomma président de la régence (ou
tribunal d'appel d'Krfurt]. Kn même
temps il était commissaire pour l'exé-
culion des edianges ou cerisions mu-
tuelles entre Saxe-Weimar et la
lVu5.se. entre la Prusse et la maison
de Schwartibour^. ba 1819 cnÊn, il
KEL
443
o*eat plus que la directioa des affaire,
diplomatiques près lc> cours saxorinr>
de la li;;nc crnestine, près les ducs
d'Anlialt,près les princes drSchwarli-
bour^; et dr Ueuss. Criait toujours de
la diplomatie, mai> au fond c'était une
sinécure. Ktfurt riait sa résidence; et
le lieu ou a^ait commencé sa carrière
d'homme d't-tat la \\l aussi finir ; il
mourut le *J'J iio\ . 1827, a Stedten ,
non loin d'Kifurl. F — ot.
K K L L K H ( (àtoïK.i ) , auteur
prrMiinr des crirbrrs Slumim lier
.-imlin hf,UAi\\i\l le limai ITtiO, près
de llonndorf, dan% la Korrt -Noire.
Son père était maréchal-ferrant et
sou\ent il traitait ses enfants a\ec la
rudesse d'un bras habitué i dompter
les métaux, (^ux-ci ne s'en réfu;;iaienl
qu'avec plus d'amour sous l'aile d'une
mère dont la douceur formait con-
traste avec le dur caractère de l'iras-
cible for;;eron. Celle imprevsion ne
s'effaça jamais de l'anic dr (ieor^e, et
dès l'enfance le di>po>a .lux sentiments
tendres et intimcN, qui, jar une rirange
antinomie, ne reinprrhaient pas d'être
colère, jaloux, haineux et >anilrux au
suprême de^re. Il a^ait beaucoup de
mémoire et d'aptitude en tout <:rnre.
De l'école des bénédictins de > illin-
gen, il passa au >;vmnase de Fnbour^;
tenu par les jésuiles, puis à l'unirer-
site de Vienne où il termina ses étu-
des philosophiques, et se mit à l'ana-
tomie et à la pathologie. Partout il
fut remarqué comme un des élèves qui
donnaient le> plus hautes espérances.
Mais tous ses moments n'rtaicnt pas
voues au travail , et ses dépenses un
peu fortes dans la capitale de l'Au-
tnche fatiguèrent hinitot son père ,
qui le rappela péremptoirement. 1^
jeune homme revint desespéré ; puis
lise résigna. Tous ses souvenirs d'en-
fance a\ aient refleuri suaves et bril-
lants. Il s'était rendu à une messe de
l'abbaye de Saint-Biaise. La poésie
444
KEL
sublime des pompes catholiques , le
chant, les orgues, la richesse de l'ar-
chitecture, ratmosphère pure et calme
du lieu snint, tout cela Tavait saisi. Il
n'aspirail plus qu'à s'enfermer comme
novice à l'abbaye. On l'admit sur-le-
ciiamp (1778); et, sept ans après, il
recevait la prêtrise ù Constance. Ce
laps de temps , entre son premier
pas au monastère et l'instant qui le
consacrait irrévocablement au saint
ministère, s'était écoulé en études so-
lides et variées. Sou supérieur, l'abbé
Gerberl, qui appréciait son caractère et
son talent, lui lit professer neuf ans
durant la philosophie, les antiquités,
la diplomatique, le droit ecclésiastique,
l'histoire, et lui fit faire de fréquents
vo)af!;es aux frais du couvent. Kcller
pendant ces excursions noua de nom-
breuses relations avec les savants, et re-
cueillit de précieux matériaux dans les
abbayes de la Souabe pour l'histoire
des évêchés de Verden, d'Augsbourg et
d'Eichsta?dt. Il fut ensuite pourvu de
la cure de Gurtweil aux environs de
Waldstat, puis de celle de Schluchsee
où il passa les plus heureux moments
de sa vie, sur les bords délicieux du
lac de Constance, au milieu de sites
charmants et tout pi es de l'abbaye qu'il
aimait. L'année 1803 vit finir ce bon-
heur. Le pnncc-abbé venait de mou-
rir : il s'aj^issait de lui choisir un suc-
cesseur, Keller fut un do ceux qui eu-
rent le plus de voix; un seul parmi ses
confrères en comptait autant. Enfin
pourtant l'élection lonj^-temps balan-
cée se termina en faveur de ce rival de
tout point inférieur à Kellei'. Jamais
ambitieux désappointé ne se livra plu*
immodérément à sa fureur que l'ex-
curé de Schluchsee. Il ne se plain;nit
pas seulement de la fortune, de l'in-
justice des hommes, de l'aveuf^lcment
du siècle; d ne se borna point à voci-
férer des invectives contre ceux dont
les votes malencontreux avaient donné
KEL
l'avantage à Bertold, ni à voir un noir
complot et des intrigues infernales dans
l'échec qu'il éprouvait: il enveloppa
tous les monastères, toute la catiiolicité
dans la haine qu'il avait vouée aux au-
teurs de ce revers. De vive voix et
par écrit , dans l'intimité et en pu-
blic , il redisait à plaisir , non pas
ces plates épigrammes, mais ces inju-
res surannées, que l'impiété, l'étour-
derie, le mauvais goiJt, ont tant de
fois répétées contre les sociétés mo-
nasti(iues. Le cloître était la grotte
cimmérienne , asile des ténèbres, la
geôle et la géhenne de Pesprit, le pou-
lailler de l'hérésie, etc. Luther, dans
ses jours de triviales joyeusetés, n'en
a pas plus dit. Et pourtant qu'était-ce
en 1803 qu'un prince-abbé? Les
princes-abbés n'avaient pas plus de
trois ans à vivre. Déjà nombre de
couvents avaient été sécularisés au
bruit du canon des Français, et le tour
de Saint-Rlaise n'était pas loin ! Ne
pouvant s'habituer à vivre simple
moine dans les murs de rabba>e,
l'abbé manqué se fit donner ou ac-
cepta une autre cure : ce fut celle de
Wislikon en Argovie, et de là il prit à
tache de nuire à l'élu et à ses électeurs.
Ses sarcasmes et ses criailleries eussent
produit bien peu d'effet, si la France
toujours victorieuse n'eût enlevé à
l'Autriche, pour les donner à qui bon
lui semblerait en les sécularisant, ses
possessions du Brisgau. Cette spoliation
qu'en tout autre circonstance, el sur-
tout s'il eût été abbé, Keller eut re-
gardée comme le comble de l'injustice
et de l'impiéié, le transporta de joie.
Il était vengé : les pauvres bénédictins
étaient dispersés , l'abbé n'était plus
prince. « J'ai vu Bertold se carrer à
« la diète Je n'ai fait que passer,
« il n'était déjà plus. » keller eut
encore de beaux jours. Libre, lui aussi,
du lien monastique et nommé curé
de l'église dont venait d'élre nouvelle-
KEL
me nr i\o\rt la villf d' Arau, il »*> vo^ ait
^uùif, aimr, \aiitf. On rrchercliait
»a cuii\rr»aliuM , on accourait à ^rs
5frinon5 ri on Ic4 applaudissait ; envi-
ronnr de 5a\anl> ou d'iiomnirs da
mondeirunfspriltrrscultixf, il a\ait le
l'LiMr df l'cmpcjrlfr sur eux tous et de
srnlir que presque tous reconnaivsaient
«'a supriionlr. Kl, quand \r\ Stun-
itrii ttrr hulacltt parurrni . itipiiiion
In lui atli ibua ; la manicre dont il s'en
drfriidil n'rlail pas failc pour di'.Nua-
dn : la curiosité s'avivait encore et un
rlurme m>Nterieu\ enveloppait la per-
sonne de l'auteur. Mais il n est pa« de
gloire qui n'ail son amertume. Si les
auditeurs de Keller étaient tous admira-
teurs de son elocution facile, éléj;ante,
animée et peisua>i\e, ils n'étaient pas
lou> édifiés de ses idées : lU trouvaient
son lan{;aj;e trop lil>éial, son ratlioli-
cisme trop voisin des Iconoclastes et
de Luther. Ses sermons improrisés
pi étaient suitout le liane aux attaques :
rapide parleur, il ne délimitait pas lou-
|ours sa pensée avec la ticrnière préci-
sion ; n'écrivant point, il ne fixait pas
invincildemrnt sa parole de manière à
erapédier qu'on ne la travestit. On lui
reproduit encore d'être ami du crlè-
bre Dalbei;; et de son vicaire-;;énéral
le baron de \N essenberc^. De tout
cela il résulta que les catholiques scru-
puleux virent Keller de mauvais u-il,
que le nonce du pape parta>;ea cette
antipathie, et que moine au sein de sa
ville , où il comptait le plus d'amis
et d'admirateurs, Relier eut a .soutenir
une polémique irritante et à subir des
drsa^iemcnts quotidiens. Ces circon-
stances et aussi son inconstance natu-
relle lui firent abandonner Arau. Il alla
se fixer à Zurzach en qualité de cure et
doven de chapitre: mais il s'en fallut
de beaucoup qu'il trouvât l.i un audi-
toire bénévole, le comprenant ou as-
pirant a le comprendre; étroilessc d'es-
prit, jalousie et calomnie, voilà quelles
KtL
445
dlipûsitions l'accueillirent. Qu'on )U};e
ce que dut rtic cet enfer pour un
homme dont l'orgueil dépassait toute
expression. Méconnu , épié , tiraillé
de tous côtés comme si l'on eût for-
mé le complot de le tuer à coups
d'épin;;les , au bout de deux ans il
n'v put tenir et fut heuieux d'avoir
pour refii;;e un poste bien infrrieur à
(îraffriihausen. Kh bien I là encore il
sut se faire des ennemis , la populace
animée contre lui le réduisit à s'enfuir.
(^est qu'effectivement une cuie de
campa<;ne n'était pas faite à sa taille:
un aigle ne peut se déployer en cage,
il V végète, il T brise se* ailes et
meurt. \jl vraie place de Keller aurait
été une chaire de faculté dans une
f;rande ville: il y pensa bien, et il »«)l-
iciia celle de r ribourg , mais il ne
l'obtint point. Son dernier .séjour fut
la cure de l*faffen>»eiler aux environs
de Fribuurg en Bnsgau : il n'v fut pas
plus heureui, il > letrouva 1rs mêmes
mirurs, les mêmes esprits, les mêmes
préjugés. H s'isola davantage. Mas
s'isoler est crime selon les êtres soup-
çonneux qui croient toujours ou qu'on
le» méprise ou qu'on a de» m> stères à
cacher. Sa réputation d'ailleurs était
partout répandue; mais dans des pro-
vinces reculées , dans des hameaux,
cette réputation était fâcheuse : il était
le prêtre impie, le moine apostat, le
prédicateur hérétique. Ce n'est pas
tout : sa paroisse était pauvre, il n'était
pas riche, il n'avait rien économisé. La
vicille.sse et riinligencc se reunissaient
pour accabler le pauvre ermite, en butte
déjà au mauvais vouloir de tant d'en-
ennemis. l'ne fois pourtant la régence
du canton d'Argovie lui fit tenir spon-
tanément cent ducats ; Keller en fut
touche aux larmes ; mais les créanciers
et les maladies les eurent bientôt dé-
voré^. Keller mourut ain>i de mille
morts dans une longue et douloureuse
agonie, lui que la nature avait dote si
446 KEL
heureusement, lui qui, s*ll eât voulu,
aurait pu vivre considéré , paisible et
riche, et qui peul-étre, s'il n'eût pas
blessé ses confrères par les saillies de
son oîf;ueil, aurait été élu à celte place
de prince-abbé qu'il méritait par son
talent. Sa fin eut lieu du 7 au 8 déc.
1827. Lesouvrao;es incontestablement
de lui sont ; I. Des Conférences pas-
ivraies pleines de chaleur et d'onction,
mais qui pèchent quelquefois par la lo-
gique,et où il n'est pas sûr qu'une sévère
orthodoxie n'ait rien à reprendre. II.
Idéal pour cha(pie état de la vie,
ou Morale en tableaux, 1818, un
des livres de morale qui captivent le
mieux le lecteur par un charme at-
tractif, mais qui, pas plus que les autres
écrits de Keller,n'a été à l'abri de criti-
ques très-amères et très-violentes. III.
Cafholi'ci/in, 1821. C'est une série
de petits traités où Kcller touche suc-
cessivement à une foule de sujets ; on y
reconnaît la main du maître, surtout
en fait d'histoire. Mais trop souvent
la fureur de l'ex-moine contre les moi-
nes, du prêtre contre la papauté, s'y
donne canière. 11 avait de plus pré-
paré les matériaux des dix à douze pre-
mières lettres de l'/y/^/Z/a^e/ ri' or, grand
dictionnaire de l'histoire ecclésiasti-
que où il eut résumé ce qu'il savait sur
toutes les branches de l'histoire ecclé-
siastique, et où il eût donné son dernier
mot sur une foule de questions. Il pa-
raît aussi qu'il avait travaillé i l'histoire
des évcchcs de Verden, d'Augsbourg
et d'Eichstandt, mais que les manu-
scrits en sont éparpillés dans diverses
mains : il s'en trouve plusieurs aux
archives d'Arau. Restent les Stitn-
den der Andarht. L'éditeur de cet
ouvrage, qui compte au moins quinze
éditions en allemand, et qui a été tra-
duit en français sous le titre de Mé-
ditations religieuses par MM. Mon-
nard et Gence (Paris, 1830-36, 8
tom. en 16 vol.), a déclaré queKeller
REL
n'a eu aucune part à la rédaction (1) ;
et cet écrivain lui-mcme l'a dit tout
haut en vingt occasions, tout en avouant
qu'il s'honorerait d'en être l'auteur.
Mais il est un fait certain, c'est que
rien ne ressemble plus au style, au
ton, au tour d'idées de Keller, que le
style, le ton, le tour d'idées des Slun-
den der Andacht ; c'est la même al-
lure, la même méthode, le même mé-
lange de préceptes et d'exemples , le
même arôme moral, la même brusque-
rie de transitions ; enfin des passages
entiers des sermons que prononçait
Keller dans Arau se retrouvent dans
les Stunden ; et il est plus que probable
que telle ou telle Méditation est un
sermon tout entier. Ainsi le fond des
Stunden der Andacht, au moins pour
une portion considérable , est de Kel-
ler, mais il n'a pas été en relation di-
recte avec le libraire , il n'a pas ré-
digé pour lui. Quels ont été les rédac-
teurs? en quoi consiste leur part de
travail ? Ce sont des questions sur
lesquelles il est difficile de prononcer.
P — OT.
KELLERMAîV]V,DucDE
VALMY (François-Christophe) ,
maréchal de France , offre l'exemple
assez rare d'un officier de fortune éga-
lement bien traité par l'ancien régime
et par la révolution. Il naquit à Stras-
bourg, le 30 mai 1735, d'une famille
distinguée ; son bisaïeul était président
de la chambre des Treize et prévôt des
marchands en 1669; mais cette no-
blesse bourgeoise étant regardée alors
comme bien Inférieure à la noblesse d'é-
pée, il fallut, pour que Kellermann s'é-
levât avant 1789 au-dessus des grades
subalternes, non-seulement beaucoup de
(i) C'fst j.-».rjs cloute ;i tort que Griice «".-.l
désigné sur le titre cuinnie tra(iucl«ur, puis-
<|>if , ne sachant pns In Itini^iie aileinandc, il ne
faisait que retoucher la iruductioii exécutée pnr
M. Moniiard, et dont le uianiiscrit était «iivoyc
de Suisse. C'est ce qu'il nous a dit lui inèinc ,
i-t nous l'avons d'ailleurs vu plusieurs foi» faire
ce travail pânible et ingrat. L.
■éiitret de bravoure, maii «iicore le
roucoula lie circun»ljnces lieuieuscs.
Dan» toule> le^ biu^rai>iiie» publirrs
lie son vi>aiil, on lit que son ^uùl pro
nonré pour Petat inililairc lui Gt pien-
(Ire ilu ser\irc CDinme »iiupie lius>aril
dans le ré^iuient de Lowendabl. Kel-
lermann, qui a\ant luutse faisait liun-
neur d'rlre un enfant delà résolution,
ne nVlama jamais contre cette asser-
tion ;inais il est ceitain, d'après 5es
t'tals de ser\ice,que ce fut comme cadet
qu'il entra dans ce corp4 en 17.')*2, à
I à^e de dix sent ans. Kn 17.'>3, il
passa ensri^ne dan» Ixopl-Bavière ; el
lut noronir heulenaitt aux \olontaircs
d'Alsace, le G mai 17.'>(i. Deux ans
après, il fit ses premières armes dans
la ^urrre de srpf uns. et mérita dès la
première campagne le ;;radc de capi-
taine en second 1,0 a\nl 17ôH) dans le
même corps; puis, l'annce siii\aiite, se
distiD;;ua à la bataille de IWr^liem.
Capitaine à la suite djii> les voluiituires
du Daupliine J 3 a\ril 17r>l\ il justi-
fia cet avancement par une action ifé-
ilat. A l'affaire d'Orsten piè>de\Ve-
sel, il chargea avec son escadron trois
cents grenadiers ennemis, lesGt prison-
niers et s'empara de leur canon. Dans
la campagne suivant!- (t7<»2\ il atta-
qua avec cent cinquante chevaux un
corps beaucoup plus nombreux, et qui
»-tail protr;;é par de> c!iasseurs erabus-
3uésdans un bois. Ti ois cents ^rcna-
lers el une partie de la cavalerie du
général Slieider furent forcés de met-
tre bas les armes de\ant le capitaine
Kellermann, et se leadireut prison-
niers. Le prince de Condë, témoin de
cet exploit , lui Gt obtenir la croix
de Saint -Louis. Kellermann se si-
>;nala de nouveau à la bataille de
Friedberj;. La paix de 1763 , ame-
na beaucoup de réformes dans l'ar-
mée ; mais il n'y fut pas compris, el
pa>sa capitaine dans la le;;ion de G)n-
llans. Le marquis de G)nflaii5, sou dou-
KCL 447
veau colonel, apprécia ses talents et
devint pour lui un utile protecteur. En
1765 et 17ti(), Kellermann fut chargé
par le roi de missions particulières en
Pologne et eu Tartaiie. Kn 1771, il fut
du nombre des ofliciers qui comman-
daient , sous les ordres du bat ou de
\ loroe^nil, les tioupcsen\o>ées en Po-
logne pour appuyer la cuiifrdération de
Bar. Kellermann, aprrs avoir organisé
laca\jlci lequi 5e réunissait dans le l'a-
latinat de Craco\ie, se distingua en
dners combats contre les Kosses daus
le mois de janvier 1772. Forcé à la
retraite par la supériorité de l'ennemi,
il exécuta ce mouvement avec autant
d'Iiabileté que de bonbeur. Uevenu
en France après le second parta;;e de la
l*olo^ne, Kellermann fut élevé au ;;rade
de lieutenant colonel (2 V mars 1772).
Il dc\int major des hussards de (^n-
flans en 177U, et lors de la formation
du régiment colonel -général hussards
;i7S0), il en obtint la lieutenance-
colonelle. Crée brigadier des armées
du roi, le 1***^ janvier 17Hi, il parvint,
six semaines après, au ^rade de mestre-
de-camp en second du même régiment,
puis à celui de maréchal -de-camp, le
9 mars 17HS. Cependant la révolu-
tion de 17S'J substituait un nouvel
ordre de choses à cet ancien régime
dont Kellermann avait moins qu'un
autre à se plaindre. 11 adopta néan-
moins les idées nouNelles , mais en
hammc prudent qui, sans donner dans
les excès, en fait assez pour être du
parti «loininant ; aussi fut-il con^tam-
lueut employé. On le voit , le 12 août
1790, chargé de vérifier la comptabi-
lité des régiments. L'impartialité dont
il Gt preu\c en celte occasion tourna
é;;aleracnl au proGt de la discipline
cl de radraini>tra!ion. li fut compris,
en 1790, dans une des dernières
promotions de l'ordre «le Saint-Louis
cl crée comin.inileur. Nommé suc-
cessivcmeot commandant des dépar-
44»
KEL
tcmcnts du Haut et du Ras-Khin
(1700 et 1791), il découvrit les in-
lelli|;ences que le prince de Coiulé et
le vicomte de Mirabeau entreleuaien't
sur cette frontière, déjoua leurs projets
et mit la place de Landau dans un bon
état de défense.Cependanl tout tendait à
la désorf;anisation dans l'armée comme
dans le gouvernement. Les soldats,
malgré la défense de leurs chefs, fré-
quentaient les sociétés populaires en
Alsace aussi bien que dans les autres
provinces. A \A eissembourg, les offi-
ciers a\ant mis en prison ceux qu'ils
vo\ aient sortir des clubs , les soldats
allèrent chez le colonel demander
grâce pour leurs camarades sans pou-
voir l'obtenir. De là une collision dans
laquelle il y eut des blessés de part et
d'autre. Rellermann reçut les dépo-
sitions sur cette affaire en promettant
de les communiquer au ministre. En
attendant, cet officier général, vieilli
dans le service et (jui devait connaître
le prix de la discipline, sacrifia les prin-
cipes qui avaient dirigé toute sa vie:
il donna raison à l'indiscipline , à la
révdite; et l'on doit d'autant plus le
blâmer, qu'une conduite toute con-
traire lui était tracée }>ar le décret
du 29 sept. 1790, (jui défendait à
toute association d'entretenir des cor-
respondances avec les troupes. Dans
deux lettres au ministre de la guer-
re , qui furent tiansmises à Rassem-
blée nationale , il dénonçait les of-
ficiers comme ayant tenu des propos
injurieux pour la société patriotique
et pour les soldats. Dans la seconde
le'rlre, en annonçant qu'il avait ré-
tabli le calme ; que les soldats fai-
saient leur devoir, qu'ils étaient attachés
à la constitution , kellermann ajoutait
qu^ils ne voulaient pus entendre par-
ler de quelques officiers qui les pre-
miers a^ aient mis l'épée à la main con-
tre eux. De tels sentiments ne restèrent
pas sans récompense. Le 26 octobre
KEL
suivant, les citoyens c\ citoyennes de
Landau lui offriront Mir l'autel de la
patrie une couronne cnique , en lui
adressant les plus grands éloges sur ses
brillantes vertus et connaissances mi-
litaires. <« Vous flattez trop mon civis-
« me, répondit le général à la dépula-
« tion ; car ce que j'ai fait pour la con-
ii stitution, je l'ai fait par la persuasion
« de ces (ju alités précieuses ; et ce
« que je ferai à l'avenir correspondra
« toujours a{>ec les qualités d'un
« homme qui aime profondément sa
« patrie et qui sait apprécier la liberté
« conquise ; » puis il posa la couronne
civique sur l'exemplaire de l'acte con-
stitutionnel nouvellement proclamé, en
jurant de le maintenir jusquà la
dernière goutte de son sang et de
vivre libre ou mourir. Ce dévouement
patriotique lui valut aussi les faveurs du
pouvoir ; et, le 9 mars 1792, il fut fait
lieutenant-général. Au mois de juin
suivant , il marcha au secours de Lan-
dau menacée par les Autrichiens. Les
journaux, inventant à son occasion une
de ces calomnies qui étaient alorssi bien
rerues contre les moines, annoncèrent
qu'ayant dîné dans un couvent près de
Sarre-Louis, il avait été empoisonné
par ceux qui l'avaient invité; mais que
l'effet du mal avait été arrêté à temps
par les médecins. Le 16 août , tandis
qu'au camp de Weissembourg, les gé-
néraux Victor de Broglie et de Biige,
subissaient leur destitution plutôt que
de se soumettre aux décrets de l'assem-
blée prononçant la suspension du roi,
Kellermann , commandant le camp de
Lauterbourg, adhéra avec cnlliousias-
me à ces décrets entre les mains de
Carnot, Prieur et Coustard, commis-
saires près de l'armée du Rliin. Dans
leur lettre à l'assemblée nationale, ces
commissaires firent le plus grand éloge
du dévouement de ce général à la cause
de la révolution dans laquelle, ajou-
taient-ils, il a constamment marché.
KM.
(.4)mmainl.inl Ifi troup« ra^icruLîrcs
ju ram|» de Neukircli sur la Sarrr, il
f ouvrit l'Alsace rt la lorraine, et j\ec
(!:\ raille hommes préserva ce» j>ro\in-
rf> de b dr\. i^tation des Aufricliicns,
qui avaient pav>é le lUiin près de
Spire. Au mois d'août, a\ant retint sous
>es ordres l'armre «!ii l\liiri cl relie de
la Sarre, il se liala de faiie réparer les
l'Inès de la I^ulrr, depuis le moulin
de Pewald ju-^qu'a N> ei Nemlmur;;, et
X elexa des redoutes. I.e 'JH du iiiëiiie
mois, il prit le rnmmaiulrmeiit de l'ar-
rttro en remplaremriil de Lurlner ,
iiDinmé ^ënéralissime. I.e i tepteraltie
il quitta Metz, après l'avoir déiiaré en
tial de ?iè^r, et se poi la sueressixemeiil
à PontàMousson.llat IrDuret I.?^im ,
où il «KTiipa une poMtmii qui le mil à
inrme de se diri;:rr at« besoin vers la
^losflle ou \rrs ("lirions, et de mm-
iiuiniquer a\ec Dninnuriez. I.e mnr.s-
Ire de la pierre Serxan adtesNail
jour par jour à l'assemblre la rorrts-
poiidanre (ie Kf llermnnn, qisi prrten-
l'ail que les ennemis ne fera.riit pa*////c>-
//> de marrliersur l^aris. Kn renciai.t
fxacteraent compte de ce qu'il avait t\é
iité, ie général affertait de parler avec
iiMsirrc de ses opérations prochaines :
•• Ouant à la suite de la marche, écri-
«« vaitil an roiniilre, je \eu\ la faire
M «ans mettre dans la confidciirr hieii
M des };ens indiscrets. Comme je suis
«< toujours prêt, je lève le piquet d'une
•« heure à l'autre. » Il annonrait
en outre qn'j Saint- Dizier les hu.ssards
«le sa lésion s'étaient mesurés plus
d'uTiC fois a^c les Prussiens, et que
toujours ils avaient ru un twantage
nmrtjur. Ce ian};aj;e qui sent un peu la
f.infaronnade, et qui cepend.ml n'était
p.is dans le caractère d»' Kellermann,
s'explique à son i'f;ard par l'inconccva-
Me cohiIlmIc dfs ennemis qu'il ax.nil en
lète. Le d'ic de liiiinswirk, dans celle
j^ucneile in.nciies et de contre-mar-
ches, commettait, en apparence, les
ML Itç,
fautes les plus Grossières. Ka effet,
quand on >oll qce les Prussiens étalent
entrés dan^ N aienncs au moîr.s le 3
sept., tandis que la cote de IJiènie lui
occupée seulement le .'> par Dillon (1);
3u'ensuile, de Clermont où ils étaient
epu;s plusieurs jours, ils avaient Glë
sur leui gauche vers liar-le Duc, au lien
de pouMer en axant pour occuper Chà-
lons, cette de des opi-iatioiis, qui les
eût conduits droit à Paris , un ne
peut s'empêcher de conclut c que le
duc de lUunsvkicL, dans ce semblant
d'invasion, voulait que l'armée fran-
çaise fût avant lui à (ululons. Il s'é-
tait abstenu d'y venir pendant huit
j.. •
jours, pouvant ellecluer ce mouxement
sans tirer un coup de fu.^il. Mais
Kellermann, qt:i n'rlail ja. rncoie
dans le secret des né «orialif » «. entir
le duc de P. «le
l'autre enlir i 1,(5
de Danton et tic l.i'brun-'i i>i:d>i, ne
pouvait <|ue s'émerveiller d'axoi» affaire
à un adxersaire d*an:;>l bonne conipusi-
tion. .Aussi, )u>qii*à Valmv, le même
ton rèj;ne dans sa rorre»poi.dance. I.e
12, il se porta de Saint Diiier »ur
Har-ie -Duc. Ce mni.vement en^ar;ea
les Pru>iien$ à se replirr sur le ^ros de
leur armée. I.e lendemain, d':.j<i es l'.v 15
que Dumouriez 1 l.iil attaqué >ur liuis
points différents, ilpiil le parti de re-
venir à Saint-Dizier, pour couvrir (^.hà-
lons et Paris. On a p:clendu que ce
fut une faute, et qu'il aurait mieux fait
de conserxer les rouler de Viiry et
de Metz qui assuraient sa jonction avec
Dumouriez. Le IS, tandis que lîeur-
nonville arrivait à Notre-Dame de
l'Kpine, Kellermann sentit la iuco>.silc
de se rapprorher de Diiiuouiitz qui
était à Sainfc-Meiiehoiild, cl, le lî),
leur jonction s'opéra à Dampicire sans
que l'ennemi v .ipporlal le moindre
fi) On p«'ut con<ultrr^pour l'intrlliprnce de
c«t article . l» cailo \Mrrée dan» celle lliogra*
pbie (t. I.MII , i»oar l'arliclc Di moi mz.
LTMII
^9
45o KEL
empêchement. Enfin, dans la journée
tlu 20, eut Heu l'attaque des Prussiens
dirigée contre le corps d'armée de Koller-
maiin, qui s'était formé en bataille sur les
hauteurs de Valmy, position (jiie, dans
son rapport, il appelle drsiigrf'able,
mais qui était réellement désavanta-
geuse, et dont, malgré l'événement, le
choix lui a été reproché comme une
faute capitale ( Voy. DuMOuaiEZ ,
LXIII , 160). Là, les Français eu-
rent à subir de la part des Prussiens
une canonnade de huit heures selon le
rapport de Dumouriez, de quatorze
heures selon Kcllermann. Tout an-
nonçait un choc c;éncral entre les deux
armées ; mais l'affaire se borna à une
canorïnade des deux côtés. Nous ne
nuus biillrons point ici^ dit le duc de
Brunswick ; et, s'approchant du roi de
Prusse, qui voulait un eri2;agement plus
sérieux, il lui représenta combien il se-
rait téméraire d'assaillir les hauteurs
occupées par une armée dont la bonne
contenance laissait peu de chances fa-
vorables ; puis, donnant de nouveaux
ordres, il enjoignit aux colonnes d'at-
laque de se replier et de rentrer dans
leur première position. A la vue de
ce mouvement rétrof:;rade, Rellermann
élevant son chapeau au bout de son
épée se met à crier Vwe la nation !
Ce cri répété par toute la li^ne étonne
les Prussiens, qui font un nouveau mou-
vement de retraite, et confirme le duc
de Brunswick dans son opinion. La
victoire est à nuus , mes enfants,
s'écria Kellermann en faisant redou-
bler le feu. Dans l'action il eut un che-
val tué sous lui, et perdit trois cents
hommes tant tués que blessés. Jusqu'à
dix heures du soir il ;;arda sa position ;
mais, craignant d'être tourné par sa
droite , il repassa la petite rivière
d'Auve, en couvrit le front de son ar-
mée et prit un autre camp, sans que
l'ennemi cherchât le moins du monde
à l'attaquer. Par cette conversion , sa
KEL
droite s'appuyant sur le camp de Du-
mouriez, il assura ses communications
et déroba à l'armée prussienne une
grande partie des avantages de sa po-
sition sur le camp de la Lune. On a dit
que la précision avec laquelle ce mou-
vement fut exécuté, malgré la fatigue
des troupes et le mauvais état des che-
mins, équivalut au gain d'une seconde
bataille ; mais que fùt-il arrivé si les
Prussiens eussent tenté de le contra-
rier? Quant à la journée de Valmy en
elle-même, elle ne fut, à vrai dire, de
la part du duc de Brunswick , qu'un
.simulacre de bataille, qu'une canon-
nade insignifiante. En cette occasion,
le prince intrigant, au mépris des in-
tentions loyales du roi de Prusse, s'en
tint à un vain déploiement de forces. On
en trouve la preuve dans la relation
officielle rédigée au quartier-général
de Frédéric-Guillaume : « Du premier
« général au dernier soldat, y est-il
« dit, tous brûlaient du désir ardent
« d'être menés à l'ennemi, et nous
« eussions remporté le triomphe le
(i plus glorieux, si des motifs pré-
« pondérants n'eussent retenu le roi
« de se déterminer à livrer ha-
(( taille. » Ces motifs, ainsi qu'on Ta
démontré dans l'article sur Dumouriez,
étaient évidemment tirés de la négo-
ciation pratiquée secrètement d'un
camp à l'autre , et à laquelle Kel-
lermann était encore étranger. En
effet , il était si peu au fait des in-
trigues de son collègue , que dans sa
lettre au ministre, en date du 19 sept.,
il se flattait de tempérer l'ardeur de
l'ami Dumouriez; ajoutant qu'il ne
fallait pas mettre le sort de l'état au
hasard d'une action générale. Telle
était aussi l'opinion de Servan qui leur
recommandait sans cesse de ne point
livrer bataille. Quoi qu'il en soit, la
canonnade de Valmy eut une immense
influence sur l'opinion; elle releva la
confiance des Français en même temps
REL
■■*tlle 6t évanouir relie Hfs Ptus-
•mft, ri la lounire de fio%bacli fut m
qurique votlc ci>mpeits«rp. « |«-i cr\&-
« brilé de ce (aible combat, dit Mnnt-
■ gaillard, tient à ses suite» imine-
« diatrs ainsi qu'au ^rand effet qu'il
« produisit sur l'esprit national, u
Aufcuip'us, Krllernijnn, qui a>ait eu
un bran monrernent d'audace, fut la
première dupe d'une gloire si facile-
ment acquise. Kn s'entendanl prorla-
mrr partout comme un tiioropnaleur.
il n'eut pas de peine à ^e croire un
héros. I.e .'{ octobre, il écrivait au mi-
nistre de la ;4uerie que la débirle des
l'ni&siens rtaii bien décidée, ce 4fni
proui'r, ajoutait-iî, que tout dépen-
dait de ninn tijftiirr Ju :iU. Ijf lende-
main il écrivait encore ifu'ii sr fèlin-
tait tous 1rs jours He t rttr juurnre.
l'ar la même dépêche, datée du ii, il
proposa au nir M\r de faire chanter
un Te Drum. Ou lui répondit qu'il
fallait faire chanter la MursriHaisf,
que cet hvmne-là riait pius (ligne tir
Jriipftrr les arrillrs liu français li-
bre. Tout ce qu'd obtint du pouvuii
rxrcutif fui un cheval de baSaille pour
remplacer celui qui avait été toé »ott»
lui. I.,es rapports des commissaires
de rassemblée près de l'armée du cen-
tre, Carra, Sdierv et IVieur, conte-
naient .sans ce»*e l'elofje de Keller-
roann : i< Nous atons ttouvé son ar-
«« méedans le meilleur ordre possible,
H di5aient-iU dans leur lettre du "2
«< octobre. La discipline v rr^ne , le
é soldat est plein d'ardeur et de cou-
« ra^e, etc. » Une autre dépêche se
terminait ainsi : « "^ ous ne rhanlons
•< plus ça ira, mais nous rlianterons
«« ça va; et le ;;énéral Kellermawn
« nous prie d'ajouter : çu ira tout
m thii^er (7 oct. ). >» Cependant
plusieurs émij^és se trouvaient parmi
ses prisonniers. Les envoyer à Paris
équivalait à un arrêt de mort. Keller-
nann hésita ; il fit demander par les
KFL
45i
comrai»:»aire5 le^ ordirs de la Convcii-
tioo qui , I- 8 net., décréta, sur la
propostiiundc Ver^niaud, qu'on .ippli-
qverait à ces prisonniers la loi qui
prontnçait la mort coiilre tout émigré
prit les armes à la main. Après cela,
on rej^retterait de voir Kellermann se
livrer, dan» une dépêche lue à la
Convention , à d'inconvenantes plai-
tantenes >ur ces inloi tunes , «i l'on
ne savait que c'était alo*-» pour les
homme, revêtus du pouvoir le seul
movcn de se faire pardonner qael-
({ne« artrs de modération. ■ Mon
•« avant t^arde, ecnv ait-il, a fait dêox
«« cents prisonniers, parmi lesquels se
« sont trouvés de« éini;;rés paHaite-
« ment monté» (>j nrises amusent
« heautoup les sitldats. » \jt l'i, il
annonça révacnalion de Verdun , et
deux jours aprè^ il passa la lieuse.
I*e IS, les Prussiens sortirent de
I^n;;wv; enfin, le 'l'\, KellermasQ
oidoitna trois salves d'artillerie ém
toutes 1rs places de «on rommandemcat
pour si:'naler qu'il n'existait pivs
d'ennemi sur le territoire de la répu-
blique. Cependant les commissaires
pru«iens négociaient tout aussi bien
avec lui qu'avec l)umonriei. \a Moni-
teur lui-même annonça que ces qéné-
raut avaient diné avec les envoyés
prussiens Manstem et .Mas>embach.
Ce furent ces iK';;ociations encore plus
que les déinoii»lrations stratégiques de
kellermann qui .imrnèrent l'évacua-
tion si prompte de ces places. Fit
tout cela n'empêchait pas nos généraux
d'aflecter avec les clran;;er5 le lan^aL;c
le plus hautain. Ainsi le '11 ortobre,
lorsque le duc de Brunswick et Kalc-
kreiilfi cnvovèrent demander urte en-
trevue à Kellermarin, celui ci répondit
qu'il ne pouvait entrer dans aucune con-
férence tant que l'armée prussienne se-
rtit sur le territoire de l.i république.
f.a plus grande union rêvait alors
entre Kellerinann et Dumoaricr, bien
*9-
45i
KUL
que peu de jours auparavant quelque
inësirlelli^ence se fut manifestée dans
leur correspondance avec le minis-
tre de la f;uene. Kellermann avait
non-seulement refusé de passer sous
les ordres de Duniouriez, mais proposé
(24 sept.) un plan de campa{;ne tout
différent. Le conseil exécutif n'ap-
prouva ni les prétentions ni les plans
de Kellermann , qui se soumit de
bonne grâce et n'agit plus dès-lors
que d'après les inspirations de ])u-
mourlez. Ce fut ce dernier qui le mit
hors d'état d'atteindre les Prussiens
dans leur retraite, en ne lui donnant
l'ordre d'occuper les hauteurs de Fon-
taine que lorsque leur armée eut gagné
les défilés de Grandpré; et l'on ne
peut pas douter que ce ne fût une con-
séquence des conventions secrètes entre
le duc de Brunswick et Duniouriez.
L'armée prussienne avait alors deux
marches d'avance. Ce fut seulement le
4 octobre qu'il fut permis à Kellermann
de la suivre d'un peu près. Le 6, toute
cette armée se trouvant réunie sous les
murs de Verdun, Dumourlcz manda
Kellermann à Auliy, puis, après lui
avoir fait part de son intention de se
porter en Flandre, il lui déclara que
désormais réuni au général Dillon ,
il serait chargé de reprendre Ver-
dun et Longwy et d'achever de
cbassfi les coalisés du territoire fran-
çais. Il lui insinua en même temps
qu'il f.-illait moins s'attacher à combat-
tre les Prussiens qu'à les décider par
de nouveaux pourparlers à remettre le
plus promptement possible ces deux
places, et à se retirer ensuite au-delà
des frontières. C'avait été après une
conférence entre Jhunswick et Kel-
leiMiann que l'on était convenu de
livrer aux Français , le 22 octobre ,
une poite de Longwy aux mêmes con-
ditions qui avaient ri'glé la capitulation
de Verdun. Le 24, tandis que l'arinée
priissicnnc était campée à IMurlc près
KEL
de Luxembourg, et que par conséquent
le territoire français n'était plus en-
vahi, nouvelle entrevue autorisée par
les commissaires de la Convention, en-
tre Kellermann et le duc de Brunswick,
qui s'y trouva accompagné du prince
héréditaire de Hohenlohe, du marquis
de Lucchésini et du prince de Beuss,
ambassadeur de l'empereur; « Géné-
« rai, lui dit le duc, nous vous avons
« prié de venir à ce rendez-vous pour
« parler de paix ; >» et en même temps
il l'engage à en poser lui-même les
bases: «« Cela ne sera pas difficile, ré-
« pond Kellermann, qui avait ses in-
« structions : reconnaissez la républi-
« que française le plus authentique-
« ment possible, et ne vous mêlez ja-
« mais directement ni indirectement
« du roi ni des émigrés ; les autres
« difficultés peuvent facilement s'a-
it planir. » Il invite alors le duc
de Brunswick à s'expliquer à son
tour : « Eh ! bien , répond le duc ,
« nous nous en retournerons cha-
« cun chez nous, comme des gens de
« noces. » Kellermann, se tournant
vers l'ambassadeur impérial, lui de-
mande alors qui paiera les frais de no-
ces: « Quant à moi, ajouta-t-il , je
« pense que l'empereur ayant été
« l'agresseur, les Pays- lias doivent
« être donnés à la France en dédom-
« magement. » A ces mots le prince
de l\euss ayant montré de l'humeur,
le duc feignit de ne pas le remarquer
et dit à Kellermann : « Général, reu-
« dez compte à la Convention natio-
« nale que nous sommes tous dispo-
« ses à la paix ; et, pour vous le prou-
« ver, la Convention n'a qu'à nommer
a des plénipotentiaires, et désigner un
« lieu poui les conférences; nous
« nous y rendrons. En attendant
« nous nous tiendrons, soit à Luxem-
'< bourg, soit dans les l^ays-lias, où
" l'on pourra nous aveitlr. »> On ne
peut douter que ces propositions ne
KEL
àe la part du dur i\t
Bruniwîcl , et que les Pruuieiis ne
désira- vpiit ahanJoniier l'Aulriclic cl
*e retirer de la roalittoii, mais l'iina-
iion que fil alors (^stine dans reierlo-
ral de ^Ia>ellre mil obstacle à loul rap-
ptorhemcnl avec la France (2). Maî-
tre de Mavence, Cusline aurait dû
couronner son lieureuse expédition
par rorciipalion de (x>blenlz; mais il
térooij^na la rrainte de s'aiïaiblir en
se prolongeant ja-.que sur ce point, et
soutint que Kellermann, chargé de
poursui\re 1rs l'iuv^iens, était plus i
portée d'obtenir le résnilat qu'on
attendait de lui : raisonnement tans
justesse, car pouvail-il croirr (|ue les
Prussiens qui >e retiraient méthodique-
ment, sans se laisser eiilamci , iit^li;;e-
raient, pour pu-Nenir re mou\ement
dcKelleimann, défaire occuper Kbren-
brestein à la liàle, par un corps de
troupes léfjères, qui précéderait lepros
de leiri forces .' Au lieu de descendre
le Uliin, Kellrrmaiin prit ses canton-
nements eiilre la Moselle et la Saire,
établissant son quarlier-prnéral.iMetz ;
et Custine se poita sur Francfort
attiré par l'appât du butin. Mais le
jour n^ae qu'il faisait passer dans celte
REL
453
(1) Cm Drforiatloat far«at rt«rU«« poar la
pmai^r* toi» aalhvnltqurutrnl par le convrii-
lionncl IfanuinJ ilr I4 Mratr. a la «^^iir* ila
S «rixlrmlaire au IV ;3o »»|>t 1*9^). Il r>\>-
porta l«ili»'iiur« dr kriirruidiiii lr> qur iiout
l'aron» reprotloit, et ajonta t|u<> i)oD-»ruir-
uirut cm f,ruit» rondu roinpic <ie celle i-n-
frrciice aux rrproeniautt du |m>>i|>Ip Prirur.
Siller\ rt Carra, inan quM corre«p<>tidit k c«
• ujrt avec Pacbe , ri qur la Co:i«rtitinii u'i a
avait jintai* cir intiruiir. Ilarinand certitojil
trnir de ffrur rt dr Krllrruiann tous re« fjitl.
Mrrlin de Douji, rappoitrur tlu comité de talul
public, e kjx^dclrt mer, ajo-ilaol que le gou-
vrrnciurnt il'jl»r« n'anrail |m« injnqar de faire
la paii, t'il avait coi. nu In d>«i«i»iii»iit dr»
HruNsirn*. Ilannind rrptiquj : J^ ftit qu* j'mi
eitt en *iai, ou ineu Arllermmn.t etl^n mrnl*mr,
— Mais pour qui sait lire d'un cril cUirvojani
le» Moniirun de kcple iibn-, oct'.brr, nuveiubte
rt drcrnibrr 1791, l'içtinrance de Merlin dr
llou.*! pji.ii.rj iiivraisrinbljblr : il niait ce qu'il
ne |u.u«.iii i^iiori-r; et c'rtait bien lui qui luc-
riiait Irpilbrie de mtnlemr iiii«e en avant par
Uariuand d« la Meii<«.
\ille dei proclamations raenaranie^
ronlie le laiid^ra\e de liesse, et qu'il
appelait lc> tmupes de ce monstre à
la révolte i^2.'> octobre), il appui que
les llessois entraient à Cobleiiti et
que les iVussiens les suivaient de près.
Voulant éviter le icproclie de n'avoir
pas occupé celle ville si importante
par sa poMlioii, il adres^a à la G)n-
venlinn une plainte formelle contre
Kellerraann, qui, disait-il, eût pu
s'upposeï facilement à la marche des
PrtLSsieiis: •< S'il avait passé la Moselle
w et la Sarre, ajoutait (Justine, il >e
M serait rendu maître de Trêves et de
•• («oblentz, sans combat, et aurait pris
» les magasins de l'ennemi. ■ Celte
dénonciation de Custine avajl été pré-
cédée d'une (oriespoiiilance entre les
deux généraux. Nous l'avons sous les
yeux, et il esl impossible de ne pas y
reconnaître que la politesse, la conve-
nance aussi bien que la raison sous le
rappoit militaire, se trouvent du cdlé
de Kellcrmann , qui d'ailleurs avait
exposé son plan au pouvoir exécutif
dans les mêmes termes. Il écrivit
à Servan le 7 octobre 17*J2 ( nous
copions tcxturllcmnit ) : « Il faut
«« profiter du moment de la déroute
«« des ennemis , pour entrer en .\1-
w lemaj;iie, et pour cet effet, il fau-
« drail que Custine joriifie son ar-
« mce d'une partie de sesf»arnisoii> et
«« trus.aïUc sur le Khin. llien ne peut
« dans ce moment l'ernpècher des'cni-
« parer de la ville de l'hilisbourg, et
w y faire travailler en rê^le, arrant^or
M (lermesheim, et ^ jeter un pont »le
« communiration , avec une bonne
«« tête qui le mit en état d'y passer
•« et repa>sei le Kîiiii, Miivanlles cir-
a constances. Il peut faire contribuer
«« le pavs de IJaden jusqu'à Kehl
«« près de Strasbourg, el loisque je
*^ serai en mesure de me porter sur
M Trêves el Coblentz, il viendrait à
« Mayence; dans celte disposition
454
KEL
(' tiotis nous donnerions la main, f te. »
En suivant le contre-pied de ce plan si
sagement combiné , en faisant une
pointe sur le Mein, sans s'être assuré
le cours du Bas-Rhin, Custine perdit
tout; et, après avoir été assiéf!;é dans
Mayence , qui fut repris par les coa-
lisés , il fut contraint de se replier
sur TAlsace. Mais revenons à sa
correspondance avec Kellerinann. Le
27 octobre, Custine avait écrit à ce
derniei-, pour l'engager à faire mou-
voir ses troupes cantoonces sur la
Cliièvre, afin de s'approcher de lui :
« Ma bonne volonté égale la vôtre,
« lui répondit Rellermann (3) ; il y
« a dix mois que j'ai proposé, à plu-
« sieurs reprises, de faire ce que vous
« venez d'exécuter avec tout le nerf
« possible ; et me réunir à Coblenlz
« avec l'armée du centre , c'est en-
« core mon avis aujourd'hui , mais
*♦ » Ici le général alléguait l'état
affreux des chemins, la nécessité d'at-
tendre que les gelées les eussent res-
suyés, et que l'armée, vêtue et remise
de ses extrêmes fatigues, fût en état
d'entreprendre une campagne d'hiver.
Il objectait encore le mauvais étal des
chevaux de son artillerie et de sa cava-
lerie ; enfin l'absence des magasins de
vivres. « Les calculs, ajoutait-il, m'ont
« mis à même de terminer une campa-
« ^nequc l'on n'osait pas dans les com-
« mencements se promettre une issue
«f si heureuse. Le soin extrême que
« j'ai eu de mes soldats les a fait aller
« jusqu'au bout et résister à des temps
(' dont il n'y a pas eu d'exemple. Je
« vous dirai avec la même vérité, telle
« que soit la confiance et l'empire
« que je puisse avoir sur mes braves
« compagnons d'armes, il serait im-
« possible d'exiger qu'ils nmtinurnt
« leurs travaux, nus connne ils sont. Au
»< reste, mon cher général, pour faire
(ï. Du quaititrgt'iiiial do Mclz, le 3o octo-
bre 17g;!.
KEL
« la marche que vous me proposez,
« il faudrait que je comhatie l'armée
« prussienne el autrichienne au moins
« du double de la mienne. Je vous
« l'ai dit et répété à plusieurs reprises,
« qu'il faut, pour espérer ^un succès
« heureux en nous rendant sur le
« Rhin, des mesures aussi sages que
« bien combinées, et que le plus grand
« mystère soit gardé, etc. » Croirait-
on qu'à ce langage si mesuré et si ami-
cal, Custine répondit par des repro-
ches injurieux , tels que ceux-ci :
« Dites, monsieur, que vous n'avez
« point eu la volonté de seconder mes
« opérations, ou que, ne vous étant
« pas donné la peine de jeter les yeux
« sur une carte, vous n'avez pas com-
te pris l'avantage que vous pourriez
« tirer de cette position (sur la Mo-
« selle et sur la Sarre) ; ou qu'enfin
« vous avez craint de combattre
« M. Hohenlohe , crainte d'autant
« plus mal fondée que l'avantage de
« la po.sition eût été pour vous , ou
<c dites enfin, ce que je pense, que ces
« trois motifs ont eu part à la grande
cf faute que vous avez laite. » Custine,
oubliant qu'au moins à Vairny Kel-
lermann avait déployé quelque cou-
rage, ajoutait ensuite: « ()serai-je vous
«( demander, monsieur, quelles sont
« vos grandes actions ? \ ous êtes-vous
« approché assez près de nos enne-
« mis, pour profiter (h leur détresse?
« c'est ce que je n'ai lu nulle part. »
Plus loin il disait encore : « La peur
« de combattre deux armées était ,
« je le savais , votre véritable motif.
« Mais si vous aviez eu la moindre
« notion du pays où vous aviez à vous
« porter, vous auriez pu facilement
« vous rassurer. Mais Yigiwrance et
« lu peur ne font pas les grands
« généraux. >» On conçoit que, poussé
à bout par de telles invectives, Reller-
mann à la dénonciation faite contre
lui par Custine à la Convention ait ré-
KF.r
pondn , même ofl'irifllfm<nl, qu'rllr
Il 'aiHiit fHi rire dit tre que dana un
iittès de Julie ou de vin (i). •« Il me
«< laïf, ajout. lit il, (i'a\uir fui Ijciir-
« nifnl ib Taffaire qui a eu lifu à I.an-
" dau enirf If prcmifr i<';;imfnt tic
•• dra^oii5 el Ir^ hussards de NN'urm-
« sfr. Je crois que s'il y a eu de la
«< hrlielc, elle esl de la part de Cus
<• tinc, po(ir avoir ma! posté son rc^i-
< meut et n'avoir pas combattu k sa
• tèle; qnanl à S irlor Ilro;;lie et
<« moi, nous a^ons ^té forccA de nous
«■ retirer, tourna et près d'être pris par
«' les ennemis. >• Sur la demande de
.leanl)el.r>(fV.cenom,IAII,193;,
la lettre de Keilcrmann fut envovée
aux romité> militaire et de surveillance.
** Si Custine est le \ainqucur de
«« Majence et de Spire, dit ce diput^,
« l'assemblée, jiuqu'à ce qu'elle ait
« ju;;é sur pièces \ues, n'oubliera pas
m que Krilerraaiui est Vlwnime du
« 20 srptrndre. » Cependant Ser-
van avait été remplacé par l'aclir, qui
donna au ministère de la ;;uerTe une
activité aussi violente que désordonnée,
et qui, le jour même de fon installation
('2 nov.) , en\o>aà Kellermann r«>r-
dre de ne pas prendre de quartiers
d'hiver, et de niarrliet an delà du
lUiin : «• Il ne faut plu> calculer au-
j« jourd'liui, lui disait il ; le plan des
« opérations est non-seulement ar-
« rété, mais il s'exécute ; mais Cus-
« tine , mais Dumouriez comptent
« sur vous; et si vous ne marchiez pas
«« ils .seraient compromis, peut ctic
« accablés. » I.e lendemain, comme
Kellermann marchait vers la Sarre,
par suite du plan qui lui était im-
posé par le conseil exécutif (5) , il
fut rappelé, et sa retraite laissa les
coalisés en possession de Coblentz ,
de Trêves , et le prince de Hohen-
(4) l>*itr« du i noT., lae à la r.onvfntion
(5) Kou» avons tous In yeux l'ordre du con-
Mil ciKulif ti(né |>«r Pache , le 4 dot. Il
KRL 4S5
lohe-Kirchberp maître^ de Luxem-
bour;;. Ainsi fut manqué le plan de
campagne que s'attribuait Dumouriex,
et qui, sefun^ lui , aurait terminé la
f;uerre. On ne saurait due pourquoi,
orsqtie le 21 oct. Kellermann a>ait
demandé l'autorisation de brûler ou
bombarder l.uxemboui;;, elle ne lui
fut po nt accordée. Dans cette même
dépêche, il demand.^it à ('tre nommé
l'un des maréchaux de la république,
si fun en faisait. Mais alors il s'a-
gissait pour lui , non de récompen-
ses, mais de rendie compte de .sa con-
duite, et de répondre à des accu.sations
3ui, i celte époque, conduisirent tant
e généraux à !a mort. Mandé à Pa-
ris par le ronseil exécutif (6), il lui
montra sur la carte plus de soixante
campements en moins de Irois mois,
tant pour opérer sa jonction avec I)u-
raouriez que « pour s«»uten!r, par l'iM-
" trépidité de % in;;t-deux mille soldats
« de la lihertè^ le choc de qualre-
« \in';t-dix raille est la^'es, et les chas-
•« ser entièrement a>ec leurs tyrans
•« hors du territoire sacré de la répii-
•« blique. »» Ce sont les expression*
dont lui-œême se »cnit lorsque, le 1 i
nov., il fut admis à la barre de la
Convention. Il protesta ensuite de sou
zèle à combattre l'aristocratie et le
Jayètisme; puis il ajouta que, avec une
armée fatij;uéc, manijuant de tout el
réduite de moitié par la séparation de
celle du pénci al Valence qui marchait
sur Givet, il lui aurait rtc impossible
de dcNarrcer trente mille liomnies au
moins qui avaient trois ou quatre mar-
ches sur lui. Il annonçait ensuite que,
y e»t pr^^cri^ à Kcllrnnann de iiiirchrr \e plus
l«it po»»»bU. atrc ao.ooo Uommr*. f>oiir lom ou-
rir à lUpèdilion dr Cuitiiir ; ce rorps de-
Tjit rtre cr>niniandè par Brarnonrillp.
é Cet ordre, qui lermine la drpècli» ■»*»-
li \rr d>n» la note prrcrdenle , était conçu
djn» d--» irrinr» ilrsapprobalenr» i • Conside-
W^f jiit le ppM de déposition qu'a inonire le pé-
m ncfil k-rlrrinann poor iiiarcberafec les trou-
• p«» qu'il commande, sniTaot les ordres qn'il
■ en a re^*. etc. »
45G
KEL
pour concilier la justice avec les conve-
nances , le coiispil exécutif l'avait
nommé au commaniîemenl ilc l'armée
(les Alpes. <f Citoyens lc;;is1ateurs ,
« (lisait-il, la journée du 10 août a
c< sauv(î la république , celle du 20
»< septembre a sauvé Paris sur les
<f hauteurs de Valmy... 11 s'ap,it main-
*' tenant de sauver cette patrie par la
« destruction des tyrans étrangers; il
«< s'a<;it de faire plus encore, il faut
«' porter chez les peuples voisins l'é-
•' tendard de la liberté et le tableau
« des droits de rhomrnc ; c'est vers
« l'Orient que vous dirij^ez nos pas
« pour (lélhrer Rome (mtitjue du
<' joug des prêtres. » Ces expres-
sions révolutionnaires, bien plus que
les excellentes raisons straté|;iqiics qu'il
avait alléf;uécs (7) , valurent à Kellcr-
niann une flatteuse allocution du pré-
sident Hérault de Séchelles. Mali^ré ce
triomphe, les ennemis de KcUermann
ne cessaient de répéter les accusations
de Custine. Le j\Ionitcur du 18 nov.
renfermait une lettre de ce f^énéral
adressée au ministre de la p;uerre et
dont la première phrase les résu-
mait toutes : « Fatin;né des lenteurs et
« des refus du général KcUermann,
« de faire mouvoir les troupes canton-
« néesr.urlaChière; ces lenteurs ayant
« fait former à l'ennemi !e [)rojet de
« me faii e abandonner Francfort et de
« me renfermer dans Mayence, etc. »
Kellerm.'-.nn, qui sentait bien que cette
grave affaire n'était pas finie, ne parlit
point pour son nouveau poste , sans
adresser à la Convention une lettre
(29 nov.), dans laquelle il priait les
(7) Le in(':nifiirc «h* la ctmp.ifine «le '/P* ,
rédigé ])ar Kencniianii liii-inr-iiin , i x .'^Ik .-mi diî-
pot de la guerre. Il fonm: avtc ««-lui «Ip l)iM«in.
qui e>^t <lans le même carton , un liisioriqnr»
Loinpiet de celle campngnc tant vantét- , nuis
généralement si |)< ii citrinue sous Aon véritable
jour avant que les Mém'iiret tiret dn papiers
d'un homme d'état el les arii le» Doiim el Du moi .
Jinz dans notre Biographie (toni. lAII cl I.XIII)
eoisent commence à toulerer le voile.
KEL
législateurs de la nation ou de mépri-
ser ses calomniateurs, ou de le mettre à
portée de les confondre. Du reste, il
protestait de nouveau de son dévoue-
ment : « Citoyens, disait-il, je vais
« reporter sous vos auspices aux an-
« ciens hommes la liberté exclue depuis
« si long-temps de ce beau climat.
« Les troupes françaises par leur exac-
« titiide à la discipline la leur feront
« aimer, et seront fidèles à la devise
« sacrée pour les hommes libres :
« guerre aux châteaux; paix aux
ce calianes, et protection aux monu-
<( inciits des arts. >» Malgré cette
pompeuse annonce, l'armée des Alpes,
«ont !e quartier-
■général était à Cbam-
béry, ne dépassa point les limites du
nouveau département du Mont-lUanc.
Kellermaiin la trouva dans le plus grand
désordre, ce qui porta les commissaires
de la Convention (Simon, Hérault, Ja-
got et Grégoire) à proclamer l'ur-
gente nécessité de compléter cette ar-
mée « qui , disaient ils , n'a liérité de
« Montesquiou, que le délabrement
« et les dommages à réparer ( rap-
« port du h janvier 1793). » Mais
dès le 25, en vertu d'un décret rendu
sur le rapport de Dubois-Crancé, elle
dut être [lortéc à un efleclif de plus de
vingt mille hommes. De son coté, le
général en chef mit de l'activité à or-
ganiser la défense du pays qui lui était
confiée. Entre autres dispositions
nous citerons la formation d'un corps
de six cents hommes levés parmi les
montagnards, sous le nom de chas-
seurs des Alpes, pour les o[»poseraux
barbets. Mais ces soins ne préoccu ■
paient pas tellement Kellermann qu'il
ne se crût obligé de faire du propagan-
disme. C'était , d'ailleurs , pour les
généraux qui avaient servi sous l'ancien
régime, le seul moyen de sauver leur
tète, et encore n'y réussissaient-ils pas
toujours. Ainsi on le voit le 27 déc. sé-
vir contre le colonel el les musiciens (iu
T'J* r^ifiMat (ancien noalonnaU)qal,
;iii moment on l'on allait mettre I.oiiis
\ N I en ju^eiiirtil, avaiciil jtun* i\c> aii s
proicrils , entre autres : (J lUcluird !
ô mon roi! - ï^ ffrincté que Keller-
•• mann a ilrplo>ëe dans celle occa-
" sion, dl>aient lei mrmfs coramis&ai-
•« res , a |m odnit le mcilicut effet sur
- retprit public. »• A cette époque le
j;éncral Je l'ai niée d'Italie eut, tant
a»ec le ministre de la guerre l'ache
qu'avec le« patriotes de Genève, une
r«)rre<pondanfc au sujet du mouve-
nirnt révolutionnaire qui éclata dans
cette ville; niai» à Iravers les elo^cs
que le^ (iénexois donnaient à Min
caractère , ils ne dissimulaient pas
l«*urs inquiétudes de voir augmen-
ter le noniLie de ses troupes dans
leur voisinage. Kn vain, dans sa ré-
ponse, il protesta que ce petit mou-
vement n'avait pour but que «« d'as-
•< surerla liberté des nouveaux Ir ères
" du Mont-Blanc que l'horreur du des-
potisme venait dr réunir a la ré-
• publique française ; >» en vain par-
la t-il de son défir empressé devenir
\t'\\ tloanrr Ir baiser Jridrrnel ; une
seconde lettre des comités genevois
indiqua bien claiiement que, sembla-
ble au coq de la fable, ils ne crai-
«;naic:il rien tant que ce baiser iVa-
niour fraternelle (H). (x?pendaul il
fut encore souvent question de Kel-
lermann dans les discussions de la
GiMvcntion et des jacobins où il était
tantôt attaqué, tantôt défendu. Le
Il avril, Thuriot, en appuyant le dé-
cret de proscription contre Dumouriei:,
proclama Kellerroann comme a\ant
saui'r la républii^ue dans les plaines
de (^liampaj;ne, en résistant à l'ordre
de ce traître, de prendre une position
qui cùl compromis le salut de rarnicc ;
et rcltc assertion, qui était une absur-
dité {f^oy. DiMoiniFz, L\III\ fut
accueillie par des applaudissements
KEL
4",:
unanimes. Mais, k la séance du IJ,
on lut une lettre de Custine qui, en
dénonçant I. s /n;//Mo«.v lece^le^. de%
{généraux de l'armée de la .Moselle,
ajoutait: •« J'oserai vous le due avec
M cette franrliise (pu ne convient qu'a
M un républicain, une telle conduite
M fut enruura;;ée par vous le jour où
•• Kellermanii, aprè* a\«tir indigne-
n ment trahi les intérêts de son pa>$,
•< reçut ros applaudissements. »> Ce-
pendant rora;;e se foimait d'un autre
rl^té : dénoncé par les commis«aires à
Lv on, d'après une lettre de leurs col-
lègue» auprrs de l'armée des Alpes,
comme suspect de complicité avec I)u-
mouriez et les I''g<ilité, Kellermann
axait éle suspendu de ses fonctions par
le comité de salut public. I>ientot les
coiuœi»aires prèi l'armée des .Mpes,
mieux informes après une conféicnce
de nuat-c î.- :res avec le j;énéral , et la
visite de ses papieis, avaient reconnu
son innocence ; et Cambnn, au nom
du comité de salut public, proposait sa
réintégration; mais, les depute> Ma-
thieu et (fénissieux avant annoncé
Qu'il> avalent des faits contre lui, la
Coi ention décréta que tuj'.i, les dé-
nonciations seraient adressées m co-
mité qui ferait un rapport. Mandé
à l*aiis, (|uelques jours ap(è>, par le
conseil executif, il sortit pur de l'exa-
men qui fut fait de sa conduite ; et ,
sur le rapport de Harère (18 mai),
la Convention décréta qu'il n'avait
pas démérité de la patiie. Haière
ajouta qu'une maladie survenue à
lîiron l'empêchant de prendre le
commandement de I armée destinée à
combattre les rebelles de la Vendée,
Kcllennann s'en était chargé jusqu'à
son rétablissement. Trois jours après,
le ministre de la <;uerre annonça que
ce f;énéral , nommé au comm.mdement
désarmées des Alpes et d'Italie, avait
reçu du conseil exécutif l'ordre de par-
tir pour la Hocheile, afin d'r organiser
458
REL
rarraée qui allait se former sur les
côtes. A celte occasion Amar déclara
que Kelleniiann avait perdu la con-
liance des bons citoyens et de l'armée.
Collot-d'Herbois s'étonna que le con-
seil exécutif eût donné au même homme
le commandement de deux armées si
éloignées Tune de l'autre ; et il fut dé-
crété qu'il Y aurait un f^énéral pour
chaque armée. En conséquence, sa no-
mination ne fut confirmée que pour
l'armée des Alpes, et l'armée d'Italie
fut donnée au vénérai llrunet ; mais
Kellermann conserva le titre de géné-
ral en chef de toutes les deux. Après
avoir inspecté l'armée d'Italie, il prit à
l'armée des Alpes les mesures néces-
saires , soit pour couvrir celte fron-
tière, soit pour lier ses opérations à
celles de son collègue. Dès le mois de
juin il commença les hostilités contre
le roi de Sardaigne, envoya au mi-
nistre un rapport sur l'allaque de Cla-
vières, pi emier village piémonlais; puis,
le 23 juillet, il rendit compte par un
rapport, daté de Grenoble, de l'attaque
de la montagne de Tête-Dure. Dans
ce temps, Lyon s'était insurgé contre
la Convention, et les Anglais allaient
être maîtres de Toulon. Il parait que
ces deux événements n'eussent pas
eu lieu si l'on eût laissé Kellermann
conlinuer à user des moyens de con-
ciliation que déjà il avait employés vis-
à-vis des Lyonnais, et si d'un autre
côté les commissaires de la Convention
n'avaient pas retardé la marche de
quatre mille lionimes de troupes qu'il
avait confiées au général Carlaux pour
les conduire à Toulon. Un décret du
12 juillet avait autorisé les commis-
saires delà Convention à requérir Kel-
lermann de faire marcher une partie
de son armée contre Lyon. On l'a
accusé d'avoir mis quelque lenteur à
l'exécution de cet ordre. Le 28 juilh),
Jiillaud-Varenne le dénonça pour
avoir méconnu l'autorité des com-
KEL
missaires Albilte et Dubois-Crancé.
Toutefois le 6 août , il partit du
camp de Bourg, avec Dubois-Crancé
et Gaulhier pour se porter sur Lyon.
Il établit son camp devant cette ville,
et le 8 août il somma les Lyonnais
d'ouvrir leurs portes à l'armée répu-
blicaine. Ceux-ci n'ayant point obtem-
péré, il commença les dispositions du
siège ; et deux jours après, à propos
de la fcte du 10 août , qui se célébrait
dans son camp, il publia une nouvelle
proclamation dont la Convention or-
donna l'insertion au bulletin et l'envoi
à tous les départements. Le langage
qu'il tenait aux Lyonnais était pour-
tant fort modéré et contrastait évidem-
ment avec le ton des actes officiels de
l'époque : <' Si la Convention nationale
« pouvait se tromper sur mon compte,
« disait-il, je lui exposerais avec fran-
« chise mes sentiments, je lui ferais
« ma pétition, mais je commencerais
« à obéir à ses lois. Toute autre ma-
« nière d'agir a trop le caractère de
« la rébellion ; encore si j'avais des
<f torts, je ne compromettrais que moi ;
« et vous, vous sacrifiez tous vos con-
<f citoyens. » II les engageait, en ter-
minant, à venir dans son camp frater-
niser avec ses soldats. Ces tentatives
de conciliation furent vaines ; car, si
les Lyonnais avaient pu se fier à Kel-
lermann, il n'en était pas de même des
représentants du peuple dont il était
l'instrument. Au lieu de bombarder la
ville comme ceux-ci l'auraient voulu, il
se détermina à intercepter sur tous les
points l'arrivage des subsistances. Ce-
pendant les Piéraontais avaient repris
la Savoie et contraint l'armée des Al-
pes à se replier. Kellermann n'obtint
qu'avec beaucoup de peine la permis-
sion de quitter le siège pendant trois
jours. 11 ranima le courage des trou-
pes, les rétablit dans des positions
de la Maurienne et de la Tarcntaisc;
cl, selon l'expression dont il se ser-
KFL
TÎt djns SI iMp^lif i la G)iivfnlion ,
il arrtlu Irn pro^rra tirs sutriiitrsdu
drspotr ullrtinumliiin. Il triait île re-
tour ilfxaiil I.Yon le Iroiiieme jour '2.'»
aoùlV l/(»nicler {]ue le» représentants
du pe«j>le n Kellerroann eavo^èrent
|>our rendre compte i la (x)nxention
de ce* opération* s'exprima ainsi au
nom de -on général : «« <Jnanf an»
•« l*irmniiiai«, iU sont arluellement i
•• ('l»aml»rr> ; mai» Krllermann a juré
•« qu'ils n'iraient pas pln". loin : une
** trop grande rc^pon • >ur
" 5a tète pour qu'il l' . er-
•« ment ; mai.-, roinptex, Ir^i^Llenrs,
« qu'rn frnpptint Lyon vi>u% frap-
•« prz tes Pirrtutntars. »• Ce* drr-
nicies parole* étaient évidemment le
coiilre-pied de la pendre de Keller-
mann qui, en expos- nt so* premiers
plan* anx reI»^é^cntant* , leur axait
dit : « f.> n est pas in' qur vvis
" prendrez Lyon, t'est à lu fron-
« iière. »• Malgré ce mt^Jêrantisifie,
si le comité de salul public fro>ait
utile de maiiitenT dans le romman-
dement on li(>ranie de rr caractère ,
Kellerinann n'en était que plu* ex-
posé aux atiaqaes des jacobins. A
la séarïce du li7 aoni , Amar, impu-
tant à la tralii*on de ce {;(*uéral et
à *a t'onnicenre le* rêver* du Pié-
mont et 1.1 lenteur du *iè;;e de l.ton,
demanda positivement Qi K l'oîi fît
TOMi'.m SA Tf.TE; et la Convent on
dérréla que séance tenante un rapport
serait fait *ur sa ronduitr. fîarère. au
nom do ccmilé dç salut public, cita une
lettre de Dubois-Cranrc qui attestait
«< que Kellcrmann étsit franc et lo\al;
«« qu'il avait de la mollesNe, et que si
«' on lui promettait le commandement
« de l'armée du nord, l.von serait
« bientôt léduil. » Le rapporteur
ajoutait qt.»' tîes lettres interceptées in-
diquaient que les L\onnais crovaiont
ce {général dans leurs intérêts. Dubois-
Crancé, qui dans le fond enyisageaît
KEL iSq
comme Kelleimann l'affaire de L>on,
avait cependant demandé sa deslitu-
tion, pour ne p.is riic liii-nième ron»-
proroii ; ma; • I e comité, de peur de four-
nir de* arme* à la malveillance, se re-
fusa an renvoi d'un i;<Mieral au moment
ou il était en raatclie cuntie les rebcl*
les. kellermanu étant retenu devant
Lyon , le bombardement < ommen-
<;a le S'i, et le bulletin de ce jf)ur tju'il
en%ova i la (V ronttnl le dé-
tail des quart \ rs. Si ses ef-
fort* lui valut en» lc.tlo-r% ile la «ociété
populaire de Maçon, ?;;• { 'orlamait
« «piil était ///ifj*'/ va,
- mais que *on et.i' .lu-
•« vais et entravait *e* opérations, » il
n'en fut pas moin* denonréà la séance
de* jacobins du 8 septembre par Ro-
bespierre qui, l'accusant d'avoir din;;ë
tonte* le* conspiration* qui avaient
éclaté pendant cette campa^jne , dé-
clara que jamai* »ou* un tel liomme
une opération patriotique ne réu**i-
rait. Deux jours apn*. Krllermann
était dr îitué et remplace de\ant L>on
par Doppet. Malpre cette destitution ,
les commissaire* tiautbier et Dubnis-
Crancé, qui avaient toujour* été con-
traires à l'avis d'aitaquer L^on de vive
force, et. par conséquent unanimes avec
Kellerirann , prirent siu- eux de le
maintenir , et le renvo>èrent com-
mander dans le Mont-lUanc, où il de-
meura jusqu'au mois d'oct. Avec huit
mille soMats de li^ne et quelques
gardes nationales et volontaires , il
reprit l'offcn-'ive le 13 sept, contre
trenle-cinq nulle Austro-Srrdes qui
s'étaient avancés jusqu'à Iîonne>illc,
d'oii ils menaçaient Annecy et Cliam-
bérv. ï.e 9 oct. ils étaient chassés
du Fauci«jnyi J* '* i a: »nta!se, de la
>Iauricnne, et ils laissaient dix-sept
casons entre les mains des Français.
« iTa frontière de Nice à Genève est
« entière, disait le général dans sa let-
« tre à la G)nvcntion ; on y respire
46o KEL
« l'air pur de la liberté; le sol de la
« république dans cette partie n'est
<( plus souillé par les despotes armés
« contre notre indépendance ; et ce-
« pendant on nie soupçonne, on m'ac-
« cuse. Citoyens lé;i,islaleurs, daio;nez
« me juo;er d'après mes actions. »
Sa prédiction sur le siècle de Lyon s'ac-
complit ; le lendemain de la retraite
des Piémontais, cette ville se rendit.
Ces succès, loin de désarmer la liaine
contre Kcllermann , ne firent que la
redoubler. « Cet homme qui a trahi
« constamment la patrie, disait ]id-
« laud-N'areiine (9) à la séance du 6
« octobre, ne remporte maintenant
« des victoires qu'afin de détourner
t( l'attention de la Convention. » Puis,
sur la proposition de cet orateur, non-
seulement la Convention coniirma la
destitution de Kellermann , mais pro-
nonça le rappel des représentants du peu-
ple qui l'avaient maintenu. A la même
époque, il crut devoir écrire de Cham-
béry à la société des jacobins pour se
féliciter d'avoir fait triompher le pa-
triotisme dans la Savoie; il priait la
société de lui confi: mer le titre de gé-
néral des jucohins que lui avaient
donné les ennemis. Cet acte de fai-
blesse ne fit qu'aojgraver sa position :
la société reçut comme une dérision
cette avance d'un homme qui aurait
du être cliâlié depuis long-temps.
On lui fit \\\\ crime d'avoir dit devant
les représentants du peuple qu'il ne
pouvait aller à l'ennemi avec des 7)o-
lontaires, qu'il lui fallait absolument
des troupes de ligne ; enfin, sur la
pioposition de Perrevra, il fut rayé de
la liste de la société. De toutes parts
les accusations retentissaient contre
lui : le 20 oct., lilanchet lui imputa
d'avoir bassement fait sa cour au rcpré-
(9! Cet aclianieinciit de Hill.iucl-Varfnne con-
tre Kelleriuann s'exjtliquc par la crainte cju'.i-
Tail ce conventionnel que Kellermann ne rt:\é-
ïàl la part qn'il avait eue, en 179a, aux négo-
ciation) de Duinoariez avec les Pru»Meris.
KEL
sentant Gauthier et donné des saufs-
conduits à des Lyonnais insurgés. En-
fin le 18 oct. il reçut la notification de
sa destitution au moment où il se pré-
parait à partir pour le sièj^e de Tou-
lon. Quelques jours après il (ut arrêté,
conduit à Paris et déposé dans la pri-
son de l'Abbaye. Les protecteurs se-
crets qu'il avait dans le comité de salut
public le laissèrent pendant plus d'un
an oublié dans sa prison : c'était en
ce temps-là le seul moyen de sauver un
prévenu; car sa mort eût élé certaine
si on rcul ju^é du vivant de Robes-
pierre qui avait juré sa perle. Enfin,
le 8 nov. 1794, il comparut devant
le tribunal révolutionnaire renouvelé
depuis la chute du tyran , sous la
prévention d'avoir été fédéraliste et
d'avoir mis une criminelle négligence
dans l'organisation de l'armée des
Alpes. Il fut acquitté à l'unanimité.
Le président Dobsent, joijjjnant son suf-
frage aux éloges que lui avaient donnés
les témoins, parmi lesquels étaient seize
représentants du peuple, termina en
disant que l'histoire unirait sur la tête
de Kellermann les lauriers du Mont-
lllanc à ceux de Valmy. Le 17 déc.
ce général écrivit à la Convention pour
obtenir sa réintégration dans son
grade et des indemnités ; ce qui lui
fut accordé par décret du 15 jan-
vier 1795; puis, par un autre dé-
cret du 3 mars, il fut replacé à la tête
des armées des Alpes et d'Italie. Il prit
possession de ce commandement au
mois de mai 1795. Les deux armées
étaient fortes tout au plus de quarante-
sept mille hommes, y compris les gar-
nisons de Lyon, de Toulon , de Mar-
seille ; et elles avaient affaire à plus de
cent mille Autrichiens, Napolitains et
Piémontais, non compris les bandes
de montagnards du pays, connus sous
le nom de barbets. Il faut ajoutera cela
qu'une forte escadre anglaise, croisant
sans cesse devant Gènes, entravait les
opcrations lîc» Français et favorisait
rrllfs dfs riiiiriHis l.c '2\ jtiin, Ifs .\us-
tri.-SarcIr* rcmmcrjcrrenl à allaqurr
5ur Ions 1rs points les armées d'Italie
et de» Mpe'*. ft. prndnnt quatre mois
rnii*rrutif», il »r li\ra plti^ de quarante
ronibats , dans lesquels le^ Français
obtinrent plminirs lois ra\anta^e.
Mai» des I online Krllerninin a^ail
commis la fanic de trop élin(îte >es li-
gnes. Le "21 juin , après trois jours de
rombals , il perdit se» position» de
^ ado , de Saint-Jacques , de llardi-
iirlto. 11 écrivit au comité de salut pu-
blic que, si on ne lui en\o>ait pa» de
prompts renfoits, il serait obli;^é de
q:iitter Nice. I/alarme fut «grande , le
comité rassembla tous les dépuléi qui
avaient été à l'armée d'Italie, pour
aviser à ce qu'il fallait fane. C^eux-ci,
unanimement, drsi|;nèrcnt lionap.irte
comme connaiv>ant mieux les posi-
tions qu'ocnipait l'armer. V.u effet ,
l'année ptéréMenle, à la *uile «lu ^iéj;e
«le Toulon, il avait inspecté toute la ri-
vière de lirnes et mis l'armre d'Italie
dans les positiun;> où krllerm.iiiti l'a
vait trouvée, lionaparte rerut donc
l'ordie de se rendre au comité et,
après plusieurs conférences, rédi;;ea les
in.'tructioiis pour kellermaiin. On
pense bien que lui, qui convoitait dès-
lors le comni.mdrment «le l'armre d'I-
talie, ne né;;li;;ea pas l'occasion de re-
lever les failles de son ancien , hrài'r
sitldat , r.ilrrmrmrni artif , sans
«Inule, tout-ti'ftiit pris.'e des m.iyens
nrrrssairrs à /w directiun d'une ar-
mée en clirf (10. Vers le milieu «le
juillet, Kcllerm.inn , toujours en face
d'un ennemi très-supérieur en nom-
bre, fut encore oblijjé de res>errer ses
positions et de replier son quartier-
;;énéral sur Horf;hctto (28 juillet^ O
mouvement rétroj^rade avant fait courir
dans l'armée le bruit d une retraite,
' lo) Mrma rrt J* Sm^lfit, l. I", j«. 90 à 91,
t. VI. p. 45-1» »• e.l.lio..).
KEL
46i
Kellermann publia une proclamation
datée «r.Mlrii;;a pour le démentir.
(•race à celte nouvelle position , il se
maintint avec a\anta(;e pendant toute
la campagne. H eut au mois d'août une
correspondance, qui fut rendue publi-
que, avec le ^^eneral aufrirbien Devins,
au sujet des iraitemcnts cruels que les
f'iirhrt^ infligeaient aux pris«)nnieis
français. (Cependant la paii n\ant été
conclue avec l'Espagne , Krifermann
obtint qu'il lui serait envoyé des ren-
forts tires partie de l'armée des l*>rc-
néesOnenlales, partie de l'armée du
lUiin. Il venait de faire appiouver par
le comité de salut public le plan d'atta-
que qu'il atait conçu pour péiulrer en
Italie: mais avant que les renforts
attendus fussent arrivés, le commande-
ment de l'armée d Italie avait été
confié .iSchérer. Kellrrm.inn, n'ayant
plu-» que relui de l'armée des .Mpes ,
seconda par des diversions utiles les
opérations de ce nouveau général ,
qui s'était cliar-é d'exécuter le plan
propo.sé par son prédéce^'-cur, et qui
f;.ipna dans le mois de tMv. 1795,
l'importante bataille de Loano (/ W.
Schéhfr, XÏ.I, 112). Li lenteur des
opérations de Kellermann l'exposa
plus d'une fois aux attaque^ des jour-
naux; il fut dénoncé le 31 décembre
ITOf), dans \e Journal des hommes
li/tres, comme entretenant à Turin des
intelli-jences avec les ennemis de la
république. A celle accus.itioii il ré-
pondit dans le Moniteur en sommant
^on dénonci.iteiir «le donner <es preu-
ves, ou d'accepter la qualification de ca-
lomniateur. I-e M\ m.ii 17!)6, il écri-
vit de Cliambérv au Direclo-re pour le
féliciter de la découverte de la conspi-
ration de Babeuf. A l'oiivertiire de
la carnpapne de lTî)r), Scliérer fut
remplacé par Donaparle ; et Keller-
marln, toujours à la tète de l'armée
des .Mpes, qui éîait regardée comme la
réserve de l'armée d'Italie, n'eut àdiri-
462
KEL
ger que des opérations secondaires. Le
Directoire voulait d'abord donner Kel-
lerinarin pour second à liona[)artc ,
mais celui-ci écrivit à Carnol le 2^
mai 1796, sur ce projet qui ne lui
convenait en aucune manière : « Réu-
« nir Kellermann et moi en Italie,
« disait-il, c'est vouloir tout perdre.
« Le général Kellermann a plus d'ex-
« périence et fera mieux la f!;uerre que
« moi ; mais tous deux ensemble nous
« la ferons mal. Je ne puis pas servir
« volontiers avec un lionnne qui se
« croit le premier général de l' Eu-
if rope. » Les vœux de Bonaparte fu-
rent comblés après la Journée du 18
fructiilor (i septembre 1797). L'armée
des Alpes fut supprimée et réunie à
celle d'Italie. Quant à Kellermann,
accusé de tenir par ses opinions au
parti vaincu, il fut rappelé à Paris;
mais il ne resta pas Ions-temps dans
la disgrâce du Directoire, qui le char-
gea, conjointement avec le général Ca-
nuel, démettre en état de siège la ville
de Lyon, où s'étaient manifestés des
mouvements royalistes. On le voit l'an-
née suivanîe préposé à l'organisation de
la gendarmerie; puis, le 23 sept. 1798,
inspecteur-général de cavalerie. Se
trouvant à Angers pour inspecter Far-
mée d'Angleterre, il fut couronné au
théâtre comme le héros de Valmy et
s'empressa d'envoyer la couronne aux
autorités constituées. Peu de temps
après il al a remplir les mêmes fonc-
tions près de l'armée de Hollande. Il
était membre du bureau militaire établi
près du Directoire, au moment de la
révolution du 18 brumaire; et bien
qu'il fut demeuré étranger aux intri-
gues qui amenèrent cette journée, com-
me le premier consul sentait le be-
soin de s'entourer d'hommes en crédit
parmi les troupes, Kellermann fut ap-
pelé le premier au.sénat conservateui ,
dont il obtint la présidence le 2 août
1801. Le 2 juillet de l'année suivant>e,
KEL
il fut élu membre du conseil d'adminis-
tration de la Légion-d'FIonneur et dé-
core du cordon de giand-olficier de cet
ord;e; en mars ISOi, compris dans la
première promotion de maréchaux,
puis quelques jours après pourvu de la
sénatorerie de Colmar. En 1805, au
commencement de la campagne d'Al-
lemagne, le maréchal Kellermann fut
nommé commandant du 3^ corps de
réserve sur le l\hin, et chargé de la ligne
de défense entre Bàle et Landau. Il
organisa alors les gardes nationales
dans les départements du Rhin. Il fut
fait grand-aigle de la Légion-d'IIon-
neur, le 1^^ février 1806. Sa recon-
naissance pour l'empereur, qui avait en-
fin récompensé ses longs services d'un
titre qu'il ambitionnait depuis quinze
ans, lui fit proposer au mois de juillet
de cette même année l'érection d'un
monument en l'honneur de Napoléon,
L'empereur lui confia en 1806 et 1807
le commandement en chef de l'armée
de réserve du Pxhin, qui s'étendait de-
puis Râle jusqu'à Nimègue; il était en
même temps chargé de protéger les états
de la confédération rhénane les plus
voisins du fleuve, et de surveiller l'in-
térieur du pays jusqu'à la Hesse. L'em-
pereur, qui venait de le nommer duc
de\ almVjle dota alors du riche domaine
de J ohannisberg, s'tué sur la rive droite
du Rhin, et qui plus tard a été donné
par l'Autriche au prince de Metter-
nicli. Kellermann fui aussi autorisé par
l'empereur à porter la grande croix de
l'ordrede laFidélité de liade ; déjà l'an-
née précédente il avait reçu la grande
croix d'or de Wurtemberg. Il eut , en
1808, le commandement de l'armée de
réserve d'Espagne; puis, en 1809, celui
du cor[»s d'observation de l'Elbe et
de la Meuse-Inférieure. Lors du dé-
barquement des Anglais dans l'île de
Walclieren, Kellermann fut chargé de
former à Maeslricht le corps d'obser-
vation de la Meuse-Inférieure, destine
i l'rendrt rennemi en (lanc, l'il s'a-
\aii';j!l (JjtH l'lii:i-f rii Vu Isn.
il pré»iJa le cull
Kliiji. IViMJanl 1 , ., ... il .
If IHIJ. Kiiloiiuann, i.i|>uclr •►ur le
î'' M, > icjiitic cotuiujiiiienieiil df>
s «le ié>erte a^ec le ;;ou\erfie'
iiiriit iniiiiaiie ilr^|u\!»tle l>er^, Ileh^c,
Darmstjill, N\ m ul)our«, Fraiiclort
et Nunsju. Il ctiiisfMa ce roinnuiiite-
nimt !|vr, .1 ' , tu,,!,. iKm. rp'Mjnr
Ne^eli.>aii 11
cril)')ue«l«' i ,
ion iii!mii le Uiit Je t^n^ inulilriBcnt
\er>i- ilejiuis 171)2. Sa probile, la la-
^tssc lie son aiiiaÎDistiation, m moilé-
'^alion, roal^fé le» ordres rigoureux
in'il était trop sou>eul rliat;;e d'ac-
rnronlir, axaient fait i ««perler -un nom
Mir les lieux ri\cs ilu lUiln. Durant
toute la rampa;;iic dt 1H13, il fui
rliai^c d'organiser en ntfo'ftr^ tir
nmrtlir \t% tro(jpe> qu" ^
ressail de lever en Fiante
ùuyen de Farmet /rdruuise, es» -il
• dit dans le manuscrit de 1813, «jui
M préside i leur départ, au moioeut de
•• s'a\.infer sur les terre* élran;;cre».»
V la suite de la bataille de llanau (30
'I 31 oct. 1813), il prit le comuun-
'•nient de toutes 1rs réserves à Melx.
,1 il fu». encore charge, avec le rnaré-
' tal Oudiiiot, d'organiser de nouveaux
1 aiaïUon-s pour les faire filer su la
Cliainpa^ne, ou Napoléon avait établi
le centre de ses ope. alions Lorsque ,
à la bn de janvier ISl V, celui-ci porta
îon qiiarlier-«;énéral à Oulous, il fit
appeler le duc de Valmv ; et, se rappe-
lant que vin^t-ileux ans auparavant
'! avait ^a^ite le tilit de son d .ciio
...lis celle contrée, il passa la soirée
.1 recacillir de lui les renseioneraents
dont il avait besoin. A la suite de cet
enli elien, l'cnipci eur parlil pour \ iti |,
laissant a Ciialuns le vieux maréchiil
KEL
463
p" (les traînards et recevoir
^I ioiii la niardie avait été
• dans les Vrdennes. Alors Na-
, -^ i, qui aflrctail d'évoquer les sou-
venu'* de la république, ne manqua
•pas de diie et de faire inipiimer que le
vuinqurur de / aliit) dc\ai( encore
one foi> defi ' ' de l'Ar-
^oueel la rn | Les évè-
^emenl^ de Ihl i le iiu.... i-nl ainsi
prêt à ^r rall.icl.er au ;:ou\einrroent
rojfal. Le T' avril 181V. il était à
l*aris, et vola comme sénateur la dé-
chéance de l'empereur et la création
d'un ^omernenient pruvisore; le 22
avril il fut nomme commi^saiie du roi
l^ouisXVlII dan» la 3" division mi-
litaire, à Metx; pui« créé pair de
France le 4 juin et ;;randiToix de Tor-
diede Saint -Ix)uis. Nommé à la même
• I oque ;;ouvt * !j â* division
niiliuiff, à il publia le 8
j' einle des
^. lUstc
peiuiaiit les C^nt jours,
, ..tcc a la cliambre de* pairs
après le retour du roi. Depuis cette
époque, passant la plus (grande partie
de Tannre à sa maison de campagne de
Soisv-Montmorencj, il se fit peu re-
marquer. H mourut à Paris, le 12
septerubre 1820, à Pige de qiiatre-
vinot->ix ans, laissant un fils illustre
parmi les braves de nos armées, mais
qui ne devait pas long temps lui sur-
vivre Jo). l'article ci-après). Kellcr-
roann, veuf de sa première femme,
avait été, en 1812, sur le point d'é-
pouser M'"*" Viclorine de Clia>»tena\,
nna moins remarquable par son esprit
que par sa bea-.ilé : mai* la famille du
maréchal et Napoléon lui-même s'é-
ta. eut opposes a cette union. Le duc
de N almv fut inhume au cimetière du
Uere-Lachaise, dans le inèine tombeau
qu'^l .IV ait fait ériger à sa femme.
Barbé - Marbois , son beau-fi-ère et
(il) Voy. F*i», Mwucrtt <U i8i3 «< §«14.
464 KEL
son collègue à la chambre des pairs ,
redit sur sa tombe les dernières pa-
roles que lui avait dictées rillustrc
mourant : c'était un viJeu pour que
son cœur fût déposé à Valmy au
milieu de ses braoes frères d' ar-
mes tués à la journée du 20 sept.
i792. Fidèle à sa dernière volonté, le
fils du maréchal accomplit cette mission
le 16 octobre 1820. Le maréchal Kel-
lerraann avait présidé en 1817 à la
publication d'une brochure Intitulée:
Esquisse de la carrière militaire de
Fr.-Clir. de KcUcrmann , duc de
Valmy, pair et maréchal de France,
rédigée sur les notes de M. le maréchal
par M. de Botldoux, son commissaire
ordonnateur en chef, Paris, un vol.
in-S° de 72 pag. C'est une apologie
de toutes les opérations militaires du
maréchal. D — R — R-
KELLER3ÎAKX (François-
Étiknke), fils du précédent, naquit à
Melz en 1770, et fui élevé à Paris
au collège des Quatre-TSaiions. Des-
tiné à la carrière des armes, il entra au
service avec le grade de sous-lieutenant
dans le régiment de Colonel-général.
Plus tard 11 fut attaché à l'ambassade
des Etats-Unis jusqu'en 1793, épo-
que à laquelle il vint auprès de son
père en qualité d'aide-de-camp, d'a-
bord au siège de Lyon, ensuite à l'ar-
mée des Alpes. Bientôt compromis
dans les persécutions qu'essuya ce gé-
néral, il fut emprisonne comme lui.
Ayant obtenu sa liberté , il alla de-
mander un asile dans sa ville natale
à M. de ÎNIarbois, son oncle , qui ,
lui-même , à celte époque de terreur ,
n'était pas en cureté. Le jeune Kel-
lermann, ne doutant plus alors que
ce ne fût dans les rangs de l'armée
seulement qu'il pût trouver un re-
fuge, et ayant vainement sollicité pour
ctre employé dans son grade de chef
d'escadron , se fit simple soldat au
1" régiment de hussards, préférant
KEL
devoir à son seul mérite une posi-
tion refusée à un droit incontestable.
Enfin les mauvais jours cessèrent ;
Robespierre tomba, Kellermann re-
couvra son grade de chef d'escadron.
Ce fut en cette qualité qu'il reparut
à l'armée d'Italie , où 11 fit ses pre-
mières campagnes comme aide -de-
camp de son père. Devenu adjudant-
général , il assista aux batailles de
iiassano , d'Arcole , de Rivoli et
à la prise de Mantoue. Il fut blessé
de plusieurs coups de sabre au pas-
sage du Tagliamento , en 1797 ,
circonstance qui lui devint aussi utile
que glorieuse. Bonaparte l'ayant dé-
signé pour présenter au Directoire les
drapeaux pris sur l'ennemi, cette ho-
norable mission lui valut le grade de
général de brigade. Il eut peu d'occa-
sions de se distinguer jusqu'à l'inva-
sion de Naples sous Champlonnel ,
dans laquelle quinze mille hommes de
nos troupes dispersèrent soixante mille
Napolitains. C'est dans cette expédition
que Kellermann , après avoir dissipe
une tourbe de lazzaronl , apercevant
sur le champ de bataille un homme
qui cherchait à rallier les fuyards , dit
à ceux qui l'entouraient : « Voici un
« brave, ce ne peut être un lazza- ■
« rone ; je veux savoir à qui nous •
« avons affaire. » Et aussitôt il s'é-
lance vers ce gucrier , déchargeant
en l'air ses pistolels pour lui inspi-
rer de la confiance : « Rendez -
« vous prisonnier! lui dil-il en l'abor-
« dant.» L'étranger abandonné des
siens n'eut garde de refuser cette pro-
position faite d'une façon si chevale-
resque , mais ayant déclaré qu'il était
le comie Roger de Damas, Keller-
mann, touché des dangers de sa posi-
tion, lui permit de s'éloigner et le
traita avec les plus nobles égards. On
sait comment les Français furent plus
tard obligés d'abandonner leur con-
quête. Kellermann ne faisait plus
KEL
alor» pailic Ar ctl\c Armer. Altaqur
d'une noial;;if \iolenle , il élail ic-
Iciiu à (inir, >ur un lit ilc iloul(ur%,
à peine ^um , il obtint ilu (irrraifr
ronsul unf liiii^adc de j^roise cavalerie
dans rarinée qui entra 5ous «e« or-
dres en Italie ; c'est à la tète du "2'
et du Itr rr^iment «le celle arme qu'il
prit part ii la lulaille de Maren;;o.()n
ne doit point ouldirr ici la polemi(|ue
qui a élé eii^a;;ée sur la question de
&a\oir à qui doit être déferr l'Iioniirur
de cette ;;raiMle )ournee. I,rs iLilrurs
de Itonaparle n'ont pas manque , pen-
dant sa vie, de lui en attribuer toute
la gloire, daignant à peine en faire re-
jaillir une r.iil)le partie sur h mémoire
du général l)e>ai\. parce que les moriN
ne font ^iière ombrage aux \i\aiits.
Nous, qui avons sous les veux, en
écrivant ces li;;nes , les pièces du pro-
cès, nous qui voulons rrmlie à kel-
Icrounn sa juste portion île ;;loiie ,
constatons que , dè> le malin de la
bataille, le> divisions l^nnes et \ ic-
tor avaient elé écrasées, que plus lard
celle de Desaix, composée tout au plus
de six mille hommes , après un le;;er
succès sur des tirailleurs , nlia se briser
contre la formidable colonne lancée
Ear le j^énérai Mrlas. Tout alors sem-
lait perdu pour la France : Desaix
tué, la confusion dans ses troupes ,
furJrr de céder le terniiu , defntis
long- temps en\utye pur le premier
consul , qui , lui-même , avait donné
l'exemple de la reliaite, toi.t indi-
quait un désastre imminent , lorsque
Keilermann, chargé d'appuver la divi-
sion Desaix, s'apernit que la colonne
ennemie, qu'il n'avait pas encore com-
battue, s'abandonnait à la |>oursuite
des nôtres avoc une ardeur inconsidé-
rée. Ce fut pour lui comme une in-
spiration ; il ju^c le moment favora-
ble, s'élance a\ec sa cavalerie à travers
ravant-:;ardc autrichienne qu'il sur-
prend dans le désordre de la victoire.
LXViil.
KFJ.
4(^5
Kn un moment tout est culbuté, foulé
aux pieds des chevaux; le triomphe
est complet ; les Autrichiens con>ternés
mettent bas les armes ! Cependant ,
au milieu «le son mouvement , Keller-
mann avait cru reronnaiire que les
dra;;ons de Lichtenstrin prenaient
position sur son flanc droit; il an été
la moitié de sa troupe avant qu'elle ait
entièrement pénètre ^lan^ la colonne
autrirhienne; il la remet en bataille
pour contenir ce rr^imcnt «jui, frap-
Ec de stupeur , reste spectateur immo-
ile du désastre des bataillons lion -
;;rois ; car huit tie ces bataillons seule-
ment avaient été écrasés. Le corps de
bataille était intact, la cavalerie, l'im-
mense cavalerie autrichienne «le iMelas
n'avait point ilonné; tout cela parais-
sait niedusé, anéanti L'armée au-
trichienne se mit donc en retraite, et
celle retraite serhan;;ea bienlAl en une
confusion épouvantable. Des corps en-
tiers, qui n'av.tient point été en;;a;;és,
qui ignoraient même la cause du dé
sordre, prirent la fuite parce qu'ils vi-
rent fuir les autres ! Il faut le constater
ici , l'histoire de la f;iierre ne fournit
pas beaucoup d'exemples d'un tel ré-
sultat obtenu par d'aussi faibles
nio\cns. Quatre cents chevaux chan-
ger la destinée d'un empire ! Après la
bataille, le premier consul, toujours
disposé à s'dil'usquer de la ;;loire d'au-
trui , dit à son ancien aide-decamp
avec une iiulirieience affectée : «< Vous
«c avez fait la une assez belle charge,
«« général. >» — « Je le crois bien, pre-
" mier consul , lui répondit keller-
« mann, elle \ous met la couronne
«« sur la tete.M l^aroles peut-être in-
discrètes vis-à-vis d'un homme qui
ne voulait rien devoir qu a lui-même,
qu'à son ^énie, et dont le résultat s'ex-
plique assez par la froideur qui régna
depuis lors entre le f;énéral couronné
et le «énéral qui lui avait assuré la cou-
ronne... Ce dernier ne put dans la suite
3o
466
KEL
obtenir le bàlon de niaréclial, quoiqu'il
Teùt incontestablement ^a^^né ; sculc-
nient , quelque temps après , il fut
élevé au f^rade de c^énéral de division ,
et employé comme tel àTarmée de Ha-
ijpvre, sous Dernardotte. Commandant
un corps de cavalerie à Austerlitz , il
e^éputa plusieurs charges très-belles
pt fut blessé grièvement, ce qui le con-
damna au repos pendant plus d'un an.
^n 1807, il passa à l'armée de Por-
tpoaj, et se trouva sous les ordres de
Junot à celte affaire de Vimeira , où
[^ duc de Wellington combattit pour
U première fois les l' rançais. Le succès
ne fut point pour notre armée ; il fal-
lut évacuer Lisbonne , traiter d'une ca-
pitulation, sauver surtout le butin im-
mense recueilli par nos généraux.
Pour cela un diploniate était encore
plus nécessaire qu'un guerrier. Kel-
Jernaann , esprit délié et pénétrant,
fu; envoyé au cqmp des vainqueurs.
Un fait assez curieu.x , c'est qu'à pei-
ne en présence des généraux ennemis
à Torres-Vedras , on lui demanda
»'ii savait parler anglais ; mais , se
doutant que celte qucs'ion était faite
i^ dessein, il icpondit que non, quoi-
qu'il parlât fort bien celte langue.
On crut en conséquence devoir trai-
ter avec lui sans les précautions
usitées en pareille affaire ; et c'est
ainsi que voyant ses interlocuteurs se
retirer dans l'embrasure d'une croisée,
pour discuter les propositions , il les
entendit se dire : « Nous ne sommes
« pas en bonne position ; il faut l'é-
« couler d'autant plus favorablement
^ que la (lotie russe mouillée dans le
« Tage, poite dix mille liommes de
(( débarquement qui pourraient pien-
y dre parti contre nois.» Kelleimann
n'eut garde de négliger ces lévéla-
lions ; ayant insisté avec plus de force
sur celte dernière ciironslanre , il dé-
concerta, e(fra\ a Wellington ainsi que
sir Henri J)alrymple, et il obtint enfin
KEL
celte convention de Cintra tellement
honorable pour nos armes , que l'An-
gleterre et l'Espagne furent au mo-
ment d'en violer les conditions, com-
me elles firent plus tard de celle de
Bailer.. L'armée française débarqua
dans les ports de la Biscaye, amenée
sur des vaisseaux anglais, pour rentrer
dans la Péninsule un mois après en
être sortie. Le général Kellermann
y rentra aussi chargé qu'il était de
couvrir avec son corps d'armée tout le
pays qui s'étend des frontières de
I^Vance , au pied du Guadaramma et
à la frontière du Portugal et de la
Galice. C'est alors que s'étant mis
en communication avec le maréchal
Ney, ils envahirent ensemble les Astu-
ries, dispersant devant eux le corps du
marquis de la Romana. Le maréchal, en
se retirant , lui laissa le commandement
supérieur dont il fit si bon usage, qu'il
atteignit le duc Del Parque sur les
hauteurs d'Alba de Tornies ; cette ar-
rière-garde , forte de plus de dix mille
hommes, fut complètement détruite. —
liientol les désastres de Moscou arri-
vèrent. Kellermann, retenu malade,
n'avait pu y assister; il fut assez heu-
reux pour appliquer son courage et
son habileté à une campagne non
moins mémorable, celle de 1813,
notamment à lîaulzen où il fut blessé
deux fois et eut cinn chevaux tués sous
lui. Tristes présages des dangers qui
l'attendaient encore ! 1814 était venu
avec son cortège de succès infruc-
tueux et de revers irréparables, laissant
à Kellermann le stérile honneur d'avoir
détruit par une charge de cavalerie le
corps de Pahlen, d'avoir culbuté celui
de Saint-Julien à Saint-Pavo, de lui
avoir (ail (|iiiiize cents prisonniers ; en-
fin, au coîiihat do Bar-sur-Aube, d'a-
voir empêché l'armée prussienne de
déboucher iks hauteurs dont elle s'était
emparée, et sauvé par une charge ra-
pide et vigoureuse le corps du mare-
KEL
clial OuJinot. A|Mrs ia rhutr du «^oii-
\rinrroriit im|>rrial, kt-IIrrmaiiu, aiii»!
que b plupait (liN ^tnrr;iu& de l'eru-
pire , se suuraïl aux lîuurbuns et fut
cooitné dans se^ titres. Au mois de
mai, il fut un des i i
teurs du projet de
U >tatue de llrrui l^ ,
Neuf , ft fi;."!ra sur la |
des r ... I.c '2(i lUàt» itSi ,,
il ni.' I trie de i'a\ai.t-^arde
3ui, iOU«i les oïdies du duc de lierri,
evail s'opposer à l'arri^^ de Na-
poléon, mais qui n'eut pas le temps
d'agir. Aiipelc à la dumbie des pjtr»
des Ceut-jours, puis k un rominaiidr-
ment dans la grande armre de Napo-
létm, il prit part à la courte campagne
du mois de juin. Dans le coniba! du
lO.aui Quatre-])ra<, il enfonça plu-
sieurs lignes d'infanterie, l'cniiant
toute la journée, le nureclial Nf\, qui,
avec 3r»,0()(» liomuies, éiait cluii^»* de
combattre l'armét* an^lai e , a>:iit paiu
sous l'influence d'une irrésolution con-
tinuelle. Ce ne fut f;ucre que \er.s le
soir, après que Napoléon l'eut fait pré-
venir des avantages remportés sur les
Prussiens, qu'il se décida à frapper un
coup éncr{;ique, et qu'il dit à Kelicr-
mann : «« Allons, ;;éneral, rempcrcnr
est >ictoiieux, écrasons les ,\n^lai> ;
rejelons-lcs sur la mer et foiçons-les
de se rembarquer. >» Kellernunn lui
6l ob<er\er qu'une forte partie de sa
division étant à se refaire dans les \il-
la;;es voisins, il ne disposait que de peu
d'hoiiHuos ; mais le maréclul paraissant
de plus en plus exalté, il tornic les cui-
rassiers et Ici carabiniers en colonne,
s'élance sur l'ennemi, enfonce $ucce.ssi-
vement trois W^nes coroposc*es des
Kcossais, troupe excellente, et se dispo-
sait à profiter de son sucns, quand il
vit avec douleur que son ciief n'avait
pas ordonne un seul motivciiienl pour
appuyer celle diar^c si briiiaule. Force
fut donc de reprendre le chemin qu'il
KHL
46;
.1 travers les eoncmit^ , cn<
1, .il,. M, .M r- - >.!.i au milieu
>'• arriva eu
ein.» »jui , . Ht à toute
bride leur * (i.o\al d«
I II
.. , lu
. U..V. u L iucict d<i
I M n'.i^.i't pour r.-Ls-
acii 1 , u.i 11 illi'i,
qin- ilrtix 1 1 I,. 1 1 .111-
raixiiic. l.iil'ii on p.irMut a le tirer de
cet ctâ! < r.K.r i;. .!..! c fcinnulierc,
il eut I e ses cava-
liers f f »!f
IMtnquo «M I
»lev>e à L jnKi.r.u.i !.•>, 1 1 lia lut
qui, lors de la retiaite de larmee der-
rière la ï.owi". fi.' !.
neraux (it-iar»! • ' ,
soumK>i(tn I
Wlll I),
manu irsta k.m .t^aul plus
d'aliineni a sa ; c activité ,
3u'un douloureux procès de famille
ans lequel son succès froissa bien
cruellement ses sentiments d'époux et
de père. A la mort du maréclial, il
hérita de son titre de duc et de la pai-
rie. I.e ;;éiirral ktllennann mourut
en iS'J.'i, Un ail! (»n nom , le souve-
nir de sa Vie ;;uri rierc au >(u\ iil> qui
lui est resté, et qui est aujourd'hui
membre d(* la cli.tin! rc AvS' députes
suui le titre de duc de N aiuiv.
KF.LLISOX (Mathikl), ihéo-
lo};ien an<;lais , naquit en l.'iOU dans
le comté de Northampton ; fut élevé
dans les collèges anglais de Douai , de
Reims, de lîome, et occupa pendant
^pl ans une chaire de theoioi^ie dans
ce dernier. ANant été appelé en 158Q
à Heims, pour v i euiplir le niéuie eoiv
ploi,.il v prit le de^ré de docteur, et
parsinl qitclqi.es années apci à la
dignité de chancelier de runiversilé,
I..a mauva'.*^e administration du ùm-
Jo.
468
Kl'L
teur Woiiliinwton, présidciU du fol-
lèse de j)():tai, fit sentir le besoin uc
lui donner un successeur. On jv-^la les
yeux sur le docteur Kellison, et sa
bonne conduite justifia parfaitement an
pareil choix. Ses premières opérations
furent d'éteindre les factions qui dé-
chiraient ce collège , et d'y réiablir
la discipline suivant l'esprit des fonda-
teurs. Les dettes contractées par son
prédécesseur, et qui avaient anéanti les
ressources de cette maison, présentaient
une tâche bien difficile. Kellison ne
la ju^^ea pas au-dessus de son zèle;
il alla pour cela faire une coHecle en
Anf];leterre où il mit à contribution la
bourse des catholiques , et obtint, non
sans beaucoup de peine , du i^ouver-
neraent de Bruxelles , le paiement
des arréraf];es et la continuation de
la pension dont les rois d'Espagne
avaient doté le collèg;e de Douai. A
peine était-il sorti de cet embarras
qu'une maladie contai^ieuse, répandue
dans la ville , l'obligea de transférer
ses élèves au château de Lalain^:;, ap-
partenant à la comtesse de lîerlai-
mont, où leurs études, j^^ràce à sa vigi-
lance, ne souffrirent aucune inlprrnp-
tion. J.a réforme à laquelle il avait été
oblio;é de soumettre son coilèfje lui at-
tira des ennemis puissants qui le dénon-
cèrent à Kome : mais il lut pleine-
ment justifié par le rapport de deux vi-
siteurs envoyés pour examiner sa con-
duite, et par celui des deux nonces de
Bruxelles et de Taris. Accusé d'èlre
favorable au serment d'allé^i^eance con-
damné jcii" le ['.ape et sur lequel les
catholiques d'An;^lel(.Mre étaient divi-
sés, il répondit à cette accusation, en
1617, dans un traité sur le droit des
princes et des évecpies, où il s'(\[)ii-
qua avec beaucoup de sap^e.sc sur les
bornes qui séparent les «Icux puissan-
ces. Cet ouvraj^e avant été réim[irimé
en 1623, avec quelques adilitions, un
ennemi caché en dénonça l'auteur au
KEL
roi "Jacques F' , comme fauteur de la
doctrine qui autorise à déposer et mê-
me à assassiner les princes excommu-
niés. Le monarque, qui de[»uis lonji;-
temps connaissait la loyauté de Kelli-
son, parut surpris des torts qu'on lui
imputait ; et dès que celui-ci fut averti,
il s'empressa de dissiper les inquié-
tudes de son souverain par une let-
tre qu'il lui écrivit directement , en
lui offrant des cautions respectables
poui- répondre de sa soumission au
serment d'allégeance. Peu de temps
après , il publia une défense de la
hiérarchie ecclésiastique , où il in-
sistait fortement sur la nécessité du
gouvernement épiscopal dans chaque
église nationale, et surtout dans celles
d'Angleterre, où cette forme de gou-
vernement venait d'être rétablie [Voy.
Bisiiop, IV, 528). Cette mesure con-
trariait singulièrement les prétentions
des réguliers', qui aimaient mieux dé-
pendre du pape, dont l'éloiguemenl
favorisait leur insubordination , que
des évéques placés sur les lieux et
par conséquent à portée de surveiller
leur conduite. Les ?P. Knott, vice-
provincial des jésuites en Angleterre,
et Floyd, son confrère , attaquèrent
\;vement la personne et le livre du
docteur Kellison, dans dos écrits qui
furent cond.-mnés en 1631 par l'ar-
chevéfiiie de Paris, la faculté de théolo-
gie et l'assemblée du clergé de France.
Pendant que ce docteur triomphait
ainsi des vains efforts de ses enne-
mis du dedans , il obtenait des suc-
cès j)lns consolants sur ceux du dehors.
Il avait publié un écrit intitulé /r
Bail/on de Vronintile reforme , qui
contribua singulièrement ri la conver-
sion (ie plusieurs protestants anglais.
iNIontague, (jiii fut depuis évê(jue de
Cliicbesler, lui ayant répondu [tar le
Ihnllimur.ur Iniillo'!:!'', Kellison, dans
sa réplique, pressa si fortement le doc-
leur anglican que celui-ci se rappro-
MX
du l»raurntii< t\e l.i cÎKCtntiP rj|l»..li-
•jiic >ur la , ur
riU\ocjlioii ■ <- (1rs
Iiuiinr5 (Tu^rri rt In satisljctiuii , ilc
iiutnrre quM Hniiit trrs u>jircl à *«
rullr;;ue« louclont m>ii uriliodo&ie.
l/« (locleur Krlli»nii, rhar^f d'aiinm
rt (le travaux, leiniina sa carrière k
Douai rn ItiVl . Sa ta;!le était atan-
lj_rii r , sa |)irNtanre ini|iu»aiitr. Si.ii
ina:iitirii ^rj\e iii>ptr4it If rc^|lrrl
m iiu'-iiie teiiip» «^iie xtn manirre» ^f*
fjlJe», les a^témiMils ilc »a ron*er>a-
lion, et le inrillrur ton a|i|>rlairiit la
rnii6aiire et fai%airni nublirrrol>!.rii-
nlé (le son r !i .M ' I ti I^> rallioii(|iir«
anglais Ir •' a (iluMeurs re-
prises poui . . (-[MM-opalc dans
leur pa^s; mais s.", modestie et son
humilité mirent ronriamment des ob-
stacles à raccompl:N>cment de leurs
\(iux. Ses ou\ra^es sont : I. J^ltin
tir in niHt^'rllr reli^iun , Douai ,
ir»()3, in-H . 11. iïfftliiiiir ti la li'-
/Mtnsr tir Sutrlijff u CL.umten tir itt
noni'riir rrligioti , Keinis, 1608,
in 8". III. Ortt'in ron/m Hr/trint
Il , rrgt M'nut. IV. Lt
lidii/un t.'i i.' rr formé. V.
'..iuiven rr/onnotiunis prasrrtint
i iii\'inisttrtz , Douai, iri6, in-S".
VI. JjT droit rt itt jnriJii fitm ilu
pnuce rt liu prriul , 1 (i 1 7 - 1 G :î 1 ,
in->°. Vil, Tmitr fie iu hirrurcltir
tir rFi^lisr tuntrr Ctiiuinhie tir
Cali'in / 1 6J9 , i n 8° . V 1 1 1 . Instruc-
tions courtrs rt nn rssairrs pour 1rs
t atiiuUijurs tf Anglrtrrrr, tuuriitint
leurs pasteurs^ \iV.\{. l\. (^orn-
innittiriits in tcrtitiiu jmrtrm Sum
imcsamti I'iwmii\ lt)3-, in-fol. \.
Lrtirr tut roi Jari^urs r^ , manuscrit.
T—n.
KELLY (Michel), chanteur et
r,)nipos.loitr de must(]uc , n.K^uil à
I)u\)rM». Il uil dans ses mémoires que
un pcro était le maître des cérémonies
o château, et qu'il faisait en même
Kf.L
i6c,
irmp ie (ouimcrce de \in , ritmul de
fondions a^ ri singulier. A peine ijȑ
de trois ans, ou ir mettait :ur la table
de famdlepour amuxer les conM^e« avec
la chanson, faroniM: alors : Tlirre ivas
a joiiy miiirr tuitr. A sept ans, il
conimen(;a l'élude de la musique pour
jaipielle tou« le^ siens él aient pas.'>ion->
nc^. Il fut question del'en'.x^er »e per-
fectionner en Italie, et m .iitrndanl il
d< ' rr de sa \ille natale
d. . liuuiti. Ses parents
ne ^uuiiOiiil pu* qu'il sui\it , loin
d'eux surtout, la carrière où Tmiraî-
n.iit un ^oùt décidé; il le> quitta en
1779, et se diiij;ra vers la teiic clas-
sique du chant. Il a>ait alor» quinze
ans. Il fut p.iifailrinent accueilli a \a-
ples par le chevalier VV illiani llamil-
tnti, protecteur éclaire de« arts et des
ariistrs; mais c'est à Florence qu'il
devait d'aboi d exercer son talent. C'é-
tait le premier chanteur aii^lai:. qui
eût encore paru sur la scèue italienne :
il > obtint du succè», à ce qu'il nous
apprend lui morne. Son eii^.ijrmonl
étant rempli, i! partit pour ^ cuise sur
la parole d*i;n Piitrepreiicni , qui bien-
tàt le laissa dans i'embanas, lui et
toute une troupe d'acteurs, en dispa-
raissant, faute de potivoir répondre k
certaines conditions exigées par les
roat^i.'t rats, (lui étaient chargés de la sur-
veillance administrative des tiiéatres.
La per>pecti>e (jr-i s'ouvrait devant
KelK était des plus tristes, car il n'a-
vait plus qu'un snjuin dans sa poche,
lorsqu'il exe. ta l'iniérét tout particulier
de>l""' lîéiiini, chanteuse célèbre, qui
l'emmena à (iralz. Uevenu daii-. l'état
vénitien, il s'y en;;ai;ca pour h: théâtre
de r>rescia. Tne aventure d'amour ou
le simple soupçon d'è«rc , auprès de
la plus belle des chanteuses , le rival
(ISin 5ei;;neur du pa>s , liès-violent
et trcs-d3n«;ereux en raison des as-
sassins «\c profession qu'il avait à sa
solde, amena des menaces qui l'ef-
470 KEL
fravèreiil à tel point qu'il s'enfuit de la
salle après la première partie d'une
représentation où il avait joué et
chanté. 11 arriva ainsi à Vérone en
costume de théâtre et y produisit un
effet très-rislble. Une fols rassuré, Use
mit en route pour Trévlse, ville très-
fréquentée par les nobles de N enise
dans la saison des villégiature. 11 passa
ensuite à Ldliie , puis visita succes-
sivement Ferrare, Modène et Parme.
L'ambassadeur d'Autriche à Venise
lui ayant fait des offres très-avanta-
geuses pour Vienne, qui avait à cette
époque la cour la plus brillante de
rturope, il s'y rendit, et y connut
Haydn ainsi que Gluck, objet de sa
plus vive admiration, et dans un opéra
duquel {Ipliigénie) , il joua Pylade ;
Mozart qu'il a dépeint dans sa vie de
famille , et qui , dit-il , applaudit la
musique que lui, Kelly, avait écrite
pour la Canzone de Mélastase si con-
nue ; Grazie agli iiiganni tuai;
Paësiello, Saliéri qui travaillait à son
Tarare , Jarnowick , le chevalier de
Saint-Georf;es, le baron de l)atz, l'abbé
Casti, etc., etc. Dans // re Teodoro,
dont celui-ci avait fourni le llbretto,
Kelly fut chargé du rôle du pauvre
Gafferio, et y Introduisit un air de sa
composition, fait et surtout chanté en
imitation d'un mendiant Italien qui
courait les rues de Vienne. Notre Ir-
landais s'en tira si bien que tout le
temps qu'il passa encore dans cette
ville, on ne le nommait plus que le
Vieux Gafferio. Il fut rappelé dans
son pays en 1787, par une maladie
de sa mère, traversa rAllemajj;ne , et
gagna Strasbourg où il fut frappé du
jeu de M'"'^ IJugazon (jul y donnait
des représentations. Il fit connaissance
à Londres avec mistri.is Crouch , et
dès-lors commença une liaison qui a
duré toute la vie de celle-ci. Il la sui-
vit à Paris, elle et son mari. Kelly,
assez sévère pour les chanteurs et
KEL
les chanteuses de notre opéra, mais
surtout pour ceux qui criaient sui-
vant l'usage de ce temps , loua beau-
coup l'exécution de nos chœurs , et
alla jusqu'à l'enthousiasme pour la
musique de Grétry dans Richard
Cœur-de-lion. Il ne donna cette fois
que six semaines à la capitale de la
France; mais il y revint en 1790 et
éprouva, sans trop s'en plaindre, quel-
ques-uns des inconvénients attachés
aux passions politiques et à l'esprit
d'égalité que la révolution venait d'in-
troduire dans les basses classes. Tou-
tefois les intérêts du théâtre domi-
nèrent chez lui tous les autres ; et ,
si les excès de toute espèce auxquels
Paris était en proie le frappèrent , il
n'en fut pas très-affecté ; car il disait
n'y avoir trouvé sur ses pas que la
gaîté et le plaisir. Il condamnait l'écri-
vain qui avait osé l'appeler : « Ville de
« bruit, de fumée et de boue, où les
« femmes ne croient plus à l'honneur,
« ni les hommes à la vertu. » Il
croyait que c'était là de la poésie, et
il a cité et imprimé , en l'altérant
beaucoup, celle phrase comme étant
des vers de J.-l>. Rousseau, et non
pas de la prose de Jean-Jacques dans
son Emile. Pendant l'hiver de 1790
à 1791 et au printemps de cette der-
nière année, il reparut sur la scène en
Angleterre, et fit encore une visite à
Paris vers le milieu de 1791. Il était
cette fols bien plus disposé à plaindre les
déplorables infortunes de Louis XVI et
de Marie-Antoinette. On aime à lire
dans ses mémoires, qu'à Londres, vers
le 21 janv. 1793, par respect pour la
douleur de ceux qui pleuraient la mort
du roi martyr, il n'y eut point de
spectacle à J)rury-Lane, dont Shé-
ridan était principal propriétaire ; mais
le mérite n'en fut pas à celui-ci qui
était absent : il appartint tout entier
à l'acteur Kemble. Shéridan , à son
retour, blàraa cette mesure de relu-
rhe , disant qur la politique rt la rr-
liijion devaifui dic rf;;a: Jers roiumc
etiAn{;èrr(dan« tut liru ron&arrea l'art
draiiuht|U4r. Kt rrpriidaiit, iiou< a^i^utr
Kfli?, nul pfut-rtre ne rondaninail
plus Sinrrreinrnt (]iie crt orateur (a-
raeai le ^raiid crime rointnis en France
dans ce jour néfaste. H joaa ver^ le
m^e temps, m Ansleiene et en Ir-
lande a%ec in:><lris< Croiirli, nui «'était
séparée de «nii mari. Son del»ut rom-
mefomjiOMtnir doperaient lieni l^in-
dre* en Iruier 17U7. il réunit en
17îïH, à frl rmplui, relui de clianleur,
dan5 une piére ou \\ avait Dussek
pour colbloralrur. Kn ITUD, il fil la
inu«ique «le l*iuirrn , opéra de Shé-
ridan. Il avait un rôle à remplir le 15
mai IKOO, jour ou un coup de pistolet
fut lire du parterre «ur (ieor^e^ 111 ,
lor>que te prinre en' e
à l'Opéra, et \\ fnt r .•
i la curioNile n
irrité, sur le mu i
été airèlé •;iir-lc-rliamp. A la tin du
spectacle, auquel le vieux moiiartjue
avait assité usée un ^an;;- froid ailini-
rable , pendant que sa famille fon-
dait en laime<, les speciatenr» rede-
mandèrent l'air national qui aoit été,
avant la repieseutatiou, le «ij^nal at-
tendu par l'assassin pour faire feu.
Kellv était en train de le clianter a\ec
ses camarades, quand il reçut, (»ar or-
dre de Sheridan, un couplet de cir-
constance, improvisé, sur le rintlime
de (îod sure thr Ung , couplol qti'il
entonna d'une ^oix ies-.i;;itée : c'est
celui qui commence par frotn the as-
sassin s hliHV, et qui a été fort con-
nu depuis lors en Ai1j;letcrre. I/ef-
fet en fat prodi^^ieux. A la fin de
1801, il re>olut de former dans l^all-
Mall un de'p^t pour vendre sa nom-
breuse musique et celle des autres com-
positeurs, st>it an<;Uis , r-oit italiens.
Son ma;;.T>ln s'oii^nl le 1*^^' janvier
1802, mais il v fil fort mal ses aûaires,
47t
KRL
ne pnuvaiil suffire à ses occupât!
multipliée > comme acteur et composi>
teor dans trois théâtres de Londies^
oatre sc^ (onrtioui d'eiitreprenear du
tliëatre italien et de dnecteur de la
muiique «laiis deux autres salles de
spectacle. 1^ France le revit au mois
de juillet IHO-J : un était alors en
paix avec l'An^lelerie. il vtita^eait
cette fois avec le chanteur N i|;anoni.
Se* récits de celle époque sont inté-
ressants, et celui rnlie autres d'one
repirsrntalioti lï. hitinminifur zà
Itieatre- Français ou (>liaile« Fox, re-
connu dans une lo^e, excita de^ balle-
ments de mains dit fois phi^ fort.s que
ceux dont llonaparte fut l'objei , lors-
qu'il entra peu de temps après. Nm
theaires truuveicnt de nouveau pracé
.vuprè^ de Keili. lout lui éluit bon,
pouivu que l'on n'atlaqnat pis es
<s présence le rhant aiiflais et la
• d cxrcuer la musi-
oii relie de (irelfvj
celui de nos compositeurs qu'il pré-
ferait à tous. 11 crut pouvoir Irans-
poiter un opera-comique de ce célébré
niaitre sur le théâtre de l^ndres: ie
Ju^rmfnt dr Miihis ; mais il juf;ea
qu'il fallait plus de poivre {(Mjenne)
au i;oùt br.tanniquc (nous conservons
5a plaisante e.*presslon', qu'il ne s'en
trouve dans les airs de cet opna-co-
miqiie ainsi que dans ceux de V/ltWint
jdhm.ï et des L\ù'nrnirn1s iinpreous
qu'il admirait d .ailleurs. 11 peidil en
ISOâ M"" Cioudi, qui était à la fois
nnc très-jolie femme, nne tres-a;;réa-
ble clianleiKe, et dftnt l'allnrhemeiil
pour lui fut a toute épreuve. Il résolut
d'abandonner le théâtre ai:ssitôt qu'il
le pourrait, se réservant toutefois de
composer, il s'était a>socië avec Shc-
ridan, tant pour la direction du théâtre
de Drurv-Lane, qu'il fjarda Irciilc ans,
et qui Liiiia en février 1809, que
pour la mise en scène au Grand Opéra.
11 avait paru pendant ce lou^ espace
472 J^EL
comme principal ténor et dans les
opéras sérieux et dans les opéras bouf-
fons. 11 monta pour la dernière fois en
septembre 1811 sur le théâtre de i3u-
blin où il avait débuté enfant. Ce fut
peu de temps après que l'infidélité du
préposé auquel il avait donné toute sa
confiance, comme marchand de musi-
que, lui fit subir à Londres, sinon la
honte, du moins toutes les conséquences
d'une banqueroute déclarée sous son
nom. 11 partit une fois de [dus pour
Paris en juin 1814, à l'effet de rendre
service à des amis. Il ne raconte n^uère
des événements de ce dernier voyage
que des scènes d'auberge , ses bons
dîners surtout , et puis on y trouve
force compie-rendus des spectacles
français. De 1797 à 18:21, il avait
fourni à différents théâtres la musi-
que de soixante-six pièces dont il a
publié la liste, et composé en outre
beaucoup de chansons sur des paroles
italiennes, anr;laises et françaises. Nous
avons quelque peine à nous expliquer
comment ce serait Shéridan qui aurait
dit à Kelly , son collaborateur et l'admi-
rateur passionné de ses talents divers
comme homme politique et auteur, un
mot cruellement satirique : « Tu es
« jmporfateurile inusifjue etcomposi-
« teur de vins, >• sous-ciitendant que
le bon Irlandais donnait souvent com-
me de lui des airs italiens très-connus,
et puis, faisant allusion à ce que Kelly
s'était fortement adonné à l'ivrof^nerie
depuis la mort de mistriss Crouch, et
avait apparemment débile beauroiq) de
\iM dans sa .société intime. Quelques
années avant sa mort, il était fort f^out-
teux et ne pouvait plus sortir de chez
lui. C'est ce qui lui a donné le temjis
de recueillir ses Soiwettirs. Il les a [)ii-
bliés en 18'J(> ( lieniinlscrnrrs of
Kelly). Ce livre est loin de révéler un
homme lettré , mais il contient une
loiile «l'anecdotes sur les personna;;e.';
dit;lin^ué."5 avec lesquels il avait été le
KEL
plus en rapport , principalement sur
Shéridan. 11 ne laisse échapper aucune
occasion de témoionerlareconnai.ssance
qu'il devait au prince de (ralles, devenu
Georges IV, et les derniers mots de
son dernier volume sont pour lui : God
savcihe king. Il estropie quelquefois
les noms étrangers, les noms français
surtout, de la manière la plus comi-
que, attribuant à tels ou tels des bons
mois ou dos faits oui traînent partout.
Cejicndant il y aurait de quoi former,
en lui accordant l'honneur de la tra-
duction , une bonne moitié de volume
des deux qu'il a consacrés à ses vo\a-
p;es, à ses rencontres, etc. L'auteur de
cet article en a donné un ample extrait
dans les /innales de la liltérature et
des arts, recueil estimable dont M.
Trouvé était le principal rédacteur. A
dire vrai , malgré sa longue carrière
théâtrale , on ne connaît bien Kelly
que par ce qu'il nous a appris sur
lui-même dans son ouvrage. Ses succès
au théâtre ont pu tenir à son caractère
qui le faisait généralement aimer, à ses
liaisons de société, enfin au défaut
d'autres talents qui fussent alors su-
périeurs aux siens. Il mourut à Mai gale
le 9 oct. 1S!2(), dans l'année mcrnc où
avait paru son livre, et son corps fut
transporté à Londres dans le cimetière
Saint-Paul. Il avait un frère, aide-dc-
camp de loi d Wellington en Espagne,
et à la bataille «le ^^ alcrloo, qui avait
été introduit prè.> du duc par le talent
qu'il possédait, lui aussi, pour la mu-
sique. L — P — K.
KELP (Juste-Jkan) , érudit
.saxon auquel la linguistique et l'his-
toire doivent de la reconnaissance, na-
quit le 17 septembre Ki.jO, à Verden,
où son père était organiste. Il se ren-
dit , après avoir fini ses premières
éludes, dans les écoles de Verden et
de Minden, à Piinteln, et ensuite à
Kf/Tiigsberg, où il ne resta pas moins
de trois ans à suivre les cours acadé-
I
K£L
MiM|iifs. l«e vaii5eaa qui Ir ramfiuit, eu
1(»73, fit naufra^je »ur In côlr^ de
l'île de Uti;rii , nuis il se sauva sans
aiilic iluniina^r que la peur, et quel-
ques »fma iirn .iprès^il fui de retour à
N cftieii. Sou •!rv.>rin riait «le faire une
édutjliuii |).^i ticiilirie , et pruvisoire-
roent il donna des leçon» en \ ille ou chez
lui. Mai^, las d'attendre, il eutia dans
radmiiii^tralinn rt, apièi a\oir rera-
Kli diverses fonctions suballernes aux
aillia^^es d*Klirenl»oniu. de Plalten-
bour^, deSoldf rn et de Nienbour>;,il fut
secrétaire à Kotlienl>our>; et à Vfrdcn
sucres.^1 veinent, puK bnilli dans Oltrts-
ber;;. I/nnaMomics Danois, en 171:2,
lui 6l reM;;ner ie> fonctions'peu com-
patibles ilan; cette crise a*ec «on à;;e,
et il ne ciienlia point, quand I? péril
eut disparu, à recouvrer une position.
Chanoine de Hameslo deptii> lon-ues
années, il trouvait dan> le ir^eiiu de
son canouK-at, joint à se> économies,
plus qu'il ni* lui fallait pour vivre. Srs
^oûts avaient tuiijours été ceux d'un
savant; il s'était .spécialement livré h
l'élude d -s antiquités et de l'hisloire de
la l>avse-S.i\e, ainsi que du dialecte
germanique qui s'y était parle, et il
recon>truisit eu partie la langue des
Qiauques , un des peuples de l'an-
cienne (iermnnie qui eurent le plus
de celébr!tt'. il a\ait beaucoup écrit,
et dans sa vieillev.c encore , il te-
nait à réaliser la devise MuHus dûs
sine linrtt. Il n'a cependant fait im-
primer que peu d'ou\ra^es, ou pluttU
d'opuscules, et encore n'ont -iU paru
({lie dans des livres sortis d'une autre
plume ou dans de^ recueils. Kn re-
vanche il laissa divers manuscrits par-
mi leN<]uels plusieurs sont irn[ioilants.
On les conserve à la bibliothèque dr
Hanovre, et de plusieurs «rentre eux
on a tué des copies qui ont clé utiles
aux nombreux compilateurs auxquels
nous dc\ons l'hisldire do Iiirnif et de
N crden. Kc!p motiriit, doven de son
KEL
473
cbapitie, le :)() juillet 1720. Voici la
liste des écrits qu'il a mis ou laissé
mettre au jour. I. Glussarii (Maucki
sf*fiimen (dans les (Àji/rt tutiea ety-
inulvgûu de Leibniti) , Hanovre,
1717, in-S", Y part., p. 110-50).
Vjc fra>;ment curieux n'est pas, comme
on rima|;ine(ait dans notre siècle si
fccond ru prospectus cl en avorte-
ments, l'échantillon d'un ouvrage à
faire, mais l'cxtiait d'un travail coro-
f>lel ou prés de l'être, dont Kccai d a vu
e manu<^crit ^Vov. préface des LuUrrl.
elynwl.^ p. Il) et dont un tiouve
uiir copie a la bibliothèque de llam-
boui^. (.e (îlossanuni ( haut n um,
dont nul savant iniriix qu'un linguiste
de la Uasse-Saxe n'était à même de
rassembler et de coordonner le> ma-
tériaux , se compose presque cxcluMve-
mcnt de ceux des termrs bas-saxons
(ou PiuttiJrutsi h qui ne sont guère
en usage que dans les territoires de
Brème et de Verden, ou qui serublent
venir originairement des langues ru-
nique-î, sc> thiques, gothiques ou Scan-
dinaves. 11. hrmartfues historiqurs
.sur une lettre iT ordination et d'in^
dulgeme tntUi'ee a (m^rl dans la
l ieilit-Miin fie , Hanovre, 1723,
in-S". 111. I^ttre^ a l'arr/ds^iste
Diedrich dr Sliidc ^dans les Mernor.
Sind. de Seelen, p. 2(K), J-Jî». 2.10,
300). Ces lettres roulent sur l'hiNJoirc
delà ville de Stade. IV. Cimtinuaiio
I tttii/ofii un hiepisruporuni Urcmen-
sium Othonitini (dans les duchés de
li rente et de Verden^ V^ rec, p.
109 et suiv.). V. De la fête de la
Sainte Lance (dans le même ou\rage,
0' rec, p. VGl) et sui\.). VI. Ln ex-
trait de son Krpliratiun des noms
propres qui se lisent dans le hrcf
de fondation de l'église et de T écê-
ché^dc Verden (d.ins les Antiquités
et noui^eautés des duchés de Brcnie
et de Verden, tom. V\ p. lO.ï et
suiv.). VIL IJu extrait de son ////^rj a
474 J^EM
historique sur Brème et Verden ci
sur les limites fies deuxécêchés (dans
le même ouvraf^e, t. 1®'", p. 105).
Quant à ses ouvraj^es liicdlls, ce sont,
outre le vocabulaire de la lan^^ue des
Chauqucs, IVxplication des noms pro-
pres et Taperçu historique cités plus
haut: 1" un Mémoire sur les dîmes
dans les pays de Brème et de J^er-
den, et une autre monographie intitu-
lée : Oui, les territoires de Brème
et de Verden ont toujours été un
obseroatoire et un champ de ba-
taille pour toutes sortes de nations
belligérantes; 2° un Fragment sur
le pays de J {a de In , puis V Hadele-
ria Jorlunœ pila, puis enSn Hadele-
ria et nunc et olim optimo jure Bre-
fnensis. Ces deux derniers ouvrages
ont été analysés dans les duchés de
Brème et de Verden , 6*^ rec, p. 36
et il. V Uadeleria fortunœ pila
est un tableau des nombreuses vicissi-
tudes souffertes par le pays de Hadeln
et de ces caprices de la fortune qui
tant de fois l^onl réuni au duché de
Brème pour l'en disjoindre, et l'en ont
disjoint pour l'y réunir de nouveau ;
3" une Chroni(jue du comté de
Hoya ; 4° Fata ottershergensia
(analysé aussi dans les duchés de
Brème et de Verden, 5*^ rec, pag.
38 et suiv.). Kelp y donne briève-
ment, mais d'après des documents sûrs
et combinés de main de maître, l'indi-
cation des territoires qui, après avoir
appartenu dans des temps reculés aux
comtes de la Wolpe, furent incorpo-
rés à l'archevcclié de Ijrème, et s'é-
tendent notamment sur le château et le
territoire d'Ottersbeig. V — OT.
KEMBLE (Jlan-Piuuppi:) ,
le plus célèbre acteur dont s'enorgueil-
lisse la scène anglaise, naquit le 1*^"^
février 1757, à Preston (comté de
Lancastre). Son père, Roger Kcmblr,
directeur d'une compagnie nomade qui
exploitait les provinces du nord, eût
KËM
bien souhaité que, de sa nombreuse fa-
mille, ni filles ni fils ne missent les pieds
sur les planches; et il ne le laissa pa-
raître qu'une fois devant le parterre à
Worcester, dans le rôle du duc d'York
de la tragédie de Charles \^^ . L'enfant
avait alors dix ans. Il fut ensuite placé
an séminaire catholique romain de
Sedgeley-Park (Stafford) , car son
père professait le catholicisme , puis
dans un des collèges de l'université de
Douai. Partout il fil preuve de dispo-
sitions extraordinaires et moissonna
les lauriers scolastiques, mcme en phi-
losophie et en théologie. Déjà son
père croyait le voir choisir une pro-
fession savante : mais l'uniformité mo-
nacale de la vie du professeur, du
prêtre, ou du légiste, ne convenait
point à son humeur , à ses habitudes
d'enfance. Au collège même, ce que
maîtres et camarades admiraient le plus
en lui, c'était la grâce et la facilité de
l'élocution , c'était surtout le débit
oratoire ; déjà l'acteur s'était révélé.
Il abandonna donc l'université sans
l'autorisation paternelle et vint débar-
quer à Bristol , d'où , sur la nouvelle
que son père et sa troupe étaient à
jîrecknock , il se rendit en cette ville
de la principauté de Galles. Le chef de
la bande couiique le reçut très- froide-
ment et lui signifia d'aller chercher
fortune ailleurs. Les comédiens fuient
moins sévères et firent entre eux, pour
la lui remettre, une collecte à laquelle
leur directeur ne put se défendre de
contribuer pour une guinée. \]xï peu
moins léger d'argent après cela, l'ex-
séminarlste alla débuter à Wolver-
hampion , sous Chamberlain ; il n'a-
vait que dix-neuf ans. Son premier
rôle, Throdose, dans isi Force de Ta-
/nour, ne fut pas très-rcmarqué, mais
dans celui de Bajazet il eut un vrai
succès et , dès ce moment, les connais-
seurs purent lui prédire un grand
avenir. Il eut cependant encore long-
lemp^ à f mirir la pro\ mrf Mal pi^ é dp
( II, il Vf TV. ' ' uliam
t 'ir* lulniaii t liia-
luiliqur fia>l s\ fort (]u'uii df &«< amis
rt lui m furriit réduits, pour atllrrr
le public , à faire de» tour» d'e>ca-
raola{;f .vjl alla ensuite à N> orfe>ter,
nù du moins il joua la rum^ie; puis en-
fin, »ur la rrromin:)ndalion de &a MPiir
(mislriss Siddons; , il parut aui tliéa-
trr< roKiux de M.inrliotrr et de l.i*er-
pool. (\'cA de telle rpo(|ue que date
sa réputation : plem d'jmuur pour sj
profession , en embia^^sjot toute» le»
p.iri:es d'un roup d'iril, il travaillait
en même temps sa Voix, son ;;e>le, se»
poses , son costume ; tout applaudi
qu'il était, il sentait la pos^sibilité d'un
mieux, il cherchait i être plus vrai,
plus profond , plus saisissant , plus
nuancé; il creusait ses n-les , il ne le»
eludiait pas seulement en eui-meines,
il les examinait par rapport à l'enseni-
ble, et <c modifiait spontanéroenl |M»ur
rriix i%er IrsqueU il était on scène.
I ' t nature de toutes les quali-
i' is qui font briller un ac-
leui , et de la haute inlelli;;ence qui f.iit
du hrillanl romedien un ^rand aiIiNle,
il poneira encore mieuv les secreis de
Part dramatique en essarant de deve-
nir auteur. De cette première tentative
provinrent en peu de temps une tra-
gédie, lirlisdirr, et un poème, Le p<i'
luis lie la Pitir. \j\ pièce fut jouée et
le poème imprimé. Mais bientôt il lui
vint un repentir : il racheta tout ce
que le libraire avait encore «l'exempiai-
res , et il n'en resta qu'un tres-petil
nombre entre des mains étrangères, de
sorte que , quand ce volume se montre
«lans les vente», il monte à un prix
fort életé. Celte sévérité pour soi-
même démontre mieux que nous ne
pourrions le faire quelle haute idée
kembic se faisait de la perfection, et à
quel point avrec ses dons innés, ses
connaissances acquises et sa persévé-
KEM l'y*
rance, il devait monter. Sur cet entre'
faites, le vieux Vate \N ilkiiison, ce
sardonique et madré directeur du
théâtre d'\oil, lui offrit un en^a^^e-
ment qu'il accepta. Le pai terre,
tout difficile qu'il (lait , lendit justice
au nouvel acteur, et bienlàl s'en en-
ihousiaMna. Outre se» rôle» , Kem-
ble eut un jour l'idée de déclamer
comme inteimède, dans les eulr'actes,
le» plus belles ode» de (îraN , de .Ma-
son et de (filins, ou bien le» histoi-
re» de I^fevre et de Marie, par Ster-
ne. Cette nouveauté fut lre»-;;oùtee,
et Ton vit tous Icn jeunes jjen» »e
prendre de belle passion pour Sterne,
(filins et (traT : on eut dit une Sevré
epidcmique. C était à qui reproiluirait
le mieux la déclamation Ivrique du
(^rand acteur, comme le» Abdéritains<
âpre» avoir vu représenter le» Huo
ihtiiitrs d'Kuripide, allaient répétant
des lambeaux de dialo<;ue» et de
clirrurs. (Quoique chéii des habitant»
d'\orL. kemble, peu de temps après,
suivit V.ite NN'illinson en Kcosse ,
où, inde[>endammenl de sa renom-
mée comnie acteur, il se 6l remar-
quer, comme homme de lettres et com-
me critique, par wxx morceau qu'il lut en
séance publique, et ou il traitait de l'é-
loquence sacrée et profane. Il passa
ensuite deux ans (ITN'J et H.'); à Du-
blin. I^ théâtre de SmocL-Allev lui
dut de fortes receltes , et le trafique
Jeph-son (/ o). ce nom, ci-dessus),
le succès colns:»al de son (.omte de
JSarhonnr. Kemble ) jouait le rôle
du comte, el il v mit tant d'entraîne-
ment, d'ame et d'énerpic qu'il sembla,
autant que le poète lui-même, avoir
tiré de sa tête ce beau caractère. En6n
mislriss Siddons , toujours la j)remière
lu but, lui fil avoir un en»ac^ement i
Uhirv-Ï.ane , où elle-même était en
po^sesNion de charmer le public. Il j
débuta le l*^^*^ septembre 1783, dans
le rôle A'ilamlel qu'il avait rempli
476 KEM
avec éclat à Dublin, et qui resta tou-
jours un de ses triomphes. Jamais le
maintien , la physionomie n'avaient
rendu, comme les Anglais le virent
alors , la terreur relio;ieuse, profonde
qui obsède, qui enveloppe la vie
d'HamIet, et, quoique quelques anciens
du théâtre murmurassent le nom de
(iarnck, le public classa de prime-
abord Kenible , sur ce débul, au ni-
veau des Irai^édiens consommés. Ce
qui n'est pas douteux , c'est que tra-
vaillant toujours ce rôle favori, il lui
donna un de^^ré de puissance et de
perfection tel que désormais il y a ris-
que pour un acteur à s'écarter, en quoi
que ce soit, des traditions de Kemble.
11 ne fut pas moins heureux dans tous
les autres rôles tragiques qu'il aborda,
et le suivre pas à pas dans la carrière
dramatique, ce ne serait qu'enregis-
trer des succès, et toujours des suc-
cès. Toutefois , pendant quatre ans
encore, il ne fut pas seul chargé des
premiers emplois. Smiîh qui les avait
avant lui s'en réservait ce qu'il \oulait;
les rois de théâtre sont tout aussi lents
que les rois vrais à donner leur abdi-
cation. Sa retraite, en 1788, laissa la
place entière à Kemble. 11 venait alors
d'unir son sort à celui de la jeune et
jolie veuve de son camarade (1787),
mariage heureux et assorti dont pour-
tant on a comme pris à tâche de tlétr ir
l'origine, en le faisant résulter d\in
calcul indigne de Kemble. Un [)re-
micr ministre anglais, dit-on (c'était
lord North) , avait cru s'apercevoir
que sa fille était éprise de Kemble,
lequel n'en était plus à le savoir, et
qu il y avait danger. 11 demande donc
rendez-vous à l'acteur, et en lui si-
gnifiant que ce caprice n'a point son
approbation, lui déclare qu'il a pourvu
à toutes les éventualités, et i\\\v quel-
que chose qu'ils imaginent, sa fille et
lui, il est sûr de déjouer leurs plans;
mais qu'il lui répugne de faire le mé-
KEM
tler de geôlier, et (jne l'artiste l'obli-
gera sensiblement en desespérant sa
fille, c'est-à-dire en se mariant immé-
diatement à qui bon lui semblera ,
et lui promet comme indemnité qua-
tre mille guinées. Kemble ne met
pas le grand seigneur à la porte, au
contraire, il remercie; il ne se fait
point donner l'argent d'avance , 11
donc î un lord , un pair peut -il man-
quer de parole ? il épouse, puis quel-
ques jours après il demande à l'hom-
me d'état les banknotes ; sur quoi
son excellence lui rit au nez et nie
la dette. Voilà sans doute un bel
éclîantlllon des co'.nmérages britanni-
ques colportés et renforcés par les cent
voix de la presse ; et les quatre person-
nages ont chacun un joli rôle, l'artiste
vénal, le ministre fourbe, la noble miss
inflammable, la rivale prise comme pis-
aller, comme première venue. Malheu-
reusement pour riiistorielle, les Invrai-
semblances qui l'égaient la rendent
plus que suspecte. Le noble caractère
de l'artiste, l'indignation qu'il témoi-
gna toujours pour cette anecdote, ses
dénégations formelles, verbales et par
écrit , au point qu'un jour, lisant ce
récit dans une notice sur sa vie, il in-
scrivit en marge mensonge [a lie),
achèvent de leiiwie complètement
inadmissible la tradition telle que
nous l'avons. — La retraite de King
suivit de prc.^ celle de Smith; et la
même année 1788 vit Kemble rempla-
cer l'un comme chef d'emploi et l'au-
tre comme directeur de Drury-ljauc.
On a souvent douté que le même
homme [)uisse, avec succès, cumuler
deux fonctions si antipathiques en
apparence , puisque l'une est artis-
tique et que l'autre est adminis-
trative , bureaucratique , financière.
Sans entamer ici la question , sans
faire voir que la force des choses
amène presque toujours invinciblement
Oii le directeur parmi les artistes, ou
KKM
l»ien un arli«le à la «liref lion, nouN ci-
Ictun» kemblc comme un des exem-
ples qui irndeiil a prou\ei l'iitiiilé ilu
rumul. I,e ihralrr , NOUS ^^Ml ailiuiiiK-
Iratiuii, prit une face nouvelle. I.a
mise en scène fui plus '. . dé-
cor» plu> varié*, plus , >e
trouvèrent en rapport a\cc le ;;ran-
diose du drame, i^ mailiim le laide-
ment lelriliué opéra des roiiade* ; le*
anacliionisiuei «le costumes, Maibrlh
en unifiiime de ;;énnal aiii^lai*, i^iitun
en ailes de pigeon di^paruient à jamai»
de Drunr-l^nc, el sucfes»i*croent de
ttms \ts \\\t^\rrs iropurlant& : ainsi ,
ta révolution faite par Talma sur la
scène française, Kemhie l'opérait en
Anj;lelerre; et, m.ilj;ré tant de clian-
peraents dispendiei'i , la caisse ne
5*en trouvait pis mal. l/acli\ilc de
krtuiiîr ne se borna point à mener
lir II nul \t> études «le l'auteur et les
lra\aui du bureaucrate : aux fatigues
el aux tribulations ;;uiivcrnrinenlales
du direcleur, il joignit encore l'inj^ral
métier d'arrangeur et quelquefois
d'auteur. Il remit ainsi en vo«ue di-
\ erses pièces, la plupart de .shaLs-
pcare , qu'on n'osait plus jouer que
rarement, et enrirliU le répertoire de
qrrbj'ies nou\e.iut»*s (Tc/j. ci-apres la
bibliographie). L'empire de Kemble
sur Drurv-I.ane dura de doute a Irciie
ans , «auf une interruption de peu de
durée. Il abdiqua au bout de ce temps
(ISOI), las des tracasserie^ que nul
n'esquive, quelle que snit sa dexlérilé,
lorsqu'il faut manier la j;ent tlié.i-
tr.ile , plus irritable encore que les
poètes. Il avait d'ailleurs envie de faire
m\t excursion en France : jamais in-
stant n'avait été plus favorable. Le
traite de Lunéville était en train de se
si«;ucr, on r.i';;oriail la paix d'Amiens.
Son arrivée à Paris fut annoncée par
les journaux comme celle d'un souve-
lain. La comédie françai>e lit une ré-
ception magnifique à celui qu'on nom-
KEM 477
mait le Lelain de l'Angleterre. Talma
se plut à conduire partout IMIusire
touriste, à lui -eivir de cicérone, à
lui procurer de-, laielr-. , pour enrl-
cliir la superbe bibliothèque drama-
tique que se formait l'ex-directeur de
DiurT-Lane; et, comme il n'est point
de bonne fêle vans solennité ^astro-
nomi<;ue , il lui donna un brillant
dîner, suivi d'un plus brillant sou-
per eticnie , auxquels furent conviés
1rs premiers acteurs de tous \t\ \\\éi-
lies de la capitale. C'est \* que Kem-
ble prononça ce mut profond, mais
qui exprime bien la vanité biitanni-
quc impatiente de toute supériorité
chez d'autres nations. On causait dra-
me et auteurs dramatiques, on exami-
nait qui l'emportait du théâtre français
ou du théâtre an;;lais, el kemble na-
turelienierit citait Shakspeare comme
inimitable, comme supérieur aux Cor-
neille, aux Uacine, aux Voltaire, etc.
LU conM\e alors lança le nom de
Molière. — •• Molière , dit kemble,
•« n'est pas Français. »• — •« Com-
« ment .' Mnliéie n'est pas Fran-
« çais ! • — M Non! Un jour Diej, vou-
« lant donner le plaisir de la comédie
M aux hommes, laissa tomber Molière
M sur la tetre: il fallait bien qu'il
M lomb.il quelque part : il tomba en
« France , mais il n'est pas plus
" Français qu'An;;lais, que («rer, rjue
«< Chinoi*; , que l'éruvien.-» kemble
alla ensuite en Rspa^ne , mais il n'y
resta que peu de temp.> et, en 1803,
il était de retour à Londres. I^ bien-
Ir^t il acheta pour vin;;t-cinq mille li-
vres sterling 'f'"n <^*"1 mille francs),
un sixième du théâtre de Covcrit-Gar-
den ; puis, le directeur I.,eu is avant don-
né sa démission, il prit le sceptre à sa
place et, comme naguère sur l'autre
grande scène de la capitale, se multi-
pliant à force de tetc et d'activité, il
divisa son uniteen trois personnes, l'ad-
ministrateur, l'arrangeur el l'acteur. Il
478 KEM
eurlcliit encore plus le répertoire de Cu-
vent-Garden qu'il n'avait amélioré
celui de Drur\-Lane. L'adiniralion
du public était devenue de la Irénésie,
et il n'eùl point fallu douter à Lon-
dres que Keniblc ne fut le premier tra-
gédien de l'univers. Sa fortune, consi-
dérable déjà, était en voie de s'acci oi-
tre quand tout-à-coup le feu prit au
théâtre, et en trois heures dévora mu-
railles , loges, scène , salle , des forets
de décors, en un mot tout (20 sept.
1808). Les propriétaires n'étaient
point assurés. Kemble dans ce désas-
tre fut le moins à plaindre. Le duc de
>iorthumberland , auquel il avait ja-
dis donné quelques leçons de débit
oratoire, lui prêta spontanément, pour
aider à la reconstruction de l'édifice,
dix mille livres sterlino; (deux cent cin-
quante mille francs), dont il ne lui
laissa payer que quelques mois l'inté-
rêt; puis, quand fut posée la première
pierre du nouveau théâtre, il lui ren-
voya dans une lettre l'obligation, en
n'exigeant en retour de ce trait royal
qu'un silence absolu. ÀSeuf mois après
(18 septembre 1809), le théâtre était
rouvert au public, mais la prétention
des directeurs de porter le prix des
places du parterre à quelques pences
plus haut qu'avant le désastre mit les
iubitués du théâtre en fureur contre
Kemble, qu'on signala comme l'auteur
de celte innovation, et causa la bur-
lesque émeute d'O. V. (initiales d'o/J
prire ou l'ancien prix !) qui se renou-
vela régulièrement chaque soir, pendnTit
deux mois. Sur tous les chapeauxselisail
O. P.; du lever à la chute du rideau, le
cri d'O. P. empêchait d'entendre un
mot de ce que disaient les acteurs. Les
insurgés du parterre exéciilaieut à tour
de rôle des rigaudons sur les bancs ;
et leurs bonds frénétiques donnèrent
naissance à TO. P., nouvelle espèce
de danse qui prend place dans l'his-
toire de la chorégraphie, entre la valse
KEM
cl le galop. Boileau et Pope y eus-
sent trouvé le sujet d'une épopée héroV-
comique, aussi riche en épisodes que le
Lutrin et \tRapi de la boucle de che-
veux. Ces scènes grotesques, qui trans-
portaient la comédie du théâtre dans la
salle , n'inspirèrent pourtant qu'un
court badinage latin aux muscs anglai-
ses : ce fut y Effodiuntur opes irrita-
mcnici malorum de Gibb. Enfin la
paix se fit aux conditions voulues par
John Bull : l'administration rétablit
l'ancien tarif , et Kemble , dont la
popularité avait reçu des atteintes ,
moissonna derechef les applaudis -
sements. L'enthousiasme cependant
n'était pas si vif que par le passé.
Est-ce pour le ranimer, en se faisant
désirer, que Kemble, à la fin de la
saison, quitta Londres pour aller cou-
rir la province ? Le fait est que ,
après deux mois et plus d'absence,
quand il reparut, le 11 janvier 1814,
sur la scène de Covent-Garden , dans
le rôle de Coriolan, il vit toute l'as-
sistance se lever à son entrée et
l'accueillir par une triple salve d'ap-
plaudissements. Il avait alors cin-
quante-sept ans. Depuis long-temps il
avait annoncé qu'à soixante il quitte-
rait irrémissiblement la carrière qu'il
avait fournie avec tant d'éclat. Il tint
parole : sa dernière représentation à
Edimburgh eut lieu le 20 mars, sa
dernière à Londres, le 2.3 juin 1817.
Cette solennité théâtrale réunissait
toutes les notabilités de l'art, de la
presse, du barreau, de la tribune et de
la haute société britannique , les Flax-
man , les Lawrence , les Crabbe , les
liurney, les Campbell, les lieber, etc.:
Talma aussi s'y trouva. La salle était
comble. Ce grand public était venu
avec la ferme résolution de forcer
Kemble à renoncer à la sienne. La
manière admirable dont il s'accjuitta <le
ce rôle de (Joriolan, un de ses tiiom-
phcs, redoubla les regrets. Lors donc
klM
luiirs et <ir
letfnlil uit 11 .
ar//.' «u Jiire^vril ! .Mais Kemblc
tint Hon rt |>rt>cUiiu sa déciàioii irré-
vocable, fl les >|»cctatcui& 5*écoulfrrnî
trulemcul ci icuiciucnt, romme s'ils ve-
naient ifa&^iktrr à la inoit û'un ctre
çheri. DanN le;> couli>sei pu ai fojer,
autre iiiriilriil ! Les camarades île
Krmbir, ni i'riiioiu ant de lëmui^na-
;;ci de regrets el d'affection , lui de-
mandaient comiui' NOU>rnir quelque
|ii(*ce de .'OU «tt'uine A ^întt^:^\*^ il
lai>^a >rN ^a■l.'.ll^J. a i ' • son
nuMichmi , cl U ;uM.tle v "<^ !"•
jura de le garder plu^ tidelement que
Desdcmona celui d'OtlirlIu. Kn re-
vandie ceux-ri rcsoluieiit de lui don-
ner un supe ! • - i!'ar;;enltrie, et, à
cet effet, il i.i le mncouii de
tous le^ arp leurs de Kera-
blf, et oi^ ne souscription
dont (iiir |<j: '..c puuiUnt s'évapora en
lin nin^M't que dincr d'adieu {'11 juin),
<j lit de leur présence les
Il ex, d'L^rcinont, de Slair,
d ()s>oi) , de l.auderdale, et où au
milieu des toa^t furent débiles des vers
a la gloire de Kemble. On peut liie
dans les Œu^Trs de Campbell les
strophes qu'il adressa en cet ini^tant
a l'illustre tia;;édien (1 . La vie de
Kcnible depuL> ce temps iruffre plui
rieu de remarquable. On a dit que les
acteurs meurent deux lo.>, la prenne, e
lorsqu'ils abandonnent le théâtre, la
>econde quand l aine quitte le corps.
Lu ellel, après la vie elincclaiite de la
scène , qu'est-ce que la retraite opu-
lente et paisible ou va Gnir le {;rand
artiste dramatique .' Qu'est ce en "cné-
ral que le palais où vit obscur et dé-
couronné le souvi rain qui a déposé sa
couronne. .\pre> ces solennels adieux au
théâtre, Kemble alla soiiiner à Toolouse
KEM 47»
un a^tliiuc qui depuis lon^-trnipb cou-
prome!!.! ! a >ante. Il ne revint à
c fui» pour mettre uidie
I irintérèt et pour vendre
ta bibliolhr |uc , remarquable surtout
par une tiche collrciion de pièces an-
f;laises et autres, ainsi aue «tes luis rc>
atives au tlieatre : la collection entière
fut acquise par le duc de l)e>un>hirc,
en ' 1S2(). Il bi donation, à
so! lies, de <»a paît de pro-
pne.c lie ( évaluée
alors à cinqt. stetlin;;
(nu douze cent m. . c francs]
au heu de deux <• mie mille.
K érable cependant ne passait pas pour
riche, c'est-à-tlire qu'aprc^ avoir tenu
pendant plus de trente ans les pre-
miers rôles, et avoir administré les
deux piemiers théalrts de la capitale,
il eût pu lire beaucoup plus riche qu'il
ne l'était : sa vie ^landiose, sa hbé-
ralité, t!' ' - .tables avaient
eu j;rar, >es pioGts et
ses i^aïus. il en jv4:i .i»ei encoie cc-
peiiiianl pour nioTi'rr' a S4in ficrc une
^ciieroMle ic ,! pour garder
apie> cela do , laidement sur
le continent ^au moins deux mille li-
tres sterling ou cinquante mille fianci
de rente). Il partit ensuite et, après
un cuiiit séjour en liance, pendant
lequel il plaça ses fonds d.ms les ren-
tes françaises , et rendit à Talma ,
jouant dans . Itiuilic, les applaudisse-
ments qu'il en avait reçus dans i.orio-
Lui, il s'établit aux enviions de Lau-
sanne, daiis la delicieise maison de
(i} PhJ* of tbr Britisb «Ufe, et«.
»■ Krr'- - ■ 1 .. .' , ,,,ni ,Je
•e irtti«r nrr. a fait
«H»" »l--n . - ;; ih'atr
Je '' .-fc ,
K ■ soi^
frr • lifi |>r<>cnt,
m» . j et" trllpiuent
MrK .■ qui lui lraii»iHet
une r..rtui.r ii coiinJ" f bl»- qu il eu a prrdu
la ptroir; r: jr^ deux frerr» Sout rrtli-s pnid.int
<]«ir|i|ue i-iii|>» il,in« les bras l'un de l'^m^ra
aTant qui Cliarles ait po prntioncrr quelqaei
dota pour cipntncr u recooiiaiMaoca.
48o
KEM
Beauslte, où sa vie se partageait entre
la lecture et les soins du jartlinap;e.
Eu 1S22 il eut l'idée de visiter l'Ita-
lie, mais il eut le tort de ciioisir l'ar-
ritMe-saif-on pour ce voya^^e qui fut
fatal à sa santé, \jana ratlioa de
l\ome le frappa si n;rièvcnieFit (jue son
médecin lui commanda péremptoire-
ment de revenir à Lausanne. Il sembla
s'y rétablir , mais sa convalescence ne
fut jamais complète ; et bientôt il fut
frappé d'une apoplexie qui l'enleva
en deux jours, 24-26 février 1823.
Kemble avait beaucoup de Talma pour
le caractère, et l'on ne l'eut s'étonner
qu'ils aient eu l'un poui l'autre une au)i-
tié vive. Kemble lisait un cliaiiitre de la
liible tous les matins, et plein de cette
lecture il vivait en quelque sorte dans
un monde surnaturel et supérieur. ])e
là ce mot de Talma sur son ami. « Il
« est beau comme Isaïe! » 11 savait
pourtant descendre parfois de ces sphè-
res f^randioses. Des viriles inspirations
du patriotisme , des fiers accents tle
l'ambition, il passait à l'expression de
la tendresse, de l'affliction, des values
et lonr^ues rêveries, ou plutôt il avait
l'art de fondre cette expression de fé-
minine faiblesse avec les tons vi<^ou-
reux de passions plus altières. Quand
il en était ainsi, quand le Dieu se fai-
sait homme, quand la chair saio;nait et
que l'os souffrait, en dépit de l'imper-
turbabilité de l'àme qu'il ne faut pas
prendre pour l'impassibilité du cœur,
oh ! alors il y avait dans ces plaintes de
géant , dans ces mâles soupirs, dans
cette mélancolie d'une àme profonde
comme la mer , comme l'infini , une
suavité, une sonorilé «pie rien ne [»cut
exprimer. C'est là ce qui le rendait
si merveilleusement inimitable dans
l'Etranger ; dans le (Jraddork de
la Heine de la fortune , ou il unis-
sait la mélancolie pensive et douce
à la plus persuasive vérité , et où sous
les formes les plu«; humbles il semblait
KEM
une créature supérieure à l'humanité ;
dans le roi Lear, lorsqu'il exhalait ces
cris du cœur, Lear, nature, Lear ! de-
dans Caton, quand le républicain, ému
dans ses entrailles d'époux, mais com-
primant son frémissement , faisait fré-
mir tout l'auditoire , avec ces trois
mots, Vurtia is dead; dans llamlcl,
auquel pourtant il savait conserver le
brillant du jeune homme et l'énergie
de l'adulte , mais où il faisait prédo-
miner la fibre rêveuse d'une àme qui
se laisse aller à la dérive , en proie
à la langueur, à l'indifférence, à l'ir-
lésolution, à la vue rétrospective de
ce qui fut , de ce qu'on eut pu em-
pêcher et de ce qu'on ne peut ré-
parer. De même les rôles énergiques
de Cor/'ulan , de Bruius , de lord
Toivnley , du cardinal TVolsey , de
Macbeth étaient au nombre de ses
triomphes. Dans celui du roi Jean ,
rôle ingrat et odieux pourtant à quel-
ques égards , il produisait une im-
pression poignante et profonde. Il
réussissait un peu moins dans celui de
Richard III ; il s'y montrait trop re-
cueilli, trop égal ; on sentait qu'il avait
besoin d'effort , de contrainte pour
exprimer , à s'y méprendre, un être
aussi antipathique à lui que l'horrible
duc de (ïlocester : il l'exprimait néan-
moins, mais cette contrainte répandait
sur le rôle un air de calme et d'homogé-
néité, bien loin de cette fougue élec-
trique, de cette mobilité de la trombe
qui dévaste et qui dévore, caractère de
l'ambitieux tyran qui clôt l'èie des
deux Pioses. Et pourtant lorscju'il ne
s'agissait que de la flexibilité compa-
tible avec la vertu ou le désir de la
vertu, il redevenait l'acteur sans égal.
C'est ainsi qu'il communitpiait aux
vives mais honnêtes physionomies de
llotspur et à'Ocàwien un feu, un pi-
quant dont rarement la scène an-
glaise a fourni des exemples. On com-
prend qu'avec de telles qualités il de-
lEM
KRM
i.si
>ail ei( lUr dans Ir iiaiii ronii<]ur ,
tint (|uM lie ^'a^,t^vall |i;iN U'rx|iiiinrr
Irtlrtljiii amer, ic %rrplici&inr luiiiriu,
le nraiirnirnl dial)oii<]uc de Mé|>lii5to-
|)lirl(-N. Mjii roiiiiiie le^ rMct de liant
comique ^oul rarr>, il iaut d:ic qu'en
général la comédie conveiiail peu à son
talent. C^mme homme du monde, et
dan» le>. relation* fanuline» de la ^ie,
kemlile était aiiiul)lr, obligeant et jo-
Mal. IVu d'adiuiiii^li aleurs de tlieàtrc
ont moins méconlenir l'irascible trou-
{»eau des acteurs , auteurs et composi-
teurs. Il faisait collection de^ caiicatu-
res publiées sur son compte et les mon-
trait \oloiilins a i|iii souhaitait les\oir.
On a \u qu'en 177K il fit jouer à
N orL une tra^rJie de tirlisttirr : l'an-
néc soixante lut iepié.senlée 5ur le mê-
me théâtre hi trminr ufjttifr , farce
de Na fa^on , que plus tard il remania
cl donna, sons le tilie de l'rojr/s de
Jeinnif^ à Drur>-Line. Kn 1T80 il
publia un petit volume de poesie.s que
par la suite, comme nous l'avons dit, il
I élira de la circulation, l n peu aprèt
son début à I^iidrc-^ , comme un pou
avant sa retraite de celle* ville , il donna
deux couits eN5ais sur Macl>elh, inlitii-
Irs, l'un \uui'rl r.mmrn tU Macbeth
( Macbetli lecoiisidered ) , l^ndres ,
ITStl. l'autre Muihrth et Hithurd
y//, ibid., lKl7,-r.in-8". Il refondit
ou retouclia profondément di\er>es
pièces qui, rajeunies de forme et de
titre, eurent un succès qu'elles ne pou-
vaient plus se promettre. I^ comédie
des Erreur X devint ainsi Uh ! cest
impossiide, 1780 ; Tttni rtieu.r nest
pas tant pis, de Uickerstaff, (ut mcta-
iMorphosc en une farce intitulée le
r anneau , 17S8; des lillettes de
campagne^ de Charles Johnson, il lit
la co:nédle de la Ferme ;\i première
jiaitie du Corsaire, de mslnss liehn,
fournit Wlnwur flw.r mille masques^
1790; une panloraiine de la composi-
tion de d'Kjîvilla fui le canevas da
Programme iF Alex andre-h'Grand ,
179.'j ; et lis Inmnts rumiipies, de
Cibber, irj.aïuient nu lhe.\!re déguisés
en CeUtdon et Flurimel, ou Hiise
ronire ruse ^ihe llapp> coonter-
plot). F.nlin il arraii-ea et adapta
au& eii^ence» du moderne théâtre, sans
les retravailler autant , beaucoup de
comédies et de tra;;edies de ShaLs-
peare {llamlet, Maif>et/i, le roi
lu^r , le roi Jean , Jules- (Irsar,
(.'oriolan, les deux parties de Henri
Il , Henri r, Henri UH, Othello,
licmieo et Juliette , (Jymùeline , la
Tempête, (Utnime vous iHMdrei,
i/est ga^ue! c'est hien joué [K\W
v^ell that end> %tell; ; les Deux gen-
tilshommes de / erune , le Mar^
rhand de / mise, la Douzième nuit^
le (^onte d'ilix'er, les Joyeuses com-
mères de Windsor, liien du train
pour rien. Poids /nnir fpoids, et quel-
que» autre» encore, comme (.alon, le-
nise sauifêe, de Mon/ort, ht liexHin-
che , le Faux ami, le Marchand
Jourhe, le Marchand loyal, la l oie
du monde, la Fille if Honneur, Sou-
veau moyen de payer les vieilles
dettes, etc , etc. On a publié (en an-
;:lais^ des Mémoires sur la vie de
J.-Ph. Kemhle, l^ndre.s 182:>, 2
vol. in-8 '. F — OT.
KK.MP ( JFv!<-TMKoponE Van
lier) , missionnaire protestant , né ï
Uotterdam en 17V8, était fils du pas-
teur de celte ville. A Tuniversilé de
I.evde il étudia non seulement la théo-
loj;ie et les lanj^ues anciennes , mai»
encore la médecine, et même la tacti-
que, comme par un pressentiment des
diverses destinées qui rallendaieiit. Il
entra d'abord dans l'armée, et fut lieu-
tenant de drapions. Puis s'élant marié,
il alundonna la rnrricrc militaire, et
alla étudier la médecine à Ldimbour^^,
T prit les deprc^ de docteur, et publia
dans cette ville un ouvra:;e latin sur
la cosmologie, intitulé : Parmeuides,
t.xviii.
3i
^Hi
KEM
KEM
De retour Jans sa patrie , il s'éial.lit
foiiirin' niétleclii à Mldilelliourr;. Kri
1791, il renonça aussi à cet état, et
se relira avec sa famille à Dortreclit.
Là, ayant fait dans la même année,
avec sa femme et sa fille, une partie de
plaisir dans un bateau , sur la rivière
de Merwede, il eut le malheur d'es-
suyer une rafiale qui fil chavirer le
bateau. Sa femme et sa fille se novè-
ronl;il ne se sauva lui-même qu'en
s'atcrochant au bateau, et en y res-
tant suspendu 'jusqu'à ce qu'on vînt à
son secours. ])e[niis lors son esprit,
frappé de ce désastre, se tourna vers la
reIij:;ion. Il écrivit un ouvraj^e intitulé :
La Tlièodicée dit suint Paul, qui fut
mise au jour parle professeur Kroin en
1798. Van der Kemp, étant résolu
d'aller prêcher l'Evangile aux peuples
païens, olfrit ses services 'i la société
lies missions de Londres , se fit sa-
crer , et reçut l'ordre de se rendre •
au (>ap de lionne- Espérance pour
convertir les Iloltentots au christia-^
nismc. Avant de partir, il apprit le
métier de briquolier, afm de [louvoir
ensei;;ner à ses colons iuturs l'art de
construire des habitations commo-
des. Il s'embarqua vers la fin de
1798, avec trois aides; et, arrivé
dans la colonie, il consentit à instruire
les lloltenlols du district de Graaf-
iiouicl!. (Cependant il obtint d'un
roi cafre un terrain pour y fonder
une colonie clirélienne dont il jeta
li;.i fondeiiM'nts ; mais l'état de troubles
dans lequel se trouvait al>)rs la colonie,
ne lui permit pas de continuer sf)n
projet. Iies.saya plus tard d'instruire et
de convertir dc> Iloltentots à (Jiraaf-
licynnlt; ce qui fut très mal vu par
les colons hollandais, lesquels regar-
daient comme dangereux «le trop éclai-
rer les indigènes qu'ils ne trouvaient
déjà que trop enclins à résister à leur
domination. Les méconlents firent une
allaque sur la ville, et Van der kemp
faillit être tué par ces furieux. Cepen-
dant le "ouverneur-'iénéral Dundas
engagea les missionnaires às'élabhr sur
la frontière de la colonie, veis la baie
de Lagoa. En conséquence. Van der
Kemp alla, en 1802, avec ses aides et
avec cent neuf liottentots jeter les fon-
dements de la mission de Bethelsdorp
dans un terrain sec et aride, le plus
mauvais peut-être de toute la colonie.
Le nombre dos colons augmenta bien-
tôt jusqu'à deux cent vingt-deux; ^ an
der Kemp fit bâtir des huttes et une
maison de prière. Les colons conti-
nuèrent à traiter hostilement les Hot-
tentots réunis dans ce Heu, et accusèrent
le chef de la mission de les soulever
contre les Européens. Le gouver-
neur hollandais Janssens , cédant à
leurs clameurs, appela les missionnai-
res au Cap, pour qu'ils eussent à se
défendre sur les accusations portées
contre eux. Ils y furent retenus jus-
qu'à l'arrivée du gouverneur anglais
jjaird, en 180G, qui laissa repartir Van
der Kemp potu- Bethelsdorp. Il résulta
pourtant d'un rapport que le gouver-
nement ordonna en 1809, sur l'état
de la mission, que son chef avait eu peu
de succès dans ses eftorts pour civiliser
les indigènes. Le voyageur allemand
Lichtenstein, qui visita lîctliclsdorp,
en trace une esquis>e peu Oalteuse. I^a
mission était «le l'aspect le plus miséra-
ble, et Van der Kemp avait mis plus
de soin à faire prier et chanter les
liottentots qu'à les habituer au tra-
vail, et à leur ins[.irer le goût ile l'in-
dustrie. Abandonné des autorités, haï
par les colons , il se rendit de nou-
veau au Ca[) ;.niais il y succomba aux
fatigues et aux conirariétés le 7 déc.
1811. La société des missions à Lon-
dres publia des mémoires sur sa vie
laborieuse. Philip qui fut envoyé en
1818 au Cap , comme inspecteur ,
et qui visita la mission , la trouva
(Uns un état plus satisfaisant que
KRM
KirlilfQSlein. Tnutffni« HfttirUdnrp
rH rt*\é un pau>re hameau, ci d'au
Un nli«sin|)^ ont fait oiiljlier rrllr-
ci. l'Inlip juge h «.firnre cl le r.ir.ic-
Ifre de N an dci Komp d une ma-
nière bien plu> ra>orable ()uc ne l'a-
rail fait l.irlilen Inii. « Van der
Kenip, dit le missionnaire anglais ,
était un homme Irèircma! qiulilr ; à
de« talent* d'un ordre rle^ê , il joi-
piait dc<^ (|'ialit^s morale» et inlrllef-
luelles (|ui le rendaient capable de
f;randes rho»e«. H connai«^it seize
an<^e«, étant doue d'une facil te éton-
nante pour le« apprendre. IVndant
M>n coml séjour chci \efi (lilre*, il
r ! un esvai de oramniaiie de
l< • . et dressa un \orabulaire
de pic^ lie huitcentA mots. Il était bon
matliciiiatirien , et , en outre, tcrs>
▼erse dans la médecine, la chimie, l'a-
natomie citniparce et l'hi^loire natu-
reile. Se dexouant a riiumanité -ioiif-
frante , il prit la defe ii.se dos llutten-
lots avec tant de chaleur t\ de persé-
vérance que, si les missionnaire* ont
pu continuer leurs travaux, c'e>t à lui
qu'ils en ont Tobliii^ation. Souvent le^
lettres qu'il adre«»ait aux autorités
él.iient empreintes de son ind^riation,
et pouvaient paraître peu mcsinécs. Il
s'était fait l>e.iucoup d'ennemis ; quand
j'arrivai en .Vfnque, les clameurs con-
tre Van dcr Kemp étaient si lorlcs et
«i générales , les récits fâcheux sur
son caractère étaient si nombreux , si
détailles et paraissaient s\ aulheitli-
ques , qu'il se passa plus de dix- huit
mois avant que mes préventions se fus-
sent effacées (1). >» Outre les récits des
vova^cs que nous aTois cites, on peut
consulter sur Van der Kemp le 3" vol.
des Trunsdctiuns de la socirté des
missions de Londres. D — G
(l) Philip, Hfirmr<hfi m S^ulk Afn<^ , Loo-
dre* . i8îH. — U ait kcaacr, llttoirt grntrvlr dn
ti, Parit, iVlo, lom. Xl\.
KEM
/«83
krMi'R (Jf\n), Anf^laift remar-
quable p.ir >r> talents et sa facilité,
naquit a Dcptfnrd le.f V avril 174N.
Sa famille que des ^éiiéalof^tes plus
om moins phusibles font remonter jus-
qu'aux Ah^lii-Saxons, s'était, dit-on,
alliée plu eurs fois aux l*Liitat;enel8
et aux Ooiirtcnev du Devonshire, et
comptait parmi ses illustrai ions le cé-
lèbre Jean kenipe , atdiCNèque de
r^nlcrburv , et cardinal sous Henri
NUI Son père, à qui la protection
du duc de New-CÂlIe avait valu
le poste lucratif de commisuire du
bill^n, a la Monnaie, avait ainsi le
* maniement de plu.ieiirs millions par
an. et, riche déjj, il acquit encore tie
3uoi joindre i sa délicieuse maison
e CheUea les superbes jardins da
haiicla^h, et de quoi reunir i sa ta-
ble, splendjdemnit servie, de» artistes,
des i^eiis du monde, des hommes poli»
tiques, de> femmes elr^antes. |j >e-
naicnt les .Si;ibb, les Dixon, les Hom-
nev , l'infortuné poêle Smart, le
révérend .M. Jakson , qui sut et ne dit
pas le secret des Lettres de Junius,
et la jolie lad\ llamer, sœur du coni-
missatie du billon , moins jolie pour-
tant que la seconde femme de son
frère, lni^s Met ton, la plus charmante
personne des tiois royaumes, suivant
le portraitiste Kumne\ dont le pin-
C4'au nttiis a conservé ses traits. Miss
Merton devint fatale au jeune Kerape.
\euNcdu père de celui-ci '177!^, elle
hérita de la plus ;;i ande partie de sa for-
tune et en eut non l'usufruit , mais la
propriété; puis elle épousa en secondes
noces le graveur Dixon. Heureuse-
ment le jeune homme obtint, avec la
plus faible partie de l'hérila^e, la sur-
vivance de la charge dans laquelle s'é-
tait enrichi son père. Au milieu de la
société brillante et choisie que rassem-
blait le sal(»n paternel, il avait puii-**^
nn f;ont vif pour les beaux-arts et il
left avait cultivés avec succès. Il excel-
484
KEM
lait sur la llute et il adoucissait, en
lilant (les sons njoclleux et lentli es , la
sombre mélancolie de Smart, qui écou-
tait en pleurant ses mélodies favorites
exécutées par Kempe, et qui écrivait
ensuite quelques-unes de ces li;];nes
plaintives et rêveuses qui semblent
mouillées de larmes. Green lui fit ca-
deau du clavecin, meuble essentiel de
la chambre à coucher de Haendel, qui
tant de fois avait rompu son sommeil
au milieu de la nuit, pour y laisser cou-
rir sur les touches avec ses doif2;ts les
idées écloses en son^^e dans son imagi-
nation. Il peignit sur les originaux de
ïiodge, déposés à l'amirauté, les vues
des diverses contrées découvertes par
Furneaux, Byron et Cook. Il mode-
lait avec élégance des fleurs, des fruits,
des animaux, et c'est lui qui fit les
sculptures des belles orgues de l'é-
glise de ^Yrexham , ainsi que celles
de plusieurs autres orgues exécutées
par Green. De quatre enfants qu'il eut
deux seulement lui survécurent : sa
fdle, mistriss Slothar (depuis nnstriss
J>ray), s'est fait connaître par ses Let-
tres de Nonniindie et de Bretagne^
avant d'épouser le vicaiie de Tavis-
tock , connu lui-même par des 5^/--
mons remarquables et par d'élégantes
poésies, lyriques. Jean Kempe mourut
1er'" juin 1823. P— ot.
KEMPER (.lEAN-MELcmon) ,
né le 2G avril 177G, à Amsterdam,
reçut sa première éducation chez son
aïeule maternelle (jui vivait foi t retirée
à Jlarlem. Cette femme respectable se
plut à développer les inclinations ver-
tueuses qu'elle aper(;ul en lui. J.e jeune
Ivemper, après avoir épuisé toutes les
ressources qu'offrait, pour l'étude des
lettres, l'école latine de Harlem, alla
perfectionner son instruction dans sa
ville natale , sous les professeurs Van
^^nimcrcn et VVyttenbach; il fut bien-
tol au nombre de leurs élèves les plus
distingues. Le savant Gras, dont il de-
KEM
vint l'ami, fut son professeur de droit.
La dissertation intitulée: De juriseun-
sidtorum romanunim principio ,
(jiiod contra honos mores ficit, id
jure rat uni esse non oporterc , qu'il
soutint de la manière la plus brillante,
lui valut le grade de docteur en droit à
l'université de Leyde, en 179G. Ses
compatriotes l'avant engagé à venir
exercer chez eux la profession d'avocat,
il y consentit , mais avec le désir de se
livrer par la suite à la carrière de l'en-
seignement. La Hollande, entraînée
dans la tourmente politique qui me-
naçait l'Europe, était devenue le théâ-
► tre de continuelles agitations. Partisan
d'une sage liberté, mais ennemi des
démagogues, Kemper soutint contre
eux plus d'une lutte. Aussi ne fut-ce
qu'au triomphe des principes d'une
salutaire modération, en 1799, qu'il
dut la chaire de droit civil et naturel à
Hardervvyck. Il l'occupa jusqu'en
1806, que Gras manifesta le vœu d'ê-
tre remplacé par lui pour la leçon de
droit civil à l'Athénée d'Amsterdam.
Gédant aux plus flatteuses instances, il
alla professer à l'université de Leyde,
en 1809, le droit naturel et le droit
des gens. H donna, l'année suivante,
sous le règne de Louis lionaparle, une
édition du Code criminel de la lloU
lande^ avec une introduction et un com-
mentaire qui lui méritèrent les suffra-
ges de tout le barreau. L'indépendance,
nationale avait toujouis été pour Kem-
per un véritable objet de culte, et dès
l'année 180G, dans le Jieciteil de let-
tres hollandaises j qui, publié sous le
voile de l'anonyme par un libraire
d'Amsterdam, iû infiniment de bruit,
il se prononça contre rinfluence que
le gouvernement français cherchnil à
prendre sur la république bat ave. Son
desespoir fut au comble lorsqu'il vit sa
patrie englobée dans le vaste empire
de Napoléon. Il conçut, après la dé-
sastreuse campagne dç Kussie, le pro-
KK.M
1^1 «l>mpl4>m *l M)ii ascentUitl -m |j
• N.'N nomhlfo^(s iclaiioi» à
i ei fcl f!al Je c)i05fs. Ij
baUiiic lie Lrt|i%icL arciut ses r»|>e-
TÀOCti. F.11611, au iiioi> de no\enibrc
IMID, il jrréléij de tous ses nio>ens
le mouvement de riiisiiircclioii lioflan-
iaUe. 11 seconda pui»saaiment MM.
de llo^endorp el N an drr l)a>n, qui
s'ëlaient places à la trie du (;ou\er-
nrtnent pruM^uiie; décida même la
\il|e d' Ain^terdain à faite cause com-
mune a^ec Li lla>e, et dè>-l(its il n')
eut plus qu'une >eiile diirclion. Ke
prince d'()iaii;;e, à son retour, hési-
tait sur la qualilicjriuii qu'il lui conte-
nait de pieiitlre: Krinper coiilril»ua
plus que per^oiiife à lui faite ptcfrrrr
au litre de stuthuiitUr ct\\x\ i\e pritirr
suui'rrt^'n , comme moins susceptible
de rappeler d'anciennes dissensions, et
plus anaio>;ue aux besoins du moment.
1^ dignité de recteur ma;;iiiii(]ite de
runi\ersilë de l.e\de, le collier de
commandeur du Lton-Neerlandais, des
lettres de noblesse et le brevet de con-
seiller d'elal lionoraiie, futcnl accor-
des à ce coura;;eux ciio>en, en recom-
pense des service^ qu'il avait rendus à
sa patrie. Kemper prit la p!u> (;rande
part à ror;;aniwitioi> des univerbiti^ et
des c()llc;;es. Nommé membre de la
commission char<^ée de pi épater la lé-
pslation du nouveau ro\auin<; des
Pays-lias, il rédigea le pi ojet de G)de
civil. Ciel ouvrage, qui s'écailait trop
du (x)de fiançais, parut manquer de
mélliode et de précision. Le profond
savoir et les lumières de son auteur ne
purent le mcllre à l'abri d'indécentes
critiques. Quelqu'un et^^ai^ranl kcm- «
per à fairo des dcmarthcs pour lépri-
mer l'audace avec laquelle plusieurs
journalistes s'étaient permis de l'atta-
quer dans celle circonstance : Je m'en
gartlrrai bien, répondit-il ; la lihfriè
de lii presse esl une si honnc r/iose,
fjnil faut sa^'vir la respccicr jusqfic
MM
.jS
dans ses ècarla. Député pai la pm
vince dr Hollande aux ëlats-^nn-
raux , kemper > donna des pieu\r.
multipliées de l'étendue et de lava
nélé de ses connaissances. Son elucu-
lion était vive , fjcile , entraînante ,
et jamais une personnalité desobli-
f;eante ne sortit de sa bouche, roal(;rc
a chaleur avec laquelle il improvisait
ses réplii|ues. Il paia!N>ait jouir d tinr
saule pai laite , lorsque (lappe d'un
coup d'apoplexie, le :20 juillet 1S2V,
\\ fut enlevé subitement à la tendio.No
de sa femme el de cinq enfants dun(
il était l'idole à si jii*tc litre, l'erson-
ne ne réunissait au même de;;ré les qiia-
lilés du cirur àcellcs de l'esprit. Mem-
bre d'un {;raud nombre de socicté.s
savantes, et de l'institut roval de Hol-
lande depuis sa fondation (180H , il a
publié des disseï talions latines dont
voici les plus importantes : De jure
îmmutalùli et tifmio, it»- V", 1 lar-
der v\ u l , 1 7 Ul) ; De prudent ia ci ■
iu'ii in pruntiA'enda enitliiiuiie, in-8'*,
Haiderv^vcL, ISOO; De titterurum
stuJiu, ruiamitusis rrifHtUica te:n-
porihus, optimo saint iu et perfugio,
in-8", llaidct w >cL, ISOti; J)e fto-
pu forum fegilfus , optimis intres-
centis vel di'cresrentis fiuniunitatis
indiiiis, in-8*, Amsterdam, 180(»;
De disdplinanun nioralium ptirs-
tuntia cum rateris disciplinis corn-
fuiralu, in-8'\ Lcvde, 1809; De
irtatis nustrœ fatis, exempta gen-
ii/jus ac firitsertitn liefgiis nunifuam
nrgligrndo, Levdc, Î81l>, in-8 '; des
discours en langue hollanilaise sur
digèrent s sujets^ Amsterdam , ISl i,
1 vol. in-8", dédié au prince souve-
rain» depuis roi des l'a\s lias; (!es
obsc^^atious sur diverses parties du
di^it français, d.nns un recueil intitulé :
/Ir.nalesde la législation française,
à rasage des dèpartemnits hollan-
dais ^ 5 cahier?. Ce fui lui qui pio-
nonra l'élo 'C foncbrc de Cras dans la
486 KEM
société frli.v meritis d'Amsterdam.
Son mémoire De Tinflucncc qu'ont
exercée les événements ftolitiqiies
ainsi que les opinions religieuses et
philosophiques , depuis vingt-cinq
ans, sur les lumières, la religion et
les mœurs des peuples de l'Europe,
fut, en 1818 , couronné par la so-
ciété de Harlem (dite société teylé-
rienne) ; son Essai sur la nécessité
des idées religieuses et de leur pra-
tique relatii'ement aux vertus mo-
rales, lui axait valu l'accessit avec
nne médaille d'argent , au concours
de 1801. St~t.
KEHPII(NicoLAs), dit àe Stras-
bourg, parce qu'il était né dans cette
ville , vers 1397 , fut reçu maî!re-ès-
arts à Vienne en Autriche, où il avait
étudié la philosophie. Il se fit char^
treux le 6 se[»tembre 14i0, et sa pru-
dence, sa piété, le distinguèrent dans
un institut déjà si distingué lui-même
entre les ordres religieux. Ce fut dans
la Charlreuse, nommée en latin Gem-
nicam , qu'il reçut l'habit et qu'iJ
exerça ensuite les fonctions de prieur.
Il remplit la même charge dans quel-
ques autres maisons , parvint jusqu'à
l'âge décent ans et mourut en 1/(97.
On a de lui un grand nombre d'c-
cnts parmi lesquels nous citerons :
I . liegulœ grammaticales. II. Dis-
putala super lihris posteriorum
Aristotelis. IIÏ. Tracta tu s tripar-
titus de studio theologiœ moralis
IVoy. la Bihliothcque ascétique
tom. IV) du P. r>ernard Pez, impri-
mée à Ralisbonne en 172i, in-8^).
IV. Alphahetarium dioini amoris
de eleoatione mentis in Deum. Cet*
ouvrage est atlribué par les bém*dic-
tins à Martin de C>bs ou de Zips ;
par les dominicains à Jean >iider;
par d'aulres à Thomas à Kcmpis. V.
Tractafus de discretione (qui se
trouve aussi (tom. ÏX) dans la Ijiblio-
thèque du P. Pez). VI. Tractatus
KEN
de modo pen^eniendi ad 'perfectam
Dei et proximi dilectionem. Le P.
Pez , au tome IV de sa Bibliothè-
que ascétique , attribue cet ouvrage à
dom Kemph ; au tome VI , il l'attri-
bue à Henri Arnoul. VII. Liber ser-
monum super epistolas et evange-
lia totius anni , in-fol. VIIÏ. Ser-
mones in [esta sanctorum. IX.
Tractatus super Orationem domini-
cam, Symholum apostolorum et De
calogum. Enfin un traité sur l'Orai-
son dominicale , sur le Symbole des
apôtres et le Décalogue, écrit en lan-
gue vulgaire , en faveur d'Elisabeth
d'Autriche, femme d'Albert V. Il est
probable que c'est une traduction du
traité latin annoncé ci-dessus. Quoique
plusieurs des nombreux traités du P.
Kemph ne soient que des ojjuscules,
il a été un des plus féconds écrivains
de Tordre des chartreux. On peut con-
sulter sur ses écrits la Magna hihlio-
iheca. ecclesiasiica, les PP. Ciraud
et P\ichard, etc. B — D — E.
KEXDRÏCK (John), de Bos^
ton, fut le premier marin des Etat.s-
Unis, qui, s'élançant dans la carrière
des grandes navigations, en rendit les
préceptes familiers à ses compatriotes
et les guida vers la côte nord-ouest
d'Amérique, ainsi que dans les îles du
grand Océan où ils ont fait ensuite
un commerce si lucratif. Quoiqu'on
lui reproche quelques fautes, c'était un
homme d'un talent supérieur , d'un
bon jugement, d'un caractère coura-
geux et entreprenant. Son premier
voyage remarquable eut lieu , sons
le patronage ^w congrès , au mois
d'août 1787. Pour en conserver le
souvenir dans les pays qu'il élevait vi-
siter, on frappa des médailles qui re-
présentaient ses deux navires, le trois-
mrits la Cjolomhia et le sloop le Wa-
shington. On lisait ces mots en exer-
g'ie et sur le revers : (lolumhia and
Washington : commanded by ./.
REN
Kendnck, fiUrd ai liosfoii, A.
imrrica, ftw thr fntrifu' (hfnn, l,y
.1 ■ llarrell.S. ilri>.\n, (,. liuljinh,
J. Darby, C Ilot. h. J. M. Piu-
tani, 17H7. Kn 17'JI, il nrriiUil
Mil juire ^o\a^r tir \a («lune « U cùlc
N. ()., sur le bri^ Ir II asliin-^ton,
ni roinpj^iiir avec Doublas qui coia-
inaiidatt Ai (,rthe. l/ile d'Hawaii
[lM'Ii)hrrj dans Tarchipel des Sand-
wich, qui avait vu périr (x)ol, le plu<
^r.tiid navigateur de l'Angleterre , fut
auski le tliealic de la rooit de Krn-
dricL, le plus ;;ranil naM^^ilriir dr>
i.lat>-( niik. 1 n commandant aii;;lais
.i>ant voulu iirer une saUe en son
li< iinrui , un de^ canons »e trouva
rlij!|;r par ine^^ardr d'un lioulel et
d'un p.^quet i\r milraillrs (]ni allei<;;ni-
iriit le capitaine Krndiicl et deux
mousses, sur le gaillard d'ainere de
son na\ire. Cet évrneinenl lra>;^ique
eut lieu ver» i'annre 18(KK On a
donne le nom de Kendricl à une pe-
tite ile iiluee d.ins la paitie occiden-
tale du grand Océan, non loin des
Mariannrs. lî^v — F.
kr.WKnV jLt>i,r(>>SKl, bené-
drlin, iir en l^^l a Mutlirl, en
I . - c, [lasNa de bonne beure en Aile
ii.i^iif pour pouvoir v p'ofesser le ca-
tiiilii .^iiie , et bientôt prononça se^
\iru\ femme piofès dans I ordre de
Saint lie noil , au cou>ent écossais de
Kali>boiine. Il ne démentit pas la ré-
putation de savoir de cet illustre corps,
mais c'est aux sciences phvsiques et à
l'histoire naturelle qu'il se voua de
préférence. On lui doit des observa-
lions intei estantes sur le fl«nt des
orseaux , sur le fer, sur les marais. Il
cultiNait aussi la poé>ie latine, et l'on
a de lui deux pièces de circonslance en
cette langue. Membre de la snciflé
économique de Iiurgliaii>eii 1T.')1)],
plus lard il de>int membre uidinaiie,
puis trésorier, pui.s secietaire de l'a-
cadéuiie des sciences de Munich, et
KEN
4«7
oicmbre d'une vin;^taiiie d'antres as-
socialioni savanliv; , parmi les<]ue!lrs
nous di»tiii;:iieioits la société pour les
abeille» m llautr l.iisace, et l'acadéinir
de liolo^ne qui l'ctut, en 17i)S, à une
des placer «acanlcs d.iMs son sein. De
plus Telecleui de r>j\iéie, son .-^nii-
veraiii, 1 avait nniuioe conse lier au dé-
parlement des alfaires irl!;4ipu<'es , et
membre du comité dr censuir. Il ;;arda
ces places jusque danv un i'^e liés-
avancé. Il mourut le II avril 1H04.
Srs écrits sont pour la plupart dissémi-
nr> dans des recueils snentifiqur^. Kn
voici les principaux. I. hipusr soni-
nniirr Jrs m hrrrhra tir physit^ur
sournisri à l'aratlrniir tirs si irni r\
lie Muniih, Munich, 17G3, in-K"
'anon>me). 11. D/x'/rs tniiirs Hr
physique ^dans le l\itriotr dr lia-
iurre\ 17ti*J. III. l'ruiir sur 1rs
miintis (dans les Iranuiitiims de
l'académie électorale des sciences de
Miinirli. tom. V\ '1' part., 176.'i, p.
127-lt;0). IV. Truitr sur ir U-
UHird (dans les Soin'r/Irs Trunsai-
iiuns philusdpliiqurs dr fui tidrtitir
rirttorulr. tora. 1", pa;;. 3-37). V.
Krrhrn/trs sur ir frr même recueil,
tom. 11. pa^. 40:., Vr>(.). M. îir
nuirqurs sur la trinftrraturr, pria-
iifHtlrmrnt dr 17S3 a ITKti ^mémc
recueil, tom. V, pa-. ;i99,. Vil. Iir
lu parrnir du rrnard rt du < liirfi
(même recueil, tom. V|, pa^. 217-
2V2). VIII. lirmarqurs sur Ir
chant drs uisraux (même recueil ,
tom. VII, paj;. 170-206). — Un au-
tie KhNNKDY Jran]^ ministre an-
glican à i»iadley, daus le comte de
I)eib\. mo(t en 17G0, était Ires-foit
en astronomie , en chronologie , et il
a laissé des ouvrages impoilanls sur
Ptiue et l'autre de ces sciences : I.
AoMi'r/A' niflhodr pour fixrr rt
rxpliqurr la tliroiiulofilr dr l' E-
c ri fuir d'opifs If s piinripes rt les
doruters usironuinujues dt Mv'ise ,
/i88
KEN
Londres , 1752, in-8". II. Exa-
men (les antiquités clirunolos^iques
de Jakson, 1753, ln-8". \\hl)e la
rommensurahilifé du mouvement
diurne et du mom^emcnt annuel,
1753, ln-8°. IV. Système complet
de chronologie astronomique^ ab-
straction faite des Ecritures, 17G3,'
in- 8°. V. Explication et démon-
stration du système complet de
chronologie astronomique , 1 775 ,
in-8". AI. Dissertation sur quelques
points importants et incertains de la
chronologie , m 3, ln-8". P — OT.
K E \ T (ïlnor ARD-Ai GUSTE ,
duc de) et de Stralherrie, comte de
Dublin, etc., était le quatrième fils elle
cinquième enfant du roi d'Angleterre;
George III. Né le 2 novembre 1767,
il fut d'abord élevé en Angleterre ,
mais aussitôt qu'il eut atteint fàge de
dix-sept ans , son père, désirant lui
donner une éducation militaire, l'en-
vova en Allemagne où il fut soumis
aux minuties et à toute la sévérité
de la discipline germanique. Ce fut à
Lunebourg , qui faisait partie de l'é-
lectoral de George III , qu'on fjxa
la résidence du p'ince Edouard. Un
onjcier-général , placé auprès de lui
avec le titre de gouverneur, dirigea ses
éludes, et il commença ses exercices
comme cadel. A la fin de l'année il
alla habiter Hanovre. Logé dans l'un
des palais, les fi ais de table et des équi-
pages étaient pavés sur les fonds de
l'clectorat ; mais son gouverneur avait
l'entière disposition', sans contrôle ,
des mille livres sterling qu'on allouait
pour les autres dépenses; et le prince
recevait seulement sur cette somme
deux pislolespar semaine comme mon-
naie de poche. Celte excessive pnr-
rimonie à l'égard d'un jeune homme
de dix-huit à vingl ans placé dans nn
rang si élevé, jointe à Tobligalion ri-
goiiiouse d'assister s toutes les païades
et de remplir les plus minutieux de-
KEN
voirs des exercices , n'était pas faite
pour lui élever l'esprit. Il reçut cepen-
dant, en 1786, le rang de colonel
dans les gardes. Ce qu'il y a de sin-
gulier, c'est que la résidence dans la-
quelle on l'envoya ensuite fut Genève,
cité où l'esprit d'égalité et les mœurs
républicaines formaient un contraste
frappant avec les usages et la na-
ture despotique des gouvernements
dans les pays qu'il avait habités jus-
qu'alors. Il y fit connaissance avec
plusieurs jeunes seigneurs anglais du
même àgc que lui , mais la pension
qu'on lui allouait était si faible, qii'il
ne put les imiter dans leurs dépenses
qu'en faisant des dettes ; ce qui lui at-
tira plusieurs fois des morlificalions.
Lorsqti'il eut atteint vingt-trois ans,
il fut rappelé en Angleterre où on le
nomma colonel du 70^^ régiment d'in-
fanterie. Ayant dépassé !a majorité, il
se flattait qu'on lui accorderait , ainsi
que cela avait été fait pour son frère,
le duc de Clarence, un apanage et un
élablissemenl convenable. Il espérait
aussi passer quelque temps dans le
sein de sa famille et cultiver. la so-
ciété de ses amis ; mais il n'y avait
pas huit jours qu'il était colonel ,
quand il reçut soudainement l'ordre de
se rendre à Gibraltar. Comme il sa-
vait qu'aucune réclamation ne serait
écoutée, il obéit en silence à la volonté
de son père,, rejoignit son régiment
dans la résidence qu'on lui fixait, et,
après un court séjour, fit voile avec ce
même régiment pour Québec , dans
l'été de 1791. En 174)3, on le mit
sous les ordres du général sir.Charles,
devenu plus tard lord Grey, chargé
d'une expédition contre les Antilles
françaises. Cette expédition réussit et
le prince lit pour la première fois u'^pgc
de son épée c-ontrc les ennemis de son
pays. A cette occasion, il perdit une
grande partie de ses équipages mili-
taires t'îi traversant le lac Champlain
ki:n
&ar la (;iace. Hacc à la tête du caiii|»
ilriache de I«a (.onI«, il montra ilr la
bra^oiirr à l'alLique du l'orl-Ko\al
diiis l'ilr Marliiiiqiir, auquel un donna
en »iiii lionneui le nom dr fort Kdnuard.
Il ^r di^lin^iia auvsià Sainle-I.ucic et à
la(iiiadploiipe. .\ la fin de la campa^jnc
de tT'JV, le prince Kdouard retourna
dans l'Anicnque septentrionale , ou il
eut poiir rernmpense le gou\ernrmenl
de la Nouxelle Kroi'-c auquel ona)outa,
le \'2 joiivierJTlM), le prade cîe lieu-
tenanl-;;rnéral. A^ant lait une vio-
lente rljiite de rlieval pendant son sé-
jour a llalif.iY, il revint en Vn^leletre
pour V rrtablir sa *anlé. Kii IT'J'J il
fut appelé à la chambre des lord> par
une patente qui le créait duc de Kent
et de Stratlierne, et comte de Dublin ;
et le parlement lui accorda enûn une
proMsion de douze mille livres slerlio*;
(trois cent mille francs), que ses detix
frères aînés avaient obtenue a leur ma-
jorité, et que le duc de Cumberland,
quoique de quatre ans pliib |eiiue, ob-
tint le môme joui que lui. Nomme la
nirine année commandant en chef de
toutes les troupes dans l'Ainenque an-
glaise, il >e rendit à son poste; mais,
atteint d'une fièvre bilieuse , il eut
h permission d'aller en Ani^lelene ou
il arriva dans l'aiituiiine de IKOO. l*eu
de jours après il (ul nomme colonel de
JVovai-Kco5sais, ré-ciment dont il con-
serva le romin.indement jusqu'à sa
mort ; et le :{() mars 1802 il obtint le
gouvernement de (iibraltar. A peine
en eul il pris possession qu'il voulut
iniroduiie parmi les troupes de la gar-
nison toatc la ri;;ueur de la tactique
aileniaruie. Lc\r avant le jour, abhor-
rant tout exrès de table, sobic jiiNqu'à
l'cvrès, ponctuel d.ius l'acroinplissc-
nicnt de tousses devoirs, il e\iL;eail
des autres ce qu'il faisait lui-même.
.Mais il n'était pas possible qu'une réu-
nion d'hommes , surtout de soldats,
imitassent rab>tineiicc , la rf:;tilanlc
KEN
4%
et le> habitude» au:>tères du uouvcau
gouverneur. Il avait pris sur le con-
finent le (:oûl de l'unifoi mite la plus
correcte dau^ riiabiilemenl et l'cqui-
pemenl dr^ inililaKes; et. tandis qu'il
forçait le^ suidais a avoir les che-
veux coupes strictement d'après ui
certain modèle , il les dé<;oùtait par
des parades et des revues cuntinuellcs.
Mais d'un autre cale on doit leconnaî»
tre que les habitants de (îibrallar se
plaignaient depuis lon;;-lenips, et avec
raistMi, de la licence de la (;ainison,
et que les troupes étaient livrée:» à la
(aineanlise cl a l'insultoidinaiiun, vices
pousses a l'excès par la lacible qu'elles
avaient de s w!>andonner a la débauche.
Pour couper le mai dan^ sa lacine, le
duc de Kent, quelque perle qui dût en
résulter pour lui-même, ordonna la
fermeture de plusieurs maisons où l'on
vendait du vin, afin de lelcnir les sol-
dats dans leurs baraques (11, et adopta
un svsteme diiispeclion propre à ré-
primer l'ivrognerie et l'insuboidina-
tion. CjCs mesures mal calculées, |uin
de produire l'eflet que le prince en avait
attendu , irritèrent au dernier point
les soldats. Des députations envo>écs
au duc pour obtenir la permission de
célébrer comme une frte la nuit de
Noël, avant été ruisesaux anèts par ses
ordres, la ;:arnison se souleva, les '23
et '2li décembre 1802, pour le faire
partir et pour melire i^ sa |dace le gé-
néral liarnel. L'insurrection fut terri-
b!e;*mais le .') V'^ré;;iinent, qui n'v avait
point pris part , lit feu sur les sédi-
tieux qui se dispersèrent. Le lende-
main, après une journée entière pas-
sée dans la confusion , et nial;;ie les
effoits du oéneral liarnet pour réla-
blir le calme , le tumulte augmenta
veri l'entrée de la nuit : à dix heures
tout était soulevé. Le prince sortit alors
à la tcte de son ré;;irncDt , avec une
i} lit dioil »ar la v< n'.e itdil allout au guu-
490
KEN
compagnie de c;reuadiers et deux piè-
ces (Je campagne , et il marcha sur les
révollés. Le feu des canons et de la
mousqueterle dura depuis dix heures
trois quarts jusqu'à miiiujt ; les iir.itins
vaincus et dispersés furent presque
tous arrêtés, et les printipaux traduits
devant une cour martiale. Il parait
que le capitaine Dodd , qui lui ame-
na un détachement d'artillerie, con-
tribua beaucoup à faire rentrer la
f^arnison dans le devoir. Au mois
de janvier 1803, les habitants de Gi-
braltar s'empressèrent de témoigner au
prince, dans une adresse, toute la sa-
tisfaction que leur avait fait éprouver sa
conduite dans cette circonstance.
Quoi qu'il en soit , le ministère ju-
gea convenable de le rappeler,- mais
il reçut en 1805 le bâton de feld-
maréclial. Depuis ce moment le duc
de Kent ne put obtenir d'être réin-
té;iré dans le gouvernement de Gi-
braltar, et on ne lui accorda pas
même de commandement. Cette dis-
grâce fut attribuée avec quelque raison
a la jalousie qui existait entre ce prince
et le duc d'Yoïk, commandant en
chef de l'armée, et qui s'accrut extrê-
mement lors de l'enquèîe parlemen-
taire relative à la conduite de ce der-
nier. On avait répandu le bruit que
le duc de Kent n'était pas étranger à
l'accusalion portée contre son frère :
pour se justifier de cette imputation, il
crut devoir publier une série de ques-
tions adressées par lui , à ce sujet, le
26 juillet 1809, au capitaine Dodd,
son secrétaire, devant deux témoins
avec les réponses de ce dernier. Quel-
que opinion que l'on doive se former
de celte singulière justification, on
voit depuis ce moment le duc de Kent
à *la tcte de plusieurs institutions de
bienfaisance, qu'il fréquentait assidû-
ment. Kn 1815, il se réunit à ses jcu-
ne:> frères pour présenter une réclama-
tion au parlement, à l'effet d'obtenir
KEN
des allocations plus considérables pour
soutenir leur rang et acquitter les det-
tes qu'ils avaient été forcés de contrac-
ter. Il renouvela plus lard , en son
propre nom, les réclamations qu'il avait
déjà adressées plusieurs fois à \V .
î*itt, et que ce ministre avait promis
d'appuver; mais elle" furent toujours
repoussées. Le duc de Kent abandon-
na donc à ses créanciers la moilié de
ses revenus, et il se retira en 1810
à Briixelles pour v fai^e <ic6 écono-
mies. Son principal délassement élail
le théâtre qu[il suivait avec passion ;
il faisait aussi des excursions en Alle-
magne pour visiter les différentes bran-
ches de sa famille qui y élaient cia-
blies. A la mort de la princesse
Charlotte de Galles (1817), on son-
gea à plusieurs mariages pour les plus
jeunes branches de la famille royale,
afin d'éviter que la couronne pût se
trouver sans héritiers. Ce fut à celte
occasion que, d'après les instances tle
la reine sa mère, le duc de Kent pré-
senta ses hommages à Vicloria-Maria-
Louisa, la plus jeune fille du duc ré-
gnant de Saxe-Cobourg, et de la prin-
cesse de Reuss, née en 1786 et veuve
du prince héréditaire de Linengen (2).
Le mariage fut célébré à Cobourg le
29 mai 1818, suivant les rites luthé-
riens , et bientôt après solennisé de
nouveau à Kew conformément au cé-
rémonial de l'église anglicane. Pour
continuer de suivre le plan économi-
que qu'il avait adopté, le duc et la du-
chesse de Kent ne tardèrent pas à
retourner sur le continent, et s'établi-
rent à Arnorbach, que cette princesse
avait choisi pour sa résidence. Un évé-
nement coniribua bientôt à la félicité
et aux embarras du duc de Kent. J^a
duchesse fut reconnue grosse , et le
(■>) l.e piincedf Liiien;;en «Tait 44 ^'i* 'or:^-
qii'iJ rpousa.ni i8o7. la princesst: de (iobour;;
qui nVtait àpéf que de ifi nn». Un fil» i»»u de ce
mariage «uccédd à son père.
KEN
roupie roTsI , dé»irant qne \r ftuit i)f
Irur union ^it le jour en Anjeleire,
ve rendit immniiairnienl i Londres.
I.r ^4 mai 1H19 h durheue arrou-
rha an palais de Ken<>in<;tnn d'une
tille qui rerut le» nomi d*.\lex.indn-
na N irtoria (3). \jts mederiiu lui
àMn\ pre^riil d'habiter le rlunat plus
dodx du l)rxnn^liiie , lc> deii\ epont
>'eial»lirenl a Sidmoiilh, où le duc, qoi
jouiN«ail a cette rpoque d une grande
popularité, fut »ai»i d'une fifvre pro-
duite (»ar un rhumr nr^li^é et, aprè^
une coarte maladie, mourut le '2^ jan-
vier 18j1) dan^le^ brasdela ducltesM
qui avait montré à son an(;u^te époni,
pendant va courle maladie , autant de
zèle (|tie d'aiïertion. I.e duc dr Kent ,
d'une taille et d'une force atMiiique,
avjit un a*pect impo^nl, temp'-ré par
une poittevse simple et naturelle. Sa
première éducation qu'il re<^t ea \n-
;;leterre fut soijinée , mais il était
fâcheux que son pouvenieiu allemand
l'eût habitué, pendant »on «ejour dans
l'electoiat de Hanovre, à i\t^ pratiques
trop minutieuses, et qui le rendirent
impopulaire dans l'aimée, (ximme son
père, il se levait de très bonne heure,
prenait unt tavse de café, recevait suc-
cessivement ses principaux serviteurs,
parmi lesqneU Gourait l'intendant de
»a maison qui lui cemr!tait chaque
jour le compte détaillé de la dé-
pen";e da jour précrdt-nt , oà étaient
compris non seulement la viande, le
pain et \e vin, mais la moutarde, le
sel, le |K)i\re, etc., qui a\aient rlé con-
sommés ; chaque article de dépense
avant an chapitre distinct. On doit si-
gnaler, entre aulre-^ sinijulaiités du
duc de Kent, le grand nombre de clo-
chettes destinées à faire observer l'or-
dre el la régularité dans le palais de
KeuNin^ton ; elles coulaient seules trois
cents livres sterling; (.sept nulle cinq
cents francs^. Ce palais renfermait
(B Anjovrd'hui rritn d'AitrMfrr* (i#4iy
KKR
49«
a«Mi une immense quantité de pcrrIuleN
à mosiipie. Deui surtout, qai son-
naient tous les quarts d'heure, étaient
partirMiicrenirn* deplai>anles pour les
étranf^ers dont elles interrompaient la
conversation , et «.emblainit avoir été
fa te* evpre» pour empêcher de s'enten-
dre. Si le dur di* Krnt avait quelques
ridicule», on doit recoiinaitre qu'il était
bienfasant et doué d'un etrriirni ca-
raclerr II est le premier colonel an-
glais qui ait donnr l'exemple des er(ile%
réjjimenlaires, el, comme son père, il
contribua de toutes les manières a ré-
pandre l'instruction parmi les difTn en-
tes classes de la société. Il fut le pa-
tron de la plupart des institutions cha-
ritables de r.\n;;leterre, et souxent il
présida leurs réunions, montrant dans
les ili<cour$ qu'il t prononçait une élo-
quence parfaitement appropriée au
sujet 1) — 7 — s.
kKK ALIO, dame K()IU.l;i
(LoilSK-KmClT»: (iriHFMFNT r»K),
née à Paris le 2'i aoàt 17.%8 ,
était fille de l^ouis-Velix (îuinement
de Kéralio {I uy. ce nom, XXII,
31'»), membre de l'académie d'.Krras
et de la société patriotique de Hennés.
Klle se maria à Hobert, depuis député
de Paris à la Gtnvention ualioiiale.
M"* de Kéral'o était douée «le disposi-
tions naturelles qui, pràre à l'éducation
soignée qu'elle axai? reçue de son père,
se développèrent de bonne heure ;
mais l'usaoe précoce qu'elle en 6t ,
n'a pu prociier qu'une existence éphé-
mère aux nombreux ouvraf;es qu'elle
a composés, publiés on édités et dont
nous donnerons ci-après la liste. Ses
romans sont au-dessous du médiocre, et
son histoire d'Klisabeth est d'une diffu-
sion^ accablante. Elle avait trente-trois
ans lorsqu'elle rpousal^obert dont l'af-
6liation à la société des jacobins avait
exailé l'ambition au point le plus
absurde, et l'on e^t porté à penser
qu'elle la partageait. Il faut lire a ce
49^ KKR
sujet tlaiis les iMcmolres de M""^^ Uo-
laiid, qui la peint comme une femme
spirituelle, adroite et fière, le récit de
ses démarches auprès de lîiissot, afin
qu'il obtint de Dumouriez , alors mi-
nistre des afiaires étranf];èrcs, un em-
ploi pour son mari. Brissot va trou-
ver ]Jumouriez qui répond à ses sol-
licitations : «< Ouoi ! vous me parlez
« de ce petit homme à tète noire,
«< aiiFsl lar^e qu'il est haut i* Je ne
«< me déshonorerai pas en employant
« une telle caboche. — Mais , ré-
«< plique Brissot, parmi les ari;ents que
« vous êtes dans le cas d'employer,
«« tous n'ont pas besoin d'une égale
« capacité? — Je n'emploie pas un
« fou semblable. — Mais vous avez
«< promis à sa femme! — Sans doute,
« une place inférieure, de mille écus
« d'appointements; savez - vous ce
« qu'il me demande ;' l'ambassade de
« Constantinople!... — L'ambassade
« de Constantinople, s'écrie lîrissot en
« riant , cela n'est pas possible ! —
«< Cela est ainsi. — Je n'ai plus rien
« à dire îsimoi, ajouta Dumon-
«< riez, sinon que je fais rouler ce
K tonneau jusqu'à la rue s'il se pré-
« sente chez moi, et que j'interdis ma
« porte à sa femme. » — M"'*^ Roland
continue ainsi : « M'"*^ Robert re-
« tourna chez Brissot qui, dans son
« in;;énuité, lui dit qu'elle avait fait
a une folie de demander une ambas-
« sade, et qu'a\ec de pareilles préten-
« lions on devait finir par ne rien
« obtenir. — Nous ne la revîmes plus,
« mais son mari fit une brochure con-
«< trc Brissot, comme un distributeur
« de places et un faussaire (|iii lui avait
« promis l'amba'^sadc de Coiistantiiio-
« pic et s'élail dédit » Robert qui,
dès 17î)0, avait publié un ouvia;^e in-
titulé : ie lié/juijlicanis/nc udupté à
la France, s'affilia aux (^ordeliers, se
lia avec Danton qui l'employa après le
10 août 1792, comme .son secrétaire
KEK
quand il lut nommé au ministère de la
justice , qui protégea son entrée au
collège électoral et son élection en
qualité de député à la Convention, où
Robert vota la mort de Louis XVI,
sans appel et sans sursis , regret-
tant, dit-il, qu'il ne fut pas en son
pouvoir de voter aussi celle de tous les
souverains. Il est difficile d'imaginer
quelque chose de plus épouvantable que
le discours qu'il prononça à cette oc-
casion. Il avait, dès le 15 nov. 1792,
déployé tous ses efforts pour hâter
ce jugement. Alors Robert paya ses
dettes, fit de la dépense et reçut à sa
table Philippe-Egalité et bien d'au-
tres. Sa femme faisait les honneurs de
la maison qui était tenue sur un grand
pied. Postérieurement 11 fut dénonce
par \'ergniaud pour ses relations avec
le duc d'Orléans. Il exerçait alors à Pa-
ris le commerce d'épiceries, et fut dé-
signé comme accapareur à la populace,
qui pilla sa maison et s'empara de plu-
sieurs tonneaux de rhum. Cet accapare-
ment fit pleuvoir sur un homme qui avait
tant crié contre les accapareurs, des
sarcasmes de toute espèce, et on lui
donna le sobriquet de liobert-lihiiiit.
Il survécut à la chute des Dantonistes ;
fut envoyé à Liège en 1795, où sa fem-
me l'accompagna, puis rappelé par dé-
cret du 27 mai, comme entravant les
opérations de l'administration de la
Belgique. Il se hâta alors de fcliciter
la Convention sur ses succès contre les
terroristes aux premiers jours de prai-
rial. Il ne rentra point dans le corps
législatif, et s'occupa de fournitures pen-
dant que sa femme composait des ro-
mans. C'est ainsi qu'ils passèrent toutes
les années de l'enqtlre. Après le retour
des Bourbons , ils se retirèrent à
Bîuxetle;., où Robert se fil liquoriste.
M""' Robert y est morte en 1821, et
son mari ne lui a survécu que cinq ans.
— On a d'elle, comme auteur: I. Adr-
Ididc, ou Mémoires de la marquise
kii;
«//•.y*»». Neu/cWiel, 177G,ia-H .
1 1 . IlistuirtiTKlisaltfth , rrinetr. in-
^Ictii rc, tirée Jrs rrri/s orii^inuux
tttifjuis, actes, titres et autres pirrrs
manuscritt-s qui n'ont point emure
/A/rw , 17HG-SU . ."i vol. lu-H". 111.
. inteiia et i'Mruîine, ou r Amour et
r.lmitié. Taris, 1808, .'> \ol. iu-12.
IV. llphonse et Matliiliic, ou la
Familte espagnole, ibld., ISOD, i
\ûl. in- 12. V. liuse et Alhert, ou U
Tombeau cfllmma, ibiJ., 1^0, 3
uil. in- 12. VI. éléments Je ion -
struition , anglais-français , 1810,
in-S". — Comme traiiurlricc : 1" diiïf-
rculs moireaux cvlralts des Mrmoires
lie fat atlemie tte Sirnne, 1772, In-
12; 2" Histoire du grun.l- duché
de Toscane, sons le gou^'ernement
des Mrdicis,\rn\. Jerilalicn de Kl*
j;uccio-riaIuzzi, lom. VI à l\,in-8'\
1783 à 178 V ; les cinq premiers vo-
lume> avaient été traduits par Lefcbvre
de Villebrune; 3" l'oyages dans les
Deu.X'Siciles, traduit de ran;;lai$ de
Svtinburne, 1785; V" Etat des pri-
sons, des hôpitaux, et des maisons
de force ^ trad. de l'an;;!, de Ilouard,
1788. in-8": 5" t Etranger en Ir-
hinde, 1809; #6" l'oyage en llol-
Linde et dans le midi de C Allema-
gne, ISOD. Ces deux ouvra;;e> jonl
traduits de r^n;;I.iis de J. Carr. —
Comme cdîtcur , elle a publié, 17S6-
89, quatorze \olume$ formant le com-
mencement d'une (Collection des meil'
leurs oucragcs Jrançais composes
fMtrdesJemmej. Cette collection qui
devait avoir quarante volumes iii-8"
n'a pas été continuée. Kilc .i donné
au:5i une édition i[c>> Fa/des de iJuds-
/o.cn anglais, 1810. in-12. Ilnfiu,
INl"'' de Kéralio fut collaboratrice avec
.son porc et avec Uobcrl, devriiu plus
ta.d son mari, du Mercure national,
ou Journal détat et du citoyen ,
dont qualie-vin^t-<ept numéros paru-
rent \k\ ;M tlifcmbre 1789 au 29 mars
KER
4c)'i
1791. On la ref;arde encore romme
auteur de rt)uvra;;e intitulé: les (.ri-
mes des reines de France, depuis le
I uinmencement de la monarchie
lusqu'a MtirieAntoinettét , l'aris ,
1791. la-H' , Neufcliàlel, 1792, soc.
t>po;;r., iri'-12. n(ju\ elle édition cor-
rigée et au^raentre , l'aiis, au bu-
leaude» Ut'\olution> de l'aI;^,an II,
1793, in 8". — Ce volume a été attri-
bue à Piudliomme par beaucoup de
personnes, mais nousMiairoe.s poitrs à
le croire de M"" Uoberl [/ ry. JU.-
nKNGtK, IV, 239); cette croyance est
appuyée >ur les rap|Mirts de société
et de collaboration qu'elle a\ait d«-,À
avec Uoberl , a\ant leur maiia^e, et
a\ec l'iuiihomme, ardent résolution-
naire , auteur des He^^olutions de
Paris. Si quelque doute à cet é-^ard
()0U\ait être encore rle>é, il faudrait
e fonder sur l'iniluence qu'aurait pu
conserver sur sa ûlle le clie\alier de
Kéralio qui ne mourut qu'en dérendire
1793, et qui, après s'ctre montic d'a-
bord parti.san des reformes, délesta
jusqu'à la Gn de sa Me les excès de la
révolution ; mais M'"** Uoland nous a
fourni la preuve que cette influence
dut être, daps les deux derniei es années
de l'existence du père, plus que contre-
balancée par l'iniUience toute-puiâsante
du mari et de ses amis. Z.
Ki:ilCKliElH:KK(JF.AN (.^-
I\Al\I> , antiquaire et )ii>lorien ^ naquit
vers l'année 1678, à Fauquemont,
capitale de la sei;;neurie de ce nom,
qui faisait autrefois partie du duché de
Limbour;; , sous la dénomination de
piiys-rëuni. Il fil ses humanités à
Macstricht, et alla ensuite étudier la
philosopliie efla théo!o;;ic à l'iiniver-
sité de Louvain. Ces deux (lenilers
cour>-terminés, il se consacra à l'éfuJe
Adi langues saxantes, de la critique
sacrée el de l'antiquité. Puis il en-
seigna les belles-lettres , el donna
un roars d'histoire au collèiie des
494
KER
Ïrois-Langues à Louvain. Nommé ,
en 1708 , historiographe par l'em-
pereur Joseph 1^' , il en remplit les
fonctions jusqu'à sa mort, le 16 mars
1738. On a de lui : I. Grmnmatica
laiina^ Louvain, 1706, in-12. Cette
grammaire est pleine de recherches
qu'on ne trouve pas ailleurs, 11.5j.v-
tiiimi apocalyplicuni Louvain, 1708,
in- 12. III. Prodromus Vanieli-
cus, sive nopj conatiis liistorici, cri-
iici in celeherrimas dijjicultaies his-
turiœ veteris T est a menti , nwnar-
chiarum Àsiœ, etc., ac prœcipue
Danielem prophefam , Louvain ,
1711,in-12; ouvraf^^e plein d'érudi-
tion, et dans lequel les hypothèses de
l'auteur peuvent éclaircirles questions
hisloriques et iiéooraphiques de l'Ecri-
ture-Sainte. IV. De monarchia Ro-
mœ puganœ secunduni concurdiam
in ter S S prophetas Danielem et
Joannem : consequens historia a
monurchiœ conditoribus iisque ad
urhis et imperii ruinam ; accessit sé-
ries hisioriœ aporalypticœ, Louvain,
1727, in-12. V. De situ Para-
disi terres fris, ibid., 1731, in-12.
L'auteur place le Paradis terrestre un
peu au-dessus de la Babylonie entre
les bras occidental et oriental de l'Eu-
phraîe jusqu'à leur embouchure. Ce
svstème, différent de celui de lïuel,
offre autant de probabilités. On trouve
dans le même volume une Dissertation
sur le nombre des années que le Sau-
iU'ur a instruit le peuple^ çt une au-
tre inlitiiléc : De Cepha ter corrupto.
Vi. J)c5 poésies latines dans lesquel-
les on reconnaît delà ;^ràce et de l'ima-
fçination. Kecrkhedère a laissé plu-
sieurs manuscrits restés inédits, entre
autres : Traite des LXX semaines
de ])aniel, qui était soumis à la cen-
sure lorsqu'd mourut. L — 1 L.
KERCKOVE (Jr..\N-IUi'TisTE
Van), né à Oost-Ecloo en Belgique,
le 5 janvier 1790, étudia d'abord au
KEH
collège de Gand, puis entra au sémi-
naire de cette ville en 1812. L'évê-
que, M. de Broglie [f-'^oy. ce nom,
LÏX, 290), par suite de son dévoue-
ment au pape Pie VII, alors prison-
nier à Fontainebleau, était lui-même
relégué dans l'ile Sainte-Marguerite.
Napoléon envoya, pour administrer le
diocèse, un ecclésiastique dont la plu-
part des membres du clergé ne voulu-
rent pas reconnaître l'autorité , et
plusicufs furent, à ce sujet, arrêtés ou
exilés. La même opposition s' étant
manifestée parmi les séminaristes , les
uns furent conduits à Paris et détenus
à Sainte-Pélagie; les autres, au nom-
bre desquels se trouvait Kerckove ,
furent dirigés, comme conscrits, sur la
citadelle de Wesel, où quarante mou-
rurent d'une maladie contagieuse. La
chute de l'empire français , dont la
Belgique fut alors séparée pour faire
partie du nouveau royaume des Pays-
Bas, permit à Kerckove de venir conti-
nuer au séminaire de Gand ses études
théologiques ; et bientôt , quoique
jeune encore, il alla exercer le profes-
sorat à Saint-Nicolas et à Sainte-
r»arbe. Elevé au sacerdoce , il remplit
d'abord les fonctions de vicaire à Si-
nay, puis à Courtrai, où il organisa
une école du dimanche pour de jeunes
filles pauvres, et, en 1826, il fut nom-
mé curé de Uupelmonde. Il consacrait
ses loisirs à la traduction en flamand
de quelques ouvrages français, et insé-
rait dans divers journaux des articles
religieux et politiques, l! appuya vive-
ment les réclamations des catholiques
contre les mesures restrictives adoptées
à leur égard par le gouvernement néer-
landais; et, après la révolution belge de
1830, il fut élu député au congrès na-
tional, où il siégea dans les rangs de
l'opposition. Kerckove mourut , le 1 3
décembre 1832, à Stckène, dont l'é-
vcque de Gand l'avait nommé curé
depuis quelques mois. P — RT.
iftR
KKR
405
KFRESSTI IIV ( ALnYvJ.,
srf>ii Jr), M\ant Imnf^rois, né (n
fTH.'», fui suffc» i\emenl profe>*eur
«l'IiiNlolif uiii%fr>flle ft H'hi^loire po-
liliniir à rarail^nneJf Oraiid-Vaiadin,
iiQ il nt >«')o'triia pas moin* Je Ircnle-
uii aii« , pui% i IVslh où il en |<2i%a
seiie. Birn que lecnaïqiiable romme
prores$eur, c*c*t surtout fomine écri-
vain quM se ilisttn^^ua. Il a rendu an
sti\\ct< ricU» l'Iiisloiredf la Hongrie,
qimrqoe la manie du paradoxe Tait en-
Il aine pluN d'une foi» i de* liipottiHes
trop liardies. Ain^i, par exemple, il
prétend que le* Mad^iare» desrendent
des Huns, ce qui n'est \rai qu'en éten-
dant le ^en» qu'il donne an mot de
Huns. I.'rmpereur François I*', pour
lin témoigner son c>time particulière,
lui conféra la niddex^e et l.i mrdaille
du mérite ci\ il. Kete^Nlurv mouiutle
•Jl aMil iS^'ï-Son ou\in^r le plu*
roniidrrable est le ( .umtfrndiurn his-
toriiT umWrsttlis , l'e^lfi , 1 H 1 7 1 9 ,
^ \ol. Mais les plus reinaiqiuble& sont
'. 1)is-ifrtutio tîr llungnrorum ori-
^1 trutatir pn'mis iin uruifiuh's, Peslh,
\H\\), m-8'' ;c*est là qu'il veut prou-
\er l'origine exclusivement liunnique
ilr<; Mad^iatcs\ et ses iiissrrtatnmrs
Itistnriio-i riticir ocimionr trnlami-
uimi puUIruntin vulgdtir , t^iteis
lirhi rriiis uutiirii trias utffu- de
lu :'^inr, srrUhiis a sic t ici s tu tnigni-
lionr aiiisipir grstis Mu^yaronim ,
tnuVlioncs ti(hrrsiis noctiturum ra-
I uni nias et figmenta vhuiirantur ,
IV l'i. 181 V, in 8" Ja disseiiation lU
iirionynii Ueiœ régis ^uftirii crtate,
nvait été puliliec seule, ï'c.th , 181*2,
in 8"). On doit encore à Keresstury
l.inramrntn his! iriiv prugnuitira
llutigiiriiT pasitidriilMS distinrta ,
l'i"<;th, 170G. in 8'\ et Ifis'uriaepis-
lopatui W. Varudinensis{\)\ et il
pnrait qu'il a laissé au>si quelques ma-
nuscrits. P — <)T.
i) r/esl-iMiir*- Ji r»t.>n»!-V,ifafliii
KKKI VALANT (1) (NiroiKs
\j. DliST de\ littérateur, naquit Ir
•ir> février 17:»0 ï Nantes, d'une fa-
mille lionorable. Après avoir achevé
ses études de collr^c avec succès, il fil
son couit de droit r\ fut reçu avocat
au pailement. (^urlt}u?s années après
il acquit une rlia^^^e de maitre des
comptes à la chambre de Hrrta^ne, et
dès-lors ronsacra v«s loisii . à la cul-
turc des lettres. |«a ié\olQlion le priva
de sa place, sans attaquer sa fortune;
et il put continuer de chercher dans
l'étude des consolations. Il s'était per-
fectionné dans le latin par la lecture
de^ meilleurs auteurs . il apprit encore
l'italien, l'anglais, r\ 5e rendit familiers
les chefs- d'iruvre écnts dans ces deux
lan;;ues. A l'a^e de près de rinquante
ans, nouveau Frunmleu, fommr il le
disait plaisamment lui-mrme, Kériva-
lant s'cNsaNa dans l'ail des \ers. Des
imitations a;;iéablfs de la Prière uni-
i'erseilf de Pope, de Veiegie de Tiray
sur un cimetière, d'un hymne d'Addi-
son.etc, insérées dans les journaux et
dans les Almanarhs tirs Muses , le
filent connaître. Kncoura;;é par le>
suffrages de critiques érlairé^., il prépa-
rait des travaux plus imp'irtanls lois-
que des chaurins vinrent empoison-
ner et abré«;er>on existence. Uesié lon;;-
lemps veuf, il s'i'tait remarié et rési-
dait dans une maison de campagne
près dr Fontenay-le-(^mte (Vendée),
avec sa jeune épouse qu'il eut la dou-
leur de perdre ; et, ce qui mit le com-
ble \ son affliction , un fils qu'il avait
en de son premier mariai;e , se tua
sur le corps de .sa belle- mère , pour
laquelle il avait conru une passion fré-
nétique. Kérivalanl, dé>c<pérc, ven-
<rtv*a propriété et aciiota , dans les
environs de Nantes, la terre de La
(i) Il r>l aoininé Ki*»t4!«T dans la t«bU- drs
J4ammmtk< J*t Mmtfi dr 1797 h 1800. Cf ne fut
<|ii'»o ilui qor IVdiu-ur dr ce recueil lui rendit
voo T^riuble nom.
496
KER
Ver(lièr<' où de nouvelles rallniités
ralleiulnieiit. Au mois traoùl 1815,
lors de l'invasion de la France, des
troupes prussiennes furent dirij^ées sur
la Loirc-Infcrieure. Zélé royaliste,
Kcrivalant icçut ces étranj',ers com-
me des libérateurs et en lo-;ea un
^rand nombre chez lui ; mais , peu
sensibles à cette hospitalité, les Prus-
siens devinrent plus exigeants, et ils
finirent par tout briser : les domes-
tiques furent maltraités , les femmes
se sauvèrent ; et Kérivalant lui-mê-
me se cacha dans un grenier. Il
survécut peu à l'émotion qu'il avait
éprouvée , et mourut le 1 5 octob.
1815 , après avoir ordonné que ses
manuscrits fussent envoyés à M. de
La Bouisse, son ami, pour les pu-
blier. Ce sont des imitations en vers
des plus belles pièces à^ Ausone ,
des traductions des épigrammes choi-
sies de Martial et d'Oav« , et de
plusieurs élégies de Jlhulle. Outre
une foule de vers dispersés dans
les 1 ecueils du temps , on a de Ke-
livalant : \. La Vendée , poème
rlègiaquc , Paris, 1814, in-8".
lï. Ef)i grammes choisies d'Oa^en,
Iraduiles en vers français, Lyon,
1819, in-lS. L'éditeur, M. de La
liouisse, annonçait, en 182'2, que
les imitations à'/iiisone étaient prêtes
à paraître ; et qu'il travaillait au com-
mentaire dont il se proposait d'accom-
I)agiicr la traduction des épigrammes
de Martial. Les recueils de la so-
ciété académique de Nantes , dont
Kérivalant était un des fondateurs,
contiennent (année 1808) l'analyse
(\\\n essai, qu'il avait composé. Sur
forlgine, les progrès et le génie de
la langue française. On y trouve
aussi son Eloge prononcé à la séance
publique de 1815. Une notice sur
Kérivalant a été insérée dans le Jour'
nal ânecdotique de Caslelnaudary ,
18 septembre 1822. W— s.
KLR
KER\ (Vincent de), chirurgien
et médecin Ci'ilèbre, naquit à Gratz en
Styrie, le 20 janvier 17G0. Son père
était x\\\ assez pauvre employé chez le
comte de Schalgotsch, mais il avait de
l'instruction et le mit en état d'entrer
au collège avec avantage. Avec l'esprit
et la facilité qui lui méritaient les prix,
Kern montrait beaucoup de fougue et
d'indiscipline. Placé au sortir de ses
éludes chez le chirurgien IMédérer ,
il s'abandonna à tant de folies, que
non-seulement Médérer le renvoya,
mais que la maison et la bourse pa-
ternelles lui furent fermées ou peu s'en
faut. Fort mal secouru par ses camara-
des d'oro-ie et de bal, il quitta Gratz,
non encore détermine sur ce qu il
avait à faire, chemina au travers delà
Haote-StyrieparZeiringet Judenburg,
et finit par entrer comme domestique
dans une maison du Salzbourg ; 11 ser-
vit de même plus tard à Trieste et à
Venise. Ainsi aux prises avec les dures
nécessités de la vie , il vint rapide-
ment à résipiscence, se remit aux étu-
des médicales abandonnées, mais aux-
quelles il ne pouvait plus consacrer, ou-
tre la nuit, que quelques furlifs moments
delajou.née. Désormais il ne sortait
plus sans un livre en poche ou à la main.
Il devint pliilosopiie pratique en même
temps que cliirurgien, et il fit à lui seul
un cours complet de psychologie phy-
siognomonique expérimentale. Celle
espèce d'aulodidaxie communiqua beau-
coup de vigueur et d'originalité à son
caractère , et par suite à ses écrits.
Enfin, en 1783, 11 avait économisé
une petite somme qui lui servit à
prendre le grade de maître en chi-
rurgie à Vienne (1784), avec le litre
d'aidc-accoiicheur. Quelque temps cii-
foic pourtant 11 vécut de privations.
Mais Leber, un de ses professeurs qui
avait deviné ses hauts talents, lui ouvrit
une ère nouvelle en le faisant nommer
chirurgien du duc de Saxe-IIildburg-
KER
Iimmu, MMlc pra biillint «anidoiiif,
m.iis (jiii l( mil j l'abri du l>r-iiiii.
KriM ititifita Jr Na nou\clle (losi-
lioii pour s^ pfrf(rflinnner. Dour du
Ijirnt de l'olivrixalioii , il rcconniil
à de> cures oj»érrfs prcNqur vpniilanë-
mciil, soun le chaume de misérahles ea-
Itanes , romhicn la naliire fait plu*
que le rliarlataiiisme mnlical pour la
^uérison i\e> maladies, et combien il
V avait il simplifier, a retrancher dans
les lofi^s et fastueux proredrs de pres-
que tous ses confrères (1). Kn m^me
temps il voulut voir comment opéraient
et médiramentaient les étran;;ers. Son
séjour à Venise avait élé fécond pour
son instruction et surtout pour son
esprit. Il sentait que plus il \errait et
rompaierait, mieux il apprécierait l'u-
tile, le funeste et l'indiflrreiit, mieut
il discernerait cnmnierit lui-même de-
m'a <c romluiie au ihe\et des malade,
et ce qu'il dexrait ou ajouter ou ôler
.lux méthodes allemainlrN. Dans cette
vue il sisila une paitie i!e l'Allemagne,
la France, l'Italie, entendit les théo-
lies aux univerÀÎtcs, examina la prati-
< I ) Vu fait rrinir.lujljt.- qui »r |irr*«ala alors
.1 «..n I l»«rr« >' .«'iir •!•• !• pon-i •\e
,1. j.art dr t.. .r% et d* !...i|r. r
iii..Jilicjlii>ii< , , I 6l tubir « lj iIk-
rur^ir. In |iju«rr maMu-Mvr* Je i'«u<ir»it i|a'il
bjlii'uit tiait iffrct» dri'uit plutieun a)itM~v«
il'iiB ulrVrr (1« mauvjiM itaiarr à Ij j«nil>«.
Tout lr> UMi^rna riaplo^rt ii'a*airnl ainnir «u-
rm.r aim lior:iti"n. I.« malade fe tlriiruiiiu i
cuti»ullrr Ir jeune cbirurKicu. krru eumina t«
mal a«rc :itlrntiun , r( , ne «nrant pji Ij |>fMi-
Itililf de rniKerver Ir tnt luhrr , «e coulriHa de
|irr»cTir- U proiirrlé , la repo». •! de» loiiuui
jtvc dr l'eau Iirde. Uu rrtir, il promit au ma-
ladr de lui fjirr une trcunde TÏtile au b«>ul de
quriqui» juur«; niait de iininbrru»e« occupa-
lioai lui Qreot oublier m pruno ^»e, el le uialade
allriidit Taineinent »on inrdriui |xudant plu-
•ienrt temaine^. moi pour cela diaronlinurr le
Iraiiffiiieiit qui lui avait été ordonaé. tnGn, fa-
tigue du luti|; rrj<oi auquel il était cnndainiié,
il envoya M feiBine demauder à Kern »'il deTjit
eiirure faire te* lotions liéde» et gjrdrr le iit,
p(ii«i]ur «j j>int>e riait presque t t
|;uerie. Kern, se rapprljnl alor* !.. ,1
avait dnniire. «« batd d'dllrr trou\ ir .1
Quel fut >uii i-Ionnriu> lit eu voTai.l lu crrr eu
pleiiM voie de gurruoa ! C« recuirai ioe^pérc
ne fui p*rHn ni jMuir lui . !ij pour la science.
I)_l>_,.
I.TVIII.
KER
497
<|uedan^ le^ liApItaux,et entra en lela-
tion avec di\ers naxants de ces (»a\s.
Il se lendil ensuite à Vienne, aver
troii cents llorins qu'il axait reçu* en
donnant sa démission à llildbui;;hau>
*en ; el, apirs > a\t)ir suivi les ci)ur.s
u*ueU ^17HS IH) , toujours aitic des
recororoantljlions de I.eber nui le mi-
rent à même de sub\enir à ses dépen-
ses , il fut admis an docl«)rat (de chi-
nir^ieV Pi'ti dr temps après, l'archidu-
chessr Mane Anne le nomma, de la
manière la plus (laiteuse, chirurpen de
sa maison; mais bienl(^t il quitta ce
poste pour voler au recours du comte
de I lalzfcld ^ra\ eroent maladeù l'i a>;ue,
qui a\ai( pour lui une \i\e affection et
qui lui avsura une pension via;;ère.
Kern eul la douleur de ne pouvoir sau-
ver ce noble ami ; va réputation nais-
sante, loin d'en souiïni aiiriin échec,
ne fit que |;raiidir de jour en j«Mii . Dès
170.'», il fut ailaché comme chirur-
pen à l'élablissemcnt des sourds-
muets de Vienne. De 17117 à 1805,
il remplit, au l>céc de La>bacli . la
chaire publique de chirurpe et d'ac-
couchement, et plus t.ird il > fit aussi
des leçons sur l'éducation phvsique. Ja-
mais auparavant ce cours n'avait eu le
caraclcre cminemmeiil chirur^iral (|u'il
sut lui donner. Sans né^li;;ei la théorie
palliolo^ique et les principes qui doi-
vent dt)miner les opérai ions, il s'appli-
qua surtout à former des opérateurs
tant en décrivant, en anaKsant les
instruments dans tous leurs dVlails, y
compris leurs modificalions et leurs per-
fectionnements, qu'en démontrant la
manière de s'en servir. Joij;naiit le pré-
cepte à l'exemple, il avait la prestesse
de main, la sûreté de coii(i d'ail d'un
grand opérateur. Il v réunissait une
activité in(atij;ab!c, professant , {guéris-
sant, écrivant en même temps avec la
même facilité. En 17î>S. l'autoiité su-
périeure du pays lui demanda une in-
stmction populaire sur l'inoculation :
32
498 KER
il s'empressa iVen rédiger une qui
est un chef-tVœuvre en ce f!;emc et
qui fut répandue par milliers d'exein-
plaiies. Il voulut ini'me parcourir toute
la Cainiole et la ('arintlile, pour re-
futillir lies reii5ei;:;ncmeiits sur le motie
et les résultats de Tinoculalion dans
ces provinces, en général rebelles à
toute innovation. Si la lucidité, la
promptitude et les succès de Kern
[ilaisaiont à quelques personnes d'élile,
les formes vives, ncltes de son esprit
supérieur froissaient beaucoup de lourds
cerveaux qu'il entreprenait de convain-
cre. Ses confrères en général le goû-
taient peu : on le trouvait trop expédilif,
faisant trop peu sonner les diftlcullés :
on eut é!é c'iarmc de le trouver en
faute, on brodait ses paroles, on lui
prélait (las intentions. Les médecins se
plaignaient de ce qu'il empiétait sur la
médecine, lui racconnnodeur de bras et
de jambes cassés ; et ils criaient à l'usur-
pation. Le racconnnodeur de bras et
de jambes, pour faire cesser leurs cla-
meurs, soutint des thèses et reçut so-
lennellement le docte bonnet (1799).
(^)uatre ans après, toujours visant à
cire des premiers au courant de la
science, il alla à Venise apprendre
de Pajola la cyslolomie que cet ha-
bile praticien venait d'imaginer; puis,
avant de reprendre la roule d'Allema-
gne, il visita les hr-pitaux de Padoue et
de Trieste. Deux ans après ce voyage,
Kern enfin quittait Laybach pour oc-
cuper la chaire de chirurgie et de cli-
nique à l'université de ^Vienne. Ce
choix était le plus heureux peut-être
qu'on pût faire. Il ne manquait pas
«i'élèves à Vienne, mais il y mamjuait
de la méthode et une direction. Kern,
par la vivacité même de ces formes qui
blessaient les liéotiens de la Carniole,
plut à cette effervescente jeunesse, et
prit sur elle un ascendant iunuense, (pii
tourna au profit de l'ordie. Guidés
par un maître passionné pour l'utile cl
KEU
pour le vrai, les jeunes gens s'habi-
tuèrent à mettre de coté les subtilités
oiseuses qui avivent l'esprit de sophis-
me sans rien produire, et plus encore
à ne se laisser ni prendre à l'attrait
d'une innovation qui pose sur une base
fausse , ni imposer par l'antiquité
d'une vieille erreur. Quant aux opé-
rations, elles se présentaient plus nom-
breuses et plus ardues à Vienne. La
rare habileté qu'y déploya le nouveau
professeur fut dès le premier moment
pour beaucoup dans la vénération que lui
témoignèrent ses élèves : sa réputation
devint bientôt européenne ; d'illustres
sociétés étrangères lui ouvrirent leurs
portes. A l'intérieur il ne cessait de pro-
voquer des améliorations. C'est sur sa
proposition que fut fondée la biblîo-
thè(|ue annexée à l'école de clinique ,
bibliothèque qu'il enrichit de plusieurs
centaines de siens volumes. C'est à sa
sollicitation que le baron de Slifft créa
V liistitiU d' opérations chirurgicales,
aux élèves duquel Kern, tant qu'il vé-
cut, prodigua gratuitement les leçons
de théorie et de pratique. De cet éta-
blissement et des cours de l'université
sont sortis des centaines d'opérateurs
remarquables, et peut-être vingt-cinq
professeurs qui tous reconnaissent com-
bien la chirurgie actuelle en Autriche
doit à Kern de simplicité, de prestesse,
de précision, de sûreté, et le regardent
connue un des hommes (pii ont été le
i)his utiles à leurs semblables. Sexa2.é-
naire, il voulut encore laire un voyage
scientifique; et, en 1821-22, on le
vil parcourir rAlIcmagiic , la France
et l'Italie, jusqu'à isaples. Il vécut
encore se[)t ans, et mourut le 1G avril
1829. L'empereur l'avait créé cheva-
lier, et dans la dernière année de sa
vieil fut vice-directeur des écoles mé-
dico-chirurgicales et vétérinaires de
l'université de Vienne. On a vu quelles
îjualilés distinguaient l'esprit de Kern :
son caractère était le même , très*
KKf\
xrai, lii- Icnnf , tf^s-ijft, liiï ..ml
|p m(nsoni;r rllinlii^up, iiurrliant
rn lii^nr ttroitr, dcinjsqu.tiil impitu^a-
lilrmrnt Ir rliniUtariiftitie , loujotirs
«lierclianl le positif, ne comiMciunl
*\f pro;;rci que par la simpliucatiun.
De là \f> noiiiliicux riinrmis (]uM eut
parmi les hotnniei nîoJiocre<. Vourh:i,
quoique docteur, il ne croyait pas à
toutes les proiuewcs Je la métlecine, et
il lui ani\ait souvent Je le Jirc. Il pen-
sait clicfprtail que, sur ^in^l maladies,
îa nature m ^urrit neuf toute seule et
II- le mcJerin. Sa foi en l'art
c . ' ;jil un peu plus forte; mais
là, enroir. il cro>ait que les tio<s quarts
Ju temps la nature fait tout et le pra-
ticien rien. Si, continuellement occupe
par des cours, par sa clientèle et sej
I dations avec les hommes influents ,
Kern n'a pas eu le temps J'écrire beau-
coup , &a plume pourtant n'est pas res-
tée iiiactive. Voici ce qu'on lui doit :
I . Mnuonmihiw pour l'introdui tiun
ilr rinmulotinn m (Àirniole [Y.i'iu-
nerun^ z. KinPiihr., etc.), I^^bach,
179S. C'est l'instruction populaire
dont nousa\ons parlé. II. ^Ipfirl aux
lutLittmts de tu (larniulr pour iud-
mission ^tiiéralr du rua //i.Ij\bacli,
1798. On voit qu'il fut des pre-
miers à proclamer la belle découverte
de Jcnner : il a>ait nume exi^é que
son fJLs tout jeune fût des premiers à
recevoir le vaccin. III. linnuniucs
sur fusugr des hui/is, La\bacli,
1 80iî . 1 V . Propositions fundunien-
tulcs de lu partie marwelle de lu
ninlerine , ibiJ. , 1803. V. .Innu-
It'S de rli/titfur chirurgicale à îè-
I oie supérieure de tienne , Vienne ,
1807-09, 2 vol. VI (en français).
. h'is au.i chirurgiens pour les enga-
ger à adopter une méthode plus
simple, plus naturelle et woins dis-
pendieuse dans le pansement des
bUssés^ Vienne , 1809; 2^ édition ,
IbiJ. , 182G ; trad. en allemand ,
KFR
km
.biJ , ISIO. Vil. Disumrs sur le
mérite et l'imfHtrtiini e de Péducutio/i
p/iysitj'ue, IHII. \ \\\ . De ht ma-
nière de traiter les nududes après
rampututioit , \ irnne , 181 i; lî*"
cJit. , 1H2G , traJ. en ilalim , ibid.,
1820. Cet ouvra;;e, lumineu:>ement
écrit, contient un ensemble de pré-
ceptes, d'applications et de recomman-
dations qui ne peu\ent i-tie liop pré-
sentes à touN ceux qui s'occupent des
.soin^ à donner au\ amputés. IX. lit
murtjues sur lu lithotritie. ou Situ-
i-rlle méthoile de traiUr la pierre
jHtr iM'iule et Le Huy , \ iciine ,
18'i6. \. De remploi du Jer chaud
dans dii*erses maladies , ibid. ,
1 828. XI. Pathologie de la pierre
et de lu tystotomie , chez tun et
r autre sexe , ibid., 18*28. Peu d'ou-
vrantes ont été le frnit d'une expé-
rience plus imposante. Kern avait prati-
qué la cv>totcmie trois cent trente <rpt
fois , et dix nulades seulement a\ aient
succombé aux suites de cette onération.
So!i volume est un trésor de vérités
pratiques, et il sera toujours classique
pour le lithotome , même se ser\ant
des procédas deCixialeou de tout au-
tre qui différera de l'appareil lillioto-
mique. XII. Les sersfires de la cli-
nitpte chirurgicale à Vienne du 18
acril 180.-)/; 182V, Vienne, 1828.
XIII. ()iser\'ations et remarques
du domaine de la chirurgie prati-
(pie , ibid., 1828. XIV. Traité
des lésions de la tète et de la perfo-
ration du ceri'eau , ibid. , 1829.
On y reconnait encore la m.iiii d'un
des mailrcsdela science. XN . Divers
articles àMxsWilmanach impérial de
Cempire it Autriche, et le Discours
iPiUK^erture à fecole supérieure de
J'iemw en 180:>, 182V. XVI. ]\Iu^
nuel de chirurgie, tiré des leçons Je
Kern , publié par R.-F. Hussian ,
son élève , Vienn« , 1831 , ln-8" ,
tom. r'. P— OT
32.
:>oo
KER
KER
KERPEX (George, baron de),
jjoiicral aiitriclncn , né le 26 mars
1741, enlra dès sa jeunesse dnis la
cariiôre di^; armes , et servit d'abord
d.i'.îs rarlillerie. Après avoir fait, sous
]>.-îiidn!i cl le prinrc de Cohourg , la
j;uerrc contre les Turcs, il lut employé
en 179 Va Tarmce du prince de Co-
houv^ contre les Français, et s'y di>-
tinp,ua dans différentes occasions. En
février 1797, il fut élevé au f;rade de
feld-maréclial-lieutenant, et employé à
l'armée d'Italie, où il servit dans le
Tyrol. Pour récompenser son zèle et
son courao;e , l'empereur lui donna
en juillet de la même année le ré^i-
merit de Pele;^rini infanterie , et le
nomma ensuite orand-maître d'artil-
lerie. Le baron de Kerpcn se trouva
jiarmi les f^énéraux faits prisonniers à
LIm en 1805, et comme eux il subit
tontes les humiliations de celte igno-
minieuse capitulation. Après ce mal-
heureux événement, il vécut dans la
retraite, et il y mourut le 26 octo-
bre 18-23. M— D j.
KEUSSEXlînOCK (Hi hman
de), historien allemand, naquit vers
1.')26, d'une faniille originaire du
comté de Lippe qui s'était établie à
Aiunstcr. Il fui témoin des excès et
de la tyrannie exercée par la secte
anabaptiste dans cette ville, cl forcé
avec sa famille et beaucoup d'au-
tres d'émir;rer, par suite du refus
d'un nouveau baptême. Quand les ana-
baptistes eurent été chassés de Muns-
ter , il y revint pour continuer ses étu-
des. Après (ju'il eut dirigé pendant
deux ans l'école de H arum, le chapitre
de la cathédrale de Munster lui con-
lia le redorât du gymnase ou collè^'^e
de celte ville. Le pro;;ramMie des étu-
des de cet établissement, qu'il pid)lia
en l.').")!, annonce un homme très-
capable de diriger l'enseignement.
Ce. qu'on remarque surtout avec sa-
lisfaclioii dans ce plan, intitulé Ha-
tîo sludiorum scholœ monasterien-
si'Sy c'est l'efiort tenté par le recteur
pour faire raisonner chaque semaine
les élèves sur ce qu'ils ont appris , et
porrr établir une sorte d'exauren nni-
tuel. Kerssenbrock employa ses loi-
sirs à écrire en latin l'histoire des trou-
bles causés par les ana!)aptistes pendant
son enfance. 11 lit précéder cet ouvrag;e
d'une description intéressante de la
ville de Munster. En 1573, il en
envoya le manuscrit à Colof;;ne pour le
faire imprimer ; mais les magistrats
de Munster ayant appris que l'his-
torien parlait avec peu de ménage-
ment de la conduite de quelques fa-
milles pendant les troubles, et contes-
tait le titre de noblesse à une classe de
bourgeois qui prétendait avoir cer-
tains privilèges , lui enjoignirent de
soumettre le manuscrit à la cen-
sure du conseil. Kerssenbrock obéit,
mais il avait eu soin de faire faire des
copies de son livre par les éroliei's. En
1575 on voulut le forcer de changer
plusieurs passages de son histoire, et,
sur son relus, il fut mis en prison,
îlclàché ensuite sous cautior», mais in-
sulté par les bour-geois privilégiés, et
menacé sans cesse, il profita de la sus-
pension des cours du collège , pen-
dant une épidémie, pour aller pren-
dre les fonctions de recteur au collège
de Padcrboiii. Toutefois il ne put
quitter IMrrnster qu'après avoir payé
une amende de deux cents rixdales,
à laquelle il avait élé condamné.
Son ouvrage intitulé H/'slorla Juro-
ris aiwuiiplistici est resté manu-
scrit; il eu existe plusieurs copies
dans les bibliothèques de la Westpha-
lie. Deux siècles après, on en a publié
une traduction allemande , in- V\
]\L r)aston a fait du manuscrit latin un
court extrait en fiançais, et l'a publié
sous le titre de Jean Bockclson, ou
Ln roi dé: Munster^ fragment histori-
que, Paris et iîesançon, 1824, in-8".
(^)uniqiic riiljrlië de quelque \>ir-
lialilc, cet ouuaj^c r>l Irrs- estimé
comme ëtini le récit le plus détaillé ,
lait par un témoin omlaire , de ce qui
s'ctait yi'^sé à .Mui):lrr peiidanl (|ue
\rs aiiabaptistfN él.iTiit Us mailrrN de
la \illr. l II l.iit.tln^us rpi'si ufHirum
inunusterirnsluni, rrdi^épar Kcrs^en-
I lorL, eit également resté manuscrit,
aiiiM que son apprl au public, relali-
\rnieiita la conduite injuste des ma;;i^-
ti.ils de Munster en%e:s lui : (ùtu-
stirum ntfttwitatis Mu g. Ilrrm. a
Krrssrn/tnnk sutcinrftt narrutio ,
t uni eurutudrm vera rt sotiilu con-
tuliilionr , etc. Il composa cette
.ipolo«;ie i Weil , où il s'était re-
tiré après avoir quitté Padrrhorn.
Dans cette derniore \ille il a>ait fait
paraître un (Àituiuf^us rfn'sro/uirum
l*inIrrf>ornrnsium. Non content de
r^polo^ie qu'il avait rédigée, son indi-
{;nation contre le corps municipal de
Munster s'exhala en saliies qui ral-
lumèrent la fureur des conseillers, et
il fallut toute la protection du ma-
^i>trat de NN'erl pour le mettre à i'a-
l»ri dr nouvelles pcivérulions. Kers^^en-
luocL mourut dans le lieu desaietraite;
(•n ignore en quelle annce. 1^ — (;.
IvI:KVKLK(;AN vAit.istin-
lii f\N Mu>-Fn\>n»is LKGovnRK nr\
né en Itrela^ncle 17 sept. 17 \S, d'une
famille très-lionorable de la lioui^^eru-
sie, fut nommé fort jeune sénéchal du
présidial de Ouimper , et , malgré les
avanta<;es de cette place , manifesta
dès-lors tous les sentiments de jalou-
sie et d'inimitié qui animaient dans
ce temps-là contre le clerf;é et la
noblesse la plupart des hommes de
^on ordre. Kn 17SS. il fit imprimer,
sous le titre de llrjlc.xions il un plii-
losophe breton, un panijth'.et très-vio-
lent dans lequel on remarquait le pas-
saj;e suivant : •• I.a noblesse cl le cler-
« f;é, ces deux ordres rapaccs, se sont
•< approprié tous les avaîit3£;es de la
KLi;
:>oi
« société, se sont emparés de toute:»
« les issues qui conduisent aux lion-
m neurs, aux di-tinct:ons; ont fait ta-
•« rir |»our nous toutes les sourceN de
«« ^ai^ance et de la prospérité. Ou
M nous a vexés, marrré> à peu pi es
•« comme de> bétei de somme... •• Cet
écrit , foft audacieux pour l'époque,
fit une grande srnsationcn Iiiela;;ne, et
l'année Mutante l'auteur fut rludrputé
de la senechausNce de (^>uinip«'r, aux
étals ;;énérauk , où il se rangea dès le
commencement parmi les plus ardents
ré\olulionnaire>. Il fit paitie de ce
fameux comité breton que les dépu-
té.* du liers-etat de lirela;;ne lor-
mèrciit à Versailles , et qui fut le
n(i>au delà fameuse société des jaco-
bins. Kervelé;;aii parla peu à la tribun?
de l'assemblée nationale, où il fut un des
membres du comilr chargé de l'aliéna-
tion des domaines nationaux, qui ne
comprenaient alois que les biens ec-
clésiastiques. Il eut plusieurs alterca-
tions avec ceux de ses collègues qui
ne professaient pxs les mêmes opi-
nions que lui , entre autres avec le
vicomte de Mirabeau, rnntie b quel il
se battit au pistolet, et qu'il blessa lé-
gèrement. Mais, après le vo\aj;c de
Varennes, il chanf;ea enlièrcincnt de
svstème, et ne montra pas moins d'é-
nergie dans le parti constitutionnel,
qui fut renversé par la révolution du
10 août, qu'il en avait d'abord mon-
tré parmi les plus ardents nnvateur.s.
liéôlu par le département du Finistère
à la Convention nationale en 1702, il
V vota la détention de Louis XVI
et son bannissement à la paix. At-
taché au parti de la Gironde , il dé-
nonça, dès lo> premières séances, la
fcîîilic incendiaire de Maral ; devint ,
ensuite, membre de la commission des
dou7.c, opposée à la commune de Pa-
ris, et fut décrète d'arrestation le 31
mai 1793. S'élant évadé, il fut mis
hors la loi , et vint à bout de se
5oi
KET
KET
soustraire aux poursuites, en se cachant
dans son déj)aiMemcnt, où incmo. il
|trocina un asile à quelques-uns de. ses
compagnons d'infortune, qui, oblij^és
depuis de s'éloif^ner, furent arrcte's
jirès de Bordeaux. Kervelégan rentra
dans le sein de la Convention, après la
chute de la Mou/agne, devint membre
d'j comité de sûreté générale, montra
le plus giand courage lors de Tinsur-
reclion du l^^praiiial (20 mai 1795),
où rassemblée eut à lutter contre la
populace des faubourgs révoltés, et y
fut même blessé. 11 passa ensuite au
conseil des Anciens dont il fut secré-
taire. Il en sortit en 1798, fut réélu
en mars 1799 à celui des Cinq-cents,
puis entra au corps législatif, dont il fit
partie pendant toute la durée du gou-
vernement de Bonaparte , et pendant
la première année de la restauration
où cette assemblée prit le nom de
chambre des députés. A l'époque du
i20 mars 1815, Kervelégan se retira
dans son pays natal à Quimper, où il est
mort le '24'fév. 1825. B— u.
KETEL (Puchard), bon lati-
niste, n'est connu que comme l'édi-
teur du recueil dont on va parler. Né
vers 1670, peut-être en Hollande, il
était en 1700 recteur du gymnase
de (iouda. Ce fut cette même année ou
h suivante qu'il mit au jour son re-
cueil des grammaiiiens latins ; mais
cette première édition et la seconde qui
parut peu de temps après sont deve-
nues si rares que Chr. Sax n'en avait
pas pu découvrir un seul exemplaire
dans les bibliothèques d'Allemagne
(Voy. Onumdsticun, VI, annlcrta,
6li). Le catalogue de la bibliothèque
du roi ne cite que la troisième édi-
tion, dont voici le titre : De clcgan-
tiori lalinitate comparanda scripfo-
res sr.lecti, Amsterdam, 1713, in-V%
Atwx part. Ce recueil qui est trcs-es-
timé contient : Card. IIadriani De,
sermone laiino etvenalio. — Gifanii
Ofjseronfionrs singuïai'cs inlinguam
liitinam. — SciOPii Obscrva/ioncs
ling. lat. — P. Vavassoris Obser-
vationes de vi et usu verburum f/uo-
rumdani latinor. , et De ludicra die-
tione. En tête de la première partie
est une bonne préface de l'éditeur,
intitulée : De ratione imilandi opti-
mo^: ling. lat. scriptores. AV — s.
KETT (Henri), professeur et
homme de lettres , né à Norv^'ich en
1761 , passa des écoles de cette ville au
collège de la Trinité dans l'université
d'Oxford, et s'y fit remarquer de AVar-
ton, alors doven de l'établissement.
Se vouant à la carrière professorale,
il prit le grade de maître- ès-arts, de-
vint membre du corps enseignant ,
étudia profondément la théologie et
l'histoire ecclésiastique, et au milieu de
ces travaux trouva le temps de publier
non seulement quelques compilations,
mais encore des ouvrages importants,
qui eurent un vrai succès, et de coo-
pérer à la rédaction du Gentlemon's
magazine et d'un autre recueil pério-
dique, l'O//^ ^oJr/V/«, à la tête du-
quel étaient Mcnro et Horne. En
1793 il se mit sur les rangs pour la
chaire de poésie, mais Hurdis l'emporta
sur lui. En 1808 il résigna ses fonc-
tions dans lesquelles il eut Ingram pour
successeur, et partagea son temps entre
le séjour du collège d'Oxford, et les bé-
néfices qu'il obtint à diverses reprises.
Comme beaucoup de ses collègues, il
était dans les ordres, et il avait fini par
avoir, indépendamment d'un titre de
prédicateur du roià WhitehalJ, la cure
d'Hvlceham (Lincoln), laquelle n'é-
tait guère qu'une sinécure. Il n'eût
tenu qu'à lui d'y joindre d'autres bé-
néfices à son choix, parmi ceux dont
son collège avait la jouissance; mais il
laissa toujours de plus jeunes les ob-
tenir. Il le pouvait. Sa fortune per-
sonnelle , celle de la femme qu'il
épousa un peu tard (en 1823), se mon-
KCT
Uif'nt à |>lii|> (Je^ixrrnl iiiillr Gaiir^.
Il fl.iil un peu moins in«rn>iblr à h
:;l(»Mr d*é\it |»rr>i«lrtil liii co!lr-r : mnls
riru\ fois va fAiidiiLiturc à ce lilrc
( rhoua. Sa mori fut I»rn5qiie : il ite
crowit fort liMH nagrur; en \isiferhfz
lin de ses amis à Slanwell, nprès avdir
aiment et copiensement drjcim«? , il
"«'axisa dr vouloir prendre un bain
r;nid; probablement une crampe le
aisit, on ne retrouva que ses babils
v.T le riva;;e [U) juin l8'i.')V — Le»
• livrâmes de Kett sont : I. l/Ht's-
I !rr intrrf/rrtr tirs f)rophrties . ou
('oup (firil sur 1rs prophrtirs dr la
llifilr rt trur arruntplissrmrnt , etc. ,
()xU):d, 17»m IM», 3 vol. in t-», plu-
-^eurs fois réimprima depuis en 2 \ol.
iii-H". Cet ouvrage, écrit d'un st^le
Nimple et populaire, est un des meil-
leurs qu'ait inspirés un sujet si ricbe
ri si Tappant. KeU \ montre beau-
coyp de sa\oir, et, ce qui vaut mieux
encore, beaucoup de sa;:acilé à rap-
procher les oèncnierits dr la prédic-
tion , à mettre en relief leur carac-
tère inconnu, à y découNcir dr$ cir-
roiisiances et îles nuances peu saisies
aupara\ant. Tout s'encbaine avec mé-
thode, avec aisance; peu ou point de
controverse , mais l'art avec lequel les
faits sont tantôt fjroupés, tantôt éche-
lonnés, tient lieu de discussion, et l'on
peut dire qu'il v a démuiisttation sans
preuve. I/ensemhIe peut cire lu avec
pl.ii>ir, même par des lecteurs superfi-
ciels, et les hommes plus sérieux y
puiseront encore des choses utiles.
II. I''Irmrnts ^rnrrnux t/rs cori-
ndisstinces, ou Inlnnlurtion aux //-
crrs utilrs (liiTfi 1rs hninrhrs prin-
I ipalrs de la littrraturr rt drs arts ,
ISO'2, 2 vol. in-8 \ auxquels nous
joindrons les Additions auv rlr-
nwnts grnrraur drs ronnaissanrrSy
lS()-2, in-8". fji netteté, l'exactitude,
la conciMon élégante sont les (grands
racrilcs de ce manuel, destine spéciale-
KET
?o3
mentaux jt - de runi\ersité.
Outre lesex; - principes et \n
résumés, on v trouve une partie bt
bl>o;;rapbi(]ue fort bien f:«ile et qui
indique aux lecteurs 1rs litres on il.
doivent puiser. Tes l'.lrmrnts ont
eo aassi plusieurs éditions. III. Im
loi^iqur rrndtir aisrr, ou /W stif-
I i::t tr dr la manirrr dr raisonnrr
(f Iristufr , IStm, in li. K.II ,
cette fois, avait usé un peu trop de
sa méthode expciblive : on peut le
voir aux inexactitudes, aux laruiirs, à
la lé'N-reté des appréciations. ïj criti
que ne se fit pas faute de relever ces dé
fauts ; il eut le bon esprit non seulement
de ne pas s'en f.irlier, ^r ne pas e^sat rr
de polémique, mais encore de retirer
tout doucement le plus qu'il put d'exem-
plaires de la circulation. IV'. Parsîrs
dr jrunrssr, ITUIÎ. On ne peut louer
tiaus res Porsirs qu'une facilité dont
l'auteur a quelquefois abusé, et qu'il a
souvent portée jusque dans la morale.
Aussi eut-il regret de ces péchéi de
jeunr-se, et mit il à les faire di«;pa-
raitre une activité qui en a rendu les
exemplaires fort rares. Quant à la va-
leur poétique de l'œuvre, nous nous en
tenons au ju;;ement deréj»i;iramnuti>tc
(Th. Warton) qui dit à peu près ;
V«ii c» urt . fhliqne {irrCidc !
Pt in dir.'» aT*c r*i»on
i}99 »i Krtl II Vît p4% us Ovid^,
Du muios, ma foi, c'c*t un tNjton.
V. Voyagr aux lars du (lundtrr-
land rt du Jfrstmorr/tintl , 1708
(dans le Tiniristr anglais licMavor).
Ce voyage ne contient j;uèrc qu'une
quarantaine de pa^es. N I. Srrntons
prêches à O.x for d, 1701, in-S". D'a-
près un lej;s fait par Ibmpton, 1:20 liv.
sunt assij^nées chaque année à un ec-
clésiastique appartenant à l'université
pour T prononcer huit discours sur- des
matières reli;;ieusc«:. Ceux de Rett
firent quelque sensation dans le temps,
parce qu'il débuta par y juclificr le
io4
KET
caractèie des Pères de l'Eglise comme
historiens, contre les imputations de
Gibbon , de Mlddleton, de Prieslley.
\IL Emilie, 1809 , 3 vol. in-12 ;
2^ édition, très-auo;mentce, 1812. —
Mil. Une traduction du Génie du
christianisme , de Chateaubriand ,
sous le titre de Beiiulrs du diristia-
nismc aoec préface et notes ^ 1812,3
vol. in-8". i.c titre ne porte point le
nom du traduciciir, mais la notoriété
publique a toujours altribué cette ver-
sion à Kett. IX. Mélanges, lesquels
liC sonlautre chose qu'une réimpression
des articles en prose donnés vers 1787 à
voila podrida. Ces lé^^crs morceaux
unissent à la finesse des observa-
tions et au bon sens, beaucoup de sel
et d'humeur. X. LesJIciirs de fesprit,
ou Recueil de bons mots anciens et
modernes, 1814, 2 vol. in-12, Kett
donna aussi une nouvelle édition des
Beautés de la poésie anglaise de
AVadlew, 1810, 2 vol. in-12, avec
ujie notice sur l'auteur. Il préparait une
I eimprcssion des Proocrhes grecs de
I.ubin avec traduction anglaise, et l'on
en a trouvé la co^ue ti ès-avancée dans
i>cs manuscrits. Enfin, il a laissé beau-
coup de sermons manuscrits aussi, avec
prurc au docteur Mavor son ami, de
dt'cidcr s'ils devaient ou non voir la lu-
mière. Il est probable qu'ils ne la ver-
ront pas.
()T.
KEI TILHUADSSOi\
(Matts ou Matthias), administra-
teur du rojaumc de Suède , parvint
par son seul mérite à cette dif;nlté
cminentc. Tous les historiens s'ac-
cordent à dire qu'il était d'une fa-
mille absolument Inconnue. Dès sa
jeunesse il se iiistin[;iia par sa bravoure
dans les combats, notamment contre
iesUussesqui, en 1291, avaient envahi
la Finlande, et qui, en 1293, furent
repoussés jusque dans l'In^^rie. Son
couraf^e qui l'avait mis en évidence, et
SCS autres qualités brillantes et solides
KET
lui valurent d'être admis dans la fami-
liarité des ducs Eric et Valdemar,
frères du roi Birger [Voy. Birger,
IV, 514). Ils le considéraient com-
me le plus vaillant et le plus avisé
des hommes de leur cour. Quand ils
se soulevèrent contre ce monarque, en
1304, Keltilmundsson leur rendit des
services signalés , et leur procura des
avanîao^es dans plusieurs circonstances
importantes. Birger, faible et ingrat,
a^^ant sacrifié Torkcl Knutsson ,
son tuteur , ses frères ne tardèrent
pas à devenir plus puissants que
lui, et s'emparèrent de plusieurs villes
fortes, entre autres de Stockholm qui
fut prise par Kettllmundsson. Après
la mort de ses frères causée par son
infâme trahison, en 1317, Birger,
devenu l'objet de la haine générale, fut
obligé de fuir devant l'armée des mé-
contents : Kettllmundsson la comman-
dait; bientôt il convoqua une assem-
blée des grands à Skara, s'y fil décla-
jer administrateur du royaume, et prit
successivement Nykœping, Stegebnrg
et d'autres places ; ensuite il fondit
la Se
anic
et forç.-]
le roi de
Danemark à conclure une trêve. Il
réunit, en 1319, une dicte où, con-
trairement à l'usage , les habitants
de la campagne et les bourgeois des
villes furent appelés , et parurent
pour la première fols en qualité d'é-
tals du royaume. La diète se tint
dans le champ de Mora près d'Upsal.
Un chevalier parla le premier pour re-
montrer à l'assemblée la nécessité de
choisir un nouveau roi, les crimes et
l'ineptie de Birger ayant occasionne
tant d'événements désastreux : puis
Kettllmundsson s'avança, portant dans
ses bias Magnus, fils du duc Eric, et
prononça un discours si énergique et
si touchant que chacun s'empressa de
prêter serment de fidélité et d'obéis-
sance au jeune prince, à peine âgé de
trois ans. La régence fut exercée par
KLi
KL\
un loiiMril composé de mx |nrl.«|. ri
de \iii{;l-neuf ^n^iifiir.-» laïques. <^)ticl-
(|ue ieni|>s au(*arj\aiit , un e\rquc
el su c);e\alit*rs cUicnt partis pour
OpNio, alors capitale de la Nor\è^e,
ahii de coineiiir a\rr le conseil su-
pirme de ce pa>s de la marche à »ui-
\ie pour le ^ou\r[nement des deux
io>.iuine>, rcunis sous une mfmc main.
Oiii^iioie quels niutir> dclei niinrtent
!\r!tilmuri(lN()n à se demedre de la tu-
irlic du jeune loi, el de la cliar>;r d'ad-
miiii>lralrur, qui fut occuper par Knut
Jol:.ins5on. Nranmoins il ronser\a la
pliLs ^ranûe Inilueuce dans les affaires,
ri fa rendre de sa;;es ordonnances.
II a^randil le teiritoire de la Surde en
> rriMPssanl la Scanie, la lilelinjjie el
Ir Ilalland méridional, qui en axaient
»tf lon{;lcmps srpaiés. Il rclablil la
lianquillilc >ur les fronllères par des
campa;;nes l»eureu>es contre les I)i-
nois, les Uu>NrN, el Canut , duc du
Ilnlland replcnlnonal. F.niin il mit un
ffcin à Taxidité dc> >ille> ar-^caliques
qui allumaient des pri\ilr;;cs dont leur
romineicc jouiNsail en Suède et en
Nor\c^e. \ sa mort , airi\éc en
i'.VM, !\Ia(;nus qui, raiinée précé-
dente , axail atteint sa majorité prit
lf<i inies du gouvernement el les tint
peu lialiilemeiit ( f oy. M.MjNLS ,
\\VÎ, 1V3}. KetlilnanuKson fut
icdc\.«l'lc de >ei premiers sucres daii>
la f;ueric à sa force corporelle, qui
riait p(()di^icu>c, et dont il abu^a quel-
quefois. Les liistoricns de .«^on pa\s,
tout en rendant justice à son acti-
\ité, à sa prudence, mêlée de har-
diesse, lui reprochent son manque de
f;énciojité , son ingratitude en\eis
quelques-uns de ses Lietifaileuis , et
son peu de préxovance dans les con-
cessions qu'il fit au clergé. E — s.
KKVSLER (Ji-an-Ckorges) ,
antiqii.iir, naquit en 1(>89 à Tliur-
naw dan> rë\cché de lîamherj;. Ayant
achevé .<es éludes, il visita la Hollande
el l*An;;leterre pour perfectionner ses
connaivsanrrs. Pendant son séjour à
Londre» il fut admis a la société i o^ale,
aprè^ la communication d'un mémoire
sur la dce.NNp .\r/mlanni \tfm!tfur,
divinité des anciens (iermains qui pré-
sidait à la mer. De retour en Aiiema-
pne, il N'rtabiit a /rll dall^ le Hano-
vre, et se chargea <Ie l'eiiiicatiftii de>
retits fils du comte de lin n toil, dont
un a rendu drpiiis de si ;;rjnd.s service»
au DanrinarL. Il condiii>il ^es élrvr^ à
raradrmie de Tuiilii^iie, et en ITlîl)
les ac rompauna , connne ;;ouvcrneur,
dar.s les principales cours de {'Kuiopc.
Avant eu l'occasion de faire un ^rand
nombre de remarques échapjiees à »es
devanciers, il employa les dernières
années de sa vie à rédiger ni vo>a"es,
et mourut au château de Iicinslori en
17i3. Ses principaux ou\ra;;es sont :
I. tntiifuitiilrs sricilœ scpteiitrio-
luilrs et celtifit. Ilanovie, 17*J0,
inS", fi^., rare. Ce volume conlient
six di.vsertalions : sur le monumnit du
comté de Salisburv connu sous le nom
de Stuiit'-IIiiigr^ que l'auteur croit
être un tombeau ; .sur la déesse \rhu-
irn ^ avec le plan d'une m^tholnpc
des anciens Germains; sur le gui des
Druides; sur la défense faite aux («ei-
mains de man-;er de la chair ih che-
val ; sur leurs fêtes religieuses , et les
libations qu'ils faisaient dans leurs sa-
criGces el dans leurs festins; sur les
driiidesscs cl la farultc qu'on leur at-
tribuait de prédire l'avenir ; cl enfin
la description d'une urne sépulcrale
découverte en 171Î) à Neilin^,dans
la Basse-Marche. II. Ncuesfr lui
sf, etc., Nouveau.x vovnj;esen Allf'ma-
{^nesen liohémc.en Hont;rie, en Suisse,
en Italie, etc., Hanovre, t7iO-Vl,2
vol. in-i''. Après la mort de Kcyslcr,
ses Voyages f: e it réimprimés avec
des additions deCodcfr. Schulz, ibld.,
1751 ; et il en a paru une troisième
édition en 1776, 2 vol. in-V". Ils ont
5o6
KHE
KHE
cic Uadiiits eu hollandais, Amsterdam,
IT.'î.'î, ei en ant;lais, Londres, 1750-
57, ï vol. in-4". Les critiques ne s'ac-
cordent pas sur Iç mérite île Ke\sler
comme voyageur. J.-3Iath. Gesner
(ad isagogen) en porte un juf^ernent
très-lavorable ; mais Gérard llcnrkcns
( ^ oiahil. lib. Ici 11)^ en lui accordant
uwt Jurande dilio;ence, se plaint qu'elle
ne lût pas diriiiée par le bon sens
[diligcntia siolida] , et le cjlèbre
^yinckelmann dit que les Voyages de
Iveysler, pour ce qui ref:;arde les ou-
vrages de l'art, soit de Kome, soit des
autres villes de l'Italie, ne méritent
pas d'être cités ; car il n'a fait
que copier les plus mauvais livres en
ce genre ( préface de V Histoire de
/Vvr/, trad. de Ja;isen). W — s.
KIIELL (le P. Joseph), savant
numismate, naquit en 1714, à Lintz,
dans la Haute-Autriche. Avant em-
brassé la règle de Saint-Ignace, il pro-
fessa successivement dans divers collè-
ges de la société, l'hébreu, la philoso-
phie, l'histoire et la critique des textes
sacrés. Ses talents ne pouvaient man-
quer de le Caire connaître. Nommé
conservateur de la bibliothèque Garclli
{Voy. ce nom, XVI, 468), et du ca-
binet de médailles de l'académie thé-
résienne, il mourut à Vienne, le 4
nov, 1772. Outre une édition de l'ou-
vrage de Frœlich : deFnmilia Vabal-
hithi, nuniis ilîuslruta, précédée de
V Eloge de l'auteur [Voy. Frof.lich,
XVI , 98), on a du 1>. Khell: I.
AucloriUis iitriusqite lihri Macltii-
baarum canonico-hisforica ndju/a ;
et Froelicliianî annales asserli ,
Vienne, 1749, in-4" (1). II. Physira
ex recentioriini ohseroationihiis ,
ibid., 1752-53, 2 vol. in-4". C'est
le cours qu'il avait composé pour ses
élèves de philosophie. 111. Kcloga
observa /ionum in nooi TcstaineiUi
( I ) Ot oavra^^e anonyme n'a poinl itqçoqmi
de Ddrbirr.
libris , ibid., 1756, in-8°. Cet ou-
vrage est très-estimé. W . De cpocha
historiœ Vwth^ ibid., in-12. V. Epis-
iohx. dnœ de iotidein munis œrris
numopliYlacii Haoeriani , ibid. ,
1761, in-4°. Dans la seconde de sis
lettres, l'auteur expose ses raisons de
suspecter la médaille de Vespasia
Folla, du cabinet de Havern. Celle
opinion trouva des contradicteurs. Jo-
seph Monsberger défendit l'aulhcnli-
cité de cette médaille dans une disser-
tation à laquelle le V. Khell ne jugea
pas à propos de répondre. VI. J)c
numismate Angusli uureo jornux.
maximœ ex ruderibus Hcrcuhnti
eruto libellus, in-4" , réimprimé dans
les Arta erudit.^ 1763, p. 591-616.
Le médaillon qui fait le sujet de celle
curieuse dissertation est celui qui a été
gravé au frontispice du tome 11 des
Peintures trouvées à Herculanum.
VIL La traduction latine du Tcsoro
britannico de Haym, Vienne, 1762-
65, 2 vol. in-4", enrichie des notes
qui la rendent bien supérieure à l'ori-
ginal (Voy. Hay.m, XIX, 523).
Vni. Un bon supplément d'après les
médailles du cabinet thérésien, à l'ou-
vrage de Vaillant: jS^umismata iiii-
perator. rom anorum ,^ \cnney 1767,
in-4°. Ce volume n'est pas comnnin
en France [Voy. Vaillant, XLVII,
255). VY— s.
KIÏÉRASKOFF (Michel-
Matskiimtcii de) , poète et littéra-
teur russe, ne le 25 octobre 1733,
était issu d'une famille noble de Vala-
chie, qui vint s'établir en Riissie sous
le règne de Pierre-le-Grand. Son père,
ofGcier dans le régiment des chevaliers-
gardes , le destinant à l'élat mili-
taire, le plaça dans le corps des cadets.
A sa sortie , en 1751 , il reçut le brevet
de lieutenant, et pritrang dans l'armée ;
mais , plus désireux de cueillir des
lauriers sur le Parnasse que sur les
champs de bataille, il abandonna bien-
lAl la profo^inn dw aroin pour celle
•'• '^i'> succrs tljiit ceU"? inni-
^ 0 fuèirtit rallciilion. \«1-
lOf..» i'utiitrrMlr Je ^Io^fotl^lc^ sarrr.i
liou (IKO:)), il m (!c\iut plus t.inl
\f curjU'ur. Mcinhrc de racadéinle iin
pcriale dcibcilcs-lellreiel de |ilusieiirs
autres coropa»nie« savantes, il fui en-
core nomme conseiller de cour et vice-
prisulent du collf;;e des mines; enfin
il fut di'foré de* ordres de Saint -Via-
diiiiir et de Sainte-Anne. KhcrajlnfT
mourut le 27 sept. 1S07. Krnule
des Loroonosoiï et des SoumoiolufT
(/o). ces noms, \\IV, GGO, et
XI.III, 18i\ il lient un ran; distin-
{;ué auprès d'eux. I/adrairation qu'il
a excitée n'a pas été ciiconscrite
dan-, .son pa>$; les étran;;ers , entre
autres l^\es<]ue {ifisloirr tir liussir^
lom. V), lui ont donné de justes clo-
;;e4. Chez lui la rectitude du lanj;af;c
n'en affaiblit ni l'élévation, ni l'enjouv*-
inent. I/epopée, le drame, la poésie
l>rique, la satire, le roman, la chanson
même, exercèrent tour à tour sa verve,
et «lans ces cornpo^ition> diverses il sut
\arier son st>|e selon rex:;;ence des
sujets. On a de Miéraskoff: I. Des
poèmes, dont plusieurs sont consacrés
à célébrer la gloire de la Russie : la
lltilaillf (Ir Tschrsmr, lu RussiaJe,
.\ih'goro(l tli'lL'réf , qu'on regarde
comme un chef-d'œuvre ; ri'Lilité tirs
Irftres, lu Burharimlr^ Catlmus rt
htirnwnir,t{c. II. Des Ira^éilies re-
présentées avec succès sur diiïérenis
théâtres, et parmi lesquelles nous cite-
rons : lu Hrli'girusr vrnltirnnr , Pla-
turnr, Murfrsiu rt Trleslra, liori'i-
lue ; une comédie hôroujue en m\
ncte, intitulée; /".-///i/-*-. III. Des fa-
bles, en deux volumes. IV. \)ts odes,
dcsépltres, idylles, élé;;ies , épic;ram-
raes, etc., et une héroïde imitée d'O-
vide : Ariadne rt Tlièsre. V. Des
lettres critiques et satiriques en vers et
en prose, dont quelques-unes furent
MA
5o7
ioiéréfs dans l^s journaux lilléraiies
de 17f»0à ITtiV. VI. Suimi r»m-
ftilius, innun moral, où l'auteur met
dans la botirlir de la n)mphe K;;érie
de hauts en^n;nemenls sur la lé^.bla-
tion et le ;;ou\erneuient des peuples.
(let ouvrage est , comme celui de
KIorian , une imitai ion du 'IVlrniw
Îue , car KhérasLoff était très-versé
ans la littérature française, et faisait
surtout du chef-d'œuvre de Fénrlon
une lecture assidue; mais il n'osa ja-
mais en entreprendre la traduction.—
K I! t n \ sK« ik K K VJiuihrth - 1 assilirx*'
n i-\ervnt'Jf , M'"* de', épotse du
précèdent, née le 9 noNembie 17V7,
f'il marii-e l'^ort jeune, et parla;;ea le :i)\û.
de son mari pour la poe>ie. Outre un
poème sur le Drsustrr tle LisUmne,
on a de cette dame des odes ana-
créontiques, des héi nVdes, des é^^loi'ues,
desépitres.des éléj;ies. IMusieurs de ses
rtroductions parurent dans les journaux
ittéraires de Moscou, et lui \aluient
d'honorables suffrages. I^ célèbre Sou-
murolofflui dédia une de ses alléjjoi ies,
et lui adressa une ode dans laquelle il
f»rodi^ue les encouragements et les
ouan^es à celte muse moscovite. On
a comparé M""^ de KhérasLoff à la
comtesse de la Snzc pour l'esprit, le
charme de la con>ersation et l'elé^ance
des vers ; mais elle était loin de lui
ressembler sous d'autres rapports, l^
culture i\ts. lettres ne lui fil jamais né-
j;ri;;er le soin de ses affaires domesti-
ques ; et l'affection qu'elle portait à son
mari lui en rendit la perte d'autant
plus douloureu e. Elle lui survécut peu
de temps, et mourut eojan\ier 1809.
L'empereur .Mexandre à son avène-
ment au troue l'avait décorée de l'ordre
de Saiîite-Catherinc. '/■>■
K'IA-KII1\(; est le titre ho-
norifique en chinois, ou, en mandchou,
Sàiichoungu Fengrhen ( suprême
félicite), donné aux années du rc^ne
du dernier empereur de la Cfiine, et
30b
Klà
sous lequel ce prince a élc connu en
Europe. Les Cliinois ne connaissent
pas le nom de leur souverain tant qu'il
est vivant ; ce n'est qu'après sa mort
que, soumis à un jugement public, il
reçoit un tilre plus ou moins lionorable,
suivant qu'il a réj^né avec plus ou
moins de vertus, de talents, de f;loire
cl de bonheur. Cinquième empeieur de
la dynastie réo;nante Tuï-tsing (la très-
pure ) , d'origine mandchoue, Kia-
Khinf;, né en 1759, était le dix-
septième fds du célèbre Rhian-Loung
[f^oy. ce nom, XXII, 367), qui abdi-
qua en sa faveur, le 8 février 1796. Il
monta sur le trône à l'âge de 37 ans, et
continua pendant trois ans à recevoir
les instructions de son père. Il avait
alors trois frères vivants, dont deux
plus âgés et l'autre plus jeune que lui.
Le nouvel empereur abusait des liqueurs
fortes, et, dans son état d'ivresse pres-
que continuel, il commit des actes fré-
quents d'injustice et de violence, qui
furent sinon la cause, du moins le pré-
texte des troubles qui agitèrent son
règne. Ceux qui éclatèrent dès la pre-
mière année paraissaient avoir pour
but un changement de dynastie. La
secte des Pe-li séduisit et bouleversa
quatre [irovinces. Ria-Khing, à la
nouvelle que ses troupes avaient été
battues, avala du poison, dans un accès
de désespoir, et serait mort s'il n'eût
été promptcment secouru. Déjà on avait
songé à prier son père de reprendre les
rênes du gouvernement. Cène fut qu'a-
près huit ans de guerres cruelles que les
généraux de Ria-Kbing parvinrent à
étouffer le feu de la révolte qui s'était
manifesté dans le midi et dans le nord
de la Chine. En 1800, l'empereur
disgracia et fit arrêter le premier mi-
nistre de son prédécesseur, comme
accusé d'avoir divulgué les secrets de
l'état, intercepté et détruit des dépê-
ches officielles, relatives aux opéra-
tions militaires, soustrait et falsifié des
KlA
décrets impériaux, toléré la mauvaise
administration de quelques mandarins;
encouragé la paresse, le vol et la men-
dicité. A ces graves accusations se
joignaient d'autres griefs qui auraient
fort peu d'importance en Europe ,
comme d'éfrc entré à cheval dans le
palais de l'empereur par la porte à
gauche réservée au souverain ; d'avoir
employé pour ses appartements l'ar-
chitecture et les matériaux spéciale-
ment affectés aux demeures impériales;
enfin d'avoir possédé deux cents col-
liers de perles, nombre excédant ceux
de l'empereur. Ses biens confisqués
montèrent à plus de vingt-cinq millions.
Les troubles continuèrent plusieurs
années dansl'intérieur, et les deux frères
aînés de l'empereur, soupçonnés de les
favoriser, furent privés juridiquement
de leurs dignités et de leurs biens. Une
escadre anglaise ayant débarqué quinze
cents hommes à Macao, le 21 sept.
1808, sous prétexte de s'y opposer à
une descente des Français , malgré
les protestations des Chinois et des Por-
tugais, l'empereur Indigné fit des pré-
paratifs de guerre et publia des éilits
qui déterminèrent l'amiral anglais à
rembarquer ses troupes. Trois mois
après il destitua le vice-roi de Canton
et quelques mandarins pour avoir
manqué d'énergie dans cette occasion.
Sans interrompre ses relations com-
merciales avec les Anglais, il dé.'^cndit
à leurs vaisseaux de remonter la rivière
de Canton. Les ravages commis, en
1809, dans les mers de la Chine par
les pirates des îles des Larrons, et l'im-
possibilité de les réprimer, amenèrent
un rapprochement entre les deux gou-
vernements ; mais le haut prix que
les Anglais mirent à leurs services
fit préférer les propositions des Portu-
gais de Macao. — Ria-Rhlng n'é-
tait pas aimé : deux fols on avait
tenté de l'empoisonner. Il fit mourir
plusieurs eunuques , instruments de
KlA
ces ron)plnt«, ibnt s«s fr^rw parai>-
saifiii rirf 1^ chfU. A cm causf»
tit' mccoitlfntrinriit se jni^nirrnl Jrs
rinlams dans Ir» firaiic^^. f«a mi-
<fre fl la fa:iiinp laiiM-cs par les »lc-
Ikorilnncnls ilu II(>an;;-lIo c\clliiciit
rufin nue ri-\.>lle telle qu'on n'en avait
|us >u en C.liine, Jepiiii près Je deux
siècles. I.e fatiatismc t avait beaucoup
de part, et elle paiaissail avoir pour
but de lèl.iblir l'ancienne dv nantie.
Klle commença dans la province de
lloiian rt s'étendit jusqu'à l'èLin;;.
\n lieu de prodij;uer $e* trésors pour
adoucir les mailienrs publics, l'empe-
reur se contenta d'ouvrir une souscrip-
tion dont les eflrts furent plus lents et
moins cflicaces. Il venait de se livrer
aux plaisirs de la chasse à Jeho en
Tartarie, et rentrait dans sa capitale,
le 18 ocr. 1813, lorsque des rebel-
les assaillirent son palais et en occu-
pèrent une partie durant trois jours.
IMusieurs de ses femmes, craignant de
t.iml)er vivant^'s en leur pouvoir, se
donnèrent la in.)il. Des secours arrivés
de Tart.-vrie facililèrml la délivrance de
l'empereur et la fuite dci séditieux,
dont la cause >'afraiblit depuis de jour
en jour. L'année 181 i se passa en
jugements et en exécutions. Plusieurs
centaines de rebelles périrent par di-
vers supplices. Kia-Kuin;; avait pu-
blic ranii»*(.' pr.'céJente une procla-
mation écrite de sa propre main, et
ilaiis laquelle, er d.'clarart qu'il n'a-
vait jamais opprimé ses sujets, i! avouait
qu'il n'avait p.is les taler.Ls de ses
prédécesseurs, et qtie les malheurs de
son rè^ne devaient être attribués à
ses fau!e.->, à .sa faiblesse, ainsi qu'à
l'incapacité, à la né^li;;ence cl à la
dciohiissancc deses ministres. Le vais-
eau anglais Wttrcsle avant pris un
navire américain dans une rivière de la
Chine, en 18H, cet acte d'hostilité
fut re;;arJé par l'empereur comme une
■ola'ion de la neutralité, et les ré-
MA ^09
sultats de cette affaire furent av>ri
•graves pour néce««siter la mission ex-
traordinaire de ««ir ricoi;;es Staunton,
qui néanmoins quitta (^nton avec tous
iei .Vn;;laii, la;>saiit au vice roi une let-
tre cachetée pour la cour de Pékin. 1^
{:>ouverneur, intimide par ciMte démar-
che, lui dépêcha un exprès pour l'invi-
ter à venir reprendre les conférences,
à la suite desquelles furent arrangés
les difii-remls entre la factorerie an-
glaise de Marao et le vice-roi de Can-
ton. !^ cour de Pel ii;; ménageait les
Anglais dont les forct-s maritimes lui
étaient nécessaires pour proté'^er ses
cAfes contre les pirates des ile^ des
I«arrons, qui avaient o.sé attaquer .Ma-
cao. (^pendant les An^^lais, qui vi-^aient
à monopoliser lecommerce de la (^hine,
trouvaient des rivaux redoutable; dans
les .Vméricains. Kia-Khin;; cherchait
aussi à se faire des amis parmi les au-
tres natioiis chrétiennes. Kn ISOI , il
avait accord»' aux missionnaires pmt'»-
^ai-. le libre evercice de leur re!i;;ion ,
avec des terrains pour y bâtir df*^ é;;li-
ses. En ISl.'» , s'étant fait rendie
compte des sentences rendues contre
les jésuites, il écrivit au ba; du rap-
port avec son crayon rou^e: " queTéciit
du 1 1 janvier 172V cesse d'être loi de
l'empire. Il n'est qu'un Diou, et ce
I)ieu ne s'offense pas de la diversité
des noms qu'on lui donne. »• F^.s édits
de tolérance de 1G9"2 et de 1711,
furent donc transcrits de nouveau au
tribunal dos rites, et une copie revê-
tue du sceau impérial fut remise à
un jésuite portu;;ais. Peu avant la pu-
blication de cet édil, des persécutions
avaient eu lieu dans la province de
SeT^cImen, où un missionna-rc fia?i-
çais fut mis à mort par ordre du vice-
roi. L'ambas^idear an;4lais, lotd Ain-
herst, arriva en Chine, en ISIG, pour
complimenter l'empereur sur la fin de
l'insurrection et pour le rassurer sur la
crainte qu'il pouvait avoir conçue de la
DTO
ks%
f^uenc que les An:;Iais avaient faite
à son voisin, le radjalidcNepaal. Mais
Cc'l envoyé ne put ni remplir l'objet de
sa mission ni nicme obtenir audience,
parce qu'il refusa de se soumettre aux
pro.->tcrnalions humiliantes qu'on y
exij^e des étrangers et don\ lord Ma-
carliiey s'était seul dispensé. XJn dé-
cret impérial du 4 sept, expliqua les
intrigues qui avaient nui au succès de
celte ambassade, laquelle n'eut d'au-
tres résultats qu'un échange de let-
tres et de présents. L'empereur dis-
gracia ses ministres pour ne l'avoir pas
iîiformc de la guerre du Nepau!, et pour
n'avoir pas insisté auprès de l'ambas-
sadeur aniilais sur le chanirement d'ha-
bit et les neuf prosternations exigées
par le cérémonial. Les égards que l'on
témoigna à lord Aniherst et à sa suite,
tant à Péking que sur la route, cessè-
rent à Canton , où le vice-roi leur refusa
des provisions et de l'eau fraîche, et lit
nȏme canonner leurs vaisseaux qui ri-
postèrent. Ces hostilités, dontrirasci-
i)le et inlenipérant Kia-Khlng pouvait
bien cire le provocateur, furent le
préambule de la guerre qui devait écla-
ter souo son successeur. En 1818, ce
monarque dégrada son premier minis-
tre Soung-Tajin, coupable de lui avoir
conseillé de ne pas visiter les tombeaux
de ses ancêtres , et d'avoir attribué à
l'intention de S. M. la sécheresse qui
afiil;ieail alors la Chine. Kia-Ivliln»
motiiut le 2 sept. 1820 , après un
règne de vingt-quatre ans. Son tes-
tament , publié le jour de sa mort ,
traduit de l'anglais du révérend Mo-
rl.sson et revu sur le texte chinois
par ^L Landresse, a été Inséré dans le
tome P"^ du Journal asiatique, mal
182i2. Le monarque y rappelle |)lu-
sicurs événements de son règne et
rapporte avec assez de franchise ce qu'il
a fait de bien et de mal. \h\ décret du
conseil impérial de Péking décerna à ce
prince le nom de Jouy-Ti (l'empereur
KIC
ingénieux), lequel ne donne pas une
grande idée du respect des Chinois
pour la mémoire d'un empereur qui
abusait des liqueurs fortes. On lui a
donné aussi le nom posthume de Jin-
Tsoung Jouy-IIoang-Ti (l'auguste
et sage empereur, le compatissant pré-
décesseur). Kia-Khlng se proposait de
laisser le trône à son quatrième fils, mais
après une longue luttequi entraîna la ré-
volte de plusieurs provinces, il demeura
à son second-fils Mian-Ning^ dont le
règne dure encore et porte le titre
chinois de Tao-Kouaug {éâ2i\.àt\îi
victoire). A — t.
KICIA^SKi (Pie), sénateur cas-
tellan d'i royaume de Pologne, né en
1752, dans la Grande Pologne, se dis-
posait à recevoir les ordres sacrés chez
les jésuites, en 1773, lorsque leur so-
ciété fut dissoute. Ayant changé de
carrière, il fut employé dans les bu-
reaux du conseil permanent; en 1782,
il était secrétaire de la diète dont il
publia le journal. En 1783, le roi
Stanislas-Auguste le nomma premier
secrétaire de son cabinet, emploi que
Klclnski conserva jusqu'en 1792.
Il était en même temps membre de
la commission qui administrait les
finances. Appelé en 178i , par la
confiance de ses concitoyens , à la
diète de Grodno, et, en 1788, à celle
qui dura quatre ans, il s'y fit remar-
quer par sa sagesse et son indépen-
dance. Dans la séance où Ton vota la
constitution du 3 mai 1791, choisi
pour parler le dernier, il rallia à la ma-
jorité l(!r. membres chancelants, et la
constitution fut proclamée presque à
l'unanimité. Le roi ayant, en 1792,
signé la confédération de Targowicz ,
la position de Klclnski devint très-
difficile. Il avait été combh' de bienfaits,
c! la bienveillance royale l'avait depuis
peu nommé sénateur et castcllan de Po-
lanlec. Il fallait choisir entre la patrie
et le roi ; sans hésiter II i envoya à Sta-
tk
KID
iit-bs SOI) di|^Ioiiir ilr scnateiii . l.c^
UuNb^ apiit rir r)iûS!>^ (Ir Vjir u\io
un uioU (l*a\til 17'Jl, Kicii^Li fut
ilio>»i |iir le^ iubilaiits, |>oiir adiiii
ntsirrr un àe^ quartiers tie la \ilir.
Apièsia inallirurrusc* bataille de Ma-
ciejoHicc el la |»riiC île Vario\ie, il
^e retira dans les pro\inces pulunai-
sei échues i 1* Autriche, (^nime il
a\ait tutit perdu , la |>(inccv>e I.ubo-
niirsla luurnit à sesbeboins. I.e rovau-
nir de P«iln;;ne a\ant été rétabli en
1815, Kicinsli fut rappelé au sénat,
et dan< la diète de 1818, il \uta avec
r(tppo>iti(>n. Il emplu>a les derniers
inunieiit> de sa carrière à mettre en
tttdre 1rs matériaux qu'il avait lecueiU
lis sur riiistoire de son temps. Il était
très ricfio en di)cuturiits sur la confé-
d< ration de Tar^uwicz. Pendant qu'il
s'occupait de ses travaux littéraires, un
drcrrt l'appela, en ISiG, pour sii-^er
3u tribunal de la diète, qui devait in-
struire el juj;er la cau^ de ce que Ton
appelait la Socirlê ptitriotiiue polo-
naise. Le jugement, prononcé au moii
do mai 1S28, déclara qtie les accusés
e:nprisonnés depuis deux ans étaient
Innocents. Mais, avant que le décret
eût é'.é porte, Kicinsli, que le sort de
ses compati iotes avait vivement touché,
Fut frappé d'apoplexie au milieu de
la discu.^sioo et mourut subitement.
G— Y.
!v I (' K X. ( Ji AN ] , pharmacien ,
né en 1772, à Druxellcs, mourut dans
1.1 méiuc ville en 1831. Sti Flure tîc
lirii.i elles f le premier ouvrage qu'il
publia, étendit au loin. sa rcuiitation. Il
la soutint dignement dans la suite, par
les divers travaux auMpiels il se Pivra.
lin des plus remarquables est son lic-
sumé de minéralogie qu'il a eu le rare
mérite de débarrasser de ces détails
technifji;cs, de ces descriptions scienti-
fiques, ilonl quelques auteurs sont .si
prodigues. Malgré son extrême mo-
destie, la plupart des sociétés savantes
voulurent le compter dans leur >cin :
ainsi il fut mriiibtcdu ci-devant jury
de médecine, pui^ du conseil de santé,
de l'académie des sciences el belles-
lettres de r»ruxellcs. Ses écrits sont :
I . Flora rtrui tllensts, e.i Iiiùens tha-
rucUres generum et spetierujiipiu/t~
(arum r in uni Uru.iellus crescen-
tium,seeuntîum Liiuurutn lîisfHtsita,
lum S) noftyniis aui iorum; t uiuddi-
tur l^xieon hutunirum, in y;/o ter-
mini artis Lre\ùter e.ipumtntur ,
Bruxelles, 181:>, in-8^ II. liehuion
d'un voyageftiit a la grotte de Unn
au mois tfaoùt 1822 , avec de>
notices sur plusieurs autres nrulles
du pavs , Bruxelles , 18*i3, in-8" ,
orné d'un plan lithographie de la
girolle et de quatre planches. III.
llesume du cours de ininrralogie et
Je botaniijue donne au nntsre des
srîences et lettres de llruielles,
Hruxelles, l8iS. in-18. IV. Tenta-
men minerulogituni^ seu minera-
lîum noxui distrihutio in classes, or-
diites^ gênera, species; eum varieta-
tihus et synopsis auitotum ; cuî
additur Le.i ieon niintralugicum ,
Hruxelles, 1821, in-8'. ivicLx c.^l en-
core auteur de plusieurs dissertations
insérées dans les Mémoires de l'aca-
démie de liruxellos. i) — i» — 1\.
KinnEKUVSTLR (Ki-
(.iiaui»), abbc de l'ordre de Sainl-He-
noit et docteur d'Oxford , natif da
Worcesiersliire, fil profession à l'àjje
de dix-sept ans chez les bénétlictins de
^^ inchcombe dans le comté de Glo^
ccster. Après s<»n cours académique à
Oxford, il fut nommé prieur de \N in-
chcombe et sut si bien se concilier l'es-
time de ses conlVèrcs que, TaLba^e
étant devenue vacaiitc en 1487, ils le
choisirent d'une vo:x utianuue pour
occuper celte place. Sous son gouver-
nement, les bonnes éludes furent re-
mises en vigueur, la discipline monas-
lîque fut rétablie, et diverses institu-
J12
&I£
tions propres à exciter rdmulation rt
la ré;4iilanlé (îoîinèrcTit à ce mona-
stèn* la lessemhiaiite d'une pellte uni-
versité. Les affaires de son ablja^ye
l'ayant appelé à Rome en 1501, il
s'y occupa surtout d'en étudier les
monuments et de s'instruire à fond de
tout ce qui pouvait tendre à la perfec-
tion nionaslique. Son talent pour la
prédication lui avait fait une f];rande
réputation à la cour de Henri Vlil.
C'était l'époque où les nouvelles opi-
nions reli<^ieuses, qui commençaient à
ao;iter les esprits, excitaient de vives
disputes entre les laïques et les ecclé-
siastiques, au sujet des exemptions du
clergé. L'abbé Kiddermvster prit for-
tement la défense des prérogatives de
son état dans un sermon prêctié en
1515, à Saint-Paul de Londres. Le
bruit que fit ce discours lui suscita de
grands adversaires parmi les ecclésiasti-
ques courtisans, et il fut surtout vive-
ment combattu par le docteur Stan-
dish, gardien des cordeliers. Cet abbé
n'eut pas la douleur de voir les ca-
lamités qui affligèrent son pays peu
de temps après sa mort , arrivée en
1531. On a de lui : L Tracùi-
tus contra dortrinam Lutlierl ,
1521. IL IJistoria fundaiionis mo-
nastc.rnde IVinrJiconihe. lU. Cata-
logjis, vr.l liistoria uhhaliirn monas-
tp.ril de. WinchcomJie , etc. Cette
histoire commence à l'année 988, sous
le règne du roi Edgar. IV. RenoQatio
prioUrgiorum , charlarum , et aliorum
muriun/entorum munasterii de IV in-
chcondte. T — D.
K I E F F E R C Je AN-D.\NiEL ) ,
orientaliste, né à Strasbourg, le 4 mai
17()7, se voua de bonne heure aux
études, sous la direction des célèbres
professeurs de l'université de sa ville
natale , Oberlin , Schweigha;user et
Dahler. Il se destina d'abord au mi-
nistère évangélique : mais le goût des
langues et de la littérature orienta-
KIE
talcs l'emporta , et il s*y livra dans la
suite avec ardeur , pour ne plus les
abandonner. Après un séjour de quel-
ques années à Paris employées dans
l'enseignement, M. llosenstiel, dont
plus tard il épousa la fille aînée, le lit
attacher , le 3 frimaire an III (23
nov. 1794), en qualité de traducteur
d'allemand, au secrétariat de la com-
mission des relations extérieures. En
janvier 1795 , il présenta à la com-
mission un projet pour la formation
d'une collection des actes politiques
de la France avec les puissances étran-
gères et des puissances étrangères
entre elles. Ce projet , dont le mé-
moire original se trouve aux archi-
ves du ministère, obtint l'approba-
tion du gouvernement. Le 3 mars
1796 , Kieffer fut nommé second
secrétaire interprète de l'ambassade
de France près la Porte-Ottomane, et
partit en celte qualité avec le nouvel
ambassadeur, Aubert-Dubayet. Lors
de la rupture avec cette puissance, par
suite de l'invasion de l'Egypte, Kief-
fer fut emprisonné , ainsi que Fxuflin
[Voy. ce nom , XXXIX , 269), alors
chargé d'affaires , au château des Sept-
Tours. Ils y demeurèrent trois années.
Cette conmiunauté de disgrâce mit le
jeune orientaliste en rapport journa-
lier avec l'un des hommes dont les
vertus et les talents ont le plus ho-
noré la diplomatie française dans le
Levant. Il s'établit entre eux des
liens d'estime et d'amitié qui s'accru-
rent de jour en jour et durèrent toute
la vie. Pendant cette longue capti-
vité , les leçons de Ruffin et celles
de Dantan , l'un des inlerprèles de
l'ambassade, initièrent Kieffer dans la
connaissance ap[)rofondie de la langue
turque, à laquelle il joignit celle de
l'arabe et du persan qui en sont le
complément indispensable. Sorti d«*s
Sept-Tours le 25 août 1801, Kieffer
continua, en 1802 et 1803, à faire
Kii:
Kin
'-.i.T
|iaitie Je la légation française à (l^tii-
^laiiliaiiplr , et srritiiJa Kiilliii tljiis
I i:iiiiie(iMti* (le^ Irauiuv rlii-clur> )>)i c
iJernirr, pour obtenir de ia l'orle la
ir>iilutiuii dn é•abilv^elllCllls religieux
et de roiiinierre i|ui apparteiiaieut à
b France, el pour faire lenirer les
Fiançais dans tous les priv tirées et
immunités dont ils jouiss^tient en
\rtlu lies jnctriiiirs rapitulatiofiN. Kn
juillfl 1H(Ki, Kicffer fui cliar;:é d'ac-
cumi'a^nrr 4 l'aiii Saul-llalet-Kf-
frndi, le piemiei ambassadeur otto-
man qui se rendit dans cette capi-
tale apin la conclusion de la paix.
Au moi» de fé\iior 180 V , il (ut nom-
mé secrétaire inici prête au niMiistère
»l«'s affaires ctran^rres, et peu de temps
après suppléant de Ituffin danâ la
cliaiie de turc au colle;;e de France.
I:n iSn.'», il fut , conjointement a>ec
son collègue l'uNicli, chargé de tra-
duite en turc les bulletins de la grande
ifinée française et d'en sur\eillcr l'im-
pie sion dans cette lahi^nr. l'ar relie
piiLlicjlioii, continuée iMi lîSt).'), ISOG
fl tS(>7, il contribua beaucoup à rrpan-
die dan> tout le Levant la connais>ance
des faitï prodigieux «pu, à celle époque,
illubtièient les années impériales. De-
puis plu^ieurs années il sciait occupé,
de concert a\ec IVulGn, de la coiu-
posilion d'un dirlioiiiiaire usuel , turc-
liançai:» Fii 181 1 , le nnni>lre des re-
lations extérieures prit un vif intérêt à
celte publication . D'api es scsordresjcs
feuilles de ce diclionnaiie , que Kicffer
piepaiait à Paris, claienl portées par
Ic5 coutners du ministère à Consian-
tinople , d'où Uuriin les renvoyait
au rédacteur primitif avec les additions
«t les corrections qu'il avait ju^éa pro-
pos d') faire. Ce travail, dont le ma-
nuscrit fut retrouvé dans les papiers de
Kieffcr, a été publié aux frais de sa
\euNe M'"^" Loui-c kieffer, née l\o-
.senstiel, el de M. Uianchi , secrétaire
interprète adjoint pour les langues
LXVIIl.
orientales, qui en a rc\u le texte <l
surveille l'imprcAsion à l'Imprimeiie
io\ale. l'.iiriclii d'ailleurs, p.*. cet orien-
taliste disiin;;né , d'un assex {;rand
noubre de mois nouveaux qui lui
manquaient, ce dictionnaire, qui for-
me un fort \oIume in-octavo, renfer-
me pour \e turc toute la substance de
rénorine et dispendieux le\i({up de Me-
Uln^ll, ri il est aussi \e complément né-
cessaire du / ot ahuhiirr frun^ itisturc
donne par M. Itianrln m 181)1. —
1^ '11 lanvicr 181.'», Kicffer fut nom-
mé rhf\alier de la Le^ion-d'iionneur.
Fn 1S18, dr suppléant qu'il était de-
puis 18().'>, il devint, a la demande
même de lliiffin, titulaire de la cliaire
de ce dernier au collejie de France, l'ar
ordonnance royale du \) nov. IHlD,
il fut nommé premier secrétaire inler-
ptèle pour les laii;4iies oriotilales , ri
chargé de la direction de l'école des
élé>es interprètes du ;;ouvernefDenl
attacliée au collège Louis-le-^îrand.
Appelé en outre à remplir, comme ses
colle^ue>, les fonctions de profesvur
dans celle école, il conliibua beaucoup
aux pro^i es des sujets distingués qui sor-
tirent de cet utile établissement, fondé
par Louis \IV. Il perdit, en 18-23. I4
place de premier secrétaire interprète
du loi pour les lan;;ues orientales, qui
avait toujours été considérée comme un
poste de retraite, el dont ses prédéces-
seurs les Cardonne, les N eiiture, les
Kufiin avaient joui à ce titre jusqu'à la
fin de leur carrière. Déjà l'on avait
\oulu l'en dépouiller en 182G; mais
l'intrigue qui, à celle époque, écboua
devant la probité consciencieuse du
baron de Damas, réussit à la fin de
l'ainiée 1829. Kieffer fut ties-sen-
sible à cette disgrâce non méritée , et
qui abrégea ses jours. Il chercha néan-
moins des consolations dans l'étude.
Dix années de sa vie ont été consacrées
à donner la première traduction com-
plète du Nouveau-Testament et en-
33
5i4
RIE
suite (le la Bible eu langue uiii|iie.
Intlépendainmenldes longs et péiîil)los
travaux auxquels 11 se livra pour Tac-
cuniplisscmeut de cette œuvre ilc pa-
tience et d'érudition, Kiefler,en hom-
niede lettres aussi modeste qu'instruit ,
ne déil:i!;^ua point deconsulter plusieurs
orieiUalistcs se^ collègues, et il entretint
menje avec ceux des pavs ttrangers une
correspondance dont le résultat fut
tl'assurer, par les éclaircissements qu'il
fil Imprlincr, le succès de son entrc-
pr'u^e. En iôj i , il fut élu vice-président
de la sociélé asiatique, dont il était un
des fondateurs. Jamais la sociélé bibli-
que n'a eu d'agent plus zélé et plus in-
fatigable. L'ardeur avec laquelle il s'ac-
quitta de sa mission était telle qjie,
dans le courant de 183-2, il distribua
lui seul cent soixante mille exemplaires
(les Saintes-Ecritures , dont presque
toujours il accompagnait l'envoi d'une
lettre de sa main ; et il corrigeait lui-
même les épreuves de chaque édition
nouvelle. Cette ardeur, il la portait
dans l'accomplif^cmcnl de ses devoirs
pour les grandes comme pour les p.itites
choses ; et il y joignait une exactitude et
nu esprit d'ordre dont les hommes pro-
bes ;;|ijirécic!il seuls toute l'importance.
On le vil trois jours avant sa mort, ar-
rivée le 29 janvier ISlil», pouvant à [)tl-
uesc soutenir, sortir de cliez lui, malgré
le^ M^^lauccs de sa famille, pour aller
encore au co'iège de France donner ses
dernières leçons (1). (i — k — i).
__KH:\iiAYER (le biron Mi-
(i) Coinini: Ws cmirs d'arak*», de pfr:..)ii «t de
tore noiil Irijdfs à l'.iris, il- »oiit jj^ii fiôipi. nie,
à l'i xrf(ilii>n i\r veux c|iti mil lifu .-m ccdli-gi' lU-
l-mris-U'-Grjiid. j«)iir Us jeunes gMis <|iij sc dc.«
Xiwitl à Irf dijdr.uiaii.- r>ricn(;d<!. Les unirii. Uiu*.
ju «olli';;»? de l-'uirc q l'à l;i nibliolh<-(|iic- ro\ .l'c,
lie oiiiiptenr que diiix ou trois élove» thuciin,
el quelqui-fois iiK.iiis. Kicflrr (cl nous it'eiiteii-
don- atlndilir «"Il ri<-n !«• mm le de ce snvjnl »t
niudctle |iror>>.<ii;ur) u'jv-'il plus qu'un cU'vh
qui, aymt «■niO'.ani in-ul inofil»' de sr» Ir^ini»,
•n «iis;)<isjit a |>r<n'lrr; ri.ns'" <lfl lui. •< .\c vous
reiii'fz \tiàS, tni di( KiiCfir, cur on supin imer.-i
ma «luire i>i |i'r^rinii<- n'ai^iile a nnnirour-; »
f-t , pour If. tlii'ider » rr'>l<-i', îl lui abaiuloriiia
une partie de (on tr.ilUmentt A — t.
KIL
CHEL de), général autrichien, né veiT.
1760, d'une famille noble, suivit dès sa
jeunesse la carrière des armes, et se si-
eiiala dans la "uerre contre les Turcs
sous Laudon cl le prince de (j(d)onrg.
Devenu major, puis colonel d'un rég:-
ment d'infanterie, il fut employé dans la
guerre contre la France en 1792, com-
me général-major, puis comme lieutc-
nant-feld-maréchal. Il se trouvait en
celte qualité, en 1800, dans l'armée
chargée de couvrir la SoUabe et le Bris-
gâw. En 1805, il commandait au.ssi le
corps autrichien chargé de couvrir la
Bavière , et il se retira vers la Bo-
hème , lorsque Napoléon marcha sur
Vienne, après la capitulation d'Ulni.
La troupe du baron de Kienmayer
s'élant réunie au corps russe de Kou-
talsoff, il fut remplacé par le comte
de Merfeeldl , et se rendit en Bo-
hême où il continua de combattre
sous les ordres de l'archiduc Ferdi-
nand. Lorsque ce prince évacua l^ra-
gue, par suite de l'armistice qui suivit
la bataille d'Auslcrlitz, Kienmayer fut
chargé du commandement supérieur en
lîohcme. il fil encore avec beaucoup
de distinction la campagne de î80î),
sous l'archiduc Charles. A.près la paix
de Vienne , sa santé se trouvant af-
faiblie , il demanda à (Ire employé
dans un pays dont le climat fut moins
rude, ce qui ne lui fut point accordé
à cette époque ; mai.s, après la mort du
comte de ]\iénau, l'empereur, s'élant
souvenu de cette demande, le nomma
commandr.nt-g;:uî'ral de la 'i"ran:iylva-
nie; et il accompagna celle nomination
d'une lettre autographe trè.s-ilatleuse.
En ISIS, le même prince le nomma
comm.indanl-général de la Moravie;
et c'est dans ce.^ fonctions qu'il est mort
en 1828. M— i)j.
KILIDJ-ARSLA ^^ 8 '^
second sultan Seldjoukide d'Anatoîie,
s'étant retiré en Per.se après la bn tra-
gique de son père Soléiman (f'^oy. ce
Kir
KIL
'M 5
nnm, \LIII, 1J), fut retfiia pri-
sonnier à hpafian, a%pc <e^ fr^rr^. jll^-
qu'à la mort An suhaii Melil-(^>iali,
Ifiir parrnl. lU rcfou%rèrenl alor5 Ifur
libfrl^ cl rcntrrrent dans Nir^ l'an
VHr,derijr-. <109'2 •!«• J.-C.V Kiliclj-
Arslan, qui étail Tainf, monta aussilôl
sur If IrAne et mit fin a r.marciiic qni
iliirail Jfpuis sfpl ans {f^oy. Aboil-
(IvrfM.I, 88). Apre* avoir rëlahli
1*01 drr clans sfs étal*, par la dfpo^i-
lion t\r p!:ts':cur« émirs amhitirux , au
noîiilin* dr>q!ieU était If j;ouvernpur de
Niçéf , frrrc d'Abonl-Cacem, il les
agrandit par di\ erses ronquêtes qu'il fit
»uf les <irrrs, tant en teire ferme que
Aim 1rs îles i\r l'Arrliipel ('e prince,
famnix dans l'histoire de la première
rroisâde et dans le poème du 'las.se, est
nommé mal à propos Soléiman par les
auteurs ;;refs et latins qui l'ont con-
fondu a\ee son père. Ouelque^-cns
plus exacts l'ont distinf;uc sous le non
de So'r'ninn le jejne. Ce fut en i'JO de
riié-. J(M)7 de J.-C.) que les diré-
tiens d'Occident inondèrent pour la
prnn'èie fois les provinces de l'Asie-
.^ï:r;rtMcqui formaient l'empire de Ki-
lidj-Arsian. 11 reçut sans effroi l'avant -
^arde de leur armée so:is les ordres de
Pierre l'Krmi'e , de (iautier Sans-
tooir cl de pli!sieurs autres chefs ohs-
cnrs ; la tailla en pièces et la détruisit
entièrement, à l'exception des jeunes
f;ens des deux sexrs qui furent réduits
en ser\itude, el d'en\iion trois mille
hommes que Pierre, secouru par l'em-
pereur Alexis Comncne, ramena dans
Constantinople. Vi\ nouvel ora'^c fon-
dit b:ent(^t sur les états du sultan, qui
fit de vains eflorts po:ir le dissiper.
Cinq à six cent mille chrétiens, com-
mandés par Godefroi de Rouillon et ses
frères Haudouin et Eir.lache, par lîohé-
moi.d, prince deTarcnlc,el Tancrède,
son cousin, par P\aimond dcSaint-(iil-
les, comte de Toulouse, Adhémar, évé-
queduPuv, et par plusieurs antres
»eij;nef:rj dt"stinj;ués , »e pré>entè-
rent devant Nirre , capitale de Ki-
lidj-ArsIan, et en formèrent le blocus
le 15 mai. (.!e prince, qui était allé
chercher de^ *ec,)urs cher ses voisin»,
parut bientàl à la trte de cinquante
mille hommes ; a\ec des forces si iné-
palrs il ne crai;;nit pas de combattre
deux jours de suite les croises, et ne se
relira qu'aprrs avoir disputé chèrement
la victoire. Knfin, un $iè;;e mcartrier
de trente cinq jours força la ville à se
rendre, le 20 juin, non pas aux croi-
sés, mais à l'emperear Alexis, par l'a-
dresse de Butiiniite, -énéral des trou-
pes qu'il avait envoyées pour prendre
part à celte expédition, l/arméechié-
tieniie, en quittant Nicée, se parta|:;ea
en deux colonnes qui campèrent a drux
milles de di lance l'une de l'autre dans
la plaine de Dorviée (KsLi-(!hehi).
Kilidj-.KrsIan, suixi de deux cent mille
horames qu'il était parvenu i^ rassem-
bler, surprit la colonne de ;;auche com-
mandée par Hobémond, le 2 juillet, et
l'aurait exterminée si elle n'eût élé
secourue h propos par (iodefroi, qui
commandait la droite, f.e sullan vaincu
abandonna son camp, ses munitions,
ses b3f;.T^es ; mas sa perte en hommes
fut moins considérable que celle des
chrétiens. Après a^oir essuyé deux au-
tres défaites dans la Pisidiect la Lvcao-
nie, il >e contenta deliarcelcr les croisés
dans leiir marche et de leur co:iper les
vivres, sans risquer de nouveaux com-
bats : mais ils n'en r3vaf;èrenl pas
moins ses états, en les traversant dans
toute leur lonç;ueur jusqu'à leur arrivée
sur les frontières de Syrie. Il eut bien-
tôt sa rcvanclie sur un corps de quinze
raîtic Danois qu'il fil tous passer au fil
de l'épée avec Suénon, (ils de leur roi.
L'aniu'e suivante, lorsque les croisés
eurent pris Antioche, Kllidj-Arslan
se distiii;;na comme auxiliaire à la fa-
meuse bataille qui cul lieu, le 28 juin
1098, sous les murs de celle ville. Il
33.
5r6
KIL
KIL
attaqua en queue rarmée chrétienne,
pour lui fouppr les communications
avec la mer; mais ses exploits, dans
celle jounice , ne p;n\;ut empêcher la
déroule i\cs Musidmans, ni la prise de
«K'iUbalcni , qui en fut le principal lé-
«-.allat. (Z'o)'. IjOUÏ.mo^d, IV, 679;
GoDEFUOi, XVlI,54{J,el Korbouga
auSuppl.). Quoique les forces du sul-
tan fussent coiisuioiablcmcnt diminuée;
par tant de combats, par la perle de
sa capitale, par la ruine de ses campa-
gnes et d'un f;rand nombre de villes,
et que les autres parties de l'Analolie
fussent en proie aux incursions des
(irecs et à Tambllion de ses émirs , ce
pilnce ne trouvait pas moins de res-
sources dans son ^éme, son courage et
son activité, que dans les secours qu'il
allait solliciter chez tous les souverains
de l'Asie. Au mois de ramadhan 454
( juillet 1101), 11 détruisit successive-
ment trois nouvelles armées de croisés ;
la pr emière forte de deux cent soixante
mille hommes , lombards , français et
allemands, dont à peine un tiers par-
vint à s'eLliapper et lut ramené à Con-
slantinoph; [lar les comtes de Toulouse
et de lilois; la seconde, comj)osce de
quinze mille hommes (les femmes non
comprises), dont il ne se sau\a (jue
sept cents hommes et le comte de Ne-
vers, leur chef, qui ga;.Mia pcniblement
Anlioche, couvert de hailluns et à
pied. La troisième, commandée par le
comte de Vermandois et j»ar les ducs
d' Acjullaineet de Jîavlcre, comptait cent
soixante nj;!le imllvldiis, dont une fai-
ble partie LMta l.'inioi t ou l'esclavage, en
se réfu:^i:înt à Coribtanlinople, à l'cx-
ceplion du duc d'Aquitaine qui arriva
au-)sl jusqu'à Anliodie, en mendiant,
a\ec six de ses compa;^nons d'infor-
tune (1). Des démêlés eurent lieu dans
( I , l/liisioricri ar;ili<! Mm (flAtliir uiirilme eu.
(.■.•r<- à Kiliilj-Ar<>ljii iiu<: v.cluiru sur l'aimoud,
f o.u fil<'S:>iiit-(JilleA,i|ui IIP se sauvM qu'avec 3 o<>
hoaiinK»; nuis c'e»t pciit-ètro lu même qi^e la
|irfi:iiè.e tl^> trois do il uou*. vfi:on» fl-- jurl'T.
la suite entre Kilidj-Arslan et Ibn-I)a-
nischmend, prince de Malathie , celui
de ses vassaux qui avait le mieux se-
condé ses efforts contre les chrétiens.
Cet émir ayant baltu et fait prison-
nier Bohémond, prince d'Antioclie,
le relâcha moyennant une rançon ,
l'an 1102. KllldjArslan, qui avait
compté sur une somme plus forte, que
l'empereur Alexis avait offerte pour
que le prisonnier lui fut livré, fit la
guerre avec succès à Ibn-Danischmend,
et ne lui accorda la paix que par la
médiation du sultan de Perse, Barkya-
rok (Foj.ceiiom, III, 378). N'ayant
plus à lutter contre les croisés qui ,
pour se rendre dans la Palestine, trou-
vèrent des routes plus courtes et moins
difficiles que celle de l'Anatolie, Ri-
lldj-Arslan mit tous ses soins à rame-
ner l'abondance et la tranquillité dans
ses états, choisit pour sa capitale Ico-
niura (Cogny ou Konleh), et prit plus
de part aux affaires de l'Orient. Dja-
waly, autorisé par Mohammed [Voy.
ce liom , XXIX , 225) , nouveau
sultan de Perse, avait fait périr Djo-
karmisch, roi deMoussoul, qu'il venait
remplacer. Los habitants ne voulant
pas le reconnaître se jetèrent , ainsi
que le fils de Ujokarmisch , dans les
bias de Kilidj-Arslan, le second po-
tentat de l'Asie musulmane par sa
puissance, et le premier par sa célé-
brité. Ce prince marcha vers Mous-
soul , força Djawaly iVcn lever le siège,
enli a dans celte ville le 25 redjeb 500
de rhé;^;. (22 mars 1107), fit procla-
mer son nom dans la Lholhbah et se
mit ainsi en révolte ouverte contre
jMohammed, son suzeiain. Celle dé-
marche, dictée par l'orgueil et l'ambi-
tion, le rendit odieux à tous les émirs
de Syrie: ils s'empressèrent de soute-
nir Djawaly qui s'était retiré à Ralia-
bah. Le sultan marcha contre lui, lais-
sant son fils Melik-Chah, âgé de onze
anr. pour goiiverner Moussoul, sous la
Kll.
KIL
liirfclitin d'un niiin.Ntrr ilr Cdiifijnrr
l.fi t\eu\ arm«*fN »c rfiironlrrrenr le
'JO Jznulladali [Ml jiiillfi ) sur Irs
hor(l> du Kliahour. \ la suite d'une
artion lres->i\c, Kilidj-Arslan aban-
d«»nne des .sien*, el entraîné malgré
lui dans leur fuite, \nnliit tra^e^^el la
iMirre, mais, son rliexal s'elant ab.iltu,
il se nova aprc* un ré;;nc de quinte
auN. Son lils se sau\a en l*er>e el
Molls^o^l toinita au pouvoir des vain-
queurs On doit re^rcllri que re ;;rand
pi iiire, dont 1rs auteurs musulmans ne
lotit presque aucune mention, n'ait pas
tiouxe parmi eux un historien di^ne
de lui. I.^ troupes qu'il avait laissées
dans s« états se joij;nirenl au\ (irecs
pour faire la ;;uerre aux chrétiens
ocrideutaiix , sur qui elles c)l»lin-
rent de grands succès, cl re\inreiil
«lans TAnatolie cliarj;érs tic présents
de l'empereur Alexis. Ce pa^s fut
bientôt replon;;c dans l'anarcb-r, el ne
respira que sous le rèi;no do Ma-'oud,
Ois el second successeur de Kili<ij-
Arslan(/o). Masoip 1". WMI.
:iSV, el K iiii>j-Ansi.vN II , III cl
IV. t \\ll.p i1:>-VIÔ . A T.
KILMAIXK (CnARirs-JKN-
MNG$\ t;<^néral français, naquit à Du-
blin, en Irlande, xcrs ITTiO. d'une fa-
mile noble, très-allacliée à la relijjion
catholique , el par conséquent foit
opposée au joui; de rAn;;lcterre. Ce
fut pour le soustraire à ce )oufj que, des
Tà^p de quinie ans, son père l'amena
en France, et le fil entier conimr sim-
ple hussard dans le [••-inienl de L:.u-
zun. Le jeune Kilmainc suivil ce corps
en Amérique, où il lil la ;;iicrrc de l'in-
dépendance sous I^favetlc el lîiron,
•^011 colonel, qui sut le ilistin^upr el le
fit nommer sous-lieutcnaiit. l\e\cnu
en France plein des iùccs de libcrlc
el d'insurrection qu'il avait vues triom-
pher dans le Nouveau ^Ioiiilc,ai!i-i que
la plupart des ofticicis qui avaient fait
celle f^nerre, Kilmainc vil avec joie, en
ITS'J , érlaier dans sa patiie adoplivc
une révolution qui lui parut desti-
née aux mêmes résultats. Il devin!
alors capitaine, fl coiitiibiia beaucoup
en 17'JI à retenii sous le diapeau
français la plus grande partie de son
régiment qui, a l'exemple de Ko\al .M-
lemand el des hussardN de S.ive, voulait
déserter tout entier. ( trace au léle pa-
Inrliqiie de kilinairie, il n't eut f;iiérc
que le, »if:iriers qui rmi;:rèient, et ce fut
poui lui une nouxelie cause d'axance-
ment. Il devint chef d'esradrnn, et lit
en celte qualité lr« première^ campa-
gnes de la rexnlulinn sons l^fa>elte et
Duroouriez. A .lemma(*es, où il s'était
dislint:ué, re dein.er le nomma colo-
nel; mais cette nomination ne fut pas
confirmée par le mniNtre de la guerre,
qui l'en d<'domnta.:ea un peu plus laid
par un bie\et de mari-i hal-de-camp.
S'élanl montic f.i\or.ible au parti de la
(^nxen'iun iiatonair, loi s de la défec-
tion de Diimoiiiiez, Kitmaine fut nom-
mé ;;énét.il de d \ision; et il commanda
ra>ant-;:arde de Dampieire, qui rendit
le meilleur l< nioi-na;;»' de sa conduite
dans les affaires mcnrtiières des 1*^*^ el
"2 mai 17'.)IJ, ou, silori Icrappoit offi-
ciel, il eut deux chrxaux tues ous lui.
Il ne deploxa pa<. moins de xaleur cinq
jours a()iè> dans la mallieiite;ise ten-
tatixequefil encore Dampicne pour
délivrer Condé. Ce ;;énér^l axant cic
tué, I.amarchc fut mis .t sa place, et
Kilm.iine all.i commander un corps sé-
pare dans les Ard'-nncs; mais il x re.sta
peu. Kcvenu bientôt sur le ihéàlie des
;;rands événements, il s'v trouva dan<>
les circonstances les plus critiques.
Après la mort de Darapicrre et l'arres-
tatïoii de CnsiiiiC, l'armée du Nord,
restée sans chef «t sans direction , ré-
duite à trente mille hommes, et con-
duite au ha-ard par d'ic;norants con-
ventionnels ou des ;;éiiéraux sans ex-
périence , s'était d'abord éloignée de
Valenciennes, pour se retirer au camp
5i8
KIL
(le C(\^<ir; [luis elle avait qtiiué celte
cx'eilt'iilc [)o>ilioii {>our levemr à C'.'Hc
de Famars (]ui couvrait Valciicicn-
iic-. Enfin oblifi^ée tl'abaiuloimcr celle
ville à ses propres ftf.ccs, rarinéc dti
Nord était venue encore une fois se ré-
fugier derrière l'Escaut. C'est là que
Kilmaine la joif^nit dans les premiers
jours d'août. Sa position semblait toul-
à-fait désespérée', et en présence de
l'échafaud , dressé pour tous les géné-
raux vaincus, ou seulement soupçonnés,
personne n'osait en prendre le com-
mandement. 11 ne l'accepta que pro-
\isoiremenl, et en attendant, dit-il au
représentant Delmas, envoyé pour le
surveiller, qu'un autre plus habile vou-
lut se charger d'une si grande respon-
sabilité. Posé alors sur l'Escaut, dans
le fatneux camp de César , Kilmaine
allait avoir devant lui le duc d'York et
le pi ince de Cobourg, à la tote de qua-
tre-vingt mille hommes. S'il essujait
un échec, il n'y avait plus une seule
place , une position , ni une réserve
qui pût empêcher les alliés de pénétrer
jusqu'à Paris. Et déjà la Convention,
qui, après tant de levées et d'enrôle-
ments, ne pouvait plus disposer d'un
bataillon, et n'avait autour d'elle que
des orateurs de clubs ou des égorgeurs
de prisons, songeait, comme naguère
devant les Prussiens, à abandonner la
capitale, sans pouvoir se retirer der-
1 icrc la Loire, car elle y eût trouvé les
Vendéens triomphants. Et dans le
même temps Mayence avait capitulé ;
loulon était au pouvoir des Anglais;
les Espagnols envahissaient le ilous-
sillon ; les Austro-Sardes menaçaient
à la fois le Dauphiné et la Provence ;
enfin, après la révolution du 31 mai,
qui avait assuré le triomphe de Uobes-
pierre, Lyon, iSïarseilIc, tous les dépar-
tements du midi, tous ceux de l'Ouest,
s'étaient soulevés contre l'oppression
conventionnelle. S'il était vrai que les
rois coalisés voulussent sincèrement
KIL
rétablir la monarchie de Louis XVI ,
si, comme ils l'avaient si hautement
annoncé dans leurs manifestes, c'était
pour ramener l'ordre eu France, pour y
réprimer la révolution, qu'ils avaient
pris les armes, jamais les circonstances
ne leur avaient été plus favorables. Ces
circonstances ressemblaient sous beau-
coup de rapports à ce qui s'était passé
en Champagne un peu moins d'un an
auparavant (Z^-^. DuMOURir.z, LXIH,
160). ^lais à ces deux époques égale-
ment décisives, la secrète ambition des
puissances et les Intrigues de leur di-
plomatie eurent plus d'influence sur les
événements, il faut bien le reconnaître,
que la force des armes et les promesses
des manifestes. Il semble que , dans
cette seconde campagne, lorsqu'ils fu-
rent les maîtres de Condé, de Va-
ler.ciennes, et qu'ils virent que le che-
min de Paris leur était ouvert , les
Autrichiens voulurent prendre leur
revanche des honteuses tiansactions
dont ils n'avaient été que les specta-
teurs au camp de la Lune. A Dieu
ne plaise cependant que nous accu-
sions le généralissime de 1793 d'a-
voir joué un rôle aussi méprisable que
celui de 1792. Le prince de Cobourg
s'était au contraire montré d'abord
très-franc et très-loyal. Il avait promis
sincèrement à Dumouriez de concou-
rir à son projet de rétablir la monar-
chie, et il s'était engagé pour cela à four-
nir un corps auxiliaire, à ne point dé-
passer notre frontière ; enfin, il avait
solennellement renoncé ^ toute espèce
de conquête. Mais, jJourde pareils en-
gagements, il n'avait reçu de son ca-
binet ni pouvoirs, ni instructions;
et ce n'était pas ainsi que l'entendait
Thugut , alors suprême directeur de
la diplomatie autrichienne. Dès que
cet astucieux ministre eut connais-
sance de ces engagements, il les fit
improuver, annuler par 1 empereur ;
et un congrès fut formé à Anvers ,
UL
»B, tl« roncrri avec rAn^lelern-. ou
' I que 1rs a"
ia ftiiitf fir
■ Us f tour ir p/Aw r.' ilis gniitnlus
' tir l'a^'oir. (]« furenl Ir< r-^nrr-.-
- .! ; -le. On ei. .
!! [ " 1- I . 1.1 |Mil U*C. I. N
vrnsfe T \irent un iii*(urinbrrtnrtit i!e
la France, beaucoup lro|i clairrmrnt
annoncr. Ce qu'il y a tle .sûr, c'e>t qve
dès-lors il ne fut plu« qnrstinn da
Irnne de Ix)ui5 X\ 11, dont Dumon-
lirt, de conccil a\ec le pnnre de (x>-
Imtir^, avait prom!.* le rrlabli^^rment
dans sa prurlamation du 5 avril ; et
l'on ne parla pas davanta*;e de riti-
toituni*e leine Marie- Antoinette, alors
SX prrs de l'écliaiaud, et qu'un mut de
I rnipercur , son nc\eu , uu nioute-
nient de ses aimées pouNait sau\er(l) !
Certes, il fut assez évident aloi> que ce
n'rtait pas dans des inlén-ts de famille,
et bien moins encore dans reux de la
monartliiedes Houibon^^que l'Autriclie
faisait la ^ueire. C'est en son propre
nom qu'elle pren.iit pos^>c$»iou k\c nos
provinces et de nus places; cl, après
i} (.V.e ilan» \e inni.e irinp* que Mjr»-t n
Sr':ioiniiIf fumit rtiTovr» »n Itaiic psr lei co-
•tiiies de l« (.oiivrnliuu, |>our y nrgi rirr avrc
tlilfrrrnlrt {luianct, n qu'il* furmi artnrt
'ur le territoire >ait»e par «r.tr- .».. r,l....,| \^
Vienne, ^ui fit faïkir \o\k\ U < . : ■.,, ■
Iruciion» , aiw»! que le» «i> il.lr^
dont il< riaient portenra. lu .■«.> <-iit < mn ieurs
uialle» 60000 loui» ru or et dr plut forte» utm-
me» ei»r«>re m (lapirr de rrrdit »iir 'lilf^rro^ei
pllre* . A qai riait dettiné cet argrnt * |U n«
l'eut jjtii»!» diii mai* tl r»t m\srt fjiile te le
ouiiprri.il, r. !t 1< Coiiventinn , i!aiit le penl
où etle - u'ivait pas compte »or
«'•relit 1 itrl oi> ; elle 1> t a«ail < !)•
c«>re tli.'.^ j l'.\iitri( lie 1j drlivraiire
•Ir la r'-ifte d- l-raitte, et m'^inr relie dr tes eii-
fanlf. Lorsqu'ils te virent iiicarri-rr> d.ii>» la ci-
ladrlle de ^I^n'our, lis riiTu\c> frai.i jis »e hi-
lArent de faire coDoaitrc cette pirtie de Iruri
in«tr«clioiia , ne doutai. t point qu'one pareille
coniinnnicJiion ne leur fit jussiiot rrcouvrrr la
ISber<r ; mais il n'en Tut ri>-n ; on \rs m^ern aa
coolr-iirv Javaiitagr ; rt lorsque rnfiu l'A utricba
con riiiit a ouvrir Us porte* de leur i rison , il
y ataii Jeux ans qne l'infortant-e Marir-Autoi-
ueile était iiioric »ur uue<li«faud ; et »oii 61s,
rbrriliT du irôD* de l.oui* \V|, était aussi
mort dans les soorTraiicrs d'une loii^e cap-
t>«rte:
KiL
ItlCf
au'clie sr Li ainsi emparée de (>Midé el
«le N jlrntit^inr», il ne s'a|*i^satt (du^
po»r rlle que de ronipleler une fron-
tière atift l*a>s-I>a&, lesquels elle avait
aulrefuts \ofilu r.der à ta rrut>e, mais
qu'en ce moment Tliu^ul foulait con-
server. Kl dans le inmie temps le
duc d'^oik , qui avait r^alemciit de
^on cabinet des in>tiuctioiis et dos or-
dres p(»ur s'emparer, au nom «le l'An-
f;leletre, de la place de Dunlerque,
cet ancien objet descunvoitisetsbiilati-
nique», n'attendait pour cela que l'avis
du départ d'une eipédilion maiiltme,
prt'pai ée à cet effet . ' i:itieisde
la'lamise. Cfspr: 1 • it lon»s,
et, en allendant, le pnnie anglais déli-
beiadans le> inur>dc ^ alenriennesavec
le ^«•n<'ranssime atitr:r!'.ten,(V()Ui .savoir
si, avant d'entroprein'te de nouveaux
sièges, ils ne devaient pas frapper nn
dernier coup contre l'aimée fiançaisc
et la mettre hors d'rlat d'interrompre
leurs opérations. C'était une question
fort simule , el cependant ils furent
près de deux semaines à la ré^oudu*.
N alonciennes avait capiliilc le '2H juil-
let, et ce ne fut que le S août que l'ar-
mce aiistro-bntaiiiiiqiir parut devant le
camp de César, iin-ciséincnt le lende-
main du jour où Kilniaine l'avait éva-
cué. On a dit qu'il fui prévenu
de la marche des coalist's , el cela est
assez probable, car on sait qu'alors les
comités de la Convention avaient de
secrètes iiilelli;;ciicesdans tous lesétals-
raajois et même dans les cabinets de
la coalition. Au reite Kilniaine en se
retirant ne faisait qu'obéir à la né-
ces:»ité. H quittait une position où il
ne pouvait plus tenir , tant son ar-
mée était peu nombreuse et démoia-
lis«:e ! Si les alliés eussent voulu la
suivre sur la Scarpe ou sur la Somme,
un dernier eiïort pouvait la disperser
complètement, et ils étaient les maitres
de la capitale ; \U pouvaient renverser
la révolution dans ses bases. Mais
KIL
KIL
c'est ce que n'ont évidemment jamais
voulu les Anglais ni les Autrichiens ; ils
aimèrent bien mieux dans celte occa-
sion, comme toujours, profiter de nos
désordres et de nos révolutions pour
s'emparer de nos places et de nos pro-
vinces, afin de s'assurer des indem-
iiitrs , des garnnfirs , et laisser /e
volcan se consumer hii-même^ com-
me le disait naguère un prince prussien.
Jamais , il faut en convenir, cette
politique ne se montra plus évidem-
ment dans sa honteuse nudité. Ce fut
au moment où Kilmainc, après avoir
abandonné le camp de César, qti'il ne
|>ouvait plus défendre, et s'ètie retiré
derrièi e la Scarpe , barrière encore
plus faible que celle de l'Escav.î, se
préparait à se réfugier sur la Somme
son dernier asile, que les deux chcfi de
la coalition, qui n'avaient plus besoin
que d'un dernier effort pour compléter
leur triomphe, firent tout-à-coup voile
face, et séparèrent lcu?s forces , l'un
pour aller s'emparer de J)imkerquc ,
l'autre pour assiéger le Qiicsnov.
On sait ce qu'il arriva de ces deux
conquêtes, dont la première ne put
s'accomplir, et dont, au bout de quel-
ques mois , il fallut rendre la seconde.
Alais ce qui doit étonner davantage,
même à cette époque de duplicité et
de déception, c'est que le brave Kil-
maine, qui avait rendu un immense
service à la nouvelle et si précaire ré-
publique, qui, par sa retraite exécutée
contre l'avis des représentants i\\i peu-
ple, et par conséquent au péril de sa vie,
avait conservé à la France son armée la
plus importante, fut précisément à cause
de cela dénoncé, arrêté, et passa près
d'un an dans les cachots de Paris, trcs-
heut eux de ne pas mourir sur l'échafaud ,
comme Custinc qui l'avait précédé
dans le commandement , comme son
ancien prolecteur lîiron, et comme
Mouchard, enfin, qui avait été pendant
quinze jours son successeur, et qui,
après une victoire décisive et très-
honorable sur le duc d'York, ex-
pia le tort si grave alors d'avoir mé-
connu les pouvoirs d'un représentant
du peuple. Kilmaine ne recouvra la
liberté qu'après la chute de Robes-
pierre. Ktant resté alors encore quel-
que temps à Paris sans emploi, il s'y
trouvait à l'époque de rinsiirreclion
du r'' prairial an Ht (20 mai 1795),
et il seconda avec beaucoup de zèle
Pichcgru, dans la lutte que ce général
eut à soutenir pour la défense de la
Convention nationale contre la popu-
lace insurgée des faubourgs. Il com-
battit encore pour la Convention au
13 vendémiaire de l'année suivante
avec Bonaparte ; et le parti révolu-
tionnaire. Jl suivit ensuite ce géné-
ral à l'armée d'Italie , où il eut part
à ses premières victoires; comme aussi
à celle de Castiglione et surtout au
siège de îvJantoue qu'il fut chargé de
couvrir dans le mois de sept. 1796,
lorsque Wurmser, s'étant présente
avec une nombreuse armée, j'our déli-
vrer celte place, fut contraint de s'y
renfermer. Kilmainc contribua beau-
coup à cet heureux résultat; cl il aida
encore très-efticacement le général
en chef dans les opérations et les
intrigues qui précédèrent la prise de
N enisc; ce qui donna souvent à Bo-
naparte occasion de le voir et de l'ap-
piécier. Voici , d'après les mémoi-
res publiés par le général Montho-
lon , le portrait qu'il en traçait à
Sainte - Hélène : «* Kilmainc était
« un excellent officier de cavalerie; il
a avait du sang froid, du coup-d'œil;
« il était très-pro[)re à commander
« des corps d'observation détachés, à
« toutes les commissions délicates
« qui exigent de l'esprit, du discer-
" ncmenlcl une tcte saine... 11 rendit
« des services importants à l'armée,
« dont il eût été un des principaux
" généraux sans la faiblesse de sa santé.
RIN
•« il a«ail UDe grande connai ^jncr
•• tirs Iroupr^ aiilncliirnnn. Kamilirr
f i\rc Inir lartiijiie, il ne s'en lais>ail
« |>oinl im|»o rr par 1rs (.\u\ bruits
•• qu'elles snnl dans l'haliiludr de
" rrpandre sur le* dm ières d'une ar-
" nier, m par re< trte.s de colonne*
• qii'rl|p> jellenl dan* loiiles Ifs di-
-< rections pour faire croire à la pre-
•« .senre de {grande* force» où elle» ne
•< sont pas. Ses opinions pnlili(|ue«
- eiaienl fort modérées... »• I^ Di-
rectoire \oulant , en 17*JS, donner
le cliaii»;c îur le but de l'expriiition
qu'il p.eparail pour rK.;i\p:e, pensa
i\ur \r nom d'un Irlandais serait pro-
pre a faire croire «ju'plle était deslinee
pour l'Irlande , et il le noniiiia i;éiiéral
ci\ clief de Wirmre li' An^lrtrrrr qui
n'eMsIa jamais, le rôle de Kilmaine
en cette occasion sf borna donc ï
«juejqiies courses sur les cAtrsdc France
rt de Hollande. Kn 1791), le L)i:ectoire
lo nomma plus sérieusement ^jéncral en
clicf dr l'armée d'IieUetie; mais sa
^jiile l'obbi^ea bien'ôl de céder ce
comm.indcmrut À Masséiia. Il revint
à Paris , où des clia;:rins domestiques
aïoiilèient à ses soulfiancrs. Atteint
d'une maladie ai^ui*. il mourut le 1 .■>
décembre de cette aiiiue, au moment
ou rdcxalion de Bonaparte allait lui
ou\rir une biillaute carrière. M — l» j.
k'i.\(i John , savant é\èque an-
glais, iic\cu de Robert Kinp, premier
évèquc d'Oxford, naquit en 1559 à
Woinal, dans le comté de liucLin-
gham. 1! de\int ciiapelain delà reine
Elisabeth, archidiacre de Noltint;ham,
do\en d«* Christ-Church, et enfin évo-
que do Londres en 1611. l)istinj;ué
5U(tout par son éloquence, il prêchait
avec beaucoup de ztle et d'assiduité.
Jacques II, faisant allusion au nom de
A/'nrr, qui en anglais s-^nific roi\ l'ap-
pelait le rui des prédicateurs. Sa
mort eut lieu en 16'21. On a de lui
des Sermons et des Leçons (lecta-
KIN
5ii
res ) A//r Jonas ^ 159i. — Kin«,
( Henry ) , éxèque de Cliicbestei ,
était fils du prnédent, et naquit à
WoTn.il en 1591. Successivement
cbapfl.nii dr Jacques l*"*^ rt {\r Chât-
ies ^^ il lut elcve en Itiii sur le
sièi;e rpiscopal ou la difficullr des
trmps l'rxpo^a à la peisérulion. Uéduit
à .se caihrr pendant la ^iieire ci\ile , il
recouvra son é^èch^ à la ir.slauration,
et moût ut en 1669. Il >emblait avoir
hérité de son père le talent de la pic-
dicalion. On a de lui des .sermons
imprimes à diverses époqur^, rt »jurl-
ques .«litres écrit* : I. l. xpmititni île
itirtii^on din'iinii (de, 1 (»:iS et 1 6.') \ ,
in-V'. 11. Les Psaumes de I)o%'id,
mis rn vers, d'aprr^ la nouvelle tra-
duction de la Itible, 1651, in-l'J.
m. Projtirid frniissenirni poussé
au r funérailles de rinroiuftaraUe et
glorieux monaripie Charles i*^' ,
1619. IV. Pot mes ^ elrgies, fut ra-
dotes et sonnets, 1657, in -8". \ .
Dii'ers poèmes latins et fi r ers, elc,
— Son Irrre. ./oA/i KiNG, orateur pu-
blic de runiveisité d'( )\ford, chanoine
de ^^ iiidsor et prebeiidier de Saiiil-
Paul, moirut en 16i>9, n'a\aiit publié
que (jurlqiirs ojuiscuies. I..
KI\(i \\ iiii\>i\ pnblicislean-
glais . naquit à Slepnev , dans le
Middlcsrx en 16S5. .\près avoir 1er-
miiH", en 1701. ses études riassiqiies
au rolle;;e de Hailiol à Oxford, il suivit
la carrière du droit, et prit, en 1715,
le de;;ré de docteur. Secrétaire du duc
d'Ormond et du comte d'Arian pen-
dant qu'ils occupaient le poste de
chancelier de l'université, il fut fait, en
1718 , principal de Saint-Mar\-
Hàll. S'étant présenté, en 1722,
comme candidat à l'uniNersité, il rési-
}jna son office de secrétaire, mais le
docteur Clarke, son concurrent, TaNant
emporté sur lui, ;i se rendit en Irlande
immédiatement après cet échec. On
i^ore les véritables motifs de ce Toya-
522
KJN
KIN
ge, que ses ennemis attribuèreiil ad dé-
sir (le mettre lui-même en vente ses ta-
lents et son suffrage. H a repoussa vi-
vement cette accusation et rien i:'a pu
faire supposer qu'elle fut fondée. <« A
«< aucune époque de ma vie, dit Tviuj^,
«< soit en Angleterre, soit en Irlande,
« sous le f^ouvernemcnt actuel, comme
" sous ceux qui Pont précédé, je n\ii
«< essayé par aucun moyen d'obtenir
« une place, une pension ou un ein-
« ploi de quelque espèce que ce soit.
« Je pourrais assif^ner différentes rai-
« sons pour ma conduite, mais il en
« est une que j'ai toujours été dis-
« posé à donner. J'ai hérité de ma
« famille un patrimoine suffisant pour
« satisfaire à tous mes besoins , et
« pour me laisser la liberté de me
« livrer à ces études libérales qui dans
« ma jeunesse m'ont procuré les plai-
« sir les plus solides, et qui ont été
M les délites et le bonheur de ma
« vieillesse. J'ai d'ailleurs toujours
« conçu une secrète horreur pour un
« état de servilité et de dépendance ;
« et je n'ai jamais vu qu'un homme
« en place ou un courtisan, dans une
« classe élevée ou inférieure, prêtre ou
« laïque , fut son propre maîti e. »
Pendant soji séjour en Irlande, il fit
imprimer un poème épique, Ir. Toast,
sous le noui de Scheffer , lapon , et
supposé traduit par Pere|^rine Do-
nald. C'était une saliie politique qui
fut donnée à des amis, mais jamais ven-
due. Warton pi étend qu'd faisait dans
cette satire des allusions mordantes à la
couilessc de Ncwbur^h. Lors de la dé-
dicace de la bibliothèque de l\adcliffo,
en 17 W, il prononça sur le théâtre
d'Oxford un discours latin qui fut ac-
cueilli par les acclamations d'un nom-
breux auditoire. Warton lui accorda
à ce sujet de grands éloj^es dans ses
Triomphes (TLsis (the Triumphs of
Isis). Mais, loisque ce discours eut été
imprimé, il ne fut pas eit géntral aassi
bien acf:ueilli. L'auteur fut attaqué
dans plusieurs pamphlets ; on lui repro-
cha d'écrire en latin barbare, de cher-
cher à faire délester le gouvernement
et à poussc^r les jeunes membres de
l'université à la sédition et à la licence;
accusations très-graves, si on ne de-
vait pas présumer qu'elles sont dic-
tées par l'esprit de malveillance et de
parti. xV la mémorable élection qui
eut lieu en 1755 , dans le comté
d'Oxford, l'attachement qu'il montra
pour l'ancien ordre de choses lui
attira le ressentiment des partisans
de l'ordre actuel. O.i l'attaqua vio-
lemment dans les journaux et dans
les pamphlets, et on l'accusa d'être wn
Irlandais, d'avoir reçu quinze cents li-
vres sterlino; pour des souscription.", à
des ouvrages qu'il n'avait jamais pu-
bliés, d'avoir cherché à se vendre en
Angleterre et en Irlande sans qu'on
eût trouvé qu'il valut la peine d'être
acheté ; d'avoir écrit le Londun coc-
Tu'ng posl ; d'être enfin l'auteur <ies
Considérations potitiques, ouvrsge
pubHé en 1710, sous le règne de la
reine Anne, et àwDreamcr, qui avait
paru en 1754, sous le format in-S".
11 publia à cette époque son Apolo-
gie, dans laquelle il se justifia assez bren
des imputations qu'on lui faisait, tout
en s'avouant néanmoins l'auteur du
iJrcamer et en récriminant contre ses
adversaires. Parmi les ouvrages que
King a reconnus être de lui, nous ci-
terons: \. Miltoni epistola ad Pol-
liancni (lord Polwarth). II. Srrmo
pedestris. III. Scnmmim, er.loga ,
IV. 'Tenipliiin lUiertatis, en trois li-
vres. V. Tresoratiuncnlœ. Vl.Epis-
iula o/jjiirgatoria. VIL Antonictti
ducis Corscorum epistola ad Corscos
de rege eligendo. Vill. Kulogiitiii
Jacci etoncnsis. IX. Avili epistola
ad Perillam, virginem Scotam. X.
Oratiuncula habita in domo convo-
vationis ojoon. cum epistola dedica-
RIN
\ti%h. Kinp, en '
rrir; fp pl'i iî '
l'orj r!.iv.M(jiif , d'un orateur cxrpllcnt et
«l'un et i l>ain au5<i élégant que facile
ni laliii et m aii;;lais ï). Il mourut le
'M) lier. 1703, après avoir e«qui<sé
fiii-mcmc son propre caractère dans
une rpitaplic ou il avoue ses défauts,
et réclame des louaii;;cs pour 5a bien-
veillance, sa temnérnnce et son cou-
r.i;;e. Celle épil.i;'! r îîrvii't éfre 'gravée
sur uneboîlecro irson
C(r»r aurait été j con-
servé à Saint-^lary-iiaii. li lut en-
terré dans ré;;lise d'Kalin;;, mais
l'inscription est sur unetahlede mar-
l>r.^ de la chapelle de Saint-Marv-
llall. On trouve un portrait frappant
du docteur Kin;; dans l'aperçu donné
par \Vorl!di;e de rinslallation de lord
^^ eNtinorlaiiii tomme chancelier de
riii.!\er>ilt* d'Oxford, en 1761. On
peut aussi consulter sur Kinj; Nichols's
fîouver et Swift. I) - 7.— s.
KI\(1 (sir KiCHARn) , vice-ami-
i.<l anglais, fils aîné de Tamiral du
M.rll.-.ro„-l..
d«* Oarbutu. K...„ - ; - » c
«ir trr* au'trre : oc burjiil que d« i rau. ii pm*
Mit que l'ope aviil »brt-|;r se« joum eu liuvtnt
det liqueiir« *|i t de mets tr^»-
«••aiv>noo4. l! r dr» nrr^ai»
jnj;! ran«, . l -i r\\:'\\s m
r|> •«« et prrr» , un ^- \
K>Dt inr>rt«, dit il. U >
rt.». i al r, eu I -^1 . . r
el . l uii.v-rMU . ji:. -
sr. mariaprdii roi. (ui
• < , r te parlî ja><'!>i;c
dont il Dr Urda pa-> a »«>rp«rt r.— Ltirédacteort
de V EJ.nbmrgh Jltrfm . en ai:oou(ant la deiuiè-
mf ' ■ f "J tri . qui parut à I tm-
li l^utjust ce an d^sinlérti-
5- Uoce de carjclirtt de ce
t L.
KIN
5i^
même nom. naquit le 2W sept. 1771.
Entré de bonne heure dnns la ma-
rine , il «erv't \ lM»rd de plusieunt
•r son père, et
^ . e fixé par les
reniements, li ohtmt le ranj^ de capi-
taine et le commandement delà fréj^ate
.-/i/rorri.de^inpl-hnit canons, avec la-
quelle il croisa dans la station de l'Ir-
lande, SOIS les ordres de l'afiiiral Kinj;*-
mill jusqu'au mois de juillet 17î>.'». \
relie époque il succéda au capitaine
Re>nolds dans le commandement du
Druitl. de ii ente-deux canons. Sc^ bCt-
viceaàbordde ce na\ire, à\tc lr(juel
il aecom;ia;Mia un ^jrand nombic de
convois allant en l'ortu^al ou en ve-
nant, furent plutôt dilTiciles que bril-
lants. Le 7 janvier 1707, il s'empara
de la / l'Ilr Hr î,on\'nf, ;;t and na> ire de
transpoil français de la malheureuse
expédition de Morard de (lalles, diri-
î;éc contre l'Irlande; et, pendant l'été
de la même année, il passa k bord de
la frégate le Strius, plarée sous les or-
dres de lord Dnnraii à la hauteur da
Tevcl. L'année suivante, en allant re-
connaître ce port , !e capitaine Kinj;
rencontra deux navires de ^^uerre hol-
landais , nne frégate et une corvette.
Oimme \U étaient à denx milles l'un de
l'auîre et hors d'état de se soutenir
mutuellement, il attaqi:a d'abord la
corvette qu'.l força d'amener son pavil-
lon, et, après une assez longue chasse
el un combat d'une demie-îieure, il
s'empara é;;aleracnt de la fré;;ate. C'é-
tait la Furie, de trente-six canons et le
fViiakzfiamhriiJ, de quatorze, sortis
du Texel la nuit précédente avec des
troupe*; et des armes deslinérs pour
rirhr.le. Cette affaire est remarqua-
ble par la singulière erreur de juge-
ment dont elle fut l'occasion. Un sloop
de guerre anglais se trouvait à une
très-petite distance du Heu du combat
etitre le navire du capitaine King et la
conrette hollandaise ; mais, malgré les
5î4 KIN
vives instances de ses officiers jimii
aller y prendre part , le commandant
de ce sloop s'y refusa obstinément
dans Tinlime persuasion que c'étaient
trois vaisseaux ennemis qui fei^iinaicnt
d'avoir entre eux un engagement
pour l'attirer à portée de canon. Quoi-
que le capitaine King répondit à ses
signaux particuliers, son illusion ne
cessa que lorsque l'affaire fut terminée.
Une profonde mélancolie s'empara
alors de ce mallieureux commandant, et
lord Duncan sous lequel il s'était dis-
tingué peiidant la guerre précédente
à la bataille de Camperdown , ayant
refusé de le voir, il se donna lui-mcmc
la mort quelques semaines après. Le
S/n'i/s fit depuis différentes captures
sur les côtes de France, mais son ca-
pitaine n'eut aucune occasion de se
signaler particulièrement. Le 26 jan-
vier 1801 , il donna la chasse à la
Dédaigneuse, fiégate française de
Irente-six canons, el, après une pour-
suite de deux jours et un combat
acliarné de trois quarts d'heure , il la
força de se rendre à V Oiseau et au
Sirius. l.'Amrthist s'était aussi jointe
à la chasse, mais elle ne put arriver
qu'après la prise du bâtiment. Ce fut
la dernière de cette guerre, ^.ç^ Sirius
ayant été désarmé en 1802, le capitai-
ne King resta à terre jusqu'en 1805,
que son gouvernement lui confia VA-
c/iille, de soixante-quatorze canons.
On le voit la même année avec le jDr<?r/ J-
//ow^///ctle6'o/o.v.î//.vsousCollingv\ood
devant le port de Cadix, d'où ils furent
chassés par les flottes combinées de
France et d'Espagne. Au mois d'octo-
bre suivant, il se trouvait sous les or-
dres de Nelson et prit part au com-
bat de 'JVafalgar. Engagé successive-
ment avec les vaisseaux espagnols le
Mon fanez et V Argonaute, il força
l'un à s'enfuir et l'autre à baisser pa-
villon. Deux navires français le /ii^r-
wick et V Achille se présentèrent pour
KlIN
l'cmpccher d'animer sa prise; une ac-
tion violente et désespérée s'engagea
alors entre V Achille anglais et les
nouveaux antagonistes, et se termina
par la capture du Benvick. Ij Achille
eut dans ces affaires treize hom-
mes tués et cinquante-neuf blessés.
L'année suivante, le capitaine King
fut présent au combat dans lequel sir
Samuel llood perdit un bras, et où
quatre grosses frégates françaises fu-
rent prises. A la mort de son frère ,
arrivée en nov. 1806 , King lui suc-
céda dans le titre de baronnet. II
servit ensuite au blocus du Ferrol el
à la défense de Cadix, où l'équipage de
V Achille fut reparti dans des chalou-
pes canonnières sous les ordresdu lieu-
tenant Pearse. De Cadix, sir Richard
passa sous les ordres de sir Charles Cot-
ton, comme capitaine de la flotte de
la Méditerranée, et il servit en la
même qualité, dans la flotte du Canal.
Compris dans la promnîion du mois
d'août 1812, il joignit la flotte de sir
Richard Pellevv stationnée devant la
hauteur de Toulon , avec le San-Jo-
sepli, de cent douze canons. Ce vais-
seau fut un de ceux qui se mesurèrent
au mois de novembre 1813, avec l'ef-
cadre française commandée par l'ami-
ral Emeriau qui avait son pavillon sur
le Tf^agram, de cent trente canons.
Mais les Français, ayant l'avantage du
vent , furent en peu d'instants hors
de portée, et le feu, auquel s'étaient
jointes les batteries du iSV^;^^, cessa.
J^a perte du San- Joseph fut seule-
ment de deux à quatre blessés. Sir Ri-
chard venait d'être nommé chevalier
commandeur de l'ordre du Rain ,
quand au printemps de 1810 il hissa
son pavillon à bord du Minden, ayant
reçu le commandement de la station
des Indes-Orientales, d'où il revint
au mois d'oct. 1820. Le 19 juillet
1821, il reçut sa commission de vice-
amiral, et il fui nommé grand'-croix
KIN
KIN
5i5
«le rniJrr Ju Bain en 1K33. Il était
tuinmaiiilant rn rhrfiians la MriLvuy
lorN.|iie, apreN (li\ jnurs ijr inalatln*, il
l'iuiinit dans l'Iiotrl «le l'Amiianlé à
Slirrner*. le .'» août lK:ii. Ses ir^Jrs
lurent t)e|»ose5 ilans i'é^lise de l'Ile «le
Slir|»|i\. Sir KichariJ Kinj; avait eu «le
Min premier maria<;e avrc la lili.* lie
l'amiral DurLworlIi qtialie til'. et une
filli' ; il eu! doti\ tiU cl ticut ûlle-» île
^(,n sri'onJ mariage a\ec la fille de l'a-
nrtal (motion. D — 7. - %.
kl\4j (PlFnnK lotd). publiriNte
anglais, descendait du lord ^rand-
rliancelier du mrme nom. Ne^eu par
sa niere du crlcl>re lxKKe(/'o>'. Kl!<r,
{l^irrre), Wll , V2V) , 61$ aine
du sixième lord Kin;» et de Char-
luile tVedrrdfl , il naquit le 31 août
1770, et fut élevé à l'université de
C^mbrid^e. Il était encore mineur
i»)tsque son prie mourut au mois de
nov. 17y;i. 11 ^uccéda au titre de
lurd OcLItam, et devint pair d'An^le-
Iciie. Des voti eiilrce à la cliambrc
liaute, lord K'n^ li;;ura dans Ici r3ni;5
de I opposition dont il >e montra l'un
d«*smembies les plus actifs. 11 attaqua
dans la >eance du 12 fc\rier iStK)
l'expédition de Hollande, et appu\a
la proposition d'une enquête pimr re-
rliercher les causes des désasiies qui
en avaient rli- la suite. lU'opposa le 27
a ce qu'on suspendit plu.s lon^-teni[>$
l'acte iï Ïiulu-Lis corpus , et dit que
telte mPNtiie n riait propre qu'à au^-
nu-ntcr le pouvoir ministériel, aux dé-
pens des libertés publiques. Kii 1803,
j1 prit une ;;rande part aux discusMons
qui eurent lieu lorsque la banque d' \n-
^Icteiie su>pe:idit ses paiements, et il
publia à ce sujet un pamphlet intitulé :
Pensrrs et reflexions sur les restric-
tions des fHiieinents en espèces aux
bam^ues iC Angleterre et d'Irlande.
11 fit imprimer aussi, en 1811, un dis-
cours prononce par lui à la chambre
des lords sur le hill du comte de
Stunliofte, concernant les gtnnees et
les hdletK de bampie. Au mois t!c
mars iHlf», il ipproclia \i\ement auK
ministres de n'avoir fait aucune dé-
marche auprès du con;;rès de Vienne,
pour la rentrée ties fonds dus au ;;ou-
vernement anj;lais par l'Autriche et la
Kussie depuis 17l)fi. Kn 1820 ^1«J
août), il s'opposa fortemoni à toutes
les mesures proposées contre la reine
(>aroimp ; et, en 1829, il publia la
/ ie de John I. tck". un volume in-i*^
avec des extraits de .i correspondance,
des journaux et di coninum place
lUpok , d'après des matériaux orl^ji-
naux qui rtaipiit en sa possession. Une
5ect)nde rdition de cet cuvraf^e a paru
en 1830, dans le format in-8", avec
d'importantes additions puisées dans
les propres notes du lord-chancelier.
J/ord Kinj; se fit aus.si remarquer ver.i
la 6n de sa carrière comme un ennemi
violent de l'ét^lise an;;luanr. Il mou-
rut à I.ondies le V juin 1833. Il a\ait
épousé, en 180V, Ilester Fortescue,
fille du comte de ce nom, et nièce
de lord (irenMJle, dont il a laissé un
(Ils et pluvieuts filles. I) — 7. — s.
KI\SHi-:UC;K\ ^le comte
Jfsn-Mfm\i van', amiral hollandais,
né le V^ mai 1735, à I)op>bourR,
dans le pa\s de (lueldres, d'une fa-
mille noble, entra au service dès l'àj^c
de neuf ans dans l'armée de terre, cl
pas>a dans la manne cinq ans après.
H y parcourut avec rapidité tous les
grades, et il était vice-amiral en 17(i7
lorsque la i;uerre éclata entre la Porte
et la Kussie. A\ant obtenu du stathou-
der la permission de passer au service
de celle dernière puissance, il fut ac-
cucitti avec beaucoup d'emjiressement
par l'impératrice Callierme II, qui lui
confia le commandement d'une flolte
de cinq vaisseaux de h^ne et de quel-
ques petits bàliments de guerre, a\ec
laquelle il remporta dans la mer Noire
une victoire importante sur la flotte
5?.6
KIN
turijiie, composée de treize vai<îscaux
(le li;;ne. Il lit dans celte occasion la
première expérience d'une nianœnNie
très-ingénieuse et qui depuis a été imi-
tée dans toutes les escadres de l'Eu-
rope. Ayant observé avec soin l'élat
de la navigation et du commerce dans
ces parages, il remit à l'impératrice un
mémoire que cette princesse reç'it
avec beaucoup d'intérêt. Cependant
Kinsbcrgen quitta la Russie , et il
revint , en 1776 , dans sa patrie ,
où on le char£,ea aussitôt de néiro-
cier la paix avec l'empereur de Maroc;
ce dont il s'acquitta avec autant de
bonheur que d'habileté. La guerre
avec l'Angleterre ayant ensuite éclaté,
Kinsbergen fut mis à la telc d'une di-
vision de sept vaisseaux de ligne sous
les ordres de l'amiral Zoutman, et il eut
beaucoup de part à la victoire de J)og-
gersbunck, qui fut remportée sur l'ami-
ral Parker. Lorsque la paix fui conclue
(1783), on lui fit des propositions
avantageuses pour !e service de Russie ;
niais il s'y refusa obstinément, et, ne
voulant plus quitter le service de sa
patrie, il rejeta en mrme temps de
pareilles offres qui lui vinrent de la part
du Danemark. Reste ainsi l'un des
chefs les plus distingues de la marine
hollandaise, il jouissait d'une grande
fortune, et se trouvait dans une position
très-brillante, lorsque la révolution de
France vint porter le trouble en Eu-
rope et plus particulièrement en IIol-
l.iiulfi. L'amiral Kinsbergcn concourut
d'abord avec beaucoup de zèle à re-
pousser les premières tentatives d'inva-
sion qui furent faites par inimouricz;
niais(juand les Provinces-Unies, si lion-
leusemenl aJ>andonnées par leurs alliés,
furent définitivement tombées au pou-
voir des Français en 17'.)5, et que
ceux-ci les soumirent à leurs systèmes
de rénovation , l'arairal Kinsbergen
fut destitué et arrêté. Il ne recouvra la
liberté qu'aux prières de son ancien ami
KIN
Schimmel-Péninck. S'ëtant retiré dans
une de ses terres près de Doesbourg,il
ne s'y occupa plus que de sciences et
d'agriculture. Ses amis firent d'inutiles
efforts pour le tirer de cette retraite ;
et il ne la quitta pas même lorsque le
frère de Bonaparte, devenu roi de
Hollande, le nomma son chambellan-
sénateur, et, en mémoire de la gloire
qu'il avait acquise en combattant les
Anglais, le fit comte de Doggers-
bunck. Ne pouvant pas repousser
ces honneurs, il en refusa du moins tous
l£s traitements, et continua de vivre à
sa belle terre d'Appeldoorn, où il avait
établi des serres chaudes, et où il culti-
vait des plantes de tous les climats.
C'est là qu'il mourut en 1820. Le
comte de Doggersbunck, véritable phi-
lanthrope, fut le créateur de beaucoup
d'élablissemenls utiles. C'est à lui
que la Hollande doit l'institut de la
marine à Amsterdam, celui des sourds-
muets àGroningue, les académies d'II-
treclit , d'Harderwich , etc. Mem-
bre ou correspondant des principa-
les sociétés savantes de l'Europe, il
a publié, sous le nom de ses élèves ,
des cartes et des ouvrages qui sont
devenus classiques : 1° Ordre etin-
slruclioii concernant le service des
vaisseaux; ^^^ Exercice du canon sur
un vaisseau de guerre ; 3° Manuel
du marin ; 4" Principe de la tacti-
que de mer ; 5*^ l'Artilierie pratique
de la marine; 6" Description de
l Archipel , avec une cai te générale.
Ce dernier ouvrage, qui est très-es-
timéjfut traduit en allemand en 1793. -
M— i)j.
KIXSK"! ( François-Joskph ),
général autrichien, naquit à Prague,
le G décembre 1739, de l'une des fa-
milles les plus illustres de !a P>ohêmc,
dont son père , le comte François-
Ferdinand, était chancelier et gou-
verneur héréditaire. Envoyé de bonne
heure à l'académie de Vienne, il y fit,
RfN
MN
r^-.
avrr bottroup t\c siirrès, $c$ premièi es
ëtinlr*. (ju'il ^int terminer à riiiiiMT-
sil«r (le rra;;u<'. Iîf^liné il'ahoi J 4 la
rirriffc ci\iU, il se livra à la science
(les lois ; mais, 5on gotU particulier
rentraiiiant ytn les ariues, il entra,
en IT.'iî), comme volontaire, dans les
cliex au -légers , donl son frère, le
ciimle Jo.trph, é\iA colonel. Il passa
ensuite, comme sous-lie«iten»ul, dans
Ir r^^imrnl de I^sc), et fil, en cette
({ualitr, les premières campagnes de b
guerre de irpi ans , contre les l*rus-
siens. Kn 17G0, il faisait naitie, com-
me capitaine, du corps d armée com-
po*i* de !\i.'<.$e$ et d'Autridiiens qui ,
scnis les ordres de Lascv et de Cier-
niclicfT, snrpril et occupa T.erlin. Ce
fut lui qui en porta la nouvelle au ma-
réchal haun. Il devint lientcM major,
puis colonel (176S\ Alors, plein de
zèle pour l'inslruition de son irj;imcnt,
il V cré-1, à ses frais, en faveur dos jeu-
j ;, une école qui fixa le> re-
îipératricc Marie Thérèse,
. - !■. il (le nio>!cle à quelques établis-
, .'::s du même •;eiirc. Toujours
.iNiiic d'instruction, il ne dédaignait pas,
mcnic alors qu'il était colonel, de sui-
vre les cour» parliruliers que le matîié-
m.Tlicien Tes-^aneL, professeur dislîn-
>^v.r, lennil à Prn;;uc. Le V septembre
177:î, il fut nommé général-major.
Trois ans après, le désir de connaître
toutes les branches de l'instruction
l.ii fit entreprendre , d'après le dé-
sir que lui en témoi;;nait l'impératrice,
pi'ti leurs VON a^cs pour visiter les éco-
les les pl'.;s renominécN. S'étant rendu
d'abord à Stuttj;ard, il y \h l'acadé-
mie militaire, qui alors joiiissait d'une
nrande réputation. En Suisse, il vi-^ila
les érole.> formées par le baron de Sa-
lis el Pesta!ozzi. De retour de ses voya-
ges, il adressa à rimpérntnce un rap-
port d.^ns lequel il fil des rapproclic-
ments cui ieux sur ces établissements et
celui de Vienne. En 1778, le comte
Kinsli commanda une Lri;;ade à l'aile
(;.iuche de l'armée qui se réunit en Ih»
liéme sous les oidres de I^udon. On
sait que, dans cette insignifiante cam-
pagne, le j;rand Fiédeiic et l'empe-
reur Joseph , séparés par l'Elbe, ne
fil eut la gueire que par des marches et
contre-marches, sans jamais en venir
aux mains. Il entrait alors dans le sys-
tème autiirliien de faire passer Iré-
qurmment les pé léraux d'un corp.s à
I autre. Ain>i, depuis tr 13 avril 177K,
jusqu'au moment où le- années piircnt
leurs quartiers d'hiver, Kiii:»Li &«
trouva successivement sous les ordres
des {généraux Wallis, Ellriciisbausen,
Albert de Saxe-Teschen, el NVurm-
ser. Après la pai\ deTeschcn, qui fut
si;:née le 13 mai 1779, il épousa la
fille du comte de Traulm.in.tijiifl , qui
était dame d'honneur de rinipératrice^
et cette princes.se le nomma, dans La
même année , colonel - prupilélalre
d'un régiment d'inranterie; puis , en
17S0 , .^ous directeur de l'aradéiuie
militaire de N ienne-Neustadt. Cet éta-
blissement célebie fut alors réorganisé
d'api es les idées et les plans que Kinski
avait conçus dans sr.s vovaf;es; et,
lorsque le comte Antoine Collorédo,
qui en était le premier directeur, moi»-
rul (1785), il lui succéda immédiate-
ment. En lui confiant ces foiirlions
importantes, l'empereur Joseph II lui
donna le titre de chambellan et le ;;ra-
de de feid-raaréchal-lieutenant. Fen-
dant sonadmlnistratio!! de ce bel éla-
blissemeot, quia duré viii;;t-six ans, le
comte Kinski forma la plupart des of-
ficiers et généraux qui ont illustré l'ar-
mée autrichienne. Dansle même temps,
l'erîfpereur, qui l'aim.iit beaucoup, lui
confia encore d'autres fonctions; mais
Jamais il ne quitta ses «lèves qu'avec
epliis vif rco;ret. En 17S3, il accum-
pa;;na ce prince dans son voya^^c en
Italie; et, en 1788, il dut le suivre
également dans sa campagne contre
528
KIN
KIN
les Turcs ^ où il fut spécialeineiit
rharj^é île ;iiiiger rnrcli'iluc Fiançois,
depuis empereur. Kiiiski suivit avec
beaucoup d'alleiillon les opérations Je
cette {];ucrrc, et il les fit toutes servir à
rinstruclloii (lu jeune prince, dont la
personne , gravement compromise ,
dans la nuit du 20 au 21 septembre,
ne fut sauvée que par sa présence d'es-
prit. L'armée autrichienne se retirait
d'Iilovsasur Caransebes, lorsque tout-
à-coup une terreur panique saisit l'ar-
rière-(;ard; et se répandit dans le corps
principal. L'archiduc se trouvait en
ce moment à la première colonne. Le
comte Rinski donna sur-le-champ ,
au bataillon qui était près de lui ,
l'ordre de se former en carré , et il
plaça au milieu le jeune archiduc, qui,
marchant ainsi pendant la nuit, arriva
sur une hauteur, où il prit position, et
se trouva en sûreté jusqu'au jour, où il
fut rejoint par les autres colonnes.
Plusieurs coups de canon furent tirés
sur le carré, et deux hommes furent
tués à côté du prince. Lorsqu'il quitta
l'armée, au mois de décembre 1788 ,
le comte KinsLi retourna à son acadé-
mie, et il ne s'en éloigna que six ans
plus lard, quand son ancien élève ,
devenu empereur , sous le nom de
Fiançois II, lui conGa le commande-
ment d'un corps d'armée, qui se réunit
sur le Rhin pour combattre les Fran-
çais. Envoyé d'abord dans le pays de
I uxembourg, pour y commander une
division, il fut bientôt dirigé vers les
Pa\s-r>as, où la grande armée austro-
britannique combatfait sous les ordres
du prince de Cobourg et du duc
d'York. 11 ) arriva dans le moment
où, a|ii es s'être emparé de Condé, de
Valencicnncs et du camp de Famars ,
cette armée, qui hésitait depuis doiix
semaines , allait enfin occuper, sans
combattre, le camp de Cé.sar, évacué
par les Français (Voy. Kilmaink,
dans ce vol). Le comte Kinski fut placé
ce jour-là (8 août 1793) sous les or-
dic:; de Glairfayt, et s'il n'y courut
pas de plus grande dangers, il n'y ac-
quit pas plus de gloire que le reste de
l'année dont il faisait partie. On sait
que les Français avaient déjà opéré leur
retraite sur Jja paume et Aiias , lors-
que les alliés se présentèrent devant le
fameux camp de César, pour l'atta-
quer, et qu'au lieu de les suivie les An-
glais allèrent faire le siège de Dunker-
que, et les Autrichiens celui du Ques-
noy. Le comte Rinski fut au nombre
de ces derniers , et il prit beaucoup de
part à ce siège. Après la reddition de
la place (18 août), sa division fut diri-
gée vers Maubeuge, et chargée encore
de couvrir les opérations du siège, que
Jourdau contraignit bientôt les Au-
trichiens de lever, après la bataille de
Wattignies [Foy. Jourdan , dans
ce vol.). Le comte Rinski reçut alors
l'ordre de joindre, avec Clairfayt ,
l'armée du duc d'York, dans la West-
Flandr e. Le 25 octobre, les deux gé-
néraux, parlant de Tournay, se mirent
en marche, et ils s'emparèrent d?. Me-
nin et de quelques autres places. L'ar-
mée française, sous les ordres de Pi-
cliegru, avait cerne Y'pres ; ils la for-
cèrent de se retirer sur Bailleul et Po-
peringen. Les alliés ayant pris alors
des quartiers d'hiver , Rinski resta
5.0US les ordres du duc d'York , avec
dix-huit bataillons, vingt-sept compa-
gnies et quatorze escadrons de trou-
pes autrichiennes. T/empereur Fran-
çois étant arrivé dans les Pays-lîas à
celle époque, la campagne de 171) i
commença, le 17 avril, par une atta-
que générale que l'on fit, du Cateau et
Forest, srrr l'armée française, carrton-
née entre Gurse et Landrecics. Le
jiilnce de Cobourg avait divisé ses
troupes en huit colonnes ; la troisième,
dans laquelle se placèrent l'empereur
et le général en chef, était sous les or-
dres du comte Rinski. Cette colonne
succrs, auuuci KiiisLi rut une ;;ran(Jr
[•art, la jM.icf se rendit ['M) a^rill
UN
enleva les postes et ie^ redoutes qu'elle
était rliar^ée d'allaquer , et rîlc piit
deui canons. I.e lendemain I.andie-
cie» fut cerné. Le prince héréditaire
d'Orange di[i;;eait le^ traxauk du
siè^e. I.e '22 avril , l'arrnre d'ob-
serralion , dont la seconde colonne
était sous les ordre^ de KiiiNli , at-
taqua l'armée française, la repoussa,
et s'établit sur les deux rives de la
Sambre. I.e même jour, l'empereur lui
annonçait , de Hiu&elles, par un billet
de sa main , qu'il le nommait général-
frld-zeu;;raeisler, ou -i and maître de
l'artillerie. l.e'JGaMil, l'armerfran-
çai»e s'avança p<nir dé;;a;;er I^ndre-
cie>, maiN elle (ut rrpoussee. Après ce
ucces, auqi
•art, la pi:
N rrs le milieu de mai, l'armée aulri-
cliiennr. partagée en six c«)rps, dont
le ({ualrieme était sous le commaniie-
ment de Kiii>li, entra en Flambe, pour
en chasser le général Picbe^ru. I.e 17,
le comte KinsLi s'empara de Houvi-
nes , et repoussa au-delà de Marck
le corps français qui était devant lui.
I.e> autres corps autrichiens furent
moins heureux ; l'iche^ru reprit Lan-
nov, Turcoinj; , Waterloo; et l'ar-
mée autrichienne se retira sur Tour-
iiav. Le général Iiender avant alors
été chargé d'aller prendre le comman-
ilemenl de Luxeinbourj , le comte
KinsLi fut nommé rommandant-oéiié-
ral dans les Favs-Uas; mais il eut i
peine le temps d'entrer en fonctions
que l'armée dut se retirer sur la Meu-
se, d'après les ordres qu'avait lais-
sés l'empereur. Le 12 juillet il
évacua lîruxellcs , où les Français
entrèrent immédiatement , et la re-
traite continua jusqu'au Uliin. L'ar-
mée autrichienne prit ses quartiers
d'hiver sur la rive droite du fleuve.
Au mois de janvier 179."), ayant été
nommé commandant de l'aile gauche
de l'armée autrichienne , Kinski fut
LXVllI.
KIN
Sig
cbar^é de défendre le passade du lUiin;
mais, depuis deux ans, il était absent
de son aradimie, ou ses élèves le ré-
clamaient i\cc une extrême impatience.
IjC 11 )uin, il reçut enfin ordre de re-
mettre le commandement de son corps
d'armée au générai Sziarrav, et de ve-
nir reprendre ses fonctions à l'acadé-
mie, qu'il ne quitta plus, )us<pi'au rooi>
i'aoùt t7'.)H, lorsque l'armée fran-
çaise, s'etant avancée dans le Haut-
Palatinat, il fut envoyé en toute hâte à
iVa^ue, pour y assister, au moins de
ses conseils, le général Hender , et
prendre le commandement tles trou-
pes. SI les Français pénelr.iieiit en Bo-
hème. Mais c'est alors que liernadolle
avant été battu à Neumairkt, et Jour-
dan à .\mberj; et à \\ urizbour;;, la
Hohèine fut hors de dan;;ei . Kin<^ki
relouiiia vers «^es élè\rs. .\ii moi-; de
mai iKtK'j, comme on piévo\ail qu'une
nouvelle guerre avec la France allait
éclater, l'empereur François voulut
visiter l'Autriche supérieure, et Kinski
reçut ordre de l'accompaj^ner. A\ant
été atteint le IS mai d'une violente
inllammation de poitrine, il (ut trans-
porté à Nienne; et il mourut dans
celte ville , le *J juin de la même
année. D'après ses dernières disposi-
tions, ses dépouilles mortelles furent
déposées au cimetière de l'académie
qui avait été si lon;;-lemps l'objet de
ses soins et de son affection. Les of-
Bciers de l'armée autrichienne, presque
tous ses élèves, se cotisèrent pour lui
élever un monument , dont l'exécution
fut conGée au célèbre Schaller. Ce
monument est [ilacé au milieu du
jardin. Sur le piédestal en marbre, de
seizt pieds de haut , on voit le buste
en bronze, de j;randeur colossale. Les
ouvraj^es que le comte ivinski a publiés
pendant le tem(is de sa direction et
pour l'usage de ses élèves, tous très-
estiraés , sont depuis lona;-temps élé-
mentaires dans l'armée autrichienne ;
34
53o
KIR
KIR
savoir : I. Abrégé élémenfm'rc de
ce qui concerne le service ini/ifaire,
•2'' édit., 2 part., tienne, 1795,
ln-8". II. Mélanges, 6 part,,
Vienne. 1786, in-8^ III. Frinci-
pcs généraux sur Vinstruction pu-
blique et principalement sur Vin-
struction luilitaire , 1787, in-8".
Ces divers oiivraj^es ont eu plusieurs
éditions. Une souscription fut ouverte
en 1825 pour une édition complète
dans un format plus classique, afin que
tous les oificicrs et même les soldats
pussent en faire usage. Dès Tannée
1775, le comie Kinski avait j^ratifié
la ville de Pra^^ue de sa collection
de machines hjdrauliques et de son
cabinet de minéraux. En 1776, il fit
don à l'université de sa bibliothèque
particulière et de celle de sa famille.
La ville reconnaissante le nomma di-
recteur de la bibliothèque et du cabi-
net de minéraux de Tuniversité. — Le
comte KiNSKi {Joseph)^ frère du pré-
cédent, fut comme lui un des f;énéraux
les plus distinj^ués de l'armée aulii-
chicnne. C'était surtout dans l'arme
de la cavalerie qu'il excellait. Jouis-
.sant d'une faraude faveur auprès de
.ïoseph H, il l'accompagna dans la
^ueiic de la succession de Ravière et
dans celle contre les Turcs. Après la
niott de ce prince il fut rarement em-
ployé, devint f^ouverncur de Vienne,
et mourut dans celle ville en février
ISOr. M— Dj.
KIUKi: uni TE. Voy.
\\ HiTi:, I>, i56.
IvIKWAX (KicuARF)), chimiste
célèbre, né en Irlande dans le comté
de Calloway , vint de bonne heure à
Dublin et, après avoir achevé ses pie-
mières études, y suivit les cours de
droit à l'université, et y prit ses f; ra-
des tant de liceucié que de docteur
ès-juiisprudsncc ; enfin il y fut reru
avocat et plaida rnèine quelques cau-
ses. Mais prolâblernent les profits n'en
lurent pas grands, et les procès lui lais-
sèrent assez de loisir pour qu'il étudiât
la chimie et l'histoire naturelle. In-
sensiblement il se trouva qu'il en savait
à-peu-près autant dans ces sciences
d'observation que dans l'inextricable
labyrinthe des lois anglaises, et qu'il
comptait dans celte carrière bien moins
de rivaux qu'au barreau. Cependant,
ne croyant point devoir rester en
Irlande , il se rendit à Londres où
non seulement il fut reçu membre de
la Société royale, ce qui ne coule qu'un
peu d'argent et n'exige que de fort
médiocres connaissances , mais où di-
vers mémoires remarquables le tirè-
rent de la foule des membres ses col-
lègues ; et où, en 1782, un travail
particuher lui valut la médaille de Co-
pley. Ainsi classé parmi les savants,
Kirwan revint en Irlande en 1783,
et, désormais voué tout entier aux
sciences naturelles , il n'eut plus d'au-
tre soin que d'en étendre le domaine
par des découvertes, et d'en populari-
ser les résultats par tous les moyens
que peuveîit amener l'émulation et la
publicité. Les nombreux Mémoires
dont il enrichit les Transactions de
la société royale de Dublin , et une
deml-ilouz.iine d'ouvrages d'exposi-
tion contribuèrent puissamment à ce
double résultat. De bonne heure la
socic
té royale de Dublin
lui décerna
la présidence, et sa renommée, devenue
européenne, lui valut le litre de mem-
bre des princi[iales sociétés savantes
de rKuro[)C. Il fonda , sous les auspi-
ces du gouvernement anglais, un corps
îjavant destiné à poursuivre les décou-
vertes scientifiques et à leur donner une
direction prati(]ue et utile. Celle so-
ciété, appelée, (lu nom de son créateur,
société kinvanienne , existe encore
aujourd'hui : la minéralogie et la chi-
mie lui sont redevables de progrès
réels. Kirwan lui-même donnait l'es-
sor et l'élan à ses collaborateurs, pas-
KIK
KIR
^3
anl a\fc une rapiJlté mfrTeillpu<i^ dir
la botanique à la minéralogie , dr la
minéralonie a la chiinif , de la rlii-
mie à la inéléoroloj^ic , toujours clirr-
clianl des applications à IV^nono-
mif, à la fabricalion, se tenant soi-
j^neu^ement au courant de tout ce qui
se derou\rait ailleurs ft «e balançant
point à se déclarer pour l'idée nou-
velle dès qu'elle auiil les laits pour elle.
C'est ainsi qu'en un temps où les clii-
mistes an<;lais ne >oulairnt point en-
core reconnaître la révolution opérée
par T^Toisier dans la théorie fonda-
mentale de la combustion, Kirwan finit
bar admettre d'avsez bonne price
l'oxi^ène qui ren\er a.t le pblo«;istl-
quc. (^»mme minéralo};iNte, surtout, il
n'avait aucun rival dan<( toute la
C»rande Hreia;;ne.et il fallait pa^iser la
mer pour lrou\er des «^avanlsqui l'em-
portassent sur lui. liien nu'crolifr et
arranj;eur des Allemands le plus sou-
vent, ceux-ci ne dédai;;naieut pas de
lui rendre la pareille , et plus d'nn mé
moire, plus d'un crand ou\raf;e de
Riiwan, ont eu los Honneurs de la tra-
duction allemande. Ne pouvant don-
ner ici la liste complète de ses mé-
moires, soit dans les Transudiuris
fthilusophiifurs de hi sih irtc royale
lit' Londres , soit dans celles de la
société royale de l)ithliii\, nous nous
contenterons d'indiquer ceux où il
rend compte de sa belle série d'expé-
riences tendant à déterminer les pe-
santeurs spécifiques et les divers de-
j;rcs d'affinités chimiques des sels ,
ceux qui contiennent ses recherches
sur la force respective des acides, et
enfin ses travaux sur les propriétés de
la stronliane et les caractères par les-
3ucls elle se distingue de labarUe. On
oit de plus à Kirwan : I. Apprécia-
tion de la température sous des la-
titudes différentes, Londres, 1787,
in-8" (traduit en français, par Adet ,
Paris, 1789; traduit en allemand, par
(>rell). II. Tableau comparatif des
oôsm'atitms météorologrtpies faite 'i
en Irlanile, acec (fucltfues indica-
tions fMtur former des prédictions
sur tes changements de temps. III.
Eléments de minéraloi^ie, Dublin,
17'.)V-*)7, 2 vol. in-H" (Iraduil en
français, par (fibelin, Paiis, 17S.'>,
in-H"; traduit en allemande C'est
rouvra;je capital de Kirwan. F,n don-
nant à r.\n;^leterre ce précis dont elle
manquait , il eu» soin 6'\ faire en
trer toutes les découvertes modernes,
et principalement celles ties Alleman<ls
dont é\idemment les manuels lui ont
servi de modèle. S'il mérite des louanj;es
rous ce rapport, il faut avouer qu'il est
un peu tiop sobre de citations et
de louan;;es quand il s'apit de la
France; et l'on reconnaît là parfaite-
ment l'impartialité britatini(jue. Au
reste, il \ a Aelléilé de méthode par tout
l'ouvrage. Le point «le vue auquel se
fdacc Kir\san, la nécessite de fonder
a classification minéraIoj;ique , non
plus, comme Werner, sur des caractè-
res extérieurs, non plus, comme Home
de Li-'le, sur 1."» forme extérieure des
cristaux, mais sur les éléments >rais
dont se compose la molécule co!:sti-
tuanle, enfin surtout les analyses déli-
cates et nombreuses qu'il donne de
divers minéraux, bien qu'il ne faille
pas aveuglément compter sur cette
précision mathématique, assignent un
rani; très-haut à l'ouvraf^e de Kirvsan,
qui est bien dépassé aujourd'hui, mais
qui n'en est pas moins le point de
départ d'une ère nouvelle, et où se
dessine nettement l'esprit du minéra-
logiste moderne. IV. Essai sur Ta -
nalyse des substances minérales ,
Dublin, 1799, in-8''. Kirwan, dans
son zèle pour la science minéralor^i-
que, dans son impatience d'en répan-
dre, d'en faciliter, d'en préciser les
principes, était sans cesse tourmenté
de ridée que les caractères mécaniques
34.
:)ii
KIR
KLA
ou extrinsèques sont insuffisants, que
la composition chimique seule peut, en
révélant la vraie nature des minéraux,
fournir les vrais moyens de les recon-
naître sûrement. C'est sous l'empire
de cette idée qu'il écrivit l'ouvrage
dont le titre précède. V. Essai sui' le
phlogislique et sur la nature des
acides , Londres , 1787, in-8°, 2**
édition (traduit en français par M"*^
Lavoisier, avec des noies de Guyton-
Morveau, de Lavoisier, de Laplace, de
Mono;e, de Berthollet, Paris, 1788,
in-8"). VL Des engrais les plus
ui>antageux et de leur application
aux divers terrains^ Dublin, 1796,
in-8° (traduit en français par F. -G.
Maurice, Genève, 1800 et 1806,
in-8° ; puis réimprimé à la suite du
Traité des engrais, du même au-
teur, 18'25, et suivi d'une explication
des termes chimiques qu'emploie Kir-
wan;tradiiit eu nllcmandpar A.-S.-L.
Lentcn). VIL Essai de géologie,
Dublin, 1799, in-8" (trad. en alle-
mand par Crell). Kirwan essaie, dans
ce traité, de concilier les idées de la
Genèse, alk't;^orisées et largement in-
terprétées, mais dans des Innites que
ne condamne point rEç:;lise, avec les
faits de l'histoire de la terre que l'ob-
servation permet de ref^ard.»r corinne
incontestables, et les induclioiri qu'il
croit pouvoir en tirer. Kirwan, dans
toutes ces explications, diffère beau-
coup de Deluc [Voy. ce nom, LXII,
291). Les ennemis de la foi, dans leur
manière d'apprécier les splèmes des
deux t^colo^iucs, se sont montrés fort
opposés à Kirwan, dont eflcclivement
les théories sont imparfaites. Mais in-
sensiblement les pro;;rès de la ^éolo-
^ie ont montré qu'il n'a point eu au-
tant de tort qu'on Ta cru, que Deluc
est loul au moins aussi (gratuit que lui
dans ses hvpothèses, et que souvent il
est aussi loin, peut-être même plus loin
des faits. P— ot.
KLAPROTH (Jules-Henri),
orientaliste célèbre, né à Berlin le 11
oct. 1783, était fils d'un chimiste dis-
tinf^ué [Voy. Klaproth , XXII ,
458) qui, frappé des dispositions qu'il
montra dès rào;e le plus tendre, s'em-
pressa de les cultiver. Il fit dès-lors de
grands progrès en chimie , en minéra-
logie , en botanique; mais, à mesure
qu'il approchait de l'adolescence, ces
études perdirent de l'attrait qu'elles
avaient pour lui. Une impulsion irré-
sistible le poussait vers l'étude des lan-
gues orientales. La bibliothèque royale
de Berlin possède une collection assez
considérable de livres chinois. Dès que
Klaproth les vit, le désir de connaître
cette langue s'éveilla en lui ; un dic-
tionnaire informe rédigé par Mentzel
{Voy. ce nom, XXVIII, 327) sous la
direction du P. Couplet, et le diction-
naire chinois-espagnol du P. Diaz, ou-
vrage également imparfait dont une
copie se trouve dans cette bibliothè-
que , lui fournirent les premiers moyens
de satisfaire sa curiosité. Il y joi-
gnit le Muséum sinicum de Bayer
(Voy. ce nom, III , 603). Une note
écrite sur son exemplaire de ce livre,
le 21 juin 1835, et que nous lûmes
ce jour-là même , porte ces mots :
" Le présent exemplaire a été le pre-
« mier secours que j'ai eu en 1797,
« époque du commencement de mes
" études chinoises.» Il entreprenait
donc seul à quaiorze ans une tache
qui , selon l'opinion généralement ré-
pandue alors, exigeait en Chine mê-
me la vie entière d'un homme studieux.
Son ardeur s'accrut avec le succès :
les résultats neufs et curieux qu'il en-
trevoyait excitaient vivement son in-
térêt, et bientôt, captivé par les étu-
des de son choix, il négligea toutes les
autres. Aussi, Interrogé par l'exami-
nateur du gymnase, il se trouva hors
d'état de répondre aux plus simples
questions. « Mais vous ne savez donc
KL\
** rien!* lui dit celui-ri : — Si , mon-
« sieur , je «ais le cliiiinis. — C/om-
« nient, Ir rlminis ! qui \ons l'aurait
M enseigne — iVisoiinr , je l'ai a(>-
M pris tout »eul.» La dessus rexarm-
nateur de se récrier, et Kiaprolh t\e
courir à ses radiers où il montre a
l'eiaminateur émerveille des copies de
texte, des e^ais de traduction , des
extraits faits sur les ori<;iiiaux mêmes.
H répond ensuite à toutes les aues-
lions , résout toutes les difTicullrs ,
révèle en peu de mots le facile m\s-
tère du lan;;a;;e cliinois , l'explique
avec clarté, le rommeiMr a>ec prrci-
Mon. Ses maîtres fuient convaincus
alors qu'il n'avait pas perdu son
temps, et son peie, bien que très-rli.i-
^iin de renoncer aux projets quil
avait formés pour lui, eut du moins la
consolation de penser que ce fils pour-
rait s'ouvrir une carrière honorable.
Cependant il exif^ea que Jules-Henri
apprit ce qu'il aurait dii savoir, et se
livrât aux études philologiques pro-
prement dites, alors presque exclusi-
vement en honneur en Allem.i-ne.
Afin de mieux assurer le succès de
cette résolution, il l'éloi^na de lier-
lin ou la tentation de cultiver la lan-
gue chinoise aurait pu l'enlraîner. Ce
fut à l'université de Malle qu'il l'en-
vova en ISUl. Le jeune Klaproth v
eut lait en peu de mois des propres qui
étonnèrent ses maîtres; et comme il
ne trouvait dans celle ville ni ma-
nuscrits ni professeurs capables de lui
aplanir la voie, il alla poursuivre à
Dresde, dans l'été de \H()2, hs tra-
vaux qu'on l'avait forcé d'inlcrroinpre
à Herlin. \ la fin de celle même an-
née, il publiait , en allemand a \\ ei-
mar, les premiers cahiers de son Ma-
gasin asiatiijur. Ce recueil périodi-
que attira les re|;ards de rAllemaf;nc
savante; et de ce moment date la renom-
mée de Klaproth. On était surpris
qu'un jeune homme de dix-neuf ans
KLA
533
déployât des connaissances si profon-
des sur «le> sujets à peu près ij^norés des
hommes les plusdortes. Alors son père
reconnut Teneur de ses prevrntions, et
dans le même temps le comte Jean l'o-
to^ki, avec lequel le jeune Klaproth
avait eu l'occa-Mon de converser à Krr-
lin, frappé de la pénétration et du dis-
cernement qu'il montrait en pailani
de la Chine et de tout ce qui la con-
cerne , s'einpre«-sa, de retour à Saint-
IVtersbour^ , de lecommander au mi-
nistère rujxe un homme que «es no-
tions sur l'empire chinois devaient
rendre très inleressaiif pour la Hus-
sie, liée depuis IGKD i\f( ce vaste
état de l'Asie , par de» traiirs nui
n'ont pas rlé enfreints. Klaproth lut
appelr a Saint-l'elersbour;; en IHOV,
et l'acadrmie des >riences se l'associa
en qualité d'ad|oint pour les langues
et la liltéralure asiatiques. Celte dis-
tinction n'était pas purement honori-
fique, et le désir qu'il avait de s'en
montrer ili(;ne , non moins que les
obligations qu'elle lui imposait, le dé-
termincrent a abandonner sa patrie et
les travaux qu'il v avait rcimmenres.
Des l'année suivante une ambassade
extraordinaire, destinée pour Pflinp,
vint lui offrir un inoveii d'étendre .ses
recherches. On n'était pas encore fixé
sur le choix d'un ambassadeur, que
Klaproth était <lr)à désigné pour l'ac-
conipa;;ner comme interprète. F.e comte
Totoçki fut placé à la tète des savants, et
(iolovkin char^;e de la politique. Kla-
proth n'attendit pas que ceiui-ri eût
achevé ses préparatifs; il partit au
printemps de 180.'), visita C.izan et
l'erm , traver.Na les monts Ourals ,
^tei^nit Ekalerinbourfî en Asie, cA-
tova rirlich depuis Toboisk jusqu'à
Omsk , d'où il j^a^^na Tomsk, Kras-
novarsk et enfin Irkoutsk qui était le
point de réunion de l'ambassade. Il
préféra cette route, quoique ce ne fut
pas la plus directe , afin d'éviter des
534 l^LA
passages difficiles dans les niontaf^nes,
et parce qu'elle présentait plus de par-
ties intéressantes à visiter. Elle le con-
duisit d'abord cl.ez les Samoyèdes et
chez plusieurs de ces nombreuses peu-
plades Gnnoises et tartares qui habitent
le Ion» de l'Ob, du lenissei et du lac
Baïkal. Dans la Sibérie méridionale,
il rencontra des tribus de races tur-
que, monjj;ole et autres ; il vécut par-
mi les Bachkirs, les Dzoungars, les
Teléoutes ; parmi les Tongouses de
ïobolsk et d'Irkoutsk; il étudia leurs
mœurs, recueillit des vocabulaires de
tous leurs dialectes, s'appliqua à dis-
tinguer leur physionomie nationale
pour parvenir à démêler les traits ca-
ractéristiques des familles dont la race
s'était croisée avec d'autres. A la fin
de l'été de 1805, toute l'ambassade
fut réunie à Irkoutsk : le 17 octobre
elle arriva au fort de Kiakhta sur les
confins de l'empire, où des difficultés
suscitées par les autorités chinoises la
retinrent jusqu'à la fin de l'année. Ce
séjour forcé fut très-utile à Klaproth
qui en profita pour apprendre le mon-
gol, se perfectionner dans le mand-
chou, recueillir des matériaux , et se
procurer une collection considérable
de livres chinois, tibétains, mandchous
et mongols. Enfin , le 1*^*^ janvier
180t>, on put franchir la frontière et
entrer en Mongolie : le froid était de-
venu excessif, plusieurs fois le mer-
cure gela dans les baromètres; les
voyageurs en souffraient d'autant plus
qu'ils ne parcoururent qu'en quatorze
jours la distance de soixante-quatorze
lieues qui sépare Riakhla de l'Ourga
ou Kouren , ville ou plutôt camp où
réside le gouverneur-général, et que
dans tout ce trajet ils n'eurent d'autre
abri que des tentes de feutre. J.à se
renouvelèrent les discussions sur le
cérémonial chinois ; l'ambassadeur
russe refusait de s'y .soumettre, allé-
guant l'exemple de lord Macartney ,
KLA
qui n'avait fait d'autre salut à Tempe-
reur Khlang-Loung que celui qui en
Europe est usité en pareil cas (Voy.
Macartnky, XXVI, 23). Des cour-
riers furent expédiés à Péklng, et l'on
espérait une réponse favorable du tri-
bunal des rites ou de l'empereur
même, quand survint une altercation
sur une misérable question d'étiquette.
Alors les négociations prirent une
tournure fâcheuse , les esprits s'aigri-
rent; et le 10 février l'ambassade fut
congédiée avec dédain par une lettre
venue de Péklng. Elle revit Kiakhta
dans les premiers jours de mars ; l'a-
cadémie de Saint-Pétersbourg envoya
aussitôt de nouvelles Instructions à ses
délégués. Klaproth, qui, dans les con-
férences entre Golovkln et les manda-
rins, avait fait preuve d'une capacité
peu commune et d'une véritable con-
naissance de la langue chinoise , fut
chargé de continuer à visiter les fron-
tières des deux empires à l'ouest de
Kiakhta jusqu'à Oustkamenogorsk ,
sur l'Irtlsch , près du step des Kirghlz.
Dans ce voyage il traversa l'Altaï,
d'où il se rendit aux anciens temples
bouddhiques de Semipalatnaya et
d'Ablaïkit pour recueillir les frag-
ments tibétains qui pouvaient s'y trou-
ver encore. Il gagna ensuite le Kous-
sougoul , lac du pays des Khalkha ,
revint à Irkoutsk dont 11 visita les en-
virons, explora les bords du lac Baï-
kal, longea les monts Sayaniens, passa
de nouveau la chaîne de l'Altaï; et,
après avoir fait une excursion depuis les
ilves de l'Irtlsch jusqu'au lac Dzaï-
sang dans le pays des Euleuths ou
Kalmouks, à quelque distance de la
frontière méridionale de la Sibérie, il
se dirigea vers Omsk pour reprendre
la roule de Saint-Pétersbourg où il
arriva au commencement de 1807,
après une absence de vingt mois, pen-
dant lesquels il avait parcouru un es-
pace d'environ dix-huit cents lieues.
KLA
KLA
.35
F.tint à IiloutsL, il >it un officin de
la marine japonaise qui , joK^ pat un
naafrj{;e jor le* rôtc^ orientales de la
Sihérie , aNail rlé amcnr' dans celle
tille; les entrptirns de Klaprulh avec
ce marin Irrs-instruil PaidiTenl k
rrïmposff un vocal»ulaire japonais.
I.'aradémie, à laqucllr il rendit compte,
dans un rapport drtaillé, de ses occu-
pations pendant son vo\a^e aii^-si ion^
qiir pcniltle , reconnut tant de xrle en
le nommant académicien extraordi-
naire, diNtinction qtii n'est accordée à
un académicien-adjoint qu'après a>nir
exercé ses fondions pendant six ans.
l/empereur Alexandre lui accorda une
pension de trois cents roubles et lui
donna des marques de bienveillance
particulière. On lui réserxait une ré-
compense plus flatteuse en lui ména-
;;eant l'occasion ile se distin;;uer dans
une nouvelle nnvsion. Malgré le> \o\a-
;:es de plusieurs savants en (iror|;ie et
dans les monts (^lucase, le ;;ouverne-
nient rus-^e vo\ait bien qu'il lui restait
encnie beaucoup à apprendre sur ses
nouvelles possessions. Klaproth qui
paraif.sait plus qu'aucun autre en état
d'examiner convenablement ces con-
trées, leurs ressources et leurs habi-
tants , fut, sur la proposition du comte
Potoçli, équitable appréciateiii de «.es
services dans la précédente expédition,
a^réé pour le vo\a;;e à entreprendre.
Muni des instructions de son protec-
teur et de celles de l'académie , il
quitta de nouveau Saint-Pétersbourg
le 1 ."> septembre, et alla par Moscou
et KliarkolTà Novo-Tclierlask , capi-
tale des Cosaques du Don. Il v sé-
journa quelque temps afin d'étudier
les KalmouU des environs, et profita
de l'occasion pour compléter les no-
tions qu'il avait rassemblées en Sibé-
rie et ailleurs sur la relic;ioii lamaïque.
Kn novembre, il traversa le step du
Don, passa par Géorii^hievsk, capitale
du gouvernement du Caucase, où il re-
cueillit des renseignements >ur les
Tclierlesses et sur les peuplades vivant
au delà du Kouban ; et visita les rui-
nes de Madjar sur la Kouma, le mont
Besch-Tau, ses eaux minérales et l'é-
tablissement des missionnaires anglais.
Les circonstances l'obligèrent de se
diriger tout de suite vers Mosdol, et
de prendre sa roule par la petite Ka-
banlah et VladiLa\l.i^ sur le TereL
Marcliant avec une esnnte militaire
ccMisidetable, il remonta le Ion;; de ce
fletne dans la vallée étroite où il coule,
et qui était fermée autrefois par les cé-
lèbres portes caucasiennes. I.e '2Vt dé-
cembre il franchit le (^louda ou mont
de la Croix {Khrrstoxuu'-Ouni'', mon-
ta;;ne neigeuse qui fait le point de par-
ta{;e des eaux, et sui\it le cours de
l'.Vra^vi qui tombe dans le Kour. Le
1 i janvier 1K()8, il entra dans Tillis,
capitale de la (iéor;;ie, et y resta jus-
qu'au ') mars; il revint alors dans la
vallée de l'.Krat^vi et vers les monts
nei;;eux où il découvrit les sources du
TereL. Après celte campa;;ne tres-pé-
nible, quoique de comte durée, il re-
vit Tiflis, d'où il sortit le 2 V mars,
et fit à plusieurs reprises des excur-
sions dans la déorpie, tant à l'est
qu'à l'ouest de la capitale. Les mala-
dies pestilentielles qui sévi>saient de
plus en plus dans les vallées, et les ap-
préhensions d'hostilités prochaines
avec la l'erse, ne lui permirent pas
d'aller dans ce pavs ni même à lia-
kou, comme il l'avait d'abord projeté.
D'ailleurs l'académie, qui ne pouvait
plus subvenir aux frais du vo\a^e, le
rappelait. Il retourna donc à .Mos-
dok, où il fut oblij;é de laisser ses com-
p^nons de vovaj^e trop affaiblis par
la maladie pour le suivre dans de nou-
velles courses à la petite Kabardah et
aux vallées du Caucase septentrional.
Quand il rentra à Mosdok ses compa-
f;nons étaient morts. « Les fati;;ues du
«« vo)at;e dans les montagnes, dit-il.
536
KLA
KLA
«< et l'influence du climat extrêmement
<< malsain des bords du Terek auquel
« je n'étais pas accoutumé, me causè-
« rent une fièvre violente. Néanmoins
«' je partis de Mosdok le 24 août, et
« je ^at^nai Géorghievsk. La fièvre
" s'étanl un peu calmée, je fis des
«< excursions à Madjari ainsi qu'à
« Oust-Labinsk sur le Kouban ; mais
«< mon mal m'empêcha d'en profiter
« comme je le désirais. Je restai à
« Stavropol pendant les mois d'oclo-
« bre et de novembre ; de là j'allai en
« traîneau par Tcherkask à Voronèje,
« puis je retournai par Toula à Mos-
w cou et à Saint-Pétersbourj^ où j'ar-
« rivai bien malade , le 1 1 janvier
<« 1809, et ma santé ne fut complè-
«t tement rétablie qu'en automne.»
Les résultats de ce vojaj^e furent suc-
cessivement communiqués à l'acadé»
mie : ils concernaient principalement
les recherches de Klaproth sur les
langues des peuples du Caucase et
les inductions qu'il en avait tirées re-
lativement à beaucoup d'idiomes de
l'Asie et d'autres parties du monde, il
pensait, que pour la plupart, ils dé-
rivent d'une souche commune. Kn
communiquant sa découverte à l'aca-
démie, il l'appuya d'un vocabulaire de
mots caraïbes qu'il avait rencontrés
dans les langues de plusieurs peuples «lu
nord et de l'est de l'Asie. Quoiqu'il
n'ait pas donné de suite à ce travail,
il était à propos de le si-^naler, parce
qu'il n'a jamais abandonné complète-
ment les idées qu'il lui avait suggérées.
L'aradémie voulant témoigner le haut
intérêt qu'elle prenait à ces recher-
ches, décida qu'une des dissertations
de Klaproth , qui concernait les Af-
ghans, serait imprimée en dehors de
ses Mémoires, à ses frais, ainsi qu'un
recueil en allemand, intitulé Àrcliives
pour la littérature orientale. Kla-
proth ne s'occupa point alors de la pu-
blication de son voyage : peut-être
l'autorité, qui en Russie soumet tous
les ouvrages à la censure avant qu'ils
soient imprimés , arrêta-t-elle le sien;
c'est ce qu'il n'a pas expliqué. Mais 11
paraît que quoiqu'il eût été décoré
d'un ordre de l'empire et gratifié du
titre de conseiller aulique , il ne se
trouvait pas à son aise à Saint-Péters-
bourg. Ses prétentions avaient semblé
exagérées; il n'avait obtenu ni les ré-
compenses, ni les indemnités qu'il ré-
clamait ; toutefois sa capacité bien
reconnue lui valait une grande consi-
dération. A la demande du prince
Czartoryski, curateur de l'université
de Vilna, il traça le plan d'une école
spéciale des langues asiatiques pour
cet établissement. Il venait d'y être
nommé professeur, et se disposait à
partir, lorsqu'il fut retenu par le mi-
nistre de l'instruction publique qui le
chargea de rédiger le catalogue de la
riche collection des livres et manuscrits
chinois et mandchous appartenant à
l'académie. Envoyé à Berlin en 1811
pour y diriger la gravure des différents
caractères nécessaires à cet ouvrage , il
saisit avec empressement celte occa-
sion de quitter la Kussie. En quatorze
mois la besogne dont il était chargé
fut terminée. Le congé qu'il sollicita
en 181 2 se fit long temps attendre ; en
l'obtenant, il perdit les titres de no-
blesse qui lui avaient été conférés, ses
lilics académiques et les autres faveurs
qu'il tenait du gouvernement russe.
Celte disgrâce qu'il avait prévue ne
diminua nullement son ardeur pour
l'étude, quoique l'époque fût peu favo-
rable pour la culture des lettres. Il
avait commencé, en avril 1812, l'im-
pression de son voyage au Caucase;
les événements de la guerre le forcè-
rent de l'interrompre ainsi que ses au-
tres travaux, en 1813. Afin de pou-
voir les poursuivre avec sécurité , il
alla se réfugier à Warrabruon, petite
ville dans les montagnes qui séparent
KLA
la Ikolirinc Je la Siléiif ; mais bientôt
ceUe yroMnce fut fnTaliii» et une partie
(lu mantisrn! qu'il rxpediait à Herlin
fut perdue. Ouand les circonstance» le
permirent, il en ache\a l'impression en
181V, puis il vo>a;;eaen Italie et passa
dans l'île d'Klhe, où il fut bien reçu par
Napoléon, qui lui parla avec intérêt de
ses vo>a;;es et de ses travaux. On a dit
que précédemment il avait fait d« de-
marrlics pour entrer au service de l'ran-
re, et que ce fut le même motif qui le
conduisit auprès de l'empereur. On
ajoute que sa demande fut accueillie et
qu'on lui confia comme essai la rédac-
tion d un mémoire sur les difiérenles
races asiatiques (;ui liabilerit les fron-
tières de la IVussie, mais que la chute de
la puissance qu'il a\ait invoquée ne lui
laissa pas le temps de l'achever, (^uoi
qu'il en soit, on ne le vit pas changer
«l'opinion aa j;ie des circonstances, et
loujoiiis il manifesta une haute estime
pour l'homme extraordinaire auquel il
a\ait adressé son homma<^e lorsqu'il
était déjà ren>ersé du tiôiie. Uesté à
Hoierice dans une position ties-difii-
cile , Klaproth réunit ses dernières
resNourccs pour venir en France. Il
arriva vers la fin de 1S1.'> à l*aris,
qu'il a constamment habite depuis. Le
comte Jean PotoçLi, dont l'amitié le
uivait partout, l'en^a^ea à s'y fixer,
en lui représentant que c'était là qu'il
trou\erait le plus de facilités et de
ecours de tous ;;enres pour mettre en
(t*u\re les nombreux matériaux qu'il
avait rassemblés et poursuivre ses re-
cherches. Klaproth vivait à Paris
d'une manijMC assez précaire, lorsque
le baron Guillaume de lliimboldt le
rencontra, et employa toute Tiiitluence
que lui donnait un iiicrite éminent,
encore plus qu'une haute position ,
pour améliorer le sort de son com-
patriote. Il ne le connaissait que pour
l'avoir vu à Dresde, dans une si-
tuation peu heureuse, après la bataille
KLA
537
de Leipzig ; il n'i{;norail aucune cir-
constance de .son vo>a^e 4 l^orto-
Kerraio ; mais il appréciait ses tra-
vaux, ses nombreuses coiiiiais>ances ,
et prévovait tout ce que les lettres
devaient attendre de lui par les services
qu'il leur avait rendus. Sur sa demande,
le roi de IVusse conféra à Klaproth ,
le 11 août IKlti, le titre de profes-
seur des lan(;ue5 et de la littérature
isiatiqueN , en lui allouant, outre un
traitement considérable , une forte
somme pour la publication de ses ou-
vra^e>, et la permission de rester à
Pans jusqu'à leur achèvement. C'eNl
à cet encoura;;ement que l'on doit
plusieurs li>res importants dont il
sera question plus tard. Assuré dé-
sormais de son avenir , Klaproth se
livra .sans obstacle à son ^oùt favori.
Ses recherches embrassaient la litté-
rature , la j;éo;:raphie de l'.Xsie , et
d'autres sujets. 1.^ liite de ses ouvra-
;;es qui terminera cet article donne
lemo>en de suivre les proj;rès de ses
études, la marche de ses travaux, jus-
qu'aux habitudes de son esprit , cl
d'apeicexoir les nombreux résultats
auxquels l'ont conduit une inj;énieuse
sa>;acité et une méditation persévé-
rante que secondait une mémoire vaste
et sure. Mais on doit regretter tous
les moments qu'il a consacrés à des
discussions aussi inutiles au progrès
des lettres qu'affligeantes pour ceux
qui s'intéressent à leur j;loire. Do-
miné, on peut le dire, par un amour
excessif de la vérité, par une anti[>a-
thie invincible pour les théories qui
ne s'appuyaient pas sur les faits, par
une haine implacable pour le charla-
tanisme quel que fût son masque, pour
ri;^norance vaniteuse , il les poursui-
vait à outrance. Cependant il faut
avouer que parfois il croyait voir cette
sorte d'ennemis ;<ù ils n'étaient pas,
erreur et disposition d'esprit d'autant
plus fâcheuses qu'elles avaient pour
538
KLA
principes un dévouement absolu aux
inlcrêts de la science et une conviclion
profonde. C'est ce qui explique celte
critique âpre et mordante , souvent
de'pourvue des ménaf;ements et des
égards qui servent si bien le bon droit,
la raison et la vérité. Mais on doit
dire aussi que nul ne fut plus oblio;eant
et plus bienveillant que Klaprotli ,
pour les personnes qui réclamaient ses
conseils ; nous en avons entendu plu-
sieurs témoigner leur satisfaction et
leur reconnaissance mêlées de surprise,
car, au ton de sa polémique, elles se
le figuraient comme un homme intrai-
table et désobligeant. L'envie, cette
passion des âmes basses, était absolu-
ment étrangère à Klaproth. Toujours
il s'empressa de rendre justice au vrai
mérite, même à celui de ses rivaux, et
cet hommage était sincère. Le grand
nombre des ouvrages qu'il a publiés ,
ses éludes variées et compliquées, ses
recherches difficiles toujours si scru-
puleuses, ses soins minutieux dans tout
ce qui tient à l'exactitude des faits,
des citations et de l'orthographe, pour-
raient faire supposer que c'était un de
ces érudits qui, constamment livrés à
leurs occupations sérieuses^ restent
étrangers au monde et à ses distrac-
tions. Il n'en était pas ainsi : Kla-
proth avait le goût et les habitudes de
la haute société, ainsi qu'un penchant
très-décidé pour ce qui compose une
douce et élégante existence ; il n'était
l'ennemi ni de la gaîté ni des plaisirs.
C'est peut-être à ce partage entre l'é-
tude et les dissipations mondaines
qu'il dut le déclin rapide de sa santé.
Depuis 1833 des palpitations, sur les
symptômes desquelles il avait pu se
méprendre, annonçaient qu'il portait
en lui le germe d'un mal incurable ;
son extérieur trahissait un dépérisse-
ment graduel et rapide. Le voyage
(ju'il fit à I>erlin dans l'automne de
183'!- semblait devoir lui procurer du
KLA
soulagement : l'air natal, raccueil dis-
tingué de son roi, les suffrages de ses
plus célèbres compatriotes , les mar-
ques d'affection de ses vieux arnis
n'avaient pu ranimer sa vie épuisée;
il revint plus souffrant, luttant Contie
une maladie de cœur et les commence-
ments d'une hydropisie de poitrine
qui, malgré tous les secours de l'art et
les soins empressés de M. le docteur
Breschet , faisaient des progrès ef-
frayants. Malgré ses souffrances, Kla-
proth se fit long-temps illusion sur la
gravité de son état, et conserva l'es-
poir d'une guérison prochaine. Toute-
fois, à la suite d'étouffements, de dé-
faillances , de vertiges , il s'apercevait
de temps en temps que ses idées se
brouillaient et que sa mémoire s'affai-
blissait : alors il se laissait aller à de
tristes pressentiments. « Sortez, s'é-
« cria-t-il un jour, au moment où en-
« trant chez lui , nous le trouvâmes
« tenant sa tête entre ses mains ,
« triste, abattu, tout consterné : sor-
« tez, je deviens fou, je n'ai plus de
« souvenirs , je ne puis rassembler
« mes idées; la pensée m'échappe; je
« suis perdu pour la science ; je [>ré-
« fère cent fois la mort, il m'est im-
« possible de soutenir une conver-
« sation ! » Nous nous retirâmes le
cœur navré. Quelques jours après il
était plus calme, il causait avec plaisir,
il nous entretenait de ses travaux, il
se félicitait de l'acquisition de livres
nouveaux. Néanmoins l'idée de sa fin
le poursuivait : « Vous me survivrez,
(( nous disait-il. » Et comme nous
nous efforcions d'éloigner cette pen-
sée, en lui représentant que nous avions
seize ans de plus que lui : « Non, ré-
« pliquait-il , c'en est fait, je cesserai
<( bientôt de vivre.» Saisi d'une at-
teinte subite , il succomba le jeudi 27
août 183.1, à une heure du matin.
Sa dépouille mortelle fut conduite au
cimetière Montmartre le dimanche
KLA
»uiTant. Parai les personnes qu« cette
cért'inoiiie a>alt ra!>:>riiiblcoN , on ic-
ni.it (]ii.iit M. Ir baron Alrx.iiiilrr tic
lliimliulJt qui honore 1rs bcieiices
.iiilant qu'il en e^t honoré , et qui
j\ait été un ile^ plus zélé-» protecteurs
de Kbpiolh ; le secrétaire de la léj;a-
lion pru.^ienne, des savants rraiii^ais et
élran;;ers, des hommes de distinction
ri beaucoup d'autres qui avaient pour
Klaprolh un véritable attachement.
^1 Boisard, pasteur de ré;;lise lulhé-
I irnne, prononça l'éloge du défunt dans
lin di>cours sim|i!e et louchant. — Par-
lons maintenant des ses piiticipaux
écrits. I. .hùitisrhrs rnagudn, elc
( Magasin asiatitjur runiftosr par
unr sotièté lie gens de lettres, et pu-
blié par J. Klaproth), \N eimar ,
1802, 1 ^ol. in-8'\ cartes et fi-. (>t
lunrage périodique, qui contient des
mémoires sur tous les sujets possibles
Concernant l'Asie, est préred»' d'une
introduction datée de décembre 1801 ;
ainsi Klaprolh n'avait que dix-huit
an> et deux mois quand il la si;;na. Il
.1 donné dans ce recueil : Sur les
contrées de PAsIe au-delà du
Muustag qui ont été lonnues des
anciens ; Sur les peuples tflu-
gog et de Magog; Sur la reli-
gion de to en Chine ; (Àjuquète
ile la Chine par les Mand< hous en
ItJVi ; Traite de Caïuienne littéra-
ture des Chinois ; Description (les
antiquités des monts de Hisotoun
près de Kermanchàh ( en Perse ) ;
y le moire dr liager sur les inscrip-
tions babyloniennes découvertes ré-
cemment , traduit et arcompa^^né de
remarques. On est réellement surpris
de la variété et de la iiroforuieur des étu-
des d'un homme de dix neufans, quand
on lit ces divers morceaux. II. Sur
la langue et F origine des .Ighouans
ou Afghans , Saint - Pélersbouri:; ,
1810, in- i*^ (en allemand). Quelques
auteurs avaient attribué une origine
KLà 639
hébraVqne aux Afj;hans : Klaprolh
démontre par des preuves tiii-cs de
leur idiome qu'ils a|>|iartiennent à la
même souche que les Persans , les
Kourdes, les Ossctes et autres peu-
ples dont la lanj;ue pré>f nie de l'affi-
nité a\ec le sanscrit, et que depuis les
temps histori(jues ils ont habit»- !••
pa>» monla<;neux situé entre l'Inde et
la Per^e. III. irchii>esde la littéra-
ture, de r histoire et de la linguisti-
que de r.lsie, Saint-Péteisbour^ ,
1810, in-i" (allemand', volume pre-
mier et unique. Il contient : i'ijral-
lele des prim ipau i tarai teres d'é-
criture de C . Isie a\'ec C alphabet aile-
mand : langues du i^iucase. — Les
. tghuuans. — Le llabour iSameh ,
ou Li^'re des conseils de F empereur
liabour. — Mémoire de sir G.
Sttiunton sur la vaccine ; traduction
du traité publié en chinois il Macao
en 180.'». — Kxcerpla ex historia
satraparum arbelensium in majore
trmenia. I/auleur de cette histoire
e>t Ktienne Orpélian, archevêque de
S>ounie à la fin du XIIT siècle. —
Fragments sur F.i^ui et le Pcgou,
et vocabulaire boman ou biirman.
- Fragments de CiiliuttiC des Lieou-
Khieuu. — lieniarques sur la fron-
tière russe et chinoise rei ueillis dans
un voyage fait sur les lieux en
ISO-'j. |\'. Inscription de )u, tra-
duite et expliquée, lîe'^lin , 1811,
in-i", fi;;ures (allemand). Ce monu-
ment antique de la Chine, qui remonte
au vin<;t-lroi.sième siècle avant notre
ère , avait été publié et commenté
par IIa;;er. Klaproth a traité ce
sujet plus habilement , et il a fait
litho^raphier, en douze feuilles ^rand
in-folio, un Jar simile de celte in-
scription. V. Mémoire sur la lan-
gue et récriture des Ouigours, licr-
lin, 1812, ln-8", figures; Paris, 1820,
in-fol. (allemand). Ce mémoire avait
d'abord été inséré dans les Mines de
54o
KLA
V Orient , tom. II. On était indécis sur
Toi i^ine de cepeuple de l'Asie centrale,
souvent cité par des auteurs du moyen
â;;e. Klaproth conclut qu'il appartenait
à la famille turque. ^' I. Voyage au
Caucase et en Géorgie entrepris en
1807 et 1808, contenant une des-
cription complète des pays cauca-
siens et de leurs habitants , Halle et
Berlin, 1812, 1814, 2 vol. in-8^
cartes (allemand) ; traduit en ano;lais
par F. Shoberl, Londres, 1814,
in-4°, cartes; en français, Paris,
1823, 2 vol. in-8^ carte. — Ce li-
vre renferme beaucoup de renseigne-
riens sur le Caucase et ses peuples; on
désirerait que l'auteur eût répandu plus
d'agrément dans sa narration. On re-
grette de ne pas trouver dans la tra-
duction française , revue par l'auteur,
les instructions du comte Potoçki ré-
digées en français , et quelques au-
tres parties non moins importantes.
Le deuxième volume contient de plus
que la version française : Description
des pays caucasiens ; Histoire de
Géorgie ; Renturques sur les fron-
tières de la Chine et de la Russie ;
Langue et écriture des Ouigours ; en
revanche on trouve dans la version fran-
çaise : VII. Langues du Caucase
[Supplément du Voyage au Caucase
et en Géorgie) , Halle et Berlin ,
1814, in-8**. Les cantons habités
par chaque peuple sont décrits som-
mairement ; des vocabulaires sont joints
à ces notices. VHl. Description géo-
grapliique et historirp/e du Caucase
oriental entre le Terek, l'/lragi>i, le
Kouhan et la mer Caspienne, Wei-
mar, 1814, in-S°. Ce volume est le
supplément du Voyage au Caucase.
Klaproth n'avait pu parcourir le Cau-
case oriental , mais il avait recueilli
sur celle contrée de nombreux ren-
seignements fournis par les indigè-
nes; ce qui le mit à même de décou-
vrir les erreurs de Reineggs [Voy. ce
KLA
nom, XXXVII, 281), de purger l'ou-
vrage de Guldenstaedt des fautes d'im-
pression (FOJ.GULDENSTAEDT, XIX,
203) , et de remplir une lacune dans
la géographie. IX. Description des
propinces russes entre la mer Cas-
pienne et la mer Noire , Berlin ,
1814, in-12. X. Supplément au
Dictionnaire chinois du P. Rasile
de Glemona [imprimé en \S\'^ par
les soins de M. Deguignes), Paris,
1819, in-fol. Ce livre est destine
à corriger et augmenter les diction-
naires chinois publiés par les mission-
naires catholiques ; il donne aussi plu-
sieurs tables utiles aux commençants ,
lesquelles étaient contenues dans le
manuscrit du P. Basile et que l'édi-
teur avait omises. Un Examen cri-
ligue du Dictionnaire mis au jour
par M. Deguignes, précède le Sup-
plément : il est bien écrit , le style
spirituel et passablement mordant
peut le faire attribuer à Rémusat. Le
Supplément devait avoir une suite
qui n'a point paru. XI. Tripartitum,
seu de analogia linguarum libellus,
Vienne, 1820-23, in-fol. oblong.
C'est un ouvrage fait en commun avec
le baron de Mérian. XII. Catalogue
des livres et manuscrits chinois et
mantchous de la bibliothèque de Ber-
lin, et dissertation sur la langue et
r origine des Ouigours, Paris, 1822,
in-fol. (allemand). Chaque article est
accompagné d'éclaircissements curieux
et de notices intéressantes. XIH.
Âsiapolyglotta, Paris, 1823, in-4"
et atlas in-fol. (allemand) ; 2^ édition,
ibid., 1829, qui ne consiste que dans
un titre nouveau et 60 pages d'additions
et améliorations. Les peuples de l'Asie
sont rangés, dans cejlivre, d'après leurs
idiomes qui sont divisés en vingt-trois
classes. Les principes qui dirigent l'au-
teur paraissent généralement admissi-
bles ; des discussions sur divers points
sont très-intéressantes ; l'ouvrage corn-
KL\
KLA
mf iice par un« Apprrciatiun raison-
nef tirs historiens iisiuliijtirs; qui f^l
suixic Jf (Àittsiiirrufiims sur 1rs tir-
lugfs et les immdutiuns ; il cnI Icr-
miiif par uiip / ie de IiuiuiJita,ét riie
ttapries 1rs rrriis des Munffois.
\l^ . Miigiisin asiutiiiue, ou Uevue
géuiirup/iiifue et /listuriiiue de f i-
sie rentruir rt srfiirndiunaU , l*a •
i»>, ISJ.'», 'J carlp-., in-8". Ce recufil,
oui mjliie(ir(-u>riurn( o*a pas t\t con-
liiiiir, reiilcrrae : / o)u^r a Khokitnd,
fait en \^\:\et 181V, par IMi. Na-
sarov. — S otites géographiques et
historiques sur Khokand, iaih-
tutnd, liudiikhi h(in et autres pays
vitisins, tritduites du tliiiutis. — He-
marifurs utr 1rs pruplrs qui hahi-
tent la Jrontiere cliinuise , sur les
Tatars trihutairrs de la Russie et
sur 1rs Soiouts rt Mongols soumis ii
la (.hine recueillies, J/r 1 772 <i 1 78 1 ,
par le^or l'csterev. — I)escription du
(.aucase et des fHiys qui a\Hiisinent
la mer Suire et la mer (Aispirnne ,
traduite de Carabe de Massoudi. —
Urmoirr sur Ir cours du } aru-
Dujnglfu- 1 chou, ou du grand fleui'c
du I ubet , suii'i de nuiicrs sur la
source du liurrampoutrr. — / o» âge
tluns l.tsir centrale, par Mir lu«t-
Llla en 1812. — Notice sur les
Samoyrdrs, par Va>slli Krcstliiin. —
lioute de J'ching- 1 ou-Fou, en (Jii-
nr, à tra^'ers le Tubel oriental jus-
quà IV lassa ou Lassa ^ traduit du
chinois. — Tableau des plus hautes
montagnes de la (Jtine , d'après les
ous'ragrs gèugrapliiqurs des (Chi-
nois.— Description du Si-l)zang ou
Tubet. — l'ous ces morceaux sont irn-
poi lanls pour la connaissance de l'Asie.
\\ . I\ibleiiu.v historiques de r . isie,
depuis la monarr hie deC.yrus jusqu à
nos jours, accompagnes de rerher-
ihrs historiques et critiques sur
cette partie du monde, Paris, 182G,
iii-i" el allas in-foi. Les vin^l-sept
cartes qui composent cet atlas mon-
trent les clian^emenls sur\entt> lians
les difl^rmt^ pa>N Je l'.Vsie depuis C>-
rus jusqu'en 182'»; à cliarune appar-
tient une explication contenue dans
un aperçu grnrral qui termine le
volume in-V". Celui-ci présente, non
l'histoire circonNtancii'e de l'.Vsie, mais
le tableau général et moiivr de ses ré-
solutions. IMuNieurs contrées sont à
peine numnH-e> à cause du manque to-
tal de matériaux authentiques. Des
morceaux trè* remarquables de cet
ou>ra;;e sont : .iprr^u historiqur rt
et/inogntphique des pruplrs de
r isie moyenne jusqu'à l\in HXM)
de notre ère ; liecherches sur la
grande migration des peuples: l'un
et l'autre (»iïrent des aperrus nfufs et
curieux ; l'origine des lluns est expli-
Îuée d'une manière très salisfaisanle.
.'Hermès, journal allemand, ayant
critiqué ce li\re , Klaprolli lui répon-
dit dans sa langue. \VI. Mémoires
relatifs it P. Isie, contenant des re-
cherches historiques, géographiques
et philologi(p/es sur les peuples de
rOrient, Paris, 1820-1828, 3 vol.
in-8", cartes et planches, ('e recueil
a obtenu le succès qu'il mnitait : on
V trou\e : De la frontière russe et
chinoise, mémoire bon à consulter
surtout à une époque où un élat euro-
péen a la prétention de fane «lésirr le
{gouvernement chinois de ses antiques
usages. — Description de la Russie
traduite du chinois , morceau inté-
ressant sous les mêmes rapports que le
précédent. — Analyse des recherches
sur r ancienne histoire de la Russie,
par M. LehiberjT. — Sur quelques
antiquités de la Sibérie. — l'examen
d'un extrait d'une histoire des
khans Mongols de J.-J. Scfmiidl,
et réponse. RIaproth expose les par-
lies faibles de l'ouvra^^e que Schmidl
se propose de traduire; celui-ci con-
vient de la juNlesse de quelques-unes
542 KlA
(îes observations. — Sur raffmite du
cophte aç>ec les langues du nord de
rAsie et du nord-est de V Europe.
— Comparaison du basque avec les
idiomes asiatiques et pî'inci paiement
aç>ec ceux quon nomme sémitiques.
— Mémoire de Jean Ouosk'Jierdjan,
suicide vingt-huit anciennes descrip-
tions arméniennes : le litre annonce
de plus que, pou traduire ce mémoi-
re , Ivlaproth s'est fait aider par un
Arménien; l'auteur avait été témoin
des événements arrivés en Géorgie et
en Arménie à la fin du XVIIP siècle
et au commencement du suivant ; des
notes servent à mieux comprendre son
récit et à éclaircir la géo^^raphie. —
Notice sur V archipel de Jean Po-
foçki dans la partie septentrionale
de la mer Jaune. Cet archipel n'a-
vait pas été vu par les navigateurs an-
glais dans leurs explorations de la mer
Jrtune jusqu'en 1816. Klaprotli le si-
gnale d'après les cartes chinoises et
paie un tribut d'éloges à son bienfai-
teur, dont il impose le nom à ces îles.
— Description de file Formose, ex-
traite des libres chinois; — Vocabu-
laire Jormosan ; — Phrases en for-
jnosan : détails très-curieux sur cette
île nommée Thaï-Ouan par les Chi-
nois. On sait que Psalmanazar (JVj'.
ce nom, XXXVÏ, 176) avait publié
sur l'île Formose et ses habitants un ro-
man qui a long-temps passé pour un
ouNrage sérieux et a même été cité. —
Sur l'origine du papier-monnaie en
Chine. Il y fut connu , dès l'an 119
avant notre ère, mais ne devint d'un
usage général que dans le X*^ siècle de
J.-C. : ses vicissitudes sont intéres-
santes à suivre; 11 disparut en 14.').^). fl
fut introduit en Perse par les Mongols ;
INIarco-VoIo en a fait mention. —
Examen des historiens asiatiques,
traduction du mémoire de Wtsia po-
lyglotla. — Lettre à M. l'abbé G ro-
sier, critique des assertions de M.
klA
Deguîgnes le fils , contraires à l'an-
cienneté de rhlstoire de la Chine. —
3Iots sanscrits comparés avec ceux
des autres idiomes indo-germani-
ques et avec les langues de V/lsie
septentrionale. — Sur l'origine des
Mandchous. Ce peuple, dont les em-
pereurs régnent aujourd'hui en Chine,
a une souche commune avec les Ton-
gouses. — Voyage à la montagne
Blanche y traduit du mandchou.
Cette chaîne, nommée en Chinois
Tchhang-Pé-Chan^ est située dans
le pays des Mandchous au nord de la
Corée. — Sur les Tatars, explication
de ce nom souvent employé inexacte-
ment.— Fragments sur les races et
sur les langues de Vancien et du
nomyeau continent. — Vie de Boud-
dha d'après les bWes mongols, tra-
duite de V/4sia polyglotta. — Carac-
tères primitifs des Chinois. — No-
tice du Babour-Nameh, ou Histoire
du sultan Babour , écrite par lui-
même en turc oriental. Ce Babour
est le fondateur de la dynastie mogole
dans l'Inde, en 1525. — Description
des îles Lieou-Khieou , extraite
d'ouvrages japonais et chinois. —
Description des îles Mou-Nin-Sima,
trad. de Vouvrage japonais San-
Kokf-Tsu-Ban. ■ — Recherches sur
les ports de Gampou et de Zaï-
thoum en Chine, décrits par Marco-
Polo, et qui se nomment aujourd'hui
Kan-Fou et Tsiuan-Tcheou-Fou. Ce
mémoire est un essai du commentaire
que Klaproth projetait deptibliersur la
relation du célèbre voyageur vénitien.
— Histoire delà ville de Khotan.
C'est l'analyse du livre de Rémusal
portant le même titre. — Observations
critiques sur les recherches relatives
à l'hisloire politique et religieuse
de V intérieur de ï Asie, publiées par
M. Schmidt. — Eclaircissements sur
une carte chinoise et japoTiaise de
finde. — Lettres sur la littérature
KLA
inunilihuue. Kiirs avaient paru |)tr-
rrjrrnmfiit avrr un titre particulier
|Mi(ir riiacune. Kllrs sunt dirigées runti r
f..inj;lèi». — l)r.u riptwrt du Lu Hm-
ktil. — / uKtfiulairr htliit, prrsun ri
lumun (U la f^i/tliu/Iirifur iJr Fntn-
ctsio Vttnin ha. Ij notice qui pré-
cède le M)cabuLtre contient de> ren-
seignements in-struclifs sur le> Comans,
peuple crièbre du ini)>cn à^e. — Ao-
( ici" lie la tnrr (Àispirnnr. — Obsrr-
iui fions sur la tarir tir F Asie ^ pu-
bliée en 1K:22, par M. A. Arroi»smit)i :
elles relé\ent les nombreuses imperfec-
tions de cette carte. — Drsrriptiun
(lu grand canal de la (Jiine, et traite
ii'ouK'ra<^rs ihinitis. — Mrrnuirr sur
Ir tours de la grande ri^'iere du Tu-
het. — Sur la langue des Afghans.
— Notice d^unr carte /afmnaise
cunseri'ee dans le Musée hritan -
nitiue de Londres. — Hrinarques
critiques sur la traduction allr-
mande des uu^^res de Conjurius, par
Scliott . X V 1 1 . / oiaffulairr et gram-
maire de la langue géorgienne^ Pa-
ri-, 18-J7, in-8". La première partie,
contenant le \ocaliulaire ^éorj^ien-
{ran(;aisel franç.ii5-;;éor^ien,a seule été
publiée. XVIII. Lettre sur les dè-
cou\'ertes des hiérogly/dies acroht-
giqnrs adressée à M. le comte de
Coulianoff, Paris, i8:>7 , in-8".
\ I \ . Seconde lettre .sur les hiérogly-
fthes adressée a M. I). S... , Paris ,
18/7, in-8°. L'auteur pense qu'au
point où l'on était parvenu dans la
connaissance de l'écriture hiéro;;!)-
pbique des EgNptiens, les signes «jui
foimaient celle écriture étaient: T'des
caractères phonétiques reconnus par
Younr; et Cliampollion ; 2" des si-
{^nes repré-^enlanl les initiales des
mots , classe découverte par M. de
(îoulianoff et que Kiaprotli appelle
acrolo;;iques; 3" de >éritables imaf;es,
qui si;;niûaient ce qu'elles représen-
taient ; V des hléroj^lyphes s)mboli-
KL.\
543
aue», classe encore peu connue; 5° des
signes anagl) fthes , que l'on a l'es-
pérance de cunnaitre plus paiticuliè-
rement par les recbercbes de M. de
(■oulianofr. Cliampollion répondit à la
premièie lettre, ce (]ui donna lieu à la
seconde. X X . (lollet tion d'antiquités
égyptiennes, ferurilIlrN par M. le die-
vaiier de Palin , publiées par MM. l)o-
row rt Kbprotli, ru trentp-trois plaii-
clies auxquelles on en a joint une tren-
te-quatrième représentant les plus
beaux scarabées de la collection de
M. J, Pavsalacqua , précédées d'ob-
servations critiques sur l'alphabet bié-
ro;;l\pbique découvert par .M. Qiam-
poUion jeune, et sur les pro«;rè-s faits
lusqu'à ce jour dans l'art de décliiffrcr
les anciennes écritures égyptiennes,
avec deux planches, Paris, 1821), in-
fol. Klaproth ne conteste pas le mé-
rite de Cliampollion ; il reconnaît qu'il
a corri;;é les méprises de Th. Youn^;
3u'à celui-ci appartient la découverte
es signes biéro<;l>pliiques des an-
ciens Égyptiens, et que Cliampollion
l'a considérablement aii;;mentée ; mais
cette décou>erle ne peut conduire qu'à
la lecture des noms propies des rois de
quelcjues autres personiia;;es , tantlis
qu'elle n'e^t d'aucune utilité pour la
lecture des hiéro;;l\ plies idco;;raplii-
ques et symboliques, et que Cliampol-
lion échoua presque toujours en vou-
lant expliquer les derniers. Son sys-
tème ne repose pas sur des bases fixes,
et il chanj^e à volonté le sens qu'il
attribue aux caractères tant phonéti-
ques que s\mbolJques. La connaissance
imparfaite de l'ancien idiome de l'E-
j;v(<f, que nous pouvons nous procu-
rer par le secours du copie, ne sera
jamais suffisante pour exjiiiquer le sens
d'une inscription hiéroglyphique, en
supposant même qu'elle lût écrite en
caractères [ihonétiques; raltération de
la Tidjled'. thydos., publiée par Cliam-
pollion, donne la mesure de la confiance
544
KLA
que niéiitent ses travaux sur les anti-
quités égyptiennes. XXI. Examen
critique des travaux de M. CJiam-
pulliun jeune sur les hiéroglyphes,
Paris, 1832, in-8^ XXII. Chresto-
TTiathie mandchou, ou Recueil de tex-
tes mandchou, destiné aux personnes
qui veulent s occuper de l'étude de
cette langue, Paris, i828, in-S''.
On y trouve V Eloge de la lyillc de
Moukden par l'empereur Khian-
Loung, avec une traduction aussi litté-
rale qu'il était possible de la donner en
français sans la rendre inintelligible.
On sait que la version du P. Amiot
était une véritable paraphrase {Voy.
Khian - LouNG , XXII , 374 ).
XXIII. Notice d'une mappemonde
et dune cosmographie chinoises, Pa-
ris, 1833, in-8*\ La mappemonde est
un mélange d'idées chinoises et euro-
péennes. On doit donc supposer que
l'auteur s'est servi pour la composer
d'un planisphère européen dressé dans
la première moitié du XVP siècle ,
et traduit en chinois par quelque mis-
sionnaire. Les détails offrent des cho-
ses très-singulières. La cosmographie a
pour auteur un docteur, qui sous le rè-
gne de Rhang-Hi {Voy. ce nom ,
XXII, 351) accompagna son père
dans ses expéditions contre les pirates.
Le livre parut en 1730; RIaproth
s'est servi de l'édition qui fut pu-
bliée en 1793. XXIV. Lettre à
M. le baron A. de liumholdt sur
tim^ention de la boussole , Paris ,
1S3V, in-8", figures. Dès la plus haute
antiquité, les Chinois ont connu l'ai-
mant, sa force attractive et sa propriété
de se diriger vers le nord. Mais la plus
ancienne menlion de celle qu'il a de
communiquer le magnélisnic au fer,
ne se trouve énoncée que dans un ou-
vrage de l'an 121 de notre ère. Des
livres publiés à peu près cent ans
plus tard citent l'usage de la boussole
pour marquer le nord et le sud ; d'au-
KLA
très, qui sont de 1111 à 1117, indi-
quent l'inclinaison de l'aiguille aiman-
tée dont la découverte chez les Euro-
péens ne fut faite que par Christophe
Colomb, dans son premier voyage en
Amérique. Tous ces faits sont appuyés
sur de nombreux témoignages histori-
ques. RIaproth montre de la même
manière que les Chinois avaient fait
long-temps avant nous beaucoup d'au-
tres découvertes, telles que la force at-
tractive dusuccin; la cause du flux et
reflux de la mer, la poudre à canon, en-
fin l'imprimerie qui date chez eux des
premières années du X*' siècle, et qui
de là fut portée dans les pays voisins.
Il pense que plusieurs de ces connais-
sances ont été transmises par les navi-
gateurs arabes aux peuples de l'Asie
occidentale, puis communiquées de pro-
che en proche aux Européens. L'ou-
vrage commence par des recherches
sur l'ancienneté de la connaissance de
l'aimant en Asie et en Europe, et sur
les noms par lesquels on désigne cette
pierre singulière ainsi que l'aiguille
aimantée, dans les divers idiomes et
dialectes de ces deux parties du monde.
XXV. Tableau historique, géogra-
phique, ethnographique et politique
du Caucase et des provinces limi-
trophes entre la Russie et la Perse^
Paris, 1828, in-8'\ Ce livre a sou-
vent été mis à contribution par les
écrivains qui ont traité des pays cau-
casiens. RIaproth a publié comme édi-
teur : Voyage en Géorgie et en ^t..i-
rette, Berlin, 1815, in-8°, et Des-
cription des pays caucasiens par
Guldenstaedt, ibid., 183i, in-8".
[Voy. GULDENSTAKDT , XIX , 203).
— Voyage à Pékin ii traorrs la
Mongolie en 1820 et 1821 , par
M. G. Timkovski, Paris, 1827,2
vol. in-8" et atlas. La préface de cette
publication , que nous avons signée
conjointement avec RIaproth, indique
les changements que nous avons du
KLA
faire à retle relation tcrAc en ru-i-;e ri
à sa traduction par M. N...; noi:^ \
a>ons ajouta un indrv ^éiifrat qui man-
quait darw ron;;inal. — l*rin iftrs Je
trtudf t utn/HJ/utiii'r iJr.s liirtf^urs. par
le lian)n de Mrnan, l'ar-s, 182S,
m H". Kbprolli l« ijt suivre dVM-
s^rv'titiofis sur 1rs nu lues ilrs lun-
gurs srmiinfurs, et dans la ptrface tit
rrln;;r de l'aulrur qui venait de mou-
rir et qui a\ait elc Non ami. — l uyugr
iluns 1rs strps d'Astrakan ri du (mu-
rasr. llistuirr />rimitiW drs pruplrs
tfui ont hithitr rrs roiitrrrs. Sttu-
x'niu prripir du Pont-l.uxin, par le
rurale Jean l*olin;k.», l'ari*, 1829, 2
vol. in-H ', planclies et cartes. Kla-
prolli a arcompa^né ces volumes de
nole« et tie tabler, et dans la preiace a
rtprimé sa sincère reconnai>sanre de»
bienfaits du romle Jean l'oto^Li. —
I)rs4 ri/ffion du I uhrl , iraduitr fHir'
lirllrmrnt du i hiiuds rn russr par
le F. Uracinlhe Kilrliourin rtdurussr
rn français par .M..., soi^nrusrmrnt
rr\'ur ri corrigrr sur turiginal r/ii-
nuis, romplrirr rt acronipagnrr tir
nttfrs, Paris, 1831, in-S', carte* et
plan. — \if}on o l)aï iisiran, ou .tn-
nalrs drs rmpcrrurs du Japon , tra-
diiitts par M. Isaar Titsin{;h, ai>rr
l'uidr dr plusirurs intrrprrtrs atta-
I lirs au t unipttn'r hollandais dr .\ an-
gasaki, oui'ragr rr^'u.romplr/rrt cor-
rigr sur l'original japimais-rhinois,
art uni/Hignr dr nutrs rtprnrdr ifun
aprrçu dr Cllistoirr mythologiijue
du Japon, Paris, IS.H, in-4 '. l/.ir-
licle T1T.SINGH, t. Xf.VI, p. 16.J,
donne le détail des travaux de ce vo> a-
^eur; M. f.jndresse,un des bibliol()é-
caires de l'institut de France, a fait la
table alphabétique des Anrudrs de
Da'tri. — Brri'r A otida drl rrgno
drl Tibrt dal fra Francesco OraJo
drlla Prnna di lirlli 1730; publié
d'après le manuscrit autographe de
l'auteur, Paris, 1835,in-8^.Klaproth
LXVIlî.
KLA
?i45
fut redevable aux soins de M. .'^aU;,
savant bibliographe italien, du niinu-
•.fr;t de ce livre dont nous avoli^ fait
une roenlmn va;^!ie à l'arlicle de Tau-
leur [l oy. PiNNA, XWIIl. 313).
— Abel P.éinusal avait laissé ini|iarfail
la l'ut kour ki , ou lirlalion drs
royaumrs ImudiUiitptrs. Après la
mort de ce sa\anl, Kla|»roth se chargea
de compléter ce qui reNlait inachevé;
mais la mort vint l'arfcter lui-même
dans sou travail, qui a élé terminé par
M. I^ndresse «|ue drja il s'était associé
pour l'aider. Rlaproth a ti aduit de l'ori-
•;inal japonais-chinois San hukf tsou
ran tu srts, ou Aprr^u gmrral drs
trois royaumrs. Pans, 1832, ;^raud
in-8'\ cartes. l/ouvra;;e publu* en
1786, à Yedo, contient la descrip-
tion de la Oorée, des îles de f.ieou-
Kliseou et de l.i i^rande î!e d'Vcso.
Klaproth a lait bcaticniip «i aiidiliuns
à ce livre qui est impôt tant pour la
^éoc^raphie. — Il a encoie f»)iirni à di-
vers recueil» de nombreux article> ,
dont plusieurs ont élé publiés à pari,
et dont voici les principaux : à V En-
cyrloprdie modernr de Court in :
luingurs. — Aprrçu dr F origine
des dicrrsrs rrrilnrrs du tnondr ,
Paris, 1832, in-8'\ p|. — \ la tra-
duction du Vova»e de Denham et
Clapperton : Kssai sur la langue du
liornou, suii'i drs v:jra/tulairrs du
Brgharmi, du M and ara rt de Tim-
bouctou. ibid., 1820, in-8". — Au
Journid asiatiqur : Mrmoirr sur
l'idrntité drs ()ssrtrsac>rr 1rs Alains.
— Sur 1rs amhassadrs rn Chinr. —
Liste des thés 1rs plus cèlchres dr la
Chine. — Critiifur dr hi description
historique dr la Chine , par M. J.
Orlow, — Extrait dr l'histoirr du
Karhmir. — Mémoire sur l'identité
des Thou Khin aoec 1rs Turcs. —
yoyagrs dr M. Ksoma de Koros
dans la Haute- Asie. — Notice sur
la mention de la Chine faite par
35
546
KLA
Tlièophylacte Simocatte. — Nolire
de hi grande, encyclopédie cidnuise,
intitulée : Kou-Kln-Tchou-Chou. —
Sur le pays de Tendue ou Ten-
duch mentionné par Marco Po-
lo , etc. — Au JSouveau Journal
asiatique : Commentaire sur la
description des pays caucasiens de
Strabon. — iienuirques géogra-
phi (pies sur les promices occi-
dentales de la Chine décrites par
JMarco Polo. — Comparaisons de la
langue des Tcliouoaches avec les
idiomes turcs. — Observations sur le
dictionnaire tubétain imprimé à Sé-
rampore. — Sur les clefs chinoi-
ses.— Foukoua siriak, ou Traité sur
l'origine des richesses au Japon écrit
en 1706 ; traduit sur l'original Ja-
ponais et accompagné de notes. —
Extraits d'une topographie de la
Géorgie. — Rapport sur un mé-
moire relatif à l'origine des Japo-
nais,\}2iT M. D. Siebold. — Extrait
du JJcrbend Named, ou Histoire de
Derhend. — Observations critiques
sur la traduction d'un drame chi-
nois^ par M. Davis. — Rapport sur
Ir plan de Pékin y publié à Saint-
Pétersbourg en 1829. — Rapport
sur V histoire ottomane, publiée par
M. de Hammer. — Description du
pays de Didocthi, extraite de la to-
pographie géorgienne. — Sur les
anciennes églises clirétiennes dans
le Caucase au-delà du Kouban. —
Analyse criliijue de l'Histoire et de
la dort rlne du bouddhisme, par M.
K. lipliain. — Rapport sur les ouvra-
ges du P. Hyacinthe Bitcliourin
relatifs à l'histoire des Mongols. —
Rapport sur le projet de voyage au-
tour du monde, par M. Buckingham.
— Tableau chronologique des plus
célèbres patriarches et des événe-
ments les plus remarquables de la
religion bouddhique, rédigé en 1 678.
■ — Notes sur le Tubet. — Aotice et
KLA
explication des inscriptions de Bol-
gliari ; les ruines de Bol;;hari sont au
sud de Kazan sur les bords du Volga.
— Notice de f Encyclopédie litté-
raire de Ma-Touan-Lin. — Sur les
Da'iris , ou Empereurs du Japon. — ■
Description de la Chine sous le règne
de la dynastie mongole^ d'après Ra-
cliid-Edpin. — Histoire de la Géor-
gicytic. — Aux Nouvelles Annales des
iwyages : Liste des points de la Si-
bérie dont les élévations au-dessus
du niveau de la mer ont été détermi-
nées.— Description du mont Tche-
konday par Sokolov, l'un des compa-
gnons de voyage de Pallas (trad. du
russe) . — Description de lile de Haï-
non, avec une carie. — V Almanach
impérial de la Chine Commerce
de la Russie avec la Chine, écrit en
1823. — Notice sur H' Lassa, capi-
tale du Tubet, Si\ec un plan. — Lésai-
manachs chinois. — De la religion
des Tao Szu en Chine. — Notice sur
le Japon, extraite des livres japo-
nais et autres sources. — Description
de l'Arménie russe. — yl perçu du
voyage de Hiouan-Thsang , prêtre
bouddhiste chinois , dans l'Asie
moyenne et l'Inde. — Montagnes
couvertes de neiges perpétuelles dans
riunnan en Chine. — A la Biogra-
phie universelle les aiticles Slrittcr,
Taliclilchcv, ThsaoThsan, Tlisin-Clil-
lIouang-Tl,Touiichen,Wang-Mang,
Wan-I.y, WenAYang, Wiclimann,
Wilford, \^ ou-Heoii, Wou-Wang,
Y-Hiang, Zie^cnhalg, Zlzianow, etc.
— Souvent Klaproth a esquissé et
dessine même en partie les cartes qui
accompagnent quelques-uns de ses
ouvrages. Ses voyages et ses études
lui facilitaient ce travail. Pendant
plusieurs années il s'occupa d'une carte
de l'Asie centrale , dont il fournit
les matériaux. Kile fut exécutée sons sa
direction, mais ne parut qu'après sa
mort, sous ce lilrc ; Carte de l'A sic
KLA
rntnih , àrrss^r tTiiprh des car-
te\ !r\*res par urilre tir i'rrnprrcur
Khian-Loung. fnir 1rs imssioituiirrs
dr Prkt'n rt iC après un grand nom -
brr dr mttions rxtraites rt traduitrs
dt iiWrs chinois, Paris, 183.>, 4
feuiilrs f;raud ai;;lf. F.llc repiésfnfe les
|»a>s tic V \ùe entre '2'» el .'»*i de';rfs
Jc'lat. N. et entre 62 et MU de^t«
lie lonjjitiule à l't.l île Paris ; elle jette
iiti ^ijii.l "i!i jur cts c«»nlrrc% [eu
ioti!;i)rs l)r|>iti. qu'il a^ail roncu le
I rii;ct Je rrlte carte, Klaproll» n a^ait
l'aN rrssr tle comparer 1rs retîsei,;ne-
iiirnts que lui fournisuiciit les libres
diiiiiiis a\ec ceu\ que les mivsionnai-
re^ avaient communiqué» à d'Anville,
rt dont ce ^rand ^ro';raplie avait fait
II .1 -r pour les caries qu il a jointes i
Vîlistoirr de la Chinr de I)uhalde
[Voy. ce nom, XII , 18:j;. Parce
rao^eu il avait découvert la cause tics
efrrnr< de d'Aiiville, qui soi.l a-NscZ
II' pour le-> > étions occiden-
li ;ie> de riIimabVa. Ila\ait
recuclli beo.uroup de nole> qui cu5^eni
fait la base d'un mémoire où il aurait
exposé, diicuté les molifs d'après les-
quels il s'était décidé dans ses déter-
minations. Il a au>si donné: (larte de
la Mvnfolir, du pays des Mand-
chous, de la lAtrér et du Japon ,
Paris, 1S33. 11 a puMié, sous le nom
do Louis de l'Or : Lettres à la sui irlc
tisiatiijue de Paris, Paris, 1823,
in-8". Dans la première il critique
l'onvrn^e allemand de VVéd. Adelun^;,
iiilituk-: (Mup-d\ril sur toutes les
langues connues et leurs dialectes;
dans la seconde il censure le Monde
primiiij àt Link. Elles sont bien rai-
sonnées, le ton n'en c>t pas trop amer,
et elles contiennent des observations
judicieuses sur la nomenclature et la
distribution des différentes races hu-
maines. Klaprotli a fait paraître en-
core sous le pseudonyme de JlHhelm
LauterUich (en allemand) : Prèten-
KLA 5^7
dut traduction des otn^rages dr
(Uinjurius, iraprrs la langue origi-
nuit, im/tosturr littéraire des ou-
i'rugrs du dm trur If 'ilhelni Si huit,
IVipiig et Paiis, 1828, in-8 avec
le texte chinois. O petit écrit dé-
Toile l'ignorance et le charlatanisme
du docteur Schott qui annonçait
a*.ec emphase que, pour compren-
dre l'auteur qu'd traduirait , il s*é-
tait aidé des conseils de deux Cln-
nois venus eu .Kllrma^oe; or, ces deux
habitants du céle>te empire étaient dr>
pavsans du district de Canton, dont
l'un avait été cuisinier, rt qui, d'après
un accord passé avec un bateleur, se
faisaient voir pour de l'argent. Le ^ou-
vrniement prus&<en les avait ensuite
en^a;;és avenir i l'université de iialle,
afin d'v former des élèves pour la lan-
gue chinoise. Klaproth démontre que
la traduction allemande est tout sim-
plement une version de celle que Mars-
ham avait publiée en anglais a S- :ain-
por dans l'Inde, et dont Uémusat avait
dévoilé les nombreuses ine\actilude>.
Cet opuscule présente au>si des détails
précieux sur l'étude de la langue chi-
noise en Europe. Ij liste détaillée de
tous les écrits sortis de la plume de
Klaproth se trouve dans le Catalo-
gue dck bibliothèque, Paris, 1S39,
in-8", rédigé par le libraire Merlin qui
en a fait un livre de bibhof;ra|>hie très-
remarquable. M. C. I^ndicssc, quia
t raduit les titres des ouv ra;^es orientaux,
y a ajouté de courtes notices sur chaque
ouvra;;e. Klaproth s'était occupe d'un
nouveau Mithridatès qui, intiépen-
darnrpeiit d'un aperçu grarumatical et
d'un texte analvsc de chaque langue,
devait offrir un vocabulaire comparatif
des idiomes des cinq parties du monde
et le tableau du système graphique en
usage chez tous les peuples. Il avait
conclu dans le temps des arrangements
avec un libraire allemand pour la publi-
cation de ce grand travail qu'il a laiysé
35.
548
KLA
inachevé, ot dont les matériaux exis-
tants sont indiqués en détail à la (\n de
sonca!aloo;uc. il avait terminé, peu de
temps avant sa mort, une Description
{(ro^raj)liiqui', stuti clique et liislo-
riqiie ilc V empire chinois, qui devait
paraître en même temps à Paris et à
Londres, en français et en anglais. Le
manuscrit est entre les mains d'une
maison de librairie française. Pendant
plusieurs années Klaprolli consacra
une partie de ses veilles à un' com-
mentaire sur Marco Polo : il recon-
naissait le mérite de celui de Mars-
den sur ce célèbre voya^^eur ; mais
le docte Anglais , étranger à la lan-
gue chinoise, n'avait pu donner l'ex-
plication de plusieurs points difficiles.
il ne perdait pas de vue ce sujet, et un
jour il nous aborda d'un air satisfait,
en s'écriant : « A la fin je suis venu à
« bout des obstacles qui m'embarras-
" saient encore dans mon travail sur
« Marco Polo. 11 n'en restait plus
'< que deux que j'ai surmontf's re ma-
" lin. » Nous le félicitâmes sincère-
ment de celle heuretise issue après
tant de recherches assidues pour les-
quelles il avait fons-.ilté, rapproché, ex-
tfail, traduit même tous les textes chi-
nois, tartaresct persans qui pouvaient
l'éclairer sur les lieux que le vova-
{^eur vénitien avait visités. La société
de géographie de Paris devait faire
les frais de cette publication , qui au-
rait puissamment servi à l'intelligence
du plus habile des vovap;eMr.s «lu moyen-
age,et àréchiircissement d'une lonlede
points géographiques obscurs de l'Asie
centiale. Mais la plus consiilérable})ai-
lie des matériaux de ce travail n'exis-
tait que dans l'admirable mémoire de
Klaprolh; ceux qu'on a trouvés dans
ses portefeuilles consistent dans une
liasse de papiers contenant des passa-
gesextrailsoutraduits des géographes et
des historiens orientaux ; des collations
de textes, des notesdri nouveau commen-
KLA
taire; les cent seize premiers chapitres
<le textedeRamusio, c'est-à-dire plus de
la moitié de l'ouvrage, revus, corrigés
et annolé.s. On a pensé qu'en réunis-
sant ces matériaux aux annotations
manuscrites dont il avait chargé un
volume II de Ramusio et l'édition de
Marco Polo publiée par la société de
géographie de Paris , il serait possible
de reprendre et d'achever la belle en-
treprise dont il avait formé le dessein.
Toutefois nous craignons que ce vœu
ne puisse s'effectuer; Klaproth seul
pouvait tirer parti de ces éléments
dont seul il avait la clé. On a aussi
trouvé parmi ses manuscrits beau-
coup de notes et de fragments con-
cernant la géographie et l'ethnogra-
phie de la Haute et de la Moyenne-
Asie. On peut dire que cette partie
du monde était sa terre de prédilection.
11 a enrichi de notes d'une haute im-
portance les Fragments de géologie
et de climatologie asiati(pie de M.
A. de Humboldt, Paris, 1831, 2 vol.
in-8". Néanmoins le reste du globe
ne lui était pas étranger, et ses nom-
breux ouvrages en font foi. Peut-être,
dans ses travaux sur les langues, Kla-
proth a-t-il attaché trop de valeur à la
comparaison des vocabulaires, et pas
assez à celle des grammaires. « Il s'est
« malheureusement presque toujours
« borné, dit M. Landresse, à confé-
« rer des listes de mots, sans chercher
« .à pénétrer dans cette structure in-
« time qui les rassemble et les com-
« bine , comme les m.embres d'un
« corps, pour leur donner de la \ie.
<' C'était là le défaut de l'ouvrage de
« Catherine 11 et de Pallas, ce qui
« fut aussi celui (\c\\isia polyglotta
«f qui répond trop peu, sous ce rappoi t,
« aux progrès (ju'ont faits depuis vingt
« ans l'étude philosophique et l'his-
« toire critique des langues. » Le résul-
tat des affinités qu'il avait cru découvrir
entre les idiomes qui n'ont entre eux
KLA
quf i\f< I appui ts |;ciiëi ju\, comrouii> a
loulcs If* lan^uf^, fut présente «iain
le tfiops à rarailémie de Saint- l'r-
tersb<»ur{;, ri a|<|)u\é sur un vocabu-
laire Je mois caraïbes qu'il avait ren-
contrés dans le^ langues de plu>ieurs
peuj)lc> de l'Asie du centre, du nord
et de l'est. Il ne parait pas qu'il
ait donné suite à ce tra\ail ; mais
M. I^ndre^se a ju^é qu'il était im-
porlaiit de le signaler, •« parce «jue
•• Klaprolii i»'a\ail jamais abandonne
M com[<letcincnt les idées «ju'il lui avait
** su^érées. Non-seulement on en rc-
« trouve l'inNimalion tout entitie
« dans la feuille qu'il a publiée sous
«' le titre bizarre de IJir ci uhitjur ,
•« mais il a proenté à plusieurs rcpri-
« ses, quoique avec une certaine dé-
•< 6ance, des vues semblables dans
•< X Asia polyglutta , ainsi que daiis
«« plusieurs autres écrits; elles ont
•• seulement etémodiCôes et restieiii-
•« tes par tout ce (juerà^e,rexpcririicc
•< et l'étude doi\ent apporter de ma-
« lurité et de n-serve dans l'esprit
M qui se livre à ces combinaisons. »•
— Klaproth fut un des fondateurs cl
des membres les plus lélcs de la sociélé
asiatique de l'aris. M. tendresse lui a
consacré une notice dans le cahier «le
sept. 1835 , du journal de celle
compaj;nic. M. de I.a Kenaudière lui
a pave le même tribut dans le ca-
hier d'octobre des Xi):wi'l/rs .In-
tuiUs (les voyages , dont Rlaprnlh
était un des collaborateurs. Nous
avons, avec la permi>sion de ces deii\
auteurs, mis à contiibution leurs noli-
ccs, et nous avons puise dans nos sou-
venirs beaucoup de détails sur ce sa-
vant qui, depuis le moment où nous le
connûmes, nous lémoiona constam-
ment de l'afTeclion. Nous n'ignorons
pas qu'il a été l'objet d'imputations
graves. Si l'on nous reproche de n'en
avoir pas fait mention , nous repon-
drons que parmi les faits dont on l'ac-
KIJ
cu>a quel(|ues-uiis pouvaient être e\.i-
;;éré>, et nous n'a\ons pas \oulu d'ail-
leurs entrer dans une discussion sans
utilité pour la science, et qui aurait
donné une étendue démesurée à notre
article. V. - s.
kM:iu:iu; ou clkukiu;
(Jl am), surnomme le huit .tllrntiirnl,
naquit à lie: ne ou a Nurembci^ vers
liH.*». Il embrassa la profes.<.ion de
marchand ou de banquier , et, jouis-
sant d'une ;;rande fortune , se li-
vra à des operaliiMis Gnancières trés-
lucrati\es. .S'il était de Nurember;;, il
est à présumer qu'il fut du petit nom-
biede ceux qui, fidèles à la religion
de leurs anrctres, s'expatrièrent lors-
que, en lô.JO, les habitants de celle
ville embrassèrent le protestantisme ,
et iignèrenl la confcsAion d'Aug'--
bour^. Quoi (ju'il en soit, Kleberg
se trouvait à Lvon en 1.j3.'^, à l'é-
poque où, apiés une horrible fami-
ne, le consulat fonda sou.s le titre d'. ///-
musnc grnrralc un éLiblissemciit des-
tiné à secourir les pauvies et les mala-
des, lorsque la ville serait en proie à la
disette ou à quelque épidcuiie. Klc-
berg fut un des premiers souscripteurs
de cette œu\ie philaiitropique , qui
plus tard fut réunie à 1(111 des hospi-
ces de la ville. On a calculé que dans
rinter\alle de 1533 à 15U», année
de sa mort , le Ihih Allcntand avait
donne à V Aumosnr f^énrrale une
somme de huit nulle cinq cent quaran-
tc-ciiKj !ivre^. Peu de temps après
s'èlre {'i^éîi Lxm, il avait épousé l*e-
loiinc de Boiizin, née à Tourii.T, en
Flandre, veuve de Jean de La For^c
dont elle avait un fils qui fut seij^neur
d\\i .. File lui avait apporté en dot
une jolie viila, voisine de F\on, sur la
livc gauche de la Saône , dont une
partie des b.itiments existe encore ,
et où l'on voit une tour fort an-
cienne , appelée vulgairement Tour
de lu ikllc- Allemande. François 1"""
55o
KLÉ
qui avait eu plusieurs fois recours à la
hoursc lie Kléberf;;, le nomma son valet
(le chambre ordinaire par lettres-paten-
tes du dernier mars 15i3. Peu de
temps après, les commissaires royaux,
chargés par le roi de l'aliénation des
biens du connétable de Bourbon, lui
vendirent les tcires du Cliastelard et
de Villeneuve, en Dombes. Après cette
acquisition il ajouta à son nom le ti-
tre de sieur du Cliastelard ; c'est
ainsi que l'appelle François 1*^', dans
une lettre qu'il lui écrivit le 11 déc.
de la même année, pour le remercier
de l'avoir «< secouru en prest d'une
« bonne somme d'ar^i^ent. » Ce prince
lui adressa une autre lettre qui est trop
intéressante pour ne pas être repro-
duite ici : « Seigneur lehan Clébert^e,
«c i'ay receu vostre lettre du 5* de ce
« mois, et par icelle veu le debuoir
«< et dilij^cnce que vous auez faict et
« faictes pour le faict des emprunts
« que ie veux faire à Lyon, dont ie
« vous say très bon gré : et voyant
« ainsy que vous me mandez que les
«( marchands n'y veulent entendre que
« mon filz le dauphin ne s'y oblige
« comme moi, i'en seray content, et
«« désia mondict filz l'a ainsy accordé,
«< dont vous pouvez adueitir les mar-
e< chands, à fin qu'ils tiennent leur
« argent prest, ainsy que me Icman-
»« dez. El sur ce seigneur lehan Cle-
•< berge, ie prie Dieu qu'il vous ayt en
« sa garde. Kscrit à Paris, le 11®
u lourde mars 1545, signé Françoys,
« et plus bas, Bochetel. » Kléberg
avait encore acquis, le 11 mars 1544,
un tennement qui avait appartenu aux
anciens comtes d'Auxerre, situé à
Lyon, à l'angle de la grande cote et de
la rue Neyret, lequel fut ensuite réuni
au monastère de Notre-Dame de la
Déserte. Cette même année, il fut nom-
mé, par les terriers de L)on, conseiller
«le ville; mais il refusa ces honorables
fonctions , donnant pour motifs les
KL
soins qu'exigeait un fils âgé de cinq
ans , les affaires dont le roi l'avait
chargé, et surtout son grand âge. On
n'agréa point ses excuses et son nom
figura sur la liste des échevins. Tou-
tefois, le bon /iUemand ne vit pas la
fin de son consulat, car il mourut le G
sept. 1546, dans la maison dite de
Saini-Ambroise, située place du Plâ-
tre , et sur l'emplacement de laquelle
Louis Tolosan de Montfort a fait con-
struire une des plus belles maisons de
Lyon. Le 25 août précédent , Klé-
berg avait dicté ses dernières volon-
tés à ]\P Pierre Dorlin , notaire. Il
partagea sa fortune entre sa femme
et son fils unique David ; il fit wn
legs de quatre mille livres à VAu-
mosne gé né j'aie ; quant « à ses ar-
« mures, espées, hacquebutcs et autres
« bastons et instruments de guerre, »
il les donna à son beau-fils, Etienne
de la Forge. On a voulu conclure de
cette dernière disposition que Kléberg
avait été militaire; mais il y avait alors
à Lyon une compagnie d'arquebusiers
formée des citoyens les plus notables
et tout porte à croire que Kléberg
en a fait partie. Un siècle après sa
mort , la postérité du bon Allemand
était éteinte ; mais la presque tota-
lité de sa fortune avait passé entre
les mains d'un homme non moins gé-
néreux, l'avocat Jacques Moyrou, qui
la transmit à VAumosne générale
par son testament. Quelques écri-
vains veulent qu'une statue en bois
placée sur un rocher, dans le quartier
de Bourgneuf, soit celle de Kléberg;
mais cette allégation n'est justifiée par
aucun document authentique. M.
Kreghot du Lut a consacré à ce per-
sonnage , dans ses Mélanges sur
Lyon, une notice où nous avons puisé
les éléments de cet article. A. P.
KLEI\ fFnKDl'RIC-AuGUSTE) ,
né à Friedricnstall , près de Ronne-
bourg, le 7 nov. 1793, compta parmi
KLE
*.« nuitrfs au gTmna«e «i'Allfnbour;^
le c«irbre I1irba^li>, \nits suimI ^\tc
iuccr> \ts CtJiirs ai .uUiuiqurs fi' 1 nia
(IHII-ISIV, rrmporla le prix tilio-
uielie au séimiuirr li()inilelu|tir, obtint
un pftil emploi de in.iitie à une des
écoles lie la \ille, el enfin se lit rece-
voir dorleur rn |>lii!o^n|ihir et barlielier
en llieolo^ie (1817k llientàt ses Lft-
ires sur if christianisme et le protes-
Utnlisnie lui attirèrent de vives atta-
ques verbalement et par écrit. Quoi-
que très-fecond en sarcasme» et très-
blessant pour ses adversaires, il se fit
pourtant asseï d'aini> ou assez de réf>u-
lation pour être nommé, en IHlW,
diacre et prédicateur de la garnison.
Insensiblement ses niées es%entielle-
inent progressive* se modi6rrent en
s'rlevaiit. Mais il n'eut pas le temps
d'aller bien loin dans une cainere
on sans doute il se fut distin;;(ié.
\ alétndinaire des l'enfance , frappe
de la fin prématurée de sa jeune épouse
(18:21), qui lui laissait un fils en bas-
ane, en vain alla-t il demander la santé
aux eauv salines de Kup>en ; il s'é-
teignit dans de lon;;ues souffrances,
le \'l février 1S23. Klein n'était
point un homme de {;enie, mais il
réunissait beaucoup de piécieu.ses qua-
lités, aussi utiles quelquefois à la science
que le génie. l>ne prodigieuse mémoire
en était la moindre. Ksprit méditatif
et .souple, des qu'il étudiait un système,
il en pétiétratt les difficultés, il l'é-
laborait, le rapprochait de tous les au-
tres. Kn rapprochant il comparait ,
en comparant il apercevait l'onomc
des divergences, il creusait le sol jus-
qu'à la couche où la disparité n'est
plus, où movennanl quelques rema-
niements tout est homogène; en un
mot, il conciliait ou comprenait la pos-
-ibiiité de la conciliation. De là son
N>stomc de religiosité par lequel il
pi étendait satisfaire au rationalisme et
au surnaturalisme , après avoir touIo
KLE
55i
faire proclamer le surnaturalisme par
la faculté rationnelle. In autre titre
de Klein à nos honimages, c'e^t l'in-
dépendance parfaite de son esprit.
Sa droiture de caractère n'était pas
moins rem-irquable; il avait en hor-
reur tout d«'^'uis«Miient de la pensée,
notamment d.iris la sphne scientifique;
aussi la critique périodique rt semi-
1tétio<1ique telle que les temps actuels
'ont faite lui semblait-elle immorale
el odieuse, car il d'y voyait que l'ex-
pression de pa.ssions alfeclucusrs on
haineuses, insouciantes de vérilr. Vjt
n'est pas qu'il eiit beaucoup à s'en
plaindre , la critique avait aidé à le
laiie connailre. (>n a de Klein : I.
I/éliufuerif e ilit ministre de réalise
tnnsitleré comme ministre de Jesu.s-
i.hrist, Uipiig, 1818. Dai.s celte
suite de lectures, une des plus utiles
que puissent faire ceux qui scdesliiirnt
à la chaire , Klein a eu pour but de
montrer la fausseté des idées fonda-
mentales trop généralement répandues
sur ce que doit cire b prédication; à
son avis le programme, qu'au reste on
ne remplit pas, pèche par exagération
et par lacune ; on veut trop et trop peu :
trop, quand on demande une théologie
savante, une forme élégante et fleurie
à l'orateur sacré; trop peu, lorsqu'on
ne lui demande pas un sens religieux
profond , seul moyen de donner de la
vie el une force persuasive au discours.
Quand il publia ce livre assez court,
Klein en était à son époque de transi-
tion: il avait écrit les trois ouvrages
ou recueils qui vont suivre. Il mar-
chait à grands pas vers l'invention de
son système de religiosité. II. Douze
dÎM-ours prononces à VégUsc de lu
ville II léna, etc., Leipzig, 1818.
Sans être comparables aux chefs-d'oeu-
vre de l'éloquence sacrée, ces douze
morceaux, prononcés avant que Klein
eût une place dans l'église, se recom-
mandent par des qualités analogues à
DJ2
KLE
celles dont plus tard il donna la théo-
rie. S'il n'a pas la luxuriante phraséo-
logie, la subtile théoloo;ie, il expose
nettement, il raisonne sans qu'on s'en
aperçoive , il persuade , peu s'en faut
qu'il ne . captive : il y a dans tout ce
qu'il dit une lumière et une douce
chaleur. , parfaitement en harmonie
avec les vul(2;aires proportions de la
prédication quotidienne. Mais est-ce
hien là de la prédication ? Pour éviter
toute objection, Klein a intitulé son
recueil Discours et non Serinons ou
Homélies, lll. Lettres écrites dans
l'intimité , sur le christianisme cl
sur le protestantisme {diM sujet du
troisième jubilé séculaire de la réfor-
mation), léna, 1817. Cet écrit extrê-
mement remarquable comme phase du
développement de l'esprit de Klein,
peut être lu avec profit et plaisir par
qui sait trier le bon et le douteux.
«t Ni le Christ ni la religion , dit-il
«< dans sa troisième lettre , ne per-
« dent , soit en dignité , soit en
« influence, lors même qu'une révé-
«< lation extraordinaire n'attesterait
" pas leur orig;ine divine. » Et plus
loin, « Jésus dut sa religion au JJicu
« interne, au logos qui se manifes-
« tait à lui avec le plus grand degré de
«f clarté. 11 n'était donc plus juif, puis-
«c qu'jl suivait ses révélations propres,
« et dès-lors sa religion n'était plus
M une religion positive, c'est-à-dire
« reposant sur une autorité étrangère;
« sa religion était \\n rationalisme,
« car le rationalisme est une manière
« de penser par .soi-même, d'après
«< des principes rationnels. » Evidem-
ment il était impossible qu'après en
être venu si jeune à des idées si pro-
fondes, mais si insuffisantes, si insou-
tenables sous certains rapports, Klein
n'allât pas bientôt plus loin, c'est ce
que nous verrons plus bas. IV. De lo-
quendi formula yXùxrTuiç XuMtv f/uœ
est in I cp. ad Corintli. et in A et.
KLE
Apost. , léna , 1816. V. Esquisse
de religiosisme , ou Essai d'un
nouveau système de fusion entre le
rationalisme et le surnaturalisme ,
Leipzig, 1819. Ici Klein est sorti des
embarras de la première période philo-
sophique de sa vie: il ne se préoccupe
plus pour commencer de rationnel ou
de surnaturel; débutant par une haute
synthèse et non par analyse , il pose
d'abord l'homme comme religieux ; la
religiosité est la face principale de son
âme ou plutôt son àme à la plus haute
puissance, le religiosisme est un fait
qu'opère et continue sans interruption
la religiosité. Le religiosisme et la reli-
giosité ne sont point à démontrer, on
ne peut évidemment que les étudier ,
les analyser. Or, en les analysant, on
découvre la raison d'un côté, le sur-
naturel de l'autre; ces deux éléments y
co-existent, on n'en peut douter, et dès-
lors co-exislent harmonieusement, que
l'un des deux prenne ou non cette har-
monie.Klein ne veut qu'expliquer l'exis-
tence et la légitimité de la religion en
général d'abord, puis du christianisme
en particulier ; mais remarquons que
c'est un protestant , non un catho-
lique qui parle. VL Exposé du sys-
tème dogmatique de l'église éoan-
gélique protestante (avec remarques
historiques et critiques), léna, 1822.
Ce n'est qu'un précis, nn manuel pour
l'étude approfondie de la dogmatique ,
mais c'est \\\\ précis parfait. Tous les
points sommaires décidés ou indécis,
historiques ou dogmatiques sont effleu-
rés en passant, et la plus sûre érudition
a présidé à tous les détails offerts aux
jeunes étudiants. VU. Divers opuscu-
les , savoir : 1° JJoit-il et va-t-il
se former de C église luthérienne une
nouvelle église (anonyme) ; 2" Pour
quel parti théologique la force pu-
blique doit- elle être intolérante (ano-
nyme) ; 3" Indications pour t amélio-
ration de Vétat de t église et de Vin-
KLL
KLE
553
struitiun (rédigées surtout en vue du
grand-tlurlië de Sa«e-\Vf iraar, fie),
JéiJi, IHJO; \" Jpprl a tous Us
Jrtini's- niu^urts tU C i.uroftr /irhtrs-
tante, rtr , léna, ISfJ. On doit
au5M 3k klriii une édition de ï'hKU-
sitislfs on tir nififittr cuncioiumdi
d'Krasme. Irn.i. INJU. 1* — OT.
KLKl.\S4:iinol> (Galius-
Aloys (tASPARlt), célèbre criminalisle
allemand, né le 6 janvier 17G:i, à
NN iirlzl)our^, se voua de bonne heure
à l'élude de la jurisprudence a\cr le
devteni d'v opérer une révolution dont
la necenNile. dont l'ur^iMiceolaicnl sen-
ties depuis les écrits de Ucccaiia, de
Filan^ieri et de Montesquieu. Ses élu-
des étaient a peine unies qu'on attira
sur lui les re;;ards du prince-e\fque
d'brtlial qui, de Puniversitc de Ciurl-
tin;;ue où il prit ses de;;rés, l'envova
suivre les srances de la chambre im-
périale de \N etziar, rt qui ensuite le
nomma professeur de droit romain et
de droit criminel a \N iir ubti'jr;^. 11
n'avait encore que vin;;l-lrois ans :
bientôt a|irès il joignit à 5a chaire le
litre de conseiller d'elal. 1^ variété
même des travaux nue lui imposait
cette double sphère d acti>itf le char-
mait, rt pour lui c'était un bonheur en
même temps qu'un trit)mplie île com-
muniquer ses idées par la pa:olc. Maisla
mapniricence du résultat ne l'aveuglait
pa^ sur l'immensité de la taclic, et il
sentait instinctivement qu'il ne po.ssé-
dait pas sous forme nette et scieuti6-
que les piincipcs f;eiicraux qui expli-
quent et conliennenl toutes les parti-
cularités du droit , qu'il ne pouvait
arriver aux premiers qu'en étudiant
séparément et succe-sivemeiit les se-
condes. Si, pour bien comprendre les
détails, il faut avoir quelque idée préli-
minaire de l'ensemble, en roanche,
pour saisir parfaitement cl puissam-
ment l'ensemble, il faut a\oir un ^rand
nombre de notions de détail. Telle
fut la marche de kleinschiod: ne
coramcnrant point |>ar une ambitieuse
et hypothflique svnihèse, il porta ses
regards sur une foule de points séparés,
inlerio^caiil à propo>. de rhariin d'eux
l'histoire et le ïcns intime, et tai liant
de construite pour chacun une .solution
philosophique, c'est-à-dire en rapport
avec la nature de l'honimt' individuel et
avec la nature delà société, la procé-
dure ciiiuinelle attira la prcniiore son
allrntion. (/est dans celle partie du
droit qu'il v avait le plus d'abus on
d'iniquités a supprimer. Il examina
d'abord quelques-uns de» crime-, et
délits , ainsi que les peines infli^oes
au criminel. De là une série de pe-
tits traités spéciaux écrits en latin ,
et plus tard reunis en deux volumes.
Ce ne sont pas des déclamations de
rhéteur et de philanthrope, ce sont des
raisonnements et des observations re-
marquablej les uns et les autres par
une justesse qu'on n'a pas contestée.
I.es premiers en date roiilcnt sur l'ef-
fet (le finiper/ei/iuii des preu^'es en
matière rriniinel/e , sur l'iinjuitte'
ment , sur lu nécessite de limiter
r usage de la confrontation, sur l'ap-
titude du délateur a déposer comme
témoin. In autre traite sommaire-
ment J/* la perpétration, de l his-
toire et de la pénalité du bracon-
nage et de la procédure suii^ie à son
égard ; dans un autre il discute Vori-
gine de Vidée du vol, T essence du 2^ol
et les peines (]u y applique la so-
ciété, et il démontre facilement que,
quelque vive (jue doive être la répro-
bation sociale pour cette manière d'ac-
qtrérir, le crime contre les choses ne
peut à lui seul être mis sur la hgnc des
crimes contro les (teisonnes et entraî-
ner raisonnablement la punition capi-
tale. Déjà, au reste, cette conclus:oii
était vubaire, mais il s'agissait d'en ad-
ministrcr la preuve mathématique, sans
phrase, sans appel à la sensibilité et en
554
KLE
remontant à la nature même du phéno-
mène et à la base tla jiif];ement par le-
quel nous appelons vol ce mode de
translation de la propriété. Le morne
esprii de recherche consciencieuse et
fondamentale préside à V Essai sur la
peine (les travaux forcés^ à Y Essai
sur la saisie des biens d'un suspect
ou d'un criminel (d'un prévenu ou
d'un condamné). Vlus de maturité,
plus d'élévation, plus d'aisance à ma-
nier les idées {générales se décèlent
dans son Mémoire pour la théo-
rie de l'adultère, dans ses Recher-
ches sur les conditions d'un mandat
d'arrêt en affaires criminelles ou au-
tres, dans sa Théorie de la répara-
tion du dommage produit par h
crime, et dans la Théorie de Vadhé-
siun en matière criminelle (1). Ces
quatre morceaux forment comme la
transition de ses premiers travaux à
l'ouvrage qui a fondé sa réputation et
qui , quoique dépassé aujourd'hui ,
quoique à rectifier en plus d'un pas-
saf^e, quoique composé trop exclusive-
ment au point de vue du système pré-
ventif , n'en est pas moins digne
d'être lu et médité par tout juriste
profond. C'est son Développement
systématique des idées et des véri-
tés fondamentales du droit pénal,
Erlangen, 1793-1796, 3 vol. (3^ édi-
tion, 1815). On peut due sans exagé-
ration que cette grande publication a
largement influé sur la législation et le
droit, tant en contribuant à faire partir
désormais toute théorie juridique de
principes fondamentaux sérieusement
discutés ( par exemple , des droits de
la société, comme supérieurs aux droits
de riiomme), qu'en soulevant une [)0-
lémiqtie décisive sur le choix d'un prin-
cipe exclusivement à tout autre, ou sur
la combinaison de principes diveis.
(i) Adhérer, en maliète criminelle, ilan» le
style dn la juritpnidrricc dllemande, n'e»t au-
tre choie que s* porter partie cirile.
KLE
Celui de Kleinschrod n'est pas de na-
ture à compter une infinité de parti-
sans en France ; mais en Allemagne,
et dans tous les pavs où domine l'es-
prit conservateur, il excite moins de
répulsion. S'il devait avoir contre lui
les Feuerbach, les Almendingen, eu
revanche il allait voir partager ses opi-
nions par les StUbel, losTitlman, les
Grohnann. Sans être absolument le
premier à les émettre, il fut le pre-
mier à les réunir en corps de doc-
trine , à les lancer dans le monde
scientifique et politique à l'état de
système ; et dès-lors on dut voir en lui
un de ces chefs d'école , dont bien
peu sont véritablement les invenletirs
des principes qu'ils combinent. Ce
fut alors pour Kleinschrod une né-
cessité de s'élever une tribune pour y
proclamer et défendre ses maximes.
Uni à Klein, il fonda, en 1798, les
Archives du droit criminel, aux-
quelles prirent part d'autres notabi-
lités de la science, et dont la piemière
série, close en 1817, a été suivie, sans
interruption, des Nouvelles archives
du droit criminel par Kleinschrod,
Konopack et Mittermaïer, 1818, etc.
Ce recueil est d'une haute valeur;
d'une part , il fait fonction de biblio-
graphie et d'histoire critique des pu-
blications relatives au droit criminel ;
de l'autre, on y trouve traitée une foule
de questions dogmatiques, pratiques, et
c'est avec le grand ouvrage de Klein-
schrod ce qui fait connaître le mieux
l'ensemble des doctrines de l'école pré-
ventive. Ce n'est pas cela pourtant qui
fonda sa gloire : bien avant 1798, et
même avant l'apparition du Développe-
ment systémati(jur, sa réputation était
faite. Au milieu du mouvement général
qui portait les esprits élevés vers la lé-
gislation, il devait nécessairement être
remarqué : LéopoldenToscane(1786),
Joseph II dans les états autrichiens
(1787 et 1788) avaient donné chacun
KLi:
un ro(l<» pliK a^',e, plus dout (jiie crux
qu'iU at)uli<^aif ut ; L l'ru6.>e tu «-Inbo-
lait un qui(l(r\ait |)3raitre fn 17iK'>; U
Fianrc, tirn qu'aver des formes tîes-
!i«clivc> cl en avaul le «ioubic tort de
fomnieucer par faire table ro-se Je tout
le pavsc et d'opérer sa révolution Ic-
^islati\epar la \iolence et par les mas-
ses , suivait en l'exaspérant (1791)
l'exemple des princes. D'Kitlial, tou-
jours c\èqur de N\ iirtibour;^, voulait
suspasser encore le beau code criminel
Sclinartzenberg, monument du prin-
cipal de son prrdrfev>eur <ieor^e d«
Lnnbour»;. Il confia à son référendaire
Pflaum ta rédarlion d'un code pénal
basé sur rcsqui>se du code pénal de
Quislorp ; puis il in\ita kleinsclirod
à réviser le travail de Pllaum. Cette
tàcbe ne fut terminée qu'après la mort
du prélat, et parut en 171)5, sous le
titre de Codr p<-mil de liamherg.
Kleinsclirod avait \ peine fini que
l'électeur Maximilien-Joseph de IJa-
vière, frappé des imperfections du code
ciiminel bavarois, et plus encore du
ruaniiue de gradation des peines et de
leur disproportion avec les délits, lui de-
manda un projet à substituera la légis-
lation draconienne qui, depuis une qua-
rantaine d'annéeset plus '1751-t7îMP,
réj;issait ses états. De là le Ihujrl iht
luiie prnul pour Us états du Piilu-
timit et de Iiu\u'ère, public en 1S02,
avec le nom de Kicinschrod. Cet es-
sai remarquable lui valut des éloges et
des marques de munificence de l'élec-
teur, des critiques acerbes de la part
de ses antagonistes. Aujourd'liui que
la postérité a commence pour Klein-
sclirod, on peut faire imparlialcmenl le
départ du bien et du mal : autant il est
vrai que son Projet laissait à désirer
et qu il est au-dessous des lumières ac-
quises depuis l'époque de son appari-
tion, autant il est juste de reconnaître
qu'il l'emportait de beaucoup sur ce
qu'on arait auparavant , et que les
KLE 5f.5
progrès des modernes en codifications
sont dus en partie aux pro^n> fait»
par klrin->clirod. Ou'on n'ima^me
pas non plus que son ^vstème préven-
tif et conservateur entraîne riiez lui
une excessive .sévérité. Au contraire,
tout conservateur qu'il e>t, et peut-être
parce qu'il est conservateur, il rejette,
quoique ancien, ce qu'il ju<;e inutile
ou destructeur ; et, tout en voulant pré-
venir, il ;;raduc la répresilon : sa grada-
tion même est quelquefois minutieuse
et puérile. Il ne prodigue point la jieine
de mort. (]bar;;é par son prince de re«
viser un procès d«»nt le résultat avait
été une condamnation à mort , il ne
pronoti(;a (pie la détention dans une
maison de correction. Cependant avec
les armes françaises s'imposaient à une
partie de l'Allemai^ne les codes fran-
çais : W iirliboui;; était devenu un
(;rand-duclié et le «;rand-duc avait
admis la léj^islation civile de la rive
gauche du Kliin. Kleinsclirod donna
une attention particulière aux branches
de celte le;;islalion qui se referaient à
sa 5péciallté; le ;;rand-duc le consulta
sur les modlGcalions à faire au (^ode
Napoléon pour en approprier les dis-
positions au pavs. IMus lard (ISl.J)
parut son Iritroitui tion dctuiUre à
la théorie de la juridirliun pénale
d'après 1rs clauses de l'at te de la
ron/édératiun du H/iin, dont la pu-
blication lui valut bientfit l'honorable
mission d'adapter au ^rand-duché de
^^ iirtzbour^ le code pénal promulgué
en Autriche en 1803. Ce travail qu'il
poussa très-activement touchait à sa
fin, lorsque la réunion du f^rand duché
a la lîavièrc, tout nouvellement pour-
\\ft elle-même d'un code pénal, rendit
ses soins inutiles. Du reste il f;arda
.sa chaire et, quand, par les événements
de 1814, le monarque bavarois eut
été consolidé dans sa récente acquisi-
tion, il reçut de lui des marques d'es-
time (l'ordre du Mérite-Civil, etc.).
5jb
KLE
îyiembn; du sénat de la ville, puis
d'un comité du contentieux, doyen de
la laculté de droit, il remplissait ces
l'onctions diverses avec une ponctualité
exemplaire. Le tome Vil des Nouvel-
les arcliîoes du droit criminel con-
tient de lui un dernier article, et il a
laissé divers manuscrits intéressants.
Kleinschrod venait de faire un voya^^e
aux rives du Rhin, lorsqu'il mourut le
17 nov. 18-24.
P
-OT.
KLEÎST de NollendorJ (le
romteFr.ÉDKRlC-HENP.I-Fr.RDlNAND-
Emile), feld-maréclial prussien, né le
y avril 1763 à Berlin, commença par
être page du prince Henri, et lit ses
premières armes dans la courte guerre
de la succession de Bavière. Il reprit
ensuite ses éludes à l'école militaire
et, par ses progrès, il s'attira l'atten-
tion de Tempelhoff qui dirigeait l'éta-
blissement. Dès que la révolution fran-
çaise ouvi it des chances de guerre à la
Prusse, il fut compris dans l'élat-ma-
jor, et, en 1792, il fut attaché au
corps du prince de Hohenlohe en qua-
lité de capitaine. Bien que dans une
sphère très-inférieure, il fit preuve de
connaissances et de bravoure, princi-
palement à l'affaire d'Ober-Urzel. Il
reçut pour sa conduite en celte journée
l'ordre du mérite; et Mœllendorf, en
prenant le commandement de l'armée
prussienne, laissé vacant depuis la dé-
mission du duc de Brunswick, nomma
Kleist son adjudant, place de confiance
où il se félicita sousent de l'avoir mis.
Devenu chef d'un bataillon de gre-
nadiers (1799), il en fit bientôt, par ses
.soins, un des plus beaux corps de l'ar-
mée. Le roi Frédéric;-(inillaume liilen
témoigna sa .satisfaction en l'attachant
à sa personne comme adjudai:t général
(1803). Cet emploi ne pouvait manquer
de lui faire des envieux, et la critique
ne l'épargna pas. Massenbach prétendit
qu'il s'en acquittait fort mal, qu'il em-
ployait mal son influence, etc. Tel ne
KLE
semble pas avoir été l'avis du mo-
narque ; car il garda cinq ans Kleist
auprès de lui ; pendant la malheureuse
guerre de 180G et 1807, il lui confia
le commandement d'un réginient; et,
après la bataille d'Iéna, il l'envoya
au quartier-général de Napoléon à
Oslerode , répondre aux propositions
de paix faites par le général Ber-
trand. Epuisé de fatigue, Kleist obtint
après la paix de Tilsitt un congé indé-
fini qui le rétablit plus promptemenl
qu'il n'espérait. Au commencement
de 1808 on le vit coopérer à la
réorganisation de l'armée, et comman-
der, avec le grade de major-général,
la brigade de Francfort-sur-l'Oder.
Le nombre des troupes était borné
par les traités, et Napoléon le vou-
lait toujours insuffisant à la défense
du royaume : Kleist fut de ceux qui
réussirent le mieux dans leur circon-
scription à remplir les vues secrètes du
souverain, en donnant au peu de troupes
sous ses ordres un perfectionnement qui
compensât l'infériorité numérique. Il
n'était pas difficile de comprendre que
la lutte reconunencerait bientôt. Peu
s'en fallut que ce ne fût dès 1809, et
sans l'inattendu dénouement de Wa-
gram, qui répara Essling et découra-
gea si promptement la maison d'Au-
triche, l'héroïque tentative de Schill ,
la marche hardie du ddc de Brun.s-
Avick-CEls, auraient été le commence-
ment d'une coopération prussienne à
la guerre de la quatrième coalition.
En ce moment critique et quand d'un
instant à l'autre la Prusse pouvait ou-
vertement rentier en lice, Kleist fut
appelé par son prince au commande-
ment de Berlin. On comprend com-
bien de dextérité, de vigilance et d'in-
corruptible fidélité demandaient de pa-
reilles fonctions en de telles clrcon-
.stances. La confiance du souverain ne
fut pas déçue; et, quelque impossible
qu'il fut de cacher à Napoléon la trop
KLE
KLE
5V
Juste inimitié île la IVu<;'e, an motn<;
n'rut il pa^ la salisfaclion dr pouvoir
irpiofher (^^^s liostiliti^ Ib^^ranlrs. l ii
Nfrobliiit <1r cuncoiilc suliM>ta ilonr
troi«ann«'r^ au milieu de rexi;;encr des
conirihulions mililnires, des npionna-
j;es d'une police hrannique et de tou-
tes les \etations du svstèine rontincn-
tal. Kt quand fut \cnue la dc'-astreu-^f
expédition de Pni^^ie, qunnd la Piuise
n*o>anl cisroie rompre eut à fournir
un lontiii^cnl, Klei>t, ronimr ni.ijor-
^^néral, eut une brigade à ronimander,
sous les ordres du ^cnrral division-
naire \orl. Le corps entier obéissait
i (ira\\ort, K'(|upl lui-mrme fut sou-
mis à Macdonald , cliar;;r d'opérer
dans les [tiovinces balliques avec cent
mille hommes qui formaient la (;au-
tlie de la grande armée. On sait avec
combien dr rapidité avancèrent d'a-
bord ces troupes auxquelles , sur ce
point rorame sur les autres, les Uusses
n'opposeront pas la redoutable éner-
jiie qu'ils mettaient en réserve pour
l'arrière-saison. I^CourlanJe fut pres-
que entièrement conquise sans coup
férir, kleist contribua essentiellement
au ^aiti de la première afiaire , en
filant avec s.i brij;ade le lon^; du ruis-
seau d'Kckau sur le flanc et le dos i\cs
Russes, pui> les attaquant par derrière
tandis que isiawert les prenait de
front. Il fut ensuite cliar;;é d'occuper
Mittau, pendant que le f;énéral fian-
rais faisait les pri'p.iratifs t\ii siè;;e de
l\ic;a. Celte opération n'était pas de
celles que les Kusses fussent disposés
à souffrir, et d'ailleurs le moment était
venu où i'inceudie de Moslou allait
donner le si;;nal d'hoslililés sérieuses.
Hessaisissanl l'offiMisive , les Uusses
marchèrent sur Mittau. YorL, qui avait
pris le commantlement du corps prus-
sien en remplacement de (irawert
alors malade, char^^ea kleisl de pro-
té<'er les tètes de pont en avant de
celte ville avec trois escadrons et cinq
bataillons : il ne pouvait abandonner
i l'ennemi, sans ess.iver ou sans frin-
dre quelque réMstanre, un point dt* si
haute importance pour la ;;.iurlie de la
positmn prussienne ; mais au fond on
peut croire qu'il ne voulait pas la con-
server à tout prix , et en réalité les
Prussiens et les I\usses se ménagèrent
mutuellement. Kleist n'envo>a que
quelques coups de fusils aux tins-
ses, qui bientôt se trouvèrent infini-
ment supérieurs rri nombre; et alors
5ui\int un ordre d'\ ork portant de >e
retirer sur le reste du corps prussien
en arrièie île Mittau. (Vpend.anl il n'y
a\ait point rollii-Mon «onij-j» Je ni.ore
entre les auxiliaires forcés de Napolmn
et les Uusses ; et qu?nd, le :29 sept.,
ceux-ci voulurent s emparer par force
du parc d'artillerie de hulieiid.ihl, el
qu'ils franchirent l'Aa dans cette vue,
York et Kleist dépîovèrent la plus
prande vif;ueur pour repousse cette ten-
tative. Ce dernier marchant au de\ant
de l'ennemi, sur la rive gauche, le forra
de repasser la rivirre; mais ce ne lut que
bien a\.nnt dans la nuit, et l'engage-
ment recotnmenra le lendemain, quoi-
que sans avantaj^c pour les Kus.ses.
Nous ne sui\rons pas Kle;st d:»ns tou-
tes les petites affaires auxquelles il eut
part avant et pendant le blocus de
Ki^a. Ce blocui très-imjiarfait, puis-
qu'on ne pouvait intercepter la coiu-
munication de la citadelle avec la mer,
fut levé àès le commencement de
nov. Les Prussiens pendant ce temps
avaient beaucoup souffert. Ils bivoua-
quaient sur un sol maréc.i^eux ; le
froid se faisait vivement sentir, el les
adiuiiiistralions françaises, non con-
teîites de les laisser manquer du né-
cessaire , retenaient les munitions
et les armes préparées à Pillau pour
leur usaj^e. Quand le corps de .Mardo-
nald les eut rejoints, ils fui ont placés
à l'arrière-garde , moins sans doute
parce que l'on comptait sur leur 6né-
5 ",8
KLE
liléqiie parce que, tant qu'ils ne se dé-
clareraient pas contre la France, Ils fa-
ciliteraient toujours d'autant la re-
tiaite, et que s'il en périssait dans les
attaques journalières de l'ennemi , la
perte serait peu regrettable pour Napo-
léon. York et Kleist dans celte situa-
tion devinèrent les intentions de leur
monarque ; ils n'en recevaient point
d'instruction , mais les circonstances
étaient parlantes : les détails de la dé-
sastreuse retraite se multipliaient de
jour en jour et devenaient de plus en
plus incontestables. C'était le moment
de prendre la revanche dont jamais
la Prusse n'avait perdu l'espoir. Le
corps d'York, en couvrant le mouve-
ment rétrograde de Macdcnald , ne
(il donc pas grand mal aux Russes
qui, de leur côté, ne furent pas très-
cruels pour lui , bien que dans les
rapports au général français on gran-
dit les afi'aires et l'on haussât les per-
tes. Il) en avait toutefois de réelles,
et des nuées de Cosaques harcelaient
incessamment les flancs de l'arrière-
garde. Mais , à dire vrai, ces excur-
sions eussent pu être plus redoutables,
et l'on sait à présent que dès ce mo-
ment il y avait secrètement des pour-
pailers entre les agents des deux en-
nemis qui devaient bientôt devenir des
alliés; ce qui paraissait d'autant plus
naturel que le corps russe chargé de
poursuivre les Prussiens était celui du
beau-frère de Kleist. Les fugitifs tou-
thaiciil aux frontières prussiennes
quand W ittgenstein, par une suite de
manœuvres moins difhciles sans doute
qu'on ne l'imagine , enveloppa les
Prussiens Irès-affaiblis d'ailleurs par
leurs pertes et par la désertion. Il
fallait ou passer de vive force , ce qui
ne pouvait s'effectuer qu'au prix de
perles considérables, ou bien capituler.
C'est à faire naître l'occasion de ce
dilemme que probablement les deux
généraux travaillaient depuis long-
KLE
temps. York non seulement posa les
armes devant les ennemis qu'il eût
combattus à regret (30 déc.) , mais
encore il convint de faire cause com-
mune avec les Russes, pour peu que le
roi ratifiât sa convention. Kleist sui-
vit naturellement la fortune de son su-
périeur; et, MassenTOch, averti à temps,
quoique alors il fut à dislance , se
prononça aussi dans ce sens. Cepen-
dant le roi, croyant ne pas devoir en-
core se prononcer franchement sur
ce qui venait de se passer , affecta un
grand courroux de la trahison d'York.
Mais dès le 19 janvier 11 transféra le
commandement de l'armée à Kleist, ce
qui n'empêcha pas York de procla-
mer le 27, à Kœnigsberg, que sa
destitution ne lui avait point été
adressée ; et, comme si le cabinet de
Prusse eût pu Ignorer que Kleist était
avec son supérieur, il quittait Berlin
pour Breslau en compagnie de l'am-
bassadeur français Marsan et en pro-
testant de son dévouement à Napo-
léon. Mais personne ne fut dupe de
cette comédie , et si l'on eut été
disposé à l'être , les antécédents des
hommes qui dès lors se pressaient au-
tour du roi, les Rlucher , les Scharn-
host, les Gnelsenau devaient suffire
pour ouvrir les yeux. Le 27 février
en effet fut signée l'alliance du czar
avec le roi de Prusse , et , le mois
suivant , le corps russe de Wltt-
genstein, le corps prussien d'York et
de Kleist entraient à lierlin évacué
par Augereau. Ces deux corps à la fin
de mais se portèrent en avant sur
Magdebourg : York fut détaché sur
\Vittenberg,afin d'en faire le siège ou
plutôt le blocus, et, quand la place fut
investie, Kleist parut à la tète des
colonnes qui se hasardèrent à l'ouest
de l'LIbe. 11 coopéra au mouvement
sur Dessau, occupa le passage de la
Saaie à Halle, et le 28 avril , assailli
par Lauriston et huit mille hommes en
KLK
avant t)e rflte ville, bien qu'il nVn
tût ^ut%t que liiiq mille, il le^uu^^a
tuult*% le!^ aliaijue«. lOulefui'», devant
«!r. foire» supérieures el quand l'ai-
uK-e .ill.rr a\ait résolu un mouvement
^em-ral de retraite, il ne jjouvail se
maintenir à Halle. Il partit doiir le
surlendemain à U nouvelle de la perte
de Mer>rbour|;, et se retira sur Skeu-
ditx pour opérer m jonction atec la
;;rande armée, aui environs de Leip-
ii|;. lîienlot eut lieu la batadle de Lut-
zen {'2 mai). Napoléon avait leparu,
et sa pre>ence accrlcrait les e\ene>
inenis. Pondant que U mavse des deux
aimées ^e disputait les Mila;;es mren-
dii i on avant de (iro»s-(iirr>clien ,
kloist, placé dans l^ipii;; aver »a bri-
;;adp, défendait la ville contre Lauris-
t«in, supéiieur en nombre , et tri:p lai-
ble il l'évacuait il trois heures. 1^ len-
demain il fit un effort inutile pour y
rrniror : les alliés étaient en pleine
rrtratte et abandonnaient la l^ut de
l'KIbe; foi ce fut que lui-môinese reti-
i.il en toute liate. Il ^e replia sur
\N urlzcii et repassa le fleuve. La ba-
taille de Iiautzen .suivit de près :
klei.st > déplova pendant les deux
jours un dovouemenl el un courage qui
lui mériurent les é!o-es de l'empe-
reur Alexandre, il occupait avec sa
bii^ade les hauteurs de liuij; et de lîa-
saniwiti , à la droite de lîautzen ,
et faisait partie de la première li^ne.
Tout le jour il défendit le passaj;c de U
Sprée contre les attaques roitérées de
î\iarmonl el de lieilrand qui voulaient
le »b l'usquer, et qui, mailres de la ville,
diii;;c;enl leurs attaques sur Nieder-
Keina dont ils enlevèrent les hau-
teurs. Trois mille hommes détaches par
liliicher au secours de Kleist l'aiilè-
rent encore à prolonger une résistance
desespérée, pendant lar|uellc l'armée
alliée se repliait avec lenteur el mé-
thode. Voyant son ilanc c;auclie me-
nacé du colé de Nieder-Keina , et ,
kLL
55q
d'autre part, les Français te prépa-
rant à iLiverser la Spiee du rAlé de
Nieder-4iuika , Kleist alla se refor-
mer derrière les batterie^ de Lilten ,
et c'est alois que les Kianrai.'* s'avan-
cèrent sur tmiic ta h«;ne jusqu'à ce
que l'aile ^aurhe des l^uftsesles arrêtât.
1^ lendemain, quand l'anivee de Ne?
à Klir et sa jonction avec Bertrand
eurent brusquement refoule Harclav
de IoIIt de sa pOMlion de N> ind-
muhlen-IWr^ , et que le Ilanc droit de
lUiirher se trouva menacé, Kleist fut
char{;é d'aller ntablir les aflaires sur
ce point. In plein ^urcès couronna
ses efforts; le village fut eiiloTé par la
parde prussienne et le ré*;imrnt de
Salberc;, brillant fait d'armes qui em-
pêchait Napoléon d'envelopi»er, com-
me il le projetait, toute l'aile droite
de« «ll-M, et qui i en«lait bien plus rude
la tâche de c!ia<5er lUiiciier de ^â forte
position de Kre(L>fcitt. Il est vrai
pourtant que cette tàdie fut accomplie
en deux heures j>.ir ^larmonl et lîcr-
trand. Cependant l'aile j;auchc com-
battait avec avantaj;e, la droite reculait
sans beaucoup de perte, el si tous les al-
lies renircnl l'ordre de la retraite, ce fut
plutAt pour éviter un dé>astie possible
que par suite d'un desastre réel, fîar-
clay et Kleist formèrent l'arrière-f^arde
dans colle marche ritrof;rade , el pla-
cés sur les hauteurs de (icerilz, bar-
rant le passade à Lauriston et à Ney
qui eussent voulu atteindre VVeissen-
ber^; avant liliicher et Yoik, ils ne se
laissèrent ni couper ni mettre en dé-
route : la cavalerie française, trop peu
nombreuse et mal moulée, facilita
beaocoup leur lâche. Les deux <^éné-
raux atteignirent ainsi Ixeichenbach.
Bientôt eut lieu le célèbre armistice
de Picisswilz , qui donna le temps
aux alliés de déterminer la défec-
tion de l'Autriche. C'est à Kleist
que Frédéric-fiuiilaume donna la mis-
sion d'aller, concurremment avec le
56o
KLE
russe Sdiouvalov, faire les cniidilions
de l'armistice, qui fut si^iié le 4 juin
et prorogé jusqu'au 10 août, A la re-
prise des hostilités , tandis que Blil-
cher restait en Silésle oîi bientôt il
devait gagner la bataille de la Katz-
bach, Kleist chargé du commande-
ment du deuxième corps d'armée prus-
sien, celui que naguère avait commandé
Blucher, traversa la Bohême et alla
joindre la grande armée de Schwar-
tzenberg. Le 26 et le 27 il eut part à
la bataille de Dresde : s'avançant de
Leubnitz contre Strehlen et Gross-
Garten, il formait le centre qui seul,
tandis que les Russes et les Autrichiens
aux deux ailes étaient forcés à se re-
plier, se maintint en position. Obligé
enfin de suivre le mouvement général,
Kleist se rapprochait des montagnes
de la Bohême, quand tout à coup ar-
rive un ordre du roi de Prusse d'aller
au secours d'Ostermann, qui se défen-
dait héroïquement, contre les trente
mille hommes de Vandamme , dans la
plaine de Ruim (30 août), mais dont les
rangs considérablement éclaircis sem-
blaient garantir l'entière défaite. Un
premier renfort prussien venu 1 après-
midi , puis une colonne autrichienne
avaient rétabli le combat, et la lutte se
poursuivait avec fureur, lorsque l'ap-
parition de Kleist vint tout changer.
Il était arrivé la veille au soir à
Glasliiitte : le roi l'avait chargé de s'a-
vancer parle Geiersberg ; mais, déses-
pérant de pouvoir se rendre maître
assez tôt de ce passage, 11 se porta par
la crête de la montagne vers xNollen-
dorf , pour prendre de là les Français
à dos. .Sa présence sur ce point fut
tomme un coup de foudre pour Van-
damme. Laissant une résoi ve pour oc-
cuper les hauteurs de Peterswalde, il
descendit avec la rapidité d'un torrent
sur les Français déjà pressés de deux
côtés, et qui se trouvèrent alors cernés
de toutes paris. Après avoir courert le
KLE
champ de bataille de leurs morts, dix
mille hommes tombèrent aux mains
des vainqueurs, les autres ne trouvè-
rent dans les forêts qu'un refuge mo-
mentané ; toute rartilleric fut prise,
ainsi que les bagages , les munitions.
Vandamme lui-même, qui avait cru ga-
gner en cette circonstance le bâton de
maréchal promis formellement par Na-
poléon, resta captif. Les journées de
la Katzbach et de Kulm furent pour
l'armée française le commencement
d'une série de revers que désormais
la victoire ne devait que rarement in-
terrompre. Kleist reçut de la main du
roi de Prusse , pour première récom-
pense, l'ordre de l'Algle-Nolr. Ayant
suivi les mouvements de l'armée alliée
hors de la Bohême, il se dirigea sur
Zwlckau et se trouva le 11 oct. à Bor-
na. Le jour de la grande bataille de
Leipzig (16 oct.), il était à l'aile gau-
che dans la direction de Grœbern et de
Gossa, et marchait sur Mark-Kleeberg
dont il s'empara, et qu'il garda malgré
les efforts réitérés des Français. Il s'a-
vança ensuite contre le plateau élevé de
Wachau, d'où Napoléon examinait les
mouvements et dirigeait les opéra-
tions ; mais, malgré la persévérance et
le courage avec lesquels les troupes ne
ceùicrenl de revenir à la charge jus-
qu'à quatre heures du soir, il ne put
déloger les Français de cette forte
position. D'énormes renforts affluaient
sans cesse des deux côtés, et bientôt
les environs Immédiats de Wachau
furent un des principaux théâtres de
la lutte. Le corps de Kleist s'était
battu sans interruption pendant neuf
heures et conservait toujours son poste
de Mark-Kleeberg, lorsque enfin le gé-
;!éral Blanchi vint l'appuyer. Le sur-
lendemain (car on sait que le 17 se
passa à peu près dans l'Inaction), uni
sous les ordres de Barclay aux lUisses
de Wittgenstein et à un corps auxi-
liaire saxo-pnissien, .sous le grand-duc
KLE
(>)n.stantln et MiloraJo>ilcli, il s'avan-
ça contre NN arliau ; (tuis il eiii^xtrta U
luilciif tif Ma\Nilorf et se poita sur le
\illa|;e ilc i'iub»t))e)tia. qui fut dru\
fois pris par les PruNsien» et deux foisi
repris par les Français. Kiri^l y
rprou\a de prosses peiles , mais celles
(les Français ne (uient pas moindres;
et, s'il ne put se maintenir dans le lia-
lueau tant contesté, du moins sut-il
inellre son artillerie , ses ba;;aj;e$ à
f ou\ ei l , et contenir ses adversaires dans
ProbNllie>da. l'n assaut lui livra le len-
demain ce malheureux village auquel
les Français, p;»ur prote;;er leur re-
traite, mirent le feu quoiqu'ils y eus-
enl leurs bles>cs. Kleisl fut a.s«.ez gé-
néreux pour en sauver une grande
pattie. Il marcha ensuite contre Kr-
fuit, dont il s'empara sans beaucoup
de peine le 10 janvier IHIV. Ln
mois après, le Ci>i ps de RIeist ,
lies-reduil par les combats et les ma-
ladies, allait rejoindre en France l'ar-
mée de Silésie sous liliicher, et dès
le 7 il s'était tiouvé à Chalons-sur-
Marnc. Dans celte dernicie partie de
la ^ueire, Kleisl suivit pailoul liliicher
et eut sa part de tous les événements.
Il assista aux échecs de Monlinirail,
de Chateau-Thierr) , qui punirent la
folle idée qu'avait eue liliicher de s'é-
carter de la j;ra!ide armée el d'agir
séparément. En levanche il fut un
des principaux acteurs à l'affaire de
I^on (8 mars) : c'est lui qui fit, uni
au général YoiL, la charj;e brillante
par laquelle furent défaits le corps de
Marmont el la cavalerie d'Arri^hi.
Il se sif;nal.i de même aux combats de
la Feitc-Gaudier, de Clave. puis à la
bataille de Paris (30 mars], qui mit
un terme à la lutte de la révolution
française contre l'Europe. Le roi de
Prusse lui donna le litre de comte de
Nolicndorf, lui assigna comme dota-
tion le domaine ro\al de Sldlterlin-
î^enbourg , dans La principauté de
LXVlll.
KLE
56i
llalbersiadt , et lui conféra le :i\iè-
me ir^imenl d'infanterie. I.^rs de la
visite que re monarque rendit en An-
jjlelerrc an princc-ie;;ent, Kleist fut
de sa suite. Enfin, après le relourdes
armées victorieuses, il reçut le com-
mandement du corps placé à demeure
sur le Khin , el fixa son quartier-
{;énéral à Aix-la-(>hapelle. C'est U
au'il apprit la nouvelle de l'éva-
sion de l>onaparte ^en 1K|.'»^ Dési-
gné incontinent ^éneial en chef de
i'armre allemande du nord ainsi que
du deuxième corps d'armée prussien,
il hâtait les préparatifs de départ lors-
qu'une lon;;ue et douloureuse maladie
le mit sur le bord du tombeau, et le ré-
duisit à donner sa démission. Uevenu
à la santé, il fut gratifié par le roi du
commandement général du quatrième
corps prussien établi en Saxe. Mais
bientôt les habitants le virent avec
chagrin, cédant aux malaises phvsi-
ques, résultats de ses fati;;iies et de «es
travaux, résigner un commandement
dont lU s'étaient bien trouvés. Le mo-
narque en acceptant sa démission lui
assigna une pension et lui donna le
biton de feld-maréchal (.5 mai 1821),
le jour même où mourait \]onaparte à
Sainte- Hélène. RIeist ne survécut que
peu de temps à celui qu'il avait tant
contribué à vaincre : il mourut , le
17 février 1823, des suites d'une in-
flammation du foie , après une courte
maladie, à lierlin où il résidait avec sa
famille. 11 avait été nommé récemment
conseiller d'état. Tous les souverains
de la coalition l'avaieul décoré de leurs
ordres , et Napoléon hu>m lui avait
donné la croix de la Lcgian-d Hon-
neur. Sa dépouille mortelle repose sous
la coupole de l'église de la garnison, à
Berlin. Son buste en bronze, par
Rauch, figure dans le jardin de Pots-
dam, au milieu de ceu.x des autres gé-
néraux qui se sont fait un nom dans
les dernières guerres. P — OT.
36
KLE
RLE
KLEIST (Henri de), poète al-
lemand, non raoins célèbre que son
homonyme, le brillant Ewald-Chris-
tian {i'oy. Kleist, XXI ï , 4o8),
qui, comme lui, servit la Prusse sur les
champs de bataille , i»aquil en 1776 à
Francfort-sur-rOiler. Il entrait dans sa
dix-sepliènie année, lorsqu'il Bt, en qua-
lité de cadet, cette campagne des bords
du Uhin si remarquable par l'inutilité
des mouvements stratégiques et les pro-
fits que sut y ménager le généralissime
pour le cabinet prussien et pour lui.
Kleist sans doute ne comprit rien à
cette incompréhensible manière de faire
la guerre, manière qui, certes, n'était
point celle du grand Frédéric ; et la
mobilité fiévreuse et fantasque d'un ca-
ractère {dus enclin que de raison à la
mélancolie et au desenchantement le
porta bientôt à abandonner la carrière
militaire. La paix de Bàle d'ailleurs
avait restreint le développement guer-
lier de la Prusse. De retour à Franc-
fort, Kleist y travailla deux ans (1799
et 1800) avec beaucoup d'assiduité,
menant de front les études littéraires,
celles du droit et des sciences admi-
nistratives. Des relations de famille ne
tardèrent point à le faire recevoir dans
\c5 bureaux du ministère des accises
tt du commerce à Berlin , sous
Slruensée. Mais la régularité bureau-
cratique était peu dans ses goûts.
Aussi fut-il au comble de ses vœux
quand on l'envoya pour quelques dé-
tails, moitié diplomatiques, moitié com-
merciaux, à Paris. Le principal point
de cette mission était sans doute de
fournir des cliifircs plus ou moins
inexacts à l'ambassade pour aidera la
fixation de la grosse indemnité que
devait avoir la Prusse, en compensa-
tion et de ce qu'elle cédait sur la rive
gauche du lUiin et de la force morale
que son inaction depuis 179.') (on
pourrait dire depuis 1792) avait don-
née à la résolution française. On
sait que cette indemnité, quadruple au
moins pour la population , et sextuple
pour le territoire, fut, sous le rapport
du revenu, nominalement quatorze fois
et réellement de vingt-deux à vingt-
quatre fois égale à la perte. Kleist
passa pour cela un an entier à Paris ou
à Luiiéville, puis revint en Allemagne
par la Suisse. Mais, arrivé à Dresde, il
eut le plaisir d'y trouver l'ordre de re-
tourner dans la capitale de la France.
11 retravtrsa donc encore ce poétique
pays de Suisse, dont la physionomie
accidentée ébranlait en lui toutes les
fibres maladives et rêveuses, et revint
pour aplanir de ces difficultés finan-
cières que rencontre toujours l'exécu-
tion d'un grand traité. Nous ne savons
si primitivement ses sentiments pour la
France telle que l'avaient faite la ré-
volution française, puis Bonaparte,
étaient de l'amour et de l'admiration;
mais évidemment il n'était pas be-
soin d'avoir sa perspicacité, son irri-
tabilité et son patriotisme pour perdre
vile ces illusions et pour passer de
l'affection à la haine. L'impudente
ambition, la morgue hautaine, les exi-
geiices de plus en plus impérieuses de
Napoléon , et plus encore le mépris
que son gouvernement , après avoir
leurré , trompé, deshonoré et réduit
au rang de complice le gouverne-
ment prussien, laissait percer, et pour
le caractère moral et pour la valeur
matérielle de cette puissance, ne pou-
vaient que blesser profondement un en-
fant de la Prusse, bien complètement
au courant, sinon du passé, au moins
du présent. Faisant partie de l'admi-
nistration des finances et du commerce,
Kleist surtout sentait quel coup mor-
tel devait porter à la prospérité prus-
sienne cet impitoyable système conti-
nental. 11 ne quitta pourtant Paris
qu'en 180(), lorsque les mésintelligen-
ces entre Napoléon et la cour de Ber-
lin en furent venues à ce point qu'on
RLF.
RLE
563
II* po«Talt plus mettre en doute l'im-
iM iMiire d'une rupture. Struensée a\ait
te r de M\rr, mais KKist n'rri re-
litiii\:i ]n. tTioiri-. <a plare au doparte-
innil l'.r. tllaiirs coinmcrnales : il la
roiisrr\a |usqu à la bAlaille d'Iéiia, qui
fut sîii\ic vi proroptempnt de l'occupa-
lion de Heiliii , de la reddition , de
Tocrupation de tontes les pirates et de
loute^lespro\incesoctidentale5. Kleist
a\ec les lideles s'était porté %crs Kcr-
iiij;sl»erp, mais il n'y retrouva aucun
rmploi. Au bout de quelques mois il
♦•t.iit de retour à Uorlin toujours aux
fii.iMis *]>. VV«i!i.v> Son départ avait
Hr rr Tiii.' vu • i.rhjMC sorte comme
une dr^^'itiori , l)(u.:ipatle entendant
q»ip , (înns tout royaume rcmquis, les
fonclionnaiies reslasseii». i leur poste
tant qu'il ne leur ordonnerait pas, lui,
d'en sortir. Kmigrer, c'était protester
dtf sa lidolité à l'ordre de choses de
truil ou près d'être détruit par la vic-
toire, c'était jeter une ombre d'illégi-
timité, dr désapprobation sur le droit
de *p:>liation et de conquête, c'était se
constituer en hostilité. Kleist, à son
retour, fut donc saisi et dirigé comme
prisonnier de c^ucne vers rinténeur de
la France: Joux, Chàlons-sur-Sac^ne
furent successivement ses prisons. On
peut penser ce que riniqinté d'un trai-
tement si contraire au droit des j;ens
produisit <ur son esprit. C'est la sans
doute que son patriotisme prit le ca-
ractère de l'exahalion, et que cette
exaltation devint de la fureur. La
paix de Tilsitt le rendit à l'Allema-
gne; mais après a\oir un an durant
travailléà Dresde avec Adam Muller,
son ami et so!i camarade, au PJ'ébus^
il .se rendit à l^a;;ue, et se mit en route
pour Vienne, afin de prendre part à la
f;iierrc de l'Autrirlie contre Napoléon.
-Mais c'était au moment de la bataille
de \\ a^ram ; et la prompte paix de
Vienne vint brusquement mettre un
terme à ses illusions, et le réduire à re-
tourner en I'iu<>e. On peut s'étonner
qucle ;;ou\ernemenl français > ait souf-
fert son retour, l n seul nom de poète
était alors pli;«i naiional que lesien, c'é-
tait celui delliéodure Ku-rner, Tvr'.ée
pernianiqur ; mais, en peisé\rrant dans
ces appellaiions antiques données à des
contemporains, on eût pu le nommer,
lui, l'Arctinui du Nord. Sa lltttailin
trilrrnumn est comme une Marseil-
laise dansdcf;';;ante2ques jToportions ;
et rexa;;ération tantdt du st^le, tan-
tôt des situations, rimpos*ibiiitc de
supposer auxCîermains du <irrle d'Au-
çxï-^Xt les idées et le ton que kleist leur
prête, n'empêchaient en rien toute la
jeunesse alleniar de de relire et de répé-
ter a\er la plus chaude admirât ion les ma-
gnifiques tirades héroïijries et l\riques
dont fourmille ce f>oème , qui ^*.u reste
ne fut publié en son entier par Voss
que lorsque Klfist n'existait plus. ï^
vie intime de ce poète était bien celle
de l'artiste excentrique et jeune chez
qui la lave bouillonne, encore. K me-
sure qu'il a\ançaitdans la vie, sa sen-
sibilité allait croissant et il devenait de
plus en plus hvpocondre , étranger à la
vie réelle ; mécontent de l'unixers et
de lui-nicmc , malade d'orj^ueil, si-
non coninje homme, d'i moins comme
poète, il empirait à plaisir sa position,
il envenimait ses plaies. L'nedame ma-
ladive, tout aus>i impressionnable, tout
aussi hors du vrai que lui, avait quitté
sa maison, son mari pour croire en lui,
pour vivre sans cesse à coté de lui.
Celait M'"" Vof;el, femme d'un né-
gociant de Berlin. Gîtte amie ( car ils
se donnaient le nom d'ami) ne trouva
pas-plus le bonheur et le calme près de
Kleist qu'elle ne les lui fit connaître.
Las enfin des amertumes sans nombre
fruits d'une liaison imprudente, mais se
re;^ardant comme des victimes de l'in-
gratitude humaine et du béotisme des
formes s>>ciales, Kleist et son amie
quittèrent la vie en 1811 parle sui-
36.
564
KLE
cille, donnant ainsi à la foule des êlres
médiocres qui s'impatientent et se trou-
vent incompris un exemple trop fidèle-
ment suivi. Nous ne justifierons point
Kleist, mais nous le plalndronr-, el nous
ne dirons que la vérité en disant qu'il
V avait évidemment chez lui tendance à
riiallucination, tendance exaltée en-
rôle par toutes les a;j;itationsde la vie,
et que le contact de M'"*^ ^ oj];ei, et la
sévérité du moj.Je en froissant sa Gère
susceptibilité, porta au plus haut degré.
Nous regretterons surtout que cette
prompte mort ait enlevé à l'Allemagne
un poète qui eût pris rang parmi les
premiers. 11 y a chez lui du Jean-
vJacques Rousseau et de l'André Ché-
nier, quoiqu'il n'ait pas tout le per-
suasif du (iénevois et ce parfum d'ex-
quise et d'intime poésie qu'exhalent
les vers du second. Mais la sensibilité,
la chaleur, caractérisent tout ce qu'il a
laissé. On respire chez lui une atmo-
sphère passionnée, son style a la fièvre
et la donne. A ces hautes qualités du
poète de premier ordre, il en joint
d'autres, le grandiose de l'idée, la har-
«iiesse du plan, la lécondité des dé-
tails, la richesse de l'expression, la
souplesse et la limpidité du vers. Il
manque pourtant bien des choses à
Kleist: grand poète lyrique et même
épujue, il n est poète drainatifjiio (jue
de nom; il ne sait pas vraiment dialo-
j;;ucr ; ses personnages ne vivent pas,
ils se meuvent comme des marionnet-
tes sur des lignes droites ou anguleuses
(jiii tuent Tillusion ; les caractères ou
sont manques ou manquent l'effet : l'ac-
tion n'est pas conduite avec art : {)oint
de dégradation, point de nuance. Ces
défauts sont moindres dans les deux
\ol(imes de contes, notamment dans
jMiclicl Kuhlhaar. Ses tragédies, au
iiombie de cinq, sont : la Famille
(le Srhrojfenstrin, qui, malgré ses dé-
fauts, peut sembler à beaucoup de lec-
teurs nn chef-d'œuvre ; Penth^siUe,
KLE
écrite de verve el où l'on pressent déjà
le poète qui fait tenir un si énergique
langage à Thusnelda ; Kœichp.n
d' Itcilbronn, qu'il Intitula drame che-
valeresque et où les suites fatales de l'a-
mour, devenant comme le mauvais gé-
nie de l'homme, irrésistible et entraî-
nant d'abîme en abîme, sont rendues
avec une effroyable puissance; enfin
le Prince de Hambourg et la Ba-
taille d'IIei'jîiann, posthumes l'une et
l'antre, mais dont beaucoup de mor-
ceaux étaient connus de ses amis.
Deux comédies, Amphitryon et la
Cruche cassée, complètent la liste de
ses œuvres. Les deux drames posthu-
mes ont été publiés par Tieck qui les
a fait précéder d'un Discours préli-
minaire sur la vie et les œuvres
de Kleist (i). P— ot.
KLEXAU (Jean, baron de Ja-
NOWITZ, comte de), général autri-
chien, né en Bohême vers 1760, de
l'une des plus anciennes familles de ce
pays, entra fort jeune au service, et
fut officier d'étal-major à la fin de la
guerre contre les Turcs. Venu sur les
bords du Rhin, dès le commencement
de la guerre contre la France , il y
servit d'abord, sous le général Wurm-
scr, et donna dans plusieurs occasions
des preuves de valeur et d'habileté. En
1794, étant lieutenant-colonel de dra-
gons, il fut chargé de commander sous
le général Latour, la ligne des avant-
(i'; Ses OEuvrex ont <I<'; rpuni«;s et pul>liëes
par Louis Tieck, Rcriin, iSjio, 3 vol. in-8°. Ses
Coiiifi ont (■l>' traduits «ni fionrnis par M. Chcr-
linlio/., |)i<'i(d('s d'une Vie de l'auteur, i83o,
i vol. iii-i->. On peut lire , sur ce poAte, des
(iiticles ••triHliis (luiis le Cnlholiqne (do M. I«
l)aron d'Iv kstiiii), Uiai 1818, p. 249-314, '"t
dans le (iliilie (a'ors floctriuaire) , septembic,
1S28. — l.a fririuie à laqiutllc il s'était attacha
r'tait alteiiii«> d'un mal incnrabli; : elle lui fit
jurer (II- lui tlonucr une dftriiièfK marque d'a-
piiiiur, M.llf! (|u'i.llc l'exigerait de sa tendresse :
«•'était de la tuer. Dans un hois près de .Sans-
Souci, Kici."! accomplit sou horrible promesse,
el st* tua après. 11 avait brûle auparavant, entre
autres manuscrits, un journal ou il se rendait
compte de *<"« eentiinents, I-.
KLE
KLK
5ii5
postes df\ant l.i^;;e, et :>'y dcfendit le
"27 juillet , avec le plus ;;iAnd c»»u-
la^c , centre un ennemi beaucoup
plu5 nombreux. Mais, attaqué ensuite
>ur se* dertirres par les habitants (pii
s'étaient arme?., il lut obli;;é de se re-
tirer. Il re\int bienliU à la fhar;;e ,
pénétra dans le faubourg dWmer-
cirur , rejeta les Français de l'autre
cAté de rOurtlie, et s'etiipara du pont
et delà porte qu'il fit barricader. Dans
la carnpa;;ne de 17î>.*>, il était sous les
ordres de Clairfa\t, lorsque, par les
mouvements rapides d'un corps de ca-
ralerie qu'il commandait, il garantit
la place d'IIeideiberi; près de tomber
.111 poiixoir des Kranrais. L'année sui-
vante il passa à l'ariiiée d'Italie, où il
commanda le ré;;iment des hussards
de NN urmser a\ec beaucoup de dis-
tinction. Devenu premier aidc-de-
camp du maréchal de \\ urmser, il
l'accompagna dans ses malheureuses
tentatives pour délivrer Mantoue, et
fut renfermé comme lui dans cette
place. Kn>o\é à Bonaparte aGn de
proposer la capitulation, il fit d'inu-
tiles efforts pour en imposer à ce gé-
néral sur l'état de la «garnison qui était
désespéré, et fut oblif;ë de consentir
aux plus dures conditions. Napoléon
parle de lui a\ec élo;;e dans se> Mr-
ninirrs de Sainte-llelène. Kn 171)9
klenau servait encore à l'armée d'Ita-
lie comme {;énéral-major, cl il fui char-
gé de couvrir le sièf;e de Mantoue, en-
trepris par le j^énéral Krav, en obser-
vant avec six mille hommes, près de
Bologne et du fort l rbano, les mou-
vements de Macdonald qui revenait
de Naples avec une armée. Apres
s'être emparé de Kerrare ^2*2 mai' ,
le général français l'attaqua près
de San-Giovani. Klenau lui laissa
passer le pont , cl tombant sur les
colonnes françaises , avant qu'elles
eussent le temps de se former, il les
repoussa, prit leur artillerie, fit grand
nombre de prisonniers, et se maintint
pendant toute la journée dans sa posi-
tion qu'il ne quitta qu'à la nuit, et
lorsqu'il apprit qu'une dniMon autri-
chienne axait été battue près de Mo-
dène. Après la bataille de la l rebbia,
il cerna le fort l'rbano, et marcha sur
Bologne, où il coupa la retraite au
général Hullin,$ur Florence. I/entrée
3u'il fit alors dans cette ville, au milieu
es applaudi^sements de la population,
fut une espèce de triomphe. Il fut en-
suite chargé de la triple mission , de
soutenir la révolte des Aretins contre
les Français ; de poursuivre l'armée de
MacdonabI , et de se mettre en com-
munication a\ec la flolille anglaise qui
croisait devant (iéiies. Dans sa mar-
che vers les cAles, il fit près de onze
cents prisonniers. Le 31 juillet, il
s'empara de Sariane et de quatre châ-
teaux-forts , et poursuivit l'ennemi
jusqu'au golfe de la Spezia. Comme
le corps q;i'il commandait était très-
faible, il ne chercha point à s'engager
dans les montagnes, mais avant de se
retirer derrière la Stura, il attaqua
le général Miollis et se rendit maître
deSestri, de Uapallo et de Uecco. Se
trouvant ensuite devant des forces su-
périeures, il se relira derrière Sestri
sur le Monte-Braco. et commença le
blocus du fort de Sanla-Maria.
N'avant point d'arlillerie, il en fil ve-
nir de Lurra et des diflérenls forts de
la cAte avec des munilions : après
deux jours de bombardement, le fort
se rendit et les six cents hommes
qui l'occupaient furent prisonniers.
Dans le mois de décembre, Klenau
alla<^ua les positions deSori, Monte-
G)rnue etTorriglia, s'en empara mal-
gré les difficultés du terrain , et re-
poussa les Français jusque sous les
murs de Gènes. Les habitants de cette
ville avaient promis que , lorsque les
Autrichiens se montreraient devant
leurs murs, toute la population se sou-
566
KLE
lèverait coulre la garnison française ;
mais ceflc promesse ne fui point exc-
ciilcc , et les Français, profitant de
raflaiblisscincnl du corps de Iloîien-
zollcrn , avec lequel Klenau devait
ap;ir, tournèrent la position de ce der-
nier pour le prendre à revers. Ce fut
alors qu'il s'ouvrit un passage au mi-
lieu des corps ennemis par une mar-
che aussi habile que courageuse.
Ayant pris ses cantonnements près de
Sarzanc derrière la Magra, il fit occu-
per Sestri par ses avant-postes. A
l'ouverture de la campagne suivante
(1800), il fut appelé à l'armée d'Al-
lemagne, sous les ordres de Kray.
Le 18 décembre 11 eut à soutenir un
combat très-vif entre Nuremberg et
Lauf, contre le général Augereau, et il
le rejeta de l'autre côté de la Rednitz.
Nommé à cette époque feld- maréchal-
lieutenant, il continua d'être employé
à l'armée d'Allemagne et il eut le
malheur, en 1805, de faire partie de
l'armée que commandait Mack et qui
capitula si honteusement à Ulm. Lors-
que cette armée défda devant Napo-
léon, il en reçut des paroles de conso-
lation fort honorables. Dans la guerre
de 1807, 11 commandait une division
en lîohéme. Le jour de la bataille
d'Aspern (1809), il fut chargé avec
une partie de l'avant-garde de pous-
ser une reconnaissance sur l'ile de
Lobau, oîi les Français avaient réuni
de grandes forces. On voit dans le
bidlelin de l'armée autrichienne qu'il
V donna de nouvelles preuves de ta-
lent et de bravoure. A Wagram , 11
conduisait le sixième corps en rempla-
cement du général Nlller, qui était
tombé malade. Ce corps, qui occupait
d'abord les retranchemens sur la rive
gauche du Danube, prit ensuite posi-
tion sur les hauteurs de Slammers-
dorf, et fut destiné à attaquer l'aile
gauche des Français. Klenau se mit
en mouvement à la pointe du jour, le
KLE
6 juin, et il attaqua les Français dont
les masses d'infanterie étaient postées
près d'Aspern et dans les prairies en-
tre ce village et Stadelau. Quand la
retraite générale fut ordonnée, Klenau
se retira en combattant, et passa la
nuit en bataille sur les hauteurs de
Stammersdorf. Le jour suivant , 11 for-
ma r arrière-garde. Arrivé le 7 à Korn-
neubourg, à 2 heures de l'après-midi,
11 fut attaqué par les Français et ne
quitta la ville qu'après s'être battu
jusqu'au soir. Le 8, il se maintint
pendant toute la journée dans la posi-
tion entre Stokerau et Malebern , et
le 9 il défendit Tiollabrunn contre des
attaques impétueuses qui durèrent sans
interruption jusqu'à minuit. Après ce
rude combat, les troupes de Klenau,
affaiblies et harassées de fatigues, ren-
trèrent en ligne et furent remplacées
par le cinquième corps. On voit, dans
le bulletin officiel de l'armée autri-
chienne , que « le général Klenau
« avait rendu de grands services dans
« cette occasion par la fermeté avec
« laquelle il avait commandé l'arrlère-
« garde, et que S. A. L se plaisait à
« lui en exprimer toute sa satisfac-
« tion. » En 1813 il fut nommé gé-
néral de cavalerie et employé a l'armée
de Bohême , où sa division, engagée
maladroitem.ent dans les montagnes
près de Dresde , essuya un violent
échec. A la bataille de Leipzig, il com-
mandait les troupes autrichiennes qui
firent partie du troisième corps com-
posé de Russes, de Prussiens et d'Au-
trichiens, et qui fut chargé de l'atta-
que sur la rive droite de la Plelsse. Le
combat que cette colonne eut à soute-
nir contre les troupes de Murât et de
Lauriston fut le plus Important de
la journée, et il est connu sous le nom
de Wachau. Le comte de Klenau se
porta ensuite sur Liberwoltkwitz où
Macdonald et Mortier le forcèrent ,
par leur supériorité, à faire un mou-
RLE
567
\rafnt rèlTO^âàt mr Sjrfriirlslirim.
lou^ Ici efforts ^e l'fnuraii pcmr
s'emparer ilf cette po-nlion Mnrent
échuier devant la ré>i5tMice 0|ilnia-
Ire de Klrtiau. On si\l que la lutte
se termina le 16 dér., s«r ce point,
à Ta^aniaiic des allié». Il en ftit de
mrme le IS , où le IroiMpmc corps
IrioffDpha près de /,uLrlliaa.«cn , SweT-
Nauendorf et Sloelteritz. Aprrs celle
^ranile bataille des nations , Klenau
réélit loi die d'investir la ^ille de
])re>«le, ilrlcndue pai trente mille hom-
mes sous les ordres de (îou\ioii-Saint-
Cvr ; et il es^uta d'abord (|iielqiies
sorties de la part du général Mouton;
mais bientôt le naiechal (fouvion-
Sainl-Cvr, épuisé par les maladies et
Ir manque de tivre^. fut obligé de ca-
pituler sous la condition cpie la garni-
son retournerait en France, et q<i'rlle
pourrait servir de nouveau au bout «le
six mois. Celte convention était sans
doute fort convenable pour l'armée
française, mais les souverains alliés re-
fusèrent de la ratifier \ i'oy. («orvioN,
lAV, .')H:i', et le comte de Klenau
retint la garnison prisonnière, à peu
près aussi dclovalement que les Espa-
gnols avaient retenu Dupont à lîav-
len. Il lui offrit toutefois, par une sorte
de dérision, de rentrer dans la place,
où il savait bien alors qu'elle ne pou-
vait plus tenir. Depuis cette époque, le
comte Klenau ne prit plus de part à la
guerre. In peu plus tard, il fut nommé
commandant de la Moravie, et il mou-
rut dans ce poste honorable en ISIO.
J/empereur l'avait nomme conseiller
intime, puis chambellan, et enfin con-
seiller de j^erre et de cour. H était
colonel titulaire du cinquième régiment
de chevau-lt'i;ers, et il avait été décoré
de la grand'croix de Lcopnhî et de
celle de commandeur de Marie-Thé-
rèse. 11 avait aussi reçu des décorations
de la plupart des souverains de l'Eu-
rope. M — DJ-
peintre allemand, naquit au riHa^e de
kesftel>dorf, en Sate, le .*> mai 1751.
Son p^re était on simple fermier : hii-
mème pendant sa jeune^<<e garda soti-
Tenl les moulons : aussi les scènes de
la campagne se gravèrent-elles rneffa-
çablement «lans sa jeune imagination ;
et quand la fortune, l'enlevant à son
humble condition, l'en! mis au ranj; des
artistes célèbres, c'est ji la reproduc-
tion dos scènes ch.impètres qn'il vona
son pinceau. Son père, qai n'était point
ab>-ohimenl pauvre et qui avait su dis-
tinguer en lui d'heiireusfs dispositions,
l'avait placé .i domc ans dans une mai-
son d'educal ion de Dresde. l/in«;tilu-
teur le présenta an conseiller Ifage-
dorn, alors directeur de l'aradémiedes
beaux-arts, et il en obtint pour son
élève la permission de visiter l'école
de tiessin. Il v fit des progrès rapides;
et C. Mutin, directeur de l'académie, le
prit assez en affection pour en faire sou
élevé spécial. Il devint ensuite celui
de l'habile professeur Dictrich qui
fut saisi d'admiration, en le vovant
à la galerie de Dresde copier vn
Rembrandt avec antanl de goût que
«le vigueur. Jusque là klengel s'était
surtout voué aux grands ^^enres, à l'his-
toire, sous Dietrich : il se mit alors
à peindre le pavsage , les animaux ,
et bientôt il sembla s'apercevoir que
c'était sa vocation. Il s'appropria si
parfaitement la manière de son maître,
(jtic souv ent les connaisseurs ont confon-
du ses tableaux avec ceux de Dietrich,
et que jdus d'une fois dans les ventes on
a payé les premierscommcles seconds.
Mais il ne se borna point à ce mo-
dèle : les belles t ni les de Rerghem ,
de Potter étaient souvent les objets de
ses visites à la galerie de Dresde, et
n>ême, quand il fut célèbre, il ne re-
gardait point comme au dessous de sa
dignité de les copier. Kn même temps il
s'exerçait à peindre d'après nature. I^es
568
KLE
sites charmants dont Dresde est envi-
ronné, fournissaient assez matière à ses
pinceaux, et l'étude des^rands paysa-
p;istcs lui avait appris ce qui manque à
tant de peintres, à bien voir encore
plus qu'à bien rendre la nature. 11 en
résulta que , tout pénétré qu'il était
du stvle de Dielricli et des beautés de
Potier cl de Bergliem, ce n'est point
véritablement chez eux , c'est dans la
nature seule qu'il puisa ses inspira-
tions, et que sa manière porte en fjé-
néial un cachet d'originalité que n'ont
pas toujours des maîtres plus hardis
et qui se vantent de n'être qu'eux-
mêmes. Klengel , pour arriver à ce
degré de talent , eut besoin d'une
persévérance à toute épreuve : obligé
de se suffire à lui-même, ne trafiquant
point encore de ses tableaux, et déjà
peut-être un peu jalousé , durant qua-
tre ans il passa ses jours au sein des
privations. Enfin ce dur apprentis-
sage cessa en 1771, et il obtint le di-
plôme nécessaire pour ouvrir école à
son tour. 11 travailla pour les exposi-
tions publiques et eut le bonheur de
voir presque tous ses tableaux achetés
avant les clôtures. Il devint membre de
l'académie, en 1783, sur la recom-
mandation d'Hagedorn. Sa réputation
des lors était établie, et jusqu'au:: pre-
mières années du XIX'^ siècle elle ne fit
que s'accroître, bien que comme tous
les artistes de quel(|ue valeur, il ne
manquât ni d'envieux ni d'ennemis.
J/académie des arts de lierlin le nom-
ma, en 1786, membre honoraire. Qua-
tre ans après, le roi de Saxe l'envoya
passer un an en Italie. Klengel avait
toujouis passionnément souhaité ce
voyage, différé par des difficultés pécu-
niaires et plus encore par cette irrésolu-
tion à laquelle souvent on n'échappe
que par la brusque impulsion du de-
hors. On peut comprendre avec com-
bien d'affectueuse reconnaissance et
de plaisir, il se mit en route pour
KLE
cette contrée classique des arts et des
antiquités. Tout en visitant les su-
perbes collections et les monuments
dont chaque grande ville de l'Italie
abonde, Klengel par une sage distri-
bution de son temps, ou plutôt par une
activité de tous les moments , trouva
moyen de travailler Immensément et
revint en Allemagne avec d'énormes
portefeuilles, bien garnis d'études de la
nature italienne, et même avec des ta-
bleaux. Son talent gagna beaucoup à
ce voyage; et nul doute, pour ceux qui
suivent le développement du génie d'un
artiste , que ses idées , ses impressions
d'Italie n'aient heureusement modifié sa
manière purement germainejusqu'alors.
S'il est vrai que ses tableaux de sites
toscans et de scènes romaines, malgré
leur mérite réel, n'égalent point en vé-
rité, en moelleux, en harmonie intime
et douce ceux qui représentent les scènes
et les sites de son pays, il est certain
aussi que celte nature léerique et bril-
lante que dore si délicieusement le so-
leil, et où tant de variété se marie à
tant de beauté, se reflète en quelque
sorte dans les lignes et les nuances par
lesquelles il rend les charmes plus ter-
nes de la brumeuse Allemagne. A ces
travaux de paysagiste , Klengel avait
encore joint jadis ceux de portraitiste;
mais ne consentant jamais à faire moins
que le portrait en pied, il y renonça
complètement dans ses dernières an-
nées. La multiplicité de ses occupations
à partir de 1800 lui rendait inutile ce
moyen dégrossir son revenu. Il avait
été nommé professeur à l'académie des
beaux-arts, fonctions laborieuses qu'il
remplit assidûment sans titulariat
jusqu'en 1815; et en qualité de titu-
laire jusqu'à sa mort , le 19 déc.
1824. Klengel était un excellent dé-
monstrateur ; et comme à la théorie ■
il joignait sans cesse l'exemple , on ne f
s'étonnera pas qu'il ait formé beaucoup
d'élèves remarquables. C'est sous lui
MX
quf les MfnrLf , Ifs Sfamm , 1rs
\\ fhlf , lf> Hcirhfl, les Fabcr, s'i-
nilirreiit aux |»rliifi|)r<i de l'art, et c'e>l
à lui niif b Saxe iloil l'Iioiineur il'rtre
re;;arilrf rDinmc la pirmicrf école »le
rAllrma;:iir pour Ip j»a^«-a.,e. KluJicr
et to|iifr 1rs inodèlrs, m |p.%éiuiliaiit et
Ifs r(t|»iaiit apprendre a voir la nature,
telle elait la liase de son enNei^nement.
Kuss\ s\le\ail-il de loules ses force*
contre la prétention des modernes de
peindre d'aprè« leurs seules inspira-
tions, ou même d'après nature, (^elleop-
pasition aux mcllio.les nouvelles déj;é-
nérait piifois en hoiilades et en debla-
térations fort hyperboliques. I^ fond
des choses, c'est qu'à la con\iction du
dan';ei et de l'insuffisance des expé-
dili%es doctrines de l'art par inspira-
tion et sans élude, se joif;nait lacile-
It le regret de sentir qu'il était
, que du premier ran«; il re-
tombait au second , qu'on osait dé-
sormais accueillir a\ec froideur , non
seulement le:i ouvrages de la vieillesse
du peintre , mais ceux de l'époque
brillante de sa vie. Il ne recevait donc
pas avec aménité les jeunes ^ens qui
s'adressaient à lui , et .m parfois il té-
moignait de la bonté à ceux qui Vé-
coutaient comme une voix dernière
d'un svstème qui s'en va , d'un siè-
cle qui s'éteint, le plus souvent son
abord découra;;eait les adolescents.
Ce qui surtout lui donnait cette ré-
putation , c'est qu'il ne pouvait se
décider à peindre devant témoin ;
cet effet d'ime timiilitc qu'il ne pou-
vait vaincre était attribué , par ceux
3 ni le connaissaient peu , à la crainte
e laisser pénétrer le secret de sa ma-
nière , frayeur puérile et qui jamais
n'entra dans «a tète. Klcn<;el i^ravait
habilement, et c'est en partie à l'habi-
tude qu'il avait prise de ;;ravcr sou-
vent qu'est due la fermeté de son pin-
ceau. Sa composition en général est
s^e plu.> qu'ingénieuse , son dessin est
KLE 569
correct , son coloris bien entendu,
parfois magique, surtout s'il s'agit de
dégrader des nuances, de peindre des
ciels en second plan ou des lointains :
il excelle par iirulierement à icndre les
eaux et les feuillages. Son (envte n'a
point été recueilli , et probablement
ne saurait l'être. I.a majeure partie
de ses tableaux à l'huile , de grande
dimension , ornent les châteaux en
lU>sie ou en l*olo;;ue : le prince de
llaratinsli surtout en possède de fort
beaux. Quelques autres ont été acquis
par les rois de Ba>ière (la Hnol/r du
fromrnt^ iH'i.'J; et un paysage Un-
lirn au rrrpusrulr, \H'2'y\ par le roi
de Saxe (.//WA;/i gn niant 1rs Ihrufs
(f hlmètr , srrne de rrèpusi nie ,
1H*J.'» , par le duc Auguste de SaxeCio-
\\\^ {\ Krole de village. ISI'J). Nous
remarquerons encore sa t iirèt, sa ('es-
rade au luucher du soleil, et parmi
les d(»uze ou quinie belles loile.^ ori-
ginales qu'il laissa en mourant, indé-
pendanimeiit de quelques copies do
llerghem , V Entrée du huis. \ Idylle ^
ou la Jeune Iniigneuse , la Tent'
pète ( ou l'on voit au loin des bran-
ches de grands arbres pliées par l'ou-
ragan et deux bergers qui fuient
épouvantés), le Sarcophage (scène
italienne où l'œil erre sur un groupe de
cvprès, sur des temples, sur des rui-
nes , sur une chute d'eau et sur des
figures de baigneurs), un autre déli-
cieux Paysage d'Italie. où .sont réunis
collines, vallées, arbres verdoyants et
arides rochers, mer et courber du so-
leil, le tout animé par des bergers et
letn s troupeaux ; entiii, un (>lair de
lime, avec de fortes masses d'arbres et
un temple de Minerve. Outre ces tra-
vaux majeurs, Klengel n'a cessé de don-
ner de charmantes pages in-fol. ou
in-i", qui ont tic gravées les unes
à part, les autres en recueil, et quantité
de vignettes pour les publications de
Gerlach à partir de 1780. Parmi les
O'JO
KLE
recueils de f];ra\ures, nous indiquerons
ses (Kiwres griwècs à Veau- forte ,
Dresde, 1800, 80 feuilles, petit in-fol.
(il n'en a clé tiré que 25 exemplai-
res au plus). Ces 80 feuilles contien-
nent 132 sujets. Parmi les estampes
isolées ou qui se vendent deux à deux,
\ Auberge , la Scène de camp à
Dresde , Y Incendie nocturne mé-
ritent une mention. P — ot.
KLETTE?^ (George-Ernest
de), né le 13 avril 1759, à Kitzinf];en
(évêché de Wiirtzboiirg), et mort à
Vienne le 22 déc. 1827, avait été mé-
decin en cViel de l'armée suédoise pen-
dant la fameuse campagne de Finlande
sous Gustave II T, puis avait rempli les
chaires académiques à Greifswald
(1794-1806),à Wittenberg, à Hal-
le ; enfin, ayant donné sa démission
(1816), il était venu achever paisi-
blement ses jours à Vienne On lui
doit : I. Gazette mensuelle médicale
de Vienne (Wiener, medizin. Mo-
natschr.), 1789, 4 vol. II. Essai
d'une histoire de la propension des
femmes à augmenter leur beauté^
1792. III. Idées critiques sur cette
question : Quelle est la manière d'ex-
poser la médecine pratique qui va le
mieux au but? 1798. IV. Mémoire
pour la criti/jue des opinions ré-
cemment proclamées en médecine,
1801. V, Divers opuscules tels que:
1 '' Oratio de ingénia medici, 1797 ;
2^^ De constitutione morborum
alrabilaria seri autumni propria y
1<S06 ; 3" De perversa in reb. me-
dicis inquirendis et explicandis phi"
losopliandi ratione, 1 807 ; 4" De
inepta remediorum débilitant, de-
nominatione, 1S07 ;5'' De constitut.
morborum neroosa , 1 8 1 0-1 2 ; 6"
De varia malignitatis ratione in
Jebre scarlat.^ 1811; T' De mo-
derando aqu<z frigidœ usu externo
in dio. morbis curand. V I. Une édit.
ailem. da Lexique d« Biaacard. Zr.
KLE
KLEUKER (Jean-Frédéric),
mythologue allemand, naquit eu \l\^y
à Oslerodc près du Harz , remplit
long-temps les fonctions de prorecleur
au gymnase de Lemgo, devint en-
suite recteur de Fécole des savants à
Osnabriick (1791^, et sept ans après
obtint la chaire de théologie à l'uni-
versité de Kiel, où s'écoulèrent ses
ving;t-neuf dernières années. Kleuker
mourut le l^'^juin 1827, la même an-
née que Rode, celui de tous les alle-
mands avec Kleuker qui a le mieux
mérité de la religion de Zoroastre.
Nous diviserons les ouvrages de Kleu-
ker en cinq catégories d'après les su-
jets qu'ils traitent. I. Sur les religions
étrangères au christianisme : 1" le
Zend-Avesta, ou la Parole vioante
de Zoroastre, 1776; 2^ édition,
1786, 3 vol. in-4° (c'est une traduc-
tion pure et simple du Zend-Avcsla
d'Anquetil, lequel avait été traduit sur
les textes zend, pehlvi et parsi que pos-
sèdent les Guèbres, mais qui n'avait pu
être ni précédée d'une récension criti-
que du texte, ni complètement irré-
prochable comme version) ; 2" Appen-
dice au Zend-Ai)esta,\7S\ et 1783,
2 vol. in-i", dont l'un en 2 part, et
l'autre en 3 (cet appendice, qui forme
un tout complet avec le Zend-Avesta
même, se compose en grande partie de
mémoires d'Anquetil, de l'abbé Fou-
cher , etc., dispersés dans le recueil
de l'académie des inscriptions et dans
le Journal des savants, plus des té-
moignages des Grecs et des Romains
sur la religion des anciens Perses) ;
3" le Zend-Aoesta en petit ; 4" une
traduction de la Relation historique
meroeillcuse de CJIindousfan et du
Bengale d'IIoUvcIl, avec un Traité
sur la philosophie des Hindous,
1778; 5'^ le Système religieux
brahmanique, 1797; 6" Genius e
srriptonmi antiquit. rnonumentis
haurientUis, 1776. 11. Sur le chfis-
tiaiii^me: i" Jrttn, Pirrrr rt Piiui
» onsiiJerts cuminr amwnçunf ie
(Jirist, 1785; '1' jSuUi'ri r.nifiirn rt
nUtinissrmrnt des priiu Ijnilrs fjreu-
sfts dr la V ritr du t Jiri^iùiniinir rt
dr ht rrv>r/u/iun, 1 7S7 - D l , J \o\. ;
3" Di'st usxion ilrtuillrr drs fonde-
tnrnts dr Cauthrnticitr rt dr la rrr-
diiilitr drs sounrs ri ritrs du ihris-
tianisfnr, 179.'», Il vol. ; V" l^ttrr à
i/nr arnir rhrrtirwir sur fitux'ra^e
l'Urrdrr intitulr <lii Ktls de Dieu ,
iSO-i;."»' l)is%. dr Jrsu Christi srr-
itii>rh hominum rci Usùt rt ecclr-
>iis; <r' Prnsrrs sur Crtat dr /*<•-
glisr èvHingrlitfur rt sitr 1rs hihlrs
ihrrtirnnrs. III. Kxé^è^e et trailuc-
lioiis bibliques: 1" Ecrits dr Sulo-
mon, 1777, 1780 et 1786, M part.
en 2 vol. ; 2" llumnwntatiu dr iirxu
ifutilis intrr uirunufur fa dus pro^thr-
lùn ad Prlri I rp., I, :> , 10, 12,
17*^*-; X^ drs .tpui ryphrsdu ^uu-
rau-irstamrnt, 17î>S; X'^ de Co-
ri^inr rt du l/ut drs itttrrs drs afuj-
trrs suû'ant 1rs auteurs riLi-mrmrs^
1791) ; '>" de Furiginr dr C .ipina-
lypsrdr saint Jran, 1800. IV. Pl.i-
lo>upliie et tliéolo^ie lationiteile : 1"
Lrttrrs sur 1rs miracles^ 1781;
'1' instrui tiun sur la tulrranrr, la
raisim, la rr^^rlatiuii^ Li thruJogie,
Ir passi/fir dr Itt mer IlcMf^r ei la
rrsurrrrtitin ilu Christ ^ 1778; 3'^
de la naturr et dr furigine dr la
iliu trinr dr rrinanation dans la Ca-
halr. 17S6 ^ouvra^c couronnée; \°
drs Oui rt ^un dr la thrulugir bi-
Idique chrétienne rt de la thcolugie
rationnelle, \S\9. y . Opuscules, coni-
pilalions ou articles de recueils pcrio-
iliques, par exemple : l*' Chrrstoma-
thia ital., 1787, '2 vol., et un Dic-
tionnaire pour les lecteurs de la Chres-
tomatliie; 2" cinq volumes de traduc-
tion de Platon, 1778-92, plus la
traduction de la liépuhli^/ue i\u nx-me,
1805; 'S" des remarques et additions
KLl
57.
pour b traduction par FicL de l'/Z/j-
tuire drs antitfuitrsy îles arts rt drs
sciences de r Asie, par W'ill. Jones;
V' la prëfacr de Vllistuirr dr .Irsus
iPapers saint Mathiru, par \N itzcn-
niann, etc., etc. /,
KLiyiBEUr. (Charles de),
liomroe d'état et savant suédois, naquit
le 9 nov. 17(17, à (iellle , où son
pèfe élait fabricant. A)ant aciievéses
éludes à I iiniverMtéd'Upsal, il sc ren-
dit à SlocLliolin pour V sui\re la car-
rière civile. 11 entra, en 1788, an col-
lège du commerce où il obtint, en
1802, b place de greffier et, six ans
après, celle d'assesseur. I^s talents et
le lèle qu'il v déploNa lui méritèrent la
confiance du roi, qui le chargea, en
1817, du portefeuille des Gnanres et
du commerce. A l.i tète de cette vaste
administration, kiintber^ rendit les
services les plus ;;rands au commerce
et à l'industrie ; et les améliorations
qu*il introduisit dans son ministère
portent l'empreinte de son amour
pour la prospérité publique. I<a même
année le vit décorer de l'Ktoile-l'o-
laire, et trois ans après il fut anobli.
I.^ mort d'Edoîcrantz avant laissé va-
cante la présidence du collège du com-
met ce en 1S21 , les re^^ards sc ûxèrent
sur riiomme e\péiir»ienté qui a\ait dé-
plové dans tous ses rappoits au roi le
;;éi»ie d'un homme d'état consomme, et
kliiitberf; fut nomme président du
collèf;e où trente-trois ans auparavant
il était venu commencer sa carrière.
11 serait trop lon^ d'énuraéicr les
comités dont il fit partie. Les prin-
cipaux furent l'administration des doua-
ne:*, et le bureau d'assurance contre
l'inrendie. Il avait été nommé , en
ISl.'V, membre de l'académie des scien-
ces de Stockliolm, et deux ans après
élu président de celte société. Il pro-
nonça en quittant le fauteuil un discours
sur les principaux cïmngements
des droits des ports de la Suède^
572 KLU
tonrJianl les vaisseaux de l'état et
irux de T étranger, depuis les temps
les plus reculés de la monarcliic
jusqu'à nos jours y où il déploya ses
vasles connaissances. Jouissant d'une
bonne santé, Klintberg ne se croyait
pas si près de sa fin. Comme il revenait
de sa maison de campagne le 1 5 juillet
1 826, pour se rendre à Stockholm, les
chevaux prirent le mors aux dents, en-
traînèrent la voiture et causèrent la
mort du président. B — L — m.
KLUJIER (JosEPii-Louis) , pu-
hliciste allemand, né en 1762, à
Tliann {); es Fulde, s'adonna de bonne
heure à l'élude du droit administra-
tif, et dès l'année 1786 occupait
nne chaire de jurisprudence à Erlan-
gen. En 1804, il fut appelé com-
me référendaire particulier à Carls-
ruhe qu'il quitta trois ans après pour
aller enseif^ner le droit à l'université
de Heidelberg. En 1808 , il fut nom-
mé conseiller d'état et conseiller inti-
me à Carisruhe. 11 a publié sur le
droit public des ouvrages qui lui ont
fait une grande réputation : I. Précis
des Jonctions de référendaire^ Er-
Jangen , 1808. II. Instruction sur
lu cryptographie, ibid., 1808. IIÏ.
Organisation des postes telle quelle
existe et telle quelle devrait être,
ibid., 1811. Il obtint de sa cour
la permission de 1 érider à Vienne pen-
dant toute la durée du congrès qui se
tint dans cette ville j cl là il trouva
l'occasion de réunir pour l'histoire de
cette époque de riches et précieux ma-
tériaux qu'il fit paraître sous le titre
de : W. Actes du congrès de Vienne
pendant les années 181i et 181.J,
Erlangen, 1815 à 1819,8 vol. Il
donna en<;uite une édition séparée des
deux actes les plus importants sous ce
titre : Acte final du congres de
Vienne et acte de la confédération
germanique, Erlangen, 1810; 2^
édit,, 1818. Cette édition se distin-
KLU
gue par l'exactitude rigoureuse du
texte et par les notes critiques qui
l'accompagnent. En raison de ses con-
naissances profondes et variées, et de
sa présence comme témoin à la rédac-
tion du nouveau système fédératif ,
Kliiber fut choisi pour présenter dog-
matiquement le droit fédératif, et c'est
ce qu'il fit dans un ouvrage intitulé :
V . Droit public de la confédération
germanique et des états fédérés ,
Francfort, 1817; 3" édit., 1831.11
publia encore : VI. Recueil de pièces
originales sur le droit public de la
confédération germanique, 3^ édit.,
Erlangen, 1830. En même temps il
traitait le droit public européen dans
son Droit des gens moderne de V Eu-
rope, Stuttgard, 1819, 2 vol.: d'a-
bord en français, puis en 1821, en
allemand. Depuis 1814, Kliiber avait
reçu de pressantes sollicitations pour
entier au service de Prusse. Il s'y dé-
termina en 1817, et fut aussitôt nom-
mé conseiller d'ambassade. Harden-
berg, dont il avait éprouvé de tout
temps les bonnes grâces et la vive
amitié, était chancelier. Dès lors sa
vie devint toute politique. Mais à peine
avait-il donné la seconde édition de
son Droit public de la confédéra-
tion germanique (1822) , que cet
ouvrage le fit accuser d'hérésie po-
litique. Une instruction fut même di-
rigée contre lui après la mort de
Hardenberg , ce qui le décida , en
1823, à quitter le service de la Prusse.
Dans les dernières années de sa vie,
il a publié divers traités sur l'histoire,
sur les sciences administratives et ju-
diciaires, qui ont Jeté un grand jour
sur des points de droit intéressants.
Kliiber est mort en 1840. D — i) — r,.
KLl'GE (ChrétienTiikophile),
prédicateur et orientaliste allemand, né
le 6 août 1742, à Wittenberg, où son
père était archidiacre , finit ses études
et prit ses degrés à l'université de
KLU
ffllf villf . Hacliflifr fn lhéolo»;if en
17GH , diacrf rti 1770, il rfni(»lii
quatre ans durant, à titre extraordl-
iiairr, unecli.tirc j Scljulj»((»rta (1771-
177'>\ pni^ fui apprio à Meii en
comme piofeiieur d'Iubreu à l'érolc
proMnriale et eomme pasteur à l'o^Iise
•l*" Sainte-.VnVe , fonctions dont il
acquitta pendant près d'un demi-
Mecle avec autant de surcc-i ([uc de
zèle, mais qui mallieiiiriisement ne lui
laissèrent que peu de loisir pour écrire.
(Cependant à l'étude approfondie de*
lant;tie« orientales , il joignait des
connaissances numismaîiques tres->a$-
les et tarifes qui l'eussent mis à même
d'enrichir la pliiloIo;;ie sacrée ou pro-
fane de tra\au\ précieux. Ses fils du
moins pioGtèrent de cette science, en-
fouie dans le professorat ou la prédi-
cation , et un d'eux , orientaliste et
;;éooraphe distin;;ué, nous a dédomma-
j;és de cette perte, klu^e était devenu
surintendant à /jlin; mais ne pouvant,
à cau^e de son à^e, en faire marcher
les fondions avec ses autres occupa-
tions, il donna sa démission de la surin-
tendance en lS()r>. Seize .iris après,
dans sa quatrc-vinoiièmc année , il
ithtint sa retraite en f;ardant se;; émolu-
ments (1821 \ qui ne lui furent pas
loiii;- temps pa>és. Il mourut le 1:2 avril
IS-Ji. L'académie de\N ittenberj;, lors
de son jiihilé en 1802, ra\ait gratifié
du diplôme de docteur en théolof;ie.
On a de lui deux dissertations: l'une
Dr EUgantiu illrtionis poetirœ in
mrmhris Jiumanis efferlimm loropo-
sitis, Wittenberf; , 17G6-G7, in-V";
l'autre Je lerbis Pauli ad Ehr.^
11, 2, ô <^i' à'^iAwv >.x).Y.^-'.; >.'>:;, etc.,
iid legem si nui tira m, quatn dirurit
angelonim rni/iistrrio latam , uiale
rrcun//is, adj. varia S. S. luca iii-
terprelandi tcntaminr, ^^ itlenberf;,
1802; plus une demi-douzaine de Ser-
mons imprimés séparément en 1775,
77.79, 80 et 81. /.
KXU
673
KLIIGEL ((iEORGFS-SiM(i\),
professeur de mathématiques et de
physique à Halle, et membre de plu-
sieurs académies, né à Hambourg, le
19 août 17;J9, commcnra se* éludes
dans celte ville. 11 avait il'abord le
[•rojet d'étudier la théolof;ie, mais une
vocation toute particulière et la con-
naissance qu'il fit de l>usc)i l'attirèrent
rers les mathématiques, l'ours'v livrer
a\ec plus de succès, il se rendit à l'u-
nivor-ité de (jirtlin{;uc. Knsuite il
passa deuK ans en Hanovre où il publia
son Magasin tir Utirios're. Vm 17CG,
il fut appelé à llclmsladl comme pro-
fesseur ordinaire de mathématiques.
Kri 1788, il suivit Karsten i Mille, où
il mourut le V août 1812. N oici les
plus remarquables de ses écrits: I. En-
tyc/uftrdir, ou Altrègé de toutes les
connaissances usuelles (G vol., 3*
ëdit., Berlin, 180G), ouvrage conti-
nué par Stein [7*^ vol., lîerlin, 1816).
1 1 . l'ri.K iprs d'astronomie (5" édit . ,
1819). III. Connaissantes ration-
nelles usuelles (2* édit., Leipzig,
1791 : ouvrage fait en commMii avec
SCS collè^jucs \N elthusen , llcnLe ,
Bruns et Crell). IV. Dictionnaire Je
mallirmatiifues (3 vol. , Lcipzi;; ,
1803-1808), continue par MolKeidc
[K vol., Leipzig, 1813;, mais non
achc\é. D — n — n.
kLUPFEL (EMMANUEL-Cuni.-
tophe), ministre protestant, né dans
le duché de Saxe-Gotha, était déjà pas-
teur lorsqu'il accompagna le Gis du
duc Frédéric III de Saxetiotha, daii.s
un voyage en Allemagne et en France.
Pendant son séjour à Paris , il de-
vint l'ami de (irinim, et par lui il
connut J.-J. Rousseau. Les trois amis
se trouvèrent souvent ensemble, et
ne passèrent pas toujours leur temps
d'une manière édifiante , à en jugfr
par une partie de plaisir dont Jean-
Jacques raconte tous les délails dans
ses G)nfe.ssions. De retour dans sa
574
RLU
patrie, et ayant remis son élève en-
tre les mains de ses parents, Kluj;-
fel reprit ses fonctions ecclésiasti-
ques ; et il fut membre, puis vlce-prcsi-
dent du consistoire protestant du du-
ché de Gotha. Un autre f^ouverneur
des jeunes princes, Guillaume de Ixot-
berf^, venait également de terminer l'é-
ducalion de son élève, et il était entré
dans la carrière administrative, oii il
occupa les premières places, telles que
celles de ministre d'état et de prési-
dent de la chambre ducale. Celui-ci
essaya, en 1763, une imitation des
Eirennes mignonnes sous le titre
à' Almanach nécessaire, qui ressem-
blait plutôt à la spéculation d'un pa-
petier qu'à l'ouvrage d'un littérateur.
Pour l'année suivante il s'associa Kl'iip-
fel ; et ce dernier, sachant écrire en
français, se chargea de la rédaction.
Alors l'entreprise devint plus litté-
raire; l'ouvrage parut en 176i, sous
le titre à'Alinanach de Gotha , et
11 a été continué jusqu'à nos jours ;
cependant ce ne fut que peu à peu
qu'il acquit le degré d'utilité qui lui a
valu sa réputation. En iTG.'), le ré-
dacteur y ajouta la partie astronomi-
que. Dès la première année il donna
la généalogie des familles régnantes.
KLU
surtout celle de la maison de Saxe, des
notices sur les curiosités de la nature et
de l'art, sur la géographie et l'histoire
naturelle, etc. En 1768, Klupfel y
joignit des gravures représentant d'a-
bord des sujets mythologiques et allé-
goriques, puis des scènes dramatiques,
tirées du répertoire des théâtres alle-
mands. L'almanach eut un grand suc-
cès, et se débita partlcuUèrement dans
les cours où l'on s'en servait pour la
partie généalogique. Kliipfel mourut en
1776. Son ancien collègue Rolberg
reprit alors la rédaction de l'almanach. •
— ; Klupfel (Engelherl) , théologien
allemand, né en 1733 et mort en 181 1 ,
a publié: I. Noi>a hihliotheca eccles.
Frihurg., Fribourg et Ulm, 1775 à
1790, 7 vol. in-8°. IL Institutiones
theologiœ a'ogmaticœ, 3® édit., Vien-
ne,1807, 2vol. in-8". Iir. Vollsiœn-
âigeSammlung, etc., collection com-
plète de tous les écrits provoqués par
les édits de tolérance et de réforme
principalement à Vienne, Strasbourg,
1784-86, 6 vol. in-8^ Le dernier
contient les mandements et lettres pas-
torales des évêques, surtout de ceux
d'Allemagne, pour servir à l'histoire
des progi es des lumières dans la science
ecclésiastique. 1) — g.
FIN DU SOIXANTE HUITIEME VOLUME.
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