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Full text of "Biographie universelle ancienne et moderne, ou, Histoire, par ordre alphabétique, de la vie publique et privée de tous les hommes qui se sont fait remarquer par leurs écrits, leurs actions, leurs talents, leurs vertus ou leurs crimes : Ouvrage entièrement neuf"

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îl^ 


M 


Jv'f 


BIOGIAAPHIt: 


UNIVKRSELLE 
ANCIENNE  ET  IV^DKHNK 

SI  l»l»LÉME>r. 


\ 


JA— Kl.l  . 


imprimerie  de  f\  DCfX>NT  ei  Cwnp., 
rae  JeGreoeJie-St-floooré,  5f». 


bio(;raphie 

UNIVliRSELLi:, 
ANCIENNE    KT   MODKKNE 

SUPPLÉMENT, 


%T    fRIVtK     DR    T(>L'>    LRS     MOMMKS    <>ri   »B    »OJ«T   FAIT   IIEMAR«^UB»    f*B 
I.RUES    icaiT^,    I.KL'KH    AC:TIoM>  .     ItLRS    T4I  R!«T's  ,     IRIKx    \tllTt:>    OU 

OCTtAOI    EjrrtÙlKMIVT    VBOV. 

RCDIG£  par    une  SOr.lETC  DE  GF.NS  DE  LETTRES  ET   DE  SAVANTS. 


TOME  SOIWNTK-lll  IIII.Mi; 


A  PARIS, 


CHEZ   I„-(;.    MICHA>Un.    KDIIKI'R, 

RtTR    nu    HASABD-RICBELIflU  ,     W*     I  "î 


\^i\ 


(. 


W«L*OTHl'' 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  furfding  from 

University  of  0t]f^a 

If  II 


http://www.archive.org/details/biographieuniam68mich 


SIGNATURES    DKs    Al  TKIJKS 

DU    SOIXANTE-in  iriK.MK    VOI.liMK 


MM. 


MM 


A 

D«   BàkARfl 

G— T       A. 

Gaatiiia. 

A.   P 

PiMiCAc»  alni    Ani  ) 

G-f 

Glai. 

A  — T. 

U.  Ac»irr«KT 

J— •-». 

JOVAAA.. 

»— »—• 

Baoicmi. 

J— • 

JuCAAAia 

B-L— ■ 

Blcmm 

L. 

LkvIAVAI  CACCAt. 

B      r 

De  BftArciAsr. 

L-<-i. 

LaCATTA   JotTAOlA 

B-c 

BiArtut 

L-G-t. 

Da  laGaaa««a 

B       T        B 

Dt    BtOMITILLI 

L-t-L 

Lavallaia. 

c:— Ar. 

r.ATTKAr-CàLklVILlB. 

L-.-i 

J    Lauociici. 

(:«-c. 

r.HAMtftUO. 

L-r- ». 

Hlppolyle   AA    LA    POATI 

O-L— • 

Dl  CuUBITTB-LAMrtlLII 

L— •-•. 

Uaocaa  (Umia). 

c— t— T 

CoLbomiT. 

M—A 

Malaola 

(     M    P. 

PiLLIT 

M— j. 

MicAACA  jeuni>. 

t.— «-.I 

!>■  Cakiimi 

M.  D-T 

Maati^  Uoiit. 

C-t— «. 

Catto». 

M— t 

Da  MAAcrAAIf. 

D— ■— «, 

DeMit  (Lo«i»). 

Oi— ■ 

OlAAAM 

D-»-«. 

DiBiia 

P— c— T 

Picot. 

D— c. 

hirriac. 

P-OT. 

pAAIAor. 

D-1-». 

DlUtQCK. 

p— AT. 

i'AILAAAt. 

D— ■— a. 

DiaoïoiR. 

B-A— ^ 

Ra^aclaii. 

D-1-». 

DlXO«    M     LA    R.^riTTK 

R-»-c 

Da    RAirvtAAiAc. 

E— »-D. 

ECKAI». 

s— A. 

SOAAA. 

E-i. 

Ettifc*. 

S^a 

Da    SAATAAAa. 

r. 

Anonvme. 

St— t. 

Dk  Staaaaat. 

F   D.  c 

FitiLLtT  bi  Coacait 

T-D 

K-Lt. 

Favolli. 

W— ». 

WALctiAAAA 

i;— c-T. 

bi  r.ttcotT 

W-A 

Wkuv 

G-H-D 

GrtKAKO. 

z. 

Anomrnr . 

Bior.  UAPiiii: 

UNIVERSEiJ.t. 


J  A  HA  LOT  (te  p<Tf  Krai«;oi« 

Kiri»I?«aM>  ,  ffifbrr  |»rrdiC4lrur.  na- 
auil  à  l'arnif,  en  I7M0,  de  |iarriit« 
françait  qui  »*>  rlairiil  riablit  |K>ur 
ftercrr  le  foramrrcf  Jrunc  f  ncof  r  ,  il 
fut  rn^o^  a  rani«fr>ilé  àr  celle  ^ille  , 
où  il  ne  *r  fit  d'abortl  reauraoer  que 
par  »on  eilrèroe  ti^acilé  et  V ai;;re«r 
Je  M»n  cararlere.  Mai»  les  Mtin»  d'an 
Nocre  rii*rciicmep1  ri  suitoul  le*  pra- 
'  '     '  '  ■         •     '  :i 


t  pen- 


I  (irdre  Jf  "^ 
daill  s<in  H(t\  if  :jl  ijtir.  t!  ,'  j'j  i;ii  mil- 
Irr  ili)u\  et  pj'irut ,  il  <  !i-iii^rj  rnt  r:f 
ment  de  rarartere,  et  qu'il  ^  prépara  a 
la  carrière  de  la  chaire  quM  devait  par- 
courir a^ec  tant  d'eclal.  Ix>rM]u*il  eut 
terminé  %ei  éluder  de  philmopnie.  on 
ren>o^a  a  lloroe  au  courent  de  la  Mi- 
nerve pour  >  faire  son  cour*  de  théolo- 
gie. C*r^^  là  que,  doue  d'une  inlelli- 
't  d  une  excellente  mémoire, 
,  .a  a  l'étude  des  langues 
o. icjiulc*  et  surtout  dr  l'hébreu,  a6n 
de  se  bien  pénétrer  de  l'f-prit  de  l'K- 
criture  et    de  li  e  biblique 

appuvée  sur  le^  i.  v  _,  iiaux.  Vou- 

lant dc>-lors  se  consacrer  a  la  prcdira- 
lion,  objet  spécial  de  la  rè;;le  du  saint 


ïoné^nrét  Ma  ordre,  il  fît  nne  eliMic 

I  de    la     l>elle    et    harwo- 

II  <*  italirnnr    n^^fim  bien- 

.1  fut 
rr  .  ,       :     .         ,  pr». 

ljt«  et  par  de  ;;rand«  «ou^erams   pour 

!>rnnoarrr  de»  oiaisont  funèbres  et 
aire  des  stations  du  carême  dans  leurs 
cathédrales  NousTavont  entendu  deui 
foi%  a  Turin,  en  présence  de  la  coui  et 
de  la  famille  rotale,  et  noas  avons  en- 
core présentes  a  la  pensée  toute  IV- 
le^ance  de  ses  eipressions  et  la  force 
de  ses  raisonnements.  I)e  si  ^^rands 
talent%  lui  ouvrirent  les  portes  de  plu- 
sieurs académies  ,  notamment  de  celle 
d'archeolo;;ie  à  Kome  ,  de  la  liber* 
tine  et  de  l'Arcadie  Dans  les  clia- 
pitrcs  de  son  ordre  il  obtint  les  pre- 
mières  di^^nites  et  fut  nommé  maître* 
{jeneral  et  con^ulteur  de  la  con;;réj;a- 
tion  de  l'Index  et  des  indul^enceN,  en- 
fin examinateur  dr^  évéques.  Ge  fut 
lui  qui  perfectionna  la  d<^ripline  dans 
les  couvents,  et  qui  \  établit  de^  chaires 
de  philosophie  et  de  théologie.  Toutes 
ce^  occupations  ne  lui  Grcrtt  pas  ne^h- 
J:f^Ja  preiliration,  et  il  continu.i  de  s  y 
distinguer  jusqu'à  la  fin  de  sj  mc.  Ja- 
balot  mourut  subitement  a  Horne  le  9 
nurs1834,frappcd'apoplexie.Onade 


LXVIll 


JAB 


JAB 


lui  :  I.  Dcgli  Ehrci  nellororapporio 
colle  mizioni  crisflune,  Borne,  18:2."), 
m-l"2,  ouvrage  intéressant  où  l'auteur 
démontre  que  le  Talnuid ,  qui  con- 
tient la  loi  orale,  la  doctrine,  la  mo- 
rale et  les  traditions  des  Juifs,  est  en 
opposition  avec  les  lois  sociales  de  no- 
tre civilisation.  II.  Orazîonc funèbre 
in  morte  del  conte  Antonio  Cerali{\), 
deita  in  Parnui  net  1816,  in-4". 
La  mort  du  père  Jabalot  fut  déplorée 
par  la  plupart  des  savants  italiens,  no- 
tamment par  le  comte  Antoine-Louis 
Cagnoli  dans  une  pièce  de  vers  impri- 
mée à  Be^f^io  en  1835,  et  par  le  père 
Maurice  Oiiveri  dans  un  élo^e  (unèbre 
Iule  4 juin  1833,  à  une  des  séances 
de  l'académie  d'archéologie,  et  imprimé 
dans  le  journal  arcadique  de  Uome. 

G G Y. 

JABLOXOWSKI  (Vladis- 
LAS),  i^énéral,  issu  d'une  maison  illus- 
tre dans  les  annales  polonaises,  né  en 
1769,  (ut  envoyé  à  l'école  de  Brienne 
pour  y  achever  ses  études.  Il  s'y  trouva 
en  même  temps  que  Napoléon  Bo- 
naparte avec  lequel  il  eut  une  dispute 
d'écolier  fort  légère  ,  mais  que  le 
Corse  vindicatif  n'ouhlia  jamais.  En 
1789,  Jahlonowski  entra  comme  lieu- 
tenant dans  le  régiment  de  royal-al- 
lemand au  service  de  tVance.  Les  évé- 
nements de  1791  le  rappelèrent  en 
Pologne;  et,  dans  les  guerres  de  1792 
et  1794,  il  coMiballit  pour  l'indépen- 
dance de  la  patrie  dans  les  rangs  de 
l'armée  polonaise.  le  4  nov.  1794,  à 
l'assaut  de  IVaga,  il  défendit  courageu- 
sement avec  SulLowski  l'île  de  Saxe, 
que  l'on  appelle  kampu-Saskd ^  suv 
la  Vistule.  Oésespérant  du  salut  de  la 

(i)  Le  comte  Ceiati  est  auteur  de  pliisiedrs 
oarrages  ifn|>ri<iiés  ùtnn  sa  viHe  natale  p;ir 
Bu<Ioui ,  uoU'nuteiit  :  t'^  J^  ville  Luclirsi,  cou 
opu  rnli  in  verii  rd  m  firoia,  l'ariiu-,  1-85,  in-j''; 
l"  i'.l'i^^io  dr(  .yfniiHra  Prot^rro,  con  averlenz* 
tulle  'ue  fjotiie,  i'iiiute,  1801  ;  l'-"  f-'ila  di  (,re- 
gorio  ('rrati  ,  veuoio  di  Piateiifa,  coii  aniiota- 
tioni  0  corretioni  a//a  Gtneti,  cic.  ,  ihiJ.  1S07, 
10-8*  ;  4^  Oputcoli,  ibid.,  1809,  4  ▼ol.  im-4''. 


Pologne,  il  revint  en  France.  Après 
avoir  servi  dans  l'armée  républicaine 
en  Italie,  il  commanda  une  des  légions 
levées  par  Dombrowski.  On  le  trouva 
dans  tous  les  postes  difficiles,  jusqu'à  ce 
que  la  paix  d'Amiens  eût  terminé  la 
guerre  dans  cette  contrée.  Le  premier 
consul  ayant  résolu,  en  1802,  de  sou- 
mettre Saint-Domingue,  Jablonowski 
fut  mis  à  la  tête  de  la  légion  polonaise 
qui  s'embarqua  à  Toulon.  On  sait  com- 
ment ce  chef  et  presque  tous  ses  com- 
patriotes périrent  dans  cette  malheu- 
reuse expédition  où  Napoléon  n'avait 
guère  envoyé  que  ceux  dont  la  présence 
l'importunait  en  Europe.       G     Y. 

JABLOXSKI  (Charles-Gus- 
tave), naturaliste  allemand  ,  né  en 
1756,  était  secrétaire  particulier  de  la 
reine  de  Prusse,  ce  qui  ne  l'empêcha 
pas  de  s'adonner  avec  beaucoup  d'ar- 
deur à  l'histoire  naturelle,  et  particu- 
lièrement à  l'entomologie,  genre  dans 
lequel  il  s'était  formé  une  collection 
considérable.  Il  entreprit  de  traiter 
cette  science  dans  un  ouvrage  étendu  qui 
devait  faire  suite  à  celui  de  liuffon.  Mais 
il  ne  vécut  pas  assez  long-temps  pour 
pouvoir  exécuter  entièrement  son  plan  ; 
car  il  mourut  en  1787,  à  l'âge  de 
trente-un  ans;  heureusement  il  eut  un 
continuateurzélédanslepasteur  Ilerbst 
{Voy.  ce  nom,  XX,  240)  à  Ber- 
lin, qui,  étant  lui-même  entomologue 
et  possesseur  d'une  collection  d'insec- 
tes plus  considérable  que  celle  de  Ja- 
blonski,  réunit  ?près  la  mort  de  celui-ci 
lesdeuxcabinetsets'en  servit  pour  con- 
tinuer le  grand  ouvrage  entomologique 
commencé  par  le  jeune  savant,  et  in- 
titulé ;  Nutur  System ,  etc. ,  Système 
naturel  de  tous  les  insectes  connus, 
indigènes  et  exotiques.  La  partie  des 
papillons  ,  publiée  à  Berlin  >  1783- 
180G,  forme  10  vol.  in-8"  avec  gra- 
vures enluminées  ;  et  la  partie  des  co- 
léoptères ,  Berlin,  1785-1804,  se 
compose  de  1 1  vol.  in-8°,  ornés  éga- 


JAC 

Irmmi  *\f  ,;rafur«  coloria.  Jahlon<li 

n'j  [>nM-r  ijuf  le*  foin.   I  fl  II  «lu  pr- 

mier  Je  ffN  oinrjijr»,   *f  un  •*al  %o- 

I  — »<•    ■'-    Tâufre     A»»iil   le*    Itifatx 

I  te  ei  de  M    l>4^i*«ii  ,    rrlle 

iiir  lir  lififfon   jTai!  une  (;rande  va- 

Irur  »oenlifi<jiie.  ei   elle  ne  l'a  fO*  m- 

:  r  rinrnl    |ier.ltie,    p«i*qa«    le*    Jem 

N  ont  m  Miiii  de  fimirer  e!  de  dr 

•  t-rr»   d'apre*    le* 

I   *ou*    le*    \tn\ 

\jt   re*te,  |»ri« 

ri,   est   nn  Ira-,  ni 

.'-  .  tiion    Ij    partie 

J  it>;-!i  k    pèrlie  par  une  r\  _     . 

Iitile  et  une  ledarlimi    lourde   ei  lali- 

pante.  Ser  »e%  in'>lanre«,  «on  père  étaJ 

aile  dan*  la  Tiniane  pour  dm f lier  de* 

objets  d'l»l»foire  naturelle    l.e  premier 

envoi  arriva  peti  de  jour*  âpre*  la  mort 

du  jeune  naliirriltsle.  I>— «. 

4  ArJvS1>\*'\Viui4«\  e«m|»o- 
«teur  et  liuéraleur  an«lai*  .   61*    d  an 
marrhand   dK^eter.  ni»|»i»t  en  17  M 
Comme  il  mon' 
aition*  pour  la    r^ 

tuirre  son  inrlinatmn.  il  >e  rendit  a 
Londre* ,  où  *on  ^''iiie  *e  développa 
sous  la  direrlion  de  Trater*.  rompo- 
siletir  habile  et  or^aniMe  de  la  cha- 
pelle du  roi.  Jark*nn ,  rentra  dan* 
M  rite  natale  ,  y  fut  nommé  ,  en 
1777,  *oii*-chantfe  et  organiste  de 
la  cathédrale.  Parmi  *e*  rompn*i- 
tion*  musicale*,  on  dislin'/ue  pjtiirn- 
lièremcnt  «-es  sonate*  et  *e  li 

ont  lonij-tenip-^  charme  *i'  . 

tes.  Il  aval  «iirlnut  Ir  ^etrrl  df  ilui(> 
ner  à  la  poé^ir  elr^i.ique  une  mélodie 
élégante  et  plainlne,  maiN  à  laquelle 
on  a  reproché  de  pouvoir  *'appliq'ier  à 
t(»ute  espèce  de  *er*  de  ce  penre.  NN'il- 
liam  Jackson  s'est  aeqois  aussi  de  la 
réputation  par  quelques  productions  lit- 
téraires, publiée»  de  17S2i  179H, 
^BS  lesquelles  on  reconnait  un  es- 
prit original  ,  mais  porté  ao  paradoxe. 
CalfiNant  presque  tous  les  beaux  arti. 


JAC  i 

il  a  laanié  Ip  pinre.iu,  ^an*  remon- 
ter ju  iiTàiui  ni.MJ,  le  de  la  nature, 
et  *e  liornaiil  a  ropiir  le*  maîtres.  De 
nieinequ'eii  musique  I  rappelait  VMivent 
la  manière  de  rra%ers,  de  même  il  a 
reproduit  aeee  ouelque  »»rre*  la  coiih 

fionlion  et  le  roloi  i*  de  ^on  ami  (tain*- 
•ofoii^h  II  e^i  mort  a  K*eter,  !<•  f 'J 
jinlln  lMO:l  Se»  nii\ra,:e^  *oiit  :  |. 
l  rente  lettrfn  sur  Jù'rrs  tu/rf.f,  ^ 
fol.  in  li.  ITMi  r  édit  ,  atecle 
non  de  l'auteur,  17Hi:  une  V  édf- 
tion  ,  att  -mertre  de  l»eaoeo*r]> ,  parut 
en  I7''  Il    l.riifuotrnlgrf, 

*»«■  dr  mr  lies   sujets  VO' 

rtrs  ,  17'JH,  im'H\  On  »  trouve  , 
rnnMne  iiaii\  le  préeédent,  du  ««Toir, 
de  rmlerét.  da  ^o^t,  et  même  du  *értie. 
Dan»  le  morceau  principal,  Tauteitr 
s  es!  pro|>osé  de  démontrer  que  l'anti- 
que repre*enlation  ^Tr' 
node«  dn  monde  pjr  .•  ^ 

ve   lealiM-   |.  ' ,,».  le 

*en«  tn\er»r  ,    •nnê  : 

^  n'ont  pa*  été 
f  .  -  \.'à^f^  d'or, 
^ue  nou*  »\on%  rrn  être  derrière  nom, 
e»l  de.»ntnott*.  »  III  Traite  ntr  Ce- 
Inl  ftresent  de  la  musique  à  hmàres, 
171)1.  in-^^  IV.  Di,-htfit  rruvre* 
moMcale*  ,    con^i*1aat    en    Hymnes  , 

f  k  Elégies  ,  nne   OJe  a  Ci- 

"  '  .   des    Fantnisies  (Fairr 

I-"  ■  ■  «  nies,   el  qui 

""'  I  •  .    1   .  .'    -A    de   .*es 

fomp.i.  I  ,;I^  (pi!  ,,nt  \o  le  jinir.  On 
pcoi  consulter  d'atllem^*  le  [U'^ement 
que  le  docteur  Rurnev  a  exprimé  <ur 
le  rarritr  de  cet  artiste  d.ins  la  (iyf/n- 
petlia  de  I très  L. 

JA<:KS0.\  ^Joiin\  célèhre 
peintre  de  portrait*,  naquit  en  1778 
i  Lxslin;;ham,  petit  Tilla«^  sitin- «l.ins 
la  partie  septentrionale  de  rYoïlsIiirc 
éîv  Anjjleterre.  Kil>  d'un  pauvre  tailleur 
et  destine  par  sa  position  à  manier  lui- 
même  rni^uille,  m:>is  entraîné  par  un 
goùl  naturel  pour  le  dcs5in,   il   donna 


I. 


JAC 


JAC 


de  très-bonne  heure  des  preuves  d'une 
singulière  aptitude  à  reproduire  les 
traits  des  personnes  qui  passaient  sous 
ses  yeux.  Quelques  essais  en  ce  genre 
frappèrent  tellement  le  maître  d'école 
de  l'endroit  qu'il  s'empressa  de  les 
présenter  à  la  famille  du  comte  de 
Mulgrave;  et,  de  ce  moment,  la  car- 
rière du  jeune  Jackson  fut  changée.  Le 
comte  et  sir  Georges  Beaumont  devin- 
rent ses  protecteurs,  et  lui  donnèrent 
les  moyens  de  vaincre  les  premiers  obsta- 
cles qui  l'empéchaleut  de  suivre  sa  vo- 
cation. L'apprenti  tailleur,  après  avoir 
fréquenté  l'école  de  dessin  de  l'Acadé- 
mie royale,  s'établit  dans  la  capitale 
comme  peintre  de  portraits.  Ceux  qu'il 
fit  à  l'aquarelle  furent  généralement 
admirés,  et  lui  valurent  beaucoup  d'ar- 
gent ;  mais  ses  débuts  dans  la  peinture 
à  l'huile  ne  lurent  pas  très-heureux  : 
onlui  préférait  les  ouvrages  de  Beechey, 
Hoppner,  Ople  et  Lawrence.  Son  ta- 
lent finit  cependant  par  acquérir  ce  qui 
lui  manquait,  et  il  put  alorsse  montrer 
sans  désavantage  à  côté  de  ses  émules. 
Le  portrait  de  Canova  fut  un  de  ceux 
qui  commencèrent  sa  réputation,  et  il 
la  soutint  par  un  grand  nombre  d'au- 
tres, entre  lesquels  on  a  remarqué  : 
Ic^Jportraits  en  pied  du  marquis  de 
Chandos  dans  le  costume  d'officier  de 
hussards  ;  du  comte  Fllz-Willlam  ;  de 
laiJy  Anna  Vernon  (femme  de  l'arche- 
vé(jue  d'York),  et  de  miss  Vernon  :  les 
portraits  en  buste  des  artistes  Th.  Sto- 
thard  et  JohnFlaxman,  ce  dernier  sar- 
loul  dont  Lawrence  fut  tellement  char- 
mé qu'il  dit  que  Vandick  se  fut  fait 
honneur  de  l'avoir  produit  ;  le  portrait 
de  Robert  l'eel,  du  sculpteur  Chan- 
trey,  et  le  sien.  C'est  d'après  ces  des- 
sins qu'ont  été  gravées  un  grand  nom- 
bre de  trtes  dans  la  splcndide  piibllra- 
tlon  de  Cadell  :  Par  traits  dr  person- 
nes illustres  du  XI  ïW  siècle. 
Jackson  a  été  considéré  comme  un  des 
meilleurs  élèves  de  Reynolds:  «  Moins 


«  élégant  que  Lawrence,  dit  le  Jour- 
«  nul  des  artistes,  mais  copiant  plus 
«<  fidèlement  la  nature ,  il  saisissait 
«  avec  une  admirable  facilité  les  traits 
<c  caractéristiques  de  la  physionomie  et 
«  les  reproduisait  avec  un  rare  bon- 
«  heur.  Il  travaillait  avec  rapidité,  et 
«  cependantses  tableaux  sont  d'un  fini 
«  précieux.  Son  coloris  avait  du  relief, 
«  de  l'éclat  et  de  la  vérité.  »  Cet  artiste 
avait  une  âme  noble  et  des  mœurs  dou- 
ces: il  vivait  dans  les  meilleurs  termes 
avec  ses  rivaux  de  gloire,  et  se  plaisait 
à  favoriser  les  premiers  pas  de  ceux  qui 
entraient  dans  la  carrière  ayant  d'heu- 
reuses dispositions.  Bien  qu'il  fût  de 
la  secte  des  méthodistes  ,  et  très-zélé, 
dit-on,  il  n'était  pas  cruel  envers  l'é- 
glise établie  :1a  petite  éghse  de  son  petit 
village  reçut  de  lui  pour  orner  le  maitre- 
autel  un  tableau  du  Christ  dans  le  jar- 
din des  Oliviers,  qu'ilavait  fait  d'après 
le  Corrége.  John  Jackson  avait  été 
admis  à  l'académie  royale  en  1817  ;  le 
titre  d'académicien  de  Saint-Luc  lui  fut 
donné  lorsqu'il  se  rendit  à  Rome  en 
1819,  accompagné  de  son  ami  Chan- 
trey.  Il  est  mort  à  Londres  le  l'^'^juln 
1831.  Une  partie  des  détails  qui  se 
trouvent  dans  cette  notice  a  été  em- 
pruntée à  la  Bihliothècjue  des  Beaux)- 
Arts  (Llbrary  of  the  fine  arts).     L. 

JACOB-KOLB  (Gérard),  lit- 
térateur, naquit  à  Reims,  le  15  oct. 
1775.  Son  aïeul  avait  été  grand  bailli 
de  l'archevêque  de  Talleyrand-Pérl- 
gord  [Voy.  ce  nom,  XLIV,  436).  Son 
père,  Simon,  d'abord  avocat ,  auteur 
de  quelques  mémoires  et  de  quelques 
poésies,  se  livra  ensuite  au  commerce 
des  vins,  et  mourut  à  Reims  en  182G. 
Le  jeune  Jacob,  destiné  à  la  carrière 
commerciale ,  commença  néanmoins 
'f  s  éludes  dans  sa  ville  natale,  et  alla 
les  continuer  en  Allemagne,  où  il  se  per- 
fectionna dans  la  langue  allemande;  il 
se  maria  à  Strasbourg  et  revint  à  Reims 
vers  1796.  Associe  dès-lors  à  la  mai- 


J\< 


JAC 


«on  Jf  Min  prrf ,   il    >oiia;;M    dan".  If^ 
certlfs    d'\llrma;;ne  :    t'r^l  ^lJll^    un 
de  >r*  \(M  jgf>  aur  »e  trouvant  a  N\  f i 
mar,  en  1H0| ,  il  cul  l'a^anla^r  Je  con- 
naître le  célèbre  Schiller  qui  mettait  u 
Jrttnnftt Art  aa  tlirafre.  Kainiliariié 
awc  \ts  poètes  françai^  et  déjà  lié  arec 
les  hommes  de  leitrn  de  la  capitale,  il 
lai  fut  facile  de  donner  de  bon*  atis   à 
ce  {jrand  poêle.  V\\\\  lard  drvcnu    chef 
de5kafnaiMin,  Jacnl)f;t  pluMeur%vnia;:e« 
en   Knj^lrlerre,  alla  en  \\u 
rut  \r\  r\x\\A\%  Nnrd  et  iri!  i 
le    roi    ("'  T     m  ,    qui  l  actu«»ll:l 

d'une   niJ!  .:uée.  Né  avec  un 

caractère  ai drnl  ri  d'une  activité  pro- 
di{;ieu4e,  il  Irmna  encore,  malgré  Ir* 
»oin^  qu'il  donnait  à  son  commerce 
tre^-étendu,  le  temps  de  *r  livirr  à  l'é- 
lude de  riiistoire  naturelle,  des  atiti- 
ouité4  ,  de  la  numismatique  et  de  la 
littérature.  Son  inconstance  dan^  tes 
fronts  pour  lesquels  d'ailleurs  il  ne  ne- 
^ii^ea  jamais  aucune  drpense ,  nuisit  à 
sespro<luction>.  l'assionned'abordponr 
l'histoire  naturelle,  il  *^  composa  un 
rabinrt  de  tout  ce  qu'il  put  reunir  sur 
cette  intéressante  partie.  I^  ;;é<do;;ie 
le  fixa  ensuite  ;  et,  d'aptes  de  lorts  in- 
dices aue  la  monta;;ne  de  Keims  re- 
celait de  la  houille  ,  indices  qu'il  rrut 
reconnaître  par  les  li;;nites  et  le»  sour- 
ces d'eaux  ferruj;ineu5e«  qu'on  v  ren- 
contre, il  appela  dans  sa  belle  maison  de 
Monchenot,  commune  de  Viller»-Alle- 
raud,  des  savants  instruits  sur  cette 
matière,  et,  suivant  leurs  avis,  il  6t 
fouiller  à  Pendroit  dit  les  Vauzillons  , 
terroir  de  Killv-la-Montaijne  ;  au  lieu 
de  houille,  il  ne  relira  qu'un  lignite 
schisteux,  qui  brûle  à  la  vérité,  mais 
en  répandant  une  odeur  tellement  dé- 
sa;;réaUc  qu'il  n'eût  jamais  etf  possi- 
ble de  s'fn  servir  dans  les  habitations. 
De  l'h  slolre  naturelle  (icrarJ  Jarob 
passa  à  la  numismatique  :  il  rechercha 
avec  axidiie  les  médailles  grecques,  ro- 
maines,   françaises  et  autres,  en  forma 


un  beau  et  riche  médailler,  et  s'en  défit 
qiiriqiies  annérs  après,  pour  quinze  à 
vin^l  mille  fiants.  |)r^  médailles  à  la 
connaissance  des  monuments  des  an- 
ciens peuples  la  lranMtH)n  était  naturel- 
le; ils  t  livra  avec  ardrur  ri  fit  un  recueil 
de  près  de  30  vol.  m  i  '  dr  tout  ce  qui 
avait  été  écrit  sur  les  antiquités  ^rec- 
floes,  romaines,  {gauloises,  etc.  Il  y  a 
dans  ce  recueil  deux  volumes  sur  l'his- 
toire de  Ue'ms  qu'il  eut  un  moment 
y  '  iiiion  de  faire  imprimer  L'abbé 
<  r»  (Tof.  ce  nom  ,  L\  V,    IM'») 

voulait  aussi  faire  imprimer  sa  Drs- 
rription  historii^ur  rt  stotistitfur  lir 
lu  villr  ilrHrims  M  l^balard,  a  qui 
ils  s'étaient  adressés  tous  deux  pour  l'im- 
pression de  ces  ouvrages,  leur  proposa 
de  1rs  fondre  en  un  seul.  I.'idrr  leur 
parut  bonne,  et  ils  se  di>pos4>tent  à  la 
réaliser;  mais,  ne  pouvant  ensuite  se 
mettre  d'accord  ,  iU  6nirent  par  se 
brouiller.  L'abbe  Ctértuei  fit  imprimer 
son  livre  ï  (^hàlons,  et  Jacob-Kolb  pu- 
blia à  Ueims,  sous  le  nom  de  son  père, 
ses  Sittrs  histnriqurs  rt  rritufurs 
pour  servir  ï  rou%ra|;e  atant  pour 
titre:  Drsrription  hislorit^ur  rt  stti- 
tistiqur  dr  la  villr  dr  Hrims  Jacob- 
Kolb  aurait  bien  ^oulu  placer  ce  volu- 
mineux recueil,  qui  n'est  pas  sans  méri- 
te, au  cabinet  du  roi ,  mais,  ne  pou^ant 
?  parvenir,  il  l'échanf^ea  asec  un  libraire 
qui  le  vendit  à  M.  le  marquis  de  Fortia. 
Les  autographes  l'occupèrent  ensuite  ; 
et,  s'elant  mis  en  rapport  avec  beau- 
coup de  personnes  de  distinction  ,  il 
en  rassembla  à  grands  frais  une  belle 
collection.  Il  jouissait  à  peine  de  cr 
trésor  qu'il  le  vendit  à  un  An;;laiN 
qui  lui  compta  vin^^t-cinq  mille  francs 
Alors  a>anl  ouitté  le  commerce  et 
s'étant  fixé  à  l'aris  ,  son  ardente  ac- 
tivité se  porta  sur  un  nouvel  objet  , 
ih-rechercha  les  livres,  mais  plus 
particulièrement  les  belles  éditions 
C'était  le  moment  où  les  libraires 
de    la    capitale    publiaient   avec    luxe 


JAC 


JAC 


les  ouvrages  de  nos  meilleurs  au- 
teurs^ Jacob  se  les  procura,  mais 
voulant  encore  enrichir  ce  qui  élail 
déjà  si  beau,  il  se  composa  àes  exem- 
plaires uniques,  soit  en  \  ajoutant  ou 
changeant  les  gravures,  soit  en  y  joi- 
gnant des  lettres  autographes  des  au- 
teurs. Celte  collection  qui  lui  coûtait 
plus  de  dix  mille  francs  eut  bientôt 
le  sort  des  médailles  et  des  autogra- 
phes ;  il  venait  d'en  retirer  trente 
mille  francs  avec  une  réserve  de  neuf 
cents  volumes,  quand  la  mort  le  frappa 
le  15  janvier  1830.  Suivant  ses  inten- 
tions sa  dépouille  mortelle  fut  déposée 
au  cimetière  du  Père-Lachaise  ,  dans 
le  lieu  qu'il  avait  fait  disposer  lui-même 
dès  le  11  juin  1827  ,  peu  de  temps 
après  son  arrivée  à  Paris.  Voici  son 
épitaphe  telle  qu'il  la  composa  ,  en 
laissant  à  ses  enfants  le  soin  d'y  ajou- 
ter la  dernière  ligne  : 

A  la  fin  de  ce  rêve 

Qu'on  iioinine  !a  \\c  , 

Ici  repose  (icrazd  .I.Kob  , 

Écuyer,  chevalier  de  la  Logioij-d'Honneur, 

Membre  «le  la  société  pliiîh'll^niqoe  , 

Correspondant  des  socn  tés  royales 

Des  antiq'i.iire<i  de  France, 

De  Cbàlonb.siir-Ma-ne, 

Né  à  Reims  le  i5  janvier  1775. 

Jacob-Kolb  a  publié  les  ouvrages  sui- 
vants :  I .  Recherches  hislorif/ues  sur 
les  antiijuités  d'/îugst,  ancienne  co- 
lonie romaine,  située  près  (le  Bùle 
en  Suisse,  traduites  de  l'allemand  et 
augmentées  de  notes  et  observations 
critiques,  etc.,  lieims,  18*23,  brochure 
in-8"  avec  des  jil.tnches.  il.  Descrip- 
tion histori<jue  de  lu  villrde  Reims, 
ibid.,  1825,  brochure  in-8".  Ce  petit 
ouvrage  sur  uut  grande  et  ancienne 
▼ille  n'a  satisfait  personne,  pas  même 
son  auteur  qui  pouvait  mieux  faire; 
mais  on  le  lui  demanda  quelques  jours 
avant  le  29  mai  1825  et  absolument 
pour  ce  jour  (où  le  sacre  de  Charles  X 
eut  heu).  Ce  travail  précipité  \alut  ce- 
pendant à  l'auteur  la  croix  de  la  Légion- 
d'Honneur.  111.    Traité  élémentaire 


de  la  numismatique  ancienne^  grec- 
que et  rumainc,  composé  d'après  celui 
d'Eckhel,  Paris,  1825,  2  vol.  in-8° 
avec  planches.  IV.  JSoticesur  lu  ra- 
reté des  médailles  antiques^  leur  va- 
leur et  leur  prix,  calculés  par  approxi- 
mation ,  d'après  Jean  Pinkerton  et 
Jean-Godefroi  Lipsius,  avec  des  notes 
et  observations  du  traducteur,  ibid., 
1828,  brochure  in -8".  Cet  opuscule 
peut  servii  d'appendice  au  Traité  élé- 
mentaire. V.  Recherches  historiques 
sur  les  croisades  et  les  Templiers, 
ibid.,  1828,  in-8°,  orné  de  gravures 
au  trait.  Ce  livre  auquel  son  auteur  pou- 
vait donner  un  tout  autre  titre,  puis- 
qu'il a  fort  peu  de  rapport  avec  les 
croisades,  n'est  cependant  pas  sans  in- 
térêt, et  c'est,  comme  l'a  fort  bien  dit  le 
rapporteur  de  la  société  d'agriculture 
de  Chàlons-sur-Marne  (  séance  de 
1829  ),  un  recueil  curieux  de  do- 
cuments déjà  connus,  qui  se  trouvent 
disséminés  dans  plusieurs  historiens 
et  dans  quelques  livres  français  et 
allemands,  quon  n'est  pas  fâché  de 
trouver  réunis  dans  un  seul  volume. 
VI.  Voyage  philosophique  dans 
l  Amérique  méridionale ,  rédigé  par 
l'éditeur  de  l'An  2440,  Paris,  1829, 
in-12.  VII.  Le  Frondeur,  ou  Obser- 
vation sur  les  mœurs  de  Paris  et 
de  la  province  au  commencement  du 
A7A"  siècle,  ibid.,  1829,  in-12.  Ce 
petit  ouvrage,  quoique  inférieur  à  ceux 
que  plusieurs  auteurs  ont  publiés  sur  le 
même  sujet,  se  ht  encore  avec  plaisir. 
Jacob  était  un  des  collaborateurs  de 
la  Biographie  universelle,  à  laquelle 
il  a  fourni,  entre  autres,  les  articles 
Burigny  ^  Coulin  ,  Lin  guet ,  etc.  Il 
avait  t  e I m i II é  u n  Traité  des  participes 
de  la  langue  française,  et  il  s'occu- 
pait d'un  ouvrage  sur  l'astronomie  et 
la  géographie  physique  ;  mais  la  mort 
l'empêcha  de  publier  l'un  et  de  ter- 
miner l'autre.  L — c — J. 
JA(X>15.  Voy.  Jakob,  ci-après. 


JAC 


JAC 


jAcon  f:i  s  ;j»AN  Ai»oi.- 

PHi),  vitjnt  iIjiioin,  iiJifuii  à  (^|>«n 
hj{;ur  \t  21  mai  IG'JH.  Il  rui  pour 
|>ric  le  conisrillrr  de  )u»licf  Oh^rr  Ja- 
robxu»  (  l'uy.  ce  nom  ,  X\l.  .i27). 
Aprr»  4\uir  trrminr  von  ^ilucjlion  au 
rollr;;r  dr  liorrli,  il  fut  nommé  rurr 
dr  U  paroisse  dr  l.idoe  et  Sin<trum  en 
Sriande,  rt  mouiul  le  3  août  177:2. 
On  a  de  lui  :  I.  Thèses  ptt y  sint  , 
Cnpenl.a-ue.  I7IH.  1719,  in-i"  11. 
Si  hetlion  Je  planitirum  strui  furu  et 
vegettifione ,  ilud.,  17*27.  in-H'  III. 
l'heses  mist  rllitnnr  ,  ibid.  ,  17iiO  , 
in-i". —  J\<nH«iN  Jonitées),  frère 
du  prérrdeni,  naquit  ronimr  lui  a  Co- 
penhague et  fut  r\r\t  auvNi  au  col- 
leur de  lUtrrli.  De  même  que  >on 
frère  il  entra  dan>  la  rainereerrleMasli- 
qiie.fut  nomme  en  171()rutede  Ka\oe, 
eii>uite  pré\(\t  ,  et  mourut  en  17-IH. 
Il  a  publié  :  I.  Disp.  Je  tirte  t.hristi 
merhtinira ,  (^penii.,  1703,  in-i". 
II.  l)e  Sthythir  priT  iiarfH/ru  petr 
ro^atù'H ,  ibid.,  17t»V,  in  i".  III. 
De  velerum  gnimmotii  itrutn  cen- 
sura, ibid.,  170.'i.  IV.  Ur  muteria 
et  forma  lihrurum  ap.  vftrres,  ibid  , 
ITtK»  — J  \«  •II,».!  s  (  Miilhian  ,  *ur- 
noininr  ir  Ji  une,  pour  le  diNliii^uei 
d'un  autre  rrirlitr  ni'^iierin  danois  ap- 
pelé ccunme  lui  ^I.l^l:u^  Jaroli-fu*.  dit 
i' Ancien.  Ne  a  .\arliuuN  dans  le  Julland 
le  1'^'^  mai  1637,  re  sa\ant  était  fils 
du  dorteur  Jarnb  Maltliia^en  ,  é*é- 
que  d'Aaihuo^.  Il  termina  en  ICiB 
ses  éludes  à  l'ccole  de  .va  \ille  natale, 
vo^aJfa  pendant  quatre  ans,  de  IGGO 
à  HUiV,  dans  les  pavs  élranfjers  M 
fut  nommé  à  son  retour  profe^^eur 
d'histoiieet  de  »;éo graphie  à  riini%er- 
sit«*  deG)penljai;ue.  Kn  ITitiS  il  de- 
MMt  professeur  de  langue  j^recque  el 
enfin  professeur  de  minlecine.  Il  mou- 
rut le  'l:^  janxier  16HH.  On  a  de  lui  : 
Oftsercutionrs  medinr  ,  npuscule  in- 
jiéré  dans  les  Jrla  meJica  de  Co- 
penhague, l) — z — s. 


JACORI  (CiimsTiAW -Fbkdé- 
mci,  sa\ant  daooiv ,  naquit  i  K.sm\n- 
derôd  danv  Tife  de  Selandc,  le  12 
mars  1739.  Son  père,  appelé  Pierre 
.lacobi,  était  prêtre  du  (Château  de 
tredensborp,  etOiarlolte  Slielfer,  sa 
mère.  de\int  pla%  tard  dame  de  U 
chambre  de  U  reme  JulianeMahe. 
.\pre«  avoir  étudie  la  jnriNprudrnce, 
Jacubi  fut  nomme  en  1770  astesseur 
au  tribunal  de  la  cour,  l'année  suivante 
il  deriat  SM^^seur  au  Inbanal  de 
la  CMT  et  it  l'état  sie^^rant  à  (Co- 
penhague.  en  1772  lecteur  chei  U 
toi,  et  la  même  année  av»e<vsrur  a  la 
cour  vuprérae.  Nuaimé  en  1774 
roaseiller  de  ju^lice,  il  eiail  en  1776 
»ic^-»eerelaire  de  la  siKiele  de*  ^eien- 
ce»  de  C«peuha;;ue.  et  ron*eiller  d'é- 
tat. Kn  17H0,  la  inrme  <M»f  lele  le  rhoê 
»it  ponr  »on  seerélaire,  et  le  roi  l'eleva 
en  17K1  an  ran^  de  conseiller  de  con- 
férence. Il  était  aii**i  membre  de  la  m>- 
fiéte  de»  sciences  de  Trondhieni  ,  M 
Norvège  ,  et  de  la  société  d'économie 
dome%tique  de  (^penhagae.  Il  avait 
occupé  penilant  plusieurs  années  le 
povte  de  grand-mailrc  des  pa^es  de  la 
reine  .luliane-Marie.  Il  a  publie  :  I. 
t.lo^e  Je  r arches èifite  AbsuUm,  qui 
obtint  le  phi  propo-e  par  la  «-ocieté  de» 
bel le>- lettres  et  sciences  utile*  de  Co- 
penhague ,  et  fot  insér.-  dans  ^on  re* 
cueil.  Cel  éloge  a  ele  ausM  imprimé 
à  part  ,  Copenhague  ,  1769  ,  iii-8**. 
11.  IHsp.  Je  mnralitate  rnusiT  mo- 
ralis  aJ physirain  reiatir,  G)|»enh., 
1759,  in  8  .  III  Ut/rr  de  Sapho 
à  l*hatm,  troJuite  J'(ktJe  ,  in>«erée 
dans  le  recueil  de  la  société  des  belles- 
lettres,  G^penh  ,  1770.  in-H".  |V. 
Oraison  Junr lire  Je  llrnri  llie/ms^ 
iierne,  lue  a  la  sim  iete  Jes  sciences, 
le  3  novembre  1780, Copenli  ,  1 780, 
iii»>8".  — Ja<.»»«I  {Utiltlur),  savant  is- 
landais, après  avoir  fait  ses  éludai  k 
Copenha;:ue,  obtint  en  1757  la  place 
de  préfet  ou  sjsseiroaod  du  district  de 


J/VC 


.l.\C 


Westmaniîùe  en  Islande.  Quelques; 
années  plus  tard  il  passa  en  la  même 
qualité  dans  le  district  de  Strande  dé- 
pendant de  la  même  ile.  Il  a  publié  : 
I.  Ixelroé  rnmplet  des  montagnes 
tf  Islande  qui  jettent  des  flammes, 
Copenhague,  1757,  in-8",  en  da- 
nois. II.  Vie  de  Bi'arne  Ilalt/ior- 
sen,  iliid.,  1777,  in-S",  en  islandais. 
111.  Gratiantm  actiu  Frid.  / ',  no- 
mine  patriœ  persoluta,  uh  naoes 
cihariis  onusfas  sub  hiemcm  in  Is- 
landiani  famé  lalntraniem  missas , 
Copenh.,  in-fol.,  sans  indication  d'an- 
née. IV.  Chronolugiœ  tentamen  , 
Hrappsôe,  1781,  in-i'\  en  islandais. 
D— z— s. 

JACORI      (FRKDhRIC-IlF.NRl), 

philosophe  allemand,  naquit  à  Dussel- 
dorf  le  25  janvier  17'f3.Son  père, 
avant  fait  de  bonnes  affaires  dans  le 
commerce,  destina  ce  second  fils  à  la 
même  carrière,  en  laissant  suivre  au 
fils  aine,  Jean-(feor;!;es,  son  f;oùt  pour 
la  littérature  dans  laquelle  il  s'est  en 
effet  distinû;ué  (/oj.  J.-G.  Jacobi  , 
XXI  ,  327).  Le  cadet  ,  n'admettant 
et  ne  retenant  dans  sa  mémoire  que 
ce  qu'il  concevait  clairement  ,  parais- 
sait un  e<pril  Ires-borné  ,  et  le  père 
crojait  qu'on  pouvait  en  faire  tout  au 
plus  un  marchanil;  il  l'envova  à  l'à^e 
de  seiie  ans  d'abord  à  Francfort,  puis 
à  Genève  pour  l'initier  dans  la  prati- 
que commerciale.  Le  séjour  de  Genève 
produisit  un  effet  contraire  sur  le  jeune 
Jacobi.  Au  lieu  du  commerce  il  étudia 
les  sciences  physifjues,  se  fit  expliquer 
par  Lesa;;e  V  Introduction  a  la  jilii- 
losopliie  de  s  (ira\esande,  et  se  pro- 
po'^a  d'embrasser  la  profession  de  mé- 
decin. Il  se  lia  avec  le  philoso[)he 
lionnet  ,  et  alla  visiter  Voltaire  à 
Ferney.  Cependant  \\  fallut  renoncer 
aux  projets  d'avenir  ,  et  retourner 
dans  la  maison  paternelle  pour  s'oc- 
cuper des  affaires  commerciale.s.  Il 
n'avait  que  vingt-deux  ans  quand  il  .se 


maria  avec  Bettv  de  Glermont,  des 
environs  d'Aix-la-Cliapelle.  Il  se 
trouva  alors  dans  une  position  bril- 
lante que  d'autres  lui  auraient  enviée  ; 
quant  à  lui  ce  n'était  pas  la  prospérité 
du  commerce  qui  pouvait  faire  son  bon- 
heur; aussi  n'aspirait-il  qu'à  une  si- 
tuation qui  lui  permit  de  suivre  sou 
penchant  pour  les  études  littéraires. 
Il  fut  enfin  nommé  conseiller  de  la 
chambre  aulique  de  Julieis  et  de  iîerg, 
puis  conseiller  intime  à  Dusseldorf. 
Dcs-lors,  abandonnant  le  commerce,  il 
passa  le  temps  que  lui  laissaient  ses 
fonctions,  d'ailleurs  peu  importantes, 
soit  dans  la  société  i\(tS'  hommes  in- 
struits de  la  ville,  soit  dans  le  sein  de 
sa  famille  à  Pempelfort ,  maison  de 
campagne  aorréable  ,  située  à  peu  de 
distance  de  Dusseldorf.  11  s'était  adon- 
né à  l'élude  de  la  philosophie,  et  il  se 
mit  en  rapport  avec  les  hommes  qui  la 
cultivaient  en  Allema^',ne,  surtout  avec 
Kant ,  Fichte  et  I\einhold.  Les  litté- 
rateurs aussi  l'intéressaient  :  il  corres- 
pondait avec  Goethe  ,  AVieland,  I\ich- 
ter,  Lavater,  etc.  Possédant  une  for- 
tune qui  s'accrut  beaucoup  ,  après  la 
mort  de  son  beau- père  (en  1776),  il 
était  à  même  d'exercer  une  noble  hos- 
pitalité envers  les  savants  et  les  litté- 
rateurs qui  venaient  le  visiter.  Son 
bonlieur  ne  fut  pourtant  pas  sans 
mélanj^e  de  contrariété.  Des  irri- 
tations nerveuses  déranf];eaienî  fré- 
quemment sa  santé;  une  mauvaise 
spéculation  de  son  père  le  foira  d'y  re- 
médier par  des  .sacrifices  d'argent  con- 
sidér.'ibles.  Ayant  franchement  exposé 
à  l'électeur  palatin  ce  que  le  sy.stème 
douanier  avait  de  vicieux  ,  il  fut  éloi- 
f;né  des  affaires  ;  enfin  la  mort  de  .sa 
femme  troubla  son  bonheur  domesti- 
que. Des  voyages  à  Londres  et  à  VVei- 
mar,  .séjour  de  quelques  hommes  célè- 
bres ,  lui  servirent  de  distraction. 
D'autres  chaj^rins  vinrent  éprouver  sa 
philosophie  :  les  armées  françaises  en- 


JAC 


JAC 


Yahlrent  ie*  pTopr'téiés  anprf^  d'Ait- 
la-(!hap^Hf ,  lamli»  que  Im  émi^ré^ 
franrais  inomiaifnt  iVmpelfort.  Pour 
it  UMi^lnve  aux    <)•  qu'il 

^prou\ail  jur  Ip*  hor.l  il  alla 

^'rlalilir  dans  \e  Hi>  nt  s^s 

ciifanli  dans  »rs  dm.  ^     ■   rnanl 

allrrnati^rmrnt  a  ilambour;;  et  a  Ku 
tin  ,  il  enirrtinl*  drs  liaisons  avrc  \rs 
hommrt    1rs    plu«    remarquablrs    du 

f»av»,  leU  oaeSlolbrr^,  Vovk,  Hfin- 
lold ,  et  Draucoup  d'autre*,  aut- 
queU  %e  joignirent  de*  Kranrai»  que 
1rs  rirconslan'-e*  axaient  conduits  sur 
les  bfirds  de  l'Klbe  ;  notamment 
les  »;rn«'raux  Dumouriex  et  Dumas. 
y.n  1H01  il  reMUt  soir  ses  enfants 
à  l)us>rldorf ,  rt  fil  de  là  une  ri- 
cursion  à  Paris ,    pour   ju^er   par    sei 

firopres  veut  des  rfTrts  de  crMc  réso- 
ution  à  laquelle  il  s'rlail  \ivrment  in- 
téressé dès  le  rommenremrnt  ,  mais 
dont  il  a\ait  sésèrement  rondamné  les 
eicès.  De  retour  à  Kutin,  il  fut  appelé 
à  faire  partie  de  l'arademie  royale  de 
Munirh,  que  le  nouveau  ministre  , 
Montjjelas  ,  Toulait  rr<^pnrrer.  Jarobi 
\int  s'établir  dan<i  la  capitale  de  la  lia- 
▼ière  ,  où  il  fut  porté  à  la  prévidenre 
de  l'arademie  en  lWt7.  Four  donner 
à  cr  corps  une  impuUion  toute  nou- 
▼elle,  il  désirait  v  appeler  plusieurs 
nommes  di>lin^ur>  par  leur  r>prit  plii- 
losophiquc  ,  particulièrement  son  ami 
Ke:iiliold,  auquel  il  destinait  la  place  de 
secrttaire  perpétuel  ;  mais  il  trouva 
des  obstacles  imprévue  qu'il  ne  put 
vaincre,  et  lui  même  eut  de  la  peine  à 
se  faire  pardonner  son  esprit  investi- 
gateur ,  étant  mal  vu  des  Bavarois 
de  la  vieille  roclie,  qui  le  re-^ardaiont 
comme  un  ré%olutionnaire.  Jacobi  se 
résif;na  quand  il  vil  srs  rfforts  para- 
Ivséspai  les  ennemis  de  la  philosophie; 
et,  ajMes  avoir  rempli  les  fonctions  de 
sa  place  pendnnl  environ  douze  ans, 
il  alla  passer  dans  la  retraite  les  der- 
nières années  de  sa   vie   qni,    malgré 


se5  infirmités,  ne  furent  pas  sans  char- 
me; car  sa  maison  était  le  rendei-\ous 
de  tous  lr>  hommes  éclairés  ,  et  les 
étr3n;;ers  qui  xeuainil  à  Munirh  s'em- 
prev^ienl  de  préNfutcr  'rurs  homma- 
ges au  philosophe.  Il  mnuiut  le  10 
mars  1H19.  Jacobi  élail  un  parfait 
honnête  homme,  pinii  de  candeur  et 
de  sincérité .  il  recherchait  la  vérité  avec 
un  c(Tur  droit  et  reli;;ieux  ,  et  pour  y 
parvenir  il  prenait  le  seul  chemin  qui  lui 
lût  propre.  On  a  dit  de  lui  qu'il  avait 
de  la  dévotion  pour  un  Dieu  inconnu. 
Il  voulait  arriver  par  la  conna'ssanre 
de  la  nature  à  celle  de  la  divinité  ;  écri- 
vant toujours  V1US  l'infltiencede  ses  sen- 
timents momentanés  i\tc  une  {grande 
al'ondaiirr  «l'idérs,  il  n'a  pas  toujours 
été  d'acrord  axer  lui-même,  ou  plutTil 
il  a  modifié  qiielquefiMN  ses  opinions  ; 
et  il  a  combattu  omertenirnt  celles  des 
philosophes  qui  lui  paraissaient  s'écar- 
ter de  la  vérité.  Aussi  une  partie  de 
ses  ouvrages,  empreinte  d'un  carac- 
tère pnirmique,  a  été  provoquée  par 
des  publications  d'auffes  penseurs.  Il 
avait  sur  plusieurs  d'entie  eux  l'avan- 
ta;;e  de  la  lucidité  des  idées  et  de  la 
netteté  de  l'expression.  Son  [tremier 
o!i\r.i^r  fut  It'oltlrttmr,  177î>,  2  vol., 
espère  de  roman  philosophnjue,  qui  eut 
quatre  éditions.  Les  Lrtlrrs  tfAll- 
av'il .  en  '2  vol.  ,  dont  il  publia  d'a- 
bord des  fragments,  ont  la  im-me  ten- 
dance. Kn  ITSii  il  fit  paraître  Our/- 
ques  mots  de  Lessing  smuint  de 
cominrntaire  aux  voya^^rs  des  pa- 
pes. Jusque-là  il  n'avait  pas  encore 
pris  ran;;  parmi  les  grands  philosophes 
de  r.\liema;;ne  ;  mais  en  1"8.'>  il  pro- 
duisit une  grande  sensation  par  son 
ouxra^e  sur  lu  doctrine  de  Spirutsti, 
en  forme  de  lettres  adressées  à  Moïse 
Mend«'|s<o!.n,  dont  il  donna  en  1789 
unèéd-lion  plus  ample  avec  des  sup- 
pléments. I.e  but  de  cet  érrit  était  de 
prouver  à  Mendelssolni  .  qui  se  propo- 
sait de  composer  un  ouvrage  sur  Les- 


10  JA.C 

sing,  que  cet  écrivain  avait  fini  par 
adopter  le  s\slème  de  Spinosa.  A  ce 
sujet  Jncohi  examina  à  fond  les  opi- 
nions de  ce  philosophe  qu'il  reo;arila 
comme  méconnu  par  la  postérité,  et 
s'eflorça  de  le  présenter  comme  un 
des  {iénies  les  plus  profonds  et  des  es- 
prits les  plus  judicieux  qui  aient  existé. 
L'étude  des  œuvres  de  Spinosa,  disait- 
il  ,  l'avait  convaincu  qu'il  y  a  des 
choses  qu'on  ne  peut  expliquer ,  et 
qu'il  faut  prendre  connue  on  les  trouve; 
de  là  la  nécessité  d'une  foi  et  d'une 
dévotion  substituées  à  un  savoir  fondé 
sur  le  néant,  et  qui  lui  paraissent  le 
seul  et  véritable  fondement  de  la  phi- 
loso[)liie  ;  de  là  une  révélation  de  la 
nature  qui  force  tout  le  monde  à 
croire  et  à  admettre  par  la  foi  certaines 
vérités  élerncllcs.  Jacobi  convient  que 
personne  avant  lui  n'a  prolessé  pour 
Spinosa  la  même  vénération.  Elle  trou- 
va des  contradicteurs  au  nombre  des- 
quels fut  .Mendeissohn  même  :  aussi  se 
crut-il  obli^'jé  de  publier  une  Réfuia- 
iion  (hs  inculpations  de  Mendeis- 
sohn^ 178G.  Il  faut  dire  pourtant  que 
Jacobi  ne  partageait  point  l'opinion 
de  Spinosa  sur  la  nécessité  à  laquelle, 
selon  le  philosophe  d'AmsIeidam, 
l'action  de  Thomme  est  soumise,  et 
qui  reujpcche  d'être  libre.  Selon  Ja- 
cobi, la  conscience  précède  l'action  au 
lieu  de  la  suivre  comme  le  soutient 
Spirio>a.  11  n'admettait  pas  non  plus, 
avec  ce  philosophe,  que  le  monde  sub- 
siste éternellement  sans  Dieu  ou  comme 
Dieu;  d'un  autre  côté  il  combattait 
l'opinion  de  l'école  de  Leibnilz  et 
Wolf  sur  l'origine  du  monde  ,  comme 
procédant  naluiellement  de  Dieu.  Pour 
répondre  aux  att.tqiies  auxquelles  il  fut 
en  butte,  il  alla  chercher  dans  les  Es- 
sais de  1 1 lime, des  preuves  de  sa  manière 
de  considérer  la  révélation  ,  et  il  [tublia 
en  1787  :  David  îliinie,  sur  la  foi , 
ou  l  idralisme  et  le  réalisme,  avec  wn 
supplément  destiné  à  eomLaltre  le  s)s- 


JAC 

tème  de  Kant  sur  l'idéalisme  transcen- 
dant, lîeaucoup  de  personnes  ne  lui  par- 
donnaient pas  d'avoir  soutenu  que,  par 
la  seule  raison,  nous  ne  pouvons  parve- 
nir à  la  connaissance  de  l'existence  de 
Dieu.  Plus  tard,  il  attaqua  aussi  les 
dées  philosophiques  de  Fichte,  avec 
ilequel  il  entretenait  néanmoins  une 
correspondance  amicale  ;  sa  brochure 
Jacohi  à  Fichte  parut  en  1799  :  ce 
dernier  de  son  côté  déclarait,  dans  ses 
lettres  particulières,  que  la  doctrine  de 
son  adversaire  lui  paraissait  affreuse. 
Cependant  Jacobi  justiûait  son  ami  du 
reproche  d'athéisme  que  plusieurs  sa- 
vants adressaient  au  professeur  d'iéna  ; 
selon  Jacobi ,  la  philosophie  transcen- 
dante n'est  pas  plus  athée  que  la  géo- 
métrie ou  l'arithmétique.  Sa  doctrine  sur 
le  libre  arbitre,  ajoutée  à  l'ouvrage  sur 
Spinosa,  sous  le  titre  de  Propositions 
préparatoires  sur  la  contrainte  et  la 
liberté  de  l'homme ,  parut  en  1799, 
séparément,  avec  le  titre  :  De  rinsépa- 
rahilité  de  tidée  de  liberté  et  de 
providence ,  et  de  Vidée  de  raison. 
Il  y  admet  une  résistance  qui  empêche 
le  libre  arbitre  de  vaincre  tous  les  ob- 
stacles, et  d'être  par  conséquent  par- 
faitement libre.  Cette  lutte  qui,  selon 
lui.  règne  dans  la  nature  entièi  e  ,  lui 
paraît  être  un  mystère  impénétrable  de 
la  création.  On  a  atlatjué  ces  idées 
comme  insuffisantes,  et  l'on  a  a|)jn  ouvé 
davantage  d'autres  endroits  de  ses 
œuvres  où  il  définit  la  liberté  morale 
comme  étant  la  faculté  de  régler,  se- 
lon les  exigences  de  la  vertu  ,  nos  dé- 
sirs sensuels,  nos  penchants  et  nos 
passions,  et  où  il  regarde  le  libre  ar- 
bitra à  la  fois  comme  la  cause  el  comme 
l'effet  de  la  vertu  xwîimt.  Kn  1811, 
Jacobi  publia  un  ouMage  Des  choses 
divines  et  de  leur  révélation  ,  dans 
lequel  il  soutient  que  ce  n'est  que  par 
révélation  el  par  intuition  que  nous 
pouvons  nous  convaincre  de  l'existence 
de  Dieu ,  et  que,  s'il  ne  se  révélait  pas 


JAC 


JAC 


II 


m  nou» ,  rien  df  ce  qui  e»t  hors  ile 
uous  ue  pourrait  uuus  le  faire  rou- 
luiitr  A\ant  alljqur  ^aiu  cet  érril  la 
pliiluM)pltie  lie  SclieUiii^,  il  »*atlira 
une  réplique  de  la  paît  de  re  phtloNO- 
plir  ^1  ,  et  d'aulir»  eiri\aiii>  piireul 
part  a  la  di^euvMon  ['2)  Jacobi  publia 
niruie  dan»  di\ei5  recueils  périodi- 
ques de»  ninrrraux  remarquableN,  faut 
s\u  b  pliiiosiipliie  spéculative  que  »or 
la  pliiloMtpliie  morale,  llans  la  der- 
iiif'ie  époque  de  sa  vie  il  rerueillit  lui- 
inème  >ca  (  ^m\  re$,  et  fil  précéder  celle* 
qui  liaileiil  delà  pliilosopliic ,  et  qui 
en  forment  la  plu^  grande  partie  , 
d'une  introduction  ou  il  pre%enle  le> 
résultat!  des  pensées  qui  ont  eie  I  ob- 
jet de  se«  méditation^  pendant  toute 
»a  Me.  C^tte  édiiion,  publiée  a  l^ipx'^ 
sous  le  litre  de  t'ritdriih  Utinruh 
Jiiruhis  Wfrke ,  et  conimenree  en 
iSi'2  M»u>  ses  }eux,  ne  fui  arlie\ée 
qu'api e>  sa  mort,  et  forme  mk  \oluuies, 
«ans  lesquels  on  trouve  drs  lellre.s  a 
llcider,  Furster,  Jean  Mullei.kanl. 
l^vater,  ain»i  que  sa  coriespondanre 
a\rr  llaiiMiin.  On  a  encore  publie  un 
ciiuii  de  la  r(nres|>ondaiire  de  Jacobi 
(^lusn  lisnitr  lirir/wn  fisrfj , I^ipuf;, 
1Hiâ-*i7,  '2  vol.  in-8",  inti-ressante 
pour  riiistoTf  lilleraire  de  l'époque. 
On  >  trouTe  les  lellie^  qu'il  a  rcli.in^res 
avec  (luilie,  Scliiller ,  (niillaiiine  de 
lluiuboldt,  Necler,  madame  de  !«lacl , 
Clliailes  Villns,  If  coiule  d'An^ivil- 
lers  el  d'autres  pei>oiina;:es  leniarqiia 
bifs.  Apres  fra  mort  ,  l'acailenne  de 
Mumrli  atnsacra  une  séance  à  la  lec- 
ture de  trois  éloges  composés  par  ses 
anciens  collègues  Scliliclitej;roII  , 
^^  ciller  el  1  Inersch  ;  ils  ont  été  pu- 
blies ensemble  sous  ce  titre  :  F.- II. 
Jmolti,  sa  vie,  srs  doririnrs  ft  ses 
allions,  Munich,  iHlî».  in-H''.  Une 
bonne  aiiaiNse  de  ses  ouvies  pliiloso- 

1        l'r    k     ai     Jrr    Stiui/i     ««a     J„i    ^i,:Uirkfj 
Dr,:  fi,     i»ii. 

1      Fui,    *on  deutichtr  Pkd»$9fki« .  Jrt   uitd 

KuHii ,  ilia. 


phique*  a  paru  dan»  les  Annales  liUr- 
rairts  de  Uriilelherg,  par  \\v^t\  , 
IH17,  et  dans  le  recueil  peiiodique  al- 
lemand Ilermes  .  I.eipii^,  18*iÛ,  \o\. 
XIV,  pai  un  anonvuie.       1) — g. 

J  A<:4l|tl  (\>l»lM-UnlM)LPtir), 
juii^nnsulte,  ne  a  llaiioMr  m  17  iG  , 
était  fiU  d'un  nirmlxe  du  coiULsIoire  de 
()elle.  I)'ab4>rd  auditeur,  il  fut  élu,  en 
17711  ,  secretaiie,  et  deux  ans  âpre», 
»>ndic  dei  etal.s  de  l.unebour^.  Il  prit 
une  pari  active  a  l'e&eculion  du  parla;;e 
des  vaines  pâtures,  ainsi  quau»  travaux 
de  b  société  d'économie  rui  aie  de  Celle 
dont  il  était  membie  lior^de  l'occupa- 
tion du  Hanovre  par  les  Fran<;ais  en 
iHOCi,  Jacobi  lui  nomme  subdele;;ué  de 
la  roniinivsion  admiiiisliative  pour  le 
pav>de  {.unebour^;,  el,  après  l'organi- 
sation du  rovaume  de  W  esiplialie ,  il 
fut  diieclrur  des  contribiiiioiis  indirec- 
tes a  I.unrbotirj  ,  ptirs  «l-^fteur  des 
douane^  '      iiiswick. 

.\u  irt.>i  ,  rndance 

du  Hanovre,  il  eul  la  direction  des  im- 
pôt^  pour  le  pavs  de  Lunebour^;.  Au  ju- 
bile de  sa  carrière  administrativre,  en 
lMl23,  il  re^ul  du  roi  la  décoration  de 
Tordre  des  (îuelfes,  el  de  l'université 
de  (firttin;;ue  le  dipUmr  de  docteur  en 
drt>il.  Il  mourut  le -i*i  |uilirt  \H'2h. 
Farmi  ses  ecntson  remarque:  I.  tas- 
sai tf  une  afMi/oitie  des  peines  tapi» 
taies,  i.erouo,  177(1.  II.  Sur  fulilitè 
des  i  luis.  Celle.  17«2  ,  iii-i".  III. 
Expose  drs  droits  du  fHNii^oir  su- 
prême jHtr  rapport  a  la  liberté  riiùle, 
Dessauel  Leipui,  1783,  in-8".  |V. 
Ptè'  es  re/atii'es  a  la  runstitutiun  des 
états  de  iMnebourg,  Hanovre,  1794- 
93,  rivol.  Il  a  publie  pendant  dix  ^ns 
avec  Kraut  el  IlenecLc  les  .innales 
du  pays  de  Urunsaiik  ,  Lmiebourg 
et  Hanovre,  1780-179."):  et  avec 
KmJeil  a  commencé  un  linueil/HJur 
f/iistoirr  dr.f  ptiy  s  dr  l)run.<m'irk  et 
LuneUmr-.  Celle,  1802  ,  dont  il  n'a 
paru  que  le  1*"^  vol.  D— C. 


12 


JAC 


JAC 


JACOBSEX,    JACOBS  ou 

JA(X)PSEX  (Michel),  marin  cé- 
lèbre ,    naquit  à    Dunkerqiie    vers  le 
niilied    du    X^  I^    siècle ,    d'une  fa- 
mille noble  et  ancienne,  originaire  de 
la  Brille  en   Hollande  ,  et  dont  une 
branche  s'était  élablie  dans  la  Flandre 
maritime  lors    de    la    révolution    des 
Pays-Bas.  Use  sio;nala  héroïquement 
au  service  d'Kspao;ne;  en  1585,  il  fut 
élevé   au  grade  de  capitaine  de  vais- 
seau, et  il  en  montait  un  en  1588  dans 
la    fameuse    armée    navale    de    Phi- 
lippe II ,  dite  y  invincible.  Ce  fut  à 
son  courage  et  à  son  intelligence  que 
l'Espagne  dut  la  conservation  des  dé- 
bris  de  cette  llolte  malheiueuse.  En 
1595  il  commanda    une  escadre  es- 
pagnole ,    piit  ,    brûla    ou    coula    à 
fond  tous  les  bâtiments  hollandais  em- 
ployés à  la    pèche.    \]nt    continuité 
d  actions  éclatantes  lui  procura  succes- 
sivement le  grade  d'amiral-général  et  sa 
nomination    à  Tordre    de  Saint-Jac- 
ques. En  1G32,  il  amena  d'Espagne  à 
l)unkerque  sa  flotte  avec  quatre  mille 
hommes  de  troupes;  sans  s'effrayer  du 
nombre  des  vaisseaux  anglais  et  hollan- 
dais qui  défendaient  l'entrée  du  port. 
Retournant    ensuite  avec  cette  même 
flotte  en  Espagne  pour  y  chercher  d'au- 
tres   troupes,  il    battit    dix  vaisseaux 
turcs ,    et    ramena   tous   les    siens    à 
IJiinkerque.  'J'elle  fut  sa  dernière  ex- 
pédition ;  mais,  dit  Faulconier,  histo- 
rien de  IJunkerque,  «  il  ne  jouit  pas 
«   long-temps    du     bonheur    de   son 
<  voyage ,  et  mourut  quelques  jours 
«  après  son  arrivée  ,  en   1633.   Il  y 
«   avait  cinquante  ans  qu'il  servait  le 
«   roi  d'Espagne,  et  toujours  avec  tant 
«   de  valeur,  de  conduite  et  de  for- 
«   lune,  que  les  Hollandais  le  surnom- 
«   mèrent  le   Jienard  de   la   mrr.» 
Le  roi  catholique  fit  transporter  son 
corps  à  Séville  :  il  y  fut  enterré  dans 
l'église    où    reposent  les    cendres  de 
Christophe  Colomb.  Z. 


JACOBS  EX  (CoRNiL-Guis- 
lain),  arrière-petit-fdsde  Michel, naquit 
aux  environs  de  Dunkerque,  le  11  sep- 
tembre 1709,  et  fit  d'excellentes  études 
à  l'université  de  Louvain.  Il  était  près 
d'entrer  dans  l'état  ecclésiastique  lors- 
que le  baron  de  Reutlitsch  ,  ami  de 
sa  famille,  l'en  détourna  et  lui  procura 
un  crédit  considérable  pour  entrer  dans 
la  carrière  du  commerce.  Il  l'eng^o-ea 
à  s'établir  dans  l'île  de  Noirmoutier  où 
Jacobsen  se  maria  peu  de  temps  après 
son  arrivée.  C'est  lui  qui ,  le  premier 
dans  cette  île,  en  faisant  des  dessèche- 
ments, força  la  mer  à  reculer  sur  elle- 
même.  En  1755  il  y  renferma  les  lacs 
de  mer  de  la  Fosse,  qu'il  avait  obtenus 
m  concession  et  sauva  de  la  misère , 
dans  cette  année  de  disette,  toute  la 
popidation  indigente,  par  des  grains 
qu'il  fit  venir  de  l'étranger.  Avant 
lui  ,  le  commerce  de  l'île  de  Noir- 
moutier se  réduisait  à  quelques  échan- 
ges avec  le  continent  ;  c'est  par  l'ac- 
tivité seule  de  son  génie  que  les  bâ- 
timents du  nord  sont  venus  dans  ses 
ports.  Il  fut  le  créateur  et  fondateur 
de  l'île  de  la  Crosnière  qu'il  gagna  sur 
la  mer.  Ce  fut  le  1*""  avril  1767  qu'il 
déroba  cette  île  à  l'Océan  avec  l'aide  de 
onze  cents  hommes  qu'il  avait  rassem- 
blés de  dix-sept  paroisses  du  conti- 
nent voisin.  Il  avait  commencé  celte 
grande  et  belle  entreprise  par  une  pe- 
tite clôture  où  il  fit  construire,  en  plan- 
ches ,  une  immense  cambuse  qui  porte 
encore  son  nom,  pour  y  loger  ses 
travailleurs.  Avant  de  commencer  ses 
vastes  travaux,  comme  ses  mœurs  anti- 
ques rappelaient  celles  des  patriaîches, 
il  fit  mettre  tous  ses  ouvriers  à  ge- 
noux et  entonna  lui-même  le  Veni 
Creator^  en  leur  disant  :  Ici,  mes  en- 
fants, sera  bâtie  une  église.  En  ef- 
fet ,  cinq  ans  après,  au  mois  de  février 
1772,  il  obtint  l'érection  d'une  cure 
dans  l'île  de  Pé,  dite  la  Crosnière  ; 
mais  l'église    et  le    presbytère    qu'il 


JAC 


JAL 


avait  tait  bâhr  ont  rté  «létniils  p«n<bnt 
la  r^oluhoii.  Il  conslrui»it  Mir  cellt 
rie  Irrule  mjiM>ii5,  ri  rrllc  pelile  coli>- 
ni«  roiilirnt  aujourd'liui  Irrnlr-tJrui 
leu\  (Vr»f  uiir  tlo  bciirt  couqyrirs 
qii  \n  <kur  U  mrr  ,  car,  intlr- 

\u-  tir    rarrroiv>curiit    il'uii 

I,  .  .VI  ju  r  ■  .  .1  |j  Kranre,  ce  àe*- 
rif.r.iiriii  .i|  (nir  uiip  rommuiiica- 
lion  pai  irirc  amer  l»aN*r  ,  «le  N«ir- 
moulifr  au  coiiliurol.  l'rrMiniir  n'avait 
encore  o%é  t  pa»»«r  à  dictai  ;  c'est 
Jacobfteii  qui  ca  6l  l'c^vai  le  premier 
avec  des  '^uitic*  ,  et  »a  fille,  KliNal>el)i> 
N  irtoire,  ^  pa\»a  en  voilure.  Il  nou- 
rat  en  17K7  ,  à  Noir  mou  lier,  ou  il 
elait  établi  ilepuiv  cniquanle  an» ,  et 
ou  M»^  vef  liiv  le  fui^aJrut  rr^p^firr  rom- 
nu  '  lie.  D'ap!  -  •  rr» 

\i>  Il  corps  fut  :  •Ijim 

le  ciiurlieir  ilr  l'ile  tle  L  (.roMiirir.  Il 
lais^^a  cinq  rufanl»,  qualrr  Llirs  et  un 
l'argon.  Sa  qualnrme  ù\:e,  KliNil>rtli- 
Vicluire  clout  on  a  lirfa  parle  .  lut 
condamnée  a  niorl  et  fuMllee  à  Noir- 
raoulier  a\ec  madame  d'Klbee  dans  le 
lemps  de  la  Irneur.  Elle  s'elail  mariée 
a%ec  lui  >et-irlaiie  du  roi,  Mourain  de 
rilerbauilirre.  qui  fut  au^i  condamne 
à  mort  par  le  liibunal  re\olu(ionuatre 
de>  Sables.  Z. 

JA<:OTl.\  le  colonel  l'iinni  . 
naqtit  \r  11  a\ril  ITG.'idanste  village 
di-   '  .  u>    près    I^n^res ,  d'une 

fj:  >      .iu\aieurs  respectable,  mais 

peu  (avonsee  de  la  fortune.  Il  fui  de 
Douiie  lieure  destine  par  .son  oncle  , 
l'un  des  directeurs  du  terrier  de  la 
Corse,  à  la  profe^ion  de  géomètre  du 
cadxslre,  et  son  éducation  fui  dirigée 
vers  ce  but.  Sa  principale  étude  fut 
celle  des  mathématiques  pour  le>quel- 
les  il  montra  des  sa  plus  tendre  en- 
fance une  (;randc  aptitude,  lue  pro- 
fondeur de  réflexion  cl  une  pc rNpicacilé 
remarquabh-  .  "'li  ne  se  demciiiirent 
jamais,  lui  firent  taire  des  pro^ie>  ra- 
pide>  et   triomphèrent  de  l'obscurité 


des  démonstrations  de  soa  précepteur, 
iiuitre  d'école  de  Mlla;;e  peu  iustniil 
et  routinier.  Il  ne  se  li\ra  que  tard  à 
Pétude  de  la  lan^^ue  latine,  et  quinze 
mois  lui  »uf!iienl  pour  élte  en  elal  de 
bien  traduire  le<»  oraivms  de  Cliceron. 
A\ec  de  paieillr»  dispnvtîntt^  .  aidé 
par    le%   circonttancrt  ,    >'  ,ie 

bonne  heure  par  le  ;:rnri  .■  I.  .  <:ie 
qui  ne  resva  de  lui  donner  dr>  leinoi- 
;;Da^es  d  estime,  même  depuis  >on  avè- 
nement a  l'empire  ,  il  eùl  pu  parcourir 
une  plu»  brillante  carrière  m  une  mo- 
destie etce>>Mve  ne  l'eût  retenu.  .\r- 
ri«é  eu  (x)rse  «ers  la  fin  de  l'année 
1781  ,  il  fut  d'abord  emploie  dans 
les  bureaux  du  terrier,  soit  au  drvsin 
de  la  rarle,  soit  à  la  tenue  des  écri- 
tures :  ensn>e  ensuite  en  campagne  en 
qualiie  il'r'nr  et  sous  la  direction 
u'iih  r    du  cadastre,   tout   le 

Ira^  <  t  devint  utile  au  terrier, 

et  pM  àe  icaips  apre%  on  le  chai  -ea  de 
le«er  «m  des  parties  les  plus  dilliriles 
de  l'île.  I^rs  difficultés  du  terrain,  le 
chmat,  les  maladies,  d'injustes  préven- 
tions qu'un  dévouement  sans  bornes 
ne  put  vaincre  entièrement,  rien  ne  le 
rebuta.  I^  cadastre  etaii  a  peine  ter- 
mine, lorsque  la  capitulation  de  Bastia 
du  2  praiiial  an  '2  i'2\  mai  17'.)i)  en 
livra  lc%  plans  aux  .\n^lai>.  I^>  con- 
sentions en  réservaient  uiie  copie  aa 
(^ouwrnement  français  Jacotin  fiit 
clur^e  de  la  dire.  Sa  miv>ion  fut  dif- 
ficile; il  eprou\a  une  %i\e  opposition 
de  la  part  de  l'amiral  an;:lats  llood 
qui,  malgré  les  termes  formels  de  la 
capitulation  ,  refusait  opiniâtrement  de 
laisser  prendre  aucune  communication 
du  terrier.  Ijl  fermeté  et  la  patience 
de  Jacolin  triomphèrent  a  l.i  fin  de 
ces  obstacles  :  il  quitta  la  Gjrse  dans 
le  quiis  de  jiars  179G,  après  quatorze 
ans  u  un  travail  pemhle,  et  re\int  en 
France  rapportant  une  copie  complète 
de  tout  le  travail  du  cadastre.  \ 
peine  avait-il  revu  >a  pairie  que,  déjà 


i4 


JAC 


apprécié,   il    lut    désigné   pour   faire 
partie   de    la    mémorable    expédition 
d'Eo;Apte,  sous  les  ordres  de  M.  Teste- 
vuide,  son  oncle,  directeur  des  opéra- 
tions   topographiques.     Débarqué     à 
Alexandrie    avec  l'armée   le  5   juillet 
1798,  il  n'y  avait  que  trois  mois  qu'il 
était  en  Egvle,  lorsqu'il   fut  appelé  à 
remplacer  son  oncle  qui  avait  péri  assas- 
siné dans  la   révolte  du  Caire.  Bien- 
tôt Texpédition  de  Syrie  se  prépara  : 
Jacotin,  qui  déjà  avait  été  remarqué  par 
Caffarelli  et  par  le  général  en  chef,  fut 
désigné  pour  en  faire  partie.  Il  déploya 
un  zèle  infatigable  pendant  cette  campa- 
gne, où  Ton  eut  continuellement  à  lutter 
contre  l'ennemi,  la  famine  et  la  peste  ;  d 
reconnut  ou  leva  hii-mème  la  presque 
totalité  de  la  partie  de  cette  contrée 
parcourue  par  l'armée  française.  A  son 
retour  en  Egypte,  on  organisa  le  corps 
des   ingénieurs -géo2,raphes  ;    il  en  fut 
nommé  directeur.  Dans  cette  position 
il  redoubla  d'activité  ;  non  content  de 
diriger  les  ingénieurs  qu'il  avait   sous 
ses  ordres,  de  provoquer,  de  rassem- 
bler les  matériaux  qui  lui  étaient  four- 
nis par  j)lus  de  cinquante  ofticiers  de 
toutes  armes,  il  parcourait  lui-même  le 
pays  au  milieu  de  tous  les  dangers  île 
la  guerre  et  du  climat.    Dans  une  de 
ces  pénibles  excursions,  comme  il  pas- 
sait un  pont  sur  le  canal  de  Moès,  son 
cheval  effrayé  .«e  renversa  dans  le  ca- 
nal,   l'entraîna   dans   sa  chute  et  lui 
cassa  la  jambe  en  deux  endroits.  Cet 
accident  le  (orra  de  renoncer  aux  opé- 
rations de  campagne  pour  se  livrer  en- 
tièrement au  travail  du  cabinet.  I.e  23 
janvier  18(K),  il  avait  été  nommé  mem- 
bre de  l'institut  formé  au  Ca-re  :  il  qmtta 
l'Egvpte  l'un  des  derniers,  vers  la  fin  du 
mois  d'août  1801  .De  retour  en  France, 
promu  au  grade  de  colonel  à  l'époque 
de   la   formation   des  ingénieurs-géo- 
graphes en  corps  militaire,    personne 
n'eut  la  pensée  de  lui  disputer  l'hon- 
neur qui  lui  était  dû  de  diriger  Tem- 


JAC 

ploi   des    nombreux    matériaux    qu'il 
avait  rapportés,  et  qui  lui  appartenaient 
en    grande  partie;  il  fut  chargé  de  la 
rédaction  de    la    carte    d'Egypte    et 
nommé  chef  de  la  partie  topographique 
du  dépôt -général  de  la  guerre.  Pendant 
les  guerres  nombreuses  qui  se  succé- 
dèrent presque  sans  interruption ,  les 
travaux  dont  il  fut  chargé  se  multi- 
plièrent à  l'infini;   chaque  campagne 
nécessitait  une  carte  et  des  plans  nou- 
veaux :  l'impatience  du  chef  du  gouver- 
nement ne  permettait   pas  de  retard. 
Jacotin  fit  face  à  tout,  et  cependant  il 
ne  négligea  pas  les  travaux  de  l'atlas 
de  l'Egypte  et  de  la  Syrie;  le  travail 
était  achevé,  les  cuivres  étaient  gravés, 
mais  Bonaparte,  qui  sans  doute  par  des 
raisons  politiques    ne   voulait  pas  que 
cette  carte  fut  publiée,   les  fit  mettre 
sous  les  scellés,    défendit  qu'on  en  ti- 
rât aucun  exemplaire,  et  en  rendit  le 
directeur  du  dépôt-général  de  la  guerre 
responsable.    Ce  relard  qui  ajournait 
la  gloire  de  Jacotin  lui  donna  l'occa- 
sion d'enrichir  l'atlas  de  tous  les  ren- 
seignements   qu'il   obtint    des    voya- 
geurs   qui    avaient     parcouru     cette 
antique  contrée   depuis   le   retour   de 
l'expédition.    Ce  bel    ouvrage    aurait 
suffi  pour  lui  assurer   une  réputation 
durable  ;  Jacotin  ne  s'en  tint  pas  là  : 
on  avait  rassemblé  les    matériaux  du 
cadastre  de  la  Corse,  auquel  il  avait 
puissamment  coopéré  dans  sa  jeunesse 
et  qu'il  avait  sauvé  des  mains  des  An- 
glais :  il  en  rédigea   la  carte  ,  travail 
d'autant  plus  important  qu'il  contient 
les    détails    iVun    pays   jusqu'ici    peu 
connu  et   appelé  à   grandir  en  indus- 
trie et  en   civilisation.  Dans  le  cours 
de  ses  nonïbreiises  occupations,  il  en- 
couragea les  artistes  employés  sous  ses 
ordres,  et  forma  au  dépôt-général  de 
la  guerre  une  école  de  gravure  et  de 
dessin.  Etranger  à  l'intrigue,  il  ne  pro- 
tégea que  le  mérite,  et  c'est  à  ses  soins 
et  à  son  amour  pour  la  justice  que  l'on 


JAC 

doit  ane  pfpini^re  d'ajintn  (|tti  avu- 
rent  à  la  !■<  •  lè  djii«  la 

^a«urr  ln(>  un   le  té- 

11'  r 

a'  .    .    i 

t'  If  lie  L  iioinrilr  rai  le  Je 

I  iJif  immeiisf  et  vraiment 

luiioriai.  qui  (n  'rra  riirore  de  ijoin- 
hreu>rN  aii'irc  ilr  Ira^ail  au  mrp^  dV- 
iJl-major  auquel  rexêculion  en  r^t 
rnn(\ée  depuis  la  fuvon,  operj'e  dan» 
in    sein  ,    du    savant   et    regrettable 

«<iq>5    des    in^én  î- '-       Il 

tiresva  pour  la  ra  I,  et 

parlr^.  \  <  .  une 

carte  <:  nui 

fut  ariirwr    a^n 
pieuse,  (l^itnmaml. 

avait  rtr  (Irriilrr  ,  elle  lut  t(lll^ttulle, 
dessinée  rt  >^ra\pr  en  moins  d'un  an 
et  remise  k  relal-major  de  l'armée 
avant  d'entrer  en  carapajjne.  (^tle 
première  carte  pr^ntait  de»  imper- 
fertions  qu'on    ne    pou\ait    attribuer 

3u'au  dei.iut  de  matériaux  ,  .laroliti 
epuis  la  lin  de  la  carapa^nr  s'ornuait 
d'en  rr«ii;;rr  une  nou\cllf  sur  une 
éclieiie  plus  étendue.  Il  avaj  i 

cet  eiïrl  1rs  matériau\  ra; 
les  officiers  «le  l'arriirr  ;  il  ■ 
lr>  \n\a;;eur>,  il  consultait 
■  par  la  persévérance  de  son  Irawil  il 
•  rail  parvenu  à  donner  à  celle  carte 
le  cachet  de  perfrriion  que  portent 
tous  -tes  ouvrages  ;  elle  était  conçue 
dans  la  profondeur  de  sa  pensée,  mais 
l'exécution  en  était  à  peine  commencée 
loiM|iie  la  mort  le  frappa,  le  ï  avril 
1H27,  après  trois  mois  de  souffrances 
1  î^ës  causées  par  une  «jan^ienc  $é- 
nile  ,  résultat  d'une  \ie  excevvivfment 
Ial)(»rieu>e.  Nul  liommc  ,  peut  tire  , 
n'a  porté  i  un  plus  haut  point  le 
tèle  pour  l'accomplivsement  Je  ses  de- 
▼oirs,  rabni.:ation  de  ses  intérêts  et  le 
dévouement  pour  ses  amis.  Son  carac- 
tère et  ses  travaux  ont  été  peints,  avec 
autant  de    sentiment  que  de  talent , 


JAC 


fS 


dans  deux  discours  prononcés,  le  pre- 
mier sur  sa  tombe  par  M.  Joraard  , 
l'un  de  »es  compa.;nons  d'K-^tpte,  eî 
le  second  dan^  unr  sranre  solennelle 
Jr  h  ^or.éié  de  '."Nv.fjplnp^  J,,„t  j| 
éi.i  \i  I  jrenaudière. 

Sf  ont  ;  la  nirte 

ijr  i  or%r  tn  \\m\  ieuiiir^,  publier  par 
le  dep«\l  de  la  ;:uerre  en  IH-JV.  le 
^rand  ifini  ilrC h.iiYi>tr  rttir  ht  .Syrie 
en  .'>3  fr-.  ■'•  V  t  l.jie  avec  la  Drsrrip- 
lion  dr  ar  ordre  du  gouver- 

nement .  im  <i>  ' nuire  *ur  la  construc- 
tion de  cet  atla«  ,  un  antre  sur  la 
sopei6rie  del'K^vpte;  enfin  \à  rurte 
trh'tfuiarir  en  H  feuilles  qu'il  devait 
•  r  par  une  plus  parfaite  en  20 

J        !< 

.IA<:OTOT    I  né  à  l)i. 

|on  en  l?.*».'),  étu  i   la  théo« 

lo^ie  ;  mais  ,  ne  se  sentant  pas  de 
vocation  pour  l'état  ercle»ixNtique  ,  il 
dirigea  se-v  vues  ^ers  la  carrière  de 
rensei;::nemenl.  A  l'époque  de  l'or- 
;.in  -jiion  de  l'h^ole  polytechnique, 
apprire  alors  eco!e  centrale  des  tra- 
vaux publics  ( 'i6  nov.  I7î*i)  ,  il  en 
fut  nommé   )   '  >    e.  Il   était  en 

mrmr  trmp^  u  conseil  d'ad- 

:ii. tuteur  pour  l'ad- 
.  Le  *2()  avril  de 
I  aniire  suivante,  désirant  retourner 
dans  sa  ville  natale,  il  donna  sa  démis- 
sion. Successivement  professeur  de 
phvsique,  de  chimie,  de  mathématiques 
et  d'astronomie  à  l'école  centrale,  puis 
au  hcée  de  Dijon,  où  il  faisait  des 
cours  publics  auxquels  les  dames  se 
pressaient  pour  l'entendre,  il  devint 
plus  tard  proviseur  de  ce  Ivcée,  et  fut 
enfin  nomme  recteur  de  l'académie  en 
en  ix(>9;  mai>  les  événements  politi- 
quei.de  lHir>  lui  firent  perdre  sa  pla- 
ce [V .  Celte  mesure  fut  vivement  cri- 
tiquée dans  le  temps,  car  P.  Jacotot , 

(i  Un  neh#prticolirrrJ*  Pion  l'en  ëedoiB- 
iBafc^  ra  l'iiMliluant  brnuer  da  tou  M*  bien». 
prodaiMiil   »S  à  3o.ooo  fr.  d«  reTeniu. 


x6 


JA.C 


aussi  remarquable  par  son  immense  sa- 
voir que  par  sa  douceur  et  sou  urba- 
nité, avait  rendu  de  j^rands  serNices  a 
Dijon,  en  y  fondant  un  cabinet  de  phy- 
sique et  de  chimie,  ainsi  qu'un  obser- 
vatoire d'astronomie.  Il  mourut  dans 
cette  ville  le  14  juillet  1821,  j;i''nérale- 
ment  regretté  ;  les  étudiants  de  Tacadé- 
niie  assistèrent  à  ses  funérailles.  On  a  de 
lui  un  Cours  de  jjliysique  expérimen- 
tale et  de  chimie,  a  f  usage  des  écoles 
centrales,  et  spécialement  de  l'école 
centrale  de  la  Côle-d'Or,  Paris  , 
1801,  2  vol.  in-8°,  et  atlas,  m-4''  de 
61  pi.  Il  en  donna  une  seconde  édi- 
tion ,  totalement  refondue  et  aug- 
mentée de  plus  d'un  tiers,  sous  ce 
litre  :  Éléments  de  physique  expéri- 
mentale, de  chimie  et  de  minéralo- 
gie, suii^isd'un  uhrégé  lï  astronomie, 
à  l'usage  des  lycées  et  autres  éta- 
hlissements  d'instruction  publique , 
Paris,  1805,  2vol.  in-8^  et  atlas 
in-4"  de  73  pi.  V Abeille,  tom.  IV, 
pa^.  71  ,  contient  une  notice  sur 
P.'jacolot.  D— z— s. 

J  A  COTO  T  (Joseph),  cousin 
du  précédent,  s'est  rendu  célèbre  par 
une  mélhode  qui  a  reçu  de  lui  le  nom 
è^ Enseignement  universel  ei  d'éman- 
cipation intellectuelle ,  méthode  qui 
a  excité  de  vives  controverses  et  que 
ses  admirateurs  croient  destinée  à  ame- 
ner une  révolution  dans  l'enseigne- 
ment. Né  à  Dijon,  le  4  mars  1770, 
de  Henri  Jacoiot,  d'abord  boucher  et 
ensuite  teneur  de  livres  de  son  beau- 
père  Joseph  Tardy,  njaître  chaipen- 
tier  ,  le  jeune  Jacotot  fut  placé  à  l'à^e 
de  neuf  ans  au  collèf^e  de  sa  ville  na- 
tale ,  par  !iOn  ^raiid-pcre  maternel 
qui  se  charj;ea  de  tous  les  frais  de  son 
éducation.  Dès  sa  plus  tendre  enfance, 
il  se  fit  distinf^uer  par  un  désir  insatia- 
ble de  savoir,  et  surtout  par  une  vo- 
lonté forte  à  laquelle  il  dut  la  supério- 
rité qu'il  ne  tarda  pas  à  obtenir  sur  la 
plupart  de  ses  condisciples.  Ce  fui  sous 


JAC 

l'abbé  Bertrand ,  connu  par  ses  tra- 
vaux sur  les  aérostats  (f^oj.  Ber- 
trand, LVlll,  104),  qu'il  étudia  les 
mathématiques.  Sorti  du  collège,  troi- 
sième insit^ne  en  rhétorique,  à  l'à^e  de 
quatorze  ans,  Jacotnt  continua  ses  étu- 
des aidé  des  conseils  de  son  cousin 
[J^oy.  l'article  précédent)  qui  lui  servit 
toujours  de  père.  Il  obtint  à  dix-neuf 
ans  la  chaire  d'humanités  au  collèj>e 
de  Dijon ,  suivit  simultanément  des 
cours  de  droit  et  se  fit  recevoir  avocat. 
Il  embrassa  avec  ardeur  les  principes 
de  la  révolution  ,  et  figura  dans  la  so- 
ciété populaire  de  Dijon.  Il  exerçait 
encore  les  fonctions  de  professeur  d'hu- 
manités ,  lorsque,  en  1791 ,  il  aban- 
donna ses  paisibles  occupations  et  s'en- 
rôla dans  un  bataillon  de  la  Côte- 
d'Or,  où  ses  talents  le  firent  nommer 
par  ses  camarades  capitaine  de  l'ar- 
tillerie. Ce  fut  en  celte  qualité  qu'il  ser- 
vit à  l'armée  commandée  par  Dumou- 
ricz,  qu'il  se  trouva  aux  sièges  de  Va- 
lencienues  et  de  Lyon,  et  qu'il  prit  une 
part  active  à  diverses  affaires,  entre  au- 
tres à  celles  de  la  Montafi;ne-de-Fer  près 
Louvain  et  de  Pellemberg.  Au  mois  de 
nov.  1793  ,  les  ministres  des  contri- 
butions et  de  la  guerre  lui  donnèrent 
l'ordre  de  se  rendre  à  Paris ,  où  il  fut 
placé  dans  le  bureau  central  de  la  ré- 
gie des  poudres  et  salpêtres.  L'année 
suirante  (août  1794),  il  était  se- 
crétaire de  Pille  ,  commissaire  de 
l'organisation  et  des  mouvemenis  des 
armées  de  terre;  et  il  n'avait  pas 
encore  alleint  vingt- cinq  ans  lorsqu'il 
fut  nommé  substitut  du  directeur  des 
études  de  l'école  ceritr.'ile  des  travaux 
publics,  appelée  depuis  Ecole  poh  tech- 
nique. ^Fitré  dans  cet  établissement 
le  l'^'^  déc.  1794,  Jacotot  remplis- 
sait depuis  six  mois  les  fonctions  de 
substitut,  lorsqu'il  crut  devoir  donner 
sa  démission  le  29  mal  179.5.  Le  con- 
seil d'instruction  de  l'école  ,•  où  l'on 
voyait  figurer  les  hommes  les  plus  il- 


JAC 

l«  »«  if ncfN,  If  1*  que  Mon 
f«,  VMMfurliii,  Vron\ ,  fie,  ii'a>ant  pu 
iairr  changer  sa  détrrmination,  fxpri- 
nu,  par  un  \o!r  «pfcial ,  l«  rej;rels 
qu'il  éprouvait  df  \t  voir  »*rloif;ner. 
Jarolot  iif  sVlail  tlrcitlë  à  quillcr  l'K- 
co\e  |»ol^lfrhniqiir  qu'après  avoii  ap- 
pri»  que  le  jur^  li'in^lrurhon  publique 
leiiail  lit"  \r  nnmmrr  piofi*%srur  ilr  lo- 
•.M.jijr  rt  il'.iii.iKvf  »lr»  4rll^JtlOll9  ri  t!r> 
i.;.r>  .1  I  j  pr  riiurre  cfolc  rrnirale  tir  l)i 
M»ii.  Kn  17îM»  il  occupai!  Jam  la  nèroe 
rrole  la  cliaire  Je^  lan^uri  anciennes, 
h  jiiiiliahséavec  presque  \ou\  les^enrr» 
(le  G|pnai»vances,  Jacnlol  elail  propre  à 
tout  enseigner;  dès  lors  ou  l'appelait 
partout  où  il  fallait  or;;aniser  une  cliaire 
nouvelle,  ou  donnera  d'ancirnries  élu- 
ilc>  unr  dircflion  meilleuie.  Ce  fut  ainsi 
(ju'ru  l'an  \ll  (18()!ïj  il  passa  de  la 
«  '  I  ••  des  langues  anriennrs  à  celle  t\r 
r  rinatiqurs  Iramtendanirs  du  h- 
..,  ,i,-  I)  n  qu'en  iSfMi  on  le 
iMMi.iu.i  pi..',  cur  «iupplr.iiil  a  l'école 
«le  droit  ,  et  en  IHt)*».  profrsNfur  de 
mailirroaliques  pures  a  la  faci.llr  des 
^ciences.  I^  même  année  ,  il  obtint 
le  r,!ade  de  docteur  e^cienccs  :  il  était 
df|.i  docteur  ès-lettre*  et  docteur  en 
droit.  Ix)r^ae  les  Autrichiens  occupè- 
irnt  Dijon,  en  ISI  V,  .lacotot,  natu- 
iclirment  frondeur  rt  caustique,  dont 
lc>  idées  libérales  étaient  connues  et 
qui  passait  pour  exercer  beaucoup 
li'iiilluence  sur  la  population  ,  fut  en- 
lc\c  par  eut  pour  servir  d'ota-e. 
Kendu  peu  .iprés  à  la  liberté,  il  re- 
Mnl  à  Di|oii  ,  où  ,  pendant  1rs  cent- 
jours  de  1813  ,  ses  compatriotes  l'é- 
lurent député  à  la  chambre  des  re- 
présentants. Il  réussit  à  faire  échouer 
es  amis  au  collé{;e  d'arrondissement  ; 
mais  ils  courureql  le  laire  nnmmr--  au 
collè>;e  de  d»-partcment,  ou  il  ne  poci- 
vail  entrer.  Klu  ainsi  maljjre  lui  à 
une  grande  majorité  ,  Jaroîot  consi- 
déia  celle  persévérance  Je  volonté 
comme    un    ordre     auquel    il    devait 


JAC 


»7 


obéir.  11  accepta  en  disant  aax  éler- 
tetirs  :  •«  .le  n'approuve  pas  voire 
m  choix,  mais  puisque  vous  l'avez  vo:ilu 
m  fti  obstinément,  je  le  veux  aavsi,  et 
m  ne  puis  maintenant  que  vous  féliciter 
m  de  l'éiiergir  et  de  l'inllexibilité  de 
M  votre  vouloir,  l'uissent  rtre  ainsi 
••  xoul-jes  toute*  les  représrnialion.s 
••  nationales  !  ••  Jacolol  prit  une 
patt  active  aux  débats  de  la  rham- 
biedrs  représenlatil-  Il  fil  adopter  le 
20  juin  la  II  il'unr  commis- 

sion ,   pour   I  •-:     les    constitu- 

tions françaises  dans  un  seul  et  inrme 
cadre.  CJiar^é  avec  quelqurs  autres 
de  rédiger  unç  adrev^e  au  peuple  fran- 
çaiH,  il  déclara,  le  2*J  du  même  mois , 
an  «^and  élonnement  de  se^  collr;;ues, 

3u'il  n'avait  eu  aucune  conna.ssance 
u  projet  que  ManurI  présentait  au 
ii<<ni  de  la  comm1^Mon  dont  il  était 
r.ij'porteur.  •«  Je  ni"  serais  tu  ,  ajouta 
«  Jarol«>t ,  si  ce  pri»jet  n'eût  été  tive- 
«  ment  attaqué  n  Deux  jours  après , 
ce  f-jt   lui  «j  ta  la   commis- 

sion, et  «a  M  t  adoptée  a  l'u- 

nanimile.  Comme  dans  toutes  les  cir- 
conslanrrs  il  s'rtait  prononcé  avec 
beaucoup  de  violence  contre  les  ?ionr- 
bons ,  il  crut  devoii  quitter  la  France 
a\ec  sa  famille,  lors  de  la  dissolution  de 
celle  assemblée,  et  se  relira  voloiilai- 
renieiil  à  Kruxelles.  Il  v  vécut  dans 
I  intimité  de  plusieurs  roii\entionne|s, 
et  chercha  dans  le  prnd-j;!  de  «jticl- 
ques  leçons  à  éc»)nomlsrr  \c^  faibles  res- 
>ources  qui  formaient  toute  sa  fortune. 
Les  premières  ne  lui  furent  pa\ccs 
qu'a  raison  d'un  demi-franc  ;  mats 
on  lui  proposa,  en  1S18,  la  chaire 
de  littérature  françai.se  à  l'uiiiverité  de 
lx)uvain.  Klle  avait  été  olTerlc  d'i- 
bujd  à  l'académicien  Arnaiill  qui  fa 
refusa  en  dé>i;;nant  Jacotot  comme 
valant  heauroup  mieux  que  lui. 
Dès-lois  celui-ci  se  dévoua  tout  en- 
tier à  ses  élèves  avec  un  zèle  et  un 
désintéressement   au  -  dessus  de  tout 


LXv  iif. 


i8 


JAC 


l 


éloge.  On  accourait  en  foule  à  ses  le- 
çons, qu'il  savait  rendre  aussi  instruc- 
tives que  piquantes,  et  auxquelles  il  ad- 
meltait  indistinctement  tout  le  inonde 
sans    exiger   la    moindre   rétribution. 
Mais  11  ne  savait   pas  le  hollandais  , 
et  les  trois  quarts   de  son  auditoire 
ne   comprenaient  pas  le  français.  En 
réfléchissant  aux    moyens   de  vaincre 
cette  difBcuhé  ,  le  hasard  offrit  à  ses 
yeux  une  traduction  hollandaise  du  Té- 
lémaque  de  Fénelon.  Il  mit  ce  livre  en- 
tre les  mains  de  ses  élèves  en  leur  fai- 
sant dire  ,  par  un   de  leurs  camarades 
ui  lui  servait  d'interorète,  ^l'appren- 
re  par  cœur  le  français  de  ce  livre,  et 
de  s'aider,  pour  le  comprendre,  de  la 
traduction  hollandaise  en  regard.  Il  les 
invita  ensuite  à  répéter  sans  cesse  ce 
qu'ils   auraient    appris    pour    ne   pas 
1  oublier,  à  lire  le  reste  pour  le  racon- 
ter, en  ayant  soin  de  le  rappoiter  au 
petit  nombre  de  pages  qu'ils  savaient 
imperturbablement ,  puis  il  les  engagea 
à  écrire    ce   qu'ils  pensaient  de  tout 
cela.    Quelle   ne    fut  pas  sa  surprise 
quand  il  vit  que,   sans  qu'il  leur  eût 
rien  expliqué,  les  élèves  mettaient  l'or- 
thographe et  suivaient  les  règles  de  la 
grammaire  à  mesure  que  le  livre  leur 
devenait    familier    par   la   répétition  , 
et  enûn  qu'en  Irès-peu  de  temps  ces 
étrangers  écrivaient  purement  le  fran- 
çais !  Jacotot  en  conclut  que  les  maî- 
tres explicateurs  n'étalent  pas   indis- 
ftensables  ;    et    quand    il  eut  appliqué 
a  même  méthode  à  l'écriture  ,  au  des- 
sin, à  la  peinture,  aux  mathématiques, 
à  l'hébreu  ,  à  l'arabe,  etc.,  et  que  ses 
expériences  eurent  réussi ,  il  s'aperçut 
qu'on  pouvait  V^ut  enseigner  aux  au- 
tres, même  ce  qu'on  ne  connaissait  pas 
soi-même.   La  méthode  fut  trouvée,  et 
Jacotot  lui  donna,  le  15  ocl.  1S18,  le 
nom  à' Enseignement  uniifersel.  Ap- 
prendre, rèpèler  et  comparer  à  une 
seule  et  mêmecliose^  sont  les  trois 
principes  qui  lui  servent  de  fondement. 


JAC 

Apprenez  un  Ihre   et  rapportez-y 
tous  les  autres  ,  c'est  là   toute   ma 
méihode  ,    dit  Jacotot.    Les  heureu- 
ses applications   qu'il    en  fit  à   Lou- 
vain,  où  plusieurs  institutions  de  gar- 
çons  et  de  filles  avaient  été  étabhes 
d'après   son    mode    d'enseignement , 
attirèrent  l'attention  du  roi  des  Pays- 
Bas.    D'après  ses   ordres,    l'adminis- 
trateur de  l'instruction  publique   in- 
vita ,   le   6  juillet  1826,   un  savant 
hollandais,   M.    Kinker ,    professeur 
à  Liège  ,  à   examiner   la  méthode  de  ^ 
V enseignement  unii>ersel  dans  les  éco- 
les établies  à  Louvain  sous  la  dlrç^tion 
particulière  de  Jacotot ,  pour  être  en  état 
de  présenter  au  département  de  l'inté- 
rieur un  rapport  détaillé  et  motivé  sur 
la  nouveauté,  la  nature  et  la  tendance 
de  cette  méthode.  Il  fut  également  pres- 
crit à  M.  Kinker  de  spécifier  ce  qu'il 
pourrait  y  avoir  de  bon  ou  de  défec- 
tueux dans  le  nouvel  enseignement,  et 
d'indiquer   les  branches  d'instruction 
auxquelles  on  pourrait  le  mieux  l'ap- 
pliquer. M.  Kinker,   après  avoir  exa- 
mnié  la  nouvelle  méthode  avec  l'at- 
tention la  plus  Hicrupuleuse,   ce  sont 
les  termes  dont  il  se  sert,  dans  les  éco- 
les mêmes  dirigées  d'après  ïenseigne- 
ment  universel)  àéclârâ ,  dans  son  mé- 
moire du  26  sept.  1826,  qu'elle  était, 
sous  tous  les   rapports ,   digne    des 
recherches  ultérieures  des  savants,  aux- 
quels  leur  impartialité  et  leurs    vues 
élevées  donnent  le  droit  de  juger  une 
expérience  nouvelle  faite  sur  l'esprit 
humain.  Elle   lui    parut    plus  propre 
que  toute  autre  à  faire  faire  aux  élèves,  en 
un   espace  de  temps  bien  plus  court 
que  celui  que  Von  emploie  ordinaire- 
ment dans  la  plupart  des  objets  des 
connaissances  humaines,  des  progrès 
frappants  et  qui  paraîtraient  tenir 
du  prodige,  si  la  nature  même  de  cet 
enseignement  n'expliquaitcelte  marche 
rapide.  M.  Kinker  reconnut  que  la  dé- 
nomination d'enseignement  universel 


I 


JAC 


JAC 


lii  appartenait  incontf^taMfment  . 
puis</u'rlir  potuHiit  s' 
toutes  lr%  l>rutuhe%  iJ' 
suncrs  humtiinrs,  m  fmfUan!  I  opi« 
nion  qu'une  dénominiitou  qui  fipri- 
ner^it  re  qar  Irt  (irrc)  noromaifnt 
auto^h'JtfTi.1  •  rusn^utntrnt  qu'où  ie 
donne  a  soi-même^  rn  frrait  niiem 
Cftnnaitre  le  rararlèrr  di>ltnclir.  \je 
mailfc  de  ren^e^nrinriil  univer%el 
^*r^t  en   riïe!  <)   '  '»•  qui  montre 

à  I  rle^e  Ir   fin  ilnit    suivre; 

c'e^t  à  fflui n  à  iniir»  Iter  srul.rt  à  sr 
rrniirr  lui  tnètnr  AwAi/r  dan»  la  bran- 
rlir  qu'il  rulii\e,  en  regardant,  en 
refleihisumt,  et  surtout  en  répétant 
$ans  cesse  ce  qu'il  a  drrrwnert  et 
trouve  ptir  ses  propres  efurts  dans  la 
science  a  laquelle  il  s'est  voué,  et  en 
comparant  ce  qu'il  veut  apprendre  à 
ce  qu'il  Mit  d)-)i.  La  mrtlinde  dr  Vrn 
seignenunl  utn\'rrset,  ri  Jarntot  ntn 
a  jamais  divon^enu ,  n'e«l  pa«  entière- 
ment neiwe  il),  ma.s  re  qui  doit  la 
faire  prrfrrer  au&  autres,  crsi  que.  dans 
ces  deinieirs,  finstrurtinn  t/r  sui 
même  n'e^t  qu'arcevsoire,  cl  souvent 
purement  accidentelle  ,  tandis  qu'elle 
constitue  au  contraire  le  caractère  prin- 
cipal de  l'en^ri^nement  universel. 
Quant  à  la  tendance  de  cette  mé- 
thode, elle  consiste  surtout  en  ce  que 
le^  elr\es  se  forment  une  idée  claire 
de  ranalo;:ie  ,  plus  facile  à  sentir  qu'i 
expliquer,  qu'il  v  a  entre  les  diflrrcntes 
branche^  de>  cuiinais>anrrs  Immaines  , 
de  mrrac  qu'entre  \rs  diffrientes  modi- 
fications que  subit  l'enseignement  dans 
ces  diverses  brandie-*.  Comme  il  est  im- 
portant dans  son  apprécialinn  de  faire 
attention  à  la  manière  d'en  introduire 
l'usage,  il  esl  à  craindre,  dit  encore  le 
rapporteur,  qu'on  ne  trouve  pas  beau- 
coup d'instituteurs  qui  sachent  l'appli- 
quer aussi   bien  que  M.   Jacolot,  qui 

(i)  «  L'emrico«"ii»«-nl  uoiirr^l  u'rtt  pa*  moc 
•oavuaie  .  •  dit  Jacotnt  ^Ltmgm*  matemtdi», 
Louvaio,  3*  édilioo,  p.  79). 


jo«nnent  comme  luii  de»  connaissances 
ides  cl  xaréf*.  et  au  ta'ent  de 
j  irer  dr  I4  ronfianre  de»  élevés  en 
leui  inspirant  dr  la  cnnfiance  en  eux- 
mémrK,  celui  dr  leur  adres^ser  les  qoe»- 
lions  exploratrices  convenables,  de  ne 
jamais  deiaiwer  leur  ju;;eraenl,  et  de 
•'occuper  enfin  plul(\t  à  <^cartrr  les  ob- 
stacles et  a  faire  éviter  les  écurils  qu'à 
montrer  la  route.  Toutes  les  methodrs 
.'  '  rllrment  de 

I  <  ar  ,dan^  ces 

r  ne  et  inter- 

j  _  '  .Ir^  de  Tari 

ou  de  ia  •<  tandis 

que  dans  I  .        ^  srI  ai 

contraire,  le  maître,  pénétré  de  la  mé- 
thode d'apprendre  par  soi-même,  ne 
doit  être  considéré  que  comme  un  rom- 
pa;;non  de  «ova^e  qui  fait  le  chemin 
avec  l'élese,  attire  son  attention  sur 
chaque  root,  sur  chaque  •->llabe,  sur 
chaque  Irtire  dont  une  phrase  e^t  com- 
posée; lui  fait  trous er  des  rapprnrhe- 
mrnts,  Ir  force  de  repéter  «^n»  cesse  et 
t'  de   «a   mémoire  (2).  On 

I  utétre  reprocher  ï  la  mé- 

thode. a)oi]le  M.  Kinler,  de  trop  exi- 
ger de  l'attention  et  de  la  mémoire ,  et 
critiquer  les  efforts  qu'on  fait  pour  ob- 
tenir des  résultats  rapidrs  qui  ne  se- 
raient pas  toujours  durables,  ijUtn'tpt'on 
puisse  plutôt  applitjuer  lette  critique 
a  Cahus  rt  a  Iriagrration  de  la  nir- 
t/iude  ipi'ii  la  méthode  ellr-mèmr. 
H  conclut   enfin,    de   ces   rrilexions , 

3  lie  y  enseignement  uni^^ersel  s'alliera 
ifliciienirrit  avec  les  autres  methodrs 
qui  procèdent  en  sens  inserse.  l'our 
le  faire  prospérer,  pour  en  connaître 
mieux  la  nature,  la  tendance,  Va- 
*tiiritage  durable  et  la  juste  valeur, 
il  conviendra  de    l'isoler  des    inslitu- 


{%•)  On  p..«rr.it  •»priii.*r  crli»-  diffAr^n*» 
d'Mn#  »UTr  tnart^fp  rn  diMnt  :  jifprindrt  et 
r^tantr  .il. on    ri     1'     c  mpar-'i»©!», 

TOlli    .  un.r*'<fl  :  •pprtudr*    et    Ml - 

^l,f,    (,  .Mclioairc  dcf  collcfet  cl 

de  la  plui'jr-. 


ao 


JAC 


JAC 


lions  d'instruction  inférieure  el  njo)  en- 
ne  déjà  existantes,  et  de  l'inlroduire  sé- 
parément, en  énc;eant,  par  exemple,  un 
institut,  qui  serait  en  même  temps  une 
école  normale  pour  de  jeunes  maîtres, 
et  une  école  pour  des  élèves  ordinaires, 
où  l'on  s'appliquerait  à  maintenir  l'en- 
seignement universel  non  mélangé,  pur 
et  sans  communication  avec  les  autres 
modes.  A  peine  le  rapport  de  M.  Kin- 
ker  eut-il  été  mis  sous  les  yeux  du  roi 
que  ce  souverain,  qui  avait  déjà  décoré 
Jacotot  de  l'ordre  du  Lion  des  Pays- 
Bas,  lui  fit  écrire  par  l'administrateur 
de   l'instruction    publique   (11   nov.), 
pour  savoir  quelle  serait  la  voie  la  plus 
facile  et  la  moins   dispendieuse  d'ap- 
pliquer sa  méthode  d'enseignement  à 
une  étude  plus  générale  de  la  langue 
hollandaise  dans  les  provinces  wallon- 
nes, et  de  quelle  manière  il  pourrait 
coopérer  à  établir  cet  enseignement  et 
en  diriger  la  marche.  Quelques  lettres 
avaient  déjà  été  échangées   entre  cet 
administrateur  et  Jacotot;     et  celui- 
ci  avait  fait  connaître  qu'il  devrait  être 
spécialement  chargé  d'organiser  l'ensei- 
gnement d'après   sa  méthode  sans  au- 
cune espèce  d'intervention  étrangère, 
qu'il  était  au  surplus  aux  ordres  du  roi, 
lorsque  le  1*^*^  mars  1827,  le  prince 
Frédéric  ,   commissaire-général   de  la 
guerre,  lui  écrivit  au  sujet  d'une   école 
normale  d'instructeurs,  à  établira  Lou- 
vain  d'après  sa    méthode,   et   dont  il 
le  priait  de  surveiller   les   opérations. 
A)ant  accepté  cette  tâche,  Jacotot  .se 
mit  à  l'oeuvre,  et  bientôt,  malgré  tou- 
tes les   entraves   que  les    nombreux  et 
puissants  partisans  des  anciennes  mé- 
thodes lui  suscitaient,  il  réussit  si  com- 
plètement  {\\x  après  deux  mois  eiwi- 
ron  (renseignement,  il  put  mander  au 
roi,  le  22  mai,  que  les  ojfu.iers  ries  di- 
vers corps  de  F  armée  réunis  en  école 
normale   à  Louvain    étaient   suffi- 
sammrnt  instruits.  Il  fit,  le  14 juin 
suivant,   la  même  communication   au 


prince  Frédéric,  qui  s'était  déclaré  le 
protecteur  de  V enseignement  wmersel 
et  de  son  fondateur,   en    lui   mandant 
que  désormais  toute  prolongation  serait 
inutilement   dispendieuse.    Cependant 
comme  ces  officiers  exprimèrent  le  plus 
vif  désir  de  continuer  leurs  études  d'a- 
près la  méthode  appliquée  à  la  fortifi- 
cation passagère  et  permanente,  à 
r histoire  ,  à   la  géographie  ,    aux 
sciences  physiques,  aux  langues  et 
aux  mathématiques^  Jacotot,  sur  la 
demande  du  prince  Frédéric  (26  juin 
1827),. approuvée  par  le  roi,  consentit 
à  donner  encore  ses   soins  à  l'école 
normale,  en  déclinant  toute  espèce  de 
responsabilité,  si   l'on  introduisait  en        Û 
quoi  que  ce  soit  l'ancienne  méthode.        ^ 
l)ès  le  8  du  même  mois  ,  il  annonça 
au  prince    que   les  soldats    wallons , 
dont  le  gouvernement  lui  avait  confié 
l'instruction,   savaient  lire,  écrire  et 
compter,   et  commençaient  à  appren- 
dre le  hollandais.  Le  12  juillet  ,   il 
adressa  au  roi  des  Pays-Bas,  d'après 
le  conseil  du  prince    Frédéric ,  un 
mémoire  communiqué  préalablement  à 
ce  prince  qui  y  retrouvait /ùw/c/«  doc- 
trine du  savant  dijonnais,  à  Uégurd 
de   la   méthode   de    l'enseignement 
universel ,   exposée   sans  feinte   ni 
réticence   aucune ,   avec  franchise 
et    abandon.    Jacotot    y    proposait 
les   moyens   d'établir   Venseigncmcnt 
unii'crsel   dans    le   royaume;  mais  il 
ne  voulait  se   charger  de  la   direction 
ou  plutôt  de  l'inspection   (]ue  sous   la 
condition  <pL  il  n  aurait  d'autres  in- 
termédiaires entre  la  puissance  et 
lui    fjue    ceux     (pi  il    indic^uerait  , 
qu'on   ferait  tout  ce  qu'il  dirait  , 
et    rien    que    ce  qu'il  dirait.    Du 
reste,  il   ne  demandait  pour  lui  per- 
sonnellement,    ni  titre  ^  ni  argent, 
et  désirait  être  considéré,  non   comme 
un  fonctionnaire  qu'on  emploie,   mais 
comme  \\\\ phih)sophe  qu'on  croit  avoir 
besoin  de  consulter.  Enfin ,  il  deman- 


JAC 

tbit  ronfuifice  entih-e  twer  responui- 
hilitr,  ou  M  l'on  ne  voulait  que  l'cvsa^er 
il  promrllait  uirisiunce  fMtsswf,  mais 
sans  rtre  respunsaUe.  Mjl^r^  loole 
la  protrclion  de  la  famille  ro>ale,  on 
ne  revvait  de  lui  susciter  des  entraves. 
Alorrt,  ne  voulant  point  que  l'on    pill 
dire  que  l'esvai  tente  par  le  roi  de«  l'ai  s- 
Rat  n'a>ait  pas  réuvsi,    il    rrul  devoir 
faire   re  qu'il    appela   un   nmp  d'rtat 
dans  sou  prlit  empire,   à  l'ocraMon  de 
rinslallatiun     de   l'école   noimale    de 
Lnuvain  ,    qui    eut    lieu    le    17   oct. 
1827    II  v    prononça  un  discours    \é- 
hénent   dani  lequel    il  attaquait  tant 
aocone  espèce  de  mena;^ement  s^s  ad- 
Tersaires ,  en  rappelant  arec  amertume 
les  obstacles  nombreux   qu  il  lencon- 
trait.  I>e  1  V  f^\iier  de  l'annre  Nuisante 
(lHâ8),    il  expo&a  au  prince    les   Ira- 
CMMries  qu'on  faisait  subir  a  l'rcole  des 
Cxlels  auxquels  on  refusait  les  instru- 
ments qui  leur  étaient  nécessaires  ou  qui 
n'ea  recevaient  que  d'incomplets,  el  le 
99  èm  màmt  mois,   il   écrivit  au   roi 
loi-Même  qu'il   avait  souvent  dit  ï  sa 
Majesté  yu'iV  rtoit  imfHissihU  (tria- 
Uir  renseignement    um%*ersei   dans 
tordre  social,  à  cause  des  ftrr juges 
et   des  intérêts    opposes.  Il  déclara 
en  même  temps  qu'il   devait  ie  retirer 
et  qu'il  se  retirait  avec  respect  ,   bien 
qu'il    restât    toujours    aux    ordres   du 
souverain,  si  jaraaiî;  S.  M.  crovait  que 
le    moment  fût  \enu   d'écarter   a^Hjnt 
tout  les   conseillers  de  la  vieille   mé- 
tbode  pour  faire  jouir  ses    peuples   de 
V enseignement  uni^'er sel .  On  ne  voit 
pas  que  depuis  celte  époque  Jacotut  ait 
entretenu  'le  cor-espondance  soit  avec 
le  prince  rwal,    soit    avec    le  toi  des 
Pays-Bas,  nî  qu'il  ail  été  char -é  de   la 
surveillance  d'auc-an  établissem^t  d'in- 
struction publique.  Vendant   les  deux 
années  qu'il  resta  encore  à   I^uvain, 
il  continua  de  donner  ies  conseils  aux 
élèves     des    institutions     qui    avaient 
adopté  sa  mëlhoJc  ;  et,  njalcrré  la  dé- 


JAC 


%t 


faveur  attachée  i  ce  titre  auprè* 
des  rxaintnaieurs  officiels ,  un  {;iand 
nombre  obtint  eut  de  biillant*  succès 
dans  les  examens  publics  qu'ils  eurent 
à  soutenir.  Il  ne  se  pa^sait  pas  de  jour 
que  Jacolot  ne  reçût  h  >isile  des 
hommes  les  plus  di^liii;;iiéN,  non  seu- 
lement du  royaume  drs  l'a>s  Ua-.  et  de 
Kraure  ,  mais  encore  d*.\llfina«^ne  , 
d'An>;le!erre,  et  mrine  de  Hussie  et 
des  ktals-lnis  d'Anirrique.  Presque 
"tous  rentraient  dans  letir  patrie  enthou- 
siasmes de  la  méthode  et  de  son  fon- 
dateur (3V  Vivement  attaqué,  tourné 
en  ridicule  dans  quelques  journaux 
et  dans  des  écrits  publiés  par  des 
personnes  envers  lesquelles  il  s'était 
montrr  Irès-commumcatif,  Jacotot  n  a 
jamais  \oulu  repondre  aux  critiques, 
mais  il  était  devenu  extirmeroent  sus- 
ceptible. Cette  susceptibilité  disparais- 
sait néanmoins  quanti  il  t'apercesait 
qu'on  désirait  vrntablement  connaî- 
tre sa  méthode  et  les  meilleurs  moyens 
de    l'appliquer    il    l'enseignement.     Il 


11 

1 


•••'".  •'-■    r— -•      I —    '--■-    - 

Ui     xrtvait     I»    Il     <«*rirr     1*19      ■  t«    ••»- 
.  phr.i*  4*«  M'.vrM     ••!    I«    coaikH    d«  l'art 

,     '  ■         V  •    "r»;  ro««  »rtt  .  »r--n- 

•■  |»o«r  l«»   cb.  >'  • 

■    :    inti    ripr'K       .  Ij 

•  r,t   !•  p  «1»  r-»- 

rt    liu    t'm- 

,  >  rjf"*'"  •■'   '' 

4  ).;ut  u..."i  »u  i.iuiut»  ....    1  ' 

■  qu-  U  »««-,rir  vont  d««H  |>niiA«t 

■  t»fu%   rrt  lU-i*   ft  bMt.>r«ra   à  , 

•  Dom.  •  M.  Kro«i»i«r^  fjit  un  «'t.ne    »■ 

lii«    a«  c*U*    MclWoJ*.     quM    •«'Il     • 
p«iMlanl  ton  fjoar  »    |.»o»-mi.    tl*n»  m,j   !■-  , 

^ft    «  /•    fottt    4*1     arlVWfj    d*    l'*n$  ,    «n 

il    n!^  «if-r     .n.illilud»     lU    f«i'«    k    l'appoi   it« 
l  .  ru  fjrrur  «U  Jatolul   •id" 

,  i.roi.  M.  l'.andouin.   j»o<al 


!«'<  rap|.  .  i  »  -r  U  u..  •I...J1  ^  e  i  r  .  ".  ""''^ 
mmf*ri*t  «lu  |l  lr"u»«  •«liuiraUlc  pjr  »•»  »'  "'*  ' " 
<.l#.  qui  nalirrga  r-**  ••««<«"•"'  Ir  trmp»  d« 
i-,  ,,irucu..«.  ma»  fouro.l  au  ,.."»rc  le  mojM 
u.nun.>n.U,^m.,*nf  ..  rtc  MM.  de  l-*.l'yne. 
<  lemrol  D.»orn.e..  Bo..t«r.  elc  .  •  aocortienl 
d.u»  leur  «,..n.ou  en  fateur  du  mode  d.ii.e.- 
gurmeut  de  Jacwtot. 


23 


JAC 


JAC 


montrait  alors  une  extrême  bonho- 
mie ,  souffrait  sans  impatience  les 
contradictions,  et  s'empressait  de  ré- 
soudre les  difficultés  qu'on  lui  sou- 
mettait. Le  9  août  1830,  il  quitta 
pour  toujours  la  Bel}:;ique  et  se  rendit 
à  Paris.  C'est  là  que  nous  avons  eu 
l'avantage  de  le  voir  et  de  nous  en- 
tretenir avec  lui  sur  la  méthode  de 
V enseignement  universel ,  dont  nous 
avions  déjà  pris  une  idée  dans  les  ou- 
vrages du  fondateur,  dans  ceux  de  ses' 
partisans  et  de  ses  adversaires,  et  en 
visitant  les  institutions  où  celte  métho- 
de est  suivie.  Nous  bornant  en  général 
au  rôle  de  rapporteur,  dans  l'aperçu 
que  nous  en  avons  donné  il  y  a  dix 
ans  (4)  ,  nous  reconnaissions  cepen- 
dant avec  M.  Duiiveau,  l'un  des  ad- 
versaires les  plus  prononcés  et  les 
plus  habiles  ^e  V enseignement  uni- 
versel ,  «  qu'en  adoptant  pour  l'in- 
«  struction  de  la  jeunesse  des  métho- 
«  des  radicalement  nouvelles,  on  a 
«<  toujours  contre  soi  une  masse  énor- 
<f  me  de  probabilités  (5).  »  Mais  nous 
ajoutions,  et  sur  ce  point  nous  étions 
d'accord  avec  M.  Kinker,  «  que  sans 
détruire  de  fond  en  comble  l'ancien 
mode  d'enseignement  qui  a  pour  lui 
l'expérience  et  la  sanction  des  âges, 
et  sans  faire  table  rase  pour  con- 
struire à  la  place  un  édifice  tout  nou- 
veau ,  un  gouvernement  sage  et 
éclairé  ne  devait   pas  rester  toujours 


H^  Bulletin  «le»  sciences  ^«fograph.,  ëconoinie 
puhliqtif,  etc.,   i83o,  in-8o. 

(5)  Hn  partagi-aiit  ropuiion  de  M.  Durivean  «nr 
!«'  inc»)iirr'ni»-iits  prf'Siiiiiiihles  dr-  méihodes  d'in- 
ilrurlioii  rtidir-ilemcrtl  uoiioell^i,  nous  avions  loi  t 
de  supposer  qu'on  pouvait  class^^r  dans  te  nom- 
bre celle  «1«-  .la<  olol  ;  car,  outre  <pic  ce  deriii«T 
d^Ure  lui-ni^iiie  que  1-»  printipr»  qii>  !>rrvenl 
de  base  i  Vfitr'giiemml  uniyrne/  ne  sont  pan 
noiiTeau»,  on  saii  qu'ils  ont  été  prorlainés  ;i»ant 
lai  par  des  buuiti;ex  superi<'iji  s.  (.f  qui  cnnsit- 
lue  le  mérite  de  Jacr)tot,  c'^-st  l';q>plicaiion  et 
la  |;énéruli»aiion  de  r^-.s  |»rintipe>  ;  c'eM  d'jvoir 
indiqiir  un  objet  d'eiiide  pour  terme  Ue  mmpu- 
rmixon,  et  de  f  iire  rapporter  ions  In  aiitrei  ob- 
jets à  celui  qu'on  a  éiudié ;re  r|ni  est  raJicaiemetil 
nouveau,  t'est  à' usnir  ^xtbiii  qu'on  pouvait  truei' 
fn.tr  c#  ifu'on  ignorait. 


statlonnaire.  Nous  disions  qu'il  pou- 
vait et  devait  même,  non  seulement 
profiter  des  améliorations  dont  l'uti- 
lité est  démontrée  ,  mais  encoura- 
ger les  essais  que  désiraient  ten- 
ter des  hommes  offrant  toutes  les  ga- 
ranties nécessaires  par  leurs  talents, 
leur  caractère  et  leur  moralité,  surtout 
lorsque  des  essais  semblables  avaient 
déjà  produit  d'heureux  résultats.  Après 
un  court  séjour  à  Paris  ,  Jacotol  se 
retira  à  Valenciennes  ;  et,  pendant 
les  sept  années  qu'il  resta  dans  celte 
ville  ,  il  répandit  sa  méthode  dans 
beaucoup  de  familles.  De  retour  dans 
la  capitale  de  la  France  au  mois  de 
mars  1838,  il  continua  de  l'habiter  et 
de  consacrer  tous  ses  instants,  jusqu'à 
sa  mort  arrivée  le  30  juillet  18i0  (6), 
à  mettre  les  pères  de  jamille  pau- 
vres et  ignorants  ,  c  est-à-dire  ne 
sachant  ni  lire  ni  écrire,  en  état 
d'enseigner  à  leurs  enfants  la  lec- 
ture, l'écriture,  les  sciences^  etc., 
en  un  mut  ce  qu'ils  ignoraient.  sSes 
obsèques  furent  célébrées  sans  osten- 
tation ;  mais  quatre  à  cinq  cents  per- 
sonnes accompagnèrent  sa  dépouille 
mortelle  jusqu'au  cimetière  du  Père-la- 
Ghaise.  Plusieurs  discours  furent  pro- 
noncés sur  sa  tombe  par  des  professeurs, 
des  élèves,  et  même  des  femmes.  M. 
Gannal  a  embaumé  son  corps  d'après  la 
demande  de  ses  disciples,  sans  vouloir 
accepter  de  rétribution,  s'estimant  heu- 
reux, leur  a-t-il  écrit,  d'avoir  été  choisi. 
Un  monument  doit  être  çlevé  à  sa  mé- 
moire, et  M.  de  Cubières,  minist»-e  de 
la  guerre,  son  ami  et  son  disciple  ,  a 
souscrit  des  premiers  ,  et  accepté  la 
présidence  de  la  romuiission  de  ce  mo- 
nument. J.  Jacotot  arail  épousé,  au 
mois  de*  juin  17î)'l<,  une  fille  de  M. 
Defacqz,  receveur  principal  des  doua- 


en    i87.8    une   littiogiajihie 
l^fe   p<i'cln*e    Mir  son 


(6j  On  a  pubi 
représentant  J.irolot 
éfiaulD  par  sniti-  Wc  l'nifinnité  aj>peléc  torticolis 
dont  il  Tut  affi  ctc  peudaut  le«  viugl  deruières 
années  de  sa  rie. 


JAC 

Mi  à  Tovrnjv,  dont  il  a  f«  pln- 
timn  riifjiit»  l.'r&trait  df%rlo|>pé 
da  rapport  dr  M.  kiiiLrr  t\  ïrs  nla- 
tiom  qui  prrcrtlrni  ont  fa  t  ^tilBvJin- 
ramt  ronnailrr  b  m<  I  jrotot. 

Nous  allons  eianinr  rut  aael- 

qim  onn  6ts  princtpain  ob|frltun« 
qu'on  a  faite«  rontrr  rlle.  On  a  il'abord 
c/il'qu^  la  i<>noini  liai  ion  «lonnee  à  la 
mHliodr  À  i'.nsrignrmmt  uniorraei, 
à'  t  nui  nt  if  Hit  ton  inlrlln  turUf.  Nous 
a\onft  %u  rommrni  M  kinlrr  justifie 
celle  première  qoalifirjitinn  ;  quant  k 
la  serunde,  on  ne  - 
qtie  f'fHf  rmaiiri|»er  n  • 

•>i  le^s  pf  orticNN*^  ilr  J*<n! 
f-e»,  que  de  tuiifiin\%rr  pf 
ainsi  dire  la  irienre,  de  metlre  loul  in- 
dividu en  état  de  »'invlruire  sans  re- 
courir à  une  intellioenre  étrangère.  1^ 
proposition  que  toulrs  lr$  intrlUgm- 
ers  sont  eguirs,  et  l'adage  que  tttut 
est  dans  tout,  et  que  rirn  n'est  tians 
rirn,  ramenés  par  Jarotot  à  rliaqiie 
page  de  ses  ou^ra-^e*.  ont  é\r  ^i«rmrnt 
critiqués  par  MM.  )>uri»eju,  le  dor  de 
I>Ms,  lx>rain,  etc.  1^  proposition  re- 
lative a  Tesalite  de»  inielli^enres  chea 
kNB  les  liomme«  bien  conformes,  c'est- 
à-dire  le  fait  qu'ils  nai.N<«ent  tous  avec 
la  faruhe  de  comprendre  ,  de  voir  ,  de 
saisir  des  rapports  n'est  pa>  nouvelle^ 
elle  a  ^é  émise  par  Descartes.  New- 
ton, Cousin,  etc.  An  surplus,  Jarotot 
ne  la  reproente  que  comme  une 
opinion  qu'il  <>nonre,  comme  une  lit- 
pothése  qu'il  cKerclie  à  veiifier,  et  à 
laquelle  il  raitaclie  cependant  touv  le^ 
actes  inlellettueU.  Il  ne  prcinid  point 
que  tous  les  bomm«-  . nt  dans 

Ifurs  actes  la  mcint-  .  i-,  puis- 

que la  plupart  de  ces  actes  sont  irré- 
llechis  et  sans  but  ;  mais  il  attaque  la 
distraction  comme  un  vice  et  non 
comme  une  incapacité.  Arme  de  ce 
principe  essentiellement  moral  et  en- 
courageant, il  ju-e  les  individus  ,  non 
i' après   la  somme  des  maoïfesUiioDS 


JAC 


i3 


acquises,  nais  d'après  l'esKenee  même 
de  tonte  manifestation  inlellectuelle  II 
ne  conteste  m  la  snj.éhonté  de  la 
scienrr  .  nt  la  stipérmiitedu  talent, 
bien  «,  <  l'opinion  de  i'inr^a- 

liie  m  ■  <-  rommr   fausse  et  im- 

OMinle.    >ui^ant   lui.   apprendre  c'ert 
fociprendie,    comprendre   c  est    rap- 
porter, lier,   efabraaer  ;   ici  l'anaKse 
et  la  »>ntbrse  se  to«cbent  .    re»prii, 
touioan   pr^   à   tsccooiber,  a  besoin 
d'un  levier,  d'un  appui,  d'in  principe 
vivant,  intente,  profond;  ce   pnnctpe 
égaille    des  intelli-enres     1  oute 
ri^    de   .Isrotf-t    Comme   prnfes- 
rur.  s'>    raitacbe 
'  I       irr    l'amonr  -pro- 

pre,  abaisser  I  op^neil,  élever  le  mé- 
tal, »eniner  et  lourneiiter  l'esprit  par 
des  quesMons  inattendues,  purs  l'abaii-^ 
donner  à  lui  mené  et  le  lancer  se  dere> 
lopper  librement  dans  le  rtiamp  qu'il 
lai  avait  ouvert  ;  tel  était  le  résuhat  de 
l'opinion  qu'il  avait  soin  d'inculquer  à 
»es  elr\eset  qui  le  caractérise  C^tte 
OjMiiion  de  l'e^alité  des  intelli;;enre» 
mériterait,  si  elle  n'était  pas  vraie,  d'ê- 
tre considérre  comme  telle  dam  nos 
collèges  ou  ,  sur  cent  élevés,  une  ▼mj;- 
taine  tout  au  plus  sont  cla^sé5  par- 
mi les  intelligents  dont  on  s'occupe, 
tandis  qne  les  autres  jo;;és  incapables 
d'acquérir  l'instruction,  ou  supposés  do 
moins  engourdis  par  la  paresse,  sont 
liv rés  à  eni  mêmes  et  abandonnés  à  letrr 
triste  -oit.  L'ada{;e  que  Jaroiot  mpsi- 
dére  comme  un  axiome,  si;:i!ifie  que 
tout  est  (tnulii^fr  dans  les  actes  in- 
tellectuels, qu'il  n'en  e^t  aucon  qu'on 
ne  puivse  rom/n/rrr  a  un  autre  sous 
plus  ou  moins  de  points  de  vue. 
M.  KiiiLer,  comme  M.  Durirau  ,  a 
^it  qu'il  ne  fallait  pas  juf^er  la  méthode 
seulement  par  .son  fondateur ,  P^^ce 
qu'il  serait  difficile  detrou%er  des  insti- 
tuteurs qui  sussent  Tappliqu""  comme 
lui,  el  le  dernier  a  ajouté  qu'elle  n'é- 
tait bonne  que  dirigée  par  lui  ;  qu'on 


^4 


JAC 


ne  devait  se  prononcer  qu'après  des 
expériences  auxquelles  l'inventeur  eiit 
été  tout-à-fait  étranger,  et  qui  eussent 
été  suivies  pendant  un  certain  temps 
par  des  hommes  exempts  de  toute 
prétention.  Il  a  demandé  enfin  qu'on 
lui  montrât  les  hommes  distiiijj;iiés  pro- 
duits par  l'enseignement  universel,  les 
chefs-d'œuvre  dus  à  cet  enseignement. 
Qu'on  les  lui  montre  ,  et  il  se  déclare 
le  partisan  de  la  méthode.  On  a  ré- 
pondu :  Depuis  vingt  ans  environ  que 
V enseignement  universel  est  appliqué, 
non  sans  heaucoup  d'entraves,  des  ex- 
périences ont  été  faites  non  seulement 
à  Louvain  où  Jacotot  a  résidé  jus- 
qu'en 1830,  mais  à  Bruxelles,  à  An- 
vers ,  à  Verviers,  à  Cambrai ,  à  Cler- 
mont-Ferrand,  à  Paris,  à  Civray,  etc. 
Dans  toutes  ces  villes  ,  les  élèves  ont 
fait  des  progrès  rapides  et  conslatés 
par  des  examens  ;  ainsi  que  cela  ré- 
sulte de  rapports  ,  dont  plusieurs  ont 
été  publiés,  sur  les  résultats  obtenus 
dans  les  institutions  y^coif/Vf^  qu'on 
y  a  établies.  Si  les  noms  d'un  très- 
grand  nombre  d'enfants  élevés  d'après 
cette  méthode  ne  peuvent  être  cités,  11 
est  facile  d'en  Indiquer  les  motifs.  D'a- 
bord les  universités  en  absorbent  la 
majeure  partie  au  fur  et  à  mesure  de 
leur  sortie  des  instituts  de  l'enseigne- 
ment universel.  11  y  a,  d'un  autre  côté, 
très-peu  de  parents  destinant  leurs  en- 
fants à  suivre  une  carrière  quelconque 
qui  ne  craignent  de  nuire  à  leurs 
succès  futurs  en  osant  avouer  qu'ils 
les  ont  lait  élever  par  la  méthode  de 
Jacotot  ;  il  en  est  encore  moins  qui 
se  déterminent  même  à  tenter  l'ex- 
périence. Quelques-uns  cependant 
agissent  différemment  ;  mais  Ils  sont 
rares ,  par  suite  de  la  défaveur  qu'on 
a  cherché  à  jeter  sur  celle  mé'.hode. 
Des  musiciens  célèbres  ,  parmi  les- 
quels nous  citerons  de  Derlot  et 
Ourry ,  premier  violon  de  l'opéra  de 
Londres  ,    attribuent   une  partie  de 


JAC 

leurs  progrès  aux  leçons  de  Jacotot 
qui  a  provoqué  en  eux,  disent-ils  ,  de 
sérieuses  réflexions  sur  leur  art ,  etc.  ; 
Albert  Grisar,  d'Anvers  ,  auteur  de  la 
Folle,  de  VOpèra  à  la  cour,  etc.  ; 
Polydore  Devos,  planiste  distingué  , 
ont  été  élevés  d'après  la  méthode  pure 
par  M.  de  Séprés,  qui  ne  sait  pas  une 
note  de  musique;  le  jeun^  Bertera, 
aujourd'hui  premier  élève  de  l'école 
pol\  technique,  a  appris  de  son  père  , 
suivant  la  même  méthode,  les  hautes 
mathématiques,  le  dessin,  etc.,  que 
ce  dernier  ne  connaissait  pas  (7)  ;  le 
père  de  M"*^  Descos  lui  a  enseigne 
plusieurs  langues  étrangères  ,  l'alle- 
mand et  l'arabe,  par  exemple,  la  pein- 
ture, etc.  ,  dont  11  n'avait  pas  la  moin- 
dre notion.  Il  serait  facile  de  multi- 
plier les  faits,  sans  parler  de  ceux  dont 
M.  Kinker  a  été  témoin,  et  qu'il  cite 
dans  son  rapport  (8) .  Nous  dirons  , 
en  terminant  cette  notice,  qu'on  pour- 
rait se  demander,  et  cette  question  ne 
serait  pas  étrangère  à'I'enseignement 
universel  ,  ce  qu'on  apprend  dans 
nos  collèges,  à  l'exception  des  langues 
anciennes  que  même  si  peu  d'élèves 
ont  bien  retenues  ,  après  huit  ou  dix 
des  plus  belles  années  de  la  vie  tris- 
tement consacrées  à   l'élude  (9).  La 


(7)  M.  Hcrtcrn  ptTC  nous  a  assuré  qu'il  avait 
ëîevé  de  la  même  manière  .sa  fille  et  son  fils 
aîné  ,  aujourd'hui  avocat  à  la  cour  royale  de 
Paris. 

(8)  Il  en  est  un  que  nous  ne  devons  pas  ce- 
prndanl  passer  sous  silence  ,  c'est  celui  «le  huit 
soldais  ilielirés  du  i3>^^  de  ligne  qui  ,  sous  les 
yeux  d'un  ofli'iir  ,  aujouid'hui  capitaine  îii- 
.Mrucli'ur  de  l'école  pulylecbnique,  ont  npprii 
en  qu.iUfi  mois,  en  trav;iill.-int  cjunirc  luurrs 
par  jour,  d'.iprès  I,-»  niétiiode  de  .I.icolot ,  !a 
Ifcture,  récriture,  l'orthographe,  la  f;rammairc, 
la  comjiosition.  le  calcul  et  le  dessin.  li  <loit 
exister  au  ministère  <lu  la  guerre  un  rapport  .^ 
ce  sujet  de  feu  M.  le  lieuteuant-géuéral  Damre* 
mnnt,  qui  avait  passé  ciij(|  beuic?  a  examiocr 
ces  soldais  pendant  l'iuspcctinn  gémrale  de 
i833. 

(g)  M.  Hoffmr.n  ,  proft-fseur  de  langues  à 
Paris,  d'ailleurs  antagoniste  très-prononcé  de 
Venseigiiement  unirersei  ,  a  eu  Ja  pensée  «le  réu- 
nir les  lémoigiioffis  de  Loïke,  Montaigne,  Eras- 
me ,  Roliin  .Condiilac  ,  etc.,  contre  le  système 
suivi  dnas  nus  collèges.  Cet  ottvriige  ,  curienx 


JAC 


JAC 


i:> 


néc«f«ilé  et  b  p<wiibilil^  à'uppren- 
drt  mieux  et  plus  tU  thusry  m 
moins  de  temps  ,  que  personne  ut 
>juiuil  coiitMlrr  ,  imcuera  uns  tlniile 
un  jour  l'adoption ,  sinon  tic  IV/i- 
^riffnement  unit^rsri  lui-même  ,  du 
iiiuiiis  lie  l'un  At  ^ri  principes  fon- 
t)jmrnlau&  :  la  rrftrtition  lunlutuelle 
ri  iu  t  umfxiraisun.  Jarotut  a  piiblif  : 
I.    /  ,nt    utîi%'rriri ,     hin- 

^ur  I  .   I^u\ain,    tH:i'J,    1 

\i>l.  iii-^  ,  G  rUition^.  Il  ^  rn  a  ru 
•Iruxlrjiitirt.  m  allrroand.  Il  Jjtn^ur 
'.'r^m^rrr.  I.ou^ain,  iH^.'i.t  xol.iii 
S  ,  (»  rtiiion^.  111.  Malhrniiitupirs, 
ibij.,  XH'li,  1  >o\.  in  H',  \  e»l.Jion*. 
la  «lernirre  est  suivie  d'un  é(>itonte  de 
malhemaliques  par  M.  Jacolot  GU. 
IN  .  Musique,  dessi  i  et  peinture  , 
ibid..  IhiV,  1  vol.  in-H  ,  V  editmns. 
^  .  Droit  et  philosvpfiie  fhtnei  usti' 
yu^.l'ari*.  IH.IT.  1  vol.  m  H",  ei- 
tiait    du    journal    de    l'hi'  ii 

iittellccluelle ,  avec  reitt 
•  J'ii  dts  élevés  qui  impru«i>titt  ii^us 
àti  \àngiÊti  que  j'ignore.  »•  N  1.  Let- 
tre du  Jonduteur  de  renseigne- 
ment uniifersel  uu  gênera!  La- 
layette,  lx>uvain,  18*29,  brochure  de 
7  pa^es  in  8".  On  a  publie  sur,  pour 
ou  contre  reii>ei;^nement  universel,  un 
^rand  nombre  de  brochures;  voici  les 
liliesdes  principales:  1"  litipport  sur 
lu  methotJe  de  M.  Jarotut,  pié-^eolë 
au  inini>tere  de  l'intérieur  du  roanroe 
des  Pavs-IUs,  le  8  sfpirmbre  I82G, 
par  M.  kinLer,  commissaire  nommé 
par  le  roi  pour  l'examen  de  celte  mé- 
thode, Faris,  18-2»),  2"  édition,  m  8", 
sui\i  d'un  mémoire  au  roi  des  l*a>s- 
lias  au  sujet  de  ce  rapport  parM.de 
Séprés  ;  2"  Examen  ru.  sonne  de  ren- 
seignement unii>ersel.  Ce,  par  Dun- 
?eau,  ex-directeur  de*  éludes  à  l'école 


^r  l««  citation*  qa'il  coaiWnt.  •  po«r  liir«  : 
Lf$  w^eet  Ji  t'i.i'lrycliom  pti/ijm*  érmom-r^i  par 
h  rm>$Mut*m*nt,  pmr  It  ttmo'gnmgt  en  mn/Zenn 
mmUurt  et  fv  i'tsptnemc;  P«m.  ilia.  ,m-f. 


pol> technique,  etc.,  IJruxolles.  1827, 
in-K"  de  72  pu^.  ;  ^  rdit. .  1821». 
iu-8  '  de  |0:J  pa^.  ;  :j"  Ht'/utatiitn  de 
h  methotle  Juiutut ,  cunsideiée  dans 
ses  principes.  se%  piocedes  et  ses  résul- 
tats ,  par  M.  Lorain,  ptofekseur  aa 
coll.^e  I^uis-le-(îraud,  Paris,  in-8**; 
V  "  Lettre  a  M.  JuUien  [  Mure- 
Inlvine)  de  Paris,  sur  l'applir-vilon 
et  Iri  développements  de  L  mrthode 
de  l'en^i^neiuent  unnervci,  par  J.  l*. 
(  Mtailiede  pension  à   ^  er- 

^  ■  .  .  1827.  in8  .  .V  Hnp- 
p^u  i  .%ur  les  résultats  ,  l'esprit  et 
fiii/lurnre  morale  et  intellrt  tuelle 
de  Lt  metfiOiJr  de  .1/  Jutotot,  pré- 
sente a  ^l.  de  Naltmesnil,  roini^lre 
de  l'instruction  publique,  le  ô  août 
t82*J,  par  Baudouin,  avocat  à  la  cour 
rovalede  Paris,  l'aiis,  18*29,  in-8'*; 
G'  (Ainsiderations  sur  les  résultats 
impartants  iftiiJtlient  en  lielgii;ue  le 
nou%'rau  moile  {fediuatittn  ins-enté 
ptjr  M.  JatutiU,pii  K.  IJoulmv.  sui- 
vies d'une  instruction  normale  et  tliiiie 
lettre  de  M.  le  duc  de  I  r-,  nr  l.nloc- 
U  me  de  {'égalité  inte!  i'r 

1829.    in-8";   7"     1.  .  'fi'. 

uni%'ersrl  de  Jacotoi  en  ftresenee  de 
renseignement  uni^^ersitaire  ,  par 
Kenjamin  Ijroche  ,  Paris  ,  1829  ,  in- 
8  '  ;  8"  De  la  méthode  Jatotot,  par 
Joseph  Kev  de  Grenoble,  (irenoble  et 
!'.•  «laie  d'impre»it«ii,\    in-8'\ 

'.I  >ui  b  méthode  d'ense!;;ne- 

mciil  universel  de  M.  Jacot<»t,  extrait 
du  Huile  tin  de  la  sotiète  tC  agricul- 
ture. Itelles  lettres,  srienres  et  arts 
de  Poitiers.  VoxùtM s  1829,  in-8"; 
10'  Enseignement  universel  t\  Iraiié 
complet  de  la  méthode  de  -M.  Jarolot 
rendue  accessible  à  toutes  les  intelli- 
^^ces,  etc.  ;  par  Durielz,  Paris,  1829, 
in-ïi",  V  éditions  ;  U"  Simple  exposé 
de  la  méthode  naturelle  selon  Jaco- 
toi,  etc.  ;  par  (iuillard.  L>on  ,  1829, 
in-8"  ;  1 2"  liésume  dr  la  méthode 
de  M.  Jacotot ,  par  Souvestre  ,  avo- 


26 


JAG 


cat,  professeur  à  Nantes,  1829  ;   13° 
Résume  d'un  cours  normal  (T ensei- 
gnement unwersel  appliqué  à  Hn- 
struciion  primaire,  prolessé  devant 
MM.    les  instituteurs  du    canton  de 
Mulhausen;  par  A.  Penot,  docteur  ès- 
sciences ,  professeur  de  chimie  appli- 
quée, Strasbourg;,  1829;  \'i^  Anna- 
les de  renseignement  universel,  etc.; 
parM.deSëprés,  1829-1830;   15° 
Résumé  de  la  méthode  de  M.  Jaco- 
iot,  Grenoble,  18-29,  in-12.  C'est  la 
réunion,  faite  par  un  libraire  de  Gre- 
noble, des  articles  que  M.  le  comte  de 
Lasteyiie  avait  publiés  sur  la  méthode 
dans  le  Journal  de  C éducation  ;  1 6° 
Journal  de  l'émancipation  univer- 
selle, dédié  aux  pères  de  famille,  rédi{2;é 
par  plusieurs  disciples  de  J.  Jacotot  et 
publié  sous  ses  auspices  par  ses    fils; 
17'^  Manuel  complet  de  l'enseigne- 
ment universel,  par  P. -Y.  de  Séprés, 
1  vol.    in-12;     18"     Une   visite  à 
Louvain ,   suivie     des   considérations 
d'un  père  de  famille   sur  Timportante 
découverte   de  M.  Jacotot,   etc.,  par 
E.  Boutmy,  Paris,  in-8°,  2  éditions; 
19^^  De  la  metliode  et  des  métho- 
des ,    par   E.    De.shouillieres    in-12; 
20"   Rapport  à  la    société    des  mé- 
thodes de   Paris  ,    sur   le  mode   d'en- 
sei»neme!it  de  M.  Jacotot,  par  Frous- 
sard, Paris,  iii-8"  ;    21'^  l'imancipa- 
tion  intellectuelle,  ou  Méthode  d'en- 
seignement universel,  etc.,  par  M.  le 
comte  de  Lasteyrie ,  in-8"  ;   22"  Ré- 
sumé des    principes  de  renseigne- 
ment universel ,  etc.  ;  par   M.    Des- 
houillières,  directeur  de  l'institut  Ja- 
cotot,   in-8";  23"  Observations  sur 
la  méthode  Jacotot .  son  origine,  son 
esprit  et    son    vérifahje  mode ,   par 
M.  Amondieu,    professeur  au    collej^e 
royal  de  Nantes,  in-8''  ;  2^  L'Hom- 
me-machine,  ou    (j(msé(jurnccs  fu- 
nestes  de  la   méthode    Jacotot   sur 
l'intelligence   des  enjants  ,    in -S"; 
25°   La  Jacotomanie,  ou  Le  pour 


JAC 

et  le  contre  de  la   méthode  Jaco- 
tot ,  et  conclusions  sur  cette    mé- 
thode, précis  indispensable  aux  adep- 
tes du  fondateur,    aux   établissements 
d'instruction  publique,  et  aux  pères  de 
famille  ,  par  Chompré,  ancien  profes- 
seur ,   in-8'^  ;  26"   Nouvelle  exposi- 
tion de  la    méthode  de  M.  Jacotot, 
parB.  Gonod,   Paris,   1830,  in-8"; 
27"    Ce  que  c'est  que  la  méthode 
Jacotot  ,    lettre  du   docteur  Ratier , 
avec  cette  épigraphe  :  Qui  veut  peuty 
Paris,  1834,  in-S**  ;   28"    Jacotot 
et   sa  méthode,  etc.,   par   Auguste 
Guyard  ,  1840  ,   in-8°,   2  éditions. 
D— z— s. 
JACQUARD(Joseph-Marie), 
né  à  Lyon,  le  7  juillet  1752,  était  fils 
d'un  simple    ouvrier  à  la  ^rand-tire, 
c'est-à-dire   en  étoffes    brochées.    Sa 
mère  ,    Antoinette    Rive  ,    était    li- 
seuse de  dessin.  Lire  un  dessin  c'est 
disposer  les  fils  de  chaîne  d'une  étoffe 
dans  l'ordre  indiqué  par   le  dessina- 
teur sur  une  carte  divisée  par  petites 
cases  ,   de   manière    à    élever   tour  à 
tour  un   certain  nombre  de  ces  fils  au 
moyen  de  ficelles,  pour  composer  et  re- 
produire sur  une  étoffe  un  dessin  sem- 
blable à  celui  qui  est  tracé  sur  la  carte. 
Ses  ancêtres  étaient  de  pauvres  culti- 
vateurs du  petit  villaoje  <le  Couson,  si- 
tué sur  la  rive  droite  de   la  Saône,  à 
deux  lieues  de  Lyon.  Son  père  qui   le 
destinait  à  suivre  sa  propre  carrière  ne 
lui  fit  donner  aucune  espèce  d'instruc- 
tion ,  mais   le  jeune  Jacquard  apprit 
pour  ainsi  dire  de  lui-même  à  lire  et  à 
écrire.  Dès  sa  plus  tendre  enfance   il 
av.iil  montré  le  »oùt  le  plus  marqué  [)Our 
la  mécanique;  tous  ses  moments  étaient 
employés  à  faire  des  machines  propres 
à  diflérenis  usaj^es.   Il  construisait  de 
petites  maisons  en  bois,  des  tours,  des 
éj^lises  ,   de  petits  meubles.  Ces  divers 
ouvra;];es    étaient     remarquables     par 
l'exactitude  des  proportions.  Airivé  à 
sa  douzième  année,  il  fol  placé  par  son 


JAC 


JAC 


père  tiani  an  atelirr  tir  relirur  de  li- 
>rc*:  puis  riiMuie  ilatH  relui  iJ'un  àrs 
nirillrur»  foudrur^  de  L\oii.  Kaplo>^ 
à  là  (uiidrrie  dft  caraclrre^  d'imprimé- 
rie,  il  montra  6e  l'Iiabilrif .  et,  lou- 
jour»  ;;iiidé  par  »oii  t:;oiii  pour  b  rarra- 
nique,  il  fil  plu^ieut^  outils  à  l'usage 
de5  couIrlieM,  lonjoars  avec  le  même 
iurrf*.  Sa  merr  eiaiil  morte,  il  rennl 
auprr«  de  vin  \>tte  dont  il  reput  la 
protection  (.rJOHCi étant ninri auv«i quel- 
ques jiiiirrs  après,  ri  ne  lui  a>  jnl  laiv^e 
qu  une  9urre«5ion  lres-mudM{ue,  il  rn 
employa  une  partie  à  monter  un 
atelier  d'étoffes  façonnées;  mais  «on 
f;énie  ne  se  prèiait  point  k  diriger 
un  etabii^^emenl  semblable  ;  son  en- 
I reprise  ne  fui  pas  lieurru>e  ,  il  (ut 
oblif;!*  de  trndrr  ^r^  mélirr»  pour  pa>er 
ses  dellr>.  Feu  de  irtnp<«  api  rs  il  rpo'.i- 
&a  la  fille  d'un  aimunrr  nomme  Hm- 
chon  dont  il  espérait  obtenir  une  dot, 
mais  son  espoir  fut  de^u  :  et  dans  la 
grue  r.à  il  »e  trouvait,  il  fut  obligé 
de  vendre  sa    maison  paternelle.  Jar* 

3u3rd  était  doue  d'un  caractère  si 
oux  et  si  pe«  intere>sé  ,  que  , 
mal;;ré  les  désagréments  qu'il  es- 
su\.i  dttJj  part  de  la  famille  de  sa 
Irniinr  ,  il  n'en  ronser\a  pas  moins 
pour  cellr-ci  le  plus  tendre  attarlie- 
mriit.  Il  est  viai  qu'elle  riait  un  mo- 
drlr  de  pahence,  de  douceur  et  d'acli- 
vile:  il  n'en  eut  qu'un  fais.  Jacquard, 
sans  fortune,  >an.s  arnbiltmi,  sans  pré- 
vision pour  son  a\eiiii  ,  ne  refait 
qu'inventions  ri  peHfClioiinrm^nf«i  tïn 
mrtirrs  pour  le  tivsaf;e  des  elolïes  la- 
çnnners ,  la  coolellerie  rt  l'art  tvpo- 
lirapbique  ;  mais  ,  comme  il  ne  ga- 
j;nâit  pas  une  obole ,  il  fut  réduit  k 
se  ineUre  au  service  d'un  chaufour- 
nier de  la  Bre&se.  Sa  femme  resta  à 
Lyon  pour  faire  valoir  une  petite  fa- 
brique de  c'iapeaux  de  paillr  qu'elle 
aya  t  établie.  I/élat  àt  pénurie  et 
d'obscurité  ou  Jacquard  vécut  jus- 
qu'au momcQl  ou  sa  priaupalc  inten- 


tioM  rofllfln^^lire  connue,  sa  limi- 
diir  naisrelU,  m  mode^tle  ,  ont  laissé 
i>^ioiei  1rs  cit constances  de  sa  vie , 
et  même  celles  qui  se  raitaclient  à  cette 
invention.  ()u  sait  ftrulrinrni  qu'il  fit 
une  élude  particulière  du  mriier  à 
sampirs,  que  de|a  birii  axant  1790  il 
a«ail  con^u  I  idée  de  la  supprewion  du 
tir  des  lacs;  on  trouve  la  preuve  de  ce 
fait  dans  l'eipose  de  »a  demanile  du 
brevet  d  in«eutioii  qu'il  obtint  Ir  '2'.\ 
6tr.  \H0\.  V.n  \1'J'2,  Jacquard  em- 
brassa a\ec  ardeur  la  cause  «Ir  la  révolu- 
tion, il  retint  a  l.ynn  en  ITUilrt  fut  un 
des  drfensrurs  de  cette  ville  duiant  le 
sie^e  mémorable  qu  elle  MMitint  contre 
l'armée  de  laC^nxeniion,  alors  qu'on 
vit  une  polluer  de  Lyonnais,  jeunes  et 
sans  evpenriice  dans  1rs  aimes,  lutter 
pendant  soiiante-six  jours  contre  la 
lamine  et  contre  une  année  de  soixante 
nulle  liommes  de  troupes  aguerries. 
.Nomme  >^)ns  ofhrier.  Jacquard  com- 
battit presque  toujours  aux  postes 
avances  ,  ayant  a  ses  ctVtes  son  fils 
à;;e  de  qmnie  ans.  Api  es  la  reJ<li- 
ton  dr  |.\na,  la  terreor  y  amena  l'é- 
chafaud  et  les  mitraillades  :  Jacquard, 
dénonce  et  poursuivi,  s'enfuil  avec  son 
fils  qui  a\a  I  alors  dix-sept  ans.  Toui 
deux  s'enrèierrnt  dan*  le  preniu  r  ba- 
taillon des  volontaires  du  departrinenl 
de  KbAiir-rt-Koire;  et  ils  partirent 
pfMjr  l'arnire  du  Klun.  Noinnir  mem- 
bre du  conseil  dr  discipline  ,  JaCtjuard 
axait  en  celle  qiralite  la  siir%eillanre 
d'un  certain  nombre  de  disciplinaires 
prisonniers  dans  un  petit  villa;;e  près 
de  lla^iienatj.  lout-a-coup  on  en- 
tend le  canon.  «'  Camarades,  s'écria- 
"  t-il ,  qui  m'aime  me  suive  !  Je  pro- 
*  mets  remission  à  ceux  qui  iront  de- 
«*  4Bander  des  fusils  pour  >e  baitre.  »• 
Quelque  temps  après  ,  le  fils  fut  blessé 
à  mort  sur  le  cham[»  de  baïailir  ,  et  il 
expira  dans  les  bra,  de  son  pcie.  Jac- 
quard, désespère  de  la  perle  de  son  fils 
unique ,  revint  à  L/on.  U  chercha  yai- 


a8 


JAC 


nement  la  maison  qu^il  avait  habitée  ; 
elle  avait  été  la  proie  des  flammes.  Il 
ignorait  le  sort  de  sa  femme  qu'il  n'a- 
vait pu  ni  prévenir  de  sa  fuite,  ni  in- 
former du  lieu  de  sa  retraite;  il  la  re- 
trouva enfin  dans  un  orrenier,  occupée 
à  tresser.de  la  paille  pour  les  cha- 
peaux. Il  se  vit  d'abord  réduit  par  le 
besoin  à  partager  ce  travail  ino;rat.  Ce- 
pendant Lyon  commençait  à  se  relever 
de  ses  ruines  ,  et  déjà  plusieurs  de 
ses  fabricants  ,  qui  s'étaient  réfup;iés 
en  Suisse,  en  Allemagne  et  en  An- 
gleterre ,  avaient  rapporté  dans  leur 
patrie  leurs  pénates  et  leur  industrie. 
Jacquard ,  poursuivant  son  idée  pre- 
mière de  trouver  un  moyen  mécanique 
capable  de  remplacer  la  tireuse  de 
lacs,  se  mit  à  y  travailler  de  nouveau, 
et  il  parvint  à  fabriquer  une  machine 
qui  remplissait  assez  imparfaitement  ce 
but.  Il  la  présenta  en  sept.  1801  à 
l'exposiiion  des  produits  de  l'industrie 
nationale,  dont  le  jury  lui  accorda  une 
médaille  de  bronze.  La  même  année, 
il  obtint  pour  cette  machine  à  laquelle 
il  donna  le  nom  de  lireuse  di'.  lacs, 
un  brevet  d'invention  pour  dix  ans. 
Il  fit  un  métier  sur  ce  modèle ,  et ,  en 
1802  ,  à  l'époque  où  la  ((msulla  se 
réunit  à  Lyon  pour  l'élection  du  prési- 
dent de  la  république  cisalpine ,  la 
machine  de  Jacquard  fixa  l'attention 
de  celte  assemblée  dont  les  me»nbres 
allèrent,  avec  le  ministre  de  l'intérieur 
Carnot,  la  visiter  dans  i'humble  do- 
micile de  l'inventeur ,  lUe  de  la  l*é- 
cherie.  Cependant  les  sociétés  des 
arts  de  Paris  et  de  Londres  mi- 
rent au  concours  un  prix  considérable 
pour  l'invention  d'inie  machine  propre 
à  fabriquer  des  filets  pour  la  pèche 
maritime  et  le  baslinijaiie  des  vaisseaux 
de  guerre.  Jacquard  entreprit  cette 
œuvre  extrêmement  difficile;  il  y  réus- 
sit; mais  tels  étalent  son  désintéresse- 
ment et  sa  modestie,  qu'il  se  borna  à 
s'entretenir  avec  ses  amis  de   sa  dé- 


JAC 

couverte,  sans  avoir  la  pensée  d'en  ti- 
rer parti  ;  et,  négligeant  les  perfection- 
nements dont  son  invention  était  sus- 
ceptible, il  la  laissa  de  côté.  Le  préfet 
de  Lyon,  informé  de  cette  invention  , 
envoya  Jacquard  et  son  métier  à  filet 
à  Paris  :  l'essai  en  fut  fait,  et  la  société 
d'encouragement  lui  décerna  la  grande 
médaille  d'or  le  2  février  1804.  A 
cette  occasion,  Carnot,  qui  ne  conce- 
vait point  ce  mécanisme,  lui  dit  brus- 
quement :  «  C'est  donc  toi  qui  pré- 
«  tends  réussir  aune  chose  qu'il  n'ap- 
«<  partient  pas  aux  hommes  de  faire  , 
«  c'est-à-dire  un  nœud  avec  un  fil 
«  tendu  !  »  Jacquard  ,  sans  s'intimi- 
der de  celle  interpellation  ,  répondit 
au  ministre  avec  la  simplicité  de  lan- 
gage qui  lui  était  naturelle  ,  et  le 
laissa  pleinement  convaincu.  Placé 
au  conservatoire  des  arts  et  métiers , 
sous  les  ordres  de  Molard ,  il  y  fut 
employé  à  restaurer  et  à  mettre  en 
état  les  machines  et  les  modèles;  il 
y  inventa  les  métiers  tisseurs  pour 
fabriquer  des  rubans  de  velours  à 
double  face  et  d'autres  pour  des  tis- 
sus de  colon  à  doubles  et  triples  na- 
vettes. Il  monta  le  fameux  mâtier  de 
^  aucanson,  destiné  à  remplacer  le  ti- 
reur de  lacs  que  Jacquard  recher- 
chait depuis  quinze  ans,  et  le  mit  en 
état  de  fonctionner.  Mais  celte  ma- 
chine, très-compliquée,  opérait  lente- 
ment; c'était  une  espèce  de  cylindre  à 
serinette  dont  les  effets  étaient  trop 
restreints  :  elle  n'aurait  pu  servir  que 
pour  des  dessins  de  deux  pouces  au 
plus,  et  elle  aurait  coûté  dix  mille 
francs,  somme  infiniment  au  dessus 
des  moyens  d'un  ouvrier.  C'est  pour- 
quoi elle  fui  mise  au  rang  des  machines 
curieuses  ,  mais  inutiles.  Jacquard  , 
rap[)elé  à  Lyon  en  180i,  fut  placé  à 
l'iiospice  de  l'Antiquaille,  pour  y  éta- 
blir un  atelier  d'étoffes  façonnées  et  de 
tapis  façon  des  Gobelins  par  les  pro- 
cédés dont  il   était  l'inventeur.   Dès- 


JAC 

lors  ii  ft'oMup^  des  Bio>eiu  de  (aire 
adopter  dans  1rs  maoufarlurei  de  \.\ot\ 
%es  deux  iineiilioiis,  celle  du  métier  à 
fabriquer  les  fiieU  et  le  mecjiiiMne 
|iour  U  s(l|»|lrr^^iotl  des  lue-.  H  fut 
|iuiNk.itninrii(  scrondr  par  l'inllueiire 
du  i.rlie  fjbiirjiit  (limille  Peiuoti,  qui 
il*  mil  en  rappuit  a\rc  le  conseil  inuui- 
d(ul  et  |j  ciurabrr  de  roniiiififc  «le 
Lvoii  l  iif  (ommiNikiOP,  com|Mi»rf  dr* 
pluN  liabile/  fabricants,  fut  chargée  de 
rrcunnaitre  les  a%anta^es  de  ce  der- 
nier inrrjnisroe  ;  et  leur  témoi(;na^e 
fut  unjniiue  en  faveur  du  procède  de 
JjcquAid.  Kiifjn  un  derrel  impenal , 
dair  de  Ilerlin,  le  27  ocl.  IHOG.  m- 
toiisa  r^dMiini^lr Jtifin  municipale  de 
K>oii  à  aciirtri  de  Jacqujid  le  pii\i- 
Ir^c  de  son  procède,  iini\ennanl  une 
rente  viagère  de  trois  mille  Irancs,  re- 
MfNible  par  moitié  »ur  la  tète  de  sa 
fciuiue  en  car»  de  sur»i\ance.  Sm  bre- 
\rl  tomba  ainsi  dans  le  domaine  public. 
Jjrquaid  axait  en  outre  demande  au 
gouvernement  quM  lui  fût  arcorde  une 
piiiue  de  niiquaiite  francs  poui  riiaque 
métier  de  son  invention.  Napoit-on,  en 
si<;iiant  Ir  drrrrt  qui  assurait  ce  droit 
au  modeste  fabricant  ,  s'écria  :  Kn 
voila  un  (jui  se  tontrntr  de  fteu  ! 
Cette  mèrac  année  ,  l'académie  des 
scieuces  et  arts  de  Lvon  lut  décerna 
la  médaille  du  prii  fuiiiie  par  le  con- 
sul I.ebrui).  Jacquard  s'occupa  de:>- 
lois  à  introduire  sa  machine  dans  les 
ateliers  d'étoiïes  façonnées  et  bro- 
chées ,  mais  il  n'y  reuxsil  que  diffici- 
lement ,  malgré  la  prime  que  lui  avait 
accordée  Napoléon  pour  chacune  de 
celles  qu'il  placerait.  Les  ouxners  tis- 
seurs, craignant  de  manquer  de  travail 
par  cette  invention,  s«  liguèrent  con'rc 
lui,  gâtèrent  des  elofl'es  afin  de  faire 
croire  que  ce  mécanisme  fonctionnait 
mal,  et  en  hrùicrenl  même  sur  les  places 
publique^.  Tradiiil  devant  le  tribunal 
lies  prud'hommes ,  Jacquard  eut  plus 
li'uiic  fois  à  essuyer  des  outrages  et  des 


JAC  «9 

scticcs.  l^n  joor  m^e ,  près  de  la 
porte  Saint-Claii  ,  on  le  relira  des 
mains  d'un  ^^upe  «Ir  furieux  qui  vou- 
lait le  jrter  dans  le  KliAne.  Heureuse- 
ment que  quelques  fjbiicantN  srii>és  lui 
firent  construite  unr  iiou\rllr  machine 
dont  ils  tireient  un  parti  m  a\ juij^eux, 
que  bienlAt  de  toutes  part»  on  s'em- 
pressa de  1.1  mettre  eu  usa^e.  (^uiinue  à 
\,\on  rti  IKO.'i,  mise  en  pratique  en 
1809.  elle  lut  ^éoeraJemenl  adoptée 
en  IHli,  il  >  avait  alors  di\*liuii  mille 
métier»  ballant  à  la  Jacquard;  et  deput» 
leur  nombre  v'e>l  rieve  au  delj  de  tienle 
raille.  Sou  invention  s'est  rrpandaesuc- 
cevsiveincnt  en  Suisse,  en  .\llrma;;ne, 
en  Italie,  en  Amérique,  et  le*  (ihinois 
même  commencent  a  s'en  servir,  mal;;ré 
leurs  pieju-es  et  leur  vieille  routine. 
Jacquard  fut  sollicite  par  de^  fabri- 
cants lie  Kouen  et  de  Saint-Ouenlin 
d'aller  itc^aniser  cliri  eui  des  ate- 
liers de  lisva;;e  pour  des  étoffes  de  co- 
lon et  de  batiste.  Ij  ville  de  Man- 
chester en  .\n^leterrelui  fil  ollm  pour 
le  même  objet  une  somme  considé- 
rable, et  un  traitement  capable  de  lui 
procurer  une  eiisience opulente.  Mais 
son  patriotisme  lui  fil  refuser  ces  bril- 
lants avantages,  et  il  resta  à  Kvon. 
Quelques  années  après  ,  Jacquard  fui 
décore  de  l.i  croix  de  la  l,e;;ion- 
d'Ilonneur.  Ce  biave  homme,  avant 
perdu  sa  femme  ,  ^e  retira  à  OuOins 
joli  village  situe  a  une  lieue  de  Lyon, 
dans  une  petite  maisrn  dont  on  lui 
avait  lé^ué  la  jouis^sance  durant  sa 
vie.  C'est  là  qu'il  passa  ses  derniè- 
res années  ,  partageant  son  if  mps  en- 
tre la  culture  d'un  petit  jaMin  et  les 
exercices  de  la  reli;;ion  catlio!i(juc.  Jl 
termina  sa  carrière  paisiblement  le 
7  ^il  18'H,  à  l'a^^e  de  quatre-\iii^t- 
deux  ans  ,  et  sa  cendre  repose  dans 
le  cimetière  d'Oullins  ,  a  côlé  de 
la  tombe  de  l'académicien  l'homas 
[l'oy.  ce  nom,  \L^  ,  466).  Les 
habitants   de  cette  commune   lui  ont 


3o  JAC 

consacré,  dans  leur  église,  l'cpitaphc 
suivante  : 

A  la  méiiioi^ 
De  Joseph- Miirie  Jacquard, 

MéoiiliiciOi   célèbre. 

Homme  de  bi«ii  et  de  gcnie, 

Mort  à  Oulliiis  ,  dans  sa  iiiai.on  , 

Le  vu  auùt   m  dccc  xxmv, 

Au  ■'>ejn  de<  consol.ilious  religieuses. 

Au  Doin  des  babiianis  de  la  commune, 

lloiiim.ige 

Du  conseil  luunic'pal 

Dunt  il  avait  fail  partie. 

Le   corps  municipal   de   Lvon   a   fait, 
exécuter,    par    le    directeur  de  l'école 
de   peinture  de  cette  ville  et  du    vi- 
vant  de   Jacquard ,    son  portrait  en 
pied,  vrai  chel-d' œuvre,  qui  a  été  placé 
au  Muséum.  On  organisa  ensuite  une 
souscription  pour    lui  élever  une  sta- 
tue.   Ce  monument,    ouvrage  de  M. 
Foyatier,  auteur  du  Spaitacus  ,   a  été 
inaugu'é,  le  dimanche  16  août  18  VO, 
sur   la  place   Sathonay   où   était   déjà 
placé  le  buste  de  Tabbé  Uozier  (  Koj. 
ce  nom,   XXXIX,    206).  Un  con- 
cours immense  de  curieux  et   toute    la 
population  manufacturière  de  î>yon  se 
pressaient  à  cette  cérémonie,  à  laquelle 
assistaient  les  autorités  civiles  et  mdi- 
taires.  Des  discours  à  la  mémoire   de 
Jacquard    out  été  prononcés   par    le 
maire  de  la  ville,  par  le  préfet  du  dé- 
partement ,  et  par  le  président  de  la 
commission  du  monument.  Le  nom  de 
Jacquard  est  devenu  ,  pour  ainsi  dire, 
technique  dans  les  deux  mondes.  Heu- 
reux continuateur  des  efforts   de  N  au- 
canson,  qui   comme  lui  a  perfectionné 
à  Lyon    les    midiines   à  tisser  ,   Jac- 
quard a  inventé  une  machine  bien  sim- 
ple et  peB  coûteuse,  à  la  portée   de  la 
classe  paifvre  des   tisseurs,   qui  a  for- 
mé une  époque  mémorable  et  une  nou- 
velle ère  dans  Tart  des  tissus.  Cet   art 
a  éprouvé    une  révolution   complète  ; 
l'ouvrier  n'est  plus  qu'une  machine  à 
mouvement   qui    produit  sans  peine , 
promptement  et  à  bon   marché,   des 
étoffes  ornées  des  dessins  les  plus  ri- 
ches et  les  plu»  compliqués,  que  leur 


JAC 

prix  modéré  met  à  la  portée  de  toutes 
les  classes  de  la  société.  Celte  machine, 
loin  de  diminuer  le  nombre  des  ou- 
vriers employés  au  tissage  des  étoffes, 
l'a  au  contraire  décuplé;  elle  a  fait 
élever  d'innombrables  manufactures  de 
tissus  dans  toute  l'Europe  et  donné 
au  commerce  de  ce  genre  une  activité 
et  une  extension  inouïes.  M.  de  Fortis 
a  publié  ,  au  moment  où  nous  termi- 
nions cet  article,  un  Eloge  historique 
de  Jacijiiard  ,  suivi  d'une  Notice  sur 
la  Èlatue  élei>ée  à  Lyon  à  sa  mé- 
moire et  les  mamifactures  d'étoffes 
de  soie  de  cette  ville  ,  1  vol.  in-8". 
Jacquard  a  ,  dans  V Anmiaire  des 
ho!nme<i  utiles  ,  un  article  que  M.  de 
Fortis  qualifie  de  roman. 

Oz — M  et  1) — R — R. 
JACQIJELIX  (Jacques- An- 
dré) ,  littérateur  et  chansonnier,  na- 
quit à  Paris,  non  pas  en  1773,  com- 
me on  l'a  dit  dans  la  plupart  des  Bio- 
graphies contemporaines,  mais  le  18 
mars  1776.  Fils  d'un  valet  de  chambre 
du  dernier  prince  de  Conti ,  il  fit  de 
bonnes  études  dans  un  collège  où  il 
eut  JJésaugiers  pour  condisciple  et 
ami,  et  il  apprit  si  bien  le  latin  qu'il 
était  en  état ,  chose  assez  rare  en 
France,  de  soutenir  une  conversation 
dans  cette  langue.  Privé  de  toutes  res- 
sources par  l'éloignemenl  de  son  père, 
qui  avait  partagé  la  détention  du  prince 
de  Conti  à  Marseille  et  sa  déportation 
en  Fspagne  où  il  le  précéda  au  tom- 
beau, peu  d'années  avant  la  rentrée 
des  nr)urbons  en  France ,  le  jeune 
Jacqiifilin  se  livra  à  la  littérature  dra- 
matique et  donna  aux  théâtres  secon- 
daires, seul  ou  avec  quelques  collabo- 
rateurs, une  cinquantaine  d'ouvrages 
dont  la  plupart  ont  été  imprimés.  Ce 
fut  à  celui  des  Jeunes-Arlistes,  rue  de 
Bondy,  qu'il  obtint  ses  premiers  suc- 
rés. Il  y  fit  représenter,  en  1799  :  \. 
Jean  La  Fontaine,  vaudeville  anec- 
dotique.   II   (avec  Philidor,  pseudo- 


JAC 

omeJr  Ilochfllc)  (1).  LEnjunt  dt 
fo/nour ,  tiA^rJic  uurlrM|ue  en  un 
actr,  CD  verN,  kuilc  des  t'ureurt  d*- 
Cumitur,  U3^t<\<t  burlfMfue  en  \tïs 
t\  rn  un  arle,  ou^ra^e  île  mmi  colUlio- 
ralrur.  ixWt  \ut(t  a  rrpaiu  ni  tH(hî 
souN  un  nuu^rau  lilii*  :  Lrs  Hrrus  dr 
cuisine ,  ou  fLii/uitt  dt  i'untuur. 
111.  Jeun  liuiine  et  ses  en/unis  , 
vauJrullf  anrcdoliqur.  IV.  LAnti 
<fitunniftie ,  ou  /r  Mariage  sous  la 
cheminée t  atle4fuiaa(lf  fii  \audc«ille». 
V.  Im  (Je  jurée.  o\x  les  fjuiitre  au 
teurs,  roDirdic  anrrdutique  en  vaude- 
▼lllfi.  VI  ^avec  Ufcrlclle)  Lr  Pein- 
tre dans  son  nie'nii/fe ,  comrdie  en 
deux  jcle*.  VU  (a\ec  IVoclwlIf'.  /V<i 
dori  ùffle.  battu  et  content,  comédie- 
vaudexille.  tu  1800:  Vlll.  le  Prê- 
teur sur  gages,  ou  f  Intérieur  d  une 
maison  de  prêt  ,  conédi^vaudr^iiie  , 
imprimée  >ou>  ce  tilre  :  I^  l'aldeau 
de  liapha'el ,  ou  A  trompeur,  trtuu- 
peur  et  t//-//ii,  comédie  proverbe  ,  re- 
mise au  iheilreel  leirnprinirr,  en  1820 
cl  1821,  sous  Ici  lilrci  de  Le  Prê- 
teur sur  gages  ,  ou  A  trompeur^ 
trompeur  et  demi  ,  et  de  Le  Tuliruu 
de  liaphaël ,  ou  le  Préteur  sur  ga- 
ges. 1\.  Ar  Hasard  corrigé  par 
C amour,  ou  la  t  ille  en  luit  rie,  aile- 
qiiinade  en  \jiide\illes,  1801 .  \  ^avec 
Ui^jaud).  Molière  a^'ec  ses  amis,  ou 
le  Souper  d'Autcuil .  comédie  hus- 
tonque  eu  deux  acies  el  en  \aude»illes, 
1801,  remise  au  Oiéalre  de-  ^  .i<s 
el  réimprimée  en  18(^6  sous  le  lilre  de 
Molière,  ou  le  Souper  di  AuieuU. 


naturel  J'un  pri>c<irriir  au  |i4rlciiirnl  ,  ujquit 
i  P»rif  le  S  oriiibr»  i-»i,  n  y  mnurwt  |r  i-  mii 
i8J4.  Avocat  «us  cun*#il*  du  roi  el  a  la  c«>«ir 
Je  cas-.>t'On  .  il  I..I  un  àr%  inrinh-et  le»  |>  u%  .!i» 
imifii.v  (hi  barrra*  4e  Pari,.  Ootrr  U.  (i.ce» 
«•e.»  cLiii»  cet  art  cU  et  outra^'t  de  la  jeu 
De<-»e.  il  a  Honiie  etv-ore  au  lUiire  dr.  Jruu'»- 
Artote»,  «Trc  Serri^rrt ,  U  htrr  mal^-  t  tui  «o- 
Kedie  Taod-.ille.  iê..i.  Oa  ■  «k«^  de  .«•  I« 
Cde  <- »//  m,i  en  ^r,,  a»ec  l«  UxU  en  regard  . 
li.re  I".  Pari»,  iSoS,  ia-il.  et  <{o«Jqoea  écnU 
d«  jMTiaprudaaee. 


140 


11 


\1  \>ev\).  (Jn(f  et  deux  foni  trois  , 
comr«l:ep'  t»\ci  l>«  eu  un  acte  el  «u  vao- 
de\ille».  1802  C^  fui  dans  cette  ao- 
oer  ,  cl  non  pa»  \er%  iKO'i  ou  1806  , 
comme  l'a  dil  IWazier  dans  ^oullistoire 
des  petits  tlietUres,  que  le  Diau\ais  état 
des  aliaircs  du  lltealir  àts  Jeunes  Ar- 
li»te.>  awnl  pro%oqué  la  dispersion 
Biomenljnee  de  se^  adeurs  et  le  drpari 
àe\  principaux  pour  MarNeilie,  hrvau- 
f;ierN  fut  du  \o>a^e  a\cc  »on  ami  Jac- 
quelin  ,  le  premier  comme  directeur  et 
cltef  d  nrrlieslie  de  la  lioupe  arobu- 
Lnle,  el  le  »erond  comme  re^ia»cur  et 
ftouOleur.  lu  campagne  ne  fut  pas  bril- 
Uule,  el  quoique,  eu  retenant  a  Paris, 
Ur>au^ier»  eut  fait  re>*tKiice  de  »un 
talent  sur  le  niolon,  d  se  lui  restait 
plus  qu'un  sou  lorsqu'ils  arri^ereiit  à 
la  b^iiierc.  Il  adiela  un  petit  pain 
qu'd  partagea  avec  Jacquelin  en  lui  di- 
MUt  :  iJioims  l'atle  ou  la  cuisse. 
Himl(\t  l'existence  des  deux  anus  dé- 
tint plus  lieureiL^.  I)evau;;iers  la  dut 
au  succès  de  ses  ouxra;;es  dramatiques 
el  suiloui  de  ^e^  cliansoos  J  o» .  Dk- 
SAtGlIlR!^,  lAll,  :i57).  Jacquelin  ob- 
tint un  modeste  emploi  au  ministère 
de  la  guerre  ,  ce  qui  ne  l'empéclia  pas 
de  continuera  travailler  pour  Je  théâ- 
tre. Il  a\ail  donne  ^seull  a  celui  des 
Jeune>-Kle\es  de  la  rue  Daupliine  : 
\11  I^  Mort  de  Arrort,  folie  en  an 
acte,  en  >aiide\illes.  1801  ;  il  y  donna  : 
XI U  (avec  l(ou:;euiont).  L'Amour 
a  i .iiiglai.se ,  180;i.  \IV  ^seul).  iL^ 
A  /<•*  e  de  ma  tanie  Aurore  .  ou  la 
Manie  tlts  romans,  opera-\aude*ille, 
180.1  \V  (avec  l)e^u|;iers).  U  Ma- 
gisUr  et  Li  Meunière,  ou  les  E^co- 
barderies  villageoises,  1803.  XV| 
(seul).  Le  Jaloux  de  village ,  ou  U 
P^it  bo  nrui  jaune,  \S{)\.  A  u  t  héa- 
Ire  des  N  arides  (avec  Dcsauj^iers  )  : 
XN  11.  Gilles  rn  deuil ,  opcra-comi- 

?ue,  1802.   XVIII.  Cric -crac  y    ou 
Habit  de   Gascon,    1803.    XIX 
U?ec  lUgaudj.  Piron  aifcu^U,  1804. 


3a 


me 


XX  (seul).  La  Parenté  de  contre- 
bande ,  ou  Id  Pauvre  diable ,  sifflée 
en  1806.  XXI  (avec  Rochelle).  Pe- 
lisso'i ,  ou  C'est  le  diable,  1807.  Au 
théâtre  du  Vaudeville  :  XXII  (avec 
Rigaud).  Lejaux  Lindor,  ou  t Ha- 
bit ne  fait  pas  tliomme,  qui  fut  mal 
accueilli  en  1807.  Jacquelin  ayant 
été  «lésif;né  pour  suivre  à  Tarmée  le 
maréchal  Berihicr,  fut  nommé  à  son 
retour  sous-chef  de  bureau.  En  1810, 
il  signala  sa  reconnaissance  en  publiant: 
XXlll.  Ode ,  stances  et  pot-pourri 
sur  lu  naissance  du  roi  de  Rome , 
1811,  in-8°.  Mais  bientôt  il  célé- 
bra la  restauration  par  des  hommajjjes 
poétiques.  XXIV.  Henri  IV,  les 
Bourbons  et  la  paix,  1814  ,  in-8", 
où  se  trouve  une  Ode  contre  lu  guerre 
dont  une  strophe  est  absolument  la 
même,  sauf  deux  mots,  qu'une  de  celles 
de  son  ode  au  roi  de  Home.  11  donna 
aussi,  avec  M.  Rouf^einont  :  XXV,  Le 
Chansonnier  des  Bourbons  ,  précédé 
(fiMie  dédicace  à  la  duchesse  douairière 
d'Orléan^  1814,  in-18.  Il  obtint 
alors  la  croix  de  la  Légion-d'Honneur 
et  une  pension  ,  soit  pour  prix  de  ses 
chansons  ,  soit  en  récompense  du  dé- 
vouement de  son  père.  Quelque  temps 
après,  il  fut  nommé  inspecteur  des 
tliéàtres  secondaires  de  Pans.  Bien 
qu'il  n'eût  été  admis  qu'en  1812  dans 
la  société  du  Cateau  moderne,  et  qu'il 
n'y  eîil  donné  que  deiw  chansons  ,  il 
en  fut  nommé  secrétaire-général  en 
1815,  et  dès  l'année  suivante  ses  chan- 
sons y  furent  beaucoup  plus  nombreu- 
ses que  celles  de  ses  confrères  ,  sans 
être  meilleures,  quoique  plus  longues  ; 
car  il  y  en  a  de  soixante  et  quatre- 
vingts  couplets.  Cette  société  s'étant 
dissoute  en  1818,  Jac(juelin  n'a  rien 
donné  dans  le  Réveil  du  Caveau. 
Membre  de  la  société  des  sciences  de 
Paris,  il  mourut  dans  cette  ville,  le  1 9 
aoùl  1827,  dix  jours  après  son  ami 
Désau^iers;  et  M.  Ourry,  son  con- 


JAC 

frère  et  son  collaborateur,  prononça 
un  discours  sur  sa  tombe.  J.es  autres     '2 
ouvrages  de  ce  littérateur  sont  :  I.  Ho-      1 
norine,  ou  Mes  vingt-deujo  ans,  his-      I 
toire  véritable  de  M""  D***,  Paris,      ! 
1803,  3  vol.  in-12,  fig.  II.  Histoire 
des  Templiers,  1805,   ln-12.    III. 
Mujemme,  mes  amis  et  moi-même, 
pot -pourri  en  trois  actes  et  en  vaude- 
villes, pour  la  fête  de  M™®  Jacquelin, 

1812,  in-8°.IV.  La  petite  Galerie 
dramatique ,  dialogue  entre  un  An- 
glais et   le  libraire  Martinet ,   Paris , 

1813,  iu-4"  de  20  pages.  V.  La  Ga- 
lerie des  badauds  célèbres,  ou  Vi- 
vent les  enfants  de  Paris,  chanson- 
nette biographique,  1816,  in-lS,  in- 
sérée aussi  dans  le  Caveau.  VI.  Ijc 
Sang  des  Bourbons  ,  galerie  histori- 
que des  rois  et  princes  de  cette  fa- 
mille, depuis  Henri  IV  jusqu'à  nos 
jours,  Paris,  1820,  2  vol.  in-4°  et  22 
planches.  L'auteur  fut  admis  à  présen-  | 
ter  à  Louis  XVIII  un  exemplaire  de 

cet  ouvrage.  VIÏ.  Manuel  biographi- 
que ,  ou  Dictionnaire  historique 
abrégé  des  grands  hommes,  depuis 
les  temps  les  plus  reculés,  sur  le  plan 
de  celui  de  Chompré,  1825  ,  2  vol. 
in-12.  Jacquelin  termina  sa  carrière 
comme  il  l'avait  commencée  ,  par  des 
ouvrages  dramatiques.  Il  donna  au 
théâtre  du  Vaudeville  :  I  (avec  M.  Our- 
ry). Thompson  et  Garrick,  ou  l'Au- 
teur et  facteur,  1822.^  II  (avec  MM. 
Ourry  et  Chazet).  V Ecarté,  ou  le 
Lendemain  du  bal,  1822,  pièce 
qui  eut  moins  de  succès  que  celle 
qui  fut  jouée  la  même  année  ,  et  sous 
le  même  titre  ,  au  (iymnase  drama- 
tique. A  l'Ambigu- Comique  (avec 
M.  Coupart)  :  III.  Levez  la  toile , 
vaudeville  épisodique,  1820.  IV.  La 
Fête  des  Halles  ,  on  le  Retour  des 
braves,  1823,  après  la  campagne  du 
duc  d'Angoulème  en  Espagne.  W .  Le 
Passage  militaire,  ou  la  Désertion 
par  honneur,   pour   la  fête  du  roi. 


lAC 

IS>3.  A* te  MM.  Coupait  ci  Nufcz 
M.  Iaj  ïète  diiutomnr,  IHii.  Vit. 
If  HrUHu-itun  hnur,  IK'ii    VIII 
I  r    Vrtii  postillon  tir    t'imrs  ,    ou 
Drui  fftrs  fHtur  une  (  le   ronronne- 
mpnl  fl  la  {t\e  de  (^l^arlf^  X),    1825. 
IX  (avec  MM.  (xîuparl  t\  Overna)). 
l.'Kntrre  à  Hfirns.  \H'2:t.    X   (*eiil). 
Lr  /VA  tir  Phurtimonti,  ou  la  For^t 
fiichanire  ,  ^audeviile-fwrif  tn  Iroi* 
acln,  \H'23.  XI    ^s«ul),  aui  CJiarops- 
Kl>$^,  pour   l«  funambuirs  :  /Int 
^ourr  et  ilrmeiur,  ou  1rs  \  rrtus  tir 
llrnri  Jl  ,  pantomime  en  lrol^  actes, 

1  H'Jô  X 1 1 .  /  Vi  trait  tir  (Jutrlrma 
ffir,  ou  F.gintirJ  rt  Immn  .  tir  a  ne 
heroVaue  m  trois  actr*,  repre>enlé  aui 
fète>  de  l'aris,  pour  la  Saint-Charles 
1K2.'».  V.w  société,  au  lliéàlre  de  la 
lianlieue  :  XIII.  Lr  lirurniiis  ^  ou 
n-Mitincr  tir  llrnri  //.IH-Y..  Au 
théâtre  de  Comte  :  XIV.  Iai  Saint- 
Charlrs  tiu  collrgr  ,  lH'i6.  On  ^oil 
<jue  peu  d'auteurs  ont  été  plus  cons- 
tants et  plus  féconds  dans  leur  re- 
connai.vsance  pour  les  Uourbons.  Il 
a^ail  présenté  à  l'Opéra,  en  1S17, 
r Originr  drs  Oriurs  .  pièce  imitée 
des  Grtlcrs  de  Sainl-Foix  ,  mais  oui 
est  re<.tée  dans  les  car  tons  de  l'adminis- 
tration. Il  a  été  éditeui  de  VAlmu- 
nai  h  drs  Gnlrrs,  ou  F.trrnnrs  a  lu 
hrautr,  de  180Va  tKOS,:>  %ol.  in-lH; 
de  YAlmanai  h  tir  C  Amour  rt  tir 
rjmitir,  1H()9,  in-lS,  fi^.;  de  la 
Lyrr  nuiçonniifur,  de  1809  à  1813, 
5  vol  in-18;  du  Chtinsonnirr  tir  Li 
Lourrt  tir  la  villr,  1811  et  1812, 

2  vol  in-18,  et  du  (Jiojisonnirr 
franr-maçon,  1816,  in-lS.  II  a  in- 
séré des  pièces  de  vers  dans  V.llma- 
ncirh  tirs  Musrs  et  autres  recueils  pé- 
riodiques. A — T. 

J  VCQUEMARD  (Ktienne), 
ffraramairien  ,  né  le  2V  sept.  1772  , 
à  Paris,  était  (ils  d'un  >alel  de  pied 
du  comte  d'Artois.  Il  fit  d'excel- 
lentes études  au  collège  de  Louis-le^ 


JVC  J3 

Cirand  ,  w)u>  la  direction  de  Qiaui- 
Dâgne  if'o)  .  ce  nom,  LX,  392),  pour 
lequel  jl  conserNa  toute  sa  vie  une  ten- 
dre afTection  ;  et  sui\it  les  levons  de 
Tabbé  Delille,  qui  lui  inspira  le  ^nût  des 
ters  et  lui  en  enseigna  le  mécanisme.  Ses 
éludes  terminées,  il  apprit  l'italien  et 
ran(;lats,  et  se  perfectionna  dans  la 
rauMQueet  le  de^sln.  Quelques  person- 
nes haut  placées  qui  lui  portaient  de 
l'intérêt  jugèrent  qu'il  pourrait  être 
employé  à  I  éducation  des  princes,  et  le 
firent,  en  attendant,  attacher  à  la  sur- 
veillance du  palais  et  des  jardins  de 
Saint-Cloud.  11  a«ait  alors  dix-huit 
ans,  la  révolution  était  commencée, 
maison  ne  penvait  pas  nue  le  lr<1ne  eAt 
rien  à  en  redouter.  La  journée  du 
20  juin  1792  détruisit  cette  sécu 
rite;  congédié  de  Saint-Cloud,  il  re- 
vint à  Paris;  mais,  atteint  quelques 
mois  après  par  la  loi  sur  ta  réquisition, 
iLfut  incorporé  dans  un  bataillon  et 
dirigé  sur  l'armée  du  Nord.  1^  délica- 
tesse de  sa  santé,  et  suilout  son  ex- 
cessive rovopie  !e  rendaient  impropre 
au  service  actif.  On  le  plaça  dans 
le  bureau  du  quartier  maître,  et  il  fut, 
pend.mt  près  de  deux  ans,  char;;é  de  la 
comptabilité  du  bataillon.  Des  qu'il 
eut  obtenu  son  con,;e  de  réforme,  il 
décida  ses  parents  à  quitter  Paris,  pour 
venir  habiter  liourj^uifjnon  le-Morejf, 
petit  villaj^e  de  Franche-Comté  dont 
ils  étaient  originaires,  et  où  ils  avaient 
conservé  un  modeste  domaine.  Pré- 
voyant bien  qu'il  v  serait  tout-à-(âit 
isolé,  Jacquemard  avait  eu  soin  de  se 
précautionner  de  musique,  de  crayons 
et  d'une  bibliothèque  choisie;  mais,  ces 
ressources  nr  lui  suffisant  par»  pour 
combattre  l'ennui,  il  imagina  de  se  créer 
une  occupation  en  s'imposant  la  tâche 
de  donner  des  leçons   de  grammaire  à 

Quelques  jeunes  gens  de  son  village, 
ans  lesquels  il  avait  reconnu  des  dis- 
fiosiiions.  I>a  rapidité  de  leuj  s  progrès 
'atuchant  de  plus  en  plus  à  ses  élèyes, 


LXV111. 


34 


JAC 


il  rédigea  pour  eux  des  Eléments  de 
grammaire  française,  qu'il  soumit  à 
des  juo;es  compéleiits,  notammenl  à 
Boiiivilliers;  et,  encouragé  par  leurs  siif- 
fraoesjillesfil  imprimer  en  180.'), in-'i-", 
avec  une  dédicace  à  Champagne,  tribat 
tardif  mais  sincère  de  sa  reconnais- 
sance. 11  avait  été  nommé,  l'année  pré- 
cédente, membre  correspondant  de  la 
société  d'agriculture,  sciences  et  arts 
du  département  de  la  Ha!ite-*aône,  et 
il  lui  communiqua  successivement  des 
traductions  en  vers  de  la  première 
Eglogue  de  Virgile;  da  Vieillard  de 
Vérone  de  Claudien  ;  de  la  Maison 
de  campagne  d'Ausone  ;  et  d'un  épi- 
sode du  Prculium  rusticum  de  Va- 
nière  (1).  En  1811, 11  donna  une  nou- 
velle édition  améliorée  de  son  Abrégé 
de  grammaire  française,  in-12,  qu'il 
dédia  à  Fontanes,  alors  grand-maître 
de  l'université.  Les  événements  de 
1814  a^ant  ramené  le  comte  d'Arfois 
à  Paris  ,  le  père  de  Jacquemard  ne 
put  résister  au  désir  de  revoir  le 
prince  qui  l'avait  honoré  de  ses  bontés. 
Admis  à  lui  présenter  ses  hommages  , 
le  vieux  serviteur  ,  à  qui  son  ancien 
maître  tendait  la  main  ,  fut  saisi 
d'une  telle  émotion  qu'il  s'évanouit. 
Les  soins  qui  lui  furent  prodigués  le 
rappelèrent  à  la  vie,  mais  ne  purent 
lui  rendre  la  santé,  et  dès  ce  moment  il 
ne  fil  plus  que  languir.  Jacquemard 
reçut  alors  de  pressantes  Invitations 
de  se  fixera  Paris;  mais,  exempt  de 
toute  ambition,  content  d'une  fortune 
qui  suffisait  à  ses  besoins,  il  ne  voulut 
pas  quitter  son  village  dont  il  fut  nom- 
mé maire,  charge  qu'il  se  h.ita  d'abdi- 
quer dès  que  les  circonstances  le  lui 
permirent.  La  poésie  avait  conservé 
pour  lui  le  même  charme  que  dans  .sa 
jeunesse;  mais  11  s'occupait  d'hisloire, 
de  géographie,  de  statistique,  et  il  pré- 


(i;  Ces  différrute»  pièces  sont  iiii|)riiiii'es  dam 
Jc'l  Mdiuoîm  ii*  Im  40».  lU  U  Haute-Smôn»,  tom . 
II  «t  III. 


JAG 

parait  une  troisième  édition  de  ses  élé- 
ments de  grammaire,  quand  arriva  la 
révolution  de  1830.  Privé  de  journaux 
et  ne  pouvant  ajouter  fol  aux  bruits  qui 
circulaient,  U  allait  s'informer  des  nou- 
velles à  Morey,  sépare  de  Bourguignon 
par  une  roche  élevée,  lorsqu'il  tomba 
dans  un  abîme  où  11  fut  retrouvé  mort 
le  3  aoiit  1830.  Ainsi  (et  c'est  une 
chose  digne  d'être  remarquée)  ,  le 
retour  des  Bourbons  en  France  avait 
hâté  la  fin  du  père,  et  leur  expulsion 
coûta  la  vie  au  fils.  Indépendamment  de 
la  Grammaire  française  et  des  diffé- 
rentes pièces  de  vers  déjà  citées,  on  doit 
à  Jacquemard  un  Centon  composé  de 
vers  de  Virgile ,  adressé  à  Bonaparte 
en  1802,  et  Imprimé  dans  la  Décade^ 
tom.  XXXII,  et  des  Essais  de  fables 
(Besançon,  1820,ln-18),  opuscule 
tiré  à  un  très-petit  nombre  d'exem- 
plaires (Voy  le  Calai,  de  la  biblioth. 
de  M.  Nodier,  1830,  n"  394).  Parmi 
les  livres  qui  traitent  des  principes  de 
la  langue  française,  la  Grammaire  de 
Jacquemard  mérite  une  place  dislln- 
guée.  On  y  trouve  une  nombreuse  sé- 
rie de  locutions  et  de  constructions 
vicieuses  avec  leur  corrigé,  travail  bien 
fait  et  très-utile  aux  commençants.  La 
théorie  des  participes  y  est  développée 
avec  beaucoup  d'étendue.  Enfin  ,  cet 
ouvrage,  en  général  exact ,  et  où  les 
règles  sont  appuyées  sur  des  exemples 
choisis  dans  les  meilleurs  écrivains  , 
atteste  beaucoup  de  recherches  et  d'ob- 
servations de  la  part  de  l'auteur;  mais 
cependant  les  notes  dont  il  est  sur- 
chargé, et  qui  parfois  sont  plus  lon- 
gues que  le  texte,  des  répétitions  fré- 
quentes et  peu  utiles ,  y  jettent  une 
sorte  de  diffusion.  \V — s. 

JACQIEMART  (l'abbé  Ni 
COLAS-TiiinRRi) ,  né  à  Sedan,  vers 
1730,  après  avoir  été  novice  chez  les 
chartreux,  puis  chez  les  bénédictins^ 
fut  successivement  curé  de  Tahure,  des 
Grandes-Loges,  puis  d'Epernay,  de 


SAC 


JAC 


^  ilIrry-Omay  r\  de  ViUfri-devani- 
Mri.cre*.  i.r  •'••  •! ..  .-ffienij  indM|uriil 
ass«i  l'iiisl.!  .11    urarlrir;il 

ëlait  plus  pfuj'  r  .1  ii^urer  sur  dr>  Irc- 
trjui  qur  daii>  la  duiic  r%aii^rliqur. 
(Ja^plliallt  le  leoips  cl  juuaiil  avec  la 
vir,  il  laisviil  a  ^on  \iraire  ht*  deuiirN 
à  remplii  (I  iir  Mni^eail  qu'à  ^on  {>Uj- 
«ir.  Son  rxlnicur    rlâft   peu    a\antj- 

Îeux    et    >a    nuve    plo^   que   ne^ljjrr 
.ui-mrme  a  drcnl   >a  G^nre  daiik  "dr^ 
\risin»ero    parmi    Ir»    Mrin'i^rs    ilr 
/xiTjiW  pul  lir>  en  I7KJ,    pji  Ficmni 
Woa  de  Sloane  J) 


I  r 

II  ,  ' 
Om  ..  ,.r.„..r...  .   . 

I  our  ua  li  »rur  à' 

l.'r»!  %<»  1  purtrail  ij..|  ..   ..     ;•.-  ■  --  -^ 

I/abbé  Jacquemart  portail  dan^  I9  *o- 
cirlé   un   r>c'it    ran-^liqur    «t    ' 
dunt  IfNN.iiliir^  irlj'^^K-m   I  . 
Sa  fijurlii-r  boufionne  ne  f  • 
à  aucun  dr^  lra\e(»  qui  Ne  Irn 
son  c)iem*n    11  amuit  à  fine  de^  nto- 
nurinws  connue  ou  peuj  en  )u;;rr  par 
la  citation  ri  dcs»UÂ,  et  le  plu>>ou>en( 
5a  rime  portait  sur  le  nom  de  la  per- 
sonne a  qui  il   les  adit*»sait.  Se»  >er> 
étaient  $i)u^ent  fnrt  «raxcleux.  11  mou- 
rut en  1^03,  a  N  illerA  (.erua\  dont   il 
a\ait   repri-  la  cure,  aprr>  a\uii  quitte 
celle   de    ViUrrs-de.artt-Mozièies.    11 
a  publif  :  /  i>\it^r  en  vrrs  a  rublHtye 
de  La^iil  liru    l.ie;;e  ,  17ô(»    ,  m-^", 
pitco  !■  l'fsijue,    et   laite  >ans    doute, 
dit  un  liio^taplie,  i^uu   d  lii  iurir  rtuit 
en  4^coitrs.  IJ — 1\  — 1\. 

Di    V:,,,  >■   ,T  DU  Ataoïtai   rt    •.«',.!  <'«?»«, 

I                           i-mp  «t  ch«»  .                -  I  <iHi«  , 

u»r.l  i;^^,  le  la 

>  .  fui  k    U    I  .t.i... 

l  J^natile.  KmXwrr  u 

.    u  ,  il  fut  lie  «««c  . 

(t ...1     lnJUCOOp    de      »rr-    ..r     -..'.rlr 

doot  las  pr«iuicr>  rcuioalciit  à  r«aa«e  1767.  et 
lu  ucnucr*  M>at  da  iSjj).  Il  a  9sltii«,  omu  a 


ja<:(,»m:\iaki  (Nio>la$- 

FRA>n»|s  ,  tirir  du  piiTédcyt,  ué  à 
Sedan  le  "1  o»i..l.if  17:).'»,  y  exerça  la 

Eiofovon  de  libiatic  ri  >  iiut  uu  ca- 
inet  liltetaire  pendant  niutorze  ans. 
l/e>poir  de  faite  de  mrillrure^  afTatre» 
Taltifa  à  Pari^.  en  l77t  ,  niai>  il  ne 
prospéra  pa»  «:  birn  qn  il  réu- 

nit   à    la    pr<  libraire   rellf 

d'li<immr>  de  IclUc^.  Nlaibeureux  ju»- 
qu'a  la  tin,  il  w<Mintt  ibits  rrtie  capi- 
tale, à  riio^pire  <!  r  ,  le  2 
auil  I71MJ.  lia  «  le  %nile 
de  ranuu\me  :  1.  Éirfiriiiuis  ttun 
LUÙù'ij/eur  um/Ti'tatii  uir  U  projet 
iTabolir  teulu^nige  et  ta  truite  des 
nr-^rr^  .  ntl^f3;:r    traduit  de  Tan^lai*  , 

I :  .       I  ..       .    17110.   in  li.   Il 

Hrnuiri^ur.s  J  '  •  '      '   '■/urs 

sur  1rs  trriU'  fa- 

les  de  I*uris,d  lifjti  i  lu  iiuu^'cUc  lir- 
cuiiurifttion  An  \  fc\rier  I7'JI  ^  pur 
urtJre  nuiurrit^ur ,  Paris,  1791  , 
tri-K".  III  Hrniiirt;ttr^  liisturiijues  et 
)  r5  ,  /  oUrgiu- 
.}>rtlrs  .\uppri- 
mre»  duits  lu  vdU  et  juul^ourgs  de 
Paris,  d'après  le  dètret  de  fusseni 
Uèe  naiiorutle  du  '2  fè\frier  1791, 
Paris,  ^lIM,  in-H"  ;  réiiiiphnié  sous 
ce  titre  :T^j  liuines  parisiennes  de- 
^tuis  tu  rri'otiétiun  de  17K'J  et  années 
suieuntes.  u%'er  des  renia rifues  ftis- 
turit^ues,  Paii» ,  1702,  in-S".  IV. 
l.lrennes  aux  èmi^rrs,  ibid..  1793. 
in- 12.  N  .  Le  tlieophîtantrvf*e  de- 
iW/^.pMFr.J*»*.ib.,  I79«,in8". 
Cet  ouvra;;e  fut  saisi  |»ar  la  police.  Tou- 
tes ces  production-^  sont  dignes  d'un  au- 
teur famélique.  M.Quéraid  [Frane 
tin.,  toni.  IV)  lui  attribue:  1"  Les 
ttummages  et  les  vorux  de  la  nglion 
fru-  '■rsentèsà  LL.  MM   fl 

u  i  royale,  Ji'er  un   I)is- 

«•  f<»rl  prlil  ilOWbrr  d't-iriwpljtïe*.  lilrndu-- 
lion  «n  »rr.  rr.iu(ai*  de  U  CJtutt  de  RuJJin  de 
CUudrn'I./.n.lrr».!!'  f.în-">  :  M  celle  de/'.Vrt 
pwi*fM  à  llo. «ce vl^ii<lrr*(P«fU),  •««*.»•»•;. 
dediwau  roi  Lr«uU  XVlll 

3. 


"i6 


JAC 


JAC 


cours,  177-1,  iiî-8**,  dont  l'auteur  est 
l'abbc  Jacquemln  du  Valdaon,  d'après 
le  Suppl.  à  la  France  litt.  (h  1778, 
tom.  111,  par  La  Porte;  2**  Le  nou- 
veau   Mississipi ,    ou  les  Dangers 
d'habiter  les  bords  du   Scioto,  par 
un  patriote  voyageur,  Paris,  1791, 
in-8°,  ouvrac;e  publié  à   la  librairie  de 
Jacquemart,    mais   qui,  suivant  Bar- 
bier [Dict.  des  anonymes ,  tom.  II), 
et   suivant   M.     Quérard   lui-même 
{France  litt.  tom.  Vlll),  a  pour  au- 
teur Roux,   sergent-major  du   district 
des  Prémontrés.  D — R — RetP — rt. 
J  A  C  Q  l  E  M I  \  (Jean-Ber- 
nard), p;éomètre  du  chapitre  métropo- 
litain de  Tours,  naquit  à  Amboise  en 
1720.  Durant  le  lonp;  exercice  de  ses 
fonctions,  l'église  de  Tours  ne  lui  pré- 
senta   aucune  occasion  de  développer 
ses  talents  comme  architecte   dans  un 
ouvrage  de  queliquc  importance ,  et  sa 
scrupuleuse  délicatesse  lui  interdit,  plus 
encore     que    l'engagement     par     lui 
contracté,  de  rien  entreprendre  d'é- 
tranger   au   chapitre  qui  le  salariait  ; 
mais    du    moins  il    consacra  ses  loi- 
sirs à  des  travaux   utiles   à  Part,  Ira- 
vaux  que  sa   modestie   l'empêcha    de 
rendre  publics.  Il  a  laissé^anuscrits  : 
I .  Essai  sur  la  structure,  percus- 
sion et  suspension  des  cloches,  ac- 
compagné de. tables  et  de  douze  plan- 
ches dessinées  par  lui.   Cet  ouvrage  , 
huit  de  longues  méditations    et  d'ex- 
périences  réitérées,   rectifie  dans   ses 
bases  les  plus  importantes,  et  par  une 
thqorie  complète,  celle    qu'on   trouve 
dans  l'Encyclopédie.    Les  démonstra- 
tions en  sont  si.  solides  et  si  claires  qu'il 
eût  pu  devenir  un  guide  sûr  pour  tous 
ccîtjx  qui  s'occupent   de   la  fonte   des 
cloches.  II.  Traité  de  géométrie  pra- 
tique,  remarquable  par  sa   concision, 
sa  lucidité  et  la  simplicité    des  procé- 
dés imaginés  par  l'auteur,    au    moven 
desquels,  pour  les  plans  levés  à  labous- 
«ole,  on  rapporte  en  deux  heures,  sur 


une  seule  méridienne,  ce  qu'on  rap- 
porterait à  peine  en  huit  heures  par 
les  méthodes  connues  qui  exigent  au- 
tant de  parallèles  que  de  côtés.  IIL 
Traité  de  constructions  de  diverses 
espèces ,  accompagné  de  figures  ,  ta- 
bles et  tarifs;  ouvrage  plein  dfe  vues 
neuves  et  remarquable  aussi  par  son 
extrême  concision.  IV.  Un  Traité  de 
charpenterie  contenant,  entre  autres 
objets  ,  la  comparaison  des  combles, 
suivant  la  méthode  de  Philibert  De- 
lorme  ,  avec  ceux  des  meilleurs  con- 
structeurs modernes  ;  ensemble  le  nou- 
veau système  perfectionné  de  l'auteur 
qui,  outre  l'avantage  de  l'économie 
sur  les  deux  précédents,  concilie  la  lé- 
gèreté de  l'un  avec  la  solidité  de  l'au- 
tre. Le  trjivail  de  Jacquemin  est  ac- 
compagné d'une  série  d'excellents  pro- 
fils de  formes  de  charpentes  retroussées 
suivant  ce  nouveau  système.  Il  mourut 
à  Tours    en  1786.       L — s — d. 

JACQUEMIX  (Jacques - 
Alexis),  évêque  de  Saint-Dié,  ne  à 
Nancy,  le  .4  août  1750,  entra  de  bon- 
ne heure  dans  la  carrière  ecclésiasti- 
que. Il  remplit  d'abord  les  fonctions 
de  vicaire  dans  une  des  paroisses  de 
cette  ville,  montra  du  talent  pour  la 
prédication  et  un  grand  zèle  pour  assis- 
ter les  criminels  condamnés  à  moif. 
En  1778,  il  fut  nommé  professeur  de 
théologie  à  l'université  de  Nancy;  mais 
à  l'époque  de  la  révolution  ,  ayant  re- 
fusé de  prêter  serment  à  la  constitu- 
tion civile  du  clergé,  il  se  retira  en 
Allemagne  où  il  rejoignit  M.  de  La 
Eare(Koj.  ce  nom,  LXIII,  53i), 
évêque  de  Nancy,  qui  le  fit  son  vicaire- 
général.  C'est  en  cette  qualité  que 
l'abbé  Jacquemin  rentra  en  France, 
où  il  courut  de  grands  dangers  sous  le 
règne  de  la  terreur.  Lors  du  concor- 
dat de  1801 ,  M.  de  La  Fare  ne  don- 
na pas  sa  démission,  mais  s'abstint  de 
tout  exercice  de  juridiction  épiscopale 
dans  son  diocèse,  et  il  chargea  encore 


JAC 

>on  vicairc-f;énèal  tir  reniire  publique 
une  JrrUialioii  à  rr  hU]e\.  IMu«  lard 
Jjrquriniii  piofc^sa  h  pliilo>op)iic  au 
l^cet  Je  Nauru  II  re^ut,  en  ISJ!),  la 
croif  Je  la  I.r-^inn  il' Honneur  ri  fut 
nommé  à  I  '  ■  Saint -Die  .  mais 

l'i^e  cl  Ir  le  runtrai;;nireiiâ 

au  bout  Je  nurli|ur>  anuee>  Je  se  Jrmel- 
tre  Je  son  sir^e.  Il  maorul  le  15  juin 
1832  Jans  «a  \ille  natale,  où  il  «'était 
retiré  avec  le  tilrc  Je  chanoine  é^éque 
du  chapitre  Je  Saint  Denii.  Outre  un 
traité  imprimé  Jr  Imarruitionr  l'rC' 
bi  liU'ini.  faisant  partie  J'uii  r«>urN  J^ 
théoloj^ie  qu'il  se  proposait  Je  publier 
a\ec  l'abbe  MeziH,  son  collègue  a  l'u- 
niversité Je  Nancy,  projrt  »jne  les  évé- 
nements politiques  l'cmprc  hrient  Je 
réaliser,  on  a  Je  lui  un  .ILrffirtUs 
mémoires  Je  l'abbé  Bairuel/^oiir  a/t- 
i^ir  a  Chistuirr  Wu  jitt  oùinismr  , 
Hambourg  (Nano).  IKOl.  Paris, 
18!7,  2  vol.  in-'l2.  Dans  les  pre- 
■ières  années  Je  la  révolution  ,  Jac- 
quemin  fut  un  Jes  coljaborateur^  Ju 
journal    intitulé  :   le   (ÀitliuJuiue    de 

ffaïUY'  l*  — HT. 

JAC(,>1  EMI.XOT  (Jfan- 

Ignace),  comte  Je  l'emi  le,  né  à  Nai- 
>'es-<levant-Uar  en  Lorraine,  en  1758, 
était  avocat  au  parlement  Je  Nanrv  lors- 
que la  révolution  cnmmenra.  Ainsi  que 
la  plupart  Je  ses  coiifrciCN,  il  s'en  Jé- 
dara  partisan,  mais  avec  moJeration,  et 
défenjit  avec  courage,  Jcs  le  commen- 
cement, plusieurs  Je  ceu\  qui  s'r  mon- 
trèrent opposés.  Ce  fut  lui  qui  en 
1790  sauva  J'une  mort  inévitable. le 
général  Malsei;;ne,  envové  par  le  roi 
pour  répi inier  Hinsurrec'.ion  Je  Nancv , 
et  que  les  solJals  révoltés  voulaient 
massacrer.  Plus  larj  ,  Jacqueminot 
sentit  le  besoin  Je  se  faire  oublier,  et 
par  la  il  échappa  aux  périls  Je  la  ter- 
reur. Le  département  Je  la  Meurlhe 
Pavant  nommé  en  1797  l'un  Je  ses 
députés  au  conseil  des  cinq-cents,  en 
mém£  temps  que  lioulay  Je  la  Meur- 


JAC  37 

tlie,  il  \  suivit  i  p«u  près  U  alac  h- 
i;ne  politique  que  son  compatriote,  et 
jouit  comme  lui  J'unc  «^ranJe  faveur 
auprc.  Ai\  Directoire,  surtout  après  la 
révolution  Ju  18  frucliJor  an  V,  oè  il 
se  ran^^ea  avec  beauruup  de  xèle  da 
parti  Jes  prescripteurs.  Du  reste  il  ne 
s'occupa  ^uere  Jans  celte  assemblée 
que  J'alTaires  juJiciaires  et  aJminisira- 
tives,  et  il  se  fit  reraarc^uer  Jans  Jeux 
occasions  par  sn  opinions  contre  la 
librrte  Je  la  presse.  J'aborJ  quanj  il 
s'agit  Je  mettre  les  joumaui  sous  le 
pouvoir  Ju  Directoire  ,  ensuite  en 
combattant  un  projet  Je  Kerlier  qui, 
seloîi  Im)  ,  laivsait  trop  Je  latituJe  aut 
1  S'elant  montré  l'un    Jes 

I'  parll^ans  Je  Itonaparte  ï 

lepoq'ie  du  18  brumaire,  il  fut  nom- 
me >enaleur  peu  Je  temps  après,  et 
obtint  Miccessivement  la  senalorerie  Ju 
Jépariement  Ju  NorJ  ,  et  les  titres 
de  comte  de  Haro  et  de  commandant 
Je  la  Le;;ion  J'Ilonneur.  C'est  au  mi- 
lieu Je  ces  honneurs  qu'il  mourut  à 
l'aiis.  le  13  juin  1813.  Il  fut  inhumé 
Jan»  les  caveaui  Je  l'e^lise  Je  Sainte- 
(feQevtève,alor>  nommée  le  Panthéon, 
et  consacrée  par  un  Jccret  impérial  à  la 
sépulture  Je>  ^ranJs  iiomnies.  Son  con- 
frère [.JcépeJe^rononqa  m\\\  oraison 
funèbre.  M  —  l»j. 

JAC(,>LK.\IO\T  (Victor), 
uaturalisle  et  vrova^eur  fiançais,  était 
né  à  Pans  le  6  août  1801.  Doué 
J'une  grande  lacililé  et  d'une  intelli- 
gence remarquable,  il  fit  de  très-bonnes 
éludes.  Il  les  avait  terminées  à  (|uinze 
ans;  son  pcre ,  homme  instruit  (1), 
souhaitait  ({u'il  se  destinât  à  la  méde- 
cine. Victor,  emportf  par  l'arJeur  Je 
cultiver  les  sciences  qui  ont  pour  objet 
l»<onnaissance  Je  la  nature,  se  livra 
Jes  ce  m.)uient  avec  pas>ion  à  ce  pen- 
chant, l 'n  acciJent  qui  manqua  Je  lui 

lion  pabUqu».  H  membre  t\>\  LribanaU»»!  mort 
le  9  norcmbre  ■  f  36. 


38 


JAC 


être  funeste  ne  put  ralentir  que  passa- 
o;èremeiit  ses  progrès  sans  nmnrlir  son 
zèle.  Dans  le  laboraloire  de  chimie  où 
il  travaillait,  un  vase  plein  de  cyano- 
gène (acide  prussiqne)  se  brisa  entre 
ses  mains;  il  respira  quelques  parties 
de  ce  fluide  si  délétère,  el  fut  sur-le- 
ciiamp  atteint  d'un  commencement  de 
phthisie  lanngée.  Les  médecins  dé- 
sespéraient de  sa  vie.  11  fallut  qu'il 
renonçât  à  suivre  les  cours,  et  qu'il 
allât  passer  le  temps  de  sa  convalescence 
à  la  campagne.  Accueilli  à  la  Grange 
par  le  général  Lafayctte,  ami  de  sa  fa- 
mille, il  dut  au  séjour  des  champs  le 
dévelopement  de  son  amour  pour  la 
botanique  :  «  C'est  à  la  Grange ,  dit- 
«  il  dans  une  lettre  datée  de  l-SSS, 
«  que  je  commençai  à  former  mon 
«  herbier  au  mois  de  mai  1818,  » 
Ce  goût,  quand  sa  santé  fut  un  peu  ré- 
tablie, lui  fil  roinier  des  liaisons  avec 
plusieurs  hommes  éiuinents  dans  les 
sciences,  et  le  mit  particulièrement  en 
rapport  avet  Raruond  dont  la  conver- 
sation était  exliémement  attrayante  et 
instructive.  Il  puisa  dans  ses  entretiens 
avec  ce  savant  un  goût  très-vif  pour  la 
géologie,  et  dej)uis  cette  époque  l'élude 
des  plantes  et  des  roches  l'occupa  prin- 
cipalement. Il  V  con<^ra  les  instants 
qu'il  passa  chez  M .  de  Trac)  à  Para)  en 
Bourbonnais,  chez  M.  le  comte  Jaii- 
bert  à  Ilerrv  dans  le  Berry.  Il  fit  en 
1821 ,  avec  ce  dernier  à  qui  ces  scien- 
ces sont  familières,  des  excursions  dans 
les  montagnes  de  l'Auvergne  el  du  Vi- 
varais,  dans  les  Cevennes,  les  Alpes  du 
Dauphiné  el  de  la  Suisse.  Vers  1824, 
ses  rapports  avec  M.  Jauberl  avaient 
cessé:  "  Mais,  dit  il,  je  lui  ai  pardonné 
'«  de  .s'être  séparé  de  moi,  et  les  sou- 
«  vcHirs  de  notre  amitié  me  sont  re- 
"  devenus  bien  doux  aussi,  •»  Quel- 
que temps  après  des  chagrins  plus  sé- 
rieux le  déterminèrent  à  quif'er  la 
France:  «  J'étais  alors,  écrit-il  plui 
"    lard  à  son  frère  ,  M.  Porphyre  Jac- 


,    JAC 

«<  quemont,  au  faîte  des  malhews  de  la 
«  vie.  »  Ce  frère  l'accompagna  jusqu'au 
Havre  où,  le  3  novembre  1 82G,  il  s'em- 
barqua pour  les  Etats-Unis  de  l'Amé- 
rique du  Nord.  Il  allait  y  joindre  un 
îîlitre  de  ses  frères,  M.  Frédéric  Jac- 
(fïiemont.  Il  parcourut  une  partie  des 
élats  du  Nord  et  du  Canada,  vit  le 
Saut  du  Niagara,  manqua  de  se  noyer 
dans  la  rivière  de  ce  nom,  et  navigua 
sur  le  lac  Erié.  A  Philadelphie  un  in- 
cident inattendu  le  décida  à  un  nouveau 
vo\agc.  Un  Français  avait  tenu  des 
discours  qu'il  jugea  offensants  pour  les 
siens  et  pour  lui  même;  les  lois  des 
Etats-Unis  ne  lui  laissaient  pas  la  possi- 
bilité de  l'appeler  en  duel  11  lui  donna, 
par  une  lettre,  rendez-vous  dans  l'ile 
d'Haïti  où  il  arriva  le  18fév,  1827;  son 
frère  Frédéric  étalt^lors  au  Port-au-Prin- 
ce; Victor  Jacquemont  passa  trois  mois 
dans  ce  pays,  attendant  inutilement 
son  adversaire,  mais  ne  négligeant  pas 
rhistpire  naturelle.  Il  rapporta  en 
France  de  belles  collections  de  plantes 
et  de  roches.  Ce  séjour  dans  une  partie 
d'Haïti,  mal  famée  parmi  les  Européens 
pour  sa  .salubrité,  lui  fit  prendre  con- 
fiance dans  sa  santé  qui  n'avait  nulle- 
ment été  altérée;  el,  résolu  de  profiler 
de  cet  essai,  il  'rédigea  un  plan  de 
voyage  aux  Indes-Orientales,  qu'il  sou- 
mil  aux  professeurs  du  muséum  d'his- 
toire naturelle.  L'intelligence  qui 
avait  présidé  à  la  formation  de  ses 
collections,  connues  de  plusieurs  d'en- 
tre eux  ,  détermina  l'approbation  de 
son  [)lan  ;  il  est  nommé  voyageur  na- 
turaliste du  gouvernemçnl.  Aussitôt  il 
se  prépare  à  son  départ,  et,  muni  de 
leltre.sde  lecommandat'rons  de  ses  amis 
de  Paris,  il  court  à  Londres.  Quelques 
semaines  passées  dans  cette  capitale 
suffirent  pour  faire  apprécier  ce  qu'il 
valait;  il  s'assura  ainsi  d'avance  dans 
l'Inde  de  puissantes  proteriions  aux*- 
quelles  il  dut  plus  tard  de  pouvoir 
poursuivre ,  sans    obstacle  ,    se»    re- 


JAC 


JAC 


rlierrh««  dans  àes  rouuètt  où  U  p\a- 

;   .   r  .î.      !..  ..     rr»4    l'All- 

•  M       «lutïnl»  lies 

iitrt  ne  »uiil   pa»  Atliii:<.  in- 

•  ni.  l)*u^  aii>  a* aiii  M»ii  dé- 
part puui  l'indr  il  it^nural  ran;;lai»;  il 
l'a\ail  appiuk  au&  Kuis-l  nis.  11  i'rn- 
harqua  mit  la  roi  «cl le  Aj  ZrUr  qui 
jpparrilla  de  IWesl  le  'ift  aoàt  1S2H  : 

'  Je  &UIS  cuuteiil,  éeril-il  à  ftou  (lère 
"  Poiphue  ;  le  (lire  que  au  .^lisfAc- 
lionne  »oil  ^ra^eel  >enrusr,  rc!ae»t 
X  laulile.  Il  >  a  lutte  au  tlrdaii^  de 
"  mm.  Ma  rrllrMoii  do'l  fonihaHre 
"    ineN  \m\< 

"     M\e*,  lli.i      •  1.  •     r 

n  Bêles  fait  laiie...  Manilriiaiilru  re- 
«  i^ardanl  l'axenir  de\aot  moi,  je  vims 
M  uue  penle  plus  ou  luuiiis  c<^ale, 
••  mais  ruiDlanle,  qui  me  ronduil  né- 
•«  cessairemenl  vrr>  une  position  liouo- 
«  rableel  Nali>fu»»aiite  dan»  ce  monde. 
M  C'est  loi,  l'orplnre.  qui  m'a»  jeté 
N  daos  celle  pro;;ie«>i<)n  nmMclle  de 
n  bonheur.  Tu  e-  lu  cjum*  de  ce  que 
M  je  serai,  de  ce  que  jr  Irrai  a  présent; 
«<  je  ne  rej^relle  plu^  rien  du  pa>>e.  m 
I^  navire  n'arriva  qu'en  mai  1h29  à 
Calcutta.  Durant  relIrtra^erxT de  neuf 
mois,  il  avait  relaclie  à  Tenenfle,  à 
Uio  de  Janeiro,  au  cap  de  lumne-hls- 
péraoce,  à  Uourbon,  à  l'ondicliért. 
1.AS  lettres  de  Londres  et  de  Fans,  dont 
Jacqueronnt  était  porteur,  lui  valurent 
un  accueil  bienveillant  et  ihlleur  de  la 
part  des  pnncipaux  per&onna^e^  de 
rinde-An;;lai5C.  Cet  accueil  ne  se  dé- 
mentit jamais.  «  l)esreroniiiiandaliuns 
«  honorables  que  j'ap|H)rtai^,  échl-il 
««  à  M.  \  tclur  de  Tracv,  m'ont  ou- 
«'  rert  toute&  le*  maisons  respectables. 
«<  J'ai  choisi  celle  où  je  pensais  devoir 
««  être  le  pluj  libre  pour  me  livrer  sans 
«  partaje  à  mes  études;  telle  atait  été 
«  la  prevovance  de  mes  amis,  qu'il 
«  n'est  pas  un  seul  homme  m  ce 
«  pav$,  que  je  n'y  aie  vu  avec  plaisjr  et 
«  profit,  auquel  je  ne  nac  fusse  adressé 


.<  directement  d'Kurope.  »  Pami  le» 
pf  '  nt  deTaml- 

tit  il  ciici  lord 

W  lUiJiu  l««iiîiiKà,  ^uuNciiieur  |;éné- 
lal  àf  l'Inde  Jaruncinont  se  montra 
reconnaissant  :  •«  C  est,  dit  il,  l'homme 
••  oui  fail  |>eut  être  le  plus  d'honneur  i 
••  1  Kuropc«t  a  l'Asie.  »  San»  %c  lais- 
."^er  distraire  par  les  passe-temps  agréa- 
bles que  lui  mena;;eait  l'obli^rance  de 
^«s  hôtes,  il  profila  des  m*  moi*  qu'il 
resta  a  Calcutta  pour  prendre  coniiaiv- 
sauce  des  collection»  d'hi^^toue  naturelle 
qui  s'>  irouvrni,  pour  cunviillrr  tous 
les  ou\-  •^   sur    l'Inde,  dans 

relie  V  >     u<ba)  ,  k   Mad^a^,  et 

1rs  volumineu»  lecueiU  impnme.s  en 
Vnj;leterre,  pour  appiendre  l'hindous- 
tao  et  le  persan,  pour  se  familiariser 
avec  les  mtrurt  et  les  usages  du  pajs. 
Ses  prepaialifs  terminai,  il  se  mil  ea 
route  le  'JO  novembre,  avec  un  traio 
qui  est  indispensable  dans  ces  contrées 
ri  dont  il  est  le  premier  à  plaisanter. 
Il  marchait  vers  l'ouest  :  le  iil  décem- 
bre ri  filtra  dans  r»riiarès,  la  cite  sainte 
des  HiridiMi'.  .  le  2.J  janvier  1H30,  il 
^isiiaii  <!r diamant  de  l'anna, 

en  Boi  Ir  20  frNrier  il  était 

a  A;;ra  .  le  tO  mars  a  Ddili  où  il  fut 
présenté  au  ^raml-mo^ol,  qui  aujour- 
d'hui est,  comme  cliacun  sa-t,  un  sim- 
ple pensionnaire  des  .\nj;laii.  (Jiemi- 
nant  rns<iile  au  nord,  il  ajleint  Her- 
douar,  heu  de  pèlerinage  célèbre,  i 
l'endroit  où  le  Can::e  sort  des  monta- 
gnes ;  I  '  •  'renU  gra- 
dins d.  .-à  Djam- 
nautri,  au&  souicc>  de  la  l),emiiali;  le 
iô  mai  il  était  entouré  de  .commets 
C'iuvcrl.s  de  nei;;es  perpétuelles,  l^  10 
juin  il  eut  la  bonne  fortune  de  rencon- 
tra, k  l'erali,  Jamcj  (ierard,  depuis 
lono;-temps  accouluraé  aux  courses  dan^ 
ces  raonia^nesiraj.  CtBvBD,  LXV, 
•292).  Le  21  juin  il  fut  fêté  à  Simlah 
par  M.  kenuedv,  ofGcier  d'arllllerie 
anglais,  qui  commandait  d^ns  ces  can? 


4o 


JAC 


tons.  Le  gouvernement  britannique  y 
laisse  l'apparence  de  la  souveraineté  à 
une  quantité  de  roitelets  qu'il  empêche 
de  se  nuire  réciproquement,  et  de  pres- 
surer leurs  sujets.  Ces  ombres  de  po- 
tentats rendirent  de  grands  honneurs 
à  Jacquemont,  qui,  avançant  toujours, 
franchit  le  13  juillet  le  ghat  ou  col  de 
Borendo,  et  descendit  le  long  des 
flancs  septentrionaux  de  rHimalaVa , 
dans  la  vallée  du  Setledjc  supéi  ieur.  Il 
s'approchait  de  la  frontière  de  l'empire 
chinois  ;  il  ne  put  aller  vers  l'est  au- 
delà  de  Bekhar  dans  le  Tibet ,  où,  le 
15  août,  un  officier  de  cet  état  lui  en- 
joignit de  retourner  sur  ses  pas;  il 
essaya  en  se  dirigeant  vers  l'ouest 
d'être  plus  heureux.  Au  milieu  de  ces 
cantons  reculés  il  éprouva  un  plaisir 
bien  réel  en  recevant  une  lettre  du 
général  Allard  qui,  de  Lahor,  lui  faisait 
des  offres  de  services  auprès  de  Rendjit 
Singh,  maharadjah  des  Seikhs;  c'était 
d'un  heureux  augure  pour  les  projets 
futurs  du  jeune  vovageur.  Toutefois  sa 
tentative  pour  entrer  sur  le  territoire 
chinois,  dans  le  voisinage  de  Lari, 
échoua  le  '2  sept.  ;  le  village  de  Ka- 
naour,  d'où  il  érr!\!t  ,  est  à  3700 
mètres  d'altitude,  il  avait  cause  à  Ka- 
nem,  autre  village  de  ce  pays  ,  avec 
M.  Csoma  de  Kœrœs,  Hongrois,  qui 
a  passé  plusieurs  années  dans  le  Ti- 
bet pour  eu  étudier  la  langue.  Re- 
tournant alors  vers  le  sud,  Jacquemont 
repassa  l'HimalaVa  ;  le  23  oct.  il  re- 
vit Simiah  ,  le  l^'^  nov.  Sabathou;  le 
21  un  m?ssager  lui  remit  à  Chahran- 
pour,  dans  les  plaines  de  l'HindousIan, 
une  Gazetic  de  Calcutta  qui  annon- 
çait les  événements  de  juillet.  Jacque- 
mont les  avait  prévus  :  il  se  hâta  d'arri- 
ver à  M'rat,  grande  station  militaire 
entrele  Gange  et  laDjemnah.  Tous  les 
officiers  civils  et  militaires  se  réunirent 
pour  lui  donner  une  fêle  :  à  cette  occa- 
sion il  y  prononça  en  anglais  un  dis- 
cours qui  prouve  une  grande  facilit»?  à 


JAC 

s'exprimer  dans  cette  langue  ;  Il  témoi- 
gna convenablement  sa  reconnaissance 
et  enleva  les  suffrages  de  ses  auditeurs  ; 
puis  il  se  rendit  à  Dehli,  et,  en  mars 
1831,  entra  dans  la  Pendjab.  Rendjit 
Slngh  prit  en  amitié  le  jeune  Français 
avec  lequel  il  pouvait  causer  des  scien- 
ces, de  la  philosophie,  des  arts  et  des 
usages  de  l'Europe.  Ce  souverain,  peu 
tempéré  dans  ses  habitudes,  voyant 
que  Jacquemont  était  aussi  sobre  que 
laborieux  et  instruit,  conçut  pour  lui 
un  intérêt  qu'il  nianifesta  par  des  dons, 
des  largesses,  des  témoignages  d'affec- 
tion. Jacquemont  eut  la  permission 
d'aller  où  il  voudrait  :  des  lettres-pa- 
tentes recommandaient  de  le  bien  trai- 
ter ;  des  escortes  lui  furent  données. 
Sans  la  protection  et  la  munificence  du 
maharadjah,  Jacquemont  avec  des  fi- 
nances très-bornées,  et  hors  des  limites 
de  la  domination  anglaise,  n'eût  pu 
poursuivre  ses  recherches  dans  cette 
partie  de  ITnde  ;  comblé  des  bienfaits  de 
ce  prince,  il  lui  fut  possible  de  les  con- 
tinuer. Toutefois  le  gouverneur  d'une 
forteresse,  dans  les  montagnes  au  nord 
du  Pendjab  ,  eut  le  tort  de  l'arrêter 
et  d'extorquer  de  lui  une  somme  de 
cinq  cents  roupies  (  douze  cent  cin- 
quante francs)  :  il  lui  eût  même  fait  un 
mauvais  parti  sans  l'assurance  et  le 
sang-froid  du  jeune  voyageur  qui  finit 
par  lui  inspirer  du  respect.  Rendjit 
Singh,  instruit  de  ce  méfait,  dédomma- 
gea Jacquemont  de  ses  pertes  ;  et,  à  sa 
sollicitation,  se  contenta  de  chasser  le 
bandit  et  de  lui  enlever  tout  ce  qu'il 
possédait  ;  dans  le  premier  moment  il 
avait  ordonné  qu'on  lui  coupât  le  nez 
et  les  oreilles  s'il  se  présentait  à  Lahor. 
«  La  manière  dont  le  roi  parle  de  moi 
«  dans  ce  firman,  dit  notre  jeune  com- 
<(  patriote,  exprime  une  grande  consi- 
«  dération,  une  bienveillance  réelle  et 
«  a  produit  ici  \\\\  effet  merveilleux.  » 
C'cst.du  Cachemire  qu'il  écrivait  ainsi  à 
son  pire  ;  il  ëtait  entré  dès  les  premiers 


JAC 

jour»  et  Mai  dan»  celte  contrée  ciue 
dnii  Kuropérns  ««dUment  avaient  ilr- 
crileaxaiil  lui:  KrançoU  llrtnin  en 
166i,  (tcof|;e  Forslrreu  MH'2  j^/  ny . 
Ur.R7iiKn  ,  IV,  30.'»,  ci  VurvsTtn, 
XV,  -i^JO).  I^  gouverneur  remontra 
trè»-cropre*»é  à  le  servir  en  tout,  et 
JjcquemonI  (liiit;ea  cumroe  il  voulut 
&e>  luvesii^ilious  i  il  remonta  ver»  l'est 
jusqu'aux  »ource^  Jm  l)|aleai.  11  aurait 
bien  \oulu  tiaverser  les  muuia;;iie»  de 
ce  côlé  pour  iletcemlie  daii>  le  bassin 
(lu  Srlledje  .  If«  obsladrs  pliv^ques 
rcinpèclieiciil  d'effetUicr  ce  drsveiu. 
Il  Gl  «ne  excursion  ver>  le  nord,  revint 
a  Seniu^oi ,  capitale  du  (  ^clieimre,  M>r- 
lit  de  ce  pav»  en  seplrmbte,  par  le  col 
de  l'\r-l*anlial,  ri  p4i>a  prr»  du  ;i«-nc- 
ral  Allaid  liutl  )Oui«  à  \aiiit»ii,  \ille 
sainte  des  SeiLii»:  il  eut  ii  une  audience 
particulière  de  Kendjit  Sin^ii  (|ui  lui 
offrit  la  \ice-ro\aute  du  ClacheoiHe: 
«•  Je  ae  moquai  beaucoup  de  lui  et 
H  4e  sa  propoMiion,  qui  n'éiait  sans 
«  doute  qu'un  pie^e  pour  connaître 
M  ma  peni4*e.  Il  me  plut  davantage 
»  encore  qu'a  mon  payia4;e  a  I^lioi , 
•*  sans  doute  par  1rs  caieeœs  qu'il  me 
•<  fit  >'  ^lettre  a  son  père  du  19  oct.'. 
InMté  par  ce  prince  a  raccumpa<;ner 
dans  l'entrevue  qu'il  allait  avoir  avec  le 
^ouverueur^eneial  de  l'Inde,  à  Kou- 
pour  sur  1rs  riveN  du  Setledje,  il  mon- 
tait un  élepliaul  (^ui  marchait  cùte  à 
cote  avec  celui  de  Uendjit  Sin^li,  et 
discourait  comme  un  oracle  avec  lui. 
•'  Gimme  il  n'y  avait  pas  la  plus  petite 
•<  herbe  à  raraasNrr  dans  les  plaines 
•«  sablonneuses  cl  brûlées  que  nouslra- 
"  versions,  je  ne  rej;rettais  pas  de  ne 
««  pouvoir    m'arrèler  selon  ma  fanlai- 

"   s'c Le  21    octobre  j'ai   pris  de 

«  mon  cher  Ucndjil  Sinuliraon  con^é 
M  deljnitif.  Notre  dernieic  entrevue 
M  fui  longue  et  infiniment  amicale. 
"  l'iciidjil  me  fil  mille  caresses;  il  me 
«<  prit  el  me  serra  les  mains  plusieurs 
"   fois,  aux  bordées  les  mieux  servies  de 


JAC 


4i 


«  flatterie,  ou,  sans  le  cbcrtber,  je 
«  roeitaiK  un  pru  de  senriment;  je  ne 
«  laiNsai  le  roi  qu'a  la  nuil  noire,  lui 
M  laix^ant  tous  ^lr^  virux  itour  sa  gloire 
•  et  sa  pro»pef  lie  ;  ri  emportant,  tn 
-  échange  de  ces  paroln  dorées,  m 
•<  klielal  ihabil  d  honneur  magnifi- 
M  que.  Kn  levcnant  a  ma  lente,  je 
M  trouvai  que  le  roi  >  avait  envnvé  en 
M  CMlre  un  présent  Je  cinq  cent»  rou- 
«  ^les.  '•  Muni  d'un  firinan  de  Heiid- 
jit  Siiighet  d  un  autredu  colonel  \N  a- 
dc,  af^Mil  d  iienent  britanni- 

oMpréftdr  ^KtmddMidaatt, 

Jaiquemonl,  se  driubant  ■OitUfint 
aux  pompes  qui  l'ailendaicat  tmr  la 
bords  du  Sel  led|e,  prit  lai  outr  de  Mon- 
di,  ou  il  vitila  les  mines  qui  prevnlent 
beaucoup  d'intrrrl  groh»;;iqur  ;  le  rad- 
jah que  l(eiid|il  luia^aildi-pemt  comme 
le  plus  récalcitrant  de  >es  vassaux  des 
moulagnes  fut  pour  lui  tres-anical. 
1^  \i  i.ovembre  Jacquemont  repassa 
le  Setledje.  et  à  sa  grande  satisfarlion 
se  trouva  de  nouveau  sur  le  lernloire 
britannique.  Son  nombreux  équipage 
lui  devenant  mutile  ,  il  renvoya  cliex 
eux  tous  le-s  Seiklis  qui  formaient  son 
e&coite,  et  qui  a  sa  recommandation 
furent  lecoropensr».  il  rencontra  ses 
anciens  amis  a  Sabathuu.  a  .Simlah,  à 
Drhh  ou  il  revint  le  IGdereinbre.  Il  y 
vit  M.  .Viexandie  Hurne>,  j  qui  nous 
devons  un  Vo>agc  lutérevant  dans  les 
pav>  de  l'Asie  compiis  entre  l' Indus 
et  la  mei  (^pienne,  et  qui  fait  de  lui 
une  mention  honorable.  (Ve^l  a>sez 
à  temps  pour  rejoindre  à^^el<|ues 
lieues  le  camp  du  gouverneur -gênerai 
qui  venait  de  quitter  la  ville  impériale: 
«  J'ai  passé,  dit-il,  deux  journées 
•«  charmantes  avec  lord  et  ladv  ^^  il- 
«  liam  UenlincL.  -  Ueveou  ensuite 
pour  quelques  jours  à  Deli^  afin  de 
faire  embaïquer  sur  la  l)|emnah  ses 
collections  de  tout  genre  ,  il  expri- 
me ,  dans  SCS  lettres  ,  l'espoir  de 
terminer      heureusement     le     vo)a^c 


JAC 


JAC 


qu'il  va  entreprendre  dans  les  contrées 
raéridlonaies  de  Tlnde.  Il  quitta  cette 
ville  le    14  février  1832,   passa  par 
Firouzpoiir,  Djevpoiir,  la  ville  la  plus 
magnifique  de  ri nde,   Adjmir,   Tchit- 
tore,   Oudjein,  Indore,    Mondleisir; 
il  avait  ainsi  traversé  le    Radjpoutana, 
le  Mevar,  le  Mulva,  le  Kandeïclie  ;  à 
iNIondleisir,  ville   la  plus  chaude   de 
rinde,   il    rentra    dans  la  zone  tor- 
ride,  et  au-delà  .d'Assir^our,  fameuse 
forteresse,  il  fut  bientôt  dans. le  Dek- 
han,  qui  est  la  partie  de  Tlnde  au  sud 
de  la  Nerbeddah  ;  il  y  "\lt   successive- 
ment Adjintab,  Aurenpabad  et  Daou- 
letabad;il   visita   les  ruines    merveil- 
leuses d'Elora,  Le  22  mai,  il  écrivit  de 
ce  lieu  célèbre  à  son  père  :  «  Entre  les 
«   montagnes    de    \  indhia    et  celles 
«  d'Adjintah,ddnslesvalléesdelaNer- 
«   beddah  et  du  Tapti,  je  m'étais  ha- 
«  bitué  parfaitement  à  4-2  et  43  degrés 
«   de  chaleur  ;  j'avais  presque  fini    par 
«f  trouver   qu'il   n'y    avait    rien     de 
((  trop.  »  Jusque  là,  malgré  ses  gran- 
des fatigues,  sa  santé  n'avait   pas  été 
altéiée;il  avait  su  par  un  traitement 
que  lui  suggérait  son  jugement  droit, 
et  en  faisant  usage  des  ressources  que 
les  lieux  lui  fournissaient,  se  débarrasser 
des  atteintes   de    quelques    maladies. 
Mais  il  n'en  fut  pas  de  même  quand, 
après  avoir  passe  le  Godaveri  et  s'être 
approché  des  sources  de  la  Kistnah  ou 
Chrichna,  sur  le  revers   oriental   des 
(jhàtf,  il  eut  séjourné  quelque  temps  à 
Pouna,^ns  la  saison  des  pluies.  Tout 
dans  ce  V^nde  est  mêlé  <le  bonheur  et 
de  malheur,  il  venait  d'apprendre   le 
16  juillet  q^i'il   était  nommé  chevalier 
de  la  I  égion-d'Honneur  ;  peu  de  jours 
après;  une  attaque  violente  et  soudaine 
de  dysien^rie  le  retint  plusieurs  jours 
dans  stn  iX et  lui  causa  des   doulein-s 
cruelle* .  Après  sa  guérison,  il  visita  l'île 
de  Salsette  pour  en  étudier  les  roches, 
et  fut  lorcé  d'aller  beaucoup  au  soleil, 
sur  cette  côte  insalubre,  dans  la  saison 


la  plus  malsaine  de  l'année  ;  il  en  résulta 
du  malaise  dont  il  se  plaint  dans  sa  der- 
nière lettre;    il   arriva  épuisé  à  Bom- 
bay le  29  oct.,  et  dès  le  lendemain  il 
fut  obligé  de  garder  le  lit.  Il  reçut  de 
M.   J.   Nicol,   négociant  anglais   qui 
l'avait  logé  chez  lui,    des  soins  qu'il 
n'aurait  pu  attendre  que  d'un  vieil  ami'. 
Cependant,  au  bout  de. quelques  jours, 
il  quitta  la  maison  de  ce  négociant  pour 
se  faire  transporter  dans  un  apparte- 
ment commode  et  spacieux,  au  quartier 
des  officiers  malades.  Il  avait  connu 
tout  de  suite  la   nature  de  son  mal,  il 
en  prévit  l'issue.  Dans  sa  dernière  let- 
tre adressée  à  son  frère  ,  M.  Porphyre 
Jacquemont  ,  en   date  du  1*^'  déc.  , 
il  s'exprime  ainsi  :   «    Il  y  a  trente- 
a  deux  jours  que  je  suis  arrivé  ici  fort 
«  souffrant  et  trente-un  que  je  suis 
«  au  lit.  J'ai  pris  dans  les  forêts  em- 
<f  pestées  de  l'île  de  Salsette,  exposé 
«   à  l'ardeur  du  soleil  dans  la  saison  la 
«  plus   malsaine  ,  le    germe  de  cette 
«  maladie  ,    dont  au  reste  j'ai   reçu 
«  souvent ,    depuis    mon    passage    à 
«   Adjmir  en  mars,  des  atteintes  sur  la 
<f   nature  desquelles  je  m'étais  fait  illu- 
«   sion  ;  c'étaient  des  inflammations  du 
«  foie.    Les  miasmes  pestilentiels  de 
<f  Salsette  m'ont  achevé.  Dès  le  début 
«   du  mal,  j'ai  fait  mon  testament  et 
«   réglé   mes  affaires......  Tu   devras 

"  trouver  quelque  consolation  dans 
«f  l'assurance  que  je  te  donne  que , 
«  depuis  mon  arrivée  ici,  je  n'ai  cessé 
K  d'être  comblé  des  attentions  les  plus 
'<  afiectueuses  et  les  plus  touchantes 
«  d'une  quantité  d'hommes  bons  et 
«  aimnblcs.  Ils  viennent  me  voir  sans 
<f  cesse,  caressent  mes  caprices  de  ma- 
«  lade,  préviennent  toutes  mes  fantai- 
«  sies...  L'excellent  Mac-Lennan (son 
«  médecin)  a  presque  compromis  sa 
«  santé  pour  moi...  ;  la  maladie  heu- 
»  feusement  lire  à  sa  fin  qui  peut 
«  m'étre  fatale,  quoique  ce  soit  plus 
«  probable  ainsi  ;  »  puis  il  dit  adieu  à 


JAC 

sM  Mm  ,  l*nieN(C  i  caatoUr  )«w 
p^c.  ri  finit  aiit»!:  •<  Adieu  !  o)i  !  que 
M  vous  rtr^  «iinr>  «Je  volt  r  p4u>re  \  ic- 
••  lor  !  —  Adieu  |)Ottr  la  lier iiirtr  fols  ! 
•«  éirndu  sut  le  dos.  |«  iir  puis  eci  ire 
M  qu'avrr  un  cra^nn  .  dr  peur  que  ret 
•«  caiarleres  ne  s'rlfarrnl.  l'eicellmt 
«  M.  Nicol  ciipirra  celle  lelUr  a  la 
«•  pJuBe,  afin  que  )C  soi»  sur  que  lu 
«<  pmuM  lire  n«s  dernières  pcnsm.  • 
Il  »i(*ne  el  ajoute:  «  J'ai  pu  M0iier  ce 
«  que  l'admirahle  M.  Nicol  a  biea 
-  voi4u  fi>piei  \dieu  eurore.  me» 
•«  aa^  !  1^  :^  décembre  m  iVinbiil 
loul  le  temps  de  va  malaiie.  Jjcqur- 
mont  ton»ena  une  Iianquillile  el  un 
ronleulemrnl  pa  i;i  Is.  Le  7  drc.  ,  a 
SIX  lieure>  du  mim  ,  il  empira  eiilouié 
de  M.  Nicoi  el  de  M.  >br  l.«-^naii, 
el  ^arda  jusqu'au  drniier  iiioinenl  l'u- 
sage de  ses  lacul  les.  Le  lendemain  ai 
soir,  il  fui  enterré  avec  Irt  lioiineHit 
inililaires,  ctuiime  rlievalier  do  k  Le« 
^loiid' Honneur  :  le&  oiemlireN  du  ;;ou- 
▼ernemenl  el  l»eauroup  d  aulie^  per- 
sonnes asj»isierenl  à  son  convoi,  l'ne 
épilapKe  1res  simple,  qu'il  a^ait  indi* 
qoee  la  veille  a  .M.  Nicol.  fui  ^avee 
sur  b  pierre  qui  rouvre  sa  tombe, 
('■race  aux  toins  de  cet  exreiient 
homme,  lou*  les  objets  d'Iiistoire  na- 
turelle laisses  a  Koioba)  par  Jarque- 
mont,  set  papiers  el  d'autres  objet» 
fareni  exped:e&  en  t'rance.  On  a  dt 
lui  :  I .  A  otr  sur  le  ftisemeni  du 
Gypse  dans  les  Alftes  ^insérée  daiii 
les  Annales  des  sciences  naturelles, 
IH'ii,  tom.  III).  O  petit  ecnl  an- 
nonçait deia.  3U  jiitii  iiiriil  «1rs  ^rnlc- 
pues,  beaiuoiipde  va^mHi'  e:  »i  insina- 
tion.  11.  Lurrespondanre  de  l  ùtur 
Jarquemont  aver  sa  Ju mille  et  fUu- 
sieurs  de  ses  amis  .  pendant'  son 
voyage  dans  Finde  ilH^H  18:12 >, 
Paris.  iKiii;  i'^edil.,  |K:i.-,,  1  vol. 
in-8",  avec  le  poriraii  de  l'auletir  et 
une  carte  litlio^raphiée  de  l'Inde.  Ces 
deux  Tolumes  renferment   cent  lettres. 


JAQ 


43 


Oa  y  lit  «Uc  détails  piqiants  mit  mo 
vo>a^e',  sur  sev  a\enlurei  avant  de 
piller  la  Kianrr,  mu  tout  ce  qui  le 
concerne  pei»oiiitellemrnl.  Klles  unt 
ol»»"!»!!  (Ml  l^f^  ./.iiiii  i,incis  cbcx 
'iicnl  de  >cience 
l'oui  ne  pas  en- 
un  \ei  les  |;eus  du  monde  .  iiraninuins 
rlir>  MMit  lUNtroctives.  (^lle»  uicnic 
aui  M>at  adievNee.s  à  de»  Kav.iMi<»  ne 
s  appesantissent  pas  sur  les  ub|cls  de 
leurN  éludes.  riuMettr>  de  ceux-ci  en 
uni  reçu  qu'iU  n'ont  \      '  .t  Tim- 

pie^Moii    Stinprie.  <  onde 


4  ua-iiii  quille*  lui  pji  4f  liaient  ; 
M.  l'uiplnie  Ja<quemont  romballit 
celte  idée.  >  iclor  l'en  (cmemc  Je  1 1 
auil  1831  ;  «  lu  as  eu  rai!»ou  de  top* 
M  po»er  à  ce  qu'un  piibLal  aucune 
•*  fMirlie  de  mes  lettres.  1 1  est  iropus^t- 
«  Ue  qu'elles  ne  »oicot  pas  érnic» 
X  ^\t<  trop  de  ne^li^^ence  pour  plaire 
«  a  d'autres  qu'a  de>aaiis.  »  Il  ajoute 
que    ces     I    '  u^   >oul    prématu- 

rées.  Ninur  '    .  C^  li\re  a  été 

ju^e    trop  ^      irierie 

pat  de^  Imi  com- 

pris :  \\s  uni  cru  que  J4ii|uriNi>iit  se 
posait  coiuiiie  un  lionime  a  bonnes 
lortuues,  el  »e  vaaiail  «le  ncs  succe« 
aupie:»  de*  dames  ties-re>peclabies. 
Tout  liomme  rai»onuable  n')  verra 
que  refiusiou  de  senlimenls  bien  ua« 
lurelle  à  quiconque  éprotve  une  vive 
satisfactioB,  (|uei  quej»oil  son  à^e.  Il 
ne  tarit  pa>  «'ans  les  leinoi;;na;^c.s  de 
^.l  ;_f.iii;utlt-  (>our  !(*^  bt>iit«->  dont  lurd 
et  1.1. i\  \\  ni. .1111  iW-m  iuL,  ainsi  que 
d  aulics  Arij,iaiN  iiâbilauls  de  I  Inde 
l'ont  comble.  M.  Hurnes,  dont  nous 
3voiis  cite  If  nom  plus  haut,  rend  jus- 
lice  à  J.icquemont.  11  parie  de  lui 
comme  d'un  homme  tres-atiréable  en 
société;  il  ajoute  qu'il  était  très-réservé 
sar  tout  ce  qui  concernait  son  expédi- 
tjon,  mais  si  bien  au  fait  âe  toutes  jcs 


44 


JAC 


nouvelles  de  Tlnde-Supérieure,  qu'on 
aurait  eu  de  la  peine  à  le  prendre  pour 
un  étranger.  «  Ce  jeune  Français, dit-il,* 
«  a  laissé  dans  l'Inde  beaucoup  d'amis 
«c  pour  pleurer  sa  perte.  Je  ne  crois 
«  pas  que  les  lettres  publiées  peut-être 
«  prématurément  par  sa  famille,  de- 
«  puis  sa  mort,  sulfisent  pour  le  faire 
«  connaître  convenablement.  Atten- 
«  dons  le  résultat  de  ses  recherches 
«  savantes  »  (tom.  I*^'  de  son  Voyage, 
2®  édit.,  pag.  183).  On  reconnaît,  en 
lisant  la  correspondance  de  Jacque- 
mont,  qu'il  a  pour  son  père  un  profond 
respect  et  une  vive  tendresse  ;  ses  frères 
ont  une  part  égale  à  son  affection  ;  tous 
ses  amis  lui  sont  chers,  son  attachement 
pour  eux  est  ardent  et  ne  se  ralentit 
dans  aucune  occasion  ;  il  regrette  que 
quelques-uns  se  soient  éloignés  de  lui. 
Un  point  est  blâmable  dans  cette  cor- 
respondance, nous  y  reviendrons  plus 
tard.  III.  Voyage  dans  l'Inde  pen- 
dant les  années  1828  à  1832,  in- fol. 
avec  planches,  Paris,  183.>,  et  années 
suivantes.  Au  moment  où  nous  écri- 
vons cette  notice  (juillet  1840),  il  a 
paru  vingt-sept  livr?isons  de  cet  ou- 
vrage ;  il  doit  en  avoir  cinquante.  Le 
texte  imprimé  s'arrête  au  jour  où 
Jacquemont  est  repoussé  de  la  fron- 
tière chinoise.  Ce  livre  contient  des  dé- 
tails précieux  sur  la  géologie  et  la  bo- 
tanique, sur  l'aspect  physique  de  l'IIin- 
doustan  ,  du  Cachemire  et  de  quelques 
cantons  du  Tibet  ,  des  observations 
sur  l'etlmograplne,  des  remarques  sur 
l'état  moral  et  polilijjue  des  pjys  et 
des  peuples.  Si  les  jugements  de  l'au- 
teur paraissent  parfois  hasardés  ,  du 
moms  sa  franchise  lui  sert  d'excuse, 
mais  on  ne  peut  qu'applaudir  dans  des 
occasions  nombreuses  à  sa  sagacité;  il 
la  manifeste  de  même  dans  sa  Cor- 
respondance. Ses  opinions  sont  dé- 
mocratiques; mais  il  trouve  que  l'af- 
franchissement des  anciennes  colonies 
es{(agnoles  a  été  un  malheur  pour  elle:;, 


JAC 

'parce  qu'elles  n'étaient  pas  préparées 
à  un  régime  d'indépendance  et  de 
liberté.  Haïti,  quelque  grossière  que 
soit  son  organisation  politique,  lui  pa- 
rait encore  la  république  ou  plutôt  le 
gouvernement  modèle  parmi  tous  ces 
nouveaux  états  :  c'est  le  seul  où  l'on  ne 
se  tue  pas  sans  cesse.  Il  dit  que  la  dorai- 
nation  des  Anglais  est  bienfaisante  pour 
les  contrées  où  ils  l'exercent  dans  l'O- 
rient, et  se  moque  cordialement  des 
rêves  que  l'on  débite  à  Paris  sur  ce 
sujet.  Il  dit  ailleurs  :  ««  J'ai  ri  et^beau- 
«  coup,  et  d'autres  Européen^aussi 
«  ont  ri  des  grandes  phrases  orienta- 
«  les  du  général  Lamarque  sur  la  Kus- 
«  sic,  le  Dalkhan,  le  Caucase,  la  Per- 
«  se,  la  Chine  et  la  cruelle  oppression 
«  qu^  font,  peser  sur  cent  millions 
«  d'Indiens,  prêts  à  se  révolter,  les 
«  perfides  insulaires  ;  je  souhaiterais 
«  que  l'ordre  légal  allât  son  train  à 
«  Papîs,  comme  du  cap  Comorin  aux 
«  cimes  de  l'HimalaVa.  »  Ses  ré- 
flexions sur  la  révolution  de  juillet 
sont  remarquables.  Il  demande  ce  que 
ses  amis,  qui  ont  regretté  son  absence 
dans  cette  circonstance,  eussent  pu  faire 
raisonnablement  de  lui,  qui  se  sent 
incapable  d'occuper  convenablement  un 
emploi  politique.  Il  fait  preuve  de  bon 
sens  en  littérature;  l'annonce  des  spec- 
tacles, au  bas  des  gazettes  de  Paris,  lui 
apprend  comment  la  scène  a  été  envahie 
par  des  pièces  monstrueuses  :  «  Tout 
«  cela  est  de  bien  mauvais  goût.  En 
«  mettant  sous  la  remise  les  Grecs,  le  s 
«<  Uomains  et  les  marquis  de  notre 
«  vieux  théâtre,  nous  n'avons  pas  été 
«  heureux  dans  le  choix  de  leurs  suc- 
«  cesseurs.  »  Il  les  appelle  Messieurs 
de  l'horrible.  Dans  toute  sa  corres- 
pondance on  ne  lit  pas  une  seule  phrase 
désobligeante  pour  qui  que  ce  soit.  11 
s'exprime  très-gaîment  sur  quelques 
actions  de  Hendjit  Singh;  c'est  que  ce 
prince  se  permettait  en  public,  dans  sa 
conduite,  des  éc^u'ts  par-  trop  scanda- 


JAC 

Irux.  —  I^  plaisir  que  l'on  éprouve  i 
U  Irdurf  dr^  Ifllrr»  dr  Jar(|urnioiit 
est  |>eiiiblcmcnl  interrompu  pai  *on 
septiciMTir  pou^^r  jusqu'à  rinrredulilf 
la  plus  pruiinnrrr.  Ce»  nirnic>  senli- 
roeiils  se  rflruuvmt  dans  >on  {^rand 
ouvraf;e.  rrol>jl>lrnirnt  il  eût  cUànf^é 
ces  passades  a\aiit  de  pré%eiiter  »on 
livre  au  public.  —  M.  Adrirn  de  Jus- 
sieu,  di;;ne  succeaaeur  de*  ;:iand>  bo- 
tanistes de  ce  nom  ,  a  fait  imprimer, 
dans  les  \ou\'rlUs  .(imulrs  du  mu- 
séum iffusiturr  tuiturellt  (tom.  Il, 
pa|;.  300]  ,  une  notice  sur  Jarque- 
roont  ,  dont  il  fut  l'ami.  F.lie  nous 
a  rté  utile  pour  la  rrdartinn  de  rrt  ar- 
ticle: nous  en  emprunterQn>  encore 
quelque?  trait*  :  «•  l'eisonne  ne  savait 
<«  mieux  que  VidorJacquemont  inspi- 
H  rer  l'amitié:  les  souvenirs  qu'il  a 
•«  laissés  partout  l'attestent  :  son  es- 
•«  prit  original,  prompt  à  saisir  les  ri- 
«  dirule^,  et  à  soutenir  en  |ouant  le 
•«  paradoxe,  son  caractère  trop  indr- 
«<  pendant  pour  se  soumettre  toii)our>  à 
««  tous  les  mena|;ements  minutieux  im- 
B  posés  par  la  société  ont  pu  sans  doute 
•«  effrayer  quelquefois  et  éloi;;ner  mo- 
«  menlanement  de  lui  ceux  qui  lecon- 
«  naissaient  mal:  on  ne  <e sentait  en- 
•<  suite  que  plus  attire  vers  lui ,  on  lui 
•«  savait  plus  de  ^ré  d'une  bonté  et 
•«  d'une  sensibilité  vraies  qui  ne  se  tra- 
«  hissaient  jamais  sans  se  montre' 
•«  d'une  bienveillance  qui  n'était  ja- 
«  mais  banale  ,  mais  >ouveir  in^é- 
«  nieuse  ;  surtout  on  était  llatté  de 
•<  son  amitié,  parce  qu'on  le  sa>aii 
««  juo;e  éclairé  et  diflicile.  Son  instruc- 
«  tion  variée  et  solide,  avec  son  ori- 
*«  {finalité  d'aperçus  et  d'expressions, 
««  donnait  à  sa  conversation  un  piquant 
««  intérêt,  que  se  rappellent  tous  ceux 
•'  qui  en  ont  joui.  Il  a\all  le  vrai  cou- 
«  raf;e  ,  celui  de  tous  1rs  moments, 
«  oui  retléchil  et  agit  vile  en  présence 
.«  du  danger ,  qui  ne  le  recherche  ni 
'<   ne  le  craint.  >»   Les  %ure$  des  cou- 


JAC 


45 


pes  de  terrau» ,  les  vues  de  villes  ,  de 
villa»;eN,  de  montagnes  et  de  pa)sa^es, 
le»  portraits,  sont  j;ra\es  d'après  le> 
devsins  de  .lacf|uemont.  Kn  reconiui;»- 
sance  des  sernce*  qu'il  a  rendus  à  la 
science,  deux  ^enre*  de  pLntrs  ont  été 
établis  sous  le  nom  de  Jut  tiurnwntia, 
l'un  appartenant  à  la  famillr  des  com- 
posées, tribu  des  .SenecionideeN  et  mm- 
pienaiit  nue!llue^  espèces  dr  l'Inde 
publiées  ùjiii  I  histoire  de  xon  N  o>  j^e  ; 
l'aiitie.  faisant  partie  de  la  Uiuillc  des 
convolvulacées,  est  composée  d'espèces 
américaines.  K— *•*. 

JAr.V>rKS{M*TMiKi  Joskph). 
l'un  des  plus'  savants  théologiens  du 
\Nlir  <>ierle,  naquit  en  1  Tilt»  à  .\rc- 
Sous  -  Monteuot  ,  bailliaf;e  de  Sa- 
lins. Ses  heureuses  di.sposilions  déci- 
dèrent .ses  parents,  quoique  pauvres,  il 
ren\o>er  continuer  ses  études  à  l'uni- 
versité de  llesançon  ou  il  les  termina 
d'une  manière  tre>  brillante,  \vaiil 
embrasse  l'elat  ecclésiastique,  il  rem- 
plit d'abord  les  modestes  fondions  de 
Mcaire  de  campagne;  maisil  fui  appelé 
peu  de  temps  après  à  Ixjns-le-Saulnier 
pour  ^  pr()feiNer  la  philosophie  et  les 
mathemalique>.  Au  bout  de  deuv 
ans  il  obtint  la  chaire  de  mathé- 
matiques nouvellement  établie  au  col- 
le<;e  de  Besançon,  et  ne  tarda  pas  à 
justiGer  la  haute  idée  qu'il  avait  fait 
concevoir  de  ses  talents.  Un  mémoire 
sur  une  propriété  des  courbes  qu'il 
avait  découverte  lui  valut  des  élo;;esde 
d' Alembert;  et  tes  nombreux  élèves  qu'il 
présentait  chaque  année  aux  examens 
pour  l'admission  aux  écoles  de  l'arlille- 
rie  et  du  pénie  lui  méritèrent  l'estime 
de  l'abbé  Bossu t ,  avec  lequel  il  en- 
tretint long  temps  une  correspond.mcc 
.^cientiGque.  Nommé  membre  de  l'aca- 
démie de  Besançon,  en  1773,  il  y  lut, 
le  jour  de  sa  réception,  un  précis  de 
la  vie  des  mathématiciens  francs-com- 
tois (1    ;  enfin,  à   la    mort  du   savant 

(OC«o«>raçe.   •>"»'   q^e   le»  différent  mr- 


46  JA.C 

Bullet  (Voy.  ce  nom,  VI,  253),  il  lui 
succéda  comme  professeur  de  théolo- 
gie à  l'université,  et  se  montra  (lio;ne 
d'occuper  une  cliaire  que  la  réputation 
de  son  prédécesseur  avait  rendue  très- 
diftîcile.  Quoique  o;rand  mathématicien, 
l'abbé  Jacques  n'avait  pas  su  calculer 
ses  dépenses  de  manière  à  les  combi- 
ner avec  ses  ressources.  Sa  bonté  na- 
turelle lui  avait  fait  contracter  quel- 
ques dettes  qu'il  était  assez  embarras- 
sé d'acquitter.  En  refusant  de  prêter 
le  serment  exi^é  des  fonctionnaires 
ecclésiastiques ,  il  se  priva  de  tout 
moyen  de  payer  ses  créanciers.  Il  sortit 
de  f  rance  en  1 79 1 ,  et  se  retira  d'abord 
à  Fribourt;,  puis  à  Constance  où  il  ne 
vécut  que  du  faible  produit  de  quelques 
leçons  de  p;ramrtiaire.  L'un  de.sescom- 
pao;nons  d'exil,  l'abbé  Lambert,  était  à 
Constance  lorsque  Jacques  y'arriva. 
«<  Ce  me  fut,  dit-il,  une  chose  pénible 
«  devoir  un  tel  honimedansune  cham- 
«  bre  sans  feu ,  vêtu  d'un  mauvais  ha- 
«  bit  râpé,  et  oblipjé  à  sorixante  ans 
tf  de  colporter  par  un  temps  très-froid, 
te  de  maison  en  maison,  son  français 
u  et  son  allemand  ;  il  avait  appris  par 
«  cœur,  non-seulement  la  f:;ranimaire 
w  de  GoltsThed ,  mais  encore  l'énor- 
«  me  dictionnaire  de  la  lanf!;ue  alle- 
«  mande  en  deux  f^ros  \oliimes  in-4**  ; 
«  et,  à  quelque  ligne  qu'on  le  nut,  il 
u  continuait  sans  manquer  ni  dépla- 
«  cer  un  seul  mot;  qu'on  ju^e  par 
ce  là  de  sa  mémoire  prodigieuse.  Ses 
«  talents  n'étaient  point  inférieurs  : 
«  av^c  un  mérite  aussi  extraordi- 
K  nalre,  il  était  la  modestie  même  ,  et 
<(  ne  se  plai;;nait  pas  d'une  posr- 
«  tion  dont  tout  le  monde  p;émissait.» 
{Mémoires  de  Jurnille  ,  192).  Heu- 
reusement l'abbé  Jacques  parvint  à 
se  placer  chez  un  riche  particulier 
de  Munich,  qui  lui  confia  l'éducation 


moires  lus  par  l'abbé  iacqnes  à   l'aeadcmie  de 
Besancon  ,  aont  cob— rr^  «t— 6  les  regittres  de 

celte  compagnie. 


JAC 

de  ses  enfants:  Après  le  concordat  de 
180t,  il  se  hâta  de  rentrer  en  France, 
et  s'établit  à  Paris  oii  il  s'occupa  de 
rédiger  les  observations  que  son  ex- 
périence l'avait  mis  à  même  de  faire 
sur  l'enseignement  des  langues.  A  la 
création  des  académies  en  1810,  il  fut 
nommé  doyen  de  la  faculté  de  théolo- 
gie à  Lyon.  Il  passa  le  reste  de  sa  vie 
dans  l'exercice  de  cette  place  ,  et  mou- 
rut le  16  février  1821,  à  l'àgç  de 
quatre-vingl-cîiKj  ans.  On  a  de  lui  :  I. 
Prœlectioiies  iheologicœ,  Besançon, 
1781-86,  7  vol.  in-12.  Ce  cours  de 
tliéologie  devenu  rare  est  assez  recher- 
ché. 11.  Preuves  convaincantes  de 
la  religion  chrétienne,  en  forme  de 
dialogue  à  la  portée  de  tout  le  monde, 
Neufchatel,  1793  ;  Paris,  1804;  Dole, 
1812,  in-12.  La  première  édition  est 
suivie  d'une  rp/i//rt//o«  des  principes  de 
l'église  constitutionnelle,  que  l'auteur 
supprima  depuis  par  amour  de  la  paix. 
ÏIl .  Nouvelle  grammaire  allemande, 
d'après  les  principes  de  Gotlsched  et 
Juncker,  avec  un  petit  Dictionnaire 
français-allerrtand,  Strasbourg  (1795), 
petit  in-8"  de  134  pag.;  elle  areu  plu- 
sieurs éditions.  IV.  Eléments  de  la 
grammaire  française,  Paris,  1804, 
in-12.  V.  Démonstration  simple  et 
directe  des  propriétés  des  parallè- 
les rencontrées  par  une  sécante ,  ibid. , 
1804,  in-8".  VI.  Moyens  de  dou- 
liler  au  moins  les  progrès  de  la  lan- 
gue latine ,  ibid.,  1804,  in-12.  VIL 
Moyen  peu  dispendieux  et  générale- 
ment applicahle  de  mettre  les  enfants 
en  état  de  traduire  la  plupart  des  au- 
teurs la'insà  l'âge  où  l'on  a  coutume 
de  les  envoyer  aux  premières  écoles  de 
latinité,  ib'id.  ,  180."),  in-12  VIII. 
La  logique  et  la  métaphysique  rap- 
pelées à  leurs  principes,  ibid.,  1805, 
in-12.  IX.  Les  traits  les  plus  inté- 
ressants de  l'histoire  ancienne  et 
de  l'histoire  romaine,  tirés  des  au- 
teurs latins,  et  liés  par  des  «oRimaires 


MC 

des  antres  Ciits  hi)tonq«e«  ,  ibul  , 
182(),â  vol.  in- 12.  CVl  une  indue 
lion  dr*  Siirrationes  e.uerpUt,  rlc, 
d«  Dumnurhrl  (/'<«> .  ce  Dura,  I.V11> 
142).  L'abbé  Jarqur»  a\ait,  liit  on, 
romposé  un  ouvrage  >ur  le»  il  ren- 
iions At  !V^!  c  Je  France  à  la  6ti 
du  Wlir  sirtir;  mais  il  le  ieia  au 
feu,  parce  «jur  \ts  principes  qu'il  v  de- 
fendait  nV'.i'fiii  point  m  \^^:nv^n^r 
a^f^' 
Ollf  ^ 

diie.  L'y  a  éie 

prononce  .1     :   .  .  :    1.         r on  par 

J.-ll.  Rrchet  {Vu},  ce  nnra,  LV||, 
4!)2).  On  trouve  ue«  notices  $ur  cet 
écrivain  dan«  Wimi  de  la  rrli^ioti 
XXMI  ,  I4i7  ,  cl  dans  V  Annuiitrr 
Jirrrutugi^ue  At  M.  Maliul ,  IHJt, 
1>I0  i:l  W— $, 

4AC\>l'i:T(Pin»nn.n*àr,re 
Bohie  dans  le*  d»" 
XVII'^  siècle,  se  liM. 
du  droit  et  fut  re^^u  a^utjt  ju  pat  le 
tnent  de  Paris  ;  mais,  sur  la  fin  de  sa 
vie,  il  eit)bras>a  l'elat  rcrl«->ia*lique  et 
fut  promu  aux  ordres  sacre>  Il  mou- 
rnt  dans  sa  ville  natale  en  176G.  On 
a  de  lui  :  I.  Ahrègi^  du  (ummentairr 
de  ta  coutume  de  Tuarame.  etc., 
Auxerrre,  1761,  2  vol  in-V°.  I)e^ 
exemplairi>  de  cet  ou\7a;;e  son!  intllu- 
léi  ;  Ibrrgf  général  du  tomnirn- 
taire  de  toutfs  les  coutumes  et  des 
autres  lois  munin'pttles  en  usage 
dans  les  dijférentes  ftriH'inces  de 
France,  Paris  ,  176V  ,  *J  vol  in-i''  ; 
mais  ce  n'est  qu'un  ciian^ement  de 
frontispice.  II.  Traité  des  fiefs.  Pa- 
ins, 176>,  iu-1-2.  III.  Traité  des  jus- 
tires  tie  seigneurs  et  des  de^'oirs  en 
dépendant ,  ibid . ,  1 7 ti  i .  i  n- 12 .  I V . 
Ui  rlef  du  paradis, on  Prières  clwe- 
tiennes  ,  extraites  des  meilleurs  li- 
bres d'église,  ibid.,  1766,  in-1-i. — 
Jacquet  de  Maizet  (  Louis-Sebas- 
tien), prêtre,  né  à  Naocy  en  1716, 
fut  bibliothécaire  du  prince  de  Paar  i 


JAC  <, 

\  ienne  en  Autriche  ;  obtint  un  cano- 
nicat  au  cidlè^r  de  Saint- Jtan  à  Var 
iovie,  etre\iuia  Vifime  uù  il/ut  nom 
mo  professeur  d*hi-.limc  et  dr  ;;éo^ra- 
pllie  à  l'aradcmie  militairi-  dr  cette 
>ille.  Il  niuuiut  le  17  août  ISOO.  ()n 
a  de  lui  :   I     lltHirs   de    -  ^ 

Virnne,  in-8".  II.  hArmr 
/'  /'.  tion  ul'i  f^rr  dr 

I  terrestre,  ibid., 

.111.  Eléments  de  fliis- 

ine,  ancienne  et  mo<lerne, 
ibid.,  17.'>*»-.'»6,  iii-8  '    C^es  deu»  der - 
oirr%  ouwa^es    sont   anoinmei.     IV 
Le  militaire  citoyen,  ou   tlmploi  des 
hommes,  Vienn»,  1759  ,  in  K"  ;  Pj 
ris,  1760,  in  12.    V.    Eléments   de 
r histoire  antienne ,    Vienne,   1763, 
in  S".    VI.    Eléments  de    F  histoire 
d*  lllenmgne.  ibid,   1760-70,  in-xS" 
VII     Prrtis  de  rrlntririté,  ou    Ex- 

f- intentai  et  thét trique  des 
s  électriques, \\)\A.,  1776, 
m  S  .  \  III.  lettre  tPun  abhr  de 
]  ienne  a  un  de  ses  amis  a  Pres- 
Ifourg,  sur  Félei  trophore  fterpétuel, 
ibid.,  1776,   in-S**   (anonyme). 

P-RT. 

JA(:<0i:ET(JEA5-CLAir>E), 

pamphlétaire  obscur,  qui  ne  peut  être 
omiN  d^ns  la  liiographie,  pui^fjue  «-on 
norp  ligure  dans  le^  mémoire^  du  temps, 
éuilnftvers  17:îO,  à  I^ns-le-Saul- 
nier.  Fils  et  neveu  de  magistrats  ho- 
norables,  après  a\oir  achevé  ses  étu- 
drN  à  ruiii>ersité  de  Fiesanron  ,  il 
exerça  d'abord  la  profession  d  avocat , 

fiuis  acquit,  en  1763,  la  charge  de 
irutenanl  particulier  au  bailliage  de  sa 
ville  natale.  Il  avait  épousé  quelque 
temps  auparavant  la  fille  du  greffier  en 
chef  du  parlement  de  Doinbe.s,  qui  lui 
av'ilit  apporté  urte  dot  considérable. 
Tout  semblait  lui  promettre  un  sort 
heureux;  mais  il  dis^pa  protnptement 
sa  fortune  par  sesprodij;alilés,  et  pour 
soutenir  son  luxe  cul  recours  à  des 
moyens  que  réprouvait  la  déhcatesse. 


48  JAC 

Forcé  de  vendre  sa  charge,  il  laissa  sa 
femme  à  Lons-le-Saulnier ,  et  vint  en 
1772  à  Paris,  où  il  vécut  d'abord  des 
bénéfices  qu'il  faisait  sur  la  vente  des 
livres  prohibés.  Il  parvint  à  se  f^ire 
donner  le  titre  d'inspecteur  de  la  li- 
brairie étrangère,  et  prit  alors  d'un  fief 
près  de  Salins,  possédé  par  sa  famille, 
le  nom  de  La  Doye.  On  lit  dans  les 
Mémoires  secrets  (XXII,  181)  qu'en 
1777  il  s'offrit  d'aller  en  Hollande 
arrêter  le  comte  de  Mirabeau ,  et 
qu'ayant  gagné  sa  confiance,  en  se  don- 
nant pour  un  officier  que  des  malheurs 
obligeaient  de  s'expatrier,  il  s'empara  de 
sa  personne  et  le  ramena  lui-même  pri- 
sonnier au  château  de  Vincennes.  Mais 
on  voit  dans  les  Lettres  de  Mirabeau 
à  Sophie  que  l'exempt  de  police  chargé 
de  son  arrestation  se  nommait  Brugniè- 
res.  Si  Jacquet  y  concourut,  ce  ne  fut 
donc  que  comme  agent  subalterne.  Plus 
tard  il  reçut  du  comte  de  Maurepas  la 
mission  d'aller  en  Angleterre  à  la  re- 
cherche d'un  libelle  qui  s'y  imprimait 
contre  la  reine;  et  ,  sous  prétexte 
d'en  prévenir  la  circulation,  il  tira  du 
ministère  à  plusieurs  reprises  des  som- 
mes assez  fortes.  Mais  convaincu  d'être 
lui-même  l'auteur  du  libelle  qu'il  avait 
dénoncé,  et  de  s'entendre  avec  Mo- 
rande  (^o/.  ce  nom,  XXX,  69) 
pour  tromper  le  ministère,  il  fut  en- 
fermé 4  la  P>astille  (déc.  1781),  Les 
Mémoires  secrets  disent  que,  jugé  par 
une  commission  secrète.  Jacquet  fut 
condamné  à  mort,  mais  que  cette  peine 
fut  commuée  en  une  prison  perpétuelle. 
Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  depuis 
on  n'en  entendit  plus  parler.  Jacquet 
peut  être  regardé  comme  un  des  au- 
teurs ou  collaborateurs  des  divers  pam- 
phlets anonymes  publiés  contre  la 
cour  de  1 775  à  1 780.  Suivant  Barbier 
il  eut  part  à  l'ouvrage  intitulé:  Les 
Joueurs  et  M.  Dussaulx ,  1781  , 
in-8°,  dirigé  contre  les  maisons  de 
jeux.  W— s. 


JAC 

JACQUET  (Louis),  littérateur, 
né  à  Lyon  le  G  mars  1732,  fit  ses 
études  sous  la  direction  des  jésuites  et 
fut  admis  dans  l'institut  à  l'âge  de  dix- 
sept  ans  (1749),  puis  envoyé  par  ses 
supérieurs  au  collège  de  Dole,  oîi  il  en- 
seigna successivement  les  humanités  et 
la  rhétorique.  Il  remporta  un  prix  à 
l'académie  de  Besançon,  en  1760,  par 
un  discours  sur  /:ette  maxime  :  La 
candeur  et  la  Jranchise  sont-  com- 
munément plus  utiles  dans  le  ma- 
niement des  affaires  que  la  ruse  et 
la  dissimulation.  L'année  suivante 
il  se  mit  sur  les  rangs,  et  ne  fut  pas 
moins  heureux  en  traitant  cette  ques- 
tion :  Le  désir  de  perpétuer  son 
nom  et  ses  actions  dans  la  mémoire 
des  hommes  est-il  conforme  à  la 
nature  et  à  la  raison  ?  Cette  fois  il 
avait  pour  concurrent  son  compatriote 
et  son  ami  le  P.  Philipon  ,  connu 
depuis  dans  le  monde  sous  le  nom 
de  La  Madelaine  {Voy.  Philipon  , 
XXXIV,  61).  Le  P.  Jacquet  qui 
s'était  prononcé  pour  l'affirmative  ob- 
tint le  prix,  et  Philipon  l'accessit.  Les 
deux  rivaux  s'entendirent  pour  faire 
imprimer  leurs  discours  qui  parurent 
sous  ce  titre  :  Le  Pour  et  le  Contre 
sur  cette  question  proposée  par  Va- 
cadémie  de  Besançon ,  etc.,  Lyon, 
1761 ,  in-8".  Deux  ans  après,  le  P.  Jac- 
quet partagea  le  prix  avec  mademoiselle 
de  Bermann  O^'oy.  ce  nom,  LVIII, 
49),  pour  un  discours  sur  ce  sujet  : 
Combien  les  mœurs  donnent  de  prix 
aux  talents!  (1).  A  la  suppression 
des  jésuites,  le  P.  Jacquet  revint  à 
Lyon,  où  il  fut  nommé  chancelier  de 
l'église  Saint-Jean,  et  s'étant  fait  re- 

(i)  L'académie  de  Besançon,  ayant  cette  annét- 
(l'jôi)  dçox  prix  d'éloquence  ,  décerna  le  pre- 
mier à  l'al)b(*  Bergicr,  hi  connu  depuis  par  «es 
ourraget  en  faveur  de  la  religion,  et  partagea 
le  scconl  tiiirc  uindciuoiselle  de  lîcniiaai  c:  lu 
P.  JacqiiPt,  qui  témoigna  le  désir  de  n'être 
point  nommé  dans  la  &^nce  (Uegitlr.  de  l'a- 
ead.,  II,  (éanceda  i4  août). 


arotat  il  panage^  «on  \em\»^  eu- 
tr«  Ifs  lra\au\  Ju  rab  iirt  ri  la  culture 
«le  son  c^pnl.  Admis  eu  ITlil»  a  l'aca- 
driiiir  (Ir  l.>on,  il  t  prononça  le  jour 
de  sa  rrrrptinn  un  distuurs  fort  re* 
njirquable ,  dans  lequel  il  eiiamine 
Tintluenre  de-»  Ifllrrs  >ur  les  miriirs, 
et  déride  rommr  l\oiisteau  qu'elle  ne 
leur  a  pas  rir  r^\oiable.  Il  reîlescendit 
en  ITti'Jdan»  la  lice  acad^iq»f,  et 
fut  couronne  a  Marseille  pour  un  di»- 
foui4  sur  cette  question  :  l^s  lois 
soinptuiiires  rorn'irnnrni-ri/rs  aux 
vumarrhies  ['1^  .'  Jacquet  prenait  une 
paît  très-arti^e  aux  traçant  de  l'ara- 
drniie  de  I.\on  dont  il  etail  Cun  des 
mrmhrrs  les  plus  distingués  ^U\  ef  lui 
communiquait  frequemmetit  le  résultat 
de  ses  recliercbes  archéoioj^iques  ou  de 
iti  excursions  dans  le  domaine  de  la 
poésie.  C'est  lui  qui  fut  clurf^é  du  rap- 
port sur  les  concours  auxquels  l'abbe 
Ha\nal  avait  donne  lieu,  en  fai^^ant  les 
fonds  d'un  prix  qui  de>ail  être  décerné 
à  l'auteur  du  meilleur  mrmoire  sur 
l'intluence  de  la  décou\erle  de  1'  \mr- 
rique  [f'oy.  IUynu.  WWII, 
IT.J.  Ce  ruftfHirt  .(\\\r  Delandtne  cite 
comme  un  modèle  en  ce  ;;enre ,  fut 
imprimé  en  1791  {\).  I/abbe  Jac- 
quet travaillait  depuis  plus  de  dix  ans 
i  un  ^rand  ouvra^^e  dans  lequel  il  se 
proposait  de  rechercher  Torifiine  de  la 
société,  celle  du  lan-ac^e,  des  arts,  etc.  ; 
il  en  a\ait  lu  plusieurs  fra;;menl>  à  ses 
confrères  dont  les  suffra^ies  l'encoura- 
geaient à  poursuivre  la  tache  difFirile 
qu'ils'élait  imposée.  La  révolution  l'obli- 
gea d'mlerrompre  ses  paisibles  études  ; 
forcé  bientôt  de  chercher  un  asile  con- 


;>^   C*  <li«roar«  «tt   iaipnna*  djri>    1«    Rremrtl 
de  rjcjdrmic d'  MartnlW  puar  l'«ui.««  .;-o 
5     Cet  aii'si  ({Qc  le   qu«lifie  I>«Und>nV    r« 

46*.;. 

(4)  Soiu  ce  titre  :    Co%f  d'mil  tmr  ht  ^^mrr, 

emaromttifmi  oml  eu  li*n  m  l'mtméimt»  en  ititmtn  . 
Miet-Uurtt  *t  mrli  de  Ljom  .  ^omr  U  prix  offir't 
fr  fa!>b*  fimrmml.  sur  la  dee»urrru  d^  t' Amt- 
n^m»,  Ltoo.  BnijiPt.  1791,  in-l*. 


JAC 


\\\ 


tre  la  l>iafinie  dans  le  voisina'^e  de 
h\on,  il  \  mouiul  en  179  V.  Outie  ir^ 
divers  morceaux  di-jà  cites,  on  a  de 
lui  :  Parallèle  des  tragiques  grrts^ 
et  fraiii^ais,  \,\ox\,  I7G(),  in- 12.  On 
conservait  ï  la  bibliuthrque  de  cftte 
▼ille  \tat.  des  munuycrits,  n"  1  V'.M)), 
sept  disrour»  de  l'abbe  Jacquet  sur  la 
|>errrctibilite  de  l'homme, sur  les  nururs, 
.sur  l'elat  de  nature  ,  etc.,  qui  de\airiii 
être  autant  de  parties  ou  de  < 
son  ;;raiid  ou\ra;;e  dont  1 
est  probablement  perdu.  (>C9  di«iei-> 
écrit»  offrent,  suivant  Delandine,  soit 
par  le  fond  des  idées,  soit  par  1rs  for- 
mes du  st>le,  comme  un  reflet  des  ou- 
xra;;eA  de  Housseau  dont  il  était  un 
admirateur  pavAionne.  M.  (,)uerard  en 
attribuant  dans  la  France  littéraire, 
à  l'abbé  Jacquet ,  une  part  a  la  bro- 
chure intitulée  :  lys  Joueurs  et  M. 
DussuuIj.  ,  l'a  confondu  i\fc  un  a^enl 
subalterne  de  la  police,  son  hnmoiiMue 
(lu),  l'art,  précèdent).        \V — s. 

J  Ar\>l  KT  Kl  OJî«K  VlMCENT- 
Sr^MSi as),  orientaliste  l>el;;e,  naquit 
le  10  mai  IKII  à  Bruxelles.  Ses  pa- 
rents, mieux  parta;;és  de  sentiments 
honorables  que  des  biens  de  la  fortune, 
l'avant  amené  des  l'aide  de  deux  aiu 
à  Paris ,  avaient  tache  d'assurer  sou 
avenir  en  lui  procurant  l'instruction 
que  le  développement  précoce  de  son 
intelligence  [laraissait  exiger  Au  col- 
léj;e  Louis  le-<irand  .  il  obtint  des  .suc- 
cès et  en  sortit  avec  une  connaissance 
sufJLsante  des  langues  anciennes.  Bien- 
tôt il  entreprit  l'étude  des  langues 
orientales  ;  et  ce  fut  avec  une  ardeur 
qui  ne  >e  ralentit  pas  un  seul  instant 
qu'il  suivit  les  leçons  d'.\bel  Bémusat 
pour  le  chinois,  celles  de  Chézv,  et 
plus  tard  de  M.  Kugene  Burnonf,  ()0ur 
le  sanscnt  ;  celles  de  S>lvestre  de  Sary 
pour  l'arabe  et  le  persan  ;  celles  de 
M.  Amedee  Jaubert  pour  le  turc. 
Dès  l'année  1829  il  devint  membre  de 
la  société  asiatique,  et   ne  tarda  pas  à 


LXV11I. 


5o 


JAC 


lire  dans  les  séances  de  celte  compa- 
gnie, et  ài  Insérer  dans  son  journal,  des 
mémoires  et  des  disseilatlons  qui  at- 
testaient des  recherches  persévérantes 
et  une  sagacité  remarquable.    11  em- 
brassa aussi  dans  ses  investigations  le 
malais  et  les  Idiomes  des  peuples  de 
l'ancien  monde  les  plus  reculés  vers 
l'orient;  11  portait  en  même  temps  son 
attention   sur  la  géographie  et  l'his- 
toire des  nations.   Plusieurs  savants  , 
frappés    de  l'imporlauce  des   travaux 
d'un  homme  ,  si  jeune  encore,  lui  ma- 
nifestèrent leur  estime   et  correspon- 
dirent avec  lui.  Les  deux  langues  les 
plus  célèbres  de  l'Asie  orientale  ,    le 
sanscrit  et  le  chinois,  avalent  spécia- 
lement  fixé  son   attention  ;  mais,  de- 
puis 1833  surtout ,  il  avait  concentré 
presque  tous  ses  efforts  sur  le  sanscrit  ; 
il  le  lisait  avec  la  plus  grande  facilité, 
et  l'avait  suivi  dans  les  dialectes  qui  en 
dérivent.    H  était   déjà   préparé  pour 
riiiterprélation    des    monuments    épi- 
graphiques  que  la  société  asiatique  de 
Calcutta  met  chaque  jour  en  lumière. 
Il  avait  entrepris  de   publier  un  re- 
cueil d'inscriptions  indiennes ,    et  ce 
projet,  pour  l'exécution  duquel  il  n'a- 
vait trouvé  d'encouragements  que  hors 
de  France  ,  l'avait  conduit  à  des  élu- 
des très-profondes  sur  la  paléographie 
sanscrite  qu'il  possédait  peut-être  à  un 
plus  haut  degré  qu'aucun  autre  giiilo- 
logue  du  continent.    11  connaissait   à 
fond  les  insciipllons  précédemment  tra- 
duites dans  divers    recueils   publiés  en 
Angleterre  et  dans  les  Indes  ,  et  avait 
commencé  l'examen  de  plusieurs  monu- 
ments du  même  genre,  encore  inédits, 
dont  il  (levait   la  comnuinicaliOL*  à  la 
libéralité  des  savants  de  Calcutta;  car^ 
de   tous  les  pays  où  les  lettres  orien- 
tales sont  cultivées,  il  recevait  des  té- 
moignages de  l'intérêt  qu'il  Inspirait. 
La  douceur  de  son  caractère  ,  relevée 
par  une  délicateàse  d'esprit  que  ne  dé- 
parait pas  un  peu  de  malice  sans  inal- 


JAC 

veillance ,  lui  avait  acquis  l'amitié 
de  toutes  les  personnes  qui  le  connais- 
saient ;  sa  courtoisie,  sa  conduite  exem- 
plaire lui  méritaient  les  égards  de  qui- 
conque avait  des  rapports  avec  lui. 
Mais  tous  ces  avantages  ne  le  rendaient 
pas  plus  heureux.  11  avait  commencé  et 
poursuivi  ses  études  avec  un  dévoue- 
ment complet  à  la  science  ;  •  les  diffi- 
cultés de  sa  position  ne  le  rebutaient 
pas  :  pour  sortir  de  l'état  de  gêne  où  il 
se  trouvait ,  il  consacrait  à  un  travail 
opiniâtre  les  heures  qu'il  aurait  dû  lais- 
ser au  sommeil.  Vainement  ses  amis  le 
recommandèrent  à  la  bienveillance  des 
hommes  qui  disposaient  des  grâces  et 
de  ceux  qui  pouvaient  attirer  sur  lui 
l'attention  des  grands.  Le  résultat  na- 
turel de  cet  excès  d'application  se  ma- 
nifesta :  Jacquet ,  qui  avait  la  poitrine 
faible,  commença  dès  1837  à  dépérir 
d'une  manière  sensible  ;  sa  pâleur,  son 
amaigrissement  signalèrent  le  délabre- 
ment de  sa  santé.  Néanmoins  sa  gaîté 
ne  l'abandonnait  pas.  Nous  le  vîmes, 
au  milieu  de  juin  1838,  étendu  sur  son 
lit  de  douleur,  et  cependant  calme  et 
enjoué;  il  parla  très-spirituellement  des 
affaires,  de  la  littérature;  et, quand  nous 
nous  retirâmes,  il  promit  que  nous  au- 
rions sa  visite  aussitôt  que  ses  forces  lui 
permettraient  de  quitter  la  chambre. 
Nous  sortîmes  le  cœur  navré,  car  tout 
indiquait  qu'il  ne  guérirait  pas.  Il  mou- 
rut le  7  juillet.  Quelques  amis  accom- 
pagnèrent son  convoi.  Presque  tous  ses 
écrits  sont  contenus  dans  le  Nouveau 
journal  asialiijue'.  l.  Noie  sur  lu  lil- 
tr  rature  du  Ni  pal,  t  om .  i  v .  1 L  Notice 
sur  hs  accouchements  au  Japon. 
111.  ()ljser\)alions  ^grammaticales 
sur  un  spécimen  du  dialecte  abyssin 
du  Tigre,  tom.  v.  W .  Le  lii^re  du 
grant-caan.  V.  Notice  sur  la  col- 
lection des  manuscrits  palis  et  sing- 
halais  de  Copenhague ,  traduite  du 
danois  ,  t.  vi.  VJ.  Légende  d'Eson 
selon    le     chin  -  sian  -  ihoung-kian. 


JAC 


JaC 


5r 


VII.  So4ice  sur  tfuelques  relations 
ilipJftmotitfUfs  tirs  niungois  tir  iJiinr 
ih'ri  /r-i  f*^iftr%  (T  Imunom  ,  l.  vu. 
NUI  M'  Lm^r%  ni.il.i.  \  .  ja^tinuis 
rt  fHtlyittyirtis  f  otiimor-v  (Un«  \t  loin. 
i\,  ,x  H  XI  ^..  l\.  .\utiir  .wr  utir 
niri/ij:'.'  'V  (fhacA/n  Khon, 

traiin  ni    \.    h.t)niu- 

!■■  if  Us 

.1  \\ 

/   I  II  m  it  un  ntunu.^ 
inlr   li  l:.:inn  tirs     1/ 

iiu^  il.iiis  |.liiMi  tirs  \oi  iiir»  MtlVJnl^  . 
\ll.  Ur.u  rifitiun  tirs  llrs  iniptt  rt 
I rtjnunrr  ,  t om .  v 1 1 1 .  \\\\,  4)ritiinr 
tir  i  un  tirs  ntjm%  stius  Irsifurls  frnt- 
pirr  ntnitiin  a  rtr  connu  a  tu  (.hinr. 
\  I  N  .  St»ticr  sur  la  srrir  tltt  thsinsf 
tthhti  ou  liu  t  tir  pur,  \.  IX.  \N. 
Imftrrssiun  ri  tlUtrit/ulittn  tir  htttis 
lurrs  tt  la  (Jiinr.  l.  ix.  W  I.  Stt- 
titr  sur  1rs  (tninii  It/oun^  .  I.  xii 
\\  M.  (Àtn/r«  turrt  sur  fftrix'inr  tir 
la  tlrnitntinntiiin  tir  l'.ilriijur  ,  lom 
Xill.  \NIIl.  t'uiistm  iilU^urr  futr 
1rs  rntitnjmrfans  poiw  rr/rtrr  l  h- 
ottngitr  ,  I .  M  V .  \  I  \ .  \ lotir  tCr  i  - 
prrssittn  sym/juJi.iur  tirs  nomhrrs 
rmpluyrs  par  trs  Inrlirns,  1rs  J'ittr- 
tains  rt  trs  Jtnunuiis  ,  t.  X.vi.  X\. 
JN  utirr  tir  tu  rullrttnm  tirs  mrduit'rs 
batirirnnrs  et  intlosryht^urs  rup- 
porirrs  par  tr  ^rnrrtit  Utttnl.  \\\. 
îSotirr  sur  trs  dn  uuorriry  tin  i%rn- 
lo^iqurs  fatlrs  par    M.  H  '■ 

dans  r .Ifglumistttn  vf""' 
les  toluiit»  suivants),  t.  I"  ilr  U  .t  ■«•- 
rie.  WII.  Exanirn  tir  tu  traJur- 
tion  tlu  Fo-kour4xi.  Wlll.  i^n'/rr- 
turrs  sur  Irx  ntttrrhrs  tl'.itrtandrr 
tJans  la  Itartrianr ,  par  tr  ^rnrraJ 
Court.  WIV.  Examrn  t^itiqur  tir 
foui'roîjr  intitulé  :  Die  Ail pf  r>i$f lien 
Keilin^scririltcn  von  Pfrsfpolls,  von 
Chr.  LasNen.  C«s  trois arliil«,  qu'on 
lit  dans  le>  tora.  Il  ,  IV,  V  et  V|  , 
sent  restes  incomplets.  XXV.  Lé- 
gende de  C esprit  tlu  foyer,  traduite 


do  rliinAi»  et  publiée  dan^  un  journal 
bel)»e  M.  K  humour  a  in»ét^  d^nt  le 
tom.  N  1  du  Juurtuit  usiatiqur  vite 
courte  iioliee  sur  .l4ei|uet.  Kite  iiom 
a  été  atile  poir  la  redariion  de  rel  ar> 
licle.  Il  dit  avec  v<^rile  i^ue  ce  jeune 
lioinmr  t  rniiiru  de^  inrdailles 

(jiie   M  lui    avait  ap|M>(lée<i 

de  Ia|i4!l  du  ^rur  .1  (^..nl;  \t%  re- 
niar(|ue%  dfint  tl  .)•  ;  i  laii  |c  mé- 
uiuiie  «il-  •'  r  ,  ,  I  ..' •  t|ijienl  en- 
core a -^r     .;-•    I»  r-  .    (     .111. •!!'%.        V.  —  5, 

J.\4:<^M  I.VO'I  dr  HamfPrtune 
CiM  i»f -Kn\^«,tns-Jo<rpn  (Athk- 
niH»\  neiDir^Mien  1771  .«niourul 
j  l*an>  en  1M:J.'>.  l'roeureMr-uéo^ral 
dq•ul^  lS-2i;  |u«<|u'en  IH^iO,  il  fu>  avec 
Uellarl  et  M  jrrlungv,  M  M.  de  V*- 
lime^nil  el  de  Kroe,  la  |>emonni(Ka- 
lion  (le  l'aulonle  )udirijire  qui  eot 
Mnt  lie  liiiie*  ««onienir  dan«  rel  inler- 
talle.    \  '-  avoir   ne  l'organe 

du  fn  r  dm*  Il   fnn-*pira- 

I  '  I  la 

f^'  1  -     .    .  «een 

iM.tl  d  avoir  oinnire  de  la  partialité 
pour  L  Ctuzrttr,  aux  dernier*  |oursdu 
replie  de  (^llarle^  \.  Ce  m<'fne  hom- 
me ménla  pourtant  que  le  bâtonnier 
de  «41»  ofare,  en  1H3.S  ,  fn  sur  sa 
Imnhe  cet  élo-^e,  qu'il  n'avait  pa*  en 
d  ennemi*.  >l«trl  «iniplr  aroe.al,  après 
av«»ir  eie  viii^t  an<  mat^i'^tral  el  députe, 
Jarquinof  de  H^mpeimie  avjil  mm- 
mené»*  pai  celle  meute  profe**»oii  d*a- 
vocnl.  Il  iVxerra  dam  »a  ville  n:itale 
de  ITIM»  a  1811.  .Vcfueilli  par  ses  an- 
ciens, les  Bouchard,  les  i^acoste,  les 
Miiri%<)t,  Ic'  Ki^ercl  de  Bciuvais,  qui 
tenaient  le  premier  ran*».  il  pril  bien- 
tôt une  place  luxiorable  el  devint 
l'émule  des  tro'S  premier.^  ,  qin  for- 
maT^nl  alors  l'ëlilc  des  avocate  plai- 
dants. Son  père  avait  été  aussi  un 
avocat  cmineiil  du  barreau  de  Dijon, 
où    il   était    professeur   de  «'roit   (1). 

(i       I.   ni    ..ateur  du  Comf1  yuntùe-it,    i    toI. 

13- S» 


01 


JA€ 


Pendant  la  ten  eur  ,  Jacquinol  dé- 
fendit,  avec  talent  et  coiirao;e,  des  vic- 
times de  la  violence  révolutionnaire, 
entre  autres  les  membres  de  Tancien 
parlement  de  Dijon,  au  nombre  des- 
quels était  le  président  Richard.  L'ho- 
norable carrière  qu'il  allait  parcourir 
dans  la  magistrature  eut  son  com- 
mencement sous  l'empire.  11  fut  nommé 
avocat  général  en  1811 ,  à  Dijon  même, 
puis  procureur-général  à  La  Haye  (2). 
Les  désastres  de  181 3  le  rappelèrent  en 
France.  11  ne  remplit  aucune  fonction 
publique  pendant  la  première  année 
de  la  restauration  ni  pendant  les 
cent-jours ,  bien  qu'il  eût  été  nommé 
procureur-général  impérial  à  Colmar. 
Au  second  retour  des  Bourbons  , 
il  fut  appelé  au  poste  de  procureur 
du  roi  du  tribunal  de  la  Seine,  et  le 
titre  de  maître  des  requêtes  en  ser- 
vice extraordinaire  accompagna  cette 
nomination.  L'année  suivante  11  alla 
présider  le  collège  électoral  de  l'Yon- 
ne, fut  porté  à  la  députation,  et  à  cha- 
que nouvelle  législature  il  remplit  les 
mêmes  fonctions  et  obtint  le  même 
honneur  jusqu'au-delà  de  1830.  Lors 
de  l'installation  de  la  cour  prévô- 
tale  à  Paris,  en  janvier  1816,  Jac- 
quinot  de  Parapelune  justifia  ainsi  la 
création  de  ce  tribunal  exce[)tionnel  : 
«  La  publicité  des  débats  ,  dil-11  ,  la 
«  liberté  eJ  le  respect  dus  à  la  défense 
«€  des  accusés,  la  moralité  des  juges 
«<   nommés  par  le  roi,onriront  unetri- 

(2*  L'introduction  de  la  ligisljtioii  friirrç.iis»; 
exigea  îiliirs  un  travail  iinineiise.  Le»  peines  de 
détiniioii  |>r<'ni)uci;i8  d'ajfiès  hi  Jo:s  ijr  ces 
proviiici-h  réunir»  étjirnt  d'une  excessive  .Jurée  ; 
iDais  defc  tOinniisMOns  en  provoquaient  la  ino- 
dérjtion  d'année  à  autre,  en  ;.yaMt  é^'ard  a  la 
conduite  de*  «  on'laiim»'»  Le»  cb.iiifjeimnis  (|iii 
«urvinient  dans  l'administration  rend  reiit  iitv 
C'SBiire  la  révision  dé  loule»  les  tond.iiii'ia- 
tion$  alors  subies.  Cette  crande  lui-Mon  fut 
abando<  née  a  la  sagesse  et  à  la  conscience  du 
procureur-général.  Il  lu  remplit  di(;!iein'<nt  ,  et 
peu  laiil  longtemps  on  a  vu  a  la  cUnncellerie, 
dans  1«  cahiuL-l  du  gardc-des-!.C4.Miix,  la  n-niiion 
de  ce»  acte»  de  révision  regardés  comme  un 
de»  inunuments  judiciâicca  qui  honorent  la 
Franae.  G — a — 1>. 


JAC 

«  pie  garantie  aux  accusés.  La  cour 
«c  prévôtale  était  nécessaire  dans  une 
«  grande  cité  (^  le  méchant  clierche 
<c  un  associé  à  ses  projets  criminels, 
«(  ou  un  refuge  quand  il  les  a  exécu- 
«(  tés.  »  A  la  chambre  des  députés , 
Jacqulnot  se  posa  comme  juriscon- 
sulte :  aucune  discussion  importante 
n'avait  lieu  qu'il  n'y  prît  part,  aucune 
session  ne  s'écoula  sans  qu'il  fut  nommé 
membre  des  commissions  chargées  de 
l'examen  des  plus  graves  projets  de  loi. 
Il  ne  se  lançait  point  dans  les  luttes 
brillantes  de  la  tribune,  mais  on  trou- 
vait toujours  chez  lui,  dans  la  prépara- 
tion des  lois,  le  secours  d'une  vaste 
expérience  des  affaires  et  d'une  facilité 
de  travail  extrêmement  remarquable. 
Les  lois  sur  la  presse  étaient  surtout 
son  domaine  ;  c'est  là  qu'il  cherchait  à 
pourvoir  l'ordre  social  de  tous  les 
moyens  de  préservation  dont  il  con- 
naissait mieux  que  personne  la  juste 
portée.  Dès  la  session  de  1816,  Il 
parla  avec  force  dans  la  discussion  sur 
les  journaux.  «  Si  les  livres,  dlt-il,  ont 
«  leurs  destinées,  les  journaux  ont 
«  aussi  la  leur,  et  elle  est  bien  diffé- 
«  rente.  Un  livre  est-Il  utile,  sa  pu- 
«  blicité  augmente  à  mesure  que  sa 
«  réputation  s'étend  :  ne  présente-t-U 
«<  qu'une  production  réprouvée  par  la 
<f  morale  et  par  le  goût,  l'opinion  en 
«  fait  une  prompte  justice;  est-il  dan- 
«  geieux,  incendiaire,  il  est  arrêté  et 
«  les  auteurs  poursuivis.  H  n'en  est 
«  pas  ainsi  des  journaux:  leaial  qu'ils 
«  peuvent  produire  est  aussi  prompt 
«<  qu'infaillible  ;  en  peu  d'instants,  le 
«  journal  à  peine  sorti  de  la  pres<»e 
«  est  connu  dans  le  palais  des  grands, 
o  comme  dans  le  réduit  des. pauvres.  » 
En  1817,  Jacqulnot  fut  nommé  maî- 
tre des  requêtes  en  service  ordinaire. 
En  1818,  il  fit  partie  de  la  commis- 
sion du  projet  de  loi  ayant  pour  objet 
d'organiser  la  défense  de  la  France. 
La  proposition  relative  à  la  puissance 


iAC 

patern^ie  lui  revenait  clément  ilr 
droit,  tbn' U  mrmr  »fk^ioii  df  IHIK, 
comme  jiiri'rnusullc  ri  comrnr  rlirf  i\f 
par(]iifl.  On  le  rrirniiNr,  ni  \H\0  , 
mrrrihre  tif  la  romn)i>%iun  du  projrt 
Hf  loi  sur  la  pt  e^^  ;  ce  qui  rsl  digne  dr 
r«narr|ne,  rar  les  temps  de  IHI9 
étaient  fort  différents  drreatde  1K16; 
nars  les  rolle<;ues  de  Jarquinol  con- 
naissaient sa  modération  ri  ne  vou- 
laient pas  se  primer  de  se\  lumit-re>.  i  j 
rcminiission  du  prn|rt  sur  l.i  ri-lurmr  du 
jurv  le  rompla  parmi  ves  m-  is 

celte  session  de  1819.  I^z<  jI 

D<;ura,  la  même  année,  parmi  Irv  signa- 
taires des  slaluls  dr  la  sorieir  pour  l'a- 
nélioration  dr*  priM»ns(3).  Kn  1820, 
les  luttes  rrrommencent  sur  laque^llou 
de  la  liberté  individuelle,  snr  la  rensure 
des|ournau\  et  écrits  périodi«pir«,  et  il 
T  prend  la  part  la  plus  vive.  Dans  la  dis- 
cussion, le  magistrat,  le  savant  lé;;ixte 
se  monire,  la  passion  (.iinais.  l/ma- 
leur  lai.«>e  de  côtr   la   question    poliii 

3ue  même,  pour  ne  von  que  les  règles 
'éirrnrilr  moi  aie.  Il  fui  nommé  con- 
seiller d'élal  en  service  ordinaiie  en 
IN'JI  ;  on  a  vu  qu'il  a\ait  passé  soc- 
cessivrmriil  par  tous  1rs  j^radrs  ;  on 
I  atiarlia  au  comilr  dr  Ir^islation  rn 
lMi2.  lians  Ir  coûtant  de  la  session 
dr  crilr  année,  il  parut  à  la  tribune 
pour  discuter  de  nouveau  la  loi  sur  1rs 
délits  de  la  presse.  L'n  membre  de 
la  chambre  ,  dans  celle  discussion  , 
allrniia  qu'à  l'occasion  drs  troubles 
du  mois  de  juin  1820  ,  des  tribu- 
naux avaient  refuse  dé  faire  dioit  aux 
plaintes  des  députés  qui  avaient  été 
outraoés,  mallraités ,  on  allait  jus- 
qii  à  dire  a&sAssinés  ,  en  sorlanl  du 
lieu  de  leur  séance.  M.  de  (  .irardin 
affirmait  positivcraenW  qu'un  individu 
qu'on  avait  pris  pour  Manuel  axait 
reçu  trois  coups  de  poi;;nard  ,   que  le 

(3;  Il  jTa.t  ce»-  \r  ^,,,1  pnr^m,!  ,  i„,i„ol.on 
leiiJjutà  faire  ii.ifrrnjrr  diiu  lr«  «ingt^nuatr* 
* tonte  p«r»ouii«  arrêter.  r_»__,. 


JAC  M 

fait  a\aii  été  constaté  iudiciairemenl  ; 
Jacquinot  ,  défenseur- né  du  tribunal 
dont  il  riajt   mrmlnr  ,   ri*pondit    qu'il 
adjurail  se»  collrj;uc>  dr  la  cliambre  qui 
avaient  elé  insulles  dr  dire   s'ils  n'â- 
taienl  pas  etr  rntendiis   par   la  justice 
et  requis  de  furuirr  leurs  plaintes,   ft'il 
en  existait  de  fontiee^.  11  n'apuartraait 
pas  au  pouvoir  le^'  latif,  ajoutait  l'ora- 
teur,  de  critiquer  liti   lu^rrnenl  émané 
d'un    tribunal.   Celait  la  un  épisode 
de    la   discussion.  Dans  la  ilisrussion 
mène.  Jacquinot  demandait  que  tout 
les  corps   constitués   fu-iMnl   prote;;e4 
contre  les    a;;re»sions  de  la    pres>e  , 
amsi  que  1rs  membres  de%  drux  cham- 
bres cl  lesliibunaux  :  et  il  voulait  que 
celle    drnomiiialion   dr  corps  consti- 
tues s'élrndil  jusqu'aux  conseils  de  l'or- 
dre de^  avocats,  comme  étant,  eux  aussi, 
revêtus  d'un   pouvoir  public,    c'est-à- 
dire  reconnu  par  la  lui  :    rien  n'était 
moins  oflensii*.    11   n'en  fallut   pas  da- 
vaiiLi^e  ce|>endant  pouré\eiller  la  sus- 
repiiliihlé    mquiele    et   soupçonneuse 
de  la  gauche    dalor>.    I^  gênerai  Foj 
cria  aux  corporations    que  l'on    ten- 
dait a  rétablir;  et  en  cela  il  fut  secon- 
dé par   Manuel  et   II.  (^instant.    .Ma- 
nuel déclarait   pour   sa  part    qu'il  ne 
reconnaissait    de  corps  constitues  que 
les  ministres,  parce  que  seuls  iU  étaient 
respun>ablr^;    docliine   plus  exar^érée 
et  moins  admissible  ()ue  le  système  lie 
l'orateur  qu'il  citmbatlail.   Nlauuel  fai- 
sait planer  au-des^sa%de    la  tribune  le 
speclre   aiena<;ant  du  pouvoir  absolu. 
Dans  la  di:>cuvMun  du   même  projet  de 
loi,  Jacquinot   dr  l'ainpelune  soutint 
que  l'article  de  la  charte  qiii  prrinrîlait 
la  libre  mariire>l.ilion  des  o|Miiion<>   nr 
pouvait  s'entendre   de   la   publication 
dè^  gravures,  des  dessins,    Jes  carica- 
tures ;  que  ce  n'était  pas  là  un  nio\en 
de  manifoter  une    opinion.  La  loi  de 
1819,   à  la  vérité,  avait    permis    la 
publication  préaJable  après  le  dépôt  de 
cinq  exemplaires,  mai-s  tl  en  était  ré- 


54 


JAC 


suite  de  grands  abus.  On  pouvait  se 
rappeler   les   caricatures  io;nobles  qui 
avaiei)*.  outragé  les   mœurs,  la  majesté 
royale  et  tout  ce  qui  devait  être  un  ob- 
jet de  respect.  Daunou  demanda  que  les 
expositions  n'eussent  point  lieu  piihll- 
quemeni  ;  cet  amendement  fut  rejeté 
et  l'article  adopté  dans  son  entier.  >»ous 
en  resterions  là  de  cette  discussion,  si  un 
mot,  prononcé  par  BenjaminConstant, 
ne  se  rattacbaità  des  débats  parlemen- 
taires bien   célèbres  dans  ces  derniers 
temps  ;  il  s'agissait   de  régler  le  mode 
de  défense  des  accusés  cités  devant  la 
chambre  élective  :  la  question  était  de 
savo'.r  si   la  chambre   serait    maîtresse 
d'accorder  ou  de  refuser  un  défenseur  à 
l'accusé,  suivant  les  circonstances.  Aux 
raisonnements  de   Jacquinol  dé  Pam- 
pelune,  lîenjamin  Constant  opposait , 
avec  quelque  raison,   que  c'était  bien 
assez  de  distraire  un  citoyen  de  ses  juges 
naturels,   sans  laisser  encore  ses  juges 
d'exception,  maîtres  de  lui   enlever  le 
droit  qui  ap{)artient  à   tout  prévenu  : 
celui  de  se  choisir  un  di'fenseur  ;  et  il 
ajoutait  avec  indignation  :  <c  Cela  seul 
«   suffirait   pour   faire    condamner    la 
«   reute  dans   laquelle   nous   entrons, 
«  V horrible  roule  de  l'omnipotence 
«  par lewent aire.    >»  Ainsi  l'omnipo- 
teuce    parlementaire,     proclamée    en 
principe    depuis,  par  U  majorité  de 
la  coalition  victorieuse  de  ISliS,  était 
rejetée     comme    u»*    objet    d'exécra- 
tion  par  ro[tposition    impuissante  de 
1822:  «  .levons  dira-  continuait  lîen- 
w  jamin   Constant,  comme  un  orateur 
«<   céh'bre  ,   je  suis  impatient    de  dé- 
«    pouiller'   la    portion     de    tyrannie 
«   dont  vous  voulez  m'investlr.  »  i)e 
son    c<^lé  ,   le  général    Foy  rappelait 
«   l*exécruhle  loi  du  22   prairial  an 
«   2,  qui  disait  dans  un  de  ses  arti- 
«   des  :   la  loi  refuse  des  défenseurs 
<f    aux  accusés;  ils  en  trouveront  parmi 
«   les  jurés    patriotes.»    Vax    1825  , 
Jacquinol  proposa,  ï  la  loi  d'indem- 


JAC 

nité  des  émigrés  ,  plusieurs  amende- 
ments et  un  article  additionnel.  Par 
deux  ordonnances  (12  juillet  1826)  il 
fut  nommé  procureur-général  près  la 
cour  royale  de  Paris ,  et  promu  aux 
mêmes  fonctions  près  la  cour  des  pairs. 
En  1826,  il  fut  présenté  comme  can- 
didat à  la  vice-présidence  de  la  cham- 
bre, et  obtint  un  grand  nombre  de 
suffrages.  Il  fut  chargé  de  porter  la 
parole  à  la  chambre  des  pairs  dans  la 
discussion  du  projet  de  loi  sur  les  dé- 
lits commis  dans  les  échelles  du  Levant, 
et  fit  partie,  à  la  chambre  des  députés, 
de  la  commission  du  projet  sur  les  sub- 
stitutions. Son  rôle  ne  fut  pas  moins  ac- 
tif dans  la  session  de  18i7,  où  les  lois 
sur  la  presse  furent  de  nouveau  mises  en 
question.  En  1828,  la  discussion  s'en- 
gagea encore  sur  cet  inépuisable  sujet , 
et  il  lut  nommé  membre  de  la  commis- 
sion d'examen  du  nouveau  projet  de  loi 
qu'il  défendit  toutefois  avec  une  sage 
mesure.  D'après  le  projet ,  tous  les 
écrits  périodiques  paraissant  plus  d'une 
fois  par  mois  étaient  soumis  au  cau- 
tionnement. Jacquinot  de  Pampelune 
pensa  qu'on  pouvait  en  dispenser  les 
journaux  scientifiques  et  littéraires 
qui  ne  paraîtraient  pas  plus  d'une  fois 
la  semaine.  Dans  la  même  discussion, 
il  posait  comme  règle ,  en  matière  de 
délit  de  la  presse,  que  le  délit  n'était 
imputable  qu'à  l'éditeur  qui  publiait; 
que  l'auteur  ne  devait  être  considéré 
que  comme  complice,  ayant  pu  com- 
poser l'écrit  incriminé  sans  inten- 
tion de  [lublicité.  Envisageant  la  mê- 
me question  sous  un  autre  point  de 
vue,  il  admettait  que  des  cas  pouvaient 
se  présenter  où  l'éditeur  aurait  agi 
sans  intention  criminelle.  La  discussion 
devint  fort  curieuse  par  les  regrets 
manifestes  à  cette  époque  de  1828, 
au  sujet  du  ministère  Villèle.  «  Il 
y  a  six  mois,  un  an,  dit  un  des  ora- 
teurs ,  les  journaux  répétaient  unani- 
mement :   Otez-nou8  M.  de  Villèle  , 


JAC 


JAC 


5n 


IHM»  allom  mtrfr  dan«  nnê  ère  de 
joie  r\  âf  bonheur  ;  et  l'on  parlait 
jtrr  un  tel  arcent  de  ron^irtion  que 
moi-même  ,  comme  le  loup  de  la  fa- 
ble, je  m*"  fori^eai^  une  friirité  qui  me 
faixaif  pleurer  de  tendresse;  eli  bien! 
re  mmislére  e*t  t(im!<e,  rt  le*  journaux 
continuent  dr  «.♦•  pLiindre.»  Kn  tH2*J. 
nou<  retrou>onN  .1  rnuinot  de  l*ampe- 
liinr  dan^  les  débats  lé'^i^latifs,  tant  de 
la  rliambre  élerli^e  que  de  la  pairie  où 
il  se  présentait  encore  en  qualité  de 
commissaire  du  roi,  i  l'occasion  de 
detu  proiel".,  l'un  sur  le«  crimes  et  dë- 
Its  de  l'armée,  l'autre  sur  la  contrainte 
par  corps.  Il  v  <outrnait  la  lutte  contre 
MM.  Decazeset  de  Hro-lie  Puis  il 
retenait  à  la  rhambre  des  drpulés  pren 
dr  e  part  à  la  disrii«i<ion  C(»ncrrnanl  l'or- 
;;ani*ation  des  tribunaux  miliiaires.  A 
la  fin  de  la  même  srv«.n>n,  il  ftit  nommé 
membre  de  la  ronim!'>-^inn 
I  examen  du  prn)r|  dr  loi  n 
slilution  des  |ii<:^rs  et  con^eiliers  audi- 
teurs. Il  s'a^isvail  de  les  supprimer  en 
1829.  et  l'on  parle  en  IHVO  de  le« 
rétablir.  Mais  il  restait  pour  Jacquinot 
de  Pampelune  à  subir  une  épreuve  plus 
déci^Tc  que  toutes  les  autres ,  la  réso- 
lution de  18:iO.  Lorsqu'il  avait  tra- 
versé celle  de  ITH*»,  quarante  ans  au- 
paravant ,  il  a;;issait  dans  la  liberté  de 
sa  profession  d'av-ncat  :  la  résolution 
nouTelle  le  trouvait  dans  la  plus  dif- 
ficile position  de  la  raa;;istrature.  Sa 
conduite  nous  donnera  la  clé  du  ca- 
ractère de  l'bomme  politique,  des  <irn- 
tiraents  intimes  de  l'homme  privé. 
Ceux  q'ie  les  révolutions  renversent 
comme  ceux  à  qui  elles  profitent,  ceux 
que  le  pouvoir  élè\e  comme  ceux  qu'il 
abandonne  ,  se  montrent  à  peu  près 
invariablement  le  lendemain  de  leur 
chan;;ement  de  position  le  contre- 
pied  de  re  qu'on  les  a  vus  la  veille  Les 
mêmes  qui  ne  trouvaient  jamais  a-^sez 
de  liberté  pour  eux  ,  et  %  qui  semblait 
tonjoun  trop  forte  la  part  de  Tautointéf 


parlent  et  a;;iss«nt  aloi^  en  vertu  de 
sentiments  contraires,  et  réciproque- 
ment I.es  absolutistes  du  2.*)  judiet 
1H30,  d'après  cett»  rèj;le,  sont  devenus 
des  ullra-lil>^ranx  au  mois  de  septem- 
bre suivant.  Celte  rèj;le  ne  fut  pas  à 
rosai;e  de  Jacquinot  de  ^.impelune; 
de  I  autre  c^^^é  de  la  révolution  ,  il  j 
eut  pour  lui  les  m^rees  principes  i 
défendre,  b  même  i.atrie  i  servir.  Il 
^arda  le  poste  qu'il  occupait  dans  la 
ma;;istrature  jusqu'au  ^  août  1H3(),  et 
suivit  la  même  li^ne  qu'auparavant  à  la 
chambre  des  députés  où  il  avait  *lé 
réélu  en  juin.  I)ans  la  discussion  de  la 
loi  sur  les  rrirurs  puhtii  s.  le  parti  de 
l'opposition  ne  manquait  pas  d'étendre 
la  puissance  du  jurv  ,  de  substituer 
l'omiiipotenre  mobile  et  passionnée  du 
tribunal  éphémcf  à  l'impassibilité  du 
iy::e  inamovible.  Jacquinot  de  Pampe- 
'' mandait  au  contraire  qae  la  loi 
il  aux  tribunaux  et  aux  cours,  k 
l'exclusion  du  jurv,  le  droit  d'appré- 
cier s'il  existe  des  circonstances  atté- 
nuantes. Kn  1H31,  l'homme  de  fjou- 
«erneroent  ««e  prononçait  en  termes 
explicites  ,  je  député  déclarait  •«  que 
«  son  vote  était  assuré  à  toute  mesure 
>  a>ant  pour  but  le  maintien  de  la  di- 
•«  f^nilé  de  la  France  au  dehors,  de 
■  l'ordre  et  de  l'exécution  des  lois  ai 
«  dedans.»  le  caractère  d'ancien  pro- 
cureur .général  le  con^-tituait  cepentlanl 
en  élat  de  susoicion  auprès  de  ceux 
qu'on  appelait  alors  le  paiti  du  mouiv- 
mrnt.  I^  j;auche,  qui  l'aurait  cru  'ap- 
prouvait les  visites  dominha:reî>,  même 
dans  leurs  excès,  et  elle  interrompait 
Jacquinot  de  Pampelune  quand  il  de- 
mandait des  restrictions  î  cette  me- 
si^e.  On  en  vint  un  jour  il  lui  repro- 
cher sa  partialité  pour  la  GauUr  de 
Fnirtcr,  mise  en  accusation  pour  un 
délit  delà  presse,  dans  les  premiers 
mois  de  \H'M  Une  telle  inculpation 
était  fjrave,  car  elle  impliquail  une 
complicité    quelconque    du     ma^stnt 


S6 


JAC 


JAE 


dans  la  direction  politique,  par  laquelle 
la  restauration  s'était  perdue  :  aussi 
s'en  defend-il  par  la  voie  mcme  du 
Moniteur.  Si  M.  de  Geuoude  n'avait 
pas  subi  sa  condamnation,  c'est  que  le 
condamné  s'était  pourvu  en  cassation. 
Or,  il  n'avait  été  statué  par  la  cour 
sur  son  pourvoi  que  le  19  août  1830. 
«  Le  3  août,  écrit  Jacquinot  de  Pam- 
«  pelune,  j'avais  cessé  mes  fonctions, 
«c  j'étais  remplacé.»  En  1832,  il  es- 
suva  pour  la  première  fois  un  échec 
aux  élections  de  l'Yonne  ;  c'est  le 
seul,  car  il  fut  réélu  en  183i.  Il  ne 
lui  arriva  pas  à  son  retour  à  la  chambre, 
comme  à  d'autres  députes,  d'être 
éclipsés  ou  de  s'éclipser  tout-à-fait , 
parce  que  leur  temps  est  passé  ;  la 
mission  d'un  savant  lén^islateur  n^est 
pas  soumise  aux  oscillations  de  la  fa- 
veur publique,  elle  dure  autant  que  sa 
vie  :  aussi  y  reprit-il  son  ancienne 
place.  La  dernière  fois  qu'il  y  parut, 
ce  fut  dans  la  session  de  1835,  pour 
proposer  un  amendement  au  projet  de 
loi  sur  la  responsabilité  des  ministres. 
La  mort  le  surprit  dans  le  cours  de 
cette  session.  Il  avait  eu  la  douleur  de 
voir  tous  ses  enfants  torttl)nr  succes- 
sivement autour  de  lui.  Marié  à  la 
fille  du  marquis  de  Genouilly  de  Pam- 
pelune  (4)  ,  écuyer  commandant  des 
écuries  de  la  reine  ^larie-Antoinette, 
une  ordonnance  de  Louis  XVI II  lui 
avait  permis  de  joindre  à  son  nom  ce- 
lui de  sa  femme.  Repoussé  de  la  magis- 
trature, Jacquinot  de  Pampelune  avait 
cherché  un  refu^^e  au  barreau,  d'où  il 
était  sorti  vinj^t  ans  auparavant.  Ce  fut 
un  avocat  qui  déposa  sur  la  tète  du  ju- 
risconulte  la  couronne  méritée  fiarune 
vie  si  honorablemrnl  remplie.  Un 
questeur  de  la  chambre  des  députés 
acquitta  la  dette  de  ses  collèf^ues.   Les 

(4)  C«^te  fpBime  «listiiigu«';e  \e  vit  lor«qii*il 
plaidait  pour  le  malh»  ureiix  pn-sift'-nt  Ricliard  ; 
chanii'c  ei  eniraiiK^'^  pur  son  ilorpiPiice  pj- 
llictlqne  ,  elle  lui  voii.i  diA-lorii  un  l<'n<lre  alta- 
cbemenl  fr — » — n. 


deux  voix  qui  se  firent  eutendre  s'u- 
nirent pour  proclamer  la  modération 
du  caractère  de  l'homme  politique  et 
du  maf];istrat.  «  C'est  dans  notre  or- 
«'  dre,  dit  avec  orgueil  M.  Philippe 
«  Dupin,  qu'il  a  commencé  sa  carrière 
«f  avec  succès  et  avec  éclat  ;  c'est  dans 
«  notre  ordre  qu'il  l'a  terminée  avec 
«  honneur  et  dignité.  La  révolution  ne 
«  lui  ôta  que  ses  places;  l'estime  pu- 
«<  blique  et  ses  vertus  d'homme  lui 
«  restèrent.»  L'orateur,  non  suspect, 
qui  portait  la  parole,  n'eut  rien  à  ajou- 
ter après  lui  avoir  décerné  ce  magnifi- 
que éloge  :  «  Que  nul  ne  l'avait  soup- 
«  çonné  d'ajouter  aux  rigueurs  de  ses 
«  fondions  l'aigreur  du  caractère  ou 
«  le  ferment  d'un  sentiment  haineux.  » 
M.  Philippe  Dupin  racontait  qu'il 
avait  été  témoin  des  travaux  opiniâtres 
de  celui  que  regrettaient  le  barreau  et  le 
parlement,  ^ans  le  cours  de  la  session 
de  1831,  à  l'occasion  de  la  nouvelle 
loi  sur  la  contrainte  par  corps  ;  il  qua- 
lifiait cette  loi  d'une  des  meilleures 
qu'on  ait  faites,  et  la  disait  empreinte 
de  celte  philantropie  véritable ,  de  ce 
progrès  utile  qui  servent  la  liberté  sans 
troubler  le  pays.  M.  D — Y. 

JAC(JȕJbT  (Rlaise).  Voy.  Ja- 
QuoT,  XXI ,  405. 

JJ^CK  (Michel),  jurisconsulte 
allemand,  né  en  1783  à  Piamberg  , 
exerça  d'abord  l'état  d'avocat  auprès 
du  tribunal  royal  de  sa  ville  natale  , 
puis,  en  1808,  au  tribunal  d'appel  du 
cercle  du  Ilaut-Mein.  Dix  ans  après, 
il  fut  nommé  assesseur  au  tribunal 
d'appel  de  lîambcrg,  et  enfin,  en  1829, 
à  celui  d'Anspach,  où  il  était  à  peine 
depuis  un  an  ,  lorsqu'une  aliénation 
mentale  le  força  de  quitter  ce  poste.  11 
mouiut  dans  une  maison  desantéàSon- 
nenstein,  près  Pirna  en  Saxe,  le  25 
janvier  1833.  Les  rapports  qu'il  fit 
comme  assesseur  furent  remarqués  à 
cause  de  l'érudition  judiciaire  qui  y  est 
répandue.  Outre  une  Théorie  de  la 


JAB 


JaC 


re.  qo'ii  pabiia  en  1803  avant  tie 
prrnilrv  sf*  dt^rr*  dr  dofirur  a  l'uni- 
^ri^:lr,nn  lui  duit  un  ^rand  nombre 
dr  lirtM-liurrt  ^u^  la  intispmtirnrf  ri 
iadminisliatinn  |>ubli({ur,  ainsi  qu'une 
Statistique  du  r«> uumr  Jr  lut^irrr 
stHis  Ir  mpptirt  tirs  iuis  i  nulrs  , 
lHi8-lH2*».  _  Jmxk  (  Churirs  )  , 
^ra^ear  rrirbrt,  ne  à  I^dwig^bourg 
dans  ir  NN  urlember^  en  176:1,  mou- 
rul  à  Berlin  en  184M»,  aprr«  s'eirc  di*- 
tin^uepar  la  gravure  d'eirelieules  car- 
ies gro'^rapliique».  I) — ii. 

J  .L  \  iSr.  Il  ((^iDKrROI-JAC- 
^IM),  mrderin  dr  lla^^nri;,  na(|uif 
en  celle  nlle  le  17  octobre  17.'»1. 
Kie\r  atrc  soin  par  un  père  «jui  ctrrrait 
Taii  de  ^néni  de  la  manirre  la  plus  lin* 
rioraliie,  et  dr^^lnr  de*  ses  plus  jeunet 
ans  a  une  raiiiere  dont  touirs  les  rir- 
W)nslanre.s  ie  reuiiiv.saient  pour  aplanir 
irt  difl'icullés  ,  il  6i  »e5  eludef  meilica- 
les  à  (fffllin^ue.  ^  u^el,  Krxieben  , 
IMurrar,  NVrisber^ ,  Kirliler,  Osian- 
der  et  Raldin;;er  brillaient  alors  dans 
cette  univefNite  célèbre.  Il  profila  lia- 
bilement  des  levons  de  ces  grands  maî- 
tres, et,  après  avoir  termine  toutes  »e* 
clauses,  prit  le  ^rade  de  docteur.  Sa 
ihèse  de  rrcrption  roulait  sur  un  sujet 
de  la  plus  hautr  importance,  mais  qu'il 
n'était  pa<i  donne  a  un  débutant  u'a- 
prolondir  et  d'eimsa^^er  sous  tous  le* 
rapports  qui  le  lient  d'une  manière  si 
intime  avec  les  ;;randes  questions  de 
réconomif  politique.  Klle  a  pour  litre: 
Dissrrta/io  sistens  phtJiistxts  ex  ul- 
cère niratioftrs  iirUiquas  ,  (icettin- 
pie,  177.'>,  iii-V  '.  Jf  niscli  retint  alors 
dans  sa  ville  natale,  ou  il  .se  fit  une  clien- 
tèle fort  étendue.  Nomme  médecin  de 
1  IWpilal  des  pauvres,  il  rédigea,  de  con- 
cert avec  ses  collè]p;ues,  un  tableau  des 
mé«lifatnents  usités  dans  cet  établisse- 
ment, «ious  le  litre  de  PharmarupiTa 
p'iuprrum,  in  usum  inslUuti  i  liniii 
ilumbur^rnsis,  Hambourg,  1781  , 
in-S*^  ;  réimprimé  en  1785.  Aucun  au- 


tre écrit  n'est  «orti  de  sa  plnme.  Le« 
ocrupations  incessantes  de  la  pratique 
ne  lui  pfi mirent  p.is  de  rninm.iniquer 
au  public  les  obsrrxalions  qu'il  dut 
reunii  pendant  ciiKjnante  -  cinq  ans 
d  une  vie  passée  dans  l.i  rontempla- 
limi  des  misrres  liumtnirs  ||  suc- 
comba le  18  noN.  iKiiO,  re;;reitë 
d^  s^s  compatriotes,  dont  il  a\ait  la 
confiance  rt  l'affection.       J  —  1» — î«. 

JAC;t:i.LO.\.  l  oy.  ALF.X4N- 
niii  J\(;iLLoK,  I,  531. 

J  AliOT  r.Rir.oinr.-MAiiiF) . 
conventionnel,  ne  djns  le  r.«i;;ev.  en 
1751,  était,  a\anl  1781>,  nn  a\ocat 
obscur  de  la  petite  *illr  de  Nantua. 
S  étant  montre  fort  rliaud  partisan  de 
la  révolution,  il  fut  nommé,  en  1791, 
l'un  drs  députes  «iu  drparienieni  de 
r  Vin  a  l'assemblée  ie^^islative ,  on  il  se 
Gi  peu  remarquer.  Il  n'v  prit  qu'une 
seule  fois  la  parole  dans  la  séance  du 
\  février  1792,  à  l'occasion  d'un  rap- 
poitdefîorgueranqMi  atail  b'amr.avec 
quelque  raivon,  l'usage  abu«if  que  l'on 
faisait  du  droit  de  pétition,  .lagnt  pré- 
tendit que  ce  rapport  n'était  qu'une 
diatrUte  t  outre  le  pruftir.  ce  qui  lui 
valut  de  Irès-vifs  applaudiisemenls  de 
la  part  des  tribune^.  Nomme  par  le 
nieine  département  depntr  a  la  (',on- 
venlion  nationale,  il  fut  un  drs  com- 
missaires que  celte  assemblée  envova 
dan*  le  ^lont-hlanc  peu  de  jours  avant 
le  procès  de  Louis  \N  I,  et  il  signa  en 
cette  qualité  la  fameuse  lettre  datée  de 
Cliambérv  le  1  \  janvier  1793  (  yoy. 
(îKi.i.oinK,  K\V|,70\  Revenu  à  la 
%»nvention  ,  il  continua  de  s'y  mon- 
trer parmi  les  plus  ardenJs  révolution- 
naires et  fut  nomme  secrétaire  ,  puis 
membre  du  comité  de  sûreté  générale. 
L^é  pa:  liculirremenl  avec  Amar,  il  prit 
comme  lui  une  part  trè^-ac  live  à  toutes 
les  arrestations,  a  tontes  les  proscrip- 
tions de  cette  horrible  époque;  mais 
il  eut  toujours  grand  soin  de  s'effa- 
cer et  de  se  tenir  caclié    dans  les  dr- 


58 


JAG 


constances  critiques.  Ce  fut  pour  ce 
caractère  de  faiblesse  que  Merlino  , 
député  du  même  département ,  le  dé- 
nonça à  la  tribune  quelques  jours  après 
la  chute  de  Robespierre.  «  ...Jese- 
«  rais  coupable,  dit  il,  si  je  vous  tai- 
«  sais  une  lâcheté  d'autant  j)lus  con- 
«<  damnable  qu'elle  vient  d'un  homme 
«  qui  est  chargé  de  fonctions  impor- 
«  tantes.  Je  vous  dénonce  Jaf!;ot  qui , 
««  dans  toutes  les  circonstances  péril- 
ce  leuses  de  la  législature  et  de  la  Con- 
K  vention,  a  eu  le  soin  de  se  cacher...» 
Il  avait  terni  la  même  conduite  dans 
la  nuit  du  9  ati  10  thermidor,  quoi- 
qu'il fût  du  comité  de  sûreté  générale. 
«  Je  dois  ajouter,  dit  encore  Merlino, 
«  que  dans  ce  moment  mon  dépaite- 
«  ment  géniiî  sous  l'oppression  la  plus 
«  tyrannique  des  hébertistes  et  des  ro- 
n  bespierriens  soutenus  par  Jagot.... 
«  Je  demande  qu'il  soit  remplacé  au 

«  comité    de    sûreté   générale »> 

Cette  dernière  partie  de  la  motion  de 
Merlino  fut  à  l'instant  décrétée  ,  et 
l'on  expulsa  Jagot  du  comité  de  sû- 
reté générale  en  même  temps"  que 
David  et  Lavicomterie.  IMus  tard  on 
produisit  contre  lui  une  lettre  par  la- 
quelle il  reprochait  à  un  comité  révo- 
lutionnaire de  ne  pas  indiquer  la  for- 
tune des  personnes  qu'il  faisait  arrêter 
comme  suspectes;  et  il  fut  décrété  d'ar- 
restation sur  l'accusation  de  Gouly, 
qui  prétendit  qu'étant  chargé  de  la 
correspondance  au  comité  de  sûreté 
générale  ,  Jagot  avait  soustrait  des  pa- 
piers à  la  charge  de  quelques  scélcrals 
du  département  de  l'Ain  qu'il  prot0 
geail.  Amnistié  par  la  loi  de  brumaire 
anl^,  il  n'osa  point  retourner  dans 
son  département,  et  il  dénaîura  sa  for- 
tune pour  aller  s'établir  à  ïoul ,  dans 
la  Meurthe,  ou  il  est  mort  en  janvier 
183S,  sans  avoir  été  exilé  en  IHIG  , 
son  vote  dans  le  procès  de  Louis  \V| 
ayant  été  considéré  tel  que  celui  de 
Grégoire.  M — D  j. 


JAH 

J  Aï  J IV  (Frédéric),  médecin  al- 
lemand, né  à  Meiningen  en  1766,  prit 
le  grade  de  docteur  à  léna  en  1787, 
devint  ensuite  médecin  de  la  cour  du 
duc  de  Saxe-Meiningen  et  médecin 
des  eaux  de  Liebenstein.  Il  mourut  le 
19  décembre  1813.  Ses  ouvrages 
sont  :  l.  Dissertatio  inauguralisme- 
dica  de  utero  retroQcrso,  léna,  1787. 
C'est  la  thèse  de  l'auteur  pour  le  doc- 
torat. Elle  a  été  réimprimée  dans  le 
Delectus  opusculorum  de  Frank , 
t.  YI,  p.  133.  II.  Essai  d'un  Ma- 
nuel de  médecine  populaire  ,  léna  , 
1790,'in-8A(en  allemand).  III. 
Clioix  des  médicaments  les  plus  sa- 
lutaires, ou  Matière  médicale  pra- 
tique (allemand),  Erfuit,  1797-1800, 
2  vol.  in-8"  ;  bon  ouvrage,  utile  pour 
un  praticien.  Après  une  introduction 
qui  contient  les  généralités  de  la  ma- 
tière médicale  ,  l'auteur  traite  de  tous 
les  médicaments  par  ordre  alphabéti- 
que. Il  a  paru  en  1807  une  deuxième 
édition  de  cet  ouvrage  qui  est  fort  esti- 
mé en  Allemagne.  On  est  étonné  qu'il 
n'ait  pas  été  traduit  en  fiançais,  ni  en 
aucune  autre  langue,  que  nous  sachions. 
Une  troisième  édition  a  paru  en  1814; 
enfin,  en  1818,  le  docteur  H. -A.  Er- 
hard  en  a  publié  une  quatrième,  corri- 
gée et  augmentée  par  lui,  en  2  vol.  in- 
S'^.  IV.  Essai  sur  le  système  de 
Z^roa'rt (allemand),  léna,  1799, in-S"*. 
V  .  Essai  sur  la  coqueluche  (allem.), 
Riidolstadt,  1805,  in-8".  VI.  Nou- 
veau système  des  maladies  des  en- 
Jiiiils  d'après  les  principes  de  Hroam 
et  l'expérience  (allem,),  Uudolstadt, 
1803  ,  in-8";  une  troisième  édition  a 
paru  en  1 81 9.  V 1 1 .  (jlinitptr  des  nm- 
ladies  cUronitpies^  ^rfiiith,  18*- 
1821 ,  4  vol.  in  8"  (allem.).  Cet  ouvra- 
ge a  été  continué,  depuis  le  second 
volume,  par  le  docteur  H.-A.*Erhard. 
On  trouve  encore  plusieurs  articles  de 
Jahn  dans  différents  journaux  de  mé- 
decine allemands.  G — T — r. 


JAU 

JAk'On  (b>rf<-HK!«lll  dt\  i  na 

àiê  prinripaiit  |>liiio«o{4m  aileroanfl» 
àe  VéxuAe  lir  k^ni.  na*|uit  \t  'Ht  ir- 
▼ner  17.'»9a  Wfllin.  prtitr^iUe  du 
durhr  tir  Ma^debourç;  Son  (irir,  pait- 
vrr  pa^«Mnrnlirr  ruin^ ,  alla  ie  ^er 
à  Mer»*^ur;4,  alors  an  posToir  dr  \'t- 
irclcur  OT  Sa\p  Nj  «Irlff»**,  qui  «lura 
II!  .mien^a  melirp  \on 

f  relui  fi  nrût  mon 

!ir  un  ^.»ut  Ji<î.-mI  pmir  l'rliiHr  II  le 
lais«^  donc  alUr  il'ahonl  4  l'ernle  gra- 
tnilr  du  rlupilredr  ^l^(  -rlmnr^.  De  li. 
le  jeune  I.(hii«- Menr  i  r  itm!  '  .m  ;m  m 
naw  luthérien  «Ir  H  a 

puide  par  une  de  r^^  mn 

autquellen  il  dut  <^e%  Miere«,  cl  dn  re^le 
comptant  plu«  »ur  la  HroMdenre  ou»nr 
&a  propre  énergie  que  *ur  va  Koar»e  à- 
peu-presvide,  el  nur  le-^  sec  ou  r%  de  *on 
père,  las  de  l'entretenir  à  ne  rien  faire. 
lleiireu<>emeRt  il  arail  un  p^u  de  Toix, 
et  res  liabitudes  ivusirales  rummii- 
■es  a  tous  les  Allemand^  :  il  >«•  mit 
four  vivre  au  nomUir  d<*  rr*  «"mllants 
chorùtC5  qui,  dan*  les  \ilii  \  n- 
pne,  vont  chantant   et   qn-  -ut 

le*  maisons  et  1rs  «"^li<es  li  Im  reve- 
nait ain»i  de  sept  à  linit  ou  ne».f  ;;ias- 
cl»en  par  semaine,  arec  lesquels  d  g'a- 
chelatt  du  pain  et  des  livres  ,  formant 
du  reste  un  contraste  parfait  avec  ses 
nomades  ami<  et  déployant  autant  d'ar- 
dew  pour  l'étude,  autant  de  constance 
el  de  régulante,  qu  ils  trouvaient  de 
charmes,  eux  .  à  la  xie  décousue,  vaga- 
bonde el  licencieuse  :  un  de  ses  pro- 
fesseurs ,  Jani  (  l'oy.  ce  nom  ,  n- 
*prrs\,  remarqua  sa  honne  conduite  et 
apporta  quelipie  soulagement  à  son 
sort.  Ayant  ainsi  alteinl  dix -huit  ans 
et  la  fin  de  ses  études  décollé;:?.  Jakob, 
possesseur  d'une  somme  de  six  ihalers. 
ne  balança  point  à  suivre  les  coiirs  des 
facultés  (1777r.  U  lui  fallait  du  cou- 
rage, lîn  an  encore  il  vécut  au  jour  le 
jour  et  d'expédients.  Knûn  des  leçons 
particulières  et  une  place  as  séminaire 


JAl  59 

le  mirent  an-^les^as  àfê  prCHMT*  be* 
«•ins.  On  crotâit  qu'il  se  vouerait  à 
la  carrière  pasmrjlr  ,  el  la  tlir(»lo;;ie 
sembla  d'abord  son  rtiide  île  pretii" 
leclion;  mais  in»en%iblrmrnl  la  philo- 
logie, l'érudition  proionde,  balancèrent 
les  attraits  dr  la  théologie,  et  outre  le» 
leçons  de  .Semler  el  de  N<r4»elt  ,  se» 
professeurs  de  critique  biblique  et  de 
do^ie ,  d  allait  entendre  ceilns  de 
Vhtiix  sur  1 1  lu*'  cl  celle»  de 

Irapp  s^l  l'étlitcalion,  \i- 

saiit   a    se   rcudo  ••    au 

pfoirssnral  ri  au  1  «)'ic, 

et  dispoM"  a  s'ai'  .'nr'i  .  ■  .1  r  :  '•• 
dans  l'une  ri  l'auir  <  .•  .  r  \.i  .1, 
l'hrmorait  de  <4>n  anilié;  mais  c  est 
Semler  qui  eterça  sur  lui  la  plus  grande 
intlurnce  ,  ou  plutôt  c'est  avec  le  nenic 
d«  Semler  que  le  sien  svm|>alhisail  le 
niieoi  :  c'nt  à  l'école  de  celui-ci  el 
sous  se>  auspices  qur  se  développèrent 
en  lui  celle  indr|»enilaiicr  d'esprit  , 
cet  amour  du  vrai  ,  du  positif,  du 
précis  .  crtte  anlipalliie  |m>ui  le  mys- 
ticisme ,  pour  les  solutions  liasaideu- 
ses  qui  furent  comme  U*  carliel  de 
son  eri»ei^neinrnl  ri  de  ses  ouvra- 
ges. Kn  17MI.  il  débuta  dans  la  car- 
rière srliolislique  en  remplissant  par 
inlérim,  nevfniots  durant,  a  l'orcasion 
du  départ  de  Jani  |mur  KiJeben,  les 
fonctions  i\e  co-recleur  du  ^vranase  lu- 
thérien. <>and  l'arrivée  ilu  recteur 
Sflimietler  raffiaiichit  de  celle  charge 
f17K|),  il  fut  nommé  adjoint  de  la 
chaire  de  troisième,  pvs,  en  l7H"i,  il 
obtint  le  litul:  lî  île  sixième  qu'il  cu- 
mulait avec  le  poste  d'ancien  f^f/iiur) 
du  séminaire.  Désormais  a  l'abri  d  in- 
quiet uiies  matérielles  et  a  même  de  se 
livrer  à  sa  voc.Tri.»o.  il  se  mit  avec  son 
atni  Koth  à  travailler  avec  ardeur  sur 
les  philosophes  anciens  et  modernes, 
tnquatreans,  de  i782à  178.>,  illut 
dans  leur  laiif^uc,  d'une  pari ,  Ions  les 
philosophes  latins  el  grecs  el  quelquc»- 
nns  de  leurs  commentateurs,  de  Taotre 


6o 


JAK 


JAK 


tous  les  ouvrages  philosophiques  re- 
marquables écrits  en  anglais,  en  fran- 
çais, en  italien,  en  allemand;  il  les  lut 
la  plume  à  la  main,  et  remplit  ses  car- 
tons d'une  prodigieuse  quantité  d'a- 
nalyses, d'extraits  ou  de  réilexions  soit 
sur  les  passages,  soit  sur  les  sujets  qui 
s'offraient  à  lui  :  les  histoires  de  la 
philosophie  ,  au  reste  peu  nombreuses 
à  cette  époque,  passèrent  aussi  soi||  ses 
yeux,  avec  les  articles  biographiques 
des  philosophes  célèbres,  t^^n  il  en 
arriva  aux  contemporains.  L'étoile  de 
Kant  venait  de  se  lever  sur  l'hori- 
zon. Jakob  fut  un  des  premiers  à  la 
saluer  de  ses  acclamations.  On  ne  peut 
imaginer  quel  eflet  produisuent  sur  lui 
la  Critique  de  l<i  raison  pure  récem- 
ment sortie  des  presses  de  Kiga  (1781), 
les  Prolégomènes  de  métaphysi- 
que et  la  Base  d'une  metaphycique 
de  la  morale  qui  l'avaient  suivie 
(1783).  Plein  d'enthousiasme  pour  le 
miraculeux  professeur  de  Kœnigsberg, 
il  crut  avoir  enfin  trouvé  ce  que  depuis 
long-temps  il  avait  en  vain  cherché,  du 
certain,  de  l'inattaquable.  Kant  rayait 
beaucoup  dans  les  solutions  et  les  pré- 
tentions de  la  métaphysique  ancienne, 
mais  il  ne  rayait  que  des  erreurs;  il 
renvoyait  les  chimères  au  ijéant,  il  n'a- 
néantissait point  le  vrai  :  il  enrichissait 
la  métaphysique  en  lui  faisant  re- 
jeter des  richesses  imaginaires,  il  affer- 
missait le  champ  de  la  science  en  le  ré- 
trécissant, (^e  qu'il  laissait  debout  dé- 
fiait le  douterai!  moins  selon  Jakob. 
Kri  effet,  pour  un  esprit  de  la  trempe 
du  siefi,  mélhodifjiie,  scrutateur  et  po- 
sitif, mais  peu  flexible  et  peu  apte  aux 
svnthèses  ,  le  criticismc  satisfaisait  à 
tout.  Il  ne  fallait  au  svstème  pour  réu- 
nir l'approbation  universelle  qu'un  peu 
plus  d'élégance,  un  peu  plus  d'art  d'ex- 
position. L'aridité,  l'obscurité  de  Kant 
rebutaient  le  vulgaire  des  lecteurs.  Sur 
d'esquiver  ces  défauts  en  écrivant  com- 
me en  s'expriroant  de  vive  voix,  Jakob 


résolut  dès-lors  de  se  faire  le  vulga- 
risateur de  la  philosophie  nouvelle. 
Son  premier  soin  fut  de  prendre  le 
grade  de  maître  ès-philosophie  (mai 
1785)  ;  puis  il  «jommença  des  lectures 
qui  d'abord  roulèrent  alternativement 
sur  la  philologie  et  la  philosophie  , 
mais  où  bientôt  il  s'occupa*xclusive- 
ment'  de  la  dernière  de  ces  deux  scien- 
ces. Le  nombre  des  auditeurs  qui 
se  pressaient  autour  de  lui  dépassa 
tout  ce  qu'on  avait  vu  jusqu'alors  en 
Allemagne.  La  précision,  la  netteté, 
la  méthode  qu'il  apportait  dans  l'ex- 
posé des  principes  et  qui  les  rendaient 
aisés  à  saisir  étaient  pour  plus  de  moi- 
tié dans  ce  succès,  et  nul  doute  qu'à 
Jakob  ne  revienne  l'honneur  d'avoir 
popularisé  la  doctrine  de  Kant  à  Halle. 
Le  professeur  de  philosophie  à  la  fa- 
culté, J.-Aug.  Kberhardt ,  en  fut  ma- 
lade de  désespoir  :  il  détestait  le  kan- 
tisme, et  jusqu'à  cette  époque  il  avait 
joui  de  quelque  renom  :  l'éclat  avec  le- 
quel débutait  son  jeune  rival  blessait  sa 
vanité;  le  succès  du  criticisme  révoltait 
ses  convictions.  Il  fallut  pourtant  qu'il 
bût  le  calice  jusqu'à  la  lie  :  chaque  jour 
lui  ravissait  des  auditeurs,  et  non  con- 
tents de  déserter  sa  salle,  les  traîtres 
passaient  à  l'ennemi  ;  ils  allaient  étu- 
dier Kant  et  applaudir  son  interprète. 
Chaque  jour  aussi  Jakob  agrandissait 
le  cercle  étroit  d'abord  de  ses  lectures; 
et  de  la  logique  son  premier  objet  ,  il 
passa  aux  éléments  delà  métaphysique, 
à  la  psychologie  empirique,  à  la  morale, 
au  droit  naturel  ,  trouvant  toujours 
moyen  de  rattacher  ces  sciences  aux 
principes  féconds  posés  par  Kant  , 
et  dont  au  reste  cet  illustre  penseur 
avait  lui-même  fait  application  à  la  mé- 
taphysique et  à  la  moiale.  Au  bout  de 
deux  ans,  l'université  de  Halle  l'admit, 
mais  sans  titulariat,  à  la  chaire  de  phi- 
losophie de  la  faculté,  qu'il  cumula  bien- 
trk  avec  sa  place  de  prédicateur  à  la 
maison  de  correction  de  Halle.  I^oin 


JAR 


JAR 


6i 


iJe  M  rjlriilir  aprrs  ce  pronirr  pai,  il 
irJouhIa  «l'acli\ilé  :  peuseur  prufoiid, 
IMfirur  luiiile  ,  il  lrou\ait  vans  crv>r 
d«o  |iuiiils  (le  >ur,  (Je>  ai^umeiilN,  d» 
rj|i|iorls  iiou\ejii\;  la  Joriniir  dans  sa 
IxHiilir  dr\ciiail  plu>  aUtJ^jiilr,  plu% 
iircM:>lible;  rlr;;jiit  el  rapide  écrivain, 
il  la  rt^pandait  au-delà  des  limiles  de 
l'uni^erkile.  Ses  re>urae»  et  se»  manurU 
di*  lo^i()ue  et  inelaplnsuiue ,  de  p.v- 
rliolu^if,  de  morale  ,  de  «Iroil  natuirl, 
elaieiil  adupln  dan»  le»  universités  et 
dans  les  folIr^f>.  inrrae  par  des  admi- 
iii>traliuiis  ralliul-(|i»rs  ,  el  avaient  1rs 
liuniieurs  de  la  lrlln))rr^^uln  et  de  la 
cuiilte-fa^un.  l/arjiiwiiiir  de  Lexie  le 
(ouionnait  ilTSU)  ,  celle  de  llarlem 
lui  décernait  un  acrr»Mt  ^ITUl  .  Sa 
Doctrine  phiUnuftlnt^ue.  du  lirait 
(1795\  mise  au  juur  a\ant  l'ouvrage 
de.kant  sur  le  mrme  sujet,  a>ail  piuu- 
\e  qu'il  était  capable  d*ou>rir  le  pre- 
mier le  champ  d'une  science  et  d'en 
parcourir  toute  Irlendue.  Son  ^raiid 
ouvrage  de  la  lu'li^iun  uuix'rrsfUt  , 
bientôt  sui\i  des  priiuiftrs  de  lu  sa- 
gesse et  de  lu  rie  humaine  ^1802  , 
mil  le  sceau  a  >a  réputation.  Au  iiii- 
lieu  de  ces  succès  il  a\ail  Piiftti  rie 
noiniur  en  tilie  a  la  chaire  <' 
phie  de  Halle  ,  aptes  a\oir    <  .• 

de  (liessen  ITîM  .  (^pendaut  le  s>s- 
trrue  auquel  JuLub  >'elait  \oue  a\ec 
tant  de  zèle  était  dqà  depa^M*.  Comme 
toutes  les  impulsion»  puissantes,  l'ap- 
parition de  la  Critique  de  la  raison 
puie  a\ait  été  le  si;;nal  d'un  immense 
essor  dans  tout  le  monde  iulellecluel  ; 
et,  roinme  après  toutes  le>  révolutions 
QUI  donnent  le  l)ranle  aux  maxses,  il 
>  était  bicnlôt  pose  deux  partis,  le 
mou\emenl  et  la  rcsi>tanre.  Tandis 
que  quelques  intellij;eiM:e>,  s'attarhant 
rigoureusement,  ou  peu  s'en  faut,  à  la 
lettre  de  kaiit,  juraient  toujours  par 
ce  philosophe  ,  rej;ardaient  ses  livres 
comme  une  bible,  ses  formules  comme 
sacramentelles,  et  ne  voulaient  ni  plu* 


ni  moin»  nue  lui  ;  d'autre»  plu»  hardie» 
ou  moin»  lacileN  a  contenter  restaient 
en  deçà  ou  »'j\eniuraieiit  au-delà,  ^ra- 
citant  \ei»  le  scrpiiriMue  ou  aspirant 
au  »ceplicisme  .  quelques  une»  même 
>'elanraienl  ùan*  le-»  values  relions  du 
mysticisme  ou  tendaient  a  ieab»orber 
toutes  le»  antimonie»  dans  un  s\ncrë- 
tisne  qui  n'est  pas  loin  du  panlliei>me. 
Jakob  était  des  premier».  Il  a\ait  eu 
faim  et  («iif  de  certitude,  lon^  lerop\«a 
barque  a>ait  ele  a  la  dérive,  jouet  des 
vents  et  des  systèmes;  enfin  il  avait  jeté 
Panrre  dans  Ir^  eaux  profondes  de 
Kant  :  il  voulait  rester  en  place.  11 
s'indi^nait  qu'on  prétendit  ramener  la 
phil<»ophie  sur  le  sable  mouvant,  ^lai» 
quelle  force  au  mitnde  eut  comprime  ce 
lessoit  dcN  intelligences  m  vij;oureu»e- 
ment  tendu  par  kant  C'est  comme  »i 
l'on  eût,  apie-i  le  triomphe  de  Luther, 
demandé  que  le  protes'.anlisme  ne  con- 
tint ^mais  deux  nuance»  dans  son  »ein. 
Déjà  Kevnoldel  Ueck  avaient, ciiacuii 
a  sa  fa^on  ,  modifie  le  critici>mc  qu'il» 
prétendaient  |ji>ser  intact  dans  >nn  es- 
sence; Fichie  transformait  le  subjectif 
de  kant  en  moi  et  l'objerlif  en  non- 
moi  ,  et ,  tirant  le  second  du  premier, 
neo-seiileiucnt  elabhvsait  un  idéalisme 
à  la  place  de  la  ^henomenalitr ,  mais 
dans  >on  ideali»nie  ne  niftiait  en  relief 
qu'une  de^  face»  de  sa  substance; 
Schellin;^  préludait  a  l'idéalisme  Irjii:»- 
cendenlal,  a  la  doctrine  de  l'absolu  en 
publiant  ses  Idées  sur  une  fthiloso- 
phie  de  liP nature  (179'>),  en  élabo- 
rant son  ûmr  du  monde ,  dont  il 
émettait  de|a  de  vive  voix  les  proposi- 
tions fondamentale».  Les  deux  der- 
niers surtout  vov aient  déjà  se  «rouper 
autour  d'eux  nombre  de  disciples  :  ils 
avaient  leurs  chaires  et  leurs  jour- 
naux, ils  devaient  le  Ion  en  maîtres,  et, 
oppuse>  entre  eux  sur  des  points  hni- 
damenlaux,  n'en  étaient  pas  moins  unis 
contre  les  fidèles  adeptes  de  kant,  trai- 
tant leurs  principe»  comme  une  doc- 


63 


JAR 


trine  surannée,  et  eux  comme  des  par- 
tisans de  vieilles  idées.  Le  cnlicisnîe, 
débordé  par  ces  nouveaux  venus, ne  pou- 
vait pourtant  se  laisser  évincer  sans  dé- 
fense :  les  kantistes  purs  se  déterminè- 
rent à  fonder  un  journal  pour  «uerroyer 
contre  leurs  adversaires  :  Jakob  en 
fut  le  rédacteur  en  chef.  Mais  l'entre- 
prise ne  tarda  point  à  devenir  onéreuse. 
Jakob  d'abord  s'était  chargé  des  frais 
(1*795);  le  libraire  Kleefeld  se  substi- 
tua ensuite  à  lui  pendant  deux  ans 
(1796  et  1797)  et  le  mode  de  publi- 
cation changea  en  même  temps  (aux 
numéros  hebdomadaires  d'une  demi- 
feuille  in-4'^  furent  substitués  des  ca- 
hiers trimestriels).  Ni  l'un  ni  l'autre 
mode  n'étaient  ce  qu'il  fallait  pour  eni- 
pêctier  l'oubli  et  la  fati|^ue,  pour  te- 
nir les  esprits  en  éveil  et  en  ^oùt.  I^ 
rédaction  ne  fut  pas  non  plus  à  l'abri 
de  reproches  :  la  partialité,  l'acrimo- 
nie prenaient  souvent  la  place  de  la 
justice  et  de  l'urbanité,  que  les  savants 
ne  devraient  jamais  bannir  de  leur 
polémique  :  départ  et  d'autre,  l'irrita- 
tion s'en  mêla  :  à  l'arDjumentation  tran- 
chante, étroite  et  raide  des  kantistes, 
les  amis  des  Visbek  ,  des  Schelli»^, 
répondirent  par  des  épif^rammes  plutôt 
grossières  que  spirituelles  :  les  Heures 
surtout,  quoique  rédi<2;ées  sous  les  aus- 
pices de  deux  grands  hommes,  Schil- 
ler cl  Gœlhe,  se  signalèrent  dans  cet 
échanj^e  de  personnalités  et  de  sar- 
casmes, le  plus  souvent  dardés  sur  Ja- 
kob, bien  qu'ordinairement*les  articles 
qui  mettaient  ses  anta^^onistes  en  fu- 
reur, notamment  les  analyses  des  ou- 
vrages d'Ilh,  de  Reil,  de  Fichte,  de 
Visbek ,  fussent  de  ses  collaborateurs 
et  non  de  lui.  Il  n'en  avait  pas  moins 
un  peu  de  tort  de  laisser  les  collabora- 
teurs prendre  un  ton  trop  haut  et  trop 
acerbe  :  les  purs  kantistes  d'ailleurs 
avaient  mauvaise  f^rare  de  vouloir  immo- 
biliser la  science,  et,  quand  l'ebn  était 
donné,  de  l'eachaîner  parce  qu'ils  nt 


JAK 

pouvaient  le  suivre.  Leur  cause  eût- 
elle  été  la  bonne,  elle  n'eut  pas  été  la 
plus  populaire,  il  eut  fallu  pour  en  balan- 
cer l'impopularité  un  o;énie  transcen- 
dant. Mais  c'est  aux  hommes  du  mou- 
vement qu'appartenait  alors  le  }^énie,  et 
non  à  ceux  delà  résistance.  Après  trois 
ans  de  guerre,  Jakob  fut  donc  harassé 
de  la  lutte;  et,  désespérant  du  criticis- 
me,  un  peu  chagrin  de  le  voir  déserté 
du  public  qui  courait  aux  novateurs, 
ne  voulant  ni  soutenir  ni  abandonner 
l'cdince  qui  tombait,  de  la  philosophie 
pure  il  se  réfugia  dans  les  applications 
de  la  philosophie,  se  réservant  de  les 
subordonner  autant  que  possible  aux 
principes  très-légèrement  modifiés  du 
maître  et  non  à  ceux  des  écoles  récen- 
tes. C'est  en  1798  que  commence  cette 
seconde  période  de  sa  vie  scientifique. 
11  n'arrivait  point  sans  préparation  à 
ces  nouvelles  études:  depuis  long  temps 
des  écrits  sur  la  législation,  l'économie 
politique,  les  finances  et  la  science  ad- 
ministrative, avaient  été  au  nombre  de 
ses  éludes  favorites;  et  souvent  à  la 
suite  de  ses  méditations  sur  la  morale 
et  la  métaphysique  de  la  morale,  il  ar- 
rivait au  droit,  à  sa  loi  :  il  avait  même, 
nous  L'avons  dit,  entamé  ce  sujet  avant 
Kant.  Lors  donc  qu'en  1800  il  com- 
mença des  lectures  publiques  sur  l'é- 
conomie sociale,  il  vit  les  élèves  affluer 
derechef  à  son  cours,  et  avec  les  élè- 
ves des  hommes  Aw  monde,  un  vérita- 
ble public.  L'année  suivante  (1801), 
il  fut  élu  pro-recteur  de  l'université  ; 
et  par  une  exception  sans  exemple  jus- 
que-là il  fut  prorogé  dans  ce  poste 
jusqu'en  180i.  Déjà  il  avait  employé 
son  activité  administrative,  soit  comme 
membre  du  .sénat  académique,  soit  en 
s'occupant  des  finances  de  la  faculté  de 
philosophie.  Son  pro-rectorat  de  trois 
ans  fui  signalé  par  deux  grands  évé- 
nements. L'université  de  Halle  était 
fort  pauvre  et  fort  gênée:  sor  la  demande 
de  Jakob,  le  roi  de  Prusse  lui  accorda, 


JAK 


JAK 


63 


avec  MilHMi  provenant  de  la  Mi>t« 
lies  bien»  ^  jéMiitc»  de  ia  l'rujk»e  |»o- 
lnn:)txr  .  une  aHgmenUiion  de  liuii 
I!  >  par  an  que  des  au«;inf'iit)- 

I  iiirlle*    |K>rlèrenl    à    quinze 

mile.  1^  rèKleoicnl  de  l'univerMlé 
olfrait  beavccMip  de  défauts  :  .laLnb  , 
sur  i'invitatioii  du  culimet,  en  éla- 
bora un  autre  qui  iatisfai^ait  aui  con- 
ditions voulues  ,  et  qui ,  bientul  miu- 
ini>  au  ministre  Massow ,  fut  ^anr- 
tionne  pai  l'aiiprobalion  royale.  Il 
s'appliqua  ju.vm  à  fatre  rr^>er  m  fait 
beaucoup  «I  aluis  que  lu  leiinr^s*»  »|pi 
academio    '  Mnmr  de:(    pnvi- 

iè^t».  l  iK  vlrifie    rrpnma 

les   de>ordie»    JuisqueU    plusietii^    ^e 
lieraient  ;    plus  d'elr>e«    qui    v?n^vent 
peidre  leur  temps  rt  rar;;enl  «ir  leurs 
parents,  sans  mcltre  les    pirtU  dan« 
les    salle:>   de   la   faculté  :   stirtoal    il 
ne  voulut  plus  entendie  parler  de  det- 
tes d'eludiaut>.  (^es  ioe>ure5,  pour  les* 
quelles  il  fallut  de  la  ferrorir  rt  du  rmi* 
ra;;e,  escilereiit  dr>  inetoiileiilrmrnis. 
A   \\    longue,   la  nia|onle  de^  rlr^es 
lui  rendit  plu^  de  justice  ,  et  i^ot  bien 
remarquer  que,  daii>  les  orfa*i«»n>  ou 
les  eVMdaiiIs  étaient   lèses  et   a>a'cnt 
raison,  il  prenait  leur  défense  avec  vi- 
gueur et  dignité,  sans  reculer  d'un  pas; 
mais  Timprcssion  première  était  inef- 
façable. On  l'estimait  et   le  redoutait  ; 
on  ne  l'aioiait  pas.  JaLub  était  rede- 
venu,   simple    professeur  ,    quand    la 
guerre  avec  la  Fiance  ecbta  m  1H(^H. 
I.a  bataille  d'Iena  ouvrit  K*s  {»oites  de 
halle,  l'ius  heureuse  que  le  reste  de  la 
ville,  la  maison  de  JaLob  etliappa  au 
pillai;e  et  à  la  dévastation  ;   le  ;;f  néral 
Dupont  Y  logeait  :  mais  le  court  séjour 
de  ce  protecteur  lui  conta  en  un  clin- 
d'œil    toutes  ses    provision-,   et    cinq 
cents  thalers.  Pour  a)[obie  de  maux, 
runi\ersité   de   Halle   avait    déplu    à 
Napoléon  :    en  vain    Berthier  «l'etait 
porte  garant  des  bonries  iulenâions  d* 
l'empereur.  Laitier  conquérant  parut 


en  personne  à  I  Lille  le  19  oct  :  et 
ses  brèves  r> 

durent  fjirr  )  , 

de  l'univer^iie  un  sim  tre  dénoue- 
nieiiî.  ••  Vh'  1.1  ttii-nl,.'  ,•  ,.st  votre 
'"  .  e  sait  se 

1-»       I       -        I '  •i''  :  "Vo- 

tre unoersité  est  belliqueuse  !  vos  étu- 
diants ont  voulu  former  un  regmenl 
de  housards.  ■  Kl  enfin,  comme  pour 
passer  l'éimn^e  ior  tout  ce  que  la 
Ville  avait  souffert  à  l'enirée  des  Fran- 
çais :  "  C'est  fait  !  -  di^ne  pendant 
du  mot  qu'il  avait  prononre  à  jena  : 
'  (l'est  la  ;;uerre!  -  Ja\ob  était  de  la 
drputation,  et  jufjea  bien  que  «e*  mo- 
nasvllables,  ces  coup*  de  boutoir, 
riaient  des  indices  plus  sûrs  de  fa 
pensée  de  Napoléon  ,  que  la  {^ràce 
a\rr  Uqurllr  il  prit  leur  pétition,  et 
promit  d*\  répondre.  Kn  efTei,  la  ré- 
ponse fut  ordre  à  l'université  de  se  re- 
garder comme  dissoute ,  et  aux  étu- 
diants de  quitter  Malle  < 
quatre  heures.  |^  sénat  > 
lit  un  inutile  rïïort  pour  flrrl..;  Napo- 
léon :  il  en  fut  pour  cent  louis  donnés 

*  ^ille,  afin  d'ob- 

•  •  •  '  "t  répondit  bien- 
tôt par  cette  note  laconique  :  «  Sa  Ma- 
jesté n'entend  pas  que  l'université  se 
rétablisse.»»  Klle  se  rétablit  icpendant, 
mats  «ous  Jér(^me,  et  après  l'organisa- 
tion du  rovaume  de  ^^  rstphalie.  Ja- 
lob  n'eût  point  voulu  alors  ^  occuper 
nn  emploi.  Les  profes.seurs  s'étaient 
eloi;;nes  la  [ilupart.  Il  suivit  leur  exem- 
ple, et  après  avoir  fait  faire,  par  Schiilz 
et  Niemevrr,  des  démarches  pour  une 
des  chaires  académiques  de  llerlin  ,  il 
accepta  celle  d'économie  politi(jue  que 
Km  oITrit  l'université  russe  de  Kliar- 
kow  (1807),  et  qu'il  avait  dedai;;iiée 
deux  ans  plus  tôt.  Bien  que  ses  appoin- 
tements fussent  satisfaisants  (di.\  raille 
roubles)  et  qu'il  pût  se  prometire  du  loi- 
.^ir  dans  ce  poste,  il  ne  s'v  rendit  que 
comme  a  une  terre  d'exil.  La  nécessité 


64 


JAK 


de  faire  son  cours  en  latin,  puisqu'il  ne 
savait  pas  le  russeet  que  ses  auditeurs  ne 
savaient  pasTallemand  ;  l'inimaf^inable 
ignorance  de  la  population  russe,  le 
spectacle  d'une  société  de  dominateurs 
et  de  serfs  aussi  vicieux  les  uns  que 
les  autres,  l'esprit  mesquin  et  tracas- 
sier  de  presque  tous  ses  collèj^ues  , 
qui  le  ialousaieiit  parce  que  le  comte 
Potorli  ,  curateur  de  l'université,  lui 
marquait  plus  d'éj^ards  qu'à  la  plupart 
des  professeurs,  enGn  le  mépris  et  les 
préjun;és  qu'affectent  les  Russes  du 
commun  pour  les  Allemands,  dont  le 
nom  chez  eux  est  une  injure,  lui  ren- 
daient le  séjour  de  Kliarkow  pénible. 
Il  arriva  même  qu'il  se  prit  de  que- 
relle avec  le  comte  Po^oçki  à  l'oc- 
casion de  son  ami  Rotli  qu'il  souhaitait 
avoir  pour  collègue  à  Kharkow,  et  en 
raison  des  lenteurs  du  comte  à  remplir 
les  formalités  nécessaires.  Aux  avis  de 
Jakob  qui  s'évertuait  à  le  stimuler,  il 
répondit  qu'il  n'avait  que  faire  d'un 
vice-civaleur,  et  qu'un  professeur,  que 
toute  une  université  même  pouvaient  en 
Russie  être  brisés  d'un  souffle  :  Ja- 
kob répliqua  en  offrant  sa  démission. 
Cette  fermeté  calma  les  transports  du 
j;rand  seip;neur,  et  l'harmonie  renaquit. 
Cependant  Jakob  était  toujours  mé- 
content de  se  sentir  au  fond  d'un  dé- 
sert, de  faire  en  vain  retentir  sa  voix 
parmi  des  Cosaques,  de  ne  plus  pnrli- 
cipcr  au  mouvement  intellectuel,  de 
ri;;norer  en  quelque  sorte,  éloigné  qu'il 
était  du  foyer  et  du  centre  des  lumiè- 
res. Il  tachait  de  se  distraire  en  ap- 
prenant le  russe,  qu'au  bout  de  peu  de 
temps  il  posséda  au  point  de  causer  en 
cette  lan|;ue,  en  revoyant  la  nouvelle 
édition  de  ses  Principes  d'économie 
nationale,  en  publiant  se^,  Principes 
de  législation  pénale ,  enfin  en  rédi- 
geant à  l'usar^e  des  gymnases  russes 
des  manuels  de  logique,  de  morale,  de 
métaphysique,  de  grammaire  générale, 
d'esthétique ,  de  droit  naturel  et  d'é- 


JAK 

conomie  politique.  L'éducation  en 
Russie  est  ambitieuse  et  encyclopédi- 
que :  on  veut,  on  croit  possible  que  les 
élèves  d'écoles  secondaires  aient  des 
notions  de  toutes  les  sciences.  Mais 
les  professeurs  et  les  livres  à  l'aide 
desquels  pouvait  se  réaliser  le  pro- 
gramme étaient  rares.  Jakob  voulut 
au  moins  combler  la  seconde  lacune, 
et  ,  à  cet  effet  ,  il  présenta  au  mi- 
nistre de  l'instruction  publique  un 
plan  ,  faisant  sentir  qu'il  fallait  en 
même  temps  des  manuels  à  l'usage  des 
élèves  et  des  commentaires  à  l'usage 
des  maîtres,  et  offrant  de  se  charger 
des  uns  et  des  autres.  On  l'approuva, 
et  il  reçut  ordre  de  se  mettre  immé- 
diatement à  l'ouvrage  (1808)  :  on  lui 
expédia  même  de  St-Pétersbourg  un 
Russe ,  Ourpenski  ,  lequel  aurait  pour 
fonction  de  traduire  en  russe  à  mesure 
qu'il  écrirait  en  allemand.  Telle  fut  la 
rapidité  avec  laquelle  il  y  procéda, 
qu'en  moins  de  trois  ans  et  au  miliiru 
des  travaux  de  sa  chaire,  de  l'élude  du 
russe,  et  d'autres  occupations  encore, 
il  acheva  les  sept  manuels  et  trois  des 
sept  commentaires.  Il  trouvait  encore 
moyen  pendant  ce  temps  de  remplir  les 
fonctions  d'inspecteur  des  écoles  de  la 
couronne,  et  celles  de  membre  du  co- 
mité des  écoles.  En  1808,  lorsque  les 
assignations  de  la  banque  impériale 
tombèrent  tout  à  coup,  il  jeta  rapide- 
ment ses  réflexions  dans  une  brochure 
que  peu  de  personnes  pouvaient  com- 
prendre, et  que  Potoçki  ne  lui  conseil- 
lait point  d'imprimer,  répétant:  «  Nos 
finamciers  sont  des  imbécillcs,  ils  n'y 
entendront  rien  ,  vous  en  serez  pour 
vos  frais.  »  Jakob  alors  fit  parvenir  di- 
rectement, par  son  ami  Wiirst,  son 
opuscule  à  l'empereur  Alexandre,  qui 
le  communiqua  au  ministre  de  l'in- 
struction publique,  Spcranski.  Ce  der- 
nier en  fit  un  rapport  favorable  à 
l'empcr^ir  ;  et  au  mois  de  septembre 
1809  une  estafette  vint  trouver  Jakob  i 


JAk 


JAK 


NoaTeaa-Tcherkasl,  dont  il  inspectait 
\ts  Croies  aver  son  auii  Stoiko^itrh,  rt 
lui  donna  l'ordre  df  vr  rrndre  >ans  delui 
à  Saint  iVlcrsbour;;.  Sj>rranski  If  rrçut 
lrr*-birn  ,  lui  6t  dncrjf^  qiic<>tron*  ft 
fut  émerveille  de  sr*  rr[M»n>c*.  Jalob, 
s'il  faut  l'en  croire  sur  ce  [>oinl,  devina 
à  peu  de  chu^e  pro  la  Mimine  d'a^^i- 
enalioni  mi^c  en  rirrulalion  par  la 
banque,  romme  5'il  eût  eu  le^  procr*- 
verbaiu  de  cette  adinini^lraiion  :  celte 
suinine  montait  à  plu<  de  quatre  cent 
ciuquante  milliont.  l)es-lors  il  fut 
tre^-bien  dans  l'esprit  de  Speraosli, 
et  Alexandre  ,  sur  sj  rrrommandatron, 
lui  conûa  plu>ieurN  tra>ati\  important). 
Iiientc\t  il  fut  nommr  membre  du  co- 
mité de  Gnanrrs,  destine  a  1  ele\er  le  cre^ 
dit  :  deux  auties  membre»  y  siégeaient 
a%ec  lui  ,  \N  urst  et  lïalou^ianski 
(  1809  ).  Trois  seroaineN  après  ,  il 
rédigea  le  MrniiHrr  en  réponse 
aux  questions  lie  Sprrunski ,  mé- 
moire ou,  après  avoir  liacé  le  tabieaa 
des  fautes  commises  par  la  pfété- 
dcntc  adminiNlration  ,  il  exposait  les 
piiiicipes  j;nirrau\  il'apies  lesqueU  le 
comité  opereiait,  pour  lrllau^ser  j^ra- 
durllemeiit  les  valeurs  decreditées  et 
ré;;ulariser  le  s>  sterne  monétaire  de  la 
Russie.  Pour  les  détails,  il  les  remet- 
tait au  temps  ou  le  ministre  aurait 
fourni  au  comité  de  plus  amples  do- 
cuments. Alexandre  témoigna  sa  sa- 
tisfaction à  l'auteur,  en  le  nommant 
chevalier  de  Sainte-Anne,  et  enjoi- 
gnant au  don  d'une  ba^iie  en  bril- 
lants l'assurance  d'une  place  dans 
la  commission  législative  et  d'un  em- 
ploi au  ministère  des  finances.  Sur  cet 
espoir  ,  JaLob  manda  sa  famille  de 
Kharkow  à  Saint-Pétersbourg.  Les 
promesses  de  l'empereur  ne  tardèrent 
peint  à  se  réaliser;  mais  auparavant  il 
eut  le  cha<îrin  de  voir,  par  suite  d'une 
révolution  miiiisiérielle  qui  porta  Gou- 
riev  aux  finances,  avorter  le  s>stème 
qu'il  regardait  comme  le  meilleur,  et 


qu'appovait  Speranski.  Des  deux  «>«- 
téme^  en  prrsrnrr,  celui- de  Speranski 
et  celui  de  (  »o ji  u-v ,  rn  apparence  c'est 
bien  le  premiei  «jui  fut  adopté  ;  main 
c'est  (touiiet  qui  eut  mivsion  de  le 
mettre  en  pratique,  et  l'on  ne  s'éton- 
ne pav  qu'il  s'y  soit  pris  de  manière 
à  l'emprclier  de  produire  des  rrsultals. 
Jakob  re^^ardait  cet  çchec  comme  per- 
soniirl  :  dégoûté  des  cabales  et  de  l'Ii^- 
pocnsie  de  la  cour,  il  songeait  à  .se 
rendre  a  N  ilna  où  l'université  lui  of- 
fi ait  une  de  ses  chaires  académiques, 
Speranski  le  retint.  (^  dernier  rtait  le 
chef  de  la  commission  législative  nou 
tellement  instituée  pour  donner  des 
codes  au«  liasses  et  divisée  en  cinq 
sections.  Il  Bt  nommer  Jakob  chef  de 
la  section  criminelle.  I.es  travaux  d'a- 
bord marchèrent  a  merveille.  Speranski 
donnait  carte  blanche  au  philosophe 
qui,  familiarisé  d'avance  avec  les  prin- 
cipes (généraux  du  droit  et  avec  les 
lr      "  spéciales  de  r.Mlema;;oe, 

d(        \  lire,   de   l'Italie,    nous  ne 

diM>n>p4»de  la  France,  car  il  professait 
pour  les  codes  napoléoniens  un  dédain 
e\aî;éré,  n'avait  qu'à  passer  en  revue 
les  lois  criminelles  de  la  Uussie  et  les 
ouv rafles  écrits  pour  les  développer  et 
les  éclaircir.  Jakob,  après  ces  études 
premières,  dressa  comme  base  du  tra- 
vail définitif  trois  traites  en  forme  de 
grands  tableaux,  présentant  :1e  premier 
les  principes  de  droit  d'après  jesquels 
il  juj;erait  les  délits  et  graduerait  les 
châtiments,  le  second  les  crimes  oui 
emporteraient  la  mort,  le  troisième  les 
autres  crimes  avec  les  peines  corres- 
pondantes; puis,  approuvé  complète- 
ment par  l'ex-ministre,  il  rédi;^ea  en 
deux  ans  un  code  dont  la  mansué- 
tude n'excluait  point  la  sévérité  ,  et 
qui  décelait,  avec  les  méditations  du 
savant,  l'expérience  de  l'homme  d'é- 
tat, nuis  qui  froissait  trop  les  habi- 
tudes et  les  préjugés  russes.  C'était  la 
faute  de  Speranski,  dont  l'esprit  éle?é 


Lxvm. 


66 


JAK 


JAK 


méprisait  les  :nénaji;ements.  Malheu- 
reusement pour  Jakob,  Speranski  ne 
put  (léfeiulre  ses  idées  jusqu'au  bout. 
L'aristocratie  russe  le  haïssait,  la  plèbe 
et  la.cla.sse  nioycniie  ne  Taiinaicnt  pas; 
on  le  regardait  comme  le  repré.--entant 
des  idées  étranj^^ères,  et  les  idées  étran- 
gères étaient  considérées  comme  la 
cause  de  la  dépréciation  du  papier,  de  la 
gêne  du  commerce,  de  la  famine,  de  la 
guerre  qu'on  allait  avoir  avec  Napoléon, 
Le  pauvre  Speranski  ne  put  tenir  con- 
tre cette  explosion  de  la  nationalité 
russe  qu'il  fallait  bien  contenter  au 
moment  d'une  lui  le  qu'on  voulait  ren- 
dre nationale  (1811).  Uelé<;ué  à  Nij- 
ni-Novgorod  ,  il  ne  recouvra  la  faveur 
d'Alexandre  qu'en  1816.  Pour  Jakob 
on  le  traitait  mieux,  mais  on  eût  aussi 
voulu  l'éloigner.  On  lui  proposa  la  di- 
rection supérieure  des  douanes  de 
Radzivllov  :  c'était  une  de  ces  places 
où  cinq  ans  sufGsent  pour  faire  fortune 
pour  peu  qu'on  sache  fermer  les  yeux, 
mais  où,  si  l'on  n'a  pas  cette  complai- 
sance, on  court  risque  d'apoplexie  ou 
de  mort  subite.  A  son  refus  ,  on  se  ra- 
battit sur  une  chaire  au  couvent  de 
Saint- Alexandre-Nevski  ;  ce  n'était 
point  une  chaire  d'enseignement  su- 
périeur, il  la  rejeta.  Il  le.sta  donc  dans 
la  capitale  comme  chef  de  la  section 
criminelle.  Mais  évidemment  ses  tra- 
vaux précédents  étaient  h  appés  de  mjl- 
lité*:  son  plan  de  code  était  le  contre- 
pied  de  l'esprit  russe  ,  et  cet  esprit 
depuis  la  guerre  de  France  était  deve- 
nu plus  superstitieux  et  plus  étroit  que 
jamais  :  on  vo}ait  dans  Napoléon  le 
fléau  de  Dieu  levé  contre  les  péchés  de 
la  Uussie,  et  le  retour  à  l'ancienne  sim- 
plicité, à  l'ancienne  foi  pouvait  seul  dés- 
armer le  courroux  de  Dieu.  Les  grands 
étaient  aussi  engoués  de  ces  idées  que 
le  peuple.  On  conçoit  que  ce  n'est 
point  à  de  telles  dispositions  que  de- 
vaient plaire  les  principes  de  Ikccaria 
et  de  î'eucrbach.  Novoslizow  se  saisit 


du  ministère  :  la  commission  de  légis- 
lation eut  pour  chef  le  prince  La- 
poukin  :  un  favori  du  prince  fut  chargé 
de  recevoir  les  projets  des  chefs  de  sec- 
tion et  s'empara  bientôt  de  tout  le 
travail  :  le  bouleversement  du  person- 
nel facilita  cet  accaparement  d'attribu- 
tions. Bientôt  pourtant  il  fléchit  sous 
un  faix  que  personne  n'eût  pu  porter, 
et  pour  le  criminel  au  moins  il  appela 
Jakob  à  l'aide,  lui  prodigyant  les  flat- 
teries et  les  promesses.  Sans  trop  le 
croire  Jakob  se  mit  à  l'œuvre  :  il  fut  sti- 
pulé qu'il  refondrait  son  plan  de  code  , 
l'harmoniserait  avec  les  lois  et  coutu- 
mes russes,  et  que,  après  l'avoir  sou- 
mis à  la  révision  du  favori,  il  aurait  en- 
core droit  d'examiner  les  changements 
faits  à  son  travail  avant  qu'il  fût  ques- 
tion d'en  soumettre  l'ensemble  au  con- 
seil impérial.  Mais  l'expéditif  mosco- 
vite trouvait  cette  marche  bien  longue; 
le  plus  souvent  donc  11  négligea  de 
renvoyer  à  Jakob  les  passages  qu'il 
amendait,  intercalait  ou  défigurait  par 
des  suppressions;  et  soumettant  au  jour 
le  jour,  et  chapitre  par  chapitre,  le  re- 
cueil législatif  au  conseil  impérial,  il 
rendait  toute  modification  ultérieure 
impraticable.  Le  code,  ains  ibaclé,  ne 
pouvait  manquer  d'oiirir  des  fautes  et 
des  lacunes.  Jakob  perdit  l'envie  et  le 
courage  de  s'en  mêler,  et  n'y  travailla 
plus  que  matériellement,  sans  illusion 
et  sans  espoir  de  faire  le  bien  ou  de  s'il- 
luslrer.  En  1816,  la  commission  fut 
réor^j^anisée  ;  ainsi  que  \\  lirst  et  Ba- 
lougianski ,  Jakob  perdit  le  titre  de 
chef  de  section  ,  sous  prétexte  qu'il 
avait  trop  d'occupation  au  ministère 
des  finances  pour  remplir  ses  fonctions 
à  la  commission  ;  mais  il  fut  nommé  di- 
recteur de  la  rédaction  des  lois  crimi- 
nelles. Las  depuis  long-temps  de  cette 
fausse  position,  las  d'être  inutile  et  infé- 
rieur, Jakob  ré.sôlul  de  dire  adieu  à  la 
Russie  et  de  revoir  sa  patrie  délivrée 
enfin  du  sabre  de  Napoléon.  11  notifia 


JAK 

sa  dAfrminalinn  3uinii)i>-lrr(bnstr  nid 
weni  on  «|ufl(jur>  artlclc^  ciu'il  \etiait 
de  |Mi|.i  r!  (onirf  la  prohiKiliui  i!c4 
iin|><.t  ijtioii^  m  Rui^irratioirnl  la  plus 
j;i.iinlr  «rnsation  ronlrr  If*  faiiletir* 
miMie  de  et  s>*lfmf  ,  a«imi»  ileptti» 
iHll  par  le  raliinft  russe  el  prorogé 
il'......-.-.-,  .•    ., .• 

I..-     ru  ,         ,     

■'       1    lie  le  rcleiiii    |- 
I'        '>ns  :  rien  ne  pm  I 

l'as  ifirme  la  prr*perti\r  du  posir  l»nl 
lanl  lie  ron^ul-^^neral  île  Hii*^ie  dan> 
la  Pm^M"  polonaise ,  ce  qui  pourtant 
l'eûl  rapprtM-lir  île  sa  Yille  natale  et 
replacé  au  miHen  des  Allemands,  f^ 
pleine  que  ces  regrets  étaient  sincères, 
c'est  que  l'emperenr,  en  lui  accordant 
•lans  les  termes  I 

I  II  conféra  la  nnl 

II  <  .  .c  ixn^  déconseiller  rt  une  peu 
M<'i!  innuelle.  .laLob  rennl  à  ll:ille,  où 

M  ire  l'attendait  el  on  il  repi  it  la  %ie 
1  1  Me  et  unifotiue  dn  «j\aut.  Ses 
lectures  .i  celte  le  de  «a  \ie 

ne  roulèrent  que  inces  adm:- 

nislrati\es  et  politiques.  Il  ne  retrou- 
va point  l'aflluence  el  les  succès  de 
ilH^  :  la  voit  iki  vieillard  ne  fit  pin, 
écho  ,  el  puis  on  était  bien  familia- 
risé en  Allemagne  aver  les  objets  dn 
nouveau  cours.  1^  solidité,  l'ordre, 
là  piéci-ion  s*v  retrouvaient  toujours, 
mais  la  noureaiité.  l'erlal,  la  M*e  n'î 
étaient  plus.  D'ailleurs  h  jeunesse  se 
souvenait  du  ri;;ide  pro-recteur  de 
ISOI.  Elle  ne  s'en  souvint  pas  seule. 
Les  troubles  de  la  Vrtitoniu,  en  1S17, 
lui  firent  décerner  par  le  ministère 
prussien  le  titre  de  rominissaire  rora! 
pour  la  répression  des  pertarbateui-s, 
et  pe;i  après  il  échangea  ce  titre  contre 
le  pro-rectorat.  Sa  vigilance,  rautorilë 
de  son  cararlère  ramenèrent  bientôt  le 
bon  ordre.  C'est  encore  à  lui  qiie  re- 
courut le  oouvernement  en  18:2i,  lor-;- 
qne  les  menées  de  h  fhirsrhrnsrhaft 
devinrent  voisines  du  complot  et  de  la 


JAK  67 

réM  Ile  :  y.w  Mil  ordre  ro\al  du  cabinet, 
Jalo!»  re^'it  alors  pour  troi«  ans  la 
di'^niîë  deco-rerteur.  Il  eut  d'abord  à 
\aincre  de  ;:rand^  obstacles,  maix  tous 
pustiiie  s'aplanirent  devant  son  san*- 
ff'    '  \\*rc  et  sa  prudence.  Fré- 

il'  me    II!    recoinpfTiNa   ses 

par    la   d.  le   l'Ai^le- 

.    et   en  ml   ^a  no- 

Kenlre  dait-»  U   vie   privée  ,    il 
i'4il  par  or»lre  .1 1  roi  don  nou- 
\eaii  statut  po  m  I  de  Iliîle, 

lorsqu'une  crise    ■  I  enleva   le 

'il  lu.llet  1H-27.  :i  l^ucb.ta-dl  où  il 
s'était  rendu  pour  prendre  leÉ  eaiix.-^ 
On  a  va  ce  qu'était  Jakdli  comme 
homme  et  comme  penseur  :  le  carac- 
tère reflétait  le  :;enie.  et  le  pénie  le 
•  e  :  rectitude  dans  les  idées  et 
•'  dans  la  conduite,  ténarilé  i\:kns 
le.  v.xiémes  è)  constance  d.ii'  ^  - 
sions   piiM^,  clarté    dmts  1  1 

scientifique  el  fran 

lion^  t!'^  '1  ^  ie,  •  _  •■  i  .  :  .• 
b  ires  des  principes  et    in- 

\<  .  :  :  ti»ujprimer  le<  aberrations 
lie  b  jennesse  ;  il  olfre  un  l>pe  où  tout 
r»Ven  rapport  el  toul  en  relief,  comme 
la  médaille  qui  sort  du  balancier.  Du 
reste  peu  d'ori,;inalité,  point  de  flexi- 
bilité, mais  de  l'ap'itude  i  tout  com- 
prendre, à  tout  souineltrc  à  la  forme, 
a  re^run'-r  rt  commenter  tout.  Comme 
I  •  romine  écrivain,  il  a  icn- 

d  v>  éminents  :  Si'    ;'récis  et 

manuels,  ses  tradtictions,  ses  ouvra{;es 
de  recfieiciies  nnl  tous  été  utiles  et 
peuvent  l'être  enrore;  tous  brillent  par 
des  qualités  qui  leur  sont  propres. 
Comme  Jarisconsultc ,  il  .s'écarte  xm 
peVde  Kant.et  tire  une  li^ne  de  dé- 
maicntion  moins  profonde  que  lui  en- 
tre (a  lé-^alité  el  la  moralité.  Cirume 
criminaliste,  il  appartient  à  l'école  de 
Feuei  barh;  et.qiel  que  soit  le  juj^ement 
que  l'on  '>or  te  sur  rà-propos  du  code 
dfMit  il  voiilait  rrratHier  la  Russie ,  on 
ne  peut   mcconnaitre  que  pour   l'ap- 

5. 


68 


JAK 


préciatlon  des  délits  ou  crimes,  de  même 
que  pour  rapplicalion  des  peines,!!  n'of- 
fre beaur.o'jp  de  traits  curieux.  Comme 
économiste,    il  fut  un  des  premiers  à 
distino;uer   l'économie   sociale    d'avec 
l'économie    politique    :    ses   principes 
sont  sains  et  larges  ;  en  orénéral  il  im- 
prouve les  systèmes  restrictifs   :    il  a 
traité  de  main  de  maître  les  questions 
de  papier-monnaie,  non  pour  la  Rus- 
sie seule,  mais  pour  la  Prusse  ou  plutôt 
pour  tous  les  pa\s  :  à  côté  de  chaque 
idée  théorique  ,  il  avait  un  événement, 
un  fait  à  mettre   en  avant ,  joij^nant 
ainsi  à  la  démonstration  la  preuve  em- 
pirique et  convaincante  du  mouvement 
par  la  marche.  Enfui  il  a  porté  ses  re- 
gards sur  la  science  administrative  et 
sur  la  police,  déduisant  le  prouverne- 
ment  et  sesroua»esdes  principes  philo- 
sophiques, jugeant  ce  qui  est  et  souvent 
l'approuvant,  souvent  aussi  le  blâmant 
et  disant  ce  qu'il  faut  mettre  à  la  place, 
homme  d'expérience  dans  Vu-priori, 
homme  de  pensée  dans  l'empirisme  et 
dans  l'histoire.  Voici  la  liste  de  ses 
ouvrages.    I.  Prolégomènes  de  phi- 
losophie   pratique,     Halle.     1787, 
in-8".  H.  Fondements  de  la  logique 
universelle  et  éléments  critiques  de 
métaphysique    universelle,     Halle, 
1788,  in-S";   2®  édition    totalement 
refondue,  1791;  S''',  augmentée,  1793; 
4*',  refondue  et   augnjcntéc,    1800   : 
contrefaçon  à   Francfort-sur-le-Mein, 
179i,în-8^.  m.    Fondements  de 
la  psychologie  expérimentale,  Halle, 
1791,  in-8";    2*"   édition    totalement 
refondue,    1793;    3'',    augmentée, 
1800;    4°,  augmentée,    1810.  IV. 
Morale  philosophique,  Halle,  1794, 
in-8o,  (Je  traité  se  compose  de  trois 
parties  :  1''  la  critique  de  la   raison 
pure;  2^"  la  morale  générale    on  dé- 
monstration de  l'existence  du  devoir  ; 
3'^  la  morale   spéciale   subdivisée    en 
deux  sections,  le  mode  d'action  de  la 
liberté,   les  oblif^ations  et  vertus  spé- 


JAK 

c'ales.  V.  Doctrine  philosophique  du 
droit,  Halle,  1795,  in-8";  ^  édition, 
1801.  C'est  un  des  ouvrages  les  plus 
profonds  de  Jakob  et  un  de  ceux  où  il 
y  a  le  plus  de  vues  à  lui  (/^oj.  plus  haut), 
lien  donna  l'année  suivante  un  abrégé 
à   l'usage  des  élèves  qui  suivraient  son 
cours;  cet  abrégé  a  pour  titre:  Extrait 
du  droit  naturel  du  professeur  Ja~ 
koh.  Halle,  1796,  in-8".  VI.  V  La 
religion  universelle,  Halle,    1797, 
gr.   in-8°   (dont   plus  de   trois  mille 
exemplaires  s'enlevèrent  dans  le  cours 
d'une  année);  2"  Les  principes  de  la 
sagesse  et  les  règles  de  la  vie  hu- 
maine,  ibid. ,  1800,  in-8".  J.es  deux 
ouvrages  réunis  se   vendirent  ensuite 
«ous  le  titre  de  Philosophie  pratique, 
ibid.  ,  1800  et  1801  (le  2"'  volume, 
celui  de  la  religion  universelle,  était 
vraiment    une    réimpression).     Vil. 
Principes  d'économie  nationale,  ou 
Théorie  de  la    richesse  nationale  , 
Halle  et   Leipzig,   1805,  in  8";   2^' 
édition,    Kharkow,    Halle,    Leipzig, 
1809,  in-8";   3*^,  Irès-augmeutée  et 
corrigée,     1825,    2    volumes    grand 
in-8o  :  contrefaçon,  Vienne,  1814, 
in-8".  VIII.  Principes  des  lois  et  des 
institutions  de  police  ^  Halle  et  Leip- 
zig, 1809,   in-8o.  IX.   Introduction 
à  l'étude  des  sciences  administrati- 
ves. Halle,  1819,  in-8".  X.    Théo- 
rie et  pratique  des  finances ,  ou  les 
principes   de   la   science  financière 
é(  laircis  par  des  exemples  tirés  de 
l'histoire  moderne,  Halle,  1821,   2 
vol.  in-8"  (contrefaçon  à  lleutlingen, 
1824,  in-8").   Cet   ouvrage    est    un 
chef-d'œuvre  :  l'idée  en  est  heureuse, 
l'exécution  en  est  parfaite  ;  la  lecture 
en  est   commode  et  instructive.    Les 
faits  démontrent  les  principes,  les  prin-        É 
cipes  rehaussent  et  font  comprendre       ^ 
les  fails.  XI.  Les  sept  petit  manuels: 
Principes    de  logique  et  métaphy- 
sique, de  psychologie  empirique^  de 
grammaire  générale  y    de  morale^ 


JAK 

/ /■  ptifitii/ur.  iPi^slhrlitjur  , 

«;     :  iiturrl;r\   \rs  l'.rluirris^r- 

mrnts  ri  mnimentairrs  sur  Irs  trois 
prrtnirrs  Ja  Ps\chulu$(ir  et  la  (irarn' 
maire  grnrralr  s^ulr»,  f  I  Ifur»  rcUiir- 
ti<:<irwrnts  nous  sont  tnmh^  entre  les 
in.iiii*.  le  tout  en  Allemand,  Ri;;a , 
ISIi.in  8"  Ir.  \  vol.).  Ona  »u  plu< 
haat  ()ue  1oti<;  (r%  manuel»  Hrvairnt 
4enir  a  rr«liiration  ilr^  jeunes  Kn^sr» 
de^  rolle^es  :  aprè*  la  rliiilr  »lr  S|»e- 
ran^Li ,  le  iiou^ernement  rrMnl  *nr 
relie  déri«>ion  ,  l'amiral  (lliifliloT 
a>ant  déclaré  que  ces  opu^nile^  élaient 
en  désaccord  avec  le  fhfi*liJn!^me,  el 
tartout  a»ef  la  doclnne  de  l'éj^li'** 
fjree que.  XII.  Projet  tir  rtnJr  rrinti- 
nri  pour  t  empire  russe.  Il  aile, 
IHIK,  I11-8".  (^1  oH\ra«^e  e».t  acrom- 
pa;;né  de  remarquer  sur  les  lof*  cnmi- 
iirllts  artuellement  en  vij;uenr  en 
Wus  r,  ri  dr  rriliqiie*  «iir  le  code 
erjminrl  pnMie  à  S.i'  -irjj  et 

que  la  rommi^'^ion   \r.  s  Ijt- 

pnuLin  <c  pteparait  a  sulr.tiiurr  an 
ilen.  (^  drmirr  fut  puldie  en  alle- 
mand, a  I Lille  la  mi  me  année,  par  le 
fiU  de  Jalnb.  \ll!.  fisrpji^se  ifune 
'  ncycluf}r/lir  des  srienres  el  des 
.jrt's  ,  Halle,  IH(M),  in-8°.  XIV. 
F.  i  amen  des  Heures  du  matin  de 
Mendeissufin,  ou  Discussion  de  tou' 
tes  tes  preui'es  sp  rulutices  île  Cexis' 
tenre-  de  Dieu  \\\rc  une  ptefare  de 
Kant\  I^ipzi-,  ITSfi,  in-8".  XV. 
Ij'.4nti'Mtirhio\*el ,  ou  des  Homes 
de  Cofirissance  cis'ile  '\  l'of ration  de 
deux  articles  du  journnl  vrrnsurl  de 
Berlin,  lept.  el  tiéc.  17U3;  par  kanl 
cl  par  Gcnli^,  Halle,  1T0V.  in  8"  ; 
•i"  édition  ,  17*»6  :  la  V  était  ano- 
nvme.  XV|.  Des  traductions  :  1'  de 
l'IIistoirr  desapfitres.  Halle,  177î>, 
in-8";  '2  '  des  traites  de  Hume  Mur  A* 
nature  humaine.  Halle,  1700  el  01,  ♦ 
3  \a\.  f;r.  in-8";  3°  De  la  liaison  du 
physique  et  du  moral  de  Cabanis  , 
Halle  et  Leipiiiî,  180i.  2  vol.  ln-8" 


JAK  6f) 

(ixer  nn  traité  sur  le<  borne»  de  I.1 
pb\*tolo;;te  el  de  rantbropoln^ie)  ;  V* 
de  Vh.tonomie  p<di tique  de  Sav  , 
Halle,  IM)7,  2M)l.;;r.  in-8«  (contre- 
façon à  Vienne,  I8n,  o  >„1.  h»  8") 
avec  remarqnr^  el  ad«lilion<;  .'ï"  de 
Vhuropr  en  1821,  d'K\eiett  ,  Leip- 
lij»  el  r»aml»erj;,  1823,  '2  vol.  gr, 
in-8",  axrc  renurqnr^  et  rectifications 
dans  le  «rhs  monarrliique.  XVjj.  Des 
traduclinn<i  bbres  et  (»ii  1rs  on^ra«;es  ori- 
ginaux clian<^ent  complrlement  d'as- 
pect; *a\oir  :  1"  les  (lonsiilrrations  sur 
les  formes  de  gtMi'ernement ,  d' Al»». 
Sidne^,  Krfurl.  17î>.'>,  in-8";  2"  un 
Dictionnaire  philosophique  tiré  de 
Hayle  ou  Dictionnaire  biographique 
de*  philosophes,  abré«;é  des  articirs  dn 
Dit  tionnaire  historique  et  critique 
dei;a>le>,llalle,170f».in8'M"vol.: 
3'*  les  (.onsiderntiftns  de  .Ins.  F.onr 
siir  Cètal  actuel  de  t agriculture,  thi 
commerce ,  des  finances  de  r.-fn- 
gleterre,  Ir-^'V.'  ,  18-J3.  ^'r.  in-8". 
X\  III  mges  inrm\  lesquels 

noii^    «I  IIS  :    1"   des    Traités 

phihisophiques  sur  la  throhtgie,  la 
fto/itique.  le  droit,  la  religion  ,  la 
morale.  Halle,  1707.  in  8";  2**  la 
lU'monstrtition  de  Cimmortalitè  de 
tiime  fHir  tidèe  du  decoir  'qui  eut 
le  prix  a  La  Ha>e  et  que  l'auteur  tra- 
duisit du  latin  en  allemand  avec  clian- 
{jernenlO,  /;ùllich.iu,  1700,  in-S"  (2* 
édition  au;;inenlée,  170i  ;  3*^  la  Dé- 
monstration morale  de  Ce.ristenre 
de  Dieu  (qui  eut  l'accessit  à  Harlem 
eu  1701  et  qu'il  traduisit  aussi  du  la- 
tin en  allemand),  Liebau,  170  V,  in  8"  ; 
2*  éililion,  mmiifiéc  el  au^mcnlée, 
17<)8  ;  V^  \m  Mémoire  'couronné  par 
la  société  libre  économique  de  Saint- 
Petersboiirr;)  sur  le  travail  des  pay 
sans  lihres  comparé  à  celui  des 
serfs  relativement  au  fruit  quen  re- 
tire C agriculture,  181  V;  5""  Courte 
instruction  sur  le  papier-monnaie 
en  Prusse,  Halle  el  Leipzig,  1806, 


70 


JAK 


111-8°;  6"  Du  pupier-iuoundir  ru 
Russie  et  du  moyen  de  lui  donner 
une  rmleur  inaltérable,  Halle,  1817; 
7"  De  la  liberté  et  de  la  discipline 
académique,  aoec  des  vues  spéciales 
sur  les  unipersités  prussiennes^  Leip- 
zig, 1819,  in-8*^  (publié  à  l'occasion 
des  désordres  de  la  Teutonia)  ;  8"  De 
Allegoria  homerica  ,  thèse  que  Ja- 
kob  soutint  en  1783.  XIX.  JJcs  re- 
cueds  périodiques  dont  le  piincipal  , 
Annales  de  la  pJiilosop/iie  et  de 
r esprit philusophicpie ,\):mi\\  trois  ans 
de  suite,  1795-97  [Voy.  plus  haut). 
Les  autres  furent  1"  un  Journal  men- 
suel pour  les  dames  (en  collaboration 
avec  Rothj,  Halle,  1786,  in-8",  1 
vol.;  2"  la  Feuille  de  Jlagdebourg 
et  llalberstadt  (avec  Barckhausen), 
janv.,fév.  elmars,  1801,  in-8'';  3°les 
Annales  (T économie  polilique  et  de 
statistique  en  Prusse  {à\ec  Kru<;;), 
Halle  et  Leipzig,  1804,  1' '  vol.  Nul 
de  ces  derniers  ne  se  .soutint.  XX. 
Beaucoup  d'articles  dans  V Hermès 
(àun''\n  au  n'^  XXVlil),  dans  la 
Gazette  universelle,  littéraire,  dans 
la  Feuille  de  conversation ,  dans 
le  Journal  de  psychologie  empiri- 
que,  etc.,  etc.;  le  bel  article  Nathu- 
sius  dans  les  Zritgenossen  ;  une  col- 
laboration importante  aux  articles 
d'économie  politique  du  Dictionnaire 
(allenjand)  ^y^  la  conversation.  XXI. 
des  Mémoires  (manuscrits)  sur  sa  vie. 
]|  a  aussi  donné  une  édition  de  Phè- 
dre, Halle,  1785,  in-8^'  (2'  édition, 
1799;  :r,  18:>:{),  et  consenti  à  pu- 
blier des  Essais  pliilosopliiques  sur 
r homme  [en  français],  Halle,  1819, 
in-8";  2' édition  ,  Paris,  18:>3,  ou- 
vran;e  très-faible  qui,  bien  qu'on  l'ait 
soupçonné  d'en  être  l'auteur  ,  n^cst 
pas  de  lui,  et  doit  être  .sorti  de  la  plume 
de  quelque  grand  sei^^neur  polonais  ou 
russe.  Au  reste,  nous  ne  connaissons 
de  traduction  française  d'aucun  ou- 
vrage de  .Jakob.  P — ot. 


JAL 

J  ALABERT  (Jean-François- 
Joseph),  orrand-vicaire  du  diocèse  de 
Paris,  naquit  à  Toulouse  le  29  août 
1753,  d'une  famille  honnête,  mais 
peu  aisée.  Il  fit  d'excellentes  études 
dans  l'un  des  collèges  de  sa  ville  natale 
sous  le  patronage  de  M.  de  Brienne  , 
alors  archevêque  de  celte  ville  ;  mais 
lorsque  la  révolution  commença ,  sans 
se  nrontrer  ingrat  envers  son  protec- 
teur, il  ne  suivit  pas  la  même  ligne  d'o- 
pinions. Plus  tard  il  entra  au  grand 
séminaire  ,  prit  ses  grades  universi- 
taires, et  reçut  les  ordres  sacrés.  Joi- 
gnant à  des  manières  affables  beaucoup 
de  douceur  et  de  vertu  ,  Jalabert  , 
après  avoir  exercé  pendant  quelque 
temps  le  ministère  ecclésiastique  à 
Toulouse,  fut  placé  à  la  tête  du  petit 
séminaire  de  celte  ville.  C'est  là  que 
le  trouva  la  révolution.  En  1791 ,  il 
fut  obligé  de  quitter  ce  poste,  à  cause 
de  son  refus  de  prêter  le  serment  exigé 
par  la  constitution  civile  du  clergé. 
Alors  il  se  rendit  à  Paris  où  il 
se  lia  particulièrement  avec  Emery, 
supérieur-général  de  Saint-Sulpice , 
chargé  de  l'administration  du  diocèse 
pendant  la  persécution  et  l'exil  de  mon- 
seigneur de  Juigné.  La  connaissance 
profonde  qu'il  avait  des  canons  de  l'é- 
glise le  fit  admettre,  quelque  temps 
après !a  terreur,  d?ns  le  conseil  del'ad- 
ministiation  diocésaine.  A  l'époque  du 
concordat,  il  fut  promu  chanoine  ho- 
noraire au  chapitre  de  la  métropole,  et 
lorsque  ]M.  de  Mons,  décédé  arche- 
vêque d'Avignon,  fut  nommé  à  l'évê- 
ché  de  Mende,  l'empereur  Napoléon 
dit  «  qu'il  voulait  que  l'homme  le  plus 
«  beau,  le  plus  gracieux  et  le  plus  ai- 
«'  mable  i\u  chapitre  de  la  métropole, 
«  )  remplaçât,  comme  chanoine  titu- 
^  îaire,  le  plus  pointilleux,  le  plus 
/'   spirituel  et  le  plus  mal  fait   (1).  » 


(i)  M.  i]e  Mons  t;l.iit  bossu,  mai»  plein    d'es« 
prit  ,  de  luencff  et  ite  tnlenl. 


lAL 


JAL 


("Vlait  «lr>vii«'i  .l.tl.'l»rit  iloiil  If* 
jv.ihti,:»  «  vl'  ■  .  '  .-.  'iJl  u  :;i  t!  .|Ua- 
blr».  1^  rjriiiiul  tic  lirlto\ ,    jrrlir^r- 

3ur  de  Vins  ,  rtjiil  moil  ni  1H4M, 
alaltrri  fut  nomnir  )(raiiil-%  irait e  ca- 
pitiilaiir,  ri  ce  fut  rn  irtic  quaiii^  (|u'il 
prononça,  (lan«  la  hi^ilique  de  \olrr- 
Damr,  le  'Xt  iinn,  l'oraison  funèlirc  liii 
pontifr,  ibns  laqurllc  il  avait  inlrr- 
(i\  1rs  W^ues  >uiYanm  atlrrs>^«  à 
N  'oleon  ,  quoiiiu  M  ne  fût  pa*  pré- 
scnl  ;  «  IVince  !  piii<quf  ton»  è\e% 
"  aimant,  \o\is  a^ex  ilu  comprenJic 
"  combirii  IVtait  aiKsi  le  vertueutpre- 
•<  bl  dont  nous  (li-,>li>tt»n«  L  mort  ri 
M  rombirn  c'eluil  \ou\  >iii  tout  qoM 
«  aimait.  Je  me  pbis  a  \i>:u  dire,  et 
•«  vous  rroirex  qur  \oiis  eussiez  rté 
•<  plus  délicieusement  emu  dr>  eCTu- 
•<  sions  de  son  dénouement  piiur  vons, 
•<  dont  nou5i  étions  témoins  dans  sa 
<•  MMielé  intime,  que  \ous  ne  l'anei 
"  peut-rire  encore  rté  des  «iiMoar» 
«  pompeux  que  dicte  l'amoDr  ^0  vos 
"    peuples  pour    votre    au^nisie     prrr 

«    sonne »  Ce  fut  encore  dans  le 

iiirmr  discours  que  Jabberl  harangua 
(lambacéies,  arclM-cliancelier  de  l'em- 
pire .  qui  aNsistait  à  la  cérémonie  : 
"  SéreiiiN>ime  prince  !  lui  dit-il  ,  no- 
«  tre  >eitueux  prélat  part^eait  a>ec 
«  Tempire  français  la  tres-liaiitc  ci»n- 
<•  sidéralion  publique  qu'eut  attachée 
«  à  votre  personne  la  lontiancr  si;;na- 
«  lée  du  monarque,  et  la  sa^evie  avec 
•«  laquelle  voik  dit  iiiei  Ir-  rène>  de 
«  l'état  si  souvent  déposées  dans  >os 
<c  mains.  Mais  il  aimaJ  surtout  j  pe- 
««  ser  sur  celles  qui  sNmpathi"»  lient  le 
««  plus  avec  les  siennes.  >»  C>elte  ma- 
nière de  parler  plaKjii  beaucoup  a  Na- 
poléon, qui  fil  plusieurs  dons  -énereux 
à  Jalaliert  et  qui  tenait  à  le  conserver 
i  Paris,  au  sein  du  chapitre  métropo- 
litain ,  où  ses  bons  ofTices  lu;  éla-cnt 
nécessaires  Ku  efTet,  le  crédit  de  l'abbé 
Jalabert  était  très  puissant  dans  ce 
corps  ,  tant  à  cause  de  son  amabilité, 


aa'à  cause  de  la  vénératio»  q«i  s'alt.v 
chaii  a  sa  %eMu  ri  a  l'mTiobbibté  de 
%e*  principes  uiibodoies,  reftlen  talacU 
dan>  toutes  le>  cirroii%ijncc3k  orageuse* 
qu'il  anail  lra\ei%ées.  F.n  iHO^t,  le« 
biles  de  la  cliante  a^ant  rerbmc  con- 
tre des  cban^eroent»  que  le  ))()u\«ri)*- 
uwnt  voulait  faire  aux  statuts  ôc  leur 
con^re)*aI  on,  Jabbert,  pre%sr  par  le 
■inistre  des  coller,  Hi;;ot  de  Fréame- 
■ea  ,  \e*  eiborta  à  b  soumission  ,  et 
pabba  Meiae  à  ce  sujet  une  bi'ocbure 
de  iiO  pa;^  m  V'\saus  poumon  toutetnis 
partentr  jtriminrr  ce  différend, qui  »ub- 
M.sla  ius4}u'en  \X\  i.  Le  iiaviil  \H\  f , 
.labbrrt  tut  eun)re  appelé  a  pronon- 
cer I  oraison  funebie  de  monÀri;>neur 
de  Jui^né,  ancien  arcl»e\éque  de  Harx, 
dans  b  ba.sili«pie  de  Notre-  Dame  :  il  U 
6i  avec  onction,  et  contrnta  toat  le 
monde,  ce  qui  était  avsex  d>fiirile  avant 
a  parler  deN  rxcis  de  la  rrvoluiidn  eu 
présence  des  lévolutionn.^ires  enrichis 
il  titrés  aoi  l'ennirounaient.  Ij  même 
année,  M.  d' Vslros,  aLis  <  • 
oéral  de  Pari»,   a\ant   corn  j 

M.  Portails,  le  Irrf  de  P»e  \  Il  , 
adresse  au  cardinal  Manrv  J  uy.  ce 
nom,  XWII,  .'>7I  ,  pour  lui  enjoin- 
dre de  quitter  l'administi ation  d*i  dio- 
cèse de  Paris,  Napoléon  en  fot  irrité 
au  point  de  se  déterminer  à  faire  ar- 
rêter en  pleine  cour  M.  d'Aslros  , 
le  jour  ou  il  viendrait  le  compbmen- 
ter  a  l'occasion  du  premier  de  l'an. 
Les  hommrs  de   Tempire   i  '  t 

la  démarche  de  ce  digue  ■ 
que  comme  une  félonie:  lU  t.isaienl 
que  ,  par  l'acte  courageux  qui  lui 
était  reproché,  il  avait,  en  s'entendant 
arec  un  sou>erain  étranger,  forfait  à 
ses  devoirs  vis-a-vis  du  souverain  «le 
la  France.  Sans  contredit  c'était  de 
rexaf»rralion;  cependant,  le  chapitre 
mélro|)oHliin  de  Paris,  excité  par  le 
cardinal  Maurv,  «on  archcvèque-nom- 
raé,  iuj;ea  que  M.  d'Astros  a>ail  agi 
contrairement  aux  libertés  de  l'édise 


72  JAL 

gallicane,  et  lui  retira  les  pouvoirs  tle 
vicaire-i:;énéral  qui  lui  avaient  été  précé- 
demment conférés  ;  alors  le  chapitre  en 
corps,  conduit  par  le  cardinal  Maury, 
se  présenta  de  nouveau  le  6  janvier  à 
l'empereur,  pour  l'assurer  du  dévoue- 
ment de  tous  ses  membres  et  désavouer 
la  conduite  de  M.  d'Astros  :  «  Sire  » , 
s'écria  l'abbé  Jalabert  ,  chargé  de 
porter  la  parole  au  nom  de  ses  col- 
lègues, «  nous  sommes  catholiques  et 
«  nous  nous  glorifions  en  même  temps 
«  plus  que  jamais,  sous  votre  règne, 
«<  d'être  français  (2).  »  Dans  le  même 
temps  les  prêtres  de  la  congrégation  de 
Saint-Sulpice  ayant  été  obligés  d'aban- 
donner la  direction  du  grand  séminaire 
diocésain  de  Paris,  l'abbé  Jalabert  fut 
appelé  à  les  remplacer.  «  On  le  vit,  dit 
«  ÏAmi  de  lu  religion,  s'arracher  à 
«  toutes  ses  habitudes  et  se  ployer  aux 
«  assujétisseraents  de  sa  nouvelle  pla- 
ce ce.  »  En  effet  ,  Jalabert  rentra 
dans  cette  carrière,  par  laquelle  il  avait 
débuté,  avec  tout  le  zèle  et  le  dévoue- 
ment d'un  homme  mûr,  qui  apporte, 
pour  la  directioïi  d'une  jeunesse  stu- 
dieuse ,  l'expérience  puisée  dans  les 
fréquentation  du  monde  et  dans  la 
rapports  continuels  avec  les  diverses 
autorités  d'un  étal  constitué,  comme 
l'était  alors  l'empire  français.  Lors- 
que  Napoléon  eut    été  détrôné,   Ja- 


(ï)  L'.-idrrss<;  du  chapitre  métropolitain  à 
l'empereur  fut  rf-digi-e  par  le  cardinal  Maury; 
niait  il  parait  bi>  m  certain  que,  au  moment 
même  oii  l'abb'*  J.ilahcrl,  comme  prisident  du 
chapitre,  allait  en  faire  lecture  ,  le  carclin;il  lui 
remit  la  copie  d'une  adr»  sue  difri-renle  de  celle 
qui  avait  été  consentie  par  le  cha|.ilrf .  I.'abbë 
Jalabrrt  ,  pris  au  dépourvu,  intimid»-,  n'osa  ré- 
clamer devant  rnnpfreur  contre  celle  »uj)er- 
cberie.  H  s'«  n  plai^-nit  ou  sortir  d»- l'audicncf  ; 
mait  on  lui  conseilla  <!c  ue  p.is  f.iirc  d'éclat  et 
de  ne  pas  s'exposer  au  rc-srntlni»  nt  de  Napo> 
Jéon.  Il  dévora  donc  v\\  silen<e  l'Iinuiiliation 
d'avoir  présente-  une  adresse  remplie  «le  choses 
ba'-ardées,  inexactes  et  ejmperees  Celle  même 
adresse  fat  bieutrit  publiée  el  envoyée  aux  évc- 
ques  el  aux  chapitres  d'ilali»- ,  «pie  l'on  sollicita 
d'y  adhérer.  l'Iusieurs  cédèrent  m  effet  aux 
instances  et  aux  menaces  qui  leur  furent  faites, 
et  leur»  adhésions  ont  été  imprimées.  V — c — t. 


J\L 

labert  fut  encore  nommé  grand-vicaire 
capitulaire  par  les  chanoines  de  Paris, 
et  il  eut  la  plus  grande  part  à  l'admi- 
nistration du  diocèse.  Pendant  tout  le 
temps  de  la  vacance  du  siège  et  après 
que  lé  cardinal  Maury  eut  été  mis  à 
l'écart  ,  il  publia  plusieurs  mande- 
ments ,  entre  autres  un  dans  lequel 
il  s'attachait  à  prémunir  les  fidèles 
contre  les  sophismes  des  philosophes 
du  derniei  siècle ,  et  combattait  la 
facilité  que  le  gouvernement  laissait 
au  libéralisme  de  propager  d'une  ma- 
nière effrayante  les  écrits  les  plus  mau- 
vais de  J.-J.  Rousseau  et  de  Vol- 
taire. Ce  scandale  ,  dénoncé  par  le 
courageux  vicaire-général  ,  n'est  pas 
l'une  des  moindres  fautes  de  la  restau- 
ration. Toutefois,  quelque  dévoué  que 
Jalabert  eût  été  à  l'empereur  Napo- 
léon, il  était  dans  son  cœur  d'être  éga- 
lement soumis  et  gracieux  à  la  race 
des  Ijourbons  remontée  sur  le  trône 
de  France.  En  mai  1816  ,  il  disait  au 
roi  à  la  tête  du  chapitre  :  «  Sire,  du  3 
«  mai  1814,  dont  le  12  avril  futTau- 
«  rore,  jusqu'au  3  mai  1816,  nous 
«  retranchons  cent  jours  et  no  js  comp- 
«  tons  des  siècles  de  félicité  publique 
»  et  de  bonheur  personnel.  »  Le  3 
novembre  de  la  même  année  Jalabert 
harangua  Louis  XVI H  ,  lorsque  ce 
prince  ^e.  rendit  à  la  métropole  pour 
assister  à  la  messe  du  Saint-Esprit,  à 
l'occasion  de  la  session  des  cliambres. 
En  1819,  le  cardinal  de  Périgord  , 
grand -aumônier  de  France,  ayant  pris 
l'admiiii.stration  du  diocèse  de  Paris, 
nomma  Jalabert  archidiacre  de  No- 
tre-Dame et  premier  grand-vicaire. 
Monseigneur  de  Quélen,  succédant  au 
cardinal,  lui  montra  la  même  estime 
et  le  continua  dans  sa  dignité,  profi- 
tant avec  empressement  des  conseils  de 
son  expérience,  et  l'honorant  de  son 
amitié,  jusqu'à  ce  que  les  infirmités 
vinssent  terminer  sa  carrière  si  pleine 
de  vertus  et  de  travaux  vraiment  ec- 


lAM 

rlcMOiliquw.  Tou*  %es  mon  >  ni 

pjrta^és    rnirc    racromi  > 

te*  dfvoin  el  unr  rorrrsjunwlai.fc  de 
pifir  qu'il  fntretcnail  i\ec  iiiir  dr  sei 
MTtiTi,  fondainrf  ri  prcmific  ^upé- 
rirurp  d'une  communauté  ron^ijcree  à 
l'edurjlion  des  jeunrs  filles  dans  la  pe- 
tite ville  de  Saint-(  ienirz  ^.\%cuon). 
li  mourut  le  17  mai  iHJ.'i,  aprr>  une 
coiiile  maladie  ,  muni  dr*  ^wours  de 
la  religion  ,  qui  lui  furent  adminiMréi 
pai  monseigneur  de  <^)uelen  |iii-mfro«. 
1^  mérite  réel  de  ce  dit;iie  erclé»ias- 
lique  a\ait  elë  parlirulierrnieiit  appré- 
cie par  Napoléon  et  par  le%  hommes 
de  tant  de  couleurs  qu'il  a^ait  groupés 
autour  de  lui  ;  par  rinii  aiclie«éqnes  de 
Paris  ave^  lesquels  il  avait  parta«;é 
Tautorilé  spirituelle  sur  la  capitale  de 
la  France  ;  par  les  prmres  tle  la  maison 
de  Kuurbon  auxquels  il  n'avait  inspiré 
aucun  omhrage  mal;:ré.se$  liaisons  avec 
Napoléon  ;  enfin  par  le  cierge  de  Pa- 
ris, qui  trouva  toujours  en  lui  un  pro- 
tecteur paternel  ,  un  appréciateur  ju- 
dicieux, un  zélateur  intrépide  de  l'ob- 
ser\-alion  des  rè^^les  protectrices,  éta- 
blies par  les  canons  de  l'ej^liNe  en  fa- 
veur de  tous.  Outre  les  opuscules  de 
circonstance  mentionnés  dans  le  cours 
de  cet  article,  on  attribue  à  Jalabert 
deux  écrits  en  faveur  du  gouvernement 
d.»  l'époque  ,  et  qui  parurent  sous  le 
voile  de  l'annovme:  I.  t.xuwrn  des 
difjnullès  qu'un  oppose  a  la  pro- 
messe fie  fui  fit  le  a  la  constitution, 
Paris,  18()<)  et  1H(H,  in-8''.  II.  Pro- 
jet lie  charger  les  ecclésiastiques 
d éclairer  les  fidèles  sur  leurs  droits 
contre  les  entreprises  du  despotisme , 
et  de  propager  la  doctrine  de  la  sou- 
l'eraineté  des  peuples  par  Feni^oi  de 
missionnaires  en  pays  étrangers , 
aoec  un  aperçu  dr  C reprit  actuel 
de  fcolise  constitutionnelle  .  ibid.  , 
1801  ,  in-8°.  Z. 

JAMERAV  DL'VAL.    J'oy. 
Du\AL,  XII,  413 


JAM  7:^ 

JA.\it:s(i\  ^wiuiA^o,  tiie«. 

lof^ien  anglais,  était  profe«seur  dliis- 
toire  à  l'aradrmte  de  Tilascovk  dans  la 
première  moitu-  du  W  UT  siècle.  Il 
e^t  principaleninit  comiki  par  l'ouvrage 
suivant  :  Spii  ilegia  tinliquilatunt 
.hg)/>ti  utque  et  virlnarum  gen- 
/i//m,<»la5Cov» ,  IT'iO,  pet.  in-8"raie. 
L'auteur  annonce  que  son  but  dans 
cet  ouvra;;e  est  de  faciliter  l'étude  de  la 
llible,  et  de  montrer  que  les  récits  en 
•ont  constamment  d'accord  a?ecreux  de 
l'iiistoire.  Les  dev\  premiers  chapitres 
tout  consacrés  à  la  ^ro^raphie  ancienne 
de  l'K^vpte.  Y.n  indiquant  les  villes  1rs 
plus  ceiebres  ,  l'aiileiir  rapproche  les 
pass:i;(es  de  la  HiUe  de  ceux  d'ilérn- 
dole  et  de  Dimiore  ou  il  en  est  pailé. 
Dans  les  chapitres  suivants  il  traite  ra- 

fiidemeiit  de  l'empire  d'.\Nsvrie,  i\r  ce- 
uide  Uabyione.  des  Med«>-Perses,  des 
Scvthes  et  eniin  des  Hébreux  avant 
l'avènement  du  Messie,  en  ne  s'ap- 
puvant  que  sur  l'autorité  des  histo- 
riens. Il  revient  ensuite  à  l'K^vpte,  el 
après  avoir  établi  que  lac)uunolii*;iede 
ses  rois,  tellequenous  l'avons,  e^l  trés- 
defrctueuse,  il  s'efforce  de  prouver  que 
cet  empile  n'a  pas  la  haute  antiquité 
qu'un  lui  allribue^énéralemenl.  Il  pré- 
tend queloth,  re;;ardé  comme  l'inven- 
teur de  l'écriture  alphabétique,  e.sl  \f 
même  ner^onnaj;e  que  le  patriarche  Jo- 
sepli  auquel  il  fait  lioniieur  ùe  l'intro- 
duction de  l'écriture  en  K»vpte.  Ce  fct, 
suivant  Jameson,  pour  avoir  rendu  cet 
immense  service  que  Joseph  fut  revêtu 
des  piemieres  dif;iiit«-s  de  l'état,  et  non 
pour  avoir  expliqué  les  son;;es  de  Pha- 
raon. Parvenu  à  l'histoire  j»articulière 
de  cliaque  roi,  il  examine  la  liste  cliro- 
nolo;iique  que  Svncelle  en  adonnée 
d'après  Manethon,  et  v  si;in3le[>lusienrs 
mépriie.s;  il  soutient  que  Sésostris  (1), 
est  le  même  que  Sciiisak  ou  Scsac , 
prince  contemporain  de  lioboam.  Celle 

(I)  Suivant  (iu^r.B   du  Kochcr,  Séiostris  esl 
l«  patnarcbc  j4cob. 


74  JAM 

opinion  avait  été  déjà  soutenue  par  Mars- 
ham*  et  contredite  par  Périzonius  à  qui 
Jameson  reproche  de  n'avoir  fait  qu'em- 
brouiller IMiistoire  de  ce  prince,  en 
cherchant  à  l'éclaircir.  On  voit  que  le 
système  de  Jameson  se  rapproclie  beau- 
coup de  celui  de  Tauteur  de  V His- 
toire véritable  des  temps  fabuleux 
{Voy.  OUÉRIN  DU  ROCHIR,  XIX, 
27,  et  Baer  ,  LVll  ,  45).  Tous 
les  deux  ont  trouvé  des  partisans  ; 
mais  aussi  de  nombreux  contradic- 
teurs. Le  temps  n'est  sans  doute 
pas  éloigné  où  Ton  saura  ce  qu'il  faut 
croire  de  la  haute  antiquité  de  TEojvpte 
et  de  son  état  florissant  à  une  époque 
qui  précède  de  tant  de  siècles  les  plus 
anciens  monuments  de  Thistoire.  On 
connaît  encore  de  William  Jameson  : 
Sum  of  ihe  episcopal  cuntroi>ersy , 
Glascow,  1703,  in-8".  Mais  c'est  pro- 
bablement un  autre  écrivain  du  même 
nom  qui  est  l'auteur  des  Essais  sur  la 
vertu  et  V harmonie  morale,  trad.  de 
ranij;lais  (par  Eidous),  Paris,  1770, 
2vol.in-12.  W— s. 

JAM  ET  (Lyon  ou  Léon),  l'un 
des  plus  chers  amis  de  Marot,  était  né 
vers  la  fin  du  XV^  siècle  à  Sanzay, 
dans  le  Poitou,  d'une  famille  noble  , 
dont  une  branche,  établie  depuis  en 
^ormandie,  a  fourni  plusieurs  hom- 
mes de  mérite.  Etant  venu  de  bonne 
heure  à  la  cour,  il  se  lia  pi  omplement 
avec  Marot  que  sa  conversation  pi- 
quante et  spirituelle  faisait  rechercher 
de  tous  les  jeunes  ;;ens.  ALirot,  enfer- 
mé dans  les  prisons  du  Cliatelet  pour 
avoir  mant^é  du  lard  un  jour  maigre, 
eut  recours  pour  en  sortir  à  la  protec- 
tion de  Jamet.  Ce  fut  alors  qu'il  lui 
adres.-.a  cette  êpître,  si  connue,  dans 
laquelle  il  se  compare  au  rat  de  la  fa- 
ble, qui  débvré  par  un    Lion   (1)    lui 


(i)  Marot  dut  s'applaccJir  b(>aiicnii|i  d'avfiir 
Irouvé  celle  occasion  dVquivo(|iirr  ;  nr  le  nom 
à*-.  Jamei,  genre  d'esprit  ^liors  fort  a  la  mode, 
et  qui  s'y  laaiiitiiit  auez  long-temps. 


JAM 

rendit  peu  de  jours  après  le  même  ser- 
vice. Si  Jamet  ne  fut  pas  as.sez  heureux 
pour  délivrer  Marot,  il  obtint  du  moins 
sa  translation  dans  les  prisons  de  Char- 
tres, et  ne  né^^lio^ea  rien  pour  adoucir 
sa  captivité.  Jamet  partageait  les  opi- 
nions de  son  ami  sur  les  moines,  et  ne 
laissait  guère  passer  l'occasion  de  se  di- 
vertir à  leurs  dépens.  A  cette  époque  il 
n'en  fallai  t  pas  davantage  pour  être  soup- 
çonné de  protestantisme. Obligé,  vers  la 
En  de  1535,  de  quitter  la  France,  il 
trouva  dans  cette  même  cour  de  Fer- 
rare  que  Marot  venait  d'abandonner, 
un  asile  honorable,  et  le  repos  dont  il 
commençait  à  sentir  le  prix.  La  du- 
chesse Renée  de  France  [i'^oy.  ce  nom, 
XXXVII,  35Y),  si  bonne ,  si  géné- 
reuse envers  tous  ses  compatriotes,  le 
choisit  pour  son  secrétaire.  Plus  pru- 
dent ou  moins  étourdi  que  Marot,  Ja- 
met parvint  à  dissiper  en  partie  les  pré- 
ventions du  duc  de  Ferrare  contre  les 
Français.  Ce  prince  l'honora  de  sa 
confiance,  et  le  chargea  d'aller  à  Rome 
réclamer  du  souverain  pontife  une  di- 
minution sur  les  droits  d'investiture  de 
quelques  domaines  (Voy.  la  14^  let- 
tre de  Rabelais).*  Quoique  Marot  pa- 
rût l'avoir  entièrement  oublié ,  Jamet 
ne  cessa  de  prendre  à  son  sort  le  plus 
vif  intérêt.  Il  lui  adressa,  en  1543,  une 
Epître,  en  vers  redoublés,  pour  l'en- 
gager à  venir  partager  le  repos  dont  il 
jouissait  à  la  cour  de  Ferrare.  Cette 
invitation  arrivait  trop  tard.  Marot, 
alors  fugitif,  mourut  l'année  suivante 
(15i4)àTurn(r.MAROT,XXVlIÏ, 
2i2),  et  son  fidèle  .ami  lui  fit  élever, 
dans  l'église  Saint-Jean,  un  tombeau 
de  marbre  qu'il  décora  d'une  touchante 
épitaplie  en  vers  de  huit  syllables. 
Jamet  revint  en  France  avec  la  du- 
chesse Pienée,  sa  prolectrice,  et  mourut 
dans  la  Normandie  vers  1561.  ]1 
comptait  encore  parmi  ses  amis  Me- 
lin  de  Saint-Cielais,  et  DoUt  qui  lui  a 
dédié  son  édition,  devenue  très-rare^ 


\M 


JAM 


tiç>  (J:Ui'r.r.s  dt  Marol  ,  Kvon,  l.'*V;i, 
iii  8".  On  n'ajr  .Kiiuol  qu  uii  lies  |kIiI 
nombre  il (-  ;  i\e>;    mai^  elles 

sonUrnt  (>•>  rr  un  nu;,  pjiint 

les  |*ur(c%  (lu  \\  l'^  Nièflr.  Imirj.cu- 
tlamuiriil  dc^Jeux  mdnruuv  ilejj  cilr», 
on  trouve  eucotr  de  lui,  dans  les  ^Au- 

iT^J  de  M.ïinl     11 1>  /  o/i//- 111)1  iitiiiiniMtrr 

par  ce  ver  ^ 
Dn  autre: 

¥tÀt*  L«bia  r««r»«al  ilr 

Une  Inulutiun  J' Aust.nf,  ci  itii  Utuim 
sur  Alii.  Dieux  du  lUdui  j  {udilir 
àiUs  sts  Jirrnaiiuris  histuriqurs,  I, 
l().i,  une  A<;/iii// de  .lamel  jur  /u 
Saillir- 1  iergr  ,  lirçe  d  un  inanu.srrit 
de  luuceiul,  que  l'on  cr<iii  exerulepar 
Geoiïiav  rot> .  La  notice  que  du  Kadier 
a  dounee  dans  la  liiUiuth.  du  Poitou, 
Il  ,  H8,  fit  inc()in(>lrte.         W  -    s. 

JA.\li/r  lame  |Pit:nRL  Char- 
Lts],  liUcialem  niudr>ir  el  laborieux, 
était  de  la  même  famdle  que  I  ami  de 
MaruI  ^1):  et  descendait  par  le»  fem- 
mes de  l'historien  Meierav.  Il  naquit 
en  ITOl ,  a  Loiiui-te5.  près  d' Alencoo 
el  lerniiua  ses  éluder  à  l'université  de 
Caen;  ila^ouelui  mènie,'dan<^  une  let- 
tre à  s<jn  fière,  qu'il  fit  peu  de  pro|»rés 
dans  la  langue  ialiiie  dont  les  con»! lut- 
tions lui  paraissaient  birarres  ;  mais  il 
excella  dans  toui  les  exei  cicr^  du  corps. 
A  dix-neuf  ans  il  fut  admis  dan<(  les 
bureaux  derintendancedesA  province, 
où  il  se  forma  prompleraent  aux  affai- 
res ;  tt  en  17*J."l,  il  ulitint  la  place  de 
preni^ commis  de  M.  ()rr>  de  Ful- 
vy,  frcre  du  contrùleur-»;pneral  des  fi- 
nances. En  arrivant  à  li^aris,  son  pre- 
mier soin  fut  de  rechercher  la  société 
des  gens  de  lettres,  et  il  <e  lia  d'une 
manière  assez  intime  avec  (lueulletle 
{Voy.  ce  nom,  XIX,    38).  auquel  il 

^i)  L}'oii  J'ioet  rt.-iitrnii«tn-grri»ain  du  tria- 
•icak  de  IVcrirain  qui  fait  Ir    f^j«t  d«  cet    ar» 


fournit  dfN  ■  >on  édition  des 

hsMiis  de    '  I  o)  .  railiilc 

sui\aiil  .1  lit  .< .  .,Mt  .i-.iiiie  de  Tiavle, 
qu'il  se  tlallaii  d.-  ^.o^ nlei  /Htr/ui/e- 
miiit,  tourna  ses  ctudeN  vers  la  méta- 
plntiqur,  rt  il  perdit  dan»  des  discUA* 
Moos  oi^usr>  un  temp!^  qu'il  aurait 
eaplo>c  plus  utilement  a  sou  projet 
de  perfectionner  le  dictionnaire  de  la 
langue  Iran^aisc.  K.n  ITii.'i,  il  fut  tn- 
vo>épar»es  protecteurs  a  L<irienlouil 
i<i:i|lt    |>endatit  plusieurs  années    la 

I  >■  de  piemier  commis  de  la  roropa- 
^isie  des  ludr».  De  retour  a  l'ans,  il 
rrpnl  *nti  emploi  dans  le»  bureaux  du 
r  lierai ,  et  continua  de  don- 
II'  s  à  la  culture  des  lettres. 
Suu|H;oni)e  d'a,«oir  paii  a  la  publira- 
lion  de  i]urlque%  pamphlets  de.va^r  râbles 
à  U  cour,  il  fut  mis  a  la  lîasiille  en 
IT'}.'».  Ce  fut  dan.s  celte  prison  qu'il 
arheva  de  recueillir  et  de  mettre  en 
ordre  se»  Dbsrrs^atiuns  sur  les  diction- 
naire» fraii^ji»,  particulièrement  celui 
de'l  ieM)iix.  Il  Gt  ce  travail,  qui  »uppo$e 
d'iinmeii>es  rerheichei,  n'a\ant  pas  à 
sa  di>pu  ittoii  un  seul  volume,  même 
le  dictioiiii.^ire  de  Botulni  ;  mi\s,com- 
rae  il  en  fait  la  remarque,  on  n'est 
pu.nt  i  \i  UasliUe  pour  lra>aiher  com- 
modément i  une  pareille  composition  ; 
on  V  est  pour  pleurer  ses  pèches  [Lon- 
srr%HJtrur,  décembre,  17'>7,  p.  144). 

II  est  puibable  qu'en  obtenant  sa  li- 
berté Jamet  perdit  sa  place,  et  reçut 
l'oidre  de  quitter  Paris.  Du  moins  il 
est  certain  que  depuis  cette  époque  , 
il  disparut  eut  t-r«.iDent  de  la  scène 
du  monde.  On  sa:l  qu'il  vivait  encore 
en  1770.  Comme  il  était  alors  dans 
H(i  à^ea\ancé,  on  peut  conjecturer 
qu'il  ne  poussa  pas  heii  au-delà  sa 
carrière.  Jamet  a  fourni  des  notes  à 
l'ediMon  de  Rcihrltiis  .  publiée  par 
(iueollette  en    173:2   rJ),  et  un  assez 

(i;  S«\  Aj.v/  *ur  Rjb.  Uis  .  iju'-  Jamet  ap- 
pelait Ml  j>lji<anUnt  le»  pi<d»  d«  mouche, 
ont  été    trai»»foriiie«a,   d»"»  1*  ^>o«*«  htltnin 


76 


JAM 


^rand  nombre  d'articles  au  Diction- 
naire de  Trévoux,  1752  [f'^oy-  1>er- 
THELIN,  LVIII,  99).  ainsi  qu'au  Dic- 
tionnaire de  droit  et  de  prati(juc  par 
Fcrrière.  Enûn,  on  a  de  lui  les  opus- 
cules suivants:  I.  Essais  mctaphy' 
tiques  (Paris),  1732,  in-12.  ÎI. 
Lettre  en  forme  de  dissertation  sur 
la  création,  1733  ,  in-8".  Suivant 
M.  Quérard,  elle  a  été  traduite  en 
latin  par  Lancelot,  et  en  vers  fran- 
çais par  Martin  de  lîussy  (Voy. 
France  littéraire).  lïl.  Idée  de  la 
métaphysicjue  ,  traduite  de  l'anj^lais 
d'Atjem  (anagramme  de  Jamct),  Nan- 
cy, 1739,iii-12;  réimprimée  dans 
le  Conservateur,  septembre  1758. 
IV.  Daneclie-men-kan  y  philosophe 
mogol,  avec  des  remarques,  1740, 
in-12.  V.  Lettres  di  M.  Lancelot  sur 
Vinjini  ou  l'unité  de  substance ,  et 
sur  l'auteur  de  h  philosophie  des  jeu- 
nes gens  (Miron),  1740,  in-8°.  VI. 
Lettres  critiques  sur  le  goiit  et  sur  la 
doctrine  de  Bayle ,  1740,  in- 8". 
VU.  Prowptuaire  de  la  métaphy- 
sique du  Dictionnaire  de  Bayle , 
1740,  in-12.  Vin.  Lettre  à  M.  le 
chevalier  de  P.  (Pacaroni),  sur  la 
métaphysique  et  la  logique  ,  Paris, 
1742,  in-12;  réimprimée  dans  le  Con- 
seroateur,  septembre  1757.  D'après 
la  France  littéraire  ,  elle  avait  déjà 
paru  sous  le  litre  de  Lettre  sur  les 
caractères  de  différence  de  la  mé- 
taphysique et  de  1(1  logique  y  1740. 
IX.  Lettre  sur  le  lieu  et  r espace, 
17i2,  in-12.  X.  I^ettre  sur  le  prin^ 
cipe  de  saint  Augustin  :  Sub  Deo  justo 
nemo  miser,  nisi  mere.itur,  174!i, 
in-8''.  XI.  L'épilaphr  du  liihliothé- 
caire.  Ce  badina;;e,  de  dou7.e  .î  treize 
cents   vers  sur  la   rime  en  in,  fut  im- 


de  1778,  en  un  ouvrago  intilnlé  :  Lei  Pieds  de 
mouc/ie,  ou  les  Noces  de  Hubelais  ,  6  %ol.  in- 8". 
C'iie  singulière  bi-Tun  se  rnrouve  dnn»  la 
France  litterair»  de  M.  Quirard  ,  ouvrage  dont 
personne  d'aillrurs  n'apprécie  mieux  que  nous 
l'exactitade  et  l'utilité. 


JAM 

primé  par  extrait  dans  le  Couscnya- 
teur  du  mois  d'avril  1758  sur  le  ma- 
nuscrit de  Jamet  le  jeune.  Cependant 
tous  les  bibliographes  en  citent  une 
édit.  de  1747, in-4".  XI.  Troislcttres 
aux  imprimeurs  du  Dictionnaire  de 
Trévoux ,  1748-50,  in-4".  XIII. 
I^ettres  aux  auteurs  de  t Encyclopé- 
die,i7ô0,  in-8°.  XIV.  Petit  écrit  sur 
les  devoirs  des  gens  en  place,  1753. 
XV.  Lettre  au  sujet  de  ses  mémoi- 
res manuscrits  concernant  le  com- 
merce des  Indes,  1754.  XVI.  Ob- 
seroations  sur  les  moyens  de  perfec- 
tionner les  Dictionnaires  de  Trévoux 
et  de  Moréri,  in-12.  Cet  opuscule 
daté  de  la  Jjastille,  25  mal  1756,  a 
été  réimprimé  dans  le  Conservateur, 
décembre  1757.  W — s. 

«1A3ÏET  le  jeune  (François- 
Louis)  ,  célèbre  bibliophile  ,  frère  du 
précédent,  naquit  en  1710  à  Louviè- 
res.  11  fut  fort  jeune  attaché  comme  se- 
crétaire à  M.  de  la  Galaizière ,  qui 
passa  de  l'intendance  de  Soissons  ,  en 
17-37,  à  celle  de  Lorraine.  Il  demeura 
vingt  ans  à  Nancy,  partageant  comme 
son  frère  tous  ses  loisirs  entre  les  de- 
voirs de  sa  place  et  la  culture  des  let- 
tres. Il  se  lia  d'une  étroite  amitié  avec 
Lancelot  (  Voy.  ce  nom  ,  XXIII  , 
322) ,  envoyé  par  le  gouvernement  en 
Lorraine  pour  dresser  l'inventaire  des 
archives  de  cette  province.  Il  était  en 
correspondance  avec  Louis  l\acme  ,  à 
qui ,  par  le  moven  de  M.  de  la  (ialai- 
zièi  e,  il  eut  le  bonheur  de  rendre  quel- 
ques services  ;  et  il  visitait  assez  fré- 
quemment ,  dans  son  abbaye  iLSe- 
iiones,  I)om  Calmet,  qui  lui  donna  les 
premières  leçons  de  biblioi!;raphie.  Pa.î- 
siormé  pour  les  livres,  il  profitait  pour 
en  acquérir  de  toutes  les  occasions  , 
malheureusement  assez  rares  alors  en 
province;  mais,  grâce  à  sa  persévé- 
rance ,  il  possédait  cependant  une  as- 
.sez  jolie  collection  lorsqu'il  vint  habiter 
Paris.  Déjà  connu  des  libraires  et  des 


.lAM 

prinrt|>iti\  amalfur*  ,  il  df\in!  birn- 
l6l  i'oraric  des  \rritrA  Je  li\rf<,  ou  il 
ne  M  (l'slin^uait  |>a%  moins  par  reten- 
due et  la  variété  de  ses  connaissances 
que  par  la  délicalev^  de  son  ;;oùt.  (aI 
homme  aimable  et  >pii  iluel  mourut  à 
l'aiisle  M)  aotil  t77M.  Les  liues  qui 
lui  ont  apparîniu  ,  presque  tous  enri- 
chis de  ()url(|urs  noirs  de  sa  main  et 
d'une  pji faite  condition,  sont  tirs-re- 
cherchrs  des  curieux.  On  a  de  lui  , 
dans  V.inrur  litlrraire,  tians  les  >//•- 
tmtirrs  lit  Irr%'ouA  et  dans  \f  (priser • 
valeur,  quehjues  morceaux  d'histoire 
ou  de  littérature.  Ilebrailet  après  lui 
M.  Querard  en  ont  donné  l'indira- 
tion.  Avant  176*»  ,  il  s'occupait  déjà 
d'une  nouvelle  édition  du  Manuel 
leiitiue  de  l'ahbr  iNevost,  qui  devait 
être  auijmenice  d'un  -r.unl  nombre 
d'articles;  mais  il  n'a  pas  fini  ce  tra\ail. 
Il  avait  déposé  sur  les  Miar;;es  d'un 
c\<  :  ;  '  '.•  de  l'édition  de  Montaigne 
p.ii  ( .  iniilrlte  (/  <i)-.  l'art,  précèdent^ 
une  multitude  de  notes  hl^lon•]ues  , 
morales  et  littéraires,  qu'il  se  proposait 
d'emplover  dans  une  nouvelle  édition 
des  l.s.uu's.  liarbier,  dans  son  Dirtion- 
naire  des  anonymes,  2*"  éd. ,  n"  ôS.'iU, 
parle  de  cet  exemplaire  comme  d'un  li- 
vre trés-precieux.  Dés  l'ane  devinât 
an%  Jamet  avait  contracte  l'habitude 
de  tenir  une  e5pece  de  journal  dans  le- 

auel  il  inscrivait,  sans  choix  et  sans  or- 
re,  avec  la  hste  de  ses  dîners  et  de  ses 
soupers,  de  ses  vova;;es  ,  de  ses  rhu- 
mes,  et  même  de  ses  a\entiires  valan- 
tes, toutes  les  pièces  rares  ou  bin^uiio- 
res  qui  lui  tombaient  entre  les  inainii. 
Ainsi  l'on  V  trou\p  pele-mele  des  ar- 
rêts du  parlement,  des  fxintphlets  jan- 
sénistes ,  avec  des  ciiansons  orduriè- 
res  ,  des  épio;rararaes  ,  le^  Priapres 
de  Illot  et  de  Grécourt  ,  la  Char- 
treuse et  les  Ornhres  de  Gressel  ,  le 
Paris  riilinile  de  Petit,  et  des  ex- 
traits des  ?sou\'rUrs  ecrlèstastiques. 
Cet   ouvrage,    qu'il   a  judicieusement 


JAN 


77 


nommé  lui-même  un  chaos,  fait  au- 
jourd'hui patiip  des  manuscrits  de  la 
bibliothèque  du  roi.  Il  est  parta{;é  en 
deux  volumes  in- i" ,  ensemble  de  21 36 
pa^es.  I^s  bibliographes  le  citent  tan- 
tôt »ous  le  litie  des  Stromatrs  ,  tantôt 
»ous  relui  des  MisreJ/anra  dr  Jamet. 
Il  porte  encore  ceux  de  l\)/yaiithea 
et  de  (  htion  l.e  premier  volume  lom- 
mence  a  l'année  173<let  Gmt  .i  1736; 
le  MTCond  a  17M>.  Mais  l'auteur  n'a 
pas  revsé  jusqu'à  .sa  mort  d'v  faire  des 
additions  et  des  rorreclioiis.  .\insi  |.i 
note  suivante  se  trouve  pa^e  ri.'i.'i ,  à 
la  mar^e  d'un  mandement  de  l'evéque 
janséniste  de  Saint-l'apoul  :  **  J'étais 
M  bien  jeune  quand  je  m'amusai  à  co- 
«  pier  celte  pauvreté.  Je  cro> ais  que 
«  cela  était  beau  et  bon.\)ue  l'édu- 
••  cation  nous  rend  niais!  Décembre 
..    1772.  «  NN— s. 

4 A.\l  Cl! ni.sTi\N-l)AMi>), savant 
philolo;4ue  allemand,  et  l'un  des  plus 
célèbres  rommenlateurs  d'Hornre,  na- 

3uit  le  10  dec  17i3à  (ilaiiflia.  ^es 
Impositions  naturelles  furent  dévelop- 
pées par  l'éducation  que  lui  lit  donner 
son  père ,  pasteur  d'une  e^hse  de  sa 
ville  natale.  Non  seulement  il  suivit 
dans  l'école  du  N\  aisenhaus  (la  maison 
des  orphelin*)  le  cours  des  éludes  ordi  • 
naires,  mais  il  apprit  encore  le  fran- 
çais, l'italien  et  l'anglais.  Ses  pen- 
chants l'enlrainèrent  vers  l'élude  de  la 
littérature  ancienne.  Il  fut  reçu  doc- 
teur en  philosophie,  à;;c  de  vin^t-neuf 
ans,  et  s'adonna  à  l'ensei^^ncmenf. 
Après  avoir  ele  rép-  titeur  dans  l'école 
ou  il  avait  fait  .«^es  éludes,  il  suppléa  le 
recteur  TaiLst,  qui  alors  était  fort  3{;i*. 
Ku  17H0,  Jani  fut  mis,  en  qualité  de 
recteur,  a  la  tète  du  collège  d'Kisleben, 
petite  ville  d'environ  6,I)(K)  habitants, 
qui  fait  partie  actuellement  des  états 
prussiens  comme  rhef-lieu  du  comté  de 
Mansfeld,  dans  la  province  de  Saxe. 
Jani  axait  été  investi  de  la  place  qu'il 
occupait  par  le  comte  de   Mansfeld. 


78 


JAN 


Mais  ce  comte  mourut  ;  son  fils  unique 
le  suivit  de  près  clans  la  tombe ,  et  en 
eux  s'éteignit  leur  illustre  lamille.    Le 
comté  (le   Maiisfeld  retourna  comme 
héritage  à  Télecleur  de  Saxe  qui  cou- 
firuja  Jani  dans  le  poste  qu  11  occupait. 
Le  collège ,  ou  ,  comme  on  dit  en  Al- 
lemagne, le  gymnase  d'Kisleben,  sous 
la  direction  du  nouveau  secteur  ,  ac- 
quit une  renommée   qui  y  augmenta 
promptement  le    nombre   des  élèves. 
Non  seulement  Jani  y  établit   un  or- 
dre parfait  et  des  cours  d'études  as- 
sortis aux   intelligences  des  difforeuts 
âges  ,    mais   dans   ses  instructions    11 
développait  avec   un  admirable  savoir 
tout  le  génie  des  langues  anciennes,  et 
faisait   ressortir  avec  goût  les  beautés 
des  auteur9»grecs  et  latins.  Par  un  heu- 
reux mélange  de  douceur  et  de  fern»elé, 
il    savait    se    faire  obéir  des  écoliers, 
qui  le  chérissaient  comme  un  père  et 
comme    un  ami.    î^our  faciliter   leurs 
éludes ,  il   publia  divers  traités  dont 
nous  donnerons  les  titres.  Mais  ce  fut 
son  édition  des  Odes  d'Horace   qui  le 
plaça  au  premier  rang  des  critiques  et 
des  philologues  ;   il  avait  préparé  des 
éditions  de  V  elléius  F^aterculus,  de  Sl- 
llus  Italiens  et  de  Lucrèce,  ainsi  qu'un 
Dictionnaire  de  la  langue  grecque.  Des 
maladies  et  des  chagrins  domestiques  le 
forcèrent  d'lntcrr()m[>re  ses   fonctions 
de  recteur,  et  la  mort  rem[)echa  de  ter- 
miner les  ouviages  qu'il  avait   entre- 
pris. Il  perdit  dans  la  Heur  de  l'âge  ses 
deux  premières    femmes,  toutes  deux 
jeunes,  toutes  deux  sœurs  et  [jortant  le 
nom  de  Caipzov;   11   fut  pleuré  de   la 
troisième  femme  qu'il  avait  épousée,  des 
filles  qu'il  a\ait  eues  de  ses  trois  fem- 
mes, et  d'un  fils  (pil  récompensa  tous 
les  soins  de  son  père  et  fut  à  Gœttln^ue 
un  des  plus  brillants  élevés  du  célèbre 
Heyne.  Jani  mourut  le  5  oct.  1790, 
âf!;é  seulement  de  quarante-.sept   ans. 
Cet  auteur  laborieux  a  donné  les  ou- 
vrages suivants  :  I .  Recueil  (ïépilhr.' 


JAN 

tes ,  de  substantifs ,  de  verbes   et 
d\idi^erbes,  avec  un  Index,  alphabé- 
tique des  dieux  et  des  héros  citez  les 
anciens,  Halle,  177i,  en  latin.    II. 
Principes  de  dialectique  ,  aoec  un 
Tableau  de  l'histuire  de  la  philoso- 
phie à  C usage  des  gymnases,  Halle, 
1770,  en  latin.    HI.    Obseroations 
critiques  ,  trois  parties,  1784-1786. 
I V .  Sur  l'art  poétique  chez  les  La- 
tins, 1774,  ln-8",  en  latin.  V.  Courte 
notice  sur  la  poésie  latine ,  Halle  , 
177'2,  en  latin.  VI.  V Ami  de  T éco- 
lier, programme,  1776-1778,  in-4°, 
en  allemand.  Y 1 1 .  L'Knélde  de  Virgile, 
traduite  en  allemand  ,  Halle,    1784, 
in-v".  VIH.    Une  édition  des  Odes 
d'Horace,  avec  des  variantes  tirées  des 
manuscrits;  un  commentaire  et  une  sa- 
vante préface,    Leipzig,  1778- 1782  , 
2  vol.  ln-8".  C'est  l'ouvragé  le  plus 
important  de  Jani.  Aucun  éditeur  ou 
commentateur    latin    d'Horace    n'a  , 
suivant  nous,  développé  dans  ses  argu- 
ments et  dans  ses  notes,  avec  plus  de 
goût  et  de  savoir,  les  beautés  poétiques 
et  les  intentions  historiques  des  odes 
d'Horace.  Il  y  a  eu  une  seconde  édi- 
tion de  cet  ouvrage  en  1S09;   mais  ce 
n'est  qu'aine  réimpression   de  la  pre- 
nïière.  lîaumgartner  a  publié,  après  la 
mort  de  Jani,  un  ouvrage  en  alleniind, 
Intitulé  Eclaircissements  et  observa- 
tions sur  les  Satires  et  les  Eptlres 
d' Horace,  d'après  les  leçons  de  Jani, 
en   trois   parties,    Lelpzi^i;  ,    1705. 

W— R. 

JAIVIÇOX.  Voy.  Gavin, 
LXV,  184. 

.1  A\I\  (le  V.  JosF.PH),  religieux 
du  monastère  des  (irands  Augnstlns  de 
Lyon  et  vicaire  provincial  de  son  or- 
dre, naquit  dans  cette  ville  vers  1715. 
La  bibliothèque  de  son  couvent  était  , 
après  celle  des  J émîtes  ,  la  plus  consi- 
dérable qui  fût  à  Lvon.  La  direction 
en  fut  donnée  vers  1753  au  V.  Janln, 
qui  avait  de  vastes  connaissances  en 


JAN 

hi&loirv,  et  *ur!ool  en  nuinÏMoalique. 
('Vvt  lui  qui  atail  fait  placer  5ur  la 
pniiri|ulf  porte  de  celle  bibliullièque 
rin>crtption  sut%aate,  conipo>rc  par  le 

Mic  bnoiÎBr^  v»«unl  •!  p«»»lilr«  Mbi 

Hic  iMrnI  «I   ail«'>«l. 

Ric  lo<|»uu  ur  cl  «b»anl. 

Le  F.  Janiii  ne  voulut  jaraai»  être 
inotnbir  traucune  afatlémif  ,  niJ%  il 
roi  t^•^pomlail  a%ef  un  -rand  nomlwr 
tle  Njvaiit.<^.  On  fon>er\r  daiiN  le»  bi- 
bliothèque* de  ^<me^  le>  Irllre*  qu'il 
écrivit  à  J-F.  Se;;«ner.  Cn  lettre»  ont 
trait  à  pluîkieur»  ob)rl>  d'anliquilc>,  no 
tamment  à  la  jambe  d'un  rhetal  dr 
bitinze  trouvée  dans  la  Saune  en 
ITtitj,  et  à  une  planne  de  même  m.tal 
découverte  pré*  de  L>on. 
$e  trouvait  une  suite  de  c.i 
5(ilumenl  di^eten^^  dr  l.»  i,  K  .i  ;  .1 
bels  cunnu>>  /  c»  .  ^n.ii»:!.  \l.l, 
472).  A^anl  de  se  liuer  à  M)n  ^où! 
pour  ranliquitc,  le  I*.  Janin  Nelail  t\c- 
ciipé  d'un  iravad  a^sez  im(Mirlant:  il 
a\ait  réduit  en  abrégé  le*  Annulrs  de 
Ut  (Jiirtr  sur  la  ver>ion  française  du 
tongl*in{i'TthingSi\\t  par  le  jes-jiie 
Minria  dr  Mailla,  version  i|ui  furni-iit 
doute  \olume>  in-V",  et  (|ui  fut  ceilc^ 
en  177'),  par  les  l'I*.  de  l'Oratoire  do 
^^on,  à  l'abbé  (ilo^  cr  qui  la  pullia 
en  1777  i  Vov.  K-  calaioui.r  de*  ma- 
nuscrits de  la  bibliulliequr  dr  l.>on, 
t.  r^  p.  li,  ett.  Il,  p.H8).guanlà 
Wi/fTfi^r,  Ir  IV  J.iiiin  en  a\ait  lait 
liomma;;cen  17G9à  ^I.  de  Moiitaiel, 
archevêque  de  L>on,et  aux  administra- 
teurs du  bureau  des  colle;;es,  qui  le  dé- 
posèrent dans  la  bibliothèque  dr  crtlc 
ville  où  il  est  resté  inédit.  F.ors  de  la 
uppresMon  drscouxents,  le  l*.  Janin 
ne  Cl  îîl  point  devoir  adhérer  au  srhisme 
ron^tilulionncl;  et,  quoiqu'il  lût  par- 
venu à  un  .ii;e  très-avancé,  il  ne  voulut 
point  quitter  sa  ville  natale  ou  son  mi- 
iiivttre  pouvait  encore  être  utile  aux 
fidèles.  Pendant  le  fort  de  la  lerreur, 


JAN 


79 


il  ji'él*it  ré(u|;ié  chez  un  ourrier  en 
soie.  Veifc  la  fin  dr  drceiubie  17U3, 
on  lui  apprit  qu*un  pav^n  venait  de 
dérou\rir  pf  rs  dr  Fourrière  un  certain 
nombre  de  metlailles  Irès-biçn  conser- 
vée» ;  il  ^e  rendit  auNMlùt  clirt  le  pro- 
prielj  rr,  et  .idirla  un  inédnllon  de 
J)  'liais.  a\aul  dr  1  entrer 

d.i  .    il  fut  rrniniiu  par 

d.  rti!  m  pri- 

MH      I  la  rham» 

bre  dr     'I  -^  liie  on  Mr^e  main- 

tenant i<  '  de  rnuiiuerce,  il  s'y 

lrQii«aa\ec  (eu  Delandine,  qui  fut  de- 
pui^  bibliothécaire  de  la  ville  de  Ljou. 
m  (Combien  de  foLs  ,  »*écrie  cet  écri- 
vain, j'admirai  m  vaste  mémoire  ,  les 
faits  intéressants  qu'il  }  a\ait  déposés, 
n.  va  touchante  sim- 
1  r^  de  quatre\ino|s 

.i::<.  ..,.;«<(  DiLiidine,  et  il  pailait  lil- 
It-raliirr  asrc  Ir  frii  dr  L  jruiieNsc  ;  «a 
':.vil(  riait  inaltrrablr ,  et  cependant  il 
allendait  la  mort,  elle  arri\a.  Inter- 
roge la  veille  et  condamné  futur  iwair 
rrlusr  df  rendre  ses  lettres  de  prê- 
trise et  prêché  \i  contre-résolution), 
il  causa  t  a«ec  calme  lorsque  les  bour- 
reaux vinrent  le  saisir  et  inirrrom 
pre  ses  intrres>.ants  entretiens  catalo- 
gue des  manuscrits  de  la  bibliothèque 
de  \.\o\\^  t.  V\  p.  26  .  1^  l,a  lèle  du 
P.  Janin  tomba  sous  la  hache  révolu- 
tionnaire le  1.')  mats  17î>V  (Vov. /rv 
Martyrs  de  lu  fui  ,  par  l'abbé  (iuil- 
lon  lie  Montleon  ,  t.  III,  p.  3iG,  où 
sa  mort  est  placée  par  erreur  au  3  jan- 
vier, jour  où  périt  un  aiilr^  Lyon- 
nais portant  aussi  le  nom  de  Joseph 
Jitnin  ,  qui  n'était  à^é  que  de  vinj^t- 
lrdi«  ans,  et  qui  était  maître  de  pen- 
sion ;  vov.  eurore  Prudhornme,  l)ic- 
tionn.  des  individus  condamnés  à 
mort  pendant  la  rè^'ulutiun  ,  t.  11 , 
p.  6).  A    P. 

J  A  \  I  X  de  Combe- blanche 
(Jean\  chlruriiien  et  oculiste,  né  à 
Carcassonne  le  11  juin  1731  ,  s'ap- 


8o 


JAN 


pllqua  spécialement  à  l'étude  des  ma- 
ladies des  yeux.  Dès  Tàge  de  vingt-huit 
ans  ,  les  nombreuses  opérations  qu'il 
fit  soit  dans  les  hôpitaux ,  soit  sur  des 
personnes  distinguées  de  Montpellier, 
lui  méritèrent  les  éloges  de  l'université 
de  cette  ville.  Il  n'eut  pas  moins  de 
succès  dans  tous  les  lieux  oij  il  fut  ap- 
pelé, notamment  à  Paris  ,  à  Toulouse, 
à  Milan.  S'élant  fixé  à  Lyon,  il  obtint 
le  titre  d'oculiste  de  la  ville  ,  et  devint 
prévôt  du  collège  de  chirurgie.  De 
toutes  parts  on  venait  le  consulter  ou 
réclamer  ses  soins.  Le  cardinal  de  I\o- 
han,  qui  joua  un  si  grand  rôle  dans 
l'affaire  du  collier,  se  rendit  exprès  à 
Lyon  pour  faire  examiner  ses  yeux  par 
cet  habile  praticien  et  se  logea  même 
chez  lui.  En  1777,  le  duc  de  Modène 
(François  III  d'Esté) ,  âgé  de  quatre- 
vingts  ans  et  affecté  de  la  «ataracte  , 
invita  le  docteur  Janin  à  venir  l'opé- 
rer; la  cure  réussit  complètement,  et  le 
prince  recouvra  la  vue.  Pour  luitémoi- 
pïcr  sa  reconnaissance  il  le  nomma 
son  médecin  oculiste,  et  lui  assura  une 
pension  viagère  de  2,400  fr.  L'uni- 
versité de  Modène  se  l'agrégea  comme 
professeur  honoraire  ,  et  l'impératrice 
Marie-Thérèse  lui  adressa  une  lettre 
de  félicitation  accompagnée  d'un  riche 
présent.  Thomas,  l'auteur  de  VLloge 
de  JMarc-Aurèle  ,  qu'il  avait  guéri 
d'une  ophthalmie,  lui  conserva  dès-lors 
beaucoup  d'attachement  et  lui  adressa 
une  Kpître  imprimée  dans  ses  œuvres. 
Lorsque,  dans  lin  voyage  en  Savoie , 
Ducis  fit  aux  Echelles  une  chute  très- 
grave,  Thomas,  alors  à  Lyon  ,  s'em- 
pressa de  lui  amener  Janin  dont  les 
soins  contribuèrent  au  prompt  réta- 
blissement de  son  ami.  Thomas  a  ra- 
conté l'accident  arrivé  à  Ducis  dans 
une  lettre  à  M™^  Necker  du  27  juin 
1785.  Sa  correspondance  en  con- 
tient quelques-unes  adressées  à  Janin. 
En  1787  il  reçut  de  Louis  XVI  le 
cordon  de  Saint-Michel.  Janin  s'oc- 


JAN 

cupa  aussi  à  rechercher  les  moyens 
de  combattre  les  exhalaisons  méphi- 
tiques, et  fit,  en  présence  de  commis- 
saires, diverses  expériences  à  ce. sujet. 
Il  résidait  à  Paris  dans  les  dernières 
années  du  XVIIP  siècle;  mais  nous 
ignorons  la  date  de  sa  mort.  Outre  plu- 
sieurs articles  relatifs  à  son  art  impri- 
més dans  différents  recueils ,  on  a  de 
lui  :  I.  Traité  sur  la  fistule  lacry- 
male,  in-8°.  II.  Ohseri^utions  sur 
la  maladie  des  yeux  ,  1767,  in- 
12.  III.  Mémoires  et  Obsenùitions 
anatomiques ,  physiologiques  et  phy- 
siques sur  l'œil  et  les  maladies  qui 
ajfectent  cet  organe,  Lyon,  1772, 
in-8°  ;  traduit  en  allemand  par  Selle 
(  Voy.  ce  nom-,  XLÏ,  540) ,  Ber- 
lin, 1776;  ibid.,  1788,  in-8".  IV. 
Réflexions  sur  le  triste  sort  des  per- 
sonnes qui,  sous  une  apparence  de 
mort ,  ont  été  enterrées  vivantes,  ou 
Précis  d^un  mémoire  sur  les  causes 
de  la  mort  subite  et  violente,  etc.  , 
Paris  et  La  Haye,  1772  ,  in-8''.  V. 
U anti-méphitique,  ou  Moyen  de  dé- 
truire les  exhalaisons  pernicieuses 
et  mortelles  des  fosses  d'aisance  , 
r odeur  infecte  des  égoûts,  celle  des 
hôpitaux,  des  prisons ,  des  vais- 
seaux de  guerre  ,  etc. ,  imprimé  par 
ordre  du  gouvernement,  Paris,  1781, 
1782  ,  in-8°.  VI.  Détail  de  ce  qui 
s  est  passé  dans  les  expériences  fai- 
tes par  M:  Janin  les  18  ^/  23  mars, 
en  présence  des  commissaires  réunis 
de  f  académie  royale  des  sciences 
et  de  la  société  royale  de  médecine, 
concernant  l'anti-méphitique  ,  Paris  , 
1782,  in-8".  VII.  Dissertations  et 
Lettres  sur  le  méphilisme  et  Vanti- 
méphitisme,  adressées  à  M.  Cadet, 
ibid.,  1784,  in-8".  VIII.  Réponse 
il  M.  CyRyan  (professeur  de  méde- 
cine à  Lyon),  sur  le  magnétisme  <7n/- 
/77<y/,  (ienève  et  Lyon,  1784,  in-8°. 
IX.  La  vérité  mise  en  évidence , 
Paris  et  Lyon,  1785,  in-12.  On  at- 


JAiN 


JA.N 


bi 


-   î   Janin   n 

àkti   a<     i    llulfl     i).-  .      I  :..   CI4U; 

»'<KCUJUit  at;-'  il  •     •  ^\CtlI, 

iolilule  :  /  iun  tUs 

morts  fhir    I'  .rui,uu 

\ifur  Gurnn .  1 7  b'J ,  1  n - 1 2  (  )j:  —  M . 
JAM.N  ^^K^  MAnir-Mu-Y). 
Iiilrrjlrur  rt  )•  itiulisic,  né  à  IVi« 
en  1777  ,  G(  àt  bonoM  é\nàt%  an 
collr^e  Je  Saiule-IUrix ,  rt ,  quoi- 
que il'un  rarjrleie  fort  doai  rt  fort 
ino«Jr«lr  .    drbiili    Jan«    la   lilt^alare 

.;..  i  ■,'! 

Du.  uMi  .      11  .11,    dr 

ifiiilic  fniiipir  -•  litiéra- 

turr.  Drs  Ir  c<  '  lU  ilr  U  rr»- 

tauration,  il  p.i  nal  la  Ouo- 

tidiftme^  ou  il  lut  ^pcculrmrnt  ciurj^é 
de  rrnsrroblr  i'--  »  ■^'•Ilri  rt  de  b 
rédaction   du.  l>our   1rs   ar- 

ticles   des  ^raii...  M  publia 

rn  1H17  uu  rrrticil  uiiilulr 

lettres  '  '  ■  I  il 

rxprima  *!  rt 

qui  rut  l*.  '  ia 

p!'.l*•rM^^  .  tie 

ia   ùii  de  1  annre 
I  "  fit  impriinrr  m>«s 

U  roiai'ialion  un  ^rand  nombrr  d'o- 
des pour  crlrbrrr  Ir*  di\rr«  r\mr- 
mrnts  des  règnes  de  I^ais  W 111  et 
de  Qiailes  \.  Il  est  Tautrur  d'une  Vif 
de  La  Harpe,  qu'il  a  composée  poor 
nnr  nourrllr  rd.tiun  du  Cours  tle  iii- 
trraturr  ^  publur  par  A.  Co^lr  ,  édi- 
tion à  laqurlir  il  a  ajouté  un  volume 
conlrnant  l  l'iurnrn  irithfue  et  rai- 
sonne dr^  ilrainrs  r!  t::^r  i  rs  i!.*  l'au- 
irur  qui  ne  sont  \m>  u  les  au  llicjlrr. 
On  lui  doit  encore  plusirurs  éditions 
dr  rou>ra^r  Inlllulc  :  Paris,  l'er- 
suillrs  et  /es  pru^inces  {f'uy.  Drr.AS 
DE  lioiN  Saint  JtsT,  lAIII.  71  . 
En  18 Jl  ^16  juin)  »  il  fit  rrprésrntrr 
au  srcond  1  hcatrr-Français  une  tragé- 
die à'OresU  qui ,  avant  d'être  rnlen- 


! '•  iiMuljinnée  par  1rs  rlrve»  dr^ 
lie    nirtiffinr   et   de  droit,   foc! 
oppuvr^,  rummr  l'on  iiait  ,   au  j;ou\ri 
nemrnt    dr   rr    irmpli,     dont  Jamii 
'  !f  pailivan. 
\     '  ,  .  Il   lU  firent 

nrrulrr  dan»  ir  paitrrrr  dr\  billrli  q«i 
port  air  ni  ;  l^s  ècuJes  Je  li.uù  et  dr 
metlecine  sont  menacées  :  union  et 
forte.  K  la  troisirmr  rrpré^rniaiion  , 
le  mini%irrr  mt  la  (aible^ke  d'rn  or 
donner    lui-rornir    L  n.    Kn 

iH*27  tl'»  fr^nrr^  M.        I  lit  re- 

II In  au  Tliralrr   !  l.itui\ 


rritnnr,  roni- 


triomphr,  rn  drc    1H27,  ut 

Janin,  laivuut  inarhrtét  \  .u- 

«ra;;r«,  jnrmi  leuiurls  s«  Irouvrnt  unr 
Vie  dr  I^ui»  Wl  rt  une  tra;;rdir  rn 
xet*  {hjirnne  ^lanel),  dont  1rs  qua- 
tre prrmirr\  actes  u>nl  Irr  rainés.      /^. 

J.WKOWSKl.  général  polo- 
nais. I  :  irt  aclne  à  l'insuirec- 
tion  '  1  Si  .  rt  commanda  an 
Corp^  Jju^ljtmrr  poignaisr  qui  fut 
oppfHcr  atit  Kll"«•^,  rt  que  comman- 
I  Slr^necLi.  Au 

<  .  •  n,  le  corps  d'ar- 
■re  ruvse  du  r;eneral  kreulz  s'riait 
porté  dr  Lublm  sur  la  Podiacliir  ;  Ku- 
di^rr  Ir  suivit  de  la  Vollnnieà  Lubliu. 
SLr^necLi  conçut  le  liaidi  projet  d'é- 
craser successi\eroent  1rs  dirux  corps 
ennemis.  Tandis  que  U\binsli  dr\ait 
tomber  sur  le  qénnal  kiruU,  Ir  rurp» 

<  r,     '    rr  dr%ait  rirr  rn- 

:au&  polonais,  sa- 
>••<{  .  Liiii^iiu\k^Li  ;tirivant  dr/jmosc, 
Kimonno  ornant  de  Pulawi,  et 
JanlowsLi  arrivant  de  Luk.o\« .  De 
faus>es  démonstrations  faites  par  1rs 
Uuises  sur  SieroL  troraprrciil  le  ^n- 
raandant  en  chef  polonais,  cii  lui  faibanl 
concevoir  des  craintes  pour  la  sûreté 
de  la  capitale  de  la  Pologne,  d'autant 
plu>  qup  .TanLow.sLi ,  malgré  les  forces 

6    . 


t^  JAN 

considérables  mises  sous  ses  ordres , 
ne  repoussait  point  les  Rosses  ,  quoi- 
que, le  19  juin,  un  colonel  de  son  corps 
se  fut  battu  avec  avantage,  auprès  de  I.i- 
sobyni,  contre  toutes  les  forces  de  l'en- 
ïiemi.  Pour  couvrir  Varsovie,  l'ordre 
fut  donné  à  Rybinski  et  à  Jankowski 
de  revenir  sur  leurs  pas.  On  pense  que 
dans  ce  moment  encore  Jankowski  au- 
rait pu  attaquer  avec  succès  et  battre  le 
corps  russe.  Il  n'en  fit  rien.  Son  inac- 
tion indigna  la  nation  polonaise  :  la 
plus  belle  occasion  d'arrêter  l'ennemi 
était  perdue.  Il  fallut  se  résigner  à  la 
retraite.  On  demanda  la  mise  en  juge- 
ment des  chefs  ineptes  qui,  ayant  laissé 
échapper  des  circonstances  favorables, 
compromettaient  la  sûreté  de  la  capi- 
tale. Skrynecki  fit  arrêter  |e  29  juin 
Jankov'ski  et  Cakowski,  ainsi  que  plu- 
sieurs personnes  accusées  de  complot 
en  faveur  des  Russes.  Traduit  devant 
un  conseil  de  guerre  extraordinaire 
sous  l'accusation  de  haute  trahison,  au 
commencement  du  mois  d'août ,  Jan- 
kowski se  défendit  avec  chaleur  et  indi- 
piation  ,  fit  une  déclaration  solennelle 
de  son  patnotisme,  et  demanda  à  com- 
battre dans  l'armée  comme  simple  sol- 
dat, pour  prouver  à  ses  quatre  fils,  di- 
sait-il, que  leur  père  n'était  pas  traître 
ik  la  patrie.  Le  conseil  de  guerre  ex- 
traordinaire ne  vit  pas  dans  la  con- 
duite de  ce  général  un  caractère  de 
trahison  ;  mais  il  le  renvoya  devant  le 
conseil  de  guerre  ordinaire  pour  répon- 
dre de  sa  conduite  stratégique  vis-à- 
Tis  l'ennemi.  En  conséquence,  il  fut 
ramené  en  prison.  Ce  jugement  irrita 
le  club  patriotique  dans  lequel  sié- 
geaient les  hommes  les  plus  exaltés,  et 
q|Ul  ne  voyait  partout  que  compIcHs  et 
trahisons.  Le  15  août,  après  une 
sél^ce  très-orageuse  de  ce  club  ,  des 
furibonds  se  portèrent  ^nr  le  château 
où  Jankowski  était  détenu  avec  des 
compagnons  d'infortune  ;  les  portes 
furent  forcées  Sans  que  les  troupes  et 


JAN 

la  garde  nationale  fissent  beaucoup 
de  résistance.  Jankowski  et  les  autres 
prisonniers  furent  cruellement  mutilés, 
puis  pendus  par  des  brigands  que  sou- 
tenait toute  la  populace.  Les  mas- 
sacres continuèrent  le  lendemain  ;  et 
ce  mouvement  démagogique  ne  fit  que 
hâter  la  chute  de  la  Pologne.     D — G. 

JAXXEQLIjV  (Clément)  est 
plus  connu  sous  le  nom  de  Cle- 
meris  non  pupa.  On  ne  sait  pas  quel 
pavs  lui  a  donné  le  jour;  M.  Fétis 
croit  qu'il  habitait  Lyon,  où  la  plupart 
de  ses  ouvrages  ont  été  publiés  ;  mais 
il  avait  été  auparavant  mailre  de  cha- 
pelle de  Charles-Quint.  La  musique  a 
eu  en  lui  son  Rabelais,  puisqu'il  est  au- 
teur d'une  foule  de  morceaux  curieux, 
tels  que  le  Caquet  des  femmes,  la 
Bataille  de  Marignun,  ou  la  Défaite 
des  Suisses  en  1515,  le  Chant  des 
oiseaux,  et  les  Cris  de -Paris.  Il  laissa 
en  mourant  sept  livres  de  motels  et  une 
messe  des  morts.  Ses  chansons  fran^ 
çaises,  publiées  in-4*^  en  1559,  ont 
un  meilleur  st}le  et  un  chant  plus 
agréable  que  celles  des  autres  maîtres 
du  même  temps.  Choron,  qui  a  ressus- 
cité parmi  nous  le  goût  de  l'ancienne 
musique,  a  fait  exécuter  avec  succès  de 
1830  à  1832,  par  ses  cent  cinquante 
élèves  de  la  rue  de  Vaugirard,  la  Ba- 
taille de  Mariffnan,  et  les  Cris  de 
Paris.  Ces  deux  ouvrages  décèlent  un 
génie  supérieur.  Le  second  a  été  giavé 
dans  la  Gazette  musicale  de  Paris, 
du  22  août  1839.  F— le. 

.TAWE^t'IX,  sieur  de  Ho- 
chcfort  (Claude),  voyageur  français, 
était  né  à  Ciialons-sur-Mame.  11  avait 
accompagné  M.  de  lîellièvre ,  ambas- 
sadeur de  France  en  Angleterre  pour 
renouveler  l'amitié  entre  les  deux  pays; 
mais  sa  jeunesse  lui  faisant  désirer  de 
courir  un  peu  le  monde ,  il  quitta 
Londres  et  le  service  de  l'ambassadeur, 
après  avoir  assez  bien  appris  la  lan- 
gue anglaise,  et  alla  à  Dieppe.  Le  ca- 


JA!f 


JAxN 


as 


pitaine  d'à*  iia\ire  prit  k  partir  le 
reçvt  à  %on  bord  comme  soldât  dans 
■■e  conpat;nie  qu'il  pmbar(|uait ,  et  , 
\m  Couvrant  quelque  rapariu  ,  le  fit 
Mil  éaiiain  On  mit  à  la  xiiie  le  5 
■•«embre  1637;  api>5  une  iraver»ée 
pénibit,  on  arn\a  »ur  la  céte  de  Bar- 
MTÏe  que  Ton  ^ui%it  jo^qu'au  rap 
Blâar,  où  l'on  drbarqna,  afin  d'r  con- 
flruire  des  barque*  ••  qui  sont  ncres- 
•  aaires,  dit  Taiiteiir,  pour  entrer  dans 
«  la  rivière  du  Senr^a  ,  1rs  narires 
«   étant  ronlraifx  'rr  à 

«    la  rade.  «•    i.r-  •'»  *i 

(arottche»  q»«  Ton  ne  pou^.i 
•▼et  eua  qu'en  depmant  à  q'.> 
teste  les  ol.jets  que  l'on  >oulaii  don- 
ner en  eclianpe   de  leurs  poivrons;  il» 
les    venaient   chercher ,    lais»aient    ce 
qu'ils  apportaient,  puis  s*enfu\ aient  an 
plus  vite.  Quand  on  fut  entré  dans  le 
ileuve ,  on  s'as-ança  jusqu'à  Hieurt  ,  i 
trois  lieues  de  son  embouchure;  on  bi- 
lit  une  maison  par  \e  secours  des  nè- 
gres, et  l'on  s'occupa  de  commercer  «Tec 
eux.    hnsuilc  le  capitaine  rt  une  partie 
de  son  monde   remontèrent  le   Heure 
jusqu'à  'lerrier-l\on;;e  ,  à  soixante-dix 
iienes  de   distance  ,   en   continuant   i 
traiter  a\ec   le»  indif^énes,    des  cuirs, 
de  l'noire,  de  la  pomme,  des  plumes 
d'autruche,  de  l'ambre  pris  et  de  l'or. 
L'insalubrité     du    climat    décida    les 
Français  à  quitter  le  pa^s  ;  ils  allèrent 
aux  lies  du  cap  Vert,  >  prirent  des  ri- 
rres,  et  en6n   revinrent  à  Dieppe  en 
163H.  Janncquin  publia  le  récit  de  ses 
courses  sons  ce  titre  :  l'oya^r  de  Ij- 
l>yr  ou  royaume  de  >  '■-  long 

du  \iiitr,ai>n    fn    n  't    drx 

luiiilunts  qui  sont  le  long  ^e  ce 
Ji/uoe  ,  leurs  coutumes  et  jnçims  de 
n\re,  1rs  particularil'^s  les  plus  re- 
miir,;mi/jlcs  de  ce  pays,  Paris,  1 6  H, 
in-lii.  Il  cA  évident  qne  par  le  nom 
de  Libye. Iannequ;n  entend  le  Sahara  ; 
liii-inéme  ,  dans  sa  préface,  convient 
qtté  ce  pays  est  fort  éloigne  de  ceux 


qv'il  a  Tos.  Suivant  les  idées  de  son 
temps,  il  penNP  que  le  Ni^er,  aprè» 
avoir  arrogé  le  royaume  de  'lombouf- 
tou,  qui  doit  être  le  Ilambara ,  se  di- 
vise en  trois  bras,  dont  l'un  tombe 
dans  la  mer  entre  le  déseit  et  la  con- 
trée dç  Sénéiial ,  et  le  troisième,  dont 
le  roors  est  plus  luo^  que  le>  d<  ux  au> 
très,  se  décharj;e  près  de  la  côte  dt 
Guinée.  On  «oit  que  ces  opinions 
avaient  la  lér'  '  ^      ^*         .îanl 

la  plupart  dr^  j  lin 

SOI  c> .  il  ne  lient  ao- 

cuii'  nal,et  l'on  ne  ton- 

nait la  dalr  de  »ua  retour  nnr  d'aptes 
celle  qu'il  énonce  dans  le  titre  de  *on 
livre.  Mais  ses  observations  sur  les 
mœurs  et  les  iisa;jes  des  nèj;res  sont  as- 
sei  instructives,  souvent  très-exactes  et 
très  judirieuses,  quoiqu'il  montre  par- 
fois une  ;;ro^sière  crédulité.  Ceux  qui 
ont  exploré  la  contrée  où  coule  le  Sé- 
négal reconnaissent  que  beaucoup  de 
cin  :;ime  il'é- 

po  ,  .    L— s. 

j  A  .\  O  I)    ,  Jl  \N   Ji».sIPH-JOA« 

cHiM),  ma^iitrat,  ne  en  1761  à  Clair- 
vaux,  petite  ville  du  Jura  ,  était  neveu 
de  Vernier,  mort  pair  de  France  en 
1818  (roi     VihMHi.   XLMII  , 
252).  Il  aclieva  ses  études  à  l'univer- 
sité de  Besancon,  el  fil  en  17R6  sei 
débuts  au  barreau  de  cette  ville  sous 
le  patronage  du  professeur  (^urvoiiier 
il  oy.  ce   nom,   X  ,    \22) ,  dont  il 
avait    mérité  l'estime  par  son  amour 
pour  le  travail,  et  qui  lui  portail  nn  vif 
intérêt.  Mal^^ré  l'éclat  de  se  premières 
plaidoiries  ,  il  quitta  Besançon    pour 
alUr  s'établir  à  l.ons-le-Saulnier  où  il 
ne  tarda  pas  ï  jouir  de  la  réputation 
d'un  bon  jiinsconsnlte.  S' étant  montré 
dans  le  principe  favorable  à  la  rrvolu- 
tjon,  il  fut ,  en  1790,  élu  membre  du 
conseil-oénéral    du    dt-paitemenl    da 
Jura.  11  était  un  des  coura^eox  admi- 
nistrateurs de  ce  département  qui  ten- 
tèrent, au  mois  de  mai  1793  ,  d'orga- 

6. 


8i 


JAIS 


JAN 


niscr  des  moyens  île  résistance  à  la  tv- 
rani'.ie  de  la  Convention,  et  fut  comprij 
dans  le  décret  du  27  juillet  qui  les 
mandait  à  la  barre  de  celle  assemblée 
pour  rendre  compte  de  leur  conduite. 
Ayant,  ainsi  que  ses  collègues,  refusé 
prudemment  d'obéir  à  ce  décret,  il  dut 
s'éloit,ner  et  se  tint  caclié  jusqu'après 
le  9  thermidor.  Lors  de  la  mise  en  ac- 
tivité de  la  conslitullon  de  l'an  111 ,  il 
fut  envoyé  par  son  département  au  con- 
seil des  Cinq-Cents  où  il  se  fit  remar- 
quer par  sa  modération  et  la  sagesse 
de  ses  vues.  Après  le  18  brumaire  ,  il 
fit  partie  du  corps  législatif  qui  Télut 
un  de  ses  secrétaires  ;  et,  lors  de  l'ex- 
piralion  de  son  mandat,  en  1809,  il 
lut  continué  dans  ses  fonctions  qu'il 
remplissait  encore  à  la  restauration. 
Nommé,  en  1804,  juge  au  tribunal  de 
1^^  instance  de  la  Seine,  il  en  fut  fait  vi- 
ce-président en  1814;  passa  en  1829 
conseiller  à  la  cour  royale  de  Paris , 
et  mourut  au  mois  de  mal  183G. 
W— s. 
JAXSSEXBOY  ou  JA\S- 
SEXS,  en  hùn  Janscnius ,  est  le 
nom  de  cinq  frères  qui  se  distinguèrent 
dans  le  même  ordre  religieux.  Ziriczée, 
petite  ville  de  l'ile  de  Schowen  (Zé- 
lande)  fut  leur  patrie.  Cette  ville 
ayant  été  reprise  par  les  Hollandais 
sur  les  Espagnols  ,  qui  s'en  étaient 
emparés  en  1575,  la  famille  Jans- 
senbov ,  ainsi  que  d'autres,  clieriha 
un  asile  plus  favorable  à  l'exercice  de 
la  religion  catholique,  à  la  propaga- 
tion tt  à  la  défense  de  laquelle  se 
consacrèrent  les  personnages  dont  nous 
allons  parler.  —  Nicolos  Jansskn- 
itOY  naquit  dans  la  seconde  moitié 
du  XVr  siècle  et  prit  l'habit  des 
dominicains  à  Anvers.  Aux  éludes  or- 
dinaires il  avait  ajouté  celle  des  lan- 
gues orientales  et  du  grec,  parce  qu'il 
était  persuadé  que  cette  connaissance 
lui  serait  utile  dans  les  discussions  avec 
les  miuislrcs  de  la  nouvelle  secte  qui 


comnieni^ait  à  devenir  nombreuse.  D'a- 
bord régent,  puis  supérieur  du  collège 
de  Lière,  dans  le  Brabanl,  il  forma  ses 
élèves  aux  lettres  et  les  fortifia  sur  le  dog- 
me, pour  les  mettre  en  état  de  ne  pas 
craindre  les  vaines  subtilités  des  minis- 
tres protestants.  Professeur  de  théologie 
à  Louvain,  il  prit  ses  degrés  dans  l'uni- 
versité de  celte  ville.  Ce  fut  là  aussi 
qu'il  publia  ses  premiers  ouvrages,  ce 
qui  ne  l'enipécha  pas  de  travailler  avec 
zèle  à  la  conversion  des  hérétiques  et 
de  s'opposer  de  toutes  ses  forces  aux 
progrès  de  l'erreur.  Le  succès  de  ses 
travaux  dans  les  Pays-Bas  porta  le 
nonce  apostolique  (  Jean  -  François 
Conti)  à  l'envoyer,  avec  le  P.  Jacques 
de  I>ro\ver  ,  dans  le  Danemark,  pour 
essayer  de  ramener  les  luthériens  au 
sein  de  l'église.  Après  avoir  parcouru 
avec  un  zèle  prudent  et  généreux  le 
Uolstcin,  la  >iorvège,  cl  quelques  au- 
tres provinces  du  Nord,  il  alla  à  Uome 
rendre  compte  à  Grégoire  XV  et  à  la 
congrégation  de  la  propagande  de  tout 
ce  (ju'il  avait  fait  dans  ces  contrées 
et  proposer  les  moyens  qu'il  jugeait 
convenables.  Ses  vues  furent  goûtées, 
et  muni  de  nouvelles  instructions,  de 
nouveaux  pouvoirs,  il  partit  pour  les 
mêmes  provinces  en  1G23.  La  con- 
grégation des  cardinaux  voulut  qu'il  y 
fût  accompagné  de  deux  de  ses  frères, 
Corneille  et  Dominique.  Frédéric  III, 
roi  de  Danemark,  leur  permit  de  prê- 
cher la  religion  catholique  dans  tous 
ses  états.  Les  zélés  missionnaires  su- 
rent profiter  de  cette  liberté,  et  Nico- 
las Jansscnboy  ne  se  laissa  déconcer- 
ter par  aucune  des  entraves  et  des 
persécutions  dont  ne  purent  le  ga- 
rantir* ni  la  protection  du  roi  ,  ni  la 
conversion  de  plusieurs  sectaires.  Il 
obtint  de  Frédéric  le  libre  exercice 
de  la  religion  catholique  à  Frédé- 
rjkstad,  ville  nouvellement  bâtie  par 
ce  prince  dans  le  Ilolstein.  Ln  consé- 
quence des  Lettres  que  donna  Frédé- 


JAN 


JAÎ1 


8S 


rie  III  tn  1G*i.'>,  plusieurs  famille 
àkpenéti  dans  If7>  l'ro\inccs-I  nie!»  >e 
réfugièrent  dans  la  nouvelle  %ilie,  pour 
y  exercer  leur  relipon.  Noire  fervent 
religieux  v  établit  une  paroi»se  el  fut 
le  |Memiri  .      '         '  •  -  lU  nais- 

«anl.  I^s  ut    p:\4 

i-3  ilu  irlour  à  la 
^1  la  \if;ibiife  ilu 
piMiir  lr>  niijiriiijit  d'éclater,  ils  l.i- 
cliairnt  de  se  drdnmmaper  par  queltpie 
autre  voie  ;  et,  n'osant  plus  atiaquer  le 
pasteur,  ds  e»<va>èreul  de  séduire  adroi- 
tement au  moins  unepaitie  du  trou- 
peau, en  répandant  un  écrit  récemment 
composé  par  Jean  Muller,  ministre 
à  Hambourg,  sous  c<^itre:  .Icrrtis- 
srrnnit  ntrrssm'rf.  Nicolas  Jansen- 
bov  motirul  le  21  nov.  ItiilV.  l'arini 
Cfux  qui  l'ont  fait  connaître,  on  doit 
ciler  Jran-Adolp**e,  auteur  des  .-In- 
nulfs  des  évéques  de  Sles\ick,  qui  en 
fait  le  plus  grand  elo^e.  Il  a  laissé: 
I.  Pu.it'^yritfur  de  saint  l  humas 
(FA  (juin,  I. ou  vain,  1021,  m-8".  II. 
/  ie  de  saint  Duniinitjuc,  Anxeis, 
1622,  i  n  - 8" .  III.  -  //i imadi'rrsio- 
nés  et  schulîa  in  apolugiam  niq)rr 
éditant  de  vita  et  nwrir  Jtnjnnis 
DunsS(oti,adi,'ersus  II.  P.  F.  .lira- 
Juimiun  HuAÙum.  urd.  Prit  die.  Jk 
T.  M.  rt  List,  ertirs.  srn'fttureni,  Co- 
logne, 1G22.  IV.  Defemio  Jidci  ra- 
iholicœ  et  a/tostuliiit  rvnianœ  uppo- 
sita  admonitioni  necessnriiz  Jo^innis 
Mullfri,lutherani  prceditantisllam- 
fmrgensis,  .\nvers  ,  IGiJl  ,  in-H". 
C'est  la  rcfulalion  de  V.ti'rrtissemrnt 
nécessaire  que  nous  avons  mentionné 
ci-dessus.  V.  Bénéficia  FF.  Pnzdi- 
caturibus  a  dixui  i^ir^ine  rollaîa  , 
Anvers,  1632,  in-t2.  Nicolas  Jans- 
senboy  publia  aussi  une  traduction  en 
latin  de  V  Instruction  des  prêt  ers.  de 
Molina  ,  cliai  Ireux  espagnol.  (^)ucl(|iies 
personnes  attribuent  celle  IraJuriion 
au  P.  Raymond  de  Ladesou,  mais  il  pa- 
rait que  c'est  à  tort,  et  la  iS oui'fi/e  Ai- 


fdiothèque  r^fHi^nole  (tom.  1*^,  pag 
114  la  donne  formellement  au  V. 
Janssenboy,  disant  qu'il  la  traduisit  sur 
la  septième  édition  f>pa;;nole,  et  la  pu- 
blia a  C^lo:înf ,  i  An\eis,  etc.  Nie  nias 
.Il         '     .  a  aussi  donne  une  Iraduc- 

I  tli  s  lias  de  cun science  de 
l'icru*  i.cdrsraa,  dominiraiii.  K.nfin, 
on  conservait  jadis  maiiuscnte  au  cou- 
rent des  dominicains  d'.\nxers  une 
apologétique  qu'il  avait  faite  des  note^ 
et  scbolies  indiquées  ci-dessui  ,  sous 
le  n"  III.  —  llurneille  Ja!««s$»  MioY  , 
après  avoir  fait  ses  études  à  Kouxain.se 
rendit  en  Italie  «ers  le  roromencemrnl 
du  Wir  siècle.  Il  avait  pris  l'babit 
des  dominicains  au  courent  de  Kois- 
le-I)uc,  lorsque  cette  sille  était  encore 
sous  la  doiiiiiialion  du  roi  d'Kspagne. 
Ouoique  étranger  dans  la  Péninsule,  il 
se  mit  bientôt  en  état  d'exercer  le  mi- 
nistère de  la  parole  dans  les  villes  dr 
Ix)mbardie,  et  il  enseigna  dans  les  éco- 
lo de  llologne.  Ij  Propagande  ,  in- 
struite de  .va  capacité  el  de  la  \i\acilé 
de  *a  foi,  le  fil  partir,  eu  1623,  pour 
les  provinces  du  Nord,  où  il  arriva  ai ec 
son  frère  Nicolas,  et  ce  que  l'un  faisait 
dans  le  llolstein  poui  le  rétablissement 
ou  l'accroissement  du  catholicisme  , 
l'autre  tachait  de  le  faire  dans  la  liasse- 
Saxe.  Les  tra\aux,  les  dangers  mêmes 
pour  sa  vie,  ne  purent  ralentir  le  zèle 
de  Corneille  Janssenboy  ,  qui  ne  fut 
pas  toujours  couronné  du  succès  qu'il 
méritait.  Ses  supérieurs  l'ayant  rap- 
pelé en  Flandre  ,  il  s'arrêta  quel- 
que temps  à  Moniclendam,  petite  yille 
àfs  Pays- lias  ,  où  il  eiil  quciijUC' 
consolalion'i  et  beaucoup  d'épreu- 
ves. S'eJ.int  embarque  pour  aller  à 
Home  instruire  le  Saint-Sicge  lie  l'é- 
tat de  la  religion  dans  les  Provinces- 
t^iiies,  une  tempête  siolente  assaillit 
If  bâtiment  qu'il  montait,  cl  il  périt  le 

I I  octobre  1637.  lu  de  sts  frères,  Ici 
passagers  cl  tout  l'cijuipage  furent  avec 
lui  la  proie  des  liol.<;.  Pendant   le  se- 


te 


lAN 


jour  que  Corneille  Jan&senboy  fil  en 
Hollande,  il  écrivit  plusieurs  ouvrages 
de  piete  ou  d  histoire  qui  n  ont  ete  im- 
primés qu'après  sa  mort.  Jean  Muller 
avait  répliqué  à  la  réponse  de  ISicolas 
Janssenboy  dont  nous  avons  parlé  au 
commencement  de  cet  article  ;  comme 
Nicolas  était  mort,  son  frère  Corneille 
crut  que  c'était  à  lui  de  venger  la  mé- 
moire de  Tauteur  outragée  par  le  mi- 
nistre luthérien  ;  il  fit  donc  l'apologie 
de  l'ouvrage  intitulé:  Défense  de  la 
foi catholifjue,  eih  publia  en  1635. 
— Dominique  Janssenboy,  troisième 
frère,  avait  aussi  pris  l'habit  des  do- 
minicains au  couvent  de  Bois-le-Duc; 
et,  envoyé  par  le  Saint-Siège  dans  les 
provinces  du  Nord,  il  poussa  plus  loin 
que  les  deux  précédents  ses  jours  et 
ses  travaux.  La  ville  de  Hambourg  fut 
le  théâtre  de  ses  combats  et  de  ses 
disputes  avec  les  docteurs  delà  réforme. 
Ce  fut  en  1623  qu'il  arriva  comme 
prédicateur  et  pasteur  apostolique  dans 
cette  ville  où  il  eut  à  souffrir  beaucoup, 
mais  où  il  eut  aussi  le  bonheur  de  ra- 
mener plusieurs  apostats  au  sein  de  l'é- 
glise. Le  plus  ardent  de  ses  ennemis 
fut  encore  Jean  Muller,  qui  publia 
contre  lui  un  libelle,  et  fit  tant  que  le 
sénat  ordonna  au  P.  Dominique  de 
sortir  de  la  ville,  sous  deux  jours.  Cet 
ordre  néanmoins  fut  révoqué  avant  son 
exécution;  mais,  en  163i',  notre  reli- 
gieux fut  contraint  d'aller  ailleurs,  et 
se  retira  d'abord  à  Cologne ,  d'où , 
après  un  fructueux  apostolat,  il  crut 
devoir  entrer  au  monastère  d'Anvers. 
Vers  16  4-3  ses  supérieurs  l'envoyèrent 
à  Amsterdam,  où  il  mourut  le  14  mars 
1647.  Pendant  son  séjour  à  Colo- 
gne ,  il  avait  publié  quelques  ouvra- 
ges en  latin  et  en  allemand  pour  expli- 
quer les  pratiques  de  l'église  romaine 
attaquées  par  les  luthériens,  et  montrer 
que  la  doctrine  de  ceux-ci  n'était  pas 
moins  o{  posée  k  l'Ecriture-sainte  qu'à 
toute  la  tradition.  A  Anvers  il  fit  im- 


JAW 

primer,  en  1643,  une  traduction  fla- 
mande de  l'ouvrage  italien  sur  les  mi- 
racles qui  s'opéraient  tous  les  jours 
devant  l'image  de  saint  Dominique, 
dans  l'église  deSoriano.  Son  but  était 
d'opposer  ce  témoignage  public  aux 
impiétés  des  nouveaux  iconoclastes.— 
ico/ia/Y/ Janssenboy,  frère  des  précé- 
dents, avait  fait  profession  dans  le  cou- 
vent des  dominicains  de  Bois-le-Duc. 
Il  était  dans  cette  ville  quand  elle  fut 
assiégée  et  prise  par  les  Hollandais  sous 
la  conduite  du  prince  d'Orange  (1 629). 
Les  conditions  de  la  capitulation  furent 
que  tous  les  ecclésiastiques  et  religieux 
sortiraient  de  la  ville  à  la  suite  de  leur 
évéque,  MichelT)pnovius,  dont  le  P. 
Touron  a  donné  Thistoire.  Mais  Léo- 
nard Janssenboy  ne  tarda  pas  à  y  ren- 
trer par  ordre  de  ses  supérieurs,  qui 
confiaient  cette  mission  à  sa  haute  pru- 
dence, en  lui  permettant  de  porter 
l'habit  séculier.  Il  y  exerça  ce  fructueux 
et  obscur  ministère  pendant  trente- 
quatre  ans,  et  y  termina  sa  carrière  le 
21  février  1663.  Dans  ses  moments 
de  loisir,  le  fervent  missionnaire  com- 
po.ftit  de  petits  ouvrages  de  dévo- 
tion. Ses  cantiques  spirituels,  écrits 
en  flamand,  furent  imprimés  à  Anvers 
^fi  1635.  Il  a  aussi  donné  une  histoire 
abrégée  de  quelques  saints  personna- 
ges de  l'ordre  des  dominicains,  qui 
fut  imprimée  en  1644.  —  Ambroise 
Janssenboy,  cinquième  frère  des  pré- 
cédents ,  entra  aussi  dans  l'ordre  de 
Saint-Dominique  et  s'y  distingua  éga- 
lement par  son  zèle  et  sa  piété;  mais 
sa  vie  est  moins  connue,  et  il  ne  pa- 
raît pas  qu'il  ait  écrit.  Il  se  rendait 
en  Italie  avec  son  frère  Corneille  , 
lorsqu'il  périt  sur  mer,  avec  lui  et 
tout  l'équipage,  le  11  oct.  1637.  On 
peut  consulter  sur  ces  religieux  célèbres 
les  œuvres  du  P.  Echard,  du  P.  Tou- 
ron, et  le  Dictionnaire  de  Richard  , 
tous  auteurs  de  Perdre  des  Domini- 
cains. B — D — E. 


JAN 

JA\SSK\S   (Jaîi-NN  lUvnsK 

^éu^r^l    liuliatiibu  ,    or    \r   X'À   oct. 
I76i  à  Niiur^iue  ,  ou  son  ji«re  ,   of- 
fiper  au  rr^iuiciil   J'.ViUa,  clait  en 
f^arniHin  ,   cnlia,   a   i'^-^r   de   quiuxc 
«a»,  couime  cadcl  ilaus   re  mciae  ré- 
pBcnt ,  ou  il  (loml  bienlùl  oUicicr. 
A)aut  montré  du  dooueroent  au  parti 
oran^isle  ,    il  fui   rtcom\ycuu  par   le 
gra<k    (le    capitaine    Jau>    le    rr^i- 
OMOl  de  NN'arirnJcbcti,  et  6t  la  cam- 
pagne   de    ITDit    coiiire    Ir»    bran- 
cà\*.  ((richement  blessé  le  15  septem- 
bre  devant    Meuia  ,    il  continua    de 
scnir    l'année    >ui\ante  ,    même    en 
179Ô,  nial;;rc    les  rlian;;rmenls   poli- 
tiques qui    t'opcrrrent   en     Hollande 
et  renverseren*  le  slalliouderat    loule- 
fui  $es  l)le»5ure*  rol(  (;uerie5  le  forcè- 
rent de  demander  m  retraite,  qu'il  ob- 
tint A>ec  une  pension  :  il  a\ait  à  peine 
trente-trois  au»;  mait  «es  talents,  qu'il 
n'atail   encore   déploies  que    sur  un 
théâtre  bien  circonvcrit  ,  ne   devaient 
pas  rester  inutile»  pour  U  patne,  et 
J^nssens  était  destine  a  fournir  encore 
une    longue   carrière  d'activité.    Km- 
plové,  .vous  les  au>pices  du  nouveau 
gouverneroeut  balave,  dans  l'adiuinis- 
tratton  des  troupes  françaises  a  la  solde 
de  U    Hollande,    il    fut    promu,  en 
mars  17^J7,  aui  fonctions  de  coramis- 
uirc -général    de    cette     administra- 
tioo  ,  et  pendant  cinq  ans   qu'il   le« 
exerça  ,    il  fut   à  diTerses  reprise  en- 
toéà  l'aris,  aGn  de  prévenir  des  chan- 
f^emcnt»  vexaloircs  et  onéreux  que   le 
gouvernement   français  prétendait  ap- 
porter aux  stipulations   arrêtées  entre 
ces  deux  elals  pour  Tenlrçlien  des  trou- 
pes. Il  s'acquitta  de  cr.  missions  avec 
autant  «^intelligence  que   de  probité. 
On  avait  misa  sa  du*posi«ion  des  som- 
mes   considérables   dont  il  n'était  pas 
obligé  de  rendre  compte  :  son  gouver- 
nement le  Ml  avec  surprise  les  remettre 
à  son  retour,  sans  retenir  autre  cliose 
que  ses  frais  de  voyage  calculés  avec  la 


JAIS  87 

plus  stricie  économie.  En  1802  ,  ton 
adffl  iioiration  avant  élc  supprimée,  il 
fut  ii'iriime  ^^••l>e!^eu^  et  ^éucial  en 
cbei  ilr  L  culoiiir  du  (lap  de  Uotee- 
K>|ieijiice.  Aium:.>i  (),ir  .ipieenreau 
rliel-lieu  de  cri  rtjltli    riiicnl  ce^sa  do 

fiarailre  indispenvable  ,  il  alla  visiter 
'intérieur  des  terres,  pénétra  jusqnS 
dant  U  Cafrerie,  et  conclut  un  traité 
avec  un  roi  ou  clief  nommé  (îaVka.  U 
aurait  pénétré  plu?^  loin  et  recueilli  une 
plus  ample  moiMon  de  connaiN^ancet 
Mir  l'intérieur  de  cette  partie  de  l'Afri* 
nac.  si  la  rupture  de  la  paix  avec  11 
Ctrande  llretj::T)r  ne  l'ar.-t-t  rappelé  aa 
Cap  dont  Ir     '  .  rut  la  con- 

quête. \  I  j^  .  er,  le»  co- 

lons,oubliant  leur  divisions, 

secondèrent  avec  t._^  -  .  icnt  les  dis- 
positions lie  défense  prises  par  letir  goa 
verneur.  Janstens  ne  désespérait  point 
d«  mettre  la  colonie  à  l'abri  de  toute 
atteinte,  lor>qtt'il  reçut  de  son  gouver- 
nement l'ordie  de  diriger  la  meilleure 
partie  de  ses  troupes  europécDoes  sur 
batavia.    Cet   ordre  ,  néCMté  par  la 

fdns  grande  imnoi  lance  de  Batavia  re- 
ativement  au  Cap  ,  ne  pouvait  avoir 
d'autre  re»ultat  que  la  reddition  de 
cette  dernière  colonie,  des  que  Iw  An- 
glais s'y  présenteraient  en  force.  Aussi 
le  débarquement  de  dix  mille  des  leurs, 
sous  les  ordres  du  général  Baird,  dans 
les  premiers  )oui»  de  janvier  1806, 
rendit  impuissants  tous  les  efforts  da 
gouverneur  Janssens  qui  n'avait  plus 
sous  s«  ordres  que  din-neuf  cents  hom- 
mes, presque  tous  colons  et  Hotten- 
tots.  il  es>ava  néanmoins  de  resi>ter  ; 
mais  trahi  par  un  bataillon  étran;:ei 
qui  faisait  partie  de  son  corps,  et  qui 
lâcha  pied  au  commencement  de  I  at- 
taque laite  le  8  janvier  par  les  Anj^lais, 
Xan:»6eii5  obtint  du  moins  une  capitu- 
lation honorable.  11  fut  stipulé  que  les 
braves  restes  ûdcles  au  gouverneur  hol- 
bndais  .seraient  transportés  dans  leur 
patrie  avec  leur  chef,  et  qu'Us  ne  se- 


88 


JAN 


JAN 


raient  pas  considérés  comme  prison- 
niers. Il  demeura  encore  quelques  se- 
maines au  Cap  avant  de  s'embarquer, 
et  trouva  l'approbation  de  sa  conduite 
dans  les  témoignages  uuaniyies  de  res- 
pect et  de  regrets  que  lui  donnèrent  les 
habitants  de  la  colonie,  sur  laquelle  il 
n'exerçait  plus  aucune  autorité.  De  re- 
tour en  Hollande,  il  fut  accueilli  de  la 
manière  la  plus  flatteuse  par  son  nou- 
veau souverain  Louis-Napoléon  ,  qui , 
comme  on  sait ,  s'était  fait  Hollan- 
dais, et  manifestait  à  ses  nouveaux  su- 
jets la  préférence  la  plus  marquée  sur 
les  Français.  Janssens  se  fit  d'ailleur§ 
un  titre  particulier  à  la  bienveillance 
de  ce  prince  qui  s'occupait  très-spécia- 
lement de  sa  cave  ,  en  lui  faisant  hom- 
mage, à  son  débarquement,  d'une  pro- 
vision très-précieuse  de  vins  de  Cons- 
tance et  du  Cap  (l).  Il  fut,  au  mois  de 
juillet  de  cette  même  année,  nommé 
secrétaire-général  du  ministère  de  la 
guerre  avec  le  titre  de  conseiller  d'état. 
11  présida  en  cette  qualité  les  sections  de 
la  guerre  et  de  la  marine,  fut  intendant 
de  l'armée  du  lihin,  directeur-général 
de  l'administration  de  lagucn  e,et  enfin, 
en  1807,  ministre  de  ce  département; 
niais  il  ne  conserva  pas  long-temps  ce 
poste.  L'instabilité  du  roi  Louis  dans 
le  choix  des  hommes  était  égale  à  ses 
bonnes  intentions  ;  et  la  faveur  dont 
Janssens  paraissait  jouir  auprès  delà 
reine  Hortense  détermina  sa  disgrâce. 
Il  conserva  néanmoins  le  grade  de  lieu- 
tenant-général et  le  titre  de  conseiller 
d'état  avec  une  pension  de  8,000  flo- 
rins. Après  avoir  visité  la  Suisse  et 
l'Italie,  il  reparut  à  la  cour  du  roi 
Louis  qui ,  revenu  de  ses  préventions  , 
lui  aurait  confié  le  gouvernement  des 
Indes-Orientales  ,    si    son    abdication 


(i)  On  peut  coiMuIler,  ^iir  les  soins  particu- 
liers que  Louis  Bonaparte  donnait  à  ses  celliers, 
■  es  mifiuoires  intitulés /a  Cour  Je  Hollande  sous 
I»  règne  de  Louis- Napoléon,  par  un  auditeur,  Pa- 
rii,  i833,  r  vol.in-l". 


n'eût  empêché  l'exécution  de  ce-projet. 

Chargé  par  le  gouvernement  provisoire  • 
de  Hollande  d'aller  porter  à  l'empe- 
reur cette  nouvelle,  et  d'apprendre  ses 
intentions  à  l'égard  de  ce  pays,  Jans- 
sens eut  un  entretien  de  plusieurs  heures 
avec  Napoléon  qui ,  après  avoir  écouté 
attentivement  ses  réponses  à  une  foule 
de  questions  qu'il  lui  avait  adressées 
sur  la  situation  intérieure  de  la  Hol- 
lande ,  garda  d'abord  un  long  silence 
qui  laissait  le  général  Janssens  dans 
une  pénible  incertitude,  puis  finit  par 
rédiger  lui-même  le  décret  qui  réunit  la 
Hollande  à  l'empire  fiançais  (9  juillet 
1810).  Dès  celte  époque  l'empereur 
ne  cessa  de  témoigner  son  estime  à 
l'ancien  ministre  de  son  frère;  il  le  fit 
d'abord  porter  surle  tableau  des  lieu- 
tenants-généraux en  activité,  et  le  nom- 
ma gouverneur-général  des  anciens 
établissements  de  la  Hollande  dans  les 
Indes-Orientales  ,  en  remplacement  du 
général  Daendcls  (  Koj.  ce  nom  , 
LXII  ,10).  A  son  arrivée  à  Bata- 
via ,  après  une  traversée  de  près  de 
quatre  mois  (1811),  Janssens  trouva 
une  armée  d'une  force  nominale  as- 
sez considérable,  mais  où  l'oii  ne  comp- 
tait qu'un  petit  nombre  d'Européens, 
la  plupart  invalides  ;  le  reste  se  com- 
posait de  nouvelles  levées  javanai- 
ses, mal  disciplinées  et  mal  comman- 
dées. La  désertion  et  les  maladies 
(une  épidémie  régnait  alors  à  Batavia  ) 
achevaient  de  rendre  les  moyens  de 
défense  insuffisants  en  cas  d'attaque 
des  Anglais  ;  enfin,  de  trois  mille  sol- 
dats aguerris  que  l'empereur  avait  l'in- 
tention d'envoyer  dans  la  colonie  , 
troi .  cents  seulement  parvinrent  à  celte 
destination.  Ainsi  Janssens  élait  pour 
la  seconde  fois  condamné  ,  malgré  son 
dévouement  et  sa  capacité,  à  céder  de- 
vant la  supériorité  numérique  des  An- 
glais. Ce  fut  au  mois  de  septembre 
1811  qu'ils  parurent  devant  Batavia. 
Lord  Minto,  gouverneur-général  des 


jAn 


JAW 


)Bs  an<;biNrs   (lan>  Ira  Indrv  , 
i|»a{;njil  cti  pcr^minf  rcilf  «!>«•- 
Alion.   La  ré^i^tanrr  tic  Jatis>rii%   fut 
Msti  brillanle  que  maDirtirrusr.  I,or»- 
qof ,  dam  la  journrc  du  '26  »q)trml*re, 
il  se  «il  iraprlucu»riiiriit    attaqué  dans 
Ms  rftranrlirn)rnt>  ,  une   forte  e\plo- 
aion  M  fit  eiitriidre.  C^ait    une  re- 
dovle  que  le  major  Muller  avait  juré 
|j  veille  ,  en  quittant  son  <;enéral  ,  de 
faire  |i!utÀt  vauler  en  l'air  arer  lui  et 
toute  »a  troupe,    que  de  la   rendie  à 
Tennemi  :  il  Imt  parole  et    trouva  une 
mort  i^lorir-ise  >(mi%  1rs  drlu:^  de  celte 
redoute,  »jiii  en*e\elit  a  la  foiN  vf*  braves 
coropa;;iH)ns  d'armer  et  le^  a«< ailiaiit». 
Tanl  d  heriiÏMnr  fut  inutile;  le*  Java- 
nais ,   frappa  d'une  terreur  panique  , 
prirent  la  fuite  de  toutes  parts.  Jairv- 
sens  ,   obli<;é  d'ordonner   la  retraite  , 
faillit  être  tué  par  un  détachement   de 
raralerie  an;;lai>e  ;  il  ne  dut  la  vie  qu]à 
la  gcnéroMte   du  commandant  ennemi 
qui  ,   n'aspirant   qu'a    le  faire  pM^on- 
nier,  le   protégea   contre  scn  troupes, 
irritées  de   la  rf*>istancc  des   llollau- 
dais.  Fanenuà  Buitonzor^,  aprrs  avoir 
incendié   sur    sa   route   des   roa^.i<ins 
d'epicene,  J.in>sens    refusa  la  capitu- 
lation qui  lui  lut  olfcrte  par  lord  Minlo. 
Comme  il  ne  pouvait    tenir  dans  cette 
position  avec   le   peu  de  troupes  qu'il 
conservait  encore,  il  se  porta  sur  Sa- 
maran;;,  où  il  reçut  dt<.  princes  indiens 
quelques  renforts  qui  l'altandonnèrent 
à  la  première  attaque.  Ne  se  trouvant 
entouré   que  d'un  petit  nombre  d'ufB* 
ciers,  il  fut  oblijjé  de  capiîult'r  avec  l'en- 
nemi qui  alors  lui  imposa  de  dures  con- 
ditions. 11  f;ii  transporté  comme  prison- 
nier en   .Kn^lclerre  avec  son  état-ma- 
jor, tandis  que  ses  autre,  oftîciers  fu- 
rent reléj;uesau  Uen;;ale.   Au  mois  de 
novembre  181-2,  il  lui  fut  permis  de 
se  reiKÎrc  ni  France,  sur  sa  parole  de 
ne  point  suvir  contre  la  (irande-Iire- 
tagne  qa'il  ne  fût  échanp;é.   Kn  arri- 
vant à  Paris,  il  demanda  que  sa  con- 


doile  fût  )u{;ée  par  un  conieil  de  (guerre. 
•«  J'ai  moi-mcme  rx.iminé  votre  af 
«  faire,  lui  dit  \apolroii  ;  je  vous  ai 
••  justifié  coropleti-mrnt  ,  et  je  vais 
•'  \ou^  rmplo>er  a  l'intérieur.  »*  lui 
effet,  il  fat  nommé  au  commandrinent 
de  la  '.W^  division  militaire,  dont  le 
cbef-liru  était  à  (ironin{;ae;  il  fut  en 
cotre  indemnisé  de  ses  pertes]  et  créé 
baron  d'empire.  1^  «^éfféral  Jans^en^  ^e 
signala  par  la  sa.'e>»e  avec  laquelle  il 
reprima,  v'  '  "     i 

siiirerlion  '  ' 

Kri^e;  il  ;  ne  fonire  le  ic-- 

sentiment  .  l  .  lis  le  comte  de 
nmtinrl  Hoon  ,  qui  était  tombe  dan» 
leurs  mains  à  la  suite  du  soulèvement 
de  ses  anciens  vas  aux.  Des  frégates 
anglaises  avant  paru  devant  Ham- 
bourg, Janssens,  qui  prévoyait  la  pos- 
sibilité qu'un  ordre  lui  enjoi;;nit  d'agir 
contre  ce»  forces,  rajipelaau  pouverne- 
menl  français  qu'il  n'était  pas  encoir 
échangé  ,  et  que  par  con<e.)ueiil  l'Iinn- 
neur  s'oppONail  à  ce  qu'il  fut  emplo\p 
de  ce  ciite.  l.'einpeieur  app:i)ii^a  re 
scrupule  ,  et  fit  passer  sur  le  rluinip 
l'honorable  général  a  b  *i*  dniMoii 
militaire,  à  Mézeres.  C'est  la  qu'il  re- 
çut enfin  l'acte  de  son  échange  au  mois 
de  février  181 J.  L'année  suivante,  au 
mois  de  mars,  sur  l'ordre  qu'il  en  avait 
reçu,  il  ne  laissa  dans  les  places- fortes 
de  sa  division  que  le  tier.s  des  trrîupes  , 
et  vint  avec  le  reste  ,  qui  se  montait  à 
six  mille  hommes,  joindre  l'empereur 
à  Heims.  Napoléon  voulut  alors  lui 
donner  le  commandement  d'une  divi- 
sion d'infanterie  sous  les  ordres  du 
marerhal  Nev;  mais  Janssens  alle;;ua 
son  peu  d'c\périenc#poiir  faire  mou- 
voir de  r;randcs  mas>es  devant  des  en 
nemis  si  nombreux.  CjC  refus  tnoJcste 
TIC  parut  point  déplaire  ;  et  l'enipcieur 
voulait  le  renvover  à  >Iozières  avec  des 
pouvoirs  trcs-elcndus.  'Nouveau  refu.s 
du  général,  qui  objecta  que,  dans  celte 
position,  il  aurait  sans  doute  les  Hol- 


9^ 


JAN 


landais  à  combattre,  et  qu'il  ne  pourrait 
s'y  résoudre  :  alors  l'empereur  lui  dit 
d'aller  attendre  à  Pans  que  les  cir- 
constances changeassent.  Il  y  resta 
jusqu'à  l'entrée  i\eS'  alliés ,  en  conser- 
vant toujours  SCS  appoinleujents ,  et 
donna  ensuite  sa  démission  du  ser\ice 
de  France.  Rentré  dans  sa  patrie  en 
avril  1814,  il  offrit  ses  sersices  au  roi 
des  Pays  lias.  Ce  prince,  oubliant  que 
Janssens  avait  scr\i  le  parti  opposé  au 
sien,  p(tur  ne  se  rappeler  que  les  blessu- 
res qu'il  avait  reçues  en  1793  en  com- 
battant sous  ses  ordres ,  lui  conserva 
le  njrade  de  lieutenant-général  et  le 
chargea  de  coopérer  à  l'oroanisalion  de 
l'armée  du  nouveau  royaume  des  Pays- 
Bas.  Janssens  y  fut  ensuite  chargé  de 
l'administration  de  la  guerre ,  avec  le 

titre  de  commissaire-général  et  le  rana 
j  ,    .      j,  "^    .  ,  " 

de  secrétaire  d  ciat  ;  mais,  sur  sa  de- 
mande réitérée,  le  roi  accepta  sa  démis- 
sion de  cette  place  ;  et  depuis  lors  ce  gé- 
néral a  vécu  dans  la  retraite.  11  est  mort 
le  1^*^  juin  1S35,  laissant  peu  de  for- 
tune à  sa  famille ,  mais  la  réputation 
la  plus  honorable.  11  avait  à  (les  épo- 
ques antérieures  été  successivement 
nommé  commandant  et  grand'croix 
des  ordres  de  l'Union  et  de  la  Réu- 
nion ,  officier ,  puis  commandant  et 
grand -officier  de  la  Légion -d'Hon- 
neur, grade  dans  lequel  il  fut  confirmé 
par  Louis  XVI II  ;  enfin  le  roi  des 
Pays-Ras  le  créa  grand'croix  et  chan- 
celier de  l'ordre  militaire  de  Guillau- 
me ,  et  lui  conféra  le  titre  d'écuyer 
pour  lui  et  ses  descendants.  D — r — r. 
JAWIKU  (Antide),  célèbre 
horloger,  né  à  Saint-Claude,  le  1*^^ 
juillet  17.j1,  étai#fiis  d'un  simple  la- 
boureur qui  s'était  fait  de  lui-même 
horloger  et  qui  contribua  beaucoup  à 
étendre  cette  branche  d'industrie  dans 
les  montagnes  du  Jura.  Son  père, 
dont  il  a  parlé  plusieurs  fois  avec  en- 
thousia^rae  dans  ses  ouvrages,  lui  don- 
na les  premières  notions  de  la  raécani- 


JAN 

que.  Il  eut  ensuite  pour  maître  l'abbé 
Tour  nier  {J'^oy.  ce  nom,  XL\  ï,  375), 
qui  lui  enseigna  les  éléments  du  calcul 
des  rouages  par  une  méthode  dont  il 
était  l'inventeur.  Doué  d'une  mémoire 
prodigieuse,  en  quittant  cet  homme  ex- 
traordinaire Janvier  écrivait  ses  leçons, 
qu'il  a  publiées  textuellement  bien  long- 
temps api  es  dans  la  deuxième  édition  du 
liecueû  de  ses  machines.  L'éclipsé 
du  l^"^  avril  176^  lui  inspira  un  goût 
irrésistiblepour  l'astronomie  ;  et,  avant 
sa  quinzième  année,  il  avait  exécuté, 
d'a^^rès  le  système  de  l'abbé  ïournier  , 
une  sphère  mouvante  qui  reproduisait 
toutes  les  révolutions  des  corps  célestes. 
Il  présenta  cette  ingénieuse  machine, 
en  1768,  à  l'académie  de  Besançon, 
dont  les  éloges  fixèrent  l'attention  publi- 
que sur  le  jeune  artiste.  Les  magistrats 
de  celte  ville  l'accueillirent  surtoutavec 
une  distinction  inusitée,  et  pour  l'enga- 
ger à  s'y  fixer  lui  accordèrent  des  let- 
tres de  citoyen  qui  lui  furent  expédiées 
au  nom  de  son  père  (1),  parce  qu'il 
n'avait  pas  lui-même  l'âge  nécessaire 
pour  qu'elles  pussent  l'être  au  sien. 
Après  avoir  passé  à  Besançon  quelques 
années  qui  furent  sinon  les  plus  heu- 
reuses, du  moins  les  plus  calmes  de  sa 
vie,  il  se  rendit  à  Paris,  pour  s'y  per- 
fectionner par  la  fréquentation  des  ar- 
tistes et  des  savants  ;  11  s'y  lia  particu- 
lièrement avec  Ferdinand  Bertlioud  et 
Lalande  dont  les  ouvrages  avaient  recti- 
fié ses  premières  idées  (2),  et  en  reçut 
de  sages  conseils  qu'il  sut  mettre  à  pro- 
fit. Fn  1771  ,  il  avait  construit  un 
grand  planétaire  de  trois  pieds  de  dia- 
mètre, représentant  les  inégalités  des 
planètes,  leurs  excentricités,  la  rétro- 
gradation des  points  équinoxiaux,  avec 
des  rouages  en  racine  de  buis.  Il  per- 

(i)  Claid-'I-Jimnc  Janvier. 

(ï  )  «  L' Eisai  dr  l''iT«l.  lierlhoud  et  Y  Astronomie 
ôf  Lal.iiidc  filleul  les  preiniers  livr<stjni  r«-c - 
lifit^rcnt  iiics  idcos  <  r/oiu-es  et  .Tchrvirtnt  dr 
développer  les  g-rnies  d'un  talent  dont  les  pro- 
ductions sont  uiijoiiifi'hui  la  proie  de  la  ciipi- 
dite.»  {Dts  réfoluiions  dtt  torpt  céU$Ui,  p.  3ti.) 


iah 

fetti^nni  H  circula  en  rui>rc  relie 
■achine«  rêtiuile  à  dit  pouces  de  dia- 
■être,  et  eul  riioniieur  de  h  prr>eiilu 
an  roi  l^ui»  W,  au  mois  d'ociobrt 
1773,  a  Koulajuebltau  ^3).  (]cl te  de- 
marche  ii'a\anl  )>:>»  ru  le  rcMillat  quM 
cneif^ail.  il  ne  i.iida  pa»aayiller  Va- 
ut, el  sVljLlit  a  \  erduQ  où  il  M  loana 
•n  f77V.  Il  V  demeura  dia  am , 
tuer^anl  l'eiald  horloger,  mais  au  fond 
l'occupant  rnoin^  de  «ou  rommercc  t|ue 
^  Mt  narliine^  a^lronomtques  et  det 
nojeacde  lei  petfrciionnrr.  Ilie\inlâ 
Paris  en  17k4  ,  apportant  de  petite* 
•phércs  que  Ijilande  ût  arlieler  pour  le 
rei  par  ^1.  de  I^  Ferle,  inirndant  des 
Menas- plaibirs  ;  rt  la  mrite  aiinre  , 
Mr  la  recommandation  de  son  rrirpio- 
lecteur,  il  obtint  le  brevet  d'horloger- 
nécanlnen  du  roi  »\tc  un  lof^emeut  au 
Louvre.  \\u  17N(),  il  rompo^a  une  pe- 
tite hotlot;eà  équation  el  a  remontoir, 
laprrniieiede  celle  e>prce.  Au  moi» 
dcleuior  17^9,  il  prrseiila  a  l'afaile- 
nie  des  sciences  une  fi^randr  horloge  pla- 
nètaiie,  la  plu^  complttequi  eût  encore 
pini;  elle  fut  acquise  par  Louis  \V| 
pour  \in>^t  quatre  millr  francs  et  placée 
dantsa  petite  bibliothèque  a  Versailles. 
C'est  celle  que  l'on  voit  aujourd'hui  au 
palais  des  Tuileries  ^i  .Knl7'Ji,  il  1er- 

(3)  1^  jnHM  Jaa«i«r,  qui  triait  la  t««)r  peur 

la  prr*ni«Te  foi»  ,  rui  l'i""  r,,M,  ^,  .1.-  .(  n^tf 
«•  dnurali  an  «i««t  ma  »■ 

prr»«u(«  <lu  rui.  L«  coar  «na 

pain«  r».r  Ir*  UV'ifrnnrr  j  j  i>.-  ;r  i  arii«(a 
l««iér«ir*  ;  in*it  U  liroiriunt  <!••  |  <•  ic*,  M.  <!• 
Sariiiir»,  |«  fct  a«rr'ir  «ir  quiiirr  l'â<i».  m  lui 
arcor«iaiil  quisM  joan  |>ouf  «i«it*r  Ij  cjpiulr. 

(4|    J*ii»irr,    i{u«   >wn    vrrt  <  t  r  J'Lor  logrf  «rtli- 
•••""•  roi,    con- 

■•'■  '•,  rsvru'a 

»'"'  ,       ,  -    ,-    u»  IU.ur. 

"»"  Jilr-,i,.-iii.  .1-  ,  ,|,,  ,|  J  rut  une 

•**•  ■  l*"  c«dr«a.ifiii  ir|>r\  wMtJil  une 

cati.      .     1 ^  (l'uB<-   |ira|riUou    |iarli<  «livre. 

Crue  m.cliiue  ,  ttrofiiéa  au  UiOit  d'cKl-Ure 
1791. (Ht  por(r«  auK  Toilerie*  f,.^r  Mrf  j.r* 
••aléa  au  n>i  i^ui  .  iJrpMu  Ir  6  -       j 

fai«ait  ta  rr^iilriiic.  Au  jnar    i  ,,, 

hist«NU  avant  qur  I.oaia  Wi  |.  r  %r 

Cr4a«4Ua  rt  dcMia  vuir  U  machiitr     \l .  .|,  Uittr 
roaJuilil   prrs     t.'r  l'artijtr  qui  ,    lui    parljiu 
>••  ••  priaîtèra  foM .  «'MapratM  4«  Ui  «ipli. 


JAN 


9» 


nina  sa  pendule  planétaire  qui  fut  pla- 
cée au  Musée  (liiUioéh.  asirunumia.^ 
pa^i-  \'ÀkJ.  Quoitju'il  fut  partisan  de» 
piiiicipcs  de  b  rt-^uluiion,  Jan\ier  n'y 
prit  aucune  paît  Mis  à  la  trte  d'une 
école  d'horlo^rrie  dont  il  a\ait  solt^té 
la  création,  loais  qu'il  fut  ohli^r  de 
6outrniràse»frait,il  parta;;rason  lempi 
enlic  le«  soins  qu  il  tle\ait  à  se^  elr>es 
dont  pluMrurs  lui  Gient  hoiinnii,  rt 
la  ron»lruclion  ou  le  perffriioiinrinrnt 
des  Machinée  qu'il  imaginait.  Il  dut 
s'occuper  êMei  aes  questions  soulevées 
par  le  nouveau  si  sterne  horaire  proposé 
à  la  (Convention.  Ct  fut  à  la  suite  de 
lon«:nes  discussions  qu'il  eut  à  ce  »u|rt 
a\er  Frrd.  lirrthouil  qa'ili  adoptrrrnt 
en^elllh!e  Irplan  de  1  horloge  publique 
pour  le»  fonimuîies  de  campa;;nr,  que 
Janvier  publia  phi.s  lard.  Kii  IMU),  il 
soumit  au  ju|;rmrnt  de  ITnslitut  une 
|>endiile  à  la(]urlle  ii  ttavaillait  depuis 
plu^  dr  douieaiis,  ou  ila  repré^^enlr  les 
inri;alile>  de  la  lune,  le  c)ian;;rnienl  de 
l'escentricilé  et  le  mouvement  de  l'a- 
pot(ee.  Celte  pendule,  qui  surpasse  de 
beaucoup  tout  re  qui  avait  été  lait  jus- 
qu'alors en  ce  (;enre,  a  été  d«*crile  par 
Lalande    dans   la    (Àmmiissuncr  tirs 


q<irr   >i>n  <>u«r«fr.    la  pr'nrro*  rc 
triit  iiii  ,     |iiiit     ilrinjnjj    roiiiiDrni 


rr«uta  arrc  al- 

|iiiii  ilrinjnj4  roiiiiDrnt  ou  «ovait 
l'b'Mfr.  Jaaiirr  lui  il  «l'altoril  remarquer  la 
nom  tir  la  «rUa  àe  Part  >ur  U  carte. et  ul>««r- 
vrr  «■tiauilp  que  l«>  inrrid  m  tiui  la  travmait 
4»a<en<l*U.  k«r  i'rrbrlle  «ira  lt>ng>ln4M  «Molii- 
Ira,  à  la  ■mala  •clurlla  ■  §«i|i|M>»o««  ,  <iil-il, 
iMjil.>uia  ,  que  ruu»  «eulrt  tonualtre  Itirura 
qu'il  ni   ilaii*  an  aairr  lia  >.  a  Mri(.  par  rvm- 

i,ir     ..   u  '  \     Cr   :rol  .   !a    rr  nr  .  qoî   rt    tl    bii^»«^ 


euf...U    .1   M.    I.:  i..a.   JjiniT 

reale   inlrrdit  ;  m  «e   rappelle    •• 

vo}af«il«  Viril,    .  u  ,  .    U  »•  reiiJrr  ao 

fuj  .iil  Je  Vrrt'illr»,  le  >i  jun»,  tôt -(fr  dont 
la  projal  n'avait  p«  *lra  mi»  i  e»éc«i  on;  rt  il 
ba  d  -ot*  plo*  «lue  la  rcnertii  pri»  T'H  licalioo 
\f«ite  ao  lia.ard  dr  la  Tillr  de  Mctx  |Hiur  une 
aliuxon  luordanlr.  Deoi  ibioule*  «prcf  Louis 
XVI  entrj.  Il  ».t  *»».  pljinr  la  p-ndulc,  ri  »>« 
fct  ripl  quer  le  in«  ra.ii  me  rt  luaac.-.  il  dr«lara 
l«i-iu<  ui<  rii  (j  rr  lac.juuition;  iiiaia  deui  Yi<:\t- 
f^t  ri  '    •cuuice*    que  Durai,  lii'iniBa 

^  (en  1  .  *>"'  aoaoBcar  qua  la  rat 

ne  prtii  •   iâ  paudule,  F—M. 


9^ 


JAN 


temps  Tpoui'WnXll  ;  et  Janvier  a  don- 
né lui-même  les  détails  de  sa  construc- 
tion dans  V Histoire  (Je  la  mesure  du 
iemvs  par  Ikrthoud,  II,  207-41. 
A  l'exposilion  de  1802,  il  présenta 
et^lut  à  son  auteur  la  méd.tilie  d'or. 
Janvier  mit  à  l'exposition  de  1819, 
trois  pendules  que  le  jui  y  déclara  «  re- 
«  marquables  parla  précision  du  tra- 
«  vail  et  par  les  combinaisons  qui  ser- 
«  vent  à  indiquer  les  diNisions  du 
«  temps,  »  et  à  celle  de  1823,  son 
horIo;2,c  à  secondes  et  à  poids  qu'il  re- 
gardait lui-même  comme  le  plus  parfait 
de  ses  ouvrai;es.  II  obtint  dans  ces  deux 
expositions  le  rappel  de  la  médaille  d'or; 
et  dans  la  deniiére  le  jury  termina  son 
rapport  sur  les  machines  de  Janvier  en 
disant  «  que  personne  n'avait  plus 
<f  contribué  à  porter  riiorlojrerie  fran- 
"  raise  à  Télat  de  prospérité  où  elle 
«f  est  parvenue.  }>  Cet  appel  à  la  y^iné- 
rositéduf^ouvernement  ne  fut  point  en- 
tendu. Aucun  ministre  n'eut  la  pensée 
de  venir  au  secours  d'un  artiste  dont 
les  productions  étaient ,  depuis  long- 
temps, comme  il  s'en  plaint  énergique- 
ment,  lu  proie  de  la  cupidité,  et  qui 
s'était  trop  occupé  de  son  art  pour 
avoir  pu  songer  à  la  fortune.  Réduit 
pour  subsister  à  vendre  pièce  à  pièce 
ses  livres,  ses  dessins,  ses  meubles  et 
puis  ses  machines,  il  ne  lui  restait  d'au- 
tre ressource  lorsqu'il  tomba  malade  que 
de  solliciter  une  {«lace  à  l'Hôtel-Dieu. 
11  y  mourut  le  23  .septembre  1835,  à 
l'âge  de  quatre-vingt-quatre  ans  Ci).  Dès 
le  lendemain  les  journaux  annoncèrent 
qu'une  souscription  était  ouverte  pour 
élever  un  monument  à  sa  mémoire  ;  mais 
cet  élan  laidif  en  faveur  d'un  vieillard, 
qu'il  eût  mieux  valu  secourir  pendant  sa 
vie,  n'a  pas  eu  de  suite.  Lu  des  com- 

{■j I  Quelques  jours  uVJiit  ta  inorl,  il  tlm.iit  : 
J'ut  heioin  de  v  vre  encore  Jriii  nui  /j  ntr  ailirver 
tlti  ouvrages  commeneét.  Voilà  <loric  ua  hoiniiie 
d>:  génie  rjui,  faute  de  «ecoiirs,  lai<>.se  ,  coiniiie 
tant  d  autres,  des  oarragcs  iinparr^it  ,  cl  meurt 
darii  la  misère,  après  b«aucou|>  de  peinM  et  d« 
satrUicei.  F — l%. 


JAIS 

patriotes  de  Janvier,  M.  Huguenin , 
jeune  statuaire  dont  on  a  déjà  vu  dés 
Quvrages  à  diverses  expositions,  a  mo- 
delé son  buste.  Précédemment  son 
portrait  avait  été  lithograpliié.  Janvier 
qui,  dès  qu'il  l'avait  pu,  s'était  occupé 
de  compléter  sa  première  éducation, 
avait  des  connaissances  très-variées  ;  il 
se  délassait  de  ses  études  sérieuses  par 
la  culture  des  lettres  ;  et  on  a  de  lui 
quelques  pièces  de  vers  très-agréables. 
Son  compatriote  Gu^étand  (Voy.  ce 
nom,  XIX,  24G),  avec  lequel  il  avait 
ététrès-lié  dans  sa  jeunesse,  lui  a  adressé 
une  épitre  sur  le  doute,  l'une  de  ses 
meilleures  productions.  Reconnaissant 
des  bontés  qu'avait  eues  pour  lui  La- 
lande,  il  fit  giaver  à  ses  frais  le  por- 
trait de  ce  savant  que  l'on  voit  en 
tête  du  quatrième  volume  de  V His- 
toire des  niathéniutiijucs  par  Montu- 
cla.  Ce  fut  le  même  sentiment  qui  lui 
fit  payer  un  dernier  tribut  à  Ferdi- 
nand Berlhoud  en  publiant ,  dans  le 
Moniteur,  une  notice  sur  ce  grand 
horloger.  Naturellement  bon  et  ser- 
viable,  le  malheur  avait,  dans  ses  der- 
nières années,  changé  son  caractère 
bienveillant  en  une  sombre  misanthro- 
pie. Va\  composant  son  dernier  écrit, 
la  Description  de  ses  machines,  il 
eut  évidemment  pour  but  de  se  relever 
à  ses  propi  es  veux  et  de  se  rendre  une 
justice  que  ses  contemporains  sem- 
blaient lui  refuser.  La  première  plan- 
che de  ce  volume  représente  la  pendule 
astronomique  qu'il  avait  exécutée  avant 
sa  quinzième  année:  «  C'est  par  cet 
«  essai,  dit-il,  que  j'ai  ouvert  une  car- 
«f  rière  inféconde,  où  dans  le  pénible 
«  cours  de  soixante  années  de  travail, 
«  après  avoir  sacrifié  vingt-cinq  mille 
«  francs  à  mon  instruction  et  au  p'ai- 
«  sir  de  la  répandre  gratuitement,  je 
«  n'ai  rencontié  qu'un  peu  de  gloire, 
«  l'abandon,  la  misère  et  l'oubli.  » 
Plus  loin  il  se  compare  à  Pascal  : 
t>  Enfant  grématuré  comme  lui,  d'une 


•  auifti  faibif  romple&inn  ,  on  ne  sera 
••  pa«  étonné  nue  j'aie  u>é  mou  cerveau 
M  a  *'  '  '  '  'ri  |ienvec-i  ou  qu'elles 

«   a:<  1  nia  \ie  ipa^.    31  ).  a 

Aillcu{:>,  tl  Jil  eiicuie:  ••  1^  nature 
M  m'avait  dutleii'uitr  fur  ce  (le  telerare, 
«  d'un  c^piit  fccuiiil  en  rev&ourres  et 
M  dune  patience  à  toute  épreuve,  puis- 
M  que,nrdc  pjtcnls  Mn-kroilanetie  n'ai 
m  rien  pu  acquei  tr  que  par  mes  pi  upres 
«  fi'ices  (pa;;.  57^.  ••  Janvier  était 
meniKre  dea  académies  de  Kouen  el  de 
Uesançon  et  de  plusieurs  autres  socié- 
tés scientifiques  et  littrraires.  Comme 
écrivain,  on  a  de  lui:  I.  Etrennes 
rhrofionirtriifurs  pour  Cun  1 8 1 1  , 
ou  Précis  dr  le  qui  loncrrnr  le 
temps ,  ses  di^ùsions ,  ses  mesures , 
leurs  usages,  t\c.,  l*aris,  1810,  in- 
1:2.  (^t  ou>ra;;e  a  été  rniiipi  une  sous 
le  titre  de  Manuel  throimnietri- 
que,tlc.,  181  :>  cl  18J1 .  iu-li.  avec 
5  plancli.  C'r>t,  roinine  il  en  prévient 
dans  l'avertissement,  une  reproduction 
de rupu:»cule  publié  en  ITâ'J.parl'ierre 
Leroy  (/o).  ce  nom,  X\IV,  :ii.'>}, 
avec  le>  chanj^eroents  qne  le  progrès  de$ 
arts  rendjil  iiidiNpen>ables.  I^  frontis- 
pice représente  la  ruionne  de  b  place 
N  enilôtue,  dont  Janvier  aurait  voulu 
faire  un  mi;  '  recon- 

nut que  la  <.    ,  .culs  de 

la  nouvelle  lue  leiuiiiil  cepiujct  impra- 
ticable. On  V  trouve  Jpa^.  11»  de  la  T" 
éd.)  des  réilexions  lies-reinarquables 
sur  la  iiéceN>ile  de  rnb5ervatiundu  di- 
manche, indépendamment  du  piécepte 
reli»ieu.\.  II.  Essai  sur  les  horloges 
publiques  pour  les  runiinunes  de  la 
catnpagne,  l'aris,  1811 , in-8  ',  û^. Cet 
opu.'icule  utile  mérite  d'élic  lil  par  les 
personnes  auxquelles  il  e.sl  adresse.  111. 
Des  re%'oluiions  des  corps  célestes 
par  le  mèranisme  des  rouages  ,  l'a- 
ris, 1S12,  in-4°  avec  8  plancli.  I.a 
première  partie  de  cet  ouvrage  se  com- 
pose de  la  description  du  planétaire 
uuiomute  du  célèbre  Clir.  lluy^ens  , 


JAR 


95 


traduite  du  latin  par  Janvier  lui-m^me 
qui.  comme  on  l'a  déjà  dit,  s'était,  dés 
qu'il  l'avait  pu  ,  occupé  de  compléter 
son  éducation  littéraire;  il  se  plaint  des 
horlo^^ers  qui  s'api.rn|.i  i,-nl  ses  dérou- 
terlesel  nnmmr  rrn\  qm  Utui  leur  pro- 
fit de  le*.  IV.  rjoge  des 
wathr.  .  l'an'',  ISI  ^  ,';„.8*». 
V.  Preris  des  calendriers  iis.'il  et 
ecclésiastique,  ibid.,  I8:ji,  iM-8'\ 
\  1 .  Du  /H}UK'itir  des  sciences  sur  le 
honluur  des  hommes,  ibid.,  182.'», 
in-8'  de  16  pa;;  V||.  Recueil  de 
machines  ,  composées  et  exécutées 
par  Janvier,  ViTti,  18*27,  in-V  de 
39  yi».  de  tetle  avec  12  planrli.  ;  re- 
produit en  1828,  in-i"  de  Gl  pa^. 
avec  l.'l  plancli.  Olle  seconde  n'  i 
est  au;;mentec  de«  leçons  de  I  ^  >■• 
lournier  >ur  le  calcul  de»  roua;^e^.  I.e* 
macliines  de  Janvier  demies  dans  ce 
volume  vont,  outre  la  pendule  astrono- 
mique dtmt  on  a  drjà  parlé,  une  [  (Mi- 
dule  repré>erilant  le  niouv  mirnl  \  '  r 
soleil,  exécutée  en  1766.  et  l'hoi!..  .  j 
fécondes  et  à  poids  admise  a  l'expo»!- 
tinn  de  1823.  Il  v  a  joint  la  quadrature 
et  la  description  de  rii4>rlo;;e  du  car- 
dinal de  (iranvelle  qu'il  avait  vue  h 
rildtel-de-VilJe  de  Bevan(;on  ou  elle 
est  encore,  et  qu'il  remanie  comme  un 
des  ouvra;;es  les  plus  pai laits  qui  aient 
elc  exécutés  à  Nuremberg;  au  \N  l* 
siècle.  NV— s. 

4. \  lu:  III        l  oyc-    lUsdll  , 

X\\N  II.  los. 

JAKU-PAWILMKK 

(Loi  IS   Al.E\ANt)RK)  ,    né    le    7     MON. 

17."»7,  à  Ui{;onnay  près  de  Niort  , 
exerça  d'abord  la  médecine  d.iiis  celle 
dernière  ville  dont  il  fui,  en  171M),  le 
premier  maire  conslitulioiincl.  Il  «tait 
procureur-syndic  des  I)eux-Se>res  , 
niiand  ce  déparlement  le  iiomm.T  dé- 
pute à  l'assemblée  lé;;islari\e  en  1  /'Jl, 
puis  en  sept.  17'J2  à  la  Convenlion 
nationale.  Voici  ses  votes  dans  le  pro- 
cès de  Louis  XVI  :   U  détenliou  jus-. 


94  JAR 

qu'à  la  paix  ,  le  bannissement  et  en- 
fin le  sursis  à  l'exécution.  Il  risqua 
aussi  une  démarche  éminemment  cou- 
rageuse à  cette  époque  de  terreur  et 
de  lâcheté;  ce  fut  lui  qui  entraîna  le 
député  Duchàtel,  alors  presque  mou- 
rant, jusqu'au  sein  de  l'assemblée,  le 
soutint  dans  ses  bras  à  la  tribune,  et  le 
mit  à  même  de  voter  en  faveur  de  l'in- 
fortuné monarque.  Celte  action  ,  qui 
les  honore  tous  deux  ,  les  vouait  aux 
venojeances  révolutionnaires  (  Voy. 
DucHATKL  ,  XII  ,  105)  ,  et  bien- 
tôt elle  servit  de  prétexte  à  Marat, 
lorsque  ,  dénon(;ant  Jard-Panvillier 
comme  modéré,  il  provoqua  ainsi  son 
rappel  d'une  mission  qu'il  exerçait  au- 
près de  l'armée  des  Côtes  et  de  la  Ro- 
chelle. Du  reste,  les  paroles  qu'il  pro- 
nonça à  l'occasion  de  la  loi  sur  les  em- 
ployés de  la  liste  civile  téinoit^nent  suf- 
fisamment de  sa  probité  politique,  de 
son  respect  pour  les  droits  acquis. 
«<  Les  règles  de  l'équité,  dit-il,  sont 
«<  immuables,  en  vain  voudrait-on  re- 
«  procher  à  ces  hommes  les  abus  du 
«  régime  auquel  tenait  leur  existence  ; 
«  on  ne  saurait  les  blâmer  d'être  en- 
a  tiés  dans  une  carrière  oiî  le  sort  a 
«  (ait  naître  la  plupart  d'entre  eux.  » 
Après  le  9  thermidor,  Jard-Panvillier 
lutta  encore  avec  énergie  contre  le  sys- 
tème mal  comprimé  du  terrorisme. 
Membre  du  conseil  des  cinq- cents, 
en  171).'),  il  en  sortit  en  1797,  mais 
il  fut  immédiatement  réélu.  11  combat- 
tit dans  cette  assemblée  la  loi  du  '\ 
brumaire  an  IV,  qui  déclarait  les  pa- 
rents d'émigrés  incapables  d'exercer 
aucune  fonction  publique.  Sa  voix  dans 
la  discussion  sur  le  rétablissement  du 
cultt  (an  V,  juillet  1797)  retentit  en- 
core en  faveur  des  prêtres  rentrés  en 
France  :«  Lorsqu'on  apprend,  s'écrie- 
«  t-il,  qu'ils  sont  dénués  de  tout  ;  on  ne 
«  voit  plus  en  eux  que  des  hommes  ac- 
«c  câblés  d'âge  et  d'inlirmités,  ou  expo- 
«  ses  k  toutes  les  horreurs  du  besoin.  » 


JAR 

En  l'an   VII  (juillet  1799), il  s'é- 
leva contre  la   loi  des  otages  et  con- 
tre la  motion  de  déclarer  la  patrie  en 
danger.  S'étant  montré  favorable  à  la 
révolution  du  18  brumaire,  il  fut  nom- 
mé commissaire  du  nouveau  gouverne- 
ment dans  les  départements  de  l'Ouest, 
puis  appelé  au  tribunat  oiî  il    remplit 
successivement  les  fonctions  de  secré- 
taire, de  président  et  de  questeur.  Il 
vota  ensuite   pour  la  proposition    de 
Curée  tendant  à  porter  le  premier  con- 
sul au  trône  impérial.  Rapporteur  de  la 
commission  qui  avait    été  chargée  de 
l'examiner,  il  fut  aussi  le  président  de 
la  députation  qui  alla  présenter  aux  sé- 
nateurs le  vœu  du  tribunat,  et  il  obtint 
les  titres  de  commandant  de  la  Légion- 
d'Honneur  et   de  baron  de  l'empire; 
enfin  son  département  le  nomma  pre- 
mier candidat  au  sénat  appelé  conser- 
vateur. Lors  de  la  suppression  du  tri- 
bunat en  1808,  Napoléon  l'éleva  aux 
fonctions  de  président  de  chambre  à 
la   cour  des  comptes.   C'est  en  cette 
qualité  qu'il  lui  adressa  ,  en  décem- 
bre 1812,   après  la  retraite  de  Rus- 
sie ,  un   discours  dans  lequel  il  s'ex- 
prima avec  indignation  sur  la  conspi- 
ration du  général  Malet  {Voy.  ce  nom, 
XXVI,  367).    Plus  lard,  le  5  avril 
18îi,il  adhéra  à  la    déchéance  de 
l'empereur.  La  chambre  des   députés 
le  vit  toujours  sous  la  restauration  au 
nombre  des  membres  dont  la  modéra- 
tion réglait  la  conduite  parlementaire. 
Il  mourut   à  Paris,  le  13  avril  1822. 
Jard-Panvillier ,    dans   le  commence- 
ment de  la  révolution  pava  sans  doute 
quelque    tribut  à   l'effervescence     du 
temps,  mais  aucun    excès,  aucun  acte 
odieux  ne  pèsent  sur  sa  mémoire.  Il  a 
pu  répéter  à  la  fin  de  sa  tie  ce  qu'il 
disait  au  conseil  des  cinq-cents  en  fa- 
veur des  émigrés  rentrés  :  «  Moi  aussi, 
"  j'ai  essuyé  bien  des  larmes  et   n'en 
«  ai    jamais  fait  répandre.   »  Rarbé- 
Marbois.  premier  pi^sident  de  la  cour 


Ar'  mmpfr'  ,   ^nalJn(  prrtrdrr   Hi^nr- 

fTirn»    \r    rnlir.'ir   Hont     41    rOTOpS^mr 

;l  M'.i't  h  ^>frlf,  >f  fonlenta  de  ciirr 
(r*^  I  iiulrs  de  Jir«J  l'an\illirr  a  un  fonc- 
tionnaire qui  lui  «Innandjit  mmmrnl 
on  |ioovait  prf*cr\er  la  >rlle  de  MeM 
des  fanions  qni  la  désolaient  alors  : 
«  Noos  sommes,  lai  dit  il ,  dans  le 
«•  trajel  qni  d'an  étal  anti-^of  ial  con- 
«  daim  ii>1  ou  lard  i  la  courorde  et  à 
«  la  paix.  Nom  t\on*  rnfure  des  lois 
«  eruelles  et  «•" 
«  un  pen  Air  tern 
«  tAt  sans  forre.  I.r 
«  sions  n'ont  point  . 
«  totijours  par  reprendre Irut  empire. 
■  faites-les  exémier,  ne  «.ouffrcz  ao- 
•  cune  inju%tire,  et  tous  prrierrerez 
«  totre  rommone  des  fléaux  dont  tant 
«  d'antres  sont  victimes.  »»  —  Jard- 
Fanvillrer  a  lai«é  nn  %U,  ancien  sotts- 
préfet  et  maintenant  conseiller  maître 
à  la  cour  des  comptes       1.— -ii — E. 

J.\KIH:L  (  .  .  .  V  ftnmme 
dVsprit  et  de  {;oul  et  $."^^ 
phile,  oublie  dans  tous  le>^  . 
rr.T,  et  sur  leq  lel  on  re^rrHr  île  ne 
jnfi  trouver  une  notice  Ain^  la  slatlsti- 
(fur  du  département  de  l' AiMie,  était 
né,  ^ers  17*20,  dans  le  ^•oi^sonnais  à 
Braine  ,  de  parents  qui  tenaient  dans 
le  paTs  on  ran»  honorable.  Arrivé  a 
ràj»e  de  prendre  on  état,  il  acquit  une 
(^arpe  d'ofBcier  dans  la  maison  du 
roi,  et  put  facilement  continuer  de  se 
li>Ter a  l'étude li.  a  pro- 

rince.  Il  s'était  .  r  heure 

ierassemblerdcb  lisiCsiareoel  des  ma- 
nuscrits principalement  sur  l'histoire 
au  moyen-à;;e;  et  il  >  joi;^nit  un  cabi- 
net curieux  d'histoire  naturelle  et 
d'antiques  troutés  en  jurande  partie  à 
Brame  ou  dans  les  ciiviron'^^  de  cette 
Tille,qu'il  habita  près  qne  constamment. 
D'un  caractère  oblif;eant,  Jardel  «^'em- 
pressait de  mettre  à  la  disposition  dc^ 
savants  le  résultat  de  ses  recherches. 
C'wt  ainsi  qu'ayant  trouvé  près  de 


Rraine  une  pierre  é^\ptienne  ,  îï  l'en- 
\o\y  it  ^,.1^Iu^  qui  la  fil  graver  dans 
le  t«)me  IN  de  ses  ititKjuitfS  ,  pi. 
21  ,  et  en  donna  l'cvpliration  pa«. 
6*2.  Kontetle  lui  dut  la  notice  de 
quantité  de  nianuscritN  préripiu  pour 
son  édition  de  la  liihlittthtijur  de 
riiisloire  de  France  ,  el  l'abbe  C^r- 
lier,  d'utiles  renseinnement*  dont  il  a 
fait  ttsj       *  n    ■   '       '.  Va- 

iois  ,    \  (du 

^  Icl^liara- 

't  fn  par- 

wr 

1     .   ■    '  4  se 

deiaire  dr  sesli\res  rares  et  de  ses  ma 
nuscnts.  Il  en  fit  imprimer,  cette  an- 
née, le  cnUiloi^ur  à  quarante  eiem- 
plaires  qu'il  distrilnia  dans  les  pars 
étr3nî;ers,  espérant  >  trouver  pins  fa- 
cilement un  acquéreur  qu'en  France 
(  l'ei  ^ n ot  .  /^/-/vr/ .  f>tblin::r . .  t  Or»' . 
Vjt  fut  un  I'     '  r  lui  de  ne  pas 

r^us^sir  à  \<  alitr  de  ses  li- 

:    de  sa   biblio- 
t-TM^t  ans.  I^ 
nufiir  do  lofe>  ,  11  lui   res- 

taient à  sa  mort  ii<'e  a  Paris 

en  179'J,  in-8".  Jardel  a\aii  composé 
sur  firaine  et  ses  environ^  plu.ieurs 
ouTra;;es  dont  on  trouve  les  titres 
dans  la  fîiUiofhrtfur  de  Font  et  te.  Il 
suffira  donc  d'indiquer  ici  le*  princi- 
paux :  I.  Mrnuiir-  circonstancié 
pour  pnjucrr  que  Bl\EriNATrsi  ou 
brainr  est  situé  sur  Vnuplacemrnt 
du  ÎJinr.AX  lirs  t.ommmtairrs  dr 
C'rsiir,  in-i".  ('•  11  u'a  point 

été  adoptée  par  !•  .us  plus  ré- 

cents du  Soissonnais.  Suivant  M.  de 
Russv,  Ribrax  est  Fisme^  sur  la  Vesic 
(Statist.  du  dépurtrrunnt  dr  r.îis- 
tif ,  I,  136).  11.  Lrttrr  sur  Li  ville 
ifti  li'aine;  elle  est  imprimée  dans  les 
SouK'rllrs  rrchrrrhfs  sur  iti  France 
piiblipes  par  Hérissant  en  1700,  lora. 
l",  p.  rV)  m.  Mémoire  surThis- 
laire  nalurelU  du  Soi  s  sonnais,  ibid., 


96  JAR 

II,  310.  IV.  Lettre  sur  quelques 
antiquités  trompées  près  de  la  Fère 
en  Tardenois  {Mercure,  1766,  janv. 
74-85.)  W— s. 

JAi\DIX  (César)  ,  naquit  à  Li- 
sieiix  ,  en  1772,  de  parenli.  qui  le- 
naicnt  un  des  plus  beaux  hôtels  f^aniis 
de  la  ville  ,  et  qui  donnèrent  à  leur  fils 
une  éducation  soignée,  dont  une  mé- 
moire heureuse  et  des  dispositions  na- 
turelles le  firent  profiter. Ses  sentiments 
répondirent  à  son  éducation.  Atteint 
par  les  lois  de  la  réquisition,  il  entra 
dans  le  cinquième  bataillon  du  Calva- 
dos, qui  avait  été  envoyé  dans  la  Ven- 
dée. Avant  vu  chez  ses  parents  quel- 
ques-uns des  chefs  contre  lesquels  on 
l'envovait  combattre,  il  quitta  bientôt 
les  républicains  pour  passer  dans  les 
ranos  opposés.  Il  avait  quelque  tein- 
ture du  mécanisme  de  l'imprimerie, 
et  s'offrit  comme  pouvant  travailler 
à  la  composition  des  écrits  royalis- 
tes et  des  proclamations  qui  se  fai- 
saient au  quartier-général  des  Ven- 
déens. Les  firconstances  avant  changé 
les  idées  après  la  révolution  du  9  ther- 
midor ,  il  vint  à  Paris  ,  et  fit  dans  les 
journaux  divers  ai  ticles ,  où  Ton  re- 
marquait de  l'esprit  et  de  la  facilité, 
liientot  il  fut  attaché  à  la  rédaction 
du  Courrier  républicain  ,  journal  qui 
n'avait  de  icpublirain  que  le  titre  , 
4ti  qui  professait  les  opinions  roya- 
listes les  plus  prononcées  en  atta- 
quant les  républicains  et  ce  qu'on 
appelait  alors  les  terroristes.  Barras 
fut  surtout  l'objet  de  ces  attaques,  et 
il  s'en  irrita  au  dernier  point.  C'était, 
si  l'on  peut  le  dire ,  la  mouche  qui  pi- 
que le  lion  comme  dans  la  fable  de 
La  Fontaine  ;  car  liarras  en  rugissait 
dans  son  palais  du  Luxembourg.  Il 
attribua  ces  sorties,  dont  tout  Paris 
s'amusait,  à  l'abbé  Poncelm,  pro[»ric- 
taire  de  cette  feuille.  Soit  qu'il  se 
trompât  sur  l'auteur  véritable,  soit  qu'il 
voulût  sevenger  de  la  liberté  que  celui-ci 


JAR 

laissait  à  Jardin,  Barras  ne  recula  pas 
devant  un  odieux  guet-à-pens,  Ilapos- 
ta  des  alguasils  qui  s'attachèrent 
aux  pas  de  Poncelin,  et  saisirent  une 
occasion  de  s'emparer  de  sa  personne 
pour  le  conduire  au  Luxembourg  dans 
les  appartements  de  Barras,  qui  lui  fit 
donner  une  correction  des  plus  san- 
glantes et  telle  que  jamais  écolier  n'en 
avait  reçu  de  pareille  ;  puis  on  le  re- 
jeta tout  meurtri  dans  la  rue.  Les 
journaux  parlèrent  longuement  de  cette 
indignité,  pour  la  flétrir  comme  elle 
le  méritait  ;  mais  l'auteur,  alors  l'un 
des  membres  les  plus  influents  du  Di- 
rectoire ,  échappa  à  toute  punition. 
Les  royalistes  eux-mêmes  ne  purent 
s'empêcher  de  rire  entre  eux  de  cette 
bizarre  vengeance.  Barras  n'en  fut 
que  plus  mal  traité;  car  dans  ce  temps, 
qu'on  a  justement  appelé  Vâge  d'or 
de  la  pensée,  tout  se  disait  :  on  n'a- 
vait pas  besoin  de  cet  entortillage  , 
de  ces  circonlocutions  auxquelles  on 
est  obligé  de  recourir  aujourd'hui.  On 
disait  sans  le  moindre  détour  Merlin- 
potence,  juges  bourreaux,  lâches  légi- 
cides,  et  ceux  qui  étaient  ainsi  désignés 
ne  pensaient  pas  à  demander  des  répa- 
rations aux  tribunaux,  qui  d'ailleurs  ne 
leur  en  auraient  pas  donné.  On  recevait 
et  l'on  se  renvoyait  les  épitliètes  les  plus 
blessantes,  sans  se  mettre  plur  en  peine 
des  suites  que  de  la  vérité;  c'était  l'es- 
prit du  temps.  Quand,  en  iSO'î, (kor- 
ges  Cadoudal appelait  Thuriot  Tueroi, 
il  ne  faisait  que  répéter  ce  que  les  jour- 
naux avaient  dit  librement  à  une  autre 
époque.  C'est  à  la  faveur  de  cette  liber- 
té, on  peut  diro  illimitée,  qu'on  vint 
à  bout  de  renverser  le  Directoire,  dont 
au  reste  peu  de  personnes  voulaient.  Il 
tomba  sous  les  coups  de  la  presse  bien 
plus  encore  que  sous  ceux  de  Bona- 
parte ,  qui  trouva  les  esprits  préparés  à 
la  chute  de  ce  gouvernement.  Mais 
avant  son  renversement  ,  cette  puis- 
sance directoriale  ,    devenue  ridicule , 


JAR 

fn  un  Jfrnifr  ciïort  pour  prolonj;fr  %a 
•Irplorable  fxislrnff ,  il  ret  rffor!  fut 
\r  18  friirliJor.  Harrax  n'oubli»  ni 
Ponrflin  niJarilin,  t\  \nus  deux  furciil 
rompri*.  à\ec  uiif  \in^laiiif  de  Jrpulc*, 
<)am  le  Jécrrt  dr  déportation  à  la 
r.uianr.  Jardin  fut  assrx  heureux 
pour  écltapprr  ib  rrtte  mesure ,  il  se 
rarha  ;  mai*  lorsque  le  temps  eut  ralmë 
les  irritation^,  et  que  Ronapatte  eut 
pris  le  pou\oir,  il  lui  fui  permis  de  se 
rendre  il  l'ilr  d'Olemn  avec  les  Si- 
mëon  ,  les  Dumniard  ,  1rs  Villjret- 
.loxeuse,  les  Hoi^^\ -d'An^Lis,  les  Mu- 
rait e,  les  Doiimerr,  etc.,  dans  la  so- 
ciété desquels  il  ne  pu!  qtie  trouver  de* 
arantajjes  et  perfectionner  une  éihira- 
tion  qui  n'axail  pas  toujours  eu  une 
irès-honne  direction.  On  assure  qn'il 
rxisie  de  lui  une  correspondance  où  la 
biof^aplue  des  hommes  avec  |p^qt>els  il 
»  passé  le  temps  de  sa  déportation  à 
lile  dOieron  e<t  prrNentrr  d'une 
manière  fort  piquante,  et  où  il  ju^e 
a\er  assez  de  hoolieur  et  une  t;rande 
fmesse  ses  compagnons  d'infortune. 
Si  elle  paraît  nn  jour,  on  y  serra 
que  ceux  à  qui  la  reiionitii'^  a  donné 
un  certain  ccl.it  sont  sii)elN  aux  mêmes 
faiblesses  que  le  vulgaire.  Mais  repor- 
tons-nous à  une  époque  anténeure  à  la 
résolution  de  brumaire  qui  fit  de  Bo- 
naparte un  premier  consul  et  bientôt 
un  empereur,  à  une  époque  antérieure 
néme  au  IH  fructidor.  Jardin,  dont 
les  opinions  n'étaient  pas  équivoques, 
désira  (^e  les  républicains  lui  donnas- 
sent eux-mêmes  un  certificat  de  roya- 
lisme. Dans  cette  vue,  il  pria  l'auteur  de 
cet  article  de  faire  insérer  dans  \\^n.i 
des  lois,  journal  rédigé  alors  par  un 
ancien  morne  devenu  députe,  nommé 
Vouitier,  une  lettre  où  furent  supposés 
divers  actes  de  royalisme  qu'on  attri- 
bua à  Jardin,  qui  pouvait  bien  en  avoir 
fait  quelques-uns,  mais  non  pas  ceux 
qui  renfermaient  en  eux-mêmes  une 
sorte  de  honte.  La  lettre  parut  dans  le 


|uurnal  que  nous  venons  de  ritei ,  le  f» 
avril  1797  .1  n.!  H  la  trouv.»  trop  forte, 
e!  à  cette  orra    ..n  rô|irta  le  mol  du  ré- 

f;ent  :  •«  'lu  me  .l.-^ui>»'s  trop.  ••  Après 
e  18  fructidor.  J-iidin  s'était  rendu 
librement  a  l'île  d'Oleron  comme  le» 
autres  déportés  à  qui  cette  ile  fut  as- 
signée pour  lieu  d'exil  :  il  en  sortit  avec 
eux,  et  revint  à  Paris.  Mais  il  >urvécut 
peu  à  ce  retour.  Des  maladies,  raiiitées 
par  son  .-.   le  forcèrent  d'en- 

treràl:  (lapucins,  ou  l'ait  fut 

impuissant  puui  lui  rendre  la  santé. 
Apres  %\x  mois  de  soufirances  ,  il  r 
moaiut  en  IKO'J.  Cjtux  qui  l'ont 
connu  rendent  justice  i  son  courage  et 
i^  ses  talent!  qui  auraient  fait  de  lui  un 
bon  écrivain  et  uu  lelé  défenseur  de  la 
monarchie.  M — T. 

JARJ.IYKS  (KnAî»çois-At 
r.rsTiN-IUlMKR  i>Fj,  né  à  (irenoble, 
le  2V  oct.  17ir>,  d'une  ancienne  fa- 
mille du  Daupliiné ,  était  neveu  du 
lieutenant-«éuéral  de  HoQrcet  (1  uy. 
ce  nom,  N  ,  '.\'ùh,  connu  par  ses  .Vfr. 
iniiires  sur  lr%  fruntirrrs  drs  Al- 
f>rs.ei(.  D'abord  élevé  ,  puis  coopé- 
rateur  de  son  oncle  dans  ses  travaux 
topoi^raphiques,  il  servit  sons  lui  com- 
me aide  de-ramp  de  I7f»9  à  1779,  et 
passa  en  qualité  de  capitaine  à  l'état- 
major  de  l'armée.  Il  tut  adjoint  à  la 
direction  {;énérale  de  la  ;;uerre,  décoré 
dt  l'ordre  de  Sainl-l.oiis  et  nommé 
maréchal  de-ramp  par  Louis  WI  en 
179*2.  De  J.ii  i.i>es  avait  épousé  une 
des  premières  femmes  de  chambre  de 
la  reine  Marie-.Kntoinelte ,  que  crtle 
princesse  honorait  d  une  bienveillance 
particulière.  Celte  circonstance  le  mil 
à  portée  d'être  personnellement  connu 
de  la  famille  ro>ale,  et  lui  fournit  |>1us 
d'une  occasion  de  témoigner  son  dé- 
vouement. Voici  ce  qu'on  lit,  à  son 
^/)et,  4»ns  les  Mrmoirrs  dr  inuiiame 
Compan  11,  1-29)  :  «♦  M.  de  Jarjayes, 
««  colonel,  attaché  ï  l'élat-major  de 
<•    l'armée,  eut  le  bonheur  de  rendre 


LXVIll. 


98  JAR 

K   plusieurs  services  à  la  reine,  et  de 
«   s'acquitter    avec  la  discréllon  et  la 
«<   Jif^^jjité    convenables     de   plusieurs 
«    missions  importantes.  Leurs  'Vlajes- 
«   lés  avalent  la  plus  grande  coauance 
«   en  lui,  quoique   souvent  la  saj^esse 
«   de  ses  craintes,    quand  II  s'agissait 
<»   de    projets  inconsidérés ,   Teùt  fait 
«   taxer,  pai'  des  imprudents  et  des  en- 
«   nerais,  de  suivre  les   principes  des 
«(   constitulionnels.    Envoyé  à  Turin, 
«  il   eut   de  la   peine   à  dissuader  les 
u   princes  du  projet  qu'ils  avaient  for- 
«<   mé  à  celte  époque   de  rentrer    en 
«  France,  avec  une  très-faible  armée  ; 
«c   et,  lorsque  dans  un  conseil  qui  se 
«  prolongea  jusqu'à  trois  heures  du 
«c   matin,  il  eut  fait  voir  ses  instructions 
«  et    démontré    que   cette   démarche 
u   exposerait  le  roi,  le  comte  d'Artois 
«<   seul  se  prononça  contre  le  plan  qui 
<c   était  du   p'ince  de  Condé.  »   Plus 
tard,  selon   Jes     mêmes    Mémoires^ 
M.  de  Jarja)  es  fut  le  premier  intermé- 
diaire des  relations  qui  s'établirent  en- 
tre la  reine  et  Barnave  ,  Duport   et 
Alexandre  de  Lameth,  pour  affermir 
le  système   constitutionnel   contre  les 
projets  des  républicains.   «    Après  le 
«  20  juin  ,  dit  encore  M^"'  Campan, 
«   la  reine   mit  dans  un  portefeuille, 
«   qu'elle  confia  à  M.  de  Jarjayes,  ses 
«<  lettres  de  familJe,   plusieurs  corres- 
«»   pondances  qu'elle  jugeait  nécessaire 
«   de  conserver  pour  l'hiitoire  du  temps 
il   de  la   révolution,    et   parliculière- 
»c   mont  des  lettres  de  liainave   et  ses 
«  réponses,  dont  elle  avait  fait  des  co- 
«   pies.  »  On  verra  qu'il  ne    dépendit 
pas  de  la  fidélité  du  dépositaire  que  ce 
but  ne  lut  rempli.    Jaijavcs  se  trouva 
aux  Tuileries,  le  1 0  août  1 7!):^,  comme 
officier  d'état-major  :   le  roi  lui  ayant 
fait  connaître  le  plan  de  défens^quele 
baron  de  Vloménil  avait  préparé,  il  ne 
se   dissimula  pas  que,  vu   la  faiblesse 
des  moyens,  la  défaite  était  cerlainL'. 
Bientôt   H  fut    du   petit   nombre  des 


JAK 

serviteurs  fidèles  qui   accompagnèrent 
le  monarque  dans  la  traversée,  depuis 
le  château  jusqu'à  l'assemblée.  Lorsque 
la  famille  royale  fut  confinée   dans  la 
loge  du  LogograpJid  ,  Jai  jayes  parvint 
jusqu'à  Louis  X\  I  dont  il  prit  les  or- 
dres, et  fut  forcé  de  s'éloigner.  On  sait 
qu'à  la  fin   d'août  des  visites  domici- 
liaires très-sévères    eurent    lieu   chez 
toutes  les  personnes  qui  avaient  eu  des 
relations  avec  la  cour  ;  elles  furent  je- 
tées dans  les  prisons  et  presque  toutes 
y  périrent  aux  journées  de  septembre. 
Ce  fut  en  ce  moment  d'effroi  général 
que  Jarjayes  ne  pouvant  confier  à  au- 
cun autre  le  portefeuille  de  la  reine, 
se  vit  réduit  à  le  brûler  et  à   chercher 
un  asile  hors  de  chez  lui.  Néanmoins, 
depuis  que  la  famille  royale  avait  été 
transférée  au  Temple,  il  était  parvenu 
à  entretenir  quelques     relations  avec 
elle.  La  mort  de  Louis  XVI  ne  lui  ôta 
pas  toute  espérance  de   manifester  en- 
core son  dévouement  à  la  reine  et  à  son 
fils  ;  en  effet  une  occasion  périlleuse  se 
présenta.     Toulan    (Voy.   ce  nom, 
XLVI ,  323) ,  l'un  des  plus  exagérés 
des  commissaires  chargés  de  la  surveil- 
lance Intérieure  de  la  tour  et  qui  s'é- 
tait montré  sous  les   formes  les  plus 
acerbes,  n'avait  pu  voir  la  magnanime 
résignation  du  roi  et   des  princesses 
sans  en  être  touché.  De  concert    avec 
Turgy    el  Cléry    (  Voy.    ces  noms  , 
XLVIL86,  et  LXI,  134),  ilavait  em- 
ployé secrètement  tous  les  moyeps  pour 
adoucir  la  captivité  de  ce  prince  el  de 
sa  famille.  Ajnès  le  21  janvier,  s'aper- 
cevant  que  la  vigilance  des  autres  com- 
missaires devenait  moins  rigoureuse,  il 
conçut  le  hardi  projet  de  faire  évader 
Louis  XVII  et   les  princesses,    projet 
qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  la  ten- 
tative d'enlèvement  qu'essaya  plus  tard 
le    baron   de   Batz  (  Voy.  ce   nom  , 
LVII,  299).  La  reine  à  qui  Toulan  le 
soumit  voulut,  avant  tout,  que  ce  pro- 
jet fut  examiné  par  le  chevalier  de  Jar- 


JAR 

jatf^,  et  lut  remit  un  billet  àt  sa  m  en 
podr  fccénérjl:  le  mnnifipal  ^e  rentirl 
aapr^  de  lui.  liitroiiuil,  son  vêtement, 
se%  manièm,  tout  ins|Mre()f  la  ilrfianre 
à  Jjirji^n  qui  le  eoii^iilere  atec  in- 
(jiî  «tude  et  craint  d'apptendrt  Tabjet 
tir  a  tisitf.  Il  reptjussjjt  les  ronfiden- 
re?i  de  l'incotinu.  loîvqtjerrîuifi.  pDur 
pr»>f!vrrvi  m--  nn,  p-e^rnlr   l««   liilirf, 

-  '  '  (jui  a 
Il  poa- 
n  >et  prendre  cniitianre  en  l  liomroe 
«  qui  Tnu5  parlera  de  ma  part  en  «out 
«  remettant  ce  billet.  Se*  sentiments 
«•  me  5ant  connus;  depuis  cinq  mois 
•«  il  n*a  pa»  Tarie.  Ne  vous  fiex  pas 
•<  trop  à  la  femme  de  l'homme  qui  e-.t 
<«   enfermé  ici  a^ec  nous:    je  ne  me  fie 

«  ni  à  elle  ni  i  son  mari  (1'  »  C'é- 
taient Tison  et  sa  femme.   Revenu  de 

1  'l'j  r,  Jarja\ei  s'empre  sa  de 
ilciii m.!.-  a  Toulan  par  quel*  mo>ens 
il  se  proposait  d'arriver  i^on  but ,  el 
s*il  ne  pourrait  pxs  l'introduire  an 
Temple  afin  d'en  conférer  avec  la  reine. 
Le  commissaire  ne  ref^arda  pas  celte 
difficulté  comme  insurmontable,  el  sur 
un  mot  que  le  général  lui  donna  pour 
la  prince<ise,  il  lui  rapporta  ce  billet  : 
««  Maintenant,  si  vous  êtes  décidé  i 
«  venir  ici,  il  serait  mieux  que  cela  fût 
•*  bientôt.  Mais,  mon  Dieu!  prenez 
«<  bien  garde  d'être  reconnu  el>»i  tout 
•«  de  la  femme    qui    e>t   en!erméc   ici 

-  avec  nous.  »  Sous  un  déguisement 
qui  le  ;  rii.i:l  niéconnaisahle  ,  la:  |.i\e5 
fut  intiudiiii  dans  la  tour  par  I  t)ul.iii  : 
il  discuta  devant  la  reine  le  plan  d'é- 
vasion imaginé  par  le  municip  il,  r  re- 


J.\R 


99 


!\ 

1     Tf  Inllr 

t    ri    lei    . 

■    1.».. 
1  rrfairn 
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'    •" 

■!T 

ei  <iii«  ji.!«  ii< 


i\  tr»n«cr»- 
•  ut  le 


d- 


connut  1.1  p'isNil  ilif  é  de  réussir  ;  mais  il 
iB;;ea  qu  1 .  laa  m.liprn^.iblc  de  mettre 
un  second  commissaire  dans  le  secret 
I.epitre  qui,  par  sa  conduite,  avait  in- 
spiré de  la  conlianrr  a  Louis  XV|  et 
procuré  t!e^  coiiMilalions  à  Marie- .\n- 
to. nette,  fol  d-M^^ne  \  peine  le  Ȏnr- 
rat  eut-il  quitté  la  tour  que  criir  prin- 
cesse ,    loiiiourt    frappée  de  l'idée  des 

pou- 
ciots: 

-    l'rr'  Klle 

••   me  j  '  me  et 

«  la  femme  dont  je  vous  parle  dans 
«<  l'autre  billet.  lirliez  de  voir  ma- 
«  dame  Th.  ;  on  tous  expliquera 
•«  pourquoi.  Comment  est  votre  lem- 
••  me  :'  Klle  a  le  co-ur  trop  bon  ponr 
"  n'être  pas  malade.  »  Jarjaves  avait 
répondu  par  écrit  aui  demandes  que 
la  reine  lui  avait  (aiteNde  \ive  \t»ix,  lor» 
de  l'entrevue  an  Temple.  Bientôt  il 
reçut  de  cette  princesse  une  lettre  plus 
importante,  la  voici:  •«  Notre  billet 
«<  m'a  fait  du  bien.  Je  n'avais  aucun 
«  doute  sur  le  Ni\rrnois,  mais  j'étais 
•«  au  désespoir  qu'on  pût  en  penser 
u  du  mal.  Kcontezbien  les  idées  qu*on 
•«  vous  proposera;  eiaminex-les  dans 
"  Totre  prudence  :  ponr  nous,  nous 
••  (nous)  lierons  a^ec  uneconfianceen- 
«»  tiére.  Mon  Dieu  !  que  je  serais  heu- 
•«  reu<e,  et  surtout  de  pouvoir  vous 
•«  compter  an  nombre  de  reui  qui  pen- 
««  Aent  nous  être  utiles!  Nous  verrex 
•«  le  nouveau  pci"sonna^e  :  son  exté- 
«  rieur  ne  prévient  pas,  [2',  mais  il 
«  est  absolument  nécessaire,  et  il  faut 
«  l'a.oir.  T...  vou.s  dira  ce  qu'il  faut 
««  faire  ponr  cela.  Ticliez  de  vous  le 
««  procurer  et  de  finir  avec  lui  avant 
•«  qu'il  revienne  ici.  Si  vous  ne  le  pou- 
«  vez  pas,  vovez  M.  Delaborde  de 
««Nna  part,  si  vous  n'y  trouvez  pas  d'in- 
a  conxénients  ;  vous  savez  qu  il  a 
«  de  rati;cnt  à  moi.  »»  Le  t;cnérai  vit 
le  commissaire,  lui  donna  une  connais* 

{%'.  Kuurr  co:ncmiij»-.  r -plet  rt  le»  |>icd}  bola. 


("!' 


;LîOTH£CA     ; 


100  JAR 

sance  entière  des  projets,  et  convint  de 
tout  avec  lui  et  avec  Toulan  ;   mais  il 
craii^nit ,   en  s'adressant  à  M.  de  La- 
borde,  de  mettre  quelqu'un  de  plus  dans 
la   confidence.   Au  risque  de  sa    vie, 
Jarja^  es  voulut  joindre  celui  de  sa  for- 
tune; il  en  écrivit  à  la  reine,    qui  lui 
répondit:  En  effet,  je  crois  qu'il  est 
«   impossible  de  faiie  aucune  démar- 
.»   che  dans  ce  moment  près  de  M.  de 
ce   Lab...  Toutes  auraient  de   Tincon- 
«  vénient.  Il  vaut  mieux  que  ce  soit 
«   vous   qui  finissiez  cette  affaire  par 
«   vous-même,  si  vous  pouvez.  J'avais 
«  pensé  à  lui  pour  vous  éviter  l'avance 
«   d'une  somme  si  forte  pour  vous.  » 
L'avance  fut  faite.  Le  commissaire  tou- 
cha la  somme,  et  prit  rengafi;eraent  de 
concourir  de    tout   son  pouvoir  à    la 
réussite  de  l'entreprise.    Le  lendemain 
Jarjaves    reçut  la  récompense  la  plus 
dicne  de  ses  soins  dans    ces   mots  : 
<«   T...  m'a  dit  ce  matin  que  vous  aviez 
«   fini  avec  le  comm...    Combien  un 
«   ami  tel  que  vous  m'est  précieux  !  » 
La  reine  eût    désiré   que  ïoulan  fiit 
récompensé  ;  elle  le  îémoif;na  au  '^éné- 
ral  par  ce  billet  :  «  Je  serais  bien  aise 
«c   que  vous  pussiez  aussi  faire  quel- 
«<   que  chose  pour   T...  ;  il  se  conduit 
«   trop  bien  pour  ne  pas  le  reconiiai- 
«(   tre.   »    Aussi   désintéressé  qu'il  se 
montrait  dévoué,  Toulan  ne  voulut  rien 
accepter  de  cette  princesse  qu'une  ta- 
batière en  or,  dont.elle  faisait  q'ielque- 
fois  usar^e:  cette   boîte   fut,    dans  la 
suite,  la  principale  cause  de  sa  perle. 
Dès  que  le  chevalier  de  Jarjayes  eut 
arrêté  les  premières  bases  du  plan  d'é- 
vasion  et  qu'il  eut  fait  préparer    des 
liabils  d'homme  et  d'autres  vêtements 
pour  la  reine  et  M""'*   Tlibabeth  ,    les 
commissaires  introduisirent  sous  leurs 
manteaux  ces  effets  dans  la  tour.  Les 
princesses  auraient  ceint  des  écharpes 
Incolores,  et,  munies  de  cartes  d'entrée 
telles  que  les  municipaux,  elles  seraient 
sorties  sous  te  travestissement.  Il   pa- 


JAR 

raissait    difficile  d'enlever  de  la  tour 
madame  Royale,  et  surtoutle  jeune  roi, 
qui  était  le  plus  surveillé  :  on  en  trouva 
le  moyen.  Chaque  jour,  l'homme  char- 
gé de  nettoyer  les  quinquets  et  les  ré- 
verbères venait  le  soir  les  allumer  ;   il 
était  accompagné  de  deux  enfants  qui 
l'aidaient  dans  son  travail,  et  il  sortait 
du    Temple  bien   avant  sept  heures. 
Après  son  départ  et  lorsque  les  senti- 
nelles auraient  été  relevées,  un  ami  de 
Toulan,  Ricard  (3),  royaliste  éprouvé, 
serait  entré  dans   la  tour  au  moyen 
d'une    carte    semblable    à    celle   des 
ouvriers  employés  au  Temple  :  arrivé  à 
l'appartement  de  la  reine,  sa  boîte  de 
fer-blanc  au  bras,  il  aurait  recules  en- 
fants des  mains    de  Toulan  qui  l'eiit 
grondé  de  n'être  pas  venu  lui-même 
arranger  les   quinquets,  et  il  se  serait 
éloigné  avec   eux  pour  les  conduire  à 
l'endroit   convenu.    Trois    cabriolets 
étaient   disposés  pour  le   voyage.    La 
reine,   le  jeune  roi    seraient    montés 
dans  le  premier  avec  le  général  ;  ma- 
dame Royale  aurait  été  conduite  par 
Lepitre,  et  madame  Elisabeth  par  Tou- 
lan. Les  dispositions  et  les  incidents 
étaient  calculés  de  manière   qu'on  ne 
pouvait  se  mettre  à  la  poursuite  des 
prisonniers  que  cinq  à  six  heures  après 
leur  départ.  Des  passc-poris  bien  en 
règle  ne  laissaient   aucune  inquiétude 
pour  la  route.  On  avait  d'abord  pensé 
à  chercher  un  asile  dans  la  Vendée  qui 
-  commençait  à  se  soulever;  mais  la  dis- 
tance parut  trop  grande  et  les  difficul- 
tés trop  multiitlites.  11  semblait  plus  fa- 
cile de  gagner  les  cotes  de  la  Norman- 
die et  de  s'assurer  les  moyens  de  pas- 
ser en  Angleterre.  C'était  même  à  ce 
dernier  parti   que    le   général   s'était 
arrêté;  il  avait  sur  un  point  de  la  côte, 
près  du  Havre,  un  bateau  que  son  ami 
intime,  Amaberf,  premier  commis  des 
finances  ,     tenait    à    sa    disposition. 
«   M.   de  Jarg  ***,  dit  Lepitre,  qui 

(3)  I.fpitie  le  noiiiine  Guy;  c'est  ù  tort. 


jAi; 


JAK 


loi 


•  Tmll  Imijours  *in>i,  ht  chargeait  Je 
«  poai\oira  loul  ;  il  atjit  i'ai^rnt 
m  nétc\sji\i  f ,  e\  nnu^  pouvions  rtwiipler 
■  sur  sey  taifnis  rt  sut  >on  zrle  i 
«  loutr  éprfu«e.  •»  I.e*  diffrrciilcs  me- 
»um  ilunl  il  est  inulilf  d'euumricr  1rs 
drtaiii  a\anl  clc  arirlers,  l'cxéciilion 
ilii  ptojrl  a\ait  clé  iotiiaoée  aui  pre- 
inifi*  )oiir>  «le  roars;  h  le  succès,  au 
•»  dire  encore  de  l.epitre,  paraivsail 
M  assuré.  >*  Mais  le^  irrésolutions,  les 
fft^eurs  de  ce  commissaire  tirriil  difîc- 
ter  le  départ  d'un  jour  a  l'autre  .  mal- 
f^ré  les  vivei  instances  deJarjays  rt 
de  Toulan,  et  quoique  la  reinrciU  dai- 
gné lui  donner  une  nirclie  de  »es  (lie> 
veuK  et  de  ceux  de  «es  enfants,  avec 
celle  devise  :  Poiu  ama  th'  il  mûrir 
trmr  .  Tien  ne  put  \a;iirrr  m  pusilla- 
nimité; enfin,  1rs  drualMiui  sVlr»i-rciil 
dans  la  (lonsenlion  sur  1rs  mesures  a 
prendre  contre  1rs  Bourbons  rendi- 
rent aut  mrmlirrs  de  la  commune 
toute  leur  sescntr,  l'évasion  dr  louir 
la  Camille  rovaie  dmiit  dev4)(mai>  im- 
pouible ,  et  principalrniml  celle  du 
jeune  roi,  sur  lequel  on  exerçait  le  plus 
de  surveillaace.  Le  même  inipo>Mbilité 
■'exLNlait  pa^  encore  pour  fane  èsadrr 
la  reine  seule  ;  c'est  ce  qui  détermina 
le  chevalier  de  Jarjaves  à  supplier 
crlte  princesse,  dont  les  jours  étaient 
le  plus  mcn.ufs,  de  profile/  des  res- 
sources qui  lui  restaient  cncoïc  pour 
se  soustraire  à  ses  bouri^u\.  Toulan, 
dont  le  courage  et  le  tè!e  étaient  au  - 
dessus  de  toute  crainte,  mit  sous  les 
veux  de  Marie-Antoinette  les  détails 
du  nouveau  projet,  auquel  I-*pilie  ne 
fui  aucunement  initié.  Pour  celte  fois, 
Toulan  se  char^jeait  de  faire  sortir  la 
reine  et  de  la  conduire  dans  un  lieu  où 
elle  aurait  trouvé  le  ^énéial,  qui  avait 
fait  des  dispositions  telles  que  le  salut 
de  celle  infortunée  priucesse  était  assu- 
ré. Elle  approuva  en  entier  le  nouveau 
plan.  Mais,  b  veille  nicme  du  jour 
Exe  pour  le  départ,   ne  pouvaia  sop- 


uortei  l'idce  de  se  séparer  de  ses  en- 
fants et  de  madame  Klisabetli  ,  elle 
écrivil  auclievalirr  de  Jarja\esce  billet, 
éternel  monument  de  sa  tendresse 
maternelle:  •<  Nous  avons  fait  un  beau 
M  rrve,  voilà  tout,  mais  nous  t  avon> 
•<  beaucoup  ;;a^ne  en  trouvant  encore 
M  dans  celte  occasion  une  nouvelle 
M  preuve  de  votre  entier  dévouement 
M  pour  moi.  Ma  configure  en  vouse^t 
M  sans  borne},  voun  Irouvriex  dans 
M  toutes  les  occasioiis  en  moi  du  caiar- 
M  tere  rt  du  coura|;c:  mais  rutt^rèt 
M  de  mon  Glse%t  le  seul  quime^uide, 
*-  et  quelque  bonheur  que  j'eusse 
••  éprouvé  à  être  bur%d'rri,  je  ne  peux 
H  pas  consentir-  à  me  séparer  de  lut. 
•«  .Vu  re>te,  je  reconnais  bien  votre 
M  ailaclirment  dans  tout  ce  (]ue  vou^ 
-  m'avex  dit  li  ei .  G>mplez  que  )e  sens 
M  la  bonté  de  vos  raisons  pour  mon 
••  propre  inter et ,  et  que  cette  or ca 
M  sibii  peut  ne  plus  se  rencontrer  : 
>  roai>  je  ne  pourrais  jouir  de  iien  en 
«  laissant  mes  enfants,  et  celle  idée 
••  ne  molaisse  pa^  inrme  de  regret .  >» 
D'après  sa  résolution  et  la  crainte  que 
la  reine  a^ait  de  se  voir  à  chaque  m 
liant  privée  de  loule  communication, 
celle  princes>e  et  madame  Klisabelh 
char;;errnt  le  ciievalier  de  Jarja>es  de 
la  mission,  délicate  en  ce  temps  de  ter- 
reur, de  traiiMiietlie  à  Maiisifur  et  au 
couile  d'Ailoi<>  le  racliet  ,  l'anneau  et 
le  paquet  i enfermant  des  cheveux  de 
la  Ltmille  lovale  que  l.ouiN  XVI,  peu 
de  mumenls  avant  son  dcpail  du  tem- 
ple, avait  remis  à  Clerv  pour  les  porter 
à  la  leine.  Les  municipaux  s'en  étaient 
empalés  et  les  avaient  mis  sous  les 
scellrs,  mais,  par  une  pieuse  frauda, 
Toulan  ,  pendant  les  préparatifs  du 
projet  d'évasion,  était  parvenu  à  les 
N'étirer,  en  les  remplaçant  par  d'autres, 
et  il  s'était  empressé  de  les  remettre  à 
la  reine.  O  fut  vers  la  fin  de  mars 
1793,  (lue  Marie-.VnloinclleconGa  ce 
précieux  dépôt  au  clievalierde  Jarjaves; 


JAR 


JAR 


il  alla  d'abord  à  Turin  remplir  une 
mission  dont  madame  Elisabeth  l'a- 
vait chargé  pour  la  princesse  de  Pié- 
mont, sa  sœur.  Le  roi  le  retint  auprès 
de  lui,  adressa  lui-même  à  Monsieur 
les  dépêches  (lesprisonniers  du  Temple, 
par  un  courrier  extraordinaire,  nomma 
le  général  son  aide-de-camp  et  lui  con- 
féra l'ordre  militaire  des  SS. -Maurice 
et  Lazare.  Peu  après,  Jarjayes  reçut  de 
Monsieur  une  lettre  autographe  que 
nous  avons  lue,  datée  de  Hamra,  le 
14  mai  1793,  et  dont  nous  avons  co- 
pié ces  expressions  :  «  Vous  m'avez 
K  procuré  le  bien  le  plus  précieux  que 
«  j'aie  au  monde,  la  seule  véritable 
«  consolation  que  j'aie  éprouvée  de- 
««  puis  nos  malheurs.  Il  ne  me  manque 
"  que  de  témoigner  moi-même  aux 
«  êtres  plus  chers  que  ma  vie  dont 
«  vous  m'avez  donné  des  nouvelles, 
«  combien  je  les  aime,  combien  leur 
f<  billet  et  l'autre  gage  de  leur  ami- 
«<  tié,  de  leur  confiance,  ont  pénélié 
fc  mon  àme  dcsplusdoux  sentiments... 
c{  J'aurais  désiré  vous  voir,  vous  parler 
«  de  ma  reconnaissance,  m'entretenir, 
«  avec  vous  deux  ,  des  moindres  dé- 
«  Jails,  des  services  que  vous  leur  av£z 
«  rendus.  Mais  je  ne  puis  qu'approu- 
«f  ver  les  raisons  qui  vous  font  rester 
«  en  Piémont.  Continuez  à  y  servir 
«  notre  jeune  et  malheureux  roi,  com- 
te me  vous  avez  servi  le  frère  que  je 
«  regretterai  toute  ma  vie.  »  Après 
l'invasion  des  troupes  françaises  en 
Piémont,  Jarjayes  trouva  le  moyen  de 
rentrer  en  France,  où,  dépouillé  de 
ses  biens,  il  soutint  sa  famille  par  ses 
travaux.  Une  ordonnance  du  4  fév. 
1815  l'avait  élevé  au  grade  de  lieute- 
nant-général. Sa  capacité  et  son  ca- 
ractcre  le  firent  appeler  par  le  minisire 
dr:>  finances,  sur  la  j>résentation  des 
5.ociélaires  des  salines  de  l'est ,  aux 
fonctions  de  vire-président  de  celte 
ronjpagnie.  Il  les  exerçait,  lorsque,  âgé 
de  «soixante  dtx-sppt  ans,    il  mourut  à 


Fontenay-aux-Roses  près  Paris,  le  11 
septembre  182'2.  11  n'a  manqué  à  son 
honorable  entreprise  que  le  succès  pour 
immortaliser  son  nom.  —  Jarjayes 
(  Louise-Marguerite  -  Emilie  Quet- 
pée  de  Laborde,  madame  de) ,  femme 
du  précédent,  obtint  de  la  reine  Ma- 
rie-Antoinette la  plus  entière  confiance 
et  s'en  montra  digne  dans  toutes  les 
occasions.  Pendant  les  plaidoiries  au 
tribunal  révolutionnaire  ,  Chauveau- 
Lagarde  qui  avait  parlé  le  premîér, 
était  déjà  en  arrestation  ,  lorsque  la 
reine  remit  à  Tronson  duCoudray,  son 
autre  défenseur,  une  boucle  de  ses  che- 
veux et  deux  anneaux  d'or  qui  lui  ser- 
vaient de  pendants  d'oreille  depuis  sa 
captivité.  En  fouillant  cet  avocat,  qui 
fut  aussi  arrêté,  on  trouva  sur  lui  c*es 
précieux  objets  ;  il  fut  aisé  d'en  con- 
naître la  destination,  puisque  le  nom 
et  l'adresse  étaient  sur  l'enveloppe. 
INladame  de  Jarjayes  fut  incarcérée  aux 
Madelonnettes  pour  avoir  reçu  cette 
preuve  touchante  du  souvenir  de  celte 
princesse;  elle  y  resta  six  semaines. 
Mise  en  liberté ,  elle  fut  arrêtée  de 
nouveau  pour  la  même  caise  et  avec  la 
plus  grande  partie  de  sa  famille  ,  et  ne 
recouvra  la  liberté  qu'au  bout  de  neuf 
mois,  après  la  chute  de  Robespierre. 
Cette  dame  mourut  à  Paris  le  23  juin 
1837.  E— K— D. 

JAROPOLK  ou  JARO- 
P  E  L  K  l^*^,  cinquième  grand-duc  de 
Russie, succéda  à  Snn  ientoslas  1  *^^  (  Voy. 
ce  nom,  XL1V,278).  S' étant  laissé 
entraîner  par  des  insinuations  perfides, 
il  déclara  la  guerre  à  son  f/ère  Oleg, 
dont  il  déplora  sincèrement  la  mort  ; 
quand  il  vit  sous  ses  yeux  son  corps  en- 
sanglanté {Vuy.  Olig,  XXXI,  564), 
peut-être  éprouvait  il  un  pressentiment 
secret  du  .sort  qui  l'attendait.  Son  au- 
tre frèr?  ,  Vladimir-le-Grand  {Voy. 
renom,  XLIX,  3i7),  réfugié  chez 
les  Vaiègiies  ou  ^iormands,  desquels 
descendait  la  famille  régnante  de  Rus- 


JAR 

Aif,  i'iumt  ivanc^  à  la  (c(«  d'un  corps 
de  troupe*  jusqu'à  Km^,  proposa  a 
JaropolL  de  \riiir  Ir  truu\rr  pour  m* 
roucritrr.  lu  bra^e  »er\itcur  appelé 
Variajlo  employa  tous  le>  mu^ens 
pour  en  JéCouruer  le  in  iure  :  ••  Crai<;nex 
••  celte  entrevue ,  lui  dirait  il  :  vous 
M  D*cn  retiendrez  point  ;  rëfu^iet- 
«  vous  près  des  Pies^rngowiens  ou 
«  Pclfhéné^ues,  renlrei  à  la  tèle  de* 
«  troupes  qu'ils  vous  donneront  ,  et 
«  vous  ferez  la  loi  à  ^  ladimtr  »*  Mal- 
gré re  conseil  •<>a<;e,  Jaropolk  alla  trou- 
ver le  \ainqueur,  et  il  (ut  r^or^é  par 

luiiiwn.  r.-v 

J  AUOSMF  II.  d 

tvitili,  Iroisii-ine  fil*  de  \  1 1 1 

[\  oy.  ce  nom,  \I.IX,  5hh  ,  succéda 
en  1238  à  <ou  fn-re  aine,  (îeor^e  II 
[f'uy.ce  nom,  \ Vil,  H7),  dans  le 
^raud-duclié  de  Russie.  I^  bataille  de 
Site  a>ant  été  perdue,  les  Tarlares  qui 
ne  rencontrèrent  plus  d'ol>s;arlcs  s'a- 
vancèrent surSouzdalet  kuzelsL,  tout 
fut  pillé  et  massacré.  Ualu  klian  {f  uy. 
Bati',  III.ÔJI),  rassasie  de  ramage  , 
se  retira  pourquelqttr  (enipssur  le  Don, 
et  Jaroslaf  quitta  kio\»  afin  de  pien- 
dre  possession  du  ^rjnd-durlie  dont  la 
ville  capitale  était  Vladimir  ^l^ilS,  ; 
peu  après  on  apprit  que  Ilatu  s'avan- 
çait de  nou>eau  pour  de>a>ter  les 
Î provinces  méridionales  de  l'empire, 
'éréiaslafet  Tclierni^ow  furent  pillées, 
bridées  ;  de  là  Halu  marcha  sur  Kiow 
qui ,  ap:  es  une  défense  coura;;cu»e  , 
éprou\a  le  mrrae  sort.  Ainsi  disparut 
pour  jamais  celle  antique  capitale,  que 
les  annales  du  temps  appellent  la  mcrr 
des  villes  russes.  Uien  n'>  fut  épar- 
gné, pas  même  l'asile  sarre  iks  tom- 
beaux. Lesé<;lis€s,  construite^  par  des 
architectes  {;recs,  furent  miiu-es  jus- 
qu'aux fondements.  Le  piince  Déraé- 
trius,  qui  par  ordre  du  -raiid-duc  avait 
défendu  Kiow,  fut  pris  Us  arme*  .i  la 
main  et  amené  de\ant  IJalu,  qui,  con- 
tre 6on  ordinaire,  lui  dit   :  Je  t\ii  - 


J.VR 


lo^ 


corde  lu  vie.  De  kiow,  lialu  i'avança 
sur  llalirxet  sur  lespro\inces  que  nous 
appelons aujuiirdMiui  la  (lallirie;  de  là  il 
se  jeta  sur  la  lloii^ilr  .«  Il  semljait, 
"  disent  les  annalistes  du  temps,  qu'un 
•■  neu\e  de  feu  »e  fût  luulé  ^ur  la  IVus 
«  $ie,  deuuis  les  ri\rs  de  l'OLa  jusqu'à 
••  celles  uu  San.  Vared  à  une  béte  fé- 
M  roce,  Ikitu  décorait  les  provinces  et 
«  en  déchirait  les  restes  a\ec  kCs  grij- 
«  fes.  Les  plus  vaillants  parmi  I« 
••  prinres  russes  étaient  morts  dans  1rs 
M  cnndiats,  les  auIre^  erraient  sur  des 
•«  terres  élranj;ere».  Les  mrrrs  pleu- 
«•  raient  Ir'jrs  rnfanis  qu'elles  a%aient 
•  \\x  écraser  sous  les  clie\aux  des  Tar- 
u  lares,  ou  e\|»oser  à  àes  traitements 
«  ignominieux."  Hatu  ajant  conduit 
les  dépouilles  de  la  Uussiefur  les  bords 
de  la  mer  Caspienne  ,  en>o>a  de  là  à 
Jaroslaf  l'ordre  de  \enir  le  reconnaître 
pour  souverain.  Le  >;rand  duc  obéit,  et 
du  camp  de  Uatu  il  fit  partir  Cons- 
tantin, le  plu  jeune  de  Ke>  fils,  pour 
aller  en  Tar'.arie  se  prosterner  aux 
pieds  du  ^rand  Ihan  ,  Oltaï-klian, 
{iny.  ce  nom,  WXI,  5J9]  qui  cé- 
lébrait les  victoires  que  s«  armées  ve- 
naient de  remporter  en  (>hine  et  en 
Kurope.  J.iro>laf,  accuerlli  par  Halu 
avec  distinction,  fut  nommé  chef  des 
princes  russ«s  ;  et,  deux  uns  après  , 
Constantin  re\in(  de  la  Tarlarie  ap- 
portant avec  lui  l'ordre  intimé  à  son 
père  de  se  rendre  à  la  r;rande  Iior- 
de.  Jaroslaf  n'était  point  en  mesure 
de  déM)bcIr.  \\anl  fait  ses  adieux  à 
la  Russie  qu'il  n'espérait  plus  rooir, 
il  .irri\a  4;r  les  bords  du  ncu>e  Vrnoui , 
et  là  il  subit  une  nouvelle  humiliatiort. 
Contraint  de  se  prosterner  de\ ant  le  trô- 
ne du  ^rand  khan,  il  rnoiirut  de  douleur 
.ÎOsrpt.  |2V6)cn  re\enaiitdcre!:on- 
^^ux  voyage.  Il  fut  le  père  d  Alexan- 
dre Newsli,  si  céltbro  dan^  les  annale.*; 
delà  Russie  ^/oj.  Ai.kxam.ke,  J, 
.'riS;,  et  d'Andic  Jaro.<lawilfh  ^Vo)  . 
Andrk,  LV|,2v2v  G— y 


io4 


JAPx 


JARRIC  (Pierre  DU),  jcsuiie, 
né  à  Toulouse  en  1565  ,  professa 
pendant  quinze  ans  la  théologie  nio- 
nh  au  collège  de  lîordeaux  ,  avec 
beaucoup  de  réputation ,  et  mourut  à 
Saintes  en  1616.  Il  est  auteur  de 
Wllistoire  des  choses  juénwrahles 
adoenues  tant  es  Indes  orientales 
que  autres  pays  de  lu  derom^erte 
des  Portugais  ,  «Uc.  ,  Bordeaux  , 
1608-16I0'-1614,  3  vol.  in-V.  Cet 
ouvraoje,  rare  et  recherché  ,  a  élé 
traduit  en  latin  par  le  P.  Ma!h.  Mar- 
tiiiez  ,  Cologne,  1615,  3  vol.  in-8". 
Dans  le  principe,  Jarric  s'était  seule- 
inen!  proposé  de  mettre  en  français  les 
relations  publiées  par  lesjésuites  italiens 
et  espagnols  sur  les  établissements  que 
la  société  venait  de  former  en  Améri- 
que. Mais  chaque  écrivain  ,  n'ajant 
traité  que  d'une  province  ,  donnait 
des  détails  omis  par  les  autres  ;  et,  à 
moins  de  lire  toutes  ces  relations,  on  ne 
pouvait  avoir  qu'une  idée  incomplète 
des  travaux  des  missionnaires  dans  le 
Nouveau-Monde  ,  et  des  pays  dont 
Ils  avaient  ,  pour  ainsi  dire  ,  fait 
une  seconde  fois  la  découverte.  Jar- 
ric renonça  donc  à  son  projet  ,  et  , 
prenant  dans  la  relation  de  chaque 
missionnaire  ce  qu'il  y  avait  de  plus 
intéressant,  en  coniposa  rouvrafi;e  dont 
il  s'af^it.  JJien  qu'il  n'ait  pas  été  , 
comme  on  le  dit  dans  la  Biographie 
Idulousuine  (1),  témoin  oculaire  des 
faits  qu'il  rapporte  ,  son  ouvrage 
n'en  contient  pas  moins  sur  les  mœms 
des  Indiens  et  sur  l'histoire  naturelle 
de  l'Amérique  une  foule  de  détails  dont 
les  récits  des  nouveaux  voyageurs  ont 
confirmé  l'cxachlnde.  La  bibliothèque 
de  Toulouse  possède  quelques  manu- 
scrits de  Jarric.  W — s. 

(t)  Le  1*.  du  Jar.-ic  a  deux  article»  dari%  la 
li'ogtuphie  loulouiaint.  C'est  dans  l<;  setonil  (I  , 
45G  ,  quesr  trouvant  le»  moU  soulignés.  Uiin»  !<• 
preiiiHjr  (I,  334),  1<-'  redjcleur  dit  que  rouvrd;;c 
de  Jarri'' ,  «lonl  il  change  le  titre  m  celui  de 
Tr,tor  de  l'hntoire  des  fndes,  ne  iiicriloit  pas 
l'hunncur  d'être  traduit  en  latin. 


JAR 

J  A  R  R  Y  (Pierre-François- 
Théophile)  ,  chanoine  de  Liège  et 
écrivain  ecclésiastique  ,  était  né  en 
mars  1764,  à  Saint-Pierre-sur-Dive, 
en  Normandie.  Il  commença  ses  études 
en  province  et  vint  les  achever  à  Pa- 
ris ;  mais  il  n'eut  point  le  temps  de 
faire  sa  licence  en  Sorbotine,  la  révo- 
lution avant  fermé  celte  célèbre  école. 
Nommé  curé  d'Escots,  paroisse  voisine 
du  lieu  de  sa  naissance  ,  il  ne  fit  que 
prendre  possession  de  sa  cure  et  fut 
obli".é  de  s'éloiîrner  immédiatement, 
par  suite  des  persécutions  qui  tu- 
rent dirigées  contre  le  clergé.  Non 
content  de  refuser  le  serment  ,  il  le 
combattit  par  quelques  écrits.  En 
1791  il  se  retira  à  Jersey  d'où  11  passa 
en  Angleterre  l'année  suivante,  et  de  là 
en  Allemagne.  Nous  croyons  qu'il  sé- 
journa quelque  temps  dans  l'évcché  de 
Liège  et  à  Maestricht.  On  lui  attribue 
une  instruction  pastorale  du  prince- 
éveque  de  Liège  sur  les  causes  de  la 
révolution  et  sur  les  moyens  d'en  arrê- 
ter les  progrès  ;  celte  instruction  est 
datée  de  Burgos,  mais  cette  date  n'a- 
vait élé  imaginée  sans  doute  que  pour 
dérouter  les  persécuteurs ,  car  ni  l'é- 
vêque  ni  l'abbé  Jarry  n'étaient  allés  en 
Espagne.  L'évéque  d'Auxerre,  M.  de 
Cicé,  qui  connut  l'abbé  Jarry  en  Alle- 
magne, lui  donna  le  titre  de  son  grand- 
vicaire  en  1798.  Pie  W  ,  alors  exilé  à 
Florence,  le  nomma  archidiacre  et  cha- 
noine-1  réfoncier  de  l'église  princière  de 
Liège;  mais  les  événements,  qui  devin- 
rent.de  jour  en  jour  plus  funestes,  ne 
permirent  pas  à  l'abbé  Jarry  de  jouir  de 
celte  prébende.  Il  demeura  long-temps 
à  Munster,  enWestphalie,  où  plusieurs 
évéqiics  français  et  un  grand  nombre 
d'ecclésiastiques  étaient  réfugiés.  Son 
esprit  cultivé ,  sa  conversation  pi- 
quante et  ses  manières  aimables  lui 
concilièrent  l'estime  de  plusieurs  sei- 
gneurs allemands.  Il  eut  part  à  la  con- 
version du  célèbre  comte  de  Stolberg, 


JAK 

pl  dans  lr>  dftiiirrs  (rinp«  ^e  %*  >ip 
il  entrrirnait  rncuir  unr  rorre^^oii 
dancf  avec  M«  anii^  dr  NVe>i|tlialip.  Il 
•e  rcnira  point  en  Kranre  »prrs  If  con- 
cordai, ^  (il  veulrinrni  un  rourt  «o>j^e 
en  1H07,  el  ne  rr\inl  loul-a-fail  au'a- 
ptr^  la  rf5lauralion.  Ketiré  â  Falaise 
aoprès  d'une  parente  ,  il  va  pas*e  se-, 
der nirres  annrrs,  parta^^eanl  M)n  lpinp> 
entre  |«  fxfifire^  de  piete  cl  IVludr. 
Avant  écrit  en  18! (>  une  lellrr  dr  fr- 
lirilatinns  à  l*ie  ^  Il  «nr  »nn  retour 
dan^  <es  ^tat»,  ce  pnnlifc  lui  adressa  le 
29  juin  un  bref  lionnralde.  l/eȏque 
de  Ha\eux  lui  donna  le  litre  de  vicaire- 
^éoéral.  I.'abbé  Jarrv  s'aDli^^eail  vive- 
ment de^  maux  de  la  religion  ;  il  s'ef 
frayait  du  délire  des  opinions  et  de  la 
lirenre  de  la  presse.  \jk  mort  du  duc 
de  Berrv  fit  sur  lui  une  ^i%e  imprei- 
sion.  Il  t'était  rendu  a  l.i^ieiii  pour 
assisler  k  une  retraite  erriesiastiqur, 
lorsqu'il  fut  atteint  de  la  maladie  qui 
remporta,  le  M  août  iH-Jit.  On  a  de 
lui  un  avsez  ^rand  nombre  demis  qui 
montrent  autant  de  talrnt  que  de 
tèle.  I.  Questûm  sur  Ir  serment, 
1791,  in-8".  II.  L\Me  t'uuchet 
peint  par  lui  tnème,  Jersev,  2  août 
1791,  in-H"  de  62  paoes!  III.  lie 
de  tahltr  Faw  hrl .  Jersev,  1791. 
in-8o  jj.  30  pjj.  |\  Cxintruste  en- 
tre un  tfuakrr  et  fu/pôe  taurhet, 
Jersev,  1791  ,  in  8°  de  Ô9  paj;. 
Ces  opuscules  ,  publiés  sous  le  nom 
de  l'abbé  de  N  alméron  ,  sont  diri»;rs 
contre  Kaurlict ,  é>équf  fonslilution- 
nel  du  CaUados.  V.  Discours  sur  ta 
délivrante  de  Muestrirht ,  1793. 
^I.  Oraison  Junehre  du  cardinal 
de  La  Hurhe/uucauld ,  Munster, 
18(»1,in-r  de  51  pap.  V||.  (trai- 
suri  funrhre  de  la  comtesse  Antoi- 
nette de  Kaunitz-Ricthiurg,  1803, 
in-8".  \j|j.  Dissertdliun  sur  /V- 
piscopat  de  s/iint  Pierre  a  Antio- 
chr,  Paris,  1S()7,  in  8"  de  103  pa-. 
C'est  une  réfutation  d'un  religieux  al- 


JAR 


o5 


temand,    MnlLenbulii  ,    qui  avait  pu 
bbe,  de  ITHô   a   1801,  plus  de  vin^l 
dissertations  critiques   ou    il  niait  les 
faits  le»   plu»  avérés  dr   l'iiistoire   ec- 
clrsiaslique.  L'abbé  Jairv  a%ait  rédi|;é 
un  ou«ra|:e   latin    pour  lui   repondie, 
niJiN  il  ne  l'a  |M>iiit   publie:  !>i  disser- 
tatittn  est  un  eiliail  de  crt   oii\ra^e. 
I  \  .  i.tunien  dune  dissertation  sur 
la  mitigation  des  peines  des  tia/n 
nés,    l^ipxi^.    1810,  in-8"   de    200 
pa{>es;  c'est  une  réponse  à  une  di.\.srr 
tation  de  l'abbr  Kmer>  qui   n'a   point 


ele  publiée,  mais  dont  on  avait  eiivovr 

Îuelques  exemplaires  a  !^!unsler.  X. 
)u  retablisxrment  de  C empire  fier- 
maïuifue  tel  tfuil  était  avant  1792, 
fMir  un  tre/ontirr  de  Liège,  l*aii>, 
181  i,  in-8".  XI.  Discours  sur  lit 
catastrophe  du  2t>  mars  et  Mtr  U  re- 
tour (/u  ro/.  ibid.,  Ihl .'),  in-8".  XII. 
Discours  prttnoni  e  a  Houen  a  la  .S7- 
Louis,  1816.  l'aris,  1817  XIU. 
Sur  uiint  Hermenegtlde,ftnr  l  .  A . 
T.  I).  L.  ton  ancien  trefoiirirr  dr 
l.ié^e,  Paris,  1817.  iu-8  '  de  G8  pa 
ges  ;  c'est  une  réponse  à  un  arlirir  de 
Malle-Brun  dans  le  Journal  des  Dé- 
bats du  7  mars  1812;  à  la  6ii  il  Y  a 
deux  notes,  l'une  sur  V Essai  sur  fo- 
raison  funehre  de  .M.  N  illemain  , 
l'autre  sur  VUistuirr  du  lias- Empire 
de  Kovou.  XIV.  Orai.utn  fuiuhre 
du  prince  de  (.onde,  l'aiis,  1818, 
in-8";  ce  discours  ne  parait  pas  avoir 
elé  prononcé  ;  il  renferme  des  considé- 
rations élevées  sur  nos  niallieuis  et 
sur  leurs  causes.  W.  De  la  Uiei  té 
de  la  presse,  ibid.  ,  1819,  111-8" 
de  52  pa^,  XVI.  Sur  la  petite 
église,  ibid.,  1S20,  in-8"  de  i6 
pa^es.  Il  V  a  des  choses  curieuses  daiLS 
cet  écrit,  qui  est  une^poiise  à  des  ec- 
désiastiours  du  Mans,  l/abbe  J^rry 
était  un  homme  de  mérite  et  de  tale|^. 
Plu-ietirs  des  écrits  ci-de,>5us  sont  re- 
marquables par  les  pensées  et  par  la 
vene  du  si) le.  P— t — T. 


i<»6 


SAS 


JASIXSKI  (Jacques),  général 
polonais,  né  en  Lithuanie,  était  lieu- 
tenant d'artillerie  pendant  la  campa- 
gne que  les  Polonais  soutinrent  en 
1792  contre  les  Russes.  En  1794  se 
trouvant  presque  seul  au  milieu  de  la 
Lithuanie.- occupée  par  les  Kiisses  ,  11 
courut  et  exécuta  le  dessein  de  délivrer 
la  ville  de  Wilna  et  de  soulever  la  pro- 
vince. Dans  la  nuit  du  2:î  au  ^ï  avril 
1794,  n'ayant  avec  lui  que  cinq  cents 
hommes  ,  il  tomba  sur  la  garnison 
qui  était  de  trois  mille  Russes,  en  fit 
prisonniers  plus  de  deux  mille  avec 
leur  générai  Arsenlew,  et  son  état-ma- 
jor, et  répandit  au  loin  la  terreur  de 
son  entreprise.  Kocluszko  appela  au- 
près de  lui  ce  chef  entreprenant  et  le 
plaça  dans  le  conseil  national.  Ja- 
slnski  fit,  mais  bien  inutilement,  des 
prodiges  de  valeur  à  l'assaut  de  Praga. 
Il  tomba  après  avoir  vendu  chèrement 
sa  vie.  La  veille  de  l'assaut,  Il  avait  dit 
à  ses  amis  que  si  les  Russes  n'étaient 
point  repousses  on  ne  le  verrait  plus: 
il  tint  parole.  G — y. 

JASOX,  frère  d'Onias  III, 
grand-prêtre  des  Juifs  [f^oy.  Onias, 
XXXH  ,  14),  dépouilla  celui-ci  du 
souverain  pontificat  qu'il  obtint  à  prix 
d'argent  d'Antiochus-t^piphane  ,  roi 
de  Svrie,  sous  la  domination  duquel 
était  alors  la  Judée  (175  avant  J.-C). 
Loin  d'imiter  la  piété  de  son  frère,  il 
s'efforça  d'introduire  parmi  les  Juifs 
les  mœurs  et  les  coutumes  des  païens. 
Quelques  années  après,  Ménélaiis,  que 
Jason  avait  envoyé  auprès  d'Antio- 
chus,  gagna  les  bonnes  grâces  de  ce 
monarque  et  en  acheta  à  son  tour  la 
dignité  de  grand-prètre.  Revenu  à  Jé- 
rusalem, il  en  expulsa  Jason  qui  se  ré- 
fugia chez  les^mmonites  ,  mais  qui 
h^ntôt,  sur  un  faux  bruit  de  la  mort 
^u  roi  de  Syrie,  ra  sembla  mille  hom- 
mes, et  pénétra  dans  la  capitale  de  la 
Judée,  où  il  commit  toutes  sortes  de 
violences,  sans  pouvoir  néanmoins  res- 


JAS 

saisir  l'autorité.  Contraint  de  prendre 
la  fuite,  il  erra  successivement  en  Ara- 
bie, en  Egypte  et  se  retira  enfin  à 
Lacédémone,  où  il  mourut  misérable 
et  méprisé.  Tel  est  le  récit  de  l'auteur 
du  second  livre  des  Machabées  ;  celui 
de  Flavius  Josèphe  (Antiq.  jud.)  est 
moins  étendu  et  diffère  sur  quelques 
détails  généalogiques. — Jason  de  Cy- 
rène  écrivit  en  grec  l'histoire  des 
persécutions  exercées  contre  les  Juifs 
par  les  rois  de  Syrie.  Son  ouvrage  est" 
perdu  ;  mais  il  en  reste  un  abrégé, 
écrit  aussi  en  grec  par  un  auteur  dont 
le  nom  n'est  pas  connu.  Cet  abrégé 
forme  le  second  livre  des  IMacha- 
hées.  — Jason  de  Thessalonlque,  cité 
dans  les  Actes  des  apôtres  (chapitre 
xvii),  et  dans  VEpitre  aux  Romains 
(xvi),  était  parent  de  saint  Paul  et 
le  logea  chez  lui  avec  Sllas,  son  com- 
pagnon de  voyage.  Les  Juifs  de  la 
ville,  étant  venus  assaillir  la  maison  de 
Jason  pour  se  saisir  de  ses  hôtes  et  ne 
les  ayant  pas  trouvés ,  le  conduisirent 
lui-même  devant  les  magistrats  qui  le 
renvoyèrent  absous.  Suivant  les  Grecs, 
il  fut  d'abord  évêque  de  Tarse  et  en- 
suite d'Icône.  P — rt. 

JASOX  de  Phkres,  un  des  prin- 
ces les  plus  célèbres  de  la  Grèce,  dut 
naître  vers  le  temps  de  l'expédition  des 
Athéniens  en  Sicile,  c'est-à-dire  de 
41 G  à  41 3  avant  J.-C.  Sa  famille,  la 
plus  noble  et  la  plus  opulente  du  pays, 
■  faisait  remonter  son  origine  aux  an- 
ciens rois  de  Thessalie,  et  ne  le  cédait 
point  en  illustration  aux  fameux  Alé- 
vadcs  de  I>arisse.  Lyrophron  son  père, 
était  le  premier  personnage  de  Phères 
où  il  joua  un  grand  rôle  politique,  fai- 
sant alliance  avec  Sparte,  baîlani  à  la 
tête  de  l'armée  phéréenne  les  Laris- 
séens  et  d'autres  peuples  de  Thessalie, 
vers  le  temps  de  la  grande  éclipse  so- 
laire du  \\  septembre  404 avant  J.-C; 
et  probablement  il  couvait  des  plans 
très-vastes,  lorsqu'il  mourut  vers  396. 


JAS 

11  UfHJI  9lttl8»  projfti  de  ^^rand^s 
rirWt»  à  M*  trois  ftU,  Jison,  I'ol>  - 
pliroji ,  Put)  dore.  JA<ion  reuiiii^sait 
toutes  les  qualil»  qui  peuvciil  don- 
ner la  popularité  dans  uue  cilr  ^uer- 
rièrr  :  uue  (;énrroMle  saus  boroe»,  un 
Corp»  de  fer,  un  courage  invincible  , 
la  liardie.v»e  à  ritiirooK  ,  la  circou>pec- 
tion  et  la  rapidiic  dji)«  Tr^iruiion; 
qu'on  V  joigne  i'adie»^»*  mre, 

1  art   de    coordonner   •  les 

mo>rii>auii  rao^rn^pitui  jumci  jubul, 
enfin  unearti\ile  qur  ui  lr>oliNljrles  m 
même  les  «ucrr»  nr  pomairiil  paraU  ser, 
on  comprendra  combien  Ja.son  de%ai( 
a^ir  sur  l'imagination  mobile  et  \ite, 
kur  Taudace  va^aUmde  et  a%eniareu>e 
de  la  (iicre.  11  est  vrai  que  seuls 
rilcllade  et  le  IVIo|N>Hè^  a\ aient 
).i(lis  prétendu  au  liire  de  (irece  et 
qu'à  lllUrie,  àl'Kpire,  à  la  Ma- 
cédoine qualiijées  de  barbares,  l'or- 
i;ueil  des  Donen»  et  lonirns  du  sud 
avait  joint  la  1  brvs^iie.  .Mai»  ce*  ana- 
thrmc»  burannes  ne  truairnl  point 
contre  les  rait>  :  presque  toute  la  clas^e 
duminanle  de  1  liCN>alie  participait  à  la 
civilisation  «grecque;  et ,  à  mesure  que 
l'on  s'éloignait  des  premières  tjuerres 
mcdiques,  les  lumières  se  répandant  de 
proche  en  proclie  projetaient  leurs 
ra>ons  sur  les  peuplade>  restées  en  ar- 
rière. D'autre  part  la^ueire  du  l'elo- 
ponese  avait  uié  li'>  iorces  des  deux 
grandes  républiques  méridionale^,  et 
déjà  se  dessinait  ce  ;irand  phénomène 
de  l'or^ani^e  social  en  (Wece  ,  l'iin- 
pui-ssanrc  asecenUaliser.  Allu-nes avait 
inemedublemenl  perdu  sa  suprématie, 
et  la  victorieuse  Sparte,  mal;;re  ses  ef- 
forts pour  en  hériter,  allait  reculer  mé- 
mo en  Pcloponèse.  C'est  en  ce  mo- 
ment et  pendant  les  tenlaiivcs  des 
Thvmbion,  des  Derollidas,  des  A;;é- 
silas  en  Asie  que  Jason  parut  sur  la 
scène,  l  ne  suite  d'artifices  et  d'intri- 
i^ues,  sur  lesquelles  nous  n'avons  point 
de  ren»ci^iiemenis,  lui  valut  la  totalité 


JAS 


107 


00  peu  s'en  faut  de  l'héritage  paten»el 
au  préjudice  de  >ehdeui  frt-res,  et  biea- 
tdt  au  sein  de  sa  ville  natale  la  souve- 
raine autorité  ,  autorité  illégitime  et 
usurpée,  il  est  vrai,  mais  qui  n'empor* 
tait  pas  essentiellement  par  elle-méoie 
l'idée  odieute  que  les  modernes  atta- 
chent avec  raison  à  l'uMiipation.  Kn 
effet,  à  peu  d'exceptions  pre^,  le^  pe- 
tits^als  de  la  (îrece  étaient  »anN  cevse 
a^ilX  par  de*  roolniioiM  qui  faisaient 
passer  le^  pouvoir  ratieà  la 

démocratie,  et  rer:j  '.et  qui, 

M  elles  n'euNsenI  ele  en  pai 

la  ferocile  ;;eiKrale  du  lu  ,  ,  nent 
offert  une  pande  analogie  avec  ces  brus- 
ques chan,;eroents  de  roini.vlère  qui  »em- 
blent  devenir  l'elal  normal  du  gouver- 
nement représentatif  :  l'aristocratie, l'es- 
prit dorien,  reprr^ntaient  la  résistan- 
ce, le  parti  conservateur  ;  la  démocra- 
tie, l'esprit  ionien  au  contraire, aspirait 
au  mouvement,  à  l'innovation,  i.e  mal 
de  la  (iiece  fut  que  généralement  les 
deux  svNiemes  »e  balancèrent  eiacte- 
menl,  et  qu'aucun  n'eut  asseï  de  su- 
périorité |>our  terrasser  l'autre  et  se 
sentir  de  l'énergie  de  reste.  1^  bien  des 
guerres  civiles,  c'est  qu'un  partr  écrase 
l'autre  proroplemenl,  sans  que  du  cMc 
du  vainqueur  la  déperdition  de  forces 
amene-la  prostration,  de  sorte  qu'avec 
ce  qu'il  se  trouve  de  forces  libres  et 
disponibles  exerrees  par  la  lulte  et 
exaltées  par  le  triomphe,  le  maitre  du 
chjin|>  de  bataille  les  applique  iramé- 
di.ilenient  et  a  l'aise  ^  quelque  u-uvie 
utile  et  grande.  C'e>t  ce  qui  ne  pouvait 
>e  léali.ser  en  (irèce  que  sur  les  ruines 
des  deux  parti.s  ,  en  d'autres  termes, 
ce  qui  ne  pouvait  se  réaliser  que  par  un 
tvran.  I,e  t\ran  au  milieu  de  ce  flux  et 
rellux  des  deux  partis,  c'était  au  roi- 
lielrdes  ministères  au  jour  le  jour  lecoi 
qui  rè^ne  et  gouverne,  indiflerent  et 
supérieur  aux  devises  des  partis  ,  usant 
des  forces  des  uns  et  des  autres,  les 
haraoniant  et  les  faisant  converger  en- 


io8 


JAS 


semble.  Malheureusement  le  aéniesrec 
était  antipathique  àcerégimesahitaire  : 
nulle  tyrannie  ne  naquit  viable  en  (iiè- 
ce.  Il  lui  fallut,  pour  qu'elle  a^it  coinine 
corps  unique,  des  princes  qu'elle  re<^ar- 
ilait  comme  élrano;ers,  un  Philippe,  un 
Alexandre:  encore  Sparte, TEtolie  et 
bien  d'autres  contrées  prolestèrent - 
elles  par  une  malveillante  inertie;  et  l'u- 
nion factice  des  Grecs  sous  le  Mkîtec- 
torat  macédonien  fut-elle  aussi  rapide- 
ment dissoute  que  péniblement  établie. 
Peut-être  eût-elle  eu  plus  de  chances 
de  durée  si  le  centre  de  l'autorité  eût 
été  la  Thcssalie,  si  le  généralissime  de 
la  Grèce  eût  été  Jason  :  le  cri  »  à  bas 
l'étranj^er  !  »  eût  eu  moins  d'écho  ;  la 
répulsion  n'eût  point  été  si  vive  :  la 
ïhessalie  était  le  berceau  des  Grecs  du 
s-id,  elle  touchait  aux  Ioniens  ,  elle 
avait  encore  une  Doride,  elle  avait  les 
l^liermopvles  ;  sa  cavalerie  était  la  meil- 
leure connue;  ses  ports,  son  commer- 
ce lui  donnaient  quelqu2  ressemblance 
avec  Athènes.  Telles  sont  les  considé- 
rations qui,  graduellement  ,  amenèrent 
Jason  aux  plans  fiiQ;antesques  qu'il  finit 
par  concevoir,  mais  qui  n'eussent  été 
que  de  la  démence  s'il  eût  débuté  [)ar 
y  sonj;er.  Ce  qui  classe  cet  usurpateur 
parmi  les  grands  hommes  ,  c'est  que 
son  bon  sens  n'était  pas  moindre  que  la 
largeur  de  ses  vues  ,  c'est  que  ses  idées 
s'agrandirent  par  le  succès  comme  ses 
succès  par  ses  idées,  c'est  qu'il  ne  tenta 
jamais  que  ce  dont  il  était  sûr,  et  par 
conséquent  qu'il  ne  manqua  pas  une 
de  ses  entreprises.  Une  fois  maître  ab- 
solu à  Phères  (390),  il  mit  ses  soins  à  se 
former  un  noyau  de  troupes  d'élite,  il 
le  porta  en  peu  de  temps  à  six  mille 
hommes  ,  tous  choisis  parmi  les  plus 
robustes  et  les  plus  braves,  bien  exercés, 
bien  payés,  ne  respirant  que  la  guerre, 
ne  connaissant  que  Jason.  Sans  cesse 
au  milieu  d'eux,  souvent  vêtu  comme 
eux,  mangeant  comme  eux,  jeûnant 
comme  eux  et  plus  long-temps  qu'eux, 


JAS 

Jason  était  leur  type  et  leur  mo- 
dèle, leur  idole  et  leur  espoir.  H 
récompensait  libéralement  leur  va- 
leur ;  aux  blessés,  aux  malades  il  prodi- 
guait des  soins;  des  obsèques  lionora- 
bles  accompagnaient  les  morts  à  la 
tombe.  A  quiconque  se  dégoûtait  du 
service  ou  ne  s'y  portait  qu'avec  peu 
de  zèle,  il  accordait  facilement  son 
congé.  C'était  le  temps  oii  les  mer- 
cenaires commençaient  à  fourmiller  en 
(jrrèce.  Jason  peut-être  fut  un  de  ceux 
qui  contribuèrent  à  introduire  celléau; 
mais  ses  mercenaires  étaient  la  plupart 
Thessaliens  :  ceux-là  au  moins  étaient 
presque  des  nationaux;  et,  si  ses  plans 
se  fussent  réalisés  ,  ils  l'eussent  été 
complètement.  Les  mercenaires,  d'ail- 
leurs, étalent  les  seiils  éléments  alors 
possibles  de  troupes  permanentes,  et 
des  troupes  permanentes  étaient  la 
condition  essentielle  de  toute  puissance 
durable.  Avec  l'augmentation  de  son 
armée  Jason  faisait  marcher  de  front 
les  mesures  politiques,  et  amenait  par 
d'habiles  préparatifs  l'instant  de  frap- 
per les  grands  coups.  Il  étendait  en 
pleine  paix  son  inlluence  sur  tous  les 
points  de  la  Thessalle;  son  hospitalité 
magnifique  attirait  les  notabilités  voisi- 
nes à  Phères  et  lui  valait  d'utiles  liai- 
sons; il  affectait  du  goût  pour  les  arts, 
pour  l'éloquence,  et  ses  flatteurs  le  re- 
présentaient comme  se  livrant  lui-mê- 
me, ainsi  que  Denys,  à  la  composition 
d'oeuvres  littéraires  :  il  charmait  les 
Athéniens  en  venant  sA  gardes  dé- 
fendre en  personne,  devant  les  tribu- 
naux démocratiques  d'Athènes,  son  ami 
le  général  Timothée,  Ce  mélange  de 
force  et  d'adresse  lui  soumit  de  bonne 
heure  diverses  peuplades  de  l'ouest  et 
du  sud,  les  J)olo[)es,  habitants  des 
Callidiomes,  les  Maraces  sur  les  fron- 
tières de  l'Etolie,  les  Énianes  et  les 
Drvopes  répandus  sur  les  versants  de 
rcAlla,  tous  intrépides  montagnards 
qui   ne  demandaient  pas   mieux    que 


JA> 


JAS 


i«o 


il  ilie  coniluii  .  j-ai   un  cliff  lubilr  fl 
lieurrux.  au  |»iilj,;e  •!''  coiilrcf-»  \oi*i 
nr*.  (iii^T  i    u)u  srcour»,    Nf();icne, 
tu<n   J'Ili  t  rr  .   en    recolle     mnlre 
Alhriir  (  son  jiuloiilr  en  ^te- 

nant L  <  '  iiinnr  (ui\int  a  do- 

miner   (hu^r.     luuinanl    ruNuile    au 
nord,   il   profila  i\e^  lii  seasiou»  lie  la 
maison  ro> aie  i^sur  de  Caranu*.  pi»ur  in- 
tcr^enii  dans  lf>  aiïairc*  de  la  Marédoi- 
ne.  Annnla^  III,  en  av5a*»inanl  l'u^ur- 
paleur  ^ausaniai.n'axail  (oni{u:><|u'uii 
trône  clianrelanl  (.JlMi)  ;  les   HlMiolei 
is'élaient  abattu»  sur    la    Macrdoine  et 
après  a^oir  réduit  le  pau\re  monarque 
à  fuir  de  sa  capitale,  a  céder    dr»  cilr%, 
dei  di>trict»  i()l>ntlte.  et  finalement 
à  te  réfu;;ier  en   llir^Hilie  à  peu   près 
^aiu  terre,  avaient  d«)nné  la  couronne 
à  rinsi^uiGant   Aif;ee   11,   fantôme  de 
roi   qui   n'eût  ose   ri*>ister  a  la  moin- 
dre   de   leur»  volontés   ^390).   JaM)n 
rhanj;ea  cet  étal  de  clio*«^  ;  le  roi  dé- 
possède trouva  un  a»ile  i  m  cour  ,  et 
bientôt  à  la  tète  des  troupes    tiie^»a- 
lirniifs  que  conduisait  Jason  en    per- 
>oiine,  seconde   par  ^in^urrecllon   des 
Maredonuiis  que  Ici   \iolences  et   les 
rtpines  des  llUiiotc:»  a'a\aient  que  trop 
iati^uès,   il  \it    I éprendre  ra|>idemrnt 
à  ces  deinier>  la  plupart  des  pro\:Qces 
qu'iU  possédaient,  el  fut  rétabli  a  l'rlla 
(388).    On   comprend  combien  un  tri 
événement  dut  au>;mcntei  la  puissance 
et  Tinlluence  de  Jason.   I^  Macédoine 
dès-lors  lui  pava  un  tribut  et   lui  four- 
nit des  auxiliaires  robustes  et  aptesaux 
fatii^ues  militaires.  On   peut    s'étonner 
de  ne  pas  le  voir  i ester  en  Macédoine 
pour  aider  Am\ntûs on  lutte  a\ec  ()l\n- 
the  :  c'est  Sparte  qui,  à  la  sollicitation 
des  cil  es  grecques  menacées  dans   leur 
indépendance  par  celte  reine  de  la  pé 
nlnsule  chalcidique,  entreprit  la  ;iuerre 
«ontre  elle.    Jason   resta    inactif    en 
celle  occasion.  C'est  probableracnl  qu'à 
la  suile  de  l'expédition  macédonienne, 
il  al  taqua  par  ses  armes  ou  par  l'or  et  par 


I  iiiifi^ne  les  tiio  oputi*ntes  et  popu- 
leuse» du  centre  et  de  l'est  :  I^iiv^e  et 
l*li.i  *  furrent  son  attinlion. 

lia  ,    «micicsaii    .;iandi*sdif- 

ficulirs,  il  lui  obbtie  d'ajourner  l.i  con- 
quele    iW   la    srton«li-.    \  ers   le  même 
temps  d  enlia.t  eu  iLt'.e    arec  Atliènet 
au  sujet  de  l'Kubec  qu'il  eu:  voulu  sou*> 
traire  a  la  domination  allii'u.rtii^,  et  k 
laquelle  il  se  laisait   prc»enicr  de   loin 
comme    un     libérateur:  jl  rnn^o.iait 
au»si   le  sud  de  l'Kpire   et    fomeutait 
parmi  les  Nfolov^es  l'emeulc  qui    ron- 
trai);nil  Mfela%  à  s'evpalrier.  l.ri  Mo- 
loises  s'allièrent  avec  lui,  et   de    pro- 
té;;és  il  comptait  bien  en  Cane  des  su- 
jets,  quand    l'intervention  atlienienne 
arrêta  ses  projets.  .Kiretj»  letinl  et  le* 
Itistieotes,  à  lavoii  de  Tliérippide  qui 
prit  sur  tu\  un  amendant  vans  bornes, 
ouvraient  leurs  portes  et  acceptaient  de- 
recbef  le  jou^  d'.Vtheiiei.    Qiabrias, 
à  la  tète  de  ces  detniers,  s'avança  en 
'Hies^lie,  prit  Metropolis,  377  u\ant 
.l.-C..  et  mena(;ail  de  soulever  le,  |)o- 
lope»,  les  Kuiu>u-,rl  lesMaraces.  Ipli.- 
crate  vint  rusui'.r,   puis  Timntliit-.  Ce 
dernier  était  plutôt  là  iK'^ociatem  ^i:i* 
^énesal.  Jason,  depui>  lon^-tem;>s  «oii 
ami,  traita  volontiers  a\ec  Athènes  par 
son   intermédiaire.    .Mais   on    ne    sait 
point    exactement    quel   fut   le   traité. 
Suivant   les  uns,   Jason   abandonnait 
complètement   l'Kpiie,    selon    Us  au- 
tres, il  se  bornait  à    l'évacuer  ;  Alcétas 
en  i^^rdalit    le  trône  était  son   tribu- 
taire, et  le  maitre  de  Plieres.  obei  de- 
puis  la    mer   Ionienne  jusqu'à  la  mrr 
Kf;ée,élrei^uail  l'Ilrllade  comme  d'une 
ceinture.    Sur  ces  entrefaites,  Tlu-bes, 
qui  venait  de  se  délivrer  de  la  tvraiinie 
de  Sparte,  osait,  ^ràce  à  l'elopulas  et 
Kpaminondas,    ^ràce   aussi  à   l'.ippui 
d'^lliènes,  entrer  en  liceaxec  la  'j..  amie 
cilc  du  Péloponese,  et  la  lutte  se  -oute- 
iiail  -^ans  d«'savaiita:,c.  L'occasion  pa- 
rut favorable  à  Ja^on  pour   attaquer 
l'iijrsale.  Battu  en  plusieurs  rencon- 


lO 


JAS 


très,  enfin  Polydamas  de  Pharsale,  le 
plus  tenace  des  antagonistes  de  Jason, 
le  plus  ferme  coryphée  du  système 
aristocratique  ,  demanda  un  armistice  : 
Jason  y  consentit  et  eut  avec  lui  une 
conférence,  où  lui  dévoilant  sincère- 
ment ses  vastes  plans,  soit  pour  la  réu- 
nion des  ïhessaliens  en  une  nation  et 
un  empèse,  soit  pour  la  destruction  de 
l'empire  médo-persan  ,  et  promettant 
de  lui  donner,  le  premier  rang  après 
lui  dansses  états,  il  terminait  en  ces  ter- 
mes :  «  ïu  le  vois,  seul  et  par  tes  forces 
«  tn  ne  peux  me  résister ,  et  tes  efforts 
«  n'ont  pour  résultat  qu'une  inutile 
"  effusion  de  sang.  Va  donc  chercher 
«  tes  alliés  les  Spartiates ,  j'y  consens. 
«  S'ils  veulent,  s'ils  peuvent  t'envoyer 
«  des  secours,  nous  continuerons  la 
"  guerre,  je  combattrai  et  Sparte  et 
«  toi;  mais  si  tes  alliés  ont  trop  de 
«  leurs  propres  affaires  pour  se  meltie 
«f  encore  les  tiennes  sur  les  bras,  s'ils 
«  te  laissent  isolé,  alors  renonce  à 
«  soutenir  une  cause  insoutenable,  ai- 
«  de-moi  à  devenir  le  généialissimede 
«  la  Grèce  et  sois  le  pi-^mier  en  Thes- 
«  salie  après  Jason.  »  Polydamas  se 
rendit  en  effet  à  Sparte,  déjà  peut-être 
converti  par  la  parole  puissante  de  Ja- 
son, et  souhaitant  que  ses  alliés  du  Pé- 
loponèse  l'abandonnassent.  Si  tel  était 
son  but,  il  dut  être  satisfait.  Les  Spar- 
tiates avouèrent  leur  impuissance  et 
n'offrirent  (jiie  des  renforts  insignifiants. 
Polydamas,  de  retour,  ne  balança  plus, 
il  convertit  la  trêve  en  paix  définitive, 
ouvrit  les  portes  de  Pharsale  à  Jason, 
ne  se  réservant  que  la  citadelle,  et  le  fit 
reconnaître  dans  toutes  les  villes  qui 
dépendaient  de  Pharsale.  Une  diète  «le 
toutes  les  cités  tliessaliennes  s'assembla 
par  ses  soins  réunis  à  ceux  de  Jason; 
Jason  y  fut  proclamé  piinre  de  Ihes- 
salie.  Il  s'occupa  dès-lors  de  régler 
les  contingents  des  citfs  en  argent  et 
en  troupes.  Bientôt  il  eut  sur  pied  vingt 
mille  hoplites,  ce  qui    supposait  qiia- 


JAS 

rante  mille  hommes ,  et  plus  de  huit 
raille  cavaliers.  A  celte  armée  régulière 
il  pouvait  à  volonté  joindre  un  nombre 
proportionné  de  peltastes  dont  les  ré- 
gions limitrophes  lui  offraient  les  élé- 
ments. Avec  ces  forces,  Jason,  pour 
peu  qu'il  maintînt  son  autorité  sur  ses 
Thessaliens  ,  ne  craignait  aucune  puis- 
sance grecque  et  pouvait  en  faire  trem- 
bler beaucoup.  L'Epire  barbare  était 
divisée;  la  Macédoine  affaiblie  n'était 
un  royaume  que  de  nom  ,  et  lui  payait 
tribut  ;  les  Odryses  étaient  trop  loin,  et 
Sparte  s'acharnait  en  pure  perte  sur 
Thèbes,  qui  bientôt  allait  lui  ravir  sa 
renommée  et  sa  prépondérance  mili- 
taire. La  vaste  puissance  d'Athènes, 
éparse  en  tronçons  par  Lysandre,  avait 
tenté  en  vain  de  se  recomposer.  En  de 
telles  circonstances,  nul  doute  qu'avec 
de  l'unité  ,  avec  un  homme  de  gé- 
nie pour  chef  ,  la  Thessalie  ne  pût 
sous  peu  de  temps  devenir  la  puis- 
sance dominante  de  la  Grèce  ;  et  quel 
champ  immense  s'offrait  à  elle  !  Puis- 
sance navale  en  même  temps  que  puis- 
sance continentale  (car  elle  dominait 
la  Macédoine  d'où  Athènes  tirait  ses 
bois  de  construction  ;  ses  nombreux 
esclaves  étaient  une  pépinière  de  mate- 
lots, et  elle  n'avait  besoin  d'aller  de- 
mander du  grain  et  de  l'argent  à  per- 
sonne) ,  elle  s'annexerait  successivement 
l'Eubée,  les  C)clades,  les  îles  de 
Thrace  et  d'Asie  dont  est  semée  la 
mer  Egée,  et  prendrait  dès-lors  pied 
en  Asie.  Tel  était  le  plan  de  Jason. 
Il  le  méditait  depuis  long-temps,  il 
s'en  était  ouvert  à  ses  amis  ,  Poly- 
damas l'avait  apprécié.  La  partie  la 
plus  chimérique  de  ce  plan  ,  l'ex- 
pédition contre  les  Achéménides  n'é- 
tait pas  si  dépourvue  de  sens  qu'on  a 
semblé  le  croire.  N'est-ce  pas  ce  que 
Philippe  voulut,  ce  qu'Alexandre  exé- 
cuta un  tiers  de  siècle  après  Jason  ?  et 
l'Anabase  et  Agésilas  n'en  avaient-ils 
pas  démontré  la  possibilité  à  certaines 


JAS 

«ms.  qui  louin  auTiient  He  bien- 
lit  truuirs  par  JjNon  .'  ouaiil  a  la  réa- 
lité du  proirt  lui-iiirii;r,  lurn  quf  l'ac- 
rt'!:i.  '  lit  ru  fût  elui^iir,  un  it'rn 

M..  .r.    Oulre    qut    \e   Innoi- 

^lu^uc  lu:iucl  lie  \rinn»lioii  l'ulIrNle, 
il  tsl  a  irniirqurr  «jMr  I  inxaNton  lir  U 
l'cfc  pji    Ifâ  (il»  ;»  le  Ifile 

Ir   plu-»  rréqiiriit  ..  nitiook  dr* 

M>plii^lr\  :  aioM  ic  ^raiiil  liMinnif  au- 
quel rt  Jil  rc>er\r  l'hoiinrur  dr  {>i  cndrr, 
au  liuui  de  la  ( àrece ,  crite  ecblante 
re\auche  dndoasialioii»  de  Daiiu*  et 
de  Xer&é»  ,  ne  pourrait  prétendre  k 
riionneur  d*eu  a^nr  conçu  l'idée.  Or 
.lavou.  atec  Min  t;oùt  rrcl  ou  fruit  pour 
Ir   '  '  .  declama- 

t  e  en  *u^- 

;;r;a.l  plu^  U  utic  l'iuilanl  rr  teuipt 
les  r\eneraenl^  marfli.iient.  Spailr,  de 
moins  rn  m  '.i<^  ,  avait  enùn 

perdu  la  b.it  >  I  '  .cires,  mai»  dis- 

posait toute»  in  ioicts  pour  réparer 
ce  coup  terrible  dont  elle  ne  >e  re- . 
leva  pas  (:)7U).  Tliebes,  i  la  foii  ra- 
\ieet  comme  épouvantée  de  &on  écla- 
tante victoire,  clieicliait  paitout  des 
alliés.  Tandis  qu'.Vllirnes  décline  im- 
poliliquemeut  sa  demande,  et  rarme 
s'unit  a  Sparte,  Ja^ion  souscrit  a\ec 
erapressemriil  »ux  %«rui  des  Tlirbains, 
équipe  noml  rs  comme  pour 

prcscrvrr  la  i'  attaque>   man- 

times,  puis  rapide  cuinrae  l'eclair  arri- 
ve aux  environs  de  l'Iiebes  avec  sa  ca- 
valerie et  son  infanteiie  soldées,  lon<;- 
temps  avant  que  les  1  liebains  aient  ea 
le  temps  de  rassembler  des  forces. 
Cette  précipitation  cachait  des  vues 
ambitieuses.  I/a>tuce  profonde  dont 
l'Iiilippede  Macedo'^e  usa  pendant  la 
j;urrie  sacrée  ,  Jason  se  piei'atait  à  la 
deplover.  Quand  les  Spaitiates  |uru- 
rent,  il  les  m«'na;;ea:  il  n'eût  tenu  qu'à 
lui,  s'il  eût  voulu  par  exemple  lumber 
avec  sa  ca^ale^le  du  haut  d'un  coteau 
sur  1  ennemi,  de  l'écraser  et  d'en  faire 
une  épouvantable  boucherie.  11  se  ^arda 


lAS  III 

bien  Je  rendre  lesThébains  si  heorfox 
«l  M  puissants  ;  et  sou»  des  prétextât 
fmolc»  il  refuia  de  combattre.  Il  eut 
soin  en  même  IrropN  de  faire  savoir  aux 
Spaitiates  que  Iruis  ennemis  n'élaient 
pJ  '  t  que  quelques- 

un  a    em.    Son 

;;rai)d  but,  en  Icuaul  ausi  la  balance 
riitie  la  puissance  nouvelle  qui  ;;ran- 
dissait  et  la  puiv^anre  ancienne  qui  s'en 
allait  mourante,  riait  de  prolonger  la 
lutte  entre  elles  deux  et  de  les  affaiblir 
l'une  par  l'autre.  11  avait  aussi  un  but 
secondaire  :  c'était  de  faire,  k  Paide  des 
corps  nombreux  qa*il  amenait  Comme 
auxiliaires,  quelque  coup  de  main  heu- 
reux et  lucratif.  Il  n'v  manqua  pas. 
Dès  qu'il  eut  fait  conclure  avec  le  roi 
dr  Sparte  Cleombrole  un  armistice,  il 
roinitjrfiiJi  »a  retraite  sur  CVeusis,  puis 
sui   I  r,  et  retourna  par  llvaro- 

j»o!  1      'cide,  s'empara  des  fao- 

bour^  de  la  ville  qui  lui  ferma  set 
portes,  dévasta  le  ua«s,  puis  tout  i  coup 
sij;na  la  paix  avec (rx  Phocéens,  subor- 
nant à  démanteler  Freinée  sur  son  pas- 
sa|;e,  aGn  de  pouvoir  toujours  à  son  f;ré 
s'avancer  en  llellade  sans  laisser  der- 
rière lui  de  place  fortifiée.  H  envahit 
ensuite  le>  deux  [.rendes  oponlienne 
et  épicnemidienne  qui  ne  firent  pas 
plus  heureuvement  ré>istanrr.  Hrpas- 
-sanl  les  roonls,  il  mit  le  sie;:e  devant 
lleradrcde  Trachinie,  colonie  larédé- 
monienne  fondée  pendant  la  >;uerredu 
Peluponcse.  Soit  par  suite  d'accord 
secret  avec  Sparte  ,  soit  simplement 
parce  que,  auxiliaire  nominal  des  Thé- 
bains,  il  était  en  guerre  avec  Sparte,  il 
détruisit  cet  étliblisseroent  dont  la  dé- 
cadence, au  reste,  était  déjà  marquée,  et 
qui  après  avoir  jeté  un  ;^rand  éclat  à  sa 
nai^saoce  aNait  faibli  subitement.  Il  en 
acheva  la  ruine:  quelques  habitations 
seules  survécurent  au  pas^a^c  de  Ja- 
son: le  tcriitoire  colonial  fut  partagé 
entre  lc>  ORlhéens  et  les  Méllens.  De 
là  en 6 11  il  marcha  en   Perrhébic,    où^ 


m  JAS 

probablement  il  n'eut  pas  moins  Je 
succès.  Ainsi  le  pouvoir  de  Jason  en 
Tliessalie  devenait,  par  la  contestation 
même,  plus  incontesté  de  jour  en  jour  ; 
les  résistances  à  main  armée  ne  ser- 
vaient qu'à  consolider  et  à  étendre  sa 
suprématie.  Chef  des  ïhessaliens,  su- 
périeur à  la  Macédoine  et  à  l'Kpire  ses 
tributaires,  protecteur  àes  Eubéens, 
médiateur  en  Béotie,  invoqué  par  les 
uns,  redouté  par  les  autres,  respecté 
de  tous,  il  ne  voyait  encore  dans  tout 
ce  qu'il  avait  fait  que  les  premiers  éche- 
lons de  sa  grandeur.  Il  méditait  une 
expédition  prochaine  contre  la  Phoci- 
de,  dont  évidemment  la  possession  au- 
rait été  pour  lui  du  plus  haut  intérêt  : 
par  elle  il  eût  coupé  en  deux  la  Hel- 
lade  ,  il  eût  occupé  les  positions  les 
plus  fortes,  les  pluscentralesdecepays: 
il  eût  toujours  été  à  même  de  prendre 
à  revers  la  Béotie  qui  n'eût  dès-lors 
agi  que  par  ses  ordres  ou  swis  ses  or- 
dres :  un  an  plus  tard  les  ïhébains 
avec  les  alliés  du  Péloponèse,  mais  sans 
concours  de  la  part  des  Thessaliens, 
envahissaient  la  Laconie  et  achevaient 
de  briser  sans  retour  la  puissance  de 
Sparte;  que  n'eussent-ilspoint  fait  avec 
Jason  ?  11  est  vrai  qu'il  venait  de  signer 
la  paix  avec  la  Phocide.  Aussi  ne  don- 
nait-il son  expédition  que  comme  un 
voyage  pieux  au  temple  de  Delphes, 
et  telle  avait  été  la  pensée  de  la  paix 
qu'il  venait  de  conclure.  Les  jeux  py- 
îlii(jues  approchaient.  11  voulait  s'y 
rendie  et  offiir  en  personne  un  sacri- 
fice au  Dieu,  mais  avec  toute  son  ar- 
mée. 11  avait  réuni  à  grands  frais,  et  tii 
proposant  des  primes  à  qui  lui  fourni- 
rait les  plus  belles  têtes  de  bétail,  des 
milliers debœufs, de  brebis,  d'agneaux, 
de  chèvres ,  il  avait  requis  de  toutes 
les  villes  deThessalle  leurs  contingents 
pour  construire  cette  colossale  héca- 
tombe ;  il  multipliait  de  tous  cotés  les 
préparatifs,  les  revues,  les  messages 
patents  et  secrets;  outre  son  armée,  il 


JAS 

voulait  avoir  à  Delphes  et  autour  de 
Delphes  de  nombreuses  créatures,  Kn 
un  mot  il  occupait  de  lui  toute  la  Grè- 
ce. On  se  sentait  à  la  veille  d'un  im- 
mense événement,  mais  qu'on  ne  de- 
vinait pas  :  suivant  les  uns  il  voulait 
[•iiler  le  temple  de  Delphes;  d'autres 
le  soupçonnaient  de  viser  à  se  faire 
déférer,  par  les  Grecs  réunis  pour  la 
solennité  ,  l'intendance  des  jeux  et 
celle  duterfiple.  Cette  supposition  était 
sans  doute  vraie  :  ce  titre  qui  en  d'autres 
mains  était  un  hochet  ou  un  instrument 
inutile,  ce  titre  tout-àfait  légal  eût  investi 
Jason  d'autant  de  considération  mo- 
rale qu'il  avait  de  force  matérielle  , 
l'eût  introduit  au  nom  du  ciel  et  paci- 
fiquement dans  les  affaires  générales  de 
la  Grèce,  eût  mis  en  ses  mains  le  ma- 
niement des  sommes  énormes  dépo- 
sées au  temple  de  Delphes  ;  enfin 
il  n'eut  point  eu  besoin  de  le  piller, 
et  quant  au  contrôle  exercé  par  1  Am- 
phictyoniesur  la  gestion  des  intendants, 
il  n'y  avait  pas  là  de  quoi  faire  peur  au 
maître  de  cinquante  mille  hommes. 
Les  Phocéens  ne  firent  rien  pour  écar- 
ter leur  entreprenant  rival  ;  car  tel  avait 
été,  ils  eurent  soin  de  le  répandre,  l'or- 
dre d'Apollon  qu'ils  avaient  consulté, 
et  qui  ,  en  vrai  style  d'oracle  ,  avait 
répondu  <f  j'y  pourvoirai,  »  ou  quelque 
chose  d'équivalent.  Il  y  pourvut  eu 
effet.  Jason  venait  de  passer  en  revue 
sa  cavalerie  dans  la  plaine  de  Plières, 
et  commençait  à  donner  audience  :  sept 
jeunes  gens  approchèrent  de  lui,  et, 
feignant  de  se  prendre  de  querelle,  tirè- 
rrnt  leurs  cpées  qu'ils  eurent  le  temps 
de  plonger  dans  son  sein  avant  que  les 
gardes  vinssent  au  secours (369).  Ceux- 
ci  tuèrent  sur  plact  deux  des  assassins, 
un  troisième  fut  percé  de  coups  en 
montant  à  cheval,  les  quatre  autres  s'é- 
chappèrent au  galop  et  se  réfugièrent 
dans  la  (irèce  méridionale,  oîi  ils  furent 
accueillis  avec  honneur,  loin  d'être  li- 
vrés par  voie  d'extradition,  il  ne  paraît 


JAS 

|-.T  «rjillrur.  que  Ir  ^ouvmKmmi  île 
riièreileiAitirclaiiiês.  Ilirii  qu'un  n'^it 
jaauft  ru  e\artrni«Mil  quri  fut  le  nio!/ile 
iic>meuiliu'(i  Je  Jx\nii,  ilnr  dou.s  sein- 
l)lr  {as  tloulriu  qiiele^  vrais  coupables 
élaiciit  &es  lieux  fier  es:  ce  fut  une  des 
mineurs  qui  rouiurenl  ;  tout  autre 
Iruit,  s'il  eiil  rtr  fonde,  ^e  serait  vé- 
rifié avec  le  l«-in|'->  :  la  facilité  avec  la* 
quelle  sejit  lioinmrs  arnim  a|qirocliè 
rent  indique  quelque  connivence  de  la 
pa.'t  des  ;;ardr>  ;  la  pruin|>litude  a\ec 
laquellr  furent  lues  ceux  qui  probaMe- 
incnt  avaient  le  secret  du  complot  en 
ri  une  autre  preuve.  Knfin  Tol^dore 
<t  Polvpliron  nr  venj^rifnf  point  la 
mort  de  leur  ficre.  TtiUtefois  il  est  à 
croire  que  les  clicCs  de  la  Phoc  de  ne  fu- 
rent point  ctiAnj;ersàrévènrnjrut.  Ins- 
truits du  incronlentement  ja!i)ux  des 
frorc>  «le  Jason,  ils  durent  <e  mettre  en 
rapport  a\ec  ces  princes  liaineu\  .  les 
animer,  leur  fournir  des  roovens  ,  leur 
répéter  que  jamais  occasion  ne  serait 
plus  fa\orable  [»our  frapper  que  celle 
ou  la  mort  de  leur  frère  préviendrait 
un  sacrilège,  et  semblerait!  œuvre  d'A- 
pollon l'vtliien  lui-même.  I^s  grandes 
>ues  de  Jason  finirent  avec  lui,  bien 
que  son  empire  fut  de  force  à  sub-^ister 
même  sous  des  princes  médiocres.  Mais 
l'incapacité,  les  discorde.^  iio  lardèrent 
point  à  les  ruiner.  D'abord  l*ol>pliron 
et  l'olvdore  s'emparèrent  de  tout,  au 
prëjuilice  de  leurs  ne\cu\  [Lycophron, 
TiMplione  ,  l'ilholas',  tous  trois  fils  de 
Jason;  puis  Pol\p!iron  tua  Polvdore 
pendant  son  sommeil  en  se  rendant  i 
I^riise:  lui-nièrae  il  périt  assassiné 
par  le  fils  de  Polvdore,  Alexandre,  si 
connu  par  ses  querelles  a\ec  Pélopî- 
das,  par  son  abominable  t>rannie  et 
par  sa  mort  non  moins  affreuse.  Il 
avait  épousé  Tbébé  sa  cousine,  fille  de 
Jason,  et  Thébé  força  ses  trois  frères  à 
lui  donner  In  mort.  Pendant  ce  temps 
la  M.ic«l  ne,  TKpire,  diverses  cités 
de  Tlic--  .Viu*  s'étaient  soustraites  à  la 

LXVIll. 


JAU 


u3 


domination  de  Fhères  :  sous  Ut  troi« 
fiU  de  Ja>on  ce  fut  encore  pis.  Phéres 
m^rae  se  souleva  contre  les  Ja^onides  ; 
Philippe  de  Macédoine  intervint  pour 
l'aristocratie  ou,  comme  on  disait,  pour 
le  parti  de  la  liberté  contre  les  Jaso- 
nides,Tlia.ssa  trois  fois  le  jeune  I.yco- 
pliron  et  soumit  i  rinlliienre  macédo- 
nienne le  pa>v  qui  semblait  devoir  de- 
venir le  premier  de  la  (dcce.  P — ot. 
JAS<).\    lu).  MviNo.  WVI, 

JAmEïlT^UcowieFRAî^çois), 
né  en  IT.'jH  ,  commença  ,  ainsi  que 
tant  d'autres  illustrations  de  notre 
époque  ,  par  la  profession  d'avocat, 
qu'il  eierça  à  ISordeaui  ;  et ,  dans  un 
a^e  encoie  peu  avancé  ,  il  enseigna 
le  droit.  Kn  1789,  il  fut  iiommé  mem 
bie  de  la  municipalité,  puis  commis- 
saire auprès  du  tribunal  civil,  et  mem- 
bre de  11  co'nmi'vion  fedérali'^te  qui 
s''  's  cette  ville   en    IT'J.'l, 

i><>  1  la  Convention  nationale. 

Il  eut  ,  avec  un  ^rand  nombre  de 
ses  amis  et  compatriotes  ,  l'iionneur 
d'être  mis  hors  la  loi  par  un  décret. 
Celte  proscripïion  ne  lui  permit  de  re- 
prendre sa  profession  d'avocat  qu'en 
1795.  Nommé,  en  1790.  membre  du 
conseil-général  du  département  de  la 
Gironde,  il  fut  appelé,  en  1802,  à  faire 
partie  du  tribunal  ou  il  fut  clu  [ilusienrs 
fois  secrétaire,  et  président  en  180^. 
H  prit  beaucoup  de  p.irt  à  la  rédaction 
de  nos  codes  et  concourut  à  plusieurs 
projets  de  loi  oii  dominaient  les  consi- 
dérations politiques  les  plus  impor- 
tantes ,  notamment  sur  les  colonies. 
].e  discours  qu'il  prononça  dans  cette 
occasion  est  plein  d'idoes  et  de  vues 
non  moins  applicables  dans  les  cir- 
constances actuelles  qu'au  temps  où  il 
fuf^écrit  :  "  I/crrcur  politique  est  à  cMé 
•«  delapiilianthropie,  dit-il;  l'effcl  de 
««  la  loi  présentée  sera  de  conserver  ii 
««  la  France  ses  colonies  qui  l'avaient 
•«   élevée  à  un  dej^ré  de  splendeur ,  le 

8 


tt4  JAU 

«  désespoir  de  ses  rivaux.  Le  com- 
«  merce  des  colonies  portait  des  sorn- 
«  mes  immenses  dans  le  trésor  public  ; 
«  il  était  un  des  principaux   moyens 
tt  d'accroissement  pour  la  marine  du 
«  commerce,  et  conséquemment  pour 
«  la  marine  de  Tétat  :  toutes  ce*s  véri- 
«   tés  sont  reconnues.  Dans  un   temps 
«  où  la  fureur  d'innovation  a  fait  met- 
«  tre  en  question  les   choses  les  plus 
«    positives,  ajoutait-il,   on  a  pu  de- 
«   mander  si  la  France  ne  pouvait  pas 
«  être  ramenée  à  la  seule  qualité  d'a- 
«  gricole  ;  mais  aujourd'hui  toutes  ces 
«  abstractions  sont  bannies.  Nos  voi- 
«   sins  ont  des  colonies  riches,   nous 
•   devons  recouvrer,  nous  devons  con- 
«  server  les  nôtres,  autrement   plus 
«  d'équilibre.  Ce. ne  sera  pas  en  vain 
«   que   nous  aurons  fait  tant  et  de  si 
«  grands  sacrifices  pour  reconquérir 
«  ces  colonies  que  nos  aïeux  avaient 
«  formées.  »  L'orateur  terminait   en 
demandant  que  la  loi  conciliât  les  in- 
térêts des  propriétaires  avec  les  ména- 
gements que  méritaient  les  hommes  de 
couleur;  que  l'homme  ne  fût  point  ou- 
tragé, mais  que  la  culture  non  plus  ne 
fût  point  sacrifiée.  La  question  de  l'é- 
mancipation   donne    à   ces  réflexions 
tout  le   mérite  de    l'opportunité.   La 
France  y  devra   regarder  à  deux  fois, 
avant  d'adopter  cette  opinion  de  cer- 
tains esprits,  que  nos  intérêts  se   sont 
transportés  de    l'Atlantique    dans  la 
Méditen  anée  ;  elle  y  regardera  à  deux 
fois  a'ant  d'abandonner  les  fruits  de 
cette  guerre  d'Amérique,  qui,  en  faisant 
germer  chez  nous  les  idées  de  liberté, 
et  les  fatales  illusions  du  républicanis- 
me, nous  a  du  moins   donné  un   allié 
dont  la  puissance  maritime   a  ébranlé 
celle   de  nos  rivaux.    I\.ipp()rteur   du 
projet  de  loi  sur  les  donations  et  les 
testaments,  Jaubert  proclamait  les  prin- 
cipes de  la  propriété  ,  compromis  par 
des  sophismes  dans  le  cours  des  précé- 
dentes législatures.  Il  réfuta  aussi  les 


JAD 

objections  de  ceux  auxquels  répugnait 
l^unité  de  législation.  Enfin  il  ne  crai- 
gnit pas   de  reconnaître  qu'il  n'avait 
rien  moins  fallu  qu'un  mouvement  d'en- 
semble, auquel  la  nation  entière  avait 
pris  part,  pour  arriver  à  ce  désirable  ré- 
sultat d'une  même  loi  pour  tous  les  en- 
fants de  la  même  patrie.  Le  jour  vint 
où  il  put  dire,  avec  sa  part  de  joie  et  de 
juste  orgueil,  dans  son  rapport  du  pro- 
jet relatif  à  la  réunion  des  lois  civiles 
en  un  seul  corps  (23  mars  1804)  :  «  Il 
est  donc  vrai  que  nous  sommes  parve- 
nus à  cette  époque  si  intéressante  dans 
l'histoire  d'une  nation,    si  ardemment 
désirée  par  les  amis  de  la  morale  et  de 
la  philosophie,  si  vainement  attendue 
pendant  plusieurs  siècles ,   oiî   il   est 
permis,  aux   législateurs  du  plus   bel 
empire,  de  dire  avec  la  certitude  d'a- 
voir rempli  dignement  le  plus  noble 
ministère  :  «  Français,  le  code  de  vos 
«  lois  civiles  est  complet.  La  diversion 
«  qui  régnait  dans  la  législation  accu- 
«  sait  la  raison  humaine.  »  Il  est  cu- 
rieux d'entendre  le  même  orateur  re- 
procher à  Louis  XIV,  devant   Bona- 
parte, d'avoir  trop  aimé  la  guerre,  et 
par  là  empêché  la  législation  de  s'as- 
seoir  uniformément   sur  un  sol  sans 
cesse  ébranlé.  On  ne  s'étonnera  pas 
que   Jaubert  ait  appuyé  la  proposi- 
tion de   confier   le   gouvernement  de 
la  république  à  Napoléon  Bonaparte, 
avec  le  titre  d'empereur.  Il  fut  nom- 
mé membre  de  la  commission  char- 
gée   de  l'examen   de  cette    question. 
Quelques  mois  auparavant,  au  moment 
où  la  conspiration  de  Pichegru  fut  dé- 
couverte ^19  février  1  soi),  il  avait  été 
chargé  au  nom  du  tribunat  d'exprimer 
au  premier  consul  la  part   que  cette 
assemblée  prenait  à  ses  périls.  Dans  son 
discours  il  accusa  l'Angleterre  de  per- 
fidie, et  ce  n'est  pas  la  seule  fois  qu'on 
le  verra  atteindre  cette   puissance  de 
ses  invectives.    Pour  Bonaparte  ,   ce 
temps  était   encore  celui  d'une  appa- 


JAU 


JAU 


ni 


rente  iMMl^tion  :  «•  Jr  ne  pni«,  d'il- il, 
M  me  ilcfciiilre  ti'un  »«ulimeiit  pémliie 
•<  lorsque  je  soii|;e  à  la  MtuatiiMi  (Un» 
M  laquelle  st  lrou\erait  au|(turd'livi 
«  le  ^iind  peuple,  ù  le  ilernirr  atlen- 
«  tatasait  pu  i eu ^ir.  C'est  coiilrt  U 
gloire,  la  lilurtr,  irs  lUstinèes  do 
peuple  fraiir  lis  qu'un  a  cuntpiré. . .  • 
l)*autrei»  |mo|cI>  île  loi  eurriit  eii- 
(oir  Jaubrtt  pour  rap|>orieur  ,  no 
Uniment  ior^Ani^^ation  du  notariat 
cl  le  contrat  (le  lnn.i;:r  11  fui  un 
lies   secrétaire»  ;  <lu   pioces- 

^rrbal  du  Code  >:'    ^  rr  ci>ile,  et 

fut  ensuite  nommr  in*^perleur^énéral 
«les  éeoles  de  droit  dt  l^lltier^  et  de 
Toulouse.  Le  corp»  législatif  alors 
rtait  le  seul  conseil  du  gouvernement, 
car  les  plu>  haute»  question»  de  la  po 
lilique,  même  celles  qui  rr^.irdaient  la 
paix  et  la  guerre,  étaient  Ar  miu  do- 
maine. Napoléon  fut  .  'u'à  la 
Gn  le  soiuei.Tfi  vn  t-  m»u- 
vent  en  cof  cn«- 
seillers  sut  i  .  ique, 
sauf  à  ne  tenir  conipleque  dr  ses  pr  opre* 
dessein*.  Nous  \o\ons  .laultert  ,  com- 
me or{;anedu  tnhuuat,  s'cspliqner,sur 
la  rupture  avec  l'Autriche,  danit  un  div- 
rours  qu'il  prononça  IcliH  .^epl.  IHO.'). 
Il  V  dit  que  la  France  a\ ait  eicnilé  !i- 
dèfcment  lei  traités,  qu'il  n'en  étail 
pas  de  même  des  c.ibiiirls  de  Londres 
et  Je  ^  ieune  :  que,  laiiJ  s  que  l'.Vn^jle- 
terre  aNait  donnr  osleiusihlrmejr  aux 
Hollandais  l'ordre  de  rendre  le  cap 
de  lionne  r.spei.i lire  ,  serrètem^nl 
elle  leur  avait  jucm  i  it  de  le  retenir. 
L  Autriche  ronger \ee  dcui  fois  sur  <hs 
trfhies  par  la  France  a^ait  o^é.  d'ac- 
cord avec  TAn^lelrrre ,  dep!i)\er  de» 
bataillons  et  occuper  la  Bavière.  I/eni- 
percur  rcrul  les  félicitations  de  l'ora- 
teur du  tribunal,  qui  le  loua  d'a\oir 
tout  fait  pour  éviter  la  f^uerre,  pour 
conquérir  la  liberté  des  mers  et  la 
paix  du  monde.  L'année  suivante  , 
Jaobert,  qui  était  commandant  de  la 


I>lOon- d'Honneur,  fut 
srdlrr  d'élat  et  aiiache  à  la  section  des 
finance»,  llpiesenlaau  corps  lé^isla 
tit,  entre  a«trefl  pn))cl>.  de  loi ,  criai 
des  finance».  JuriM-on^ulte  et  lioramt 
d'étal,  il  était  en  même  Irnips  écono* 
nii»te  et  financier  ;  cet  en  rpilr  der- 
nière qualité  qu'il  fut  nnmiiie  ;;ou\er 
neur  de  la  Banque,  kr  9  août  lHt»7  I  >e 
Blême  qi»**  N*|M.|nin  ,  .Isnbeil  eiail 
alors  A  '  •    .jur. 

A  la  p:<  de« 

aelionnaire»  lir  la  ikaninir,  li  mani- 
festa avec  beaucoup  de  force  l'e^pnir 
qo'il  mettait  dans  U  [tait  générale  : 
••    1^  paix  continentale,  dit-il,  réjouit 

•  tontes  les  itnr\.  Ce  doit  élie  le  ré- 
«  »ultat  ile.N  immenses  travaux  dr  l'em- 
M   pereur.    Drja   les    tranftactinnt  de 

•  venaient  plus  nombreuse  ,  tl  le 
■    commerce    rept  ruait    une   uoM\-ellt 

•  vie...  «•  If.f '  I tient 
que  ne  l'aN.i  .  • .  «,  il 
exf>»«a  an  r.  .%\%{  ^i.'t  août 
iKtiTj  I*»  lu  .'»!'•  de  loi  liur 
riiitêréi  de  i'ar^rnl.  et  auui  bur  le« 
droil.s  du  lii^Nor  public,  sur  le?»  biens 
des  comptables,  »ur  le  mode  de  re- 
couvrement drs  frais  dr  JMt^ticeau  pro- 
fit du  trésor.  N'imnié  |ilus  tard  mem- 
bre du  loinite  d  k  cniileiilieuv  de  la 
liste  civile ,  créé  comîe  et  comman- 
deur de  l'ordre  d*-  ii,  »1  pré- 
siila  deux  foi»  le  .  rrtoial  du 
iiers,  et  dn.x  luis  il  lui  ehr  premier 
candidat  au  sénat,  parle  rolle^^e  éler- 
loi  al  de  la  (liitinde  :  mais  de  tels  suc- 
cès furent  niêléi  de  quelques  infortu- 
nes. Au  retour  de  I  Vesde,  Jatiberl  eut 
à  subir,  en  présence  de  la  cour,  des  re- 
proches amers  sur  la  Banque,  sur  le 
conseil  de  régence.  Ces  reproches 
étaient  surtout  diriojés  contre  M.  Uo- 
dier,  l'un  des  «Hif-^ouverneurs.  Il 
répondit  avec  coura;;e  .  se  justifia 
sur  tous  les  points  ,  et  jusqu'à  trois 
fois  défendit  son  collègue  avec  bean- 
couf    de    force     Dans    les    plumiers 

8. 


ll(i 


JAU 


jours  (le  1814,  il  fut  nommé  chef  de  la 
4^  légion  de  la  garde  nationale  pari- 
sienne; mais,  ainsi  que  Talleyrand  et 
d'autres  grands  personnages  dont  Na- 
poléon craignait    l'influence,  il  reçut 
l'ordre  de  quitter  Paris  le  30  mars  au 
soir,    aussitôt  après   la   capitulation. 
Quand  la  déchéance    fut  prononcée, 
le  comte  Jaubert-  vint    reprendre  le 
commandement  de  sa  légion,  à  la  tête 
de  laquelle  il  se  trouvait  lors  de  l'en- 
trée du  comte  d'Artois  dans  la  capitale. 
Louis  XVI 1 1  ne  manqua  pas  de  le  com- 
prendre dans  la  promotion  qui  eut  lieu, 
le  6  janvier  1815,  en  faveur  de  la  garde 
nationale.    Il    fut  nommé  grand-offi- 
cier de  la   Légion-d' Honneur,  et,  au 
mois    de    février    suivant  ,    remplaça 
Sieyes  en  qualité  de  conseillera  la  cour 
de  cassation ,  oii  il  fut  installé  par  le 
TâOuveau  président  de  Sèze,  son  compa- 
triote et  son  ami .  Il  reçut  en  même  temps 
le  titre  de  conseiller  d'état  honoraire. 
Les  actionnaires  de  la  J>anque  profitè- 
rent de  la  première  restauration  pour  at- 
taquer la  constitution  de  cette  société  et 
demander  des  changements  ;    mais  M. 
Lafûte,  gouverneur  provisoire,  parlant 
au  nom  du  conseil-général,  dut  vanter 
la  conduite  de  Jaubert,  et  reconnaître 
qu'il  avait  atténué,  autant  qu'il   était 
en  lui,  les  inconvénients  de  la  loi  de 
1806.  Lors  du  débarquement  de  Bo- 
naparte en  mars  1815  ,  le  comte  Jau- 
bert   signa  l'adresse  de   la     cour  de 
cassation  au  roi ,   ce   qui  n'empêcha 
pas  Napoléon  de  le  nommer,   le  2i 
mars  ,  directeur-général   des    contri- 
butions indirectes   et  de    le    rappeler 
au  conseil  d'état.  11  marqua  son  pas- 
sage dans  cette  administration  en  y  in- 
troduisant la  division  territoriale  qui  a 
été  maintenue   depuis ,   et  qui    com- 
mença l'essai  du  système  des  abonne- 
ments pour  les  boissons,  en   remplace- 
ment des  exercices.  A   la  même  épo- 
que,  il  soutint  contre  lîonaparte,  en 
présence  de  plusieurs    témoins,    une 


JAU 

nouvelle  lutte  en  faveur  de  Laine  et 
de  Sèze  qui   avaient   été^  comme  en 
1814,  traités  de  factieux.  Jaubert  les 
défendit  courageusement,  et  parla  avec 
éloge  de  l'un  et  de  l'autre.  Au  second 
retour  du  roi,  il  conservason  comman- 
dement dans  la  garde  nationale  jusqu'au 
mois  de  novembre  1815.  A  cette  épo- 
que, le  duc  de  Ueggio  lui   appliqua  le 
règlement  qui  s'opposait  à  ce  qu'il  fut 
officier  d'une  légion  qui  n'était  pas  celle 
de  sa  résidence;  mais  il  accompagna 
cette  décision  d'une  lettre  flatteuse,  et 
le  comte  d' Artois  le  nomma  colonel 
honoraire.    Depuis  cette  époque  jus- 
qu'à sa  mort,  qui  eut  lieu  le  17  mars 
1822,  le  comte  Jaubert  paraît  s'être 
occupé  uniquement  d'agi'onomie.   On 
le  retrouve  en  1821,    apportant  ses 
soins  à  la  naturalisation    des  chèvres 
du  Tibet.  Le  Moniteur  du  mois  de 
mars  1822,  dans  un  article  nécrologi- 
que qui  lui  est  consacré,  dit  qu'il  s'était 
particulièrement  attaché  un  neveu  qu'il 
avait  jugé  digne  de   devenir  son   fils 
adoplif,   et  qui  promettait   de   porter 
avec  honneur  le  titre  dont  il  venait 
d'hériter.  Si  le  choix  du  père  adoptif 
a    honoré    le    fils  ,    celui-ci    fut    loin 
de  se  montrer  indigne  d'un  tel  choix, 
et    les    prévisions   du   Moniteur   de 
1822  ont  été  justifiées  en  1840.  L'é- 
ducation du  ministre  actuel  (1)  a   été 
large,  sérieuse,    complète  ,  et  c'est  à 
son  (Wcle  qu'il  la  doit.        M.  1) — T. 
JAI'BEIIT    (le    comte   Louis 
dk)  ,  né  à   Thionville,   le   10  février 
1704,  suivit  d'abord  la  carrière  mili- 
taire, quitta  le  service  en   1794  avec 
le  grade  de  capitaine  d'artillerie,  et  se 
retira  en  Allemagne,  llentré  en  Fran- 
ce sous  le  consulat,  il  fut   nommé  en 
1804   bibliothécaire    de    la    ville  de 
Metz,  et,  de  1810  à  1819,  il  fut  pro- 
priétaire-rédacteur du  .fournal  de,  la 
Moselle.    Il  mourut  à   Metz,   le   27 
septembre  1828.  Outre  plusieurs  piè- 


JAIJ 


JAt 


CM  àê  poésies  m$itét%  (Uns  le  Sf*<i 
tuUur  du  \uril ,  on  a  de  lui  :  I. 
.4prri^u  d'un  plan  d'rdumlion  ^  a 
ruMige  d'un  jrunr  sri^nn.r,  N  leaiie, 
1796,  in-H'.  II.  l iihlfuu  historiijuf 
lies  costumes .  dfs  nururs  et  des 
usages  des  prim  ifntui  peuples  de 
rautiiiuitè  et  du  tnoyen-ùfie,  lutluil 
de  l'alicnianil  dr  Kul>ert  de  SpalUrl  , 
Meli,  IKOVlHOy,  7  vol.  in-H"  a\ec 
7  uliicrs  in-i"  de  (i|(ure5.  (^t  ou- 
vraf;e  n'a  pas  été  continué  :  il  devait 
avoir  di\  volumes  de  leile  et  dii  ca- 
hiers de  fi-iures.  \* — IIT. 

JAI  rKIlKI    (.sm'aivi»-Jfvn- 
ANl»l\h-JuM  ni    ,    f\è(jur    de    Melz, 
était  uc   le    1.J  drccinbie   173'J,  à  la 
Ko(|ue-r»iuvNaue   en    Trovence.    Aine 
d'une  fainilie   nouibieuse,   il  rtudia  au 
collège  de   louhuise,  puis  à  l'unnerMlé 
é'Aix,  et  fut   fait,    jeune  encore,  cha- 
noine de  la  cullr^iale  d'Aulps.  1^  dé- 
sir de  se  fortifier  dans  les  coniiai>san- 
ces  propres  à   son  état ,    ren;;j;;ea  à 
venir  à  Paris.  11  suivit  les  prédicateurs 
les  plus  di.sliuf;u«>    de   ce  terapN-la,    se 
lia  entre  autres  avec  l'abbé  houlo;;ne, 
son    compatriote,  et   monta  lui-même 
dans  la  cliaire.    Il  s'attacha   au  clergé 
de  Saint-  lloch,  puis   à  celui  de  Saint- 
Sulpice.  AucomuiencemrnI  de  la  révo- 
lution, il  publia   quelques  écrits.    Un 
journal    qu'il    entrepiit,  sous  le   titre 
d'.  liuiales  de  lu  religion  et  du  sen- 
timent, parut  depuis  le  commencement 
de  171U  jusqu'à  la  moitié  de    17'J2. 
Après  le  10  août,  l'auteur   fut  obligé 
de    se  cacher  ,  et    ^e  retira    à   Or- 
léans ,  puis  en   IVovence  où  il   passa 
plusieurs   années  ,  et    ou  il   exerça  le 
iiiinislère  après  la  terreur.    Klant  re- 
venu à   Paris,  il  fut   un  des  premiers 
rcdadeurs  des    Annales   religieuses, 
qu'il  abandonna  ensuite  à  l'abbé  r>ou- 
loj;ne   pour  s'occuper   de  la  composi- 
tion  de  divers  écrits.  Kn  180"i,  après 
le  concordat  ,    l'ancien  é\èque  d'An- 
{;ers,  de  Lorrv.  avant  été  nommé  évre- 


que  delà  Rochelle,  et  ne  pouvant  >'> 
rendre  imniedulrment  à    cause  de   sa 
mauvaise   sanle  ,     l'âbbé    Jauffict   fut 
char;;é  d'v  aller  a\ec  la  qualité  d'admi- 
nistrateur;   mais  avant    son    dépail  il 
fut  chuiM  pour  ^rand -vicaire  de  l.von, 
et  .se  rendit  dans  celte  ville  ou  ie  clergé 
constitutionnel  awit  Misriie  des   divi- 
sions,  il  se  ttouva  même  bientôt   à  la 
télé  de  l'administration  du    diocrM-  , 
l'archevêque  deL>on  avant  été  nom- 
mé  amUb»adeur    à    Home.    (^    dio- 
cèse   lui  lut  redevable  d'etablis-semenls 
utiles,  ce  fut  le  premier  où  l'on  foi  ma 
de»    séminaiir»  ,    et    où    furent    réta- 
bli»  le»     firrrs    de»   écoles    chrétien- 
ne-* qui  de  là     se  répandirent    dan»  le 
centre  de  la  France    II  contribua  auvsi 
au  rétablissement  des  sururs  de  Saint- 
Charles.   Ap|>elé  à    Paris   comme  vi- 
caire-;;énéral   de   la   grande- aumùne- 
rie,il  provoqua  des  mesures  utiles  et 
fit  revivre  des  instituts  recoramanda- 
blcs  ;  différentes  con^ié^alions  fuient 
autorisées,   les  missions  etranj^ères  re- 
çurent  quelques    encouragements,  les 
a>>ociations  d'hospitalier  e»  et  d'institu- 
trices  obtinrent    plus  de    protection. 
I.es  dames   de  Saint-Maur,   celles  du 
reiu;;e,  dites  de  Saint-Michel,   durent 
beaucoup    entre   autres  aux   soins    de 
l'abbe   Jauflret.   !x)rsqu'on  forma    la 
chapelle    des    huileries,  il  fut  iioKimé 
un  des  chapelains.  I/évèque  de  Metz, 
Hienaimé,  étant   mort   au  commence- 
ment  de    ISOG  ,    Jauffret   fut   nom- 
mé  à  sa   place   le    15   juillet,  préco- 
nisé à  Komc  le  *JG  août,  et  sacré  par  le 
cardinal  Fesch    le   S    décembre  ;   >oii 
titre  de  chapelain  fui  alors  cluTrij^c    «ii 
celui   d'aumônier.    Le,  nouvel    evèque 
trouvait  tout  à  faire  dans  son  diocèse  , 
l'à^^e  et  les  inGrraités  de  son  j»rcdece5seur 
ne  lui  avant  pas  permis  de  former  les 
,  établissements  indlspensabes.  Ses  pre- 
miers soins  se  portèrent  mii    les  sémi- 
naires ;  le  c»rand>emiiiairede  Metz  sor- 
tit de  ses  ruines,  et  trois  petits  sémiuai- 


iB 


JAU 


res  furent  établis.  L'évéque  exhorta  les 

curés  dans  une  lettre  pastorale  à  favori- 
ser les  vocalioiis  ccrlcsiastiques.  Lui-mê- 
me logea  quelque  temps  les  jeunes  gens 
dans  son  palais  et  obtint  du  gou>er- 
nement  les  bâtiments  nécessaires.  II 
parcourut  avec  soin  son  diocèse  qui 
alors  comprenait  trois  départements  , 
la  Moselle,  les  Forêts  et  les  Ardennes. 
L'autorité  civile  s'était  crue  obligée  peu 
auparavant  d'interdiie  l'exercice  du 
culte  extérieur,  aGii  de  prévenir  des 
révoltes  fâcheuses  ;  le  nouvel  éveque 
fit  lever  cette  défense  sans  qu'il  en 
résultât  aucun  inconvénient.  Il  prêchait 
dans  les  églises  et  procura  des  missions 
dans  plusieurs  cantons;  on  lui  dut  le 
rétablissement  de  quelques  anciennes 
congrégations;  en  outi'e,  il  en  institua 
deux  nouvelles,  les  dames  de  Sainte- 
Sophie  et  les  sœurs  de  Sainte-Chré- 
tienne, qui  se  livrent  à  l'instruction  des 
jeunes  personnes  de  (iiiïérenles  classes; 
il  leur  donna  des  règlements  et  se  plai- 
sait à  diriger  ces  instituts  naissants.  Les 
sœurs  de  Sainte-Elisabeth  à  Luxem- 
bourg et  celles  de  la  Providence  établies 
par  un  pieux  ecclésiastique  près  For- 
bach  furent  encouragées  par  ses  soins. 
Son  titre  d'aumonier  le  forçait  de  temps 
en  temps  de  venir  à  Paris  pour  son  ser- 
vice au  château.  En  1810,  il  fut  dé- 
signé pour  faire  partie  du  cortège  qui 
devait  aller  au  devant  de  l'archi-du- 
chesse  Marie- Louise  ;  il  fit  donc  le 
voyage  de  Rrunnau  et  revint  à  Pa- 
ris avec  la  princesse ,  dont  il  fut  le 
confesseur  en  quelques  circonstan- 
ces. La  même  année  il  fut  du  nombre 
des  dix-neuf  évêques  qui  écrivirent  à 
Pie  ^  II  pour  demander  une  amplia- 
tion  de  l'induit  sur  les  dispenses  de 
mariages.  L'archevêque d'Aix, de  Cicé, 
étant  mort  le  '22  août,  l'empereur  avait 
d'abord  nommé  à  sa  place  l'abbé  Du- 
voisin,  éveque  de  Nantes;  maisrelui-ri 
fit  ag  étr  les  motifs  de  san  refus,  et  le 
^janvier  iHii    i'è^êque  de  Metz  fut 


JAU 

nommé  à  Aix;  il  fit  quelques  représen- 
tations, mais  le  moment  n'était  pas 
favorable  pour  résister  à  celui  qui  ve- 
nailide  frapper  d'une  éclatante  disgrâce 
l'abbé  d'Astros  et  le  comte  Portails. 
Le  prélat  n'osa  refuser  sa  translation, 
se  prêta  aux  arrangements  qu'on  pre- 
nait alors,  et  reçut  les  pouvoirs  conférés 
par  le  chapitre  d'Aix,  tandis  qu'il  don- 
nait à  l'abbé  Laurent ,  nommé  éveque 
de  Metz,  des  pouvoirs  de  grand-vicaire 
pour  administrer  ce  diocèse.  Cependant 
il  ne  se  pressa  point  de  se  rendre  à  son 
nouveau  poste,  et  passa  près  d'un  an  à 
Paris, attendant  les  événements.  Arrivé 
à  Aix,  il  n'exerça  aucune  fonction  épis- 
copale,  n'usa  d'aucun  des  droits  réser- 
vés aux  piélats  canoniqueinent  institués 
et  ne  prit  d'autre  place  dans  le  chœur 
de  la  cathédrale  que  celle  d'un  éveque 
étranger.  Sa  modération  et  sa  rései'fe 
le  firent  aimer  dans  ce  pays.  Il  s'oc- 
cupa d'y  former  des  établissements  re- 
ligieux, et  eût  souhaité  y  Introduire  les 
deux  congrégations  qu'il  avait  créées  à 
Metz.  Il  fut  du  nombre  des  douze  évê- 
ques qui,  le  27  avril  1811,  écrivirent 
au  pape,  alors  à  Savon e,  pour  le  prier 
d'accueillir  une  députation  de  trois  évê- 
ques français;  il  ne  prenait  dans  celte 
lettre  que  le  titre  d'évêque  de  Metz. 
Quelques  jours  après,  il  adressa  en  son 
propre  nom  une  lettre  à  Pie  VJl;  dans 
celte  lettre  datée  du  1*^*^  mai ,  il  parlait 
de  sa  nomination  au  siège  d'Aix,  et  ex- 
posait le  besoin  des  églises  et  les  raisons 
qui  devaient,  selon  lui,  engager  le  pape 
à  donner  des  bulles  aux  évêques  nom- 
més. Le  prélat  assista  au  concile  de 
l-Sll,  où  il  ne  se  fit  pas  remarquer. 
Se  trouvant  à  Paris  à  l'époque  de  la 
restauration,  il  se  hâla  de  renoncer  à 
l'administration  du  diocèse  d'Aix,  et  re- 
prit le  gouvernement  du  diocèse  de 
Metz,  où  il  retourna  peu  après.  Le  re- 
tour de  Napoléon,  en  1815,  replaça 
M-Jaiilfrel  dans  une  situation  difficile. 
Instruit  que  l'abbé  Laurent ,  qa'il  avait 


JAU 

de  Sedan  ,  s'était  rendu 
précipitaminrut  »  l'aii!»  ri  iirrlrmUii 
faire  rr>  1*1  e  !.a  iiuin nul  iui  i  ^^li,  .1 
crul  devoir  >■  'u>  U  c^ 

piUie  |»our  •  V,  Ou  as> 

Mire  qu  il  niamloia  1  iiilruliuii  de  ne 
|)luj>  quitter  Mclx,  uuis  L  |>rur  le  til 
«ksuler  au  (^liamp  de-Mai.  A{>rr>  le 
Mfond  retoui  du  rni  ,  il  reluurna  a 
Meti.  Un  profrvseur  du  collège  de 
l.uKerabour^,  l'abbé  Muiiriien  ,  a>aul 
(ait  M>ulenir,  le  8  août  iMlti,  une  iliesc 
pleine  deprnpojiilions  liardir>rl  dange- 
reuses, Te^'êque  ddut  la  |undirli(in  s'é- 
tendait eurure  sui  le  ^randdurlie  dr 
Luxembourg,  qui  était  l'aunrn  drpar 
tement  des  Foi  ris,  rondainiia  la  llii-ke 
par  une  ordunnaïue  du  1  *J  mnrmbre, 
et  défendit  aux  cirées  en  de 

»ui>re  les  cours  du  pioi  Muii- 

chen  se  retira  i  (îaud  uu  il  mourut  peu 
après.  I/é\è(|ue  de    NJeU  concourut  a 
former  dans  celte  ville  un  établi s»einent 
de  (r ères  dcN  écoles  clin-tienne»;  il  le^ 
rc^ul  même  d'abord  dans  son  palaL».  Il 
établit  des  retraites   anuuelles  pour  le 
clergé,  et  remit  eu  vigueur  ruiticialité, 
ce  qui  lui  attira  des  critique^  de  laii- 
juinais  dans   la   iJironitjue    religieu- 
se. En   18*i(),  il  coinoqua  le»  arclii- 
prètres  de  >oii  duKof,   ei  poblia   des 
statuts  svnodaui  qui  ont  été  imprimes. 
L'érection  de  i'arclievt'clie  de    ileiras, 
en  1821,    retira    le  departeinrnt   de> 
Ardennes  de  la  juridiction  de    rr\rque 
de  Metx,  qui   non-seulement    \it  cette 
soustraction  sans  peine  ,    Mais  s'em- 
pressa de  rendre  au  nouvel  archevêque 
de  Ueims  tous  les  services  qui  étaient 
en  son  pouvoir.  Le  con-s«il-;;eneral  des 
Ardennes  lui  témoigna  de   la  recon- 
naissance  de  son  administration    par 
des  lettres  tlalteuses  acco9|>a^net>s  de 
l'oflrande  d'un   calice,  de  burettes  et 
d'uu  ba>>in  en  vermeil.  Kn  18J3,  Te-, 
vèque  a>ait  tenu  sou    svnode;    étant 
venu  à  l'aris,  il  mourut  subitement  chez 
SOI  frère,  dans  lanuitdal2au  13Bui 


JAU 


»»9 


11  laissa  de  vifs  rep-ets  \   Metx    où   sa 
douceur  et  >on  c>|<iii  conciliant  eiaieul 
jtiNleœent  j(.|'ici  «•>   Son  corps,  dénosé 
provisoirement  dans    l'e^li^e  des  (lir- 
nie>  a  l'an»,  fut  transporté  en  juin  sui- 
vant à  Meti  et  inlinnir  iIaiin  \t  caveau 
de3  évêt|ue>.  l  ne  orais^tn  funèbre  fut 
prononcée   en    son   honneur;   elle  est 
courte   et   contient  peu  de   faits.  Nous 
terminerons  en    donnant  la  lute  de» 
écrits  du  vertueux    prélat:   I.    De   la 
religion  ^  à    iassrtuhUe   natiunuU , 
distiturs   phitoiuphiijur  et  poittitjue, 
171M),   ra  H"  ;  plusieurs  fuis  réimprimé 
sous  les  titres  tie  la  rrliffiun    aux  lé- 
gislateurs ,   et    de   la   religion    uus. 
t  ran{t tis    W.    / rtna Ir  v  de  la  religion 
et  du  sentiment ,   loiirnal    liebdoroa- 
daiie,  IT'Jl    17«>J.  IlL  Du  tulle pu- 
Llii  ,  ITU.'),  in-8 '.  (^l  ou\ra|;e  parut 
d'.iboid   p.ir    extraits    dans     les   An- 
nales religieuses  et    fut    ensuite  im- 
primé i  part.  IV.    Annales  religiru- 
ses  ,  les  dix- huit    premiers    numéros 
seulement.  V.   Des  tonsolaiions,  ou 
Un  ueil  de  le  tfue  la  raison  et  la  re- 
ligion peui'ent    uffrir  de  consolation 
au.1  malheureuA ,  \'t96.   l.'ivol.  in- 
IH  ;  on  en  a  extrait  :  V 1 .  lUrnsoiatii^ns 
des  divines  écritures,  3  vol.  in- 18  ; 
MI.  Du  iuitide,  'J  vol.  in  18.  MIL 
/:,  I  amen  critiifue  du  nout^eau  calen- 
drier,    1797,  in-8".    IX.    O-.Wrw 
choisies  de  tenelun  ^  1800,   ti  vol. 
in- 12.    X.    iKui'res  spiriturlies  de 
J-enelon^  ^  yo\.   in-l'i.    XL  L'Ado- 
rateur en  esprit  et  en  ver  lit,  1800, 
in- 18.  XII .  Dessers  ices  tfue  lesjem- 
mes  peuçi'iU  rendre  a  la  religion  , 
1800,  in-l*i  ;  la  2^  édition  qui  a  pour 
titre:    f  ies  des   dames  françaises, 
181G,  in-12,  estd'unaraidel'e^èque. 
X 1 1 1 .  Ejcamen  fHtrtiiulier  pour  des 
saurs,  in- 12    XIV.  Lettres  sur   la 
religion  et  lu  met  a  pli)  siuue,  de    Fé- 
nelon,  in-12    XV.  Méditations  sur 
Us  sou/f ronces  de  N.S.,  avec  une 
Instruction]  sur     Us  [indulgences, 


lao 


JAt 


JAU 


1800,  iii-18.  XVI.  Mémoires  pour 
servir  à  Vliistuire  de  la  religion  ii 
lafin  (lu  XVIIl''  siècle,  1803,  2 
voL  in- 8*^';  ce  devait  élre  le  commen- 
cement d'une  collection  de  pièces  re- 
latives à  la  persécution  contre  les 
prêtres  pendant  la  terreur.  ]M.  Jaufiret 
avait  réuni  un  grand  nombre  de  maté- 
riaux pour  cet  objet  et,  ne  pouvant  plus 
s'en  occuper,  avait  engagé  des  amis  à 
continuer  son  plan.  Différentes  cir- 
constances s'opposèrent  à  l'exécution 
de  ce  projet.  XVII.  De  la  vraie  sa- 
gesse pour  senur  Je  suite  à  Vhnitu- 
tion,  1804,  in-12.  XVIII.  Entre- 
tiens sur  le  sacrement  de  confirma- 
tion, 1809,  in-8°.  XIX.  Recueil 
clioiside  mandements ,  1820,  2  vol. 
in-8^\  XX.  Instruction  sur  T esprit 
du  sacerdoce  chrétien,  1821.  XXI. 
Autre  sur  la  morale  de  Véoangile, 
1822.  Nous  aurions  pu  citer  encore 
quelques  écrits  publiés  par  cet  évéque 
avant  son  épiscopat.  Il  donna  une  édi- 
tion du  Paradis  de  Vâmc,  traduit  du 
latin  d'Horstius,  2  vol.  in-12,  et  des 
Eloges  des  é<j>êques  français,  par 
Godeau,  in-8°.  La  Biographie  des 
vivants  lui  attribue  les  Illustres  vic- 
times vengées  des  injustices  de  leurs 
contemporains,  1802,  in-8".  L'///-/ 
épistulaire,  1793,  3  vol.  in-18,  et  les 
Paroles  mémorables  des  grands  hom- 
mes, 1802,  2  vol.  in-18,  qui  ont  paru 
sous  le  nom  de  Louis-Franrois  Jauffret , 
frère  de  l'évêque,  sont,  dit-on,  de  ce 
dernier.  En6n  le  prélat  s'étailbeaucoup 
occupé  dans  ses  dernières  années  d'un 
ouvraj^e  auquel  il  attachait  une  pjrandc 
importance.  Cet  ouvrage  était  destiné 
à  montrer  comment  on  peut  séparer 
les  dogmes  primitifs  reconnus  par  tout 
le  genre  humain,  des  erreurs  (juc  l'i- 
gnorance et  la  passion  y  ont  mêlées,  et 
comment  on  peut  arriver  ainsi  à  la 
religion  véritable.  L'auteur  voulait  don- 
nera son  travail  le  titre  de  Jiecherches 
de  la  vraie   religion.   Il  l'avait  fait 


imprimer  en  épreuve  pour  le  commu- 
niquer à  quelques  amis,  et  profiter  de 
leurs  reuiarques  et  de  leurs  avis.  Celui 
qui  écrit  cet  article  a  eu  dans  le  temps 
connaissance  de  l'ouvrage  pour  lequel 
l'évêque  s'était  beaucoup  servi  du  Pa- 
rallèle des  religions,  de  l'abbé  Bru- 
net,  1792,  5  vol.  in-4''.  Mais  il  ne 
s'était  peut-êlre  pas  mis  assez  au  cou- 
rant des  recherches  historiques  faites 
dans  ces  derniers  temps  par  des  savants 
français  et  étrangers,  j^a  famille  de 
Jaufiret  avait  formé  le  projet  de  pu- 
blier cet  ouvrage  ,  mais  elle  parail  y 
avoir  renoncé.  Nous  croyons  d'ail- 
leurs qu'il  serait  nécessaire  de  soumet- 
tre le  travail  du  prélat  à  un  nouvel 
examen  ,  et  qu'il  y  aurait  beaucoup  à 
ajouter.  P — c — t. 

JAUFFRET  (Jean-Bap- 
tiste), frère  du  précédent,  naquit  en 
1771.  Il  quitta  la  France  de  bonne 
heure,  et  se  fixa  en  Russie.  Nommé 
directeur  de  l'institution  des  sourds- 
muets  à  Saint-Pétersbourg,  il  mérita 
l'estime  et  la  confiance  de  l'empereur 
Alexandre ,  qui  le  créa  chevalier  de 
l'ordre  de  Saint-\  ladimir.  Les  iion- 
neurs  qui  lui  furent  accordés  après  sa 
mort,  arrivée  en  1828,  parlent  hau- 
tement en  faveur  de  sa  longue  auMi- 
nistration.  Son  portrait,  demandé  à  sa 
famille,  a  été  placé  dans  u«e  des  salles 
d'honneur  de  la  n)aison  des  sourds- 
muets  de  Saint-Pétersbourg  ,  et  l'em- 
pereur Nicolas  a  voulu  lairc  lui-mcnie 
les  frais  des  obsèques  de  l'ancien  di- 
recteur. F. 

JAUFFRET  (Joseph),  le 
dernier  des  quatre  frères  de  ce  nom, 
naquit  à  la  lloque-Brussane  le  G 
décembre  1781.  Dès  l'àgc  de  vingt- 
un  ans  ,  il  entra ,  en  qualité  de  chef 
du  secrétariat,  à  la  direction  des  cultes 
dont  Portalis  était  chargé.  C'était  l'é- 
poque où  se  préparait  le  concordat 
entre  le  gouvernement  français  et  la 
cour  de  Home  (1801).  Jaufiret  fut  té- 


JAt 


^JAL 


lai 


raoïn  tlv  tuttt  ce  qui  se  fit  à  ccllr  oc- 
casion; rl  rrllr  circon&lanre  ronlnlMia 
braKCOiip  à  tJr\rlopper  en  lui  le  {»«ii- 
rhatit  pour  l*rlu(le  Jn  <|iie^lions  ec- 
t\rn2>\H\ues  ({ui  Ta  di.stiii;;iié  plus  tard. 
H  iir  (itiilla  point  le  miniMcre  des 
cultes  à  la  mort  de  Porlalis,  en  1807, 
rt  conliittu  d'>  remplir  diverses  fonr- 
lioii«,uolantinrnl  rrlir<dr   ■  r- 

néial.  .\dnii>rn  |H1  Vronn  <•* 

rri|U( '.cn  au  ronseil  dVtal,  il  ^  \  Ul  une 
lépulalinn  de  sa\oir  et  d'iropadiaiité. 
ilepuM  lor»,  lout  en  se  coniarrant  aux 
devoirs  de  sa  rliar;;e,  avec  une  avsi- 
tlnitr  fatale,  peul-èlre,  à  sa  com|<lrxiun 
drlicatr,  il  .^'occupa  jusqu'en  ii^'M't  tVé- 
crils&élieuK,  la  plupart  touchant  les  ma- 
tières dont  il  avait  fait  l'objet  de  ses 
plus  habituelles  inedilattons.  A  celte 
dernière  époque,  il  était  le  do>cn  de4 
maîtres  des  requêtes,  et  à  la  veille 
d'occuper  la  piemioie  paraître  parmi 
les  rniisriilers  délai,  loixque  la  nuirt 
le  frappa  le  *J  mars  iH.'tÔ.  On  a  de 
lui.  I.  l'immrn  tirs  artt'rirs  organi- 
qufs,  fuihlifs  a  la  suite  du  ronrttr- 
tiiil  Jr  \m)\,  iUtns  Ifurs  rapports 
iwrr  nos  lihrrtrs.  Us  règle:  géné- 
rales tie  f  église  et  Lt  police  de 
l'état .  1 M 1 7 ,  I  n -«" .  II.  Hutmen  du 
projet  de  loi  relatif  au  nom'eau  ron- 
curditt,  1 H 1 7 ,  I n -8".  111.  Mémoi- 
res historitfues  sur  les  affaires  «-- 
clesiastiijues  de  F  rame ,  ftemlani 
les  premières  années  du  \7.\* 
siircle,  181  y,  3  vol.  in-8".  Jauf- 
frcl  a\ait  préparé,  avant  sa  raori, 
une  nouvelle  édition  de  celle  curieu>e 
relation  hisloritjue.  IV.  hes missions 
tn  France,  18-2(),  in-8  '.  V.  De  la 
juridiction  episcoptile  ,  ii  C occasion 
tfun  rrrit  de  lumjuinais  contre  les 
noui> elles  ofjicialités  ,  18 il,  in-8". 
W.  Des  recours  au  conseil  tfétat, 
dans  les  cas  d'abus  en  matières  ec- 
clésiastitjucs,  182ô,  in-8°.  Cet  ou- 
vraj^e  a  eu  une  deuxième  édition  en 
1830.  VU.  Du  célibat  des  prêtres 


a  rotrasiun  d'une  ordonnance  ren- 
due fHtr  le  prrsiilrnt  du  trihumil  de 
première  instani  r  du  flrfHtrtemrnt 
de  la  Seine  .  18JK,  in^'"  ;  réimpri- 
mé, dans  le  mois  qui  sni\it  sa  publi- 
cation, avec  le  jugement  du  tribunal. 
Les  talents  de  J.  Jaufirrt  ne  se  bor- 
naient point  an\  ronnaisNanrcs  spécia- 
les a  ses  (onctions.  Il  était  membre 
des  académies  ou  sociétés  savantes  de 
l'  \illes    de    Fiance,     l'ari< , 

1  nlle,  .\bbe\i|le;  et  il  culti 

\ait  3k\^  distinction  l'art  île  la  pein- 
ture, qu'il  avait  étudié  sous  Da^id. 
X.'.-lmi  de  la  religion,  dan^  le  n"  du 
30  a^ril  1836,  contient  une  nolice 
sur  J.  .laufTret.  F. 

«9.\rSSArn  (bu  is  m  ^  na- 
quit à  \  zès,  le  îi'J  mars  l.'>80,  de  pa- 
rents calvinistes.  Il  fit  d*e*cellenle» 
rludes,  et  devint  si  liabiie  cbiis  les 
lant;ues  latine  et  -recqiio ,  qu'il  pu- 
blia à  Vxjs  de  ^\\^:^  ans  une  traduc- 
tion de  I ltu(  ydide.  qui  fut  iinpiiniée  à 
l.e>de  en  KitHI.  (^Ite  ti.iduiliori  lui 
fil  beaucoup  d'honneur,  et  peut  soute- 
nir la  comparaison  avec  toutes  celles 
qui  avaient  paru  a\aiil  celte  époque. 
Plus  tard,  a>ant  obtenu  une  place  de 
conseiller  i  la  chambre  mi-partie  de 
Castres,  il  lémoii^na  au  roi  sa  recon- 
naissance  en    publiant    un     opuscule 


puitii 
de   C 


sous  le  titre  de  Carmen  île  rébus 
gestii  iMdoKHci  \lll.  Il  fut  un  des 
membres  les  plus  irles  de  racadéinie 
de  Cis'.res,  et  mourut  le  l.'»  juillet 
1(iG;j  ,  lais.sant  un  Gis  héritier  dr  son 
nom  ,  de  ses  talents  et  de  s.i  place. 
Vje  fils,  qui  portait  aussi  le  préii(»tn  «le 
lAHiis,  était  né  le  13  jan\ier  \iV.\0, 
et  avait  reçu  une  édticatimi  tn'>-soi- 
^née.  Il  mourut  le  1.'»  jaiivitr  iJiSS  , 
après  avoi.'-  eu  le  chagrin  de  voir  s'é- 
teindre l'académie  de  Castres  dont  il 
était  membre.  Les  re^^islres  de  cet  utile 
établissement,  rédi;;és  par  M.  de  Spe- 
randien  ,  et  qui  sont  encore  manu- 
scrits ,   contiennent  la  liste   des  nom- 


132 


JAU 


JEA 


breuses  productions  de  Louis  de  Jaus- 

sautl  fils.  Voici  les  principales  :  1"  Epi- 
tuphes ,  epign/mnies.  e\c.  y  sur  la  mort 
de  Balzac,  16  nov.  1658;  '2^  Disli- 
(futs  latins  sur  la  paix  avec  rF.spa^ne, 
5  décembre,  1659;  3"  Epilaphes  , 
épigrammes ,  etc. ,  sur  la  mort  de 
Mazarin,  21  juin  1661;  hr"^  Vers 
latins  sur  la  conquête  de  la  Franche- 
Comté,  8  janvier  1669;  5"  Dix  Re- 
marques sur  le  quatrièuie  livre  des 
Annales  de  Tacite,  9  juillet  1669; 
6"  Douze  Reinurques  et  coSeclions 
aux  Epilrcs  critiques  de  Leièvre  de 
Saumur,  13  août  1669.      C — L — B. 

J  ArSSl\  (Louis- Am and),  apo- 
thicaire, suivit  en  cette  qualité  les  trou- 
pes auxiliaires ,  commandées  par  le 
maréchal  de  Maillebois  (Voy.  ce  nom, 
XXVI,  240),  que  la  France  envoya 
en  Corse  afin  d'y  comprimer  Tinsur- 
rection  des  habitants  contre  la  répu- 
blique de  Gènes,  à  laquelle  cette  île 
appartenait  alors.  Il  profila  de  son  se 
jour  dans  ce  pays  pour  y  recueillir  des 
documents  historiques  et  scientifiques 
qu'il  publia  plus  tard  sous  différents  ti- 
tres, mais  dont  le  plus  o;rand  nombre 
n'a  jamais  paru.  Jaussin  mourut  à  Pa- 
ris le  25  mars  1767.  On  a  de  lui  :  I. 
Ouvrage  historique  et  chimique  oii 
fan  examine  s'il  est  certain  que 
Clcopâlre  ait  dissous  sur-le-champ 
la  perle  quon  dit  quelle  aoala  dans 
un  festin,  Paris,  1749,  in-8".  II. 
Mémoires  historiques,  militaires  et 
politiques  sur  l'Ile  de  Corse^  avec 
f  histoire  naturelle  de  ce  pays,  Lau- 
sanne, 175H,  2  vol,  in-12.  III.  Mé- 
moires historiques  et  militaires  sur 
les  principaux  événements  arrivés 
dans  file  de  Corse  ,  depuis  1738 
Jusquen  17  VI,  ibid.,  1759,  2  vol. 
)n-12.  IV.  Lettre  à  M.  l'ahhédela 
Porte,  Paris,  1759,  in-12.  V.  Let- 
tre au  sujet  des  nouvelles  formules 
de  pharmacie.  VI.  Mémoire  sur  le 
scorbut.  P — RT. 


JEAIV   VI   (  Marie  -  Joseph - 

Louis),    roi   di' Poitii;;al,  était  le  se- 
cond fils  de   Pierre  lll,  roi  titulaire, 
oncle  et  époux  de   Marie- Françoise- 
Elisabeth,  reine  de  Portugal.  Il  nac^it 
à  Lisbonne  le  13  mai  1767.  La  reine 
sa  mère  lui  donna  pour  précepteur  le 
savant   vénitien  Franzini  (1),  dont  il 
reçut   les  leçons  pendant    l'espace  de 
dix  ans.   Il  étudia  le  latin,  l'histoire, 
la  géographie  et  les  langues   française 
et  italienne.  Ce  fut  sa  mère  qui  le  con- 
duisit à  Badajoz,  où,  en  présence  des 
deux  familles  royales  d'Fspagne  et  de 
Portugal,   il  épousa,  le  8  mai  1784, 
Charlotle-Joachime  de  Bourbon,  fille 
du  roi  Charles  IV  (2).  A    la  mort   de 
son  frère  aîné  le  prince  Joseph,  arri- 
vée en  1788,  Jean  VI,  alors  Infant, 
devint  héritier   présomptif  de  la  cou- 
ronne.   Pour  apprécier    sa    poHtique 
comme  souverain  et  les  insurmontables 
difficultés  qu'il   eut  à  vaincre  pendant 
tout   le    temps  de   son  règne,  11  faut 
avoir   égard  aux  circonstances  et   aux 
événements  qui    survinrent   alors    en 
Europe.  Il  faut  se  rappeler  que  les  plus 
grands    empires,  tels   que  la    Russie, 
l'Autriche  et  la  Prusse,  fléchirent  devant 
le   colosse  révolutionnaire  ;  que  l'An- 
gleterre elle-même  n'échappa  au  sort 
des  puissances  continenlales  que  par  sa 
position  insulaire  ,  par  la  puissance  de 
son  aristocratie   et  de  ses  nombreuses 
flottes  ,  et  que  ce  ne    fut  pas  sans  de 
grands  sacrifices  d'argent.    Il  faut  .se 
rappeler  aussi  combien   de   souverains 

(i)  Fr.'iliziiii  ni.iil  un  iiiatliéiiialicicii  prc^roiid, 
un  |>li}sicien  et  iiatiiniiislK  disiiiiguc  ,  eiiriii  un 
littérateur  très-ci  iidil.  Vouliiiii  insiiiiire  ses  .-lu- 
gitste  .  élèves  et  leur  inspirer  du  Roûl  pour  les 
sciences  ft  les  arts,  il  fot'iua  dans  le  palais  royal 
dt-  lUdlein  un  cal)iiicl  d«'  |ili\  !ii(ju.:  et  une  riche 
collection  de  inodi'lcs  d'.iris  ft  de  métiers,  où 
il  exposa  aussi  en  relief  le  système  général  de 
forlification  <rAiit<>iii!i  et  un  grand  nombre  de 
ma    hines  hydrauliqiu  s. 

(ï)  Voy,  Mtm.  Uist.  de  lot  Desposorios  ,  etc. 
Pleins  pouvoirs  donnés  à  l'ambassadeur  mar- 
quis de  I^uriral,  le  i5  mars  1784  ,  et  par  le 
roi  d'Lspague  au  comte  de  FloriJaBlanca  ,  le 
aS  mars.  —  Le  traité  de  mariag«  iiU  sigaé  le 
10  mars  17$$. 


JhA 


IBA 


iftS 


it  de  leur»  irâaes ,  tan- 
liit  ^  Jean  VI  ,  après  a\oir  tié 
la  pTMNei  inuiiarijue  f|ui  ait  oȎ  tia- 
fcner  rAlljnli<nie  ,  ^au\a  \>n  rcl?f 
détcrraiualiou  cour^i^ruNe,  m  rouioiiiie 
et  Aa  famillr ,  qu'il  déjoua  ainsi  1rs 
projetas  (lu  dominateur  de  rKiirn{>e. 
Il  faut  ron&idcrci  que  re  prinrr  , 
^race  à  reltr  ir>449liun,  de\int  le  fon- 
dateur d'un  \astp  rmpire,  et  qu'il  vit 
lors  de  la  pais  ;;rnriale  le  l'ortu^al 
élevé  au  raii;^  de  puissance  du  premiei 
ordre,  et  -es    ainlia  nfr  \r> 

traites  dr  \  iennr  et  ..     .  .*   mrmr 

titre  que  reui  des  autir^  italutn».  Jean 
VI  commenta  a  ;:i»u\eiiirr  au  nom  dr 
u  méte  le  t()  œar-  1703,  a  l'occasioN 
de  la  maladie  de  crttr  pnnreNNC  .  mai* 
le  retient  ne  rlian;^ea  eu  rien  la  politi- 
que exiéf  ieure  suivir  par  sa  mrre,  sru- 
lenent  il  la  moditia  selon  les  cirron 
stances  et  les  e%enerorat s;  il  ne  toucha 
point  non  plus  aux  mesures  adinmi^ 
trati\es  ihtriieure».  Il  conw^.ta  lr> 
mêmes  raiiii>ties  ,  qui  appartrnairiil 
presque  tous  [W]  a  l'école  politique  du 
rr;;ne  de  Josrpli.  I^  canali^^ation  du 
Mo»déf;o  distingua  le»  ptennrio  an- 
■ëct  de  ton  re^^ne  ainsi  que  l'ouxn  luit- 
àê  plnâcvs  grandes  roules,  nolam- 
■ent  ceiic  de  Li>bunne  a  Coïinl>re,  et 
dr  crlte  ville  à  Porto.  Il  créa  dans  la 
même  année  ^1 79  i  l'établisArnirnl  im- 
portant de  l'école  de  fortification  pour 
les  eirvrs  qui  se  destinaient  au  coq>s 
du  t^énie  rt  à  l'arlillrne.  Kn  l'aniier 
17*J6,  l'armée  subit  aussi  de>  rérorme> 
im|»ortantr<ï  rt  vit  créer  le  corps  de  la 
léj;ion  sous  Ir  commandrmeiit  du  mar- 
quis d'Alorua.  1^  marine  eut  égale- 
ment sa  part  d'amélioration.  Le  ré- 
gent fonda  ,  m  t7*J7,  une  académie 
nautique  (academia  dos  ;;uardas    ma- 

(j>  Chi  decrs  minittm.  BalMaiao.  rtait  oiffoi- 
We  *•  \*  ïociHr  myale  <1«  l>ond»««  «i  4'a«trv« 
aradrniir*  Il  rait  m  corrvtpoodaBC*  «vrc  p|a- 
«irurt  MiTaiiU  riran^rr»  4n  piOTUiar  « 
tr*  ««tr««  a«cc  Linnr.  Il  fournit  ét% 
■MaU  à  Rob«rUon  et  à  l'abbé  Raynal. 


de   Banne 
cupa    aus^i 


rinhis)  ,  et  dans  U  a^ne  année 
Ir  tribunal  de  l'amirauté  et  un  rorps 
^  bri-ada  irai  ).  Il  s'oc- 
dr  la  réformr  drs  ordres 
rrli^ieui.  K  cri  rf:et,  il  institua  une 
coinmiskion  avec  les  pouvoirs  les  plut 
élrndus.  I*ar  cette  mrsurr  1rs  admis- 
sions furrnt  diminuées,  H  m  pru  d'an- 
nées cette  reforme  ;;raduellr  dr\iiit  irrs- 
sensible.  I<<  récent  amrliora  rnrore 
le  »>stemr  des  études  piiiiiatres,  rt 
fonda  dan»  les  \illr>  et  communes  du 
rn^«iime  un  ;;rand  nnmbir  d'écoles 
publiques  rt  {;ratuites.  l'our  la  direc- 
tion dr  ces  établissements  ,  il  créa  la 
juntr  tir  Iti  liirn  tittn  t!r\  rtudrs,  rt, 
afin  dr  faciliter  da«anla;^e  la  culture 
dr^  lettres  ,  il  fomia  la  bibliotbrque 
publique  de  Lisbonne  (179K),  et  nom- 
ma pour  son  premier  biblintbécairr 
un  des  plus  savants  académiciens,  lequel 
établit  nue  admirable  classification  dans 
cet  immense  dépAi  des  connaissances 
humaiitr-  Il  donna  aus>i  une  nouvelle 
oi^anisation  au  nrlir  musée  d'histoire 
nalurrllr  .  rt  au  jardin  botanique,  rt  il 
choisit  à  cet  rfTrt  plusirurs  indivi- 
dus qui,  sous  la  dirrction  dr  l'acadrmir 
des  Kinirrs,  furrnt  chargés  de  visiter 
le'*  pi  itjripaies  ailles  de  l'Kuinpe  pour 
s'enrichir  dr  connaissances  scientifi- 
ques, tandis  qu'il  en  envoya  d'autres 
en  Amérique  dont  les  talents  avaient 
été  mis  à  l'épreuve  dans  1rs  travaux 
de  l'univrrsité,  dans  1rs  sciences  ma- 
tlKiiiatiques  rt  naturrlles,  et  qui  avatrnt 
o'  irnu  1rs  suffrages  de  celte  savante 
académie.  Il  créa  encore  l'rcole  des 
cliarles  aui  archives  du  ro>aume,  insti 
tution  qui  deiint,  en  quelques  années, 
aussi  brillante  que  celle  qui  avait 
été  créée  en  France  ,  et  bientôt 
les  résultais  les  plus  utiles  en  fu- 
rent obtenus  (i).  Les  soins  du  retient 
"•V  portèrent  aussi  sur  les  mines  du  Por- 

(l'  V..J.  Ir»  in^uioirri  publié»  par  le»  rlAvei 
«i«  IVoIf'  Ar%  ch^rtra  de  Litbonne  ,  oolamiarQt 
c»tn  qui  pararent  en  iSï4  *<•  «8*5  ,  impri- 
■keria  royale. 


124 


JEA. 


tugal  déjà  si  leiiommces  au  temps  des 
Phéuicieiis  et  des  Carlhanjinols,   et  il 
créa  l'administralion  des  mines.  11  fil 
exploiter   la  mine  d'or  d'Adiça,  qui, 
ayant    élé  en   exploitation   depuis  le 
XIP  siècle  sous  Alphonse  F'  jusqu'au 
XVI  siècle  sous  Jean  111,  avait  depuis 
été  abandonnée.  D'autre  part  lesbcsoins 
de  l'armée  inspirèrent  à  ceprinceTidée 
de  rétablir  de  nouveau  les  maf;;nifiques 
forges  de  'i  liomar ,  de  Figuelro  et  de 
Machuca.  Il  fit  en  outre  leprendre,  en 
1802,  les  travaux  àe  Jazd/l/ge,  qui  à 
elle  seule  pourrait  suiure  à  tous  les  be- 
soins du  pays  et  des  colonies.    Il  fit  de 
même  exploiter  les  mines  de  charbon 
de  Ijuarcos  et  celle  de  S. -Pedro    da 
Cova,  découverte  en  1802.  Il  confir- 
ma, par  une  loi  du  4  fév.  1802,  celle  du 
20  août  1721,  sur  la  conservation  des 
monuments  de  l'antiquité  et  dumoyen- 
agc  ,   détermina  le  local  où  devaient 
être  exposés   les  marbres,  statues,  in- 
.scriptioiis,  et  voulut  que   le  conserva- 
teur de  la  bibliothèque  publique  ouvrît 
une  correspondance  avec  les  différentes 
municipalités  du  royaume,  sur  les  anti- 
quités qui  seraient  trouvées  dans  leurs 
arrondissements.  Lors  de  la  découverte 
faite  à  Lisbonne,  en  1799,  du  théâtre 
romain,  dédié  à  Néron,  le  prince  char- 
j>ea   rarchilecle   Fabri  d'en    lever  le 
plan,  et   c'est  à  cette  mesure   que  la 
science  doit  la  curieuse  dissertation  qui 
a    paru  plus  tard  sur  ce  beau  mon;i- 
raenl  (5).  Le  récent  encouragea  aussi 
l'agriculture,  le  commerce  et  l'indus- 
trie ;  il  créa  plusieurs  fabricpies,   fonda 
une  chaire  de  métallurgie  à  l'université 
de  Coïmbre,  l'académie  de   marine  et 
de  commerce  à  Porto  et  quelques  au- 
tres établissements  littéraires.   J>a  ma- 
ladie de  la  reine  Marie  ne  laissant  au- 
cun espoir,  le  prince,  en  1799,  prit  le 
titre  de  régent  qu'il  garda   jusqu'à  la 


(5)  Voy.  la  dissertation  sur  ce  monument  pu- 
bliée à  Lihbonnc  en  i8ib  par  L.  Antonio  d'Aze- 
Tedo. 


JEA 

mort  de  sa  mère,   malgré  l'opposition 
d'un  de  ses  ministres,  Seabra  ,  savant 
publicistc  qui  avait  soutenu  que  Jean 
VI  devait  convoquer  les  Cortès,  afin 
d'obtenir  la  sanction  des  trois  étals, 
d'après  les  exemples  de  l'histoire  na- 
tionale, et  selon  la  constitution  de  la 
monarchie.  Mais  la  crainte   inspirée 
par  les  événements  <jui  se  succédèrent 
en  France  lors  de  la  convocation  des 
états-géiiéraux    fil   rejeter    cet    avis  ; 
le  prince  se  déclara  régent,  et  fit  passer 
tous  les  actes  en  son  nom.  Il  fut  re- 
connu par  la  nation  sans   le  moindre 
symptôme  de  mécontentement ,  et  la 
ville  de  Porto,  qui  à  toutes  les  époques 
remarquables  de   la  monarchie    avait 
joué   un  grand  rôle,  fil   frapper  une 
médaille  en  l'honneur  de  cet  avène- 
ment. La  sollicitude  éclairée  du  régent 
ne  se  borna  point  pendant  la  première 
période  de  son  administration  à   ses 
étais  d'Europe,  elle  s'étendit  encore 
aux  colonies  et  surtout  au  Biésil,  où 
il  fonda  treize  villes  nouvelles  avec  de 
nombreux  établissements  dans  l'intérêt 
de  l'agriculture  et  des  sciences  géogra- 
phiques. Aux  archives  de  la  marine  et 
des  colonies  à  Lisbonne,  on  possède 
un  grand   nombre  de  projets   formés 
d'après  les  ordres  de  ce  prince  sur  les 
riches  établissements  d'Afrique  et  de 
l'Inde.  Il  faisait  rédiger  par  des  hom- 
mes spéciaux  des  mémoires  qu'il  Usait 
attentivement  et  qu'il  faisait  soigneuse- 
ment conserver  dans  son  cabinet  (6). 
L'administration    active  et  ferme  de 
Jean  VI ,  dit  un  écrivain  français  qu'on 
n'accusera  pas  de  flatterie  envers    les 
rois  (7),   «  procura  au  Portugal  une 
tt  véritable     prospérité    qui    malheu- 

((j)  Nous  en  avims  iu  plusieurs,  entre  autres 
un  travail  de  M.  Vicira  T»v;ir,  secrétaire  et  ai- 
chiristc  de  Goa  ,  sur  les  colonies  de  l'Afrique 
orientale  v.l  sur  les  possessions  de  l'Inde  ,  (|ui 
malbeniciisement  resta  inédit  ,  de  uiiine  que 
son  Catalogue  dos  n)anu^crils  des  arcbivis  de 
Goa  ,  depuis   la  coïKjuélc  jusqu'à  nos  jouis. 

(7)  Riibbe.  —  Résumé  de  l'histoire  du  Vor- 
tngaf. 


J|{A 


J£A 


1)5 


«  rtMÉMMlt  4iira  p^   d'années.  C« 

M  priuri*  enrotirA^^rait  tou^  les  grnrr^ 
«  île  travaux,  levait  ton»  \ts  obstacles, 
«  comhlail  tous  lr>  >\6ei  d'une  or;;a- 
«  ■isation  éronnioiqiif  imparfaite.  (  'ne 
«  ère  nouvelle  lie  tli*\elo|>|\f>menl  pour 
««  le  j;énie  national  -^cmlthit  se  prcpa- 
«  rer  lofîiqiie  L  ;;iici  re  miiI  .ijouiiirr 
«  le  rciullal  tic  tous  se*  elforts.  »•  Kn 
efTel,  quoique re  pi incepjrimr politique 
sa^e  ne  voulût  pas  prendre  une  part 
bien  active  à  la  f^ueire  que  les  puis- 
unce«  roaiiirrs  firent  à  la  Fr.ince  en 
1793,  il  >e  nul  repenilanl  ol)li;,r,  «l'a- 
près  le  traité  «le  fMsus  ttuirris  qui 
existait  entre  le  Portugal  et  rKspa»ne, 
(le  mettre  i  la  disposition ^e  retle 
puissance  un  corps  de  troupes  qui  ne 
devait  servir  qu'en  qualité  d'auiiltai- 
res  (S).  Kn  17UV,  il  s'oppova  même 
à  ce  que  ses  troupes  pénétrassent  sur 
le  territoire  français  ;  et,  lorsque  par  le 
traité  de  llàle  (1795i  IF-spa-ne  eut 
s'gue  la  paix  (91,  les  troupe>  de  terre 
rentièrent  dans  leurs fov  ers,  et  les  vais- 
seaux qui  avaient  joint  les  escadres  an- 
glaises dans  h  Méditerranée  reçurent 
ordre  de  revenir  dans  les  ports  portu- 
^ai.;.  Celte  conduite,  qui  annonçait  de 
la  part  du  prince  une  ;;rande  modéra- 
tion, attira  sur  lui,  à  IVpoque  du  traité 
de  1797,  l'inimitié  de  l'une  et  de  l'autre 
puissance.  i'Ius  tard  Konaparte  ayant 
décidé  l'Kspa^ne  à  laire  la  jjuerrc  au 
l'ortu^al  ^  envova  une  armée  de  quinie 
mille  itommes  sous  les  or*lres  de  I.e- 
clerc.  L'arrat-e  espa;;nole  commandée 
par  le  prince  de  la  l'aix  commença  les 
liostililés.  D'autre  part,  le  cabinet  an- 
glais qui  avait  reconnu  la  nécessite  de 
faire  une  Irève  avec  la  France  ne  four- 
nit au  Portuf;al  que   trois  cent    mille 


(8;  VoTrx  ,  outrr  le  trait.-  cl"*lli»nor  mire 
l'Espai^ne  ei  le  l'ortu);a! ,  la  convruttou  pntvi- 
•oire  do  ij  juillet  170Î.  lur  le*  lecour*  qua 
l'Etpaçnc  rt  le  r»rtu;al  devaient  »•  prêter 
m  ca»    de  guerre  a»ec  1j  France. 

(cj)    Vov.  Martriis ,    Hetutil  drs    tmin      \\ 
6S*> 


ItflH  sterling  de  subsides  (!0j,  et  qiuv 
Ire  ré'^iinenls  d'infanterie.  Ke  récent, 
qoid'abotd  avait  piis  le  parti  de  se 
mettre  à  la  tête  de  l'armée  portu- 
gaise (11),  résolut  alors  de  tr.iiter  sé- 
parément et  envoya  l'inlo,  ministie  des 
affaires  étrangère*,  à  Badaiox  .tfm  de 
ni*;orirr,  avec  luicien  Hoii.ipat  le  et  le 
ptinreile  la  Paix,  le  tiaiie  du  (i  inin 
IHOl  I  l'i)  qui  (ut  bientôt  ^utvi  de  celui 
de  Madrid  du  •-i9  septembre.  Par  suite 
de  ces  malheureux  traiirs.  irs  marcban- 
di'.es  fiaiiraises  fuient  pla.ées  sur  le 
mri:ie  pinl  que  les  anglaises  pour  les 
droits  d'entrée  ,  le  Portu«;al  con*en- 
tit  .1  feimer  ses  ports  aux  vaisseaux 
anj^lais,  et  s'obligea  de  plus  à  payer  à 
la  France  une  somme  de  tingt-cinq 
millions  (1!)).  Enfin  le  Portii<;al  céda 


»«ni  l^f 
la  lo   *. 


ire  la 
Ml  . 


(■ail  i  »a  r<iur  I»  i< 
Itr    <i*a~a  e»p»r»il»«' 


a'avaiit  pat  rie  ratifié  iaia*«^l)at<-ii,<  ni  pjr  la 
cour  de  Litboane,  fat  d^lare  nul  pjr  ir  ll.r<<- 
loira  le  a6  octobre  (Voj.  .t/a/feau.  Ml,  to-). 
(il)  Nout  avoof  prit  rnanautanie  <le  co  fait 
•Ijiix  une  rtirieu»«  cormpoodaoca  inédite  de 
1    r!    l..>brrt   Ftii-Uerald,  alar»  iiahattaJeur  à 

I  ..b..t.ne. 

;it;  VoT.  Mmneni.  Siipp..  Il ,  34o. 
X(il)  Voi.  la  note  ilr  l.Muni  R..n.ipartr  da  «7 
Mpl.  tSoi ,  adrctcf  au  pt  inre  de  Ij  l'.iix  ,  rt  Li 
Irllre  J'i  priiica  à  C.  nibeiro  Freire  .  ininivtie 
de  l'..rlu|:al  il  Madrid,  d^tce  du  uiLinejour. 
V..y.  une  autre  noU  d«  Lucieo  Buna|>arte  du  a8 
•r|i'ieiiil»re,  adr«*»é«  au  prince  de  l4|l>jix,  decla- 


ii6 


JEA. 


à  l'Espagne  Ollvenza  et  son  territoire, 
et  à  la  France  un  territoire  de  soixante 
milles  d'étendue  dans  la  Guiane  portu- 
gaise. Ces  conditions  onéreuses  furent,  il 
est  vrai,  modifiées  par  le  traité  d'Amiens 
du  21  mars  1802;  mais,  l'année  sui- 
vante, le  renouvellement  de  la  guerre 
entre  l'Angleterre  et  la  France  exposa 
le  Portugal  à  de  nouveaux  dangers. 
Napoléon,  qui  avait  fait  arrêter  et  dé- 
tenir comme  otages  tous  les  Anglais 
qui  vovageaient  en  France,  exigea  du 
prince-régent  qu'il  fermât  ses  ports 
aux  Anglais  ,  menaçant  le  Portugal 
d'une  invasion  immédiate  si  cette  ré- 
clamation n'était  pas  accueillie.  Dans 
une  conjoncture  si  critique,  le  gouver- 
nement britannique  envoya  à  Lisbonne 
lord  Roseling  ,  le  général  Simcoe  et 
Saint-Vincent  chargés  d'offrir  tous  les 
secours  en  troupes,  en  armes  et  argent, 
aussi  bien  que  des  flottes,  dans  le  cas 
où  le  prince-régent  serait  disposé  à 
résister  à  Napoléon,  ou  de  fournir  à  ce 
souverain  tous  les  moyens  pour  se  re- 
tirer au  Brésil ,  déclarant  en  même 
temps  que  si  la  cour  c'e  Lisbonne  re- 
fusait ces  propositions ,  les  Anglais 
s'empareraient  de  vive  force  du  port 
de  Lisljonne,  et  captureraient  tous  les 
vaisseaux  dans  les  ports.  Le  régent,  si 
souvent  accusé,  par  des  écrivains  mal 
informés,  d'avoir  toujours  cédé  à  l'An- 
gleterre ,  rejeta  ces  propositions  avec 
beaucoup  de  fermeté,  et  il  obtint  de 
Napoléon  une  promesse  de  neutralité 
qui  fut  stipulée  dans  la  convention 
entre  le  Portugal  et  la  France,  signée 
le  6  octobre  1803.  Cette  neutralité, 
achetée  il  est  vrai  par  de  grands  sa- 
crifices, tourna  cepeniiant  à  l'avantage 
du  Portugal.  Car  on  doit  dire  à  l'hon- 
neur du  régent  qu'il  obtint  dans  de  si 

rant  qu»-  n,  dans  IVspacp  de  dou/,»-  licurps  ,  il 
ne  receriil  ane  réponse  ^aiisfai^aiile  ,  l'armé»; 
française  entrerait  m  l'oilD(;al.  l.<-  prince  d«^  la 
Paix  ,  par  une  autre  nol«*  d.iiée  du  imine  jour, 
aniion<  e  à  Lucien  ,  auiba^sadeur  de  France  ,  la 
conclusion  de  U  paix  entre  le  Portugal  et  la 
France. 


JEA 

pénibles  circonstances  ce  que  des  états 
plus  puissants  ne  purent  obtenir.  Par 
suite  de  ce  traité  on  vit  le  commerce 
portugais  se  rétablir  de  nouveau,  mal- 
gré la  reprise  des  hostilités  entre  la 
France  et  l'Angleterre,  et  le  Portugal 
jouir  au  moins  pendant  quelques  années 
de  tous  les  avantages  de  la  neutralité. 
Mais  lorsque  le  dominateur  de  l'Eu- 
rope eut  porté  les  derniers  coups  à 
l'empire  germanique ,  lorsqu'il  eut 
triomphé  de  l'Autriche  et  de  la  Rus- 
sie à  Austerlitz  ,  de  la  Prusse  à 
léna  ,  et  qu'après  s'être  fait  empe- 
reur et  roi,  il  eut  audacieusement  dé- 
claré que  les  Bourbons  de  Naples  et 
d'EspagA  avaient  cessé  de  régner,  le 
Portugal  ne  put  pas  se  flatter  de  conser- 
ver encore  celte  bienfaisante  neutralité. 
C'est  alors  que  Napoléon,  prêt  à  l'en- 
velopper dans  ses  plans  d'usurpation 
depuis  longtemps  médités  sur  la  Pé- 
ninsule ,  ne  manqua  pas  de  prétex- 
tes pour  rompre  le  traité  de  neutra- 
lité qui  lui  faisait  ombrage.  Il  ac- 
cusa d'abord  le  régent  de  s'être  lié 
plus  intimement  avec  les  Anglais  , 
et  de  leur  avoir  accordé  des  secours 
lors  de  l'armement  de  leurs  flottes  par- 
ties du  cap  de  Bonne-Espérance  pour 
aller  conquérir  Buenos-Ayres  (14)  et 
Montevideo.  Les  avantages  que  la 
France  devait  tirer  de  son  alliance  avec 
le  Portugal  ne  purent  satisfaire  Bona- 
parte qui  était  alors  dans  tout  l'éclat 
de  sa  puissance.  U  annonça  hautement 
que,  de  concert  avec  l'Espagne,  il  fe- 
rnit  marcher  une  armée  sur  Lisbonne  ; 
et  cette  menace,  dont  l'effet  ne  fut  un 
mom«it  suspendu  que  par  la  guerre  de 
Prusse,  se  réalisa  après  le  traité  de 
Tilsitt.  Ce  fut  le  14  octobre  1807  que 
Napoléon  déclara,  dans  l'audience  qu'il 
donnait  au  corps  diplomatique,  qu'il 
ne  permettrait  plus    aucune    relation 


(ti/  Les  Anglais  s'empan'^reiit  de  Buenos-Ay- 
res le  2  joitlet  i8o6»  et  de  Haldonado  le  37 
octobre. 


JEÀ 

conracrriile  ou  p«litM|M  &•  cmiti- 
nfiit  a»«f  l'Annleierre,  cl  que,  n\  lUii^ 
dfu&  nois  Ir  pnnre  i^^nit  de  l'orto- 
pA  nj  renonçait  pa*  entièrrinent,  ta 
maison  tir  firugam  e  nu  mit  rrssr  r/r 
rrgnrr.  Drs  re  jour  il  i\f  fil  plu*  i  la 
cour  de  Lisbonne  qur  de»  proposi- 
tions loul-.i-fail  inadmi*Mlil«  KoMute, 
par  une  noir  <|nr  rommut>  m- 

ce  M.  de  Uavnrval.  fl' 
res  de  tVanre,  il  enjoisini  uu  ir^rul 
de  fenner  aui  An;;lais  dan*  \r  driai 
de  trois  semaine*  lou*  Ir*  port*  du 
Portugal,  d'arrêter  Inu*  les  «ujeU  bri- 
tanniques résidant  dans  ses  état*  ;  en- 
fin, de  confisquer  toute>  le«  propriété» 
an;;laises.  Dans  cette  déplorable  situa- 
tion le  prinre  fit  encore  tous  se*  efforts 
afin  de  prolon;:er  son  séjour  dans  la 
métropole  el  d'éloi;;ner  nue  rupture 
avec  la  France;  et,  croyant  i^e  tirer 
dVinbarras,  il  accepta  la  première  de 
ces  propositions  ,  en  demandant  du 
temp5  pour  1rs  deut  autre*.  Mais  un 
tel  sacrifice  fail  au  bonheur  de  son 
pavs,  loin  de  satisfaire  Ir  dominateur, 
excita  son  mécontentement  el  ne  satis- 
fit pas  davanta;;e  l'Angleterre'  I>e  mi- 
nistre de  Portugal  à  lx)ndre«  obtint 
cependant  du  cabinet  britannique  l'as- 
surance que  Ir  l*ortn;;al  ne  serait  point 
inquiété  pour  le  fait  de  la  clAture  des 
ports,  po  ,  ',at   pas 

aux  propi  '  dès  re 

moment  sa^ilual.onil»",  ;i,t  lii-^plus  dnn- 
Hereuse*  ;  pour  sp  soiisi:.iire  à  tant  de 
périlslépriiice  H  .:enl  c  '  br-^  »in  drto-il 
soncoura;;e  el  de  toute  «.a  présence  d'es- 
prit. JiLsque-là  il  n'avail  jias  <érieu>e 
ment  pense  à  se  retirer  au  Brésil ,  el  il 
n'était  question  que  d'v  envoyer  >on  fils 
aine  domi^edro,avec  le  litre  de  connéta- 
ble, et  une  desesscrurs(t.V;  mais  alors 
^lacé  entre    une  armée   franco-e>pa- 

(i>)  Tout  avait  rif  pr.j.jrc  |.our  1*  .1.  pjrl  .Ir 
doin  r«'<!r<>,  ItN  .ifriiirr»  d»  ta  nuiton  riairnt 
Doiuuir»  ,  rt  le  cii'i<l<  «ir  BrLuooIr  Kfut  drt 
Wttrespatrtite*  de  gouverneur  da  princa,  ta- 
pk>i  de  U  ploj  luate  importance,  q«i  n'avail  éW 


HA 


117 


S  «oie,  qui  enraliissait  lePortupI,  et  la 
otte  anglaise,  qui  tenait  bloqué  le  port 
de  sa  caiiiiale,  Jean  Vi  n'eut  pas  d'au- 
tre parli  ï  prendre  Ouiltanl  le  pa 
lais  de  Mafra,  il  vintbabiler  celui  d'\- 
)uda  ,  ï  IjNbonne,  où  il  réunit  plu- 
sieur*  foi*  le  conseil  d'riat  pour  lui 
faire  part  de  celte  grande  drirrmina 
tion  que  le  célèbre  Pombal  a^a-t  • 
fois  su;;i;érér  au  i(»i  Josepli.  \,  . 
avoir  établi  une  ie,;eiice  pour  ailinuiis- 
trrr  les  affaires  du  pa\s  pendant  son 
abM-nce,  il  annonça  son  départ  par  un 
décret  qui  fut  publié  le  iifi  novembre, 
et  il  déclara  (|ue  son  intention  éta*t 
de  ne  prolonj;er  «m  séjour  au  Brésil 
que  jusqu'à  la  paix  générale.  I^ord 
Stran-fort  ,  ministre  d'An^^leterre  , 
avant  fait  connaître  il  la  cour  ce  que 
Napoléon  venait  de  déclarer  publi- 
quement ,  que  ///  imtium  dr  lira' 
gutur  Ui'ait  rrsxr  tir  rr-inrr  ,  cet 
averlt*  rm»*n*  .irreléra  le  départ  'If») 
I^  I'  ' .    sa   famille  et  leur 

suite  ^     'enl.le*27  novembre 

ISO",  sur  une  flotte  portugaise  criin- 
poM-e  de  huit  vaisseaux  de  premier 
raii;;.  quatre  fré<;ates ,  douze  nricks  , 
un  schooner  et  beaucoup  de  navi- 
res du  commerce.  1^  nombre  total 
d  .enta  bord 

t'  de  quinze 

roiiic.  luule  |j  cj|.ljle  était  dans 
la  consternation,  F,a  fotile  •;?  pressait 
autour    du  prinre,   r"  lit  ses 

L;enoux,  et  le*  pleur*  <  •  !••  tous 

le*.  >eux  Lèvent,  étant  (le\enu  con- 
traire, emprrbn  la  flotte  de  sortir  de  la 
barre  pendant  toute  la  journée  du  '27. 


•crurd^  è  |>er«oiiot!  d>pui«  la  minoriir  dr  Se- 
brurii.  au  \VI*  tti^-lr.  tort  ilr  la  uoinutaliou 
i' 

■  al  qui  eonle- 

•lu    avait    «'(é 

^iiiitli  qui  I  tiit 

rMrwir*  an- 

^  riugjl  à  Lon- 

dr»-»,  il'Mn  iJnininRii»   ic  >^>ul*,  »'ttait   Jll^^^  tiu- 

fire»»r  dg  Ir  faire  parvenir  au  prioce-régent. 
Vou-  »ar  cela  l'écrit  publie  par  ce  diplomaU, 
•oua  ce  litre  :  L*é  juatn  coincidtiut .) 


1?.8 


JEA. 


JE\ 


Leregeiit,  qui  se  tenait  sur  le  pont,  dit 
alors  à  Tamiral  Cuiilia  ;  J'ainirrais 
jjiifux  périr  par  un  naufrage  (pic  de 
tomber  dans  les  mains  de  Jiona- 
purle  ;  car  ce  malheur  serait  plus 
grand  pour  moi  que  celui  fjue- 
prouoa  François  j''*'  prisonnier  de 
Charles  V  (17).  La  flotte  n'entra  dans 
rOcéan  que  le  29.  Elle  avait  à  peine 
dépassé  la  barre  qu(*  l'avant-o^arde  de 
Junot  arriva  au  bouri^  de  Sacavem,  à 
deux  lieues  de  Lisbonne.  Le  prince 
fut  reçu  au  sortir  du  Ta£;e ,  avec  les 
plus  éclatantes  démonstrations  d'allé- 
f;ie>se,  par  le  brave  amiral  sir  Sidnev 
Smith  qui  commandail  une  immense 
flotte  anj^laise,  et  qui,  à  la  tête  de  ses 
officiers,  se  rendit  en  t^rand  uniforme  à 
bord  du  vaisseau  amiral,  pour  comj»li- 
menter  le  récent.  La  flotte  portugaise, 
assaillie  dans  la  traversée  par  deux 
tempêtes  violentes,  arriva  le  21  janvier 
1808à  J>aliia  accompagnée  du  vaisseau 
de  ligne  anglais  le  Brdjort.  Le  prince 
fut  reçu  avec  les  plus  vifs  transports 
d'allégresse  par  le  peuple  et  par  le  ca- 
pitaine-général, comte  da  Tonte.  Le 
28  du  même  mois,  une  ordonnance 
rovale  ouvrit  les  ports  du  Brésil  à  tou- 
tes les  nations  amies,  et  permit  Tim- 
porlation  de  toutes  les  marchandises 
étrangères  moyennant  un  faible  droit , 
ainsi  que  la  libre  exportation  de  presque 
tous  les  produits  de  la  colonie.  I^cs 
habitants  de  la  grande  ville  de  lîaliia 
firent  tous  leurs  efforts  pour  décidci"  le 
régent  à  fixer  sa  résidence  dans  cette 
ancienne  capitale  du  ]>résil,  et  ils  offri- 
rent de  lui  faire  bàlir  à  leurs  fiais  un 
somptueux  palais.  Mais  le  prince  avait 
ré>^olu  de  s'établir  à  l»io-.Ianeiro.  Il 
s'embarqua  le  26  février  et  arriva  le  7 
mars.  j3ès-lors,  unicjuemcnt  occupé 
d'améliorer    les  différentes    branches 


d'administration  de  cette  vaste  contrée, 
il  y  fonda  un  grand  nombre  d'institu- 
tions utiles.  Après  avoir  permis  aux 
Brésiliens  d'exercer  toute  espèce  d'in- 
dustrie manufacturière,  il  établit  des  tri- 
bunaux civils  et  militaires,  des  conseils 
d'administration ,  wwq.  préfecture  de 
police,  VxWft  gendarmerie,  un  trésor,  \m 
conseil  des  finances,  une  banque,  une 
imprimerie  royale,  une  fabrique  de 
poudre  à  canon;  enfin  il  Institua  à 
Minas-Gcrrcs  une  junte  sous  la  pré- 
sidence du  capitaine-général,  pour  la 
civilisation  des  Indiens  sauvages  et 
pour  la  navigation  du  Kio  l)ol<;e.  H 
fonda  des  prix  en  faveur  de  ceux  qui 
introduiraient  au  Brésil  des  arbres  et 
des  plantes  utiles.  Il  fit  établir  un  hô- 
pital militaire,  des  écoles  d'anatomie, 
de  chirurgie  et  de  médecine.  Il  créa 
l'académie  royale  militaire  pour  l'en- 
seignement des  mathématiques,  de  la 
physique,  de  la  chimie,  de  la  métallur- 
gie, de  l'histoire  naturelle  et  des  scien- 
ces militaires  ;  enfin  il  ouvrit  au  public 
sa  bibliothèque  particulière  et  fonda 
la  bibliothèque  publique  de  Bio-Ja- 
neiro.  Il  augmenta  encore  le  jardin 
botanique  de  Lagoa  (18),  y  envoya 
un  grand  nombre  de  plantes  trans- 
portées de  Cayenne  et  de  l'Asie. 
C'est  encore  aux  soins  de  ce  prince 
qu'on  doit  la  prodigieuse  quantité 
d'arbres  à  thé  plantés  dans  et  jardin, 
cl  à  Santa-Cruz  (19).  Ce  fut  par  les 
moyens  mis  à  la  disposition  du  savan| 
minéralogiste  Napion,  d'après  les  or- 
dres du  régent,  qu'on  dut  les  premières 
expériences  faites  au  Brésil  sur  la  ré- 
sistance ,  l'élasticité  et  la  dureté  des 
métaux  et  des  principales  espèces  de 
bois  de  celte  vaste  région.  Il  fit  de 
(ioa  un  port  franc,  y  permit  la  liberté 
des    cultes  ,    cl   proclama  égalcmci< 


(17)  L'antcur  (le  cpfnriiclc  sclrouv.iit  .iiiprrs 
(lu  prince  quand  il  {iroiioriçu  «rs  parolcf.  rcni.ir- 
qii.-ihlcs;  d'autres  témoins  encore  viTarils  jicu- 
vcrit  ans^i  les  atlcsl'T. 


(18)  Ln  crcalicn  de  cet  «•tabli-'seinciit  dalc  du 
replie  du  roi  Josi  j)li. 

(k,)  I,;i  rrcolte  du  thé'Cn  1810  monta  5  (rente 
millo  livres  pisant. 


la  loïenute  TfU^ttw^  Junsioui  \«  Hié- 
Nil,  il  f nroura^ra  h  rdluiii^at.iiii  du  non 
\rl  rmi'iic  m  (aivAnl  vriur  tli-^  A(;uir> 
df4  colons  AuiqiicU  il  arconla  îles  Irr- 
rrs,  de  l'ai^eul,  ilf%  ustensiles  rt  toute 
sotte  lie  secours  pour  la  culture  et  l'ë- 
(liiution  ()c5  Ue.>tiaii\.  11  exempta  ces 
colons  et  leurs  enUnt^  ilu  sertice  mi- 
litaire ,  declaiant  que  tous  ceux  qui 
viendi aient  se  fixer  an  lin^il  joui- 
raient des  mêmes  a^jnla>;r^.  Il  éta- 
blit des  colonie*  daiM  rinterieiir  ,  re 
qui  contribua  1 
tion  des  jieujiL. 

à  prands  frais  une  ctilun.c  >tii.sve,  et 
transpniter  ce*il  fanjàlie*  auxquelles 
on  d:.lrib:ia  Hca  terres,  e.i  pr  »|.rie!é, 
avec  exctnpliou  d'iinpAts  y'20  .  Pour 
encourager  Ta^ricullure  .  le  rr^enl  ac- 
corda aux  habitants  du  Hic^il  Id*  pii« 
^ilè^e  que  leur>  propriété!*,  noiamuient 
lersucreries  et  les  récolte*,  ne  pour- 
laienl  être  saisie;»  en  luljlilé  ,  tuai;» 
seulement  dans  une  partie  t!e  leurs  re 
\rnus.  Il  donna  une  foi  te  iinpiilsion 
aux  cominunication>  interienr^•^.  A  ret 
effet  il  lit  ouvrir  dc5  ^nndes  routes 
dans  l'inlf  rieur  décelable  continent, 
el  conlinuer  cilles  qui  n'elaien^  point 
achevées  vil).  Il  ordonna  d'explorer  de 
nouxeau  les  grandes  liviercs  Sladeira, 
Tapajoz,  Xin^u  et  Arinox  ;  el,  par  ces 
dispositions,  la  navigation  depuis  Villa 
Bella  par  les  ri^  ière^  (  iuaporv*,  .Marno- 
réelMadeira  jusqu'à  l'Aniizoïie,  el  par 
ce  orand  Ueuve  jusqu'au  l*ara,  comme 
aussi  la  navi;iat  on  du  (!u!aba  par  l' Ari- 
not  el  par  le  lapajoi  furent  ou\eites; 
el  des  courriers  furent  établis  sur  toutes 
les  roules.  Knfin  le  prince  Jean  ne  fon- 
da pas  moins  de  Irenle-une  villes  noj- 


(lo)  Cctie  colonie  fut  appclO«  Km^^tlU-Fn 
h»mrg. 

{■»*)  C-S  routM  tont  V^^^\^  p,r«  jo»quà 
Rio  Janeiro  ;  d.'pai»  le  Tocniin»  jutqu'a  la 
«ource  (le  l'Ilapicuru  ;  p«r  l'iuUrirar  dr*  fore-», 
(iepais  la  province  (l'M|iiriio  S«niu  juwju'à  }A't. 
■««  G^rrrs;  depuis  Campo»  de  Goiucasc»  jm- 
qa'à  Minai  ;  en6n  par  l'iiitcrirur  d«-j  forfli. 

LlVIll. 


ji:a  ijç, 

^ellc».  Sv>i  \iir%  cVtendiient  aussi  à 
rrxpluraliiii  des  mine<t,  et  il  accorda 
de  i^ranJo  pn\ilo;;es  aux  explorateur:^ 
Il  londa  1.1  l>r1le  fonderie  de  fei  du 
iMoiro  do  l'ilar  ,  )uu>  la  diiertion  du 
savant  mHallut;4i>te  Feireiia  da  Cama- 
XÀ,  et  celle  d'ipanrma  ^ou<>  la  direction 
de  Varnhacen.  Voulant  eiirouiagn 
des  consirnctions  à  Hio-Janeiro  ,  il 
exemp'a  pendant  vin^t  ans  de  toute 
conlnbuiioii  les  pioprietaire>  dcN  mai- 
sons de  plus  ilun  elaj»,e,  el  celles  d'un 
•  ndant  dix  ans.  Il  fit  con^lruile  le 
\-f  thr.4ire  lie  Sainl-Jean,  un  im- 
wen-tc  baliinent  pour  le  trésor  et  la 
inonnai'*  ,  «If  magnifiques  caser nr;. 
Il  ajniiln  a  tous  ces  enibelli^vnnen:  ■ 
la  création  d'un  tre^- beau  laulm  poui 
la  promenade  publique  ï  Kahia  ,  ou 
il  m  éle\er  une  place  de  commerce  , 
la  bourse  ,  et  dota  celle  belle  cile 
d'une  riche  bibliothèque.  .V  Fer 
nambonc,  re  prince  fit  e\écnter  des 
travaux  coiuidérables  poui  emprrher 
|j  ruine  du  poitde  Kerife.  lUonlinua 
en  inéhjc  leu*p-N  a  encoura;;«r  le  rom- 
inerce  et  les  fabrique^,  en  réduisant 
1rs  droils  d'entrée ,  et  en  supprimant 
entier ement  ceux  qui  étaient  peiçus  sur 
tes  niaicha!idi-es  de  la  (>hine  venues 
par  la  vole  de  Macao  daits  de^  vais- 
seaux portugais;  de  même  que  sur  les 
matières  premières  employées  dan->  les 
manufactures  nati«nale>.  Ainianl  pas- 
sioiiTiement  la  inusi({ue  ,  il  ht  \enir  de 
Lisbonne  cinquante  chanteurs,  près 

3ue  tous  Ilaliens,  el  porta  l'orchestre 
e  la  cour  el  de  la  chapelle  ro>alc  a 
cent  in^lruinettlistes.  Il  appela  auprès 
de  lui  le  célèbre  Maicos  l'orlu^al,  dont 
plusieurs  pièces  ont  été  données  au 
Théâtre- Italien  de  Paris.  Si  celte  me- 
sure eut  une  ;;rande  inihience  sur  le 
perfeclionnemenl  du  talent  qu'ont  en 
l^néral  les  lirésilieiis  pour  la  musi- 
que, il  en  fui  de  même  de  celle  que  le 
prince  adopta  en  181G,  de  faire  venir 
de  France  une  colonie  d'artisles  a  la 


ijo 


JEA 


tête  de  laquelle  élaient  Lebreton,  de 
racadéinie  des    beaux-arts  ,  Debret  , 
peintre    d'histoire  ,  Taunav  ,  paysa- 
{;iste  ,   etc.   G  est  à  toutes  ces  déci- 
sions du    récent  que    le  ]>résil   doit 
une  école  des  beaux-arts  ,  un  grand 
nombre   d'édifices    remarquables  ,    et 
l'espoir  d'un  avenir  plus  brillant  en- 
core. Après  ce  coup  d'œil  rapide  sur 
la  politique  administrative  de  Jean  VI, 
quant  à  l'intérieur  de  ses  états  trans- 
atlantiques, nous  signalerons  ses  actes 
de  politique  extérieure  pendant  son  sé- 
jour au  Brésil.  A  peine  arrivé  à  Rio- 
Janeiro  il  déclara,   par  un  manifeste 
du  i^^  mai  1808,  nuls  et  non  avenus 
tous  les  traités  conclus  par  le  gouver- 
nement de  Portugal  avec  le  gouverne- 
ment français,  et  nommément  ceux  de 
lîadajoz  et  de  Madrid,  en  1801,  com- 
me aussi  la  neutralité  de  1804.  11  se 
reconnut  l'ami  et  l'allié  de  la  Grandc- 
Iketagne,  déclarant  qu'il  ne  poserait 
les  armes  que  de  concert  avec  cette 
puissance,  et  qu'il  ne  consentirait  ja- 
mais, quelles  que  fussent  les  ind'emnités 
qu'on  lui  proposât,  à  la  cession  du  Por- 
tugal. Au  mois  d'août  de  la  même  an- 
née, en  réponse  à  un  mémoire  que  lui 
avaient  présenté  son  épouse  et  son  ne- 
veu ,  l'infant  dom  Pedro  Garlos,  et 
dont  l'objet  était  d'implorer  sa  pro- 
tection pour  le  maintien  de  leurs  droits 
à  la  couronne  d'Espagne,  que  Napo- 
léon venait  de  placer  sur  la  tête  de  son 
frère,  le  prince-régent,  par  une  décla- 
ration solennelle,  promit  de  coopérer 
de  tout  son  pouvoir  au   maintien   de 
ces  droits,  <c  oubliant,  ajouta-t-il,  mon 
«  juste  ressentiment  contre  l'Espagne, 
«   qui   a  donné  passage  aux  troupes 
«  françaises,  et  qui  s'est  jointe  à  la 
«   France  pour  l'invasion  du  Portu- 
«  gai.  »    Dans  les  années  suivantes  , 
le  régent  fit  occuper  la  Guiane  fran- 
çaise par  une  expédition  envoyée  du 
Para ,  et  qui  avait  forcé  le  gouverneur 
de    cette  colonie  ,    V^ictor   Hugues  , 


JEA 

à  capituler  (2-2).  En  1810,  pen- 
sant que  le  Portugal  avait  lieu  de 
craindre  une  nouvelle  invasion,  le  ré- 
gent signa  avec  l'Angleterre  un  traité, 
qui  garantit  de  nouveau  la  couronne 
de  Portugal  à  la  maison  de  Bragance  ; 
et,  pour  obtenir  cette  alliance  ,  le 
négociateur  conclut  le  fameux  traité 
de  commerce  qui  a  été  l'objet  de 
tant  de  controverses  de  la  part  des 
économistes.  Ge  fut  à  la  même  épo- 
que que  le  régent  obtint  de  l'Angle- 
terre trois  cent  mille  livres  sterling 
d'indemnité  pour  les  vaisseaux  né- 
griers, capturés  par  les  croisières  bri- 
tanniques ,  et  appartenant  pour  la 
plupart  à  des  négociants  de  Bahia. 
Pendant  ce  temps,  les  provinces  de 
l'antique  royaume  de  Portugal,  enva- 
.hies  successivement  par  les  armées  de 
la  France  et  de  l'Angleterre  ,  étaient 
livrées  à  toutes  les  calamités  de  la 
guerre,  sans  que  leur  souverain  pût  les 
secourir  ni  même  communiquer  avec 
elles.  Le  désordre  et  l'anarchie  y  fu- 
rent portés  à  tel  point  qu'on  a  dit 
que  plusieurs  lieutenants  de  Napo- 
léon voulurent  s'y  faire  proclamer 
rois..  Mais  ces  bruits,  il  faut  bien  le 
dire,  ne  reposèrent  jamais  sur  aucune 
preuve.  Gependant  l'imnjense  majorité 
de  la  population  portugaise,  fidèle  à  ses 
anciens  princes,  s'était  soulevée  con- 
tre les  Français  ;  des  troupes  s'étaient 
organisées,  et  long-temps  réunies  aux 
Anglais  et  aux  Espagnols  ,  elles  com- 
battirent avec  autant  de  courage  que 
de  résignation  pour  une  cause  qui  sem- 
blait dçsespérée  (23).  Ge  ne  fut  qu'en 

fîî)  Victor  nugdfs  capitula  le  t?.  janvier 
i8oq.  «I  Durant  h-s  huit  a'iiicfsdo  la  doiiiinatioii 
«  poitugiise  ,  il  ne  se  jjussa  rien  de  r<iu-irqua- 
«  ble  dans  la  coloni».".  l.o  (ioJe  civil  demeura 
«  en  vigueur,  à  l'exception  de  la  inîse  en  s^- 
«<  (|ucstre  des  l>i«Mi8  des  absents  ;  le  pays  fut 
«  tfiiité  avec  asser  de  miriiagi  menlj.  »  (Notice» 
statistiques  sur  les  colonies  françaises,  l'a  ri  s  , 
Imprimerie  royale.  2*=  partie,  p.  i54.) 

(l'i)  Voy.  J/isloria  da  Jnvasao  dos  Francescs, 
par  J.  Acurcio  das  Ncves.  —  NAriex  ,  Sur  la 
guerre   de    la    Péninsule.   Hehtiou   liistoiique  des 


}t\ 


JLA 


i3i 


1811,  aprèi  If  Irionipf:»  lie  h  Ci*ali- 
lion,  que  If  pr  incf-réj^r ni  put  sf  remet- 
tre m  romnitmirnlion  sui\iea\rf  Lis- 
bonne. Son  autcntc  >  fut  alois  plei- 
nement reconnue, et  ilse luta  J'en>o>er 
au  rouvres  «le  Vienne  troi>  miniilie* 
pIcni|'otriitiaiirN  (ji..  nlitinreiit  la  resti- 
tution delà  |>larr  il()li\eiiu,  et  pri- 
rent ren;;a.;fmcnt  «le  rendre  a  la 
Franrr  la  portion  de  la  (îuiane  qui 
jadi^  avait  appartenu  à  cette  puis^nre 
jusqu'à  r(hapocL.  f/K>pa;;ne  ne  s*c- 
lant  pas  lialee  de  remplir  cette  condi- 
tion qui  lui  était  imposée  par  le  con- 
gru, ce  fut  par  repré»aille%  que  le 
prince-té^ent  fit  occuper    ^'  '•  o 

ainsi  qu'une  partie  de^  p' 
pa.;nolrs  sur  la  ri\e  ^ptt  iitiuMiale 
de  la  IMata  ,  allr^uant  aussi  la  né- 
cessite de  les  i^ardrr  tant  que  duie- 
rait  la  contestation  entre  rK5pa;;ne  et 
ses  colonies  m»urj;ées,  et  au*M  comme 
garantie  de  la  reslittitinn  d'Oli- 
▼enzaÇ2i).  I«a  cour  de  Madrid,  nul- 
fjé  les  nouvelles  alliantes  de  famille 
qui  eurent  lieu  à  cette  époque,  apal 
voulu  retenir  la  ville  d'()li>enza  con- 
tre la  deciNion  tlu  congrès,  il  réclama 
la  médiation  des  cours  de  France  , 
d'Autriche,  de  IWissie  et  d'An};Ie- 
tcrre.  Le  tiO  mars  iSlO  ,  après 
la  mort  de  la  reine  «^a  nicrc  ,  le 
prince-récent  prit  le  litre  de  roi  du 
rovaume-uni  de  Po(tu;^al,  l(ré:il  et 
Al^arves,  a\er  le  nom  de  Jean  NI  ;  et 
en  cette  qualité  il  fut  reconnu  par 
toutes  les  puissances  qui  s'empressèrent 
d'envo)ef  leurs  ambassadeurs  pour  le 
complimenter.  Dès- lors  ,  possesseur 
d'un  vaste  empire,  il  ne  né;;lif;ea  rien 
pour  en  assurer  la  prospéi  ite  a  l'aide  de 
riiidustrie  et  du  commerce  ^2')).  l*ro- 
tccteur  des  science*;  et  des  arts  il  cnnti- 

f*u€mntti  <iui  tmrt 
rmsi»n  tin  t'rai.rai 

(l4     Cr  fot   l'.o.r   ..     . ^...i   „^    ,,,„r 

de  Poriucal  unr  di»:Miin  de  tmu^t  compotrc 
des  r^i;iijuciiu  qui  s  roivot  le  plus  diktioguM 
dam  la  guerre  de  \»  Prniosule. 

\a5)  Vo)-.   l'ouTraçc   du    sarant    rcoDonistc 


nna  de  le^  fau  e  lleiirir.  Knlin,  par  un  df^ 
fret  puldi  le  17  déc.  ISI,"»,  il  éle\a  le 
lîféMl  a'i  11'      '  iiuie.  Toutes  les 

puu><>anre>     ■  '  re  muiveau  ti- 

tre, et  par  Icu.  .  !s  félicitè- 

rent le  prince  siii  ,1,  fçiie  „,ç. 

sure.  Mais,  par  une  xii  le  de  fatalité, 
Jean  N  i  devait  toujours  \oir  son  "ou- 
Tenieroeiit  enlra>epar  des  révolutions 
et  par  des  obstarles  imprévus,  l'eu  de 
temps  après  ^n  a^  ènement  au  trAne,  un 
fait  de  la  plus  lilnte  importance  fut 
près  d'ebianler  l'empire  brésilien  jus- 
que dans  ses  fondements.  Lue  conspi- 
ration dont  l'objet  était  l'elablissemenl 
d'un  cou%erneme!  '  ''        :     ' 

par  un  cei  tain  M  i 

nambouc.  .Vu  preniiir  btuil,  le  cliel  de 
la  judire  .t>.iiiI  sotilri  f.nre  arrêter  ceux 
qu'il  Si  '«,  auteurs, 

fut  tur  _  \ice  qui  se 

trouvait  au  nombre  des  conjurés.  Hien 
alors  ne  >eniMait  devoir  comprimer  la 
révolte  qui  menaçait  de  s'elendre  jus- 
qu'à Ualiia  :  mais  la  cour  de  Uio  Ja- 
neiro ,  instruite  à  temps  par  le  «gou- 
verneur, que  les  insurp«s  a\aienl  len- 
\o>é  à  l>oid  d'un  [»elit  calxjleur,  prit 
des  me>ureN  si  vi;;oureuses  que  l'in- 
surrection fut  étouffée  à  sa  naissance. 
I^  roi,  au  moment  où  il  rerut  la  nou- 
velle  (îr  rrfte  réxolle,  assistait  aux  fu- 
I  sofi  ne\eu,   l'infant   dom 

r  '  de  l5ourb.>n.  Il  conserva 

un  calme  panait  ,  et ,  à*:^  que  la  cé- 
rémonie fut  terminée,  il  alla  expédier 
les  ordres  nécessaires  ;  plusieurs  fois 
dans  la  même  journée  il  se  transporta 
aui  arsenaux  pour  hâter  par  sa  pré- 
sence les  armements,  et  il  prit  encore 
d'autres  mesures  dont  ses  ministres 
n'euient  connaissance  qu'après  l'exé- 
cution. Il  envo>a  mémo  des  ordres  à 
I  1  une  pour  que  la  régence  expédiât 
.'  •  !i  côlé  quelques  bâtiments  afin  de 
bloquer  les  insurgés.  Pendant  que  le  roi 

SrUa  LUl>oa.  inlilul^  =  Memonoj  d*j  btnefieto$ 
pilélicot  dj>  gartrno  d,l  rtf  D.  Joao  FI 


i32 


JE  A 


JEA 


prenait  ces  inesujcsà  Uio,  le  comte  ilos 
Arcos  avait  fait  imcsllr  Fcrnainhoiic 
par  terre  et  par  mer,  et  tandis  que  Ton 
battait  et  dispersai!  Icslnsiir-;és(lai»sune 
soi  tie,  les  troupes  de  la  marine  s'em- 
parèrent de  la  ville.  Ainsi  Tordre  fut 
bientôt  partout  rétabli.  Vers  le  même 
tenjps,  on  découvrit  à  Lisbonne  une 
autre  conspiration  dont  le  but ,  qui 
n'a  jamais  été  bien  connu  du  pu- 
blic ,  était  certainement  aussi  le  ren- 
versement des  anciennes  institutions 
monarchiques.  L'autorité  royale  ob- 
tint le  même  succès  dans  cette  occa- 
sion (26),  et  plusieurs  chefs  du  com- 
plot furent  arrêtés.  Cependant  le  roi 
fut  profondément  affecté  lorsqu'il  ap- 
prit qu'on  avait  fait  fusiller  le  général 
Frelre.  Dans  celte  même  année  ,  il 
conclut  par  le  ministère  du  marquis 
de  Marialva  ,  son  ambassadeur  à 
Vienne,  le  niarlofî;e  de  son  fils,  dom 
Pedro  ,  avec  rarchiduchcvsc  Léopol- 
dine,  fille  de  l'empereur  François  H. 
Ce  mariage  se  fit  par  procuration  à 
V  ienne,  et  la  princesse  s'embarqua  sur 
le  vaisseau  de  ligne  portuf^ais  le  Jean 
VI,  le  13  août,  à  Llvourne,  d'où  elle 
fit  voile  pour  Ulo-Janeiio,  où  elle  ar- 
riva le  ô  novembre.  Le  roi  s'étanl  i  en- 
du  à  son  bord  reçut  cette  princesse 
avec  de  grandes  démonstrations  de 
joie,  et  depuis  il  ne  cessa  de  lui  don- 
ner des  preuves  du  plus  vif  iiîlérêt. 
J)e  son  coté,  la  priiicesse  prit  si  bien 
les  habitudes  de  la  cour  portugaise,  que 
Jean  VI  répétait  souvent  :  Il  seinhle 
qu'elle  soit  w'e  par  mi  nous.  Les  fê- 
tes qui  eurent  lieu  à  cette  occasion 
touchaient  à  peine  à  leur  terme,  lors- 
que le  (>  février  de  l'année  suivante 
(1818)  Jean  VI  fut  couronné  roi  à 
Kio-Janeiro  avec  tout  le  cérémonial 
n«lté  dans  les  premiers  âges  de  la  mo- 
narchie. Le  prinre  ,  contre  l'usage 
ancien,  avait  retardé   celte  cérémonie 


(af,)    Voy.  Mail,  sur  In  ciinjnniliin  du  gcierai 
C  f'rfirr.  publié  h  Loiidrcs  m  i8io,  inb". 


de  près  de  deux  ans,  par  égard  poin'  la 
mémoire  de  sa  mère  qu'il  honora  tou- 
jojHs  du  plus  profond  respect  (27). 
Tant  qu'elle  vécut,  il  se  rendait  deux 
fois  par  jour  dans  SL^s  appartements;  et 
quand  il  la  rencontrait  dans  ses  prome- 
nades il  descendait  immédiatement  de 
sa  voiture,  et  n'y  remontait  que  lorsque 
la  princesse  s'était  éloignée. — Pendant 
que  cela  se  passait  au  Brésil,  d'autres 
événements  bien  graves  se  préparaient 
en  Portugal.  L'émigration  (28)  de  la 
famille  royale  au  Brésil ,  cet  événe- 
ment sans  exemple  dans  l'histoire  , 
avait  laissé  en  Portugal  les  gerbes 
d'une  révolution  prochaine.  L'école 
philosophique  du  XVIII*^  siècle  avait 
fait  de  nombreux  prosélytes  dans  ce 
royaume.  Dès  l'année  1808,  les  cory- 
phées de  cette  école  avaient  rédigé  un 
projet  de  constitution  que  le  comte  da 
Ega,  ancien  ambassadeur  de  Portugal 
à  Madrid,  devait  présenter  à  Bona- 
parte, à  Bayonne,  au  nom  d'une  dé- 
putation  portugaise;  mais  cette  école 
n'avait  point  les  sympathies  des  masses. 
Cependant  les  événements  de  la  guerre 
de  l'indépendance  (1809  à  1815) 
donnèrent  à  l'armée  victorieuse  une 
grande  importance,  et  rendirent  à  la 
nation  portugaise  toute  l'activité  et 
l'énergie  des  temps  antiques,  A  la 
même  époque ,  les  maximes  des  cortès 
de  Cadix  retentirent  en  Portugal;  mais 
le  peuple,  qui  aimait  réellement  sou 
roi,  en  attendait  patiemment  le  retour. 
Après  la  chute  de  Napoléon,  la  cour 
de  Saint-James  manifesta  plus  d'une 
fois  le  désir  de  voir  Jean  VI  revenir  à 
Lisbonne  :  elle  envoya   dans  ce  but  à 

(y.-])  A  son  r«tonr  du  Urcsil ,  Jean  VI  nitiaiis- 
j)ori'r  <ljns  un  v.iiss<au  de  sa  Hotle  les  restes 
inoric-ls  de  sa  nnMc.  Sur  le  vaisseau  qui  It-s 
poila  flottait  ri-iciidard  royal.  Il  leur  fil  rendre 
Ici  )>lii!>  grands  honneurs  lors  de  leur  transla- 
tion dans  l'cglisc  du  (^œnr  de  .lésas  à  Libboiine 
ou  «"'t   érigé    xm    louiljeau  inagninqnc. 

(28^  Je.in  \I  n'.iduii  liait  jamais  io  mol  d'<''/n(- 
i;ralion;  il  disait  toujours  :  <<  Je  n'ai  pas  f'migré; 
j';ii  transféré  ma  cour  d'une  put  lie  d<:  mon 
royaume  à  une  autre.» 


ji:a 


Il  A 


33 


Kio-Jineiro,  fn  IMf  r>,  ramirni  mi  .1 
l>rre>ford  ;    mais  If  jirincc  s'v   irfiiNa 
t<  par  riJéc   du  bien  qur  va 

I  Mailfaiicatix  peuple^  ilr  «on 

i.».>.\il  (iiipirf,  et  au  si,  il  faut  le  «lire, 
l'otii  nvrut  se  soustraire  au\  e\'^enr« 
•  '  ;  .  '  ;  r  ;;ran(lcs  pui.ssanrrsiJr  rK# 
i.'pr  (J:mi  qu'il  eu  »oit,  011  iK^eut 
*e  dissimuler  que  le  méronletilement 
quVpiuiiva  la  nation  tle  s«  voir  forcée, 
rianl  mrlropole,  (l'a\oir  recours  à  une 
rolonie  pour  atlendie  plus  de  six  mois 
«  t  quelquefois  un  an  la  décision  d*af- 
Ijiios  pressantes,  n'ait  é\é  pour  beau- 
rnti|.  «luis  les  causes  ue  bouleversement 
<:  «(laieient  plus  taij.  O  ne  fnl  ce- 
1  •  I  l.inl  qu'en  présence  des  ié\oluliori 
dKspa^neeldc  Naj>lrs,  en  \H'20,  que 
les  premiers  desordres  se  manifeirrentà 
l'orlo  le  '2\  août.  Ij  régence  sentit  aus- 
sitôt le  danger  de  ?;a  position,  et  prit 
toutes  les  précautions  que  la  piudenrc 
lui  su^i;éra.  Le  maréclial  lieresford,  in- 
-Iruit  de  tout  ce  qui  se  passait  en  Kspa- 
^ne  et  en  l*ortu;;al,  résolut  d'aller  lui- 
même  à  Uio-Janeiro  pour  informer 
!••  roi  et  le  solliciter  d'euNover  de  Tar- 
uenl  et  des  instructions .  Knibai  q.e  dans 
les  premiers  jours  d'avril  sur  la  fté-jate 
an;;laise  la  Spurtùite,  il  arriva  a  Uii>- 
Janeiro  le  9  mai.  Le  roi  fil  pailir  aus- 
sMAi  un  vaisseau  chargé  d'arpent  pour 
paver  la  solde  arricjéc  des  troupes,  et 
il  chargea  la  rr-rrirc  lîe  Lisbonne  d'o- 
pérer dans  l'administration  intérieure 
les  cban{;ements  qu'elle  croirait  néces- 
saires. Mais  déjà  le  mal  avait  fait  de 
grands  pro;;rès.  Dirigés  par  quelques 
officiers  et  par  les  socié'cs  >errèles 
répandues  sur  toute  la  surface  de  la 
Péninsule,  les  conjurés,  mettant 
i  profit  l'absence  du  maréclid,  s'é- 
taient assemblés  dans  la  nuit  du  '2'S 
au  2V  août  chez  le  colonel  Sepulveda  , 
fils  du  brave  général  de  ce  nom,  qui 
atait  rendu  de  ;;rands  services  à  la 
restauration   ['2[>)  :  là  ils  préparèrent 

(19)  Oo  prut  cgiijultrr  »ur  ce  c<'o<ra!  :   .V». 


des  piorlaniiiious  et  des  plans  de  ré- 
volte; puis  »i>  »r  réiin'ient  à  leurs 
quartiers,  liaran;;urrrni  les  troupes,  et 
se  poiierent  a  l'iioirl -de  ville  où  il> 
convoquéient  les  antoiilcs  et  créèrent 
une  iunledegouvernciiieiil  composée  de 
seize  membres,  qui  se  liala  de  publier 
un  manifr^ie.  Dans  cet  acte  mémo- 
rable, la  junte  accusait  le  roi  de  l'a- 
néantivsement  du  commrire,  de  la  dé- 
cadence de  l'agricultu'e,  enfin  de  ton- 
tes le«  cabmilén  qui  avaient  suivi  M>n 
départ  (30).  Bientôt  plusieurs  clieb. 
militaires  envovnent  leur  adiiesion  à 
la  'unie  qui  eut  sous  »ei  ordie>  vingt 
deut  mille  boinines  ,  dont  une  pariK: 
mairba  >ur  la  capitale.  Ij  régenre  de 
Lisbonnre  instruite  de  celle  insurrec- 
tion voulut  en  atrêler  les  progrès.  F.lle 
réunit  i'iimed  .«len:enl  un  grand  con- 
seil auquel  assi>lcrent  presque  louiez 
les  principale^  autorités.  Klle  doniu 
l'ordre  au  général  Victoria  et  au  comte 
d' \maranle  de  maicber  »ur  Porto, 
mais  ces  gént':aut  »e  virent  abandon- 
nés de  leuis  propres  soldats.  I^es  gou- 
verneurs d.j  royaume  prirent  des  me- 
sures pour  empêcber  les  communica- 
tions; ilsrr»'  '  r  une  pro- 
clamation ai  mêle  dans 
fes  princ  pe>  d  t>l»»tvsjjMe  au  roi  et  a 
la  re-^ence,  seule  depositaiie  de  son 
poMvoT  ;  mais  c'est  en  vain  qu'une 
nouvelle  proclamation  fut  publiée  le 
i"^  septembre,  proinellanl ,  au  nom 
du  roi ,  la  convocation  des  (^rtès  ou 
du  congrès  national  suivant  l'ancienne 
conslilulion.  C'est  en  vain  qu'elle  fu 
paraître  d'autres  prcclamation>  le  jour 
suixanl.  accordant  i.ne  amnistie  géné- 

r,       ■'      u-    .>»   rr  •     r.    Ju    p'-rr»/  Srpu.'rfJj  ,     paf 

I  .  \.  (.  ■  .  r^.  ;..il.  I.  en  ifog.  Lornn»*  le  jcunr 
cv.'  ticl  >t  j.'.Ui  'j  .  <  .1  il  e««  «|uc.r»oii  lui  foicé 
<r«ii>(:.rr.  .|»ic»  la  rr»iaur3iioii  «le  lîiii  . 
J^a  M  l«ti  fi!  i.f--  |.rii»ion  donl  il  *  jo""  P*»' 
fî»î\  loul  l«  ieuij.1  qu'il  a  luih.ie  Pan»,  iiu^u'a 

J.,  VoT.  n»t»i  .  Mnmi  iUlitlique  tw  U  rojmu- 
-/  -iV  /'  ^<■cu^  I  .  84.  Otlr  pi^e  p«ul  donner 
au  lectrur  «':rjn;rr  »  la  natioo  porta;ai$-  m.» 
idrr  dr  «un  amour  |o«r  Ja»n  VI. 


.34 


JEA 


raie  aux  ofticiers,  soldats  et  citoyens 
qui  reviendraient  à  l'obéissance  ;  c'est 
en  vain  que  le  9  sept,  les  lettres  de 
convocation  pour  les  Coitès  furent  ex- 
pédiées par  les  gouverneurs  au  nom  du 
roi,  et  qu'ils  adressèrent  à  la  junte  de 
Porto  une  lettre  qui  enji;ao;eait  ses 
membres  à  se  dépouiller  d'une  autorité 
illéi>ilime,  puisque  la  convocation  du 
congrès  national  leur  ôtait  tout  motif 
de  la  conserver.  Les  gouverneurs  du 
rovaume  avertirent  enfin  que  le  roi 
seiait  supplié  de  revenir  en  Portugal, 
ou  d'y  envoyer  le  prince  son  fils  aîné. 
Mais  la  révolution  avait  déjà  acquis 
une  grande  force ,  et  le  plan  de  ses 
autetns  était  bien  différent  de  celui 
qu'ils  avaient  indiqué  dans  leur  mani- 
feste. Les  événements  se  précipitèrent 
tellement  que,  le  1 5  septembre,  le  i  G^ 
régiment  s'élant  insurgé  à  Lisbonne, 
la  révolution  s'effectua  dans  cette  ville 
et  la  régence  fut  retirée  à  ceux  qui 
l'exerçaient  au  nom  du  roi.  La  junte 
de  Porto,  réunie  à  celle  de  la  capitale, 
dessina  bientôt  son  caractère  en  décré- 
tant que  la  constitution  des  cartes  es- 
pagnole s  serait  immédiatement  procla- 
mée. Dès-lors  l'autorité  du  roi  n'exista 
plus  que  de  nom.  Lorsque  ce  prince 
fut  informé  de  ces  événements,  croyant 
encore  pouvoir  arrêter  l'insurrection, 
il  .sanctionna  la  convocation  desCortcs, 
et  accorda  une  amnistie  générale  ; 
mais  on  sait  assez  que  ce  n'est  pas  par 
de  telles  concessions  que  les  révolu - 
ions  s'apaisent.  Celle  du  Portugal 
fit  donc  encore  de  nouveaux  progrès  ; 
et  ce  qu'il  y  eut  de  plus  faclieux  pour 
Jean  VI ,  c'est  qu'ell*"  menaça  bientôt 
ses  états  du  Brésil.  A  Kernambouc,  à 
Lahia  et  même  à  Rio -Janeiro,  le  peu- 
ple parut  tout  à  coup  s'agiter,  et  les 
troupes  prenant  part  au  désordre,  le 
10  février  1821 ,  une  nouvelle  consti- 
tution fut  demandée.  J)ans  ces  cir- 
constances funestc-s  le  roi  réunit  plu- 
sieurs fois  son  conseil  sans  que  rien 


JEA 

de  convenable  put  y  être  décidé.  Le 
24  février,  il  fit  publier  une  déclara- 
tion annonçant  la  résolution  d'en- 
voyer le  prince  héréditaire  dom  Pedro 
à  Lisbonne,  pour  y  entendre  les  plain- 
tes des  Portugais  et  les  rapporter  au 
pftd  de  son  trône ,  afin  qu'il  ju- 
geât ce  qu'il  convenait  de  faire  et  don- 
nât à  ses  peuples  du  Portugal  et  du 
Brésil  une  constitution  selon  leurs  be- 
soins et  leurs  mœurs.  Mais  rien  de 
tout  cela  ne  put  contenir  l^esprit  de 
rébellion.  Jean  VI  s'étant  rendu  à  la 
maison  de  campagne  de  Saint-Christo- 
phe, où  il  se  plaisait  beaucoup,  le  26 
février  au  matin  ,  des  troupes  de  toutes 
armes,  conduites  par  des  sous-officiers 
sur  la  place  du  théâtre  de  Saint-Jean  , 
s'emparèrent  de  toutes  les  avenues,  et 
un  conseil ,  formé  des  chefs  de  l'in- 
surrection, se  réunit  dans  la  salle  du 
théâtre,  où  bientôt  ils  réclamèrent  im- 
périeusement la  promulgation  de  la 
constitution.  Le  prince  royal  dom  Pe- 
dro ,  revenant  de  Saint-Christophe  , 
lut  alors  aux  troupes  un  décret  dans 
lequel  Jean  VI  acceptait  la  constitu- 
tion telle  qu'elle  serait  faite  par  les 
Cortès  en  Portugal.  Alors  les  insurgés 
se  transportèrent  à  la  maison  de  plai- 
sance du  roi  pour  le  ramener,  ainsi 
que  sa  famille,  à  son  palais  de  Rio- 
Janeiro.  Plusieurs  d'entre  eux  s'atte- 
lèrent à  sa  voiture  et  firent  de  cette 
marche  une  sorte  de  triomphe.  Rentré 
dans  son  palais,  le  monarque  parut  au 
balcon  où  il  fut  encore  fort  applaudi. 
Il  renouvela  ensuite  :  on  ministère  et 
rendit  plusieurs  décrets  dont  l'un,  du  7 
mars,  fut  la  nomination  de  neuf  députés 
aux  Cortès  de  Lisbonne;  et  dans  la  soi- 
rée, accompagné  de  toute  sa  famille,  il 
se  rendit  au  théâtre,  où  de  nombreux  ap- 
plaudissements raccuellllrent.  Voyant 
cependant  à  quel  point  son  autorité 
s'était  affaiblie  par  suite  des  événe- 
ments que  nous  avons  rapportés  ; 
considérant  aussi  que  ,  par  la  conti- 


JEA 

miation  de  KMit^oor  au  Rrf^iUnvi- 
ronné  de  nou\flle^   rrptibli'nirt,  il  ne 

fiouvait  arrfler  les  |»rn;;té^  d  une  ré*o- 
otioD,  et  pensant  d'tilleim  que  5on 
retour  à  Lisbonne  produirait  <ur  la 
nation  portu^ai^e  non-'^culement  une 
j;rande  rvplosuni  ^^*CIltllmlMa^me,  mai* 
enrnrr  cjur  o  ptrNriirr  da^^  l'aiifienne 
f  '  tilri>er  l'esprit  (ic- 

I.  .iil,  en  outre,  que 

le^  ;;i4iiilr^  puis^aiM^s  de  TF-iirope  ne 
larderaient  pat  à  rétjhtir  r^nrirn  or- 
dre de  choses,  d'après  1rs  p^i^ripe^  qui 
avaient  dirte  le  traité  de  la  Sainte- 
Alliance  (1)1)  ,  Jean  VI  6t  publier 
an  décret  pour  annoncer  sa  dëler- 
mination  de  retourner  à  Lisbonne. 
Mais  cette  résolution  ,  dont  la  née e^s!té 
était  sentie  par  toutes  les  personnes 
raisonnables,  rv       '  ''  <•- 

tnde  sur  les  il.n  l 

du  roi  l.i!^«>ait  Ir  1J:«  il  rvju»  r,  tlc'c>t 
en  consi-qurnce  qu'il  fut  conxeiui  dans 
iu\e  a-v>efnb!re  t\  rirrteurs  réuni»  à  la 
Bourse  de  s'oppoNrr  à  ce  départ  et 
d'en\over  au  prince  une  dépuUtion 
pour  lui  demander  un  •;ouverneroent 
provisoire,  dont  son  6K  aîné  dom  Pe- 
dro serait  le  régent  pendant  l'absence 
du  monarque.  Mais  il  leur  fit  décla- 
rer qu'aucun  cban;:j^raent  n'aurait  lieu 
avant   que  la   constitution    du  Portu- 

f;al  fut  terminée.  Pendant  ce  temps 
es  préparatifs  de  départ  se  trouvant 
terminés  ,  le  monarque  ,  avec  sa  fa- 
mille et  se<  mmi  1res  ,  s'embarqua  le 
26  avril  18*21 ,  i  bord  du  vaisseau  de 
li;;ne  ,  le  .han  f^I  ,  commandé  par 
le  contre  amiral  de  Vianna  (3*2).  Pln- 

(Ji)  (!eqtii  proavr  q««  la  p«n«^  du  roi.  au 


JEA 


i35 


». 


q«  il«  nr  ( 

Uil  dire  :  -,  ^ 

drvnt-rllr;     j>u.i:i  (>our  riuUiir   >  ..uvtrtt    «t«irv 
de  cbosr<  *  m 

(ij)  Cet  ofbcirr  rrfut  U  otraM  Uu«  qa«  ton 
aïeul,  1«  famcui    duin  Pedro  d«   Mrneto,  prr 


autres  bâtiments  l'accompa- 
gnaient avant  à  leur  bord  toute  la  suite 
da  roi  ,  composée  d'environ  quatre 
mille  per«onnes.  Il  paiait  que  dans 
la  travetsée  on  lui  conseilla  de  dé- 
birquer  i  une  des  ilex  de  Madrra  ou 
des  Açores,*d*où  il  adresserait  à  la  na- 
ti(»n  porlo;;ai*eune  proles?al-nn  contre 
tout  ce  qui  avait  été  fait,  d\ec  l'exposé 
do  svsN'me  de  ;;<»uvernemeiil  qu'il  vou- 
lait ailopter;  mais  le  roi  s'v  refusa.  ïj 
(lotie  arriva ,  le  3  juillet  IH'il,  en  vue 
de  Lisbonne,  et  mouilla  dans  If  port  : 
des  saivrs  d'artillerie  tirées  des  forts 
et  des  vaisseaux  de  la  manne  rovale  si- 
gnalèrent sa  présence.  l.e»Corlé», crai- 
gnant que  la  popularité  de  Jean  VI 
n'amenil  une  conire-iétolution  spon- 
tanée, sedéclarèrent  en  permanence,  et 
donne  '         .«nce  des  pouvoirs  illi- 

mités  I  riit.  en  outre,  que  reut 

qui  fera  eut  «.uicnd  e  d'autres  cris  que 
ceiM  de  vi,'r  f/t  rrlii^inn,  /rr  Corfrs, 
I  'tnrf, 

f:  ,1  .    ,■    ,  .itmnr 

perturbateur  s,  et  que,  jusqu  al'et.iMi  <  • 
menldelarnnotitulion,  leroi  nepontr.iit 
donner  d'emploi  àaucun  étranf:er  sans  le 
consentement  des(^rtès;  enfin,  qu'il 
ne  pourrait  destituer  ni  changer  les 
commandants  militaires  de  Lisbonne 
et  de  Porto  ,  non  plus  que  le  surin- 
tendant de  la  police.  Cette  cbam- 
bre  démocratiq  e  ne  se  borna  point 
à  de  telles  mesures  ,  elle  fit  intimer 
au  roi  qu'il  ne  serait  pas  permis  de 
di^arquer  }k  quelques  personnes  de  la 
cour,  et  e!Ie  envova  ^  bord  de  l'e^ra- 
dre  une  dépulalion  qui  v  re<ta  en 
permanence.  Malgré  tout  ce  qu'il  y 
avait  d'injurieux  pour  le  monarque 
dans  de  telles  mesures,  il  y  consentit 
sans  hésiter,  et  il  attendit  a  bord  jus- 

!.        \\\'.t. 

-  Mon- 

ne.    lui 

l'ariKUrd  r.  »"  »"••  ^"»  vi'.^Ma.i 

mtMAMui  U  w... -l^*-   l*- «>"«•»/  "t"» 

pjrril  CT^aeincni    »«  coiucrtit  dani  sa  fanjinr 


i36 


JEA 


.)EÂ 


qu'au  lendemain.  Après  plusieurs  mes- 
sages et  différentes  expiitalions,  .Jian 
VI   et  les  princes  débarquèrent  le  i, 
\ers    midi,  et    se  rendirent  à  la  ca- 
thédrale suivis  de  toute,  la  cour   dans 
des   carrosses,   ensuite  à  la  salle   des 
Corlès  où  le  monarque  prêt*  serment  à 
la  constitution  décrétée  par  elles  le  9 
mars.    Craignant  que  toute  tentative 
de  ressaisir  son  autorité  ne  fut  suivie 
d'une  guerre  civile,  Jean  VI  prit  son 
parli,  et  il  affecta  une  jurande  sécurité 
au  sein  de  celle  assemblée  qui  venait 
de   lui  dicter  de  si  liumiliantcs  coîidi- 
tions.   Le   présidcnî    prétendit    néan- 
moins daiis  ie  discours  qu'il  adressa  au 
monarque    qu'à    compter  de    ce  Jour 
son  nom   devait   eli  e  placé  à  coté  de 
ceux  d'Alphonse  i*"',   de  Jean    T"'' et 
de  Jean  IV,    qui  avaient  restauré  la 
monarchie.  Le  roi  se  borda  à  remettre 
une    réponse   par  éc  il ,   et  sortit  de 
la  salle  au  bruit  de  nombreuses  accla- 
mations. Puis  ,  co'itinuanl  à  se  mon- 
trer plein    de    confiance   comme  s'il 
eût  joui  de  la  plénilude  de  son  pouvoir, 
lors  de  la  créalion  de  la  garde  natio- 
nale ,   il   parut  au  tiiéàtie  de  Sain'- 
Charlcs  avec  runifoime   de  ce  corps, 
et    il  ordonna  a  toute  la  cour  d'y  pa- 
raître   de    la   même    manière.    Nous 
ne    ferons    pas    ici    l'histoiique    des 
circonstances  qui  préparèrent  la  con- 
tre-révolution du  mois  de  mai  1823. 
Les  faits  qui  eurent  lieu  depuis  le  re- 
tour de  Jean  VI  jusqu'à  celte  époque 
appartiennent  plus  à    l'histoire  géné- 
rale qu'à    la  bio;;raphie  de    ce  prince. 
Ne  prenant  aucune  part    aux  événe- 
ments, il  se  tint  tellement  en   dehors 
de  toute  influence,  qu'il  refusa  obstiné- 
ment les  offres  qui  lui  furent  faiîcs   à 
plusieurs  reprises   pour    I."  rétablisse- 
ment du  pouvoir  royal.  Noyant  tou- 
tes les  difficultés  et  les  périls  de  pa- 
reilles tentatives   il  disait   quelquefois 
dans  son  intimité,  quand   il  voyait  les 
Certes  et  les  ministres  débordés  par  les 


circonstances  et  près  de  succomber  : 
«  C'est  à  ceux  qui  ont  fait  tout  cela, 
<'  qu'il  appartient  de  s'en  tirer.  »  11  en 
attendait  le  dénouement  de  la  manifesta- 
tion bien  prononcée  de  la  majorité  de  U 
nation  cl  des  événements  extérieurs.  Ce 
dénouement  ne  se  fit  point  attendre.  Le 
18mai,latroupedelignes'étantmiseen 
révolte  contre  les  Corlès  vint  au  palais 
de  Bcmnosta  sous  les  fenêtres  du  roi, 
et  s'élant  réunie  aux  masses  du  peuple 
cria  :  viW  le  roi,  à  bus  la  constitu- 
tion. Jean  VI  se  montra  au  balcon 
entre  les  deux  princesses  ses  filles,  et 
on  foula  aux  pieds  la  cocarde  consti- 
tutionnelle aux  cris  de  vive  le  roi.   Ce 
lut  alors  que,  cédant  au  vœu  populaire, 
ce  prince  se  rendit  à  Villa-Franca.  Dès 
ce  moment  le  pouvoir  démocratique  fut 
renversé  ,   et  dans    le  trajet  de  Villa- 
Franca  à   Lisbonne ,   pendant  quatre 
grandes  lieues,  Jean  VI  se  vit  l'objet 
d'un    véritable    triomphe.    Toute    la 
population    sur    son    passage    pous- 
sait des    cris  de  joie  ,  et  à    son  en- 
trée à  Lisbonne  l'enthousiasme  éclata 
encore   davantage.  L^ne  sorte  de  fré- 
nésie s'était  emparée  de   tous  les  es- 
prits;  on  porta  le  prince  en  triomphe 
jusqu'à  la  cathédrale.  Cependant,  doué 
d'une  grande  pénétration,  connaissant 
la  force  relative  des  partis  politiques,  et 
craignant  que  celle  explosion  d'enthou- 
siasme ne  produisit  des  vengeances,  il 
fit  tous  ses  eflorls  pour  en  modérer  les 
clans;  et  voyant  bien   que  les  choses 
ne  pouvaient  rester  dans  le  même  état 
qu'avant  la  révolution,  il  nomma  une 
commission    chargée   de    lui  proposer 
un  projet   de   constitution    suivant  les 
formcj  nouvelles.  Après  plusieurs  séan- 
ces ,    Stokler,   l'un  des   membres  de 
cette  commission,  de  concert  avec  plu- 
sieurs Af*  ses   collègues,  fit  un  rapport 
d'après  lequel  non-seulement  une  com- 
mission n'avait  pas  d'autorité  pour  pro- 
poser le   moindre  changement  à  l'an- 
cienne constitution,  mais  encore  que  le 


JbA 

loi  lui'inrntr  ii'jivait  pa>  le  iliini  ilVii 
oclio\rr  vm»  !c  ».>»i>cfiUMiKMil  Jr*  trm* 
orilrr»  iëu:»>  aux  (!.•'-    ^-lt»M  les  au 
Cieui  u%a};e».  (.rllc  •'  ni  prë- 

\alu,  la  coiumivMuii  '  ■  <■,  ri  ie 

roi  promulgua,  le  V|uiii  lH:ii,  une  lui 
drcUrant  que  Paiii  eiine  coiutilulion 
(lu  royaume  était  la  seule  I  '^ale,  qu'elle 
(Jcmeuiait  en  xi^neur,  puisqu'elle  a\ait 
ëié  ^anclionllee  par  lui  à  son  aTènrmciit 
au  Irdjie,  et  par  le»  roi*  ses  prrjcre%- 
teur.s;  il  orJjiinail  eiiGii  que  les  (^irle» 
composées  îles  troi>  otJte»  du  ro\ amue 
fuv^eiil  convoquée»  aiisMtùl  que  le  cnu- 
^eii  de^  miiii»tres  auiatl  teiminr  les 
Iraxaux  preparatoiies.  l  ue  nouvelle 
riunmiv&ion  ,  rompo>er  tic  mlni^tre» 
d'état,  du  ^rand  cluiirelier  et  de  quel- 
ques juriscunsnltes,  fut  cliar;;ée  de  ré- 
oi;;er,  d'apiès  les  anciens  usa^e> ,  les 
in&truclioiis  relatives  au«  élections; 
mais  les  craintes  qui  furent  expiimees 
par  le  cabinet  de  Madrid,  de  conrcit 
avec  d'autie>  pui>sances,  »ui  le  iliu- 
ccr  de  pareilles  réunions ,  décidèrent 
le  roi  à  ajourner  iinléliiiitnent  celle 
roe5ure.  \ji  position  do  Jean  N  I  était 
alors  ^182ij  extrcniemenl  etubarras- 
unte.  I^  parti  inonarcliique  se  divisait 
en  exaltes  et  en  moderé.>,  et  les  révo- 
lutionnaires, quoique  vaincus,  étaient 
fort  nombreux.  Le  roi,  toujours  dis- 
pose à  de-»  voies  de  modération,  fit  de 
TainseTtorts  pour  maintenir  l'équilibre; 
et  les  affaires  du  I>ré.>il  vinrent  ajou- 
ter aux  difficultés  de  sa  position.  I^ 
perte  de  celle  riclic  colonie  auj^menta 
la  détresse  des  finances  iX\  .  \jc  ;?ou- 
vernenient  an;;lai.s.  voulant  amener  une 
conciliation,  avait  obtenu  du  roi  que 
son  ministre  à  Londres  fut  autorise  à 
entre:  en  négociation  avec  les  com- 
mL^aiies  brésiliens  qui  >c  t  roux  aient 
en  Angleterre.  C'est  alors  que  Jean 
VI,  fatif^ué  des  dissentin:ents  qui  ré- 

•  ii]  Vuur  le*  <li-{3il>  ftor  l'bi»(o«rr  «]•  la  trpj- 
r.ilio>i  tia  Brr^il,  <>m  ncnl  rr.iuuUrr  Iti,i»ir  of 
Brmiil  fr«m    the  Mr,.r«i   of    Br^gmuM  f*mdj,  hr 


JfcA 


i3-. 


puaient  au  s»in  de  son  ministère  et 
vujilant  prouxer  qu'il  ne  cédait  à  I  in- 
fluence d'aucun  p.Mti,  con;;éJ»a  tous 
ses  mint>lres  a  la  fot>.  Sir  Charles 
Sliiail,  enxo'ie  biil.ii.mque,  étant  ar- 
rixe  à  Lsl'oniie  ,  Ii*  tUinla  cependant 
à  teconnaitie  l'indepetuluice  du  Itrr- 
sil,  et  même  sa  séparation  du  Portugal 
(!el!res- patent  es  du  13  mai  iS'iô).  Ce 
roxauut^  était,  comuï"  l.i!.,..t  de. 
étals  de  rKnrope  ,  grevé  d'une  dette 
considérable  ,  encore  au^menlie  de 
trois  einpinnls  faits  soiu  le  i< 
des  (^/4Hles.  I^  roi,  |N)uisuixant 
duclleroent  un  NV-teuie  Ai-  ie:i'  . 
Co::jbiné  de  nuninr  a  nr  pa«.  f>  - 
trop  biusqiieinenl  le 
lieis,  fit  au  lanfdcs  d 
céments  faxo:abies  au  devrlopjiemenl 
de  l'indusliie.à  l'expoil^tion  dr>  iitîies 
produits  dn  lirésil  ;  et.  par  suite  de 
celle  mesuie,  des  expéiii'iuns  considé- 
rables furent  faites.  On  peut  encoie 
roellie  au  ran^  des  dérisions  aduiinis- 
tralives  lei  plus  &a;;es  qui  furent  alors 
exécutées,  la  crcalion  d'unç  l'itn/t  des 
erap.'unts  rovaux,  chargée  de  rcclici- 
cber  les  mn>ens  les  plu^  etûcaccs  pour 
ramort:v>ement  de  la  dette  et  l'exlinr- 
l.on  du  papier-monnaie,  er.liti  poui  Ir 
réiablisement  du  crédit  pnlLc  cbranlr 
par  les  dernieies  cn.>es.  Tout  c  foi  s  , 
malice  cei  opérations  salntaiies,  le  mé- 
contentement s'accrut  d'autant  plus 
3ue  l'on  voyait  le  monarque  approcher 
e  sa  fin.  I.,orsqu'il  s'agit  de  signer  le 
traité  de  la  séparation  du  Hrésil,  i*im- 
pression  que  Jean  N  1  éplou^a  fui  telle 
qu'on  le  xil  plon;:^é  dans  la  plus  pro- 
fonde tristesse.  11  a  dit  souvent  depuis, 
à  ceux  qui  rentouraieiil,  qu'il  ne  pou- 
vait pas  se  faire  à  l'idée  qu'un  tel  éxè- 
uement  se  fût  passé  sous  son  n%;ne. 
Néanmoins,  d'après  l'étiquette  com- 
mandée par  la  politique,  toute  la  cour 
fut  mandée  ce  jour-là  à  Mafra  pour 
une  grande  réception,  en  romniémora- 
lion  du  renouxeliemcnt    des  relations 


i38 


JEA 


avec  le  Brésil  et  du  nouveau  titre  d'em- 
pereur dont  le  roi  venait  d'être  investi  ; 
mais  les  serviteurs  de  ce  prince  n'o- 
sèrent se  présenter  devant  lui  en 
uniforme  que  le  troisième  jour  et  à 
l'heure  même  de  la  grande  réception. 
S(Mi  chagrin  était  si  notoire  que  ,  de 
plus  de  trois  mille  personnes  qui  se 
rendirent  à  Mafra,  deux  seuleujerit  le 
félicitèrent  à  cette  occasion  ,  ce  qui  fit 
dire  au  monarque  après  la  cérémonie  : 
«  J'ai  bien  pensé  que  ces  deux  hommes 
«  seraient  les  seuls  qui  m'adresseraient 
<*  un  pareil  compliment.  »  Dès  lors  il 
ne  mena  plus  qu'une  vie  lanj^uissanle 
et  il  éprouva  à  cette  époque  encore  d'au- 
tres chagrins  que  le  temps  n'est  pas 
venu  de  révéler.  Le  traite  de  sépara- 
tion était  d'autant  moins  fait  pour 
tranquilliser  les  esprits  des  Portugais  • 
et  des  Brésiliens  ,  qu'ils  n'y  voyaient 
aucune  stipulation  relative  à  l'événe- 
ment qui  malheureusement  semblait 
trop  prochain,  la  mort  du  roi.  Acca- 
blé de  tant  de  chagrins,  Jean  VI  fut 
atteint,  le  4.mars  1826,  d'une  maladie 
que  les  médecins  désignèrent  d'abord 
comme  des  attaques  nerveuses,  mais 
qui  offrait  aussi  des  svmptômes  d'a- 
poplexie et  d'épiîepsie.  Le  5  et  le 
0,  les  accidents  reparurent  avec  une 
nouvelle  violence,  et  les  médecins  té- 
moignèrent plus  d'inquiétude.  Le  roi 
connut  très-bien  lui-même  son^  état,  et 
il  voulut  recevoir  les  derniers  sacre- 
ments. Le  même  jour  il  rendit  un  dé- 
cret parleqtuîl  il  confia  pour  la  durée 
de  sa  maladie  le  gouvernement  de  l'élat 
à  la  princesse  Isabelle-Marie,  sa  fille, 
qu'il  affectionnait  particulièrement. 
Cette  princesse  dut  être  assistée  d'un 
conseil  de  régence,  composé  du  cardi- 
nal patriarche  de  Li  bonne,  du  duc  de 
Cadaval,  du  marquis  de  \  allada  et  du 
comte  dos  Arcos.  A  ce  conseil  dut 
être  appelé  successivement  chacun  des 
ministres pourles  affaires  de  son  dépar- 
ment,  et  tout  dut  y  être  décidé  a  la  ma- 


JEA 

jorité  des  voix,  celle  de  la  princesse 
devant  cire  décisive  en  cas  de  partage. 
Pendant  toute  la  maladie,  le  peuple  et 
toutes  les  classes  de  la  nation  montrè- 
rent le  plus  vif  intérêt  pour  leur  roi  ; 
on  les  vit  se  porter  en  foule  auprès  du 
palais  pour  s'informer  de  la  santé  du 
monarque  ,  et  les  temples  furent  rem- 
plis de  fidèles  priant  pour  son  réta- 
blissement. Le  9  au  soir  une  crise  se  ma- 
nifesta, et  le  lendemain  il  expira  à  qua- 
tre heures  du  soir.  La  princesse  régente 
ordonna  aussitôt  que  les  derniers  de- 
voirs lui  fussent  rendus  avec  la  plus 
grande  magnificence.  Le  corps  resta  ex- 
posé durant  trois  jours;  et  lepeuplevint 
en  foule  lui  rendre  les  derniers  devoirs. 
Il  fut  ensuite  transporté  au  couvent  de 
Saint-Vincent  de  Fora,  sépuhure  de 
la  maison  de  Bragance.  Les  tribunaux 
et  les  administrations  furent  fermés 
pendant  huit  jours,  et  le  deuil  fut  porté 
par  toute  la  nation  pendant  un  an. 
Jean  VI  était  doué  d'une  mémoire  pro- 
digieuse,il  citait  souvent  et  à  propos  des 
faits  historiques,  notamment  ceux  de 
l'histoire  de  son  pays.  Il  se  plaisait  à 
faire  des  questions  aux  officiers  de  sa 
marine,  sur  des  points  de  géographie,  et 
nous  l'avoift  eijtendu  plusieurs  fois  dé- 
ployer dans  ces  entretiens  de  vastes 
connaissances.  Il  parlait  avec  une  gran- 
de facilité,  et  sa  conversation  était  tou- 
jours empreinte  de  dignité  et  de  modé- 
ration. Un  écrivain  étranger,  l'auteur 
des  /hinales  hio^raphiques^  qui  est 
loin  de  lui  être  favorable,  a  été  forcé 
d'avouer  que  -i  les  personnes  qui  ont  eu 
«  des  occasions  fréquentes  d'étudier  le 
«  prince  régent,  ont  été  fra[>pées  de 
«'  sr-s  progrès  dans  les  sciences ,  et 
«  qu'elles  lui  ont  reconnu  un  esprit 
«  loin  d'être  aussi  borné  qu'on  l'avait 
«  supposé  très-gratuitement.  Le  fait 
«<  est  qu'il  avait  acquis  beaucoup  de 
'<  connaissances  pasiiioes  sur  Vélat 
'(  de.  riùirupc,  et  sur  les  principaux 
«  personnages  qui  dirigeaient  les  ca- 


JEA 

••  binfl».  Il  ^tait  parfailrment  an  rnu- 
«<  rant  df  loiilr«  1rs  intii;;urs  df 
M  *e»  rnurli5an>  et  valait  ju«qu*au\ 
••  iDoindir^  driails  de  Inir  >if  prixrt. 
«  Dan»  millf  nr^on^tancM  ,  Il  mon- 
«  tra  une  ^^ande  ju<'lf*.*e  de  fai^onne- 
•»  inrni,  pt  unr  |»ënélralion  pfucom- 
«  muiie  »•  Nom  qui  l'avons  appro- 
ché ,  fl  qui  avon*  entendu  pluMeur^ 
liommM  d'rlat  qui  fai*.iienl  parlie 
de  v)n  ronsell  ,  nous  pouvons  assurer 
que  son  opinion  était  toujours  l.i  plos 
*a«e  ;  qu'il  était  doue  d'une  profomle- 
fonnaiwanre  des  hommes  eJ  dr^  .iOai- 
res ,  ft  qu'il  étonnait  souvent  par  la 
farilité  aver  laquelle  il  saisissait  les 
questions  les  plus  diffiriles.  (>  prinee 
se  fil  aimer  de  tous  les  souverains  de 
son  temps,  et  il  reçut  d'eux  des  preu- 
ves multipliées  d'e<time  et  d'amitié. 
Ce  fut  le  premier  prinre  de  la  dy- 
nastie de  IJra^.inre  aumiel  l'Angle- 
terre euvoM  l'ordre  de  la  Jarretirre. 
l.'empereHr  de  Uu^^:e,  le  roi  de  Fran- 
ce et  celui  de  Hanemark  lui  en\o\è 
renl  »-;;alement  leurs  ordres.  Jean  VI 
.icciieiilatt  les  éîran;;ers  i\er  beaucoup 
d'affahililé  et  il  les  comblait  de  pré- 
sents magnifiques.  Morier?,  dans  son 
Voyage  en  Prrse,  parle  ainsi  dn  sé- 
jour que  les  ambassadeurs  an;:riis  et 
persan  tirent  à  la  cour  de  IVio-Janei- 
1^  :  ««  I.e  récent  du  lN>r1u.;al  témo»;;na 
««  i  Ï-L.  KK.  avec  une  ;;rande  poli- 
«  les>e  son  dé  ir  de  les  recevoir  pen- 
-  dant  leur  séjoin-  dans  cette  ville,  et 
"  il  fil  préparer  pour  cela  une  maison 
«  très-convenable.  ï  a  cui<ine  de  S. 
•  \.  !\.,  sa  cave,  ses  domestiques  et 
"  ses  équipa;^es  furent  mis  à  leur 
«  disposition.  Ce  fut  le  ministre  de  sa 
«  majesté  britannique  à  la  cour  de 
«  Hi(t-0wn'ro,  lord  Stran;;ford  qui 
«  nous  conduisit  à  l'auJience,  et  la  ré- 
«  ception  nous  flatta  infiniment:  /r 
«  prinre  ntppela  à  tanihossaflrur 
«  persan  que  ses  am  êtres  a\,>aienl 
«    ètè  autrefois  les   alliés    de    son 


IRA 


i3q 


M  fMi)s,  et  lui  manifesta  tout  le  plai- 
•«  sir  quil  rprou^uiit  à  pinu'oir ,  par 
«  son  canal,  offrir  au  munaniue 
••  persan  le  renouvellement  tle  la- 
•«  mitié  qui  a\*ait  jadis  existé  entre 
"  les  deti  î  nations.  »  C^  fut  encore  ï 
la  bienxeilhnce  de  ce  prince  et  à  >on 
désir  d'enconra^ei  les  sciences,  que  le 
%o^a:;eur  ^l.i\«e  dut  les  secours  qu'il 
trouva  au  lUesil  pour  ses  excursions 
dans  l'inlerietir  de  ce  continent,  et  ce 
fut  par  son  appui  qu'il  publia  les  rr-tj! 
lats  de  sr\  decou^eitrs,  d»»nl  le  i 
a;;réa  la  ilédirare.  .Iran  N  I  ne  t. 
;ina  pas  moins  d'intérêt  au  pnnrc 
Maximilien  de  W'ied-Neu^ietl, savant 
naturaliste  qui  s'était  rendu  au  Brésil 
pour  V  faire  un  %o]»a,ie  scientifique,  et 
qui  ,  arrivé  à  Kio  .laneirn  ,  s'associa 
les  naturalistes  Keloni  et  Fre\reiss. 
I.e  roi  fit  e\pé«|ier  des  ordres  à  toutes 
les  autorites  brr>ili<-nnes  de  leur  fournir 
des  escortes,  des  bêles  de  «omme  pour 
le  transport  de  leurs  rollections,  et  c'est 
à  cette  faveur  que  l'on  doit  le  bel  ou^  ra;;e 
qui  en  fut  le  résultat.  (Vesl  malpré 
tous  ces  faits  qu'un  détracteur  a  public 
dans  une  binj^iaphie  étran(;ère  aue  ce 
prince  ne  prole>;eait  pas  les  gens  de  let- 
tres. H  combla  aussi  de  politesse  le  célè- 
bre Storll-r.  lorsque  ce  mathématicien 
lui  fut  présenté  à  Hio-Janeiro,  qiioi- 
qu'en  iHOTil  fui  allé  au  devant  de  Ju- 
notpouric  complimenter  au  nom  de  l'a- 
cadémie rov.ile  des  sciences  dont  il  était 
secrétaire  Jean  VI  ne  l'en  nomma  pas 
moins  commandeur  de  l'ordre  du(>!insl 
et  ;::)!iverneiirdes  \rores,a>eclc  ^radc 
de  lieutenanl-^énéral.  1^1  ;;rand  nom- 
bre d'.iutres  hommes  di>tin;;ués  dans 
toutes  les  branches  des  sciences  et  de 
la  littérature  reçurent  des  marques  de 
sa  bienveillance.  Ce  prince  ne  man- 
quait jamais  d'assister  a>ec  toute  sa  fa- 
mille aux  séances  publiques  de  l'acadé- 
mie des  sciences  (le  Lisbonne;  et  il  y 
causait  famUièrement  aNCcles  différents 
membres  sur   toutes  sortes   de  sujets. 


i4o 


JEÂ 


Quand  II  fut  question  de  nommer  des 
préccjUeurs  pour  ses  enfants,  son  cIioÎk 
se  poila  sur  trois  hommes  émincnls:  le 
i;éomèlre  Montciro  da  lioclia  ,  pro- 
fesseur à  Tuniverslté  de  Coïuibte  et 
dont  les  ouvrages  ont  été  publias  à 
Paris  en  1808;  le  clieralier  llade- 
nfiakcr,qul  savait  presque  toutes  'es 
lanf^ues  vivantes;  enfin  le  docteur  R. 
llaymnndo  Nogulera  ,  recteur  du  col- 
lège des  nobles.  rrotco;eant  les  arts 
avec  le  même  zèle,  ce  prince  fit  tout  ce 
qui  fut  en  son  pouvoir  pv)ur  cncouraf^er 
les  artistes  an  lircsil  comme  en  Por- 
tugal. C'est  à  lui  que  Ton  doit  la  con- 
struction du  beau  palais  dWjuda,  orné 
de  statues,  de  trophées  scnlptcs  cl  de 
pei;:tures  faites  par  des  artistes  natio- 
naux. Ce  fut  aussi  lui  qui  chargea  le  ' 
c:'l{;l-.rc  peintre  Cyrilo  et  d'autres  de 
peindre  les  plafonds  du  palais  de  Ma- 
fra,  cl  des  tableaux  d'imuiense  dimen- 
sion pour  y  tracer  les  hauts  faits  de 
l'histoire  nationale.  iSaturelieincnt  la- 
borieux, il  se  levait  dès  l'aube  du  jour,  et 
passait  plusieurs  heures  à  lire  des  rap- 
ports sur  les  affaires  du  f^ouvernement , 
écrivant  en  mar^e  son  opinion  ou  sa 
décision.  M.  Torlade,  qui  savait  pres- 
que toutes  les  laiio;ues  de  l'Europe  , 
était  chargé  de  lui  faire  des  extraits  de 
tous  les  journaux  étrangers,  ce  qui  ne 
l'empêchait  pas  de  lire  lui-même  les 
rapports  d'une  foule  d'agents  secrets 
qu'il  avait  partout.  Il  travaillait  régu- 
lièrement avec  ses  ministres  ,  et  quoi- 
quM  leur  laissât  une  grande  latitude,  il 
lui  est  souvent  arrivé  de  briser  leur 
existence  par  une  décision  subite.  On 
lui  a  faussement  reproché  de  l'irrésolu- 
tion ;  car,  de  même  que  Charles  V,  il 
n'hésitait  que  jusqu'au  moment  du 
péril  (3V).  11  récompensa  largement 
tous  les  militaires  nationaux  ou  étran- 
gers qui  commandèrent  l'armée  portu- 

(i4)  Voy.  la  relation  île  Tir|><>lo  tilri-  j>or 
Ranki;  darw  son  fslimable  c)iivrj;;e  iiililul»?  : 
Histoire  des  osnianln  et  de  fa  monnirhie  etpa- 
gnol*  pendant  In  XTP  tt  XrH'  tiriUi. 


.lEA 

gaise   dans  les  guerres  de  la  Pénin- 
sule ,    cî  les  personnes   qui  l'accom- 
pag'ièrenl    au  Drésll   et  qui   avaient 
abandonné   leurs    biens  en  Portugal. 
]Soiis  savons  que  ces  témoignages  de 
gratitude  ont  élC  taxés  de  prodigalité 
par  les  détracteurs  de  ce  prince,  et  que 
les  mêmes  écrivains  ont  blâmé  les  dé- 
penses qu'il  fit  à  Piio- Janeiro.  Ces  dé- 
penses furent,  il  est  vrai,   considéra- 
bles; mais  il  nous  suffira  de  dire,  d'a- 
près un  auteur  étranger  très-bien  in- 
formé des  choses  de  ce  pays,  que  la 
dette  de  la  seule  province  de  Rlo-Ja- 
neiro,    qui  élail  au  temps  de  Jean  VI 
(1821)  de  douze  millions,  s'est  élevée, 
après  son  départ  jusqi'à  1831 ,  c'est-à- 
dire  en  dixans, à  (leuxcentsmilHons(35). 
Ce  prince  était  fort  accessible,  et  il  don  - 
naît  chaque  semaine  une  audience  à 
laquelle    tout  le    monde  était    admis. 
Souvent  il  y  accordait   des  secours,  et 
il  y  recevait  des  plaintes  même  contre 
ses    ministres.    11    recevait  aussi   une 
fols  par  semaine  les  ambassadeurs  des 
cours  étrangères,   et   il  causait    avec 
chacun  d'eux.   11  s'était   fait   dans  la 
diplomatie  un  grand  nombre   d'amis, 
au   nombre   desquels     nous    citerons 
le  maréchal  Lannes  dont  on  connaît 
la   réponse    à  Napoléon  ,  qui  voulut 
l'envoyer    nne    seconde    fois   à   Lis- 
bonne en  1805,  pour  y  opérer  le  ren- 
versement de  la  monarchie  :  «  Je  ne 
«   veux  traliir,  dit  ce  loyal  militaire,  ni 
.<  les  Intérêts  de  la  France,  ni  ceux  de. 
«  mon    royal   ami.  »    {Voy.  pour  le 
complément  de  cette  notice  les  articles 
AiîHATSTKS,  LVl,  47;  Charlotte, 
LX  ,   494  ;    CiiAVi  s  ,   LX  ,  576. 
S— M. 
JEAIV  ,  moine  de  Marmoutlers, 
né  vers  la  fin   du   XV  siccl^,   vécut 
sous  les  règnes  de  Louis-le-Gros  et  de 
Louis-le-Jeune.  Il    est    auteur   d'une 
Histoire  de  GeoJfroi-lc-Bel  (  Voy. 

(3;))  Voy.  Hislor^  of  Brasil  ùj  yérnilagr,  t.   Il  , 
P    ««7 


JlwV 


Jl  A 


..•  nom  ,  wn  ,  n;i) ,  tiu*   ,if 

.\ ftrmaritiir ,  lomir  tie  Jauni inr  , 
d'.Jnjou  ft  lin  \fiiinr,  que  1*011  lrou\e 
à  la  li:i  lie  ri-Jitii).'!  ili-  (i.r-i.''c  «le 
Tour5,  ilonnée  (lar  I.Aiiiriil  rimlicl  , 
et  Jonl  \on  I-  lilir  :  Jotinnis  mo- 
luichi  nia/uri ^  niumistrrli  ,  i.ui  lirgr 
J.iuithu'iu  .iuniurr  vi.tit  ,  htsturitr 
Otiii0rcilt.  I)ui  is  Sormannurum  rt 
corttîtis  .  in'lr^iiK'untm  ,  J'urunuruin 
et  Cirnomunrtorum ,  liLri  duo,  elf .  , 
Paris,  Nicolas  DufosM-.  H»  10,  in  H*. 
IVaprrs  (>lusieur^  pavwa$;M  de  celle  liis- 
loirc  qui  »«  ln)u\rnt  répété*  mot  pour 
mot  daiis/rj  (irstrs  drs  ntmtrs  d An- 
j(H4,  il  est  évident  que  ce  moine  est 
aus^i  Tauteur  de  cft  autre  ouvrage  et 
At  V  llixtnirr  iL' il  rnnstrurtinn  du 
thùlrau  d\lnthoisf.  l>'ailleur>,^ans 
son  prolo'^uc  dr  i'lli>loiie  de  (ieof- 
froi  ,  qui  est  une  sorte  de  dédicace  ï 
(îu:llaume  ,  e\éqiie  du  Man»  ,  Jean 
s'annonce  comme  a>ant  dcjà  écrit  ou 
recueilli  plu.sieurs  autres  histoires  : 
H  Kt  cum  multorum  aliorum'princi- 
«  puin  liistorias  colli^erimus  ,  circà 
•«  hune  .ifTectuosius  immoramur.  »»  — 
(^  derni»Ts  mois  peuvent  expliquer  la 
différence  de  ^t\lc  qui  se  remarque  en- 
tic  riliNtoiri*  lie  (ieoffroi  cl  celles  des 
comtes  dWnjoH  rt  de  la  con>liuctinn 
du  chàteiu  d'Ambuï^r.  Si  celui  de  la 
première  est  plus  élevé,  il  faut  en  attri- 
buer la  cause  au  sujet  ;  ctA  une  espèce 
de  panégyrique;  les  deux  autres ,  au 
contraire  ,  ne  sont  que  de  «impies 
narrations.  Klles  ont  été  insérces  par 
dora  Luc  d'  Xchéry  dans  son  Spiri- 
lège  ,  tom.  X  de  l'édition  in-V",  sous 
ces  litres  :  Gesiu  cunsuluni  .tndr- 
gaoensium  ft  Amiasicnsium^  uutore 
mutuicho  hrnediftino  ntajoris  mit- 
nasterii, 
gem. 

Amlmsiœ  et  ipsius  dominorum  ges- 
tis.  —  l'ne  tratliiçtion  en  a  été  don- 
née par  l'abbc  de  Marolles  ;  mais  elle 
■*est  ni  élégante  ni  fidèle.  —  C'est  en- 


ad  Uenrirum  .triglùc  rc- 
Liber  decompositiunr  fustri 


fore  au  m^me  religieux  que  l'on  tloit 
attribuer  la  pii*mieic  p.irlie  au  manu- 
scrit anonvme  ,  calalo,;uë  à  la  bibiio- 
thrfjre  d  1  roi  n.mh  rr  iii,v  :  (ùiriuttiii 
t  liirtiiii  rfironi- 

♦  fii   pn'ori/'iis  , 

dans  i  .  lmp!isM$im  icllritio  de  Mar- 
lène  et  Durand  .  I.  V.  p  017  ,]  oy. 
M\RltM.  \\N  l|,J7i;  Ci-  Ir.lnn 
nniiir  .!  ffinimcnce  a  |j  ii3i?.>.i  rr  d»« 
.1  '  f,  ne  finit  qu'à  I'jii  liJT, 

d M,  «iotl  infi'ier  qu'ellearlr  kihIi- 

nuée  par  un  chanoine  du  célèbre  clu|ii- 
tre  de  Saint-^lartin  de  Tours,  cli.î;   1.  .• 
qui  existait   et   llorissait  a  une  r 
bien  plus   reculée,  l.nfin  on  e^t   ; 
à  croire  qu'il  fut  l'auteur  de  l'o  . 
intitulé  :    'Vrartotu%  dr  Conimctuiu- 
tionr  i uroninr  proi'inn'it  ,  etc.,  (pii 
»«  trouve  r^alemcnt   dans  l'édition  de 
(iré^oire  de  TouLs^le  Laurent  noclirf. 
L'éditeur   a  judicieusement    remar(]ur 
que  cr  traite  commence   de  la   mrnie 
manière  que  l'Histoire   de  (îeoffroi- 
lehcl,  ce  qui   indique  que  ces   deux 
ouvrages  sont   dus  a  la  même  plume: 
toutefois  le  traité  r/<r  f  '.''■■■ 

a  é>idemmenl   eu  un  ' 


l'a 


enlViil..  L 


41-  •.  \  irien  polonais  \i\.-»il 

en  Sile>ie  souj.  le  rè^ne  de  Ca.s'inir-le- 
(*rand,  dans  le  \IN  *"  siècle.  H  a  écrit 
une  chronique  de  Pologne,  que  Som- 
mer>ber;;  a  publiée  dans  le  premier 
volume  de  sa  collection.  L'auteai 
y  prend  le  nom  de  Jean  /sans  ajouter 
d'autre  caractère  pour  se  faire  ctMin.ii 
tre  ,  et  il  termine  ainsi  son  onvr.i  n«  : 
«  1^  chronique  des  I^cchile>  a  ck* 
•<  achevée  par  les  mains  de  Je.iii,  I'.mi 
«  du  Seigneur  13.')'J,  le  samedi  .■i\.iril 
•<  le  Dimanche  rti«/<//r  DomiiKt.»  — 
(j'est  aussi  pendant  ce  siècle  qu'a  clé 
çcrile  la  Chruniqur  anonunc  des 
princes  île  Polugnr  iwrr  leurs  ac^ 
tiuns.  Sommersber^  l'a  publiée  immé- 
diatement après  celle  de  Jean.  Klle 
l'emporte  sur  celte  dernière  par  l'iu- 


i/^l 


JEA 


lérct  des  détails  et  la  manière  dont  ils 
sont  présentés.  G — y. 

«lEA^  ,  roi  de  Hongrie,  f  oj. 
Zapoly,  lu,  13i^-139. 

JEAA  -  CIJRYSOSTOME 
(le  Père).  Voy.  Iji-iimères-Louvi- 
GNY,  LVIII,  68,  note  1. 

JE  AXA  ET  (Louis-François), 
général  français,  né  le  5  nov.  1768 
d'une  famille  obscure,  s'enrôla  dès  le 
commencement  de  la  révolution  dans 
un  bataillon  de  volontaires  natio- 
naux ,  où  il  fit  toutes  les  campa- 
gnes des  armées  du  Nord  et  d'Italie. 
Parvenu  au  grade  de  général  de  bri- 
gade, le  25  novembre  1813,  il  fut  mis 
à  la  retraite  en  1814  par  le  gouver- 
nement de  la  restauration.  L'empereur 
Napoléon  lui  rendit  son  emploi  après 
le  retour  de  Tile  d'Llbe  ,  en  1815, 
et  le  nomma  convnandant  du  dépar- 
tement de  l'Ain.  Les  journaux  annon- 
cèrent peu  de  temps  apics  qu'il  s'était 
fait  inscrire  sur  la  liste  des  fédérés. 
Après  la  bataille  de  Walcrloo,  lors- 
que l'armée  impériale  se  fut  retirée 
derrièie  la  Loire,  Jeannet  se  liàta  de 
la  rejoindre,  espéi-ant  y  être  em- 
|)lo}é;  mais  le  licenciement  le  fil  bien- 
tôt rentrer  encore  une  fois  d;ins  la 
retraite,  où  il  mourut  en  1832. — 
Jeaknet  {Oudi'n),  neveu  du  fameux 
Danton  ,  était  né  à  Arcis-sur-Aube 
dont  il  fut  le  maire  en  1790.  Nommé 
en  1792,  après  la  chute  du  gouverne- 
ment royal  ,  commissaire  du  conseil 
exécutif  à  Thionville,  il  se  trouva  dans 
celle  place  pendant  le  siège,  et  y  mon- 
tra de  la  ferniclé.  Envoyé  peu  de  temps 
après  comme  commissaire  de  la  Con- 
vrntion  nationale  à  Cayenne,  il  ftit 
chargé  d'v  proclamer  la  liberlé  des 
noirs.  Ayanl  appris  la  uioit  de  son  on- 
cle ,  il  craignit  d'éprouver  le  nirme 
sort  ,  et  se  sauva  aux  Ltals-Unis  , 
après  avoir  vidé  les  caisses  de  la  colo- 
nie. Etant  retourné  en  France  un  peu 
plus  lard,    il    fut   envo)c   de    nou- 


JEA 

y  eau  ,  en  1797,  commissaire  du  Di- 
rectoire exécutif  à  Cayenne  ;  et  ce  fut 
alors  qu'il  y  établit,  sur  l'habitation 
nommée  la  Franchise,  une  maison  de 
correction  où  les  nègres  libres  et 
exempts  ^w  fouet  servile,  mais  soumis 
aunerf  de  bœuf  constitutionnel,  étaient 
corrigés  de  leur  penchant  à  la  paresse. 
Jeannet  se  trouvait  encore  à  Cayenne 
lorsque  les  déportés  de  fructidor  y  ar- 
rivèrent à  la  fin  d'octobre  1797.  Il  se 
montra  fort  sévère  à  leur  égard,  et  les 
mémoires  de  Ramel  et  de  Larue  con- 
tiennent des  plaintes  très-graves  sur 
lui.  Destitué  en  1800  par  le  gouver- 
nement consulaire  ,  pour  concussions 
et  abus  de  j)ouvoir,  Jeannet  revint  à 
Paris  où  il  publia  un  mémoire  juslifi- 
cat^.  Il  se  retira  ensuite  dans  sa  patrie 
où  il  mourut  dans  les  premières  an- 
nées de  la  restauration.        M — d  j. 

JEANAir^'      (jEAN-r>APTISTF.)  , 

général  français  ,  était  né  en  1771  à 
Laneria  en  Franche-Comté,  d'une  fa- 
mille de  cultivateurs;  il  embrassa  avec 
beaucoup  de  clialeur  la  cause  de  la  ré- 
volution et  s'enrôla,  dès  le  commen- 
cement,  dans  un  bataillon  de  volon- 
taires du  Jura  avec  lequel  il  fit  toutes 
les  campagnes  des  armées  du  Rhin  et 
d'ilalie.  Parvenu  successivement  au 
giade  de  général  de  brigade  (1808)  et 
à  celui  de  général  de  division,  il  obtint 
aussi  le  litre  de  baron,  et  devint  le 
gendre  du  célèbre  peintre  David.  Louis 
XVIII  le  conserva  dans  son  grade  et 
lui  donna  la  croix  de  Saint-Louis  en 
1814.  Mais  ayant  i épris  du  service 
lorsque  Bonaparte  revint  de  l'île 
d'KIbe,  en  1815,  et  ayant  commandé 
une  division  au  sixième  corps  de  la 
grande  armée,  il  fut  de  nouveau  mis  à 
la  retraite  après  le  second  retour  du 
roi.  IJienlôt  atteint  d'une  maladie  gra- 
ve, il  ne  fit  plus  que  languir.  Ce  géné- 
ral se  rendait  aux  bains  d'Aix,  en  Sa- 
voie, dans  le  mois  de  mal  1830,  lors- 
qu'en  passant  par  Saulleu  il  s'étrangla 


JEB 

lui-ro^in«ilin>uiiarri>^  d'aiïrria^Ct  doii- 
itw*.  l'oilc  II-  'rii<!f'tMaiii  au  cimclirrr 
J<*  rrllr  xllr,  il  >  fut  enterré  a%cc  loo> 
le»  iioiiiiciii!»  ({u'il  fui  poksiblr  tic  lui 
rrnJie.  IVl—  !•  j. 

J  K  A  X  \ I  \      l'oy.    J ANKI»  , 
\\I.  'MK\,  fl  .1  NMN  ,  Jaiis  n-  \ol. 

«I  i:ii  U    ^.h  vNt,    llu-clo^ien  an- 
^l.i     ,    «é  à  I.<»iultc*    en    17.i(>,  oc- 
cii^'.i  plusicui  >   riiipioi'»    pi^iirs  à  l'u- 
nie iisitc   lie  Caoïiiridfie   et    juuit    tle 
(|uei<)ucs     beiic(jce3     errlr»ia.sli^ues  , 
DOlamment   du     do>enné  de  Cachet I. 
Diverse»  opinions  religieuses  qu'il  ma- 
nifola  iUus  un  cours  ile  leçon»  llieo- 
lopques  ,  et     qui    s'ccaitdiiriil    de    la 
doclrine  leçue,  lui  aniinnil  en  ITTO 
une  mtcrdicUon  publique   On  le  pré- 
sente   (oiuine    un    des    plu^  >iolenls 
champions  de  la  liUrle  illiiiiïtre   tant 
religieuse  que  pdlilique,   ce  qtii  parait 
peu  con^équenl  >*il  est  vra^  qu'il  pro- 
voqua  et    (iefendil    a\ec   ardeur  l'rla- 
blis5einent    d'examens    aniiueU    dans 
runiver>ilé.    Ce   fut    piobaulcment   le 
mauvais  résultai  de  ses  rfrot:»  qui  le 
détermina   en    1775    à   res,;ncr    ses 
fonctions  minislrrielles,  et  à  étudier  la* 
médecine  qu'il  pratiqua  ensuite  à  Lon- 
dres.  11  ne  ces>a   point  cependant  de 
s'occuper  de  politique  et  de  théologie, 
soit  comme  jouinali>te,    soit  comme 
orateur  de  cIuIk.    Il  mourut  en    17S(i. 
C*elait  un  homme  plein  d'aiti\ité  et 
4'inslruction ,    qui  reuni^^ait    la    con- 
nai>sance  des  sciences  exactes  et  autres 
à  la  connaissance  des  langues,  même 
de  l'arabe  et  de  l'hébreu.  Ou  doit  re- 
gretter que  tant  de  mérite  ait  été  ab- 
sorbé par  le  ^oùl  de  la  controverse.  Ce- 
tait  un  brouillon,  un  fanatique,  mais  un 
fanatique  de  bonne  foi,  et  qu'il  faut  se 
contenter  de  plaindre.  Ses  ouvra;;es  ont 
été  publies  en  t7«7,  3  vol.  in-8",   par 
Disney,  et  contiennent  principalement 
une  hurmunii'Jrs  Esfangiles,  un  traite 
sur  la  paralysie  et  divei  s  écrits  de  po- 
litique.  Il  composa,  en  société  arec 


JEB 


\l\ô 


4en  <lc  ses  amis,  un  volume  in-i"  in- 
titulé •  Exterpta  tpunhim  e.  ArtWo- 
nii  prinripih  philusuftliiit.  naturalis, 
ttitn  notis  varit>ruiu,  ouvra;;e  qui  fut 
*•!  l'usa^e  de  Tuniversité  de 

C-  S-i>. 

JÏAIU  .Itv>  .  iM..',i  ai.Jais, 
né  le  '27  septniibu-  177'»,  à  I)ro- 
gheda  en  Irlande,  a{q)arleiiail  à  une 
faioiile  tres-distinguee  dans  le>  .scien- 
ces, la  philosophie  et  les  lettres.  Son 
étfucatiou  fut  ti  es- soignée  et  il  rn  pro- 
fita. .\u  sortir  des  collèges  de  Cel- 
bhd;;e  et  de  l^odondetry,  il  rint 
étudiera  l'université  de  Dublin,  sous 
les  auspices  de  rarclie\êque  de  celte 
Ville,  le  vénérable  Ma.;es,  qui  l'hono- 
rait d'une  affection  puiticulieie.  C'é- 
tait Tepoque  où  celle  université  comp- 
tait dans  son  sein  ••ne  foule  de  jeu- 
ne» talents;  les  iJovd  .  les  Daven- 
port,  les  W  rav,  les  Sandes,  1rs  Sad- 
lier,  les  (ieorje  (^oi>,  les  Malurin. 
Jebb   brilla  dans  c?lte   pléiade,    tant 

f>ar  l'ele^^aMte  de  l'élocutioii  que  par 
a  sobdité  et  la  variété  des  Ct)nnaissan- 
ces.  Kn  1797  il  remporta  deux  des 
trois  prix  fondés  par  le  docteur  Do«- 
II       ''  le  époque,  S.1  rocation  re- 

I  .  it  pionoiicee.  Cependant, 

asauiu  tuiierdan^la  canièie  ecclésias- 
tique, il  bit  obligé  de  faiic  quelque 
temps  un  service  miliiairc,  on  ne  peut 
moins  eu  harmonie  a\ec  >es  goùls  : 
ainsi  le  voulait  l'état  de  li  oublc  et  d'a- 
gitation de  la  pauvie  Irlande.  Mais, 
dés  que  le  calme  fut  un  peu  rétabli , 
il  se  hâta  de  jeter  l'uniforme  aux  or- 
ties,  et  en  janvier  17î»9  il  reçut  les 
ordres.  Presque  aussitôt  il  se  vit  re- 
cherché par  deux  éveques,  Cleaverde 
Feriis  et  JîroiiehcL  de  kiimore,  q'.ii, 
chacun  uii  iiéiit'lice  àlamiin,  se  di^pu- 
Vaieiil  le  jeune  diarre.  Jebb  se  décida 
en  faveur  du  dernier  ,  et  alla  en 
conséquence  gérer  la  rare  Je  Swanli- 
bar.  Dans  les  fondions  délicates  qi'il 
avait  à  rempbr  au  milieu  d'une  popu 


i44 


JEH 


lalioîi  iloiU  la  majorité  catliolique  se 
re;;arilalt  cotnine  opprimée,  et  avait  !>liis 
«le  tlisposJlion  à  délcsler  qu'à  tolérer 
les  miiiistn's  imposés  par  riiitoiéraiice 
de  rép,lise  établie,  Jebb  non-seule- 
ment inl  supporté  par  ses  paroissiens, 
il  sut  encore  conquérir  leur  estime  et 
leur  affection.  Ainsi  qu'Heber  à  Ilod- 
uett,  il  ne  prècba  que  les  vertus  et  la 
cbarité,ne  dit  mot  du  dogme,  évita 
tout  ce  qui  ressembiail  à  la  contro- 
verse, et,  par  ses  elforls  comme  par 
son  exemple,  répandit  l'esprit  de  paix 
et  d'union  dans  une  partie  du  pays. 
Aussi  l'époque  de  son  passage  laissa-t- 
elle  à  Swanlibar  un  souvenir  profond;  et 
trente  années  après  son  départ  de 
cette  paroisse  ,  son  nom  y  était-il  pro- 
noncé avec  l'accent  de  la  vénération. 
De  Swanlibar,  Jebb  fut  appelé  à  Ca- 
shel,  en  qualité  de  lecteur  i!e  la  cathé- 
drale ,  par  son  protecteur,  le  docteur 
Broderick  ,  au  moment  où  ce  prélat 
fut  transféré  de  son  évéclié  de  Kil- 
raore  à  la  ville  archiépiscopale  du 
Leinster.*  11  v  resta  plusieurs  années;  et 
le  rectorat  d'Abinp;don  étant  venu  à 
vaquer  il  le  sollicita  et  l'obtint.  C'é- 
tait un  des  bénéfices  les  plus  lucratifs 
de  l'Irlande  ,  wn  de  ceux  qui  lais- 
saient le  plus  de  loisirs  à  leurs  opulents 
titulaires.  Jebb  put  s'y  livrer  à  son 
j^oût  pour  la  littérature,  et'  quelques 
ouvrages  furent  le  fruit  de  ses  médita- 
tions dans  cette  belle  solitude,  lîien 
<iue  rien  no  lui  maïujtiàl  dans  son  heu- 
reuse po-ilion,  un  nouveau  don  de 
l'archevêque  vint  encore  l'y  trouver;  il 
fut  nommé  archidiacre  du  diocèse,  et 
à  cette  occasion  il  prit  les  degrés  de 
bachelier  et  ensuite  de  docteur  en 
théologie  à  l'université  de  Dublin. 
P^nfin,  en  18*23,  lors  de  la  translation 
d'EIrington  au  siège  de  Ferns,  il  fut 
promu  à  l'évêché  de  Limerick.  Sa 
conduite  dans  ce  diocèse,  un  des  plus 
misérables  comme  un  des  plus  vastes 
de  l'Irlande,  fut   celle  qu'on   devait 


.ii:i; 

altendie  de  lui  apits  les  actes  de 
toute  sa  vie.  Attér.uer  Ie3  difliculfés 
de  tout  genre  (jui  s'opposaient  au  bien, 
au  lieu  de  vouloir  les  surmonter  de  vive 
force,  stimuler  rindilTcrer.ee  religieuse 
des  uns,  répriuier  la  tendance  fanati- 
que ou  l'intolérance  des  autres,  adou- 
cir les  animositc.^  politiques,  chercher 
partout  la  misère  pour  appliquer  un 
remède  et  won  de  vains  pailiatils  à  ses 
plaies,  réformer  les  habitudes,  les  pré- 
jugés et  l'imprévoyance  de  l'Irlandais, 
préparer  la  réparation  de  tant  de  maux 
physiques  et  autres  sous  lesquels  suc- 
combe l'de ,  qui  prouve  si  énergi- 
quement  la  vérité  des  idées  de  Mal- 
thus  ,  tel  fut  le  programme  que  se 
proposa  le  vertueux  évcque  et  dont  il 
remplit  du  moins  une  partie.  Sous 
d'autres  rapports  encore ,  l'épiscopat 
de  Jebb  mérite  une  mention  à  part  : 
contraireyient  à  l'usage  en  vogue,  il 
n'eut  aucun  égard  pour  la  collation 
des  bénéfices  aux  recommandations  de 
l'aristocratie  ;  le  mérite,  la  vertu,  les 
lumières  furent  à  .ses  yeux  les  seuls 
titres;  patronage  était  pour  lui  un 
mot  vide  de  sens.  Beaucoup  de  gran- 
des dames,  de  riches  seigneurs  com- 
mencèrent par  jeter  les  h.auts  cris  :  le 
prélat  contimia  impassiblement  sa 
route,  et  peu  à  peu  on  s'habitua  à  ses 
façons  de  faire,  on  en  vint  à  les  louer. 
Jusqu'en  1824  pourtant  le  nom  de 
Jebb  n'avait  guère  eu  de  retentisse- 
ment que  dans  sa  patrie  :  le  biil  de 
lord  \Vellingtor,  sur  les  modifications 
à  introduire  dans  les  dnnes  irlaudai .;  s 
lui  fournit  une  occasion  de  se  faire 
connaître  en  Angleterre.  C'était  au 
moment  de  la  troisième  lecture  du 
bill  :  la  chambre  haute  reçut  de  l'éve- 
que  de  Limerick  une  adresse  où  il  ré- 
clamait contre  les  assertions  exagérées 
de  ceux  qui,  pour  faire  passer  plus  ai- 
sément la  mesure,  enflaient  des  deux 
tiers  le  budget  de  l'église  anglicane  en 
Irlande,  mais  où  du  reste  il  appuyait 


JEU 

ilo  luutfi  »r«  fortft  if  projfl  minûtr- 
jicl  fl  traçjil  à  ^raiui%  roups  «Ir  jjin- 

ituauKs    (JcN    If  r\|»liM!fius 

•fcl'IfLnilr   Je:  l.»rs,undc4 

iioni>  |M)|uii4irrs  ilr  1  An^lrlrrre  :  od 
^'rn(]llll  de  *rs  «uxta^r-i,  dt  »n  ant^ 
crdeiiii  :  on  fut  ëlminé  d'avoir  igno- 
ré cel  orateur  parfait,  ce  grand  évo- 
que, ce  solide  théologien.  Indubila- 
Mrineiit  ses  destiné**  fu'^%ei»t  drveiiae^ 
hrill.uiles,  si  iiiir  |u:.ilTvir  suinte  ne 
l'eût  lijppé  dans  l'ete  tic  1827,  et  si, 
depuis  re  temps,  il  n'eût  langui  m 
depit  «lu  *rro!ir^  de  la  mrtlecinr,  juv- 
qu'a  rr  i|ii  cntin  la  mott  \uil  mettre  un 
'  ri  nie  a  ce  «iin  ioi  rr.U  l  d'c\:  trnc*,  le 

;  diccinl)!!-  lS;i3.  On  a  Jr  .IcU»  :  1. 
Dos  St-rmuns  lemaïquable*  par  U 
lieaute  du  .vt>le,  l'cie^anfe  de  la  dic- 
'  on  et  un  heureux  emploi  de  l'Kcri- 

iire^la  plupart  out  elc  réirii«  en  un 
\olume,  pnhiie  pendant  qiiM  vivait  au 
pre*b>tète  d' Khin^i!nn).  H.  l  n  A'.«- 
.%<;/  sur  la  littt'ruture  S4trrè(.  (Vt 
ouvr.ij;e  est  plein  de  vues  fine'  et  iii- 
péniruses  ;  .lebb  >  déploie  une  érudi- 
t  lin  ptototide;  c'est  lui  qui  a  décou- 
\c\\,  lijiis  les  Inrones  et  les  discours 
<|ue  nous  ont  coii<ervcs  les  évanj;é- 
listes,  lies  vesti;;es  d'une  lédaction  roc- 
tiiqiie,  précieux  non  seulement  comme 
curiosités,  mais  comme  ollrant  un  nou- 
veau reoven  de  prouver  l'authenticité 
des  Kvan;;ilcs  et  d'en  épuier  le  texte. 
III.  Une  f/irvlof'ir  pratùfue  qui  ne 
Ml  le  jour  qu'aprcs  sa  moit,  mais  dont 
il  avait  jeté  les  premiers  linéaments 
pendant  sa  jeunesse  et  qu'il  élabora 
Je  nouveau  dans  les  couds  interval- 
les que  lui  laissait ^a  p.iralvsie.  IV. 
On  lui  doit  encore  dc^  tilitions  de 
divers  ouvra{;es  ,  tels  que  :  l"  les 
Discours  de  To^vuson^  '2"  les  Œu' 
Krrs  de  l'iielan,  3'  les  lies  de  liur- 
nct  ,  4""  un  choix  de  traités  rcli{;ieux 
de  différents  auteurs  ,  intitule  :  l^iété 
siM'i  t/sre/ismr.  P — ot. 


JEl 


H-' 


ji:rrr.uso\  Jhomas),  un 

des  foiid.neiis  de  l'indépendance  an- 
^loaméricaiiir,  et  IplioiMrr^e  président 
lies  Klats  l  lus,  naquit  le  2  avril  1713 
à  Shadv»all,  au  comte  d'Alhemarle  en 
Vir};inie.  Sa  faTuille,  évidemment  ori- 
pnaire  d'Angleterre  ,  était  établie  ea 
Amérique  depuis  trois  ^én«>rations. 
Son  père  avait  été  chargé,  avec  le  co- 
lonel Krv,  de  déterminer  les  limites 
entre  la  ^  irj;inie  et  la  Caroline  sep- 
tentrionale. L'éducation  du  jeune 
homme  fut  auvsi  soignée  qu'elle  pou 
vail  l'élre  en  Amériaue  a  cette  épo<]ue 
où  les  colonies  ,  toujours  soumises  au 
jou;;  britannique,  ne  se  développaient 
qu'avec  l'auteur ,  bien  que  ravéuement 
de  la  maison  de  Hanovre  au  ti une  eut 
donné  un  vaste  essor  au  commerce  et  à 
la  marine  de  la  métropole.  Ses  pre- 
mières éludes  terminées ,  il  résolut  de 
se  faire  avocat,  et  dans  ce  but  il  suivit 
les  cours  de  droit  du  ch.mcelier 
^^>the,  dont  il  se  concilia  des -lors 
l'estime  et  l'affection.  Il  cultivait  en 
même  temps  les  mathématiques,  l'astro- 
iiom-e  .  1.1  i^r-i^^raphie,  la  pinsique;  il 
*  '  •  peinture;  en  un  root  ,  il 

Si  i  a  des  tendances  très-en- 

rvrlop^iques,  et  rerhetchait  celle  vi- 
riété  de  connaissances  qui  plane  sur 
chaaue  science  en  parlkulier  et  qui  fé- 
conde si  puissamment  la  faculté  com- 
parative. L'éclat  avec  lequel ,  mal^é 
ce  surcrcît  de  travaux ,  il  acheva  les 
études  pre'.criles  et  debiila  au  bar  reau  le 
fit  nommer,  à  vinjt  et  un  ans,  membre 
de  la  législature  provinciale  (17t>V^  , 
cl  quelque  temps  après  ju;;e  du  comté 
d'Albemarle.  I>ientdt  éclaU-renl  les 
dissentiments  entre  les  colonies  et  la 
métropole  à  propos  de  l'acte  du  tim- 
bre (,171».")),  surtout  après  la  fameuse 
déclaration  par  laquelle  se  terminait 
IVje  de  révocation  de  l'acte  du  tim- 
bre 1766).  Grâce  à  cette  déclaration 
impolitique  ,  la  querelle  d'intérêt  se 
changeait  en  qnestion  de  droit.  De  tout 


10 


i46 


JEF 


temps  les  avocats,  avec  et  sans  cause  , 
mais  surtout  les  derniers,  se  sont  éver- 
tues sur  ces  problèmes.  Jeflcrson  ,  qui 
pour  le  moment  n'était  que  jufî;e,  n'y 
manqua  pas.  Son  opinion  fut  celle  que 
dictait  la  théorie  stricte,  ici  d'accord 
avec  le  besoin  et  le  vœu  des  colo- 
nies ,  celle  que  devait  indubitablement 
vouer  à  l'anathème  le  parti  qui  s'inti- 
tule gouvernemental  et  conservateur  : 
les  colonies  ,  à  son  avis  ,  ne  pou- 
vaient être  légalement  frappées  d'im- 
pôt que  par  un  parlement  où  siége- 
raient leurs  députés.  On  sait  comment 
les  débals  ainsi  maladroitement  en- 
gagés par  le  gouvernement  britanni- 
que s'envenimèrent  chaque  jour ,  et 
comment  la  faible  taxe  du  thé,  éta- 
blie par  le  ministère  de  Grafton  pour 
sauver  le  principe  et  non  pour  en 
retirer  un  bénéfice,  amena  la  ferme- 
ture du  port  de  Boston  et  la  révo- 
cation de  la  charte  du  INIassaclius- 
sets.  Piientôt  se  réunit  à  Philadelphie 
le  congrès  des  représentants  des  douze 
provinces  (5  déc.  1774)  ;  Jefferson 
a\ait  été  clioisi  membre  de  la  conven- 
tion virginienne,  qui  nomma  les  repré- 
sentants de  sa  province  natale;  et,  trop 
malade  pour  prendre  part  à  l'élection  , 
il  s'était  signalé  en  rédigeant  pour  les 
mandataires  des  instructions  qu'il 
transmit  à  l'assemblée  et  qui  furent  uni- 
versellement approuvées  non  seule- 
ment en  -Virginie  ,  mais  dans  toute  l'é- 
tendue des  colonies.  La  substance  de  ces 
instructions  [lortait  «<  que  les  actes  du 
pailcmenl  britannique  contre  Massa- 
chus:iets  étaient  o[»prcssifs,  inconstitu- 
tionnels; que  les  colonies  devaient  re- 
pousser la  force  par  la  force;  mais 
qu'en  attendant  il  serait  présenté  une 
adresse  au  roi  et  une  pétition  à  la  cham- 
bre des  communes.  »  Lord  North,  tout 
en  continuant  à  traiter  en  rebelles  les 
colons  de  l'Amérique  ,  envoya  au  con- 
giès  une  proposllfun  de  ronr.iliatinn. 
C'est  Jeffenson  qui   fut  cliargé  par  la 


JEF 

législature  de  répondre  à  ce  document  : 
il  montra  l'insuffisance  des  conces- 
sions faites  par  le  gouvernement,  l'im- 
possibilité de  se  fier  à  ses  protestations, 
l'iniquité  ,  l'inconstitutionnalité  des 
principes  dans  lesquels  persévérait  le 
cabinet ,  et  que  les  colonies  ne  pou- 
vaient plus  feindre  d'admettre  ,  depuis 
qu'on  les  avait  débattues  au  grand  jour. 
L'énergie  et  la  franchise  de  cette  ré- 
ponse achevèrent  de  décider  la  métro- 
pole à  la  guerre.  La  chambre  des  lords 
y  préluda,  en  comprenant  Jefferson 
dans  les  mises  hors  la  loi  et  l'exceptant 
de  l'amnistie  générale  qu'offrait  le  mo- 
narque à  tous  ses  sujets  rebelles.  La 
même  année  vil  s'assembler  le  deuxième 
congrès  de  Philadelphie  (  20  mai 
1775)  ;  et  cette  fois  les  treize  provin- 
ces y  concouraient  par  leurs  représen- 
tants. Jefferson  fut  un  de  ceux  qu'y 
envoya  la  Virginie.  Là  il  vit  pour  la 
première  fois  les  Washington  ,  les 
Franklin,  les  Jay,  les  John  Adams  et 
les  autres  coryphées  du  mouvement.  Il 
jouit  bientôt  d'une  considération  mar- 
quée parmi  ces  hommes  illustres,  et , 
sans  le  céder  à  qui  que  ce  fut  en  sang- 
froid,  en  circonspection,  il  se  fit  remar- 
quer par  la  hardiesse  de  ses  décisions. 
Sans  contredit,  personne  plus  que  lui 
n'eut  part  à  cette  résolution  aventu- 
reuse qui  d'un  coup  brisa  tout  lien  en- 
tre l'Angleterre  et  ses  colonies  ,  la  ré- 
solulion  (f  inih'priidance.  Egalement 
inaccessible  à  la  séduction,  à  la  crainte, 
aux  arrière-pensées,  il  dédaigna  tou- 
jours ces  partis  mitoyens  qui,  en  révo- 
lution, ne  sont  bons  qu'à  tout  perdre  ; 
et,  une  fois  la  lutte  entamée,  il  comprit 
qu'il  fallait  fermer*la  porte  à  toute  idée 
de  transaction,  hormis  après  le  triom- 
phe. J)u  haut  de  cette  grande  pensée, 
il  pulvérisa  tous  les  arguments  que  les 
timides  opposaient  au  parti  de  Téman- 
cipatioii  :  conjointement  avec  son  ami 
Lee,  il  l'avait  proposé  formellement  ; 
conjointement   avec   Adams  ,  il  le  4it 


JEF 

pr^loir  (lan^  b  >lL»cu>&tun,  el  il  s'tn 
remii  à  la  \icluirc  tiu  »oiit  île  lë^iliiiiei 


JEF 


«4- 


iif  iiV 


'-  eul  volé  roronie  il  renlciiiljit  , 
lu!  i  iiiiiiiltre  Je  la  rnmmisMoi)  rlioi^ie 
|.o,i  !r,l^rr  la  *lrt luratiun  d'iiule- 
fi(  Uilittue  ;  el  c'c^l  i  lui  qoe  »es 
follr .lie*  à  leur  lour  ilrfcrèrent  celle 
'  t  le  niumle  a  lu  ce  celc- 
tr,  également  rrmarqit.ible 
par  une  ^^ul^^ance  de  «IrJurlion  irieMx- 
titii',  par  la  force  du  Ht\le,  |ur  b  ma- 
jeilé  de  l'accenl.  Le  con^re^  *e  iiala 
de  la  sancliunner  telle  que  Jeiïer»on  la 
lui,  i  une  clause  prè5  :  celie-ci  était 
une  pioteilalinn  éloquente  contre  l'es- 
rla>a^e  et  la  traite  des  noiri.  I^s  lé;;i«- 
latrur>  ne  crurent  pa-»  de\«iir  donner 
suite  à  ce  qu'ils  re^ardinent  cororoe 
une  utopie,  el  rei»cU>a;;e  re>la  en  vi- 
gueur et  en  honneur  .m  «nt»  d'un  y»y% 
qui  en  ce  moment  rc<  '  me  un 

droit    imprescr-plible  i  jucr  : 

il  >  existe  encore,  au  moins  dan<  quid- 
que«  elat5  ,  et  le  temps  est  loin  ou 
on  le  pioliibera.  Peu  de  temm  après, 
JeHerson  quitta  la  place  qii  il  avait 
dans  le  congrès,  mais  pour  en  accepter 
une  dans  le  nombre  des  drlé^^ue^  de 
\  ir^iiiif  octobre  1776).  Sa  connais- 
»ance  approfondie  du  droit  r\  lit  cliar- 
;;er,  a\ec  NN  vllie  et  IViuilcton  ,  de  la 
réMsion   des  anciens  statuts  bntanni- 

3UCS,  des  actes  des  deux  contres  et  «le 
irrrsrs  parties  des  coninion  /uivs  :  le 
tout  de\ait  être  modidc  de  manière  i 
s'barmoniser  a>ec  le  nouvel  ordre  po- 
litique et  réuni  en  un  code  unique.  Jef- 
ferson  se  mit  sur-le  cliamp  à  rou\rase, 
et  il  y  travailla  deux  ans  entiers  sans 
interruption.  Ainsi  la  jeune  Amérique 
procédait  en  masse  à  une  rénovation 
complète.  L'émancipation,  la  codifica- 
tion marchaient  ensemble  :  toutes  deux 
devaient  se  reproduire  encore  ailleuis. 
Le  code  fut  adopta.  Le  dr»it  d'aînesse, 
les  substitutions  étaient  abolis  ;  l'impor- 
Ution  des  enclaves  fut  interdite^hieo  que 


l'ctrlava^  fût  maintenu  ;  plus  de  reli- 
f(ion dominante,  tolérance  absolae .  O» 
idées,  plutôt  politiques  et  constituantes 

3ue  puirroent  relatives  aux  détails  du 
roit  ci\il,  ne  pasM-ient  pas  sans  op- 
t>iïsition;  mais  Jelierson  le*  soutint  à 
a  tribune,  et  iimt  par  les  voir  adoptées 
(177S).  L'année  sui\anie  il  leçut , 
pour  un  an  ,  le  gouxernrmrnt  de  U 
N  ;ri;iiiie;  et,  continue dantcetle  charge 
à  l'expiration  de  -i  première  commis- 
sion, il  remplit  a>ec  honneur  ces  fonc- 
tions alors  aussi  pénibles  que  dan;;e- 
rcuses.  La  seconde  année  surtout  fut 
lernble  pourles  Vir^iniens.  I«a  Virgi- 
nie, perpétuellement  menacée  par  les 
troupes  an;;laisrs,  finit  par  être  enva- 
hie (17H1)  par  Gunmallis  qui  s'em- 
para d'N  ork-Toi^n  ,  de  (iioiicesler , 
et  qui  fit  de^  incursions  ju.%4)tie  dans  le 
ctrur  de  la  pro\ince  ,  tandis  que  le 
transfuge  \mold  t  portait  la  dévasta- 
tion, la  fermeté  de  Jeiïerson  et  les 
a\is  qu'il  tut  laiiiAt  transmettre,  tantôt 
ouvrir  dans  ses  communications  avec 
les  Français  qui  se  proposaient  la  déli- 
vrance du  pa>s,  furent  pour  l>eau^oup 
dans  les  événements  qui  suivirent,  el 
contribuèrent  à  produire  les  fausses 
mesures  de  Clinton  ,  l'isolement  de 
C<irnwallis  et  la  capitulation  d'^ork- 
lown.  n^nv  fois  le  con;;rès  lui  vota 
des   ren  pour  sa  conduite  en 

ces;;raw  .inre.s.  (^s  soins  de 

tous  les|uiii.>  ne  t'einpéchaieiil  pas  de 
s'adonner  à  des  travaux  de  cabinet  ;  el 
cette  même  annre  17S1  ,  si  riche  en 
crises  déchirantes,  et  finalcmeut  en 
avantages  décisifs  |>oMr  l'émancipation 
américaine,  le  vo\ait  mettre  au  jour  ses 
admirables  Soirs  sur  la  yirginir.  En 
fin  la  paix  de  Versailles  vint  consolider 
l'ouvrage  des  armes  el  fit  reromiaitre  au 
cabinet  de  Sailli-James  lui-ménip  l'in- 
dèpendaoce  de  la  nouvelle  république 
fedéralive  du  Nord  17H3  .  lleélu  dé- 
puté de  la  Virginie  au  conjurés  de  cette 
année  ,  Jefferson  y  présenta  un  projet 


10. 


^8 


JE  F 


JEF 


^iC.  constitution  pour  cet  état  ,  projet 
sans  (ioute  élaboré  tle  concert  avec  les 
notables  ses  compatriotes.    Mais  son 
but  n'était  pas  de  se  si<;naler  comme 
législateur  et  comme   orateur  :  il  aspi- 
rait à  un  poste  diplomatique.  Il  fut  au 
comble  de  ses  v(i:ux  quand  Jay,   alors 
ministre  des  affaires  étranf;ères  ,  le  fit 
partir  pour  l'Europe  en  même  temps 
que  Franklin  et  Jobn  Adams  (1784), 
qu'on  envoyait  pour  sio;ner  des  traités 
de  commerce,  pour  former  des  commu- 
nications diplomatiques  avec  les  puis- 
sances européennes  appelées  à  jouer  un 
rôle  vis-à-vis  des  États-Unis.  Frank- 
lin, déjà  connu  en  France,  y  retourna. 
John  Adams  et  Jefferson  devaient  d'a- 
bord se  rendre  en  Espagne  ;  des  dépê- 
ches qu'ils  reçurent  chemin  faisant  leur 
apprirent  que  leur  présence  désormais 
V  serait  superilue,  et  ils  tournèrent  vers 
i'Anf^leterre.  Bientôt  Adams  l'y  laissa 
seul.  Jefferson  n'y  fut  point  heureux  : 
toutes  ses  tentatives  pour  obtenir  des 
ministres  anglais  un  traité  de  commerce 
avantageux  aux  deux  peuples,  et  basé 
sur  des    libertés  larges  ,    échoiièrent 
moins  encore  peut-être  contre  les  pré- 
juc^és  des  Pllt,  Cower  et  Camarthen 
que  contre  les  défiances  et  la  rancune 
des  An{];lais.  \\  emporta  de  cet  essai  in- 
fructueux de  négociations  une  antipa- 
thie pour  l'Angleterre  qui  fut  aussi  du- 
rable que  sa  vie.  C'est  donc  avec  plai- 
sir qu'après  le  retour  de  Franklin  en 
Amérique  il  passa   de  l'ambassade  de 
Londres  à  celle  de   France  (1780). 
Reçu,  fêté  à  Versailles  comme  à  Pa- 
ris, des  ministres  comme  des  j^ens  du 
inonde  ,   il    s'acquit  bientôt  une  in- 
iluence   considérable,  et  parvint,   en 
dépit  des  ressorts  multipliés  que  firent 
jouer  les  fermiers-généraux  ,  à  obtenir 
la  liberté  du  commerce  du  tabac,  et  di- 
verses autres  concessions  d'imp)rtancc. 
i^endant  ce  temps  la  révolution  fian- 
çaise  germait  à  bruit  sourd,   i^lle  eût 
éclaté  un  peu  plus  lot,  un  peu  plus  tard, 


grâce  à  la  faiblesse  da  la  ro\auté.  Mais 
qui  pourrait  nier  que  quelques  circon- 
stances qui  eussent  pu  ne  ppint  avoir 
lieu  n'aient  accéléré  l'explosion  ?  Au 
nombre  de  ces  circonstances  figurent  , 
on  n'en  saurait  douter,  le  parti  qu'avait 
pris  Louis  XV  î  de  soutenir  l'émanci- 
pation coloniale,  parti  qu'au  reste  con- 
seillait la  politique  anti-anglaise,  et  les 
relations  de  tous  les  jours  qui  s'établi- 
rent entre  les  coryphées  de  la  philoso- 
phie, tout-puissants  alors  dans  les  sa- 
lons, et  quelques-uns  des  chefs  de  cette 
révolution  américaine,  première  réali- 
sation des  doctrines  nouvelles.  Lié  sur- 
tout avec  les    sociétés  d'Holbach  et 
d'Helvétius,  Jefferson  eut  donc  sa  part 
d'action  dans  cette  espèce  de  mouve- 
ment fébrile  qui   emportait  si  vite  la 
France  vers  une  rénovation.  Mais  il 
faut  lui  rendre  cette  justice  qu'il  ne 
coopéra  jamais  de  près  ou  de  loin  aux 
actes.  Nous  ajouterions  même  que  les 
meneurs  de  la   première   assemblée  , 
s'ils  eussent  tenu  compte  plus  sérieuse- 
ment de  ses  avis,  auraient  épargné   à 
leur  patrie  bien  des  commotions  ,  si 
nous  ne   savions  que ,  lorsqu'une  fois 
l'arène  s'est  ouverte  aux  passions ,  ce 
n'est  pas  une  circonstance  qu'il  faudrait 
ou  supprimer  ou   introduire,  c'en  est 
des  milliers.  Au  moment  où  l'Assem- 
blée   constituante    agitait   la    grande 
question  :  «  La  législature  doit-elle  ou 
non   former    une   seule  chambre?  » 
Sleyes  ,  ]>arnave,   JMounier  et  autres 
membres   influents  de  l'assemblée  se 
rendirent  auprès  de  lui,  et  semblèrent 
s'en  remettre  à  sa  décision.  Jefferson 
leur  recommanda  le  système  des  deux 
chambras  ,   non  comme  système  an- 
glais ,    mais    comme    système    sage. 
«   C'est,  dit-il ,  celui  qui  offre  plus  de 
garanties  contre    la  précipitation  ,    à 
laquelle  on   est   encore  plus  sujet  en 
France  qu'ailleurs,  et  aussi  contre  la 
tendance    d'une    chambre    législative 
unique  au  despotisme.  »  Ces  considé- 


iitionNiic  furciil  pa»  inj  irruïs  ilf-, 
ttiiiMiilanlNi  maisrllc';  ur  (luiriil  tnuiii 
pher  à  ^i^^rlnlllre  ;  cl  Uiiu|oi:lo  rc- 
jfla  b  «liMMoii  de  |j  lr-i>bluic.'  li 
s^mpallnvait  ib\jnta;;e  a\ec  une  aalre 
doctiiiie  (lu  temps,  qui,  re^lreinle  eu 
(le  M^es  limites  et  lui  «qu'il  rr^iie  uu 
bon  esprit  clirz  uiir  nation  ,  est  apte  à 
produire  (le  grandi  atanta;;e9,  le  jun  : 
il  n'axait  pas  tnil,  au  moins,  lurxqu'il 
en  apprériail  l'impoi  tance  ,  et  quaiid, 
•il  une  Icllrc  il  l'ahbé  Arnaud,  il  di- 
•  jn'appliqner  et  réalitfr  les  lois  sont 
clioses  pluN  ^ra\es  que  de  le»  faire,  et 
que  si  une  iialion  i\Ml  t  rliuisir  riilie 
le  >arriGre  de  va  puissance  judiriaire 
ou  de  sa  puissance  U*^i>lati\e,  c'ot  à  la 
dernière  qu'elle  dexiail  renoncer.  Ce 
principe,  que  JclTcrMui  énonçait  dans 
rii>polluse  alors  reçue  d'une  rénova- 
tion democrati(iue,  e^l  pluN  di^ne  de 
inrditaliun  qu'il  ne  le  semlde  au  pre- 
mier in^t.1llt ,  il  iluiiiic  droit  de  con- 
clure qu'une  raoïiiirli'c  peut  être  forte 
encore  en  se  d«  Tune  Injune 

partie  de  sa  pui  tlive  ,  mais 

qu'il  n'y  a  point  de  »uiut  pour  elle  si 
elle  laisse  einaliir  ia  juridiction;  et 
dt>-lors  on  voit  a\ec  comliien  de  pié- 
cautions  il  faut  admettie  le  jurv,  si  en- 
\aliisseur  de  sa  nature,  et  qui  alïiclie  bi 
audacieusement  sa  souveraineté.  Au 
total  donc,  Jefferson  ne  se  fai>ait  point 
lUiL^ion  sur  la  marche  de  la  révolution 
française,  el  >o\a'.l  fort  lnen  qu'elle  ne 
tournait  point  a  1  KIdnrado.  I<e>  intri- 
gues du  Pala:s.Ku>al  surtout  étaient 
claires  à  ses  veux.  Sa  position  lui  fai- 
sait une  nécessité  d'en  être  in>lruit. 
L'avènement  de  la   maison   d'Orléans 


Jht 


»4î) 


au  trAne  de  France  à  celle  er 


que  eût 


entraîné  un  revirement  dans  la  poliliqi 
extérieure.  L'Angleterre,  en  appuyant 
même  le|;èrcincnt  les  prétentions  du 
chef  de  celle  maison  ,  lui  vendait  cher 
ses  promesses  amlii^uës  :  Jefferson  eut 
vent  d'une  transaction  ou  d'un  projet 
de  transaction  d'après  lequel  le  duc  , 


poji  obtenir  de  l'argent  du  cabinet  an 
(;Iais  ,  aurait  plulul^  la  cession  de  lotit 
ce  dont  la  France  eijit  encore  nantie 
eu  Amérique;  et  qui  eût  pu  ;;arantir 
que,  le  ca^  échéant,  la  noinelle  royauté 
u'eùt  pas  lai&%é  l'iiiion  à  la  merci  de 
r  An;;leterre  '  Ce  (lui ,  du  i  e>le,  rassurait 
l'anb^ssadeur  ,  c  est  qu'il  ne  voyait 
DM  que  ces  menées  dussent  réussir  , 
les  agents  du  prince  n'rtant  ni  dé- 
voué» ni  sincères  ,  rt  lui  -  mrme 
n'ayant  pas  les  qualités  de  son  rôle. 
Le  séjour  de  Jcffeison  en  France 
dura  ainsi  jusque  vers  la  fin  de  sep- 
tcmbie  17h*',  époque  à  la(|uelle  il 
fut  reiuplacr  pai  Morris.  Lui-même 
a\ait  xdlicilr  son  relour.  Il  venait  en 
ce  roomcnl  d'obtenu  du  cabinet  de 
Versailles  la  liberté  d'iropurialion  des 
salaiNonsan;;lo-améiicainesen  France, 
el  l'autorisation  de  prendre  de^  mesures 
eificaces  )H)ur  Ir  paiement  des  officiers 
élraii^eis   qui   avaient  '       l.lals- 

I  ii;>  dans  la  ^uertc  de  .  mce. 

C'e»t  durant  l'ahM-iicc  lîc  JtlJerson 
qu'avait  élr  ledi^re  la  constitution  dé- 
bnilive  dcN  Lia  s  l  ui^  17S7  .  <^>uoi- 
que  loin  de  sa  pairie,  l'uiubavsadeur 
n'élail  point  ic.-lo  >.ius  influence  sur 
\cs  débals  élèves  à  cette  occasion  dans 
la  convention  extiauidinaire  appelée 
pour  la  voler.  C/ot  de  lui  que  vinrent 
originairement  les  ainendemcnts,  a« 
nombre  de  dit ,  qui  restreignirent  le 
pou\uir  du  con;;rc5  sur  radmini:>tration 
des  états  particuliers.  De  iclour  en 
Amérique,  il  fut  chargé  par  \\  ashiui;- 
lon  du  portefeuille  de>  aflaiics  étran;;c- 
res,  dit  vulgairement  sccrélaiierie-d*é- 
tat  ^avril  ITUO).  Ma!;;ré  les  efforts  de 
son  pjcdéce^eur  Jav,  tout  était  encore 
à  créer  dans  ce  département.  Les  con- 
naissances positives  qu'un  séjour  de 
q«(Jquc5  années  en  Liiropc  av.iit  don- 
nées au  ministre  le  mettaient  à  même 
âc  réparer  vile  celte  lacune,  et  d'oUc- 
nir  de  ;;rauds  lésullals  en  évitant  de 
-rands  abus  :  bientôt,  en  effet,  le  ser- 


i5o 


JEF 


JEF 


vice  diplomatique  fut  organisé  réguliè- 
rement et  sur  le  pied  européen  ,  quant 
à  retendue  et  à  la  célérité  des  commu- 
nications, mais  non  quant  à  la  dépense  : 
la  capacité  prouvée,  les  services  el  non 
les  grands  noms,  les  grands  airs,  les 
prétentions  folles,  ou  les  habitudes   de 
prodigalité,  furent  les  seuls  litres  de  pla- 
cement. En  dépit  de  l'exemple  de  l'Eu- 
rope ,  Jefferson   ne   comprit  point  la 
nécessité  des  profusions  el  des  frais  de 
représentation  :  l'argent  ne  manquait 
nullement  aux  ambassadeurs  et  autres 
agents  du  gouvernement  fédéral  ;  mais 
il  fut  réservé  pour  d'autres  objets  que 
la  satisfaction  de  leurs  caprices   per- 
sonnels cl  de  leur  vanité.  Il  faut  dire 
aussi  que  la  crise  pécuniaire  dont  se 
remettaient  à  peine  alors  les  États- 
Unis  obligeait   à  une  stricte   écono- 
mie; et  d'autre  part,  les  modestes  ha- 
bitudes de  la  plupart  de  ces  colons  , 
devenus  à  l'improviste  citovens  d'un 
grand  état,  rendaient  praticable  le  sjstè- 
'  me  de  simplicité.  Jefferson  n'en  eut  pas 
moins  beaucoup  île  mérite  à  continuer, 
ériger  en  quelque  sorte  en  loi ,  ce  qui 
jusqu'alors  n'avait  été  que  nécessité  , 
hasard.  Les  mauvais   exemples  pren- 
nent encore  plus  facilement    que   les 
bons:  il  n'eût  tenu  qu'à  lui  de  mettre 
aux  afiaires  des  hommes  à  fracas,  et  de 
les  envoyer  au  loin  faire  des  folies  di- 
plomatiques et  leur  fortune  ;  quant  à 
l'argent,  on  en  eût  bien  t^uvé  pour 
l'inutile,  quitte  à  en  manquer  dans  les 
afiaires  essentielles,  à  désorganiser  les 
services,  à  grossir  on  peu  cette  dette 
publique,  signe,  dit-on,  de  la  prospé- 
rité des  états.    Nous   ne  voyons  point 
que  cette  simplicité  ail  nui  en  rien  au 
respect  de-.  FLuropéens  pour  la  nouvelle 
république;    et  qui    peut   dire  à  quel 
point  elle  a  servi  :'  La  lovauté,  la  fran- 
chise, à  l'ordre  du  jour  dans  les  léga- 
tions américaines,  formaient  aussi  un 
parfait  contraste  avec  la  duplicité  qu'af- 
fecte quiconque  en  Europe  a  respiré 


huit  jours  l'air  d'une  chancellerie  ;  et 
bien  que  cette  loyauté  d'un  côté  ne  dé- 
génère point  en  indiscrétion  et  en  dupe- 
rie, que  de  l'autre  clic  n'ait  pas  toujours 
été  sans  tache  ,  la  renommée  en  sub- 
siste et  produit  toujours  certain   effet 
moral,  qui  ne  nuit  en  rien  aux  effets 
■  matériels  de  l'habileté  :  c'est  être  ha- 
bile quelquefois  que  de  passer  pour  ne 
pas  l'être.    Dans  ses    relations   avec 
les  deux  grandes  puissances  occiden- 
tales  de  l'Europe ,    Jefferson  donna 
toujours  carrière  à  sa  prédilection  pour 
la  France.  C'était  en  effet  la  seule  li- 
gne politique  avantageuse  à  l'Union  ; 
et  il  fallait  de  l'aveuglement  ou  de  la 
mauvaise  foi    pour  proclamer  que  la 
puissance  commerciale,  la  plus  jalouse 
qui  ait  jamais  été,  se  réconcilierait  cor- 
dialement avec  ses  sujets  échappés  à 
son  joug;  verrait  de  bon  œil  leurs  pro- 
grès et  aiderait  à  leur  développement. 
Sans  doute  «  la  reconnaissance  ne  doit 
pas  être  la  règle  de  la  conduite  politi- 
que d'une  nation  ;  »  mais  l'inimitié  et 
les  mauvais  services  ne  prouvent  pas 
non  plus  qu'on  a  des  intérêts  communs, 
et   surtout  que  l'ennemi  de  la  veille 
sera  le   lendemain   un    allié  sincère. 
Toutefois  il  eût  été  absurde  ,  dans  la 
lutte  qui  bientôt  s'éleva  entre  l'An- 
gleterre et  la  France,  de  prendre  ac- 
tivement   parti  pour  cette  dernière. 
Mais  telle  n'était  pas  là  politique  de 
Jefferson  :  le  maintien  de  la   neutra- 
lité, voilà  ce  qu'il  voulait.  Ces  diver- 
gences relativement  aux  affaires  étran- 
gères tenaient  à  d'autres  dissensions, 
relatives,  celles-ci,  au  régime  intérieur 
de  l'Union.    Là  encore  deux  systèmes 
étaient  en  présence  ,  le  système  fran- 
çais et  le  système  anglais.  Suivant  ce 
dernier ,   réiémcnt  aristocratique  eût 
dû,  comme  en  Angleterre,  prédominer 
dans  la  constitution  ;  les  adhérents  du 
.système  français,  au  contraire ,   don- 
naient la  préférence  aux  institutions  et 
aux  formes  démocratiques.  A  celte  pre- 


JEP 


JEF 


i5i 


rm^î4^f'en  joignait  une  aolre,  celle 
<!<  !  I  ^^e^  à  chaque  eiat  «a  <>ouverainelé 
..i.iu.lre.  entière,  île  Irlle  Hirte  qu'il» 
o'eus«ent  entre  eux  (l'autre;^  relations 
nue  relies  qui  unissent  drs  nations  iii- 
ile(>riiii.intes  qui  ont  forme  alliance  en- 
rml  I.  I.  ;ir  l.^er^JiIe.^,au  rcmtraire, 
\     .-i>!;  .  .  rlal«  par  un  lien  \i- 

^oureu\   et  ttl»!i^.iioire  qui    en    fil  un 
fat^ffiM  uni  et  l^^ll^i^ible.  On  le»  nom- 
iliites;    mais  tandis  que  les 
I  «le  France  voulaient  reli- 

riier  la  centralisation,  ceux  deirnion, 
lU  contraire  ,    voulaient  l'établir,  et, 
jn»  lui  «lonner  la  force  evtrème  ,  e%- 
«essive  peut-être  qu'elle  a  chei   noas  , 
\U  voulaient  pré>enir  cet  rparpilleincnt 
«le  forces,  cette  absence  de  concert  et 
«l'unilë  que  provoquaient  les  démocra- 
i(>  m  |Mrroiii>ant  sans  ccvsr  ,  comme 
!<•   |>iliiiiiirii    de    la    pro««p«*i  île  ararn- 
r.iinr,  l.i  -.rpiL^iion  des  clals,    en  ré- 
[•:.ni..iiii  iiMiif  armce  permanente,  en 
drni.iiidant   rabolilioii   de  tout    impAt 
^«'iirial,    et,    pour   moven  d'éteindre 
les  dettcN  contractées  pendant  la  fjuerre, 
la  banqueroute.  Knfin  ,  et  c'est  là  son 
dernier  Irait,  différent  encore  de  tout 
ce  que  nous  voyons  en  Kurope.  les  ^ 
déralistes  tenaient  surtout  au  dévelop- 
pement de  la  pnssance  maritime  et  du 
commerre  ;    Icn    di-inocrates    vouliienl 
surtout  le  développcuient  de  h  rirlir^se 
agricole,  la  mise  en  valeur  d'un  sol  un- 
nense  et  fertile,  l'activité  de  la  produc- 
tion, et  par  suite  l'accroisvement  de  la 
population  sur  une  surface  qui  pouvait 
nourrir  vin;;t  fois  ce  qu'elle  avait  d'Iia- 
bitanls.    Jofîerson    était    démocrate  , 
^V  ashinj^ton   fédéraliste;    du  reste  ni 
l'un  ni  l'autre   n'admettaient  le«  exa- 
gérations de  leur  parti.  Uéuiiir  les  deux 
systèmes   d'économie   politique  aurait 
été  leur  vœu  et  celui  de  toos  les  bom- 
mes  sa^^cs  ;    mais  dans  le  moment  où 
reffcrvescence  de  la  polémique  est   au 
comble,  et   où  chaque  parti  in>crit  sur 
son  drapeau  plusieurs  devises ,  dont 


l'une  ts\  di^ue  d'élo«es  ou  de  tolérance, 
mais  dont  l'autre  semble  snbversiveet 
odieuse,  s'entendir  e-t  iropos.sible  ,  et 
le  temps  de  la  conciliation  n'est  pas 
venu,  l/amliassadeur  français  Gtnet 
voulut  profiler  de  ces  drluts  et  des 
svmpatlne<  du  parti  démnrr.-itique  en 
faveur  de  la  révolution  fraiirai>r.  pour 
exciter  \r>,  .leffri  soinens  à  une  révolte 
contre  le  président,  qui  tenait  alors  de 
proclamer  la  neutralité  de  l'I'nion 
dans  la  ;;uerre  entre  la  coalition  et  la 
France  Jelfer»on,  d'accord  au  reste 
avec  \>  a»liin;:ton  sur  l'excellence  du 
»nteme  de  neutralité,  •'>  refusa  ouver- 
lement,  et  6t  avorter  amsi  de*  projets 
qui  euvsent  mis  l'état  en  feu.  Cette  ab- 
ne<;ation  pourtant  ne  put  le  maintenir 
au  poste  ou  l'avaient  porté  ses  amis  : 
la  dissidence  du  président  rt  du  minis- 
tre aH;;MieMt.iti  dr  jour  en  iour  :  le  sys- 
tème ji  liant 
du  teii..  I  iois- 
sion  le  1"  janvier  I7'.»V  et  >e  retira 
dans  »a  terre  de  Monticello  où  .  au 
sein  de  «a  famille,  il  parta;;ea  ses  loisirs 
entre  de4  travaux  scientifiques  ou  litté- 
raire* et  l'exploitation  de  ses  propriétés 
rurales.  Bientdt  ses  compatriotes  le 
choisirent  pour  les  représenter  à  la 
chambre supérietire  du  con;;res  fednal, 
en  d'autres  termrs,  au  xnal  ;  |»uis  il  se 
porta,  en  17i»7,  compétiteur  de  John 
Adams  pour  ta  présidence  ;  mais  quel- 
ques voix  lui  manquèrent.  Il  fut  alors 
vice-président    de  droit ,    et    en    cette 

analité  il  fut  diar-é  de  la  présidence 
u  sénat.  I^  situation  dos  démocrates 
élail  toujours  difficile  ;  les  adhéreuls 
du  système  an;;lais  étaient  en  énorme 
majorilédanslesdeux chambres, et  y  ma- 
nn-uv  raient  avec  la  morgue  et  l'outre- 
cuidance familières  aux  majorités  par- 
lementaires :  la  niinorilé,  par  un  de  ces 
eïhips  de  tête  dont  l'An-leterre  ,  en 
ITH'J,  avait  donné  l'exemple  ,  et  que 
le  libéralisme  français  imita  tn  18-26, 
se  retira  en  masse  ,  criant  à  Toppres- 


i:>2 


JEl 


JCF 


sion,  et  proleslaut  contre  l'iisui  jMliv)u 
(le  pouvoir  des  anf^loiuanes.  Celle  bou- 
derie du  désespoir  ne  déplut  point  aux 
dominateurs  du  jour  ;  leur  joie  eut  été 
au  comble  si  Jeflerson  eut  pris  le  mouie 
parti  et  eût  résigne  au  moins  sa  place 
de  président  du  sénat,  car  sa  ^ice-pré- 
sideuce  était  paralysée  tant  que  le  pré- 
sident était  là.  Mais  il  n'en  fit  rien  , 
et,  intrépide  en  dépit  de  son  isolement, 
en  dépit  des  tracasseries  qu'on  lui 
suscita  pour  le  dcf];oûler,  il  tint  léle  à 
ses  antagonistes,  tajidls  que, seul  aussi, 
Gallatin,  à  la  chauibre  Inférieure,  ré- 
sistant avec  la  même  opiniâtreté,  ne 
négligea  nulle  occasion  de  faire  écla- 
ter les  injustices  ou  les  fautes  du 
parti  dominant  ,  l'cmpccba  de  com- 
pléter sa  victoire  ,  cl ,  rcslant  ainsi 
comme  une  tête  de  pont- ,  donna  le 
lemps  à  ses  amis  politiques  de  se  re- 
connaître et  de  se  reformer,  d'api- 
toyer sur  leur  position  et  d'irriter  con- 
tre leurs  adversaires.  Tout  parli  en 
général  s'use  par  l'usage  qu'il  lait  de  la 
victoire  ,  s'expose  aux  traits  de  la  criti- 
que par  cela  même  qu'il  est  au  pouvoir, 
et  se  dépopularise  parce  qu'il  a  joui  de 
la  popuiarllé.  Tel  fut  le  sort  de  la  fac.- 
tion  anglaise.  l*eu  à  peu  les  afiancesa- 
dos  d'Amérique  rallièrent  à  eux  des 
mécontents,  se  remirent  de  leur  décou- 
ragement ,  acquirent  une  supériorité 
décidée  dans  quelques  états,  comme  la 
Virginie,  le  Kentucky,  etc.;  et,  moyen- 
nant des  efiorls  inouïs,  se  Irouvèrent 
de  force  à  recommencer  la  lutte  quand 
le  lemps  fut  venu  où  expiraient  les 
pouvoirs  de  la  législature.  Bientôt  il 
s'agit  de  nommer,  en  remplacement  de 
Wasbington,  qui  depuis  dix  ans  occu- 
pait la  suprême  maglslrature,  un  nou- 
veau président  et  un  vice-présldenl. 
La  présidence  fut  conférée  à  Jobn 
Adams  ,  le  corypbée  des  fédéralistes  ; 
mais  Jefferson,  son  indomptable  ad- 
>ersaire,  fut  porlé  à  la  vice-présiden- 
c  Ce  premier  pas  était  de  bon  augure 


pour  les  Jelïersoniens,  Toutelois  l'on 
ne  pouvait  se  dissimuler  que  le  partage 
du  pouvoir  était  inégal,  et  qu'à  moins 
d'une  persévérance  continue,  secondée 
par  d'iieureux  événements  en  Europe, 
cet  ascendant  du  parti  français  ne 
pourrait  se  soulenlr.  En  celle  occasion 
même,  il  avait  fallu  le  contre-coup  des 
victoires  de  Bonajiartc  en  Italie  et  du 
traité  de  Caiiipo-Foimio  pour  amener 
le  résultat  dont  se  félicitait  le  parli. 
On  pressent  donc  que  les  années  sui- 
vantes furent  pour  les  Etats-Unis  com- 
me pour  l'Eurofic  une  période  d'indé- 
cision et  de  liralllements.  Cependant 
la  sagesse  qu'on  ne  peut  méconnaître 
dans  le  caraclèrc  des  bomuKs  d'état 
anglo-américains  et  l'esprit  modéré, 
laborieux  et  positif  des  populations 
qu'ils  ont  à  régir,  atlénucrent  ces  incon- 
véiiienls.  Nulle  collision  n'éclata  entre 
les  adhérents  de  systèmes  divers;  et, 
bien  que  les  vues  continuassent  à  di- 
verger au  suprême  degré,  la  guerre  de 
plume  et  de  paroles  fut  la  seule  dont 
on  eut  à  se  plaindre.  Les  deux  syslè- 
meslultèrent  d'une  uianlère  digne  d'eux 
à  qui  l'empoileiail  :  l'agricullure  dou- 
blbses[uodiiils,  le  commerce  multiplia 
ses  transactions  et  ses  ricliesses,  la  po- 
pulation suivit  toujours  son  mouvement 
progressif.  Pendant  ce  temps  liona- 
parte,  revenu  d'Eg)pte,  s'était  saisi  du 
pouvoir  en  France  et,  tout  en  commen- 
çant la  réoi  ganisation  d'un  pays  las  de 
l'aiiarcbie  et  de  la  révolution  ,  avait 
])orlé  un  coup  moi  lel  à  la  seconde  coa- 
lition par  la  victoire  de  Marengo.  Le 
conlre-coup  du  Iriompbe  de  la  France 
en  Europe  fut  en  Amérique  la  prépon- 
dérance du  parli  Jeffeisonien.  Quand 
les  quatre  années  de  présidence  de 
.iobn  Adams  furent  achevées,  en  vain 
ses  amis  s'évertuèrent  pour  le  faire 
iéélire  :  grâce  aux  événements  euro- 
péens, et  grâce  au  concours  des  états 
du  Sud  et  de  TOuesl,  ou  si  l'on  veut 
grâce  à  quatre  noIx  de  majorilé,  la  can- 


Ji-1 


JLl 


ii3 


(lulalurc  tle  JcilciMiii  rcu  ni|  ,  m  iiiar.. 
1H4)I.  Aiii>t  rr\rtu  tic  h  supiriuc  »u- 
lunlr  |*our  ()U4lre  aii>,  iiou5  pouuMi:» 
{•ar  4iilt(i|)Jlioii  dur  )»uui  limt  ,  c»r 
biruquc  la  [HCMileucr  fui  t{uailnciiuaic, 
il  (u(  rrooiumé  (IcrrclirT  rt  j  une 
^1  aiiilr  ina|uritc  en  1  N().'»,  et  roiiiiiirnça 
aiiiM  la  li^lc  des  prcMilriib  Je  liuil  ans 
(JefTer-MM»,  IHOl-lHOÎI,  Madijoii  , 
18(nMHl7,  Juliiiguinrv  Adams 
1S21-I82U,  JaclKon,  IHiD-lSllT;, 
il  lit  marcher  lie  front,  a^ec  i'applica- 
tion  Je  sci  principe»  et  la  realiNalion 
Je  sc>  plans,  les  améliorai  ion»  male- 
nrllcs  qui  Je\aient  Jjns  ra\enii  por- 
ter les  fruits  le>  plus  nchcN  ri  rrciNici- 
lier  les  systèmes  depuis  longtemps  en 
prr>ence.  I/adniini^lialion  Je  Jolin 
AJanis  axait  cte  signalée  par  la  roi^ 
soliJaliou  Ju  >\sti'iue  fcdeiatif  :  il  n'v 
touclu  ppint  et  respecta  la  centralisa - 
(ion  uporre;  mais  il  redui>it  inimedia- 
lemcnt  rarinee  à  trois  mille  hommes, 
la  tlolleà  six  ù>^ales  à  peine  capables 
de  tenir  la  mer  ;  il  annonça  (|u'ai'ei- 
[tiralion  Ju  pri\ile^e  de  la  hanipie  ^c- 
neialc  d  llanullon,  conlie  I  institution 
de  laquelle  il  s'était  elc%e,  cet  établis- 
sement ce>oeiait  d'exister;  il  6t  rejeter 
un  projet  d'université  ualionale  et  des 
plans  de  C4iuli.sation  >;eui.*iale.  Mais, 
en  diuiiniiant  ainsi  l'action  centrale,  il 
ne  ptetcndait  pas  aiirler  les  d(*velo(>- 
peineut»  locaux  ,  et  même  il  montra 
qu'il  avait  des  pensées  d'ei^emble. 
11  tenta  de  res*er|er  les  iicrud>  entre 
les  étals  du  Noid  et  ceux  du  Sud  , 
en  rendant  de  plus  en  plus  nécessaires 
à  ces  republiqu«*s  commerçantes  du 
Nord,  placées  comme  des  avanl-postes 
de  l'Amérique  sur  l'Aliantif^ue,  les  pro- 
duits des  Caroliues,  de  la(icori;ie,  de 
la  Per.iisvlvanic  et  de  la  Vii^inie;à 
ccilcs-ci  les  débouchés  que  l'active 
manne  du  Nord  offrait  aux  riches- 
>ti  de  leur  sol  ,  à  l'exubérance  de 
leur  culture  et  de  leur  industrie.  Il 
mit  s<!^  i-uinsa  eieerà   colé  des  élaU 


maiitiuies  et  occidenlaiix  des  terri- 
îbires  nouveaux,  i|ui  donnaient  à  la 
politique  ^enn air  de  l'I'nion  de  su- 
peibe>  acclol^  «•inciits  en  superficie» 
de  nouveaux  ciciii;.iii-.  de  nche.vte  agri- 
cole et  manufuitunrrc ,  un  debou- 
clir  imlrlîniment  ouveit  à  l'exccs  Je  la 
popu  uiioii,  et  offraieul  à  la  politique 
pailiiulière  des  .lefTer^nnirn»  h  per- 
spective delà  formaliuii  d'une  niavsc 
J'iDtérels  continentaux  qui  loi  ou  tar^l 
feraient  équilibre  aux  intérêts  mariti- 
mes. Kn  attendant  que  ce^  acqui>iliDii& 
nouvelles  parvin>>ent  a  l'impoilancc 
nece^^aire  pour  leur  vaUnr  le  titie  d'é- 
tals, lU  enirevovaient  le  pnvfti-^e  de 
le»  ro^ir  direclrmenl  comme  Jc%  pio- 
vinces  ^  car  il  est  de  principe  aux 
Klal*  l  ni*  que  Te»  di>liicls  p.iilicu- 
liers  dont  la  population  n'aiiive  pas  à 
soixante  mille  âmes  ne  soient  point 
qualifies  étals,  et  des-lors  te>tent  ^ou- 
veines  par  l'aulorile  cealrale  jusqu'à 
re  qu'ils  allei^nent  avec  ce  cliillrc 
leur  adiuiNsion  dan>  la  fédération  com- 
me lépubliques  a  pai1.  JennsAin  dé- 
buta tbns  celle  caniere  par  oblenir 
de  la  Fiance,  muvenuant quatre- vingts 
millions,  la  Louisiane.  l<e  traite  Ju  'M) 
avril  1803,  qui  liansportail  celle  ma- 
;;niûque  posv.>Mon  a  la  {grande  répu- 
blique de  rAmeiil|lie  du  Noid  fut  uu 
coup  de  foudre  pour  l'Aii^lelerrc  el 
pour  rKspa;;ne  :  pour  l'An^lelerre 
avec  laquelle  semblait  devoir  se  con- 
clure un  traité  commencé  sous  l'in- 
llueiice  du  parti  fédéral  ;  |four  TKspa- 
;;ne  qui,  non  seulement  eu  cédant  la 
J.ouisianr  a  la  France  par  le  Irailé  se- 
cret de  Saint- lldefonsc  du  l*^"^  «jclobrc 
1801,  avait  stipule  la  rétrocession  en 
cas  de  non-occupation  du  pap  par  les 
Français,  mais  qui ,  de  pi»  ,  vovail 
l'Luion  par  celte  eii)ambee  Ki;;an- 
lesquc  se  poser  entre  les  Florides  et 
le  Nouveau- Mexique  ,  ses  domai- 
nes, et  les  menacer  é;;alement.  De 
plus,  par  celle  translation  d«  proprie- 


i54 


JEF 


té,  avantageuse  en  même  temps  à  la 
France,  qui  n'eut  pu  protéger  la  Loui- 
siane, et  à  rUinoii,  si  bien  [)lncée 
pour  se  défendre  envers  et  conlre 
tous,  le  cabinet  de  Saint-James  per- 
dait à  la  fois  et  le  droit  de  s'empa- 
rer d'un  immense  pays,  qu'il  se  fut  at- 
tribué comme  dépouille  de  la  France,  et 
le  moyen  de  prendre  à  revers  les  Etats- 
Unis  qu'alors  il  nourrissait  l'espoir  de 
faire  rentrer  sout<  sa  domination.  Grâ- 
ce à  l'admirable  traité  de  1803  et  à  la 
haute  sagesse  du  président,  l'Union  se 
trouvait  avoir  ainsi  non-seulement  un 
dévelopoemenf,  mais  une  barrière:  son 
existence  comme  état  indépendant  ne 
date  vraiment  que  de  ce  traité.  Aupa- 
ravant l'indépendance  existait,  mais 
précaire  et  peu  viable  :  la  frontière 
était  trop  près  et  la  France  trop  loin. 
Tout  cliangea  dès  que  la  Louisiane  vint 
donner  à  la  fédéralion  trop  exclusive- 
ment maritime ,  trop  éparpillée  sur 
l'Atlantique,  une  base  inattaquable;  et 
les  illusions  dont  le  ministère  bri- 
tannique s'était  bercé  rentrèrent  pour 
jamais  dans  les  brouillards  de  la  Ta- 
mise. Ce  n'est  pas  tout ,  un  autre 
grand  résultat  de  l'acquisition  de  la 
Louisiane  devait  être  l'adjonclion-  des 
Florides  dès  lors  pressées  entre  la  nou- 
velle province  et  la*^éorgie,  puis  l'en- 
vahissement de  tous  les  déserts  occi- 
dentaux entre  le  Nouveau-Mexique  et 
les  possessions  anglaises  jusqu'à  la  mer 
Pacifique.  Jcfferson  ne  se  borna  point 
à  deviner  ces  résultats  dans  l'avenir,  il 
en  accéléra  beaucoup  l'instant  ;  et,  peu 
après  la  fin  de  sa  présidence,  les  évé- 
nements s'accomplirent  au  moins  au- 
tant par  suite  de  ses  mesures  que  par 
celles  des  hommes  sous  lesquels  ils 
eurent  Mu.  Son  premier  pas  fut,  en 
prenant  possession  de  la  Louisiane,  de 
prétendre  qu'elles'étendait  à  TK^t,  non 
jusqu'à  la  branche  Ibcrville  du  Missis- 
sipi  seulement,  comme  le  voulaient  les 
Espagnols,  mais  jusqu'au  llio-Perdido, 


JEF 

petite  rivière  à  Test  de  Pensacola. 
C'était  s'attribuer  la  Floride  occiden- 
tale à  peu  près  entière.  L'Espagne  ré- 
clama; plaintes  inutiles.  Finalement 
on  en  vint  à  une  rupture.  Jefferson 
l'avait  prévue  et  souhaitée  ,  il  était  en 
mesure  :  la  Floride  orientale  fut  occu- 
pée sans  grande  peine  ;  puis  la  Pénin- 
sule ,  bouleversée  par  l'ambition  de 
Napoléon  et  devenue  le  théâtre  où 
l'Angleterre  et  la  France  luttaient 
corps  à  corps,  eut  bien  assez  de  son- 
ger à  elle-même.  Qu'était-ce  que  Saint- 
Augustin  et  Pensacola,  quand  Madrid, 
Saragosse,  Valence,  quand  toute  l'Es- 
pagne ,  sauf  Cadix  ,  était  en  feu  r* 
Jefferson  quitta  le  pouvoir  avant  que 
le  sort  de  l'Espagne  eût  été  décidé; 
mais  le  sort  de  la  Floride  l'était  ir- 
révocablement :  Jefferson  avait  for- 
mulé à  huis-clos  ce  qui  deux  aas  après 
(en  1811)  fut  notifié  par  le  pré- 
sident Madison  à  qui  voulut  l'enten- 
dre ;  «c  La  Floride  occidentale  est  à 
«  nous  par  le  traité  de  1803;  la  Flo- 
«  ride  orientale,  nous  la  rendrons  sitôt 
«  que  l'Espagne  aura  payé  au  gouver- 
«  nement  fédéral  ce  qu'elle  doit  pour 
«  les  frais  de  guerre  et  aux  particuliers 
«  les  indemnités  qui  leur  sont  dues  ; 
«  jusrjiie-là  nous  l'occuperons  comme 
«  nantissement:  quanta  l'hypothèse 
«  d'une  cession  des  Florides  par  l'Es- 
«<  pagne  à  un  tiers  qui  paierait  les 
«  somntes  par  nous  réclamées  ,  les 
ic  Etats-Unis  ne  le  souffriront  jamais.» 
Ce  tiers  si  prompt  à  payer,  c'eût  été  le 
cabinet  anglais,  qui  eut  eu  là,  en  effet, 
une  [)osilion  commode,  comme  Mahon 
ou  Calais,  lorsqu'il  possédait  Mahon  ou 
Calais,  conftne  (iibrallar,  puisqu'on 
lui  laisse  toujours  Gibraltar.  MaisJel- 
ferson  avait  pénétré  cette  politique, 
et  la  (irande-liretagne  en  fiit  encore 
pour  ses  frais  de  négociations  avec 
l'Espagne.  Jl  ne  mit  pas  moins  de  soin 
à  jeter  les  jalons  de  futures  conquêtes  du 
côté  de  l'Ouest.  Le  ilom  de  Louisiane 


rml)ra«sait  d«  f^parw    immrn^rt.raai* 
mal  connus  r\  mal  ppuj»lé>  ;  *ruK  <]ttr\ 
quw  rha*%*ur^  ,     qarl(|iifs    inlrrpitlcs 
mivif)iinairf5    «'y    értîent   a»rnluré<  , 
s.ân%  fn  Irourer   la  fin  :  taijufnifnl  on 
"^entait  que  rommf  r^^ion  nalurrllr  ce 
|»a>s  cmhra^sf  tout  le  ha«'>ifi  Jii  ^Ii^^i*- 
-ipi:  unf  fois  cf  ba^^in   dflfrmin^,    il 
iMferail  cnrorf  une   autre  r<';;ion  en- 
tre   les   monta^^nes   qui    encai^^ent   le 
bassin  (lu  Mi^siv^ipi    à    l'OiirM    rt    la 
cMr    lir  r()rr.in  Pacifique.    .)rUfrson 
rr>«»lut  «Ir  ptrlmler  par  unr  exploration 
^cieIltitlque  en  rè»le  i  l'ocrtipation  ;;ra- 
duelle  4e  ces  larges  solitutles  où    ja- 
mais cof^née  ne  frappa  l«  \ieax  tronc», 
où  jamais  di^ae  n'enchaîna  le  boni  At* 
fleu\e5.  l*ar   se^  ordres,  le*  To>a;;eurs 
llunter    et    Diinb-ir    reconnurent    les 
liords  dr  la  ^^  arliita  ;  le  colonel  Free- 
m.m   chercha  la   >ource   de    la  ri>iére 
Kon^e;  le  major  IMe  <ui»it  le   cours 
du  MivM-<Nipi  et  de  TArLan^at  jusque 
leur   origine;    le«  capitaines   ï^enis   et 
(liai le   dans  une  rour?e    de   plus    de 
douie  cent5  lieues  remontèrent  l'énor- 
me Missouri,  et,  après  avoir  franctii  les 
grands  murs   basaltiques  du  pa^s  des 
Mandanes  et  les   Isles  mi<souiSennes 
des  monta;;Ties  Kocheuses  ,  arri%erent 
dans  ces  parafées  où  le  plu>  ^rand  fleu\e 
du  monde  n'est  plu-s  qu'un  filel  qu'en- 
jamberait un  enfar^t.  Trois  menues  ri- 
rières  forment    j»ar    leurs   réunions  le 
Missouri  :  l,enis  et  Clarle  leur  impo- 
sèrent les  noms  de  trois  ^ands  hom- 
mes américains,  (lall.itin,  Madi-^on   et 
Jeiïerson  :    la  branche   sud-oneNt ,  la 
plus  lointaine  des  trois,  celle  qui  sem- 
ble fuir  le  plus  dans  la  profondeur   du 
désert  et  aspirer  à  l'autre  mer,  reçut  le 
dernier  nom.  Ces  To>af^es  qui  ouvrent 
une  ère  nouvelle  dans  l'histoire  de  la 
découverte  de  l'Amérique  ne  restèrent 
pas  ton;;- temps  sans  être   utilisés.  .Iff- 
ferson  avait  prescrit  aux   explorateurs 
de  nouer  partout  des  inteHi;;erirTs  avec 
les  hôtes  du  désert.  Pike,  en  1805,  ré- 


JEF 


i55 


roacilia  les  Chipiouais  et  les  Sious;  les 
Mandane^  5e  montrèrent  disposés  en 
fa>eur  des  blanrs  Kn  1S0H,  il  fil 
adopter  par  le  congrès  un  traité  entrt 
ITnion  et  les  chrfs  Oiks.  Fn  1804, 
Tï  ptf»,  il  reçut  il  di\eiNes  reprises  des 
envoyés  des  sauvages,  notamiurnt  des 
cl  '  '  ,  et,  en  se  conciliant   leur 

bi  •    par   queb|ufs    pté^rnls, 

en  lit  tlr^  jiii  .mon  pour  tou- 

jour»,  au  m  <  n  temps.  Ilirn- 

\M  la  ri^ilratinn  plaça  ses  postes 
avancée  dans  ledé;ert,  et  tonr-i-tour 
douce  ou  menaçante,  bienfaitrice  oa 
fane<te,  elle  commença  cet  envahisse- 
ment progressif  qui  n'a  point  encore 
atteint  sa  limite,  et  qui  sans  censé  \a 
refoulant  le  sauvage  et  déboisant  la  »o- 
h'ude  pour  la  mélamorphoNcr  en  rian- 
tes cultures  et  en  >illa^e%.  l  ne  chaîne 
de  lieux  babines  relii*  ainsi  les  mes  des 
detjx  océans,  et  le  poète  a  pu  dire  de 
rCnion:  «  >  ^ande   républi- 

M    q'ir  qui   r  i  monde,  salut, 

•«  Occident   rii» 

1  '  i."  but,  .lefferson 

fil  de  la  l,oritstane  deux  parts  di>tincles, 
la  Basse- Louisiane  qii  bientôt  prit 
rang  d'état ,' la  IIaute-T.ouisiane  ou 
Arkansas  qui  fut  et  reste  encore  un 
territoire.  Il  sépara  de  même  l'Ohio 
du  ('onnecticut  :  ce  territoire,  aujour- 
d'hui état,  reçut  de  lui  des  statuts  pro- 
>i«oires,  et  conformément  à  la  doc- 
trine qu'il  a\aif  ém'-e  des  ITT.'»,  et  à  la- 
quelle il  éla  !  '  !<-Ie,  quoi- 
que tolérant  1.  .  les  états 
di%ersement  constitues,  I  esclavage  j 
fut  prohibé.  Indiana  aussi  cessa  de 
faire  partie  de  l'Illinois.  Fin  même 
temps  il  tentait  de  plier  les  peuplades 
indiennes  voisines  des  états  les  plus  an- 
ciens de  l'Union  aux  habitudes  et  aux 
travaux  de  la  vie  civilisée:  il  eut  la 
satisfaction  de  voir  plusieurs  d'entre 
elles  renoncer  à  l'existence  nomade  et 

k»,    U^il.   o  gre-t  republik.  of  lUe  worid, 
Tbuu  r'tuug  eiupirc  of  the  >»«»t.' 


i5b 


JEF 


précaire  hérilée  de   leurs  pères,  pour 
adopter  le  régime  européen  :  les  Tclic- 
Tokls  surtout   se  laissèrent   f^uidcr  les 
premiers  dans  celte  vole  oà  aujourd'hui 
encore  ils  précèdent  tous  les  indigèncj 
de  l'Amérique  ;    un   cinqulcnie  seule- 
njenl  de  la  nation  a  persévéré  dans  les 
préjuj^és  de  ses  aïeux  et   s'est   retirée 
sur  les  bords  de  l'Arkansas  :  le  reste 
forme  sous  la  protection  des  Etats-Unis 
une     république     Indépendante     qui 
compte  quatre-vinf;;ls  villages  et  qui  a 
une  blLtiiothèque,  des  écoles,  un  jour- 
nal en  salan}2;ue  et  en  anglais  (/."  Phr- 
nix  ichcruki).  Ce  chanf;cnient,  qui  exé- 
culjé  sur  tous  les  Indiens  supprimerait 
pacifiquement  les  ennemis  qu'a  pu  pen- 
dant un  temps  redouter  la  civilisation, 
niéritc,   certes,   des  élofies  à  l'iiomme 
d'(il.';l  (jui en futleprinclpal auteur:  lien 
mérite  d'autant  plus- que  pour  le  produire 
il  eut  recours,  non   comme  on  l'a  fait 
souvent,  à  la  face  corruptrice  de  la  ci- 
vilisation, mais  à  la  relij^ion  et  à  la  mo- 
rale :    des    missionnaires    baptistes  et 
moraves  furent  les   principaux  argents 
de  cette  noble  politique.  Ea  li^ne  suivie 
par  Jefierson  dans  les  autres  branches 
de  l'administration  ne   fat  pas   moins 
sage  et  pas  moins  utile  à  l'état .  Mettant 
de  côté  de  vaines  déQances,  il  rapporta 
la    loi   conlie  les   étrangers,  comme 
incompatible  avec  les  vrais  intérêts  d'un 
pavs  commerçant.  Dans  la  gestion  des 
finances  il  apporta  des  améllorallons 
graves,  réduisit  les  dépenses  de  l'état 
et  diminua  la  dette  publique  de  trente- 
trois  millions  et  demi.  Il  abolit  les  droits 
intérieurs  d'état  à  état ,  ne  voyant  dans 
les  demi-prohibitions,  que  des  théori- 
ciens étroits  api)cllent  protection,  (ju'un 
sur  moven  de  tarir  la  prospérité   pu- 
blique.   Dans   ses    stipulations    com- 
merciales avec  les   puissances  étrangè- 
res, il  mit  de  mcnie  en  avant  les  prin- 
cipes les  plus  larges  et  se  montra  prêt 
à  favoriser  les  Iraportatlons  du  dehors, 
mais  en  exigeant  la  réciprocité.  En6n 


JEF 

il  fonda  la  célèbre  académie  militaire 
de  \\  cslpolnt,  imitation  de  l'Pkole po- 
lytechnique de  Paris.   Celte  modéra- 
tion, ce  libéralfeme,  ne  l'empêchèrent 
pas  de  déployer,  quand  les  circonstan- 
ces le  requéraient,  toute  l'énergie  né- 
cessaiie  pour  conjurer   le  péril ,  pour 
comprimer  la  résistance.  Impartial  et 
tolérant  à  l'égard  de  ses  antagonistes, 
il  étoufl'a  par  sa  vigilance   et  par  des 
mesures  décisives  rapidement  adoptées 
deux     tentatives     d'insurrection    des 
noirs  (1801    et    1803).  Des  corsaires 
de  Maroc  et  de  Tripoli  s'étaient  per- 
mis quelques  déprédations  sur  des  vais- 
seaux marchands  de  l'Union  :  ne  pou- 
vant obtenir  satisfaction,  il  déclara  la 
guerre  aux  deux  puissances  et  bientôt 
il  les  réduisit  à  implorer  la  paix  (1801- 
1804).  On  a  vu  plus  haut  comment, 
après  un  échange  de  notes  au  sujet  des 
limites  entre  la  Louisiane  et  la  Floride, 
il  fil  marcher  des   troupes  sur  la  Flo- 
ride orientale,  et  sous  prétexte  d'indem- 
nités se  saisit  de  ce  gage  pour  ne  plus 
le  laisser  échapper.  11  lui  fallut  encore 
plus  de  vigueur  pour  préserver  sa  na- 
tion du  fléau  de   la  guerre  pendant  la 
lutte  colossale  des  coalitions  salariées 
par  l'Angleterre  contre  laFrance:  les 
deux  nations  rivales  prétendaient  éga- 
lement   l'entraîner  à  prendre  parti  : 
Insinuations,    notes  impérieuses  ,  sé- 
ductions ,  menaces ,    tout  fut  mis  en 
oeuvre  ;    il    resta    inébranlable.    En- 
suite ce  furent  des  armateurs  des  deux 
nations  qui  capturèrent  les  bâtiments 
américains,  en  dépit  de  la  neutralité  et 
en   dépit  du  principe  que  le  pavillon 
couvre  la  marchandise;  il  fit  rendre  par 
la  législature  un    décret   qui    mettait 
l'embargo  sur  tous  les  vaisseaux  de  l'U- 
nion :  «<  mieux  encore  vaut  la  stagnation 
que  la  mort,  »»  disaient  les  fauteurs  de 
cet  acte  (1805).  Enfin,  après  avoir  né- 
gocié le  désistement  des  prétentions  de 
la  France,  n'ayant  plus  pour  ennemie 
que  l'Angleterre,  il  leva  l'interdiction. 


Ji:i' 


m 


ij' 


l  ne  iommaiion  imp^riru>r  liu  r.il)inri 
tir  Sjinl-Jjmr«  ordni  ii.iil  la  r.lfilitrr 
lie  lnu*  If*  na\irr»  dr^  KlatN-l  111% 
clurp^i  de  «lenrcr*  élran;;orr<  à  Irtir  sol 
el  \i  pte^Nr  df%maIfloU  qui  %'*  lniu\e- 
rjiritt,  rt  de  plu^  .libil  ju^qll'j  dé* 
rlaicr  qu'il  nr  iortirail  |diisiirr  barrique 
de  sucre  drs  roionir^ennrmie^  «ur  quel- 

3ue  vais^ran  qur  cr  fût  à  moins  que,  ron- 
uite  dan«  Ir^  |>or(^  britanniques,  elle 
n'v  fùl  suumise  a  des  ta&es  :  JefTer^on 
rép4)ndil  en  faisant  prendre  à  la  lé- 
gislature amrriraineune  ri>5oliilion  por- 
tant que  tout  preneur  sur  un  bâtiment 
araérirain  serait  puni  de  mort,  que  tout 
matelot  aurait  le  droit  de  tuer  qui- 
conque tenterait  de  presser,  et  rornte- 
rail  ainsi  récompense  ,  que  toute  Ticti* 
me  de  la  pre>sr  serait  déilomma^i^ée  , 
enfin  que  Union  exercerait  comme 
représailles  sur  1rs  b.-iliments  anglais 
une  presse  é^ale  à  celle  qu'auraient  su- 
bie les  Américains.  1^  réponse  pro- 
duisit l'effet  piévu,  et  les  rodomonta- 
des anglaises  se  bornèrent  à  quelques 
pirateries  le  long  des  cAles  et  a  des 
ij\.i;;ps  dans  la  Caroline.  Cependant 
le  pied  de  paix  ne  fut  point  rétabli,  et 
la  manne  dr>  deux  pa\s  préludait  de 
loin  en  loin  à  U  guerre  q:ii  de\ait  finir 
par  éclater  <ur  les  frontieics  septen- 
trionales en  \H\:i.  Au  total  (ienr,  la 
situation  de  II  nioii  clait  montée  au 
plus  haut  point  de  grandeur  et  dj  pro- 
spérité qu'il  fût  possible  d'atteindre  au 
milieu  de  la  gran4e  guerre  qui  boule- 
Tersait  le  monde  en  Iném^  temps  que 
rturope,  lorsque  Jolïer>ou  quitta  les 
insignes  de  la  présidence.  H  n'eût  tenu 
qu'à  lui  de  rester  a  celte  haute  place 
au  moins  quatre  ans  encore.  I/assem- 
bléc  de  la  Pennsylvanie  lui  a\ail  oficrt 
de  le  réélire:  beaucoup  d'élats  avaient 
toujours  été  favorables  à  son  sv  terne, 
les  états  nouveaux  l'étaient  encore 
davantage,  cl  les  événements  v  avaient 
de  plus  en  plus  donné  de  la  force. 
On    peut  donc   croire  que  peu  dVf- 


ioris  lin  en  s4Mit  suffi  pour  emporter 
sa  troisième  nnmin.>tion.  H  ne  ^ou- 
lut  point  essayer;  (f  c'est  depuis  ce 
temps  qne  rtt^.i^r  semble  a\oir  sanc- 
tionné .  •ii'.ioii  de  toute  troi- 
s'cfîie  •  à  la  présidence  , 
ap!i-s  iiiiit  .T.M  dr  pn*<rssion.  Mnnti- 
cello  re<lexint  »on  i-iie.  l'Itis  que  sexa- 
génaire à  cette  époque  ,  il  semblait 
vouloir  pavser  le  reste  de  set  jour!»  en 

fiaix  entre  le  sonvenir  de  ses  artcs  et 
es  loi^ir»  d'nfie  existence  liltna.ic  ou 
dourement  occupée,  il  n'Hait  pas  ri- 
che :  ces  hommes  qui  pendant  des  an- 
nées avaient  géré  les  alfaires  d'un  pav* 
renommé  par  la  richesse  el  le  mercan- 
tilisme réalisaient  au  pied  de  la  lettre 
ce  qu'on  a  dit  des  Gncinnatus,  des 
l^riciiis,  et  sortaient  des  affaires  plus 
pau\res  qu'ils  n'v  étaient  entres;  c^^ 
leurs  appointements  modestes  avaient 
suffi  tout  juste  à  leur  entretien,  et  leurs 
propriétés  ne  s'étaient  point  améliorées, 
loin  de  l'fr  1  dn  maître,  (^tte  insou- 
ciance sublime  fut  jusqu'au  bout  tn 
malad-e  de  .Icfferson  ,  mal  iJ-e  pe« 
contagieuse  de  ce  cAtë-ci  de  l' V-^ 
tiantique.  Keudn  à  la  vie  pri^-e, 
au  lieu  de  songer  à  régui.iriscr  s.i  for- 
tune, il  consacra  son  iniluence  et  S!*s 
\eilles  à  créer  l'université  de  N  irgiiiie. 
Hien  que  seconde  par  quelcpips  collè- 
gues, c'est  lui  que  ce  bel  étauli  sèment 
regarde  à  juste  titre  comme  son  fonda- 
teur: il  eût  pu  inscrire  avec  son  nom,  sur 
la  façade,  Krrgi.  Mais  tandis  qu'il  s'é- 
puisait à  doter  sa  patrie  d'un  dernier 
monument,  l'abandon  de  ses  propres 
intérits,  une  hospitalité  dispetidieuse, 
des  m.iiheiirs  imprévus  le  r«'ilu!sirenl 
insensiblement  à  la  gène,  à  la  détres- 
se :  il  fut  oblige  p<»ur  vi^re  ira\oir 
recours  à  des  expédients  qui  dm  eut  coû- 
ter à  sa  délicatesse,  el  de  Ihiiirbien 
cruellement  ses  illusions,  s'ilo-l  encore 
des  illusions  à  soixante  douze  ans:  ce 
fui  d'abord  sa  belle  et  riche  bibliothè- 
que qu'il  offrit  de  vendre  âu  congrès  k 


i58 


JEF 


des  conditions  très-avantageuses   pour 
Tacquércur  ;  on  accepta;  plus  tard   ce 
furent   ses  propriétés   qu  il  demanda, 
par    une  requête    lonf!;uement   et  for- 
tement motivée,  Tautorisation  de  met- 
tre en  vente  sous   forme  de  loterie. 
Triste  faveur  !  et  le   produit  n'en  fut 
pas  même  suffisant  pour  se  débarrasser 
des  créanciers,  bien  que  la  reconnais- 
sance publique  s'empressât  de  faciliter 
la  vente,  et  que  tous  les  billets  eussent 
été  pris  par  (!es  comités  spéciaux  lormés 
dans  ce  but.  Il   était  sans  cesse  aux 
abois,  sans  cesse  à  la  veille  d'être  dé- 
pouillé, par  autoritéde  justice,  des  seuls 
moyens  d'existence  que  lui  eussent  valu 
ces  mesures,  lorsque  enfin  la  mort  vint 
le  délivrer  de  ces  hideuses  poursuites, 
le  4  juillet  1826.  Il  y  avait  cinquante 
ans  jour  pour  jour  que  l'indépendance 
américaine  avait  été  proclamée.  Que 
d'événements  dans  ce  demi-siècle  !  1 1  les 
repassait  souvent  dans  sa  mémoire  ;  ma- 
lade et  pressentant  à  ses  fréquentes  dé- 
faillances une  mort  procbaine,  il  expri- 
mait le  vœu  de  \ivre  jusqu'à  cet  anni- 
versaire :    son   vœu    lut  exaucé.    Une 
foïticldence  frappante,  c'est  que  John 
Adams,  jadis  son  adversaire  politique, 
avec  lequel  depuis  il   s'était  réconcilié 
et  auquel  il  écrivait  fiéquemrhent, mou- 
rut le  même  jour  que   lui.  J-,es  canon- 
nades, les  réjouissances  publiques  l'a- 
vaient  réveillé   d'un  engourdissement 
avant-coureur  de  sa  fiti  :  «   Pourquoi 
ce  bruit?»  dit-il.  On   le  lui  apprit, 
«c  Voilà  un  bien  beau  jour ,  »  reprit- 
il ,  et   il  expira.  Jefferson   réunissait 
des  connai.ssari(es  très-\ariées  :  droit, 
histoire,  langues  tant    anciennes  (|ue 
modernes,  économie  politique,  mathé- 
matiques, astronomie,  chimie,   physi- 
que ,  liisloirc  naturelle,  technologie  et 
arts  mécaniques,    lllléralure,   rien  ne 
lui  était  étranger.  Il  était  depuis  1801 
membre  associé  de  TI  nstilut  de  France  ; 
depuis  1809,  associé  étranger  de  celui 
de  Hollande,  première  classe.  I^  même 


JEF 

année  il  avait  reçu  le  titre  de  membre 
honoraire    de    la  société   royale    des 
sciences  de  Varsovie.  Les  principales  so- 
ciétés savantes  des  Etats-Unis  le  comp- 
taient aussi  parmi  leurs  membres   (2). 
— 11  a  été  dit  plus  haut  que   Jefferson 
au  milieu  de  ses  travaux  politiques  et 
administratifs  avait  encore  trouvé   le 
temps  d'écrire.   On  a  de  lui  :  I.   Les 
Notes  sur   tctat  de  Virginie  (déjà 
citées),  1782,  in-8°;  2'  édit.,  1788, 
in-8°,  carte.  C'est  un  excellent   tra- 
vail.  L'abbé  Morellet  l'a  traduit  en 
français,  1786,  in-8"  :  il  a  souvent  été 
réimprimé.  II.  Manuel  du  droit  par- 
lementaire,'WdiûxxnoXoiï,  1802;  trad. 
en  français  par  Pichon,  Paris  ,  1815, 
in-8",  et  en  espagnol  par  JoachimOf- 
tega,  Paris,  182G,  in-12.  III.  Vues 
sommaires  sur  les  droits  deVAmé" 
riqueanglaise.ill^ij'm-S".  IV. Beau- 
coup de  pièces  politiques  importantes, 
parmi  lesquelles  figurent  en  première 
ligne  la  Réponse  à  lord  North,  la  Dé- 
claration d'indépendance^  le  Projet 
de  constitution  pour  la    Virginie , 
trois  célèbres  Rapports  (1°    sur   Vu- 
nilé  des  poids,  mesures  et  monnaies, 
14  avril  1790  ;  2°  sur  fêtai  des  pê- 
cheries de  la  morue  et  de  la  haleine, 
1791  ;  3"  sur  le  commerce  extérieur 
des  Etats-Unis,  ses  privilèges  et  ses 
restriction  s,  1 7  9  3  )  ;  et  1  es  Discours 
pour    l'om'erlure  du    congrès.    V, 
Plusieurs    Mémoires    scientifiques , 
dont  un  sur  un  os  Jossile  gigantes- 
que trouvé. en  Virginie;  un  autre  sur 
la  mémoire,  le  Jugement  et  V imagi- 
nation des  nègres  (il  combat  ce  qu'on 
a  dit  de  l'infériorilé    des  intelligences 
éthiopiennes)  ;  un  troisième   sur   une 
charrue  de   son  invention    (dans  les 
Annales  du  muséum  d'histoire  na- 
turelle de  Paris,  d'où  il  a  été  trans- 
porta avec  de  nouveaux  détails  et  avec 

'i  ,  l.a  SDCiel*^  |>lliloHn|tlii<iiie  de  l'IiiliKlnlpine 
a  fait  iuiprimer,  en  iH?'],  r«'log«  de  Jt-ffcr.son, 
prononcé  «levant  elle  le  ii  avril  de  celle  inèiiie 
•  nbé«,  par  Nicbolaa  Bidale.  D — z— «. 


f».;iirf  li.iMH  i«  .\«»m»v.;m  luiirs  t  n/rt 
ft/rt  ira'^rirulltirr  ru  17  vol.  in-H  '). 
J.e   ('   •  r    ilrs  arU  rt  m^tifiN 

df  r.i  •   un   niodrle  tlf  relie 

rliinuf  t}ut  lâil  liraucnup  il  lioiiiieur  a 
I  ii'iiiiinr  délai  son  invriileur,  ri  qui 
I  nr  avcr  rombirn  de  &ac;artlé  li 
.<j  ;  .i]iiail  à  Ats  |irobirme5  usurU  les 
cairuls  les  pliK  anius.  Il  faut  joindre  à 
ces  ouvraj^es  le»  Mémoires  tir  .Irffrr- 
stm  .  publiés  par  Kandttipli  Jeflferson, 
IH-J!»,  i  \ol.  in  H  ",  Lue  foule  de  lo- 
calilrs  aui  KlaU  Unis  s'appelleni  ou 
du  nom  de  JefTerson  ou  d'un  nom  qui 
en  der>\e.  Ainsi  il  v  a  au  kenlucLv  un 
conté  et  une  ville  tie  JefTervonlovin  . 
la  Vir-^une,  laC^rnlme  du  Nord  onl 
•  «M*;  la    N  ir^inie   el  Indiana 

I  lie  ;  on  compte  Ireae  romtr^ 

'  I  '  tii  ;  enfin  il  \  a  des  villes  de 
.1 .  :  1  tlans  Nrw  Jersey,  dans  New- 

llampsliire,  dans  New-York,  dan«  le 
Maine,  dans  la  l'cnnsjvaoir  ,  dans  le 
Tennessee,  dans  le  MiîMïuri,  dans  la 
(îcort^ie  ou  même  on  en  distingue 
deux  :  mais  l'Oliio  l'emporte  sur  tous, 
«•I  eti  1S-J7  cet  étal  ne  compiail  pas 
moins  dequato(zevillr>,  nous  ne  disons 
pa>  se  dislin^uanl,  mais  se  ronfondant 
par  le  nom  de  .IrOVr-ion,      l* — nr. 

.IKFKKin'  (Jy.KS),  iliéolof^ien 
anglais,  né  en  16i7  à  IpswicI»,  fui  sue* 
ce>M\emeiil  cure  de  Dennin^ton  dans 
le  fomie  de  SufiolL,  mini>tre  d'une 
cj^llse  de  Norwicli,  râleur  de>  deux 
petites  cures  de  kirlon  et  de  FalLen- 
iiam,  et  archidiacre  de  Norwich.  Sa 
modestie  aurait  laissé  son  mérite  igno- 
ré ,  SI  quelques  hommes  célèbres  el 
puisants  ne  l'eussent  mis  à  portée  de 
>e  faire  conuaiire.  Sir  hUlouard  Atlvns, 
premier  baron  de  Ttrliiquier,  lui  don- 
na un  apparteraenl  dans  son  h(Hel,  el 
le  mena  avec  lui  dans  le  monde  où 
il  se  lia  avec  plusieurs  personnages  dis- 
tinguos dans  l'église  el  dans  les  lettres. 
Ennemi  de  la  controverse  religieuse,  il 
aTait  coutume  de  dire  quelle  produi- 


JEl 


»^ 


%ait  plus  (le  rlmlntr  f/ue  tIe  lu- 
mière. Il  mounil  en  17JtK  ii;é  de 
soi&ante-douie  anN.  On  a  de  lui  un 
voltmir  de  K^rmoii"  publ-é  en  1701, 
•I  1  quelques 

Il  .       ^  1  iiii-s  en>em- 

ble  en  1  i.'tl ,  2  vol  m  H  lia  publié 
en  outre  la  Moralr  rhrrfirrme  de  sir 
Thomas  llrowne;  .tphurisntrx  mo- 
raux et  religieux  ,  lirA  des  papier» 
du  docteur  Whirhcole,  el  trois  volu- 
mes de  sermons  du  même  auteur.  11  a 
laisse  plusieurs  volumes  de  manuscrits. 
S— D. 
JKFFKHVS  Tiio%iAs1,céo»r%- 
phe  anglais  .   doul  |r  sont 

plus  rounuN  que  Ir»   «!  x  vie 

laborieuse,  était  né  ver*  1720.  Ses  ta- 
lents lui  mi'iitrimt  le  litre  honorable 
de  ;;ro^r.iplie  du  roi;  el  il  mnuiiit 
après  17H(>.  Outre  une  belle  carte  de 
Vfrltuule  en  quatre  feiilles.  on  lui 
doit  les  caries  dr  la  Deitmiferte  (le 
la  h'ioride.  compilation  de  Wil.  Uo- 
betl,  l^ondres,  176:1,  in-i",  el  celles 
de  la  traduclion  an<;laise  des  l' ora- 
ges des  Russes  pour  découvrir  un 
passade  au  nord-e>l  delAnuTique,  pu- 
blies en  allemand  par  S.  ^lulll'r.  ibid., 
17Gi,  in-V';  enfin  :  I.  In  lirrueil 
des  haltillements  des  différentes  na- 
tions ,  anglais  el  fraiirais,  Londres, 
17.'>7,  '1  vol.  in-V.  II.  ihr  mitu- 
rai,  etc.,  c'esl-à-dtre  Histoire  naturelle 
politique  de  l'Amérique  so;is  'a  domi- 
nation française,  ibid.,  1761,  in-fol., 
fi^.  IVulcI-Dumont  en  a  extrait  : 
Conduite  des  Françitis  par  rapport 
à  lu  rupuoelle  Ecosse ,  !/)ndies  J*a- 
ris),  176.'>,  m- 12.  III.  Avec  L;ine  et 
Morris  :  Le  iSlitte  de  l' .Imrri'pie 
septentrionale,  177<i,  ^r.  m -fol.,  re- 
produit à  Paris  en  1778.  IV.  ït^est 
inditin,  c'est-à-dire  Allas  ou  Descrip- 
tion ;;énéralc  des  Indes  occidentales 
d'après  les  relations  les  jLis  récentes, 
178Ô,  ^r.  in-fol.  Cet  Atlas  et  le  pré- 
cédent sont  estimés.  W — s. 


itk) 


JlitJ 


,IEH 


JEFFREYS  ((itORGK),  auteur 
an^^lals,  nn  en  KiTS  à  Weldrnn  (com- 
té (le  Norlîiainplon),  clait  parent  des 
tlucs  (!e  Chandos;  11  occupa  divers 
•emplois  publics  à  runiversilé  de  Cam- 
i)ndû;e,  cl  fut  quelque  temps  secrétaire 
<lu  docleur  Ilarlstrongc ,  évéque  de 
.Oerry  en  Irlande.  11  mourut  en  1755, 
À^é  de  soixantc-d'.x-sept  ans.  On  a  de 
lui  des  JMdcm^es  en  lyers  et  en  prose, 
1754,  1  vol.  in-4",  où  Ton  trouve 
Jeux  trap;édles  ,  Edivin  et  j\lcrupe, 
•qui  ont  été  représenlées  sur  le  théâtre 
ide  Llncoln's-ln-Fields  et  le  Triom- 
^\e  de  la  Vérité,  oratorio.  C'est  de 
Jeffreys  que  sont  les  vers  anonymes 
imp{iraés  en  tcte  de  la  tragédie  de 
Caton  ,  ce  qu'Addlson  ne  sut  jamais. 
S— D. 

JEIÏABEXTAFUF,  seigneur 
maure,  né  dans  le  royaume  de  Maroc, 
vécut,  dès  sa  plus  tendre  jeunesse,' au 
.milieu  du  tumulte  des  camps.  11  possé- 
dait une  rare  force  de  corps,  un  grand 
<:ourage  et  fut  doué  de  toutes  les  ver- 
tus qui  font  le  bon  capitaine.  Après 
avoir  long-temps  combattu  contre  les 
Portugais,  il  fut  chassé  par  eux  de  la 
ville  de  Sapliim,  en  1508.  C'était  le 
tempsoù  régnait  Emmanuel,  \\^  roi  du 
Portugal.  Jehabentafuf  s'engagea  au 
service  deVe  monarque.  Quels  furent 
les  motifs  de  cette  conduite:^  l'intérêt 
ou  l'estime  qu'il  portait  aux  Portugais. 
Quoi  qn'il  en  soit,  le  guerrier  maure, 
quand  il  eut  passé  sous  les  drapeaux  du 
l'ortuL',.'.!,  ?er\il  celle  nation  avec  une 
inviolalile  lidclilé.  Le  premier  service 
qu'il  lui  rendit  fut  la  piofnpie  e'  en- 
tière défaite  des  habitants  de  Xlatime, 
contrée  du  royaume  de  Maroc.  En- 
voyé peu  de  temps  après  (151:^)  contre 
une  troupe  de  rebelles  retranchés  au 
village  d'Arèsc,  près  de  la  montagne 
de  Fer,  il  les  surprit  pendant  la  nuit , 
les  tailla  en  pièces,  et  revint  chargé 
de  butin.  Il  se  distingua  encore  dans 
la  guerre  que  Ferdinand  d'Ataïde  avait 


déclarée  au  roi  dt?  Maror  ol  nu  shériU 
des  Arabes  d'Afrique.  Neuf  compa- 
gnies de  Sarrasins  lurent  écrasées  par 
lui  au  pied  du  mont  Atlas,  et  le  shérif, 
malgré  son  courage  et  le  nombre  de 
ses-  troupes,  ne  put  l'empêcher  de  ra- 
vager tout  le  pays  de  Xialime.  Pa.r  les 
périls  qu'il  bravait  chaque  jour,  par  ies 
fréquentes  victoires  ,  par  ses  mœurs 
simples  et  sa  conduite  désintéressée  , 
Jehabentafuf  donnait  continuellement 
d'irrécusables  preuves  de  son  zèle  pour 
les  Portugais.  Cependant  ils  vinrent  à 
soupçonner  sa  fidélilé  et  se  séparèrent 
de  lui  ;  tant  il  est  difficile  de  croire  à 
la  sincérité  d'un  guerrier  qui  com- 
bat sa  propre  patrie  !  le  Maure , 
profondément  affligé  if^  Injurieux 
soupçons  dont  il  était  l'objet,  courut, 
pour  les  dissiper,  porter  la  guerre  et 
le  ravage  au  sein  du  royaume  de  Ma- 
roc. Cetteconduile  ouvrit  enfin  sur  son 
compte  les  yeux  des  Portugais,  et  ils 
lui  rendirent  leur  confiance.  Charmé 
de  ce  retour,  11  marcha  avec  le  gouver- 
neur de  Saphim  à  la  conquête  de  Ted- 
nest,  ville  de  la  province  de  Héa,  dans 
le  royaume  de  Maroc.  Commandant 
l'avant-garde,  il  se  jeta  avec  son  au- 
dace accoutumée  sur  les  troupes  du 
shérif,  et  leur  enleva  un  butin  consi- 
dérable. Tednest  fut  conquis  presque 
aussitôt.  L'ardent  et  terrible  Maure 
ne  rêvait  que  la  gloire  des  armes;  tou- 
jours dévoré  (k  désir  d'en  acquérir, 
il  adopta  avec  enthousiasme  la  propo- 
sition qui  lui  fut  faite  d'aller  (aire  des 
courses  jusqu'aux  jtorlcs  de  JMaroc.  \]f\ 
de  si's  iitics  d'armes,  offusqué  tlo  >a 
gloire,  fit  mainiucrce  projet.  Attaqués 
(1513)  dans  la  province  de  Ducala,  par 
un  corps  de  troupes  maures,  les  Portu- 
gais en  firent  une  horrible  boucheiie. 
Jehabentafuf  eut  encore  une  part  écla- 
tante à  cette  victoire.  Nacer,  roi  do  .Mé- 
quinez,  ayant  appris  la  défaite  des  Mau- 
res auxquels  11  venait  se  joindre , 
s'empara   d'Ahnedine ,   ville    occupée 


Ji:ii 


JIL 


lOi 


jar  l«  clirétirrw.  Noire  hrr<M  ,  liop 
fjiblf  pour  |»iiuioir  lui  rrsisirr,  se  re- 
lira -  N  ,  ,  ,;r  fjii 
coml'  i.fr  )e< 
cilerucr».  .\\aiii  il  «niici  4  .Sjj>liiro,  il 
rencontra  un  dcLirlinnciit  coiiMilrra- 
ble  lie  l'arméf  ruiirniic,  quM  liallil  et 
mit  en  fuite.  Il  montra  Jaii^  rette  cir- 
consiauce  une  valeur,  une  prudence, 
■ne  rapiilité  de  coup  d'tr.l  qui  inspi- 
rèrent une  rive  admiration  et  une 
haute  idée  de  ses  talent>  mililairci 
Nacer  (pou\anlé  n'osa  le  poursuivre. 
Sorti  de  Saphiin  |>enda:it  la  nuit,  Je- 
liabentjfuf  a<.a  \enir  insulter  le  camp 
de  ce  ladie  luonarque,  et  y  porta  la 
terreur.  Ilicnlôl  le*  si>1tials  de  N.irrr, 
Indigné»  de  sa  lun'  it 
leurs  armeN  à  relie  >  •, 
et  raillèrent  à  mettre  leur  r(»i  eu  finie. 
Kn  t.'»ir>,  Jcliaheulafuf  '«ui^i  d'un 
> aillant  officier  pnrtu;;ais,  ilom  Topès 
Ilarri;;ue ,  et  d'un  petit  nombre  de 
troupes,  attaqua  un  parti  maure  campé 
prè.s  du  mont  Allas  ;  il  en  ma&sacra 
une  ;;rande  partie.  Celle  rapide  vic- 
Ictlre  le  rendit  maître  de  cinq  cents 
privimiiers  ,  de  vin^t  mille  bêtes  à 
Liiiie,  de  mille  bœufs  et  de  quatre  cents 
chameaux.  Après  tant  île  biiiianls  ex- 
ploit, Jeii.ibenlafdf  -^e  rejidit  a  Lis- 
bonne où  Kmrnanuel  rarciieillit  avec 
lionneur  et  le  combla  de  félicitations. 
\\ant  appris  jl.'ilG  que  quelques  sei- 
;4neurs  Xerqoois  s'étaient  révoltés  con- 
tre les  Portu|;ai<  et  les  avaient  chassés, 
il  offrit  à  ce  prince  d'aller  les  faire  ren- 
trer soun  son  obéissance  à  condition 
qu'ils  obtiendraient  leur  pardon.  Son 
intervention  acceptée,  il  partit  pour 
l'Afrique,  et  à  sa  voix  les  rebelles  ren- 
trèrent dans  le  devoir.  Depuis  quelque 
temps ,  d'intimes  liaiso:is  î'pfaienl  for- 
mées entre  le  héros  raaare  et  un  chef por- 
tuo^ais,  NiinezMascaré^nas.CeJiai^ons 
firent  ombra;;e  à  ceux  qui  les  appro- 
chaient. On  chercha  Ions  les  moyens  de 
les  rompre  ,  et  l'on  y  parvint.  Nlasca- 


1  raillas  poussa  SI  loin  la  haine  contre  le 
Maure,  qu'il  o.a  l'accuser  de  trahison 
ai?prè*  du  roi  de  l'orlu^al.  Jehaben- 
laluf  se  justifia  el  recouvra  la  confiance 
d'F.mmannel  :  Masraré^nas  reçut  l'or- 
dre de  continuer  a  lui  fournir  le^  se- 
cours nécc^^aires  pour  L  ;;ucrre.  Je- 
habcntafiif  combattit  de  nouveau  les 
ennemis  du  l'ortu;;al,  et,  uar  ses  bril- 
lants sucres,  força  tout  le  monde  à 
reconnaître  en  lui  un  guerrier  aussi 
fidèle  que  bra\e.  Toujours  iufati;;able, 
toujours  li\ré  à  son  ardente  passion 
pour  la  gloire,  il  forma  le  projet  d'aller 
attaquer  le  roi  de  Maroc  dans  sa  capi- 
tale même,  et  en  fit  part  aux  .Maure^ 
de  Dabibe  ,  de  (tarubic  et  de  Ledei- 
hambre,  qui,  effravés  d'un  pareil  des- 
sein, et  crai,;nanl  d'êlre  subjugués  à 
leur  tour  ,  conspirèrent  en  secret  sa 
perle.  Il  leur  fournit  lui-même,  par 
um  imprudence,  les  moyens  d'eiécuter 
leur  oilieux  complot.  Il  avait  perdu 
^521)  un  de  ses  capitaines.  Un  ban- 
quet eut  lieu  pour  célébrer ,  selon 
la  coutume  des  Niaures,  les  fanéraille» 
du  défunt.  Jehabentafuf  y  vint  sans 
défiance,  suixi  seulement  de  trois  de  ses 
officiers.  Au  milieu  du  festin,  trois  des 
conjurés  >e  précipitèrent  sur  le  héros, 
et  lui  portèrent  plusieurs  coups  de  poi- 
gnaid  dont  il  mourut  à  l'inïttant.  .\in.si 
périt  ,  victime  de  sa  trop  ^énéreust 
confiance,  ce  guerrier  célèbre,  modèle 
de  courage,  de  sagesse,  de  modestie  et 
de  désintéressement.  \^  nouvelle  de  sa 
fin  tragique  se  répandit  dans  son  camp 
et  v  [K)rta  la  douleur  et  la  consternation. 
On  résolut  de  venger  ce  meurtre  détes- 
table. I.es  Portugais  se  joignirent  aux 
Maures  de  Jehabentafuf,  el  massa- 
crèrent un  grand  nombre  d'infidèles. 

JKMOTTK,  JKLVOTE  ou 
(iKLIO  TK  f|*iKRRK\  la  plus  belle 
haute-contre  que  Ton  ait  entendue  à 
l'académie  ro>ale  de  musique,  s'il  faut 
en  croire  les  anciens  amateurs,  naquit 


LWin 


II 


161 


JEL 


dans  le  Béarn,  d'une  famille  obscure, 
vers  1710,  et  fut  d'abord  ciifaiit  de 
chœur  à  Toulouse,  d'où  le  bruit  de  sa 
réputation  le  fit  appeler  à  Paris,  aux 
frais  de  l'administration  de  l'Opéra.  Il 
débuta    sur  ce    théâtre  avec    le   plus 
brillant  succès,  au  mois  d'avril  1733, 
et  fut  aussitôt  en{:;ao;é  aux  appointe- 
ments de  douze  cents  francs.  On  les 
^augmenta  proc;ressivement  jusqu'à  àeu\ 
'mille  cinq  cents  francs,  en  1740,  non 
'CïOTiipris  trois  cents  francs  pour  pain 
et  vin.  En  1741,  on  les  porta  à  trois 
raille  francs,  et  on  y  ajouta  deux  mille 
francs  de  ojratîfication  tant    annuelle 
qu'extraordinaire,  outre  les  trois  cents 
francs  de  pain  et  vin.  Jfeliotte  créa  un 
gramd  nombre  de  rôles,  tels  que  ceux 
de  harchmus,  de  Zoi'oastre,  de  Ti- 
tan, de  (lastor,  dans  des  opéras  com- 
plètement   oubliés  aujourd'hui  ,   mais 
qui  furent  très-suivis  dans  un  temps  où 
l'art  musical,  malgré  le  génie  de  Ra- 
meau, ne  laissait  pas  entrevoir  les  pro- 
grès qu'il  fit  sous  Gluck,   Piccini  et 
Sacchini.   Aucun  acteur,    peut-être, 
n'a  eu  en  France  une  existence  plus 
heureuse    et  plus   honorable  nue  Je- 
liotte.  On  tressaillait  de  joie  ilès  qu'il 
paraissait   sur  la  scène  ;  on  l'écoutait 
avec  l'ivresse  du  plaisir,  et  toujours  les 
applaudissements  marquaient  le  repos 
de  sa  voix  remarquable  par  le  volume, 
la  plénitude  des  sons,  et  par  l'éclat  de 
son  timbre  argentin.  Comme  il  était 
bon  musicien,  et  qu'au  talent  de  chan- 
leur  il  joignait  au  suprême  degré  celui 
<!e  cohiédien  ,  son   état  ne  lui  coûtait 
aucune  peine  et  ne  lui  causa  jamais  de 
'désagréments.  Chéri,  considéré  parmi 
SCS  camaradps  qu'il  traitait  avec  une 
politesse  amicale,  mais  sans  familiarité, 
il  vivait  en  homme  du  monde.  \Jn  es- 
■prit  cultivé,  Mn  caractère  gai,  complai- 
sant, doHX,  simple  et  modeste,  plus  en- 
core que  sa  voix  et  sa  guitare,  le  faisaient 
accueillir,  désirer  partout,  cl  il  n'était 
'déplace  nulle  part.  Quoique  Jéliotte 


JEL 

ne  fut  ni  beau  ni  bien  fait ,  il  s'em- 
bellissait en  chantant,  et  charmait  les 
veux  autant  que  les  oreilles.  Homme  à 
bonnes  fortunes,  il  était  renommé  par 
sa  discrétion;  et,  de  ses  nombreuses  con- 
quêtes,  on   ne  connut  que  celles  qui 
voulurent  s'afGcher.  -Le  premier  usage 
qu'il  fit  d'une  petite  fortune,  fruit  de 
ses  talents,  de  son   économie  et  des 
grâces  de  la  cour,  fut  de  procurer  de 
l'aisance  à  sa  famille.  Il  jouissait  dans 
les  bureaux  des  ministres  d'un  grand 
crédit    qu'il    employait  à  rendre   des 
services   essentiels  à    la  province   où 
il  était  né.  Tous  les  ans,  il  lui   était 
permis  d'y  faire  un  voyage,  et  de  Pa- 
ris à  Pau  son  passage  était  marqué  par 
des  fêtes  continuelles.  Il  avait  à  Tou- 
louse deux  amis  qu'il  préférait  à  tous 
les  autres ,  son  ancien  maître  de  musi- 
que et  le  tailleur  chez  lequel  il  avait 
logé.  La  noblesse,  le  parlement  se  dis- 
putaient le  second  souper  que  Jéliotte 
faisait   à  Toulouse  ;  mais   le  premier 
était  réservé  à  ces  deux  amis.  Le  15 
mars  1755,  il  parut  pour  la  dernière 
fois  sur  le  théâtre  de  l'Opéra.  11  ob- 
tint sa  pension  de  retraite  et  continua 
de  jouer  aux  spectacles  de  la  cour  jus- 
qu'au 9  novembre  1765.   Il  y  avait 
fait  représenter  en  1740,  pour  le  ma- 
riage du  Dauphin,  Topera  de  Zclisca 
dont  la  musique  était  de  sa  composition 
et  les  paroles  de  La  Noue.  De  retour 
dans  son  pays  où  il  jouissait  de  U  plus 
grande  considération,  même  auprès  de 
son  évêque,  il  fit  encore  quelques  voya- 
ges à  Paris,  et  mourut  presque  octogé- 
naire ,  en  1788.  Jéliotte  inspirait  le 
bonheur  dont  il  portait  l'empreinte  sur 
.sa  physionomie,  et  sa  prospérité  qui  ne 
.se  démentit  jamais  fut  à  l'abri  des  traits 
de  l'envie  et  de  la  haine.  Il  a  composé 
la  musicjue  de  beaucoup   de  chansons 
qui  ,    suivant    Laborde  ,  paraissaient 
charmantes  ,  même  quand  elles  étaient 
chaulées    par  d'autres    que  par   lui. 
•    A — T. 


JFN 


JEN 


iG3 


JKMIXA  (MARC.A!«Toi:«r\ 

!•  MÎ*,  n^a  Villa-Nova  , 

f  »  l'an 

«'  ut  du 

l\|.Mi  >.  \r  «  •  !  llc-t  I7'>V.  On  a  Jr  loi 
1rs  oii\r.i}:r"i  siiiNnnts  :  | .  Dr  Jchre  rpi- 
{inriiru,  MoTnlt)\i,  178'),  în-8".  CTr^l 
la  li^Nfription  rl'im'*  >-u't\,  nve  de  ficuc 
|»rfifliiale  qril  rr.  <  ville   ri   la 

)•  ■•■  --  'rMon.ln,  ...  17.S|ftl7Hr>. 
(  .•  a  ^t^  r^lmf»rinié  «lan»  let. 

\  '  clrBma. 

11/  (  irmmm  , 

(fiirr^^ii.r:    iJuujiu  i  vallr 

l'tmfiri  fhrminis  $Htt  :,t  in 

/  :n  17«7,  Moml,Ai,  17H'). 

I  If   tn-^nir  voltiuir,  Jrmina 

ut*  antres  opus- 
«:  I"  Drnir- 
fnmr  sicr  éurhunnitit  hucitfu  ;  2"  Ad 
mrvni  Hr  frhrr  rpiilrmiru  opusruhim 
<if ;-'}(H.t ;  3"  l)f  gangrrnnsis  htm- 
hurum  ufrrrifnis  ;  i**  Dr  mUinrium 
rrssatwnr  vri  sa  lient  rarîtatr.  On 
trouve  l'anal > se  dr  ce^  divers  ouvra;:e^, 
nîn<i  ryin»    la  nntr  de  qiielqne^    m:>nii- 


^i  :  i  Bri\5.\Ri»  baron  PK\ 
nvant  orientaliste,  naquit  en  M'^\  à 
N  icnne,  où  çon  père  ren^li^isail  une 
jlare  dans  les  bureaux  de  la  clianrelle- 

""  • ••^    '"     *^<»  destinant  à  la  rar- 

e,  après  avoir  termine 
—s  (,.,i-  ;  ,1  iii-t(»ire  et  de  philo>op!iie, 
il  étudia  les  lan;;ues  de  l'Or'ent  et  s\ 
rendit  bientôt  très-habile.  Il  fut,  Cfl 
1705,  attaché  comme  serrrtaiie  4 
ranibnssade  d'Autriche  à  G>nst2nli- 
nople;  et  deux  an>  aprè>  il  rfv::it  i 
Temeswar  arec  le  litre  iT 
EnTOvé  siirressivement  d.i  .  -i 

résidences  ,  il  montra  en  plusicars  oc- 
casions des  talents  qui  lui  procurè- 
rent un  avancement  aussi  rapide  qu'ho- 
norable.   Secrétaire   du    cabinet    en 


1770.  il  fut,  on  1772,  accrédilc  pré* 
dr  '  ''  ottomane  comme  chargé 
d  IVmprreiir.  A  son  retour 

i'  Ml  dr<  fioiiliè- 

T'  ,    MMiire  acquise 

1.  Vuiiiilic.  l'.u  177G, 

il  !  '  r  aulique;  rn  1791, 

cnnse  llfr  a  la  chancellerie  intime  ;  «, 
en  17'J8,  directeur  de  la  chancflJerie 
italienne.  Il  mourut  à  Vienne  le  13 
fé%rier  1H(»7.  Des  1772  il  axait  suç- 
tét\i  au  célèbre  Vao-Swieten  daiv^  la 
place  de  con  erratcir  de  la  TV  ' 
nur  impérialr.  (^  fut  JrmM  . 
pnala- 

natrr  i^ 

rvr    :         /      ,       .  .      ^\\  II|  . 

:ifs  I  .  ,.  H,'  .  ••  :  _  ._  t  ane 
curietise  dissertation  :  Ife  /utis  lin- 
ptaritm  orientutium  nimirum  ftrr- 
sirijf  rt  furdcit,  dont  il  existe  des 
exemplaires  tirés  i  part  ,  Vienne, 
1780,  in-lol.  -de  161  pa^;.  On  lui  doit 
encore  :  llisiitria  priorum  rrgum 
Prrsarum  ftost  finuatum  in  rrgnu 
i-'^  ■■!    ri    ytohunietir     Mir- 

t  '  r  rt  Itit.^  riini  iiotis  gru- 

'■iis,  Vienne,  1782, 
^^ll;KH(^^!)  ,X\1\, 
l^.i',  cri  ouvrage  est  date   de   1792 
par  erreur  tvpo^raphique.      AV — s. 

.TFA'Kf.V  ;\Vniu>i\  théolo- 
gien an;;lais,  non  conformihte,  naquit 
en  1(>12,  i  Sndburv  où  son  père  était 
ministre.  Après  a\oir  fait  de  Driilaales 
études  à  Canibrid;;e,  il  reçut  les  or- 
dres et  fui  successivemeot  attaché  à 
plusieurs  églises  comme  prédicateur. 
Il  fut  nommé  en  IGil  ministre  de 
Christ-Qiurch,  dans  New^ate-St.ccl. 
à  Londres,  et  prédicateur  de  Saintc- 
'^nne  L/ark  friars  (les  l'énilcnts 
noirs).  Mais  lor.<qMe  la  révolution  eut 
éclaté,  le  refus  d'obéir  aux  injonctions 
«bi  parlement  lui  coûta  ses  bénéfices; 
et  il  fut  même  plus  tard  enfermé  dans 
la  Tour  ,  comme  .lyanl  trempé  dans  la 
conspiration  de  Love  qui  avait   pour 


i64 


JEN 


but  la  restauration  du  trône.  Cepen- 
dant le  pouvoir  dominant  lui  pardon- 
na ;  il  put  rentrer  dans  son  é;^lise,  et 
ce  fut  précisémeut  celte  restauration 
qu'il  appelait  de  ses  vœux  qui  fut 
inexorable  pour  lui.  Le  refus  de  con- 
formité lui  Gt  de  nouveau  perdre  sa 
position,  et  sa  persistance  à  prêcher 
de  côté  et  d'autre  moliva,  en  1684-, 
son  arrestation.  Détenu  dans  New- 

sate,  il  V  fut  traité  avec  une  f'rande 

•  •'i        II    •  •  •     • 

rio;ueur,  laquelle  jointe  au  mauvais  air 

de  la  prison,  mit  bientôt  son  existence 
en  danger.  Une  pétition,  appuyée  par 
des  certificats  de  médecins  ,  trouva 
Charles  II  sourd  à  la  voix  de  Thuma- 
niîé.  On  ne  put  obtenir  de  lui  que  cette 
réponse  inconcevable,  eu  égard  au  dé- 
vouement antérieur  du  prisonnier  : 
«  Jenkin  restera  en  prison  le  reste  de 
«  sa  vie.  »  Le  malheureux  mourut 
quatre  mois  après  son  incarcération,  le 
lî)  janvier  1G85.  Calamy  rapporte 
qu'un  seifi;neur,  avant  été  informé  de 
cet  événement,  l'annonça  au  roi  en 
ces  termes  :  «  N'en  déplaise  à  votre 
««  majesté,  Jenkin  vient  de  redcvemr 
«  libre.»  —  «  Et  qui  lui  a  donné  la 
*t  liberté  '.'  »  demanda  Charles  — 
«  Quelqu'un  qui  est  plus  o;rand  que 
«  votre  .majesté  ,  le  Hoi  des  lloisl  » 
reprit  l'homme  de  cour  qui  ne  faisait 
pas  sa  cour  en  ce  moment.  Cliarlcf  II, 
ajoute  Calamv,  parut  frappé  de  cette 
réponse  et  {:;arda  le  silence.  Le  défunt 
fut  enterré  avec  une  grande  pompe,  et 
«n  1715  un  monument  lut  élevé  à  sa 
mémoire.  William  Jenkin  a  publié 
quelque^  érrits  de  controverse  ,  des 
sern:ons,  et  une  Exposition  de  fK- 
pitre  de  Jude,  2  vol.  lu-ï"  et  in-fol., 
ouvrage  qui  a  conser\é  de  la  répu- 
tation. L. 

JKXKI\  (RoiîKRt),  théologien 
anglais,  né  en  lG'>f>  à  Minstor  dans 
l'île  de  Thanet.  fut  princi[ial  du  col- 
lège de  Saint -Jean  à  Cambridge,  pro- 
h— fpi    de  théologie  ,    chapoiniu    (!u 


JEN 

docteur  Lake ,  évêque  de  Chichester, 
et  précenteur  de  cette  église.  Il  perdit 
ces  bénéfices  à  la  révohition  de  1(>88 
comme  réfractaire  au  serment,  et  riiou- 
rut  dans  un  état  d'imbécillité  ,  en 
1727,  âgé  de  soixante-dix  ans.  On  a 
de  lui  plusieurs  ouvrages  qui  furent 
bien  accueillis  du  public,  entre  autres  : 

I.  Examen  liistoi-ique  de  V autorité 
des  conciles  généraux,  1688,  in-4°. 

II.  Defensio  Sancti  yiugustini  ad- 
' versus  Jo.  Phcrepununi,   1707,  in- 

8".  111.  Une  traduction  anglaise  de 
la  Vie  d'Apollonius  de  Tyane,  du 
français  de  Tillemont,  1702,  in-8". 
IV.  Remarques  sur  quatre  livres 
récemment  publiés,  savoir  :  V  His- 
toire des  Juifs  de  lîasnage  ;  huit 
sermons  de  AV  histon  ;  la  Paraphra- 
se et  les  notes  de  Loke  sur  les  Epi- 
ires  de  saint  Paul,  et  la  Bibliothèque 
choisie  de  Leclcrc.  V.  V  excellence 
(leasonablcncss)  et  ta  certitude  de 
la  religion  chrétienne,  ouvrage  dont 
il  parut  en  1721  une  cinquième  édi- 
tion corrigée.  S — D. 

JEXKIXSOX.  Voy.  Liyer- 
pooL,  XXIV,  576,  etauSuppl. 

♦ÎEXKS  (1jKiNJ\:\iin),  théologien 
anglais,  né  en  lGi6  d'une  ancienne 
lauîille  du  Shropshire  ,  fut  recteur 
d'Ilarlay  et  de  Kcnley  dans  celte  pro- 
vince, et  (^apelain  du  comte  de  lirad- 
ford.  11  est  auteur  de  quelques  ouvra- 
ges dont  le  plus  connu  e.  t  intitulé  : 
Prières  et  ofjices  de  dévotion^  dédié 
à  Williams  ,  évoque  de  Chichester  , 
avec  lequel  Jenks  avait  un  degré  de 
parenté  ;  ce  livre  a  eu  un  grand  nombre 
d'éditions,  la  27'',  en  1810,  retouchée 
par  le  révérend  (jli.  Siméon.  On  cite 
de  lui  des  Méditations  sur  dioers 
sujets  importants  ,  reproduites  en 
1756,  2  volumes  in-8",  avec  une  pré- 
face de  J.  Hervey.  Une  de  ces  mé- 
ditations roule  sur  son  cercueil  qu'il 
avait  préparé  ,  qu'il  tint  près  ilc  lui 
(tendant  plusieurs  années,  et  dans  le- 


JEN 

(lucl  il  atait  pbré  deux  crâne»,  dont 
1  uu   ^ait  celui  iriiii   de  »es  prorlir>. 
JriiLs  e>t  mori  a  Ilarla>  en  \  i'2\.  !.. 
JK\kS    (>>iiNfSTnK),    naquit 
tlan%   le  Srliopsliire.    A|»rrs  avoir  fait 
&nn  cour»  il'etuJrs  r\  pr(ifr«.<r  |irn(laiit 
MX  ans  la  philosopliir  dan»  le  rollr;;e 
anglais  lie   Doiu;  ,  il   (ut  renvoyé  rn 
Angleterre  comme  missionnaire,  et  en 
eierra  le«  fonctions  avec  beaucoup  de 
iucces  ihns  le  comté  de  NNotce^ler. 
l/e  roi  .lacnue>  II,  in^tiuit  de  »es  ta- 
lents |>our  la  prédication  ,  l'appela  i 
Londre>,  et  lui  dni;iia  le  titre  de  son 
prédicateur.   Lors  de  la  révolution  qui 
«envers  ce  prince  lii  trône,  il  le  sui- 
vit sur  le  continent.  pJlsa  le  rc'te  de 
va  %ie,   partie  en    Flandre,    pat  lie  en 
An;;letene,  et    mourut  a   l^ndies  en 
171*).  Doué  d'une  conception   facile, 
d'un  esprit  net,  Jrnks  avait  une  con- 
versation a^realile,    et   qui    le  tendait 
inteiessant  dans  la  société.    Il  joi|;nait 
i  ces  qualités  un  (;rand  fonds  de  re- 
ligion qui    lui    attira   le  respect  et   la 
confiance  de  tous  se*  compatriotes  ca- 
tholiques ;    ils  lui   en  donnèrent    lies 
preu\es  non    équivoques   en     170:l  , 
en    le    pri>po>^anl    pour  être   éle>é    à 
l'episcopat    et    pour    remplir  le>  fonc- 
tions de  vicaire  apostolique  en  An;;le- 
lerre.    Mais,    malj^té  les  soUicitalioiis 
de  rinternoncc   de   Bruxelles,    qui  le 
pressait    de    se   rcmlie   aux    vtrux   de 
ceux  qui  le  (lemanJaienl  pour  leur  pre- 
mier  pasteur,    il  s'y    refusa   constam- 
ment par  liumilité.  Ses  ouvra;;e$  rou- 
lent  presque  tous  sur   de*    sujets  de 
morale,  et   attestent  combien  il  était 
occupé  des  devoirs   de  son  état  :    1. 
fermons,  iiiS^.  \\.  Lrftrrs ou  Trat- 
iè  concernant  U  cuncilr  dr  Trrntr. 
III.  Obéissance  Oifeugle  d'un  hum- 
ble   pénitent  ,    comme   le   meilleur 
remède  contre  les  scrupules,  1G90, 
in-12.    ï\  .    Sécurité   d'un   humble 
pénitent,  en  ferme  de  lettre  adres- 
sée a  H.  S.,   1700,   in-12.  V    Le 


JEN 


i60 


raur  humble  et  contrit,  twec  le  y 
mttiifs  et  les  cwisidérations  propres 
ùle/itrmer,  lti«JH,  iu-12.  V|.  Jous 
les  dexHjirs  du  chrétien  ,  en  troi.s 
parties,  1707,  in  IJ  C'est  un  fidèle 
jkr^è  du  (  Jitéclitsmr  du  concile  de 
Trente.  V||.  Essai  sur  C amour  de 
Dieu  VIII.  Abref^é  du  précédent 
ou^ra^e.  I\.  (.ourte  atuilyse  du 
lii're  de  Jansenius.  1710,  inliî.  \. 
Distours  sur  la  soumission  u  la 
pttissanre  dii'ine  .  manuscrit.  T — I». 
•IKWKli  (Cm AiiLKs). littérateur 
ançlai<»,  né  en  1737,  fil  «es  Téludcs 
dans  l'ani^ersité  de  (Iarohrid;;e,  et 
obtint  en  1767  et  fi'J  ,  les  pri\  fondé) 
p.ir  Sealon.  Il  fut  depuis  recteur  de 
qiiri'].ies  pami^ses  en  di(Terent>  comtes. 
el  mourut  en  1771.  I^s  ouvraj;es  qu'il 
a  jiroduits  en  plusieurs  ;;enres,  tant  en 
prose  qu'en  vers ,  n'ont  pas  eu  un 
j;rand  succès,  et  ne  sont  plus  ;;uère  lus 
aujourd'hui.  Ce  sont  :  l.ouisa,  conte, 
poésie,  in-V,  le  Ihm  des  langues, 
poème  ;  la  Destruction  de  A  intime  ; 
des  Eglogues  urbaines  ^Town  eclo- 
Ruesl  ;  lettres  de  Jxtthario  it  Péné- 
lope.  2  vol.;  quelques  comédies,  etc. 

JFWKR   (F.iM)rAr\t»\  médecin 
an;;lais,  qui  a  allaclir  ;:lor  icii^cmnil  :>oii 
nom  à  la  découverte  et  à  \\  propn;;atioii 
de  la  vaccine,  naquit  le   17  mail  7  i9, 
■».  PeUlev,  comte  de<ilore.ster.  Il  était 
fort  jeune  lorsqu'il    perdit   son  pèie  , 
mail:e-ès-arts  de  l'uniAersitc  d'Oxford, 
lecteur  de  UocLhamplon  et  vicaire  de 
Ilerle!e\  ;  mais  les  soins  affectueux  de 
Jean  .lenner,  son  frère  aîné,  adouci- 
rent le  malliem  de  celte  perte.   Apiès 
avoir  terminé  sa  première   éducation 
xCirce.-ter,  Kdouard  fut  mi«;  entre  les 
mains  ile  Daniel    Kudlow,    chirurgien 
distingué  à  Sudburv,  qui  lui  servit   de 
maître  j'ispjn'en    1770.    C'est   là  qu'il 
fut  atteint  d'une   affection  hypochon- 
drianuc,  d'où    résulta    une  susceptibi- 
lité morbifique  qu'il  conserva  toute  sa 


i66 


JEN 


JEN 


vie.  A  celte  époque  (1770),  il  vint 
demeurer  à  Londres  chez  le  célèbre 
Jean  Ilunter  qui,  frappé  des  iieureu- 
ses  dispositions  de  son  élève,  Tassocia 
bientôt  à  ses  travaux.  Les  progiès 
qu'il  fit  sous  cet  h.ihile  maître,  psrt%- 
culièrement  dans  l'étude  de  l'anatomie 
comparée,  lui  valurent  la  proposition 
d'accompap;ner  le  capitaine  Cook  dans 
son  premier  voyao;e  autour  du  monde, 
mais  Jenner  refusa  les  conditions  avan- 
tat^euses  qui  lui  furent  offertes.  Un  peu 
plus  tard  il  refusa  én;alement  une  place 
lucrative  dans  l'Iude,  par  attachement 
pour  son  frère  et  pour  son  pays  natal. 
Après  être  resté  chez  Hunter  deux  an- 
nées environ  ,  Jenner  alla  s'établir  à 
Berkclev,  pour  y  pratiquer  la  chirur- 
gie. C'est  là  que,  malo;ré  les  devoirs 
pénibles  de  sa  profession,  il  trouvait 
encore  le  temps  de  cultiver  l'étude  de 
la  ph)sioloo;ie  et  de  l'histoire  naturelle. 
11  est  parvenu  spécialement  à  éclaircir, 
par  des  observations  exactes  et  variées, 
un  point  d'ornithologie,  jusque-là  très- 
obscur  pour  la  plupart  des  naturalistes. 
Ce  point  est  relatif  aux  mœurs  du  cou- 
cou, à  la  ponte  de  la  femelle  dans  le 
nid  d'autres  oiseaux  ,  et  au  moyen 
qu'emploie  le  petit  à  peine  éclos  pour 
expulser,  du  nid  où  il  a  élé  couvé,  les 
œufs  ou  les  autres  petits  oiseaux,  et 
usurper  ainsi  non-seulement  leur  de- 
meure, mais  encore  la  tendresse  de 
leur  mèie.  Voici  comment  Jenner  ex- 
plique la  manière  très-remarquable 
dont  s'y  prend  l'usurpateur:  «  Le 
«  jeune  coucou,  peu  d'heures  après 
"  sa  naissance  ,  en  s'aidant  de  son 
•  croupion  et  de  ses  ailes,  tache  de  se 
«  glisser  sous  le  petit  oiseau  dont  il 
«  partage  le  berceau,  et  de  le  placer 
«  sur  son  dos,  où  il  le  retient  en  éle- 
«  vant  ses  ailes.  Alors  se  traînant  à 
«  reculons  jusqu'au  bord  élevé  du  nid, 
<f  il  se  repose  un  instant  ;  puis,  faisant 
«  un  eflbit,  il  jette  sa  charj;e  hors  du 
"   nid,  et  îate  ensuite  avec  l'extrémilc 


«  de  ses  ailes,  comme  pour  se  con- 
«  vaincre  du  succès  de  son  entreprise. 
«  Quelquefois  en  grimpant  sur  les 
«  bords  du  nid,  il  y  laisse  rçtomber 
«  sa  charge;  mais  bientôt  il  rccom- 
«  nience  son  travail,  et  ne  le  disconti- 
«  nue  que  lorsqu'il  en  est  venu  com- 
«  plètement  à  bout.  On  est  surpris  de 
«  voir  les  efforts  réitérés  d'un  coucou 
«  de  deux  ou  trois  jours  ,  lorsqu'on 
«  met  à  coté  de  lui  un  petit  oiseau 
«  déjà  trop  lourd  pour  qu'il  puisse  le 
«  soulever.  11  est  alors  dans  une  agita- 
it tion  continuelle  et  ne  cesse  de  tra- 
it vailler.  Mais  quand  il  approche  du 
«  douzième  jou»  de  sa  naissance ,  il 
«  perd  le  désii-  de  jeter  ses  compa- 
«  gnons  hors  du  nid,  et  ne  les  y.in- 
«  quiète  plus.  La  configuration  part- 
it ticulière  du  jeune  coucou  est  très- 
«  propre  à  lui  faire  exécuter  cette  ex- 
«  pulsion.  Différente  de  celle  des 
«  autres  oiseaux ,  la  partie  supérieure 
«  de  son  corps,  depuis  la  nuque  jas- 
«  qu'au  croupion,  est  très-large,  et 
«  on  aperçoit  dans  son  milieu  une 
«  dépression  considérable  :  il  semble 
«  que  cet  enfoncement  soit  fait  pour 
«  placer  plus  sûrement  les  œufs  ou 
((  les  pelits  oiseaux  que  le  coucou  veut 
«  rejeter  ;  car  dès  que  le  jeune  oi- 
«  seau  a  atteint  à  peu  près  son  dou- 
«  zième  jour,  cette  cavité  est  entière- 
«  ment  effacée  ,  et  son  dos  ne  diffère 
«  en  aucune  manière  de  celui  des  au- 
«  très  oiseaux.  L'obligation  qu'a  le 
<«  jeune  coucou  de  rejeter  les  œufs  ou 
«  les  petits  oiseaux  de  leur  nid  corn- 
et mun,  rend  raison  du  soin  que  la 
<t  femelle  de  cetle  espèce  prend  de 
«  pondre  dans  les  nids  d'oiseaux  À% 
't  petite  taille  »  (()hseroatiorts  sur 
r histoire  twturelh  du  coucou ,  extrait 
des  Transaclioiis  philosophiques  de 
Londres^  année  1788).  Ces  nouvelles 
et  intéressantes  recherches  excitèrent 
Taltention  des  naturalistes,  et  valurent 
à  Jenner  l'honneur  d'être  reçu  raem- 


JEN 


JI.N 


hre  (Je  la     >  jle  »!<    I^mlri-  . 

liifll  qu'il  ••  pMfil    «If   rlt:- 

fii  I'. 

|.|U>I.M  , 

pour  obienir  du  l.ulir  iiuciique  |;ur. 
Il  patajl  auNM  aMur  ilccou\ril,  ai  l'un 
en  croil  le  docteur  rarr>,  dr  1\mU,  U 
rausc  de  l'an^riif  de  puiliiiie,  quoi- 
qu'on attribue  tommun^mriit  relie 
roiina;<isanre  an  docteur  llebndcu. 
^i.l:^  rp  qui  détail  iinuiurlalisri  le  nom 
de  .irnner,   re  »•  .<  rs  ri 

le*  ol>«er\aiion.s  ;  >-«  li- 

>ter  a>rc  uiir  j.  . 
pour  rLililii  d  une  m 
ble  la  pro|»iir[r  li  <  . 
nne.  .\\anl  nr.iuiiio  ! 
de  gloire  qm  lui  retient  a  lorc^ion 
de  cette  dccou\erte,  il  n'est  pa»  liois 
de  propos  d'en  tracer  rbi>tori(|ue  , 
et  pour  cela  nous  ne  pouTouA  micui 
faire  que  d'emprunter  à  M.  le  docteur 
llu»5on  une  partie  de  l'etrelleut  aili- 
c\e  iHirnnr .  \ni\Att  dans  le  Uiciiun- 
nnire  tirs  siien'  rs  mrtJùuIts,  timie 
I.NI.On  \ienl  de  derouMir  lh21  , 
dans  le  SiituU\a granlliuiit,  ouna^e 
aij>fnl  Im-amii-n  ,  atudiue  a  l)liaii- 
>aiitaii,  des  preu%e&  que  linocuLlion 
de  la  \accine  était  connue  des  auteuis 
induus,  qui,  dans  le>  temps  reculi-a, 
ont  écrit  sur  la  médecine.  L'auteur 
décrit  neuf  espèces  de  petites  ^croies, 
dont  \\  reconnaît  aue  trois  sont  iucù< 
râbles.  11  indique  les  relies  siii\ante$ 
a  observer  pour  l'inncuialion  ;  «  l're- 
«  nrz  le  lluide  du  bouton  du  pi>  d'une 
«  vaclieou  du  bra'.d'un  liomnie  entre 
«  1  épaule  et  le  coude  jusqu'à  ce  que 
•«  le  sans»  paraisse,  b*  lluide  >e  inél.int 
«  avec  le  sanu,  il  en  rtsiiUeia  la  lj«\re 
«  de  la  petite \érole.  Cx-iie  ci,  produite 
«  par  le  iluide  tiré  du  boulon  du  pi^ 
«  de  la  \arhc,  sera  aiis.si  be tii^nc  nue 
N  la  maladie  naturelle.  Elle  ne  doit 
«  pas  occasionner  J* alarmes,  cta^exi- 
«  géra  pas  de  traitement  médical.  Le 
«   malade  suivra  la  diète  qui  lui  con- 


«  «iendra  .  il  pourra  «Uie  inoculé  urit 
'<  fefilr  f.'s,  (i!j  driiï,  trois,  quatiC» 
i.«*  bouton,  pour  elle 
c  tl  une  bonne  cou- 
•  leur,  rempli  d'un  liquide  clair  el 
•«  eulourc  d'un  cercle  iuU|;e:  oa  n^ 
H  doit  ua5  aaindre  alors  d'clic  alla- 
•■  que  (M  U  petite  \erole  pendant  tout 
«  jeie>ledesa  >ic.  Quand  l'niuculao 
«   tiou  a  lieu  par  le    l!     '  '    t  du 

m  boulon  du  pi>  d  une  i^iica 

••    pcrsonue*  ont  I  ^iiiprii- 

••    dani  deiit  nu    :  et  qurl- 

acco  de 
.Kcom- 
au& 
-  de 
»    la  pcl  Ile  \  noie,  mais  dune  nature 
*.    tie3-beiii^ne.  Il    U)  a  aucuQ  dan- 
a   ^cr,   et  le  tout  disparaît    en  Iroi* 
••   jours.    »  Ce»  piécieux  détails  sonl 
conliiniés  par  d'autres,  <|ui  oui  ctë  re- 
çu i  i  lus  rapprocbée 
di  '•>.    Le    nabab 
M  .   eu 
1.                                                        c  de 

(ii.aX.p.iUt   ,     d.4l.ll     lie     Lciiu.i.,     Gl 

vriir  un  brauiiiie  iiomnie  Vlrp-(  )iob>, 
qui  s  occupait  pliu  pari  l  de 

cette  maladie.  Arrivé  u-  '  |Our 

dererupltoB,  ce  bramine  t('iuui;;ua  le 
re^rel  de  n'avovr  pas  de  appelé  plus 
lui,  et  ajouta  qu'il  eut  pu  la  pie\eoir  : 
«  .le  (^arde,  dit -il,  un  lit  trempé  -dans 
••  la  matière  qui  découle  de  la  pu^lule 
«  de  la  vaciic,  et  ce  dl  me  donne  le 
•<  nioMo  de  piocuier  à  volonté  une 
M  éruption  lacile:  je  pa.'se  dans  une 
<'  aiguille  le  Ijl  iniprr^^iié,  que  j'insiuue 
«  entre  l'e^-îderme  el  la  cliair  de  Teu- 
«  faut  dan.i  la  pai  iiesupei  ieure  du  bias 
«  ou  je  le  laisse.  Ce  til  procure  tou- 
"  jours  une  éruption  facile;  il  ne  sort 
M  qu'un  ti  €>-pclil  nombi  e  de  puilules, 
«  et  jamais  aucun  eiifaul  ne  lueurt  de 
-  celte  maladie.  »  \.ti  A  mut  Us  déchût 
mie  el  de  physit^'te  (lom.  X,  mai* 
1819  ^     conlienuenl    une  lettre     de 


i68 


JEN 


M.  W.  Bruce,  consul  à  Bushire , 
adressée  à  M.  W.  Erskine,  de  Bom- 
bay, au  sujet  de  la  vaccine,  et  conçue 
en  ces  termes  :  «  Dans  mon  dernier 
«  voyage  à  Bombay,  je  vous  annonçai 
«  que  la  vaccine  (the  roiv-pov)  était 
«  connue  en  Perse  parmi  la  tribu  no- 
«  made  des  Eliaats;  depuis  mon  re- 
«  tour  à  Bushire,  j'ai  pris  à  ce  sujet 
«  les  plus  exactes  informations  auprès 
«  des  individus  de  cette  peuplade  qui 
"  y  viennent  l'hiver  pour  vendre  de 
«  la  laine  ,  des  tapis  ,  du  beurre  ,  du 
«  fromage,  etc.  Les  troupeaux,  dans 
«  celle  saison,  descendent  des  monla- 
«  gnes,  comme  vous  savez,  et  se  réj»an- 
«<  dent  dans  le  pays  plat  Tous  les 
«  Eliaats  auxquels  je  me  suis  adressé, 
«  quoiqu'ils  appartinssent  à  sept  ou 
«  huit  tribus  différentes,  m'ont,  d'un 
«  commun  accord  ,  assuré  que  ceux 
«  d'entre  eux  qui  sont  employés  à 
«'  trai'-e  les  troupeaux  gagnent  une 
«  maladie  qui  les  préserve  parfaile- 
«<  ment  de  la  petite  vérole  :  ils  ajou- 
«  taient  que  cette  maladie  régne  par- 
«  mi  les  vaches,  et  a  principalement 
«  son  siège  sur  les  pis  ;  mais  que  les 
«  brebis  y  étaient  encore  plus  sujettes, 
«  et  que  c'était  d'elles  surtout  que  les 
•<  beigers  la  prenaient.  Ce  fait  ,  je 
«  pense,  n'était  pas  connu  jusqu'ici. 
«  Je  ne  conserve  toutefois  aucun  doi'te 
•«  sur  son  exactitude  :  car  il  m'a  été 
"  assuré  par  quarante  ou  cinquante 
«'  personnes  diiï/'renles,  et  il  faut  re- 
<'  marquer  qu'elles  n'avaient  aucun 
««  intérêt  à  me  tromper.  Tour  être 
**  plus  certain  encore,  s'il  était  pos- 
<'  sible,  je  m'adressai  à  uu  feimier 
«  très-respectable,  nommé  iMalalla, 
«  dont  la  dcmeuie  est  à  quatorze  milles 
«  d'ici,  et  qui  m'a  quelcpies  obliga- 
*t  tiens.  Cet  individu  confirma  non- 
«'  seulement  tout  ce  que  j'avais  appris 
«  àe.a  FJiaats  ,  mais  il  ajouta  (pie  la 
"  maladie  est  fort  commune  dans  le 
"    pays  qu'il  habite,  et  que  ses  propres 


JEN 

M  brebis  l'ont  très-souvent.  »  Le  pas- 
sage suivant,  tiré  de  V Essai  politique 
sur  le  royaume  de  la  Nouvelle-  Espa- 
gne,\>u  M.  de  Ilumboldt,  montre  que 
les  habitantsdelaCordillière  des  Andes 
avaient  aussi  remarqué  l'eflet  préserva- 
tif du  vaccin  :  «  On  avait  inoculé  (en 
«  1802)  la  petite  vérole  dans  la  mai- 
«  son  du  marquis  de  Valleumbroso  à 
«  un  nègre  esclave;  il  n'eut  aucun 
«  symptôme  de  la  maladie.  On  vou- 
«  lut  répéter  l'opération  ,  lorsque  le 
«'  jeune  homme  déclara  qu'il  était 
«  bien  sûr  de  ne  jamais  avoir  la  pe- 
«  tite  vérole,  parce  que,  en  trayant 
«  les  vaches  dans  la  Cordillière  des 
«  Andes,  il  avait  eu  une  sorte  d'érup- 
«  tion  cutanée,  causée,  au  due  d'an- 
«  cicns  patres  indiens  ,  par  le  con- 
«  tact- de  certains  tubercules  que  l'on 
«  trouve  quelquefois  aux  pis  des  va- 
«  ches.  Ceux  qui  ont  eu  cette  éruption, 
<f  disait  le  nègre,  n'ont  jamais  la  pe- 
«<  tite  vérole.  »  A  ces  documents  nous 
pouvons  ajouter  d'autres  faits  qui  ne 
nous  paraissent  pas  moins  importants, 
et  qui  prouvent  que  la  vaccine  était  con- 
nue et  propagée  long-temps  avant  les 
premières  expériences  de  .ienncr.  11 
est  certain  que  dans  différentes  parties 
du  Devonshire ,  du  Sommerset  ,  du 
Leice.stershire  ,  du  Slaffordshire,  du 
Midlesex  ,  on  sait  par  une  tradition, 
dont  il  est  impossible  de  fixer  l'origine, 
que  les  individus  qui,  en  trayant  des 
vaches ,  contractent  des  pustules  aux 
mains,  sont,  par  la  suite,  exempts  de  la 
petite  vérole.  La  même  opinion  existe 
dans  la  Carinthie  ,  le  Holstein,  le 
Mecklembourg  et  aux  environs  de  Ber- 
lin. Le  chirurgien  Fewster,  de  Thor- 
nebury,  et  le  docteur  Sulton,  célèbre 
inoculalcur  de  la  variole,  trouvèrent , 
en  17()8,  un  grand  nombre  de  paysans 
auxquels  ils  iiioculèrent  la  petite  vérole, 
.sans  pouvoir  la  leur  faire  contracter. 
Ces  paysans  les  assurèrent  que  celle 
résistance    à    la  contagion  provenait 


Ae  ce  qn'iU  avairni  ru  la  rarcine.  Lr* 
«Ifu»  pralinriis  firriit  alors  de."»  irclirr- 
rlir>  ri  ronslalrreiil  la  |u»lr.v&c(le  rrllc 
oli-«r\ Jlion  Krwiler  en  parla  inrinr 
Jjri>  une  «ociHé  nirdicale  lioni  il  riait 
locnibre;  mai* re  premier  aperçu  tomba 
roRipIrleroent  tians  l'oubli.  Il  parait 
que  c'est  en  France  ,  clan»  l'annre 
1781 ,  que  l'idée  prrmirre  de  la  possi- 
bilité du  transport  d'une  éruption  i\f 
la  \arlie  sur  l'honme  a  eu  lieu;  que 
crtir  idri".  rmisr  par  un  Kr.i'i  i 

un  mrdrriii  anglais,  a  rir  r«i  <• 

par  rr  drrnirr  au  docirur  Jriii.ri ,  qui 
ensiiitr,  appliquant  toute  »on  attention 
a  re  fait ,  aurait  ronsulte  les  traditions 
populaires  du  pa>5  ou  il  exerçait  la 
nieilrnne,  et  aurait  appris  que  depuis 
lon;;-temp»  on  v  coniiuissait  cette  pro- 
priété qu'avait  la  maladie  de  la  >ache 
non-seulement  de  se  communiquer  a 
l'homme,  mais  encore  de  le  préserver 
de  la  petite  \rrole.  C^  fut  Qiaptal  , 
aiois  ministre  de  l'intérieur,  qui  trans- 
mit an  comité  central  de  \accine,  établi 
à  Paris,  les  faits  suivants  qui  ne  lais- 
sent aucune  espèce  de  doute  sur  l'on- 
;;ine  vraiment  française  de  la  vaccine, 
et  méritent  consrqunumrnt  d'rtie  lap- 
f>ortes  avec  tideitle.  llabaut-l'ommirr, 
ministre  protestant  à  Montpellier  a\ant 
la  révolution  de  17h9,  fiappe  de  ce 
que  ,  dans  le  Midi  .  ou  confondait, 
sous  \t  nom  i\e  f/iruttr ,  la  petite  vé- 
role de  l'homme  et  le  claveau  des  mou- 
tons, en  demandait  un  jour  la  laison 
à  unajiriculteur  des  environs  de  Mont- 
pellier: celui-ci  répondit  que  cette  ^Z- 
lotfr  atteignait  aussi  le  lra>on  des  va- 
«iics,  et  il  ajouta  que  le  cas  était  rare,  et 
la  maladie lres-beni|;ne.  Acetteépoque 
(1781),  il  y  avait  à  Montpellier  un 
riche  négociant  de  Biiklol,  nomme  Ir- 
laiiii  ,  qui,  dt'puis  plusieurs  anne.s  , 
venait  passer  Thivcr  dans  cette  ville 
a\ec  un  moiloiiri  anglais,  le  docteur 
Vcv,.  Kabaut-Pornmier  s'était  intime- 
ment lié  avec  ces   deux  messieurs:  un 


Jlî^ 


»09 


joarqiie  la  conversation  roulait  sur  Tr- 
noculation,  il  leur  lit  observer  qti'iV 
serai/  prolnélilmuiit  tumititiifux  d'i- 
iHMuUr  a  l  huiuntf  lu  fjicutte  drs 
Viuhes  ,  iMine  tfu'elti-  rtail  cun- 
stuniment  sans  Jutifirr.  On  disserta 
lon;;ueroeiit  sur  cet  ub|rt,  et  le  docteur 
Vt%  j;outa  que.  •  il6t  ijn*  '  .  ■  .<  i  ùc  re- 
tour en  .\n;;icterrc,  il  proposerait  ce 
nouveau  ;;enrT  d  inoculation  à  Min  ami 
le  docteur  Jeûner.  I)iv-liuil  au» après, 
c'est-a-diie  en  17l>9,  Uabaul  enten- 
dant parler  de  la  derouvrite  de  la  vac- 
cine crut  voir  realiri  va  prévision, 
et  écrivit  à  M.  Iiland  pour  lui  rappe- 
ler leur  C(>nversation  a  ce  sujet,  i^liii- 
ci  répondit  par  deu\  lettre>  ,  doiit 
Chaplal  lut  l'orij^inat  :  i|u'il  se  soute- 
nait fort  bien  de  tout  ce  qui  avait  été 
dit  à  Montpellier,  ainsi  que  de  la  pro- 
messe de  M.  lVv«  d'en  parler  au  doc- 
teur Jenner  ,  mais  qnM  ignorait  ce 
qu'avait  pu  faire  M.  l'e«  à  ton  retour. 
Tous  ces  détails  ont  été  raconi«->  plu- 
S4euis  fois  a  diverse^  personnes  p.ii 
Habaut-l'oraniier,  qui  a1ou|ouis  eu  la 
modestie  de  ne  pas  revendiquer  l'idée 
première  de  la  decouveite.  rcimiiiuiiN 
cette  esquik.se  historique  en  coiicliiai.l 
avec  M.  Ilu.sson  ••  que  la  vaccine  elail 
"  connue  avant  que  Jenner  s'en  fiil 
«  sérieusement  occupe,  et  que,  saus 
•«  lien  ôter  au  mérite  du  dorleur  au- 
"  ^lais  ,  qui  a  étudié ,  approfondi  , 
«  e&périmenté  et  fait  conn;titie  tout 
•<  ce  qui  est  relatif  à  la  vaccine,  notie 
«  patrie  peut  réclamer  sa  part  dans 
•«  cette  heureuse  invention  ,  qu'elle 
«  doit  en  revendiquer  l'idce  rucre  el 
«  pieroière;  cl  que  les  Anglais  qui 
«  ont  enlevé  à  t'ascal  sa  presse  hy- 
«  draulique,  à  Dalesme  sa  pompe  à 
«  feu,  à  Lebon  son  tliermoLnipe,  à 
u  Montalcrnbeit  ses  afliîts  de  ruanne, 
M  à  (iuvton-Morveau  .ses  moyens  de 
.<  désinfection,  à  Curaudoau  .sa  théorie 
««  du  chlore,  au  chevalier  l'aulel  sa 
-    méthode    d'ensei^inement    mutuel , 


170 


JEN 


«  qu'ils  ont  appelée  méthode  à  la  Lau- 
«  castre,  se  sont  é>^alement  approprié 
«  tout  le  mérite  d'une  découverte 
«  dont  la  première  pensée  leur  a  été 
«<  donnée  par  un  Français,  et  dont 
«  l'élude  et  la  juste  appréciation  ont 
<c  été,  même  de  leur  aveu,  plus  rlgou- 
<(  reusement  suivies  parmi  nous  que 
«  parmi  eux.  »  On  pourrait  ajouter 
qu'ils  ont  aussi  voulu  enlever  à  Papiu 
sa  machine  à  vapeur  aqueuse  et  à  pis- 
ton, et  tout  récemment  à  Dao;uerre  son 
intéressante  découverte.  Mais  suivons 
les  travaux  de  Jenner.  Il  avait  observé 
que,  dans  les  (i^randes  inoculations  de 
variole  que  l'on  pratiquait  alors  en 
Anolelerre  à  certaines  époques  de  l'an- 
née, plusieurs  individus  lésistaient  à 
l'infection  varlollque.  Il  interrogea  ces 
individus,  consulta  les  gros  proprié- 
taires, et,  après  avoir  rassemblé  les  tra- 
ditions populaires  du  canton,  il  fut 
naturellement  conduit  à  étudier  un 
phénomène  aussi  nouveau.  Il  trouva 
que  les  sujets  réfractaires  à  1  inocula- 
tion étaient  pour  la  plupart  occupés 
dans  les  laiteries  et  qu'ils  avalent  con- 
tractédesboutons  aux  mains,  en  trayant 
les  vaches  dont  le  pis  présentait  une 
éruption  connue  sous  le  nom  de  coiv- 
pox,  fréquente  surtout  parmi  celles 
qui  habitaient  des  pâturages  humides. 
Ensuite,  voulant  remonter  à  l'origine 
de  cette  maladie ,  il  fit  de  nouvelles 
recherches,  et  il  acquit  la  certitude 
qu'elle  était  produite  par  la  matière  qui 
suinte  des  talons  des  chevaux  attaqués 
des  eaux  aux  jambes  [greiise)^  laquelle 
matière  portée  par  les  garçons  de  fer- 
me sur  les  trayons  des  vaches,  était 
ainsi  inoculée  à  ces  dernières,  et  leur 
donnait  le  rotv-^o.u;  que,  de  plus,  si  les 
personnes  chargées  de  les  traire  n'a- 
valent pas  eu  la  variole,  et  si  elles  por- 
taient des  excoriatiops  aux  mains,  elles 
contractaient  des  vaches  la  maladie 
(jiie,  pour  celle  raison,  il  nomma  7v/- 
riolœ  vnccinœ.  Après  avoir  poursuivi 


JEN 

en  silence  pendant  plusieurs  années, 
c'est-à-dire  depuis  1792,  ses  observa- 
tions sur  Telfet  anti-variollque  de  la 
vaccine,  Jenner  pensa  que  l'on  pou- 
vait propager  celle-ci,  en  la  transmet- 
tant de  la  vache  à  l'homme,  puis  d'un 
homme  à  un  autre,  suivant  le  procédé 
de  l'inoculation  varlollque.  Ses  tentati- 
ves, commencées  le  14  mai  1796,  fu- 
rent suivies  de  succès,  et  c'est  ainsi 
qu'il  parvint,  deux  ans  plus  tard,  à 
substituer  pour  toujours  à  la  plus  af- 
freuse maladie  une  éruption  bornée  à 
quelques  boutons.  Dans  le  premier  ou- 
vrage qu'il  publia  sur  ce  sujet  (1798), 
il  donne  les  détails  de  toutes  les  expé- 
riences auxquelles  il  se  livra  pour  s'as- 
surer positivement  de  la  propriété  inhé- 
rente à  ta  vaccine  de  préserver  de  l'in- 
fection de  la  variole,  et  il  ajoute  avec 
satisfaction  que  ses  observations  furent 
confirmées  par  le  témoignage  concor- 
dant de  M.  Dolland,  chirurgien,  qui 
avait  entrepris  les  mêmes  recherches 
dans  une  province  éloignée.  Par  suite 
de  cette  découverte,  Jenner  fut  obligé 
de  quitter  la  vallée  de  Glocester,  et  de 
se  rendre  à  Londres,  oii  il  consacra 
tout  son  temps  à  donner  aux  médecins 
les  instructions  dont  ils  pouvaient 
avoir  besoin  pour  le  succès  de  la  vac- 
cination, et  à  entretenir  avec  l'étran- 
ger une  Immense  correspondance,  la- 
(juelle  devint  même  tellement  étendue, 
qu'il  fut  forcé  d'en  demander  l'inter- 
luption,  à  cause  des  frais  énormes  qu'el- 
le lui  occasionnait.  Dès  que  la  décou- 
verte jennérlenne  fut  bien  constatée 
par  la  répétition  d'expériences  multi- 
pliées, elle  valut  à  sou  auteur  d'una- 
nimes applaudissements.  Toutes  les 
sociétés  médicales  de  l'Kurope  s'em- 
pressèrent de  se  l'associer  et  de  lui 
délivrer  des  témoignages  flatteurs  de 
leur  assentiment.  Une  Soci(^l.é  jcnné- 
rienne  fut  créée  à  l>ondres  pour  l'ex- 
tinction de  la  petite  vérole.  Tous  les 
médecins  rivalisèrent  de  dévouement 


JEN 

pour  propat^rr  la  pri^ifuse  iiuuvrautf». 

L.1  Fiaiire  fut  la  prcmicie  à  l'ac- 
I  .-  iiii  b>oi4l)lemciit  par  Ir^  Miins 
lij  dur  (le    1^   lîoclirfuucaulil  ,    <]ui  , 

i  de  iJu  docteur  '1  iiourrl,  ou\iil  une 
Miuscdptuiii  pour  lcljbli>>rineiil  d'un 
comiltf  ceulral  de  vaccine,  charge  de 
répandre  paitout  le  bieniait  de  La 
iiuu\clie  inoculation.  Le»  aoiuies  de 
la  sriciirc  n'offrenl  pas  dVxrmple 
(lu 11  (iiii(uur>«  aijvsi  unanuur  qur  rc- 
lui  qui  rut  lieu  a  celle  épot|uc  pour 
anVanrlMr  Chuaanile  rnlirir  du  tlrau 
\  iji  IHOI,  lr>  mrdrciu>   cl 

de  L  nurine  inhale  au- 
^lai>e  iii eut  frapper  en  1  ikonuet.i  de 
Jeuiicr  une  médaille  qui  repre»ciile 
Apollon,  dieu  de  la  nirdenne,  rendant 
à  rAn^lelerre  un  malelul  •^orri  pjr  la 
>accinc:  la  ligure  alle^^oi  ique  de  l'An- 

'--'-- retient  a  la  main  unerouroniie  ci' 

.  iu  centre  de  laquelle  r>t  le  nom 

cette  face  a  pour  le^^ende 

I.  <  str/Ud  rrfuLsit.  I.ere%ei» 

olhf  uuc  autre  ,  .iii-de*U4  de  laquelle 

on  lit  (irorgio  IJI  rr^r,  etau-dessoDs 

^'  ■'  rr  tiurr.  V.n  iKOL.l'impiMatrice 
li  l'ière  de  Kussie  écrivit  à  Jen- 
iirr  une  lettre  trc>-llalteu5e ,  qu'elle 
arrompa»iia  d'un  diamant  de  ^r.iiid 
prix,  l'our  donner  à  ce  médecin  d'ecla- 
lautstémoi^na^e-i  delà  reconnai.^^ancc 
nationale,  le  parlement  d'AnoIrterre 
lui  vota  drox  fois  des  remerniuenl« 
publics  et  unanimes,  lui  accorda  le  '2 
juin  1K02  une  somme  de  di\  mille 
livres  sterling,  et  en  1H(>7,  one  autre 
de  vin^t  mille  livres ,  à  quoi  il  faut 
ajouter  cinq  cents  lé>'r<.  dont  le  roi 
lui  fit  cadeau   ^lotal  7'  iiics^ 

A  l'occasion  de  cette  i  >■  n  na- 

tionale, leiameux  l'itt,  alors  chancelier 
de   l'ecliiquier,   proiionra    les  paioies 

uivantes  :  ««  La  chambre  peut  voler 
•<  pour  le  docteur  Jenner  telle  récom- 
«<  pense  qu'elle  jugera  conveuable  : 
«<  elle  recevra  l'approbalioti  Ranime, 
«<   parce  que  cette  rccomjÉhse  a  ponr 


JEN 


171 


m  objet  la  plus  grande  on  Tune  des 
••  plu^  iinport.iulr>  dfiouvertes  que  la 
H  -.ociete  ait  laites  depuis  la  création 
-  du  monde.  >•  Kn  1K(»V,  Jenner  fut 
nomme  maire  de  (Iheltenham  ,  bour<; 
célèbre  pai  se%  eaux  minérales.  Au 
mois  de  tlecembre  iKO.'i,  le  lord  maire 
et  \naliiermrii  de  l«ondres,  lui  dë- 
cernrreiit  les  droits  defianchise  et  de 
ci(f ,  et  lui  en  orfi^nt  \v  diplôme  dans 
une  boite  eni  «  iii<-™#«!  .uiiauts  ,  hon- 
neur dont  il  II,  car  il  ne  fit 
que  quelque  lurs  dans  celte 
capitale.  A>aul  (k-iJu  sa  femme  en 
iHi.j,  li  se  retira  à  IterLelev,  lieu  de 
s3k  Dai»«ance,  avec  son  fils  rt  sa  lille. 
1^  il  ne  ces^  de  consacrer  à  l'étude  1rs 
dernièrej  années  de  sa  vie:  il  cherrliait 
spécialement  à  étendre  le-^  applications 
préser^alivr^  de  la  vacrine  à  certaines 
afTections  eniptix  es,  à  la  en(|uelurhe,etc. 
(Convaincu  dc^  eiïels  avanta;;eut  des 
irritations  artificielles  firitées  a  la  sur- 
face de  la  peau,  il  publia,  en  lH'i'2, 
une  lettre  adressée  à  son  ami  le  doc- 
letir  Parrv.  de  H:ï|Ii,  dsM«  hq'iflî.*  il 
lui  conir- 
retiT,  n 

s  ration  «le 

1  «i        ,  .»ns  men- 

tales, et  dans  plusieurs  autres  maladies 
des  or{;anes  internes.  O  fut  là  le  der- 
nier travad  de  Jenner.  Occupé  dans 
sa  bibliothèque  ,  il  fut  soudainement 
frappe  d'apopletie,  et  il  expira  le  26 
janxier  1S*2:1,  à  Tige  de  ^oixante-qua- 
tone  ans.  Voiii  la  liste  de  ses  ouvra- 
^:  \.  The  nalunil  history  of  the 
tttrkoo  :  Histoire  naturelle  du  coucou  ; 
imprimée  lians  les  rraniarti<ms(if  lu 
siHritti'  nntih'  tics  srirnrrs  de  Lon- 
Mrrs.  178 S.  II.  ./  prucrss  for  prr- 
purin^  pure  emrtir  tarlnr  hy  re- 
rristallisalion:  IVocédé  pour  préparer 
le  tartre  emétique  par  la  recrisîallisa- 
tion.  O  mémoire  a  été  inséré  dans  le 
1"^  volume  des  Trtinsartions  delà 
société  établie  par  Htuiter  pour  ta- 


mi 


JEN 


JEN 


vunr.ement  des  sciences  médicales  cl 
chirurgicales ,   1793.   III.    /în   in- 
(juiry  info  ilie  causes  and  effccls  oj 
ihc  vciriolœ  vaccinœ,  etc.  :  Recher- 
ches sur   les  causes  et   les  eftets  tle  la 
varlole-vaccme,     maladie    dccouverle 
dans  piusleurs    comtés   de  l'oiicsl    de 
rAii^ielerre,notamiîieul  dans  lecomlé 
deGlocester,  et  connue  sous  le  nom 
de  vérole  de  vaclie,   Londres  ,  juin 
1798,   in-r  ;  3iWit.,    1801.  Cet 
ouvra(;c  que  Jenner  dédia  à  son  ami 
C.  Pairy,  médecin  à  Tjalh,  a  été  tra- 
duit en  latin  par  Careno  sous  ce  litre  : 
Ed.  Jcnneri  disquisitio  de  causis  et 
cjfcctilms    variolarum  vaccinarum^ 
^  icnne  (Autriche),  1799,  in-4°,avec 
fi:',urcs  coloriées;  en  français  par  M.  L. 
C.  d(;  L^-^**  (M.  le  chevalier  de   la 
Roque),   Lyon,    1800,   in-8".  IV. 
Furthcr  obsrroalions  on  ihe  variolcc 
vacciiiœ:  Autres  observations  sur   la 
vaccine,  Londres,  1799,  in-4".  A''. // 
continuation  of  jacts  and   ohseroa- 
iions  relative  to  ihe  variolœ  vacci- 
nœ  or  coiv-po.v  :  Suite  des  faits  et 
observations  relatifs  à  la  vaccine,  Lon- 
dres, 180.0,  in-4".  VL   The  origiii 
(tf  lltc  rxiccine  inoculation: Orif^inc  de 
l'inoculation  de  la  vaccine,    Londres, 
1801.    VIL    On  the   varirties  and 
modifications  oj  the  vaccine  pustule 
occasionned  hy  an  herpetic   statc  of 
ihe  skin:  Sur  les  variétés  et  les  modi- 
fications des  pustides  de  vaccine  occa- 
sionnées par  l'état  dartreux  de  la  peau, 
Cheltenham,  1819,  in-V.  Cet  ouvra- 
ge avait  déjà  été   itnprlmé  en   180G, 
dans  le  12**  volume  du   Médical  and 
physical  journal.   VI IL    Oùsenfa- 
l ions  on  the  distrmprr  in  dogs  :  Ob- 
servations sur  les  m.ilndies  des  chiens. 
— Tivo  cases  of  sniall-pox  injection 
communicatrd  io  ihe  fœtus  in  utero, 
under  peculiar  circunistaiu  es,  u^ith 
additional  remarks  :  Deux  cas  de  pe- 
tite vérole  communiquée  au  fœtus  dans 
la  matrice,  avec  des  circonstances  par- 


ticulières ,    suivis  de  remarques.  Ces 
deux  écrits  ont  été  publiés  dans  le  1^' 
volume  des  Transactions  philosophi- 
ques de  la  société  médico-chirurgi- 
cale, année  1809.  IX.  Factsfor  the 
mosi  part  unobseroed  or  not  duly 
noticed  respecting  variolous  conta- 
gion :  Faits  relatifs  à  la  contagion  de  la 
variole,  la  plupart  non  observés  jus- 
qu'à présent,  ou  du  moins  sur  lesquels 
on  n'avait  point  de  notions  exactes, 
1808.  X.  In  référence  io  ihe  influen-  . 
ce  of  herpès  in  modijying  the  vac- 
cine pustule  :  \)c  l'intluence  des  dar- 
tres pour  modifier  les  boutons  de  vac- 
cine. Cet  écrit  iiil  envoyé  par  Jenner 
au  docteur  W  illan  ,  qui  le  plaça  dans 
son  traité  sur  V inoculation  de  la  vac- 
cine. Des  observations  analor;ucs,  com- 
muniquées par  Jenner  au  docteur  \'V  il- 
son    Philip,  de  Worcester,  se  trou- 
vent dans  l'appendice  de  l'ouvrage  de 
ce  dernier  sur  les  maladies  fébriles. 
Jenner  avait  encore  appelé  l'attention 
des  médecins  sur  ce  point ,   dans  une 
lettre  publiée  en  1821.  XL  A- Leiler 
to  Cil.  Henry  Parry,  D.  M.,  on  ihe 
influence    oJ  artijicial  éruptions   in 
certain  diseuses,  etc.:  Lettre  à  Ch.- 
H.  Parry  sur  l'influence  des  éruptions 
artificielles  dans  certaines  maladies  du 
corps  humain ,  avec  des  recherches  sur 
les  avantages  probables  qui  doivent  ré- 
sulter de  nouvelles  expériences,  1822. 
Enfin  on  trouve  dans  un  ouvrage  pério- 
dique, intitulé  V Artiste,  plusieurs  arti 
des  de  Jenner  sur  des  sujets  étrangers 
à  la  médecine.  M.  le  docteur  Amédée 
Dupau  a  publié  ^\\c  Notice  histori 
(pie  .sur  Jenner  dans  la  Revue  ency- 
clopèdiquc ,]!iu\\cr  182i,  notice  tirée 
ensuite  à  part  sous  formode  brochure. 

R— D— N. 

JENMNGS  (David),  théolo- 
gien anglais,  non-conformiste,  né  en 
1  091 ,  à  Kibworth  en  Leicestershire  , 
fut,  en  1718,  élu  pasteur  d'une  église 
de  sa  cong#galion  dans  le  quartier  de 


JBN 

\N  jppin^,  à  lAjntfrri,  et  (;ai(la  ceVf 
position  |)Cii()ant  quarante  années.  Il 
cousacra  une  pu: lie  de  sa  vie  à  l'en- 
sei^neinenl,  et  exerça  sa  plume  sur 
(liOei cul''  «iijrls.  Il  mourut  en  17ti2. 
On  a  de  lui  :  i.  licuu/f  ri  Uititi- 
fiigcs  li'iinr  ftirir  /trri  wf  ^en  une 
suite  de  sr:  i.Kiti  .\  ITJO.  11.  Intru- 
tluitin'i  II  i  u.mge  tirs  gU)i>r%,  I7i7, 
livre  i]ai  a  rié  populaire  durant  plus 
d'un  demi-sierle.  III.  Apprl tt  in  rai- 
son et  fiu  srns  rurnmun  tutu  iuntt  in 
vrritf  (If s  Saintrs- Ecritures.  \\ . 
Introiiui  tiun  a  ta  runnuissam  e  des 
metiailies .  V .  ,  tntiquites  /uu^es^  ou 
>>uite  lie  ie^uns  sur  ies  trois  pre- 
miers irx'res  de  M  dise  et  .iuron,  de 
f^oc/tviVi,  auxquelles  est  [ointe  une  i)is- 
sertutiun  sur  la  ioriffue  iieiiràiifue, 
176fi,  '1  vol.  in-8".  (^t  ouxraje,  pu- 
Idié  sur  le  manuscrit  de  Jennin^^  par 
le  docteur  t  unieaux,  jouit  d'une  juste 
irpulalion.  L'édition  en  était  épuisée, 
et  l'on  en  dnirait  une  nou\elle,  elle  a 
[laru  \rrs  l'année  IHI  1 .  L. 

JK.\\I\C;S     HF.Nni-(>»l«STAN- 

tin\  antiquaire  anglais,  aussi  fameui 
par  >e$  bizarreries  et  les  vicissitudes  de 
sa  fortune  que  par  $es  collections,  était 
natif  du  roitité  d'(  )\rord.  SliiplaLe  ,  où 
il  vit  le  jour  en  I7ii2,  clail  un  ma^ni- 
fique  douiaiiic  depuis  loii;j-lfmps  ap- 
paitenaiil  a^faiu<!!L>  (pu  ti^ii:.tit  par- 
mi 1rs  plus  riche:»  e(  même  parmi  le^ 
plus  nobles  du  comté,  s'il  e:^t  Mai  que 
les  marqi:is  de  lla^tin^s,  que  le>  foni- 
tes  de  liuntin^ton  en  lus^nl  des 
branches.  Outre  cei  a\anla^es,  Henri 
Jenninj;>  ii'avatl  m  fierc  m  sceur. 
On  devine  aisément  que  ce  jeune 
héritier  ne  fut  point  victime  de  maî- 
tres trop  sévères  cl  qu'il  eut  la  li- 
berté de  se  livrer  à  ses  j;oûls.  lu  heu- 
qu'il  amiÀ 
de  l'esprit 
il  étudiait  au  ha-ard  et  sans  choix  , 
ne  suivant  que  l'inspiration  du  nio- 
ment,  et  ajoutant  sans  cesse  à  l'exceii- 


tourisle,  le>i»eletiiia^fsqu'il  a\ait  com- 
mences le  sabre  au  cùté.   (^  pelerina- 


reux  liasard   voulut  qu'il    amiÀt  assez 
l'étude  et   <ju'il   eût   de  l'espi 


JEN  .173 

tricité,  %m  èànma  de  .1^;  \Att*.  Il  ne 
poussa  pM  méove  ft es  loin  rtducalion 
du  collège.  Au  soi  tir  de  l'ccoie  de 
^^  estroinster,  où  il  a\ait  eu  pour  coi>- 
disciples  lla<tin^s,  lmpe\,  (ihurcliiU 
et  nn  comte  de  lUcLin^liam  ,  il  entr« 
comrar  iiilirirr  dans  le  premier  re^i- 
m'  .lc>  .1  picdtl7VH).    Mm 

q  ..  r  qu'il  eût  à  porter  l'élé- 

gant umiorme  chamarre  de  bioderiet 
d'or,  il  ne  tarda  pAs  à  tiouver  les  lau- 
riers de  ^lar»  un  peu  nionotones ,  et 
le  duc  deCumbetland,  de  1  r^lciiicnlaiit 
némoire,  un  peu  chan;;eanl.  L'épau- 
letle  alors  perdit  de  «on  cliarnie,  il  r^ 
signa  sa  commission  après  l'alfaire  de 
klasler  Sexen,  et  il  continua,  pacifique 

isie,  lopelei 

ices  le  sabre 
fjes  furent  lon;;s  :  pendant  le  temps 
qu'il  T  consacra,  il  eût  pu  à  l'aise  aller 
en  Chine,  pousser  a  la  terre  de  Die 
inen  ,  à  la  Sou\elle-/>lande,  et  rete- 
nir par  l'e^t  en  .Vn;;leierrc  en  s'arre- 
tant  vini^t  fois  et  plus  en  route  II  eût 
du  moins  pu  \isiter  l'Kurope  entière, 
de  la  llussie  à  l'Ilspa^ne,  et  des  elats 
Scandinaves  à  li  Turquie,  ^lais  tl 
n'en  fit  rien,  quoiqu'il  s*  te  fût  proposé 
pe»il-^tre.  \u  bout  d'un  couil  «cjonr 
en  France,  il  passa  huit  ans  de  suite  en 
Italie,  dont  trois  à  Home  dar:s  la  so- 
ciété de  lord  Mount  llermor,  habile 
amateur  d'uruvres  artistiques.  La  con- 
versation de  cet  inimitable  llairenrd'an- 
tiqiiesfut  contagieuse  pour  le  dr.(ru\  re- 
ment de  Jennin^s,  qui  bientôt,  a^ant 
tant  d  heuies  et  de  ;;uinéfs  de  reste,  se 
mit  à  faire  collettioii  d'objets  il'arls  et 
de  curiosités  et  qui,  lors  de  son  relotir 
dans  ses  foyers, en  emporta  une  p.icotille 
«i^nsidérable.  1^  vent  était  alors  aux 
aiittijuités.  Les  monomanes  de  1  espèce 
deJennin^sabondaient  parm;  lt'>  riches 
de la(irande  lirrtaj;ne elenchti  i>s3ient 
Ui  uns  sur  les  autres  en  lait  de  lolies 
et  de  prodigalités.  Devenu l'heriliei  de 
^hpiake,  Jenmn^s  fil  de  la  résidence 


174  JEW 

délicieuse  de  ses  ancêtres  un  musée ,  où 

trônait  surtout,  pai^i  les  statues  et  fi- 
gurines, un  chien  sans  queue  en  marbre, 
qu'il  assurait  être  la  statue  iconlque  du 
chien  d'Alcibiade,  ce  qui  lui  valut  pen- 
daut  lon»-temps   le  sobriquet  de  J)og 
Jennings,  lequel  ne  tomba  en  désué- 
tude que  pour  faire   place   à  celui  de 
Chillahy  Jennings.  Chillaby  était  le 
nom  d'un  cheval  venu  de  Bombay  et 
qu'il   avait  payé  trois  cents  j!;uinées  , 
croyant  béni^nement,  sur  la  foi  du  ma- 
quirrnon,  que  ce  coursier  s'était  vendu 
aux  Indes  plus  de  treize  fols  ce  prix. 
C'était  un  noble  quadrupède,   agile  et 
plein  de  feu,    bien   qu'il  ne   descendit 
sans  doute  pas  en  droite  ligne,  comme 
Jennings    se  l'était  rais  en  tête,   des 
chevaux   cappadociens ,  qui  gagnaient 
les  prix  aux  cirques  de  Piome  et  de 
Constanliiiople,  mais  fier,  fantasque, 
et  ne  se  laissant  manier  commodément 
par  personne.  Jennings,   comme  s'il 
n'eût  point  eu  avec  les  bronzes,  les  toi- 
les, les  bas-reliefs  et  les  médailles  assez 
de  moyens  de  mener  grand  train  sa  for- 
tune, n'eu  eut  pas  moins  la  malencon- 
treuse idée  de  se  faire  recevoir  membre 
duJockey-club  et  de  spéculer  sur  l'agi- 
lité de  Chillaby  aux  courses   d'Epsom 
et  de  Newmarket.  La  haute  et  la  basse 
aristocratie, qui  trichent  plus  qu'elles  ne 
jouent  à  ces  tripots  d'équitation,  ei.cou- 
ragèrent  le  débutant  et  eurent  soin  de 
le  faire  martingaler  dans  cette  voie  de 
ruine  ;  il  y  perdit  des  centaines  et  des 
milliers  de  gulnées,  notamment. contre 
un  comte  d'Abingdon  et  un  vieux  duc 
de  Queensburv  dont  tout  le  club,  sauf 
lui,  voyait  à  jour   les   roueries  éhon- 
técs;  mais  personne  n'avait  la  charité 
de  les  lui  dévoiler.    11  n'y  eut  pas  cru 
d'ailleurs,  et  à  peine  y  niil-il  quand 
ses   créanciers   survinrent,  eux  aussi, 
pour  fondre  la  cloche.  Tout  fut  vendu, 
les  trois  ou  quatre  mille  acres  de  terres 
patrimoniales,  le  manoir,  les  collections 
interrompues  pour  Chillahy.  Chillaby 


JEN 

lui-même,  cause  de  tapt  de  désastres, 

alla  piaffer  hors  de  l'écurie  de  Ship- 
lake  et  s'assouplir  sous  la  cravache  du 
célèbre  écuyer  Hughes    au  cirque  de 
Salnt-Georges-rield:   seul,   le  chien 
d'Alcibiade   resta  fidèle  à  son   infor- 
tuné   maître   et  le  suivit  à   l'hmnble 
maison  de  campagne,  où  quelque  temps 
encore  il  esquiva  les  poursuites  de  ses 
créanciers.  Ceux-ci  pourtant   le  déter- 
rèrent dans  sa  retraite  ;  impitoyables, 
ils  le  traînèrent  devant  le  tribunal  du 
banc  du  roi ,  et  obtinrent  sentence  con- 
tre lut.  Jennings  subit  ainsi  plusieurs 
mois  de  détention  en  1777  et  1778, 
sans  se   désabuser  complètement   sur 
Queensbury  et  Chillaby,  sur  les   che- 
vaux et  les  jockeys,  mais  sans  se  sentir  la 
folle  envie  de  recommencer.  Le  célèbre 
Horn  ïooke  était  son  compagnon  de 
captivité  ;  la  politique  vint  faire  diver- 
sion à  ses    ennuis,    mais  il  en  trouva 
bientôt  l'argot  plus  ennuyeux  que  celui 
de  Newmarket  ;    et  il  se  mit  alors   à 
rêver  de  nouveau   collections  et  anti- 
ques. Enfin  les  affaires  s'arrangèrent, 
l'écrou  fut  levé,  ou  pour  employer  le? 
expressions  dé  Jennings  lui-même,  les 
fers  que  faisaient  peser  sur   lui   ses 
créanciers  furent   rivés  par  l'hymen. 
Ces  nœuds  pourtant  étaient  plus  riants, 
d'autant  plus  que  sa  deuxième  femme 
(car  Jennings  était  veuf)  lui  apportait 
en  dot  de  quoi  réparer  les  brèclies  faites 
à  sa  fortune  par  Chillaby.  Ainsi  revenu 
sur  l'eau,   Jennings,  bien  que  regar- 
dant toujours   le    vieux    Queensbury 
comme  le  roi  des  Jockeys,  n'alla  plus 
parier  à  l'hippodrome,  résolu,  s'il  per- 
dait son  argent  ,  de  ne  plus  le  perdre 
qu'en  objets  au  moins  visibles  et  pal- 
pables :    du   reste  tout  lui  fut   bon  , 
antiquités,  chefs-d'œuvre  modernes  et 
moven-àge,  statues  et  tableaux,  nielles 
et  médndies,  imprimés  et  manuscrits, 
ustensiles  et  objets  d'art ,  échantillons 
minéralogiques  et  coquilles.  Les  auto- 
graphes seuls  lui  manquaient,  ils  n'é- 


JEN 

Uieot  point  imauiiir^  à  celle 
Deshoome»  tr!%  tjur  Jfiiiiin^ttont  tn 
Anglefei  re  (Irrorc^  du  uoiii  de  vu  iuu- 
Sts,  et  le*  raretr»  (|u'il»  lutli^^nt  ^rii- 
coir  un  mol  technii]tte  et  qu'il  Caul  se 
Radier  île  ra\er)  &onl  Je»  ob|cl«  lie 
i  irtu.  \\oir  ce  q«e  ue  posWdc  m! 
que  iir  pa\»ed«iil  que<|Ml- 
(|..  «lofit  on  viit  Ir    uon  et 

le  imiiiiiir,  •  lair-«enirN,^oila 

U  ^li>:rr  fl  .  r   Mjpieuie  pour 

crN  nnina^.is^iirur»  lie  cuiiusilrt.  Jra- 
Mui;;^  i^Uit  .ml^l  à  ra|>»>^re  du  l»oii- 
heur,  n'fpinufant  ^iieie  d'autrei  cou- 
lrjrieté>  (|ur  quelques  reproche»  de  m 
femme  qui  lai  demaudiit  a  quoi  bon 
tant  de  inoiliisque^  ,  et  de  temps  en 
lemp*  le  lir<>oiii  de  recourir  a  L  hocuse 
«Ir  *r^  ..    .  .     . 

irtlur. 

e\t>neiuciil    iiii|t;i.\u    %tnt  iciuci>ci  nj 
frltcite    rrnai>^.i|Me  r\   (mi  ravir    drrr- 
rlirf  va    liLrrlr      • 
dr.    cointrs   nif  m 

iialles  >enait  de  iiioiinr.  C>e  conipia- 
lile,  bui^ant  l'uva;;e  commun  a  lou:>  le-^ 
hauts  agents  de  tinanre  quand  on  ne 
restreint  pas  «etèrenent  leurs  tendaiH 
ces,  faisait  la  banque  et  Pescoiopte  , 
usant  des  .soronie>  qu'il  avait  en  caisse 
au  nom  du  «jou \ernemeiil  coninie  do 
^^  Cent  autres  en    fai- 

^  ,Tl  laroiilnin*'.  rVtait 

eu  qucli^uc 
autrement  t 

licatesse,  une  uccu>.iii»tii  m 
ice  loutre  des  conlreres. 
coup  le  ministère  s'avise  do  vouioir 
rr|. rimer  cet  elal  de  rhosfs.  I*ri«e  (c'é- 
tait le  nom  du  comptable)  lais.«ait  an 
mince  déficit.  Stîodain  on  en  recherche 
lo>  causes  a^ec  fracas,  on  fait  sonner 
haut  les  (grands  mots  de  inaUr  i 

traite  comine  cnmplicos  cei, 
Irjtiivo  comniodi'  de   ><    '  c\   de 

l'ar^fut  par  le  recevc  Jtn- 

inn_':,  le  duc  de  Portiand  cl  une  foule 
d'autres  étaient  daoscecas.  Le  «irand 


JEN 


^  échappa. 'Alurs,  avec  lear  i»- 
ptrtiwlé  ordinaire,  les  i^ens  de  justice 
M  rabattirent  »ui  Jenniii;;s,  et  iustru- 

mr;  •: •     :  halnleraciit   qu'a  propoA 

d  'bel  de  l^oi^  cents  |>uiné« 

t7,.iwii  h   :,  ri\  ^  iuteirt», 

le*  frai  «  deiu.f    ,  li'uvucat, 

•e      ■  •  r  ,    d  mil  liiuuluiie,    do 

plii  TTetîtlr.  j|-  lut    drtTTiTidè- 

m 

*'   ' 

ses  coitrriioiiN   en   vcnle.  (.elle  luis    fo 
chien  d'Alcibiade  nr  ci  i  m-   Nou>liaire 
à    la   griffe   du    «  •--priMuir. 

l/inforlune  JciiiMi..     ........  .«  et  âu  lit 

ne  |iou\ait    pjrler  ohvucle  a   rica.   Il 

eût  ete  iieureuv    pour   lui    d'en    Cire 

quitte  a  m  bonauiche.  Mai>»oilquelc- 

'     •  :ii'  ;.  .  vi^ee, 

ime 

et.  ijOlC 

)t  IlOII 

setrie     I  iie- 

ujfiit.  .      i         «^r*! 

une  :  !>  1  it  Laite  et  un  acte  vule 
au  ;  .  :'  it  pour  prévenir  doaornuis 
dr  .  :  .1.  .-.  Violence.  Mais  la  réi^o- 
hitiiMi  u.  >  deuk  diamhies,  en  le  réliabi- 
lilant,  ire  lui  reslittujt  point  ce  qu'on 
kl     ■  '  iiir    lon*^- 

Iri'  eu  pour 

le  -.  ^  .  .,.j/  la  jUiiRf  ilc-^  liomme.«. 
Il"  '  Il  et  le  fi  r  ne  l'avait  de- 
I  appartenait  : 
•^  biens  à  elle  ; 
li  était  encore  riciie,  malgré  ses  pertes 
et  maigre  la  di>perMon  des  trésors 
qu'il  avait  si  Lborieusement  surveillés. 
Il  se  remit  à  foruvre  ;  et  bienlàt  co- 
quilles, hvres ,  minéraux,  manuscrits, 
brontes  et  portraits,  statues,  tableaux 
at  raretés  de  toutes  sortes  s'ainoncelé- 
renl  deiiauve.-iu  dans  sa  demeure.  Sa 
^mmi'  raouml,  la  nioTiomaiiie  de  I  an- 
tiquaire f^  développa  pour  lors  dans 
totil  «on  luxe:  sa  maison  deChelsea, 
jadis  demeure  du  comte  de  l>uclin- 
gham,  son  condisciple  ,  prit  l'aspect 


«Vuiie  oralcrie  '-  nuîubles,  chemiiices, 
cartons,  ravons,  aruioires  vitrées,  mé- 
liaiUlcrs  élaler.t  ^ijix-^és  de  ces  trésors 
si  ch.-'rs  à  sou  cœur-;  chaque  jour  Ten- 
combrement  rétrécissait  l'espace;  on 
ne  pouvait  se  mouvoir  dans  son  appar- 
tement qu'en  courant  risque  de  fractu- 
rer la  jambe  d'Achille  ou  de  faire  tom- 
ber la  boîte  à  rouc^e  dç  Marie -Antoi- 
nette. Sexag;énaire  à  cette  époque,  il 
\iécut  lonû;-temps  encore  ,  ses  collec- 
tions, ses  détiances  augmentant  tous 
les  jours,  tandis  qu'écornée  par  les  ac- 
quisitions et  les  emprunts,  sa  fortune 
disponible  allait  sans  cesse  se  rédui- 
sant. Cependant  il  avait  et  il  eut  jus- 
qu'à sa  mort  de  quoi  vivre  commodé- 
ment, s'il  eût  voulu.  Une  part  de  pro- 
priété à  la  Jamaïque  lui  valait  par  an 
de  quinze  à  vingt- cinq  mille  francs,  et 
on  le  payait  exactement.  Sa  mort  eut 
lieu  le  7  février  1819.  Son  corps  ne 
fut  pas  brûlé  suivant  son  vœu  :  11  s'était 
brouillé  avec  celui  qu'il  avait  désigné 
pour  son  incinérateur ,  en  Ije  priant 
de  lui  prêter  la  modique  somme  de 
7,500  fr.  Ce  faux  ami  n'avait-ll  pas  osé 
lui  dire  :  «  Klle  est  à  votre  service,  si 
vous  la  voulez  pour  des  choses  uti- 
les. »  Mais  si  cet  argent  eût  dû  ser- 
vir à  des  chflils  utiles,  est-ce  que  Jen- 
nlngs  l'aurait  souhaité.'  C'était  l'Inutile 
quU'enchanlait.  A  mesure  qu'il  vieillis- 
sait, il  s'entichait  davantage  de  ses  ri- 
chesses, et  il  en  perdait  de  vue  le  boire 
«t  le  manger.  Acheter,  placer,  classer, 
éliqueller,  cataloguer  ses  acquisitions 
accaparaient  tousses  instants.  C'était 
4încore  bien  pis  lorsqu'il  s'agissait  de 
nettover," de  brosser,  de  limer,  de  po- 
lir, de  faire  luire  riris  aux  mille  cou- 
leors  d'on  coquillage.  Mais  la  magni- 
ficence du  contenu  formait  un  rislble 
contraste  avec  la  simplicité  du  conte- 
nant. D'épaisses  couches  de  poussière 
où  un  géologue  eût  distingué  des  pre- 
mière, seconde  et  troisième  lormalions 
et  la  couche  alluvionelle  ,  couvraient 


JEN 

les  fastueuses  armoires  vitrées,  les  ri- 
ches rayons  d'acajou,  et  le  magnifique 
iricliniuni  (Voy.  plus  bas).  Arachné 
tendait  sa  toile  du  nez  au  menton  de 
Pallas;  des  cendres  qui  encombraient 
le  foyer  et  qu'il  ne  permettait  d'oter  que 
lorsqu'elles  menaçaient  de  toucher  la 
vfîntouse,  volaient  par  toutes  les  salles  : 
rarement  le  domestique  avait  le  droit 
d'entrer  dans  le  sanctum  sanctorum: 
sonvieux maître,  plus  soupçonneux  que 
Tibère,  craignait  toujours  qu'un  doigt 
crochu  ne  lui  dérobât  un  de  ses  joyaux. 
On  pense  bien  que  sa  tenue  était  en  tout 
digne  de  celle  de  sa  maison.  Nous  ne 
nous  amuserons  point  à  les  décrire. 
Mais  ce  qu'on  ne  saurait  imaginer, 
c'est  la  bizarrerie  de  ses  faits  et  gestes, 
c'est  la  singularité  de  ses  idées,  de  ses 
réparties  !  on  en  ferait  des  volumes. 
Ainsi,  par  exemple,  s'il  déjeunait  com- 
me les  vulgaires  mortels  de  nos  jours, 
il  ne  dînait  qu'en  trlclinlum.  Devenu 
propriétaire  d'une  ravissante  statue  de 
Vénus,  pendant  les  six  premiers  mois 
qui  suivirent  l'acquisition,  il  la  lit  placer 
chaque  jour  au  haut  bout  de  la  table 
où  deux  laquais  en  grande  livrée,  gants 
blancs  et  l'épingle  de  diamant  au  jabot, 
servaient  devant  le  beau  marbre  des 
plats  choisis  fumants,  qu'on  remportait 
ensuite.  L'idée  d'aller  pourrir  en  terre 
après  sa  mort  lui  semblait  anti-poéti- 
que; et  un  de  ses  désirs  les  plus  vifs 
était  de  pouvoir  compter,  au  lieu  d'in- 
humation, sur  la  concrèniation.  Kn 
attendant  que  quelque  àmc  charitable 
voulût  lui  promettre  de  satisfaire  ce 
caprice,  il  fit  dioix  et  de  l'urne  où 
devait  être  recueillie  sa  cendre,  et  d'un 
grand  pocle  (jiii  devait serylr  débucher; 
et  finalement  il  trouva  un  gai  et  brave 
gentleman  du  voisinage  qui  s'engagea 
cordialement  à  lui  rendre  ce  sei  vice, 
fût-ce  sur  le  pont  de  ]>attersea  et  à  la 
barbe  des  actionnaires  du  pont,  bien 
qu'il  ne  fût  que  de  bols.  L'incompara- 
ble Vénus  devait   être  la  récompense 


JEU 

èe  cti  Mploii.  IVniUnl  lon^-IfffifM 
.iriiniii^s  fit  iiii  ra^  |).iiliciilirr  ilu  •^^• 
noul  IWinaparte  ri  mi*mr  au^M  <ie 
lempereur  .Napoléon  :  Ir  Ion!  pour- 
quoi.' cVst  que,  Miivaiit  lui,  Napoiron 
ii'ol>rivs.iil  pa^  à  celle  i;;noblr  ambition 
qui  fait  (i'orJinairr  1rs  runqiirrants,  et 
qup  $on  luit  ftail  de  rrtinir  dan*  »a  ca- 
pitale ce  qne  le  monde  a\ait  de  plus 
rare  en  tableaux,  srulplure^ ,  livrer, 
m.iniKcrils  et  curio»ite:t  de  tout  gfnre  : 
NapolcNMi.Mm  //rr55«.«'lait  un  vu  Iuom>! 
l'armi  les  obielti  que  Jennin^s  aimait  à 
voir  «'entasser  autour  d^lui  rliirnt 
auvM  lesiiislrumenis  deprrnNioti  ;  nom- 
bre de  rhionomelres  exécut»%  par  le* 
ui.Tilie»  défait  orn.ii<ul  c  pièces; 
nuii  toutes  codaient  au  pciidide-moii- 
stie,  dont  ra>ait  ;;ratiGe  le  feu  comte 
Stanhope  el  «Jortl  il  compl.iit  pen- 
dant des  heures  entières  les  >ibralion$. 
Sa  joiii  nre  se  passait  ainsi  à  courir  les 
tentes,  à  cll&ser  ses  acquisitions,  i  dé- 
crasser, à  liislier  el  à  faire  riialover  ses 
coquilles,  puis  à  le>  montrer.  1^  nuit 
il  clunj;eai«  de  diverti«sspmrnt  ;  el  per- 
ché nul;;rc  décembre  au  jdiis  haut  de 
la  niai>on,  puisque  llerscliel  cl  Olbers 
ne  le  l.ii^viient  point  dot  mir,  il  s'éver- 
liiait  à  découvrir  une  douzirme  planète, 
que  sans  doute  il  eût  noinuiee  /f  t  hieti 
(£ Ah  iltiadt.  Il  avail  toujours  près  de 
lai  ouvert  sur  un  pupitre  un  Horace 
ud  usum  l)rlpl}ini  en  maroquin  vert, 
el  il  sedeleclailà  v  lrou\er  des  à-propos 
pour  toutes  les  phases  de  la  vie.  S'il  in- 
vitait à  partager  el  la  table  el  le  Iricli- 
nium,  «  Si  potrs  archaicis,  cornfi\*a, 
«  rerumberr  Irrtis.  »  était  le  prélude 
oblii^e  de  l'invitalion.  Un  noble  duc 
louaif-il  ses  mollusques,  ses  Van  l)\ck, 
Prinripiius  plaruissc  viris  non  ul- 
tima  laits  est.  tn  prison ,  la  captivité 
lui  pesail  moins  s'il  affublait  inopiné- 
ment le  créancier  de  Tépilhcte  Son 
missura  rutenu...  Mais  pour  rien  au 
monde  il  n'eut  dit  Doruircm  patrras, 
bien  qu'il  se  ren^nr^eàt  en  lisant  la  fin 


JRT< 


«77 


Je  la  phrase  iliiufe  nir  srilirrt  ar/iutn 
Il  était  •;rand  «-iNmido^iste  aussi,  mais 
ses  étvmolo^ies  riaient  soiixent  àssn 
grotesques  :  ildrri\ait,  par  exemple,  sa- 
lade de  l'italien  sitllulu,  casque,  et  il 
le  démontrait  en  ajoulanl  (pi'au  moyen- 
i;;e  les  her«»s  à  court  de  \i\te)  etde 
xisselles  dans  leurs  courses  lointaines, 
se  contentaient  de  maigres  laitues  sau- 
Tl<;es  ou  autres  herbes  qu'allait  cueillir 
pour  eux  leur  Dulcinée,  et  que  Te  casque 
servait  de  saladier.  Ses  connaissances 
sur  tout  autre  sujet  étaient  de  même, 
variées,  ma's  incohérentes  ,  superficiel- 
les, incomplètes.  On  le  trompait  en 
fait  de  tableaux ,  il  se  trompait  lui- 
nirme  en  fait  de  ^culptui  e>,  de  mnlailles; 
il  ne  savait  que  trr!»-mal  l.i  mnrlnlio- 
lo;;ie,  bien  que  sa  collection  conchvtio- 
lo;;ique  fut  digne  d'un  roi  el  l'empor- 
lat  sur  tous  ses  autres  trésors.  Il  était 
principalement  bien  assorti  en  cônes. 
Venaient  ensuite  les  genres  Murex  , 
'l'npiex  ,  Hustelhtria  ,  liulimus  , 
Stromhus,  Artuleu,  Hua  inrlin.  Je- 
reLeUum,t\  d'admirables  Ilarfui  lionl 
une  seule  avait  coûté  trois  mille  francs. 
Il  eut  le  [daisir  de  voir  Perrv  dans  sa 
Conchvliolo^ic  citer  sa  superbe  Jrga- 
uiiuta  vitreii ,  et  faire  «raver  >a  tii- 
plei  f*eria,  son  Herupiei  fitsca.i^ 
Melaniii  tiurun/iu,  son  ()Ii\'a  suUirt- 
dis  :  une  de  ses  Cv  pi  ées  reçut  du  grand 
conchvliologiste  le  nom  du  (^ypriza 
Jenningsea.  Tout  en  poursuivant 
les  stroinbes  au  fond  de  la  mer  et  les 
étoiles  au  ciel  ,  Jennings  écrivait  de 
temps  à  autre.  On  a  de  lui  :  I.  Li- 
hres  réflexions  sommaires,  ou  Ls- 
(fuisses  impartiales  et  franc  examen 
de  divers  oh  jet  s  intéressants .  Lo  n  d  r  es , 
17-^)8.  Grand  admirateur  de  Montai- 
gne, Jennings  prend  a  tàrlie  d'imiter 
l'allure  libie,  disinvolle  ^-ce  célèbre 
écrivain  ;  mais  il  ne  le  reproduit  guère 
que  par  le  manque  de  liaison  el  par  ses 
paradoxes  :  «  Que  le  mahométisme  , 
«    dit'il   quelque   part  ,  eiJt   été    glo- 


LTvin. 


la 


178 


JEN 


tf  rieux  et  beau  ,  s'il  eût  été  ce  que 
«  probablement  il  fut  dans  la  con- 
«  ceplion  de  Mahomet  ,  s'il  n'eût 
«  point  été  dominé  par  les  arrière- 
«  pensées  de  conquêtes,  s'il  n'eût  pas 
«  été  souillé  par  ces  pieuses  fraudes 
«  qui  sont  un  bon  calcul  pour  attirer 
«  la  multitude  et  assurer  le  rapide  éta- 
it blissement  du  système,  mais  qui  lui 
«  méritent  un  juste  renom  de  cliarlata- 
«  nisme  et  d'imposture  !  »  II.  Essai 
sur  les  preuves  de  la  religion ,  ou 
Démonstration  de  cette  thèse  que  la 
raison  donne  de  la  religion  une  dé- 
monstration solide  et  que  la  foi  ne 
la  démontre  que  fort  mal  (an  En- 
deavour  to  prove  that  reason  es  alo- 
ne  ,  etc.) ,  Londres,  1771.  L'auteur 
insiste  sur  trois  points,  l'utilité  de  la 
vertu,  l'existence  d'un  être  éternel  et 
tout-puissant,  l'attrayante  perspective 
d'une  vie  future.  La  seconde  partie  pré- 
sente quelques  arguments  à  peu  près 
neufs  ,  sinon  par  le  fond ,  du  moins 
par  la  forme  et  le  détail  ;  ils  sont  tirés 
de  l'astronomie  et  de  l'histoire  natu- 
relle. Dans  un  post-scriptum  ajouté  à 
l'ouvrac^c  en  1783,  il  admet  que  poli- 
tiquement il  est  nécessaire  d'établir  un 
mode  de  culte  public.  IH.  Recherches 
physiques  sur  le  pouvoir  et  les  pro- 
priétés de  r esprit,  et  sur  la  possibilité 
qua  Vintelligence  humaine  du.^oir 
une  conception  delà  Toute  Puissan- 
ce. Cette  conception  de  la  Toute-Puis- 
sance, Jenninfi;s  la  déduit  des  phéno- 
mènes de  la  nature  et  de  l'expérience; 
il  s'élève  contre  la  philosophie  fran- 
çaise qui  a  prétendu  nier  les  attributs 
de  Dieu  et  toute  existence  à  venir  ;  il 
montre  combien,  au  contraire,  de  no- 
bles et  hautes  Intellif^ences  doiventsou- 
haiter  cette  existence,  au  sein  de  la- 
quelle ell«l|)ourront  continuer  leurs 
méditations  ,  pénétrer  plus  profondé- 
ment k;  merveilles  de  la  création  et 
comprendre  le  Créateur.  W .  Remar- 
ques curieuses  sur  C enfance  et  l'édu- 


JEW 

cation.  Ce  livre  écrit  sous  l'influence 
des  Idées  de  Jean-Jacques  ne  contient 
rien  de  capital  ;  Jennings  y  traite  sur- 
tout de  la  nécessité  de  commencer  de 
bonne  heure  l'éducation  de  l'enfant, 
de  donner  à  l'esprit  et  à  l'àme  l'amour 
du  vrai,  l'horreur  du  faux  ;  en  d'autres 
termes,  la  rectitude  au  jugement,  la 
sincérité  au  cœur.  V.  Pensées  sur  le 
progrès  et  la  décadence  des  beaux- 
arts.  Notre  antiquaire  passe  en  revue 
les  diverses  écoles  de  la  Grèce  et  de 
Rome  ;  puis  il  s'appesantit  sur  l'égalité 
présumablefles  siècles  entre  eux,  relati- 
vement au  nombre  des  hommes  qui 
naissent  avec  le  génie  ou  avec  des  dis- 
positions au  génie,  mais  que  l'avarice 
des  parents  détourne  de  l'art  et  jette 
dans  les  métiers  lucratifs.  Passant  en- 
suite au  contraire,  il^ighale  le  ridicule 
de  ces  institutions  ou  de  ces  habitudes 
d'après  lesquelles  le  fils  d'un  artiste  sera 
livré  à  l'art,  tandis  qu'il  n'est  propre 
qu'à  manier  le  mètre,  le  code  ou  le 
carnet  de  l'agent  de  change  :  «  Les 
"  Egyptiens,  dlt-11,  grâce  à  leur  or- 
"  ganlsaîlon  par  castes  n'ont  point  eu 
«  d'art,  et  bien  qu'ils  aient  produit 
«  une  innombrable  quantité  de  sta- 
«  tues,  de  bas-reliefs,  de  médailles, 
«  d'instruments  de  toutes  sortes  ,  je 
«  ne  vols  chez  eux  que  métier  et  rien 
«  de  plus.  »  Quoique  l'assertion  soit 
tranchante,  elle  a  du  vrai  ;  et  indu- 
bitablement la  cause  qu'as.signe  Jen- 
nlngs  est  pour  beaucoup  dans  le  sta- 
tionnement, dans  l'imperfection  et  dans 
la  médiocrité  de  l'art  égyptien,  une 
fois  qu'on  a  mis  à  part  l'aichitecture. 
VI.  Traduction  (envers)  à\i  cinquiè- 
me chant  de  IKnjer  du  Dante,  Lon- 
dres, 17.')''^.  C'était  se  mettre  un  peu 
tard  à  versifier:  aussi  la  traduction  en 
resta-t-elle  là.  Cependant  H  est  possi- 
ble que  quelques-uns  des  vers  datent 
de  sa  jeunesse.  Elle  est  en  vers  blancs, 
ce  qui  peut  être  le  plus  commode,  mais 
ce  qui,  certes,  n'est  pas  le  mieux  choisi 


pour  rfodrf  l'ipre  et  puiuintf  hinno- 
mie  de  \»  irrui  rinid.  Fcut-rlre  Jfn- 
iiin^<  ne  voulut- il  qur  pouvoir  dire  a  Min 
aai  le  ^enilcman  char;;é  liemritiele 
fea  i  ^a  (iepouille  mortelle,  Ihbita 
s/htr^rs  Ituryma  Juiùtlam  I  atis 
amiri.  VII.  <i/tser%'iitiu.'ts  sur  tes 
Ui^antages  ifunr  position  Wr»v>  ei 
sèchr.  Jeiiuiii^s  >  conseille,  eonlrairr- 
■ent  à  l'usage  le  plu^  smW\,  de  baiir  m 
Maison  de  rampa^ne  «ur  le»  rolline^, 
tant  pour  la  beauté  de  la  vue  que  pour 
la  uuté;  et  il  v  indique,  d'après  re  qu'il 
a  remarque  en  Italie,  divers  moven^ 
d'avoir  commodément  de  l'eau  lim- 
pide, de  la  i^lace,  de»  silos.  V|||. 
Lilirr  eiwuflr  sur  fenormr  accrois- 
seinent  ars  hommes  df  lui ,  etc. 
Jenntn^<>  aimait  beaucoup  à  dire  qu'il 
avait  confiance  en  ia  mrdecine,  mais 
non  aux  médecin*  ;  qu'il  respect*»!  la 
relijjion,  peu  les  mini^tre<  ;  qu'il  es- 
timait la  justice,  mais  point  du  tout 
les  gens  de  justice.  Sa  IMtre  m- 
qu/U  se  sent  beaucoup  de  cette  anti- 
pathie et  de  cette  épi;;rammalique  tour- 
nure d'esprit  ;  sans  aller  au  fond  da 
problème,  elle  se  fait  lire  a^ec  inté- 
rêt el  provoque  de  sérieuses  réile&ions. 
F— <)T. 

JEIMISOX  (HoiïEnT),  littéra- 
teur, né  en  Mande  en  1736,  fit  de 
bonnes  etades  classiques ,  puis  entra 
dans  la  carnère  des  armes  ;  il  était  par- 
venu au  ^radf  de  capitaine  dans  le 
1\V  d'infanterie,  lorsqu'il  fut  mis  à  la 
demi-solde  en  17(»3,  par  suite  de  la 
réduction  que  subit  ce  ré;;iment.  L'a- 
vanta{;e  qu'il  eut  vers  ce  temps  de  se 
trouver  en  contact  avec  sir  (irrard  Ha- 
milton,  et  de  vivre  dan^  son  intimité, 
lui  ouvrit  une  carrière  nouvelle  et  fa- 
vorisa son  avancement.  Déjà  connu 
par  des  succès  au  théâtre,  il  fut  bicn- 
t«U  lancé  dans  h  société  des  hommes 
les  plus  influents  de  l'époque,  Kdra. 
Burke.SamuelJohnson,  GarricL,  etc.; 
nuis  il  dut  se  dérober  à  ces  brillantes 


JEP 


179 


relations  pour  aller  occuper  en  Irlande 
la  place  de  premier  eruver  sous  le  nou- 
veau gouverneur .  lord  vicomte  Town- 
shcnd  ,  place  temporaire  où  il  parvint 
toutefois  à  se  maintenir  sous  douze 
gouverneurs  sacce^ib:  Il  eut  en  njéme 
temps  un  sie^e  dans  la  chambre  des 
communes ,  où  ,  s'il  ne  déplova  pas 
d'éloquence ,  il  savait  réveiller  l'as- 
sembler par  les  saillies  de  son  esprit. 
Jephson  avait  époasé  en  17G7  une 
de^  Gllesde  sir  Kdward  IJarrv,  méde- 
cin celrbre,  auteur  de  quelques  ou- 
vrages. Lui  même  s'e«t  lait  un  nom 
par  des  productions  dans  des  ^n- 
Tt%  divers:  I.  liraganret  tragédie, 
l7Tr>  ,  qui  eut  beaacoup  de  succèi 
dans  la  nouveauté.  Horace  Walpolc 
exprima  son  admiration  pour  cette 
pièce  dans  des  termes  qui  parurent 
fort  exagérés,  et  adressa  au  poète  des 
réilexions  sur  la  tragédie,  en  trois  let- 
tres qui  ont  été  insérées  dans  le  recueil 
de  ses  cruvres.  Kn  retour.  Jephson 
emprunta  au  roman  dr  ^^  alpole,  Ir 
(Ihùtrau  (il)truntr.  l'idée  d'une  au- 
tre tragédie:  II.  />•  comte  dr  Sar- 
bonne,  qui,  représentée  en  1781,  sur 
le  théâtre  de  Covent-(«arden,  eut  un 
succès  encore  plus  éclatant  que  la  pré- 
cédente. FJle  a  été  traduite  en  fran- 
çais par  M"""  la  baronne  de  \\'as<;e  , 
el  fait  partie  du  'l'hràtre  anglais^ 
publié  par  cette  dame.  III.  Im 
loi  des  lAtmhards ,  tragédie,  1779. 
IV.  IJlhUrl,  o^év^  bouflon,  1783. 
\  .  Im  (Mwptignr,  opéra,  178,').  VI. 
Julio,  ou  rimant  italien,  tragédie, 
1787.  Cette  pièce  oui  fut  repré;.entée 
à  Dnirv-Lane  offre  de  grandes  beautés 
de  détail.  V|I.  L\-imuur  et  la  guer- 
/•<.  1787  ;  Deux  cordes  à  votre  arc, 
l'TÏ)!,  opéras  bouffons.  VIII.  Iai 
Conspiration, \r^^éX\t.  IX.  Portraits 
romains  ,  pocme  en  vers  héroïques 
avec  des  remarques  et  des  illustrations 
historiques,  Londres,  170i,  in-4°  de 
280  pages,  avec  un  portrait  deTautcu^ 


1. 


i8o 


JEK 


€t  tVautres  fjj];ure.s.  C'est  uii(*  suite  »le 
portraits  ,  faits  avec  autant  (rclé::,aur.e 
que  (le  vip.ueur,  des  hommes  illustres  de 
la  république  romalue.  Je[»hson,  en 
traçant  ces  caractères,  paraît  avoir  eu 
pour  objet  principal  de  faire  apprécier 
ol  chérir  davantage,  par  comparaison, 
la  forme  du  ojouverncnienl  de  son  pays, 
qu'il  n'a  cesse  d'exalier,  et  il  ne  man- 
que pas  d'exprimer  son  horreur  pour 
ce  qui  se  passait  en  France  au  moment 
où  il  tenait  la  plume,  i^'impresslon  de 
ce  livre,  dont  Êdm.  Malone  fut  l'édi- 
teur et  qui  lui  est  dédié,  est  magnifique, 
'ît  l'on  ne  regrette  pas  un  tel  luxe  en  11- 
sant  l'ouvrage.  \.La  confession  de  J. 
B.  Couteau,  citoyen /rançais,  1794, 
production  dont  le  titre  et  la  date  peu- 
vent faire  juger  la  couleur.  R.  Jephson 
mourut  en  mal  1803,  dans  sa  mai- 
son aux  environs  de  Dublin.     L. 

JERXllVGHAM  (Edward)  , 
littérateur  anglais  ,  issu  d'une  ancienne 
famille  catholique  du  comté  de  Nor- 
folk, et  né  en  1 7:27,  reçut  sa  principale 
instruction  dans  le  collège  anglais  de 
Douav,  et  acheva  ses  éludes  à  Paris. 
Rentré  dans  son  pays,  il  y  exerça  sa 
muse  sur  diflcrents  sujets,  et  fut  généra- 
lement inspiré  par  des  sentiments  d'hu- 
manité et  de  bienveillance.  Un  de  sos 
premiers  poèmes  eut  pour  objet  un  éta- 
blissement de  bienfaisance  [t/tr  Ali/g- 
daJen  charity],  ouvert  en  1758,  en 
faveur  des  fdies  repentantes,  asile  qui 
ne  put  recevoir  d'abord  que  huit  de 
ces  malheureuses,  mais  qui  prit  par  la 
j!iite  de  l'extension.  Le  philanthrope 
Howard,  qui  s'y  intéressa  efficacement, 
se  plaisait  à  reconnaître  que  les  vers 
de  Jernlngham  avalent  beaucoup  con- 
tribué au  succès  obtenu  en  celle  occa- 
sion. La  i^alrric  s1iuksp!'iiriciinr,  an- 
tre poème  publié  vers  171)1,  et  dans 
lequel  l'auteur  eut  pour  but  ,  non  de 
porter  desjugcrncnls  sur  les  tableaux 
exposés  en  ce  moment,  mais  de  siig- 
gérei  de  nouveau';  '^'l'fî  ••  jionr  enrichir 


JER 

les  expositions  futures,  offre  de  grandes 
beautés ,  et  reçut  du  célèbre  Edm. 
Rurke  des  éloges  exprimés  dans  le  lan- 
gage le  plus  poétique.  Les  divers  ])oè- 
mes  de  Jernlngtiam  ont  été  recueillis 
pour  la  première  fois  en  3  vol.  in- 12  , 
puis  en  179G  ,  en  deux  seulement; 
nous  avons  cette  édition  sous  les '^  eux. 
iSous  y  remarquons  :  les  Madeleines; 
la  Religieuse,  ou  Adéldide  à  son 
amie;  le  Comment;  le  Déserteur  ;  les 
Funéî-ailles  d'Arahert ,  moine  de 
la  Trappe  ;  la  Galerie  shakspea- 
rienne;  Ahailard  à  Hélo'ise  ;  l' En- 
thousiasme. Le  caiactère  de  ces  poé- 
sies est  la  tendresse  du  sentiment,  l'é- 
lévation  de  la  pensée,  l'élégance  du 
style.  Ayant  de  la  disposition  à  la  mé- 
lancolie, Jerningham  réussit  particu- 
lièrement dans  le  genre  élégiaque.  Peu 
de  m^ois  avant  sa  mort,  il  chantait  en- 
core ,  et  son  Adieu  du  vieux  Barde 
n'est  pas  dépourvu  de  mérite.  Il  se  dis- 
posa à  subir  la  dernière  épreuve  de 
toute  existence  humaine,  ens'imposant 
une  étude  tardive  de  la  théologie  , 
supporta  avec  courage  les  douleurs 
de  la  maladie,  et  mourut  le  12  no- 
vembre 1812.  Voici  la  liste  de  ses 
ouvi  âges  ;  J .  Poèmes  et  pièces  de 
théâtre,  O*"  édition,  1806,  4  vol.  II. 
Oraisons  funèbres  et  sermons  choi- 
sis, traduits  de  ]>ossuet,  précédés  d'un 
Essai  sur  l'éloquence  de  la  chaire^ 
3"  édition ,  1 80 1 .  11  ï .  Le  doux  ca- 
ractère fmild  tenour)  du  christianis- 
me, essai,  2''  édition,  1807,  I\  .  Lu 
dignité  de  la  nature  humaine^  essai, 
180.J.  V.  L'Ecole  alexandrienne^  on 
les  premiers  (pd  professèrent  le 
christianisme  dans  Alexandrie,  3*^ 
édition  ,  1810.  Vi.  Adieu  du  vieux 
poète, 2^'  édition  avec  des  additions, 
1812.  L. 

.ÏERPBIAXIOX  (Gabriel-Jo- 
.SF.iMF,  baron  de),  né  au  Puy,  le  15 
mars  17.")S,  d'une  famille  noble,  fut 
nommé,  en  1785,   syndic  du    VeUv  , 


MA\ 


JKK 


iHi 


place  qve  >c»  jncetre»  avaient  occupée 
depuis  un  siècle,  rt  sié-^ea  aux  etjls  de 
I^ii<;uednc  a\aiil  la  re\olulioii.  Arrrié 
pendant  la  terreur  ,  il  re^la  dix-liint 
mois  en  prison.  Appelé,  en  IHOO,  jla 
préfectuic  de  la  Lizrte,  il  pa!».-a,  en 
1H(I2.  a  celle  de  la  Haute  Marne,  et 
fut  désigne,  en  ISO'J,  candidat  au  sr- 
nat,  par  le  dépaileinehl  de  la  lijule- 
Loire.  Louis  W  111  le  nomma  oftiner 
de  la  Lésion 'd'Honneur  et  le  cira  la- 
ron.  1/empereur  Alexandre,  en  IHlè, 
lui  conféra  l'ordre  de  Sainte-Anne,  se- 
conde clas^,  pour  les  soins  qu'il  a\ait 
pris  des  militaires  ru>Nes  qui,  l'année 
précédente,  se  tiou\ aient  dans  la  liau- 
te-Marne.  A>aiit  obtenu  sa  irtraite, 
il  habita  d'abord  >a  terre  de  Juzenne- 
court  dans  le  même  département ,  plus 
tard  il  se  relira  a  Lu>ii.  ou  il  mourut  le 
13a\rillH.Ji.()nadelui  :  1.  Mr/noirr 
sur  la  suri  fuirf^r  iju'tfjroui'e  le  tir- 
partrmrnt  t/f  lu  llautr-Loirr  aans 
la  rrpurtitiun  ^rn fruit-  tits  cuntriliU' 
tions  dirrctes,  le  l*u>,  iT'JT,  in-H". 
11.  SUitistique  du  JrfHjrtrnirnt  tU 
la  Locrr<',  Mende,  1«()1,  in-8".  Jer- 
pliamon  cultivait  auvii  la  nuioismati- 
que,  et  s'était  furnic  une  riclic  collec- 
tion de  monnaies  et  de  médaillcb  anti- 
ques. V !\T. 

JKUVIS  .In UN  ,  comte  de. SViiVi/- 
Vimrnt  .  amiral  .m^laia,  naquit  le  9 
janvier  17:»V,  a  Meaford,  comte  de 
Staiïord.  Kiilré  au  service  dès  r.if^e  de 
dix  ans,  il  na\if;ua  acli\cment  et  fruc- 
tueusement. Les  expéditions  diri;;ees 
en  17r>9  contre  (^)uebec,  et  eu  17(i2, 
contre Terre-NeuNe,  lui  donnèrent  l'oc- 
casion de  se  dislin;;uer.  Kn  1772,  il 
commandait  V  Alurme,  de  32  canons, 
le  premier  bâtiment  de  la  marine  an- 
glaise qui  fut  double  en  cuivie.  l'a->é 
sur  le  Foudroyant,  de  8i,  il  fil  pûilie 
de  la  ilolte  de  la  i^Ianclie  jn<qu  en 
1778;  captura  la  fréj;alc  française  la 
Fa  lias  .et  se  trouva  au  coi|ibat 
d'Oue^saut  livre  pai  le  comlc  d'Onil- 


liers  a  rainu al  keppet  ^T.  ces  nom», 
XXII.  :»00,  et  \X\II.  187).  Dans 
ce  combat,  dont  l'Iionneur  resta  au 
pavillon  français,  Jrnis  seconda  avec 
autant  de  valeur  son  amiral  qu'il  mit 
de  loyauté  à  Ir  •   l'accusation 

(|ue  lui  intenta  .  Jannique  de 

n'avoir  pav  vainru.  Il  nioiitûil  encore 
le  yuudru) aiit  lor>que,  le  20  a\nl 
17H2,  au  moment  ou  la  guerre  d'A- 
mérique allait  finir,  il  captura  le  vais- 
seau franl^ais  le  Pégase,  de  7i  ca- 
nons, commandé  par  le  clievalier  de 
Ctllart.  1^  récit  cmpliatique  de  ce 
combat  in-     '  t  mieux  que  lou^ 

lesiaisoiii  iibien,  à  celte  épo- 

que, la    I  '   f  pou\ait    peu 

!»ellatler«l  •'.i.ince a  laquelle 

plu.  lard  elle  pittcndit  avec  plus  de 
raison.  .lervis  arrompaî^na  lord  llov»t 
c!iaif;é,  en  17M2,  de  secourir  la  forle- 
ressede  (îibraltar,  et  prit  paît  au  com- 
bat livre  en  tlel.ors<!iidtlroit.  I^s  élec- 
tion* de  178V  ren\o>erent  »iej;er  au 
parlement,  ou  son  exprr icnce  des  cho- 
ses de  ta  marine  ne  Ict  point  perdue, 
l'romu  au  |;radc  de  contre-amiral  en 
1787.  il  fut  invc  li  en  1790  du  com- 
mandement de  l'e-odre  blaoclie.  Au 
début  de  la  loii;;iie  lutte  niarilime  en 
trepri>e  par  la  république  contre  I  .\n- 
};lelerre,  Tamiral  Jervis  fut  cîiar^e,  de 
concert  avec  le  j;éneial  sir  Charles 
Cirev.  d'aller  ^'emparer  de  nos  élablis- 
semenK  de>  Indes-Occidenlales  qui . 
excepté  la  Maitiniqiie  dont  la  leddi- 
tlon  eut  lieu  le  2ti  avril  179  V,  érhap- 
pèrenl  à  cette  altaque  imprévue.  .Nom- 
mé au  commandement  de  l'escadre 
birtie,  il  succrda,  en  1793  ,  à  l'amiral 
Holhiui  dans  la  Méditerranée.  Jervis 
s«4)orta  ensuite  avec  seulement  quinze 
vais>eaux,  trois  frégates  et  trois  bâti- 
ments lci;crs  contre  la  flotte  espa-nole 
auxordios  «le  Girdova;  l'aMeiiinil  le 
1  i-  fe^i^  1797,  sous  le  cap  Saint- 
Vincciit,  et  lui  enleva  qiulrevai|^tx 
aptisiai  comlat  prolonge.  Les  deux 


i8a 


JOB 


chambres  du  parlement  lui  volèrent  des 
remercîments;   il   fut    créé  comte    de 
Saint-Vincent  y  et  reçut,  avec  la  chaîne 
d'or,  une  pension  de  trois  mille  livres 
sterling  qui,  après  sa  mort,   fut  inté- 
gralement continuée  à  sa  famille.   La 
formidable  émeute  qui  venait  d'éclater 
dans  la  flotte  de  la  Manche  s'étendit  à 
celle  de  la  Méditerranée.  L'amiralJer- 
vis  parvint  à  la  contenir  par  sa  vigilance 
et  sa  fermeté.  Prévenu  de  la  prochaine 
sortie  de  l'expédition  que  le  gouverne- 
ment français  préparait  dans  le  plus 
grand  mystère,  et  dont  le  but,  en  effet, 
demeura  secret  jusqu'à  ce  qu'elle  eût 
abordé  la  terre  des  Pharaons,  il  déta- 
cha aussitôt  Nelson   dans  la  Méditer- 
ranée. On  sait  qu,'après  avoir  passé  à 
toucher  h  flotte  française,  qui  lui  resta 
cachée  par  un  brouillard,  Nelson  vint 
lui  livrer  le  désastreux  combat  du  l*""^ 
août  1798,  au   mouillage  d'Aboukir. 
En  1800,  Jervis  prit  le  commande- 
ment de  la  flotte  de  la  Manche.  L'an- 
née suivante,  appelé  au  poste  éminent 
de  premier  lord  de  l'amirauté,  il  s'ap- 
pliqua à  extirper  des  abus  qui  trouvè- 
rent des  défenseurs  intéressés ,    mais 
assez  habiles  pour  rendre  impopulaire 
son  administration.  Toutefois  l'amiral 
Jervis  semble   n'avoir  quitté  ce   poste 
qu'en  180i,  et  pour  faire  place  à  lord 
Melville,  intime  ami  de  Pitt.En  1806, 
sous  le  ministère  de  Fox,  il  prit  encore 
une  fois  le  commandement  de  la  flotte 
de  la  Manche.  Il   fut  nommé  général 
des  soldats  de    marine  [marines)    en 
1814  i  puis,   l'année  suivante,   mem- 
bre de  la  société  royale.  Enfin,  le  19 
juillet   1821  ,  jour   du  couronncnftnt 
de  George  IV  ,  il  fut  élevé  à  la  dignité 
d'amiral  de  la    flotte.    Le  comte    de 
Saint-Vincent  était  d'une   petite  sta- 
ture, mais  d'un  caractère  imposant.  11 
mourut  le  26  mars  1823,  dans  sa  qua- 
tre-vingt-dixième année.       ^ — u. 

.  4É^I^>  premier  patriarche  de  l'église 
russe,  fut  élevé  à  cette  dignité   le  23 


JOB 

janvier  1589.  Jusque-là  l'église  grec- 
que ne  connaissait  que  quatre  patriar- 
ches, ceux  de  Constantinople,  d'An- 
tioche,  d'Alexandrie  et  de  Jérusalem. 
Boris  Godounoff(Koj.  Godounoff  , 
XVII,  570),  qui  sous  le  tzar  Fédor 
commandait  en  maître  et  qui,  après  ia 
mort  de  ce  prince,  monta  sur  le  trône, 
résolut  de  chercher  un  appui  dans  Job 
qu'il  avait  fait  nommer  métropolitain 
de  Moscou.  Le  patriarche  d'Antioche 
élént  venu  (1586)  dans  cette  capitale, 
pour  y  recueillir  des  aumônes,  Boris 
lui  témoigna  le  désir  d'établir  un  pa- 
triarche en  Russie.  Cette  proposition 
fut  agréée  par  le  clergé  grec;  Jérémie, 
patriarche  de  Constantinople,   se  ren- 
dit en  1588  à  Moscou,  et  chargé,  com- 
me il  le  disait,    de  pleins  pouvoirs  de 
l'église  grecque,  il  sacra   patriarche  le 
métropolitain  Job    que  le  tzar   avait 
choisi.  Api  es  la  cérémonie,  le  tzar  re- 
mit à  Job  sa  crosse  patriarcale  en  lui 
ordonnant  de  se  nommer  U  chef  des 
évé(fues,   le  père  des  peres^    et  le 
patriarche  des  pays  septentrionaux, 
par  la  grâce  de  Dieu  et  la  volonté 
du  tzar.  Afin  de  consolider  la  préten- 
due suprématie  de   l'église  russe,   on 
dressa  une  charte,  dans  laquelle  il  est 
dit:  «   L'ancienne  Rome  est  tombée 
«   par  l'hérésie  d'Apollinaire  ;  la  nou- 
u  vclle  Rome,  Constantinople,  est  au 
«  pouvoir  de  la  race  impie  des  Sarra- 
«   sins  ;  la  troisième   Rome  est   Mos- 
«  cou.  Au  lieu  du  faux  chef  de   l'é- 
«  glise  d'Occident,  le  premier  prélat 
«   œcuménique  est    le  patriarche    de 
«   Constantinople;     le   second    celui 
et  d'Alexandrie  ;    le    troisième    celui 
«   de  Moscou  et  de  toute  la  Russie; 
«   le  quatrième  celui  d'Antioche,  et  le 
a   cinquième  celui   de  Jérusalem.    En 
«   Russie,  on  priera  pour  le  patriarche 
«<  de  la    Grèce,  et  en   Grèce  pour  le 
«   nôtre  qui  dorénavant  et  jusqu'à  la 
«  fi/i  du  monde  sera  choisi   et  consa- 
«  crc  à  Moscou,  sans  que  l'on  ait  be- 


JOB 


JOB 


t83 


•  50III  àe  ipriiunr  iu  cootentcment 
«  ou  à  l'jpprultali.tn  du  clcr^c  j»ief . 
«  Il  V  aura  5UUS  le  palrurrlie  quatre 
•«  luelropnlitaiii^:  à  No\»;^oro«l,  a  ka- 
•<   tan,  à  Uo>t«>iï  et  a    k.ruulil>L  ;  six 

•  atclie^rques,  a  N  olo^tla,  àSou^tdal, 

•  À  Ni^tP;;uro(J,  àSmoleii&k,  à  Krua 
«  cl  .1  Iwcr  ;  huil  évèqufi,  à  l*»koff, 
"  a  \\\t(,  àOustiou^,  a  Hidozero,  k 
-  Kniomna  ,  à  Droilref,  et  dan»  le 
■  pa>s  de  Siéwiecx  (I).  ■  Job,  éle- 
vé par  Horis  ,  fut  reconnaissant.  Il 
approuva  Tls^ssinat  du  jeune  prince 
Demcirius  [l'uy.  ce  nom,  lAll  , 
.'Utij  ;  après  la  mort  de  Kcdor,  il  pro- 
clama lloris  tur  de  Moscou  et  de  la 
Uuvsie.  et  le  '20  feuier  i:>'J9  il  le  sa- 
cra et  le  rouroniia  en  prrsence  des 
grands  de  Tempife.  Le  faui  Drinetrius 
étant  eiitréà  Moscou  (lt»0.')',  le  pa- 
triarche Joli  lut  saisi  au  moment  ou  il 
célébrait  la  messe  dans  l'i-i^iise  de  l'As- 
somption ;  dépouille  de  ses  babils  pon- 
tiàcaui ,  il  fut  re\étu  d'un  manteau 
noir,  traîné,  insulte  dans  le  temple, 
jeté  sur  un  chariot  et  conduit  dans  un 
couvent.  In  prélat  ;;rec,  Ignare,  ar- 
chevêque de  Chypre,  nomme  patriar- 
che par  l'imposteur,  sacra  et  couronna 
le  nouveau  tzar.  Job,  tres-a\ancc  en 
à;;e.  mourut  dans  son  couvent,  (i — Y. 

•lUBKK  1  ^V.-CiAURiti)  ,  né- 
gociant à  i'aris,  embrassa  avec  beau- 
coup d'ardeur  la  cause  de  la  re\olu- 
tion,  fut  surcesslxement  clecleur,  offi- 
cier municipal  de  cette  ville  et  a;;eiit  de 
police.  Il  déposa  contre  la  reine  Marie- 
Antoinelte  dans  le  procès  qui  lui  fut  fait 
par  le  tribunal  révolutionnaire  de  Pa- 
ns. Quelques  jours  auparavant,  il  a>ait 
été  chassé  de  la  municipalité  pour  vol; 
mais  Kobesplerre  l'avait  fait  reinlé- 
f;rer.  Au  9  thermidor  an  II  ^27  juillet 


(i)  O  ncuTel   ordre  Ar  cbotrt  4<>r«  r«>f<t    «lu 
au».  l'irrrr-lc-Crand  rnlouldit  1«  ■  "i 

jKjtrijrvhr  rt,  Toubiit  rrj^ncr  ni  >< 
.ibulit    le   litrr  de    pairurcbe;    >  ut 

supprimé  celui  de  uetropnlitaiii  ,  %  tl  n'c:!  axjit 
irouTc  qu'uM  stul  à  la  leie  de  régli»«  ruM*. 


1794),  il  prit  part  i  la  révolte  de  la 
commune  en  faveur  At  son  protecteur, 
fut  mis  hor»  la  loi  avec  ses  collègues, 
et  comme  eui  eiecute  le  surlendemain, 
11   iherinulor.  /,. 

J  O  ï\  W  Z  (KmmaW!  rj.)  ,  membre 
de  la  chambre  des  députes,  naquit  en 
177.*>a  Morei,  petite  ville  du  Jura, 
qui  date  de  moins  d'un  siècle  ,  et  dont 
le  rapide  accroissement  est  en  partie 
rou^ra(;e  de  %on  père,  mort  il  v  a  quel- 

3aei  années  ,    laissant    la    réputation 
\n  habile  négociant  ^IV  Après  avoir 
achevé  ses  éludes   i    Besançon  ,  il  alla 

rtuiser  à  l'aris  dans  les  leçons  des  plu» 
labiles  professeur»  celte  pureté  de  goût 
qu'on  remarque  dans  !ves  e^»ais  litté- 
raires. Atteint  par  la  conscription,  il 
fut  incorpore  dans  un  régiment  ;  mais, 
peu  propre  au  service,  il  ne  tarda  pas  a 
solliciter  et  a  obtenir  son  congé.  Dès  ce 
temps-la  (luehjues  vers  dans  lesquels  il 
conbait  a  l'amitie  ses  innocents  projets 
furent  inséré»  a  son  inso  dans  les  jour- 
naux fi),  et  lu:  valurent  des  éloges  qu'il 
n'avait  pas  rectierchés.  Aussitôt  qu'il 
fut  libre,  il  revint  à   l'aris  ou   il  passa 

fdusieurs  années  dans  la  société  de» 
ittrrateurs  les  plus  distingués  de  l'é- 
poque, l'alissot  conçut  pour  lui  beau- 
coup d'e>time;  et,  dans  une  nouvelle 
édition  de  ses  Mrn.itirts,  lui  prédit 
••  des  succès  brillants  dans  la  poésie, 
"  s'il  continuait  de  s'y  livrer  avec  cette 
«  émulation  courageu.se  qui  annonce  à 
«<  la  fois  le  vrai  talent  et  qui  en  assure 
«  la  gloire  »  [Œuires  complètes^ 
IV,  3î)6).  Mais  Jobez,  soumis  aux 
désirs  de  son  père,  retourna  dans   sa 


'i)  Avant  1734,  l'etnitlaceniriit  de  la  priits 
«ille  de  Morei  o'rtait  qu  un  drtcri  ,  ellr  a  maïu- 
^^B*nl  One  pnpuUliao  da  jooo  iiiJlTidua. 
J.B.  I>olard  de  ^aini-(.laude.  cjui  le  pr«i»iier  y 
cou«'tui«it  un«  nainr,  cti  fut  le  rrritable  fnii- 
dateur.  Ko  iliq.  (.laude  Jobci.  père  du  depolé 
qui  f4il  le  »t.|ei  dr  tel  ar. icic.  y  f.  nda  un  hos- 
pice auquel  il  a»«i|;na  1800  franc»  de  raveunt 
(Vos.  \r%  J»'mtii«mj.  par  D.  Monoirr.  «ij,  t-'i). 
(à)  t'r^gmemti  d'une  Efùr*  a  Au^.  Cad/, 
Moailanr,  ao  l\.  4? 


i84 


JOB 


famille;  et  dei-lors,  oblige  de  s'appli- 
quer au  commerce,  fut  forcé  d'ajourner 
l'exécution  des  divers  ouvrages  qu'il 
avait  ébauchés.  Devenu  maire  de  Morez , 
11  donna  ses  soins  aux  établissements 
que  réclamait  Tinduslrleuse  population 
de  celte  ville.  En  1815,  il  fut  élu  pen- 
dant les  cent-jours  membre  delà  cham- 
bre des  représentants;  mais  il  ne  se  fit 
point  remarquer  dans  cette  assemblée. 
Après  le  second  retour  du  roi,  il  fut 
nommé  par  ordonnance  président  du 
collège  du  département  du  Jura,  et  réélu 
député.  Dans  celte  session,  il  se  réunit 
à  la  rainoMlé  qui  vola  pour  les  projets 
du  ministère,  attaqué  par  le  côté  droit. 
N'a>ant  pu  prononcera  la  tribune  son 
opinion  sur  la  loi  d'amnistie  qu'il  vou- 
lait telle  que  le  j^ouverneraent  l'avait 
présentée,  il  la  lit  imprimer.  Le  5  mars 
1816,  il  parla  contre  le  projet  d'attri- 
buer au  roi  la  faculté  de  faire  des  ad- 
jonctions aux  collèges  électoraux  quand 
il  le  jugerait  convenable.  L'ordonnance 
du  5  septembre  ayant  pronoiicé  la  dis- 
solution de  la  chambre,  Jobez,  con- 
tinué par  le  roi  dans  la  présidence  du 
collège  de  son  département,  fut  réélu 
député.  Dans  la  session  de  1817,  il 
attaqua  vivement  le  budget  du  ministre 
de  la  guerre  (Clarke,  duc  de  Fehre), 
auquel  il  reprocha  plusieurs  illégalités; 
et,  quoique  son  discours  n'eût  été  en- 
tendu qu'avec  une  extrême  défaveur 
par  le  coté  droit,  la  chambre  en  vota 
l'impression.  Il  fui  réélu  député  pour 
la  quatrième  fois  en  1820  ;  mais,  celte 
fois,  malgré  le  mi.'jiitère  qui  fit  tous  ses 
efforts  pour  Técarler.  Lors  de  la  dis- 
cussion de  la  no;:vclle  loi  électorale, 
il  soutint  que  le  gouvernement  n'avait 
pas  le  droit  de  uioJificr  le  svsteme  d'é- 
lection établi  par  la  cliarte,  et  i  epoussa 
dx  même  l'ainendement  de  M  I>oin,qui 
cependant  fut  adopté.  Le  7  avril  Î82I , 
il  comballilla  proposition  de  ALSiricvs 
«Je  Mavrinhac,  qui  deniandait  qf:c  b's 
oral  CUIS  r^poelés  à  l'ordre  fusienl  obli- 


JOD 

gés  de  quitter  à  l'instant  la  tribune. 
Les  collèges  électoraux  avant  été  con- 
voqués d'après  la  nouvelle  loi ,  Jobez 
cessa  de  faire  partie  de  la  députatioii 
du  Jura;  mais,  en  1828,  il  fut  élu  par 
le  collège  de  l'arrondissement  de  Be- 
sançon. Après  la  session,  il  s'empressa 
de  retourner  dans  sa  famille.  Le  9  oc- 
tobre, il  était  allé  visiter  un  de  ses  amis 
à  quelques  lieues  de  Lons-le-Saulnier  ; 
en  revenant,  le  cheval  qu'il  montait 
s'emporta,  et  quoique  excellent  ca- 
valier il  ne  put  s'en  rendre  maitre. 
Lancé  rudement  contre  un  mur,  tous 
les  secours  qu'on  s'empressa  de  lui 
porter  furent  inutiles  ,  et  il  expira 
quelques  instants  après,  à  l'âge  de  cin- 
quante-trois ans.  Sa  mort  fur  un  sujet 
de  deuil  pour  le  Jura.  Tous  les  partis  se 
réunirent  pour  le  pleurer.  Ses  restes  , 
transportés  de  Lons-lc-Saulnier  à  Siam 
où  il  venait  d'élabiir  une  dc^  plus  bel- 
les fo'  ges  de  la  province,  furent  accom- 
pagnés par  une  foule  immense.  I>a 
description  fit;  ses  obsèques  a  été 
imprimée  in-S'\  Jobez  était  un  hom- 
me de  mœurs  douces  ,  faisant  le  bien 
sans  ostentation  et  cachant  sous  àts 
dehors  simples  et  modestes  des  con- 
naissances étendues  et  variées.  Outre 
des  discours  et  des  opinions  imprimés 
séparément  ou  recueillis  dans  les  jour- 
naux on  ad  elui:  Epilreà  Palissot 
pur  un  habitant  du  Jura  ,  Paris  , 
1806,  in-8".  Le  sujet  de  celle  épilre, 
dans  laquelle  on  reconnaît  un  écrivain 
nourri  de  la  lecture  de  Boileau,  est 
Valliunce  d'un  esprit  satirique  et 
d'un  hon  cœur.  Il  a  laissé  manuscrit 
un  poème  intitulé  :  les  Eléments; 
le  chant  àjjcu  qui  contient  une  des- 
ciiption  t.^es  remarquable  ^cs  forges, 
est  imprimii  dans  le  Recueil  de  i'aca- 
déniio  de  Besançon,  année  1808.  L« 
purtrtiil  de  Jobez  est  gravé  iii-i°. 
W— s. 
JODOC5  S  SIXCEKl  S.  T 
Zi.%zrr,Li>G,  Llf,  370. 


JOD 


jon 


i85 


JOIIRKLL   '  Ki(:h«iii>-Faii    , 

litirrjirur  iUji^lâitN,  na<]Uit  i)an«  Ir  ronile 
-ir  s  ,  •    ,1,  If  \:\  no%.   1715.   Sa  fu- 

i: •     ^^iiaiffiuciil    établie  ilaii»   \e 

riiiiilc  (le  l)rtb> ,  fiait  a  rai%r.  Son  Lis- 
jiVul  [lalrnirl  a\ait  rrm|ili,  qiiaranlr- 
Irois  ans  durant,  les  fonctiou^  de  clerc 
de  la  riiambre  des  coinrounes;  M>n  pete 
rlail  >olliciteur-;;eneral  du  prince  de 
iailei,  fiU  de  (ieor^e  II  el  père  de 
(teor;;e  III,  et  à  ce  titre  fut  initie  aut 
Mitri^ues  du  parti  de  I^ire«lerliouse. 
^a  mort  prématurée,  en  1701,  laissa 
.lodrell  en  posse^jion  d'un  riche  hé- 
ritage, lont;-lrmps  a«ant  (fu'il  eût  at- 
teint Si  majorité  :  il  a\ait  i\tu\  frères, 
mais  ronformement  a  l'usa^iede*  pran- 
dr  laiiiillc>  en  Aiif;leterre,  c'est  a  lui 
(]iir  loi.t  lui  dr\()lu  m  sa  ijualile  d'aine. 
(>eu\-ci,  du  reste,  firent  lieureusemenl 
leur  clirraiu  :  l'un,  sir  l*aul, après  a\oir 
rti^u  if  tilre  de  Lni^lit  en  17K7,  de*inl 
incdetin  du  nabab d'Ai rot  '•t  mourut  en 
1K03  a  Madras;  l'autre,  qui  se  nom- 
mait lienn,  suivit  la  rairirre  des  loi»  à 
l'e&emple  de  son  père,  et  Gnit  par  join- 
dre a  une  place  dans  la  commission 
de»  banqueroiiies  un  sif  ^f  a  la  chambre 
des  communes.  Pour  Hichard,  aranl 
aclievé^ev  éludes  aux  col|i*ues  d'Kloii  et 
de  llnlfotd,  il  se  li\ra  aux  letlies, 
n)èlaiilen>eniblepariin  amal;;ame  assez 
elran;;e  la  se\ere  philohipie  et  le  théâ- 
tre. Ainsi,  eu  1778,  on  le  vil  fournir 
des  notes  a  V Esihylr  de  Potier,  cl  en 
1779  il  donnait  à  HavmarLel  une 
comédie  en  trois  aciei,  la  l  eu\'c  qui 
a  enrure  son  muri  (a  W  idow  and 
no  Widow).  En  1781,  il  faisait  pa- 
railiede  lon;;ues  etutJrs>ur  deux  pièces 
d'Kuiipide;  cl,  en  MH.i,  on  le  >owil 
se  rabnllre  de  nouveau  sur  llaN  marlet 
et  \  ofîiir  au  pablic  sa  binette  en  un 
arli-,  /  air  c'est  croire.  11  continua 
aiUM  l'Ciidanl  plusieurs  années  ,  nuis 
e/ideuiiiieiitetu  Jiîdsc::;iicur,  ncchcr- 
iImiiI  dans  la  bllcialuie  cl  l'élude 
qu'un    pjr>c-lcmps  et    ne   ^c  berçant 


point  des  chimrres  de  gloire  ,  ajoutant 
à  son  lilre  de  mombrr  de  la  sociftr 
rovale  àr  Kondies  qu'il  avait  depuis 
1772,  et  que  tout  If  monde  peut  avoir 
pour  son  ar«;eiil,  rclm  de  membre  de  b 
socielédes  aiiliquairr»  178^1,  et  de 
membre  du  club  d'tUsex  llead  pour  le 
soula;;ement  des  vieux  jours  de  John - 
•ou.  sr  faisant  ircrvni.  i!  n  Iftîrrs-loi* 
à  (Hford  en  17U.'),  et  nommer  jn;;e  de 
paix  pour  Irt  comtes  d'Oxford,  de  l)er- 
bv,  de  NorfolL,  de  Middlrsex;  et,  au 
milieu  de  tout  cela,  songeant  de  temps 
à  autre  a  jouer  un  ri\le  politique  et  .i 
entrer  au  parlement.  Il  parvint  en  ef- 
fet, aux  élections  ;;enerales  de  1790, 
à  se  faire  nommer  reprrsentant  pour 
Seafurd;  mais  il  ne  ve;;eaqne  provisoi- 
rement, et  (inalemeiit  un  concurrent 
jalons  parvint  à  le  faire  exclure  comme 
indûment  élu,  le  19  mars  1792.  Ses 
commettants  cependant  le  irnninmé- 
rent  en  179i,  et  cette  foi*  il  fut  admis. 
Mais  la  disMilution  du  parlement,  en 
1796,  le  replaça  de  nouveau  dans  la 
foule  ;  il  recula  devant  les  frais  énormes 
d'une  réélection,  et  des-lor>il  annonça 
(|u'il  préférait  son  repos,  il  eut  pu  due 
son  argent,  aux  asitatioiis  de  l'arène 
politique,  qui  probablement  ne  l'eussent 
point  indeiniiisr  de^  drUiurs  nécessai- 
res pour  voilurer,  heber/,er  et  tenir  en 
bonne  humeur  ses  parli.sans,  pour  ho- 
kussrr  el  faire  verser  en  route  .ses  an- 
tagonistes. Celle  vie  paisible  et  lé^^ère- 
ment  occupée  prolongea  ses  jours,  mais 
insensiblement  ses  facultés  mentales 
bais>crent  :  en  iH'I'I  il  fut  chéciaic  en 
enfance,  et  Ton  nomma  un  curateur 
pour  veiller  à  sa  personne  et  à  ses  biens. 
Il  vécut  encore  ainsi  neuf  an*.  Sa 
mort  eut  lieu  le  2G  janv.  1831.  On  a 
de  lui  :  I .  Etudes  ^o\x  Kc!airr!sscnienls), 
sur  CI  on  et  sur  les  IUicl  hantes 
tV  Euripide  ^en  anglais.  Illustrai  ions 
of  Euripides  on  the  Ion,  etc.  ,  Lon- 
dres, 1781.  2voI.iii-8'.  W.  Etudes 
(  ou  Eclaircissemenls  )   sur  Alceste  , 


i86 


JOH 


Londres,  1790,  in-8°.  III.  Quatre 
lettres  sur  un  manuscrit  d'Euripi- 
de, anciennement  en  la  possession  de 
Milton  (dans  les  Mémoires  de  Cra- 
dock,  tora.  IV).  IV,  Diverses  piè- 
ces de  théâtre  (outre  les  deux  dont  il 
a  été  question  plus  haut  ;  la  Veuoe 
qui  a  son  mari;  Croire  c  est  voir ^ 
ùnpriraées  en  1780  et  1786),  sa- 
voir :  une  tragédie  intitulée  :  l'Hé- 
roine  persane^  1786,  in-8*^  et  in- 
4°  ;  Qui  a  peur,  farce  en  un  acte  ;  la 
Pension  de  demoiselles  ,  comédie  ; 
Un  et  tous,  farce  ;  le  Traoestisse- 
ment ,  comtà^xt  ;  le  Musicien,  hvce  (les 
cinq  dernières  réunies  en  un  volume  , 
sous  ce  titre  :  Choix  de  pièces  dra- 
matiques). La  trao;édie  n'avait  jamais 
été  représentée^  bien  qu'offerte  succes- 
sivement aux  directeurs  de  Covent- 
Garden  et  de  Drury-Lane.  Dans  sa 
première  comédie,  la  Veuoe,  Jodreli 
avait  dépeint  des  personnages  réels  et 
connus.  V.  Le  chevalier  et  les  moi- 
nes, conte  tiré  du  rjvausTov  de  Th. 
Hevwood.  P — OT. 

J01IA\\0T  (Charles  Hen- 
ri-Alfred), graveur,  dessinateur  et 
peintre  distingué  de  Técole  française, 
naquit  le  21  mars  1800,  à  Offenbach- 
sur-le-Mein,  dans  le  grand-duché  de 
Hesse,  de  François  Joharmot,  riche 
négociant  de  Francfort  ,  et  dWnne- 
INIarle-Klisabeth  Gevss,  d'une  famille 
riche  ,  alliée  aux  liethmann,  célèbres 
banquiers  de  cette  ville.  Il  descendait, 
du  coté  paternel,  de  l'une  de  ces  famil- 
les de  religioFinaires  que  la  révocation 
de  l'édit  de  Nantes  força  de  chercher 
un  refuge  à  l'étranger.  Johannot,  un  de 
ses  ancêtres,  avait  porté  en  Allemagne 
cette  fabrication  des  beaux  papiers 
d'Annonay  qu'il  avait  été  contraint 
d'abandonner  en  France,  et  que  con- 
tinuent aujourd'hui  encore,  au  même 
lieu,  les  descendants  d'une  branche  d<.'  la 
même  souche.  Envoyé  de  bonne  heure 
à  Lyon  pour  y  étudier  le  commerce,  et 


JOH 

appelé  à  jouir,  un  jour,  d'une  immense 
fortune,  le  père  du  peintre  voulut,  à  l'i- 
mitation  de  son  aïeul ,  consacrer  de 
grands  capitaux  à  la  création  d'une 
nouvelle  industrie  dans  la  patrie  adop- 
tivc  de  sa  famille.  N'ayant  encore  que 
vingt-deux  ans,  il  enrôla  des  ouvriers 
lyonnais ,  acheta  des  métiers,  et  alla 
fonder  ,  en  Allemagne  ,  la  première 
grande  manufacture  d'étoffes  de  sole 
qui  y  ait  été  établie.  Inventif,  indus- 
trieux. Instruit,  Il  aimait  à  s'entourer 
d'artistes  et  de  gens  de  lettres,  et  don- 
nait même  à  la  culture  de  la  littéra- 
ture et  des  arts  plus  que  ses  loisirs. 
Il  peignait  les  fleurs  avec  beaucoup 
d'agrément  ,  et ,  à  l'àg*  de  quatre- 
vingts  ans,  11  reprit  ses  pinceaux  et 
produisit  encore  des  œuvres  d'une  fer- 
meté rare  et  du  sentiment  le  plus  heu- 
reux. Bien  avant  Sénefelder,  il  avait  im- 
primé lithographiquement  de  la  musique 
à  Offenbach,  et,  le  premier,  il  Importa 
la  lithographie  en  France.  Ce  fut  au 
milieu  du  cercle  éclairé  dont  s'entourait 
son  père,  que  s'éleva  la  tendre  enfance 
d'Alfred  ;  et  ces  premières  impressions, 
qui  laissent  à  l'esprit  et  au  cœur  des  tra- 
ces si  longues  et  si  profondes,  ne  furent 
pas  étrangères^  la  vocation  qu'il  an- 
nonça, dès  avant  l'âge  de  raison,  pour 
la  carrière  où  l'attendaient  de  si  bril- 
lants succès.  L'enfant  artiste  le  plus 
heureusement  doué  ,  s'il  grandit  au 
sein  de  toutes  les  aisances,  de  tontes 
les  aimables  distractions  de  la  vie,  rare- 
ment parvient  à  la  renommée.  Le  plus 
souvent  il  mollit  et  s'éteint  dans  une 
sécurité  lmpui.%anle,  et  ne  sait  pas 
payer  assez  cher  une  gloire  qui  ne  se 
donne  jamais.  Celle  d'Alfred  lui  coûta 
cher,  car  son  père,  ayant  essuyé  des  re- 
vers de  fortune,  se  vit  contraint  de 
venir  se  fixer  à  Paris,  en  1806,  avec 
sa  famille  ;  et  ce  ne  fut  qu'après  les 
j>lus  longues  épreuves,  les  plus  pénibles 
luttes,  que  le  jeune  Alfred  conquit  une 
position  digne  de  son  courage  et  de  ses 


JOU 

latents  natureU.   Il  n'était  alors  qu  un 
enfant  plein  d'intrlll^ence.  Sa    roere, 
personne  Je  (;ranJ  mérite,  d'un  e^jn  il 
^érieul  et  cultivé,  voulut  se  livrer  veule 
à  son  eduralion  comme  a   celle  de  ses 
quatre  autres  en(ant^  :    tout    ce  qu'ils 
Mirent  ,  ils  le  tinrent  de  ses  lumieies  et 
de  Nj  IendIe^^e.    Oprndant  on  était  à 
celle  cpotiuf  de  splendeur  où  toutes  les 
nrlif  veNdrs  rausrf*  de  l'Italie    s'arcu- 
iiiuljieiit  au  muNce  du  I^uvre.  in  ou 
deui  ans  après  l'enfant  v   fut  conduit. 
A  la  vue  de  tant  de  trésors,  il  est   saisi 
d*une  indicible  émotion.  Sa  jeune  ima- 
gination s'allume,   son  admiration  de- 
vient un  culte,  une  M)rte  de  fanatisme. 
II    n'a     plus   désormais    d'autre    rêve 
aue  de  pavseï  sa  vie  devant  ces  cliefs- 
il'iruvre,  que  de  boire,  pour  ainsi  par- 
ler, la  poéiie  à  sa  source  ;  que  d'être 
admis  à  imiter  ces   monuments  du  ^é- 
nie.  Dès  lors,  icncclii,  feime,  énergi- 
que dans  sa  volonté,  comme  depuis  il  le 
fut  toujours,  il  dit  :    •«   Jr  srrui  ur- 
tistf  !  M  prit  un  ciavon,  et,   dans  tous 
les  instants  de  liberté  que  lui  laissaient 
les  leçons  de   sa  mère  ,   il  se  livra  à 
l'étude  du  dessin  avec  une  ardeur  inex- 
primable :  sa  vocation  était  fuéc.   On 
sait  que  les  galeries  du   Louvre  sont, 
durant  la  semaine,  transformées  en  un 
vaste  atelier  où  se  réunisxcnl  les  jeunes 
artistes  pour  copier  les  tableaux  des  maî- 
tres. Muni  d'une  carte  empruntée  à  son 
frète  aîné,  Charles  Jolianiiot,  j;raveur 
habile,  enlevé,  depuis  lors,  aux  beaiii- 
arts,  au  moment  ou  il  s'v  était  fait  un 
nom,  Alfred  obtint,  malgré  son exlièrae 
jeunesse,  la  faveur  de   travailler   dans 
les  salles.   Un    jour   qu'absorbé  tout 
entier  dans  son  travail  ,   il   ne   voyait 
que  son  modèle,  et  demeurait  étran;;er 
à  tout  ce  qui  se   passait  autour  de  lui, 
soudain   il   sentit   une  main   se   poser 
dourement  sur  son  épaule  ;  il  détourna 
la  tète  et  vil  un  homme  dont  les  traits, 
l'œil  et  le  inaintien  lui  inspireront  un 
sentiment  indéfinissable   de    respect: 


JOH  187 

M  Coora^e,  mon  ami  !  »  lui  dit  celui- 
ci  ,  en  lui  souriant  affectueusement  et 
lui  touchant  la  joue  de  sa  main.  C^t 
homme  était  Napolron  qui  semblait, 
dans  les  premiers  evsais  de  l'enfant, 
avoir  devinr  l'avenir  de  l'artiste.  Mal- 
heureusement, .\lfred  fut  obligé  de  sus- 
pendre ses  travaux  pour  suivre  à  liam- 
bour;;,  ville  alors  lran<;ai^e,  son  père 
que  la  protection  d'un  Ar  srs  patents, 
le  vrnérable  comte  de  lloiw  d'.Vn^las, 
avait  fait  nommer,  par  l'empereur,  in- 
specteur de  la  librairie.  O*  fonctions  le 
mettaient,  de  nouveau,  en  rapport  avec 
tout  ce  qui  tenait  aux  lettres  et  aun 
arts.  I^  vocation  du  jeune  artiste  s'af- 
fermit du  retuur  de  ce»  circonstances. 
Des  collection^  précieu.se>  de  gravures 
furent  mises  à  va  disposition  .  et ,  ^rà- 
ce  aux  oxrelirrils  modèles  qu'il  j  puisa, 
bien  plus  qu'aux  lc(;ons  infécondes  de 
quelques  fjibles  peiiities  d'Ailema;;ne 
qu'il  eut  alors  pour  maîtres,  il  lit  dans 
le  de<sin  de  rapides  propres  que  mal- 
heureusement encore  vinrent  interrom- 
pre les  éveneinenl  poliliuues.  1  out  le 
monde  connaît  le  roemotable  siè^e  que 
soutint,  en  1813,  la  ville  de  Ham- 
bourg, et  les  horribles  assauts  inté- 
rieurs que  la  famine  et  la  contagion 
livrèrent  à  ses  habitants.  I.,es  priva- 
tions, les  cha^iins,  le  tvphus,  les  an- 
goisses de  tout  genre  auxquels  fut  alors 
en  proie  l'infortuné  Alficd,  portèrent, 
à  sa  constitution  déjà  délicate,  une  at- 
teinte dont  il  ne  se  releva  jamais.  De 
là,  cet  aflVcux  mal  dont  le  sic^e  est  la 

fiuitrine.  qui  le  mina  sourdement,  et 
e  conduisit  ,  pas  à  pas,  de  douleurs 
en  douleurs,  à  la  mort.  Après  avoir  ac- 
compagné son  père,  nommé  par  la  res- 
tauration inspecteur  de  la  librairie,  à 
Lvon  et  à  d'autres  ré>idcnrcs,  il  revint 
eriGn  avec  lui,  en  1818,  ^e  fixer  de 
nouveau  à  Paiis.  Là,  il  retrouva  son 
frère  aîné,  Charles  Johannol,  qui  péni- 
blement et  de  tout  son  courage  fondait 
sa  réputation  de  graveur.  Charles  des- 


i8« 


JOH 


sinait  avec  f];oiit ,  {gravait  avec  chariiK*, 
ft  Ton  a  de  lui  de  fort  jolies  vlgneltes 
au  pointillé  d'après  Desenne,  powr  l'or- 
iierneiit  de  livres  ,  notamment  pour 
l'Ermite  de  la  Guyane,  et  une  f;rande 
planciie  fort  bien  exécutée,  le  Trom- 
pette hlesséy  d'après  Horace  Vcrnct. 
Le  laborieux  artiste  devint  la  ressource 
e\  l'asile  de  celte  famille  errante,  bat- 
tue àc  tant  d'oraf2;es  ;  mais  ressource 
insuffisanle  à  laquelle  vint  couraf^euse- 
ment  s'ajouter  le  jeune  Alfred.  Celui- 
ci,  dont  les  éludes,  tant  de  fois  inter- 
rompues, n'étaient  point  achevées,  se 
mit  à  ^aver  sans  relâche,  sous  la  direc- 
tion de  son  Irère,  tout  ce  qui  lui  tom- 
ba sous  la  main.  Ce  furent,  d'abord, 
des  lma2;es  de  confiseur,  puis  des  saln- 
telés  pour  les  Jean  et  les  Bulia,  puis 
enfin  de  ces  suites  de  légendes  sacrées 
ou  populaires  dont  la  reproduction  n'est 
livrée  qu'aux  burins  inexpérimentés. 
Ces  travaux  Ingrats  dévoraient  tout 
son  temps,  et  retardaient  l'essor  de  ses 
dispositions  natives;  mais  jamais  un 
murmure  ne  s'échappa  de  ses  lèvres  ; 
et  le  bonheur  de  contribuer,  pour  sa 
part,  au  soutien  de  ses  parents,  lui  fai- 
sait oublier  l'interruption  d'études  ce- 
pendant si  chères.  Bientôt  son  dévoue- 
ment devait  être  mis  à  de  plus  rudes 
et  plus  solennelles  épreuves:  en  1825, 
Cliailes  mourut  à  trente-sept  ans,  et 
celte  mort  fit  peser  sur  le  jeune  Alfred 
tout  le  poids  qu'à  peine  tous  deux  suf- 
fisaient à  supporter.  Le  jeune  homme 
se  montra  é^al  à  sa  noble  tâche;  11 
l'acccpla  comme  un  devoir  pieux,  avec 
cette  dignité  simple,  celte  sérénité  d'un 
esprit  ferme  cl  (11111  rœui  bien  placé,  et 
il  trouva  dans  .son  aficttion  la  force  de 
Paccomplir  jusqu'au  bout.  Ucspf)niable, 
si  jeune,  du  soil  d'une  nombreuse  fa- 
mille, il  se  recueillit  reli;;!CUsenienl  ;  et, 
.sentant  qu'une  volonté  soutenue  pour- 
rait seule  faire  face  aux  difficulté",  sans 
nombie  qui  l'entouraient  ,  11  adopta, 
de:,  ce  moment,  nue  règle  inflexible  de 


JOH 

conduite  à  laquelle  il  soumit  la  moin- 
dre de  ses  actions.  Ainsi  s'écoulèrent 
ses  plus  belles  années  dans  l'accom- 
pllssement  sacré  des  plus  Impérieux 
devoirs  ;  ainsi  sa  vie  fut  sans  jeu- 
nesse ,  et  il  passa ,  d'un  même  pas, 
de  l'adolescence  à  l'âge  mûr;  ainsi,  son 
caractère  déjà  naturellement  sérieux, 
la  tournure  déjà  naturellement  médita- 
tive de  son  esprit,  empruntèrent,  de 
cette  époque  de  sa  vie,  une  teinte  de 
gravité  plus  profonde;  et  toutefois  jamais 
sérieux  ne  fut  plus  aimable ,  jamais 
solidité  d'esj)rit  ne  fut  accompagnée 
de  plus  d'égalité  d'humeur,  d'une  in- 
dulgence plus  exquise,  d'une  plus  en- 
tière bienveillance.  Mais  revenons  à 
ses  premières  années.  Le  germe  du 
talent  était  là  :  il  cherchait  à  se  faire 
jour  malgré  les  obstacles.  Alfred  gra- 
vait, gravait  jour  et  nuit  :  une  planche 
parut  enfin  :  les  Orphelins,  d'après 
Sclieffer,  laquelle  signala  le  jeune  artiste 
aux  peintres  de  cette  époque  comme 
un  traducteur  plein  d'intelligence  et 
de  sentiment.  Les  peintres  sourirent, 
en  effet ,  à  cet  heureux  début  où  le 
jeune  Alfred  avait  habilement  marié  le 
pointillé,  genre  agréable,  mais  de  peu 
de  ressources,  aux  lignes  plus  sévères 
du  burin.  Gérard,  cet  homme  de  tant 
de  talent  et  d'esprit,  qui  savait  si  bien 
qu'un  des  moyens  de  popularité  pour 
un  peintre  ,  c'est  d'être  gravé  ,  et  qui 
ne  s'en  fit  faute,  encouragea  les  dispo- 
sitions du  débutant  et  lui  confia  la  gra- 
vure en  taille-douce  de  quelques-uns 
de  ses  tableaux  :  d'abord  une  scène  de 
la  charmante  nouvelle  à'Ourikuy  et 
plus  tard  Louis  Xllprese/itufii  Phi- 
lippe K  aiiv  (imlnissadeurs  (ï Es- 
pagne. I/habllelé  qu'il  déploya  dans 
cette  dernière  planche  pour  laquelle  11 
s'est  fait  beaucoup  aider,  mais  à  laquelle 
il  a  donné  le  coup  d'œll  du  maître  et 
la  dernière  main,  la  place  à  \\\\  rang 
honorable  à  côté  des  œuvres  d'un  ordre 
plus  élevé  qui  ont  principalement  con- 


JOH 


JOH 


i.so 


iriUié  à  l'fitfQ&ion  dr  o  réputstioti. 
(^pendant,  lifpuis  \in;;l-ciiiq  anncr», 
l'Aii^Iflrrr*  a\ail  imprima  un  r%^nrf\- 
Iraordinairr  j  la  librairie,  fit  aNsonanl 
l«  art^   (lu  (lc<.^in  au   «sucrés  i\e  ccllft 
branche  d'iniltistrif .   Alors  que  la  paix 
3\.i:l  r(iu>frt  le  rniitiiicnl,  les  merveil- 
les (lu  biiiiii  .iii^la  ^   avaien!   fait    leur 
entrée  Irioinpli.iiile  en  France,  el  «ou-i 
deMunies  leN  (nbnlaires  de  la  (trande- 
Brela;;ne  |>our  ses  ^ple^dide!>  édilion* 
i  Ulustratiuiis.    La   \i(;neUe  de   nos 
voisins  tourna   Inites  les  téies,  devint 
le  point  de   mite,  l'objet    d'étude    et 
dVmulalion     de  quiconque    tenait    le 
luirin  et   la  pointe.    Alors    naquit  un 
^nùt   passionne   pour    les    édilion>   de 
luxe  qui  nous  valut  de  beaux  ou\ra;;es 
t>po^rapiriques    et     chalco;;rapliiques. 
Déjà,  il  e>l  vrai,   les    Didot,    lr>    Ke*- 
nnuard  el  les  (Vapelet  avaient  produit, 
en  ce  penre,   des   monuments  immor- 
tels ;  mais  rien  n'avait  encore  paru  qui, 
sous  le  point   de   vue  de  la  delirate'^ie 
et  du  fini  des  embellissements,  pût  ri- 
Taliser  avec  les   MiUr  et  une  .\uits, 
dont  les    ravissantes  compositions  au- 
raient   suffi    pour    placer    le    peintre 
Smirke  au  premier  ran;;  parmi  les  ar- 
tistes. \x  (jil  IjUix  et  le  Don  (^uixote, 
d'après  le  même  peintre,  vinrent  ajouter 
encore   à    l'enllion^ia^ime    comme    aa 
désespoir  de  nos  ilcs>;n.-iteurs  et  de  nos 
j^raveurs  de  vignettes,  à  qui  cependant 
le  Gîrrej;e  de  la   France,   l'admirable 
l'ierre  IVudhon,  avait  donné  des  lc(;ons 
lieureuses.  Jusque  là,  Moieau  le  jeune, 
M  peu  puissant  dans  se*; efieLs,mai>  si  fin, 
M  spirituel,  si  supérieur,  si  admirable- 
ment habile  à  reproduire  les  scènes  du 
-iorle  de  Louij  XIV  et  surtout  de  celui 
de  Louis  XV,  était  le  modèle  désespé- 
rant des  artistes  qui  cuhiv aient  le  même 
^cnre.  Seul  di°;ne  d'être  cité,  Alexandre 
Desenne  avait  succédé  à    Moreaii  sans 
le  remplacer  ,  et  tenait  alors  le  sceptre 
de  la  vit;nette.   Alfred    Johannol,  en 
attendant  qu'il  prît  un  plus  haut  vdl, 


nf  pâH\aii  rester  étranger  à  ce  mnuviv 
ment  de  l'une  des  branches  les  plus  ti- 
vaces  de  l'art.  Il  rtaî^,  eneiïet,  de  ceux 
que  les  succ^  de    la   vi;;netle  aiif;lal*c 
empêchaient  de  dormir  ;  il  iravaillaà  l'é- 
{i;aler,  et  nou«  allons  le  voir, m  ce  ;;enre, 
marquant  forlrmrnt  son  époque  du  ca- 
chet d*"  son  talent,   soit  qu'il  ait  reçu, 
soit  qu'il  ait   donné  l'impul  ion  comme 
graveur,  dessinateur  ou   peiitre.  D'a- 
bord, il  se  ran;;ea  smis  la  bannière  du 
timide  nnvaeur  Devenne,  et  {:rava,  ib 
la  manière  an;;laise,   bon  nombre  des 
compositions  de  ce  talent  un  peu  froid, 
mais  plrin  de  ;;oût  et   de  ^race.  Desen- 
ne,  homme*  instruit,  orné  d'une  ;;rande 
lecture,   doue  d'une   justesse   exlréme 
d'idées  sur  les  arts  .  apprécia  vivemeat 
le  caractère  mm,  l'esprit  droit  el    le  ta- 
lent fécond  de  Johaniiot.  Il  lui  donna 
des  directions  et  des  conseils,  et,  sou* 
les  veux  itnis  de  ce  maiire    indul^ent, 
Alfred,  d'abord  timide,   plus   confiant 
ensuite  en  ses   propres   forces ,  essava 
ses  premières  compositions;  et,  tandi.* 
qu'il  préludait   ainsi  dans  le  silence   à 
ses  grands  succès  en  ornement  de  livres, 
dessins,aquarelles.  gravure  de  vignette, 
gravure  de  grande  planche,  tout  mar- 
chait à  la  fois  el  sans  se  nuire,  et  prou- 
vait la  merveilleuse  souplesse  de  ce  ta- 
lent   multiforme.    Grpendant,    .^iir  les 
traces  de  Desenne  ,    avait  apparu,   de 
pnme-saut,  un   homme    pourvu  de   la 
plus    heureuse    or;;anisation,    sachant 
d'un  tour  de  main  triompher  de  toutes 
les  difficultés  de  l'art  au  ^\é  d'un  caprice 
improvisateur,  Achille Devéria;  et  seul, 
en  elTet,  à  la  mort  de  cet  artiste  aima- 
ble, Achille  demeura  un  instant  en  pos- 
session des  illustrations  biblio;;raphi- 
^es.  Alfred  voulait  se  soumettre  en- 
core à  de  nombreuses  épreuves,  avant 
ilcnlrer  dans  la   lire  et  de  disputer  la 
palme  à   l'heujeux    siirresseur  de  son 
ami  ;  mais  la  lilho;;rai'Mie  ne  tarda  pas 
à  rendre  celui-ci  infuiele  à  sa  première 
vocation;    vint   Jolannol    qui  dnnita 


igo 


JOH 


par  terminer  quelques  vignettes  laissées 
inachevées  par  Desenne,  et  quelques 
jours  encore,  et  il  régna  seul.  Seul  ?non, 
car  à  côté  de  lui  s'élevait  un  plus  jeune 
frère  ,  Tony  ,  artiste  aussi,  plein  d'es- 
pérance et  d'avenir,  l'un  des  membres 
de  cette  famille  que  la  jeunesse  d'Alfred 
avait  adoptée.  Tony  avait  grandi  à  côté 
de  son  frère,  plein  d'une  respectueuse 
déférence  pour  le  savoir,  pour  l'expé- 
rience précoce,  pour  la  vertu  bienveil- 
lante et  sans  faste.  Il  avait  grandi  en 
âge  et  en  habileté  ;  et  bientôt,  côte  à 
côte  avec  Alfred,  il  marchait  de  con- 
cert ,  d'une  même  allure,  aux  mêmes 
luttes,  aux  mêmes  triomplies  :  graveur 
avec  le  graveur,  dessinateur  et  peintre, 
avec  le  dessinateur  et  le  peintre  ;  spec- 
tacle unique  et  touchant  d'une  triple 
fraternité  du  sang,  de  l'esprit  et  du  ta- 
lent. Nulle  affection  n'était  plu.s  sin- 
cère, nulle  plus  pure,  nulle  plus  entière. 
Alfred  et  Tony,  Tony  et  Alfred,  deux 
talents  jumeaux ,  une  seule  et  même 
existence ,  une  seule  àme  en  deux  corps. 
Dès-lors,  à  ce  période  du  moins^  l'his- 
toire de  l'un  est  celle  de  l'autre.  La 
part  qu'eut  celui-ci  dans  les  composi- 
tions de  celui-là,  qui  le  saurait  dire? 
ils  ne  l'auraieFit  su  dire  eux-mêmes, 
tant  leur  vie  d'intelligence  était  mise 
en  commun  !  Interprètes  d'abord  des 
oeuvres  d'autrui,  après  avoir  prêté  à 
d'autres  le  passeport  de  leur  burin,  ils 
volèrent  bientôt  de  leurs  propres  ailes, 
et  gravèrent  les  dessins  dont  ils  étalent 
les  auteurs.  L'eau-forte,  cultivée  d'une 
façon  si  brillante,  par  les  maîtres  an- 
ciens et  par  quelques  modernes,  devint 
leur  procédé  favori,  comme  répondant 
mieux  par  la  promptitude  de  l'exécu- 
tion à  la  promptitude  de  leur  pensée; 
et  des  collections  de  vignettes  pour  les 
fiîuvrcs  de  VValter  Scott,  de  l'améri- 
cain Cooper  et  de  lord  liyron  virent 
le  jour.  Presque  à  la  fols  ils  trouvaient 
le  temps  de  publier  encore  une  raulli- 
lude  d'autres  vignettes  où  l'imaglna- 


JOH 

tion,  l'esprit  et  la  grâce  se  disputaient 
le  mérite  de  l'exécution.  Il  n'est  pas  un 
grand  nom  littéraire  en  France  qui 
n'ait  travaillé  avec  les  deux  frères,  pas 
une  édition  de  luxe  que  n'aient  enrichie 
leurs  dessins.  C'est  alors  que  le  plus 
jeune  des  frères  orna  tant  de  livres 
de  dessins  sur  bois  que  grava  Perret, 
et  que  son  crayon  spirituel  lutta  de 
verve  et  d'originalité  avec  l'auteur  du 
lirre  bizarre  du  Roi  de  Bohême  et  ses 
sept  châteaux ,  débauche  d'esprit  , 
mais  d'un  esprit  supérieur.  C'est  donc 
plus  particulièrement  le  jeune  Tony, 
et  avant  lui  Achille  Devéria ,  à  qui 
l'art  fut  redevable  de  la  restauration  en 
France  de  la  gravure  sur  bois,  que  son 
mode  expéditif  d'exécution  et  d'impres- 
sion appelait  à  de  si  importants  résul- 
tats réalisés  aujourd'hui.  Mais  Alfred  a 
pris  en  ce  genre  une  grande  part  aux  tra- 
vaux de  son  frère,  et  l'on  a  eu  de  lui 
un  certain  nombre  de  dessins  sur  bois. 
Toutefolsquclque  brillants  et  populaires 
que  fussent  ces  succès,  les  deux  frères, 
l'aîné  surtout,  rêvaient  une  ambition 
plus  élevée  ,  celle  de  se  livrer  à  la  pein- 
ture. Il  fit,  avec  son  courage  ordi- 
naire, de  premiers  essais  auxquels  bien- 
tôt vint  s'associer  le  plus  jeune;  et  le 
fruit  de  ces  communs  efforts  fut  l'appa- 
rition, au  salon  de  1831,  de  deux  ca- 
dres 011  leurs  productions  confondues 
décelaient  une  origine  fraternelle.  C'é- 
taient encore  des  illustrations  de  li- 
vres :  vingt-quatre  petits  tableaux  des- 
tinés à  être  gravés  pour  les  œuvres  du 
romancier  écossais.  Cette  forme  nou- 
velle du  facile  génie  des  deux  frères 
intéressa  vivement.  La  vérité  du  cos- 
tume y  était  le  moindre  mérite.  Jus- 
tesse de  pantomime,  esprit  des  têtes 
qui  signalait  parfois  la  plus  heureuse 
imitation  delà  finesse d'Ilolbein  unie  à 
l'expression,  au  jeu  de  physionomie, 
au  laisser-aller  d'Hogarth;  harmonie 
séduisante  et  parfaite,  telles  furent  les 
qualités  auxquelles   on  prit   plaisir  à 


JOH 

donner   «Jm    ëloge<  ;    et  l'on    oublia 
qu'une  critique  ;;ronilfU4e  réfl.imail  un 
roloris  plus  >i;;oiirriit,  un   (le^Mn  |)lii^ 
^ère  ,  un  mndeir  plu^   fernfe,  el  plus 
de  relief.  Ouelque  clio^e,  en  cITrl ,  dé- 
celait enroie  la  set:here<«e  de  main  du 
praveur.  Mai*  à  me\ure  qu'Alfred  prit 
l'habiludedu  pinceau,  ce»  défaut»  9'at- 
ténurreiit  ou  dispai  urent,  et  le<  qualités 
restèrent.   Tandis  4|ue  Tonv  continuait 
à  rr^iier  seul  en  maître  dans  le  domai- 
ne de  la  librairie  de  luxe,  et   ne   pei 
{^ail  que  de  loin  à  loin  quelque  toile, 
Alfred  se  lirait  presque  e\clusi>ement  à 
la  peinture.  Vers  la  fin  du  mrine  salon 
de  lH!n  ,  il  exposa  son    premier  ;^rand 
tableau  de  rbetalet,  \ Arrestation  tie 
Jean  de  l.respirre  sous  Hit  lirliru  ; 
et,  dan»  sa  defianre  de  lui-même,  il  at- 
tendit sur  son  œurre  le   jugement  do 
public  avec  toute  l'anxiélé  du   poète 
dramatique,  le  jour  de   l'épreuve  su- 
prême de\ant  ses  juj^es.    I>e   ju;:;ement 
fut  favorable  au  modeste  artiste.   L'in- 
térêt de   la   scène,  la  facilité  d'exéru- 
tion,  la  séduction  de  l'harmonie  géné- 
rale firent   le  plus   ^rand  honneur  aa 
bonJohannot.   On   se  demand.nl  ou 
donc  ce  jeune  artiste  ,  qui  n'avait  tra- 
vaillé dans  aucun  atelier,  avait  trou>é  le 
secret  de  ces  qualités  solides  et  brillan- 
tes. C'est  que  les  natures  d'élite  sup- 
pléent par  l'instinct  a  ce  qui  leur  man- 
que du  cAté  de  l'étude  et  du  métier  ; 
c'est  que  le  sentiment  e<t  comme  un  don 
de  seconde  vue,  comme  un  de  ces  éclairs 
de  rintcllif^ence  d'en  haut.  Alors,  une 
arène  nouvelle  s'ouvrait,  vasleet  libre,  ï 
l'ardent  repard  de  l'heureux  .\lfred.  Il 
s'y  élança  avec  toute  l'énergie  du  cour- 
sier généreux  qu'ont  retenu  les  entra- 
ves. Pour  se  jeter  tout  entier  dans  l'é- 
tude (le    la  peinture,  ce  beau  idéal  de 
ses  jeunes  années,  ce  culte  rélléchi  de 
son  à;:;e  mur,  il  n  hésite  pas  ï  sacrifier 
les  bt'nétice>   considérables  et   actuels 
que  lui  assurent  des  travaux  moins  éle- 
▼és;  et  les  progrès  de  sa  palette  rf- 


JOH 


«9» 


pondent  à  l'artive  pers^érance  de  se$ 
effort».  N  oilà  donc  rnfinsa  viearran;;ée 
à  u  f;lli*e  '  l/aisanre  sourit  à  tout  ce  qui 
lui  est  cher.  \x  public  lui  continue  ses 
applaudissements.  |j  princesse  Marie 
d'Orléan»,  cet  anr;e  aux  aile»  pures, 
une  admirable  artiste  sur  les  marches 
d'un  trAne,  a  voulu  posséder  le»  deux 
cadre»  de  sujet»  de  \V.  Scotl  î  \.t  roi 
lui-même  le  distingue,  le  décore,  jjoûte 
un  talent  si  plein  de  fine^^  à  la  lois  ^ 
de  sentiment ,  se  plait  dan»  »a  conver- 
sation, honore  la  dignité  de  ce  carac- 
tère d'riM  iri'e'r»  dr  h  rnvedlance  qui 
va  i  lion  !    Alfied 

est   '  I  rrait,  s'il  était 

donné  de  l'être  ici-ba»  ,  et  »i  mériter  le 
bonheur  était  en  jouir.  Mais  il  e»l  aux 

f>ri»e»  intérieurement  avec  un  mal  qui 
e  déchire.  Sa  (dithi»ie  pulmonaire  étend 
»e»  ravage».  Trop  habitué  i  4'ob»erver 
pour  se  faire  illusion,  il  connaît  le  dan- 
ger, mais  il  parde  pour  lui  seul  cette 
angoisse  de  tcius  les  instant»,  et  son 
travail  ne  perd  rien  de  son  ardeur. 
î,a  fondation  de»  {galeries  historiques 
de  Versail'es  vient  ouvrir  un  nouveau 
débouché  i  ses  cruvres.  Il  accepte  de 
préférence,  entre  les  travaux  qui  lui 
••ont  offerts,  ceux  dont  les  proportions 
devaient  lui  permettre  d'atteindre  les 
points  les  plu»  élevés  de  son  art.  Le 
plus  f;rand  de»  (luise,  François  de 
Lorraine,  présentant,  aptes  la  ba- 
taille de  Dreux  ,  les  officiers  de 
son  armée  à  Charles  l\,  fut  (1836) 
son  début  dans  la  {;rande  peinture 
(au  chiteau  d'KuV  Cette  toile,  d'un 
mérite  distinf;ué  ,  est  certainement 
l'une  des  plus  éclatantes  nianifesta- 
\ions  de  la  forte  volonté  qui  caracté- 
n^ait  Alfred  ,  dont  la  faiblesse  sem- 
blait devoir  succomber  sous  la  hù^ue 
d'un  si  prand  travail.  Kt  de  fait,  son 
mal  empirait  et  le  forçait,  de  temps  en 
temps,  de  poser  ses  pinceaux.  Une 
lueur  de  santé  revenait-elle,  vile  il  les 
reprenait.  C'est  ainsi  que,  dans    les 


192 


JOH 


comls  luiersalli^<î  de  trompeuses  ronvn- 
lescences,  il  trouva  le  temps  de  décorer 
nue  chapelle  de  l'c;^li>ede  Notre-Dame- 
de-Lorelte  où  il  exécuta  deux  sujets  pui- 
sés dans  la  vie  de  saint  Hyacinthe. 
C'est  ainsi  qu'indépendamment  des  pe- 
tits sujets  tirés  de  \\  alter  Scott,  et  du 
tableau  de  l'arrestation  de  Crespicre, 
il  avait  peint,  en  1831 ,  Don  Juan 
naufragé  trouvé  sur  le  rioage  pur 
Haïdée,  et  une  scène  du  roman  de 
Linq-]\larsy  de  M.  de  Vigny;  en  1 833, 
V Annonce  de  la  victoire  d'Hasten- 
beck  (Palais-Royal)  :  V Entrée  de  ma- 
demoiselle de  Montpensier  à  Orléans 
pendant  la  Fronde  (au  Luxembour^^)  ; 
en  1834,  François  r^  et  Charles- 
Quint  (au  comte  de  Lariboisière)  ;  en 
1835,  le  Courrier  Vernet pansé  par 
le  roi;  enfin,  Henri  H,  Catherine 
de  Médicis  et  leurs  enfants ^  et,  dans 
les  trois  années  suivantes  jusqu'à  sa 
mort,  Marie-Sluart  quittant  l'Ecos- 
se; Anne  d'Est,  duchesse  de  Guise, 
se  présentant  à  la  cour  de  Charles 
IX;  Saint-Martin  et  la  bataille  de 
Bratielen  ,  dite  de  Saint-Jacques. 
Ici  la  nature  vaincue  succomba  sous  ce 
dernier  effort.  Dès  long-temps,  il  le 
savait,  un  repos  presque  absolu  eut  pu 
seul  arrêter  les  ravages  de  la  consomp- 
tion. Mais  le  mal,  tout  en  l'abattant, 
semblait  lui  donner  un  feu  nouveau,  des 
inspirations  plus  vives,  un  amour  plus 
ardent  pour  son  art,  comme  si  le  fléau 
cruel  eijt  voulu  parer  sa  victime  avant  de 
la  frapper.  Coiiilnmné  à  mourir  jeune, 
et  résigiié  à  sîdiir  rct  arrêt,  il  voulait, 
du  moins,  mcttie  à  profil  cliatuie  jour 
de  grâce  qui  lui  était  accordé,  tant  le 
sacrifice  de  son  art  était  le  seul  qu'il 
ne  pût  consentir  à  ajouter  à  tous  ses 
sacrifices!  Kt  c'est  une  activité  aussi  in- 
cessante qui  peut  seule  expliquer  com- 
ment, avec  ses  œiivres  capitales  ,  il  a 
pu,  dans  ce  qu'il  appelait  ses  moments 
de  repos,  produire  cette  quantité  pro- 
digieuse de  vignettes,  d'aquarelles,  de 


JOH 

stpja,  diMliP.'îstiisau  crayon,  à  la  plume, 
à  l'encrede  Chine,  qui  ont  tant  contri- 
bué à  populariser  son  nom.  Le  nom 
des  Johannot  est,  en  effet,  avec  celui  de 
Charlet,  en  des  branches  différentes 
de  l'art,  l'un  des  plus  populaires  de  la 
France.  Alfred  mettait,  du  reste,  à  ses 
œuvres  les  plus  fugitives,  à  celles-là 
que  n'eût  pas  déparées  un  peu  de  né- 
gligence, le  même,  soin,  le  même 
amour,  la  même  correction  qu'à  ses 
grands  tableaux.  En  tout  il  portait  la 
même  conscience.  Il  est  même  quelques- 
unes  de  ses  aquarelles  qui,  par  la  belle 
entente  de  composition  et  l'exécution 
pittoresque,  ont  acquis,  jusqu'à  un  cer- 
tain point,  l'importance  de  tableaux  à 
l'huile,  notamment  les  Adieux  de 
Charles  P^  à  sa  famille,  et  Olivier 
Cromwell  lisant  la  Bible  à  ses  en- 
fants assemblés,  deux  pièces  qui  ont 
eu  les  honneurs  de  la  gravure.  ]/a  pein- 
ture de  la  Bataille  de  Brattelen,  exé- 
cutée pour  le  Musée  de  Versailles, 
avait,  disions-nous,  été  sa  dernière 
lutte  contre  son  progressif  épuisement. 
11  se  préparait  à  se  reposer  et  à  se  dis- 
traire de  ses  rudes  travaux  par  quel- 
ques petits  tableaux  de  chevalet,  quand 
des  affaires  de  famille  vinrent  réclamer 
sa  présence  à  Manheim,  où  s'étaient  re- 
tirés son  père  et  sa  sœur.  En  vain,  son 
frère  et  ses  amis  le  conjurèrent  de  ne 
point  entreprendre  un  voyage  si  pé- 
nible, dans  son  état  de  faiblesse;  .sa 
conscience  lui  représentait  ce  voyage 
comme  un  devoir  indispensable;  il  par- 
tit,laissant  tousceuxqui  l'aimaient  dans 
une  anxiélé  que  vinrent  bientôt  aug- 
menter les  plus  alarmantes  nouvelles.  Il 
était  tombé  tout-à-fait  malade  à  Man- 
heim. Une  légère  amélioration  étant 
survenue,  il  voulut  en  profiter  pour 
revenir  en  France;  mais  les  forces  lui 
manquèrent  à  Baden ,  et  ce  ne  fut 
qu'au  bout  de  plus  d'un  mois  qu'il  put 
entreprendre  la  route  de  Paris,  il  y 
arriva  enfin  après  d'incroyables  difb- 


JOU 

cuJté»;  Buii  ,  à  vrii  dire,  àé)k  il  n'éUit 
plus:  MNi  ime  »«ulf  torrivait  ,   et  le 
vulbevreui  ar(i»lc  ne  revit  li  rapiule 
que  pour    oITrir   a    vr»  ;troi%  une   Lien 
liMlernnsoljilioo.celledelrui  »rtrer  une 
dernière  fou  la  main  avant  de  les  quit- 
ti*r  pour  jamais.  Il  vit   %rnir  »on  heure 
suprême  avec  toute  la  résignation  qu'on 
devait  attendre  d'un   homme    dont  la 
vie  avait    eie   un   perpétuel    vacriGce. 
Mai^  rinfoftuné  ne  put  tenir   jusqu'au 
^rnier  moment  à  la  petisee  poignante 
de  se«MravaukMi«{>eiidu5;  et  nul  «pec- 
larle  ne  fut  glas  touchant  et  plu^  dou- 
lovcfu  que  »es  adieai  a  la  peinture, 
•OB  ioic  .  M)n  ruite  ,   von   idolâtrie.  Il 
empira  le  7   defemhre  1H!J7,    et  cette 
perle  fut  vivement  drjjluK-e  par  lev  ar- 
tistes et  par  un   ^laud  nouibre  d'écri- 
vains et   d  hommes  d'eiite,  qui  avaient 
en  sa  personne  ^oùte  le  talent  de  l'ar- 
tiste, aimé   et  respecte  le  caractère  de 
l'homme  de  bien.  Toute  la    vie,  chet 
Alfred  Johannot,  semblait  s'être  réfu- 
giée dans  rinlelli<;ejice.  Chez  lui  l'hom- 
me manquait  à  l'artiste,    et   sa  factice 
fiisteuce  a  ele  unlon^;  problème  lesolu 
par  la  force  de  volonté,  par   le    calme 
et  la  tenue  de  l'esprit ,  par  la  vages^e  in- 
tiolahledu  régime.  Son  àrne  dominail 
sa  «>ante  :  il  voulait,  et  sa  volonté  ren- 
dait la  nature  en    quelque  >orte  obéis- 
sante.   S'il  ne    parvenait  pas    à    faire 
passer  dans  ses  (ru\  rr»  toute  l'énergie 
dont  sa  tète  était  douée;  s'il  v  deroen- 
lail  un   coloriste  plus  harmomeui  que 
puisr.ant,  il  les  marquait  du  moins  d'une 
lorte  empreinte  de  merveilleuse  adresse 
et  de  constante  originalité.   Ce   senti- 
ment fin   et  délicat   qui  sait  ciiolsir  et 
mettre  chaque  chose  a  sa   place  et  qui 
constitue  le  f^odi  ^  don  plus  rare    en- 
core que  le  talent,   il  le  possédait  a  un 
depré  supérieur;  et  toutes  ses  truvres 
respirent  1«*  i:oût.  I^  tact  d'Alfred  lui 
avait  appris  de  bonne  heure  à  se   gar- 
der des   exagérations  en  tout    genre. 
Jeté  dans  les  arts  à  une  époque  on  s'agi- 

LTTIII, 


JOH 


193 


tait  avec  fureur  la  question  tant  débat- 
tue, si  peti  éclairrie,  du  ch.fsitfue  et  du 
ro/nuntnfur  ;  vivant  incevsaniinenl  au 
milieu  des  plus    jidenl%  sectateurs    de 
ces  snleme»  evcluNiN.  i(Mi|>)uts    le  pied 
uir  les  charbons  ardenu  dr   l'amoor- 
propre,  il  ne  prit  les  couleurs  de  per- 
sonne, et   M*    réfugia   an    srm    dr   l'é- 
lude, indulgent   pf>ur  tous,   é^alrment 
chéri  dans  les  deux  camps.    I^  fureur 
d'embellir  ou  d'etagérer  la  nature  ré- 
pugnait  également   à    sa  manière    de 
sentir.  Dans  les  aimables  épancheroits 
de  l'aleher   où  il    se  montrait,  cooHM 
toujours  ,    ingénieui  ,    calme  ,     jndi- 
cient   et    simple  ,   il  aimait  à   répeter 
qu'il   vient,  pour   les  esprits  droits   et 
sûrs,  un  temps  où   l'on  trouve  la  na- 
ture   M    belle,  si   uue,    si  lire    m^me 
dans  ses   défauts,   qu'on   penche   i  la 
rendre  telle  qu'on  la  voit  :  et  c'est  l'ei- 
trétae  difficulté  qu'on  rencontre  à  être 
asset  vrai  pour  plaire,  en  la  suivant  de 
près  ,    qui   seule  peut  détourner  d*ea 
suivre  la  route.    Il   vovait    sainement 
en  tout?  chose,  et  son  bon  sens  exquis 
I  aurait    rendu     propre    à    toutes    les 
carrières,  même  les  plus  dissemb'ables. 
Son     organivalion    était    merveilleuse 
ponr  tous  les  arts.    A   Hambourg,    la 
musique  lui  devint  une  passion  ardente 
comme    la  peinture;  il   apprit  le  haut- 
bots   et  la    (lûie  ;  et  ,  ne    pouvant  em 
rien   demeurer   médiocre,  il  v    devint 
de  force  de  maître  ;  mais  la  nature  de 
son  affection  organique  le    força  d'v 
renoncer  bientôt.   A    Lvon  ,    il  s'é- 
prit   aussi   de  science  ,    et  tour-à-tour 
il    étudia   avec    son    frère  Ton>    l'or- 
nithologie ,    la     botanique  ,    I  anato- 
roic  ;   et    tel   est    le    secret   de    Iha- 
tHeté  qu'ils  montrèrent,    depuis,  tous 
deux   à  peindre   les   animaux.    Alfred 
était  sensible  à   l'éloge;    non  qu'il  fît 
cas  de    cette  critique,  simplement  spi- 
rituelle et   si    peu  spéciale,  des  feuilles 
publiques:  mais  l'éloge  le  touchait,  loi 
<.!  bienveillant,  comme  une  expression 

i3 


»94 


JOU 


de  bienveillance.  Ce  mot  qui  fit  for- 
tune au  XVI II*  siècle,  et  qui  pel^^nalt 
si  bien  Tétat  des  esprits  à  cette  époque: 
«  C'est  aux  muNiciens  à  faire  de  la  mu- 
sique et  aux  philosophes  à  en  parier,  » 
il  l'appliquait  plaisamment  à  la  pein- 
ture ;  et  cet  axiome,  si  peu  axiomatique, 
devenait  la  critique  la  plus  juste  de  la  cri- 
tique elle-même.  Sagement  il  laissait 
de  côté  toute  délibération,  toute  discus- 
sion d'école  et  de  secte  sur  les  beaux- 
arts,  se  bornait  à  produire;  et,  comme 
cet  ancien,  pour  prouver  le  mouvement, 
il  marchait.  F.  d.  C. 

JOfiX  (Jean-Denis)  .  médecin  , 
né  à  Tœplllz  en  Bohême,  le  18  jan- 
vier   1764-,   exerça  d'abord  l'art  de 
guérir  à  Prao;ue,  puis  dans  sa  ville  na- 
tale, où  il  mourut  le  14  mars  1814.  Ses 
écrits  sont  :  I.  Sur  les  abus  qui  exis- 
tent dims  r exercice  de  la  médecine, 
pour  servir  de  supplément  à  l'ouvrage 
de  Tissot  sur  les  moyens  de    perfec- 
tionner les  études  de  médecine (allem.), 
Prague,  1786,    in-8".   II.  Diction- 
naire des  luis  médicales  de  /'  4uiri- 
che ,    depuis  1.3i8    jusqu'à  l'époque 
actuelle  (allem.),  Praj;ue,  1792-1798, 
6  vol.  ln-8".  Les  deux  derniers  volu- 
mes   de  cet  ouvrage   ont  pour   titre  : 
Police  médicale  et  médecine  légale 
des  états  héréditaires   (F Autriche. 
III.  Les  bains  de  Tœplitz  en  Bohê- 
mCy  considérés  sous  le  rapport  de  la 
physique,  de  la  médecine  et  de  la  po- 
litique {dWtm.],  Dresde,  1792,in-8^\ 
John  a  encore  publié  d'antres  écrits  sur 
les  eaux    de  Tcrplitz.   IV^  AJémoires 
de  médecine   de  dioers  savants   de 
Bohême    (allem.),    Prague,     1798, 
in-8°.  Ou  trouNe  dans  ce  recueil  plu- 
sieurs mémoires  de  John  :  les  uns  sont 
sur  les  eaux  de  Tii'plltz  ,  les  autres  sur 
divers  sujets  relatifs  à  la  Ilohéme.    Il 
a  aussi  ajouté  des  notes  à  la  Médecine 
légale  de  Sikora ,  et  il  a  [niblié  le  2*^ 
volume   des  Disse.rtaliones  medicœ 
Pragenses.  O — T — R. 


JOH 

JOHXES.  Voy.  Jones,  ci-apri*. 
JOH  XSOX,  aventurier  allemand, 
au  X  V 1 1 1*^  siècle,  fil  quelque  sensation 
par  ses  efforts  pour   opérer  des  réfor- 
mes dans  la  franche-maçonnerie.  En 
1763  ,  il  s'annonça    comme   envoyé 
d'Ecosse  par   des     supérieurs    succé- 
dant sans  interruption  aux  grands  maî- 
tres des  Templiers ,  et  inconnus   aux 
chefs   même    des    loges   maçonniques 
d'Allemagne.  Il  soutint  que  la  vérita- 
ble franche-maçonnerie  n'était  qu'une 
suite  de  l'ordre  du  Temple,  et  «qu'en 
conséquence,  le  rit  templier  était  le  vé- 
ritable. Il  tint  à  léna  un  chapitre  de  la 
stricte  observance  de  ce  rit.  En  même 
temps  il  déclara  faux  et  erroné  le  sys- 
tème adopté  par  la  mère-loge  de  P>erHn, 
dite  desTrois-Globes,  et  fil  brûler  les 
écrits   publiés  par   un  autre  novateur 
nommé  Rosa,  qui  se  disait  député  par 
le  maître  de  la  loge  des  Trois-Globes  , 
soutenant  que    la  franche-maçonnerie 
était  l'alchimie  et  conservait  le  secret  de 
la  pierre  philosophale  el  de  la  véritable 
cosmogonie.  Celui-ci  avait  adressé  des 
circulaires  sur  sa  doctrine  aux  autres  lo- 
ges d'Allemagne.  Johnson,  après  avoir 
livré  ces  écrits  aux  ilammes  avec   un 
grand  fracas,  et  au  bruit  d'une  musique 
guerrière,  fit  part  à  son  tour  aux  lo- 
ges d'Allemagne  de  la  condamnation 
de  la  doctrine  de  Rosa,  et  les  engagea 
toutes  à  s'affilier  à  la  loge  d'iéna,  com- 
me enseignant  seule  la  vraie  doctrine 
maçonnique.    Un  grand    nombre    de 
loges   se    rangèrent   de   son  parti,  et 
abandonnèrent  le  rit  de  la  mère-loge 
de  lierliii  pour  celui  du  temple  d'Iéna. 
Non  content  de  cette  réforme,  John- 
son s'arrogea  le  droit  de  nominerseul 
des  cbcvaliers,  s'appuyant  toujours  sur 
les  pleins  pouvoirs  donnés  par  les  pré- 
tendus su{)érieurs  invisibles  pour  la  ré- 
forinr  de  l'ordre  maçonnique.  Ses  pré- 
tcnlions  ne  purent  manquer  d'offenser 
les  chefs  de   ces   loges.  Le   baron  de 
Hund,  ardent  promoteur  de  la  fran- 


lOH 

cbe-iaafÉawii,  vint,  en  1 764,  aMiiter 
au  consent  de  Joliiison  Jan<.  rmlrn- 
lion  de  Ir  drina«qucr.  Il  drc(>u\iit  que 
le  soinliMiit  templier  éfov!»ais  amÏxX 
d'aliurd  rir  allaclir  au  sen  ice  d'un  >;en- 
tilliomiD«  rourlandais  ftous  le  nom  de 
Leurlil  qu'il  a\ai(  ecliangé  ensuite  ron- 
Ire  celui  de  HerLrr,  en  entrant  comme 
secrclaire  cliex  le  duc  de  llernbuur;;. 
qu'enfin  il  a\ait  fait  de  la  faus>e  mou- 
naie ,  et  s'elait  approprie  de»  l«»nd> 
pubiiCN,  elr.  Dénonce  pour  sesmahrr- 
Mlioi!5,  JulinMinfut  arietr  par  la  police 
pi  ii«.>ieune,  et  enfrtpie  d'alturd  a  Ma;;* 
dcbuur^,  pui5  à  ^^  artrnbur^  ;  nous 
i|i;nui uns  M  ce  fut  en  sertit  d'un  )n;;e- 
Rient  rr^tilipi  ou  d'après  la  nulorielé 
de  .<e>  driils.  Il  mourut  en  prison  l'an 
1775.  Ses  partisans  ré[>andirent  le 
bruit  qu'il  avait  été  as.$asMiié  (  1  ) .  mais 
comment  aurait-il  pu  l'être  en  prison:' 
À  moin>  qu'on  ne  suppose,  ce  qui  n'est 
pas  >ra!>einlilable,  que  le  ^ou\efne- 
ment  prii>sien  l'ait  fait  mourir  >ecrt*te 
ment.  Son  ennemi,  le  biron  de  lluiid, 
a\ail  pris  possession  des  papiei  >  de 
Johnson,  et  s'eiail  fait  nommer  t;rand- 
maître  des  loges  du  rit  du  Temple. 

D— G. 

JOII\STO\  JArgiFi),  liifé- 
riteur  écos>ais  d'j  WUI*  siècle, 
descendait  d'une  ancienne  et  noble 
famille.  Après  avoir  étudié  à  Kdini 
bour^,  à  (ilascow  cl  à  l^rabrid^e,  il 
acriimpa^ina  en  DanemaiL,  comme 
tli-neLin  ,  Morten  Hden  ,  eii\o\é 
extraordinaire  d'An^ilelerre  près  la 
tour  de  Copenha;;ue.  Kn  17H;iii  re- 
tourna dans  sa  patrie  avec  le  même 
envo\é,  et  revint  la  même  aiince  en 
Danemark  pour  y  exercer  les  fondions 
de  chapelain  de  la  lé{;alion  anj;laise. 
Nous  ignorons  Tepoque  de  sa  nais- 
sance et  celle  de  sa  mort.  On  lui  doit 
les  écrits  suivants   :  1.  Anecdotes  oj 

(«     BoitnrTn.e.  /«   Jriaittt   ckmjttt,  p*ri.  a 
y.  «9    —  jii  a    J^lJtHiirum  ,    ou    Or»j»j/»^»*  ^ 
tUtêt.  ^  Im  /rmJK-imeitntrtt,  ton.  |  ,  p.  ,,| 


JOL 


•94 


Oùii^  the  ùàick,  king  uf  Alun,  and 
the  liehridian  priai  es,  islandish  and 
en^itsh  (Anrctiolrs  d'Olave-le-Noii , 
roi  de  Man,  et  i\rs  piinces  hebnb- 
dien»,  en  i^lalldai^  cl  en  an;;lais\  Co- 
peobac^ue.  17Ht>,  m-lJ.  II.  Noive- 
giun  accouni  uf  kin^  Il  ut  us  expc 
dit  ion  ugainsl  Siutlund,  l^tiJ,  is' 
lundi sh  and  euglisit  wit/i  noirs  (Ké- 
cit  nor^p^ien  de  l'expediiiun  du  roi 
llacun  contre  l'KcosNe  eu  l'JtiJ,  en 
islandais  et  eu  ^n^lal^,  avec  de»  no- 
tes ,  lUid  .  t78J.  inlJ  III.  Lo4j- 
irukur  (Js'id*i,  ur  thrdealU  wng  uj 
l.uiibruk  /éO»»'  Ursi  turmtly  priiUed 
frutu  varitus  manust  i  ipi%  lu  ivhich 
are  adtled  the  various  reudings  ;  a 
iitenii  latin  versiun  ,  an  islundo- 
latino  glussary  ,  and  rxplaruitury 
notes  (Lodbrokar  Qvida,  ou  le  (  .liant 
de  mort  de  l.odb,  imprime  aujourd  hui 
correct emeni  ,  d'après  divers  manu 
scrils,  auquel  on  a  ajouté  les  diiïé- 
renles  variantes,  version  lillrrale  en  la- 
tin, avec  un  ^lo^^ai^e  islando-lalin  et 
des  notes  e&plicativcd),  ibid.,  1782, 
in  12.  IV.  A  Jragment  ol  an  tient 
h i.^ tory  uj  Sttttland  and  Orkiieys 
^^Va^raent  d'une  ancienne  histoire  de 
rKrov5«  et  des  Orcades),  ibid.,  1783, 
in-12  l>— z— s. 

4<nJVKAr  de  Segraix  (Ma- 
nu- .MAi»nnNK-Niroii  - Alixah- 
niiiNF.  (iKIIIKK,*  femme),  cornue 
dans  le  monde  littéraire  sous  les  noms 
à\4dine  Joliveau  I),  est  une  des 
femmes  qui  se  sont  le  pjufi  distinguées, 
de  nos  jours,  dans  la  poésie.  Née  le 
16  novembre  1756.  à  l>ar-sur-Aubc, 
où  son  père  était  ai 4^1  du  roi  et  sub- 
'^.«léoué  de  l'intendance  de  Chainpa- 
j^nc,  elle  re^ut  une  éducation  soi;;née 
et  vint  se  fixer  il  Paris ,  après  avoir 
épousé,  fort  jeune  encore  ,  Nicolas- 
Claude  Jolive.iu,  l'iiii  des  administra- 
teurs  dea  me>sa;'enes  royales.    Vou- 


(i|     Aétnt    «s(     probrfbiruirut    UD    djm  uutif 
d'ÀtrxAaiiriac. 


l3. 


196 


JOL 


lant  suppléer  aux  maisons  d'ensei- 
o;nemciit  détruites  pendant  la  révolu- 
tion et  diriger  elle-même  Tinslruction 
de  ses  enfants,  M"**^  Jollveau  s'assiijé- 
til  à  apprendre  le  latin,  l'italien  et 
Taîiglais.  Le  talent  de  la  poésie  fut  la 
récompense  de  ses  soins  maternels. 
Klle  devint  fabuliste  en  étudiant  les 
beautés  de  La  Fontaine  pour  les  faire 
sentira  ses  cbers  élèves.  Mais  les  en- 
couragements de  l'abbé  Aubert,  de  Du 
Tremblay  et  de  Le  Bailly  échouèrent 
long-temps  coi^re  sa  modestie.  Elle  se 
refusait  toujours  à  publier,  même  dans 
les  recueils  périodiques,  ses  premiers 
essais  qui  avaient  été  applaudis  à  la 
société  des  belles-lettres  dont  elle  était 
membre.  M'"*'  Jollveau  avait  enfin 
consenti  à  tji  insérer  quelques-uns 
dans  VAlmanach  des  Muses  ,  les 
Etrennes  (T Apollon,  et  le  Petit  ma- 
gasin (les  (lames ,  lorsqu'elle  donna 
la  première  édition  de  ses  Fables  nou- 
velles en  vers,  suivies  de  quelques 
poésies,  Paris,  1802,  in-18.  Ce  re- 
cueil est  le  premier  dans  ce  genre 
qu'ait  publié  une  femme  française,  en 
lie  comptant  pas  V Herbier  w(jral  de 
j^pie  j^  Qpnlis,  Ce  ne  fut  que  quatre 
ans  après  que  parurent  les  fables  ras- 
semblées de  M™*^  de  La  Ferandière,ph.s 
anciennement  connues  en  détail.  Cel- 
les de  M*"^  Joliveau,  divisées  en  six 
livres,  furent  porfées  à  neuf  dans  une 
seconde  édition,  en  1807.  La  trol- 
.sième,  publiée  en  1814,  et  dédiée  à  la 
duciicsse  d'AngouIéme  ,  est  partagée 
aussi  en  neuf  livres.  Sur  les  175  fables 
qu'elle  contient,  l'auteur  en  retrancha 
environ  70  de  la^précédenle  édition  , 
les  remplaça  par  un  pareil  nombre  de 
nouvelles,  et  en  abrégea  plusieurs  au- 
tres. On  a  encore  de  M"""  Joliveau 
Suzanne,  poème  en  quatre  chants, 
suivi  du  Bepentir,  poème  en  deux 
chants  et  de  poésies  fugitives,  Pans, 
1811,  in-18.  Quoiqu'elle  ait  traité  le 
sujet  «;rabrenx  deSnzanne  avec  la  grâce, 


JOL 

la  décence  et  la  délicatesse  qu'une  fem- 
me seule  pouvait  y  mettre,  c'est  sur- 
tout a  ses  fables  qu'elle  devra  sa  répu- 
tation ;  plusieurs  sont  imitées  de  Les- 
sing,  de  Llchtwehr,  de  Desbillons,etc. 
Les  éloges  qu'elles  obtinrent  dans  neuf 
journaux,  entre  autres  dans  les  Peti- 
tes Affiches,  rédigées  par  l'abbé  Au- 
bert, ne  sont  pas  dus  uniquement  à  la 
complaisance  et  à  la  galanterie.  Elles 
ont  mérité  leur  succès  par  d'heureu- 
ses inventions,  parunegrande  connals- 
.sance  du  cœur  humain,  par  des  idées 
fines  et  spirituelles.,  par  des  moralités 
qui  décèlent  une  belle  âme  et  dignes 
d'une  tendre  mère,  enfin,  par  un  style 
simple  et  naturel  qui ,  malgré  quel- 
ques négligences ,  est  loin  de  manquer 
de  grâce  et  de  charmes.  Ces  fables 
conviennent  surtout  pour  l'éducation 
des  jeunes  filles.  Quelques-unes  ont  eu 
l'honneur  d'être  traduites  en  italien. 
M"^*^  Joliveau  en  avait  annoncé  ou 
du  moins  fait  espérer  depuis  long-temps 
une  quatrième  édition  plus  soignée, 
plus  correcte  et  plus  complète,  dans 
laquelle  seraient  entrées  les  fables 
qu'elle  avait  publiées  plus  récemment 
dans  divers  recueils  ,  celles  qu'elle 
avait  imitées  de  Krilof,  dans  l'édition 
française  de  ce  fabuliste  russe,  donnée, 
en  1825,  par  le  comte  Orloff,  et 
d'autres  inédites.  Son  poème  d'Alfred- 
Ic-Grand,  roi  d'Angleterre,  en  qin'nze 
chants  et  en  prose  mêlée  de  vers,  s'était 
fait  avantageusement  connaître  par 
quelques  morceaux  remarquables,  tels 
que  la  Description  d'un  tournoi,  et 
V Indmdie  de  la  flotte  d(moise  à  la 
suite  d'une  tempête.  Mais  cet  ouvrage 
impatiemment  attendu  ne  paraîtra  pro- 
bablement jamais,  l'auteur  ne  l'ayant 
ni  terminé  ni  corrigé.  Les  chagrins 
les  plus  cuisants  empoisonnèrent  le 
dernier  tiers  de  la  vie  de  M*"*  Joll- 
veau, étouffèrent  sa  noble  émulation, 
et  glacèrent  sa  verve  poétique.  Elle 
perdit  son  époux  en  1812.  Des  cinq 


JOL 


Wi  qn  tue  en  avait  eus,  et  qui  fji- 
il  sonc?|>oir  elionofjjueil,  sou  lioi- 
t'tème  ù\s  ,  qui  terrait  dans  la  ma- 
nne ,  (ut  tue  en  18UÔ  ,^u  combat 
de  Trafal^ar.  I^s  deui  aines,  dont 
Tun  suivait  la  Carrière  adminislratixe, 
et  l'autre  était  déjà  un  \ioloni>le  dis- 
tingué, moururent  d'une  aiïeclion  de 
roiinne  ainsi  que  leurs  deux  s<rurs  ; 
urie  d'elles  seulement  avait  été  mariée 
et  lais>a  deux  enfants  sur  qui  se  repor- 
tèrent les  afTectiuni  et  les  somt  de  leur 
aïeule.  I.e  lempN  et  ces  douces  occupa- 
tions aui aient  adouci  l'anirilume  de 
ses  regrets,  »i  des  revers  de  fortune 
éprouves  par  sa  famille  n'ru\sent  re- 
nouvelé ses  angoivses.  M"""  Joli  veau 
avait  été  une  des  plus  belles  femmes  de 
sontemps  :  elle  l'était  encoieà  soixante 
ans  ;  et  à  soixante-douze  sa  figure  ne 
paraissait  nullement  atteinte  des  rava- 
ges de  la  \ieille$se.  (^pendant  «on 
moral  était  aiïecte  ,  et  l'affaiblissement 
progressif  de  ses  organes  la  rendait  in- 
capable de  toute  occupalion  sui\ie,  de 
toute  contention  d'esprit,  l  neafiection 
d'e>lomac ,  occasionnée  par  l'ancien 
abus  de  boissons  rafraichissante.s,  lui 
causa  alors  des  attaques  de  paraKsie 
dont  la  dernière  l'emporta,  le  27  dec. 
1830,  dans  sa  soixante-quinzième  an- 
née. M"**  Joliveau  était  membre  lio- 
noraire  de  l'Allieuee  des  ails  de  Pa- 
ris, de  la  société  d'émulation  et  d'agri- 
culture du  ilépaitcment  de  l'Ain  et  de 
noclques  autres  académies  de  proNince. 
M.  Uossignol  a  érigé  à  son  aïeule  un 
tombeau  sur  lequel  il  a  fait  graver  une 
épitaphe  latine  qui  rappelle  ses  talents 
et  ses  vertus.  Héritier  des  manuscrits  dç 
M™'  Joliveau,  parmi  lesquels  doit  se 
trouver  le  Tombeau  d  Adonis,  imité 
de  Bion  et  lu  i  l'Athénée,  au  nom 
de  l'auteur,  par  M*"'  Pipelet  (aujour- 
d'hui princesse  de  Salm  ) ,  M.  Uos- 
signol prépare  une  édition  compicie 
et  soignée  des  fables  de  M'"'^  Joliveau, 
ornée  de  son  portrait.  A — T. 


.loi 


"17 


«IlILLI  J. -(«.),  duileui  eu  mé- 
decine, litléialeu!  et  historien,  est, 
iunant  llaibiri  linun.rrit.^  468), 
l'auteur  de  la  litl>!ntthcque  volanU, 
ou  Elite  df  pinrs  /u^di^^rs  (en  vers 
el  en  prose),  AmUndjro  (Pari»), 
1700  et  1701,in -l'i,  m  cinq  parties, 
ou\rage  qu'«>n  a  attribué  à  Ua^le  [T. 
ce  nom,  III  ,  G11;.  Jolli  a  aussi 
publie  une  Uistoirr  de  Potitffrte  et 
du  ffrand-iJurhr  de  Lilhuunie,  de- 
puis la  fondation  de  la  monarchie  jus- 
qu'à pré>rnt,  nu  l'on  «oit  une  relation 
fuleir  de  ce  ipii  s'rst  passe  a  la  dernière 
élection,  Am^'cdam,  169S,  iii-12; 
ibid.,  16U9, -i  vol.  in-1l>.  Cet  ou- 
vrage a  été  réimprime  dans  V Histoire 
des  rois  de  l*tdofirte,  par  .Massuel 
(/  o).cennra,  \\N  H.  ViU).  G-\. 

JOLLI VKT    (Jl  VN-IiAPTISTK- 

MoïsK  ,  conseillri  d'état,  né  vers  17r)() 
àl'uiuj  pies  Joignv,  était  notaire  à 
Nemours  a^ant  la  résolution  ,  et  , 
comme  beaucoup  de  ses  confrères  , 
s'en  montia  paili^aii  ,  mai>  avec  roo 
deration.  11  fut  nommé  en  1790  un 
des  admini>trateuts  du  dépaitement  de 
Seine  et- Marne  ,  puis  député  à  l'A  - 
semblée  législative,  où  il  »iégea  con 
stamment  à  côté  des  gens  de  bien 
teU  que  Vaublaiic,  Dumas  el  Pa>toret. 
11  parut  rarrniciit  à  la  tiibune,  et  sa 
moijon  la  plus  lemarqnable  fut  celle 
qu'il  fit  la  veille  mcuie  du  10  août 
1792,  ou  il  eut  le  courage  de  signaler 
les  projets  du  club  des  Jac«ibins  à  une 
séance  duquel  il  avait  as-i>lé  secrète- 
ment, et  ou  il  avait  entendu  \oner  à 
y cxci  ration  puldiqur  et  à  la  mort 
tous  les  députés  qui  avaient  voté  pour 
Lara>elte.  KcUappc  comme  par  miracle 
aux  rnaisacres  qui  eurent  lieu  lo  lende- 
main, il  se  retira  dans  sa  famille,  espé- 
rant s'v  faire  oublier;  mais,  arrêté  pen- 
dant la  terreur,  il  ne  sortit  de  prison 
qu'aptes  le  9  thermidor.  Les  talents 
qu'il  avait  montres  comme  adininislra- 
icur  le    tirent    nommer  en    Pan   MI 


198 


JOL 


(1795)  conservateur-général  des  hypo- 
thèques ;  et ,  lors  de  la  suppression  de 
cette  place,  après  le  18  brumaire,  il  fut 
adjoint  à  la  comuiission  du  conseil  des 
Anciens  ,  section  des  finances  ,  puis 
nommé  conseiller  d'état.  En  Tan  IX 
(1801),  désigné  préfet  du  départe- 
ment du  Monl-Tonnerre,  il  remplaça 
Shée  dans  les  fonctions  de  commissaire- 
p;énéral  pour  l'organisation  de?  quatre 
nouveaux  départements  de  la  rive  gau- 
che du  Rhin.  Rentré  dès  l'année  sui- 
vante au  conseil  d  état,  il  fut  chargé  de 
présenter  au  corps  législatif  différents 
projets  de  loi,  et  d'y  soutenir  la  dis- 
cussion sur  les  titres  du  Code  civil  re- 
latifs aux  privilèges  et  hypothèques  et 
à  l'expropriation  forcée.  En  1805,  il 
fut  nommé  liquidateur-général  de  la 
dette  des  départements  de  la  rive  gau- 
che du  Rhin  ;  et ,  en  1807,  ministre 
du  trésor  du  nouveau  royaume  de 
Weslphalie.  Créé  la  même  année 
comte  de  l'empire,  il  fut,  en  1811, 
présenté  candidat  au  sénat  par  le  col- 
lège électoral  du  département  de 
l'Yonne.  Admis  à  la  retraite  en  1815, 
avec  le  titre  de  conseiller  d'état  hono- 
laire  ,  il  mourut  à  Paris  le  29  juin 
1818,  et  fut  inhumé  au  cimetière  du 
Père  La  Chaise.  Un  de  ses  amis  pro- 
nonça sur  sa  tombe  un  discours  qui 
fut  imprimé  dans  le  Moniteur  du 
3  juillet.  On  a  de  lui  :  I.  Princi- 
pes fondamentnux  du  régime  social 
comparés  avec  le  plan  de  ronsti- 
fution  présenté  à  la  Convention  na- 
tionale de  France,  1793  ,  in-8". 
II.  De  V impôt  progressif  et  du  mor- 
cellement des  patrimoines  ,  1 798, 
in  8".  m.  De  VimpAt  sur  les  suc- 
cessions, de  relui  sur  le  sel  et  com- 
paraison de  ces  deux  impôts,  soit 
entre  eux ,  soit  aiuc  les  contribu- 
tions directes,  1798,  in-S".  IV.  Du 
Thalivrg  du  Rliin,  considéré  comme 
limite  entre  la  France  et  t /lllema- 
gne;  des  péages  et  des  douanes  éfa- 


JOL 

bits  sur  les  deux  riçes  du  Rhin,  et  du 
droit  de  relâche  forcée,  appartenant 
aux  deux  villes  de  Mayence  et  de 
Cologne,  Mayence,  1801  ,  in-8°.  V. 
De  C expertise,  1802,  in-S'*.— On 
l'a  confondu  quelquefois  avec  Jollivet 
Baj'allère  ,  qui  rédigeait  en  1797  le 
journal  intitulé  :  le  Gardien  de  la 
constitution^  pour  lequel  il  fut  con- 
damné à  la  déportation  par  la  loi  du 
19  fructidor  an  V  ;  mais  il  réussit 
à  s'y  soustraire.  Il  alla  plus  tard  habi- 
ter à  la  Martinique  où  il  est  mort  de- 
puis quelques  années. — Un  autre  Jol- 
livet fut  nommé  en  1815,  par  le  dé- 
partement du  Morbihan,  membre  de  la 
chambre  des  députés  où  il  vota  con- 
stamment avec  la  majorité. 

M— T)j.  et  W—s. 
JOLLY  (Toussaint-Félix), 
écrivain  ecclésiastique,  né  le  30  mai 
1759,  à  Moivre,  diocèse  de  Chàlons- 
sur-Marne,  fit  ses  études  à  Chalons  et 
entra  à  vingt  ans  dans  la  congrégation 
des  chanoines  réguliers  de  Sainte-Ge- 
neviève; il  prit  l'habit  dans  l'abbaye 
de  Saint-Quentin  de  Beauvais,  et  y  fit 
profession  le  15  février  1781.  Ses 
succès  dans  les  études  théologiques 
donnèrent  une  idée  favcrrable  de  ses  ta- 
lents, mais  sa  piété  et  son  bon  juge- 
ment parurent  surtout  en  ce  qu'il  se 
préserva  de  la  dissipation  et  de  l'esprit 
de  nouveauté  qui,  malgré  d'honorables 
exemples,  s'étaient  insinués  dans  sa 
congrégation.  On  le  chargea  d'ensei- 
gner la  théologie,  d'abord  à  Reauvais, 
puis  au  Val  des  écoliers,  autre  abbaye 
dans  le  diocèse  de  Langres.  Nommé, 
en  1788,  prieur  de  Chàtillon-sur- 
Scine,  il  s'y  fit  aimer  par  sa  prudence 
et  son  esprit  conciliant.  A  l'époque  de 
la  fédération  du  1i  juillet  1790,  les 
autorités  le  prièient  de  dire  la  messe 
et  de  prononcer  le  discours.  11  parla, 
en  effet,  sur  la  sainteté  du  serment  et 
sur  les  obligations  qu'il  impose.  La 
constitution   civile    du    clergé  n'était 


JO!. 

tn  TÎpifw,  et  (If  bon<  fff l«^ 
prétèmit  aior«  if  ^frmf  ni  Jf 
6Hfliif  à  la  nitinn,   a  la  loi  ft  au  roi. 
Mmïs  la  rf\olution    Mii^ait   «on  rour<. 
Loiii^  \N  I   »anrlionna   pfu   aprrs    la 
ronsiiliilion  riulf  du   clrr^f.   I j  «iijp- 
prf*.*lon  «If s  alil>a\f^  fl  df*  mona^lfrr* 
était    reioliif.    On   fut  quflquf  tfm|>* 
Tf^prianf  df  con^r^ff    ral>lia\f  df 
Chatillon.  1^^  rfli;;ifUY  «ouliailairnl  df 
ronlinurr  à  vi%rf  fO  rommnnanlf  ;    la 
tillf  de  (.hatdion  témoi^na-t   If  d^ir 
df  Ifs  ron\fr\fr.  I^  consfil  ;;énff al  de 
la  rnnimunf  prit  à  re  sujet.  If  ^fmter 
1791.  la  dflil>éralion  la  plus  eipre^e 
et  la  plu»  honorabif  pour  If^  rfii^irui. 
Une  pfhlion  dan»  le  mrme  seus  ,  <i- 
Ç^îiff  If  3  avril  par  If*.  anIonIfA  ft  lr^ 
hahitant<v ,  fut  fnvo\ff  à   l'A^Nfinhlff 
nalionaif,  mais  rmllftildf  Camus   la 
fil  rfjfler.   Cf-I  alor*   cpif  If  \*.  JiiHv 
rédi;:fa  unf  dfriaralion  daiff  df   juin 
1791 ,  fl  si^iiff  df  Ini,  df  se^  reli^ifux 
el  de  ses  ftudiants:  il  v   ftprimait   »f5 
i^eprels  de  nt  pouvoir  suivre  sf<  fn;;a- 
pements  ei    adressait  sfs  ffmfrrimf nt« 
et  sfsadifux  aux  habitanls  df  la  \illf. 
Il  rf<^ut  d'fux  à   ffltf   fpoquf  dfs  tf- 
■ioi;;na5^fs  d'iiilfrél  fl  dVslimf,    Il  fn 
étail  di^ne  par  ^f s  procrdfs    gfnfrfux. 
Dans  un  lemp»  de  lii^rllr,  il  avait  fait 
tfndte  tout  le  bif  de    Tabbave  à    un 
pri\  modique    ptMir  soulager   les  pau- 
vres, el  en   se  reliranl   il  rérompfnsa 
lar^fmfnt  Ifs  domfNliqiifs  ,  sans  s'oc- 
cuper de    ses    besoins   personnels.   Ij 
famille   de    Mes^rigny   s'empressa   de 
lui  offnr  un  asile.  Il  se  rendit  mile  pour 
Téduralion  des  enlanls   de  la  maison, 
mai*  (>endanl  la  terreur   il   fui  obli;;é 
de  la  quitter.  Il  se  earba  dans  le  bois 
de  Hoiiloone.el  il  se  réfugiait  la  nuit  à 
l'assv     La   rhule  de    Hobespierre  lui 
perwit  de  reparaître;  il  rentra  dms  la 
famille  de  Mesj^ricjry,  el  \  vécut  dansîa 
retraite,  connu  se«jiement  de  quelques 
amis  qui  appréciaient  son   bon  esprit. 
Après  le  concordai   de   1801  ,   il  ne 


JOL 


«99 


rrut  pas  pooToir  rester  oisif,  et  alla 
profe^jcr  la  théologie  et  rÉcriture- 
Niinte  au  séminaire  de  Trojres;  il  rem- 
plissait celle  fonction  avec  autant  de 
désin'éressrmenl  que  de  zèle ,  car  ja- 
mais il  nevnidul  rrcrvoir  de  traitement  : 
IVvéque  de  'l'rnves  le  nomma  chanoine 
honoraire  Pendant  lr<  tronhlr*  de  ce 
diocèse  en  IHII  rf  snnfr--  suivantes, 
la  conduite   de   !  '      ^    fui  con- 

slammenl  pleinr  .  -•  et  de  fer- 

meté llres'a  lou)ours  aiiafhé  h  l'au- 
torité de  IVvéque  enfermé  à  Vmcrn- 
nes  ou  exilé  k  Kalaise,  et  dit  franche- 
ment son  ati$  sur  ce  qui  t  était  con- 
traire. I.e  séminaire  avant  élé  fermé 
par  sni'e  de  la  persécution,  l'abbé  Jollj 
vint  i  Paris  ou  il  resta  jusqu'après  les 
Cent-Jours.  Mais  l'intérêt  qu'il  portait 
à  ses  élevés  et  Ir  désir  de  $e  rendre 
utile  ren;:a2èrenl  à  retourner  à  1  rojes 
et  à  >  reprendre  ses  fondions  au  sémi- 
naire Au  boni  df  deux  ans,  sa  santé 
qui  déclinait  le  força  de  rerrnir  à  Pa- 
ris. HienlAl  ses  inlirmiiés  rempèrhé- 
rent  de  sortir,  mai*  l'aclivité  de  son 
esprit  ne  lui  permellait  pas  d'être  O'sif. 
On  a  de  lui  deux  ouvraî;es  qui  suppo- 
sent beaucoup  de  lecture:  ie  IMrmo- 
rial  sur  lu  rr^oliition  française, 
IH-ii.  inl'J.  réimprimé  en  18*J8,  S 
vol.  in-12  :  et  U  Mrmnrialfir  t Krri- 
turr-Siiinfr,  en  *J  parties,  la  1*^*  en 
18:J.î,  en  2  vol.  in-l*2,  pour  l'édition 
latine  avec  la  traduclion  el  en  1  roi. 
pour  l'édition  fr.inraise  ;  la  2*  partie 
en  1826,  aussi  en  2  vol.  pour  l'étli- 
lion  lai i ne  et  en  1  vol.  pour  le  fran- 
çais seulement,  l/auleur  avait  fixé  un 
prix  très-modique  pour  son  ouvrage, 
et  de  plus  il  l'envoyait  nratuilemenl 
dans  les  séminaires  ;  peul-êire  aurail- 
il  rendu  ses  livres  plus  utiles  en  em- 
brassant moins  d'objpts,  m.'^is  il  ne  sa- 
vait pas  se  restreindre.  Ou  a  encore 
de  lui  :  Brrc>e  dr  rrVgione  catho- 
liro,  etc.,  roniprnditim,  avec  une  tra- 
duction  française  en   regard  ,  1*25, 


100 


JOL 


in-12.  C'est  un  extrait  de  la  seconde 
partie  de  son  Mémorial  de  l Écri- 
ture- Sainte.  II  devait  publier  un 
Mémorial  sur  r  éducation,  qu'il  n'eut 
pas  le  temps  d'achever.  L'abbé  Jolly 
avait  vraiment  l'esprit  de  son  état.  11 
menait  une  vie  austère,  et  était  toujours 
occupé  ou  de  la  prière  ou  de  ses  tra- 
vaux. Il  faisait  des  extraits  de  toutes 
ses  lectures.  11  mourut  le  14  octobre 
1829,  après  quelques  jours  seulement 
de  maladie.  Ses  obsèques  eurent  lied 
le  16,  au  milieu  d'un  grand  concours 
de  confrères  et  d'amis.  L'abbé  Jolly 
était  aimé  et  considéré  ;  on  le  consul- 
tait souvent  sur  les  études  ecclésiasti- 
ques et  sur  des  affaires  qui  intéressaient 
la  religion  et  le  clergé.  Plusieurs  pré- 
lats lui  donnèrent  des  témoignages 
d'estime.  Son  testament  offrait  beau- 
coup de  legs  pieux.  Ce  que  nous  ve- 
nons de  dire  de  lui  est  extrait  d'une 
notice  qui  a  paru  àdiUsV  Ami  de  la 
religion,  du  3  avril  1830,  t.  LXIII. 
P-c— T. 
JOLLY  (  Adrien -Ji:an-Bap- 
TiSTE  MUFFAT,  dit),  auteur  dra- 
matique et  comédien,  naquit  le  22 
octobre  1773,  au  château  du  Raincy, 
où  son  père  était  contrôleur  de  la 
bouche.  La  famille  de  sa  mère  était 
aussi  depuis  long-temps  attachée  au 
service  de  la  maison  d'Orléans.  Il  reçut 
une  éducation  soignée  dans  un  collège; 
mais  la  révolution  et  la  chute  de  ses 
protecteurs  minèrent  sa  fortune  et  ses 
^pérances.  Atteint  parla  loi  de  la  pre- 
mière réquisition  en  1793,  il  servit 
quelque  temps  dans  la  cavalerie,  obtint 
son  congé  pour  cause  de  blessures,  et 
revint  à  Paris,  sans  argent,  sans  ap- 
pui, mais  doué  d'une  merveilleuse  apti- 
tude pour  les  arl>.  Comme  il  savait 
dessiner,  il  apprit  facilement  à  graver, 
et  il  se  serait  enrichi  à  faire  dei^  mé- 
dailles en  or  sur  un  fond  noir,  que  les 
femmes  portaient  alors  en  collie's,  en 
bagues  et  en  boucles  d'oreilles,  si  son 


JOL 

insouciance,  son  goût  pour  les  plaisirs 
et  la  société  des  artistes  ne  lui  eussent 
fait  dissiper  tout  ce  qu'il  gagnait.  Des 
dispositions  naturelles  pour  la  comé- 
die, un  talent  extraordinaire  pour  l'i- 
mitation, et  la  fréquentation  de  Vo- 
lange,  de  ïhiémet  et  de  Fitz-James 
procurèrent  à  Muffat  des  rebsources 
momentanées.  Admis  dans  les  meil- 
leures sociétés,  il  y  improvisait  des  scè- 
nes de  paravent  où  il  savait  allier  la 
bouffonnerie  au  bon  goût  et  au  piquant 
de  l'à-propos.  Ses  succès  dans  ce  genre 
et  son  état  de  gêne  le  déterminèrent 
enfin  à  entrer  dans  la  carrière  drama- 
tique. Il  débuta,  en  1802  ,  sous  le 
nom  de  Jolly,  au  théâtre  Molière, 
rue  Sain\-Martin,  par  un  rôle  de  niais 
où  il  remplaçait  un  acteur  malade , 
dans  la  Petite  Jieoue,  un  des  premiers 
ouvrages  de  M.  Dumcrsan  ,  et  il  y 
révéla  le  talent  original  dont  il  était 
doué.  Il  entra  ensuite  au  théâtre  du 
Marais,  puis  à  celui  des  Délassements- 
Comiques  ,  boulevarl  du  Temple,  où 
il  fut  très  plaisant  dans  le  niais  de  la 
Mère  (Àimiis  ,  de  ilougemont  ;  il 
y  donna  en  1803,  avec  Brazier , 
Viorogne  tout  seul  j,  ou  S  ai  ma 
cassette  vide^  monologue  en  vaude- 
ville, où  il  fut  si  applaudi  comme  ac- 
teur et  comme  auteur,  qu'avant  passé, 
en  180i,  au  tliéatre  des  Variétés,  il  y 
transporta  cette  pièce  qui  lui  valut  le 
même  succès.  Il  y  créa  les  rôles  d'Ar- 
doise dans  V Intrigue  sur  les  toits  ; 
de  l'xVviron  dans  le  Pont  des  Arts; 
de  Dercault  dans  les  (jhevilles  de 
maître  /iduni;ào.  Scudéry  dans  Cha- 
pelle et  Hachaumont,  etc.  Il  se  fit  mê- 
me remarquei  à  côté  de  Brunet  dans  un 
des  Trois  Innocents.  La  démence  et 
la  mort  de  Carpentier  rendaient  Jolly 
nécessaire  au  théâtre  du  V^audeville 
dans  l'emploi  vacant  de  premier  comi- 
que. Il  y  débuta  le  10  avril  1808  , 
et  vit  bientôt  croître  sa  réputation 
par  la   manière  originale  dont  il  créa 


un  >;iaiid  uombie  Je   i(^lr>,  |>aiiui  Ir^- 

ÎurU  nous  cil«ron>  nira|>(int  ilaii» 
iay  uni  au  Piutt •  \ru/  ;  Bf  1 1 r  jnil 
lUns  \i  liciie  nu  Uiis  ilornuint  ;  le 
S«né<:lijl  (Jans  Jrunnr  tf.én  ,  on  le 
Sicj^e  tC Orléans  ;  Drrlindimlin  iljns 
le»  Adieux  Je  lu  Sumaritaiiie  ;  mai» 
surtout  lAinUiru,  ou  le  Peintre uu  tu- 
ùurti  ;  Qopiieau  ilaiis  le  PrtM'és  ilu 
t uniîun^u  ;  le^ériiable  KiimonJ  Jjiis 
les  Deuc  lùhnuitd ;  le  nirJrnn  tians 
les  Mines  de  Heuujon ,  ou  Ils  sont  sou- 
i»es;  le  pli>sjcieii  (ihï  dius  le  Mariage 
et tracagtint ;  Gaspiinl  Cotise ,  elc 
Joli>  a^all  Je  la  vei\e  ,  Ju  morJanI  ;  il 
eicellait  Jaiu  les  caricatures  et  se  pri- 
mait J'urve  manière  piquante;  mais, 
toujours  \ rai  Jans  son  coutume,  Jans 
•on  masque,  Jans  sa  tournure,  Jans 
tes  Jivers  lan^a^es,  il  n'atait  jamais 
recours  à  la  charge  ,  aux  (;r.maces  ,  à 
la  trivialité  II  savait  nuancer  1rs  Jif- 
feiences  J'un  vice,  J'un  riJicule,  sui- 
vant la  profes>ion  et  le  caractère  Jes 
personnages  qu  il  repr reculait.  C'est 
ainsi  que  ,  Jan>  Tivrcs^e  Je  I^ntara,  il 
laissait  eulrevoir  les  senlimenis  noble> 
de  Tarli^te,  et  Jans  celle  J'KJmonJ  la 
naïve  franchise  et  la  bonhomie  Ju  mi- 
litaire. Dans  l^nlara ,  il  traçait  lui- 
même,  sur  le  Jos  de  son  modèle,  un 
portrait  qui,  pour  toal  autre  acteur,  eût 
é:é  préparé  d'avance.  Il  jouait  aussi 
les  rôles  de  tra\e>tis5.froents  avec  une 
promptitude  et  uue  devtenie  admira- 
bles, comme  il  le  prouva  en  1816,  dans 
la  Rosière  de  Hurtatll,  ou  il  rem- 
plissait deux  rôles  d'Anglais,  mUord 
Spleen  et  ^ir  Scott  d'une  manière  si 
contrastée,  qu'on  ne  pouvait  croire  que 
ce  fût  le  même  acteur.  Dans  (nirrirk, 
ou  les  (Comédiens  françijis  ,  il  prenait 
tous  les  visages,  toutes  les  formes,  fous 
les  caractères.  A  celte  époque  entrè- 
rent au  théâtre  du  Vaudeville  deux 
comédiens  qui  se  concilièrent  bientôt 
U  faveur  du  parterre  :  l'un,  (lonlier, 
par  un  véritable  talent,  l'autre,  Philip- 


î()(. 


î<»t 


pe  Houvian,  pai  une  phvMoiioroie  jo- 
viale et  uue  ^i.iiidc  vuliil'i!il'*delaugue. 
I^pietinrr,  «ciant  pas  piécisenient 
chargé  Je^  mè-uf-x  r  .le',  que  Joli),  ne 
pouvait  lui  potier  oi.jbra^e;  mais  le 
second,  le  Joublant  Janv  l'emploi  des 
comiques,  devint  son  rival.  Ils  paru- 
rent néanmoins  ensemble  dans  lr% 
DeuA  Cuspurd ,  en  l  >  l  T .  J oii , 
joua  dans  une  scène  dr  C^^sandie  et 
l'aillasse  qu'il  avait  arrangée,  il  créa 
encore  le  rôle  de  lord  .\rlhur  dans  L 
Maison  de  Jeanne  (C .lrr,t\  l'un  ibs 
Deux  ralentin  ,  en  INIS.  .1/,, 
sieur  Tout  lie  a  tout,  en  181'.).  M  .i i  x 
déjà  le  dr^oùt  t'était  emparé  de  lui  et 
ajoutait  à  sa  paresse  naturelle.  Il  fai- 
.sait  de  fréquentes  absences,  »oiu  pré- 
texte de  sa  mauvai.se  sanle  ,  ce  qui  ne 
l'emprcha  pas,  en  18:i!0,  d'aller  passer 
un  an  à  Ix)ndres  où  il  fit  une  ample 
moisson  de  lauriers  et  de  ^uiiiers.  el 
il  n'en  revint  qu'en  sepleuibrc  18*21 . 
Il  obtint  uii^rand  succès  dans  Pierre, 
Paul  et  Jean,  où  il  établit  !e  rôle  de 
Faul,  et  pat  ut  ensuite  dans  uu  proverbe 
arrange  par  lui  el  .Vuberlin.  doniier 
avant  p4lé  au  (ivinnaoe  Diamalique, 
Jollv  semblait  toujour>  deNliné  à  etie 
une  des  colonnes  du  ^  audevilie  :  mais 
ce  ihéilre,  en  décadence  sous  la  direc- 
tion de  Désaugiers,  ne  se  releva  pas 
sous  celle  de  M.  Cvprien  Uéiard. 
Lorsqu'elle  eut  été  rendue  à  D(!sau- 
giers,  Jollv  crut  échapper  a  la  rivalité 
de  Philippe  en  suivant  M.  Béraid  au 
théâtre  des  Nouveautés,  que  celui-ci 
venait  de  fonder  sur  la  place  de  la 
Bourse.  Il  V  donna,  en  18:iT,  avec 
MM.  Arm.  Darlois  et  Biiv^cl:  Paris 
et  Londres,  vaudeville  en  "2  actes,  el 
V  créa  quelques  rôles  peu  impoiiants; 
mais  se  voyant  poursuivi  par  Philippe 
qui  entra  a  ce  thealre,  en  1828,  il 
prit  définitivement  sa  retraite  que  son 
reposel  sa  >ante  lui  rendaient  néces- 
saire. I)ev.inateur  et  mécanicien  ,  il 
avait  commencé  et  fort  avancé  la  cqI- 


20Î 


JOL 


lection  des  caricatures  d'acteurs ,  pu- 
bliée par  Martinet.  Il  construisit  un 
petit  théâtre  portatif,  avec  lequel  il 
amusait,  au  château  des  Tuileries,  les 
enfants  du  duc  de  Berrv.  Il  fonda 
ensuite  ,  dans  le  passap;e  de  l'Opéra, 
un  petit  spectacle  qui  porta  son  nom, 
et  qui  tenait  le  milieu  entre  les  ma- 
rionnettes perfectionnées  et  le  spec- 
tacle mécain'que  de  Pierre.  11  di- 
sait plaisamment  :  •«  J'ai  été  assez 
«  ioiif^-teraps  marionnette  de  direc- 
«'  teurs,  je  vais  être  directeur  de  ma- 
«  rionnettes.  »  Ce  théâtre,  dont  l'ou- 
verture eut  lieu  le  26  octobre  1829, 
et  où  Jolly  prouva  qu'il  joii!;nait 
au  talent  -de  comédien  ceux  de  pein- 
tre-décorateur et  de  machiniste  ,  et 
qu'après  avoir  fait  rire  les  pères  il 
pouvait  amuser  les  enfants,  n'eut  pour- 
tant qu'une  vor;ue  momentanée.  Il 
manquait  à  Jolly  l'esprit  d'ordre  et 
l'expérience  des  affaires  ;  il  tranchait 
du  grand  seigneur  par  ses  prodiga- 
lités. Il  fut  forcé  de  vendre  son  en- 
treprise et  son  privilège  ,  en  1830  , 
à  un  ancien  courtier  de  commerce  qui, 
abusant  de  sa  confiance,  lui  fnleva  par 
une  faillite,  en  1831,  la  somme  qu'il 
s'était  obligé  de  payer  (1).  Jolly  avait 
épousé,  en  1812,  Alexandrine  Saint- 
Aubin,  seconde  fille  de  la  célèbre  ac- 
trice M'"*"  Saint-Aubin,  et  qui  elle- 
même  avait  obtenu  des  succès  à  l'O- 
péra-Comique,  surtout  dans  le  rôle  de 
Cendnilon.  Se  voyant  à  peu  près 
ruiné,  il  se  relira  avec  sa  femme  et  sa 
fille,  dans  le  déftartement  de  la  Nièvre, 
espérant  que  l'air  et  la  trancpiillité  de 
la  campagne  adouciraient  ses  maux  et 
ses  chagrins.  H  sut,  par  l'économie 
qu'il  n'avait  jamais  connue,  s'y  créer 
des  ressources  et  des  occupations  ho- 
norables.  Dans  sa  dernière  maladie  , 


II  Ce  tbf^ire»,  qui  a  reçu  le  nnin  «le  djin- 
pnse  enfiitiiii ,  a  ji.isw*  |).ir  |>lii»i«urs  iiiiitiH  :  il 
ap;>a>ti<nl  .lujoardhiii  à  MM.  Mo  i\  d»»  Vindé 
et  Arcbdt-acnn,  et  et  dtrii;é,  depuii  18M,  par 
M.   Moriral  de  Saiot-llilaira. 


JOL 

il  eut  la  satisfaction  d'embrasser  sa 
belle-mère  qui  était  plusieurs  fois  ve- 
nue à  son  secours  et  qui,  malgré  son 
grand  âge  ,  brava  ,  pour  le  voir,  les 
fatigues  d'un  long  voyage  ,  dans  une 
saison  avancée.  Il  mourut  à  Grand- 
Pré,  près  de  Lormes,  le  28  oct.  1839. 
Le  plus  ancien  de  ses  amis,  M.  Du- 
mersan,  lui  a  consacré  une  notice  dans 
le  Monde  dramatique  ^  et  lui  a  fait 
une  épitaphe.  Carie  Vernet  a  peint 
Jolly  dans  plusieurs  rôles.     A — t. 

J  O  L  V  de  Broy  (  Lo u l  s-  P  H  i  Li- 
bert-Josf.ph),  né  à  Dijon  le 23  mars 
1736,  fut  président  à  mortier  au  par- 
lement de  cette  ville.  Très-versé  dans 
la  jurisprudence,  il  avait  fait  une  étude 
particulière  du  droit  canonique.  Non 
seulement  il  se  montra  fort  opposé  aux 
changements  politiques  qu'amena  la 
révolution,  mais  il  improuva  même  la 
réorganisation  de  l'église  de  France 
d'après  le  concordat  de  1801 .  Il  mou- 
rut à  Dijon  le  21  février  1822.  Le 
Journal  de  la  Câte-d'Or,  du  23 
février  de  la  même  année  contient  une 
Notice  d'Amanton  sur  Joly  de  Bévy. 
On  a  de  lui  :  I.  Le  parlement  ou- 
tragé, in-i"  de  29  pag.  Cet  écrit  pu- 
blié à  Dijon  en  1762,  sous  le  voile  de 
l'anonvme,  était  dirigé  contre  les  élus 
généraux  du  duché  de  liourgogne,  et 
en  particulier  contre  Varenne  {^oy. 
ce  nom,  XLVII,  498).  Le  chancelier 
ayant  ordonné  au  parlement  de  Dijon 
d'en  poursuivre  l'auteur,  Joly  de  Bévy, 
dans  la  séance  de  cette  cour,  du  3  mars 
17(52,  déclara  que  lui  seul  avait  com- 
posé le  mémoire  incriminé,  et  donna  la 
démission  de  son  office  (Voy.  le  l)ir- 
iiormaire  des  rinnnymes  de  lîarhier, 
tom.  III,  n'^  13Si9).  11.  De  la  mm- 
velle  relise  de  France,  \)'\']on  et  Pa- 
ris, 181 6,  in-S".  L'auteur  attaque  le 
concordat,  blâme  la  conduite  du  clergé 
cl  du  pape  Pie  Vil.  Il  ya  bien  de 
l'amertume  et  de  l'exagération  dans 
cet  ouvrase.  M.  de  La  Mennais  en  fit 


JOL 

alor^  nne  criiiqoe  trf5-jii«lf  "m^r<'^ 
(i'ibord  daiK  une  fruillr  pfriodiqur  , 
ft  rrj^^oiluilf  clam  jcs  lirflrxiuni  ri 
Mrlanfirs  ,  IHlî»  .  in-H".  p.i;;f  JIM. 
l'.-tmi  lie  lii  rrllgion  ,  du  1S  tirrrm- 
bre  IHIfi,  si;;nala  au*«.i  bien  ci?*  as- 
sertions oulr^es  ft  i!f  faut  raÏMinne- 
menls  ilans  IVrrit  de  l'anc'rn  pré- 
sident ï  morlirr.  III  h' nwirn  Jrs 
npfuiriliuns  et  r  de  Cange 

Huphaël  a  I hi  '•-  'fin  ,   srr- 

citeiir  lie  Dieu,  dans  tr%  mois  de 
/finoier,  fr^rier,  murs  et  iwril  1816, 
Dijon,  1H17,  in-8",  deut  éJilinns. 
IV.  /  V  r  ordre  de  la  mt/desse  et  de 
ton  nntiijiiite  chri  tes  Frnnrs.  il»id  , 
1HI7  .  .n  8'.  V.  Sur  Imh's  Ml', 
<bi«l  ,  IK'JO,  in-8".  Ce-!  une  apologie 
dr  ff  monarque.  VI.  \niii'f'ltr  tra- 
duction du  JiiTe  de  rimifatiim  de 
JetuK Christ,  ibid.,  IHIfi  .  in- 1*2  ; 
*2*  edil.,  a^rc  les  textes  de  rFrrilure- 
Sainteen  ia:in.ibid.,  tH51,in-8"; 
3*  édil.,  avec  le^  mêmes  texte*  en 
français,  ibid.,  18->*2,  in  8".  VU. 
Prières  h  /•  •  •  •  dc^  Jidèîes  dans 
1rs  temps  tl  .  et  de  ralami- 

trs,  tirrrs  ur.'s  i  Mrtmes  de  Ihn'id  et 
des  runtiijurs  compris  dans  1rs  divins 
ofjïrrs  dr  fèg/isr,  Iradur'ion  de  J .  F. 
I^iharpe,  etc.,  l)i)on,  1817,  in-1^. 
I  )'a|»rf >  Ifv  intentions  de  Jol>  de  lîetry, 
relie  rnin|Mlation  ne  fut  pa>  mise  dans 
le  commeiTc.  VIII.  Instrurfinns ftour 
un  prrhrur  tnurlir  dr  Diru  .ipfirrut  se 
tnn\}rrtir,  tirrrs  du  commentaire  des 
Psaumes  de  Diu^id .  par  le  P.  Ber- 
/A/>r;  suivies  du  lirrit  motii'rde  tu  con- 
vrrsion  d'un  incrrduir  [  Laharpr^ ,  qui 
fut  longtemps  un  drs  plus  renommes 
dans  la  secte  philosophiqur.  et  au- 
trur  dr  ce  rèril.  \[}\A.,  ISiit).  in-l*2. 
I\.  Hrruril  d'auforitrs  ^rn^^rs pro- 
posrrstt  la  méditation  res  fidèles,  et 
prinn'ihiJivnrnl  à  la  jnmrssr  inrx- 
prrinirut'f  ,  puur  son  inslrtution  , 
ibid..  18-21,  iii-8".  X.  Kxirail  du 
li*^e  de  M.   Burke,  sur  la  rex>oùi- 


jm. 


noî 


tion  française,  ibid.,  1819,  in-8** 
(l'oy.  liinkî.N  I.  :\2X.  Knfin,  Jolj 
de  i\é\y  a  donné  une  nouvelle  éditioa 
du  l'raitr  de  la  péremption  dtin- 
stanre  de  Melenrf,  au^nirntée  d'un 
Traité  du  président  Itoiiliirr  sur  la 
même  matière,  Di^on,  1787,  in-8°. 
Il  ke  proposait  aussi  d'éditer  \rs  (Eu- 
cres  de  jurisprudem  e  A\x  pré^ulent 
lioabier.  dorit  il  n'a  publié  que  '2  \ol. 
in-fol..  ibid  ,  1787  88.  et  un  X  vol. 
NUppIrntentaire  en  1789  Poy.  Bol- 
lilfR.  V,  :107'  -  I/abbéJ(>i.Y,qu*oii 
a  quelquefois  confondu  avec  le  précé- 
dent et  avec  d*autre«  bnmoni mes,  na- 
quit à  Dijon  en  171.'»,  fut  président  en 
la  chambre  des  comptes  de  îîourpnpne, 
et  mourut  vers  177.').  On  a  de  lui  : 
I.  l'ruilr  du  mal  et  de  la  rrporw 
tion,  Dijon,  17.''»7,  1770,  2  vol.  in- 
12.  II.  Traite  des  anges  Itons  rt 
mau%Hiis.\\uA  ,  1770.3  vol.  in  12L 
III.  ht  rrlii^iiin  chrétienne  èilairêe 
fHir  le  dogme  rt  fuir  ta  prufJirtie , 
ibid,  1770,  4ïol.in-r2.  Ces  trois 
ourraj^e*  parurent  son*  le  voile  de  l'a- 
non\me.  P — nT. 

JOL  V  ,  cbef  rendéen  ,  né  d'une 
famille  obscure  à  Bordeaux,  vers  1700, 
fonna  des  les  premiers  jours  de  m.irs 
1793,  entre  l^motte  \rl.ard  et  S.iinl- 
(•iileN,  une  di\ision  d'iii^ui^és  q:ii  fut 
d'abord  ap^telée  \\>rrurr  des  Sa/des. 
Trois  de  ses  fils  combaltaienl  avec  lui. 
Apres  plusieurs  avaMtu;:es,  il  attaqua 
deux  fois  les  Sables-d'Olonne  ,  et  fut 
repoussé  avec  perte  Dans  le  mois  de 
juin,  il  fi»  sa  jonction  avec  Cliaretlc 
pour  Taliaque  de  Nantes,  #  rentra 
^ians  la  Vendée  après  cette  expédition 
qui  fat  sans  succès.  Il  se  joi;;nit  encore 
à  (^harette,  lorsque  Parméede  Mavencc 
pénétra  dans  le  pavs  vendéen,  et  il  se 
tiouva  aux  batailles  de  Torfoii  ,  de 
Montai;;uetdeS,i;iit-Viii;;pnf.  Il  Ct  en- 
suîtela  ramp.i:;ned'hiver  de  1 79  V,  après 
le  passade  de  la  Loire  par  la  grande  ar- 
mée vendéenne.  Denxàt  ses  fils  furent 


20', 


JOL 


JOL 


lues  à  ses  côtés  dans  la  même  action  ; 
un  troisième,  quiavait  passédu  côté  des 
républicains,  fut  aussi  tué  le  même  jour. 
C'est  à  cette  époque  qu'ayant  demandé 
au  chef  de  l'artillerie  Leblanc  de  la 
poudre  pour  ses  soldats  qui  en  man- 
quaient ,  et  n'ayant  pu  en  obtenir,  il 
lui  brûla  la  cervelle  d'un  coup  de 
pistolet.  D'un  caractère  violent  et 
ambitieux,  Joly,  pendant  cette  campa- 
o;ne,  disputa  le  commandement  en  chef 
du  lias-Poitou  à  Charette  qui  l'em- 
porta sur  lui.  Dès-lors  sa  haine  contre 
Charette  ne  connut  plus  de  bornes  ; 
elle  lui  devint  funeste.  Lors  de  la  réu- 
n'on  des  armées  de  Stofflel  et  de  Cha- 
rette à  la  Beziliairo,  en  avril  1795,  on 
accusa  Joly  d'avoir  détourné  les  ap- 
pjuvjoionnements.  Abandonné  par  une 
partie  de  sa  division  qui  se  rangea  sous 
les  drapeaux  de  Charette,  il  fut  pro- 
scrit et  massacré  par  les  chasseurs  de 
Stofflet,  en  voulant  passer  la  Loire  à 
Saint-Florent.  B — P. 

JOLY  (Joseph),  littérateur,  na- 
quit vers  1770,  à  Salins,  d'une  famille 
honorable.  Après  avoir  fait  d'excellen- 
tes éludes  au  collè^^e  de  sa  ville  natale,  il 
fut  admis  dans  la  conp;ré{:;alion  de  TO- 
ratoire  et  envoyé  à  Juilly  où,  dès  l'âge 
de  seize  ans,  il  professa  les  humanités 
avec  un  succès  qui  lui  valut  les  encou- 
raj^ements  les  plus  flatteurs.  A  la  sup- 
pression de  ce  collège,  il  vint  à  Paris 
dans  le  but  de  s'y  perfectionner  par  la 
fréquentation  des  savants;  mais,  atteint 
bientôt  par  la  loi  de  la  réquisition,  force 
lui  fut  de  rejoindre  un  des  bataillons  du 
Jura,  dans  lequel  il  fit  les  premières 
campa;;ncs  sur  le  l\hin.  Une  fois  dé- 
gagé du  service  militaire,  il  se  hâta  de 
regagner  Paris,  résolu  de  se  livrer  en- 
tièrement à  l'élude.  Vivant  dans  la 
retraite  au  milieu  du  tourbillon  de  la 
capitale,  11  se  familiarisa  bien  vile  avec 
les  principales  langues  de  Thurope 
dont  la  connaissance  pouvait  devenir 
pour  lui  une  ressource,  et  passa  plusieurs 


années  à  étudier  les  chefs-d'œuvre 
des  poètes  de  l'Italie,  de  l'Angleteufe 
et  de  l'Allemagne.  En  1804,  i'Insti- 
tut  ayant  proposé,  pour  le  prix  de 
poésie,  V Indépendance  de  t homme  de 
lettres,  Joly  voulut  traiter  un  sujet  qui 
convenait  si  bien  à  ses  Idées.  Il  n'obtint 
pas  le  prix;  mais  il  n'en  fit  pas  moins 
imprimer  son  Epître  (1),  dans  laquelle 
les  critiques  remarquèrent  l'épisode 
sur  la  mert  de  Socrate.  Il  n'avait  pas 
mis  son  nom  à  la  tête  de  sa  pièce  ;  et  ce 
fut  de  même,  en  gardant  l'anonyme, 
qu'il  publia  différentes  traductions  dont 
le  succès  ne  put  le  déterminer  à  s'en 
avouer  l'auteur.  Il  avait  refusé,  dans 
les  premières  années  de  l'empire,  un 
poste  diplomatique,  qui  l'aurait  obligé 
dje  résider  en  Allemagne,  et  par  con- 
séquent aurait  dérangé  ses  habitudes. 
Plus  tard,  sous  la  restauration,  11  refusa 
aussi  les  différents  emplois  qui  lui 
furent  offerts,  préférant  à  toutes  les 
jouissances  du  luxe  et  de  la  vanité, 
cette  indépendance  précieuse  qui  lui 
permettait  de  disposer  de  son  temps  à 
sa  fantaisie  sans  avoir  de  compte  à 
rendre  à  personne.  L'âge  ne  changea 
rien  à  ses  habitudes  et  ne  modifia  point 
son  caractère  naturellement  fier  et 
morose.  Il  mourut  à  Paris  le  1*^'  août 
ISiO,  laissant  un  fils  qui  s'est  fait  une 
réputation  dans  les  arts  du  dessin.  In- 
dépendamment de  ï Epître  dont  on 
a  parlé,  on  connaît  de  Joly  les  tra- 
ductions suivantes:  I.  Les  aventures 
d<!  Sapho,  prêtresse  de  Mytilène , 
trad.  de  l'italien  (du  comte  Verri), 
Paris,  1803,  ln-12.  IL  Les  Fables 
de  Gay,  trad.  en  vers  français,  Paris , 
1811,  ln-18,  fig.,  précédées  d'une 
notice  sur  l'auteur.  ÎII.  Vivian,  ou 
C Homme  sans  caractère,  trad.  de 
l'anglais  de  miss  Edgeworlh,  Paris, 
1813,  3  vol.  ln-18.  IV.  Traduction 
en  vers  français  des  fables  complètes 

(i)  Epilre  sur  V iudfipendanrt  dvt  gens    de  Id- 
Ires,  ttc,  Paris,    i8oJ,  in-S"  de    t4  pages. 


JOL 


JOL 


2o5 


lie  Phèdre,  t\  J«  Irentc  d«oi  nou- 
*flle5  fâblr*  publicrN  ci'aprf*  le  manu- 
•icril  àe  l'rroti,  avrc  le  Irtie  en  tr- 
^anl  f!  tle^  notes,  l'aria,  \H\'\,  in  H". 
1^  Iradurteiir  a  ie|>tnduil,  dans  rette 
^ilioit,  le  tetlc  de  Schwab  pour  les 
anciennes  fables,  et  celui  de  Jannelli 
pour  les  nouvelles.  La  préface  et  les 
notes  ^ont  d'un  bommedef^nùt  et  d'un 
littérateur  exercé;  et  la  Tcr*ification  ne 
manque  ni  d'aisance  nvde  facilité.  I«a 
traduction  des  anciennes  fables  de 
Pheiire  reparut  la  rarme  année  , 
in- 18,  précédée  d'une  Epitre  du  tra- 
ducteur à  un  écolier  de  si.iieme.  V. 
L'Italie  ttiUtnt  lu  Rumination  des 
Humains, U^à.  de  l'italien  de  Micali, 
sur  la  inédit..  l'aHs,  IKii,  \  %ol. 
in-8'  avec  atlas.  Jolv  a  eu  M.  Vauriei 
pour  collaborateur  dans  cette  traduc- 
tion oui  a  été  revue  par  Gence,el  M. 
Kaoul-Kochette  dont  le  nom  seul  pa- 
rait sur  le  frontispice.  NV — s. 

JOLV  de  Maiieruy.  l  .  M\iZF. 
ROY,  \XVl,  \W.\. 

JOLV-CLEllC  ;NicoLvs  ,  na- 
turaliste, né  à  Lvon,  se  consacra  fort 
jeune  encore  à  l'état  ecclésiastique  ainsi 
que  son  frère,  et  entra  dans  la  conjuré- 
dation  de^  béncdiclins  de  Saint -Maur; 
reais  il  s'occupa  moins  de  théologie  et 
mrme  d'histoire,  celle  étude  fax  orile  de 
l'ordre  de  Saint-lienoil,  que  de  bota- 
nique el,  par  suite,  de  l'fnstoire  natu- 
relle en  f^énéral.  Ces  travaux* on  peu 
profanes,  s'ils  ne  lui  tirent  prendre  un 
peu  en  dé^oùl  I'cIaI  monastique,  ne 
contribuèrent  pas  a  ranimer  sa  voca- 
tion. Aussi  vil-il  sans  cha;;rin  la  révolu- 
lion  séculariser  les  couvents  el  condam- 
ner, en  e\ia;eanl  le  serment  à  la  consti- 
tution civile  du  clerf;é,  la  plus  i;rande 
partie  des  ecclésiastiques  à  résilier  ou 
à  perdre  leur  position.  On  a  dit  que 
son  frère,  ^ràce  à  ce  bouleversement  su- 
bit, devint,  de  chanoine  de  Saint-Paul 
à  Lyon,  évèque  constitutionnel  de  cette 
ville,  et  se  hâta  de  nommer  son  frère 


grand-ficaire.  Mais  IVr^ue  constitu- 
tionnel de  L>on,  de  1791  àl7i>i,fnt 
l^mourette,  et  quuid  I  jmourelle  ce>*a 
de  l'être,  en  mourant  >ur  l'echafaud,  la 
terreur  ne  lui  donna  pa>  dr  teniplaçant, 
et  probablement  Jolv-dirrc  riait  leduit 
à  se  cachet .  Lorsqu'il  fut  possible  de  re- 
paraître sans  danger  pour  sa  vie,  mais 
sans  vicariat  comme  sans  canonicat, 
force  lui  fut  de  chercher  des  ressources 
eilraordmaires.  Il  sollicita  et  obtint 
la  chaire  d'histoire  naturelle  à  l'écnlf 
centrale  de  l'Oise.  I<a,  non  content  de 
l'auditoire  masculin  obligé  qu'il  entre- 
tenait des  beautés  des  trois  rè;;ne&,  il 
iroa,;ina  de  faire  au\  dames  de  Beauvais 
un  cours  public  de  botanique.  Tout 
alla  bien  tant  qu'il  ne  s'a<;it  que  de 
ti^es,  de  racines,  de  colvledons  et  de 
pétales:  mais  quand  le  bon  béncdictin, 

3ui  ne  possédait  sans  doute  pas  Tart 
e  ^aier  assex  la  nudité  des  descrip- 
tions et  de  Bler  délicatement  une  phra- 
-  '  ■  diaphane  pour  les  uns,  inin- 
•  pour  les  autres,  en  fut  \enu  à 
i  aiutuiuie  du  pistil,  et  au  rôle  des  hou- 
pes  qui  couronnent  les  étamines,  et  à 
rabsorptiondu  pollen,  et  aux  pohian- 
dries  de  Linné,  etc.,  etc.,  la  trans- 
parence des  détails  effaroucha  la  pu- 
deur des  Bières,  toujours  craintitcs  pour 
lriir«  filles,  et  Jol>-Clerc,  à  la  séance 
suivante,  n*eut  à  débiter  del'or^ano^ra- 
phie  qu'aux  banquettes,  llcontinua en- 
core quelques  années  ses  fonctions  à 
l'école  centrale,  y  mêlant  des  travaux 
de  librairie  et  contribuant  non  par 
des  découvertes,  mais  par  des  réiumés, 
par  des  compilations  bien  faites,  à  la 
propafjalion  de  la  science.  Kn  1S02, 
son  frère  et  lui  obtinrent  du  saint-siè^e 
une  cédule  qui  les  rendait  à  l'état  bVque. 
Celait  en  quelque  stM-te  un  bill  d'in- 
demnité pour  le  premier,  qui  s  était 
marié.  Notre  naturaliste  n'élail  pas 
dans  ce  cas.  Il  survécut  àcefrère,  mort 
vers  1812,  et  ne  mourut  qu'en  1817, 
le  6  février,  à  Sainte-Périne  de  Chail- 


ao6 


JON 


lot.  Outre  une  nouvelle  édition  des 
Eléments  de  botanique  de  Tourne- 
fort,  Paris,  1797,  6  vol.  in-8*\  ou- 
tre un  tratluctioii,  qui  est  la  prediicre 
en  français,  du  Système  sexuel  des 
végétaux  àt  Linnée  ,  1978,  in-8", 
S'-'édit.,  1810,  in  8";  outre  la  Cryp- 
togamîe  complète  du  luénie  auteur, 
traduite  aussi  pour  la  première  fois  du 
latin  en  français,  sur  l'édition  de  Gme- 
lin,  et  enritliie  de  notes,  notions  prelé- 
minaires  ,  etc.) ,  on  a  de  lui  :  1.  Un 
Cours  complet  et  suivi  de  botanique , 
1795,  in-8'^  (ouvraf);e  qui  devait  avoir 
plusieurs  volumes,  mais  qui  en  est  resté 
au  l*^'^).  11.  Principes  de  la  philo- 
sophie du  botaniste,  ou  Dictionnaire 
interprété  et  raisonné  des  princi- 
paux préceptes  et  des  termes  que  la 
botanique,  la  médecine,  la  physique 
et  f  agriculture  ont  consacrés  à  fé- 
tude  et  à  la  connaissance  des  plan- 
tes, 1798,  in  8".  111.  Phytologie 
universelle,  ou  Histoire  naturelle  et 
méthodique  des  plantes^  de  leurs 
propriétés,  de  leurs  vertus  et  de  leur 
rii////r^,  1799, 5  vol. in-SMV.CùM/-^ 
de  minéralogie  rapporté  au  tableau 
niétliodifjue  des  minéraux  donnés 
par  Daubenton,  1802,  in  8".  V. 
Dictionnaire  raisonné  et  abrégé 
(f  histoire  naturelle  par  d'anciens 
professeurs,  Paris,  180C  ,  2  vol. 
in  8°.  Pour  ne  rien  omettre  des  œu- 
vres de  Joly-Clerc,  nous  mentionne - 
j  ons  cnfm  son  Apologie  des  prêtres 
mariés,  ou  Abus  du  célibat  prouvé 
aux  prêtres  catholiques  par  le  ci- 
toyen J*^'*'^ ,  Paris,  1798  (an  VI), 
in-8'\  P_OT. 

JOX/E  ou  JOXSE\(G..si.E), 
savant  islandais  ,  évèque  de  Skalliolt , 
n.'iquit  en  1513,  à  ÏIrauii;^erde.  Jon 
Gislesen  son  père,  prêtre  de  la  paroisse 
de  r,aiilverjaljan,  diocèse  de  Skalliolt, 
lui  fil  donner  l'instruction  eléiiiciitaire 
par  Alexio  ,  devenu  depuis  atibé  de 
Viber;   il  continua  ses  études  dans  la 


JON 

maison  de  Tévéque  0°;mund  qui,  ayant 
pour  lui  beaucoup  d'attachement,  l'or- 
donna prêtre  et  le  nomma  peu  de  temps 
après  curé  de  l'église  cathédrale  de 
Skalliolt.  Le  père  de  Jonsen  était 
brouillé  avec  lui,  parce  qu'il  prétendait 
que  son  fils  deviendrait  un  jour  le  chef 
de  ceux  qui  voulaient  détruire  l'an- 
cienne religion  et  en  introduire  une 
nouvelle,  c^  qui  arriva  comme  il  le  di- 
sait. En  effet  Jonsen  s'étant  lié  avec 
Gissur  Einarsen  et  Oddar  Gottschalch- 
sen  apprit  d'eux  à  goûter  les  écrits 
de  Luther,  qu'il  n'osait  cependant  lire 
qu'en  cachette  et  surtout  à  l'insu  du 
vieux  évêque  Ogmund.  Lisant  un  jour 
une  traduction  du  Nouveau-Testament 
par  Luther,  l'éveque  le  surprit  et  exigea 
la  remise  du  livre  ;  et,  comme  Jonsen 
cherchait  a  le  cacher,  Ogmund  fut  si 
mécontent  qu'il  le  lui  arracha  des  mains 
et  le  jeta  dans  la  rue,  en  disant  que  c'é- 
tait des  hérésies  de  Luther.  Jonsen  fut 
curé  de  Skalliolt  jusqu'en  1540.  En 
1  546,  il  fut  pourvu  de  la  prébende  de 
Selardal,  devint  ensuite  officiai  de  l'é- 
veque Gissur  Einarsen,  dans  le  district 
deliardastrand,el,pluslard,  remplitles 
mêmes  fonctions  auprès  de  l'éveque 
Morlen  Einarsen.  Ayant  été  excom- 
munié en  1550,  par  l'éveque  Jon 
Araesund,  il  partit  pour  Copenhague  , 
aûn  de  faire  casser  la  sentence,  liien 
accueilli  dans  cette  capitale,  Jonsen 
parvint -à  se  justifier  et  ne  tarda  pas  à 
retourner  en  Islande.  Lorsqu'il  y  arriva, 
il  apprit  qu'une  sentence  prononcée 
contre  lui  le  privait  de  son  emploi  et 
ordonnait  ki  confiscation  de  ses  biens. 
Mais  comme  Jon  Aiacsund  qui  l'avait 
rendue  fui  lui-même  mis  à  mort  bien- 
tôt après,  Jonsen  rentra  dans  sa  pré- 
bende et  lui  élu,  en  1556,  évéque  de 
Skalliolt.  L'année  suivante  il  fit  wn 
second  voyage  à  Copenhague,  et,  après 
y  avoir  élé  sacré,  il  retourna,  en  1558, 
dans  son  diocèse  où  il  mourut  le  30 
août  1587.  il  avait  été  marié  deux  fois, 


la  prfmi^re  à  (^nuine,  fille  trKjolf, 
iaqurile  auparavant  a\ait  eu,  linM  que 
^a  MFur,  dn  enfanU  de  »on  propre 
irère,  re  qui  rau^j  un  ^ranH  »rjndale 
el  fut  ^o'netil  rrprorlir  à  J(»fl^cn,  qui 
rpnii^a  i-iiNcrondr^  noces Dtoi  ili^p,  (jllc 
de  Jt)ii.  il  a  pulilie:  I.  1^  i inquiiiiir- 
trttisirnir  iliiiftitrr  ti Isu't'^,  a»rc  une 
rntirtp    e»|>lir.ilinTi    r\    tinp   prelare  ilu 

V   1'  (  i:>.'.7.  11. 

lii^ti'iir-  i.f  i.i  ,'■  .'i   itr  Jeru- 

salrm ,  ibid . ,   I  .'ï.'»7  .    i  1 1 .    Mtir^urita 
ihrtilu^ira,  lradu>lrenis|jndaiN,  ibid., 
1558.    IV.   Psaumes,    en   i>landai<, 
ibid.,  t.')58.    V.  Traduction  àt  Jrsus 
Sirmh  (le  litre  àt\'F.itlfsiiistitfur\ 
en  islandais,  llolum.  l.'iSO.  V|.  Hfùs- 
tnla  ad  Juh.    Hemiii  hiuni  ptistitrrm 
llatuliurs;. .  dan*  le  JuntSi  (.olrri  li- 
brllus  rpislutarum,  tVanrfort,  l.'iH?. 
D— z-s. 
JOX.Kou  JOXSKX  (SvriN  . 
errlé»iaNlii;iie    i^l.indai»,  né  en  1  (>().'), 
alla  ,  suivant    rusa>;e    de  »e4    compa- 
IriotCN   qui  se   destinent  au  ^aretdo^e, 
faire  ses  éludes  à   l'univerMle  de  ^- 
penlia;;ue,  et  renat   eiercer   dans  son 
lie  diverses  fondions  du  ministère  rvaa- 
:;éli(]ue.  Il  fut  un  des  collaboralrur<i  de 
la  \er>ion  islandaise  de    la  iiiblr,  iin- 
primce  a  lloluin  en  IBiV,    par  l'evè- 
()ue'Hiorlaciui  SLuleson.  Jon>en    tra- 
«iul^Mt  dans  la  mriiie  langue  le    Udif/ni- 
lia    l)ri   d'Ilei  bercer,    le     l  fntaitit 
christianisme   d'.Vrnd,  etc.  ;  mais   il 
parait  que  ces  version»  sont  drnipurées 
en  manuscrit,  il   mourut   en  16H7,  à 
Tige  de    qualre-via|;t-qualre   ans. 
C.  M.  l». 
JOX^E  ou  JO\SE\  (Stf-in), 
savant  prola:  islandais,  ne  dans  la   pa- 
roisse  d'Iiialtrbalke  ,    diocèse  d'Iio- 
lum  ,    descendait    d'une    pauvre    fa- 
mille de   preires    Sa   raère   s'appelait 
Gudriina  Slem^nm,   et    son  père  qui 
portait    le    nog^   de  Jon    1  bor^eirsen 
avait  eu    trente-quatre  enlants  de  ses 
<)iulrc  mariages.  A  dix-huit  aiu  il  fut 


JON 


•^ 


CiiTOfé  i  iVrole  de  Holum  et  U 
••«  études  a  (>»penl:a:iue.  En  1688, 
il  fui  nomme  rlij|icljin  à  llilerdal, 
et  appeir,  en  1ti*)-J,  a  la  calliedrale  de 
SLallioll  l/anuee  %ui\anle  il  obtint 
la  cure  d'Iliiernes,  ou  il  rrsta  jusqu'en 
16*18,  et  passa  ensuite  à  relie  de 
.Sribrri;  Il  fut  enfin  rlu.  en  t"  1 1 ,  éf^ 
que  d' lloluin  ,  ou  il  mourut  \r  '2  dé- 
rembrr  ITII'J.  On  a  de  lui:  I.  D.f. 
ferentfs  traduclims  en  i»landais  :  1" 
d'un  l\iaunie.l\n\um  ,  1713;  'J"  de 
Wtnt/tropohjgie  de  l^^ssrniu^,  ibid., 
17111,  in-8";  'A"  de»  Caare- Perse 
de  hacbU.  ibid..  1719.  in  8"  ;  i** 
de»  Prt'dii  utiims  sur  la  /Mission  de 
l<a^<enins,  ibid.,  17'J:l  17iO.  in-8'^; 
.*»"  tXdlearii  Munaths  wui  It  ih  hen- 
Ueder  ;  6^  de  la  /<//»//-.  llolum.  1 728, 
in-fol.  Kntrrpnse  par  l'ordre  du  roi 
Frrdrric  IV,  crile  traduction,  calquée 
ti  op  Gilrlement  sur  l'édition  danoise,  ne 
salisGt  pas  le<  amateurs  de  la  pureté  de 
l'idiome  i\ijn(lais,  rt  ils  donner  eut  la 
préférence  a  la  version  de  1  lioi  iacius* 
Skuleson,quoiqueleseKera|>laire»en  fus- 
sent devenusextrèmemeiit  rares.  Vn^ex 
l'Iiistoire  des  bibles  jklandaises  par  liar- 
boi*'.  dans  la  iKtnitt hr  bihiiothik  , 
tome  VIII.  11.  Ahrr^ê  liu  licrr 
li  heures i\e  I*assénius,  Holuiu,  t7.i3. 
111.  Psatleriuni  trium pha/e,  i]it\tfn~ 
ba^iie,  17iil.  in  S".  I  V.  iislordrh^ 
lompose  de  méditations  spirituelles. 
I.,e  tome  111  de  l' Histoire  ecclésias- 
tique d'Islande  contient  l'indication  de 
quelques  autres  ouvra;;es  de  Joiisen 
impniné<  a  llolum  ;  il  est  éditeur  du 
Diarium  christianum,  publie  dans  la 
même  ville,  de  1719  a  17:23,  in-S", 
et  qu'on  lui  a  quelquefois  attribué  , 
quoiqu'il  soit  réellement  de  llal^rim 
Peter^ien.  D  — z— s. 

JO.\AS,  religieux  «le  l'ordre  de 
Saint- Benoit,  né  vers  599,  à  Suse, 
dans  la  Li:;urie,  embrassa  la  vie  mo- 
nastique en  ois.  dans  l'abbaye  de 
Hobio,fuudéeparsajutColoinbau,lor6- 


:a8 


JO!^ 


JON 


que,  pour  se  soustraire  à  la  colère  de 
Brunehaut,  il  vint  chercher  un  asile  en 
Italie.  Ses  talents  précoces  lui  méritè- 
rent la  conGance  de  saint  Altale,  alors 
abbé  de  ce  monastère,  qui  Templova 
comme  secrétaire.  11  accompagna  le 
nouvel  abbé  saint  Kertulfe  à  Komc 
en  628  ;  et  depuis  il  fit  avec  sa  per- 
mission diflérenls  voyages.  On  prétend 
qu'à  cette  époque  il  se  rendit  en  Irlan- 
de pour  s'instruire,  dans  la  conversa- 
tion des  vieillards,  des  faits  relatifs 
aux  premières  années  de  saint  Colom- 
ban  dont  il  avait  déjà  formé  le  projet 
d'écrire  la  Ki>.  Attiré  par  la  réputa- 
tion de  saint  Amand,  abbé  d'Elnone, 
il  visita  ce  monastère,  qui  dès-lors  eut 
constamment  pour  lui  un  attrait  parti- 
culier. 11  habita  quelque  temps  Evoriac 
(Faremoutier),  diocèse  de  Meaux.  En- 
fin il  se  trouvait  à  Pvéomé  ,  diocèse  de 
Langres,  lorsque  le  roi  Ciotaire  III  et 
Bathilde,  sa  mère,  l'envovèrent,  en 
659,  à  Chalons  pour  y  régler  quel- 
ques affaires.  Jonas  avait  alors  le  ti- 
tre d'abbé;  et  les  auteurs  de  Y  His- 
toire littéraire  de  France  conjectu- 
rent qu'il  était  abbé  d'Elnone.  iJes 
faits  que  l'on  vient  de  rapporter  on 
peut  conclure,  avec  assez  de  vraisem- 
blance ,  que  Jonas  ne  retourna  pointa 
iiobio,  ou  du  moins  que  les  séjours 
qu'il  y  fit  furent  de  courte  durée.  Il 
vivait  encore  en  605  ;  mais  on  ignore 
la  date  de  sa  mort.  Ses  contemporains 
louent  son  éloquence,  son  érudition  et 
même  son  talent  comme  écrivain.  On 
a  de  lui  :  les  Fies  de  suint  Colom- 
ban  ;  de  ses  disciples  saint  Altale  et 
saint Berlulje,  abbésdeBobio  ;  à'Eus- 
tase ,  abbé  de  Luxeuil  ;  et  de  sainte 
Fare^  abbeised' Evoriac.  Ces  vies,  in- 
sérées d'abord  dans  le  tome  III  des 
Œafr^5 du V en. Bède,  ontpassédepuis 
dans  les  différents  recueils  des /^<?/^j<f<?5 
5'û/Vî/5,  notamment  dans  celui  desliol- 
landistes,  et  dans  les  Acta  sanctur. 
ord,  S.  Benedicii  de  D.   Mabillon, 


11,5-449.  Elles  sont  assez  exactes, 
mais  le  style  en  est  dcilguré  par  des 
expressions  emphatiques  qui  le  ren- 
dent souvent  obscur.  On  doit  encore  à 
Jonas  une  révision  de  la  Vie  de  saint 
Jean  de  Tieomé,  à  laquelle  il  joignit 
un  Dialogue  sur  les  miracles  de  ce 
saint,  écrit  d'un  style  plus  simple  et 
plus  naturel  que  ses  autres  ouvrages. 
Cette  Vie  ainsi  retouchée  est  imprimée 
avec  le  Dialogue  dans  V Histoire  de 
Vahhaye  de  Kê.omé  au  Moustier^ 
Saint-Jean^  par  le  P.  Rouvière,  Paris, 
1637,  In-i""  ;  et  lesBollandistes  l'ont 
reproduite  dans  leur  Recueil  au  28 
janvier,  après  l'avoir  revue  sur  trois 
anciennes  copies.  On  trouve  une  Vie 
de  Jonas  dans  V Histoire  littéraire 
delà  France,  III,  603-08.  C'est  la 
source  où  l'on  a  puisé  pour  rédiger  cet 
article.  W — s. 

JOXCOrRT  (Pierre  de),  pré- 
dicateur protestant,  quitta  la  France 
quelque  temps  avant  la  révocation  de 
l'édit  de  Nantes  et  se  retira  en  Hol- 
lande. Il  devint  ministre  de  l'église 
wallonne  à  La  Haye,  où  il  mourut  vers 
1725.  On  a  de  lui  :  I.  Entretiens  sur 
les  différentes  méthodes  d' expliquer 
t  Ecriture  et  de  prêcher  de  ceux  quon 
appelle  Coccéiens  et  Voétiens  dans 
les  Proi>inces-lynies ,  Amsterdam, 
1707,  in-12.  Cet  ouvrage  amena  une 
polémique  entre  l'auteur  et  les  Coc- 
céiens: ceux-ci  l'attaquèrent  dans  deux 
écrits  auxquels  Joncourt  répondit  par 
de  y ouocaux  éclaircissements,  et  par 
une  Lettre  aux  églises  ivallonnes  des 
Pays-Bas,  U  Haye,  1708,  in  12. 
1 1 .  Pensées  utiles  aux  chrétiens  de 
tous  les  états,  La  Haye,  1710  ,  in-8" 
(anonyme).  III.  Quatre  Lettres  sur 
les  jeux  de  hasard,  et  une  sur  l'usa- 
ge de  se  faire  celer  pour  éviter  une 
visite  incommode,  1714,  in-12. 
L'auteur  publia  la  nysme  année  une 
nouvelle  Lettre,  pour  seroir  de  ré- 
plique à  la  dêjense  de  M.  de  la  Pla- 


JON 

!/•//<',  qui  ptfiendiit.  ainM  qor  liir 
Itfuar,  qiir  Ir»  \ru\  de  hiiaij  nr  «Mit 
pA<  toujours  riifuiiir!^;  Ji-nrourl  ue 
pjrljs^rail  pi*  cfllf  opiniou  (I  oy. 
l\%nnt\^\t ,  III,  3V6,  r\  Ti.*»  im., 
\  \  \  V .  1  (»  I V .  l.rttrrs  rriinfufs  sur 
Jù'crs  sujets  imftortiints  dt  rhcritU' 
rr-Suin/e  ,  ArnNtrribm,  tTlJ,  in- 1:1 
janoninic).  V.  Entretims  sur  tetmi 
ftrrsrnt  tU  la  reilgiun  m  truntr, 
où  Con  traite  umpiemrnt  de  t auto- 
rité des  pitpes  et  de  ses  /uiJrments, 
Iji  llavr,  il"!'»,  in-l'J  Joncourt  j 
Jonné  une  étlilion  àts  Psaumes  de 
Ikjx'id,  mis  en  rime  française  par 
(dément  Marot  et  T^  ' 

ttoUk'eUemeni  retiHi,  \      .   \ 
ITHi.  in-lJ  r— hr. 

JO\t:iH  U  r  (t^LiE  m),  nrà 
Iji  Ha>r,  «Uns  In  dernirm  anntrs  da 
Wll'iicclf.  profrvvi  lon^-lfmpt  U 
pliilosopMe  à  Uots  lr-l)ur,  où  il  t\tr- 
çait  au^i  le»  iuactioni  de  pa»trur.  Kn 
1729,  ilcoucourut  avec  Mira\Mjndr, 
Prosper  Marchand  el  a'ilres,  à  la  ré- 
daction du  .Jimrrml  littéraire  de  1^ 
IIa>e.  et  à  la  conlinuation  de  relie 
même  feuille  ^ou$  le  litre  de  Journal 
historique  de  la  rèftuhlit^ue  des  let- 
tres, i'npriraé  à  I^ide  IMu»  lard  il 
fut  un  drs  collaborateurs  de  \^  Uihlio- 
thèt^ue  des  siirnres  et  des  beaux- 
arts,  aulie  journal  qui  »e  publiait  à  la 
lla>e.  Joncourt  mourut  dans  celte 
Tïlle  \eri  1770.  Il  a  composé  quelques 
écrits,  roais  c'est  surtout  a  la  traduction 
d'ouvrages  anglais  en  français  qu'il 
consacra  sa  plume.  Ou  a  de  lui:  I. 
^oui^elle  hihli,}thrque  anglaise,  La 
Ila>e,  17:)f),  3  ^ol.  in  8".  Celait 
une  publication  périodique  dont  il  pa- 
raissait un  cahier  tous  1rs  deux  mois. 
II.  Tniité  sur  la  nature  et  .sur  les 
prim  ipaux  usages  de  la  plus  simple 
espèce  des  nombres  tri^onau  r,  ibid., 
176-2,  in-V.  L'auteur  avait  d'abord 
compose  ce  traité  en  latin;  il  le  tra- 
duisit lui-même  en  français.  lU.  Œit- 


JON 


»o9 


^m  di,rr%es,  ibid.,  ITlik,  m  iH  . 
177G,  si  loi.  in  12.  Toiilei  !es  pircrs 
Je  ce  recur  I  nr  %ont  pa*  dr  Joi.oouil  ; 
il  y  en  a  pîuMrui*  qu'il  .i  ruirnient 
tradailetde  l'an 'Lu»!-!  d-; 
Farai  le«  noal)reu^e5  irat!i  i| 

à  pabliert  sou*  le  voile  dr  lanotMne, 
(Mire  àt%  lraiie%  lhét>lo>;ii|urx  el  de^ 
•tnWHM  àêia.  SlierlorL  et  de  I  uca«, 
BOtts  fi I fTon»  :  1  "  .y /.  i  pJtntn .  ou  le 
Petit  philosophe,  traduit  de  l'an^Uii 
de  Berlelev  /  o»  .  ce  nom,  |V,  *Jti.'>), 
U  Haie.'  173^,  2  toI  in.l2  2 
Introductiitn  à  tu  phdosttphie,  Ir  da 
latin  de  **(ira*rtjndr,  l^vde,  1737, 
l~»s,inK".  3*edit.,  I7ÔG,  au^- 
.rparMhmand  Tov  re  nom, 
L\l.217    3    / 

trad.  du  la!in  li  i  i  .  »  ..  , 

2  toi.  in-i'.  Oiie  lrad«ir!iou  Ijjle, 
a:n«i  que  la  précédente,  sou^  les  veoji 
de  l'auteur,  est  pref..néc  à  celle  de  Ho- 
latui  le-VirloTt.  l'aris,  17  i7,  2  *ol 
ia-8*'  (ro/.'(>nAVC5\!«Dk.  WIII. 
3'>2>.  4"  l'nyage  tfjnson  autour 
du  monde.  UiA.  del'ant^lus.  .Vm^ter- 
dam,  1719,  17.'il,  in-i'.(>l!r  tra- 
duction, revue  par  l'abbé  de  <iiia  de 
Malves  /o>.(;l^.  XVIII.  Ô7G\  a 
rlé  réimprimée  à  Paris,  17.'iO,  in-i" 
ou  \  \ol.  in  12.  5'^  Joncouit  a  en- 
core traduit  de  ran>;lais:  i. intenta 
de  la  philosopliie  neu'tofu'en/ie  de 
Femberlon.  Amsieidam.  17â.">,  iu-8*'. 
—  Eléments  de  philosopliie  mo- 
rale de  David  Kordvce,  Ïj  Ha\e, 
17. "if»,  in -8".  — Eléments  iF.ilgehre 
dr  Saundersnn(l),  .\nistrrdam,  17.'»6, 
2  vol.  in-i". — Dialogues  des  morts, 
de  Lvltlcton.  Ij  Ila>e,  17tiO.  m  N  . 
«—Le  7*"  et  le  8'  volume  du  Specta- 
teur anglais,  ibid.,  1730-.>V,  m-12. 
Il  travailla,  en  société  a\ec  Oiauiriiié, 
Robinet  et  autres  peus  d^  lettres,  à 
l'édition   de   {'Histoire    umWrselle , 

■|)  C'r«t  pir  *rr»ur  ^"t  .  k  l'*rtirlr  S4u»- 
»«kM>»  \\l..  461  ,  oa  a  écrit  B»HC«mr  »u  lira  if« 
Jjme^mrt. 

'4 


3IO 


JON 


trad.  de  l'anglais,  Amsterdam,  1742 
et  années  suivantes,  46  vol.  in-4°  ;  à 
celle  du  livre  de  Job,  trad.  du  latin  de 
Schullens  [Voy.  ce  nom,  Xï.l,  253), 
en  société  avec  Âilamandet  Sacrelaire, 
Leyde,1 748,  in-4'\  Enfin  il  publia  une 
traduction  des  Œuvres  dh^erses  de  Po- 
pe^ à  laquelle  il  avait  coopéré,  Amster- 
dam, 1754,  7  v.  in-12  ;  ibid.,  1763, 
>vol.  in-8^  ibid.,  1767,  8  v.  in-12. 
Suivant  Barbier  [Examen  critiq., 
p.  472),  c'est  à  un  autre  Joncourt, 
professeur  de  langues  étrangères  à  Pa- 
ris, que  Ton  doit  un  Essai  sur  la  dif- 
férence du  nombre  des  hommes, 
dans  les  temps  anciens  et  modernes, 
trad.  de  l'anglaisde  R.  Wallace,  Lon- 
dres (Paris),  1754,  in-8"  et  in-12. 
Plusieurs  bibliographes  donnent  même 
à  ce  dernier  quelques-unes  des  traduc- 
tions anonymes  mentionnées  plus  haut 
et  qu'on  attribue  ordinairement  à  Elle 
de  Joncourt.  Il  est  possible  que  l'homo- 
nvnile  des  deux  personnages  ait  causé 
quehjues  méprises.  P — rt. 

JOXDOT  (Etienne),  né  en 
1770,  à  Montcénis  ,  près  d'Autun  , 
après  avoir  fait  au  collège  de  Sainte- 
Barbe,  à  Paris,  de  bonnes  éludes,  se 
liv  a  avec  passion  à  la  littérature,  et 
n'adopta  point,  quoique  bien  jeune,  les 
principes  de  la  révolution.  Loin  de  là, 
il  s'attacha  en  qualité  de  secrétaire  à 
un  général  vendéen  ;  tout  dévoué  à  la 
cause  qu'il  avait  embrassée,  il  inséra 
dans  un  journal  monarchique,  \e  Cour- 
rier unii'erscl,  un  article  apologétique 
sur  l'armée  catholique  et  royale.  Après 
la  première  pacification  des  départe- 
ments de  rOuest,  il  revint  à  Paris  et 
donna  une  nouvelle  preuve  de  ses  sen- 
timents politiques  en  publiant  un  Pa- 
rallèle de  Louis  XV 1  et  de  Tsorig- 
Ching,  empereur  de  lu  Chine ,  Pa- 
ris, 1797.  Vivement  ému  des  mal- 
heurs de  ce  prince,  il  en  traçait  le  pa- 
négyrique sous  la  forme  d'une  compa- 
raison avec  l'un  des  meilleurs  monar- 


JON 

ques  de  l'Orient.  Ce  courageux  écrit 
fut  suivi  d'une  production ,  I'jB^- 
prit  de  la  révolution  Jrançaise , 
qui  attira  à  son  auteur  des  éloges 
et  des  critiques  également  exagérés. 
Il  ouvrit  à  la  même  époque  dans  le 
faubourg  Saint-Germain  une  pension 
oii  il  n'admettait  pour  sous-maîtres  que 
des  hommes  connus  par  leurs  princi- 
pes religieux  (1).  Il  coopérait  en  même 
temps  au  Véridique,  journal  destiné  à 
les  propager.  Cette  feuille  ayant  été 
supprimée,  Jondot  fut  admis  au  nom- 
bre des  écrivains  qui ,  dans  le  Jour- 
nal des  Débats  ,  s^attachaient  à  ré- 
pandre des  idées  saines  en  politique, 
en  morale,  en  littérature.  Il  fut  spécia- 
lement chargé  de  la  partie  des  voyages 
etdeshvres  d'histoire.  On  remarqua  le 
soin  af  ec  lequel  il  rédigeait  ses  articles  : 
il  ne  se  bornait  pas  à  faire  un  extrait  sec 
et  aride  des  livres  qui  lui  étaient  confiés  ; 
chaque  ouvrage  lui  servait  de  cadre 
pour  offrir  aux  lecteurs  des  rapproche- 
ments utiles  et  des  aperçus  neufs.  Si 
depuis  il  a  été  surpassé  dans  cette  car- 
rière par  les  Dussault,  les  Geoffroy, 
les  Iloffman  ,  les  Féletz  ,  ses  collabo- 
rateurs, il  n'en  est  pas  moins  juste  de 
rappeler  que  Jondot  eut  le  mérite 
d'être  un  des  premiers  à  former  cette 
croisade  lilléraire  et  religieuse  qui 
contribua  si  puissamment  à  la  réor- 
ganisation de  l'ordre  social.  On  dis- 
tingua dans  le  temps  ses  articles  sur 
le  Musée  de  la  rue  des  Petlts-Augus- 
tins;  sur  la  foret  de  Fontainebleau, 
sur  les  tombeaux  de  Saint-Denis  ,  et 
sa  réfutation  de  l'ouvrage  éminemment 
antl-cîl\hollque  de  Cli.  Villers  sur  la 
réformation  de  Luther.  Cependant  la 
précipitation  du  travail  le  fit  quelque- 
fols  donner  dans  d'étranges  bévues: 
ainsi,  en  rendant  compte  du  Traité 
sur  la  grande  tactique  de  M.  le 
général  Jomini,  il  débutait  dans  son 
article  en  louant  l'auteur  d'avoir  dit 

(i)  Voy.  les  /innales  Cal/>oli'jues,  juip  1797. 


f»rfcis^ent  le  conlraire  d«  ce  que  rc- 
ul-ci  irait  énonce  et  prouvé  dans  ^on 
liire,  relativement  à  la  lactique  (!e>  an- 
rien^.  A  ses  fondions  de  journaliste, 
Jtiiulitt  joi;;nait  celles  dr  :  '  i 
tl'i  idire  dans  quelques  ël.i. 
tl'mstruction  puliliquf.  Ku  IT'J'J,  jI 
publia  des  ()l>srr\.Hitions  critiques  sur 
1rs  Irions  tt histoire  du  (l.  l'oinry. 
Dans  rel  uuvia;;e  Jniidol  indiquait  une 
SouK'elle  methoiU  iC apprendre  Hii s 
tuire:  on  >  remarquait  un  cliapitre 
contre  Tallirisme.  Celait  un  vrai  ma- 
nifeste contre  le  philosophisme  ,  ainsi 
que  l'annonçait  IV|)!;;raplie:  ^îihiltam 
absurde  diri  ftotest  tjuud  non  dii  utur 
ah aiitfuo phiiouiphu.  1^  Dnade phi- 
iusophirpie  attaqua  vixement  Jondot 
au  sujet  de  cette  Lrocliure,  et  entre  au- 
tre^ ;;rief5  lui  reprocha  d'rVrr  chrétien. 
C'était  alors  un  titre  aux  >eux  du  ^ou. 
vememrnt  réparateur  de  Ilonaparte  ; 
aussi  fut  il  nommé,  en  IKdV  ,  pro- 
fesseur d'histoire  à  l'école  niililalre  de 
Fontainebleau.  ()uelqnr>  années  après, 
Jondot  publia  le  plus  important  de  tes 
ouvrages  sous  ce  titre  :  Tableau  histo- 
rique des  nations  ,  ou  ïiupproche- 
ments  des  principaux  è%'enewents 
arrik.'rs  à  la  même  rpo<fue  sur  la  sur- 
face de  la  terre  (1809,  \  vol.  in -8*'). 
Dans  ce  livre  l'auteur  ne  se  sert  de 
l'histoire  que  pour  venir  à  l'appui  de 
ses  doctrines  politiques ,  mais  son  éru- 
dition est  souvent  >uperGciclle.  Trop 
souvent  aussi  il  tombe  dans  la  décla- 
mation. En  1810,  lors  de  la  création 
des  facultés  dans  la  nouvelle  université 
impériale,  Jondot  fut  nommé  à  la  chaire 
d'histoire  à  Uouen,  d'où  il  passa  deux 
ans  après  à  celle  d'Orléans  ;  mais  il 
donna  sa  démission  en  1813,  pour  se 
livrer  avec  plus  d'indépendance  «  ses 
éludes  historiques.  Il  est  vrai  de  dire 
qu'avec  son  extérieur  peu  avenant,  son 
élocution  pénible  et  sa  parole  assez 
commune,  Jondot  n'était  pas  fait  pour 
renseignement  oral.  C'est  ce  qu'il  fui 


JON 


11 1 


forcé  de  reconnaître  lui-rorme,  lors- 
que nommé  en  1S18,  par  M.  Uo>er- 
Collard,  profe.oteur  d'hisloire  au  col- 
lège Hourbon,  il  dut ,  faute  de  pou- 
voir tenir  ses  élrxes,  se  reiiier  après 
quelques  scènes  de  désoidre.  Depuu 
celle  époque  ,  »ans  renoncer  à  ses 
f;oul»  littéraires ,  il  s'occupa  pres- 
que eiclusivement  de  faire  valon  des 
propiiélés  en  ^ ignobles  qu'il  povNédait 
dans  le  département  de  ta  >Iarne.  Il 
mourut  à  Taiis  le  10  mars  18.')V,  et 
»es  restes  furent,  »ui\ant  une  disposi- 
tion de  son  testament,  transportés  i 
Rieui,  près  de  Montrnirail,  où  élaient 
situés  ses  biens.  Jondot  a\  ait  publié,  ou- 
tre les  ouvra;;es  dont  nous  avons  parlé, 
une  Histoire  de  r empereur  Julien, 
tirée  des  auteurs  idolâtres  et  t  otifir- 
mèe  par  ses  propres  écrits  ;  suis'ie  du 
Récit  dr  la  drstistreuse  retraite  des 
levions  romaines  (l'aris,  1817,  2  vol. 
in-8").  Cet  ouTrai;e,  écrit  d'un  st\le 
déclamatoire  ,  offre  des  recherche^ 
d'érudition  ,  mats  on  n'v  trouve 
qu'une  critique  peu  uine.  C'est  une 
satire  contre  Julien  que  Tauteur 
cherche  par  des  allusions  forcées  i 
comparer  à  Honaparte,  surtout  à  l'oc- 
casion de  la  retraite  de  Kusâie  ;  en- 
fin l'ouvrage  de  Jondot  n'a  pa^  fait 
oublier  celui  de  l'abbé  de  I^  Itlet- 
terie.  En  général  il  manquait  de  la 
qualité  la  plus  eNsentiellede  riiistonen, 
1  impartialito;  sou  st\le,  qui  u'ctait  pa& 
dépourvu  d'un  certain  éclat,  péchait 
sou\ent  par  le  défaut  de  justesse  et  de 
raesme.  On  lui  attribue  :  lettres 
trojennes,  ou  Ol/seryotiufts  critiques 
sûr  les  oui'rages  iThistoirc  qui  con- 
courent pour  le  prix  décennal,  \a  8** 
de  9:2  paf;es  (I8IO1.  On  peut  croire 
que  le  dépit  de  n'avoir  pas  obtenu  une 
mention  du  jury  ,  pour  son  Tableau 
des  nations,  ne  fut  pas  élranj^er  aux 
motifs  qui  en^a^èrent  Jondot  à  publier 
ce  pamphlet,  dans  lequel,  du  reste,  il 
ne    manqua   pas    d'attaquer  les  ten- 

>4 


212 


JON 


ilances  anll- religieuses  des  rapporteurs 
«le  l'Institut.  Après  avoir  passé  sa  jeu- 
nesse et  son  acre  mûr  à  couibatlre  les 
philosophes  incrédules,  Jonilot  fniltpar 
entrer  en  lii'.te  avec  un  ecclé.^iaslique 
dont  les  écrils,  empreints  d'un  véritable 
radicalisme  catholique,  ont  causé  tant 
de  perturbation  au  sein  de  la  société  reli- 
gieuse. Dans  le  second  volume  del'iiV 
sai  sur  ïinâifjérenrc  en  matière  de 
religion,  M.  de  Lamennais  avait  avan- 
cé des  propositions  qui  sembleraient 
sorties  de  l'école  de  Pyrrhon.  A  ces  as- 
sertions menant  droit  au  doute  et  à  Tin- 
crédu!ité,Jondot  opposa  un  écrit  intitu- 
lé :  Winti-Pyrrhonien,  ou  Réfutation 
complète  desprincipes  contenus  dans 
le  deuxième  volume  de  l'Essai,  etc., 
principes  subversifs  de  toute  croyance 
religieuse,  de  toute  mora'.e,  et  con- 
traires aux  notions  de  la  saine  phy- 
sique ainsi  qu'à  V expérience  de  l'his- 
toire (Paris,  18-21 , 1  vol.  in-8'').  L'an- 
nonce seule  d'un  titre  si  hostile  excita 
dandes  journaux  une  violente  polémi- 
que. Avant  mênie  que  l'ouvraf^e  eût  paru, 
les  amis  de  M.  de  Lamennais,  entre  au- 
tres ^l.  le  comteO'Mahony,  prirent  fait 
et  cause  contre  Jondot  dans  le  Drapeau 
Idanc  et  dans  d'autres  journaux  roya- 
listes, où  Ils  ne  lui  épargnèrent  pas  les 
injures.  Lui-même  répondit  dans  la 
Gazette  de  France,  avec  une  modé- 
ration dont  il  n'avait  pas  donné  l'exem- 
ple dans  son  Anti-Pyrrhonien,  où. 
selon  l'expression  d'un  critique,  il  est 
aussi  vif  et  aussi  amer  que  saint  Jérô- 
me écrivant  contre  le  moine  Vlf^i- 
iance.  D'ailleurs,  la  critique  de  Jon- 
dot était  diiïuse,  embarrassée  d'une 
loulc  de  propositions  incidentes  ,  et 
surcharf^ée  de  traits  d'une  érudition 
indi'^este.  Aussi  sa  Réfutation,  dont 
l'aTinoncc  avait  produit  tant  de  scan- 
dale, fut-elle  complètement  oubliée  peu 
du' semaines  après  son  apparition;  et 
de  toute  cette  polémique  il  ne  reste 
peut-être  pour  les  connaisseurs  que  le 


JON 

souvenir  de  deux  très-piquants  articles 
de  M.  de  Féletz  sur  l'écrit  de  Jondot. 
Depuis  ce  temps,  celui-ci  se  retira  de  la 
lice,  uniquement  occupé  de  préparer 
une  seconde  édition  de  son  Tableau 
historique  des  nations,  qui  est  snoins 
une  réimpression  qu'une  refonte  pres- 
que entière  de  l'ouvrage- (1829,  4  vol. 
in-8").  Il  avait  encore  publié  en  1801, 
avec  Mutin  et  Salgues  :  la  Philoso- 
phie rendue  à  ses  premiers  princi- 
pes, ou  Cours  d'études  sur  la  reli- 
gion, la  morale  et  les  principes  de 
{'ordre  social,  pour  l'instruction  de 
la  jeunesse  (2  vol.  in-8°).  Tous  ceux 
qui  ont  connu  Jondot  estimaient  son 
caractère  plein  de  franchise  et  de 
loyauté.  Chez  lui  la  simplicité  des  ma- 
nières allait  jusqu'à  la  naïveté;  témoin 
ce  trait  de  sa  jeunesse.  Il  venait  d'être 
arrêté  comme  secrétaire  par  un  géné- 
ral :  toutes  les  conventions  étaient  sti- 
pulées; mais  le  lendemain,  de  grand 
matin,  Jondot  se  rendit  près  de  son 
futur  patron  :  «  Monsieur,  lui  dit-il, 
«  il  est  un  fait  que  ma  conscience  dé- 
«  fend  de  vous  celer,  c'est  que  j'ai  de 
«  fausses  dents.  »  On  juge  aisément 
de  l'effet  d'une  pareille  confidence. 
Jondot,  outre  sa  pension  de  retraite  de 
l'université,  jouissait  d'une  pension  sur 
les  fonds  destinés  aux  gens  de  lettres. 
Il  a  revu  la  3''  édition  d;i  Précis  de 
r histoire  unioerselle  d'Anquetil,  pu- 
bliée en  1807,  un  an  après  la  mort 
de  cet    historien    (12    vol.   ln-12). 

D— R— R. 

JO\ES  ou  JOHXES  (Tho- 
mas), savant  anglais,  né  vers  1749, 
fut  député  de  Cardigan  à  la  chambre 
des  communes  et  lord-lieutenant  de 
ce  comté.  Possesseur  d'une  fortune 
considérable,  il  en  employa  une  par- 
tie à  décorer  d'une  manière  pittores- 
que sa  résidence  d'IIafod,  et  à  y  réu- 
nir de  précieux  objets  d'art  et  de 
littérature  ;  mais  sa  passion  pour  les 
monuments   anciens    n'absorbait   pas 


JCI> 


JÔ.N 


iil 


toute  son  »me,  et  il  ron&jcriii  iiiie 
portion  de  ses  re\fnn*  a  :oula»;er  le* 
mtiitts  qui  rljieiil  ^ou^  %ts  >eu\.  Iho- 
■as  Joliiie5  a  traduit  en  anjjis  plu- 
sieurs Je  nos  anciennes  r)iiunii)ues  : 
celle*  de  troissuni,  1803-1807.  4 
>ol.  in-i";  a\rrun  supplrment,  1810; 
Monstrrlri,  ISO«J,  i  \ol.  in-i',  lire 
au&si  in-fol.,  et  I^ondre^.  1810,  12 
\ol.  in-8";  Ijiutquirrr,  1807.  ^rand 
in-8',  avec  fi;;uie5;  \'2  eieinplaires 
seulement  ont  éir  tiré*  in-V".  ijti  tra- 
ductions ,  a\ec  un  ^rand 
liite  de  f\|  .  sont  «oiiiesde» 
presses  que  1  autrui  j\ait  rtoblies  dans 
sa  propre  maison,  à  Hafot).  11  mourut 
le  'i3a>ril  1816.  i^é  de  soiiante-sept 
ans. — JoMS  '^Ju/m  ,  jurisconsulte 
et  littérateur,  naquit  dans  un  xilla^e 
da  comté  de  Caermatthen  i Irlande  , 
en  1772  ,  de  parents  pauvres  qui, 
Toxant  son  ardeiT  pour  s'instruire, 
le  laifserenl  se  \\\icr  à  son  penchant . 
II  (it  de  bonnes  éluder,  et  pas<a  sa 
jeunesse  dans  les  fonctions  de  l'ensei- 
gnement, tant  dans  «on  pa\s  qu'en 
Allemagne.  I\entie  dans  sa  patrie,  il 
se  tourna  >ers  le  ban  eau;  mais  quel- 
ques sarcasmes  qu'il  se  permit  «ur  les 
abus  de  la  chicane  nui>irent  à  ses  suc- 
cès, et  il  chercha  d'autres  rCNSources 
pour  subsister  dans  ses  talents  litté- 
raires. I.es  ou\raj;es  suivants,  qui  sor- 
tirent successivement  de  sa  plume  ,  ne 
purent  cependant  le  mettre  toujours 
au-dessus  du  besoin  ,  et  il  mourut  « 
à  peu  près  dans  l'indigence,  à  Islin^- 
ton,  en  1838  :  1.  l  oyugfs  dans  lu 
république  française,  traduits  du  da- 
nois du  docteur  l^uj:f;e,  1801,  in-8". 
II.  De  libellis  fawosis,  ou  /*/  Lui 
du  liUllc,  1812,  in.8^  111.  Les 
Kcangiles  traduits  m  gallois,  1818, 
in- 12.  IV.  Histoire  du  pays  de 
Galles.  1  vol.  in-8",  laquelle  lui  at- 
tira des  inimltic^  dans  le  pays  dont  il 
se  faisait  T historien.  Il  avait  laissé 
manuscrit:  The  J^orthiesoflfales^ 


ou  iBéaotrr^  sur  d  anciens  personaa- 
gM  bretons  et  (gallois  depuis  Cassi- 
velaanns  jusqu'à  nos  jours.  L. 

JO.XKS  (i;ioiu;r..MATiiir.i  ), 
marin  an;;lais,  qui  %'rs\  acquis  de  la 
réputation  comme  v(.\a;'pur  et  statis- 
ticien, était  le  fieie  de  1  officier  du  ^i- 
nieJ.-T.  Jone*  qui  cnn»lrui.tit  les  11 - 
f^nesde  Torres  Vedra*  et  dirigea  l'atta- 
que de  Uerp-op-/oom.  Ne  ver»  177t>, 
il  entra  de  bonne  heure  dans  la  marine 
ro\ale  nou^  le  lUic  d'Yorl  .  reçut  va 
première  ci>niniiN>ion  en  1 802,  et,  après 
a\oii  f  ,;iirc  .i\ec  iumnei  r  dan*  Ir^  ciot- 
sieres  et  dan^  diterv  ei  avec 

les  navires  danrais,  pi  II    ,  ni  sur 

lescAtes  d'islrie  et  d.»iis  le>  eaux  de 
N  enise,  il  fut  promu  au  tirade  de  capi- 
taine du  bricL  le  l'osian,  et  en  celte 
3ualite  coopéra,  durant  le  sie^e  de  IMe 
e  Léon,  à  la  défense  de  Cadix,  en 
1811.  Après  la  paix,  il  mit  un  soin 
particulier  à  inspecter  ions  le^  arsenaux 
maritimes  et  \t>  p«rts  de  la  France  et 
de  la  Hollande:  et  bientôt  l'amirauté 
le  char{;ea  de  diriger  de*  observations 
sur  les  établissements  de  même  f;enre 
des  puissances  septentrionales  et  de 
l'empire  ottoman.  Il  publia  le  résultat 
de  ses  recherches  sous  le  titre  de  \  oya- 
ges  en  .\or\'rge,  en  Surdr,  en  t  in- 
lande,  en  Hussit\  en  iurifuir,  ainsi 
que  sur  les  côtes  de  la  wertr.'îutsf  et 
de  la  mer  \oire,  Londres,  1827,  2v. 
in-8°.  Cet  ouvra;;e  est  un.iniinement 
re{;ardé  par  les  hommes  «oéctanx  eom- 
roc  un  doriiinent  des  plus  précieux 
pour  l'exattilude  des  chiffres,  pour 
l'étendue  et  la  solidité  des  recherches, 
-pour  la  justc^'e desappréciations.  Tous 
les  éléments,  tous  les  résultats  qu'y 
coniif;ne  l'auteur  sont  contemporains 
ou  peut  s'en  faut.  11  fil  surtout  une 
{grande  sensation  à  la  cour  de  Iiussic; 
et  l'empereur  ié;;nant  en  dl  marquer 
sa  satisfanion  à  rauleur.  Très-fai- 
ble de  sanlc  ,  Jones  avait  quitté  la 
Grande-Bretagne  pour  unclimat  tbaud: 


!ll4 


JON 


arrivé  à  Malte,  il  eut  le  malheur  d'y 
faire  une  chute  grave,  ne  fut  relevé 
qu'avec  trois  côtes  cassées  et  l'épaule 
démise,  et  trois  jours  après  mourut  des 
suites  de  cette  secousse,  en  1830. — 
Un  autre  JoNi:s  [Guillaume],  né  en 
176-2,  mort  le  17  février  1831,  s'é- 
tait signalé  comme  mathématicien  et 
astronome:  savant  profond,  observa- 
teur habile,  professeur  élégant,  écrivain 
laborieux,  il  s'était  montré  l'émule  des 
grands  analystes  et  astronomes  de  sou 
siècle,  les  Maskeline,  les  Priestley,  les 
Hutton  ;  ses  indications  avaient  aidé 
les  opticiens  et  constructeurs  d'instru- 
ments de  précision  à  perfectionner  leurs 
produits.  \j  Encyclopédie  hritanni' 
que  et  celle  de  Kees  [liées' s  Cyclo- 
pœdid)  contiennent  de  lui  beaucoup 
d'articles.  De  plus  il  a  donné  séparé- 
ment des  descriptions  à' un  instru- 
ment solaire ,  à' un  étui  de  mathé- 
matiques, du  quadrant  d'Halley,  et 
soigné  une  édition  des  Oùiores  com- 
plètes de  George  Adauis.  P — ot. 
JO\GE  (Nicolas),  écrivain  da- 
nois, fils  de  Pierre  Nielsen,  réviseur 
de  la  chambre  royale  des  comptes  qui 
était  en  racFue  temps  jaugeur  de  navires 
{skihs-mualer),  et  arrière-petil-fils  de 
Nicolas  de  Jonge,  célèbre  négociant 
d'Amsterdam  ,  naquit  à  Copenhague 
le  29  août  1727.  Après  avoir  reçu 
une  bonne  éducation  scolaire  ,  il  em- 
brassa la  carrière  ecclésiastique,  et  fut 
nommé  prêtre  ou  curé  de  la  paroisse 
d'Ailislov,  en  Sélande,  où  il  mourut 
dans  un  àgc  très-avancé.  Il  a  publié 
un  grand  nombre  d'ouvrages  :  1.  Sy- 
nopsis geof^rapliiœ  universalis  cap- 
tui  discentium  arcomtuodata  ,  Co- 
penhague, 17.ji,  in-8".  Il  en  a  été 
publié  une  seconde  édition  corrigée 
et  augmentée  ,  accompagnée  de  5 
cartes  géographiques,  Copenhague  et 
Leipzig,  1758  ,  in-8".  II.  Vie  du 
vice-amiral  Just  Juil ,  Copenha- 
gue .   1755  ,    in-8";  traduite  en  al- 


JON 

ieraand  par  Mongel ,  ibid.  ,  1756, 
in-8°.  III.  PJiœdriJabularum  Mso- 
piarum  libri  V  capiui  Tironum 
accommodati ,  par  N.  Philomusum, 
ibid. ,  1756.  IV,  Histoire  univer- 
selle de  Louis  Ilolberg,  traduite  en 
partie  d'après  le  compcndium  latin 
de  cet  écrivain,  mais  néanmoins  consi- 
dérablement améliorée,  et  en  partie 
augmentée,  avec  les  histoires  de  plu- 
sieurs états  européens,  et  continuée, 
Copenh.,  1757,  in-8°,  avec  une  in- 
troduction du  conseiller  d'état    Kall. 

V.  CoUegium  bihlicum  ,  continens 
historiam  sacram  veteris  et  novi 
Testamenti  ,  cum  prœfut.  ,  Johun, 
Otton.  Bangii,  ibid.,  1760,  in-8". 

VI.  Voyage  .d  A  vieux,  traduction, 
ibid.,  1759,  6  vol.  in-8°.  VU. 
Géographie  de  Wœrner  ;  traduction, 
ibid.,  1753,  in-8";  2^  édition,  ibid., 

1776,  in-8''.  VIII.  Géographie  de 
Louis  lîolberg,  ou  Description  du 
monde,  d'après  le  petit  compendium 
latin  de  cet  écrivain  ,  mais  considéra- 
blement augmentée  et  ornée  de  cartes 
géographiques,  en  trois  tomes,  ibid., 
1759,  1761  et  1763,  in-4°.  IX. 
Archivarius  homileticus.  Recueil  de 
dispositions  sur  les  textes  évangéliques 
des  dimanches  et  fêles ,  extraits  des 
écrits  des  hommes  les  plus  célèbres,  en 
six  parties,  ibid.,  1763,  1767  et 
1769,  in-8";  la  4"  partie  a  paru  en 
1774,  in-4°,  et  la  5^  partie,  égale- 
ment in-4",  en  1777.  Cette  5®  partie 
a  paru  séparément   la   même   année, 

1777,  sous  le  titre  de  Géographie 
de  la  patrie,  et  la  6*"'  imprimée  en 
1779,  in-4",  est  intitulée  :  Descrip- 
tion géographif/ue  du  royaume  de 
Norvège,  des  /les  L'œroe,  de  l'Is- 
lande et  du  Groenland.  X.  Nupiia- 
lia,  ibid.,  1762,  in-8";  2^  édition, 
ibid.,  1770,  in-8".  XI.  Funeralia, 
ibid.,  1769,  in-8°.  XII.  Vies  des 
èvrques  évangéliques  du  diocèse  de 
Sélande  ,  avec  leurs  portraits,  publié 


JON 


JON 


par  Jona5  Hjh,  ihid  ,  1761,  in-i* 
l-a  Vif  i\ts  huit  ilfrnifr»  e*l  l'ouxra^e 
et  Jonpe  :    mais  Cflle  «Îm  seyt  pre- 
■irrs  c»l  de  (^p.-Frl.  Uoliif.  \III. 
j4t/as  tirs  écoles,  ibid.,  177J,  In-S**. 

XIV.  Kwai  d'un  I.riiron  siholas- 
tirum    latino-danii  um.  ibid.,  177.*l. 

XV.  iirponsr  au  noiwel  e.nirnen 
critique  dr  la  description  thoro- 
graphitfue  du  royaume  de  hane- 
mark,  ih-d  ,  1777.  \V|.  Drsrrip- 
tiitît  Ir  la  résidence  royale 
de   (                  .r ,    V   partir,    ibid-, 

17s;i,',n  V  I)     7.— V 

JO\l\  riiinrnT^  nédan^  l'Ao- 
Ter(;nf  en  1.'»96,  et  mort  à  Tnurnnn 
le  9  mars  16!)K,  Hait  entré  rhei  les 
jésuites  de  cette  tille  en  lOl'l,  el  »'y 
était  rnj3t;é  piu«tard  par  la  profeuion 
solennelle.  On  a  de  lui:  \.  Lyricu, 
Lvon  ,  1630,  in- 16;  atec  queb^ue^ 
addition*,  l»ari<,  \i\Xi  ,  in-li.  II. 
///!//  ra.  Iib    I;    Musit  et 

Grui  .UT,  lib.  I  ;  .inarreun 

ehristiunu»  ,  lib.  111  ,  L^on  ,  Pierre 
Halllv  ,  1()3i  ,  in-12.  LWnacréon 
du  1*.  .lonin  est  plus  chaste  que  \\- 
nacréon  de  Tros,  mais  il  manque  de 
goât,  et  ne  .«^aurait  une  seule  fois  ri- 
taliser  avec  le  >oluptueux  vieillard. 
Non  content  d'avoir  christianisé  Ana- 
créon  ,  rude  et  pénible  tâche  que 
tenta  plus  tard  le  IV  d'Aquino  {l'oy. 
ce  nom  ,  II  ,  3.')0)  ,  Joniii  publia 
bientôt:  III.  Uiim  christianus,  Tou- 
louse, Colomier,  1()36,  in-S'.  Cette 
fois  il  joua  de  bonheur,  et,  pour  la  poé- 
sie comme  pour  le.s  sujets,  il  fit  un  ou- 
vrage qui  mériterait  d'être  plus  connu. 
Il  est  étonnant  qu'on  ne  parle  jamais 
du  Bion  chrétien^  quand  on  publie  le 
Bion  profane,  le  liionclassirptr.  IV. 
Elr^iiz  ,  ïlendecasyllahi ,  Scaznn- 
tes,  lamhi,  L\on,  1634,  in-l-J.  V. 
Porwatïim  lihri  duo,  Lvon,  1637, 
in -16.  VI  Kthira  puesis  ,  L>on  , 
1637,  in-16.  VII.  Moralis  Mjtlm- 
y>gia,  Alphaheto  gncnvira,  en   vers 


iambes  prers  ,   Lton  ,    1637,in-16 
VIII.  Moralis  institutiu  ,  epit^ram- 
matum  centuriit  trrs,  disticlut  gnib' 
frt.L'^on,  1637,  in  16.  I.,e> verser ecs 
sont    expliqués  m  latin  ,  comme  dan» 
V Anai  reon   et  le   ///o/i.  Ouoique   le 
V.  Jonin  n'ait  ibinne  que  des  poé^iesi, 
il  avait  cependant  en«ei;;né  la  pluln o 
phie   et    la    théologie  ,    puis    eip;   ,ur 
rKcnlure-Sainte.  Dans  ^es  ^erv  {;urs, 
dans  ses  vers  lalins,  on  remarque   une 
grande  \i\acile  dV^prit,  beaucoup  de 
le^ance  et  de  facilite    l.e  I'  Sanadon  a 
peint  en  deui  mots  le   caractère  des 
poésies  de  Jonin  : 

NcrUrv  p#rplu«a« 

Le  p.  Théophile  Uavnaud,  qui  décou- 
vrit le  véritable  nom  de  V ldit*t  {t'oy. 
Ravmond  Jof\nAN  2),  X\ll  ,  4), 
fut  sin;:ulièrement  aide  dans  ses  recher^ 
ches  par  le  I*.  (lilberl  Jonin,  comme 
il  le  dit  lui  même  3).  C— L — T. 

jo.\sK.\.  rv»/.  jo»»;,  XXI, 

6H^61-2,  et  dans  ce  vol 

JO.\STO.\    (\Minn).    roy. 

.1<)MNM..>.  \\I.  597. 

JOWILLK  (AicrsTiw-JrAW- 
Fratiçois  Uuiillun  de\  l'un  des  qua- 
tre dovens  des  maîtres  des  requêtes, 
à  l'époque  de  leur  suppression,  naquit 
ï  Ilruielles,  en  1733.  .\  peine  ànr  de 
dix-neuf  ans,  il  fut  admis  au  parlement 
de  Paris,  comme  conseiller  de  ^rand'- 
chambre.  Il  eut  entrée  au  conseil  en 
17<»"J,  et  fut,  troii  ans  après,  l'un  des 
douze  commissaires  désioné^  pour  tenir 
le  parlement  de  Kennes  et  ju»er  en- 
suite I^  Chalolais  ,  à  Saint-Malo.  On 
sait  que  la  procédure  fut  assoupir  par 
une  déclaration  du  roi  [Voy.  Cumo- 
T.\IS,  \II,6VJ  .  Il  continua  de  siéger 
au  conseil  du  roi,  jusqu'au  17  aoîil 
1780.  Alors  il  émij/ra,  en  témoignant 
le  regret   de    n'avoir  pas  pris  ce  parti 

(i     Nuiijd..f.i.  Ca'mi,  a.  ut.    i. 
(>)  L«>    p.  ba>i>au(l   kc    ooiuine  constaniin<nt 
Ravuiond   JorJaii. 

f'j)  reufttt  du  F.  Raynaad,  tom.  W,  p.  \\. 


2l6 


JON 


plus  tôt,  quoiqu'il  possédât  plus  de  cent 
mille  francs  de  rente.  Il  ne  rentra  en 
France  que  par  suite  de  l'acte  d'am- 
nistie qui  rouvrit  aux  Français  fuoitlfs 
l'entrée  de  la  patrie.  Le  grand  âge  de 
Cliaillon  de  Jonville  ne  lui  permit 
pas  de  jouir  long-temps  de  celte  faveur. 
II  mourut  à  Paris  à  la  fin  de  l'année 
1807.  Il  avait  publié  beaucoup  d'écrits 
et  de  pamphlets  dirigés  contre  les  prin- 
cipes de  la  révolution,  notamment  :  ï. 
Apologie  lie  la  constitution  françai- 
se, ou  Etats  républicains  et  monar- 


vhiqves  compara 


les  histoires 


de  Rome  et  de  France,  2  parties,  Pa- 
ris, 1789,  in-12.  II.  La  vraie  philo- 
sophie adressée  aux  états-généraux^ 
Paris,   1789,  in  12.  III.  Français, 
soyons  Français,  1789,  in-12.   IV. 
Création   de  deux  chambres  haute 
et  basse,  1789,  in-12.  On  assure  que 
cet  écrit   encourut  la  désapprobation 
àe  Monsieur,  frère  du  roi,  qui   depuis 
consacra  cependant ,  par  sa  charte  de 
1814,  l'attribution  du  pouvoir  législa- 
tif à  deux  chambres ,  en  réservant   au 
souverain  la  proposition  et  la  sanction 
des  lois.  V.  Ultimatum  de  la  saine 
partie  (désarmée,    quant  à  présent) 
aux  provinces  et  surtout  aux  bail- 
linges  ,    Francfort,    12   dcc.    1790, 
in-12,  imprimé  par  ordre  des  princes 
qui  récompensèrent   l'auleur,   en    lui 
conférant  le  titre  de  conseiller  d'état. 
VI.  Révolutions  (ie  France  prophé' 
Usées,  Sîrasbourg,  1791  ,    1792  et 
1793,   W  parties  in- 8^.  Cet  ouvrage 
lut  imprimé  à  l'Jteiihcim,  aux  frais  du 
cardinal  de  Rolian.  Cliaillon  de  -Ion- 
ville  élait  un  ami  éclairé  des  ails.  H  lit 
plusieurs  vovagfs  en  Italie  d'où  il  rap- 
porta un  assez  grand  nombre  d'objets 
précieux  ,    notamment    de    très-belles 
mosaïques  qui  furent  confisquées  par  la 
nation.  Elles  ont  servi  depuis  à  former 
le  pavé  de  l'enceinte  où  avait  été  placé 
l'Apollon  du  belvédère,  au  musée  du 
Louvre.  \j — M — X. 


JOR 

JORDAX  (Claude),  dit  de  Co- 
lombier, né  dans  la  seconde  moitié  du 
XVII'''  siècle,    voyagea   pendant  une 
douzaine  d'années  en  diverses  contrées 
de  l'Europe,  et  s'établit,  en  1G86,  li- 
braire à  Leyde.  Plus  ta-d  s'élant  retiré 
dans  le  Rarrois,  il  rédigea  et  publia 
ses  Voyages  historiques  de  V Europe 
depuis  1092   jusqu'en    1700,   Paris, 
1692-1703,  8  vol.  in-12.  Cet  ou- 
vrage, qu'il  dédia  au  roi  de  France  dont 
il  était  pensionné,  contient,  outre  les 
observations    recueillies   par   Jordan 
dans  le  cours  de  ses  voyages,  des  mé- 
moires que  lui  avait  laissés  un   de  ses 
amis  sur  le  même  sujet,  et  fut  réimpri- 
mé plusieurs  fois  en  France  et  à  l'étran- 
ger. En  1704,  Jordan  fonda,  sous  le 
titre  de  la  Clef  du  cabinet  des  princes 
de  l'Europe,  un  journal  mensuel,  con- 
sacré aux  matières    du  temps,  c'est-à- 
dire  aux  nouvelles  de  la  politique,   de 
la  littérature,  des  sciences,   etc.,  qui 
parut  d'abord  à  Luxembourg  et  fut  en- 
suite imprimé  à  Verdun;  mais,   quoi- 
que depuis  1717,  l'impression  s'en  fit 
à  Paris,  il  esl  resté  connu  sous  le  nom 
i]e  Joui  n(d  de  Verdun.  Les  publica- 
tions de  ce  genre   n'étaient  pas  alors 
aussi  nombreuses  qu'elles  le  ioul  main- 
tenant ;  le   rncucil  de   Jordan  eut  un 
succès  immense;  et  ,    pour  en  agran- 
dir le  cadre  ,   il    donna  un  Supplé- 
ment où   il    rapporte  les  événements 
remarquables  arrivés    depuis  la  paix 
de  Risivicli ,  en  1 697 ,  jusqu'en  1 70 i, 
Verdun,  1713,2  vol.  in-8".  Il  con- 
tinua, jusqu'en  1727,  la  rédaction  de 
cet  ouvrage  périodique,  auquel  travail- 
lèrent succestiivement  les  académiciens 
La  Ijarre,  Egl)',  IJonamyet  Ameilhon 
(f  oy.  ces  noms,  tom.    III,  V,  XIÏ, 
LVI),  pt  qui  cessa  de  paraître  en  1776. 
La   collection  complète  en  120  vol. 
in-8",  assez  lare  aujourd'hui,  est   en- 
core recherchée  à  cause  des  détails  cu- 
rieux et  vraiment  utiles  qu'elle  renfer- 
me.  Dreux  du  Radier,  auteur  de  la 


I 


JOB 

7  uhlr'  gnierttlf  dit  Jimrnal  Jt"  l  1 1  • 
ilun  (^depuis  I6U7  jusqu'en  17.')6,  U 
\ol.  in-8"  «après  avoir,  dans  sa  pir- 
farf,  dfxi^nc  commr  le  fondateur  de 
rellr|iiiltl  irai  ion  (.\\à\  les  Pliiii|)pc  Jor- 
dan lie  l)urand.  la  rrNiilur,  dnns  la 
'i ohlr  inrme,  à  (Jande  Jordan.  Celul- 
n,  d'après  le  Jourmil  littrrairr,  qui 
parul  a  Soleuie  en  170.'»,  aurait  des- 
avoué 5a  pailiripjtion  à  la  i.Uf  du 
calunet  des  primes  ;  mais  on  »ail  que 
le^  «irsaveui  d'écrits  qui  tout  lient  a  la 
|Mtliii(]ue  ne  tirent  point  à  ronse- 
qurnrr.  (^aude  Jordan  mourut  proba- 
blement en  17  VG,  année  ou  les  itii- 
tules  de  son  nom,  (\.  J.  qui,  depuis 
1717,  »e  lisaient  sur  le  frontispice  du 
JiMtriuil  dr  l  rrdun  .  cesseient  d'> 
ijf;urer,  quoique  d'ailleuis  il  n'v  tra- 
vaillai drjà  plus.  On  lui  doit  encore 
un  (J.oix  de  bons  mots  ^par  oidre 
alphabet iquei,  ou  Pcnsrrs  des  grns 
(P esprit  sur  timte  sorte  de  sujets, 
Amsterdam,  1709,  in-l*J  ;  nouvelle 
édition,  consideiabicment  au|;mentee, 
ibid.,  171G,  in-8'.  C'est  à  tort  que 
Tromper  Marchand,  dans  son  édition 
des  I^-ttres  ihaisics  de  lia)  le,  attri- 
bue à  Claude  Jordan  \' Histoire  ahrc- 
fée  de  fKurofte.  qui  se  vendait  cliei 
lui  loisQu'il  était  libraire  à  l^vde,  mais 
dont  I  auteur  est  Jacques  Bernard 
(No>.  Vh.mifien  crit.  de  llarbier). 
P— ni. 
J01U)A\  CAHiia.F.^  naquit  à 
Lvoii,  le  11  )an\!er  1771  ,  d'une 
recommandable  famille  de  nc^orianls. 
Il  avait  dix-sept  ans  et  sortait  du 
séminaiie  de  Sainl-lrénée  ,  où  il 
n\ail  achevé  ses  études  comme  élève 
Inique  ,  lorsqu'il  se  trouva  au  châ- 
teau de  Viiille  chci  son  oncle  , 
M.  Pcrier  (1;,  où  s'a<$emblaient,  sans 
c.invocalion  royale  ,  de  hur  propre 
droit  et  autorité,  les  éiats  de  Dauphiné. 


.loi; 


717 


^ijl'Lrr  Je  Casimir  Firirr,  iloiil  t..  JoicJjn 
fut  \«  ci-clttciiiir,  /ami.  t\  dont  on  «jit  <|<i«  irt 
e|i>n>on«  influèrc,  t  iKaucoop  »ur  les  airnnr»  . 
(urtoot  à  ré|NHjur  de  la  roUuratioo.      X  — o  j. 


Il  a.s>i>ta  ani^i  a  ce  |ii entier  acte  de  la 
révolution.  Telles  fuient  les  piemic* 
re»  impressions  qui  pénétrèrent  son 
esprit  et  influèrent  sur  ses  opinions. 
'Jout  Jeune  qu'd  était,  il  se  lia  avec 
les  hommes  importants  ri  honorables 
de  celle  réunion,  avec  Mouniei  sur- 
tout. Des  \iv  .  s'erir^rii  4  en  lui  rrt* 
amour  de  la  liberté  et  de  la  justice,  (ju> 
et  confondu  avec  un  invariable  senti- 
ment dedroitureetde  modcialion.l^r>- 
qu'uii  discutait  à  l'assemblée  ronst'H- 
tuante  la  conslitulinn  c.Mle  du  clergé, 
Camille  Jordan  publia  quelques  écrits 
contrairesàcetteuruvreimprutlente.S^ 
éducation  au  séminaire  lui  avait  donné 
une  pielé  vive  et  sincère  ;  il  eiait  alors 
un  vrai  sulpirien,  plein  d'aversion  pour 
les  doctrines  jansenistev,  qui,  abâtar- 
dies, médiocres  et  exagérées,  tentaient, 
à  la  faveur  de  la  révolution,  une  pilo\a- 
ble  réforme  de  l'K^lise  de  France,  tn 
1793,  la  viilcdeL>on  se  souleva  contre 
la  Convmlion,  qui,  a^re»  le  supplice  de 
liOuis  \N  I.  préludait  au  ré;;imc  de  U 
terreur  par  la  proscription  de»  niion- 
dins.  Camille  Jordan  prit,  avec  éner;;ie 
et  chaleur,  «^a  part  dan»  celte  luroïque 
résistance,  et  se  ût  remarquer  par  son 
éloquence  et  >on  coura;;e.  Avant  reru 
au  commencement  du  siè;;e  une  mis- 
sion pour  le  département  du  Jura,  il 
dut  son  salut  à  cette  circonstance,  et 
se  réfugia  en  Suivse,  puU  en  .\nj;lr- 
terre.  \À  ,  il  devint  l'ami  de  quel- 
,qucs  émigrés  français  qui  ,  comme 
lui  ,  ne  connaissaient  point  de  liberlé 
sans  riuimanité  ,  la  justice  et  la  rai- 
son :  Malouet  ,  I^llv-Tollendal,  Ca- 
zalès.  Il  s'attacha  aussi  aux  hommes 
distingués  de  l'Angleterre  dont  les 
opinions  étaient  conformes  aux  sien- 
nes :  Fox  ,  ErsLine  ,  Markinlosli  , 
lord  Holland.  Il  suivait  as>idument 
les  séances  du  parlement,  s'instruisait 
des  loi.s  de  toutes  les  circoiistarices 
politiques,  des  opinions,  de  la  littéra- 
ture de  l'Angleterre.  Son  esprit  était 


ii8 


JOR 


actif,  ses  sentiments  élevés ,  son  âme 
candide ,  sa  vie  pure.  Il  rentra  en 
France  après  la  révolution  du  9  ther- 
midor. En  1797,  il  fut  élu  député  au 
conseil  des  Cinq  cents  par  le  départe- 
ment du  Rhône.  Ce  fut  alors  que  le 
public  commença  à  connaître  son  nom  ; 
il  débuta  avec  éclat  à  la  tribune,  et 
prit  place  parmi  les  hommes  qui ,  la 
plupart  sans  arrière-pensée,  voulaient, 
à  cette  époque,  faire  profiter  la  liberté 
constitutionnelle  au  rétablissement  de 
l'ordre  social,  et  l'égalité  à  l'abaisse- 
ment de  cette  aristocratie  de  crime  et 
àê  médiocrité,  née  des  mauvais  jours  de 
la  révolution.  La  lutte  était  vive; 
ceux  qui  tenaient  le  pouvoir  voyaient 
quels  périls  il  y  aurait  pour  eux  et 
peut-être  pour  la  France  à  s'en  laisser 
déposséder.  Un  rapport  relatif  à  la  po- 
lice des  cultes  attira  l'attention  sur 
les  débuts  du  jeune  député  de  Lyon. 
L'intolérance  irréiif^ieuse  du  XVIIl® 
siècle  était  encore  dans  sa  verdeur  ;  la 
persécution  du  clerojé,  l'oppression  du 
culte  catholique  ,  passaient ,  aux  yeux 
du  parti  dominant,  pour  des  conquêtes 
de  la  révolution,  essentielles  à  conser- 
ver. 11  s'éleva,  parmi  cette  opinion,  une 
clameur  {2;énéiale  contre  un  orateur 
qui  osait  parler  avec  respect  et  affec- 
tion de  la  relipon  où  il  était  né  :  ce 
fut  un  feu  roulant  d'épi^rammes  vul- 
gaires et  de  lourdes  plaisanteries  con- 
tre le  député  qui  réclamait  pour  la 
majorité  de  la  nation  la  liberté  d» 
pratiquer  son  culte.  On  ne  tarissait 
pas  de  moqueries  sur  les  cloches,  que, 
suivant  le  rapporteur  ,  il  devait  être 
permis  de  sonner.  Dans  une  autre  dis- 
cussion, Camille  Jordaii  encourut  quel- 
ques reproches  plus  fondés  :  le  midi 
de  la  France,  et  surtout  la  ville  de 
Lyon,  étaient  le  théâtre  d'une  vive 
réaction;  des  meurtres,  des  massacres 
de  prison  ,  des  actes  de  violence 
avaient  été  commis,  des  sociétés  secrè- 
tes s'étaient  formées,  elles  exerçaient 


JOR 

de  sanguinaires  vengeances  sur  les  ré- 
volutionnaires, elles  menaçaient  le  gou- 
vernement et  troublaient  la  sécurité  du 
pays.  Le  Directoire  exécutif  en  rendit 
compte  par  un  message;  il  lui  conve- 
nait, ainsi  qu'au  parti  révolutionnaire, 
d'exacrérer  ce  <renre  de  désordres.  Ca- 
mille  Jordan  chercha  trop  à  les  atté- 
nuer ;  on  était  alors  à  une  époque  où 
les  plus  vertueux  citoyens  ne  savaient 
pas  s'élever  avec  calme  et  fermeté  au- 
dessus  de  la  domination  de  l'esprit  de 
parti.  D'ailleurs,  il  y  avait  quelque 
chose  dans  le  caractère  et  le  talent  de 
Camille  Jordan  qui  l'entraînait  facile- 
ment trop  loin  dans  ses  opinions  et 
son  langage.  La  pureté  de  son  inten- 
tion, sa  candeur,  sa  bonne  foi,  la  cha- 
leur qui  venait  animer  cette  àme  douce 
et  pure,  une  sorte  d'aveuglement  pres- 
que involontaire  l'empêchaient  sou- 
vent de  juger  l'esprit  de  parti  et  de 
prévoir  ses  œuvres  ;  alors  il  s'empor- 
tait fort  au  delà  de  sa  modération  ac- 
coutumée. Toujours  uni  aux  gens  de 
bien  ,  toujours  en  sympathie  avec  tou- 
tes les  pensées  sages  et  morales,  il  in- 
quiétait sans  cesse  ses  amis  par  ce 
penchant  à  une  exagération  sincère. 
Le  coup  d'état  du  18  fructidor  devait 
l'atteindre  plus  que  tout  autre  ;  il  se 
déroba  à  la  déportation  et  se  retira  en 
Suisse,  où  il  publia,  contre  la  tyran- 
nie directoriale  et  contre  la  révolution 
du  18  fructidor,  une  protestation  qu'il 
envoya  à  ses  commollaiits.  La  Suisse 
allait  être  envahie  par  les  Français  :  il 
passa  en  Allemagne  et  y  vécut  long- 
temps près  de  son  ami  .Mounicr  à 
\V  eirnar.  Le  temps  de  ce  nouvel  exil 
ne  fut  point  perdu  pour  lui  :  il  étudia 
la  langue,  la  littérature,  la  philosophie 
allemandes.  C'était  un  de  ces  esprits 
nul  ne  manquent  jamais  une  occasion 
d'agrandir  le  domaine  de  leurs  con- 
naissances, de  leurs  pensées.  Le  18 
brumaire  fit  cesser  sa  proscription,  il 
revint  en  France  et  ne  conçut  aucun 


JOR 

dcsir  de  s'attacher  aa  ^miirernemcnt 
roRMibire  ;  il  se  félicitait  du  retoar  de 
l'ordre  ,  mais  il  était  de  reax  c^ui  re- 
grettaient la  liberté  ri  qui  nr  xowirnt 
rien  d'heurrui  ni  de  tue  pour  la 
France,  tant  que  ne  serait  pas  trou- 
\ée  une  pn»ilion  ou  le  pouvoir  serait 
fort,  en  même  lemp^  que  le*  libertés 
seraient  garanties.  Ses  opinions  et  ses 
sollicitudes  lui  dictèrent,  en  iKO'i,  un 
écrit  intilulr  :  Ae  vrai  srns  du  î««/f 
national  sur  Ir  conjmUtt  il  vif.  qui 
parut  à  l'époque  où  Napoléon,  par  un 
nomma<;e  dérisoire  à  la  souveraineté 
du  peuple,  consultait  les  assemblées 
piituaires  sur  cette  prive  de  possession 
du  pouvoir  absolu.  I^  brochure  fut 
saisie  :  un  ami  de  Camille  Jordan 
qvi  l'avait  remise  ï  l'imprimeur  fut  ar- 
rête; alors  le  véritable  auteur  déclara 
son  nom,  M.  Ducliesne  fut  mis  en  li- 
berté, et  nulle  poursuite  ne  fut  eiercée 
contre  Camille  Jordan.  —  Il  se  retira 
à  l.^on,  se  tint  à  l'écart,  se  maria, 
vécut  dans  le  silence  et  rob>curilé 
parmi  toute  la  ploire  du  règne  impé- 
rial. —  I.orsque  I^uis  WIII  fut  re- 
monté sur  le  IrAne,  en  181V,  Camille 
Jordan  fut  un  des  députés  que  la 
ville  de  Lvon  eu\ova  au  souverain 
ramené  par  la  restauration  {'!).  Sa  re- 
nomm«*e  de  fructidor,  son  éloi;^nemenl 
constant  pour  Napoléon  ,  étaient  de 
^ands  titres  à  obtenir  faveur  auprès 
des  opinions  ro>alistes;  le  pouverne- 
menl  des  Bourbons  pouvait  >  \oir  les 
preuves  d'une  lonj^ue  fidélité.  On  ima- 
gina de  récompenser  Camille  Jordan 
par  des  titres  de  noblesse  :  il  s'étonna 
de   cette  façon  de  l'honorer,    mais  il 


1  Qurlqn«  irmpi  anpjravant,  C.  Jordjn 
aiait  lait  partir  d'une  ilrput^tion  qve  la  «illc 
de  l.yn  ayait  en«OTr«  auprès  de  IVnip<T««r 
d'Ai-trirbr  à  Dijon,  afin  dVn  obtroir  d-»  aHoa- 
cistrmml)  aux  irquititinn»  doat  rllr  était  frap. 
prr.  On  ^Ji!  qup  les  drputr*.  qui  ay«ieni  eir 
fhr.;M<  pa^mi  Ir*  bninines  I»*  pin»  connus  pour 
!i  royali-te»,    sai^irriit  rrtte  orca- 

•  le    monarque  aotrichirn  «or   la 

pr.  '  rctablitsenient  des  Bourbons  ,  et 


JOR 


^"9 


ëUit  ai  loin  de  toute  vanité  qoM  ne 
s'en  offensa  pas  ,  et  souriait  douce- 
ment de  cette  complète  méconnais- 
sance de  la  resoliiiion  sociale  qui 
avait  changé  la  France  ['X  .  Il  ne  mon- 
tra aucun  désir  d'entrer  dans  les  af- 
faires :  »es  habit uties  domestiques,  sa 
santé,  l'absence  de  toute  ambition,  le 
retenaient  dans  \fs  fovers.  Pendant  le» 
cent -jours  de  1K1.'>,  sa  maison  fut 
insultée  ;  les  révolutionnaires  retrou- 
vèrent leur  vieille  haine  contre  lui, 
comme  il  avait  retrouvé  au^si  son  aver- 
sion pa<sionné«  contre  eui.  lorsque, 
après  la  seconde  restauration,  de  nou- 
velles élections  furent  faites,  (.imillr 
Jordan,  nomme  par  le  j^ouvernemenl 
président  du  colle;;e  électoral  de  l.von, 
ne  voulut  pas  être  élu  députe.  A 
cette  époque  il  accepta  du  conseil 
municipal  la  misxion  de  se  rendre  en 
Anf;leterre  pour  v  re-^ler  la  succession 
du  majoi  Martin,  qui  avait  lé^ué  plus 
d'un  million  aux  hospices  de  I>>on,  sa 
ville  natale.  Il  revit  ses  amis  d'.Knj^le- 
tcrre,  et  reçut  toutes  les  marques  d'une 


1"' 


qu 


'  (or 

u«e« 
>|u'i( 


protiable.  .Viou»  peutna»  au  rontrairr  qnr  (..  Jor- 
daa,  qoi  «rail  Irarrra»  La  re*olu'u>it  rn«imna* 
d'buniaM  «(nie«  à  la  caa»«  de*  Bouilxint,  n'^' 
«ait  point  ignore  |ri>rt  pri>j*lt  (I  leur*  vcr-is,  tt 
qi.e  tn«^t»e  tl  l»t  (•»n»îr»'«  »nu»cnt.  M.  Roytr- 
C  -  %on  aipi  et  arii 

<<  >!•«  è  l'an»   k'a^ent 

»•  .  t:nr   •  f  r,rc  mo> 


t    duii*  U  (...(i.crc  \ 
^  Jana  une  li  lonsi 


Lt.^^e.  <i  p_»  uti  *(ul  jour. 
■  nmte  ,  tioa^    n'^Ton»  ci« 

désunit  :  airme  bu:,  mrmti  f^nstri,  mr'mti  tf- 
m  fmrtt,  mimr  furtnmt  .'  ■  51  —  o  J. 

(J)  Roo»  ^ons  llrtt  de  crolr«  qne  cette  idée 
de  rrTrtin|»en*er  le»  service»  que  C.  Jordan  arait 
rendue  a  U  cause  dr»  Rourlx-n^  par  des  lettres 
de  rîohi*>4^e.  Tint  de  M.  Royrr-Collar.l;  car 
trt    ,  t   .le  la    caii«e    royale  fit    à  cetla 

é,-.'i  irioineiit  où  il  rtait  .lu  pouvoir, 

la  II  iicn  i  [<tu»ieurs  personnes  qoi 

»r  t'..ii>  j.  '1'  ...j.ru  prèïdaii»  1«-  ujc.ne  cas, et  qai 
en  sourire-. t  en  »a  présence,  à-;ieu-prè»  comme 
avai\  faite.  Jordan.  *• — oj- 


220 


JOR 


grande  consldcralion.  Eu  1816,  après 

i  oiilonnance  du  5  septembre  (i),  Ca- 
mille Jordan  céda  euiin  aux  instances 
de  SCS  amis  et  du  ministère  ;  il  fut  élu 
Hcpiilé  par  le  département  de  TAln , 
dont  il  présida  le  collèf:;e  ,  et  en 
même  temps  par  le  département  du 
Rhône  (5).  Il  reparut  après  vingt  ans 
sur  la  scène  politique,  entouré  de  l'es- 
time publique  et  du  souvenir  de  ses  an- 
ciens succès.  Sa  place  était  marquée 
d'avance  près  de  M.  Uoycr-Collard, 
son  ami ,  son  collèo;ue  de  h  uclidor, 
celui  qui  avait  juf^é  comme  lui  le  des- 
potisme impérial  ;  qui,  comme  lui  , 
cherchait  des  garanties  pour  les  liber- 
tés dans  1.2  nior.aich'e  léf];itime.  Ca- 
mille Jordan  s'associa  avec  chaleur  et 
siiicérilé  à  la  cause  de  justice  et  de 
modération  qu'il  fallait  dès  lors  défen- 
dre contre  les  attaques  de  deux  partis 
opposés,  en  demandant  à  la  seule  rai- 
son et  à  l'intérêt  public  bien  entendu, 
appui  et  force  contre  les  vieilles  pas- 
sio!is  politiques.  Il  tarda  peu  à  retrou- 
ver cl  à  accroilre  sa  renommée  d'ora- 
teur :  il  défendit  le  projet  de  la  loi  des 
élections,  de  cette  loi  constitutive  de 
la  monarchie  actuelle,  qui  accorde  les 
suflrao;es  aux  citoyens,  seulement  quand 
ils  offrent  présomption  de  lumières 
et  d'indépendance,  et  qui  les  refuse  à 
ceux  qui  pourraient  voter  par  in- 
fluence ou  sugf2;estion  aveugle.  Ses  amis 
et  lui  comprirent  que  delà  devait  sor- 
tir la  représentation  véritable  de  la 
société  finnraise  telle  qu'elle  est.  Dans 
un  autre  discours,  il  répliqua  avec  un 
f;rand  éclat  aux  orateurs  qui,  voulant 
donner  au  cli'ii:!:  une  dotation  doma- 


(i)  On  a  (il I  <|ue  (',.  Jori^an  .irail  eu  qii(l(|iic 
part  i  ccltç  ortl«>nr.a:itc  \i.n-  l.i(jiii:|le  rutprniioii- 
i:cc  I.T  cJissntiitiiui  «Ir  la  cluinlire  ùJlrouvabfc.  Ci; 
<|u'il  y  a  dcsur.t'cst  (pii*  .!rs  lors  il  seran^ea  du 
parti  iiiinUlcri'-i  (|uir.jvait  f;iii  rrmlrr, et  qu'il  !« 
kerrit  jusqu'à  t-c^  dcruirrs  uioriieiits.        M — d  j. 

(j)  Il  op'.a  pour  le  <l^parti-mi  ni  de  l'Ain,  oii 
sou  clertion  .ivait  #Hé  fortrini-nl  coulesléc  par  l«; 
parti  roy.iliMe,  ri  très  chaudement  appuyée  par 
Je  ininibtére  auteur  et  produit  de  rordunnancc 
do  5  s>;pteinbre.  M—»  j. 


JOR 

iiiale,  s'opposaient  à  ce  que  le  j2;ouver- 
nement  consacrât  ce  ^â<^e  au  paiement 
de  la  dette  publique  (6).  En  même 
temps,  il  ne  refusait  pas  au  gouverne- 
ment les  moyens  de  se  défendre  contre 
les  factions  déchaînées  :  il  consentait, 
pour  un  an,  à  la  censure  des  journaux 
et  à  la  suspension  de  la  liberté  indi- 
viduelle. A  la  session  suivante ,  en 
1818,  Camille  Jordan  et  ses  amis  po- 
litiques ne  se  séparèrent  pas  complè- 
tement du  ministère  ;  ils  lui  concédè- 
rent encore  les  lois  d'exception,  mais 
ils  devinrent  plus  exigeants  sur  les  ga- 
ranties de  la  liberté.  Ils  demandèrent 
le  vote  annuel  du  recrutement  et  la 
juridiction  du  jury  pour  les  délits  de 
la  presse.  Camille  Jordan  prononça 
dans  cette  dernière  discussion  un  dis- 
cours d'un  grand  effet;  il  peignit  d'une 
façon  pénétrante  les  tergiversations 
d'un  ministère  qui  ne  savait  trouver  au- 
cune force  dans  l'opinion  publique;  et 
qui ,  dans  sa  timidité,  montrait  au 
pays  une  méfiance  injurieuse  ;  il  af- 
fublait cette  politique  du  nom  de 
constilutionalismc  Initard.  Ce  fut 
aussi  un  beau  discours  que  celui  où 
il  signala  le  régime  de  terreur  que  la 
cour  prévôtale  et  les  autorités  locales 
intimidées  ou  passionnées  faisaient  pe- 
ser sur  la  ville  de  Lyon,  so;is  le  pré- 
texte d'une  sorte  de  conspiration.  En 
cette  occasion  encore,  il  alla  bien  plus 
loin  que  n'eût  voulu  le  ministère  ,  con- 
traint par  sa  situation  à  ménager,  tout 
en  la  réprimant ,  la  faction  contre-ré- 
volutionnaire. On  ne  put  faire  consen- 
tir Camille  Jordan  à  épargner  par 
son  silence  quelques  embarras  au  gou- 
vernement :  il  voulut  dire  la  vérité  (7). 


(6)  C'est  dans  celte  occasion  que  C.  Jordan  , 
ayant  inroqiic  le  témoignage  des  inagisirnts  qui 
se  trouvaient  à  la  chambre,  M .  Ctau&el  de  Cous- 
icrgues  lui  répondit  :  «  Je  suis  magistrat  ,  et  je 
ne  vo'is  approuve  pas.»  M — uj. 

(7)  Voulant  que  la  liiographi*;  resie  fidèle  à 
son  rjtigraphe  ,  et  toujours  persuadé  qu'elle  ne 
doit  aux  mort!  que  la  vérité  ,  nou^  diroiM  ici  que 
tous  les  témoignages,  et  surtout  ce  qui  a  été  rc- 


JOR 


JOR 


aai 


\  la  Cil  df  fetir  vs»ioii,  il  attre?fj  auT 
cl«cl(urs  df  l'Ain  ri  ilii  l\liorir  un 
rcfil  où  il  rendait  fom{»le  dw  molif^ 
Je  sj  conduite  politi.]ue  et  dri  difii- 
culln  df  ^a  situation.  Sa  Ininne  foi, 
son  indrpfodancc,  la  pureté  lU  ses 
n)otir>,  crUteul  dans  rclte  publication. 
Il  fut  réchi,  et  re\int  encore  à  la  *e»- 
sJousui\:inle.  I.cmini&t ère  était  ciian;;^. 
I.e  duc  de  l\irlirliru  et  I^ainé  s'étaient 
retirés,  .M.  de  Cazr»  dui^eait  la  poli- 
tique intérieure;  de  Serres  propo>ait 
les  lois  qui  aiïrancliisuient  la  pres<^e. 
Camille  Jordan,  dont  la  sanir  se  dé- 
truisait de  plus  en  plus,  qui  portait  le 
uerme  incurable  du  mal  auquel  il  de- 
^ait  succomber,  proGla  de  cette  con- 
formité  du  ministère  a%ec  ses  opinions 
et  SM  tues,  pour  prendre  quelque  re- 
pos ;  il  vota  silencieu>ement  pcnilant 
cette  sesvsion.  Après  quelques  mois,  la 
situation  des  affaires  deunt  plus  ^rave 
qu'elle  ne  l'avait  encore  ete.  I,e  parti 
contre-té\ulutionnaire,  \aincu  et  mé- 
content, conservait  de  profondes  ra- 
cines dans  le  j^ouvemcmcnt.  Son  inté- 
rêt au  maintien  de  la  d\nastie  ne 
pouxait  être  douteux  ,  la  bincérilé  de 
son  afleclion  n'était  pas  contestable, 
il  voulait  user  du  poit\oir  roval  à  sa 
^uise  et  selon  .«es  passions  ;  roai>,  au 
\rai,  il  ne  son;>e.iit  ni  à  le  detniire, 
ni  à  l'affaiblir.  Kn  nuiiie  temps,  un 
fond  de  méfiance  réciproque  existait 
entre  la  majorité  de  la  nation  et  la  dy- 
nastie :  l'une  \ovait  toujours  la  ré\o- 
lutinn  prête  à  renaître,  désordonnée  et 
sanf;lante  ,  l'autre  aperce\ait  très-bien 
que  ses  liberléi  étaient  un  objet  d'in- 
quiétude ;  que  ses  sou\enirs  récents 
étaient  antipathiques,  que  ses  mœurs 

ceminenl  r«vrlé  par  Pcacliel  «t  pir  le  gcnrral 
Dnaadicn.  riabli>.rnl  tjns  rr^.liqqp  «^/ni  iSi6 
1m  cooipir.  tion»  qui  rciattrent  a  Giraoblc  n  a 
LyoQ  cuiitrR  le  poutruir  Jet  Bourbon^  n'eia.mt 
que  trop  rrellrs,  ti  qu«  la  rrprcstion  fut  loin  d'en 
élt*  •éfèrr.  Ce  tout  de*  qaesiions  qae  o«at  trai- 
teroQiplus  ainpleiDcnt  a  l'ariicle  Loun  Xfljf. 
Noos  ne  pooTont  poar  le  inomeot  <{o' j  renvoyer 
le  Wctear.  M— nj 


acthellM  evritaient  une  invincible  ré- 
pu;;nance.  H  \  a\ait  de  patt  et  d'autre 
une  ceilaine  ron\irliun  intérieure 
qu'on  était  incompalibir .  Jrs  opinions 
révolutionnaires,  les  ambitions  déçue«, 
les  vanité»  ble^^sées,  les  entliousiasoies 
irréfléchis  ,  le  fanatisme  des  esprits 
faut  puisaient  dans  cette  dispositioa 
du  public  une  force  vraiment   roena- 

Sante.  Les  élections  de  \H{'J,  le  chuii 
e  (iré^oire,  élu  évidemment  comme 
iéf;icide,  l'uvj^e  a^resMt  de  InutfN  jr. 
libertés  ntn^tttutionnellr^  ,  luJMi^e^- 
taient  le  pénl  au\  >eu\  lu  moins  ciair- 
vovants.  Ourlque>-uns  peavaient  qu'il 
fallait  fairr  réMstance  ouverte  au  parti 
qui  cherchait  à  renverser  la  d>  nantie  {>ar 
une  révolution  nouvelle;  mais  en  mrme 
temps  ils  voulaient  qu'on  donnât  toutes 
les  garanties  réclamées  par  les  gens  de 
bien  et  les  hommes  éclairés.  Ij  possi- 
bilité actuelle  d'une  telle  marclie  pa- 
rut généralement  douteuse,  les  esprits 
n'étaient  pas  asseï  murs,  assez  rassis 
pour  qu'on  pût  espérer  l'appui  de  l'o- 
pinion publique.  Hestaient  deux  réso- 
lutions à  prendre  :  emprunter  l'appui 
du  parti  coiitre>rtvolutionnaire,  sauf  à 
le  modérer,  s'il  riait  p(>»sible;  ou  bien 
attendre  que  les  fautes  e'  les  exa;;'*ra- 
tions  de  l'autre  parti  lui  lUsent  per- 
dre sa  popularité  et  alors,  seulement, 
commencer  à  lui  résister.  Camille  Jor- 
dan et  la  plupart  de  ses  amis  virent 
plus  de  dan;;er  au  premier  projet  qu'au 
second,  ils  résolurent  de  s'opposer  de 
toutes  leuis  forcesau\  entreprises  d'un 
ministère  qui  se  rapprochait  de  la  f:^r- 
tion  cotitre-rcvolutionnaire.  Ils  s'\  dt- 
rnièrent  encore  bien  davantage  Ioi.mjuc 
1  assassinat  du  duc  de  lîern  fut  de-  onu 
l'occasion  de  la  chute  de  M.  de  Cazes; 
lorsque  M.  de  llithclieu  fut  rentre  au 
miiiialere  ,  déterminé  dans  son  trouble 
à  faire  alliance  avec  les  rovaiistcs.  Ce 
fut  pour  soutenir  celle  lutte  solennelle 
que  Camille  Jordan  sacrifia  le  repo>  de 
ses  derniers  jours;  il  repari.t  à  Ucham« 


212  JOR 

bre  et  se  plaça  ouvertement  dans  cette 
opposition  où  le  général  Foy  et  Casi- 
mir Périer  formaient  la  limite  et  la 
transition  entre  les  deux  opinions  li- 
bérales. Le  grand  combat  s'engagea 
sur  la  réforme  de  la  loi  électorale.  Ca- 
mille Jordan  proposa  un  amendement 
qui  n'est  autre  que  la  loi  rendue  de- 
puis 1830.  Chaque  arrondissement 
devait  élire  un  député  ;  on  échappait 
ainsi  aux  influences  trop  actives  de 
l'esprit  de  parti  et  de  l'intrigue,  et  l'on 
accroissait  les  influences  locales  plus 
calmes  et  moins  menaçantes.  La  prio- 
rité de  discussion  fut  obtenue  pour  l'a- 
mendement, son  adoption  eût  été  la 
chute  du  ministère,  ou  du  moins  la  dé- 
faite du  système  politique  qu'il  adop- 
tait.  D'incroyables  efforts  et  même , 
dit-on,  des  suffrages  achetés  procurè- 
rent une  majorité  de  cinq  voix  con- 
tre l'amendement.  Aussitôt  après  la 
session  ,  le  ministère  de  M.  de  Ri- 
chelieu consomma  son  alliance  avec 
le  parti  contre-révolutionnaire,  se  sé- 
parant de  tous  ceux  de  ses  anciens 
amis  qui  s'étaient  opposés  à  la  nou- 
velle loi  d'élection  et  à  la  marche  sui- 
vie par  le  gouvernement.  C'était  con- 
tre Camille  Jordan  que  l'irritation 
était  la  plus  vive.  11  connaissait  peu 
l'art  des  ménagements  ;  sa  bonne 
conscience  ne  lui  laissait  pas  de  scru- 
pule; il  allait  toujours  au  dernier  terme 
de  son  opinion.  Pendant  les  troubles 
du  mois  de  juin  1820,  les  députés 
étaient  insultés  par  les  gardes-du- 
corps  et  les  jeunes  gens  royalistes,  tan- 
dis qu'en  m«'me  temjis  l'émeute  popu- 
laire menaçait  le  gouvernement.  De 
vives  discussions  reproduisaient  à  la 
chambre  ces  scènes  de  guerre  civile. 
(Emilie  Jordan  y  fut  sévère  pour  la 
police;  le  ministère  lu!  reprochait  d'a- 
voir moins  songé  à  l'ordre  public  qu'au 
respect  du  à  la  r.eprésen!aiion  natio- 
nale. 11  fut  rave  du  conseil  d'état  où 
il  avait  été  appelé  en  1817;  on  vou- 


JOR 

lot  même  donner  à  ce  qu'on  avait  la 
prétention  d'appeler  sa  disgrâce  ,  quel- 
que chose  de  plus  marqué  que  pour 
M.  Roycr-Collard  et  les  autres  con- 
seillers d'état  de  l'opposition.  Il  reçut 
cette  atteinte  avec  un  grand  calme , 
regrettant  seulement  que  M.  de  Ser- 
res, son  ami,  son  compagnon  d'opi- 
nions, se  fut  chargé  de  cette  mesure.  A 
la  session  suivante,  en  1821,  Camille 
Jordan  était  devenu  si  faible  et  si  souf- 
frant qu'il  ne  pouvait  suivre  les  séances. 
Il  n'y  parut  guère  qu'une  fois  pour 
effrayer  Louis  XVIII,  ou  plutôt  pour 
fournir  au  parti,  alors  dominant,  Toc- 
casion  d'exiger  des  mesures  de  police 
et  de  persécution.  D'officieux  valets 
avaient  fait  éclater  un  pétard  d'arti- 
fice près  de  l'appartement  du  roi  ;  le 
secret  de  cet  ignoble  complot  ne  fut 
pas  connu  tout  de  suite,  et  il  fut  ques- 
tion à  la  chambre  des  députés  de  pré- 
senter une  adresse.  Camille  Jordan  se 
fit  transporter  au  comité  secret  où  elle 
se  discutait  :  ce  fut  son  dernier  dis- 
cours, c'est  la  dernière  fois  que  sa 
voix  a  été  entendue  en  public;  il  fut 
aussi  éloquent,  aussi  convaincu,  aussi 
énergique  que  jamais.  Dès  lors  il  dé- 
clina rapidement  ;  ses  souffrances 
étalent  cruelles;  il  les  endurait  patiem- 
ment et  se  résignait  avec  calme  à  sa  fin 
qu'il  voyait  approcher.  La  conversation 
de  ses  amis,  les  soins  de  sa  famille, 
étaient  le  seul  allégement  de  ses  maux. 
Il  mourut,  le  19  mai  1821,  d'un 
squi'rre  intestinal. — Ses  funérailles 
furent  touchantes  :  son  convoi  était 
sans  pompe,  conforme  à  sa  médiocre 
fortune;  mais  l'élite  de  la  France,  sans 
distinction  de  partis  ni  d'opinions,  for- 
mait son  noble  cortège  ;  un  sentiment 
commun  et  profond  se  lisait  sur  toutes 
les  physionomies  ;  c'était  un  hommage 
universel  à  une  vertu,  à  un  talent,  à 
un  caractère  honoré  de  tous.  Les  jeu- 
nes gens  des  écoles,  la  foule  popu- 
laire se  joignirent  au  convoi.  Sur  le 


JOR 


JOR 


ii3 


boid  de  la  {ùut  où  l'on  allait  déposer 
If  fftfueii ,  M.  Ko>ef-(^llard ,  le 
ro^^lallt  ami  de  (Emilie  Jordan,  e^- 
sa>a  de  pronoiirn  (}urlt|Qf4  parole^; 
le«  hrmr*  rloufTaifnl  la  voi»,  il  ne 
put  proirrrr  qu'un  dcchiraiit  adiru. 
.M.  dp  Saint- \ulairr,  au  nom  de  la 
«liamhredf*  depiilM  ;  M.  Kainhaud, 
maire  de  l.^nn,  au  nnm  dr  la  %ille, 
lendiirnt  liommas^f  a  une  rie  »i  re>' 
pfdablr  et  si  pure.  Plus  tard,  nn  mo- 
nument lui  fut  é\e\é  par  souscription. 
Nul  n'a  laissa  des  re;;rels  plu*  pro- 
fonde dane  le  Miuvenir  de  ceai  qui 
l'ont  rnnnu  ;  nul  ne  fut  plii>  aimé  de 
ses  amis.  Son  caraclere  elait  plein  de 
rliaiine,  dr  dnureur  ,  d'une  naïveté 
p!r>(|ue  enfantine  ,  mèlee  à  la  force  et 
à  l'életation  ,  la  pens^  du  mal  lui  riait 
étrangère,  et  il  ne  savait  pas  la  suppo- 
ser dans  les  autres.  Son  esprit  était 
délicat  et  fin  ,  ses  impression»  promp- 
tes et  faciles  ,  tout  ce  qui  était  Leaii  et 
noble  produisait  en  lui  une  Msible 
émotion.  Sa  physionomie  était  d'une 
douceur  et  d'une  grâce  particulières. 
Il  vécut  sans  ennemis,  .sans  en\ieux, 
environné  d'estime  et  d'affection.  Ca- 
mille .Inrdan  n'a  laissé  aucun  ouvrage 
considérable  :  ses  discours  et  »es  opi- 
nions ont  été  réunis  et  publiés  en  un 
\olume.  Voici  une  liste  a^sez  cora- 
plèle  des  divers  écrits  de  circonstance 
qu'il  a  fait  imprimer  :  I.  Ltttre  à 
M.  lAtmourrtte  Sf  disant  r\*fi^ue 
df  Lyon.  II.  Histoire  dr  la  t  um'er- 
sion  d'une  damr  parisienne,  sous  le 
pseudonyme  de  Simon.  III.  La  toi 
et  la  religion  vengées.  (^  trois 
brochures  se  rapportent  à  la  contro- 
verse sur  la  constitution  civile  du 
clergé.  L'auteur  y  réclame  énergique- 
menl  contre  l'intolérance  a\ec  laquelle 
on  traitait  alors  les  catholiques  qui  ne 
Toulaient  pas  reconnaître  les  lois  qu'ils 
crovaient  contraires  à  la  religion.  IV. 
Ai'is  (i  mes  commettants.  V.  C.  Jor- 
dan, députe  du  Wiône,  à  ses  com- 


mettants sur  lit  re^'olution  du  18 
Jructidor.  NI  Le  vrai  sens  du  vote 
national  sur  le  nmsulat  a  vie.  N  1 1 . 
Im  sessittn  //<?  1H17  .  aui   habitants 

de  lAin  et  du  UhAiie Il  a  laissé 

en  mann^ci  it  :  lUscours  sur  C  in- 
fluente reriprotfue  de  l'rliHjuence 
sur  la  rex'olution  et  de  la  re^'olulion 
sur  fehnfuenre  —  Kloge  dr  f avo- 
cat -  grneral  Serx'un.  —  Llogr  de 
.M.  t'a  y  de  Sathonay,  maire  de 
Lyon.  —  Hssai  sur  Klopstoïk.  Oii 
trouve  des  fragments  de  kiopsiock  et 
de  Schiller,  traduits  en  pro^e  français 
par  C  Jordan  dans  WiheiUe  de  IH-JU 
et  18-il.  rédiges  par  M'"'  Dufrenov, 
qai  a  publie  dans  Ir  mrree  joarnal  , 
tom.  III  ,  pag.  131  ,  une  notice  «or 
C.  Jordan.  A. 

JOKhKXS  ((.EiiitiT  on  <;<{• 
nAiu>-I)\Mi)),ne  le  lU  fesrier  1731, 
i  l>e\eaier  (non  pas  en  171  i,  comme 
ledit  Sax),  étudia  la  jurisprudence  et 
devint  un  des  magistral»  municipaux  de 
sa  >ille  natale  en  1771.  Il  fui  député, 
en  1786,  aux  états-généraux:  ses  en- 
nemis politiques  parvinrent  à  le  priver 
de  ses  emplois  où  il  ne  fut  rétabli  qu'en 
1795.  Celle  année  et  les  deux  suivan- 
tes il  siégea  une  seconde  fois  dans  cette 
assemblée.  Les  partis  déchiraient  alors 
les  IVosmreslJnies  ;  à  la  grande  sur- 
prise du  public,  Jordens  fui  emprisonné 
et  conduit  à  Ilondshoired^L.  Mais  il 
ne  tarda  pas  à  sortir  de  captivité,  et 
continua  de  prendre  pari  aux  afTaires 
publiques;  entre  autres  fondions  il 
remplit  celles  de  trésorier  de  rOver)s- 
$el,  jusqu'à  ce  qu'^fin  il  fût,  en  1S02, 
miinmé  conseiller  de  la  cour  batave 
suprême.  Comme  homme  de  lettres, 
Jordens  a  mis  au  jour  deux  disserta- 
tions académiques  qu'il  avait  soutenues, 
dans  sa  jeunesse,  sur  les  bancs  de  l'uni- 
versité: 1.  Dr  differentiis  artionum 
bonœjidet.  strict  i/'u  ris  eturhitraria- 
rum ,  Devenler  ,  17.i3,  in-i°.  IL 
Ad  Icgem  unicam  codicis   de  Nili 


^4 


JOS 


iiggcrihiis  non  runipemh's  ,  Leyl*', 
1750  ,  in-i",  Parvonii  à  l'à^e  imV, 
il  se  mit  à  ciillivcr  les  muses  latines 
cl  ]M.  lloeiiffl  Ta  loué  sous  ce  rap- 
port dans  son  Paniassus  hitino-Bd- 
giciLS.  paj];.  ii29.  Il  publia  en  1795, 
à  Devcnler  :  III.  Josephus  ,  car- 
mine  heroïco  célébra  tus.  On  sait  que 
ce  sujet,  traité  ici  en  huit  livres,  n'a- 
vait pas  inspiré  d'une  manière  fort 
heureuse  Fracastor  et  Elle  Corsinl. 
On  lui  doit  encore:  IV.  Gellia,  lusus 
poellcus,  accedunt  cjusdeni  eclogœ  et 
epigrammata,  Leyde,  1 795.  Sax  rap- 
porte quelques  vers  qu'il  laissa  dans  sa 
prison,  au  moment  de  sa  délivrance  et 
qui  ne  valent  pas  ceux  qu'avait  com- 
posés Grotlus  à  Lœwestein.  Jordens 
mourut  en  1803.  M.  Scheltema  lui  a 
donné  place  dans  sa  Hollande  politi- 
que [Staaikundig  Nederland ,  II, 
553),  et  M.  Hofman-Peerlkarap,dans 
sa  Galerie  de  poètes  latins.  Celui-ci  y 
marque  la  naissance  de  Jordens  com- 
me l'avait  fait  erronément  l'auteur  de 
ÏOnomasticonlilterarium,  espèce  de 
méprise  qu'il  est  si  facile  de  commettre, 
surtout  pour  les  contemporains,  que 
Ja  critique  aurait  tort  de  se  montrer 
trop  sévère  à  cet  é^^ard.      1\ — F — G. 

JOUGE  JIAX.  Voy.  Jui^N  y 
Santaciua  ,  XXÎI,  80. 

JOSE  (Antonio),  auteur  drama- 
tique portugais,  naquit  au  commence- 
imentdu  X  VHP  siècle.  Accusé  de  ju- 
daïsme, 11  fut  jeté  dans  les  cachots  de 
^'inquisition  où  il  subit  d'horribles  tor- 
iures,  et  n'en  sortit  qu'en  1745,  pour 
<lrc  livré  aux  llammes.  Il  est  évident 
«que  cet  Infortuné  entretenait  au  fond 
rfie  l'âme  quelque  pressentiment  de  la 
«i£|)lorable  fin  qui  l'attendait  ;  car  11 
avait  eu  soin  de  terminer  chacun  des 
volumes  de  la  première  édition  de  ses 
<£uvres,  par  une  espèce  d'acte  de  foi, 
portant  qu'il  ne  crovail  à  aucune  des 
divinités  qu'il  avait  mises  en  scène.  Il 
avait  dans  le  célèbre  comte  d'Eryceyra 


JOS 

un  protecteur  chaud  et  zélé,  qui,  s'il 
eût  existé  à  l'époque  du  terrible  sacri- 
fice qui  termina  sa  vie,  n'eût  sans  doute 
pas  manqué  de  s'employer  pour  le 
sauver.  Ce  qui  caractérise  le  génie  co- 
mique de  José,  c'est  une  bizarrerie  in- 
concevable et  une  invincible  indépen- 
dance. Il  se  faisait  un  jeu  de  violer 
toutes  les  rèf];les,  heureuses  inventions 
du  goût  et  de  la  raison.  On  rapporte 
qu'après  avoir  vu  la  représentation 
d'une  des  pièces  de  cet  auteur,  le  comte 
d'Erycevra  le  pressa  de  lire  Molière  et 
de  chercher  à  l'imiter.  Il  est  probable 
que  José  ne  fit  ni  l'un  ni  l'autre;  car 
il  continua  de  suivre  les  impulsions  de 
son  imagination  déréglée.  Son  génie 
était  d'une  fécondité  sans  exemple.  Il 
aimait  à  s'abandonner  aux  plus  triviales 
plaisanteries,  et  ne  pouvait  réussir  à 
peindre  les  vices  et  les  caractères.  Ce- 
pendant il  est  certains  abus  de  son 
temps  qu'il  osa  fronder,  et  certains  ri- 
dicules qu'il  peignit  avec  une  malicieuse 
gaîté.  La  contexture  de  ses  pièces  est 
généralement  négligée  ;  on  en  peut 
dire  autant  de  la  plupart  de  ses  cou- 
plets. Tout  imparfait,  tout  extravagant 
qu'il  est,  il  ne  laisse  pas  de  plaire  par 
les  traits  piquants  de  son  dialogue  et 
la  vivacité  originale  de  son  esprit.  Les 
Mémoires  de  l'académie  des  sciences 
renlcrment  sur  le  théâtre  portugais  une 
notice  où  après  avoir  indiqué  les  défauts 
de  cet  auteur,  on  dit  avec  raison  qu'il 
savait  entraîner  l'Imagination  par  .^a 
folle  gaîté.  JjC  théâtre  de  José  est  très- 
considérable.  La  plupart  des  pièces  qui 
le  composent  sont  regardées  comme 
des  espèces  d'opéras  comiques  à  grand 
spectacle.  I>cs  meilleures  de  ces  pièces 
sont  Incontestablement  J).  Quixote, 
Esope,  les  Enchanleincnts  de  Me- 
dee.  Antonio  José  exerça  sur  les  es- 
prits plus  d'influence  qu'on  n'aurait  pu 
s'y  attendre.  Il  a  souvent  été  imité; 
mais  H  est  à  observer  que  ses  imi- 
tateurs  ne    lui    ont    guère  emprunté 


JOS 

qot  tméifzuti.  On  distin|rM  parmi 

eux  un  cfrtaiii  S^lxrio  da  Silvera  t 
Sviraqui.ic piquant dVlrc  pliL*  réj^nlier 
dans  \n  pirrrs  qiir  «on  iiioiifir,  publia 
du  temps  de  Jo^e  une  empire  de  Irau'" 
COOlédie  intitule*:  C. inunir  Jait  tirs 
choses  îmfHJSsililes,  ou  Inrs  tJr  (ms- 
tru,  rrinr  de  Portugal,  ouvrage  qu'il 
terminait  par  le  couronnement  il'I- 
Dés  »ur  la  scène,  et  qui  ne  roénle 
qu'une  simple  mention    T.  7.. 

JosÉmiM-:  Marip  JdSKPH 

Hosk-Taschfh  dk  xj^  I'ackhik  ,  im- 
pératrice des  Français,  sous  le  nom  de  , 
naquit  aux  Trois  tiets,  à  la  Martini- 
que l),le  2i  juin  170!),  lejour  même 
ou  fut  si;;ne  a\ec  l'Angleterre  le  traité 
qui  tendit  cette  colonie  à  la  France. 
S)n  père,  Tasclier  de  la  Paierie,  elaii 
capitaine  déport  dansb  manne  i ovale. 
Klle  reçut  dans  la  colonie  la  mauvaise 
éducation  des  créoles,  mais  l'Iicureu-se 
naiure  de  son  cœur  et  de  son  esprit 
eu  a\ait  fait,  à  moins  de  treiie  ans, 
la  créature  la  plus  séduisante.  Kile 
a\ail  de)a  donné  toute  sa  tendiesseà 
un  jeune  créole  lorsqu'elle  fut  amenée 
en  France  avant  à  peine  quinte  ans. 
vSes  parents  la  placèrent  à  1  abba\e  de 
l'anlliemont  en  attendant  son  mariage 
a\ef  le  vicomte  de  Beauliarnais,  né 
comme  elle  a  la  Martinique.  Otie 
union  ne  fut  pas  heureuse,  les  deux 
époux  ne  s'etant  pris  que  pour  com- 
plaire à  leurs  familles  et  alors  que  tous 
les  deux  avaient  déjà  le  cœur  occupé 


,  I  \**  ain«teun  du  thriirr  por(u(;ai%  p«o- 
V.  Ht  cuiitultar  le  volume  que  M.  Kerd.  Dmii  a 
donii,  daat  la  iraductioa  de>  CÂtfi  J-<xu.r^  d* i 
th'\iiret  etrmngtri.  |U  j  trooTeront  l'ciaaeti  do 
^>>Uinc  (irainatiqu*  ii«qaclqu««-uns  de»  pritici- 
pjin    auteurs  portogai». 

1  l-i  fauiilk  Tascher  de  la  Pa^ierir  Hait 
or,-.n.iirc  du  Blaisoii.  l^  maoqua  de  fortune 
o»)  .  -ri  I,-  |v>re  de  Joséphine  à  »olliciier  Ij  ;.'ace 
de  pcrant  Jatis  unehabiuiion  de  la  Mariitnque. 
I:  iji->j  a  Hloi»  quatre  »«art  et  un  frcre.  Troi» 
de  c<  •>  »<r.irs  »e  fiienl  religieusu,  une  jo»  Cr- 
»ulin.i  «-t  une  au  courent  de  la  Bourlilière.  à 
•  iuc-i,|ui»  liruei  du  lA>cbc».  La  qoatrirme  Mxur 
nt  i,i>rte  à  Blois  depuis  que  madame  Bouaparle 
cuit  deveaue  impératrice.  L->» — ■, 

LIVIU. 


108 


tiS 


d*on  premier  amour.  Reauharnais  ron- 
BOt  bienliU  rindination  de  Joséphine 
pour  le  jeune  croie  qui  était  venu  en 
France;  et  celle-ci  n  i;;nora  pas  non 
plus  la  liaison  de  son  mai  i  a\  ec  une  au- 
tre femme.  Delà  des  scènes  de  jalousie 
fréquentes.  1^  naissance  de  deux  en- 
fants. Kui^ene  (/  o».  Hk\i  H\nîiAlS  , 
LVn  .  373)  et  llorlense  (  T'o/. 
LWII ,  31H),  ne  reconcilia  point 
les  deux  époux.  Tandis  que  Ueau- 
liamais  aOichait  une  j^ramie  passion 
pour  la  femme  qui  troublait  son  mé- 
na'^e,  la  jeune  vicomles*e  se  précipi- 
tait dans  mainte  aventure  calante.  Ce 
fut  surtout  après  sa  présentation  à  la 
reine  Maiie-Anloinelte.  qu'enivrée  des 
hommages  d'une  foule  d'hommes  du 
plus  haut  ran^,  elle  prit  complètement 
sa  ri-vanrhe  des  inGdelites  d'un  époux 
qu'on  n'appelait  à  la  cour  que  A*  ùeuu 
danseur.  Les  chcxses  en  vinrent  à  un 
tel  point  que  lleauharnais  ,  persuadé 
qu'Hurtense  n'était  pas  de  lui,  songea 
à  une  vépar.ition.  11  fit  un  voyage  a  la 
Martinique  pour  établir  une  enquête 
sur  la  conduite  de  sa  femme  avant  son 
arrixee  en  France,  et  à  sou  retour  il  lui 
intenta  un  procès.  I/afiaire,  évoquée 
au  parlement  de  Paris,  prit,  ^rare  aux 
pui.Nsaiits  protecteurs  de  Jo>cphiiie  , 
une  tournure  tellement  favoiable  que 
le  mari  fut  condamné  à  reprendre  sa 
femme,  si  elle  voulait  revenir  a\ec  lui, 
ou  a  lui  faire  une  pension  de  dix  mille 
livres;  enbn  le  parlement  permit  à  cei- 
le-ci  de  ne  point  habiter  le  même  hôtel 
que  son  époux.  Durant  son  procès  elle 
s  était  retirée  à  l'abbaye  de  l'anlhe- 
mofit.  Kede\enue  hbre,  elle  céda  au 
désir  d'aller  à  la  .Nlartiuique  avec  sa 
fille  Hortense,  revoir  sa  mère  à^ëe  et 
infirme  ^1787).  Elle  y  demeura  trois 
ans.  Alors  les  troubles  éclatèrent  si  su- 
bitement dans  la  colonie,  qu'elle  fut 
oblij^ee  de  fuir  sans  avoir  eu  le  temps 
de  faire  ses  adieux  à  i-a  famille.  Tou- 
jours brouillée  avec  son   mari,  d'ail- 


ii6 


JOS 


leurs  sans  ordre  et  sans  prévoyance,  elle 
était  aux  expédlenls  :  le  prix  de  son  pas- 
sage avait  absorbé  la  plus  o;raiide  par- 
tie de  ses  ressources,  et  il  ne  lui  restait 
pas  de  quoi  acheter  des  souliers  à  sa  fille, 
lorsqu'un  contre-maître  du  bâtiment  lui 
en  fit  accepter  une  paire.  Devenue  im- 
pératrice, elle  aimait  à  se  rappeler  cette 
circonstance  ,  et  disait  à  ses  femmes  , 
en  leur  montrant  ses  diamants,  qu'elle 
avait  été  plus  contente   de  recevoir 
une  vieille  paire  de  souliers,  que  tous 
ces  joyaux  étalés  devant  elle   (2). 
A  son   arrivée  en  France  ,   elle  des- 
cendit à  Paris,  rue  du  Sépulcre    (au- 
jourd'hui du   Drao;on  ) ,   à  l'hôtel  des 
Asturies,  chez  un  fameux  baio,neur  qui 
logeait  des  personnes  de  première  dis- 
tinction. M"^®de  Montmorin,  épouse 
du  gouverneur  de  Fontainebleau,  se- 
condée par  !e  marquis  de  Beauharnais, 
père  du  vicomte,  qui  aimait  beaucoup 
sa  belle-fille,  entreprit  de  réconcilier 
les  deux  époux.  Une  explication  très- 
vive  eut  Heu  :  Eugène  et  Hortense  se 
jetèrent  entre  les  bras  de  leur  père;  le  ser- 
ment d'oubli  pour  le  passé  et  d'union 
pour  l'avenir  fut  fait  de  part  et  d'autre. 
Hortense  fut  présentée  à  son  père  sous  le 
costume  d'un  jeune  américain:  «  C'est 
«€   moi,  s'écria  le  vicomte  !  Je  me  re- 
«  connaissons   ces  traits;    telle  était 
a   ma  ressemblance   à  l'âge   de  sept 
«f   ans.  »  Il  embrassa  sa  fille  plusieurs 
fols,  parut  enchanté  de  la  petite  sur- 
prise qu'on  lui  avait  ménagée  et  dit  en 
riant  à  son  père  et  à  M"**^   de  Mont- 
morin :    Verum  putes    haud   œgre, 
quod  valde  exspetus  (On  croit  sans 
peine  ce  qu'on   souhaite  ardemment). 
Cependant   la  France   commençait   à 
être  livrée  aux  orages  révolutionnaires. 
Beauharnais,  devenu  l'un  des  princi- 
paux appuis  du  système  constitution- 
nel, jouissait   d'une  grande  influence  ; 
sa  maison  devint    le   rendez-vous  des 

(ï)  Mémoires  iur  Joiépfun* ,  par  mademoiselU 


JOS 

hommes  politiques.  Joséphine  ,  for- 
cée   d'entendre    d'interminables    dis- 
cussions ,  se  mit  bientôt  à  la  hauteur 
de  pareilles  matières,  et  ne  tarda  pas  à 
partager   le  crédit  de  son  époux.   Fi- 
dèle au  caractère    qu'elle  a  déployé 
constamment  depuis ,  elle  se  montra 
dès-lors  toujours  favorable  aux  victimes 
des  événements.  Parmi  les  malheureux 
à  qui  elle  sauva  la  vie,  on  peut  citer 
M''^  de  Béthlsy.  Le  moment  vint  où 
le  vicomte  de  Beauharnais  lui-même 
fut  arrêté.  Sa  femme  lui  rendit,  dans  sa 
prison,  les   soins  les  plus  affectueux. 
Elle  alla  Implorer  les  hommes  les  plus 
puissants  de  l'époque  ;    mais  ils   ou- 
blièrent l'accueil  que  la  plupart  d'entre 
eux  avaient  reçu  d'elle  dans  d'autres 
temps,  et,  pour  se  délivrer  de  ses  sol- 
licitations ,  ils  signèrent  l'ordre  de  son 
arrestation.  Conduite  à  la  maison  des 
Carmes  de  la  rue  de  Vaugirard,  oii  se 
trouvaient   déjà  quelques   femmes  de 
qualité,   elle  se  rendit  agréable  à  ses 
compagnes  de  captivité  par  la  sérénité 
d'àme  et  l'aménité  de  caractère  qu'elle 
conserva  dans  l'infortune.  Elle  faisait 
assez  habituellement  aux  nombreux  dé- 
tenus la  lecture  des  journaux  qui  n'an- 
nonçaient alors  que  des  accusations  et 
des  supplices.  Chacun  se  groupait  au- 
tour d'elle;  on  respirait  à  peine;  mais 
le  cri  de  douleur  échappait  quelquefois. 
Qu'on  se  figure  le  trouble  et  le  déses- 
poir de  Joséphine  lorsque,  le  7  thermi- 
dor (25  juill.  1794),  elle  vit  le  nom  de 
son  époux  inscrit  à  la  colonne  des  guil- 
lotinés. Elle  tomba  sans  connaissance. 
Dans  cette  position,  où  elle  n'avait 
d"autre  perspective  qu'un  sort  sembla- 
ble, elle  ne  tenait  plus  à  la  vie  qu'en 
pensant  à  ses  deux  enfants,  et  se  rap- 
pelait aussi  avec  une  lueur  d'espoir  la 
prédiction   qui  ,    avant     son   premier 
mariage  ,    lui    avait    été    faite    à   ia 
Martinique ,   par   une    vieille    mulâ- 
tresse nommée    Euphémle  :   «   Vous 
«  serez  unie  i  un  homme  blond 


JOS 

"  Voire  étoile  rous  promet  dtux  al- 
««  lianres.  \.r  premifr  de  tos  rpout 
««  tsl  né  i  la  ^la^lllllqur,  mau  il  li.i- 
•«  bilera  IKurope  ft  réunira  l'epée; 
M   un  pritcè?»  fâcheux  voua  ilé>iiiiira  .   il 

«    périra   d'une   manière  trafique 

•<  Voire  *erond  mari  sera  !r«*N  brun, 
•  il  <>t  .;  iir  ri;ri>}'.-. une,  peu  fortuné; 
•<  (rpcmluiit  il  r <  iiij.lira  le  inonde  de 
««  sa  gloire  et  de  sa  puiv'anie-  Vou* 
•<  de>iendrexalor»  une  dame  émmenle, 
•«  %ou»  ierex  plu^que  rrine  ;  pui»  aprb 
n  avoir  étonné  le  monde,  %Hmt  mour- 
*'  m  malhrurruse.  »»  \jt  lendemain 
du  jour  où  elle  apprit  la  mort  de  soa 
mari,  on  lui  apporta  son  acte  d'&ifu- 
-aiiim  I.r  ;:i*'ilier,  entrant  dan<i  la 
(li.iinlrr  nu  (lie  rourhait  avec  la  i\\X' 
clics>e  d'\i;;uillon  et  deux  autre»  da- 
mes, lui  dit  qu'il  venait  prendre  son  lit 
de  san>;le  pour  le  donner  à  un  autre 
prisonnier  :  «<  car,  ajouta  cet  liomme 
••  avec  un  atroce  sourire,  vous  n'en  au- 
••  rezpas  besoin,  puisqu'on  va  \ousrlier- 
«  cher  pour  vous  mener  à  b  Concieij^e- 
«  rie  et  de  là  à  la;;uillotine.»  Aces  mots 
ses  compa;;nes  d'ttifoitnne  poussèrent 
les  hauts  cris  ;  mai>  M*^**  de  Beatihar- 
nais,  pour  faire  cesser  ces  lamentations, 
leur  dit  que  cette  douleur  n'avait  pas  le 
sens  commun, que  non  seulement  elle  ne 
mourrait  pas,  mais  qu'elle  serait  rrine 
df  FruHif. — «  Que  ne  nommez- vous 
m  votre  maison?  lui  demanda  avec  co- 
«  1ère  M"**  la  duches»e  d'\!;;uillon. 
«  — Kh  !  bien,  ma  chère,  je  vous  nom- 
«  merai  dame  d'honneur ,  je  vous  le 
»  promets.  »  Kt  les  oleur-^  de  ses  com- 
pa^ines coulèrent  de  plus  belle  :car  elles 
la  crovaicnl  folle.  On  était  au  nruf 
thermidor.  Le  hasard  fil  qu'au  même 
moment  les  prisonnières  s'approchè- 
rent de  la  fenêtre,  et  qu'une  femme  du 
peuple  leur  annonça  par  ses  ^e^stes,  en 
prenant  sa  rohe  et  en  jetant  une  pier- 
re, que  le  Icroce  dictateur  venait  de 
monter  sur  l'echafaud.  l*eu  d'inslanls 
après,   le  geôLer  vint  conârmer  cette 


JOS 


a»7 


nouvelle,  et  rapporta  4  M™*  de  Beau- 
liai nais  son  lit  de  sangle:  «<  Vous  le 
«  vovex.  dit  elle,  je  ne  serai  pas  ^uil- 
••  lotinee  et  |e  serai  rrine  de  Fraife.  » 
Ce  qui  la  confirmait  dans  ses  idées, 
c'est  que,  du  sein  même  de  la  prison, 
elleavail  trouvé  movrn  d'in'rrro^er  par 
écrit  une  leune  pe*  'ir  depuis 

si  criehre  comme  «1  ■  .  ^1   '  l^e- 

normand,  alors  deienue  a  la  Petite- 
Force,  pour  a^oir  prédit  malheur  à  l\o> 
bespicire  el  ï  Saint-Jusl.  I. 'oracle 
atail  répondu  i  M'"*  de  Reauhamais 
par  une  prédiction  tout  i-fait  analo- 
gue ï  colle  qui  lui  avait  été  faite  en 
Amérique  I )<•!!% rée  de  prison  par  le 
crédit  deTallien,  le  lendemain  de  la 
chute  de  I\obespierre  ,  Joséphine  s€ 
h.\ta  d'aller  consulter  lasvbille  du  fau- 
bour»;  Sainl-(iermain,  qui  venait  au.«i 
d'être  rendue  à  la  liberté;  le  plaisir 
de  s'entretenir  fréquemment  avec  elle 
devint  un  besoin  pour  M™*"  de  Reau- 
hamais, dont  riina;;ination  caressait 
comme  des  réalités  les  paroles  arobi- 
^ui^  de  c^s  prétendues  prophétesses. 
Dans  sa  prison  elle  s'était  liée  d'un* 
vive  amitié  avec   M"*  de   Fontenaj, 

Îui  fut  bientAt  après  M™''  Tallien. 
JL  s>mpathie  ,  la  conformité  de  f^oûts, 
rendit  ce  sentiment  plus  durable 
qu'on  n'aurait  pu  le  présumer  de  deux 
femmes  aussi  légères  l'une  que  l'au- 
tre. Lorsque  le  11  thermidor  M"* 
de  Fontenay  fut  amenée  à  la  barre 
de  la  Convention,  elle  était  accompa- 
{jnée  de  M""  de  lieauharnais.  Leurs 
malheurs  parurent  attendrir  l'assem- 
blée ;  on  leur  prodigua  des  consolati'vns, 
liçs  promesses,  et,  comme  c'est  rusa;;e 
en  révolution,  on  n'v  pensa  plus  le 
lendemain.  Heureusement,  M"**  Tal- 
lien  n'oublia  pas  M"'"  de  Beauhar- 
nais.  Toutefois,  alors,  commença  pour 
Joséphine  une  époque  de  misère  et  de 
détresse  qu'elle  aimait  à  se  rappeler 
au  temps  de  sa  prospérité.  Elle  vivait 
pour   ainsi  dire  au  jour  le  jour.  Au 

i5. 


228 


JOS 


JOS 


moment  de  la  dlselle  qui  ne  tarda 
pas  a  se  faire  sentir,  elle  était  heu- 
reuse de  trouver  chaque  jour  à  dî- 
ner chez  M™*  Dumouhn  ,  femme 
fort  riche  et  fort  obh^eante,  qui  réu- 
nissait chez  elle  un  petit  nombre  d'a- 
mis, ruinés  par  la  révolution.  Chacun 
apportait  son  pain,  qui  était  alors  une 
denrée  bien  rare;  >r"^  Dumouhn,  sa- 
chant que  Joséphine  était  plus  pauvre 
encore  que  les  autres,  la  dispensa  de 
cet  usage,  ce  qui  fit  dire  à  celle-ci 
qu'elle  recevait  positivement  son  pain 
quotidien.  M"^®  de  Montmorin,  qui 
était  aussi  de  cette  société,  donna  de 
nouvelles  preuves  d'intérêt  à  M"'^  de 
Beauharnais  qu'elle  avait  protégée  lors 
de  son  procès  avec  son  mari,  et  lui  pro- 
cura des  robes  et  jusqu'à  des  jupons 
dont  elle  manquait.  L'unique  distrac- 
tion de  la  pauvre  vicomtesse  était  de 
se  rendre  à  Challlot,  chez  M™^  de 
Fontenay,  qui  réunissait  dans  son  sa- 
lon les  députés  les  plus  Influents  de 
l'époque,  et  même  plusieurs  de  ceux 
qu'on  appelait  alors  des  ci-deoant. 
Quelques  semaines  après  le  9  thermi- 
dor, invitée  à  un  grand  dîner  chezTal- 
lien,  M'"'^  de  Beauharnais  arriva  un 
peu  tard  :  elle  s'excusa  en  disant  que, 
privée  de  voiture  ,  elle  avait  eu  re- 
tours à  celle  d'une  de  sesamles,  ets'étalt 
vue  forcée  de  l'accompagner  au  fau- 
bourg Salnt-(iermain.  On  avait  formé 
le  projet  de  passer  la  soirée  au  specta- 
cle ;  Joséphine,  contrainte  de  calculer 
avec  elle-même,  allégua  pour  se  dispen- 
ser d'y  aller  que  la  santé  d'un  de  ses 
enfants  exi;;eait  sa  pi  ésencc à  sept  heures 
du  soir.  Tallien  lui  offrit  de  la  ramener 
dans  sa  voiture.  \)ks  qu'elle  y  fut  mon- 
tée avec  lui  ;  «  Vous  vous  êtes  plainte, 
«  lui  dit-il,  de  la  rigueur  du  sort  qui 
«  vous  contraignait  d'aller  à  pied. 
«  Celte  voiture  vous  appartient,  m,)- 
«<  dame  ;  elle  vous  tA  rendue  par  les 
c(  comités;  déplus  j'ai  obtenu  en  votre 
«  faveur   une  ordonnance   pour    que 


«  Tadministratlon  des  doraalne*s  fasse 
«  effectuer  tout  de  suite  la  levée  des 
«  scellés  sur  votre  mobilier.  Quant  au 
«  séquestre  de  vos  biens  vous  pouvez 
«  demeurer  paisible. Provlsolrementre- 
«  cevez  ce  mandat  sur  le  trésor  (3).  » 
Ce  fut  chez  ïaUien  que  Joséphine 
rencontra  Barras,  qui, sans  cesser  d'être 
lié  de  la  manière  la  plus  intime  avec 
-[yjme  ^j^j^^jen  ^  attacha  à  son  char  la 
vicomtesse  de  Beauharnais;  et  toutes 
deux,  satisfaites  d'avoir  à  leur  usage 
le  crédit  d'un  tel  protecteur  ,  sup- 
portèrent sans  se  brouiller  une  ri- 
vaHlé  qui  était  parfaitement  dans  les 
idées  et  dans  les  mœurs  de  celte 
époque.  Barras  fournit  généreusement 
aux  dépenses  de  Joséphine  ,  qui  ve- 
nait de  rentier  dans  quelques  débris 
des  propriétés  confisquées  sur  son  mari. 
Dès-lors  elle  commença  à  jouer  un 
rôle  politique,  en  réunissant  chez  clic 
les  députés  thermidoriens.  Bientôt  on 
rechercha  de  toutes  parts  son  appui, 
et  ses'  services  n'étalent  pas  tou- 
jours gratuits.  Au  reste,  à  celle  épo- 
que de  dissolution  ,  tout  était  vénal. 
Le  général  Hoche,  qu'elle  appelait 
dans  l'intimité  le  modeste  Lauiro , 
était  un  de  ses  plus  assidus  courtisans  (  t 
passait  pouî-  intéresser  viveiiient  son 
cœur  (4).  Cependant  rinsurroction  du 
13  vendémiaire  éclata.  Barras,  charrié 

(3)  Madame  de  Beatiharn.iis ,  taxée  à  .jo.unn 
francs  <laiis  un  emprunt  forer  qu'on  (U  en  1796, 
ne  put  trouver  celle  sonuiic,  lualjié  la  dépré- 
ciation du  signe  niontt.iire. 

(4j  On  lit  danii  les  noie,  des  Mémniret  de  Jo- 
liphine,  par  niadeujoiseile  Leiioruiand  :  «  Quel- 
ques heures  avant  qu'il  rondil  le  «lernier  sou- 
pir, il  écrivit  à  madame  llonaparle;  //  Uu  révéla 
un  secret  fameux,  cl  l'invila  à  ne  point  négliger 
d'en  faire  usage  (|uand  les  circonstances  pour 
raicnl  le  lui  pirmcitre.  La  mémoire  de  llocUe 
était  précieuse  à  .losépliine  ;  elle  n'en  parlait 
jamais  qu'avec  le  sentiment  d'une  profonde 
tristesse;  elle  était  convaincue  que  cet  ancien 
aini  avait  bu  à  la  c;ouj)e  de  ISéron;  mais  jamais 
elle  ne  déclina  dev;int  jtersnnnc  le  nom  ni  les 
qualités  de  l'auteur  du  crime.  »  il  est  assez  re- 
marquable (jiie,  selon  M.  de  Las  Cases,  Ronn- 
jiarte  disait  à  Sainte-Hélène:  «  Si  Moche  avait 
«  vécu  ,  il  aurait  fallu  que  le  cbar  de  l'uu  de 
w  nous  deux  brisât  celui  de  l'autre.» 


JOS 

du  roaiinanJnnriit  ilrs  troupes  de  la 
Coineulioii  contre  1rs  vcctums  .soulr- 
vm,  s'adjoignit  Bonaparte  Celui-ci, 
après  sa  \irloiiC5urlrs  Parisiens,  fut  in- 
troduit par  son  protecteur  cliez  M*"'* 
Tallien  et  de  Cluîtrau  lUnaud  qui  , 
a>ec  M"""  de  Beauliarnais,  ré<;naient 
dans  l'espèce  de  cour  déjà  formée  autour 
de  Uarras.  Ces  djmes  donnaient  alors  le 
ton  à  une  société  qui  se  jetait  tète  bais- 
sée dans  le  touiliillon  des  plaivirs. 
I/intimité  de  M'""  de  Ueauharnais  et 
de  M"""  Tallien  était  pubiicjue:  toutes 
deux  affectaient  de  ^e  montrer  au  bal, 
au  spectacle  et  môme  aux  promena- 
des ,  dans  la  toilette  la  plu»  eitraor- 
dinaire  et  souvent  la  plus  indécetile. 
Ce  furent  elle-  qui  essayèrent  de  met- 
tre à  la  mode  ce  costume  d'une  nudiic 
apparente  qui  consistait  à  montrer 
sous  une  robe  de  j;aze  toutes  les  for- 
mes dessinées  par  des  pantalons  de  soie 
couleur  de  cliair.  Ij  lettre  suixante 
adressée  par  M™"  de  Beauharnais  k 
M""*  Tallien  fera  connaître  toute  la 
frivolité  des  pensées  qui  les  occupaient  ; 
«  Il  est  quc^•aon ,  ma  chore  amie, 
«  écrivait  Joséphine,  d'une ma^nifioue 
«  soirée  à  Tliéiusson  ;  je  ne  \ous  de- 
«  mande  pas  si  vous  y  paraîtrez.  Ijt 
«<  fête  serait  bien  languissante  sans 
«  TOUS.  Je  vons  écris  pour  vous  prier 
«  de  vous  V  montrer  avec  le  surtout  de 
«  fleur  de  pêcher  que  vous  aimez  tant 
«  et  que  je  ne  liai:»  pas  non  plus:  je 
««  me  propose  de  porter  le  pareil. 
«  Comme  il  me  paraît  important  que 
«  nos  parures  soient  al)solumcnt  ks 
«  mêmes,  je  vohs  préviens  que  j'aurai 
«*  sur  les  cheveux  un  mouchoir  rouj;e 
««  noué  à  la  créole,  avec  trois  crochets 
•«  aux  tempes.  Ce  qui  est  bien  hardi 
•<  pour  moi  est  tout  naturel  pour 
«  vous,  plus  jeune,  peut-être  plus  jolie, 
«  mais  incomparablement  plus  fraî- 
«  che.  Vous  voyez  que  je  rends  jus- 
«<  lice  à  tout  le  monde.  Mais  c'est  an 
l<  coup  de  parti  ;  il  s'agit  de  désespé- 


JOS  139 

«  rer  le  frais  liirhuns  et  les  liretel- 
n  1rs  (trifliiisrs  ^.'>).  »  Par  suite  de 
se»  elepenses  de  toilette  et  de  son  dé- 
faut d'ordre,  M""  de  Beauharnais  fa- 
ti;;uait  Iiarras  de  ses  coutinuelles  de- 
mandes d'arjjent.  Klle  puisait  en  outre, 
sans  façon  ,  dans  la  bourse  de  ciuelques 
amis  intimes,  entre  autres  du  ci  devant 
marquis  de  Caulaincourt,  père  chi  duc 
de  ^  icence  (f>).  K.nfin  (et  I  histoire  im- 
partiale est  bien  obligée  de  le  reconnaî- 
tre) la  vie  de  celle  qui  devait  plus  tard 
occuper,  non  sans  dignité,  le  plus  beau 
trône  du  monde,  n'était  Téritablement 
alors  que  celle  d'une  courtisane  de 
haute  volée.  I^  moment  vint  où  elle 
de>ait  sacrifier,  pour  contracter  un  se- 
cond h>men,  sa  liberté  dont  ellesavait 
si  bien  user.  Quelques  jours  après  le  1  '\ 
ventlémiaire,  elle  rencontra  chez  M'"*" 
de  (^Jiàteau-Benaud  le  général  Bo- 
naparte, qu'elle  avait  jusqu'alors  à  peine 
remarque  dans  la  foule  de>  courtisans 
de  Barras;  et  même  telle  était  le 
peu  de  considération  dont  il  jouissait, 
que  ceux  qui  l'avaient  si  utilement  em- 
ployé ne  1  appelaient  que  A;  prtitr  ru- 
lottr  tir  fxau.  M'""  de  Beauharnais 
condescendant  à  lui  adresser  la  parole 
lui  dit:  «  H  me  semble,  cito>en  ^éné- 
'«  rai,  que  ce  n  est  qu  ï  re<^ret  que 
«  vous  avez  jeté  la  consternation  dans 
«  la  capitale. — C'est  très-possible  , 
««  répondll-il  ;  mais  que  voulez-vous, 
«  madame  :'  les  militaires  sont  des  au- 
'«  tomates  que  le  «ouvernemeut  fait 
«  mouvoir  à  son  grc;  ils  ne  sasent 
«c  qu'obéir.  Les  sections  sont  trcs- 
««  heureuses,  je  les  ai  ménagées;  la 
««  plupart  de  nos  canons  n'étaient  char- 
«  c^és  qu'à  poudre...  >»  Quelle  fut  la 
surprise    de  Joséphine  lorsque,   trois 

fS)  Sobriquet*  de  »<ci*tc  Jonnu  i  des  feiuines 
qui  riTalisaicDt  atrc  mr-dauie*  de  Ueaubaruais 
et  Talliea. 

(6)  Il  cootioaa  d'être  fort  assidu  che*  ma- 
dame Bonaparte  iou»  le  consulat  .  et  lui  donnait 
d.  ^  con^eilt  qu'elle  ccoutait  sans  !•$  siiirre,  dit 
«nidjined'Abranlc»  dûn»  tt^  Mtmoirts.  W  finit 
par  drplâire  I  oa  o«  lappeUil  que  k»  ndoltur. 


«3o 


JOS 


jours  après  cet  entretien,  B^uras loi  dît: 
•  Je  veux  vous  faire  épouser  le  petit 
«  Bonaparte,  que  je  fais  général  en 
«  chef.  Je  lui  ménage  la  conquête  de 
«  l'Italie.  En  vous  épousant  il  se  crée 
«  un  nom  dans  le  monde  ;  et,  de  son 
«  côté,  vous  trouvez  en  lui  un  sou- 
«  tien.  »  M™**  de  Beauharnais  re- 
poussa long-temps  celte  proposition. 
Plus  elle  étudiait  le  caractère  de  Bo- 
naparte, plus  elle  y  remarquait  des 
biiarreries  et  des  prétentions  dont  elle 
pe  pouvait  se  rendre  compte.  Enfin, 
il  lui  inspirait  une  telle  aversion  qu'elle 
cessa  pendant  quelque  temps  de  fré- 
quenter la  maison  de  M™^  de  Giàteau- 
Ilenaud  où  il  venait  passer  toutes  ses 
soirées.  Mais  elle  le  rencontrait  encore 
chez  Tallien;  et  plus  elle  évitait  la  pré- 
sence de  Bonapaite,  plus  il  semblait  se 
multiplier  sur  ses  pas.  Ce  n'est  pas  qu  il 
pût  ignorer  la  conduite  plus  que  léc^ère 
de  M*"®  de  Beauharnais  :  ce  motif, 
qui  eût  arrêté  un  prétendant  tant  soit 
peu  scrupuleux,  fut  au  contraire  ce  qui 
le  décida.  Calculant  sa  position  avec 
sagacité  ,  il  se  flattait  de  s'assurer  à 
tout  jamais  la  protection  de  Barras 
par  sa  condescendance  à  lui  sauver  les 
ennuis  d'une  passion  usée.  Toutefois 
il  est  sûr  que  captivé  par  les  manières 
gracieuses  et  distinguées  de  Joséphine, 
Bonaparte  l'aima  plus  qu'on  n'aime 
une  femme  dont  on  n'a  fait  choix  que 
par  des  vues  d'ambition.  Barras,  qui  te- 
nait beaucoup  à  ce  que  ce  mariage  se 
fit,  engagea  M*"*^  de  Château-Renaud 
à  en  être  la  médiatrice  ;  mais  M™*  de 
Beauharnais  aimait  véritablement  le  vé- 
nérai Hoche.  On  imagina  de  faire  inter- 
cepter pendant  un  mois  sa  correspon- 
dance avec  ce  dernier  ;  et  Jcséphine,  pi- 
3uée  de  se  voir  ainsi  négligée,  consentit 
e  guerre  lasse  à  recevoir  la  main  du 
protégé  de  Barras.  Son  premier  maria- 
ge n'ayant  pas  été  heureux  ,  elle  crai- 
gnait de  s'engager  de  nouveau.  Tout 
l'eOrajait  chez  le  général  ainsi  qu'elie- 


JOS 

mérae  Ta  exprimé  dans  une  lettre 
publiée  par  M^'^  Ducrest  :  «  Je  suis 
«  effravée  de  l'empire  qu'il  semble 
«  vouloir  exercer  sur  tout  ce  qui  l'en- 
«  toure.  Son  regard  scrutateur  a  quel- 
«  que  chose  de  singulier  et  qui  ne 
«  s'explique  pas ,  mais  qui  impose 
«  même  à  nos  directeurs  ;  jugez  s'il 
«  doit  intimider  une  femme  î  Enfin  ce 
«  qui  devrait  me  plaire,  la  force  d'une 
«  passion  dont  il  parle  avec  une  éner- 
«  gie  qui  ne  me  permet  pas  de  douter 
«  de  sa  sincérité,  est  précisément  ce 
«  qui  arrête  le  consentement  que  je  suis 
«  souvent  prête  à  donner.  Ayant  passé 
«  la  première  jeunesse,  puis-je  espérer 
«  de  consener  long-temps  cette  ten- 
«  dresse  violente,  qui  chez  le  général 
«€  ressemble  à  un  accès  de  délire  ?  » 
Rappelant  ensuiteles  promesses  de  Bar- 
ras au  sujet  du  commandement  en  chef 
de  l'armée  d'Italie,  elle  ajoutait  :  «<  Hier, 
K  Bonaparte  en  me  parlant  de  cette 
a  faveur  qui  lait  déjà  murmurer  ses 
«  frères  d'armes,  quoiqu'elle  ne  soit 
«  pas  encore  accordée  :  Croient-ils 
«  donc,  me  disait-il,  que  f  aie  besoin 
«  de  protection  pour  parvenir  f  lis 
«  seront  tous  trop  heureux  un  jour 
«  que  je  veuille  bien  law  accorder  la 
«  mienne.  Mon  épèe  est  à  mon  coté 
«  et  Oi^ec  elle  f  irai  loin.  »  Le  Mé- 
morial de  Sainte- Hélène  rapporte 
d'une  manière  bien  différente  les  pre- 
mières relations  entre  Bonaparte  et 
M™*"  de  Beauharnais,  et  ce  récit  tout  ro- 
manesque se  trouve  suffisamment  réfuté 
dans  cette  Biographie  kV aiTilcle  d'Eu- 
gène de  Beauharnais  {Voy.  ce  nom, 
LVH,  37.3).  Leur  mariage  civil  fut  cé- 
lébré au  deuxième  arrondissement  de  Pa- 
ris, le  19  ventôse  an  W  (9  mars  1796), 
i  dix  heures  du  soir.  Sur  l'acte  qui  en 
fut  dressé  ,  la  mariée  parmi  ses  pré- 
noms prenait  celui  àt  Joseph  et  non  pas 
de  Joséphine;  puis,  ce  qui  est  bien  plus 
important  à  remarquer ,  elle  se  rajeu- 
oksait  de  quatre  ans  ,  tu  plaçant  sa 


JOS 


JOS 


Sll 


■aunnca  k  l'ann^r  17G7  (7^.  Bona- 
parte, dans  srt  rausrim  df  Sainte  ll<^ 
Ifne,  l'accuse  d'avoir  produit  l'e&trait 
baplUtrrr  d'une  scrur  cadclte,  morte 
depuis  lon^-Ifrups.  «  I ^  pautre  José- 
•>  phinc,  ajouiait-il,  s'etpnsait  à  de 
«  l^rands  inconvénients,  ijt  pouvait 
«  être  la  repliement  un  n-s  de  nullité 
«  de  mari.t^f  »  I  ouleloiv  lui-ra^me, 
il    M    reii'  re    de   ce   men- 

songe  de    I     ;  r  ,   car    W  Il/nu- 

nai  h  itnitrnai  ,  ou  ne  s'imprimait 
pan  une  ii^nr  qui  ne  fût  auton»^ 
par  lai  ,  fa  vait  naître  Jtnépliine  le 
24  juin  I7HH.  Il  n'y  eut  point  de 
nariage  religieux  entre  Bonaparte  et 
u  future  :  et  lor:>que  plus  tard  il  fit  cé- 
lébrer par  an  prêtre,  dan;»  \a  maison  de 
la  rue  de  la  Victoire,  le  mana;;e  de  son 
frère  l.,ouis  avec  Horteii»e  de  heau- 
harnais,  il  profita  de  l'occasion  pour 
Caire  bénir  l'union  de  sa  strur  Caroline 
avec  Murât,  qui  n'avaient  pas  été  ma- 
riés à  l'é^^lise.  «  Quant  à  lui,  observe 
«  le  duc  de  Bovif;o  dans  ses  Mémoire-*, 
■  il  s'en  abstint,  ce  qui  nous  6t  faire 
m  quelques  redeiions...  Il  ne  se  trou- 
«  vait  ainsi  lie  à  Joséphine  que  par 
«  Tactecivil,  lien  susceptible  d'être  a  n- 
«  nulé  conformément  aux  dispositions 
«  de  la  loi  sur  le  maria^^e.  1^  disci- 
«  pline  ecclésia>lique  n'avait  donc  rien 
«  à  Toir  à  son  divorce  quelles  qu'aient 
M  été  ses  prétentions  m  \H\i).  » 
Ici  Kovi»o  s'est  placé  volontairement 


(7)  Cck^rl ,  <!« Il*  *»  brn.  bur<-  inlilMlr«  :  Quti- 
/«•*  é'tlml  <•■  -        *  Bmmma- 

fmrt»ttl-il  w  .  ,ij»*  i;6J 

»•  trOVTUt     .   r    .  -.    qaw- 

tion  ;   OtJIS    qur   \r   II...     /  ,  t 

surrbargr  du  mot  ir-^t  •   -   \ 

«    dit-il  ,  j'ai  r  II   rr«  .1    ;«■.  re 

«    trait    que  ,  Je    jr^(.     hour   Ui'ru 

«   conraiocr'  t  ,  j'ji    prit    le   pjrti 

«   d'aller  *rr  ur    le   rrjuire  luriu* 

■  dr  \i  paroi>»e  «ic  .\o.»>.|r  Grand,  oa  !•  pre 
-  mier  mariaire  a    eU  célèbre    le    i3  d^crmbre 

■  '779'  re|fiftre  actuelletnent  d^|>osé  au  jr.fie 
«  da  Iribanal  ciril  dr  Tontuisc  Or,  l'acte  d«  c« 
«  mariage,  eotiéremfnt    intact,  contiate  qn*  . 

■  aaiTint  son  acte  de  baptême,  dûment  Tia4  , 
«  àlmrf-J»t«fh-RoM  Tascher  wt  Ma  l«  a3  jaia 


ï  cAié  de  la  vérité  ,  tftwmt  il  Ta  si 
souvent  fait  dans  ses  Mémoires;  car  il 
eit  peu  probable  <]u'admis  dan»  l'inlirae 
confidence  de  Bonaparte,  il  ail  ignoré 
que  la  bénédiction  nuptiale  (ut  donnée 
aux  deux  époux,  trois  jouis  avant  le 
sacre,  à  minuit,  dans  la  cliapelle  des 
Tuileries,  en  pré>ence  d'un  très  petit 
nombre  de  témoins,  par  le  cardinal 
Kesch,  d'après  la  demande  formelle  da 
pape.  Ja^epliine  toulot  avoir  son  ex- 
trait de  mariage  qui  lui  fut  délivré. 
Dan»  la  crainte  que  cette  pièce  im- 
portante ne  fût  égarée  oa  soustraite, 
car  Napoléon  ne  s'était  prêté  qu'avec 
répu|;naiice  à  l'acte  religieux,  elle  la 
remit  a  son  £ls  K.ugene  qui  l'emporta 
en  Italie  l'Ius  tard,  quanti,  après  le  dh- 
vorce,  il  fut  question  du  mariac;e  de 
Napoléon  avec  Marie- lx)ttise  ,  cette 
princesse  fit  demander  à  Joséphine 
si  elle  avait  ete  mariée  à  Te^li^e  ) 
ajoutant  que  ,  dan<  ce  cas  ,  elle 
ne  pourrait  se  décider  à  one  vnion 
qu'elle  regardait  romme  sacrilège.  Jo- 
séplime,  toute  rè»i;;née  au  plus  dou- 
loureux sacrifice,  lui  fit  dire  de  s'en 
rapporter  au  Moniirur.  C'était  éluder 
b  venté,  sans  la  trahir:  car  elle  sa- 
vait parfaitement  que  Napoléon  n'a- 
vait pas  voulu  que  le  journal  officiel 
publiât  une  si  tardive  cérémonie  ;8). 
I.^s  conclusions  motivées  données  par 
l'ablte  (^rpet,  promoteur  de  l'officia- 
liie  de  Paris,  le  H  janvier  IHK),  sur 
la  validité  du  maria^^e,  le  déclarent  nul, 
faute  de  /<;  présence  du  propre  pas- 
teur et  de  celle  des  témoins  voulus 
pur  le  concile  de  J  Vente  et  les  or  don- 
liijnces.  Klles  portent  en  outre  qae  Bo- 
naparte avait  allégué  n'avoir  pas  réel- 
lement donné  son  consentement  a  la 
célébration,  mais  ne  s'y  être  prêté  que 
pour  céder  aux  instances  de  l'impéra- 

[è)  Cri  d^Uili  »onl  tire»  de»  yftmotrtt  <U  Jo- 
tifktmt,  par  madriDoitell*  Ducre»t ,  qui  ,  r«  le* 
rapportant  dan»  le»  lennes  qur  nom  aron»  re- 
prodmiu,  ajoale  :  «VoiU  du  moin»  ce  qa.  j'ai  e»- 
>  fliniiBn  foi»  d«  U  booeh*  d«  9.  M.  • 


2^1 


JOS 


JOS 


trice.  Ces  particularités,  fondées  sui- 
des pièces  officielles  et  des  récits  au- 
thentiques, prouvent  combien  l'auteur 
du  Mémorial  de  Sainte-Hélène  était 
mal  informé  lorsqu'il  a  prétendu  que 
dès  l'origine  Joséphine  avait  été  mariée 
au  général  Bonaparte  par  un  prêtre 
insermenté,  mais  qui  avait  négligé,  par 
pur  accident,  de  requérir  l'autorisation 
obligée  du  curé  de  la  paroisse.  Quoi  qu'il 
en  soit,  les  premiers  temps  de  cette 
union  ne  furent  pas  aussi  lieurcux  qu'on 
l'a  dit  généralement.  Si  Bonaparte 
était  passionnément  amoureux  de  l'é- 
pouse dont  les  grâces  l'avaient  subju- 
gué ,  malgré  ses  trente-trois  ans  et 
l'infection  de  son  haleine  ,  elle  ne 
laissa  pas  de  lui  donner  de  graves  su- 
jets de  jalousie.  D'abord  leur  mariage 
resta  secret  pendant  quelques  semaines. 
Douze  jours  après,  Bonaparte  était 
parti  pour  l'Italie.  Demeurée  à  Paris, 
Joséphine  dissimula  même  vis-à-vis  de 
ses  amis,  ne  voulant  poiiîl  leur  avouer 
qu'elle  avait  contracté  des  liens  indisso- 
lubles avec  le  petit  Bonaparte.  Cette 
union  en  effet  fut  désapprouvée  for- 
tement par  sa  famille  et  par  la  plupart 
de  ses  amjs  de  l'ancien  régime;  mais 
Barras,  ïallien  et  son  épouse,  applau- 
dissaient hautement  au  parti  qu'elle 
avait  pris.  Elle  se  livra  tout  entière  à 
leur  société,  vivant  d'ailleurs  très-froide- 
ment avec  la  mère,  les  frères  et  les  sœurs 
delîonaparte,  qui  lui  témoignèrent  tou- 
jours beaucoup  d'cloignement.  A  cette 
époque  une  fièvre  de  plaisir  et  de  dissi- 
pation régnait  dans  Paris  à  peine  sorti 
de  la  terreur  révolutionnaire.  Il  n'y 
avait  pas  encore  de  sociétés,  mais  des 
réunions  brillantes  telles  que  les  bals 
de  Thélusson  ,  de  Piicliclieu  et  i\çs 
étrangers.  Là,  toutes  les  classes,  toutes 
les  opinions  se  mêlaient  sans  se  con- 
fondre. On  sait  qu'alors  une  foule  d'é- 
migrés étaient  rentrés;  et,  dans  ces  soi- 
rées consacrées  à  la  danse  ,  quelques 
lâaraes  du  faubourg  Saint-Germain  s'a- 


rausaient  comme  les  autres,  mais  en  se 
croyant  le  droit  de  mépriser  celles  de 
leur  caste  qui  fréquentaient  la  société 
des  directeurs  ;  témoin  ce  mot  d'une  de 
ces  pures  aristocrates ,  qui  refusa  de 
s'asseoir  à  côté  de  la  ci-devant  M^^  de 
Beauharnais  ,  au  bal  de  Thélusson  , 
en  disant  :  «  Je  ne  veux  pas  me  lier 
«  avec  une  pareille  femme.  Je  n'aime 
«  pas  les  gens  qui  déshonorent  leur 
«  malheur  (9).  »  Cependant  chaque 
courrier  apportait  à  Joséphine  une 
lettre  de  son  époux  :  quelques-unes 
de  ces  épîtres  ont  été  imprimées  : 
elles  sont  brûlantes  d'amour  et  em- 
preintes d'un  sentiment  de  jalousie. 
On  en  jugera  par  ces  passages  : 
«  La  nature  m'a  fait  l'àme  forte  et 
«  décidée  ;  elle  t'a  bâtie  de  dentelle 
«  et  de  gaze...  Femme,  tourment,  bon- 
«  heur,  espérance  de  ma  vie...  Tes 
«  lettres  sont  froides:  la  chaleur  du 
«  cœur  n'est  pas  pour  moi  ;  je  suis  le 
«  mari,  un  autre  doit  être  l'amant: 
«  il  faut  être  comme  tout  le  monde.  » 
Il  désirait  la  faire  venir  en  Italie  ;  elle 
ne  se  pressait  pas:  «  Tu  devais  partir 
«  le  5  prairial,  lui  écrivait-il  encore; 
«  bon  que  j'étais!  Comme?  si  une  pe- 
«  tite  femme  jjouvail  abandonner  ses 
H  habitudes,  ses  anns,  sa  M"'^  Tal- 
«  lien,  un  dincr  chez  Iiarras,  une  re- 
«  présentation  d'une  pièce  nouvelle  et 
«  Fortuné,  oui.  Fortuné  (10) .  Tu  ai- 
«  mes  tout  jdus  que  ton  mari,  car  tu 
«  n'as  pour  lui  qu'un  peu  d'estime  et 
«  une  portion  de  celle  bienveillance 
«<  dont  Ion  c(L'ur  abonde.  »  On  voit  par 
cette  correspondance  que  Joséphine 
f'iotivaiî  ses  relards  sur  un  prétendu 
commencement  de  grossesse  :  elle  sen- 
tait, disait-elle,  l'eAt/^Ai/  rcrnucr.  Cc- 


{ij)   On  attribue  ce  iiiol  à  iiiacluine  de  n.-iin.-x. 

(u))  (;'étail  un  chat  Tavori  :  .fosi--,>biiiu  ,  qui 
BT.-iit  lu  pu&sioi)  (les  iiiiiinaux  ,  lui  donna  pour 
iiiccesscur  sous  l'rinpire  un  autre  cjiot  iioiiiiiié 
Monsieur  l'apiii,  {\\\'\  j'aisuil  le  du;  epoir  des  da- 
ines d'honneur  et  que  ^a|>uléon  poursuivit  un 
jour  ik  coups  de  piucett^'S. 


JOS 


JOS 


ÎÎ3 


Marat,  premier  alde-Jê-eamp 
de  Bonaparte,  >int  apporter  au  Ditrr- 
toire  le»  premiers  ilrapeaui  conquis  en 
Italie;  et  M"*"  lîonjparte,  de  concert 
a»ec  ^I'"'^Tallicn,  le  fit  nommer  géné- 
ral de  bri;;ade.  De  retour  en  Italie, 
Murât  fut  a*sei  mal  reçu  par  le  général 
en  chef  auquel  riaient  revenus  quel 
ques  propos  sur  l'inliinité  rapide  de 
ses  relations  avec  Joséphine.  Néan- 
moins il  le  conserva  pntir  .iit)«--de- 
ramp;    mais,    .vu   sirçe   •!     ^1  -, 

Nlurat  a>ant  montre  de    >  n  , 

lionaparle  le  dis;^racia  tnul-a-tail,  ce 
qui  n'empêcha  pas  les  deui  amies  d'ol>- 
tenir  plus  tard  pour  lui,  du  ministre  de 
la  {guerre,  qu'il  ferait  partie  de  Parmcc 
d'K};>pte.  Après  Mnrat,  Junnt,  autre 
aide*de-camp  de  Bonaparte,  vint  ap- 
porter au  Directoire  les  féconds  dra- 
peaux pris  en  Italie.  M""  Bonaparte 
parut  dans  cette  crrémonie  avec  son 
inséparable  amie,  M*"*"  Tallien.  Vue  à 
quelquedistance,Josép)iine était  encore 
charmante,  et  rien  n  égalait  la  heauie 
de  sa  compafjne.  Toutes  deux  étaient 
inise^dans  ce  i^oùt  antique  qui  rappelle 
les  statues  «recques.  La  foulcseprev^ail 
pour  Irtvnir.  Junot  était  chargé  de  con- 
duire M"""  Bonaparte  en  Italie.  Dans 
la  route  il  eut  la  maladresse  de  faire  la 
cour,  sous  les  veux  de  va  maîtresse,  à 
M  ""  Ix)uise,  simple  camériste.  I*a  co- 
quetterie des  femmes  ne  p.-)rdonne 
point  ces  choses- là  ;  aussi  NI"'"  Bo- 
naparte témoigna  toujours  depui)  beau- 
coup de  froiileur  à  J  unot .  (^lui-ci  devint 
son  ennemi  acharné,  et  ce  sentiment 
d'hostilité  le  poussa  par  la  suite  à  des 
démarches  peu  di;;ne5  d'un  militaire,  et 
qui  lui  ont  été  reprochées  dans  plusieurs 
mémoires.  A  Milan,  Joséphine  se  vit 
entourée  des  honneurs  que  l'on  rend  à 
une  souveraine.  Klle  lo^ea  au  palais 
Serbelloni,  où  elle  menait  un  train  de 
princesse,  faisant  des  dettes  comme  par- 
tout. VMe  p.irlil  de  lîrescia  avec  son 
mari,  e<  commença  pour  ainsi  dire  la 


campagne  contre  VVurmser.  A  Vé- 
ronr,  rllr  fut  irmoin  des  premiers  coups 
de  fusil.  Be\rnur  à  (^slcI-Novo,  et 
tovant  le  passade  des  blessée,  elle  vou- 
lait ;;a;;ner  Brescia  ;  mais  elle  fut  ar- 
rêtée par  l'enneini  qui  était  maître  de 
Ponte- Marco.  Korrre  alors  de  ipiilter 
l'arrore,  elle  traversa  le  l^^,  B<. 
F'errare,  et  ^'a;:na  l.ucque»,  po' 
par  la  rramlret  par  les  bruits  snui.o 
que  l'on  r<-panJait  Nur  le  sort  de  l'ar- 
mée française  qui  n'aviit  pas  encore 
été  daiiH  une  position  si  critiipie 
(/'«>.  N\p«ilionV  Toutefois  elle 
fut  bien  .icctieillie  par  le  sénat  de  l.uc- 
ques,  qui  vint  la  complimenter  et  lui 
présenter  le*  huiles  d'hor  neur  comme 
à  une  prinresfte.  I<es  Lucquois  eurent 
bientôt  heu  de  s'applandir  de  ce  bon 
procède.  Bonapaite  ,  ^ainqueii.  leur 
fit,  à  la  prière  de  Joséphine  ,  1rs  plus 
;;randes  concessions.  Depuis  lors  les 
fêtes  et  le*  plaisirs  de  toute  e>pèce 
l'enuronnèrent  en  Italie.  Klle  se  mon* 
Ira  succesviveinent  à  Livourne  et  à 
Florence  ;  puis  elle  fiva  son  séjour  à 
M:iaii.  l*er;i!.int  que  Bonaparte  p(»iir- 
suivail  le  "^le^e  de  Mantoue,  José|>liine 
se  rendit  à  l'avie,  à  Crémone,  .î  Plai- 
sance,  etc.  Kiant  à  .Milan,  elle  n'a- 
vait pas  peu  contribué  ,  par  l'ascen- 
dant de  ses  larj^es^es  envers  le  peuple, 
à  repousser  des  partis  de  T^roliens 
qui  s'étaient  montrés  aux  portes  de 
cette  \illc.  lîonaparte  lui  en  sut°ré: 
««  l'ne  autre  (ois,  lui  dit-il,  je  pourrai 
M  vous  condor  .sans  crainte  les  rênes 
n  d'un  état...;  puis  alors,  Joséphine, 
«  continua-t-il  en  riant,  tu  aur.ts  une 
««  voix  delibérali\e  d.ins  mon  conseil  ; 
«^  mais  pour  la  clé  de  mon  Irrsor,  tu  ne 
«  l'auras  jamais.  »  Lorsque  le  ;;énéral 
en  chef  reçut  du  Directoire  l'ordre  de 
renverser  la  pnissiince  poniificalr,  il  se 
contenta  d'envover  à  Borne  le  <;énéral 
Victor,  et  se  porta  de  sa  personne  .«^or 
Faenza  et  Ceseiie.  Joséphine  l'ac- 
compa;:;nj  juiqu  à  Imola,  où  tous  deux 


234 


JOS 


furent  reçus  par  Tévêque,  depuis  pape 
sous  le  nom  de  Pie  VII.  Elle  supplia 
Bonaparte  de  se  montrer  généreux  en- 
vers lui  ;  il  ménaj^ea  la  ville,  mais  il 
prit  l'argenterie  et  les  diamants  qui  se 
trouvaient  au  palais  épiscopal.  De  re- 
tour à  Milan,  elle  ne  s'en  éloigna  plus, 
et  si  l'on  en  croit  la  clnonique scanda- 
leuse de  l'armée,  consignée  dans  les 
Mémoires  àt  M'"®  d'Abranlès,  elle 
conçut  un  très-vif  attachement  pour  un 
aide-de-camp  du  général  Leclerc.  M. 
Charles  (c'était  son  nom)  déjeunait 
avec  elle  sitôt  que  Bonaparte  partait 
pour  quelque  expédition.  Ce  qui  pa- 
raît certain  ,  c'est  que  ce  fut  alors 
que  commencèrent  les  défiances  de  son 
mari.  Un  de  ses  aides-de-camp,  Le- 
marrois,  lui  rendait  un  compte  fidèle 
des  moindres  actions  de  son  épouse. 
Quelques  lettres  qu'elle  recevait  furent 
dénoncées;  et  Bonaparte  les  jugea  cri- 
minelles. Dès  ce  moment  la  discorde 
se  mit  entre  les  deux  époux.  Dans  un 
accès  de  colère  ,  il  tua  d'un  coup  de 
pied  un  jeune  carlin  qui  avait  été  don- 
né à  Joséphine  par  le  général  Iloche. 
Quelques  jours  après,  il  eut  honte  de 
son  emportement  et,  pour  le  réparer, 
il  fit  élever  un  monument  à  la  victime 
dans  les  jardins  de  Mondeze,  près  de 
M ilan.  Du  reste  les  deux  époux  s'enten- 
daient lort  bien  pour  les  intérêts  de  leur 
ambition.  Bonaparte  accablait  d'impôts 
les  premières  maisons  de  l'Italie,  non 
qu'il  eut  rintention  de  les  ruiner  entiè- 
rement, mais  il  voulait  les  tenir  dans  ..a 
dépendance.  Il  leur  faisait  eniendre  de 
s'adiesser  à  son  épouse.  Alors  José- 
phine promettait  beaucoup,  et ,  quel- 
que temps  après,  comme  si  elle  eût 
échoué  dans  ses  sollicitations  ,  el/e  di- 
sait avec  une  feinte  tristesse  :  le  général 
ne  le  veut  pas.  On  la  .suppliait  de  re- 
doubler ses  efforts;  elle  profitait  habile- 
ment de  cette  confiance  pour  pénétrer 
tous  les  secrets  ;  elle  finit  même  par 
obtenir  ie&  archiver  de  l'état  que  le^  au- 


JOS 

torités  avaient  fait  disparaître  à  Tentrée 
des  Français.  En  public,  Bonaparte 
désapprouvait  Joséphine  de  s'intéres- 
ser à  la  noblesse  italienne.  «  Elle 
«  n'obtiendra  rien  de  moi,  disait-il  à 
ce  ses  généraux;  je  ne  puis  favoriser 
«  les  grands;  leur  fortune  me  répond 
«  de  leur  soumission.  »  Par  ce  ma- 
nège concerté,  Joséphine  était  adorée 
dans  les  provinces  conquises,  et  sa  po- 
pularité servait  merveilleusement  les 
desseins  de  son  époux.  H  ne  faut  pas 
omettre  que  ces  services,  qui  lui  coû- 
taient si  peu,  lui  valurent  une  immense 
qurinlité  de  diamants  qu  elle  accepta 
toujours  sans  scrupule.  Quand  Bona- 
parte était  éloigné  de  Milan,  il  lui  en- 
voyait tous  les  jours  un  courrier  ;  elle 
était  instruite  à  point  de  tous  les  mou- 
vements de  l'armée,  et  les  principaux  of- 
ficiers recevaient  les  bulletins  de  samain; 
mais  elle  cachait  avec  soin  les  défaites. 
Après  la  prise  de  Vérone,  son  inter- 
vention ne  fut  pas  inutile  pour  préserver 
celte  ville  du  pillage  :  «  Le  prétendant 
«  de  Frantt,  écrivait-elle  à  Bonaparte, 
«  a  trouvé  dans  cette  ville  asile  et  pro- 
«  teclion;  c'en  est  assez  pour  vous  et 
«  pour  moi  ;  vous  m'entendez,  géné- 
«  rai.  »  Quand  le  vainqueur  de  l'Italie 
se  rendit  à  Bastadt  pour  négocier  la 
paix,  il  s'y  fil  précéder  par  son  aide- 
dc-camp  Mural  et  par  Joséphine,  qui 
devint  dans  celte  ville  la  reine  du 
cercle  diplomatique.  Elle  se  con- 
duisit avec  beaucoup  de  réserve  et  de 
dignité  ;  les  diplomates  étrangers 
étaient  charniés  de  retrouver  les  formes 
de  l'ancienne  cour  dans  la  femme  d'un 
général,  (jui,  personnellement,  aflèctait 
avec  eux  la  hauteur  et  quelquefois  la 
grossièreté  d'un  parvenu.  Joséphine  ne 
prolongea  point  ce  séjour  à  Bastadt 
aussi  lon^-temps  que  son  époux,  et  de 
retour  à  Milan  elle  reprit  ses  intimités 
avec  l'aide-de-camp  Charles.  Quand 
Bonaparte  revint  à  Paris,  ses  (rères, 
espéraut  détruire  i'iaûueace  de  leur 


bellf-«niT,  chfTf hfrent  à  exciter  «a  ja- 

ioiisif  par  Irur^  rapports.  Son   amour 
encore  trrs  %if  pour  sa  froime,   cl   ses 
trataux    coiiliiiurl»    pour  l'expédition 
d'Kp^pte,  ne  refn|»À: lièrent  pas  de  piê- 
ter  quelque  attention  à  ce*  propo».  Il  v 
eut  quelques  di>putes  conjugale*,  qui  $e 
terminaient  lou;t>urN  a  l'axanlai^ede  l'a- 
droile  JoNrpliiiic.   Le  roelier  Anloinr, 
espion  »errrt  du  mari,  lui  déiioii«;a  en- 
core les  aMuliiites  de  lV<»ltol,  seeietaire 
de   Harras.    1^   (ait    était  vrai;    mai% 
M*"*    Honaparte    se    serrait    adroite- 
ment    de  crtle    inlimile    pour     con 
naiire    les   *ecret<   du   dirrrteur.    I*ar 
cemo>en   elle  découvrit  que  les  ri/iy 
sires   desiraient   foilcment    la   démis- 
sion  du   vainqueur   de    l'Italie.    Alois 
elle  en<;a^ea  Koiiaparte  à  faire  moinen» 
tanémeiit  quelques  li';;ères  concessions 
pour  mieux  parvenir  à  son  but.   Mais 
le  {^enrral  fut    in>liuit   que,  sous    pré- 
texte d'aller    au    maiu,;c,    son  e(M>u«e 
allait    voir    en    srriet  llarras.  C/eiail, 
51  l'on  en  croit  M'  "  Leiiormand,  pour 
sauv*er  les  jours  d'un  émi^ire  conJani- 
né  à   être  fuMlIt-.  Ouoi  «ju'il  en  s»)it  , 
Donaparte  lui    fit   au    retour  une  via- 
lente  querelle  et   la  chassa  de  son  \u\- 
tel,  à  onze  heures  du  soir  ,  en  don- 
nant ordre  à  sm   rr^ ,„  de    rem[»écher 
de  rentrer.  Joséphine,  se   trouvant  à 
minuit  dans  la  rue,  alla  chercher  un  asile 
chez  M'""  de  Château- Heiiaud  qui  la 
ramena  quelque'^  heures  plus  tard  au- 
près de  son  mari ,  el  s'v  pril  avec  tant 
d  adre>.se  que  le  même  jour  elle  accom- 
{•a^na  les  deux  époux  dans  une  prome- 
nade au  bois  de  lîoulomie.  Depuis  son 
retour  à    Paris,   Jo>e|.hiiie  partageait 
tous  les  horamaj^es  dont  son  mari  était 
l'objet,  et,  ce  qui  ne  plaisait  pas  tou- 
jours  à   celui-ci,  c'est  que  nuine  dans 
le  public  on  parlait  de   la    reconnais- 
sance  qu'il   devait  à  sa  femme.    Non 
seulement  .M'"''  Bonaparte  ne  fit  rien 
pour  détruire  celle  opinion,  mais  elle  y 
donna  de  la  consistance  par  sei  coun- 


JOS 


a3S 


à  des  flatteurs.  On  peut  ju^er 
combien  l'ame  alliere  de  Bonaparte 
était  blesser  quand  il  entendait  leprler 

?\xtcrtiiH  le  crrUit  de  stt  femme  qui 
uçaii  e/rve  et  qui  le  suuienuii.  Mais 
son  amour  pour  Jusephine  et  peut-Àre 
ausêi  son  intérêt  politique  lui  lai:>aient 
diisiniuler  son  depit.  Mairie  ces  scènes 
d'inlriieui,  en  public  il  etail  tuuiours 
aux  petits  soins  pour  elle.  On  put  ie  re- 
marquer, le  *J  ianvier  17U8,  a  une  frtc 
doonrea  M'""  Beft-V'jf  t^  p.vr  Irminii- 
Ire  lallevrand  i  ••  llo 

M    naparle  ,  dit  ai  dm 

M  dan>  ses  ^Stmi'emrs,  a  toujours  ctc 
M  près  de  sa  lemine  pendant  toute  la 
«  durée  du  souper.  Il  paiait  rtie  fort 
M  occupe  d'elle.  On  dit  même  qu  il  en 
«  est  amoureux  et  exce»sivenieul  ja- 
»  lonx.  .M""^  Bonaparte  n'est  ce- 
«  pendant  plus  jolie,  ellr  a  pré»  de 
M  quarante  ans,  et  les  païait  bien  ;  elle 
M  conserve  une  taiiie  ele;;aiite  et  un 
<t  bon  curur  qui  ne  veillira  |amais.  >• 
C'était  le  monietit  ou  NI""'  de  SlairI 
|io(tr>(inai'  >  <    -qucs 

le  li'Tos  (jii  pour- 

suivie de  ses  virulentes  satires,  hlle  lui 
avait  écrit  de  loiu  sans  le  connaître; 
elle  le  harcelait  présent.  K  l'en  croire, 
c'était  une  monstruosité  que  l'union  du 
peine  à  une  petite  insi\!,nijntnie  errole^ 
indi;4iic  de  l'apprécier  el  de  l'enten- 
dre, etc.  Bonaparte  jetait  au  feu  ses 
lettres,  en  les  Iruissant  et  en  les  dértii- 
raiit  a^ec  debout  ;  puis  il  disait  à  Buur- 
neniie  :  •<  .Vh  bien  oui  î  une  femme 
«<  bel  esprit,  unefai:>euse  de  sentiment 
M  se  comparer  a  Joséphine!  Bour- 
«  rienne,  je  ne  veux  pas  repondre  à 
M  de  pareilles  lettres,  i»  Depiii.s  son 
retour  à  Paris,  il  fut  importune  du 
même  empiessernent,  auquel  il  opposa 
la  rneriie  froideur  et  le  même  silence. 
M'""  de  Staël  ne  se  derour-i^ca  poiut, 
el ,  résolue  de  tirer  de  lui  quelques 
paroles,  l'interpella  publiquement  à 
celle  même  fcte  donnée  par  Talley- 


!i36 


JOS 


rand  :  «  Quelle  est,  demanda-t-elle  à 
«  Napoléon,  la  première  femme  du 
«  monde,  morte  ou  vivante:' — Celle 
«  qui  a  fait  le  plus  d'enfants,  répondit 
«  le  o;énéral.  «  .M™*^  de  wStaël,  un  peu 
iléconcertée  d'abord,  essaya  de  se  re- 
mettre en  lui  disant  qu'il  avait  la  répu- 
tation d'aimer  peu  les  femmes  :  «  Par- 
^f  donnez-moi,  reprit-il,  j'aime  beau- 
<«<  coup  la  mienne  ,  madame.  »  Les 
•dépenses  exorbitantes  de  Joséphine 
^donnaient  pourtant  lieu  à  une  (j;uerre 
intestine  entre  les  deux  époux.  Etant 
encore  à  Milan,  elle  avait  écrit  à  Paris 
pour  qu'on  meublât  (we/:  tout  ce  qu'il 
y  avait  de  mieux  sa  maison  rueChan- 
tereine  qu'elle  avait  achetée  de  Talma 
quarante  mille  francs.  Quelle  fut  la 
surprise  et  la  mauvaise  humeur  de  Bo- 
naparte ,  quand  on  lui  présenta  le 
^'ompte  de  ce  mobilier  qui  ne  montait 
pas  à  moins  de  cent  vin^t  mille  francs  ! 
Il  eut  beau  se  défendre,  tempêter.  L'en- 
trepreneur montrait  la  lettre  de  José- 
phine; or,  tous  les  meubles  étaient 
'd'après  des  modèles  faits  exprès.  Il 
•fallut  en  passer  par  là.  «  Elle  avait 
•"  à  l'excès,  dit  liourrienne,  le  goîit 
■•«  du  Juxe  et  de  la  dépense.  Ce  pen- 
•«  chant  ,  né  de  l'oisiveté ,  était  de- 
«r  venu  une  habitude  et  presque  tou- 
«  jours  sans  besoins  réels.  De  combien 
'<  i-de  scènes  n'al-je  pas  été  témoin 
«  lorsque  le  moment  de  payer  les 
«  fournisseurs  était  arrivé  !  Elle  ne  dé- 
«t  »clarait  jamais  que  la  moitié  des  mé- 
«  înoires,  et  cela  renouvelait  les  repro- 
«  ches.  Que  de  larmes  elle  répandait 
«c  qu'elle  aurait  pu  s'épargner  si  faci- 
««  lement!  »  Lors  du  départ  de  lîona- 
partepour  l'expédition  d'Egypte,  Jo- 
séphine l'accompaj^na  jusqu'à  Toulon  , 
et  témoi{i;na  le  désir  de  le  suivre  en 
E^vpte.  Aux  objections  du  {!;énéral  , 
elle  répondait  que,  née  créole  ,  la  cha- 
leur du  climat  lui  serait  favorable.  Par 
un  sinf^ulier  rapprochement,  c'était  sur 
]a  Pomone  qu'elle  youlait  faire  la  tra- 


JOS 

versée,  c'est-à-dire  sur  le  même  bâti- 
ment qui  dans  sa  première  jeunesse  l'a- 
vait amenée  de  la  Martinique.  Bona- 
parte, ayant  fini  par  céder  au  désir  de  sa 
femme ,  promit  de  lui  envoyer  le  na- 
vire, et  l'engagea  ,  en  attendant ,  à 
aller  aux  eaux  de  Plombières,  Elle 
y  consentit  d'autant  plus  facilement, 
qu'elle  croyait  à  l'efficacité  de  ces 
eaux  pour  lui  rendre  une  fécon- 
dité devenue  impossible.  A  Plombiè- 
res ,  elle  faillit  devenir  victime  d'un 
grave  accident.  Comme  elle  était  un 
jour  avec  sa  société  sur  le  balcon  de 
son  hôtel,  ce  balcon  s'écroula  :  toutes 
les  personnes  qui  s'y  trouvaient  tom- 
bèrent dans  la  rue.  L'une  d'elles  eut 
la  cuisse  cassée.  M'"^  Bonaparte  en  fut 
quitte  pour  des  meurtrissures.  Sans 
cet  accident,  qui  prolongea  son  sé- 
jour à  Plombières  ,  elle  serait  deve- 
nue prisonnière  des  Anglais  ;  car  la 
Pomone  fut  prise  pendant  la  traversée. 
Comme  d'ailleurs  Bonaparte  ,  dans 
toutes  ses  lettres  ,  détournait  sa  femme 
du  projet  d'aller  le  rejoindre,  elle  re- 
vint à  Paris,  où  elle  s'occupa,  d'après  les 
recommandations  de  son  mari ,  de  lui 
acheter  une  maison  de  campagne.  Après 
avoir  hésité  long-temps  entre  la  terre  de 
Bis  et  la  Malmaison,  ellese  décida  pour 
cette  dernière  qu'elle  acheta  de  M.  Le- 
coulteux  d'i  Moley,  moyennant  cent 
soixante  mille  francs ,  bien  que  son 
mari  lui  eut  déclaré  ne  vouloir  y  met- 
tre que  le  tiers  de  cette  somme.  II  y 
avait  une  foule  de  réparations  à  faire  ; 
et  la  ferme  rapportait  tout  au  plus 
douze  mille  livres  de  rentes.  Mais 
quand  Joséphine  achetait,  rien  ne 
l'inquiétait  moins  que  de  payer  :  sa 
profusion  irréfléchie  perpétuait  le  dé- 
sordre et  la  détresse  de  sa  maison. 
Les  quarante  mille  francs  de  revenu 
que  lui  avait  assurés  Bonaparte  avant 
son  départ  ne  lui  suffisaient  pas  ;  et  ce- 
pendant deux  envois  extraordinaires 
d'argent  s' élevant  à  pareille  somme  lui 


il 


avaient  Mé  faits  d'Iil^pte  en  raoiiiN 
d'uiir  aiin^.  1)<>  plus  ,  à  U  reconi- 
inaiiiialinn  i\e  Karra»,  le  lllltli^I^e  Je 
la  polirr  touché  la  rnm|irenait  dans 
\es  li.siribulions  claiiilr&tiiies  sur  le 
|iiO(iuit  des  jeui.  Il  lui  retint  même, 
(le  Ij  main  à  la  main ,  mille  louis, 
galanterie  ministérielle  qui  lui  ^a;;na 
pour  jamais  le  cœur  de  Joséphine.  Il 
sa\ail  par  elle  beaucoup  de  choso  : 
car  elle  voyait  tout  l'ari».  mais  liams 
mt'ins  souvent  qu'autrefois,  fréqoen- 
taiil  plutdi  Gohier,  pré>idrnt  du  Di- 
rectoire; elle  était  aussi  fort  liée  a\ec  le 
munilionnaire  Ouvrard,  qui  plu.s  tl'une 
fois  lui  oinnt  >a  caivse  pour  de  prét> 
dont  il  ne  fut  jamais  rembourse.  Du 
re^te,  elle  \i\ail  fort  mal  a>ec  ses  beaux- 
frères  Joseph  et  Lucien,  qui  ne  ces- 
saient de  décrie)  sa  conduite.  Le  direc- 
teur (îoliicr  désapprouvait  sa  liaison 
avec  l'aide-de-caïup  C.harles,  bien  que 
Joséphine  s'eiïuirat  de  la  lui  faire  envi- 
sager comme  de  pur  sentiment  :  •«  S'il 
M  \ou-<  est  impossible  de  la  rompre  , 
M  lui  disait-il  ,  et  qu'elle  vous  tienne 
•«  tant  au  coeur,  dworcri.  »»  Cette 
parole  fit  d'autant  plus  d'impression 
sur  elle,  qu'alors  précisément  le  bruit 
courait  que  Konaparte  était  perdu 
et  qu'il  ne  reviendrait  jamais.  KUe 
alla  jusqu'à  Caire  rédiger  sa  demande 
en  divorce;  puis,  avant  d'aller  plus 
loin,  ayant  con:»ultéLccoulteu\deCan- 
teleii,  cet  homme  prudent  lui  lit  sen- 
tir toute  l'incoineiiaiire  de  ce  projet  : 
«<  En  supposant  véritables  les  bruits 
««  sinistres  qui  courent  sur  lo  général, 
«  lui  dit-il ,  son  nom  seul  est  pour 
«<  vous  une  auréole  qui  vous  entoure 
«  d'une  considération  que  yous  per- 
«c  drez  aussitôt  que  vous  y  aurez  re- 
i<  nonce.  »  11  la  persuada  si  bien 
qu'elle  déchira  devant  lui  sa  demande 
en  divorce,  dont  il  ne  fut  jamais  ques- 
tion depuis;  car,  an  retour  de  son  époux, 
elle  n'eut  {:;arde  de  s'en  vanter.  Ce- 
pendant en  tf^ypte,  Juiiot,  qui  depuis 


jas  i-Kj 

le  foya;;e  d'Italie  était  devenu  l'ennemi 
de  Joséphine,  profila  du  libre  accès  qu'il 
avait  auprès  «le  son  -cneral  pour  lui 
faire  sur  les  intrigues  de  sa  femme  des 
rapports  dans  lesquels  malheureuse- 
ment trop  de  vérités  se  mêlaient  à  U 
calomnie.  Après  cet  entretien,  Bona- 
parte apostroplu  yivement  mjii  secré> 
taire  Bourrienne.raccu&antdclui  avoir 
caché  les  inGdélitn  de  sa  femme  : 
•«  J'e&lerminerai ,  s'ccria-t-il  ,  cette 
m  rare  de  blondms  et  de  freluquets. 
M  (,)uant  a  elle,  le  diyorce,  oui,  un  di- 
«  yorce  public,  éclatant  !  »  Il  youlail 
écrire  à  Joséphine  pour  commencer  le 
jirocès.  Bourrienne,  sincèrement  atta- 
clié  a  celle-ci  ,  fit  sentir  au  général 
toute  r indiscrétion  de  Junot  (11),  el 
combien  il  serait  imprudent  de  lu- 
sarder  une  lettre  qui  pourrait  être  in- 
terceptée par  les  Anglais.  Bonaparte 
se  calma  ,  et  quelques  jours  après  il 
se  plaignit  à  Bourrienne  du  mal  que 
Junot  lui  avait  fait  par  des  révéla- 
tioBS  que  la  mali;;nili*  pouvait  bien 
a^uir  inventées.  Depuis  il  ne  par- 
donna jamais  à  celui-ci,  et  l'on  a  dit 
que  c'est  un  des  motil>  pour  lesquels 
Junot  n'a  pas  été  maréchal  de  France. 
On  doit  penser  que  Joséphine,  à  qui 
son  mari  lui-même  lacouta  plus  tard 
ces  indiscrets  propos,  les  a  encore  moins 
pardonnes.  LUe  plaisantait  souvent  sur 
les  manières  de  Junot  qu'elle  trou- 
yait,  avec  raison,  fort  communes.  Dans 
le  premier  accès  de  son  mécontente- 
ment, Bimapane  avait  écrit  une  lettre 
de  reproche^)  à  Joséphine  qui  >  fît  une 
réponse  tres-adroite  :  ««Je  vois  en  ef- 
«"  fel  beaucoup  de  monde,  disait-elle, 
«(  et  c'est  à  qui  me  complimentera  sur 
«c  \os  succès;  el  j'aNoue  que  je  n'ai 
«   pas  la  force  de  fermer  ma  porte  à 

(ti)  «  Sans  que  Bonaparte  me  l'ait  dit. j'ai  eu 
-t  bfjucnap  de  ralion»  de  pcnsrr  que  le  nom  d* 
«  Mural  ruit  Kjrti  avec  celui  de  Charles  de  U 
«  bouclic  «le  Jufioi,  lors  de  »tv>  iiidtscrelioot 
■<  aux  soirKs  de  Meisoudiab  (.V«/n.  de  Bout' 
«  rt*mA«,  toai.  m,  p-  »«7)-  •» 


238 


JOS 


«  qui  me  parle  de  vous.  Les  honi- 
«  me?  sont  en  grand  nombre  dans 
«  nia  société;  ils  comprennent  mieux 
«  que  les  femmes  vos  hardis  projets  ; 
«  ils  parlent  avec  enthousiasme  de  ce 
«  que  vous  faites  de  £;rand ,  tandis 
«  que  celles-ci  ne  savent  que  se  plain- 
«  dre  de  ce  que  vous  avez  emmené  avec 
«  vous  leur  époux ,  leur  frère  ,  leur 
«  père!...  Cependant  il  en  est  dont 
«  j'aime  le  cœur,  Tesprit,  de  préfé- 
«  rence  à  tout,  parce  qu'elles  ont  pour 
«  vous  une  sincère  amitié.  Il  faut 
«  avant  tout  placer  ici  les  noms  des 
«  spirituelles  M™^^  d'Aiguillon,  Tal- 
«  lien  et  ma  tante.  Je  les  quitte  peu 
«  et  elles  vous  diront,  ingrat  que  vous 
«  êtes,  si  j'ai  pensé  à  faire  des  coquet- 
«  tcries  à  tout  le  monde,  etc.  >»  Plus 
loin  ,  elle  ajoutait  :  «  On  me  rend  ici 
«  des  honneurs  qui  quelquefois  m'em- 
«  barrassent;  car  enfin  je  ne  suis  paslia- 
«  bitiiceà  ces  hommages  qui,  je  le  vois, 
«  déplaisent  à  nos  autorités  toujours 
«  ombrageuses  et  craignant  de  per- 
V  dre  leur  pouvoir  de  la  veille.  Lai's- 
«  sez  faire  fous  ces  gens,  me  dites- 
«  vous;  Il  ai?,  mon  ami,  ils  tacheront 
«  de  vous  nuire;  ils  vous  accuseront 
«  de  chercher  à  diminuer  leur  ouis- 
«  sance  ;  et  je  serais  désolée  de  contri- 
«  buer  en  rien  à  une  humeur  que  vos 
«  triomphes  suffisent  pour  justifier. 
«  Lorsque  vous  reviendrez  couvert  de 
«  nouveaux  lauriers  ,  que  feront  ils  , 
«  mon  Dieu,  si  déjà  ils  se  tourmen- 
«  tent  :'  »  A  cette  époque  Bonaparte, 
qui  s'était  un  peu  radouci,  envoya  à.Io- 
.séphine  deux  châles  cachemires.  ]\1'^*^^ 
lîourrienne,  Hamelin  et  Visconti  en 
eurent  aussi.  Ces  châles  qui  depuis  ont 
fait  fureur  n'eurent  pas  d'abord  l'avan- 
tage de  plaire.  «  Ils  peuvent  etretrès- 
»(  beaux  et  très-chers ,  écrivait  José- 
«  phine  à  son  fils  Eugène  ;  mais  ils  me 
«  paraissent  fort  laids.  Leur  grand 
<c  avantage  est  dans  leur  légèreté.  Je 
u  doute    que   cette  mode  prenne. 


JOS 

«  N'importe ,  ils  me  font  plaisir 
«f  parce  qu'ils  sont  extraordinaires  et 
«  chauds.  »  Cependant,  depuis  lors, 
les  femmes  ont  voulu  toutes  se  parer  de 
ces  châles  si  laids  ,  et  Joséphine,  sur- 
tout, eut  la  passion  des  cachemires; 
elle  en  ^gosséàaii  cent  cinquante  d'une 
beauté  remarquable  et  qui,  en  1814, 
furent  vendus  bien  au  dessous  de  leur 
valeur.  Les  indiscrétions  de  Junot, 
après  avoir  causé  chez  Bonaparte  une 
explosion  de  fureur  jalouse,  n'avaient 
pas  laissé  de  traces  apparentes;  mais 
il  n'en  était  pas  moins  en  proie  à 
des  soupçons  que  ses  frères  et  ses 
sœurs  ne  manqu»Ment  pas  de  con- 
firmer, par  les  rapports  les  plus  en- 
venimés, lorsqu'il  revint  d'Egypte.  Ils 
le  firent  avec  d'autant  plus  de  facilité 
que  M"^^  Bonaparte  était  absente. 
Comme  elle  n'était  pas  sans  inquié- 
tude sur  la  manière  dont  elle  serait 
accueillie  par  son  époux  ,  elle  était 
partie  pour  aller  au  devant  de  lui 
dès  qu'on  apprit  son  débarquement. 
Elle  eût  voulu  ,  en  le  revoyant  , 
être  accompagnée  d'une  personne  qui 
put  la  protéger;  elle  crut  que  Lecoul- 
teux  de  Canteleu,  entouré  comme  il 
l'était  de  l'estime  générale,  serait  le 
meilleur  appui  qu'elle  pût  avoir;  mais 
celui-ci  ne  se  souciait  pas  de  se  faire 
son  chevalier  dans  une  circonstance 
aussi  délicate.  Il  lui  représenta  qu'elle 
ignorait  par  quelle  route  Bonaparte 
arrivait  ;  (|ue  sans  doute  elle  le  man- 
querait, et  qu'il  était  préférable  de  l'at- 
tendre à  Paris.  Elle  ne  fut  pas  de  cet 
avis  ;  mais,  comme  elle  n'avait  pas 
d'argent  pour  faire  ce  vopge  ,  elle 
demanda  cincjuante  louis  à  lîarras  qui 
les  lui  donna  d'assez  mauvaise  grâce. 
Elle  pai  tit  donc  seule  et  prit  la  route 
de  Bourgogne,  tandis  que  Bonaparte 
arrivait  par  le  Bourbonnais.  Lucien, 
plus  heureux,  avait  pris  la  bonneroute. 
11  profita  de  ces  premiers  instants  pour 
prévenir  son  frère  qui,   ne  trouvant 


105 

plus  sa  ftmmf  i  son  arriv^'f ,  accneillii 
t(>u5    In   propos    qui   lui  furent  trnus 
contrf  fllf  par  sa   famillr,  entra  <lan« 
une  j;raniJe  fureur  el  pron(»nra  enrnre 
le  mot  lie  ili\'ori  e.    I/errrur  de  roule 
ne  lui  parut    qu'un    prétexte.   iVe5olu 
de  ronipre  à  tout  jamais,  il  fit  i\r\ 
rhrx  le  portier  tous  les   effet  s  dr    ^1 
Hnnaparle  avec    ordre  de 
•1  entrer     lorNqu'eile    se    |'  < 
Mais    quelques    ami<  ,     et    surtout    le 
fournisseur  Collot  .  lui  représenlet enl 
l'infonvenance    d'un    tel    éclat    alors 
«jue  la  France  entière  a\ail  le-i  yen»  sur 
lui.  "  C^  n'est  pas  le  moment,  dit-il, 
M   de  débuter  par  un   ridicule  et   de 
«  jouer  le  r«Me  d'un  mari  de  Molière. 
«    laissez  là  les  torts  de  votre  femme. 
•«    Si  vous  n'en  êtes  pas  satisfait ,  vous 
««    la   ren\errei  lorsque   vous   n'aurez 
"    pas  autre  chose  à  ''aire.  »•  l*eu  ébranlé 
par  ce  sa;;e  corvseil,  lionaparte  déclara 
qu'il  ne  pardonnerait  jamais.  •«    Vous 
«    me  connaissez  bien,  ajouta-t-il  ;  si 
«<   je  n'étais  pa^  sur  de  moi,  j'an-aclie- 
««    rais  ce  cirur  el  je  le  jetterais  au  feu.  »» 
Kn  disant  ces  mots  sa  main  déchirait 
»a  poitrine.  Cependant  Joséphine,  qui 
était  allée  au  devant  de  lui  jusqu'à  L>  on 
sans  le  rencontrer,  revint  dans  la  nuit 
qui  suivit  cet  entrelien.  Bonaparte  ne 
\oulut    pas   la  voir,  et   pendant  deux 
jours  il  lui  tint  rigueur  ^1 2^  ;  mais  il  ne 
put   résister  aux  prières  d'Ku^ene  et 
d'Ilorlense  ;    en6n  ,    après   de    lon- 
gues   supplications,   ils  allèrent  cher- 
cher   leur     mère     et    la   ramenèrent 
dans  les  bras  de  son   époux.   K!le  at- 
tenda'.l    sa  décision  au    bas   d'un  pe- 
tit escalier  déiobé,   presque   couchée 
sur  les  marches  et  souffrant  de  froid  el 
de  chagrin.   Après  cette  réunion  ,  les 
efforts   qu'elle  fil   pour  se  jusliBer  et 
pour   repiendre    son    empire    sur   lui 
trouvèrent  dans  le  cœur  de  lîonaparte, 

(n  ronflant,  d.in'i  »f^  Mfin..irr«,  aTfiupqa« 
Im  tjpLcuiioiu  qu'eurent  alors  Us  drux  époux 
M  M  terwuhàrtmt  fat  toujours  s»mj  cru  tt  tm/u  m»- 


JOS 


i39 


tonjoim  épris  de  m  femme,  un  poisiant 
auxiliaire  Dans  maintes  circonstances 
elle^ul  profiter  adroitement  de  sa  fai- 
blesse superstitieuse  :  m  On  parle  de 
«  ton  étoile,  lui  dixait  ellr  (juelquefois, 
-  mais  c'e^l  la  mienne  qui  l'influence: 
c'est  à  moi  qu'il  a  elé  prédit  de  hautes 
destinées.  »  Du  reste,  un  de^  mo>ens 
les  plus  puivsanl^  qu'elle  eiiipln\a  pour 
le  ramener  fut  d'user  habileinent  de 
représailles.  Pendant  son  séjour  en 
K;;>pte,  lionaparle  a^ait  eu  assrz  pu- 
bliqtiemrnt  pour  maltresse  une  M'"*" 
Fuurès  Joséphine  s'empara  de  celte 
arme  pour  repousser  les  attaque»  de 
son  époux .  et  elle  ne  lui  laivsa  ni 
paii  ni  trêve  jusqu'à  ce  qu'il  eût  éloi- 
gné celte  femme,  qui  était  rexenue  à 
Paris.  Après  ente  bouderie  conju;;ale, 
leur  union  ne  fut  plus  troublée.  José- 
phine, il  faut  lui  rendre  cette  justice, 
sentit  la  nécessité  de  raellre  enfin  de 
la  régularité  dans  sa  conduite,  et  elle 
ne  s'attira  plus  dequeielles  que  pour 
ses  folles  dépenses.  Klle  s'attacha  vé- 
ritablement a  Honaparte  et  sut  iui 
(lunnrr  Ir  honhrur  :  elle  se  montra 
constamment  son  amie  la  plus  tendre, 
professant  en  toute  occasion  la  soumis- 
sion, le  dévouement ,  la  complaisance 
la  plus  absolue.  On  peut  lire  dans  les 
Mrmuirrs  de  Constimt  avec  «juelîc 
sollicitude  elle  soij;nail  son  mari  lors- 
qu'il éprouvait  quelque  indisposition. 
Klle  avait  une  mémoire  prodi;;ieuse, 
que  Bonaparte,  qui  l'appelait  son 
a^rniia ,  se  plaisait  à  mettre  à  contri- 
bution. F^lle  faisait  sans  pédanterie  des 
citations  qui  prouvaient  ui:e  lecture 
variée  ;  el  la  défiance  qu'elle  avait  tou- 
jours d'elle-môme  rerapèchait  de  par- 
ler de  ce  qu'elle  ne  savait  pas.  Klle 
était  excellente  musicienne  ,  jouait 
très-bien  de  la  harpe,  chantait  et  des- 
sinait avec  o;oùt.  Sans  être  réguliè- 
rement belle,  elle  avait  un  charme  in- 
dicible dans  son  regard  presque  tou- 
jours voilé  par  ses  longues  paupières. 


a4o 


JOS 


Aucun  peintre,  pas  même  David,  n'a 
pu  exprimer  reffet  que  produisait  Tcn- 
semble  de  sa  personne  ;  car  la  grâce, 
si  difficile  à  saisir,  était  ce  qui  la  dis- 
tinguait par  dessus  tout.  Elle  avait  un 
tact  parfait,  un  sentiment  exquis  des 
convenances,  un  jugement  sain,  avec 
une  douceur  qui  ne  se  démentait  ja- 
mais. «  Je  n'ai  vu,  a  dit  l>ourrienne 
<f  dans  SCS  Mémoires,  aucune  femme 
«  apporter  dans  la  société  de  tous  les 
«  jours  autant  d'égalité  de  caractère, 
«  autant  de  cet  esprit  de  bienveillance 
«  qui  €st  la  première  condition  de 
«  l'amabilité.  »  Il  faut  reconnaître 
aussi  que,  sous  le  rapport  politique,  elle 
avait  par  sa  dextérité  préparé  les  bril- 
lants succès  que  Bonaparte  obtint  à 
son  retour  d'Egvpte.  Aux  approches 
du  18  brumaire,  elle  sut  traiter  adroi- 
tement avec  quelques  hommes  in- 
fluents ,  et  ménager  à  son  mari  des 
intelligences  jusque  dans  l'armée  du 
Rhin.  Il  est  connu  qu'elle  inspira  à 
Gohier,  alors  président  du  Directoire, 
et  à  sa  femme,  une  confiance  toute  favo- 
rable aux  desseins  ambitieux  de  ]>ona- 
paite.  Par  son  habileté  à  rester  toujours 
maîtresse  de  la  conversation  dans  son  sa- 
lon, elle  prévint  de  fâcheux  démêlés  entre 
son  époux  et  Dernadotte  qui  voulait  à 
tout  prix  maintenir  le  J)Irectoire.  Dans 
cette  fameuse  journée,  espérant  rallier 
(johier  à  la  cause  de  son  mari,  elle 
l'avait  invité  à  déjeuner;  mais  il  ne  vint 
pas.  l*endanl  que  Bonaparte  était  au 
conseil  des  Anciens,  on  peut  juger  des 
inquiétudes  de  .Joséphine  (jui  resta 
seule  avec  Bourricnne.  Remplie  d'une 
bienveillance  véritable  pour  M'"*''  Go- 
hier et  son  mari ,  elle  envoya  dire  à 
ce  dernier  de  ne  pas  faire  d'éclat  , 
et  de  se  reposer  sur  l'affection  de 
Bonaparte,  dont  l'intention  était  de 
faire  tout  pour  Gohier.  Quand,  à 
trois  heures  du  matin,  iionapartc  re- 
vint de  Sainl-Cloud,  il  passa  une  par- 
tie de  la  nuit  à  causer  avec  Joséphine 


JOS 

des  événements  de  la  journée.  Bientôt 
iî  s'établit  ,  connue  premier  consul , 
au  Luxembourg ,  où  elle  le  suivit. 
Dès-lors  elle  ne  vit  plus  que  les  per- 
sonnes qui  convenaient  à  son  mari  , 
et  rompit  toutes  celles  de  ses  ancien- 
nes liaisons  qui  rappelaient  le  temps 
des  saturnales  du  Directoire.  Plus  de 
visites  chez  Barras  ,  alors  en  pleine 
disgrâce  ,  ni  chez  M'"^  ïallien  qui 
ne  fut  pas  exempte  de  cette  déla- 
veur. Bonaparte  ne  voulut  jamais  per- 
mettre à  Joséphine  de  la  recevoir  au 
Luxembourg,  ni  plus  tard  aux  Tuile- 
ries. Ce  fut  pour  celle-ci  un  cruel 
crève-cœur,  car  elle  était  tendrement 
attachée  à  M"^''"  Tallien ,  qui  dans 
d'autres  temps  lui  avait  rendu,  ainsi 
qu'à  Bonaparte,  des  services  impor- 
tants. Il  paraît  cependant  que  Joséphine 
la  voyait  quelquefois  à  la  Malmaison  ; 
mais  Bonaparte  n'en  sut  jamais  rien,  ou 
bien,  satisfait  du  mystère  qui  présidait 
à  ces  entrevues,  il  fit  semblant  de  n'en 
rien  savoir.  Joséphine  conservait  avec 
soin  une  collection  des  lettres  de  M™^ 
Tallien  et  de  plusieurs  personnages  mar- 
quants. C'est  elle  qui  de  nosjoursa  mis 
à  la  mode  les  collections  d'autographes. 
Quant  à  Tallien  il  aurait  terminé  ses 
jours  dans  le  plus  entier  dénuement,  si 
Joséphine  n'eût  pourvu  à  ses  besoins 
par  une  pension  que  lui  continua  Eu- 
gène ,  après  la  mort  de  sa  mère. 
Joséphine  fournit  aussi  aux  frais  de 
l'éducation  de  M"'''  Tallien  dont  le 
prénom  était  Thermidor ,  et  qui  a 
épousé  depuis  le  comte  Pelct.  Bona- 
parte voulant  appuyer  son  nouveau 
gouvernement  sur  un  système  de  fu- 
sion, profita  habilement  des  ancien- 
nes relations  aristocratiques  de  José- 
fdiine  pour  attirer  à  lui  le  parti  roya- 
iste.  «  Sans  ma  femme,  disait-il  à 
«  Sainte-Hélène  ,  je  n'aurais  jamais 
'<  pu  avoir  avec  ce  parti  aucun  i  a()[»ort 
<'  naturel.  »  A  celte  époque  le  salon  de 
M'"*^  de  Montesson  était  le  seul  où  se 


chez  V0U4.  J'aurai  brM>iii  de  quel- 
ques IraJitiuns.  Vous  \ouJrex 


JOS 

ti  uu\ii>iriil  léunis  le'»  rini^iv»  iciii.t  ^, 

leN  graatU  sei;;neurs  le^Xei  en  Fraiire, 
le<  panenus  nu Iclii»  de  leurs  drpouil- 
lei,  fl  1^5  liomnirs  cclrbrcs  tbiu  tous 
1rs  ;riires.  Au»mIAi  qu'il  fui  r\e\é  aa 
i(ui>-ilal,  Bonaparte  fil  \enir  M'"'"  de 
^Iollles^oll,  H  Je  serai  riiarmède  vous 
"  être  utile,  lui  dit  il,  mais  aussi  je 
«  coropic  sur  vous.  1^  Ion  Je  la  bonne 
•«  compa;;nie  e^t  à  peu  pu*i  perdu  en 
•«    France;    il   faut   qu'il    se   rrliou\e 

quel- 
bien 
•<  les  donner  à  ma  fciniue;  et  lorsque 
•«  quelque  élran;;cr  de  marque  vien- 
««  dra  à  Paris,  vou»  lui  oiïriirz  des  (è- 
••  tes  pour  qu'il  soit  convaincu  que 
••  nulle  part  on  ne  peut  avoir  plus  de 
^rare  et  d'amabilité.  »•  A  cet  eflcl 
.!  leiidit  à  M""  de  Moi.te^son  la 
peiiMOii  de  cent  suivante  mille  francs 
que  lui  avait  assi;;née  le  duc  dOr- 
leans  ,  son  époux.  Jojépliine  té- 
moigna toujouis  la  plus  vive  amitié 
à  celte  femme  remarquable  par  les 
^râce<i  de  son  esprit.  Etant  impcra- 
tricc  ,  elle  venait  souvent  déjeuner  et 
passer  des  journées  entières  à  Homain- 
villc,  on  M'""  de  Montesson  avait  une 
iiabitâtion  charmante.  Les  pauvres  du 
pa>s  se  ressentaient  toujours  de  ces 
\isiles;  •«  car,  dit  M"'  Ducrest,  l'im- 
«•  péralrice  voulait  que  tout  le  monde 
«(  fût  heureux  là  où  elle  paraissait  >• 
Ce  fiit  au  I.uxcmboui;;,  dans  les  sa- 
lons dont  elle  fai>ait  si  bien  les  hon- 
neurs ,  que,  dès  le  commencement  du 
consulat,  le  mot  de  madame  redevint 
en  iisa^ç.  Ce  premier  retour  vers  l'an- 
cienne politesse  française  ne  laissa  pas 
d'effaroucher  quelques  su.sceptibililés 
républicaines;  mais  Bonaparle  s'en 
souciait  peu.  Déjà  il  tranchait  du  maî- 
tre. Ce  fut  pendant  sa  résidence  au 
Luxembourg  qu'il  voulut  faire  arrêter 
le  fameux  lournisseiK  Ouvrard,  qui 
avait  été  l'ami  intime  de  M'"*^  de  Beau- 
harnais.  Prévenu  par  Bourricnne,  Ou- 

LXVIII. 


.ÎOS 


211 


Maul  Cul  il-  irmps  de  roeltre  ^  Tabri 
ceuK  de  ses  p.ipirrs  qui  auraient  pu 
coroprumetlre  qiielqu'un.  I.^s  scellés 
fuient  ce|>endant  appo:>és  chez  lui; 
mais  on  n'v  trouva  que  la  preu- 
ve de«  emprunts  que  lui  avait  faits 
M""  Bonaparif.  (Juaiid  le  pieniiei' 
consul  et  ses  deux  collègues  vinrent 
s'in«laller  aux  Tuileries  ^1')  février 
1 800^,  Joséphine,  placée  modestement 
à  l'une  des  lenètres  de  l'appartement 
assigné  au  troisième  consul  l^lirun, 
se  contenta  d'élre  simple  spectatrice 
du  corle;;e  brillant  dont  son  époaz 
était  le  principal  personnage.  Elle  s'é- 
tait,  des  le  malin,  rendue  sans  éclat 
au  château  où  elle  occupa  les  appaite- 
menis  du  rez-de-chaussée  sur  le  jardin. 
Celaient  ceux  de  l'infortunée  Marie- 
.\nloineile.  Lorsque  Josrphine  s'^ 
installa,  elle  se  troubla  et  des  larmes 
s'échappèrent  de  ses  veux.  •«  Je  pré- 
•«  férerais  habiter  la  .Nlalmaison,  dit- 
«•  elle  à  Bonaparte,  ce  palais  me  dc- 
"  plait  ,  je  tremble  sur  la  sdlidité 
••  d'une  SI  haute  élévation.  Que  di- 
'«  ront  tes  soldab .'  —  Que  je  uc 
«  marche  point  sur  les  traces  d'un  Fa- 
«  bricius ,  madame.  Le  petit  caporal 
M  français,  mieux  avisé  qur  !e  consul 
«<  ronnin  ,  veut  recueillir  les  fruits 
«  d  une  victoire  où  il  ne  lui  a  fallu 
•«  que  de  l'audace  pour  réussir.  J'ai 
«  joué  mon  rôle  àSaint-Qoud  ;  maiu- 
<«  tenant  c'est  à  vous  à  prendre  l'es- 
«  prit  du  vôtre.»  Quelques  jours aprè< 
celte  installation,  il  >  eut  chez  Joséphi- 
ne léceplion  du  corps  diplomatique  A 
luiil  heures  du  soir  les  salons  étaient 
encombrés  par  la  foule  des  personnes 
invitées  (ambassadeurs,  sénateurs,  mi- 
nistres ,  f;énéraux  ,  colonels  ,  dames 
élran;;ères,  femmes  de  généraux);  et, 

3uand  après  beaucoup  de  peine  et 
'embarras  le  cercle  fut  formé ,  un 
domestique  en  livrée  vert  et  or 
annonça  Madame,  femme  du  pre~ 
mier  consul.  .Après  elle,   venaieiit  la 

i6 


l4'2 


J05 


mère  et  les  sœurs  de  Bonaparte  ;  puis 
quatre  dames  qui,  sans  avoir  de  tilres, 
accompaci;naient    ordinairement   José- 
phine. Celle-ci,  entrant  de  prime  abord 
dans  le  cérémonial  des  reines,  fit  le 
tour  du  cercle,  conduite  par  le  minis- 
tre drs  relations  extérieures,  Talley- 
rand,  qui  lui  donnait  la   main   et  qui 
lui  nomma  les  membres  du  corps  di- 
plomatique. «  Ses  oreilles,   dit  Cons- 
K  tant  dans  ses  Dlémoires ,   durent 
u   être  ap;réablement  frappées  du  mur- 
«   mure  ilatteur  qui  Taccueillit  à  son 
«   entrée.»  Cette  première  réception 
d'étiquette   produisit  le   plus  heureux 
effet  dans  Paris;  le  commerce  se  ra- 
nima en  voyant  reparaître  les  habits 
brodés   et    les    équipages.    On   peut 
même  ajouter  que  le  luxe  et  les  dé- 
penses  de   Joséphine   eurent  la  plus 
heureuse  influence.  Déià  elle  avait  pris 
une  attitude  de  souveraine;  les  fem- 
mes se  levaient  toutes  lorsqu'elle  en- 
trait ou   qu'elle  sortait.    JJepuis   lors, 
toutes  les  fois  qu'un  ambassadeur  ou 
quelque    corps    de    l'état    sortait    de 
l'audienre  des  trois  consuls ,  il  allait 
chez  M"'^  Ironaparte  comme  autre- 
fois chez   la  reine.   Les    républicains 
continuaient   de   murmurer.  Carnot  , 
ministre    de    la    f!;uerre  ,    ne   cessait 
de  faire  des  remontrances  au  premier 
consul  sur  la  pompe   de   sa   cour   et 
sur   la   propension    de    Joséphine    à 
jouer  le  rôle  d'une  reine,  en  réunis- 
sant autour  d'elle  des  femmes  dont  le 
nom  aristocratique  flattait  son  amour- 
propre.    Ces   représentations   fatif:;uc- 
rent  lîonaparte,  et  il  fit  demander  à 
Carnot  sa  démis.'^ion.  L'orgueil  du  pre- 
mier consul  était  flatté  de  la  {^ràce  et 
de  la  dignité  que  déployait  José()hine 
dans  ces  réceptions  d'apparat  :  en  cela 
elle  secondait  parfaitement  ses  vues,  et, 
comme  mari,  son  amour-propre  eût  été 
blessé  s'il  l'eut  vue  remplir  ce  rôle  offi- 
ciel avec  moins  d'aisance   et  de  tact. 
Habituée  de  bonne  heure  à  la  haute 


J05 

société,  elle  connaissait  parfaitement 
cette  convenance  de  lano;ao;e  qui  mé- 
nage tous  les  intérêts,  tous  les  amours- 
propres;  et  M™®  Junot,dansses  î\lé- 
ijioires,  s'est  montrée  souverainement 
injuste  envers   elle  ,    en    prétendant 
qu'elle  eut   besoin   de  recevoir  à  cet 
égard  des  leçons  de  sou  mari.  Ce  retour 
de  l'étiquette  dans  le  palais  consulaire 
produisit  des    effets    importants.    La 
bonne  compagnie  commença  à  se  divi- 
ser. Une  partie  essaya  de  faire  de  l'op- 
position, l'autre  se  rapprocha  du  pre- 
mier consul.  Joséphine  attirait,  encou- 
rageait à  merveille  ces  ambitions  un 
peu  honteuses  ;  elle  avait   été  femme 
de  qualité,  elle  en  conservait  les  ma- 
nières ,    et  l'on  pouvait  la  voir  sans 
déroger.  Les  anciennes  amies  qui  l'a- 
vaient oubliée  dans  la  tourmente  ré- 
volutionnaire se  rappelaient  leur  atta- 
chement d'autrefois,  et  trouvaient  très- 
agréable  de   le   lui   rappeler   à    elle- 
même    au    milieu    des    magnificences 
renaissantes  des  Tuileries.  Ces  dames 
concoururent,    avec   la  nouvelle  maî- 
tresse du  lieu,  à  introduire  auprès  du 
consul  les  usages  de  la  vieille   cour. 
Toutefois  ,  tant  que  le  cérémonial  ne 
fut  pas  réglé,  Joséphine  eut  à  ses  ré- 
ceptions officielles  peu  de  femmes  de 
l'ancien  régime  ;  elle.se  contentait  de 
les  recevoir  dans  l'intimité  des  visites  du 
matin.  Bonaparte  lui  faisait  craindre  de 
se  voir  compromise  par  les  prétentions 
que    pourraient   élever  quelques-unes 
de  ces  dames  ;  et  elle-mi-me  craignait 
de  les  blesser  par  l'étiquette  que  lui 
imposait  son  rang  d'épouse  du  chef  de 
l'état.   Aussi  n'y  avait-il  rien  de  plus 
monotone  alors  que  le  château  des  Tui- 
leries. Le  premier  consul  ne  quittant 
pas  son  cabinet,  M"**^  lîonaparte  était 
obligée,  pour  tuer  le  temps,  d'aller  tous 
les  soirs  au  théâtre  avec  sa  fille.  Après 
le  'Spectacle,  dont  le  plus  souvent  elle 
n'attendait  pas  la  fin  ;,  elle  revenait  ter- 
miner sa  soirée  par  un  whist,  ou,  s'il  n'y 


J05 

atait  pli  lisct  de  monde,  par  une 
partie  de  piquet  qu'rllc  fai^Ait  a^er  le 
>ccond  roiiMil  ou  quelque  autre  iiri - 
*onna -e  de  ceMc  ^rauic.  —  ï.c%  icm- 
nes  des  aide>-de-rainp  du  piemirr 
consul  >eitaient  lui  tenir  rompapiie. 
C'étaient  chaque  )uur  Ici  rortnes  per- 
sonnes ,  les  mêmes  jeux.  Mai«  il  eu 
était  autrement  à  la  Malmaisnn,  qui 
fut  comme  le  Trianon  de  la  cour 
consulaire.  La  société  j  était  d'une 
élégance  .simple,  également  eloij^nce 
de  la  cro>5ifrelé  lepuliliraine  et  du 
faste  de  l'empire.  Lj  iloiiapa:te  me- 
nait pa^5e^  ce  qu'il  a|>pelail  irs  jours 
de  /o.'/^/'',  et  lorvque  plus  tard  il  eut 
Saint  Cloud,  il  ne  crva  point  d'afTec 
tionner  la  Malmai$on.  Tout  le  monde 
jf  était  admis  par  M'"*  Uonaparte  sur 
un  pied  d'égalité  qui  mettait  cliacun  à 
M)n  aise.  Outie  la  lauiille  Heauharnais, 
et  celle  du  prcLiier  consul,  il  v  \enail 
des  personnages  distingués  par  leur» 
fonrtioiis  ;  des  savants,  des  artistes, 
enfin  «juclijur.  nobles  de  l'ancieu  ic- 
j;'me,  entre  autres  le  prince  de  Toii. 
Cette  société,  dont  la  plupart  des  mem- 
bres étaient  jeunes  ,  se  lierait  sou> 
rent  à  des  exercices  qui  rappelaient 
les  jeux  du  collo|;e  :  entre  aulics  les 
barres.  C'était  ordinairement  après  dî- 
ner que  Joséphine,  Hortense,  Rona- 
parte  et  leur  société  se  di\i:»aient  en 
deux  camp>  et  vaquait  à  ce  jokax  exer- 
cice. Pour  complaire  à  Ju?»ephine,  le 
ftremier  consul  a\ait  fait  construire  à 
a  Malmaison  une  jolie  petite  salle  de 
sprctacle,  dont  \^  comédien.^  ordinaire* 
étaient  Euj;ène,  liortcuse,  M'""'  Mu- 
ral, Junot,  le^énéral  I.aurû.ton,  Bour- 
rienne,  le  préfet  du  palais  Didelot,  etc. 
Talraa  et  Michot  présidaient  aux  répô 
tilioiis.  Après  le  spectacle  on  causait 
jii:;qu'à  minuit  dans  les  salons  du  rez- 
de-cluussce.  Joséphine  se  plaisait  en- 
core à  rassembler  à  la  Malmai^nn  des 
objets  d'art,  ce  qui  l'exposait  à  des 
boutades  de  son  mari  :  «<  car  lorsqu'à 


JOS 


^43 


m  la  faveur  de  mon  nom  ,  dit-il  dani 
M    le  Mtinurial ,  rlle  était  parvenue  a 

•  s'emparer  de  quel«|ues  chefs-d'iru- 
«  \re,  bien  qu'ils  fussent  dans  mon 
«  palais  ,  sous  mes  jeux ,  je  me 
m   iruyais  intle;  ils  nelaiimt  pus  au 

•  Muséum.  •'  Ce  fut  encore  à  la  .Mal- 
maison  que  Joséphiuc  commenta  celte 
belle  collection  de  piaules  exntiqur^, 
dont  laplupart  (M.'  '•  iulde 
Kianre  et  l'uni  -i  iv«\4 
liclé  de  nou\ellei  iJcu;  i.  1. 

qu'elle  donnait  a  celte  ma 
sanie,   et    qui   se   cuntim.  ic 

sous    l'emplie,    étaient    ai  ,  j, 

Bonaparte,  pour  fa\urisri  ion  oMeme 
de  fu>ion.  Il  n'|  ai  ait  jamais  d'hom- 
mes ,  beaucoup  de  femmes  y  étaient 
incitées  qui,  dans  roii;;ine,  n'etaienl 
pas  admises  aux  graniU  cercles  de  U 
cour.  l'Iu»  tard  elles  ont  fi^uicdans 
\\4lmanachiinperial;  mais  alors  elles 
paraixsaieiit  ne  vouliur  se  laltacher 
qu'a  W"*^  lU  Uruu/uirnais  4  umme à 
une  des  leurs.  Au  surplus  celle-ci  ne 
pouvait  rece\oir  personue  ni  acceptei 
aucune  inMtation  ,  sans  rauton>.tliun 
de  sou  mail.  Il  lui  fit  uu  jour  une 
Uès\erte  mercuriale  d'au»ir  eli*  tle 
jcuuer  chez  une  femme  pour  laquelle 
lui-même  prufcs^ail  la  plus  hanle  es- 
time, M'"*^  de  Vaines,  veuve  de  l'an- 
cien piemier  commis  des  finance». 
C'était  une  raison  de  prudeuce  qui  le 
faisait  a^ir  ainsi  ;  il  connaissait  i'ex- 
Iréiuc  facilite  de  Joséphine  à  accueil- 
lir toutes  les  sollicilalions.  tnfin  il 
se  mêlait  de>  détails  de  sa  toilette  ; 
et  sur  ce  point  aus>i  elle  fut  sou- 
vent oblijjée  de  se  conformer  à  son 
^oûl.  yjn  jour  de  cérémonies,  elle  pa- 
rut avec  une  robe  qu'il  n'aimait  pas  ; 
il  jeta  violemment  son  ccriloiie  sur 
elle,  pour  la  forcer  d'en  inetire  une  nu- 
ne.  Une  autre  fois,  la  veille  «le  la  cé- 
lébration du  14  juillet  (180:2),  il  lui 
dit  :  i<  Joséphine,  je  veux  que  tu  sois 
«   éblouissante  de  beauté  et  de  parure, 


1^1 


JOS 


«  et  richement  habillée,  entends-tu  •'  » 
,<  _  Oui,  répondit-elle,  et  puis  ensuite 
«<  tu  fais  des  scènes,  lu  cries,  tu  rayes 
«  mes  bons  à  paver  sui  mes  niémoi- 
«  res.  '»  On  peut  dire  qu'elle  était  alors 
à  l'époque  la  plus  heureuse  de  sa  vie  ; 
elle  venait  de  conclure  le  mariage  de 
Caroline  ,  une  des  sœurs  de  Bona- 
parte, avec  Murât.  Nous  avons  dit 
avec  quelle  chaleur  elle  avait  contribué 
à  l'avancement  de  celui-ci.  Convaincue 
qu'elle  se  l'était  attaché  par  les  liens 
de  l'amitié  et  de  la  reconnaissance , 
elle  avait  souhaité  ardemment  de  le 
voir  uni  à  Bonaparte  par  une  alliance 
de  famille.  Le  premier  consul  qui  sa- 
vait que  Caroline  était  recherchée  par 
le  prince  de  Santa-Croce,  hésita  long- 
temps avant  de  donner  son  consente- 
ment en  fa'  eur  de  ^ïurat,  le  fils  d'un 
aubergiste  !  s'écrialt-11  ;  mais  José- 
phine mit  en  usage  tout  ce  qu'elle  avait 
de  moyens  de  persuasion  pour  lui 
faire  changer  d'avis.  1!  céda  enfin  ; 
et  ,  quand  le  mariage  fut  décidé  ,  il 
se  montra  d'autant  plus  satisfait  que, 
dans  l'empressement  de  sa  femme  à 
le  faire  conclure  ,  il  croyait  voir  une 
preuve  de  la  fausseté  des  rapports 
que  Junot  lui  avait  faits  sur  l'in- 
timité qui  régnait  entre  Murât  et 
Joséphine.  Ce  mariage  fut  célébré  sans 
pompe  au  Luxembourg.  Le  premier 
consul  n'avait  pu  compter  à  sa  sœur 
que  trente  mille  francs  de  dot  ;  pour  la 
dédommager,  il  prit  à  sa  femme  un  col- 
lier de  diamants  et  le  donna  à  la  fu- 
ture. Joséphine,  fort  peu  satufaite  de 
cette  soustraction  ,  .«^'en  indemnisa  en 
se  faisant  donner  par  les  fournisseurs 
des  hôpitaux  de  l'armée  d'Italie  une 
somme  de  deux  cent  cinquante  mille 
francs  au  moven  de  laquelle  passa,  dans 
son  écrln  ,  des  mag.islns  du  fameux 
bijoutier  Foncier  ,  une  magnifique 
collection  de  perles  fines  ,  qui  avait 
appartenu  à  Marie-Antoinette.  Tout 
cela  se  fil  à  l'insu  de  Donaparle.  Mais, 


.105 

la  parure  de  perles  ainsi  acquise , 
la  difficulté  fut  de  s'en  servir  ;  car 
le  premier  consul  connaissait  tous  les 
bijoux  que  possédait  sa  femme.  Se- 
lon son  habitude,  elle  s'en  tira  par 
nn  mensonge  dont  Bourrienne  se  ren- 
dit complice  ,  et  persuada  à  son  mari 
que  c'était  le  collier  de  perles  qu'elle 
avait  reçu  de  la  république  cisalpine. 
«  M"'*^  Bonaparte  ,  dit  Bourrienne 
t'  dans  ses  Mémoires,  joua  son  rôle 
»c  avec  une  dextérité  charmante  ;  je  ne 
«  me  tirai  pas  mal  non  plus  du  rôle 
«  de  compère,  et  Bonaparte  ne  se 
«  douta  de  rien  (13).  »  Joséphine 
n'eut  à  se  louer  dans  aucune  circon- 
stance de  s'être  donné  Murât  pour 
beau-frère.  Cet  homme,  si  brave  à  la 
tête  d'une  charge  de  cavalerie,  était  le 
plus  faible  des  liommes  dans  toutes  les 
relations  delà  vie  civile;  et  Caroline  sa 
femme  ,  acariâtre  ,  coquette  et  despoti- 
que,ne  laissait  échapper  aucune  occasion 
de  mortifier  sa  belle-sœur.  Cela  n'empê- 
cha point  celle-ci  de  lui  rendre  un  de 
ces  services  dont  les  femmes  apprécie- 
ront surtout  l'importance.  M'"^  Mu- 
rat,  étant  à  la  Malmaison,  fut  surprise 
d'un  évanouissement.  Toutes  les  dames 
présentes  s'empressèrent  de  lui  porter 
secours  ,  et  Joséphine  ne  fut  pas  la 
dernière  ;  mais  en  la  délaçant  elle 
trouva  dans  sa  robe  une  lettre  qui 
n'était  assurément  pas  de  son  mari. 
Sans  faire  semblant  de  rien  ,  elle 
la  lui  mit  dans  la  main  qu'elle  tint 
fermée  dans  la  sienne  tant  que  dura 
l'évanouissement.  Joséphine  avait  été 
aussi  mal  avisée  pour  le  mariage  de 
Murât  qu'elle  le  fut  plus  tard  pour 
celui   de  sa  fille  Ilorlense  ;    et   Ca- 


(i3)  Ronaparte ,  dnns  ie  Mémorial,  explique 
aiiioi  la  tendance  de  sa  pmnièie  A  mine  ou 
mensonge  :  «i  Une  iinlrc  nuance  caractéiisliq<i«  de 
u  Joséphine,  c'élail  sa  constante  dénépalion. 
■(  Dans  quelque  iiioin»'nt  que  ce  fût,  qnrhjne 
«  qucsiio'i  ()iic  j',!  lui  Csse,  son  premier  niouvc. 
«  inenl  t-t.iil  la  négation  et  »a  picmière  parole  : 
'<  non.  Ce  n'était  pas  préciséim-nl  nn  mensonge, 
"  c'était  une précuutioo,  nue  simple  défensive.» 


JOS 

roline  exerçait  sur  »on  é^oux  \e  Ao- 
potisror  le  |>lu>  intolrrablr.  Joséphine 
ht  tout  ce  uu'rile  put  pour  lui  ii^pi- 
rer  plus  de  tlouceur  et  Je  souini\»iun. 
•«  Quoi,  lui  écrivait  elle,  xous  faites 
«  pleurer  ce  pauvre  Mural  !  Passe  en- 
«  corc  pour  tlé|»o<^fr  k  vos  pieJi  ses 
-  armes  victoririJse>  ,  Hercule  filait 
«  aux  pietK  (l'Ompliale,  mais  il  n'y 
«  pleurait  pas.  Avec  tant  Je  m<)>eii> 
«  Je  plaire  ,  pourquoi  préfrrei-voiiN 
••  Je  commanJer  '  »  CepniJarit  le 
pni  J'arquisilioii  Je  la  Malmaison 
n'était  pas  pavé,  et  ce  reliquat  coiisi- 
dérable  n'était  pas  la  seule  Jette  de 
Joséphine.  I^es  erobellissemenls ,  les 
constructions  qu'elle  avait  fait  faire 
dans  cette  résidence  s'élevaient  k  Jes 
sommes  itumrnsrs.  J'."séphine  ni  Hour- 
rienne  ,  son  intime  ronfjJrut  ,  n'o- 
saient affronter  la  colère  Ju  premier 
consul  en  lui  parlant  Je  rrs  Jettes.  Ils 
furent  ptrvcnus  par  TallevranJ.  qui, 
toujours  assez  Jisposé  à  Je^seivii  José- 
phine auprès  Je  son  maii,  Jit  à  celui-ci 
qu'un  ^raiiJ  nombre  Je  créanciers  ex- 
halaient leur  mécontentement.  Bona- 
parte sentant  que  sa  position  exigeait  Je 
tarir  promplement  L  source  Je  pareils 
propos,  orJonna  sur-le-champ  à  Hour- 
rjenne  Je  Jeman Jerà  Joséplnnr  !r  mon- 
tant exact  Je  ses  Jettes.  ««  Qu'elle 
«  avoue  tout,  ajouta-l-il,  j'ai  Tardent 
•«  Je  Hambourg  ,1  i);  j'en  veux  finir  et 
•<  ne  veux  pas  recommencer  ;  mais  ne 
«  pavez  pas  sans  me  montrer  le^  mé- 
•«  moires  Je  tous  ces  coquins-là.  •»  José- 
phine fut  J'abord  ravie  Jes  dispositions 
de  son  mari ,  mais  cela  ne  Jura  pas  :  elle 
craignait  d'avouer  qu'elle  Jevail  Jouze 
cent  mille  francs  ;  et,  malgré  les  repré- 
sentations Je  Rourrienne  ,  elle  n'en 


'ti)  C'était  qnatre  million*  qnr  le  %inH 
de  Hambourg  aviit  iiitot*»  a*  pirmier  eoiitui 
poar  prévenir  une  a^reMinti  inoïivee  mr  l'et- 
iradi'ion  i)e  Naper  Tandy  et  de  Blackwril  , 
rèfaçiéf  irlanlait.  Ces  quatre  millinrn  furrnt 
«iutribart  en  vratiScati-viu,  et  le  treaor  publie 
nVn  re^t  r  m. 


JOS 


a{6 


a«oua  que  su  cent  mille,  lu  somme 
était  encore  xsset  forte  pour  Jonner  Je 
rhuraear  à  Rinapaile,  J'autant  plus 
qu'il  !>oupçoniiail  -a  fnnme  de  Jissimu 
1er  quelque  chose.  •<  Kh'  bien,  Jil-il, 
"  prenrz  six  cent  nulle  francs  ;  mais 
•  liquiJez  1rs  Jettes  avec  cette  somme 
M  ri  que  je  n'en  ente nJc  plus  parler.  »• 
M""  Uonaparle  lemit  ses  mémoires  à 
Bourrienne  L'exaj;eration  Je^  prix  et 
même  Jrs  fourniluies  etatt  inconie\a- 
Lle.  In  marrliand  rrrut  tiente-cinq 
mille  (lancs  au  lieu  de  quaire-vin^t 
mille,  et  eut  l'impudence  de  dire  qu'il 
T  j;a^nait  encme.  .^ur  le  mémoire  du 
marchand  de  mmies  ,  étaient  portés 
trente-huit  chapeaux  neufs  ,  seule- 
ment pour  un  mois.  !j  trop  facile  Jo- 
séphine se  récria  sur  ce  qu'elle  appe- 
lait simplement  une  erreur.  Bref, 
Bourrienne  raconte  qu'il  réussit  i 
tout  terminer  avec  les  six  cent  mille 
francs;  et  il  est  probable  qu'il  v  eut 
encore  quelques  petits  profits.  Mais 
Joséphine  retomba  bientôt  dans  les 
méme5  écarts.  Heureusement  ,  l'ar- 
gent devint  plus  abondant.  Otte  in- 
concevable manie  de  dépenser  était 
pour  elle  une  cause  incessante  de  cha- 
grins ,  sa  profusion  irréfléchie  rendit 
le  désordre  permanent  dans  sa  mai- 
son ;  il  lui  était  impo»sible  de  jamais 
fixer  ses  comptes  ;  aussi  c'était  con- 
stamment de  grandes  querelles  avec 
son  mari,  quand  le  moment  de  paver 
arrivait.  Klle  allait  jusqu'à  envoyer  dire 
à  ses  marchands  de  ne  déclarer  que 
la  moitié  de  leur;  fournitures.  Pour 
en  finir  tir  cet  article  ,  nous  rap- 
porterons encore  une  anecdote.  Un 
matin  l'empereur  entra,  sans  être  at- 
tendu ,  chez  sa  femme  :  il  y  trouva 
quelques  dames  qui  formaient  le  con- 
•çil  secret  de  sa  toilette  ;  puis  la  fa- 
meuse modiôte  De^peaux  faisant  un 
erave  rapport  sur  les  modes  nouvel- 
les. C'était  précisément  une  des  per- 
sonnes à   qui   il   avait    défendu    d'ap- 


246 


JOS 


piocher  de  l'impératrice  qu'elle  ruinait. 
Toutefois  il  ne  fit  pas  d'éclat,  et  José- 
phine, qui  le  connaissait  si  bien,  fut  la 
seule  qui  comprît  l'ironie  de  son  rcp;ard 
lorsqu'il  se  retira  en  disant  :  «  Conti- 
"  nuez ,  mesdames ,  je  suis  fâché  de 
«'  vous  avoir  dérangées.  »  Il  donna 
quelques  ordres  inaperçus  ;  et,  lorsque 
la  marchande  sortit  ,  un  agent  de  po- 
lice la  pria  de  monter  en  fiacre  et  la 
conduisit  à  Bicétre.  Cette  affaire  fit 
grand  bruit  dans  tout  Paris.  Beaucoup 
d'amis  de  l'impératrice  allèrent  rendre 
visite  à  la  prisonnière.  Bonaparte  s'a- 
musa beaucoup  de  cet  intérêt  excité 
par  une  marchande  de  pompons{ib). 
[[  est  un  aspect  plus  honorable  sous 
lequel ,  pendant  le  consulat  comme 
sous  l'empire,  Joséphine  s'offre  à  la 
plume  impartiale  de  l'historien.  C'est 
la  constante  sollicitude  qu'elle  mit  à 
adoucir  les  malheurs  auxquels  le  gou- 
vernement réparateur  de  son  époux 
venait  mettre  un  terme.  Une  foule  d'é- 
migrés lui  durent  lour  radiation,  leurs 
biens,  des  pensions  ou  des  setours. 
Elle  encourageait  les  arts  et  l'indus- 
trie, elle  se  montrait  généreuse  envers 
les  artistes  ,  comme  envers  les  plus 
humbles  artisans.  Si  Je  gagne  les  ba- 
tailles, c'est  toi  qui  gagnes  les  cœur  s , 
est  un  mot  que  Bonaparte  adressa, 
dit-on,  à  Joséphine.  Toute  espèce  de 
malheur,  sans  distinction  de  parti,  avait 
accès  auprès  d'elle.  Elle  faisaitune  pen- 
sion à  la  nourrice  du  dauphin,  et  le  Iré- 


(ri»).Stani.'.las<:cGirar'Jin,qui  raconte Janii  sei 
Souftniri  critf  anecdote,  «'•f,';ileunf'nl  rapportée 
par  f^on't.iiif,  «t  «Im»  le  Mémorial,  ajoute  cedc- 
ijil  plaisant:  «  Ce  fut  Sjvary  que  Bon^iparta 
chir^ea  de  l'.in  pslat  on.  Comme  il  se  mettait 
^n  devoir  d'obéir,  Uuroc  l'engagea  à  laisser 
•-cli.ipper  madpinois'Ilc  Ucspeaux  :  «Non,par- 
m  bleu,  j«  n'en  frrai  rien,  r<^plir|na  S^ivaiy  :  tu 
•(  xtf  %f.TJt\s  pas  aub&i  indulgent  si  clli  fourni><sait 
•«  dfs  modes  à  ta  frmuie.  C.'e.si  elle  qui  me 
«  ruine  jjt*  trouve  une  ocrasioii  dir  m'en  venger, 
«f  je  ne  serai  pas  assci  sot  pour  la  perdr. .  V.i , 
«  mon  cber,  tu  en  ferais  mitant  si  ,  a<i  lieu  de 
«  inadeinoi>ili';  Dispeaux.  <:'<l;iil  Lfroy  !'■  i»o- 
«  diste  ;  car  c'est  cheï  lui  que  ta  femm»  achète 
"   ses  cUiffuiu.  » 


JOS 

sor  de  ses  libéralités  n'était  pas  même 
fermé  à  des  personnes  que  leurs  anté- 
cédents révolutionnaires  semblaient  en 
rendre  peu  dignes.  Par  suite  de  cette 
bonté  qui  s'étendait  à  tout ,  elle  se 
chargea  de  l'éducation  d'une  fille  na- 
turelle que  le  vicomte  de  Beauharnais 
avait  eue  au  temps  de  leur  mariage  ;  elle 
la  dota  généreusement  en  la  mariant 
avec  un  préfet  de  l'empire.  Depuis 
plusieurs  années,  les  artistes  persécu- 
tés, comme  les  riches  et  les  nobles,  se 
contentaient  de  travailler  dans  la  soli- 
tude. Pour  leur  rendre  l'inspiration,  il 
fallait  non  seulement  bien  payer  leurs 
ouvrages  ,  mais  encore  entourer  les  au- 
teurs de  tous  les  égards  dus  au  talent  : 
c'est  ce  que  savait  faire  admirablement 
Joséjhine,  Excellente  musicienne  , 
connaisseuse  en  peinture  ,  aimant  la 
lecture  et  la  poésie ,  elle  était  digne 
d'apprécier  les  artistes  et  les  gens  de 
lettres.  Sous  ses  auspices,  Gros,  Giro- 
det,  Guérin,  et  surtout  Kedouté,  le 
peintre  de  Heurs  dont  elle  fut  l'écolière, 
reprirent  leurs  pinceaux;  Spontini  , 
Paer,  Boïeldieu  leur  lyre  ;  Fontanes, 
Arnault,  Andrieux,  J.emercier  leur 
plume.  M.  Turpin  de  Crissé,  lorsqu'il 
venait  à  la  Malraaison,  s'y  rendait  dans 
un  cabriolet  plus  que  modeste  ;  José- 
phine le  sut,  et,  sans  le  prévenir,  elle 
en  fit  acheter  un  fort  beau  avec  un  ex- 
cellent cheval  ;  et  cet  amateur  devenu 
artiste  fut  agréablement  surpris  lorsque, 
en  donnant  ordre  à  son  domestique 
défaire  avancer  son  humble  équipage 
pour  retourner  à  Paris,  il  vit  appro- 
cher l'élégant  cabriolet  qui  lui  était 
destiné  par  l'impératrice.  Une  autre 
fois  en  payant  à  M.  Turpin  un  ta- 
bleau au  prix  convenu  elle  y  ajouta 
un  diamant  do  six  mille  francs,  en  di- 
sant: <f  Ceci  est  pour  votre  bonne 
<«  mère  ;  mais  si  je  n'ai  pas  deviné  son 
«  goût,  diles-lui  bien  que  je  ne  serai 
«<  pas  choquée  qu'elle  change  ce  faible 
«  gage   de  mon   amitié  pour  ce  qui 


JOS 

«  poarra  lai  convenir.  "  Protectrire 
WmieàtVàtl  Jnnuliqur,  qui  dr\iiil  ù 
fltnssaiii  soui  Ir  ruri»uLl  ri  suun  IVm* 
pire,  tWt  rniilnbua  ltrjiirnii|i  a  faire 
obtenir  à  M  ''  |)iicl)r>iiuiN  Min  orJie 
(le  cJcliut,  et  lui  fournit  de  brillants 
coutumes  pour  paraitre.  Klle  lémoi|>nait 
aov>i  une  vive  aOection  à  M"'  Kao- 
court.  A  l'époque  de  son  inrarréiation, 
Jo^pliine avait  eupo(irrnm|>a;;ne  relie 
comédienne,  qui,  devenue  Mtrr,  ouvrit 

fdusieurs  fois  &a  bourse  \  ^I""'  de  Heau- 
iarNais;eirelleci  s'en  souvint  toujours. 
Après  son  divorce,  elle  la  reçut  plu- 
»ieurs  fois  à  Navarre  et  à  la  Malmai- 
son ;  elle  la  faisait  asseoir  auprès  d'elle, 
et  s*en  occupait  beaiicoup.  Dans  une 
de  cesviMte»,  Josèplune  lui  fit  voir  ses 
serres,  lui  expliqua  les  moyens  de  cul- 
ture ;  et,  bien  qu'elle  fût  fort  avare  de 
ses  nouvelles  planirs  ,  elle  en  fit  em- 
pailler plusieurs,  afin  que  l'actrice  pût 
les  emporter  comme  un  souvenir  de  re- 
connaissance {\i\).  Irriublante  devant 
son  mari  lorsqu'il  s'agissait  d'avouer 
une  dette  ,  ou  de  soiliciler  une  ^^ràce 
ordinaire  ,  Joséphine  montrait  ,  dans 
les  occasions  décisives,  une  énergie 
dont  la  mollesse  toute  créole  de  son 
caractère  aurai»  semblé  la  rendre  inca- 
pable :  témoin  la  vi^ucir  de  ses  rrpré- 
senlalions  malliru^eusement  inutiles 
lors  de  l'arrestation  du  duc  d'Fln^liien. 
Bonaparte,  en  cette  circon>tance,  la 
repoussa  avec  une  dureté  17'  dont  il 
n  avait  pas  donné  d'exemple  depuis  sa 
pre.Tiière  entrevue  au  retour  d*K;;>pte: 
«    Melez-vous  de  cr  qui  vous  regarde, 

•  i61  On  doi(  k  Joftrphioc  l«  uluraluiiion  ea 
Fmiic*  iIq  emm»ltm 

(■:   r      .        .  ,. 

•  du  ) 

•  Ir»    ir-'î-  \f 

m  larinr*    < 

m  non*  rfr^.^^  ^ 

m  «Tait  qu'un-  i.iiun  latc.-  riir.>..i«lu>Airr  qui 
m  rùt  pu  'ni»zfT  m  >danf  |U>naparie  i  torlir  df 

•  rhrt  rilc    dao*  rr   m.'tuiae.  rt  avant  J'atc.ir 

•  pria  'ou»rn  !•  $  prrranlinns  nrreasairei  p-iar 
«  diMÎmulrr  te  tort  qti*  pouv;iit  lai  faire  la 
■  nunqua  da  toilctlp.  • 


JOS  i47 

M  lui  dit-il  avec  fureur  ;  ce  ne  sont  pas 
u  la  des  afl'aires  de  f^inme.  Laissei- 
"  moi.  ••  Klle  fui  plus  lirurrii^edans  son 
intercession  en  faveur  dt  MM.de  Po- 
li;;nac,de  Hiviere elCIiarlfsd'Ilozier, 
impliqués  dans  la  conspiration  de 
(àror^es  Cadoudal.  Knfin  on  peut  dire 
sans  e&a^eral  ion  qu'elle  cont i  ibua  beau- 
coup a  rendie  populaire  le  gouver- 
nement de  son  mari  ,  en  tempérant 
les  accès  de  colère  auxquels  Honaparte 
était  trop  sujet  à  s'abandonner.  Per- 
sonnelle pouvait  coroprendie  comme 
elle  tous  les  necrels  de  ce  caractère  si 
d.fljnle  a  dompter,  et  mrroe  à  définir  ; 
personne  n'osait  comme  elle  s'exposer 
a  son  méconlentenicMl  plutôt  que  de 
ne  pas  bii  donner  un  avis  qu'elle 
crovait  utile;  personne  enfin  n'aurait 
su  mettre  plus  de  sa;;acilé,  plus  de 
bienveillance  il  profiter  de  l'occa-sion  , 
et  ,  ainsi  que  l'a  dit  N\  aller  Scott  : 
«  Bonaparte  violent  par  tempéra* 
••  ment,  «oldat  par  éducation  et  doué 
«  par  la  fortune  du  pouvoir  le  plus 
«  de>|iolique,  avait  besoin  plus  qu'au- 
«  cun  prinre,  d'un  esprit  tel  que  celui 
<«  de  Joscpliine,  qui  pouvait  intervenir 
"  sans  importunile  rt  faire  une  remon- 
««  trance  sans  offense.  »  Ixirsqu'elle 
demandait  une  ^rire  pour  une  faute 
comini-e  dans  l'inlérieur  du  roénaf;e 
impéiial,  il  était  rare  que  Napoléon, 
après  avoir  beaucoup  tempêté,  ne  l'ac- 
cordât pas.  Dans  ces  moments  il  était 
plein  d'abandon  pour  Joséphine,  et 
le  fidèle  G)nslant  le  montre  alors 
embrassant  sa  femme  au  cou  et  à  la 
figure,  en  lui  donnant  des  tapes  d'a- 
mi lie,  et  l'appelant  ma  grosse  ht  te. 
Non  moins  obri;;eante  pour  ses  enne- 
mis que  pour  ses  amis,  elle  ramena  plus 
d'une  fois  la  paix  dans  la  famille  de  son 
ejhiux.  Lorsque  Bon.ip.irte  se  fâchait 
contre  ses  frères  ou  contre  ses  sœurs  , 
et  les  unes  et  les  autres  lui  en  donnaient 
fréiuemment  sujet,  Joséphine  disait 
quelques    mots   et    tout    s'arranp;eait. 


248 


JOS 


Le  début  d'une  lettre  adressée  par  elle 
à  sa  belle-mère  offrira  la  preuve  de 
cet  esprit  conciliant  :  «  Usez  ,  ina- 
«  dame  et  très-honorée  mère,  de  Tas- 
«  cendant  que  vous  donnent  votre  ex- 
*'  périence,  votre  dif;;nlté,  vos  vertus  et 
•«  l'amour  de  l'empereur,  pour  rendre 
«  à  sa  famille  la  paix  intérieure  qui  en 
«  est  bannie.  J'ai  craint  de  mêler  ma 
«  voix  à  ces  discordes  intestines  ,  dans 
«<  la  crainte  que  la  calomnie  ne  m'ac- 
««  cuse  de  les  irriter  en  m'en  mêlant. 
«<  C'est  à  vous,  madame,  qu'il  appar- 
«  tient  de  les  calmer  ;  et ,  pour  cela, 
<«  dites  seulement  que  vous  en  êtes 
«  avertie.  Votre  prudence  aura  com- 
««  mencé  l'ouvrage  en  signalant  le  mal; 
«  la  leur  en  trouvera  le  remède.  Je  ne 
«  nomme  personne,  et  voire  sagacité 
«  devinera  tout  le  monde,  etc.  »  Bo- 
naparte ne  pouvait  résister  aux  pleurs 
de  Joséphine  qui,  par  un  privilège  assez 
rare,  donnaient  un  nouvel  attrait  à  sa 
£gure.  Il  ne  résistait  pas  non  plus  à  la 
séduction  de  sa  voix  (18).  Cest  ce  qui 
Et  dire  au  premier  consul,  de  retour  de 
Marengo,  quand  il  sévit  partout  ac- 
cueilli avec  enthousiasme  :  «  Le  bruit 
«  de  ces  acclamations  est  aussi  doux 
**  pour  moi  que  le  son  de  voix  de  Jo- 
"  séphine.  »  11  aimait  à  en  faire  sa 
lectrice  ,  et  elle  s'en  acquittait  avec 
le  charme  qui  se  mêlait  à  toutes  ses 
actions.  <C'est  ainsi  que ,  grâce  à  sa 
soumission  ,  à  son  dévouement ,  à  ?a 
complaisance  sans  bornes,  elle  finit 
par  subiuguer  un  époux  qu'elle  avait 
été  près  de  perdre  à  jamais  Ni  fa- 
tigues ni  privations  ne  la  rebutaient 
pour  être  plus  souvent  avec  lui.  Daus 
les  fréquents  et  rapides  voyages  qj'il 
faisait  ,  elle  emplovait  l'impcrlnnilé  , 
la'  ruse  même  pour  le  suivre.  Quel- 
que subit  que  fût  le  départ,  elle  était 
toujours  prêle  ;  «  Montais -je  en 
«  voiture  au  milieu  de  la  nuit:*  di- 
"  sait  Bonaparte  ;  à  ma  grande  sur- 
fis; M<  moire''  »!<•  rcni«?nn». 


JOS 

«  prise  j'y  trouvais  Joséphine  établie, 
«  bien  qu'elle  ne  dût  pas  être  duvoya- 
«  ge....,  et  la  plupart  du  temps  il  fal- 
«  lait  que  je  cédasse.  »  Une  fois  ce- 
pendant il  était  parvenu  à  lui  cacher 
son  départ,  qui  devait  avoir  lieu  à  une 
heure  du  matin  ;  mais,  en  dépit  de 
toutes  les  précautions,  une  indiscrétion 
avertit  Joséphine  au  dernier  moment. 
Soudain,  sans  atlendre  ses  femmes,  elle 
saule  à  bas  du  lit,  passe  le  premier  vête- 
ment qui  se  trouve  sous  sa  main,  des- 
cend,en  pantoufdesetsans  bas,  les  esca- 
liers d'un  pas  ra[iide,  et  se  jette  dans  les 
bras  de  Bonaparte  au  moment  où  il  allait 
monter  en  voiture.  En  vovant  couler 
les  pleuis  de  sa  femme,  il  s'attendrit  ; 
elle  s'en  aperçoit ,  et  déjà,  à  peine  vê- 
tue, elle  est  blottie  dans  le  fond  de  la 
voiture.  Bonaparte  la  couvrit  de  sa  pe- 
lisse, et  partit  en  donnant  ordre  qu'au 
premier  relais  elle  trouvât  tout  ce  qui 
lui  était  nécessaire.  H  faut  bien  le  re- 
connaître ,  sous  peine  d'être  injuste, 
cette  influence  qu'elle  conservait  sur 
son  époux  par  ces  petits  moyens  dont 
les  femmes  seules  ont  le  secret,  elle  ne 
l'employait  que  pour  servir  les  vérita- 
bles inlén'ls  de  Bonaparte,  et  pour  dé- 
tourner les  effets  des  résolutions  préci- 
pitées et  prises  dans  un  moment  d'hu- 
meur. I,a  parlialilé  de  Joséphine,  et 
même  de  Bonaparte,  pour  les  nobles 
donna  quelque  temps  l'espoir  au  parti 
rovalistc  de  lui  voir  jouer  le  rôle  de 
Monck.  Quand  le  20  février  1800, 
Louis  XV III  lui  écrivit  une  lettre 
dans  ce  sens,  il  fut  sept  mois  sans  faire 
de  réponse,  tant  il  était  encore  incer- 
tain sur  le  p.'ii  li  qu'il  devait  prendre  à 
l'égard  ile:^  iiourbons  !  Joséphine  et 
Ilortcnsc  le  conjincrent  de  donner  de 
l'espérance  an  roi.  Les  instances  étaient 
si  fortes  ,  qu'il  dit  à  Bourrienne  : 
«  Ces  diables  de  femmes  sont  folles. 
«<  C'est  le   faubourg    Saint-Germain 

-'   qui   leur    tourne    la    tête Je 

"    ne  leur  en  veux  pas.  »   Ce   fut    à 


J05 

rrllc  rpoque  que  U  iliitlir$i»r  de  (iiii- 
flir,  cliargre  d'une  mivsion  du  comte 
d^\rlOl^,  ^inl  à  Paris  négocier  ^efrè- 
lemenl  en  fa\eur  de^  Bourlioiis.  Tiès- 
eapablr  par  les  {priées  de  s.i  fi;:iire  de 
rnrlei  leaucnup  d'allrails  i  l'impor- 
tanre  de  la  nê'^ofialion  ,  celle  dame 
p^nrlra  facilement  auprès  de  José- 
pliin**,  avec  laquelle  elle  déjeuna  à  la 
Milmaison.  Klle  lui  parla  des  brill.inu 
a\ar:ia^f^  que  les  princes  étaient  du- 
po^r^  a  offrir  au  premier  consul ,  s'il  vou- 
lait rétablir  le«  Bourbons.  Il  devait  être 
connétable,  recevoir  la  terre  deCham- 
bord,  enfin  sa  statue  serait  ^rij;ée  sur 
la  place  du  (arrousel.  Joséphine  de- 
vait avoir  le  tabourel  des  duclievsw,  six 
cent  niillr  livres  de  rente  et  pour  deu\ 
millions  de  diamants  ;  KM;;ene,  être  fait 
grand  d'K>pa;;ne;  llorlense  épouser 
un  duc,  etc.  'I  rotnani  ces  conditions 
mjj;niGques  ,  Joséphine  «e  liàta  d'en 
parler  à  Bonaparte  qui  répondit  3L\er 
beaucoup  de  sens  ;  «  Grite  colonne 
«  dont  on  vous  parle  aurait  pour  base 
«  le  cadavre  du  premier  con>uI  (19). 
•«  ^  ous  imaj^inezvous  que  rrs  revr- 
••  nufiis  ine  laisseraient  vivre  un  an, 
••  un  mois,  une  semaine  '  Je  serais 
•«  pour  eux  un  objet  de  haine  el  d*c- 
'«  pouNanle.'  Sépare  de  mes  compa- 
««  {inons  d'armes,  où  serait  mon  appui 
'•  dans  cel  isolement  :'  Ma  chère  amie, 
•«  tu  es  une  bien  bonne  femme,  mais 
•«  tu  manques  de  ^ens.  Va,  laisse-moi 
«•  fjire,  tu  auras  ainsi  que  les  tiens 
"  mieux  que  l'on  ne  t'offre  el  tu  le 
«'  conserveras  a\cc  plus  de  sûreté.  »* 
Comme  Joséphine  el  Ilortense  insis- 
taient, Bonaparte  leur  dit  à  moitié  fâ- 
che :  «<  Puisque  vous  êtes  louiez  deux  du 
o  faul^otirg  Sainl-(^iermain,  allez  vous 
•♦   le;;er  rue  de  Grenelle  (-JO).  »  La  jo- 

■|<j^  A  celU  o<va»ior>.  Louapartr  ditail  rocor*-^ 
à  Laraynie  :   •  il»  Di'i.ffrcni    une  lutue  ;  maii 
«  i;jrr    .m  piolmul  :   ils  |.ourrai«nt  bien  m'en 
«   r.4irc  t<Oe  pruon    » 

(jo)  On  peut  hrc  J^ns  Ifi  ittatoirwt  de  M.   de 
Clrnnmil-G«lleraii()r  <{r«    d«'iailt    «Mn  rurieut 


JOS  i49 

lieduche^Ne  était  encore  là;  lesdiannes 
de  u  figure,  ses  )eux,  ses  paroles, 
étaient  din;;r^  au  succès  de  sa  mission  : 
M  elle  ne  sauiail  jamais as%ez  reconnaî- 
tre ,  disait  elle,  le  bonheur  (|ue  lui  pro- 
curait M"'"  Bonaparte,  de  voir  el  d'en 
tendre  un  (;rand   homme,   un  héros,  w 


Mai%lt.ul  fui  iimlile:  lad 


reçut 


dans  L  nuit  l'ordre  de  quitter  Paris. 
Le  secrel  n'a\ail  pas  été  si  birn  ;;ardé, 
sur  celle  négociation  avortée,  que  la 
famille  de  Bonaparte  n'eût  eu  con- 
naissance des  avanla;;es  offetts  exclu- 
sivement i  Joséphine  el  k  ses  enfants. 
Ce  fut  pour  M"**  Ij'lilia  et  pour  se* 
filles  un  prétexte  de  se  fadier  sérieuse- 
ment et  d'accuser  leur  belle-fille  el 
scrur  d'indiflricnce  pour  elles.  |/avi- 
dilé  des  Bonapai  te,  pour  le  pouvoir  et 
pour  la  .grandeur,  formait  un  contraste 
frappant  avec  la  persi-taiice  de  José- 
phine à  éIoi;;ner  louie  idée  d'eléxation 
nouvelle  poui  son  époux.  Ces  senti- 
ments d'abné^alion  politique  qu'elle 
cherchait  à  lui  inculquer  étaient  in- 
spirés chez  elle  par  des  craintes  que 
les  événements  justifièrent  trop  bien 
plus  lard.  Klle  se  désolait  d'avance 
de  voir  de\ant  elle  les  apprêts  d'un  lr(V 
ne  ,  et  elle  pleurait  s()u\enl  sur  celle 
idée  avec  sa  fille  :  <«  Nous  mon- 
M  tons  à  une  hauteur  d'où  la  chute 
««  sera  terrible,  di-ail-elle,  quelquefois 
**  aux  personnes  de  son  intimité.  Je 
"  voudrais  que  mon  mari  *.e  contentât 
««  de  ce  qu'il  a,  et  de  moins  encore, 
M  pour  que  nous  vécussions  avec  nos 
<'  amis  dans  une  douce  familiarité. 
«  Avant  peu  tout  cela  va  disparaitrc 
«  et  un  espace  immense  nous  .sépa- 
«  rera  de  vous.  »»  Des  crainte^  super- 
stllieuîcs  bc  mêlaient  à  ces  picvisions. 
Une  pvlhonissc  alors  célèbre,  la  Vil  • 
lencuve  ,  nui  demeurait  rue  de  Lan- 
crv,  avait  dil  à  Joséphine  pendant  le 

•or  le  ro)>li»iu«  Jr  Joié(.bine  dé»  I-  M.irtiiiiqae. 
linti  que  TrloRi;  que  fit  d'elle  L' m»  XVill  ile- 
•  ant  r»m^ne  M.  dr  rieruiopt-GBlleran.l»-. 


35l 


JOS 


séjour  de  son  mari  en  Egypte  :  «  Vous 
«  êtes  la  femme  d'un  p;rando;énéral  qui 
«  deviendra  plus  grand  encore.  Vous 
K  occuperez  la  première  place  de 
«  France  ;  mais  ce  sera  pour  en  des- 
«  cendre.  »  L'attentat  du  3  nivôse 
("24  déc.  1800)  vint  lui  prouver  com- 
bien toutes  ces  grandeurs  étaient  pé- 
rilleuses. Le  hasard  qui  sauva  Bona- 
parte préserva  aussi  Joséphine  ;  car 
elle  eût  été  atteinte  par  la  machine 
infernale  ,  si  sa  voiture  ,  qui  devait 
suivre  celle  du  premier  consul,  ne  se 
fût  trouvée  assez  loin  en  arrière.  Elle 
allait  y  monter  lorsque  liapp,  chargé 
de  l'accompagner  ,  critiqua  gaîment 
la  couleur  de  son  chale.  De  là  une  pe- 
tite discussion  prolongée  une  ou  deux 
minutes,  durant  lesquelles  le  piemier 
consul  qui  n'attendait  jamais  paitit  en 
avant.  L'explosion  eut  lieu  comme  la  voi- 
ture de  Joséphine  arrivait.  Toutes  les 
glaces  furent  brisées  et  tombèrent  sur 
le  cou  et  les  épaules  de  M"^  de  Beau- 
harnais.  Après  cet  événement,  Bona- 
parte assista  au  spectacle  avec  autant 
de  calme  que  si  rien  n'eût  menacé  sa 
vie.  Sa  femme  ne  fut  pas  aussi  maîtresse 
d'elle-même.  Rlle  pleurait,  et,  quelque 
effort  qu'elle  fit  pour  dissimuler  ses  lar- 
mes, on  les  vit  couler  avec  abondance. 
Plusieurs  mois  après  elle  montra  beau- 
coup d'empressement  quand  don  Louis 
de  Bourbon,  roi  d'Elrurie,  et  la  reine 
sa  femme,  vinrent  à  Paris.  «  Il  nocs 
«  arrive  un  roi,  s'écria-t-elle,  et  un 
««  Bourbon  encore!  Je  suis  tout  émue 
«  à  la  pensée  que  je  me  trouverai  en 
«  prése/ice  de  ces  grandeurs  !  Je  ne 
«<  saurai  comment  m'y  prendre  pour 
"  faire  vis-à-vis  d'eux  la  femme  du  pre- 
«'  mier  consul.  >»  Toutefois,  le  res- 
pect pour  un  sang  ro\al  n'<:touffa 
pas  riiez  elle  le  désir  de  l'emporter  sur 
la  reine  d'Etrurie,  p.ir  Pélrgancecl  l'é- 
clat de  sa  parure.  Cette  princes<ie  pa- 
rut enfin.  Quel  désenrhaiitemcnt  ! 
nulle  grâce  dans  son  maintien  ;  nulle 


/OS 

élégance  dans  sa  mise,  oii  il  n*y  avait 
pas  même  de  la  propreté  !  José- 
phine se  plaignit  d'un  Iriomplie  trop 
facile.  On  ne  saurait  exprimer,  en 
effet  ,  quelle  importance  elle  mettait 
à  la  toilette.  Presque  journellement 
elle  admettait  auprès  d'elle  le  marchand 
de  modes  Leroy,  pour  parler  bonnets 
et  chapeaux,  et  elle  n'aurait  sacrifié  ces 
entretiens  à  rien  au  monde.  La  violente 
envie  d'avoir  un  nouveau  cachemire  la 
fit  un  peu  déroger  à  sa  bonté  ordi- 
naire. M'"*^  IMurat  était  convenue  d'a- 
cheter ce  chiffon  moyennant  quatorze 
mille  francs.  Joséphine  alla  sur  le  mar- 
ché de  sa  belle-sœur  et  obtint  le  ca- 
chemire. Grande  querelle:  Napoléon 
intervint  vainement  pour  la  termi- 
ner ;  il  fallut  se  fâcher.  Il  décida  que 
Joséphine  ne  porterait  plus  le  chàle 
et  donna  un  collier  de  perles  à  sa  sœur. 
Dans  cette  circonstance,  M'"^  Laetitia, 
la  mère  de  Bonaparte,  témoigna  le 
plus  vif  ressentiment  contre  sa  bru. 
C'est  alors  que,  sentant  plus  que  jamais 
le  besoin  d'avoir  un  appui  dans  une 
famille  où  elle  n'avait  que  des  ennemis, 
Joséphine  amena  par  ses  intrigues  le 
mariage  de  sa  fille  Ilortense  avec  Louis 
Bonaparte.  Le  premier  consul  voulait 
donner  sa  belle-fille  à  Duroc;  les 
frères  du  consul  poussaient  à  ce  ma- 
riage ,  afin  d'isoler  Joséphine  d' Ilor- 
tense ;  mais  .ïoséphine  l'emporta,  et  si 
Louis  Bonaparte  fut  toujours  dévoué  à 
.sa  belle-mère,  celle-ri  ne  dut  pourtant 
pas  se  féliciter  de  son  succès  en  voyant 
à  quel  point  ce  mariage  fit  le  malheur 
de  sa  fille  ainsi  que  de  son  mari.  Ici  se 
place  une  grave  inculpation  qui  fut  ré- 
pandue dans  le  temps  par  toute  l'Eu- 
rope, et  (jui  fondt-e  ou  non  pèsera  tou- 
jours, en  raison  de  cette  publicité,  sur 
la  mémoire  de  Jo-^éphlne,  de  lîonaparte 
et  d'IIortensc.  On  adii  (jue  le  premier 
consul  avait  eu  pour  sa  belle-fille  d'au- 
tres sentiments  que  ceux  d'un  beau- 
père;  que  Joséphine  ayant  la   certi- 


JOS 

tuJf  Jle  ne  lîonner  jamais  d'hérilifr  à 
son  ^poiii  favorisa  cfllr  liaison  iiiccs- 
lurusr,  ft  qne ,  quand  l'arbre  porta  '•es 
frttiu,  elle  \ou\u\  masquer  par  un  ma- 
riaî;e  subil  une  inlri^ue  qui  Jejà  se  dé- 
celait aui  >r(ii  des  courtisans;  nu'llor- 
tensc  eût  volontiers  épousé  Uuroc  ; 
mai*  que  Napoléon  songeant  à  l'avr- 
nir,  et  ralrulanl  dès-lor>  la  possibilité 
d'une  adoption  voulut  rourenlrer  dans 
sa  prhprelamille.  par  un  double  infe^le, 
rintri;;ue  à  laquelle  il  allait  devoir  l'a- 
vantage d'être  père.  De  l.i  l'union  si 
malbenrrusr  de  Louis  et  d'Ilortense; 
delà  rnfin  la  naissance  de  l?ur  fils  aîné. 
I-e$  Méraoiro  de  Ginsiant,  ceu«  de 
Rourrienne  ont  repoussé  ces  bruits 
comme  un  ii)en>on;;e.  Napoiron  ,  dans 
le  Mrmoriiil  tir  Suinte-Il <  Irnr.  en 
se  défendant  contre  celte  imputation, 
avoue  du  moins  que  son  frère  1/Ouis 
connaissait  ces  rumeurs,  et  que  leur 
publicité  ct)nt(il)uait  à  le  rendre  en- 
core plus  mallieiiicux.  Ouant  à  nous, 
notre  devoir  rtait  de  ne  point  pas- 
ser sous  silence  des  bruits  qui  eurent 
tant  d'iiinucnce  sur  les  dcïtinées  de 
cette  famille,  f.e  lendemain  de  ce  ma- 
ria{;e,  Josépliine  partit  avec  le  pre- 
mier consul  pour  Lvon ,  où  il  fut 
proclamé  président  de  la  république 
cisalpine.  Kllr  parta:;ea  les  honneurs 
et  l'enlliousiasme  dont  il  était  l'objet 
dans  ceîle  citéeju'il  se  plut  à  relever  de 
ses  ruines.  De  retour  k  l'aris,  Bona- 
parte dressa  toute>  ses  batteries  pour 
se  faire  déclarer  consul  a  vie.  On  ne 
parlait  plus  autour  de  lui  que  d'iiéré- 
dilé  et  de  d^  nastie  ;  rnai^  tous  ces  mots 
d'ordre  politique  cachaient  la  lutte  in- 
testine à  laquelle  était  en  proie  la  fa- 
mille consulaire  ;  ceux  qui  les  mettaient 
en  avant  y  vov  aient  un  moveii  d'écon- 
duire  Joséphine  par  un  divorce;  et 
c^lle-ci  ,  en  s'opposanl  constamment 
à  l'influence  de  ces  consed>,  défendait 
sa  propre  cau>p  en  même  temps  qu'elle 
croyait  servir  le^^  intérêts  de  son  mari. 


JOS 


i5i 


Bonaparte  lui  parlait  très-rarement  et 
avec  peu  de  ronfuince  de  politique  et 
des  affaires  publiques.  OurUcJi/r, 
yuV//^/riV-o//'.'diNail  il  souvent.  Joseph 
et  surtout  I^cien  étaient  les  plus  ach.ir- 
nés  des  cnnrmis  de  Josrphine.  l'ieoc- 
cupfs  de  la  pensée  de  cniircnircr  le 
j  '.r»>|ps  mains   de  leur  frrre, 

lit  trois  mo>ens  pour  at- 
ttiiidie  ce  but  ;  l'hérédile,  le  divorre 
et  l'empire.  Dès  Tannée  18(K)  ^déc.) , 
Lucien  avait  fait  paraître  un  petit 
pamphlet  intitule  :  Paralli-lr  entre 
i^sar,  tlroirtiVeUrt  lioiuifHirtr^  dans 
lequel  l'hérédité  monarrhique  rtait  ou- 
verleroent  prechée.  On  peut  voir  dans 
notre  notice  sur  Fouché  comment  le 
premier  consul  se  crut  obli;;é  de  dés- 
avouer cette  publication  intempestive, 
mais  qui  ne  porta  pas  moins  à  José* 
phine  un  coup  bien  sensible.  Bour- 
rienne,  dans  ses  Mrmuirrs,  rapporte  à 
celle  occasion  une  anei  dote  qui  d'ail- 
leurs nous  montre  Bonapaile  et  sa 
femme  en  déshabille.  <•  Je  n  ai  pas 
oublie  ,  dit-il  ,  qu'étant  un  )our  en- 
trée dans  notre  cabinet  .sans  être 
annoncée,  Joséphine  s'approcha  de 
Bonaparte  doucement,  s'assit  sur  ses 
j^enoux,  lui  passa  légèrement  les  doigts 
dans  les  cheveux  et  sur  la  figure , 
et,  jugeant  l'instant  favorable,  lui  dit 
aver  une  exprevMon  de  tendres >e  :  «•  Je 
«<  t'en  prie,  Bonaparte,  ne  te  fais  pas 
M  roi.  C'e-st  ce  vilain  Lucien  qui  te 
«  pousse;  ne  l'écoute  pas.  »»  Bona- 
parte lui  répondit  sans  humeur  et 
même  en  riant  :  «<  Tues  folle,  mapau- 
••  vre  Joséphine.  Ce  sont  les  vic-llos 
«  douairières  du  fanbourj»  Samt-Cier- 
<  main,  c'est  ta  La  Rochefoucauld 
««  qui  te  fait  tous  ces  contes  la...;  tu 
««  m'ennuies,  laisse-moi  lranf)Hille.  »• 
\Ce  jour-là,  ajoute  Bounienne,  la  meil- 
leure intellifjencp  ré;;nait  dans  le  ména- 
{;e;maisje  me  rappellequ'alorsia  néces- 
sité d'être  témoin  de  quelque^  tendres- 
ses affectueuses  n'était  pas  la  fonction  la 


25? 


J05 


plus  n^rcable  da  secrétaire  intime  (lîl). 
Cependant  Lucien  n'en  poursuivait  pas 
moins  son  idée  fixe.  Lui,  qu'on  avait 
vu  naguère  si  ardent  républicain  , 
affectait  déjà  une  morgue  princière. 
M'"^  Bonaparte  lai  demandant  un  jour 
pourquoi  il  n'était  pas  venu  dnier  chez 
son  frère:  «<  l'arce  que,  répondit  Lu- 
«  tien,  il  n'y  avait  pas  de  place  niar- 
»f  quéc  pour  moi.  Les  frères  de  l>o- 
«  nartarte  doivent  avoir  les  premières 
«  places  après  lui.  — Qu'entends-jei' 
«  lui  répondit  Joséphine;  niais  si  vous 
*«  êtes  le  frère  de  lîojiapai  te,  rappe- 
«  lez-vous  ce  que  vous  étiez;  chez 
«  moi  toutes  les  places  sont  égales. 
«  Eugène  ne  rnc  <li,':iit  jamais  une  pa- 
«  re'lle  sottise.  »  l»econnaissant  que 
toutes  ses  insinuations  auprès  du  con- 
sul ne  pouvaient  détruire  rinfluencede 
Joséphine,  Lucien  paraissait  quelque- 
fois se  rapprocher  d'elle.  Ce  fut  dans 
un  de  ces  moments  de  feinte  réconci- 
liation qiM  lui  fit  cette  ouverture  per- 
fide: «  \  ous  allez  aux  eaux  de  Plom- 
i(  bières  (août  1802),  il  faut  avoir  un 
<'  enfant  d'un  autre,  puisqu'il  ne  peut 
«  pas  ^ous  en  fan e.  »  Joséphine  ac- 
cueillit avec  indignation  ces  paroles 
qui  pouvaient  bien  n'être  qu'un  piège. 
Lucien  insista  :  «  Si  vous  ne  voulez  pas 
«  ou  si  vous  ne  pouvez  pas  ,  reprit-il, 
«  il  faut  que  Bonaparte  ait  un  enfant 
«  d'une  autre  femme,  car  il  faut  assu- 
ff  rer  l'hérédité.  C'est  dans  votre  in- 
"  lérét,  vous  devez  savoir  pourquoi.  » 
Plus  tard  Joséphine  devait  se  montrer 
raoins  scrupuleuse,  et,  après  avoir  vai- 
nement employé  tous  les  secours  de  la 
médecine  pour  vaincre  sa  stérilité  (22), 
mettre  son  époux  sur  la  voie  ffune 
grande  superrlirr},'  polilifjue  H  lu  lui 
proposer  même   dirertenient     (23). 

(21/  Mmioiin  J-  nourn,„..r,  t.  V,  p.  ^3. 

(21;  Ro'i'rifiiiic,  dwi»  <«•*  Mimuot-s,  r.iiin'-llc 
lo  joie  «rfaiiliin-  «iii'r|M  ouv  .1  I(i'nn|t;jrle,  lot»- 
quc,  j)ar  un  tour  cJc  force  me  i  ni,  Ci-rn  ail  Cl 
inoincntanoinent  reparailrc  olu-z  }i>yt^i\\\nr:  c^r- 
t«iDt  signes  nieoiUKlt  (le  la   fécondité. 

'7V)   .Vrmorii/  rfr  Sainti'-Hilini'. 


■lOS 

Bourriennc  a  beau  nier  ce  fait  :  sa  dé- 
négation motivée  seulement  sur  ce  que 
Joséphine,  qui  lui  (waii  confié  tant 
d'autres  choses,  ne  lui  avait  pas  parlé 
de  cette  communication  extraordi- 
naire, n'est  d'aucun  poids  devant  le 
témoignage  si  positif  de  Napoléon. 
Cette  partialité  poussée  si  loin  par 
Bourrienne  ,  en  faveur  de  M'"®  Bo- 
naparte ,  s'explique  par  la  protection 
constante  qu'elle  lui  accorda  auprès  de 
son  mari  ;  et  Bourrienne  lui  donna 
en  maintes  occasions  des  conseils  uti- 
les. De  tous  les  enneuiis  de  Joséphine, 
celui  qui  sans  aucun  doute  lui  fut  le 
plus  nuisible  est  Tallejiand.  Son  ini- 
mitié datait  de  loin.  Pendant  l'expé- 
dition d'Eg^-pte,  alors  que  bien  des 
gens  ne  croyaient  plus  au  retour  du 
général  en  chef,  il  s'était,  dans  plusieurs 
circonstances,  montré  très-impoli  en- 
vers M'"^  Bonaparte.  Unjour,  particu- 
lièrement,dînant  chez Barras, et  se  trou- 
vant placé  entre  elle  et  M"^  Tallien, 
il  mit  tant  de  grâce  dans  les  soins  dont 
il  entoura  celle-ci,  et  si  peu  de  politesse 
envers  M'"*^  Bonaparte,  qu'elle  jugea 
qu'il  fallait  que  son  époux  fut  mort,  pour 
qu'un  courtisan  du  pouvoir  aussi  avisé 
que  Tallevrand  la  traitât  si  mal. 
Cette  idée,  jointe  à  l'amour-propre 
blessé,  lui  fit  quitter  la  table  en  pleu- 
rant. Tallevrand,  qui  n'avait  pas  oublié 
cette  circonstance  et  qui  craignait  le 
ressentiment  de  Joséphine,  employait 
dès  celte  époque  tous  ses  efforts  pour 
engager  Napoléon  à  divorcer.  Trois 
mois  avant  L  proclamation  de  l'empire, 
il  lui  conseilla  d'éjiouscr  la  princesse 
Wilhelmine  de  liade,  alléguant  l'appui 
que  ce  mariage  lui  ferait  trouver  dans 
les  cours  de  Btissie  et  de  liavièie.  Bo- 
naparte balança  ;  mais  l'ascendant  de 
Joséphine  l'emporta  encore  cette  lois, 
et  elle  devint  impératrice.  Elle  avait 
alors  un  soutien  dans  Fouché  qui  lui 
donna  plus  d'un  bon  avis  ;  mais,  tou- 
jours porté  à  l'intrigue  pour  tc  rendre 


JOS 


.105 


1$^ 


iiccri>4ire,  il  au^menlait   le>  (erreurs 
de  Joséphine  par  île  rauN4c>  confuJen- 
rrs,  menant  en  avant  jusqu'aux  Ji^eu 
»e$   de   bonne  aventure,   entre  anlre^ 
M"*  1^  Normand  que  Joséphine  con 
stihait  journelleiMcnt.  Mais  Kmtché  fut 
rrnvo\r.  IWilerer,  qui  était  rat;enl    le 
plu^  actif  «le  la   faction    des  frère*  de 
Bonaparte,  a\.iit  travaillé  avec  ardeur 
à  la  dis-race  de  ce  iuini'>tre.   I  n  jour 
il    «^emporta   avec    tant    de    violrnce 
contre  lui  en  pré>enre  de  M""^  n<ina 
parte,    que  celle-ci  lui   répliqua   avec 
une  exlrcme  vivacifé:  *  I.c%  Nraisenne- 
«<    mis  de  mon  man  sont  ceui  qui  lui 
rt   donnent  des  idées  d'hérédité,  de  dv- 
««    nastie,  de  divorce,  de  maiia;;e.»  Ce 
nVlait  donc   pas   à  tort   aue   Fourhé 
avait  dit  lors  de  son  renvoi  :   «    M"*' 
««    Bonaparte  me  regrettera.  »•  Cepen- 
dant   Ilortense,    devenue  M"""    l.onis 
Bonaparte,  était  enreinte,  et  .-avançait 
dans  sa  grossesse.  Quelque   tendresse 
qu'eût  Joséphine    pour   ses  enfanis  , 
elle   ne  vovait  pas  arriver,  st   l'on  eu 
croit  Bounienne,  l'époque  île  la  dell- 
rrance  Je  sa  fille  avec  le  plai>ir  >i  na- 
turel au  cirur  d'une   raere.    Klle  n'i- 
gnorait pas  les  bruits  répandus  sur  la 
iiiison    d' Ilortense   avec    le    premier 
consul,  et  celte  rumeui  lui  faisait  ver- 
ser des  larmes.  Toutefois    cette  lutte, 
entre  les    Bonaparir  et  les  lieauhar- 
nais,   se  termina  à  ra\anta;;e   de   ces 
derniers.  IjCs  deux  seuls  hommes  d'état 
qui  servaient  alors  Bonaparte,  Tallev- 
rand  et   Kouché,  quelle  que  fut  l.i  dif- 
férence de  leurs  sentiments  personnels 
pour  Joséphine  ,    sentirent   (pic,  dans 
l'intérêt  de  la  marche  et  de  l'unité  du 
pouvoir,  riiifluencc  douce   et  bénigne 
des   Beauharnais  était   préférable  aux 
empiétements  excessifs  et  impérieux  de 
Lucien,  qui  à  lui  seul  aurait  voulu  ré- 
genter  l'étal  el  ne  laisser  à  son  frère 
que  la  conduite  de  l'armée.  Tout  fut 
politiquement  concilié  par  les  deux  mi- 
nistres; et,  à  la  suite  d'une  scène  vlo- 


leuleenlie  le»  deuv  frères,  Lucien  se 
mit  en  route  pour  Madrid, avecle  litre 
d'ambassadeur  extraordinaire.  Ainsi 
Joséphine  se  >it  dclt\iée  des  obses- 
sions de  son  beau-frère.  Au  milieu  de 
ces  petites  inti  igues  de  palais  Ifs  grands 
ré>ultat>>  poliliqiirs  s'accomplusaienl. 
Le  concordat  fui  pioclamé  (I8()J);  et 
quand  te  jour  de  l'jqur^  le  pirmier 
consul  alla  assister  au  J't  Drtim  qui 
fut  chanté  a  Notre-Dame,  .M"**"  l»o- 
naparle  »*)  rendit  de  >nn  ci^té  en 
grandr  pompe.  Soixante  ou  qiiilrc- 
Vfinits  dame>  furent  déM;'néf>  pour 
l'accompa^nei .  Klle  n'avait  pa»  meure 
de  daiiir>  du  palais  ;  seulement  ,  dit 
M'"''  d'.Vbrantès,  quatre  dame<  de 
cumpa;;nie  s'étaient  presque  volontai- 
rement mises  en  possession  de  cet  em- 
ploi. Un  scnalU!»-cotisullc  du  V  août 
1802  avant  proclame  Bonaparte  con- 
sul à  vie,  il  V  eut  ce  jo'irla  réce|)iio:i  du 
corps  diplomatique  et  des  aulonlr^i. 
Tout  dans  les  giaiids  appartemens  des 
Tuileries  aval  un  air  de  fête  et  d'ap- 
parat ;  mai^  Joséphine  ne  vovail  pas 
moins  dans  ciia(]ue  pas  du  {iicmier 
consul  vers  le  trAiie  un  pas  qui  l'eloi- 
gnait  d'elle.  l'iiste,  dévorée  dp  cha- 
grin, il  lui  fallut  faire  les  honneuis  de 
la  réception  du  soir:  elle  s'en  aru  titta 
avec  ià  grâce  accoutumée.  Immédiate- 
ment après  le  concordat ,  elle  insista 
non  sans  succès  auprès  de  son  mari 
pour  qu'il  fil  pavser  une  loi  d'amni:>tie 
en  faveur  des  émigrés.  Au  mois  d'oc- 
tobre de  celte  même  année,  elle  l'ic- 
coinpagna  dans  son  vovage  eu  Nor- 
mandie. Partout  elle  reçut  les  honneurs 
réseï  vés  aux  tètes  couronnées,  et  lais>a 
des  souvenir^  de  on  affabilité  tt  de  ses 
bienfaits.  Peu  de  temps  après  sou  re- 
tour, une  décision  des  consuls  accorda 
i  M""  Bonaparte  quatre  dames  pour 
lui  uiiUr  à  faire  les  honneurs  du 
palais  :  c'élaicnl  M""''  de  Kéinusat, 
de  Talhouet,  de  Luçay  cl  de  Lauris- 
ton.    F^  Malmalsoii   ne  suffisant  plus 


254 


JOS 


au  premier  consul,  dont  la  maison,  ainsi 
que  celle  de  Joséphine,  devenait  de 
jour  en  jour  plus  nombreuse,  il  s'était 
établi  à  Saint-Cloud  au  printemps  de 
cette  même  année  (1802).  On  recon- 
nut Tinfluence  de  Josépiiine  au  soin 
que  Ton  eut  de  rendre  aux  anciens 
serviteurs  de  Marie-Antoinette  ,  les 
places  qu'ils  occupaient  dans  celte  ré- 
sidence. Ceux  qui  étaient  trop  âp;és 
pour  les  reprendre  reçurent  des  pen- 
sions. Au  mois  de  juin  1803,  elle  visita 
avec  son  mari  les  côtes  du  Nord  et  la 
liel^ique.  A  Anvers  elle  fut  haran^^uée 
par  l'archevêque  de  Malines,  Roque- 
laure,  qui  lui  dit  entre  autres  flagor- 
neries :  «  Après  vous  être  unie  au 
u  premier  consul  par  les  nœuds 
«  sacrés  d'une  alliance  sainte  , 
«  vous  vous  trouvez  aujourd'hui  envi- 
<f  ronnée  de  sa  gloire,  etc.»  On  se 
demanda  dans  le  temps  si  ce  n'était 
pas  manquer  aux  convenances  ecclé- 
siastiques de  parler  ainsi  d'un  mariao;e 
qui  n'existait  que  sur  les  registres  de 
l'état  civil  ;  ou  bien  le  prélat  avait-il 
seulement  recouru  à  cette  formule  pour 
engager  les  époux  à  accomplir  ce  qu'il 
les  félicitait  d'avoir  fait.  C'est  vers 
cette  époque  (6  nov.  1803)  qu'eut 
lieu  le  mariage  de  Pauline,  sœur  de  Bo- 
naparte et  veuve  du  général  Leclerc, 
avec  le  prince  Borghèse.  La  nouvelle 
princesse  avait  toujours  été  l'ardente 
ennemie  de  Joséphine  ;  elle  pleurait  de 
dépit  chaque  fois  qu'elle  la  voyait  cou- 
verte de  diamarjls,  environnée  de  tonte 
la  pompe  royale.  Aussi  ce  fut  un  vrai 
triomphe  pour  elle  de  se  faire  annon- 
cer comme  princesse  JiorgJièse  dans 
le  salon  de  sa  belle-sœur  qui  n'était 
encore  que  W"^  Ihiiapartc.  Le  com- 
mencement de  l'année  IHOi  ,  qui  de- 
vait donner  un  trône  à  Joséphine,  fut 
marqué  par  des  événements  qui  l'af- 
fecterenl  d'une  manière  sensible.  L'ar- 
restation du  général  Moreau,  impliqué 
dans  la  conspiration  de  Georges  Ca- 


JOS 

doudal,  excita  d'abord  dans  la  famille 
de  Bonaparte  un  sentiment  de  joie. 
Joséphine  elle-même  ne  fut  pas  in- 
sensible à  l'humiliation  de  l'épouse  et 
surtout  de  la  belle-mère  de  ce  général. 
C'était  pourtant  elle  qui  avait  rnarlé 
Moreau  à  M"^  Hulot,  son  amie,  créole 
comme  elle.  Bientôt  l'élévation  de  Jo- 
séphine excita  la  jalousie  de  la  mère 
et  de  la  fille  :  c'étaient  des  propos  , 
des  caquets  perpétuels  contre  la  nou- 
velle habitante  des  Tuileries.  Ce  fut 
bien  pis  quand  l'étiquette  empêcha 
jyjme  jyjQpggy  d'être  admise  chez  la 
femme  du  premier  consul  aussi  libre- 
ment qu'autrefois.  Un  jour  qu'elle 
s'y  présenta  sans  être  aussitôt  re- 
çue, sa  mère  qui  l'accompagnait  dit 
assez  haut  pour  être  entendue  que 
la  femme  du  vainqueur  de  Holien- 
linden  n'était  pas  Jaite  pour  atten- 
dre. Ce  propos  arriva  à  son  adresse  et 
rendit  plus  froides  et  encore  plus  rares 
les  relations  de  Joséphine  avec  M/"^ 
Moreau.  De  là  ce  premier  mouve- 
ment d'une  joie  maligne  après  l'ar- 
restation du  général  ;  mais  Joséphine 
revint  bientôt  à  de  meilleurs  senii- 
ments  :  sa  fille,  les  sœuis  de  Bona- 
parte en  firent  autant ,  et  Joséphine 
plaida  la  cause  de  Moreau  auprès  de 
son  mari.  Elle  intercéda  vainement 
aussi  en  faveur  de  Toussaint- Louvcr- 
lurc  et  désapprouva  la  désastreuse  ex- 
pédition de  Saint-Domingue.  Nous 
avons  dit  plus  haut  quelle  fut  sa  noble 
conduite  lors  de  l'assassinat  du  duc 
d'Knghien.  Ce  grand  crime  fut  commis 
le  21  mars  1804  ;  et  le  18  mai  suivant 
Joséphine  était  impératrice.  Ce  jour- 
là  Cambacérès  et  le  sénat,  après  avoir 
félicité  le  nouvel  empereur  ,  allèrent 
donner  pour  la  première  fois  à  l'impé- 
ratrice le  titre  de  majesté.  Peu  de 
jours  après,  elle  fut  haranguée  par  Fabre 
de  l'Aude,  au  nom  du  tribunal.  U  lui 
adressa  ces  paroles  qui ,  malheureuse- 
ment pour  elle,  n'étaient  pas  une  pro- 


J05 

ph^tif.  ■  hti  feronifs  r(|>rrnnrDt  fn6u 
••  leur  ring  dont  nnr  ^ros  ii'ipcifunrilc 
M   cJ.  '.  >  a>i'l  cloi{;iiee'.  ; /joiij 

m  ni  .  V  film  irfxtuse  dr  tr- 

•I  poux.**  Ia- bnlLnif'»  re\crir^  iloiil 
«'était  ber  ce  re>{)ril  suprr^kl ilirui de  Jo- 
s^hiiie  étalent  enfin  réalisées;  mais  elle 
n'en  était  pas  plus  heureuse.  Klie  ne 
pouxait  délarlier  l'idée  de  son  éle\alion 
de  la  sanglante  tra^rilie  qui  l'avait  pré- 
cétire.  Dans  un  entretien  ronfidenliel 
qu'elle  eut  alors  avec  lloui tienne,  elle 
lui  disait  :  m  I^  titre  d'impératrice  ne 
M    m'éblouit  pa>.  J'au;;ure  mal  de  tout 
«   cela  pour  lui  ,  poui  mes  enfants  et 
«    pour  moi.    \jf>   misérables  doivent 
«  être  contents!   vovez   ou    ils   l'ont 
«   poussé  !  (^tte  mott  empoisonne  ma 
«   vie.  *•   Elle  ne  dissimulait   pas    ses 
craintes  devant  Ijonapaite.  ••  Lessouve 
«    rains  ne  s'accoutumeront  pis  à  fra- 
«    terniver  avec  nous,  lui  dit-elle  uu 
«   jour  ;  on  nous  traitera  de  parvenus. 
M  —  Certainement  ,  répliqua  Napo- 
■   léon  ;  mais  si  avant  dix  ans  ma  dv- 
M   nastie  était    la   plus   ancienne    de 
•I   toutes  !  M  Jamais  Joséphine  n'avait 
été  moins  satisfaite  qu'à  celte  époque 
où  sa  haute  fortune  excitait  l'élonne- 
ment  du  monde.  Bonaparte  s'était  af- 
franchi peu  à  peu  de  l'avyujétis^eraent 
d'un    ménage  bourgeois  :  Il  avait  cessé 
d'avoir  la  inrme  c!iaiiibre  el  le  mrme  lit 
que  sa  femme.   <«  Tant  que  dura  celle 
«   habitude,  a  dit  N.ipoléon  à  Saiiile- 
«•    Hélène,  aiicnne  de  mes  pensées,  au- 
•«   cunc  action    n'échappait   à    José- 
«   phine  ;  elle  suivait,  sal>i>sait,  dévi- 
er  naît  tout  ;  ce  qui  parfois   n'était  pas 
«    sans  j;èue  pour  moi   et  pour  lei  af- 
«    falres.   >»   Puis  il   raconte   qu'avant 
été    obli{;é,   i    l'époque    du   camp  de 
Rouloj^ne,  en  18or>,  de  prolonf;or  son 
IraNail  forl  avant  dans  la  ouït,  José- 
phine, quand  il  revint  se  coucher,  lui 
fit  une  scène  de  jalousie.  Il  se  Ticha  à 
son  tour,  s'évada,   et  ne  voulut  plus 
reprendre  son  assujélisscmcnt.  II  y  a 


JOS 


^5 


Îuelqae   ineiactiiude   dan&    ce  récit. 
)n  voit   dans  les  ^!éraoires  de  Con- 
stant, qui  devait  être    mieux   informé, 
que,  dès  le  consulat,  chacun  des  deux 
époux    ava  t   eu   sa    chambre    à    cou- 
cher.   "    Celait  une  j^iaudejoie  pour 
«    M""  Ilonaparle  ,  dit    le  minutieuK 
M    valet   de    chambre  ,  quand  elle  re> 
M    cevail  la  visite  de  son  nuii;    toute 
M    la  maison  en  était  instruite  le  len- 
M   demain.    Je  la  vois   encore  dire   à 
«   tout   venant,  en  frottant  ses  petites 
«   nains   :    Je  me  suis  U%>ée   tard 
e   uujiMirifhui  ;  mais,  voyei  v>ous  , 
«    cest    ifue    lluruipurte    est   venu 
*>   piisser  la  nuit  Ui'ec  mut.  etc.  ■ 
On  peut  concilier  les  deux  versions  eu 
disant  qu'à  l'epoijne  du  camp  de  Bou- 
logne   ces    visites  conjugales  cessèrent 
toul-à-fait  ,   et   avec    elles    s'évanouit 
presque  toute  rinflucnce  de  Joséphine. 
Devenue  impératrice,  l'orgueil  de  son 
nouveau    titre   n'avait   rien    chan;;é  à 
l'aménité  de  son  caractère;  mais  au- 
tour d'elle  commença  i  se  déplover  ce 
faste,    cette  sévérité  d'étiquette  aux- 
quels Napoléon  attachait  une  si  haute 
importance,  et  qui  étalent  si  forl  antipa- 
tltique>au  caiactrre  plein  d'abandon  de 
Joséphine.  Il  lui    donna,   pour  dame 
d'honneur,  la  comtesse  de  l.a  l\oche- 
foucauld,  femme  remarquable   par  tes 
qualités   du   citur    el   de  l'esprit  ,    el 
qu'il   chargea  de  tout  ce   qui  tendrait 
à    enviionner    l'impératrice    de    con- 
sidération   et     d'éclat.     •«    Informei- 
«   TOUS,  lui  dit  il,  de  ce  qui  se  faisait 
M  à    la  cour  de    Marie-. \nlolnelle  , 
H    quels   usa;;es  ,    quelle   étiquette    y 
«   étalent  observées,  el  accouimoJez- 
M   vous  aux  habitudes  pré.senl<*<  ;    ne 
««   craî;;nei  pas  de  renlrer  dans  les  an- 
<«   cienncs  coutumes,  etc.  >»   Joséphine 
aura't  cependanl  fait  un  aulr»*  choix  : 
>^ulant    tenir  la    parole  qu'elle   avait 
donnée  en  priion  à  la  duchesse  d'Ai- 
guillon, devenue  M"""  Louis  de  Girar- 
din,  elle  l'avait  demandée  pour  dame 


af)6 


JOS 


d'honneur;  rempercjr  ne  le  voulul 
pas,  parce  qu'elle  élalt  divorcée.  Ce 
fut  un  vrai  clia^rln  poiir  Joséphine. 
A  celle  occasion  elle  écri\il  à  son  an- 
cienne amie.  «  L'impératrice  do  France 
«  est  la  première  esclave  de  Tein- 
«  pire  et  ne  peut  acquitter  la  dette 
«  de  M'"^  de  Beauharnais  !  C'est  là  le 
«  supplice  de  ma  vie  ,  et  c'est  ce  qui 
«  vous  expliquera  pourquoi  vous 
«  n'occupt^z  pas  une  place  près  de 
<t  moi  ;  pourquoi  je  ne  vois  pas 
«c  M*"*  Tallien,  etc.  »  Outre  sa  dame 
d'honneur,  Joséphine  avait  une  dame 
d'atours  et  trente-six  dames  du  palais, 
dont  vingt-quatre  françaises  et  douze 
jtalieniies;  elle  eut  aussi  des  chambel- 
lans, des  écuyers  ,  etc.  Dans  ce  per- 
sonnel, un  pe'lit  nombre  de  noms  nou- 
veaux se  mêlaient  aux  noms  les  plus 
aristocratiques  de  l'ancien  régime  :  c'est 
ce  qui  faisait  dire  quelquefois  à  Joséphi- 
ne qu'elle  était  très-malheureuse  de  res- 
ter assise  ,  lorsque  des  femmes  qui 
avaient  été  ses  égales  ou  même  ses 
supérieures  entraient  chez  elle.  Parmi 
les  dames  du  palais  était  M'"^  de  Che- 
vreuse,  qui  eut  le  tort  d'affecter  des 
airs  de  supériorité  à  l'égard  de  l'im- 
pératrice. Napoléon  l'exila  de  Paris, 
et  Joséphine  sollicita  son  rappel  à 
plusieurs  reprises  ,  mais  sans  pou- 
voir V  obtenir.  L'empereur  disait  tou- 
jours :  «  Je  ne  veux  pas  d'imperli- 
«  nente  chez  moi.»  On  avait  donné 
à  Joséphine  un  assez  grand  nombre 
de  femmes  de  chambre  qui  devaient 
faire  leur  SiSrvicc  par  quartier.  Arrivée 
à  cet  .Tge  où  l'on  a  besoin  de  tout 
l'art,  de  tous  les  mystères  de  la  toi- 
lette, elle  pria  l'empereur  de  lui  lais- 
ser seulement  ses  anciennes  femmes  de 
chambre  ;  et  ,  à  la  réserve  de  l'une 
d'elles  (M"**"  Saint-llilaire),  qui,  sous 
l'ancien  régime,  avait  exercé  les  mê- 
mes fonctions  auprès  de  M"'^  Adé- 
laïde ,  on  fjl  des  dames  d'annonce  de 
toutes  les  nouvelles  femmes  de  cham- 


J05 

bre.  Elles  se  tenaient  d.uis  Tenlrée  des 
petits  appartements,  cl  n'avaient  d'au- 
tres fonctions  que  d'annoncer  l'em- 
pereur, lorsqu'il  venait  chez  l'impéra- 
trice. M™*^  de  Lavaletle ,  dame  d'a- 
tours ,  s'était  persuadée  qu'elle  de- 
vait avoir  la  direction  entière  de  la 
toilette  ;  mais  Joséphine  pour  qui 
cet  objet  était  la  plus  sérieuse  des 
occupations,  et  qui  trouvait  d'ailleurs 
que  sa  nièce  manquait  de  goût,  lui  si- 
gnifia qu'elle  entendait  choisir  elle- 
même  ses  élofies  et  ne  céder  ce  soin  à 
per.«onne.  11  existait  une  grande  ja- 
lousie entre  M'"'^  Saint-Hilaire  ,  sa 
première  femme  de  chambre,  et  M"^ 
Avrilloii  qui,  attachée  depuis  longues 
années  au  service  de  M™^  Bonaparte, 
conservait  avec  elle  le  ton  de  la  fami- 
liarité. Jamais  les  piérogatives  des  am- 
bassadrices entre  elles  n'ont  occasioné 
autant  de  débats  qu'il  s'en  élevait 
quelquefois  entre  les  femmes  de  José- 
phine. Un  jour  les  deux  rivales  avaient, 
chacune  de  son  côté  ,  réclamé  le  re- 
dressement de  leurs  griefs  respectifs 
près  de  leur  maîtresse ,  qui  ,  com- 
me d'habitude  ,  donna  raison  à  celle 
qui  lui  parlait.  Il  en  résulta  que  le 
désordre  devint  plus  grand  ,  ciiaque 
partie  se  trouvant  forte  de  l'approba- 
tion de  sa  maîtresse.  11  fallut  que 
M'"*^  de  La  Rochefoucauld  intervint; 
et  désormais  il  ne  fut  plus  permis  aux 
femmes  de  l'impératrice  de  venir  l'en- 
tretenir de  leurs  débats.  Ce  fut  le  di- 
manche, 15  juillet  180i,  jour  choisi 
à  dessein  par  Napoléon,  afin  d'éluder 
l'anniversaire  du  14  juillet  ,  que  fut 
déplojée  pour  la  première  fois,  aux 
)oiix  des  Parisiens  ,  la  pompe  im- 
périale. Pour  la  première  fois  ,  l'im- 
pératrice Joséphine  eut  son  cortège 
distinct  de  celui  de  l'empereur.  Re- 
çue à  la  porte  de  l'Hôtel-des-lnvali- 
des  par  le  maréchal  Serrurier,  gouver- 
neur, et  à  l'entrée  de  l'église  par  le 
cardinal  de  Belloy,  elle  {ut  conduite 


JOS 

J;iin  nne  inbune  lli«po^cc  potii  elle 
en  face  du  I^^^ne  Je  rKupcreur,  qui 
reçu!  ce  jour-la  le  ^errnrnl  tie  i)i\-neuf 
cents  chevaliers  de  la  Lr^ioiwl' Hon- 
neur. Trni>  jours  aprè^  il  se  reiidil  au 
camp  de  Boulogne.  »an>e:nmcner  l'im- 
përalrice  qui  dut  ie  préparer  à  faire  un 
%o\ar;e  en  Belj^Kjue,  où  elle  devait  re- 
trouver son  mari  au  clialeau  de  I^- 
ken.  Bien  qu'elle  fût  en  proie  à  de 
cuisants  chagrins  ^rar,  san<  pailerdes 
suites  trafiques  de  la  run<piiaiion  de 
Georjjes  CadouJ.il  .  plus  que  jamais 
la  craiule  d'un  divorce  ri  cerla-nes  in- 
fidélités de  son  époui  lui  drci;iiairnt 
Tàme)  ,  elle  était  trop  femme  pour 
que  rien  lui  fil  né-^li^rr  les  affaires  de 
toilette  :  et  ce  fut  pour  elle  une  °ra*e 
question  de  li.  ctder  l(*s  parures  qu'elle 
emporterait  dans  ce  voTa;;e.  Au  mi- 
lieu de  ces  préparatifs  qui  se  faisaient 
k  Saint-Cloud,  elle  alla  pendant  un 
jour  respirer  plus  librement  à  la  Mal- 
maison,  où  il  lui  était  du  moins  per- 
mis de  se  soustraire  a  réti(|uelte. 
Elle  V  reçut  la  visite  de  lio:irrienne, 
qui  n  éta;l  plus  secrétaire  de  Njp'dcon; 
et  comme  il  la  saluait  du  titre  de  ma- 
jesté :  -  Ah!  Boiirrienne,  lui  dit-elle, 
«  laissex-moi  oublier  ici  que  je  suis 
M  impératiicc  !  »  Puis,  dans  la  suite 
de  l'entretien,  el'e  se  félicita  d'axoir 
contribué  à  sauver  la  vie  de  MM. 
de  Poli;;nac  et  de  Ui^ère  :  elle  dit 
encore  :  h  ||  v  aura  du  moins  quel- 
M  ques  familles  qui  lui  devront  de  la 
«  reconnaissaiire;  il  i>'e<il  pas  mécliaiit, 
««  ce  sont  ses  conseillers  qui  lui  font 
«  commettre  de  vilaines  actions.  » 
Dans  ses  vova^es,  Jo>épliiiie  n'était 
pas  plus  libre  qu'aux  Tuileries.  C* 
qu'elle  devait  faire,  ce  qu'elle  devait 
dire  était  ré^lé  d'avance  par  l'empe- 
reur ;  chaque  malin  elle  était  obli- 
gée d'.ipprcndre  son  rôle  de  la  jour- 
née. Ce  vova^e  eu  r»elj;ique  et  dans 
les  provinces  Rhénanes  dura  trois 
«ois.  Alors  se  préparait  la  confédéra- 

t.win. 


X)S 


rb 


Ijuti  du  lUtiii  duut  Napoltun  allait  \e 
déclarer  le  protecteur.  Joséphine  tint 
sa  cour  a\ec  beaucoup  d'éclat  à  Aix- 
la-Chapelle.  atten«l.-)ul  son  époux  qui 
était  enrore  au  camp  de  Uoulo;;ne.  Le 
l.'ï  août  elle  fit  dans  la  cathédrale  , 
au  nom  de  l'empereur,  la  distribution 
des  décorations  de  la  ï>^tnn-d'llon- 
neur  ;  mais,  au  milieu  de  tant  d'érlat  et 
d'adulations,  elle  eut  plus  d'i.ue  fois  k 
souiïrir  de  l'humeur  despotique  et  ja- 
louse de  son  époux  qui,  bien  qu'eloi- 
f^né,  était  informe  de  ses  moindres  ac- 
tions. Dans  une  réreplion,  un  vieil  of- 
ficier (;éne!al,  peu  au  fait  de  relii|iirtte, 
s'assit  sur  le  même  divan  que  l'im- 
pératrice; et  celle-ci,  pour  ne  pas  hu- 
milier un  militaire  honorable,  parut  ne 
point  s'apercevoir  de  cette  inconve- 
nance. Bonaparte,  qui  vint  la  rejoin- 
dre k  Aix-la-Chapelle,  lui  fit  un  cri- 
me de  celte  condescendance  et  lui 
adressa  de  vifs  reproches.  I-a  ville  de 
Mavence  oflril  à  rimpéralrice  un  bal 
le  25  septembre.  Klle  était  malade 
ce  jour- li.  Napoléon  la  força  de  se 
lever  en  la  tirant  brusquement  du  lit 
par  un  bras.  Joséphine,  a\ec  sa  sou- 
mission ordinaire,  s'habilla  et  parut 
une  dem- heure  à  la  fêle.  Mais  cette 
abné;;ation  d'elle-même  faisait  place 
à  une  résistance  persévérante,  lorsque 
les  intérêts  de  ses  enfants  étaient  com- 
promis. Quelques  jour^  auparavant,  en 
recevant  les  instructions  de  son  mari 
pour  la  présentation  des  princes  de 
B.ide,  elle  lui  demanda  l'étiqurlte  qu'il 
fallait  suivre  pour  son  fils.  Ijonaparte 
répond  t  sèchement  qu'il  ne  serait  pas 
présenté.  Joséphine  lui  remontra  (ju'il 
n'était  pas  convenable  que  le  fils  de 
l'impératrice  ne  fùl  rompic  pour  r  en  ; 
qu'elle  n'avait  jam.-ïis  rien  d«>m.Tndc 
riour  elle,  qu'elle  nacait  pas  pleuré 
pour  être  princesse  {'2\) ,  mi\9>  (\\it^ 

(il)  .VUu»  on  lU»  «Œur»  «le  Itowa[>ari.'  aux- 
qullf»  on  n'⻫ii  p»»  ytn*é  Amn%  le  premier 
inofM'nt  qatl'oo  cré«   l'eaipire.  et  qui  »inr*i>« 

'? 


i5i> 


JOS 


son  fils  devant  dîner  chez  elle  avec  lei 
princes  allemands,  il  fallait  bien  qu'il 
lût  présenté;  que,  dans  l'ancien  régime, 
si  M.  de  Beauharnais  eût  voyagé  en 
Allemagne  il  aurait  été  admis  partout. 
Ces  derniers  mots  excitèrent  la  colère 
de  Napoléon  :  il  répondit    qu'elle  ci- 
tait toujours  son  impertinent  ancien 
régime;   et   que  ,    après   tout  ,    son 
fils  pouvait    ne    pas  dîner   ce  jour-là 
chez  elle.   Pendant  que    cette   scène 
avait  lieu  avec  l'empereur,  Talleyrand, 
toujours  disposé  à  susciter  des   con- 
trariétés à  Joséphine,   prélendit  user 
des  prérogatives  de  sa  place  pour  dé- 
signer le    prince    Eugène   parmi    les 
grands-officiers  de  la  couronne  qui  de- 
vaient aller  prendre  les  princes   à  la 
portière  de    leurs  carrosses.    Kugène 
conla  cette  nouvelle  malice  à  sa  mère, 
et    convint  avec    elle  qu'il   n'accom- 
pagnerait pas  les  princes,  qu'il  se  ren- 
drait   le  soir  dans    le  salon    un  peu 
avant  six  heures  ,  et  que  Joséphine  y 
serait  pour  le  présenter.    La  chose  se 
passa  de  cette  manière  ;  Bonaparte , 
qui   n'arriva   qu'après   six  heures,  et 
dont  la  colère  était  calmée,  ne  s'in- 
forma pas    même    si    la  présentation 
avait  eu  lieu.  Cependant  il  avait  pour 
Eugène  Beauharnais  une  véritable  af- 
fection, il  lui  en  donna  même  de  gran- 
des preuves   Et  c'est  ici  que  Joséphine 
mettait  en  pratique,  avec  un  tact  ad- 
mirable,  la  connaissance  parfaite  du 
caractère  de  son  époux  :  «  Jamais,  a 
««   dit    -Napoléon  à  Sainte-Hélène,  il 
u   ne  lui  est  arrivé  de  rien  demander 
«c   pour  Eugène,  d'avoir  jamais  même 
M   remercié  pour  ce  que  je  faisais  pour 
«  lui;  d'avoir  même  montré  plus  de 
tt  soin  et  de  complaisance  le  jour  des 
*t   grandes  faveurs  ,  tant  elle  avait  à 
u  cœur  de  se  montrer  persuadée  et  de 
«  me  convaincre  que  tout  cela  n'élait 
««   pas  son  affaire,  mais  la  mienne.  »>  Elle 

!•   iRiiii  nidin    <^u,>|ilier  iiv*c  l.irm»    leur  frir* 
poar  obttoir  i«  titre  <!•  princ«t>rt. 


JOS 

avait  sans  doute  la  pensée  que  Napo- 
léon viendrait  à  adopter  Eugène  pour 
son   successeur.   Deux  naois  après  le 
voyage  en  Belgique,  eut  lieu  la  céré- 
monie du  sacre.  Trois  jours  aupara- 
vant,   le   cardinal  Fesch,   d'après  la 
demande  formelle  du  pape,  avait  donné 
la  bénédiction  nuptiale  aux  époux,  à 
minuit,   dans  la  chapille  des  Tuile- 
ries, en  présence  d'un  petit  nombre  de 
témoins,   au  nombre  desquels  étaient 
Eugène   et  Duroc.   Joséphine   voulut 
avoir  son   extrait  de  mariage  qui  lui 
fut  délivré.   Elle  le   remit  à  son  fils 
qui  l'emporta  en  Italie,  dans  la  crainte 
qu'il  ne  fût  égaré  ou  soustrait.  Le  pape 
Pie  VII   aimait  beaucoup  Joséphine 
qui  lui  écrivit  alors  pour  lui  confier 
ses   sentiments  secrets.    Le  premier , 
celui  qui  dominait  tous  les  autres  était, 
disait-elle,  la  conviction  de  sa  faiblesse 
et  de  son  incapacité;  puis  elle  ajoutait  : 
<f    Mais  que  d'autres  écueils   environ* 
«  nent  le  rang  où  il  me  fait  monter!...» 
Le  jour  du  sacre,  elle  reçut  l'onction 
sainte  de  la  main   du    pontife  et    la 
couronne  de  celle  de  son  époux.    Ce 
jour,  en  apparence  si  brillant,  fut  à  ce 
qu'elle  dit  depuis  à  ses  intimes  le  plus 
triste  de  sa   vie  ,  tant  elle  était  préoc- 
cupée   de    l'idée  que  cette   couronne 
chancelait   déjà  sur  sa  tête  !   Mais,  à 
ne  juger   que  l'extérieur  (2.5),  qui  ne 
l'eut   regardée    comme  digne  d'envie 
en  la  voyant   éclatante  de  parure    et 
chargée  de  plus  de  diamants  qu'aucune 
souveraine    peut-être    n'en  a   jamais 
porté?  L'armoire  aux  bijoux  qui  avait 
appartenu   à  Marie-Anloinette  et  qui 
n'avait  jamais  été  tout- à- fait  pleine, 
était  trop   petite  pour  l'impératrice; 
et  lorsque  plus   tard ,  après   son  di- 
vorce ,    elle  voulut    faire   voir   toutes 
ses  parures  à  plusieurs  dames  qui  en 


(i5)  Ainsi  on  lit  <lan»  cerlains  iiiéinoires 
qu'au  iiKiiiii-nt  où  NupoléoK  couronna  Jo.séphina 
à  ^'oriiiux  (It-viiiit  lui,  elle  clait  ravistantt  dt 
bonheur  tt  d*  beault. 


JOS 

tMnoignaifut  le  dr^ir,  il  fallut  fiirr 
drevver  une  «'normr  taMc  pour  \  «!'-[. tv 
ur  1rs  éfrin*;  cl,  b  uIjIc  iif  ^uftisjul 

Ea*,  on  ni  couvrit  fiirorf  d'autrcsmcu- 
les.  Après  a»oir  joui  «!r  raiîmiration 
muflle  Ae  rr«  damrs,  JoMphine  Irur 
dit:  «  CroNrx  moi.  n'rinirz  ^uct  luxe 
«  qui  nr  fait  pu  le  bonheur.  Sun;;ez 
«  que  j'ai  été  très- malheureuse  en 
«  possédant  des  bijoux  «i  rares.  Dan» 
••  le  rommenremetit  de  mon  flon- 
«   nanle    lurlnne.     je  me  Mii-i  .imu*ée 

*  de  ces  folifirlift*  l'eu  a  peu  je  m'en 
«  suis  »i  bien  «lé^dùlée,  que  je  n'en 
«    porte  plu>.  D'aillfiir*  mille    événe- 

•  menls  prineiit  pri»er  île  ces  super- 
«  be^  inulililés:  n'ai-je  pas  les  Ari- 
«  ^«o/r//rî  de  la  reine  Marie  Anloi- 
«  nette  \j2Ct)  :*  m  Celait  après  son  di- 
vorce que  Joséphine  parlait  ainsi  ;  mais 
elle  n'axait  pas  toujours  pen«.é  si  sa;;e- 
inent.  Son  ^oùt  pour  les  bijoux  s'ëten- 
dil  pendant  quelque  tempN  aux  ru- 
rio-  rs  ,  aux  métiailles  ,  aux 
pif  Dec  on  fl.ili.iil  celte  fan- 
taisie, tl  huit  par  lui  persuader  qu'il  lui 
fallait  a\nir  i  la  Mahnaison  un  cabinet 
d'antique>,  avec  un  conservateur,  (le 
projet  «'accomplit,  et  le  nouxeau  cabi- 
net s'enrichît  proniptemenl  aux  dépen.s 
èt<-  autres  palai.s;  mais  ce  ;;nAt  venu  su- 
bitement se  passa  bientôt  ;  le  cabinet 
fut  pris  pour  faire  un  s.ilon  de  compa- 
gnie, et  les  antiques  reléj;ués  dans  une 
antichambre.  A  quelque  temps  de  U  , 
on  mil  dans  la  trie  de  l'impératrice  de 
se  faire  monter  une  parure  de  pierres 
grecques  et  romaines.  Klle  eu  Ct  la 
demande  à  l'empereur  qui  refusa  d'a- 
bord, mai^  il  finit  par  coder  ;  et  I  hir  oc, 
charrié  d'aller  au  cabinet  des  antiques 
choisir  ce  qui  était  nécessaire,  mit  la 
main  sur  les  plus  belles  pierres  de  la  col- 


f  i6  le»  ùngio.'eiirs  »nol  <Jrs  poim  d'an  tral 
diam'Kt  •all^  jkiiii  >  niftra-Z'-.  C.rWrt  dnnt  il 
•»(  qur*iio»  i>  i  nul  cl.-  racbrtrrt ,  a  la  vente 
après  lir cet  <ie  JuM-^bioe,  p«r  ■tadam*  U  d«« 
•ht»»«  il'ADgooU'in*. 


J05 


a  »i) 


lection  l.e  joaillier  delà  couronne  les 
munta  ni.i.u  Tw|uemenl;  mais  cette 
pamir  riail  ^i  hnirde  que  l'imprra- 
trice  lie  la  porta  jamais.  (Quelques 
rotiis  après  le  »arre  ini|»rrial  ,  Napo- 
léon 'oii^ea  k  se  faire  couronner  roi 
d'Italie.  Dans  un  entretien  conGden- 
tiel  avec  Uourrienne,  récemment  nom- 
mé par  lui  ministre  résident  i  Ham- 
bourg, il  lui  dit  :  «  Il  faut  qu'axant 
•    mo'i  départ   pour  l'Italie  vous   me 

m   reudiex   un    service Allez  viiir 

m  ma  femme,  tachei  encore  une  fui» 
••  de  lui  faire  entendre  rai»on  sur  se» 
«  folles  dépenses;  chaque  jour  )'en 
«  découvre  de  nouvelles,  (^uand  )e  lui 
«  en  parle,  je  me  farhe,  je  m'emporte, 
m  elle  pleure,  je  lui  pardonne,  je  paie  ; 
••  elle  fait  de  belles  promeA>es  ,  mais 
m  le  lendemain  c'est  la  même  chose, 
«  et  c'est  toujours  à  recommencer.  Si 
M  du  moins  j'avais  eu  un  eulant  d'elle  ! 
«  c'est  le  tourment  de  ma  vie  que  de 
«  n'avoir  pas  d'enfants.  Je  comprends 
**  que  ma  position  ne  sera  assurée 
t  que  quand  j'en  aurai  un.  .\ucun  de 
•«  mes  frères  n'est  capable  de  me  rem- 
m  placer  ;  tout  est  commencé ,  rien 
••  n'est  achevé  ;  Dieu  sail  ce  qui  arri- 
1  verail.  »•  I/impératrice,  par  «es  pa- 
roles pleines  d'abandon,  facilita  sin- 
gulièrement à  l^ourrienne  la  mission 
délirale  dont  il  était  char;;é.  •«  Si  vous 
M  étiez  encore  avec  lionaparte,  mon 
•I    cher  Ilourrienne,   lui  dit-elle,  vous 

-  lui  feriez  entendre  raison.  Je  ne 
t<  sais  qui  se  plaît  à  lui  faire  des  rap- 
w  ports,  mais,  vraiment,  je  crois  qu'il 
«va  des  ^ens  occupés  partout  à  clier- 
m  cher  quelles  sonl  mes  dettes  pour 
«  aller  le  lui  rapporter.  Que  \oulez- 
««  vous  :'  on  m'apporte  de  belles  rho- 
m   ses ,    je   les  achète  :  on  ne  nie  de- 

^  mande  pas  d'sr^ent,  et  puis  on  ré- 
«  clame    le  paiement   quand  je  n'en 

-  ai  pas.  Quand  j'en  ai  ,  vous  savez 
m  l'emploi  que  j'en  fais  ;  je  le  donne 
«  en  p;rande  partie  à  des  malheureux, 


*7' 


a6o 


JOS 


i(  à  de  pauvres  émigrés  (27).  Allons, 
«  je  vais  tacher  d'être  plus  économe  ; 
«  diles-lc-lui,  si  vous  !e  revo}  ez.  »  Ces 
paroles  mettent  à  nu  le  caractère  de 
Josc^ihine,  sa  lacililé,  son  imprévoyan- 
ce. i}ourrienn<f  s'était  bien  gardé  de 
parler  des  regrets  que  lui  avait  té- 
moignés Bonaparte  de  n'avoir  pas 
d'enfant.  «  La  pauvre  femme,  dit-il, 
«  je  l'aurais  mise  au  désespoir;  car 
K  elle  portait  en  elle  un  invincible 
«  pressentiment  de  ce  qui  devait  lui 
«  arriver  un  jour.  »  Plus  que  jamais 
en  effet  les  hommes  d'élat  intéres- 
sés à  soutenir  l'édiGce  impérial  son- 
geaient au  divorce.  Dans  ce  temps- 
là  Fouché  dit  au  même  Bourrienne  : 
«  Il  serait  à  désirer  que  l'impératrice 
u  vint  à  mourir;  cela  lèverait  bien  des 
«c  difficultés.  Tôt  ou  tard,  il  faudra 
«  bien  que  l'empereur  prenne  une 
«  femme  qui  lui  fasse  des  enfants,  car 
«  tant  qu'il  n'aura  pas  d'héritier  di- 
«  rect,  il  y  aura  à  craindre  que  sa 
«  mort  ne  soit  un  sujet  de  dissolution. 
u  Ses  frères  sont  d'une  incapacité  ré- 
«  voilante  ;  et  l'on  verrait  surgir  un 
«c  nouveau  parti  en  faveur  des  Bour- 
«(  bons;  c'est  ce  qu'avant  tout  il  faut 
«  prévenir.»  Lorsque  Napoléon  p.r- 
tit  pour  se  faire  couronner  roi  d'Italie, 
Joséphine  l'accompagna,  bien  qu'elle 
ne  dût  pas  partager  ce  nouveau  dia- 
dème. Partout  elle  reçut  les  hommages 
dus  à  sa  souveraineté;  mais  elle  eut  de 
cruels  déboires.  A  Milan  ,  où  il  passa 
un  mois,  Napoléon  renouvela  la  liai- 
son qu'il  avait  formée  cinq  ans  au- 
paravant avec  la  célèbre  cantatrice 
Grassini.  Joséphine  en  fut  instruite; 
de  là  des  scènes  de  jalousie  qui  un 
peu  plus  lard  amenèrent  la  sépaialion 
définitive  des  deux  lils.  A  Mauloiie , 


{^^)  Elle  disait  vrai.  Klle  r<p.'ndaii  beaucoup 
daumonr»  ;  ePr  entrK.-nait  nue  co.  r.  ponda.ice 
l-«;satlivf  avrc  le>  sœurs  de  thjril»-  qui  soi- 
priatent  Us  nial.idi.s,  tt  leur  tnvoj  ;iit  une  foule 
de  clioses.  Ses  valrl»  claienl  charge»  d'aller 
paroiit  porter  «les  te<Oiir<.  hux  pauTir». 


JOS 

une  circonstance  particulière  lui  rap- 
pela douloureusement  les  torts  de  sa 
vie  passée.  L'empereur  engageait  Lucien 
à  rompre  son  mariage  avec  M"'*'  Jou- 
berlhou,pour  épouser  la  reine  d' Et  rurie 
qui  venait  de  perdre  son  mari.  Lucien 
repoussa  toutes  les  instances  de  son 
frère:  «c  Vous  voyez,  lui  dit  celui-ci, 
«  où  vous  conduit  votre  entêtement 
«  et  votre  sot  amour  pour  une  .  .  . 
«  — Au  moins,  répliqua  Lucien,  la 
«  mienne  était  jeune  et  jolie.  »>  Cette  al- 
lusion mit  le  comble  à  la  fureur  de  Na- 
poléon, qui  jetant  sa  montre  avec  force 
sur  le  parquet  s'écria:  «  Puisque  tu  ne 
«  veux  rien  entendre,  eh  bien!  jeté 
«  briserai  comme  cette  montre.  »  Au 
nioisdeseptembredecelteannée  1805, 
Bonaparte  partit  pour  la  campagne 
qui  se  termina  par  la  bataille  d'Aus- 
terlitz.  Joséphine  reçut  alors  de  son 
époux,  sur  les  suites  de  cette  vic- 
toire, une  longue  lettre  qui  finissait 
ainsi:  «  Je  te  renouvelle  les  assuran- 
ce ces  de  mon  amour  sans  terme.  Ton 
<(  fils  fait  des  merveilles,  je  le  récom- 
«  penserai.  Embrasse  ta  tille,  ses  en- 
«  fants,  mes  frères  et  ma  mère  par  qui 
«  j'aurais  dû  commencer;  tous  les 
e  nôtres  enfin.  Il  y  aura  bientôt  une 
«  couronne  de  plus  dans  la  famille.  >» 
Ces  mots  réveillèrent  toutes  les  ambi- 
tions. Joséphine  se  figura  que  celte 
couronne  tomberait  sur  la  tête  de  son 
fils,  et  elle  écrivit  dans  ce  sens  à  son 
mari  ainsi  qu'à  Eugène,  llortense  , 
forte  de  l'alTeclion  que  son  beau- 
père  portail  à  ses  enfants,  ne  douta  pas 
que  Louis  Bonaparte,  son  mari,  ne  fût 
choisi;  enfin  Joseph,  se  fiant  sur  son 
droit  d'aînesse,  conçut  un  espoir  qui 
fut  bienlôl  justifié.  La  lettre  où  José- 
pliifie  remerciait  par  anticipation  l'em- 
pereur du  trône  qu'il  destinait  à  Eu- 
gène le  mécontenta  vivement  :  il  ne 
voulait  pas  donner  au  fils  de  Joséphine 
une  indépendance  absolue,  mais  il  vou- 
lait le  tenir  en  tutelle.  L'impératrice  alla 


JOS 


JOS 


161 


son  iniri  à  Munich  (  janvier 
1806'',oùcllr  rut  U  vati»r>clion  de  M)lr 
son  liU  Jctniir  le  ^entlrr  du  rui  de 
Bavière.  A  .Municli,  puis  à  Slull^aid, 
un  ;;rjnd  noiiibre  de  |)iiiirrs  rt  de 
princevies  lui  furent  presenires.  Klle 
eut  be4iirou|i  de  peme  à  ne  pas  rire, 
quand  on  lui  aniioiira  la  princesse Cu> 
nr^onde.  Klle  dit  mrrae  le  soir,  aux  per- 
5011110  de  »on  intérieur,  que  lorsqu'elle 
Vit  la  j»rinceN*e  a^^i^e,  elle  s'imaginait 
la  voir  ftrnrhrr  tir  càt^.  •«  AsAuré- 
•«  ment,  observe  na'n entent  Oui'^lant, 
"  rimperalrirc  avjii  lu  le>  aventure» 
N  de  (landidr  rt  '\e  l.i  lille  du  très  no- 
•«  ble  bai  ttti  licilnindcr'!  en  IruncL.  » 
Au  pnntriiips  de  cette  même  année, 
Paris  fut  témoin  d'un  roarlane  non 
moins  satisfaisant  pour  Joséphine.  Sa 
cousine  Stéphanie  de  l»eauharnais 
épousa  le  piinre  héréditaire  de  iSa- 
de  (:2SV  1^  25  sept,  suivant,  au  mo- 
ment où  la  ;;uerre  allait  éclater  avec  la 
Prusse,  Jo>éph:ne  pjriit  p<iur  Ma> en- 
ce  avec  Napoiron.  iViidant  cette  cam- 
pagne elle  eut  à  s'afth^rr  de  la  ma- 
nière inconvenante  dont  il  s'expri- 
mait dans  ses  bulletins  sur  les  fem- 
mes, et  particulièrement  sur  la  briie  et 
malheureuse  reine  de  Pru:>5e.  Klle  té- 


(38)  Bon>|>art«  »«r«it  «tr  p^r«  k  c*li*jriin« 
parvMl*  1.1». .r-  n.ra-.l  ri;,  ««aii  p  rJu  »« 
nmtt*  .ni  ■'■■  ^^ttr 

Iiou   >  tl'aiM  ju- 

ban.  N'jpo  .  ru 

Icnd'i  Ju  •  .,r  . 

•t  Cainiui  itl  ,..  .  k  .  .  ,  ■  .  V ,  .  ■  ,,  .  .^...,  .  .luri- 
■  qu'un  de  luii  no  u  4  l«  ih  rgr  d'un*  Ait,  l«i»#.' 
«  Me  cr^iii^iu  |i«»  qur  la  tt>r-it'>irr  iiVn  *•  uffi* 
«   ua  ji.ur  »  a  ti  «it..||.  ;  .-  fui  r»p«. 

dir  pour    raiMrnrr    .st.  ma  •  aui 

Tuilrrin;    uuis    trt    r-  voulurml 

point  t'«>idrvat»ir.  >Ji 1  ;■       1      *..tur  »j 

llOli«  nicrisjirr».  rt  b»  11  o.  il  f.i;  e  i|,«^  l.c  i;.. 
•«Cl  od  courrir-r  aupr-fridu  lipu  .  -»pt:  oniie 
d<r  »*  fain-  rrtii-itre  a  riiitianl.  au  no.u  .fr  la 
loi,  l«  ji-tiii'- riifjnl  ,  qui  .  placir  clin  niaU 'me 
Campan,  prc£ia  lrp<-lieMr«-u«eiiieni  d«  la  br  I- 
laolr  r<lucjli''ii  qui  lui  fui  donnrr.  Ma<i.  »i  l'on 
en  croit  .Njpii  éoii  djué  \<e  .l/rworia/  d*  StMmtt- 
Hriét* ,  cl.c  vcnit  avec  son  uiari  »-|teo.pr^ 
coam.-  la  reinr  Ifort^nse  a«rc  le  si>>n  ,  mot^ttmut 
dt  emor.tet,  oJJScUojU  iU  ritHtptndmmct,  c*  qae 
I— épL—  éiëmmit/cn. 


moi;;na  iiumuc  son  mécontentement  a 
s<in  mari,  qui  lui  répondit  sur  ce  ton 
de  ;;jLnlerie  et  de  .^cnsillllitc  qu'on 
retrouve  dans  loult-N  ses  Irllres  à  José- 
phine: ••  J'ai  reçu  ta  lettre  où  tu  me 
«•  païais  larh(*e  du  nul  que  je  dis  des 
■  frmmes.  Il  est  vrai  qur  je  hais  les 
«  femmes  intrigantes  au-drlà  de  tout. 
«•  Je  SUIS  accoutumé  à  des  femmcNdou- 
•  ce4.  bonnrs  rt  conciliantes:  ce  sont 
"  elles  que  j'aime.  .*^i  elles  m'ont  {;até, 
m  ce  n'eNt  pas  ma  faute,  mais  la  tien- 
••  ne,  etc.  «  i'Iuv  lard,  lors  du  traité 
de  liUilt,  il  lui  marquait  :  ••  Ij  reine 
••  de  Prusse  e  I  réellement  cliarmjn- 
-  te;  elle  est  pleine  de  coquetterie 
**  pour  moi  ;  mais  n'en  sois  pas  ja- 
•«  louse  ;  je  suis  une  toile  cirée  sur  la- 
••  quelle  cela  ne  fait  que  glisser.  » 
Joséphine  était  alors  en  proie  à  la 
douleur  la  plus  amére  :  le  fils  aine 
de  sa  (ilte  llorlense  ,  cet  enfant 
que  Napoléon  semblait  dé5i;;ner  pour 
son  .    venait   de  mourir.  I^ 

cho  ier  qui  lui  tenait   de  si 

piès  a  tl.c-i:ii  Mir  aurait  avsuré  l'm- 
tluence  de  Jovepliinr  atiMnt  qu'elle 
pouvait   Te -prrri ,  y  Mit  pri- 

vée d  en  donner  iki  lit  i' <an{;. 

Napoléon  fit  ériiler  le  plus  profond 
chaj;r;n;  Josépliine,  dé.>ol»-e,  s'enfer- 
ma pendant  trois  jours,  pleurant  ,  ne 
vovant  per.sonne  que  ses  femmes  et  ne 
prenant  pour  ainsi  dire  aucune  iiouf' 
riture.  Pour  ne  pas  se  di-traire  de  sa 
douleur,  elle  s'entourait  de  ce  qui  pou- 
vait lui  rappeler  xm  m-illicnr  sans  remè- 
de. Klle  obtint  non  san^  peine  delà  reine 
Hortense  la  chevelure  blonde  du  jeune 
prince  qu'elle  fit  encadrer  sur  un  fond 
de  velours  noir.  Cependant  Najinlcon 
songeait  de  nouveau  au  divorce:  tous 
les  ministres,  toute  .sa  famille,  à  I  ex- 
'^eption  do  Montalivet  el  du  rârdina 
Fesch  ,  étaient  d'accord  sur  ce  point, 
et,  comme  nous  l'avons  dit  a  l'article 
Foudié  (lAIV,  327),  cet  homme 
d'état,  jusqu'alors  si  dévouéà  Joséphine 


162 


JOS 


prit  néanmoins  l'initiative  à  cet  é^arcl. 

Irulépendaminentdeses  Insinuai  ions  au- 
près de  l'empereur,  h'ouciié,  si  Ton  en 
croit  une  conversation  de  Joséphine 
rapportée  dans  les  Soucenirs  (leStanis- 
las  Girardin,  avait  foi  rné  avecTalley- 
rand  et  Junot,  gouverneur  de  Paris, une 
sorte  de  triumvirat  pour  faire  passer  le 
trône  à  Murât  au  détriment  d'Iiu^ène 
Beauharnais,  dans  le  ras  où  Napoléon 
eût  ététué  dans  la  campagne  de  Prusse. 
Ce  projet  avait  pris  tant  de  consistance 
que  Caroline,  l'épouse  de  Murât,  osa 
s'adressera  Joséphine  elle-même  pour 
lui  demander  si  son  mari  n'avait  pas 
raison  de  s'y  prêter.  A  ses  douleurs 
comme  aïeule  ,  à  ses  inquiétudes 
comme  mère  et  comme  épouse , 
se  jolo;nirent  alors  de  nouveaux  sujets 
de  jalousie.  On  avait  cité  deux  femmes 

de  la  cour,  entre  autres  M"^^  D 1, 

comme  étant  honorées  des  homma^^es 
furtifs  de  l'empereur.  On  parlait  encore 
d'une  belle  Italienne  qu'il  avait  connue 
^  Gènes.  Cette  liaison  dura  un  an,  et 
donna  lieu  de  la  part  de  Joséphine  à 
plusieurs  scènes  de  jalousie,  dont  on 
peut  lire  les  détails  dans  les  Mémoires  de 
Constant.  Enfin  elle  avait,  selon  W^^ 
d'Abrantès,  une  vie  empoisonnée  par 
les  rapports  que  lui  faisaient  chaque  jour 
une  foule  de  femmes  de  sa  maison  ;  car 
c'était  pour  elle  un  besoin  d'écouter  ces 
caquets  :  le  compte  vrai  ou  faux  qu'on 
lui  rendait  de  toute  la  conduite  des 
personnes  de  la  cour  lui  fournissait  un 
bulletin  qu'elle  rédigeait,  et  qui  passait 
quelquefois  sous  les  yeux  de  l'empereur. 
Pendant  un  voyage  que  Napoléon  fit  en 
Italie  (nov.  1  -lOT),  il  voulut,  en  com- 
blant Eugène  de  ses  faveurs,  le  préparer 
aux  idées  de  divorce.  Le  décret  de 
Milan,  par  lequel,  à  défaut  d'enfants 
maies  et  légitimes  de  la  descendance 
directe,  il  adoptait  Flugène  pour  son 
fils  et  son  successeur  à  la  couronne 
d'Italie,  donaa,  à  ceux  qui  savaient  lire 
les    pensées    secrètes    de    Bonaparte 


JOS 

dans  ses  actes  patents ,  la  preuve  qu'il 
l'avait  exclu  de  toute  hérédité  pour  la 
couronne  impériale  de  France,  et  qu'il 
songeait  sérieusement  à  une  nouvelle 
alliance  pour  lui-même.  Il  eut  aussi  à 
Mantoue  une  entrevue  avec  Lucien  qui, 
dans  son  inimitié  toujours  vivace  contre 
Joséphine,  autant  que  par  ambition 
personnelle  ,  consentit  à  donner  .sa 
tille  au  prince  des  Asturies  ,  depuis 
Ferdinand  VII  ,  mariage  qui  devait 
empêcher  ce  dernier  d'épouser  M 
Tascher,  parente  de  l'impératrice.  Ce 
projet  d'une  alliance  espagnole  ne 
s'effectua  pas  comme  on  le  sait  ;  et, 
au  mois  de  janvier  1808,  Joséphine 
eut  la  satisfaction  de  voir  M"®  Tas- 
cher ,  élevée  par  Napoléon  au  rang 
de  princesse  française  ,  épouser  le  duc 
d'Aremberg.  Durant  ce  même  hi- 
ver, qui  fut  remarquable  par  la  grande 
quantité  de  fêtes  et  de  bals,  elle  se 
donna  le  plaisir  d'intriguer  toute  une 
nuit  l'empereur  au  bal  masqué  de 
l'Opéra  ,  qui  était  alors  le  rendez- 
vous  de  la  haute  société.  Le  moment 
était  venu  où  Napoléon  devait  par- 
tir pour  les  frontières  d'Espagne  avec 
l'impératrice,  qu'il  laissa  à  Bordeaux. 
Son  intention  était  que  celte  partie 
de  la  France  si  maltraitée  depuis  la 
guerre  reçût  au  moins  de  bonnes  pa- 
roles. Joséphine  eut  donc  l'ordred'être 
aimable  pour  les  Bordelais,  qui  furent 
enchantés  d'elle.  A  la  fin  du  mois  d'a- 
vril elle  alla  rejoindre  l'empereur  à 
Bayonne.  Quelques  notes  qu'elle  a 
écrites  sur  ce  voyage  prouvent  combien 
elle  voyait  juste  en  politique.  Elle 
avait  conçu  les  plus  sinistres  pressenti- 
ments de  l'odieuse  agression  de  Napo- 
léon contre  l'Espagne.  Sans  se  mê- 
ler beaucoup  des  affaires  publiques  , 
elle  était  douée  d'un  instinct  tellement 
perfectionné  que  rarement  elle  s'est 
trompée  sur  les  choses  qui  devaient 
tourner  à  bien  ou  à  mal  pour  son 
mari.  Durant  son  séjour  au  château  de 


I 


JOS 


»6J 


Marrac,  elle  fil  par  lei   manières  une 

iseiaiiis 
^iia   lei 
piàâs  luuti  .  Cull^iJlil   noiu 

a|i()rrnJ  •{  >ij  a  la  rriuc  il'K>- 

pa^ne  ties  levons  de  luilrilr  française. 
l)an%  la  suite,  rluièmr  a|>re<kle  ilource, 
elle  rendit  «l'impurlanls  »enices  ires 
prince»  e&ilé>,  !>ui  tout  lorsque,  eu  l'ab- 
sence de  Tempereur,  les  pairment» 
de  leurs  pensions  étaient  en  letard. 
Alor>  elle  faixail  toutes  le^  drmarclies 
ueressaire.^,  >oit  aupre>  des  mmislies, 
soit  auprr»  Je  Nj^xilrou.  Ju^r^jlnnc 
avait  eu  a  >e  plaiiidir  d'une  reieiUe  in- 
ijdrlite  de  l'cmiirieur,  mai%  elle  fut 
bientôt  délivrée  de  sa  nouvelle  rivale. 

C'était  M  '*"  (i u  ,  cjue  Napoléon 

a\ait  remarquée  au  bal  de  l'Ilotcl  de- 
\  ille,  qui  ne  le  fit  pas  soupiier  lon^- 
tea>p5  et  qu'il  nomma  lectrice  de  i'im- 
pdatrice.  Knivrée  de  sa  nouvelle  faveur, 
elle  prit  pendant  levo>a^ede  Ka>unne 
on  ton  d  imprrlinriice  fort  déplace  vi\- 
à-vis  de  M""*  de  lîassanort de  Mont- 
morency que  l'impeiatrire  a\ait  ame- 
nées a\ec  elle.  Kllc»  se  plaignirent  à 
Jo.sepliine  qui  fit  a  la  délinquante  quel- 
ques douces  repre>ent.ttioii>.  1/enipe- 
reur,  instruit  de  cette  tracasserie,  ren- 

TO)a  à    Fari»    M"    (■ u,  qui 

depuis  ne  reparut  plus  a  la  cour,  l/im- 

f)éralrice  quitta  le  cliateau  de  Marrac 
c  20  juillet,  parcourut  avec  l'emprteur 
quelques  départements,  cl  tous  deux 
revinientà  Paris  assister  aux  fêtes  du 
1 3  août.  (^)uelques  jours  après,  se  trou- 
vant à  Sainl-Cloud,  Napoléon,  José- 
pliine  cl  leurs  familiers  jouèrent  aux 
barres  pour  la  dernière  fois.  C'était 
la  nuit.  Des  valets  de  pied  portaient 
destbmbeaux.  L'empereur  tomba  en 
courant  ,  il  fut  fait  prisonnier  ,  mais 
rompit  bientôt  .son  ban  ,  se  remit 
à  courir  et,  quand  il  fut  las,  il  em- 
mena Jo>e[dnne  ,  malgré  les  récla- 
mations de>  joueurs.  Jamais  ,  depuis  , 
cette   intimile  bourgeoise    ne  se   ma- 


nifesta entre  les  deux  époux.  A  cette 
époque  appartient  la  proposition  de  U 
pail  de  Ju>epliiiie  à  son  mari  de  la 
grandr   suprn  firrir  polilit^ue  a  la- 

Îuelle  nous  avons  deja  fait  ailu>ion 
uns  cet  article.  Qu'elle  ait  ou  non  fait 
cette  ouverture,  il  est  certain  qu'alors 
ou  disait  dans  tous  1rs  salons  de  l'aris 
qu'une  certaine  dame  était  enceinte  du 
fait  de  l'empeieur  ;  qu'en  même  teinp» 
Joséphine  allait  leinure  une  ^ros^es.Ne  et 

Îu'au  moment  de  l'accoucttemenl  de  la 
ame,  elle  se  ferait  passer  pour  la  mère 
de  Iriifant.  Murât,  qui  n'était  pas  des 
derniers  à  accréditer  ce  bruit,  disait  : 
M  Oroline  et  moi,  uous  ne  soufTi  irons 
•  jamais  cela,  et  je  me  déferai  du  ba- 
M  tard.  »»  (^pendant  Napoléon  paitit 
pour  l'enlrevued'lMlurt,  sans  emmener 
Joséphine:  il  en  fut  de  même  lors  du 
second  voyagea  IU>onne(oct.  1808). 
1^  jour  uu  départ  ,  elle  fit  appeler 
Constant,  et  lui  renouvela  des  rerum- 
mainUlions  qui  manifestaient  tonte  sa 
sollicitude.  Le  caractère  vindicatif  du 
I        '  "  ,  •  .pour 

I.  il    fu- 

nu:  diiuluuicux.  Lilc  \<>uL.l  partir; 
l'empereur  eut  mille  peine.^a  la  retenir. 
Tandis  que,  dans  son  astucieuse  poli- 
tique, il  convoquait  à  Iî.i>onne  une 
réunion  de^  cortes  et  leur  dictait  une 
conslituiion  illusoire  ,  undésa\eu  offi- 
ciel qu'il  donna  à  certaines  paroles  de 
Joséphine,  par  la  voie  du  Moniteur 
du  l:i  décembre,  révéla  aux  esprits  ob- 
servateurs toute  rinpocrisie  de  celle 
vaine  dcmoiisUation  en  faveur  du  sys- 
tème représentatif.  Kn  répondant  à 
une  haian^ue  du  président  du  corps  lé- 
gislatif, l'imperaliice,  ne  sori;;earil  (ju'à 
énoncer  une  expression  bienveillante, 
avait  dit:  «  Le  premier  scritmieiit  de 
«^  l'empereur  a  éle  pour  le  corps  lcr;is- 
««  lai  if  qui  repmente  la  mit  ton.  >» 
Cette  phrase  excita  la  colcri  de  Napo- 
léon. ilen\o)a  de  Madrid  un  article 
rempli  d'aijjreur,  dans  lequel  il  décla- 


a64 


JOS 


rait  que  l'empereur  était  le  seul  repré- 
sentant de  la  nation.  Cet  article  était 
écrit  lie  sa  main;  et  en  eiïet,  quel  au- 
tre eût  osé  donner  une  réprimande 
publique  à  l'impératrice?  Au  surplus 
celle-ci  ne  se  fit  pas  répéter  deux  fois 
cette  leçon  ;  et  lorsque  au  l^'^  janvier 
1809  elle  donna  audience  aux  auto- 
rités, en  l'absence  de  l'empereur,  elle 
tint  un  autre  lan<];af;e.  Revenu  d'Ks- 
par^ne,  le  23  janvior.  Napoléon  resta 
à  peine  deux  mois  à  Taris,  et  par- 
tit le  13  avril  pour  aller  comballre 
l'Autriche.  L'impératrice  l'accompaf^na 
jusqu'à  Strasbourg,  où  la  reine  de 
Westphalie,  la  reine  de  Hollande  et 
la  grande-duchesse  de  Bade  ne  tardè- 
rent pas  à  venir  la  Joindre.  A  son  re- 
tour à  Paris  son  existence  ne  fut  plus 
la  même.  Les  bruits  de  divorce,  de- 
puis deux  ans  répandus  par  la  police 
de  Fouché  et  par  certains  amis  de 
Napoléon  ,  prirent  plus  de  consis- 
tance. Toutes  les  fois  que  Joséphine 
avait  voulu  s'en  plaindre  à  lui  ,  il 
en  avait  paru  presque  aussi  irrité 
qu'elle-même  ;  et  ,  sur  ses  assuran- 
ces ,  la  malheureuse  femme ,  sa  fa- 
mille et  ses  amis  s'efforçaient  de  dé- 
truire de  leur  cote  des  bruits  que  la 
police  ne  cessait  d'accréditer.  C'était  un 
conflit  de  caquets  et  d'intrif^ues  dignes 
des  plus  tristes  règnes  du  Has-Em- 
pire.  Le  moment  arriva  enfin  où  le 
coup  que  Joséphine  redoutait  depuis 
tant  d'années  vint  la  frapper.  Napo- 
léon pendant  sa  ré  idence  à  S(hœn- 
brunn  s'était  déridé.  Kbloui  de  sa 
grandeur  ,  il  s'abandonnait  à  tout 
l'enivrement  du  pouvoir.  Jadis  il  s'é- 
tait cru  trop  heureux  que  la  vicom- 
tesse de  Beauliarnais  daignât  l'accep- 
ter pour  mari  ;  maintenant  il  trouvait 
que  la  bonne  Joséphine  était  bien 
heureuse  d'avoir  été  quatre  ans  impé- 
ratrice, et  qu'elle  devait  céder  la  place 
à  une  autre.  Depuis  longtemps  le  comte 
de  Narbonne    l'excitait    adroitement 


JOS 

à  se  relever  aux  yeux  de  l'Europe 
par  un  second  mariage;  et  ,  cepen- 
dant, c'était  Joséphine  qui,  sous  le 
consulat  ,  avait  mis  ce  courtisan  en 
rapport  avec  son  mari.  Il  est  constant 
aujourd'hui  qu'une  alliance  de  faujille 
fut  une  des  conditions  secrètes  de  la 
paix  accordée,  le  14oct.,à  l'Autriche. 
Ce  fut  après  cette  convention  que  Bo- 
naparte arriva,  dans  la  journée  du  26 
octobre  ,  à  Fontaineleeau,  quoiqu'il 
eut  annoncé  qu'il  n'y  serait  que  le  len- 
demain. 11  témoigna  beaucoup  d'hu- 
meur de  n'y  pas  trouver  l'impératrice 
qui,  même  en  devançant  ses  ordres  , 
n'arriva  qu'à  six  heuics  du  soir.  «  C'est 
«  bien  heureux  !  »  dit-il,  quand  on  lui 
annonça  que  la  voiture  de  Joséphine 
était  dans  la  cour  ;  puis,  sans  aller  au- 
devant  d'elle  comme  d'habitude,  il  se 
remit  à  écrire  ;  et  lorsqu'elle  accourut 
auprès  de  lui,  il  ne  se  dérangea  pas. 
«  Ah!  vous  voilà,  madame,  lui  dit-il 
«  avec  un  regard  sévère;  vous  faites 
«  bien  :  car  j'allais  partir  pour  Saint- 
es Cloud.  »  Puis  il  reprit  sontrava-l. 
Joséphine  voulut  s'excuser  ;  il  lui  ré- 
pondit si  durement  qu'elle  en  pleura. 
Aussitôt  il  s'en  repentit  et  demanda 
pardon  en  convenant  de  £on  tort.  La 
querelle  finie,  les  deux  époux  s'em- 
brassèrent^ et  dtwant  toute  la  soirée 
qui  fut  marquée  [lar  une  réception 
peu  nombreuse  ,  Napoléon  se  mon- 
tra gai  et  aimable.  Son  séjour  à  Fo«- 
tainebleau  se  prolongea  jusqu'au  14 
nov.,  et  fut  fort  triste.  Tous  les  gens 
de  service  purent  s'apercevoir  que 
l'empereur  ,  lorsqu'il  était  avec  José- 
phine, paraissait  contraint,  préoccupé. 
Le  incnie  embarras  se  peignait  dans  les 
traits  de  celle-ci.  Pour  la  première 
fois  lîonaparte  fil  interiompre  les  com- 
munications qui  avaient  toujours  existé 
entre  leurs  deux  appartements.  José- 
phine ne  se  lii  point  illusion  sur  les 
funestes  pronostics  q'i'elle  devait  ti- 
rer de  cette  disposition  nouvelle  :  elle 


JOS 


JOS 


i65 


Manda  auprès  dVIle  I)ur»c ,  qui  la 
trouva  loui  rn  Ijrmci.  ••  Je  >ui»  prr 
m  due,  luidil-rlle!  tout  r»t  fini  pour 
«  moi!  rommrnt  cacher  ma  lioulf." 
•  ^  ous  ,  Duroc,  >(>us  a^rz  toujours 
••  élé  bon  pour  moi,  \nus  e\  Kapp. 
M  Ce  irr>l  pa>  \ou*  qui  ra»ex  en;,a;;ë 
"  à  «e  srparer  de  moi.  Ce  *onl  me* 
«  ennemis,  c'est  Sa\arj,  Junol,  que 
«  sais  je?  Ce  font  encore  plus  se»  en - 
*•  neoiu  que  les  mien^.  Kl  mon  pauvre 
«  Ku(;rne ,  quand  il  Mura  que  ]e  suis 
-  répudiée  par  un  in;;rat  .  oui  ,  Du- 
••  roc  ,  un  in^ral  î  ••  Napoléon  des  *a 
rentrée  à  l'aii^  ^e  montra  inipalient  de 
terminer  une  aflaire  dont  il  était  d'au- 
tant plus  douloureusement  preorrupé, 
3t:e  |iisqu*.iu  dri  uier  moment  il  flotta 
ans  une  incertitude  peu  compatible 
a^  ec  son  caractère,  et  qui  atteste  la  con- 
stance de  ses  sentiments  pour  José- 
phine. On  peut  croire  même  que,  mal- 
ère  l'envie  qu'il  axait  de  se  donner  un 
uénlter  ,  il  n'eût  jamais  rompu  les 
nirud^  qui  l'unissaient  à  elle,  si  parmi 
les  per^onn3;;es  influents  qui  l'entou- 
raient (|url({ue>  uns  eussent  bien  voulu 
plaider  la  cause  de  l'impéiatrice  ;  mais 
elle  les  a\a)t  presque  tou>  contre  elle, 
tant  ces  hommes  d'état  s'a\eu;;laient 
sur  les  suites  d'une  alliance  royale 
pour  Na(>oléon.  Cambacrrès,  qui  fut 
toujours  l'ami  de  Joséphine,  n'était 
pas  d'un  caractère  à  la  servir  chaude- 
ment. Duroc,  qui  avait  tant  de  crédit 
sur  l'esprit  de  Napoléon,  ne  poussa 
certainement  pas  au  divorce;  mais, 
se  rappelant  qu'autrefois  Jo;ep[iine 
l'axail  refusé  pour  ;_endie  ,  il  se  tut 
lorsqu'il  aurait  pu  parler  pour  elle. 
Toute  la  famille  de  Napoléon  ,  ses 
sœurs  piinripalemenl  ,  ne  cherchaient 
qu'à  l'éloigner  du  tronc.  C'est  alors 
que  Napoléon  tint  un  conseil  .««ecrel 
auquel  furent  appelés  Pierlhier,  Tal- 
Icvrai'.d,  liei^naull  de  Saint-Jean  d'An- 
f;elv  «l  Cânibatérés.  Ce  dernier  fut  le 
seul  qui  parla  contre  le  divorce  ;  mais 


il  le  fit  avec  celte  mesure  qoi  réglait 
toutes  ses  actions  ••  Je  \ois,  dit  il, 
«  de  grands  obstacles,  soit  au  divorce, 
«  soit  au  mariage  qui  doit  le  suivre. 
••  Celui  qui  e\i>te  maintenant  a  été 
«  sanctionné  par  la  loi  ci\ilc  et  la  bé- 
•«    nédiction  religieuse  ;  >ous  axez  fait 

•  sacior  l'impcratrire  ,  \ons  l'axez 
m  pendant  quinte  ans  con6rmée  dans 
m    ses  druils    de    femme    lé;;ilime;    il 

•  n'esi^te  entre  vous  aucune  inrom- 
«  patibilile  d'humeur;  sa  conduite  e>t 
m    irréprochable,  elle  vous  est  clière. 

■  A  quel  Mie  demanderez-xous  le  di- 

■  TOfce:'  I.'imperatiice  \  donneia-t- 
«  elle  son  conentrmeni  **  lauiha  t-il 
«  recourir  a  la  force,  à  la  raison  d'é- 
M  tal .'  les  difliculles  m'rffi  aient  ;  elles 
m  viendront  de  toutes  paris,  etc.  >• 
L'axis  du  dixorce  préxalul  cependant 
dans  ce  conciliabule,  comme  on  dexait 
s*>  attendre,  .\ucun  obstacle  ne  de- 
vait s'opposer  à  la  rupture  du  lien  ci- 
vil, mais  il  n'en  était  pas  de  même 
du  lien  relipeux.  Napoléon  consulta 
Cambacérès  pour  laxoir  s'il  dexait 
s'adiesser  au  pape,  démarche  a^sez  dif- 
ficile dans  les  termes  où  l'empereiT 
était  alors  axec  I*ie  V||.  (jinbaceiès 
lui  rrpondit,  plus  en  lé^i-te  qu'en  ami  de 
Joséphine,  que  ce  n'était  pas  le  saint- 
siè;.e  que  cette  affaire  re;;ardail,  mais 
seulement  l'officialité  de  l'archexéché 
de  Taris.  -  Vous  n'êtes,  lui  «iit-il, 
"  dexaol  rKj;lise  qu'un  simple  paiti- 
«  culier  qui  xienl  demander  l'annu- 
M  lation  d'un  mariage  pour  lequel  on 
«  a  tran»;;res*c  les  rej^les  canoniques; 
t  et,  comme  il  dépendra  de  xos  ^ens 
w    d'affaires  de  duc  à  ce  sujet  tout  ce 

■  qu'il  vous  plaira,  l'officialité  sur  le 
«  vu  des  pièces  inë^u'irres  et  sur  la 
«  déposition  des  témoins  vous  (!rcla- 
««  rera  libre.»»  N:»poléoii,  eiiiiunté 
de  cet  avis,  pria  Carnbacére.s  de  s'a- 
boucher axec  les  membres  de  ce  tribu- 
nal ccclésia^stiquc.  L'archi-chancelier, 
pris  par  ses  propres  paroles,  ne  put  se 


266 


JOS 


défendre  de  cette  démarche  ;  il  se  re- 
fusa du  moins  a  la  triste  mission  d'an- 
noncer à  JosLvliine  la  résolnlion  de 
son  époux  (f^oy.  CAWDACÉr.ts,  LX, 
14),  et  conseilla  d'en  charger  le  prince 
Eugène.  Napoléon  s'empressa  d'écrire 
a  celui-ci  une  lettre  où  la  fatale  com- 
munication était  adoucie  par  l'exjjres- 
sion  des  sentiments  les  plus  paternels. 
«  Ma  mère  et  moi,  dit  Eugène  dans 
«  sa  réponse,  nous  devons  en  cette 
«  circonstance  donner  au  monde  un 
M  grand  exemple  de  courage  et  de  ré- 
«  signation.  Je  le  donnerai,  c'est  tout 
«  ce  que  je  puis  vous  dire,  et  assuré- 
«  ment  tout  ce  que  vous  pouvez  exiger 
«'  de  moi.  Fils  respectueux  et  sujet 
«  soumis,  je  n'oublierai  jamais  que 
m  vous  êtes  mon  empereur  et  mon 
«  père.  »  Malgré  ce  langage  noble, 
dès  qu'Eugène  fut  arrivé  d'Italie,  il  se 
prêta  à  toutes  les  démarches  que  lui 
imposa  son  beau-père  avec  une  docilité 
sans  doute  excessive  [f^oy.  Beauhar- 
NAis,  LVII,  385).  Il  n'en  fut  pas 
de  n)eme  d'Ilortense.  Mettant  de  côté 
la  timidité  qui  la  retenait  en  présence 
de  Napoléon  ,  elle  lui  reprocha  avec 
énergie  son  ingratitude  envers  José- 
phine. L'empereur  lui  répondit  par  des 
raisons  de  politique;  elle  les  rétorqua 
contre  lui  ;  mais  cette  scène  pénible  ne 
changea  rien  à  ce  qui  avait  été  arrêté. 
Horlense  dut  finir  par  obéir  comme 
les  autres  ,  et  elle  éclaira  sa  mère  sur 
la  possibilité  du  divorce,  sans  en  pré- 
ciser le  moment.  Joséphine  la  comprit 
dès  les  premiers  mots;  mais  il  lui  pa- 
rut que  Napoléon,  en  ne  fixant  pas  de 
terme,  l'éloignait  indéfiniment.  Celte 
Ineur  d'espéiance  fit  bientôt  place  à 
des  alarmes  de  plus  en  plus  vi\es.  C'é- 
taient des  pleurs  ,  des  plaintes  dont 
elle  ne  cessait  d'entretenir  ses  femmes. 
'J'anlôt  elle  formait  le  projet  de  refuser 
tout  consentement,  de  soutenir  devant 
les  tribunaux  la  validité  de  son  ma- 
riage; tantôt  elle  se  flattait  d'attendrir 


JOS 

par  ses  prières  le  cœur  de  Napoléon, 
qui  aurait  bien  souhaité  qu'elle  eût 
supporté  sa  chute  sans  impatience,  et 
surtout  sans  explication  ;  mais  «  il   lui 

«  était  impossible  ,  disait-elle.  Je  se 

«  laissa'  égorger,  sans  avoir  fait  une 

«  tentative  pour  se  soustraire  à  ce  sort 

«  cruel.  »  Laissons-la  raconter  elle- 
même  celte  scène  qui  eut  lieu  le  30  nov.: 

«  Nous  dinàmes  ensemble  comme  à 

«  l'ordinaire,  et   il  me  fallait  étouffer 

«  les  larmes,   qui,  malgré  moi,  s'é- 

«  chappaient  de  mes  yeux.  Je  ne  dis 

«  pas  un  mol  pendant  ce  triste  diner, 

«  et  lui  ne  rompit  le  silence  que  pour 

«  demander   à    un  de  ses  serviteurs 

«  quel  temps    il    faisait    (29).    Pour 

«  moi,  je  vis  bien  que  le  temps  était 

«  à  l'orage,  et  l'orage  ne  tarda  pas  à 

«  éclater.  Aussitôt  que  Bonaparte  eut 

«  pris  son  café  (30),  il  congédia  tout 

«  le  monde  et  je  demeurai  seule  avec 

«  lui.  Quel  air,  (juel  regard  il  avait  ! 

«  je    lisais    dans    l'altération   de  ses 

«  traits  le  combat  qui  se  passait  dans 

«  son  àme  ;  mais  enfin  je  voyais  bien 

«  que    mon    heure   était   arrivée.    Il 

«  était  tremblant,  et  moi,  j'éprouvais 

«  un   frisson  universel.  Il  s'approcha 

«  de  moi,    me  piit  la  main,  la  posa 

«  sur  son  cœur,  me  regarda  un  mo- 

«  ment  sans  rien  dire,  puis  enfin  laissa 

«  échapper    ces    paroles    funestes    : 

«»  Jusefj/iine  !  ma  bonne  Joséphine  ! 

«  tu  sais  si  je  t'ai  aimée!...  Cest  à 


(29  Constant,  dans  S'  s  Mémoires,  décrit  ainsi 
ceilr  st»-ne  •  «  Les  nffi.  ier.,  kW  nrvice,  immobi- 
les comm>'  des  r»-riiips  ,  obienraient  loiit  avec 
un»-  imniicliidi'  cuiuusr  ;  |)fridaiit  Hiut  le  r«'|>as 
qui  fut  !><rvi  pour  la  foriiif,  c-.r  lenis  nujestés 
ne  tiiiM'hèrPiit  »  rirri.  on  ii'entriidit  que  le  bruit 
uniforme  de^  assiettes  .>|),ioilees  el  reporters  , 
trisieiuent  varie  par  la  voix  monotone  des  offi- 
ciers de  bouche  et  par  le  tintement  queproilui- 
sait  l'empereur  en  f. a|>|)aiit  muchinaleniint  ii^in 
couteau  sur  \tt\  parois  d.   son  verre.» 

(Jo)  Il  On  apporta  le  café,  et,  selon  l'iisiige  , 
un  page  presenia  le  pi;ite.iu  à  l'imperalrice  pour 
qti'elle  verSîit  »  Ile  même  la  liqueur;  mais  l'em- 
j)ereur  le  prit  lui-m<ine,  versa  le  café  dans  la 
ti^^e,  fil  loiiJre  le  sucre,  en  icgard.inl  toujours 
l'impératrice  qui  restait  dibout  comme  frap|yéc 
dfl  stupeur  [Conslant,  ibid.).  » 


JOS 

«  toi,  à  toi  sruU,  que  faithi  les  seuls 
t  instanti  de  Imnhrur  que  fui  ^fti- 
m  tés  dans  re  mornJe.  Jus^pliine  , 
m  ma  tiestinee  eut  plus  furtr  que  ma 
m  \Hiiimte.  Mes  ajf ri  lions  les  plus 
■  chères  doiWni  se  luire  Jr^unt  les 
«  interèls  de  la  t ratu e,  —  AVn 
««  dite^  fhjs  fdus,  eus- je  la  force  de 
•  lui  te|)ondte  ,  je  m'y  utlendais  , 
«  je  iHHts  comprends  ;  mais  le  coup 
m  nen  est  ptis  moins  mortel.  Je 
M  ne  pus  en  dire  davanla^^e,  je  ne  »ai& 
«  ce  qui  se  pasva  en  mni;  je  rroi»  que 
m  je  proférai  des  cris  ;  je  rru*  ma  rai- 
«  ton  à  jamais  perdue  ;  je  demeurai 
m  sans  ronnaisNaiice  ;  et,  quam)  jr  rr- 
«  vins  k  moi,  jr  me  lrou\ji  dans  ma 
u  chambre. M  Kn  elTel,  elle  rial  loro- 
bre  commr  exaimine  aux  pieds  de 
l'empereur  oui  appela  M.  de  Kauvset, 
prrfft  du  palais,  alors  de  ser\ice.  Aidé 
par  lui  et  par  le  gardien  du  porte- 
feuille, Napoléon  transporta  Joséphine 
chrx  elle  par  Tescalicr  intérieur  qui 
conduisait  a  son  appartement,  aGn  de 
lui  faire  donner  les  soins  qu'eiigeail 
»on  étal.  «  Je  tenais  l'impératrice 
M  dans  mes  bras  qui  entouraient  sa 
M  taille,  dit  M.  t!v  Ilau^  el  dans  sm 
«  Mémoires  ^  son  dos  était  appu\é 
«  sur  ma  poitrine.  I^)rsqu'ellr  sentit 
«  les  efforts  que  je  faiiais  pour  m'tin- 
«  pécher  de  tomber  ,  elle  me  dit 
m  tout  bas  :  \  vus  me  serrez  trop 
«  Jurt.  Je  \is  alors  que  je  n'a\ais 
«  rien  à  craindre  pour  sa  santé  et 
«  qu'elle  n'a\ait  pas  perdu  conuais- 
«  sance  un  seul  instant.  »  l'eiidanl 
que  les  femmes  de  l'impératrice  lui 
prodi{;uaient  des  secours  ,  Napoléon, 
ému  jusqu'aux  larmes,  laissa  écîiapper, 
ens'adre.ssantàM.deIiausset,queiqucs 
paroles  entrecoupées  sur  la  malheu- 
reuse néces-sité  du  divorce,  qui,  disait- 
il,  était  dcNenu  un  devoir  déplorable, 
rigoureux.  La  reine  Hortense  et  ie 
médecin  CorNÏ.sart  ne  taidèrent  pas  à 
se  rendre  auprès  de  1  impératrice.  Bo- 


JOS 


167 


naparte  revint  la  voir  dans  U  soirée. 
M  Non,  dit-elle  dans  le  récit  qu'elle 
«  fit  à  Bnurnenue  de  toute  celle 
M  sctiie  ,  non  ,  \ous  ne  sauriez  vous 
m  peindre  l'horreur  que  sa  \ue  ra'in- 
«  spira  en  ce  moment.  L'inieret  ménie 
«  qu'il  a^ait  l'air  de  prendre  à  ma 
*<  souffrance  semblait  une  cruauté  de 
«  plus.»»  Cependant  la  jjiaiide  afiaire 
du  di\urre  occupait  tous  le\  courli- 
.san»  :  chacun  était  a  l'affût  de  ce 
qui  se  passait  entre  les  deu&  époux. 
Napoléon,  après  a\oir  rompu  la  ^lace, 
espérait  déterminer  Joséphine  à  le  de- 
mander elle  même.  (]ela  fut  impos<>ible. 
Elle  ne  regrettait  pas,  disait-elle,  ce 
tn^ne  qu'elle  a\ait  toujours  redoute  ; 
"on  seul  cha-rin  était  de  s'eloi;;ner  de 
l'empereur;  et  ces  explications  n'a- 
vaient jamais  lieu  sans  de  nou\elles  lar- 
mes. «  Ne  cherche  pas  à  ro'emou\oir, 
••  lui  disait  l'empereur;  je  t'aime  tou- 
«  jouis  :  la  politique  n'a  pasdecirur, 
"  elle  n'a  qtu-  de  la  trie.  Je  le  donne- 
»  rai  cinq  millions  par  an,  et  unesou- 
••  %erainete  dont  lUroe  sera  le  chef- 
«  lieu.  M  l/imperatrire  insista  beau- 
coup pour  re>lrr  en  France  et  conti- 
nua de  \tT^r  des  larmes.  •«  .Sawi- 
•«  *ous  ,  dit  l'empereur,  que  ce  di- 
•«  \orce  .sera  un  épisode  dans  ma 
••  \ie.  (^)uelle  '•rené  dans  une  tra;;é- 
•«  die  ^31  !  —  Kt  qui  en  serale  tuanf 
«  demanda  Josep  ine.  —  Le  lyran, 
"  reprit  Napoieon  déconcerl.»  ,  eh 
«  bien  ,  ce  sera  Fouché  ou  Talley- 
•'  rand.  »•  Cependant  tous  les  rois  de 
la  confédération  du  lUiin  et  de  la  fa- 
mille impériale,  à  l'exception  de  Jo- 
seph, étaient  arrivés  à  Paris  pour  as- 
sister aux  leles  qui  devaient  s'>  célé- 
brer à  l'occasion  de  l'annixeisaire  du 
couronnement.  On  eùl  dit  quel'em- 
fTtfeur  \oiilail  placer  son  divorce  sous 
la  sanction  des  Irtes  couronnées.  Il 
fallut    que    Joséphine  fut   présente  à 

'3i)    Journal   rt    «oaTCiirs    de  Staniilat  Ci- 
ra rdiD 


a6>> 


JOS 


toutes  ces  solennités,  au  Te  Druni 
chanté  à  Xolre-Dame  (3  décembre]  ; 
mais  Tempereur  lut  seul  {)/  ce  sur  le 
trône  et  sous  le  dais;  'impéralrice 
dans  une  tribune.  Pendant  cette  lon- 
gue cérémonie  elle  eut  tout  le  teoips 
de  faire  de  tristes  réflexions.  Cinq 
ans  auparavant  elle  avait  été  cou- 
ronnée dans  cette  même  én;lise.  Le 
soir  il  y  eut  banquet  aux  Tuileries. 
^  oici  comment  un  témoin  oculaire, 
Stanislas  deGirardin,  dans  ses  Suiwe- 
Tiirs  ^  peint  la  contenance  des  deux 
époux.  <'  L'empereur  en;;raiid costume, 
«  chapeau  à  la  Henri  IV  toujours  sur 
«  la  tête;  l'air  soucieux,  mann;eant 
«  pliis  qu'à  l'ordinaire.  L'impératrice 
«f  richement  parée,  beaucoup  d'éclat, 
«  grâce  aux  pinceaux  d'isabcy; 
«  l'air  triste.»  —  «  Le  visaa;e  plus 
«  souffrant  encore  que  le  matin  ,  » 
ajoute  Constant  dans  ses  Mémoires. 
Le  lendemain  il  y  eut  fêle  à  Tllôtel- 
de-^  ille.  L'iuipéralrice  eut  assez  de 
pouvoir  sur  elle-même  pour  y  déployer 
sa  grâce  et  sa  bienveillance  ordiiiaiics. 
Le  préfet  Frochot  adressa  à  l'em- 
pereur seul  le  discours  d'usage  ;  il 
lui  fut  défendu  de  proiioiicer  celui  qu'il 
avait  préparé  pour  l'impératrice.  Ce 
fut  la  dernière  fois  qu'elle  se  montra 
en  grande  cérémonie.  1 1  y  eut  le  surlen- 
demain (6  décembre)  bal  à  la  cour,  elle 
n'y  parut  point.  Ce  jour  là,  elle  écri- 
vit à  Napoléon,  pour  tacher  de  fléchir 
sa  volonté,  utie  lettre  qui  se  terminait 
ainsi  :  «  Ah  !  mon  ami ,  que  vous  avez 
«  tort  dans  ce  que  vous  faites  !  Pour- 
«  quoi  ne  songez  vous  pas  aussi,  dans 
«  cet  avenir  qui  vous  occupe  tant,  aux 
«  douceurs  d'une  société  intime  avec 
«  une  personne  qui  est  de  votre  rang, 
<f  de  votre  âge,  qui  sait  respecter  vos 
«  goûts,  vos  habitudes,  et  qui  appar- 
ie parlient  par  elle  et  ses  enfants  à 
«  votre  famille,  qui  a  su  vivre  en  paix 
«  avec  voire  mère  el  vos  sœurs,  devant 
"  qui  vous  pouvez  parler  du  passé  sans 


JOS 

«t  embarras,quiyousentendau moindre 
"  mol.  Trouverez  vous  ces  avantages 
«  avec  une  femme  étrangère  aux  vôtres 
«  qu'elle  a  déjà  peut-être  appris  à  juger 
«  avec  dédain  ;  qui  ne  voudra  voir  en 
«  vous  que  l'empereur  Napoléon  et 
«  point  le  général  Bonaparte;  qui,  igno- 
«  rant  lesparticularilé-^de  votre  vie,  se- 
<f  ra  toujours  une  étrangère  pour  vous  ? 
«  Tout,  jusqu'à  son  accent,  vous  pri- 
«  vera  du  charme  de  la  vie  intime. 
«  Vous  garderez  vos  souvenirs  sans 
«<  oser  les  lui  confier,  el  ce  ne  sera 
«  pas  sans  honte  que  vous  prononce - 
«  rez  tel  mot  dont  le  sens  ne  lui  sera 
«  que  désagréable,  etc.»  Joséphine 
chargea  Cambacérès  de  porter  celle 
lettre  à  Napoléon,  qui  s'écria  avec  une 
expression  singulière  de  chagrin  : 
«  Joséphine  m'écrit  :  ah  !  mon  Uieu, 
«  pourquoi  faire?  ma  résolution  est 
<f  piise;  je  la  rends  malheureuse,  je 
«  le  sais  ;  mais  qu'elle  sache  que  je  me 
«  suis  immolé  avant  elle.  »  —  Puis, 
après  avoir  lu  la  lettre  :  «  Dites  à  Jo- 
a  séphine  que  je  lui  répondrai,  que  je 
"  la  regarde  comme  la  plus  excellente 
«<  des  femmes  :  elle  vaut  mieux  que 
«  moi,  je  vous  l'allesle  :  c'est  une 
««  créature  angélique  ;  le  courage  que 
«  je  mets  à  l'abandonner  me  sur- 
«  prend  ;  mais  il  le  faut  :  vous  en 
"  sentez  la  nécessité  :  tachez  de  la  lui 
a  faire  comprendre.  »  Une  heure  après, 
elle  reçut  la  réponse  de  Napoléon, 
a  Je  ne  me  remarie  pas  pour  moi,  lui 
«<  disait  il,  je  chcrclie  à  maintenir  ce 
«<  que  j'ai  fondé.  Ton  fils  ne  peut  me 
«  succéder  au  détriment  de  mes  ne- 
«  veux,  et  la  Fiance  voudrait-elle  de 
<•  ceux-ci  pour  ses  maitres...  :'  Qu'ar- 
«<  riverait-il  à  ma  mort  ?  Des  déchire- 
«  menls  affreux,  le  partage  de  la  suc- 
««  cession  d'Alexandre,  la  guerre  ci- 
«  vile...  Je  sais  que  tu  vaux  mieux 
«<  que  tu  ne  le  sais  toi-même  ;  je  t'ap- 
"  précie  à  la  valeur...  Tu  es  sans  re- 
«   proche  ,  et  je  serais  san»  excuse,  si 


JOS 

M  je  n'étais  l'rmpcrrur  en  nièioe  lempi 
•<  que  ton  mjii...  Tadie  de  le  mi- 
M  ener,  en«isa<;e  notre  divorce  du  calé 
M  iionorablr,  associe  toi  à  cet  arte  de 
M  mon  abné;;alion  ;  sois  eu  me  qiiit- 
«  tant  la  prenurre  mère  de  ii!o:i  pru« 
M  pic,  ric.  ••  Jiisrplriir  avait  écrit  ^ns 
lifviri'iip  tlr.poii  :  cille  rrponse  fit 
cv  jiioiiir  .sa  diTniére  illu>ion  ;  et  deN  lors 
rlle  .s'arma  de  celte  force  pasMve  que 
donne  la  iYM;;nalion.  (^pendant  Flu- 
;;e(ie  arrixa  d  Italie.  Il  apprit  de  la 
iiourliemrme  de  l'impéiatiice  combien 
le  divorce  ciail  prochain,  .\ccable  de 
celle  confidence,  il  alla  trouver  l'em- 
pereur et  lui  dit  :  •*  Sire,  permettei 
•«  que  je  vous  quitte.  —  Comment  ' 
•«  —  ••  Oui,  sire,  le  fiU  de  relie  qui 
"  n'est  plus  l'impératrice  ne  peut  res- 
♦«  ter  vice-roi  :  je  suivr:ii  ma  mère 
<«  dans  sa  retraite.  —  Tu  veux  me 
«  quitter  Ku^ènc:*  loi!  «h!...  ne 
•«  sais-lu  pas  combien  sont  impérieuses 
•«  les  raisons  qui  me  forcent  à  pren- 
•<  dre  un  tel  parli.'  Kt  si  je  l'obtiens 
'<  ce  Gis,  objet  de  mes  plus  cbers  dé- 
«  sirs,  ce  GU  qui  m'est  nccevsaire  ;  qui 
«  me  remplacera  auprès  de  lui  lors- 
•«  que  je  serai  absent  :'  qui  lui  servira 
H  Je  pète,  si  je  meurs  ;'  qui  l'élèvera  ? 
«  qui  fera  un  lioinine  de  lui  :'  *•  Na- 
poléon a\ait  les  larmes  aux  veux  en 
prononçant  ces  mots.  Lii;;ène  ne  put 
resi^te^  a  un  pareil  lan^a^e,  et  ;l  se 
conforma  .i  toutes  le>  démarches  que 
lui  dicla  son  beau-pere.  Joséphine, 
d'ailleurs  ,  au  milieu  de  sa  doiileur, 
essavail  de  rendre  moins  amere  celle 
(le  <^es  eiifaiils;  les  en;;ai;eant  à  ne 
point  s'occuper  d'elle,  mais  d'eux  ;  à 
ciaiiidie  surloul  de  mécontenler  Na- 
poléon lorsqu'elle  ne  serait  plus  là 
pour  veiller  à  leurs  intérêts;  et,  quand 
il  fut  question  de  son  établissement  en 
Italie,  elle  fut  la  première  à  les  dissua- 
der dii  projet  de  l'y  suivre.  Joséphine 
donna  une  preuve  non  moins  grande 
de  sa    résignation  ,  en  assistant  aux 


JOS  ySg 

fêles  que  Berthier  offrit  k  toute  Ja 
cour  dans  sa  terre  de  («rosbois.  Pen- 
dant ces  fêtes  l'empereur  parut  beau- 
coup occupe  d'elle.  Il  y  eut  comé- 
die. \je  lu^ard  >  produisit  une  scène 
plaisante  :  on  jouait  iluilrt  Iwussel 
maiire  dr  ilnltintatiun.  (^<lci  l\ous- 
sel  liinui;;ne  a  un  de  ses  amis  \e  désir 
de  divorcer  :  celui-ci  l'y  in;;a^e.  Ca- 
det Koussel  change  ensui;e  de  n^olu- 
tion  en  dl^ant  :  ••  Je  sais  ce  qu'est  ma 
•<  femme,  je  ne  sais  pas  ce  que  serait 
••  celle  t|uc  je  prendrais.  »  l.es  corn  ti- 
sans  ont  ri  m  tJrJuns ,  dit  dans  ses 
Situx'rnirs  Slani.slas  de  (*irardin  ,  nui 
était  présent.  Knfm  arriva  le  jour  fa- 
tal :  c'clait  le  16  décembre.  Tou^  les 
liunaparle.tous  le»  i»eauliarnais étaient 
réunis.  Cambaceies  et  He;;naull  de 
Saint-Jean  d'.Vn^ely  recurent  ,  en 
oualile  d'officiers  de  l'elat  civil  de  la 
faratlle  impériale,  l'acte  de  divscdulion 
du  raaria;;e  entre  Jo<.éphine  et  Napo- 
léon Bonapar'e.  Klle  ne  put  pronon- 
cer le  discours  qui  avait  été  préparé 
pour  elle  et  qui  n'en  fut  pas  moins 
inséré  le  surlendemain  dans  le  Mo- 
niteur (Sl^.  \jes  larmes  étouffèrent 
sa  voix  et  elle  ne  proféra  «  au  mi- 
lieu des  sanglots,  que  ces  mots  .Mitrc- 
coiipes  :  M  Vous  voyez  une  femme 
•«  bien  malheureuse...  Je  peuls  tout 
•«  le  repos  de  ma  vie.  Je  mourrai  bien- 
•«  tôt.  Ce  divorce  me  tue...  (Jue  l'oa 
««  lav.e  ce  qu'on  voudra,  je  me  sou- 
•«  mettrai  à  loul.  »»  ^/'oj.  C\MU.\- 
r.KRK>i,  LX,  H  et  15).  Pendant  celte 
triste  séance,  l'empereur  ne  dit  pas  un 
mot,  il  était  immobile  comme  une  sta- 
tue. 1^  soir,  lorsqu'il  venait  de  se 
mettre  ao  lit,  la  porie  s^ouvrit  'oiità- 
coup,  et  Joséphine,  la  fij;ure  ;  .«nver- 
sée,  les  cheveux  épars,  s'avanri  d'un 
p»5  chancelant  vers  le  lit  de  l'empe- 
reur ,  il  V  eut  entre  les  deux  époux  une- 

.ta'  Ce  di-iourk  ri  Ir»  aulr.'k  actes  lus  dans 
I.  tiiiiril  il«  ainille  »'.iii  un  cher-d'iruvre  d« 
r  'l^ii  <><«,  dit  Starii«la>  de  «jirardio,  qui  les  aV- 
tr.h  ••  a   IVm^rvor  lai-mèiB*. 


a7< 


JOS 


scène  déchirante  et  un  long  entretien 
dont  le  secret  n'a  jamais  transpiré.  Le 
lendemain  ,  Joséphine  quitta  pour 
toujours  les  Tuileries,  et  se  relira  avec 
ses  enfanis  et  son  gendre  à  la  Mal- 
maison (33).  Ce  jour-là  le  sénat  prit 
plusieurs  décisions  relatives  à  la  dissolu- 
tion du  mariage  civil.  Il  v  eut  cependant 
plus  de  bulletins  négatifs  que  de  cou- 
tume, et  quelques  bulletins  d'évêques 
furent  conditionnels,  entre  autres  ce- 
lui de  l'archevêque  de  Tours,  de  Bar- 
rai, qui  vota  en  ces  termes  :  Oui , 
quant  au  mariage  cii?il.  W  ne  res- 
tait plus  à  obtenir  que  la  dissolution 
du  mariage  religieux.  Cambacérès  s'en 
entendit  avec  Tofficialité,  qui  rendit  la 
sentence  mentionnéeau  commencement 
de  cet  article.  Les  témoins  entendus 
dans  cette  procédure  furent  Berthier, 
Talleyrand  et  Duroc.  Les  nullités  n'é- 
taient pas  inventées,  et  certes,  l'Eglise 
a  cassé  des  unions  bien  mieux  éta- 
blies que  celle-là.  Toutefois,  on  peut 
supposer,  sans  injustice,  que  ceux  qui 
furent  si  empressés  à  prononcer  que 
le  mariage  de  Napoléon  et  de  Jo- 
séphine était  nul ,  eussent  déployé 
au  besoin  la  même  science  cl  le  même 
dévouement  pour  le  déclarer  légiti- 
me (34).  Napoléon  ne  tarda  pas  à  for- 

(33)  Elle  dit  .-liors  à  la  cointP^>e  de  I  a  Roclie 
foucnuld  :  «  Hfurtiix  M.  et  ni.ditmf  de  TiiscLer 
«  «le  n'avoir  pas  ^té  ii  moins  de  la  dist;r.^ie  di; 
w  leur  Glle  !  »  M.  de  Tu.'-cber  était  innrt  dc> 
pui«  loig-tnups.  Sa  veuve  vécut  n  .simple  par- 
ticulière aux  Trois  Ileis,  à  la  Maitiniqu*',  «i.iDs 
Touloir  Jtcepl<r  Its  bonn>ur.s  que  lui  offrait 
son  gendre.   Klle  ei;,it  dei  <  d»e  en  1807. 

(34)  Le  divorce  fui  condamné  à  l'ari»  par 
tous  les  espnl^  iri(le|.end  "iiis.  (^nclq'ie.s  jours 
•  vaut  qu'il  fui  prononce,  l'avoué  Desrez  ,  an- 
cii-n  procun-ur  au  parlement  et  doyen  du  b.ir- 
re<n  ,  qui  av^il  occupé  pour  madame  de  Keau- 
liarii.iis  avant  l;i  revi'Iuiion  ,  lors  d«  son  procès 
avec  son  pn  ini<  r  mari ,  >inl  la  voir  aux  Tuile- 
ries  pour  I  instnnr)' que  l'acle  qu'elle  iillait  si- 
gner eliiit  nul,  p-r(»-  <|u'«)n  u'observer.iit  pas 
toutes  les  fornidlités  légales  II  lui  prr>po<i;iit  d'en 
appeler  comme  d'abus,  et  lui  olfruit  à  cet  égard 
son  ii.inisière  «l  le  contours  de  ses  amis  du 
palais.  .Napoléon,  qui  ne  «onnjissaii  pas  De^- 
re/. ,  snirinl  siibieinent.  Il  voulut  d'abord  in 
imposer  au  vieillard;  uiais  ,  subjugue  j)ar  .son 
éa«r|^ii  tranquille,  il  s'adoucit ,    et  Giiit  par  lui 


JOS 

mer  la  nouvelle  maison  de  Joséphine. 
Sa  surprise  fut  grande  de  voir  la  com-... 
tcsse  de  La  Rochefoucauld  le  supplier 
de  la  maintenir  dans  sa  charge  auprès 
de  la  nouvelle  impératrice.  L'empe- 
reur indigné  la  destitua  pour  donner 
sa  place,  auprès  de  Joséphine,  à  la 
comtesse  d'Arberg ,  femme  d'un  mé- 
rite sérieux.  Elle  devait  correspondre 
directement  avec  l'empereur  pour  le 
tenir  au  courant  de  ce  qui  se  passait 
à  la  Malmaison  ou  à  Navarre  (beau 
domaine  près  d'Evreux  dont  Napo- 
léon fit  alors  présent  à  Joséphine). 
L'impératrice  avait   été  long-temps  , 

et  à  juste  titre,  jalouse  dcM"^*^G i, 

une  de  ses  lectrices  ,  et  la  traitait 
assez  froidement.  Celle-ci  s'en  était 
plainte  à  l'empereur,  qui  engagea 
Joséphine  à  avoir  plus  de  bienveil- 
lance pour  celte  dame  ,  sur  l'alla- 
chement  de  laquelle  elle  pouvait 
compter ,  et  avec  laquelle  il  n'avait 
plus  la  moindre  liaison.  L'impératrice, 
sans  être  bien  convaincue  de  cette  der- 
nière assertion,  avait  cessé  de  bouder 
M™*  G i,  lorsqu'un  matin  l'empe- 
reur, qui  avait  apparemment  quel- 
que crainte  que  la  belle  Génoise  ne 
reprît  sur  lui  quelque  empire,  entra 
brusquement  chez  l'impératrice,  en  lui 

diî>ant  :  «  Chassez  M"*^  G i  :  il  faut 

«  qu'elle  retourne  en  Italie.  »  Celte 
fois  Joséphine  prit  la  défense  de  sa 
lectrice.  Il  courait  déjà  des  bruits  de 
divorce,  w  Vous«:avez  bien,  mon  ami, 
«  dit -elle  à  Bonaparte,  que  le  meil- 
«   leur  moyen  que  vous  ayez  d'être  dé- 

'<   livré  de  la  présence  de  M"'^  G i, 

«  c'est  de  la  laisser  avec  moi.  Souffrez 
«<  que  je  la  garde.  Nous  pleurerons 
«   ensemble  ;  elle  et  moi  nous  nous 


offrir  une  place  dans  la  magistrature;  Desres 
refusa  et  se  retira.  II  est  murt  en  i8a6,  laig. 
>ant  d's  sommes  considérables  en  or  cachées 
dans  II»  rayo  s  de  sa  bibliothi^que.  Il  avail  en 
sa  possession  un  giand  nombre  de  lettres  auto- 
gra|)hes  d^  Joséphine,  fl  était  ami  intinie  dt 
BeHart.     ' 


JOS 

••  entendrons  bien.»  Dès  re  monienl 
Josrphine  fui  |»Ifine  de  honte  j»our 
j  Irctiice  qui  \jk  suint  à  L  Mal 
maison  cl  i  Sa^jrre,  M"""  d*Arl>ei^, 
«)i.r  J(i»e(iliine  appelait  su  f^ramle 
' rssr,  a\ail  tout  pouvoir  bur  les 
de  la  maison.  F.lle  >  étaldil  un 
tiidir  parfait,  et  c'rst  bien  cerlame- 
iiiriil  a  elle  que  rimprralnre  a  dû  la 
>ali>farlion  de  poii\oir  continuer  à  ré- 
pandie  de  nombreui  bienfaits,  sans 
diminuer  autour  d'elle  re  lute  qui  lui 
était  de\enu  si  nécessaire.  I*oin  de 
s'oiïenscr  des  remonlraiiccs  de  M"** 
d\\r!)er>;  ,  elle  lui  donnait  toujours 
raison;  cédait  a^ec  une  Rràce  cbar- 
manle  aux  obsei>alions  justes  qui  lui 
el.iirnt  faites,  et  l'en  aimait  dj\anla^e. 
\.i  petite  rour  de  la  M^linai^on  fut 
d'abord  fort  liiNtr,  bien  que  durant  Ir 
mois  de  janvier  IKK)  L  fouir  des  vi- 
siteurs s'>  portât,  avec  la  rerliliidr  de 
ne  pasdeplaiie  à  l'emprreur  qui  con- 
serva toujours  pour  Joépliine  les  de- 
hors de  la  plus  tendie  affection. 
•  Cette  habitation,  jadis  si  brillante, 
offrait  alors,»  selon  (liraidin,  dans  ses 
Suucrnirs,  »  lecaractèie  d'une  pro- 
fonde tristesse...  I/ennui  était  peint 
sur  toutes  les  Goures...  Une  heure 
après  notre  arrivée  ,  l'impératrice  en- 
tra :  elle  avait  les.  veux  rou;;en,  et  de 
grosses  larmes  roulaient  encore  sous 
ses  paupières...  Klle  affecta  de  parler 
de  l'eiupeieur,  du  dt'sir  qu'il  lui  témoi- 
gnait de  lui  Toir  habiter  Taris...  C* 
3u'clle  disait  eût  paru  simple  le  mois 
ernier  ;  aujourd'hui  on  n  v  voit  que 
l'envie  de  faire  croire  il  un  crédit  per- 
du. »  Toutes  les  majestés,  toutes  les 
altesses  d'ancienne  ou  de  iiouv  elle  date, 

3ui  se  trouvaient  à  Paris  dans  l'hiver 
e  1810,  allèrent  àla  Malinaison  s'in- 
cliner devant  Joséphine.  Ces  visites  lui 
étaient  pénibles  et  douces  en  même 
temps,  parce  qu'elles  lui  raonlraienl 
que  la  volonté  de  l'empereur  était 
qu'elle  fût   toujours  honorée.   Quand 


J05 


*7« 


la  belle  saison  arriva,  elle  se  rendit 
i  (lenève,  vova;;eant  sous  le  nom  de 
la  comtesse  u'.Krbrr^.  Son  but  etail 
de  voir  Kuj;ènc  ri  nj  femme  ,  qui 
vinrent  de  Milan  pour  passer  qurhiuet 
jours  avec  elle.  l)ans  ce  vo>a;;c  elle 
parut  au<>>M  calme,  aus>i  satisfaite  qu'à 
aucune  autre  époqur  de  »a  vie.  De  re- 
tout  en  Fiame,  elle  reprit  un  train 
de  vie  soums  a  unr  etiqurtlr  ai»sez  mo- 
notone C/cpeiidant  sa  cour  ne  fut  pas 
aussi  triste  au'on  aurait  pu  le  pensrr. 
I^s  plaisirs  de  Navarre  et  de  la  Mal- 
maison  étaient  peu  bru>ants;  c'étaient 
des  conversations  spirituelles,  des  lec- 
ture», des  promenadrs  en  calèche.  \a 
dessin  des  llrurs,  l'étude  de  la  botaui- 

aue  ,  le  soin  d'un  superbe  troupeau 
e  mrrinos  occupaient  tous  les  loisirs 
que  Joséphine  ne  consacrait  pas  au 
^oût  de  la  parure,  et  l'on  a  dit  qu  elle  se 
fit  faire  alors  plus  de  chapeaux  et  de 
robes,  peul-rire,  qu'au  temps  où  elle 
régnait  à  cAté  de  s<in  époui.  Les  Mé- 
moires de  M'  '  Ducrest  font  connaître 
combien  eiait  régulier  l'emploi  de  cha- 
Que  journée.  Joséphine  avait  appris 
leiactiludeà  l'école  de  Napoléon,  si 
minutieux  dans  ses  habitudes  d'inté- 
rieur. Dans  ses  proniriiadrs,  elle  de- 
n  piqu 
^rand 

tiime,  etc.  Knnu>ce  de  celle  étiquette, 
el'e  permit  à  l'ecu>er  et  à  roHirier  de 
la  suivre  en  frac,  el  onlonna  que  l'es- 
corte ne  sortit  «jtie  les  jours  de  céré- 
monie. L'emperrur  en  fui  instruit;  il 
écrivit  à  M"**  dWrber;; ,  •«  qu'il  fal- 
lait qu'on  se  souvint  que  l'impératrice 
axait  été  sacrée;  que  tout  devait  se 
pa>ser  loin  des  Tuileries  comme  si  l'on 
y  était  encore;  qu'il  avait  oublié  les 
pa^es  dans  la  formation  de  sa  maison, 
dv'il  allait  en  nommer  douze  ^ce  qu'il 
fil  en  effet^  ;  qu'il  ne  voulait  pas  de 
frac;  que  c'cîait  manquer  essentielle- 
ment à  ce  que  l'on  dcN.nt  a  S.  M.  »  Il 
fallut  donc  reprendre  l'habit  brodé,  el 


vait    avoir   pour    escoilr  un  piquet  de 
cavalerie,  un    écuver   en   ;;raiid    cos- 


l'JI 


JOS 


se  soumettre  iVailleurs  à  toutes  les  i  ! 
guenrs  tle  la  rcprésPiitalion.  Ce  n'était 
qu'à  onze  heures  Ju  soir,  qu'enfin  dé- 
barassée  de  ce  jouo;,  elle  pouvait  causer 
avec  ses  intimes  et  se  livrer  à  sou  o;oût 
favori  pour  tirer  les  cartes.  Dans  ces 
causeries,  elle  déplo\ait  tout  l'apure- 
ment de  son  esprit.  Quelquefois  elle 
parlait  de  reunui  qui  l'avait  dévorée 
aux  Tuileries.  Il  lui  arrivait  de  s'inter- 
rompre subitement  au  milieu  d'une 
narration  ,  en  disant  que  tout  ce 
qu'elle  contait  était  redit  à  l'empe- 
reur ;  elle  n'avait  de  sonpçon  sur  au- 
cune personne  de  son  intimité  :  ce- 
pendant 11  est  certain  qu'il  -^  avait  au 
moins  un  espion.  F^es  visites  d'Hor- 
tense,  et  surtout  d'Eugène  Beauhar- 
nais,  lanimaient  un  peu  la  monotonie 
de  cette  petite  cour.  Lorsque  Joséphine 
était  à  Navarre,  sa  fête  se  célébrait 
avec  solennité  à  Evreux  ;  elle  avait 
mérité  l'amour  de  la  population  de 
cette  ville  en  répandant  des  aumônes 
considérables,  en  fondant  une  école 
pour  les  pauvres  orphelines,  en  agran- 
dissant la  promenade,  en  faisant  con- 
struire une  salle  de  spectacle  ,  etc. 
Chaque  année  elle  donnait  plus  de 
cent  mille  francs  à  l'évcque  Bourlier, 
pour  les  pauvres  du  diocrse.  Ce  fu- 
rent pour  elle  des  journées  bien  tristes 
que  celles  qui  précédèrent  le  second 
maria;^e  de  Napoléon.  Elle  demeura 
complètement  seule,  réduite  aux  per- 
sonnes de  son  service,  et  à  deux  ou 
trois  visiteurs  fidèles.  «  Je  voudrais  , 
■^  disait-elle,  faire  montre  de  fouraf;e, 
■u  cela  m'est  impossible  :  je  voudrais 
«  être  aujoind'hui  à  la  Nouvellc-Zem- 
«  ble.  »  Ce  qui  la  consola  fut  d'ap- 
prendre que  la  nouvelle  impératrice 
ne  la  faisait  pas  oublier.  Cependant 
les  écrivains  de  police  épuisaient,  pour 
faire  valoir  Marie-Louise,  toutes  les 
formes  de  l'adulation.  Dans  Vo\>é\3  du 
Triomphe  de  Tnijuti,  se  trouvaient 
des  allusions  très-flatteuses  pour  José- 


JOS 

phine.  dont  on  avait  peint  le  caractère 
sous  le  nom  de  Plotine  ;  on  les  suppri- 
ma, et  certains  journaux  donnèrent  à 
cette  bassesse  le  nom  de  chanf;;cments 
heureux.  Si  l'on  en  croit  les  conver- 
sations de  Sainte-Hélène ,  Joséphine, 
lorsqu'il  fut  question  du  mariage  avec 
l'archiduchesse  ,  «  se  serait  conduite 
«  avec  beaucoup  de  grâce  et  d'a- 
rt dresse;  elle  aurait  désiié  que  le  vice- 
«  roi  (Eugène)  fût  mis  à  la  tète  de  cette 
«  affaire,  et  aurait  fait  elle-même,  à  cet 
«  égard,  des  offres  de  service  à  la 
«  maison  d'Autric'.e  (35)  Joséphine 
«  eût  vu  volontiers  Marie-Louise;  elle 
«  en  parlait  souvent  et  avec  beau- 
«  coup  d'intérêt,  ainsi  que  du  roi  de 
«  Rome.  Quant  à  Marie-Louise  ,  elle 
«  traitait  à  merveille  Eugène  et  llor- 
«  tense  ;  mais  elle  montrait  une 
«  grande  répugnance  pour  Joséplilne, 
«  et  surtout  une  vive  jalousie.  Je 
«  voulais  la  mener  un  jour  à  la  Mal- 
«  maison;  elle  se  mit  à  fondre  en  lar- 
«  mes.  Elle  ne  m'empêchait  pas  d'y 
«  aller,  disait-elle,  se  contentant  de 
«  ne  vouloir  pas  le  savoir.  Toiite- 
<f  fois,  dès  qu'elle  en  soupçonnait  l'in- 
«  tentlon,  il  n'est  pas  de  ruse  qji'elle 
ce  n'employât  pour  me  gcner  là-des- 
«  sus.  Elle  ne  me  quittait  plus  ;  et; 
«  comme  ces  visites  srinblaieiit  lui 
«  faire  beaucoup  de  peine  ,  je  me  fis 
<c  violence  et  n'allai  presque  plus  à  la 
«  Malmaison.  »  Marie- Louise  n'était 
pas  moins  jalouse  de  la  popularité  de 
Joséphine  :  elle  avait  en  horreur  tout 
ce  qui  pouvait  lui  rappeler  celle  dont 

Ci5)  C.rXXe  .is.seriion  parni't  f|ii«'l(nie  p»ii  in- 
Trois«nilil;)l)l<-  quand  on  songe  aux  It-rnit-s  d'une 
l.Miir  (|iic  Jo^<|iliiiic'  ;lllre•<^a  à  Napoléon,  six 
jour';  .Tpi  es  que  \v.  divorce  fut  pronorxf  :  «  Atcc 
«  qui  roirn<zvou.s  allinin  e  ?  avt-c  l'tnin'inie  de 
«  la  France,  cpII«"  insidieuse  niaisL-n  d'Antri- 
«  che ,  qui  déleste  notre  pay»  par  sfntiinpnt  , 
«  par  syslrnie  ,  par  m  ci-ssil*'.  Je  r;e  \:\\s  que 
"  vous  léprler  ce  qnc  vous  m'avez  «lit  niiilr 
«  fois;  mais  alois  vtre  .Tinbilii'n  se  bornnit  A 
«  huniilirr  unt-  puissance  qu'il  vous  envient  de 
«  r<  lever  .Twjourd'lini  Croyez  moi  lai. l  <|ue  vou» 
«  serez  maître  de  l'Kurope  ,  elle  vous  sera  iou- 
"  mi»t  ;  mais  n'ayez  jamais  dertver».  m 


JUS 

cll«  ocrapail  la  plare.  Oujnt)  elle  ai- 
Uil  à  Siiut-Cfriroain,  rllc  faiNait  pren- 
dre la  route  lie  ('.liatou,  afin  de  ne 
point  passer  de\aut  la  ^]ai^uiso^. 
••  Cecaractere,  obier^c  M  *^  Ducresl, 
a  dû  lui  causer  de  ;;ran(ls  chagrins  : 
car,  malj;ré  sa  faveur,  elle  n'a  pu  affai- 
lilir  les  sentinientN  de  son  époux  pour 
Joséphine  ;  il  ne  prenait  pas  la  peine 
de  les  cachet,  parlait  d'elle  souvent,  et 
ne  né;;li^eait  aucune  occasion  de  la 
faire  \alnir.»  Lorsqu'il  lui  arrivait  d'al- 
ler à  la  Malmaison,  «<  c'étaient,  disait- 
*»  il  encore,  c'étaient  alors  d'autres 
«    larmes  et  Ar-  \  •  '"         .   '•  e 

«   espèce.  Josr,  ''.>'- 

»  Tant  les  veux,  cl  duu>  :>i-.  mU  mUdiis, 
M  l'exemple  de  la  le-iime  de  Henri 
«<  IV,  qui  a\ait  vécu  a  Faris  après  son 
M  divorce,  avait  assiste  au  sacre,  etc.»' 
Qiaque  semaine  il  lui  énixa.t  des  hil- 
lets  courts,  mais  aimables,  et  toujours 
reças  avec  reconnaissance  :  souvent 
elle  les  lisait  à  s«  darnes.  Klle  trouvait 
une  consolation  encore  plus  réelle  dans 
la  réprobation  dont  l'opinion  publique 
avait  frappe  le  divorce  de  I>onaparte  et 
son  maria;;c  avec  une  Autrichienne, 
(l'était  une  crovance  populaire  que  la 
bonne  fortune  de  Napoléon  tenait  à 
la  prc>ence  de  Joséphine  auprès  de  lui; 
et  il  faut  convenir  que  les  e\èiieme;il$ 
qui  suivirent  son  :>ccoiid  nuiia^e  étaient 
bien  de  nature  à  jusiiher  ce  préjugé. 
Toutefois  elle  faisait  les  vcrux  les  plus 
sincères  pour  Bonaparte ,  et  vovait 
avec  douleur  l'horizon  politique  s  as- 
sombrir autour  de  lui.  Mais  tel  était 
encore ,  dans  l'esprit  de  la  pauvre  ré- 
pudiée ,  Teropire  des  diiffons  ,  qu'a- 
près avoir  pleuré  un  quart  d'iieure,  on 
la  voyait  oublier  ses  lannes  pour  don- 
ner audience  à  des  marchandes  de  mo- 
des et  à  des  inventeurs  de  paiiircs  nou- 
velles. A  l'aspect  d'un  joli  chapeau  elle 
n'était  plus  qu'une  lemiiie  ordinaire; 
et  ,  si  l'on  avait  retranché  de  sa  vie 
tout  le  temps  quelle  passait  à  pieu- 


JOS 


a-'î 


rer  et  it  su  toilette ,  la  durée  en  eût 
été  bien  courte.  \u  moment  du  di- 
vorce elle  avait  \ersé  une  telle  abon- 
dance de  larmes,  qu'elle  fut  plus  de 
six  mois  sans  voir  clair  :  ses  veux 
étaient  dans  un  élat  aflieux.  Open- 
dant ,  à  la  naivance  du  loi  de  Home, 
elle  eut  a*-^cz  de  force  sut  rlle-mème 
pour  que  l'on  pût  croire  qu'elle  prenait 
part  à  la  joie  commune.  I^  lendemain 
Napoléon  lui  écrivit  :  ««  Cet  enfant,  de 
M  concett  avec  notre Ku;;ène,  fera  mon 
«  bonheur  et  celui  de  la  Kiaiice.  >•  Kn 
remettant  sa  réponse  au  pa|;e  de  l'em- 
pereur, elle  lui  fit  présent  d'une  épingle 
de  rimf  mille  friim  s.  Klle  donna  un 
bal  ma;;nitique  ou  elle  .se  montra  en 
;;iande  loileltr,  et  ,  pour  la  première 
fois  depuis  sa  dis;;race  ,  parée  de  st% 
diamants.  Klle  n'a\ait  porté  que  rare- 
ment le  riche  diadème  tlu  sacre,  qui 
pevait  trois  livres,  et  qu'elle  ne  quittait 
jamais  sans  avoir  au  fiont  un  profond 
sillon  avec  une  cruelle  migraine.  KHe 
était  fort  sujette  à  ce  mal  aux  Tui- 
leries, où  rien  ne  pouvait  l'exempter 
des  fatigues  de  l'étiquette.  Napoléon 
ne  lui  permettait  pas  m<'ine  de  se  plain- 
dre. Pour  la  iiuerir  il  lui  faisait  faiie 
•i-  •■M  calèche  ;  et  souvent 

•  ûo  faire  arrêter  pour  se 

I  '  ijur>  heures  dans  une  mau- 

\.  •  I  .,r.  Depuis  ledivorce  elle  n'é- 
prouvait plus  cette  indispositKMi,  ;;ràce 
à  la  vie  paisible  de  la  Malmai->on  et  de 
Navarre  :  aussi  avait-elle  pris  beau- 
coup d'embonpoint.  Dans  ces  deux 
résidences,  son  appartement  particu- 
lier était  joli ,  mais  sans  luxe,  et  paré 
de  celte  simplicité  élé;;ante  qui  n'est  pas 
moins  coûteuse  que  la  ma;;niGcence. 
(x)nservaiit  pour  Napoléon  une  sorte 
de  culte  et  d'adoration,  elle  n'avait 
pNnt  permis  que  l'on  déranf;eàt  rien 
dans  le  lof;ement  qu'il  avait  occupé  à 
la  .Mainnison.  Un  livre  d'histoire 
posé  sur  son  bureau  clait  encore  mar- 
qué à  la  page  où  il  s'élait  arrêté  ;  qael- 


^74 


JOS 


ques  pièces  de  ses  habillements  se  trou- 
vaient éparses  sur  les  meubles.  Elle 
seule  se  charf];eait  d'ôter  la  poussière  à 
ce  qu'elle  appelait  ses  reliques,  et  ra- 
rement elle  donnait  la  permission  d'en- 
trer dans  ce  sanctwaire.  Les  apparte- 
ments d'honneur  étaient  restés  d'une 
extrême  magniticence  :  le  meuble  du 
salon  en  tapisserie  était  l'ouvraf^e  de 
Joséphine  elle-même.  Bien  qu'elle  fut 
alors  un  peu  mieux  rét;lée  dans  ses 
dépenses,  le  gaspillante  alla  d'abord  si 
loin  à  Navarre  qu'on  y  comptait 
chaque  jour  vingt-deux  tables  servies 
séparément,  parce  qu'il  y  avait  dans 
la  domesticité  de  l'antichambre  une 
hiérarchie  aussi  sévèrement  observée 
que  dans  la  haute  domesticité  du  sa- 
lon. M'"^  d  Arberg,  que  Joséphine 
chargea  de  mettre  ordre  à  cette  rui- 
neuse étiquette,  ne  put  obtenir  que  la 
réduction  de  six  tables  ;  et  avec  cela 
les  valets  de  pied  et  les  gens  de  l'écu- 
rie n'étaient  pas  nourris.  Le  château 
était  foit  incommode  :  on  devait  en 
construire  un  autre,  et  l'empereur  avait 
promis  d'en  payer  la  moitié ,  mais 
Joséphine  y  renonça  par  économie. 
Aimant  les  fleurs  avec  passion  ,  elle 
voulut  avoir  des  serres  qui  pussent  lui 
en  fournir  en  t(!ul  temps;  et  pour  suf- 
fire à  cette  dépense  ,  sans  diminuer 
les  sommes  consacrées  au  soulagement 
des  pauvres,  ou  aux  présents  destinés 
à  ceux  qu'elle  aimait ,  la  ménage- 
rie de  la  Malmaison  fut  supprimée. 
Des  arbres  étrangers,  des  fleurs  par- 
tout, des  gazons  d'une  beauté  rare, 
faisaient  l'ornement  du  parc.  José- 
phine, qui  favorisa  spécialement  l'in- 
troduction des  mérinos  en  France , 
avait  fait  bâtir  une  ruperbe  bergerie. 
Elle  avait  aussi  établi  à  la  Malmaison 
une  école  d'agricnliure  à  l'instar  de 
celle  de  Rambouillet.  Toutefois  l'em- 
pressement que  ,  dans  les  premiers 
temps  ,  les  courtisans  avaient  cru  de- 
voir témoigner  à  Marie-Louise  s'était 


JOS 

bien  ralenti  dès  qu'ils  virent  le  rôle 
de  nullité  qu'elle  remplissait  aux  Tui- 
leries ;  et  déjà  Ton  s'empressait  de 
retourner  faire  sa  cour  à  Joséphine, 
qui  savait  pardonner  à  qui  l'avait  né- 
gligée ou  oflcnsée,  et  près  de  laquelle 
on  se  trouvait  aussi  à  l'aise  qu'on  l'é- 
tait peu  devant  la  seconde  impératrice. 
A  Navarre  elle  avait  reçu  beaucoup 
de  lettres  de  personnes  attachées  à 
l'empereur,  qui  désiraient  passer  quel- 
ques jours  auprès  d'elle.  Craignant 
que  ces  vovages  n'offusquassent  Marie- 
Louise,  elle  dut  refuser  ces  demandes, 
à  quelques  exceptions  près  en  faveur 
de  dames  qui  avaient  été  dans  son  in- 
timité. 11  n'en  était  pas  de  même  à  la 
Malmaison.  Les  sénateurs,  les  conseil- 
lers d'état,  les  personnes  attachées  aux 
maisons  de  l'empereur,  des  princesses 
et  même  de  Marie-Louise,  affluaient  à 
cette  résidence  si  voisine  de  la  capitale. 
Deux  des  plus  assidus  étaient  le  cardi- 
nal Maury  et  surtout  Cambacérès. 
<«  C'est  un  homme  que  j'estime,  dit- 
«  elle  un  jour  à  ses  femmes,  lorsqu'il 
«  fut  parti,  parce  que  c'est  un  de 
<f  ceux  qui  ont  le  moins  flatté  Pempe- 
«  reur  ;  il  m'a  souvent  donné  de  bons 
«  conseils,  et  ce  n'est  jamais  en  vain 
»<  que  je  les  lui  ai  demandés.»  Per- 
sonne, en  effet,  n'aimait  moins  la  flat- 
terie que  Joséphine;  et,  quand  elle 
demandait  des  avis,  c'était  pour  être 
éclairée  et  non  pour  être  approuvée  : 
ainsi,  M"^^  d'Arberg  avait  avec  elle 
son  franc  parler  aussi  bien  qu'avait  pu 
l'avoir  son  ancienne  dame  d'honneur, 
Al"'®  d^  La  Rochefoucauld.  Joséphine 
désapprouvait  la  servilité  du  sénat ,  et 
y  voyait  la  cause  de  plusieurs  mesu- 
res qui  n'eussent  jamais  été  proposées 
par  Napoléon,  sans  la  certitude  qu'il 
avait  de  ne  rencontrer  aucun  obstacle 
aux  actes  les  plus  tyranni(jues.  *<  Mal- 
«  gré  cette  soumission,  disait-elle  un 
«  jour  à  ses  daines,  Napoléon  n'estime 
«  ni  n'aime  les  sénateurs,  et  je  l'ai  tu 


J05 

«  t*AMNV  WhK9UP  ^c  c^  qu'il  ap- 
«  pebit  BM  niche  faite  à  ers  nin- 
m  ftirur>.  u  Puis  elle  racorili  coroinent , 
en  1807,  iiuiruit  que  le  sénal  a\di.t 
en  réserve  une  somme  ile  quinze  cent 
luille  francs  ,  rrmpereiir  amena  ce 
corps  ^  1rs  rm|ilo\er  a  la  re»lauialiou 
Je  VOiléun^  qui  recul  alors  le  nom  de 
ThrtUre  dr  iimurrutritr.  l)an>  l'an- 
nce  1811,  le  calnir  de  sa  prlile  cour 
fut  IruuLie  par  le^  embarras  quV- 
pruu\a  dans  ses  aiïaiies  le  bjni|i.ier 
rirrlûl,  son  in(endanl-(;entrji.  Klle 
intercéda  vainement  auprès  de  Na- 
poléon pouj  quM  ne  peidit  pas  sa 
place  :  le  comie  de  Monllitault  lui 
lut  donné  pour  succe.»eur.  lorsque 
Napoléon  venait  la  \oir  quelquefois  à  la 
Malmaison,  elle  parai^^ait  heureuse. 
Dans  ces  entretiens,  comme  dans  ses 
lettres,  il  lui  parlait  toujours  du  roi  de 
liome  et  du  plaisir  qu  il  aurait  à  le  lui 
amener  quand  il  serait  plus  grand. 
Klle  TTirmr  dr^irail  voir  cet  enfant 
qu  si  cher  ;  tuais  elle  était 

pei  _  <  jama  s  Marie-Loui>e  ne 

le  permettrait,  'i'rndremenl  attachée  à 
M*"'  de  Montesquiou,  •;ou>ernante  du 
roi  de  Rome,  elle  entretenait  a\ec 
elle  une  correspondance  qui  dura  jus- 
qu'à s^  mort.  Ln  jour  M"**  de 
Montesquiou  reçut  ordre  de  l'empe- 
reur de  conduire  le  petit  roi  à  baga- 
telle: Josc^)hine  s'\  tiou\ait;  elle  avait 
enfin  obtenu  la  Lveur  de  voir  cet  en- 
fant :  «  Je  ne  sache  rien  au  monde, 
dit  Constant  dans  ses  Mt-rnoires,  de 
plus  touchant  que  la  joie  de  celte  ex- 
cellente femme  à  la  vue  du  fiis  de  Napo- 
léon, u  Elle  le  couvrit  de  caresses,  le 
baigna  de  ses  larmes.  Ces  visite5  secrè- 
tes se  renouvelèrent  quelquefois  ;  mais 
l'enfant  {;randi5sait  ;  un  mot  indiscret, 
bé^a>é  par  lui,  pouvait  porter  ombrage 
il  Marie  Louise.  L'empereur,  pour  s'é- 
pargner cette  contrariété  ,  qui  eût  pu 
porter  atteinte  à  son  bonheur  domesti- 
que, ordonna  que  les  visiter  deviiàiscnt 


JOS 


175 


plat  rares  :  on  finit  par  les  suspendre 
lout-à-fait.  Le  roi  de  Naplcs,  Murât, 
qui,  ainsi  que  sa  fennue,  s'était  con- 
staninienl  muntic  liusiiJe  à  Joséphine, 
fut,  de  tous  le«  membres  de  la  famille 
impériale,  le  dernier  à  lui  rendre  visite 
à  la  Malmaison  ,  et  encore  fut-il  as- 
.sez  ^'       '  '  lui  dire  qu'il  ne  lenait 

que  lion  expresse  de  Napo- 

léon. A  celle  occasion,  elle  dit  à  ses 
femme-  ;  •<  Il  e^l  trop  servile  a\ec  l'em- 
••  pereur  pour  lui  être  sinfèrement 
«*  dévoué;  s'il  se  troiite  jamais  en 
m  position  de  le  trahir,  il  le  fera.»  Jo- 
séphine à  vécu  as^ex  pour  voir  réali- 
ser ses  prévision*.  Au  commencement 
de  1812,  Honaparte  étant  venu  la 
▼isiter  eut  a^ec  elle  une  conversa- 
tion qui  dura  deux  heures,  et  dont  les 
courtisans  ne  purent  pénétrer  le  rars- 
tère.  Klle  répéta  plusieurs  (ois  que  ja- 
mais il  n'avait  ete  plus  aimable,  et 
t  un  vif  regret  de  ne 
i  :e  pour    rrt   hrurrux 

lie  la  trrrr.  (^>uelques  mnr.  obis  lard, 
cette  epithete  ne  convenait  plii>  à  Na- 
poléon. Son  étoile  palis«ait,  et  le  trcp 
fameux  vingt -neutième  bulletin  de  la 
grande-armée  vint  jeter  la  conster- 
nation par  toute  la  France.  Le  pu- 
blic ne  manqua  px^  de  remarquer  que 
l'élonn.inle  prospérité  de  Napoléon 
semblait  a\oir  fini  a>ec  l'elo'gnement 
de  Joséphine.  IVndant  celte  fatale 
campai^ne  de  Kussie  ,  elle  était  allée 
en  Italie  assister  aux  couches  de  la 
rifc-reine,  sa  belle-fille.  Ce  furent  là 
pour  elle  les  derniers  instants  de  bon- 
heur. L'année  suivante,  les  resers  des 
armées  françaises  rendus  irréparables 
par  la  défection  de  l'Autriche  affec- 
tèrent profondément  Joséphine,  qui 
reconnut  combien  son  dnorce  avait 
^<té  inutile  pour  la  France,  et  combien 
Napoléon  avait  été  déçu  en  espérant 
que  le  litre  de  son  beau-pere  porterait 
Icmpeieur  François  il  à  abandonner 
sa  politique  et  ses  intérêts  comme  sou- 

18. 


l'jS 


JOS 


veraln.  Durant  la  lullc  sanglante  qui 
marqua  la  lin  île  1813  et  les  premiers 
mois  de  1814,  les  soirées  de  la  Mal- 
maison  ne  se  passèrent  qu'à  faire  de 
la  charpie  pour  les  blessés  :  Joséplil- 
ne  se  livrait  activement  à  cette  pieuse 
occupation,  et  ses  libéralités  se  répan- 
dirent ,  par  les  mains   des  sœurs  de 
la  charité,  dans  les  hôpitaux.   Tou- 
chée de  commisération  pour  tous  les 
malheurs  ,  elle  prenait  un  vif  intérêt 
au  sort  du  vénérable  Pie  VII,   alors 
prisonnier  à  Fontainebleau.  Elle  pro- 
fita   de    Téloignement   de  l'empereur 
pour  envoyer  dans  cette  résidence  un 
agent  fidèle ,    chargé    de    lui    rendre 
compte,  dans  les  moindres  détails,   de 
la  situation  du    saint-père.   Pie  VII 
fut  singulièrement  touché  de  ce  bon 
souvenir  de  Joséphine  ;  11  reçut  son  en- 
voyé de  la  manière  la  plus  affectueuse, 
et,  dans  une  lettre  adressée  à  celle  qu'il 
regardait  toujours  comme  l'épouse  lé- 
gitime   de    Napoléon  ,    11   s'exprima 
ainsi  :  «  ^Madame,  les  gouvernements 
«  ont  toujours  montré  si  peu  de  scru- 
«<   pule  dans  la  manière  dont  ils  ont 
<f   satisfait  leur  haine,   qu'il  n'est  pas 
«   encore  permis  de  prononcer  sur  la 
«   conduite    de    votre    époux    envers 
«  mol.»   Au  mois  de  janvier  1814, 
elle  reçut  la  dernière  visite  de  Napo- 
léon. Le  29  mars  suivant,  lorsqu'elle 
eut  connaissance  des  préparatifs  de  dé- 
part  que  faisait  l'impératrice  Marie- 
Louise  pour  lilols,  elle  réoolul  de  se 
retirer  à  Navarre,  et  durant  ce  voya- 
ge  elle   eut  à  craindre  d'être  enlevée 
par   quelque  parti    de  Cosaques.  Ce- 
pendant   les   événements  se   précipi- 
taient ;    lionaparte  lui    avait  écrit  de 
iirienne  une  lettre  des  plus  tendres. 
t(   J'ai  cherché  dans  plusieurs  combats 
«    à  rencontrer  la  mort,  disait- il  ;  je 
«   ne  puis  la  redouter,  elle  serait  au- 
«<  jourd'hui  un  bienfait  pour   moi... 
«<   Mais  je  voudrais  revoir  une  seule 
«   fois  Joséphine...  »    Klic    ne    de- 


JOS 

meura  que  peu  de  jours  au  château  de 
Navarre,   les  souverains  alliés  l'ayant 
invitée  de  la  manière  la  plus  pressante 
à  quitter  cette  retraite  pour  revenir  à 
la  Malmaison.  Ce  fut  alors  qu'elle  re- 
cueillit de  toutes  parts  des  témoignages 
d'estime  et  d'intérêt,  juste  récompense 
de  la  modestie  et  dç  la  bonté  qu  elle 
avait  conservées  sur  le  trône.  Le  duc 
de  Berri  arrivé  à  Caen,  et  songeant 
aux  circonstances  qui  pouvaient  alar- 
mer l'ex-impératrice  à  Navarre  ,  en- 
voya le  comte  de  Mesnard  pour  lui 
offrir  une  garde  d'honneur;  mais  Jo- 
séphine en  était  déjà  partie.  A  son  re- 
tour à  la  Malmaison,    elle  vit  que  ses 
propriétés  avaient  été  respectées  ;  une 
garde  d'honneur  veillait  autour  d'elle  ; 
enfin  elle  se  trouva  au  milieu  d'une 
nouvelle    cour ,   formée   des    person- 
nages les  plus    marquants    de  l'Eu- 
rope. Le  roi  de  Prusse  et  l'empereur 
Alexandre   lui  témoignaient  les  égards 
les  plus  respectueux  ;  mais  c'était  un 
faible  dédommagement  pour  un  cœur 
navré  de  tant  de  douleurs.  Elle  dé- 
plorait  d'avoir  perdu  ses  droits  à  ac- 
compagner Napoléon   à   l'île  d'Elbe. 
«   11  est  malheureux,   s'écrlalt-elle,  et 
«  je  ne  puis  être  avec  lui  !  »  Elle  n'é- 
tait pas  moins  inquiète  du  sort  de  son 
fils  et  de  sa  fille.  Cependant   l'intri- 
gue s'agitait  encore  dans  la  petite  cour 
de   la    INIalmaison.    On   conseillait    à 
Joséphine    d'écrire    à  Louis   XVIII 
qu'elle,  jie  savait  ce  qu  elle  élail  (36), 
ce  qu'elle  avait   été,    et   qu'elle    le 
priait  de   fixer   son  existence.  L'em- 

(36)  Ivlle  vcii.iil  (IVlr^  viveinenl  ofCenstie  de 
ce  parasijplie  insirr  dans  le  Journal  des  Dé- 
bats :  «  L'friiipcieur  de  Russie  s'est  rendu  il  y  a 
<leux  jouis  iiii  <li;Ue.iu  d<;  Saint-Leti,  près  de 
Montmorency.  S.  M.  y  a  dîne  avrc  le  prince 
Eugène  ,  ta  nirre  et  sa  sœur.  »  —  «  Ne  pouvait- 
on  pas  parler  de  moi  avec  nn  peu  plus  de  res- 
pect, disait  Joséphine;  doisje  élre  ainsi  à  la 
suite  de  mon  fils  ?  J'ai  un  nom  ,  je  sui»  montée 
»ur  le  trône,  j'ai  été  couronnée  et  sacrée; 
l'empereur  Alexandre  m'a  protégée  spéciale- 
ment; aussitôt  qu'il  a  été  inaitre  du  pont  de 
Neuilly,  il  a  envoya  une  sauvegarde  à  la  Mal- 
uiai'nn.  » 


JOS 

txreur    AlnanJie    t'opposa    foiniri 
ement   i   ceUc    démiTchf  :    •«   (^Ite 
M   Irltie,    lui  tlit-il,  ilr\ifn(lrait  votre 
■   opprobre  ;  le  cur  Je   Uu^^ic  saura 
«   voiii    pioié^er    en\er5    el    contre 
«  lous.»    l).ins  une   autre    occasion, 
ce  prince  lui  dit   :  «<    Hr^ardex-moi  , 
«<    madame  ,     pour     \ous    ain^i    que 
«   pour  %o4  rp.r.iiits  ,  comme  un  au- 
•«   tre   Alexandre   pour    la  famille  de 
«   Darius.  ••  Malgré  c«  puissantes  con- 
solations, le   coup  mortri  était  porté. 
Ce  fut  en   revenant  de  Sainl-I^u,  où 
la  reine    llorten  e  a%ait    donné    un 
grand  dîner  aux  souverains,  que  Jo- 
scpliine  éprouva    un    malaise    univer- 
sel.   Son    mcdrcin    (M.   Iloreau)   lui 
ordonna  l'émrtique  ;  elle  parut  un  in- 
stant  soul.i^re ,    rt    reprit    ses    h.il)!- 
ludes  ;  mais  il  ôJait   facile    de  s'aper- 
cevoir  qu'elle    souffrait.    I.e   10   mai, 
l'empereur  .\le\andre  vint  dîner  ib  la 
Malma!<on  ;  elle  rest.i   dans   le  salon 
mal}:;ré   les    vi^es    souf.rances    qu'elle 
éprouvait.  On  fit  une  partie  de  barres 
après  le  dîner,  .sur  la  belle  pelouse  qui 
était  devant  le  palais;  elle  essaya  d'y 
prendre  part,  mais  ses  forces  la  trahi- 
rent, elle  fut  contrainte  de  s'avenir. 
L'altération   de  sa  fi-ure  alarma  tout 
le   monde,  bien    qu'elle   s'elforç.U  de 
sourire.   Le  lendemain  elle   voulut  en 
vain  faire  sa  promcn-ide  arrotitumée. 
Depuis  ce  jour- la  elle  nr  Gt  plus  que 
languir.  Cepend.int,  le  *JV,  m.-»I;;ré  la 
défense   de  son  mrdecin,  elle  se  lf\a 
pour   recevoir    le    roi    de    Prusse    et 
l'empereur  Alexandre ,    qui    dînèrent 
à   la    Malmaison.    Llle  se  mit  à    ta- 
ble ;  mais  la  violence  du  mal  l'obligea 
de  se  retirer  et  de   charf^er   sa  fille 
Hortense  de  la  remplacer.  Des  ce  mo- 
ment sa  malndie,  qui  était  une  esqui- 
nancie  cancéreuse,  prit  un   caractère 
de  plus  en  plus  sérieux.   Dans  la  nuit 
du  27  au  '28  ,   elle  reçut  les  secours 
de   la  relipon  ,   el  mourut  le  '29  i 
onie    heure:^    du    matin.    L'empereur 


JOS 


ni 


Alrxaiidf  se  promenait  triplement 
dans    les    allées    du    jardin  ,    tandis 

Su'Kugène  el  llortense  recefaienl  le 
emier  soupir  de  Irur  mère.  Klle  avait 
conservé  jusqu'à  la  fin  sa  pri-  <iii<- 
d'esprit  et  même  toute  son  arii<  i 
Apprenant  ravant-veille  qur  le  \)c\n- 
tre  hedouté  s'était  rendu  à  la  Mal- 
maison pour  dcNsiner  deux  belles 
rdantes  de  sa  serre,  elle  Ir  fit  wnir, 
ui  tendit  la  main,  puis  le  repou^sa 
doucement  en  lii  disant  qu'elle  avaii 
peur  que  »a  maladie  ne  se  ;;a^n.ii 
Son  corps  fut  déposé  dans  l'r-i -e 
de  Kueil  ,  et  tinivi  d'un  nombreux 
1  I  l'empereur    Alexandre  se 

i  lier  p.ir   le  général  Sack.en. 

I.  arclicM-que  de  Tours,  Barrai,  pre- 
mier aumAnier  de  la  défunte  ,  et  qui 
lui  était  totijouTs  resté  drvoué ,  pro- 
nonça l'orai.son  funèbre,  qu'd  fit  impri- 
mer ^:ï7.  Kn  1K22  *ps  enfantsobtin- 
rent  la  |>ermision  d'élever  dans  celte 
église  un  monument  (38)  à  leur  mnr, 
qui,  à  son  lit  de  mort,  pul  d;re  dVilr- 
raème  avec  vérité  :  «  I^  première 
«  femme  de  Napoléon  n*a  jamais  lait 
«  verser  une  larme.  »  On  doit  re- 
connaître que  Joséphine  mourut  i 
propos  :  car  sa  présence  eût  été  fort 
I  lule  en  France  :  au<si  son- 

i  se  retirer  en  Suisse.  I^s 
biuiuU^  plus  sinislrcs  counirent  sur 
cet  événement  :  on  parla  d'cmpoison- 
nemeiil  ,  m.iis  l'autopsie  du  corp>, 
qui  fui  embaumé,  prouva  que  sa  morl 

ét.iit   naturelle Maints  auteurs   de 

Mémoires  se  sont  exercés  sur  la 
\-ie  de  la  première  femme  de  Bo- 
naparte ,  à  laquelle  WallCT  Scott  a 
consacré  les  meilleures  pa;;es  de  son 
Ulstoire  (ir  ^'uftolrun.  Sans  par- 
>i^r  «les    Mrmoirrs  dr  .1/"'"   lu  dif- 


ftrtmmt 

r.  F.  c 


j0  ->. 


'   («r  Je«^hine  y  «i  représentée  en  inarbr.- 
blinc  .  k  fMioax,  Aatu  ftmiode  de  U  pnére. 


178 


JOS 


chesse  d'Ahrantès ,  qui ,  à  l'éf;;ar(i 
de  Joséphine,  ne  sont  qu'un  libelle  ; 
sans  s'arrêter  davantage  à  ceux  de 
M'  *  Avrillon  qui  sont  de  purs  bavar- 
dages de  femme  de  chambre,  on  peut 
citer  ceux  de  M"*  Ducrest  sur  José- 
phine et  ses  contemporains.  Ils  con- 
tiennent des  anecdotes  intéressantes  , 
et  sont  terminés  par  des  lettres  qui  pa- 
raissent authentiques.  Les  Mémoires 
de  Bourrienne,  de  Constant ,  de  M. 
de  Bausset,  etc.,  font  également  bien 
connaître  cette  femme  dont  la  place 
est  marquée  dans  l'histoire.  Quant  aux 
Souvenirs  de  M"*^  Lenormand  et  aux 
Mémoires  qu'elle  a  publiés  comme 
étant  de  cette  impératrice  ,  on  doit  ne 
les  lire  qu'avec  précaution  ;  mais  il 
est  juste  de  reconnaître  que  ces  deux 
publications  (39)  offrent  des  particula- 
rités curieuses  et  des  pages  véritable- 
ment écrites  de  la  main  de  Joséphine. 
En  1820  le  prince  Eugène  s'était  cru 
obligé  de  désavouer,  par  la  voie  des 
journaux,  un  autre  ouvrage  publié  à 
Paris  sous  le  nom  de  Mémoires  et 
correspondance  de  l'impératrice  Jo- 
séphine. <«  Je  remercie  l'auteur,  di- 
sait-il,  de  la  justice  qu'il  lui  rend  et, 
dans  les  lettres  qu'il  lui  attribue,  des 
sentiments  français  dont  elle  fut  tou- 
jours animée.  Je  déclare  cependant 
qu'd  n'y  a  pas  dans  ce  livre  une  seule 
ligne  qui  soit  réellement  de  ma  mère, 
de  ma  sœur  ni  de  moi  ;  pas  uneanecdote 
sur  ma  famille  qui  soit  conforme  à  la 
vérité.  »  En  1827,  on  a  publié  Les 
lettres  de  Napoléon  à  Joséphine 
pendant  la  première  campagne  d'I- 
talie, le  consulat  et  f  empire,  et  les 
lettres  deJoséphine  à  Napoléon  et  à 
.sa  fille,  Paris,  1833  ,  2  vol.  in-8". 
J)_n— R. 

(ig)  Voici  lo'S  titre*  de  ces  d<;ux  publications  ; 
X*  Souftntrt  prop/icli'juei  d'une  tibrtle  sur  let 
tauiti  fcrilei  de  son  arretlation  en  1809,  Pari» , 
i8i5,  i  vol.  in-8*;  a"  Mémiiret  /iiilon</uei  ei 
Mereti  de  Joiep/iine  (Maric-I\'><,e  T.ischpr  de  in 
Pagerie),  première  épntise  de  Napoléon  Dona- 
parte,  a*  édition.  Pari»,  1817,  3  toI.  in-S". 


JOS 

JOSQUIIV  DEPREZ,  regardé 
comme  le  plus  grand  compositeur  de 
son  temps,  et  comme  le  plus  habile  de 
l'école  Uamande,  naquit  en  Belgique 
vers  1450.  Il  fut  élève  d'Ockenhelm, 
sur  la  mort  duquel  il  composa  une 
Déploration  en  contre-point  et  canon, 
à  cinq  parties,  sur  le  plain-chant  de 
V Introït  de  la  messe  des  Morts.  Cette 
pièce  savante  et  singuHère  se  trouve 
dans  \' Histoire  de  la  musique  de 
Burnej ,  et  Choron  l'a  fait  graver 
dans  sa  belle  collection  des  classiques. 
Adami  da  Bolsena  dit  que  Josquin 
fut  chanteur  à  la  chapelle  pontificale 
du  temps  de  Sixte  IV,  c'est-à-dire  de 
1471  à  1484.  Il  fut  ensuite  maître 
de  chapelle  à  Cambray,  où  du  moins 
il  séjourna;  enfin,  il  fut  maître  de 
chapelle  de  Louis  XIL  Glaréan,  dans 
son  Dodécachorde,  imprimé  en  1547, 
le  nomme  le  Primarium  des  chan- 
teurs du  roi,  et  raconte  quelques  anec- 
dotes qui  prouvent  qu'il  le  fut  en  effet. 
Ce  priiice  lui  ayant  promis  un  béné- 
fice oublia  sa  promesse.  Josquin  , 
pour  la  lui  rappeler,  composa  un  mo- 
tet sur  ces  paroles  :  Memor  esto 
verhitui.  Le  roi  n'y  ayant  pas  fait  atten- 
tion, Josquin  en  composa  un  autre  sur 
ces  paroles  :  Portio  mea  non  est  in 
terra  viventium  (Je  n'ai  point  de 
partage  sur  la  terre  des  vivants).  Cette 
fois,  le  roi  comprit  le  sens  du  motet, 
et  donna  un  bénéfice  à  Josquin,  qui, 
pour  le  remercier,  composa  un  troisième 
motet  sur  ces  paroles  :  Bonitatem  fe- 
cisti  cum  servo  tuo,  domine  (Vous 
avez  usé  de  bienfaisance  envers  votre 
serviteur,  etc.);  mais  Glaréan  remar- 
que que  le  désir  l'avait  mieux  inspiré 
que  la  reconnaissance,  et  que  son  der- 
nier motet  ne  valait  pas  le  précédent. 
Tous  les  écrivains  de  cette  époque  s'ac- 
cordent à  reconnaître  en  lui  les  dons  de 
la  nature  et  de  l'art  :  riche  invention , 
connaissance  approfondie  des  règles  et 
de  toutes  les  ressources  de  la  corapo- 


JOS 

plo>rr.  //  est,  tlift^nl-iU,  U  mailre 
des  note %;  il  en  fait  te  tfuil  vrut^ 
et  tes  autres  en  font  ce  qu'il.i  prU' 
K*ent.  .M>is;rf  «An  talent  ri  sa  fjrilité, 
Jn«quin  soignait  Mn:;itltrrrmenl  %e\ 
<  '  t  ne  s*  |»rrs>ail  point  de  lei 

,  I     r*!  i  U  n  limon  île  taiil  i!e 

c^uM-i  t^îi  •?«!!* 

snlMlîfft!-  ^  f on- 

à  i<H 

I        .  aj»|»utr 

leurs  prereples  de  son  auionir  et  de 
ses  eKpmplet.  F — LK. 

JtISSAX  (DitDRT  de),  inln- 
);ant  adroit  et  •^iritnel,  néàSlrasbour;; 
en  I7H3,  dall,  »'il  fanl  s'en  rappor- 
ter auT  chrnniqnes  du  temps,  fils  na- 
turel de  M'""  I*efou\reur  et  «l'un  rere- 
▼eur  •'  '  t 

Il  p. 


JOS 


^79 


i^ui5  de  iuitiaii,  li  •  e 

heure  ce.»  manirresi;'"  s 

qui  tiennent  lieu  de  ineriie  a  plus  d  un 
homme  du  monde.  Il  ^ut  pa^^ver,  satis 
effort,  des  valons  de  Strasbourg  dans 
les  cercles  brillants  de  la  capitale  :  son 
esprit  naturel  et  rulii\(*  le  fit  admettre 
dans  la  société  des  ;;rands  et  de  quel- 
ques dames  qualifiées  qui  le  prAnrrent. 
Parmi  ses  protecteurs  les  plus  chauds, 
il  compta  le  duc  de  (jliarires,  le  duc 
d'Ai^utlIon  ,  et  suttoul  le  prince  de 
^lontbarre>.  Il  devint  le  négociateur  de 
l'union  projeti-e  de  b  filio  d**  ce  minis- 
tre avec  le  prinre  lié:  rdilaire  de  Nas- 
sau-SarbrucL  Le  mini>tre  l'en  récom- 
pensa en  le  faisant  nommer  s>ndic- 
adjoint  de  la  ville  de  Strasbourg,  pour 
remplacer  Gérard  qui  tenait  d'être 
chargé  d'une  mission  diplomatique. 
Cependant  le  prince  de  Monibarrev 
a  fait  ,  dans  ses  Mémoires,  un  por- 
trait peu   flatté  de  Jn<;san.  ««   Vu  nom- 

(i)  P^u*  €U  Paru  dttoiUe,  par  Manu'l,  Pa- 
n*.  1791,1001.  I.p.  iS^. 


«  bre  de  mes  affidés  était  un  hoim- 
«  rae  plein  d'esprit  et  de  connais- 
«  sances,  né  en  .Vlsace,  dont  l'edu- 
«  eaiion  avait  été  treN-cultivée,  mats 
M  dont  les  besoins  (ournaliers  et  les 
«•  fantai^iies  avaient  toujours  excédé  Ict 
«  reniens  réels,  et  qui  pour  les  satit- 
«  (airr  s'était  voue  a  l'intri^ae...  Cet 
«    liommr,  >  •  •- 

«    blei  et  h  i 

■   intéressant,  a^^ii  l».tn  oufl<jur,   ju 

•  con\enient«  procrdanl  de  l'inimora- 
«   l.ir  dr  son  carartrre    et    de  l'rspecc 

•  de  liaisons  qu'indifféremment  et 
«  soccrs*i\fment  il  avait  entretenues 
«  avec  toutes  les  classes,  sans  distinc- 
«  tion.  Mais  ces  le^er»  défauts  étaient 
m  rachetés  par  une  ileiibdité  de  priii- 
«   ripes  qui   le  rendait    propre  à  tous 

rAles.    »•    Il    parait    que   celte 
té     fut   portée  fort    hun  ;    car 
le    pi  tnce  ,   dans  la    confession   qu'il 
fait  de  son  p«^r'tant  po  ir  les  femmes, 
avoue  que  fri   lui  ménagea 

quelques  r»  ^  a:^réables  dans 

ce  {jenre.  I^r-iqne  M.  de  Montbarrey 
quitta  le  ministère  ,  Jossao  ,  que  le 
corps  municipal  de  Slrasbourp  avait  vu 
avec  peine,  ne  conserva  pas  son  em- 
ploi. Il  alla  se  fiier  à  Parts  où  il  devint 
l'agent  des  princes  de  Nassau  ,  de 
IIcssr-Darmstadt,  etc.  Il  selia  a\ec  les 
pens  de  lettres  et  i^a^na  surtout  l'affec- 
tion de  lieaumarcliais.  Toute  l'Kurope 
a  retenti  du  scandale  qu'orcasionna 
le  procès  en  adultère  qui  lui  fut  in- 
tenté par  le  banquier  Kornmann,  cliei 
lequel  il  avait  été  présente  par  le  baron 
de  Spon.  premier  président  du  ronseil 
souverain  d'.Klsace.  Notre  liio^rafliie 
a  rendu  un  compte  détaillé  de  celte 
afTaire  [Voy.  Berga-VK  ,  LVIII  , 
4J  l.').  Kornmann  perdit  son  pro- 
cès ,  après  avoir  amusé  le  public  ^ 
ses  dépens  ,  pendant  plusieurs  an- 
nées. Ouoique  l'avocat  ,  dans  ses 
facturas  "  eût  tracé  un  tableau  hi- 
deax  de  la  vie  privée  de    Jossan,  le 


:>8( 


JOS 


JOS 


inonde  continua  de  ne  voir  que 
l'homme  aimable  dans  le  séducteur 
de  M"''"  Kornmann  ,  et  sa  réputation 
ne  soufirit  que  médiocrement  des  atta- 
ques qui  lui  avaient  été  portées  par 
un  si  rude  adversaire.  Bientôt  Téclat 
de  ces  débats  scandaleux  alla  se  perdre 
dans  le  retentissement  de  nos  premiers 
orages  politiques.  Dès  ce  moment 
Jossan  semble  s'effacer  ;  mais  il  y  a 
lieu  de  croire  qu'il  partagea  le  sen- 
timent de  répulsion  de  ses  protecteurs 
pour  une  réoénération  sociale.  Ce 
qu'il  y  a  de  remarquable,  c'est  qu'à  la 
même  époque,  Kornmann,  sa  partie 
adverse,  fut  porté  au  nombre  des  pre- 
miers représentants  de  la  commune  de 
Paris.  La  haine  de  Jossan  contre 
Necker  avait  d'ailleurs  éclaté,  quel- 
ques années  auparavant,  par  la  pu- 
blication d'une  prétendue  Lettre  du 
marquis  CaraccloU  à  M.  d'Alem- 
hert,  Londres,  1781,  in-4°  et  in-8^ 
Cet  écrit,  dans  lequel  Necker  était  cruel- 
lement maltraité,  avait  été  composé 
par  le  général  Grimoard  ;  Jossan  y 
fil  quelques  additions  ,  pour  le  ren- 
dre plus  incisif.  Il  s'était  d'abord 
fait  connaître  par  des  critiques  fort 
ingénieuses  sur  le  salon  (i2).  Mais  ces 
succès  éphémères  n'ont  laissé  aucune 
trace.  L'esprit  d'intrigue  étouffa  chez 
lui  des  germes  de  talent  qui,  dévelop- 
pés par  la  culture  et  le  travail,  eussent 
pu  lui  procurer  une  célébrité  moins  fâ- 
cheuse. Outre  les  défenses  qu'il  publia 
dans  son  procès  en  adultère,  on  a  de 
lui  une  Lettre  a  M.  liergassr,  i7S7 , 
in-4".  Ce  fut  lui  qui  fournit,  en  partie, 
les  matériaux  dont  lîeaumarchais  se 
servit  pour  son  Mémoire  en  réponse 
au  libelle  dlffdmaloire ,  signé  (iuil- 
laume  Kornmann.  L — M — x. 

JOSSE  (Louis)  ,  né  à  Chartres, 
vers  la  fin  du XVII''  siècle,  fut  pourvu 


'2)   M*inoir«s  lacreti  pour  stin'r  n  /'IJntoue  J» 
la  ripubl'qat  ii*i    htirt*  ,  toin    XIV,    iS  crtobrt 


d'un  canonicat  à  l'église  cathédrale  de 
cette  ville.  S'étant  rangé  parmi  les 
opposants  à  laconstitution  Unigenitus, 
il  fut  frappé,  en  1729,  d'une  lettre  de 
cachet  qui  l'excluait  du  chapitre  ca- 
pitulaire,  avec  le  doyen  et  quelques 
autres  chanoines.  Le  motif  apparent  de 
cette  mesure  était  l'appel  qu'ils  avaient 
interjeté  de  la  bulle  au  futur  concile^ 
mais  la  cause  réelle  était  leur  résistance 
aux  entreprises  de  l'évêque  (du  Mous- 
tiers  deMérinville),  qui  voulait  s'empa- 
rer de  l'administration  de  l'Hôtel-Dieu, 
aupréjudicedes  droits  du  chapitre.  Dans 
sa  retraite  forcée,  l'abbé  Josse  tradui- 
sit en  français  VArgenis  de  lîarclay  , 
roman  allégorique  dont  la  vogue  extra- 
ordinaire commençait  à  se  passer.  JI 
fit  paraître  cette  version  nouvelle  à 
Chartres,  1732,  3  vol.  in-12.  Par  une 
impartialité  bien  rare,  les  journalistes 
de  Trévoux ,  qui  avaient  suivi  d'au- 
tres bannières,  n'en  firent  pas  inoins 
l'éloge  de  ce  travail  :  «  Le  traducteur 
«  a  certainement  du  génie,  de  la  vi- 
«  vacité  et  de  l'élégance  dans  son 
«  style.  Parmi  les  vers  français  qui 
«  rendent  la  poésie  de  Poriginal ,  on 
M  en  trouve  un  grand  nombre  qui  nefe- 
«  raient  point  déshonneur  aux  maîtres 
«  de  l'art  (1).  »  Tout  en  rendant 
justice  au  traducteur  ,  le  caustique 
Lenglet  JJufresnov  observe  «  qu'il 
«  aurait  été  à  souhaiter  que  M.  l'abbé 
«  Josse,  homme  d'esprit,  eût  exercé 
«  ses  talents  sur  un  ouvrage  moins 
«  ennuyeux  et  plus  généralement 
«  utile.  »  On  doit  encore  à  Josse 
unt  Dissertation  sur  l'état  du  com- 
mère, en  France ,  sous  les  rois  de 
la  première  et.de  la  seconde  race  , 
Paris,  1753,  in-12,  qui  obtint 
l'accessit  au  concours  ouvert  sur  cette 
question  par  l'académie  d'Amiens. 
On  a  cru  qu'il  avait  eu  quelque  part 
à  des  pamphlets   contre   Téveque   de 

(1)    lifiimoires  pour  l' histoire  tff s  srtincfs  ri  rlt^ 
htaui-ott'.  avril,  17?»,  p.  S55. 


JOU 

(.luiirf^,  entre  aulrfs  au  Mandr- 
mrnt  m  vrrs  fiurlrsifurs  sur  lu  mi.^- 
uon  ilr  Miinlrs,  1717,  in-l*i.  Mais 
>4  f(wpriallnn  à  df  parnl*  rfrils  e^l 
au  rooint  (loulrti<^f .  I.r  nrrroli)(;f  de 
la  Kiatire  lilirraire  nefailpatcdiiuailre 
la  «latr  ilr  s.i  innri.  \. —  M — \. 

JOriiMUT  losKPii\  ir^ulte. 
ne  à  l.«on,  e^t  ronnu  yir  son  Diffinn- 
nnirr  français- Iii/iti^  iirr  tirsouirurs 
oriffinau.i  rt  ctassitjues  lif  Tunr  rt 
<lr  Cautrrlangur,  I,>on,  1709,  i»-i", 
ilud  ,  17'i:i.  Clet  ouKrape,  autrefois 
rsliiné  et  dipne  de  l'être,  n'a  plu«  co«r\ 
»lrpuis  Ifs  travaux  plus  complets  de 
N  '  !,  (le  \N  aillv  ,  etc.  Jouhcrt  com- 
;  <Mi  Dictionnairr  au  collè^i^e  de  la 

l  ifde  I^\on,  où  il  fut  longtemps 
M  t  des  basses  classes  et  où  il  mou- 
lul,  suixant  (x)lonia,  le  î20  février 
1711»,  suivant  Feller  et  Sahatier, 
▼ers  172i.  N  ov.  sur  ce  Dittumnairt 
les  Mrinttirrsdr  '/rr^oii-r.  avril  1710, 

pa^    li'iltetsuiv On  a  du  l*.  Jou- 

bert  quelques  panê;;vriques  imprimés 
sous  un  autre  nom  ipie  le  s  rn.  C'est 
une  chosf  asseï  sini;ulière  que  ce  père, 

3 ni  excellait  pour  le  choix  des  roots  et 
e  la  plira.se,  eut  un  as:,ei  mau\ais 
stxle  dans  ses  compo>itions  .Coloma  , 
llist  iitt.,  tom.  XI  .  p  7-2(»V  C'est 
Joubert  qui  sut  inspirer  l'amour  de  la 
poésie  laline  à  l'auleur  dit  Prtrhiun 
rusfirum  (/'o>.  VATtiFRE,  XI.VII, 
451).  C-i-T. 

JOl'BKUT  l'abbé  Fw^wçoi^ 
de\  i  peine  mentionné  par  un  petit 
nombre  de  bio^raplies,  naquit  à  Mont- 
pellier le  12  orl.  16S1),  aîné  des  qua- 
tre fiis  d'André  de  Joubert  ^1),  sjn- 


'  I     André  fie  Jnul>«rt  était  priitTiU  d'Itasc  «t 
•rrir-rr-priit-filtdc  l^nreni  (^'•r.  Jntatir.  XXM. 
44      On  (•«•«t    au«*i   (oo^ulier.  Han*  U»   rrcari'a 
tir   l'jt  .«demie    my^Ir  de«   «riencr«  dr  Montpel- 
lier. \''  l'-"*  de  Rrne-(;.i«panl  dr  Jnabert,  »yil. 
,  l'un  dci    frères  puî- 
.  prononcé  en    i»8r , 
.    .  ddiis    le»  ÉlogtB    dit 
t^\dt-ui  fu  dt    '/"  .t^'iiitr  publiéi  »n  ilii  par 
l'harnn  de»  Oerei't».  f  ta!    il  »». 


JOt' 


iRi 


dic-général  des  états  de  Ijïn;;uedoc. 
Dés  l'i^e  de  cinq  ans  ,  la  survivance 
de  cette  charge  lui  fut  accordée  ; 
plus  tard  il  fut  admis  à  m  partager  les 
lonctions.  mais  venu  à  PariN,  en  1710, 
avec  son  père  qui  était  de  la  depulalion 
des  états,  et  frappé   de  la   mort   très- 

Iiioiiij'tr  d'un  de  «es  ami',  i!  t  retira  à 
'Oratoire,  puis,  trois  ans  après,  il  re- 
nonça à  sa  cbar,;e  pour  entrer  au  sé- 
roinaiie  de  Sainl-^iaploire.  C'e»t  par 
les  conseils  et  soa*  la  direction  de 
l'abbe  Du^et  qu'il  avail  pri»  et  «oiii 
cette  destination.  Oidonné  prêtre  en 
17*iH,  il  fut  cliar;;é  des  conférences 
sur  rKcriliire-Sainte  qui  se  faisaient  ï 
Sainl-Ktienne  du  Mont.  C'était  après 
l\olliti  qu'il  s'acquittait  de  cet  emploi, 
expliquant  les  Kcrituir»  avec  lumière  et 
onction,  et  donnant  les  premiers  essais 
de  l'ouvrage  qu'il  publia  il.ins  la  sufe 
sur  les  prophéties  dc.lérémie,  F.rérhiel 
et  Daniel  \'ï\  l'ne  maladif,  puis  un 
événement  impréxii  mirent  fin  à  ces 
eiercices.  I.'abbé  de  Joubert  était 
ont  à  des  amis  et  à  on  cler;;é  suspects 
de  jansénisme  ;  il  mena't  nne  rie  oc- 
cupée et  retirée  ;  enfin ,  pendant  sa  con- 
valescence, il  s'amusait  i  ran;er  ?es 
papiers  et  à  brûler  ceux  qui  lui  étaient 
in'itilcs  :  ces  diverses  circonstances, 
nnl.immenî  la  dernière,  rapportée^  au 
lieutenant  de  police  Hérault,  exci- 
tèrent ses  soupçons.  On  faisait  alors 
d'aclives  rtcherches  pour  découvrir 
l'auteur  des  Xoucrllrsrrrlrsiastiqttrs. 
fnterro;;é  s'il  connais^sait  cet  auteur, 
Joubert  répondit  né;;ativement,  et  n'en 
fut  pas  moins  conduit  h  la  liastille  le 
1  %  nov.  1730.  Il  en  .sortit  le  '21  dcc. 
suivant  par  les  sollicitations  dc>  amis 
de  sa  famille;  mais  le  '27  on  lui  si- 
^fia  une    lettre  de  cachet  qui  le  ren- 

(>)  Ô^|>eut  lire  ace  »ujel  une  lettre  adre*»ee 
«o  1-44  à  Vuhbé  de  Jo.il^ri  par  Jrao-Charle» 
deSëcur  l'or  ce  nom,  XI. I  .  474:,  ancien  e»*- 
qne  d.-  Saint'Pjpoul.  et  iiiprimee  en  1740  «'an» 
l^^A-e^fe  é,  I»  M#  de  ce  prcUt.  connu  par  »on 
oppoiilion  à  U  bulle  Imgtwtus  .  opinion  qae 
I  ait>g'*tt  l'abh     •      'ojl)ert. 


282 


JOU 


voyait  à  Montpellier.  Son  séjour  n'y  fut 
pas  long-  Tair  du  pays  ayant  affai- 
bli sa  santé,  il  obtint  la  liberté  d'aller 
où  bon  lui  semblerait,  pourvu  qu'il  se 
tint  éloigné  de  Paris  de  trente  lieues. 
11  choisit  la  ville  de  Troyes  où  nombre 
de  ses  amis  vivaient  en  paix  sous  la  pro- 
tection de  révéque  Dossuet.  Après  y 
avoir  séjourné  trois  ans,  il  eut  enfin  la 
permission  de  retourner  à  Paris,  et  il  y 
passa  le  reste  de  sa  vie  dans  la  prati- 
que des  vertus  de  son  élat.  Trois  an- 
nées de  souffrances  précédèrent  sa  mort 
qui' arriva  le  29  déc.  1763.  Quatre 
ans  après ,  les  iSoupelles  ecclésias- 
tiques ,  cause  indirecte  de  ses  dis- 
grâces ,  lui  consacrèrent  un  long  ar- 
ticle auquel  nous  avons  emprunté 
plusieurs  détails:  nous  y  joindrons  la 
liste  de  ses  nombreux  ouvrages  telle 
qu'elle  se  trouve  à  la  suite  d'une  œuvre 
posthume  imprimée  en  1786,  parles 
«oins  de  sa  famille  A.  De  la  connais- 
sance des  temps  par  rapport  a  la 
religion  :  «  le  soir  vous  dites ,  iljeî-a 
beau,e[c.j  »  1727.  II.  Explication 
de  l'Iiistoire  de  Joseph,  selon  les  di- 
vers sens  que  les  saints  pères  y  ont 
aperçus,  avec  une  dissertation  pré- 
liminaire sur  les  sens  figurés  de  l'E- 
criture, 1728,  in-12.  III.  Traité 
des  caractères  essentiels  à  tous  les 
prophètes  (la  3^  partie  renferme  des 
Eclaircissements  sur  Job] ,  1 74 1 ,  in- 
12.  \\ .  Trois  Lettres  sur  L'interpré- 
tation des  saintes  Ecritures,  1744, 
in-12.  V.  Explication  des  principa- 
les prophéties  de  Jérémie,  d'Ezé- 
chiel  et  de  Daniel,  disposées  selon 
tordre  des  tetnps,  Avignon  (Paris), 
1749,  5  vol.  in-12.  VI,  Critique 
sommaire  de  CAhrégé  chronologique 
de  f  histoire  ecclésiastique,  imprimé 
chez  Hérissant ,  1751.  VU.  Com- 
mentaire sur  les  douze  petits  prophè- 
tes,  Avignon,  17r>V17r>9,  6  vol. 
in- 12.  Vill.  Commentaire  sur  l'A- 
pocalypse, ibld.,  1762,  2  vol.  in-12. 


JOU 

IX.  Les  Psaumes  des  vêpres  du 
dimanche ,  1786  ,  in-12.  Tous  ces 
divers  ouvrages  dont  plusieurs  furent 
estimés  dans  leur  temps  attestent  une 
grande  connaissance  des  Ecritures, 
mais  la  plupart  sont  empreints  des  opi- 
nions que  l'auteur  avait  embrassées. 
J.'arlicle  déjà  cité  des  Noui>elles  ecclé- 
siastiques parle  en  outre,  mais  sans 
détail ,  de  publications  que  l'abbé  de 
Joubert  crut  devoir  faire  à  propos  de 
Véoènement  des  convulsions  :  de  ce 
nombre  était  sans  doute  la  Disserta- 
tion sur  les  effets  physiques  des  con- 
vulsions ,  paiticulièrement  indiquée 
dans  quelques  dictionnaires — Joubert 
de  Beaupré  (l'abbé  Jean-Baptiste 
de),  le  plus  jeune  des  frères  du  précé- 
dent, né  en  1701  à  Montpellier,  et 
qui  y  mourut  en  1791  avec  une  grande 
réputation  de  vertu  et  de  savoir,  avait 
eu  la  principale  part  à  la  composition 
de  deux  ouvrages  de  piété  fort  répan- 
dus dans  le  diocèse:  l'un  est  intitu- 
lé :  /e  Propre  des  saints  de  f  église 
cathédrale  et  du  diocèse  de  Mont- 
pellier, et  a  été  réimprimé  plusieurs 
fois,  format  in-12,  notamment  en 
1773,  avec  des  prières  chrétiennes  en 
forme  de  méditations  sur  les  princi- 
pales fcles  du  diocèse.  L'autre,  inti- 
tulé: Office  pour  la  fcfe  des  mi- 
racles de  Notre-Dame  des  Tables, 
qui  se  célèbre  dans  l'église  pa- 
roissiale de  ce  nom  (à  Montpel- 
lier) le  31  août,  fut  imprimé  eu  1172, 
à  Montpellier  ,  1  vol.  in-12.  Pios- 
set  ,  conseiller  à  la  cour  des  comptes, 
connu  dans  la  littérature  par  le  poème 
de  l'Agriculture,  composa  une  prose 
et  deux  hymnes  en  vers  latins  pour 
la  messe  de  cet  office.  C'est  ce  qu'in- 
diquent les  initiales  suivantes  P.  F.  R. 
(par  Fulcrand  Piosset)  qui  marquent 
ces  trois  morceaux.  Le  même  auteur 
avait  également  fourni  des  hymnes  et 
des  proses  pour  le  Propre  des  saints, 
mais  sans  les  indiquer  par  des  initiales 


JOU 


JOU 


«m 


ni  d*auciia«  luIre  manièrf . — Joibfiit 
[P/n/ippr-lMtiirrnt  df  ^ .  baron  df  Soin  - 
nicrcs  fl  de  Munlirdon,  el  ue\tn  de* 
précc«Jent5,  sticcrda  d'abord  i  »on  p«re 
(I«jurenl-I;;nare)  (J),  dan*  la  char|*e 
dr  [irnident  en  la  rour  des  comptes 
ri  hnanres  de  Montpellier,  pui&  ,  en 
1777,  oblinl  celle  de  tr^^orier  des 
riats  de  I  jn^urdoc  vacante  par  la  mort 
d'un  de  ses  oncles  materneU.  I/opu- 
Irnce  (]u'eile  lui  procura  fut  favorable 
a  son  ^oût  pour  les  sciences  et  1rs  artt. 
On  peut  voir  à  Tarltrle  (Juiptal  lora. 
I.\,  p.  %'\\)\  ce  qu'il  fil  pour  le*  dé- 
buts de  ce  célèbre  clumisle.  Ce  fut  éga- 
lement lui  qui  prépara  les  succi-s  da 
peintre  Fabre  ,  de  Montpellier,  en- 
vové  et  élevé  par  ses  soins  à  Koroe,  et 
revenu  avec  de  riches  collections  dont 
son  pa^s  natal  a  profité,  llien  d'autre* 
artisle.N  durent  à  .loubert  les  .secours  et 
les  encouragements  les  plus  utiles.  Il 
emplo\a  \\  icar  à  dessiner  les  rbefs- 
d'ieu\re  de  peinture  et  de  sculpture 
que  I  enfermait  le  palais  Pitti  ,  et 
c'est  ce  qui  donna  origine  à  la  col- 
lection connue  sous  le  nom  de  (mlrrie 
tU  Fiarriirr.  publiée  en  i8  livralsont. 
Les  23  premières,  eiposées  en  1H()2, 
obtinrent  la  nieilai I le  d'ori. l'or-  Mas- 
nrmtR,  XWII,  397),  et  le  junr 
motiva  celte  distinction  sur  la  Iteuutê 
lie  Foucntpr  ,  fun  des  />///t  cunsi' 
deruiilrs  de  la  lihrairie  et  le  plus 
parfait  dr  rruv  du  mè/nr  ftrnre. 
Ce  (ul  en  1813  ,  par  les  soins  de* 
lieriliers  de  Joubert,  que  se  termina 
celle  belle  entreprise  qui  remontait  à 
1787,  et  dont  il  n'avait  \\i  (|ne  les 
commencements,  étant  mort  à  Paris  le 
30    mars  179*2.    Il  élail   des   acadé- 

(3)  On  doit  à  ce  maxiatrat  t  Jmfrmemi  im^mr- 


lis' 


M 

UU«  de  Jm 


f^r^f  4-    kr^f 


blie   à 
0114  le 


•r-' 


nies  de  Montpellier  ,  de  Toulon - 
se  ,  et  correspondant  de  l'académie 
des  sciences  de  l'ans.  Ou  trouve,  dans 
les  mémoires  de  celle  dernière  (années 
177ieti779'  trois  dissertations  de 
Joubert  sor  des  sajets  d'bistoire  na- 
turelle. C— h — K. 

J  (H    H  K  K  T  (JmF.PiO,  ancien 
in  .  ^  .  "rr  de  Tu- 

n  'i  (dépar- 

lerocitl  de   1a    Doidti^itc),    le    (>    mai 
17.'ii.   V  quat-'-rr  in-,  tl  a\3-t  trrm-rîé 
ses  études.    I 
V  étudier  les  i 

des  lettre^,  et  entra  d  abord  dans  la 
con^^ie^aiion  de  la  ïhtctrine ^  où, 
sans  prononcer  de  vcrux,  il  professa 
quelaues  classes  avec  distinction.  Mais 
la  délicatesse  de  sa  constitution  l'ayant 
forcé  de  renoncer  i  l'enseignement,  il 
>iiil  à  Paris,  à  r.i^e  de  *in'^l-deux  ans, 
et  ne  larda  pas  à  être  introduit  et  re- 
maripié  d.vns  la  soceté  drs  hommes  de 
lettres  du  temps.  Il  connut  Diderot, 
d'.Membert  ,  Marmonlcl  ,  I^liarpe  , 
Uivarol  ,  et  contraria  avec  Konlanes 
une  liai>»on  que  la  mort  seule  a  pu 
rompre.  'rou>  \t\\\  vécurent  ,  jtuqu'en 
1790.  dans  une  étroite  communauté 
de  sentiments  et  d'idées.  A  cette  épo- 
que, Joulierl  élu  par  ses  compatriotes, 
et  sans  l'avoir  sollicité,  juc;c  de  paii 
du  canton  de  Monli;inar  ,  ne  crut  pas 
pouvoir  refuser  ce  temoijna^e  d'estime. 
Il  exerça  pendant  deux  .ins  celle  ma- 
;;istrature  a\rc  le  lèle  et  l'ardeur  qu'il 
apportait  dans  ^accomp!l^sement  de 
tons  ses  devoirs.  Ce  ne  fut  qnapres  le 
9  thermidor  qu'il  re>inl  à  Pans.  Oiiel- 
qiies  années  plus  tard  ,  Fontancs  qui 
s  était  lié,  à  Londres,  avec  .M.  de  Cha- 
teaubriand, voulut  qu'à  son  tour  Jou- 
b«Ql  devînt  son  ami.  Plusieurs  passades 
des  rruvres  de  notre  ^rand  écrivain 
témoijinent  de  la  tendre  et  profonde 
affection  qui  l'unit  en  eflel  à  Joubert. 
iJi  ne  se  bornaient  pas  les  amitiés  il- 
lustres  que  celui-ci  comptait  dans   la 


284 


JOU 


vie.  Le  charme  de  sa  conversation,  les 
aperçus  pleins  de  finesse  et  d'éclat 
qu'il  y  répandait  avec  une  profusion, 
une  urbanité  dont  les  modèles  com- 
mençaient à  devenir  rares,  attiraient 
autour  de  lui  les  hommes  les  plus  dis- 
tingués et  les  femmes  les  plus  spiri- 
tuelles. Personne,  depuis  J)iderot,  n'a- 
vait porté  à  un  plus  haut  dc;;ré  l'art 
de  captiver  son  auditoire  :  Joubert 
avait  toutefois  sur  Diderot  de  o;rands 
avaiilaf^cs  ,  une  haine  constante  pour 
le  sophisme  et  un  culte  religieux  pour 
la  vérité.  Sa  mort,  arrivée  le  4  mai 
182i,  fut  pleurée  par  tous  ceux  qui 
l'avaient  connu.  La  nature  de  son  es- 
prit et  l'extrcme  délicatesse  de  sa  santé 
semblent  lui  avoir  interdit  les  longs 
travaux.  Il  n'avait  publié,  pendant  sa 
vie,  que  quelques  articles  non  signés 
dans  les  journaux.  Mais  il  a  laissé  un 
nombre  très-considérable  de  réflexions, 
de  maximes  et  de  pensées  écrites  au 
cravon,  et,  pour  ainsi  dire,  en  courant, 
sur  de  petits  cahiers  qui  se  sont  heu- 
reusement conservés.  En  1838,  M'"^ 
Joubert,  sa  veuve,  sentant  sa  fin  ap- 
procher ,  confia  à  M.  de  Chateau- 
briand, qui  voulut  bien  l'accepter,  le 
soin  d'extraire  et  de  faire  imprimer 
quelques  portions  de  ces  matériaux  en 
désordre.  Malheureusement  elle  ne  les 
avait  réunis  qu'en  partie,  et  les  pro- 
grès rapides  de  la  maladie  faisaient  à 
l'illustre  éditeur  la  loi  de  terminer  ce 
travail  à  la  hâte.  Le  volume  qui  ren- 


ferme les  P 


de  Joubert,  tiré  à 


un  très  petit  nombre  d'exemplaires,  et 
distribué  seulement  à  quelques  amis  , 
suffit  pour  donner  une  haule  idée  de 
l'esprit  et  de  l'àme  de  son  auteur. 
Mais  on  y  trouve  un  grand  nombre  de 
fautes  typographiques,  d'erreurs,  d'ob- 
scurilés  ou  de  redites,  (|ui  seraient  de 
nature  à  compromettre  son  succès , 
.s'il  était  livré  à  une  véritable  publicité. 
On  .s'occupe  en  ce  moment  d'une  édi- 
tion plus  complète  et  plus  châtiée  de 


JOU 

ces  Pensées.  J^e  travail  en  est  achevé, 
et  quelques  lectures  entendues  par  ce- 
lui qui  écrit  ces  lignes  l'autorisent  à 
prédire  que  Joubert  prendra  bientôt 
un  rang  très-élevé  parmi  nos  écri- 
vains spiritualistes.  F — le. 

JOUFFROV  (François-Gas- 
pard de),  évêque  du  Mans,  de  la  même 
famille  que  l'inventeur  des  bateaux  à 
vapeur  {Voy.  l'article  suivant),  mais 
d'une  autre  branche,  naquit  en  1723, 
au  château  de  Gonsans  près  de  Besan- 
çon. Après  avoir  achevé  ses  études 
théologiques  d'une  manière  brillante, 
il  entra  dans  les  ordres  et  fut  pourvu 
d'un  canonical  au  chapitre  noble  de 
Saint-Claude.  Nommé,  en  1774,  à 
l'évêché  de  Gap,  il  fut  transféré,  en 
1778,  à  celui  du  Mans,  où,  dit  un 
biographe,  il  fit  beaucoup  de  bien.  Il 
s'occupa  d'abord  de  rétablir  l'ordre  et 
la  paix  dans  son  diocèse;  mais  il  ne 
put  y  parvenir  qu'en  unissant  à  la  pa- 
tience une  grande  fermeté.  Désirant 
ranimer  le  goût  des  fortes  études  dans 
son  clergé,  il  institua  des  concours 
pour  les  cures  qui  ne  furent  plus  don- 
nées qu'au  talent  et  au  mérite.  Député 
aux  états-généraux  en  1789,  il  fut  du 
nombre  des  prélats  qui  protestèrent 
contre  les  décrets  de  l'assemblée  con- 
stituante, et  se  retira,  vers  la  fin  de 
1792,  à  Paderborn  en  Wesiphalie, 
dont  le  chapitre  était  uni  par  des  liens 
de  confraternité  avec  celui  du  Mans 
depuis  plusieurs  siècles.  Il  fut  accueilli 
par  les  chanoines  de  Paderborn  avec 
les  égards  dus  à  son  rang  et  à  sa 
position.  Un  revenu  de  douze  cents 
florins  lui  fut  assigné  sur  la  mensc  ca- 
pitulaire;  et,  comme  il  était  naturelle- 
ment économe,  il  se  trouva  assez  riche 
pour  venir  au  secours  de  ses  compa- 
triotes plus  malheureux  que  lui.  Ce, 
respectable  prélat  mourut  dans  l'exil  en 
1797.  M.  P,  Renouard  lui  a  consacré 
une  notice  à  la  fin  du  2"  vol.  de  ses  £"5- 
sais  historiques  sur  le  Maine.  W — s. 


JOU 

.ica  FFIIOY  itAhlnins  (Cl^i- 
l>r.F«ANÇoisl)iinoTiii.l,  marquis  àr  , 
rminnu  ju|uiiril'liui  pour  l'un  tirs 
lionimrs  qui  ont  po^scJé  au  plu«  luut 
drf;ic  le  ;;emc  de  la  mfcaDiquc  et  pour 
le  véritable  inventeur  de*  p>io&raptiej, 
bateaui  à  vapeur,  était,  ainsi  que  l'in- 
dique mn  titre,  d'une  des  meilleures 
fainillrs  de  son  pays  natal,  la  Kranclie- 
(^role.  Il  naquit  vers  \l'y\  ,  et  des 
son  jeune  a;;e  montia  pour  les  applira- 
tiens  des  sciences  exactes  uiir  ûpiilude 
de  laquelle  on  faisait  parmi  les  mciis 
fort  peu  de  cas,  ou  qui  mrme  semblait 
tendre  à  dn  o;;rr.  Kiitre  au  re;;iment  de 
Hourbun,  infanterie,  en  1772  ,  il  eut 
avec  son  colonel  une  affaire  d'Iionneur 
dont  le  résultat  fut  une  lettre  de  ca- 
chet qui  l'exila  deux  ans  en  Provence. 
A  la  faveur  de  ce  loisir  forcé,  il  eut  le 
temps  de  recueillir  les  matériaux  d*un 
ouvrage  sur  le>  manœuvies  des  galères 
à  rames.  Redevenu  libre,  il  se  rendit  à 
Faris  qu'il  vil  alors  pour  la  première 
fois  (1770).  C'était  le  moment  où 
les  frères  Perler  venaient  de  créer,  au 
;;rand  éba)ii>5ement  des  Parisiens,  la 
fameuse  machine  à  vapeur  dite  pompe 
à  Jeu  de  Cluiillot.  \jt  jeune  marquis 
de  Joullrov  s'erapie^sa  d'obtenir  son 
entrée  particulière  cher  Perler,  où  il 
étudia  sérieusement  le  nouveau  méca- 
nisme, et  où  bientôt  il  sut  se  faire  dis- 
tinguer de  la  foule  des  visitants  par  U 
justesse  et  la  profondeur  de  sa  conver- 
sation. IMein  encore  des  matenaux 
qu'il  avait  recueillis  sur  les  galères  ï 
rames,  il  ne  fut  pas  lon;;-tcmps  sans 
pensiT  que  le  nouveau  moteur  pouvait 
avcr  avantage  s'appri«juer  à  la  navl|;a- 
tioii,  et  il  en  émil  l'idée  en  petit  co- 
milé  devant  Perler  lui-même,  devant 
le  marcdial-dc-camp  chevalier  de  Fol- 
len.iv.  devant  le  marquis  Ducrest,  Irèie 
de  M'""  lie  Genlls, el  devant  M .  d' .Vuxi- 
rou.  On  applaudit  à  l'idée  ;  il  y  a  plus, 
on  l'embrassa  avec  ardeur;  mais,  quand 
il  s'agit  de  la  réaliser,  il  se  ûl  une  scis- 


JOU 


a85 


slon  dans  l'assemblée  qui  se  divisa  el  sur 
le  mode  de  mécanisme  qu'il  fatulrait 
adopter,  et  surtout  sur  la  base  des  cal- 
culs a  vaincre  et  de  la  force  motrice  à 
employer.  Suivant  Parler,  ces  éléments 
devaietil  se  supputer  d'api rs  l'eipé- 
hence  d'un    bateau  de  hala;;e   remor- 

3ué  par  de*  chevaux;  Joulfrov  srntit 
e  prime  abord  et  dit  fout  haut  (|u'il 
fallait  au  moins  trois  fois  autant  de 
puisvince  motrice  des  que  Ton  prenait 
le  point  d'appui  dans  l'eau.  Humi  q  le 
d'.\u\iron  et  Follcnav  se  declara^srllt 
pour  celte  façon  de  voir,  on  coni|>:end 
que  le  jeunr  gentilhomme  ,  en  pré- 
sence d  une  renommée  industrielle 
semblablr  à  relie  de  Perler,  dut  s'ef- 
facer. Cependant  il  ne  renonça  point 
à  son  projet  ;  et  ,  tandis  que  !•*  riche 
capitaliste,  dans  ses  rastes  ateliers  et 
sous  les  auspices  de  l'académie  des 
sciences, cherchait  à  réaliser  sa  chimère, 
Joulfrov  à  cent  lieues  de  Paris,  au 
milieu  d'obstacles  de  tout  genre,  .sans 
autre  secours  qu'un  chaudronnier  de 
\illa;;e,  parvenait  en  juin  et  juillet 
177G,  c'est  à-dire  un  an  avant  que 
Perler  reconnût  la  vanité  de  ses  essais, 
à  faire  naviguer  un  bâtiment  à  vapeur 
sur  le  I)oub>.  Ce  prrmler  bateau  avait 
quarante  pieds  de  long  sur  six  de 
large  :  l'appareil  nageur  consistait 
en  tiges  de  huit  pieds  de  longueur  sas- 
pendues  de  chaque  côté  vers  l'avant,  et 
portant  à  leur  extrémité  des  cliàssis  ar- 
més de  volets  mobiles  comme  nos  per- 
siennes ,  el  plongeant  de  dix-huit  pou- 
ces dans  l'eau  :  les  châssis  pouvaient 
décrire  un  arc  de  huit  pieds  de  ravon 
et  de  trois  pietls  de  corde  :  un  levier 
muni  d'un  contre  poids  les  maintenait 
au  bout  de  leur  course  vers  l'ivant. 
Le  moteur  était  une  pompe  a  feu  on 
machine  à  simple  eflet,  dont  le  piston 
communiquait  aux  liges  par  une  chaîne 
el  une  poulie  de  renvoi.  I).*-  que  la 
vapeur  soulevait  ce  piston,  les  contre- 
|)oids    ramenaient  en  avant  les  volets 


a86 


JOU 


qui  faisaient  alors  fonction  de  rames  et 
qui,  dans  cette  course  rétrograde,  se 
fermaient  sur  eux-mêmes  afin  d'oppo- 
ser la  moindre  résistance  possible  ;  puis, 
quand  le  filet  d'eau  froide  opérait  le 
vide  dans  le  cylindre,  le  piston  en  re- 
descendant retirait  ses  rames  avec  une 
grande  rapidité,  et  alors  les  volets  se 
trouvaient  ouverts  pour  offrir  toute 
leur  surface  et  choquer  le  fluide.  Quel- 
que imparfait  que  pût  être  cet  ingénieux 
appareil,  construit  au  fond  d'une  pro- 
vince où  il  était  impossible  de  se  pro- 
curer des  cylindres  fondus  et  alésés,  il 
est  certain  qu'aucun  de  ceux  qui  jus- 
qu'alors avaient  proposé  des  moyens 
d'appliquer  la  vapeur  à  la  navigation, 
n'avait  émis  d'idées  semblables  à  ce  que 
Jouffroy  venait  de  concevoir  et  d'exé- 
cuter réellement.  L'année  suivante  , 
Ducrest  décrivit  la  tentative  infiuc- 
tueuse  de  Périer,  qui  semble  depuis  ce 
temps  avoir  été  un  peu  hostile  à  celui 
qui  paraissait  plus  près  du  but.  L'étroit 
esprit  de  province  et  aussi  l'esprit  de 
caste  nobiliaire  servaient  cette  sourde 
opposition:  on  eût  dit  les  parents  de 
Jouffroy  de  complicité  avec  ses  jaloux. 
11  eut  vers  ce  temps  l'envie  d'entrer  dans 
une  armespêciale,  comme  l'artillerie  ou 
le  génie  .-tous  les  gentilshommes  du  pays 
se  récrièrent  contre  cette  idée  ;  et  lorce 
Itit  qu'il  rentrât  dans  l'infaiitene.  On 
ne  le  désignait  dans  la  Franche-Comlé 
que  par  le  sobriquet  de  Jouffroy-la- 
Pompe.  Le  ridicule  blesse  en  tout  pays, 
il  tue  en  France.  Jouffroy  pourtant 
persévéra  encore.  Il  vit  des  défauts  à 
son  premier  bateau ,  défauts  tenant 
surtout  à  ce  que,  lors  du  ret  our  des  volets 
à  charnière  de  l'arrière  à  l'avant,  l'eau 
formant  un  courant  rapide  empêchait 
les  volets  de  se  rouvrir,  dès  que  le  bâti- 
ment allait  vile,  notamment  en  re- 
montant, et  que  la  pompe  à  feu  n'agis- 
sait que  par  intervalles,  tandis  qu'il  eût 
fallu  un  mouvement  continu.  De  ces 
deux  défauts,  un  seul,  le  premier,  ve- 


JOU 

nait  de  lui  ;  le  second  était  du  fait  de 
l'inventeur  de  la  pompe  à  feu.  Le  but 
spécial  de  Jouffroy ,  c'était  non  pas  de 
perfectionner  la  machine  à  vapeur  , 
mais  d'appliquer  la  machine  telle  quelle 
à  la  navigation.  Telle  est  la  force  du 
génie  pourtant  que,  non  content  de 
changer  son  appareil  nageur ,  il  ima- 
gina un  mode  nouveau  de  machine  à 
vapeur  par  lequel  la  vapeur  agissait 
sans  discontinuer.  Cette  machine  se 
composait  de  deux  cylindres  de  bronze 
accolés,  ouverts  par  le  haut,  placés  à 
bord  selon  le  sens  de  l'arrière  à  l'avant, 
en  faisant  avec  l'horizon  un  angle  d'en- 
viron 50".  En  bas  les  cylindres  avaient 
leurs  fonds  réunis  par  une  boite  de 
métal  ,  renfermant  une  tuile  ou  tiroir 
qui  ouvrait  ou  fermait  alternativement 
le  passage  de  la  vapeur  dans  chaque 
cylindre  et  celui  de  l'eau  d'injection. 
Un  parallélogramme,  formé  de  deux 
tringles  et  de  deux  traverses,  poussait 
alternativement  le  tiroir  à  droite  et  à 
gauche  chaque  fois  qu'un  des  pistons 
arrivait  au  bout  de  sa  course  vers  l'em- 
bouchure des  cylindres.  Au  lieu  d'être 
munis  de  tiges,  ils  portaient  fixés  à  un 
anneau  central  des  chaînes  qui,  après 
s'être  enroulées  sur  un  barillet  à  encli- 
quetagc,  étaient  tirées  vers  le  fond  du 
bateau  par  un  contre-poids.  Cet  appa- 
reil, très-médiocremenlexécuté(178U), 
surtout  pour  sa  chaudière  et  ses  acces- 
soires, produisit  pourtant  l'effet  voulu; 
évidemment  les  imperfections  de  ce 
mécanisme  tenaient  plus  à  la  con- 
struction qu'à  l'idée  ;  et  des  ingénieurs 
modernes  se  sont  fait  un  nom  en  trou- 
vant moins  bien.  Revenons  à  présent 
à  l'appareil  nageur.  De  nos  jours,  sans 
doute,  un  médiocre  mécanicien  aurait 
trouvé  le  moyen  de  corriger  le  défaut 
des  volets  à  charnières,  en  les  forçant  à 
s'ouvrir  à  un  moment  fixe.  Mais  la 
science  était  alors  trop  peu  avancée 
pour  que  Jouffroy  s'égarât  dans  cette 
recherche  :  il  renonça  donc,  en  le  re- 


JOU 

^rrttaut amèrement,  à  ^r^  châssis  pour 
li'ur  substituri  If>  roup^  à  aubfi  ^«lr 
Tarbre  «J»  ruurs  rtiil  pbcr  le  barillet  à 
enrlM|uet  j<;c autour  duquel  s'enruulairnt 
les  rliaiiies  »oi  tant  de^  pi!>loiis.  I .orsque 
la  vapeur,  ai  rivant  delà  cliiuilifre  daos 
la  buite  à  tiioir,&e  d)stnbu.iit  d'abord, 

|)ar  excmplr,  aur>liiidie  de  droite,  à 
lOïtanl  même  tuute  communication 
de  la  vapeur  au  rvlnidre  de  gauche  a^ait 
cessé,  et  le  toi'irirf  tl'itt;«»t-!!oti  s'elait 
o  ;>(•:  t  .le  ( '^ 

baiv^ait  ^vA.     .  _  - 

eiitf  amant  &a  cbaine  qui  lai>ait  (aire  a 
l'arbie  une  révolution,  tandis  que  le 
p!>lon  de  droite  recevant  la  vapeur  re- 
montait vers  le  haut  du  c)lindre  en- 
trainé  par  le  pouls  Gié  au  bout  de  sa 
rliatne  que  rencliquelar;e  lai5>ait  libre. 
Parvenu  à  ce  point,  le  tiroir  se  drpla- 
rA;i  it  le  ptslon  de  droite  continuait 
idiiii'iliairinent    refTnrt     que   relui    de 


<  i  :>  :  saiuii^utur  atâ.iii  j  (cnt 

j  i  f«U,  sa  lar^fur  à  quatorze: 

ii-s  roues  avaient  quatorze  pieds  de  dia- 
irirtre,  les  aubes  étaient  de  six  pieds 
Je  longueur  et  plon<;eaienl  à  deux  pieds 
dans  la  rivière.  Le  tirant  d'eau  du  pv- 
roscaplie  était  de  troi>  pied>,  le  poids 
total  de  trolscenl  vin;;l-$ept  milliers.,  .su- 
Toir  :  vin;;t-sepi  pour  le  navire  même, 
trois  cents  de  charge,  (^el  éiionnc  ba- 
teau maniruvra  ptiuilant  à  diverses  re- 
prises :  il  remonta,  de  L)oo  a  l'île  Harbe, 
le  courant  de  la  Saôiie.en  juillet  1783, 
en  préseiKc  de  milliers  de  témoins  par- 
mi lesquels  des  acadt.-miciens  île  L)on  : 
procès-verbal  Je  la  reu>-ile  fal  dreisé 
par  ces  derniers.  Apres  un  succès 
si  incontestable  il  n'y  avait  plus,  à  ce 
qu'il  semble,  qu'à  eiploiler  une  dé- 
couverte admirable.  Mais  qu'on  5on(;e 
que  toutes  les  parties  du  p\ro  capbc 
avaient  clé  construites  avec  parcimo- 
nie, qtie  les  bordâmes  étaient  de  min- 
ces feuillets  Je  sapin,  que  la  chaudière 


JOU  187 

au  bout  d'une  heure  d'ébdlition  se 
crevassait,  se  fendillait  de  toutes  parts! 
qu'on  solide  qu'a  celle  époque  reunir 
des  capilaui  par  artions  n'était  point 
chose  facile  comme  de  nos  jours  ! 
JouiïroT  arail  encore  bien  d'autres 
obstacle»  à  vaincre.  Il  en  trouva  un  in- 
vinrible  dan>  la  lé;ièiele,  dan-»  les  ha- 
bitudes du  roiiiistrre  lran(^ai>  d'alors. 
La  première  condition  pour  arri\er  à 
eon»l'iijer  une  sorirté  d'actionnaires 
litentinn  d'un  privilège  pour 
.  annrr>.  Il  en  demanda  un 
pour  trente  ans  a  M .  de  (Jalonne.  Ce- 
lui-ci renvoya  la  requiie  à  l'académie 
des  science>,  afin  de  savoir  s'il  r  avait 
lieu  d'accorder  le  privilège,  c  e>t-à- 
dire  s'il  )  avait  invention.  L'académie, 
à  laque  le  d'ailleurs  Joulfroy  preseoU 
en  même  temps  un  Mnnuire  sur  //•# 
pomprs  a  Jru^  nomma  commissaires 
puur  l'examen  du  mémoire  I>orda , 
l>os6ut,  Otusin  et  l'erier  ;  pour  l'eia- 
raen  du  pYroscaphe  même,  llorda  et 
Perier.  .\insi  Jouiïrov  retrouvait  pour 
ju^e  celui  que  nous  avons  vu  son  anta- 
goniste et  son  mal.  Au  lieu  de  dire 
d'une  part  que  nul  encore  n'était  venu 
à  bout  d'engendrer  la  navi;;ation  par 
la  vapeur  ,  ce  qui  était  incontestable 
et  ce  qui  était  la  première  partie  da 
verdict  demande  à  l'académie ,  et 
d'examiner  de  l'antre  si  la  cessation  des 
vo>a;;es  du  bateau  de  Lvon,  vova^e 
dont  plus  de  dix  mille  temoinsat  testaient 
la  réalité,  était  due  au  vice  d'exécution 
des  ouvriers  ou  au  vice  de  conception 
de  rinj;enieur,  l'académie  ne  voulut 
point  se  prononcer  ;  et  l'on  supȎra  au 
ministre  d'écrire  la  lettre  suivante  à 
l'inventeur  du  premier  pvroscaplie  qui 
ait  remonte  des  rivières  :  ««  Je  vous  ren- 
«   voie,  monsieur,  ralleslation  du  suc- 

•»y^cès  qu'a  eu  à  Lvon ,  etc.    Il   a 

«  paru  que  réprcuve  ne  r<'inplissalt 
«  pas  sulljsamment  les  conditions  re- 
•<  qui^e5.  Mais  si ,  au  moyen  de  la 
«  pompe  à  feu,  vous  i'éu:>sissez  à  faire 


28« 


JOU 


JOU 


«  remonter  sur  la  Seine,  l'espace  de 
«   quelques  lieues,  un  bateau  charf^é  de 
«  trois  cents  milliers,  et  que  le  succès 
«   de  cette  épreuve  soit  constaté  à  Paris 
«   d'une    manière  authentique  qui  ne 
«   laisse  aucun  doute  sur  les  avantacres 
«   de  vos  procédés,  vous  pouvez  comp- 
«  ter  qu'il  vous  sera  accordé  un  privi- 
«  lège  limité  à  quinze  années  (31  jan- 
«   vier  1784).  »  Il  n'est  aucun  besoin 
de  commenter  cette  fin  de  non-iece- 
voir.   Jouffroy    en   fut  abasourdi ,  et 
cette  fois  il  n'essaya  plus  de  se    roidir 
contre  les  difficultés  qu'il  ne   pouvait 
vaincre.    Il  vit  d'un  coup  d'œil  qu'il 
n'y  avait  plus  rien  à  faire  pour  l'in- 
stant ;  il  n'avait  pas    et   il  ne  pouvait 
pas  trouver    les  capitaux    nécessaires 
pour  la    construction    d'un  bâtiment 
solide  et  qui  pût  braver   la  mauvaise 
volonté  de  sesjuo;es.   Il  n'essaya  pas 
même  d'entrer  en  lutte  avec  ses  détrac- 
teurs :  un  gentilhomme  ne  se  donnait 
point  en  spectacle  dans  les  journaux. 
Toute  sa  venp;eance  fut  d'exécuter  sur 
la  proportion  d'un  vino;t-quatrième,  un 
modèle  de  son  pyroscaphe  et  de  l'a- 
dresser à  Venierreur  de  sa  demande,  à 
Périer     lui-même    (178 Y).    Quelques 
amis   lui    conseillèrent  de  porter  son 
invention  en  Anf;leterre,  où    dès  ce 
temps  Watt  et  Wast-]jrou;2;h  venaient 
de  faire  subir  à  la  pompe  à  feu  les  «gra- 
ves changements  qui  en  ont  fait  la  ma- 
chine à  vapeur  :  il  ne  put  s'y  résoudre. 
Puis  vin!   la  révolution:  Jouffroy  fut 
un  des  premiers  à  émif^rcr,    et   il    ne 
rentra  qu'au    bout  de   dix  ans  sous  le 
consulat.   Deux   hommes  alors,  Dcs- 
blancs  et  Fulton,  s'occupaient  l'un  à 
Trévoux,  l'autre  à  Paris  de  réaliser  la 
navigation  à  la  vapeur  :  le  premier  de- 
vait ne  pas  réussir  parce  qu'il  opérait 
sur  des  bases  fausses  et  qu'il  ne  copiait 
personne.  Desblancs  entama  dans  les 
feuilles  publiques  une  polémique  contre 
son  rival  en  réclamant  la  priorité  de 
l'invention .   L'ingénieur  américain  ré- 


pondit en  substance,  non  sans  une  dé- 
daigneuse ironie  :  «  Que  M.  Desblancs 
«  se  rassure!  est-ce  d'exploitation,  de 
«  lucre  qu'il  est  question?  je  ne  fe- 
«  rai  point  concurrence  en  Europe, 
<(  ce  n'est  pas  sur  les  ruisseaux  de 
«c  France ,  c'est  sur  les  grandes  ri- 
if  vières  de  mon  pays  que  j'exécuterai 
«  ma  navigation  !  Est-ce  d'invention 
«  qu'il  s'agit  !  Ni  M.  Desblancs  ri 
«  moi  n'imaginons  le  pyroscaphe.  Si 
«  cette  gloire  appartient  à  quelqu'un, 
«  elle  est  à  l'auteur  des  expériences 
«  de  Lyon,  des  expériences  faites  en 
«  1783  sur  la  Saône,  »  En  s'expri- 
mant  de  cette  manière,  Fulton  ne  se 
doutait  pas  que  l'auteur  de  la  décou- 
verte vivait  encore,  et  le  lisait.  Il  eût 
pu  ajouter  que  le  bateau  d'essai  qu'il 
faisait  naviguer  près  de  l'ile  aux  Cy- 
gnes n'était  vraiment  que  la  repro- 
duction en  grand  du  modèle  de  Jouf- 
froy,  modèle  qu'on  savait  avoir  été 
construit  à  peu  près  sur  l'échelle  d'un 
25^.  Mêmes  roues  à  aubes  ,  même 
lien  de  la  machine  à  vapeur  aux  roues, 
même  rapport  de  la  force  motrice 
avec  la  résistance  des  aubes  et  la 
vitesse  qui  en  résulte,  mêmes  dimen- 
sions,mêmesproportions, à  moins  qu'on 
ne  prétende  que  cent  cinquante-qua- 
tre pieds  sur  quinze  diffèrent  essen- 
tiellement de  cent  quarante  sur  qua- 
torze. Seule,  la  machine  à  vapeur  était 
tout  autre.  Mais  encore  une  fois,  l'in- 
vention du  pyrorcaphe  ne  consistait 
point  à  perfectionner  la  machine  à  va- 
peur, mais  à  imprimer,  avec  la  machine 
à  vapeur  telle  qu'elle  existait,  un  mou- 
vement à  des  navires  remontant  le 
courant.  L'imperfection  de  la  machine 
nuit  sans  doute  à  la  perfection  de  la 
marche,  mais  elle  n'ôle  rien  au  mé- 
rite de  l'inventeur  de  ce  genre  de 
marche ,  elle  le  rehausserait  plutôt  , 
lors  même  qu'il  n'aurait  pas,  comme 
Jouffroy,  créé  lui-même  un  perfec- 
tionnement à  cette  machine.  Du  reste. 


JOU 

il  rtail  éciit  que  ju»iirf  nf  ^erait  \>oiul 
rrittlur  k  Jond'itM  Je  sou  m\jiiI  : 
IVifiijjrc  Je  irlour  Je  b  lerre  J'exil 
n'a%ait  que  quel(|urs  iiiincrs  Jrbns  Je 
fortune,  il  ne  \i>ubit  rien  implorer  Ju 
ronsul.  Je  l'empereur  ;  la  liaule  police 
impéiialele  5ui\nlbll.  le  ^ènail  ;  ré- 
cijinei  à  b  nou^rlle  Je>  »uccès  de 
Kullon  en  Amniquc,  icrbmer  aulre- 
niriil  qu'a\er  un  nouxeau  pyoseaphe 
pliiN  pjibit  s'il  riait  povvible  que  ceui 
Je  se^  copistr»,  lui  eût  semble  oi^eux  , 
suranné  et  inJi^ne  Je  lui.  Il  se  tut  Jonc 
M)us  l'eropiie.  Seulement  en  arrnant 
il  était  aile  rendre  \isile  à  De^bbncs,  et 
à  l'aspect  Je  son  bateau,  qui  au  lieu  Je 
roues  po(  tait  sur  1rs  lbiir>  Je  lon^uei 
cliaînes  munies  J'aubrs  en  {;uise  Je 
ctiaprIeK,  il  lui  pri-J:t  que  le  na\ire 
ne  niaicherait  pas  et  lui  en  expliqua  les 
la'sons,  I/e\(iirnienl  justifia  «-a  pro- 
phétie. Knfin  Itunapailc  tomba,  et  b 
re^lauralion  sembla  ouMir  une  rre  nou- 
\elle  à  riiommc  Je  ^énie  m  lonj;  temps 
méconnu.  .V  b  faveur  Je  b  paix,  b 
rupiJité  mercantile  uDrit  à  Jouffro^  ce 
que  ropiiiion  ,  les  acatlriines  et  les 
ministères  lui  axaient  refusé  .  il  Miit  se 
fixer  à  Paris,  et  )  \it  se  former  une 
rompa;;nie  pour  eȎcuter  .>es  plans  ;  il 
...thnbiexetr23a>.etlOjuill.  1816), 
lit-  rari;cnt,  îles  protecteurs.  I.e  comte 
J'.\rlois  ^Jipui>  ('liarles  \)  encoura- 
gea sespiemiers  tffull^  et  lui  permit 
Je  Joiiiier  le  nom  ^tihurUs-Philiftpr 
il  son  premier  bateau  à  \apeur  construit 
au  l*etit-Heic)  ,  et  qui  fut  lancé  à  l'eau 
le  '20  août  peu  Jant  les  fêtes  qui  sui%  ii  ent 
lo  mariage  Ju  Juc  Jr  I»err\ .  Mallieuieu- 
t  menl  la  compagnie  Jouffro>  a\ait  Jejà 
imo  concurrence  J'imporlatcurs  à  su- 
l>ii ,  relie  Je  b  société  l'ajol  et  compa- 
gnie. Celte  concurrence  fut  fatale  à 
toutes  les  Jeux:  les  énormes  Jépenses 
que  nécessitait  b  mise  en  train  J'opé- 
lation-.  colossales  absorbèrent  en  peu 
Je  temps  les  fonJs  Jes  actionnaires  ;  et 
Jes  spéculateurs  venus  plus  tarJ,  mieux 


JOU 


189 


a\i>é.  et  piofiiant  Jes  tâtonnements  de 
leors  pieJrceNseurs,  réalisèrent  a  leur 
profit  les  bénéfices,  (^tte  lueur  Je 
bonlieur  qu'axait  un  instant  entrevue 
.louffio>  ne  fut  qu'un  éclair  :  il  re- 
tomba Jans  l'oubli  ,  n'a>ant  pour 
vivre  qu'une  roeJiuce  pension  et 
les  secours  Je  son  GL  ,  le  comte 
Achille  Je  JouiïroT  ,  et  mourut  en 
XWX'l  aux  lii\aiiJes,  Jo>rn  Jes  capi- 
taines J'inbnterie  Je  son  époque,  et 
frappant  exemple  à  joiiiJre  à  ceux  qui 
piouxenl  la  xerite  Je  la  Jexise  iiU 
vus  non  iHjhis  !  Tel  est  au  rooinv  le 
résultai  Je  b  réponse  Jr  Fulion  à 
DrsUaius ,  bien  que  par  b  suite 
Fullon  se  soit  laissé  donner,  sans  tou- 
tefois o.«er  le  prenJre,  le  titre  Je  créa- 
teur ilu  pxrnvcaphe.  Tel  est  le  sens  d'un 
ju;;ement  Jes  tnbunaux  an;;lo-jmeM- 
cains  sur  la  question  Je  piiorilé  de 
l'invention  de  la  naxi;;ation  à  \apeui  ; 
telle  est  l'opinion  qui  résultera  intiii- 
ciblement  de  la  lecluie  de  la  brorhuie 
de  M.  \c\i.  de  Jouiïrox  ,  intitulée 
Des  Initraux  a  viif}rur,  etc.  ,  Paris, 
1839,  et  des  pièces  justificatives  au- 
nexées  à  l'appui  des  faits  qu'elle  re- 
late ;  tel  est  le  sentiment  qu'a  émis 
M.  Ara^o  dans  Wlimuuirr  ut  1837, 
comme  si  par  l'organe  Je  son  savant 
secrétaire  t'acaJémie  eut  voulu  réparer 
l'iniquité  impolitique  qu'elle  avait  com- 
mise il  v  a  un  Jemi  siècle.  Knfin,  l'acaJé- 
mie,  Jans  un  .savant  rapport  de  sa  sec- 
tion Je  mécanique,  réJi^é  par  l'illustre 
Cauchv,  et  qui  a  Jonné  lieu  à  Jes  Jis- 
ciissions  prolon«iees  penJanl  Jeux  séan- 
ces consécutives  ,  vient  Je  constater  le 
l**"^  novembre  iH'iO,  Je  la  m.inierc  b 
plus  solennelle:  1"  que  l'invention  Jes 
bateaux  à  vapeur  appartient  à  feu  le 
■jarquis  Je  Joiiffrov  ;  '2"  que  les  py- 
r^caphes  qui  existent  ne  sont  que  Jes 
copicN,  plus  ou  moins  serviles,  Ju  ba- 
teau qui  a  navi;;ué  sur  b  Saune  en 
1783;  3"  que  le  plus  important,  ou, 
pour  mieux  Jire,   le  seul  perfectinnne- 


r  \  V 1 1 1 . 


'9 


ago 


JOU 


ment  radical  apporté  à  cette  invention, 
appartient  à  M.   Achille  de  Jouffroy 
fils,  quiatrouvé  le  moyen  de  substituer 
aux  roues  à  aubes  un  appareil  palmi- 
pède applicable  à  toutes  sortes  de  na- 
vires ,    qui    leur   procure  une  vitesse 
égale  avec  une  dépense  de  combustible 
moindre  de   moitié  ,  sans    priver   les 
navires  de  leurs  agrès,  voiles,  artillerie, 
ni  rien  changer   aux    formes  de  leur 
carène.  Ce  rapport,  appuyé  des  expé- 
riences nombreuses  faites  en  présence 
des  commissaires   de  l'académie  ,   est 
une  justice   tardive,    mais  éclatante, 
rendue  à  un  homme  de  génie  dans  la 
personne  de  son  fils,   qui  s'est  fait  le 
continuateur  de  ses  travaux  et  l'émule 
de  sa  gloire.  Désormais,  ni  les  Amé- 
ricains ni  les  Anglais  ne  contesteront 
plus  à  la  France  la  priorité  de  l'in- 
vention de  la  navigation  à    vapeur  ; 
mais  ils    lui  seront  encore  redevables 
des  perfectionnements  de  cette  inven- 
tion. La  France  en  a  la  gloire;  quant 
au  profit,  elle  le  négligera  probable- 
ment, suivant  son  habitude.      P — ot. 
JOUIX  (Nicolas),  poète  satiri- 
que et  janséniste,  naquit  à  Chartres  en 
1684.  On  ne  connaît  rien  de  sa  vie; 
on   sait   seulement   que,    après   avoir 
exercé  le  commerce  de  la  joaillerie,  il 
s'établit  banquier  à  Paris,   où  11  mou- 
rut le  22  février  1757.  11  était  lié  avec 
l'abbé  Grécouit,   et  pendant  près  de 
trente  ans  11  publia  des  satires  et  des 
libelles  contre  les  jésuites  et  contre  les 
prélats    qui  voulaient  que  dans  leurs 
diocèses  les  curés  se   conformassent  à 
la  bulle  Unigenitus.  La  foule  de  petits 
pamphlets  en  vers  et  en  prose  que  l'on 
doit  à  ce  poète  théologien  se  fait  re- 
marquer par  un  ton  [)hi3  que  grivois,  et 
en  même  temp^  par  l'érudition  mal  em- 
ployée des  notes  explicatives.  T^a  mé- 
disance et  la  calomnie   prennent  dans 
sa  prose  un  caractère  sérieux  qui  con- 
traste avec  le  ton  burlesque  de   ses 
^ers.  Son    début    poétique  avait    été 


JOU 

une  cantate  sur  les  Tuileries  ,  im- 
primée en  1717.  En  1729  ,  l'ar- 
chevêque de  Paris,  Vlntlmille,  ayant 
suspendu  de  l'exercice  de  ses  fonctions 
le  curé  de  Sarcelles,  DuUuel,qul  avait 
refusé  d'accepter  la  constitution  Uiii^c- 
nilus^  le  parti  janséniste  prit  fait  et 
cause  pour  cet  ecclésiastique  ;  et,  à  cette 
occasion,  Jouin  composa,  sous  le  nom 
de  Sarcelles,  des  harangues  en  vers 
et  en  patois,  qui  étaient  censées  adres- 
sées par  les  habitants  du  village  de  ce 
nom  à  M .  de  Vlntlmille.  L  La  première, 
qui  parut  en  1730,  est  dirigée  contre 
les  prétendus  désordres  introduits  dans 
les  paroisses  gouvernées  par  des  prê- 
tres dévoués  à  la  constitution.  II.  La 
seconde,  quiestd'avril  1731,  développe 
V esprit  et  le  caractère  que  les  jansé- 
nistes attribuent  aux  jésuites,  et  porte 
pour  premier  titre  :  Les  habitants  de 
Sarcelles  désabusez  au  sujet  de  la 
constitalîonViû^en'ûus.  Elle  est  suivie, 
dans  les  premières  éditions,  d'une  épi- 
gramme  ordnrlère  contre  le  P.  Girard  ; 
puis,  dans  toutes,  d'une  lettre  du  cardi- 
nal deTournon  écrite  de  la  Chine,  le  0 
oct.  170G,  àM.  Conon,  vicaire  aposto- 
lique d'une  des  provinces  de  cet  em- 
pire ,  sur  les  procédés  dont  ce  dernier 
avait  eu  à  se  plaindre  de  la  part  des 
jésuites.  111  ,  IV,  La  troisième  (mal 
1732)  et  la  quatrième  (juin.  1736)  pré- 
conisent les  prétendus  miracles  qui  s'o- 
péraient sur  le  tombeau  du  diacre  Paris, 
et  attaquent  l'ordonnance  de  l'archevê- 
que contre  ces  ridicules  momeries.  V. 
La  cinquième  (août  17i0)estun  remer- 
cînient  adressé  à  M.  de  Vlntlmille 
dans  un  style  non  moins  Irrévérencieux 
que  les  précédentes  satires,  au  sujet  de 
la  réintégration  du  curé  Du  Huel.  VI, 
\  II.  Jouin  composa  aussi  deux  Sar- 
celles contre  Languet  de  Cergy,  ar- 
chevêque de  Sens,  au  sujet  de  son  man- 
dement du  6  avril  1739,  ordonnant 
d'enseigner  le  nouveau  catéchisme  qu'il 
avait  donné  à  son   diocèse;  elles  sont 


JOL 

d'iTrilelJeroii  17\0.  Mil,  IX.  X 

Des  Sarcrllrs  furrut  auj.si  atlressccsau 
I  oi  ;  la  prrmlcre,  sou*  ce  tilrc  ;  Les  très- 
humilrs  rt  très-resptcturuxn  retnun- 
franrrs  des  habitants  du  village  de 
SarcrlU^  aujw/,  au  sujet  des  arai- 
res prrsentes  du  purlrrnriit  de  Pa- 
ris ;  rlle  n'a  pjs  rtc  reimpriinrc  dans 
réJilioii  JclTG  »    '  1 -.iiililul^: 

liaranfur  (!><:  dr  A»  /v/- 

r visse    dr    >  i 

1733;.  csii 

a\eu  Je  la  jucretlcnl»',  ainsi  (|iic  ilu  re- 
racrrimnit  a  M.  de  Vinlnmlle;  latioi- 
sicmc  contient  l^s  1res  humides  re- 
meri  Iwents  des  hahitants  de  Sarcel- 
les au  Jiuy  ,  au  sujet  du  refifur  du 
pdrUmenl  de  Paris  (1733).  L«  car- 
dinal de  FleuiT,  premier  ministre,  est 
furt  nialtiailc  dans  la  premièie  de  ces 
satires.  On  en  ju^fra  par  ces  vers: 

Ociabaad 
Q«*  j«  «nti4rrinn«  mii  lecbafltut 
Si  »«  tubiiU  bi|M>ci»>i« 
R«  veu*  cacboil  %*  pyilidir. 

\I.  \.:kOT\i\fmc  San  elle  ts\  adrc>srcà 
l'atchevèqucdc  Cambrai,  SainlAlbiu, 
qui  avait  donné  à  i'aris,  le  'l'i  juillet 
17  VI,  un  maadeœent  contre  une  con- 
sultation d'avocat<^  de  l*aris  en  ia\eur 
t.'e  certains  janbcnistes  de  Cambrai, 
(^ette  pièce  virulente  éiail  précédée 
d'une  épigraphe  doublement  injuiieuie 
pour  les  mirur:>  et  l.i  nai-sance  illf;,i- 
iime  de  ce  prélat  :  Spurii  non  suntad 
"rdinrs  udrnittendi  rt  ii  uni  nés  qui 
tx  Irgitimis  nuntiis  non  sunt  pru- 
rreaii.  \\\.  L  aiclit\êquc  de  Pari^ 
Clinstophc  de  lîeaumont,  ne  fut  pas 
moins  que  son  prédécesseur  en  butte 
à  la  verve  de  Nicolas  Jouin,  qui  com- 
posa contre  lui  sa  donziéme  Sarcelle, 
particulièrcmenl  dirigée  coulre  les  jc- 
<ujte<.  Dans  les  noies  se  trouve  une 
Requête  du  bourreau  d^ Orléans  con- 
tre les  jesuiits  de  cette  ville ,  qui 
avaient  usurpé  sur  ses  droits^  en  dé- 
cblrant  solenuelleoieut  plusieurs  livres 


JUL 


191 


de  Vutt  -  lîo)al  dans  la  chapelle 
de  leur  raai>on,  le  S  beplembre  1710. 
Celte  pièce  de  vers  ne  parait  point 
rire  de  Jouin.  XIII.  Harangue 
des  habituais  de  la  paroisse  de 
Sarcelles  a  monseigneur  Christophe 
de  Beaumont  de  lie  par  font ,  etc. 
(Ait.  KTjV,  in-12).  I.'autri.r  de 
celte  pièce  fut  mis  à  la  I>aslillc  ,  et 
l'on  a  prirml'i  que  c'était  par  la  tra- 
hison <!  \  I N  .  I  j  qiiatoriiéme 
et  dei  !  le  a  pour  titre  :  le 
Voyage  de  Oroslf  ((  iroilav,  villa^r 
aut  environs  dr  l'aris  ,ou  la  Surprise 
des  habitants  de  Sart  elles  (  Aix  , 
1740,  in-12),  uoo  reimprimée,  aio>i 
que  la  précédente,  dans  l'édition  dr 
176i.  Toutes  ces  pièces  sont  accom- 
pagnées de  noies  ou  l'abus  de  rerutH- 
lion  lli'  '  .r  c  mêle  au\.Viecdoles 
les  plu  .  aux  ininiiuiions  les 
p  '  '  rn  patois 
d.  •  en  fran- 
Ç'  iic  lisible. 
aii;  *  it  pas  la 
vo^ue  qu  eurent  les  Surreiles  (1)  , 
si  l'on  ne  savait  avec  quel  entliou- 
siasroe  l'esprit  de  parti  accueille  tout 
ce  qui  le  (laite.  I^urs  de  l'abolition  de 
la  sociclé  de  Jésas,  ces  Sai  celles  fu> 
renl  réimprimées  avec  une  .sorte  de  luxe 
sous  ce  titre  :  le  l  rai  reraeildes  Sar^ 
celles,  mémoires,  notes  et  anecdo- 
tes intéressantes  sur  la  conduite  de 
Carrhe^^'éque  d'  Paris  et  de  quelques 
autres  prélats  Jron^ais  ;  le  Philo- 
tamts  et  le  Portefeuille  du  diable, 
oui'rage  absolument  nécessaire  à 
ceux  qui  veulent  prendre  une  juste 
idée  des  matix  que  fhglise  a  sou/" 
ferts  pendant  le  règne  de  la  ci -dé- 
fiant soi-disant  société  de  Jésus 
i\fi>terJain,  17(ii,  2  vol.  in-12). 
/avertissement  qui  préct*t!e  le  Philo- 
tanus  annonce  que  ce  poème,  qui  n'est 

\\  <  •  >t  i  '•  rt  f;ij.  routeur  «lu  Dict.  de»  Lvra$ 
jtn.f\  i:f:  \rs  .  p  .rjc  Sunelaurt,  el  que  Bar- 
bier, d*i>\  llxamia  crii.,  et  M.  (^>urrjrl,  «lant 
la  t'rance  luttrmm,  \n  iiummeot  Saixeiadtt, 


«9- 


agî 


JOU 


point  de  Jouiii,  mais  bien  de  Gréroiu  t 
(Kf>^.  cenom,  WIII,  273),  a  [jonr 
objet  (!e  montii^r  que  la  constitution 
L  iii£;eriitus  ts[  l'œuvre  des  jésuites  {2). 
Déjà  le  Portefeuille  du  diable,  ou 
Suite  de  Fhilotamis,  poèuie  dédié  à 
:\r"®  (lalpin  (femme  d'un  néf^ociant 
de  Paris),  avait  été  public  séparément 
en  1733,  in-12.  Dans  ce  recueil  se 
trouve  encore  le  Dialogue  (en  vers) 
entre  deux  bourgeois  de  Paris,  ou 
sujet  de  V enterrement  de  M.  Cof- 
fin  (21  juin  1749).  On  avait  re- 
fusé les  sacrements  ,  mais  non  la  sé- 
pulture ecclésiastique  ,  à  cet  ancien 
recteur  de  l'université  qui  passait  pour 
janséniste.  Vient  ensuite  une  satire  fort 
licencieuse  (texte  et  notes),  dirigée  con- 
t  re  dame  Robin ,  veuve  du  sieur  Herbert 
de  Mojsaut,  que  l'ancien  évêque  de 
Mirepoix,  Bo^er  [Voy.  ce  nom,  V, 
424),  et  l'archevêque  de  Beauraont 
venaient  de  nommer  supérieure  de  la 
Salpêtrière.  On  a  encorede  Jouin  :  i° 
Chanson  d'un  inconnu,  nouvellement 
découvei  te  et  mise  an  jour  avec  des  re- 
marques critiques  par  le  docteur  Chr. 
Matanasius  (3),  sur  !'///>  des  pendus, 
ou  Histoirevéritafde  et  remarquable 
arrivée  à  l'endroit  d'un  R.  P.  de  la 
compagnie  de  Jésus  (le  P.  Couvrii^iiy), 
Turin  (Rouen),  Alétophile,  1732, 
yn-12.   Cette  pièce  a  été  réimprimée 

;i)  Knrhirr,  clans  le  JJclioi>naire  des  mony- 
mes.  11*  i-i«93,  aitiibue  à  Joiiiii  le  P/ii/oInnus  , 
<iiioii{u'il  dise  tout  le  contraire  au  u"  14218  , 
ou  il  restitue  à  (irocourt  c<;  qui  est  liien  son 
oeuvre.  H  adopte  la  même  cireurd;ins  \' Examen 
critique  des  Dcituiiuai'es,  se  fondant  sur  ce  que, 
dan'*  la  collection  des  Sarcelles  de  Jouin  ,  se 
trouve  un  avis  portant  «[u'cn  donne  le  poème 
de  l'/titutaiius  plus  exact  (jue  dans  toutes  If.s 
e-Jiiion^  pncrdentes.  «  C'est  donc  pour  ainsi 
M  dire,  obsefw:  le  bibliographe,  une  édition 
<e  avouée  et  reconnue  par  l'auteur.  »  Il  nous 
send)ie  tjtie  «ette  conclusion,  répétée  par  M. 
Qiieiard  ,  dans  la  fiance  litlrraire,  est  forcée  et 
ne  coiivieiii  pris  moins  a  l'iditeur  cju'à  l'auieur 
d'un  ouvrage.  D'.iilleurs,  sur  If  frontispice  de  la 
»'"  édition  du  Philotaum,  jiubliée  en  1720,  on 
voit  le»  initi.Ues.  par  M.  L.  U.  G,  qui  doivent 
ngnifi^r />«r  !\l.  l'ahié  de  fjrrcourt. 

j)  On  siil  que  l«î  pceudonj me  Chrjrsoslome 
MaiaiM  .in  av.'it  déjà  été  empl..yé  par  .Saint 
lt_vuc.nll.e(/'V- «^«^  «"'"'  X^^l^.iJy?)- 


JOU 

depuis  avec  des  augmentations  sous  ce 
titre:  iMœurs  des  jésuites,  leur  con- 
duite sacrilège  dans  le  tribunal  de 
la  pénitence,  avec  des  Jleniarques 
critiques,  elc.  (Turin,  Alétophile, 
1756);  2"  les  Regrets  des  jésuites 
au  sujet  du  nom>eau  Bréiuaire  de 
Paris  ;  la  Réponse  de  l'archeoéque 
aux  jésuites,  en  vers  avec  des  notes, 
1736,  in-12;  3"  Chanson  sur  le 
P.  Couorigny  {\19.1 ,  in-12);  4° 
Nouveaux  dialogues  des  morts  , 
cantctmnt  un  dialogue  du  jésuite 
Varade  et  du  régicide  Barrière 
(1739,  in-12)  ;  o""  le  Philotanus  mo- 
derne, 1740  (3  vol.  in-12).  Cette 
production  est  bien  de  Jouin  ,  et  c'est 
ce  qui  a  sans  doute  porté  quelques 
critiques  à  lui  attribuer  le  Philota- 
nus; ;  6"  Procès  contre  les  jésuites 
(celui  du  P.  Ambroise  Guys)  ,  pour 
servir  de  suite  aux  causes  célèbres 
(Brest,  1750,  in-12);  T  Pièces  et 
anecdotes  intéressantes, eic.  (Utrecht, 
1755,  2  vol.  in-12).  C'est  une  réim- 
pression de  la  plupart  des  ouvrages 
déjà  cités.  On  a  attribué  à  Jouin -et 
aux  frères  Qticsiiel  de  Dieppe:  le  Vé- 
ritable almanacli  nouveau  pour  Van- 
née 1733,  ou  le  Nouveau  calendrier 
jésuitique,  extrait  de  leur  martyro- 
loge,  mené  loge  et  nécrologe,  Tré- 
voux pour  la  plus  grande  gloire  de 
la  société.  —  Jouin  avait  composé 
des  mémoires  pour  servir  à  l'histoire 
du  cardinal  de  'J'eiicin  ,  dont  il  laissa 
le  manuscrit  au  maréchal  de  Noailles. 

D— R— R. 

JOURDAIN  ,  d'origine  alle- 
mande ,  (ut  le  deuxième  général  de 
l'ordre  des  Frères- Prêcheurs.  Il  naquit 
en  Palestine  \c,':>,  l'an  1200.  Ses  pa- 
rents qui  habitaient  le  village  de  Wol- 
tei  bourg  dans  le  royaume  de  Saxe,  sui- 
vant la  pieuse  coutume  du  temps  étaient 
allés  à  Jérusalem  visiter  les  saints 
lieux.  Il  fut  baptisé  dans  les  eaux  du 
Jourdain  et  reçut  le  nom  de  ce  fleuve. 


JOt 


jor 


i»V^ 


Im  Mmalr*  de  sj  wt  ne  nou4  ont 
point  tranoini^  critii  tie  sa  famille.  An 
retour  de  son  pèlerinage,  »on  père  di- 
rigea sa  première  enfaiire  a\ee  une 
relipeu>e  >olltrtlude.  Il  lui  fil  doiinrr 
une  éducation  trè*  chrétienne  dan» 
une  savante  uui\rrsii<«  de  rAlieroa^îne; 
et,  dès  que  *mii  |iis  rut  Ifiunné  ses  hu- 
inanitrs.ill.  fi  jeune  encore, 

eludirr    la  |  cl    la  llieolojir 

dans  un  collt-^r  ilr  V^\t^.  l.e  piemier 
jour  de  carême  de  l'Année  i*2*20  ,  il 
irrul  en  celle  >ille  l'hal'il  mon.istitjjr 
drs  mains  du  1*.  Ua\naud,  qui  prè«  I  .ut 
aiois  avec  u'i  prand  »urcrs  au  couvent 
de  Saint  Jacques.  Ses  talents,  sti  ver- 
tuv,  raal(;re  sa  jeune  <e,  le  firent  ^lire 
dans  la  mmie  année  provinci.il  de 
Kombardie.  I.e  jr\r  qu'il  montra  dan« 
le  ^ou\erncmei:t  ilc  sa  province,  le  fil 
unanimement  clmi^T,  le  (î  août  l'ilM, 
pour  sucrrdrr  à  saint  Dominique,  pa- 
triarche de  l'ordre  de>  Frère*  l'ié 
cheuis.  Kn  peu  de  tempN  il  panmt  à 
établir  sa  reli;;ion  en  France,  en  Ita- 
lie, en  (irèce,  en  Kspa;;ne,  et  même 
en  Asie.  Kntrainé  par  j^es  exhoita- 
tions  ,  Albert-le-Grand  entra  dans 
son  ordre,  dont  il  fit  la  pinire  par  sa 
science  et  iia  sainteté,  l'n  célèbre  pro- 
fesseur ,  (îaultier  ,  r)ui  ensei^'ii  i  t  la 
philosophie  à  Verceil  ,  aprr>  l'avoir 
entendu,  vint  se  r.inticr  au  nnmhie 
de  se^  enfants,  et  fui  depuis  un  saint 
religieux.  Jourdain  unissait  étroite- 
ment dans  son  co-iir  l'amour  de  la 
prière  à  l'amour  do  l'élude.  (Vesl 
pourquoi  souvent  on  l'entendait  dire 
que  si  l'oraison  est  la  nourriture  de 
1  .ime,  l'élude  en  est  le  breuva;;e  déli- 
cieux. Quelqu'un  lui  demandant  quel 
était  le  meilleur  moven  pour  arriver  à 
la  perfection  ou  de  toujours  jeûner 
ou  de  toujours  prier  :  •«  Fl  moi ,  je 
«  vous  demande,  répondit-il,  quel  est 
«  le  plus  profilable  au  corps,  ou  de  lou- 
«  jours  man;^er  ou  de  toujours  boire.  »» 
l^succcï'scur  «le  saint  Dominique,  dans 


tout  ce  qu'il  entreprit  reçut  l'appui  des 
papes  llonorius  111,  qui  lui  portait 
une  profonde  affection,  de  drépoirc 
IX,  et  de  plusieurs  pi inces  catholi- 
ques. 1/ascendant  de  s.i  \rrtu  lui  con- 
quit l'esiime  de  l'empereur  Frédéric 
11,  à  qui  il  n'hrsita  pas  d'adresser  de 
prare»  reproches,  narce  que  ce  prince 
trouhijit  la  paix  de  l'F^lise,  et  qu'il 
tendait  a  en  détruire  la  pui^^ance  dans 
son  empire,  l/eiopereur  non-seule- 
ment l'erouta  s.ins  colère  ,  mais  lui  fit 
la  promesse,  qu'il  oublia  bieutrtt  pour 
son  propre  roalhenr,  de  tenir  dans  la 
tuile  une  fond. nie  plus  WÊoàérét. 
Après  avoir  travaillé  quinte  ans  à 
gouverner  et  à  étendre  son  ordre  , 
Jourdain  voiJut  aÏWt  vtsiiet  le  tombeau 
Au  Sauveur',  près  du(|uel  il  était  né  II 
remit,  eu  pailanl,  son  autorité  entre  les 
mains  d'.\lbeit  le-(irand  qu'il  nomma 
vicaire- général,  pendant  .son  jbsence. 
I.e  cnmmencemnil  de  sa  navigation  fut 
irès-heureax.  Il  était  en  vue  de  Saint- 
Jean  d'Acre,  lorsqu'une  tempête  bri^a 
le  vaisseau  qui  le  puilait.  Il  péril 
dan»'  ce  naufrage,  avn-  cent  autres  pas- 
sagers, le  13  février  1*J37.  Jourdain 
a  écrit  nue  histoire  de  ^on  ordre  inti- 
tulée :  l)r  initiis  orjinn  Pnzdirtito- 
rum.  (''est  lui  qui  composa  l'office 
propre  de  la  fêle  de  .SainI  Dominique, 
ainsi  qu'un  chapelet  nivsièneux  de 
psatimes,  de  cantiques,  il  antiennes  et 
d'hvmnes  redoublée.  1^  premier  il  a 
intrc.duil  rusa;;e  de  chanter  le  Suhr 
Hrfina  après  compiles.  Il  a  fait  en  ou- 
tre des  cominentaiies  sur  l' Apoca- 
lypse, sur  le  petit  Pri-cian  ,  un  to- 
liirne  tte  sermons  au  peuple,  et  un  li- 
vre d'exhortations  et  de  lettres  à  ses 
relifjieux.  —  Tous  ces  faits  sont  ex- 
traits des  ouvra-es  de  saint  Anionin, 
de  Himibert.  df  Malvenda,  de  Winnèt^ 
liominiminc  par  Fi-uillct,  dcTouron, 
dans  >a  Vie  de  saint  Dominique  ,  et 
enfin  deTrilhème,  dans  son  traité  des 
écrivains  ecclésiastiques.      C — T — .«i. 


294 


JOIÎ 


JOURDAX  (  Andrk-Joseph  ) , 
né  à  Aubagne  en  Provence,  se  pronon- 
ra  avec  beaucoup  d'énerji;ie  coulre  les 
premiers  excès  de  la  révolution.  Con- 
traint bientôt  de  quitter  son  pays,  il 
fdi  d'abord  inscrit  sur  la  liste  des  émi- 
grés, puis  emprisonne  peinlanl  la  ter- 
reur. En  1795,  il  fut  dé[i.!lé  par  le 
département  des  Bocclies-du-Khône 
au  conseil  des  Cinq-Cents,  où  il  s'op- 
posa aux  lois  contre  l'craigration  et 
parla  en  faveur  de  la  liberté  de  la 
presse,  de  la  liberté  des  cultes  et  des 
prêtres  insermentés.  Rapporteur  dans 
Taffaire  des  naufragés  de  Calais,  il  eut 
le  bonheur  de  les  arracher  au  supplice, 
et  fit  décréter  par  le  conseil  qu'ils  se- 
raient déportés  dans  un  état  neutre. 
Cette  conduite  lui  attira  l'animadver- 
slon  du  Directoire,  qui  l'enveloppa  dans 
la  proscription  du  18  fructidor  {sept. 
1797).  Alors  Jourdan  se  réfugia  en 
Espagne,  et  n'obtint  la  permission  de 
rentrer  en  France  qu'après  le  18  bru- 
maire. D'abord  rais  en  surveillance  à 
Orléans,  il  fut  rétabli  dans  ses  droits 
en  1S03.  Bientôt  le  collège  électoral 
des  ]jOQche5-du-Pthône  le  ncmma  can- 
didat au  sénat  conservateur  ,  et  plus 
tard  Napoléon  lui  donna  la  préfec- 
ture du  département  des  Forets,  dont 
le  chef-lieu  était  Luxembourg.  En 
1814,  Louis  XVIII  l'appela  au  con- 
seil d'étal  en  service  ordinaire,  et  lui 
confia  ensuite  l'administration  géné- 
rale des  affaires  ecclésiastiques,  avec 
les  attributions  de  l'ancien  ministre  des 
cultes.  Jourdan  se  tint  à  l'écart  pen- 
dant les  Ceot-jours,  reprit  ses  fonc- 
tions au  second  retour  du  roi,  et  donna 
sa  démission  en  1816;  il  venait  de 
présenter  au  monarque  un  Mrmoire 
où  il  émettait  le  vœu  d'être  remplacé 
par  un  évéque,  et  il  rédigea  l'ordon- 
nance qui  investissait  le  grand-aumô- 
nier de  la  direction  des  affaires  ron- 
ccrnant  le  culte  catholique.  Il  mou- 
rut, le  6  juillet  1831,  à  Marseille,  où 


JOU 

il  s'était  retiré  avec  le  titre  de  conseil- 
ler d'état  honoraire.  P — RT. 

JOrUDAX  (Jean-Baptiste)  , 
maréchal  de  France,  fut  un  des  géné- 
raux de  notre  époque  qui  eurent  le 
plus  de  renommée ,  sans  qu'on  doive 
le  considérer  comme  un  des  plus  ha- 
biles. Son  nom  est  attaché  aux  plus 
grands  événements  des  guerres  de  la 
révolution  ,  et  par  là  sa  biographie 
doit  offrir  un  des  cotés  les  plus  inté- 
ressants de  notre  histoire  militaire. 
Ayant  sei  vi  dans  les  armées  qu'il  com- 
manda, l'auteur  de  cette  notice  fut  té- 
moin de  la  plupart  des  faits  ;  il  les  a 
ensuite  étudiés,  comparés;  il  a  recueilli, 
consulté  tous  \t?>  témoignages  et,  ce 
qu'il  n'avait  pas  compris  d'abord,  ce 
que  peu  de  personnes  comprennent 
encore  aujourd'hui,  les  causes  et  les 
secrets  moteurs  de  ces  grands  événe- 
ments, tout  s'est  expliqué,  aucun  doute 
ne  lui  reste.  D'un  autre  côté ,  placé 
dans  une  situation  indépendante  ,  c'est 
uniquement  pour  l'exactitude  de  l'his- 
toire qu'il  écrit.  Ne  demandant,  ne 
devant  rien  à  aucun  parti  ;  aucune  il- 
lusion ,  aucune  crainte  ne  peut  l'em- 
pêcli2r  de  voir  la  vérité  et  de  la  dire. 
Et  cette  profession  de  foi  qu'il  fait  à 
l'occasion  de  la  notice  du  maréchal 
Jourdan,  il  peut  l'appliquer  hautement 
à  tous  ses  travaux  dans  cette  Biogra- 
phie universelle,  où  depuis  trente  ans 
il  inscrit  ses  pensées.  —  Né  le  2  avril 
1762,  à  Limoges,  fils  d'un  chirurgien 
obscur,  Jourdan  ne  fit  que  des  études 
incomplètes,  et  il  s'enrôla,  dès  l'âge  de 
seize  ans,  comme  simple  fantassin  dans 
le  régiment  d'Auxerrois.  D'abord  en- 
voyé à  un  dépôt  de  Tile  de  Ré,  puis 
transporté  dans  l'yVméiiquedu  Nord, 
il  y  fit  nxii'.  partie  des  guerres  de  l'indé- 
pendance. Après  avoir  obtenu  un  con- 
gé, en  1782,  pour  cause  de  santé,  il 
revint  en  France  ;  et  rentra  dans  le 
même  corps  dès  qu'il  fut  rétabli.  Ré- 
formé définitivement  en  1784,  il  rc- 


JOt 

luuriu  (Um  u  Cunillc.  Sca  ^o«b  et  sa 
%aiiténe  kcmlibieiit  point  alur%  \r  poi- 
Irr  \crs  la  raiiirrr  d<^  arror^  H  %c  Gt 
luarciijiiil  tnctcirr  ;  rt,  s'rlant  marié 
avrr  une  niuùi%lc ,  ils  rfuniirn!  leurs 
iiuiii:>tiirs  analogues.  Tamlis  que  La 
femme  lenail  son  iiu^asin  de  modes, 
le  mari,  |>orlji]l  sa  marciuiidise  sur  ses 
épaules,  allait  la  \endie  de  fuire  en 
foire.  On  conçoit  que  dai<s  une  lelic  po- 
sillon  les  promesses  ou  le>  illusion»  de 
la  rt-\olution  durent  admirablement 
lui  sourire.  Drsla  fin  de  IT'Jl ,  il  s'en- 
10I.1  dans  les  volontaires  dont  l'^sscm- 
blre  ronstiluanle  venait  de  drcreler  la 
foinulion;  et  comme  dan>  la  France, 
M  peu  militaire  de  celle  rpixjiie,  c'é- 
lail  un  litre  imposant  que  d  aMiir  porté 
le  mousquet  pendant  quelques  an- 
nées ,  ses  compagnons  d'armes  le 
itonunrrrnt ,  par  acclamation  ,  clief  du 
second  batadlon  de  la  Haute-Vienne, 
qu'il  conduisit  à  la  frontière  du  Nord, 
DU  il  fit  les  premières  campagnes  de 
nos  i^uerres  sous  l..arA\etle  et  Dumou- 
liez.  1^  bonne  tenue  de  celle  tiuupe, 
et  sans  doule  aussi  riiilrlli;;ence ,  le 
courage  du  commandint ,  lui  tirent 
quebpie  réputation.  Il  fut  nommé  t;é- 
iKN-al  de  bii^.ide,  le  '21  mai  17Uil,  et 
di-u\  mois  après  ^«-ni-ral  de  division. 
Cj  c>l  en  celle  qualité  que,  le  8  sep- 
leml>re  suivant,  il  comnur:da,  sous  les 
rauis  de  DunLerque  ,  l'avant ^arde 
d'Iloucbard  qui,  par  une  des  b  xarre- 
rics  de  celte  époque  si  méconnue  et  si 
peu  comprise,  porta  sa  tête  sur  l'echa- 
faud,  après  avoir  remporté  une  vic- 
toire sur  les  Anglais,  tandis  que  son 
lieutenant,  qui  avait  montré  de  la  bra- 
voure, il  est  vrai,  dans  celte  journée 
do  llondsclioote,  où  il  reçut  une  lé- 
i;ère  blessure ,  m.iis  qui  n'avait  fait 
qu'exécuter  les  ordres  du  ^éncial  en 
chef,  fut  porte  au  premier  ran^;  de 
l'armée.  Il  se  rendit  aui>sitol  hur  U 
Sambre,  pour  y  prendre  le  cominamle- 
ment  des  dilTcrents  corps   que  le  co- 


JOU 


•9S 


ailé  de  salut  public  destinait  à  faire 
lever  le  blocus  de  Maubeu(;e,  formé 
par  le  prince  de  Gibour^,  déjà  nuilie, 
sur  celle  frontière,  de  (|uatie  de  nos 
plus  fortes  places.  Dans  celle  làclie 
diifirile,  Jiiuriian  fut  d;ii;;éou  surveillé 
par  le  représentant  du  pmple  Carnot  , 
qui,  selon  rusa;;e  du  temps,  lui  ilonna 
non  seulement  des  instrurlions  et  des 
ordres,  mais  au^si  l'exemple  du  cou- 
rage, en  se  mettant  lui-ménr  à  la  tète 
des  troupes.  On  se  battit  pendant  trois 
jours,  et  deux  fois  l'aile  droite  et  l'aile 
^audie  furent  obl»;;ées  de  rétni^rader. 
Kn6n  le  centre,  après  avoir  pris  et 
repris  trois  fois  le  village  de  \\  ati^nies, 
en  resta  définitivement  lemaitre;  1rs 
albé-s  se  retirèrent  derrièie  la  Sambre, 
et  le  drbloquement  de  .Maulie'i;;e  fut 
opéré;  ce  qui  était  un  siirrèN  immense 
dans  les  circonstanics  ou  se  trouvait  la 
république.  ]..es  représentants  du  peu- 
ple Carnot  et  Duque^no?  furent  Irrs- 
satisfaits  de  la  conduite  du  (général  en 
cbef,  et  ils  écriviient  à  la  Convention  : 
•«    Il  est  impossible  de  se  conduire  avec 

•«    plus   d'intrépidité  et  »le  s,i;;eN.N« 

«<  Son  coup  d'essai  est  d'avoir  battu 
'«  (x)bour(^  ;  voila  l'clo^e  de  ses  talents; 
•«  celui  de  son  patriotisme  est  dans  la 
•<  bouche  de  tous  ses  compagnons  d'ar« 
«  mes.  >•  Dès  lors  Jourdan  se  trouva 
placr  au  premier  ran^  de  nos;:;éni-iaux, 
et  le  comité  de  gouvernement  l'appela 
auprès  de  lui  pour  recevoir  ses  avis  sur 
les  mouvements  des  quatorze  armées, 
alors  si  importants  et  si  multipliés. 
Selon  les  nécessités  de  l'époque  ,  il 
ne  manqua  pas  ,  pendant  son  séjour 
à  l'aris ,  de  se  présenter  à  la  société 
des  jacobins,  et  il  v  fut  accueilli  par 
de  longs  applaudissements.  Mais  il 
eut  moins  de  sucres  à  la  (x)nvention 
nationale,  où  des  intrigues  malveillan- 
tes l'avaient  devancé.  D'un  aulre  c«V.c, 
il  d'I  avec  trop  «le  franchise,  dans 
les  comités,  qu'il  ne  fallait  pas  faire  de 
campagne  d'hiver,  et  que  l'on  devait 
19* 


29<J 


JOU 


employer  cette  saison  a  iustrulrc  ,  à 
discipliner  les  nouvelles  lésées,  (^ette 
pia(lonre(léj>laf  ;  et,  ilatis  un  de  ses  rap- 
ports, fiarère  ,  riiiévitable  or|;ane  de 
toutes  les  pensées  du  comité  de  salut 
public  ,  déclara  hautement  qu'il  te- 
nait Jourdan  pour  un  fort  honnête 
homme,  pour  un  excellent  républicain, 
mais  qu'il  le  croyait  dépourvu  de  l'é- 
nergie nécessaire  au  commandement 
en  chef;  que,  du  reste,  il  avait  des 
droits  incontestables  à  une  honorable 
retraite.  C'était  alors  pour  un  gé- 
néral une  véritable  faveur  qu'en  pa- 
reil cas  on  ne  l'envoyât  pas  à  l'écha- 
faud.  Jourdan  le  comprit  fort  bien; 
il  se  retira  sans  mot  dire  dans  sa 
chère  Limoges,  et  l'on  a  dit  qu'il  y  re- 
prit son  modeste  commerce.  Piche- 
gru  ,  qui  lui  avait  succédé  dans  la 
faveur  du  comité  ,  fut  aussitôt  mis  à 
sa  place.  Mais  cette  disgrâce  dura  peu  ; 
les  hommes  de  commandement  étaient 
rares  à  cette  époque;  le  mouvement  des 
partis  était  d'ailleurs  si  rapide,  et  les 
caprices  de  ceux  qui  les  dirigeaient  si  fré- 
quents, qu'au  bout  de  deux  mois  levain- 
queurdeWatignies  fut  tiré  de  sa  retraite 
pour  remplacer,  à  la  tête  de  l'armée  de  la 
Moselle,  le  jeune  Hoche  qui,  six  mois 
auparavant,  avait  été  sous  ses  ordres 
à  Dunkerque,  et  qui,  ainsi  que  lui,  de- 
venu subitement  général  en  chef,  ve- 
nait de  tomber  à  son  lour  dans  la  dis- 
grâce de  Saint-Just  et  de  Robespierre, 
l^eu  de  jours  après  son  ariivée  sur  la 
frontière  des  Ardennes,  Jourdan  ob- 
tint à  Arlon,  sur  l'Autrichien  lieau- 
lieu,  un  succès  d'autant  plus  impor- 
tant que  le  résultat  fut  d'écarter  l'en- 
nemi de  sa  route  à  travers  l'épaisse 
for»H  des  Ardennes.  Cette  marche 
fameuse,  qui  eut  sur  les  événements 
une  si  grande  iniluence  ,  fut  exé- 
cutée avec  beaucoup  de  piécision  et 
de  bonheur.  L'armée  de  la  Moselle 
passa  la  Meuse  à  Dinant  ;  et  le  !î  juin 
elle  parut  sur  la  Sarabre,  où,  depuis 


JOU 

di'Mx  mois,  quelques  divisions  du  Nord 
et  des  Ardennes,  sous  les  ordres  de 
Charnoimier  et  de  Desjardins  ,  fai- 
saient d'inutiles  elforts  pour  rompre 
l'aile  gauche  des  alliés  et  s'emparer  de 
Charlcroi.  La  veille  de  cette  appari- 
tion, ces  divisions  après  un  nouveau 
revers  avaient  été  ,  pour  la  seconde 
fois,  obligées  de  repasser  le  fleuve.  On 
conçoit  de  quelle  importance  fut  pour 
elles  l'arrivée  d'un  pareil  renfort.  En  y 
ajoutant  quelques  corps  venus  de  l'in- 
térieur ,  l'armée  qui  se  trouva  alors 
réunie  sur  la  Sambre,  et  qui  un  peu  plus 
tard  reçut,  par  décret  de  la  Convention, 
le  nom  d'armée  de  Sambre-et-Meuse, 
n'était  pas  composée  de  moins  de  qua- 
tre-vingt-dix mille  hommes,  qui  furent 
placés  sous  les  ordres  de  Jourdan.  Six 
représentants  du  peuple  furent  chargés 
de  la  diriger.  A  leur  tête  on  remar- 
quait le  confident  et  l'ami  de  Robes- 
pierre, Saint-Just,  qui,  contre  l'usage 
des  membres  du  comité  de  salut  pu- 
blic, avait  quitté  momentanément  ses 
hautes  fonctions  pour  des  motifs  qui 
ne  pouvaient  qu'être  de  la  plus  grande 
importance.  C'était  le  temps  où  se  sui- 
vaient à  Bruxelles  des  négociations  en- 
tre le  cabinet  de  Vienne  et  le  fameux  co- 
mité dont  Saint-Just  faisait  partie  [Voy. 
])oHM,  LXII,  517).  Tout  indique  que 
ce  confident  de  Robespierre  était  le 
seul  de  ses  collègues  à  l'armée  qui  fut 
dans  le  secret  de  ces  négociations,  et 
que  le  général  en  chef  lui-même  n'en 
était  pas  instruit.  Cependant  on  ne 
peut  douter  que  ce  ne  soit  en  con- 
séquence des  décisions  de  cette  espèce 
de  congrès  (1)  que  l'évacuation  de  la 
lielglque  ait  été  airr-tée  et  convenue 
dans  un  conseil  de  guerre  tenu  à  Tour- 
nai ,  le  2i  mai,  par  les  généraux  de 

II;  L'A  iil  riche  avjil  chargé  de  ces  urgocia- 
tioiis  son  ancien  aiiihassadeur  à  l'aris  Mcrcy 
dAiRenteau  tl  le  couile  Trautinansd(Mff.  M  ett 
pruh.Thle  que  ce  fut  le  principal  inotil  «lu 
voy.ig"'  (jue  le  jeune  empereur  François  II  iil 
alors  dans  les  Pays-Bas. 


JOU 

laroalilinn.  rt  dan^  ifquri  \e  pnnrr 
d'Orange  fil  d'inutiles  fffort*  pour 
que  Ton  triardàt  au  moin«  de  quelques 
■ion  une  retraite  qui  devait  amener  la 
ruMie  lie  la  llollaiide.  Ainvi  les  .illiês 
avaient  drridé  qu'iU  ahandunneraient 
les  Pa^s-Ila*,  lorvitie  .lourdaii  parut 
sur  la  Sanibre,  à  la  Irte  de  quatre- 
rinp!  dix  mille  FrançaiN,  et  Saint  Ju»! 
qui  dirigeait  ou  surveillait  ses  mouve- 
ment», de  la  part  du  romitë  de  salut  pu- 
blic, ne  pouvait  pas  l'ic^norer  ;  mais  ee 
drpiili'  savait  aussi  qu'il  n'>  avait  rien 
d  j(rrté  pour  unr  suspension  d'iiostili- 
tés  ,  et  que  les  deux  partis  prétendaient 
bien  enrnre  profiter  «le  leurs  a\anla;;es. 
I.a  Hollande  seule  était  vouée  à  une 
ruine  lertaine  et  <ans  ronipeiisation. 
Quant  aux  Autrichiens  et  aux  An;:lais, 
ils  n'ignoraient  pas  «les  lors  que  d'am- 
ples drdomnia;;emeiits  leur  étaient  a^su 
res.  Mais,  pour  le  piinre  dr  (>»bourfj, 
la  marrlie  qu'en  ce  moment  il  s'a^^i^saii 
d'opter  en  présence  des  nombreuses 
armées  de  la  république  était  une 
affaire  délicate,  et  rlle  pouvait  le  de- 
venir encore  davanla;;e  si  Jourdan  fai- 
sait de  nouveaux  progrès.  Ca'  fut  afin 
de  l'en  em[>ëctier  et  dVIoigncr  les  hVan- 
çais  de  Iliuxelles  et  de  Tirlemont , 
seul   point   de  retraite    qui  lui    restât, 

3ue  le  ^cncialivsimr  «le  la  coalition  se 
ecida  enfin  à  tenter  de  nouveaux  ef- 
forts pour  secourir  ("liarleroi,  et  que 
son  lieutenant  Heaulieu.  après  avoir 
réuni  quelques  forces  à  Nivelles,  se  mit 
en  roardie,  le  1G  juin,  pour  attaquer 
Tarmée  fran<;aise.  Mais  ce  jour-Ii 
même,  Jourdan,  qui  venait  de  passer 
la  Sambte  avec  toutes  ses  divisions, 
tomba  inopinément  sur  les  colonnes 
antrirliiennes  qu'un  épais  brouillard 
lui  avait  carbces.  On  combattit  avec 
beaucoup  d'arharncment  et  des  chan- 
ces variées  de  part  et  li'auîre  pendant 
la  plus  ma'idc  partie  de  la  journée;  et 
ce  ne  fut  que  vers  cinq  heures  du  soir 
que,  h'  rrntr»'  de*  Français  ayant  éprou- 


JOU 


'•r 


vré  quelque  desordre,  toute  leur  aimee 
fui  obl'f;ée  de  repas>er  la  Sambre,  en 
abandonnant  encore  une  fois  le  siège 
de  (.harleroi  si  imprudemment  coiti- 
mencé.  Mais  on  ne  se  rebutait  poiitf 
alors  pour  un  premier  échec  ,  et 
Saint -.lii>t  n'était  pis  homme  à  vou- 
loir que  r«n  en  re»tat  la.  il  >c 
mit  en  fureur  conlre  les  généraux  et 
les  soldats,  et  fut  près  d'en  mvover 
une /oi/r/i/r.  comme  ce'a«e  disait  a'ot», 
avec  le  général  en  chef  lui-même,  .m 
tribunal  révolutionnaire  de  Paris;  rr 
qui  était  un  arrêt  de  mort  inévitable  II 
ne  changea  de  résolution  que  lorsqu'il 
reçut  des  avis  inquiétants  sur  le  snil 
de  ^on  parti  aux  approches  dn  îl  iher- 
midoi .  Mais  de)a  beaucoup  de  virli- 
mes  avaient  été  sacrifiées  i  la  colère 
du  proconsul  par  le  tribunal  de  l'ai  - 
mee.  l/auteui  de  cette  notice  sr  sou- 
vient encore  d'avoir  vu,  sur  le*  bords 
de  la  Sambre,  condu-re  à  la  mort,  en- 
tassés pèle  mêle  dans  des  four;;oiis  dr 
rivres,  officiers  et  soldats  que  venait  de 
condamner  un  de  ces  tritiunaux  nn'li- 
fnirr.s ,  rxtraortiinairrs  rt  rrra/u- 
tionnairr.i  que  la  'invention  natio- 
nale avait  envovés  à  toutes  les  arnii-e*. 
(.elui  qui  opérait  alois  sur  la  Sam- 
bre ,  compose  d'hommes  au«si  féroces 
q<ie  Dumas  et  Fouquier- l'ainville,  ne 
prononçait  pas  des  arrêts  moins  nom- 
breux ni  moins  cruels.  Cet  horrible 
svstèine  était  d'autant  plus  odieux  <]u'il 
pesait  sur  de  jeunes  soldats  arrachés  la 
veille  à  leurs  familles  ,  et  qui  ,  apn-s 
avoir  élé  comme  autorisés  à  l'indisci- 
pline et  aux  plus  affre:!x  désordre-  par 
tous  les  exemples  de  la  révolution, et  sur 
tout  dans  l'invasion  du  Palalinat  et  d'au- 
tres contrées,  étaient  ensuite  immolés 
pour  les  moindres  fautes,  sans  transition 
et  sans  pitié.  Ceux-là  connaissent  bien 
peu  celte  époque  de  san^ct  de  terreur, 
qui  pensent  que  les  armées  en  furent  to- 
talement exemptes,  et  que  l'on  put  s'y 
rcfut;ier  pour  se  -      '  aire  à  roppressiou 


29»  JOU 

universelle  !  Mais  ce  n'est  pas  le  général 
en  chef  deTarméede  Sambre-et-Meiise 
qu'il  faut  accuser  de  ces  infamies.  Jour- 
dan  n'était  certainement  pas  un  homme 
cruel.  Lui-mcme  n'échappa,  dans  plu- 
sieurs occasions,  que  par  une  sorte  de 
miracle,  à  la  férocité  des  proconsuls, 
et,  parfois,  il  eut  beaucoup  de  peine  à 
lenr  arracher  quelques  victimes.  Il  ne 
faut  pas  croire  non  plus  que  ce  fut  à  de 
tels  moyens  que  la  France  dut  les  suc- 
cès que  ses  armées  obtinrent  alors  sur 
différents  points.  Partout  oîi  les  soldats 
français  ont  été  bien  conduits,  partout 
où  les  moyens  de  vaincre  ne  leur  ont 
pas  manqué  ,  ils  ont  fait  leur  devoir 
beaucoup  plus  par  des  sentiments 
d'honneur  et  de  patriotisme,  que  par 
àe^  pensées  de  crainte  et  d'une  avilis- 
sante terreur.  S'ils  éprouvèrent  des 
revers,  il  ne  faut  les  attribuer  qu'à  l'i- 
gnorance ,  à  l'impéritie  des  chefs  et 
surtout  à  celle  des  stupides  représen- 
tants, qui  se  mêlèrent  trop  souvent  de 
les  conduire.  Dans  cette  circonstance, 
par  exemple,  c'était  Saint-Just  lui- 
même  qui  avait  voulu  que  l'on  recom- 
mençât, en  présence  d'un  ennemi  vic- 
torieux, le  siège  de  Charleroi  qu'il  fallut 
lever  encore  une  fois  le  16  juin  avec 
de  grandes  pertes.  Mais,  pour  les  gou- 
vernants de  cette  épo{|!U',  tout  cela  était 
peu  de  chose  ;  le  lendemain  on  recom- 
mençait avec  de  nouveaux  sacrifi- 
ces. On  a  vu  que  ,  depuis  quinze 
jours,  les  alliés  avaient  formellement 
décidé  l'évacuation  des  Pays-lîas  ; 
ainsi,  il  ne  pouvait  y  avoir  désormais, 
de  leur  part,  pour  s'y  maintenir,  aucune 
entreprise  sérieuse.  Il  ne  s'agissait  plus 
pour  eux  que  d'assurer  et  d'exécuter, 
sans  perte,  une  retraite  devenue  indis- 
pensable. Il  est  donc  évident  que  ce  fut 
dans  ce  seul  but  que  le  prince  de  Co- 
bourg  ,  leur  généralissime  ,  dirigea 
vers  Charleroi ,  le  2G  juin,  la  plus 
grande  partie  de  ses  forces.  On  a  dit 
qu'il  ignora  jusqu'à  la  fin  de  la  jour- 


JOU 

née  la  reddition  de  cette  place;  mais 
cela  est  peu  probable  dans  un  pays 
découvert,  où  les  deux  armées  étaient 
en  présence  dès  la  veille  sur  une  ligne 
très-étendue,  lorsque  déjà  les  avant- 
postes  en  étaient  venus  aux  mains  sur 
différents  points,  et  qu'il  y  avait  eu  des 
prisonniers  de  part  et  d'autre.  D'ail- 
leurs toutes  les  dispositions  et  tous  les 
mouvements  de  l'armée  autrichienne 
furent  évidemment  combinés  dès  le 
matin,  sur  la  certitude  que  Charleroi 
était  au  pouvoir  des  Français.  S'il  se 
fût  agi  de  le  délivrer  encore  une  fois, 
comme  lîeaulieu  l'avait  fait  quelques 
jours  auparavant ,  le  principal  effort 
devait  être  dirigé  vers  le  centre  sur  la 
route  de  Gosselies  ,  et  non  pas  sur 
les  ailes,  à  une  grande  distance.  Et 
ce  qui  prouve  encore  mieux  que  ce 
mouvement  sur  les  deux  ailes  ,  or- 
donné par  le  prince  de  Cobourg,  ne 
devait  être  qu'une  simple  démonstra- 
tion, c'est  que  la  plus  grande  partie  de 
ses  équipages  et  des  réserves  d'artillerie 
serait  en  marche,  le  même  jour,  dans 
la  direction  de  Liège,  et  qu'il  prescrivit 
à  tous  les  corps  de  son  armée,  qui  s'a- 
vancèrent vers  la  Sarabre,  de  ne  point 
engager  d'action  sérieuse.  Vers  le 
milieu  de  la  journée,  lorsqu'il  apprit 
que  plusieurs  s'avançaient  plus  qu'ils 
n'auraient  dû  le  faire,  il  leur  envoya 
l'ordre  de  se  retirer  ;  mais  cet  ordre 
ne  put  être  exécuté  que  sur  le  soir  par 
les  corps  de  Beaulieu  et  du  prince  d'O- 
range qui  avaient  fait  le  plus  de  pro- 
grès. Le  centre  de  l'armée  française  qui 
ainail  pu  profiter  de  ce  mouvement 
imprudent  des  deux  ailesaulrichiennes, 
en  manœuvrant  sur  son  front,  resta  au 
contraire  pour  la  plus  grande  partie  , 
dans  une  complète  immobilité.  Kt  ce- 
pendant la  position  des  Français,  quoi- 
que défectueuse  sous  quelque  rapport  , 
leur  donnait  de  grands  avantages  pour 
la  facilité  et  la  célérité  des  mouvements, 
I>ien  que  fort  étendue,  celte  position 


JOU 

IVlait  «oins  qDP  celle  des  alliés,  pai»- 
que  la  li<;nr  française  a«jit  la  forme  d'un 
arr,donll.iSarol)ree(ail  la  coide,  et  que 
relie  des  Aulnrliiem,  qui  faisaient  en 
■^e  temps  des  drmonsli.ition*  sur 
lou<  les  point*,  en  dchms  de  re  demi- 
eercle  ,  embrassait  nn  fNpafc  beaucoup 
plosTa'.le.  Certes,  si  Joiinlan  avait  eu  la 
pensée  de  renforcer  rapidement  ^on 
centre  par  s^  réserves,  et  d'v  faire  un 
fH'andcflort,  on  ne  peut  pas  douter  qu'il 
n'eût  séparé  sans  peine  les  différents 
corps  des  alliés.  Kn  se  portant  ainsi  droit 
sur  Brutelles,  ilponvait  en  un  moment 
changer  la  fare  des  choses  ;  mais  il  n*v 
avait  là.tl  faut  le  dire,  personne  qui  (ùt 
capable  d'une  conception  auNM  forte  et 
pourtant  tris  >mi.lc.  D'ailleurs,  il  est 
bien  sûr  qu'à  relie  époque,  dans  l'une 
et  l'autre  armrr,  on  ne  voulait  en  ve- 
nir à  rien  de  sérieu*  ni  de  deci>if.  Le 
prince  de  G)bour<;  avait  reçu  de  l'em- 
[>ereur,  qui  était  retourné  a  \  ienne  qoel- 

3ue$  jours  auparawnt,  l'ordre  formel 
e  se  retirer,  et  il  ne  songeait  qu'à 
éracoer  la  Ilel^iqoe  sans  pertes  ;  tandis 
que  Sainl-Ju>t,  assuré  d'occuper  bien- 
t(U  cette  contrée  sans  coup  férir,  ne 
Toulait  rien  hasarder.  Aussi,  dans  celte 
journée  fameuse,  il  n\  eut  réellement 
qu'une  partie  des  dea»  armées  qui  com- 
battit ;  encore  ful-ce  sans  ordre  et  sans 
utilité.  L'aile  droite  des  Français  , 
que  coromaiidaii  Marceau,  fut  re|etée 
derrière  la  Sambre  ,  et  ce  succès 
inattendu  6l  oublier  à  Heaulieu  les 
ordres  qu'il  avait  reçus.  11  éprouva  en- 
suite une  vigoureuse  résistance  de  la 
part  de  I^febvre,  qui  occupait  Lambu- 
sart,  et  lorsqu'il  fut  séiieusement  cn- 
j:a<;é,  ce  n'est  qu'aNcc  beaucoup  de 
peine  qu'il  put  revenir  sur  ses  pas.  Dans 
d'autres  circonstances,  et  avec  des  ad- 
versaires plus  habiles  ,  il  aurait  pavé 
celte  faute  bien  cher  :  d'autant  plus 
qu'au  même  moment  le  prince  «l'O- 
range en  commellail  une  pareille  à 
l'aile  droite,  ou  il  avait  force  kléber  de 


JOU 


»w 


»e  retirer  jusqu'à  Marchienne*.  Comme 
noos  Pavons  dit  ,  pendant  tout  ce 
temps,  c'est-à-dire  pciid.intune  longue 
journée  du  mois  de  juin,  le  centre 
des  Français  resta  immobile  ;  et  nous 
ne  savons  pas  ou  M.  Ihiers  a  trouvé 
que  la  di\ision  de  Moilut,  qui  for- 
mait recentre,  en  a\anl  de  Cosselies, 
sr  tnrsura  long-trmpi  avrr  ir  grnê- 
ral  autrii  hirn  (JuasilnniHii  h  ,  qui 
rssuya  plusirurs  nwnirtn'res  pnur 
la  tournrr  ,  rt  finit  par  l'être  ^sic) 
lui-mrme,  que  cette  division  se  replia 
aussi  sur  (iosselies  après  lei  plus  ho- 
noriîbles  efforls,  etc.  ^J).  L'auteur  de 
cette  nolice  se  trouvait  ce  jour-  là  mrme 
au  centre  de  la  <!  ""T  >rlot,    ou  il 

commandait  uru  c  d'infante- 

rie ;  et  il  affirm.- ,  i^u^  crainte  d'rtre 
démenti  par  les  témoins  qui  existent 
encore  ,  qu'à  l'exception  de  quelques 
a>ant-poste»,  celte  division  ne  fil  pas 
le  moindre  effurt,  pas  un  mouvement, 
que  1  on  n'\  tira,  q'.ie  l'on  n'v  e.ssu>a 
pas  un  coup  de  fusil,  pas  un  coup  de  ca- 
non ;  que  le  villai^edeCiOSselies  qui  était 
derrière  elle  immédiatement,  et  que  l'on 
pouvait    re;;arder   comme  la  cle   de  la 

fiosition,  à  cause  de  la  roule  de  llnivel- 
e$  qui  le  traver.se,  ne  fut  pas  orciipe  un 
instant ,  m  même  altaqué  par  l'en- 
nemi, qui  son  tint  à  plus  d'une  derni- 
lieue;  qu'entin  le  ballon  dont  on  a  tant 
parle,  et  qui   manœuvra  toute  la  jour- 


ij>j>-r   ;   iiiaU  «lé  rai»ie,  on  o*-  d«'ii  nm  m  cwn- 
ur'.      I   cr    iieil  «ïu#  p«rloul  r\     dan»  tou*  lr« 


.\i,-' 


'    m.'  u  \    d»»r.  I  tir 
Kl. t.    l)a:it    crl'.r    ' 
inirr  i^flrsion    i 


,p,v 


.p  eu  Franc* .  on  a 
>rtt  mililairr». 
mira*  «boirir 
ix  «|i;'il.'»  tiii- 
.  f\rm\t\t,  la 
ip  poar  faire 


co.i.,>r.ndrc  iM.  "Ilii.r>  qo.  .  »i  Oosieh*»  , 
|.la.r  drrrirrr  lirrnlredr  l'afuii >, -■» vail  pu  «Ure 
ml   in. Util   par  IVnnc mi  ,   toute   U 


M" 


et   toutes  les  di- 


li.r,.    lr.infji>r  cul  rie  P'Oipue 

»l^  ...>^  tourn<>«3  cl  coup,  r*  de  Uur  retraite  »ur 

«  liwrlrroi,  la  »eule  qui  leur  fùl  re»tee. 


3oo 


jor 


liée  sur  ce  point  n'y  rendit  d'au- 
tre service  que  d'égayer  les  soldais, 
qui  s'amusèrent  beaucoup  de  voir  des 
gendarmes  le  tirer  par  des  cordes,  et 
donner  une  espèce  d'ovation  au  re- 
présentant Guyton  de  Morveau,  qui 
y  était  monté  par  injonction  de  Saint- 
Jusl  ,  et  qui  s'y  mourait  de  peur. 
Nous  pouvons  affirmer  encore  qu'à  la 
fin  de  la  journée,  avant  enlcndu  aux 
deux  ailes  et  presque  sur  leurs  der- 
rières quelques  détonations  d'artille- 
rie, les  troupes  de  la  division  Morlot 
crurent  à  un  revers  pareil  à  celui  du  16, 
que  même  elles  avaient  déjà  reçu  l'ordre 
de  retraite,  qu'elles  l'exécutaient  et  que 
la  tète  de  leur  colonne  entrait  dans  Gos- 
sflies,  (;;!;iiid  il  leur  vint  un  contre-ordre 
avec  la  nouvelle  d'une  victoire  à  laquelle 
elles  ne  pouvaient  croire.  Elles  n'y 
crurent  pas  davantage  ,  huit  jours  plus 
tard,  lorsqu'il  leur  en  vint  un  récit 
ofticiel  piononcé  à  la  tribune  de  la 
Convention  par  le  député  Barère.  De 
tous  ces  rapports  du  temps  qu'on  appe- 
lait des  curma^jwles,  de  tous  les  bul- 
letins du  directoire,  du  consulat  et  de 
l'empire,  nous  ne  craignons  pas  d'affir- 
mer qu'il  n'en  est  point  de  plus  men- 
songer, de  plus  radicalement  faux  que 
ce  discours  prononcé  au  nom  du  comité 
de  salut  public,  sur  la  bataille  deFleu- 
rus ,  dans  la  séance  du  1 1  messidor 
an  H  (•29  juin  1794).  D'abord  le  nom- 
bre des  combattants  dans  les  deux  ar- 
mées y  est  fort  exagéré,  celui  des  morts, 
des  blessés  l'est  encore  davantage,  et 
es  mouvements,  la  position  des  trou- 
pes y  sont  tout -à-fait  imaginaires. 
Quant  aux  prisonniers  ,  on  pourrait 
croire  ,  quelque  invraisemblable  que 
cela  paraisse  à  cAté  des  autres  circon- 
stances, que  l'armée  française  n'en  fit 
réellement  qu'un  seul;  mais  il  est  ab- 
surde ,  et  c'est  un  des  mensonges  les 
plus  impudents  que  Tiarère  ail  faits,  il 
est  absurde  de  prétendre  que  ce  fut  à 
cause  du  décret  de  la  Convention,  qui 


JOU 

ordonnait  le  massacre  des  prisonniers 
anglais,  et  que  sitôt  que  nos  soldats  vi- 
rent des  habits  ronges  ils  se  ruèrent  sur 
eux  et  en  firent  un  effroyable  carnage. 
La  vérité  est  que  de  toutes  les  troupes 
que  commandait  le  prince  de  Cobourg , 
à  Fleurus,  il  n'y  avait  pas  un  seul  ba- 
taillon anglais ,  et  que  toute  l'armée 
britannique  sans  exception  était  restée 
dans  la  Flandre  orientale  sous  les  or- 
dres du  duc  d'York,  qui  se  dispo- 
sait à  la  reconduire  en  Angleterre 
comme  Cobourg  se  préparait  à  rem- 
mener les  Autrichiens  au  delà  du  Rhin. 
Par  les  mêmes  causes  de  dissension 
qui  agitaient  alors  les  alliés,  les  Prus- 
siens n'y  avaient  également  pas  envoyé 
un  seul  régiment  [Voy-  Kalckri: ut  , 
dans  ce  vol.) ,  et  Barère  ne  l'igno- 
rait pas  ;  cependant  il  y  en  fait  figurer 
vingt  mille  !  Tous  les  membres  du 
comité  de  salut  public  savaient  la  mé- 
sintelligence, les  divisions  qui  paraly- 
saient, qui  annulaient  d'une  manière  si 
honteuse,  les  efforts  de  la  coalition  ;  ils 
avaient  tout  fait  pour  exciter,  pour 
entretenir  ces  divisions;  c'était  leur 
devoir,  et  ils  s'en  acquittaient  merveil- 
leusement. Ils  n'avaient  donc  pas  be- 
soin pour  cela  de  mentir  si  impudem- 
ment à  la  face  de  l'Furope,  ni  d'in- 
sulter à  ceux  dont  ils  triomphaient 
avec  tant  de  facilité.  Dans  ce  même 
rapport,  les  rois  et  leurs  généraux  fu- 
rent traités  de  hrigands,  (V assassins, 
par  des  gens  avec  lesquels  dans  ce  mê- 
me temps  ils  négociaient  et  transi- 
geaient !  Mais  ,  chose  plus  odieuse  et 
plus  ridicule  encore,  Piarère  osa  y  dire 
sérieusement  que  le  .sang  répandu  nu 
même  instant  à  trente  lieues  delà  sur 
les  échafauds  d'Arras,  par  le  féroce  l.e- 
bon,  avait  aussi  aidé,  contribué  à  la  vic- 
toire de  Fleurus.  Et  tout  cela  fut  applau- 
di, admiré  par  la  stupidc,  par  l'horrible 
assemblée  ;  tout  cela  se  trouve  encore 
dans  ses  procès-verbaux,  dans  ses  ar- 
chives ;   et   c'est  dans  ces  amas   d'i- 


JOU 


JOU 


iifpli^  ri  J'iinposlum  que  vont  (uii- 
»ri  les  foOUMblrur»  ,  lr>  liiNlorien^  ri 
Irt  oraleur:>  cltarUlall^  qui  sont  loul 
prét:i  à  recommencer  l!arere(I))  l^iio- 
rjnls  et  credulrs  qu'ils  sont ,  ils  ne 
\oieut  pas,  ces  historiens,  que  %i  Jour- 
tlA.'i  eût  léellemcnt  oltteiiu  a  Fleuras 
une  \irtoire  aussi  conipietc,  ausM  dé- 
cisive (]'mI  roinint  aux  orateurs  de  la 
CfJii  \  eut  IoimIc  le  dire,  le  crucial  eût  elé 
sans  excuse  de  n'atoirpas,  drs  lemrrae 
jour,  poussé  jusqu'à  Bruxelles,  de  n'a- 
voir pas  sui-le-cliamp  rejele  au-delà 
du  lUiin  les  drbris  de  i'armée  autri- 
chienne,  tandis  que  l'iche>;ru  aurait 
forcé  de  >e  rembarquer  ou  rejrlé  dans 
la  mer  ceux  du  duc  d*^orl,  alors  si 
pressé  de  s'enfuir  et  d'abandonner  ses 
allies.  M.  de  Jomiiii,  qui  est  roslé  en- 
core bien  loin  de  la  venté,  dans  le 
récit  qu'il  fait  de  la  balaillo  de  Fleu- 
rus,  a  cepcmlaiit  compris  la  |M»ition 
ou  dut  se  trouver  Juurdan  aussitôt 
après;  mais  a>antcté,  ainsi  que  les 
autres  historiens,  induit  en  erieur  sur 
la  plupart  des  faits,  les  conséquences 
qu'il  en  lire  ne  peuvent  qu'être  égale- 
ment erronées.  (>omine  nous,  il  s'é- 
tonne que  .lourdan  et  INche^ru  n'aient 
pas  reçu,  a  l'instant  même,  de>  comités 
de  la  G)u\  jnlion,  l'ordre  de  faire  su- 
bir à  I  ennemi  toutes  les  conséquences 
de  ses  défaite»,  et  de  lerueitlir  de 
leurs  victoires  tous  les  avantages  qui 
devaient  en  résulter;  mais  l'auteur  de 
notre  histoire  militaire,  pour  qui  >esoiit 
ouvertes  les  archive:»  du  ministère  de  la 
guerre,  n'a  pas  connu  celles  de  la  diplo- 

(j)  M.  dr  Jotnitii  r»l  \r  »rul  Sl^loflen  qui 
•  il  |>rfru  iuiiii>i«n(lrc  ce  »>»trin«  tir  Jtrrpliua 
rt  <!••  ni«a«'jiige  rrlaki«i-  ii.-ut  .>  K  ruru*  .  I>ir«- 
<|u°il  'lit  que  fitlfrl  d'urne  '«r/i<>«  mu'mtmlm 
Ut  Impitret  el  tet  rttuUatt  4t  ttilf  halaHe.  Il 
Ml  évitiriit  que,  djos  Im  «.irioosUiuci  uu  il  sa 
trooTsii  )>rii  île  trinp«  avant  ••  thuu,  1p  rutuile 
il-  aalulpui'lic,  diri^-c|t<r  Rnbrspirrre.  «Tait  un 
l^râii'i  intrrri  à  au^-iirntcr  :oa  (rt-di(  et  »ou  in 
flaeoce,  en  rsaf^iTjnt  le»  «ocrrA  que  »rs  pUiit 
avjiicnl  oliteuu*.  Nous  ue  com|>rrnoi)«  donc  rira 
à  la  rrruiatioo  que  M.  Thier»  3  faitr.  daus  cet'« 
occasion,  d'un  ecrivaio  qu'il  •  d'aiiiears  ti  toa- 
«•al   et  ^i  *«r«ilriDciil  copié. 


matie,  et  moins  encoiecelle^di^  la  diplo- 
raaiieocculte,uu  d'ailleurs  nous  pensons 
aaM  n'eut  pas  trouvé  beaucoup  (V). 
Mais  nous  sommes  surpris  qu'il  n'ait 
pas  soupçonne,  dans  cette  occasion, 
comme  il  l'a  fait  dans  son  ncit  de 
la  campagne  de  IT'JJ,  «jue  des  intri- 
^ue^  du  même  ;;enre  >  avaient  eu  une 
grande  pjil  (/'u>.  l)t  Moi  iwi /.  , 
lAIII,  1  V»)  ('.'r-\  ;.ir  là  UM.qinnient 
que  peuvent  s'cvj  lh):.r(  les  lenteuis  ri 
les  lie.>iijiions  de  l'aiinée  dcS.iili;. 
et-^Ieuseaprès  la  balaiiie  et  la  |>  ' 
Ciiarleroi  <^)u'on  prenne  bien  ^aido 
que  ce  fut  seulement  trois  joui  *  plus 
tard  que  Jourdan  mit  en  mouvement 
ses  divisions,  et  qu'au  lieu  delesdui^cr 
vers  sa  droite,  afin  de  couper  la  letraile 
dei  Autrichiens  sur  Namur  el  sur 
Lic^e,  il  en  dirigea  la  plus;;rande  pai- 
tie  du  rAté  de  Mons.  I^  centre  vint 
camper  aux  Quatie-r»ras,  où  il  resta  en- 
core huit  jours,  attendant  probaiileitieiil 
que  les  Autrichien^,  qui  sav.tieiil  bieti 
qu'ils  ne  reviendi aient  plus  à  Bruxel- 
les, en  eussent  enlevé  les  aichives  il 
tous  les  magasins.  I^s  |-Van(;ais  n'v 
enlrirent  que  le  fO  juillet,  qiiiniejou:  > 
après  ta  bataille;  et  ce  fut  a!or%  seule- 
ment aue  se  6t  la  jonclioD  de  l'année 
deSamure-et-Mcuse  avec  celle  d:i  N)r«!i 
Joui  dan  campait  à  cette  époque  ^\cc  le 
^ri\s  de  se-  troupes  sur  les  hauteurs  de 
NVavres,  d'où  il  ne  partit  qu'au  bout  de 
huit  jour  s,  pour  lejcler  deânitueincnlles 
Aulrithiensile  l'autre  cAlé de  la  Mcu>e, 
el  investir  MaeNlricht.  S'et.inl  établi 
à  TonL;res  et  sur  les  hniteiirs  de 
Liè;;e,  il  resta  encore  près  de  deux  mois 
immo'ùile  dans  celte  position,  lorsqu'il 

(4  <lu  *-'>t  bien  jujuurU'bui  qur  le*  p'uf  ini  • 
|>ort.>uU  *icrri>  Jr  :j  d'plotojtir  ir»uluiii>ii- 
»airr  u'o;it  pat  étr  depo«i>  Jjd*  il  »  jrtlii%r\, 
^X^que  d'.iillrar*    le»   Jep'l»,   qui-    l'.-'i    t^mlritr 

i  i;ran<i*  fi Ji^auj.iurd'tjui  iiju>chj.|H'-'iiiiiitl«ic 
p«jur  l'oiage  aeuleiiiciit  Jet  j>iii»  d«-ij  iiUMinou 
du  p:iti  .lo.iiiuao'.,r«-»»iujbltnta$s«/.  .ijirè^  Uni 
de  coaiigi-mcnlt  et  <le  vicisMtcdrt,  à  c<l  Uouime 
dont  une  femme  arr^rlMit  !»•»  che»r.i»  >>lanc«  el 
rentre  le»  n  llr^ ,  m  bien  qu'il  linil  pir  éirc 
tout-,  rail  ch.<ii«e. 


302 


JOU 


lui  eût  été  si  facile  d'aller  jusqu^au 
Rhin.  En  cela  il  fit  la  même  faute  que 
Dumoui  iez  deux  ans  auparavant  ;  mais 
elle  n'eut  pas  les  mêmes  conséquences; 
les  circonstances  avaient  bien  chanf^é  ! 
Le  motif  apparent  d'un  aussi  long 
repos  fut  qu'il  fallait  attendre  la  red- 
dition des  quatre  places  de  notre  fron- 
tière qu'occupaient  les  Autrichiens. 
Cependant  il  est  évident  qu'en  éloi- 
gnant davantage  l'ennemi  il  n'eût  fait 
qu'assurer  bien  mieux  encore  le  siège 
de  ces  forteresses,  qui  d'ailleurs  se  ren- 
dirent assez  promplement  et  presque 
sans  combattre ,  après  avoir  coûté  aux 
alliés  tant  de  dépenses  et  de  sang  !  Dès 
que  Schérer,  qui  était  chargé  de  cette 
opération,  revint  avec  les  vingt  mille 
hommes  qu'il  y  avait  employés,  il  fut 
envoyé  à  l'aile  droite  ,  pour  atta- 
quer les  Autrichiens  à  leur  gauche  sur 
les  bords  de  l'Ourthe.  Cette  attaque 
eut  bientôt  le  résultat  que  l'on  devait 
en  attendre.  Latour,  qui  avait  succédé 
au  prince  de  Cobourg  (5),  se  retira  sur 
la  Uoer,  et  tout  le  centre  cl  la  gauche 
de  l'armée  que  commandait  Jourdan 
s'étant  portés  sur  la  rive  droite  de  la 
Meuse,  marchèrent  à  l'ennemi  sur  une 
même  li"ne,  et  lui  livrèrent  dans  les 


(5)  Le  prince  dn  Coliouig,  qui,  depuis  le  mois 
de  février  1793  ,  commandait  l'année  autri- 
chi'iine,  avait  débuié  d'une  inanière  Irèsbril- 
l;into,  par  le  puss;i{;e  de  la  Roer  et  la  balaiite  de 
Nerwinde;  mais  il  avail  ensuite  méconlenlé  le 
caliinet  de  Vienne  et  surtout  le  macliiavc  lique 
Thiigut  par  ses  négociations  av<c  Dmiioiinez, 
aur|ii--l  il  avait  promis  loyalement  de  ne  pas 
touibrrà  riiitéfrrilé  du  territoire  français  et  de 
s'«ii  tenir  uu  rôl>;  d':iuxi!iaire  pour  le  rélablis- 
kpuient  de  la  inonarcliie.  (;<t  t-ngagcniriit  fut 
o:inulé  par  le  cabinet  aulricliitn  aussitôt  qu'il 
rn  cul  co;in  li'sniicr  ;  et,  si  dès  lors  on  u'ilta  pas 
.lU  priinedc  Cobour»;  le  coiniaandement  général, 
c'rst  parée  «pie  'fs  su;  ri-s  étaient  tiop  récent». 
On  attendit  pour  cela  u'autrcs  circonstances,  et 
quand  la  Bel^jiquc  fut  alundonriée,  le  moment 
paraissant  con»eiiable,  ou  lui  env«iya  sesleities 
lie  rappel;  et  il  alla  san^  murmure  et  s.ms  plainte 
cacher  dnns  la  retraite  t.on  cha-rio  et  les  mv 
crels  de  toutes  les  bouteuscK  intrigues  qu'il  avait 
vu«-s  se  tramerions  ses  yeux,  et  auxquelles  il 
avait  refusé  de  prendre  pirt.  11  fit  ses  derniers 
adie'ix  à  l'année  autrichienne  par  une  procla- 
liulioa  lr«»>digiie  et  véritableiucnt  touchante. 


JOU 

plaines  de  Juliers,  le  2  oct.  1794, 
une  des  batailles  qui  ont  fait  le  plus 
d'honneur  au  général  en  chef  par  la 
bonne  disposition  des  troupes,  l'ordre 
et  la  régularité  des  mouvements.  Mais, 
par  une  bizarrerie  dont  on  trouverait 
beaucoup  d'exemples  à  cette  époque  de 
charlatanisme,  c'est  une  de  celles  dont 
on  a  le  moins  parlé.  Huit  jours  après 
la  victoire  de  Juhers,  toute  l'armée  de 
Sambre-et-Meuse  était  campée  sur  la 
rive  gauche  du  Rhin,  depuis  Coblentz 
jusqu'à  Clèves.  Elle  occupait  encore 
les  mêmes  positions,  trois  mois  plus 
tard,  lorsque  Pichegru  envahit  la  Hol- 
lande ,  si  honteusement  abandonnée 
par  ses  alliés.  Réduite  à  ses  propres 
forces,  cette  riche  contrée,  qui  depuis 
long-temps  excitait  la  convoitise  de 
ses  voisins,  devait  évidemment  succom- 
ber sous  les  efforts  des  armées  françai- 
ses, alors  si  nombreuses,  si  aguerries  et 
que  tant  de  victoires  rendaient  encore 
plus  redoutables.  Jourdan  fit  un  mou- 
vement vers  le  Bas-Rhin  ,  pour  ap- 
puyer les  opérations  de  Pichegru , 
et  ses  divisions  de  gauche  allèrent 
jusqu'au  delà  du  Wahal  à  Arnheim 
et  Doesbourg.  Elles  revinrent ,  au 
mois  de  mars  ,  dans  leurs  premières 
positions  qu'elles  occupèrent  encore 
pendant  six  mois  ,  livrées  à  toutes 
sortes  de  besoins  ,  manquant  de  vi- 
vres ,  de  vêtements  ,  et  ne  recevant 
pour  toute  solde  que  des  assignats  tom- 
bés dans  le  discrédit  le  plus  complet. 
On  conçoit  qu'il  résulta  de  cette  pénu- 
rie beaucoup  de  désordre  et  d'indis- 
cipline. J)c  nombreuses  désertions  en 
furent  la  conséquence,  et  cette  armée  de 
Sambre-et-Meusc,  qui ,  à  la  bataille  de 
Juliers,  avait  compté  plus  de  cent  mille 
hommes,  se  trouvait  réduite  à  moins  de 
soixante  mille,  lorsque,  dans  le  mois 
de  septembre  1795,  elle  reçut  l'ordre 
de  passer  le  Rhin.  Comme  on  man- 
quait d'équipage  de  pont,  laplus  grande 
difficulté  de  cette  opération  fut  de  trou' 


JOU 


JOU 


5o3 


\er  (lei  balraui.  On  fit  fit  vffiir  Je  la 
Hollaiiilr  et  de  riiiti-neui  par  la  Mo- 
selle; et  ce  fut  par  ce  mo\en  c|ue  le 
paN'-aj^e  >'eiïrclua  prés  de  Neuwied  cl 
de  l)u&.«eldorr,  en  présenre  île  quel- 
i|  <  rorp»  aulrir)iirii<i,  qui  tiienl  peu 
tlo  -  iNiance  el  furent  auMilAi  rejrlM 
ili'incrvle  Mein.  Jourdju  Nétahlit  sur 
rrlle  ri\ière,  a>ant  sa  droite  %er<i 
^1  -nce  ,  dont  il  devait  former  le 
de  concert  avec  l'armce  de  la 
Muselle,  et  sa  «gauche  à  Fiancforl  on 
il  la  crut  suflisaroment  ^.itanlie  par  le 
lordon  de  neutralité  qu'>  avait  éla- 
iili  la  Prusse.  Mais  déjà  Jourdan  avait 
Iminéroe  violé  cette  neutralité,  et 
(dairfa)t,  qui  commandait  l'année  au- 
trichienne, ne  devait  pas  se  montrer 
plus  scrupuleux.  Dès  que  ce  ;;rneraleut 
!iioin|>lie  de  Ficlie;;ru  \er>  Manheim, 
il  injrrlia  contre  l'armée  de  Sambre-et- 
Meuse  avec  toutes  ses  forces,  et  ne  vou- 
lant pas  l'attaquer  de  front,  en  passant 
Ir  ^Irln  de>aiil  elle,  il  tourna  son  .lile 
l'u"  sous  les  murs  de  Fiancfort. 
ht  (  se>  tiouprs  lr;;eres  étaient  sur  la 
l^lin, quand  Jourdan  restait  encore  fort 
paibilileiuent  sur  le  Mein.  On  se  récria 
beaucoup  sur  celte  violation  de  la  neu- 
tralii»*  prussienne;  on  cria  même  à  la 
trahison,  à  la  perfidie;  mais  il  n'en  fal- 
lut pas  moins  faireuneproinple retraite  ; 
cl  quelque  diligence  que  l'on  y  mit  , 
ouelque>  [«récautions  que  l'on  pùi  pren- 
dre, on  lit  de  glandes  peitrs  en  équi- 
paf;e>  ;  mais  non  pas  en  ai  t:llei  le,  com- 
me l'a  piétendu,  dans  se^  Mémoires, 
le  mai cthaKiouxion  Saint  Cvr,  qui  a 
beaucoup  exa{;éré,  dans  cette  occasion, 
les  torts  du  {;énéral  en  chef  de  l'armée 
deSambrc-et-Meusc  (G).  Un  malheur 
beaucoup  plus  grand ,   mais  dont  on 

(6)  Le  maréchal  Goutiod-Sj  nt  Cy-,  qui.  djn* 
ses  Memoirti,  a  cratarc  arrc  braacou|<  il'aurr- 
tunir  W\  opératiuna  As  l'arme»?  <!«  Sdinbrr-<'t- 
Meu«e  àjtns  cettr  cainpaçn>*  d'outre-Rbiu,  criti- 
que surtout  |r^-»rT^r»iui  lit  Ij  conduite -lu  pc- 
néral  en  chrf  a  l'occJkion  «Je  sa  rflrjii»",  et, 
comine  l'ava.!  fait  avant  lui  l'archidac  Chai  les. 
1  lui  reproclic  «l'avoir  abaodooavies  é<{uipa(«s 


n'aurait  pu  accuser  personne,  fut  près 
d'arriver  à  l'aile  droite,  qui  dut  se  reti- 
rer par  le  pont  de  Neunied.  (Juand 
le»  Iftes  de  colonne  se  présentèrent 
devant  ce  pont,  elle^  le  trou\ère!it 
rompu  par  de«  bateaux  enilaiiiiné^  que 
la  diviMon  de  Marroau  >enait  de  lancer 
imprudemment  sur  le  ileuve  en  le\ant  le 
blocus  d'KliienhreitNlein.  Il  fallut  toute 
la  pre  enre  d'esprit  et  le  saii;;  fiod  de 
kleber  qui  conduisait  ces  troupes,  pour 
les  sdtistraire  a  nu  aussi  ^rand  péril, 
sans  le  leur  faire  contiaiire  et  surtout 
avant  que  l'ennemi  put  s'en  aperce- 
voir. L'armée  de  Saml»re-et- Meuse  fui 
à  peine  arrivée  sur  la  rive^auclie,  qu'elle 
se  vit  nhlii^ée  de  marcher  au  secours 
de  celle  du  lUiin  qui  venait  d'être 
forcée,  par  le  même  Clairfavt,  dans 
les  li<;nes  que,  depuis  près  d'un  an, 
elle  gardait  devant  .Ma>ence.  Kn 
moins  d'un  mois,  le  général  autrichien 
avait  ainsi  rots  en  fuite  trois  armées 
françaises.  Cette  opération  est  sans 
contiedit  une  des  plus  brillantes  de 
cette  rpoque.  .Mais  si  elle  fit  beaucoup 
d'honneur  à  (.la!ifa>t,  elle  lui  profita 
peu  ;  et,  comme  il  arrive  trop  sou- 
vent dans  les  cours  ,  l'envie  qui  le 
poursuivit  a\ec  plus  d'acharnement  en 
core  aptes  son  triomp'.ie,  l'ace ibla  dans 
le  moment  nit-nie  où  il  entrait  àN  ienne, 
au  milieu  des  applautlivseinents  de  la 
populace.  Le  prétexte  de  rette  dis;;ràcc 
fut  un  ai  mi^tice  qu'il  venait  de  conclure 
avec   Jourdan    sans  v  être  autorisé. 


'1  ;  à  quoi  J.iurdan  a  ré]>oiida  par 

u  i  ip    Ituu»  avuus   «ou»  Irt  yrui,  et 

«  il    jiro.ite  aorx    him    «|uc    l'un 

J    '  ••■•■•■  .  I.'aulrur  de  c»lti'   hoIkc. 

I    Ir  r.  i  f^iii   croit  «ievoir  rendre 
•  ^  1    II    "11. JfC  d'autant  plu*  dicte  do 

foi  qu  li  e«i  cotapletrmrnt  detinier»»»é.  Il  cora- 
maiidail  preiitriumi  djn»  cetir  rrfaite  la  d-r- 
nirre  co  i>pai;aip  lie  la  »--'  deini-hri^ade  qui  fit 
l*W'>ére-garde  d«  l'annrv  et  qui  »aue»  par  sa 
Itonne  rou  enanre  une  parti*-  de«  équipages. 
Qurlqurt  unt  furent  en  elle!  alundoiilirs  et  •!••• 
«inreut  la  pruie  de  l'enueini  ;  inji%  il  ne  lui  fut 
pat  lai>»e  une  »eule  pine  «le  cinuri  ,  el  i'oii 
ii'ciit  pa»  meioe  be  oui  dVti  fairt-  traitirr,  faute 
de  rbevaux,  par  les  ioldals  de  cette  demi  bri- 
gade, coranie  le  dit  Jourdao  dan*  »«  brocburt . 


3  / 

0^ 


JOU 


Sans  Joule  qu'après  des  combats  si 
rapldci  et  si  iniihipliés ,  les  troupes 
autrichiennes  devaient  avoir  autant  be- 
soin de  repos  que  les  nôtres.  Ce  qu'il 
y  a  de  sur,  c'est  que  pour  Tarniée  de 
Sanibre-et-Meuse,  ce  repos  était  de  la 
plus  urgente  nécessité.  Son  chef  en 
profita  pour  lui  faire  prendre  des  quar- 
tiers d'hiver  dans  un  pays  déjà  ruiné 
el  fort  malheureux,  il  est  vrai,  mais  où 
du  moins  il  put  s'occuper  de  rétablir 
l'ordre  et  la  discipline.  C'était  le  temps 
où  une  affreuse  disette  avait  désole  l'in- 
térieur de  la  France  ,  et  se  faisait 
également  sentir  dans  les  armées 
qui  occupaient  le  territoire  ennemi. 
Vivant  à  discrétion  chez  les  habitants, 
soldats  et  officiers  ne  recevaient  abso- 
lument aucune  solde.  Le  gouverne- 
ment directorial,  qui  venait  de  s'établir, 
sentit  bien  que  les  choses  ne  pouvaient 
rester  ainsi  ;  mais  la  difficulté  de  payer 
tant  de  monde  était  insurmontable  dans 
la  situation  financière  où  se  trouvait  la 
France.  Les  soldats  avaient  diminué  de 
moitié ,  mais  en  oHiciers  les  cadres 
étaient  encore  les  mêmes  qu'à  l'époque 
de  la  grande  réquisition  et  des  quatorze 
armées.  Il  fallut  en  i^iîpprimer  une  grande 
partie  et  reunir  deux  bataillons  en  un 
seul.  On  fit  encore  d'autres  suppres- 
sions dans  les  administrations  ,  dans 
les  états-majors  si  inutilement  accu- 
mulés pour  les  levées  de  1793  ,  et 
il  en  résulta  de  grandes  économies  ; 
mais  les  réformes  d'officiers  ne  pou- 
vant être  faites  que  d'après  l'ancien- 
neté ,  elles  atteifinirent  les  plus  jeu- 
nes ,  et  par  conséquent  ceux  qui  of- 
fi aient  le  plus  d'e.'^péranccs.  C'est 
une  perte  que  l'on  regretia  plus 
tard;  mais,  à  tout  prendre,  cette  nou- 
velle organisation  fut  utile,  et  elle  était 
devenue  indispensable.  L'armée  que 
commandait  Jourdan  resta  cette  année 
(179G)  plus  long-temps  que  les  autres 
dans  les  positions  où  l'avait  placée  l'ar- 
mistice; et,  bien  que  cet  armistice  eût 


JOU 

déplu  à  la  cour  de  Vienne,  le  Jeune 
archiduc  Charles,  qui  avait  succédé  i 
ClairfaNt  ,  ne  le  dénonça  (]u'au  mois 
de  mai,  lor>(jue  déjà  s'étaient  mises  en 
campagne  les  armées  du  Khin  et 
d'Italie ,  pressées  qu'elles  étaient  de 
trouver  des  pays  neufs  à  dévaster  ou 
à  manger ,  comme  disait  T-urenne 
en  pareille  occasion.  Il  est  évident 
que  le  besoin  de  faire  subsister  les 
armées,  ou  comme  cela  se  «lisait 
alors,  de  nourrir  la  guerre  pur  la 
guerre^  fut  à  cette  époque  uw  des  prin- 
cipaux obstacles  à  la  paix.  Bona- 
parte ,  qui  parut  alors  pour  la  pre- 
mière fois  sur  la  scène,  le  comprenait 
fort  bien,  quand  \\  dit  à  ses  soldats 
presque  nus  et  mourant  de  faim,  en 
leur  montrant,  du  haut  des  \lpes,  les 
fertiles  vallées  de  la  péninsule  italien- 
ne :  «  Ces  contrées  vous  appartien- 
«  nent  ;  c'est  là  que  vor.s  trouverez 
«  tout  ce  dont  vous  a\ez  besoin...» 
Poussée  par  la  même  nécessité,  l'armée 
du  Rhin  ,  que  commandait  Moreau, 
s'était  déjà  répandue  dans  la  Franco- 
nie  et  la  Bavière,  lorsque  la  fin  de  l'ar- 
mistice fut  dénoncée  à  Jourdan.  Resté 
dans  les  mêmes  positions  de  la  rive  droite 
et  delà  rive  gauche  du  Rhin,  ce  général 
tenait  ses  deux  ailes  à  plus  de  vingt  lieues 
de  distance  l'une  de  l'autre;  et  elles 
étaient  séparées  par  un  grand  lleiiveet 
un  pavs  couvert.  On  conçoit  tous  les 
avantages  d'une  telle  position  pour  les 
Autrichiens,  dont  les  connnunications, 
par  le  point  central  de  ALnence,  étaient 
aussi  sûres  que  faciles.  L'archiduc  en 
profita  pour  diriger  subitement  toutes 
ses  forces  vers  la  Lahn,  où  il  a«:cabla 
le  général  Lefebvre  (17  mai),  qui 
s'était  avancé  jusqu'à  Wetzlar.  il 
eut  ensuite  quelques  succès  contre  le 
corps  de  Kléber,  qui  couvrait  ])us- 
seldorff;  mais  Jourdan  avant  fait 
passer  le  reste  de  son  armée  sur  la 
rive  droite,  et  se  trouvant  à  la  têle  «le 
forces  supérieures  ,  le  contraignit    de 


JOl 

%e  r^fufjier  ^tir  le  Mfin,  fl  Ir  pownii- 
«it  jusqa'jiiK  portes  de  !\ati^bonne  , 
jprr*  N'rlff  emparr  lie  N\  urtibour;;, 
de  Bamberj;  et  dr  qllelque^  autres  for- 
tere**e». Celte  mar rlie  a\ enlureuse  était 
enrore  la  conȎqiienrr  de^  plans  ima- 
^tné^  par  le*  faiseurs  de  ce  lemp«-U, 
et  surtout  par  Cjrnol  qui,  après  a\oir 
dirigé  la  guerre  au  comité  de  salut 
public  ,  la  diri;;fait  encore  au  Direc- 
toire dont  il  faiNjit  partie.  On  ^ait  que 
le  plan  favori  de  ce  ^rand  slrair|;i»ie 
était  de  faire  partir  en  mrme  temps 
deux  années,  dr  points  ricanes,  pour 
1rs  réunir  5ur  les  lianes  ou  1rs  derrières 
d'un  riinrmi  qui,  se  trouvant  ainsi  forcé 
de  concentrer  se*  forces,  pou\ait  atta- 
quer séparément,  et  l'une  après  l'au- 
tre, ces  deux  armres,  comme  il  était 
arrivé  Tannée  précédente.  I. 'archiduc 
Charles  ne  profita  pas  moins  habile- 
ment que  ClairfaU  d«*  r.ivanta;;e  éri- 
denl  que  lui  donnèrent  ain^i  les  Fran- 
çais. Apres  a>oir  arrablé  Moreau  sur 
les  bords  »lu  Danube,  en  l'attaquant 
a\ec  la  plus  niandr  partie  de  ses  fur- 
ces,  il  donna  le  soin  de  le  poursuivre 
avec  (]uelques  divisions,  au  <;énéral  1^- 
tojir,  et  se  hâta  de  revenir  au  secours 
de  \\  arlensleben  qu'il  avait  laissé  en 
présence  de  Jou.dan.  Lorsqu'il  eut 
contraint  de  se  retirer  avec  beaucoup 
de  perte  la  division  Piemadolte  qui 
s*était  fort  aventurée  à  Nureniber;^  , 
il  tomba  sur  le  corps  principal  ,  qui 
fut  écrasé  à  llamber;;  et  à  \N  urli- 
bonrg,  puis  forcé  «le  se  retirer  dans  le 
plus  ;;rand  désordre  jusqu'au  IVhin. 
Dans  son  rapport  au  Directoire,  le  î;é- 
9  ncral  en  chef  déclara  que,  attaqué  par 

un  ennemi  dont  les  forces  étaient  as- 
sez consrqurnirs  (sic\  pour  le  couper 
de  ses  communications,  il  avait  tra- 
versé à' horrible  s  drfdés  ,  quil  était 
resté  sept  jours  sans  noticelles^  et 
qu*il  ne  retournerait  plus  dans  de 
pareils  pays  sans  un  ordre  formel... 
C'était  sans  doute  en  l'absence  de  son 

i.xvni. 


JOU  3n". 

chef-d'étal  nujo»  ,  Krnnuf,  que   Joiir- 
dan    avait   rrnl    lui-nirme  ,   un    lap 
port,  où  1rs  fautfs  Ar  langue  ne  >onl 
pas  ce  qui  doit  Ir  plus  rtunner.  On  ne 
comprend  pas  que  le  Directoire  Tait  pu 
blie  dans  son  inlégri'é,  %'il  n*v  fut  pas 
etcllé    par    les  ennemis    du  f^énéral. 
Ce  qu'il  V  a  de  stlr,  c'est  que  ce  revers 
porta   un  coup  funeste  à  \\  réputation 
de  celui-ci  :  et  que,  persuadé  lui-même 
qu'il  ne  lui  était  plus  possible  de  con- 
server  le  commandement  ,  il  demanda 
sa  démission  qu'on   se  liala  de   lai  ac- 
corder ,    et    »e   retira  dans   sa  chne 
Limo;;es  ,   où    il   fut    encore  heureux 
pendant     plusieurs    mois ,    au    milieu 
de    sa  famille    et  dans  son    ancienne 
simplicité.    Ce    ^enre  de   vie  conve- 
nait mieux  que   1rs  •;randrur4  du    ^i- 
iiéralat   à   cet   homme  de   sens  et  de 

Î>eu  de  prétentions.  Il  reconnaissait 
ui-mrme  son  insuffisance  à  la  trte  des 
armées  ;  rt  on  l'a  entendu  phisieurs 
fois  dire  naïvement  qu'il  eût  mieux 
aimé  passer  sa  vie  à  poiter  la  balle. 
Sa  fortune  était  restée  à  peu  près 
la  mrme  ;  et  si  des  exactions,  des  désor- 
dres avaient  été  commis  dans  ion  ar- 
mée, personne  n'avait  le  droit  ni  la 
pensée  de  les  lui  imputer.  Au  mois  de 
mars  de  l'année  suivante  ^1797),  ses 
compatriotes  de  la  Haute-Vienne  le 
nommèrent  député  au  conseil  des  Cinq- 
Cents.  Aucun  antécédent  bien  caracté- 
ristique ne  le  liait  à  l'un  ou  à  l'autre 
des  partis  qui  div  isaient  alors  la  France; 
seulement  on  se  rappelait  qu'à  l'épo- 
que du  13  vendémiaire,  il  avait  écrit 
au  président  dr  la  C/onvontion  natio- 
nale que  ses  mesures  étaient  prises 
pour  marcher  à  son  secours,  .i  cria  eût 
été  nécessaire  ;  mais  on  pouvait  ne  voir 
iJans  cette  démarche  que  la  manifesta- 
tion obligée  du  général  en  chef;  ainsi 
il  ne  tenait  qu'à  lui,  en  sa  nouvelle 
qualité  de  législateur,  de  voter  comme 
il  eut  voulu  et  de  s'asseoir  où  cela 
pouvait  lui  convenir.  S'il  alla  se  placer 

lo 


366 


JOU 


ail  côté  gauche,  ce  fut  surtout  paire 
qu'il  vit  au  côté  droit  Pic!;c^rii  , 
son  rival  de  gloire  et  de  coiiiman- 
dement  ,  celui  que  ,  sans  beaucoup 
de  raisons,  les  comités  de  la  Conven- 
tion lui  avaient  souvent  préféré.  Les 
journaux  dirent  même  alors  ou- 
vertement qu'il  s'était  fait  jacobin  , 
parce  que  le  vainqueur  de  la  Hollande 
était  royaliste.  Du  reste,  il  ne  se  mon- 
tra d'abord  que  rarement  à  la  Iribune, 
et  il  ne  prononça  dans  les  grandes  oc- 
casions que  des  discours  écrits,  et  sans 
doute  convenus  ou  arrêtés  d'avance 
avec  les  meneurs  du  parti  auquel  il 
s'était  attaché.  De  ce  nombre  fut  évi- 
demment une  longue  et  intolérante  dia- 
tribe qu'il  prononça  ,  dans  une  séance 
du  mois  de  juin,  contre  la  religion  ca- 
tholique à  laquelle  la  majorité  voulait 
alors  rendre  quelques  uns  des  avanta- 
ges que  lui  avait  fait  perdre  la  révolu- 
tion, entre  autres  l'usage  des  cloches 
et  celui  des  églises  non  vendues  com- 
me bien  nationaux.  On  se  rappelle  que 
le  député  Camille  Jordan  parla  avec 
beaucoup  de  force  en  faveur  de  ce  pro- 
jet (  Voy.  Jordan,  dans  ce  vol.). 
Le  discours  du  général  orateur  ne  fut 
sans  doute  pas  aussi  éloquent;  mais  il 
reçut  les  applaudissements  du  parti 
révolutionnaire  ,  qui  censura  avec 
beaucoup  d'amertume  celui  de  son 
adversaire.  Jourjan  concluait  par  de- 
mander que  l'on  exigeât  des  ecclésias- 
tiques une  déclaration  de  soumission 
aux  lois  de  la  républi(jue,  ce  qui  ne 
pouvait  que  donner  lieu  à  de  nouvelles 
persécutions  ;  mais  cette  proposition  fut 
rejetée.  DanslesdilTérenlcs  motion  ;  que 
le  député  de  la  Haute-Vienne  lit  à  la 
même  époque  sur  l'organisation  de  la 
garde  du  corps  législatif,  en  faveur  des 
officiers  réformés  que  l'on  voulait  ex- 
clure de  Paris,  et  de  quelques  fournis- 
seurs ou  administrateurs  des  armées, 
que  l'on  accusait  de  concussions  ,  il  se 
montra  plus    sage  et    plus   modéré  , 


JOU 

bien  que  toujours  fort  zélé  pour  la 
cause  de  la  révolution.  Ce  zèle  éclata 
surtout  dans  le  discours  emphatique 
qu'il  prononça  pour  la  commémora- 
tion du  iO  août  1792  ,  et  à  la  suite 
duquel  il  fit  décider,  par  la  majorité 
d'une  assemblée  qui,  un  mois  plus  tard, 
devait  être  décimée  et  dissoute  comme 
royaliste,  que  l'anniversaire  du  renver- 
sement de  la  monarchie  serait  un  jour 
de  fête  pour  la  France  !  On  pense  bien 
que  le  général  Jourd.m  ne  fut  pas 
étranger  à  cette  révolution  du  18  fruc- 
tidor, qui  rendit  au  parti  révolution- 
naire son  iniluence  et  son  pouvoir.  Le 
lendemain,  il  demanda  par  un  long  dis- 
cours, dont  le  conseil  ordonna  l'im- 
pression ,  qu'on  rédigeât  une  adresse 
au  peuple  français  et  aux  armées,  dans 
laquelle  on  établirait  qu'il  n'était  pas 
vrai,  comme  le  préiemlaicnl  les  en- 
nemis de  la  république,  que  la  li- 
berté eut  été  opprimée  et  la  consti- 
tution violée.  Et  quand  il  s'agit  de 
prononcer  le  serment  de  haine  à  la 
royauté  qui,  d'après  une  nouvelle  loi, 
dut  être  prêté  par  les  députés  du  nou- 
veau tiers  ,  il  s'écria  :  Je  le  jure  sur 
mon  sabre.  Depuis  ce  moment,  Jour- 
da'.i ,  que  ses  défaites  et  sa  démission 
avaient  éloigné  du  Directoire,  rentra 
dans  sa  laveur,  et  il  ne  parla  plus  que  dans 
les  intérêts  de  ce  gouvernement  et  dans 
ceux  des  soldats,  surtout  ceux  de  sa 
chère  armée  deSarnbre-et-Meuse,  qu'il 
appela  toujours  res  frères  et  ses  en- 
fant.s.  Animé  d'aussi  beaux  sentiments, 
il  prenait  toul-à-fait  au  sérieux  le  fa- 
meux milliard  promis  aux  défenseurs 
(ic  la  patrie,  et  il  fil  décréter  un  jour 
que  ce!  te  promesse,  faite  solennellement 
par  la  Convention  nationale,  ne  pou- 
vant être  acquittée  en  terres  aux  ter- 
mes du  décret  ,  serait  payée  e:i 
une  rente  viagère  à  la  paix  générale. 
Comme  cette  paix  générale  n'est  ja- 
mais venue ,  on  sait  ce  au'il  est  arrivé 
de  cette  promesse,. sur  laquelle,  d'ail- 


JOU 


JOU 


107 


leurs,  Mt  loldaU  n*onl  jamaU  l>«aurnu| 
roraplé(7).  i'.c  ftil  avec  la  mèmf  can- 
deur el  la  mcnie  comiclion  t^u'il  prè- 
seata  un  {>cu  plus  l.ird  rrtte  terrible 
loi  de  la  cunsrnption,  qui  devait  ron- 
trasiidre  pour  loujour*  ati  »er»ice  mili- 
taire ruiiiTer>alilc  des  citoyen*  fran- 
çais; et  il  ne  ciai-nil  pas  d'affirmer 
que  ce  code  de  servitude,  le  plus  dur 
qui  ait  jamais  nesé  sur  l'e.ji^re  hu- 
maine, qui  a  urvoré  en  ;  "m 
derai-siéde  plus  de  dix  ni!  1- 
nies  ,  serait  un  bir 
maiiité  ;  nue  cVlait  1 
de  la  re\ol<ituin,  dr  la  iiljcrir  .  ht  loiil 
cria.  ^11  \ri  t  !i,  n..^  de  rrjaq'ie,  fut 
,ues  et  rtdicules 
•  '  '  la  tyrannie,  que 
Jourdan  l)>ait  de  très-bonne  foi,  que 
certainement  il  n*a\ait  pa<t  rorapo- 
sée»  ,  et  dont  il  n'est  pas  Lien  sur 
qu'il  comprit  toute  la  portée.  Il 
avait  alors  dépassé  de  braiirnup  la 
limite    des    opinions    que    l'on    ap- 

F>elait  constitutioiinellrs;  et  lorsqu'à 
a  fin  de  l'année  IT'JH  le  Diri,- 
toire  s'efforra  d'inlhipiicer  b'<  élec- 
tions ,  pour  en  exclure  les  dcmaj^n- 
t;ues  que  l'on  appelait  dr<  anarchis- 
tes ,  le  député  de  la  llatile  Vienne 
l'accusa  hautement  de  vouloir  faire  an- 
nuler, sous  prétexte  d'une  conspira- 
tion dont  il  ne  donnait  pas  la  preuve, 
de  très-bons  choix  ,  faits  très-lé-ale- 
raent  et  très  ré^ulièrcnunt.  Mais  tous 
ses  efforts  furent  inutiles ,  et  il  ne 
réussit  pas  même  à  faire  valider  les 
élections  de  son  département  ,  qui 
avaient    clé    annulées  sous   le  même 


I     préle«le    hans  plusieurs  autres  orca- 


glrrÏM  d«  \»  revoUii.uo,  »Vcii<>rt.'ia  pUiv^iu- 
u>«M  :  «  Voi.à  eofi'i  Ifs  oxpriil!  ilc  lerfe  «jui  noui 
»om  promis.  » 


t  '       «iju   lie  montra  pas  moins 

«11-  -  '«-nt  à  attaquer  le  Direc- 
toire ;  et  il  est  a**r.'  pt^ibable  que  ce 
fui  autant  pour  se  déliai  ra^ser  d'une 
opposition  importune,  que  pour  met- 
tre i  profit  son  expérience  et  sa  répu- 
tation, que  ce  faible  (;ouvernrmont  le 
nomma  alors  général  en  rhef  de  l'ar- 
mée d'i  Danube,  (tétait  au  moment  où 
l'on  ro;.,it  «^r  fori  '  .  Mide  coali- 
tion   contre  la    I  us  les  pre- 


en  l^^ypie.  1  ♦•,   cl 

Moreau,  Imn      ,  'i'-dis- 

price  ,  à  cause  de  ses  liaisons  a^er 
Piche«ru ,  n'était  plus  emplové  que 
dans  les  insignifiantes  fonclirns  d'in- 
specteur. Knljn,  la  république,  qui  al- 
lait a«oir  à  combattre  TKurope  pres- 
que tout  entière  ,  ne  pouvait  lui  op- 
poser un  péfirral  de  réputation ,  ni 
mettre   en    -  de   deux 

cent  mille  I  r<  ^ur  une 

I    '  lo  fond   delà 

!  Mil  'au  Aiivder- 

/  .fourd  m  de 

1.1  '    pour   ar- 

fpptcr  le  commandement  d.ins  de  pa- 
reilles circonstances.  Il  quitta  repen- 
dant sans  hésiter  le  fauteuil  de  la  pré- 
sidence, qui  venait  de  lui  être  donné 
pour  la  seconde  fois  ;  envo\a  par  écrit 
^a  démission  à  l'assemblée,  et  après 
un  banquet  patriotique  où  il  reçut  les 
adieux  de  ses  amis,  au  nombre  des- 
quels se  trourait  Lucien  lînnaparte, 
<|ui  y  fit  un  pompeux  elo^e  du  vain- 
queur de  Fleonis,  il  partit  pour  les 
bords  du  Rf:in.  F.ncnre  nnc  fois  il 
tHii\a  de\ant  loi  l'arrliidnc  ('Jiarles  , 
à  la  Itte  d'une  armée  que  l'on  por- 
tait à  soixante  mille  hommes.  Lni- 
méme  en  a^art  à  peine  quarante  mille  ; 
et  cependant,  il  fallait  qu'il  prît  l'i- 
nitiative ,  afin  de  prévenir  la  jonc- 
tion des  Russes   que  l'on  annonraîl 


ao, 


3o8 


JOU 


JOU 


comme  très-procbaliie.  S'étanl  mis  en 
luouvement  dans   les    premiers  jours 
(ie  mars ,   il   n'eut  de  rencontre  sé- 
rieuse que  vers  la  fin  de  ce  mois,  au 
villat!;e    d'Ostrach  où  il   éprouva  un 
premier  échec ,  puis  à  Stockach  où  , 
assailli  par  des  forces  beaucoup  plus 
nombreuses  que  les  siennes,  et    mal 
secondé  par  ses  lieutenants ,  notam- 
ment par  le  «énéral  de  la  cavalerie, 
d'Hautpoul  ,  il  se  mit  lui-même  à   la 
léte   des   troupes,  et  commanda  plu- 
sieurs  charges   dans  lesquelles  il  dé- 
plova  un  très-grand  courao;e.  Mais  ces 
efforts  furent  inutiles  ;  il  fallut  céder  à 
la  supériorité  du  nombre,  et  faire  re- 
traite sur  le  Rhin.  Ijien  qu'à  cette  ba- 
taille de  Stockach  la  victoire  eût  été 
long-temps  disputée,  que  la  perte  des 
deux  armées  fût  à  peu  près  éf^ale,  et  que 
Jourdan  s'v  fut  montré  fort  brave,  elle 
porta  un  coup  funeste  à  sa  réputation, 
«léjà   fort  compromise  par  les  retraites 
de  1795  et  1798.  Les  journaux  qui, 
dans  ce  temps-là,  jouissaient  d'une  en- 
tière liberté  ,  le  décrièrent,  le  persi- 
ilèrent  à  qui   mieux  mieux.   On  alla 
jusqu'à  le  mettre  en  caricature;  et  quel- 
(jues  habitants  de  la  capitale  se  sou- 
viennent encore  del'avoir  vu  représenté 
à  cheval  sur  un  écrevisse,   avec  cette 
inscription   tirée  des  psaumes  :  VIdit 
et  fugit  ;  Jordanis  corwersus  est  re- 
frursurn.  On  conçoit  tout  le  clia^^rin 
(ju'il  en  eut.   11  tomba  malade  et   fut 
()bri;;éd'aller  se  rétablir  dans  sa  famille. 
Mais,  bientôt  réélu  député  au  conscd 
des  Cinq-Cents,  il  revint  à  Paris,  et  y 
fit  paraître  une  brochure  pour  se  dis- 
culper sur  la  bataille  deStockach,  dont 
il  rejeta  tous  les  torts  sur  d'Hautpoul, 
qui  ne  lui  avait  point  obéi ,   et  sur  le 
Directoire,  qui  ne  lui  avait  pas  donné 
assez    de  troupes.   Il  se    lia  alors    de 
plus  en  plus  avec  l'opposition   déma- 
</oc;ique  ,    et  parut    comme  l'un   des 
principaux  meneurs  à    la   société  du 
manège  et  à  toutes  les  r»'unio?is  de  ce 


parti.  Dans  une  de  ces  réunions  qui 
fut  consacrée   à  un  banquet    patrio- 
tique   il    porta    le    toast    suivant     : 
A     lu    résurrection    des    piques  ; 
puissent-elles   dans    les   mains  du 
peuple  écraser   tous  ses    ennemis  ! 
Jl   manifesta  encore,  en  plusieurs  oc- 
casions ,  à  la  tribune  législative,    des 
opinions   non   moins  énergiques,  no- 
tamment   dans     les    discussions    sur 
l'emprunt  forcé ,  sur  la  garde  natio- 
li.-le,  sur  la  proposition  de  supprimer 
du  serment  des  fonctionnaires  les  mots 
de  haine  à  VanarcJiie^  et  enfin  dans 
le  long  discours  qu'il  prononça  pour 
faire  déclarer  la  patrie  en  danger.  On 
se   rappelle  que  cette  proposition  fut 
rejetée  par  la  majorité,  après  trois  jours 
d'une  discussion  très-orageuse,  et  dans 
laquelle  Jourdan  se  montra  l'un  des 
orateurs  les  plus  acharnés.  Et  cet  achar- 
nement redoubla  encore  quand  il  vit 
que  son   projet  allait  être  définitive- 
ment repoussé.  Ce  fut  alors  que,  crai- 
gnant ou  feignant  de  craindre  un  coup 
d'état  de  la  part  du  Directoire,  il  s'é- 
tria  du  ton  le  plus  pathétique  :  «  Ju- 
«  rons  qu'on  ne  nous  enlèvera  de  nos 
«  chaises  curules  qu'après  nous  avoir 
«t  donné  la  mort...  Représentants  du 
«   peuple,  dans  une  telle  crise  que  rien 
«  ne  vous  effraie...  La  liberté  ou  la 
«  mort...»  C'était  le  28  fructidor  an 
Vil   de  larépubl-que  (sept.  1799), 
cinquante  jours  avant  le  18  brumaire, 
que  Jourdan  pai  lait  ainsi  à  la  tribune 
du  conseil  des  Cinq-Cents.  Tous  ses 
collègues  jurèrent  comme  lui  de  mou- 
rir sur  leurs  chaises  curules,  et  l'on  se 
rappoJle  qu'Augereau ,  dans  son  gros- 
sier langage,  fit  ce  serment  d'une  ma- 
nière eucore  plus  burlesque.  Cepen- 
dant nous  n'avons  pas  ouï  dire  qu'Au- 
gereau, ni  Jourdan,  ni  un  seul  de  leurs 
collègues,  soit  mort  sur  sa  chaise  curiile, 
à  la  fameuse  séance  de  Saint-Cloud  , 
où  Ronaparte    entra    dans  leur  salle 
pour   les   en    expulser....    Après  cette 


JOl 

)(iuriire  rarinuruble  ,  ruiiiiue  Juuriijii 
tétait  montre  l'un  (lr^  |>liu  arJrntN, 
sinon  à  coml)Jtlrr,  du  moins  à  préve- 
nir le  fntij»  il'fUl  qui  rlian^^ra  Icn  tlfs- 
linérs  de  l.i  Kranre  ,  le  nnuxeau  coiisul 
riii5cn\il,  le  lendemain  de  >on  triom- 
phe, sar  une  liste  de  pro^iiption  ; 
mats  on  sait  c]ue  relie  sentence  ne  fut 
que  comminatoire.  Condamne  ensuite 
à  se  rendre  en  surveillance  dans  le 
département  de  la  (Jiarente ,  il  ne 
quitta  pas  mi-nie  Paris,  et  fut  auto- 
rise i  se  I étirer  dans  une  maison  de 
ram|ia;;ne,  a  dix  lieiirs  de  cette  \ille. 
l*ujs  il  rentra  complrtem.^nl  en  ç,i^cc, 
et  fut  nomme ,  liuit  mots  plu<i  tard 
['2i  juillet  IHOO  ,  raiiiistie  extraordi- 
naire de  la  république  française  en 
I*iéniont  ;  faveur  dont  il  remercia  le 
premier  consul  par  une  lettre  trcs- 
liumble  et  trcs  re.spectueuse.  SVtant 
aussitôt  rendu  à  Turin,  il  s'v  acquitta 
de  ses  importantes  fonctions  avec  lele 
et  probité,  et  reçut  le  titre  J'admini- 
strateur-nénéral.  Ce  fut  en  celte  qua- 
lité que,  pour  préparer  la  réunion  à  la 
France  ,  il  organisa  ce  pavs  en  dé- 
partements ,  et  V  fit  régner  l'ordre 
et  la  justice  dans  toutes  le»  parties  de 
l'administration.  I..e5  i'iémontais  de 
tous  les  ran^s  et  de  tous  le>  partis  lui 
ont  rendu  ce  temoij^iia^e  ;  et,  quinte 
ans  plus  tard,  lorsqu'il  tut  remonté  sur 
son  trdne,  le  roi  Charles- Kmnianuel  le 
remercia  d'une  conduite  ausM  hono- 
rable,en  lui  envovan*.  .«^on  portrait  en- 
nclii  de  diam.iiit5 ,  a\ec  une  lettre 
très-llatleu<^e.  Mais  rexrellcnlc  admi- 
nistration du  ;;éncral  .lourdan,  en  Pit*- 
mont,  ne  put  le  raettie  à  l'abri  des 
intn;;ues  et  des  vicii^itudes  qui  agi- 
taient la  nouvelle  cour  des  Tuileries, 
et  surtout  des  prcvenlious  du  premier 
consul,  qui  avait  toujours  eu  pour  lui 
un  secret  eloi^nemenl.  Il  le  remplara 
par  le  j;énérnl  Menou ,  liomme  dur  et 
cupide,  qui  le  fit  bientôt  vivement  rc- 
f^reticr  par  les  Piémontais^.  Revenu  en 


lot 


3o<) 


t'ijiKi',  Jourduii  V  leçul  le  titie  de 
conseiller  d'état,  et  un  peu  plus  tard, 
il  eut  pendant  quelques  mois  le  com- 
mandement de  l'année  d'Italie.  Mais 
Bonaparte,  vovant  la  ^ueirejirès  dere- 
commenrer,  et  n'avant  point  lieconfian 
cedans  l'ancien  romniandant  (lel'armée 
de  Sarobre  el-Meuse,  le  remplaça  par 
MxMena.  Jourdan  passa  alors  plusieurs 
années  sans  être  emplove.  Cependant,  à 
la  création  de  l'emplie,  en  IKOV.  Napo 
léon  le  fit  m.trécliaict  ^rand-ofiicierde 
la  I.é^ion-d'Ilonneur.  rommetousreux 
qui  a\a;ent  commande  en  chef.  S'il  ne 
le  créa  pas  comte  «>u  duc,  c'est  pro- 
bablement parce  qu'il  craignit  d'elle 
refusé  Cjc  fut  en  vain  que  le  coile-r 
électoral  de  la  Haute-Vienne  le  pu 
senta  ensuite  à  pliisieuis  repri>es  com- 
me candidat  au  sénat  conscnaleur  ; 
llouaparle  le  repouvsa  toujours  à  cause 
de  ses  anciennes  opinions  ,  et  sans 
doute  aussi  parce  qu'il  ne  voulait 
pas  établir,  dans  le  sén.nt,  un  cen- 
tre d'oppo>ilion  qui  aurait  pu  deve- 
nir redoutable.  Ixs  frères  de  Napo- 
léon ,  moins  scrupuleux  ou  crnvant 
avoir  moins  de  rai>ons  de  rranidie, 
n'oublièrent  pas  bs  rapports  qu'il> 
avaient  eus  avec  .lourdan,  lor.squ'iU 
étaient  ses  collègues  au  conseil  des 
Gnq-Cents.  Joseph,  devenu  roi  de 
Naples,  en  IHOG.  remmena  dans  son 
rovaume  ou  il  le  fit  t^rand  dignitaire 
de  l'ordre  des  Deux-Siciles ,  f^ouvcr- 
neur  de  sa  capitale  ,  etc.  Il  recul 
aussi  dans  ce  temps-là  les  décorations 
de  l'uidre  de  Saint-Hubert  de  Ba- 
vière, et  l'on  vit  le  vieux  républicain 
s'arran<ier  à  merveille  de  tous  ces  hon- 
neurs. Il  passa  trois  ans  à  Naples 
dans  cette  brillante  position  ,  et  quanti 
Joseph  dut  chaii'^er  de  couronne,  et 
^u'il  se  rendit  en  Kspaj;ne  (;1808)  , 
Jourdan  l'v  suivit  encore  en  qualité 
demajor-cncral.  Celait  de.  fonctions 
asscr  difficiles  ;  car,  pour  ce  nouveau 
roi  ,    il    ne  s'a{;issail  de    rien    moins 


3io 


JOU 


que  (le  conquérir  un  royaume  contre 
le  vœu  de  la  populalion  tout  cntièie. 
On  sait  comment  Joseph  Lonapai  te, 
après  être  entré  si  péniblement  dans 
Madrid,  en  fut  expulsé,  puis  y  rentra 
pour  en  être  expulsé  une  seconde  fois. 
Jourdan  l'accompagna  ,  ri  fut  son 
conseil  dans  toutes  ces  vicissitudes. 
Comme,  dans  tant  de  revers  et  de  dé- 
sastres qui  survi;irent  on  eut  besoin 
d'une  espèce  de  bouc  énnssairc  au- 
quel on  put  imputer  tous  les  torts  , 
sur  lequel  on  put  rejeter  toutes  les 
fautes,  Jourdan  parut  fort  propre  à 
jouer  un  aussi  triste  rôle  ;  et  bientck  il 
lut  acciisé  de  tous  les  revers,  de  tous 
les  malheurs  que  les  Français  éprou- 
vèrent dans  ce  pays,  malheurs ,  qui, 
certes,  on  le  sait  assez  maintenant , 
avaient  une  origine  bien  autre  que 
Tinsuffisance  du  maréchal.  Abreuvé 
ainsi  de  toutes  sortes  de  dés^oûts  cl  de 
tracasseries,  il  demanda  sa  déiiiission 
qiu  lui  fut  accordée,  et  il  revint  en- 
core une  fois  à  Limoges,  où  il  revit, 
avec  la  même  joie,  le  toit  paternel  et 
sa  modeste  épouse.  Ce  ne  fut  que  deux 
ans  plus  lard  qu'il  retourna  en  Es- 
pagne, lorsque  le  «jouvernement  impé- 
rial, réduit  à  ladernlcie  extrémité,  et 
manquant  à  la  fois  de  généraux  et  de 
soldats,  fut  contraint  de  recourir  aux 
hommes  qu'il  avait  autrefois  traités 
avec  tant  de  rigueur  et  d'injustice. 
Jourdan  n'arriva  guère  à  Madrid,  en 
18l.'i,  que  pour  assister  aux  der- 
niers moments  de  cette  rovauté  expi- 
rante. Obligé  encore  une  fois  de  quit- 
ter sa  capitale,  et  sachant  bien  qu'il 
n'y  rc^iendrait  plus,  le  frère  de  Na- 
poléon voulut  emmener  avec  lui  tout 
ce  qui  était  Iransportable.  Le  ba- 
f'àf^t  et  rartillerle  formaient  ainsi  un 
convoi  immense,  et  dont  I  escorte  était 
aussi  insuffisante  que  mal  dirigée. 
Jourdan  ne  put  faire  admettre  aucun 
de  ses  avis,  et  même  on  repoussa  avec 
une  sorte    de   mépris  des    pressenti- 


JOU 

ments  trop  fondés  qu'il  avait  mani- 
festés quelques  jours  auparavant.  Dès 
les  prcîniers  pas  de  cette  déplorable 
retraite,  l'armée  anglo-espagnole,  que 
commandait  Wellington,  pressa  très- 
vivement  les  Français,  dont  la  marche 
ne  pouvait  être  que  fort  lente  et  fort 
pénlb'e,  chargés  comme  ils  l'étaient  de 
toutes  sortes  de  bagages.  Le  général 
anglais  les  atteignit  à  Vitloria,et  il  les 
attaqua  avant  même  qu'ils  eussent  pu 
se  former.  Le  revers  qu'ils  éprouvè- 
rent dans  celte  journée  du  21  juin 
1 S 1 3  est  un  des  p!us  funestes  qu'aient 
essuyés  nos  armes.  Cent  cinquante  piè- 
ces de  canon  avec  un  grand  nombre 
de  prisonniers,  tout  le  bagage  et  tou- 
tes les  dépouilles,  tous  les  débris  de  la 
royauté  déchue,  tombèrent  au  pouvoir 
de  l'ennemi.  Jourdan  y  perdit  même 
son  bâton  de  maréchal,  que  l'infanterie 
anglaise  prit  dans  un  fourgon  de  vi- 
vres :  ce  qui  l'^ournit  aux  journaux  de 
Londres  un  sujet  de  plaisanteries  plus 
grossières  que  spirituelles.  Un  fait 
plus  fâcheux  pour  Jourdan,  c'est  que 
ceux  qui  avaient  réellement  causé  ce  dé- 
sastre par  leur  impéritie  firent,  comme 
toujours,  ce  qu'ils  purent  pour  lui  en 
imputer  toutes  les  conséquences.  En- 
core une  fois  on  accusa  de  toutes  les 
fautes  celui  qui  n'avait  eu  aucun  pou- 
voir de  les  empêcher,  qui  n'avait  pas 
donné  un  seid  ordre  ,  m  mT'me  pu 
faire  prévaloir  un  seul  de  ses  avis.  Ce- 
pendant il  ne  fut  pas  entièrement  re- 
mercié. On  l'envoya  en  Norman- 
die ,  où  il  était  gouverneur  de  la 
15*  division  militaire,  lorsque  la  mo- 
narchie napoléonienne  tomba  en  avril 
1814.  Ainsi  que  tous  les  généraux 
mécontents  deiJonaparte,  Jourdan  ne 
se  montra  pas  fort  altligé  de  sa  chute, 
l'révcnu,  des  le  2  avril,  par  des  agents 
rovalistes,  qui  s'étaient  rendus  à  Rouen, 
il  les  accueillit  assez  bien,  et  le  lende- 
main, il  envoya  son  adhésion  au  gou- 
vernement provisoire.  Le  8,  il  adressa 


JOl' 


JOU 


3ii 


iux  troupes  dt  son  commanileuient  un 
orJr«  (lu  jour   trriniiic  |)ji   cc^  rourte^ 
ftexpre^nrs  |)ji()lfs  :  m  .  .  .  Juroit^ 
w    ol>*''<53nrp  ri    fulrlilé  à  T.f»'i;^-Sl.i 
•«    I  ''         r,    cl  ai! 

«  À  un  e%riirmenl  i|iii  airclr  rctiti^iort 
M  du  &an^,  nous  donne  la  imia  rt  »jii- 
«  ve  notre  pallie. m  I/>uis  XVIII 

Buiitra     r-  ^".inl    d'une     au-  . 

prompir  ,  en  continuant  le 

nuréci.jl  ti.iri.  s  n  pm\ernrmeiit  cl 
en  lui  donnant  le  titre  de  pair  de 
IVanre.  V  '     1  Ir  Gl  conjlr,  far 

Jourdaii  .  .    oblnui  de  Tcm- 

pire  une  d43i.iiii,oii  à  tant 

d'aulrc  t;-  i    :^r  \r  -.  ;   rt  !c 

\ieii 

la  vanité  fcktdaie.  Mais  au  retour  d« 
Pile  dTIbe,  eu  1^15,  le  maréchal, 
qiiid'al>oid  s'cUit  retire  2i  la  campa - 
f;ne,  reparut  au  champ  de  mai,  où  il 
oiïritsessenice&àNapdIcon.  C^lui-ci  le 
nom;  '  .ichainlired.-^  p.iiri 

et  r<  lier   la  G*"  ir.»l>ion 

milita;:  c  a  Ijc -ui,uii.  lUoqiié  bientôt 
dans  celte  place  par  rarméi*  autri- 
chienne, et  5omioé  par  des  parti >  iu>a- 
listes  d'en  ou\rT  lr$  porte-  :n  dia- 
peau  blanc,  il  ^  celte 

circonsiancr  d  I  'lepru- 

dence  et  de  modération  ;  et  celte  fois 
encore,  il  fui  un  des  premiers  che£» 
de  l'armée  à  reconnaître  Ta-itorilé 
ro)aIe.  Le  roi  le  nomma,  le  10  jan- 
vier suixant,  gouverneur  de  la  T*"  di>i- 
sion  à  Gienoble  ;  mais  le  lilic  de  pair 
ne  lui  fut  rendu  qu'en  ISID.  Chargé 
au  coinmencemeiil  de  181 G  de  prési- 
der le  co'iscil  de  guerre  qui  de\ait  ju- 
ger Ne)-,  il  n'eul  pas,  ain;i  que  ses 
toIlej;ucs,  asseï  de  courage  ou  lie  pré- 
vo\.ince,  pour  se  déclarer  coiupéJent, 
et  sau\er  le  maréchal  en  prononçant 
un  arrêt  d'acquiltemenl,  sur  lequel  il 
eût  été  impossible  de  revenir.  Jourdan 
traversa  ensuile ,  d'une  oianiére  assez 


paisible,  lei  quatorie  années  de  la  res- 
tauration. (!e|)eiidant  on  ne  peut  pas 
douter  qu'il  n'ait  \u  a\ec  plaisir  la  ré- 
voltitioit  de  IKÎO  On  lui  contia  aus- 
lille  des  alTaires 
irJa  que  peu  de 
jours,  a>ai:  >*  a  (1e%  fonctions 

«iii  Iiii  coi.  1    Muriiup    mieux  , 

de  j;ou\erneur  de  rh<\tel  des  In- 

4>,ei'  t -••••'!  ><-f  tuent  du    ^énéial 

de  I^lour  I^  il  trou\a  en- 

core des    nj'Mii.  -rti\  ,    et    put 

s*entreteriir     q'  i\ef  de   ce> 

s'  ■'  ••i!)re  ef 

ler.  II 
lUii ..((.;  le  et  fut 

k  ,     UU     Mllll      <! 

I  iirenne  ,  de  V.n 
et  ceux    de    Napol^n.    I^  maréchal 
Jourdan  a  pi.hlié  :   î.   Ofx'ratiun.s  Je 
r  année  du  Danube  sous  les  ordres 
<'  •'    I  '■•■^■;n;  extrait  des 

.  s  de  ce  gMrrul, 
l  ,  I  <  .•  »,  m  rv  ,  a>ec  faite.  11. 
Mrinuires  pour  ser^'ir  <>  Chistoirr 
sur  !a  canifHJgne  df  ITDG,  tunte- 
nunt  les  opérations  de  Farnirc  de 
Sand>re-rl-Mrtise,  l*.iris,  IHIO,  pu- 
blia, sou>lc  \o:iedr  l'anonuiie,  en  ré- 
ponse à  tj  ert  ions  des  Mê' 
moires  st:.  ,  de  fan  hitluc 
(Ihartes^  \o\.  in-îS".  Il  a  lai<i^^é  des 
Mémoires  manuscrits  dont  on  annonce 
la  publication  comiuc  prochaine.  —  Sa 
veuve  e>l  morte  à  LimOj;es  l'année  der- 
nière,à  l*a;,e  de  quatre-Mnf;l  IroiN  an>. 

M— Dj. 

.lOrUDAV  (Athanask  JiAN- 
I.K(iKU)  ,  juri.^consuUe  fiançais  ,  né  le 
21)  juin  1701,  à  Saiiil-Aubin-des- 
Cliamps  (Nunre),  ne  >iiit  à  Taris 
qu'après  avoir  fini  ses  études,  en  pro- 
vince, aux  écoles  centrales  ;  mais  il  y 
sui\il  les  cours  de  droit  avec  plus 
3'a->.iiduilé  que  n'en  inonUeiil  les  élè- 
ves ordinaires,  et  non  content  d'a- 
voir reçu  les  deux  degré»  indispensa- 


3l2 


JOU 


blés  et  le  titre  d'avocat,  il  prétendit 
AU  doctorat  et  l'obtint  (30  août  1813). 
On  sait  que  ce  j^rade,  qui  semble  su- 
perflu aux  praticiens,  n'est  ambitionné 
le  plus  souvent  que  par  ceux  qui  as- 
pirent à  une  chaire  de  faculté.  Tel 
*»tait  effectivement  le  vœu  de  Jourdan  : 
il  ne  parut  que  rarement  au  barreau,  il 
ne  chercha  que  mollement  à  se  créer 
une  clientèle.  Il  n'était  cependant  pas 
destiné  à  professer  en  public  :  il  ne 
donna  jamais  de  leçons  qu^à  l'auditoire 
bénévole  qu'il  rassemblait  dans  son 
cabinet.  Voulant  s'initier  à  la  marche, 
à  la  stratégie  du  concours,  il  suivit  les 
examens,  puis  il  s'exagéra  les  diflicul- 
tés,  puis  il  préluda  en  quelque  sorte 
aux  travaux  de  la  lutte  prochaine  eu 
traçant  le  tableau  de  celle  qu'il  avait 
vue  ;  mais,  quand  on  prélude  ainsi  , 
souvent  il  arrive  qu'on  prélude  toute  sa 
vie  ;  de  nouveaux  travaux  surviennent, 
l'attention  s'éparpille,  les  grands  plans 
s'ajournent.  Xul  doule  pourtant  que 
Jourdan,  place  dai.s  une  chaire,  n'eut 
donnéà  l'enseignement  du  droit  un  essor 
utile  et  vifen  mfime1em()s.  La  science, 
à  l'époque  où  il  étudiait  et  sortait  des 
bancs  ,  subissait  en  Allemagne  une 
transformation  préparée  par  les  tra- 
vaux de  législation  de  la  France,  de 
rilalie  ,  de  l'Angleterre  ,  mais  peu 
connue  et  mal  jugée  en  France  où  le 
commentaire  et  la  routine  avaient  re- 
pris leurs  droits.  Pour  sortir  de  cette 
ornière,  il  fallait  démontrer  à  l'insou- 
ciance française  que  tout  n'était  pas 
dit  en  législation  et  que  nos  voisins 
avaient  leur  tour,  .louidan  fut  un  des 
premiers  à  proclamer  celte  vérité. 
Proûtant  de  la  lacilifé  (pi'ofTiait  la 
paix  européenne,  pour  communiquer 
de  peuple  à  peuple,  il  entia  en  com- 
munication avec  les  Gœsche^,  les  Nie- 
buhr  ,  les  Clossius,  les  Ilaubold,  Ns 
Mai;  suivit  de  l'œil  Ics.iccherches  de 
ces  heureux  érudits,  et  tantôt  repro- 
duisit en  France   plusieurs    de  leurs 


JOU 

travaux,  tantôt  les  fit  connaître,  soit  à 
l'aide  de  conversations,  de  conféren- 
ces qui  avaient  de  l'écho,  soit  par  l'in- 
lerniédiaire  du  journal  la  Tlœrnis , 
qui  devint  rapidement  un  magasin 
précieux  de  notices  et  d'analyses  rela- 
tives à  toutes  les  branches  de  la 
science  du  droit.  Cette  consciencieuse 
revue  de  tout  ce  qui  se  faisait  en  juris- 
prudence, tant  à  l'étranger  que  chez 
nous  ,  ranima  au  sein  des  écoles  de 
droit,  en  France,  le  goût  des  fortes 
éludes  et  y  créa  un  nouvel  esprit.  On 
revint  avec  ardeur  aux  antiquités  du 
droit  romain,  aux  sources,  aux  textes, 
liien  que  secondant  cet  élan  et  ad- 
mirant les  trouvailles  de  Niebulir,  les 
lésurrections  opérées  par  Mai,  Jour- 
dan n'était  pas  tellement  épris  de 
l'antique  qu'il  ne  comprît  pas  que  la 
France,  qui  marche  à  la  tète  et  ne  se 
traîne  point  à  la  remorque  de  la  civi- 
lisation, doit  au  monde  quelque  chose 
de  plus  que  la  découverte  d'un  vieux 
texte  cl  la  lecture  d'un  palimpseste.  11 
suivait,  avec  la  plus  grande  attention, 
les  progrès  de  la  science  législative,  et 
surtout  le  système  de  codification  tel 
qu'il  se  développe  depuis  une  trentaine 
d'années  dans  plusieurs  états  de  l'Eu- 
rope et  du  Nouveau-Monde;  il  appar- 
tenait à  l'école  qui  veut  que  le  législa- 
teur comme  l'économiste  s'éclaire  des 
lumières  de  la  philosophie;  et,  comme 
base  de  toute  justice,  il  adoptait  les 
principes  larges  et  généreux  qu'a  lor- 
mulés  le  dix-luiitième  siècle  et  que 
doit  développer  le  dix-neuvième,  en  en 
prévenant  les  périls  par  de  sages  res- 
trictions el  en  ne  se  méprenant  point 
sur  leur  véritable  sens.  Le  garde-dcs- 
sceaux,  de  Serre,  lui  donna  mission  d'al- 
ler étudier  en  Angleterre  l'organisation 
des  justices  de  paix  :  Jourdan  en  pro- 
fila pour  acquérir  des  notions  approfon- 
dies  sur  toutes  les  branches  des 
institutions  politiques  et  judiciaiics  de 
la  (jiandc-Bretagne,  et  pour  se  lier 


afcc  Blwieurs  juriicou>uilck  tenuin- 
Oléft  dt  ce  pa>».  11  fut  auMi  dési- 
gne merolirc  dr  la  cominii»ion  cli4r;;re 
d'uu  pru|rl  d'ur^JiniMliun  iiuliciauc 
pour  \ti  rolonir»,  et  &c  fil  rriiurqiier, 
dans  le*  >c4i)ce>,  par  se^  offorl.s  pour 
raNcr  delà  loi  Ionien  fts  eiilra\e>  par 
leM|uellc-«  les  coloineN  el  la  métro- 
pole se  ^riieiit  muliicllement  sur  Ir 
terrain  «le  la  loi  rointur  mit  celui  de  la 
production  el  du  rouiinerce,  et  poui 
elriidre  aux  Kraiiçats  de  no^  po^vr>- 
»ioiis  inarilimrs  les  garantir»  dont 
joiii^^^ent  Ir-.  Krançai*  en  France.  i]e% 
eflort»  ne  |K)uvaient  triompher  :  tout 
»e  lient  dans  le  5\)teme  colonial  ;  les 
e&i»ciircs  des  colons  qui  veulent  bien 
qu'on  leur  accorde  beaucoup,  nuis  qui 
n'aci'ordrnt  eux  que  |»cu  de  clio>e  ou 
lien  ,  ajournent  encore  poui  long- 
temps \e^  amrlioialions  ;;i?nrralrs  et 
graves.  Jourdan  au  ie>le  ne  connais- 
sait qu'imparfaitement .  et  par  des  li- 
vre>,  ce  qui  se  pavsc  aux  colonies,  ce 
qui  rvplujue  cl  amené  pre>quc  né- 
ces-vatieinenl  les  abeiralion»  f)uc  la 
France  reproche  au  sv>lemc  colonial, 
et  pour  bien  ju^er  pouilanl  il  fjut 
avoir  vu.  11  ie  sentait,  et  s'il  eût. vécu, 
s'il  eut  pu  se  fa<re  donner  une  mission 
en  ce  sens  (>ar  le  ;;ouvrinemeiit,  il  eût 
de  (;rand  cœur  entrepris  un  vo>a^e  à 
nos  pONsesston^d'oiitre-mer.  Kn  atten- 
dant, le  ministre  dr  la  marine  l'envoNa, 
en  t8*2'>,  en  An<;letenc,  ou  il  s'initia 
aux  piiiicipes,  tels  tju'iU  ^ollt.  de  la  Ir- 
<;i»lalu)n  coloniale.  Il  >  recueillit  d'am- 
ples matériaux  sur  >oii  sujet;  car,  ni 
lali;;iie  ni  tra\aii  ne  lui  coûtaient 
lorsqu'il  s'a;;issail  de  l'objet  de  sa 
mission  ;  mais  sa  santé  ni  souf- 
frit. Maladif  déjà  depuLs  plu:>ieurs 
années  ,  il  aurait  dû  fuir  le  ciel 
brumeux  de  la  Grande-Urcla;;ne  : 
bientôt  il  sentit  son  mal  )  doubler 
d'intensité,  puis  une  (îèvrc  ardente  le 
saisit;  il  reprit  à  la  liàte  le  chemin  de 
la  France,  mais  à  peine  put-il  ^.i^ner 


JOU 


3i3 


Deal,  pir.  de  Douvres,  où  l'arrueillit 
rhosjMijl.lr  ;;eneieuNe  du  p3>leiii  du 
lieu,  l  ne  coll4e^llon  cerebiale  l'em- 
porta rapideutriii ,  et  se»  paieuls,  trop 
tard  avertis,  ne  drbarqueient  a  i)ou- 
vres  que  quelque^  lieuies  après  »on 
dernier  soupii ,  le  27  août  18'JG.  l.c 
seul  nu\i  '  r  romplr'rinrnl  d'  \.  .I.-L. 
Jourdan  e^l  la  liriaiiun  tlu  iuiiiuur.9 
i*Ui>rri  u  lu  fui  uiie  lie  lirait  t/r  i*urix 
fMJur  iti  I  httirr  de  droit  romniii 
(l'aiis,  IMG.  '1  vol.  lu-H),  que  noii> 
avons  ineiitioonee  plus  haut  comme 
annonce  el  cuiiime  pirpaialii  d'une 
candidatuir  qui  n  rut  p-)tiit  lieu,  ^>all> 
être  inutile  au|ouid'liui ,  il  serait  nu 
|>eu  suraune.  On  pe  saurait  en  dire 
autant  des  arlirles  qu'il  a  fournie  a  la 
J'firmis,  et  dont  beaucoup  .sont  foi  l  ic- 
marquabU»,  bien  que  cullaboialcur  as- 
sidu de  ce  reiueil  tt  n'ait  pu  se  mtin- 
trer  parloiit  l'r^al  dr  lui  memr,  et  qu'il 
ail  parfois  laissé  courir  un  peu  la- 
pidemenl  sa  plume,  (^s  ai  licier»,  lela- 
tifs  les  uns  aux  piincipe>,  les  anii-  i 
l'histoire,  quelques-uns  a  la  biblic.  i 
phie  de  la  science  du  dioil,  mcnlc- 
laient  d'être  ieimiMimé>  .»  part.  De 
plus,  Jourdan,  tr<»-pcude  lemp^  apus 
ladecouxettedeGaVuspar  Nicbutir,  dr- 
couxei  te  qu'il  fut  unde>  premier»  a  pio- 
damei  dan>  Ai  J hriiiis^  donna,  coii- 
joinlemeut  a\ec  Ulondeauet  Ducau;  io> , 
le  Juris  cn'Uis  etiugti,  volume  qui 
contient,  a  l'usage  des  ele\csde  «Iroil, 
les  InstiluU'i  deCtaïus  celles  de  Ju->li- 
nien,  les  Srnleiufs  île  Paul,  les  Fntg- 
nu'iiis  d'I  l[»ien.  Seul,  il  publia  une 
réimpression  de.-i  Fragmenta  juris 
romani  ViUicaiia  qui  u-produil  b^ne 
pour  li^ne  l'édition  «le  lîume,  doui.fc 
oar  Mai ,  sur  des  paliinpsesles  de  la  bi- 
miutheque  du  Vatican.  Ce^  fragments 
ne  contiennent  que  des  textes  .^"'^.~ 
rieuis  a  Juslinien.  hnfin  on  lui  doit 
une  édition  des  Taùulœ  rliruiiulugi- 
<a  de  liaubold,  un  des  plus  utiie.s  ou- 
viu  c.>  de   tc  savant.  1'— <JT. 


^i4 


JOU 


JOURDE  (Gilbert-Amacle)  , 
conseiller  à  la  cour  de  cassation,  na- 
quit à  Rioni  en  Auvergne,  le  17  fé- 
vrier 1757,  d'une  famille  honorable 
et  qui  exerçait  dans  cette  \  ll'e  des  fonc- 
tions municipales.  Après  "avoir  reçu  sa. 
première  éducation  dans  la  maison  pa- 
ternelle, il  fut  envoyé  à  Clermont-Fer- 
rand,  nuls  à  Paris  pour  v  éludicr  le 
droit ,  et  prit  le  ^raile  de  docteur  en 
1788.  A  rao;e  de  vino;'-quatic  ans, 
ayant  terminé  son  star!,e,  il  obtint  ie 
titre  d'avocat  au  parlement ,  et  retour- 
na dans  sa  patrie,  où  il  exerça  près 
de  la  sénéchaussée  et  du  présidial  ,  et 
se  fit  remarquer  par  son  savoir  et  son 
élociition.  Il  embrassa  la  cause  de  la  ré- 
volution avec  modération,  et  fut  nom- 
mé en  171)0  Tun  des  administrateurs 
du  district,  puis  substitut  du  procureur 
syndic,  et  en  1791  accusateur  public 
prèsletrlbunalcriminel.  DansTexercice 
de  ce  ministère,  Jourde  se  renferma 
strictement  dans  le  cercle  de  ses  devoirs, 
et  se  fit  estimer  pour  son  caractère  con- 
ciliant. Après  le  9  thermidor  ,  il  fut 
envoyé,  par  le  département  du  Puy- 
de-Dôme,  comme  député  suppléant  à 
la  Convention  nationale,  et  passa,  en 
1795,  au  conseil  des  Cinq-Cents  où, 
pendant  quatre  ai!s,  il  prit  une  part 
très-active  à  tous  les  travaux  léj^islatifs. 
La  ville  de  Kiom  lui  dut  la  conserva- 
tion de  son  tribunal  de  commerce  qui 
avait  été  établi  le  20  nov.  1790, 
et  même  de  sa  cour  d'appel,  qui  con- 
tinua d'y  sié{;er,  bien  que  Clermont- 
Ferrand  fut  le  chef-lieu  du  départe- 
ment. Sorti  du  conseil  des  Cinq-Cents 
en  1798,  il  fut  nommé  le  premier  des 
sept  subsliluts  du  commissaire  du  o;ou- 
vernement  près  le  tribunal  de  cassa- 
tion, et  bientôt  piomu  aux  fonctions 
tle  commissaire  en  chef  à  la  place 
d'Abrial ,  q«il  fut  envoyé  à  jNaphs, 
pour  y  organiser  le  (;;o!ivpinernent  et 
la  majMstrature;  mission  qui  échoua  à 
cause  de  l'invasion  de    l'Italie  par  les 


JOU 

Austro-llusses,  en  1799.  Au  retour 
d'Abrial  à  Paris  ,  Jourde  se  hâta 
de  donner,  à  l'insu  de  celui-ci ,  sa  dé- 
mission de  commissaire  en  chef,  et 
il  reprit  sa  première  place  de  substi- 
tut :  exemple  très-rare  dans  les  annales 
de  la  magistrature,  et  qui  ne  fut  pas 
oublié  par  le  même  Abrlal,  devenu 
ministre  de  la  justice  sous  le  consulat. 
La  bataille  de  Marenp;o  (  14  juin 
1800),  nyant  reconquis  à  la  France  le 
Piémont  et  la  Lombardie,  le  premier 
consul  retourna  à  Paris  le  2  juillet, 
et  il  médita  l'organisation  des  six  dé- 
parlements de  VEridan,  de  la  Stura, 
de  la  Doirn,  de  la  Sésia,  de  Murcn- 
go  et  du  Taiiaro.  A  la  fin  de  cette 
année,  sur  la  proposition  d'Abrial^  on 
désigna  le  substitut  Jourde  pour  or- 
oaniser  la  magistrature  dans  la  27^  di- 
vision militaire,  sous  la  sanction  du  gé- 
néral Jourdan  [Voy.  ce  nom  dans  ce 
vol.),  nommé  administrateur  général  à 
Ttnin.  Tout  y  était  à  faire.  11  s'agis- 
sait de  remplacer  par  un  tribunal  d'ap- 
pel ,  un  sénat  et  une  chambre  des 
comptes,  qui  prononçaient  des  décisions 
énigmatiques  en  langue  latine;  de 
rempiîicer  les  juges-mages  dans  les  pro- 
vinces [)ar  des  tribunaux  de  première 
instance  ;  de  réformer  les  abus  de  la 
procédure  éternelle,  et  d'organiser  les 
justices  de  paix  et  le  notariat.  Jour- 
de, appréciant  les  difficultés  de  cette 
mission  ,  se  fit  aider  par  son  ami 
Tixicr  qui  fut  nommé  procureur- 
général  du  tribunal  d'appel,  et  par 
Carnier  qui  fut  iînsuite  procureur-gé- 
néral du  tribunal  criminel  à  Turin. 
Une  nuée  de  jeunes  avocats  descendi- 
rent les  Alpes  pour  être  placés.  ]\lais 
.louide  ,  homme  juste  et  incorrup- 
tible ,  les  renvoya,  en  leur  disant 
(pie  son  devoir  était  de  rendre  justice 
à  de  vieux  magistrats  qui  avaient 
illustré  le  sénat  et  la  chambre  dos 
comptes  de  Turin,  comme  aussi  à  de 
jeunes  docteurs  dans  les  deux  droits, 


JOt 


JOU 


Juin.. 
f»éaéraui 
jcoars  ra. 


.  élaienl  %o- 

rlr<  a\ocals 

il,  ton 

pas  en- 


core été  corruin|tus  par  la  cliiranr  du 
barreau.  A  la  tête  du  tribunal  d'appel 
fut  place  le  ronite  Ilottone  de  Ca«irlla- 
muote  [i'.  IloTTONK,  Ll\.  T)?),  l'une 
des  premières  illustrations  dr  la  cour  àc 
cassation  ;  et  d  '       n^iituts 

furent  appelé  luinaiix 

ciimineU.  Nou>-uiu;ic,  uuu>   dûnien  a 
cet    intèi^rr   n-;an'*.î!P'!r  la   plare   dr 
commU^. 
tiibunal  I. 

di-isemenls  d  A^tl  et  d'Acqui,  > 
cent  \iii^t-cinq  niillc  anies  dr  ;  ,  ^,^ 
tiim,  établi  a  A»ti,  clief-lieu  du  départe- 
ment du  1  anaru,foorli(>ns  auxquellcsil 
nous  Gt  noiumer  après  avoir  lu  le  livre 
par  nous  ('ublie  >ous  le  titre  de  t  ormu- 
irs  drs  actes  nuliciaires  pur-dr\Htnt 
les  trihunttux  tit  prrmirrr  instttnrf 
et  (Cappel,  Turin  ,  18t)l ,  in  H".  \jts 
piemiers  omia^e»  que  Jourde  com- 
posa à  la  l'ir-ne  épo'i'ir  fiirrt»!  :  I. 
Instruci  :ue 

sur   fat.  lire 

criminelie  .  rurrettiorineiJf  et  de 
sitnpU  fM}iire ,  imin,  1801,  in-8', 
ou>raj;c  pratique  très-utile.  11.  liulU- 
Uns  de  l'udminîstratwn  tit  Piémont, 
contenant  les  luis  de  f enregistre- 
ment et  de  Curganisatiun  judiciaire, 
et  1rs  luis  relalices ,  in-S '.  Celte 
grande  collection,  qui  fut  portée  ensuite 
àplusde\in^t  ▼oluinc>,  roiiiicnt  re  tria- 
ge detoisà  partM  de  ITS'J,  roiilnr  dejujs 
lon<;-temps  a  une  roNi.nission  a  l'.iri». 
Avaiildequittci  le  l'iciuoiil.  Jourde  sol- 
licita en  \i[n  l'ordoinuiire  pour  la  réu- 
nion derepa>  sala  Iraiice.ariiid'a^urer 
les  nominations  provisoire»  et  de  don- 
ner conGance  à  la  mac^istrature,  d'au- 
tant plus  que.  à  dater  du:2l  mars  1801 , 
la  cession  des  états  de  Parme  et  de  Plai- 
sance aNail  été  sanctionnée,  il  ignorait 
les  secrets  de  la  politique  du  prcniiei 


coii.>ul  ,    qui     oK'naveait    l'aaitié    de 
Paul  1"^,    rmpeiriM    de  l(u<sie,  pro- 
tecteur    de    la    maison     de    Savoie  , 
alors    continue  m  Sardat^ne,    Après 
la    ttiort  du    czji  ,  la  politique   au- 
plaise   avant  j;a^ne  Alexandre,    cette 
nouxelle  roalition ,  ainsi   que    Teiitre- 
vur  de    Mrmrl  avec  le  roi  de  Prus*e, 
décida     Napoléon     sur     le     soit     du 
Pirtnt)nt  ;  et  il    remit  au  minislio  dr^ 
ûnaiirr*.  (  Hidui,    li*   décrrt    de   »rii- 
nion  qii   (ut  sanctionne  par    \c  •«•ii.it 
foM^^,  %.vfrur    le    11    sept.    18<)*2.     \ 
(*,  Jourde  avait  termi-ié  sa 
>  :  le4  tribunaux  du  Piémont 
I  sur  le  même  pied  que  ceux 
'•ur    de    la   France.    Il   fut 
nomme  commandant   de    la    l>;;ion- 
d'Iioniieur  des  laciration  de  cet  or- 
dre. Maintenu  dans  sa  place  de  suUti- 
tut    de  cassation,   il   en   continua   les 
fonctions  ;  et,  quand  le  nom  de  tribunal 
fut  cban^r  en  criiii  de  com  ,  A  passa, 
par  ordre  d'anfimneté,   premier  ado- 
rât ^i-neral   piésde  la  cour  supréiiie. 
(/pst  Jourde   qui    donna  ,    d.'>ns  l'af- 
faire   des  agents    de  clian^e    contn* 
M.    de    Forliin  J.in  nn.    Ir-  mémora- 
bles conr !  on  mit 
au    ran;;   <  relies 
qui  se  cuiilractent  par  )ett\  de  bonrse, 
conclusions  qui  furent  adoptées  dans 
l'arrêt  de  la  cour  du  4  août  \H-2Ï,  qui 
fixa  la  jurisprudenre  sur    la  matière. 
Nommé  con>eiiler  à  la  luemc  cour,  pat 
ordonnance  du  6  août  suivant  ,  son  zèle 
et  son  a^sidiiiié  ne  diminuèrent  point  , 
il    appo:>a   dans  les   deLbér .liions   les 
Itiminc;  et  l'expérience  que  lui  aNaienl 
acquises    trente    annérs    «le     serxires 
d.iiis  les  fondions  difliriles  du  minis- 
tère   public,    et  ses    opinions    furent 
toujours  respectées  par  ses  rollci^iies. 
Il  mourut  a  Paiis,  le  13  G'vrier  1N37, 
laissant    pour    unique  de'=cendant   M. 
Mai^ne-l-a;^raviète  ,     son    petit-fils  , 
maître  des  requêtes  flu  conseil  d'état. 

G«-G— Y. 


3i6 


JOU 


.101) 


JOL'KDEUIL  (Didier),  l'un 
des  révolutionnaires  les  plus  fougueux 
de  notre  époque,  se  montra  aux  pre- 
mières émeutes  qui  éclatèrent  dans  la 
capitale,  en  1789,  sous  la  direction  de 
J)anton,  et  devint  ensuite  membre 
du  comité  dit  de  salut  pnhlic  de  la  com- 
mune de  Paris,  qui  n'était  guère  alors 
qu'un  comité  d'insurrection  perma- 
nent. C'est  par  ce  comité  que  fut  pré- 
])arée  la  révolution  du  10  août  179:2. 
Jourdeud  fut  aussi  un  des  principaux 
directeurs  des  massacres  de  septembre  ; 
et  il  signa  la  fameuse  circulaire  qui  fut 
adressée  à  ce  sujet  par  la  commune  de 
Paris  à  toutes  celles  de  France.  11 
fut  bientôt  employé  i)ar  son  ami  Bou- 
clioltc  comme  adjoint  du  ministre  de 
Ja  guerre,  et  devint,  en  1793,  l'un  des 
jurés  du  tribunal  révolutionnaire  où  il 
concourut  a  la  condamnation  de  la 
reine  Marie-Antoinette.  Arrêté  après 
la  chute  de  la  Montagne ,  comme 
partisan  de  Robespierre,  il  fut,  après 
la  journée  du  1*^'  prairial  (juin  1795), 
envoyé  par-devant  le  tribunal  d'Eu- 
re-et-Loir. Les  événements  du  13  ven- 
démiaire an  IV  (5  oct.  1795)  pré- 
vinrent son  jugement,  et  le  firent  am- 
nistier ainsi  que  lîoucliotte.  On  le 
comptait  encore  en  1799  parmi  les 
Jacobins  de  la  capitale,  et  il  fut  un  de 
ceux  que  les  consuls  condamnèrent  le 
1 7  novembre  à  la  déportation  à  Cayen- 
ne,  peine  qui  fut  bientôt  commuée  eu 
des  ûiréls  à  garder  dans  leurs  commu- 
nes. Depuis  ce  temps  11  vécut  miséra- 
blement à  Paris,  et  mourut  dans  les 
premières  années  de  ce  siècle  comme 
la  plupart  de  ses  pareils,  sans  que  l'on 
s'en  aperçût.  M — DJ. 

JOU iu;m Ac:  Sauu  -  Méurd 

(  le  chevalier  V  hanmjis  de  )  ,  né  à 
iiordeaux  en  174.'),  d'une  ancienne 
famille  noble,  originaire  du  Limou- 
sin ,  seivll  dans  le  régiment  du 
roi  Infanterie,  depuis  17()G  jusqu'en 
1790,   époque   de  la  dissolution   de 


ce  corps.  Il  était  alors  capitaine  com- 
mandant et  chevalier  de  Saint-Louis. 
Le  31  août  1790  ,  quand  l'insur- 
rection éclata  parmi  les  troupes  de 
la  garnison  de  Nancy  ,  il  joua  \\\\ 
rôle  qui  pensa  lui  devenir  funeste. 
Très-aimé  des  soldats,  parce  que  ,  sans 
partager  leurs  idées  révolutionnaires, 
il  les  avait  toujours  bien  traités,  ceux- 
ci  crurent  n'avoir  rien  de  mieux  à  faire, 
pour  assurer  le  succès  de  leur  cause, 
que  de  le  nommi'r  général  de  l'armée 
insurgée  qui  marcha  sur  Lunéville. 
Forcé  d'accepter  cette  étrange  mission, 
Saint-Méard  ne  fit  rien  de  ce  que  les 
insurgés  attendaient  de  lui,  et  sut  se 
ménager  assez  adroitement  avec  tous 
les  partis  pour  se  donner  le  temps  de 
ineltre  sa  vie  en  siireté.  Cette  conduite 
irrita  les  révoilés;  ils  crurent  à  la  tra- 
hison; et,  trois  jours  après  cette  prise 
d'armes,  Salnt-Méard  fut  condamné  à 
mort  par  ceux-là  mêmes  qui  l'avaient 
nommé  leur  général.  Fixé  à  Paris  à  la 
suite  de  ces  événements,  11  devint  un 
des  principaux  rédacteurs  du  Journal 
de  la  ville  et  de  la  cour,  connu  sous 
le  nom  de  Fetil  Gautier^  et  qui  jouis- 
sait alors  d'une  grande  vogue  pour  sa 
gaité  soutenue  et  presque  toujours  pi- 
quante. Celte  feuille,  où  la  critique  et 
la  satire  s'exerçaient  sans  ménagement 
contre  les  ridicules  des  meneurs  révo- 
lutionnaires ,  obtint  le  plus  grand  suc- 
cès, mais  fit  en  même  temps  à  son 
auteur  de  puissants  ennemis.  Doué  d'un 
enjouement  intarissable  et  d'une  grande 
présence  d'esprit,  ces  dons  de  la  na- 
ture l'ont  sauvé  plusieurs  fois  des  cir- 
constances péiilleuses  dans  lesquelles 
il  s'est  trouvé  souvent  engagé  pendant 
les  orages  <le  la  révolution.  On  en  voit 
U  preuve  dans  sa  brochure  intitulée: 
Mon  agonie  de  trente-liait  heures^ 
ou  Récit  de  ce  (fui  ni  est  arrivé,  de 
ce  que  j'ai  vu  et  entendu  pendant  mu 
détention  dans  la  prison  de  l'ahhayc  m 
Saint-Germain,  depuis  lc22  août  jus-        m 


JOU 

</ii*i/M  ♦  septemftre  1792.  (londuii  au 
romil^  i\t  va  sM'tlon  (la  lUIif  aubir  , 
il  fut  intfrrofjr  romiDf  prr\rnu  il'rlir 
If  rfciarlfiir  li'un  jouriuil  tmti-ittnsti- 
iu/iitnnri,  tl  tl'avoir  (l^s  liaisons  a\rr 
Durtnoiet  l'rllin,  r^lartntr  i!ti  journal 
//■«  ,  îrtrs  tirs  ofxUrrs.  Sr*  rcponsw 
iraTaiit  pa-i  paiu  !Witiifai*antes,  trois 
^cillais  1(1  iitrnt  l'onlrp  lir  Ir  rondiiire 
à  Vhôlrl  liit  faulMMtrg  Suint-itrr- 
main  ;  cV>t  ain>i  que  le  prrsulfnl  Je 
la  sfftion  a|>|»rlait  retir  prison dr  l'Ab- 
bave  qui  pru  dr  jnur^  aprr^  allait  rire 
ensanglantée  par  le  plu^  r|>ou«anlabie 
nuA&acre.  Ijts  journaux  réuilulionnai- 
res.  en  annonçant  l'an  e^talion  de  Saint- 
Mcard,  ajoulrient  par  Iruis  propos 
mensongers  aux  perds  qui  menaçaient 
sa  tète.  Suivant  eux,  il  était  pioprielaire 
de  la  terre  que  le  fameux  Montaigne 
avait  possédée  près  de  liordeaux,  et 
jouissait,  en  outie,  de  plus  de  quarante 
mille  libres  de  renies.  Or,  la  terre  de 
Monlai;;nr  appartenait  a  la  famille  de 
Sé«îur ,  et  Sainl-Meard  n'axait  pas  eu 
la  moitié  de  ce  revenu,  même  avant  les 
décrets  de  la  con>titunnte  qui  \rnaient 
«le  faire  perdre  aux  nobles  leuri  renies 
féodalei.  Au  surplus,  il  faut  lire  dans  sa 
brocliuie  même  la  manière  presque 
miraculeuse  dont  il  é\ita,  lors  des  mas- 
sacres des  2  ï  t  !l  septembre,  une  mort  à 
peu  près  certaine.  Son  calme  im- 
perturbable, la  netteté,  la  fraiirliisede 
ses  réponses  en  imposèrent  à  Maillard, 
le  chef  des  ésor.;eins  ;  et  celui-ci.  après 
l'avoir  entendu,  dit  en  se  di-rouvrant  : 
««  Je  ne  vois  rien  qui  doive  faire  sus- 
«  prêter  monsieur  ;  je  lui  accorde  la 
««  liberté.  >•  \  peine  ces  mots  furent- 
ils  prononcés  que  les  mêmes  hommes 
qui  l'eussent  massacré  sur-le-champ,  si 
Nlaillai  d  l'avait  condamné,  l'enlevèrent 
dans  leurs  bras  et  l'escortèrent  jisjie 
chez  lui.  Uien  de  plus  touchant  que  le 
récit  de  Saint-Meard  ;  sa  brochure 
peut  être  considérée  comme  l'un  des 
monuments    historiques    de  cette  épo- 


JOt 


3i- 


que  de  sauvante  mémoire.  \.\'i^unir 
a  eu  dix-huit  éditions  imp^imée^  cher. 
Desenne,  dans  la  seule  année  17î>*J. 
Trois  ont  rte  puhlu-es  en  iSti;  sans 
parler  de  lrente-4i\  contre  laçons  dans 
1rs  dfparlnnrnis  ri  à  l'étranger.  Sainl- 
^1  '  'in  exemplaire  de  cha- 

•  iM.  Knfm   cri  rcrit  a 

ele  iMscir  d^tis  Ij  rollection  des  )/r- 
moirrs  Hr  lit  rr^niluliim.  l'eu  de  inoii 
avant  qu'il  vînt  se  lixer  à  Paris,  S.iiii;- 
Meard  avait  fait  imprimer  chez  llirnn 
à  Nancv  plusieurs  pamphlets,  entn  an- 
tres une  tra;^i-comédie  en  trois  actes 
sur  son  étrange  affaire  de  Nanrv.  Il 
avait  coropove  dans  la  ro^me  ville  en 
17H.-,,avec  MM.  de  Kortia  de  l»ilrs 
et  I^uis  deHois^elin,  ses  camarades  au 
régiment,  une  brochure  satirique  a>ant 
pour  titre  :  (Mrrrspomiunrr  tir  M . 
Mrsmrr  .vtr  1rs  trois  tlrium>rrtrs  tlit 
/Mttfurt  futoijonr,  tir  fhonimr  htn^url 
rt  tlu  Uitfurt  munil  (1  %nl.  in-l'JV 
Ilien  que  la  publication  de  son  .■f^nnir 
tir  trrntr-huit  hrurrs  fût  un  acte  de  cou- 
rage, et  l'on  peut  dire  même  une  sorte  de 
bravade  contre  les  instigateurs  des  mas- 
sacres deseplembre,Jourgniac  .ieSainf- 
Méard  ne  lut  point  inquiète  depuis  ;  et 
les  journalistes  «p:i  ,  dans  le  temps  , 
rendirent  compte  de  celte  brorlmrr, 
se  sont  tous  accordes  à  1.1  louer,  rjuelle 
que  fût  la  couleur  de  leurs  opinions,  il 
n'y  dissimulait  pourtant  point  les  sien- 
nes, pas  même  dans  Wii'rrtissrmrnf 
ou  ,  après  avoir  justement  llétii 
NecLer,  tir  tirsastrruse  fnrnwirr,  il 
parlait  de  ceux  qui  ,  noyant  snùtiliu- 
la  ronjîancr  tir  la  nation  tfiir  ptmr 
la  tromprr,  avaient  tontrilnir  a  lairr 
coulrr  Ir  sang  drs  Français.  C/C  qui 
d^ailleurs  faisait  respecter  «le  tous  les 
partis  ce  franc  et  invariable  rovaliste, 
c'est  que  dans  ses  relations  sociales  il 
montrait  toujours  la  plus  grande  tolé- 
rance pour  les  opinions  qu'il  com- 
battait dans  ses  écrits  par  les  traits 
incisifs    d'une    apparente    bonhomie. 


3i8 


JOU 


Au  surplus,  il  s'était  peint  lui-même 
dans  ces  paroles  adressées  aux  jno^es- 
Lourreaux  de  T Abbaye:  «  Je  n'ai  ja- 
«  mais  été  inscrit  sur  la  liste  civile  ; 
«  je  n'ai  si^ué  aucune  pétition  ;  je 
«  n'ai  aucune  correspondance  répré- 
«  hensible;  je  ne  suis  pas  sorti  de 
c<  France  depuis  l'époque  de  la  révolu- 
«  tion.  Pendant  mon  séjour  dans  la 
<c  capitale,  j'y  ai  vécu  tranquille  ;  je 
«  m'y  suis  livré  à  la  ^aixé  de  mon  ca- 
«  ractère,  qui  d'accord  avec  mes  prin- 
«  cipes  ne  m'a  jamais  permis  de  me 
«  mêler  sérieusement  des  affaires  pu- 
ce bliques,  et  encore  moins  de  faire 
ce  mal  à  qui  que  ce  soit.  »  C'est  dans 
cet  esprit  qu'on  le  vit  aux  réunions 
déshabitués  de  la  boutique  du  libraire 
j)esenne  (  Palais-Koyal)  revendiquer 
la  qu2^i\é  àe  président  et  générai  en 
chef  (le  la  société  des  gohe-nioucJies. 
La  restauration ,  qu'il  accueillit  avec 
crtlliousiasme  ,  trahit  ses  espi^ances 
aussi  bien  que  celles  de  tant  d'aulres. 
Peu  curieux  d'honneurs  et  de  place, 
il  pensait  pourtant  que  les  dan^eis 
qu'il  avait  courus  à  Nancy,  et  le  dé- 
vouement qu'il  avait  constamment  mon- 
tré, méritaient  bien  le  titre  de  colo- 
nel ;  mais  les  ministres  de  Louis  XV  J I  [ 
et  de  Charles  X  en  jut^èrent  autre- 
ment. Toujoui  serai  malgré  ses  soixante- 
dix-huit  ans,  il  publia  sur  les  dénis  de 
jtiblice  dont  il  croyait  avoir  à  se  plain- 
dre plusieurs  brochures  très-piquantes, 
et  qui  finirent  par  amener  entre  lui  et 
l'autorité  une  sorte  de  transaction  par 
suite  de  laquelle  une  pension  lui  fut 
accordée  sur  la  liste  civile,  llcureuse- 
mcnlSaint-Méaiddont  lesf^oùlsétaient 
fort  simples  avait  conservé  quelques 
débris  de  sa  fortune  patrimoniale.  On 
aura  une  idée  de  l'esprit  des  brochu- 
res dont  nous  venons  de  pailcr,  par 
leurs  intitulés  que  nous  donnoFis  tcx- 
tiieilement:  \.  Ordre  du  jour,  ou 
Salmigondis  ministériel  et  hureuu- 
cratiifuef  pour  serç>ir  de  supplément 


JOU 

et  de  consolation  à  mon  Agonie  du 
2  septembre  1792,  Paris,  chez  l'au- 
teur qui  enjait  présent,  et  chçz  le  li- 
braire VeUi,fjuile  vend,  1822,  in-S"". 
Dans  le  même  temps  il  fit  imprimer 
h  pétition  qu'il  avait  présentée  au  duc 
de  Bellune  ,  ministre  de  la  guerre 
(Paris,  1822,  in-8^').  IL  Ainsi  soit- 
il,  ou  Nec  plus  ultra  du  vieux  roya- 
liste Juurgniac  de  Saint-Méard,  Pa- 
ris, 182i^,  in-8°.  IlL  Mon  épitaphe 
en  vers  (1824,  in-8"  de  2  p,).  H  était 
digne  du  joyeux  auteur  qui  avait  com- 
mencé par  son  agonie  de  terminer  sa 
carrière  littéraire  par  son  épitaphe. 
Il  est  mort  à  Paris  le  3  février  1827. 
Dans  les  dernières  années  de  sa  vie  ,  il 
passait  presque  toutes  ses  journées  au 
café  Valois  (l*alais-lio)al).  Là,  comme 
au  temps  de  la  république  et  de  l'em- 
pire, il  se  targuait  encore  du  titre  de 
général  des  gobe-mouches  ;  et  il  avait 
lait  graver  sous  la  forme  d'une  ruclie 
de  mouches  à  miel,  des  brevets  qu'il 
distribuait  à  tous  ses  amis.  Grimod  de 
la  Reynière,  dans  la  IV*^  et  la  V®  an- 
née de  VAlmanach  des  Gourmands, 
fait  un  grand  éloge  de  Saint-Méard  ; 
A  remarque  qu'entre  ses  divers  mérites 
«  il  gobe  autre  chose  que  des  mou- 
<'  clies,  et  qu'il  présente  en  sa  per- 
«  sonne  l'exemple  d'un  des  plus  vastes 
«  et  des  plus  robustes  appétits  que 
«f  renferme  en  ce  moment  la  gour- 
(f  mande  ville  de  Pans  (  année 
1807).  ).  D— R— R. 

JOURXIJ  -  AÏJBER  (  Bfr  - 
nard],  comte  de  liistal,  naquit  à  lior- 
deaux  en  1748  ;  fils  d'un  négociant  re- 
commandable,  il  se  voua  à  l'état  de  son 
père,  et,  comme  lui,  cultiva  en  même 
temps  les  sciences  naturelles  et  les 
beaux-arts.  Il  s'était  formé  une  riche 
collection  de  tableaux  et  d'histoire  na- 
turelle ,  dont  il  partageait  libérale- 
ment la  jouissance  avec  les  amateurs. 
Il  encourageait  les  artistes  et  leur 
procurait  d'utiles  travaux.  Les  désas- 


JOU 

\rt*  de  S4inl-1)omiii;;ue.  comoifitr^ 

nvcc  la  rc\('!if'on,  I  n  ciiIcTcrenl  une 
puntie  juilie  ilc  *^  rd-iiirif  :  rnmme 
elle  ne  lui  prrm-nait  plii%  d'arnoitre 
*nn  ridieraltinrt,  il  en  lit  Joii  i  «a  Mlle 
naljile.  rt  \r  Mu^rc  |uil)lic  di*  llnrdraux 
i:ii  esi  redevable  lie  l.i"'  •'  ^  ■'♦•  pai  lie 
dc«e<ornemrnl5.  A  ri  Jntir- 

nti-Aiibrr  prit  un  >:i>>ii  i.o  uc  pour 
rj^iiniilure;  il  forma  et  eteciila  le 
prn)ct  d'une  fcin;  '   '•    I/u- 

liliti-  dr  ses  .ini'  «  e*l 

.c   tia:i>  le    pav« 
iilf.-»   sM?!oul   un 
^j4ii\l   irltf   puui    U  II    lïfs 

nier  iMO«  ;  et  il  retnpoi  '  ri,  un 

prix  d«rrrn<'  par  la  >oririe  de*  sriencr* 
ri  aris  de  U4)rdcaiix.  Il  ér  i\it  aussi 
Mir  le  medleiir  parti  à  tirer  dc>  lande* 
i|ui  se  tcouvent  entre  cette  \ille  et 
Bavonne.  il  fut  snrceviivetnent  appelé 
ati\  fonctions  de  membre  et  de  prési- 
dent de  la  rliarobre  de  rommi-rre  de 
))  iidraux,  d'adiniiiistraleur  du  di-par- 
tiii;.iit,  pi  dr  presxicnt  du  tiibtin.il  de 
Aufit  éic  élu  députe  k 
le"-l.il!\r.    il    o;'r'>  1  jinr 


raie,  l'ro-rnt  en  IT'.'ii,  pour  son  dé- 
vouement à  la  cauie  de  Louis  XVI, 
il  demeura  lon:;-temps  caclié.  A  la 
suite  du  18  brumaire,  il  fut  nomme 
membre  du  sénat  conservateur,  de- 
vint un  des  censeurs  de  b  Kanqsie  de 
France ,  après  avoir  contribue  k  la 
form.ition  de  cet  ctab!is<eniefit,  et  plus 
tard  il  fut  créé  comte  de  l'cinpire.  I.e  roi 
lui  fonléra  la  dignité  dep.Hrde  l'iaiicc, 
au  mois  de  juin  181  i;  ii'ais  il  ne 
jouit  pas  lon{;-temps  de  celfe  faveur, 
élaiiJ  mort  le  19  janvier  181").      /. 

40I  SSOL'F.  yor.  Yoisoip, 
LI,  Ô1J. 

JOrVAXT  /Nicolas-Louis), 
magistrat  ,  né  à  Ucims  le  15  sept. 
1730  ,  se  distingua  dans  ses  études 
qu'il  alla  finir  à  Paris  ,  où   il  fit  son 


JOt 


3i9 


droit  et  fut  le  condisciple  de  Tlioroas, 
•tec  le(^u»-l  d  entretint  pendant  lon^- 
lefnp<  Ar-^  Ira-  nn.  iudaips.  Krvrnu 
»'  t    drbuta   dan» 

1.»  I     .,  ,         ■  >  Itai^i?  d'avocat 

du  roi  auprrt  du  (irMii  al;  il  v  fut  en* 
suite  lieutenant  pattindier,  et  député 
avec  M.  Sulaiue-l>uvi\ier,  le  17  sept. 
I7S7,  auprès  du  parlement  rxiie  à 
Troves,  pour  \e  complimenter  au  nom 
de  la  nij(;iurature  dr  Keimt.  (îmc  par 
de*  levers  dr  foMunr  qui  I  obliquèrent 
d'en^a^'rr  unr  partie  de  mmi  patii- 
moine,  il  sollicita  ri  «bdnt  la  cliar<;e 
dr  profrAseur  en  dioit  a  l'unncr^ile  de 
Keims.  Il  en  avait  joui  a  peine  drus 
an<>  quand  la  résolution  la  lui  enleva 
et  le  dépouilla  au5si  de  ses  aulies  cliar- 
f;ei.  Toutefois  il  n'éprou\a  aucun 
clia^rin  de  ces  perte*.  Comme  beau- 
coup d'autre»  ,  il  salua  Taurore  de 
cette  ié\olution  dont  il  espérait  de 
l^rands  asanlairs ,  et  il  >  prit  une 
paît  l  .  '  1  di*. 

trictd.  delà 

roinnuiic.   Mai;>    .1    uc:  iul    pa»  lonr;- 
fem;»^  «n^  ^'apercevoir  qu'au  licj  du 
!  ut  et  dr  la  «uppre<- 
I  .   rt   de   beaucoup 
«1  s  f\  demandée* 

t'd.  !      i_  ordres,  lors  de 

a  convocation  dr^  étal>-:;enéraux  ,  il 
n'en  arriverait  qu'un  bouleversement  et 
des  maux  incalculables.  ICii;;a}^é  dans 
ce  roau>ais  pas,  il  ne  pouvait  en  sortir 
sans  déplaire  à  sa  famille,  qui  crai^^nait 
qjieparcrtte  démarche  il  ne  s'exposât 
et  ne  l'expo  .•♦l  elle  même  au  plus 
f^r.-^nd  danger.  Ju^e  au  tribunal  crimi- 
nel du  département  de  la  Maine, 
établi  à  Cii.ilons  en  179i{,  et  ensuite  à 
mims,  il  eut  beaucoup  à  oéuiir  de  la 
rioiicur  et  de  l'injusticedes  lois  révolu- 
tionnaires qu'il  lui  fallait  appliquer 
à  d'infortunés  pro5crils  ,  entre  au- 
tres au  jeune  l)eu  de  Moiitigny  et  au 
respectable  abbe  Musai  l  ,  curé  de 
Sonime-Vcsle,  accusés  d'émi;^rationet 


3io 


JOU 


JOU 


comme  te!s  roiuîamnés,  le  preFiiicr  le 
3  mars  1796  et  exécuté  le  lende- 
main, le  second  le  10  du  même  mois 
et  exécuté  le  1 1  sur  la  place  de  la 
Couture  à  Reims.  Les  pieds  sur  l'é- 
chafaud  ,  et  quelques  minutes  avant 
de  livrer  sa  tête  à  Texccuteur  ,  ce 
saint  prêtre  (1)  entonna  le  Saioe,  re- 
gina,  que  le  peuple  ,  tombant  à  ge- 
noux, continua  en  fondant  en  larmes. 
Deu  de  Montij^ny  et  l'abbé  Musart 
pouvaient  se  soustraire  au  sort  trop 
certain  qui  les  attendait  ;  des  person- 
nes charitables  leur  en  facilitaieni  les 
movens,  mais  ni  l'un  ni  l'autre  ne  vou- 
lurent en  profiter.  Après  ces  deux  ju- 
gements, poursuivis  et  soutenus  par  l'ac- 
cusateur public  ïburiot  ,  surnommé 
2ue-roi,  à  cause  de  son  vote  dans  le 
procès  de  Louis  XVI  ,  Jouvant ,  qui 
s'était  prononcé  pour  leur  acquitte- 
ment, ne  pouvant  plus  y  tenir,  donna 
sa  démission.  Retiré  à  Rilly-la-Monta- 
^ne,  à  deux  lieues  de  Reims,  il  se  remit 
des  peines  et  des  tribulations  que  son 
cœur  avait  éprouvées  depuis  1790,  et 
médita  sur  les  grandes  vérités  de  la  re- 
lif^ion,  dont  il  remplissait  les  préceptes. 
Il  réfuta  rouvra<:;c  que  l'abbé  Servant, 
vicaire  épiscopal  de  révèque  constitu- 
tionnel (le  la  Marne,  ^sicolas  Diot  {V. 
ce  nom  LX II ,  499),  avait  fait  imprimer 
à  lieims,  1791,  in-8",  sous  le  titre  de 
Réponse  à  l'ouvrage  intitulé  Petit 
r.atrihimie  pour  le  temps  présent, 
Reims,  in-18;  dans  lequel  cet  abbé 
prétendait  prouver  que  le  serment 
jf.wf^é:  de-  piètres  par  la  constitution 
-civile  du  clergé  était  dans  les  règles, 
et  que  lesectlésiaftiques  qui  le  refusaient 
étaient  des  rédaclaires.  C'est  aushi 
Jans  cette  retraite  qu'il  fit  V llxawen 
critique  de  la  Théorie  de  V imagina- 
Hun ,  (\\\t  Jean-Simon  Levcsquc    de 

'i.  La  vi«-  Hp  r.il)h«-  Musart  a  ct^  puSlif-e 
«ous  cr  titre-/.*  MoJtle  drt  pnsleitri,  i>\i  Fit 
de  M.  jVuiarl  ,  lure  i/e  Somme- y  elle  ,  diocts» 
de  C/irifont-iur~Mar,ie,  mort  t'i  lieimi,  pour  la  foi, 
le   ir  mor»   1796,  I.yon,  18*7,  iri-n. 


Pouilly  donna  au  public  en  1803 
(ro).'PouiLLV,  XXW,  oiG).  Le 
séjour  de  la  ville  convenant  mieux  à 
Jouvant  à  cause  de  son  grand  âge,  il 
se  retira  à  Reims,  où  il  mourut  le  31 
déc.  1808.  L— c—j. 

JOUVE  (Josr.î'H) ,  jésuite  fran- 
çais ,  né  à  Embrun  le  1^^  nov.  1701, 
mourut  le  2  avril  1750.  Il  s'engagea 
jeune  dans  la  société,  y  remplit  pendant 
un  temps  les  fonctions  du  professorat, 
et  sur  la  lin  de  sa  vie  se  mit  à  écrire.  Il 
avait  du  goût  pour  l'histoire,  et  les  cho- 
ses de  rOriènt  ;  mais,  comme  à  tant 
d'autres  de  ses  ingénieux  confrères  ,  le 
sérieux,  la  persévérance  lui  manquaient. 
Il  n'avait  pas  cet  indomptable  besoin 
de  vérité,  premier  caractère  de  l'his- 
torien ,  et  croyait  trop  que  le  style  , 
que  l'imagination  peuvent  la  sup- 
pléer ;  il  ne  connaissait  pas  les  lan- 
gues orientales,  le  chinois,  le  mant- 
chou  ,  en  aucune  façon.  Ces  pe- 
tits inconvénients  ne  l'empêchèrent 
pas  d'écrire  ,  à  l'aide  des  relations 
tant  imprimées  que  manuscrites  des 
missionnaires  jésuites  à  la  Chine,  et 
principalement  à  l'aide  des //«nrt/<?5r/^ 
la  Cliinei\nV.  Mailla  (encore  inédites 
alors),  une  Histoire  de  la  complète 
de  la  Chine  par  les  Tartares  IVJant- 
chouXj  Lyon,  1754,  2  vol.  in-12. 
Cet  ouvrage,  publié  sous  le  pseudo- 
nyme de  Vojeu  de  Ijiunem,  était  utile 
et  se  recommandait  de  lui-même, 
par  l'actualité  du  sujet,  puisque  la  dy- 
nastie des  'iVi'-tsirig  ou  Mantchoue, 
élevée  en  1()()2  au  trône  du  céleste 
empire,  régnait  alors  et  règne  encore 
aujourd'hui.  Jouve  y  ajouta  une  table 
chronologique  des  événements  anté- 
rieurs à  cette  grande  révolution,  table 
rétablissant  la  concordance  entre  les 
supputations  chinoises  et  celle  de  l'An- 
cien-Testament,  depuis  le  déluge  jus- 
qu'à notre  ère.  Passant  ensuite  de 
l'extrémité  du  continent  asiatique  à 
l'Asie  antérieure  ,  il  réunit  ce  que  les 


JOU 


JOl 


iai 


anciens,  en  ^rcc  et  en  lalin,  ont  écrit 
NUI  Palm>  ( c  cl  ïur  la  grande  reine,  puui 
coropusci  une  Uistiàrr  Jr  Zmoiiie , 
Farii,  tT'iS,  in- 12  O  iiiorreau,  pu- 
kJié  sou«  le  |>!»euiion>me  (l'K.u>u>  «Je 
Ilautcvillr,  fut  accurilli  tir»  fa>orable- 
mrnt.  Cependant,  s'il  est  vrai  quelalec- 
tuie  en  soit  facile  et  altacliante,  il  faut 
(liie  que  lest\te  en  e^t  prolixe  et  lâche; 
que  Jouve  vise  à  l'efTet  et  ne  rachète 
pa^  le  vice  de  ses  prrlrntion»  par  ce 
hiillant,  par  cette  vigueur  qui  doivent 
rendre  la  critique  indul^riile,  que  auel- 
qacfuis  il  se  luisie  entiainer  j  l'ab- 
strait du  romaneNqur,  qu M  v  a  souvent 
clici:  lui  iiiiiitrlli^encc  du  >ens  des 
faits,  et  cela,  pji ce  qu'il  ne  pénètre 
pas  assez  ce  que  criait  que  le  inonde 
loniain,  quelle  opposition  profonde  il 
>  avait  entre  les  deux  mondes  romain 
et  oriental,  et  jusqu'à  quel  point  pitur- 
tanl  le  second  avait  a^i  sur  le  pre- 
mier quM  voulait  achever  de  se  su- 
bordonner ou  de  s'a^Àimiler ,  et  qui 
rea^Usait  de  toutes  ses  forces  contre 
cette  action.  Nous  ne  répéterons  pa^ 
ce  que  nous  avons  dit  plus  haut,  qu'il 
eu:  fallu  de  plus  pouvoir  lire  le>  au- 
teurs orientaux ,  non  pas  qu'aucun  ait 
trace  riiu>toire  de  l'alm>re,  mais  parce 
que  de  leur  lecture  résulte  une  multi- 
tude de  notions  dont  l'ensemble  fait 
comme  respirer  une  atmosphère  syria- 
que et  arabe,  l'atmosphère  du  dwert 
et  du  bazar,  et  que  mèiue  ne  compre- 
nant que  les  rois  de  Chassan  et  d'I- 
lah  du  V  siècle,  on  remontera  par- 
faitement par  la  pensée,  aidée  d'un  peu 
d  iina<;ination  et  de  repères  histori- 
ques, a  la  Palmure  dusiecK*  dcGallien. 
Ou  peut  ajouter  qu'il  est  laclieux  que 
le  No\a^e  de  Voliiey  e;i  S\rie  n'ait  eu 
lieu  qu'après  la  publication  de  l'ou- 
vrage de  Jouve.  Mais,  pour  être  juste 
et  pour  tout  dire,  on  doit  ajouter  que 
Jouve,  avec  son  ouvra;;e,  a  contribué 
à  tixer  rallcnlion  tur  Palmyre,  à  ins- 
pirer le  désir  d'en    visiter  les  ma^ni- 


fique>  debiii.  Kn  tout  cas,  noospiu- 
rbmerons  qur,  comme  idée  de  librai- 
rie, d  lit  un  heui  eux  choix  en  s'empaiant 
de  Zéaobie.  Sm  livre  paraissait  au  mo- 
ment ou  coiniiirnrait,  avec  la  ^ueire 
de  Sept  ans,  la  deuxinuc  lutte  d'une 
souveraine  comparable  à  /x-iiobie  i  Ma- 
rie-Ihrrrse'  contre  un  antagoniste 
au  moins  1  e^al  d'.\urelien  ,  et  il 
ne  manqua  point  d'appeler  sa  /^ 
nobie  riin(>éralrice-rcinc.       J*     <rr. 

J4)l  V  (LotivFnANçois  de) , 
avcKat  au  parlement  de  l'aris,  naquit 
en  celte  ville  le  2  mai  171V.  Il  s'a- 
donna surtout  a  l'étude  des  matières 
canoniques,  et  il  acquit  dan«  ce  ;;enre 
une  SI  haute  réputation  de  uvon  que 
le  cler'^é  de  France  le  choisii  p. nu  un 
de  se*  conseils.  Il  mouint  à  l'aiis  au 
mois  de  février  1771 .  On  a  de  lui  :  I. 
Arrêts  (le  rrgirmrni  rrrueiUis  ri 
mis  m  urtJrc  ,  Vil  li  ,    1702,    in-V''. 

11.  PrinrifM's  ri  UMiges  corner - 
nant  Its  dîmes,  ibid.  ,  17ô2  et 
177G,  in-12.  111.  Confèrent  es  des 
ordo/muntes,  èdits  ,  etc.  ,  sur  les 
matières  eci  iésiustitfues^  ibid. ,  1733, 
in-i  .  \\ .  Suftftlemeiit  uuc  luis  ci- 
v'iles  dans  leur  ordre  naturel  (de  Do- 
iiiat)  ,  ibid.,  17.>G,  in-fot.  de  12(1  p. 
Ce  suppliineiil,  ptibhr  d'aboid  a  part, 
fut  ensiiiie  refondu  dans  les  éditions 
subséquentes  des  l^tis  ci\^iles.  Ln  cer- 
tain nombre  de  diTinitions  el  de  règles 
de  droit  qui  avaient  échappe  à  Domat 
ont  été  réparties  dans  les  divers  titres 
auxquels  elles  se  rapportent,  et  sont 
distinguées  par  un  si;;iie  particulier.  V. 
Primipes  sur  les  droits  et  obliga- 
tions des  gradurs.   Fans,    17Ô9,  m- 

12.  On  doit  aussi  à  Jou)  une  nouvelle 
édition  des  lutis  ect  lèsiastii^ues  de 
d'iléricourt,  Paris,  17.j(»,  in-fol.  S'il 
faut  en  croire  le  Dicliinmaire  de  Fel- 
ler,  il  préparait  une  nouvelle  édition  de 
la  Coutume  de  Meiiux,  ouvrage  qu'il 
a\ait  déjà  mis  au  jour.  Mais  il  y  a  lieu 
d'en  douter.  L  —  M — X. 


LXVIli. 


21 


311 


JOY 


JOVAUT(A.-A.-A.),  aita\/f.- 

sas  à  cause  de  son  dévoiienienl  héroï- 
que à  la  cause  des  Bourbons,  naquit  à 
Lénac,   en  Brela£;ne,  eu  1778.  Son 
extrême  jeunesse  rempéclia  de  prendre 
part  aux  premiers   troubles  de  la  Bre- 
tagne. Il  vivait  à  Rennes  dans  rolsi- 
veté,  et  y  prit  le  parti  des  Chouans.  Le 
gouvernement  le  fit  arrêter  et  conduire 
au  Temple  en  Tan  Vil  (1798);   mais 
il  obtint  sa  liberté  en  rejetant  ses  écarts 
sur  sou  jeune  à^e.  Lors  de  l'insurrec- 
tion de  l'an  VIII,  il  recruta  publique- 
ment pour  Georo;es,  et  devint  son  aide- 
de-camp.  L'amnistie  lui  lournit  l'occa- 
sion de  venir  à  Paris  ;  il  y   resta  sous 
prétexte  d'aifalres  de  commerce  et  con- 
tribua à  l'explosion  du  3  nivôse.  C'était 
lui  qui  suivait  la  machine ,  déguisé  en 
charretier.  Recherché  pour  ce  fait ,  il 
erra  en  différents   endroits  et  parvint 
enfin  à  s'embarquer  pour  Jersey,  d'où 
il  gagna   Londres.  Ses  anciennes  liai- 
sons avec  (jeorges  l'engagèrent  à  l'ac- 
compagner en  France,  dans  les  premiers 
jours  d'août  1804.   Ils  débarquèrent 
ensemble,  et  arrivèrent  dans  la  capi- 
tale, où  la  police  le  fit  arrêter  et  con- 
duire de  nouveau  au  Temple.  Joyaut  ne 
larda  pas  être  mis  en  jugement,  et  fut 
condamné  à  moitié  21  prairial  an  XII 
(10  juin  1804).  Au  moment  de  l'exé- 
cution, il  cria  vwe  le  roi,  à  plusieurs 
reprises,  et  mourut,  comme  son  intré- 
pide chef,   sans  montrer  la  moindre 
altération  dans  ses  traits.        B — P. 

J  OYCE  (le  révérend  Jéuk.miau)  , 
savant  anglais,  s'est  distingué  surtout 
par  son  aptituile  pour  l'enseignement , 
et  a  su  mettre  dans  les  ouvrages  qu'il 
a  publiés  les  connaissances  naturelles 
à  la  portée  de  la  première  jeunesse.  Il 
fit  l'éducation  de  quehpies  jeunes  gens 
de  qualité  ;  et,  ayant  adopté  les  senti- 
ments religieux  des  unitaires,  fut  long- 
temps secrétaire  de  leur  congrégation. 
11  mourut  le  20  juin  1816,  âgé  de 
cinquante-deux  ans.  On  remarque  par- 


JUB 

mi  ses  écrits  :  I.  Education  systê- 
mati(jue,  on  Insfructioii  élémentaire, 
par  les  révérends  W.  Shepherd ,  J. 
Joyce,  et  Lant  Carpenter,  Londres  , 
1815,  2  vol.  ln-8".  II.  Dialogues 
scieniifuiues.  ou  petit  cours  de  philo- 
sophie naturelle  et  expérimentale,  à 
l'usage  de  la  jeunesse  ;  traduit  en  fran- 
çais sur  la  9'''  édition,  par  Eug.  Nio- 
gret,  Paris,  1827,  6  vol.  in-18,  avec 
12  planches.  Z. 

JUBÉ  (h  la  Cour  (Jacques), 
zélé  janséniste,  né  le  27  mai  1674,  à 
Vanvres   près    Paris ,    d'une  famille 
obscure  (son  père  était  blanchisseur), 
fit  ses  premières  études  sous  un  ecclé- 
siastique nommé  Doyen,  retiré  dans  ce 
village  et  qui  se  plaisait  à  former  gra- 
tuitement des  enfants  pauvres  à  la  piété 
et  à  l'étude.  Les  dispositions  remar- 
quables   de   Jubé  engagèrent  ce  bon 
prêtre  à  l'adresser  au  P.  Jouvenci,  qui 
professait  la  rhétorique  au  collège  des 
jésuites.    Telle  était  l'ardeur  du  jeune 
rhétoricien  qu'il  venait  tous  les  jours 
en  classe  de  son  village  à  Paris,  n'ayant 
pour  asile  entre  les  deux  classes  de  la 
journée  que  des  dessous  de  porte  ou  des 
allées,  c'est  là  qu'il  faisait  ses  devoirs. 
Après  avoir  achevé   sa  philosophie,  il 
fut  reçu  maître  ès-arfs,  et, après  avoir  ob- 
tenu une  bourse  à  Saint-Maglolre,  par 
la  protection  de  M'"®  de  Lamoignon, 
supérieure  de  la  visltallon  du  faubourg 
Saint-Jacques,   il   étudia   la  théologie 
en  Sorbonne,    en  même   temps  qu'il 
suivait  au  collège  royal  un  cours  d'hé- 
breu, d'ar.nbe  et  de  syriaque.  Ces  étu- 
des  lui  valurent   Pamitié  de  l'abbé  de 
Ijongncrue,  qui  était  fort  habile  dans 
les  langues  savantes.  Élevé  au  sacer- 
doce, il  fut   d'abord  curé  de   Vaugri- 
gneusc.   Dèslors  il  se  jeta  à    corps 
perdu  dans  les  querelles  qui  divisaient 
l'église  de  France,  prit  parti  dans  l'af- 
faire du  formulaire,  et  composai  ce  su- 
jet un  livre  Imprimé  par  les  soins  de 
ses  amis,  ayant  pour  titre  :   Pour  et 


JUli 


JUB 


u^ 


imtrf  Jansrnius  totu  hant  les  ma- 
tir r es  dr  la  grnre  (pai  M .  J  ,  Pari*, 
1703,  in-l^V  Cet  uu\ia';[e  fut  si\ù  et 
supprima.  Jubé  avait  éle  appelé  deui 
années  auparavant  i  la  rure  ti'Asnièrcs 
par  lerardinai  de  Nuaille^.  Sa  paroicsc 
et  M  maison  i!e\tniriit  l'asile  dt  quel* 
qHM  e(cle>iaslique&  de  l'arii  ri  de«i 
pronucct,  qui  a>  aient  des  rai5on*  de 
a*  ttnir  rarliés.  I.e  diarre  Harit  et 
Ti»art  ,  eiilre  autres  ,  .^• 
quelque  temps  rhez  lui.  .1 
>tt  de  4on  ^jli^c  let  images ,  le»  ti^urrs 
de  taillis,  rt  toute  espère  d'ornement, 
nrnie»ur  l'autel  ;  il  avait  )ra.i:;iné  une 
■ouvellc  manirre  de  céU-brer  la  mesM  , 
récitait  tout  a  liante  voii,  ri  he  dirait  à 
Tautel  lien  de  re  qui  s«  rliaiitait  aa 
rKirar.  Il  avait  changé  toute  la  liturgie 
cipréleadait  ainsi  re\enir  aux  anciem 
■ta||M  dt  régli>e.  Kiitre  autir^  iiino* 
valioni:,  il  rrfusail  de  laisser  rlianter 
VO  salutarîs  hastiti  pend.int  I  éléva- 
tion, et  ctmimi  l'abbé  l)uboi%  drjiuis 
cardinal,  b.i  en  faif^it  reproche.  Jubé 
s'eïcusa  sur  ce  que  cette  prière  u'é- 
tait  point  fondre  dans  son  éolise,  et 
sur  son  respect  pour  le  pape,  «  ne  tou- 
«  lant  pa-s  disait-il,  rappeler  par  ce 
«  chant  le  Kou\enir  de*  enlreprife*  de 
i<  Julefi  II.  M  Otte  réponse  excita  b 
^ailé  de  Dubois,  qui  promit  d'en  réga- 
ler le  nome  du  pape.  Au  re-leJubé, 
malgré  son  fanatisme  janséniste,  ne  la>s- 
»ait  pas  dette  un  homme  d'un  >rai  mé- 
rite et  d'une  piété  sincère.  Il  répanda't 
d'abondantes  .•îJimAnes,  et  uvait  de  la 
manière  la  plu-  austère.  Il  ;;a^na  tel- 
lement ralleclion  de  ses  paroissiens 
qu'ils  se  seraient  tous  fait  éj^or^er  pour 
lui.  Dans  celte  disjKîsition  des  esprit», 
il  lui  en  coûta  peu  pour  rétablir  la  ri- 
î;aeur  de  l'ancienne  discipline  ;  il  met- 
tait en  pénitence  publique  \t!>  prdieufs 
publics  ,  obligeait  de  rester  pendant 
trois  moi>  sous  I*  porche  de  ^cî;t'^e, 
pendant  le  senice  divin,  toute  611e  qui 
avait  manqué  à  l'honneur,  llnecrai- 


conlre   ce  décret,  ce  oui   le  f.l  traiter 
avec   quelque  raison    de  hrtmiUott  par 


pià  pu  lU  faire  sortir  de  son  é|;lise, 
en  rernsant  de  commencer  la  messe, 
la  marquise  de  l*arabe>ie  ,  qui  vi- 
vait publiquement  avec  te  duc  d'Or- 
léaMs  ir^riil.  Cependant  Jubé  était 
aine  et  e>tiiaê  de  re  prince  qui,  un 
jour,  lui  6l  l'honiiriir  de  se  mellie 
à  la  table  d.i  curé  d'Asnierrs.  /àU 
pour  la  tn^sc  de  Tapprl,  on  vit  cet 
errlé^iaitiipie.  il  r.i%encment  drl.^  bulle 
/  ...e  de 
partm 
le»  rares,  et  lecuetliii  dr»  (rnioignagm 
qui  le  f.l  I 
dr  hriÂiilhi 
le  cardinal  de  IVohan.  Son  paiti  le 
chargea  d'nne  commis^ioii  iinpoit.inle 
auprès  du  pailrraent  siégeant  à  Vow 
loi*e  :  en  cf>rmin  il  fit  une  chute  dan- 
f(fre«se  ,  ce  qui  ne  l'empêcha  point 
0*accnmplir  sa  mission  .  il  re-.  inl  eiivuile 
chex  lui  se  «citre  au  lit.  .\pres  son 
retublis'emrnl  il  fut  obli^;r  de  quit- 
ter sa  rure,  en  ITîil.  Mandé  alors 
par  le  lieutenant  de  police,  il  avoua 
que  c'était  à  lui  qae  l'on  envoyait  des 
ballots  d'imprirues  saisis  à  houen,  à 
l'adresse  de  l'ablté  Anthon  qui,  en  j»rrc, 
5!;;nific  un  Jubé.  11  convint  encore 
d'avoir  fait  impriiacr  betneoup  d'écrits, 
mais  jam.ni>  rien  contre  la  religion  dt 
l'état.  Maigre  la  prolrctioa  de  la  piin- 
ce<se  de  (>»nli  et  de  la  duchesse  de 
IWtinsvtirL,  ses  amis  lui  coiiseillrieiA 
de  se  cacher.  De  »a  retraite  au\  envi- 
rons de  Pari.N,  il  écrivit  à  différentes  per- 
sonne* des  lettres  qui,  venues  à  la  co»f 
nai.ssance  de  l'evct^ue  de  Kréjtis,  depun 
card  nal  de  (leurv,  firenl  prendre  au 
conseil  de  conscience  que  présidait  ce 
prélat,  le  parti  d'arrêter  l'abbé  Jubé. 
n«-lor$  celui  ci  s'eloi'j,!ia  tout  i-fait 
de  l'aris.  Hienlôt  l'évèque  de  Mont- 
pellier ,  u«  des  chefs  du  p.irli  jan- 
séniste  ,  l'envova  à  l\ome  ,  à  l'oc- 
casion du  concile  que  lîenoîl  XIH  y 
avait  convoqué,  l.es  intri;;ues  qu'il  y 
menait  avec  Tabbe  d'Ktemare  attiré- 


21 


3a4 


JUB 


rent  l'attention,  et  il  fut  forcé  de  reve- 
nir en  France,  où  son  zèle  ne  fut  pas 
moins  actif.  On  le  chargea  d'accompa- 
*jner  en  Hollande  des  Chartreux  qui 
sortaient  de  leur  cloître  ;  il  fit  ce  voya- 
ge sous  le  nom  de  La  Cour.  L'archevê- 
que Barchkman  ,  établi  récemment  à 
Utrechtparles  appelants,  donna  Jubé 
pour  aumônier  à  la  princesse  Dolgo- 
rouki,  née  Gallitzin,  qui  avait  renoncé 
au  schisme  des  Grecs,  en  Hollande,  et 
qui  retournait  en  Russie.  On  le  cbar- 
oea  de  suivre  lesnéo;ociations  commcn- 
cées  par  Boursier,  docteur  de  Sorbon- 
ne  ,  en  1717,  pour  la  réunion  des 
deux  églises.  Barchkman  conféra  ,  le 
"20  octobre  1728,  à  Jubé ,  les  pou- 
voirs les  plus  amples  ,  tels  que  d'ap- 
prouver les  prêtres  en  Russie,  d'é- 
tablir des  pasteurs,  etc.  Arrivé  à Pillau, 
en  Prusse,  Jubé  apprit,  par  la  Gazette 
de  Leyde,  que  le  cardinal  de  Noail- 
les  avait  enfin  accepté  la  bulîe  Uni- 
genitus.  Sur  cette  nouvelle,  il  crut  de- 
voir renouveler  son  appel  comme  pour 
attirer  les  grâces  du  Seigneur  sur  sa 
mission  :  «  J'appris,  dit-il  dans  sa 
«  relation  manuscrite,  V affreuse  chute 
c<  du  cardinal  de  Noallles  et  le  corn- 
ai lie  de  toutes  ses  faiblesses.  »Ilse 
proposait  à  ce  qu'il  paraît,  dans  ses 
prédications,  de  faire  les  Grecs  appe- 
lants; mais  le  succès  ne  répondit  pas  à 
ses  efforts.  Il  trouva  beaucoup  d'obsta- 
cles à  Saint-Pétersbourg;  en  vain  le 
duc  de  Liria,  ambassadeur  d'Espagne, 
qu'il  parvint  à  mettre  dans  ses  inté- 
rêts ,  le  protégea  de  tout  son  pou- 
voir ,  et  lui  donna  le  titre  de  son 
aumônier.  Jubé  ,  qui  avait  cherché 
à  gagner  les  évêques  russes  et  qui 
d'ailleurs  était  désavoué  par  l'ambassa- 
deur de  France,  devint  suspect  ;  et  la 
princesse  Dolgoroiiki,  à  laquelle  il  était 
attaché,  étant  retournée  à  la  commu- 
nion de  l'église  russe,  son  aumônier  fut 
contraint  de  se  cacher,  puis  de  prendre 
|a  fuite.  Il  quitta   la  Russie  au  com- 


JUB 

mencement  de  1732,  et  ne  put  fran- 
chir les  limites  de  cet  empire  qu'en  se 
faisant  envelopper  dans  un  ballot  de 
marchandises.  De  retour  en  Hollande, 
en  mai  1733,  Il  y  dressa  la  relation  de 
ses  voyages,  revint  à  Paris  vers  1740, 
et  y  vécut  caché.  Etant  tombé  malade, 
il  se  fit  porter  à  l'Hôtel-Dieu,  oii  il  mou- 
rut le  30  déc.  1745.  Dans  son  testa- 
ment, du  14  juillet  1738,  il  renouvela 
encore  une  fois  son  acte  d'appel,  et 
adhéra  aux  miracles  du  diacre  Paris.  Il 
fut  inhumé  dans  l'égHse  de  Saint-Séve- 
rln.  On  trouve  les  détails  de  sa  mission 
en  Russie  à  la  fin  du  3^  volume  de 
V Histoire  et  analyse  du  liçre  de 
l'action  de  Dieu  sur  les  créatures, 
1753;  et  feu  M.  Emery  en  a  inséré 
un  extrait  dans  les  Annales  philoso- 
phâmes, morales  et  littéraires  y  1800, 
tom.  1^',  p.  161.  Son  récit  est  appuyé 
principalement  sur  la  relation  manu- 
scrite de  Jubé.  On  peut  voir  encore 
sur  cet  appelant  les  Nouvelles  ec- 
clésiastiques du  23  oct.  1746  ,  et 
V Examen  critique  de  Barbier ,  pag. 
477.  On  a  de  lui  ,  outre  une  foule 
d'écrits  anonymes  qu'il  serait  presque 
impossible  de  signaler  aujourd'hui  : 
Lettre  d'un  curé  de  Paris  à  M.  Sau- 
rin,  au  sujet  de  son  écrit  intitulé  : 
Etat  de  la  religion  en  France,  en  lui 
adressant  le  mandement  du  cardi- 
nal de  Noailles  et  deux  lettres  d'un 
médecin,  touchant  le  miracle  arrivé 
dans  la  paroisse  Saintc-Margue- 
rite,  1725,  in-12. — On  trouve,  dans 
la  Table  raisonnée  et  alphabétique 
des  Nouvelles  ecclésiastiques ,  une 
courte  Notice  sur  Juiii!;  [Claude-Ro- 
bert]., frère  du  précédent,  lequel  mou- 
rut en  1740,  à  Fumichon,  diocèse  de 
Lisieux,  après  avoir  refusé  les  sacre- 
ments plutôt  que  d'aquiescer  à  la  bulle. 
D— a— R. 
JUBE  (Auguste),  baron  de  la 
Perelle  ,  général  et  écrivain  fran- 
çais, arrière-neveu  du  précédent,  na- 


JUb 

quit  le  12  nui  1765.  Apre»  avoii 
fait  de  brillantes  études  ,  il  entra 
dans  ^ad^lini^t^ation  dr  la  marine  ni 
17H6,el  fut  em^doyéen  ITS'J,  sur  Ifs 
côle.s  de  l'Océan  par  \c\  généraux  I)u- 
noanez,  Soncv  et  NN  iinpfen.  H  em- 
brassa les  ptincipes  de  la  révolution  el 
fui  nommr,  en  171)2.  chef  delà  pre- 
mière lésion  des  ;>ardes  nationales  de 
b  Manrlie ,  obtint  l'année  suivante 
l'iiL^pertinn  des  côtes  de  ce  département 
el  fui  éle%é,  en  1704,  au  ^rade  d'in- 
specteur-f;énéral.  Kn  179G,  il  était 
passé  dans  l'armée  de  terre  a\ef  le 
litre  d'adjudant -f;énéral ,  et  fut  em 
plo^c  datis  1.1  N  endoe  auprès  du  géné- 
ral I loche  dans  les  fonctions  de  chef 
dViat-major.  Au  mois  de  brumaire  an 
^  III,  il  était  command.inl  de  la  ^arde 
du  Directoire;  mais,  tout  dévoué  à  la 
fortune  naissante  de  Uonapaile,  il  lui 
répondit,  des  le  l.'>,dei  dispositions  fa- 
>or.ibles  de  cette  troupe  qui,  dans  les  fa- 
meuses journées  du  IK  et  du  19,  ne  6t 
aucune  démonstration  pour  défendre 
les  directeurs  et  contribua  au  con- 
traire à  l'arrestation  momentanée  de 
(johier  et  de  Moulins.  Bonaparte,  de- 
venu chef  de  l'état,  cliar;;ea  Jubé  de 
l'organisation  de  la  (;arde  consulaire  ; 
mais  là  devait  s'arrêter  sa  carrière  mili- 
taire, liemplacépar  I^nnesdans  lecom- 
raandeincnt  de  ce  corps  de  prétoneiis, 
il  en  f'it  dedoroma;é  par  sa  promo- 
tion au  Iribunat  ;  et,  pendant  les  dif- 
férentes sessions  de  celte  assemblée,  il 
prit  une  part  asseï  active  à  ses  tra- 
vaux. Ijf  3  mai  18()i,  il  adliera  au 
vœu  émis  par  cette  assemblée  pour 
l'élévation  de  Bonaparte  à  l'empire. 
Lors  de  l'élirainallon  d'une  partie  des 
tribuns,  Jubé  ne  manqua  pas  d'ètie 
maintenu  par  le  nouveau  monarque, 
pour  lequel  en  toute  occasion  il  témoi- 
gnait son  enthousiasme  et  son  ad 
miratlon.  Pans  la  séance  du  "2G  .sept. 
1805,  il  s'exprimait  ainsi  :  «  I^  terre 
«  s'est  tue  devant  Alexandre  qui  vou- 


JDB 


SiS 


H  lait  l'asscnir.  Devant  ^iapoleJn  ,  la 
«<  terre,  les  mers  (ju'il  veut  franchir, 
M  l'univers  qu'il  remplit  dc  son  nom 
N  parlent  haulemeiit  de  la  grandeur 
M  de  son  ime,  de  l.i  ;;loire  de  ses  ar- 
««  mes,  des  merveilles  île  son  re'^ne, 
>•  de  la  reconnaissance  des  peuples.  » 
lîn  tel  dévouement  ne  resl.i  pas  sans 
récompense  Déjà,  lors  de  l'in^tilution 
de  la  I.e^ion-d'lloiinciir,  Jub<*  en  avait 
été  nomme  commandant  ;  après  la  dis- 
solution du  tribunal,  il  fut  nommé  pré- 
fet de  la  Doue  en  Piémont,  enfin  créé 
baron  de  l'empire.  Kn  181 2,  il  pavsa  à 
lapiefeclure  du  (ier,  qu'il  conserva 
jusqu'en  181  V.  .\pres  la  restauration  , 
Jubé  qui  avait  écrit  sur  l'histoire  mi 
litaiie,  el  qui  s'était  hàlé  de  publier  en 
l'honneur  du  ciar  .\lexandre  une  bro- 
chure ùe>  plus  Ludalives,  fut  attarhé 
au  drpAt-;;énéral  du  ministère  de  la 
guerre  avec  le  titre  d'historio;;raphe 
IMus  tard  il  fut  rois  à  la  retraite,  mais 
avec  le  titre  de  mirécîial  de  camp  et  la 
croix  de  Saint-Louis.  Il  est  mort  à 
Douribn  (Kure-el-ïx)ir)  le  1"^  juillet 
1821.  Depuis  18IS,  il  coopérait  très- 
activement  à  la  rédaction  du  Jouriml 
grnrral  fir  Frum  e  qui,  de  ministériel 
qu'il  avait  été  d'abord,  était  devenu 
liès-libcral..tJne  anecdote  assez  pi- 
quante se  rapporte  à  la  collaboration  de 
Jubé  à  cette  feuille.  Dans  un  .irliclc 
sur  la  surveillance  des  prisons  publié  au 
mois  de  janvier  1818,  il  faisait  un  ma- 
t;nifique  eloj»e  de  l'.incien  préfet  dc  la 
Doire;  un  journal  ro\aliste  remarqua 
que  cet  ancien  préfet  était  M.  Juhé 
lui-wémc.  On  a  de  lui  :  1.  Histoire 
drs  gurrrrs  des  Gaulois  el  des  Fran 
f«/5  en  Italie  depuis  lielloi'èse  j us- 
ina'à  la  mort  dc  Louis  \II  .  ^^r- 
vant  d'introduction  à  l'ouvrage  du 
général  Scrvan  qui  a  continue  ce  su- 
jet depuis  François  1"  jusqu'au  traite 
d'Amiens  (180.")  ,  ln-8").  Quoique 
l'ouvrage  de  ce  deinlor  soit  loin  d'être 
inéprochablc,    rintroductloo  de  Jubé 


3î6 


JUB 


qui  foriHe  le  premier  volume  laisse  en- 
core plus  à  désirer.  11  ne  paraît  point 
avoir  porté,  dans  Thistoire  des  siècles 
antiques,  le  flambeau  d'une  critique 
impartiale  et  judicieuse.  Ses  récits  sont 
sans  ao;rément  pour  les  lecteurs  ordi- 
naires et  sans  utilité  poi'>  les  savants. 
On  peut  relever  surtout  des  décla- 
mations usées  contre  les  prêtres ,  les 
moines  et  les  papes,  ainsi  que  des  di- 
{^ressions  assez  values  sur  les  finances, 
la  législation  et  les  mœurs  de  tous  les 
pays  ,  sans  en  excepter  la  Chine,  le  Ja- 
pon et  l'Amérique.  II.  Hommage  âr.s 
Françms  à  V empereur  Alexumîre. 
De  la  nécessité  de  transmcUre  à  la 
postérité  le  souvenir  des  hic.njaits  de 
V empereur  Alexandre  et  de  ses  au- 
gustes alliés,  et  des  moyens  de  signa- 
ler la  reconnaissance  des  Français, 
Paris,  1814,  in-8°  d'une  feuille.  Le 
litre  seul  de  celte  brochure  indique 
que  Jubé  professait  alors  en  faveur  de 
la  restauration  des  opinions  dont  l'exal- 
tation ne  tarda  pas  à  se  calmer,  III. 
Lettre  du  citccalirr  de  C  Union  à 
M.  de  Chateaubriand,  1816,  in-8^ 
Cette  lettre,  entièrement  dans  le  sens 
libéral  ,  fut  bientôt  après  suivie  d'une 
seconde.  IV.  Lettre  d'Emile  Fade 
à  jyr^^*'  Duchaume,  à  l'occasion  d'un 
mandement,  1817,in-8°.  Ce  mande- 
ment concernait  la  réimpression  des  œu- 
vres de  Voltaire.  V.  J^ettrc  d'un  Fran- 
çais à  lord  Stanhope,  ou  Réflexions 
sur  réi}f'nement  arrivé  à  lord  IVel- 
lington  dans  la  nuit  du  1 0  au  1 1  fé- 
vrier, Paris,  1818,  in-8".  Il  faut  se 
rappeler  que  cette  nuit-là,  au  moment 
où  le  noble  duc  rentrait  dans  son  botel , 
une  arme  à  feu  avait  été  déchar<:;ée  à 
bout  portant  sur  son  carrosse,  quoique 
aucune  balle  n'eût  atteint  ni  lui,  ni  ses 
gens,  ni  ses  chevaux,  ni  sa  voiture,  ni 
même  les  murailles  d'alentour.  Une  in- 
struction juridique  eut  lieu,  sans  pro- 
duire de  résultat  ;  et  l'on  vit  générale- 
ment dans  ce  gaet-apens^  une  affaire  de 


JUD 

police.  Jubé  dans  sa  brochure  insinue 
que  l'auteur  du  coup  avait  trouvé  un 
asile  dans  l'hôtel  de  Wellinf^ton;  puis 
il  en  prend  occasion  de  réfuter  par 
quelques  déclamations ,  mais  surtout 
par  des  citations  historiques,  la  dia- 
tribe qu'à  cette  occasion  lord  Stanhope 
s'était  permise  en  plein  parlement  con- 
tre la  France.  VI.  Le  Temple  de  la 
Gloire,  ou  les  Fastes  militaires  de 
la  France,  depuis  Louis  XIV  jus- 
quci  nos  jours  ,  Paris  ,  1829-21  , 
2  vol.  in-fol.  Les  deux  volumes  de 
cet  ouvrage  qui  ont  seuls  paru  furent 
publiés  en  quatorze  livraisons,  ornées 
de  trente-sept  gravures;  ils  embras- 
sent les  guerres  de  la  république.  VII. 
Histoire  générale  militaire  de  la 
France,  depuis  le  commencement  du 
règne  de  Louis  XlFjusquà  tannée 
1815.  Ce  dernier  ouvrage,  qui  n'est 
pas  dépourvu  d'intérêt ,  devait  avoir 
trois  vol.  ;  deux  seulement  ont  été  pu- 
bliés du  vivant  de  l'auteur.  Le  troisiè- 
me est  resté  manuscrit.  D — R — H. 
JUDDE  (le  Père),  né  à  Rouen, 
le  21  décembre  1661,  entra  de  bonne 
heure  dans  la  compagnie  de  Jésus,  et 
se  fit  remarquer  par  ses  talents  pour  la 
prédication.  Le  célèbre  Bourdaloue 
avait  pour  lui  une  haute  estime,  et  il 
voulut  même  qu'après  sa  mort  on  re- 
mît tous  ses  manuscrits  au  P.  Judde  ; 
mais  les  soins  mi'ltipliés  dont  celui-ci 
était  alors  chargé  s'opposèrent  à  l'ac- 
complissement de  ce  désir.  En  effet, 
après  avoir  dirigé  le  second  noviciat 
des  jésuites  à  Rouen,  il  fut  envoyé  à 
Paris  comme  supérieur  du  premier  no- 
viciat, fondions  qu'il  remplit  iusqu'en 
1721.  Il  passa  ensuite  à  la  maison  de 
retraite  d«  ce  noviciat,  puis  à  la  maison 
professe  de  l'ordre,  où  il  mourut  en 
1735.  On  a  imprimé  séparément  les 
ouvrages  suivants  du  P.  Judde  :  I. 
Retraite  spirituelle  pour  les  person- 
nes religieuses  ,  Paris  ,  1746,  in-12. 
II.   Réflexions  chrétiennes  sur  les 


Jlii) 


JUl) 


gramUs  vérilcs  tir  la  fin  et  sur  Us 
principaux  niy  stèrrt  lir  la  Passion , 
l'jris,  17Ô7,  iii-lU-  l/abl>«  l.rniA><:ner 
C /'«//.  te  nom,  XXIV,  .Vt)l4il  l'i-iL- 
tmr  «le  ce  li%re,  qui  parut  mmi»  le 
voile  «le  Tanoinme.  111.  l^.iJiorta" 
tiuns  sut  In  firirn  ifmu-r.  tl^^uirs  Je 
Irtut  rrli^ini.i  ,    (  •{«!'. 

(^Iieion,  ilirahtt.  1  .  1  toi. 

in-12:ibi(i  ,  i  .M-li   IV. 

ir ailés  sur  //  n,  a  C usage 

tles  séminariste»  et  des  rummunau- 
tes    reltgiruses ,    IWv^n^oii;    18i5, 
111-18.  Lftbbé  Ir.'ooir-Duptic  à  doD- 
n^  U  (AtUectittn  rump/ete  des  um- 
vres    sfiintuelieâ    du     l*.     JiuJde  , 
l'an»,  t781-h*i,  7   tul.  iii-li;  nou- 
velle éililion,  l)c»aiiçuii.  Ihi:>-n'>.  7 
vol.  in- 112.  Il  en  a  |««iu  m 
tion,  moins  ruinplelr,  l'a 
ô  vol.  iit-l;2.  1 
i*.   Juiiilc  liii  i 
parnii   les  omm 

Jl    l>fc\        M 

proteManl,  el  le  |ireuucr  auleor  qui  ait 
écrit  ftor  la  libelle  de  la  pre^e,  elait  né 
en  1318,  à  DippoU»alil,  daiu  la  Mi*' 
nie.  Son  perc ,  quoique  Irét-pautrr, 
ne  >oulanl  pas  contrarier  sfj^  itirlina- 
lions,  lui  prriait  d'aller  éliidici  a  l>re»- 
de.  De  cette  >ille  il  ht  rendit  a  Vii- 
teniber^ ,  puis  a  Ma^drbour^  «m  il 
arriva  naïade  cl  dans  le  démirment  le 
ploft  absolu.  Pendant  quelque-,  semai- 
nci  il  >  vécut  des  f(*rou(squ  il  rerevait 
de  la  charité  publique;  iiiaii,  ^'ëtant 
fait  promi'lrnciit  connaitre  d'uHC  ma- 
nière avanta^^eute,  il  fut  place  comme 
précepteur.  A>ant  accompagné  ton 
élève  à  VliiemLeiff,  il  v  prit,  en  lôW, 
le  f»rade  de  auilrc  és-ails,  et  revint  à 
Ma^debourp,  o«,  après  aNoir  rrnenlé 
les  humanités  au  ;;vrona  e  ,  il  fut  nom- 
me pasleur  on  prédicateur  de  l'c^lise 
Saint-Llrich.  Ses  talents  lui  méritèrent 
Teslinic  de  Francuwitz  Fiaccius  lHy 
rius],  qui  radjoi^nit  aux  rédacteurs 
4ts  Centurèartttàgdehurgenses.    Ea 


1060,  il  pa^^  pioCcftseur  de  théologie 
à  racadémie  d'iéua.  Entové  U  mèmt 
ainre  an  colloque  de  \'teiroar,  il  a'j 
prononça  furteutent  contre  le»  Syner- 
fflstes,wi  paiti>aiis  de  L  liberté  iiiiroi> 
Uc  de  l'homme  ,  dont  le  professeur 
Slii);ebi.s  etaii  le  chef  O  parti,  que 
i'elecienrd.  ivail  seci élément, 

chcuha  II'  e  >eii;;cr  de  Ju> 

de«  el  la  lruu«a  biriilui.  Judcx  avait, 
atcc  plu.'tieui*  de  «es  rullr^ues,  souscrit 
une  supplique  auk  prince^  de  la  confev 

*IOII   d  AU;:   ln)L    -»    I  OUI    Ir»  (.iiff   tl'a^i- 

•cr  auv  mi  i  fanr 

cesser  les  ut..    ..,,.  .j,,.  -.:  i......  m  >tairnl 

parmi  le*   lulhénriis.  Cette  démarche 
u'.i>aut     pioduit    ••icuii    résultat  ,   il 
adreis^a  celte  pièce  au  coDfteil  eccleua»- 
i  r  ;    et ,  sans  attendre 
il  la  fit  imprimer  avec 
'  '    une    infi  action 

'  r-e  ^\^lI^3llle,  au 
•  libel. 
'  ^  iiia|^iie. 
On  1  en  putnt  avec  une  M\erile presque 
incrovable.  Dépouille  de  •«  chaire  ,  il 
lut  en  outre  force  de  quitter  lena,  pei»- 
daul  l'hiver  le  plus  rude.  11  .«^e  retira 
d'abord  à  Ma;;del>our^  où  il  lui  restât 
des  amis;  liaison  iecontrai^nit  d'en  sor- 
tir sur-le-cltamp,  et,  maigre  la  ii;;uetii 
delà  i^auou,  ti  fui  ohli;;é  de  se  remettre 
en  route  avec  .«a  femne  et  cinq  en- 
iants  dont  le  plut  .q;ë  n'a\ait  pas 
huit  aus,  et  le  cadet  trois  mois.  H  par- 
vint, non  »ans  peine,  à  ^af;ner  \A  ih- 
raar  où  >eà  enneniis  con&eutiient  a  le 
laisA^r  en  rrpoi».  Son  exd  cessa  deux  ans 
•pré»,  et  il  lut  élu  pasteur  à  l\ostock  ; 
maie,  à  peine  arri\é  dans  cette  tilir,  il 
V  tonba  malade  et  mourut  le  1 1  juin 
.  i  it)i,  â^é<ieulement  de  trente-six  ans. 
Outre  quelques //Vrcj  de  lht-ulot;ie,  ou- 
bliés depuis  lonj;  îeiups,  on  a  de  Ju- 
dex:  De  typugraphiiz  incenliune  ri 
de  pnrlormn  legilinm  inspettiune 
Wieiius  hrcK>is  et  uiilis  ,  Copenha^^ue, 
1566,  petit   in-8".  Celte  édiliouori- 


328 


JUD 


(finale  est   très-rare;  mais  l'oiivraf;c  a 
été  recueilli  par  Wolf  dans  les  3Ionn- 
virnta   ty pograph.  ,1,  l'I-ilO.    Le 
titre   annonce    suffisamment   que  Ju- 
dex    n'est  point  un  partisan   de  la  li- 
berté de  la    presse    sans    restriction. 
Quoique,  dit-il,  par  sa  nature  la  presse 
soit  libre,  il  n'est  pas  un  seul  écrivain 
qui  refuse  de  soumettre  ses  ouvrap;es 
à  une  commission  de  censure,  établie 
légalement  ;   car  il  n'en  est  aucun  qui 
veuille  refuser  à  l'église  et  à  l'état  l'o- 
béissance qui  leur  est  due.  Mais  il   se 
plaint  que  les  consistoires   aient   usur- 
pé le  droit  de  nommer,  sans  le  con- 
cours des  magistrats,  des  censeurs  qui, 
par  ignorance  ou  mauvaise  volonté,  re- 
tardent la  publication  de  livres  utiles, 
tandis    qu'ils   en   laissent  paraître  de 
dangereux  pour  la  fol  et  pour  les  mœurs. 
J3'aillcurs  Judex,  zélé  protestant,  ne 
cesse  dans    cet  ouvrage    de  déclamer 
contre  l'église   romaine,  qu'il  appelle 
le  royaume  de  l'antechrist  ;  et,  remar- 
quant que  la  découverte  de  l'imprime- 
rie n'a  précédé  que  de   soixante-sept 
ans    la  prédication  de   Luther ,  il  en 
conclut  que   Dieu,  en  accordant  l'im- 
jtrjiuerie  aux  hommes,  a  voulu  donner 
un  moyen    de  combattre  l'antechrist, 
c'est-à-dire  le  pape  ,  et  d'en  triompher. 
Judex  ne  parle  qu'en  passant  de  la  de- 
couverte  de  l'imprimerie;  et  il  connais- 
sait   si  peu  les  procédés  typographi- 
ques qu'il  est    persuadé  que  les  Aides 
s'étaient  servis   de  caractères  d'argent 
pour  imprimer  les  œuvres  de  CicéroH;, 
et  ulia  philosophwa ,   et    que  c'est  à 
l'emploi  de  ces  t  vpes  qu'est  due  la  beauté 
de  leurs  éditions.    On    peut  consulter 
pour  plus  de  détails  :  Dr.  vita  Miil- 
thœi  Judicis.  par  André  Schopp  (1). 
Crenius  a   réimprimé    cotte    harangue 
funèbre    dans  ses    Aniifi(i(h^r.rsionrs 


'  i)  Ati'lri-  .Scbo|),')  jvoit  tpousc  la  vruTn  Ar. 
•lu'Iex,  et  par  ioti«ei|ucnt  derail  pT»-  bim  in- 
struit de  toiitP5  les  particul^ri'é*  de  &a  vie  si 
courte  el  si  agilre. 


JUÉ 

philologicœ,  VI,  49  ;  et  Bayle  en  a 
donné,  dans  son  Dictionnaire,  une 
analyse  très-intéressante  ;  mais  il  ne 
connaissait  pas  l'ouvrage  de  Judex 
dont  on  vient  de  parler,  et  qui  seul 
peut  garantir  encore  quelque  temps  sou 
nom  de  l'oubli.  W — s. 

JTJÉNIIV  (Pierre),  historien 
de  la  ville  de  Tournus,  né  à  Bourg- 
en-I»resse  le  11  décembre  1668,  em- 
brassa l'état  ecclésiastique  et  fut  pour- 
vu, en  1691,  d'un  canonicat  à  la  col- 
légiale de  Saint-Philibert  de  Tournus. 
Il  profita  de  sa  positlo.n  pour  faire  une 
étude  approfondie  des  chartes  de  celte 
abbaye  que  Pierre  de  Saint-Julien  et 
Chlfflet  n'avaient  examinées  que  su- 
perficiellement. Ses  recherches  le  con- 
duisirent à  jeter  les  bases  d'une  nou- 
velle histoire  de  l'abbaye  et  de  la  ville 
de  Tournus.  Il  en  amassa  les  maté- 
riaux pendant  près  de  quarante  ans,  et 
la  mit  au  jour  sous  le  titre  de  Nou- 
velle Histoire  de  VAhhaye  royale  et 
collégiale  de  Saint  Fhilihcrt  et  de  la 
ville  de  Tournus  ,  enrichie  de  figu- 
res, avec  une  table  chronologique,  des 
remarques  critiques  sur  le  tome  IV  de 
la  Nouvelle  (^aule  chrétienne  ;  les 
preuves  de  l'histoire  ,  le  pouillé  des 
bénéfices  dépendant  de  l'abbaye,  et  un 
essai  sur  l'origine  et  la  généalogie  de 
Chàlons ,  de  Màcon,  et  des  sires  de 
lîeaujeu,  par  un  clianolne  de  la  même 
abbaye,  Dijon,  1730  et  1733,  2  vol. 
in-V\  Le  savant  auteur  a  donné  au 
développement  de  son  sujet  toute  l'é- 
tendue que  ses  laborieuses  recherches 
justifient.  Kn  vain  lui  a-t-on  reproché 
des  détails  trop  minutieux.  11  n'y  a 
plus  rien  de  trop  dans  les  histoires  de 
nos  vieilles  cités.  Depuis  que  la  plu- 
part (les  monuments  quMles  rappellent 
ont  dispai  u  ,  c'est  là  seulement  qu'on 
peut  retrouver  encore  des  traces  de 
leur  existence.  Les  négligences  de  style 
sont  aussi  une  imperfection  qu'il  faut 
se  garder  de  relever  dans  ces   sortes 


JUG 

H'ouTra^o.  L'historirii  de  Tournu:» 
Irjtle,  par  ocrxMon,  de  quelques  pniiilN 
CutieuK  de  I  lii»loire  dr  tunce  qui  se 
r Jll  jrlienl  »  »on  >uiel .  <  )ii  lil  avec  heau- 
rnup  d'iiilnêt  le  détail  de>  ho>lilile> 
qui  rrlaleieut  enlie  la  «ille  et  l'abbave 
peiulaitl  la  ii^ur  (Iliarune  (l'elle>  a\ait 
son  armée  qui  eikcrçail  lour-à-lour  \ei 
pluN  ^raiidN  ra\a;;rs  dans  la  conirée. 
1^  seroiiil  \uiume  roinprend  les  litres, 
les  actes  et  \ts  autorités  qui  servent  de 
pièce»  justificati\es  »u  rorpr.  de  l'Iii^- 
loi'e.  l/abbc  I^beuf  a>aiit  critiqué, 
dans  le  Mercure  de  173i,  quelques 
av«ertion>  de  l'auteur  relati>e^  au  niar- 
l>ie  de  sailli  Nalérien,  l'aLhe  Jur 
mil  V  répondit  par  une  leltie  inse- 
rér  liaiLs  le  volume  du  même  |ouriul, 
qui  parut  au  mois  de  juillet  suivant. 
Succexvivement  diantre  et  doyen  du 
diapitre  ,  il  mourut  le  17  novembre 
I7i7.  L— >i--\ 

jrtiK  dr  Saint-Martin  i J  m - 
QiKS-JtKSFPii),  né  le  16  septembre 
1743  ,  ï  Limo|;es  ,  oii  sou  père 
était  conseiller  au  présidial  de  cette 
rille,  exerça  lui-même  pendant  quel- 
que temps  des  fonctions  de  raa;;is- 
trature.  l'Iuî  tard ,  il  piofessa  l'his- 
toire naturelle  à  l'école  reiiliale  du 
département  de  la  Hautc-N  lenne. 
Mais  un  penchant  irrésistible  l'en- 
trainait  \ei  .  l'arronomie:  il  j  consa- 
crait tous  ses  loisirs  et  6iiil  par  s'y 
livrer  exclusivement.  Il  existait  à  l.i- 
rooees  nne  société  d'agriculture  ,  à  la- 
quelle l'urf^ot  {Voy.  ce  nom,  \LN  II, 
69),  lorsqu'il  était  intendant  du  Li- 
mousin, avait  donné  de  praiiiis  encou- 
ragements. Jut;e  de  Saint-Martin  en 
fut,  des  rorif;iiie,  un  des  membres  les 
plus  actils  cl  les  plus  inllueiit>.  Par 
ses  conseils,  ses  exemples  et  m«  me  ses 
secours,  il  contribua  beaucoup  à  l'a- 
melinration  de  l'art  agricole,  et  sur- 
tout de  la  culture  des  arbres,  dans 
cette  contrée.  I^a  sociclé  centrale  d'a- 
,;riculture  de  Taris,  dont  il  devint  en- 


JUG 


3iq 


(Mille  coït espondant ,  lui  décerna  une 
métlaille  d'or ,  m  pour  avoir  mis  les 
cultivateurs  de  son  voi.Miia;;e  à  portée 
de  se  procurer,  chaque  année,  de» 
milliers  d'arbres  de  diflei  entes  espères, 
qui  n'avaient  jamais  ete  cultivé»  dai'f 
hnn  canton.  ••  l^i-inême  a\ait  établi 
de  belles  pépinières  sur  deux  cents 
hect.ir.  dr*  mauvaises  terres  qnM  pos- 
sédait ;  et  il  attachait  à  ce>  planlalion» 
les  noms  de  ses  enfants  ,  de  ses  amis, 
ou  d'illustres  compatriotes  :  ainsi,  par 
exemple  ,  on  v  vovait  le  bois  r/'.V- 
gufssniu,  le  bois  lurgvt,  le  bois  .V/V- 
Krstre.  il  mourut  le  'i*!  janvier  IH'JV, 
à  Kiino^rs,  avec  le  titre  de  président 
honoraire  de  la  société  d'a^ricultuie, 
des  sciences  et  des  aris  de  cette  ville. 
D'après  ses  intentions,  son  ceiru''»! 
fut  lait  avec  le  premier  sapin  qu'il  a\ail 
planté.  Dans  des  stances  dr  ^a  compo- 
sition, il  rap(>elait  agréablement  (pie 
l'amnal  Nelson  voulut  aussi  que  son 
cercueil  fût  creusé  dans  le  tronçon  d'un 
niél.  Ju^e  de  Saint-Martin  a  publie  : 
I.  Traitr  lif  la  ctiUurr  ilu  thénr  ^ 
Taris,  17W*,  in-8",  avec  6-.  Ot  ou- 
vra;;e,  ^n  jugement  des  agronomes,  est 
encore  le  meilleui  qu'on  ait  publi*"  sur 
cette  matière.  11.  Sotite  tirs  arhrrs 
rt  (ir/>ustrs  qui  rroissrnt  naturtlit'- 
mrnt  int  qui  pru\'rnl  rire  rlrx'fs  rn 
pleine  tfrrc  flans  le  Limousin ,  Limo- 
ges, 171M),  iii-H'  .  IIL  Ohsrn^utinns 
météorologiques  et  eronomiques,  fai- 
tes pendant  Cannée  17*M  dans  le 
defHirtemenl  de  la  llaute-l  ienne  , 
in-H".  IV.  Proposition  tT un  congres 
de  paix  générale  ^  Limoges,  17ÎMJ, 
in- 12.  V.  Théorie  de  la  pensée ,  de 
son  afti\'ité  primitix^e  et  de  sa  con- 
tinuité, Tans,  1806,  in  8",  avec  gra- 
vures. C'est  un  livre  élémentaire  des- 
tiné a  l'instruction  de  la  jeunesse.  NI. 
Description  pittortS(/ur  d  une  métai- 
rie dans  le  département  de  la  Hau- 
te-lienne  ,  Limoges,  1806,  in-12. 
\\ï.    Changements   sun^enus    dans 


33o 


JUL 


les  mœurs  des  habitants  de  Limoges 
depuis  une  cinquantaine  d'années  , 
2*^  édition  ,  anr,!nentée,  îbid,,  1817, 
in-8".  La  l''^  édition,  imprimée  en 
1808,  ne  fut  tirée  qu'à  cent  exemplai- 
res. Cet  ouvrage  renferme  des  détails 
intéressants  sur  Thistoire,  les  monu- 
ments, les  usages,  etc.,  du  Limousin. 
VI II.  JjU  vie  champêtre  ,  en  vers 
libres  ei  simples  comme  elle^  ibid., 
ln-4*'.  Dans  la  séance  du  5  mars 
182i  de  la  société  d'ap,riculture  de 
Limoges,  M.  Ardant  lut  une  Notice 
nécrologir/ue  sur  Juge  de  Saint-Mar- 
lin,  imprimée  in-8°,  et  M.  Alluaud , 
secrétaire  de  la  même  société,  a  pu- 
blié sur  cet  agronome  un  Essai  his- 
torique, Limoges,  1827,  in-8°.  On 
y  trouve  les  stances  intitulées  :  A  mon 
Seau  sapin ,  âge  de  cinquante-cinq 
ans.  P — RT. 

JULIEl^,  %\xiT\ommt  Antecessor 
(en  grec  ÀvTixzv^Mp),  vécut  sous  Tem- 
pereur  Justin-le-Jeune,  vers  la  fin  du 
Vj*^  siècle.  Outre  quelques  épigram- 
mes  que  l'empereur  Julien  {Voy.  ce 
nom,  XXII,  136)  a  fournies  à  l'An- 
thologie grecque,  ce  précieux  recueil  en 
contient  quatre  qui  sont  attribuées  à  ce 
Julien,  et  dont  le  genre  facétieux  con- 
traste avec  son  titre  à' Antecessor^ 
jurisconsulte  ou  professeur  de  droit. 
C'est  ainsi  qu'on  appelait  encore  à 
cette  époque  les  maîtres  qui  initiaient 
la  jeunesse  (quia  antecedehant)  aux 
études  de  la  législation.  11  avait  traduit 
du  grec  en  latin  les  Nooelles  de  Justl- 
nien  et  rédigé  la  Collation  des  loismty 
saïques  et  romaines  .On  n'a  pas  s!»r  lui 
d'autres  notions. — Julifw,  d'Egypte, 
fut  proconsul  de  cette  province  et  Ho- 
rissait  sous  le  rè,;ne  de  Jnslinien,  rers 
le  milien  du  VI*  siècle.  Son  épigramme 
K>:'.v'-ç  twavvr.:  {/innlerta  de  lirunck, 
II,  509;  Anthol.  pnlat..  Vif,  5Î>0) 
mériterait,  am  jugement  de  Vincent 
0ps9|)œns  ,  d'éirt  ^rite  en  lettres 
dW  et  eonscrtée  ^i»  toatf»  les  mé- 


JUL 

moires  [aureis  litteris  est  scribenda 
et  imis  omnium  reponenda  sensi- 
hus).  —  Nous  signalerons  aussi  une 
autre  petite  pièce  du  genre  anacréon- 
tiquc  qui  se  trouve  dans  le  fameux 
manuscrit  d'Heidelberg  ,  parmi  lea 
odes  du  poète  de  Téos.  Elle  eiit 
certainement  passé  pour  être  d'Ana- 
créon,  si  l'Anthologie  de  Planude,  qui 
nous  l'a  aussi  conservée  ,  n'avait  pas 
nommé  son  auteur,  Julien  d'Egypte. 
En  voici  une  très-ancienne  et  naïve 
traduction  : 

«  Un  jour,  un  bouquet  tissant 

«t  À  ma  gentiUc  aniuurée  , 

«<  Pariny  je  trouvai  gissant 

«c  L'aisléfils  de  Cylhéree. 

M  Loi'i  je  le  plonge  en  mon  vin 

«  El  le  bus.  Quelle  adventure  ! 

«  Depuis  mon  cuear  eu  enduro 

«  Des  uiaux  qui  n'ont  pas  de  fin.  >» 

—  Il  ne  faut  pas  confondre  ce  Julien 
d'Egypte  avec  un  autre  Juliew,  éga- 
lement poète  anthologisle  ,  *qul  est 
connu  sous  la  désignation  de  àirô 
brAo'/(y>^  Atp-TTTO'j,  c'est-à-dire  ex-préfet 
d'Egypte,ou,comme  traduit  M.  Jacehs: 
ex  génère  prœjcctorum  Mgypti. 
Celui-ci  était  un  oncle  de  Tempereur 
Julien,  qui,  vers  l'an  360,  à  l'exemple 
de  son  neveu  ,  apostasia  ,  devint  l'im- 
placable ennemi  des  chrétiens,  et  laissa 
dans  son  gouvernement  d'Egypte  le» 
plus  odieux  souvenirs  (Voy.  Théodo- 
ret ,  liv.  III,  ch.  12;  et  Sozomè' 
ne,  liv.  V,  ch,  8).  Ces  deux  Julien 
ont  été  victimes  d'une  telle  conlu- 
siort  qne  ,  parmi  les  soixante- onze 
épigrammes  qui  appartiennent  à  l'un 
ou  à  l'autre  ,  il  serait  impossible 
d'assigner  à  chacun  d'eux  la  part 
«xaete  qui  lui  revient.  Ce  qui  est  cer- 
tain ,  c'est  que  leur  poésie  est  char- 
mante, qu'elle  rivalise  avec  celle  des 
poètes  primitifs,  et  qu'en  osant  refaire 
des  é[)igrammes,  même  citées  comme 
de»  chefs-d'œuvre,  ils  ont  quelquefoi.s, 
d»n8  cette  lutte,  partage  le  prix  de  la 
gr^e,  de  l'énergie  et  de  l'enjouement. 

D— H— K. 


JLL 


JDL 


ni 


4\  LLÎV:M  Jth  i)rtimr[y\Kiu 
ANToiWf.l,  fonvcnlionml,  nr  au  iV-i./ 
Hf  H«inaii«  ,  dan*  Ir  l>au[>hiii«f,  m 
17 VI,  A'ant  fariiillc  oUrurr  et  «ans 
forfuiie,  se  rern\\\  à  Faii«  Aè^  l'.i^p  He 
4i\  huit  an»,  rt  y  rniitinua  dr->  Hudn 
à  peine  rninmrntées  i\»n%  5a  patrie. 
Ne  sarhant  pa»  niénie  le^  premiers 
ëlétiients  du  latin,  il  «uirit  un  rniirii  de 
rhétorique  umt  le  cH^lMe  i^ebmn,  et 
6t  àc  tel»  propre»,  au  à  la  fin  de  l'.in- 
née  il  obtint  un  prix  d'amplifiralinM 
Il  ne  fil  ensuite  connaîlrr  '  '  îta 
per^innna^e^  en  fre«l!t,  i  ^r^ 

rëUbre  abl»ë  de  Mablj.  (]n.  le  pré- 
*enta  .^  l.i  d-rhe^^e  de  Dantille,  fem- 
mt    '  .    cliei  laquelle  5e   rëu- 

nivN.i  jiies  ^fn^  de  lettres   et 

piiiiiK^tphr.i,  ou  sapr*  de  IVpoque, 
as>ei  aten^lcs  pour  dé^irrr  et  préparer 
Mne  révointinn  qui  de^ait  bienlAt  les 
perdre.  A  la  reenmmaiidafioi:  de  Ma- 
blf ,  M™*  de  Dantilie  rhar^ea  Jullien 
de  rëdiiration  du  jrune  prince  de 
l.ëon,  son  peiit-fiU;  et  il  eut  A^n>  le 
inéino  teinp5  encore  d'autres  éh-ve^  i 
diriger  ;  ce  qui  lui  fil  ime  av<rï  bcl'e 
exl^lenre.  Mais  tout  cela  ne  pouvait 
lui  >nff!rr;  \ntj!.Tn1  sVIever  encore  ,  il 
se  lu  icemeni,  nn 


d,., 


«I:  la   réro- 


Inlion.  N)n  enlliou^ia^me  éclata  sur- 
tout daui  la  cf>i  respondance  qu'il  eut 
alors  t\ec  ses  amis  dn  Danpliiné  ,  oè 
Ton  sait  que  l'exallttion  r«^olution- 
naire  fui  esce-wire.  Ses  lettres  répan- 
dues dans  le  départ cineiil  de  la  I)rAme 
lui  firent  une  irpnlation,  et  il  fut 
nommé  en  1791  dépiîlc  «uppiéanf  i 
rassemblée  lr-islat'\e  on  il  ne  *ié;;ea 
pas,  puis  député  i  la  CoiTrntiofl  n.i- 
linuale  oà  il  siét;ea  t\  rmmot  de  la 
monla;;ne.   Sa    prr  Mon    fut 

contre  le  p;énéral    ^:  .ti,  qu'il 

prétendit  que  tous  les  soidnis  de  son 
armée  regardaient  comme  im  ti-ailre. 
Dans  la  séanre  du  26  décembre  17î>5, 
qui  fut  très-wâfjense,   il  prononça  ati 


rtilieu  Afs  cris  et  du  plus  ^rand  tu- 
■nlte,  nn  •!  cément  pour  ap- 

puTcr   la   ;  dp    IVuhein,  qui 

itâit  .1  \Vlfùtju;;é 

sans  «»•  '         te  li's  hau- 

*  trurs  que  l'on  désigne  sous   le  nom 

•  de  Mn'ttugne,  dit-il  ;  c*e<t  à  cet 
«  TbernH»p\les  que  les  Spartiates  naB- 
••  ront  mourir  pour  sau\er  la  lî- 
«  bené..."  Il  attaqua  ensuite  Defer- 
inon  qui  présidait  ;  Paccuo  d'une 
piirtifilH/'  rfK'offiwtf  pour  la  tausr 
(1rs  h  "  ir  eu  des  entre- 
tien^ .  Fuis  il  ajouta  : 
m  Je  tlcciaiiJc  que  la  sonnette  Im  voit 
••  arrachée  ,  et  qu'il  aille  se  carhfr 
«♦  dans  l'un  des  cotn>  le*  plus  ( 

••  de  la  -^alle  ..  >•  Defermon  i 
dit  a\er  beatiroup  de  calme  ,  et  l'as- 
semblée pa-sa  i  l'ordre  du  jour.  Jul- 
lien vola  ensuite  pour  la  mort  de 
Louis  XVI,  *ans  appel  et  sans  sursis  i 
l'exécution,  déclarant  qu'il  «ivi/V  /ou- 
jofir.i  haf  frs  rois,  et  que  son  huma- 
riifr  t'ifa/rrr.  nxmt  r'routr  la  voix 
<'     '  lie  [sir*,   lui  ur- 

•r  la  mort   Dans 
'  i!;i  2    juin    1703,  lor«que 

I  attaquait  avec  tant  de  cou- 

ra;;c  et  d'énerjp»  le^  auteurs  de  la  ré- 
volution d:i  31  mai  qiii  \enait  de  se 
consommer,  Jullien  I  accu>a  de  ca- 
loniiiier  les  habitants  de  Pari<.  T.e  len- 
demain de  la  ré\olution  du  1)  thermi- 
dor qui  avait  renversé  Robespierre, 
le  député  de  la  DrAme,  suppliant,  do- 
!  ^rp  pour  son  fils  à  peine  â;;c 

:is,  dit-il,  et  que  Tallîen  et 
i'.A-...::  li.'nnnçaienl  siraMitanéincnl 
cofTimc  l'aj^i-nl  et  le  protégé  du  t\ran 
qui  l'avait  nii>  à  la  tête  de  Pin^rurtion 
^•tibiiiiue.  Jullien  déclara  que  ni  lui  ni 
son  fifs  n'avaient  demandé  cette  place; 
et  la  G)nvention  passa  à  l'ordre  du 
jour.  Après  la  ses>ion  conventionnelle, 
Jullien  ne  remplit  plus  de  fonctions 
pni>liques,  et  il  continua  d'ha!)iler  la 
capitale  sans  faire  parler  de  lui,  même 


332 


JUL 


quand  il  publia,  en  180*2  et  1803, 
dans  le  Mercure,  quelques  morceaux 
de  poésie  ,  entre  autres,  la  Nouvelle 
Rufh,  qu'il  réunit,  en  1807,  dans  un 
recueil  de  ses  œuvres  sous  le  titre  à'O- 
fjusrules  en  verà\  vol.  in-8",  de  107 
|)aj;es.  En  1814  il  se  retira  dans  ses 
propriétés  du  Dauphiné ,  oii  la  loi 
d'exil  contre  les  votans  ne  l'atteignit 
point,  parce  que  n'ayant  pas  rempli  de 
fonctions  publiques  dans  les  Cent- 
Jours  de  »  8 1  o ,  il  n'avait  pas  signé  l'acte 
ad.lilioiinci,  11  mourut,  par  accident, le 
27  septembre  1821,  laissant  deux  fils, 
dont  l'un  est  M.  Jullien  de  Paris,  dési- 
gné ci-dessus.  —  Jullien  ou  Julien 
(le  loî'.louse  (Jean)  ,  autre  conven- 
tionnel qui,  dans  le  procès  de  Louis 
XVI  ,  vota  également  pour  la  mort 
sans  a{)[!e]  et  sans  sursis  à  l'exécution, 
cl  ait  né  à  Nîmes  dans  la  religion 
protestante  dont  il  devint  ministre. 
Comme  son  homonyme  ,  il  siôgea  sur 
la  montagne;  et,  dans  différentes  mis- 
sions ainsi  que  dans  tous  ses  discours  , 
il  manifesta  des  opinions  très-exaltées  ; 
ce  qui  n'empêcha  pas  qu'il  ne  fut  dénon- 
cé par  Pvobespicrre  cl  mis  hors  la  loi. 
Persécuté  encore  après  la  révolution 
du  18  brumaire  à  laquelle  il  s'était  op- 
posé, il  se  réfugia  à  Turin  d'où  il  ne 
revint  qu'à  la  restauration.  11  s'établit 
alors  à  Kmbrun,  où  l'on  présume  qu'il 
est  mort, — Jullien  de  Paris  fut,  dans 
les  premières  années  de  la  révolution , 
l'un  des  plus  ardents  Jacobins  de  la 
capitale.  11  était  ami  de  Tjouchotle  et 
de  Marat  ;  et,  après  la  mort  de  ce  der- 
nier, il  annonça  qu'il  allait  élever  un 
autel  à  son  cœur.  Il  se  plaignit  que 
l'on  ne  jugeât  pas  assez  promptement 
Brissot  ,  %  ergniaud  et  la  reine  Marie- 
Antoinette.  11  est  mort  au  commence- 
ment de  ce  siècle.  M — d  j. 

JULLIEX  (Andhé)  ,  né  en 
176(),  à  Chàlons-sur-Saone  ,  s'est  fait 
remarquer  par  ses  découvertes  et  par 
ses  écrits,  dans  la  carrière  industrielle. 


JUL 

Négociant  en  vins,  il  ne  se  borna  pas  à 
l'exploitation  de  son  commerce.  L'œ- 
nologie, cette  branche  importante  de 
l'économie  rurale  et  domestique,  fut 
l'objet  spécial  de  ses  recherches  et  de 
ses  travaux.  Ses  premiers  essais  en  ce 
genre  obtinrent  le  suffrage  de  Chaptal, 
ancien  ministre  de  l'intérieur  ;  et  plus 
tard  la  société  d'encouragement  l'ad- 
mit au  nombre  de  ses  membres.  Atteint 
du  choléra,  il  mourut  à  Paris  en  1832. 
Outre  divers  procédés  aussi  ingénieux 
qu'utiles  ,   tels  que  des  cannelles  aéri- 
fères,  pour  transvaser  les  vins  en  bou- 
teilles, et  une  poudre  pour  leur  clarifi- 
cation ,    inventions   qui    méritèrent  à 
Jullien  des  médailles  à  plusieurs  expo- 
sitions des  produits  de  l'industrie,  on 
lui  doit  les  ouvrages  suivants  :  L  Ap- 
pareils   perfectionnés ,    propres    à 
transvaser  les  vins  et  autres  liqueurs 
avec  ou  sans  communication  avec 
Vair  extérieur,  Paris,   1809,  in-12, 
et  une  planche.   Cet  article  est  extrait 
de  la  Bihliothèque  physico-économi- 
que,  où  il  fut  d'abord  inséré  [Voy. 
Sonnini,  XLÏII,   97).  II.   Manuel 
du  sommelier,  ou  Inslruciion  prati- 
que sur  la  manière  de  soigner  les 
vins,  Paris,  1813,  in-12,  avec  une 
planche.   Cette    première   édition  est 
dédiée  à  Chaptal;  la  2*^  parut  en  1817. 
L'auteur  y  ajouta,  en  1820,  un  sup- 
plément qu'il  refondit  dans  la  3'    édi- 
tion, Paris,  1822,  ln-12.  avec  3  pi.; 
la  4*^,  publiée  en  1822,  est  augmentée 
d'un  chapitre  sur  la  litharge  ;  enfin  sa 
veuve  en  a  donné  une  5*'  en  1836.  Le 
succès  de  ce  manuel  en  prouve  suffi- 
samment   l'utilité,  m.    Topographie 
de  tous  les  vignobles  connus  ;  con- 
tenant   leur  position  géographique, 
Vindication  du  genre  et  dr  la  quali- 
té des  produits  de  chaque  cru,  les 
lieux  où  se  font  les  chargements  et 
le  principal  commerce  de  vin ,  le 
nom  et  la  capacité  des  tonneaux  et 
des  mesures  en  usage,  les  moyens 


JUM 

tir  transport  ordinairement  nu- 
l»loyès^  elc;  suùir  tfunr  classifua- 
tiim  grntraU  des  vins^  Paris,  iSI6, 
XH'l'l,  in-8";  .rc.lilion,  ibid.,  1H32. 
C'est  un  ouvrage  «|ui  a  eM^«*  bcaïunup 
i\f  mhcrclàcs ,  cl  qui  rciiicniie  des 
di-U;!s  exarts  cl  curieux.  Ainsi,  par 
cxrmple,  d'après  le*  calcuU  de  l'au- 
leur,  1 ,7r>V,ri7:i  hectares  du  sol  de  la 
France  sont  culli>«*<i  en  >i^ne»  el  don- 
iu'iil  annuelleiuriit  un  produit  inn>en  de 
:U,(>t:2,V.')2  lieft..lilir^.  Otte '-.taliv 
ti(|ue  de  loiLs  le»  > ignoble»  de>>  dn erses 
contrées  de  la  terre  (ut  accueillie  fa- 
Miiablomeiit ,  et  valut  à  Jullien  une 
médaille  d'or  que  lui  décerna  la  so- 
ciété d'encoura;;eineiit.       P — RT. 

41  MKL  Jr.AN-CiiARiKs\  né  à 
l'an-i  \e\<>  le  milieu  du  XN  lil*^  Niècle, 
rtudia  d'abord  le  droit  et  prit  le  ^rade 
de  licencie.  Avant  embrassé  l'état  ec- 
clésiastique, il  s'adonna  à  la  prédica- 
tion, fut  pourNU  d'un  canonicat  au 
chapitre  de  Saint-Marcel  à  Paris,  de- 
vint ensuite  chanoine  du  ^lans,  puis 
curé  de  Houilles  près  VeiNailles.  l'Ius 
l.ird  il  professa  les  humanités  dans  un 
rollèt;f,  el  mourut  en  1S2V  dans  une 
petite  cure  qu'il  desier>ail  aux  euvi- 
loni  d'\\allon.  On  a  de  lui  :  I.  Klos>e 
lie  Su^er,  Paris,  1779,  in-8".  C'e>l 
un  di>cours  nui  concoorut  pour  le  prix 
piuposé  par  l'Académie  franca.^e.  II. 
/ .  /(  >^r  (If  .)  /<  I  rie  - 1  herès^  ,  i m  fier  a  - 
trùe,  reine  de  Hongrie,  etc.,  ibid., 
1781,  in-H".  Lonf;-temps  après,  l'au- 
teur reproduisit  cet  cloj;e  sous  le  litre 
de  }f(irie-Thérèse,inifM-rtiirire^  etc.: 
.1  riions  de  counige  et  (tt  tes  de  Itien- 
fuisame  de  celte  auguste  suiu^eraine, 
Paris,  181(>,  in-18.  III.  Petit  ca- 
rême prêché  en  1782,  iii-S".  IV. 
Eloge  de  (Jiarlemagne,  1810,  in-8". 
V.  Introduction  à  C éloquence  ,  ou 
Eléments  de  rhétorique,  Paris,  1 8 1 2, 
in- 12.  VI.  Galerie  des  enfants,  oa 
les  Motifs  d'une  noble  énnilalion  , 
Paris,  1813,   in-12;  ibid.,   \'  édit.. 


JL.M 


Z^Z 


18'iô,  m  12,  avec  G-.  VIL  Caterie 
des  jeunes  f ter  sonnes ,  ou  les  (Juu^ 
litès  du  curur  et  de  r esprit.  Paris, 
1813,  in  12;  ibid  .  .V  édit.,  1826, 
in-12,  a\ec  G;;.  N  III.  lien^ey-,  ou 
Le  meilleur  des  hommes  de  son  siè' 
de,  drame  en  trois  actes  et  en  prose. 
Pans,  I8IV,  m  IS.  1\  Ornements 
du  cuur  humain,  ou  /  arietes  iiiw- 
rales  et  historiques,  ibid.,  I8|.'i, 
in-18,  avec  fi^.  Junicl  a  étf  l»  .1  leur 
de  quatre  lecueilsde  l'a/iie.\[i*  l..>ope, 
de  l,a  Koiitaine,  de  Kénelon  cl  de  tlu- 
rian\  ptrcedé^  de  notices  sur  les  au- 
teurs, Pari>,  1813,  V  toi.  in-18,  plu- 
sieurs fois  réimpnmi's.         P — ht. 

«M'MELIX  (Jlan-IUptijtf.). 
f avant  français,  naquit  le  12  septem- 
bre 17V.'>,  et  %i?it  de  bonne  heure  i 
Paris  étudier  l'analomie  et  la  clinique, 
la  pathologie  cl  la  matière  nu-ilicale. 
IVeçu  docteur  à  l'ancienne  Faculté,  il 
se  répandit  dans  un  mondt*  assez  bril- 
lant sans  toutefois  s'v  piocurer  une 
bien  lucrati\e  clientèle.  Aussi  n'eut- il 
aucune  peine  à  quitter  Paiis  pour  faire 
un  tour  en  Orient  à  la  suite  du  romlr 
de  Choiscul-Gouffier ,  ambassadeur  à 
la  Porte,  et  re^atda-t-il  comme  une 
partie  de  plaisir  cette  excuiMon  à 
Conslaniinople  et  en  (ircce.  Il  est 
inutile  de  dire  que  ce  n'est  pas  la  di- 
plomatie qui  l'attirait.  L'ambassade 
qui  a  produit  le  /  Oyage  pitiorcique 
en  (jrèce  est  plus  celèbie  dans  les 
lastes  de  la  littérature  que  dans  ceux  des 
chancelleries;  ce  qi.e  nous  ne  disons 
pas,  certes,  afin  de  déprécier  l'illustre 
ciuiJle,  pas  plus  que  nous  ii.»  croirions 
diminuer  le  lenom  de  Kusbeci],  en 
rappelant  que  si  sa  mission  près  de 
S^iman-le-Grand  n'eut  p.is  ^raiid 
succès  ,  du  moins  elle  valut  i  l'I'.urope 
el  le  superbe  maniiscril  de  Dioscoride, 
accompa^^né  de  deux  ou  trois  cents 
autres,  et  nombre  de  belles  plantes 
parmi  lesquelles  le  lilas  et  la  tulipe. 
Kn  se  trouvant  si  près  delà  terre  clas- 


3:^.4 


JUM 


sique  de  la  grande  poésie  et  des  beaux- 
arts,  et  à  la  suite  d'un  explorateur  dé- 
terminé d'antiquités,  le  docteur  delà 
faculté  de  Paris  devint  antiquaire  à 
son  tour,  et  se  mit  à  visiter  curieuse- 
ment les  beaux  débris  seniés  sur  le  sol 
de  la  péninsule  ottomane.  Il  traversa 
la  Thessalie,  rHeliade  et  le  Pélopo- 
nèse,  et  dans  un  coin  de  laLaconie, 
à  l'extrême  sud,  il  eut  le  bonheur  de 
retrouver  les  ruines  ,  de  fixer  l'empla- 
cement précis  de  G^thium,  ce  port  de 
Sparte  dévasté  par  Ëpaminondas,  mais 
qui  redevint  florissant  quand  Thèbes 
fut  retombée  dans  son  obscurité.  Vers 
la  même  époque,  le  hasard  jeta  sur  sa 
route  Spallanzani  que  des  vues  toutes 
différentes  guidaient  en  Grèce,  et  qui 
allait  achever  ce  long  voyage  qui  fait 
époque  dans  l'histoire  de  la  zoologie 
et  de  l'anatomie  comparée.  Jumclin 
qui  venait  de  bien  mériter  de  l'érudi- 
tion voulut  de  même  bien  mériter  de 
la  science.  Il  aida  Spallanzani  dans 
quelques-unes ,  peut-être  dans  beau- 
coup de  ces  belles  expériences  microsco- 
piques qui  sont  un  de  ses  litres  les  plus 
réels  à  la  gloire.  lîicn  que  la  collabo- 
ration de  J  umelin  ne  puisse  le  mettre  sur 
la  ligne  de  l'immortel  naturaliste,  mil 
doute  que  l'adresse  manuelle  et  l'apti- 
tude de  l'un  n'aient  été  une  bonne 
fortune  pour  le  génie  de  l'autre  ,  et,  du 
leste,  Spallanzani  ne  le  méconnut  pas. 
.1  umelin  était  de  retour  en  France 
vers  les  commencements  de  la  révolu- 
lion.  11  passa  silencieu-sement  ce  temps 
d'orage  entre  les  travaux  de  sa  pro- 
fession et  l'étude  des  sciences  physi- 
ques pour  lesquelles  sa  prédilection 
élait  devenue  plus  grande  peut-être  que 
dans  ks  premières  années  de  sa  vie. 
il  expérimentait  et  décou\rait  ;  il  ex- 
posait et  décrivait.  Kt  c'est  vraiment 
à  ce  moment  de  sa  vie  que  se  rappor- 
tent la  plupart  des  ingénieuses  inven- 
tions qui  doivent  sauver  son  nom  de 
l'oubli.    Nous  mentionnerons,  entre 


JUM 

autres  modèles  exécutés  de  sa  main  ou 
sur  ses  indications ,  une  machine 
pneumatique  d'une  construction  parti- 
culière, et  une  pompe  à  feu  dans  la- 
quelle le  mouvement  du  pi.ston  n'é- 
prouvait point  d'interruption.  Il  ima- 
gina aussi  un  moyen  de  prendre  l'eau 
au  bout  d'un  siphon  recourbé ,  sans 
interrompre  le  courant  établi  dans  le 
siphon.  On  lui  doit  de  même  diverses 
recherches  intéressantes  en  médecine 
ou  en  physiologie.  Il  essaya  de  déter- 
miner expérimentalement  les  effets 
que  produit  l'électricité  sur  l'économie 
animale,  et  les  résultats  de  l'usage 
des  styptiques  sur  l'irritabilité  humai- 
ne, et  l'action  des  liqueurs  enivrantes 
sur  la  même  faculté.  Peu  de  temps 
après  la  réorganisation  des  acadé- 
mies, il  lut  à  la  troisième  classe  de 
l'Institut  un  mctnoire  contenant  la 
relation  de  sa  découverte  des  ruines 
de  Gythium.  Nommé  ensuite  profes- 
seur de  physique  et  de  cliimic  au  Ly- 
cée impérial ,  il  fit  preuve  dans  cette 
chaire  d'une  grande  lucidité  d'expres- 
sion, d'un  grand  talent  de  déduction  ; 
et  probablement  il  eût  fini  par  être  de 
l'Institut,  s'il  n'eût  payé  le  tribut  à  la 
mort  un  peu  plus  tôt  qu'on  ne  s'y  at- 
tendait. Cet  événement  eut  lieu  le  25 
septembre  1807,  à  Visigneux  près  de 
Boissons.  Il  venait  de  publier  le  pre- 
mier tome  d'un  ouvrage  alors  néces- 
saire pour  les  collèges  et  hors  des  col- 
lèges ;  c'était  son  Jrciilc  (Hémentaire 
de  physique,  de  chitine  et  des  scien- 
ces physico-mutiièmntiijues,  Paris, 
IHOO,  in-8'^  :  il  ne  put  en  donner  le 
second,  que  pourtant  ses  amis  firent 
quelque  temps  espérer  au  public,  di- 
sant (ju'il  était  piét  pour  l'impression  : 
probablement  il  n'en  était  point  ainsi; 
far  comment  croire  qu'on  l'aurait 
laisse  en  portefeuille?  Ce  traité  se  re- 
commandait à  l'époque  de  son  appa- 
rition par  l'élcgance  et  la  clarté  par- 
faites du  style  et  aussi  par  la  conci- 


JLM 


3SS 


tin«:  s'il  Ml  paru  dt  ciaq  à  tii  jim 
piM  lA(,  il  eût  i^é  le  preaiier,  il  eftt  élé 
U  t^«l.  (^e  n'riail  t^urre ,  on  *tn 
i  .   quo  la  rétUclion 

«!  .   pour  »a  cIma«. 

L^uUut  >  p^**e  eu  re\ur  tapidcment 
Inote»  Tn  sommité»  de  b  pintique  et 
i\e  la  rhmie,  telles  qu'on  1  m  Apprenait 
de  son  temps  dans  les  rollè^e*  :  depuis 
CHi  r^t  devenu  un  peu  plu*  e&igeint, 
et  aujnurd'liui  que  les  sricnees  ont 
pris  lin  immente  développement  ,  qoe 
sur  les  bancs  rarme  on  les  ruitive 
comme  •périiiité  ;  que  ,  comme  |>our 
dupenser  d'un  maître,  les  livres  soHt 
iongt  et  pleins  de  délai!»  ,  on  trouve- 
rait le  manuel  de  Jumrlm  trop  aai<> 
gre,  trop  sec  :  on  >r  plaindrait  de  la 
sobriété  a\rr  laquelle  il  donne  des 
ciemples  ,  on  du  ait  que  ses  explica- 
tions sont  supei  liciclles  et  vai;ues  ;  on 
regretterait  qu'il  ail  semble  reserver 
toutes  les  inathématM]uespour  un  deuxiè- 
me volume  qui  devait  ne  point  paraî- 
tre. Nous  ne  parlons  pas  d'imper- 
fections involontaires  tenant  à  i'etat 
d'imperfection  de  la  science,  roni.nc  la 
classiBcatiou  des  sels  de  potasse,  de 
soude,  de  barUe,  etc.,  sous  la  nibri- 
qiie  des  composés  teinai.e^,  et  d'au- 
tres faits  de  ce  ;;enre.  (les  erreurs  se 
trouvent  au&si  dans  Fourcrov,  et  tout 
traiié  de  chimie,  à  celte  époque,  les 
eût  ir|»etees.  Outre  le  volume  qi;e 
nofjs  venons  d'apprécier  ,  on  doit  en- 
core a  Jumelin  de*  iru\>res  dioersfs 
ronrrrnani  1rs  srirnrrs  et  U3  arts  y 
179'.).  in-8'.  F— OT. 

JtAIlLIlAC  (N  Chapiilf, 
baron  de),  né  le  3  septembre  1753, 
issu  d'une  famille  très-anci'nne  et  al- 
liée aux  plus  illustres  maisons  Je 
France,  embrassa,  dès  son  plus  jeune 
iof. ,  la  carrière  militaire  ou  il  et  ses 
premières  armes  dans  le  ré^^iment 
d'Artois,  cavalerie.  Il  fut  ensuite  cliar- 
gc  de  missions  diplomatiques  auprè 
de  plusieurs  cours  du  Nord,  et  séjourna 


MMlqif  temps  à  celle  du  (trand  Vr^ 
àkk.  De  letour  en  France,  il  fut 
promi  au  grade  de  rolonri  et  part  il  « 
avec  l«  litrt  di*  rnn^iMJler  d'ambassa- 
de, pour  l.isboiiiir  on  il  ne  ro»la  q'ie 
deux  ans,  revini  ik  l'ans  et  obtint  la 
survivance  du  nonvernemnit  di*  la 
Bastille,  dont  était  titulaire  l'infortuné 
roarqnis  de  l^nnav  ,  ntn  bean-péte. 
Peut-être  eiit-il  péri  avec  lui  le  li 
juillet  17H<J,  si  celui-ci,  par  un  acte 
de  prérovance  à  la  fois  triste  et  heu- 
reuse, n  avait  pourvu  d'avance  au  ^a- 
lut  d«  son  cendre  en  l'éloignant  dt 
lui.  I.e  baron  de  Jumilhae  n'éni^ra 
point  et  vécut  dans  l'obscurilr  j(uu|n'eii 
IHli:  il   rr  'elxKtis  Wlll 

la  croix  de  .'^  ^  avec  le  brevet 

de  m»ré<-}»al  d*-f.ïmj».  1^  collo{;e  élec- 
toral du  d*'(iirtein«nt  de  Seine  et- 
C)ise,ii  »  en  septembre  181. ■», 

l'élut   r  ••  la  chambre   des  dé- 

putée. H  T  appnva,  en  avril  iKlft,  la 
propmition  de  M.  de  I*aclie>e  .Murel. 
tendant  à  replacer  entre  les  mains  du 
rleroé  catholique  le^  registre»  de  l'étal 
civil.  Tout  en  insistant  sur  cette  né- 
ce**ilé  sous  le  rapport  des  principes 
r.4tgietjx,  il  ajoutait  :  «  IVul-élre  n'e^l- 

■  il  pa>  une  seule  commune  en  Fran- 
«    ce,   ou,    par    la  ne^lijjrnee  avec  la- 

■  natlle  «^onl  tenus  ■  d  • 
«  I  état  civil ,  on  ne  lir^ 
«  fautes  grossières  qui  rninpromettent 
«•  les  intérêts  privés;  d.ins  celle  que 
••  j'habite,  qui  n'est  fom|>osée  que  de 
«  cinquante  feux,  j'ai  élé  obli;;é  de 
«  faire  rectifier  un  acte  de  décès  qui 
«(   enterrait  la  femmo  au  lien  du  mari, 

■  et  deux  acte*  de  naissarKe  on  l'on 
«  désii^nait  une  jeune  personne  cora- 
«  a>e  appartenant  au  sexe  masculin  , 
«  tandis  que  son  frère  était  censé  du 
M  senre  ft^niinin.»  Après  la  dissolu- 
tion de  1.1  r;  nnibie  de  1815,  le  ba- 
ron de  Jumiliiâc  pr«î>ida  encore  le 
collège  électoral  de  Seine-ct-Oise  qui 
le  réélut  député.  Dans  les  quatre  ses- 


336 


JUM 


JUM 


sions  auxquelles  il  assista  ,  Jnmllhac 
vota  habituellement  avec  la  minorité 
du  côté  droit.  Il  mourut  dans  son  cliâ- 
teau  de  Gui^neville  ,  près  Arpajon  , 
le  7  juillet  1820.  — On  a  de  lui  :  I. 
Réflexions  sur  tétat  des  finances , 
sur  le  budget  de  1816  et  sur  les 
moyens  les  plus  propres  à  fonder  le 
crédit  public,  Paris,  1816,  in-8°. 
II.  Opinion  sur  la  proposition  de 
M.  de  Lachèse-Murel ,  tendant  à 
supplier  le  roi  de  vouloir  bien  Jaire 
proposer  un  projet  de  loi  pour 
rendre  aux  ministres  de  la  religion 
les  fonctions  de  l'état  civil,  Paris, 
1816,  in-8".  —  Le  baron  de  Jumilliac 
a  donné  quelques  articles  dans  les  Mé- 
moires de  la  société  d'agriculture  et 
des  arts  du  département  de  Seine-et- 
Oise.  On  trouve  dans  ces  mémoires 
une  notice  sur  lui  par  Duchesne 
(XXr  année,  pages  92-97),  et  dans 
le  Journal  des  Débats  du  16  juillet 
1820.  L-s— D. 

JUMILIIAC  (Antoine-Pier - 
RE-JosEPH  Chapelle,  marquis  de),  né 
le  31  août  1764,  parent  du  précédent, 
était  fjls  du  comte  de  Jumilliac,  lieute- 
nant-général et  commandeur  de  Tordre 
de  Saint-Louis,  petit-GIs  du  marquis 
de  ce  nom  qui  commandait  les  mous- 
quetaires gris  à  la  bataille  de  Fonte- 
nov.  Il  entra  au  service  en  1777  dans 
le  régiment  du  Roi,  infanterie;  il  con- 
sacra ensuite  quatre  années  à  ^isiter 
les  principales  cours  de  l'Europe,  où  il 
reçut  des  souveraini  Taccueil  le  plus 
flatteur.  Nommé  en  1788  major  de 
coloncl-géuéi  al  hussards ,  ;l  se  livra 
tout  entier  à  l'étude  de  la  science  pro- 
pre à  celte  arme ,  et  fut  bientôt  cité 
comme  un  excellent  officier  de  cavale- 
rie. En  1791,  Louis  XVI  le  nomma 
lieutenant-colonel  de  sa  garde  consti- 
tutionnelle. Arrêté  après  le  10  août 
1 792,  puis  échappé  au  massacre  des  pri- 
.sons,  il  émigra  et  servit  dans  les  armées 
des  princes.  Il  fit  partie  de  rexpédjlion 


de  Quiberon ,  reçut ,  à  l'affaire  du  6 
juin  1795  ,  de  graves  blessures  dont  il 
se  sentit  toute  sa  vie,  et  obtint  à  cette 
occasion  la  croix  de  Saint-Louis.  Il 
avait  publié  à  Londres  un  récit  inté- 
ressant de  cette  expédition  si  désas- 
treuse dans  les  annales  dei'émfgration. 
Rentré  dans  sa  patrie,  il  reprit  du  ser- 
vice après  le  18  brumaire.  Il  fit  en 
1812  la  campagne  de  Russie  et  mé- 
rita d'être  décoré  à  Moscou  de  la  croix 
de  la  Légion-d'Honneur.  Il  avait 
épousé  depuis  son  retour  en  France 
une  sœur  du  dernier  duc  de  Richelieu. 
Après  la  restaurai  ion,  il  (ut  nommé  lieu- 
tenant-général de  cavalerie,  comman- 
dant de  la  16**  division  militaire  à  Lille, 
en  octobre  1815,  et  commandeur  de 
l'ordre  de  Saint-Louis,  le  3  mai  1816. 
Au  mois  d'octobre  suivant  il  présida 
le  collège  électoral  du  département  du 
Nord,  et  le  présida  encore  en  août 
1817.  11  mourut  à  Lille,  le  19  fé- 
vrier 1826,  des  suites  d'un  abcès  sur- 
venu à  une  ancienne  blessure  reçue  à 
Quiberon  et  de  plusieurs  attaques  suc- 
cessives d'apoplexie,  laissant  le  meil- 
leur souvenir  du  commandement  qu'il 
y  avait  exercé.  —  Son  fils  aîné,  Odet 
de  Jtimilhac,  avait  obtenu,  en  1821, 
du  roi  Louis  XV III,  de  si;ccéder  au 
nom  et  à  la  pairie  du  duc  de  Richelieu, 
son  oncle  maternel,  qui  venait  de  dé- 
céder sans  postérité.         L — s — d. 

JIIMO.WILLE  (GouLON  de), 
officier  français,  célèbre  par  sa  mort 
déplorable,  était  né  vers  1725,  d'une 
familie  originaire  de  Picardi.",  dont 
liiic  branche  subsistait  honorablement 
depuis  le  XVII*^  siècle  dans  l'Ile  de 
France  et  la  Rrie.  Son  frère  aîné, 
Coulon  de  Villiers,  capitaine  en  1747, 
fut  blessé  cette  même  année  dans  m\ 
combat  contre  les  Anglais  au  Canada. 
Jumonville  rejoignit  peu  de  temps 
après  son  frère  en  Amérique,  et  ne 
tarda  pas  à  se  faire  estimer  de  ses  chefs 
perses  talents  militaires.  Les  Anglais, 


JUN 


JUN 


.Gi- 


flant reiilrrsfn  17.')J  >ur  ic^  IfrrM 
CfdfTS  à  L  France,  s'avancèrent  jus- 
que »ur  les  bords  de  l'Oliio  et  y  jelè- 
ren!  Ir*  fondement  s  d'un  fnit.  1^  com- 
mandant français,  M.  i\r  (^uilrrcœur, 
instruit  de  rctir  infi  action  atit  traités, 
mais  craignant  de  rallunier  la  ;;uerre, 
$e  contenta  d'rn>o\fr  aux  An;;lais  un 
ofljcirr  |*o(ir  le^  sommer  d'abandon 
ner  Irur  entreprise  et  de  se  retirer.  Ils 
promirent  de  satisfaire  à  cette  injonc- 
tion; mais,  au  lieu  d'>  obtempérer  en 
effet  ,  ils  n'en  |»oursui\irenl  qu'asec 
plu5    d'ardeur   l'aclièvement     du    fort 

3u'ils  avaient  commencé  ,  auquel  \\s 
onnrrent  le  nom  de  Ai  NècrssiU.Su- 
monville,  cliar^e  parle  commandant  de 
s'assurer  si  les  Anglais  se  sont  éloignes, 
part  le  "IW  mai  pour  remplir  cette  mis 
sirn,  a.ec  une  escorte  de  trente  hom- 
mes. Arrivé  pies  du  fort,  il  est  eii\i- 
ronné  tout  à-coup  d'An|;lais  qui  font 
feu  sur  sa  petite  troupe  ;  il  fait  x,h^\\c  Je 
la  main,  montre  les  depèdiei  iloiil  il 
est  porteur  et  demande  à  les  communi- 
quer; mai»  i  peine  en  a-l-il  commencé 
la  lecture  qu'il  tombe  lâchement  assas- 
siné (/  t/J.  ^^  ASIIINGTON,  L,  238). 
Sa  mort  fut  vengée  par  scm  frère  de 
V'illiers  qui  chassa  peu  de  temps  après 
les  An;;lai5,  et  détri:isll  le  fort  dont  iU 
avaient  cru  s'assurer  la  posse>sion  par 
un  crime.  JurnorwilU  cA  le  sujet  d'un 
poème  de  riiomas  ,  que  Ijiharpe,  en 
convenant  qu'il  s'v  trouve  de  beaux 
Ters,  ref;ardail  comme  l'ouvrafje  mo- 
derne qui  rappelle  le  plus  la  manière 
de  Claudien  (Vqv.  la  (Àtrrrsportd., 
I,  139,  et  V,  W).  Le  poète  Lebrun  a 
flétri  ce  crime  des  Anglais  dans  une 
staiice  de  son  Odf  nationaU  contre 
C  Angleterre-  W — 5. 

JIJXG.  Voy.  Stilling,  XUn, 
559. 

J  UNKE  R  (Gf.orgfis-Ai.am  ) , 
lillér.itpiir  ,  n»*  à  Hanaii,  en  17  Ifi,  fut 
d'aboid  prolciseur  ,  puis  recleui  du 
collège  de  sa  ville  natale,   sur  lequel  il 


publia,  en  IT.'iO,  un  écrit  (ai»ant  con- 
naitre  l'eiat  de  cet  établissement.  H 
coopéra  aussi  a  la  traduction  allemande 
de  Vîiistoirr  unn'erseiir.  qui  avair 
paru  avec  suices  en  .\n^letorie.  Il 
quitta  ensuite  le  C(»lle^e  pour  5e  char- 
ger de  i'é<lucation  oude  la  direction  de 
deux  )eune>  n«ible>  qui  allaient  ache- 
ter leui»  études  a  G(rtliii|;ue.  l'eut - 
être  ne  cheichait-il  qu'une  occasion 
de  visiter  cette  université  celebie  11 
Y  suivit  des  cours  de  droit  ,  et  de- 
Lula  dans  cette  science  par  un  traité 
qu'il  publia  sous  ce  titre  :  Lrges  XI J 
tiifiuiurum,  in  usum  lertionum  ura- 
(iemùarum,  (•irttin;;ue,  1760.  Kn 
même  temps  il  fournit  des  morceaux  à 
un  ouvrage  périodique,  intitule  Sie- 
iriund  (Personne).  S'clanl  familiarisé 
avec  la  lan;;ue  française,  il  se  livia  en- 
suite aux  occupations  de  traducteur  et 
de  maitie  de  langue,  se  fit  connaitrc 
de  pluMeurs  ofGcierN  de  l'armée  fran- 
çaise envoyée  en  Allemagne  ,  et  dut  .i 
leur  recommandation  ,  en  17()*2,  la 
place  de  profcvseur  d'allemand  à  l'é- 
cole mlitaire  de  l'aris.  Dès-lors  Jun- 
Ler  traduisit  et  publia  un  ^rand  nom- 
bre d'ou\ra^es  de  la  littérature  aile 
mande,  dont  il  contribua  beaucoup  à  ré- 
pandre le  goût  en  France.  Après  avoir 
profevsc  peudatit  près  de  vinj;l  ans,  il 
«ibtinl  sa  retraite  avec  une  pension,  et 
fut  nommé  censeur  royal.  Mai>,  privé 
de  ces  ressources  par  refTel  de  la  révo- 
lution, il  alla  s'établir  à  Fontainebleau. 
Pluii  tard  il  se  chargea  d'ensei;;nci  la 
lé;;islatlon  à  l'école  centrale  de  cette 
ville  ;  mais  il  put  à  peine  commencer- 
cet  enseij;neraenl,  à  cause  de  la  nou- 
velle organisation  de  l'instriirtioii  pu- 
bHque.  JiiiiLer  mouiul  à  Fontaine- 
bleau en  180.').  Outre  les  produc- 
tions déjà  indiquées  et  i:ne  traduction 
allemande  du  FJiibsuplie  pmcci ,  de 
Foiinev  ,  Francfort  ,  1761  ,  3  vol. 
in-H"^  ,  on  a  de  lui  :  I.  JSuui^eaux 
principes    de  lit   grammaire    allc^ 


LXVIII. 


22 


338 


JUN 


iimntlc,  Haiiau,  17G0,  in-12;  nnu- 
velleéiillion,  Paris,  17()2.  Celte  ;i,rani- 
niaire  ,  ado{.>tce   |jour   iccolc  liiililaiie 
et   pour  d'aulres  insliliitlons  (i'ensci- 
f^iieinent  ,    eut  un  giaïul    succi's.  On 
la  considéra  lonj^-îcnips  comme  la  meil- 
leure grammaire  allemande,  et   on  la 
réimprima    plusieurs    fois.     Elle    n'a 
même  pas  entièrcmcnl  perdu  son  an- 
cienne autonlé  en  France  :  il  y  en  a 
une  édition  piildiée   à  Paris,   1809, 
in -8".     L'a::'c:ir    en    fil    aussi    un 
y4hrê£^é   à    l'usajj^e  de  l'école   loyale 
militaire,    Paris,    17()9,   in-l2.    II. 
Iiiirodurtioli    à    ta  Irriurc  des  au- 
it'urs  aUenuau/s,  en  allemand  et  en 
français,    Pari.s    1763,   iii-li.    III. 
Prnsi'c.s  libres  :^ur  âiffcrcntes  par- 
ties de  la  guerre  y  ihid.  ,  1764,   in- 
\'l.  IV.  Cliuixiwric  de  pof^siesphi- 
hisophiipies  et  agrènhles,  traduites  de 
l'anglais  et  de  ralleinand,  /Vvijijrion  et 
Paris,  1770,  2  part,  in-12.  V.  Choix 
de  philusupliie  murale,  ihid.,   1771 
2part.in-12.  Ce  recueil  se    compose 
de  nrorccaux  de  Pcrnclly  ,   Rurlama- 
qui,  Vattel,  Diderot,  etc.  VI.   T/ieâ- 
fre  alleniund  (trad.    par   .lunker   et 
Lichaud),  Paris,  1771,  2  vol.  in-13. 
VII.  ],es (j rares,  et  Vsychè  entre  les 
Grâces,  poc'mc  traduit  de  Wicland, 
ibid.  ,  1771,  2  vol.    in-12.  Diderot 
dit  de  cet  ouvra^i^e  :  «    Cela   n'est  pas 
«   mal  traduit  du  tout;  mais  je    dc- 
«<   viens  vieux,  très-vieux  apparemment, 
«   puisfpie  je  ne  saurais  plus  iiie  rcpai- 
«   trc  de   ces    haf^atelles...    Pcul-èlre 
«  cela  est-il  délicieux  en  vers  ;  mais  en 
«   pro^^c,    ce   n'est   pas   tout-à-fait    la 
«    mcdie  chose....  Le  fra^^ment  intitulé 
M    Psyché  entre    les    Ordres   n'est 
•«   rien,    du    moins   en   liaduction.    » 
VI M.  Louise,  ou  le   Pouvoir  de   la 
vertu  du  sexe,  conte  moral  traduits  de 
l'allemand  de  Zacchari»',  Paris,  1771, 
in-1  ST.  I X .  Contes connnues ,\r7n\n\\):>àc 
l'allrmand  de  Wielaiirî,   rmnrfort  et 
Paris,  1771 ,  in-ft'*.    X.    Phrddjn,  ou 


J13N 

Entretiens  sur  la  spiritualité  et  T im- 
mortalité de  V  âme,  Xv^à.   de   l'allem. 
dcMosès  Mendelssolin  ,  Paris,  1773, 
in-8".    XI.  liccucil  historique,   ou 
Choix   de  pièces  morales  et   amu- 
santeSy   en  allemand  et  en  français , 
Slrasbour-,  1774,  in-S''.  XÏI.  La 
découverte  de  t Amérique ,  trad.  de 
l'allem.  de  Campe,  Hambourg,  1783, 
2  vol.  in-8".  XIII.  Leçons  de  droit 
public,  Vs^ns,  1786,2  v.  in-8".  Junker 
a   revu    deux   traductions    de   l'alle- 
mand, l'une  des  12   preuiiers  chants 
de  la  Mcssiade  de  Klopslock,  publiée 
par  d'Anthelmy,  1769,  el  l'autre  de  la 
Dramaturgie  àe.  Lessin^,  par  Cacault, 
1785  ,    2  vol.  in-8".   «   Toutes   ces 
«   traductions,  dit    Grinim    dans    sa 
«   (Jorrespondance  ,    nous    viennent 
«   des  professeurs  de  la  lanfi;uc  alle- 
«    mande  qui  sont  à  l'école  royale  ini- 
«   lilaire.  Celle  du  Messie  a  successive- 
«    ment  passé  en  deux  ou  trois  mains 
«    (iirférenlcs.  »  Junker  possédait  bien 
les  deux  lanj];ues,   cl  il  était  loul-à-fait 
propre  aux    fonclinns  de  traducteur. 
L'académie  de  Gœtlingjie  l'avait  admis 
au  nombre  de  s^s  membres.       D — G. 
Jï'IVOT  (1)  (Laure  Permon, 
i\r'^''j,  duchesse  d'Ahraiilès,  naquit  à 
Montpellier  le  6  nov  17Si.  Son  père, 
le  sieur  Permon  ,   ori^^inairc  de  Metz, 
était  simple  commis  aux  vivres;  sa  mère 
était  une  Comncr.e.  Le  comte  de  Vcr- 
f^ennes,  qui  avait  épousé  une  Grecque  de 
celte  même  famille,  dont  les  débris  s'é- 
taient lixéjà  Ajaccio,  lit  ('onncr  à  Per- 
mon, lors  de  la   guerre  d'Amérique  , 
toute   l'entreprise   des  vivres  de  l'ar- 


(i)  .luM)r  [Jenii-liiipiiite),  cor'elier,  s.ini 
il(>ul<«  (!••  In  mntu-  f:nii»llr  i\M>-  U\  griiéral  {t'oy. 
.FtïiOT,  XXIl,  f!>7)  ,  iiiiquil  à  Cli.^lillon-stir- 
Sfiiie  fil  »iO|ii<iiilirc  i<i5.S,  el  y  mourut  le  9  00 
tohr<!  I  7  >  4  ■  H  coi)i|i()s,i,  8i)il  i-ii  rrHiiraiii,  soil 
m  latin  ,  |.liisii'iir.s  f>raisuris  fui)<M)r<fS  ,  «lis- 
<•ou^^,  «■le.  On  a  t-ncorc  (l«  lui  »  Le  Chemin  du 
ctcl  OIIV&I-I  ii(.t  rimri  qui  a.tpir/r  if  à  la  pcifec  liait, 
Autun,  i6;<i,  in-»4-  U  tli>dia  cet  ouvrage  au 
fiinciix  (l.iljrici  fl  lU)i|ijitl<',  «'Vt'que  U'Aiiluii  , 
k  i„éitif  i^'ii  avilit  (oui m  ù  WaiWlr  le  modèle 
de  bMi  KarUifc.  U— b— ». 


JUN 

111^  de  Roclianbe^ii.  I^es  Coiniiriie 
«le  Curse  olilmient  hïss'ï  ^  par  le  cie- 
«iil  (le  ce  iniiii>tre,  en  17HJ.  17S;J 
ri     178V  ,     des    leU"  •   nui 

recoiiiui usaient    Icui    <!  •-  de.< 

rinpereur&  d'Ontiit.  Dc^ia^  tt  ;eiitpi, 
l'eriiiau  qui  avait  fait  finiuiie  ml  un 
^raiid  train  dr  iiuison  dont  sa  ferniue 
faisait  fort  bien  les  liuiineur»;  il  elart 
même  sur  le  point  de  traiter  d'une 
cliar^e  de  ffr.i.ier-génëral,  lorsq«;f  la 
ré\olulu)n  éclata.  Ixiin  d*en  adopter 
le-,  principe»,  il  désapprouvait,  comme 
d in^^erriike  et  inopportune,  la  convo- 
cation des  rtuts  ^rnéiaut.  Ou  peut  ju- 
i;er  de  ses  opiiiion>  rovalistes  par  «^on 
intime  liaiMtn  avec  I  infortune  Du- 
lo^oi  {rvy.  ee  nom  .  \ll  .  !Î^O\ 
TiiulefiMs , 

lions,  il  eu''  <  il 

'<•  Pans,  d'ft happer  pendant  la  ler- 
:  l'ur  au  SOI  t  f.i!  jl  i|iii  II. (  Lirait  a!«)r»  let 
iiclie»  ans  li<>- 

l'^p^ric,  da.  ... ).;»/i/#s 

//  .'*,  »*e»t  ^auft  doute  «c'vi  d'une 
r\i)ir^sion  impropre  en  qnaliûanl  de 
^ru .  fcrmi  r  le  ^rand-prre  de  la  dn- 
rlii*  se  d'Abraniè^  :  ce  C^nslanlin 
('."iiiiiéue  était  drjÀ  bien  ai>ez  decliu 
>.ini  qu'il  fût  b«'  •    .:erer  sur  ce 

point.  Après  av>  laincdcca- 

N.i  oie  d.ins  le  u-^inieni  de  Vallière- 
li.»\al  Corse  ,  il  mourut  jeune,  en 
ITT'J,  dans  sa  modeste  habitation 
d'Ajûccio  :  mais  il  faut  convenir  aussi 
que  sa  petile-Glle,  la  duclie^sed'Abran- 
tès,  poussait  jusqu'au  ridicule  l'or^iieil 
et  Icn  prétentions  de  -a  naissance.  C'est 
ce  qui  rend  assez  ennuvcnse  la  lecture 
du  premier  volume  de  ses  Mt'rnuirrs, 
on  les  moindres  parlicuUiilés  concer- 
nant .ses  aïeux  sont  relevée-^,  amplifiées 
avic  une  prolixité  ridicule,  comme  si  sa 
uière  t(»ute  la  première  n'a-  ait  pas  com- 
meiiré  n  Jrrugrr,  en  se  trouvant  heu- 
reuse d'épouser,  parce  qu'il  était  riclie, 
UN  obscur  roturier!  I.riure  f  ermon  avait 
une  saur   ainée  nommée   Cécile,    qui 


JUN 


33c 


fut  «sa  ni.iMjine  et  «tui  épousa,  .m  inois 
d'otl.   17'.' V,  un  «  .«.al  noiii- 

i.»é  d»*  (ic'îifric  .  «le-ix  .ui» 

ap-<  :c  il.>.-iiuit  an5.  1^ 

pc:  do    l.aure   l'enmiii 

lui  lutl  a;;>tcc,  ioiui  i'  devait  Irtrcav 
re»le  toute  m  vie.  l.ile  avait  linit  an», 
lorsque  lev  dan^cr%  (|ue  couraient  M)n 
|téie  ri  sa  mcre  à  l'an»  les  fnrrèrenl 
d'aller  n'établir  à  Toulouse  :  elle  fut 
laisvée  i  l'ari.%,  ainsi  que  sa  s<rur,  et  tou- 
tes deux  furent  mises  dan»  une  petite 
pension  au  fauboiii;;  Saint-Anloine. 
Jusqu'à  rrttr  ep.».|'je  ,  Uure  Hermon 
ct.i  II-      ,  I,     .     ,,„  f\  élevée 

sr'  de  Uou>- 

SC4U.  lîiciilol  a  iKcie  la  lit  venir  à 
Touluase.  Aprè^  la  terreur,  sou  prre 
>e  fi&a  à  Bordeaux  et  M"'"  Termoii 
revint  a\ec  bCs  ileui  fillr.  à  Paris,  à 
riiolel  de  Ai  y'r.//<//ii//y//r,  rue  dr» 
Fillo-Saint- Thomas,  mener  la  vie  as- 
sei  équivoque  d'une  femme  isolée  de 
sonro.iri,  «lui  ne  reçoit  iiue  de»  hom- 
mes* et  qui  donne  à  jouer  cliezelJe.  i>o- 
naparte  devenu  général  depuis  le  »ié^e 
de  Toulon,  mai»  alors  en  dis;;race, 
ctail  fort  asNtdu  rKex  elle,  ainsi  que  Ju- 
not,  son  aide-Je  rainp  (r'o)'JiNOT, 
Wll,  157).  La  duchesse  d'Abraulés, 
dans  Nés  Mfrnui'rrs,  insi^le  »iir  l.i  po- 
sition piecaire  dans  laquelle  fut  lon;;- 
temps  le  jeune  (^rse  destine  a  une  si 
haute  fortune.  A  l'en  croire,  M.  et 
M'"*  Termon  avaient  été  sc-^  premier» 
et  ses  uniques  protecten.»  a  Fans, 
lorsqu'il  était  à  l'école  «ilitaire  ;  et  il 
ne  cessa  tiepuis  de  voir  a^sidàuienl  la 
iamdle  l'erinon,  qui  ne  lut  pis  moins 
utile  à  ses  nombretix  parents  qu'a  Ho- 
naparte  lui-même  [2;.  A  cette  époque 
ef^ju  qu'au  13  vendémiaire,  il  était 
dans  un  étal  voisin  de  la  mi>ère,  man- 
;;c;tnt  très-souvent  cliez  M""  IVrnion, 
et  s'eutretenjut  aux  dépeus  de  Junot 

!  )      M  .    a...r    l'Abrinir-  ra.ni  r  tl  .in  «e»  Mé- 
Il  .,1  ^]  ,.     le    père    de    Ronajor  i-    uiiiiriit    à 

Mt.  .  ,    ;  .cr  «Un»  la  luaixoii  •!<  inad..iiia  Penaoi^. 
<jui  r<  \ul  VI  s  J«riiicrï  «ouiurs. 


22. 


34  o 


JUN 


qui  recevail  une  assez  modique  pension 
de  sa  famille,  mais  qui  possédait  le  ta- 
lent de  la  d(n;b!cr  par  son  bonheur  au 
jeu  (3).  Loin  de  son;;er  à  l'ainée  des 
filles  de  M"'*"  Permon ,  Junot  était 
épris  de  Pauline,  une  des  sœurs  de 
Bonaparte,  et  voulait  Tépouser.  «<  At- 
«  tendons,  lui  disait  celui-ci ,  elle  n'a 
«  rien,  tu  n'as  rien  :  quel  est  le  total? 
«  Rien.  Nous  aurons  peut -être  des 
"  jours  meilleurs,  mon  ami.  Oui,  nous 
«  en  ainons,  quand  je  devrais  les  aller 
«  chercher  dans  une  autre  partie  du 
«  monde.»  A  la  suite  du  1^^  prairial, 
M™®  Permon,  intimement  liée  avec  son 
compatriote  Salicetti  ,  l'un  des  pro- 
scrits de  cette  journée,  le  cacha  au  pé- 
ril de  ses  jours  dans  son  appartement, 
à  Paris  ;  puis,  comme  alors  elle  dut  al- 
ler, avec  ses  deux  fdies,  rejoindre  son 
époux  à  Bordeaux,  elle  emmena  ce 
député  qui  prit  le  nom  et  le  passe- 
port d'un  valet  avec  lequel  il  avait 
beaucoup  de  rersemblance.  Arrivé  au 
terme  de  ce  périlleux  voyage  ,  Sa- 
licetti demanda  à  M*"*^  Permon  la 
main  de  l^aure.  En  vain  la  mère  refu- 
sait. Salicetti,  si  l'on  en  croit  les  iliV- 
tuoircs  de  M'"°  d'Abrantès  elle-mê- 
me, répondait  à  toutes  les  objections  : 
«  Klie  est  trop  jeune  !  Pas  du  tout  ; 
«  son  esprit  est  foi  iné  comme  celui 
«  d'une  personne  de  viiit;t-cinq  ans  ; 
«  rt  puis  son  caractère  est  ce  qui  m'a 
«  séduit.  Cette  jeune  iille-là  serait  ca- 
«  pable  d'être  une  seconde  Charlotte 
u  Cordny,  si  on  touchait  un  cheveu  à 
«  (juehpi'un  de  nous  trois.  »  Lors- 
qu'on fut  arrivé  à  Cette,  Salicetti  s'ein- 

(3)  C'rst  ici  If  cas  de  rniurquer  que  le  [n  re 
(le  Jiiiio!  n'était  p.is  cullivatrur  :  il  exerçuil  des 
fondions  ji-licisires  à  Biissy-Rahuliii.  Le  jeune 
.lu'iut  aciiev.i  ^ct  études  au  colli-ge  de  (Jli^tlllntt  ; 
il  fiai»  plein  de  facilite  rt  d'e.iprit  ,  Liais  1r<'s- 
maiivais  sujet,  et  faisait  f..iie  ses  devoirs  p.ir 
des  CHiiiar-'d»*-,  dont  il  était  fon  aimé,  quoi(|ii'il 
fi'U  ïJiLH  cesse  jirét  à  ex'ircer  sur  eux  son  talent 
pour  la  lu'te  1 1  le  puuil.it,  laleiil  .|u'il  rulliv.i 
•.i  Iji  iireoseii  en)  depuis  sur  ses  crésiiciirs.  il 
faisait  son  dro<t  (|uaiid  lu  rcvululiuii  k-  jrla 
d.ui!>  l'état  niililairc. 


JUN 

barqua  pour  Gènes,  et  la  jeune  Permon 
fut  à  la  fois  délivrée  des  importunités 
de  cet  homme  et  de  l'appréhension  des 
dangers  que  sa  position  appelait  sur 
j^jnie  pe,.(j,Qn  Après  un  court  séjour  à 
Bordeaux  où  elle  trouva  son  mari  pres- 
que mourant  (sept.  1795),  celle-ci  re- 
vint avec  lui  et  leur  fille  à  Paris  ,  où 
Permon  succomba  à  ses  longues  souf- 
frances ,  la  veille  de  la  fameuse  journée 
du  13  vendémiaire;  il  était  tout-à- 
fail  luiné  par  la  révolution.  Néan- 
moins sa  veuve  alla  se  fixer  dans  une 
belle  maison  de  la  Chaussée-d'Anlm  , 
et  continua  de  vivre  entourée  de  luxe 
et  des  plus  coûteuses  fantaisies.  Sa 
fille  raconte  sérieusement  que  les  re- 
grets de  M'"*^  Permon  furent  5/  vijs^ 
que,  cédant  aux  conseils  de  son  mé- 
decin qui  lui  ordonnait  la  distraction, 
elle  loua  une  luge  à  Feydeau,  quel- 
ques semaines  après  la  mort  de  son 
mari.  Au  surplus,  l'esprit  de  dénigre- 
ment le  plus  hostile  n'aurait  pu  re- 
présenter celte  dame  sous  iha  traits 
moins  favorables  que  ne  l'a  fait  ÎM'"® 
d'Abrantès,  en  voulant  préconiser 
comme  des  perfections  tous  les  défauts 
de  sa  mère.  Elle  en  fait  une  petite 
maitressc  surannée,  d'un  caractère  ab- 
solu, capricieux,  vindicatif.  On  sent 
qu'à  pareille  école  la  jeune  Laure  dut 
prendre  de  bonnes  leçons  ;  et  l'on  ne 
s'étoiine  plus  de  ce  qu'a  été  la  lillc,  en 
lisant  le  portrait  que  celle-ci  a  tracé  de 
sa  mère,  tout  en  ne  parlant  d'elle  que 
sur  le  Ion  de  la  plus  aveugle  admira- 
tion. Jîonaparte  continuant  à  voir 
beaucoup  M""^  Permon  et  sa  fille, 
celle-ci  raconte  qu'alors  le  générai  , 
vouUinl  unir  le  nom  de  Comnène  à 
celui  de  Qdomeros  (car  elle  préten- 
dait aussi  que  les  Bonaparte  sont  une 
branche  des  (^omnène),  avait  formé  le 
triple  dessein  de  marier  son  ùiiQ 
Louis  à  la  jeune  Laure,  sa  sœur  Pau- 
line au  fils  de  M""^  Permon;  enfin  de 
devenir   lui-même  l'époux  de  celle-ci , 


bien  qu'elle  pût  l'ire  \a  mitre  de  Jo- 
^f|»!i  ,  l'ainff  tle>  Boiiaparlr.  M""" 
l'ennoii  nr  répondit  à  crilr  dernieir 
piopo>  lion  que  par  det  ét\i\>  de  rire. 
(^r  rcfui  et  la  nii;li;;riife  que  mit  le  çjé- 
iinal  à  placer  un  prolej;é  de  M""  Pér- 
ir.ou  rail  erent  entre  eux  un  refioidiste- 
iiirnl  tirs  piunonré,  re  ijui  n'emprrlia 

f>as  Uonapûitc  de  Icnioi^ner  loup)ur^ 
r  plus  \i(  intéiêt  à  M'"*"  IVrroon  et  à 
^e<>  fnfjiils,  quoique  crlIr  ci  rrpomlif 
l.i  pliipait  du  lrnip>  par  dr>  duretés  a 
>rs  a\anres.  Dans  ces  anecdotes  d'in- 
térieur, comme  dans  une  fouie  de 
mémoires  publiée  par  Ie5  serviteurs  de 
Napoléon,  on  reconnaît  cjue  cet  hom- 
me, si  inlraitable  en  politique,  était  ;;é- 
iiéralement,  dans  la  vie  privée,  aussi 
f-iriie  qu'il  affectait  d'i-tre  brusque. 
M""  Tri  mon  et  &a  Glle  ,  après  a\oir 
fait  un  vo>a;;e  aux  eaux,  revinrent  à 
Paris,  où  elle-»  se  jetèrent  dans  la  dis- 
sipation, M""  Perraon  continuant  de 
recevoir  nombieuse  société,  et  M"' 
l^ure,  rlrve  dt's  danseurs  De^piéanx  , 
Saint-Sauveur  et  de  Trénis  ,  faisant 
1rs  beaux  jours  des  bals  do  l'Iiàtel 
r}iéiu»on  et  de  rhotrl  Uicliclieu.  A 
la  fin  de  l'hiver,  elle  dut  un  instant 
>'arracher  à  ces  plaisirs,  pour  faiie  sa 
première  communion.  M.  de  Maillé, 
(-\eque  de  Saint  Papoul,  le  seul  prélat 
non  sermenté  qui  exerçât  publique- 
iiiciit  les  fondions  épiscopalcs  en 
France,  lui  administra  ce  >jrremrnt. 
Elle  vante  beaucoup,  dans  ses  Mr/imi- 
res  ,  les  pieuses  dispositions  qu'elle 
apporta  à  cet  acte  leli^ieux.  Le  mo- 
ment vint  où  Junol,  nommé  gouver- 
neur de  Paris  au  rclour  de  la  cam- 
paf;ne  de  Maien^o,  demanda  et  obtint 
la  main  de  M  *  Permon,  qui  ne  man- 
que pas  cette  occasion  de  faire,  sur  les 
moindres  circonstances  qui  précédè- 
rent cette  union,  un  lon^  et  insipide 
roman  dans  lequel  on  démêle  que 
M'"*  Permon,  loiil  en  jetant  >a  fd!e  à 
la  tète  du  favori  de  Bonaparte,  eut  le 


JUN 


34. 


talent  de  lui  faire  bien  sentir  l'honneur 
de  »'allier  à  une  ('x)mnène.  Ouanl  à  la 
future,  effia^ee  sans  doute  des  manie' 
res  brutalement  communes  et  du  ca- 
ractère impétueux  de  son  prétendu, 
elle  ne  donna  son  consentement  qu*a> 
près  beaucoup  d'hésilalion ,  ou  si  Ton 
veut  do  simagrées  :  car,  dans  tous  ses 
récits,  on  remarque  si  peu  le  ton  de  la 
conviction,  qu'on  ne  uit  vraiment  si 
elle  ^e  ino(|ue  du  lerlrui  ou  d'ellr- 
roémr.  l.r  premier  consul  en  donnant 
son  appiobation  à  ce  roana;;e ,  )  joi- 
gnit une  dot  de  cent  mille  francs  et 
une  corbeille  de  quarante  mille  francs. 
On  conviendra  que  c'était  f;énérfuse- 
ment  reconnaître  les  servicei  qu'il  avait 
pu  recevoir  de  M'"'  Permon.  Junot 
qui ,  si  Ton  s'en  rapporte  aux  Mémui- 
rrs  de  sa  veuve,  était  sincèrement  ré- 
publicain et  avait  même  la  bonliomie 
lie  supposer  le  premier  consul  animé  des 
mêmes  sentiments  (V],  rrut  devoir  à 
son  opinion  et  à  sa  position  officielle, 
comme  couimandant  de  Paris,  de  ne 
pas  célébrer  son  mariage  à  l'église  ; 
mais  M™''  Permon  et  sa  fille  tinrent 
bon  et,  après  la  célébration  civile  à  la 
municipalité  du  neuMeme  arrondisse- 
ment, la  bénédiction  nuptiale  eut  lieu, 
san^  pompe  et  à  minuit,  dans  la  petite 
éj^lise  de  Saint-lx)uis  en  IMe.  (}c  ma- 
riage, à  ce  qu'il  paraît,  réjouit  fort  la 
fami'le  du  premier  consul  ,  comme  une 
espèce  de  victoire  remportée  .sur  M'"" 
H  inapaile  :  car  une  hostilité  tacite 
existait  entre  celle-ci  et  M'"*  Permon. 
Tout  en  faisant  trè-assidùment  la 
cour  à  sa  prétendue,  Junot  ne  né^li- 
^cait  pas  SCS  devoirs  comme  chef  d'une 
dt$  polices  particulières  de  lionapai  le. 
On  peut  voir  dans  le-.  Mrmuires  de 
la  duilic.s>e  d'.Vbraiilès  qu'avant  pé- 
nétré le  secret  de  la  conspiration  d'A- 
réiia  et  de  Ceracchi.  il  fut  l'insli^ateur 

(4  .  Je  «iiu  républicain  pjr  goot  et  p«r  lys- 
.  i«roe.  .nji»jji  horreur  d»  s....?  ,  etc.  «  Tel 
r»l  U  laii-  .-•  'l«ie  inaJjme  d"  Vivantes  prèle  à 
,-.„   miri  djn»  '.e  4'  ▼"•    «1-  ^«"^  Mémoires. 


34a 


JUN 


de  Tespècc  de  f;uct-apens  qui  donna 
lieu  à  rairestation  des  conjures.  Ce 
ne  fut  mètne  qu'après  cette  aireslation 
qu'il  s'occupa  de  terminer  son  rnaria- 
^e  ;  et,  à  cette  occasion,  Bonaparte  lui 
dit  :  «  Sais-tu  bien  que  ton  mariage 
«  a  tenu  à  peu  de  chose,  mon  pauvre 
«  Junot  ?  car  je  crois  que  si  ces  co- 
«  quins-ià  m'avaient  tué,  ils  ne  se  se- 
«  raient  guère  occupés  de  ta  noce  et  de 
«  ta  dot.  »>  Ce  r()lc  de  scidc,  ces  fonc- 
tions de  police,  lui  altirèroiil  des  inter- 
pellations sévères  de  la  part  de  quel- 
ques-uns de  ses  compagnons  d'armes. 
Jtinol  eut  aussi  de  (réquentes  querelles 
avec  Fouché  et  le  préfet  de  police  Du- 
bois, qui,  infiniment  plus  habiles  que 
lui,  le  firent  plus  d'une  fois  tomber  dans 
des  piè<Tes.  Son  zèle  de  dénonciateur  ne 
s'arrêtait  pas  même  devant  les  rela- 
tions intimes  de  la  société;  et  M"'® 
d'Âbrantès  ne  craint  pas  de  rappeler 
que,  dans  certaines  ciironstances,  elle 
et  sa  mère  cherchùent  à  détourner  Ju- 
not d'un  rôle  si  peu  dif^nc  d'un  mili- 
taire. Elle  raconte  encore  que  lors  de 
l'explosion  de  la  machine  infernale,  au 
3  nivose,  il  fut  tellement  fiappé  de 
cet  événement,  qu'il  tondra  pendant 
les  nuits  dans  des  soufres  effrayants.  Sa 
femme  s'étanl  alors  approchée  de  son 
lit,  d  se  réveilla  en  sursaut,  et,  sans  sa- 
voir ce  qu'il  faisait,  d'un  coup  de  pied 
dans  la  poitrine  il  l'envoya  tomber  â 
l'autre  bout  de  l'appartement.  Au  mo- 
ment du  vote  à  vie  pour  le  consulat,  le 
colonel  Foiirnier  Sarlovèse,  ami  de 
Moreau,  se  déchaîna  si  ouvertement 
contre  Ronapai  te  ,  et  affecta  même  de 
l'insulter  si  publiquement  à  l'Opéra, 
que  le  premier  consul,  se  retournant 
vers  Junot  placé  derrière  son  fauteuil, 
lui  ordonna  d'arrêter  sur-le-champ  le 
colonel.  Junot  se  présenta  en  consé- 
quence à  l'entrée  de  la  lo^^e  où  se  trou- 
vait 8arlovè.=ie,  et  de  l'air  le  plus  {Gra- 
cieux lui  fit  si^ne  qu'il  désirait  lui 
parler.  Le  colonel  se  lève  et  sort  dans 


JUN 

le  corridor.  «Qu'est-ce? demanda- 1 -il. 
—  Un  devoir  bien  pénible  que  je  dois 
remplir;  le  premier  consul  veut  que  je 
m'assuf  e  de  ta  personne.  —  Tu  fais  là 
un  vilain  métier  :  est-ce  que  passer 
mouchard  est  augmenter  de  grade?» 
Junot,  à  ce  propos  désobligeant,  entre 
en  fureur,  et,  sans  plus  songer  à  son 
devoir,  propose  au  colonel  de  se  bat- 
tre; mais  les  deux  ofticiers  de  gendar- 
mené  dont  il  s  était  tait  accompagner 
lui  déclarent  qu'il  ne  peut  agir  ainsi,  et 
qu'il  doit  conduire  Sarlovèse,  non  sur 
le  terrain  d'un  combat  singulier,  mais 
chez  le  ministre  de  la  police.  Junot 
cède  en  ajournant  le  duel,  et  conduit  le 
prisonnier  devant  Fouché.  Cependant 
le  premier  consul  eut  lieu  de  se  repen- 
tir d'avoir  confié  à  un  tel  homme 
un  poste  si  important.  Ses  bévues  en 
matière  de  police  ,  ses  indiscrétions 
avec  les  diplomates  étrangers  ,  entre 
autres  le  ministre  prussien  Luchesini, 
ses  violences,  ses  scandaleuses  orgies, 
tendaient  à  déconsidérer  le  gouverne- 
ment. Il  fut  envoyé  à  Arras  pour 
commander  la  réserve  des  grenadiers 
de  l'armée  d'Angleterre.  La  conduite 
de  M"^*^  Junot  n'était  pas  beaucoup 
plus  sage  ;  elle  jouissait  avec  délices  des 
prérogatives  agréables  attachées  à  la 
qualité  de  conirnuiidanle  de  Paris, 
loges  à  tous  les  sjieclacles,  bals,  bril- 
lantes réunions.  Prodigue  comme  son 
mari  ,  elle  dépensait  des  sommes 
énormes  pour  sa  toilette,  inventait  cha- 
que jour  de  nouvelles  modes,  et  faisait 
de  son  côté  des  dettes  qui  ne  fu- 
rent jamais  payées.  Inconséquente 
dans  ses  discours  et  dans  ses  démar- 
ches, elle  s'exposait  souvent  à  des  mor- 
tifications. Son  esprit  caustique  et  mé- 
disant lui  attirait  beaucoup  d'ennemis; 
elle-même  raconte  que  Bonaparte  lui 
dit  un  jour  :  «  Vous  avez  de  l'esprit, 
«'  petite  peste;  mais  vous  êtes  mé- 
«  charité;  ne  le  soyez  pas  :  une 
«<   femme  n'a  jamais  de  charmes  lois- 


JUN 

•<  qu'elle  se  fait  craimlrf  >•  Il  lui  le- 
prochait  encore  tîe  voir  trop  intime- 
inen!  If»   l\u•^^e.<l    el   Icn    '  i 

ruirnt  alniN  à  Taris,  et  de 
r.  'lit     robjel    de    tes     coijuctiiiic?. 
\  .    I.  est  ce  a\ec  raison    qu'on  a  dit 
de  \à  diitln'^sc  d'  \l)ranlès  :  Kilr  rluit 
fiilir  ri  spinliirllr  ;  mais,  ftiilr  fnHir 
ètrr  hrurnisr  .  rilf  ne    tu  jtiiiuiis 
rtr.   Oiiand    Itonaparte    .allait    pa-ser 
les  licaiix  joui  >  d«*  lVl<'  à  la   Ma'nui- 
;>on,elleY   était  rréqurniment  incitée; 
rlle  \  jouait  la  rorocdif  a>ec   Miccr^  ; 
rllf  y  mettait  même  une  telle  prêlen- 
lion   (juVlIr  j>reiiait  des  Icçoîin  Av  l'ac- 
teur I^  Hi%e.  \  celte  é|»»>que(lH01), 
si  Ton    en  croit   ses  Mrniuirrs  ,  elle 
captixait  TaUcntion  du  premiei  consul 
de  manière  a  inspirer  (juehpie  jalousie 
à  M"*"  r.onapaite.  Klle  raconte  même 
que  pendant  un  xova;;e  de  cille-ci  aux 
eaux  de  l'Ioinliicres,    elle  p.i«.>.i  quinze 
jours  à  la  M.ilmaixui.  Itona;  a;te  s'in- 
troduisit à  cinq  lieure>  du  matin  daius 
la  chambre  à   couclier   de  M""'  Ju- 
not  ,     s'assit    modestement    dans   un 
/autruil  au  pied  du   lit  ,   pour  lire 
des  dépêches   et   des   gazettes  ,  puis  , 
pour    toute    primauté  ,    lui  pin^a    Ir 
pied  àtnj^^rrs  ses  t  aucrrturrs  en  s'en 
allant,  (^-ette  scène  rid"cu!e  se  renou- 
vela le  lendemain  a\er  lr>  mêmes  circon- 
stances; mais  le  tr(M>icmt  jour  M'"**  Ju- 
not  drfcndit  à  sa  femme  de  chand>re  de 
le  laisser  entrer.    Il  entra   pouilant   ï 
l'aide   d'un  passe-partoul  ,  fut  froide- 
ment accueilli  et  s'en  alla  d'as-^cz  mau- 
vaise humeur.  Apres  ce  départ  elle  s'a- 
bandonnait aux  plus  amères  réllexions, 
regrettant  de  n'avoir  auprès  d'elle  ni 
Duroc   pour  la   conseiller ,   ni  Junol 
dont  la  pré>ence  l'aurait  soutenue,  lors- 
que celui-ci  survint  toul-à-coup,  sinon 
trop  tard  ,  du  moins  assez  à  propos. 
Malgré  les  protestations  de  l'héroïne 
de  celte  ancc  oie,  il  e>t  bien  difficile 
de  croire  qtie  I>onaparle,  s'd  a  jamais 
poiséi  M      Junot,  se  soit  arrêté  en 


JTJTS 


343 


si  beau  chemin.  Ir  uiemier  fiuit  de 
son  maria-ic  fut  une  fille,  aujourd'hui 
connue  dans  la  littérature  sous  le 
nom  de  M""  Juiiol  -  d'Abrantcs. 
I^  premier  consul  et  sa  femme  U 
tinrent  sur  les  fonts  de  baptrnie,  et 
elle  lut  nommée  Jo  éphine.  Les  ca- 
deaux de  baptrme  fuient,  de  la  paît 
du  premier  consul,  une  maison  ma- 
piifique  ,  rue  de»  (Jiampv-Klxsêes  , 
et  cent  mille  francs  pour  la  meubler  ; 
Joséphine  donna  un  collier  de  perle» 
des  plu»  riches  :  c'est  ain^i  aue  le  cou- 
ple consulaire  affectait  dêji  la  j;énéio 
»ilé  des  souverains.  Ver»  le  même 
temp<,  lors  du  Te  Ihiini  pour  le  (en- 
cordai, M"'*  Junol  fut  du  nombre  dcN 
dames  qui  accompa^nêient  l'épouje  du 

f)remier  consul  à  la  métroptjle.  Les 
axeuis  pleuraient  alors  sur  la  famille 
de  Junot  el  tsWt  de  sa  femme,  m- 
dé;»eni!amment  d'énormes  |;ralifira- 
tion>,  d«int  une  «eule  monta  à  trois 
cent  mille  frano.  I.'abbé  l>ienaime  , 
(mcle  de  M'"*  Junot,  fut  nommé  chè- 
que de  Metz,  son  bciu-frère  (ieouffre, 
rece\ eur-;iénéral  du  département  de 
Lol-el-Ciaroune,  son  fière  IVrmtui, 
commissaire-général  de  p«d;ce  à  Mar 
seille,  enfin  le  père  de  Junot,  con- 
servateur des  eaux  el  forêts  à  l)i 
jon.  fj  moit  de  M  "*  Permon  sur- 
vint au  milieu  de  tant  de  prospérités 
(ISOl)  :  mais  ror;;ueil  de  sa  fille  el  de 
son  Pendre  troti>a  une  coiisolalion  en 
élalaiit  surleceifuel  les  armes  de  U 
maison  de  Comnènc.  Ricntùt  vint  le 
départ  forcé  pour  \rras,  à  la  suite  d'une 
scène  scandaleuse  que  Junot  ,  étant 
j>risdevin,fit  chei(iarclii,  placier,  où 
^  réunissait  la  bonne  compagnie.  Fou- 
ché  ne  fut  pas  ctrant;er  à  cette  disj;ràce 
de  l'cx  commandant  de  Taris,  mii  fut 
remidacé  par  Mural  (5;.  M"'*  Junot, 
après  un  court  \o>a*;e  en  r>our^ot;ne, 

i8Ô3)  oar  IriUr  d'êdiru  au  prefri  tt  aux  maire» 
i?e  ta  »ill«  de  Pjri',  S"'  y  repoiidirrut  par  le 
dou  d'un»  magnifique  cpée. 


■W\ 


JUN 


alla  rejoindre  son  mari  à  Arras  ;  et 
sa  vanité  ne  manque  pas  de  rappeler 
dans  ses  Mémoires  qu'elle  sVl.iblil 
dans  la  même  maison  où  avait  \o<^é  le 
Grand  Condé.  Elle  assista  aux  so- 
lennités du  camp  de  lîoulof^ne,  et  se  fit 
remarquer  par  les  éléj^anles  profusions 
de  sa  toilette.  Junot  se  morfondait  de 
dépit  et  d'ennui  à  Arras,  lorsque  le  14 
février  1804,  sur  l'avis  confuleutie!  que 
lui  donnait  Duroc  delà  découverte  de 
la  conspiration  de  Moreau,  il  se  rendit 
à  Pans  à  franc  élrier  pour  manifester 
son  zèle.  Les  pjemiers  mots  qu'il 
adressa  à  Bonaparte  furent  pouj-  l'eii  - 
«;a^er  à  laisser  la  justice  aojir  contre 
Moreau,  à  étouffer  toute  pensée  de 
clémence,  etc.  :  «Eh!  malhe;:reux  , 
«<  s'écria  le  premier  consul  ,  veux- 
«  tii  donc  que  l'on  dise  que  je 
«  l'ai  fait  assassiner  parce  que  j'en 
«  suis  jaloux  (6):'  »  Après  cot  entic- 
tien  Bonaparte  le  renvoya  à  Arras,  où 
il  s'occupa  excinsiveinent  de  perfec- 
tionner l'instruction  militaire  des  gre- 
nadiers confiés  à  son  coiiimandement. 


le  n  ai  janiais  vu,   ( 


lit  ^V 


d'A- 


«  brantès  dans  ses  AIrnioires  ,  de 
«  mère  plus  co(pielte  (iour  :;;i  (ille,  de 
*f  femme  plus  coquette  pour  elle  nn'iiie, 
"  (pie  Junot  ne  l'était  pour  ses  ^re- 
«  nadicrs,  Icj;- toilette  et  sinliiul  'eur 
»  coiffure,  etc.  (7).  »  Lorsque  Na- 
poléon devenu  empereur  lil  i\n  voj.'i^e 
a  Arras,  il  admira  la  belle  tenue  des 
gienadiers  de  .Junot,  le  nomma,  le 
iT)  août  180i  ,  f^rand-officier  d-i  la 
Léj^ion-d'IIonneur,  et  bientôt  après  co- 
lonel-f^énéral  des  hussards:  «'  J'ai  été 
«'  un  peu  sévè/e  en  t'envoyanl  ici,  lui 
"  dit-il;  »  puis,  il  ajouta  à  toutes  ces 
faveurs  une  pension  de  treiit;;  mille 
francs  sur  sa  cassette;  mais  Junot  ne 

(t>)  Mémoires  «Je  iiiadjiine  la  diicliesAn  <J'A- 
ijrantès,  t.  IX,  p.  j.\. 

(7)  Ce  fut  lui  (|iii  contribua  in  plus  à  r.iirr 
■sobstituer  ir.  schako  au  chapeau  à  (rois  cornes 
si  incoiD'no'Jfr  pour  l.i  Iroupc,  et  à  f.iirc  ri  non- 
'  «T  le  soldat  à  la  coiffure  pondrrn  pour  juloptfir 
la  tilus. 


JUN 

put  se  consoler  de  n'avoir  pas  été  com- 
pris danslapromotion  des  maréchaux  de 
Fiance.  A  coté^ard  on  ne  peut  qu'ap- 
prouver Bonaparte  ;  car,  avant  comme 
après  cette  époque  ,  cet  officier  ne 
commanda  ianiais  en  chef  sans  faire 
des  fautes  qui  compromettaient  l'ar- 
mée. Il  n'était  qu'un  brave  soldat  , 
un  redoutable  sabreur ,  un  excellent 
instructeur,  mais  point  du  tout  gé- 
néral. Napoléon  fit  alors  quelques  lois 
somptuaires  pour  sa  nouvelle  cour.  Il 
ne  voul.'iit  pas  que  dans  cette  cour, 
composée  d'une  foule  d'officiers  ho- 
norables, mais  la  plupart  sans  fortune, 
la  folie  d'une  jeune  femme  compromît 
le  repos  de  son  mari  ;  et,  à  cette  occa- 
sion, il  dit  à  Junot,  dont  l'épouse  dé- 
pensait plus  de  deux  cent  mille  fiancs 
par  an  en  parures  :  «  C'est  à  nous  à 
«  donner  l'exemple  de  cette  modes- 
«  tie,  et  à  ne  pas  écraser,  par  un  faste 
«  ridicule,  la  femme  d'un  ofiicier  paii- 
«f  vre  ou  d'un  savant  respectable.  » 
M'"*'  Junot  était  peu  d'humeur  à 
goûter  cette  morale  ;  elle  avait  aussi 
son  sujet  de  mécontentement  :  elle  n'a- 
vait {)as  été  noiiiiiîée  dain:î  du  palais  de 
la  nouvelle  impérnliire.  lîonaparte  fit 
comjjrendie  à  Junot  (pi'il  n  entendait 
pas  faire  un  double  emploi  de  grâces 
dans  sa  maison,  et  que  quand  le  mari 
.serait  de  la  maison  militaire,  la  femme 
jie  pourrait  être  dame  du  palais.  Bona- 
parte, que  Junot  obsédait  .<ans  cesse 
de  ses  demandes,  et  qui  au  reste  ne 
pouvait  trouver  un  agent  d'un  dévoue- 
ment moins  scrupuleux,  jeta  lesyeux  sur 
lui  lorsqu'il  voulut  envoyer  en  Portugal 
un  ambassadeur,  moins  pour  entretenir 
de  bonnes  relations  avec  cette  puis- 
sance que  pour  donner  lieu  à  des 
motifs  de  rupture  et  de  contprele  II 
était  en  même  temps  bien  aise  de 
l'éloigner  de  Paris,  à  cause  de  ses  in- 
cartades. Cet  homme,  qui  n'avait  per- 
fectioîiné  que  dans  les  camps  et  les 
mauvais  lieux  une  éducation  nianqiiée 


dins  sa  première  jeunes^,  était  pié- 
soinplueux  rominr  la  force  hrutalr  , 
tranrltiDl  ctjioinr  l'ignorance,  rasluciix 
sans  ^out ,  jMoili^uc  «^aoîi  ^éneru&ité, 
mai»  (lu  moins  bon  rt  fnielc  ami  ;  il  eût 
sjcriGé  tout  à  »on  maître,  hors  ceiiK 
aiuquelsil  rtaitalljir)ir;ria:iccamaratie 
enûn ,  mais  fier  d'une  faveur  dont  il 
abusait,  orgueilleux  avec  ses  inf^'rieurs, 
pointilleux  avec  les  ministre» sur  le  rei 
pecl  (]u*il  croyait  dû  i  ^s  di{;nités. 
C'élail  le  personna<;e  le  plu<  ron^ens- 
bie  au  rAle  ()ue  Napoléon  lui  destinait  ; 
nnis  le  \irii  de  .lunol  était  de  re>ter  à 
Pjris  pour  faire  le  service  de  premier 
aide  de  camp  de  l'empereur,  et  repren- 
dre le  rominandrment  de  la  première 
l'ivision  militaire  qu'on  avûit  séparée  du 
>;oitveNiciuent  de  Paiis.  Il  liésila  lon^ 
temp:>  a\ant  d'aiceptei  :  <*  Je  ne  ferai 
««  que  des  sottises,  disait-il  naïvement 
«*  à  Cambacérc:^;  comment  ima;;ii:er 
•  que  je  pourrai  me  plier  à  tous  les 
«  ^^rlJd^cment^,  à  toute  la  duplicité 
M  qu'exige  la  diplomatie  '  >•  On  ne  lui 
en  demandait  pas  tant  :  on  ne  voulait 
que  mettre  eu  jeu  sa   franrliise  lirutale 

!)oi:r  io'it  brouillera  Ij!>bonne.  D'ail - 
eurs  M'"*"  Junot  le  pressait  d'accepter; 
elle  biùlail  de  rernplicer  5on  titre  de 
gitUi'rrruintr  pnr  celui  tïairibtissU' 
t'rire ;  et  Napoléon  ne  dédaigna  pas 
de  donner  ses  instructions  verbales  à 
celle  femme  non  moins  léj^èie qu'ambi- 
tieuse." Soyezrircon'^pecle,  lui  disait  il, 
«  c'cst-à-diic  point  bavarde,  point  cail- 
•«  lettc.  IVenex  j;arde  surtout  de  vous 
n  moquer  des  usa^jes  du  pa>5,  lorsque 
««  vous  ne  les  comprendrez  pas ,  ni  de 
«  l'intérieur  de  la  cour.  Iiappeiez- 
n  vous  que  les  souverains  ne  pardon - 
««  nent  jaraa  .  la  raillerie.  »  Si  l'on 
veut  avoir  une  idée  dr  la  conduite  de 
M'"*^  Jnnot  à  Lisbonne,  il  faut  pren- 
dre le  contre- pied  des  sa^es  avis  que  lui 
donnait  l'empereur.  Ce  fut  au  milieu 
du  carnaval  de  1805  qu'elle  quitta, 
non  sans  regret,  Paris,   lai.ssant    aux 


JUN 


345 


soins  d'une  nourrice  G)nstance  (de- 
puis M""^  .Kuberl)  ,  sa  seconde  fille. 
AfficlianI  partout  le  titie  d'ambassa- 
drice, clle-mèinr  laconte  qu'elle  tra- 
versa la  France  a\ec  l'appareil  d'une 
princesse.  A  Ilau)nne.  Juiiot  la  quitta 
pour  se  rendre  à  Madrid.  Trois  jours 
aprb,  elle  partit  pour  rKApa};ne  avec 
unr  urmèf  de  mules  qui  poilait  ses 
ba^a^e^b  et  tiainait  ses  cinq  voiture*  et 
un  four,;on.  Arrivée  le  10  mars  1H06 
à  Madrid  ,  où  elle  s'arrêta  quelque 
tenip^,  elle  fut  reçue  par  l'ambasodeur 
lieurnoinille,  rt  fut  obligée  de  ne  pa- 
raître à  la  cour  qu'en  fMtniers,  selon 
l'anliiiite  ceiémonial.  Klle  dit  que  la 
reine  d'K*pjf;ne  lui  trouva  une  pbvsio- 
nomie  CNpa;;nole  Le  2'.)  mars  elle  .se  mit 
en  route  pour  Lisbonne,  où  Junot  fit  .<^on 
entrée  avec  tout  le  céré.-nonial  qu'on 
avait  observé  en  1789,  à  l'arrivée  du 
comte  «le  Cbalons,  ambassadeur  de 
Louis  Wl  a.ipiès  de  S.  M.  T.  F. 
M""  Junot,  dans  ses  Mémoires,  rap- 
porte que  Junot  se  permit,  en  traver- 
sant le  Portujjal,  des  scènes  de  violence 
et  de  brutalité  qui  justifient  tout  ce 
que  l'on  a  pu  dire  de  lui  à  cet  é^ard. 
Dans  un  accès  de  fureur  il  aurait  tué 
un  miileliei  sans  l'interveiitioii  de 
MM.  de  I.jbordeet  de  i\a\ne\al,  nui 
l'accompagnaient  dans  son  ambassade. 
G)rome  il  arri\a  le  jour  du  Vendredi- 
Saint,  un  nsaj;e  respecté  interdisait  de 
faire  tirer  le  canon  de  la  tour  de 
îielem  po:ir  sa  réception.  Junot,  en 
cette  occaMon  du  moins,  se  condui- 
sit avec  convenance.  I-ors  de  sa  pré- 
sentation au  prince  -  ré{;cnt  ,  il  se 
conduisit  d'une  manière  assez  ca\a- 
lierc.  La  présentation  de  M""'  Junot 
eut  lieu  ensuite  ;  dè>  ce  moment  elle 
ouvnt  sa  maison  ,  recevant  tous  les 
jours,  donnant  sou\eiit  de  ^rauls  dî- 
ners et  des  bals,  en  un  mot  clieichant 
tous  les  raosens  possibles  d'effacer  par 
son  lu\e  ladv  Fjtz-Gérald,  épouse  de 
l'ambi^sadeiir  d'Ani^leterre.    Klle-roê- 


346 


JUW 


me  dit  dans  ses  Mémoires^  avec  une 
forfanterie  passablement  ridicule  :  «  La 
«  France  femme  était  représentée 
«  par  moi.  J'étais  la  seule  femme  con- 
«  sidérable  du  corps  diplomatique.  Il 
«  y  avait  bien  lady  Filz-Gérald...., 
«  rélève  de  M"**^  de  Genlis  ,  mais  ses 
«<  mauvaises  manières  étaient  en  tout 
"  opposées  à  celles  de  son  mari,  n 
Junot  remit  au  prince-réj;ent  la  ratifi- 
cation du  traité  de  neutralité  entre  la 
France  et  le  Portuf^al,  conclu  le  23 
Janvier  1803,  par  le  maréchal  Lannes, 
et  la  manière  dont  sa  femme  raconte 
cette  scène  donnera  une  idée  de  la 
sinjiulJère  diplomatie  de  ce  lieutenant 
(le  Jîouaparte  :  «  Oui,  oui ,  dit  alors  le 
«  prince  ;  c'est  à  cette  même  place 
«  que  j'ai  donné  ma  parole  royale  au 
«  général  Lannes.    C'est  un  homme 

«   qui  est  un    peu  »  Junot  fit 

ses  j^ros  yeux  ;  le  pauvre  prince  rentra 
dans  sa  coquille  et  dit  aussitôt  : 
«  C'est  un  brave  homme ,  oh  !  un 
«  brave  homme  ;  il  avait  un  grand 
«  sabre  qui  faisait  du  bruit  dans  l'es- 
«  calier  lorsqu'il  venait.  »  Peu  de 
jours  après,  le  prince  de  Brésil  offrit  le 
^rand-cordon  de  l'ordre  du  Christ  à 
Junot,  qui  le  reçut  avec  la  permission 
de  l'empereur.  Au  mois  d'oct.  1805, 
sans  attendre  l'ordre  de  Napoléon,  il 
alla  le  joindre  quelques  jours  avant  la 
bataille  d'Auslerlilz  ,  laissant  à  Lis- 
bonne Piayneval  et  M""'  Junot.  Mais 
le  désir  de  se  .signaler  n'avait  pas 
été  le  seul  motif  de  cette  proniptitude 
à  rejoindre  l'empereur,  il  picuait  , 
ainsi  que  sa  femme,  un  vif  intérêt  à 
la  belle  M'"®  Pu-camier  dont  le  mai  i 
venait  de  faire  faillite.  Kn  pas;;ant  par 
l'aris  ,  il  avait  promis  d'intercéder 
auprès  du  maître,  afin  d'obtenir  un 
prêt  de  deux  millions  pour  ce  financier. 
Cette  demande  indiscrète  porta  sans 
doute  Napoléon  à  éloi;;ner  Junot  en- 
core une  lois  de  la  capitale,  il  l'envoya 
dans  les  étals  de  Parme  et  de  Plaisance 


JUN 

pour  calmer  une  insurrection.  Regar- 
dant cette  mission  comme  un  nouvel 
exil,  Junot  chargea  sa  femme  de  de- 
mander à  l'empereur  s'il  fallait  qu'elle 
partit  pour  aller  le  joindre  à  Parme: 
«  C'était,  dit-elle  dans  ses  Mémoires, 
«  une  petite  ruse  pour  savoir  s'il  de- 
«  meurerait  long-temps  en  Italie.  »>  Na- 
poléon répliqua  par  quelques  paroles 
évasivcs  ;  c'était  tout  ce  qu'elle  voulait  ; 
les  plaisirs  de  l'hiver  de  180G  la  rete- 
naient à  Paris  ;  et  d'ailleurs  Junot,  qui 
ne  se  piqua  jamais  de  fidélité  conjugale, 
avait  trouvé  à  Parme  des  consolations 
telles  que  sa  femme,  comme  elle  le  dit 
elle-même  2iWm\)tTtnv^  y  eût  peut-être 
été  de  trop.  A  la  fin  de  l'hiver,  la  santé 
de  ses  filles  devint  pour  elle  un  prétexte 
à  de  nouveaux  délais  ;  bref,  elle  était  en- 
core à  Paris,  lorsque,  au  mois  de  juillet, 
il  fut  permis  à  Junot  d'y  revenir.  Quel- 
ques joui's  après*  (le  19),  il  était  de 
nouveau  nommé  gouverneur  de  Paris 
et  commandant  de  la  première  division 
militaire.Tantdeprospéiitéstournèient 
lattte  aux  deux  époux.  Les  dépenses 
extravagantes  recommencèrent,  et  bien 
que  Junot  eût  un  traitement  de  plus 
de  trois  cent  mille  francs,  et  (jue  l'em- 
pereur ne  ces.<;àt  de  donner  de  l'ar- 
gent, il  n*avait  que  des  dettes,  et  dissi- 
pait des  trésors  sans  profit,  sans  discer- 
nement, souvent  même  dans  des  excès 
grossiers.  Il  voyageait  avec  la  vitesse 
de  l'empeicur  :  il  avait  ses  propres  re- 
lais, des  centaines  de  chevaux  et  autres 
folies  semblables.  «  Plus  d'une  fois 
«  dans  son  bel  hôtel  à  Paris ,  disait 
«  Napoléon  à  Sainte  -  Hélène  (8), 
«  après  avoir  fortement  déjeuné,  on 
<'  l'a  vu  entrer  eu  fineur  aux  moindres 
*'  réclamations  du  plus  petit  créancier, 
«  et  prétendre  le  solder  à  coups  de 
«  sabre.  »  La  femme  n'était  pas  moins 
prodigue  pour  des  fantaisies;  et  tous 
deux  à  qui  mieux  mieux  fourni-jaierit 
ample  matière  à  la  critique  par  les  gia- 

(8)  Mémoriul  de  5ainlt- Hélène, 


JUN 

Tp>  infonNr,ji:rnrr»  de  leur   roiiduitf 
Napolron,  iti.iiiiirnminrM»u«riain  que 
roinme  anrieii  âini  de  Junol,  ri ,  qtunl 
i  \i  frminr   dp  re  dernier,  guidé  p^ir 
le  ru  il  de  la   (.'orsr  dont 

rllr  '    .  mire   t'J),  la  fil  \enir 

un  jour  poui  lui  donner  des  avis  pater- 
nels sur  le*  driordres  de  5on  mari,  sur 
ta  profu-siuii  de  lilamants  quViie  même 
avait  elaiéA  inron«^idëi<fmcnl  i  son  re- 
tour de  l*i»rlut;al.  sur  scn  intimes  rela- 
tionsaver  M.  de  Mellernitli,  lesquelles 
pouiuiient  inquiéter  lu  polit tifue. 
•«  Klle  se  fâcha,  dil  encore  l'empereur, 
«  el  j'en  fus  Irailé  comme  un  petit 
«  garçon  ;  alors  il  ne  rac  resta  plus 
«  cjii'à  l'envover  promener  et  à  l'aban- 
**  donner  à  elle  niiine.  »  L'ncquisitinn 
coûteuse  du  domaine  du  liaincv,  que 
Jiiuol  ne  pul  paver  et  dont  il  fut 
ol)li-é  de  se  défaire  plus  tard ,  d'après 
l'ordre  positif  de  I  empereur ,  n'e^t 
pas  une  des  moindres  fautes  qui  fu- 
rent reprochée>  i  ce  couple  si  peu 
modéré  dans  «es  désirs.  Junol  en- 
tretenait avec  M'"*"  Mural,  qui  n'était 
encore  que  grande-duchesse  de  Kfrg, 
des  relations  fort  intimes,  non  qu'elle 
eût  pour  lui  un  ^oùt  véritable,  mais 
elle  e-pérail,  en  V enchaînant  par  se» 
faveurs,  l'amener  à  servir  ses  vues  am- 
bitieuses. En  eiïel,  elle  ne  songeait  à 
rien  moins  qu'à  ménaj^er  à  son  époux 
rhérila{;e  de  l'empereur  dans  le  cas  où 
il  aurait  été  tué  dans  une  de  ses  cam- 

f»a;;nes.  Mural  se  llatlail  d'avoir  pour 
ui  l'armée.  De  son  côlé,  l'impératrice 
Joséphine  songeait  an  même  héritage 
pour  son  Gis  Eugène  Heauharnais; 
et  les  deux  belles- crurs  ^entaient  ré- 
ciproquement de  quelle  importance  , 
le  cas  échéant  de  la  mort  de  Na- 
poléon ,  il  serait  d'avoir  pour  sol  le 
gouverneur    de    Paris   (10).   Lorsque 

10  Si  l'on  en  croit  madame  d'Abranirs,  nu- 
dame  Mur^t  a«ail  rti-  jucqu  à  Tooloir,  dans  m* 
àmt  fiil-jiit,  que  let  cuuirur*  de  la  litrre  <J«Ju- 
Bol  •(  d«  là  tieoiic  fu5»«ot  r x.irtrinent  l«rs  niroMi. 


JIN 


347 


Ronapaitr  était  i  Tilsitt ,  Joséphine 
invita  Junol  i  déjeuner,  elle  ron- 
ds pour  >.i.Mii  re  qu'il  ferait.  Ju- 
nol, embarra«  c  parle  nom  d'Ku^ène 
que  mrtlait  en  avant  Joséphine,  fit 
une  rîj'dîi'.p  évas'^p  t!e  manière  à  ne 
|>  .  mai»  s'il  lui  fut 

a  nations    timides 

de  la  pauvre  nnperatricc,  qui  n'était 
plus  d'a^e  ï  séJuiie  personne,  il  n'en 
fut  pis  de  môme  de  la  grande-duché  vse 
Caroline  qui  était  la  plus  ap-éable, 
sans  contredit,  des  «trurs  de  Ilona 
parte.  ••  Klle  était  foit  élevante,  dit 
«  M"**  d'Abrantès ,  ouvrait  toujours 
«  le  bal  avec  le  j;o  iverneur  de  l'a- 
«  ris,  jouait  au  vkisl  avec  lui ,  mon- 
«    t.vt  à  cheval  avec  lui,  le  recevait  >eul 

*  de  préférence  à  tout  autre  ;  enfin  ce 
«    pauvre  gouverneur  de  Taris  qui  n'é- 

*  tait  pas  un  an;;e  ri  dont  la  tête  et 
«  mêineleccrur,  pour  être  bien  i  moi  et 
«  i  ses  enfants,  n'en  étaient  p.isniuin« 
«  accessibles  i  des  impressions  passa- 
«  erres,  ne  pul  résister  aux  séductions 
«  qui  naturellement  s'offraient  à  lui..; 
«  il  dcvli.t  amoureux  avec  pa<>ion... 
«  I.es  résultats  de  celle  malheureuse 
«  affaire  otil  été  la  mort  et  le  mal- 
«  heur  de  Junol....;  il  fut  exilé:  car 
«  le  gouvernement  ou  vice-royauté  de 
«  Portugal  n'élail  autre  choso  qu'un 
M  exil  dore.  »  M'"'  d'.Kbraiilès  ne 
dit  pas  tout  :  elle  aurait  pu  ajouter 
une  scène  scandaleuse  entre  elle  et 
son  époux  à  propos  de  M.  de  Met- 
lernich  ,  qui  faisait  marcher  avec  au- 
tant d'habileté  que  de  bonheur  une 
double  in!rij;ue  avec  M'"*  Mural  et 
M">«»  d'Abrantès.  Chacun?  des  tleux 
s^crovail  la  seule  aimée.  L'empereur, 
voulant  mettre  Gn  à  cc.^  désordres,  fil 
saisir  par  le  mo)en  de  sa  police  et 
tomber  entre  les  mains  de  sa  sœur 
une  lettre  que  le  galant  diplomate 
adressait  à  M"""  Junot.  M'"*  Murât 
envo>a  au  mari  la  lettre  fatale.  Junol, 
non  content  de   traiter  militairement 


34fc 


JUN 


son  épouse  infidèle,  voulait  appeler  en 
duel  son  heureux  adorateur.  Marniout, 
son  compatriote  el  son  ami,  lui  repré- 
senta que  ce  serait  jouer  trop  gros  jeu  : 
««  L'empereur,  lui  dit-il ,  a  le  plus 
«  grand  intérêt  à  bien  traiter  M.  de 
««  Metternicl).  II  n'est  déjà  pas  trop 
«  satisfait  de  toi,  je  te  conseille  de 
«  ne  pas  l'irriter  par  une  démarche 
«  peu  sage.  Les  toris  de  Melternich 
«  sont  de  ceux  qu'un  homme  d'esprit 
«  ne  venge  jamais  directement.  »  Puis 
il  lui  conseilla  d'user  de  représailles  à 
l'égard  de  l'ambassadrice.  D'autres 
amis  tinrent  à  Junot  le  même  langage 
et  finirent  par  le  persuader;  mais  s'il 
se  dirigea  vers  M"""  de  Metteriiich,  ce 
ne  fut  que  pour  donner  une  preuve  au- 
thentique de  son  ignorance  des  formes 
de  la  bonne  compagnie.  Il  envoya  un  de 
ses  aides-de-camp  complimenter  l'am- 
bassadrice et  la  prier  de  passer  chez  lui, 
ayant,  disait-il,  une  communication  à 
lui  faire.  M""'  de  Melternich  renvoya 
l'aide-de-camp  avec  la  réponse  que  mé- 
ritait l'insolence  d'un  pareil  message. 
Junot  comprit  la  leçon;  mais  marchant 
de  sottise  en  sottise,  il  ne  se  rend  chez 
l'ambassadiire  que  pour  lui  dénoncer 
platement  l'inGdélité  de  son  mari,  et  lui 
porter  sa  tendre  correspondance  avec 
M'"*^  Junot.  ï.es  lettres  étaient  sans  si- 
gnature ;  iM""^  de  Metternich  affecta 
de  ne  point  les  connaitre,  et  congédia 
Junot  en  lui  reprochant  d'avoir  man- 
qué de  délicatesse  el  d'égards.  Llle  se 
plaignit  à  Napoléon,  qui  envoya  sur- 
le-champ  chercher  Junot,  et  lui  repro- 
cha sévèrement  son  peu  de  savoir-vi- 
vre. Le  général  ,  toujours  brusque  ,  el 
ne  se  soumellant  qu'avec  peine  aux 
habitudes  de  respect  qu'exigeait  le  nou- 
vel empereur,  répondit  :  »  Vous  allez 

*  voir  qu'il  faudra  me  laisser  faire 

«  sans  me  plaindre.  Je  voulais  assom- 
«  mer  le  beau-fils,  et  lui  passer  mon 
«  sabre  au  travers  du  corps.  Marmont 
«  qui  se  mçle  de  me  donner  des  avis 


JUN 

«  m'a  retenu.  Il  fallait  pourtant  le 
«  punir.  J'ai  montré  ses  lettres  à  sa 
«  femme.  J'aurais  dû  prendre  ma  re- 
«  vanche  avec  elle. — A  la  bonne  heure, 
«  répliqua  l'empereur,  la  vengeance 
o  eût  été  selon  les  règles  de  la  bonne 
«  compagnie;  celle  que  vous  avez  prise 
rt  ne  convient  ni  à  un  galant  homme, 
«  ni  à  votre  rang.  »  Puis  il  ordonna 
à  Junot  de  lui  apporter  toutes  les  let- 
tres avant  la  nuit,  ce  qui  fut  fait  ;  et 
le  général,  qui  sans  cet  incident  n'au- 
rait peut-être  pas  emmené  sa  femme 
en  ambassade,  n'eut  garde  de  la  lais- 
ser à  Paris.  Au  surplus  ,  ce  départ 
était  une  véritable  disgrâce;  Bonaparte 
n'ignorait  pas  la  publicité  de  la  liaison 
entre  Junot  et  IM '"'' Mural  ;  il  avait 
eu  avec  lui  sur  ce  sujet  une  explication 
des  plus  vives,  dans  laquelle  Junot  s'é- 
tait permis  de  répondre  en  matamore 
à  l'égard  de  Mural.  Bonaparte  repro- 
chait encore  à  Junot  de  ne  voir  (/ne 
(les  ennemis^  parce  qu'il  cédait  à  une 
rtianie  de  sa  femme,  qui  était  de  se  fau- 
filer dans  toutes  les  sociétés  du  fau- 
bourg Saint-Germain,  même  les  plus 
hostiles  au  nouvel  établissement  impé- 
rial. Enfin,  et  c'est  là  ce  qu'il  y  a  de 
plus  honteux  pour  Junot,  Bonaparte, 
dans  sa  politique  odieuse  envers  le 
Portugal,  avait  besoin  d'un  instrument 
servile  el  audacieux  pour  envahir  ce 
pays,  el  s'emparer  du  trésor,  delà 
flotte,  ainsi  que  de  la  personne  du  prin- 
ce-.'-égenl.  Il  jeta  d'abord  les  yeux  sur 
Lannes;  mais,  dès  que  ce  péiiéral  sut 
qu'il  s'agissait  de  se  présenter  en  ami 
pour  abuser  un  prince  qui  l'avait  com- 
blé de  biens  cl  d'égards,  il  repoussa 
avec  indignation  une  mission  sembla- 
ble. Un  tel  scrupule  n'arrêta  pas  Ju- 
not, qui  cependant  était  absolument 
dans  la  même  position  à  l'égard  du 
prince  de  Portugal.  Ce  n'est  pas 
qu'il  n'eût  quelque  regret  de  quitter 
les  plaisirs  de  la  capitale  el  l'avan- 
tage   de    rester   auprès    de    i'empe- 


JUN 

rctir,  «|ui  lui  ilonnait  toujours  sans 
coiuplrr.  .\  ce  propo»  M'"*  d'Abran- 
lr<»  a^our  que  Jiinot  élail  liu  tuMiilitc 
drs  faxoriN  qui,  iniir|t«ni]ainnient  lic 
Irur»  nrlifs  rmolumrnlN  ,  ipcevairnt 
lous  lr%  nioi>  du  mailrr  une  ^ratt6- 
ralioii  i\r  huit  ou  dix  mille  lianes; 
puis  elle  ajoiitr  crilc  irllrxioii  di^ne 
de  remarque  dans  la  bouche  d'unr 
frmmr  :  ••  Plusieurs  étant  jeiiiir^  , 
H  dil-rlle,  aimaient  le  plaisir,  peut-être 
•«  même  le  fasle.  Pourquoi  non  i*  une 
m  cïistfiice  -somptueuse,  peut  -  ^tre 
*i  même  un  peu  >\bante,  leur  paraîs- 
M  sait  doubirmriit  doure ,  etr.  •*  \.e 
-0  août,  au  moment  du  départ  de  son 
niaii,  M'^'^Junot,  apirs  a>oir  fait  le> 
honneurs  de  la  frie  du  l.'i  aoùl,à  l'HA- 
tel-dc-N  il'e,  fut  cliar^ee  par  Napoléon 
de  rrce\oir,  à  son  domaine  du  Uaincv, 
la  princesse  de  NN  uilember^.'  (|ui  ve- 
nait epou^er  Jrrome-.Na['oléon  ;  et, 
par  les  détjils  qu'elle  donne  de  celte 
réception  ,  on  \oil  que  la  princeN»e  fut 
a\ ec  elle  plii>  froide  que  gracieuse  Junol 
par  lit  euBn  de  l*ans  Ir  28  août  1807. 
Arri\c  aux  pied>  des  Pyrénées,  il  quitta 
son  poste  pour  entreprendre  un  \o>ai;e 
do  plaisir  à  lJa;;ncresde  Bi^orre.  Cette 
excursion  dans  laquelle  il  perdit  un 
bracelet  de  clie\eux  blonds  déplut  à 
l'empereur,  qui  lui  fil  écrire  le  12 
octobre,  par  le  ministre  de  la  guerre 
ClarLe.  \  celaJuruit  répondit  selon 
sa  coutume  ,  d'une  manière  fort  in- 
convenante,  ce  qui  lui  attira  une  nou- 
velle réprimande.  Dans  cette  dépêche 
du  iiitnistre,  daté  *  du  29  octobre,  et  qui 
est  un  monument  précirui  pour  l'his- 
toire, en  ce  qu'elle  ilô\oile  la  politique 
astucieuf.e  de  Napoléon,  il  était  ordon- 
né à  Junot  de  marcher  de  Ciudad-l\o- 
driwo  ^ur  Lisbonne  du  20  au  3()  du  mê- 
me mois,  et  de  ne  point  s'arrêter,  que  le 
prince  récent  déclarât  ou  non  la  :;uerre. 
Si  quelque  chose  choqua  .limot  dans 
CCS  insirudions,  ce  n'est  point  le  rôle 
odieux  qu'elle^  lui  imposaient  à  l'égard 


JUN  349 

d'un  prince  dont  il  avait  reçu  l'accueil 
le  plus  gracieux,  c'est  que  le  ministre 
de  la  pierre  ne  lui  donnât  point  le 
litre  d  rrrr//r«/r.  Il  lui  enxoya  un 
cartel  ;  pui*,  Ne  plaij;nit  à  l'empereur 
qui  ,  tenant  à  ce  que  l'invasion  du 
Portugal  n'éprouvât  aucun  retard  , 
pavsa  encore  cette  incartade  à  Ju- 
not ,  et  enioi^nil  au  ministre  de  lui 
donner  ce  tilie  auquel  il  tenait  tant. 
Enfin,  M'"'  d'Abrantés,  qui  fr,u^e 
Miperbes  toutes  ces  forfanteries  de  son 
époui ,  ajoute  que  Bonaparte  manda 
Clarke  aux  Tuileries  pour  lui  tioimrr 
un  sa%Htn  ;  circonstance  qui  pourrait 
bien  être  un  mensonge.  Quoi  iju'il  en 
soit  ,  on  sait  que  Junot  exécuta  ses 
instructions  axec  une  impito\able 
ponctualité.  Il  arnva  le  27  novembre 
à  Lisbonne,  où  il  fit  son  entrée  plu- 
t«\t  rti  fiisiitif  que  comme  un  homme 
qui  xenait  dire  à  tout  un  poiiple  :  Jr 
prends  ftossrssion  du  /mys  (11).  Son 
armée  était  décimée  par  les  privations 
et  les  marches  forcées;  et  les  (juatorie 
ce. .ti  hommes  qu'il  con«er\ait  autour 
de  lui  avaient  les  pieds  tellement  déchi- 
rés, qu'ils  pouvaient  à  peine  se  soute- 
nir ;  la  moindre  tentative  de  résistance 
eût  arrêté,  détruit  entièrement  une 
armée  inconsidérément  lancée  depuis 
Alcantara  dans  celte  course  aventu- 
reuse. -Mais  le  prince-récent  était  in- 
capable d'aucune  résolution  énergique. 
•«  Lorscju'il  apprit  «piune  armée  se 
«<  ra>somblait  à  SaUmanque,  dit  la 
««  d:irlie>sc  d'Abrantés,  il  palit  ;  lors- 
«  qu'il  sut  que  son  chef  était  celui-là 
•<  même  qui  avait  pris  le  titre  d'am- 
««  bassadeur,  il  sauta  de  joie.  >»  L'in- 
sensé ne  vovait  pas  que  le  choix  de 
ce  tnéme  homme  le  coiniainiiait  (juand 
bien  même  Napoléon  n'aurait  pas  dit: 
«  Lu  miiisori  dr  Hru^unce  a  cessé 
M   de  régner  (12).  »  Dès  ce  moment 


,11      Mrmjirr,    Je    /u    i/uc/>ei>e    aylb'anlei. 
Il)  Toin.  M,  ;»a?.  9  <*•  »'"'  M'-U'oires.    Per- 
»oiiue,  00  eu  couTicndri,  n'a  accosé  plus  trvèrc- 


35o 


JDN 


J13N 


la  terreur  se  mit  dans  le  conseil  an 
prince;  il  chassa  les /inglais,  comme 
il  l'écrivit  à  Teiupereur,  son  honjrcrc. 
l'ci sonne,  excepté  (loin  Rodrigue  de 
Suiiza  et  le  comte  de  Linarcs  ,  n'osa 
ouvrir  l'avis  de  se  défendre  contre 
une  armée  si  peu  redoutable.  Après 
avoir  envové  prè.î  de  Junol  deux  am- 
bassadeurs qui  ne  purent  suspendre  sa 
niarcbe  ,  le  prince  s'embarqua  pour  le 
Brésil.  Le  dernier  bâtiment  de  la  llut- 
lille  qui  emmenait  la  famiile  royale,  avec 
les  trésors  de  la  couronne,  était  en- 
core en  vue  du  port  de  j^isbonnc  ;  Ju- 
not  s'empressa  de  montera  la  tour  de 
l»élem;  et,  avec  une  brutalité  sauvat^e, 
11  chargea  lul-inoine  un  canon  du  fort, 
le  fit  pointer  et  tirer  par  M.  de  Tas- 
cher,  son  aide  de-camp.  Le  boulet  passa 
dans  les  a^rrès  du  bâtiment,  et  le  con- 
traignit d'amener;  mais  il  ne.  pariait 
aucune  personne  de  la  famille  roya- 
le^ ajoute  M'"*'  d'Abrantès,  qui  dans 
ses  Mémoires  semble  s'associer,  par  la 
manière  dont  elle  les  présente,  à  tou- 
tes ces  indignités.  Ce  coup  de  canon 
était  au  reste ,  de  la  part  de  Junot, 
une  bravade  gratuite  et  spontanée  ;  car 
ses  ordres  secrets,  écrits  de  la  main 
même  de  /Vm/>^rrj/r,  portaient  spécia- 
lement de  tout  faire  pour  s'emparer  de 
quelques  personnes  désignées,  mais 
non  pas  du  prince  de  Brésil,  Et 
qu'en  aurais-je  fait?  dit  plus  tard 
cet  aveugle  séide  ,  quand  l'année  sui- 
vante sa  femme,  qu'il  retrouva  à  la 
Bocbclle,  rintcnogea  avidement  sur 
les  moindres  détails  de  son  séjour  en 
Portugal.  Pendant  qu'il  se  gorgeait  de 
plaisirs  et  de  pillage  dans  ce  beau 
rovaume,  sa  lemme  qui  avait  déjà  eu 
cinq  filles,  dont  deux  seules  ont  vécu  , 
s'écartant  enfin  de  cette  fécondité  fé- 
minine (c'est  toujours  elle  qui  parle), 
le  rendit  père  d'un  fils,  aujourd'hui 

riiPiil  Junol  qne  sa  f«inrne  clans  ce  pai-sose  le- 
ui:\T(\\iA)U..  Qui'l  coi.ira»le  il  j)r»'-(i<-nte  avec  I«s 
a|)ologies  qui    {(recèdent  et  qui   suivcul  ! 


héritier  du  titre  ducal  d'Abrantès. 
«  Je  te  remercie  ,  lui  écrivait  Junot , 
«  à  cette  occasion  ;  enfin  je  pour- 
«  rai  donc  laisser  à  l'empereur  un 
«  autre  mol-même...  »  Napoléon  et 
l'impératrice  Joséphine  tinrent  le  nou- 
veau-né sur  les  fonts  de  baptême. 
A  peine  délivrée  des  précautions  que 
lui  imposait  la  maternité,  M"^®  Ju- 
not se  jeta  plus  que  jamais  dans  le 
tourbillon  des  plaisirs  de  Paris;  et  l'on 
peut  lire  dans  ses  Mémoires  tous  les 
détails  qu'elle  donne  sur  les  fêtes  de 
cette  brillante  époque  de  l'empire  (13). 
Continuant  à  jouer  son  rôle  de  gou- 
oernantc  de  Paris,  elle  s'entourait  de 
gens  de  lettres;  mais,  peu  sensible  à  la 
cour  assidue  qu'ils  lui  faisaient,  elle 
immole,  dans  cette  partie  de  son  livre, 
toute  la  litlératui  e  du  temps  de  l'em- 
pire à  ces  talents  vraiment  remar- 
quables, qui  ont  pris  bien  jeune  (sic) 
encore  leurs  degrés  dans  f  avenir. 
Ce  fut  alors  que  Na[>oléon  s'appro- 
pria le  Raincy,  que  Junot  ne  pouvait 
payer  et  dont  la  possession  l'en- 
traînait à  de  trop  fortes  dépenses.  En 
effet ,  depuis  cette  acquisition,  M.  et 
M™^  Junot  avaient  pris  une  livrée 
assez  ressemblante  à  celle  de  la  mal- 
son  d'Orléans,  à  qui  avait  appartenu 
le  Raincy  ,  et  Junot ,  selon  les  pro- 
pos des  courtisans ,  faisait  le  petit 
duc  d'Orléans,  après  aooir  voulu  sin- 
ger le  comte  d' Artois  à  Longchamps. 
Ce  fut  Napoléon  lui-même  qui  voulut 
bien  annoncer  à  M'"'^  Junot  qu'il  se 
chargeait  du  Raincy  ;  [luis  à  la  fin 
de  cette  conversation  il  lui  dit  :  «<  S'il 
«f  vous  plaît  d'aller  en  Portugal  faire 
«  la  petite  reine,  je  vous  léponds 
ti  que  vous  trouverez  votre  mari  dans 
«  une  bonne  attitude.  »  Quelque 
temps  après.  Napoléon  qui  avait  con- 
féré à  Junot  le  titre  de  gouverneur- 
général    de    Portugal,   qu'il    cumidait 

(i3;  J'avais  alors  dix- sept  loges,  une  à  tiia- 
que  spectacle* 


JUN 


JUN 


35i 


avec  celui  de  (^nuYcnicur  de  Pari»  , 
lui  p«.  *  '  iidre  encore  le  lilre 
«le  ilu«  A  relie   uou^rllr 

fa\cur.   M""   Jurmt  uc  se 
lie  j»»ie:   «"Ile  rrnrle  «le  \i;  . 

telle  |Ui:.c  de 
••   a>ail  U  pius 
joii  nom  tir  la    tr*éUftf.    ••  Je   vou 
M    Ui&  le  nommer  duc  de   N:iuret)i, 
•    'ut  dit  ï  celte  ocraiiiun   l'eiiipeieur; 
«    niaiN  on  raut.i't  appelé  Junut  dr 
Snzureth^  comme  on  dit  Jrsus  de 
Sauirrth;  et  c*c>t  ce  qui  m'en   a 
eiupèrlié.  »  Toute  la  vie  de  la  nou- 
\ l'Ile  iluclie 
lii^uei    de 
|K)lili(|urs.    A  tt 
une  culcie   de    I  • 
leçii    plu&ieui>»  fui»   uu   e<  > 
qui    appoitait    en    t tance  > 
ilu    hrri   d'ritummunù  utiuit    iauce 
i.inire  Napoléon  pai  le  pape  Pie  Nil. 
(>iinnicnl    donc    ^r  hit  il  ,    dirait 
celui-ci  ,    que    toujour»    elle    »oit 
liée    avec    des  cuaemis .'  »    Tant 
•le   fjules  finirent   par  a\oir   leur  sa- 
laire. Au   coraroenroracnt    de   raniiéc 
ISOO  ,    Junol,   (lui    était   encore   eu 
l'ortut^ai,  reçut    I  urdre   d'upu  i  entie 
la    place  de   ;;ou\erneur  de   Fan»    et 
celle    d'aide-dc-camp    de    l'empereur 
comme  incompatibles.  Toujouin  mau- 
vai^e   lèle  ,    il    répondit    par    la    dé- 
m'  -.ion    de  lotîtes   ses  places    liona- 
naparte.  cédant    aux    sollicitations  de 
M"'^  Junot  ,  se  contenta  de  lui  oler 
la    place    de  premier    aide-de-camp. 
(Juant  à  celle  de  gouverneur  de  Paris, 
il   Kii    eu  conser>a    le    titre  jusqu'en 
1Si:î,  sans  cesser  de  lui   confier  des 
mis<ions  au  dehors  qui  l'empêchaient 
(l'eu  TvMnpIir  les  fonctions.    Napoléon 
a\ait  pciiélré  le  but  .'^ecret  de  l'iiitiuic 
liai>v>n  de   M"'"  Mural  et  de  Junot. 
On  en  doutera    d'autant    moius  que 
dans    un   eiiticticn   trèsMf    qu'il   oui 
avec  ia  duchesse  d'Ahranlès,  il  lui  «lit  : 
«    Il  e^^t   impo>sible   tuie  l'homiue  qui 


«  peut  à  toute  heure  entrer  sous  ma 

•   tente  ou   dans  mon  palais,  a^er  Ir 

••    litre  de  mon  aide  de  camp  ,  >oit  en 

1  '  ir  de  Pari»,  et 

<■    nulle  hom- 

••    Ww.-  Lfi'CUiLui   Junot  trônait  â 

|,isbr>nne    rj  qtial'ff   t\r  ;r -f  i  •  nrur- 

^e:  ml 

d'i  iiirs, 

et  de  dou^e  renl»  ci'uzade>  pa.    mois 

pour  ^a  table,  dont   \\  ne  fai  a  t   paii 

mène  leA  frais  ,  con* errant  d'ud leurs 

»es    énorme»    émolument»    de    Pari». 

Quoii;u'd  eût  alur»  une  irinifr  de  mai' 

.   comme  le  dit  la  duchesse,   il 

<  ;  \}^s  d'a>oir  pour  elle  de  pre- 

«)iiN  :  car,  de»  le  moment 

.tion  1-2  février  1808).  il 

lié  une  ca<.^lle  remplie 

;  «le  pieires  précieuses,  rc 

3 ni  ne  iaisvj  pas  de  causer  da  scan- 
ale.  .M""^  d'Abranlé>  a\oue  dan»  ses 
Mémoires  que  la  boîte  ne  contenait 
que  cinq  cents  carats  de  diamants 
bruts,  ce  qui  est  encore  bien  honnête. 
Rient  At  api  es,  apprenant  nue  sa  fem- 
me était  accouchée,  il  lui  fit  enNO>er, 
par  le  comnieice  de  Lisbonne,  un  col- 
lier de  diamants  qu'elle-même  estime  à 
trois  cent  c!u({uante  mille  francs.  Kn 
ineuic  temps  il  reo^a;;eail  à  lemplacer 
le  Kaiiio  par  une  autre  maison  de  cam- 
pagne ;  et  file  loua  la  Fuite  Jf  Suint- 
Jiinin,  ^  es  NeuilK.îj,  elle  eut  un 
théâtre  ;  elle  joua  la  comédie,  couronna 
des  rosières,  et  continua  de  recevoir  des 
étrangers,  et  surtout  dts  Kus&es,  ce  qui 
était  pour  Napoléon  un  sujet  continuel 
de  mécontentement.  Cependant  tout 
allait  de  mal  en  p\s  dans  le  Portu<:ral  ; 
dppuis  deux  mois  Junot  n'a>ait  pas 
dohuc  de  ses  nouvelles,  même  a  l'era- 
pcreur.  Klle  deuiaixla  à  ne  pas  faire, 
eu  sa  qualité  de  j^ouveriian'.e,  les  hon- 
neurs des  fêtes  de  l'Hôtel  de-VilJe, 
alléguant  (;ue  les  personnes  qui  devaient 
\  assister  tiouveiaient  extraordinaire 
(}u'elli>  se   mit    en    évidence ,    tandis 


352 


JUN 


qu'elle  devait  avoir  pour  son  mari  des 
motifs  d'inquiétude.  «  Eh  !  pourquoi 
«  ces  personnes  savent-elles  que  vous 
«  éles  inquiète  ,  s'écria  Napoléon 
«  courroucé;'  Voilà  le  résultat  de  vos 
«  conciliabules  de  salon,  de  tous  vos 
«  bavardages  avec  mes  ennemis.  Vous 
«  déclamez  contre  moi  ;  vous  attaquez 
«  tout  ce  que  je  fai«  !  »  L'entretien  se 
prolonfjea  sans  que  l'allière  duchesse, 
qui  connaissait  trop  bien  le  faible  de 
1  empereur  pour  ses  vieilles  connais- 
sances ,  baissât  le  ton  ;  mais  enfin  le 
maître  se  montra  et  coupa  court  à  l'en- 
tielien  par  ces  mots  qui  ne  souffraient 
pas  de  réplique  :  «  Tout  ce  qu'on  dit 
«  sur  Junot  est  faux  ;  Junot  capituler 
«  comme  Dupont  !  Tout  cela  est 
«  mensonge  ;  mais  précisément  parce 
M  qu'on  le  dit  vous  devez  aller  à  l'Hô- 
«  tel- de- Ville.  Vous  devez  y  aller, 
•c  entendez-vous  ?  et  si  vous  étiez  ma- 
«<  lade,  vous  devriez  y  aller  encore. 
«  C'est  ma  volonté.  Bonsoir.»  Il 
n'était  (jue  trop  vrai;  Junot,  après  s'ê- 
tre battu  en  héros  à  Vimieira,  avait 
été  forcé  d'évacuer  le  Portugal  (30 
août  1808),  en  vertu  de  la  capitulation 
de  Cintra;  mais  après  sa  retraite,  si 
l'on  ne  pouvait  accuser  sa  bravoure, 
ce  fut  un  cri  ^^énéral  contre  son  impé- 
ritie,  ses  déprédations,  ses  débauches  ; 
et  les  journaux  ant!;lais  firent  grand 
bruit  du  sérail  de  l'ex-gouverneur-gé- 
néral  que  l'escadre  fut  ohligêe  de  ra- 
mener à  La  Rochelle  avec  le  corps 
d'armée  française.  M'"^  Junot  alla  re- 
joindre son  mari  dans  cette  ville,  et 
bien  qu'elle  n'ignorât  pas  ses  dé- 
bordements ,  elle  fit  tout  pour  le 
consoler.  Cependant  Napoléon  pas- 
sait par  Angouléme ,  se  rendant  à 
Rayonne.  Junot  partit  à  franc  étrier 
pour  le  voir.  L'empereur  ne  lui  adressa 
aucun  reproche  :  «<  Un  homme  tel  que 
H  vous  ,  lui  dit-il,  ne  peut  revenir  à 
<*  Paris  qu'en  passant  par  Lisbonne." 
Tandis  qu'il  repartait  pour  la  péninsule, 


JUN 

M'"''  Junol  retournait  à  Paris ,  rap- 
portant encore  une  immense  quantité 
de  diamants  et  une  caisse  qui  renfermait 
des  sommes  immenses  en  or  ,  et  si 
lourde  que,  quand  il  fallut  la  monter 
dans  l'hôtel,  elle  tomba  sur  le  pavé  qui 
fut  inondé  d'une  pluie  d'or.  Selon 
M'"*'  d'Abrantès  ,  il  n'y  avait  que 
quatre  cent  trente  mille  francs  en  or, 
et  il  ne  fallait  pas,  dit-elle,  faire  tant  de 
bruit  pour  si  peu...  Mais  l'affectation 
avec  laquelle  elle  ne  cessait  d'étaler 
ses  pierreries  donna  heu  à  bien  d'autres 
commentaires,  et  encore  plus  la  mala- 
droite forfanterie  de  Juiiot  qui,  pen- 
sant mystifier  le  duc  de  Rovigo  qu'il 
n'aimait  point,  se  vanta  devant  lui 
d'avoir  rapporté  de  Portugal,  dans  un 
grand  sac,  douze  mille  diamants  d'une 
telle  grosseur,  que  dans  l'un  on  avait 
pu  tailler  un  petit  verre  pour  son  fils.  ; 
Aussi,  pendant  l'hiver  de  1809,  la 
toilette  de  M""®  d'Abrantès  était-elle  i 
constamment  un  objet  de  curiosité  ;  et 
elle-même  rapporte  dans  ses  Mémoi- 
res que  Napoléon  avait  charge  d'une 
espèce  d'enquête  à  cet  égard  José- 
phine, qui,  dans  cette  occasion,  comme 
toujours  ,  montra  beaucoup  d'indul- 
gence. Néanmoins  Junot,  qui  comman- 
dait le  8*  corps  en  Aragon  et  en  Na- 
varre, eut  pendant  deux  mois  la  direc- 
tion du  siège  deSaragosse.  L'empereur, 
peu  content  de  ses  services,  le  remplar.i 
par  le  maréchal  Lannes.  C'est  à  ce 
siège  que  se  révélèrent  les  premiers 
symptômes  de  sa  maladie  mentale.  Déjà 
sa  correspondance  avec  sa  femme  était 
empreinte  de  tout  l'affaissement  de 
son  âme,  et  il  parlait  de  suicide.  Rap- 
pelé en  France  après  la  prise  de  Sa- 
ragosse,  il  ne  demeura  à  Paris  que  le 
temps  nécessaire  {)our  rétablir  sa  santé, 
et  partit  au  bout  de  trois  semaines  avec 
un  commandement  à  la  grande  armée. 
«  Alors,  dit  la  duchesse,  tout  redevint 
«  joie  et  bonheur  autour  de  lui.» 
Tandis  qu'il  se  rendait  en  Allemagne, 


JUN 


Jl)N 


353 


où  il  ne  prit  part  qu'à  «In  o|>^raliniis 
5^fon(lairr^,  rllr  mrtnr  albit  aui  raui 
(ir  Cautfrfis  rrlablir  »oii  r^tomac  dr~ 
ijbr<'.  A  i^on  rrlour  rllc  reprit  ^nn  scr 
lire  aiiprc".  «Ir  maHanif-nicrc,  ri  fi{;Mra, 
rominc  (gouvernante  de  Pans,  aut  fè- 
tn  de  i'll(\lel-de-Villc  ,  données  i 
l'oecasion  de  la  virloire  de  Wj^rani. 
Selon  ru.<a|:;e  elle  «e  disposait  à  rece- 
voir, à  la  tele  d'un  rorlè^e  de  dames 
rlioisies,  l'impératrice,  lorsqu'elle  re- 
çut rontre-orJre  ;  et  Joséphine  ne  fut 
irnie  que  par  le  préfet  Froehol. 
I, 'empereur,  en  refu«an!  cet  honneur 
.1  relie  qtii  allait  birntAt  rrvser  de  par- 
!  »•:  Ml  •■  ■  :r  .  \  ■  'j  !  )p|fr  au  mi- 
1  .  M  ilr  criir  'rir  j.  >|.  .l.ir  r  la  première 
pensée  que  le  divorce  était  fait.  Il  v 
eut  à  ce  bal  une  telle  colme  que  M'"* 
d'Alirantés  s'évanouit  dans  la  foule; 
elle  fut  portée  dans  la  clianibrc  du 
pîffet  par  >oii  mari  (|ui,  tout  occupé 
de  la  desserrer,  jeta  sur  le  païquet 
tous  ses  diamants  ;  mais,  ;;r^ce  à  la  pro- 
bité des  {.fns  de  service  à  rH«\tel-de- 
^  'Ile,  ils  furent  rapportés  le  lendemain 
à  la  ducbe<.se  .uinstjuii  y  nuinquiit  un 
ifuitun.  Cependant  les  personnes  de 
la  cour  impériale  se  perdaient  en  con- 
jectures sur  le  nouveau  clioix  que  mé- 
ditait l'empereur.  «  Qu'il  épouse 
«  M"*  Masséna  ,  »  dit  avec  son 
fianc-parler  ordinaire  M'""  d' Abran- 
tès  au  cardinal  Maury  qui  la  votait 
tous  les  jours  I.e  propos  revint  à 
Napoléon.  ««  Comment  !  M'"*  .lunot 
«  s'avise  de  toucher  à  ces  questions 
t«  là  !  dit-il  ;  qu'elle  prenne  garde 
««  qu'elles  ne  lui  brûlent  les  doigts.» 
A  quelque  temps  de  là,  Junot  alla  re- 
prendre le  ronunandecncnt  du  S'  corps 
en  Rspaiîne:  sa  femme  avant  tcmoif;né 
le  désir  de  le  suivre,  il  n'y  consen- 
tit qu'avec  peine  ;  et  il  en  fui  de  même 
de  l'emperctir  :  mais  rien  ne  pouvait 
alors  faire  céder  la  volonté  de  cette 
heureuse  duchesse,  dont  le  malheur 
même   ne   devait  mûrir  ni  la   raison 


ni  l'esprit  II  faut  lire  dans  ses  .1/r- 
moires  (li^  avec  quelle  complaisance 
elle  décrit  l'élégant  covtuine  d'amazone 
qu'elle  inventa  pour  rette  campagne. 
On  doit  lui  rendre  crtte  justice  qu'elle 
supporta  toujours  avec  courape  les  fa- 
iiçues,  les  privation^  et  même  les  dan- 
gers. Cependant  elle  n'en  fut  pas 
moins,  souvent,  on  embarras  pour  son 
époux.  IMu*  d'une  fois  elle  sr  montra 
fort  imprudente;  en  se  promen.int  près 
de  Valiadolid,  elle  pensa  être  enlevée 
par  leN  ;;uérillas.  Dans  cette  ville  elle 
ouvrit  <^on  *alon  comme  j  l'ari  .  et 
donna  des  bals  où  ellr  dan-<a  malgré 
son  état  de  ;;rosseN>e  avancée.  Ses 
Mrnwirrs  offrent  ici  le  récit  détaillé 
et  souvent  fort  ennuveut  des  commé- 
rages de  l'armée  et  des  dissentiments 
qui  éclataient  journellement  entre  Ju- 
not, le  maréchal  Ney  et  Masséna  nui 
était  leur  chef.  A  Salamanque,  M 
d'.\brantès  adopta  une  jeune  orphe- 
line abandonnée  par  sa  mère  et  assura 
son  «^ort.  Klle  voulut  se  prévaloir  de 
cette  bonne  action  auprès  du  corrép- 
dor  qui  recevait  les  actes  nécessaires. 
••  Votre  mari  tue  asseï  d'Kspa;;nols, 
•<  lui  répondit  l'austère  ma;;rsirat  , 
«<  pour  que  vous  en  sauviez  un.»  Klle 
ne  quitta  point  Junot  jusqu'à  (^iu- 
dad-l\odrif^o.  Forcée  de  s'arrêter  dnns 
cette  ville  entièrement  ruinée  par  la 
{;uerre,  elle  v  fit  ses  couches  le  25  no- 
vembre 1810,  au  milieu  des  décom- 
bres ,  des  privations  de  toute  sorte  et 
d'une  affreuse  épidémie.  Junot  aurait 
voulu  que  le  fils  qu'elle  mit  au  monde 
s'appelât  Kodri;;o  ;  mais  ce  nom  df-plut 
à  la  duché  se  qui  le  nomma  Alfred. 
I.orîl  \Vellin};ton  ,  apprenant  à  la  fois 
l'accouchement  «le  la  duchese  et  la 
blessure  que  Junol  avait  reçue  au  nez, 
lui  offrit  toute  espèce  de  secoui  s,  et  ter- 
mina ainsi  sa  lettre  :  "  Je  ne  sais  si 
"  vous  avez  eu  des  nouvelles  de  raa- 
«   dame  la  duchesse  ;   elle  est  accou- 


354 


JUN 


«<  chéeàCiu(lad-l\odrio;o.  »  Kn  même 
temps  le  cjénéral  ani>;lais  signifia  au 
chef  Je  guérillas,  don  Juiian,  (j'ii  s'a- 
charna't  à  poursuivre  M"^*^  Juiiol, 
qu'on  ne  faisait  pas  la  guerre  aux  fem- 
mes ,  et  qu'il  entendait  que  la  du- 
chesse ne  courût  aucun  danger.  Huit 
jours  après  son  accouclieuient  ,  il 
lui  fallut  quitter  Ciudad-Uodrigo  pour 
revenir  à  Salamaiique.  Là,  en  atten- 
dant son  mari  ,  elle  continua  à  faire 
de  la  maison  où  elle  résidait  le  centre 
des  bruyants  plaisirs  de  l'hiver.  Ce  fut 
pendant  que  les  deux  époux  étaient  en 
Espagne ,  que  Napoléon  ,  qui  n'ac- 
complissaiL  plus  celte  cérémonie  que 
quand  il  avait  une  fournée  de  douze 
ou  quinze  filleuls  ,  tint  sur  les  fonts 
de  baptême  le  fils  aîné  de  Junot. 
Ayant  rejoint  sa  femme  à  Salaman- 
que  ,  le  23  avril  1811,  Junot  la  ra- 
mena en  France.  Après  avoir  été  pré- 
sentée à  la  nouvelle  impératrice  qui  la 
reçut  fort  gracieusement ,  elle  se  ren- 
dit aux  eaux  d'Aix  en  Savoie  ,  où 
étaient  réunies  beaucoup  de  dames 
de  la  cour  de  Napoléon.  Il  parait 
qu'au  milieu  de  la  grave  étiquette  de 
ces  cours  improvisées,  M™^'  d'Ahran- 
tès  crut  pouvoir  conserver  ses  libres 
allures  et  afficher  la  plus  bruyante 
gaîté(15).  La  chose  alla  jusqu'à  lui  at- 
tirer cette  semonce  de  la  princesse 
Borghèse  ,  qui ,  pourtant ,  n'était  rien 
moins  que  sévère  :  «  Savez-vous , 
*f  M™^  Junot,  que  l'empereur  serait 
«  très-mécontent  s'il  apprenait  que 
«  l'on  fait  chez  vous  des  farces  com- 
•<  me  celles  qu'on  y  joue  ':  cela  ne 
«  convient  pas  à  votre  digi:ité.  — 
•<  lionlé  du  ciel,  madame,  répondit  la 
«'  duchesse,  quelle  est  donc  ma  di- 
«<  gnité  :'  Mais  s'il  en  est  une  qui  m'em- 
"   pêche  de  rire,  je  déclare  d'avance 


(i  j,  «  A«U4  fiiap  Jch  rif  s  tel»  m»»'  iKjus  m 
Il  rùiiirs  rérHcrncut  iiialidr-s,  >i  cliti;ll«- dans  se:- 
Me'iunirei;  al  o'Iâ  Ics  ftné\r*$  oavtitts  sur  la 
plate  de  tiIU. 


JUN 

«  que  je  n'en  veux  pas.»  Quelques 
semaines  après,  elle  choqua  les  mêmes 
susceptibilités  en  souffrant  qu'on  tirât, 
le  jour  de  sa  fête  (10 août  181 2),  un  feu 
d'artifice  dans  un  endroit  où  se  trou- 
vait la  famille  impériale.  Cette  fois  elle 
reçut  une  leçon  de  madame-mère  qui 
n'avait  pas  voulu  qu'aux  eaux  M"'^ 
d'Abrantès  fit  son  service  auprès 
d'elle.  Enfin  ,  en  revenant  à  Paris,  la 
duchesse  eut  l'imprudenced'aller  voir  à 
Lyon  M'^*^  Récamier  qui  y  était  exilée. 
Ces  nouveaux  griefs,  joints  aux  fautes 
militaires  de  Junot  dans  la  campagne 
de  Russie,  portèrent  au  comble  le  mé- 
contentement de  Napoléon.  A  son  re- 
tour de  Moscou  ,  il  reprocha  à  M""^ 
d'Abrantès  de  faire  la  malade  pour 
avoir  an  prétexte  de  s'exempter  de  son 
service  auprès  de  madame-mère  ;  il  lui 
parla  aussi  de  sa  visite  à  M"^^  Réca- 
mier. ce  Que  comptez-vous ,  ajouta- 1- 
«  il,  qu'il  vous  adviendra  en  conti- 
«'  nuant  à  me  braver?»  Cependant  il 
finit  par  permettre  à  Junot  de  revenir 
en  France,  mais  .seulement  pour  qua- 
tre mois  ;  ce  fut  vainement  qu'elle 
intercéda  pour  son  frère  Albert  Per- 
mon,  destitué  de  la  place  de  commis- 
saire-général de  police  à  Marseille. 
Junot  arriva  en  France  :  rien  ne  pou- 
vait soutenir  son  âme  découragée  ; 
le  reproche  d'avoir  manqué  de  ré- 
solution, qui  venait  de  lui  être  adressé 
à  iâ  face  de  l'Europe  dans  un  bul- 
letin, lui  avait  porté  un  coup  dont 
il  ne  se  releva  jamais.  Il  voulut  voir 
l'empereur;  il  n'en  reçut  qu'un  ac- 
cueil indulgent,  et  vit  bien  qu'il  avait 
pour  jamais  perdu  son  amitié.  La  du- 
chesse ,  quoique  gravement  malade , 
donnait  des  soins  à  son  mari,  qu'elle 
représente  dans  ses  Mémoires,  «  se 
«<  couchant  à  ses  pieds,  posant  la  tête 
«  sur  ses  genoux  et  versant  des  larmes 
«<  amères  ;  »  ce  qui  n'empêche  pas  la 
maligne  duchesse  de  rappeler  qu'alors 
même  son  mari  était  en  état  de  flagrante 


JUN 

infiiWIif^  ,  aiiiM  qu'il  If  lui  avait  rë- 
vdf  lui-ni^rnp  liuiaiit  un  rourt  %o\3'^e 
qa'il  fit  PII  houri;o;^n«' ,  en  mptlinl  à 
I  adrp&ve  de  ^  frinnir  la  Ifitrp  q>ii  rtail 
Je^liiife  pour  une  maîlif^*f .  Au  r«»cn- 
mencrmfiit  <ie  1H|.),  quand  la  du 
che&se  annonça  a  Junot  quVIle  ëlait 
eufore  enrpinlf.  cfl  liominr,  san«rf^^e 
ob«rdf  par  \'u\ée  de  rrj;a;:;iier  l'amilié 
de  rrlui  dont  il  a>ait  ^Ir  Ir  téu\e,  lui 
dit  »\ec  une  r&pmbion  dërhiranlr  : 
•«  l«auie,  M  c'e*l  un  ;^ai çnn,  proinels- 
•«  moi  df  IVIevrr  dans  l'amour  el  la 
•«  rrainSe  de  l'empereur."  Ke^enanl 
sans  cesNe  sur  le^  eïpre\sioii.-i  injurieu- 
ses du  bulletin  ,  il  ileblairrail  rontre 
r homme  aux  millr ptiniK  hrs.  Murât. 
quM  accusait  de  ra\oir  calomnié  ;  et 
di>ait  à  sa  femme  :  ««  Je  n'ai  qu'une 
•«  réponse  à  leur  faire  ,  t'esi  de  me 
«<  faire  tuer  :  alor.«  quand  un  boulet 
•«  ou  une  balle  me  rei»\er>era,  je  leur 
«    demanderai,  a^  .<  .iir,.<i/\i/ 

•«   niantfiif'    tir    i  '  ••     Mans 

celte  vue  il   soliiciU   de   laire  la  ram 

fia|>ne  de  Dresde  ;  mais  horiaparte 
e  nomma  po'iverneur  de  ^  mise  et 
{;ou%erneiir-{»énéral  des  procures  ilK- 
riennes.  Pendant  que  dans  ce  poste 
Junot  ne  prou\ait  que  trop  bien  qu'il 
était  un  iiomiue  fini .  sa  femme  conti- 
nuait a  déclamer  contre  Napoléon  et 
à  voir  les  étrangers  les  plus  suspects  à 
son  gouvernement  :  aussi  le  ministre 
de  la  police,  Sa\arv,  eut  il  plusieurs 
fois  ordie  de  la  réprimander.  Ce  fut  le 
même  qui  ar.itonça  à  la  duchesse  que 
.lunct,  tombe  dans  un  accès  d'aliéna- 
tion mentale,  avait  été,  par  l'ordre  du 
prince  Ku;;ene  ,  dirij^é  sur  la  France. 
L'empereur,  en  engat^eant  M'""  Junot 
à  aller  aii-de\ant  de  lui  ,  exi^t'a  qu'on 
ne  l'amenai  point  à  Paris  ni  dans  ses 
environs.  Cette  injonction  mit  la 
duchesse  dans  une  grande  colère  : 
elle  fit  à  Savarv  une  scène  et  v 
traita  l'empereur  de  bourreac  et  d'as- 
sassin. Arrivée  à  CencTe,  elle  apprit 


jrit 


3*)' 


qne  son  mari  avait  étr  conduit  à  ^!ont- 
bar,  où  d  trou\a  .sa  fin.  Celte  nom  elle 
et  l'ordie  qn'elle  reçut  de  l'empprfur, 
de  ne  i»as  s'approcher  à  plus  de  cin- 
quante 1  rues  delà  capitale,  lui  causè- 
rent des  imprevsionv  tellement  doulou- 
reuses iprelle  fit  une  fausse  couche.  De 
(tenéve  elle  écri\it  i  Napoléon  une 
lettre  qui  tomba  entre  les  mains  de 
l'empereur  Aleiandre  et  ne  parvint 
jamais  à  mmi  adre^NC.  Bradant  les 
ordres  de  l'empereMr,  elle  revint  i 
Pans  (17   sept.    18 m.     ••   Je  suis 

•  retet^ue  dans  ma  maison  ,  dit-elle  i 
••   Savar»,  parce  que  ma  plare  est  au 
«    près  de  mes  enfants,  dont  je  suis  la 

•  tutrice  lé;;ale  et  naturelle.  J'ai  ensuite 
■    des  intérêts  personnels  aiixquelt  je 

•  dois  veiller.  »•  A  cette  déclaration 
si  précise  ,  Sivarj  répondit  un  peu 
militairement;  mai»,  bien  que  ^l'"• 
Junot  lui  eût  dit  des  injures  ,  il  la 
mena<;ea  encore  cette  fois  et  n'in- 
sista pas  avec  trop  de  ri^eur  sur 
les  ordres  de  l'empereur.  Dans  celle 
année  1HI3  ,  M'"*  Junot  perdit 
snccesnivement  deu\  amis ,  dont  l'un 
lui  avait  été  bien  précieux  ,  Duroc 
qui  lui  avait  constamment  donné  de 
bons  conseils  .  et  le  roralc  Louis  de 
Narbonne.  (^pendant  ,  malgré  son 
deuil  et  l'imminence  de  sa  ruine  (car 
Junot  n'avait  laissé  que  des  dettes) , 
sa  maison  était  encore  le  point  de  réu- 
nion de  la  plus  haute  socié;.'.  Aussi 
était-elle  i\r<'  premières  informée  des 
désastres  de  Napoléon,  contre  lequel 
elle  déclamait  alors  norr  lu  mhne 
franchise ,  dit-elle  dans  ses  Mrrnoi- 
rrs,  qu'elle  avait  inlse  auliefois  à  pu- 
hlirr  son    ndniiration.     Il   est     vrai 

3u'elle  ajoute  avec  une  rare  flexibilité 
'esprit  :  «<  J'ai  ensuite  abjuré  depuis 
««  loncj-lemps  ce  m^me  resst.itimenl 
•«  pour  revenir  à  mes  premières  ad- 
«'  mirations."  Mais  à  la  6n  de  1813, 
tout  eiilicre  aux  inspirations  de  son 
frère  Albert  Permon    et  de  «on  vieil 

i3. 


356 


JUN 


oncle  Dcmétiius  Comnène,  zélé  parti- 
san des  lîoiirbons  ,  elle  entrevit  l'es- 
poir d'obtenir  de  Louis  XNlll  les 
avantages  que  Napoléon  ne  paraissait 
plus  disposé  à  lui  accorder.  Dès  ce 
nionienl  elle  £ut  tout  aux  intrigues 
qui  accélérèrent  la  première  restaura- 
tioii  :  on  la  vil  (et  elle-même  le  ra- 
conte) donner  le  moyen  à  un  ancien 
officier  suisse,  M.  de  Wildermelz, 
agent  du  comte  d'Artois,  de  parvenir 
auprès  de  M.  de  Metternicl]  pour  ac- 
complir sa  mission.  Le  30  mars  au 
soir,  son  salon  était  rempli,  comme  à 
l'ordinaire,  de  personnes  empressées 
de  savoir  ce  qui  allait  arriver.  Sa  posi- 
tion particulière  ne  lui  faisant  envisager 
que  des  désastres,  elle  avait  caclié  ses 
diamants  dans  une  ceinture  qu'elle 
avait  sous  son  corset.  Elle  se  décida 
à  écrire  au  duc  de  Raguse  qui,  venant 
de  signer  la  capitulation  ,  lui  donna  le 
conseil  de  ne  pas  quitter  Paris  ,  «  qui 
u  serait  certainement  le  lieu  le  plus 
•f  tranquille  à  vingt  lieues  à  la  ronde.» 
L'entrée  des  alliés  amena  dans  la  mai- 
son de  la  duchesse  d'Abrantès  d'an- 
ciennes connaissances  ,  entre  autres 
Czernicheff  qui,  ainsi  que  Metternich, 
avait ,  au  temps  de  la  puissance  de 
Napoléon  ,  courtisé  toutes  les  belles 
dont  les  maris  pouvaient  avoir  des 
secrets  diplomatiques.  Le  premier  ser- 
vice qu'il  rendit  à  la  veuve  de  Junot, 
fut  de  la  délivrer  de  l'Iiote  le  plus  in- 
commode par  sa  voracité,  le  fils  de 
riietman  Platow,  pour  le  faire  rempla- 
cer par  un  homme  qui  à  cette  époque 
mérita  l'estime  des  Parisiens,  M.  de 
Wolkonski ,  premier  gentilhomme  de 
l'empereur  Alexandre.  Bientôt  Thôtel 
d'Abrantès  devint  le  rendez-vous  des 
plus  illustres  chefs  russes  et  allemands. 
Alexandre  lui-même  l'honora  plusieurs 
fois  de  ses  visites  et  eut  avec  elle  de  lon- 
gues conversations.  Mais  ce  fut  en  vain 
que  le  czar  et  le  prioce  de  Metternich 
s'entremirent,  auprès  du  roi  de  Prusse, 


JUN 

pour  faire  rendre  à  la  duchesse  d'A- 
brantès le  majorai  d'Acken  ,  rappor- 
tant cinquaute  mille  francs  ;  elle  re- 
fusa, dit-elle,  cette  grâce,  parce  qu'on 
y  mettait  la  condition  que  ses  deux 
fils  se  feraient  Prussiens.  Elle  ne  man- 
qua pas  de  se  présenter  à  la  cour  des 
Tuileries.  La  duchesse  d'Angouléme, 
qui  est  du  très-petit  nombre  de  per- 
sonnes dont  W^^  d'Abrantès  parle 
avec  convenance  dans  ses  Mémoires, 
lui  fit  l'accueil  le  plus  obligeant.  Dans 
l'audience  qu'elle  ootint  de  Louis 
XVm,  qui  fut  également  fort  gracieux 
avec  elle  ,  la  duchesse  ,  d'après  ce 
qu'elle  rapporte,  demanda  beaucoup  de 
choses;  elle  réclama  pour  son  fils  ce 
méchant  majorât  de  deux  cent  mille 
francs  qu'il  avait  sur  le  grand-livre  ; 
pour  son  frère  Albert  Pcrmon  (16) 
une  place,  et  pour  elle  l'achat  de  son 
hôtel  par  la  liste  civile,  afin  d'y  pla- 
cer le  garde-meuble  de  la  couronne. 
Louis  XVIII  accorda  tout,  et  en  défini- 
ti?c  ces  promesses  ne  se  réalisèrent 
point.  Seulement,  en  1815,1e  roi  luilil 
payer  assez  richement  la  fameuse  Bible 
de  Portugal  du  Xlli®  siècle,  avec  les 
miniatures  de  Lelio  Clavio ,  que  Ju- 
not avait  enlevée  de  Lisbonne,  dont 
Napoléon  lui  avait  fait  présent,  et  que 
la  cour  de  Portugal  prétendait  alors 
ravoir  sans  bourse  délier.  A  cette  oc- 
casion Louis  XVI II  dit  avec  fermeté  : 
«  M'"®  d'Abrantès  est  veuve  et  je 
««  dois  prendre  sa  défense.»  Pendant 
les  Cent-jours  elle  n'eut  aucun  rapport 
avec  Napoléon  ;  et  dans  ses  IMcnioires 
elle  parle  convenablement  de  la  cata- 
strophe qui  condamna  Louis  XVIII  à 
un  second  exil.  C'est  là  qu'elle  les 
termine  ;  elle  avait  promis  de  les  faire 
suivre  d'une  Histoire,  de  la  restaura- 
tion qui  n'a  pas  paru.  Depuis  1815 
jusqu'en  1834,  c'est  un  triste  specta- 
cle de  voir,  après  une  existence  si 
brillante,  la  duches.se  d'Abrantès  ré- 

(i6)  Mort  en  tSii. 


JUN 

(luilp  ,  k  ri»;e  Je  Iiriilr  an« ,  par  stm 
(lefjut  de  prévo>ance  et  d'économie, 
k  vendre  jnrre  à  pièce  les  débris  de 
&a  (uilune  J7  ;  ^  ùwt  d'emprunts 
el  de  riédils  qui  ne  furent  jamais  ac- 
quittés ;  el  ,  pour  dfrnierc  re>^ource  , 
à  ic  rortire  à  la  solde  d'un  libraire, 
moyennant  que  ,  dan*,  des  Mrmoi'- 
rrs  publiée  Ac  son  \i\anl  ,  elle  i>- 
Ncleij  lis  !.efirl>.  dévoilera  les  fai- 
blcvses  de  louiez  Ie<  per^ontjes  qui  île 
prés  ou  de  loin  ont  eu  des  rapports 
a\ec  elle!  Mlle  luèiue  dans  ce  liue 
élran;;e  ne  se  ména;^e  pas  plus  que  les 
autres  :  car,  pri\ée  de  tout  sens  moral, 
de  tout  e^prit  de  convenance,  elle  ra- 
conte le  mal  avec  les  mêmes  couleurs 
et  le!,  mêmes  rio«;es  qu'elle  dirait  le 
bien.  ToMlefois  ,  le  Ion  d'abandon 
qu'elle  aflecle  ne  l'empeclie  pas,  quand 
elle  le  veut,  de  pallier  la  \crilé.  On  a 
be.iu  jeu  de  fauc  dix  \oluroes  lorN<|ue, 
comme  elle,  on  descend  dans  le  Un  in- 
térieur, ou  que  l'on  rapporte  des  con- 
fer>ationN  de  quarante  pa^es  avec  des 
indnidu>  qu'on  peut  faire  parler  à  sa 
f;uise,  puisqu'ils  5ont  presque  tous  des- 
cendus dans  la  tombe.  Hue  dire  des 
appréciaiiorii  morales  et  polili(]ues 
d'ujie  femme  qui  se  f.iii  r.i|M)lo 'isfe  «le 
Josepli  Kebori  ^IS  ,  (jji  prcsnitc  les 
séides  de  llonaparle  romiuc  dci  répu- 
blicains purs,  qui  médit  de  tout  son  sexe 
et  qui  paile  avec  lé^rielo  des  vertus 
qui  le  rendent  re-peclable?  Ses  opi- 
nions littéraires  ne  sont  pas  plus  judi- 


(17)  JuDot.  cornu;*  oo  I'j  <lil  d»i%\  ^oa  arii' 
clr,    •tait   r  '   ftr.b  .■    un*'    •■   rt    \,,\'..    .0  !.      i.,,, 
de  litr.    . 
uar;  c.  : 

enllcctiou  ,  i..,itjue  r.j  Lur  \^t  .  4  r;e  ù.«|>rr-r« 
pir  %x  »<•«»».  11.1  y  To)aii  &ci>i«r  «•>  |>rnni(-r« 
ligne  (nul  \r^  BuJ«>ni.  lou*  |p«  ItiJol  avrclruis 
rseinplairrs  aniqup»  .  cl  co  ouirc  lr  Puuknn  n 
CUo«  imprime  tar  To.in  en  cirartrrrs  «l'or,  >s 
avec  les  dt%»\a%  de  Gérard  «t  de  l'ruilbon;  Irt 
F<bV«"I.  Lï  Fontaine  a. te  l«»  dessins  de  Per- 
cirr.  1,4  ra»#  de  Junol  étiit  h  l'i.nitson  de  fa 
bit>Ii    'brquc  ;   «lie  Talail  100,000  Trj un. 

(  fS,  <!iii<j  j'ages  sont  con$  u  ret-s  à  telle  l>cil« 
tàch*  dan«  le  Wli*  toI.  do  5m  Mèm»irn, 


JUN 


35' 


cieuse^  ,  témoin  ce  parallèle  où,  exal- 
tant l'école  romantique  aux  dépens  de 
tout  ce  qui  l'a  precéilee,  elle  nie  avec 
le  dernier  mcpiis  le>  œuvres  du  bril- 
Jant  auteur  des  Jardins  et  de  V Imu- 
ginatiun  llîh.  Oaanl  au  bl\le  des  Mr- 
muirfSf  il  e>l  queljuefois  pittoresque  et 
animé,  car  on  voit  qu'elle  écrivait  com- 
me on  improvise;  mais  il  est  plus  souvent 
incorrect  ,  diffus  et  <le  fort  mauvais 
ton.  1^1  révolution  Ae  IKDO  la  trouva 
à  rAbbayc-aux-Bois,  où  la  perte  en- 
tière de  sa  fortune  l'avait  forcée  de  se 
retirer  :  elle-même  affirme  qu'en 
voyant  le  retour  du  drapeau  tricolore  , 
elle  Jut  saisie  tfune  Je  tes  joies  sans 
mesure  qui  rrxclrnt  le  ciel.  Sans 
doute,  elle  espérait  que  le  nouvel  or- 
d»e  de  clioses  relèverait  les  espi-ran- 
ces  du  parti  bonapartiste  auquel  elle 
s'était  ralliée;  mais  rien  ne  fut  change 
i  sa  Iriste  destinée.  Kn  1831  elle 
commença  la  publiralimi  de  ses  Mé- 
moires dont  le  dix-liiiilième  volume 
a  paru  en  183.'».  \,'.l mirante  Je 
Castillf,  publié  en  1H3-J,  ofire  une 
esquisse  de  l'K^pj^ne  et  de  la  rour  de 
Madrid  sous  Qnr le»  111.  M"'  d'A- 
branles  a  composé  p'usieurs  autres 
romans  et  fourni  de  nombreux  articles 
i  diflerenls  écrits  périodiques,  entre  au- 
tres à  la  Hei'ue  Je  Paris  :  on  a  sur  tout 
r«niarquf,  pour  la  vivacité  des  peintu- 
res et  même  pour  la  nudité  des  dé- 
tails, certains  tableaux  de  la  cour  de 
Russie  au  temps  d'l''.li>alelh  el  de 
Githcrine  II.  Klie  est  morte  à  Chail- 
lot ,  le  7  juin  1838  ,  réduite  à  la 
plus  extrême  rai<ère  ,  deux  jours  après 
avoir  elé  admise  dans  une  obscuie 
maison  de  santé ,  voisine  d'une  nuire 
plus  adialandée ,  dont  le  niailre  avait 
refusé  de  la  recevoir,  faute  de  paie- 
ment d'avance.  Abandonnée  de  tous 
ceux  qu'elle  aimait  ,  elle  ne  manqua 
pas  du  moins  des  derniers  accours  de 
la  religion  qu'elle  reçut  des  mains  de 

(lu)  T..in    XMI.  ^        * 


388 


JUN 


M.  de  Quelen  ,  archevêque  de  Pa- 
ris (i20).  Les  journaux  annoncèrent 
que  le  roi  Louis- IMiilippe  lui  avait 
envoyé  un  secours  de  mille  francs  ; 
mais  il  parait  qu'il  arriva  trop  tard. 
(Quelle  fin  pour  une  Comnène  ,  pour 
celle  qui  avait  été  pendant  huit  ans 
guiwernante  de  Paris  !  M'"^  d'A- 
brantès  a  laissé  quatre  enfants.  1°  M"* 
Junot  d'Abrantès  qui,  après  avoir  été 
admise  en  1825  dans  la  cono;réfîation 
des  sœurs  de  la  charité ,  rentra  dans 
le  monde  en  1827,  et  comme  sa  mère 
s'occupe  de  littérature.  2*"  M"'^  Cons- 
tance Aubert  qui  publie  dans  différents 
journaux  des  articles  modes  et  varié- 
tés. 3°  M.  le  duc  d'Abrantès  ,  au- 
teur de  quelques  romans.  4**  M.  le 
marquis  d'Abrantès,  officier  distingué. 

J  U IV  TERBUCK  (Jacques), 
écrivain  ascétique,  dont  les  bibliogra- 
phes trompés  par  les  différents  noms 
qu'il  a  pris  à  la  tête  de  ses  ouvrages  ont 
fait  sept  ou  huit  auteurs  différents  (1), 
était  né  en  Pologne  vers  la  fin  du 
XIV®  siècle.  Entré  jeune  dans  la  con- 
grégation de  Citeaux,  il  s'y  distingua 
par  ses  talents  et  fut  (ait  abbé  de  Pa- 
rade ou  de  l^aradiso,  diocèse  de  Posen. 
Depuis  il  résigna  cette  dignité  pour  em- 
brasser la  règle  des  Chartreux  ,  et  alla 
professer  la  théologie  à  Erfurt.  Il  y 
mourut  en  1465,  à  l'âge  de  quatre- 
vingts  ans.  Le  nombre  des  ouvrages 
qu'il  a  composés  est  très-considérable. 
Ëabricius  en  a  transcrit  les  titres  dans 
la  Biôl.  med.  ri  infiin.  latin.  ,  IV, 
8  et  suiv.  I).  Bernard  Pez  en  avait 
rassemblé  la  plus  grande  partie,  et  il 
se  proposait  de  les  publier  avec  une 
dissertation  sur  la  vie  et  les  écrits  de 


(20)  On  peut  lii**;  le  rctit  (lét.iiUé  de  toutes 
ci-s  rirciiiislanct's  (Lius  un  «îcril  intitulé;  Let 
dernifrt  mnmeitlt  de  la  diiehrtse  d' /4brui,lis,  par 
A.  <le  Uoosmalcri,  laiis,  i838,  iii-V". 

(1)  JaiqufS  (le  CH'.tiix,  J.ir(|iies  le  Cli.ir- 
tre'ix.  Jacques  Junlerbiick,  Jrf<(jiifi  Hf  Polo- 
gne, Jacques  de  l'aradiso  ,  de  Clusa,  d'Erfnrl. 
Cet  »«pt  noms  (l<'si|;n>-nt  le  même  écrivain. 


Jnnterbuck  ;  mais  ce  projet  est  resté 
sans  exécution.  Le  savant  bénédictin  a 
cependant  inséré  dans  sa  Bihliolh. 
ascetica,  VII,  351,  un  opuscule  de 
Junterbuck ,  intitulé  :  De  causis  mul- 
iarum  passionum  prœcipue  iracun- 
diœ  et  remediis  earumdem.  Ses  au- 
tres ouvrages  imprimés  sont:  I.  Ser- 
mones  dominicales  notahiles  et  for- 
malcs,  Ulm,  1474,  in-fol.,  goth., 
première  édition  ,  rare  et  recherchée  ; 
il  en  existe  plusieurs  autres  du  XV® 
siècle,  in-fol.  et  in-4" ,  mais  sans 
date  et  sans  indication  de  lieu.  II. 
De  valore  et  ufililate  missarum 
pru  defunctis  (Essling),  1474,  in-fol. 
III.  Tractatus de apparitionibus ani- 
maruni  post  exitum  earum  a  cor- 
porihus,  de  earumdem  receptaculis, 
Burgdorf,  1475,  in-fol.,  goth.  (2), 
1^°  édit.,  très-rare.  Cet  ouvrage  cu- 
rieux a  été  réimprimé  dix  fois  au 
moins  dans  le  XV®  siècle.  ÏV.  De 
errorihus  et  morihus  christianorum, 
Leipzig,  1488,  in-4°.  V.  De  arte 
henc  jnoriendi,  ih'ià.y  1495,  in-4". 
VI.  Quodlibetum  statuum  humano- 
rum  (Essling),  sans  date,in-4°.  VU. 
De  veritate  dicenda  aut  tacenda. 
Sans  (\3i\e,'m-{o\.y\\\ .  De  arte  curandi 
vitia,  Leipzig,  sans  date,  in-4".  Cet 
opuscule  ne  diffère  peut  être  que  par  le 
titre  de  celui  que  D.  Pez  a  publié  dans 
la  Bildioth.  ascetica.  IX.  Deconfrac- 
tihiis  (pii  fiunt  ciim  pacto  ad  vitam 
(Cologne)  ,  sans  date  ,  iu-4°.  W — s. 
JUPPIX  (Jeaw-Baptiste),  pay- 
sagiste ,  naquit  à  Namur  en  1678. 
Son  père,  négociant  de  cette  ville  , 
ayant  remarqué  ses  heureuses  dispo- 
sitions ,  lui  fit  apprendre  le  dessin 
chez  un  peintre  namurois  et  l'envoya 
ensuite  à  Bruxelles,  où  il  étudia  plu- 
sieurs années.  Ayant  fait  d'assez  grands 

(ï)  c'est  jusqu'ici  l'.;  seni  oiîvrapc  que  l'on 
co'in.iis-p  ,  imprimé  à  Burgdorf,  dans  Je  XV' 
siècle,  l'anzpf  m  cite  deux  autres,  sans  date  , 
qu'il  croit  imprimés  avec  les  mêmes  curactères, 
(Voy.  Annal,  typogniph.,  fV,  26λ.) 


profit,  Juppin,  dan^  If  luit  «Ir  prr- 
(rrlionner  noh  talml  ,  rtitrrpril  un 
\n>a;;r  d'ila'ir.  Il  «'fiablil  irahoril  à 
Home  ,  où  il  «ui>i?  pendant  un  an 
«1  demi  Iw  four^  de  Taradéniif  ;  il  vi- 
sita ensuite  les  principales  villes  des 
aris,  telles  que  Mndene  ,  Bolo;ine.  Na- 
plei,  où  il  pei;;nit  plusieurs  tableaux 
qui  lut  avaient  été  rommantirs  par  des 
»ei;;nrurs  de  la  mur.  Il  profila  de  son 
séjour  dans  cette  dernière  ville  pour  rx»- 
miner  avec  attention  le  cratère  du  Vé 
suve  qu'il  reproduisit  sur  la  toile  avec 
une  {*rande  vérité.  {\e  beau  tableau 
fut  détruit  lors  de  l'iiirendie  du  palais 
des  évé«|ues  de  Lié^,e,  avec  quehjMes 
autres  productions  de  ce  peintre  qui 
ornaient  la  salle  des  étals.  De  retour 
de  son  vovape  ,  .luppin  babita  Na- 
mur  et  n'alla  se  fixer  à  l.iè;;e  qu'en 
1717.  C'est  dans  celte  ville  qu'il  pei- 
gnit la  plupart  de  .«es  tableaux  :  ceux 
qui  se  trouvaient  dans  le  iliiror  de 
I  é<;lise  des  Chartreux  étaient  re«;ar- 
dés  comme  ce  qu'il  avait  fait  de  plus  re- 
marquable; ils  furent  détruits  en  179i 
par  le  vandalisme  levolutlonnaire. 
I^s  é<;li$es  de  Saint-Denis  et  de  Sainl- 
Martin,  à  I.iè^e,  conservent  encore 
des  tableaux  de  Juppiii  ;  on  remarcpie, 
dans  la  deinière,  de-v  pavsa^es  qui 
ont  pr  es  de  viiifjt  pieds  carrés,  (x-  pein- 
tre travailla  encore  pour  le  prince-évé- 
que,  (îeor^es- Louis  de  Iier»;}ies,  pour 
les  comtes  d'Oullreinont  et  pour  le 
couvent  des  Croisiers  à  Iluy.  Re- 
tourné à  Namur  pour  y  vivre  prés 
d'un  frère  qu'il  aimait  teiidiemcnt  ,  il 
y  mourut  peu  après,  eu  17"J1>.  .luppin 
a  un  pinceau  ferme  et  large,  son  fe«iillé 
est  soij;né,  sa  couleur  est  vive  ,  sa 
perspective  est  bien  entendue  ;  on  re- 
marque également,  dans  ses  tableaux, 
que  le.s  diflérentes  parties  des  pa>saT 
f;es  sont  harmonisées  avec  boolieur. 
Plumier  fut  l'auteur  des  personnages 
que  Ton  rencontre  quelquefois  dans 
les  toile«  de  Juppin.         L — l — l. 


JUK 


359 


Jl  HKT  (  Kn.iwçoi.H) ,  critique 
érudit  et  consciencieux,  né  en  IT)').!, 
k  Dijon,  était  fils  d'un  greffier  au  bail- 
lia{;e  de  cette  ville.  Il  alla  tei miner 
ses  études  a  l'université  d'Orléans,  où 
bien  jeune  encore  il  prit  srs  de«;rés  en 
droit.  Lorsque  parut  le  1"'  livre  des 
Uignrrum  de  Tabourol  '/'.  ce  nom, 
X  M  N\3.'>H^,  son  cousin,  il  fil  une  pièce 
de  ver*,  en  réponse  aux  crnseuis  que 
choquaient  les  bouHonnerirs  par  trop 
licenrieuses  accumulées  dans  ce  sin^u- 
lier  volume  (1  .  Plus  tard,  avant  em 
brassé  l'elat  ecdesiasiique.  il  fut  pour- 
vu d'un  canonicat  au  chapitie  de  I^n- 
Rres  ;  et  des  lors  il  consacra  tous  ses 
loisirs  ï  l'étude  de  l'histoire  et  à  II 
culture  des  lettres.  Dans  le  moment  où 
parut  la  V///Vj  de  Pa^qtiier  (Tce  nom, 
XWill  ,  »»;î),  il  se  permit,  en  ladi 
nani,  une  rpi^ramme  dont  le  sens  était 
qu'il  lui  restait  des  mains  pour  prendre, 
maiv  non  pour  donnei .  Plus  sensible  & 
ce  jeu  de  niotsqu'il  ne  l'aurait  dt),  Pas- 
quier  ^  répondit  par  un  distique  fort 
^r«>ssici  ,  mais  avant  reçu,  quelque 
temps  aprè>,  des  xers  latins  et  français 
que  Juiet  lui  envova  pour  une  se- 
conde édition  de  la  Mam,  il  i'em précisa 
de  s'e«cusei  des  deux  vers  qu'il  avait 
insérés  dans  une  letlic  A  Tabourol: 
•«  lesquels  ,  dit-il,  je  condamne  comme 
•«  champignons,  voulant  que  leur  mort 
••  soit  aussi  prompte  que  leur  nais- 
««  sance.  »»  (Vov.  les  Lrttrrs  de  Pas- 
quier,   liv.    V|(l,    12   et    HV  Jurel 

f tarait  avoir  renoncé  de  bonne  heure  À 
a  littérature  légère  pour  se  livrer  ex- 
clusivement à  l'élude  des  anciens  mo- 
numents de  notre  histoire  ;  mais  il  ne 
composa  aucun  ouvrage  suivi ,  et  se 
borna  toute  sa  vie  aux  modestes  fonc- 
tions d'éditeur.  Pendant  les  troubles 
de  la  ligue  en  Bourgogne  ,  «<  quoicju'il 
««   fût  periilpuxd'aller  au  contraire d  un 

(1)  Celle  pièce  est  iiuprimée  cl«n«  la*  Bigar- 
rurrt,  édition  de  1661,  p.  35o.  et  dans  te»  thh- 
•fca  po^tmr,  fniler. 


^6o 


JUR 


«   parti  qui,  en  apparence,  s'établissait 
«  sur  la  religion  et  qui  était  appuyé 
«   de  l'autorité  du  gouverneur  (le  duc 
u   de    Mayenne),  il  ne  laissa  pas  de 
«  suivre  le  parti  du  roi,  et  ne  se  put 
«   tenir  en  diverses  rencontres  de  té- 
«  inoigner  combien  il  estimait  vain  le 
«   dessein  de  ceux  qui    voulaient,  au 
«  préjudice    des    lois    fondamentales 
«   de  l'état,  donner  entrée  à  l'élran- 
«  ger  (2).  >»  Cette  manière  de  penser, 
jointe  à  ses  talents,    lui  valut  1  amitié 
de  plusieurs  personnes    considérables, 
notamment  de  Gillot,  l'un  des  auteurs 
de  la  Satire  Ménippée  [Voy.  Gillot, 
XVII.  383) ,  des  Dupuy  ,  des  Pitliou 
et  du  président  de  Harlaj  qui  voulut  le 
fixera  Paris,  en  lui  faisant  obtenir  une 
place  de  conseiller-clerc  au  parlement, 
mais  ne  put  l'y  décider.  Exempt  d'am- 
bition il  vécut  tranquille  au   milieu  de 
ses  livres,    et  mourut  le  21    décem- 
bre 1626.  Outre  un  très-petit  nom- 
bre de   pièces  recueillies  par  Gruter 
dans  les    Deliciœ  poeiarum  gallor. , 
II,  383-85  ,  on  a  de  Juret  des  édi- 
tions, avec  des  notes,  des  Lettres  de 
Symmaque,  Paris,    1580,  in-4°;du 
Jonas,  poème  attribué  à  Tertullien, 
revu  sur  un  manusci  It  des  Pilliou,  dans 
la  BihliutJiecu  Putriim  de  Marg.  de 
la  Ijigne;  de  la  Vie  de  S.  Martin,  de 
Tours,  en  vers  ,  par  S.  Paulin,  Paris, 
1585,  in-8"  ;  des  Lettres  d'Yves  de 
Charlres,\\i\à.,  1585  et  1620,  in-8" 
(foj.  SoucHET,    XLIII  ,   168;    et 
Yves  de  Chartres,   LI ,  545).  Les 
notes   de    Juret  sur  les    Œuvres  de 
Sénèfpie ,    dans    l'édition    de    Paris, 
1602,  in-fol.,  ont  été  reproduites  dans 
l'édit.  Fa/'/or. ,  Amsterdam,  1672,  3 
vol.  in-S".    Celles  qu'il  avait   laissées 
sur  les  Lettres  et  le  Traité  àe  Cassio- 
dore.  De  ratione  animct,  font  partie 
de  l'édit.  de  Cassiodore,  publiée  par  D. 
Garet  en  1679,  in-fol.  On  en  trouve 

(a)  Ce  patsaf^e    est    extrait  «le  la   Notice  sur 
Joret  indiquée  à  la  Cn  do  cel  article. 


JUR 

encore  de  lui  dans  les  Panegyrici 
u^/fî/'^i;  mais  ce  n'est  là  qu'une  partie  de 
ses  travaux.  Les  savants Bouhicr  et  La- 
mare,  de  Dijon,  possédaient  les  notes  et 
les  corrections  de  Juret  sur  cinquante- 
cinq  auteurs,  anciens  ou  du  moyen-àge, 
dont  Papillon  a  donné  la  liste  détaillée 
dans  la  Bibliothèque  de  Bourgogne , 
I,  355-61  (3).  Ce  judicieux  critique  a 
été  combléd'éloges  partons  les  savants, 
entre  autres  Saumaise,  Scaliger,  Colo- 
miès,  La  iMonnoie,  et  tout  récemment 
par  l).  Ijrial  qui  rend  une  pleine  jus- 
tice à  ses  notes  remplies  d'érudition 
sur  Yves  de  Chartres,  dont  il  a  le  pre- 
mier éclairci  le  texte  (Voy.  les  Méin. 
de  Vacad.  des  inscript.,  nouv.  série, 
III,  60),  Une  courte  iV6»//r;e  sur  Juret 
par  un  contemporain,  que  Chardon  de 
La  Rochette  avait  communiquée  à  M. 
Amanlon  ,  a  été  publiée  dans  le  Jour- 
nal  de  hi  Côte  d'Or,  au  7  janvier 
1813  (4),  et  reproduite  par  Barbier 
dans  son  Examen  critique  des  dic- 
tionnaires. L^porlrait  de  Juret  était 
dans  la  bibliothèque  du  président  liou- 
hier.  W — s. 

JURGEIVSEN  (Guillaume), 
avocat  et  poète  allemand,  naquit  le  5 
mars  1789,  à  Slesvig.  Son  père  qui 
n'avait  pour  tonte  fortune  qu'un  [Mîtit 
emploi  au  tribunal  siipériem-  de  cette 
ville  et  qui  était  chargé  de  sept  enfants, 
voulait  qu'ils  n'apprissent  que  des  mé- 
tiers: Guillaume  fut  le  seul  qui  par  ses 
supplications  obtint  pour  lui  la  révoca- 
tion de  cet  ariet.  Il  lui  fut  permis  de 
mener  ses  études  jusqu'au  bout,  et  en- 
suite de  se  rendre  à  l'université  de  KicI, 
et  même  à  celle  de  Gœttingue.  Il  y 
suivit  avec  ardeur  les  cours  de  droit  et 
revint  à  Slesvig  muni  de  [)lus  de  connais- 
sances que  la  plupart  àa,  jeunes  gens 
qui  sont  censés  avoir  pâli  sur  les  Pan- 
dectes  et  la  Cai  olinc.   Là  il  débuta  par 

[i)  LfS  livres  ;iunot<s  j);ir.luict  cl  <(iii  se  Iroii- 
vaiciil  «l.nii%  le  c.il>iiiel  ilr  Luuiaro  ioiit  aujour- 
d'hui à  l;i  Hihiinllièque  ni)  aie. 

(4;  lieu  eïi^lf  un  timgc  «épiri,   4  p.  iii-8». 


JUR 

entrer  roamr  secirlairr  au  ser\ife 
|)articulicr  ilu  cutii^rillrr  de  jiutice 
Wariirnbour^,  subit  hiriilùl  avec  éclat 
un  e&aiiirii  sprrial  île  droit  ou  puur  in- 
terrogateur il  eut  le  savant  Micliaelis 
(1812),  et  te  fit  recevoir  avocat.  On 
peut  être  surpris,  après  ce  début,  qu'il 
Noit  toujours  re&té  sans  clientèle.  Il  e>t 
bien  vrai  aueSle-^\i^  avait  un  nombre 
eiïia>ant  d  avurats.touss'anachanl  1rs 
causes  et  la  plupart  faisant  fort  peu  d'af- 
faires et  d'ar;;enl.  Jiirj^ensen  d'ailleurs 
avaitencore  bien  .iit!;erl;')>c  contre  lai  : 
le  inallieuieux  rrs  !  des  co- 

médies!! des  r^  '!!  Mais  une 

bonne  eipiopnation  vaut  plus  a  l'avoué 
^uit  poursuivant,  soitco-licitant,  qu'une 
épopée  ne  rapporterait  au  plus  r^rand 
poète  de  nos  jours  :  que  serait-r<*  ^i  ce 
ptièle  était  domicilie  à  Slesvij;  :'  Le  spi- 
rituel, l'excentrique  Jur>;en5en  nej;ros- 
sissait  donc  que  ses  dossiers  poétiques, 
tandis  que  ses  rivaux  en  robe  et  bon- 
net carré  péroraient  pro>aVq'iement  au 
palais;  et  plus  d'une  fois,  sans  namdie 

rirécisément  de  voir  son  nom  enûei  la 
istedes  ;;rands  poètes  morts  de  faim  ^ 
l'inslar  du  divin  .Melé,si;;ène,  leur  pa- 
tron, il  sentit  la  main  de  ;;lace  de  la  mi- 
sère élreindrc  son  front  et  comprintei  sa 
pensée.  Ces  douleurs  matérielles,  join- 
tes aux  souiïiances  de  vanité  blessée, 
aux  mille  émotions  du  poète  tantôt 
ivre  d'un  succè>,  lantùl  furieux  des  cri- 
tiques et  souvent  en  proie  aux  spasmes 
ft^brilci  tle  la  rompo^tion,  n'alloti'^enl 
pas  la  vie;  et  Jur^ensen  n'clail  point 
né  a\ec  un  corp>  de  fer.  A  mesure  que 
sa  santé  déclinait  il  travaillait  plus  ac- 
tivement. Au  lit  de  mort,  quand  sa 
main  lui  refusait  le  service ,  il  dic- 
tait à  sa  femme.  Mais  au  fond,  c'est 
qu'il  ne  se  croyait  pas  malade  ;  il 
avait  la  vertu  théologale  du  poète, 
Tespérance  ,  même  quand  tout  autour 
de  lui  désespérait.  C'est  ainsi  qu'à 
son  dernier  anniversaire  ,  le  5  mars 
1826,  un  mois  jour   pour  jour   avant 


ju; 


36 1 


son  décè-t  ,  tandis  qu'un  cercle  ami 
fêtait  sa  naissance  en  disant  tout  bas  : 
X  II  e>t  in(.rl  !  i>  lui  >eul  comptait  ;;ue- 
rirelpeM^alt  aux  beaux  bites  qu'il  vi- 
siterait convalescent.  J'iir^ensen  n'eût 
probablement  été ,  maigre  ses  soins  , 
qu'un  médiocre  juriste  et  un  avo- 
cat inégal  ,  mais  sa  pué>ie  a  de  la 
valeur.  I.r.  beaux  et  nobles  sentiments 
i'y  e*lial<*nt,  comme  de  la  lleur  \ier;;e 
un  ai  Ame  :  le  vrai,  Ir  bon  le  subju- 
guent et  le  fascinent.  De  la,  sa  sensi- 
bilité, sa  verve.  Kn  même  lempt  il  a 
du  cidoris,  du  mouvement  ;  il  est  vrai- 
ment dramatique  dans  Ir  dtanie  et  iiurs 
du  drame,  surtout  s'il  s  a^it  de  peintu- 
res malicieuses,  de  délicates  et  fine.s 
observations.  Ses  épi^ramroes  ofrent 
ce  caractère  au  plus  haut  de^ré:  aussi 
peut-on  les  préférer  à  ses  comédies 
mêmes,  et  ne  doit  on  pxs  craindre  d'en 
placer  le  recueil  à  coté  ou  bien  peu 
au  dessiius  ilo  te  qui  exi>tede  mieux  eu 
ce  ^enie.  (x)mparati\ement  à  ces  pi- 
quantes cl  fugitives  étincelles,  sc-s  poé- 
sies lyriques  semblent  xiu  peu  ternes. 
C'est  à  notre  a\is  ce  qu'il  a  fait  en  vers 
de  plus  faible.  Ses  Œui'rrs  rumplrirs 
n'ont  jamais  été  imprimées  ensemble  , 
et  ni(  me  plusieurs  des  p  eces  qu'il 
donna  au  tliéatre  ne  l'ont  point  cte  .-é- 
parément.  Celles  qui  l'ont  été  sont  au 
nonibie  de  quatre  :  1"  Orgueil  iTur- 
tiste  (voir  les  Hiiinrs  et  fleurs  de 
VVinfricd)  ;  2''  Puunjuoi  ;dans  1'///- 
miinui  h  Jrama/itjue  de  Lebrun  pour 
1  S-Jô I  ;  3"  ^7 .'  (dans  les  Fruits  de  lec- 
tures .  1 826 ,  t .  1 1 1  )  ;  i""  Sultan  Mu/i- 
Ttioud,  ou  les  Deux  viJrs,  1827. 
Toutes  ces  biuettes  sont  en  un  seul 
acte  ;  la  quatrième  est  mêlée  de  chants 
comme  nos  vaudevilles  ou  plutôt  comme 
les  lies  courts  opéras-comiques  d'il  y 
a  quatre-vinj;ls  ans.  Knsui'.c  viennent 
une  tragédie,  également  en  un  acte, 
intitulée  les  Frères,  1821  ;  des  Poè- 
mes u  mes  enfants,  182G  ;  les  verset 
stanres ,   les   èpigrummes     ri-dessus 


362 


JUR 


appréciées,  et  enfin  des  articles  en  prose 
disséminés  dans  la  Gazette  du  monde 
élégant,  dans  Eudora,  dans  [\î- 
beillc  nordalhingienne,  etc.,  P — ot. 
JURIXE  (Louis),  médecin  et 
naturaliste  disîinû;ué ,  naquit  à  Ge- 
nève, le  6  février  17r)1,cty  mou- 
rut le  20  octobre  1819.  Après  avoir 
terminé  son  éducation  médicale  à  Pa- 
ris, il  s'empressa  de  revenir  dans  sa 
ville  natale,  où  son  temps  fut  partagé 
entre  l'art  de  guérir,  qu'il  exerçait  avec 
beaucoup  de  succès,  et  l'histoire  natu- 
relle, vers  laquelle  l'entraînait  un  goût 
très-décidé.  Retenu  dans  cette  cité  par 
tous  les  genres  d'intérêt  et  d'aff»iction, 
il  s'en  éloigna  rarement,  et  l'une  de 
ses  excursions  les  plus  éloignées  fut 
celle  qu'il  fit  à  Paris,  où  M'"''  de  Staël 
l'avait  mandé  dans  les  derniers  temps 
de  la  maladie  à  laquelle  elle  succomba. 
Son  genre  de  talent  et  la  tournure  de 
son  esprit  le  portaient  surtout  vers  les 
expériences  délicates,  vers  les  observa- 
tions de  détail.  C'était  le  caractère 
de  l'école  de  Bonnet,  à  laquelle  il  ap- 
partient par  le  genre  de  ses  travaux 
relatifs  à  l'histoire  naturelle.  Ses  ou- 
vrages sont  peu  nombreux,  mais  assez 
remarquables.  I.  Mémoire  sur  cette 
question  :  Déterminer  quels  avanta- 
ges la  médrcine  peut  retirer  des  dé- 
couvertes modernes  sur  l'art  de  con- 
naître la  pureté  de  l'air  par  les  dif- 
férents eudiomètres.  Ce  mémoire , 
qui  remporta  le  prix  proposé  par  la 
société  royale  de  médecine,  a  été  pu- 
blic en  1798,  dans  le  dixième  volume 
des  actes  de  la  compagnie.  On  ne  peut 
nier  que  Jui  ine  y  ait  fait  preuve  d'un 
rare  esprit  d'analyse  et  d'une  ingénieuse 
patience  dans  l'exéculion  d'expériences 
délicates  et  difficiles.  Mais,  malgré  ses 
efforts,  il  n'a  pu  arriver  qu'à  des  résul- 
tats négatifs.  La  pureté  et  la  salubrité 
de  l'air  sont  deux  choses  tout-à-fait 
différentes.  Les  proportions  des  prin- 
cipes constituants  de  ce  tluide  peuvent 


JUR 

varier  beaucoup  sans  qu'il  nuise  à  la 
santé  des  êtres  vivants,  tandis  que,  bien 
que  très-pur  aux  yeux  du  chimiste  ,  il 
devient  souvent  délétère  par  des  causes 
que  l'eudiomètre  ne  nous  fournit  aucun 
moyen  d'apprécier.  Les  épidémies  de 
choléra  l'ont  bien  démontré.  On  n'est 
pas  encore  parvenu  à  saisir  les  condi- 
tions spéciales  de  sa  salubrité,  et  sous 
le  point  de  vue  hygiénique  ,  nous  n'a- 
vons jusqu'ici  d'autre  eudiomètre  que 
l'état  de  santé  des  hommes  vivant  dans 
l'atmosphère  de  telle  ou  telle  région. 
IL  Mémoire  sur  V allaitement  arti- 
ficiel, Genève,  1807,  in-4°.  IIL 
JSouv elle  méthode  de  classer  les  hy- 
ménoplères  et  les  diptères ,  Paris, 
1807,  in-4°,  avec  14  pi.  color.,  ou- 
vrage parfaitement  exécuté  et  indispen- 
sable pour  l'étude  des  insectes  compris 
dans  ces  deux  ordres.  Jurine  avait 
trouvé  dans  la  disposition  des  nervures 
des  ailes,  de  bons  caractères  auxiliaires 
pour  la  distinction  des  genres,  et  beau- 
coup de  ceux  qu'il  a  créés  avec  ce  secours 
correspondent  exactement  à  ceux  de  La- 
trei^le,  concordance  qui  prouve  com- 
bien son  point  de  départ  était  juste. 
Il  a  surtout  profité  de  l'absence,  de  la 
présence,  du  nombre,  de  la  forme  et  de 
la  connexion  des  cellules  placées  près  du 
bord  externe  des  ailes  supérieures.  IV. 
Mémoire  sur  le  croup  ,  Genève , 
1810,  in-8".  Ce  mémoire  a  partagé 
le  grand  prix  de  douze  mille  francs 
fondé  par  le  gouvernement  impérial. 
C'est  une  excellente  monographie  que 
l'on  consulte  encore  avec  fruit.  V.  Mé- 
moire sur  l'angine  de  poitrine, 
Genève  et  Paris,  181.5,  in-8".  Ju- 
rine, qui  devait  être  la  victime  de 
cette  cruelle  maladie  ,  l'attribue  à 
un  état  névralgique  des  principaux 
nerfs  de  la  poitrine.  VI.  Histoire 
générale  des  Monocles  qui  se  trouvent 
aux  environs  de  Genève,  Genè\e, 
1820,  in-4",  avec  22  pi.  color.,  ou- 
vrage  capital  et   vraiment    classique, 


JUS 

dans  Ifqufl  Pinteur  a  comi^^  d«  rf- 
marqiifs  du  |»lu*  haut  intérN,  et  relr\p 
quflqufs  cricur*  {;rave*,  depuis  Ion <;- 
temps  arrrcdilées  dans  la  scienre.  I.a 
noinrnriaturr  dont  il  fait  u^a^e  diffire 
notaldemenl  ilc  rrlie  qui  a  été  adoptée 
depui-^,  re  fini  rend  la  lerture  du  livre 
un  peu  fali;;ante  On  doilfncore  à  Ju- 
rine  plusieurs  Mrmoi'rrs  \n%hé^  dans 
le  Journal  des  mines,  dans  la  liihliotliè- 
que  uni\erselle  de  (lenere  et  les  Me- 
nioire>  de  la  sociëlé  d'histoire  naturelle 
de  relie  %ille.  l'n  eicellent  Mémoire 
sur  l'arguir  foliiuè.  qui  a  paru  dans 
les  Annales  du  muséum,  lui  est  fausse- 
ment attribué  par  quelques  biblio-jra- 
fihes.  il  appartient  à  son  serondfiU, dont 
a  mort  a  été  é;;alenienl  une  ^rantlr  perte 
pour  riiisloire  naturelle.  J  — 1> — N. 
JrSSlEr  de  Montlurl  (Fran- 
çois Josfph- M  amfiit  PK^  .  conseiller 
i  la  rour  des  monnaies  de  l.\on, 
né  dans  relie  xille,  le  11  mai  17Jλ, 
est  auteur  d'un  ouvra^^e  auquel  il  n'a  pas 
mis  son  nom  et  oui  eut  un  ^rand  suc- 
cès lois  de  sa  publication.  C'est  une  In- 
strurtiun  Jacile  sur  les  roni>entwns, 
ou  \otions  yimples  sur  les  divers 
engagements  qu'on  peut  prendre 
ditns  la  société,  I.von,  1760,  in  1*2. 
Il  offrait  pour  ainsi  dire  un  cours  de 
droit  usuel  ï  la  portée  de  toutes  les  in- 
telligences cl  (jui  pouvait  mettre  cha- 
cun en  état  de  ^érer  ses  -affaires,  >ans 
l'assistance  d'un  conseil.  La  clarlé 
des  définitions  et  des  exemples,  la  pré- 
cision du  sl^le  contribuèrent  beau- 
coup à  le  populariser.  Aussi  fut-il 
souvent  réimprimé  a\ant  1789,  sans 
les  contrefaçons  qui  s'en  firent  en 
France  et  à  Tétran^er.  On  doit  encore 
à  Fr.  de  Jussieu  des  Réflexions  sur 
les  principes  de  lu  justice.  Paris, 
1761,  in- 11*.  Files  ont  élé  placées  en 
tète  de  quelques  éditions  de  rouvra;;e 
précédoiil.  Fa  rour  des  monnaies  avant 
été  supprimée  en  1771,  il  se  livra 
tout  entier  à  la  culture  des  lettres.  Il  fut 


JL'S 


363 


reçu,  en  1777,  \  Paradémie  de  Fvon. 

Mais,  quelques  aiuice»  apiè«»,  il  aban- 
donna sa  ville  uutalr  pour  s'établira  Pa- 
ris, où  il  mourut  en  1797.  L — H — \. 
Jl'SSIIir  [  Antoimk-Laurf.nt 
de),  neveu  des  tio  s  fcicbres  botanistes 
Antoine,  llernardrt  Joseph  de  Ju^sieu, 
nui  commencrrrni  rillusIratiMU  dccettc 
famille  a  laqioili*  on  i  donné  le  nom  de 
Dynastie  fHtttinitjue,  naquit  romnie 
eut  à  Fvon,  qu'hab  lait  loujour»  son 
père  Christophe  ,  l'ainé  de  seize  en 
fants.  Venu  au  monde  le  l'iauil  17VS, 
il  n'avait  que  dii-sept  ans  lorsque,  du 
collège  de  sa  \ille  natale,  il  se  rendit  à 
Paris,  dans  l'intention  d'>  »ui>re  les 
cours  de  médecine  !176.'>).  Ilernard 
son  oncle,  alors  un  d«'SCor\phées  de  l.j 
botanique  et  qui  ne  comptait  de  rivaux 
qu'.\daiison  en  France,  et  en  Suède 
Finné.  le  lo;^ea  dans  >on  appartement 

[•rés  du  Jardin-de-Plantrs.  I.e  jeune 
lomme  et  le  vieillard  travaillaient  le 
f>lus  souvent  dans  la  même  chambre  : 
es  journées  se  pavsaient  studieuses  et 
silencieuses;  le  soir  Antoine  lisait, 
Bernard  causait  :  l'objet  habituel  de  la 
conversation,  de  la  lecture,  ce  n'elail 
plus  la  médecine,  c'elaienl  les  plantes; 
étude  liée  si  intimement  d'ailleurs  a  la 
médecine,  soit  k  cau>e  de  l'organisme 
Tital  commun  au  xe^étal  el  à  rêlfo 
loolit^iqiie,  soit  paice  que  la  ph)to- 
p^aphie  fournit  moitié  au  moins  des 
éléments  à  la  matière  médicale.  IJer- 
nard  n'avait  que  rarement  écrit  ;  pres- 
que septua|;'"naire  alors  ,  il  écrivait 
bien  moins  encore.  Mais  son  inlel- 
lii;ence  était  aciive,  sa  puissance  de 
méditation  avait  j^randi  avec  l'aj^e. 
A  mesure  que  ses  veux  lui  refusaient  le 
service,  il  penélrait  plus  intimemenl 
par  la  pensée  au  fond  des  m\ stères  de 
1*^  nature  et  delà  science,  il  poursuivait 
plus  oLstinémeiit  les  hauts  problèmes 
qui  les  dominint.  Parmi  ces  problè- 
mes, un  des  plus  iuleressants  à  cette 
époque  était  celui  de  la  méthode  natu- 


364  «^US 

relie.  Linné  lui-même  l'avait  cherchée 
et  la  préconisait,  la  recoramaudait  en- 
core tout  en  s'en  éloignant,  et  après 
avoir  paré  de  tous  les  prestiges  la  fa- 
meuse méthode  arlificielle  à  laquelle 
est  identifié  son  nom.  Mais  personne 
encore  n'avait  posé  les  bases  de  cette 
méthode  naturelle  tant  souhaitée,  bien 
que  quelques  t;rands  botanistes  les  eus- 
sent en  partie  devinées  ,  ou  s'y  fus- 
sent conformés  tacitement.  Sur  la  fin 
de  sa  vie,  Bernard  de  Jussieu  fut  cer- 
tainement de  ces  derniers  ;  et  ses  Or- 
dres naturels,  dits  vulgairement  Ca- 
talogue de  Trianon,  en  font  foi.  Fa- 
milier depuis  sa  jeunesse  avec  tout  ce 
que  l'on  connaissait  alors  de  plantes, 
doué  de  la  plus  heureuse  mémoire  et 
de  la  plus  rapide  faculté  comparative, 
habile  à  force  d'habitude  à  saisir 
d'un  coup  d'œil  et  l'ensemble  des  ca- 
ractères et  leur  degré  de  permanence, 
ce  qui  est  presque  le  degré  d'impor- 
tance, exempt  d'ailleurs  de  cette  impa- 
tience, de  celte  pétulance  d'imagination 
qui  si  souvent  égare  les  hommes  de  gé- 
nie, il  était  plus  que  qui  que  ce  fut  au 
monde  sur  la  voie  de  la  métliodc  natu- 
relle ;  et  l'on  ne  peut  douter  que  réduit 
par  la  vieillesse  et  l'affaiblissement  des 
facultés  physiques  à  penser  plutôt  qu'à 
voir,  à  combiner  les  résultats  de  ses 
observations  plus  qu'à  observer,  il  n'ait 
sans  cesse  été  préoccupé  de  celte  mé- 
thode. Chaque  soir  donc  il  communi- 
quait à  son  neveu  des  réflexions,  des 
vues  qui  la  plupart  se  référaient  à  cette 
question,  de  sorte  que  ce  qui  pour  l'un 
était  le  terme ,  le  couronnement  de 
toute  une  vie  passée  à  examiner  curieu- 
sement les  plantes,  était  pour  l'autre  le 
prélude  et  l'introduction  à  la  science. 
C'est  à  force  d'empirisme  et  de  prati- 
que que  Bernard,  comme  les  botanistes 
ses  prédécesseurs  immédiats  et  ses  con- 
temporains, s'élançait  vers  la  théorie  ; 
c'est  la  théorie  qui  devait  amener  An- 
toine-Laurent à  la  pratique  de  la  bo- 


JUS 

tanique.  Insensiblement  ses  idées  pre- 
naient uneautredirection,  et  sansencore 
abandonner  la  médecine,  qui  aux  yeux 
mêmes  de  son  oncle  restait  pour  lui  un 
en-cas,  un  pis-aller,  il  se  laissait  vo- 
lontiers distraire  de  cette  étude.  De  là 
sa  thèse  yîn  œconomiani  animalem 
iiiLer  et  vegctalem  analugia,  soute- 
nue en  1770,  et  à  la  suite  de  laquelle 
il  fut  admis  au  doctorat  en  médecine. 
Cette  thèse,  exposé  concis  et  net  de  ce 
qu'on  savait  alors  de  plus  positif  sur 
la  structure  et  les  fonctions  des  végé- 
taux comparés  aux  phénomènes  de  la 
vie  des  animaux  ,  n'apprendrait  rien 
aujourd'hui  à  quiconque  connaît  les 
premiers  éléments  des  sciences  natu- 
relles :  mais,  en  1770,  elle  contenait 
des  énoncés,  sinon  tout  neufs,  dumoins 
très-peu  démontrés  pour  une  foule 
d'hommes  instruits  ;  et  la  maturité,  la 
plénitude  que  décelait  l'ensemble  des 
vues  et  des  déductions,  prouvait  de 
reste  qu'il  y  avait  là  autre  chose  qu'un 
jeune  homme  de  talent,  borné  à  lui- 
même,  à  ses  livres  et  à  ses  cours. 
C'était  le  fruit  d'une  communication 
intime,  d'une  assimilation  quotidienne 
et  graduelle  entre  deux  esprits,  l'un 
parvenu  par  ses  propres  forces  aux 
sommités  de  la  science  ,  l'autre  s'y 
laissant  transporter  et  commençant  à 
saisir  plusieurs  détails  de  l'ensemble 
enjbraf.sé  par  le  premier.  A  peu  près 
au  même  instant,  le  professeur  de  bo- 
tanique Lemonnier,  quv?  ses  occupa- 
lions  comme  premier  médecin  de 
Louis  XV  empêchaient  de  remplir  ré- 
gulièrement ses  fondions,  trouva  com- 
mode d'avoir  un  suppléant.  Bernard 
présenta  son  neveu,  Buffon  l'agiéa,  le 
roi  n'y  mit  pas  d'opposition  ;  et  com- 
ment en  eût-il  mis,  lors  même  qu'i!  fût 
sorti  de  son  insouciance  habituelle?  il 
connaissait  personnellement  et  goûtait 
beaucoup  Jîernard  de  Jussieu  avec  le- 
quel il  s'entretenait  en  quelque  sorte 
tous  les  jours,  lors  delà  plaritation  du 


JUS 

irjliri  dr  Trianon.  CVlail  le  temps 
ou  tout  ^rand  nom  pouvait  prétendre  à 
un  rér;iment,  une  roropa(;nie  du  moins 
jii  sortir  du  collège  :  le  neveu  Jr  Ju^- 
sieo  avait  bien  droit  sous  ce  lé^'me  à 
uue  rliaire  de  liolanique.  Aujourd'hui 
l'on  crierait  au  népotisme;  et  de  fait 
il  e*t  certain,  selon  Antnine-IjurenI 
lui  même,  (jue  la  science  ne  lui  \int 
qu'après  la  place.  Mais  elleMnt.  Porté 
si  \ite  et  presque  à  l'iroproviste  à  une 
des  cli.iires  de  haut  enseignement  de  la 
capitale,  sans  savoir  de  la  botanique 
autre  chose  que  quelques  éléments  et 
des  ;;éné:alites,  il  étudiait  avec  ardeur 
la  veille  ce  qu'il  de\ait  professer  le 
lendemain.  Pour  uu  esprit  vulgaire  et 
sans  Ifs  ressouires  que  lui  présentait  la 
profonde  érudition  de  son  oncir,  dic- 
tionnaire vivant  qu'il  pou\ait  feuilleter 
a  toute  heure,  cet  enseignement  au  jour 
Icjoureùtété  bien  snperlicic!  et  qnelqic- 
foi>  fautif.  Hieiitol,  au  rcitr,  il  fut  au 
pair  de  sa  tache,  et  quelques  années 
plus  tard  il  la  domina.  Dès  1773, 
c'est-à-dire  à  \inj;l  cinq  ans  et  a\ant 
d'avoir  encore  rien  publié  ,  hor- 
mis sa  thèse,  il  se  mit  sur  les  rangs 
pour  l'académie  des  sciences  ;  mais  il  se 
hjîa  de  remplir  cette  condition  essen- 
tielle, et  son  Mrmotre  sur  la  Jumil- 
Ir  drs  Rrnunntlrs  ,  1778  (dans  les 
Mémoires  de  l'académie  de>  scicnce>\ 
s'il  ne  précéda  sa  candidature  précéda 
son  élection  et  la  justiGa.  C'est  en  ré- 
digeant cette  importante  monographie 
que,  pour  la  prcmicrc  fois,  le  jeune 
savant  se  sentit  ,  dit  il ,  vroimnU 
hotdnisU.  Jusqu'alors  il  avait  ba- 
lance entre  les  désirs  de  son  oncle  et 
sa  propension  à  se  lancer  dans  une  car- 
rière lucrative  où  son  nom  ne  pouvait 
manquer  de  lui  faire  bicnlf^t  une  riche 
clientèle,  l'ne  fois  son  mémoire  publié, 
-a  >ocation  se  déclara,  et  il  se  dévoua 
[.resquc  exclusivement  à  sa  spécialité 
iiofivelle  ,  qui  devait  lai  valoir  une 
}>o;;ition    plus    haute.    La    cécité   de 


JUS 


365 


Bernard  At\\\\\  complète  :  le  neveu  se 
chargea  de  du  i;;er  a  sa  place  ta  plantation 
du  jardin,  que  >enaieiit  à  chaque  instant 
enrichir  deN  espèces  ignorées  ;  et  lorj»- 
qu'en  177  V  il  eut  été  résolu,  sur  le 
rapport  de  RufTuii  à  lx»uis  XV,  de 
doubler  le  Musée  et  de  replanter  la 
partie  consacrée  à  l'école  ptopiement 
dite,  organe  et  porte-voix  de  >on  oncle, 
il  6t  prt>aloir  l'idée  de  dispuseï  le$ 
plantes  suivant  an  ordre  nou\eau 
qui  ne  serait  ni  celui  de  Touriiefort, 
suivi  jadis  au  jardin,  ni  celui  de  Lin- 
né, ni  une  combinaison  de  l'un  et  de 
l'autre,  mais  dont  les  bases  seraient 
celles  du  (^talogue  de  Trianon,  mo- 
difiées d'après  des  vues  ultérieures  et 
aavsi  d'après  les  espèces  récemment 
connues.  Ces  bases  furent  annoncées 
au  public  ùimV Expositiurtilun  rum- 
i'ri  (trdrr  dr  plant r s  ndupfr  dans  la 
drmonstriilion  du  jardin  royal 
(177i  ,  dans  les  Mémoires  de  l'aca- 
démie des  sciences'  ,  qui  n'est  qu'un 
développement  ex  professo  des  idées 
générales  de  méthodes  déjà  émi«>es,  mais 
comme  occasionnellement,  dans  son 
iMrnwirf  sur  1rs  Hrnonrulrs.  Tandis 
qu'il  précisait  et  prouvait  ainsi  les  prin- 
cipes fondamentaux  de  la  méthode  na- 
turelle, le  jardinier  en  chef  André 
Thouin  exécutait  sous  ses  jeux  la  nou- 
velle distribution  :  ce  ne  fut  pas  , 
sans  tâtonnement,  sans  changements 
dans  l'ordre  et  dans  le  groupement 
des  familles.  Il  n'en  pouvait  être 
autrement  :  non-seulement  des  e>pè- 
ces  récentes  apparai.ssaient  .  impor- 
tées par  les  vo>ageuis,  mais  encore 
la  subordination  relative  des  caractères 
décidément  érigée  en  principes  offrail 
souvent  des  doutes  dans  l'application, 
car  souvent  c'est  la  permanence  du  ca- 
rasïère  qui  en  détermine  l'importance, 
et  il  e^t  clair  que  pour  nous  cette  per- 
manence est  une  notion  empirique  sus- 
ceptible de  varier  à  mesure  que  nous 
apercevons  des  faits  nouveaux.   C'est 


366 


JUS 


JUS 


justement  un  mérite  de  Jussleu  d'avoir 
compris  que  sa  classification  n'était 
encore  que  provisoire ,  et  de  s'être  ré- 
servé d'en  retoucher  long-temps  en- 
core les  détails.  C'est  ce  qu'il  ne  cessa 
de  faire  douze  années  durant,  de  1775 
à  1787.  Pendant  ce  temps  Bernard 
en  France,  Haller  en  Suisse,  Linné 
en  Suède,  étaient  morts  (1778  et  79), 
et  avaient  laissé  vacante  la  première 
place.  Tout  en  coopérant  activement 
à  la  formation  de  la  société  royale  de 
médecine,  dont  il  fut  nommé  trésorier, 
et  en  secondant  les  efforts  de  Vicq- 
d'Azyr  pour  soutenir  l'existence  de 
ce  corps  contre  la  jalouse  susceptibilité 
de  la  faculté,  à  laquelle  insensiblement 
il  devait  se  substituer,  Jussieu  perfec- 
tionnait l'application  des  principes 
constitutifs  de  la  méthode  annoncée 
dès  1773.  Enfin,  en  1778,  n'ayant 
en  quelque  sorte  rien  écrit  à  l'avance, 
il  entama  la  publication  de  son  Gêne- 
ra jAaiitarum  scrumhim  ordines  nu- 
turalcs  disposita,  etc.  L'impression 
en  dura  quinze  mois.  Ainsi  qu'à  tant 
d'autres,  il  fallait  lui  arracher  feuille 
à  feuille  la  copie  que  le  typographe 
était  impatient  de  mettre  sous  presse. 
Nous  n'in>isterions  pas  sur  celte  cir- 
constancesielle  ne  prouvait  qu'Antoine- 
Laurent  fut  bien  réellement  l'auteur  de 
son  livre,  et  qu'il  ne  s'est  point  borné  à 
transcrire  ou  même  a  traduire  en  latin 
les  idées  de  son  oncle.  Sa  famille,  du 
reste,  conserve  encore  les  cahiers  de 
démonstration,  base  de  ses  leçons,  et 
(le  petites  caries  manuscrites  datées, 
sur  lesquelles  il  inscrivait  les  caractères 
des  groupes  qu'il  reconnaissait;  et  ces 
brouillons  souvent  chargés  de  ratures 
attestent  bieii  évidemment  une  élabo- 
ration progressive  d'idées  premières 
qui  ,  quelque  heureusement  conçues 
qu'elles  fussent,  étaient  sujettes  à  beau- 
coup de  difficultés  dans  l'application, 
l/illustre  Cuvicr  sans  doute  a  bien  exa 
géré  en  disant  [liapport  hislori(jue 


sur  les  progrès  des  sciences  naturel- 
les depuis  1789)  que  l'ouvrage  de  M. 
de  Jussieu  fait,  dans  les  sciences  d'ob- 
servation ,  une  époque  peut-être  aussi 
importante  que  la  Chimie  de  Lavoi- 
sier  dans  les  sciences  d'expérience.  A 
coup  sûr,  la  méthode  naturelle  n'était 
point  inattendue,  et  ne  porte  point  ce 
sceau  d'originalité,  d'invention  exclu- 
sive qui  classe  si  haut  la  brillante  dé- 
couverte de  Lavoisier  ;  et,  celte  mé- 
thode même  eût-elle  été  aussi  complè- 
tement nouvelle  qu'elle  l'était  peu, 
elle  ne  révélait  pas,  comme  la  théorie 
de  i'oxigène,  des  phénomènes,  des  mo- 
des d'actions  complètement  ignorés 
jusqu'alors,  et  qui  pourtant  dominent 
toute  la  science  :  enfin,  aux  Jussieu  ap- 
partenait au  plus  la  mélhode,  mais  non 
la  nomenclature,  dont  l'idée  et  sou- 
vent les  détails  étaient  empruntés  à 
Linné.  Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que, 
s'il  faut  restreindre  ,  il  ne  faut  pas 
rayer  l'éloge  donne  à  Jussieu  par  no- 
tre grand  zoologiste.  Le  Gênera  plan- 
iarum  résumait  et  appliquait  enfin 
d'une  manière  satisfaisante  les  idées 
depuis  long-temps  en  circulation  sur 
la  méthode  ;  il  les  posait  en  système 
suffisamment  élahoré,  il  les  faisait  sor- 
tir d'un  vague  qui,  jusqu'alors,  avait 
jeté  de  l'ombre  sur  leur  légitimité,  leur 
fécondité  ou  leur  importance  ;  il  invi- 
tait à  les  vérifier  et  aussi  à  les  recti- 
fier. Sous  tous  ces  rapports,  il  a  rendu 
des  services  qu'on  ne  saurait  mécon- 
naître. Les  houleversements  auxquels 
la  France  fut  bienlôt  en  proie  empê- 
chèrent qu'en  ce  pays  le  livre  ne  fût 
étudié  comme  il  le  méritait.  Mais  à 
l'étranger  on  l'apprécia  ,  on  l'employa 
sur-le-champ  :  l'idée  qu'avait  eue  l'é- 
crivain de  rédiger  son  ouvrage  en  latin 
liàla  cette  prompte  popularité.  Outre 
l'influence  directe  que  le  Gênera  eut 
sur  la  botanique,  peut-être  en  excrça- 
t-il  une  autre,  moins  sensible  ,  mais 
tout  aussi  réelle,  sur  la  zoi)lo(^ie.  Dans 


JUS 

cette  sricscc  ao-ui  ,  la  riawfiraiion 
fiait  fQCOre  (ort  imparfaite,  ri  il  fst 
rritain  que  Cuvirr,  qui  en  a  fixé  riirm 
\rs  véritables  baseï,  avait  lon:;-trin[is 
médité  les  principes  de  la  metlimie  b<i- 
tanique.  Tandis  que  le  nom  de  Jus<iieu 
grandissait  ain^i  au  drlinis,  lui-même 
ati  dedaps  >'en>rl<t|injil  le  plu^  pnv^i- 
Mr  dr  silence  et  d  (iliNCtirité  pour  tra- 
.•  M  iVpi>que  terrible  qui  suivit  le 
tH  loùt.  Il  avait  été  prrsrntr  i  Louis 
\\;  il  aimait  les  finurbnns.  \}f% 
1790,  il  se  laissa  roufirr  le  plus  inof 
lensif  des  déparinnents  de  la  mairie 
Ac  Pans,  criui  des  liApitaux  ;  et  plus 
lard,  rnrome  cliar;;ë  d'un  service  pu- 
Mic,  il  s'exemptait  ainsi  de  paraître 
.1IIX    fêtes    civiques,   aui    décades,   au 

•  orps-<ie-^arde  lx)rsi|ue,  en  ilM'A,  le 
.lardin  to\al  dr»  plantes  fut  réorganisé 

nus  le  titre  de  Muséum  d'il  <\- 

I  elle  ,  et  que  le>  profcssrii: 
•»«)us  Ir  nom  de  conseil  i! 
t:on,  uTip  petite  oli^arcbif 

!)(  !  .  iiion  en  fut  le  premier  nora- 
tnr  il  i«-.  leur,  c'est  Jusmcu  qui  eut 
ri>onneur  de  le  suivre  immédia«eme.«t 

IT'JVl;  el  rannée  de  son  administra- 
tion fut  signalée  par  la  création  d'une 
l'ibiiothèque  consacrée  spécialement 
aux  sciences    naturelle*.  Non  content 

•  fax oir  fait  décréter  en  principe  cet 
<  !.il.iiNsement  ,  Jussieu  lui-même  alla 
tr:cr,  dans  les  vastes  bibliotlièjjues  en- 
ie\é«*s  aux  couvents,  tout  ce  qui  se  re- 
ferait aux  études  de  ses  colle^ue>  et  aux 
>  eiiiies.  Il  jela  auisi  les  bises  d'une  col- 
lection qui  ,  depuis  liuit  ans,  sous  les 
mains  d'un  bibliographe  émincnl^l), 
est  devenue  le  modèle  de  toutes  les 
bibliothèques  scientifiques,  et  qui  pour 
le  clioix,  la  suite,  la  distribution  des 
ouvratres,  comme  pour  la  facilité  des 
recherches,  n'a  point  de  rivale,  même 
en  Anjileterre.  Du  reste,  Jussieu,  bien 
qu'honorairement   charge  de  la  haute 

(i)  M.  I^m  rcier,  doctevr-mèdeciD  «ie  la  fa- 
catlade  Paris. 


JUS  S67 

«oneillance  de  la  bibliothèque  ,  ne 
s'en  occupait  jamais.  Trop  d'autres 
travaux  »e  disputaient  ses  moments. 
H  avait  repris,  à  la  première  classe  de 
l'Institut,  le  fauteuil  perdu  par  suite 
de  la  destruction  d^s  académies ,  et 
il  la  présida  ;  puis  il  fut  xirr  président 
l'année  même  ou  le  vainqueur  d'Ar- 
colr,  iiieinbie,  lui  auvsi  ,  de  l'académie 
des  sciencr*,  en  rece\ait  la  présidence 
(I79K  ;  et,  comme  on  va  le  >nir  plut 
bas,  il  lut  à  celle  savante  société  un 
(;rand  nombre  de  mémoires.  H  don- 
nait d'ailleurs  aux  savants,  .ses  con- 
frères, l'exemple  trop  fidèlement  suivi 
du  cumul  des  char;;es.  Indépendam- 
ment de  sa  chaire  de  botanique,  bien 
avant  IHOV,  k  la  mort  de  IV>rilhe, 
il  s'arrangea  pour  obtenir  celle  de 
matière  médicale  à  la  farult'*  de  mé- 
decine de  Paris  :  comme  tout  était 
dendé  à  l'avance  ,  dès  que  sa  candi- 
dature fut  annoncée,  les  concurrents 
se  retiierent.  Kn  1H08,  il  invoqua 
par  un  billet  les  sou\enirs  de  l'empe- 
reur, avec  lequel  son  titre  de  vire-pré- 
sident, en  179H,  l'avait  mis  à  même 
de  s'entretenir  :  il  obtint  ce  qu'il  avait 
demandé,  une  nomination  de  conseil- 
ler à  vie  de  l'université  impénale 
(10  sept.  1K08).  Cette  inamovibilité 
|>ourtant  ne  dura  qu'autant  que  l'em- 
pire, liien  que  Jussieu  eût  mis  la 
même  célérité  que  ses  rollèj;ues  k 
reconnaître  la  déchéance  ,  Louis 
\\III,  en  transformant  l'université 
impériale,  rava  le  nom  de  Jussieu  de 
la  liste  des  conseillers,  et  ne  le  réta- 
blit pas  sur  relie  de>  membres  du  con- 
seil roval  de  l'instruction  publique 
(1815).  Sept  ans  après,  lors  du  licen- 
ciement et  de  la  réorganisation  de 
l'école  de  médecine,  il  fut  de  ceux  qui, 
co|nme  V'auquelin,  Chaussier  ,  Pinel, 
I)e\eux  et  Ues-eiiettes,  ne  retrouvè- 
rent point  leur  chaire.  I)  eut  sans 
doute  été  plus  profondément  regrette, 
si  son  enseignement,  d'abord  posé  sur 


368 


JUS 


JUS 


une  base  féconde  et  riche,  l'accord 
des  propriétés  des  plantes  avec  leurs 
aftînilés  botaniques,  n'eût  point  fini 
par  être  monotone  et  pâle.  Trop  af- 
faissé à  celte  époque,  et  privé  depuis 
lonf];-temps  de  rusaf];e  d'un  œil,  il  ne 
pouvait  que  suivre  de  loin,  cl  f;ràce  à 
des  lectures  qui,  bien  que  mullipliées  , 
élaient  rares  el  insuffisantes ,  les  ra- 
pides progrès  Hc.  la  science  clianf^ce  de 
face  par  d'admirables  découvertes  en 
crg,anof:,rapliie  et  par  la  prodigieuse, 
exubérance  des  espèces  nouvelles. 
Probablement  il  le  sentait  lui-même  : 
car,  en  1826,  il  se  démil  de  la  seule 
chaire  qu'il  eût  encore,  celle  de  bota- 
nique au  Muséum,  en  faveur  de  son 
fils,  M.  Adrien  de  Jussieu;  et  quand, 
en  1830  ,  la  révolution  de  juillet 
prétendit  réparer  les  torts  de  la  res- 
tauration ,  il  ne  se  mit  pas  sur  les 
langs.  11  avait  prompîement  achevé 
de  se  casser;  et  son  activité  intel- 
lecluelle  se  bornait  à  se  faire  rendre 
compte  des  travaux  des  autres,  et  à 
rédiger ,  en  latin  ,  les  principaux  ré- 
sullats  acquis  naguère.  Il  s'imagi- 
nait pouvoir  ainsi  donner  une  nou- 
velle édition  du  Gcnera  pluniariim 
au  pair  de  la  science.  Mais,  comme 
on  le  devine  ,  il  n'avançait  que  len- 
tement dans  une  œuvre  infmiment 
au-dessus  de  ses  forces  et,  du  reste, 
peu  utile  au  point  où  la  science  en 
élail  venue.  Long-temps  encore  pour- 
tant il  s'entretint  de  cette  dernière 
illusion  du  vieil  âge.  Complètement 
aveugle  enfin,  11  s'exerçait  à  reconnaî- 
tre les  plantes  au  tact;  y  réussir  élait 
pour  lui  une  espèce  de  petit  triomphe.  II 
passait  alors  la  plus  grande  partie  de 
son  lemps  à  la  campagne.  Sa  mort  eut 
lieu  le  17  sept.  1836.  M.  Adrien 
Ijfongniart  s'empressa  de  faire  paraî- 
tre une  notice  historique  sur  Ant.-L. 
de  Jussieu  dans  les  Annales  des 
sciences  natur elles,  ]3iïï\.  iS'M  ;  et, 
Tannée  suivante,   M.  Flourcns  pro- 


nonça son  éloge  à  la  séance  pnbliquc 
de  l'académie  des  sciences  (13  août 
1838).  Le  caractère  de  M.  de  Jussieu 
s'est  soutenu  constamment  le  même  : 
les  habitudes  sévères  de  Bernard  avaient 
donné,  à  ce  caractère,  une  maturité 
précoce;  il  avait,  comme  son  oncle, 
une  piété  sincère.  Quoique  d'un  génie 
supérieur,  il  eut  l'art  de  se  ménager 
une  carrière  paisible  :  quand  on  l'atta- 
quait, il  laissait  dire.  Outre  les  ouvra- 
ges signalés  dans  le  cours  de  cet  arti- 
cle, Ant. -Laurent  de  Jussieu  a  publié, 
de  1799  à  1820,  beaucoup  de  mé- 
moires dans  les  Annales  et  les  Mé- 
moires du  Muséum.  La  plupart  se  ré- 
fèrent aux  années  1804-09.  De  ces 
mémoires,  quinze  roulent  sur  des  ca- 
ractères généraux  de  familles  ou  de 
groupes  supérieurs  aux  familles  tirés 
des  graines,  quinze  sur  des  familles , 
dix-huit  sur  des  genres  ou  sur  des  es- 
pèces. Ceux  de  la  première  série  ont 
pour  objets  les  nionopétales  hypogynes 
{Ami.,  tom.  V,  180'(),  les  monopéta- 
les périgynes  (V,  1804),  les  monopé- 
tales épigynes,  tant  à  anthères  réunies 
(VI,  1805;  VII,  1806;  VIII,  1806) 
qu'à  anthères  distinctes  (X,  1807),  les 
arlstolochiées  plumbaginées  (V^,  1804; 
VII,  1806),  lescaprifoliées-loranthées 
(XII,  1808),  les  araliacées  ombellifè- 
res  (XVI,  1810),  les  renonculacées 
malpighlacécs  (XVIll,  1811),  les  hy- 
péricées-guttifères  (XX,  1813),lesau- 
rantlacées-théacées  {Mém.,  II,  1815), 
les  méllacées  geranlacées  (III,  1817), 
les  mélidcées  tlliacées.  \j(is  familles 
dont  il  traite  dans  sa  seconde  série, 
sont  celles  des  amarantacées  (Ann., 
II,  1803),  desnyclaginées(ll,  1803), 
des  onagralres  (111,  180i),  des  loaja 
et  mentzella  (V,  1804),  des  passi- 
florées  (VI,  1805;  VI,  1805),  des 
verbenacées  (VII,  1806),  des  monl- 
mlées  (X!V,  1S09),  des  lobcllacées  el 
des  stylidiées  (XVI 1 1 ,  1 81 1  ),  des  po- 
lygalées  (Mém.,  I,  1815),  des  paro- 


JliS 


.lis 


in, 


,^  1,  IhiO),  i]c>  |«niuulacce5,  iluii.ni- 
llicM,  evlanlli^ca,  jjMiiinfes,  bbifc>  cl 
|»erM)ncc»  \,.inn  ,  \l\,  IH(K»K  des 
.^oUiirr^,  bon j^iitrr»,  cuii\ul\uUce?b, 
(/ulcuiuinaceo,  Li^iioiiirf.'^,  ^ciitianécs, 
&apotccs  et  aiiilisiacrr»  (XV,  iHlO)  : 
il  faut  >  joiiiJre  le  Mé/ruire  sur 
ifuelifuei  genres  anciens  de  plantes 
non  t'itissrrs  iinttrieurement  ,  et 
inainteiuint  ro/^fMjrtm  a  leurs  fu- 
tnillrs.  Kiitin,  la  liui.sième  iéùc  de 
iiirniuire>,  celle  où  il  est  que>tioii  de 
^rnies  el  d'e>|>eres,  nous  présente  »uc- 
n-  si\emeiit  Xericu  lUiliati  {.inn.,  I, 
1802  ,  qu'il  croil  neces-vaire  de  rap- 
poiler  à  un  aulie  ^enie  el  a  une  autre 
famille,  le  p.tunia  JI,  1803),  l'aci- 
carplia  et  le  boopis  ,11,  1803\  le 
cantua  ^ili,  IKOij,  le  Milanuro  cornu- 
tum  ^Ili,  ISOV),  d;tci$es  e>pece>  du 
jjenie  h^pericum  (XII,  180V),  di\ er- 
ses espèces  HDUxrlIpi  d'anrmones  (ill, 
ISOV),  lc;,r  v,l..  JV,  iSUV,  le -mh- 
noNl>le(lV,  IhOV  ,  le  pauiinia  \\  , 
18()'V),  l'upercularia  JV,  180V).  plu- 
>ieurs  ^euic>  réuniN  dans  L  laimlle 
(les  laurinëe>  (^l,  180.'>),  le  ditlip- 
tcia  et  le  blechum  ^iX.  1807),  Tli)- 
dropilium  de  Gartner  liU,  le  pliilipca 
de  Tlmnber-  ^XII,  I8()8i,  divers 
genres  de  la  flore  de  Lu(  Iwuhine  de 
J.oureiro(\l,  XII,  XM,  1808-10), 
une  nouvelle  espèce  de  iuarc;;ra>ia 
(XIV,  I80y),  le  melicocca  Ment., 
ill,  1817,.  Les  Amiides  du  Mu- 
séum contiennent  ausM,  d  Ant.-I^ur. 
de  Jusiieu,  des  Mémoires  sur  Ir  Mu- 
séum ifhiiluire  naturelle  de  l^aris 
depuis  sa  fotidation,  en  1(>-I5(i.  1, 
il,  III,  |\,  VI,  M,  1S0J-18(^), 
ri  il  a  donne,  dans  les  Mémoires  de 
la  société  royale  de  médecuie.  178"i, 
un  extrait  d'un  mémoire  de  M .  Cus- 
son,  sur  les  oinbelliferes.  Ces  travaux, 
dont  (juelques-uns  sont  Ires-courls  el 
portent  le  simple  litre  ti' Observations 
ou  même  n'en  portent  aucun,  ne  sont 

LXVlll. 


|ia%  lou^  de  iiiL-me  valeui  el  de  nu-ni;' 
uupor;ance.  MaiN  pris  dans  Irui  eii- 
seoible,  il»  icliclciil  bien  le  ;;cnie  de 
talent  de  leur  auicui,  la  science  piu- 
fonde,  le  &rnlimcnl  intime  des  \r.ii> 
rapports,  la  ljne^^e  d'observation,  la 
»af;acilé  de  ju-ement,  la  (eimcle  d'es- 
pnl,  la  patience  :  tous  oui  .servi  a 
constituer  la  science,  el  quelque  peu 
br.lianU  quMs  puissent  sembler,  toun 
uni  contiibué  au  pro<;res  et  tous  se- 
raient lionoiable^  pour  dr>  bolani^les 
ordinaaes.  lU  >unl  lenurqiiables  pjr 
le  parti  que  lira  Juv^ieude  Wtnat 
de  la  graine,  pu  (î^i  tuer,  p.uir  i<  .m 
dre  un  jour  nouveau  >ur  le  calcul  de» 
caractères,  sur  la  furmaliun  de>  fa- 
iniUe.N.  On  eut  peut-être  attendu  da- 
vantage de  Tauteur  du  Gênera,  mais 
c'eût  été  à  tort.  I>e  Gênera  et  tous  les 
mémoires  particulieis  sont  marqués  au 
iiieine  cachet,  et ,  pour  qui  sàil  bien 
riii>toire  du  premier,  accasenl  bien  la 
uuiiie  hauteur  d'e>prit.  i^e  sujet  du 
Iteiiera,  .^ans  doute,  est  plus  va.sle  cl 
plus  élevé,  maU  v' ,rst  Irailé  de  la 
même  façon  que  les  .<^jets  des  mrinoi- 
les;  Tauieur  de  l'un  ne  vaut  |ias  moins 
que  l'auteur  des  autres,  mais  il  ne 
vaut  pas  plus.  C'est  ici  le  lieu  de  s'ex- 
pliquer, san5  ambi^uile,  >ur  le  meule 
de  Jussieu  en  tant  qu'auteur  du  Gê- 
nera. Ce  ménle  a  ele  Irés-fortenieiil 
contestédan>  ces  derniers  temps  par  des 
savants,  dont  un  surtout  mérite  le  phi.s 
haut  ran^daii^la  .science;  ce  savant  est 
pourtant  aile  beaucoup  trop  loin. 
Commeiiçon-.  par  convenir  que,  î\A\\^ 
les  détails,  la  cla^sltii:atlon  du  Geneia 
a  subi  des  inodilJcatioii>  nonibieu:>e.^  ; 
qu'au  heu  des  ccnl  faiiiillo  «IWiil.- 
Liurent,  on  en  compte  aujourd'hui 
au-delà  de  trois  cents  ;  que  le-  familles 
nouvelles  n'ont  pas  toujours  ctc  eta- 
tîlies  sur  àti>  sections,  sur  des  coupes 
annoncées  par  l'auteur  du  Gênera  ; 
que  trois  des  anciennes  familles  ont  dû 
être   poitee,   loul    entières  dans    des 

'4 


3^0 


JLS 


<;roupes  voisins  ;  (jue  cinq  ne  se  sont 
tronsccs  naturelles  que  par  fi'aj];înenls  ; 
iiu'il  a  trop  souvent  disposé  ilcs  <;rou- 
j>es  d'après  les  formes  de  la  corolle  ; 
cjinl  a  semblé  méconnaître  lui- 
même  riinporîance  de  la  famille,  en  in- 
titulant son  ouvra;;c  Gênera:  qu'en- 
fin, s'il  a  souvent  su  réunir  des  ^enres 
en  familles ,  il  n'a  point  abordé  le 
problème  des  grotipcs  supérieurs  à  la 
famille,  en  d'autres  termes,  qu'il  y  a 
lacune  entre  les  familles  et  les  classes. 
(Quelques-uns  de  ces  reproclies  sont 
très-wrave^.  'j'outefois  il  ne  faut  en 
exap;ércr  aucun;  et  surtout  la  justesse 
même  des  reproches  ne  doit  pas  faire 
oublier,  d'u'i  côté,  que  des  inexacti- 
tudes, des  Insuffisances  étaient  vrai- 
ment inévitables  ,  de  l'autre,  que  les 
principes  ,  les  caractères  fondamen- 
taux sont  inattaquables.  Ceci  posé,  et 
pour  peu  qu'on  ne  se  fasse  pas  une 
trop  liaute  idée  du  mérite  des  méthodes 
et  des  classifications,  lesquelles  sont 
un  utile  auxiliaire  dé  !'a  science,  mais 
non  la  science  elle-même,  on  peut  voir 
que  la  valeur  du  rivr"è  est  grande,  bien 
(ju'aujouru'hui  il  soit  dépassé.  A  pré- 
sent quelle  est  la  valeur  de  l'auteur  i* 
Ici,  de  même,  notre  impartialité  re- 
connaîtra que  tout  ce  qui  fonde  la 
méthode  de  Jussieu,  c'est-à-dire  la 
nécessité  d'avoir  ép;ard  à  l'ensemble 
des  caractèlfes  ,  rinéf;alilé,  en  d'autres 
termes,  la  >ubordinallon  et  la  hiéiar- 
chie  des  divers  caractères,  l'importance 
supérieure  des  lobes  de  l'embryon , 
d'abord,  et  ensuite  de  l'insertion  des 
étamines  ,  avait  été  aperçu  et  signa- 
lé par  d'auties.  Mais  ,  de  ces  consi- 
df'rations  fécondes,  les  unes  n'avaient 
été  aperçues  que  coiiime  en  passatit,  et 
presque  comme  tout  autre  rappori, 
bans  être  suivies  avfcc  tétl^cilé  dans  Icj 
détails  de  iilAfiièrC  i  opérer  la  démon- 
stration ,  et  sâtt.-i  ^,lre  proclamées  à 
gr;ind  bruit  avec  'cèl  actenl  qui  force  à 
faire  atlfciitiôti  H  à  ri^gligei  le  reste  ; 


JUS 

les  autres,  tout  en  étant  énoncées  et 
prouvées  de  manière  à  prendre  rang 
dans  la  science  (la  nécessité  d'avoir 
égard  à  renscmble  de  caractères),  l'a- 
vaient clé  seules  ou  avec  un  cortège 
d'idées  fausses  qui  viciaient  les  conclu- 
sions. Que  ces  erreurs  mêmes  aient 
servi  la  science,  qui  ne  pouvait  man- 
quer d'en  faire  d'autant  plus  prompte- 
ment  justice  ,  qu'elles  se  succédaient 
plus  rapidement;  qu'Adanson,  en  im- 
provisant les  soixante-^inq  systèmes 
artificiels  (desquels  il  tire  un  soixante- 
sixième  qu'il  croit  naturel),  et  en  épui- 
sant ainsi,  de  prime  abord,  la  méthode 
ariificielle  qu'il  secoue  par  toutes  ses 
faces,  ait  peut-être  abrégé  de  cent  ans 
la  durée  de  cette  méthode  ;  qu'il 
ait  eu  dans  ses  fautes  bien  au- 
trement de  génie  que  ses  rivaux,  que 
ses  vainqueurs,  nous  l'admettons  et  le 
croyons;  mais  enfin  il  a  méconnu,  le 
fait  est  trop  certain,  lia  méconnu,  non 
par  quelques  phrases  de  loin  en  loin 
semées  dans  ses  ouvrages,  mais  dans 
l'ensemble  de  sou  grand  ouvrage  sur 
les  familles  des  plantes,  la  subordina- 
tion des  carnctères.  S'il  eût  fait  ce 
dernier  pas,  si  facile  pour  un  hom- 
me de  sa  force ,  si  simple  après  tous 
ceux  qu'il  avait  faits ,  ses  résultats 
auraient  été  à  la  hauteur  de  son  gé- 
nie, il  aurait  été  aussi  complet  qu'oii- 
ginal,  et  nul  nom  en  botanique  n'ose- 
rait se  placer  auprès  du  sien.  Mais,  dès 
(ju'il  n'en  a  pas  éié  ainsi,  rendons 
justice  à  des  travaillôi'.rs  qui,  loin  de 
lui  .sans  doute  pour  l'originalité,  pour 
l'éclat,  ont  eu  le  mérite  de  réunir  des 
vérités,  et  le  bonheur  de  les  faire  re- 
connaître en  les  proclamant.  Ces  tra- 
vailleurs, ce  sont  les  deux  Jussieu, 
lîernard  et  Ant. -Laurent.  Ni  ïwn  ni 
raulic  lie  peuvent  revendiquer  la  décou- 
verte de  la  méthode;  mais  des  quatre 
grands  faits  qui  la  constituent,  trois  ont 
été  par  eux  reconnus  plus  pleinement, 
plus  hautement  du  mrtins  que  par  tous 


JLS 

leurs  deranrifrH,  des  faiu  dominants 
rt  de«tiné>  à  doniir  bi>rs  de  mrllio- 
de;  If  qujtriiinr  ils  l'ont  admis,  sans 
If  ra^onnailip  ,  parrr  qu'il  avait  flr 
inscrit  sous  un  autre  nom  :  si  Cf  nVsl 
pM  là  nnf  rrcation,  c'f>t  qurli]uf  ^^lo^f 
poQiiant  ;  ft  rfrirs  on  nf  pful  dite  ni 
que  la  m^tlinJe  lirs  famille'*,  naturelles 
existât  avaiil  le  (jtalo^ue  de  Triauon, 
ni  qu'elle  n'existai  pas  (jnand  on  eut 
if  (ienrra.  Ufste  maintenant  ï  faire 
le  départ  de  ;;loire  entre  l'onelf  ft  le 
neveu.  A  notre  avis,  qu'un  doit  pressen- 
tir après  ce  qui  s'est  lu  beaucoup  y\\x% 
haut,  ft  '        IIS, 

c'e>t  l'on  les 

trj  •  0  : 

son  "  iio- 

mei  eil  %iai,  et  lesfaÉ.«rl*- 

rf>  '.  --^  n'f  sont   pa=;  décrits  : 

qu'iinpoilf.  peiNoniit*  ne  «la 

que  Bernard  de  Jus>icu  i  ^  >.  . 
re  qui  importe  ici,  c'est  l'ordre  dans 
lequel  elle:»  >e  suivent,  et  pour  qui- 
conque  \  jettera  an  coup  d'iril,  il  est 
cUir  que  Hrrnard  a\a:t  f^ard  a  i'^- 
semble  des  caractères,  et  en  reconnais- 
sait la  suboidination,  et  qu'une  fois  re 
principe  admis,  il  pl.irait  en  pri'inié re 
li^ne  la  prr->rnre  i  .  l'uniie 

ou  la  sîini'lfit  •  ilr  >.  en  Ne- 

coii  '  ivpo-  èpi-  oa 

péi  .  sur  le  pistil. 

Il  forma  ainsif  sept  classes  qu'Anl.- 
l.aurent  porta  depuis  à  quatone,  en 
établissant  dans  chacune  des  trois  der- 
nières trois  coupes  qui  prirent  rant; 
de  classe,  et  en  réunissant  en  une  seule 
classe  (la  qoaioriieme'  toutes  le^  di 
ciines.  Que  ces  dédoublements  et,  en 
général,  les  moditiratioiis  par  lesquelles 
les  cent  familles  du  Grnerti  se  uislin- 
j^ucnt  du  Catalogue  de  Trianon.  soient 
en  tout  ou  seulement  en  partie  l'ariivic 
dri  neveu,  la  différence  est  lé;;ère  :  sans 
doute,  il  fallait  que  les  bases  de  la 
métliodt'  naturelle  la^settl  poursuivies 
dans   les    applicaliofis  de   détftil.  M, 


JUS 


37. 


dans  cette  élaboration,  re^us»cnt  di« 
verses  modifications  ,  mai^  le  haut  mé* 
rite  e>l  à  relui  (|iii  ir.  .ippli(|tie  le  pre- 
mier aux  «oiiiiniics  ilf  lu  science.  --  H 
ftKl<*  «lu  tt.nriii  pluntaritm  trois 
Il  l'-del'ari.,  ITHyJaa" 
.  .  17*H.  par  Tsteri,  avec 
«1  ri   '.'  '•  '    peut    la  rc;;arder 

minirir  1  h.  .  .,  :  •  iron)  ;  la  W  île 
I*eipiif;,  171)2,  ui-K".  I/mtroduction 
en  latin,  comme  le  reste  de  l'ouvraije, 
a  été  réimprimée  à\cf  diverses  addi- 
tions ,  après  la  moil  de  l'aolrur,  d.inH 
le»  .Inimln  tles  Sfirnrrs  tuiturrttfs, 
IKJH,  par  If >  Miiiis  de  M.  \dfieu  de 
.lirsMeu.  Il  en  existe  des  exemplaiies 
tirés  i  part.-'P«>ur  ne  nen  omrii ri- 
fle îfMt»  ce  qui  est  sorti  de  la  )>tuiue 
Mirent  de  Juvsiru,  nous  men- 
encore  :  I.  De  nombieux 
artuie»  dans  le  ;;iand  liit  fiiminiirt 
Hr*  $nriu-r\  naturellts,  en  Ht)  v«d., 
lHlt3-;iO.  Cesârlicle>  ronlent  1rs  uns 
sur  les  familles  des  pLnte.s,  les  antres 
s«r  les  noms  vulgaires  des  vé*Hau«. 
II.  l>i%efs  -   )-     savoir:  1"  Hnp- 

port  fir  C  luissttires  char- 

nu (if  l'riiimen  ilu  tnu- 
tinimtii ,  Paris,  ITKi;  2" 
l)ti*  iturs  à  rrriti,'  de  inétirvinr , 
l'arus,  18416:  :i"  Mrmoirr  sur  fes 
riipports  rxAStinit  rntrr  A-.t  laruc- 
terr%  àrs  plantas  et  ieurt  vertus 
(Mémoires  île  la  société  rovalf  de  mé- 
decine, ITHC»!  :  V"  'StAe  nurïr  nlict 
et  lii  rontl'e  ^^Ann.ile^  du  M.i<étini, 
XIX,  1H1J):  y  StfOresterCev/fe- 
Hilùtn  à  ta  'Sou^'rile-Uohkfrttle,  en- 
treprise pimr  des  mhrrrhtx  tir 
géographie  cl  (f histoire  lutfurelfe 
(Aim.le.    \  .  1H(lV>.  r— oT. 

«Il  SSOW  liK>Ri  Cmrktophk>, 
architecte  aileinan»!  ,  né  à  ('>assel  en 
-^T.^i,  et.xrt  de>tin"  à  la  carn<-e  de 
la  JMri>|.'-ii.{  nce  .  et  quoique,  d^us  les 
écoles  ,  il  cuf  [»3<^e  <oii  temps  à  des- 
siner sans  iimtre.  et  à  faire  des  modè- 
les   de    er.n.lr(Klion>  <ft  d'outih,    <;fs 


2.,. 


37^ 


JUS 


parents  n'en  persistèrent  pas  luoms  a 
l'eiivoNer  aux  uiiiversilés  de  ^lîaiboiir^ 
el  (le  (.îœllin^iie.  pour  faire  tle  lui  nu 
jurisconsuile.  Dans  la  dernière  de  ces 
uuiversllcs ,  il  suivit  les  cours  de  ma- 
thématiques prolessés  par  Kaestiier,  et 
celte  science  fut  ce  qu'il  apprit  le 
mieux.  De  retour  à  Cassel,  il  ne  put 
dissimuler  à  sa  famille  sa  répugnance 
pour  la  carrière  du  droit,  et  on  lui 
permit  enfin  de  se  préparer  à  rarchilec- 
ture  ,  état  que  pratiquait  aussi  son 
père.  Il  passa  deux  ans  à  Paris  dans 
1  atelier  de  Wailly  ,  architecte  du 
roi,  et  se  rendit  ensuite  en  Italie,  où 
il  fit  un  très-grand  nombre  de  dessins 
de  monuments  et  d'objets  antiques. 
A  la  demande  de  Télecteur  de  Hesse- 
Cassel,  son  souverain,  il  visita  encore 
l'Angleterre  pour  prendre  connaissance 
des  châteaux  et  des  parcs.  Vers  1790, 
étant  revenu  à  Cassel,  il  fut  employé 
par  l'électeur  à  le  seconder  dans  ses 
vastes  projets  de  constructions  et  dans 
sa  manie  de  bâtir.  Ce  fut  surtout  au 
château  de  ^Yilhelmshœhe  ,  dont  une 
des  ailes  avait  presque  été  achevée  par 
l'architecte  du  roi,  que  Jussow  put  si- 
gnaler son  talent  ;  il  fit  plusieurs  pro- 
jets parmi  lesquels,  cette  fois,  le  plus 
simple  ,  mais  non  le  moins  dispen- 
dieux, fut  choisi.  C'était  probablement 
pour  satisfaire  les  goûts  bizarres  de  son 
maître  que  Jussow  avait  proposé  de 
bâtir  le  château  sous  la  forme  d'une 
grande  ruine  ou  bien  d'un  immense  arc 
de  triomphe.  L'électeur  se  contenta  du 
projet  d'un  grand  et  imposant  corps  de 
logis;  mais  il  se  dédommagea  en  fai- 
sant bâtir  par  Jussow  le  Lœvsenburg, 
dans  le  style  des  chàteaux-forts  du 
moyen-àge,  avec  chapelle,  salle  d'ar- 
mes, salle  des  chevaliers,  et  même  une 
lice  pour  les  tournois.  Jussow  construi- 
sit encore  de  petits  temples  et  autres 
fabriques  pour  le  parc  de  Wilhelms- 
ha;}ie.  Quand  Napoléon  eut  installé 
son  frère  Jérôme,  comme  roi  à  Cas- 


JLiS 

sel,   le  plan   primitif  du  château   de 

Wilhclmshœlic  fut  un  peu  dérangé  ; 
mais  une  partie  de  ce  qui  avait  été 
ajouté  fut  jeté  à  bas  après  le  retour 
de  l'électeur  Guillaume.  Celui-ci  nnt 
Jussow  à  la  tête  de  la  direction 
des  bâtiments  ,  ainsi  qu'à  celle  des 
ponts  et  chaussées,  et  le  nomma  com- 
mandeur de  l'ordre  du  Lion-Hessois. 
Jussow  construisit  encore  à  Cassel  une 
caserne  avec  une  place  d'exercices 
couverte  ,  l'église  de  la  Ncustadt  ou 
Ville-Neuve  ,  et  plusieurs  malsons 
particulières.  L'électeur  le  chargea 
de  construire  un  grand  [)alais.  L'é- 
difice fut  commencé  :  mais  l'architecte 
et  le  prince  moururent  sans  avoir  pu 
l'achever.  Une  dernière  construction 
de  Jussow  fut  la  porte  de  la  ville,  Sip- 
fe\ée  FriecJrîchsthor.  Il  mourut  le 
26  Juillet  1825.  D— g. 

JUSSY  (Paul),  né  à  Montier- 
en-Der,  fut  bénédictin  de  la  congré- 
gation de  Saint- Vannes  ,  en  166^-, 
et  devint  son  président  pour  la  neu- 
vième fois  en  1728.  Dom  Calniet 
faisait  un  très-grand  cas  de  ce  respec- 
table et  savant  religieux.  Il  nous  ap- 
prend que  dom  Jussy,  «  étant  procu- 
«  reur-général  de  la  congrégation  à 
«  Paris,  en  1686,  fit  toutes  les  pièces 
«  d'écritures  concernant  le  procès 
«  d'entre  les  supérieurs  et  religieux  de 
«  la  congrégation  de  Saint-Vannes, 
«  d'une  part,  et  les  religieux  et  supc- 
«  rieurs  de  l'ordre  de  Cluiil,  d'autre 
i<  part.  »  Ces  pièces  nombreuses,  mo- 
dèles de  style  et  de  raisonnement,  firent 
triompher  la  cause  de  Saint- Vannes. 
Dès  1680,  Jussy  avait  publié  à  ce  su- 
jet un  Juclum  qui  fut  très-recherché. 
La  collection  de  ses  lettres,  probable- 
ment perdues  par  suite  delà  suppres- 
sion des  monastères,  annonçait  un  ju- 
gement solide,  de  la  sagacité  dans  les 
affaires  les  plus  épineuses,  et  beaucoup 
de  capacité  dans  leur  conduite.  Il  mou- 
rut le  29  juin  1729.       D— li— s. 


JIS 

.1  rSS  V  (JACQUr5pHILIPPK), 

cliiiurfîieii,  naqull  vers  1716  il  iJfsaii- 
çon.  Après  V  a^oii  aclitM*  nm  éludes 
fla*<iquf*  a\cf  sucres,  il  fut  envoyé  à 
Paris  pour  v  suivre  les  cours  de  la  h- 
cullr  de  tncdeciiie.  Son  goûl  i'étani 
déclare  pour  la  rliirur^ie  ,  il  fréquenla 
pendant  plusieurs  années  les  hApi 
taux  et  les  ainpliiiliéàlres  ;  et,  pourvu 
d'un  dipl<\ine  de  licencié,  revint  exer- 
cer sa  pi  ofe.vNinn  dans  sa  \ille  natale, 
où  il  ne  tarda  pa<;à  avoir  une  clienlrle 
àssn  nombreuse.  Appelé  dans  le  cou- 
rant da  mois  de  novemhre  1  T.'ii)  à  I  li(\- 
pital  pour  y  tailler  un  malade  de  la 
pierre  ,  il  se  ser\it  du  lilhntoine  nou- 
vellement imaginé  par  le  frcrr  (^'une 
(/'(>).  ce  nom,  X.  lîil)  ;  et,  l'oprralion 
avant  réussi,  le  chiruriiicn- major  Fcr- 
rier,  qui  en  a\ait  été  témoin,  crut  de- 
voir écrire  a  ce  sujet  une  Lrltrr  au 
frère  CAmf,  dont  un  eiitrait  fut  im- 
primé dans  le  Mrnure  de  janvier 
1754.  l^ne  seconde  opération  laite 
quelques  jours  aprrs  par  .lusr>v,  avec  le 
même  instrument,  n'avant  pa%  été  cou 
ronnée  du  même  succès,  l^e\acher  /'. 
ce  nom,  \\|V,  'M\\\  cliirur^ien- 
major  des  ln^pitaux  militaires  de  lie- 
sançon,  et  partisan  de  l'ancienne  mé- 
thode de  la  taille  quM  pratiquait  (le|itiis 
trente-cinq  ans,  écrivit  a  Kerrier  une 
Lettre  [imprimée  dans  le  Merrure  de 
juin),  dans  laquelle,  en  convenant  que 
le  lithotome  du  frerc  ('^\me  paraît  être 
utile  en  certain  cas,  il  cherchait  à  dimi  ■ 
nuer  le  mérite  de  l.i  première  opération 
de  Jussv,  et  rejetait  le  mauvais  succès 
de  la  seconde  sur  l'i^nonnre  ou  la 
maladresse  de  ce  chirurj;ien.  Ouoiqiic 
Juiîv  ne  fut  pas  nommé  dans  retic 
lettre,  il  y  avait  été  dcii;;ii('  d'une  ma- 
nière si  claire  «ju'illui  était  impossible  de 
garder  le  silence  dans  cette  discussion. 
Il  adress.T  donc  à  Levacher,  sous  le 
nom  de  Ferrier,  une  Réponse  très- 
piqoante  qui  parut  dans  le  Merrure 
du  mois  de  septembre  (*2-iO-*28i.  Mal- 


JUS 


:i73 


^ré  le  \ ode  transparent  dont  il  s'était 
enveloppe,  Kr\arherne  pouvait  |ias  ^e 
mépreiuîrr  sur  son  véritable  adver- 
saire; aussi  lui  irpliqua-t  il  directement 
par  un  pamphlet  intitule  :  l,etlre'a 
M.  Ju!f\y  sur  su  reftonsed  une  lettre 
de  M.  I  uifier  [\\  etc.,  par  .MM..., 
étudiantb  en  médecine,  in-8"  de  "20 
pa^.  Jussy,  dans  sa  réponse,  ne  s'était 
pas  un  seul  instant  écarte  de  la  ques- 
lion  :  la  Irlt'^r  de  l^var  lier  est  au  con- 
traire pleine  de  prrMJiinalités  injurieu- 
ses, que  la  colère  même  n'emplova 
jamais  qu'à  défaut  de  bonnes  rason.. 
l'Ius  jeune,  plus  \il  et  maniant  mieux 
Ir  sarcasme  et  b  plaisanterie,  .lussv 
mit  lin  à  la  querelle  p.ir  une  Lettre  <i 
M.  l'acher,  etc.,  au  w/et  Je  relie 
tjuil  a  écrite  sous  le  nom  de  ses 
elè\*es,  etc.,  ptir  S.  7'.,  maître  tfè- 
rtde  du  viiia^e  de  Saligny  ['!)  dans 
ie  liituritofuuiis  (17.'>i^,  in -4"  de 
5  pa;;ei.  (^  opuscules  dont  les 
titres  ont  été  dénaturé,  par  tous 
les  bibliowraplies,  sont  depuis  long- 
temps introuvables,  l'ort-d  déclare, 
dans  son  llisUùre  de  Canalomie , 
qu'il  n'a  jamais  pu  s'en  procurer  un 
seul  c\empla-re.  Cette  vive  discussion 
contre  un  de  ses  maîtres  ne  nuisit 
point  à  .lussv.  Kn  17r)(>,  il  avait  le 
titre  de  lieutenant  du  premier  cliinir- 
;:ien  du  roi  à  Besançon;  plus  tanl  il 
fut  nommé  professeur  démonstrateur 
roval  au  colleur  de  chirur<;ie  «le  cette 
ville;  il  remplit  cette  place  avec  autant 
de  zcle  que  de  talent  jusqu'à  -a  sup- 
pression en  170.3.  Il  passa  dan;  la 
retraite  los  dernières  années  de  sa 
vie  ,  conservant  toujours  sa  i;.iîté,  et 
recherrlié  des  jeunes  jjens.  Il  mourut 
ler'avi.l  17i)S,  à  l'j'^f  de  .|r.alre- 
vin^-t  deux  ans.    Outre  les   opuscules 


(.)  Ce.t   ai 


qu  II 


il  aviil  d'abor.l  <•  ril  »on 
nom  ;  mais  il  pri'l  clui  de  l^rachrr,  a|>rrs 
qu'il  f^ut  rrçu  c!m  lettre  de  i»ol>le»se  en  r.  r...n- 
pmtr  drses  wrtice». 

(ïi  Cr  Ti;i»gr  r.t  \f  lieo  de  nai^îonc-  ât>\^' 
vacljer. 


^74 


JUS 


déjà  cilés,  on  connaît  de  lui  deux  ob- 
servations importantes,  pjibliées  dans 
le  Journal  de  médecine  :  l'une  svr 
Voiwerture  d'une  artère  guérir  sans 
ligature  (nov.  177i,  tom.  XLII); 
l'autre  5///*  les  plaies  pénétrantes  du 
Ifas-ventre  {dtoùi  Mil,  t.  XLVIII). 
La  première  est  citée  avec  éloge  par 
Sue  le  jeune  dans  son  Mémoire  sur 
Vanéorisme  de  F  artère  crurale  (ibid . , 
août  1776,  loiu.  XLVI).  W— s. 
•lUSTI  (Amklir  Hoi^t,  née  de), 
fille  du  second  lit  du  célèbre  Jean- 
Henri-Gottlob  de  J;:.sti,  mort  prison- 
nier d'état  à  Custrin  [Voy.  JuSTi  , 
XXII  ,  1G9  et  170)  ,  vit  le  jour 
en  1758.  K^qç.  de  treize  ans  à  la  mort 
de  son  père  ,  aux  tristes  scènes  dont 
avait  été  témoin  son  enfance,  elle  vit 
succéder  la  gène  et  l'isolement.  Les 
leçons  du  malheur  élevèrent  son  esprit 
et  fortifièrent  son  caractère.  Son  père, 
malgré  ses  fautes,  malgré  cette  excen- 
tricité qui  fut  la  cause  vraie  de  ses 
malheurs,  était  l'objet  de  son  admira- 
tion :  elle  eut  l'idée  d'écrire  sa  vie.  Sa 
mère,  dont  l'union  avait  été  si  dou- 
loureuse et  dont  le  bon  sens  aurait 
épargné  tant  de  maux  à  son  époux,  s'il 
eût  su  l'écouter,  l'en  empêcha  :  un  tel  li- 
vre eût  et  d  nécessairement  une  apologie, 
par  conséquent  un  manifeste  non-seu- 
lement contre  les  médiocrités  jalouses 
qu'avait  froissées  l'orgueil  de  Justi , 
mais  même  contre  le  gouvernement 
prussien,  puisque  Frédéric  avait  puni 
Justi,  non  pour  ses  mensonges,  mais 
pour  ses  révélations  et  sa  manière 
d'argumenter.  D'ailleurs,  à  quoi  bon 
réveiller  de  pénibles  souvenirs  et  re- 
venir sur  l'irrémédiable  passé.'  Amélie 
condescendit  à  la  répugnance  de  sa 
mèie  et  sacrifia  un  sujet  de  biographie 
merveilleusement dram.'iti(]iie  et  fécond, 
même  sons  une  autre  plume  que  celle 
d'une  fille  à  qui  le  lecteur  pardonne- 
rait volontiers  la  partialité.  I^lus  tard 
elle  se    maria  au  docteur  Hoist  dont 


JUS 

elle  eut  un  fils  et  deux  filles,  et  après  la 
mort  duquel  elle  dirigea  un  pension- 
nat de  jeunes  demoiselles  à  Jîoitzen- 
bourg,  ensuite  à  Hambourg,  et  finale- 
ment à  Parchim.  Ses  éludes  et  ses  mé- 
ditations habituelles  la  rendaient  par- 
faitement apte  à  tout  ce  qu'elle  entre- 
prenait. Quelques  juges  superficiels 
peut-être  lui  eussent  reproché  de  trop 
pencher  du  côté  des  études  sévères  , 
solides  et  savantes:  elle  possédait  la 
philosophie  et  l'histoire  de  la  philoso- 
phie à  un  degré  remarquable.  Pour 
nous,  ce  défaut  n'en  est  pas  un.  Vers 
1819,  elle  abandonna  son  établisse- 
ment et  se  retira  chez  son  fils ,  dans 
cetie  petite  presqu'île  de  ïeldau  que 
forment  l'Elbe  et  la  Sude  près  de 
Boitzenbourg.  C'est  là  qu^elle  mourut, 
le  6  janvier  1809.  Ses  Remarques 
sur  les  vices  de  l'éducation  moderne^ 
par  une  institutrice  qui  pratique 
(Leipzig,  1791),  publié  sous  le  voile 
de  l'anonyme  et  dont  long-temps  on 
ignora  le  véritable  auteur,  est  un  ou- 
vrage modeste,  mais  éminemment  utile  : 
le  bon  sens  a  tenu  la  plume,  mais  sans 
s'exagérer  lui-même  ;  en  mettant  à  leur 
véritable  rangl'imaginationjle  brillant, 
les  arts,  M'"*^  Justi  ne  conteste  ni 
leur  existence  ni  leur  charme,  mais 
elle  veut  des  murs  avant  des  décors  et 
la  solidité  avant  l'agrément.  Si  la  femme 
doit  savoir,  sa  sciencedoitétresérieuse  et 
positive:  si  elle  doit  développer  et  cul- 
tiver son  esprit,  c'est  par  la  morale 
surtout.  Le  livre  de  M"'^  Holst  est  un 
de  ceux  qu'on  a  le  plus  relus  en  Alle- 
magne et  l'on  devrait  aussi  le  lire  en 
France  :  mallieureusement  il  n'a  pas 
été  traduit.  On  a  encore  de  M'"^ 
Holst  :  I .  Si  et  en  quel  sens  la  femme 
est  destinée  à  une  haute  culture  de 
t esprit  (Ueber  die  Bestimm.  des  Wei- 
bes,  etc.),  Berlin,  1807.  ÏL  Juge- 
ment sur  Eli  sa,  ou  la  Femme  comme 
elle  devrait  être  (dans  le  Musarion  de 
J.indemann  ,  Altona,  1799).   P — ot. 


JUY 

jrVE\AL(lii'iJ»Hj\».miFAVx 

ouJ^n^^^'•  'tu    ronua  sous   le 

nom  tic).  .  rt  ffri\ain  asccti- 

MC  lrr»-f*  I  iiiiM.  ,  cuil  ne  %rr^l4(»0, 
dans  IcMaiiir,  r(  sr\vn  toutrnpparrnre 
au  Mans,  di-  |>a'ctits  |Mii\n-s.  Son 
rnnipalnolr  Ni.  !.«!.♦•  Trllriirr.  r'iar- 
mr  lie  \e.s  «lis]  »• ,. 

lui  |ilOrill  J  ll's  i:  iri 

se»  èlulir»  à  Pau»,  l.c  l'rileiirr  l'eo^^a- 
;;eail  ensuite  a  pa>«ber  en  Italie,  pour 
S)  perfectionner  par  la  fréqueutation 
des  savants,  se  tliar^eant  de  tous  les 
Crais  du  ^u^a^e  ;  mais  Jutenal  ne  put 


|ainai$  se  xr>4 


ttr  de  France. 


I)e*  ijuil  eut  iliide*.  il  en- 

tra dans  la  cair  rn-  •«•  i  <  :ii. 

Il   donnait,  rn    14U<),    •  •  e 

lilleralurr  a  I*aris  ;  et  indt  pi  luLuiMnrtit 
du  fonr^  jMiM'r  qd'il  fat-.tit,  dans  un 
deN  '  r.  il  avait  en- 

rot  <  i"t  rn  p;«r- 

liruiiiT.  i  lui  en 

promeita  -  ,        „  .     se  lass.t 

bientôt  el  de  I  ensei^neineni  et  du 
monde.  11  se  retira  dans  l'altbavf  de 
Qiezal-r>enoi(  en  l»erry,  qui  venait 
dVtre  réformée,  et,  aprèi  le  temps  or- 
dinaire des  eprenvo,  v  embrassa  la  >ie 
r«ii.  '"      talents  et  s.i  piete  l'ele- 

vèi •  'icnt   aux  prrnneies  di- 

^niti>.  Liu  ,  en  1497,  abbe  de  Saint- 
Sulpice  a  Uour^es,  il  >  ijl  ievi\re  l'an- 
cieniic  di>r*pline  ,  et  donna  l'exemple 
de  la  souoiivsion  à  la  rr;;le.  Il  niuurut 
en  I50Ô.L1  i>.  Jeanne  de  tVanre,  fon- 
datrice de  l'ordredes  Annoncia«lcs,  l'a- 
vait clioisi  pour  son  du  ecteur  cl  l'Iiunora 
de  sa  conbance.  On  a  de  Ju\cnal  :  I. 
Commrniurii  in  Lerentii  ru/mrJias , 
imprimés  pour  la  première  fois  dans 
rédilion  de  Teience,  l'aris,  1492  , 
in-fol.,  el  reproduits  assez  fréquem- 
ment pendant  le  WT  siècle.  11.  Inter- 
prctiitio  in  Litimv  linginr  l'Jrgantiits 
Limr.  \  iilUz  ,  l'ans  ,  1  i9  V  ,'  l  i9(i , 
1497,  in-V  .  Ces  irois  éditions  ne 
diflerent  probablement  que  par  le  fron- 


litptrc;  mais  rouvra{;e  a  été  léimpri- 
mt  plusieurs  foiN  an  cninmenrrmrnt 
du  XVr  kiecle.  111.  Grammutica, 
I  i:>18.  iu-r.Ottc  édition, 

'  -    citent   les   bibliographe!», 

I  (irarr,  piiis(|iic  aiirun  n'en 

I  ir  I  a>ant  \uv,  rt  n'cndonne 

la  ilt'.fiiption.  IV.  hftistula,  Paris, 
1  V99,  Ml  H"  ;  filer*  pai  l'jiiirr,  An- 
milrs  fyf»  « .  d'apré»  quel- 

3ues  autre  „   iplies.    J).    Liron 

il  que.  mal);re  lonleN  ses  rerberc lies,  il 
n'a%ail  jamais  pu  parvenir  à  s'en  pro- 
curer un  exemplaire.  V.  Jm  rrffe  tir 
saint  //r/roiV  traduite  en  français.  Pa- 
ns, lôtM),  in-i'.  Il  existe  de  celle  édi- 
tion des  f\.  '  iir  vélin.  Cetielra 
dnrtiona*  iiec,  Paris,  1. '>!).'>, 
petit  in-h  ^o  !i.,  cl  concc  pour  le 
*t>le.  ibid  ,  !:)73et  l'iHO.  V|  hi 
rrglr  tU  tir^'n/itm  dr  suint  Hirruinr 
a  srs  siTurs  friitrru,  llrs  dr  rrli^iun, 
pans  (vers  l.'io  ii-4"  p»tli., 
Ires-rarc.  J^  t  ,  <•  royale  en 
povsede  un  exemplaire  sur  vélip. 
Nil.  lirfornuitiunis  numaslinr  rin- 
diiiir,  Sfu  dr/rnsin  urdin.  sonrli  He- 
nrdirti,  Paris,  1503,  petit  in-8'\ 
Otie  édition  est  la  seconde;  on  n*a 
pu  découvrir  la  date  de  la  première. 
On  trouve  une  notire  assex  éten- 
due sur  Ciui  Juvenal  d.ins  \ei Singula- 
ritrs  tiisiuritfurs,  pAf  I).  laron,  111, 
41-.')1.  l/arlide  que  l.e  Pai;;c  lui  a 
donné  dans  son  Jh'r/ionnairc  du 
Mainr^  11,  50,  manque  d'exactitude. 
NV— S 
.irVEXFL  dr  (AirhnnislVv- 
Li\  «le  ,  né  à  Peiénas  en  l(i79,  .se  pré- 
tendait issu  ilelafamilleJou\enel  ou  Jn- 
vénal  des  l  rsins  (  1  )  qui,  depuis  le  rè^c 

I  Hjrbirr  Etamrn  fili'jne  dri  lirlinn- 
nairri  ,  p.  4*4  ,  •»  rrlrvani  l'onii.MOii  de  Jo- 
»«»»L  iljn»  la  flioi:rtph,rÊ,m,r,'te//f,(>l>ser*e, 
Ntaiit  »o<iiti«>  e«p«:r  <\r  raiMiti  .  qu'on  «  «an» 
ao.,tf  rrjrrT.-  l.iir  ii(i«l«  P"«'r  'a  Ift-r»-  C 
B^rL..  r  ..  u  .1^.1  e  r^  d-uln  m^r.ie  ».ir  ce 
point  (»i  ii.rr.  I-  il  v  •)  que  d*«»oir  copie  te»-» 
lurllriurnt  un  Mrmitie  sur  la  famillt  de  Jiifenet 
in»rrc  d«ri^  l'Année  Iitlérnira  de  Fréron,  1761, 
tom.  Il  .  |<.  Jui-jg^. 


\-h 


JUV 


JUV 


i]e  Charles  \  I,  avait  donné  à  IVc^iise,  à 
radnnnislration  et  à  la  inaj2;lst rature 
plusieurs  personnao;eséminen1s,  cl  qui, 
retombée  dans  l'obscurité  sous  le  vè'^De 
de  Louis  XI ,  était  venue  s'établir  dans 
le  Languedoc.  Félix  Juvenel  ('ij,  ayant 
fait  ses  études  chez  les  Oratoriens  de 
Pézénas,  alla  se  perfectionner  à  Paris. 
Etant  retourné  dans  sa  ville  natale,  il 
épousa  Anne  de  Micliel-Marlelly,  seul 
rejeton  d'une  famille  ancienne  alliée  à 
celle  de  Gnmaldi.  Comme  cette  union 
le  fixait  à  Pézcuas,  il  consacra  tous  ses 
loisirs  à  l'élude  de  l'histoire.  Il  com- 
posa pour  l'instruction  de  son  fds  les 
Prindprs  de  Phistoirc  qui  furent  pu- 
bliés en  1733  (Paris,  in-12).  11  s'oc- 
cupait de  rassembler  les  matériaux  d'un 
ouvrage  plus  étendu  sur  l'orij^ine  et 
les  progrès  de  toutes  les  connaissances 
humaines.  Il  ne  le  publia  d'abord  qu'en 
un  volume,  sous  le  titre  à' Essais  sur 
l'histoire  des  sciences,  des  helles-lei- 
Ires  et  des  arts,  Lyon,  1740,  in-12. 
Le  succès  qu'il  obtint  engagea  l'auteur 
à  le  revoir  et  à  l'augmenter.  La  seconde 
édition  parut  en  1744,  2  vol.  ln-12; 
la  troisième  en  1749,  4  vol.  in-8^,  et 
la  quatrième  en  1757,  4  vol.  in-8". 
Il  fallait  un  esprit  éminemment  analy- 
tique et  une  érudilioi.  peu  commune 
pour  embrasser  l'immensilé  des  ma- 
tières que  comportait  un  pareil  sujet. 
Sans  rester  tout-à-fait  au-dessous  de 
la  tâche  qu'il  s'était  imposée,  Juvenel 


(jj  Son  aiciil  ,  nomiiH'  aii-si  l-'elix,  laissa  un 
grand  nombre  de  traductions  et  d'autres  écrits, 
dont  deux  seulement  ont  été  imprimés:  i  " 
Don  l'flage,  ou  i Entrée  des  Maures  eu  Espa- 
gne, 1645,  ï  vol.  in  80,  roujan  historique,  a» 
Portrait  de  la  Cjquelle,  ou  la  Lettre  d' yinstundre 
a  Ttmogene.  l'aris,  1(09,  in-i>.  U  y  a  des  exem- 
plaires avec  un  nouveau  frontispice  ,  qui  por- 
tent la  date  de  i'<85. 


de  Carlencas  semble  ne  l'avoir  qu'ef- 
fleurée. C'est  d'un  vol  rapide  qu'il  par- 
court toutes  les  branches  de  nos  con- 
naissances et  qu'il  les  suit  depuis  leur 
origine  jusqu'à  l'époque  de  leur  entier 
développement.  Mais  chacune  d'elles 
se  détache  isolément  et  rien  ne  fait 
apercevoir  leur  point  de  jonction  ou 
leur  enchamement.  Une  œuvre  appro- 
fondie ne  pouvait  donc  résuUer  d'un  pa- 
reil plan.  Quelques  vues  ingénieuses, 
un  style  en  général  clair  et  précis,  sans 
pallier  le  vice  radical  de  l'exécution, 
expliquent  le  succès  de  l'ouvrage  et 
riionneiir  qu'il  eut  d'être  traduit  en 
allcm.'ind  et  en  anglais.  On  a  remarqué 
que  l'art  de  la  cuisine  et  de  la  pâtisserie 
(tom.  IV,  pag.  265  et  2G6)  n'y  avait 
pas  été  oublié,  mais  que  l'auteur  avait 
passé  sous  silence  l'art  admirable  des 
Roscius  et  des  Baron.  Juvenel  de  Car- 
lencas mourut  à  Pézénas,  le  1 1  avril 
1760,  âgé  de  plus  de  quatre-vingts- 
ans.  Il  était  membre  de  l'académie  dey 
belles-lettres  de  Marseille. — Juvenel 
(Henri  de),  père  du  précédent,  avait 
été  mousquetaire  et  capitaine  au  régi- 
ment de  la  marine.  11  mourut  à  l'âge 
de  vingt-sept  ans  (Félix  Juvenel  était 
encore  au  berceau),  dans  les  sentiments 
d'une  piété  exagérée.  Il  portait  sur  lui 
une  ceinture  de  fer  hérissée  de  poin- 
tes qui  étaient  entrées  si  profondé- 
ment dans  les  chairs  qu'on  ne  put  l'en 
tirer  dans  sa  dernière  maladie.  Il  avait 
publié  trois  roman?  historiques,  genre 
alors  fort  en  vogue,  comme  il  l'est  au- 
jourd'hui :  1  "  /e  comte  de  Richemont, 
Amsterdam,  1680,in-12;  2'' jfcV/^arr/, 
histoire  d'Angleterre,  Paris,  1695, 
2  V.  in-12;  3"  /^/  hardie  Messinoise, 
1697,  in-12.  L— M— X. 


KAK 


KAF 


k 


KVItorS.  To).  Cabois.  I  |\. 
:»io 

K.KMPF  (Jrah),  ronseillfr  et 
rordrciii  du  j;ranil-<ltif  de  Hfs.se-Hom- 
boîir^,  ne  »  I)fiix-!*onls,  le  IV  mai 
ITJ.l,  fil  ses  éltidr^  métlirale*  à  Haie, 
où  il  soutint,  en  17'>i),  pour  u  ré- 
rrjition  au  dnctoraf,  une  lllr^^  qui  eut 
un  a^sez  ^rand  releiilissrmenl.  lla^ait 
choisi  pour  sujet  la  mrlhode  suivie  par 
son  pèredans  le  traitement  de^  oUtrur- 
lions  abdominale>.  (^tte  mélhoUe  ron- 
si>le  exclusivement  dans  radministra- 
tioii  de  lavements  qui,  aujourd'hui  en- 
core, portent  le  nom  de  liu-rnirtits  de 
K.tinpf.  l/ideeneu\e  et  fondameiitale 
de  re  travail  ,  c'est  que,  d'après  l'au- 
teur, presque  toutes  les  maladies  chro- 
niques ont  leur  source  dans  \ei  obstruc- 
tions drs  >isceie^  ;<l)dominau\.  Il  est 
curieux  de  constater  l'analoj^ie  Irap- 
panle  (jui  existe  entre  celte  opinion  et 
celle  de  lîroussai»  ;  remplacez  le  mot 
oi'Struction  par  infUwiniaiiun,t\  vous 
aurez  fidèlement  résumé  en  une  seule 
proposition  toute  la  doctrine  du  méde- 
cin physiologiste.  Apres  sa  réception, 
Kj-inpi  ^e  rendit  à  la  cour  du  prince 
de  liesse- Ilonihour^,  ou  il  srjoiirna 
sept  ans.  Kii  1770,  il  devint  mc«lecin 
du  prince  d'()ian;;e- Nassau,  puis  mé- 
decin pensionne  de  la  ptincipaulé  de 
Dielz  et  médecin  des  eaux  d'Kms.  Kn 
1778,  il  fut  nommé  conseiller  supé- 
rieur et  premier  médecin  du  prince  de 
Ilesse-Hanau.  Il  quitta  ces  fondions 
en  1787,  pour  retourner  à  Hombourj; 
où  il  reçut  le  litre  de  conseiller  intime  : 
mais  il  ne  jouit  pas  longtemps  de  cette 
nouvelle  position,  car  il  mourut  le  29 
octobre  de  la  même  année,  daiis  un 
vova^e  qu'il  fil  à  Hanau.  Ses  écrits 
sont  :  I.  Dissertatio  de  infructu  va- 
sorutn  verUrùuJiy  liàle,  1753,  in-4''. 


1 1 .  Considrrations  sur  Irs  tmifirra- 
mr///5,.Schalhouse  et  Francfort,  1700, 
m  H".  III.  J'ùrreSiiurni, iiu  ir  Mon- 
tir  i'rii///rr/rom///'.romrdie médicale. 
|j  bonne  édition  e>l  relie  de  t  lancfort- 
sur-le-Mein,  177H,  in-K';  l'auteur 
n'axant  jamais  avoué  l'édition  de  (fies- 
sen,  177.'»,  in-H'.  IV.  l'.iuhiritliiim 
ifir/Jiruni,  Francfort  et  Leipii;;,  1770, 
in  H  ;  2'  édition  corri|»éc  »  Franc- 
(«:l,  17HH,  in-8"  ;  V  édition,  ror- 
i!.:re  ri  augmentée  par  (Charles  Jean- 
Iheo.i.  kiiituin,  ibid  ,  1792,  in-K"; 
tiaduit  en  allrm.ind  par(f.-F.  Durrr, 
C.liemnitz,  179V,  in-l*i;  par  J.-(^.- 
F  !t.rhreiis,  I)nrlmun<i  rt  Leipzig;, 
179(i,  in-H".  V.  l'niifr  destinr 
OUI  rnrtJm'ns  rt  aux  niulmlrs,  sur 
unr  nuu^'rHr  nuinirrr  dr  ^urrir  riiiii- 
rulrniriit  1rs  iiffrrtions  lr>  plii^  fnwrs 
qui  li.'if  Irur  sirs^r  dtins  Ir  Imis  vrnirr, 
surhtut  i ItYftoihutuirir  ,  Dessau  , 
17HV.in-S";  l^ipzig,  17S:>,  in-H"; 
nouvelle  édition, COI ri;;é«  et  au(;mentée 
d'une  réfutation  des  objections  Mui  ont 
été  faites,  l^eipzi^,  17H(>,  m-S';  ex- 
trait par  (v.-4i.C.  Muller,  llanau, 
1788,  in-8'';  Auesbour^;  ,  1790, 
in-8';  ibid,  1791.  in-8";  trailuit  en 
holl.indais  par  (i.-J.-l).  konin;;, 
Iti relit  ,  1787,  in-S";  V|.  l'ariiz 
uhsrr\uitionrs  mrdicit  ulans  1rs  Actes 
de  l'acidcmie  de  (iiessfii,  1771,  pa^. 
\'i'l).  Vil.  iraitr  dr  f/êydrop/io- 
//:'*'.  twrr  f  indication  drs  nio)  rns  1rs 
plus  rffuiurs  a  rmpluyrr  nmirr 
irtte trrrihir  maUtdir  'dans  le  Maga- 
sin de  Manau,  1778,  et  a  part,  1780, 
in-8").  Karmpf  a  fourni  encore  d'au- 
Ues  articles  au  même  journal  et  à 
celui  de  Haldinser.         j)_D— R. 

K.EI  FF'EU  (Chrktirn-Théo- 
PiiiLK  ,  surintendant  et  pasteur  à 
Ueichenbach  ^Prusse),  auteur  de  plu- 


37B 


KAE 


sieurs  ouvrages  historiques  assez  im- 
portants, naquit  à  Zodel  près  Gœrlitz, 
le  24  avril  1757.  Son  père  était  ori- 
ginaire de  la  Poméranie  ;  à  son  retour 
de  l'université  de  Leipzig,  il  fut  nommé 
pasteur  à  Zodel  qu'il  quitta  en  1768, 
pour  le  village  de  Ludwig,  où  il  mou- 
rut le  3  mai  1796.  Sa  mère,  Jeanne 
Hélène,  née  Bruckner,  était  fille  uni- 
que de  Daniel  liruckner,  édile  dans 
l'église  de  Saint-Pierre  à  Gœrlitz.  Jus- 
qu'à l'âge  de  trois  ans  C.-T.  RaBulfer 
était  si  délicat  que,  plus  d'une  fois,  on 
désespéra  de  ses  jours:  cependant,  à 
cette  époque,  sa  constitution  se  fortifia, 
et,  depuis  lors,  sa  santé  fut  bien  rare- 
ment altérée.  Jusqu'en  1770,  il  reçut 
de  son  père  les  premiers  éléments  de 
la  religion  ;  plus  tard  il  lut  guidé  par 
lui  encore  dans  l'étude  du  latin.  Son 
père  était  pénétré  d'un  profond  respect 
pour  la  Bible;  il  croyait  d'une  ma- 
nière inébranlable  à  la  manifestation 
de  Dieu  dans  cet  ouvrage,  et  mémo  il 
avait  suivi  l'exemple  de  plusieurs  de 
ses  contemporains  qui  cherchaient  dans 
l'Apocalypse  de  saint  Jean  la  prédic- 
tion des  événements  à  venir.  Ses  pieu- 
ses intentions,  sa  constance  dans  tout 
ce  qu'il  entreprenait  exercèrent  sur  son 
fils  une  grande  et  heureuse  influence. 
En  1770  ,  le  jeune  Ka^ufler  entra  au 
gymnase  de  Gfi-rlitz  ,  où  il  fut  admis 
aussitôt  en  seconde  ;  l'année  suivante 
il  fit  sa  rhétorique  dans  ce  brillant 
établissement  qui  avait  pour  recteur 
iiaumeister.  C'est  surtout  à  ce  sa- 
vant maitre  qu'il  fut  redevable  de 
l'excellente  direction  imprimée  à  son 
esprit.  A  cette  époque  le  grec  était  peu 
cultivé;  Xénophon  et  le  iSouveau- 
Testamenl  étaient  à  peu  près  les  seuls 
ouvrages  qu'on  lisait  dans  cette  lan- 
gue. Mais  on  se  livrait  avec  d'autant 
plus  de  zèle  à  l'élude  du  latin.  Les  exer- 
cices journaliers  et  l'exemple  du  rec- 
teur Iiaumeister  excitèrent  dans  beau- 
coup de  jeunes  gens  de  l'école  une  telle 


KAE 

ardeur  qu'ils  étaient  parvenus  à  parler 
et  à  écrire  le  latin  avec  la  plus  grande 
facilité.  Il  arrivait  fréquemment  au 
professeur  de  donner  un  sujet  à  traiter 
ou  à  discuter  sans  préparation  :  Kaeiiffer 
se  distinguait  toujours  dans  cette  sorte 
d'exercice.  Il  avait  un  tel  amour  pour 
l'étude  qu'il  forma,  avec  plusieurs  de 
ses  condisciples,  une  petite  société  lit- 
téraire; il  lisait  aux  membres  qui  la 
composaient  les  classiques  latins,  sur- 
tout Cicéron,  les  Lettres  de  Pline,  les 
Odes  d'Horace,  les  Tristes  et  les  Méta- 
morphoses d'Ovide,  lesEglogues,  les 
Géorgiijues  et  les  six  premiers  livres  de 
l'Enéide  de  Virgile.  11  leur  faisait  cha- 
que jour  une  dictée  allemande  qu'ils 
devaient  traduire  immédiatement  en 
latin,  etc.  En  1776,  il  se  rendit  à 
l'université  de  Leipzig  pour  se  confor- 
mer à  la  volonté  de  son  père;  et  là  il 
étudia  la  théologie  jusqu'en  1771).  Il 
suivit  avec  exactitude  les  cours  du  doc- 
teur Biirscher  sur  l'histoire  de  l'église, 
des  docteurs  Petzold  et  Morus  sur  la 
philosophie,  du  docteur  Jiébenstreit 
sur  la  symbolique,  du  docteur  Morus 
sur  l'exégèse.  L'excellent  Morus  paraît 
surtout  avoir  exercé  une  profonde  in- 
fluence sur  ses  croyances  et  sur  la  di- 
rection de  ses  études  théologiques. 
Kacufler  fut  et  resta  toujours  lidèle 
partisan  de  la  révélation  ,  mais  ce- 
pendant il  se  sentait  obligé  ,  par  sa 
conscience  ,  de  se  livrer  à  un  hbre 
examen  de  tous  les  dogmes  impo- 
sés par  la  foi.  Pendant  ses  années 
de  candidature,  de  1779  à  1783,  il 
habita  successivement  Althornitz  et 
Bautzen.  l'^n  1786,  il  fut  appelé  au 
rectorat  de  Beichenbach,  charge  qu'il 
remplit  seule  jusqu'en  1789  :  mais  de- 
puis lors  et  jusqu'en  1795,  il  fut,  en 
même  temps,  vicaire  du  premier  pas- 
teur. Il  était  pénétré  du  plus  prolond 
respect  pour  la  religion,  cniieini  du 
mal,  ami  du  bien,  ne  supportant  pas 
facilement  la  médiocrité^  regardant  en- 


KAi: 

cnre,  cependant ,  la  vertu  duBCriantf 
cominc  un  duii  de  Dirti,  ^rirui  a  IV- 
tuile,  ^ai  ft  hiniTrillaiil  dans  If  corn 
nirrrc  lie  la  \ir,  Ires-chanlaMe  rn>rr> 
Ifft  pamrrs  qui  rurrnt  loujotirs  pour  lui 
un  ardrnt  amour  cl  uiif  |trof«»n«lf  té- 
nrralion.  Kn  ITKV  de  1H  aoùl^.  il 
*'clail  uni  àFirdrri(]i  •  '         - 

berii,  fille  de  Jean    i  ,    i       ,. 

bf r;i ,  paslfur  à  ArnMjml.  1^  1(1  lev. 
il\Ki,  il  fut  nnmmr  iliarre.  et  il  rem- 
plit cet  emploi  jusqu'en  iHt^'J,  rpo.jne 
a  laquelle  il  devint  pa>teur  de  Keirlien- 
baril.  Il  donnait  alors  lui- m^me  à  %n 
enfant»  le»  premières  iiotiims  du  lalin, 
de  la  lo;^iqiie,  etc.  Uient(\t  il  fut  roro- 
plèlement  absorbé  par  de*  travaux 
liolonques,  surtout  sur  la  Haute- Lu- 
sace.  Il  les  coinmenra,  en  179(1,  par 
une  rliionique  de  iîetrlien'jarli.  Il  pu 
blia d'abord  une  i:otiresur  les  inrenilies 
remarquables  qui  avaient  ru  lieu  dans 
Ic^  petites  mIm's  de  la  ll.iute-Lu>are, 
l>udisse,  171**';  il  Gt  ^ui\re  cet  opus- 
cule d'une  courle  eN<|iiiisr  de  Vllis- 
tttirr  dr  Mrn^r/sdur/,  commune  uc- 
ciirsale  de  iUiclienbacli  ,  (iœrlili. 
1S0(K  Hientôl,aprèsil  livra  à  l'impres- 
sion son  plus^^and  ou%rat:e  :  Estfuissr 
tir  ilnsdnrr  dr  la  IIuiUr-Lusurr, 
(iurl.lx  ,  1802  iSOti,  h  vol.  ^il  en 
fit  un  abrét;é  qu'il  de>liiii  aux  éco- 
les et  qui  parut  sous  le  tire  suivant  : 
(îuidt pour  servira  l'enseisnrmrnt 
r/i»  r histoire  de  la  Haute- Lusare, 
(iu-rliti,  \Hi)H\  Il  travailla  a>ec  une 
ardeur  infatii;able  à  reumr  les  m.ile- 
naux  de  cet  o!i>ra^e  qui  lui  coula  des 
peines  infinies  :  en  elfei ,  il  eraplov  a  qua- 
tre années  à  transcrire  seulement  les 
documents  qui  servirent  à  sa  réilartion. 
Il  rappelait  souvent  avec  une  sorte  d'or- 
gueil la  confiance  avec  laquelle  les  ar- 
chives deCiœrlitz  et  de  Kœni{;sbrueck 
avaient  été  mises  à  sa  disposition.  Il 
avoua  plusieurs  fois  que  cttte  histoire 
n'était  pas  présentée  comme  il  l'enten- 
dait, et  il  désirait  pouvoir  en  retoucher 


KkE 


^79 


U  première  partie.  Cet  outrage  a  un 
mérite  qui  sera  lon^-!enips  apprécié; 
c'est  le  soin  qu'a  pris  l'auteur  de  bien 
préciser  les  dates  et  de  les  puiser  à 
des  ftou^ce^  certaine^.  Il  aurait  >oulu 
y  joindre  une  i.ible  ;  plusieurs  fois 
même  il  a\ail  roinmrnré  ce  travail 
pénible;  mais  il  fut  arrête  par  les 
dé^a^rémenls  qu'il  éprouxa  peinlaiit 
I  et  surtout  par  le  demein- 

li  la    l.iisace  qui  eut   lieu  en 

iMl  i.  Il  écrivit  un  awei  (;rand  nom- 
bre d'articles  historiques  dans  le|our- 
nal  publie  par  la  société  des  scienccN 
de  la  l^sjce,  dont  il  fut,  pendant 
trente  ans,  un  des  membres  les  plu> 
actifs  et  i  laquelle  il  laissa,  aprrs  .a 
mort,  un  manuscrit  tre»-impurl.iiit  : 
lirrueil  de  dtnuments  sur  les  n 
reitrs  ronuiirts  et  sur  les  rois  li' .  . 
tJiarlemugne  /usrju'a  Maxiniilun 
V^ ^  't  vol.  in-fol.  Kn  1H14,  aprts  les 
guéries  qui  axaient  répandu  le  deuil 
dans  sa  petite  ville  et  dans  sa  famille, 
il  eut  la  douleur  de  perdr»*  M»n  époUM?  ; 
et  il  chercha  des  distractions  dans 
ses  travaux  historiques  et  dans  les 
fleurs  de  son  jardin  qu'il  cultivait  avec 
une  sorte  de  passion.  I«a  religion 
devint  aussi  son  i  tude  journalière  : 
«  Je  lis,  rliaque  jour,  drui  clia(utres 
«  dans  ma  IJible  hébraïque,  écri> ait-il 
M  à  un  de  ses  amis  ;  je  traduis  main- 
•«  tenant  trois  programmes  du  docteur 
n  'Izschirner  :  Desarrisraute  emen- 
«  darulis  ;  je  les  trouve  fort  de  mon 
«  f;oùl.  ••  Il  envova  rar-me  à  Tzsrhir- 
•er  celte  t;ai!uction  qu'il  accompaj^na 
de  quelques  observations.  Le:iia\ril 
18'Jl,  il  fut  nommé  surintendant  du 
roi  de  Pru.vse ,  et  jusqu'à  sa  mort  il 
remplit  avec  zèle  les  (onctions  assi;;nées 
à  celte  place.  En  I8'i9,  il  fut  atteint 
é!une  attaque  d'apoplexie  qui  laissa 
des  traces  fâcheuses  ;  ses  facultés  in- 
tellertuelles  et  pluslques  s'en  res^^cn- 
tirenl  profondement.  La  traduction 
de  Tite-Live  l'occupait  uniquement  j 


^o 


KAl 


mais  ses  forces  diminuaient  chaque 
jour  :  il  finit  par  s'éteindre  doucement 
et  sans  souffrance  le  8  août  1830, 
laissant  après  lui  cinq  fils,  une  fille  et 
dix-l)uit  petits-fils.  D — D — u. 

KAI-KAOUS  II  (AzzcDDYN) , 
dixième  sultan  de  la  dynastie  des 
Turcs  Seldjoukides  de  l'Anatolie,  suc- 
céda ,  l'an  G42  de  Thé^.  (1244  ou  45 
de  J.-C),  à  son  père  Kaï-Khosrou  H 
(Joy.  ce  nom,  ci-après).  Sommé,  Tan- 
née suivante,  d'aller  rendre  hommage 
au  grand-khan  de  Tartarie,  il  se  dis- 
pensa de  celte  démarche  humiliante, 
en  prétextant  le  danger  de  laisser  ses 
états  exposés  aux  ravages  des  Grecs  et 
des  Arméniens  ;  mais  il  eut  l'impru- 
dence d'y  envoyer  son  frère  Uokhn- 
Eddyn  Kilidj-Arslari  qui,  avant  as- 
sisté en  645  (1246)  à  l'élection  du 
grand-khan  Kaïouk  (Fo/.  ce  nom, 
XXII,  215),  enobtint  letitrede  sultan 
et  la  déposition  de  son  frère.  Comme 
il  revenait  avec  une  escorte  de  2000 
Mongols,  le  vczirChams-T^ddyn  entre- 
prit de  lui  livrer  Kaï-Kaous  ;  mais  le 
«âge  Djelal-Eddyn  Cortaï,  ancien  es- 
clave grec  et  gouverneur  de  ce  prince, 
déjoua  le  projet  du  perljde  \ezir,  le  fit 
périr  et  prévint  la  guerre  entre  les  deux 
frères  par  un  partage  du  royaume. 
KaV-Kaous  eut  la  capitale  ,  Konieh 
(Iconiuni),  Angoura  et  toute  la  partie 
occidentale  de  l'Asie-Mineure  ,  qui 
portait  déjà  le  nom  de  Turquie  ;  Ki- 
lidj-Arslan  eut  Césarée,  Sivvas,  Mala- 
thia,  Arzroum  et  toute  la  partie  orien- 
tale. Leur  jeune  frère,  Kaï-Kobad, 
eut  aussi  des  apanages  ,  et  les  noms 
des  trois  princes  furent  gravés  sur  les 
monnaies  et  prononcés  dans  la  kholh- 
hah  ou  prière  publique.  L'an  652 
(1 25i),  Kaï-Kaous,  mandé  à  la  cour  du 
grand-khan  [f^oy.  Mangou,  XX VT, 
488) ,  se  fit  remplacer  par  son  frère  Kaï- 
Kobad  qui  mourut  en  route.  Craignant 
alors  que  son  silence  ou  son  absence 
ne  lui  attirât  quelque  fâcheuse  affaire 


KAl 

avec  les  Mongols ,  il  voulut  se  délivrer 
d'une  partie  de  ses  inquiétudes  en  fai- 
sant périr  Kilidj-Arslan  :  celui-ci  ,  in- 
struit de  son  dessein,  marcha  sur  Ko- 
nieh ,  fut  vaincu  et  fait  prisonnier. 
Mais  l'année  suivante  ,  le  sultan  , 
battu  à  son  tour  par  le  général  mongol 
Baïdjou-Nowian,  se  sauva  à  Sardes, 
auprès  de  l'empereur  Théodose  Lasca- 
ris  qui ,  de  peur  de  se  compromettre 
en  le  gardant  ou  en  prenant  ouverte- 
ment sa  défense,  lui  envoya  de  riches 
présents  et  quatre  cents  hommes.  Avec 
ce  faible  secours,  Kaï-Kaous  recouvra 
une  partie  de  ses  états,  en  655  (1257), 
sur  Kilidj-Arslan  que  lîaïdjou  avait 
créé  sultan  de  tout  l'empire  seldjou- 
kide.  Kaï-Kaous  envoie  une  and)assade 
au  Mongol  Houlagou  (^^o/.  ce  nom, 
XX,  609),  pour  se  soumettre  à  ce 
nouveau  souverain  de  la  Perse,  et  se 
plaindre  de  son  général.  Houlagou  or- 
donne un  nouveau  partage  entre  les 
deux  frères,  et  l'aine  rentre  dans  sa 
capitale.  Voulant  prévenir  de  nouvel- 
les hostilités ,  il  leva  une  nombreuse 
armée  de  Kurdes  ,  d'Arabes  et  de 
Turcomans ,  prit  l'initiative  et  rem- 
porta de  grands  avantages  sur  Kilidj- 
Arslan.  Mais  Baïdjou  fit  tourner  la 
chance,  et  rendit  à  celui-ci  plusieurs 
places  enlevées  à  Kaï-Kaous.  Une  fa- 
mine horrible  suspendit  la  guerre,  et 
les  deux  princes  seldjoukides,  mandés 
par  Iloidagou,  en  657  (1259),  firent 
encore  un  partage  ou  plutôt  un  échan- 
ge de  leurs  états,  et  se  séparèrejit  en 
assez  bonne  intelligence.  Mais  bientôt, 
fatigué  de  la  tyrannie  des  Mongols, 
Kaï-Kaous  se  retira,  en  659  (1261), 
avec  sa  mère,  ses  femmes  et  ses  en- 
fants, à  la  cour  de  Michel  Paléolo- 
gue,  et  lui  demanda,  soit  des  troupes 
pour  recouvrer  ses  états,  soit  des  ter- 
res pour  résider  dans  ceux  de  son  hôte. 
Le  perfide  empereur,  oubliant  l'accueil 
qu'il  avait  précédemment  reçu  du  sul- 
tan, l'amusa  par  de  belles  promesses; 


et,  ^uulaiit  roriia<;rr  IIuuIaj;ou,  il  ie\è- 
j;iu  lo  1*1  lire  mIiIjuuLiJc  djus  une  fui  - 
IcrcNSc  où  il  le  faisait  surveiller  par  nue 
piiie  d'honneur.  kaV-Kaou«  ttou\a 
iu(Men  ce)>(-n(lant  de  faire  alliance 
a\rr  Ir  rui  i\cs  nul;;are5  et  le  Lliaii 
niiin;;ul  du  KapIcliaL,  et  tenta  vaine- 
ment de  les  icndre  maitrrs  de  Con- 
»lantino(dc.  11  ne  reuvsit  pa^  mieux  dan> 
le  |>r(iict  de  leur  livrer  Michel  qu'il  avait 
obtenu  la  permis&ion  de  rejoindre. 
r.MvrIoppé  par  ces  soldats  étrangers  , 
iViit|»fieur  parvint  à  se  sauver,  en  en- 
traînant KaV-Kaous  qu'il  Gt  rentrer 
dan^  .sa  prison  ;  mais  il  l'en  fit  sortir 
pour  le  livrer  aux  rnnemis  qui  étaient 
venus»  is.sié;;er  la  place.  Kminenr  à  Se- 
laV,  sur  le  Vol^a,  le  prince  ^eldjou- 
Lidc  s'v  remaria  et  mourut  en  677 
(1J78).  Son  fils  fut  le  dernier  sultan 
••Idjoulide  de  r.\Nic-Miiieure  Jo)'- 
M  ASoi  I.  1 1 ,  tom .  \  \  \  1 1 ,  J8G  .  Sui- 
vant le  siie  de  Joinville,  kaV-k.aous 
était  un  des  plus  riches  souverains  de 
r.Vsie.  Il  avait  fait  fondie  sept  ou  huit 
^rand>  vase»  d'or  qui  contenaient  cha- 
cun trois  ou  quatre  rouids  de  vin.  C'esl 
lui  qui  avait  donné  le  riche  pavillon 
que   le  roi  d'.\jroénie  envoya  à  saint 

I.OUI-S.  .\-      T. 

KAI  klIOSIlOrr^C.AlATH- 
KDDYN),  sixième  sultan  ^eld)oulide 
d'AnatuIie,  maître  de  koineli,  dans 
les  dernières  années  dr  son  père  kilidj- 
Vrslanll  (/'.ce  nom,  Wll,  i\2\ 
s'v  maintint  après  sa  mort  ,  l'an  r>88 
(ll'J'i  de  J.-C),  ainsi  que  dan>  la 
Lvcaonie  et  dans  la  Pamphv'ic,  et 
put  le  titre  de  sultan,  à  l'exemple  de 
x's  frères  dont  il  n'avait  pas  imité  l'iu- 
^ratitude  et  la  rébellion  ,  et  qui,  s'étant 
parta;;é  tout  ce  qui  n'appartenait  pas 
aux  drecs  dans  l'Asie-Mineure,  eurent 
des  ;;uerres  continuelles  ,  soit  entre 
eux,  soit  contre  l'étranger.  I.e  plus 
puissant  et  le  plus  ambitieux,  HoLn- 
Kddvn  Soleiman,  ennemi  de  kaV- 
kho^rou  dont  la  merc  était  chretieune, 


KAI 


38 1 


lui  demanda  konieh,  capitale  des  Scld- 
jouLides,  et    sur  >on   refus  il  .s'en  em- 
para, l'an  .l'JG  (1200).  kaï-kho5roii 
alla  vainement  mendier   le  secours  du 
sultan    d'.Viep,    tjls  de  Saladin,   et   de 
Ix-on,  roi  d'.Ximènie.  11  fut  mieux  ac- 
cueilli a  Cunstanliiiuplc  par  l'empereur 
Alexis  l'Ange,  qui  le  lit  baptiser  et  l'a- 
dopta pour  son  (ili,    il  acrornpa^iia  ce 
firiuce  dans  sa  fuite,  lorst|ur,  ni  1  20  V, 
escroiseslalinv  se  furent  rendusmaitres 
de  celle  capitale.    Kokn  Kddvn  étant 
mort,  I  année   suivante,    kaV-khosrou 
sortit  de  sa  retraite,  retourna  en  Asie, 
leva  des  troupes,  s'empara  de  konieh  et 
fit  pinonnter  .son  neveu  kilidj-Arslan 
III,  fiUet  successeur  du  défunt.  11  de- 
vint alors  trés-putssant,  réunit  sous  .sa 
domination  presque  tous   les  riats  des 
Seld)ouk.ides  dans    l'AsieMineuie,  et 
re^na  en  j;rand  piinre.   H  s'unit  à  son 
beau  peie  Maiiurl  .Mauro/mnrs  qui  as- 
pirait a  l'empire,  pour  faire  la  ;;uerrc  à 
Baudouin,   empereur  de  (^onslantino- 
pie,    piii.N  à     ihrodoie   I^scaris,  qu'il 
avait  aidé  à  se  faire  empereur  de  Nicée. 
11  venait  de  prendre  Allalie   dont    il 
avait  traite  les  habitants  avec  cruauté  , 
lorsqu'il   y  vil   arriver  le  vieux  .Klexis- 
r.\n;;e    qui,    échappe    des   mains     du 
roaiqui>   de   .Monlforrat,  venait  récla- 
mer son  appui  pour  recouvrer  au  moins 
la  partie    de  ses  états  dont  I^ascaris, 
son   cendre,   était    en    possession.    Le 
sultan,  plus  sensible  .i  la  reconnaissance 
qu'à  l'amitié,   séduit  d'ailleurs  par  les 
brillantes  promesses  d'Alexis,   envova 
des  ainbas^sadeurs    à  l.ascaris   pour   le 
sommer  de  rendre  l'empire  à  son  beau- 
père.  Sur  son  refus,  il  se  mit  en  cam- 
pafiiie  avec  Alexis  et  vint  assiéger  An- 
tiocliesurle  Méandre.  Lascariss'avanra 
pour    secourir  celte  place   importante; 
et  dans  un  combat,  ou  tout   l'avantage 
était  d'abord  pour  les  musulmans,  kaV- 
khosrou  ,    avant  jtti-    La^cans  à    bas 
de  son   cheval  ,  ordonnait  à  ses  {^ens 
de    l'emporter  ,    lorsque    l'empereur 


38-».. 


KAI 


kAi 


coupa  los' jarrets  du  cheval  du  sullaii 
et  en.vaile  la  tête  à  celui-ci  ,  avant 
qu'il  eut  eu  le  temps  de  se  relever. 
Ainsi  périt  ,  Pan  607  (1210)  ,  Kaï- 
Khosrou  dont  les  historiens  i^recs  font 
à  tort  un  personnage  différent  de 
^iaïa^h-£dd^n  qu'ils  nomment  Jalha- 
tiiie.  Il  laissa  deux  fiis  qui  réo^nèrent 
après  lui,  Azzeddjn  Kaï-Kaous  V^  et 
Ala-Eddvn  KaïKohad(K.  KaÏ-Kaous 

r^t.  xxii,f>i4,etALADiN,  t.r^ 

370)  (1).  A— T. 

KAI-KÏIOSROU  II  (Gaïatii- 
Eddyn)  ,  neuvième  sultan  de  la  même 
dynastie,  succéda,  en  634  (1237),  à 
son  père  Ala  -  Eddyn  Kaï-Kobad. 
Ayant  fait  périr  un  des  chefs  des  trou- 
pes kharizniiennes  qui  étaient  à  son  ser- 
vice ,  il  irrita  tellement  celte  milice 
étran^rère  qu'elle  sortit  de  ses  étais 
après  les  avou'  rava^^es  et  envarnt  ceux 
du  roi  d'Alep,  Melik  el-Nasser  You- 
souf ,  qui  fut  forcé  de  lui  donner  des  éta- 
blissements au  delà  de  TEuphrate.  La 
mésintellij];ence  ré^;nait  alors  parmi  les 
descendants  du  arand  Saladin  [Voy. 
ce  nom,  XL,  115).  Malc^ré  les  sollici- 
tations d'Achraf,  roi  de  Damas,  Kaï- 
Khosrou  refusa  de  faire  la  guerre  au 
sull..n  d'Egypte  Melik  el-Kamel  [Voy. 
ce  nom,  XXVllI,  215),  et  préférant 
s'allier  avec  le  roi  d'Alep,  par  un  dou- 
ble mariage  de  leurs  sœurs,  il  acquit 
ainsi  le  droit  de  suzeraineté  dans  Alep. 
Une  armée  mongole  a)'ant  pénétré  en 
Arménie,  Pan  637  (1239),  le  sultan 
s'avança  contre  elle  avec  ses  troupes 
parmi  lesquelles  se  trouvait  un  corps 
de  deux  mille  chrétiens,   et  la  força 


(i)  Ce  dernier  |<riiicf,  don»  ou  n'a  pas  mis  les 
HOU15  vériiables  et  enliiis  au  tome  1"^',  avait 
f.iit  la  guerre  à  son  frère  AzE<"dyii  KuiKaons  \'  ' 
j.our  le  dépouiller.  Il  fn  dis  conqintfS  en  Géor- 
gie, en  Arménie  «l  en  Mésopolaniie,  cl  publia 
dis  lois  sages  qu'il  .sut  fair.-  «x.ciilfr.  Tour  •.: 
venger  du  régent  de  la  P.  t;l«-Arniénie  chi  z  le- 
quel il  avait  envoyé  i>a  mère  cl  »a  sœur,  que  ce 
prince,  .'on  vassal,  livra  aux  Mongols,  AlaKd-lyn 
K;.i-K..bad  assiégeait  Tarse,  qoi  ipparlenait  n» 
rr,yaanie  d'Arménie^  lorsqu'il  mourut  en  6J4 
(1237  et  non  pas  i7.36). 


de  s'éloigner  de  cette  frontière  sans 
coup  férir.  Il  put  alors  apaiser 
les  troubles  excités  par  un  Turco- 
man  nommé  Baba  qui,  se  disant  pro- 
phète, éaoreeait  indistinctement  les 
I     .  •        ^       1  1  •      r 

ciiretiens  et  les  musulmans  qui  refu- 
saient d'embrasser  sa  doctrine.  KaV- 
Khosrou,  secondé  par  son  corps  de 
Francs,  tailla  en  pièces,  prèsd'Araasie, 
les  partisans  de  cet  imposteur  et  lui  fit 
trancher  la  tète  ainsi  qu'à  son  premier 
disciple.  L'an  639  (1241),  les  Mon- 
gols rentrèrent  en  Arménie,  la  rava- 
gèrent et  prirent  Arzroum.  Moins  heu- 
reux cette  fois,  et  abandonné  par  ses 
troupes  auxiliaires,  sur  le  champ  de 
bataille,  dans  les  environs d'Arzendjan, 
le  sultan  fut  forcé  de  s'enfuir  avec  sa 
femme  et  ses  enfants  à  Angora.  Les 
vainqueurs  étendirent  leurs  ravages 
dans  l'Anatolie,  prirent  Siwas,  ainsi 
que  Césarée  de  Cappadoce  que  ce  prince 
avait  rebâtie,  et  y  commirent  d'horri- 
bles cruautés.  Kaï-Kliosrou  demanda 
la  paix  en  642  (1244),  et  ne  l'obtint 
qu'en  ;-e  rendant  tributaire  du  grand- 
khan.  Il  faisait  assiéger  Tarse  en  Cili- 
cie,  lorsque  la  nouvelle  de  sa  mort  fit 
décamper  son  armée.  Ce  prince  dé- 
bauché et  livré  aux  passions  les  plus 
déréglées  prenait  le  titre  de  grand 
sultan  ,  r  appui  du  monde  et  de 
la  religion  ,  et  pourtant  il  avait 
violé  l'islamisme  en  faisant  graver  sur 
les  monnaies  l'image  de  sa  femme, 
princesse  géorgienne,  dont  il  était  éper- 
dument  amoureux.  Par  suite  de  son 
amour,  il  protégeait  les  chrétie.is  et 
leur  faisait  espérer  la  j)ermission  de 
bâtir  olusieurs  églises  et  sa  prochaine 
conversion  à  leur  religion.  Il  eut  pour 
successeur  Kaï-Kaous  II,  l'aîné  de  ses 
troisfds. — K  aY-Kkosrou  m  {Ga'ialh- 
Kddyn)  ,  douzième  sultan  de  la  mê- 
me dynastie,  n'avait  nue  miatre  ans 
lorsqu'il  fut  substitué,  l'an  665  ou  66 
(1266  ou  67),  par  les  Mongols  à  sou 
père  Kilidj-Arslan  IV  (Ko)-.  ce  nom  , 


KAI 


RAI 


383 


Wll,  415),  qu'il»  avaient  (ail  pcrir. 
Il  i/ciil  qu'un  >ain  titre  ^.l; 
rt  tut  mi^  .1  nioit   par  ot  Jri 
KliJii,  l'un 

^(»M  fil     l'i, 

Cf     \>Af     MIU     C'  ij    11 

«  «•  nom.  \\  ^  1 1 ,      -  — T. 

1  Mi»^  ^).  ri  .Mian,  était    A 

Il    (le    naissance   et  fut  d  > 

^^^,  r-rl  --  •  ■•    \î..li-,ff,    li,..  . 

t-plicme   L  {f^**X-    f< 

.(•m,  X\I\.    -«  *)■    "  •>  jvança  par 
•i  »<nice»  et  jilu>  encore  par  *e>  in- 

Iri^jues,    et  il   par 

puissance  soun  I 

l'tl,    iiU   et    >uccc»rui    Je    M.i^uU, 
i'il    fi.i't     le     prrinlrr    émir    ti«    h 


t,   il  avait   ro.ine  ses 

_-.  V   ,  .    .1  jiaux   émir-^     M  .       I 

ivail  pour  ennemi  le  \ezii  < 
•Un  Ibn-al-Kaiadj  qui  n<*  m    ..     .i  .:. 
[►irer  des  craintes   au   Llulife  sur   le 
ptmMiir  sans  bornes  et    1rs  proiets  tle 
«iM    ainlulieux.     Mo«.lanil;eiI  oi  l».   iia 


.iv .i:i  eiu^*iuiiie  la  lita^ 
.>  liip  au  >ezir,  le  coc. 
I  kaVraaz,  afin  de  n 
l  )n  pfut    %oir  à  Ta  '  ! 

\\\,  :î'>\)  ijuci  fji  le  .. 

iia_.iini«»  dcrrtie  aftaiie  po„.  .^  - c, 

l'an  56«>  ^1170).  Les  auteurs  de  ce  cri- 
me ,  aiïertant  une  M\e  douleur,  reci>n- 
nurent  Mo^tadv,  fiU  de  ce  prinr*  ;iour 
Mui  >uCcesseur  à  condition  qiiM  don- 
nerait la  charf;e  de  vezir  à  Adliad- 
Kdd^n  \boul-Faradj,  et  celle  de  com- 
mandant-i^enerai  des  troupes  à  kaïmaz 
[roy.  M«)STAi>Y,  XXX,  2iH\  Le 
nouveau  khalife  coiiseï  vait  le  souvenir 
du  crime  de  Kaïmaz,  et, dissimulant  «;on 
dessein  d'en  tirer  venj^eance,  cherchait 
à  re^a^ner  insensiblement  son  auto- 
rité, en  témoignant  plus  de  confiance 


à  MW  Tcsir  qu'il  jugeait  moins  coupa- 
ble. Kiïma/.  était  informé  de  ce  qui  se 
tramait  toi. lu-  Im  par  le  médecin  à  qui 
le    droit    d'entrer  à 
le   khalife.  Fati;;ué 
d  inent  à  se  défier  des 

C'  taitres,    Mostadjf 

m  I  !'cin  sous  pré» 

le  .1 1:  ..  Il  V  a  un 

homme  dont  l'aspect  me    blesse,  je 
veut  m'en  défaire  »ans  éclat,  sans 
«•   honte  pour  lui  et  sans  que  ta  mort 
1   puisse  eiciter   des  troubles.    »  Le 
docteur  propose  de  lui  donner  «ne  po* 
r  et   va  ch?z  lui  pour   la 
V    peine   est  il  de   retour 
(,uc  le    Uulde    regardant    le   poi.>on  : 
••   ('*r^l    sur  toi,    dit  il,    que  je    veux 
Ter  ce    breuvage,  et  je   t'or- 
e    de   l'avaler.  »»  I^    méderin 
rhetciie   Tamement   k   s'en   défendre; 
M  .    .i.!\    lui    reproche  sa  perfidie  et 
•  le  percei  de  son  epée  s'il 
..  .^..  .  .  ..  .  ..tstaut.  \jt  >célérat  avale  le 

poison  ;  mais,  pour  que  sa  mort  ne  soit 
pas  utile  à  son  >ouverain ,  il  sort  aussi- 
tôt du  palais  et  se  hâte  d'écrire  k 
t  ■  uour  l'informer  de  son  mal- 
•  l'avertir  de  prendre  ses  pré- 
•itsalellre. 
lort  de  son 
anneicita  une  sediîion  dans  lta;;hdad, 
et  se  porta  d'abord  avec  ses  troupes  et 
ses  partisans  vers  la  maison  du  vezir, 
qu'il  sa\ait  être  l'auteur  de  toutes  les 
mesures  ri«;oureu9cs  méditées  contre 
lui.  Le  vezir,  abandonnant  sa  maison 
an  pillage  de  la  soldatesque,  se  sauva 
au  palais  du  khalile.  Kaïmaz  l'y  suivit 
aussitôt,  à  la  tele  des  mutins,  dans 
l'espoir  d'obtenir  par  l'intimidation 
que  son  ennemi  lui  fût  livré.  .Mais 
Mostad\  avant  paru  à  son  balcon  : 
«NMes  amis,  »lit-il  au  peuple  tumul- 
••  tueii-'iMnent  assemblé,  vous  vo\ez 
«'  l'insoiiiue  de  Kaïmaz  qui  attente 
«  chaque  jour  à  mon  autorité.  Je 
•<    vous  abandonne  tous  ses  biens,  et  je 


384 


KAl 


«<  me  réserve  le  droit  de  le  punir.  » 
La  populace  courut  souilaln  à  la  maison 
du  général  qui,  bien  que  seconde  par 
ses  troupes,  fit  de  vains  efforts  poui-  la 
garantir  du  pillage.  II  ne  put  même  en 
sortir  qu'en  faisant  brèche  à  la  nuirallle. 
Forcé  lie  quitter  ])aglulad ,  il  se  ren- 
dit à  Hlllah,  d'où  il  envoya  offrn'  ses 
services  à  Saladln.  Ce  grand  prince 
avant  eu  horreur  d'un  pareil  traître, 
celui-ci  prit  la  route  deMoussoul,  en 
traversant  le  désert  (jui  sépare  la  Sj  rie 
de  la  Mésopotamie.  Mais,  accablé  de 
chagrin,  malade,  pressé  par  la  soif  et 
abandonné  par  ses  gens ,  il  expira 
presque  aux  portes  de  cette  ville,  et  son 
cadavre  y  fut  enterré,  l'an  570  (1 174- 
75).  Ce  ministre  portait  si  loin  les  re- 
cherches du  luxe  et  de  la  propreté, 
qu'il  avait  fait  attacher  an  plancher  de 
sa  garde-robe  une  chaîne  d'or  à  la- 
quelle il  se  suspendait  pour  satisfaire 
aux  besoins  de  la  nature  (car  c'est  une 
impureté  légale  pour  les  musulmans 
de  se  servir  d'un  siège  élevé  pour 
cet  usage).  Il  avait  mis  aussi,  dans  le 
même  lieu,  un  grand  arbre  d'or,  ainsi 
que  ses  fruits,  qui  contenaient  les  par- 
fums les  plus  exquis.  A — T. 

KAISER  (Fri-dkric),  graveur, 
ne  à  Clm  en  1779,  annonça,  dès  sa 
première  jeunesse,  un  goût  décidé  pour 
le  dessin.  Ayant  perdu  son  père  à  l'âge 
de  treize  ans,  il  fut  mis  par  sa  mère  en 
apprentissage  chez  un  graveur  dt  lià- 
le.  Chrétien  de  Mcchel,  qui  jouissait 
d'une  réputation  peu  justifiée  par  ses 
travaux.  Au  bout  de  quelque  temps,  le 
jeune  Kaiser,  persuadé  de  la  mauvaise 
instruction  qu'il  recevait,  retourna  dans 
sa  patrie.  Afin  de  se  procurer  des 
movens  d'existence,  il  se  rendit  à  Wei- 
mai ,  et  se  mit  au  service  de  la  librairie 
dcBertuch  qui  portait  le  titre  singulier 
de  cornjjloir  ifindustrit'.  Il  y  grava 
beaucoup  de  planche.-»  pour  les  ouvra- 
ge» publiés  par  ce  libraire  ,  ainsi  c^iie 
pour  des  almanachs  ;  il  fréquenta  1  é- 


KAI 

cole  de  dessin  de  \N  eimar  qui  était 
florissante  alors,  et  il  v  gagna  une  mé- 
daille d'argent.  Sentant  qu'il  lui  fallait 
un  lieu  plus  riche  en  chefs-d'œuvre  de 
l'art  et  en  artistes  habiles  pour  per- 
fectionner son  talent  ,  il  se  rendit  à 
Paris,  prit  des  leçons  de  Berwick  et 
d'autres  artistes,  suivit  même  un  cours 
d'anatomie,  et  obtint,  en  1811,  une 
médaille  d'argent  au  concours  des  élè- 
ves de  l'école  des  Beaux- Arts.  Ce  fut 
sous  la  direction  de  Berwick  qu'il  gra- 
va ,  pour  l'ouvrage  intitulé  Galerie 
de  Florence  ,  plusieurs  bustes  anti- 
ques et  une  Melpomène  couronnée  par 
Calllope.  Au  Musée  i!  dessina  quel- 
ques tableaux  de  Raphaël,  entre  autres 
celui  de  la  Sainte- Vierge,  dite  aux  lin- 
ges, qu'il  se  proposait  de  graver,  lors- 
qu'il se  trouverait  dans  une  situation 
plus  heureuse  ;  espoir  qui  ne  fut  jamais 
accompli.  Il  fut  obligé  de  quitter  Paris, 
malgré  tous  les  agréments  que  lui  of- 
frait cette  ville,  où  il  pouvait  facile- 
ment visiter  des  musées  et  fréquenter  de 
grands  artistes  français  et  étrangers.  Il 
alla  ,  en  1811  ,  rejoindre  son  frère 
à  Naples  ,  où  il  espérait  trouver  la 
fortune  pour  tous  les  deux.  Cet  espoir 
fut  encore  trompé;  Kaiser,  contraint 
de  renoncer  aux  travaux  qui  auraient 
pu  le  rendre  célèbre,  fut  réduit  à  don- 
ner des  leçons  de  de.ssin,  et  à  graver 
et  colorier  des  vues  de  Maples  et  des 
environs.  Il  fit  aussi  douze  dessins  as- 
sez remarquables,  formant  un  recueil 
de  scènes  de  la  vie  populaire  dans 
celte  ville  ;  mais  11  n'en  grava  que  qua- 
tre. Millin,  qui  le  vit  à  JNaples  ,  le 
chargea  de  copier  pour  lui  les  objets 
antlcjucs  que  l'aichéologue  français 
voulait  faire  connaître  en  Kraïuc.  Ce- 
pendant, faute  d'occupations  assez  lu- 
cratives, Kaiser,  au  bout  de  cinq  ans, 
quitta  Naples  pour  Vienne  où  on  lui 
promettait  des  travaux.  Il  y  publia, 
avec  Knelpp,  sous  le  titre  A  Eléments 
(lu  dessin  du  paysage,  un  recueil  de 


KAI 

nuinxr  plinrlir.  qu'il  axait   {;r4*rr^   4 
I  fau-forlr  priiiljnt  »oii    rjnur   .i  N.i- 


K\l 


%H'^ 


II 


;;ra\a  4Uvm  nuciqiir.  p 


ilaiicl) 


i\r\  inoiuiroriilN  de  1  jrcliilrciurr  go- 
thique en  Auliiche,  publiée  par  le 
prince  I.irlinowslx  ,  et  ,  loujouik 
!orcë  par  \e  l>e.>oin  Je  *ivrr,  ^e  rliar- 
;.(*a  (le  r;raxnres  ronlns  impurlanle^. 
\ii  chagrin  «le  n<»  pouxoir  •**illu*lier 
\'i\  lies  oinia^e^  cii;;nfi  de  »es  Roûh, 
-*■  joij;nait  le  dépéiiseinenl  de  ^a 
.\u\6.  Aprr*  être  \eini  pleurer  sur  la 
i<-inl*e  de  sa  mère  i  (  Im,  il  retourna  à 
N  ic.Mie  et  V  mourut  d'une  maladie  de 
l">itniie,  le  '.\  frxrirr  IKfJ.  Son  por- 
ii.jil.  de>^irje  par  Klein,  a  é\é  ;;ra\ë 
l'ir  .Iran  TaNsitii,  et  une  notirc  sur  ^ 
Mr  a  été  «lonnéc  par  J.-(,.  Sclimtdl 
d.  s!eK///i./AA///.lS-20.n"8.I)-G. 
K.\ISKIUJ\(;  (DiKmRUM  ou 
liiiiRnY,  comte  de\  était  né  au  cora- 
mrnrrment  du  Wlll'  siècle,  d'une 
ancienne  famille  de  Courbnde.  Kniré 
jrtine  au  sei\ice  de  l*russe,  il  de- 
\  i]\  l'ami  du  drand  Frédéric,  alors 
prince  roxal  ,  et  fui  impliqué  dans 
In  fameuse  affaire  de  kall  [f  oy. 
Fr.rni  i\n.-(*.i  iilm  mk  i'^  tom.  X V, 
y.^ft).  I*ar\cnn  au  trône,  Kiédéric  ac- 
co:da  des  distinctions  ilatleu>es  au 
comte  de  Kaïserlin^,  et  le  rendit  confi- 
dent de  ses  travaux  littéraires.  Dans  sa 
correspondance  ,  il  le  dési<;nait  ordi- 
nairement par  le  nom  de  Crsurion, 
traduction  latine  de  celui  de  Kaï<.er- 
lin^.  H  lui  donna  une  place  à  l'acadé- 
mie des  sciences  et  belles-lettres  de 
Iierlin,  qu'il  avait  repou>elée  et  con- 
<idérableinent  étendue  depuis  son  a\è- 
neroent  an  Irc^iie.  Le  comte  de  Kaï>er- 
lin;;  enrichit  la  collection  de  celte 
société  savante  de  plusieurs  mémoires. 
Il  mourut  dans  un  àf;e  peu  avancé,  en 
17  V),  et  le  loi  chargea  Mauperluisde 
composer  son  éloge,  qui  est  imprimé 
dans  les  Mémoires  de  l'académie.  — 
Plusieurs  autres  personnages  du  même 
nom  et  de  la  même  famille   ont  jou^ 


un  rdie  dans  I.1  politique  el  la  littéta* 
ture.  l'n  nnn/r  lîf  Kaï.seriin^,  .un- 
l>a55adeur  de  Prusse  eu  HusMr,  tous 
le  lègne  de  Piciic-lc-(iiand  ,  epoii>a 
une  sirur  de  Munsde  [jk  (^roix,  dont 
la  fin  fut  si  trafique.  M'  **  Mon.  de 
\jk  Goix  axait  inspiré  la  plus  forte 
passion  à  Pierre,  qui  lé^ulul  de  l'é- 
pouser, quoiqu'il  (ùl  dt;à  lié  avec  Ca- 
iherine.  ^IJis  MrnliiluM  fil  tuui  :>e& 
cfforK  pour  écarter  la  nouxclle  faxo* 
rite  qui,  d'ailleurs,  refusait  d'ecoutn 
le»  xirux  du  rxar,  parce  qu'elle  eljil 
'ng*r^^  secrrteroent  i\tc  Ir  romle  de 
kaïserling.  Pierre  en  a\ant  été  infor- 
mé,  par  une  lettte  interceptée,  entra 
m  fmeur.  Poui  prrxfnir  les  suites  de 
l'empoiienient  du  monarque,  l'ambas- 
sadeur de  Pru-^se  se  décida  à  rpouser 
aussilAt  publiquement  M""  Mous  de 
la  Croix.  Il  ciait  malade,  el  bientôt 
ses  souffrances  le  conduisirent  au  tom- 
beau. Mais  il  avait  avsuré  une  existrnce 
honorable  à  celle  qui,  pendant  plusieurs 
années,  avait  rté  l'objet  de  son  atta- 
chement et  de  s*)»  e>time.  M"'*  de  kaV- 
scriing  xécul  long  temps  encore  loin  de 
la  cour,  à  Moscou,  où  elle  se  fil  chérir 
par  les  grâces  de  son  esprit  el  la  dou- 
ceur de  M)n  caractère.  C  — Al. 

KAISSI  AlU  NASSAIIAL- 
FKD.VII  ,  auteur  arabe  ,  né  à  Sé- 
ville  ,  mourut  à  .Maroc  en  327)  de 
riiég.  ou  1 1  iO  de  J.  (^  Parmi  ses 
dix  ers  oux  rages  ,  on  cite  ses  elugrs 
(1rs  hummrs  illuurcs  par  Irur  rru-^ 
tlitiim  et  Irurs  taltnts  fHtrttffues  , 
qu'on  trouve  manuscrits  à  la  bibliothè- 
que ro>ale  de  Paris,  n  "  1  Vlô.  Kos:>i 
croit  que  c'est  le  même  ouvrage  que  relui 
(trs  primes,  jugrs  et  gens  tir  liltres 
célèbres,  qu'on  voit  manuscrit  à  la  bi- 
bliothèque de  l'unixersité  de  Le>dc, 
n*^l(H)2,  ou  celui  qui  a  pour  titre  : 
Bihliathèque  des  hommes  Illustres 
dans  la  pi>èsie,  qui  ont  fleuri  en 
Espitgrte,  dont  Casiri  fait  l'éloge  sous 
le  rapport  de  l'élégance  et  de  l'érudi- 

a5 


386 


KAL 


tlon,  et  dont  il  donne  des  extraits 
dans  le  1^""  vol.  de  ?n  Biblhtheca  ara- 
/)i(:o-lils/)aria,  p.  103.  Z. 

KALCÎÎBERG    (Jfan  Npo- 
MOUK  de),  poêle  allemand,   naquit  le 
14    mars    1765,  en  Haute-Styrie,  au 
château  de  Pichl,  domaine  et  demeure 
habituelle  de  ses  pères.    Ses  parents 
étalent  des  plus  riches  du  pays.  Il  re- 
çut sa  première  éducation  à  Pichl  même 
ou  aux  environs  de  Pichl,  au  presbytère 
de  Hohcnwanp;.  Mais,  orphelin  de  père 
et  de  mère  à  Page  de  quatorze  ans,   il 
alla  terminer  ses  études  au  séminaire  de 
Graetz.  Les  lanj^ues  anciennes  et  en  gé- 
néral toute  réducatlon  classique  avaient 
eu  peu  de  charmes  pour  lui  :    à  Ho- 
lienwang  parliculièrement,  soit  invin- 
cible   antipathie  pour   les    objets    de 
renseignement,  soit  manque  d'adresse 
ou  de  patience  du  maître,  il  s'était  re- 
gardé comme  souverainement  malheu- 
reux, et  le  souvenir  de  cette  trisleépoque 
le  poursuivait  encore  dans  Tàge  mûr. 
Ceux-là  ne  s'en  étonneront  pas    qui 
comprennent  ce  que  c'est  que  l'instinct 
poétique  ;  l'enfant  Kalchberg  l'avait  à 
un   très-haut  degré,    et  tout  ce   qu'il 
voyait  autour  de  lui,  ces  hautes  cimes 
des  Alpes  styriennes,   ces  jeux  de  lu- 
mière dans  les  lacs  et  les  ruisseaux  des 
vallées,  ces  arcs-en-ciel   au  milieu  de 
l'humide    poussière  des  cascades,   les 
quatres  énormes  tours,  les  sombres  ga- 
leries, les  vitraux  du  château  de  Pichl, 
chamarré  ici  de  vieux  tableaux  de  la 
Passion,  la  de  vieux  portraits  de  che- 
valiers du  Temple  ou  de  l'ordre  teutoni- 
que,  tous  ces  sites  et   ces  aspects  ro- 
mantiques avaient  développé  en  lui  le 
sens   et  le  besoin    de  la   poésie.  Des 
langues  mortes,  une  antiquité  morte  et 
dont  nous  n'avons  rien,   ni  les  croyan- 
ces, ni  les  mœurs,  ni  l'organisation  so- 
ciale ou  politicpie,  ne  pouvaient  captiver 
un  esprit  saturé  de  tout  autres  idées  et 
qui,  s'il  eut  dâ  être  engoué  d'un  temps 
plutôt  que  d'un  autre,  l'aurait  été  du 


KAL 

raojen-âge  dont  le   culte  commençait 
à  renaître.  Au  reste,  ces    heures   de 
souffrance  et  de  contrariété  avaient  été 
utiles  au  jeune  homme  :  elles  lui  avaient 
appris  à  se  taire,  à  se  replier,  à  se  con- 
centrer sur  soi-même,  à  chérir,  à  re- 
chercher, à  peupler  d'images,  filles  de 
son  cerveau  ,    la  solitude.   Kalchberg 
à  Gratz  fut  moins  malheureux  ;  ses  pro- 
fesseurs lui  plurent,  il  plut  à  ses  pro- 
fesseurs. Royko,  le  plus  célèbre  d'entre 
eux  à  cette  époque,  fut  son  commen- 
sal  et   lui  ouvrit  sa  riche   bibliothè- 
que. Le  jeune  élève  s'y  familiarisa  da- 
vantage avecl'hlstolre  des  siècles  obscurs 
qui    suivent  la  chute  de  l'empire  ro- 
main et  qui  précèdent  la  renaissance, 
et  avec  la  versification ,  cet  auxiliaire 
presque  inséparable  de  la  poésie.  Sur 
î'entrefalte,  un  ami  lui  remit  un  extrait 
de  quelques  pièces  des  archives  de  la 
maUon    de   Stubenberg  :    ces  pièces 
étaient  le  récit  d'une  aventure    vérita- 
ble ;  il  en  fit  un  drame  qui,  publié  d'a- 
bord avec   le  titre  ^ Agnès  de  Habs- 
bourg, 1786,  le  fut  ensuite  sous  celui 
de  JVolfang  de  Stubenberg.  11  n'avait 
encore  que  vingt-un  ans ,  et  un  mur- 
mure général  d'approbation  salua  cette 
œuvre  dramatique,  une  des  premières 
où  fût  suivi  l'exemple  donné  par  Gœthe 
dans  Gœtz de  Berlichingen^  et  où,  avec 
la  naïve  peinture  des  mœurs,  de  l'esprit 
du  moyen-àge,  se  trouvait  la  plus  grande 
vérité  locale.  Deux  ans  après  parurent 
les    Templiers.  Ce   drame  avait  été 
versifié  au  milieu  des  détails  prosaïques 
de   la  carrière  administrative.  Kalch- 
berg, en  1785,  avait  été  nommé  à  je 
ne  sais  quel  emploi  de  la  banque;  ce 
qui   faisait  envie    à  d'autres  :  il  s'en 
plaint  amèrement  dans  la  préface  des 
Templiers  ;  et  peu  après  il  résilia  sa 
place,  pour  être  à  même  de  se  livrer 
entièrement  à  la  littérature  ,  dans  son 
château.  Un  poète  en  renom,  Schram, 
l'y  accompagna,  et  ne  fut  pas  peu  utile 
à  son  patron  qu'il  habitua  insensible- 


KAL 

mfiil  k  Vfu\>hon\e  des  exprf^Mons,  à 
|j  d^^mblioii  lia!>ilr  clr>  nuances,  à  la 
cofTfftion  -rjmmalicale.  Scirain, 
kalchber^,  S.}ic!;;fr,  Ktrni»,  d'I'u- 
nUt  pt  <|tirl«jtK«^  aiilrr*  roinpofèrfnl 
birnint  tir  Irtir^  {nH*^i«  ,  é(».irpill<^* 
dans  unr  Omlf  «)<•  rmiriU  ou  c n^fVfliM 
au  fon<l-'  Hm,  tiiirrfuril 

en  dru\  .itjlf  :  fruits 

tU  la  musr  tir  la  putrir,  17H9.  ('^ 
recueil  produisit  en  Slfiie  une  *riisa- 
llon  ptodt^irusp.  Dr  Ij>u*  Cf^les  on  se 
mit  à  improviser  des  poèmes  a  la  plus 
grande  gloire  dr  la  Sluie.  I.e  comte 
deOlie^  tout  prompt  qo'il  était  à  se 
lancer  dans  cette  voie,  n'\  parut  oue  le 
second;  Kalrliber^  a>ec  M^ami%  I  avait 
précédé.  L'usa<;e  si  éminemment  pa- 
triotique que  celui-ci  faisait  ainsi  de 
son  talent  ne  ponsait  roanqurr  dr 
le  mettre  en  répiil:»fion  parmi  1rs 
Stvinens,  ses  compatriotes.  Aussi,  dfs 
1791,  les  ttats  (i:i  p.ns  i'clurrnl-ils 
aune  forte  majoii'o  coiretller  i\f  dé- 
pntalion,  ce  quM  accepta,  rlouidimen! 
peut-être,  car  peu  après  il  envoya  «^a 
démission  sans  qu'il  \  eût  riendr  fonda- 
mentalement chan;;ë  à  son  sort.  Il 
n'avait  cli.in;;é  que  de  terre  et  de  châ- 
teau :  Piclil  avait  été  vendu,  et  à  sa 
place  il  avait  acquis  \\  iMbacli  qui  lui 
produisait  un  fort  revenu  et  qui,  outre 
l'ai^rément  de  voisins  civiiisrs,  lui  pré- 
sentait l'avantage  d'être  tout  près  de 
(irarlx.  C'est  dans  cette  moins  a;;reste 
retraite  qu'il  composa  sa  Hr\'oltr  des 
rhr\'alirrs,  179*2,  et  qu'en  1793  il 
6t  paraître  Mûrir  Vhrrhr.  Knsuitc 
vinrent  les  Che\.uilirrs  trntoniqurs  à 
Suint-  Iran  iFirrr,  179(5,  que  l'on 
peut  re;:^ri!er  comme  son  rlief-d'oruvrc. 
Hien  mieux  que  cette  pièce  ne  prouve 
non-seulement  combien  Kalchber;; 
était  faraud  poète,  mais  combien  son 
pénie  poétique  allait  ^a^nant  en  pro- 
fondeur. Aussi  ne  peul-on  que  rej^ret- 
ter  anièrrmciil  la  détermination  qu'il 
prit  alors  de  ne  plus  regarder  la  littéra- 


RAL 


1«7 


tore,  et  surtout  la  poésie,  que  comme 
nn  dr!i  arment.  (X-  afTaiie^  a.lm- 
nistratives  dont  la  monotonie  cl  l'a- 
ridilé  ava'riit  na;;  lèrr  eiïaronclié  >rtn 
ina;.ination  ,  éln  de  nouveau  et  non 
raal^rrlni  <ans  do  ite  consnllrr  de  dé- 
putalion,  il  s«  mit  à  1rs  étudier  arec 
amour.  (,)M*il  nous  suffi^r  dr  l'aperce- 
voir tantôt  faisant  partie  de  députa- 
tions  spéciales  d'état  ou  ilr  commis- 
sion», tantAt  chargé  de  la  direction  de 
la  tlianrrllriie  provitinaie  ,  o»  dr  la 
sarinirndanrr  ou  surveillance  supiéme 
du  théâtre  en  Stvric  ,  ou  enfin  de  la 
censure  théâtrale  Dans  cliacone  de 
ces  missions.  Kalchber^  fit  preuve  d'une 
connaissance  profonde,  soit  des  rir 
ments  qu'il  avait  a  manier,  soit  de  la 
constitution  ancienne  et  moderne  de 
son  pa\s,  et  plus  encore  de  celle  ira- 
mTialiJe  voiidilé  de  crur  et  d'espri 
q'M  ry'yr\^r'*r  l'homme  d'état  autri- 
«.  les  circonstances 
i  7'>7,  llonapa-'le, 
a  la  tetr  drs  I  -^^inns  victorieuses  d'Ita- 
lie, laisoant  derrière  lui  le  Frioul  véni- 
tien et  la  Cirniole,  ne  s'arrêtait  qu'à 
l<ék>ben  en  pleine  Sivrie,  dans  ta  vallée 
de  la  flaute-Mui-z,  et  ne  rétrogradait 
qu'après  avoir  sx^xié  avec  Cobentil  les 
préliminaires  du  traite  de  (^mpo-Kor- 
mio.  De  mrme  ,  en  18(10,  le  contre- 
coup de-,  événements  de  l'Italie  srptrn- 
trionalr  et  de  l'AlIrmaf^ne  antérieure  se 
fit  sentir  en  Sh  rie  par  le  perpéiurl  pas- 
sade de  troupes,  de  vivres,  que  le  cabinet 
de  Vienne  envo\ ait  à  ses  armées.  Ce 
fut  bien  pi^  en  IHO.'):  tandis  que  Na- 
polton  était  vainqueur  à  Austcililr, 
Kupène,  aidr  de  M  asséna,  traversait  la 
Stvrie  entière,  évacuée  par  l'arrhiduc 
Jean,  et  avançait  jusqu'au  Sctuimennf; 
au  delà  de  la  frontière  du  Nord.  Tant 
.^Tiiivasions  étaient  bien  faites  pour 
jeter  le  déconra^^emenl  dans  tontes  les 
âmes.  Mai*:  Kalchbero;  était  de  ceux 
dont  le  rnitt.i;;r  r  raidit  en  pré>encc 
des  obstacles.  De  lon^e  main  il  haï:.- 

a5. 


38» 


KAL 


sait  coitlialcMioiil  la  Fiance  ;  sa  liaiiie 
s'acciiil  ilc\aut  ce^  tentatives  et  rcs 
succès  réitérés  ;  mais  sou  intrépidité 
aussi.  jMcine  en  cette  désastreuse  année 

1809,  où  la  perte  des  provinces  ill)- 
riennes  vint  couronner  celle  du  Mila- 
nais, celle  des  anciennes  possessions 
de  Venise,  il  eut  au  moins  le  bonheur 
de  voir  toute  la  Stvric  avec  un  tiers 
de  la  Carinthie  restera  l'Autriclic:  il 
ne  devint  pas,  ce  qu'il  eut  pu  craindre 
un  instant,  sujet  français,  sujet  de  Na- 
poléon. Ces  services,  au  milieu  de  crises 
si  fréquentes  et  qui  semblaient  ne  devoir 
finir  que  quand  définitivement  toute 
la  monarchie  autrichienne,  moins  la 
Hongrie,  aurait  été  incorporée  à  Tera- 
pire  français  ou  à  ses  dépendances, 
étaient  d'autant  plus  dip;nes  de  la  re- 
connaissance publique  que  jamais,  du- 
rant quatorze  années  qu'il  remplit  les 
fonctions  de  conseiller  (1796-1810), 
il  ne  voulut  recevoir  la  plus  lé|;ère  rétri- 
bution. Les  états  lui  témoip;nèrent  leur 
estime  en  le  nommant  second  commis- 
saire de  l'ordie  des  nobles  (1810),  et 
le  zèle  heureux  avec  lequel  il  s'acquitta 
de  ce  mandat,   auquel  il  fut  réélu  en 

1810,  lui  valut,  à  partir  de  1817,  le 
titre  de  premier  commissaire,  t/archi- 
ducJean,  en  instituant  le  Musée  na- 
tional de  Stvrie,  l'avait  aussi  choisi 
pour  un  des  curateurs  de  ce  bel  établis- 
sement; et  en  1820  il  devint  référen- 
daire près  la  commission  provisoire  de 
finances.  On  ne  s'étonnera  pas  qu'ai- 
mant sa  province  natale  autant  qu'il 
l'aimait,  il  ait  porté  à  ces  diverses  ^es- 
lions  l'ardeur  la  plus  vive.  Voulant  ré- 
pandre et  populariser  les  mêmes  idées 
parmi  la  jeunesse  st_)nennc,  il  fit  avec 
l'archiviste  \Vartin^er  les  fonds  d'une 
médaille  de  cinquante  florins  que  cha- 
que année  une  commission  décernerait 
au  jeune  homme  qui  aurait  écrit  le 
meilleur  morceau  d'histoire  relatif  à 
la  Styric.  Il  enrichit  aussi  de  ses  dons 
le  cabinet  rie  médailles,   le,  archives, 


K\L 

la  bibliolhèijue.  Ce  n'est  point  là  ce 
qui  pouvait  l'appauvrir.  H  eut  été  heu- 
reux pour  lui  qu'il  eut  restreint  son 
activité  à  ce  cercle  d'occupations  mo- 
destes et  utiles.  Mais,  leurré  par  de 
vaines  espérances,  il  s'avisa  de  vouloir 
exploiter  une  mine  de  plomb  aro;enti- 
fère  :  la  mine  engloutit  tout,  château, 
sei^^iieuries,  maisons,  contrats,  et  le 
propriétaire  de  Wildbach  fut  réduit 
dans  ses  derniers  jours  à  payer  loyer. 
Pour  comble  de  maux,  sa  santé,  floris- 
sante jadis,  vint  à  se  détériorer.  11 
traîna  encore  ainsi  sa  vie  deux  à 
trois  ans,  au  bout  desquels  il  expua, 
le  3  février  1827.  Kalchber^  faisait 
partie  de  douze  ou  quinze  sociétés  , 
tant  littéraires  qu'économiques  ou  sa- 
vantes, qu'agronomiques  ou  musicales. 
Ses  Œuvres  complètes  ont  paru  en 
neuf  volumes.  Vienne,  1810.  Elles  se 
composent:  1"  de  six  drames  dont  cinq 
ont  été  déjà  nommés  (//^//É-i-,  co/ntesse 
de  Habsbourg,  1 78G  ;  les  Templiers, 
1788;  la  Révolte  des  chcvcdiers , 
1792;  Marie-Thérèse^  en  5  actes, 
1793;  les  Tcutoniques  àSaint-Jcaii 
d'Acre,  1796;  la  Mort  d'Attila, 
1806);  2"  de  sa  part  des  Fruits  de 
la  muse  de  la  patrie  ;  3'^  de  deux  vo- 
\\\mcsiS!Ks(juisseshistori(juesy\c.\\\\Q, 
1800  ;  4"  d'un  Traité  de  forigim:  et 
de  l'organisât  ion  des  états  de  Styric  ; 
5"  de  diversopusculcset  brochuiespar- 
nii  lesquelsnotisremarqueronscellc  qui  a 
pour  titre  les  Français  datent pspassé. 
On  devine  que  les  Français  du  temps 
présent  ont  plus  occupé  la  pensée  du 
fidèlesujel  deFrançois  11  qucics Fran- 
çais du  temps  de  Charles-Quint  et  des 
croisades,  et  que  ce  qu'il  recherche 
chez  les  arrière-^rands-pères  de  nos 
pères,  ce  sont  les  traits  des  ambitieux 
envahisseurs  de  la  Slyrie,  de  ces  détes- 
tables étourdis  qui  enjambent  des  Alpes 
{grecques  aux  Alpes  cai niques,  bivoua- 
quent dans  la  vallée  de  la  Mur/-,  boivent 
le  tokai  de  l'archevêque  de  Salzbour^, 


KM. 

^i^nfnt  t1^  pr^liminair  !^  i  IjftAtcu  uu 
tir  j   /naVin.    Le  Frjii^Mis 

a  I)'  nii  Mtirur  tir  |Mti\iiir«*<<, 

il  but  lui  rrj»iriulie  l'Alijrr,  elc,  rtr. 
1^  Français  d'ailleurs  n'a  |ioinl  d'àme, 
point  de  \er>e,  point  d'élan  :  il  cioit 
«voir  du  Roût,  d  vent  imposer  son  poût 
à  toutes  les  nations  et  turtnut,  mlieiix 
bla^plirme  !  i  l'Alleinar^ne.  MaU  l'Al- 
lemagne .s'e>t  émancipée  de  ce  jou;; 
intrllerluel  et  sVmancipera  auvsi  de 
l'autre,  elle  rc  dépêtrera  de  Napoléon 
comme  lie  l\acine.kalclil)rr;;en  e(Trt  est 
par  exrrllenci*  de  ceux  qui  se  débarras- 
sèrent des  entraves  de  la  ^allomanie. 
Lessin;;  et  (itrtiie  étaient  a  la  tête  de 
reltr  ;;rande  réaction,  il  fut  un  de  leurs 
nombreux  suivants  ;  mais  citez  lui 
c'était  spontané.  Li  :;allomanie  axait 
surtout  ro^né  en  IVussr  ou  dans  les 
environs  :  ne  fut-ce  que  comme  anta- 
goniste de  la  IVusse  ,  l'Autriche  devait 
pencliei  du  roté  d'une  nationalité  en 
littiTalure.  Or.  quoi  de  plus  proiondi- 
roent  autrichien  que  ces  dm  es  provin- 
ces,T^rol,  C>arniole,  C^riiithie.Slvrie, 
hérissées  partout  de  pics  ,  d'ai;;uillr>  et 
de  placiers,  moins  après  encore  (|ue 
leur  population  de  [Ȉtre^  et  de  chas- 
seurs d'ours .' (^est  là  que  naquit,  que 
vécut  Kalchhci^.  Sans  être,  comme  ses 
rustiques  r ompatrioles,  étranf^er  à  la  ci- 
vilisation, il  était  tout  aussi  imperméa- 
ble qu'eux  à  l'esprit  d'imitation  et  d'in- 
novation, il  était  £;ermain,  styrien,  en- 
iin  lui-même.  De  la,  dans  ses  œuvres,  un 
cachet  d'originalité  que  jamais  ne  pré- 
senlera  poète  lancé  dans  une  ^lande 
capitale  et  pénétré  par  la  centralisa- 
tion. I/éduralion  première  avait  laissé 
profondément  son  empreinte  dans  l'àmc 
dekalchber^;  tout  chez  lui  se  résu- 
mait par  quatre  mots  ,  qui  s'harnio- 
niaicnt  niei\eillea<cincnt  ensemble, 
patrie,  chevalerie,  nioven-àj;e,  immo- 
bilité. Ce>  quatre  impressions  domi- 
nent toute  sa  poésie  et  lui  donnent  une 
individualité     profonde  :    c'est    de    la 


KAL 


2^9 


poésie  prov  inciale,  montagnarde  :  c'est , 
SI  l'on  veut,  dr  la  palavinité,  mais  c'est 
quelque  cho  c  de  naïf,  de  spontané, 
qui  a  du  charme  et  qui  se  fait  croire. 
Son  élan  est  circon>crit  ,  son  vol 
étroit  et  raidr ,  mais  il  a  de  la  fraî- 
cheur et  de  la  vérité.  Cela  ne  peut 
provenir  que  de  l'assimilation  ou  de  la 
.Mroilitude  parfaite  qui  existe  entre  le 
poète  et  les  sujets  de  sa  poésie  :  il  sait 
à  ravir  le*  sites,  les  mtrur .,  les  croyan- 
ces, la  vie  externe  et  intime  qu'il  veut 
peindre;  il  sait  l'an'-ien  et  le  moderne. 
i'jT  talent  se  «nontre  au  plus  haut  de^r^ 
dans  «.es poésies  fugitives  ou  truiis  tir 
Ai  itiusr  Jf  St)rir\,  et  dans  le.s  Tru 
tuniqurs  à  Suinf-Jntn  tFArrr,  véri- 
table Inmne  à  rhéroï>me  du  che?alier 
en  l'alestine.  I^  sujet  e>t  heureuse- 
ment choisi,  le  plan  sape  et  fécond  en 
situations,  en  péripéties,  ledialo^ue  na- 
turellemeut  filé,  lira  aussi  beaucoup 
de  ce  caractère  dans  la  lir^'oitr  drs 
t  hr>.u:lirrs.  et  dans  le  sujet  si  éminem« 
ment  patriotique,  quoique  si  moderne, 
dt  Morit-  l'hrrrsr,  qu'on  peut  re^ar- 
der  comme  le  pendant  de  la  Hr^HiUe. 
Ses  deux  premières  pièces  sont  moins 
parfaites,  bien  qu'elles  décident  ,  la 
seconde  surtout  ,  un  haut  f;énie  : 
l'auteur,  tout  jeune,  n'est  pas  comme 
imprègne  intimement  de  ce  <|u'il 
exprime  ;  puis  ce  sont  des  incorrec- 
tions, des  lautes  même  contre  la  «gram- 
maire, enfin  des  fautes  contre  l'harmo- 
nie. Kl  que  l'on  ne  croie  pas  qu'ellei 
sont  clairsemées ,  elles  se  reprt-senteiit 
à  cliaquc  itniuite  comme  les  cailloux  et 
les  ronces  à  chaque  pas  pour  qui  <;ravit 
les  Alpes.  Siliram  le  corri;;ea  de  ce 
défaut.  Depuis  ce  temps,  les  pièces  de 
Kalchhei^,  toutes,  à  l'evreplion  de  la 
première,  rii  iambiqnes  de  cinq  pieds, 
rt';:rdt^eiit  phi>  l'oreille  que  par  de  pe- 
tites traces  d'apreté  qui  ne  blessent  pas 
l'euphonie,  et  l'on  peut  sans  exagéra- 
tion le  placer  parmi  les  classiques  au- 
trichiens. ^ — <^T. 


39© 


KkL 


KALCKREUTH  (le  comte 

Adolphe  -Frédéric)  ,  feld-maréclial 
prussien  ,  né  en  1737,  de  la  noble 
famille  d'Arensdorf  dans  la  Nouvelle- 
Marche,  fut  destiné  dès  l'enfance  à  la 
profession  des  armes  et  y  débuta,  sous 
le  grand  Frédéric,  dans  la  guerre  de 
sept  ans.  Il  était  alors  officier  de  ca- 
valerie et  il  passa  bientôt  à  l'état-ma- 
jor  du  prince  Henri,  dont  il  devint 
l'adjudant.  On  a  dit  qu'il  eut  beau- 
coup de  part  à  ses  succès  par  d'u- 
tiles avis  ;  mais  dans  la  suite  il  en- 
courut sa  diso;râce  par  des  torts  si 
jijraves  que  le  prince  ne  lui  pardonna 
jamais.  L'avancement  de  Kalckreuth 
dans  l'armée  continua  cependant  à  être 
rapide ,  et  son  crédit  augmenta  même 
eRCore  sous  le  successeur  de  Frédéric 
H  ;  ce  qui  ajouta  beaucoup  au  mécon- 
tentement du  prince  Henri  contre  la 
nouvelle  cour.  En  1787,  Kalckreulh 
faisait  partie  de  l'armée  qui  ,  sous 
les  ordres  du  duc  de  }>riinsvvick  ,  en- 
vahit la  Hollande  pour  y  rétablir  l'au- 
torité stathoudérienne  ,  en  présence 
des  Français  qui  restèrent  immobiles, 
après  quelques  vaines  démonstrations, 
et  il  fut  nommé  à  son  retour  inspec- 
teur-général de  la  cavalerie  et  colonel 
du  régiment  des  dragons  d'Anspach, 
qui,  après  la  mort  du  margrave  (1 805), 
devinrent  les  dragons  de  la  reine. 
Avant  été  envové,  en  1789,  comme 
gouverneur  de  la  partie  de  la  Pologne 
qui  venait  d'échoir  à  la  IVusse,  les 
hahitanls  de  ce  pays,  très-contents  de 
son  administration  et  des  principes 
qu'il  manifesta  ,  le  demandèrent  au 
roi  pour  généralissime  ;  ce  qui  ne 
leur  fut  pas  accordé.  Le  célèbre  Mi- 
rabeau, qui  l'avait  connu  à  lîerlin  et 
lux  revues  de  jVIagdeboiirg,  en  fait  un 
grand  é!oge  dans  sa  Correspcnf/finre 
secrète,  où  il  trace  du  prince  Henri 
un  portrait  peu  fl.itteur,  et  aiicjiiel  on 
pensa  dans  le  temps  que  Kaickreuth 
n'était  point  étranger.  Le  diplomate 


RAL 

français  écrivit  alors  à  son  ministère  : 
«  Je  me  suis  lié  aux  revues  de  Mag- 
«  debourg  avec  Kaickreuth  que  j'ai 
«  passablement  conquis.  »  11  est  pro- 
bable que  c'est  par  suite  de  cette  con- 
quête ou  de  cette  liaison  que  celui-ci 
montra,  dès  le  commencement, quelque 
penchant  pour  la  révolution  française, 
et  qu'en  1792  on  le  vit  très-opposéà 
la  guerre  et  aux  conséquences  du  traité 
de  Pilnitz.  Cependant,  quand  tout  fut 
décidé,  il  n'hésita  pas  à  prendre  un 
commandement  dans  l'armée  qui  dut 
opérer  l'invasion  de  la  France  sous 
les  ordres  du  duc  de  Brunswick,  dont 
il  était  resté  l'ami  et  le  confident. 
Il  se  trouvait  en  Champagne  ,  dans 
le  mois  de  septembre  ,  à  la  tête  d'un 
corps  de  l'aile  droite  des  alliés  ,  et 
ce  fut  ce  corps  d'armée  qui ,  avec 
une  division  autrichienne,  sous  les  or- 
dres de  Claiifayt  ,  força  à  deux  re- 
prises le  défilé  de  la  Croix-aux-Bois, 
où  fut  tué  le  jeune  prince  de  Ligne. 
Les  troupes  de  Kaickreuth  montrèrent 
à  cette  attaque  beaucoup  de  zèle  et  de 
valeur.  Mais  ensuite  il  les  tint  en  repos 
lorsque,  profitant  d'un  premier  succès  , 
elles  auraient  pu  se  porter  en  avant  et 
fermera  Dumouriez  sa  dernière  retraite, 
ainsi  que  ce  général  le  reconnaît  lui-mê- 
me dans  ses  Mémoires  (Koy.  Dumoij- 
Ritz,  LXIH,  15.>).  Kaickreuth  était 
alors  parfaitement  bien  a\ec  le  duc  de 
Brunswick,  et  l'on  ne  peut  pas  douter 
que  le  généralissime  delà  coalition  ne 
lui  ail  lait  connaître  au  moins  une  partie 
de  ses  plans  et  de  sa  politique.  Ce  qu'il 
y  a  de  sûr,  c'est  qu'il  concourut  de  tout 
son  pouvoir  à  les  exécuter,  que  dans  le 
conseil  de  guerre  qui  fut  tenu  avant  la 
retraite  il  opina  fortement  pour  cette 
retraite,  et  pour  qu'il  n'y  eût  point 
de  bataille.  Il  assista  ensuite  à  toutes 
les  conférences,  à  toutes  les  négocia- 
tions ostensibles  et  secrètes  qui  eurent 
lieu  avec  les  agents  de  la  Convention 
nationale  et  les  généraux  Kellermanii 


KAL 


KAL 


Sqi 


e\  Dillou  (l'o)'.  kli.i.EltMA1«l«,  dans 
ff  \o\.) ,  et  Cf  fui  lui  qui  ré^la  la  capi- 
tulation Ar  Vprdun  e\  qui  remit  rrltf 
plarr  aux  Kraiirai^.  Il  ntiitinu.-!  il  mm- 
mjiuirr  uiif  iliMMnfi  lir  l'armrf  prus- 
siriinr  »ur  la  nve  droite  du  Kliin  ;  el, 
lorsque  cette  armre  marcha  contre 
Castine,  il  riait  à  la  tète  de  i*a»anl- 
^arde,  cl  ce  fut  lui  qui  s'empara  de 
Francfort.  Il  cnndui5it  entoile  le  siè'^e 
de  Mavence,  où  plusieurs  fois  il  ^e  mit 
en  rapport  avec  les  ^ènéraui  fran- 
çais et  le>  commi'^saite^  de  la  (^n\en- 
tion  nationale,  ('e  fut  encore  lui  «jiii 
dressa  les  article^  de  la  capitulation  . 
el  certes  les  répulilirains  n'eurent  pas 
à  se  plaindie  des  rotidilions  de  ce 
Iraitè  ,    puisqu'elles  mil  ent  à  leur   dis. 

f>osilion  vin;;l  mille  hommes  d'excel- 
entes  troupes  restées  lon^- temps  i 
peu  près  inutiles  sur  le  Uhin,  et  qui, 
allant  aassilnl  combattre  les  rovalistei 
de  la  Vendée  que  rien  alors  sans 
elles  n'aurait  pu  empèclier  d'arrl\er 
il  Paris  ,  furent  la  cause  imnirdiate 
de  leurs  premiers  re>crs,  et  par  là  chan- 
f;èrenl  complètement  les  destinées  de 
la  France  1  ).  Après  la  prise  de  Maven- 
ce  Kaickreuth  commanda  un  corps 
d'armée  sur  la  rive  p.iurfie  du  Rliin  , 
d'abord  entre  Rlie^rastel  et  Sarre- 
Hruck,  où  il  combattit  pendant  quatre 
jours  de  suite,  puis  i^  Bisin;;eii,  et  en- 
fin, le  30  no%embre,  à  Morlautcrn,  où 
il  reçut  une  blessure  {;ra\e.  Il  n'iut 
aucune   part  à  l'expédition   des  Autri- 

(i)  On  doit  rrinarqurr  qu'il  «Uil  iiup..»»ibU 
qoe  le«  rrui«irni,  qui  .  djits  un  parvil  uiotncoi, 
accord^rvat  à  la  Ktrni*on  de  Mayenr»  c«>li«>  ca- 
pilulation  si  ataiitagcu^r.  i|;iiur jm<  ut  l'ciaplvi 
que  la  Coovrntion  iij|i«.n4;<  «oul^ol  lairr  de 
€r*  belle»  truapt*.  qui  a«ai<-nt  pea  pertfu  pm- 
dant  le  »ir|;e  ou  clic»  k'rtaienl  .-'(■terne»  et 
parfdllrmriit  ditciptinecs.  Tar  la  t  jpiiuljiion  , 
rllr«  «'eogagrrrni  à  n«  pa>  tcrrir  peitdani  un 
ao  roalre  les  alii^  -,  et  elle»  allrr<  al  a«ia>iu>( 
roinbatirr  le*  rt)yalt>lPt  de  la  Vrniirc  qur  le* 
Pru»^irn«  ne  rr<;ardaient  pa»  »aii«  dot.lr  «omme 
leur»  alliei,  maigre  1rs  ùrclaralious  le\  |  lus 
formelles.  El  il  en  fut  alisolummt  de  iiièiiie  à 
Mlle  cponue  de  la  garnison  de  Valencirnnc* 
qui  re\ut  des  .Kutricbiens  une  capitulation  tont- 
l-fait  Mmblable  et  qui  eut  les  mtees  r«fnltaU. 


chiens  sur  Trèvts  k  celte  époque,  et 
par  conséquent  il  n'eut  aucune  dis- 
cussion el  ne  publia  aucun  mrraoire  à 
celte  occaMtjn  ,  romnic  «)n  l'a  pré- 
tendu. Il  l'a  nié  lui-même  dans  une 
lettre  qu'il  nous  a  lait  l'honneur  de 
nous  écrire  quelque  temps  avant  2»a 
mort.  .An  mois  de  février  1794  ,  il 
se  trouvait  i  Francfort,  pour  s'y  réta- 
blir de  ses  bleMure»  ,  lorsnue  Irois 
a;;ents  du  comité  de  salut  public,  nom- 
roésOchel,  Paris  el  Fittermann,  paru- 
rent dans  cette  \ille  sous  prélevie  de 
ré;;lcr  i\rc  lui  quelaues  comptes  rela- 
tifs à  la  garnison  «le  Ma>ence,  mais 
que  l'on  a  cru*,  avec  plus  de  piobabilitr, 
remonter  aux  cnnventun.s  du  camp  de 
la  I.ane(r«j.  Dimoi  nit/,  ÎAIII). 
Comme  ces  a{;ents  venaient  de  Ma\rn- 
ce,  d<  la  part  du  maréchal  Mirllendorfr, 
i  qui  ils  s'étaient  d'aboid  adressés,  et 
qui  leur  avait  donné  une  e»curte  de  huv 
sards  pour  !e^  conduire  à  Francfort, où 
ils  entrèrent  dans  un  beau  carrosse  cn- 
levr  des  écuries  de  Versailles  ,  sur  le- 
quel ils  axaient  substitué  le  boniu-t 
rouj^e  à  l'écusson  de  Franre  ,  et  que 
sur  l'impériale  flottait  un  lar;;e  dia- 
peau  tricolore,  le  peuple  de  Franc- 
fort prit  toutes  ces  démonstrations 
pour  une  bra>ade  et  une  insulte.  I! 
était  près  de  se  jeter  sur  eux  el  de  les 
massacrer,  lorsque  KaIcLrcutli  %int  i^ 
leur  secours  et  apaisa  la  multiludr.  Il 
fit  poser  des  .sentinelles  à  leur  porte, 
les  reçut  plusieurs  fois  à  sa  table  et  eut 
avec  eux  pendant  quinie  jours  des 
conférences  fort  lon;;ue>,  et  dont  les 
véritables  motifs  n'ont  pas  été  con- 
nus du  public.  Cet  éxènemcnt  fit 
^rand  bruit  en  Allemagne  ,  et  l'on  y 
conçut  de  ^ra>es  soupçons  sur  les  se- 
crets !  apports  que  la  Prusse  entretenait 
avec  la  république  française.  Quand 
ces  conférences  lurent  tt-rmintes  et  que 
Kaickreuth  se  trouva  rétabli  de  ses 
bles-sures,  il  retourna  à  l'armée  que 
MœllendorfT  commandait  sur  la  rive 


3q7 


KAL 


(lanche  du  Rliin,  où  elle  re:l.i  dins 
rmuiivobililc  la  plus  absolue  pciiiiant 
loute  celle  cainpao;ne  de  ITOi,  qui  eut 
(le  si  grands  résultats  y)ar  rcv.tciiation 
des  Pays-lias  cl  celle  de  la  Hollande, 
que  les  Prussiens  auraient  pu  empêcher 
en  faisant  lin  mouvement  à  leur  droite. 
MœUendorfr  persista  à  s'y  refuser  mal- 
gré les  réclamations  de  l'Anç^letcire  et 
de  la  Hollande,  qui  cependant  payaient 
amplement  son  armée.  Celte  dernière 
puissance  avait  nicme  fourni  Tarlil- 
Jerie  et  les  munitions  pour  le  siè;j;e  de 
INIayence.  On  ne  peut  ^uère  douter 
que  Kalckreutb  n'ait  été  sur  ce  point 
parfaitement  d'accord  avec  MœUen- 
dorff,  et  qu'il  n'ait  eu  une  parfaite  con- 
naissance des  motifs  qui  le  délerminè- 
rent  dans  cette  circonstance  décisive. 
On  le  lui  a  publiquement  reproché,  et  il 
s'en  est  défendu avecune  irritation  et 
une  aigreur  qui  prouvent  assez  que  l'on 
avait  touché  la  corde  sensible  :  «  Jecon- 
«  nais ,  a-t-il  dit ,  ceux  qui  peuvent 
*(  l'avoir  osé  dire  ,  et  je  ne  leur  de- 
*(  mande  que  de  le  dire  en  ma  pré- 
«  seiice.  »)  Kalckreutli  ajoute,  dans  la 
letlre  dont  nous  avons  parlé,  que 
d'ailleurs  il  élait  en  sous-ordre  et  que 
Mœllendorff  ne  poi;vait  que  se  confor- 
mer aux  instruclioiis  de  sa  cour;  ce 
qui  est  très-vrai.  iNIais  ce  qui  ne  l'est 
pas  moins,  c'est  que  celte  cour,  qui 
avait  donné  les  ordres  el  les  instruc- 
tions, se  montra  fort  satisfaite  de  la 
manière  dont  Mœlleiidorff  et  Kal- 
ckreutb les  exéculèrcnt,  en  nommant 
le  premier  gouverneur  de  liei  lin  et  le 
second  gouverneur  de  'J'borii  et  de 
Dantzig,  tant  il  e>t  vrai  qn»*,  ni  Alle- 
magne comme  en  France,  ce  n'est  j»as 
toujours  en  gagnant  den  batailles  que 
les  généraux  ont  eu  de  ravanremcnt. 
Dans  cetteoccaslon  ce  fut  au  contraire 
pour  n'avoir  voulu  ni  marcher  ni  com- 
battre que  les  àeu\  chefs  prussiens  ob- 
tinrent les  plus  honor^tbles  distinctions. 
Kaickreutli    fut     même   nommé    plus 


KAL 

tard  gouverneur  de  UresloW  ,  puis 
de  lîerlln  ,  et  enllii  feld-marcclial. 
11  était  dans  nne  très-belle  position 
et  jouissait  d'une  fortune  considé- 
rable ,  lorsque  la  guerre  contre  la 
France  éclata  en  1806.  On  a  dit 
qu'après  avoir  fait  tous  ses  elfoil^  pour 
Pempécher  en  1792,  il  Pavait  au  coi.- 
ti aire  désirée  à  celle  époque;  mais  il 
s'en  défend  également  dans  l'écrit  dont 
nous  avons  parlé.  11  commandait  la 
réserve  de  l'armée  prussienne  à  la  ba- 
taille d'Averstacdt  ;  ainsi  il  y  eut  peu 
de  part,  et  il  ne  se  trouva  point  à  celle 
d'iéna.  Nommé  le  lendemain  comman- 
dant de  l'armée  prussienne  ,  il  fil  de- 
mander à  Napoléon,  par  un  de  ses  ai- 
des-dc-camp  ,  un  armistice  qui  fut 
refusé.  Alors  il  conduisit  les  débris  de 
l'armée  à  IMagdebourg,  puis  sur  TO - 
der.  Charge  ensuite  de  la  défense  de 
Danlzig,  il  résista  pendant  quatre  mois 
avec  beaucoup  de  vigueur  aux  attaques 
du  maréchal  Lefebvre,  et  iieseicndit, 
le  27  mal  1807,  qu'aoïès  cinquanle- 
un  jours  de  tranchée  ouverte.  Sa  capi- 
tulation .^ut  la  même  que  celle  qu'il 
avait  accordée  à  la  garnison  de  Mayen- 
ce  (juatuizc  ans  au;>aravant  :  sa  troupe, 
réduite  de  moitié,  sortit  aNCC  tous  les 
honneiMS  de  la  guerre  ;  et  elle  promit 
également  de  ne  pas  sei  vir  pendant  un 
an  contre  les  alliés  de  Napoléon.  Api  es 
cela  Kalckreutb  vécut  dans  la  retraite, 
et  il  ne  reparut  qu'à  Tilsitt  où  son  sou- 
verain lui  confia  une  mls>lon  très-hono- 
rable sans  doute,  mais  bien  pénible 
pour  un  bon  l'russien,  celle  de  signer 
le  traité  de  paix  le  [dus  désastreux 
qu'eut  jamais  subi  la  monarchie  du 
grand  Frédéric.  Il  se  rendit  ensuite 
dans  son  gouvernement  de  Breslaw, 
puis  dans  celui  de  lierlin,  et  lut  chargé, 
en  1810,  d'aller  complimenter  Napo- 
léon sur  son  maiiage  a\ec  nne  prin- 
cesse autrichienne.  Il  vint  à  Paris  dans 
un  très-modeste  équipage,  et  l'on  s'y 
appiçiit   à  pf'ine  de   sa  présence,    ce 


qui  le  luoililia  lM>aur(iup  ,  m  \r  foiui . 
tir  NOii  raiarlcir  cUil  une  t\ct^->\\e 
\jnilc.  Urtournë  dans  %i  (uttir  ,  alor^ 
M  liumiiirr  sons  |«  jiiu^  lit*  Nj|u>1coii, 
ii  s*\  roiiiluiAit  A\cr  uiir  c\li(iii«pru 
ilciicf  et  ne  fui  pas  Jrs  derniers  à 
riinsniier  au  loi  de  f^e  su'MnetIre. 
ll(tourMM\il  nirnie  a\«*c  une  exffs»i\e 
I  'inir  reii\  des  luililaiies  de  soncoin- 
I  .  *-ineu(  qui  sVniAlaient  dan^  la 
'..<•<-  «eciêtc  \^J'uf;rml  ùumff,  dont  le 
I)!il  notoire  était  de  di-ii\rei  la  k'russe 
de  i'op|ire>sion.  Cependant,  âpre»  le* 
ilf'^a.^lies  des  Fiamais  et  ^utlont  apir. 
I.i  \i<loire  de  I^ipzi;;,  il  se  monlr.i 
plus  franc  et  plu»  sinn-renimt  dispose 
à  roncnunt  aux  plan»  de  reslaiiialion 
pour  sa  patrie.  Le  p)usernement  de 
IutImi  ne  cesva  pas  de  lui  être  confié, 
(  !  il  iiioui  ul  d.)iis  ces  liaiilcs  fi)!)ction.s 
l<*  10  juin  1818,  à  l'a^e  de  quatre- 
\ui;;t-deu\  ans.  C'était  un  j;énéral 
Wave  et  fort  liabile,  mais  d'un  carac- 
tère Intrigant  et  dissimulé.  Iji  carrière 
iliploinati(|ue  lui  eut  mieux  con\enu 
que  celle  des  aunes.  —  In  paient  de 
«♦•  {'.t'iiéral,  Jean'iJiristophr-l  I  rirst 
«Ir  KM.i;klifcrTii,  né  le  '1rs  juin  17  H, 
ci:tr£  au  service  a  quinze  ans,  se  dis- 
tingua par  sa  valeur  et  son  san;;- froid 
à  diver!»e>  affai.eN ,  notamment  au  dé- 
li!i'  de  Domstadcs  ^17.'>8)  où,  souf- 
flant d'un  ervsipclequi  ne  lui  permet- 
tait de  puiler  ni  linlles  ni  souliers,  il 
coinbatiii  iicannioinN,  et  ,  clio>e  etran- 
t;r,  améliora  son  étal  par  ce  remède 
liémït|ue.  lUc  fil  remarquer  aussi  pen- 
dant la  courte  Guerre  de  la  succession 
de  Haxière;  puis,  en  IT'Jii,  dans  la 
iaiiipa;;ne  «lu  lUiin  ,  principaleinenl  à 
(  •iiiitcr<l)lum,  NOUS  le  ^cnéinl  Sclial. 
S. m  souverain,  à  celle  occa>ion,  le  dé- 
cora de  l'ordre  du  Mérite.  H  fut  en- 
suite cliaii;é  de  p-eiulre  liilclicà  la  tète 
de  irois  cents  volontaires  pour  courir 
la  retraite  de  l'armée  prus.siennp;  et  il 
s'acquit*  a  de  cet  le  mis>ion  avec  la  pliLs 
grande    > loueur    Quand   la  ^neire  de 


K\L 


■\^\ 


ISOC  érlala,  il  fut  nuium^  adiwtel  du 
régiment  d'iufanleric  de  Ilolienlolie  el 
pi  il  paît,  j  1.1  trie  dt*  ce  Cinp^,  à  la 
bataille  d'Iciia.  Il  rut  le  iiiallieur  d'> 
elreble^é  au  pied  ^.mclie  et  à  l.i  main 
dmite  el  dVlie  fait  pti>uiiiiler.  C'e^l 
laque  finit  .sa  lon;;ue  rjtrièremililalie, 
en  <|uelque  soi  le  romnir  elle  a\a.l  rniih- 
nience.  i^endu  à  la  libellé  ,  il  ne  prit 
plu»  {;uérr  part  aux  opei allons  mililai" 
ie«  ,  que  suspendit  d'aiileur»  la  paix 
de  Tilsill,  el  il  jouit,  lantAt  à  Berlin, 
lanlitl  a  IWe^lau  ,  d'un  lepos  que  lui 
reodaienl  néces>aiie  ses  nombreu.^rs 
blrss(ire>.  H  mourut  dans  celte  dernière 
%ille  le  V  nnv.  18*2.').  Fiedéric-4  iull- 
lauiiie  III  a^ail  bonoré  sa  vieillesse  du 
lilie  de  mainr-nrnnal.         M — D  j. 

KALKHUKX.NKU  (Ciinis 
TiAv),  ronipositenr  ,  mort  à  l*aris  le 
lu  ao'jl  iMiti,  (Ijit  juif,  et  naquit  en 
17.').'),  à  Munden,  dans  le  laiid;;;ra- 
vIjI  de  Ile  se.  H  eut  pour  m.illre  le 
rrirbie  Kmmanuel  Uach  ,  et  <«  div 
lii.oiia  p.trmi  se>  nombreux  rlè%M , 
au  point  d'être  reçu,  tiès-jeune  en- 
core, à  la  cliapellc  du  land^i.i\e.  Il 
quitta  Hesse-Ca«sel  pour  se  rendre  à 
la  cour  de  Berlin.  Atlacbe  au  piliice 
Henri,  fière  du  prand  Fiedrnc,  il 
composa  pour  son  tliéàlre  les  opéras 
suivants  :  Iai  vrUi'r  du  MultiUir;  lir- 
tiKèiritr;  tu  Frinme  it  Ir  serret  ^  elr. 
Kn  17U6.  il  parcourut  l'Allemn^ine  , 
visita  ensuite  l'Italie,  et  de  là  se  n-ndil 
en  France.  Paris  fut  le  Ici  me  de  ses 
vo>r.;',cs  et  de  ses  sutcès.  Kn  1799,11 
y  devint  maître  de.^  cbœurs  â  TOpéia, 
rt  en  180  V,  accomp.');>n.')teiir  an  piano. 
Il  «'tait  membre  de  l'académie  ro\ale 
de  StocUudin,  de  la  soriéu-  plnlbar 
inoiiiqiie  île  Bolo{;n(,  et  de  l.i  société 
philoterliniquc ,  «lont  il  dirigeât  les 
concerts  dans  les  séances  publiques.  H 
a  donne  a  l'Opéra  :  I.  Lhunt  triom- 
phal, 1797.  II.  Olyrufiie  ,  en  trois 
actes,  179S,  pièct*  ijui  n'eut  qu'une 
repnsenlaiion.     III    (avec    Lachnitli). 


394 


KAL 


Saiil,  oratorio  arrangé  avec  la  musi- 
que des  compositeurs  les  plus  distin- 
gues de  rAliemaf];ne,  de  la  France  et 
de  ritalie.  IV  (avec  le  même).  La 
Prise  de  Jéricho,  oratorio  arrangé 
comme  le  précédent ,  mais  qui  n'eut 
point  de  succès.  V.  Don  Juan,  opéra 
en  quatre  actes,  arrangé,  avec  la  mu- 
sique de  Mozart,  sur  des  paroles  fran- 
çaises. VI  (avecLachnith).  Les  Mys- 
tères d'Lsis,  opéra  en  trois  actes,  imité 
de  la  Fiu/e  encJniniée  de  Mozart. 
^'^.  La  descente  des  Français  en 
Angleterre^  1798,  opéra  non  repré- 
senté. VI II.  Œnone,  en  trois  actes, 
paroles  du  fabuliste  Le  Bailly  ;  ou- 
vrage reçu  en  1800,  et  dont  il  prépa- 
rait la  mise  en  scène  en  1806  ,  lors- 
qu'il fut  surpris  par  la  mort.  Ce  n'^ 
tait  d'abord  qu'une  Cantate,  exécutée 
avec  succès  dans  plusieurs  concerts. 
L'opéra,  joué  en  1812,  fut  retiré  après 
deux  représentations.  Kalkbrenner  a 
composé  aussi  quelques  ouvrages  sur  la 
théorie  de  l'art  musical.  Il  a  publié  à 
Berlin  un  Traité  d'accompagne- 
ment ,  et  à  Paris  ,  un  Traité  de  la 
fugue  et  du  contre-point,  d'après  le 
système  de  Richter.  On  lui  est  encore 
redevable  d'une  Histoire  de  la  mu- 
sique, en  2  vol.  in-8*\  publiée  à  Pa- 
ris en  1802.  Ce  qui  est  digne  de  re- 
marque, c'est  qu'elle  est  écrite  assez 
bien  en  français  par  un  Allemand. 
Comme  il  était  juif,  il  ne  s'attache 
guère  qu'à  la  musique  des  Hébreux. 
L'auteur  n'a  pas  eu  le  temps  de  l'ache- 
ver. La  partie  la  plus  importante,  celle 
qui  s'étend  depuis  (iuido  d'Arezzo  jus- 
qu'à nos  jours,  reste  à  faire.  F — le. 
KALL  (JF.AN-Cnni.sTiAN),  sa- 
vant prussien,  naquit  le  2i  novembre 
1714  à  Charlottenbourg  près  Berlin. 
Son  père,  Abraham  Kall,  premier  pas- 
teur d'une  église  de  Flensborg,.«;'est  fait 
un  nom  par  ses  connaissatices  dans  les 
langues  orientales.  En  1732  Kall  se 
rendit  à  runlversité  d'Iéna;  trois  ans 


KAL 

après,  il  fut  nommé  précepteur  des  pa- 
ges du  roi  à  Copenhague,  et  en  1738 
il  occupa  le  même  emploi  auprès  du 
prince  royal  Frédéric  ,  devenu  depuis 
roi  de  Danemark  sous  le  nom  de 
Frédéric  V.  11  obtint  la  même  an- 
née la  place  de  professeur  des  lan- 
gues orientales  à  l'université  de  Co- 
penh.igue,  fut  nommé,  en  1753,  con- 
seiller de  justice,  conseiller  d'état  en 
1768,  et  enfui  conseiller  de  conférence 
en  1774.  Il  mourut  le  6  novembre 
1775  ,  laissant  plusieurs  enfants  de 
son  mariage  avec  la  fille  d'Andréas 
Woldicke,  évêque  de  Wiborg.  On  a 
de  ce  savant  :  1.  Vispp.  II  de  voce 
hehrdica,  Copenhague,  1739-1741, 
in-4°.  II.  Obsenmtiones  ad  Prooer- 
hiorum  loca  4  obscuriora ,  ibid., 
1742,  in-4".  III.  Observationes  ad 
loca  5  Proi^erbioruin,  1743,  in-4°. 
IV.  Rab.  M.  Maimonidis  de  servis 
et  ancillis  tractaius ,  ibid.,  1744, 
in-4°.  V.  Bispputationes  III  in 
cantico  Deborœ  ,  ibid.,  1751  et 
1752,  in-4".  VI.  Spécimen philoso- 
plnœArabumpopularis,\h\à.,  1757- 
1760,  in-4".  VII.  Obsermtiones 
ad  loca  quœdam  V.  2'.,  ibid.,  1758, 
in-4".  VIII.  Prolrgowena  commen- 
tar.  inJerem.  cap.  30^/  31,  ibid., 
1759,  ln-4*'.  IX.  Fundawenta  lin- 
guœ  arabica  ,  ibid.,  1760,  in-4". 
X .  Comment atio  I  ad  Ilebrœœ  lin- 
gu(e  gramnuiilcam  Danzianam  , 
ibid.,  1763,  in-8".  XI.  Prodromus 
examinis  criseos  Iloubigantianœ  in. 
codicem  Ilrbrœum,  ibid.,  1763, 
in-4".  XII.  Examen  criseos  Iloubi- 
ganfiamn  ,  sprcimen  /,  176i;  //, 
1765;  ///,  1767;  7^,1769;  V, 
1770,  Copenhague,  in-4°.  XIII. 
Philosophia  Arabum  popularis,  en 
arabe  et  en  latin  avec  des  notes,  Co- 
penhague, 1764,  in-i°.  Cet  ouvrage 
comprend  les  quatre  dissertations  ou 
thèses  sur  la  philosophie  des  Arabes, 
déjà  publiées  parKali.  XIV.  Descrip- 


tut  êeptem  codùrum  V.  T.  as  /iru6iu 
jum  in  liihliuihria  re^iti,  i^y9n\\i- 
Hur.   ITtiJ»,  iii-lol.  D  — z  — s. 

KALL  ^^la)LA-v(!»l»ls^^>^'n^)  , 
fiis  ilii  prrredfiil  ,  n^  à  (  i()(irnlij;;up  le 
2.*  >fjjlembre  17i*.J,  Irtniina  <«  |»re- 
micrci  eiuiles  m  176.'»  a  IVcole  de 
Kaiitlers;  il  fui  ensuite  allariir  au 
roiir^r  lie  Knrrii,  puis  diMeii  et  en- 
fin maille  en  |)liil(»»o|iliie  en  1775. 
Il  entreprit  la  mrme  année  un  tota>;e 
dans  les  pars  étranger*,  où  il  rrNla 
jusqu'en  1777  qu'il  rentra  en  hane- 
mark,  pour  s'appliquer  spenalenirnt 
à  l'élude  des  lait:;urs  orientales,  et  il 
oerupa  la  rhaiie  que  la  mort  de  son 
péie  avait  laissre  \arante.  il  a  pu- 
wlié  :  I.  Disp.  fie  Mutottio  ejus- 
ffur  rultu  ,  C.nprnliaj^iie  ,176*J,  in- 
■\"  II.  ht)  nittiofi'ir  nonn'num  auo- 
i  umthjni  ftri^ftriorum  in  S.  S.  oc- 
lurrrntiu/n  ,  ilud.  ,  1770,  in-4*. 
III.  (iommenlationes  rriticu  philo- 
/oficit  m  firophetam  Uapg»rum  , 
ihid  .  1771-1773,  i«-i\  iV.  De 
ilupliri  pianlurum  se  ru,  Aruhitms 
lii^nito,  proframmuttt  //,  ibid., 
l7S-i,  178:{.  —  Kaii  {Marnis- 
Il  oldicke],  frère  du  précèdent ,  naquit 
à  Copen^a^ur  le  19  septembre  17.'»:2, 
et  fut  également  rirve  à  l'école  de 
Uanders.  Kn  177  V  il  fut  nommé 
membre  de  la  société  metlicale  doni  la 
dernirre  séanee  «^e  tint  \r  1"^  mai  1779, 
et  détint  licencié  en  médecine  en  1 78 1 . 
On  a  de  lui  :  I.  Histoire  Je  Iti  vie 
de  Jesus'Christ  ,  par  Mess,  Oopen- 
bamie,  1773,  in-H"'.  Il  en  a  traduit 
le<  quatre  premières  paities.  II.  Disp. 
dt'  freijuentissima  ar  pnrripua  os- 
rittilioms  causa  ,  ibid.,  177.'>,  in-8° 
III.  De  dijudirandti  ussium  purium 
sifti  in  dextro  out  sintstro  tarporis 
humani  ititere,  ptirtiruiii  prima  , 
ibid . ,  1776,  i  n  -  8*^  ;  Ejusdem  dis' 
s^riationis  piirtirula  sttunda,  ibul., 
1 777,  in-8".  W  .  Ik  vitiis  tonforma- 
tiunis  in  superiori  pehis  apertura, 


KAL 


I95 


tfint  dystoi  tant  priniurere  iHiUnI , 
ibid.,  1778.  in-8".  Il  a  encore  fait 
païaitre  plusieurs  traduction;»  dâii»  la 
llibliotiieque  des  écrivains  utiles  , 
1771,  in-4  ,  quelques  morceaux  on- 
c^inauK  dans  la  IliMmilu-que  générale 
danoise,  in-8",  et  quclipip.  re\uescri- 
ti<]ues  dans  le  Journal  de  la  littérature 
danoise.  I) — 7.- -s. 

K.AI.L  Mm  ^lUM',  savant  danois, 
de  la  même  tamille  que  le.s  précédents, 
naquit  en  17i.'l  à  Aarhuus,  dans  le 
.lulland  .  ou,  ^ui>ant  d'autres  bio;;ra- 
pbf*,  à  CiOprnlia^ue.  Api  es  avoir  reçu 
dans  la  maison  paternelle  sa  première 
eduralion  ,  il  fréquenta  l'nniNersité 
de  (icrltinmie  ,  puis  celle  de  Copen- 
li.i;;ue  ,  ou  il  obtint  le  i^rade  de  maî- 
Ire-es-arts.  Kn  17(»7,  il  fut  nom- 
mé professfur  de  «^rec  à  cet  etabiissr- 
nieiil,  et  l'année  sui\ante,  membre  de 
la  commission  rovale  de  l'instruction 
publique.  Celte  rommission  faisait 
alors  déchiffrer  et  analv^^er  les  riche* 
collections  de  manuscrits  islandais  que 
posu'de  la  bibliothèque  royale  de  i/y 
penha^iie  ;  et  Kall,  qui  avait  ciillité 
avec  succès  les  anciens  idiomes  Scandi- 
naves, prit  une  grande  part  à  ce  lia- 
vail.  LoiNque,  en  1778,  lepouxerne- 
ment  foiula  une  chaire  d'histoire  et  de 
mvtholo;:ie  du  Nord,  il  la  donna  i 
Kall,  qui,  par  suite,  réîii{;na  ses  fonc- 
tions de  professeur  de  grec.  Nommé, 
en  178:*,  membre  de  l'académie  "ovale 
des  sciencîs  de  (!openhaj;ue ,  dont  le 
célèbre  historien  Suhm  [l  oy.  ce  nom, 
XLIV',  180)  était  président,  il  se  lia 
intimement  a\ec  lui,  et  plus  tard  il 
devint  conservateur  en  chef  de  sa  ri- 
che bibliothèque,  qui,  après  la  mort 
de  ce  savant,  fut  incorporée  à  la  bi- 
bliothèque royale.  Kn  178.3,  Kall 
établit  une  société  de  littérature  étran- 
gère ,  et  une  société  patriotique  qui 
avait  pour  objet  de  fournir  gratis,  aux 
étudiants  pauvres,  les  livres  les  plus 
indispensables  à  leurs  études.  A  peu 


396  KAL 

près  à  la  même  époque,  le  gouverne- 
ment le  chargea  de  faire  un  cours  pu- 
[ilic  de  i^éograpliie  commerciale,  et  un 
cours  d'histoire  mmlalre  spécialement 
destiné  aux  officiers  de  rélat-major- 
{];cncral.  En  1808,  il  fut  nomme  his- 
toriographe des  royaumes  de  Dane- 
mark et  Norvège  ,  et  en  1811  il 
fonda  une  caisse  hvpolhécaire  pour  les 
propriétaires  d'immeuhies  de  Copen- 
hague, établissement  qui  devint  pour 
eux  d'une  si  haute  utilité  que  le  roi  , 
voulant  en  témoigner  sa  satisfaction  au 
fondateur,  lui  conféra  le  titre  de  con- 
seiller d'ctat.  En  1817,  Kall  célébra 
le  cinquantième  anniversaire  de  son 
entrée  en  fonctions  à  l'université  de 
Copenhague,  dont  il  fut  deux  fois  rec- 
teur ;  et,  à  cette  occasion,  il  fut  nom- 
mé chevalier  de  l'ordre  de  Dannebrog 
(4^  classe).  Il  mourut  en  1821.  Kall  a 
publié  un  grand  nombre  d'ouvrages, 
parmi  lesquels  nous  citerons  :  I.  Spe- 
clmen  nooœ  editionis  Sciiteuiiarum. 
Tlieognidis  Megarrnsis,  Gœttingue, 
17G6,  in-4".  11.  Plusieurs  éditions 
classiques  :  1"  des  Dialogues  choisis 
de  Lucien,  Copenhague,  1773;  2° 
du  Traité  sur  r  éducation^  dePlutar- 
(]ue ,  ibid.,  \11^\  3"  du  Manuel 
d'Epictkte,  177.5,  1781;  ^''à'Eu- 
trope  ,  1776-81;  .V  àllérodote  . 
1778.  Ces  éditions,  soit  en  grec,  soit 
en  latin,  auxquelles  Kall  a  ajouté  des 
notes  et  commentaires  importants, 
étaient  spécialement  destinées  à  l'usage 
des  écoles.  II I.  Histoire  uniorrsel/e , 
(Copenhague,  1777-80,  in-8'-\  Cet 
ouvrage,  rédigé  sur  le  [)lan  de  ce- 
lui «le  Schioekh  ,  est  très-remar- 
quable ,  à  cause  du  grand  développe- 
ment que  l'auteur  y  a  donné  à  la 
partie  qui  concerne  les  pays  du  nord. 
IV.  Analyse  des  Annales  islan- 
daises manuscrites  de  la  biblio- 
thèque royale  de  Copenhague,  Co- 
penhague, 1792,  4  vol.  in-8".  V. 
Histoire  de  la  noblesse  et  des  ordres 


KAM 

de  cheimlerie  du  Danemark,  ibid., 
1790,  in-8*\  avec  planches.  \  1.  Une 
édition  revue  du  Noui^eaufestajnent, 
ibid.,  1799,  in-8".  Kall  a  fourni  des 
notes  pour  l'édition  anglaise  du  Thé- 
saurus grœcœ  linguœ  de  H.  Estienne. 
11  a  laissé  manuscrit  un  ouvrage  in- 
titulé Monuments  septentrionaux 
du  moyen  âge  ,  auquel  sont  joints 
environ  cent  dessins,  dont  une  ving- 
taine ont  été  gravés,  mais  non  publiés. 
Il  était  un  des  plus  actifs  collabora- 
teurs du  Recueil  de  l'académie 
royale  des  sciences  de  Copenhague, 
et  du  Magasin  Danois.  Dans  le  pre- 
mier se  trouve,  entre  autres  écrits  de 
lui,  un  jNiémoire  fort  remarquable  sur 
les  renseignements  donnés  par  Ptolé- 
mée  au  sujet  de  la  Chersonèse  cimbri- 
que.  C'est  Kall  qui  a  publié  le  8^  et 
le  9^  volume  de  \' Histoire  de  Dane- 
mark  que  Suhm  avait  laissés  manu- 
scrits. M — A. 

KAMEIVSKY  (le  comte),  géné- 
ral russe,  né  d'une  famille  noble,  vers 
1735,  reçut  une  éducation  toute  mili- 
taire et  entra  dès  sa  jeunesse  dans  la 
carrière  des  armes.  Il  fit  successive- 
ment la  guerre  contre  les  Suédois,  con- 
tre les  Turcs  et  contre  les  Polonais. 
Du  même  âge  que  le  fameux  Souwa- 
row,  il  combattit  long-temps  dans  les 
mêmes  armées,  se  signala  par  les  mê- 
mes exploits,  et  obtint  un  avancement 
à  peu  près  pareil.  En  1774,  ils  étaient 
tous  les  deux  lieutenants-généraux,  et 
ils  commandaient  chacun  wnt  division 
à  Kosludje,  où  ils  remportèro;  !  une 
vi.:toire  importante  contre  les  Turcs. 
Mais,  bien  que  mieux élevécjueSouw.'- 
row,  Kamensky  était  d'un  caractère 
plus  bizarie  encore,  et  quelquefois  il 
se  montra  d'une  rigueur  que  l'on  eut 
quelque  raison  de  qualifier  de  fé- 
rocité ,  au  point  qu'il  déplut  même 
à  Catherine,  qui  cessa  long-temps  de 
l'employer.  Cependant,  en  1789,  il 
combattit  encore  contre  les  Turcs    à 


KAM 

côle  lie  M)ii  Aitcien  coiupa>;iiuii  il'ai- 
tn(>,  Souwaïuw  ,  qui  le  connaissait 
birn,  qui  C5tii.iatl  son  in.slrurtion  un- 
iitaiic.  roji>  qui  faisait  |»ru  «Ir  cxs  Je 
>un e&peiienci.  ••  kameii>L>  roitiiait  la 
••  ;:iierre.  <lt«j>t-il,  mais  la  ^urire  ne 
•<  le  connaît  ^Ai.  l'our  raoi  je  ne 
(  oiiuais  |iasla  guerre  ;  mais  la  «guerre 
•■  me  connaît.  >•  \\s  obtinrent  en- 
semble ,  le  :i2  septembre  de  celle  an- 
née ,  la  fameuse  \ictoiie  Je  Uimnick. 
Kn  IT'Ji,  ils  combattirent  encore 
ensemble  1rs  in«ur^es  |M)lonai»;  mais 
à  ra\enenienl  de  Faul  T^  ,  K,a- 
mcusLv  tomba  dans  une  complète  dis- 
j;iace  ,    et  il  ne  recouvra  son   acliMté 

3 n'en  IHUii,  sous  le  rè^ne  d'Alrian- 
re«  qui  le  créa  feld-mareclial  et  lui 
donna  le  commandement  d'un  corps 
d'armée  à  Krasno  Selo,  où  il  n'eut 
rien  à  (aire  de  remarquable,  mai>  où 
il  sut  du  moins  s'attirer  de  plus  en 
plus  la  faxeiir  du  jeune  ciar.  N  ers  la 
fin  de  ISUG  ,  il  alla  prendie  le 
ccmmandeiueiit  en  chef  de  l'armée 
russe  qui  combat  lait  les  Français  en 
l'olo^ne  ,  et  il  eut  alors  sous  se»  or- 
dies  l)u5iho\*den  et  liennii^Nen.  Na- 
poléon lui-même  commandait  l'armée 
française.  Le  23  décembre  il  pa^sa 
l'W  Lea  el  forra  les  KuNses  a  se  retirer 
jusqu'à  PuIiuncL  où,  trois  jouis  après, 
le  corps  d(*  lîenni^sen  a^ant  obtenu 
un  succès  important  sur  une  des  ai- 
le^ de  l'armée  française,  se  disposait  à 
attaquer  le  centre  a\ec  une  grande 
probabiîiltf  de  succès  ,  lorsque  ka- 
mensLj)  lui  envo\a  l'ordre  de  se  reliiei , 
et  se  retira  lui-même  de  sa  personne 
sur  les  derrières  sans  que  l'on  ait  ja- 
mai-^  pu  sa\oir  le*  motifs  de  cette 
étrange  détermination.  La  retraite 
dura  plusieurs  jouis,  el  elle  semblait  de- 
voir se  prolonger  jusqu'au  Niémen, 
qujiitl  I>enui^>en ,  qui  a\ait  pris  1<> 
commandement  en  rab>cnce  de  Ka- 
men»k\,  lequel  continuait  à  fuir  sur 
f-    derrières,    reçut    de    l'empereur 


KAM 


^9? 


Alc&andie  une  lettre  aulo<;raplie  Irès- 
llatteuse,  et  qui  le  nommait  ;;éneral  en 
chef.  Dans  l'impossibilité  où  l'on  a  ete 
d'expliquer  la  conduite  si  extraordi- 
naire que  tint  kamenskv  dans  cette 
occasion,  on  a  dii  que  de>-lors  sa  tête 
conimeocail  k  s'affaiblir.  Ce  qu'il  y  a 
de  sur,  c  est  qu'il  di»parut  enlieiement 
de  la  scène  publique  pendant  plusieurs 
années,  et  que  ce  ne  fut  ipren  tKO'.l 
qu'il  ie\int  aIa  tète  d'une  armer  de 
cent  mille  hommes  qu'Alr»andie  des- 
tinait à  raccoroplivsrmenl  de»  consen- 
tions secrètes  de  ItUitl,  relatives  à 
l'empire  ottoman,  tandis  que  Napo- 
léon accomplissait  de  son  côlé  les 
mêmes  consentions  ur  la  Péninsule 
hispanique.  karaensLy  pavsa  le  Da- 
nube le  '2't  mai,  et  il  attaqua  simulla- 
némeiit  TurtuLai,  Silistria  et  Hazard- 
jik  ,  qui  se  fendirent  successivement. 
Les  Turcs  demandèrent,  a  la  lin  de 
juin,  un  armistice  qu'il  ne  voulut  ac- 
corder qu'à  condition  que  les  forte- 
resses de  Varna  et  Schoumia  lui  se- 
raient remises;  ce  qui  ela.t  r\idemrnent 
s'ouvrir  le  chemin  de  Con^tantinoplr. 
N'avant  pu  obtenir  de  pareilles  comli- 
tions,  il  attaqua  Sclioumia  où  les  Turcs 
avaient  forme  un  vasle  camp  rrtranci.é 
défendu  par  quarante  mille  hommes. 
Apres  avoir  échoué  dans  plusieurs 
attaque»  de  vive  force  où  il  fit  de  ;;raii- 
des  pertes,  il  essavasans  plus  de  succès 
d'en  former  le  blocus.  Il  manœuvra 
ensuite  pour  attirer  hors  de  son  ramp 
le  ;;raiNl-visir  qui  commandait  les  Ot- 
tomans, et  ne  put  y  réussir.  Alors  il 
se  reporta  sur  Uoulchouk  ,  el  cette 
place  se  rendit  au  comte  de  I^nL:e- 
ron,  qui  etail  sous  ses  ordres.  Api  es 
cette  reddition  ,  la  saison  se  lioii- 
vant  a\ancée  et  les  opcraliniis  devenant 
impassibles  ,  le  maréchal  kamenskv 
repa.v-a  le  Danube,  ne  laissant  (].ie  trois 
divi>ion>  sur  la  rise  droite,  el  il  établit 
son  juarticr-;;éneral  à  Bucliare,t  ,  ni;, 
après  une  campa;;iie  au>-si  saiif;lanteqiie 


398 


KAN 


malheureuse,  il  mourut  de  fatin;ue  et  de 
de>esi»oir.  D'autres  disent  quM  lut  as- 
sassiné. Son  ijls,  qui  était  reld-niaré- 
clial  iieutenaiit,  commandait  alors  une 
armée  en  Finlande.  Koutousofl  rem- 
plaça le  feld-maréchal  dans  le  com- 
mandement de  l'armée  (^oj.  Kou- 
TorsoFF,  XXII,  558).     M — 11  j. 

KAMPEXIIAUSEX  (le  baron 
Balthazardf.)  naquit  en  1772  dans 
le  district  de  Ulga  en  Piussle.  Après 
avoir  exercé  diverses  fonctions  publi- 
ques, il  fut  nommé  directeur  de  l'écoie 
de  commerce  à  Saint  Pétersbourp;,  et 
mourut  ilans  cette  ville  le  13  septem- 
bre 1823.  On  a  de  lui  :  I.  Principes 
fin  droit  politique  russe,  Gœttln^ue, 

1792,  in-fol.  H.  Essai  d'une  des- 
cription géographico-statisti(juc  des 
gouvernements  de  l'empire  russe; 
V^  cahier,  contenant  la  Description 
du   gouvernement  d'Olonetz,  ibid., 

1793,  in-8".  111.  Objets  renuirqua- 
hles  de  la  topographie  du  gouverne- 
ment de  Saint- Pétershourg,  V^ 
partie,  1797.  Ces  deux  derniers  ou- 
vrat^es  n'ont  pas  été  continués.  IV. 
Magasin  de  Livonie,  Golha,  1803, 
tom.  V^.  C'est  le  seul  qui  ait  paru  ; 
le  manuscrit  du  second  volume  n'a 
pu  être  retrouvé  à  la  mort  du  li- 
braire-éditeur Ettinfî;uer  ,  auquel  il 
avait  été  remis.  V.  Histoire  généalo- 
gique et  chronologique  de  la  dynas- 
tie des  Romanof  y  I^eipzlcr^  1805, 
in-8'\  Tous  les  écrits  de  Kampenhau- 
sen  sont  en  allemand.  Meusel  [Alle- 
magne savante^  tom.  \^^]  lui  attri- 
bue encore  un  recueil  de  poésies 
publié  à  lUvel,  1788,  en  un  vol.; 
mais  il  parait  que  cette  production 
est    rouvraf;e    d'un     homonyme. 

P— RT. 

KAWE  (Jfan-Arnolt>),  poly- 
f^raphe  allemand  ,  remarquable  sur- 
tout par  son  caractère  excentrique  et 
.•,a  mobilité  d'esprit,  naquit  à  Detmold, 
en  mai  1773,  et,  après  avoir  couru  d'é- 


KAN 

cole  en  école,  finit  ses  premières  étu- 
des à  Mcidenoldendorl,  où  il  eut  pour 
maiîres  Drevcs  et  Kœler.  Ce  dernier, 
ayant  reconnu  en  lui  d'heureuses  dis- 
positions pour  les  éludes  p;raves  et  par- 
ticulièrement pour  la  philosophie,  lui 
donna  le  conseil  de  publier  un  travail 
critique  qui  le  classât  s{u-le-champ,  et 
comme  sujet  d'un  tel  labeur  lui  indiqua 
le  texte  du  de  Lingua  latina  de  Var- 
ron.  Kan ne  effectivement  se  mit  à  l'œu- 
vre et  plusieurs  des  corrections  et  resti- 
tutions qu'il  risqua  furent  envoyées  à 
Heyne.  Nous  ne  saurions  trop  dire 
jusqu'à  quel  point  ces  communications 
eurent  rassenliment  du  célèbre  hellé- 
niste: mais  la  promptitude  avec  laquelle 
Kanne  se  dé^joiita  de  la  tache  entre- 
prise n'est  point  une  preuve  de  la  dés- 
approbation de  son  ju^e  :  son  incon- 
stance explique  de  reste  son  change- 
ment de  résolution.  Epris  d'un  zèle 
ardent  autant  que  subit  pour  la  théo- 
logie, il  prétendait  ne  pouvoir  servir 
deux  maîtres  à  la  fois  ;  mais,  dès  qu'il 
fut  à  (iœttingue  pour  y  suivre  les  cours 
qui  devaient  lui  ouvrir  la  carrière  ecclé- 
siastique ,  l'exégèse  du  premier  livre 
de  Moïse  par  Eiclihorn  le  reporta  aux 
études  philologiques  proprement  dites, 
et  11  sentit  faiblir  en  lui  le  sentiment 
de  la  religiosité  ;  non  qu'il  le  perdit  en- 
tièrement encore,  mais  11  ne  le  voyait 
plus  comme  devant  remplir  exclusive- 
ment son  être;  et,  plein  d'une  exalta- 
tion juvénile,  il  croyait  que  l'homme 
devait  se  circonscrire  dans  un  genre  , 
dans  un  travail,  dans  une  idée.  Il  se 
remit  donc  à  l'œuvre  plus  ardemment 
(]ue  jamais  et  donna  une  édition  des 
Narrations  mythologiques  de  Conon, 
une  mythologie  et  diverses  autres  com- 
pilations. Eort  jeune  encore  à  cette 
époque,  il  attendait  ainsi  le  moment 
de  prendre  ses  grades  académiques. 
Mais  ses  parents,  assez  à  l'aise  pen- 
dant un  temps  pour  qu'il  put  comp  ■ 
ter  sur  quelque  fortune  ,  moururent , 


KAN 

fl  ne  lui  lalsirrent  riei».  Il  s€  ren- 
dit à  Lcipxi^,  (ruu\a  rii>uite  <le  Trin- 
|ilui  (bus  unf  ctiAc  Je  llal.e ,  |iui> 
triila  de  5e  G\cr  a  Ueilm  comme 
liumme  Je  lettres;  lnJt^  quoique  Jcs 
bluetles  spirituelles  l'eiiNsent  lait  re- 
niai quer  Ju  iiublic,  il  eut  bientôt  à  coni« 
battre,  Jans  cette  capitale,  la  misère  et 
le^  pri\atiun$.  Il  se  replia  Jonc  &ur  la 
province,  et  léna.  où  il  établit  provi- 
soirfineDt  ses  pénates,  lui  fournil  av»ei 
J'elr\es  pour  .sortir  Je  la  Jetre&»e  pro- 
fonJr  à  laquelle  l'avait  reJuit  sa  tenta- 
tive sur  Ileilin.  Mais  à  prine  eul^il  un 
peu  secoué  le  poids  Ju  malheur,  que, 
comme  impatient  Je  le  reprendre,  il 
quitta  la  xlir  prussienne  potir  remm- 
inenrer  le  cour>  Jr  ses  p< 
Meininj;en  le  retint  assez  ^  ^  ■: 
il  s'^  concilia  les  bonnes  prares  Ju  Juc 
ré<;nant  oui  le  mit  quelquefois  Je  ses 
parties.  Il  était  à  N\  urzbouif(  au  com- 
mencement Je  t8()'>.  \À  peut  être  la 
fortune  eût  cessé  Je  le  persécuter  s'il 
eût  l'té  sa^e,  s'il  eût  su  ne  pas  se  met- 
tre en  hostilité  avec  les  Joctrines  re- 
çues. Leslibraiie»  llreilkopfet  Hfitel 
Je  I^ipzi^  venaient  Je  lui  faire  reJi  • 
^er ,  en  le  pavant  bien,  une  Mj- 
ihulogie  dfs  lirecs.  Mais  en  reli- 
sant l'Anc-eu-Teslament  pourlara>- 
tholo^ie  {;iccque ,  kanne  s'ima^me 
qu'il  faut  enlenJrealh'^oriquemrnl  une 
roui*;  Je  passades  que  vulgairement 
on  prend  dans  le  sen>  matériel  ;  et ,  à 
la  tele  de  la  deuxième  partie  de  sa  M>- 
tholo^ie,  il  imprime  qu'un  jour  nou- 
veau vient  de  luire  à  ses  veux,  que  la 
vérité  vient  de  le  frapper,  de  l'inonder 
tout  *i'un  coup.  Ouelques  mois  après 
il  écrit  ses  Siturres priiuordinles  de 
f  histoire ^i\\x\  doivent  paraître  à  Leip- 
zig, mais  auxquelles  la  censure  refuse 
sou  assentiment.  11  court  alors  à  Leip- 
li^,  le^er  d'argent  et  laissant  crier  se« 
nombreux  créanciers  qui,  à  la  nou- 
velle de  celle  fu^ue,  voient  bien  qu'il 
faut  renoncer  à  l'e&poir  de  se  fair«  ja- 


KAN 


399 


roai.s  p^ver,  et  il  se  présente  au  Juc 
.Kuijuste  Je.Saxe  (iotha.son  manuscrit 
à  la  main,>e  1  et  lamjiitJu  célèbre  Jean- 
l'aul.  Le  duc  le  lei^ul  avec  é^ard,  et 
consentant  à  ne  prononcer  sur  le  sort 
du  volume  qu'après  examen  ,  lui  dit  : 
M  Eh  bien  !  Jean- Paul  sera  votre 
M  juge(l).  M  Mais  ni  Jean  l'aul  qui 
ne  pouvait ,  Jans  son  rapport  ,  ca- 
cher le  vrai  caractère  du  livre,  ni  le 
professeur  N\  asner  de  NN  uribourg 
que  kanne  vit  alois  à  Leipzig;  et  qui 
tacha  de  lui  rendre  de  bons  ofljces,  ne 
purent  empêcher  que  la  censure  per- 
sistât dans  sa  dcciMon  :  tout  ce  que 
put  faire  pour  lui  Jean- l'aul  m  reite 
occurrence  fut  de  le  recommaiidei  a 
l.ubecL  de  llavreuth  qui  l'imprima, 
mais  ne  lui  donna  que  cent  vin;;t  tha- 
1ers.  Ce  n'était  pas  là  de  quoi  stddrr 
ses  dettes,  défrayer  ses  vova^esetcom- 
pen.ser  le&  améres  tribulations  qu'il 
avait  éprouvées.  Son  roman  Je  Jruri' 
nelte  lui  valut  encore  moins.  iK-sespr- 
lé,  ne  sachant  où  Jonner  Je  la  trie, 
nepouvaut  trouver  de  plare  qui  lui  don- 
nât de  quoi  vivre,  il  s'en^a^ea  au  ser- 
vice de  l'ruvse,  dans  l'été  de  ISOC). 
Celait  le  moment  où  s'ouvrait  la  fa- 
meuse campa:;ne  d'iena.  (À)mme  Ni  le 
malheur  *e  fut  fait  un  jeu  de  frapper 
toujours  sur  lui,  il  fut  pris  des  pre- 
miers et,  pendant  le  peu  de  jours  (jue 
dura  sa  captivité,  il  fut  en  proie  à  toutes 
les  misères.  Heureusement  il  s'échap|ia 
près  de  Vach  en  passant  dans  une  fo- 
rêt :  nu,  inouianl  de  froid,  craignant 
toujours  de  retomber  dans  les  mains 
des  Français,  il  arriva  ainsi  aux  por- 
tes de  Darm^tadt  ou  il  eut  besoin  de 
beaucoup  mentir  pour  n'être  pas  recon- 
nu, et  continua  sa  marche  en  men- 
diant jusqu'à   Meinin^eu   où,  quelques 


fl'    II    T  a    ici  rn    allemand    un    cair  tiV  i 
<|.i'il  «I  i>ii|>o«»ibl«  de  Truérr  en  noir*  l.i    _• 
X  Drr  Kttbier  m>II  hirr  Ricbicr  scyc.  a  IWcb  >  r 
«<ai  dirr  juge,   et   Ricbter    ^tail  le  nom  de  fa - 
nuit*  d«  iein-Paai. 


KA]N 


4oo 


années  auparavant,  on  l'avait  vu  faire 
partie  de  la  société  du  duc  dans  les  pro- 
menades publiques.  Celte  position  ne 
pouvait  durer,  et  pourtant  il  n'y  avait 
aucun  moyen  de  lejoindrc  les  armées 
prussiennes  alors  si  loin  de  la  ftonîicre 
saxonne.  Kanne,  ainsi  que  plusieurs 
camarades  dont  il  fit  rencontre  à  Ijild- 
hsnLjliausen  ,  se  décida  sans  peine 
à  prendre  du  service  en  Autriche. 
Mais  tant  de  fatigues  et  de  privations 
qu'il  avait  eues  à  supporter  ne  tardè- 
rent pas  à  développer  chez  lui  le  germe 
d'une  maladie  grave:  son  corps  était 
alors  en  marche  sur  Eger;  il  fut  obligé 
de  s'aliter,  puis  on  Tévacua  sur  l'hôpi- 
tal de  Linz  où  d'autres  affections  se 
joignirent  à  celle  qui  le  minait  déjà. 
Knfin  ses  amis ,  Wagner  ,  Jean- 
Paul,  Jacobi,  le  tirèrent  de  cet  enfer  : 
en  même  temps  que  sa  convalescence 
avai.-rait  ,  ils  le  rachetèrent  du  ser- 
vice autrichien,  ils  lui  donnèrent  de 
l'argent  ,  ils  le  firent  venir  à  liay- 
icuth  ,  où  son  libraire  le  gratifia  «le 
cent  florins.  Ils  s'occupèrent  de  lui 
chercher  une  position ,  et  après  avoir 
échoué  à  Gœttingue,  après  avoir  es- 
péré pour  ^Moscou  ,  ils  lui  découvri- 
rent et  lui  firent  donner  la  chaire 
d'histoire  à  T  Institut  des  connaissances 
réelles  de  Nuremberg  (1809)  ;  enfin 
ils  le  marièrent  à  une  jeune  femme 
distinguée  sous  plus  d'un  rapport 
et  qu'il  aimait.  S'il  était  besoin  de 
prouve  pour  se  convaincre  que  ses  mal- 
heurs venaient  de  lui-même  plus  que  de 
la  fortune,  c'est  ici  qu'il  est  aisé  de  le 
reconnaître.  Loin  de  se  trouver  heu- 
reux à  présent  qu'il  avait  à  la  fois, 
calme,  sécurité,  argent,  considération, 
un  intérieur  agréable  et  le  droit  de  se 
livrer  aux  travaux  de  son  choix,  il  ne 
tarda  pas  à  se  regarder  comme  un 
des  hommes  le  plus  à  plaindre  qui 
fussent  sous  le  ciel  :  il  était  méconnu, 
incompris,  même  de  sa  femme;  il  était 
en  querelle  avec  ses  collègues,  les  plus 


KAN 

simples  et  les  meillcnis  dc>  hunitnes  ; 
il  avait,  en  mettant  la  dcrnicie  main  à 
son  Pangloss,  ou  Syslcnic  de  ioiifes 
les  /lingues,  demandé  à  l'cmpeicur 
Alexandre  de  prendre  cette  œuvre  sous 
son  patronage,  et  la  requcîe  était  restée 
sans  réponse.  Dans  cet  état  d'agitation 
lierpétuello,  il  revint  au  chrislianismc; 
dégoûté  de  la  science,  du  raisonnement, 
de  l'humanité,  il  en  vint  même  à  dire 
que  croire  est  tout,  que  développer  des 
arguments  à  l'appui  de  la  croyance  est 
inutile  et  puéril!  Un  zélé  mystique, 
élève  de  Hahn,  avait  fait  fructifier  en 
lui  ces  nouveaux  principes  dont  cerlai- 
nement  sotr  adolescence  avait  dcjàsciili 
les  germes.  Cependant,  ni  le  mysti- 
cisme ,  ni  la  misanthropie  ne  le  ren- 
dirent assez  étranger  aux  affaires  de  la 
vie  pour  qu'il  ne  trouvât  aussi  moyen 
d'avancer.  En  1817,  Il  passa  comme 
professeur  de  philosophie  au  gymnase 
de  Nuremberg,  et  en  1818  il  obtint 
à  l'académie  d'Erlangen  la  chaire  de 
littérature  orientale.  Il  en  remplit  les 
fonctions  avec  talent  et  assiduité,  mais 
hors  de  ses  cours  il  était  rare  de  l'a- 
percevoir ;  sa  singularité  ,  sa  défiance  , 
son  amour  de  la  solitude  augmentaient 
avec  les  années  et  dégénéraient  à  la  fin 
en  sauvagerie.  Ce  n'élait  point  timi- 
dité, ce  n'était  point  [)eur  des  homma- 
ges qu'on  eut  pu  rendre  à  son  méiite  : 
c'était  plutôt  indignation  secrète  de 
n'être  pasassezadmiré,  mécontentement 
de  lui-mêm;""  qui  avait  manqué  sa  vie, 
qui  avait  deux  ou  trois  fois  changé  d'o- 
pinion religieuse,  qui  s'était  usé  en 
travaux  peu  remarqiiables  ;  et  mécon- 
tentement des  autres,  qui  n'avaient  pas 
même  coté  ses  travaux  à  leur  juste  va- 
leur, ou  qui,  en  lui  refusant  les  encou- 
ragements, l'avaient  empêché  d'accom- 
plir les  grandes  choses  qu'il  avait  rêvées. 
Ne  pouvant  ni  faire  croire  sur  parole 
à  ce  haut  génie  qu'il  prétendait  porter 
en  lui,  ni  consentir  à  donner,  comme 
la  mesure  de  son  mérite  ,  ce  qu'il  fal- 


K\N 


KA^ 


Vm 


sait  rt  ce  i|)i'il  Jk\3\[  fail  cti  icjliir, 
nou->euleuiriit  il  se  cachait  dan»  \r 
|ir«^<ul ,  inaiN  il  rùl  ^oulu  ^t  taciiri  a 
iatruir,  rt  il  ancanli.^vait  quaiililr  de- 
<iil5,  de  [>iects  (|ui  cuisent  |iu  jeler  du 
jour  »ur  *on  carat  lèrr,  sur  ^  >ie  iiilrl- 
ircluelle  et  iiilcriic.  Sa  mort  rut  liru 
le  17  drc.  tH2V;  il  ira>.iit  que  ciii- 
«jitaule  un  ans.  f.c»  nomUeUA  uuvra^es 
de  kannc  décrient  un  talent  trèvhaul 
et  tiè5-varië:  il  était  plu»  qu'orienta- 
liste, il  était  lin^ui»lr  (trofond  :  à  l'éru- 
dilioii  il  joignait  la  |»er5picacilé  :  s'il 
(•oxsrdait  une  facilite  uir,  il  axait  en- 
core à  un  |duà  liaut  dr;;rr  le  [uquanl,  le 
feu,  la  saillie.  11  ui>ait  en  ;;éQéral  plus 
Uin,  plu»  MSe  ou  mieux  que  mille  au- 
tres n*eu.s^riit  \ii  à  sa  placi*.  Mais  louirs 
ces  belles  qualités  ne  plodui^ent  qu'un 
ciïrt  restreint.  Il  les  applique  à  des 
»ujels  peu  faits  pour  être  compris  de 
tous  ou  pour  saisir  énergiquement 
l'attenliou:  on  dirait  que,  serré  par  le 
temps,  par  la  ^ène  pécuniaire,  il  sent 
qu'il  ne  pourra  mener  à  dn  un  ^rand 
^ujet,  et  qu'rn  consrqupnre  il  en  rnf.i- 
iiie  de  incdiocrr^  qui  coniinninqucnt  à 
sa  manirie  quel«,ue  clio^e  d'inoppor- 
tun, dr  dissonant.  Delà  cet  air  tantôt 
d'emphase,  tantôt  de  lechrrche  que 
présente  son  si > le.  (^e  qu'il  liaite  n'est 
point  ce  qu'il  pourrait  traiter,  et  l'on 
sent  en  secret  que  ce  talent  qu'il  met  à 
traiter  un  sujet,  c'e^^t  un  talent  qu'il 
.■ïl>ais5e  et  qu'il  fausse.  C>eci  poié  ,  voici 
la  liste  des  principaux  ou^ra^es  de 
kanne:  1.  Dr  la  ftarentr  drs  iun- 
fiues  ^rer(fuc  rt  aUrniaiidr,  Lrip- 
zi^,  lîSU4,  in-8".  (,c  trailé,  quoique 
un  peu  sTstemalique ,  ronttent  une 
foule  de  clioses  frappantes,  qui  sont 
tombées  aujourd'hui  dans  le  domaine 
public,  niais  qui  alors  étaient  enroie 
neuves.  11.  S ouK^rllr  r.i position  Je 
hi  mythoU^ir  ilrs  (irrrs  et  des  Ko- 
iu  inSy  Leipz.ij;;,  180.'),  in-S".  111. 
Sourrrs  primordiales  de  Fliistoirr^ 
ou   Mythologie  unii'frselie  (avec  un 


diicouij  pieliiiiinaire  de  Jean- l'.ml  , 
Baurulh,  ISOS,  2  vol.  in  K '.  IV. 
Panihron  de  la  philosophie  imto- 
rrllr  primitiie  ,  ou  de  la  Helii{ion 
commune  a  tous  les  peuples,  '\\\- 
bin;;ur,  1811,  in-8".  (>  tilir  piomrl 
dr>  discussions  on  nr  prut  moins  or- 
thoduxrs,  et  le  li\re  tient  toutes  les 
promesMs  de  son  titre.  Kanne  vers  la 
IJn  de  sa  \ie  se  reprochait  anièrrmrnt 
cet  ou\ra;;e.  V.  Système  du  mythe 
ùidien,  ou  l.ntnos,  rt  f  histoire  de 
fhi/mmr-diru  dans  la  période  des 
r%'olutions  sw  ressi^>rs  des  rtrrs  en  - 
i'eloppesde  tenehrrs  ,avec  un  .Iper^u 
du  système  mythitjue  en  ;;uisr  d'aj»- 
prndire,  par  Ad.  Wagner),  I.eipii^, 
I8l;|,  in-8'*.  Il  m  est  «lu  .Système 
roinmc  du  Panthéon,  et  tous  deux 
appar'.icnnrni  à  la  même  ph.ise  de  la 
ppiisrr  de  kanne.  \  I.  Feuilles  it\l- 
leph  à  houph  ^sous  le  pseiidomnio  de 
\N  aller  Ilergius.I^ipzijî,  IhO'l.  \  II. 
Petit  vityage  ii  la  main  (même  p<ru- 
don>mei,  l'eni^,  I8(>:r  11  >  a  dans 
ces  deux  opuscules  be^iucoup  de  in.ilire 
et  de  traité;  l'auteur  pourtant  manquait 
parfois  de  pain  en  les  écri\jiit.  V|II. 
Histoire  du  jumnm  a  prdr  ,  ou  1rs 
iMuan^rs  dr  ma  hottr,  Niiiembrr;^, 
1811,  in-8" .  \\.  f  ingt pur.igrcphrs 
crititpirs  rt  notrs  historiques  sur  Ir 
te.itr  le  l'emps  (sous  le  pseudonyme 
d'Antoine  de  lVu$se\  Leipzi;;,  1814, 
in-H°.  X.  Hlrpsidème  y  drame  en 
cinq  actes  ,  Leipzig  ,  1803  ,  in- 
8".  XI.  Iai  Comrdir  humaine,  ou 
1rs  l\orrs  de  Ulrnsidème  et  les  bap- 
têmes de  ses  enfant i,  comédie  ni  '1 
actes,  liaxreiith,  iSll.  XII.  1rs 
V  oyages  de Sahmundi  (rorn.Tii  l-rrdc 
V liistoirr  des  /nnu  s-mo^ons),  Nii- 
lemberp,  ISlfi.XIII.  Deux  Mrmoi- 
rrs  pour  f  histoire  drs  trnèhrrs.  ou 
.  li'rnfnrrs  dr  Pliilippr  (Mwrrarius 
m  Italie  tl' après  son  maniisrrit.  et 
martyre  d'.id.  (Jarenharh,  Franc- 
fdrt-sur-le-Mein  ,  1822,  in-8".  XIV. 

26 


402 


K\0 


RecJierchcs  bibliques  ai>ec  ou  sans 
polrtuiijut' ,    Ella:»- -il,  1819,   2  vol. 
in-8'*.  X.V.  lirruril  (l histoires  véri- 
tables et  intéressantis  tirées  des  ar- 
chioes  du  christianisme ,   etc.,  Nu- 
remberg,   1815-17,   2  vol.  ln-8°; 
3"  vol.  eu  1822.  XVI.  Vie  et  traits 
choisis  de   la  vie  de  chrétiens  re- 
marquables ,   riambero;  et    Leipzig  , 
1816-17,    2    vol.    XVII.  Suite  de 
(ou  Supplément  il)  cts  deux  ouvrao;es, 
Francfort->ur-le-Meiu  ,   182i,  grand 
ln-8".  XVIII.  Le  Christ  dans  C An- 
cien-Testament, ou  Recherches  sur 
les^figures  qui  annoncent  le   Christ 
et  sur  les  passages  relatijs  au  Mes- 
sie ,  Nuremberg,  1818,  2  vol.in-8°. 
XIX.  Diverses  brochures  {/Inalecta 
philologica  ,   Leipzig,    1803  ,  etc.), 
et  divers  articles  épars  dans  des  recueils 
périodiques,  par  exemple  :  Ne  prends 
pas  les  vessies  pour  des  lanternes  , 
et  V  Arbre  généalogique  des  rois   de 
France,  dans   la  Feuille  allemande 
de  la  (jonK^ersation.   XX.   Des  édi- 
tions estimables,  savoir:  1°  Cononis 
Narra tiones  quinquag.   ex    Pliotii 
Biblioth.  (avec    lettre  préliminaire   à 
He)  ne  et  noies  de  Heyne  à  la   fin  du 
volume),   (iœttingue,    1798,  in-8"; 
2"  Anthologia  minor,  sioe  florileg. 
epigrumm.  grœc.  ex  AntJiol.   Pla- 
nud.  et  Brunskii  Analectis  selecio- 
rum  (avec  la  version  latine  de  Gro- 
tlus),  Halle,    1799  ,    grand    in-8". 
P— OT. 
KAO  i  SOU  OUTI,  onSoung- 
Outi,  preuiier  empereur  chinois  de  la 
d)'nastie  des  Soung,  s'appelait  aupara- 
vant Lieou-\u  et  avait  été  lieutenant 
de  l'un  des  chefs  de  la  révolte  contre 
la  dynastie  des  Tcin,  auquel  il  succéda, 
et  qu'il  elTaça  par  sa  valeur  et  son  habi- 
leté. Il  triompha,  depuis  l'an  de  J.-C. 
40  V,  de  plusieurs  autres  rebelles,  arra- 
cha des  mains  de  l'un  d'eux  l'etnpereur 
1  cin-N;;aiili,  prisonnier,  4époudla  les 
princes  de  Tcin  des  villes  et  des  dis- 


KAO 

tricls  qu'ils    avaient  enlevés   à  Tem- 
pire,  et  fit  périr,  en  il 6,  le  dernier 
d'entre  eux.  ^la:s   peu  satisfait  de  la 
dignité  de   prince  du  troisième  ordre, 
que  l'empereur  lui  avait  décernée,  il  le 
fit  étrangler  en  418,  et  mit  à  sa  place 
son    fils    Tcin-Kong-ïi    qu'il    força 
d'abdiquer,  en  420.  Ce  fut  a' ors  qu'il 
s'empara  du  trône  et  prit  le  nom  de 
Kao-Tsou-Outi.  Il  distribua  les  prin- 
cipautés les  plus  coTJsidérables  à  sa  fa- 
mille, et  les  charges  les  plus  impor- 
tantes   à  ses  plus  dévoués  partisans. 
Après  avoir  vainement  tenté  plusieurs 
fois  d'empoisonner  le  dernier  empe- 
reur, il  le  fit  étouffer  sous  ses  couver- 
tures, et  mourut    lui-même  en  422, 
dans  sa  soixante-septième  année.  Ce 
prince,  doué  de  toutes  les  qualités  poli- 
tiques et  guerrières ,   n'avait  que  les 
dehors  des  vertus  morales.  Il  eut  sept 
successeurs,  la  plupart    indignes    du 
trône,   déposés  et  assassinés.  La  d}^- 
nastie  des  Soung   qu'il   avait  fondée 
fut  détruite,  en  479,  par  celle  des  Tsi. 
—  Kao-Tsou    V^\    empereur  de  la 
Chine  et  fondateur  de  la  dynastie  des 
Tang,  était  prince  de  ïang  et  portait 
le  nom  de  Li-Yuen,  lorsqu'en  616  il 
fut  au  nombre  des  principaux  rebelles 
qui  renversèrent  la  courte  dynastie  des 
Soui.    Le    fantôme  d'empereur    qu'il 
avait  mis  sur  le  trône,   en  617,   le  lui 
ayant  cédé,  en  619,  il  y   monta;  et, 
des  la  première  année  de  son  règne , 
il  anéantit  les  principautés  de  Leang  , 
de  Tein  et  d'Oueï;  enfin,  au  bout  de 
six  ans,  il  resta  maître  de  tout  l'em- 
pire par  la  destruction  des  autres  prin- 
ces qui  pouvaient  le  lui  disputer.    Il 
dut  la  plus  grande  partie  de  ses  suc- 
cès à  son  fils   Li-Chimin   en   faveur 
duquel  il  abdiqua,  en  626,  et  qui  de- 
vint célèbre  sous  le  nom  deTaV-Tsoung. 
L'empereur  démissionnaire  avait  alors 
soixante-deux  ans  et  ne  mourut  qu'en 
635.    Ce  fut  Kao-Tsou    qui  agrégea 
au  conseil  suprême  la  fameuse  acadé^ 


KAO 


KVO 


Ul 


mit  foiid^  [tir  vïn  6(<,  df  reruif  la  pr- 
pini^r^  d'une  foulf  ii'homm«  cclr- 
br«  en  \ous  c^tnre^,  i^oirTfrnenr*,  na- 
;çwtrat>,  mandarin^,  <aN..nt<,  etc.,  et 
qoi  subsiste  encore  <ou»  If  nom  de 
llan-Un-Yorn.  —  K  \o-Tw)f  II, 
fondatfar  ùe  la  dTna^lie  rliinoise  âe% 
llMu-Triii  ,  s'appelait  Clie-Kin^;- 
Tan»,  avant  d'rlre  empereur.  Derenu 
par  «a  bra\oure  et  >es  talenl«i  militai- 
re» f^endrr  de  l'emperenr  Min;^- 1  ^on^; 
et  «joinerneur  de  Ho-Ton;;,  il  »r  ré- 
Tolt.i,  m  935,  contre  son  beau  (rc^c 
l«oa-()ajn;;,  qui  avait  uiurpé  If  tr(\ne 
en  faisant  périr  %on  propre  frère. 
Soutenu  pir  Ir»  Tartarrs  Kbitan^  nui 
le  proclamèrent  empereur  en  le  pla- 
çant sur  un  trAne  formé  de  nmtte-  de 
terre,  il  leur  céda  seire  placer  impor- 
tantes ,  et  poirrsuivant  ses  !inccès  il 
réduisit  Lou-Ouan;;  i  se  brûler  avec 
toute  5a  famille.  Hr«té  seul  maître  de 
l'empire,  en  P!17,  il  n'en  jouit  pas 
paisiblement.  Plusieurs  pouterneurs 
refusèrent  de  le  reconnaître  ou  ne  lui 
rendirent  q  l'une  obéi <s.ance  simulée, 
notamment  ceux  de  quelques-unes  des 
places  nii'il  avait  cédées  aux  Kliifans. 
Forcé  de  chan;;er  de  résidence  ponr 
surveiller  les  autres,  Ka(>-T*on  ne  put 
cependant  préseiiir  des  révoltes,  dans 
lesquelles  un  de  ses  (ils  fut  tué  et  un 
de  ses  frères  fait  prisonnier.  Fier  du 
secours  des  Kliitan<  qui,  depuis  la  con- 
quête «lu  Leao  Ton«,  avaient  pris  le 
nom  de  Leao,  et  auxquels  il  prodi;;uail 
les  présents  les  plus  précieux  et  les 
plus  basses  soumission*,   il  rejette  les 

f propositions  du  cbef  des  rebelles,  riont 
a  tête  est  mise  à  prix.  Mais,  en  9  W, 
pour  récompenser  son  courage  et  sa 
noble  résistance,  il  lui  offre  son  par- 
don et  lui  permet  de  se  retirer  dans 
son  pays  avec  ses  richesses,  (n  minis- 
tre, jaloux  des  faveiu-s  accordées  au 
rebelle,  le  fait  assassiner,  et  l'crape- 
reur,  pour  se  débarrasser  de  cet  ambi- 
tieux, l'éloigné  de  la  conr  en  lui  don- 


nant le  f;ouvernement  d'une  provi.ice. 
Une  nn4\rlle  révolte  écL^le,  niji>  dni- 
Ȏe  principaiemrnt  contre  le  roi  de 
l^ao,  dan^  1rs  pa>s  qui  ne  Toulaient 
pas  M.'bif  sa  domin.Tion.  Ce  prince, 
irrité  de  ce  que  le  î;»^iifral  Lieou-Tifii- 
Yuen  avait  reçu  les  soumissions  des 
rebelles,  adresse  a  l'empereur  des  re- 
proches si  outra;;eants  que  Kao  Tsoa 
en  meurt  de  chagrin,  m  9i'2.  Il  avait 
dési;;ne  poiir  son  successeur  un  de  ^rs 
fils  en  bas  à^e  ;  mais  on  mit  sur  le 
trône  son  neveu  Tsi-Ouan;;  qm.  a>ant 
voulu  secouer  le  joii;;  des  Tartares, 
ftit,  aprrs  quelques  «nerf»,  assié;:;é  dans 
sa  capitale  ,  mit  le  feu  à  son  palais , 
força  ses  femmes  \  se  jeter  dans  les 
llanimrs  et  y  aurait  péri  lui  même,  si 
un  traître  ne  l'eût  livré  aux  vainquotirs 
qui  respectèrent  ses  jours,  et  le  retin 
renl  prisonnier  —  1^  dynastie  des 
Heou-Tcin  étant  étein'e  par  celte  ca- 
tastrophe, LieotiTchi-Yuen,  prince  du 
sans,  **  fi'  proclamer  empereur,  en 
9i7,  sous  le  nom  de  K^o-Tsoi  |||, 
et  fonda  la  drnastie  des  Ileon-Man. 
Il  délivra  la  Cfilne  de  l'oppreNNion  des 
Tai  tares  î.eao  ;  mais  il  mourut  l'an- 
née Mi-vanle.  et  'on  fil*  Vu  l'i  s'eiaiit 
rendu  odieux  et  mépnsable,  par  ses 
cruautés  et  ses  débauches,  fut  détrôné 
et  tué  en  9.'»1,  et  fil  place  à  une  noa- 
relie  dvnastie.  A — T. 

KAO-TSOr.Xi;  r.  troisième 
empereur  de  la  Chine,  de  la  dynastie 
des  l'anfj,  avait  porté  le  nom  de  f.i- 
Tchi,  avant  de  .succéder,  l'an  OVH  de 
J.-C,  a  son  père  le  ^rand  Thaï- 
Tsoun«  [^oy.  ce  nom,  XIA',  '2'M]. 
Aussitôt  après  son  avènement  au  trô- 
ne ,  il  convoqua  une  asseuiblr^e  des 
{grands  et  des  pnuverneurs  «les  provin- 
ces pour  s'informer  exactement  «les 
besnirîs  du  peuple,  «l  il  s'occupa  sans 
relâche  «les  mo\rns  de  les  soiila-^er.  Il 
rainquil  l.>Unn  «les Turks  orientaux  qui 
avait  refusé  de  lu'  rendre  hommage  et 
tué  un  de  ses  ambassadeurs,  et,  l'ayant 

!l6. 


4o4  ^^'> 

fait  pili.on:iicr ,   il  se  conlcnla  <îo  le 
présenter  en  ollVande  au  temple  lio  ses 
dieux,  el  le  ieiivo\a  dans  le  Tiirkos- 
tan  avec  des  titres  pompeux,  mais  sans 
autorité.    Kao-Tscun^!;  ré;;nait  depuis 
six  ans,  chéri  de  ses  sujets  et  respecté 
de  ses  voisins,  lorsque  étant   devenu 
amoureux,  dans  un  concert,  d'une  des 
femmes  de  son  père,  il  IV'jJOusa  mal- 
çjé  les  plus  sa2,es  observations  sur  l'in- 
décence d'un  paroil  mariage,  et  devint 
l'esclave  des  volontés  de  celle  femme 
adroite   et  ambitieuse,  qui  parvint  à 
supplanter  l'impératrice  et  à  la  fane  pé- 
rir. Elle  se  défit  aussi  des  grands  qui  s'é- 
talent opposés  'a  son  élévation,  et  con- 
tralf;nit  même  le  prince  héréditaire  à 
se  donner  la  mort.  Odieuse  par  sa  ty- 
rannie, cette  princesse  sut  contenir  le 
mécontentement  général  et  employer 
utilement  l'armée  qui  conquit  la  Co- 
rée et  quelques  états  des  Tartarcs  sep- 
tentrionaux. Tel  était  son   ascendant 
sur  Kao-Tsoung,  devenu  aveugle,  que 
ce   prince,   mourant,  en  6SV  ,  ex- 
horta   son  fils  Li-Tché   ou    Tchong- 
Tsoung,  qui  allait  lui  succéder,  à  con- 
sulter l'impératrice    dans    toutes    les 
affaires.  C'est  Kao-Tsoung  qui,  ayant 
reconnu  roi  de  Perse  Firouz,  fils  du 
dernier    monarque    Sassanide    {Voy. 
Iezdkdjerd  m,  t.  XXI,  175),  lui 
donna  a^lle  en  674;  mais  au  lieu  de 
lui  fournir  des  secours  contre  les  Ara- 
bes, pour  l'aider    à    remonter  sur  le 
troue  de  ses  pères,  il  le   nomma  capi- 
taine de  ses  gardes.  —  Kao-T-Soung 
H  ,  dixième  empereur  chinois  ,  de  la 
deuxième  dynastie  des  Song^  quitta  le 
nom  de  Kang-Ouang,  lorsqu  il   suc- 
céda, en    1127,    à  son  frère    Kin- 
Tsoung  qui,  vaincu  par  les  Tartares  Kin 
ou  Nlutchin,  avait  été  déposé  et  em- 
mené par  eux  en  captivité  avec  le  précé- 
dent empereur  [Voy.    IIoi.i-'J'song, 
rXVII,  2-29)  el  plus  de  trois   mille 
personnrs  de  la  famille  impéiiale.   Le 
prince  qu'ils  avalent   mis  sur  le  trône 


KA.0 

rc  h:iîa  d'en  de>-rer.d.o,    pour   v    faire 
monter  le  jeune  Kao  Tsoung  qui  était 
absent.  Il  s'empressa  aussi  de  rappeler 
l'Impératrice    Mong-Tsi  ,    qui    ayant 
échappé  à  la  captivité,  parce  qu'elle 
avait  été  répudiée,  fut  déclarée  régente. 
Kao-Tsoi»g  fut  le  chef  de  la  branche 
des  Song  qui  ne  régna  que  sur  la  par- 
tie méridionale  de  la  Chine,  les  Kin 
étant  maîtres  de  celle  du  nord  dont 
ils  lurent  chassés  depuis  par  les  Mon- 
gols   de  la    race   de    Djenguiz-Khan 
(  Voy.  ce  nom  ,  XI  ,  438).   11  s'é- 
tablit  d'abord  à   Nanklng  ;     mais    il 
fixa   bientôt    sa    résidence    à    Yang- 
Tchou.  Ce  monarque  élait  doux  ,  af- 
fable ;   11    aimait   sincèrement    ses  su- 
jets ;  mais  11  avait  l'esprit  faible  ,  in- 
dolent et  ne  surveillait  pas  assez   ses 
ministres.  Dès   la  seconde   année  de 
son  règne  ,  les  révoltes  que  provoq;ia 
leur    mauvaise  conduite  bicnl  mourir 
de  chagrin  le  plus  fidèle  et  le  mcilledr 
général  de  l'empire,  qui  venait  (i'cmpè- 
cher  les  Tartares  de  prendre  kai-Foiig- 
Fou.    Sa  mort   leur    facilita    la  con- 
quête de  plusieurs  autres  places  qui  leur 
furent  livrées  par  trahison  ou  par  lâ- 
cheté, li'empereur  lui-méine  aurait  été 
enlevé  dans  sa  capitale,  en  1129,  s'il 
n'eut  traversé  le  Klang  dans  une  bar- 
que,   pour  se  retirer  à  Tchln-Klang. 
Dans  l'espoir  de  meltre  i\n  terme  à  la 
tyrannie   des   eunuques    qui    s'étaient 
emparés  des  affaires,   el  aux  soulève- 
ments   qu'elle    avait    excités ,    Kao- 
Tsoung  en  abandonna  deux  des  princi- 
paux aux  mécontents  qui  les  mirent  en 
pièces.    Il  n'en  fut  pas  moins  forcé  de 
céder  le  trône  à  son  fils,  encore  enfant, 
el  la  régence  à  l'impératrice  :  mais  il 
fut  réintégré  par  le  chef  des  rebelles 
vaincu  cl   soumis.    Les  Tartares,  qui 
s'étalent  retirés  avant  ces  troubles,  y 
revinrent  bienlôl  après,  et  leurs  con- 
quêtes furent  si   rapides  dans  la  partie 
méridionale  <le  la  (îliine,  que  l'empe- 
reur, chassé  de  place  en  place  cl  con- 


KM' 

train)  J»»  p  r/diJÎfr,  avw  vi  rmn  ,  il.ins 
tir  (lori  tl.  'I  1  irou.en  1  Do,  iiV- 
chap(0  j  V    .  .  qii'fii  ;;aii;unl  b 

pleiiif  mer  où  lU  nr  puiriit  l'aitein- 
irt.  \jtu>  retraite  et  le*  revei  s  qu'ils 
éprouvèrent  lei  années  suivantes  per- 
mirent à  kao-T^oun;;  tie  prendre 
terre  et  «le  rentier  dans  ses  élal*. 
Mais  les  Tarlares  lui  i>ppoM>renl  un 
rompriileur,  l.ieoii-\u,  qui  pteiiail  le 
tilre  d'nn;»rreur  et  réj;nait  sur  une 
partie  de  la  Chine.  I/armée  impériale 
triompha,  eu  ll.'Ul,  de  ce  maniirquia 
qui  fut  dépixr,  l'année  suivanir.  par 
se*  propres  partisans.  Le  roi  drs  Kin, 
devenu  plus  trailable,  acrorda  la  paix 
à  Kao-Tscui»};,  lui  ren%oo  le  corps  de 
son  père  et  celui  de  son  aïeule,  et  lui 
rendit  les  provinces  de  llonan  et  de 
Chen-si  :  maii,  en  ratifiant  le  traité,  il 
stipula  qu'il  était  souverain  de  tous  les 
pavs  au  nord  du  Kian;î,  et  que  l'empe- 
reur de  la  Ciiine  ne  posséderait  1rs 
provinces  au  «.ud  df  re  lleuv e  que  foraine 
son  vassal,  kao-l^oun,;  n'eut  pas  honte 
d'afceplci  cps  r()iuli!ion< ,  et  dr  pu- 
blier une  amnistie  ;^oné[ale  pour  si;^na- 
1er  rette  paix  humiliante.  Cemonat.^ue 
indolent  muait  pu  relever  ^a  puissan- 
ce, tandis  que  celle  des  kin  s'affaiblis- 
sait par  leurs  lon^ue^  {guerres  avec  les 
Monpols;  mais  Kao-I^ouns,  si  facile 
lorsqu'il  s'a{;issait  d'abandonner  ses 
droits  et  se»  provinces,  était  très-sus- 
ceptible sur  rétiq.jeUe,  chose  très-im- 
portante chez  les  Chinois.  Piqué  de 
quelques diffuullcs  qui  s'élevèrent  pour 
le  cérémonial  entre  le  nouveau  roi  de.s 
kin  et  lui,  plutôt  que  de  réder,  il  roni- 
prl  la  paix  et  alulicuia  l'empire,  l  an 
1101,  en  faveur  de  son  fils  Tchao- 
Oueï  ,  qui  prit  le  nniu  de  IliaoTsong 
(/  oj.ceiioiu.  FAV1I,18G).  A— T. 
KAl»MST  (Vasili  Vasiiik- 
vitch),  un  des  poètes  lyriques  les  phis 
illustres  do  la  Russie,  naquit  en  17ôG. 
Bien  qu'appartenant  à  la  classe 
moyenne  de  la  société  ,   il  rerul  une 


K\V 


AoO 


exfrlli'iile  éducation.  I^s  classiques  la 
tins  cl  ;;rec»  surtout  le  caplivèieiit 
forlemciit.  Aus^'.  manifesta- t-i!  de 
bonne  heure  un  vif  penchant  pour  la 
poésie.  H  ftait  encore  jeune  quand  sa 
traduction  des  Otlrs  d' llorutr  fixa 
l'attentinn  sur  lui.  Sa  comédie  de 
Al  Uiinnif  Jabéda  en  17*J')  aciieva 
de  dén.h-r  l'opinion  en  sa  faveur  et  de 
te  placer  au  nombre  des  hommes  qui 
connaissaient  le  mieux  les  secrets  dr  la 
lan;;ueetde  1.1  versifiration.  Kerherrhe 

λar  sr\  conlrniporains  les  plus  crlè- 
)re»  en  tout  ;;enre,  il  se  lia  intime- 
ment avec  les  hommes  de  lettres  ,  te» 
hoinnii*)  d'elat  et  les  pen^onna^es  les 
plus  remarquables  de  la  Uuvsie.  Il 
eut  surtout  pour  ami ,  son  parent  et 
son  rival  de  ^énie  ,  le  lyrique  Derja- 
viue.  H  fut  reçu  membre  de  l'académie 
impériale  de  Saiiit-I'etersboiir;;  ,  puis 
nomme  coiiN-'iller  d'état.  Kniin.  plus 
que  sexa;;rnaire ,  il  prit  sa  reiiaite  et 
alL  passer  ses  derniers  jours  à  son  do- 
maine d'OloMLhovLa  en  petite  Russie, 
C'e.sl  là  qu'il  niouiut  le  'IH  octobre 
181. J,  se  dl^travant  encore  souvent  i 
versiGer,  et  parfois  s'elevant  à  des  in- 
spirations dignes  de  sa  jeane>se.  On 
publia  une  édition  de  »e.s  (Kiwrrs 
complet f s  sous  le  titre  de  Pttrsifs 
lyritfues  tie  V .  Kapnist  ,  à  Saint- 
IV'tersbourj;  en  IHOG.  .Mais  depuis  il 
fil  paraître  une  tragédie,  .lntigont\ 
181.'».  Ce  n'e>t  point  son  meilleur  ou- 
vra j;e  ,  et  pourtant  la  punie,  le  fini 
de  sa  vjrrsifiralion  v  retlètciit  si  j  er- 
suasivement  la  sérénité  d'àinc  du  poè- 
te, qu'une  fois  le  livre  ouvert  on  ne  le 
quitte  plus.  Tel  est  aussi  le  de;;ré  du 
mérite  de  sa  comédie  de  hi  Chicanr. 
C'est  ce  que  le  théâtre  moscovite  pos- 
sède de  mieux  avec  le  Mineur  et  le 
Brigadier  de  Von  Vic>cn.  Il  existe 
encore  de  lui  un  Essai  sur  CO- 
dysscr  ,  où  il  se  montre  in<;énieux  , 
ori;;inal  et  savant ,  mais  où  la  justesse 
des  vues  est  loin  d'être  au  niveau  de 


4o6 


KAR 


la  finesse  des  observations.  Au  total, 
c'est  comme  poète  lyrique  qu'il  l'em- 
porte. Son  style  est  large,  pur,  pitto- 
resque, très-varié.  S'il  n'a  pas  l'essor 
liardi ,  l'inattendu,  le  pindarique  de 
Derjavine  ,  sa  pensée  pourtant  se  dé- 
roule richement  .  naturellement  et 
d'elle-même;  une  philosopliie  saine  en 
est  la  souice  et  la  clé,  une  douce  teinte 
de  mélancolie  l'empreint  d'un  ciiarme 
intime  et  profond.  Sous  tous  ces  as- 
pects, le  géuiedeRapnist  présente  un 
frappant  rapport  avec  celui  d'Horace; 
et,  soit  que  cette  analogie  de  talent 
et  d'esprit  ait  précédé  la  traduction, 
soit  que  la  traduclion  ait  développé 
chez  le  versificateur  moscovite  cet  esprit 
et  ce  talent ,  on  ne  s' étonnera  plus 
qu'il  ait  si  bien  réussi  à  faire  passer 
les  beautés  du  modèle  latin  dans  l'imi- 
tation russe.  P — OT. 

KARAMZIXE  (Nicolas- 
MikhaÏlomtch),  littérateur  et  histo- 
rien russe,  dont  le  nom  est  devenu  eu- 
1  opéen  ,  naquit  dans  le  gouvernement 
deSimbirsk,  en  1765.  Il  paraît  que  ses 
parents  pouvaicnl  passer  pour  nobles, 
mais  de  cette  noblesse  qui,  dans  la  vaste 
Russie,  où  les  rangs  sont  si  positive- 
ment fixés,  ne  se  dislingue  qu'à  peine 
de  la  movenne  bourgeoisie.  Comme  no- 
ble, il  fut  donc  résolu  qu'il  embrasserait 
la  carrière  des  armes.  En  effet,  à  peine 
eut-il  achevé  ses  études  à  Moscou,  dans 
la  maison  du  professeur  de  philosophie 
Schrader  et  quelque  temps  suivi  les 
cours  de  l'université,  qu'il  prit  du  ser- 
vice. Admis  dans  la  garde  impériale,  il 
eut  occasion  de  voir  de  près  l'illustreCa- 
iherine  II, qui  delà  pelitecour  deZerbst 
était  montée  au  trône  de  toutes  les 
Russies  et  l'occupait  avec  tant  d'éclat. 
Karamzine  était  né  poète  et  enthou- 
siaste :  son  àmevive  et  impressionnable 
fut  élect risée  à  la  vue  de  celte  fem- 
me qui  faisait  jouer  un  rôle  si  haut  à 
la  Russie ,  et  il  se  sentit  comme  un  be- 
soin d'entonner  le  panégyrique  de  la 


KAR 

grande  impératrice  et  de  la  grande 
nation.  Cependant  son  talent  était 
trop  peu  formé  encore  ,  et  la  litté- 
rature moscovite  présentait  trop  peu 
de  modèles  pour  qu'il  osât  voler  de 
ses  propres  ailes.  Ecolier  en  poésie, 
il  ne  voulut  risquer  un  premier  pas 
qu'appuyé  d'un  guide.  Ce  guide  fut  d'a- 
bord Shakspeare.  11  mit  en  vers  russes 
les  vers,  en  prose  russe  la  prose  de  Jules- 
César  :  peut-être  était-ce  ce  mélange 
même  qui  l'avait  séduit.  Il  s'exerça  en- 
suite sur  un  Allemand,  et  traduisit  Emi- 
lie Galoili  de  Lessing.  Après  quoi, 
passant  au  genre  didactique,  il  fit  con- 
naître à  ses  compatriotes  par  une  ver- 
sion ï Origine  du  mal  de  Haller.  De 
petites  poésies  originales  le  délassaient 
de  temps  en  temps  du  mécanisme  de  la 
traduction,  et  paraissaient  dans  \e  Jour- 
nal de  Moscou,  qu'il  composait  à  peu 
près  lui  seul.  Bientôt  ayant  abandonné 
le  service,  il  se  mit  à  voyager  (1789  et 
années  suivantes)  :  il  vit  la  Suisse  , 
l'Angleterre,  la  France  où  commen- 
çait à  rugir  la  tempête  révolutionnaire, 
mais  qui,  pleine  de  mouvement  cl  de 
vie,  offrait  un  spectacle  enivrant  au 
curieux  arrivant  des  pays  du  Nord. 
L'opinion  européenne  était  encore  en 
extase  devant  le  matéiialisme  de  Vol- 
taire ,  devant  la  sape  politique  de 
Jean-Jacques;  et  les  disciples  de  ces 
grands  hommes  étaient  adorés  à  leur 
place.  (3n  les  recherchait ,  on  vou- 
lait les  entendre,  on  eût  cru  ne  point 
avoir  vu  la  France  ,  si  l'on  n'eût  au 
moins  échangé  quelques  paroles  avec 
eux.  Xaramzine  n'omit  point  cette  for- 
malité, et  il  eut  le  bonheur  de  voir  les 
Condorcet,  les  Marmontel,  les  Lahar- 
pe,  les  Sieyes.  Il  faut  dire  toutefois 
que  ce  ne  fut  guère  pour  lui  qu'un 
spectacle  curieux,  qu'un  tribut  payé  à 
la  mode.  L'imminence  d'une  guerre, 
d'une  coalition  peut-être,  contre  le 
système  révolutionnaire  lui  fit  quitter  f| 
la  France  plus  tôt  probablement  qu'il 


HAR 

M  Paviit  totthi,  en  1791,ouau  cont' 
infiicfflirnl  de  l'^'J.  Il  revint  par 
rAllfina;:iie  cl  la  lN)lo;;ne.  De  ir- 
lour  à  Mfv^nu,  il  ^e  remit  à  la  lillé- 
rature  lej;ète,  »i  peu  pieocnipé  drs 
éirènemenli  du  jour  qu'il  ioupirail  l'e- 
légie,  et  poétisait  le  fonte,  au  moment 
où  TKurope  était  en  feu,  où  la  l'olu- 
gne  achevait  de  périr,  où  Bonaparte 
conquérait  l'Italie.  (l'était  l'année  de  la 
fuorl  de  T^allierine  :  il  publia  le  nané- 
prrique  de  cette  Sémirarai*  du  Nord  , 
panégyrique  auquel  le%  ami*  de  l'au- 
teur et  de  l'impéiatrire  \oulureiil  bien 
attnbuet  le^  qualité-,  de  l'Iiistnire  ; 
mais  où  l'on  rompreiul  que  Karainime 
l^ardail  sur  la  moi I  de  l'ieire  III  et 
d'Ivan  IV  ,  et  sur  les  re^^orls  de 
la  faxeur  de  l'otemlin  et  de  Platon 
Zoobov  un  silence  prudent.  C'est 
alors  qu'il  crut  se  sentir  de  la  voca- 
tion pour  le  f^enre  historique ,  mais 
sani  l'embrasser  encore  dans  toute  sa 
sévérité.  Il  débuta  par  deux  nouvelles, 
dont  une  notamment  sur  un  sujet  émi- 
nemment dramatiijue  [Marlhr  tu po- 
çadnitsuy  ou  la  Vrise  tir  ^  Oi'gorotf' . 
iles  petits  ouvrages  d'ima^^mation  lui 
valurent  la  place  d'historioj;raphe  de 
l'empire  russe  (180!i\  ce  qui  au  besoin 
démontrerait  que  le  gouvernement  du 
tzar  tenait  moins  a  la  miiiutieu>e  vérité 
qu'i  la  manière  d'agencer  et  de  colo- 
rier les  faits.  Lon^-temps,  du  reste, 
cette  douce  place  d'hi>loi  io;;raphe  fut 
une  sinécure  dont  l'acte  qui  revenait  le 
plus  fréquemment  était  l  émarf^enient. 
Kn6n  survinrent  les;,ravesé\ènemcnts 
de  1812,  suivis  de  la  chute  de  Napo- 
léon. Karamrine,  à  qui  la  flamme  de 
Moscou  et  les  -^.laces  de  la  Hérésina 
taillaient  de  la  besogne  ,  résolut  de 
narrer  cette  maf^nifique  épopée.  Puis 
naturellement  son  plan  s'agrandit  :  il 
pensa  au  rè^ne  entier  d'Alexandre  ,  il 
remonta  au\  Bomanov,  il  se  dit  qu'il 
fallait  tracer  rhistoire  entière  de  la 
Russie  depuis  son  berceau.  Kt  ses  en- 


KAH 


4o: 


loar9  d'apblaudir,  et  l'opinion  publi 
que,  à  qui  les  récentes  victoires  avaient 
rendu  plu^  nf  le  sentiment  de  nationa- 
lité, d'en  arriifillir  l'annonce  avec  la- 
veur et  de  prendre  en  (jiielque  sorte 
l'historiographe  au  mot.  Aleiandre 
lui-même  n'hésita  point  à  la  confirrot-r 
par  cette  parole  en  quelque  soi  te  of- 
Bcielle  :  •<  Kepeunle  russe  est  dij;ne  de 
m  connaître  son  nistoire,  rt  notre  his> 
«  toire  sera  dij;ne  du  peuple  russe.  »» 
De  lar;;es  promesses  de  subventions  et 
l'autonsation  de  fouiller  les  archives, 
toutes  les  archive»,  dit-on,  achexèrent 
de  stimuler  Karamzine  I.e  f;ouverne- 
menl  russe  ne  pava  pas  moins  de 
soitante-deux  mille  roubles  en  douxe 
années  pour  l'impression  de  son  ou- 
vra;;e.  I*our  lui,  depuis  l'auji^uste  invi- 
tation, il  n'avait  ce^se  de  mettre  à  pro- 
fit les  sources  précieuses  et  quelquefois 
uniques  placées  à  sa  disposition:  sla  • 
vonnes  ou  grecques  ,  bosniaques  ou 
russes,  polonaises  ou  mon;;oles,  il  les 
avait  toutes  interro{;ées  ,  combinées, 
contrôlées  les  unes  par  les  autres. 
Tout  préoccupé  de  la  beauté  de  la 
forme  littéraire  ,  il  s'appliqua  sur- 
tout à  fondre  ses  matériaux  en  un  tout 
harmonieux,  à  être  poète  en  même 
temps  (]ue  narrateur,  à  peindre  comme 
Tacite  qu'il  proclamait  Ir  modèle  éter- 
nel et  le  desespoir  des  hi>toriens  ;  et 
cependant  il  ne  manquait  pas  tout  poète 
et  tout  romancier  qu'il  eùlété,d'i  sens 
historique  le  plus  indispensable. l'amour 
de  la  vérité.  Il  voulut  aussi,  et  là  on  re- 
marque en  même  temps  le  eoûl  du 
vrai  et  l'instinct  littéraire,  que  sa  nar- 
ration revêtue  de  couleurs  locales,  re- 
produisit l'allure  ,  exhalât  le  parfum 
de  la  légende  :  enfin  ,  il  voulut,  afin 
de  se  mouvoir  à  son  aise,  donner 
à  son  livre  des  développements  un  peu 
vastes  Mais,  ainsi  qu'il  arrive  souvent, 
ces  développemenis  en  vinrent  au  point 
lie  l'effraver  lui-même,  et  surpassèrent 
toutes  its   prévisions.    Arrivé  au  hui- 


4o8 


KAH 


liètne  tome  ,  il  n'en  était  encore 
qu'au  lè^iic  J'ivan  IV,  règne  dont  au 
bout  (lu  volume  on  n'a  encore  vu  que 
la  portion  antérieure  à  la  mort  d'A- 
naslasie  Sabourof.  Le  onzième  ne  nous 
mène  que  jusqu'à  Ivan  Y;  et  en  conti- 
nuant sur  ce  pied,  il  est  clair  que  vingt 
volumes  ne  suffiraient  pas  pour  raconter 
la  politique  et  les  actes  si  nombreux  des 
trois  premiers  Romanov,  qui  surent 
voir  si  nettement  ce  qu'il  fallait  pour 
relever  la  Kussie  de  l'état  de  délabre- 
ment et  de  prostration  auquel  l'avaient 
réduite  quinze  ans  de  révolutions  et  de 
guerre  civile  ,  le  glorieux  règne  du 
grand  Pierre  ,  les  ignobles  saturna- 
les d'Elisabeth  ,  la  grandeur  et  les 
crimes  de  Catherine,  puir.  les  événe- 
ments contemporains.  Quoi  qu'il  en 
soit ,  Karamzine  n'eut  pas  le  temps  de 
mettre  la  dernière  main  à  son  ou- 
vrage, il  n'en  put  achever  que  onze 
tomes  :  quant  au  douzième,  qui  con- 
duit le  récit  jusqu'à  1613  et  qui  con- 
tient de  bonnes  tables  analytiques  ,  il 
n'y  avait  travaillé  que  pendant  les 
deux  dernières  années  de  sa  vie,  et  une 

Îartie  en  est  due  à  la  plume  d'Œrtel, 
ia  publication  de  l'ouvrage  de  Karam- 
zine commença  en  ISIO  :  les  huit  pre- 
miers volumes  étaient  prêts.  L'empe- 
reur voulut  qu'ils  fussent  publiés  sur- 
le  champ  et  fit  les  frais  de  l'impression 
qui  montèrent  à  soixante  mille  rou- 
bles. On  avait  à  l'avance  et  au  son  des 
thuriféraires  requis  partout  des  sous- 
cripteurs. Ceux-ci  pourtant  ne  furent 
pas  très-nombreux  lors  de  la  première 
édition  ,  le  chiffre  n'en  dépassait  pas 
six  cents;  mais  les  acheteurs  abondè- 
rent, et  les  3,000  exemplaires  qu'a- 
vait tirés  la  presse  impériale  furent  en- 
levés en  vingt-six  jours.  Pour  la  Rus- 
sie et  pour  un  livre  russe,  c'était  uu 
succès  extraordinaire,  sans  exemple. 
Du  reste  ,  ce  livre  avait  été  depuis 
long-temps  extraordinairement  prÂné. 
Karamzine,    à  mesure  qu'il  écrivait  et 


KAR 

avant  d'avoir  livré  à  l'impression,  en 
faisait  des  lectures  dans  les  soirées. 
Nous  ne  saurions  dire  si  ces  anticipa- 
tions sur  la  publicité  ajoutèrent  à  la 
véracité  de  l'iiistoire  :  à  coup  sûr  elles 
ajoutèrent  au  renom  de  l'historien.  On 
se  plaisait,  dans  les  élans  d'un  patrio- 
tisme peu  dangereux  pour  l'autorité  ou 
provoqué  par  l'autorité  même,  à  faire 
du  nom  de  Karamzine  le  synonyme 
de  Vhistorien  de  la  Russie.  Karam- 
zine en  effet  possède  plusieurs  des  bel- 
les qualités  de  l'historien,  nous  le  ver- 
rons, et  des  qualités  plus  élevées  que 
celles  dont  il  est  doué  auraient  peut- 
élrc  moins  plu  à  la  haute  société,  au 
public  peu  difficile  qu'il  avait  à  con- 
tenter. Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est 
que  dès  1818  ,  on  procédait  à  la  réim- 
pression de  ses  cinq  premiers  volumes, 
et  que  deux  Français  établis  à  Saint- 
Pétersbourg  en  commençaient  la  tra- 
duction qui  parut  en  1820.  En  1824, 
Alexandre  nomma  Karamzine  conseil- 
ler-d'état en  service  réel:  déjà  il  lui 
avait  conféré  l'ordre  de  Sainte-Anne  , 
et,  en  1816,  il  l'avait  obligé  de  quit- 
ter Moscou  pour  un  logement  au  palais 
de  Tauridc  (une  des  maisons  de  plai- 
sance deCatiicrine  II).  I^n  mai  1826, 
l'empereur  Nicolas,  en  l'autorisant  à 
passer  dniis  la  Russie  méridionale  au- 
tant de  temps  qu'il  le  jugerait  à  propos 
pour  le  rétablissement  de  sa  santé,  lui 
témoignait  ,  par  une  lettre  qui  fait 
autant  d'honneur  au  souverain  qu'au 
sujet  ,  sa  satisfaction  de  voir  avancer 
son  grand  travail,  et  lui  envoyait  l'ou- 
kase d'une  pension  de  cinquante  mille 
roubles  réversible  après  sa  mort  à  sa 
femme  et  à  ses  enfants.  Karamzine 
n'eut  pas  le  temps  de  goûter  les  résul- 
tats de  cette  spicndide  munificence: 
malade  depuis  long-temps  ,  il  avait 
baissé  encore  depuis  la  mort  inallendiie 
d'^Mexandre  à  Tagnnrog  :  il  mourut 
quelques  jours  après  avoir  reçu  la  let- 
tre Impériale,  3  juin  (22  mai),  au  pa- 


KAi; 

laii  il«  TauriJf ,  «l'une  3(Trclion  Je  pol- 
liinr,  au  uKiinrnt  ou,  sut  ra\i!i  Jc) 
iuriJerii:s  qui  lui  cniiNeillaifiil  non 
plus  Ir  rliinal  lic  U  Ciimci*,  mais  relui 
(Je  r Italie,  pour  le  guérir,  il  allait 
partir  avec  ^a  famille  et  a>ec  son  ami 
le  poète  (^lio(iLoH>li  pour  Ks  ri«es  de 
l'Arno.  Déjà  la  Irc^ate  V llrlrneï'^X- 
tendait  dan»  le  port  de  Cron«tadt  , 
qjand  sunint  son  heure  dernière.  Il 
a\ait  rtè  marie  deux  foi^.  Des  ou- 
vrages de  karamzine,  le  plus  impor- 
tant San»  doute  ,  ou  même  \c  seul 
important  ,  c'est  sa  grande  llis- 
taire  de  Russie.  Nous  a\ons  dit  com- 
ment,  par  qui,  à  quel  point  elle  lut 
préconisée  ;  à  relran;;er,  et  Mirloul 
en  France,  on  a  nn  peu  trop  fidèle- 
ment été  l'éclio  de  l'opinion  russe, 
l'ii-n  que  q(jel(]ues  cnli(|iip>  un  peu 
nioin<i  adniiratif>  aient  commencé  à 
faire  la  part  du  bien  el  tlu  mal.  Kn 
réalité,  l'histoire  russe  de  karamiine 
e>t  un  monument  m^)e^lueux.  la  Kus- 
sie  ne  possédait  point  d'historien  re- 
marquable a\ant  lui  ;  il  est  donc  le  pre- 
mier et  jusqu'ici  le  seul  .iu(|uel  ses  com- 
patriotes puissent  décerner  ce  titre. 
l)'autre  part,  l'histoire  russe  par  un 
Husse   el  dans   l'esprit  russe  ne  peut 

3 ne  tlatter  la  vanité  russe:  il  n'est 
onc  pas  étonnant  qu'une  acclama- 
tion publique  ait  salué  rou\ra;;e;  il 
>  a  là  quelque  chose  (i'.inalo;iue  a  l'en- 
thousiasme ;i\ec  lequel  les  (ircrs  enten- 
dirent pour  la  pteinière  fois  leurs  hauts 
fail.s  bien  contés.  Hérodote  a  des 
qualités;  on  s'en  engoua,  on  lui  sup- 
posa la  perfection.  Si,  pour  être  un 
parfait  historien,  il  suffisait  d'unst^le 
;;rave,  larj^e  et  harmonieux  ,  de  ta- 
bleaux animés,  de  narrations  qui  ont 
du  charme,  d'extraits  assez  fidèles  des 
chroni(jiic>  el  de  l'envie  de  représenter 
compii'lenicnt  les  mœuis,  les  coutu- 
mes l<î  mode  d'existence  des  vieilles 
population>,Karamzine  serait  le  modèle 
du  génie;  mais,  avec  ce  que  nous  avons 


aujourd'hui  d'expérience  et  d'inirl- 
licence  des  faits,  nous  sommes  pins 
diflicilei  et  nous  a\ons  laisoii  de  l'être. 
'Iile-Live,  Tjtilr  mrme,  quelque  haut 
qu'il  faille  le*  placer,  ne  sont  plus, 
comme  karamiine  l'ima^^ine,  l'idéal 
du  beau  en  hi>li»iie.  Naiicr  el  peindre, 
nari  er  el  sentir  ne  sont  point  ajiez  dans 
m\  siècle  ou  la  polit fiue  ri  le  laison- 
nemriit,  où  l'habitude  de  scruter  les 
causes  Lteiitcs  et  de  saisir  desensenibles, 
on  la  complication  de»  civilisations  et 
des  événements  enche\rtr^  les  uns 
dans  les  autres  demandent  tant  de  per- 
spicacité pour  démrler  le  \rai,  tant  de 
nellcte  dans  la  distribution  de  faits 
iioiiibreux,  et  dans  les  manières  de  les 
grouper  ;  et  il  s'en  faut  bien  que  ka- 
ranuinenaire  comme  lite-ljvr,  et  il 
s'en  laut  i>ien  plus  encore  qu'il  sache 
peindie  rt  sentir  ainsi  que  Tacite.  Lit- 
térateur et  orateur,  il  est  trop  ora- 
loiie,  trop  académique  :  son  stvie  i^tave 
et  plein  tA  uw  peu  monotone ,  il  v  a 
delà  sonorité  dans  sa  voix,  mais  pas 
d'iiiilrxiuns  ;  l'ampleur  et  la  nia;4niii- 
cence,  voilà  ses  vrais  caractères,  il  les 
a  au  suprême  de^ré  et  les  outre,  car 
il  les  a  toujours.  Il  offre  tous  le>  dé- 
fauts ,  toutes  les  insufljsànces  de  ses 
qualités.  Il  est  diffus,  il  est  pesant  , 
il  e>t  superficiel,  il  est  indécis  :  les 
trois  quarts  An  temps  il  >emble  ne  pa-s 
se  douter  des  ressorts  et  des  causes  ;  il 
prodi^tjc  les  épithèles,  mais  il  ne  lie- 
viiie  pas  l'éveiicmeiit,  il  ne  f;iit  pa> 
vivre  et  se  mouvoir  la  personne  ;  il 
ne  sait  point  échelonner  les  détails  de 
manière  à  ce  qu'on  saisisse  les  phases, 
les  nuances,  en  quelque  sorte  les  états 
divers  par  lesquels  passe  un  mi-mc 
^raiid  fait  ;  à  plus  forte  r.nison  i^^nore- 
t-il  l'art  d'échelonner  ces  grands  faits 
et  les  ensembles  ilc  faits.  Chez  lui  nulle 
division  naturelle,  nulle  p(  riode,  une 
lonj;ue  roule  sans  jalon.  Il  coud  les 
règnes  aux  règnes,  les  événements  aux 
événements,  comme  si  en  commençant 


Hio 


KAR 


il  ne  savait  pas  ce  qui  suivra.  Procédant 
par  sMilhèse ,  marche  majestueuse  et 
grandiose,   il   n'a   pas  l'art  d'éclaircir 
ce  qu'elle  a   d'obscur  par  des  noiious 
analytiques    ou   préalables    ou    jetées 
chemin   faisant.    De  là    une  confusion 
extraordinaire,  surtout  dans  toute  l'é- 
poque des  apanages  et  dans  celle  oîi,  à 
côté    des  princes    de  la   maison    de 
Rourik,  co-existent  des   i\lono;ols  ;  el 
nous  défions  la  mémoire  la  mieux  or- 
ganisée de  retenir,  les  ayant  lues  une 
seule  fois,  la  substance  de  cent  papies  de 
karamzine.  l,es  tableaux  généalogiques 
placés  à  la  fin  du  tome  huitième  pèchent 
également  :  ce  ne  sont  que  de  sèches  no- 
menclatures sans  un  mot  d'explication 
placé   au-dessous  des  noms,  la  plupart 
inconnus  ou  peu  connus,  des  princes  is- 
sus de  Rourik.  On  a  beaucoup  vanté 
le   soin  qu'il  prend  de  faire  connaître 
les  mœurs  ,  les  lois,  en  quelque  sorte 
l'atmosphère  intellectuelle  de  la  Rus- 
sie: il  y  a  du  vrai  dans  ces  louanges, 
mais   Karamzine   ne   donne  que  des 
traits  et  ne  compose  pas  de  tous  ces 
traits  réunis  un  tableau,  lacune  grave 
chez  un  historien  qu'on   veut    classer 
au  premier  rang;  puis  eût-il  su  fondre 
tous  les  traits  en  un  tableau,  toujours 
est-il  qu'il  n'eût  point,  en  les  liant  les 
uns  aux  autres,  déroulé  une  série  de  ta- 
bleaux résumani  la  vie  interne  et  intime 
de  ces  populations  slaves  et  finnoises, 
varèques  et  bulgares  ,  khazares  et  mon- 
goles, outzes  et  petchenègues.   Quant 
au  mécanisme  qui  engendre  les  événe- 
ments, quant    à   la    politique  qui    les 
domine  ou  en  cote  à  l'avance  les  résul- 
tats, il  y   songe   encore   bien  moins. 
Ainsi    Karamzine    n'est  pas   irrépro- 
chable lorsqu'il    expose  ,    il    ne    l'est 
guère   plus  lorsqu'il  s'agit    de    consti- 
tuer l'histoire.    Nul  doute   qu'il  n'ait 
souvent     remonté  aux  sources  ,   qu'il 
ne  les  ail  étudiées,  qu'il    n'ait    voulu 
en  faire  la  critique  d'abord  et  ensuite 
l'analyse  :  nul  doute  même  qœ  dans 


KAR 

ces  analyses  il  ne  nous  offre  souvent 

des  traits  précieux  et  caractéristiques 
très-peu  connus,  que  plusieurs  de  ses 
pages  n'exhalent  comme  un  parfum  de 
vieille  et  naïve  légende,  qu'il  ne  fasse 
sentir  les  aspérités  et  la  rouille,  l'aspect 
sauvage  et  la  nudité  des  vastes  lieux  et 
des  âges  reculés  qu'il  raconte;  nul 
doute  enfin  que  les  notes  jointes  à 
ses  volumes  ne  soient  la  plupart  très- 
bonnes.  En  revanche,  reconnaissons 
que  fréquemment  sa  discussion  est 
légère,  sa  critique  fautive.  Disons  sur- 
tout, et  c'est  de  tous  les  reproches  le 
plus  grave,  qu'il  a  peu  d'indépendance 
d'esprit.  D'abord  il  est  partial  et  il  ne  le 
nie  pas  :  Hérodote  ,  Thucydide  sont 
pleins  de  sève  et  de  vie,  dit-on,  parce 
qu'ils  ont  de  la  partialité  l'un  pour 
rionie ,  l'autre  pour  Athènes.  Aux 
yeux  de  Karamzine  ,  il  n'est  rien 
de  si  beau  que  d'être  né  sur  les  bords 
de  la  Neva,  du  Dniepr  ou  du  Don, 
et  en  conséquence  il  amplifie  les  hauts 
faits ,  il  atténue  les  hontes  ou  les 
crimes  de  ses  compatriotes.  Ensuite 
on  peut  assez  deviner  que  si  telle  est  sa 
manière  de  voir  à  l'égard  des  sujets, 
les  tzars,  les  princes  et  les  nobles 
russes  le  trouvent  encore  de  bien  meil- 
leure composition.  Il  est  de  fait  que  les 
abominables  ruses  de  quelques-uns  de 
ses  héros  ne  sont  ni  contées  avec  indi- 
gnation ni  qualifiées  avec  rigueur. 
C'eût  été  bien  pis  encore  si  la  mort 
n'eût  empêché  l'auteur  de  mener  son 
œuvre  jusqu'au  bout  du  XVIIP  siècle 
et  même  jusqu'en  1814.  Que  de  véri- 
tés tronquées  ou  passées  sous  silence! 
A  un  rouble  par  mensonge  ou  par  ré- 
ticence, cela  peut-être  eût  surpassé  les 
cinquante  mille  roubles  de  pension  que 
lui  assurait  son  souverain.  L'histoire  de 
Karamzine  en  russe  a  paru  à  Saint- 
Pétersbourg  de  1807  à  1824.  Saint- 
J'homas  et  Jauffret  la  traduisirent  sur- 
le  champ  en  français,  sous  les  yeux  et 
sous  les  auspices  de  Karamzine    lui- 


KAK 

r,  c«  qui^ârintjs»ait  U  GilélilëJe 
la  traduction  d'autant  mieaK  que  ka- 
ramziiir  .va\ii(  Ir  fi aurai  .  Aussi  M. 
A.  Jullirii  de  l'aiu,  qui  it  priipuMit 
dVii  duniier  une  tra«iuiiiou  et  qui 
rarnie  ra\ail  di*)à  rouii<ienrte,  s-inifia 
«00  lra\ail  aussitôt  qu'il  iut  inluioié 
de  rrtle  nouvelle.  |j  Iraductioii  de 
Saiiit-Tlioma»  et  Jiuiïrct  \il  le  jour 
à  Faiis  eu  18:20,  et  se  continua  lei 
aunées  suivantes.  Nou»  uerouiiais- 
son.^  pas  de  traduction  du  douiiraie 
\olurae.  I.^  (iriucipales  iiatiuii»  de 
l'Europe  au&si  pos>riIcnt  karàinzine 
traduit.  Nous  nous  Lonieroii^  à  ci- 
ter pour  rAlleiiia^iu  la  traduction  de 
Ilauenscliild  lODliiiueo  pai  t  Ji  ricl.  Les 
aulrr>  ou\ra^rsde  kjramzine  a%aient 
ctc  publiée  Mius  le  titre  ili  Œuires 
to//i/>/Wrj,  St-l'elfisbonr^;,  IHOi;  iU 
ont  eu  riionncur  d'une  lioisirine  édi- 
tion, 1815,  y  \ol.  (^>  ou>ra^es,  qui 
pour  laplupait  avaient  d'abord  etr  don- 
nes séparéoieul,  :-r  coaïpo>cnt  :  T*  dcNa 
traduction  des  troi»  pièces  anglaise 
et  alliniandes  ci-dessus  ;  'i"  de  Mes 
lnigalrllcs,  pDr>ies  lr;:èiT>  qui  virent 
le  jour  à  Mo>cou  eu  ITU'i.  et  où  se 
lruu\ent  beauœup  de  luntes  tlutr- 
munis  (traduits  en  allemand  par  Kicli- 
ler),  et  Atpufsies  irgrres.  d  une  .sen- 
timentalité banale  cl  iiuillc;  3  '  df  deux 
l'fiitres^  l'une  jui  le  bonlieur,  a  \\  let- 
clicf,  cl  l'autre  à  un  poêle  indigent  ;  4" 
de  lieu»  nou\ellei,  SUirllie  (Marpha) 
ta  Po^iidiiitsu,  et  Sutliulie,  ou  lu 
t iUe ifun  ùo'ùiid  ;  5"  d'un  Entrrtifii 
sur  ir  lionhnir,  de  V Eloge  de  (ÀJtf te- 
rme lu  Grunde  ;  de  SoUi'em'rs  histo- 
riques sur  le  chemin  de  Moscou  à  la 
'IroUsa  ;  6*^  des  Lettres  (fun  voyu- 
gfur  russe,  \  vol.  in-8"  traduit  en 
allemand  par  hicluer,  17y*)-18(>ij. 
li  fjul  joindre  à  ces  écrits  deux  recueik 
intitulés:  Puntheon  de  lu  littérature 
russe;  et  Punthrun  de  la  littérature 
rtrariftre.  qui  l'un  et  l'autre  ne  sont 
que  des  compilations,  et  ensuite  plu- 


KAK 


4ii 


sieurs  recueils  péritMiiques,  savoir:  \** 
Lectures  pour  les  enfants  (en  so- 
ciété avec  Prirof;  2"  Journal  de 
Musiou  ,  171*0  et  91  ^c'rst  la  que 
furent,  pour  la  preraietc  fois,  places  11 
plupart  de  se>  conies  et  poésies  léf;eres); 
3'  Aglué,  17*Ji, 'J  \ol.  ,  qui  n'esl 
autre  chose  qu'un  recueil  de  contes  dont 
beaucoup,  de|u  connus  a  celle  epoijue, 
•nt  etr  leunis  plus  lard  dans  les  (h.u- 
vres  <  onipletes  ;  V"  le  lourrier  de 
r Europe  ,  1802  et  années  suivan- 
tes (1).  I'— OT. 
K  AU  .\  KOWSKI     et  non 

(>7\llNki)NN.Nkl  ^  SrAM.SLAS  )  ,  fa- 
meux prélat  pulouais,  né  vers  lô'iO  , 
riait  e\eque  de  (^u|a\ie  ou  de  NN  la- 
(lislan  depuis  15(iit,et  s'\  était  signai** 
par  son  zèle  à  rétablir  1.*  discipline 
trop  ne;;lij;ee  par  son  prédécesseur  , 
ainsi  que  par  d'utiles  re^lnnriils  s>  no* 
daut  adressés  a  son  cler;;',  quand  la 
mort  de  Si^i»raond  11,  en  qui  s'eiei- 
^nail  la  postérité  niàlc  des  Ja^ellons, 
ouvrit  une  ère  de  discordes  et  de  cor- 
ruption à  la  Folo;:ne,  eu  rendant  la 
couronne  francbeuient  et  à  toujours 
élective  (107:2).  Il  v  avait  Ion»;  temps 
déjà  que  les  deui  grandes  secies  pro- 
testantes, le  luthéranisme  et  le  calvi- 
nisme s'rlairiil  répandues  en  rolo<jiie; 
mais  une  heré-ie  b  en  autrement  pro- 
fonde \eiiaild'>  prendre  pied,  eu  1ÔG3, 

;i1  Oulrr  rHiv'uirr    dp  [Vuitir  .   on  a  Ira  luit 
m     frâiif»'*   qurtq'  r«   oinrj;'*   d'  Riraniiin»-  : 
,  uuuvrilr.  traUiMic  |..ir  M.  Je  BuutUrr', 


M,       .m;      .-g-,    t:,    *         J»      Murpka.nu     U     Pn 

./  j.ar  J    B     I'.    .«<••  M. •T.. Il 

;.  Tiir  Iradiulioii  lit- «>  tir 

A     liriétf ,       »So5,     l'i-l  J    , 
j  .!r>-   Il    mriup  que   celle  «l"*"    iioii* 

\  .|ucr      II   y     ra    a    un*   aniirf    par 

NI  ^       -        I  lli|>|>oi/r.   Paru.    i»»».    in    iJ. 

j«  H  ,„un,  uu  ,\'ord,  iiiiilra  tlu  ru»«e  ri  du  <lj- 
noi%  d.  kjr.>in<iiir  rt  dr  Shutn.  j.ar  M.  dr  C<.if- 
Grr-lkinorcl  ,  Tar  »  ,  !>..«,  J  »ol.  iii-i».  le 
traduit.ur  Ir»  avait  d'alj»r«l  inséré»  d.ms  la 
Kou«rlle  ■•blîoihéqa*  art  roio»n»  ;  de-  trou 
vulu.iir-  un  ri,' r  i  coii»jcrr  à  I  etri»:.in  russe, 
rt  ...1,1.  i.r  >c  ,'.  -•.  ou  la  tiitt  du  tt'lnrl  :  la 
i'Mu.r,  h„.  r  J  J.r.  —  M.  Bowni.Kafaii  cod- 
u^iti  -ui  Viii;iJi>  .  da"»  'e  re<  ucil  inlilulé 
Huniat  a-.t'ij:  .- •  'i8iï  ,  quelquM-unef  dfS 
production»  po«uque»de  Karauixine.        L. 


4  12 


iïÂR 


et  faisait  tl«\^  proo;rès  inattemlus;  c'é- 
tait celle  des  anti-trinitaires  qui  re- 
nouvelait en  partie  rarianisme.  Au 
milieu  de  cette  anarchie  dos  esprits 
à  laquelie  les  prédications  de  Luther 
avaient  donné  l'essor, Karnkowski,  bien 
(jiie  catholique  zélé  et  opposé  aux  opi- 
nions au  moins  suspectes  du  primat 
ITchanski ,  crut  qu'il  ne  dépendait 
plus  du  ;î;ouvernement  séculier  de  ré- 
piimer  des  écarts  do^^ujatiques ,  en 
d'autres  Ici  mes,  que  le  pouvoir  devait 
tolérer  ce  que  la  théologie  réprouverait 
et  blâmerait  de  toutes  ses  forces.  Un 
fort  paiti  lut  du  mànc  avis  ,  mais  l'é- 
pisco{)at  polonais  ne  l'approuva  pas,  et 
Uclianski  était  en  mi'uie  temps  odieux 
et  déconsidéré.  Karnkowski  ne  crai- 
j;nit  point  de  se  rapprocher  du  prélat  qui 
gouvernait  daiis  l'interrègne;  il  eut  la 
gloire  et  le  désagrément  d'être  presque 
seul,  parmi  ses  pairs,  à  poser  des  maxi- 
mes peu  goûtées  de  son  temps  et  que 
les  siècles  suivants  ont  fini  par  réali- 
ser, avec  i\n  peu  d'exagération  peut- 
être  et  d'une  façon  trop  exclusive , 
mais  avec  raison  dans  bien  des  cas. 
C'est  lui  qui,  préliminairement  à  La  ca- 
pitulation de  1573,  antérieure  cUe- 
jnêmc  à  la  nomination  de  lîenri  de 
Valois  à  la  couronne  polonaise,  dressa 
le  fameux  formulaire  dit  Paix  des  dis- 
sidcnls.  Cet  acte  qui  garantissait  pro- 
tection égale  à  toutes  les  opinions  reli- 
gieuses dissidentes  [dissidents  éiail 
alors  synonynje  de  divergents,  héréti- 
ques et  catholiques  étaient  les  uns  et 
les  autres  dissidents),  ct\  acte,  disons- 
nous,  fut  signé  par  tous  les  sénateurs 
et  par  boat;coup  de  nonces  ,  c'est-à- 
dire  par  tout  le  parti  du  grand  maré- 
chal Firley  ;  mais,  des  dignitaires  de 
l'église  polonaise  ,  un  seul  voulut  y 
souscrire,  ce  fut  l'évêque  de  Cracovie 
Krasinski.  En  même  temps  se  débat- 
tait une  question  politique  :  qui  serait 
élu  roi  de  la  répubbquc  de  i'ologne .' 
llchanskl,  bien  que  favorable  aux  dis- 


KAR 

sidenfs,  s'était  posé  TantagoTiiste  du 
grand-maréchal  ;  et  ce  que  le  grand-ma- 
réchal résolvait  le  primat  par  cela 
même  le  désapprouvait,  l'éloignait  de 
toutes  ses  forces.  Il  voulait  que  le 
choix  tombât  sur  un  prince  de  la  mai- 
son d'Autriche  :  Firley,  uni  à  Karn- 
kowski ,  eut  soin  de  faire  insérer  dans 
les  Pacta  commenta  que  le  roi  qu'on 
allait  élire  serait  tenu  de  jurer  l'acle 
des  dissidenls.  Nul  prince  autrichien 
n'y  cul  consenti,  au  lieu  que  Monthic, 
l'ambassadeur  français  alors  à  Varso- 
vie, promit,  au  nom  de  son  gouverne- 
ment ,  que  cette  paix  des  dissidents 
non  s(îulement  vaudrait  en  Pologne, 
mais  exercerait  son  inlluence  en  Fran- 
ce, et  que  la  cour  du  Louvre,  qui  ve- 
nait de  f;iire  la  Saint-Barlhéîemi  ,  to- 
lérerait les  h;!g;jenots.  Aurait-on  fait 
honneur  à  la  parole  de  Montluc  ?  N'im- 
porte ,  Henri  vint  pendant  quelques 
mois  jouer  à  la  royauté  en  Pologne,  où 
il  plut  un  moment ,  où  bientôt  il  fut 
méprisé.  Karnkowski  le  complimenta 
lors  du  couronnement  par  un  panégy- 
rique dans  le  goût  de  celui  de  Pline- 
le-Jeiine  à  Trajan,  et  où  pourtant  nous 
remarquerons  que  sous  la  forme  de 
l'éloge  il  se  glissait  des  demandes  et  des 
avis.  Mais  Henri  avait  fort  peu  des 
goûls  de  Trajan  :  il  ne  tint  compte 
des  avis  et  peut-être  ne  les  comprit  pas 
bien,  quoiqu'il  répondit  en  beau  latin 
au  latin  des  Polonais.  La  prompte  fin 
du  règne  de  Henri  donna  bientôt  oc- 
casion à  Karnkowski  de  prendre  part 
à  de  nouvelles  intrigues.  Conl:  ;.'i\:;nent 
à  ce  qu'on  tût  pu  attendre,  on  le  vit 
se  rapprocher  d'abord  du  primat  et 
des  évêques  qui ,  dans  les  dissensions 
de  celte  époque,  tenaient  pour  l'Autri- 
che, c'esl-à-dire  pour  le  fils  ou  le  frère 
de  l'empereur  Maximilien  11,  ou  pour 
Maximilien  H  lui-même,  tandis  que 
les  nobles  en  général  portaient  Etien- 
ne Jjattorl  ;  et  dans  la  diète  du  12  dé- 
cembre 1575,  lors  de  l'élection  schis- 


iiuiii^uc,  il  \t*ijcti  fa^cdi  clfce  ilriiiitr. 
NI  -,  ■  -'l'icllcinfiil ,  il  (Mtia  l'oifillc 
.r.\  |>iot(>Ulions  des  adiu'- 
i  cii.Mir  lijlltni.ouplutâl  ilcoin^tiil  que 
iijttoii.  (Icjà  prnrli.^nl  \ei5  !c  luliiéu- 
liiMPC  rt  rintroiiiit*  lie  •;rand>,  les  uns 
lics-opposrN,  les  autres  un  peu  iiuliiïë- 
iciits  aux  iilres  ratlioliques,  puunait,  si 
rr|iisro|)al  cniilinuait  ^J  rrsl^tallce,  se 
«ieleroiiaci  cunlre  Ir^  oilliuiio&rs.  Il 
uu\ril  ra\i.s  il'eii\n}er  SuiiLov^  ilriiian- 
der  .Tti  'lraiis>|\aiii  queU  seiiliniriiti 
ierii;ieux  il  professerait,  ou  plutôt  lui 
(lire  à  quelles  conditions  une  forte 
fiartion  de  rrpiscopjl  se  drclaierait 
pour  lui  :  il  ne  t^rda  pas  à  rere\uir  so- 
Iniiiellcmctit  le  ^e^mtllt  de  r<all()!i,  de 
lie  point  abardonner  la  foi  lomninc,  et 
«  ouronna  cr  pnocc  ri  Aune  Jaj;rllon, 
ni,  le  Irndeinain,  dc\ait  doniirr  ^a 
ruiin  au  nouM-au  inonanjuc.  ^lai^iele 
f redit  que  di?  .«-emMabliN  sci\.i.>  «îo- 
>.iirnt  doiiiuT  à  KarnLo\%>Li ,  ou  p<*ut- 
rliL*  parce  qtiM  a\att  rendu  de  scmbla- 
Mes  !»er%ires,  l'année  sui%anie ,  il 
liii^ua  inulilemnil  re\èclié  de  Craco- 
\ie  (lôTT  .  (^)uoique  appuvé  de  la 
protection  du  monarque,  il  vit  5e  ^lis- 
>tr  un  ri\al  à  la  coadjutorrrie  de 
(■tienne,  quM  ambitionnait  et  où  il  eût 
foiméun  rontie-poids  à  la  puissance  de 
rarflKxcque-piiniat  l'clianski.  il  n'en 
dc\int  pas  moins,  à  la  mort  i\n  prélat, 
(»n  successeur  surTcxprcNse  recoinman 
d.i(ion  de  Hatlori.  drc^oire  \I11  lui 
«Mivo\a  SCS  bulle>.  Placi*  ainsi  à  la  Jcle 
du  clci};é  polonais  (1Ô81),  Karn- 
LowsLi  se  trouva  dans  une  fausse  posi- 
tion, suspendu  entre  ses  précédents  cl 
la  nécessité  de  marcher  d'accord  avec 
scn  évèques,  entre  ses  opinions  tolé- 
rantes et  un  secret  pressentiment  de 
tout  le  mal  que  causeraient  à  la  Pologne 
les  dissidents.  Aussi  le  vit-on  étaler  un 
grand  zèle  poiir  réformer  son  diorr<c, 
d'après  les  décrets  du  concile  de  Treil- 
le, convoquer  un  synode,  aller  de  pa- 
roisse en  paroii^^e  prcclicr  lui-mcmc,  et 


km;  4i3 

lépandre  painii  ses  subordonnés  les  li- 
vres utiles  à  rinsiritction  des  iideles  ;  et 
aussi  à  la  moi  t  de  Itailori  ^lôSU),  fut-il 
avec  le  palatin  Kticniie  et  le  slaroste 
Nicolas  laslo»  ier Li ,  à  la  tète  du  pai  ti 
des  Zboro\v.>ki  qui  favorisait  l'Autri- 
che. Kn  sa  qualité  de  primat,  il  était 
alors  char;;é  de  la  présidence  du 
royaume.  C'ri  inlrrrè^ne  fut  «le  plus  de 
SIX  mois,  pendant  lesqurls  la  farliuii 
autrichienne  résista  vigoureu>einent  , 
mais  perdit  toujours  du  terrain.  A  la 
diele  de  convocation  (*i  février  l.'»H7 ', 
les  nobles  laïque»  ayant  voulu  obstiné- 
roen:  que  la  paix  des  dissidents  fil  par- 
tie de»  nouveaux  Porta  lumcnta,  le* 
évrques  en  corps,  à  l'exception  de  celui 
de  kaminiec, se  retirèrent;  àcelie  d'élec- 
tion ^iU))uin),  les  deux  partis  soils  forme 
d'armées  restèrent  six  semaine,  en  pré- 
sence l'un  de  l'autre,  n'aitend.int  que 
le  signal  de  la  mêlée.  Li  diploinalic 
électoi aie  pendant  ce  lemp>  allait  son 
train  ,  et  de  chaque  cô:o  on  cher- 
chait à  gagner  des  transfu;;es.  I.es  en- 
nemis de  l'Autriche  furent  les  plus 
heureux  à  ce  jeu  constitutionnel  :  ils 
attirèrent  à  eux  le  primat  qui,  le  IH 
août,  proclama  Sigismond  111,  et  .i  la 
suite  du  primat  beaucoup  de  prélats  et 
presque  tous  les  nobles  leurs  adiiérents. 
Il  n'en  fut  pas  beaucoup  mieux  vu  des 
corvphées  du  paili  suédoi<<.  Jean  Zj- 
moiMi,  grand  chanci-liei  du  rovaiime 
de  Pologne  et  clicf  de  cette  faction, 
■;ranil  homme  d'elat  au  reste  et  grand 
général,  voulait  dominer  sans  rival,  et 
la  faveur  dont  l'entourait  la  chevale- 
resque noblesse  laïque  lui  facilitait  re 
lôle.  Puis  l'incursion  des  Tatars  de 
Crimée,  la  prompte  victoire  de  Z.i- 
moïski  à  I^iv^orow  sur  ces  brigands, 
porta  aucomble  sa  puissance  et  sa  gloire 
qu'il  consolida  en  même  temps  que  il 
tranquillité  de  la  Pologne,  par  laconsti- 
tulion  de  ITiHOà  l'égard  des  (Cosaques. 
Kanikowsli  alors  se  fille  cliainpion  de 
ces   pauvres  G)saqucs  opprimés  dans 


4'4 


KAR 


eiirs    libertés    politiques ,  «lans   leurs 
opi riions  religieuses  :  il  convoqua  ,  e;i 

1.300,  une  assemblée  à  Kiev  [tour  dé- 
rlarer  abolie,  ou  nulle,  la  coîistitiition 
récemment  élaborée  ;  et  ces  manifesta- 
tions, légales  peut-être  dans  un  rovau- 
me  tel  que  la  Pologne,  mais  qui  ailleurs 
eussent  été  séditieuses  ,  allaient  sans 
doute  dégénérer  en  rokoss  quaj)d  les 
Zàmoïskl  transigèrent.  Karnko\Nski 
parut  à  la  diète  de  Varsovie,  et  tra- 
vailla sincèrement  à  produire  une  paci- 
fication qui  eut  mis  tin  à  tous  ces  dé- 
sordres et  réduit  les  Cosaques  à  l'obéis- 
sance. La  paix  religieuse  devait  en  être 
l'élément  nécessaire.  Pour  arriver  à  ce 
but,  il  fallait,  suivant  les  amis  de  Karn- 
kov,ski ,  unir  les  chrétiens  grecs  aux 
catlioliques,  en  d'autres  termes  fondre 
les  deux  grandes  églises  d'Orient  et 
d'Occident.  Dans  sa  bonhomie,  car 
nous  n'oserions  dire  dans  son  inexpé- 
rience, il  croyait  cette  fusion  possible, 
et,  en  décembre  1594,  il  tint  à  cet 
effet  un  synode  à  Brzesc.  On  y  signa 
l'union  des  deux  églises  d'après  les 
pnncjpes  posés  au  concile  de  Florence. 
Du  reste  plusieurs  clauses  s'y  remar- 
quaient, qui  rendaient  les  évèques  in- 
dépendants de  la  puissance  séculière 
et  ordonnaient  la  restitution  des  biens 
aux  églises.  De  \ï  mille  difticultés  : 
d'une  part  Constantin  Ostrowski,  un 
des  provocateurs  de  l'union,  n'en  vou- 
lut plus  dès  qu'il  vit  quel  pouvoir  se 
réservaient  les  prélats;  de  l'autre  plu- 
sieurs évêques  rétractèrent  leur  adhé- 
sion et  se  plaignirent  qu'on  la  leur  eut 
arrachée  par  force.  Ces  actes  furent  à 
peu  près  les  derniers  grands  évène- 
mens  politiques  auxquels  piit  part 
karnkowski.  Il  ne  vit  ni  la  guerre  de 
Kussie  de  1  OOÎ),  ni  le  rokoss  de  IGOT). 
Il  était  mort  le  18  juin  (  20  mai  ) 
1()()3,  à  son  château  de  Kowiez.  La 
fin  de  ses  jours  avait  été  signalée  pai" 
la  protection  qu'il  accorda  aux  jésuites, 
bien  d'accord  avec  lui  sur  la  (usion  des 


KAR 

églises  latine  et  grecque.  11  leur  bàlit  up 
collège  à  Kalisz  (c'est  là  qu'il  fut  in- 
humé). Il  éleva  deux  séminaires,  l'un 
à  \Vladislaw,  l'autre  à  Gnesne.  Indé- 
pendamment de  son  rôle  comme 
homme  politique  ,  Karnkowski  a  une 
haute  importance  comme  historien. 
Voici  la  liste  de  ses  principaux  ou- 
VI  âges  :  L  Jlis/oria  interregni  post 
discessum  e  Polonia  Henrici  Ande- 
gaoensis  (qu'on  peut  regarder  comme 
fondamental  sur  ce  sujet).  H.  De 
modo  et  ordine  electiojùs  nooi  régis 
(wud  Vnrsooiam  hahïtœ  cinno  1 573, 
Cologne,  1589,  infol.  (frontispice  et 
complément  de  l'ouvrage  précédent 
qu'il  aide  à  comprendre,  comme  la 
théorie  aide  à  comprendre  les  laits). 
Il I .  Epistolœ  Jamiliares  illustriuni 
■virorum,  Cracovie,  1578,  in-4".  Ces 
lettres  forment  trois  livres.  Toutes,  on 
le  devine,  émanent  de  grands  seigneurs 
ses  contemporains  ,  toutes  sont  d'un 
intérêt  inappréciable  pour  l'histoire  de 
1565  à  1577.  Malheureusement  les 
exemplaires  en  sont  très-rares.  IV. 
1  ^  Constitiii'wnes  synodorum  ecclesiœ 
Gnesnensis,  Cracovie.  1579  ,  in-4°  ; 
2"  Constitntiones  synodales  di'œ- 
cesuTiœ  cum  cutechesi ,  Prague  , 
1590,  in-4*'.  V.  Sermones  ad paro- 
chos  et  divers  panégyriques  parmi 
lesquels  on  remarque  celui  de  Henri 
m,  en  latin  (Cologne.  1589),  traduit 
en  français  sous  le  titre  de  Harangue 
puh  ii(jue  de  bien  -  venue  au  roy 
Henry  de  Valois,  roy  esleu  des  Po- 
lonnes ,  prononcée  par  Stanislas 
Czarnkoivski,  Paris,  1574,  in-8",  et 
une  lettre  aussi  sur  l'élection  de 
Henri  III  dans  le  i)e  origine  et  ges- 
tis  Polunoruni  chroniron  de  Mari. 
(jrotnnr  [QvtW^nf^.,  1589).     P — ot. 

KARPIXSKI  (François),  né 
vers  1760  ,  dans  le  palatinat  de 
lîrzesc-Litewski,  est  connu  en  Polo- 
gne par  ses  poésies,  surtout  par  ses 
pastorales ,    qui    sont    devenues    des 


KAR 

fhanfs  popa)airf«.  On  a  de  loi  :  Jiulilh, 
tra{;cJie;  le  (Irns,  coniéilie  ;  iirr^fr, 
opiTi;  unelratljrlinn,  moitié  en  pn)«.e. 
moitié  en    •  fur  insdc 

Delitlr  ;  il  '  '-^  l'saumcs 

(fr  Diicitl,  une  pàflte  ile«  (Kucres 
îlr  Pluttirtjur,  et  il  éfriv't  sur  l'état 
«le  la  l*ol(«^ne,  et  snr  la  manière  de 
raniéliorer.  Arcueilli  à  Piilawv,  cliex 
Ie5  (aartor\$Li,  il  faisait  le  charme 
de<i  réunions  que  le  prinre  Adam  v  atti- 
rait. Stanislas*  Au;;u$te  lui  offrit  rfe^pla 
r«  honorable»  et  le  prince  San;;ii4iko 
le  pria  de  «e  charj;;er  de  l'étlucalidn  de 
se*  enfant*.  Il  refusa  ces  avanta;;e^  , 
pour  aller  >ivre  paisiblement  dans 
<wi  maison  de  campagne  de  Karj»incr\n 
que  le  foi  lui  a>ait  donnée.  I.i,  il  j»ar- 
la;;eait  ses  moments  entre  l'étude,  l'a- 
priciilture  et  l'éJucaiion  des  pauvres 
enfants  de  la  cami)a;;ne  II  publia  en 
181*1,  a  Wilna,  wn  ouvrage  intitule'  : 
Aux  enfants  pour  Irur  umusrment 
Atant  sa  mnit  il  lé|;ua  à  son  ami 
Charles  Pr>zor  un  manuscrit  qoi  con- 
tient l'histoire  des  hommes  a\ec  les- 
quels il  avait  eu  des  rapports.  Il  mou- 
rut dapN  Ir  palatinat  de  Kublin  ,  le  1 1 
septembre  \X'1\\.  Ses  (Ku\.'rrs  ont 
paru  en  quatre  volumes  in-8",  i  ^  ar- 
sovie.  1808  ;  à  Breslau,  182G;  à  Var- 
sovie. 18-2S  r.— Y. 

KARSTK\(Wf!<cf.<;iasJkan 
Gi'stavf),  dit  vulgairement  Karstem 
/r  mathrmntirien  ou  K\rstfn  Ir 
prre,é\i\l  né  le  .'>  décembre  17J2,  au 
Noilveau-Rrandebourg  dans  le  duché  de 
.Mecklerabour{;-Slrelili.  Ses  parents  le 
destinaient  au  ministère  ecclésiastique. 
Ses  études  terminées  (17.')0,,  il  alla 
passer  deux  ans  à  l'université  mecUem- 
i)Our|;eoisc  de  l\ostocL,  qu'en  17.'>2  il 
quitta  pour  celle  d'Iéna.  Dans  l'une 
et  l'autre,  il  suivit  de  front  les  cours  de 
théologie  et  de  mathématiques.  Mais 
peu  à  peu  il  donna  la  préférence  à 
celles  ci  dans  la  pratique,  bien  qu'il 
n'abandonnât  pas  tout-à-fait  ses  vues 


KAR  4i5 

piiniitives.  f.tabli  à  Rostock  par  1rs 
ronseils  d'un  ami,  et  décoré  du  ;;ra(le 
de  maître  (pii  revient  à  celui  dp  licen- 
cié (1755^,  il  se  mit  à  donner  des  le- 
çons de  m:»fhér)iliqiies  ,  iJe  lo;;i(iue  , 
de  raé*  <  de  morale,  de  droit 

naturel     i  après,  il  remplisvait 

les  fonctions  de  ptofrvNeur  de  lo"iqtie 
à  l'université.  Kn  17r»0,  le  gouverne- 
ment de  MetLIerabourjj  -  Schwérin 
vo'dut  aussi  avoir  son  école  supérieure 
et  fonda  l'universllé  de  Rillzow. 
Karsien  v  fut  nommé  ï  une  des  chai- 
res dès  la  création.  Il  n'y  resta  que 
jusqu'en  177.1,  époque  à  laquelle  il 
passa  au\  fonctions  de  professeur  de 
m.iilirinatiques  et  de  pinsiqueà  Halle. 
(",«llr>  ci  étaient  bien  pfus  dans  la  na- 
ture de  son  talent.  Cependant  il  avait 
{;ardé  de  bonnes  relations  avec  sa  pa- 
trie :  le  gouvernement  de  Schwérin 
l'avail  chargé,  en  1770,  de  surveiller 
la  constmction  des  pompes  à  feu  ,  qui 
devaient  être  distribuées  aux  petites 
villes  du  duché.  î^es  services  qu'il  ren- 
dit à  celte  occasion  lui  firent  donner 
par  le  duc  le  titre  de  conseiller  d'état. 
Il  V  joIf;nit  ensuite  celui  de  conseiller 
aufique  de  l'rusNe  Sa  mort  eut  lieu  le 
17  avril  1787.  On  a  de  lui  plusieurs 
ouvrages  qui  indiquent  la  vaste  éru- 
dition ,  la  patience  plus  que  le  ;;éiiie 
créateur.  Cependant  ses  contempo- 
rains le  rej^ardairnl  comme  une  des 
tètes  mathématiques  les  plus  fortes 
de  l'Allemagne.  Les  principaux  sont  ; 

I .  fdre  iFun  tours  complet  de  ma- 
thrnuitiijut'S  ,  2*  édit.  ,  Greifswal- 
de,  177S,  2  vol.  in-8'*;  réimpri- 
mée plus  tard  avec  une  i"  partie  tirée 
des  papiers  de  Karstcn  par  son  fils  , 
Oeifswalde,  1791,  in-S*» ,  et  aug- 
mentée encore  depuis  par  divers  sa- 
vants Mollweide,  par  exemple,  l'enri- 
rhis-ait   en    18l8    d'une    ')"   partie). 

II.  Des  Dissertiillons  de  physique 
e^dr  chimie,  Halle,  1787,  2  livres 
in-8<».  P— OT. 


4i6 


KAR 


KARSTEX  (Fkançofs-Curk- 
TitN-L.M'nKNT),  agronome  nicrklcm- 
hoiii-ficols ,  élait  le  frère  cadet  du 
précédent  et  naquit  à  IViilzow  le  3 
avril  1751.  Sou  éducation  fut  fort 
néf;l)gée.  Tout  jeune,  il  avait  perdu 
sa  mère,  ses  sœurs.  Son  père,  petit 
propriétaire  et  fermier ,  ne  pouvait 
veiller  sur  lui  ;  on  sait  les  plaies  pro- 
fondes faites  à  ces  contrées  par  la 
■;uerre  de  sept  nus.  Karsten  ,  à  dix 
ans,  savait  tout  juste  rabéccdairc  elle 
catéchisme.  Le  collè;2;e  du  chapitre  à 
(Vustrow  où  on  le  plaça  avait  de  bons 
maîtres,  mais  était  fort  mal  tenu  :  les 
élevés  s'y  rendaient  ou  ne  s'y  ren- 
daient pas,  suivant  leur  bon  plaisir. 
Lors  donc  que  Karsten  reparut  à 
(|uinze  ans  dans  la  maison  paiernelle, 
il  ne  savait  qu'un  peu  de  grammaire 
et  de  latin.  Son  père  le  mit  à  sa  comp- 
tabilité ;  mais  comme  celle  occupation 
ne  lui  prenait  que  peu  de  temps  et  qu'il 
donnait  onze  heures  sur  douze  à  la 
chasse,  à  la  pêche  et  à  l'aviceptologie  , 
on  l'envoya  comme  commis  à  Riga 
dans  une  maison  de  draperies  et  de 
soieries.  Karsten  ne  tarda  pas  à  y 
trouver  ou  à  s'y  créer  des  tribulations 
amères  qui  firent  pour  lui  de  Rij^a 
une  véritable  Sibérie;  et  il  en  revint 
chétif,  malade,  mais  un  peu  plus  rai- 
sonnable. Placé  chez  un  noble  de 
campat;ne  qui  faisait  valoir  ses  terres, 
il  s'appliqua  sérieusement  à  l'exploita- 
tion rurale,  puis  se  concilia  'es  bonnes 
<;ràces  de  son  maître  par  la  facilité 
avec  laquelle  il  tournait  les  lettres 
d'affaires,  devint  ainsi  le  factotum,  le 
secrétaire  de  la  maison,  et  eut  la  per- 
mission d'aller  secouer  la  poussière  de 
la  bibliothèque  du  château.  Les  classi- 
ques latins  ou  ^recs  qu'il  y  trouva  ne 
lui  firent  qu'un  médiocre  plaisir,  njais 
les  livres  d'histoire  naturelle  piquèrent 
sa  curiosité  :  il  sentit  que  l'exidoila- 
lion  rurale  pouvait  et  devait  être  ^u- 
tre  chose  qu'une  pratique  routinière; 


KAU 

il  devina  qu'aux  travaux  réels  devait 
présider  une  science,  cl  toutes  ses  viies 
se  portèrent  instinctivement  de  ce 
côté.  Reconnaissant  tout  ce  qui  lui 
manquait,  il  résolut  de  réparer  le  temps 
perdu,  et  il  alla  suivre  à  l'académie  de 
Riitzovv  un  cours  de  malhématiipics  , 
de  sciences  naturelles,  de  géographie. 
Il  entra  ensuite,  à  l'exemple  de  son 
frère,  dans  le  professorat  à  l'école  des 
orphelins  de  Biitzow,  suppléant  à  la 
modicité  de  ses  appointements  par  la 
composition  ou  la  traduction  de  quel- 
ques ouvi  âges;  el ,  au  bout  de  quel- 
ques années  ,  il  fut  promu  au  doc- 
torat ,  et  chargé  des  fonctioris  de 
professeur  de  philosophie  à  la  facjdté, 
fonctions  qu'en  1783  il  troqua  con- 
tre le  titulariat  de  la  chaire  d'écono- 
mie rurale.  Du  moins  il  était  dans 
sa  spécialité;  il  s'y  voua  décidément  et 
se  fit  un  commencement  de  réputation 
qu'accrut  beaucoup  sa  translation  à  l'é- 
cole des  hautes  études  Je  Rostock, 
lorsque  l'académie  de  Biitzow  fut  sup- 
primée en  178y.  Rostock,  plus  animé, 
plus  varié,  plus  commerçant,  était  un 
centre  plus  agréable  pour  l'écrivain  et 
le  penseur.  Ce  qu'il  y  voyait  le  por- 
tait naturellement  à  réfléchir  sur  les 
rapports  de  la  navigation,  du  com- 
merce, de  l'industrie,  avec  la  base  de 
toute  richesse  transformable  ou  trans- 
portable ,  l'agriculture  ;  et  ses  idées 
sur  le.-:  moyens  de  mettre  en  valeur,  soit 
la  propriétéparticulière,soit  rensemble 
des  terres  que  possède  une  même  nation 
et  d'arriver  au  plus  haut  revenu  possi- 
sible,  KS^nèrcnt  en  étendue  comme  en 
profondeur.  Acquéreur  de  vastes  ter- 
rains marécageux  et  en  friche,  situés 
aux  environs  de  Rostock  sur  les  bords 
de  la  Warnow,  il  en  opéra  le  dessè- 
chement cl  les  métamorphosa  en  riantes 
prairies,  couvertes  de  bestiaux,  mettant 
ainsi  en  pratique  les  théories  de  la 
science  et  démontrant  par  son  exem- 
ple ce  qu'il  recommandait  par  ses  le- 


KAR 

r.  Eu  179K,  aidé  de  quelque:»  unes 
Dotabililes  Ju  pa\s,  eiilre  autres 
du  comte  de  Sclilix,  qui  plus  tard  créa 
le  magnifique  villa^^edcScliliz  si  counu 
par  ses  environs  delicieui,  il  fonda  la 
Socirteit  Agrutioniir  Je  liosfoik,  la- 
quelle rendit  des  ^rl^ices  éininents  k 
I  a|;riculture  du  MecUrinbour^  et  par 
rufitre-cuup  à  rrlle  des  relions  voisines: 
il  en  fut  i'ame  tant  qu'rlle  dura,  ainsi 
que  de  celle  qui ,  eu  1^^17,  lui  succéda 
sous  la  denoininatiou  d'(  niHn  fHi- 
triotiijur,  et  qui  n'en  rtail  qu'un  dr- 
xeloppemenl.  Il  eu  était  secrétaire,  et 
le  secrétariat  sous  sa  direction  fut  com- 
me un  centre  où  con\er>;eaient  de  tous 
les  points  de  l'hurope,  par  sa  corres- 
pondance, les  recueils  périodiques  ou 
les  envois  d*ouvra;;e>  savants  ,  toutes 
les  llienries  ,  toutes  1rs  applications 
de  la  science  a>;ronomique.  Ce  cen- 
tre, il  eit  vrai,  n'rlait  pas  le  seul, 
et  le  MecUeinbour^  n'avait  point  eu 
l'initiative  du  mouvement  scientifique 
qui  s'était  drveloppé  si  lar;;enient 
dans  Texploitaiion  de  la  propriété  ter- 
lienne.  Mais  c'était  beaucoup  pour 
lin  si  petit  état  d'avoir  été  des  pre- 
miers à  parta<;er  «  des  plus  actifs  à 
propager  ce  mouvement.  I^epavsavait 
trouvé  à  cette  coopération  proGt  et 
ploire  :  profit  en  doublant  1rs  produits, 
en  exportant  bien  plus  ,  en  ^a^nant 
par  les  retours  infiniment  d'aisance  in- 
térieure; {gloire  en  df  venant  en  quel- 
que sorte  pavs-m»dele  pour  la  dessicca- 
tion et  le  déboisement,  la  formation 
des  prairies  arliBcielles  ,  l'élève  des 
bestiaux.  Karsten  eut  une  part  essen- 
tielle à  CCS  améliorations,  fut  de  ceux 
(]ui  (ioiiiicrent  (impulsion;  et,  quand 
elle  fut  dans  toute  sa  force,  il  continua 
de  l'activer  cl  de  la  ré{;ir.  Son  à^e , 
pourtant,  lui  donnait  droit  de  se  re- 
poser ;  mais,  d'une  part  ,  sa  prédilec- 
tion pour  la  science,  objet  de  toute  sa 
vie,  de  l'autre,  la  nèccs>ité  de  pourvoir 
aux  besoins  d'uue  trop  nombreuse  fâ- 


KAK  417 

mille  le  retenaient  dans  cette  voie  d'é- 
tudes persévéïantes  et  de  labeur.  11 
n'avait  pxs  moins  de  dix  enfants  qui 
lui  survécurent,  et  il  en  avait  eu  jusqu'à 
tretu:  on  comprend  que  ni  les  quel- 
ques centaines  de  tlorinsque  lui  valait 
S3L  chaire,  ni  les  menus  profits  du  se- 
crétariat, ni  le  revenu  de  se>  bruvere>, 
landes,  moulins,  cabarets  cl  marais 
passés  à  l'état  de  pi  aines,  iiun  sant 
absorber  beaumup  de  fonds  pour  roni- 
mencer.ne  suffisaient  pas  à leiidre  opu- 
lent le  chef  de  cette  tribu  des  karsten; 
mais  tous  enfin  reçurent  une  éducation 
complète,  solide,  et  entreient  dans 
des  carrières  libérales,  où  plusieurs 
à  leur  tour  se  distinguèrent.  Pour 
leur  père ,  sa  mort  eut  lieu  le  'JK  fé- 
vrier  18*29.  Le  ^rand  duc  son  sou- 
verain l'avait  nommé  conseiller  sé- 
riel. Il  appartenait  à  un  {>rand  nom- 
bre de  sociétés  savantes  d'histoire  na- 
turelle, d'aji^rononiie,  d'éronomie  poli- 
tique, et  ,  bien  que  cette  dernière  srien- 
re  ne  tînt  que  par  une  de  ses  face»  à 
l'exploitation  rurale,  il  n'avait  tenu 
qu'a  lui  au  moins  deux  fuis  de  quitter 
le  MecLlembour^  pour  des  chaires  plus 
avantageuses  en  un  sens,  la  première 
pour  aller  professer  â  l'université  de 
kaun,  la  seconde  à  la  mort  de  liecL- 
roann  qu'il  eût  remplacé  à  (jd-ttin- 
gue.  Mais  il  trouva  (îrettiiii^ue  trop 
haut  et  Kazan  trop  loin,  et  il  faut 
avouer  qu'a  cinquante-deux  ou  trois 
ans  qu'il  avait  eu  1><()3,  ileùt  été  un 
peu  tard  pour  s'expatrier.  Les  écrits 
de  Kari.ten  sont  nombreux.  Ils  le 
seraient  bien  autrement  encore  si 
l'on  publiait  la  volumineuse  corres- 
pondance dont  >a  place  de  secré- 
taire de  1'/  nion  fHitriuli(jur  était 
l'occasion,  et  dans  laquelle  se  reprodui- 
sent fréquemment  les  noms  des  Tliaer, 
des  N  o;;ht,  des  Schvverr,  des  Fclleii- 
ber^,  des  \N  estfeld,  des  Laviilz.  Dé- 
falcation faite  de  cette  masse  de  docu- 
ments inédite,  les  ouvrages  de  karsten 


»7 


4iB 


KA.R 


se  distino;uent  en»deux  classes,  traités 
particuliers,  recueils  périodiques  ou  ar- 
ticles fournis  à  ces  recueils.    Voici  la 
liste  dei   livres  :    l.    Arithmrlique  , 
1775,  2®  édition,  1778,  T,  auj^men- 
tée  et  remaniée  (par  son  fils  aiiié),  ou- 
vraj2;e  éléineutalrc,  où  Karstcn  eut  le 
mérite  de  substituer  aux  rèû;les  sèches 
jusque-là  olfertes  aux  commençants  une 
exposition  claire  et  raisonnée  à  la  por- 
tée  du  jeune  à^e.  il.  Le  commerce 
(le  r Europe  (wec  les  Deux-bides, 
1780.  C'est  un  abré<;;é  de   V Histoire 
pliilosoph.ique  de  Raynal.  III.  Traité 
(le  Véidi  (u  titel  (le  la  science  agro- 
nomique et  (le  son  utilité  pour  U  éco- 
nomie   rurale   prati<pie  ,    Roslock  , 
1783.  IV.  De  C étude  ihéuri(pie  de 
r  économie    rxir(de  ,    ibid.  ,     1789. 
C'est  en  quelque   sorte  le  récapitule 
des  leçons  qu'il  se  proposait  de   faire  à 
RostocL  en   prenant  possession  de  sa 
chaire   (de    1789  à  1790).   V.  Les 
académies  agronomiques  sont-elles 
honnes    à    quelque    chose  F    ibid.  , 
1793.  On  se  doute  assez  de  la  réponse 
du  professeur  d'ao^ronomie,  du  fonda- 
teur en  per.-pective  de  la  Société  agro- 
nomique de  Mecklemhimrg.yi.  Pre- 
miers éléments  de  l'économie  rurale 
applicable  à  l' Allemagne,    Roslock, 
1793.   VII.  Histoire  des  essais  de 
plantations  faits  depuis  1797  pour 
arrêter  les  dunes  de  If^arnemiinde, 
1801  (insérée  aussi  dans  les  liostock. 
gemeinniitzl.  Aufsœze,  ou  Mémoires 
utiles  el  à  C homme  d état  et  à  V agri- 
culteur, ann.    1801).    VIII.   Divers 
opu>cules  tels  que:    \"  Appréciation 
par  la  théorie  et  l'expérience  de  la 
machine  ahattre  en  grange  deliess- 
ler,   Zcll,    1799,  une  fi<^.    -r    Des- 
cription de  la    méthode   de  llundt 
pour  la  construction   des  hâtiments 
ruraux, ,  Lie;^nitz  ,  1811,  une  figure. 
Karslen  y  donne  de  faraudes  iouanj^es 
à  ces  procédés  éminemment  économi- 
ques et  simples,  qai  réduisent  la  dé- 


KAR 

pense  en  bois  de  charpCHte  et  de  me- 
nuiserie, sans  rien  ôler  à  la  commodité 
ou  à   la  solidité  des   constructions  né- 
cessaires pour  une  bonne  exploitation 
rurale.    3"  Préjace   et    remarques 
pour  l'introduction  à   l'agronomie 
expérimentale  de  Lanqulst ,  Berlin, 
1800.  L'auteur  y  montre  comment  il 
est  possible  de  tirer  un  revenu  consi- 
dérable  des  métairies  en  y  semant  du 
trèfle  et  des  fourrages  analogues ,  et  il 
émet  ses  pensées  sur  l'utilité  dont  peut 
être  pour  l'amélioralion   de  l'agricul- 
ture, de  l'horticulture,   de  l'industrie 
vif!;nicoie ,  de  l'élève  d'abeilles  et  de 
bestiaux ,    l'institution    d'écoles    spé- 
ciales    d'agronomie.     4°    Comment 
d'un  domaine  rural  qui  n'est  point 
propriété  commune  faire  une  ter- 
re à  rotation  et  à  prairies  artifi- 
cielles}' 1809.  5°  Solution  du  pro- 
blème: quels  sont  les  moyens  sûrs  de 
se  préserver  du  retour  de  l'épizootie 
sur  les   bœufs?   Rostock,  1813.    6" 
Programme  contenant  quelques  con- 
sidérations   sur    le    développement 
progressif  de  t espèce  humaine  au 
point   de  vue  agronomique  ,  ibid.  , 
1800.  7°  Examen  des  moyens  re- 
commandés et    employés  jusqu'ici 
contre  l'épizootie  parmi  les  Ihku/s, 
vaches    et    taureaux ,    Gœltino;ue  , 
1815.    8°  Des  colonies  de  pauvres 
sont-elles  possibles  ,  seront-elles  uti- 
les en  Mecklembourg?  1823.   IX. 
Une  traduction  de  rouvrao;e  de  iNu";ei)t, 
intitulé  :     Voyage    en    Allemagne^ 
principalement  dans   le  Mecklem- 
bourg ,   1791,2  vol.   Cette  traduc- 
tion est    accompagnée  de    remarques 
étendues  el  qui  en  rendent  la  lecture 
instructive.    Quant    à  la  coopération 
de  Karsten  au  mouvement  de  la  presse 
périodique,   en  première  ligne  se  pré- 
sentent ses  Annales   de   la    société 
agronomique    du    Mecklembourg  , 
1803-1809,  3  vol.,  et  ses  Nouvelle,^ 
annales  de  la  société  agronomique 


\ol.  (^Ilf  |>uhliralinn.  rcmplif  de  no- 
lices,  il'an\KNf<i  cl  tlf  il^ifripiioTi*  in- 
lërei*antr<,  n'a  puiiil   r!»-  le 

par   ij  ino't    «!r  I't'!!-:^,  -r 

i'cn  orrii; 
soupir.    I 

dans  If  Muniitsrhrift  du  Mnklrm- 
f>ourg  {l)fu\  de  la  h\ènf  Inrhetrr, 
juin  et  juill.  i7*»l);  liiogrnphie  du 
printrr  tindraff.x\u\  179i;  Hlun 
(Tun  toit  rnmmo<lr,  sotidr  r(  à  fr- 
prem*r  du  fru  pour  1rs  Mtimrnts  ru- 
raur,  17'JG.  Mi;»pl  ;  Prtisres  sur  un 
pnssagr  t!  n  dr  Su^mt ,  ii i  » v . 

179.');  7  "tmairr  drs  dom- 

mages causes  fi,ir  Ir  drrtiirr  tour  hit- 
Ion  aux  rrh'iruns  des  durirs  dr  sa- 
hl"  de  If^arnemilndr,  179."),  5uppl.  ; 
J*/an  pour  arrrtrr  fessur  du  sahie 
des  dunes  de  If'arnemunde.r^pnr 
suite  pour  consolider  et  utiliser  ces 
ilunes,  mai  1796  ;  Kssui  d'un  toit 
en  plaques  argileuses  pour  se  ga 
rantir  des  ristfues  du  jeu,  décembre 
1797;  Description  de  queipies  es- 
pèces de  Irmnetons  du  Mrcklem- 
Itourg,  1797,  siippl.,  etc.  Aux  Ros- 
tork.  Aufscttze,  il  a  donné  une  (m^ji- 
puraisnn  dr  la  toiture  en  pfarjws 
if  argile  aux  toits  de  ihautne  et  a 
ceux  de  pierre,  ISO'J,  pa^.  iJ-|."», 
et  un  .-ipftel  il  tous  les  pti triâtes,  ou 
Hrunissezvous  pour  planter  les  du- 
nes de  If'arnemiinde  ,  1799  ;  aux 
Anrutlrs  de  Zell,  aux  Feuilles  li//é- 
rales  du  soir  de  Scfnvêrin ,  aux 
/  \iferhrn'l.  Vnterhaltungshiœtter 
de  Sellier  ,  aux  DundeMalenden  de 
Mecklemhourg  -  Scluverin,  beaucoup 
de  peîils  articles;  an  (Calendrier  tri- 
mestriel de  Mecklemlfourg-Scluvèrin^ 
près  d'une  douzaine  d'article<^  dont  les 
plus  importants  sont  :  des  f)ii>ers  sys- 
tèmes dr  culture,  1803;  Description 
du  pn}rêdc  suisse  pour  préparer  le 
foin,  tSlV;  ri  pour  faire  pâturer 
les  vache  s,  bœufs  et  taureaux,  1815; 


KAR 


i'9 


Fautii  désespérer  de  trom^rr    en 
Mrcklenifjourg  des  carrières  de  gyp- 


se '  \H22 


KAIIS  rE\  (I)ii>iin-rn'i^- 
(ircrWK',  dit  K.\nsii  N  le  minèralu- 
l'j  KvUMiN  Ir  fils,  avait  pour 
r  savant  mailu'nnlirien  dont  l'ar- 
ticle prérètie.  H  riaqaii  le  5  avril  17(18, 
à  IJulEow,  (»ù  Wenresla*  avait  alors  la 
chaire  de  lo;;ique.  Sa  vie  présente  peu 
d'é\enenient4.  Ilacheva  ses  études  aca- 
démiques a  Halle,  se  ruua  aa  profes- 
soral et  à  la  science,  finit  par  avoir  en 
tilrr  la  chaiie  de  ininrral();;ie  et  d'or\c- 
tn^rajdiie    V-  ide    .1  l'école  des 

mines  de  1'-  '>\  reçut  l'an n^e 

suivante  le  liîic  Ac  ioii^*iller  et  a-fv- 
scur  votant  près  «le  l'administialictn 
dei  mines  et  rorf;ci,  et  rendit  dans  cette 
double  situation  de*  fervires  positifs 
à  la  science  et  au  pars,  m  formant  un 
;jr.iii.l  ii.imt>re  de  minéralogistes  et  de 
I  rs  utiles,  et  en  inventant  ou 

jM.j-u.ai  1  .lUl  dei  procédés  plus  expé- 
ditifs,  plus  certains  :  plus  tard  il  devint 
un  des  conservateurs  du  cabinet  ro^a^ 
de  minéralo^^ie  de  lîrrlin.  Sa  mort  pré- 
maturée, le  '20  mai  IHIO,  fut  une  perte 
réelle  pour  la  Pnis<e.  Il  était  membre 
de  1.1  soriéir  de-»  sciences  et  arts  dp 
Francfort-sui-l'Odrr,  de  celle  des  cu- 
rieux de  la  nature  de  Berlin,  et  corres- 
pondant de  la  société  économique  de 
Leipzig.  Cétail  un  minéralo^islc  dans 
la  plus  haute  acception  du  mot.  Au  cou- 
rant de  tous  les  pro;;rèsdela  science,  lui- 
même  il  la  faisait  avancer  :  il  savait,  il 
pressentait  et  devinait.  Ses  descriptions 
sont  d'une  exactitridii  parfaite;  il  saisit 
admirablement  les  caractères  qui  domi- 
nent. Ses  discussions  sont  lumineuses, 
ses  appréciations  justes.  Jamais  surtout 
il  ne  s*é;;are  en  llicorie^  vaines,  et  s'il 
tente  on  d'embr.ns-er  oude  circonscrire 
un  ^enre,  un  ^^roupc,  toujours  c'est  en 
s'appuvatil  sur  des  bases  non-seu- 
ffrment  ir.tureiicN  ,  mais  qu'un  couit 
examen  rend  évidentes.  Son  premier 


»7' 


4io 


KVR 


ouvra^^c  fut  le  Muséum  Leskeanuw, 
l.clpzli;,  17S0,  2  vol.  ,  fi{!;.  Karstcn 
\  a  ilcciil,  I  années  dans  un  ordre  sys- 
iémati(jnc,  les  pièces  du  riche  cabinet 
d'Iiistoire  naturelle  laissé  par  Leske: 
le  tome  1^'  contient  les    animaux,  le 
2^  les  minéraux.  Beaucoup  de  remar- 
ques scientifiques ,  qui    sortent   de   la 
lii];nedes  descriptions  vulgaires,  rendent 
ce  livre  précieux.   Celles    qui   accom- 
pagnent les    fossiles   surtout  décèlent 
chez   l'auteui ,   alors  à^é  de  vingt-un 
ans  seulement,  une  science  et  une  sa- 
gacité  rares.   Le   second    volume   du 
Mui,eum  Leskeanum  a  aussi  été  pu- 
blié (en   allemand),    sous  le   titre  de 
Cabinet  de  Natlum-God.  Lcske,  mis 
en  ordre   et  décrit^   etc.,   Leipzio;, 
1789,2  vol.    ln-8".  Karsten  , donna 
ensuite  un  Tableau  synoptique   des 
fossiles  minéraux  simples,  Berlin, 
1791,  In-fol.  ;   tableau   qui,   quoique 
destiné  uniquement  à  ses  élèves  ou  au- 
diteurs,  fut  enlevé  rapidement    et  eut 
dès  1792,àlkrlin,  une  deuxième  édi- 
tion corri^î^ée  et  auo;mentée.  Il  traduisit 
divei  s  ouvrages  du  français  en  allemand, 
par  exemple  le  Traité  du  baron  de  la 
Pevrouse  sur  les  mines  de  fer  et  les 
forf[es  de  fer  du  pays  df:  Faix,  Halle, 
1789,  in-8",  avec  des  remarques;  le 
Journal  du  dernirr  voyage  de  l)o- 
loniieu  au  travers  de  la  Suisse^  Ber- 
lin,  1802,  ln-8";  \t  Manuel  de  mi- 
néralogie deHaiiy,  Leipzig,  1804, 
ln-8*'.  il  édita,  toujours  avec  des  re- 
marques ou  des  additions,  les  Obser- 
vations minéralogi(jurs  et  métal  lut*- 
gi(]urs  de  Kiess  sur  (juehjiies  cantons 
montagneux  de  I  fesse,  I  ierl  i  n .  1791, 
In  8*^;    la  quatiiètne  partie  de  Vidée 
d'un  cours   rompt/ 1  de  matliémati- 
qucs   iGrelfswalde  ,  1791  ,  in-8'\  2^* 
édit.),  par  son  père  le   mathématicien 
Wenceslas,  ainsi   (jue  Y  Extrait  des 
principes  élémentaires    des  sciences 
matlif'inali.jues,  parle  même,  (jreils- 
Asaldc,  1790,  2  vol.  in-S''.  Mais  les 


KAR 

plus  importants  travaux    de  Karsten 
sont  ceux  qu'il  a  disséminés  dans   des 
recueils  scientifiques   de  l'Allemagne. 
Comme  tels  nous  signalerons  d'abord 
ses  Descriptions  ou  (Mractéristi<pies 
d'une   nouvelle  espèce  de  feldspath 
(Journal  des  mines  de  Kœhler  et  Hoff- 
mann ,  1^*^  année  ,  1788  ,  tome  H) , 
de  V Ecume  de  mer  (Observations  de 
la   Société  des  Curieux  de  la  nature , 
1793  ,  tom.  V) ,  de  la  Lépidolithe  de 
liotzna  en  Moravie  (même  tome),  de 
la    IVewclite  (Magasin  de  la  Société 
des  Curieux  de  la  nature,    l'^^  ann., 
1807,    2*"  tri  m.)  ;   des  Sels  (pn   se 
trouvent  indubitablement  et  à  Cétat 
de  sel  dans  la  nature  (Mag.  helvéti- 
que, etc.,    1789),    Ensuite  viennent 
ses  Remarques  oryctognostiques  sur 
Tapathite^    le  prase  et  le  wolfram. 
(Obs.  de  la  Soc.  des  Curieux  de  la  nat. 
deBerhn,tom.  HI,  1789  et  90)  ;  Ifs 
Remarques  sur  une   montagne  de 
serpentine  en  Silésie,  ï Essai  oryc- 
tognostique pour  aider  à  traccrl  his- 
toire naturelle  de  Curane  ,  V Essai 
oryctognostique  pour  l'histoire  natu- 
relle de  l'étain  (même  recueil,  t.  JV); 
deux  articles  sur  F  exploitation  des 
mines  en  France  dans  les  temps  an- 
ciens et  modernes  (Journal  des  mines 
de  Kœhler  et  Hoffmann,  1789,  t.  li, 
1793,  t.  II);  un  beau  Mémoire  cou- 
ronné sur  l'ardoise   argileuse  ,  elc. 
(Magasin  helvétique  d'histoire  naturelle 
de    Hœpfner,  lom.    III,  1788);  des 
Observations  sur  la  montagne  ba- 
saltique de  la  petite  ville  d'/lmœne- 
bourg  dans  l'électorat  de  Mayence 
(Journal   de  Kœhler  et    Hoffmann  , 
1788);    autres    sur  les  mines  d'ar- 
gent de  Kongsberg  avec  un  tableau 
de  leur  rendement  en  argent  fin  de 
\(\'i:\  à   1791   (Journallle  Kœ-hler, 
1793).  Knfin  se  placent    des   exposés 
ler.hnologKjiies  divers,  tels  (|ue  salra- 
duclion   de  la  Théorie  des  machines 
a  feu  de  Maillard  (Magasin  d'orycto- 


KAT 

fnosirdf  ljtm[>e,  3*"  partie,  17811.  i* 
partir,  1787^  ;  Je  la  Mrthoir  ,iu 
comte  Dutn/umiitI  de  imiter  le  t  hur- 
6on  à  briiier  [  Journal  de  kœhler, 
1789.;  Henmrques  sur  la  tnitlur- 
tiutt  (le  rtnti>rugr  de  Rome  de  Liste, 
inliluié:  df".  (.orui  tirres  rtterirurs 
des  foisilei  ^Maj;.  d'orvcl.  de  l<empr, 
1786,  '1"  I  arl  \  Drstriptiun  de  la 
prefM/riitioti  du  rui%*re  aux  mines  de 
Freyhrr^,  opjHirteuant  a  l'elet  teur 
Frédéric  lii,;uste  mtm.  rec. ,  1 786^ , 
et  de%  discii«.M«*ii^  Mir  quelques  |>oiiits 
srieiilifique$,  ronime:  Justfu'a  tfuel 
point  liergmann  a-til  raison  de 
plarrr  le  diamant  ftarmi  les  corps 
inflummoUes  rnêine  recueil,  l'*part. 
178.')];  des  Principes  élémentaires 
de  la  minéralogie  de  Kirauin  (nirme 
recueil,  1787  et  1790);  des  Parties 
constituantes  de  la  lepidolithe  selon 
Klapruth  Journal  de  Ktrîiler,  179*i). 
Nous  ajouterons  encoie  à  celle  liste 
d'articles  les  trois  suiNanIs  :  de  la  né- 
cessité de  la  chimie  pour  Celude  de 
la  mineraltt^ie  et  de  l'influence  t^ue 
la  première  de  ces  sciences  exerce 
sur  la  sen/nde  (Append.  aux  Ann.  de 
chimie  d'Kiell,  1788,  T  part.),  a\ec 
(Juelijues  remarques  sur  la  liaison 
les  maladies  internes  ont  Oi'ec 
'es  recherches  cliimiques  (  même 
recueil  et  mrroe  tome);  de  V.lge  des 
métaux  {\\\\\.  des  min.  et  forj^es  de 
Moll,  180:i  1  ;  de  !'.  tmhre  et  du  gise- 
ment actuel  des  plus  f^ros  morceaux 
de  c'tte  suit f tance  (Journal  mensuel 
de  Berlin,  ISO.'),  déc.  .        l'  — OT. 

K  A  T  A  .\  C:S  l  C 1!  (Matiii  vs- 
PiF.RRK),  ^avanl  hongrois,  né  le  12 
août  1750,  à  Valpo  (comte  de  Vé- 
rœcz)  en  Siavonie,  entra  dans  l'ordre 
des  Franciscains  à  liaci,  reçut  les  or- 
dres le  17  avril  1775,  puis,  se  desti- 
nant à  rinstruclion,  alla  suivre  à  Itude 
les  cours  de  l'iinixersité  rovale  hon- 
groise. I^  ic>uile  Szerdaheht,  profes- 
seur d'eslheiique  en  cet  établissement, 


KA'i 


4^  I 


l 


goûtahcaucoup  son  jeune  auditeur  ;  et, 
%MT  sa  ipcoinmaiidalion,  Kalancsich 
fui  nommé  profes!>eur  d'humanités  au 
gymnase  d'Kssek,  d'où,  en  1789,  il 
pa&&a  au  pmiiase  supérieur  d'Ai;ram. 
H  n'a\ait  encore  mis  au  jour  que  deux 
opuscules  a  celle  époque,  mais  de  si- 
lenrieases  rludes  l'avaient  rendu  pro- 
fond en  nuiiii.smatiqur  et  m  {;éo;;ra- 
phie.  Il  Ir  prouxa  hirniAl  par  une  de- 
mi-douxa<n>*  irouvra;;es  remplis  de  dé- 
tails neu^  ri  importants.  I.a  rrputation 
2ur  lui  \alurrnl  srs  prrrairrs  travaux  le 
l  nommer  profrsseur  d'archéoloj^ie  et 
bibliothécaire  a  l'eslh  en  remplace- 
ment du  savant  Sch(rn>«iesner.  Nom- 
mé directeur  de  labihliothrque  de  Tu- 
nivrrsité,  Kalancsich  mil  à  ces  fonc- 
tions dn  erses  ce  zèle  consciencieux  l'un 
des  liiils  fondamrniaux  dr  son  carac- 
tèrej;  d  lorsque,  rn  1800,  la  faiblrsse 
de  sa  sanlé  Ir  contrai;;ntt  dr  drmandrr 
sa  rrirailr,  qui  lui  fui  accorder  avec  une 
pension  dr  cinq  rrnis  florins,  à  la 
rhar;;e  de  laisser  à  la  haute  école  de 
l'r:>lh  tout  ce  qu'il  avait  écrit  et  tout 
ce  qu'il  relirait  désormais,  il  tint  ï 
honneur  dr  faire  plus  que  raison - 
nablrmrnt  on  ne  dr\ait  altendir  dr 
lui  pour  une  si  modiqur  annuité.  ^  in^l- 
dru\  an>  durant  (à  l'eslh  d'aboi d, 
1800  1809.  ensuite  à  llude,  1809- 
182'J),il  ne  sortit  point  de  son  appar- 
tement, cl  aux  personnes  de  service, 
aux  viNileiiis  ordinaires,  il  n'adressait 
que  quelques  brèves  et  rares  réponses 
qui  Miclljient  rapidement  fin  à  la  con- 
^ersalioll.  (^Ite  parcimonie  de  paroles 
fil  croire  ou  fil  dire  à  quelques  person- 
nes que  Kalancsich  avait  perdu  l'usage 
i\t>  facultés  mentales  comme  de  la  lan- 
j;ue.  Mai.  quand  il  se  trouvait  avec 
des  savants,  et  qu'il  était  question  des 
objets  de  ses  éludes,  la  richesse  et  le 
feu  de  son  lan"ai:e  démontraient  assez 
rpmbien  son  indifférence  en  matière  de 
frivolités  éiail  loin  d'être  l'impuissance 
d'un  esprit  usé.  Ce  n'est  qu'à  la  fin  de 


4^1 


KAT 


sa  vie,  et  quand  il  fut  plus  que  septua- 
génaire, qu'il  se  permit  de  sortir  parfois 
de  sa  chambre  pour  se  ranimer  en  respi- 
rant le  o;rand  air.  Il  mourut  à  Bude,  le 
2i  mai  1825.  Ratancsicli  était  alors  le 
Nestor  de  la  littérature  honp^roise  et 
son  nom  était  l'objet  d'une  vénération 
universelle.  Ses  manuscrits  furent  dé- 
posés, suivant  la  promesse  qu'il  en  avait 
faite,  à  la  bibliothèque  de  Pesth  d'où 
malheureusement  il  ne  semble  pas  qu'ils 
doivent  être  exhuuiés.  On  ne  peut 
douter  pourtant  qu'ils  ne  contiennent 
une  (ouïe  de  renseio;nements  précieux. 
En  effet,  la  plupart  roulent  exclusive- 
ment sur  la  géographie  ancienne  ;  et, 
comme  l'auteur  ne  se  mit  à  les  rédi- 
ger qu'à  l'âge  de  plus  de  cinquante 
ans,  c'est-à-dire  après  toute  une  vie 
passée  à  cette  étude  ,  comme  d'un 
autre  côté  il  embrassait  des  époques 
et  des  régions  diverses  ,  ce  qui  ,  en 
lui  donnant  l'habitude  de  la  géogra- 
phie comparée  ,  fournit  un  terrain 
solide  et  vaste  aux  recherches  spé- 
ciales qui  gagnent  dès-lors  en  certi- 
tude et  en  profondeur;  comme  enfin  il 
)•  traite  beaucoup  de  points  relatifs  aux 
pays  qu'il  habite,  aux  races  dont  il  fait 
partie,  points  qui  la  plupartsonl  encore 
environnés  d'une  obscurité  profonde, 
les  fruits  du  labeur  opiniâtre  d'un 
quart  de  siècle  ne  peuvent  guère  mériter 
le  dédain  et  l'oubli.  11  serait  à  souhai- 
ter du  moins  que  quelques-uns  des  nom- 
breux critiques  dont  l'Allemagne  abon- 
de eussent  connaissance  des  legs  iné- 
dits de  Katancsich,  et  en  donnant  de 
nouvelles  éditions  des  auteurs  qu'il 
commenta  y  joignissent  l'analyse  des 
opinions  émises  par  lui  sur  chaque 
détail  de  quelque  gravité:  on  ex- 
trairait ainsi  la  substance  de  ses  ma- 
nuscrits sans  qu'il  fallût  les  publier  en- 
tièrement. Voici  la  liste  méthodique 
de  ses  ouvrages,  dont  plusieurs  sont 
très-volumineux:  I.  Mosis  geogra- 
pliia    commentario   illustrala.    II. 


KAT 

Homeri  geographia  commentario 
illusirata.  111.  Ileruâuti  geographia 
commentario illusl rata.  IV.  Straho- 
nis geographia  commentario i/hisira- 
ta.\ .  Plinii  geographia  velutpromp- 
iuarium  anti(piœ  geographiœ  singu- 
lari studio  eUthorata.  Cet  intitulé  seul 
explique  à  quel  point  un  tel  travail  doit 
être  intéressant  :  les  quatre  livres  consa- 
crés par  l'encyclopédiste  romain  à  la 
géographie  sont  peut-être,  de  tous  les 
traités  géographiques  que  l'antiquité 
nous  a  transmis,  le  plus  riche  en  noms 
propres  ;  et ,  quoiqu'il  n'y  manque  ni 
fautes,  ni  doubles  emplois,  ni  lacu- 
nes, il  n'en  est  pas  qui  prête  mieux  à  la 
science  du  commentateur.  D'ailleurs  il 
s'y  trouve  des  parties  traitées  de  main 
de  maître  et  sur  des  documents  offi- 
ciels ;  enfin  par  le  temps  il  se  trouve  placé 
entre  les  dernières  modifications  de  la 
géographie  ancienne  et  la  géographie  pri- 
mordiale, mais  beaucoup  plus  près  de 
celle-là  que  de  celle-ci,  autant  de  rai- 
sons pour  donner  matière  à  -de  riches 
développements,  à  des  rapprochements 
féconds.  VI.  Geographia  Ptolemœi 
ad  grœcum  exemplar  commentario 
iUustrata.  VU.  Istri  adcolarum  il- 
lyrici  nom  i ni  s  geographia  vêtus.  Le 
sujet  est  un  des  plus  épineux  qui  puis- 
sent être  abordés,  et  un  de  ceux  qui  ne 
peuvent  être  traités  avec  succès  qu'aux 
enviions  ou  au  sein  même  de  l'illyrie. 
VIII.  Adversaria  philologica  varia 
itinerum  prr  Jlungariam  ,  Slavo^ 
niam,  Croatiam  susceptorum.  IX. 
Memoria  Belgradi  olim  Singiduni. 
X .  Memoria  l^alpo  arcis  oppidiy  dy- 
nastiœ,scriptoris.  XI.  Tabulœ  geo- 
graphicce ,  chorographicœ  propria 
manu  depictœuna  cum  tabula  TheO' 
dosii  s  eu  Peutingeri.  XII.  Prolusio  in 
litteratiirani  œvi  medii  ;  de  Denario 
hanali,  Cyrilli  char act ère  insigni  ; 
de  tilteratura  (Cyrilli  ;  de  litteratura 
(AagoUtica  ;  de  casula  Dioi  Stepha- 
ni  liungariœ  régis;  de  cruce  aurea 


KAl 

Giseta  rtgimr ,  nunnnis ,  tigillis ,  aliis  • 
ifue  '  tulis.  Mil. 

t.t)  r  I   ad    Irgis 

ftlululu^iir  i:u^,i.iii  /usurnsi  e.nii- 
tufu.  \{\  .  ])e  /w»»  w' ///)  Hi  II  lihriUiS. 
\V.  luf  iru.!  u   (le  la 

Grugrup/n'r  ar  ,  j.  vuri- 

ius  gnrn's  ri  vunctute  trt  tiunis  ' . 
X\  1.  l  lie  tiadurtiiiii  en  bmiiiaque 
(le  la  Hihle  sur  l'rjilion  Je  la  \  ul- 
fiale  (  adhih.  gratis  et  heiirttuis 
Juniib.),  (JiMiit  à  tes  ou%ia^r^  iinpi  i> 
mes,  (ijusieurs  ont  trait  au&»i  a  la  ^to- 
grapliie,  mai&  trois  se  rerrrrnt  à  la  nu- 
nii>maiu|ue  ou  aui  anliijuiie^,  et,  cl)u>e 
qui  pouna  surpiriiilre,  un  quatrième  >e 
compose  de  por^irs  tant  latines  que 
sla\onnes.  C'r^t  relui  qui  a  pour  litre: 
t ruitus  auti4mruiUs  in  jugis  J\ir- 
nassi  fHumunii  Irtti,  A^ram  ,  ITIM, 
in-H  '.  Knsuile  viennent  :  1.  lenlu- 
mrn  puUiium  dr  numisnititua 
utrius(fur  srmestrit,  IVtli  ,  I7*J7, 
in-8".  ll.7o5.  Ekkel  Elcmeutu  nu- 
misinutint  grnnuniio  srrmcnr  in 
latinum  pro  ustt  uuditoruin  ittins- 
LUa,  lluile,  l7Uy,  in-8  .  111.  liis- 
srrtatio  de  rttiunirm  niilliuriu  ad 
t.ssfkum  rrftrrtu ,  lUsr L ,  1 7 H 1 ,  i n - 
\";  !*•  édil..  Apam,  179V.  in-V  . 
1V\  Orlis  antitfuus  e.x  iaiuLi  iti- 
nrruria  J'hriMiosii  inifKrtiliins  sru 
Peutingeri  ad  sy.sitnta  grugra/fJtiœ 
redaitus  et  cotnnirntariu  illustra- 
tits^  liude,  lS2i-*2'>,  2  \ol.,  ouvrage 
clasMque  pour  Irtuile  «le  la  ^eo°iapliie 
ancienne,  et  à  Toccasion  d(i(|ui'l  plus 
tard  il  composa  les  cartes  dont  nous 
avons  trou\é  la  mention  dans  $e5  ma- 
nuscrits. N  .  Dr  Istru  ejusijue  adrolis 
tommentutiu,  liude,  17HK,  in-V". 
Katanrsirh  Neul  v  démontrer  que  les 
indigènes  de  TllUrie  appartenaient  ï 
la  famille  tlirace  et  il  suit  le  développe- 
ment deselran;;ersqui  postérieurement 
Tinrent  se  Gxer  en  IIKrîe,  depuis  leur 
établiNsement  )us(prà  nos  jours  avec 
des  détails  sur  la  langue  et  la  littéra> 


RAT 


4i3 


ture  de  ces  nouveau-venus.  VJ.    ïilri 

Il  '     '  illyriti  nuiiiinis  get^gra- 

f.  iphua^    i.udr.   ISJÔ,    m 

\  ,  qu  li  \.\\:  laiit  pas  ronfiuidio  avec  le 
n"  VII  «le-  nviiiMMr'is.  VU.  Spécimen 
f  '  Itnr  l\iununio- 

/,         ^  ,  ..-V     V|||./,i 

veterem  Lroaiaruin  fhitnutn  inda- 
gaiiu  philtdu^ita^  A^fani,  17 '.M)  ,  m- 
8**.  On  lui  doit  ausM  un  ou\ra^e  en 
langue  »lavonne  lotilulc  :  Poskunitsa 
l'ana  i  ihalic,  l'Use k,  17H8,  in-8*'. 

V—iYl. 

KATIIH  (le  capitaine) ,  roatlie- 
malicien  an;ilais,  était  né  à  lUi^lid.  le 
Iti  a\rii  1777.  On  lui  doit  un  liv- 
^lomelrc  très-sensible  dont  il  a  donne 
la  descr:plioii  dans  Ir*  Asiotic  re- 
seanhes.  Se»  expénencfv  pimr  dé- 
terminer la  lon;;ueur  du  pendule  à 
secondes,  m^  operati<»ns  tnj;nnoi«e- 
Iriques,  etc.,  S4)nt  Itien  conllue^.  Il 
réunissait  au  plu»  haut  de'^re  la  pa- 
tience qu'e\i;ie  la  mécanique  prati- 
que, la  finesse  d'observation,  à  une 
force  de  raisoBBcment  peu  ordinaire. 
1^  plupart  dctaoïiènies  de  TAuj^le- 
teire  et  du  continent  le  comptaient 
parmi  leurs  membres,  et  l'empereur  de 
UuNsie  le  décora  de  l'ordie  de  Sainte- 
Anne,  dans  le  ^o>a^e  qu'il  fit  à  Lon- 
dres en  IKI  V.  1j  |.lupart  des  tra\aux 
dekaleront  rlepiiltlie>dan^  les  Tram- 
arliuns  philiisupJiiijues  de  la  soriété 
ro>ale  de  Londres.  Il  mourut  dans 
celle    ville   le  'iC.  a%ril  IS'iô.        Z. 

K.V'IO.XA  (Ktifnnk),  irès-l»on 
historien  lion^rois  .  était  de  Papa, 
dans  le  comilat  de  Veszprim.  Ne  en 
173J,  de  parents  catholiques,  il  fut 
élevé  au  collè;;e  de  sa  ville  natale  par 
les  jésuites,  et  jeune  encore  il  entra 
dans  leur  ordre  dont  bienlùt  il  devait 
voir  la  siip|»ression  :  mais  la  dissolution 
de  la  société  ne  Tempèclia  d'obtenir  ni 
la  diaire  d'éloquence  sacrée  ni  celle 
d'histoire  a 'r>  mail,  ni  d'être  ch.inoinc 
de  Colocza  et'abbé  de  Badrog  Monos- 


4M 


K\T 


sor.  Il  inoiinit  en  1811.  Ses  ouvra^Cr-, 
à  l'exception  de  quelques  discours  de 
cérémonie,  sont  tous  en  latin.  Ce  sont 
I.  Synopsis  chronologica  Instoria- 
riini  ad  suhleoandam  memoriam 
historicophi/arum,  Tyrnau  ,  1757, 
1773,  2  vol.  in-8°.  II.  Jlisforia 
critica  primorum  llungariœ  (hicum 
exfide  d OUI estîr arum  et  exteronim 
ronrinnnta,  Pcslli,  1778.  lil.  His- 
toria  critica  rrgum  Hiingariœ  sfir- 
pis  Àrpadianœ  ,  Pcsth  ,  1779-80, 
3  vol.  I\  .  lïistoria  critica  rcgiim 
stirpis  /jusfriacœ,  2'2  petits  volumes, 
le  r'  et  le  ^"^  à  Kolosvar,  1790-97, 
les  20  suivants  à  Kude,  1792-1801. 
Ainsi  que  Pray,  Kaloua  dans  ces  ou- 
vrables s'est  trop  laissé  dominer  par  le 
plaisir  de  prouver  que  les  Madjiars 
descendent  des  Huns  d'Attila.  Ce  n'est 
pas  que  l'opinion  soit  complètement 
fausse  à  notre  avis,  mais  elle  a  besoin 
d'être  précisét»  et  restreinte.  Il  fallait 
d'ahord  bien  dire  ou  bien  comprendre 
que  le  fond  de  la  nation  des  Huns  n'a- 
vait rien  à  démêler  avec  l'Asie,  comme 
trop  long-lemps  on  Ta  répété,  et  que 
les  II  ins  ne  sont  autre  cliose  que  les 
Finnois  orientaux.  Ceci  posé,  bien  des 
objections  faites  outre  la  parenté  des 
noms  Jfiin  et  Hongrois,  à  cause  de 
l'aspect  iinnois  de  la  langue  madjiare, 
s'évaporaient  d'elles-mêmes,  ou  plutôt 
se  convertissaient  en  ai-^uments  favora- 
bles à  l'opinion  de  Kalona.  Il  fallait 
ensuite  ne  pas  tant  s'appesantir  sur 
Attila  même,  et  discuter  plus  fondamen- 
talement les  caractères  par  lesquels  se 
différencient  les  unes  des  autres  les  di- 
verses peuplades  bu  n  niques  <*t  fin  ;ii(jues, 
et  biei;  saisn  ,  bien  suivre  de  siècle  en  siè- 
cle l'individualilé  de  la  lioidc  madjiare 
parmi  les  autres.  V.  Kpitotne  chrono- 
logica rerum  hungaricarum ,  trans  - 
syhanicanim  et  illyricaruni,  Hude, 
179G-97,  .3  vol.  in-8°.  VI.  IHs- 
toria  metropolitanœ  colociensis  ec- 
clesiœ,  Kolocza,  1800,  2  vol.  in-8''. 


KAT 

VII.  Une  édition  de  la  Ilungaria 
cum  suis  regihus  de  Tburotz,  augmen- 
tée et  continuée  jusqu'au  milieu  du 
XVIir'  siècle,  Tyrnau,  1758,  ln-8^ 
L'histoire  des  rois  de  la  race  d'Anjou, 
de  Luxembourg  et  de  Jagellon,  qu'on 
s'attendrait  à  trouver  ici,  n'a  pas  été 
traitée  par  Katona.  Il  a  publié  sous  le 
voile  de  l'anonyme  :  Vindiciœ  cirri 
Jlunguriœ  contra  suppliceni  lihrlluni 
Samuelis  iV^oy,  Bude,  1790,  in-8**; 
Lan^i  pseudo-catholico  detracta  , 
(p4i  declarationem  statuum  catho- 
iicorum  Posonii  commentus  est  , 
anno  1791 ,  in-8°. — Un  autre  Kato- 
na [Eméric  d' Abaujoar  ou  Vijalu), 
né  vers  1572,  n'est  connu  que  com- 
me controversiste  protestant.  Nommé 
au  sortir  du  gymnase  luthérien  de  Pa- 
tak  recteur  de  l'école  de  Szepsi,  malgré 
sa  jeunesse,  il  quitta  ce  poste  en  1595, 
pour  aller  demander  à  l'Allemagne  une 
instruction  que  sa  patrie  ne  pouvait 
lui  donner,  et  il  passa  deux  ans  et  demi 
à  l'étude  de  lathéolo;^!e,  soit  à  l'univer- 
sité de  Witlenberg,  soit  à  celle  de 
Heidelberg,  allant  ainsi  puiser  tour  à 
tour  à  la  source  luthérienne  et  à  la 
source  calviniste  :  il  s'y  concilia  l'amitié 
de  ses  maîtres  Keckermann  et  J. -Phi- 
lippe Parée.  De  retour  en  Hongrie, 
tout  en  acceptant  la  direction  du  gym- 
nase de  Patak,  il  entra  dans  le  ministère, 
parut  en  qualité  de  prédicateur  à  la 
cour  de  George  V^  Hagoczi,  prince  de 
Transilvanip,  mais  s'en  dégoûta  bientôt 
et  revint  à  S/.epsi  où  il  fut  pasteur 
adjoint.  Nommé  ensuite  premier  pas- 
teur à  Cœncz,  puis  à  Keresztes ,  il  ve- 
nait de  se  rendre  à  cette  dernière  des- 
linalion,  lorsqu'il  expira  en  octobre 
1610,  dans  sa  trente-huitième  année. 
11  promettait  à  l'église  protestante  un 
de  ses  plus  fermes  champions.  Ses 
co-religionnaiies,  entre  autres  David 
(y/.iiinltinger,  dans  son  Spécimen  Hnn- 
gariœ  litlrratœ,  lui  ont  donné  les  plus 
grands   éloges.  On    a  de  lui  :    I.  Un 


KF.A 

\ri\\é  du  libre  arltitrr  en  .'>  \\\.,  tw 
lioit^rois  (c'en!  une  répon>r  à  des 
tlieies  de  Saro«i).  II.  l  ne  disser- 
lalinu  tir  l*atrum ,  lonciliarum  et 
iratiitionum  iiurton'/air  rira  /iiJri 
(iognmla^  ruitus  iJrm,  morrstfiir  tu- 
%'rndi  ,  où  il  pa^se  en  rexiie  le  dot^me, 
riiitloire,  b  disripline  et  la  morale,  et 
où  snu\ent  les  injures  se  mêlent  aux 
raisonnement  con^reTaiiloriir  papale. 
III.  \.'.lnli)nif)ismus.Vrinf(oT\  sur- 
le-Mein,  1(»1  I ,  où  l'inxectivr  déborde 
encore  da\.inlaj;e  et  qui  n'en  a  mo!>- 
soniié  que  pl'i-  dr  Imianpes  de5  enne- 
mis de  !'■  1  ne.  A  !a  trte  de 
cet  ouvr.i^  ,  rne)  setrou>entun 
Dîsrours  prrtiminaire  t\  une  ^sotirr 
sur  lu  vir  tir  ftmtrur  par  Daniel  (et 
non  p.ir  Je.in  Plolippe!  l'arme.  V — OT. 
K  K  A  .\  (KniioNn),  artenr  an- 
ffm,  naquit  à  Castle-Court  dans  le 
romié  de  F^ire^ter  ,  suivant  l'opi- 
nion la  plus  commune,  en  1787  , 
mais,  selon  quoiqur.-uns  ,  en  1700. 
Il  était  peiieiré  de  l'idée  qu'il  pou- 
vait être  fjls  naturel  du  duc  de  Nor- 
folk. Oliii  qui  (lait  connu  pour  «on 
père  fut  loin  de  produire  la  mrme 
.«sensation  d.ins  le  monde  qu'un  fn-re 
tailleor  qu'il  avait,  et  qui,  plus  lard, 
re  lit  remarquer  comme  venlnloque  , 
grimacier,  etc.  Kdinond  Kean  fui  em- 
plové,  dès  son  plus  jeune  a^e,  au  lliéâ- 
tre  de  I)nir>-I.ane  et  v  joua  dans 
des  pantomimes  les  r(\les  d'enfant.  Il 
en  fui  chas. é  pour  une  maladresse  qui 
excita  contre  lui  la  colère  de  Kemlde; 
mais  il  avait  eu  le  temps  de  concevoir 
du  ;:;oùl  pour  le  ihéalrc  ,  d'ap|»ren(lre 
même  à  reciter  des  scènes,  de  manière  à 
faire  augurer  favoral>lement  de  son 
futur  talent.  Sa  mère  que,  seule,  il 
avait  conservée,  pensa  que  c'élail  le 
cas  de  lui  donner  les  premiers  éléments 
de  l'éducation;  mais  à  bien  dire,  le 
lhé.ilre  fut  presque  sa  seule  école ,  et 
Shalspeareson  unique  lecture.  Knnuvé 
de  ce  qu'on  voulait   le  forcer  à  faire 


KEA 


4i'i 


d'autres  études,  et  pressé  de  se  sous- 
traire aii\  .is^ujétissements,  aux  sévéri- 
tés scolasimurs,  il  s'embarqua,  comme 
mousse,  à  imrd  d'un  vaisseau  qui  se 
rendait  k  Madère  ;  mais  soit  maladie  , 
soit  dé«^oùt,  il  eui  l'adresse  et  la  vive  sa- 
tisfartion  de  se  faire  ienvo\er  au  bout 
de  fort  peu  de  temps.  Kevenu  en  ,\n- 
pleterre  ,  il  cherclia  un  peu  plus  sé- 
rieusement à  s'instruire.  .A  sa  consti- 
tution débile  en  apparence  avait  suc- 
cédé une  xi^ueur  assez  grande.  S'a- 
baiidonnant  à  ^t\  penclianis  et  à  ses 
li.ibi!iides  d'indépendance  ,  au  lieu  de 
piendre  un  état  utile  ou  honorable, 
il  s'exerça  à  des  tours  de  force  à  pied 
et  à  c)ie\al  et  il  v  réussit  fi>rt  bien"; 
il  >  .irqiiit  même  de  la  rrputation.  in 
acci«!ent  qui  lui  fractura  les  deux  jam- 
bes renoiMela  ce  qui  l'avait  afiaibli 
physiquement  dans  ses  premières  an- 
nées, ei  il  trouva  qu'il  n'avait  rien  de 
mieux  à  faite  désoimais,  après  avoir  soi 
fjné  sa  «ianté,  que  de  s'attacher  entière- 
ment aux  jeux  de  la  srene.  Il  n'élail  en- 
core, à  vrai  dire,  qu'un  enfant  ;  mais, 
protégé  par  une  actrice  de  Drurv-f.ane, 
il  fut  recommandé  au  directeur  iVun 
pelil  théâtre  du  comté  d'Nork,  et  ne 
se  tira  pas  mal  de  quelques  rôles  peu 
importants  de  comédies  et  de  tra;;.'- 
dies  dont  on  le  char;;eail.  Il  chanj^ea 
bienlAt  de  troupe  et  en  ^int  même  h 
s'essaier  dans  pi;  sieurs  villes  comme 
acteur  el  comme  chanteur,  car  il  avait 
appris  et  bien  appris  la  musique.  Des 
diflirultés  de  plus  d'une  nalure,  la  mi- 
sère, le  désespoir  se  rencontrèrent 
quelquefois  sur  son  cliemin  ;  mais  l'en- 
ihou'iasme  de  sa  profession  dominant 
tout  riiez  lui,  lui  faisait  tout  surmon- 
ter. Il  n'y  avait  pa;,  .î  celle  époque, 
dans  le  voisinage  de  Londres,  un  vil- 
la;:;e  qui  ne  possédai  sa  troupe  de  co- 
médiens, kean  devint  membre  de 
ce  qu'on  appelait  tarrowlissemenl 
thrtitrtil;  el  ,  dans  sa  part  des  pro- 
duits ,    il   avait  tout  juste  trois  scheU 


4^6 


KEA 


llngs  et  six  pences  par  semaine,  somme 

sur  laquelle  il  lui  fallait  vivre  et  se 
roiiniii   de   tout    sans  exception.   Il  a 
souvent  répété,  lorsqu'il    était  arrive 
à  être  tout  à  la  fois  riche  et  célèbre, 
que  jamais  il  n'avait  été  plus  heureux 
que  dans  cette  première  période  de  son 
existence  ;  et  cependant  il  eut  encore 
à    subir   toutes    les    épreuves    de    la 
pauvreté,   de  la  faim,  du  décourao;e- 
ment.  Userait  trop  lon^  et  peu  intéres- 
sant de  le  suivre  partout  où  il  exerça, 
avec  des  chances  diverses,  sa  profession 
favorite.    Ce  fut  à   Cheltenham  qu'il 
s'eno;a^ea  dans  les  liens  du  niariac^e  , 
unissant  son  sort  à  celui  d'une  actrice, 
Irlandaise  de  naissance,  et  qui  ,   soit 
qu'il  y  eût  ou  non  de  sa  faute,  soit  que 
sa  part  fût  plus  ou  nwins  grande  dans 
les  torts  du  ménage,  ne  le  rendit  ja- 
mais heureux.  11    était   alors  âgé  de 
vingt-deux  ans.  Au  mois  de  novembre 
1790,  il  se  trouvait  à  Waterlord  en 
Irlande  ;  là,  sur  un  théâtre  qui  n'était 
pas  à  beaucoup  près  du  premier   or- 
dre, il  fit   partie  d'une  troupe  d'ac- 
teurs  nomades  ,  et  y  fut  tout  à  la  fois 
chargé  de  la  mise  en  scène,  auteur  de 
pantomimes,  premier  chanteur,  pre- 
mier acteur  tragique,  premier  mime  et 
premier  arlequin.  11  dansait  même  en- 
tre \ps  deux  actes  sur  la  corde  tendue. 
De  plus,  il  donnait  en  ville  des  leçons 
d'escrime  et  deboxage.  Mais  dans  la  tra- 
gédie il  se  distinguait  déjà  par  des  po- 
ses, par  une  altitude  Gère  cl  au  besoin 
par  de  la  grandeur.  Sheridan    Know- 
les,qui  devint  depuis  un  auteur  dra- 
matique   distingué  ,    était  aussi  mem- 
bre de  cette  association   misérable  et 
ignorée    de   pauvres  comédiens,  pour 
lesquels  il  composait  même  des  pièces. 
Les  officiers  de  la  garnison  de  Wa- 
terford,  que  Kean  contribuait  à  désen- 
nuyer, trouvaient  en  lui  un  bon  gar- 
çon, spirituel,  sans  prétentions  et  sans 
malice.  Un  médecin  qui  habitait  Ilar- 
row  lui  conseilU  de  se  rendre  a  Londres 


KEA 

et  lui  fournit  les  moyens  de  s'y  faire 
connaître,  car  on  avait  eu  le  temps  d'ou- 
blier l'acteur  enfant  qui  avait  figuré  dans 
quelques  pantomimes.  Petit  de  taille  , 
ayant  une  figure  assez  régulière,  mais 
sans  noblesse  caractéristique  ,  seule- 
ment, et  comme  par  compensation, 
une  physionomie  mobile  et  expiessive, 
enfin  possédant  un  organe  qu'il  avait 
besoin  de  travailler,  il  ne  prévenait  pas 
au  premier  abord  par  ses  moyens  ap- 
parents. Ce  fut  en  janvier  1814  qu'il 
passa  des  théâtres  de  province  sur  celui 
de  Drury-Lane.  Il  était  obscur  et 
fier  :  il  croyait  à  son  génie  et  dédai- 
gnait d'en  parler.  Il  débutait  sans 
laveur  anticipée  du  public.  Les  an- 
goisses de  l'indigence  ,  le  désir  de  la 
fortune  ,  une  espère  de  rage  concen- 
trée ,  le  pressentiment  d'une  haute 
réputation  dans  l'avenir,  tout  concou- 
rait à  rendre  cette  soirée  une  grande 
époque  de  sa  vie.  Depuis  le  jour  qui 
avait  été  fixé  par  le  directeur  pour 
le  faire  paraître,  on  avait  vu  un  hom- 
me petit,  massif  et  musculeux,  errer 
conmie  une  âme  en  peine  dans  les 
corridors  et  dans  les  galeries  de  la  salle, 
saluer  ses  futurs  camara(ies  avec  une 
feinte  mais  noble  humilité  ,  écouter 
avec  une  modestie  affectée  son  chef 
qui  lui  conseillait  de  se  tenir  dans  les 
coulisses  pour  étiidier-4e  jeu  des  autres 
acteurs,  lesquels,  en  attendant,  ne  lui 
épargnaient  aucune  raillerie.  Il  se 
renfermait  dans  un  silence  obstiné,  et 
dans  un  genre  de  politesse  hautaine 
qui  ne  disposait  personne  de  la  troupe 
en  sa  faveur.  Elle  était  médiocre  , 
cette  troupe,  et  une  vieille  pièce  de 
Shakspeare ,  le  Murcliand  de  Ve* 
nisc^  n'offrait  jias  un  bien  grand  inté- 
rêt à  un  public  peu  nombreux,  dans 
une  soirée  froide  par  elle-même.  Kean 
devait  entrer  en  scène  à  huit  heures 
et  demie,  dans  le  moment  où  ceux  des 
spectateurs  qui  paient  à  moitié  prix 
viennent  remplir  les  galeries  et  y  ap- 


porteoi  leurs  habitude»  de  \i  rie  On 
clicrcltait  inuiilriuciit  denirrc  le  fuiul 
du  llirâirc  rt  dans  s^  \o^t,  Slnlorl 
itu  )dul(^t  kcûu,  déjà  d  t\n\  eu  scriir. 
Il  s'ruil  tenu  prr5  de»  rouliN5C>,  at 
tendant  la  i relique.  <•  OuOn  me 
M  laisse  seulement  me  placer  devant 
M  la  rampe  «  avait- il  dit  au  dincleur, 
m  et  je  muntierai  ce  que  c'est  que 
«  Shakspeare  et  ShvlucL  >»  Kn  ef- 
fet ,  celait,  dit  le  romancier  Tho- 
mas (îratlan,  un  de  se>  biographe», 
le  véritable  juif  du  rooven  a;;f  qu'il 
a\ait  reproduit  ,  tel  q:ie  le  ^r.iiid 
peintie    *1  l'axait    eropiuiile 

au&  Iradit  ire^  de  >nn  temps, 

un  juif  seli  il  Un  ui<rur»  asuliques  et 
selon  le»  idee>  de  l'Oiient,  ou  le  sanp 
et  la  vie  de  l'homme  ont  si  peu  d'im- 
portance. Il  ofirail  un  »\mbole  vi\ant 
de  l'anathème  et  de  la  honte  qui  frap- 
pent les  Israélites  sous  la  loi  chié- 
tienne,  un  reprc»etilant  de  l'usure  vo- 
race,  un  l^pe  de  la  r.i^e  atroce  que 
font  naître  duns  l'Orne  de  longue»  et 
iropLcahles  persérulions.  Des  Ion,  ou 
ne  devait  plus  s'elouner  de  la  férocité 
de  sa  vengeance  ,  et  de  celte  once  de 
chair  d'un  jeune  sei;;ueur  endette  qui, 
étant  placée  dans  la  balanrr  comme 
garantie  d'un  en^at^ement  pecuniare, 
ne  devait  même  paiailre  qu'un  contre- 
poids à  peine  ^ufti>ant  au&  opprobres  si 
lun^-teraps  souifeits  par  la  nation 
juive,  kean  \enait  donner  à  ce  per- 
sonnage une  phvsionomie  qui ,  seule, 
pouvait  rendre  la  (grande  pensée  du 
poète  créateur.  Les  auditeurs  vulgaires 
assemblés  pour  jujier  le  nouveau  tra- 
gédien furentsaisi»  d'admiration  quand, 
d'une  voix  tonnante  et  profonde,  il  s'é- 
cria :  «  lia.Nsanio,  Uassanio ,  que  je 
•«  puisse  seulement  te  trouver  en  défaut , 
M  et  ma  vieille  haine  s'assouvira.  >»  Bien- 
tôt la  tri\ialitc  du  ton  et  de  la  \oix,  l'ac- 
cent à  demi  burle>que  et  à  demi  tra- 
f;ique  de  l'usurier  israélite,  excitèrent 
e  rire  général ,  et  firent  éclater  dc« 


KEA 


417 


applaudissements <  >an&  fin.  De  la, 
i;rande  Mirpii><  des  acteurs  qui  ^'c- 
laienl  tant  1110  |ue>  du  petit  comédien 
de  province,  et  qui  n'avaient  nulle- 
ment coni|ile  sui  l'enthousiasme  tou- 
jours croiNsanI  du  public,  dans  cette 
circonstance.  Il»  ne  négligèrent  rien 
(>our  amortir  l'effet  produit.  1^  second 
début  de  Kean  n'eut  heu  qu'une  se- 
maine après  ;  mais  iUrhanI  111  , 
iUlifltu  ,  liumro,  Madirlh,  asMirè- 
rent  sa  popularité.  Toutefois  ,  il  n'a* 
vait  pas  cessé  d'éprouver  quelque 
«qipoMiion,  parce  qu'il  ap|>orlail  dans 
.sa  manière  de  jouer  de^  innu>aliuns 
très-remarquables  et  une  véritable  ori- 
ginalité. Mais  avant  peu  il  eut  ren 
verNé  la  vieille  école  de  kemble.  I.a 
nii|r^le  fut  remplacée  par  la  passion,  la 
di^nilc  par  I  rlan.  par  la  vigueur  ;  le 
calme  un  peu  froid  par  une  énergie 
prononcée.  Il  avait  ouvert  un  nouxeau 
monde  aut  veum  des  amateurs  éclairé» 
de  l'art,  l/emotion  causée  par  une  fa- 
çon de  sentir  et  d'exprimer  si  peu 
commune  ,  par  un  talent  tellement 
hors  de  ligne  ,  vainquit  tous  lex  obsta- 
cles. Il  reus>it  dans  la  comédie  comme 
dans  la  tragédie;  enfin  le  |>auvre  acteur 
qui  na.:uère  portail  si  tristement  son 
petit  paquet  dans  les  rues  d^  Londres, 
passade  d*ux  livres  sterling  de  paie 
par  .semaine,  sur  le  théâtre  de  llav- 
.MarLet,  à  cinquante  livres  sterling 
par  représentation  au  même  théâtre, 
et  recueillit  ,  quelques  années  après  , 
dix  mille  livrfs  sterling  par  année. 
Il  triompha  pendant  de  longues  années 
sur  la  scène  ;  il  eut  des  valets  en  li- 
vrée, des  armes  antiques  et  des  meu- 
bles incrustés  d'or.  Il  est  peu  d'eni- 
Trements  d'amour  -  propte  coin[>ara- 
bles  à  celui  que  procurent  une  grande 
existence  théâtrale,  l'admiration  ,  l'a- 
mour même  du  public,  et  les  jouissan- 
ces de  la  fortune  qui  s'ensunent. 
Cependant  au  fond  Kean  était  resté 
le  même  ,   toujours  bon  compagnon , 


4iH 


KEA 


bon  vivant  et  plein  de  reconnaissance 
pour  ses  bienfaiteurs.  Nous  n'entre- 
prendrons pas  de  raconter  quel  usao;e 
il  fil  do  ce  que  l'on  pourrait  appeler 
ses  trésors,  par  besoin  d'excitations 
journellement  renouvelées  ,  et  de  ces 
sensations  violentes  qui  devaient  plus 
tard  le  conduire  à  l'état  d'insanité  de 
ses  dernières  années.  Sublime  comme 
acteur,  il  avait  toutes  les  prétentions 
des  talents  qui  lui  manquaient,  et  il  y  en 
eut  peu  où  il  ne  s'essavât,  sans  succès  le 
plus  souvent.  L'instinct  dramatique 
des  caractères  passionnés  était  en  lui  ; 
mais  sa  supériorité  inteilectnelle  n'al- 
lait pas  plus  loin.  Il  vivait  parle  pu- 
blic et  pour  le  public.  Toutes  ses  ac- 
tions n'avaient  qu'un  but ,  étonner. 
La  rè»le  générale  de  sa  conduite  était 
de  faire  précisément  le  contraire  de  ce 
que  l'on  attendait  de  lui.  Il  prit  mal- 
heureusement du  goût  pour  la  vie  des 
tavernes  et  pour  les  réunions  libres. 
Ces  mauvaises  habitudes  et  le  goût 
de  l'étrange  ,  du  bizarre  ,  détrui- 
sirent pour  lui  talent  et  moyens  de 
suffire  à  ses  dépenses.  Ce  n'était  pas 
qu'il  n^aimàt  encore  à  recevoir  chez 
lui  quelques  hommes  de  la  bonne  com- 
pagnie; mais,  aussitôt  qu'il  avait  franchi 
Icseuildcsa demeure  et  quittésa famille, 
il  n'avait  plus  de  rapports  qu'avec  la  lie 
du  peuple,  se  souvenant  toujours  qu'il 
avait  commencé  par  être  peuple  hil- 
niéme.  lise  plaisait  toujours  à  boxer; 
enfin  il  :-e  déclarait  protecteur  de  tout 
ce  qui  est  exiraordinaireen  fait  d'exer- 
cices corporels.  C'était,  à  huit  heures 
du  soii-,  un  héros,  le  représentant  des 
pensées  et  des  sentiments  les  plus  éle- 
vés. A  minuit  il  devenait  l'homme  de 
la  taverne,  des  contes  grivois,  de  la 
bacchanale  grossière.  J.e  lendemain 
matin  ,  il  admettait  à  son  lever  les 
voyageurs  étrangers,  les  ducs  et  princes, 
et  puis  il  retombait  de  nouveau  dans  les 
jeux  d'athlètes  de  bas  étage;  ce  qui  ne 
l'empêchait  pas  d'appeler  à  sa  table,  le 


KEA 

soir,  des  gens  de  haut  parage  que  sa 
femme  adorait,  et  dont  il  refusait  néan- 
moins les  invitations ,  ne  voulant  pas 
de  ces  salons  où  les  hommes  de  talent 
sont  montrés  comme  des  bêtes  curieu- 
ses. Sa  femme  ,  qui  avait  fait  à  Wa- 
terford,  dans  le  même  jour,  son  pre- 
mier et  son  dernier  début  théâtral , 
était  une  des  curiosités  de  la  maison 
de  Kean  à  Londres.  Toutes  les  fois 
qu'elle  parlait  du  temps  qui  avait  pré- 
cédé leur  arrivée  dans  la  capitale  de 
l'Angleterre,  elle  disait  :  «  Avant  que 
«  mon  mari  fut  grand  liomme.  >» 
Il  y  avait  dans  Kean  quelque  chose 
de  cette  farouche  susceptibilité  qui 
fit  tant  de  mal  à  J.-J.  Rousseau. 
Son  principal  travers  était  l'instinct 
démocratique  ,  qui  finit  par  l'entraî- 
ner comme  acteur  dans  la  vulgarité  , 
le  conduisit  à  sa  ruine  complète,  et 
amassa  sur  sa  tête  nn  mépris  qui  n'é- 
tait pas  juste  en  tous  points.  C'est 
que  ce  qu'il  y  avait  de  mal  entendu 
dans  sa  fierté  lui  donnait  la  crainte 
d'être  coudoyé  par  d'autres  amours- 
propres.  Il  n'aurait  consenti  pour 
rien  au  monde  à  être  confondu  avec 
quelque  célébrité  contemporaine.  Par 
degrés  ,  l'excès  de  son  ambition  dans 
ce  genre  devint  insoutenable ,  extra- 
vagant. Faute  de  pouvoir  se  distin- 
guer par  de  grandes  actions,  il  voulut 
de  la  gloire  au  prix  du  scandale.  Une 
originalité  forcée ,  des  vices  d'em- 
prutit  ,  des  folies  contrefaites  ,  une 
fausse  énergie,  lui  fournissaient  rlinque 
jour  les  moyens  de  faire  parler  de  lui. 
S'il  cessait  d'être  l'objet  des  entretiens 
publics,  11  se  croyait  perdu.  Enfin  il 
abusa  de  l'enthousiasme,  des  succès  et 
de  la  richesse,  au  point  que  le  ridicule 
succéda  pour  lui  au  mépris.  Sa  plus 
grande  renommée  avait  duré  dix-huit 
ans  ;  et  le  moment  était  venu  où 
les  écarts  de  sa  conduite  exigaierjt  qu'il 
s'éloignât,  non  pas  de  la  scène  ,  mais 
de  l'Angleterre.  Aux  Etals-Unis,  où 


KEA 

I  ^rioiiroa  liu  mois  d'octobre  IH'iO 
A  ceiiii  (le  |uiii  1H*J1  ,  il  fui  {^uùic 
sur  la  »cnie  jil^si  birn  que  ilans  >()ii 
yiy>,  mai^  m.  brau  joui  il  iiuill.i  biiis- 
«mrnii'iit  Uo^ton,  laissant  \c  ilnrctrur 
UaiiN  rriiibanao.  \|»rè<>  riiiq  moi^  il'ab- 
Nfiife,  il  rfxint  à  I.oinirf>  el  >  rcriicil- 
lit  nicoie  uiio  ain|ile  inuis>oii  d'a^tplau- 
(ii>!»«infiils  f  t  «If  ^uinces.  L'iic  inti  i;;tie 
a\cc  la  feiiime  de  son  priiici|Ml  bien- 
faiteur, qui  eut  beaucoup  île  publicité, 
le  contraignit  à  retourner  en  Améri- 
que. Il  fut,  cette  fois,  assailli  de  pierres 
sur  le  théâtre  de  Boston,  et  partit  pour 
New-^orL  ou  1rs  bravos  l'empititerent 
&ur  les  sifllrts.  Il  joua  auvsi  à  IMiiladrl- 
pliie  et  À  Ikalliinotr,  tiainant  les  dé- 
bits d'un  bf.iu  talent  qui  s'affaiblis- 
sait de  jour  en  jour.  l*rul-rtie  est-ce 
ici  qu'il  faut  placer  l'anecdote  de 
(•rattan,  qui  prétend  que  l'on  vit  ce 
^rand  actrur  s'eiifoncei  dans  les  bois 
du  Canada  et  rallier  une  bande  à  demi 
sau\a;;e,  sur  laquelle  il  exerça  une  forte 
iiillueiice.  K.iifin  il  re^a^na  Londres 
ou  le  public  oublia  encore  une  fois  les 
toits  de  rii()ininepri\é  pour  ne  s'occu- 
pci  que  du  mérite  de  l'artiste  drama- 
tique. En  \H'2H  il  vint  à  l'aris,  et  il  ^ 
parut  sur  le  théâtre  Favart  où  jouait 
alors  une  troupe  de  comédiens  anglais. 
La  représentation  était  annoncée  pour 
>ept  heures,  et  M"""  la  duclir^se  de 
lierry  arriva  une  des  premières.  Le 
parterre,  apiés  a\oir  passe  en  re\ue 
toutes  les  anecdotes  qui  couraient  sur 
le  L;rand  acteur,  finit  par  s'ennuNer  et 
se  mit  i  siffler.  Fendant  ce  temps, 
Kean  était  au  café  an^^lais  occupé  à 
boire  ;  il  reçut  à  coups  de  bouteilles  un 
garçon  de  théâtre  qui  vint  le  cliercher. 
Kn  vain  on  le  supplia  de  ne  pas  faire 
attendre  une  princesse  du  san^;  ro>al; 
ce  ne  lut  qu'au  nom  de  sa  {gloire,  et  des 
roarliinistes,  des  fi;;uranls,  qui  allaient 
pertire  leurs  emplois  el  mourir  de  faim, 
qu'il  se  leva  de  table  el  cuiisenlit,  par 
pitié  pour  ces  pauvres  prres  de  Ja- 


KEA 


419 


mille,  ï  paraître  devant  un  public  fran- 
çais.  Il  entre  en  scène  à  peu  près  ivre, 
mais  pas  assez  pour  ne  point  s'aper- 
cevoir dn  dc-i,ùl  qu'il  inspire  à  l'audi- 
toiie  ,  qui,  en  vu>ant  sa  démarche 
chancelante,  son  air  trivial  ,  ses  lèvres 
avinées  ,  pousse  un  cri  d'horreur. 
Mais,  après  les  premières  Nceiies,  où 
on  le  trouve  pit()>able  ,  il  s'elexc  con:- 
me  par  instinct,  et  graduellement,  à 
une  hauteur  telle  que  beaucoup  de 
spectateurs  crurent  qu'il  s'était  étudié 
à  reproduire  avec  le  plus  de  \erité 
possible  le  rrMe  de  l\it  luird  ///  dont 
il  était  chargé;  el  il  reçut  de  nom- 
breux applaudissements.  Au  reste,  il  fut 
f>lus  ^oiitr  dans  la  comédie  que  dans 
a  tra{;edie.  C'est  en  An«;leterre  qu'il 
devait  terminer  sa  vie  aveiilureuse. 
Kean  aurait  pu  être  l'honneur  de  sa 
profession  et  laisser,  outre  sa  réputa- 
tion ,  des  richesses  à  sa  famille.  Sa 
constitution  était  robuste  :  une  heu- 
reuse vieillesse  lui  semblait  destinée  ; 
mais  la  monotonie  de  l'ordre  el  du 
bon  sens  lui  était  insupportable,  il 
aima  mieux  la  ruine  et  un  celai  ignomi- 
nieux, couronné  par  une  fin  misérable. 
On  serait  re;;arde  comme  fabuleux  en 
décrivant  l'intérieur  de  s.i  maison,  el 
tout  ce  qu'embrassait  l'emploi  de  son 
temps  et  de  son  argent,  qui,  bientôt,  le 
laissa  sous  le  poids  de  dettes  énormes.  Il 
lui  arriva,  un  soir,  à  la  suite  d'excès 
de  toute  espèce,  de  se  trouver  hors 
d'état  de  jouer  un  de  ses  rôles  les 
plus  importants.  IVès  d'entrer  en 
scène  ,  il  fallut  l'emporter  et  faire  , 
sur  ce  qui  empêchait  l'acteur  favori 
de  paraître  ,  une  sorte  de  roman 
dont  heureusement  la  salle  entine 
fut  dupe.  Kevenu  à  lui  d'un  état  dui.t 
il  ne  s'était  pas  même  douté  ,  il 
fut  obii;;é  de  feindre  la  maladie  (jue  le 
directeur  de  Î)rur>-I>ane  lui  avait  prc- 
loe,  et  -e  laissa  entrevoir  (  'icz  lui,  dans 
ufj  lit  DU  il  t'iail  arraii-é  de  manière  à 
persuader  entièrement  le   public.  Au 


^U  KEA 

bout  du  temps  présumé  nécessaire  pour 
sa  convalescence,  ramioncc  de  sa  ren- 
trée lui  valut  un  triomphe  très[)rolital>le 
à  la  bourse  de  l'iiomine  qui  l'avait  si 
bien  servi.  Une  suite  de  dissipations, 
de  désordres  ;  des  actes  qui  teiiaient 
à  sa  vanité  insatiable  ,  finirent  par 
déranf];er  la  tête  du  pauvre  Kean. 
Voulant  s'essayer  dans  des  rôles  qui 
ne  pouvaient  plus  lui  convenir  ,  il  se 
livra,  sur  la  scène,  à  des  bouffonne- 
ries ,  à  des  impertinences  qui  auraient 
mérité  le  bâton.  Son  talent  s'anéantit 
avec  sa  raison.  Avant  ce  temps, 
connaissant  par  sa  propre  expérience 
les  vicissitudes  de  la  fortune  et  les  ca- 
prices de  la  faveur  publique,  auxquels 
l'acteur  le  plus  heureux  est  exposé  en 
courant  après  la  célébrité,  il  avait  fait 
ses  efforts  pour  détourner  son  fds, 
Charles  Kean  ,  de  se  lancer  dans  la 
carrière  théâtrale.  Il  lai  avait  en  con- 
séquence procuré  une  instruction  plus 
que  suffisante,  et  il  s'occupa  sérieuse- 
ment de  le  placer,  comme  cadet,  au 
service  de  la  compagnie  des  Indes  ; 
mais  il  éprouva  de  l'opposition  de  la 
part  de  mistriss  Kean.  La  mère  et  le 
lils  sentaient  le  besoin  qu'ils  pouvaient 
avoir  l'un  de  l'autre,  en  cas  de  chan- 
gement tout-à-fait  fâcheux  dans  la  po- 
sition d'Edmond  Kean. Celui-ci  en  étant 
venu  à  quelque  mésintelligence  dans 
ses  rapports  avec  le  directeur  deDrury- 
Lane,  conclut  au  théâtre  de  Covent- 
Garden  un  arran^^ement  en  vertu  du- 
quel son  fils  pût  suivie  sa  vocation  et 
paraître  avec  lui  dans  la  même  pièce. 
L'idée  de  faire  jouer  Othello  par  le 
père  et  Jogo  par  le  lils  sourit  tellement 
au  directeur ,  qu'il  en  fit  le  sine  (juâ 
non  du  marché.  Ce  fut  le  25  mars 
1S33  que  les  deux  Kean  se  montrèrent 
ensemble  :  la  salle  élait  pleine,  et  les 
disposiîions  du  public  étant  des  plus 
favorables,  l'effet  fut  en  réalité  pro- 
digieux. Le  r^enre  d'intérêt  que  pri- 
rent   les  spectateurs    à  cette    repré- 


KEA 

senlalion  mémorable  était  complexe  , 
car  personne  n'ignorait  ce  qui  l'avait 
précédée  dans  riutcrieur  de  la  famille 
Kean.  INIais  la  sensation  fut  bien  au- 
trement profonde  lorsque  Kean  père  , 
avec  l'accent  d'une  âme  affectée  jus- 
qu'au désespoir ,  exprima  ce  qui  était 
dans  son  rôle  ,  le  renversement  de 
toutes  ses  espérances  ,  de  tout  son 
bonheur  ;  lorsqu'il  dit  le  dernier  adieu 
à  l'ambition  du  héros,  à  la  gloire  du 
soldat,  à  la  tendresse  de  l'époux,  à  la 
faiblesse  humaine,  et  finit  comme  l'é- 
clair qui,  sortant  d'un  sombre  nuao;e, 
précède  un  violent  coup  de  tonnerre. 
Il  fut  près  de  s'évanouir  après  ces 
mots  :  «  Il  n'y  a  plus  rien  à  faire  pour 
«  le  pauvre  Othello,  »  et  il  tomba 
épuisé  dans  les  bras  de  son  fils.  Tous 
les  cœurs  sentirent  que  c'était  le  der- 
nier effort  du  grand  tragédien,  et  que 
le  théâtre  anj^lais  allait  perdre  un  de 
ses  plus  beaux  ornements. Charles  Kean 
arracha  son  père  de  la  scène  sur  laquelle 
il  avait  triomphé  ,  et  le  déroba  aux 
reo;ards  attristés  de  ceux  qu'Edmond 
Kean  avait  si  souvent  amenés  à  l'ad- 
miration, à  l'enlhousiasme,  à  la  pitié 
et  aux  larmes  (1).  On  le  transporta 
dans  sa  maison  de  Richmond  où  les  se- 
cours de  l'art  médical  furent  impuis- 
sants. 11  ne  fit  plus  que  languir  jusqu'au 
15  mai  de  la  même  année  1833,  où  il 
expira  avec  tranquillité.  On  a  calculé 
que  les  sommes  qu'il  avait  touchées 
depuis  18Î4  pouvaient  se  monter  à 
cent  soixante-seize  mille  livres  ster- 
ling; mais  ses  affaires  étaient  tellement 
dérangées  qu'aucun  des  exécuteurs 
testamentaires  ne  voulut  s'en  charger. 


(i)  Il  «-st  reinar(|ii.Tl)l(;  <jnc  l'hotnas  Gr.iiian, 
fils  de  l'oralfiir  irlandais  «lo  ce  nom,  dans  une 
notice  tiès-intciessanle  sur  Kenii  ,  m;  p.ule  pas 
(l'nne  représentation  où  cet  acieur  voulut  repa- 
raiin;  à  li  fin  de  sa  vie,  dans  le  rôle  principal 
d'une  pièce  de  (iratlan  lui  in(^ine,  iiitilulie  Heu- 
Nazir.  Il  liésitu,  dit-on,  loutaconp  an  troisii^-rne 
acte,  s'arrèla  <  t  poussa  «les  gi'nii.'-si  int-nls  alfr<  ux 
j>endant  quelques  minute"!.,.  Il  élait  devenu  fou. 
Otte  anccdolc  a  été  rapportée  par  M.  .hiIcH  .la- 
nin,  dans  le  Journal  des  Débats,  en  i8i6. 


KEA 

Il  avait  eu  de»  rapp^irt»  intinif*  de 
Mtcirlé  avec  lord  B\rou,  t|u'ii  aimait  à 
)ijr(»dirr  ,  el  a%rc  Ucjiirnup  d  4utir«> 
l'rrMinnes  di>liii^u»'C'».  M  .\lr&4iidrr 
Dumas  a  r(iiii|>o>é,  sur  crt  acirur,  une 
pièce  iiitituire  Kriiri  ,  ou  lirmrdrc 
rt  Ifcttir  ,  «jui  a  été  joiièe  au  lliéjtre 
dei  Variété»  de  Paris,  en»e|it.  1836. 

KKA'l'Sisir  l\ir.liAHi>(ioi»wi?i), 
amiral  aii;;l.iis,  naquit  a  (>lidl(on  djri» 
le  hainpNhire,  le  16  jantier  17.ï7. 
^on  prre,  rerieur  de  Hidclord  dan»  le 
!  )etuutliire   el  direeleur  de  l'ecule  de 

liverlon,  le  tit  entrer  danois  manne 
«les  l'a^e  de  treize  ans,  ci  Ir  plaça  a 
l»ord  de  la  HeUona,  dr  iouanlr-qua- 
toiie  canons.  Kn  1771,  John  Mon- 
tagne, capitaine  de  ce  na\i(e,  a\aMt  rte 
éle^é  au  ^rade  île  cnnlre-aïuiral,  el 
nomme  commandant  en  rlicf  de  la  stv 
lion  d  Halifax,  rmmrna  krals  sur  le  na- 
Mre  qu'il  montait  lui  même.  O'ioique 
les  )io»liliie«  ne  fuosent  pat  comnicn- 
cres  ,  cette  «talion  était  tré*-occupee  et 
l>ien  propre  à  former  uu  jeune  olfiner 
i]ui  débutait  dans  la  carrière  ;  aussi 
K.eats  fut-il  tre>-activeroenl  employé 
iiaiii  le  service  4es  canots  :  il  en  rom- 
mniMiait  deux.  \u  mois  de  fe»rier 
1776,  Pàmiral  Monta^uf  étant  de- 
\enu  commandant  en  clief  à  Terre- 
Neine.  kral*  l'accnrapa^na  el  rc*la 
a^ec  lui  jusqu'au  7  a\ril  1777,  qu'd 
fui  nommé  lieutenant  du  limiullirs. 
l)an«  l'afTairedu  *J7  |iii'lel  177S,  en- 
tre la  iloite  anglaise  commandée  par 
kepprl  el  la  floUe  française  aui  ordres 
«le  d'Orvilliers,  le  Hitmillifs  eut  doure 
hommes  lues  et  vin;;t-un  Messes, 
l/lionorable  l\oberl  l)it;bv,  .son  ca- 
pitaine, promu  au  ran«^  de  contre^aroi- 
rai,  invita  Tannée  suivante  Keats,  dont 
il  avait  disliii;;ué  la  conduite,  à  le  suivre 

ur  le  Hoyul-Ot'orgr.  C'était  à  bord 
de  ce  navire  que  le  prince  \N  illiatn- 
Henrv  ,  devenu  depuis  roi  d'Vn^le- 
terre(yoX.  Guillaume  IV,  t.  LXVl, 


KEA  41t 

*264),  commençait  ta  carrière  de  ma- 
rin, et  c  r^l  keats  qui  pendant  plu^ 
de  trois  ans  lut  oflicier  du  quarl  daiii 
lequel  S-  \.  il.  était  placée.  1(  avait 
été  clioi«i  comme  un  oflicier  capa- 
ble et  eipenrornte  auquel  on  pun- 
vait  contjef  en  toute  •«utcie  la  surinteu* 
dance  de  redurjiion  na\jle  du  jeune 
prince,  el  il  «acquitta  a\ec  di!>linction 
de  ces  font  tloll«llonorable^.  11  se  trou- 
vait e;;4lemenl  ji\cc  lui  sur  la  llolle 
commandée  par  sir  iieor^e^  Kodnev, 
eiivu\ee,  en  178t)  ,  pour  ravitailler 
(iibiallar;  et  ,  en  1781  ,  on  le  voit 
li^^urer,  ain&i  que  le  prince,  parmi  le.i 
officier*  de  la  llolle  du  vice-amiral 
Darby,  partie  d'Angleterre  dans  le 
miine  but.  Ce  fut  lui  qui  commanda 
1rs  bateaux  charge»  d'immen.se^  appro- 
viMonnrmeiils  pour  cette  place  ,  ou  il 
par>iiil  a  les  introduire  malgré  la  plut 
ternble  canonnade.  Vert  le  mois 
d'août  de  la  même  année,  le  contre- 
amiral  Di^b^  avant  reçu  le  comman- 
dement dr  la  liotle  anj^laise  en  Amé- 
iique  ,  emmena  avec  lui  Keats  dont 
les  talents  et  le  courage  l'avaient 
frappe.  Il  lui  confia  la  conduite  de  la 
partie  navale  d'une  expédition  con- 
tre les  nombiru\  ri  formidables  ba- 
teaux de  l'ennemi ,  >tationnés  à  en- 
viron quatorze  milles  au-dessus  de 
Jersev  ,  el  le  succès  avant  couronné 
les  efforts  du  jeune  officier,  il  obtint,  le 
\H  janvier  17Hi,  une  commission  de 
tunimandt'r  avec  le  coininandeinenl 
du  lihinoirros,  de  douze  canons.  Bien- 
tôt après  on  lui  confia  la  lionelta,  de 
quatorze  canons,  excellent  croiseur  avec 
lequel  il  re^la  à  la  station  d'Amérique 
jusqu'à  la  paix  de  1783.  Crois.inl  sous 
les  ordres  du  capitaine  (i.  keith  El- 
phinstone  à  la  hauteur  delà  Delaware, 
il  prit  une  part  acli\o  .ti  combat  du  1 1 
aa  1.')  ^eptembre  178-2,  qui  fit  tom- 
ber au  pou\oir  des  An^^lais  la  fré- 
f^ale  française  1'  ligle,  de  quarante 
canons  commandée  par  le  comte  deLa 


43a 


KEA 


Touche,  el  h  Sophie,  de  vingt-deux 
canons.  Keats  servit  encore  en  Améri- 
que jusqu'en  1785,  sans  obtenir  aucun 
avancement.  Ce   ne  fut  que  le  4  juin 
1789   qu'on  l'éleva  définitivement  au 
rang  de  commander ,  et  cette  promo- 
tion, il  la  dut  surtout   aux  vives  sol- 
licitations  du   duc  de  Clarence.  Peu 
après  il  prit  le  commandement  du  Sou- 
ihcimpion  ,    de    trente-deux  canons  , 
d'où  il  passa  à  bord  du  ISigcr,  autre 
frégate  de  la  même  classe  attachée  à  la 
flotte  qui  devait  agir  contre  la  Russie 
(1791).   Les  différends  survenus  en- 
tre les  cours  de  Londres  et  de  Saint- 
Pétersbourg  s' étant  arrangés  à  l'amia- 
ble, le  iV/g'^r   croisa  dans  les  canaux 
d'Angleterre  et  d'Llande ,  jusqu'à  la 
guerre  de  la  révolution  française.  A  cette 
époque  Keats  fut  chargé  de  disposer  le 
London,  de  quatre-vingt-dix-huit,  à  re- 
cevoir le  pavillon  du  prince,  dontil  avait 
été  jadis  l'officier  de  quart  ;  mais,  com- 
me il  ne  fut  pas  élevé,  ce  trois-ponts 
fut  désarmé  au  mois  de  mars  1794, 
et  le  capitaine  passa  sur  la  Ga/athea, 
de  trente-deux  canons,  l'une  des  qua- 
tre  frégates   de    l'escadre  aux  ordres 
de  son  ami  sir  Edouard  Pcllevv.    [\n 
179.!;,  Keats  se  trouvait  avecla  Gala- 
ihca  à  la  malheureuse  affaire  de  Qui- 
beron;  il  )  fut  chargé  de  la  direction 
des  bateaux  del'escadre de  sir  J.War- 
ren,  et  ce  fut  grâce  à  ses  bonnes  dis- 
positions que  Puisaje,  onze  cents  sol- 
dats et  deux  mille  royalistes  français 
purent  échapper  au  général   Lemoinc. 
Au  mois  de  mars  de  l'année  suivante, 
Keats  soutint   avec  la    Giddllica  m\ 
violent  engagement  contre  les  Fran- 
çais à  la  hauteur  du  iiec  du-Uaz,  et  se 
fit  particulièrement  distinguer  au  mois 
d'août  de  la  même  année  où,  après  une 
chasse  prolongée,    il   brûla  la  frégate 
française   VAndrumcnjue  à  l'embou- 
chure de  la  Gironde.  Kn  1797,  il  passa 
au    commandement  de    la   (régate   la 
BoadiceUy  de  trente  huit  canons,  et  ce 


KEA 

fut  lui  qui,  au  mois  de  septembre  1798, 
donna  à  lord  l»ridport    la    première 
nouvelle  de    la    sortie  de  l'escadre  de 
Bompart,  Il  commandait,  au  mois  de 
juillet  1799,  les  frégates  delà  division 
de  sir  C.  M.  Pôle  faisant  partie  de  la 
flotte   du  canal,   chargées  de  couvrir 
une  attaque  contre  une  escadre  espa- 
gnole qui  s'était  réfugiée  sous  les  bat- 
teries de  Pile  d'Aix.  Ses  autres  servi- 
ces à  bord  de  la  Boadicea  se  bornè- 
rent à  la  prise  de  quelques  corsaires 
qui  s'étaient  rendus  redoutables,  parmi 
lesquels  on  doit  distinguer  \eZephire , 
le  Hailleur,  V Immiciblc  Bonaparley 
le  Milan,  le  Requin,  et  enfin  V Utile. 
En  mars  1801 ,  Keats  devint  comman- 
dant du  Superbe,  de  soixante-quatorze 
canons,  et  il  resta  à  bord  de  ce  même 
bâtiment  comme    capitaine  ,    comme 
Commodore  et  comme  contre-amiral, 
jusqu'en    1810.   Placé    d'abord   sous 
sir   J.  Saumarez ,    il  ne  put  se  trou- 
ver  au    combat  d'Algesiras  (6  juil- 
let); mais,  ayant  perdu  tout  espoir  de 
joindre  l'amiral,  il  se  décida  à  retour- 
ner devant  le  port  de   Cadix  avec  la 
frégate  la  Thames  et  le  brick  Pasley 
pour  y  observer  les  mouvements  de  l'en- 
nemi. Le  9,  à  la  pointe  du    jour,  la 
flotte  espagnole  ayant  levé  l'ancre  dans 
l'intention  évidente  d'escorter  l'esca- 
dre de  Linois   jusqu'à  Cadix,    Keats 
mit  toutes  voiles  dehors  pour  les  pré- 
céder.   Dans  la    soirée   l'ennemi  jeta 
l'ancre  dans  la  baie  d'Algesiras  et  le 
capitaine  anglais  devant  Gibraltar.  A 
midi,  l^inois  parut  avec  deux  vaisseaux 
à  trois  ponts,   sept  autres  vaisseaux  de 
ligne ,    trois    frégates ,    un    lougrc    et 
queltjucs  canonnières.  A  une  hetii  e,  le 
Gœsur,  vaisseau  de  pavillon  anglais, 
sortit  du  Mole  où  il  avait  reçu  de  la 
poudre,  des  boulets  et  des  munitions, 
et  fit  le  signal  de  lever  l'ancre.    Aussi- 
tôt que  l'ennemi  eut  quitté  la  baie  de 
(iibraltar,   l'amiral   anglais  donna  le 
signal  et  ordonna  au  Superbe  de  diri- 


^fr  une  attaqiif  conirf  rarTièri^-{;ar(lf . 
loiilwlw   \oi|psfuifnl  misf^    drliori 
rn  unin«iant,cl   iir|ia<>.sjint   hirnlAt  le 
i  itjur,  KeaUaltei;;iiil  re5caclre  espa- 
^iKtle   A  onze  lieurr>  tlu  soir,  ce  navire 
liait  le  \eu\  des  an;;laisqui  fût  en  \ue  et 
a  plus  de  trois  milles  en  arrière.  Vingt 
minutes   après,  Keats  s'approcha  avec 
le  Supfrhr  à  une  couple  de  cibles  du 
liral'(Mtlus,  vaisseau  e>pa^nol  à  trois 
ponts,  et  il  ouvrit  sur  lui  un  feu  si  terri- 
iilr,  que  quelques  uns  de  ses  boulets  al- 
tn^nirent  le  Siin-Uermrnrgildu,  au- 
I;  e  vaisseau  dr  la  même  nation,  et  le  se- 
cond en  lit;ne,  par  letra^ersdu  premier. 
Il  en  rè>ulta  une  exirème   confusion  à 
liDfd  de  ces  deux  vaisseaux   qui,    pen- 
dant quelque   trraps,    lirnent  l'un  sur 
l'autre,  et  bientôt  le  lirai- Carlos   loi 
cri  tlammes.    keati  l'abandonna   alors 
pour   attaquer  le   San-Antunio ,    de 
7i  canons,  qui  en  était  le  plus  voisin; 
et  ce    vaisseau  ,    portant  le    pavillon 
du   commodorr  Le  Uov  ,   se   rendit  , 
après  un   enf;a^en»ent    de    trente   mi- 
nutes. C'est  ainsi  qu'avec  un   seul  na- 
vire ,  keals  a\ait   cause  tant  de  pertes 
à  l'ennemi.    Dans  le    même  temps  le 
llful-Lurlus  étant  tombé  sur  le  Saii" 
Iltrrnrtir^iliJu,   tous    deiii    sautèrent 
a\ec  un  bruit  e(Tro\able,  et,    de  deui 
mille  hommes   composant   leurs  équi- 
paj;es,  trois  cents  à  peine  purent  être 
sauxés.  Le  Superhf  resta  à   (libraltar 
avec  sa  prise,  et   le   rej-te   de  l'escadre 
tontiiiua  la  poursuite  de  l'ennemi.  Au 
rcnou\ellement  des  hostilités  en  1803, 
le  capitaine  Keats,  placé  sous  les  ordres 
de  Nel'oii,  fui  char;;e  par  cet  amiral  de 
demander   satisfaction   au  de>  d'Aller 
qui  avait  renvové  de  ses  états  M.  Fal- 
con,  vice-consul  anglais,  mission  dont 
il  s'acquitta a\ec  succès.  Le  Superhc  ac- 
compa{;n.i  ensuite   ce  ^rand  marin  aui 
Indes  occidentales,  pour  j  suivre   let 
flottes  combinées  de  France  et    A'V.%- 
pa^ne.    Cette  mission    accomplie ,   le 
Viciory  et  le  Superbe  jetèrent   l'an- 

LTVllI. 


KEA 


4^ 


creàSpithead,  le  18  août  180').  Le 
faisseau  de  Keats,  qui  avait   suiu    les 
croisières  de  Nel><»n  depuis  le  commen- 
cement de  la  ^ueire,  fut  mis  en  répara- 
tion ;  et,  quoique  nen  n'eût  été  ne;;ligé 
pour   accélérer  son   équipement,  il  it 
put  être  prêt  à  temps  pour  rejoindre  la 
flotte  et  prendre  part  à  la  dernière  ba- 
taille  où  péril  ce   héros.    Le  liuyal- 
Gtorge  i  bord  duquel  sir   J.    Duck- 
«orth  devait  hisser  son  paMlloii  n'étant 
point  dispose,  keats  reçut  le^ire-ami- 
ral  à  son  bord,  et  le  15  nov.  ils  arri- 
vèrent a  la  hauteur   de  Cadix,   peu  de 
jourN  après   la   bataille   de   Trafal^ar. 
l)ucLworth  ne  tarda  pas  à  quitter  la  lia* 
tion  avec  su  vaisseaux  de  hf;ne  et  une 
couple  de  frelates  pour  chei cher  l'es- 
cadie  de  Kochefort  qui   axait  mis  à  la 
voile,  et  qu'on  supposait  destinée  pour 
les  Indes  occidentales.  Le  *J.')  déc.  ils 
euient  vue  de  l'ennemi  à  la  hauteur  des 
iles  du  cap  Vert,  et  ils  le   chassèjcnl, 
le    Superbe    formant    l'avant-^arde  ; 
mais  le  mau\ais  état  des  na\ires  déter- 
mina    DucLhoiiIi   à    abandonner     la 
f>oursuile  et  a  rassembler  son  escadie; 
a   flotte  française  ,    qu'on   sut    depuis 
être    aux    ordres  de  l'amiral  Willau- 
mei.  fut  bientôt    hors   de   vue.  A>arit 
depérhe  dans  l'Inde,  le  Voafrfull  i\t 
soiiante-quatorze,  DucL.worth  se  diri- 
gea à  pleines  voiles  vers  les  Lides  occi- 
dentales où,  a^ant  appris  l'arrivée  d'une 
autre  escadie    fnnçaise,    il   se   porta 
avec  la  plus  grande  célérité  sur  San/it- 
Dominf^d.  Le  ti  fe\rier  180G,  on  dé- 
couvrit les   Français  dont  la  force  se 
composait  de  cinq    vaisseaux  de  ligne, 
de  deux  (régales  et  d'une  corvette.  Les 
dispositions   nécessaires  pour  l'atlaque 
furent    faites  immédiatement  ,   et    les 
Français    se    mirent   sous    \oile  pour 
accepter    le    coml'at.    L'action    com- 
mença   par  le    Superbe    qui  formait 
la  tête  de   la  division  du  \  ent.  Il  at- 
taqua WUexandre   de    quatre-vingts 
canons,  qui   était   à  la  tête  de   la  li- 

i8 


434 


KEA 


^nc  ennemie,  jusqu'à  ce  qu'il  ne  fût 
plus  en  état  de  f;oiiverner,  et  fut  obli- 
f;é  (le  baisser  pavillon,  lorsqu'il  plaça 
auJacieusement  son  vaisseau  par  le 
travers  de  VImpériul  de  cent  Yinf!;t 
canons  ,  «<  le  plus  beau  et  le  plus 
<f  fort  vaisseau  qui  eût  jamais  été  con- 
ct  slruit  dans  aucun  pays  du  monde.  » 
Le  trois  ponts  était  à  portée  de  pisto- 
let et  avait  probal)!ement  réservé  une 
bordée  choisie  pour  le  Superbe ;m:i\s, 
dans  ce  moment  critique,  le  contre-ami- 
ral Cocluane  plaça  vaillamment  le 
Nort/iumbrrland  dans  l'espace  étroit 
qui  existait  entre  les  deux  vaisseaux,  et 
reçut  toute  la  décharp;e,  plusieurs  des 
boulets  arrivant  au  Superbe  à  tra- 
vers le  Nortliumberland.  L'engage- 
ment devint  ^;énéral  et  se  termina  en 
faveur  des  Anglais ,  qui  en  moins  de 
deux  heures  prirent  ou  détruisirent  à 
l'ennemi  qui  était,  les  documents  an- 
glais l'avouent,  inférieur  en  force,  un 
vaisseau  de  premier  rang,  deux  vais- 
seaux de  quatre-vingts  canons  et  deux 
de  soixante-quatorze.  Le  vice-amiral, 
dans  son  rapport  à  l'amirauté,  donna 
les  plus  grands  éloges  au  système  de 
discipline  et  au  bon  ordre  qui  régnaient 
à  bord  du  Superbe,  et  il  attribua  une 
partie  du  succès  aux  excellentes  dis- 
positions de  Keats.  Quoique  le  Sn- 
nrrbe  eût  pris  une  part  très-aclive  à 
l'affaire,  sa  perte  ne  fut  pas  très-con- 
sidérable, car  il  n'eut  que  six  hommes 
tués  et  cinquanie-six  blessés.  Le  capi- 
taine Keats,  qui  avait  été  nommé  colo- 
nel des  Royal-Marines  ,  à  la  pro- 
motion de  Trafalgar,  reçut  alors,  ainsi 
que  les  autres  ofBciers  ses  camarades, 
les  remercîments  du  parlement  ;  et  le 
comité  du  fonds  patriotique  lui  vota,  à 
son  choix,  une  épée  ou  un  vase  de  la  va- 
leur de  cent  livres  sterling.  \.q  Superbe 
joignit  ensuite  la  (lotte  du  canal  com- 
mandée par  le  comte  deSaitit-Vinoent, 
mais  il  fut  bientôt  détaché  avec  .six 
vaisseaux  de  ligne  pour  relever  l'ami- 


KEA. 

rai  Stirling  et  croiser  à  rouest  de  Belle- 
Isle.  Au  mois  d'août,  il  eut  connais- 
•ance  de  quatre  frégates  françaises  ; 
mais,  après  une  chasse  de  cent  cinquante 
railles,  le  ]\Jars  qui  tenait  la  tête  ne 
put  s'approcher  que  d'une  de  ces  fré- 
gates qui  baissa  pavillon  ;  c'était  le 
Rhin,  de  quarante  canons  et  de  trois 
cent  dix-huit  hommes.  L'année  sui- 
vante, Keats  fut  employé  comme  Com- 
modore d'une  division  de  la  flotte  de 
l'amiral  Gambier  dans  son  expédition 
contre  Copenhague,  et  fut  détaché  avec 
quatre  vaisseaux  de  ligne,  trois  fréga- 
tes et  dix  brigs-canonniers  pour  assu- 
rer le  passage  desBelîs.  II  bloqua  aussi 
Stralsund  et  eut  à  remplir  les  devoirs 
les  plus  difficiles  de  toute  la  flotte.  Le 
2  octobre  1807,  il  fut  promu  au  rang 
de  contre-amiral  et  hissa  son  pavillon 
à  bord  du  Superbe,  comme  l'un  des 
vaisseaux  de  la  flotte  de  la  Bahique, 
sous  les  ordres  de  son  vieux  comman- 
dant   sir  J.  Saumarez.    Le  10  mai 

1808,  il  quitta  la  rade  d'Yarmouth 
avec  l'expéditio'i  de  sir  John  Moore 
pour  la  Suède,  et  arriva  à  Gottenbourg 
le  7  {Foy.  Moore,  XXX,  58).  11 
fut  ensuite  chargé  de  veiller  au  sort  de 
l'armée  espagnole  commandée  par  le 
marquis  de  la  Piomana  que  Napoléon, 
sous  prétexte  de  l'employer  i  la  dé- 
fense du  Hanovre  ,  avait  fait  sortir 
d'Espagne  ,  afin  qu'elle  ne  pût  contra- 
rier ses  projets  contre  ce  pays.  Keats 
remplit  sa  mission  avec  beaucoup  d'a- 
dresse ;  il  parvint  bientôt  à  se  mettre 
directement  en  relation  avec  le  mar- 
quis, et  à  le  transporter  en  Espagne 
avec  dix  mille  hommes  de  ses  troupes 
{Foy.  RoMANA,  XXXVIII,  501). 
Pour  récompense  ,  il  fut  créé  à  son 
arrivée  en  Angleterre  chevalier  de  l'or- 
dre du  Bain.  A  la  fin  du  mois  de  mai 

1809,  le  gouvernement  anglais  réso- 
lut d'attaquer  les  forces  navales  que  les 
Français  avaient  dans  l'Kscauf,  et  sir 
K.  Keats  fut  nommé  commandant  en 


KEA 

sffonJ  et  l'immeMM  ariiiif nt  qui  mit 
à  la  voile  ilaiis  rrlte  intention  ,  rt  qui 
eut  Je  si  troles  ir>iillats  pour  l'hon- 
neur britannique.  ••  H  ne  non»  a|»p.Ti- 
tient  pas  ,  ilil  naïvrinent  un  lii(i;;ra- 
phe  an^Lib,  de  nous  appesantir  sur 
cette  afljtre raailieui euse.  •  keats quitta 
ensuite  le  Suprrùr  pour  passer  à  bord 
du  M  il /uni,  de  soi5iante-<|ua!f)ne,  et 
cominandrr  les  forf ei  na\aleNeraplo>ée$ 
à  la  dcff  use  de  C^dix.  alors  av»ié;îe  par 
les  FrançaiN  H  j  établit  unrllottdle,  et 
resta  dans  cette  station  jusqu'à  l'au- 
tomne de  ISl  t ,  mais,  les  cramiesqu'un 
a\ait  coni^ur-»  pour  la  >àrete  de  (.adix 
ëtant  di-Nipres,  il  joignit  sir  K.douard 
Pelles  a  la  liaiiteur  de  Toulon,  roro nie 
commandant  en  second  de  la  llolte  de 
la  Méditerranée.  H  était  à  cette  épo- 
que vice-amiral  et  avait  son  pavillon  i 
bord  de  V Hihrrnia,  de  cent  wn^X  ca- 
nons. H  resta  dans  cette  position  jus- 
qu'au mois  d'or'obre  lHt2,  où  le 
mauvais  état  de  vi  ^anlé  le  força  de 
rentrer  en  An'^leterre  à  boid  du  (len- 
tuurf.  A>aiit  repris  quelqiies  l.uces 
dans  le  printrmp>  de  l'anni-i*  suivante, 
il  fut  noinmi'  commarniant  et  ;;ou- 
verneur  de  Terre-Neuve,  avec  ^a^^u- 
rance(|ue  *i  sa  santé  se  rétaldissail  on 
l'emploierait  d'une  manière  plus  ac- 
tive. Il  fit  voile  pour  cette  station  a\anl 
son  pavillon  ji  bord  du  lielleropiion  , 
et  dès  son  arrivée  se  li^ra  tout  entier 
aux  devoir»  de  son  i;ouNernement.  En 
181  G,  Il  se  retira  dans  le  comté  de 
l)evon,  ou  il  épousa  la  fdie  ai  née  de 
sir  Francis  H  art,  et  obtint,  en  181  S, 
le  poste  de  maior-;;on»^ral  des  Koynl- 
Marinrs.  \ommé,  tn  1821,  ;;ouver- 
ncur  de  l'hôpital  de  (treenwich,  il  r 
introduisit  d'utiles  améliorations  ,  et 
mourut  d'une  attaque  de  paral\sie,  le 
5  avril  183i.  Les  funérailles  de  Keats 
furent  célébrées  avec  pompe  par  les  or- 
dres exprès  du  roi,  qui  accorda  cinq 
cents  livres  sterling;  (12,300  fr.)pour 
|ul  élever  un  monument       1) — z — s. 


KEI 


435 


KKiril  ((lEoncK  Klphiiistonp, 

lord  \icomir)  ,  amiral  an{;lais,  d'une 
noble  famille  d'Fcosse  qui  fait  re- 
monter son  origine  à  un  j^entlemau 
allemand,  tlu  nom  d'Klvini;ton,  établi 
dans  re  in>aume  au  commencement 
du  XIV"  Mcfle  ,  était  allie  par  les 
femmes  au  maréchal  Keith  (  roy. 
ce  nom,  XXII  ,  27'i),  et  naquit 
en  1716.  Malgré  le  sort  fnne^te  de 
son  frère  aîn»*  ,  qui  périt  en  17'j8.  à 
bord  du  navire  le  Vrintr  itrorgr.  \t 
jeune  J  -e  résolut  de  parcourir 

la  can  me;  et .  .^près  avoir  reru 

une  ediit ai  on  convenable  à  rilasenv» ,  il 
s'embarquaaii  moin  de  fe\ .  17fi2,  sur  le 
(/ii.ifmrt ,  commandé  par  le  capitaine 
Jer^is,  devenu  depuis  lord  Saint  Vin- 
cent. Il  servit  succe>Mvrmcnt  jusqu'en 
17r>7,  sur  dixer^en  frégates,  acrom- 
pa;;na  en  ('.hiae  son  frère  (imllaume 
KIphinstone  ,  el  se  rendit,  en  17<i!>, 
d.vns  rindeavecle  rommodore  Ijnd- 
say  qui  le  fit  nommer  lieutenant  de 
vaisseau.  Après  son  retour  en  An;;le- 
teire,  où  il  .i\ait  été  en\ovéaver  des  dé- 
pêches, le  jeune  FJphinstone  fut  atta- 
ché au  vaisseau  portant  le  pavillon  «le 
sir  Pierre  I>ennis ,  Ciiraraandant  en 
chef  ilans  la  Méditerranée.  En  1772 
il  fui  promu  au  ran;;  de  rummundrr, 
«  t  rerjt  au  mois  de  mars  1775  la 
cotamission  de  capitaine  de  vaisseau. 
I.e  Marl/poruugh  ,  de  soixantc-qua- 
foize  canons  ,  fit  le  premier  vais- 
seau qu'il  commanda  en  celte  (jualité  ; 
il  passa  depus  sur  la  Pearl  et  M;r  la 
fré|;ate  Prrseus,  aver  laquelle  il  ser>!t 
sur  la  c6fc  d'Amérique  sous  lord 
Howe  et  sous  l'amiral  Arbulhnot. 
C'est  à  cette  époque  que  le  comté  de 
Dumbarton  ,  où  sa  faiinlle  .i\ait  de 
grandes  propriétés  et  exerçait  beau- 
coup d'influence  ,  le  nomma  son  re- 
présentant à  la  chambre  des  Com- 
mîmes. A  l.T  prise  de  Charlestown  , 
le  capitaine  Elphinstone  comman- 
dait un    dclacliemcnt  de   marins  qui 

28. 


436 


KEI 


furent  déharqucs,  et  la  bravoure  qu'il 
montra  <ians  cette  circonstance  fut  lio- 
norablcnionl  citée  dans  les  (.léjièclies 
ofticielles  île  sir  Henry  Clinton,  {géné- 
ral en  chel  (les  troupes  de  terie;  El- 
phlnstone  fut  aussi  présent  à  l'attaque 
du  Mud  Island  ,  le  15  nov.  1777. 
Revenu  en  Angleterre  avec  des  dépê- 
ches de  Tamiral  Arbutlinot,  on  lui 
confia  le  commandement  du  Jf^arivick, 
de  cinquante  canons,  et  en  1780  il 
fut  élu  de  nouveau  pour  représenter  le 
comte  où  il  avait  pris  naissance.  Il 
était  un  des  membres  indépendants 
qui  se  réunirent  à  la  taverne  deSalnt- 
Alban,  dans  le  but,  qu'ils  n'atteigni- 
rent cependant  pas,  de  réconcilier  Pitt 
avec  Fox  et  le  duc  de  Portland,  pour 
former  par  l'union  des  partis  une  admi- 
nistration vigoureuse  et  assise  sur  une 
large  base.  Au  mois  de  janvier  1781, 
il  captura,  après  un  engagement  de  peu 
de  durée,  le  vaisseau  de  guerre  hollan- 
dais le  liulerdam,  de  cinquante  ca- 
nons et  de  trois  cents  hommes  d'équi- 
page. Pendant  tout  le  temps  de  la 
guerre  ,  il  fut  employé  à  la  station 
d'Amérique  sous  l'amiral  Digby.  Il  y 
commandait  le  IVarœick  à  bord  du- 
quel le  prince  Guillaume-Henri,  de- 
puis duc  de  Clarence,  désira  faire  son 
apprentissage  de  marin,  sous  ses  or- 
dres. Le  11  sept.  1782,  ce  navire, 
de  conserve  avec  le  Lion ,  la  V es- 
tai et  la  Bonetta  ,  captura  ,  à  la 
hauteur  de  la  Delawarc,  quelques  na- 
vires français,  entre  autres  la  frégate 
V  Aigle,  (le  quarante  canons,  com- 
mandée par  le  comte  de  La  Touche, 
qui  se  réfugia  sur  le  rivage  avec  le  ba- 
ron de  Vioménil  et  plusieurs  officiers 
supérieurs.  A  l'élection  générale  de 
1786,  le  comté  de  Stirling  choisit  El- 
phlnstoiie  pour  son  représentant  au 
parlement,  et  en  1793,  la  guerre  ayant 
éclaté  avec  la  France,  il  obtint  le  com- 
mandement du  Robuste,  de  soixante- 
quatorze  canons,  et  se  rendit    dans  la 


KEI 

Méditerranée  sous  les  ordres  de  lord 
Hood.  Il  l'accompagna  à  Toulon  lors- 
que les  habitants,  trompés  par  les  An- 
glais, leur  livrèrent  cette  ville.  Elphin- 
slone  eut  dans  cette  occasion  le  com- 
mandememt  du  fort  Lamalgue,  et  quand 
l'escadre  anglaise  fit  sa  retraite  ,  il  fut 
chargé  de  faire  embarquer  les  royalistes 
français  qui  voulurent  quitter  leur  pa- 
trie, ce  dont  11  s'acquitta  fort  mal,  car 
on  sait  comment  la  plupart  de  ces 
malheureux  furent  abandonnés  à  la 
férocité  des  républicains.  A  son  re- 
tour en  Angleterre  il  fut  promu ,  le 
12  avril  1794,  au  rang  de  contre- 
amiral  de  l'escadre  Lleuc  ,  et  créé 
chevalier  de  l'ordre  du  Bain,  Nom- 
mé le  4  juillet  contre-amiral  de  Tesca- 
dre  Blanche,  il  hissa  son  pavillon  à 
bord  du  Bar/leur,  de  quatre-vingt- 
dix-huit  canons,  dans  la  flotte  du  ca- 
nal. Jusqu'à  ce  moment,  Elphlnslone 
n'avait  agi  qu'en  sous-ordre  ;  nous  le 
voyons  maintenant  occuper  un  poste 
plus  élevé.  Au  mois  de  janvier  1795, 
les  hostilités  s' étant  déclarées  entie 
la  Grande-Bretagne  et  la  république 
batave  ,  il  fut  envoyé  avec  une  flotte 
au  cap  de  Bonne-Es[iérance  et  par 
des  dispositions  convenables  il  aida  le 
général  Clarke,  commandant  des  tiou- 
pes  de  débarquement,  à  s'emparer  de 
cet  important  établissement  qui  tomba 
le  1G  septembre  au  pouvoir  des  An- 
glais. Pendant  le  cours  de  cette  cam- 
pagne sir  George  Kelth,  nomme  vice- 
amiral  dès  le  1*"*^  juin,  soumit  Icscolo»- 
nies  hollandaises  de  Ce^lan,  Cochin, 
Malaca  et  les  Moluques,  et  força  une 
escadre  hollandaise  de  deux  vaisseaux 
de  ligne,  de  cinq  frégates  ou  sloops,  etc., 
à  baisser  pavillon,  il  fit  ensuite  voile 
pour  l'F^urope,  arriva  à  Spithead  le  3 
juin  1797,  et  fut  élevé,  le  7  mars  sui- 
vant, à  la  dignité  de  baron  du  royaume 
d'Irlande,  sous  le  titre  de  baron  Kelth 
de  Stone  Havcn-Marlschal.  Au  mois  de 
mai  il  dirigea  les   préparatifs  faits   k 


MI 

Shwrnw  f«>nlic  lr\  nisur^^  ilf  lall(.lie 
stalioniK'f  au  \orr.  \prr>  que  rritc 
ré«ollr  fui  Ole  a|iji>èf ,  lorJ  Knlli  (c'rsl 
$ous  ce  liorii  qu'il  riait  alors  connu) 
coinmanila  un  (Irtariinncnt  àe  la  llotle 
du  canal,  ri  fut  rnsuitc  atlarliérn  (]ua- 
lilr  lie  cominanilantrii  second  à  la  sla- 
lion  dria  Mrillicrranéf  ,soii$  le*  ordres 
du  coiule  deSaint-Vincent  qu'd  ini^^nii 
àlàibrallar,  au  mois  de  dfcerobrel7D8. 
Comme  ce  dnnier  ^lail  à  celle  époque 
sérieu^emenl  indisposé,  Keilli  fui  rhar- 

f[é  de  bloquer  dans  le  port  de  (lïdii 
a  flolle  e5|»a^nole  composée  de  *in{;t- 
deu\  taisseaui  de  ii^ne.  1^  i  mai 
1799,  a>ant  drcouveit  la  flotte  de 
Breit  consislani  rn  Mn^lqiialro  vais 
seaux  de  li;;ne  et  neuf  \ai%seaui  de  moin- 
die  dimeiiMon,  il  n'iiésila  pa-,  nul;;rr 
un  veni  tieN  \iolenl  et  la  supériorité  nu- 
mérique de  Tennemi,  à  lr>er  l'ancre 
ctàluiofTiir  le  combat  que  celui-ci 
évita  soigneusement,  l/amiral  ilruix, 
qui  commandait  cette  flotte  française, 
renonça  mrme  à  se  joindre  à  ses  amis 
de  Cadix,  quoique  ce  port  ne  fût  pas 
à  plus  de  se|)t  à  liuit  milles  aous  le 
vent.  \a  tempête  devint  si  violente 
pendant  toute  la  nuit  suivante  (uie  ce 
ne  fut  qu'avec  la  plu-^  >;rande  dildculie 
que  les  vaisseaux  purent  être  réunis. 
Le  lendemain  malin  n'avant  aperçu  que 
qaatre  >a>^callx  français  auxquels  il 
donna  vainement  laclia<'Se,et  apfèsétre 
resté  dans  la  même  station  jiusqu'au  9, 
Keith  supposa  qu'ils  avaient  passé  le 
détroit.  H  se  rendit  i  Cibraltar  , 
croisa  i  la  hauteur  du  cap  Dell  Mell, 
et,  apprenant  que  les  Irançais  avaient 
jeté  l'ancre  à  la  baie  de  Vado  ,  il 
allait  les  y  attaquer,  lorsque  le  comte 
de  Saint-Vincent  lui  donna  l'ordre 
de  se  rendre  iniinéiliatcmcnt  à  Mi- 
norque  où  le<  Espa;;nols  parais.saient 
avoir  rintentlon  de  faire  une  descente. 
Pendant  ce  temps  ,  l'amiral  français 
allei^iiil  Caillia^i'ne  où  il  fut  joint 
bienlnt    par  Tamiral  Maisaredo,  avec 


KFl 


4Î7 


cina  vaisseaux  décent  douie  canons, 
un  de  (jiiiire  vin;;ts,  et  onze  de  soixan- 
te-quatoize,  sous  les  ordres  deCravi- 
na,  (trandillana,  Corduva,  Nava  et 
Villavinrensès.  1^  vice-amiral  an;;lais, 
dil  l'un  de  s«  bio^raplie>,  a\ant  réuni 
tou>  se»  vaivseaux,  se  proposait  de 
suivre  les  flottes  combinées  ,  lors- 
qu'il apprit  par  les  croiseurs  qu'elles 
étaient  entrées  dans  le  port  de  Krest, 
et  il  se  rendit  alors  lui  même  en  .\n- 
plelerre.  Vers  la  fin  de  nov.  1799, 
keitli  fit  voile  de  IMvroouth  sur  la 
lirinr  iJuirlntlr,  de  cent  dix  canons  , 
pour  prendre  1»  commandement  de  la 
flotte  de  la  Méditerranée  que  le  mau- 
vais état  delà  santé  An  comte  de  "^aint- 
\  incent  l'avait  forcé  de  reAi;;nei .  On 
le  voit,  au  comenriirement  de  IHOO, 
croiser  devant  IMe  de  Malte,  à  la  hau- 
teur du  port  l.a  Valette,  pour  inter- 
cepter les  secours  qu'on  pourrait  v  en- 
vover;  pendant  ce  temps,  Nelson  croi- 
sait au  vent  par  ses  ordres.  Ce  fut  par 
ces  dispositions  judicieuses  qu'il  s'em- 
para du  Crttrrfu.i ,  de  soixante-qua- 
torze, portant  le  pavillon  du  contre- 
amiral  IVrrée,  chargé  de  troupes  de 
dfbarqiiemeiit.el  d'un  t^rand  transport, 
l'eu  aptes,  Keith  déclara  en  état  de 
blocus  Toulon,  Marseille,  Nice  et  tous 
les  ports  de  la  rivière  de  (iênes  ;  et  le 
vaisseau  la  lirinr  (Ihariittr  avant  été 
entièrement  consumé  par  les  llainmes, 
pendant  qu'il  était  à  terre,  il  porta 
son  pavillon  à  bord  de  VAudurieux  et 
ensuite  du  Mino/tiurr.  et  parut  avec 
une  partie  de  sa  flotte  devant  le  port 
de  (lénes  que  les  Autrichiens  assié- 
geaient et  qui  était  défendu  par  Mas- 
séna.  Il  diri;^ea  le  blocus  avcr  tant  de 
vi;;ilance,  qu'aucune  provision  ne  put 
entrer  dans  la  place  qic  la  famine 
força  enfin  de  capituler.  I.e  4  septem- 
bre suivant,  l'île  de  Malte  se  remlit  à 
un  détachement  de  la  flotte  de  lord 
Iveith.  Le  même  mois,  le  ;;oiiverne- 
ment  anglais  avant  résolu  de    frapper 


438  KEl 

un  coupmortél  à  l'Espagne,  lord  Keilh 
se  dirigea  sur  Gibraltar,  et  de  là  dan» 
la  baie  de  Cadix  avec  la  flotte  et  les 
transports,  ayant  à  bord  sir  Ralph 
Abercromby  et  environ  dix-huit  mille 
hommes  de  troupes  sous  ses  ordres. 
Quoiqu'une  maladie  contapeuse  en- 
levât chaque  jour  un  grand  nombre 
d'habitants  de  cette  place  ,  le  gou- 
verneur ,  don  Thomas  de  Maria ,  fit 
connaître  sou  énergique  intention  de 
périr  avec  toute  la  garnison  plutôt 
que  de  capituler.  Une  correspon- 
dance réguhère  s'étant  établie  entre  ce 
gouverneur  et  lord  Keith ,  le  projet 
de  descente  fut  abandonné.  C'est  vers 
cette  époque  que  l'armée  française,  en 
Egypte,  se  trouvant  dans  une  position 
critique,  le  général  Kléber,  qui  la 
commandait,  conclut  avec  sir  Sidney 
Smith  la  convention  del  Arisch,  par 
laquelle  il  consentait  à  évacuer  ce  pays 
sous  la  condition  que  ses  troupes  se- 
raient transportées  en  France,  avec 
armes  et  bagages.  Déjà,  en  exécution 
de  ce  traité,  il  venait  de  livrer  aux 
Turcs  tous  les  forts  de  la  Haute-Egyp- 
te, ainsi  que  Damiette,  et  il  se  dispo- 
sait à  évacuer  le  Caire,  lorsque  lord 
Keith,  sous  les  ordres  duquel  Sidney 
Smith  se  trouvait  placé,  refusa  de  rati- 
£cr  la  convention ,  déjà  exécutée  en 
partie  par  les  Français ,  et  exigea  qu'ils 
missent  bas  les  armes  et  se  rendissent 
prisonniers  de  guerre.  Cette  proposi- 
tion fut  mise  à  l'ordre  du  jour  de  l'ar- 
mée française,  avec  cette  courte  et  éner- 
gique proclamation  de  Kléber:  «  Sol- 
«c  dats  !  on  ne  répond  à  de  telles  inso- 
«  Icnces  que  par  la  victoire!  préparez- 
i(  vous  à  combattre.  »  L'indignation 
des  soldats  fut  excitée  au  plus  haut 
degré;  et  la  victoire  les  accompagna  par- 
tout, suivant  la  noble  assurance  de  leur 
général  (Fo/.  Klébkr,  XXII,  463). 
Au  commencement  de  l'année  1801, 
le  gouvernement  anglais,  déterminé  à 
enlever  l'Egypte  aux  Français,  y  ren- 


KEI 

Toya  une  flotte  formidable  commandée 
par  lord  Keith,  avec  dix-sept  mille 
hommes  de  troupes  sous  les  ordres 
de  sir  Ralph  Abercromby.  Le  1" 
mars  (1)  ,  on  jeta  l'ancre  dans  la 
baie  d'Aboukir,  et  du  7  au  8  le  débar- 
quement des  troupes  s'opéra  sous  la 
protection  des  batteries  de  la  ilotle. 
Les  événements  ultérieurs  et  par  suite 
desquels  l'armée  française  fut  obli- 
gée d'abandonner  l'Egypte  ne  con- 
cernent que  secondairement  le  com- 
mandant de  la  Hotte  anglaise,  quoique 
les  rapports  qui  furent  publiés  à  ce  su- 
jet prouvent  qu'il  seconda  puissamment 
l'armée  de  terre  par  ses  bonnes  dis- 
positions et  par  ses  conseils  (Voy. 
Abercromby,  T  ,  77,  et  Menou  , 
XXVIII,  319)  (2).  Lord  Keith,  qui 
avait  été  nommé  amiral  de  l'escadre 
bleue  à  la  promotion  du  l***^  janvier 
1801  ,  reçut  les  remercîments  des 
deux  chambres  du  parlement  ,  lors- 
que la  nouvelle  de  la  conclusion  des 
opérations  en  Egypte  parvint  à  Lon- 
dres. Le  5  déc.  1801,  il  fut  créé  ba- 
ron du  Royaume-Uni  ;  la  corpora- 
tion de  Londres  lui  présenta  les  privi- 
lèges de  la  cité  dans  une  boite  d'or 
avec  une  cpée  de  la  valeur  de  cent  gui- 
nées,  et  il  fut  autorisé  à  accepter  l'or- 
dre du  Croi.ssant  que  le  grand-seigneur 
établit  pour  perpétuer  le  souvenir  des 
services  rendus  par  les  forces  anglaises 
à  l'empire  ottoman .  A  la  paix  de  1 802, 
Keith  revint  en  Angleterre,  et  cessa  d'ê- 
tre employé  activement  jusqu'au  renou- 
vellement des  hostilités  en  1803,  oii  il 
fut  nommé  commandant  en  chef  de  tou- 
tes les  forces  maritimes  delà  Grande- 
Bretagne  dans  la  mer  du  nord  et  dans 
le  canal  jusqu'à  l'ouest  de  SelseaRill. 
La  nature  de  ce  commandement,  aussi 
étendu  que  compliqué,  consistant  à  la 

(i)  c'est  par  rrrenr  que  11-  rôd.K  leur  anglais 
i!e  l'v4,iiiual  hiograj,/tical  Oùituar/  p\acti  cetiwè- 
neincnt  au  a5   innrs. 

(ï)  On  a  rcprocLé  à  lord  Keith  <î'a*oir  traité 
avac  ptu  d'égards  1«  brava  g«n«ral  Dssaix. 


KF.I 

Jois  fil  piu«  ilr  rciit  Mil;;!  \oilf>,  l'o- 
bli^rail  à  s'eulilir  sur  le  ri\a^e  ilans  une 
ktJlioii  roinriiahir,  pour  uuintriiir  s;i 
currr^ponibiirc  à\ec  \ci,  loriis  ile  l'ami - 
raule  et  le*  oflif.riN  cominamlants  rni- 
plo>n  M)U>  Nfj  (ti  (1res  dans  \t^  Diiiirs, 
à  I)un»;fMfv-i,  Sliccriirs  ,  Yarinoutli, 
I^icl,  el  tlaiK  Ifs  différentes  Malions 
placées  50u«  snn  inspection,  ainsi  qttr 
pour  la  di.sltibulion  el  1rs  stalions  île» 
navirei ,  qu'on  a\ait  ju^e  nécessaire 
cl'emplo>er  à  la  défense  de  IVnIrre  de 
la  laniise.  Ce  fui  à  hlasl  Cliff ,  près 
de  Kams^ate  ,  ipi'il  liia  sa  ré^idenre  , 
mais  ,  de  temps  cm  lemps,  il  se  ren- 
dait à  bord  de  son  \ai  se.)u  pavillon, 
ioit  pour  rernTJtnitT  U ^  r  ip-,  dr  Fran- 
ce, soil  j>.  contre 
lalloltilie.  .{.-l'An 
t^lelerre.  Au  commencement  d'ofl. 
1H0:{,  il  Gt  l'essai  d'un  nouveau  mode 
d'attaque  contre  les  chai oupe.>  canon- 
nières de  Boulo;;iie,  qui  ne  réusil 
qu'en  partie.  Kieve.à  la  fin  de  1805, 
au  ran^  d'amiial  de  l'escadre  blanche, 
lord  Keilli  continua  de  diriger  son 
important  commandement  jus(]u'au 
mois  de  mai  1807,  que  l'amiiauté 
ayant  cru  devoir  le  divist-r  en  trois,  il 
se  retira.  En  ISIJ,  il  succéda  i  sir 
Charles(^»lion  comme  commaiiiiant  en 
chef  de  la  Hotte  du  can:il,  et  fut  créé 
vicomte  au  mois  de  nui  181  i.  Tes 
ëu'nemenis  de  la  campagne  de  France 
ayant  chanr;é  la  face  des  affaires,  il 
accéda  avec  empressement  à  la  propo- 
sition qui  lui  fut  faite  au  mois  d'a^riI, 
au  nom   du    fi;«»uvernement  provisoire, 

f>ar  le  contre-amiral  .laroh,  de  cesser 
es  hostilités.  Ce  fut  à  bord  «le  l'un 
des  navires  sous  ses  ordres  que  Napo- 
léon se  rendit  après  la  désastreuse  cam- 
pa;^ne  de  Waterloo  11  posa  ,  le  ti3 
mai  1815,  la  première  pierie  du  pont 
de  Soutliv^arl  ,  renit,  en  lS-22  ,  la 
grande -croix  de  Saint -Maurice  de 
Sardai^ne  ,  et  mourut  à  Tullialan- 
Houâcle  10  mars  1823.  Lord  Keith 


KEL 


i.^0 


ne  laissa  que  deux  filles  des  deux  ma- 
riages qu'il  avait  conti actes.  Sa  bile 
aiaée  iMar;^aret  Meicer  Kl|>)iiiistoiie 
épousa,  en  1817,  le  comte  i\c  Flaliaut, 
qui  avait  seivi  comme  aide-de  camp  de 
I  eni|>ereur  Napoléon  à  la  bataille  de 
\Valerlt»o.  1) — z — s. 

KKLLKli  tie  comte  Douuth^k- 
I/)UIsChmstophf.  de\  ministre  d'é- 
tat pru.vsien  ,  était  né  à  (iotha  le 
ll>  février  1757.  Son  père,  le  ba- 
ron de  Keller,  a\ait  été  ministre  du 
di.c  de  Wurtemberg!.  Sa  mère  ,  née 
Maucttenheim  \\  '  '  '  n  lui  fit  don- 
ner une  excellri  n  *ous  ses 
veux,  après  quoi  clic  1<-  laissa  partit 
pour  le>  universités  de  (»(rllin;;iie  el  de 
Strasbourg.  I.e  jeune  keller  voulait  se 
vouer  à  la  carrière  diplomalicpie  :  il 
entendit  le  célèbre  l'iitter  professer  la 
statistique,  le  savant  Schlosser  tour  à 
tour  résumer  et  développer  l'histoire. 
Fort  de  ces  études  pi  éparatoires  ,  il 
passa  bienlAt  de>  cours  académiques 
dans  une  de  ces  petite;  chancelleries 
qui  fourmillaieat  en  .Kilema;;ne,  et  tra- 
vailla dans  le  cabinet  du  baionde  Dal- 
berf»,  alors  à  Frfurt,  d'où  il  administrait 
l'électoral  de  Ma>enre.  Mais  sa  mèie 
faisait  solliciter  pnîT  hit  .t  lierlin.  I,c 
résultat  «h-  ■  une  nomi- 
nation deco  .'.on  au  dé- 
partement des  allaires  elran;;ères  de 
Prusse  ,  et  peu  après  le  titre  de  cham- 
bellan. Ces  bienfaits  le  pénitrcrent  de 
reconnaissance.  Il  ne  s'en  livra  qu'a- 
vec un  7.èlc  plus  vif  aux  travaux  pro- 
pres à  lui  rendre  familières  toutes  les 
matières  diplomatiques,  administrati\es 
et  judiciaires.  11  traduisit  en  fiançais  la 
savante  déduction  que  le  baron  de 
Herzher;;  avait  rédii:;ée  sur  la  surces- 
sion litigieuse  de  Bavière  (1778).  Il  sut 
également  se  concilier  l'amitic'  du  j^rand- 
chancolier,  le  comte  de  Fmkenher;^. 
Aussi,  malj;r.- sa  jeunesse,  fut  il  nom- 
mé char^^éd'affaircs  de  Prusse  en  Suède, 
dès  1 779 .  Celte  destination ,  pi  us  avan- 


44o 


KEL 


taf;euse  que  ce  qu'il  demandait  quel- 
ques mois  auparavant  (le  litre  de  secré- 
taire de  légation  en  Russie)  ,  lui  four- 
nit les  moyens  de  débuter  avec  honneur 
dans  la  carrière.  C'était  le  moment  où 
l'ambition  britannique  voyait  avec  ef- 
froi Catherine  imaginer  la  neutralité 
armée.  En  dépit  des  intrigues  et  de 
l'or  du  machiavélique  cabinet,  Keller 
obtint  de  Gustave  111  l'adhésion  de  la 
Suède  à  l'acte  si  juste  et  si  heureux  qui 
liguait  toutes  les  puissances  maritimes 
contre  la  tyrannie  de  l'Angleterre,  et 
qui,  si  la  révolution  fran(;aise  ne  fut 
venue  brouHler  toutes  les  relations, 
toutes  les  alliances,  aurait  élc  fécond 
en  grands  résultats.  Il  eut  ensuite  le 
bonheur  de  contribuer  à  la  réconcilia- 
tion tardive,  il  est  vrai,  de  Louise- 
Ulrique,  sœur  de  Frédéric-lc-Grand, 
avec  le  roi  son  fils  (1782).  Les  affaires 
de  Suède,  au  reste,  n'exigeaient  pas  une 
présence  continuelle;  et  ,  en  1783  et 
1784,  tandis  que  (lustave,  sous  un 
diaphane  incognito,  faisaiten  Franceet 
en  Italie  un  de  ces  voyages  alors  à  la 
mode  parmi  les  souverains,  Keller 
passait  la  plus  grande  partie  de  son 
temps  à  Ikrlin.  Il  était  do  retour  à 
Stockholm  quand  le  vieux  Frédéric 
reconnut  ses  services  ,  en  le  nom- 
mant son  représentant  à  Saint-Péters- 
bourg; et  Frédéric  Guillaume  II,  qui, 
quelques  mois  après,  ceignit  la  couronne 
de  son  oncle,  ne  revint  pas  immédiate- 
ment sur  cette  mesure.  JMais  on  appro- 
chait du  second  partage  de  la  Polo- 
gne :  les  deux  cabinets  s'aperçurent 
bientôt  que  pour  préparer  des  événe- 
ments de  cette  importance  il  fallait  un 
ambassadeur  plus  mûr.  Keller  fut  donc 
un  peu  cavalièrement  nanti  dn  titre 
d'envoyé  extraordinaire  aux  Pays-Bas 
où  venaient  d'éclater  des  troubles  assez 
analogues  à  ceux  qui  naguère  avaient 
failli  ravir  le  stathoudérat  à  la  maison 
d'Orange,  et  qui  avaient  donné  à  la  di- 
plomatie comme  à  l'armée  prussienne 


KEL 

une  si  belle  occasion  d'intervenir.  Ce- 
pendant, avant  de  quitter  le  Nord  , 
Keller  eut  part  à  la  médiation  de  la 
Prusse  entre  le  Danemark  et  la  Suède 
alors  en  guerre  avec  la  Russie  et  par 
suite  avec  Christian  VII.  Arrivé  à  sa 
destination  ,  il  assista  aux  conférences 
de  Hamm  entre  les  puissances  qui  s'in- 
téressaient à  la  révolte  de  la  Belgique 
(la  Prusse,  l'Angleterre,  la  Hollande, 
TAutriche)  ,  et  signa  la  convention 
de  La  Haye  du  10  déc.  ,  en  vertu 
de  laquelle  les  trois  premières  garantis- 
saient à  la  quatrième  l'obéissance  des 
provinces  rebelles  ,  à  celles-ci  le  ré- 
tablissement de  leur  constitution  , 
convention  que  Léopold  II  ,  quel- 
que différent  que  fût  son  système  de 
celui  de  son  prédécesseur,  .losepli,  ne 
voulut  ratifier  qu'en  le  modifiant.  L'as- 
pect menaçant  de  la  révolution  fran- 
çaise avait  peut-être  accéléré  cette 
transaction;  et  les  cabinets  ue  Vienne, 
de  Dresde  et  de  r>errin  ne  tardèrent 
pas  à  concerter  ensemble  des  plans  tout 
autres,  en  vue  des  prochaines  éventua- 
lités que  des  troubles  un  peu  plus  gra- 
ves que  ceux  de  P)riixelles  et  (rAmsIer- 
diim  leiM"  laissaient  apercevoir.  Tou- 
jours chargé  d'affaires  de  l*russe  à  La 
Haye,  Keller  n'eut  rien  à  faire  dans 
cette  premine  partie  delà  lui  le  contre 
la  démag();;ie  française.  Il  venait  d'é- 
pouser à  Aix-la-Chapelle  une  sœur  du 
général  russe  comte  de  Wlttgenslein- 
Rernebourg  (1790):  Frédéric-('nil- 
laume  l'avait  crée  comte  et,  dès  1788, 
l'avait  gratifié  de  l'expectative  d'un 
canonicat  à  Cammin.  11  est  vrai  que 
l'expectative  ne  se  réalisa  jamais,  et  que, 
lorsque  le  chanoine  dont  il  attendait 
la  mort  décéda,  le  chapitre  n'existait 
plus.  iSous  le  retrouvons  en  mouve- 
ment ,  dans  cette  fameuse  année 
1793,  si  fertile  en  franches  horreurs 
sur  les  échafauds  de  Paris  ,  si  fertile 
eu  duplicités  diplomatiques  sur  le  théâ- 
tre de   la  guerre.  Déjà   la    Prusse  et 


KtL 

l'Autriche,  m  d^il  Jr  rautucilfs  pro- 
Irslalioni  de  iif^in(érei<fment  r(  d'u- 
nioii,  iiijircliairtit  i  |ijrl .  le  jruiir  rm- 

ftereur  rljit  a  Uruirllrs  nr^ocunl  avcr 
e  «;ou\frnemrnl  de  KubfApifirc  ,  el 
la  l*rii*4f  ne  rombatlait  que  nmlle- 
nirtil  dans  \rs  clcrtorats  ccclf>ia<klii]UC4. 
1/  Vii^lelerre,  pour  rc^>crrer  Irs  niruds 
làrlirs  de  la  rnalilion,  indiqua  un  ron- 
ptCN  à  AiMffs.  Sur  l'ordre  du  duc  de 
hninsvkirl.  Keiler  s'v  rend:!.  I,e  duc 
d'^orcL  el  le  prince  de  Sate-(.4ibour^ 
\  riaient.  Kn  \ain  ce  dernier  lenla  de 
donner  aux  deu\  puisvances  allemandes 
un  peu  de  \i;;Meur.  Au  lieu  de  prendie 
ro(Tcn>i\e  ainsi  qu'on  le  pouxail  si  fari- 
Irmenl  à  celle  époque,  au  lieu  de  niar- 
clier  sur  Paris,  on  modifia  le  plan  de 
rann»aj;ne  comme  hasardeux  ,  •  omme 
téméraire,  et  (^l)our;;  adoucit  les  fx- 

f tressions  de  son  manifeste  qui  euisent 
roissé  les  oreille»  •le^  révolutionnai- 
res. (}ette  polilii]ue  ,  aussi  timide  que 
fallacieuse  ,  n'avait  point  l'approba- 
tion de  keiler ,  et  il  ne  pressentait 
que  trop  à  quoi  elle  aboutirait.  I/an- 
née  suivante,  dès  que  les  Fiançais  eu- 
rent traxersé  le  \N  alial  sur  la  ^lace, 
il  ilépériia  une  eNiafetle  à  Berlin,  pro- 
pliélisanl  que,  m  par  une  prompte  et 
dériNixe  mantru\re  la  Prusse  ne  se  hâ- 
tait d'>  metlie  obstacle,  la  Fiance 
allait  sous  peu  se  trouver  maiiresse 
et  d'Am-terdain  et  de  toute  la  répu- 
blique des  l*rovince5-l  iiies.  I.a  pro- 
pliélie  se  léalisa  plus  Mie  encoie  qu'il 
n'rùl  osé  le  penser.  I.a  conquéic  delà 
Hollande  destituait  Keiler.,  On  sait 
a\er  combien  d'impassibilité  le  cabinet 
de  Keilin  voyait  marclier  des  événe- 
ments qui  ne  le  touchaient  point  imroé- 
dialemcut  if'oy  Kalckiiei  TH,  dans 
ce  vol.^  :  la  clairvovance  ,  l'animosilé 
de  Keiler  contre  la  France  n'étaient 
point  des  titres  péremploires  en  sa  fa- 
veur près  des  favoris  de  Fiédéric- 
liuillaume  11  On  lui  laissa  donc  am- 
plement   le  temps   de    voir   les   pa- 


KFL 


44' 


rents  de  sa  femme  dans  le  Ilolstein,  et 

d'aller  en  Tluirinj;e  visiter  ses  pro- 
pnétr».  l  II  iiioMient  on  le  dciij;na 
pour  iepii->ciilcr  la  l'russca  .Masence, 
c'est-à-dire  pour  réclamer  cl  faite  ren- 
trer les  sominc>  auxquelles  la  INusse 
prétendait  comme  protrcirirr  des  cer- 
cles expoȎ>  qu'elle  nr  pruic^rail  pas. 
Mais  (iirlli,  ciiar-é  de  cel  offuc, 
continua  de  l'exerrei ,  ri  kellrr  resta 
encore  en  rep«»s  )us(|u'en  17U7.  .V 
celle  époque  l'Autriche  vaincue  en 
Italie  semblait  à  la  veille  de  faire  la 
paix  avK  le  Diiecloire,  unis  la  l'rusNe 
qui  lui  en  a>ait  donne  l'exemple  ap- 
préhendait, nonsans  raison,  qu'elle  ne 
se  samat  en  sanifiant  l'empiic  ilont 
elle  a\ait  la  présidence,  cpi'elle  nr  stipu 
ht  en  même  lernps  que  M>n  a;;iandisse- 
menl  le  stu/u  ifuo»  re;;.inl  des  aiilies, 
et  qu'elle  ne  \iiit  à  boul  d'olcr  au  cabinet 
de  Ue'liii  l'amitié  du  ;;ou\ernrnii-nl 
français,  keiler,  envo\é  à  Vienne 
pour  éventer  ces  intrigues,  n'y  réus- 
sit qu'en  partie;  car  rhu;;ut  el  les 
deux  Cobentzl  ;;arderent  bien  leur  se- 
cret, el  ce  n'est  ^uére  que  par  les  jac- 
tances de  la  France  que  l'on  sut  a  lîer- 
lin  lescIauNCS  secrètes  de  ("anij'o-For- 
mio  Le  jeune  comte  pouiianl  n'i;;iio- 
ra  pas  tout,  et  ses  lellies  mirent  bien 
son  ;;o:i\crnernent  sur  i.i  xoie,  mats  les 
é\ènriiieiil>eui-iiieiDi'scii  diicnl  bienir'it 
pluN  que  loul  le  lesle;  l'occupaiion  «le 
Ma\ni(e  suituiil  fraj>pa  de  stupeur 
touie  r.Vlleina^ne.  Sur  cc>  eiiticfaites 
Frédéric-Ciuillaume  II  inouiut  cl  il  eut 
pour  successeur  Fie.loric-Ouillaiiiiic 
III,  son  GU.  Ce  dernier  appréciait  le 
comte  de  k'eller  ;  il  lui  donna  «le  sa 
main  à  Nci^s  la  croix  de  rAi;;le  - 
!^ou;;e.  Mais  comme  tout  alors  sem- 
blait s'acheminera  la  paix,  et  comme 
la  Pru>se  allait  avoir  besoin  de  la 
Franre,  pour  s'arrondir  par  les  scculari- 
salions  en  perspective,  il  ne  lui  donna 
qu'un  traitement  de  disponibilité.  I^ 
recrudescence  de    la   guerre  après   le 


442 


KEL 


guet-apens  deRastadt  ne  modifia  point 
CCS  arrano;ements.  Il  eût  fallu  pour 
rendre  Keller  à  l'activité  un  chanf^e- 
menl  complet  de  système.  Ce  change- 
ment fut  près  d'avoir  lieu  en  1805,  et 
Keller  était  désigné  pour  entrer  au 
ministère  :  mais  les  partisans  de  la 
France  révolutionnaire  triomphèrent 
encore  une  fois,  et  amenèrent  enfin 
la  crise  dont  peu  s'en  fallut  que  la 
Prusse  ne  revînt  jamais.  Keller  vit 
avec  la  plus  amère  douleur  les  catastro- 
phes de  1806.  Après  la  bataille  d'Iéna, 
il  se  rendit  à  Vienne  pour  y  réclamer 
le  concours  des  hommes  d'état ,  pour 
provoquer  quelque  diversion  ,  quel- 
que manifestation  utile  aux  provinces 
prussiennes  encore  vierges  du  contact 
de  l'étranger.  Peut-être  aussi  eut-il 
mission  de  voir  l'eiiipereur  en  per- 
sonne ,  de  le  sonder,  de  lui  communi- 
quer à  lui-même  les  sentiments  du  mo- 
narque prussien.  La  paix  de  ïilsitt, 
si  brusquement  conclue,  coupa  court  à 
ces  communications,  et  Keller  ne  fut 
plus  admis  ostensiblement  au  service 
prussien.  Ainsi  le  voulait  la  prudence. 
Ses  biens  étaient  situés  la  plupart  dans 
l'Eichsfeld;  et  l'Eiciisfeld  venait  de 
passer  sous  la  domination  de  Jérôme- 
Napoléon.  A  la  lettre  par  laquelle  il 
donna  à  Frédéric-Guillaume  ces  tris- 
tes informations  ,  ce  prince  répon- 
dit en  l'engageant  à  éviter  tout  ce  qui 
pouvait  inutilement  le  mettre  mal  avec 
la  prépondérance  française  ;  et  plus 
tard,  le  comte  étant  venu  à  Berlin  lui 
exprimera  quel  point  lui  pesaient  ses 
relations  involontaires  avec  la  cour  de 
Cassel,  il  lui  fit  dire  par  le  chef  de  son 
cabinet  de  se  tranquilliser,  de  prendre 
service  chez  quelque  prince  allemand, 
et  d'être  sûr  qu'il  lui  serait  tenu 
compte  de  ce  temps  passé  en  service 
étranger.  Le  monarque  assura  même  , 
en  attendant  des  jours  plus  lieureux,  à 
M™*'  de  Keller  une  pension  qui  réel- 
lement était  donnée  au  mari  pour  ses 


KEL 

services  et  sa  fidélité  (1808).  De 
1807  à  1810  pourtant,  le  comte  de 
Keller  passa  la  plus  grande  partie  de 
son  temps  dans  le  royaume  de  West- 
phalie.  Deux  fois  élu  membre  des  états 
du  nouveau  royaume  ,  il  assista  aux 
deux  sessions  de  ce  corps  à  Cassel,  et 
deux  fois  il  fut  porté  par  une  forte  ma- 
jorité à  l'une  des  cinq  places  du  comité 
des  finances,  ce  qui  le  fit  nommer  par 
Jérôme  membre  de  ce  comité.  Ce  frère 
de  Napoléon  le  décora  ensuite  de  l'or- 
dre de  la  Couronne  de  Westphalie,  et 
le  nomma  conseillei-d'état.  Keller,  qui 
évitait  de  toutes  ses  forces  les  bienfaits 
d'un  régime  qu'il  voulait  haïr,  et  qui, 
lors  même  qu'au  nom  des  états  il  pro- 
nonçait l'adresse  usuelle  au  monarque, 
ne  le  louait  que  de  son  désir  de  bien 
faire,  se  trouva  fort  heureux  lorsque  un 
jour  enfin  le  grand-duc  de  Francfort  le 
manda  pour  lui  confier  ses  affaires  liti- 
gieuses avec  la  France,  et  l'envoja  les 
plaider  à  Paris.  Il  s'acquitta  de  celte 
mission  en  négociateur  consommé,  et 
fit  rabattre  deux  millions  cent  trente 
mille  francs  des  cinq  millions  huit  cent 
quatre-vingt  mille  (]uc  la  France  pré- 
tendait sur  le  grand-duché  de  Franc- 
fort ;  et  il  fit  admettre  au  prix  de  six 
millions  le  réméré  (ou  si  l'on  veut  la 
résiliation  de  la  vente)  des  biens  do- 
maniaux du  comté  de  Ilanau  et  de  la 
principauté  de  Fulde.  Napoléon  signa 
ces  clauses,  et  Keller  envoya  ce  traité 
presque  inespéré  à  son  nouveau  maître. 
Il  se  trouvait  encore  en  France  en 
1813,  quand  les  événements  d'Alle- 
magne commencèrent  à  faire  pâlir 
l'étoile  de  Napoléon.  Soudain  il  de- 
mande ses  passe-ports  que  l'autorité  ne 
lui  délivre  ni  ne  lui  refuse  :  il  part  alors 
sans  plus  attendre  ,  il  arrive  ,  puis  se 
rend  à  Francfort-sur le-Mein  et  de  là 
dans  Aschaffenbourg.  Le  grand-duc  eut 
l'air  d'improuver  ce  brusque  retour,  cl 
Keller  alla  donner  un  coup-d'œil  à  ses 
terres  de  Thuringe.  11  reparut  après  la 


REL 

lijlûillr  dr  I  f,    tout  radifui, 

^ola  ;iu  uuj  j1  «if  NN  itlj^rri- 

stnri,  sou  brau  iirrr,  frlirila  \e  rui  dr 
l'rus%«  du  I  rtour  de  ^J  iurtune,  et  reçut 
•uinpluriixinfnt  cliez  lui  rei-élrcleur 
df  liose-C^uel,  si  frucllcracnt  dé 
puutlié  après  la  campagne  de  IHOG, 
et  (lui  à  présent  \enait  du  fond  de 
Texit  repreiidie  possession  de  ses  états. 
!  ourlié  dr  l'arrnfil  <lr  kcller,  ii  le 
nomma  son  en>  o>  r  auprès  des  trois  mo 
nar(|ues  allies,  el  luiptopnt  la  prrmirtr 
place  de  son  cabiiiel.  C'est  a^er  ce-, 
assurances  que  Krilrr  »ui>it  les  allies  en 
France  et  revit  l'tns  un  an  aptr>  l'a- 
voir quille  fuilixrmenl.  Il  n'eut  au- 
cune peine  à  faire  admettre  pro>isoi- 
(ement  que  l'électeur  administrerait 
les  étais  soumis  asant  1807  à  sa  do- 
mination; le  même  principe  s'éten- 
dait à  tous  les  princes  dépouillés  de- 
puis huit  ans.  Il  alla  ensuite  à  \  ien- 
ne,  accompagné  d'un  second  plrinpo- 
irntiaire  J.rprll  ,  ri  dans  les  ariange- 
menls  tlrfiniiifs  du  celélur  conjures,  il 
stipula  liabilriiienl  1rs  inti-réls  de  l'é- 
lecteur, ainsi  que  ctux  de  la  maison  de 
lirunswick  dont  il  riait  aussi  charge. 
Il  si^na  au  nom  des  deuK  princes 
l'acte  Gnal  du  congrès  et  ,  quelques 
jours  après  ,  l'adhésion  à  la  quadruple 
alliance  îles  quatre  ;;randes  puissjnres 
contre  l'echauffouree  de  Bonaparte, 
re\cMiu  de  l'île  d'IJbe.  Il  >it  enGn 
mrablés  tous  les  vœux  de  son  cœur. 
Le  roi  Krédéric-(iuillaume  ,  au.ssiiAt 
que  le  conjurés  de  Vienne  fut  fini, 
I  en>ova  réorganiser,  sur  un  plan  con- 
venu a  l'avance,  le  cercle  «l'Urfurt 
qu'avait  si  lont;-tem[>s  occupé  l'admi- 
nistration française  centrale  ,  puis  le 
nomma  président  de  la  régence  (ou 
tribunal  d'appel  d'Krfurt].  Kn  même 
temps  il  était  commissaire  pour  l'exé- 
culion  des  edianges  ou  cerisions  mu- 
tuelles entre  Saxe-Weimar  et  la 
lVu5.se.  entre  la  Prusse  et  la  maison 
de  Schwartibour^.    ba  1819  cnÊn,  il 


KEL 


443 


o*eat  plus  que  la  directioa  des  affaire, 
diplomatiques  près  lc>  cours  saxorinr> 
de  la  li;;nc  crnestine,  près  les  ducs 
d'Anlialt,près  les  princes  drSchwarli- 
bour^;  et  dr  Ueuss.  Criait  toujours  de 
la  diplomatie,  mai>  au  fond  c'était  une 
sinécure.  Ktfurt  riait  sa  résidence;  et 
le  lieu  ou  a^ait  commencé  sa  carrière 
d'homme  d't-tat  la  \\l  aussi  finir  ;  il 
mourut  le  *J'J  iio\ .  1827,  a  Stedten  , 
non  loin  d'Kifurl.  F — ot. 

K  K  L  L  K  H  (  (àtoïK.i  ) ,  auteur 
prrMiinr  des  crirbrrs  Slumim  lier 
.-imlin  hf,UAi\\i\l  le  limai  ITtiO,  près 
de  llonndorf,  dan%  la  Korrt -Noire. 
Son  père  était  maréchal-ferrant  et 
sou\ent  il  traitait  ses  enfants  a\ec  la 
rudesse  d'un  bras  habitué  i  dompter 
les  métaux,  (^ux-ci  ne  s'en  réfu;;iaienl 
qu'avec  plus  d'amour  sous  l'aile  d'une 
mère  dont  la  douceur  formait  con- 
traste avec  le  dur  caractère  de  l'iras- 
cible for;;eron.  Celle  imprevsion  ne 
s'effaça  jamais  de  l'anic  dr  (ieor^e,  et 
dès  l'enfance  le  di>po>a  .lux  sentiments 
tendres  et  intimcN,  qui,  jar  une  rirange 
antinomie,  ne  reinprrhaient  pas  d'être 
colère,  jaloux,  haineux  et  >anilrux  au 
suprême  de^re.  Il  a^ait  beaucoup  de 
mémoire  et  d'aptitude  en  tout  <:rnre. 
De  l'école  des  bénédictins  de  >  illin- 
gen,  il  passa  au  >;vmnase  de  Fnbour^; 
tenu  par  les  jésuiles,  puis  à  l'unirer- 
site  de  Vienne  où  il  termina  ses  étu- 
des philosophiques,  et  se  mit  à  l'ana- 
tomie  et  à  la  pathologie.  Partout  il 
fut  remarqué  comme  un  des  élèves  qui 
donnaient  le>  plus  hautes  espérances. 
Mais  tous  ses  moments  n'rtaicnt  pas 
voues  au  travail  ,  et  ses  dépenses  un 
peu  fortes  dans  la  capitale  de  l'Au- 
tnche  fatiguèrent  hinitot  son  père  , 
qui  le  rappela  péremptoirement.  1^ 
jeune  homme  revint  desespéré  ;  puis 
lise  résigna.  Tous  ses  souvenirs  d'en- 
fance a\ aient  refleuri  suaves  et  bril- 
lants. Il  s'était  rendu  à  une  messe  de 
l'abbaye  de  Saint-Biaise.  La  poésie 


444 


KEL 


sublime  des  pompes  catholiques ,  le 
chant,  les  orgues,  la  richesse  de  l'ar- 
chitecture, ratmosphère  pure  et  calme 
du  lieu  snint,  tout  cela  Tavait  saisi.  Il 
n'aspirail  plus  qu'à  s'enfermer  comme 
novice  à  l'abbaye.  On  l'admit  sur-le- 
ciiamp  (1778);  et,  sept  ans  après,  il 
recevait  la  prêtrise  ù  Constance.  Ce 
laps  de  temps  ,  entre  son  premier 
pas  au  monastère  et  l'instant  qui  le 
consacrait  irrévocablement  au  saint 
ministère,  s'était  écoulé  en  études  so- 
lides et  variées.  Sou  supérieur,  l'abbé 
Gerberl,  qui  appréciait  son  caractère  et 
son  talent,  lui  lit  professer  neuf  ans 
durant  la  philosophie,  les  antiquités, 
la  diplomatique,  le  droit  ecclésiastique, 
l'histoire,  et  lui  fit  faire  de  fréquents 
vo)af!;es  aux  frais  du  couvent.  Kcller 
pendant  ces  excursions  noua  de  nom- 
breuses relations  avec  les  savants,  et  re- 
cueillit de  précieux  matériaux  dans  les 
abbayes  de  la  Souabe  pour  l'histoire 
des  évêchés  de  Verden,  d'Augsbourg  et 
d'Eichsta?dt.  Il  fut  ensuite  pourvu  de 
la  cure  de  Gurtweil  aux  environs  de 
Waldstat,  puis  de  celle  de  Schluchsee 
où  il  passa  les  plus  heureux  moments 
de  sa  vie,  sur  les  bords  délicieux  du 
lac  de  Constance,  au  milieu  de  sites 
charmants  et  tout  pi  es  de  l'abbaye  qu'il 
aimait.  L'année  1803  vit  finir  ce  bon- 
heur. Le  pnncc-abbé  venait  de  mou- 
rir :  il  s'aj^issait  de  lui  choisir  un  suc- 
cesseur, Keller  fut  un  do  ceux  qui  eu- 
rent le  plus  de  voix;  un  seul  parmi  ses 
confrères  en  comptait  autant.  Enfin 
pourtant  l'élection  lonj^-temps  balan- 
cée se  termina  en  faveur  de  ce  rival  de 
tout  point  inférieur  à  Kellei'.  Jamais 
ambitieux  désappointé  ne  se  livra  plu* 
immodérément  à  sa  fureur  que  l'ex- 
curé  de  Schluchsee.  Il  ne  se  plain;nit 
pas  seulement  de  la  fortune,  de  l'in- 
justice des  hommes,  de  l'aveuf^lcment 
du  siècle;  d  ne  se  borna  point  à  voci- 
férer des  invectives  contre  ceux  dont 
les  votes  malencontreux  avaient  donné 


KEL 

l'avantage  à  Bertold,  ni  à  voir  un  noir 
complot  et  des  intrigues  infernales  dans 
l'échec  qu'il  éprouvait:  il  enveloppa 
tous  les  monastères,  toute  la  catiiolicité 
dans  la  haine  qu'il  avait  vouée  aux  au- 
teurs de  ce  revers.  De  vive  voix  et 
par  écrit ,  dans  l'intimité  et  en  pu- 
blic ,  il  redisait  à  plaisir ,  non  pas 
ces  plates  épigrammes,  mais  ces  inju- 
res surannées,  que  l'impiété,  l'étour- 
derie,  le  mauvais  goiJt,  ont  tant  de 
fois  répétées  contre  les  sociétés  mo- 
nasti(iues.  Le  cloître  était  la  grotte 
cimmérienne  ,  asile  des  ténèbres,  la 
geôle  et  la  géhenne  de  Pesprit,  le  pou- 
lailler de  l'hérésie,  etc.  Luther,  dans 
ses  jours  de  triviales  joyeusetés,  n'en 
a  pas  plus  dit.  Et  pourtant  qu'était-ce 
en  1803  qu'un  prince-abbé?  Les 
princes-abbés  n'avaient  pas  plus  de 
trois  ans  à  vivre.  Déjà  nombre  de 
couvents  avaient  été  sécularisés  au 
bruit  du  canon  des  Français,  et  le  tour 
de  Saint-Rlaise  n'était  pas  loin  !  Ne 
pouvant  s'habituer  à  vivre  simple 
moine  dans  les  murs  de  rabba>e, 
l'abbé  manqué  se  fit  donner  ou  ac- 
cepta une  autre  cure  :  ce  fut  celle  de 
Wislikon  en  Argovie,  et  de  là  il  prit  à 
tache  de  nuire  à  l'élu  et  à  ses  électeurs. 
Ses  sarcasmes  et  ses  criailleries  eussent 
produit  bien  peu  d'effet,  si  la  France 
toujours  victorieuse  n'eût  enlevé  à 
l'Autriche,  pour  les  donner  à  qui  bon 
lui  semblerait  en  les  sécularisant,  ses 
possessions  du  Brisgau. Cette  spoliation 
qu'en  tout  autre  circonstance,  el  sur- 
tout s'il  eût  été  abbé,  Keller  eut  re- 
gardée comme  le  comble  de  l'injustice 
et  de  l'impiéié,  le  transporta  de  joie. 
Il  était  vengé  :  les  pauvres  bénédictins 
étaient  dispersés ,  l'abbé  n'était  plus 
prince.   «  J'ai  vu  Bertold  se  carrer  à 

«  la  diète Je  n'ai  fait  que  passer, 

«  il  n'était  déjà  plus.  »  keller  eut 
encore  de  beaux  jours.  Libre,  lui  aussi, 
du  lien  monastique  et  nommé  curé 
de  l'église  dont  venait  d'élre  nouvelle- 


KEL 

me nr  i\o\rt  la  villf  d' Arau,  il  »*>  vo^  ait 
^uùif,  aimr,  \aiitf.  On  rrchercliait 
»a  cuii\rr»aliuM  ,  on  accourait  à  ^rs 
5frinon5  ri  on  Ic4  applaudissait  ;  envi- 
ronnr  de  5a\anl>  ou  d'iiomnirs  da 
mondeirunfspriltrrscultixf,  il  a\ait  le 
l'LiMr  df  l'cmpcjrlfr  sur  eux  tous  et  de 
srnlir  que  presque  tous  reconnaivsaient 
«'a  supriionlr.  Kl,  quand  \r\  Stun- 
itrii  ttrr  hulacltt  parurrni .  itipiiiion 
In  lui  atli  ibua  ;  la  manicre  dont  il  s'en 
drfriidil  n'rlail  pas  failc  pour  di'.Nua- 
dn  :  la  curiosité  s'avivait  encore  et  un 
rlurme  m>Nterieu\  enveloppait  la  per- 
sonne de  l'auteur.  Mais  il  n  est  pa«  de 
gloire  qui  n'ail  son  amertume.  Si  les 
auditeurs  de  Keller  étaient  tous  admira- 
teurs de  son  elocution  facile,  éléj;ante, 
animée  et  peisua>i\e,  ils  n'étaient  pas 
lou>  édifiés  de  ses  idées  :  lU  trouvaient 
son  lan{;aj;e  trop  lil>éial,  son  ratlioli- 
cisme  trop  voisin  des  Iconoclastes  et 
de  Luther.  Ses  sermons  improrisés 
pi  étaient  suitout  le  liane  aux  attaques  : 
rapide  parleur,  il  ne  délimitait  pas  lou- 
|ours  sa  pensée  avec  la  ticrnière  préci- 
sion ;  n'écrivant  point,  il  ne  fixait  pas 
invincildemrnt  sa  parole  de  manière  à 
erapédier  qu'on  ne  la  travestit.  On  lui 
reproduit  encore  d'être  ami  du  crlè- 
bre  Dalbei;;  et  de  son  vicaire-;;énéral 
le  baron  de  \N  essenberc^.  De  tout 
cela  il  résulta  que  les  catholiques  scru- 
puleux virent  Keller  de  mauvais  u-il, 
que  le  nonce  du  pape  parta>;ea  cette 
antipathie,  et  que  moine  au  sein  de  sa 
ville  ,  où  il  comptait  le  plus  d'amis 
et  d'admirateurs,  Relier  eut  a  .soutenir 
une  polémique  irritante  et  à  subir  des 
drsa^iemcnts  quotidiens.  Ces  circon- 
stances et  aussi  son  inconstance  natu- 
relle lui  firent  abandonner  Arau.  Il  alla 
se  fixer  à  Zurzach  en  qualité  de  cure  et 
doven  de  chapitre:  mais  il  s'en  fallut 
de  beaucoup  qu'il  trouvât  l.i  un  audi- 
toire bénévole,  le  comprenant  ou  as- 
pirant a  le  comprendre;  étroilessc  d'es- 
prit, jalousie  et  calomnie,  voilà  quelles 


KtL 


445 


dlipûsitions  l'accueillirent.  Qu'on  )U};e 
ce  que  dut  rtic  cet  enfer  pour  un 
homme  dont  l'orgueil  dépassait  toute 
expression.  Méconnu  ,  épié  ,  tiraillé 
de  tous  côtés  comme  si  l'on  eût  for- 
mé le  complot  de  le  tuer  à  coups 
d'épin;;les  ,  au  bout  de  deux  ans  il 
n'v  put  tenir  et  fut  heuieux  d'avoir 
pour  refii;;e  un  poste  bien  infrrieur  à 
(îraffriihausen.  Kh  bien  I  là  encore  il 
sut  se  faire  des  ennemis  ,  la  populace 
animée  contre  lui  le  réduisit  à  s'enfuir. 
(^est  qu'effectivement  une  cuie  de 
campa<;ne  n'était  pas  faite  à  sa  taille: 
un  aigle  ne  peut  se  déployer  en  cage, 
il  V  végète,  il  T  brise  se*  ailes  et 
meurt.  \jl  vraie  place  de  Keller  aurait 
été  une    chaire  de    faculté   dans    une 

f;rande  ville:  il  y  pensa  bien,  et  il  »«)l- 
iciia  celle  de  r  ribourg  ,  mais  il  ne 
l'obtint  point.  Son  dernier  .séjour  fut 
la  cure  de  l*faffen>»eiler  aux  environs 
de  Fribuurg  en  Bnsgau  :  il  n'v  fut  pas 
plus  heureui,  il  >  letrouva  1rs  mêmes 
mirurs,  les  mêmes  esprits,  les  mêmes 
préjugés.  H  s'isola  davantage.  Mas 
s'isoler  est  crime  selon  les  êtres  soup- 
çonneux qui  croient  toujours  ou  qu'on 
le»  méprise  ou  qu'on  a  de»  m> stères  à 
cacher.  Sa  réputation  d'ailleurs  était 
partout  répandue;  mais  dans  des  pro- 
vinces reculées  ,  dans  des  hameaux, 
cette  réputation  était  fâcheuse  :  il  était 
le  prêtre  impie,  le  moine  apostat,  le 
prédicateur  hérétique.  Ce  n'est  pas 
tout  :  sa  paroisse  était  pauvre,  il  n'était 
pas  riche,  il  n'avait  rien  économisé.  La 
vicille.sse  et  riinligencc  se  reunissaient 
pour  accabler  le  pauvre  ermite,  en  butte 
déjà  au  mauvais  vouloir  de  tant  d'en- 
ennemis.  l'ne  fois  pourtant  la  régence 
du  canton  d'Argovie  lui  fit  tenir  spon- 
tanément cent  ducats  ;  Keller  en  fut 
touche  aux  larmes  ;  mais  les  créanciers 
et  les  maladies  les  eurent  bientôt  dé- 
voré^. Keller  mourut  ain>i  de  mille 
morts  dans  une  longue  et  douloureuse 
agonie,  lui  que  la    nature  avait  dote  si 


446  KEL 

heureusement,  lui  qui,  s*ll  eât  voulu, 
aurait  pu  vivre  considéré ,  paisible  et 
riche,  et  qui  peul-étre,  s'il  n'eût  pas 
blessé  ses  confrères  par  les  saillies  de 
son  oîf;ueil,  aurait  été  élu  à  celte  place 
de  prince-abbé  qu'il  méritait  par  son 
talent.  Sa  fin  eut  lieu  du  7  au  8  déc. 
1827.  Lesouvrao;es  incontestablement 
de  lui  sont  ;  I.  Des  Conférences  pas- 
ivraies  pleines  de  chaleur  et  d'onction, 
mais  qui  pèchent  quelquefois  par  la  lo- 
gique,et  où  il  n'est  pas  sûr  qu'une  sévère 
orthodoxie  n'ait  rien  à  reprendre.  II. 
Idéal  pour  cha(pie  état  de  la  vie, 
ou  Morale  en  tableaux,  1818,  un 
des  livres  de  morale  qui  captivent  le 
mieux  le  lecteur  par  un  charme  at- 
tractif, mais  qui,  pas  plus  que  les  autres 
écrits  de  Keller,n'a  été  à  l'abri  de  criti- 
ques très-amères  et  très-violentes.  III. 
Cafholi'ci/in,  1821.  C'est  une  série 
de  petits  traités  où  Kcller  touche  suc- 
cessivement à  une  foule  de  sujets  ;  on  y 
reconnaît  la  main  du  maître,  surtout 
en  fait  d'histoire.  Mais  trop  souvent 
la  fureur  de  l'ex-moine  contre  les  moi- 
nes, du  prêtre  contre  la  papauté,  s'y 
donne  canière.  11  avait  de  plus  pré- 
paré les  matériaux  des  dix  à  douze  pre- 
mières lettres  de  l'/y/^/Z/a^e/ ri' or,  grand 
dictionnaire  de  l'histoire  ecclésiasti- 
que où  il  eut  résumé  ce  qu'il  savait  sur 
toutes  les  branches  de  l'histoire  ecclé- 
siastique, et  où  il  eût  donné  son  dernier 
mot  sur  une  foule  de  questions.  Il  pa- 
raît aussi  qu'il  avait  travaillé  i  l'histoire 
des  évcchcs  de  Verden,  d'Augsbourg 
et  d'Eichstandt,  mais  que  les  manu- 
scrits en  sont  éparpillés  dans  diverses 
mains  :  il  s'en  trouve  plusieurs  aux 
archives  d'Arau.  Restent  les  Stitn- 
den  der  Andarht.  L'éditeur  de  cet 
ouvrage,  qui  compte  au  moins  quinze 
éditions  en  allemand,  et  qui  a  été  tra- 
duit en  français  sous  le  titre  de  Mé- 
ditations religieuses  par  MM.  Mon- 
nard  et  Gence  (Paris,  1830-36,  8 
tom.  en  16  vol.),  a  déclaré  queKeller 


REL 

n'a  eu  aucune  part  à  la  rédaction  (1)  ; 
et  cet  écrivain  lui-mcme  l'a  dit  tout 
haut  en  vingt  occasions,  tout  en  avouant 
qu'il  s'honorerait  d'en  être  l'auteur. 
Mais  il  est  un  fait  certain,  c'est  que 
rien  ne  ressemble  plus  au  style,  au 
ton,  au  tour  d'idées  de  Keller,  que  le 
style,  le  ton,  le  tour  d'idées  des  Slun- 
den  der  Andacht ;  c'est  la  même  al- 
lure, la  même  méthode,  le  même  mé- 
lange de  préceptes  et  d'exemples  ,  le 
même  arôme  moral,  la  même  brusque- 
rie de  transitions  ;  enfin  des  passages 
entiers  des  sermons  que  prononçait 
Keller  dans  Arau  se  retrouvent  dans 
les  Stunden  ;  et  il  est  plus  que  probable 
que  telle  ou  telle  Méditation  est  un 
sermon  tout  entier.  Ainsi  le  fond  des 
Stunden  der  Andacht,  au  moins  pour 
une  portion  considérable  ,  est  de  Kel- 
ler, mais  il  n'a  pas  été  en  relation  di- 
recte avec  le  libraire  ,  il  n'a  pas  ré- 
digé pour  lui.  Quels  ont  été  les  rédac- 
teurs? en  quoi  consiste  leur  part  de 
travail  ?  Ce  sont  des  questions  sur 
lesquelles  il  est  difficile  de  prononcer. 
P — OT. 

KELLERMAîV]V,DucDE 

VALMY  (François-Christophe)  , 
maréchal  de  France ,  offre  l'exemple 
assez  rare  d'un  officier  de  fortune  éga- 
lement bien  traité  par  l'ancien  régime 
et  par  la  révolution.  Il  naquit  à  Stras- 
bourg, le  30  mai  1735,  d'une  famille 
distinguée  ;  son  bisaïeul  était  président 
de  la  chambre  des  Treize  et  prévôt  des 
marchands  en  1669;  mais  cette  no- 
blesse bourgeoise  étant  regardée  alors 
comme  bien  Inférieure  à  la  noblesse  d'é- 
pée,  il  fallut,  pour  que  Kellermann  s'é- 
levât avant  1789  au-dessus  des  grades 
subalternes,  non-seulement  beaucoup  de 

(i)  C'fst  j.-».rjs  cloute  ;i  tort  que  Griice  «".-.l 
désigné  sur  le  titre  cuinnie  tra(iucl«ur,  puis- 
<|>if  ,  ne  sachant  pns  In  Itini^iie  aileinandc,  il  ne 
faisait  que  retoucher  la  iruductioii  exécutée  pnr 
M.  Moniiard,  et  dont  le  uianiiscrit  était  «iivoyc 
de  Suisse.  C'est  ce  qu'il  nous  a  dit  lui  inèinc  , 
i-t  nous  l'avons  d'ailleurs  vu  plusieurs  foi»  faire 
ce  travail  pânible  et  ingrat.  L. 


■éiitret  de  bravoure,  maii  «iicore  le 
roucoula  lie  circun»ljnces  lieuieuscs. 
Dan»  toule>  le^  biu^rai>iiie»  publirrs 
lie  son  vi>aiil,  on  lit  que  son  ^uùl  pro 
nonré  pour  Petat  inililairc  lui  Gt  pien- 
(Ire  ilu  ser\irc  CDinme  »iiupie  lius>aril 
dans  le  ré^iuient  de  Lowendabl.  Kel- 
lermann,  qui  a\ant  luutse  faisait  liun- 
neur  d'rlre  un  enfant  delà  résolution, 
ne  nVlama  jamais  contre  cette  asser- 
tion ;inais  il  est  ceitain,  d'après  5es 
t'tals  de  ser\ice,que  ce  fut  comme  cadet 
qu'il  entra  dans  ce  corp4  en  17.')*2,  à 
I  à^e  de  dix  sent  ans.  Kn  17.'>3,  il 
passa  ensri^ne  dan»  Ixopl-Bavière  ;  el 
lut  noronir  heulenaitt  aux  \olontaircs 
d'Alsace,  le  G  mai  17.'>(i.  Deux  ans 
après,  il  fit  ses  premières  armes  dans 
la  ^urrre  de  srpf  uns.  et  mérita  dès  la 
première  campagne  le  ;;radc  de  capi- 
taine en  second  1,0  a\nl  17ôH)  dans  le 
même  corps;  puis,  l'annce  siii\aiite,  se 
distiD;;ua  à  la  bataille  de  IWr^liem. 
Capitaine  à  la  suite  djii>  les  voluiituires 
du  Daupliine  J  3  a\ril  17r>l\  il  justi- 
fia cet  avancement  par  une  action  ifé- 
ilat.  A  l'affaire  d'Orsten  piè>de\Ve- 
sel,  il  chargea  avec  son  escadron  trois 
cents  grenadiers  ennemis,  lesGt  prison- 
niers et  s'empara  de  leur  canon.  Dans 
la  campagne  suivant!- (t7<»2\  il  atta- 
qua avec  cent  cinquante  chevaux  un 
corps  beaucoup  plus  nombreux,  et  qui 
»-tail  protr;;é  par  de>  c!iasseurs  erabus- 

3uésdans  un  bois.  Ti ois  cents  ^rcna- 
lers  el  une  partie  de  la  cavalerie  du 
général  Slieider  furent  forcés  de  met- 
tre bas  les  armes  de\ant  le  capitaine 
Kellermann,  et  se  leadireut  prison- 
niers. Le  prince  de  Condë,  témoin  de 
cet  exploit  ,  lui  Gt  obtenir  la  croix 
de  Saint -Louis.  Kellermann  se  si- 
>;nala  de  nouveau  à  la  bataille  de 
Friedberj;.  La  paix  de  1763  ,  ame- 
na beaucoup  de  réformes  dans  l'ar- 
mée ;  mais  il  n'y  fut  pas  compris,  el 
pa>sa  capitaine  dans  la  le;;ion  de  G)n- 
llans.  Le  marquis  de  G)nflaii5,  sou  dou- 


KCL  447 

veau  colonel,  apprécia  ses  talents  et 
devint  pour  lui  un  utile  protecteur.  En 
1765  et  17ti(),  Kellermann  fut  chargé 
par  le  roi  de  missions  particulières  en 
Pologne  et  eu  Tartaiie.  Kn  1771,  il  fut 
du  nombre  des  ofliciers  qui  comman- 
daient ,  sous  les  ordres  du  bat  ou  de 
\  loroe^nil,  les  tioupcsen\o>ées  en  Po- 
logne pour  appuyer  la  cuiifrdération  de 
Bar.  Kellermann,  aprrs  avoir  organisé 
laca\jlci  lequi  5e  réunissait  dans  le  l'a- 
latinat  de  Craco\ie,  se  distingua  en 
dners  combats  contre  les  Kosses  daus 
le  mois  de  janvier  1772.  Forcé  à  la 
retraite  par  la  supériorité  de  l'ennemi, 
il  exécuta  ce  mouvement  avec  autant 
d'Iiabileté  que  de  bonbeur.  Uevenu 
en  France  après  le  second  parta;;e  de  la 
l*olo^ne,  Kellermann  fut  élevé  au  ;;rade 
de  lieutenant  colonel  (2  V  mars  1772). 
Il  dc\int  major  des  hussards  de  (^n- 
flans  en  177U,  et  lors  de  la  formation 
du  régiment  colonel -général  hussards 
;i7S0),  il  en  obtint  la  lieutenance- 
colonelle.  Crée  brigadier  des  armées 
du  roi,  le  1***^  janvier  17Hi,  il  parvint, 
six  semaines  après,  au  ^rade  de  mestre- 
de-camp  en  second  du  même  régiment, 
puis  à  celui  de  maréchal -de-camp,  le 
9  mars  17HS.  Cependant  la  révolu- 
tion de  17S'J  substituait  un  nouvel 
ordre  de  choses  à  cet  ancien  régime 
dont  Kellermann  avait  moins  qu'un 
autre  à  se  plaindre.  11  adopta  néan- 
moins les  idées  nouNelles  ,  mais  en 
hammc  prudent  qui,  sans  donner  dans 
les  excès,  en  fait  assez  pour  être  du 
parti  «loininant  ;  aussi  fut-il  con^tam- 
lueut  employé.  On  le  voit ,  le  12  août 
1790,  chargé  de  vérifier  la  comptabi- 
lité des  régiments.  L'impartialité  dont 
il  Gt  preu\c  en  celte  occasion  tourna 
é;;aleracnl  au  proGt  de  la  discipline 
cl  de  radraini>tra!ion.  li  fut  compris, 
en  1790,  dans  une  des  dernières 
promotions  de  l'ordre  «le  Saint-Louis 
cl  crée  comin.inileur.  Nommé  suc- 
cessivcmeot   commandant   des  dépar- 


44» 


KEL 


tcmcnts    du   Haut  et  du    Ras-Khin 
(1700  et  1791),  il  découvrit   les  in- 
lelli|;ences  que  le   prince  de  Coiulé  et 
le  vicomte  de  Mirabeau  entreleuaien't 
sur  cette  frontière,  déjoua  leurs  projets 
et  mit  la  place  de  Landau  dans  un  bon 
état  de  défense.Cependanl  tout  tendait  à 
la  désorf;anisation  dans  l'armée  comme 
dans  le   gouvernement.    Les   soldats, 
malgré  la  défense  de   leurs  chefs,  fré- 
quentaient  les   sociétés  populaires  en 
Alsace  aussi  bien    que  dans  les  autres 
provinces.  A  \A  eissembourg,  les  offi- 
ciers a\ant  mis  en  prison  ceux  qu'ils 
vo\  aient  sortir  des  clubs  ,  les  soldats 
allèrent    chez    le   colonel    demander 
grâce  pour  leurs  camarades  sans  pou- 
voir l'obtenir.  De  là  une  collision  dans 
laquelle  il  y  eut  des  blessés  de  part  et 
d'autre.    Rellermann  reçut  les  dépo- 
sitions sur  cette  affaire  en  promettant 
de   les  communiquer  au   ministre.  En 
attendant,  cet    officier   général,  vieilli 
dans  le  service  et  (jui  devait  connaître 
le  prix  de  la  discipline,  sacrifia  les  prin- 
cipes qui    avaient  dirigé  toute  sa  vie: 
il   donna  raison  à  l'indiscipline  ,   à  la 
révdite;    et   l'on  doit  d'autant  plus  le 
blâmer,    qu'une   conduite  toute   con- 
traire   lui    était    tracée  }>ar   le    décret 
du  29  sept.    1790,  (jui   défendait  à 
toute  association  d'entretenir  des  cor- 
respondances  avec  les  troupes.  Dans 
deux   lettres  au  ministre  de  la  guer- 
re ,  qui  furent   tiansmises    à  Rassem- 
blée   nationale  ,    il   dénonçait  les  of- 
ficiers comme  ayant   tenu  des  propos 
injurieux   pour   la  société  patriotique 
et  pour  les  soldats.   Dans  la  seconde 
le'rlre,  en  annonçant    qu'il  avait  ré- 
tabli  le  calme  ;    que  les  soldats   fai- 
saient leur  devoir,  qu'ils  étaient  attachés 
à  la  constitution  ,  kellermann  ajoutait 
qu^ils  ne  voulaient  pus  entendre  par- 
ler de  quelques  officiers  qui   les  pre- 
miers a^ aient  mis  l'épée  à  la  main  con- 
tre eux.  De  tels  sentiments  ne  restèrent 
pas  sans  récompense.    Le  26  octobre 


KEL 

suivant,  les  citoyens  c\  citoyennes  de 
Landau  lui  offriront  Mir   l'autel  de  la 
patrie   une   couronne   cnique  ,  en   lui 
adressant  les  plus  grands  éloges  sur  ses 
brillantes  vertus  et  connaissances  mi- 
litaires. <«  Vous  flattez  trop  mon  civis- 
«    me,  répondit  le  général  à  la  dépula- 
«    tion  ;  car  ce  que  j'ai  fait  pour  la  con- 
ii  stitution,  je  l'ai  fait  par  la  persuasion 
«   de  ces  (ju alités  précieuses  ;  et  ce 
«   que  je  ferai  à  l'avenir  correspondra 
«  toujours   a{>ec   les    qualités   d'un 
«   homme  qui  aime  profondément  sa 
«  patrie  et  qui  sait  apprécier  la  liberté 
«    conquise  ;  »  puis  il  posa  la  couronne 
civique  sur  l'exemplaire  de  l'acte  con- 
stitutionnel nouvellement  proclamé,  en 
jurant  de   le  maintenir  jusquà  la 
dernière  goutte  de  son  sang   et  de 
vivre  libre  ou  mourir.  Ce  dévouement 
patriotique  lui  valut  aussi  les  faveurs  du 
pouvoir  ;  et,  le  9  mars  1792,  il  fut  fait 
lieutenant-général.  Au    mois    de  juin 
suivant ,  il  marcha  au  secours  de  Lan- 
dau menacée  par  les  Autrichiens.  Les 
journaux,  inventant  à  son  occasion  une 
de  ces  calomnies  qui  étaient  alorssi  bien 
rerues  contre  les  moines,  annoncèrent 
qu'ayant  dîné  dans  un  couvent  près  de 
Sarre-Louis,   il   avait  été  empoisonné 
par  ceux  qui  l'avaient  invité;  mais  que 
l'effet  du  mal  avait  été  arrêté  à  temps 
par  les  médecins.  Le  16   août  ,  tandis 
qu'au  camp  de  Weissembourg,  les  gé- 
néraux Victor  de  Broglie  et  de  Biige, 
subissaient  leur  destitution  plutôt  que 
de  se  soumettre  aux  décrets  de  l'assem- 
blée prononçant  la  suspension  du  roi, 
Kellermann  ,  commandant  le  camp  de 
Lauterbourg,  adhéra  avec  cnlliousias- 
me  à  ces  décrets  entre   les   mains  de 
Carnot,  Prieur   et   Coustard,  commis- 
saires près  de  l'armée  du  Rliin.  Dans 
leur  lettre  à  l'assemblée  nationale,  ces 
commissaires  firent  le  plus  grand  éloge 
du  dévouement  de  ce  général  à  la  cause 
de  la   révolution   dans  laquelle,  ajou- 
taient-ils, il  a  constamment  marché. 


KM. 

(.4)mmainl.inl  Ifi  troup«  ra^icruLîrcs 
ju  ram|»  de  Neukircli  sur  la  Sarrr,  il 
f  ouvrit  l'Alsace  rt  la  lorraine,  et  j\ec 
(!:\  raille  hommes  préserva  ce»  j>ro\in- 
rf>  de  b  dr\. i^tation  des  Aufricliicns, 
qui  avaient  pav>é  le  lUiin  près  de 
Spire.  Au  mois  d'août,  a\ant  retint  sous 
>es  ordres  l'armre  «!ii  l\liiri  cl  relie  de 
la  Sarre,  il  se  liala  de  faiie  réparer  les 
l'Inès  de  la  I^ulrr,  depuis  le  moulin 
de  Pewald  ju-^qu'a  N>  ei  Nemlmur;;,  et 
X  elexa  des  redoutes.  I.e  'JH  du  iiiëiiie 
mois,  il  prit  le  rnmmaiulrmeiit  de  l'ar- 
rttro  en  remplaremriil  de  Lurlner  , 
iiDinmé  ^ënéralissime.  I.e  i  tepteraltie 
il  quitta  Metz,  après  l'avoir  déiiaré  en 
tial  de  ?iè^r,  et  se  poi  la  sueressixemeiil 
à  PontàMousson.llat  IrDuret  I.?^im  , 
où  il  «KTiipa  une  poMtmii  qui  le  mil  à 
inrme  de  se  diri;:rr  at«  besoin  vers  la 
^losflle  ou  \rrs  ("lirions,  et  de  mm- 
iiuiniquer  a\ec  Dninnuriez.  I.e  mnr.s- 
Ire  de  la  pierre  Serxan  adtesNail 
jour  par  jour  à  l'assemblre  la  rorrts- 
poiidanre  (ie  Kf  llermnnn,  qisi  prrten- 
l'ail  que  les  ennemis  ne  fera.riit  pa*////c>- 
//>  de  marrliersur  l^aris.  Kn  renciai.t 
fxacteraent  compte  de  ce  qu'il  avait  t\é 
iité,  ie  général  affertait  de  parler  avec 
iiMsirrc  de  ses  opérations  prochaines  : 
••  Ouant  à  la  suite  de  la  marche,  écri- 
««  vaitil  an  roiniilre,  je  \eu\  la  faire 
M  «ans  mettre  dans  la  confidciirr  hieii 
M  des  };ens  indiscrets.  Comme  je  suis 
«<  toujours  prêt,  je  lève  le  piquet  d'une 
•«  heure  à  l'autre.  »  Il  annonrait 
en  outre  qn'j  Saint-  Dizier  les  hu.ssards 
«le  sa  lésion  s'étaient  mesurés  plus 
d'uTiC  fois  a^c  les  Prussiens,  et  que 
toujours  ils  avaient  ru  un  twantage 
nmrtjur.  Ce  ian};aj;e  qui  sent  un  peu  la 
f.infaronnade,  et  qui  cepend.ml  n'était 
p.is  dans  le  caractère  d»'  Kellermann, 
s'explique  à  son  i'f;ard  par  l'inconccva- 
Me  cohiIlmIc  dfs  ennemis  qu'il  ax.nil  en 
lète.  Le  d'ic  de  liiiinswirk,  dans  celle 
j^ucneile  in.nciies  et  de  contre-mar- 
ches,  commettait,  en  apparence,  les 


ML  Itç, 

fautes  les  plus  Grossières.  Ka  effet, 
quand  on  >oll  qce  les  Prussiens  étalent 
entrés  dan^  N  aienncs  au  moîr.s  le  3 
sept.,  tandis  que  la  cote  de  IJiènie  lui 
occupée  seulement  le  .'>  par  Dillon  (1); 

3u'ensuile,  de  Clermont  où  ils  étaient 
epu;s  plusieurs  jours,  ils  avaient  Glë 
sur  leui  gauche  vers  liar-le  Duc, au  lien 
de  pouMer  en  axant  pour  occuper  Chà- 
lons,  cette  de  des  opi-iatioiis,  qui  les 
eût  conduits  droit  à  Paris  ,  un  ne 
peut  s'empêcher  de  conclut c  que  le 
duc  de  lUunsvkicL,  dans  ce  semblant 
d'invasion,  voulait  que  l'armée  fran- 
çaise fût  avant  lui  à  (ululons.  Il  s'é- 
tait   abstenu   d'y   venir  pendant  huit 

j..  • 

jours,  pouvant  ellecluer  ce  mouxement 

sans  tirer  un  coup  de  fu.^il.  Mais 
Kellermann,  qt:i  n'rlail  ja.  rncoie 
dans  le  secret  des  né  «orialif  »  «.  entir 
le  duc  de  P.  «le 

l'autre  enlir  i  1,(5 

de  Danton  et  tic  l.i'brun-'i  i>i:d>i,  ne 
pouvait  <|ue  s'émerveiller  d'axoi»  affaire 
à  un  adxersaire  d*an:;>l  bonne  conipusi- 
tion.  .Aussi,  )u>qii*à  Valmv,  le  même 
ton  rèj;ne  dans  sa  rorre»poi.dance.  I.e 
12,  il  se  porta  de  Saint  Diiier  »ur 
Har-ie -Duc.  Ce  mni.vement  en^ar;ea 
les  Pru>iien$  à  se  replirr  sur  le  ^ros  de 
leur  armée.  I.e  lendemain,  d':.j<i  es  l'.v  15 
que  Dumouriez  1  l.iil  attaqué  >ur  liuis 
points  différents,  ilpiil  le  parti  de  re- 
venir à  Saint-Dizier,  pour  couvrir  (^.hà- 
lons  et  Paris.  On  a  p:clendu  que  ce 
fut  une  faute,  et  qu'il  aurait  mieux  fait 
de  conserxer  les  rouler  de  Viiry  et 
de  Metz  qui  assuraient  sa  jonction  avec 
Dumouriez.  Le  IS,  tandis  que  lîeur- 
nonville  arrivait  à  Notre-Dame  de 
l'Kpine,  Kellermann  sentit  la  iuco>.silc 
de  se  rapprorher  de  Diiiuouiitz  qui 
était  à  Sainfc-Meiiehoiild,  cl,  le  lî), 
leur  jonction  s'opéra  à  Dampicire  sans 
que   l'ennemi  v    .ipporlal  le  moindre 

fi)  On  p«'ut  con<ultrr^pour  l'intrlliprnce  de 
c«t  article  .  l»  cailo  \Mrrée  dan»  celle  lliogra* 
pbie  (t.  I.MII  ,  i»oar  l'arliclc  Di  moi mz. 


LTMII 


^9 


45o  KEL 

empêchement.  Enfin,  dans  la  journée 
tlu  20,  eut  Heu  l'attaque  des  Prussiens 
dirigée  contre  le  corps  d'armée  de  Koller- 
maiin, qui  s'était  formé  en  bataille  sur  les 
hauteurs  de  Valmy,  position  (jiie,  dans 
son  rapport,  il  appelle  drsiigrf'able, 
mais  qui  était  réellement  désavanta- 
geuse, et  dont,  malgré  l'événement,  le 
choix  lui  a  été  reproché  comme  une 
faute  capitale  (  Voy.  DuMOuaiEZ  , 
LXIII  ,  160).  Là,  les  Français  eu- 
rent à  subir  de  la  part  des  Prussiens 
une  canonnade  de  huit  heures  selon  le 
rapport  de  Dumouriez,  de  quatorze 
heures  selon  Kcllermann.  Tout  an- 
nonçait un  choc  c;éncral  entre  les  deux 
armées  ;  mais  l'affaire  se  borna  à  une 
canorïnade  des  deux  côtés.  Nous  ne 
nuus  biillrons  point  ici^  dit  le  duc  de 
Brunswick  ;  et,  s'approchant  du  roi  de 
Prusse,  qui  voulait  un  eri2;agement  plus 
sérieux,  il  lui  représenta  combien  il  se- 
rait téméraire  d'assaillir  les  hauteurs 
occupées  par  une  armée  dont  la  bonne 
contenance  laissait  peu  de  chances  fa- 
vorables ;  puis,  donnant  de  nouveaux 
ordres,  il  enjoignit  aux  colonnes  d'at- 
laque  de  se  replier  et  de  rentrer  dans 
leur  première  position.  A  la  vue  de 
ce  mouvement  rétrof:;rade,  Rellermann 
élevant  son  chapeau  au  bout  de  son 
épée  se  met  à  crier  Vwe  la  nation  ! 
Ce  cri  répété  par  toute  la  li^ne  étonne 
les  Prussiens,  qui  font  un  nouveau  mou- 
vement de  retraite,  et  confirme  le  duc 
de  Brunswick  dans  son  opinion.  La 
victoire  est  à  nuus ,  mes  enfants, 
s'écria  Kellermann  en  faisant  redou- 
bler le  feu.  Dans  l'action  il  eut  un  che- 
val tué  sous  lui,  et  perdit  trois  cents 
hommes  tant  tués  que  blessés.  Jusqu'à 
dix  heures  du  soir  il  ;;arda  sa  position  ; 
mais,  craignant  d'être  tourné  par  sa 
droite ,  il  repassa  la  petite  rivière 
d'Auve,  en  couvrit  le  front  de  son  ar- 
mée et  prit  un  autre  camp,  sans  que 
l'ennemi  cherchât  le  moins  du  monde 
à  l'attaquer.  Par  cette  conversion ,  sa 


KEL 

droite  s'appuyant  sur  le  camp  de  Du- 
mouriez,  il  assura  ses  communications 
et  déroba  à  l'armée  prussienne  une 
grande  partie  des  avantages  de  sa  po- 
sition sur  le  camp  de  la  Lune.  On  a  dit 
que  la  précision  avec  laquelle  ce  mou- 
vement fut  exécuté,  malgré  la  fatigue 
des  troupes  et  le  mauvais  état  des  che- 
mins, équivalut  au  gain  d'une  seconde 
bataille  ;  mais  que  fùt-il  arrivé  si  les 
Prussiens  eussent  tenté  de  le  contra- 
rier? Quant  à  la  journée  de  Valmy  en 
elle-même,  elle  ne  fut,  à  vrai  dire,  de 
la  part  du  duc  de  Brunswick  ,  qu'un 
.simulacre  de  bataille,  qu'une  canon- 
nade insignifiante.  En  cette  occasion, 
le  prince  intrigant,  au  mépris  des  in- 
tentions loyales  du  roi  de  Prusse,  s'en 
tint  à  un  vain  déploiement  de  forces. On 
en  trouve  la  preuve  dans  la  relation 
officielle  rédigée  au  quartier-général 
de  Frédéric-Guillaume  :  «  Du  premier 
«  général  au  dernier  soldat,  y  est-il 
«  dit,  tous  brûlaient  du  désir  ardent 
«  d'être  menés  à  l'ennemi,  et  nous 
«  eussions  remporté  le  triomphe  le 
(i  plus  glorieux,  si  des  motifs  pré- 
«  pondérants  n'eussent  retenu  le  roi 
«  de  se  déterminer  à  livrer  ha- 
((  taille.  »  Ces  motifs,  ainsi  qu'on  Ta 
démontré  dans  l'article  sur  Dumouriez, 
étaient  évidemment  tirés  de  la  négo- 
ciation pratiquée  secrètement  d'un 
camp  à  l'autre  ,  et  à  laquelle  Kel- 
lermann était  encore  étranger.  En 
effet ,  il  était  si  peu  au  fait  des  in- 
trigues de  son  collègue  ,  que  dans  sa 
lettre  au  ministre,  en  date  du  19  sept., 
il  se  flattait  de  tempérer  l'ardeur  de 
l'ami  Dumouriez;  ajoutant  qu'il  ne 
fallait  pas  mettre  le  sort  de  l'état  au 
hasard  d'une  action  générale.  Telle 
était  aussi  l'opinion  de  Servan  qui  leur 
recommandait  sans  cesse  de  ne  point 
livrer  bataille.  Quoi  qu'il  en  soit,  la 
canonnade  de  Valmy  eut  une  immense 
influence  sur  l'opinion;  elle  releva  la 
confiance  des  Français  en  même  temps 


REL 

■■*tlle  6t  évanouir  relie  Hfs  Ptus- 
•mft,  ri  la  lounire  de  fio%bacli  fut  m 
qurique  votlc  ci>mpeits«rp.  «  |«-i  cr\&- 
«  brilé  de  ce  (aible  combat,  dit  Mnnt- 
■  gaillard,  tient  à  ses  suite»  imine- 
«  diatrs  ainsi  qu'au  ^rand  effet  qu'il 
«  produisit  sur  l'esprit  national,  u 
Aufcuip'us,  Krllernijnn,  qui  a>ait  eu 
un  bran  monrernent  d'audace,  fut  la 
première  dupe  d'une  gloire  si  facile- 
ment acquise.  Kn  s'entendanl  prorla- 
mrr  partout  comme  un  tiioropnaleur. 
il  n'eut  pas  de  peine  à  ^e  croire  un 
héros.  I.e  .'{  octobre,  il  écrivait  au  mi- 
nistre de  la  ;4uerie  que  la  débirle  des 
l'ni&siens  rtaii  bien  décidée,  ce  4fni 
proui'r,  ajoutait-iî,  que  tout  dépen- 
dait de  ninn  tijftiirr  Ju  :iU.  Ijf  lende- 
main il  écrivait  encore  ifu'ii  sr  fèlin- 
tait  tous  1rs  jours  He  t  rttr  juurnre. 
l'ar  la  même  dépêche,  datée  du  ii,  il 
proposa  au  nir  M\r  de  faire  chanter 
un  Te  Drum.  Ou  lui  répondit  qu'il 
fallait  faire  chanter  la  MursriHaisf, 
que  cet  hvmne-là  riait  pius  (ligne  tir 
Jriipftrr  les  arrillrs  liu  français  li- 
bre. Tout  ce  qu'd  obtint  du  pouvuii 
rxrcutif  fui  un  cheval  de  baSaille  pour 
remplacer  celui  qui  avait  été  toé  »ott» 
lui.  I.,es  rapports  des  commissaires 
de  rassemblée  près  de  l'armée  du  cen- 
tre, Carra,  Sdierv  et  IVieur,  conte- 
naient .sans  ce»*e  l'elofje  de  Keller- 
roann  :  i<  Nous  atons  ttouvé  son  ar- 
««  méedans  le  meilleur  ordre  possible, 
H  di5aient-iU  dans  leur  lettre  du  "2 
«<  octobre.  La  discipline  v  rr^ne  ,  le 
é  soldat  est  plein  d'ardeur  et  de  cou- 
«  ra^e,  etc.  »  Une  autre  dépêche  se 
terminait  ainsi  :  «  "^  ous  ne  rhanlons 
•<  plus  ça  ira,  mais  nous  rlianterons 
««  ça  va;  et  le  ;;énéral  Kellermawn 
«  nous  prie  d'ajouter  :  çu  ira  tout 
m  thii^er  (7  oct.  ).  >»  Cependant 
plusieurs  émij^és  se  trouvaient  parmi 
ses  prisonniers.  Les  envoyer  à  Paris 
équivalait  à  un  arrêt  de  mort.  Keller- 
nann  hésita  ;  il  fit  demander  par  les 


KFL 


45i 


comrai»:»aire5  le^  ordirs  de  la  Convcii- 
tioo  qui  ,  I-  8  net.,  décréta,  sur  la 
propostiiundc  Ver^niaud,  qu'on  .ippli- 
qverait  à  ces  prisonniers  la  loi  qui 
prontnçait  la  mort  coiilre  tout  émigré 
prit  les  armes  à  la  main.  Après  cela, 
on  rej^retterait  de  voir  Kellermann  se 
livrer,  dan»  une  dépêche  lue  à  la 
Convention  ,  à  d'inconvenantes  plai- 
tantenes  >ur  ces  inloi tunes  ,  «i  l'on 
ne  savait  que  c'était  alo*-»  pour  les 
homme,  revêtus  du  pouvoir  le  seul 
movcn  de  se  faire  pardonner  qael- 
({ne«  artrs  de  modération.  ■  Mon 
•«  avant  t^arde,  ecnv ait-il,  a  fait  dêox 
««  cents  prisonniers,  parmi  lesquels  se 
«  sont  trouvés  de«  éini;;rés  paHaite- 
«  ment  monté»  (>j  nrises  amusent 
«  heautoup  les  sitldats.  »  \jt  l'i,  il 
annonça  révacnalion  de  Verdun  ,  et 
deux  jours  aprè^  il  passa  la  lieuse. 
I*e  IS,  les  Prussiens  sortirent  de 
I^n;;wv;  enfin,  le  'l'\,  KellermasQ 
oidoitna  trois  salves  d'artillerie  ém 
toutes  1rs  places  de  «on  rommandemcat 
pour  si:'naler  qu'il  n'existait  pivs 
d'ennemi  sur  le  territoire  de  la  répu- 
blique. Cependant  les  commissaires 
pru«iens  négociaient  tout  aussi  bien 
avec  lui  qu'avec  l)umonriei.  \a  Moni- 
teur lui-même  annonça  que  ces  qéné- 
raut  avaient  diné  avec  les  envoyés 
prussiens  Manstem  et  .Mas>embach. 
Ce  furent  ces  iK';;ociations  encore  plus 
que  les  déinoii»lrations  stratégiques  de 
kellermann  qui  .imrnèrent  l'évacua- 
tion si  prompte  de  ces  places.  Fit 
tout  cela  n'empêchait  pas  nos  généraux 
d'aflecter  avec  les  clran;;er5  le  lan^aL;c 
le  plus  hautain.  Ainsi  le  '11  ortobre, 
lorsque  le  duc  de  Brunswick  et  Kalc- 
kreiilfi  cnvovèrent  demander  urte  en- 
trevue à  Kellermarin,  celui  ci  répondit 
qu'il  ne  pouvait  entrer  dans  aucune  con- 
férence tant  que  l'armée  prussienne  se- 
rtit sur  le  territoire  de  l.i  république. 
f.a  plus  grande  union  rêvait  alors 
entre  Kellerinann  et  Dumoaricr,  bien 


*9- 


45i 


KUL 


que  peu  de  jours  auparavant  quelque 
inësirlelli^ence  se  fut  manifestée  dans 
leur  correspondance  avec  le  minis- 
tre de  la  f;uene.  Kellermann  avait 
non-seulement  refusé  de  passer  sous 
les  ordres  de  Duniouriez,  mais  proposé 
(24  sept.)  un  plan  de  campa{;ne  tout 
différent.  Le  conseil  exécutif  n'ap- 
prouva ni  les  prétentions  ni  les  plans 
de  Kellermann  ,  qui  se  soumit  de 
bonne  grâce  et  n'agit  plus  dès-lors 
que  d'après  les  inspirations  de  ])u- 
mourlez.  Ce  fut  ce  dernier  qui  le  mit 
hors  d'état  d'atteindre  les  Prussiens 
dans  leur  retraite,  en  ne  lui  donnant 
l'ordre  d'occuper  les  hauteurs  de  Fon- 
taine que  lorsque  leur  armée  eut  gagné 
les  défilés  de  Grandpré;  et  l'on  ne 
peut  pas  douter  que  ce  ne  fût  une  con- 
séquence des  conventions  secrètes  entre 
le  duc  de  Brunswick  et  Duniouriez. 
L'armée  prussienne  avait  alors  deux 
marches  d'avance.  Ce  fut  seulement  le 
4  octobre  qu'il  fut  permis  à  Kellermann 
de  la  suivre  d'un  peu  près.  Le  6,  toute 
cette  armée  se  trouvant  réunie  sous  les 
murs  de  Verdun,  Dumourlcz  manda 
Kellermann  à  Auliy,  puis,  après  lui 
avoir  fait  part  de  son  intention  de  se 
porter  en  Flandre,  il  lui  déclara  que 
désormais  réuni  au  général  Dillon  , 
il  serait  chargé  de  reprendre  Ver- 
dun et  Longwy  et  d'achever  de 
cbassfi  les  coalisés  du  territoire  fran- 
çais. Il  lui  insinua  en  même  temps 
qu'il  f.-illait  moins  s'attacher  à  combat- 
tre les  Prussiens  qu'à  les  décider  par 
de  nouveaux  pourparlers  à  remettre  le 
plus  promptement  possible  ces  deux 
places,  et  à  se  retirer  ensuite  au-delà 
des  frontières.  C'avait  été  après  une 
conférence  entre  Jhunswick  et  Kel- 
leiMiann  que  l'on  était  convenu  de 
livrer  aux  Français  ,  le  22  octobre , 
une  poite  de  Longwy  aux  mêmes  con- 
ditions qui  avaient  ri'glé  la  capitulation 
de  Verdun.  Le  24,  tandis  que  l'arinée 
priissicnnc  était  campée  à  IMurlc  près 


KEL 

de  Luxembourg,  et  que  par  conséquent 
le  territoire  français  n'était  plus  en- 
vahi, nouvelle  entrevue  autorisée  par 
les  commissaires  de  la  Convention,  en- 
tre Kellermann  et  le  duc  de  Brunswick, 
qui  s'y  trouva  accompagné  du  prince 
héréditaire  de  Hohenlohe,  du  marquis 
de  Lucchésini  et  du  prince  de  Beuss, 
ambassadeur  de  l'empereur;  «  Géné- 
«  rai,  lui  dit  le  duc,  nous  vous  avons 
«  prié  de  venir  à  ce  rendez-vous  pour 
«  parler  de  paix  ;  >»  et  en  même  temps 
il  l'engage  à  en  poser  lui-même  les 
bases:  ««  Cela  ne  sera  pas  difficile,  ré- 
«  pond  Kellermann,  qui  avait  ses  in- 
«  structions  :  reconnaissez  la  républi- 
«  que  française  le  plus  authentique- 
«  ment  possible,  et  ne  vous  mêlez  ja- 
«  mais  directement  ni  indirectement 
«  du  roi  ni  des  émigrés  ;  les  autres 
«  difficultés  peuvent  facilement  s'a- 
it planir.  »  Il  invite  alors  le  duc 
de  Brunswick  à  s'expliquer  à  son 
tour  :  «  Eh  !  bien  ,  répond  le  duc  , 
«  nous  nous  en  retournerons  cha- 
«  cun  chez  nous,  comme  des  gens  de 
«  noces.  »  Kellermann,  se  tournant 
vers  l'ambassadeur  impérial,  lui  de- 
mande alors  qui  paiera  les  frais  de  no- 
ces: «  Quant  à  moi,  ajouta-t-il ,  je 
«  pense  que  l'empereur  ayant  été 
«  l'agresseur,  les  Pays- lias  doivent 
«  être  donnés  à  la  France  en  dédom- 
«  magement.  »  A  ces  mots  le  prince 
de  l\euss  ayant  montré  de  l'humeur, 
le  duc  feignit  de  ne  pas  le  remarquer 
et  dit  à  Kellermann  :  «  Général,  reu- 
«  dez  compte  à  la  Convention  natio- 
«  nale  que  nous  sommes  tous  dispo- 
«  ses  à  la  paix  ;  et,  pour  vous  le  prou- 
«  ver,  la  Convention  n'a  qu'à  nommer 
a  des  plénipotentiaires,  et  désigner  un 
«  lieu  poui  les  conférences;  nous 
«  nous  y  rendrons.  En  attendant 
«  nous  nous  tiendrons,  soit  à  Luxem- 
'<  bourg,  soit  dans  les  l^ays-lias,  où 
"  l'on  pourra  nous  aveitlr.  »>  On  ne 
peut  douter  que  ces  propositions    ne 


KEL 

àe  la  part  du  dur  i\t 
Bruniwîcl ,  et  que  les  Pruuieiis  ne 
désira- vpiit  ahanJoniier  l'Aulriclic  cl 
*e  retirer  de  la  roalittoii,  mais  l'iina- 
iion  que  fil  alors  (^stine  dans  reierlo- 
ral  de  ^Ia>ellre  mil  obstacle  à  loul  rap- 
ptorhemcnl  avec  la  France  (2).  Maî- 
tre de  Mavence,  Cusline  aurait  dû 
couronner  son  lieureuse  expédition 
par  rorciipalion  de  (x>blenlz;  mais  il 
térooij^na  la  rrainte  de  s'aiïaiblir  en 
se  prolongeant  ja-.que  sur  ce  point,  et 
soutint  que  Kellermann,  chargé  de 
poursui\re  1rs  l'iuv^iens,  était  plus  i 
portée  d'obtenir  le  résnilat  qu'on 
attendait  de  lui  :  raisonnement  tans 
justesse,  car  pouvail-il  croirr  (|ue  les 
Prussiens  qui  >e  retiraient  méthodique- 
ment,  sans  se  laisser  eiilamci  ,  iit^li;;e- 
raient,  pour  pu-Nenir  re  mou\ement 
dcKelleimann,  défaire  occuper  Kbren- 
brestein  à  la  liàle,  par  un  corps  de 
troupes  léfjères,  qui  précéderait  lepros 
de  leiri  forces  .'  Au  lieu  de  descendre 
le  Uliin,  Kellrrmaiin  prit  ses  canton- 
nements eiilre  la  Moselle  et  la  Saire, 
établissant  son  quarlier-prnéral.iMetz  ; 
et  Custine  se  poita  sur  Francfort 
attiré  par  l'appât  du  butin.  Mais  le 
jour  n^ae  qu'il  faisait  passer  dans  celte 


REL 


453 


(1)  Cm  Drforiatloat  far«at  rt«rU««  poar  la 
pmai^r*  toi»  aalhvnltqurutrnl  par  le  convrii- 
lionncl  IfanuinJ  ilr  I4  Mratr.  a  la  «^^iir*  ila 
S  «rixlrmlaire  au  IV  ;3o  »»|>t  1*9^).  Il  r>\>- 
porta  l«ili»'iiur«  dr  kriirruidiiii  lr>  qur  iiout 
l'aron»  reprotloit,  et  ajonta  t|u<>  i)oD-»ruir- 
uirut  cm  f,ruit»  rondu  roinpic  <ie  celle  i-n- 
frrciice  aux  rrproeniautt  du  |m>>i|>Ip  Prirur. 
Siller\  rt  Carra,  inan  quM  corre«p<>tidit  k  c« 
•  ujrt  avec  Pacbe  ,  ri  qur  la  Co:i«rtitinii  u'i  a 
avait  jintai*  cir  intiruiir.  Ilarinand  certitojil 
trnir  de  ffrur  rt  dr  Krllrruiann  tous  re«  fjitl. 
Mrrlin  de  Douji,  rappoitrur  tlu  comité  de  talul 
public,  e  kjx^dclrt  mer,  ajo-ilaol  que  le  gou- 
vrrnciurnt  il'jl»r«  n'anrail  |m«  injnqar  de  faire 
la  paii,  t'il  avait  coi. nu  In  d>«i«i»iii»iit  dr» 
HruNsirn*.  Ilannind  rrptiquj  :  J^  ftit  qu*  j'mi 
eitt  en  *iai,  ou  ineu  Arllermmn.t  etl^n  mrnl*mr, 
—  Mais  pour  qui  sait  lire  d'un  cril  cUirvojani 
le»  Moniirun  de  kcple  iibn-,  oct'.brr,  nuveiubte 
rt  drcrnibrr  1791,  l'içtinrance  de  Merlin  dr 
llou.*!  pji.ii.rj  iiivraisrinbljblr  :  il  niait  ce  qu'il 
ne  |u.u«.iii  i^iiori-r;  et  c'rtait  bien  lui  qui  luc- 
riiait  Irpilbrie  de  mtnlemr  iiii«e  en  avant  par 
Uariuand  d«  la  Meii<«. 


\ille  dei  proclamations  raenaranie^ 
ronlie  le  laiid^ra\e  de  liesse,  et  qu'il 
appelait  lc>  tmupes  de  ce  monstre  à 
la  révolte  i^2.'>  octobre),  il  appui  que 
les  llessois  entraient  à  Cobleiiti  et 
que  les  iVussiens  les  suivaient  de  près. 
Voulant  éviter  le  icproclie  de  n'avoir 
pas  occupé  celle  ville  si  importante 
par  sa  poMlioii,  il  adres^a  à  la  G)n- 
venlinn  une  plainte  formelle  contre 
Kellerraann,  qui,  disait-il,  eût  pu 
s'upposeï  facilement  à  la  marche  des 
PrtLSsieiis:  •<  S'il  avait  passé  la  Moselle 
w  et  la  Sarre,  ajoutait  (Justine,  il  >e 
M  serait  rendu  maître  de  Trêves  et  de 
••  («oblentz,  sans  combat,  et  aurait  pris 
»  les  magasins  de  l'ennemi.  ■  Celte 
dénonciation  de  Custine  avajl  été  pré- 
cédée d'une  (oriespoiiilance  entre  les 
deux  généraux.  Nous  l'avons  sous  les 
yeux,  et  il  esl  impossible  de  ne  pas  y 
reconnaître  que  la  politesse,  la  conve- 
nance aussi  bien  que  la  raison  sous  le 
rappoit  militaire,  se  trouvent  du  cdlé 
de  Kellcrmann  ,  qui  d'ailleurs  avait 
exposé  son  plan  au  pouvoir  exécutif 
dans  les  mêmes  termes.  Il  écrivit 
à  Servan  le  7  octobre  17*J2  (  nous 
copions  tcxturllcmnit  )  :  «  Il  faut 
««  profiter  du  moment  de  la  déroute 
««  des  ennemis  ,  pour  entrer  en  .\1- 
w  lemaj;iie,  et  pour  cet  effet,  il  fau- 
«  drail  que  Custine  joriifie  son  ar- 
«  mce  d'une  partie  de  sesf»arnisoii>  et 
««  trus.aïUc  sur  le  Khin.  llien  ne  peut 
«  dans  ce  moment  l'ernpècher  des'cni- 
«  parer  de  la  ville  de  l'hilisbourg,  et 
w  y  faire  travailler  en  rê^le,  arrant^or 
M  (lermesheim,  et  ^  jeter  un  pont  »le 
«  communiration ,  avec  une  bonne 
««  tête  qui  le  mit  en  état  d'y  passer 
•«  et  repa>sei  le  Kîiiii,  Miivanlles  cir- 
a  constances.  Il  peut  faire  contribuer 
««  le  pavs  de  IJaden  jusqu'à  Kehl 
««  près  de  Strasbourg,  el  loisque  je 
*^  serai  en  mesure  de  me  porter  sur 
M  Trêves  el  Coblentz,  il  viendrait  à 
«  Mayence;    dans   celte     disposition 


454 


KEL 


('  tiotis  nous  donnerions  la  main,  f  te.  » 
En  suivant  le  contre-pied  de  ce  plan  si 
sagement  combiné  ,  en  faisant  une 
pointe  sur  le  Mein,  sans  s'être  assuré 
le  cours  du  Bas-Rhin,  Custine  perdit 
tout;  et,  après  avoir  été  assiéf!;é  dans 
Mayence  ,  qui  fut  repris  par  les  coa- 
lisés ,  il  fut  contraint  de  se  replier 
sur  TAlsace.  Mais  revenons  à  sa 
correspondance  avec  Kellerinann.  Le 
27  octobre,  Custine  avait  écrit  à  ce 
derniei-,  pour  l'engager  à  faire  mou- 
voir ses  troupes  cantoonces  sur  la 
Cliièvre,  afin  de  s'approcher  de  lui  : 
«  Ma  bonne  volonté  égale  la  vôtre, 
«  lui  répondit  Rellermann  (3)  ;  il  y 
«  a  dix  mois  que  j'ai  proposé,  à  plu- 
«  sieurs  reprises,  de  faire  ce  que  vous 
«  venez  d'exécuter  avec  tout  le  nerf 
«  possible  ;  et  me  réunir  à  Coblenlz 
«  avec  l'armée  du  centre  ,  c'est  en- 
«  core  mon  avis    aujourd'hui  ,  mais 

*♦   »  Ici  le  général  alléguait  l'état 

affreux  des  chemins,  la  nécessité  d'at- 
tendre que  les  gelées  les  eussent  res- 
suyés, et  que  l'armée,  vêtue  et  remise 
de  ses  extrêmes  fatigues,  fût  en  état 
d'entreprendre  une  campagne  d'hiver. 
Il  objectait  encore  le  mauvais  étal  des 
chevaux  de  son  artillerie  et  de  sa  cava- 
lerie ;  enfin  l'absence  des  magasins  de 
vivres.  «  Les  calculs,  ajoutait-il,  m'ont 
«  mis  à  même  de  terminer  une  campa- 
«  ^nequc  l'on  n'osait  pas  dans  les  com- 
«  mencements  se  promettre  une  issue 
«f  si  heureuse.  Le  soin  extrême  que 
«  j'ai  eu  de  mes  soldats  les  a  fait  aller 
«  jusqu'au  bout  et  résister  à  des  temps 
('  dont  il  n'y  a  pas  eu  d'exemple.  Je 
«  vous  dirai  avec  la  même  vérité,  telle 
«  que  soit  la  confiance  et  l'empire 
«  que  je  puisse  avoir  sur  mes  braves 
«  compagnons  d'armes,  il  serait  im- 
«  possible  d'exiger  qu'ils  nmtinurnt 
«  leurs  travaux,  nus  connne  ils  sont.  Au 
»<   reste,   mon  cher  général,  pour  faire 

(ï.  Du  quaititrgt'iiiial  do  Mclz,  le  3o  octo- 
bre 17g;!. 


KEL 

«  la  marche  que  vous  me  proposez, 
«  il  faudrait  que  je  comhatie  l'armée 
«   prussienne  el  autrichienne  au  moins 
«  du  double  de  la  mienne.    Je  vous 
«  l'ai  dit  et  répété  à  plusieurs  reprises, 
«  qu'il  faut,  pour  espérer  ^un   succès 
«  heureux  en    nous    rendant  sur  le 
«   Rhin,  des  mesures    aussi  sages  que 
«   bien  combinées,  et  que  le  plus  grand 
«   mystère  soit  gardé,  etc.  »  Croirait- 
on  qu'à  ce  langage  si  mesuré  et  si  ami- 
cal,  Custine  répondit  par  des  repro- 
ches   injurieux  ,     tels    que    ceux-ci  : 
«  Dites,    monsieur,  que  vous  n'avez 
«   point  eu  la  volonté  de  seconder  mes 
«  opérations,   ou  que,  ne  vous  étant 
«  pas  donné  la  peine  de  jeter  les  yeux 
«   sur  une  carte,  vous  n'avez  pas  com- 
te pris   l'avantage  que  vous   pourriez 
«  tirer  de  cette  position  (sur  la  Mo- 
«  selle  et  sur  la  Sarre)  ;   ou  qu'enfin 
«  vous    avez     craint     de    combattre 
«  M.   Hohenlohe ,    crainte   d'autant 
«  plus  mal  fondée  que  l'avantage  de 
«   la   po.sition  eût  été  pour  vous ,  ou 
<c  dites  enfin,  ce  que  je  pense,  que  ces 
«   trois  motifs  ont  eu  part  à  la  grande 
cf   faute  que  vous  avez  laite.  »  Custine, 
oubliant    qu'au  moins  à  Vairny  Kel- 
lermann  avait  déployé   quelque  cou- 
rage, ajoutait  ensuite:  «  ()serai-je  vous 
«(   demander,    monsieur,   quelles  sont 
«   vos  grandes  actions  ?  \  ous  êtes-vous 
«  approché  assez  près  de   nos  enne- 
«   mis,  pour  profiter  (h  leur  détresse? 
«  c'est  ce  que  je  n'ai  lu  nulle  part.  » 
Plus  loin  il  disait  encore  :   «  La  peur 
«   de    combattre  deux    armées  était , 
«  je  le  savais  ,  votre  véritable  motif. 
«  Mais  si  vous  aviez  eu  la  moindre 
«   notion  du  pays  où  vous  aviez  à  vous 
«   porter,    vous  auriez   pu  facilement 
«   vous  rassurer.    Mais  Yigiwrance  et 
«  lu  peur  ne  font  pas  les  grands 
«   généraux.  >»  On  conçoit  que,  poussé 
à  bout  par  de  telles  invectives,  Reller- 
mann à  la  dénonciation  faite  contre 
lui  par  Custine  à  la  Convention  ait  ré- 


KF.r 

pondn  ,  même  ofl'irifllfm<nl,  qu'rllr 
Il  'aiHiit  fHi  rire  dit  tre  que  dana  un 
iittès  de  Julie  ou  de  vin  (i).  •«  Il  me 
«<  laïf,  ajout. lit  il,  (i'a\uir  fui  Ijciir- 
«  nifnl  ib  Taffaire  qui  a  eu  lifu  à  I.an- 
"  dau  enirf  If  prcmifr  i<';;imfnt  tic 
••  dra^oii5  el  Ir^  hussards  de  NN'urm- 
«  sfr.  Je  crois  que  s'il  y  a  eu  de  la 
«<  hrlielc,  elle  esl  de  la  part  de  Cus 
<•  tinc,  po(ir  avoir  ma!  posté  son  rc^i- 
<  meut  et  n'avoir  pas  combattu  k  sa 
•  tèle;  qnanl  à  S  irlor  Ilro;;lie  et 
<«  moi,  nous  a^ons  ^té  forccA  de  nous 
«■  retirer,  tourna  et  près  d'être  pris  par 
«'  les  ennemis.  >•  Sur  la  demande  de 
.leanl)el.r>(fV.cenom,IAII,193;, 
la  lettre  de  Keilcrmann  fut  envovée 
aux  romité>  militaire  et  de  surveillance. 
**  Si  Custine  est  le  \ainqucur  de 
««  Majence  et  de  Spire,  dit  ce  diput^, 
«  l'assemblée,  jiuqu'à  ce  qu'elle  ait 
«  ju;;é  sur  pièces  \ues,  n'oubliera  pas 
m  que  Krilerraaiui  est  Vlwnime  du 
«  20  srptrndre.  »  Cependant  Ser- 
van  avait  été  remplacé  par  l'aclir,  qui 
donna  au  ministère  de  la  ;;uerTe  une 
activité  aussi  violente  que  désordonnée, 
et  qui,  le  jour  même  de  fon  installation 
('2  nov.) ,  en\o>aà  Kellermann  r«>r- 
dre  de  ne  pas  prendre  de  quartiers 
d'hiver,  et  de  niarrliet  an  delà  du 
lUiin  :  «•  Il  ne  faut  plu>  calculer  au- 
j«  jourd'liui,  lui  disait  il  ;  le  plan  des 
«  opérations  est  non-seulement  ar- 
«  rété,  mais  il  s'exécute  ;  mais  Cus- 
«  tine  ,  mais  Dumouriez  comptent 
«  sur  vous;  et  si  vous  ne  marchiez  pas 
««  ils  .seraient  compromis,  peut  ctic 
«  accablés.  »  I.e  lendemain,  comme 
Kellermann  marchait  vers  la  Sarre, 
par  suite  du  plan  qui  lui  était  im- 
posé par  le  conseil  exécutif  (5) ,  il 
fut  rappelé,  et  sa  retraite  laissa  les 
coalisés  en  possession  de  Coblentz  , 
de  Trêves  ,  et  le  prince  de  Hohen- 

(4)  l>*itr«  du  i    noT.,  lae  à  la  r.onvfntion 

(5)  Kou»  avons  tous  In  yeux  l'ordre  du  con- 
Mil     ciKulif    ti(né  |>«r   Pache  ,    le    4    dot.  Il 


KRL  4S5 

lohe-Kirchberp  maître^  de  Luxem- 
bour;;.  Ainsi  fut  manqué  le  plan  de 
campagne  que  s'attribuait  Dumouriex, 
et  qui,    sefun^  lui  ,    aurait  terminé   la 

f;uerre.  On  ne  saurait  due  pourquoi, 
orsqtie  le  21  oct.  Kellermann  a>ait 
demandé  l'autorisation  de  brûler  ou 
bombarder  l.uxemboui;;,  elle  ne  lui 
fut  po  nt  accordée.  Dans  cette  même 
dépêche,  il  demand.^it  à  ('tre  nommé 
l'un  des  maréchaux  de  la  république, 
si  fun  en  faisait.  Mais  alors  il  s'a- 
gissait pour  lui ,  non  de  récompen- 
ses, mais  de  rendie  compte  de  .sa  con- 
duite, et  de  répondre  à  des  accu.sations 
3ui,  i  celte  époque,  conduisirent  tant 
e  généraux  à  !a  mort.  Mandé  à  Pa- 
ris par  le  ronseil  exécutif  (6),  il  lui 
montra  sur  la  carte  plus  de  soixante 
campements  en  moins  de  Irois  mois, 
tant  pour  opérer  sa  jonction  avec  I)u- 
raouriez  que  «  pour  s«»uten!r,  par  l'iM- 
"  trépidité  de  %  in;;t-deux  mille  soldats 
«  de  la  lihertè^  le  choc  de  qualre- 
«  \in';t-dix  raille  est  la^'es,  et  les  chas- 
•«  ser  entièrement  a>ec  leurs  tyrans 
•«  hors  du  territoire  sacré  de  la  répii- 
•«  blique.  »»  Ce  sont  les  expression* 
dont  lui-œême  se  »cnit  lorsque,  le  1  i 
nov.,  il  fut  admis  à  la  barre  de  la 
Convention.  Il  protesta  ensuite  de  sou 
zèle  à  combattre  l'aristocratie  et  le 
Jayètisme;  puis  il  ajouta  que,  avec  une 
armée  fatij;uéc,  manijuant  de  tout  el 
réduite  de  moitié  par  la  séparation  de 
celle  du  pénci  al  Valence  qui  marchait 
sur  Givet,  il  lui  aurait  rtc  impossible 
de  dcNarrcer  trente  mille  liomnies  au 
moins  qui  avaient  trois  ou  quatre  mar- 
ches sur  lui.  Il  annonçait  ensuite  que, 

y  e»t  pr^^cri^  à  Kcllrnnann  de  iiiirchrr  \e  plus 
l«it  po»»»bU.  atrc  ao.ooo  Uommr*.  f>oiir  lom  ou- 
rir  à  lUpèdilion  dr  Cuitiiir  ;  ce  rorps  de- 
Tjit  rtre  cr>niniandè  par  Brarnonrillp. 

é    Cet  ordre,  qui  lermine   la  drpècli»  ■»*»- 

li \rr  d>n»    la  note   prrcrdenle  ,  était    conçu 

djn»  d--»  irrinr»  ilrsapprobalenr»  i  •  Conside- 
W^f  jiit  le  ppM  de  déposition  qu'a  inonire  le  pé- 
m  ncfil  k-rlrrinann  poor  iiiarcberafec  les  trou- 
•  p«»  qu'il  commande,  sniTaot  les  ordres  qn'il 
■  en  a  re^*.  etc.  » 


45G 


KEL 


pour  concilier  la  justice  avec  les  conve- 
nances ,  le  coiispil  exécutif  l'avait 
nommé  au  commaniîemenl  ilc  l'armée 
(les  Alpes.  <f  Citoyens  lc;;is1ateurs  , 
«  (lisait-il,  la  journée  du  10  août  a 
c<  sauv(î  la  république ,  celle  du  20 
»<  septembre  a  sauvé  Paris  sur  les 
<f  hauteurs  de  Valmy...  11  s'ap,it  main- 
*'  tenant  de  sauver  cette  patrie  par  la 
«  destruction  des  tyrans  étrangers;  il 
«<  s'a<;it  de  faire  plus  encore,  il  faut 
«'  porter  chez  les  peuples  voisins  l'é- 
•'  tendard  de  la  liberté  et  le  tableau 
«  des  droits  de  rhomrnc  ;  c'est  vers 
«  l'Orient  que  vous  dirij^ez  nos  pas 
«  pour  (lélhrer  Rome  (mtitjue  du 
<'  joug  des  prêtres.  »  Ces  expres- 
sions révolutionnaires,  bien  plus  que 
les  excellentes  raisons  straté|;iqiics  qu'il 
avait  alléf;uécs  (7) ,  valurent  à  Kellcr- 
niann  une  flatteuse  allocution  du  pré- 
sident Hérault  de  Séchelles.  Mali^ré  ce 
triomphe,  les  ennemis  de  KcUermann 
ne  cessaient  de  répéter  les  accusations 
de  Custine.  Le  j\Ionitcur  du  18  nov. 
renfermait  une  lettre  de  ce  f^énéral 
adressée  au  ministre  de  la  p;uerre  et 
dont  la  première  phrase  les  résu- 
mait toutes  :  «  Fatin;né  des  lenteurs  et 
«  des  refus  du  général  KcUermann, 
«  de  faire  mouvoir  les  troupes  canton- 
«  néesr.urlaChière;  ces  lenteurs  ayant 
«  fait  former  à  l'ennemi  !e  [)rojet  de 
«  me  faii  e  abandonner  Francfort  et  de 
«  me  renfermer  dans  Mayence,  etc.  » 
Kellerm.'-.nn,  qui  sentait  bien  que  cette 
grave  affaire  n'était  pas  finie,  ne  parlit 
point  pour  son  nouveau  poste  ,  sans 
adresser  à  la  Convention  une  lettre 
(29   nov.),  dans   laquelle  il  priait  les 


(7)  Le  in(':nifiirc  «h*  la  ctmp.ifine  «le  '/P*  , 
rédigé  ])ar  Kencniianii  liii-inr-iiin  ,  i  x  .'^Ik  .-mi  diî- 
pot  de  la  guerre.  Il  fonm:  avtc  ««-lui  «Ip  l)iM«in. 
qui  e>^t  <lans  le  même  carton  ,  un  liisioriqnr» 
Loinpiet  de  celle  campngnc  tant  vantét-  ,  nuis 
généralement  si  |)<  ii  citrinue  sous  Aon  véritable 
jour  avant  que  les  Mém'iiret  tiret  dn  papiers 
d'un  homme  d'état  el  les  arii  le»  Doiim  el  Du  moi  . 
Jinz  dans  notre  Biographie  (toni.  lAII  cl  I.XIII) 
eoisent  commence  à  toulerer  le  voile. 


KEL 

législateurs  de  la  nation  ou  de  mépri- 
ser ses  calomniateurs,  ou  de  le  mettre  à 
portée  de  les  confondre.  Du  reste,  il 
protestait  de  nouveau  de  son  dévoue- 
ment :  «  Citoyens,  disait-il,  je  vais 
«  reporter  sous  vos  auspices  aux  an- 
«  ciens  hommes  la  liberté  exclue  depuis 
«  si  long-temps  de  ce  beau  climat. 
«  Les  troupes  françaises  par  leur  exac- 
«  titiide  à  la  discipline  la  leur  feront 
«  aimer,  et  seront  fidèles  à  la  devise 
«  sacrée  pour  les  hommes  libres  : 
«  guerre  aux  châteaux;  paix  aux 
ce  calianes,  et  protection  aux  monu- 
<(  inciits  des  arts.  >»  Malgré  cette 
pompeuse  annonce,  l'armée  des  Alpes, 


«ont  !e  quartier- 


■général  était  à  Cbam- 


béry,  ne  dépassa  point  les  limites  du 
nouveau  département  du  Mont-lUanc. 
Kellermaiin  la  trouva  dans  le  plus  grand 
désordre,  ce  qui  porta  les  commissaires 
de  la  Convention  (Simon,  Hérault,  Ja- 
got  et  Grégoire)  à  proclamer  l'ur- 
gente nécessité  de  compléter  cette  ar- 
mée «  qui ,  disaient  ils  ,  n'a  liérité  de 
«  Montesquiou,  que  le  délabrement 
«  et  les  dommages  à  réparer  (  rap- 
«  port  du  h  janvier  1793).  »  Mais 
dès  le  25,  en  vertu  d'un  décret  rendu 
sur  le  rapport  de  Dubois-Crancé,  elle 
dut  être  [lortéc  à  un  efleclif  de  plus  de 
vingt  mille  hommes.  De  son  coté,  le 
général  en  chef  mit  de  l'activité  à  or- 
ganiser la  défense  du  pays  qui  lui  était 
confiée.  Entre  autres  dispositions 
nous  citerons  la  formation  d'un  corps 
de  six  cents  hommes  levés  parmi  les 
montagnards,  sous  le  nom  de  chas- 
seurs des  Alpes,  pour  les  o[»poseraux 
barbets.  Mais  ces  soins  ne  préoccu  ■ 
paient  pas  tellement  Kellermann  qu'il 
ne  se  crût  obligé  de  faire  du  propagan- 
disme.  C'était  ,  d'ailleurs  ,  pour  les 
généraux  qui  avaient  servi  sous  l'ancien 
régime,  le  seul  moyen  de  sauver  leur 
tète,  et  encore  n'y  réussissaient-ils  pas 
toujours.  Ainsi  on  le  voit  le  27  déc.  sé- 
vir contre  le  colonel  el  les  musiciens  (iu 


T'J*  r^ifiMat  (ancien  noalonnaU)qal, 
;iii  moment  on  l'on  allait  mettre  I.oiiis 
\  N  I  en  ju^eiiirtil,  avaiciil  jtun*  i\c>  aii  s 
proicrils ,  entre  autres  :  (J  lUcluird  ! 
ô  mon  roi!  -  ï^  ffrincté  que  Keller- 
••  mann  a  ilrplo>ëe  dans  celle  occa- 
"  sion,  dl>aient  lei  mrmfs  coramis&ai- 
•«  res  ,  a  |m  odnit  le  mcilicut  effet  sur 
-  retprit  public.  »•  A  cette  époque  le 
j;éncral  Je  l'ai  niée  d'Italie  eut,  tant 
a»ec  le  ministre  de  la  guerre  l'ache 
qu'avec  le«  patriotes  de  Genève,  une 
r«)rre<pondanfc  au  sujet  du  mouve- 
nirnt  révolutionnaire  qui  éclata  dans 
cette  ville;  niai»  à  Iravers  les  elo^cs 
que  le^  (iénexois  donnaient  à  Min 
caractère  ,  ils  ne  dissimulaient  pas 
l«*urs  inquiétudes  de  voir  augmen- 
ter le  noniLie  de  ses  troupes  dans 
leur  voisinage.  Kn  vain,  dans  sa  ré- 
ponse, il  protesta  que  ce  petit  mou- 
vement n'avait  pour  but  que  ««  d'as- 
•<  surerla  liberté  des  nouveaux  Ir ères 
"  du  Mont-Blanc  que  l'horreur  du  des- 
potisme venait  dr  réunir  a  la  ré- 
•  publique  française  ;  >»  en  vain  par- 
la t-il  de  son  défir  empressé  devenir 
\t'\\  tloanrr  Ir  baiser  Jridrrnel ;  une 
seconde  lettre  des  comités  genevois 
indiqua  bien  claiiement  que,  sembla- 
ble au  coq  de  la  fable,  ils  ne  crai- 
«;naic:il  rien  tant  que  ce  baiser  iVa- 
niour  fraternelle  (H).  (x?pendaul  il 
fut  encore  souvent  question  de  Kel- 
lermann  dans  les  discussions  de  la 
GiMvcntion  et  des  jacobins  où  il  était 
tantôt  attaqué,  tantôt  défendu.  Le 
Il  avril,  Thuriot,  en  appuyant  le  dé- 
cret de  proscription  contre  Dumouriei:, 
proclama  Kellerroann  comme  a\ant 
saui'r  la  républii^ue  dans  les  plaines 
de  (^liampaj;ne,  en  résistant  à  l'ordre 
de  ce  traître,  de  prendre  une  position 
qui  cùl  compromis  le  salut  de  rarnicc  ; 
et  rcltc  assertion,  qui  était  une  absur- 
dité {f^oy.  DiMoiniFz,  L\III\  fut 
accueillie    par    des   applaudissements 


KEL 


4",: 


unanimes.  Mais,  k  la  séance  du  IJ, 
on  lut  une  lettre  de  Custine  qui,  en 
dénonçant  I.  s  /n;//Mo«.v  lece^le^.  de% 
{généraux  de  l'armée  de  la  .Moselle, 
ajoutait:  •«  J'oserai  vous  le  due  avec 
M  cette  franrliise  (pu  ne  convient  qu'a 
M  un  républicain,  une  telle  conduite 
M  fut  enruura;;ée  par  vous  le  jour  où 
••  Kellermanii,  aprè*  a\«tir  indigne- 
n  ment  trahi  les  intérêts  de  son  pa>$, 
•<  reçut  ros  applaudissements.  »>  Ce- 
pendant rora;;e  se  foimait  d'un  autre 
rl^té  :  dénoncé  par  les  commis«aires  à 
Lv on,  d'après  une  lettre  de  leurs  col- 
lègue» auprrs  de  l'armée  des  Alpes, 
comme  suspect  de  complicité  avec  I)u- 
mouriez  et  les  I''g<ilité,  Kellermann 
axait  éle  suspendu  de  ses  fonctions  par 
le  comité  de  salut  public.  I>ientot  les 
coiuœi»aires  prèi  l'armée  des  .Mpes, 
mieux  informes  après  une  conféicnce 
de  nuat-c  î.-  :res  avec  le  j;énéral  ,  et  la 
visite  de  ses  papieis,  avaient  reconnu 
son  innocence  ;  et  Cambnn,  au  nom 
du  comité  de  salut  public,  proposait  sa 
réintégration;  mais,  les  depute>  Ma- 
thieu et  (fénissieux  avant  annoncé 
Qu'il>  avalent  des  faits  contre  lui,  la 
Coi  ention  décréta  que  tuj'.i,  les  dé- 
nonciations seraient  adressées  m  co- 
mité qui  ferait  un  rapport.  Mandé 
à  l*aiis,  (|uelques  jours  ap(è>,  par  le 
conseil  executif,  il  sortit  pur  de  l'exa- 
men qui  fut  fait  de  sa  conduite  ;  et  , 
sur  le  rapport  de  Harère  (18  mai), 
la  Convention  décréta  qu'il  n'avait 
pas  démérité  de  la  patiie.  Haière 
ajouta  qu'une  maladie  survenue  à 
lîiron  l'empêchant  de  prendre  le 
commandement  de  I  armée  destinée  à 
combattre  les  rebelles  de  la  Vendée, 
Kcllennann  s'en  était  chargé  jusqu'à 
son  rétablissement.  Trois  jours  après, 
le  ministre  de  la  <;uerre  annonça  que 
ce  f;énéral ,  nommé  au  comm.mdement 
désarmées  des  Alpes  et  d'Italie,  avait 
reçu  du  conseil  exécutif  l'ordre  de  par- 
tir pour  la  Hocheile,  afin  d'r  organiser 


458 


REL 


rarraée  qui  allait  se  former  sur  les 
côtes.  A  celte  occasion  Amar  déclara 
que  Kelleniiann  avait  perdu  la  con- 
liance  des  bons  citoyens  et  de  l'armée. 
Collot-d'Herbois  s'étonna  que  le  con- 
seil exécutif  eût  donné  au  même  homme 
le  commandement  de  deux  armées  si 
éloignées  Tune  de  l'autre  ;  et  il  fut  dé- 
crété qu'il  Y  aurait  un  f^énéral  pour 
chaque  armée.  En  conséquence,  sa  no- 
mination ne  fut  confirmée  que  pour 
l'armée  des  Alpes,  et  l'armée  d'Italie 
fut  donnée  au  vénérai  llrunet  ;  mais 
Kellermann  conserva  le  titre  de  géné- 
ral en  chef  de  toutes  les  deux.  Après 
avoir  inspecté  l'armée  d'Italie,  il  prit  à 
l'armée  des  Alpes  les  mesures  néces- 
saires ,  soit  pour  couvrir  celte  fron- 
tière, soit  pour  lier  ses  opérations  à 
celles  de  son  collègue.  Dès  le  mois  de 
juin  il  commença  les  hostilités  contre 
le  roi  de  Sardaigne,  envoya  au  mi- 
nistre un  rapport  sur  l'allaque  de  Cla- 
vières,  pi  emier  village  piémonlais;  puis, 
le  23  juillet,  il  rendit  compte  par  un 
rapport,  daté  de  Grenoble,  de  l'attaque 
de  la  montagne  de  Tête-Dure.  Dans 
ce  temps,  Lyon  s'était  insurgé  contre 
la  Convention,  et  les  Anglais  allaient 
être  maîtres  de  Toulon.  Il  parait  que 
ces  deux  événements  n'eussent  pas 
eu  lieu  si  l'on  eût  laissé  Kellermann 
conlinuer  à  user  des  moyens  de  con- 
ciliation que  déjà  il  avait  employés  vis- 
à-vis  des  Lyonnais,  et  si  d'un  autre 
côté  les  commissaires  de  la  Convention 
n'avaient  pas  retardé  la  marche  de 
quatre  mille  lionimes  de  troupes  qu'il 
avait  confiées  au  général  Carlaux  pour 
les  conduire  à  Toulon.  Un  décret  du 
12  juillet  avait  autorisé  les  commis- 
saires delà  Convention  à  requérir  Kel- 
lermann de  faire  marcher  une  partie 
de  son  armée  contre  Lyon.  On  l'a 
accusé  d'avoir  mis  quelque  lenteur  à 
l'exécution  de  cet  ordre.  Le  28  juilh), 
Jiillaud-Varenne  le  dénonça  pour 
avoir   méconnu    l'autorité  des   com- 


KEL 

missaires  Albilte  et  Dubois-Crancé. 
Toutefois  le  6  août  ,  il  partit  du 
camp  de  Bourg,  avec  Dubois-Crancé 
et  Gaulhier  pour  se  porter  sur  Lyon. 
Il  établit  son  camp  devant  cette  ville, 
et  le  8  août  il  somma  les  Lyonnais 
d'ouvrir  leurs  portes  à  l'armée  répu- 
blicaine. Ceux-ci  n'ayant  point  obtem- 
péré, il  commença  les  dispositions  du 
siège  ;  et  deux  jours  après,  à  propos 
de  la  fcte  du  10  août ,  qui  se  célébrait 
dans  son  camp,  il  publia  une  nouvelle 
proclamation  dont  la  Convention  or- 
donna l'insertion  au  bulletin  et  l'envoi 
à  tous  les  départements.  Le  langage 
qu'il  tenait  aux  Lyonnais  était  pour- 
tant fort  modéré  et  contrastait  évidem- 
ment avec  le  ton  des  actes  officiels  de 
l'époque  :  <'  Si  la  Convention  nationale 
«  pouvait  se  tromper  sur  mon  compte, 
«  disait-il,  je  lui  exposerais  avec  fran- 
«  chise  mes  sentiments,  je  lui  ferais 
«  ma  pétition,  mais  je  commencerais 
«  à  obéir  à  ses  lois.  Toute  autre  ma- 
«  nière  d'agir  a  trop  le  caractère  de 
«  la  rébellion  ;  encore  si  j'avais  des 
<f  torts,  je  ne  compromettrais  que  moi  ; 
«  et  vous,  vous  sacrifiez  tous  vos  con- 
<f  citoyens.  »  II  les  engageait,  en  ter- 
minant, à  venir  dans  son  camp  frater- 
niser avec  ses  soldats.  Ces  tentatives 
de  conciliation  furent  vaines  ;  car,  si 
les  Lyonnais  avaient  pu  se  fier  à  Kel- 
lermann, il  n'en  était  pas  de  même  des 
représentants  du  peuple  dont  il  était 
l'instrument.  Au  lieu  de  bombarder  la 
ville  comme  ceux-ci  l'auraient  voulu,  il 
se  détermina  à  intercepter  sur  tous  les 
points  l'arrivage  des  subsistances.  Ce- 
pendant les  Piéraontais  avaient  repris 
la  Savoie  et  contraint  l'armée  des  Al- 
pes à  se  replier.  Kellermann  n'obtint 
qu'avec  beaucoup  de  peine  la  permis- 
sion de  quitter  le  siège  pendant  trois 
jours.  11  ranima  le  courage  des  trou- 
pes, les  rétablit  dans  des  positions 
de  la  Maurienne  et  de  la  Tarcntaisc; 
cl,  selon   l'expression  dont  il  se  ser- 


KFL 

TÎt  djns  SI  iMp^lif  i  la  G)iivfnlion  , 
il  arrtlu  Irn  pro^rra  tirs  sutriiitrsdu 
drspotr  ullrtinumliiin.  Il  triait  île  re- 
tour ilfxaiil  I.Yon  le  Iroiiieme  jour  '2.'» 
aoùlV  l/(»nicler  {]ue  le»  représentants 
du  pe«j>le  n  Kellerroann  eavo^èrent 
|>our  rendre  compte  i  la  (x)nxention 
de  ce*  opération*  s'exprima  ainsi  au 
nom  de  -on  général  :  ««  <Jnanf  an» 
•«  l*irmniiiai«,  iU  sont  arluellement  i 
••  ('l»aml»rr>  ;  mai»  Krllermann  a  juré 
•«  qu'ils  n'iraient  pas  pln".  loin  :  une 
**   trop  grande  rc^pon  •  >ur 

"    5a  tète  pour  qu'il   l'  .    er- 

•«  ment  ;  mai.-,  roinptex,  Ir^i^Llenrs, 
«  qu'rn  frnpptint  Lyon  vi>u%  frap- 
•«  prz  tes  Pirrtutntars.  »•  Ce*  drr- 
nicies  parole*  étaient  évidemment  le 
coiilre-pied  de  la  pendre  de  Keller- 
mann  qui,  en  expos- nt  so*  premiers 
plan*  anx  reI»^é^cntant* ,  leur  axait 
dit  :  «  f.>  n  est  pas  in'  qur  vvis 
"  prendrez  Lyon,  t'est  à  lu  fron- 
«  iière.  »•  Malgré  ce  mt^Jêrantisifie, 
si  le  comité  de  salul  public  fro>ait 
utile  de  maiiitenT  dans  le  romman- 
dement  on  li(>ranie  de  rr  caractère , 
Kellerinann  n'en  était  que  plu*  ex- 
posé  aux  atiaqaes  des  jacobins.  A 
la  séarïce  du  li7  aoni  ,  Amar,  impu- 
tant à  la  tralii*on  de  ce  {;(*uéral  et 
à  *a  t'onnicenre  le*  rêver*  du  Pié- 
mont et  1.1  lenteur  du  *iè;;e  de  l.ton, 
demanda  positivement  Qi  K  l'oîi  fît 
TOMi'.m  SA  Tf.TE;  et  la  Convent  on 
dérréla  que  séance  tenante  un  rapport 
serait  fait  *ur  sa  ronduitr.  fîarère.  au 
nom  do  ccmilé  dç  salut  public,  cita  une 
lettre  de  Dubois-Cranrc  qui  attestait 
«<  que  Kellcrmann  étsit  franc  et  lo\al; 
««  qu'il  avait  de  la  mollesNe,  et  que  si 
«'  on  lui  promettait  le  commandement 
«  de  l'armée  du  nord,  l.von  serait 
«  bientôt  léduil.  »  Le  rapporteur 
ajoutait  qt.»'  tîes  lettres  interceptées  in- 
diquaient que  les  L\onnais  crovaiont 
ce  {général  dans  leurs  intérêts.  Dubois- 
Crancé,  qui  dans  le  fond  enyisageaît 


KEL  iSq 

comme  Kelleimann  l'affaire  de  L>on, 
avait  cependant  demandé  sa  deslitu- 
tion,  pour  ne  p.is  riic  liii-nième  ron»- 
proroii  ;  ma;  •  I  e  comité,  de  peur  de  four- 
nir de*  arme*  à  la  malveillance,  se  re- 
fusa an  renvoi  d'un  i;<Mieral  au  moment 
ou  il  était  en  raatclie  cuntie  les  rebcl* 
les.  kellermanu  étant  retenu  devant 
Lyon  ,  le  bombardement  <  ommen- 
<;a  le  S'i,  et  le  bulletin  de  ce  jf)ur  tju'il 
en%ova  i  la  (V  ronttnl  le  dé- 

tail  des  quart  \  rs.  Si  ses  ef- 

fort* lui  valut  en»  lc.tlo-r%  ile  la  «ociété 
populaire  de  Maçon,  ?;;•  {  'orlamait 
«    «piil  était ///ifj*'/  va, 

-    mais  que  *on  et.i'  .lu- 

•«  vais  et  entravait  *e*  opérations,  »  il 
n'en  fut  pas  moin*  denonréà  la  séance 
de*  jacobins  du  8  septembre  par  Ro- 
bespierre qui,  l'accusant  d'avoir  din;;ë 
tonte*  le*  conspiration*  qui  avaient 
éclaté  pendant  cette  campa^jne  ,  dé- 
clara que  jamai*  »ou*  un  tel  liomme 
une  opération  patriotique  ne  réu**i- 
rait.  Deux  jours  apn*.  Krllermann 
était  dr  îitué  et  remplace  de\ant  L>on 
par  Doppet.  Malpre  cette  destitution  , 
les  commissaire*  tiautbier  et  Dubnis- 
Crancé,  qui  avaient  toujour*  été  con- 
traires à  l'avis  d'aitaquer  L^on  de  vive 
force,  et.  par  conséquent  unanimes  avec 
Kellerirann  ,  prirent  siu-  eux  de  le 
maintenir  ,  et  le  renvo>èrent  com- 
mander dans  le  Mont-lUanc,  où  il  de- 
meura jusqu'au  mois  d'oct.  Avec  huit 
mille  soMats  de  li^ne  et  quelques 
gardes  nationales  et  volontaires  ,  il 
reprit  l'offcn-'ive  le  13  sept,  contre 
trenle-cinq  nulle  Austro-Srrdes  qui 
s'étaient  avancés  jusqu'à  Iîonne>illc, 
d'oii  ils  menaçaient  Annecy  et  Cliam- 
bérv.  ï.e  9  oct.  ils  étaient  chassés 
du  Fauci«jnyi  J*  '*  i  a:  »nta!se,  de  la 
>Iauricnne,  et  ils  laissaient  dix-sept 
casons  entre  les  mains  des  Français. 
«  iTa  frontière  de  Nice  à  Genève  est 
«  entière,  disait  le  général  dans  sa  let- 
«  tre  à  la  G)nvcntion  ;  on  y  respire 


46o  KEL 

«  l'air  pur  de  la  liberté;  le  sol  de  la 
«  république  dans  cette  partie  n'est 
<(  plus  souillé  par  les  despotes  armés 
«  contre  notre  indépendance  ;  et  ce- 
«  pendant  on  nie  soupçonne,  on  m'ac- 
«  cuse.  Citoyens  lé;i,islaleurs,  daio;nez 
«  me  juo;er  d'après  mes  actions.  » 
Sa  prédiction  sur  le  siècle  de  Lyon  s'ac- 
complit ;  le  lendemain  de  la  retraite 
des  Piémontais,  cette  ville  se  rendit. 
Ces  succès,  loin  de  désarmer  la  liaine 
contre  Kcllermann  ,  ne  firent  que  la 
redoubler.  «  Cet  homme  qui  a  trahi 
«  constamment  la  patrie,  disait  ]id- 
«  laud-N'areiine  (9)  à  la  séance  du  6 
«  octobre,  ne  remporte  maintenant 
«  des  victoires  qu'afin  de  détourner 
t(  l'attention  de  la  Convention.  »  Puis, 
sur  la  proposition  de  cet  orateur,  non- 
seulement  la  Convention  coniirma  la 
destitution  de  Kellermann  ,  mais  pro- 
nonça le  rappel  des  représentants  du  peu- 
ple qui  l'avaient  maintenu.  A  la  même 
époque,  il  crut  devoir  écrire  de  Cham- 
béry  à  la  société  des  jacobins  pour  se 
féliciter  d'avoir  fait  triompher  le  pa- 
triotisme dans  la  Savoie;  il  priait  la 
société  de  lui  confi:  mer  le  titre  de  gé- 
néral des  jucohins  que  lui  avaient 
donné  les  ennemis.  Cet  acte  de  fai- 
blesse ne  fit  qu'aojgraver  sa  position  : 
la  société  reçut  comme  une  dérision 
cette  avance  d'un  homme  qui  aurait 
du  être  cliâlié  depuis  long-temps. 
On  lui  fit  \\\\  crime  d'avoir  dit  devant 
les  représentants  du  peuple  qu'il  ne 
pouvait  aller  à  l'ennemi  avec  des  7)o- 
lontaires,  qu'il  lui  fallait  absolument 
des  troupes  de  ligne  ;  enfin,  sur  la 
pioposition  de  Perrevra,  il  fut  rayé  de 
la  liste  de  la  société.  De  toutes  parts 
les  accusations  retentissaient  contre 
lui  :  le  20  oct.,  lilanchet  lui  imputa 
d'avoir  bassement  fait  sa  cour  au  rcpré- 

(9!  Cet  aclianieinciit  de  Hill.iucl-Varfnne  con- 
tre Kelleriuann  s'exjtliquc  par  la  crainte  cju'.i- 
Tail  ce  conventionnel  que  Kellermann  ne  rt:\é- 
ïàl  la  part  qn'il  avait  eue,  en  179a, aux  négo- 
ciation) de  Duinoariez  avec  les  Pru»Meris. 


KEL 

sentant  Gauthier  et  donné  des  saufs- 
conduits  à  des  Lyonnais  insurgés.  En- 
fin le  18  oct.  il  reçut  la  notification  de 
sa  destitution  au  moment  où  il  se  pré- 
parait à  partir  pour  le  sièj^e  de  Tou- 
lon. Quelques  jours  après  il  (ut  arrêté, 
conduit  à  Paris  et  déposé  dans  la  pri- 
son de  l'Abbaye.  Les  protecteurs  se- 
crets qu'il  avait  dans  le  comité  de  salut 
public  le  laissèrent  pendant  plus  d'un 
an  oublié  dans  sa  prison  :  c'était  en 
ce  temps-là  le  seul  moyen  de  sauver  un 
prévenu;  car  sa  mort  eût  élé  certaine 
si  on  rcul  ju^é  du  vivant  de  Robes- 
pierre qui  avait  juré  sa  perle.  Enfin, 
le  8  nov.  1794,  il  comparut  devant 
le  tribunal  révolutionnaire  renouvelé 
depuis  la  chute  du  tyran  ,  sous  la 
prévention  d'avoir  été  fédéraliste  et 
d'avoir  mis  une  criminelle  négligence 
dans  l'organisation  de  l'armée  des 
Alpes.  Il  fut  acquitté  à  l'unanimité. 
Le  président  Dobsent,  joijjjnant  son  suf- 
frage aux  éloges  que  lui  avaient  donnés 
les  témoins,  parmi  lesquels  étaient  seize 
représentants  du  peuple,  termina  en 
disant  que  l'histoire  unirait  sur  la  tête 
de  Kellermann  les  lauriers  du  Mont- 
lllanc  à  ceux  de  Valmy.  Le  17  déc. 
ce  général  écrivit  à  la  Convention  pour 
obtenir  sa  réintégration  dans  son 
grade  et  des  indemnités  ;  ce  qui  lui 
fut  accordé  par  décret  du  15  jan- 
vier 1795;  puis,  par  un  autre  dé- 
cret du  3  mars,  il  fut  replacé  à  la  tête 
des  armées  des  Alpes  et  d'Italie.  Il  prit 
possession  de  ce  commandement  au 
mois  de  mai  1795.  Les  deux  armées 
étaient  fortes  tout  au  plus  de  quarante- 
sept  mille  hommes,  y  compris  les  gar- 
nisons de  Lyon,  de  Toulon  ,  de  Mar- 
seille ;  et  elles  avaient  affaire  à  plus  de 
cent  mille  Autrichiens,  Napolitains  et 
Piémontais,  non  compris  les  bandes 
de  montagnards  du  pays,  connus  sous 
le  nom  de  barbets.  Il  faut  ajoutera  cela 
qu'une  forte  escadre  anglaise,  croisant 
sans  cesse  devant  Gènes,  entravait  les 


opcrations  lîc»  Français  et  favorisait 
rrllfs  dfs  riiiiriHis  l.c  '2\  jtiin,  Ifs  .\us- 
tri.-SarcIr*  rcmmcrjcrrenl  à  allaqurr 
5ur  Ions  1rs  points  les  armées  d'Italie 
et  de»  Mpe'*.  ft.  prndnnt  quatre  mois 
rnii*rrutif»,  il  »r  li\ra  plti^  de  quarante 
ronibats ,  dans  lesquels  le^  Français 
obtinrent  plminirs  lois  ra\anta^e. 
Mai»  des  I  online  Krllerninin  a^ail 
commis  la  fanic  de  trop  élin(îte  >es  li- 
gnes. Le  "21  juin  ,  après  trois  jours  de 
rombals  ,  il  perdit  se»  position»  de 
^  ado  ,  de  Saint-Jacques  ,  de  llardi- 
iirlto.  11  écrivit  au  comité  de  salut  pu- 
blic que,  si  on  ne  lui  en\o>ait  pa»  de 
prompts  renfoits,  il  serait  obli;^é  de 
q:iitter  Nice.  I/alarme  fut  «grande  ,  le 
comité  rassembla  tous  les  dépuléi  qui 
avaient  été  à  l'armée  d'Italie,  pour 
aviser  à  ce  qu'il  fallait  fane.  C^eux-ci, 
unanimement,  drsi|;nèrcnt  lionap.irte 
comme  connaiv>ant  mieux  les  posi- 
tions qu'ocnipait  l'armer.  V.u  effet  , 
l'année  ptéréMenle,  à  la  *uile  «lu  ^iéj;e 
«le  Toulon,  il  avait  inspecté  toute  la  ri- 
vière de  lirnes  et  mis  l'armre  d'Italie 
dans  les  positiun;>  où  krllerm.iiiti  l'a 
vait  trouvée,  lionaparte  rerut  donc 
l'ordie  de  se  rendre  au  comité  et, 
après  plusieurs  conférences,  rédi;;ea  les 
in.'tructioiis  pour  kellermaiin.  On 
pense  bien  que  lui,  qui  convoitait  dès- 
lors  le  comni.mdrment  «le  l'armre  d'I- 
talie, ne  né;;li;;ea  pas  l'occasion  de  re- 
lever les  failles  de  son  ancien  ,  hrài'r 
sitldat  ,  r.ilrrmrmrni  artif ,  sans 
«Inule,  tout-ti'ftiit  pris.'e  des  m.iyens 
nrrrssairrs  à  /w  directiun  d'une  ar- 
mée en  clirf  (10.  Vers  le  milieu  «le 
juillet,  Kcllerm.inn  ,  toujours  en  face 
d'un  ennemi  très-supérieur  en  nom- 
bre, fut  encore  oblijjé  de  res>errer  ses 
positions  et  de  replier  son  quartier- 
;;énéral  sur  Horf;hctto  (28  juillet^  O 
mouvement  rétroj^rade  avant  fait  courir 
dans  l'armée  le  bruit   d  une   retraite, 

'  lo)  Mrma  rrt  J*  Sm^lfit,  l.  I",  j«.  90  à  91, 
t.  VI.  p.  45-1»    »•  e.l.lio..). 


KEL 


46i 


Kellermann  publia  une  proclamation 
datée  «r.Mlrii;;a  pour  le  démentir. 
(•race  à  celte  nouvelle  position  ,  il  se 
maintint  avec  a\anta(;e  pendant  toute 
la  campagne.  H  eut  au  mois  d'août  une 
correspondance,  qui  fut  rendue  publi- 
que, avec  le  ^^eneral  aufrirbien  Devins, 
au  sujet  des  iraitemcnts  cruels  que  les 
f'iirhrt^  infligeaient  aux  pris«)nnieis 
français.  (Cependant  la  paii  n\ant  été 
conclue  avec  l'Espagne ,  Krifermann 
obtint  qu'il  lui  serait  envoyé  des  ren- 
forts tires  partie  de  l'armée  des  l*>rc- 
néesOnenlales,  partie  de  l'armée  du 
lUiin.  Il  venait  de  faire  appiouver  par 
le  comité  de  salut  public  le  plan  d'atta- 
que qu'il  atait  conçu  pour  péiulrer  en 
Italie:  mais  avant  que  les  renforts 
attendus  fussent  arrivés,  le  commande- 
ment de  l'armée  d  Italie  avait  été 
confié  .iSchérer.  Kellrrm.inn,  n'ayant 
plu-»  que  relui  de  l'armée  des  .Mpes  , 
seconda  par  des  diversions  utiles  les 
opérations  de  ce  nouveau  général  , 
qui  s'était  cliar-é  d'exécuter  le  plan 
propo.sé  par  son  prédéce^'-cur,  et  qui 
f;.ipna  dans  le  mois  de  tMv.  1795, 
l'importante  bataille  de  Loano  (/ W. 
Schéhfr,  XÏ.I,  112).  Li  lenteur  des 
opérations  de  Kellermann  l'exposa 
plus  d'une  fois  aux  attaque^  des  jour- 
naux; il  fut  dénoncé  le  31  décembre 
ITOf),  dans  \e  Journal  des  hommes 
li/tres,  comme  entretenant  à  Turin  des 
intelli-jences  avec  les  ennemis  de  la 
république.  A  celle  accus.itioii  il  ré- 
pondit dans  le  Moniteur  en  sommant 
^on  dénonci.iteiir  «le  donner  <es  preu- 
ves, ou  d'accepter  la  qualification  de  ca- 
lomniateur. I-e  M\  m.ii  17!)6,  il  écri- 
vit de  Cliambérv  au  Direclo-re  pour  le 
féliciter  de  la  découverte  de  la  conspi- 
ration de  Babeuf.  A  l'oiivertiire  de 
la  carnpapne  de  lTî)r),  Scliérer  fut 
remplacé  par  Donaparle  ;  et  Keller- 
marln,  toujours  à  la  tète  de  l'armée 
des  .Mpes,  qui  éîait  regardée  comme  la 
réserve  de  l'armée  d'Italie,  n'eut  àdiri- 


462 


KEL 


ger  que  des  opérations  secondaires.  Le 
Directoire  voulait  d'abord  donner  Kel- 
lerinarin  pour  second  à  liona[)artc  , 
mais  celui-ci  écrivit  à  Carnol  le  2^ 
mai  1796,  sur  ce  projet  qui  ne  lui 
convenait  en  aucune  manière  :  «  Réu- 
«  nir  Kellermann  et  moi  en  Italie, 
«  disait-il,  c'est  vouloir  tout  perdre. 
«  Le  général  Kellermann  a  plus  d'ex- 
«  périence  et  fera  mieux  la  f!;uerre  que 
«  moi  ;  mais  tous  deux  ensemble  nous 
«  la  ferons  mal.  Je  ne  puis  pas  servir 
«  volontiers  avec  un  lionnne  qui  se 
«  croit  le  premier  général  de  l' Eu- 
if  rope.  »  Les  vœux  de  Bonaparte  fu- 
rent comblés  après  la  Journée  du  18 
fructiilor  (i  septembre  1797).  L'armée 
des  Alpes  fut  supprimée  et  réunie  à 
celle  d'Italie.  Quant  à  Kellermann, 
accusé  de  tenir  par  ses  opinions  au 
parti  vaincu,  il  fut  rappelé  à  Paris; 
mais  il  ne  resta  pas  Ions-temps  dans 
la  disgrâce  du  Directoire,  qui  le  char- 
gea, conjointement  avec  le  général  Ca- 
nuel,  démettre  en  état  de  siège  la  ville 
de  Lyon,  où  s'étaient  manifestés  des 
mouvements  royalistes.  On  le  voit  l'an- 
née suivanîe  préposé  à  l'organisation  de 
la  gendarmerie;  puis,  le  23  sept.  1798, 
inspecteur-général  de  cavalerie.  Se 
trouvant  à  Angers  pour  inspecter  Far- 
mée  d'Angleterre,  il  fut  couronné  au 
théâtre  comme  le  héros  de  Valmy  et 
s'empressa  d'envoyer  la  couronne  aux 
autorités  constituées.  Peu  de  temps 
après  il  al  a  remplir  les  mêmes  fonc- 
tions près  de  l'armée  de  Hollande.  Il 
était  membre  du  bureau  militaire  établi 
près  du  Directoire,  au  moment  de  la 
révolution  du  18  brumaire;  et  bien 
qu'il  fut  demeuré  étranger  aux  intri- 
gues qui  amenèrent  cette  journée,  com- 
me le  premier  consul  sentait  le  be- 
soin de  s'entourer  d'hommes  en  crédit 
parmi  les  troupes,  Kellermann  fut  ap- 
pelé le  premier  au.sénat  conservateui , 
dont  il  obtint  la  présidence  le  2  août 
1801.  Le  2  juillet  de  l'année  suivant>e, 


KEL 

il  fut  élu  membre  du  conseil  d'adminis- 
tration de  la  Légion-d'FIonneur  et  dé- 
core du  cordon  de  giand-olficier  de  cet 
ord;e;  en  mars  ISOi,  compris  dans  la 
première  promotion  de  maréchaux, 
puis  quelques  jours  après  pourvu  de  la 
sénatorerie  de  Colmar.  En  1805,  au 
commencement  de  la  campagne  d'Al- 
lemagne, le  maréchal  Kellermann  fut 
nommé  commandant  du  3^  corps  de 
réserve  sur  le  l\hin,  et  chargé  de  la  ligne 
de  défense  entre  Bàle  et  Landau.  Il 
organisa  alors  les  gardes  nationales 
dans  les  départements  du  Rhin.  Il  fut 
fait  grand-aigle  de  la  Légion-d'IIon- 
neur,  le  1^^  février  1806.  Sa  recon- 
naissance pour  l'empereur,  qui  avait  en- 
fin récompensé  ses  longs  services  d'un 
titre  qu'il  ambitionnait  depuis  quinze 
ans,  lui  fit  proposer  au  mois  de  juillet 
de  cette  même  année  l'érection  d'un 
monument  en  l'honneur  de  Napoléon, 
L'empereur  lui  confia  en  1806  et  1807 
le  commandement  en  chef  de  l'armée 
de  réserve  du  Pxhin,  qui  s'étendait  de- 
puis Râle  jusqu'à  Nimègue;  il  était  en 
même  temps  chargé  de  protéger  les  états 
de  la  confédération  rhénane  les  plus 
voisins  du  fleuve,  et  de  surveiller  l'in- 
térieur du  pays  jusqu'à  la  Hesse.  L'em- 
pereur, qui  venait  de  le  nommer  duc 
de\  almVjle  dota  alors  du  riche  domaine 
de  J  ohannisberg,  s'tué  sur  la  rive  droite 
du  Rhin,  et  qui  plus  tard  a  été  donné 
par  l'Autriche  au  prince  de  Metter- 
nicli.  Kellermann  fui  aussi  autorisé  par 
l'empereur  à  porter  la  grande  croix  de 
l'ordrede  laFidélité  de  liade  ;  déjà  l'an- 
née précédente  il  avait  reçu  la  grande 
croix  d'or  de  Wurtemberg.  Il  eut ,  en 
1808,  le  commandement  de  l'armée  de 
réserve  d'Espagne;  puis,  en  1809,  celui 
du  cor[»s  d'observation  de  l'Elbe  et 
de  la  Meuse-Inférieure.  Lors  du  dé- 
barquement des  Anglais  dans  l'île  de 
Walclieren,  Kellermann  fut  chargé  de 
former  à  Maeslricht  le  corps  d'obser- 
vation de  la  Meuse-Inférieure,  destine 


i  l'rendrt  rennemi  en  (lanc,  l'il  s'a- 
\aii';j!l  (JjtH  l'lii:i-f  rii  Vu  Isn. 
il  pré»iJa  le  cull 

Kliiji.  IViMJanl  1 ,    .,      ...  il      . 

If  IHIJ.  Kiiloiiuann,  i.i|>uclr  •►ur  le 
î''  M,  >  icjiitic  cotuiujiiiienieiil  df> 
s  «le  ié>erte  a^ec  le  ;;ou\erfie' 
iiiriit  iniiiiaiie  ilr^|u\!»tle  l>er^,  Ileh^c, 
Darmstjill,  N\  m  ul)our«,  Fraiiclort 
et  Nunsju.  Il  ctiiisfMa  ce  roinnuiiite- 
nimt  !|vr,     .1  '  ,    tu,,!,.    iKm.    rp'Mjnr 


Ne^eli.>aii  11 

cril)')ue«l«'  i         , 

ion  iii!mii  le  Uiit  Je  t^n^  inulilriBcnt 
\er>i- ilejiuis  171)2.  Sa  probile,  la  la- 
^tssc  lie  son  aiiiaÎDistiation,  m  moilé- 
'^alion,   roal^fé    le»    ordres   rigoureux 

in'il  était  trop  sou>eul  rliat;;e  d'ac- 
rnronlir,  axaient  fait  i ««perler  -un  nom 
Mir  les  lieux  ri\cs  ilu  lUiln.  Durant 
toute  la  rampa;;iic  dt  1H13,  il  fui 
rliai^c  d'organiser  en  ntfo'ftr^  tir 
nmrtlir  \t%  tro(jpe>  qu"  ^ 
ressail  de  lever  en   Fiante 

ùuyen  de  Farmet  /rdruuise,  es» -il 

•  dit  dans  le  manuscrit  de  1813,  «jui 
M  préside  i  leur  départ,  au  moioeut  de 
••   s'a\.infer  sur  les  terre*  élran;;cre».» 

V  la  suite  de  la  bataille  de  llanau  (30 

'I  31  oct.  1813),  il  prit  le  comuun- 

'•nient  de  toutes  1rs  réserves  à  Melx. 

,1  il  fu».  encore  charge,  avec  le  rnaré- 
'  tal  Oudiiiot,  d'organiser  de  nouveaux 
1  aiaïUon-s  pour  les  faire  filer  su  la 
Cliainpa^ne,  ou  Napoléon  avait  établi 
le  centre  de  ses  ope.  alions  Lorsque  , 
à  la  bn  de  janvier  ISl  V,  celui-ci  porta 
îon  qiiarlier-«;énéral  à  Oulous,  il  fit 
appeler  le  duc  de  Valmv  ;  et,  se  rappe- 
lant que  vin^t-ileux  ans  auparavant 
'!    avait   ^a^ite   le  tilit  de  son  d  .ciio 

...lis  celle  contrée,  il  passa  la  soirée 
.1  recacillir  de  lui  les  renseioneraents 
dont  il  avait  besoin.  A  la  suite  de  cet 
enli elien,  l'cnipci eur  parlil  pour  \  iti |, 
laissant  a  Ciialuns  le   vieux  maréchiil 


KEL 


463 


p"  (les  traînards  et  recevoir 

^I  ioiii    la  niardie  avait   été 

•  dans  les  Vrdennes.  Alors  Na- 
,  -^ i,  qui  aflrctail  d'évoquer  les  sou- 
venu'* de  la  république,  ne  manqua 
•pas  de  diie  et  de  faire  inipiimer  que  le 
vuinqurur  de  /  aliit)  dc\ai(  encore 
one  foi>  defi     '       '  de  l'Ar- 

^oueel  la  rn  |     Les  évè- 

^emenl^  de  Ihl  i  le  iiu....  i-nl  ainsi 
prêt  à  ^r  rall.icl.er  au  ;:ou\einrroent 
rojfal.  Le  T' avril  181V.  il  était  à 
l*aris,  et  vola  comme  sénateur  la  dé- 
chéance de  l'empereur  et  la  création 
d'un  ^omernenient  pruvisore;  le  22 
avril  il  fut  nomme  commi^saiie  du  roi 
l^ouisXVlII  dan»  la  3"  division  mi- 
litaire, à  Metx;  pui«  créé  pair  de 
France  le  4  juin  et  ;;randiToix  de  Tor- 
diede  Saint -Ix)uis.  Nommé  à  la  même 
•  I oque  ;;ouvt  *      !j    â*   division 

niiliuiff,  à  il  publia  le  8 

j'  einle  des 

^.  lUstc 
peiuiaiit  les  C^nt  jours, 
,  ..tcc  a  la  cliambre  de*  pairs 
après  le  retour  du  roi.  Depuis  cette 
époque,  passant  la  plus  (grande  partie 
de  Tannre  à  sa  maison  de  campagne  de 
Soisv-Montmorencj,  il  se  fit  peu  re- 
marquer. H  mourut  à  Paris,  le  12 
septerubre  1820,  à  Pige  de  qiiatre- 
vinot->ix  ans,  laissant  un  fils  illustre 
parmi  les  braves  de  nos  armées,  mais 
qui  ne  devait  pas  long  temps  lui  sur- 
vivre Jo).  l'article  ci-après).  Kellcr- 
roann,  veuf  de  sa  première  femme, 
avait  été,  en  1812,  sur  le  point  d'é- 
pouser M'"*"  Viclorine  de  Clia>»tena\, 
nna  moins  remarquable  par  son  esprit 
que  par  sa  bea-.ilé  :  mai*  la  famille  du 
maréchal  et  Napoléon  lui-même  s'é- 
ta. eut  opposes  a  cette  union.  Le  duc 
de  N  almv  fut  inhume  au  cimetière  du 
Uere-Lachaise,  dans  le  inèine  tombeau 
qu'^l  .IV ait  fait  ériger  à  sa  femme. 
Barbé  -  Marbois  ,    son  beau-fi-ère  et 

(il)  Voy.  F*i»,  Mwucrtt  <U  i8i3  «<   §«14. 


464  KEL 

son  collègue  à  la  chambre  des  pairs , 
redit  sur  sa  tombe  les  dernières  pa- 
roles que  lui  avait  dictées  rillustrc 
mourant  :  c'était  un  viJeu  pour  que 
son  cœur  fût  déposé  à  Valmy  au 
milieu  de  ses  braoes  frères  d' ar- 
mes tués  à  la  journée  du  20  sept. 
i792.  Fidèle  à  sa  dernière  volonté,  le 
fils  du  maréchal  accomplit  cette  mission 
le  16  octobre  1820.  Le  maréchal  Kel- 
lerraann  avait  présidé  en  1817  à  la 
publication  d'une  brochure  Intitulée: 
Esquisse  de  la  carrière  militaire  de 
Fr.-Clir.  de  KcUcrmann ,  duc  de 
Valmy,  pair  et  maréchal  de  France, 
rédigée  sur  les  notes  de  M.  le  maréchal 
par  M.  de  Botldoux,  son  commissaire 
ordonnateur  en  chef,  Paris,  un  vol. 
in-S°  de  72  pag.  C'est  une  apologie 
de  toutes  les  opérations  militaires  du 
maréchal.  D — R — R- 

KELLER3ÎAKX  (François- 
Étiknke),  fils  du  précédent,  naquit  à 
Melz  en  1770,  et  fui  élevé  à  Paris 
au  collège  des  Quatre-TSaiions.  Des- 
tiné à  la  carrière  des  armes,  il  entra  au 
service  avec  le  grade  de  sous-lieutenant 
dans  le  régiment  de  Colonel-général. 
Plus  tard  11  fut  attaché  à  l'ambassade 
des  Etats-Unis  jusqu'en  1793,  épo- 
que à  laquelle  il  vint  auprès  de  son 
père  en  qualité  d'aide-de-camp,  d'a- 
bord au  siège  de  Lyon,  ensuite  à  l'ar- 
mée des  Alpes.  Bientôt  compromis 
dans  les  persécutions  qu'essuya  ce  gé- 
néral, il  fut  emprisonne  comme  lui. 
Ayant  obtenu  sa  liberté ,  il  alla  de- 
mander un  asile  dans  sa  ville  natale 
à  M.  de  ÎNIarbois,  son  oncle  ,  qui  , 
lui-même  ,  à  celte  époque  de  terreur  , 
n'était  pas  en  cureté.  Le  jeune  Kel- 
lermann,  ne  doutant  plus  alors  que 
ce  ne  fût  dans  les  rangs  de  l'armée 
seulement  qu'il  pût  trouver  un  re- 
fuge, et  ayant  vainement  sollicité  pour 
ctre  employé  dans  son  grade  de  chef 
d'escadron  ,  se  fit  simple  soldat  au 
1"  régiment  de  hussards,   préférant 


KEL 

devoir  à  son  seul  mérite  une  posi- 
tion refusée  à  un  droit  incontestable. 
Enfin  les  mauvais  jours  cessèrent  ; 
Robespierre  tomba,  Kellermann  re- 
couvra son  grade  de  chef  d'escadron. 
Ce  fut  en  cette  qualité  qu'il  reparut 
à  l'armée  d'Italie ,  où  11  fit  ses  pre- 
mières campagnes  comme  aide -de- 
camp  de  son  père.  Devenu  adjudant- 
général  ,  il  assista  aux  batailles  de 
iiassano  ,  d'Arcole ,  de  Rivoli  et 
à  la  prise  de  Mantoue.  Il  fut  blessé 
de  plusieurs  coups  de  sabre  au  pas- 
sage du  Tagliamento  ,  en  1797  , 
circonstance  qui  lui  devint  aussi  utile 
que  glorieuse.  Bonaparte  l'ayant  dé- 
signé pour  présenter  au  Directoire  les 
drapeaux  pris  sur  l'ennemi,  cette  ho- 
norable mission  lui  valut  le  grade  de 
général  de  brigade.  Il  eut  peu  d'occa- 
sions de  se  distinguer  jusqu'à  l'inva- 
sion de  Naples  sous  Champlonnel  , 
dans  laquelle  quinze  mille  hommes  de 
nos  troupes  dispersèrent  soixante  mille 
Napolitains.  C'est  dans  cette  expédition 
que  Kellermann ,  après  avoir  dissipe 
une  tourbe  de  lazzaronl ,  apercevant 
sur  le  champ  de  bataille  un  homme 
qui  cherchait  à  rallier  les  fuyards  ,  dit 
à  ceux  qui  l'entouraient  :  «  Voici  un 
«  brave,  ce  ne  peut  être  un  lazza-  ■ 
«  rone  ;  je  veux  savoir  à  qui  nous  • 
«  avons  affaire.  »  Et  aussitôt  il  s'é- 
lance vers  ce  gucrier  ,  déchargeant 
en  l'air  ses  pistolels  pour  lui  inspi- 
rer de  la  confiance  :  «  Rendez - 
«  vous  prisonnier!  lui  dil-il  en  l'abor- 
«  dant.»  L'étranger  abandonné  des 
siens  n'eut  garde  de  refuser  cette  pro- 
position faite  d'une  façon  si  chevale- 
resque ,  mais  ayant  déclaré  qu'il  était 
le  comie  Roger  de  Damas,  Keller- 
mann, touché  des  dangers  de  sa  posi- 
tion, lui  permit  de  s'éloigner  et  le 
traita  avec  les  plus  nobles  égards.  On 
sait  comment  les  Français  furent  plus 
tard  obligés  d'abandonner  leur  con- 
quête.   Kellermann    ne   faisait    plus 


KEL 

alor»  pailic  Ar  ctl\c  Armer.   Altaqur 
d'une  noial;;if  \iolenle  ,  il  élail    ic- 
Iciiu  à  (inir,  >ur  un  lit  ilc  iloul(ur%, 
à  peine  ^um  ,   il    obtint  ilu    (irrraifr 
ronsul  unf  liiii^adc  de  j^roise  cavalerie 
dans  rarinée  qui  entra   5ous   «e«   or- 
dres  en   Italie  ;    c'est  à  la  tète  du  "2' 
et  du  Itr  rr^iment  «le  celle  arme  qu'il 
prit  part  ii  la  lulaille  de  Maren;;o.()n 
ne  doit  point   ouldirr   ici  la  polemi(|ue 
qui  a   élé  eii^a;;ée   sur  la  question  de 
&a\oir  à  qui  doit  être  déferr  l'Iioniirur 
de  cette  ;;raiMle  )ournee.   I,rs  iLilrurs 
de  Itonaparle  n'ont  pas  manque  ,  pen- 
dant sa  vie,  de   lui  en  attribuer  toute 
la  gloire,  daignant  à  peine  en  faire  re- 
jaillir une  r.iil)le  partie  sur  h  mémoire 
du  général  l)e>ai\.  parce  que  les  moriN 
ne  font   ^iière  ombrage  aux   \i\aiits. 
Nous,  qui   avons   sous    les  veux,   en 
écrivant  ces  li;;nes ,  les  pièces  du  pro- 
cès, nous    qui   voulons    rrmlie  à  kel- 
Icrounn  sa    juste  portion   île   ;;loiie  , 
constatons  que  ,    dè>   le   malin  de   la 
bataille,   le>  divisions  l^nnes  et  \  ic- 
tor  avaient  elé  écrasées,  que    plus  lard 
celle  de  Desaix,  composée  tout  au  plus 
de  six  mille  hommes  ,  après  un   le;;er 
succès  sur  des  tirailleurs  ,  nlia  se  briser 
contre   la    formidable  colonne  lancée 

Ear  le  j^énérai  Mrlas.  Tout  alors  sem- 
lait  perdu  pour  la  France  :  Desaix 
tué,  la  confusion  dans  ses  troupes , 
furJrr  de  céder  le  terniiu  ,  defntis 
long- temps  en\utye  pur  le  premier 
consul  ,  qui ,  lui-même  ,  avait  donné 
l'exemple  de  la  reliaite,  toi.t  indi- 
quait un  désastre  imminent ,  lorsque 
Keilermann,  chargé  d'appuver  la  divi- 
sion Desaix,  s'apernit  que  la  colonne 
ennemie,  qu'il  n'avait  pas  encore  com- 
battue, s'abandonnait  à  la  |>oursuite 
des  nôtres  avoc  une  ardeur  inconsidé- 
rée. Ce  fut  pour  lui  comme  une  in- 
spiration ;  il  ju^c  le  moment  favora- 
ble, s'élance  a\ec  sa  cavalerie  à  travers 
ravant-:;ardc  autrichienne  qu'il  sur- 
prend dans  le  désordre  de  la  victoire. 

LXViil. 


KFJ. 


4(^5 


Kn  un  moment  tout  est  culbuté,  foulé 
aux  pieds  des  chevaux;  le  triomphe 
est  complet  ;  les  Autrichiens  con>ternés 
mettent  bas  les  armes  !  Cependant , 
au  milieu  «le  son  mouvement  ,  Keller- 
mann  avait  cru  reronnaiire  que  les 
dra;;ons  de  Lichtenstrin  prenaient 
position  sur  son  flanc  droit;  il  an  été 
la  moitié  de  sa  troupe  avant  qu'elle  ait 
entièrement  pénètre  ^lan^  la  colonne 
autrirhienne;  il  la  remet  en  bataille 
pour   contenir  ce   rr^imcnt  «jui,   frap- 

Ec  de  stupeur  ,  reste  spectateur   immo- 
ile    du   désastre   des  bataillons  lion - 
;;rois  ;  car  huit  tie  ces  bataillons  seule- 
ment avaient  été  écrasés.  Le  corps  de 
bataille  était  intact,  la  cavalerie,  l'im- 
mense cavalerie  autrichienne  «le  iMelas 
n'avait   point  ilonné;  tout  cela  parais- 
sait niedusé,  anéanti L'armée  au- 
trichienne se   mit   donc  en  retraite,  et 
celle  retraite  serhan;;ea  bienlAl  en  une 
confusion  épouvantable.  Des  corps  en- 
tiers, qui  n'av.tient  point  été  en;;a;;és, 
qui   ignoraient   même  la   cause  du   dé 
sordre,  prirent  la  fuite  parce  qu'ils  vi- 
rent fuir  les  autres  !  Il  faut  le  constater 
ici ,  l'histoire  de  la  f;iierre  ne  fournit 
pas  beaucoup  d'exemples  d'un   tel  ré- 
sultat    obtenu     par     d'aussi     faibles 
nio\cns.   Quatre  cents  chevaux  chan- 
ger la  destinée  d'un  empire  !  Après  la 
bataille,    le  premier   consul,  toujours 
disposé  à  s'dil'usquer  de  la  ;;loire  d'au- 
trui ,   dit  à    son   ancien   aide-decamp 
avec  une  iiulirieience  affectée  :  «<  Vous 
«c   avez  fait  la  une  assez  belle  charge, 
««  général.  >» — «  Je  le  crois  bien,  pre- 
"    mier   consul ,   lui  répondit  keller- 
«   mann,   elle   \ous  met  la  couronne 
««   sur  la  tete.M   l^aroles  peut-être  in- 
discrètes   vis-à-vis   d'un    homme    qui 
ne  voulait  rien  devoir  qu  a  lui-même, 
qu'à  son  ^énie,  et  dont  le  résultat  s'ex- 
plique assez  par  la  froideur  qui   régna 
depuis  lors  entre  le  f;énéral  couronné 
et  le  «énéral  qui  lui  avait  assuré  la  cou- 
ronne... Ce  dernier  ne  put  dans  la  suite 

3o 


466 


KEL 


obtenir  le  bàlon  de  niaréclial,  quoiqu'il 
Teùt  incontestablement  ^a^^né  ;  sculc- 
nient  ,   quelque  temps    après  ,   il    fut 
élevé  au  f^rade  de  c^énéral  de  division  , 
et  employé  comme  tel  àTarmée  de  Ha- 
ijpvre,  sous  Dernardotte.  Commandant 
un  corps  de  cavalerie  à  Austerlitz ,  il 
e^éputa   plusieurs  charges  très-belles 
pt  fut  blessé  grièvement,  ce  qui  le  con- 
damna au  repos  pendant  plus  d'un  an. 
^n  1807,  il  passa  à  l'armée  de  Por- 
tpoaj,  et  se  trouva  sous  les  ordres  de 
Junot  à  celte  affaire  de  Vimeira  ,  où 
[^  duc  de  Wellington  combattit  pour 
U  première  fois  les  l' rançais.  Le  succès 
ne  fut  point  pour  notre  armée  ;  il  fal- 
lut évacuer  Lisbonne  ,  traiter  d'une  ca- 
pitulation, sauver  surtout  le  butin  im- 
mense    recueilli     par   nos   généraux. 
Pour  cela  un  diploniate  était   encore 
plus  nécessaire  qu'un  guerrier.    Kel- 
Jernaann  ,  esprit  délié    et  pénétrant, 
fu;  envoyé  au  cqmp  des  vainqueurs. 
Un  fait  assez  curieu.x  ,  c'est  qu'à  pei- 
ne en  présence  des  généraux  ennemis 
à   Torres-Vedras ,    on  lui   demanda 
»'ii   savait  parler    anglais  ;  mais ,    se 
doutant  que   celte  qucs'ion  était  faite 
i^  dessein,  il  icpondit  que  non,  quoi- 
qu'il parlât   fort    bien    celte   langue. 
On  crut  en  conséquence  devoir   trai- 
ter   avec    lui    sans    les     précautions 
usitées  en   pareille    affaire  ;    et    c'est 
ainsi  que  voyant  ses  interlocuteurs  se 
retirer  dans  l'embrasure  d'une  croisée, 
pour  discuter  les  propositions ,  il  les 
entendit  se  dire  :  «  Nous  ne  sommes 
«    pas  en   bonne  position  ;  il  faut  l'é- 
«   couler  d'autant  plus  favorablement 
^   que   la  (lotie  russe  mouillée  dans  le 
«    Tage,  poite  dix    mille  liommes  de 
((    débarquement  qui   pourraient  pien- 
y    dre  parti  contre  nois.»  Kelleimann 
n'eut   garde   de  négliger  ces    lévéla- 
lions  ;  ayant  insisté  avec  plus  de  force 
sur  celte  dernière  ciironslanre  ,  il  dé- 
concerta, e(fra\  a  Wellington  ainsi  que 
sir  Henri  J)alrymple,  et  il  obtint  enfin 


KEL 

celte  convention  de  Cintra  tellement 
honorable  pour  nos  armes  ,  que  l'An- 
gleterre   et  l'Espagne  furent  au  mo- 
ment d'en  violer  les  conditions,  com- 
me elles  firent  plus  tard   de  celle  de 
Bailer..    L'armée  française   débarqua 
dans  les  ports  de  la  Biscaye,  amenée 
sur  des  vaisseaux  anglais,  pour  rentrer 
dans  la  Péninsule  un  mois  après   en 
être    sortie.    Le  général  Kellermann 
y   rentra  aussi  chargé  qu'il    était  de 
couvrir  avec  son  corps  d'armée  tout  le 
pays    qui    s'étend    des    frontières  de 
I^Vance  ,  au  pied  du   Guadaramma  et 
à  la  frontière  du  Portugal  et  de   la 
Galice.    C'est  alors  que    s'étant   mis 
en  communication   avec  le    maréchal 
Ney,  ils  envahirent  ensemble  les  Astu- 
ries,  dispersant  devant  eux  le  corps  du 
marquis  de  la  Romana.  Le  maréchal,  en 
se  retirant ,  lui  laissa  le  commandement 
supérieur  dont  il  fit  si  bon  usage,  qu'il 
atteignit  le    duc  Del  Parque  sur  les 
hauteurs  d'Alba  de  Tornies  ;  cette  ar- 
rière-garde ,  forte  de  plus  de  dix  mille 
hommes,  fut  complètement  détruite. — 
liientol  les  désastres  de  Moscou  arri- 
vèrent.   Kellermann,  retenu  malade, 
n'avait  pu  y  assister;  il  fut  assez  heu- 
reux  pour  appliquer  son   courage  et 
son  habileté    à    une    campagne    non 
moins    mémorable,  celle    de  1813, 
notamment  à  lîaulzen  où  il  fut  blessé 
deux  fois  et  eut  cinn  chevaux  tués  sous 
lui.  Tristes  présages  des  dangers  qui 
l'attendaient  encore  !  1814  était  venu 
avec  son    cortège   de  succès    infruc- 
tueux et  de  revers  irréparables,  laissant 
à  Kellermann  le  stérile  honneur  d'avoir 
détruit  par  une  charge   de  cavalerie  le 
corps  de  Pahlen,  d'avoir  culbuté  celui 
de   Saint-Julien  à  Saint-Pavo,  de   lui 
avoir  (ail  (|iiiiize  cents  prisonniers  ;  en- 
fin, au  coîiihat  do  Bar-sur-Aube,  d'a- 
voir  empêché  l'armée  prussienne   de 
déboucher  iks  hauteurs  dont  elle  s'était 
emparée,  et  sauvé  par  une  charge  ra- 
pide et  vigoureuse  le  corps  du  mare- 


KEL 

clial  OuJinot.   A|Mrs  ia  rhutr  du  «^oii- 
\rinrroriit  im|>rrial,  kt-IIrrmaiiu,  aiii»! 
que  b  plupait  (liN  ^tnrr;iu&  de   l'eru- 
pire ,  se  suuraïl  aux  lîuurbuns  et  fut 
cooitné  dans  se^  titres.  Au  mois  de 
mai,  il  fut   un   des    i     i 
teurs  du  projet  de 
U   >tatue  de   llrrui  l^  , 
Neuf ,  ft    fi;."!ra   sur  la  | 

des  r  ...    I.c   '2(i  lUàt»  itSi  ,, 

il    ni.'  I  trie  de  i'a\ai.t-^arde 

3ui,  iOU«i  les  oïdies  du  duc  de  lierri, 
evail  s'opposer  à  l'arri^^  de  Na- 
poléon, mais  qui  n'eut  pas  le  temps 
d'agir.  Aiipelc  à  la  dumbie  des  pjtr» 
des  Ceut-jours,  puis  k  un  rominaiidr- 
ment  dans  la  grande  armre  de  Napo- 
létm,  il  prit  part  à  la  courte  campagne 
du  mois  de  juin.  Dans  le  coniba!  du 
lO.aui  Quatre-])ra<,  il  enfonça  plu- 
sieurs lignes  d'infanterie,  l'cniiant 
toute  la  journée,  le  nureclial  Nf\,  qui, 
avec  3r»,0()(»  liomuies,  éiait  cluii^»*  de 
combattre  l'armét*  an^lai  e  ,  a>:iit  paiu 
sous  l'influence  d'une  irrésolution  con- 
tinuelle. Ce  ne  fut  f;ucre  que  \er.s  le 
soir,  après  que  Napoléon  l'eut  fait  pré- 
venir des  avantages  remportés  sur  les 
Prussiens,  qu'il  se  décida  à  frapper  un 
coup  éncr{;ique,  et  qu'il  dit  à  Kelicr- 
mann  :  ««  Allons,  ;;éneral,  rempcrcnr 
est  >ictoiieux,  écrasons  les  ,\n^lai>  ; 
rejelons-lcs  sur  la  mer  et  foiçons-les 
de  se  rembarquer.  >»  Kellernunn  lui 
6l  ob<er\er  qu'une  forte  partie  de  sa 
division  étant  à  se  refaire  dans  les  \il- 
la;;es  voisins,  il  ne  disposait  que  de  peu 
d'hoiiHuos  ;  mais  le  maréclul  paraissant 
de  plus  en  plus  exalté,  il  tornic  les  cui- 
rassiers et  Ici  carabiniers  en  colonne, 
s'élance  sur  l'ennemi,  enfonce  $ucce.ssi- 
vement  trois  W^nes  coroposc*es  des 
Kcossais,  troupe  excellente,  et  se  dispo- 
sait à  profiter  de  son  sucns,  quand  il 
vit  avec  douleur  que  son  ciief  n'avait 
pas  ordonne  un  seul  motivciiienl  pour 
appuyer  celle  diar^c  si  briiiaule.  Force 
fut  donc  de  reprendre   le  chemin  qu'il 


KHL 


46; 


.1  travers  les  eoncmit^ ,  cn< 

1,  .il,.  M, .M  r-   -  >.!.i  au  milieu 

>'•  arriva  eu 

ein.»  »jui ,   .  Ht  à  toute 

bride  leur  *  (i.o\al  d« 

I     II 

..  ,  lu 
.  U..V.  u  L  iucict  d<i 
I  M    n'.i^.i't    pour  r.-Ls- 

acii  1  ,  u.i   11  illi'i, 

qin-  ilrtix  1 1  I,.  1  1 .111- 
raixiiic.  l.iil'ii  on  p.irMut  a  le  tirer  de 
cet  ctâ!  <  r.K.r  i;.  .!..!  c  fcinnulierc, 
il  eut  I  e  ses  cava- 
liers   f f  »!f 

IMtnquo    «M  I 

»lev>e  à  L  jnKi.r.u.i   !.•>,  1 1  lia  lut 
qui,  lors  de  la  retiaite  de  larmee  der- 
rière la  ï.owi".  fi.'  !. 
neraux  (it-iar»!  •  '  , 
soumK>i(tn  I 
Wlll     I), 

manu  irsta  k.m  .t^aul   plus 

d'aliineni   a   sa     ;  c   activité  , 

3u'un  douloureux  procès  de  famille 
ans  lequel  son  succès  froissa  bien 
cruellement  ses  sentiments  d'époux  et 
de  père.  A  la  mort  du  maréclial,  il 
hérita  de  son  titre  de  duc  et  de  la  pai- 
rie. I.e  ;;éiirral  ktllennann  mourut 
en  iS'J.'i,  Un  ail!  (»n  nom  ,  le  souve- 
nir de  sa  Vie  ;;uri  rierc  au  >(u\  iil>  qui 
lui  est  resté,  et  qui  est  aujourd'hui 
membre  d(*  la  cli.tin!  rc  AvS'  députes 
suui   le   titre  de  duc    de   N  aiuiv. 

KF.LLISOX  (Mathikl),  ihéo- 
lo};ien  an<;lais  ,  naquit  en  l.'iOU  dans 
le  comté  de  Northampton  ;  fut  élevé 
dans  les  collèges  anglais  de  Douai ,  de 
Reims,  de  lîome,  et  occupa  pendant 
^pl  ans  une  chaire  de  theoioi^ie  dans 
ce  dernier.  ANant  été  appelé  en  158Q 
à  Heims,  pour  v  i  euiplir  le  niéuie  eoiv 
ploi,.il  v  prit  le  de^ré  de  docteur,  et 
parsinl  qitclqi.es  années  apci  à  la 
dignité  de  chancelier  de  runiversilé, 
I..a   mauva'.*^e  administration   du  ùm- 


Jo. 


468 


Kl'L 


teur  Woiiliinwton,  présidciU  du  fol- 
lèse  de  j)():tai,  fit  sentir  le  besoin  uc 
lui  donner  un  successeur.  On  jv-^la  les 
yeux   sur  le  docteur   Kellison,    et  sa 
bonne  conduite  justifia  parfaitement  an 
pareil  choix.  Ses  premières  opérations 
furent  d'éteindre   les  factions  qui  dé- 
chiraient  ce  collège  ,  et   d'y  réiablir 
la  discipline  suivant  l'esprit  des  fonda- 
teurs. Les  dettes    contractées  par  son 
prédécesseur,  et  qui  avaient  anéanti  les 
ressources  de  cette  maison,  présentaient 
une   tâche  bien    difficile.  Kellison   ne 
la  ju^^ea  pas  au-dessus   de   son  zèle; 
il  alla  pour  cela  faire  une  coHecle  en 
Anf];leterre  où  il  mit  à  contribution  la 
bourse  des  catholiques  ,  et  obtint,  non 
sans  beaucoup  de  peine  ,   du    i^ouver- 
neraent  de   Bruxelles  ,    le    paiement 
des   arréraf];es   et  la  continuation    de 
la  pension  dont    les    rois  d'Espagne 
avaient  doté  le  collèg;e  de  Douai.   A 
peine  était-il  sorti    de    cet   embarras 
qu'une  maladie  contai^ieuse,  répandue 
dans  la  ville  ,   l'obligea  de  transférer 
ses  élèves  au  château  de  Lalain^:;,  ap- 
partenant   à  la   comtesse    de    lîerlai- 
mont,  où  leurs  études,  j^^ràce  à  sa  vigi- 
lance,  ne  souffrirent  aucune  inlprrnp- 
tion.  J.a  réforme  à  laquelle  il  avait  été 
oblio;é  de  soumettre   son  coilèfje  lui  at- 
tira des  ennemis  puissants  qui  le  dénon- 
cèrent  à  Kome  :    mais    il   lut  pleine- 
ment justifié  par  le  rapport  de  deux  vi- 
siteurs envoyés  pour  examiner  sa  con- 
duite, et  par  celui  des  deux  nonces  de 
Bruxelles  et  de  Taris.  Accusé  d'èlre 
favorable  au  serment  d'allé^i^eance  con- 
damné  jcii"   le   ['.ape  et  sur   lequel  les 
catholiques  d'An;^lel(.Mre  étaient   divi- 
sés, il  répondit  à  cette  accusation,  en 
1617,  dans  un  traité  sur  le  droit  des 
princes  et  des  évecpies,  où  il  s'(\[)ii- 
qua  avec  beaucoup  de  sap^e.sc  sur  les 
bornes  qui  séparent  les  «Icux  puissan- 
ces. Cet  ouvraj^e  avant  été  réim[irimé 
en  1623,  avec  quelques  adilitions,  un 
ennemi  caché  en  dénonça  l'auteur  au 


KEL 

roi  "Jacques  F' ,  comme  fauteur  de  la 
doctrine  qui  autorise  à  déposer  et  mê- 
me à   assassiner  les  princes  excommu- 
niés.   Le  monarque,  qui  de[»uis  lonji;- 
temps  connaissait  la  loyauté  de  Kelli- 
son, parut  surpris  des  torts  qu'on  lui 
imputait  ;  et  dès  que  celui-ci  fut  averti, 
il    s'empressa  de   dissiper  les  inquié- 
tudes   de  son  souverain  par  une  let- 
tre   qu'il  lui  écrivit  directement  ,    en 
lui  offrant   des  cautions  respectables 
poui-    répondre   de  sa   soumission  au 
serment  d'allégeance.   Peu   de  temps 
après  ,    il  publia   une  défense  de  la 
hiérarchie    ecclésiastique ,    où    il    in- 
sistait fortement   sur   la    nécessité  du 
gouvernement  épiscopal  dans   chaque 
église  nationale,  et  surtout  dans  celles 
d'Angleterre,  où  cette  forme  de  gou- 
vernement venait  d'être  rétablie  [Voy. 
Bisiiop,  IV,  528).  Cette  mesure  con- 
trariait singulièrement  les  prétentions 
des  réguliers',  qui  aimaient  mieux  dé- 
pendre du  pape,  dont  l'éloiguemenl 
favorisait    leur  insubordination ,    que 
des   évéques    placés  sur  les  lieux    et 
par  conséquent  à  portée  de  surveiller 
leur  conduite.    Les  ?P.  Knott,  vice- 
provincial  des  jésuites  en   Angleterre, 
et  Floyd,  son  confrère  ,  attaquèrent 
\;vement   la   personne   et  le  livre  du 
docteur  Kellison,  dans  dos  écrits  qui 
furent  cond.-mnés  en   1631   par  l'ar- 
chevéfiiie  de  Paris,  la  faculté  de  théolo- 
gie et  l'assemblée  du  clergé  de  France. 
Pendant    que  ce    docteur  triomphait 
ainsi  des  vains  efforts   de    ses    enne- 
mis du  dedans  ,  il  obtenait  des  suc- 
cès j)lns  consolants  sur  ceux  du  dehors. 
Il     avait     publié   un   écrit  intitulé  /r 
Bail/on  de  Vronintile  reforme ,  qui 
contribua  singulièrement  ri  la  conver- 
sion (ie  plusieurs  protestants  anglais. 
iNIontague,   (jiii   fut  depuis  évê(jue  de 
Cliicbesler,  lui  ayant   répondu  [tar  le 
Ihnllimur.ur  Iniillo'!:!'',  Kellison,  dans 
sa  réplique,  pressa  si  fortement  le  doc- 
leur  anglican  que  celui-ci  se  rappro- 


MX 

du  l»raurntii<  t\e  l.i  cÎKCtntiP  rj|l»..li- 
•jiic  >ur  la  ,  ur 
riU\ocjlioii  ■  <-  (1rs 
Iiuiinr5  (Tu^rri  rt  In  satisljctiuii ,  ilc 
iiutnrre  quM  Hniiit  trrs  u>jircl  à  *« 
rullr;;ue«  louclont  m>ii  uriliodo&ie. 
l/«  (locleur  Krlli»nii,  rhar^f  d'aiinm 
rt  (le  travaux,  leiniina  sa  carrière  k 
Douai  rn  ItiVl .  Sa  ta;!le  était  atan- 
lj_rii  r  ,  sa  |)irNtanre  ini|iu»aiitr.  Si.ii 
ina:iitirii  ^rj\e  iii>ptr4it  If  rc^|lrrl 
m  iiu'-iiie  teiiip»  «^iie  xtn  manirre»  ^f* 
fjlJe»,  les  a^témiMils  ilc  »a  ron*er>a- 
lion,  et  le  inrillrur  ton  a|i|>rlairiit  la 
rnii6aiire  et  fai%airni  nublirrrol>!.rii- 
nlé  (le  son  r  !i  .M  '  I  ti  I^>  rallioii(|iir« 
anglais  Ir  •'  a  (iluMeurs  re- 
prises poui .  .    (-[MM-opalc  dans 

leur  pa^s;  mais  s.",  modestie  et  son 
humilité  mirent  ronriamment  des  ob- 
stacles à  raccompl:N>cment  de  leurs 
\(iux.  Ses  ou\ra^es  sont  :  I.  J^ltin 
tir  in  niHt^'rllr  reli^iun  ,  Douai  , 
ir»()3,  in-H  .  11.  iïfftliiiiir  ti  la  li'- 
/Mtnsr  tir  Sutrlijff  u  CL.umten  tir  itt 
noni'riir  rrligioti  ,  Keinis,  1608, 
in  8".  III.  Ortt'in  ron/m  Hr/trint 
Il  ,   rrgt  M'nut.    IV.    Lt 

lidii/un  t.'i  i.'   rr formé.    V. 

'..iuiven    rr/onnotiunis   prasrrtint 
i  iii\'inisttrtz  ,    Douai,   iri6,  in-S". 
VI.    JjT  droit  rt  itt  jnriJii  fitm   ilu 
pnuce  rt    liu    prriul ,    1  (i  1 7  - 1 G :î  1 , 
in->°.  Vil,  Tmitr  fie  iu   hirrurcltir 
tir     rFi^lisr   tuntrr    Ctiiuinhie    tir 
Cali'in / 1 6J9 ,  i n  8° .  V 1 1 1 .  Instruc- 
tions courtrs  rt  nn  rssairrs  pour  1rs 
t  atiiuUijurs  tf  Anglrtrrrr,    tuuriitint 
leurs  pasteurs^    \iV.\{.    l\.    (^orn- 
innittiriits  in  tcrtitiiu  jmrtrm   Sum 
imcsamti  I'iwmii\  lt)3-,  in-fol.  \. 
Lrtirr  tut  roi  Jari^urs  r^ ,  manuscrit. 
T—n. 
KELLY    (Michel),  chanteur  et 
r,)nipos.loitr   de    must(]uc  ,     n.K^uil    à 
I)u\)rM».  Il  uil  dans  ses    mémoires  que 
un  pcro  était  le  maître  des  cérémonies 
o  château,    et   qu'il   faisait   en  même 


Kf.L 


i6c, 


irmp  ie  (ouimcrce  de  \in  ,  ritmul  de 
fondions  a^  ri  singulier.  A  peine  ijȑ 
de  trois  ans,  ou  ir  mettait  :ur  la  table 
de  famdlepour  amuxer  les  conM^e«  avec 
la  chanson,  faroniM:  alors  :  Tlirre  ivas 
a  joiiy  miiirr  tuitr.  A  sept  ans,  il 
conimen(;a  l'élude  de  la  musique  pour 
jaipielle  tou«  le^  siens  él aient  pas.'>ion-> 
nc^.  Il  fut  question  del'en'.x^er  »e  per- 
fectionner en  Italie,  et  m  .iitrndanl  il 
d<  '  rr   de  sa  \ille  natale 

d.  .  liuuiti.    Ses  parents 

ne    ^uuiiOiiil    pu*    qu'il    sui\it  ,    loin 
d'eux  surtout,  la  carrière  où  Tmiraî- 
n.iit  un  ^oùt  décidé;    il    le>  quitta  en 
1779,  et  se  diiij;ra  vers  la   teiic  clas- 
sique  du  chant.  Il  a>ait  alor»  quinze 
ans.  Il  fut  p.iifailrinent  accueilli  a  \a- 
ples  par   le  chevalier  VV  illiani  llamil- 
tnti,  protecteur  éclaire  de«  arts  et  des 
ariistrs;  mais  c'est  à   Florence  qu'il 
devait  d'aboi  d  exercer  son  talent.  C'é- 
tait le   premier   chanteur   aii^lai:.  qui 
eût  encore  paru  sur  la  scèue  italienne  : 
il  >  obtint  du    succè»,  à  ce   qu'il  nous 
apprend    lui  morne.   Son    eii^.ijrmonl 
étant  rempli,  i!  partit   pour  ^  cuise  sur 
la  parole  d*i;n  Piitrepreiicni ,  qui  bien- 
tàt   le   laissa   dans    i'embanas,    lui  et 
toute  une  troupe  d'acteurs,  en    dispa- 
raissant, faute  de  potivoir  répondre    k 
certaines    conditions    exigées   par    les 
roat^i.'t  rats,  (lui  étaient  chargés  de  la  sur- 
veillance administrative  des  tiiéatres. 
La   per>pecti>e    (jr-i    s'ouvrait   devant 
KelK  était  des  plus  tristes,  car  il  n'a- 
vait plus  qu'un  snjuin  dans  sa  poche, 
lorsqu'il  exe. ta  l'iniérét  tout  particulier 
de>l""'  lîéiiini,  chanteuse  célèbre,  qui 
l'emmena  à  (iralz.  Uevenu  daii-.  l'état 
vénitien,  il  s'y  en;;ai;ca  pour  h:  théâtre 
de  r>rescia.  Tne  aventure  d'amour  ou 
le  simple   soupçon   d'è«rc  ,  auprès  de 
la  plus  belle    des  chanteuses  ,  le  rival 
(ISin    5ei;;neur    du  pa>s  ,    liès-violent 
et   trcs-d3n«;ereux   en  raison  des  as- 
sassins  «\c   profession    qu'il  avait  à  sa 
solde,   amena   des   menaces  qui    l'ef- 


470  KEL 

fravèreiil  à  tel  point  qu'il  s'enfuit  de  la 
salle  après  la  première  partie   d'une 
représentation   où    il    avait   joué    et 
chanté.   11  arriva  ainsi  à  Vérone  en 
costume  de  théâtre  et  y  produisit  un 
effet  très-rislble.  Une  fols  rassuré,  Use 
mit  en  route  pour  Trévlse,   ville  très- 
fréquentée  par  les   nobles  de   N  enise 
dans  la  saison  des  villégiature.  11  passa 
ensuite   à  Ldliie ,   puis  visita  succes- 
sivement Ferrare,  Modène  et  Parme. 
L'ambassadeur    d'Autriche  à  Venise 
lui  ayant  fait  des  offres  très-avanta- 
geuses pour  Vienne,  qui  avait  à  cette 
époque  la  cour  la  plus    brillante  de 
rturope,  il  s'y  rendit,    et  y  connut 
Haydn  ainsi  que  Gluck,   objet  de  sa 
plus  vive  admiration,  et  dans  un  opéra 
duquel  {Ipliigénie)  ,   il  joua  Pylade  ; 
Mozart  qu'il  a  dépeint  dans  sa  vie  de 
famille  ,  et   qui ,   dit-il ,  applaudit  la 
musique  que   lui,  Kelly,    avait  écrite 
pour  la  Canzone  de  Mélastase  si  con- 
nue  ;    Grazie   agli    iiiganni  tuai; 
Paësiello,  Saliéri  qui  travaillait   à  son 
Tarare  ,  Jarnowick  ,   le  chevalier  de 
Saint-Georf;es,  le  baron  de l)atz,  l'abbé 
Casti,  etc.,  etc.  Dans  //  re  Teodoro, 
dont  celui-ci  avait  fourni   le  llbretto, 
Kelly   fut   chargé  du  rôle  du  pauvre 
Gafferio,  et  y  Introduisit  un  air  de  sa 
composition,  fait  et  surtout  chanté  en 
imitation  d'un  mendiant   Italien    qui 
courait  les  rues  de  Vienne.  Notre  Ir- 
landais s'en  tira  si  bien   que  tout  le 
temps  qu'il  passa   encore   dans    cette 
ville,   on  ne  le  nommait  plus  que  le 
Vieux   Gafferio.    Il  fut  rappelé  dans 
son  pays  en  1787,    par  une  maladie 
de  sa  mère,  traversa  rAllemajj;ne  ,  et 
gagna  Strasbourg  où  il  fut  frappé  du 
jeu  de  M'"'^  IJugazon  (jul    y   donnait 
des  représentations.  Il  fit  connaissance 
à  Londres  avec  mistri.is  Crouch  ,    et 
dès-lors  commença  une  liaison  qui  a 
duré  toute  la  vie   de  celle-ci.  Il  la  sui- 
vit à  Paris,  elle  et  son  mari.   Kelly, 
assez    sévère   pour    les  chanteurs    et 


KEL 

les  chanteuses  de  notre  opéra,  mais 
surtout    pour    ceux   qui  criaient  sui- 
vant l'usage  de  ce  temps ,  loua  beau- 
coup l'exécution  de   nos  chœurs ,  et 
alla  jusqu'à   l'enthousiasme    pour   la 
musique    de    Grétry    dans   Richard 
Cœur-de-lion.  Il  ne  donna  cette  fois 
que  six  semaines   à  la  capitale    de  la 
France;  mais  il  y  revint  en  1790  et 
éprouva,  sans  trop  s'en  plaindre,  quel- 
ques-uns  des   inconvénients  attachés 
aux   passions    politiques  et  à  l'esprit 
d'égalité  que  la  révolution  venait  d'in- 
troduire dans  les  basses  classes.  Tou- 
tefois  les   intérêts  du  théâtre   domi- 
nèrent chez  lui  tous  les  autres  ;   et , 
si   les  excès  de  toute  espèce  auxquels 
Paris  était  en  proie  le  frappèrent ,  il 
n'en  fut  pas  très-affecté  ;  car  il  disait 
n'y  avoir  trouvé  sur  ses  pas  que  la 
gaîté  et  le  plaisir.  Il  condamnait  l'écri- 
vain qui  avait  osé  l'appeler  :  «  Ville  de 
«   bruit,  de  fumée  et  de  boue,  où  les 
«   femmes  ne  croient  plus  à  l'honneur, 
«  ni  les  hommes  à   la  vertu.    »   Il 
croyait  que  c'était   là  de  la  poésie,  et 
il  a  cité  et   imprimé  ,    en  l'altérant 
beaucoup,  celle  phrase  comme  étant 
des  vers  de  J.-l>.  Rousseau,  et  non 
pas  de  la  prose  de  Jean-Jacques  dans 
son  Emile.  Pendant  l'hiver  de   1790 
à  1791  et  au  printemps  de  cette  der- 
nière année,  il  reparut  sur  la  scène  en 
Angleterre,  et  fit  encore  une  visite  à 
Paris  vers  le  milieu  de  1791.   Il  était 
cette  fols  bien  plus  disposé  à  plaindre  les 
déplorables  infortunes  de  Louis  XVI  et 
de  Marie-Antoinette.  On   aime  à  lire 
dans  ses  mémoires,  qu'à  Londres,  vers 
le  21  janv.  1793,  par  respect  pour  la 
douleur  de  ceux  qui  pleuraient  la  mort 
du  roi   martyr,  il  n'y   eut    point  de 
spectacle  à  J)rury-Lane,    dont  Shé- 
ridan  était  principal  propriétaire  ;  mais 
le   mérite  n'en  fut  pas  à  celui-ci  qui 
était  absent  :  il  appartint  tout  entier 
à  l'acteur  Kemble.  Shéridan  ,  à  son 
retour,   blàraa  cette  mesure  de  relu- 


rhe  ,  disant  qur  la  politique  rt  la  rr- 
liijion  devaifui  dic  rf;;a:  Jers  roiumc 
etiAn{;èrr(dan«  tut  liru  ron&arrea  l'art 
draiiuht|U4r.  Kt  rrpriidaiit,  iiou<  a^i^utr 
Kfli?,  nul  pfut-rtre  ne  rondaninail 
plus  Sinrrreinrnt  (]iie  crt  orateur  (a- 
raeai  le  ^raiid  crime  rointnis  en  France 
dans  ce  jour  néfaste.  H  joaa  ver^  le 
m^e  temps,  m  Ansleiene  et  en  Ir- 
lande a%ec  in:><lris<  Croiirli,  nui  «'était 
séparée  de  «nii  mari.  Son  del»ut  rom- 
mefomjiOMtnir doperaient  lieni  l^in- 
dre*  en  Iruier  17U7.  il  réunit  en 
17îïH,  à  frl  rmplui,  relui  de  clianleur, 
dan5  une  piére  ou  \\  avait  Dussek 
pour  colbloralrur.  Kn  ITUD,  il  fil  la 
inu«ique  «le  l*iuirrn  ,  opéra  de  Shé- 
ridan.  Il  avait  un  rôle  à  remplir  le  15 
mai  IKOO,  jour  ou  un  coup  de  pistolet 
fut  lire  du  parterre  «ur  (ieor^e^  111  , 
lor>que  te  prinre  en'  e 

à  l'Opéra,  et  \\  fnt  r  .• 

i  la   curioNile    n 
irrité,  sur  le  mu  i 

été  airèlé  •;iir-lc-rliamp.  A  la  tin  du 
spectacle,  auquel  le  vieux  moiiartjue 
avait  assité  usée  un  ^an;;- froid  ailini- 
rable  ,  pendant  que  sa  famille  fon- 
dait en  laime<,  les  speciatenr»  rede- 
mandèrent l'air  national  qui  aoit  été, 
avant  la  repieseutatiou,  le  «ij^nal  at- 
tendu par  l'assassin  pour  faire  feu. 
Kellv  était  en  train  de  le  clianter  a\ec 
ses  camarades,  quand  il  reçut,  (»ar  or- 
dre de  Sheridan,  un  couplet  de  cir- 
constance, improvisé,  sur  le  rintlime 
de  (îod  sure  thr  Ung ,  couplol  qti'il 
entonna  d'une  ^oix  ies-.i;;itée  :  c'est 
celui  qui  commence  par  frotn  the  as- 
sassin s  hliHV,  et  qui  a  été  fort  con- 
nu depuis  lors  en  Ai1j;letcrre.  I/ef- 
fet    en    fat    prodi^^ieux.    A    la  fin    de 

1801,  il  re>olut  de  former  dans  l^all- 
Mall  un  de'p^t  pour  vendre  sa  nom- 
breuse musique  et  celle  des  autres  com- 
positeurs, st>it  an<;Uis  ,  r-oit  italiens. 
Son  ma;;.T>ln    s'oii^nl    le    1*^^'    janvier 

1802,  mais  il  v  fil  fort  mal  ses  aûaires, 


47t 


KRL 


ne  pnuvaiil  suffire  à  ses  occupât! 
multipliée >  comme  acteur  et  composi> 
teor  dans  trois  théâtres  de  Londies^ 
oatre  sc^  (onrtioui  d'eiitreprenear  du 
tliëatre  italien  et  de  dnecteur  de  la 
muiique  «laiis  deux  autres  salles  de 
spectacle.  1^  France  le  revit  au  mois 
de  juillet  IHO-J  :  un  était  alors  en 
paix  avec  l'An^lelerie.  il  vtita^eait 
cette  fois  avec  le  chanteur  N  i|;anoni. 
Se*  récits  de  celle  époque  sont  inté- 
ressants, et  celui  rnlie  autres  d'one 
repirsrntalioti  lï.  hitinminifur  zà 
Itieatre- Français  ou  (>liaile«  Fox,  re- 
connu dans  une  lo^e,  excita  de^  balle- 
ments  de  mains  dit  fois  phi^  fort.s  que 
ceux  dont  llonaparte  fut  l'objei  ,  lors- 
qu'il entra  peu  de  temps  après.  Nm 
theaires  truuveicnt  de  nouveau  pracé 
.vuprè^  de  Keili.  lout  lui  éluit  bon, 
pouivu  que  l'on  n'atlaqnat  pis  es 
<s  présence  le  rhant  aiiflais  et  la 
•  d  cxrcuer  la  musi- 
oii  relie  de  (irelfvj 
celui  de  nos  compositeurs  qu'il  pré- 
ferait à  tous.  11  crut  pouvoir  Irans- 
poiter  un  opera-comique  de  ce  célébré 
niaitre  sur  le  théâtre  de  l^ndres:  ie 
Ju^rmfnt  dr  Miihis  ;  mais  il  juf;ea 
qu'il  fallait  plus  de  poivre  {(Mjenne) 
au  i;oùt  br.tanniquc  (nous  conservons 
5a  plaisante  e.*presslon',  qu'il  ne  s'en 
trouve  dans  les  airs  de  cet  opna-co- 
miqiie  ainsi  que  dans  ceux  de  V/ltWint 
jdhm.ï  et  des  L\ù'nrnirn1s  iinpreous 
qu'il  admirait  d  .ailleurs.  11  peidil  en 
ISOâ  M""  Cioudi,  qui  était  à  la  fois 
nnc  très-jolie  femme,  nne  tres-a;;réa- 
ble  clianleiKe,  et  dftnt  l'allnrhemeiil 
pour  lui  fut  a  toute  épreuve.  Il  résolut 
d'abandonner  le  théâtre  ai:ssitôt  qu'il 
le  pourrait,  se  réservant  toutefois  de 
composer,  il  s'était  a>socië  avec  Shc- 
ridan,  tant  pour  la  direction  du  théâtre 
de  Drurv-Lane,  qu'il  fjarda  Irciilc  ans, 
et  qui  Liiiia  en  février  1809,  que 
pour  la  mise  en  scène  au  Grand  Opéra. 
11  avait   paru  pendant  ce  lou^  espace 


472  J^EL 

comme   principal    ténor    et  dans  les 
opéras  sérieux  et  dans  les  opéras  bouf- 
fons. 11  monta  pour  la  dernière  fois  en 
septembre  1811  sur  le  théâtre  de  i3u- 
blin  où  il  avait  débuté  enfant.   Ce  fut 
peu  de  temps  après  que  l'infidélité  du 
préposé  auquel  il  avait  donné  toute  sa 
confiance,  comme  marchand  de  musi- 
que, lui  fit  subir  à  Londres,   sinon  la 
honte,  du  moins  toutes  les  conséquences 
d'une  banqueroute    déclarée  sous  son 
nom.  11  partit  une  fois   de  [dus  pour 
Paris  en  juin  1814,  à  l'effet  de  rendre 
service  à  des  amis.  Il  ne  raconte  n^uère 
des  événements  de   ce  dernier  voyage 
que    des  scènes  d'auberge  ,   ses  bons 
dîners    surtout ,   et  puis  on  y  trouve 
force    compie-rendus    des    spectacles 
français.    De  1797    à   18:21,  il  avait 
fourni  à  différents  théâtres    la   musi- 
que de  soixante-six  pièces  dont  il  a 
publié  la  liste,  et  composé  en  outre 
beaucoup  de  chansons  sur  des  paroles 
italiennes, anr;laises  et  françaises.  Nous 
avons  quelque   peine  à  nous  expliquer 
comment  ce  serait  Shéridan  qui  aurait 
dit  à  Kelly ,  son  collaborateur  et  l'admi- 
rateur passionné  de  ses   talents  divers 
comme  homme  politique  et  auteur,  un 
mot  cruellement  satirique  :    «  Tu  es 
«   jmporfateurile  inusifjue  etcomposi- 
«   teur  de  vins,  >•  sous-ciitendant  que 
le  bon  Irlandais  donnait  souvent  com- 
me de  lui  des  airs  italiens  très-connus, 
et  puis,  faisant  allusion  à  ce  que  Kelly 
s'était  fortement  adonné  à  l'ivrof^nerie 
depuis  la  mort  de    mistriss  Crouch,  et 
avait  apparemment  débile  beauroiq)  de 
\iM  dans  sa  .société  intime.  Quelques 
années  avant  sa  mort,  il  était  fort  f^out- 
teux  et  ne  pouvait   plus  sortir  de  chez 
lui.  C'est  ce  qui  lui  a  donné  le  temjis 
de  recueillir  ses  Soiwettirs.  Il  les  a  [)ii- 
bliés    en    18'J(>    (  lieniinlscrnrrs  of 
Kelly).  Ce  livre  est  loin  de  révéler  un 
homme  lettré  ,   mais  il  contient    une 
loiile  «l'anecdotes  sur  les   personna;;e.'; 
dit;lin^ué."5  avec  lesquels  il  avait  été  le 


KEL 

plus  en  rapport  ,  principalement  sur 
Shéridan.  11  ne  laisse  échapper  aucune 
occasion  de  témoionerlareconnai.ssance 
qu'il  devait  au  prince  de  (ralles,  devenu 
Georges  IV,  et  les  derniers  mots  de 
son  dernier  volume  sont  pour  lui  :  God 
savcihe  king.  Il  estropie  quelquefois 
les  noms  étrangers,  les  noms  français 
surtout,  de  la  manière  la  plus  comi- 
que, attribuant  à  tels  ou  tels  des  bons 
mois  ou  dos  faits  oui  traînent  partout. 
Cejicndant  il  y  aurait  de  quoi  former, 
en  lui  accordant  l'honneur  de  la  tra- 
duction ,  une  bonne  moitié  de  volume 
des  deux  qu'il  a  consacrés  à  ses  vo\a- 
p;es,  à  ses  rencontres,  etc.  L'auteur  de 
cet  article  en  a  donné  un  ample  extrait 
dans  les  /innales  de  la  liltérature  et 
des  arts,  recueil  estimable  dont  M. 
Trouvé  était  le  principal  rédacteur.  A 
dire  vrai ,  malgré  sa  longue  carrière 
théâtrale ,  on  ne  connaît  bien  Kelly 
que  par  ce  qu'il  nous  a  appris  sur 
lui-même  dans  son  ouvrage.  Ses  succès 
au  théâtre  ont  pu  tenir  à  son  caractère 
qui  le  faisait  généralement  aimer,  à  ses 
liaisons  de  société,  enfin  au  défaut 
d'autres  talents  qui  fussent  alors  su- 
périeurs aux  siens.  Il  mourut  à  Mai  gale 
le  9  oct.  1S!2(),  dans  l'année  mcrnc  où 
avait  paru  son  livre,  et  son  corps  fut 
transporté  à  Londres  dans  le  cimetière 
Saint-Paul.  Il  avait  un  frère,  aide-dc- 
camp  de  loi  d  Wellington  en  Espagne, 
et  à  la  bataille  «le  ^^  alcrloo,  qui  avait 
été  introduit  prè.>  du  duc  par  le  talent 
qu'il  possédait,  lui  aussi,  pour  la  mu- 
sique. L — P — K. 

KELP  (Juste-Jkan)  ,  érudit 
.saxon  auquel  la  linguistique  et  l'his- 
toire doivent  de  la  reconnaissance,  na- 
quit le  17  septembre  Ki.jO,  à  Verden, 
où  son  père  était  organiste.  Il  se  ren- 
dit ,  après  avoir  fini  ses  premières 
éludes,  dans  les  écoles  de  Verden  et 
de  Minden,  à  Piinteln,  et  ensuite  à 
Kf/Tiigsberg,  où  il  ne  resta  pas  moins 
de  trois  ans  à  suivre  les  cours  acadé- 


I 


K£L 

MiM|iifs.  l«e  vaii5eaa  qui  Ir  ramfiuit,  eu 
1(»73,  fit  naufra^je  »ur  In  côlr^  de 
l'île  de  Uti;rii ,  nuis  il  se  sauva  sans 
aiilic  iluniina^r  que  la  peur,  et  quel- 
ques »fma  iirn  .iprès^il  fui  de  retour  à 
N  cftieii.  Sou  •!rv.>rin  riait  «le  faire  une 
édutjliuii  |).^i  ticiilirie ,  et  pruvisoire- 
roent  il  donna  des  leçon»  en  \  ille  ou  chez 
lui.  Mai^,  las  d'attendre,  il  eutia  dans 
radmiiii^tralinn  rt,   apièi   a\oir  rera- 

Kli  diverses  fonctions  suballernes  aux 
aillia^^es  d*Klirenl»oniu.  de  Plalten- 
bour^,  deSoldf rn  et  de  Nienbour>;,il  fut 
secrétaire  à  Kotlienl>our>;  et  à  Vfrdcn 
sucres.^1  veinent,  puK  bnilli  dans  Oltrts- 
ber;;.  I/nnaMomics  Danois,  en  171:2, 
lui  6l  reM;;ner  ie>  fonctions'peu  com- 
patibles ilan;  cette  crise  a*ec  «on  à;;e, 
et  il  ne  ciienlia  point,  quand  I?  péril 
eut  disparu,  à  recouvrer  une  position. 
Chanoine  de  Hameslo  deptii>  lon-ues 
années,  il  trouvait  dan>  le  ir^eiiu  de 
son  canouK-at,  joint  à  se>  économies, 
plus  qu'il  ni*  lui  fallait  pour  vivre.  Srs 
^oûts  avaient  tuiijours  été  ceux  d'un 
savant;  il  s'était  .spécialement  livré  h 
l'élude  d -s  antiquités  et  de  l'hisloire  de 
la  l>avse-S.i\e,  ainsi  que  du  dialecte 
germanique  qui  s'y  était  parle,  et  il 
recon>truisit  eu  partie  la  langue  des 
Qiauques  ,  un  des  peuples  de  l'an- 
cienne (iermnnie  qui  eurent  le  plus 
de  celébr!tt'.  il  a\ait  beaucoup  écrit, 
et  dans  sa  vieillev.c  encore ,  il  te- 
nait à  réaliser  la  devise  MuHus  dûs 
sine  linrtt.  Il  n'a  cependant  fait  im- 
primer que  peu  d'ou\ra^es,  ou  pluttU 
d'opuscules,  et  encore  n'ont -iU  paru 
({lie  dans  des  livres  sortis  d'une  autre 
plume  ou  dans  de^  recueils.  Kn  re- 
vanche il  laissa  divers  manuscrits  par- 
mi leN<]uels  plusieurs  sont  irn[ioilants. 
On  les  conserve  à  la  bibliothèque  dr 
Hanovre,  et  de  plusieurs  «rentre  eux 
on  a  tué  des  copies  qui  ont  clé  utiles 
aux  nombreux  compilateurs  auxquels 
nous  dc\ons  l'hisldire  do  Iiirnif  et  de 
N  crden.    Kc!p  motiriit,  doven   de  son 


KEL 


473 


cbapitie,  le  :)()  juillet  1720.  Voici  la 
liste  des  écrits  qu'il  a  mis  ou  laissé 
mettre  au  jour.  I.  Glussarii  (Maucki 
sf*fiimen  (dans  les  (Àji/rt  tutiea  ety- 
inulvgûu  de  Leibniti)  ,  Hanovre, 
1717,  in-S",  Y  part.,  p.  110-50). 
Vjc  fra>;ment  curieux  n'est  pas,  comme 
on  rima|;ine(ait  dans  notre  siècle  si 
fccond  ru  prospectus  cl  en  avorte- 
ments,  l'échantillon  d'un  ouvrage  à 
faire,  mais  l'cxtiait  d'un  travail  coro- 

f>lel  ou  prés  de  l'être,  dont  Kccai  d  a  vu 
e  manu<^crit  ^Vov.  préface  des  LuUrrl. 
elynwl.^  p.  Il)  et  dont  un  tiouve 
uiir  copie  a  la  bibliothèque  de  llam- 
boui^.  (.e  (îlossanuni  (  haut  n  um, 
dont  nul  savant  iniriix  qu'un  linguiste 
de  la  Uasse-Saxe  n'était  à  même  de 
rassembler  et  de  coordonner  le>  ma- 
tériaux ,  se  compose  presque  cxcluMve- 
mcnt  de  ceux  des  termrs  bas-saxons 
(ou  PiuttiJrutsi  h  qui  ne  sont  guère 
en  usage  que  dans  les  territoires  de 
Brème  et  de  Verden,  ou  qui  serublent 
venir  originairement  des  langues  ru- 
nique-î,  sc> thiques,  gothiques  ou  Scan- 
dinaves. 11.  hrmartfues  historiqurs 
.sur  une  lettre  iT ordination  et  d'in^ 
dulgeme  tntUi'ee  a  (m^rl  dans  la 
l  ieilit-Miin  fie  ,  Hanovre,  1723, 
in-S".  111.  I^ttre^  a  l'arr/ds^iste 
Diedrich  dr  Sliidc  ^dans  les  Mernor. 
Sind.  de  Seelen,  p.  2(K),  J-Jî».  2.10, 
300).  Ces  lettres  roulent  sur  l'hiNJoirc 
delà  ville  de  Stade.  IV.  Cimtinuaiio 
I  tttii/ofii  un  hiepisruporuni  Urcmen- 
sium  Othonitini  (dans  les  duchés  de 
li rente  et  de  Verden^  V^  rec,  p. 
109  et  suiv.).  V.  De  la  fête  de  la 
Sainte  Lance  (dans  le  même  ou\rage, 
0'  rec,  p.  VGl)  et  sui\.).  VI.  Ln  ex- 
trait de  son  Krpliratiun  des  noms 
propres  qui  se  lisent  dans  le  hrcf 
de  fondation  de  l'église  et  de  T écê- 
ché^dc  Verden  (d.ins  les  Antiquités 
et  noui^eautés  des  duchés  de  Brcnie 
et  de  Verden,  tom.  V\  p.  lO.ï  et 
suiv.).  VIL  IJu  extrait  de  son ////^rj a 


474  J^EM 

historique  sur  Brème  et  Verden  ci 
sur  les  limites  fies  deuxécêchés  (dans 
le  même  ouvraf^e,  t.  1®'",  p.  105). 
Quant  à  ses  ouvraj^es  liicdlls,  ce  sont, 
outre  le  vocabulaire  de  la  lan^^ue  des 
Chauqucs,  IVxplication  des  noms  pro- 
pres et  Taperçu  historique  cités  plus 
haut:  1"  un  Mémoire  sur  les  dîmes 
dans  les  pays  de  Brème  et  de  J^er- 
den,  et  une  autre  monographie  intitu- 
lée :  Oui,  les  territoires  de  Brème 
et  de  Verden  ont  toujours  été  un 
obseroatoire  et  un  champ  de  ba- 
taille pour  toutes  sortes  de  nations 
belligérantes;  2°  un  Fragment  sur 
le  pays  de  J  {a  de  In ,  puis  V  Hadele- 
ria Jorlunœ  pila,  puis  enSn  Hadele- 
ria  et  nunc  et  olim  optimo  jure  Bre- 
fnensis.  Ces  deux  derniers  ouvrages 
ont  été  analysés  dans  les  duchés  de 
Brème  et  de  Verden ,  6*^  rec,  p.  36 
et  il.  V Uadeleria  fortunœ  pila 
est  un  tableau  des  nombreuses  vicissi- 
tudes souffertes  par  le  pays  de  Hadeln 
et  de  ces  caprices  de  la  fortune  qui 
tant  de  fois  l^onl  réuni  au  duché  de 
Brème  pour  l'en  disjoindre,  et  l'en  ont 
disjoint  pour  l'y  réunir  de  nouveau  ; 
3"  une  Chroni(jue  du  comté  de 
Hoya  ;  4°  Fata  ottershergensia 
(analysé  aussi  dans  les  duchés  de 
Brème  et  de  Verden,  5*^  rec,  pag. 
38  et  suiv.).  Kelp  y  donne  briève- 
ment, mais  d'après  des  documents  sûrs 
et  combinés  de  main  de  maître,  l'indi- 
cation des  territoires  qui,  après  avoir 
appartenu  dans  des  temps  reculés  aux 
comtes  de  la  Wolpe,  furent  incorpo- 
rés à  l'archevcclié  de  Ijrème,  et  s'é- 
tendent notamment  sur  le  château  et  le 
territoire  d'Ottersbeig.         V — OT. 

KEMBLE  (Jlan-Piuuppi:)  , 
le  plus  célèbre  acteur  dont  s'enorgueil- 
lisse la  scène  anglaise,  naquit  le  1*^"^ 
février  1757,  à  Preston  (comté  de 
Lancastre).  Son  père,  Roger  Kcmblr, 
directeur  d'une  compagnie  nomade  qui 
exploitait  les  provinces  du  nord,  eût 


KËM 

bien  souhaité  que,  de  sa  nombreuse  fa- 
mille, ni  filles  ni  fils  ne  missent  les  pieds 
sur  les  planches;  et  il  ne  le  laissa  pa- 
raître qu'une  fois  devant  le  parterre  à 
Worcester,  dans  le  rôle  du  duc  d'York 
de  la  tragédie  de  Charles  \^^ .  L'enfant 
avait  alors  dix  ans.  Il  fut  ensuite  placé 
an  séminaire  catholique  romain  de 
Sedgeley-Park  (Stafford)  ,  car  son 
père  professait  le  catholicisme  ,  puis 
dans  un  des  collèges  de  l'université  de 
Douai.  Partout  il  fil  preuve  de  dispo- 
sitions extraordinaires  et  moissonna 
les  lauriers  scolastiques,  mcme  en  phi- 
losophie et  en  théologie.  Déjà  son 
père  croyait  le  voir  choisir  une  pro- 
fession savante  :  mais  l'uniformité  mo- 
nacale de  la  vie  du  professeur,  du 
prêtre,  ou  du  légiste,  ne  convenait 
point  à  son  humeur  ,  à  ses  habitudes 
d'enfance.  Au  collège  même,  ce  que 
maîtres  et  camarades  admiraient  le  plus 
en  lui,  c'était  la  grâce  et  la  facilité  de 
l'élocution  ,  c'était  surtout  le  débit 
oratoire  ;  déjà  l'acteur  s'était  révélé. 
Il  abandonna  donc  l'université  sans 
l'autorisation  paternelle  et  vint  débar- 
quer à  Bristol  ,  d'où  ,  sur  la  nouvelle 
que  son  père  et  sa  troupe  étaient  à 
jîrecknock  ,  il  se  rendit  en  cette  ville 
de  la  principauté  de  Galles.  Le  chef  de 
la  bande  couiique  le  reçut  très- froide- 
ment et  lui  signifia  d'aller  chercher 
fortune  ailleurs.  Les  comédiens  fuient 
moins  sévères  et  firent  entre  eux,  pour 
la  lui  remettre,  une  collecte  à  laquelle 
leur  directeur  ne  put  se  défendre  de 
contribuer  pour  une  guinée.  \]xï  peu 
moins  léger  d'argent  après  cela,  l'ex- 
séminarlste  alla  débuter  à  Wolver- 
hampion  ,  sous  Chamberlain  ;  il  n'a- 
vait que  dix-neuf  ans.  Son  premier 
rôle,  Throdose,  dans  isi  Force  de  Ta- 
/nour,  ne  fut  pas  très-rcmarqué,  mais 
dans  celui  de  Bajazet  il  eut  un  vrai 
succès  et ,  dès  ce  moment,  les  connais- 
seurs purent  lui  prédire  un  grand 
avenir.  Il  eut  cependant  encore  long- 


lemp^  à  f mirir  la  pro\  mrf  Mal  pi^  é  dp 
(  II,  il  Vf  TV.  '         '  uliam 

t  'ir*  lulniaii  t  liia- 

luiliqur  fia>l  s\  fort  (]u'uii  df  &«<  amis 
rt  lui  m  furriit  réduits,  pour  atllrrr 
le  public  ,  à  faire  de»  tour»  d'e>ca- 
raola{;f  .vjl  alla  ensuite  à  N>  orfe>ter, 
nù  du  moins  il  joua  la  rum^ie;  puis  en- 
fin, »ur  la  rrromin:)ndalion  de  &a  MPiir 
(mislriss  Siddons;  ,  il  parut  aui  tliéa- 
trr<  roKiux  de  M.inrliotrr  et  de  l.i*er- 
pool.  (\'cA  de  telle  rpo(|ue  que  date 
sa  réputation  :  plem  d'jmuur  pour  sj 
profession ,  en  embia^^sjot  toute»  le» 
p.iri:es  d'un  roup  d'iril,  il  travaillait 
en  même  temps  sa  Voix,  son  ;;e>le,  se» 
poses ,  son  costume  ;  tout  applaudi 
qu'il  était,  il  sentait  la  pos^sibilité  d'un 
mieux,  il  cherchait  i  être  plus  vrai, 
plus  profond  ,  plus  saisissant  ,  plus 
nuancé;  il  creusait  ses  n-les ,  il  ne  le» 
eludiait  pas  seulement  en  eui-meines, 
il  les  examinait  par  rapport  à  l'enseni- 
ble,  et  <c  modifiait  spontanéroenl  |M»ur 
rriix  i%er  IrsqueU  il  était  on  scène. 
I  '  t  nature  de  toutes  les  quali- 

i'  is  qui  font  briller  un   ac- 

leui ,  et  de  la  haute  inlelli;;ence  qui  f.iit 
du  hrillanl  romedien  un  ^rand  aiIiNle, 
il  poneira  encore  mieuv  les  secreis  de 
Part  dramatique  en  essarant  de  deve- 
nir auteur.  De  cette  première  tentative 
provinrent  en  peu  de  temps  une  tra- 
gédie, lirlisdirr,  et  un  poème,  Le  p<i' 
luis  lie  la  Pitir.  \j\  pièce  fut  jouée  et 
le  poème  imprimé.  Mais  bientôt  il  lui 
vint  un  repentir  :  il  racheta  tout  ce 
que  le  libraire  avait  encore  «l'exempiai- 
res  ,  et  il  n'en  resta  qu'un  tres-petil 
nombre  entre  des  mains  étrangères,  de 
sorte  que  ,  quand  ce  volume  se  montre 
«lans  les  vente»,  il  monte  à  un  prix 
fort  életé.  Celte  sévérité  pour  soi- 
même  démontre  mieux  que  nous  ne 
pourrions  le  faire  quelle  haute  idée 
kembic  se  faisait  de  la  perfection,  et  à 
quel  point  avrec  ses  dons  innés,  ses 
connaissances  acquises  et  sa  persévé- 


KEM  l'y* 

rance,  il  devait  monter.  Sur  cet  entre' 
faites,  le  vieux  Vate  \N  ilkiiison,  ce 
sardonique  et  madré  directeur  du 
théâtre  d'\oil,  lui  offrit  un  en^a^^e- 
ment  qu'il  accepta.  Le  pai terre, 
tout  difficile  qu'il  (lait  ,  lendit  justice 
au  nouvel  acteur,  et  bienlàl  s'en  en- 
ihousiaMna.  Outre  se»  rôle»  ,  Kem- 
ble  eut  un  jour  l'idée  de  déclamer 
comme  inteimède,  dans  les  eulr'actes, 
le»  plus  belles  ode»  de  (îraN ,  de  .Ma- 
son  et  de  (filins,  ou  bien  le»  histoi- 
re» de  I^fevre  et  de  Marie,  par  Ster- 
ne. Cette  nouveauté  fut  lre»-;;oùtee, 
et  Ton  vit  tous  Icn  jeunes  jjen»  »e 
prendre  de  belle  passion  pour  Sterne, 
(filins  et  (traT  :  on  eut  dit  une  Sevré 
epidcmique.  C  était  à  qui  reproiluirait 
le  mieux  la  déclamation  Ivrique  du 
(^rand  acteur,  comme  le»  Abdéritains< 
âpre»  avoir  vu  représenter  le»  Huo 
ihtiiitrs  d'Kuripide,  allaient  répétant 
des  lambeaux  de  dialo<;ue»  et  de 
clirrurs.  (Quoique  chéii  des  habitant» 
d'\orL.  kemble,  peu  de  temps  après, 
suivit  V.ite  NN'illinson  en  Kcosse , 
où,  inde[>endammenl  de  sa  renom- 
mée comnie  acteur,  il  se  6l  remar- 
quer, comme  homme  de  lettres  et  com- 
me critique,  par  wxx  morceau  qu'il  lut  en 
séance  publique,  et  ou  il  traitait  de  l'é- 
loquence sacrée  et  profane.  Il  passa 
ensuite  deux  ans  (ITN'J  et  H.');  à  Du- 
blin. I^  théâtre  de  SmocL-Allev  lui 
dut  de  fortes  receltes  ,  et  le  trafique 
Jeph-son  (/ o).  ce  nom,  ci-dessus), 
le  succès  colns:»al  de  son  (.omte  de 
JSarhonnr.  Kemble  )  jouait  le  rôle 
du  comte,  el  il  v  mit  tant  d'entraîne- 
ment, d'ame  et  d'énerpic  qu'il  sembla, 
autant  que  le  poète  lui-même,  avoir 
tiré  de  sa  tête  ce  beau  caractère.  En6n 
mislriss  Siddons  ,  toujours  la  j)remière 
lu  but,  lui  fil  avoir  un  en»ac^ement  i 
Uhirv-Ï.ane  ,  où  elle-même  était  en 
po^sesNion  de  charmer  le  public.  Il  j 
débuta  le  l*^^*^  septembre  1783,  dans 
le  rôle  A'ilamlel   qu'il  avait    rempli 


476  KEM 

avec  éclat  à  Dublin,  et  qui  resta  tou- 
jours un  de  ses  triomphes.  Jamais  le 
maintien  ,  la  physionomie  n'avaient 
rendu,  comme  les  Anglais  le  virent 
alors ,  la  terreur  relio;ieuse,  profonde 
qui  obsède,  qui  enveloppe  la  vie 
d'HamIet,  et,  quoique  quelques  anciens 
du  théâtre  murmurassent  le  nom  de 
(iarnck,  le  public  classa  de  prime- 
abord  Kenible  ,  sur  ce  débul,  au  ni- 
veau des  Irai^édiens  consommés.  Ce 
qui  n'est  pas  douteux  ,  c'est  que  tra- 
vaillant toujours  ce  rôle  favori,  il  lui 
donna  un  de^^ré  de  puissance  et  de 
perfection  tel  que  désormais  il  y  a  ris- 
que pour  un  acteur  à  s'écarter,  en  quoi 
que  ce  soit,  des  traditions  de  Kemble. 
11  ne  fut  pas  moins  heureux  dans  tous 
les  autres  rôles  tragiques  qu'il  aborda, 
et  le  suivre  pas  à  pas  dans  la  carrière 
dramatique,  ce  ne  serait  qu'enregis- 
trer des  succès,  et  toujours  des  suc- 
cès. Toutefois ,  pendant  quatre  ans 
encore,  il  ne  fut  pas  seul  chargé  des 
premiers  emplois.  Smiîh  qui  les  avait 
avant  lui  s'en  réservait  ce  qu'il  \oulait; 
les  rois  de  théâtre  sont  tout  aussi  lents 
que  les  rois  vrais  à  donner  leur  abdi- 
cation. Sa  retraite,  en  1788,  laissa  la 
place  entière  à  Kemble.  11  venait  alors 
d'unir  son  sort  à  celui  de  la  jeune  et 
jolie  veuve  de  son  camarade  (1787), 
mariage  heureux  et  assorti  dont  pour- 
tant on  a  comme  pris  à  tâche  de  tlétr  ir 
l'origine,  en  le  faisant  résulter  d\in 
calcul  indigne  de  Kemble.  Un  [)re- 
micr  ministre  anglais,  dit-on  (c'était 
lord  North)  ,  avait  cru  s'apercevoir 
que  sa  fille  était  éprise  de  Kemble, 
lequel  n'en  était  plus  à  le  savoir,  et 
qu  il  y  avait  danger.  11  demande  donc 
rendez-vous  à  l'acteur,  et  en  lui  si- 
gnifiant que  ce  caprice  n'a  point  son 
approbation,  lui  déclare  qu'il  a  pourvu 
à  toutes  les  éventualités,  et  i\\\v  quel- 
que chose  qu'ils  imaginent,  sa  fille  et 
lui,  il  est  sûr  de  déjouer  leurs  plans; 
mais  qu'il  lui  répugne  de  faire  le  mé- 


KEM 

tler  de  geôlier,  et  (jne  l'artiste  l'obli- 
gera sensiblement  en  desespérant  sa 
fille,  c'est-à-dire  en  se  mariant  immé- 
diatement à  qui  bon  lui  semblera , 
et  lui  promet  comme  indemnité  qua- 
tre mille  guinées.  Kemble  ne  met 
pas  le  grand  seigneur  à  la  porte,  au 
contraire,  il  remercie;  il  ne  se  fait 
point  donner  l'argent  d'avance  ,  11 
donc  î  un  lord  ,  un  pair  peut -il  man- 
quer de  parole  ?  il  épouse,  puis  quel- 
ques jours  après  il  demande  à  l'hom- 
me d'état  les  banknotes  ;  sur  quoi 
son  excellence  lui  rit  au  nez  et  nie 
la  dette.  Voilà  sans  doute  un  bel 
éclîantlllon  des  co'.nmérages  britanni- 
ques colportés  et  renforcés  par  les  cent 
voix  de  la  presse  ;  et  les  quatre  person- 
nages ont  chacun  un  joli  rôle,  l'artiste 
vénal,  le  ministre  fourbe,  la  noble  miss 
inflammable,  la  rivale  prise  comme  pis- 
aller,  comme  première  venue.  Malheu- 
reusement pour  riiistorielle,  les  Invrai- 
semblances qui  l'égaient  la  rendent 
plus  que  suspecte.  Le  noble  caractère 
de  l'artiste,  l'indignation  qu'il  témoi- 
gna toujours  pour  cette  anecdote,  ses 
dénégations  formelles,  verbales  et  par 
écrit  ,  au  point  qu'un  jour,  lisant  ce 
récit  dans  une  notice  sur  sa  vie,  il  in- 
scrivit en  marge  mensonge  [a  lie), 
achèvent  de  leiiwie  complètement 
inadmissible  la  tradition  telle  que 
nous  l'avons.  —  La  retraite  de  King 
suivit  de  prc.^  celle  de  Smith;  et  la 
même  année  1788  vit  Kemble  rempla- 
cer l'un  comme  chef  d'emploi  et  l'au- 
tre comme  directeur  de  Drury-ljauc. 
On  a  souvent  douté  que  le  même 
homme  [)uisse,  avec  succès,  cumuler 
deux  fonctions  si  antipathiques  en 
apparence  ,  puisque  l'une  est  artis- 
tique et  que  l'autre  est  adminis- 
trative ,  bureaucratique  ,  financière. 
Sans  entamer  ici  la  question  ,  sans 
faire  voir  que  la  force  des  choses 
amène  presque  toujours  invinciblement 
Oii  le  directeur   parmi  les  artistes,  ou 


KKM 

l»ien  un  arli«le  à  la  «liref  lion,  nouN  ci- 
Ictun»  kemblc  comme  un  des  exem- 
ples qui  irndeiil  a  prou\ei  l'iitiiilé  ilu 
rumul.  I,e  ihralrr ,  NOUS  ^^Ml  ailiuiiiK- 
Iratiuii,  prit  une  face  nouvelle.  I.a 
mise  en  scène  fui  plus  '.  .  dé- 

cor» plu>  varié*,  plus  ,    >e 

trouvèrent  en  rapport  a\cc  le  ;;ran- 
diose  du  drame,  i^  mailiim  le  laide- 
ment lelriliué  opéra  des  roiiade*  ;  le* 
anacliionisiuei  «le  costumes,  Maibrlh 
en  unifiiime  de  ;;énnal  aiii^lai*,  i^iitun 
en  ailes  de  pigeon  di^paruient  à  jamai» 
de  Drunr-l^nc,  el  sucfes»i*croent  de 
ttms  \ts  \\\t^\rrs  iropurlant&  :  ainsi , 
ta  révolution  faite  par  Talma  sur  la 
scène  française,  Kemhie  l'opérait  en 
Anj;lelerre;  et,  m.ilj;ré  tant  de  clian- 
peraents  dispendiei'i  ,  la  caisse  ne 
5*en  trouvait  pis  mal.  l/acli\ilc  de 
krtuiiîr  ne  se  borna  point  à  mener 
lir  II  nul  \t>  études  «le  l'auteur  et  les 
lra\aui  du  bureaucrate  :  aux  fatigues 
el  aux  tribulations  ;;uiivcrnrinenlales 
du  direcleur,  il  joignit  encore  l'inj^ral 
métier  d'arrangeur  et  quelquefois 
d'auteur.  Il  remit  ainsi  en  vo«ue  di- 
\ erses  pièces,  la  plupart  de  .shaLs- 
pcare  ,  qu'on  n'osait  plus  jouer  que 
rarement,  et  enrirliU  le  répertoire  de 
qrrbj'ies  nou\e.iut»*s  (Tc/j.  ci-apres  la 
bibliographie).  L'empire  de  Kemble 
sur  Drurv-I.ane  dura  de  doute  a  Irciie 
ans  ,  «auf  une  interruption  de  peu  de 
durée.  Il  abdiqua  au  bout  de  ce  temps 
(ISOI),  las  des  tracasserie^  que  nul 
n'esquive,  quelle  que  snit  sa  dexlérilé, 
lorsqu'il  faut  manier  la  j;ent  tlié.i- 
tr.ile  ,  plus  irritable  encore  que  les 
poètes.  Il  avait  d'ailleurs  envie  de  faire 
m\t  excursion  en  France  :  jamais  in- 
stant n'avait  été  plus  favorable.  Le 
traite  de  Lunéville  était  en  train  de  se 
si«;ucr,  on  r.i';;oriail  la  paix  d'Amiens. 
Son  arrivée  à  Paris  fut  annoncée  par 
les  journaux  comme  celle  d'un  souve- 
lain.  La  comédie  françai>e  lit  une  ré- 
ception magnifique  à  celui  qu'on  nom- 


KEM  477 

mait  le  Lelain  de  l'Angleterre.  Talma 
se  plut  à  conduire  partout  IMIusire 
touriste,  à  lui  -eivir  de  cicérone,  à 
lui  procurer  de-,  laielr-.  ,  pour  enrl- 
cliir  la  superbe  bibliothèque  drama- 
tique que  se  formait  l'ex-directeur  de 
DiurT-Lane;  et,  comme  il  n'est  point 
de  bonne  fêle  vans  solennité  ^astro- 
nomi<;ue  ,  il  lui  donna  un  brillant 
dîner,  suivi  d'un  plus  brillant  sou- 
per eticnie  ,  auxquels  furent  conviés 
1rs  premiers  acteurs  de  tous  \t\  \\\éi- 
lies  de  la  capitale.  C'est  \*  que  Kem- 
ble prononça  ce  mut  profond,  mais 
qui  exprime  bien  la  vanité  biitanni- 
quc  impatiente  de  toute  supériorité 
chez  d'autres  nations.  On  causait  dra- 
me et  auteurs  dramatiques,  on  exami- 
nait qui  l'emportait  du  théâtre  français 
ou  du  théâtre  an;;lais,  el  kemble  na- 
turelienierit  citait  Shakspeare  comme 
inimitable,  comme  supérieur  aux  Cor- 
neille, aux  Uacine,  aux  Voltaire,  etc. 
LU  conM\e  alors  lança  le  nom  de 
Molière.  —  ••  Molière  ,  dit  kemble, 
•«  n'est  pas  Français.  »•  —  •«  Com- 
«  ment  .'  Mnliéie  n'est  pas  Fran- 
«  çais  !  • — M  Non!  Un  jour  Diej,  vou- 
«  lant  donner  le  plaisir  de  la  comédie 
M  aux  hommes,  laissa  tomber  Molière 
M  sur  la  tetre:  il  fallait  bien  qu'il 
M  lomb.il  quelque  part  :  il  tomba  en 
«  France  ,  mais  il  n'est  pas  plus 
"  Français  qu'An;;lais,  que  («rer,  rjue 
«<  Chinoi*;  ,  que  l'éruvien.-»  kemble 
alla  ensuite  en  Rspa^ne ,  mais  il  n'y 
resta  que  peu  de  temp.>  et,  en  1803, 
il  était  de  retour  à  Londres.  I^  bien- 
Ir^t  il  acheta  pour  vin;;t-cinq  mille  li- 
vres sterling  'f'"n  <^*"1  mille  francs), 
un  sixième  du  théâtre  de  Covcrit-Gar- 
den  ;  puis,  le  directeur  I.,eu  is  avant  don- 
né sa  démission,  il  prit  le  sceptre  à  sa 
place  et,  comme  naguère  sur  l'autre 
grande  scène  de  la  capitale,  se  multi- 
pliant à  force  de  tetc  et  d'activité,  il 
divisa  son  uniteen  trois  personnes,  l'ad- 
ministrateur, l'arrangeur  el  l'acteur.  Il 


478  KEM 

eurlcliit  encore  plus  le  répertoire  de  Cu- 
vent-Garden  qu'il  n'avait  amélioré 
celui  de  Drur\-Lane.  L'adiniralion 
du  public  était  devenue  de  la  Irénésie, 
et  il  n'eùl  point  fallu  douter  à  Lon- 
dres que  Keniblc  ne  fut  le  premier  tra- 
gédien de  l'univers.  Sa  fortune,  consi- 
dérable déjà,  était  en  voie  de  s'acci  oi- 
tre  quand  tout-à-coup  le  feu  prit  au 
théâtre,  et  en  trois  heures  dévora  mu- 
railles ,  loges,  scène ,  salle ,  des  forets 
de  décors,  en  un  mot  tout  (20  sept. 
1808).  Les  propriétaires  n'étaient 
point  assurés.  Kemble  dans  ce  désas- 
tre fut  le  moins  à  plaindre.  Le  duc  de 
>iorthumberland  ,  auquel  il  avait  ja- 
dis donné  quelques  leçons  de  débit 
oratoire,  lui  prêta  spontanément,  pour 
aider  à  la  reconstruction  de  l'édifice, 
dix  mille  livres  sterlino;  (deux  cent  cin- 
quante mille  francs),  dont  il  ne  lui 
laissa  payer  que  quelques  mois  l'inté- 
rêt; puis,  quand  fut  posée  la  première 
pierre  du  nouveau  théâtre,  il  lui  ren- 
voya dans  une  lettre  l'obligation,  en 
n'exigeant  en  retour  de  ce  trait  royal 
qu'un  silence  absolu.  ÀSeuf  mois  après 
(18  septembre  1809),  le  théâtre  était 
rouvert  au  public,  mais  la  prétention 
des  directeurs  de  porter  le  prix  des 
places  du  parterre  à  quelques  pences 
plus  haut  qu'avant  le  désastre  mit  les 
iubitués  du  théâtre  en  fureur  contre 
Kemble,  qu'on  signala  comme  l'auteur 
de  celte  innovation,  et  causa  la  bur- 
lesque émeute  d'O.  V.  (initiales  d'o/J 
prire  ou  l'ancien  prix  !)  qui  se  renou- 
vela régulièrement  chaque  soir,  pendnTit 
deux  mois.  Sur  tous  les  chapeauxselisail 
O.  P.;  du  lever  à  la  chute  du  rideau,  le 
cri  d'O.  P.  empêchait  d'entendre  un 
mot  de  ce  que  disaient  les  acteurs.  Les 
insurgés  du  parterre  exéciilaieut  à  tour 
de  rôle  des  rigaudons  sur  les  bancs  ; 
et  leurs  bonds  frénétiques  donnèrent 
naissance  à  TO.  P.,  nouvelle  espèce 
de  danse  qui  prend  place  dans  l'his- 
toire de  la  chorégraphie,  entre  la  valse 


KEM 

cl  le  galop.  Boileau  et  Pope  y  eus- 
sent trouvé  le  sujet  d'une  épopée  héroV- 
comique,  aussi  riche  en  épisodes  que  le 
Lutrin  et  \tRapi  de  la  boucle  de  che- 
veux. Ces  scènes  grotesques,  qui  trans- 
portaient la  comédie  du  théâtre  dans  la 
salle  ,  n'inspirèrent  pourtant  qu'un 
court  badinage  latin  aux  muscs  anglai- 
ses :  ce  fut  y Effodiuntur  opes  irrita- 
mcnici  malorum  de  Gibb.  Enfin  la 
paix  se  fit  aux  conditions  voulues  par 
John  Bull  :  l'administration  rétablit 
l'ancien  tarif ,  et  Kemble  ,  dont  la 
popularité  avait  reçu  des  atteintes  , 
moissonna  derechef  les  applaudis  - 
sements.  L'enthousiasme  cependant 
n'était  pas  si  vif  que  par  le  passé. 
Est-ce  pour  le  ranimer,  en  se  faisant 
désirer,  que  Kemble,  à  la  fin  de  la 
saison,  quitta  Londres  pour  aller  cou- 
rir la  province  ?  Le  fait  est  que  , 
après  deux  mois  et  plus  d'absence, 
quand  il  reparut,  le  11  janvier  1814, 
sur  la  scène  de  Covent-Garden  ,  dans 
le  rôle  de  Coriolan,  il  vit  toute  l'as- 
sistance se  lever  à  son  entrée  et 
l'accueillir  par  une  triple  salve  d'ap- 
plaudissements. Il  avait  alors  cin- 
quante-sept ans.  Depuis  long-temps  il 
avait  annoncé  qu'à  soixante  il  quitte- 
rait irrémissiblement  la  carrière  qu'il 
avait  fournie  avec  tant  d'éclat.  Il  tint 
parole  :  sa  dernière  représentation  à 
Edimburgh  eut  lieu  le  20  mars,  sa 
dernière  à  Londres,  le  2.3  juin  1817. 
Cette  solennité  théâtrale  réunissait 
toutes  les  notabilités  de  l'art,  de  la 
presse,  du  barreau,  de  la  tribune  et  de 
la  haute  société  britannique  ,  les  Flax- 
man  ,  les  Lawrence ,  les  Crabbe  ,  les 
liurney,  les  Campbell,  les lieber,  etc.: 
Talma  aussi  s'y  trouva.  La  salle  était 
comble.  Ce  grand  public  était  venu 
avec  la  ferme  résolution  de  forcer 
Kemble  à  renoncer  à  la  sienne.  La 
manière  admirable  dont  il  s'accjuitta  <le 
ce  rôle  de  (Joriolan,  un  de  ses  tiiom- 
phcs,  redoubla  les  regrets.  Lors  donc 


klM 


luiirs  et  <ir 

letfnlil  uit  11  . 

ar//.'  «u  Jiire^vril  !  .Mais  Kemblc 
tint  Hon  rt  |>rt>cUiiu  sa  déciàioii  irré- 
vocable, fl  les  >|»cctatcui&  5*écoulfrrnî 
trulemcul  ci  icuiciucnt,  romme  s'ils  ve- 
naient ifa&^iktrr  à  la  inoit  û'un  ctre 
çheri.  DanN  le;>  couli>sei  pu  ai  fojer, 
autre  iiiriilriil  !  Les  camarades  île 
Krmbir,  ni  i'riiioiu ant  de  lëmui^na- 
;;ci  de  regrets  el  d'affection  ,  lui  de- 
mandaient comiui'  NOU>rnir  quelque 
|ii(*ce  de  .'OU  «tt'uine  A  ^întt^:^\*^  il 
lai>^a  >rN  ^a■l.'.ll^J.  a  i         '  •  son 

nuMichmi ,  cl  U  ;uM.tle      v  "<^  !"• 

jura  de  le  garder  plu^  tidelement  que 
Desdcmona  celui  d'OtlirlIu.  Kn  re- 
vandie  ceux-ri  rcsoluieiit  de  lui  don- 
ner un  supe  !  •  -  i!'ar;;enltrie,  et,  à 
cet  effet,  il  i.i  le  mncouii  de 

tous  le^  arp  leurs  de  Kera- 

blf,   et   oi^  ne  souscription 

dont  (iiir  |<j: '..c  puuiUnt  s'évapora  en 
lin  nin^M't  que  dincr  d'adieu  {'11  juin), 
<j  lit    de   leur    présence   les 

Il  ex,  d'L^rcinont,  de  Slair, 

d  ()s>oi)  ,  de  l.auderdale,  et  où  au 
milieu  des  toa^t  furent  débiles  des  vers 
a  la  gloire  de  Kemble.  On  peut  liie 
dans  les  Œu^Trs  de  Campbell  les 
strophes  qu'il  adressa  en  cet  ini^tant 
a  l'illustre  tia;;édien  (1  .  La  vie  de 
Kcnible  depuL>  ce  temps  iruffre  plui 
rieu  de  remarquable.  On  a  dit  que  les 
acteurs  meurent  deux  lo.>,  la  prenne,  e 
lorsqu'ils  abandonnent  le  théâtre,  la 
>econde  quand  l  aine  quitte  le  corps. 
Lu  ellel,  après  la  vie  elincclaiite  de  la 
scène  ,  qu'est-ce  que  la  retraite  opu- 
lente et  paisible  ou  va  Gnir  le  {;rand 
artiste  dramatique  .'  Qu'est  ce  en  "cné- 
ral  que  le  palais  où  vit  obscur  et  dé- 
couronné le  souvi  rain  qui  a  déposé  sa 
couronne.  .\pre>  ces  solennels  adieux  au 
théâtre,  Kemble  alla  soiiiner  à  Toolouse 


KEM  47» 

un  a^tliiuc  qui  depuis  lon^-trnipb  cou- 
prome!!.!  !     a   >ante.    Il   ne  revint  à 
c  fui»  pour  mettre  uidie 
I  irintérèt  et  pour  vendre 

ta  bibliolhr  |uc ,  remarquable  surtout 
par  une  tiche  collrciion  de  pièces  an- 

f;laises  et  autres,  ainsi  aue  «tes  luis  rc> 
atives  au  tlieatre  :  la  collection  entière 
fut  acquise  par  le  duc  de  l)e>un>hirc, 
en  '        1S2().  Il  bi   donation,  à 

so!  lies,  de  <»a  paît  de  pro- 

pne.c    lie    (  évaluée 

alors  à   cinqt.  stetlin;; 

(nu  douze  cent  m.  .  c  francs] 

au  heu  de  deux  <•  mie  mille. 

K érable  cependant  ne  passait  pas  pour 
riche,  c'est-à-tlire  qu'aprc^  avoir  tenu 
pendant  plus  de  trente  ans  les  pre- 
miers rôles,  et  avoir  administré  les 
deux  piemiers  théalrts  de  la  capitale, 
il  eût  pu  lire  beaucoup  plus  riche  qu'il 
ne  l'était  :  sa  vie  ^landiose,  sa  hbé- 
ralité,  t!'      '  -  .tables  avaient 

eu  j;rar,  >es  pioGts  et 

ses  i^aïus.  il  en  jv4:i  .i»ei  encoie  cc- 
peiiiianl  pour  nioTi'rr'  a  S4in  ficrc  une 
^ciieroMle  ic  ,!   pour  garder 

apie>  cela  do    ,  laidement  sur 

le  continent  ^au  moins  deux  mille  li- 
tres sterling  ou  cinquante  mille  fianci 
de  rente).  Il  partit  ensuite  et,  après 
un  cuiiit  séjour  en  liance,  pendant 
lequel  il  plaça  ses  fonds  d.ms  les  ren- 
tes françaises  ,  et  rendit  à  Talma  , 
jouant  dans  .  Itiuilic,  les  applaudisse- 
ments qu'il  en  avait  reçus  dans  i.orio- 
Lui,  il  s'établit  aux  enviions  de  Lau- 
sanne, daiis  la   delicieise  maison   de 


(i}  PhJ*  of  tbr  Britisb  «Ufe,  et«. 


»■    Krr'-   -    ■ 1     ..    .'      ,      ,,,ni  ,Je 

•e  irtti«r  nrr.  a  fait 

«H»"  »l--n  .  -   ;;  ih'atr 

Je  ''  .-fc  , 

K  ■   soi^ 

frr  •  lifi    |>r<>cnt, 

m»  .  j   et"  trllpiuent 

MrK  .■  qui  lui  lraii»iHet 

une  r..rtui.r  ii  coiinJ"  f  bl»-  qu  il  eu  a  prrdu 
la  ptroir;  r:  jr^  deux  frerr»  Sout  rrtli-s  pnid.int 
<]«ir|i|ue  i-iii|>»  il,in«  les  bras  l'un  de  l'^m^ra 
aTant  qui  Cliarles  ait  po  prntioncrr  quelqaei 
dota  pour  cipntncr  u  recooiiaiMaoca. 


48o 


KEM 


Beauslte,  où  sa  vie  se  partageait  entre 
la  lecture  et  les  soins  du  jartlinap;e. 
Eu  1S22  il  eut  l'idée  de  visiter  l'Ita- 
lie, mais  il  eut  le  tort  de  ciioisir  l'ar- 
ritMe-saif-on  pour  ce  voya^^e  qui  fut 
fatal  à  sa  santé,  \jana  ratlioa  de 
l\ome  le  frappa  si  n;rièvcnieFit  (jue  son 
médecin  lui  commanda  péremptoire- 
ment de  revenir  à  Lausanne.  Il  sembla 
s'y  rétablir  ,  mais  sa  convalescence  ne 
fut  jamais  complète  ;  et  bientôt  il  fut 
frappé  d'une  apoplexie  qui  l'enleva 
en  deux  jours,  24-26  février  1823. 
Kemble  avait  beaucoup  de  Talma  pour 
le  caractère,  et  l'on  ne  l'eut  s'étonner 
qu'ils  aient  eu  l'un  poui  l'autre  une  au)i- 
tié  vive.  Kemble  lisait  un  cliaiiitre  de  la 
liible  tous  les  matins,  et  plein  de  cette 
lecture  il  vivait  en  quelque  sorte  dans 
un  monde  surnaturel  et  supérieur.  ])e 
là  ce  mot  de  Talma  sur  son  ami.  «  Il 
«  est  beau  comme  Isaïe!  »  11  savait 
pourtant  descendre  parfois  de  ces  sphè- 
res f^randioses.  Des  viriles  inspirations 
du  patriotisme  ,  des  fiers  accents  tle 
l'ambition,  il  passait  à  l'expression  de 
la  tendresse,  de  l'affliction,  des  values 
et  lonr^ues  rêveries,  ou  plutôt  il  avait 
l'art  de  fondre  cette  expression  de  fé- 
minine faiblesse  avec  les  tons  vi<^ou- 
reux  de  passions  plus  altières.  Quand 
il  en  était  ainsi,  quand  le  Dieu  se  fai- 
sait homme,  quand  la  chair  saio;nait  et 
que  l'os  souffrait,  en  dépit  de  l'imper- 
turbabilité  de  l'àme  qu'il  ne  faut  pas 
prendre  pour  l'impassibilité  du  cœur, 
oh  !  alors  il  y  avait  dans  ces  plaintes  de 
géant ,  dans  ces  mâles  soupirs,  dans 
cette  mélancolie  d'une  àme  profonde 
comme  la  mer  ,  comme  l'infini  ,  une 
suavité,  une  sonorilé  «pie  rien  ne  [»cut 
exprimer.  C'est  là  ce  qui  le  rendait 
si  merveilleusement  inimitable  dans 
l'Etranger  ;  dans  le  (Jraddork  de 
la  Heine  de  la  fortune  ,  ou  il  unis- 
sait la  mélancolie  pensive  et  douce 
à  la  plus  persuasive  vérité ,  et  où  sous 
les  formes  les  plu«;  humbles  il  semblait 


KEM 

une  créature  supérieure  à  l'humanité  ; 
dans  le  roi  Lear,  lorsqu'il  exhalait  ces 
cris  du  cœur,  Lear,  nature,  Lear  !  de- 
dans Caton,  quand  le  républicain,  ému 
dans  ses  entrailles  d'époux,  mais  com- 
primant son  frémissement ,  faisait  fré- 
mir tout  l'auditoire ,  avec  ces  trois 
mots,  Vurtia  is  dead;  dans  llamlcl, 
auquel  pourtant  il  savait  conserver  le 
brillant  du  jeune  homme  et  l'énergie 
de  l'adulte  ,  mais  où  il  faisait  prédo- 
miner la  fibre  rêveuse  d'une  àme  qui 
se  laisse  aller  à  la  dérive  ,  en  proie 
à  la  langueur,  à  l'indifférence,  à  l'ir- 
lésolution,  à  la  vue  rétrospective  de 
ce  qui  fut ,  de  ce  qu'on  eut  pu  em- 
pêcher et  de  ce  qu'on  ne  peut  ré- 
parer. De  même  les  rôles  énergiques 
de  Cor/'ulan ,  de  Bruius  ,  de  lord 
Toivnley ,  du  cardinal  TVolsey ,  de 
Macbeth  étaient  au  nombre  de  ses 
triomphes.  Dans  celui  du  roi  Jean  , 
rôle  ingrat  et  odieux  pourtant  à  quel- 
ques égards  ,  il  produisait  une  im- 
pression poignante  et  profonde.  Il 
réussissait  un  peu  moins  dans  celui  de 
Richard  III  ;  il  s'y  montrait  trop  re- 
cueilli, trop  égal  ;  on  sentait  qu'il  avait 
besoin  d'effort ,  de  contrainte  pour 
exprimer  ,  à  s'y  méprendre,  un  être 
aussi  antipathique  à  lui  que  l'horrible 
duc  de  (ïlocester  :  il  l'exprimait  néan- 
moins, mais  cette  contrainte  répandait 
sur  le  rôle  un  air  de  calme  et  d'homogé- 
néité, bien  loin  de  cette  fougue  élec- 
trique, de  cette  mobilité  de  la  trombe 
qui  dévaste  et  qui  dévore,  caractère  de 
l'ambitieux  tyran  qui  clôt  l'èie  des 
deux  Pioses.  Et  pourtant  lorscju'il  ne 
s'agissait  que  de  la  flexibilité  compa- 
tible avec  la  vertu  ou  le  désir  de  la 
vertu,  il  redevenait  l'acteur  sans  égal. 
C'est  ainsi  qu'il  communitpiait  aux 
vives  mais  honnêtes  physionomies  de 
llotspur  et  à'Ocàwien  un  feu,  un  pi- 
quant dont  rarement  la  scène  an- 
glaise a  fourni  des  exemples.  On  com- 
prend qu'avec  de  telles  qualités  il  de- 


lEM 


KRM 


i.si 


>ail  ei(  lUr  dans  Ir  iiaiii  ronii<]ur  , 
tint  (|uM  lie  ^'a^,t^vall  |i;iN  U'rx|iiiinrr 
Irtlrtljiii  amer,  ic  %rrplici&inr  luiiiriu, 
le  nraiirnirnl  dial)oii<]uc  de  Mé|>lii5to- 
|)lirl(-N.  Mjii  roiiiiiie  le^  rMct  de  liant 
comique  ^oul  rarr>,  il  iaut  d:ic  qu'en 
général  la  comédie  conveiiail  peu  à  son 
talent.  C^mme  homme  du  monde,  et 
dan»  le>.  relation*  fanuline»  de  la  ^ie, 
kemlile  était  aiiiul)lr,  obligeant  et  jo- 
Mal.  IVu  d'adiuiiii^li aleurs  de  tlieàtrc 
ont  moins  méconlenir  l'irascible  trou- 
{»eau  des  acteurs  ,  auteurs  et  composi- 
teurs. Il  faisait  collection  de^  caiicatu- 
res  publiées  sur  son  compte  et  les  mon- 
trait \oloiilins  a  i|iii  souhaitait  les\oir. 
On  a  \u  qu'en  177K  il  fit  jouer  à 
N  orL  une  tra^rJie  de  tirlisttirr  :  l'an- 
néc  soixante  lut  iepié.senlée  5ur  le  mê- 
me théâtre  hi  trminr  ufjttifr  ,  farce 
de  Na  fa^on  ,  que  plus  tard  il  remania 
cl  donna,  sons  le  tilie  de  l'rojr/s  de 
Jeinnif^  à  Drur>-Line.  Kn  1T80  il 
publia  un  petit  volume  de  poesie.s  que 
par  la  suite,  comme  nous  l'avons  dit,  il 
I élira  de  la  circulation,  l  n  peu  aprèt 
son  début  à  I^iidrc-^  ,  comme  un  pou 
avant  sa  retraite  de  celle*  ville  ,  il  donna 
deux  couits  eN5ais  sur  Macl>elh,  inlitii- 
Irs,  l'un  \uui'rl r.mmrn  tU  Macbeth 
(  Macbetli  lecoiisidered  )  ,  l^ndres  , 
ITStl.  l'autre  Muihrth  et  Hithurd 
y//,  ibid.,  lKl7,-r.in-8".  Il  refondit 
ou  retouclia  profondément  di\er>es 
pièces  qui,  rajeunies  de  forme  et  de 
titre,  eurent  un  succès  qu'elles  ne  pou- 
vaient plus  se  promettre.  I^  comédie 
des  Erreur X  devint  ainsi  Uh  !  cest 
impossiide,  1780  ;  Tttni  rtieu.r  nest 
pas  tant  pis,  de  Uickerstaff,  (ut  mcta- 
iMorphosc  en  une  farce  intitulée  le 
r anneau  ,  17S8;  des  lillettes  de 
campagne^  de  Charles  Johnson,  il  lit 
la  co:nédle  de  la  Ferme  ;\i  première 
jiaitie  du  Corsaire,  de  mslnss  liehn, 
fournit  Wlnwur  flw.r  mille  masques^ 
1790;  une  panloraiine  de  la  composi- 
tion de  d'Kjîvilla    fui  le  canevas  da 


Programme  iF  Alex  andre-h'Grand , 
179.'j  ;  et  lis  Inmnts  rumiipies,  de 
Cibber,  irj.aïuient  nu  lhe.\!re  déguisés 
en  CeUtdon  et  Flurimel,  ou  Hiise 
ronire  ruse  ^ihe  llapp>  coonter- 
plot).  F.nlin  il  arraii-ea  et  adapta 
au&  eii^ence»  du  moderne  théâtre,  sans 
les  retravailler  autant  ,  beaucoup  de 
comédies  et  de  tra;;edies  de  ShaLs- 
peare  {llamlet,  Maif>et/i,  le  roi 
lu^r  ,  le  roi  Jean  ,  Jules- (Irsar, 
(.'oriolan,  les  deux  parties  de  Henri 
Il  ,  Henri  r,  Henri  UH,  Othello, 
licmieo  et  Juliette  ,  (Jymùeline  ,  la 
Tempête,  (Utnime  vous  iHMdrei, 
i/est  ga^ue!  c'est  hien  joué  [K\W 
v^ell  that  end>  %tell;  ;  les  Deux  gen- 
tilshommes de  /  erune  ,  le  Mar^ 
rhand  de  /  mise,  la  Douzième  nuit^ 
le  (^onte  d'ilix'er,  les  Joyeuses  com- 
mères de  Windsor,  liien  du  train 
pour  rien.  Poids  /nnir  fpoids,  et  quel- 
que» autre»  encore,  comme  (.alon,  le- 
nise  sauifêe,  de  Mon/ort,  ht  liexHin- 
che  ,  le  Faux  ami,  le  Marchand 
Jourhe,  le  Marchand  loyal,  la  l  oie 
du  monde, la  Fille  if  Honneur,  Sou- 
veau  moyen  de  payer  les  vieilles 
dettes,  etc  ,  etc.  On  a  publié  (en  an- 
;:lais^  des  Mémoires  sur  la  vie  de 
J.-Ph.  Kemhle,  l^ndre.s  182:>,  2 
vol.  in-8  '.  F — OT. 

KK.MP  (  JFv!<-TMKoponE  Van 
lier)  ,  missionnaire  protestant  ,  né  ï 
Uotterdam  en  17V8,  était  fils  du  pas- 
teur de  celte  ville.  A  Tuniversilé  de 
I.evde  il  étudia  non  seulement  la  théo- 
loj;ie  et  les  lanj^ues  anciennes  ,  mai» 
encore  la  médecine,  et  même  la  tacti- 
que, comme  par  un  pressentiment  des 
diverses  destinées  qui  rallendaieiit.  Il 
entra  d'abord  dans  l'armée,  et  fut  lieu- 
tenant de  drapions.  Puis  s'élant  marié, 
il  alundonna  la  rnrricrc  militaire,  et 
alla  étudier  la  médecine  à  Ldimbour^^, 
T  prit  les  deprc^  de  docteur,  et  publia 
dans  cette  ville  un  ouvra:;e  latin  sur 
la  cosmologie,  intitulé  :  Parmeuides, 


t.xviii. 


3i 


^Hi 


KEM 


KEM 


De  retour  Jans  sa  patrie  ,  il  s'éial.lit 
foiiirin'  niétleclii  à  Mldilelliourr;.  Kri 
1791,  il  renonça  aussi  à  cet  état,  et 
se  relira  avec  sa  famille  à  Dortreclit. 
Là,  ayant  fait  dans  la  même  année, 
avec  sa  femme  et  sa  fille,  une  partie  de 
plaisir  dans  un  bateau ,  sur  la  rivière 
de  Merwede,  il  eut  le  malheur  d'es- 
suyer une  rafiale  qui  fil  chavirer  le 
bateau.  Sa  femme  et  sa  fille  se  novè- 
ronl;il  ne  se  sauva  lui-même  qu'en 
s'atcrochant  au  bateau,  et  en  y  res- 
tant suspendu 'jusqu'à  ce  qu'on  vînt  à 
son  secours.  ])e[niis  lors  son  esprit, 
frappé  de  ce  désastre,  se  tourna  vers  la 
reIij:;ion.  Il  écrivit  un  ouvraj^e  intitulé  : 
La  Tlièodicée  dit  suint  Paul,  qui  fut 
mise  au  jour  parle  professeur Kroin  en 
1798.  Van  der  Kemp,  étant  résolu 
d'aller  prêcher  l'Evangile  aux  peuples 
païens,  olfrit  ses  services 'i  la  société 
lies  missions  de  Londres  ,  se  fit  sa- 
crer ,  et  reçut  l'ordre  de  se  rendre  • 
au  (>ap  de  lionne- Espérance  pour 
convertir  les  Iloltentots  au  christia-^ 
nismc.  Avant  de  partir,  il  apprit  le 
métier  de  briquolier,  afm  de  [louvoir 
ensei;;ner  à  ses  colons  iuturs  l'art  de 
construire  des  habitations  commo- 
des. Il  s'embarqua  vers  la  fin  de 
1798,  avec  trois  aides;  et,  arrivé 
dans  la  colonie,  il  consentit  à  instruire 
les  lloltenlols  du  district  de  Graaf- 
iiouicl!.  (Cependant  il  obtint  d'un 
roi  cafre  un  terrain  pour  y  fonder 
une  colonie  clirélienne  dont  il  jeta 
li;.i  fondeiiM'nts  ;  mais  l'état  de  troubles 
dans  lequel  se  trouvait  al>)rs  la  colonie, 
ne  lui  permit  pas  de  continuer  sf)n 
projet.  Iies.saya  plus  tard  d'instruire  et 
de  convertir  dc>  Iloltentots  à  (Jiraaf- 
licynnlt;  ce  qui  fut  très  mal  vu  par 
les  colons  hollandais,  lesquels  regar- 
daient comme  dangereux  «le  trop  éclai- 
rer les  indigènes  qu'ils  ne  trouvaient 
déjà  que  trop  enclins  à  résister  à  leur 
domination.  Les  méconlents  firent  une 
allaque  sur  la  ville,  et  Van  der  kemp 


faillit  être  tué  par  ces  furieux.  Cepen- 
dant le  "ouverneur-'iénéral  Dundas 
engagea  les  missionnaires  às'élabhr  sur 
la  frontière  de  la  colonie,  veis  la  baie 
de  Lagoa.  En  conséquence.  Van  der 
Kemp  alla,  en  1802,  avec  ses  aides  et 
avec  cent  neuf  liottentots  jeter  les  fon- 
dements de  la  mission  de  Bethelsdorp 
dans  un  terrain  sec  et  aride,  le  plus 
mauvais  peut-être  de  toute  la  colonie. 
Le  nombre  dos  colons  augmenta  bien- 
tôt jusqu'à  deux  cent  vingt-deux;  ^  an 
der  Kemp  fit  bâtir  des  huttes  et  une 
maison  de  prière.  Les  colons  conti- 
nuèrent à  traiter  hostilement  les  Hot- 
tentots  réunis  dans  ce  Heu,  et  accusèrent 
le  chef  de  la  mission  de  les  soulever 
contre  les  Européens.  Le  gouver- 
neur hollandais  Janssens  ,  cédant  à 
leurs  clameurs,  appela  les  missionnai- 
res au  Cap,  pour  qu'ils  eussent  à  se 
défendre  sur  les  accusations  portées 
contre  eux.  Ils  y  furent  retenus  jus- 
qu'à l'arrivée  du  gouverneur  anglais 
jjaird,  en  180G,  qui  laissa  repartir  Van 
der  Kemp  potu- Bethelsdorp.  Il  résulta 
pourtant  d'un  rapport  que  le  gouver- 
nement ordonna  en  1809,  sur  l'état 
de  la  mission,  que  son  chef  avait  eu  peu 
de  succès  dans  ses  eftorts  pour  civiliser 
les  indigènes.  Le  voyageur  allemand 
Lichtenstein,  qui  visita  lîctliclsdorp, 
en  trace  une  esquis>e  peu  Oalteuse.  I^a 
mission  était  «le  l'aspect  le  plus  miséra- 
ble, et  Van  der  Kemp  avait  mis  plus 
de  soin  à  faire  prier  et  chanter  les 
liottentots  qu'à  les  habituer  au  tra- 
vail, et  à  leur  ins[.irer  le  goût  ile  l'in- 
dustrie. Abandonné  des  autorités,  haï 
par  les  colons  ,  il  se  rendit  de  nou- 
veau au  Ca[)  ;.niais  il  y  succomba  aux 
fatigues  et  aux  conirariétés  le  7  déc. 
1811.  La  société  des  missions  à  Lon- 
dres publia  des  mémoires  sur  sa  vie 
laborieuse.  Philip  qui  fut  envoyé  en 
1818  au  Cap  ,  comme  inspecteur  , 
et  qui  visita  la  mission  ,  la  trouva 
(Uns    un    état    plus    satisfaisant    que 


KRM 

KirlilfQSlein.  Tnutffni«  HfttirUdnrp 
rH  rt*\é  un  pau>re  hameau,  ci  d'au 
Un  nli«sin|)^  ont  fait  oiiljlier  rrllr- 
ci.  l'Inlip  juge  h  «.firnre  cl  le  r.ir.ic- 
Ifre  de  N  an  dci  Komp  d  une  ma- 
nière bien  plu>  ra>orable  ()uc  ne  l'a- 
rail  fait  l.irlilen  Inii.  «  Van  der 
Kenip,  dit  le  missionnaire  anglais  , 
était  un  homme  Irèircma!  qiulilr  ;  à 
de«  talent*  d'un  ordre  rle^ê  ,  il  joi- 
piait  dc<^  (|'ialit^s  morale»  et  inlrllef- 
luelles    (|ui    le    rendaient   capable   de 

f;randes  rho»e«.  H  connai«^it  seize 
an<^e«,  étant  doue  d'une  facil  te  éton- 
nante pour  le«  apprendre.  IVndant 
M>n  coml  séjour  chci  \efi  (lilre*,  il 
r    !  un    esvai    de   oramniaiie    de 

l<  •  .  et  dressa   un  \orabulaire 

de  pic^  lie  huitcentA  mots.  Il  était  bon 
matliciiiatirien  ,  et  ,  en  outre,  tcrs> 
▼erse  dans  la  médecine,  la  chimie,  l'a- 
natomie  citniparce  et  l'hi^loire  natu- 
reile.  Se  dexouant  a  riiumanité  -ioiif- 
frante  ,  il  prit  la  defe ii.se  dos  llutten- 
lots  avec  tant  de  chaleur  t\  de  persé- 
vérance que,  si  les  missionnaire*  ont 
pu  continuer  leurs  travaux,  c'e>t  à  lui 
qu'ils  en  ont  Tobliii^ation.  Souvent  le^ 
lettres  qu'il  adre«»ait  aux  autorités 
él.iient  empreintes  de  son  ind^riation, 
et  pouvaient  paraître  peu  mcsinécs.  Il 
s'était  fait  l>e.iucoup  d'ennemis  ;  quand 
j'arrivai  en  .Vfnque,  les  clameurs  con- 
tre Van  dcr  Kemp  étaient  si  lorlcs  et 
«i  générales ,  les  récits  fâcheux  sur 
son  caractère  étaient  si  nombreux  ,  si 
détailles  et  paraissaient  s\  aulheitli- 
ques  ,  qu'il  se  passa  plus  de  dix- huit 
mois  avant  que  mes  préventions  se  fus- 
sent effacées  (1).  >»  Outre  les  récits  des 
vova^cs  que  nous  aTois  cites,  on  peut 
consulter  sur  Van  der  Kemp  le  3"  vol. 
des  Trunsdctiuns  de  la  socirté  des 
missions  de  Londres.  D — G 


(l)   Philip,   Hfirmr<hfi  m  S^ulk  Afn<^  ,  Loo- 
dre*  .  i8îH.  —  U  ait  kcaacr,  llttoirt  grntrvlr  dn 
ti,  Parit,  iVlo,  lom.  Xl\. 


KEM 


/«83 


krMi'R  (Jf\n),  Anf^laift  remar- 
quable p.ir  >r>  talents  et  sa  facilité, 
naquit  a  Dcptfnrd  le.f  V  avril  174N. 
Sa  famille  que  des  ^éiiéalof^tes  plus 
om  moins  phusibles  font  remonter  jus- 
qu'aux Ah^lii-Saxons,  s'était,  dit-on, 
alliée  plu  eurs  fois  aux  l*Liitat;enel8 
et  aux  Ooiirtcnev  du  Devonshire,  et 
comptait  parmi  ses  illustrai  ions  le  cé- 
lèbre Jean  kenipe ,  atdiCNèque  de 
r^nlcrburv  ,  et  cardinal  sous  Henri 
NUI  Son  père,  à  qui  la  protection 
du  duc  de  New-CÂlIe  avait  valu 
le  poste  lucratif  de  commisuire  du 
bill^n,  a  la  Monnaie,  avait  ainsi  le 
*  maniement  de  plu.ieiirs  millions  par 
an.  et,  riche  déjj,  il   acquit  encore  tie 

3uoi  joindre  i  sa  délicieuse  maison 
e  CheUea  les  superbes  jardins  da 
haiicla^h,  et  de  quoi  reunir  i  sa  ta- 
ble, splendjdemnit  servie,  de»  artistes, 
des  i^eiis  du  monde,  des  hommes  poli» 
tiques,  de>  femmes  elr^antes.  |j  >e- 
naicnt  les  .Si;ibb,  les  Dixon,  les  Hom- 
nev ,  l'infortuné  poêle  Smart,  le 
révérend  .M.  Jakson  ,  qui  sut  et  ne  dit 
pas  le  secret  des  Lettres  de  Junius, 
et  la  jolie  lad\  llamer,  sœur  du  coni- 
missatie  du  billon  ,  moins  jolie  pour- 
tant  que  la  seconde  femme  de  son 
frère,  lni^s  Met  ton,  la  plus  charmante 
personne  des  tiois  royaumes,  suivant 
le  portraitiste  Kumne\  dont  le  pin- 
C4'au  nttiis  a  conservé  ses  traits.  Miss 
Merton  devint  fatale  au  jeune  Kerape. 
\euNcdu  père  de  celui-ci  '177!^,  elle 
hérita  de  la  plus  ;;i  ande  partie  de  sa  for- 
tune et  en  eut  non  l'usufruit ,  mais  la 
propriété;  puis  elle  épousa  en  secondes 
noces  le  graveur  Dixon.  Heureuse- 
ment le  jeune  homme  obtint,  avec  la 
plus  faible  partie  de  l'hérila^e,  la  sur- 
vivance de  la  charge  dans  laquelle  s'é- 
tait enrichi  son  père.  Au  milieu  de  la 
société  brillante  et  choisie  que  rassem- 
blait le  sal(»n  paternel,  il  avait  puii-**^ 
nn  f;ont  vif  pour  les  beaux-arts  et  il 
left  avait  cultivés  avec  succès.  Il  excel- 


484 


KEM 


lait  sur  la  llute  et  il  adoucissait,  en 
lilant  (les  sons  njoclleux  et  lentli  es ,  la 
sombre  mélancolie  de  Smart,  qui  écou- 
tait en  pleurant  ses  mélodies  favorites 
exécutées  par  Kempe,  et  qui  écrivait 
ensuite  quelques-unes  de  ces  li;];nes 
plaintives  et  rêveuses  qui  semblent 
mouillées  de  larmes.  Green  lui  fit  ca- 
deau du  clavecin,  meuble  essentiel  de 
la  chambre  à  coucher  de  Haendel,  qui 
tant  de  fois  avait  rompu  son  sommeil 
au  milieu  de  la  nuit,  pour  y  laisser  cou- 
rir sur  les  touches  avec  ses  doif2;ts  les 
idées  écloses  en  son^^e  dans  son  imagi- 
nation. Il  peignit  sur  les  originaux  de 
ïiodge,  déposés  à  l'amirauté,  les  vues 
des  diverses  contrées  découvertes  par 
Furneaux,  Byron  et  Cook.  Il  mode- 
lait avec  élégance  des  fleurs,  des  fruits, 
des  animaux,  et  c'est  lui  qui  fit  les 
sculptures  des  belles  orgues  de  l'é- 
glise de  ^Yrexham ,  ainsi  que  celles 
de  plusieurs  autres  orgues  exécutées 
par  Green.  De  quatre  enfants  qu'il  eut 
deux  seulement  lui  survécurent  :  sa 
fdle,  mistriss  Slothar  (depuis  nnstriss 
J>ray),  s'est  fait  connaître  par  ses  Let- 
tres de  Nonniindie  et  de  Bretagne^ 
avant  d'épouser  le  vicaiie  de  Tavis- 
tock  ,  connu  lui-même  par  des  5^/-- 
mons  remarquables  et  par  d'élégantes 
poésies,  lyriques.  Jean  Kempe  mourut 
1er'"  juin  1823.  P— ot. 

KEMPER  (.lEAN-MELcmon)  , 
né  le  2G  avril  177G,  à  Amsterdam, 
reçut  sa  première  éducation  chez  son 
aïeule  maternelle  (jui  vivait  foi  t  retirée 
à  Jlarlem.  Cette  femme  respectable  se 
plut  à  développer  les  inclinations  ver- 
tueuses qu'elle  aper(;ul  en  lui.  J.e  jeune 
Ivemper,  après  avoir  épuisé  toutes  les 
ressources  qu'offrait,  pour  l'étude  des 
lettres,  l'école  latine  de  Harlem,  alla 
perfectionner  son  instruction  dans  sa 
ville  natale  ,  sous  les  professeurs  Van 
^^nimcrcn  et  VVyttenbach;  il  fut  bien- 
tol  au  nombre  de  leurs  élèves  les  plus 
distingues.  Le  savant  Gras,  dont  il  de- 


KEM 

vint  l'ami,  fut  son  professeur  de  droit. 
La  dissertation  intitulée:  De  juriseun- 
sidtorum  romanunim  principio  , 
(jiiod  contra  honos  mores  ficit,  id 
jure  rat  uni  esse  non  oporterc  ,  qu'il 
soutint  de  la  manière  la  plus  brillante, 
lui  valut  le  grade  de  docteur  en  droit  à 
l'université  de  Leyde,  en  179G.  Ses 
compatriotes  l'avant  engagé  à  venir 
exercer  chez  eux  la  profession  d'avocat, 
il  y  consentit ,  mais  avec  le  désir  de  se 
livrer  par  la  suite  à  la  carrière  de  l'en- 
seignement. La  Hollande,  entraînée 
dans  la  tourmente  politique  qui  me- 
naçait l'Europe,  était  devenue  le  théâ- 
►  tre  de  continuelles  agitations.  Partisan 
d'une  sage  liberté,  mais  ennemi  des 
démagogues,  Kemper  soutint  contre 
eux  plus  d'une  lutte.  Aussi  ne  fut-ce 
qu'au  triomphe  des  principes  d'une 
salutaire  modération,  en  1799,  qu'il 
dut  la  chaire  de  droit  civil  et  naturel  à 
Hardervvyck.  Il  l'occupa  jusqu'en 
1806,  que  Gras  manifesta  le  vœu  d'ê- 
tre remplacé  par  lui  pour  la  leçon  de 
droit  civil  à  l'Athénée  d'Amsterdam. 
Gédant  aux  plus  flatteuses  instances,  il 
alla  professer  à  l'université  de  Leyde, 
en  1809,  le  droit  naturel  et  le  droit 
des  gens.  H  donna,  l'année  suivante, 
sous  le  règne  de  Louis  lionaparle,  une 
édition  du  Code  criminel  de  la  lloU 
lande^  avec  une  introduction  et  un  com- 
mentaire qui  lui  méritèrent  les  suffra- 
ges de  tout  le  barreau.  L'indépendance, 
nationale  avait  toujouis  été  pour  Kem- 
per un  véritable  objet  de  culte,  et  dès 
l'année  180G,  dans  le  Jieciteil  de  let- 
tres hollandaises j  qui,  publié  sous  le 
voile  de  l'anonyme  par  un  libraire 
d'Amsterdam,  iû  infiniment  de  bruit, 
il  se  prononça  contre  rinfluence  que 
le  gouvernement  français  cherchnil  à 
prendre  sur  la  république  bat  ave.  Son 
desespoir  fut  au  comble  lorsqu'il  vit  sa 
patrie  englobée  dans  le  vaste  empire 
de  Napoléon.  Il  conçut,  après  la  dé- 
sastreuse campagne  dç  Kussie,  le  pro- 


KK.M 

1^1  «l>mpl4>m  *l  M)ii  ascentUitl  -m  |j 
•  N.'N  nomhlfo^(s  iclaiioi»  à 
i  ei   fcl    f!al   Je  c)i05fs.    Ij 

baUiiic  lie  Lrt|i%icL  arciut  ses  r»|>e- 
TÀOCti.  F.11611,  au  iiioi>  de  no\enibrc 
IMID,  il  jrréléij  de  tous  ses  nio>ens 
le  mouvement  de  riiisiiircclioii  lioflan- 
iaUe.  11  seconda  pui»saaiment  MM. 
de  llo^endorp  el  N  an  drr  l)a>n,  qui 
s'ëlaient  places  à  la  trie  du  (;ou\er- 
nrtnent  pruM^uiie;  décida  même  la 
\il|e  d' Ain^terdain  à  faite  cause  com- 
mune a^ec  Li  lla>e,  et  dè>-l(its  il  n') 
eut  plus  qu'une  >eiile  diirclion.  Ke 
prince  d'()iaii;;e,  à  son  retour,  hési- 
tait sur  la  qualilicjriuii  qu'il  lui  conte- 
nait de  pieiitlre:  Krinper  coiilril»ua 
plus  que  per^oiiife  à  lui  faite  ptcfrrrr 
au  litre  de  stuthuiitUr  ct\\x\  i\e  pritirr 
suui'rrt^'n  ,  comme  moins  susceptible 
de  rappeler  d'anciennes  dissensions,  et 
plus  anaio>;ue  aux  besoins  du  moment. 
1^  dignité  de  recteur  ma;;iiiii(]ite  de 
runi\ersilë  de  l.e\de,  le  collier  de 
commandeur  du  Lton-Neerlandais,  des 
lettres  de  noblesse  et  le  brevet  de  con- 
seiller d'elal  lionoraiie,  futcnl  accor- 
des à  ce  coura;;eux  ciio>en,  en  recom- 
pense des  service^  qu'il  avait  rendus  à 
sa  patrie.  Kemper  prit  la  p!u>  (;rande 
part  à  ror;;aniwitioi>  des  univerbiti^  et 
des  c()llc;;es.  Nommé  membre  de  la 
commission  char<^ée  de  pi  épater  la  lé- 
pslation  du  nouveau  ro\auin<;  des 
Pays-lias,  il  rédigea  le  pi  ojet  de  G)de 
civil.  Ciel  ouvrage,  qui  s'écailait  trop 
du  (x)de  fiançais,  parut  manquer  de 
mélliode  et  de  précision.  Le  profond 
savoir  et  les  lumières  de  son  auteur  ne 
purent  le  mcllre  à  l'abri  d'indécentes 
critiques.  Quelqu'un  et^^ai^ranl  kcm-  « 
per  à  fairo  des  dcmarthcs  pour  lépri- 
mer  l'audace  avec  laquelle  plusieurs 
journalistes  s'étaient  permis  de  l'atta- 
quer dans  celle  circonstance  :  Je  m'en 
gartlrrai  bien,  répondit-il  ;  la  lihfriè 
de  lii  presse  esl  une  si  honnc  r/iose, 
fjnil  faut  sa^'vir  la  respccicr  jusqfic 


MM 


.jS 


dans  ses  ècarla.  Député  pai  la  pm 
vince  dr  Hollande  aux  ëlats-^nn- 
raux  ,  kemper  >  donna  des  pieu\r. 
multipliées  de  l'étendue  et  de  lava 
nélé  de  ses  connaissances.  Son  elucu- 
lion  était  vive  ,  fjcile  ,  entraînante  , 
et  jamais    une    personnalité    desobli- 

f;eante  ne  sortit  de  sa  bouche,  roal(;rc 
a  chaleur  avec  laquelle  il  improvisait 
ses  réplii|ues.  Il  paia!N>ait  jouir  d  tinr 
saule  pai  laite  ,  lorsque  (lappe  d'un 
coup  d'apoplexie,  le  :20  juillet  1S2V, 
\\  fut  enlevé  subitement  à  la  tendio.No 
de  sa  femme  el  de  cinq  enfants  dun( 
il  était  l'idole  à  si  jii*tc  litre,  l'erson- 
ne  ne  réunissait  au  même  de;;ré  les  qiia- 
lilés  du  cirur  àcellcs  de  l'esprit.  Mem- 
bre d'un  {;raud  nombre  de  socicté.s 
savantes,  et  de  l'institut  roval  de  Hol- 
lande depuis  sa  fondation  (180H  ,  il  a 
publié  des  disseï  talions  latines  dont 
voici  les  plus  importantes  :  De  jure 
îmmutalùli  et  tifmio,  it»- V",  1  lar- 
der v\  u  l ,  1 7 Ul)  ;  De  prudent ia  ci ■ 
iu'ii  in  pruntiA'enda  enitliiiuiie,  in-8'*, 
Haiderv^vcL,  ISOO;  De  titterurum 
stuJiu,  ruiamitusis  rrifHtUica  te:n- 
porihus,  optimo  saint iu  et  perfugio, 
in-8",  llaidct  w  >cL,  ISOti;  J)e  fto- 
pu forum  fegilfus  ,  optimis  intres- 
centis  vel  di'cresrentis  fiuniunitatis 
indiiiis,  in-8*,  Amsterdam,  180(»; 
De  disdplinanun  nioralium  ptirs- 
tuntia  cum  rateris  disciplinis  corn- 
fuiralu,  in-8'\  Lcvde,  1809;  De 
irtatis  nustrœ  fatis,  exempta  gen- 
ii/jus  ac  firitsertitn  liefgiis  nunifuam 
nrgligrndo,  Levdc,  Î81l>,  in-8 ';  des 
discours  en  langue  hollanilaise  sur 
digèrent  s  sujets^  Amsterdam  ,  ISl  i, 
1  vol.  in-8",  dédié  au  prince  souve- 
rain» depuis  roi  des  l'a\s  lias;  (!es 
obsc^^atious  sur  diverses  parties  du 
di^it  français,  d.nns  un  recueil  intitulé  : 
/Ir.nalesde  la  législation  française, 
à  rasage  des  dèpartemnits  hollan- 
dais ^  5  cahier?.  Ce  fui  lui  qui  pio- 
nonra  l'élo 'C  foncbrc  de  Cras  dans  la 


486  KEM 

société  frli.v  meritis  d'Amsterdam. 
Son  mémoire  De  Tinflucncc  qu'ont 
exercée  les  événements  ftolitiqiies 
ainsi  que  les  opinions  religieuses  et 
philosophiques  ,  depuis  vingt-cinq 
ans,  sur  les  lumières,  la  religion  et 
les  mœurs  des  peuples  de  l'Europe, 
fut,  en  1818  ,  couronné  par  la  so- 
ciété de  Harlem  (dite  société  teylé- 
rienne)  ;  son  Essai  sur  la  nécessité 
des  idées  religieuses  et  de  leur  pra- 
tique relatii'ement  aux  vertus  mo- 
rales, lui  axait  valu  l'accessit  avec 
nne  médaille  d'argent ,  au  concours 
de  1801.  St~t. 

KEHPII(NicoLAs),  dit  àe Stras- 
bourg, parce  qu'il  était  né  dans  cette 
ville  ,  vers  1397  ,  fut  reçu  maî!re-ès- 
arts  à  Vienne  en  Autriche,  où  il  avait 
étudié  la  philosophie.  Il  se  fit  char^ 
treux  le  6  se[»tembre  14i0,  et  sa  pru- 
dence, sa  piété,  le  distinguèrent  dans 
un  institut  déjà  si  distingué  lui-même 
entre  les  ordres  religieux.  Ce  fut  dans 
la  Charlreuse,  nommée  en  latin  Gem- 
nicam  ,  qu'il  reçut  l'habit  et  qu'iJ 
exerça  ensuite  les  fonctions  de  prieur. 
Il  remplit  la  même  charge  dans  quel- 
ques autres  maisons  ,  parvint  jusqu'à 
l'âge  décent  ans  et  mourut  en  1/(97. 
On  a  de  lui  un  grand  nombre  d'c- 
cnts  parmi  lesquels  nous  citerons  : 
I .  liegulœ  grammaticales.  II.  Dis- 
putala  super  lihris  posteriorum 
Aristotelis.  IIÏ.  Tracta  tu  s  tripar- 
titus   de   studio   theologiœ  moralis 

IVoy.  la  Bihliothcque  ascétique 
tom.  IV)  du  P.  r>ernard  Pez,  impri- 
mée à  Ralisbonne  en  172i,  in-8^). 
IV.  Alphahetarium  dioini  amoris 
de  eleoatione  mentis  in  Deum.  Cet* 
ouvrage  est  atlribué  par  les  bém*dic- 
tins  à  Martin  de  C>bs  ou  de  Zips  ; 
par  les  dominicains  à  Jean  >iider; 
par  d'aulres  à  Thomas  à  Kcmpis.  V. 
Tractafus  de  discretione  (qui  se 
trouve  aussi  (tom.  ÏX)  dans  la  Ijiblio- 
thèque  du   P.   Pez).  VI.  Tractatus 


KEN 

de  modo  pen^eniendi  ad  'perfectam 
Dei  et  proximi  dilectionem.  Le  P. 
Pez ,  au  tome  IV  de  sa  Bibliothè- 
que ascétique ,  attribue  cet  ouvrage  à 
dom  Kemph  ;  au  tome  VI ,  il  l'attri- 
bue à  Henri  Arnoul.  VII.  Liber  ser- 
monum  super  epistolas  et  evange- 
lia  totius  anni  ,  in-fol.  VIIÏ.  Ser- 
mones  in  [esta  sanctorum.  IX. 
Tractatus  super  Orationem  domini- 
cam,  Symholum  apostolorum  et  De 
calogum.  Enfin  un  traité  sur  l'Orai- 
son dominicale  ,  sur  le  Symbole  des 
apôtres  et  le  Décalogue,  écrit  en  lan- 
gue vulgaire  ,  en  faveur  d'Elisabeth 
d'Autriche,  femme  d'Albert  V.  Il  est 
probable  que  c'est  une  traduction  du 
traité  latin  annoncé  ci-dessus.  Quoique 
plusieurs  des  nombreux  traités  du  P. 
Kemph  ne  soient  que  des  ojjuscules, 
il  a  été  un  des  plus  féconds  écrivains 
de  Tordre  des  chartreux.  On  peut  con- 
sulter sur  ses  écrits  la  Magna  hihlio- 
iheca.  ecclesiasiica,  les  PP.  Ciraud 
et  P\ichard,  etc.  B — D — E. 

KEXDRÏCK  (John),  de  Bos^ 
ton,  fut  le  premier  marin  des  Etat.s- 
Unis,  qui,  s'élançant  dans  la  carrière 
des  grandes  navigations,  en  rendit  les 
préceptes  familiers  à  ses  compatriotes 
et  les  guida  vers  la  côte  nord-ouest 
d'Amérique,  ainsi  que  dans  les  îles  du 
grand  Océan  où  ils  ont  fait  ensuite 
un  commerce  si  lucratif.  Quoiqu'on 
lui  reproche  quelques  fautes,  c'était  un 
homme  d'un  talent  supérieur  ,  d'un 
bon  jugement,  d'un  caractère  coura- 
geux et  entreprenant.  Son  premier 
voyage  remarquable  eut  lieu  ,  sons 
le  patronage  ^w  congrès ,  au  mois 
d'août  1787.  Pour  en  conserver  le 
souvenir  dans  les  pays  qu'il  élevait  vi- 
siter, on  frappa  des  médailles  qui  re- 
présentaient ses  deux  navires,  le  trois- 
mrits  la  Cjolomhia  et  le  sloop  le  Wa- 
shington. On  lisait  ces  mots  en  exer- 
g'ie  et  sur  le  revers  :  (lolumhia  and 
Washington  :  commanded  by   ./. 


REN 

Kendnck,  fiUrd  ai  liosfoii,  A. 
imrrica,  ftw  thr  fntrifu'  (hfnn,  l,y 
.1  ■  llarrell.S.  ilri>.\n,  (,.  liuljinh, 
J.  Darby,  C  Ilot.  h.  J.  M.  Piu- 
tani,  17H7.  Kn  17'JI,  il  nrriiUil 
Mil  juire  ^o\a^r  tir  \a  («lune  «  U  cùlc 
N.  ().,  sur  le  bri^  Ir  II  asliin-^ton, 
ni  roinpj^iiir  avec  Doublas  qui  coia- 
inaiidatt  Ai  (,rthe.  l/ile  d'Hawaii 
[lM'Ii)hrrj  dans  Tarchipel  des  Sand- 
wich, qui  avait  vu  périr  (x)ol,  le  plu< 
^r.tiid  navigateur  de  l'Angleterre  ,  fut 
auski  le  tliealic  de  la  rooit  de  Krn- 
dricL,  le  plus  ;;ranil  naM^^ilriir  dr> 
i.lat>-(  niik.  1  n  commandant  aii;;lais 
.i>ant  voulu  iirer  une  saUe  en  son 
li<  iinrui  ,  un  de^  canons  »e  trouva 
rlij!|;r  par  ine^^ardr  d'un  lioulel  et 
d'un  p.^quet  i\r  milraillrs  (]ni  allei<;;ni- 
iriit  le  capitaine  Krndiicl  et  deux 
mousses,  sur  le  gaillard  d'ainere  de 
son  na\ire.  Cet  évrneinenl  lra>;^ique 
eut  lieu  ver»  i'annre  18(KK  On  a 
donne  le  nom  de  Kendricl  à  une  pe- 
tite ile  iiluee  d.ins  la  paitie  occiden- 
tale du  grand  Océan,  non  loin  des 
Mariannrs.  lî^v — F. 

kr.WKnV  jLt>i,r(>>SKl,  bené- 
drlin,  iir  en  l^^l  a  Mutlirl,  en 
I  .  -  c,  [lasNa  de  bonne  beure  en  Aile 
ii.i^iif  pour  pouvoir  v  p'ofesser  le  ca- 
tiiilii  .^iiie  ,  et  bientôt  prononça  se^ 
\iru\  femme  piofès  dans  I  ordre  de 
Saint  lie noil ,  au  cou>ent  écossais  de 
Kali>boiine.  Il  ne  démentit  pas  la  ré- 
putation de  savoir  de  cet  illustre  corps, 
mais  c'est  aux  sciences  phvsiques  et  à 
l'histoire  naturelle  qu'il  se  voua  de 
préférence.  On  lui  doit  des  observa- 
lions  intei  estantes  sur  le  fl«nt  des 
orseaux  ,  sur  le  fer,  sur  les  marais.  Il 
cultiNait  aussi  la  poé>ie  latine,  et  l'on 
a  de  lui  deux  pièces  de  circonslance  en 
cette  langue.  Membre  de  la  snciflé 
économique  de  Iiurgliaii>eii  1T.')1)], 
plus  lard  il  de>int  membre  uidinaiie, 
puis  trésorier,  pui.s  secietaire  de  l'a- 
cadéuiie  des  sciences  de  Munich,  et 


KEN 


4«7 


oicmbre  d'une  vin;^taiiie  d'antres  as- 
socialioni  savanliv;  ,  parmi  les<]ue!lrs 
nous  di»tiii;:iieioits  la  société  pour  les 
abeille»  m  llautr  l.iisace,  et  l'acadéinir 
de  liolo^ne  qui  l'ctut,  en  17i)S,  à  une 
des  placer  «acanlcs  d.iMs  son  sein.  De 
plus  Telecleui  de  r>j\iéie,  son  .-^nii- 
veraiii,  1  avait  nniuioe  conse  lier  au  dé- 
parlement des  alfaires  irl!;4ipu<'es  ,  et 
membre  du  comité  dr  censuir.  Il  ;;arda 
ces  places  jusque  danv  un  i'^e  liés- 
avancé.  Il  mourut  le  II  avril  1H04. 
Srs  écrits  sont  pour  la  plupart  dissémi- 
nr>  dans  des  recueils  snentifiqur^.  Kn 
voici  les  principaux.  I.  hipusr  soni- 
nniirr  Jrs  m  hrrrhra  tir  physit^ur 
sournisri  à  l'aratlrniir  tirs  si  irni  r\ 
lie  Muniih,  Munich,  17G3,  in-K" 
'anon>me).  11.  D/x'/rs  tniiirs  Hr 
physique  ^dans  le  l\itriotr  dr  lia- 
iurre\  17ti*J.  III.  l'ruiir  sur  1rs 
miintis  (dans  les  Iranuiitiims  de 
l'académie  électorale  des  sciences  de 
Miinirli.  tom.  V\  '1'  part.,  176.'i,  p. 
127-lt;0).  IV.  Truitr  sur  ir  U- 
UHird  (dans  les  Soin'r/Irs  Trunsai- 
iiuns  philusdpliiqurs  dr  fui  tidrtitir 
rirttorulr.  tora.  1",  pa;;.  3-37).  V. 
Krrhrn/trs  sur  ir  frr  même  recueil, 
tom.  11.  pa^.  40:.,  Vr>(.).  M.  îir 
nuirqurs  sur  la  trinftrraturr,  pria- 
iifHtlrmrnt  dr  17S3  a  ITKti  ^mémc 
recueil,  tom.  V,  pa-.  ;i99,.  Vil.  Iir 
lu  parrnir  du  rrnard  rt  du  <  liirfi 
(même  recueil,  tom.  V|,  pa^.  217- 
2V2).  VIII.  lirmarqurs  sur  Ir 
chant  drs  uisraux  (même  recueil  , 
tom.  VII,  paj;.  170-206).  —  Un  au- 
tie  KhNNKDY  Jran]^  ministre  an- 
glican à  i»iadley,  daus  le  comte  de 
I)eib\.  mo(t  en  17G0,  était  Ires-foit 
en  astronomie  ,  en  chronologie  ,  et  il 
a  laissé  des  ouvrages  impoilanls  sur 
Ptiue  et  l'autre  de  ces  sciences  :  I. 
AoMi'r/A'  niflhodr  pour  fixrr  rt 
rxpliqurr  la  tliroiiulofilr  dr  l' E- 
c  ri  fuir  d'opifs  If  s  piinripes  rt  les 
doruters  usironuinujues  dt  Mv'ise  , 


/i88 


KEN 


Londres  ,  1752,  in-8".  II.  Exa- 
men (les  antiquités  clirunolos^iques 
de  Jakson,  1753,  ln-8".  \\hl)e  la 
rommensurahilifé  du  mouvement 
diurne  et  du  mom^emcnt  annuel, 
1753,  ln-8°.  IV.  Système  complet 
de  chronologie  astronomique^  ab- 
straction faite  des  Ecritures,  17G3,' 
in- 8°.  V.  Explication  et  démon- 
stration du  système  complet  de 
chronologie  astronomique  ,  1 775  , 
in-8".  AI.  Dissertation  sur  quelques 
points  importants  et  incertains  de  la 
chronologie ,  m 3,  ln-8".  P — OT. 
K  E  \  T  (ïlnor ARD-Ai  GUSTE , 
duc  de)  et  de  Stralherrie,  comte  de 
Dublin,  etc.,  était  le  quatrième  fils  elle 
cinquième  enfant  du  roi  d'Angleterre; 
George  III.  Né  le  2  novembre  1767, 
il  fut  d'abord  élevé  en  Angleterre  , 
mais  aussitôt  qu'il  eut  atteint  fàge  de 
dix-sept  ans ,  son  père,  désirant  lui 
donner  une  éducation  militaire,  l'en- 
vova  en  Allemagne  où  il  fut  soumis 
aux  minuties  et  à  toute  la  sévérité 
de  la  discipline  germanique.  Ce  fut  à 
Lunebourg  ,  qui  faisait  partie  de  l'é- 
lectoral de  George  III  ,  qu'on  fjxa 
la  résidence  du  p'ince  Edouard.  Un 
onjcier-général  ,  placé  auprès  de  lui 
avec  le  titre  de  gouverneur,  dirigea  ses 
éludes,  et  il  commença  ses  exercices 
comme  cadel.  A  la  fin  de  l'année  il 
alla  habiter  Hanovre.  Logé  dans  l'un 
des  palais,  les  fi  ais  de  table  et  des  équi- 
pages étaient  pavés  sur  les  fonds  de 
l'clectorat  ;  mais  son  gouverneur  avait 
l'entière  disposition',  sans  contrôle  , 
des  mille  livres  sterling  qu'on  allouait 
pour  les  autres  dépenses;  et  le  prince 
recevait  seulement  sur  cette  somme 
deux  pislolespar  semaine  comme  mon- 
naie de  poche.  Celte  excessive  pnr- 
rimonie  à  l'égard  d'un  jeune  homme 
de  dix-huit  à  vingl  ans  placé  dans  nn 
rang  si  élevé,  jointe  à  Tobligalion  ri- 
goiiiouse  d'assister  s  toutes  les  païades 
et   de  remplir  les  plus  minutieux  de- 


KEN 

voirs  des  exercices  ,  n'était  pas  faite 
pour  lui  élever  l'esprit.  Il  reçut  cepen- 
dant, en  1786,  le  rang  de  colonel 
dans  les  gardes.  Ce  qu'il  y  a  de  sin- 
gulier, c'est  que  la  résidence  dans  la- 
quelle on  l'envoya  ensuite  fut  Genève, 
cité  où  l'esprit  d'égalité  et  les  mœurs 
républicaines  formaient  un  contraste 
frappant  avec  les  usages  et  la  na- 
ture despotique  des  gouvernements 
dans  les  pays  qu'il  avait  habités  jus- 
qu'alors. Il  y  fit  connaissance  avec 
plusieurs  jeunes  seigneurs  anglais  du 
même  àgc  que  lui ,  mais  la  pension 
qu'on  lui  allouait  était  si  faible,  qii'il 
ne  put  les  imiter  dans  leurs  dépenses 
qu'en  faisant  des  dettes  ;  ce  qui  lui  at- 
tira plusieurs  fois  des  morlificalions. 
Lorsqti'il  eut  atteint  vingt-trois  ans, 
il  fut  rappelé  en  Angleterre  où  on  le 
nomma  colonel  du  70^^  régiment  d'in- 
fanterie. Ayant  dépassé  !a  majorité,  il 
se  flattait  qu'on  lui  accorderait  ,  ainsi 
que  cela  avait  été  fait  pour  son  frère, 
le  duc  de  Clarence,  un  apanage  et  un 
élablissemenl  convenable.  Il  espérait 
aussi  passer  quelque  temps  dans  le 
sein  de  sa  famille  et  cultiver. la  so- 
ciété de  ses  amis  ;  mais  il  n'y  avait 
pas  huit  jours  qu'il  était  colonel  , 
quand  il  reçut  soudainement  l'ordre  de 
se  rendre  à  Gibraltar.  Comme  il  sa- 
vait qu'aucune  réclamation  ne  serait 
écoutée,  il  obéit  en  silence  à  la  volonté 
de  son  père,,  rejoignit  son  régiment 
dans  la  résidence  qu'on  lui  fixait,  et, 
après  un  court  séjour,  fit  voile  avec  ce 
même  régiment  pour  Québec  ,  dans 
l'été  de  1791.  En  174)3,  on  le  mit 
sous  les  ordres  du  général  sir.Charles, 
devenu  plus  tard  lord  Grey,  chargé 
d'une  expédition  contre  les  Antilles 
françaises.  Cette  expédition  réussit  et 
le  prince  lit  pour  la  première  fois  u'^pgc 
de  son  épée  c-ontrc  les  ennemis  de  son 
pays.  A  cette  occasion,  il  perdit  une 
grande  partie  de  ses  équipages  mili- 
taires t'îi  traversant  le  lac  Champlain 


ki:n 

&ar  la  (;iace.  Hacc  à  la  tête  du  caiii|» 
ilriache  de  I«a  (.onI«,  il  montra  ilr  la 
bra^oiirr  à  l'alLique  du  l'orl-Ko\al 
diiis  l'ilr  Marliiiiqiir,  auquel  un  donna 
en  »iiii  lionneui  le  nom  dr  fort  Kdnuard. 
Il  ^r  di^lin^iia  auvsià  Sainle-I.ucic  et  à 
la(iiiadploiipe.  .\  la  fin  de  la  campa^jnc 
de  tT'JV,  le  prince  Kdouard  retourna 
dans  l'Anicnque  septentrionale  ,  ou  il 
eut  poiir  rernmpense  le  gou\ernrmenl 
de  la  Nouxelle  Kroi'-c  auquel  ona)outa, 
le  \'2  joiivierJTlM),  le  prade  cîe  lieu- 
tenanl-;;rnéral.  A^ant  lait  une  vio- 
lente rljiite  de  rlieval  pendant  son  sé- 
jour a  llalif.iY,  il  revint  en  Vn^leletre 
pour  V  rrtablir  sa  *anlé.  Kii  IT'J'J  il 
fut  appelé  à  la  chambre  des  lord>  par 
une  patente  qui  le  créait  duc  de  Kent 
et  de  Stratlierne,  et  comte  de  Dublin  ; 
et  le  parlement  lui  accorda  enûn  une 
proMsion  de  douze  mille  livres  slerlio*; 
(trois  cent  mille  francs),  que  ses  detix 
frères  aînés  avaient  obtenue  a  leur  ma- 
jorité, et  que  le  duc  de  Cumberland, 
quoique  de  quatre  ans  pliib  |eiiue,  ob- 
tint le  môme  joui  que  lui.  Nomme  la 
nirine  année  commandant  en  chef  de 
toutes  les  troupes  dans  l'Ainenque  an- 
glaise, il  >e  rendit  à  son  poste;  mais, 
atteint  d'une  fièvre  bilieuse  ,  il  eut 
h  permission  d'aller  en  Ani^lelene  ou 
il  arriva  dans  l'aiituiiine  de  IKOO.  l*eu 
de  jours  après  il  (ul  nomme  colonel  de 
JVovai-Kco5sais,  ré-ciment  dont  il  con- 
serva le  romin.indement  jusqu'à  sa 
mort  ;  et  le  :{()  mars  1802  il  obtint  le 
gouvernement  de  (iibraltar.  A  peine 
en  eul  il  pris  possession  qu'il  voulut 
iniroduiie  parmi  les  troupes  de  la  gar- 
nison toatc  la  ri;;ueur  de  la  tactique 
aileniaruie.  Lc\r  avant  le  jour,  abhor- 
rant tout  exrès  de  table,  sobic  jiiNqu'à 
l'cvrès,  ponctuel  d.ius  l'acroinplissc- 
nicnt  de  tousses  devoirs,  il  e\iL;eail 
des  autres  ce  qu'il  faisait  lui-même. 
.Mais  il  n'était  pas  possible  qu'une  réu- 
nion d'hommes  ,  surtout  de  soldats, 
imitassent   rab>tineiicc  ,  la  rf:;tilanlc 


KEN 


4% 


et  le>  habitude»  au:>tères  du  uouvcau 
gouverneur.  Il  avait  pris  sur  le  con- 
finent le  (:oûl  de  l'unifoi  mite  la  plus 
correcte  dau^  riiabiilemenl  et  l'cqui- 
pemenl  dr^  inililaKes;  et.  tandis  qu'il 
forçait  le^  suidais  a  avoir  les  che- 
veux coupes  strictement  d'après  ui 
certain  modèle  ,  il  les  dé<;oùtait  par 
des  parades  et  des  revues  cuntinuellcs. 
Mais  d'un  autre  cale  on  doit  leconnaî» 
tre  que  les  habitants  de  (îibrallar  se 
plaignaient  depuis  lon;;-lenips,  et  avec 
raistMi,  de  la  licence  de  la  (;ainison, 
et  que  les  troupes  étaient  livrée:»  à  la 
(aineanlise  cl  a  l'insultoidinaiiun,  vices 
pousses  a  l'excès  par  la  lacible  qu'elles 
avaient  de  s  w!>andonner  a  la  débauche. 
Pour  couper  le  mai  dan^  sa  lacine,  le 
duc  de  Kent,  quelque  perle  qui  dût  en 
résulter  pour  lui-même,  ordonna  la 
fermeture  de  plusieurs  maisons  où  l'on 
vendait  du  vin,  afin  de  lelcnir  les  sol- 
dats dans  leurs  baraques  (11,  et  adopta 
un  svsteme  diiispeclion  propre  à  ré- 
primer l'ivrognerie  et  l'insuboidina- 
tion.  CjCs  mesures  mal  calculées,  |uin 
de  produire  l'eflet  que  le  prince  en  avait 
attendu  ,  irritèrent  au  dernier  point 
les  soldats.  Des  députations  envo>écs 
au  duc  pour  obtenir  la  permission  de 
célébrer  comme  une  frte  la  nuit  de 
Noël,  avant  été  ruisesaux  anèts  par  ses 
ordres,  la  ;:arnison  se  souleva,  les  '23 
et  '2li  décembre  1802,  pour  le  faire 
partir  et  pour  melire  i^  sa  |dace  le  gé- 
néral liarnel.  L'insurrection  fut  terri- 
b!e;*mais  le  .')  V'^ré;;iinent,  qui  n'v  avait 
point  pris  part  ,  lit  feu  sur  les  sédi- 
tieux qui  se  dispersèrent.  Le  lende- 
main, après  une  journée  entière  pas- 
sée dans  la  confusion ,  et  nial;;ie  les 
effoits  du  oéneral  liarnet  pour  réla- 
blir  le  calme  ,  le  tumulte  augmenta 
veri  l'entrée  de  la  nuit  :  à  dix  heures 
tout  était  soulevé.  Le  prince  sortit  alors 
à  la  tcte  de  son  ré;;irncDt ,   avec  une 

i}  lit  dioil  »ar  la  v<  n'.e  itdil  allout  au  guu- 


490 


KEN 


compagnie  de  c;reuadiers  et  deux  piè- 
ces (Je  campagne ,  et  il  marcha  sur  les 
révollés.  Le  feu  des  canons  et  de  la 
mousqueterle  dura  depuis  dix  heures 
trois  quarts  jusqu'à  miiiujt  ;  les  iir.itins 
vaincus  et  dispersés  furent  presque 
tous  arrêtés,  et  les  printipaux  traduits 
devant  une  cour  martiale.  Il  parait 
que  le  capitaine  Dodd  ,  qui  lui  ame- 
na un  détachement  d'artillerie,  con- 
tribua beaucoup  à  faire  rentrer  la 
f^arnison  dans  le  devoir.  Au  mois 
de  janvier  1803,  les  habitants  de  Gi- 
braltar s'empressèrent  de  témoigner  au 
prince,  dans  une  adresse,  toute  la  sa- 
tisfaction que  leur  avait  fait  éprouver  sa 
conduite  dans  cette  circonstance. 
Quoi  qu'il  en  soit  ,  le  ministère  ju- 
gea convenable  de  le  rappeler,-  mais 
il  reçut  en  1805  le  bâton  de  feld- 
maréclial.  Depuis  ce  moment  le  duc 
de  Kent  ne  put  obtenir  d'être  réin- 
té;iré  dans  le  gouvernement  de  Gi- 
braltar, et  on  ne  lui  accorda  pas 
même  de  commandement.  Cette  dis- 
grâce fut  attribuée  avec  quelque  raison 
a  la  jalousie  qui  existait  entre  ce  prince 
et  le  duc  d'Yoïk,  commandant  en 
chef  de  l'armée,  et  qui  s'accrut  extrê- 
mement lors  de  l'enquèîe  parlemen- 
taire relative  à  la  conduite  de  ce  der- 
nier. On  avait  répandu  le  bruit  que 
le  duc  de  Kent  n'était  pas  étranger  à 
l'accusalion  portée  contre  son  frère  : 
pour  se  justifier  de  cette  imputation,  il 
crut  devoir  publier  une  série  de  ques- 
tions adressées  par  lui  ,  à  ce  sujet,  le 
26  juillet  1809,  au  capitaine  Dodd, 
son  secrétaire,  devant  deux  témoins 
avec  les  réponses  de  ce  dernier.  Quel- 
que opinion  que  l'on  doive  se  former 
de  celte  singulière  justification,  on 
voit  depuis  ce  moment  le  duc  de  Kent 
à  *la  tcte  de  plusieurs  institutions  de 
bienfaisance,  qu'il  fréquentait  assidû- 
ment. Kn  1815,  il  se  réunit  à  ses  jcu- 
ne:>  frères  pour  présenter  une  réclama- 
tion au  parlement,  à  l'effet  d'obtenir 


KEN 

des  allocations  plus  considérables  pour 
soutenir  leur  rang  et  acquitter  les  det- 
tes qu'ils  avaient  été  forcés  de  contrac- 
ter. Il  renouvela  plus  lard  ,  en  son 
propre  nom,  les  réclamations  qu'il  avait 
déjà  adressées  plusieurs  fois  à  \V  . 
î*itt,  et  que  ce  ministre  avait  promis 
d'appuver;  mais  elle"  furent  toujours 
repoussées.  Le  duc  de  Kent  abandon- 
na donc  à  ses  créanciers  la  moilié  de 
ses  revenus,  et  il  se  retira  en  1810 
à  Briixelles  pour  v  fai^e  <ic6  écono- 
mies. Son  principal  délassement  élail 
le  théâtre  qu[il  suivait  avec  passion  ; 
il  faisait  aussi  des  excursions  en  Alle- 
magne pour  visiter  les  différentes  bran- 
ches de  sa  famille  qui  y  élaient  cia- 
blies.  A  la  mort  de  la  princesse 
Charlotte  de  Galles  (1817),  on  son- 
gea à  plusieurs  mariages  pour  les  plus 
jeunes  branches  de  la  famille  royale, 
afin  d'éviter  que  la  couronne  pût  se 
trouver  sans  héritiers.  Ce  fut  à  celte 
occasion  que,  d'après  les  instances  tle 
la  reine  sa  mère,  le  duc  de  Kent  pré- 
senta ses  hommages  à  Vicloria-Maria- 
Louisa,  la  plus  jeune  fille  du  duc  ré- 
gnant de  Saxe-Cobourg,  et  de  la  prin- 
cesse de  Reuss,  née  en  1786  et  veuve 
du  prince  héréditaire  de  Linengen  (2). 
Le  mariage  fut  célébré  à  Cobourg  le 
29  mai  1818,  suivant  les  rites  luthé- 
riens ,  et  bientôt  après  solennisé  de 
nouveau  à  Kew  conformément  au  cé- 
rémonial de  l'église  anglicane.  Pour 
continuer  de  suivre  le  plan  économi- 
que qu'il  avait  adopté,  le  duc  et  la  du- 
chesse de  Kent  ne  tardèrent  pas  à 
retourner  sur  le  continent,  et  s'établi- 
rent à  Arnorbach,  que  cette  princesse 
avait  choisi  pour  sa  résidence.  Un  évé- 
nement coniribua  bientôt  à  la  félicité 
et  aux  embarras  du  duc  de  Kent.  J^a 
duchesse  fut  reconnue  grosse  ,  et  le 

(■>)  l.e  piincedf  Liiien;;en  «Tait  44  ^'i*  'or:^- 
qii'iJ  rpousa.ni  i8o7.  la  princesst:  de  (iobour;; 
qui  nVtait  àpéf  que  de  ifi  nn».  Un  fil»  i»»u  de  ce 
mariage  «uccédd  à  son  père. 


KEN 

roupie  roTsI ,  dé»irant  qne  \r  ftuit  i)f 
Irur  union  ^it  le  jour  en  Anjeleire, 
ve  rendit  immniiairnienl  i  Londres. 
I.r  ^4  mai  1H19  h  durheue  arrou- 
rha  an  palais  de  Ken<>in<;tnn  d'une 
tille  qui  rerut  le»  nomi  d*.\lex.indn- 
na  N  irtoria  (3).  \jts  mederiiu  lui 
àMn\  pre^riil  d'habiter  le  rlunat  plus 
dodx  du  l)rxnn^liiie  ,  lc>  deii\  epont 
>'eial»lirenl  a  Sidmoiilh,  où  le  duc,  qoi 
jouiN«ail  a  cette  rpoque  d  une  grande 
popularité,  fut  »ai»i  d'une  fifvre  pro- 
duite (»ar  un  rhumr  nr^li^é  et,  aprè^ 
une  coarte  maladie,  mourut  le  '2^  jan- 
vier 18j1)  dan^le^  brasdela  ducltesM 
qui  avait  montré  à  son  an(;u^te  époni, 
pendant  va  courle  maladie ,  autant  de 
zèle  (|tie  d'aiïertion.  I.e  duc  dr  Kent  , 
d'une  taille  et  d'une  force  atMiiique, 
avjit  un  a*pect  impo^nl,  temp'-ré  par 
une  poittevse  simple  et  naturelle.  Sa 
première  éducation  qu'il  re<^t  ea  \n- 
;;leterre  fut  soijinée ,  mais  il  était 
fâcheux  que  son  pouvenieiu  allemand 
l'eût  habitué,  pendant  »on  «ejour  dans 
l'electoiat  de  Hanovre,  à  i\t^  pratiques 
trop  minutieuses,  et  qui  le  rendirent 
impopulaire  dans  l'aimée,  (ximme  son 
père,  il  se  levait  de  très  bonne  heure, 
prenait  unt  tavse  de  café,  recevait  suc- 
cessivement ses  principaux  serviteurs, 
parmi  lesqneU  Gourait  l'intendant  de 
»a  maison  qui  lui  cemr!tait  chaque 
jour  le  compte  détaillé  de  la  dé- 
pen";e  da  jour  précrdt-nt  ,  oà  étaient 
compris  non  seulement  la  viande,  le 
pain  et  \e  vin,  mais  la  moutarde,  le 
sel,  le  |K)i\re,  etc.,  qui  a\aient  rlé  con- 
sommés ;  chaque  article  de  dépense 
avant  an  chapitre  distinct.  On  doit  si- 
gnaler, entre  aulre-^  sinijulaiités  du 
duc  de  Kent,  le  grand  nombre  de  clo- 
chettes destinées  à  faire  observer  l'or- 
dre el  la  régularité  dans  le  palais  de 
KeuNin^ton  ;  elles  coulaient  seules  trois 
cents  livres  sterling;  (.sept  nulle  cinq 
cents    francs^.    Ce    palais   renfermait 

(B     Anjovrd'hui  rritn  d'AitrMfrr*  (i#4iy 


KKR 


49« 


a«Mi  une  immense  quantité  de  pcrrIuleN 
à  mosiipie.  Deui  surtout,  qai  son- 
naient tous  les  quarts  d'heure,  étaient 
partirMiicrenirn*  deplai>anles  pour  les 
étranf^ers  dont  elles  interrompaient  la 
conversation  ,  et  «.emblainit  avoir  été 
fa  te*  evpre»  pour  empêcher  de  s'enten- 
dre. Si  le  dur  di*  Krnt  avait  quelques 
ridicule»,  on  doit  recoiinaitre  qu'il  était 
bienfasant  et  doué  d'un  etrriirni  ca- 
raclerr  II  est  le  premier  colonel  an- 
glais qui  ait  donnr  l'exemple  des  er(ile% 
réjjimenlaires,  el,  comme  son  père,  il 
contribua  de  toutes  les  manières  a  ré- 
pandre l'instruction  parmi  les  difTn en- 
tes classes  de  la  société.  Il  fut  le  pa- 
tron de  la  plupart  des  institutions  cha- 
ritables de  r.\n;;leterre,  et  souxent  il 
présida  leurs  réunions,  montrant  dans 
les  ili<cour$  qu'il  t  prononçait  une  élo- 
quence parfaitement  appropriée  au 
sujet  1)  —  7 — s. 

kKK  ALIO,  dame  K()IU.l;i 
(LoilSK-KmClT»:    (iriHFMFNT  r»K), 

née  à  Paris  le  2'i  aoàt  17.%8  , 
était  fille  de  l^ouis-Velix  (îuinement 
de  Kéralio  {I  uy.  ce  nom,  XXII, 
31'»),  membre  de  l'académie  d'.Krras 
et  de  la  société  patriotique  de  Hennés. 
Klle  se  maria  à  Hobert,  depuis  député 
de  Paris  à  la  Gtnvention  ualioiiale. 
M"*  de  Kéral'o  était  douée  «le  disposi- 
tions naturelles  qui,  pràre  à  l'éducation 
soignée  qu'elle  axai?  reçue  de  son  père, 
se  développèrent  de  bonne  heure  ; 
mais  l'usaoe  précoce  qu'elle  en  6t  , 
n'a  pu  prociier  qu'une  existence  éphé- 
mère aux  nombreux  ouvraf;es  qu'elle 
a  composés,  publiés  on  édités  et  dont 
nous  donnerons  ci-après  la  liste.  Ses 
romans  sont  au-dessous  du  médiocre,  et 
son  histoire d'Klisabeth  est  d'une  diffu- 
sion^ accablante.  Elle  avait  trente-trois 
ans  lorsqu'elle  rpousal^obert  dont  l'af- 
6liation  à  la  société  des  jacobins  avait 
exailé  l'ambition  au  point  le  plus 
absurde,  et  l'on  e^t  porté  à  penser 
qu'elle   la  partageait.  Il   faut  lire  a  ce 


49^  KKR 

sujet  tlaiis  les  iMcmolres  de  M""^^  Uo- 
laiid,  qui  la  peint  comme  une  femme 
spirituelle,  adroite  et  fière,  le  récit  de 
ses  démarches  auprès  de  lîiissot,  afin 
qu'il  obtint  de  Dumouriez  ,  alors  mi- 
nistre des  afiaires  étranf];èrcs,  un  em- 
ploi pour  son  mari.  Brissot  va  trou- 
ver ]Jumouriez  qui  répond  à  ses  sol- 
licitations :  «<  Ouoi  !  vous  me  parlez 
«  de  ce  petit  homme  à  tète  noire, 
«<  aiiFsl  lar^e  qu'il  est  haut  i*  Je  ne 
«<  me  déshonorerai  pas  en  employant 
«  une  telle  caboche.  —  Mais  ,  ré- 
«<  plique  Brissot,  parmi  les  ari;ents  que 
«  vous  êtes  dans  le  cas  d'employer, 
««  tous  n'ont  pas  besoin  d'une  égale 
«  capacité? — Je  n'emploie  pas  un 
«  fou  semblable.  —  Mais  vous  avez 
«<  promis  à  sa  femme! — Sans  doute, 
«  une  place  inférieure,  de  mille  écus 
«  d'appointements;  savez  -  vous  ce 
«  qu'il  me  demande  ;'  l'ambassade  de 
«  Constantinople!...  — L'ambassade 
«  de  Constantinople,  s'écrie  lîrissot  en 
«  riant  ,  cela  n'est  pas  possible  !  — 
«<   Cela   est  ainsi. — Je  n'ai  plus  rien 

«   à  dire îsimoi,  ajouta   Dumon- 

«<  riez,  sinon  que  je  fais  rouler  ce 
K  tonneau  jusqu'à  la  rue  s'il  se  pré- 
«  sente  chez  moi,  et  que  j'interdis  ma 
«  porte  à  sa  femme.  » — M"'*^  Roland 
continue  ainsi  :  «  M'"*^  Robert  re- 
«  tourna  chez  Brissot  qui,  dans  son 
«  in;;énuité,  lui  dit  qu'elle  avait  fait 
a  une  folie  de  demander  une  ambas- 
«  sade,  et  qu'a\ec  de  pareilles  préten- 
«  lions  on  devait  finir  par  ne  rien 
«  obtenir. — Nous  ne  la  revîmes  plus, 
«  mais  son  mari  fit  une  brochure  con- 
«<  trc  Brissot,  comme  un  distributeur 
«  de  places  et  un  faussaire  (|iii  lui  avait 
«  promis  l'amba'^sadc  de  Coiistantiiio- 

«    pic  et  s'élail  dédit »  Robert  qui, 

dès  17î)0,  avait  publié  un  ouvia;^e  in- 
titulé :  ie  lié/juijlicanis/nc  udupté  à 
la  France,  s'affilia  aux  (^ordeliers,  se 
lia  avec  Danton  qui  l'employa  après  le 
10  août  1792,  comme  .son  secrétaire 


KEK 

quand  il  lut  nommé  au  ministère  de  la 
justice  ,  qui  protégea  son  entrée  au 
collège  électoral  et  son  élection  en 
qualité  de  député  à  la  Convention,  où 
Robert  vota  la  mort  de  Louis  XVI, 
sans  appel  et  sans  sursis ,  regret- 
tant, dit-il,  qu'il  ne  fut  pas  en  son 
pouvoir  de  voter  aussi  celle  de  tous  les 
souverains.  Il  est  difficile  d'imaginer 
quelque  chose  de  plus  épouvantable  que 
le  discours  qu'il  prononça  à  cette  oc- 
casion. Il  avait,  dès  le  15  nov.  1792, 
déployé  tous  ses  efforts  pour  hâter 
ce  jugement.  Alors  Robert  paya  ses 
dettes,  fit  de  la  dépense  et  reçut  à  sa 
table  Philippe-Egalité  et  bien  d'au- 
tres. Sa  femme  faisait  les  honneurs  de 
la  maison  qui  était  tenue  sur  un  grand 
pied.  Postérieurement  11  fut  dénonce 
par  \'ergniaud  pour  ses  relations  avec 
le  duc  d'Orléans.  Il  exerçait  alors  à  Pa- 
ris le  commerce  d'épiceries,  et  fut  dé- 
signé comme  accapareur  à  la  populace, 
qui  pilla  sa  maison  et  s'empara  de  plu- 
sieurs tonneaux  de  rhum.  Cet  accapare- 
ment fit  pleuvoir  sur  un  homme  qui  avait 
tant  crié  contre  les  accapareurs,  des 
sarcasmes  de  toute  espèce,  et  on  lui 
donna  le  sobriquet  de  liobert-lihiiiit. 
Il  survécut  à  la  chute  des  Dantonistes  ; 
fut  envoyé  à  Liège  en  1795,  où  sa  fem- 
me l'accompagna,  puis  rappelé  par  dé- 
cret du  27  mai,  comme  entravant  les 
opérations  de  l'administration  de  la 
Belgique.  Il  se  hâta  alors  de  fcliciter 
la  Convention  sur  ses  succès  contre  les 
terroristes  aux  premiers  jours  de  prai- 
rial. Il  ne  rentra  point  dans  le  corps 
législatif,  et  s'occupa  de  fournitures  pen- 
dant que  sa  femme  composait  des  ro- 
mans. C'est  ainsi  qu'ils  passèrent  toutes 
les  années  de  l'enqtlre.  Après  le  retour 
des  Bourbons  ,  ils  se  retirèrent  à 
Bîuxetle;.,  où  Robert  se  fil  liquoriste. 
M""'  Robert  y  est  morte  en  1821,  et 
son  mari  ne  lui  a  survécu  que  cinq  ans. 
— On  a  d'elle,  comme  auteur:  I.  Adr- 
Ididc,  ou  Mémoires  de  la  marquise 


kii; 

«//•.y*»».  Neu/cWiel,  177G,ia-H  . 
1 1 .  IlistuirtiTKlisaltfth ,  rrinetr.  in- 
^Ictii rc,  tirée  Jrs  rrri/s  orii^inuux 
tttifjuis,  actes,  titres  et  autres  pirrrs 
manuscritt-s  qui  n'ont  point  emure 
/A/rw  ,  17HG-SU  .  ."i  vol.  lu-H".  111. 
.  inteiia  et  i'Mruîine,  ou  r Amour  et 
r.lmitié.  Taris,  1808,  .'>  \ol.  iu-12. 
IV.  llphonse  et  Matliiliic,  ou  la 
Familte  espagnole,  ibld.,  ISOD,  i 
\ûl.  in- 12.  V.  liuse  et  Alhert,  ou  U 
Tombeau  cfllmma,  ibiJ.,  1^0,  3 
uil.  in- 12.  VI.  éléments  Je  ion - 
struition ,  anglais-français  ,  1810, 
in-S". — Comme  traiiurlricc  :  1"  diiïf- 
rculs  moireaux  cvlralts  des  Mrmoires 
lie  fat  atlemie  tte  Sirnne,  1772,  In- 
12;  2"  Histoire  du  grun.l- duché 
de  Toscane,  sons  le  gou^'ernement 
des  Mrdicis,\rn\.  Jerilalicn  de  Kl* 
j;uccio-riaIuzzi,  lom.  VI  à  l\,in-8'\ 
1783  à  178  V  ;  les  cinq  premiers  vo- 
lume>  avaient  été  traduits  par  Lefcbvre 
de  Villebrune;  3"  l'oyages  dans  les 
Deu.X'Siciles,  traduit  de  ran;;lai$  de 
Svtinburne,  1785;  V"  Etat  des  pri- 
sons, des  hôpitaux,  et  des  maisons 
de  force ^  trad.  de  l'an;;!,  de  Ilouard, 
1788.  in-8":  5"  t Etranger  en  Ir- 
hinde,  1809; #6"  l'oyage  en  llol- 
Linde  et  dans  le  midi  de  C Allema- 
gne, ISOD.  Ces  deux  ouvra;;e>  jonl 
traduits  de  r^n;;I.iis  de  J.  Carr. — 
Comme  cdîtcur  ,  elle  a  publié,  17S6- 
89,  quatorze \olume$  formant  le  com- 
mencement d'une  (Collection  des  meil' 
leurs  oucragcs  Jrançais  composes 
fMtrdesJemmej.  Cette  collection  qui 
devait  avoir  quarante  volumes  iii-8" 
n'a  pas  été  continuée.  Kilc  .i  donné 
au:5i  une  édition  i[c>>  Fa/des  de  iJuds- 
/o.cn  anglais,  1810.  in-12.  Ilnfiu, 
INl"''  de  Kéralio  fut  collaboratrice  avec 
.son  porc  et  avec  Uobcrl,  devriiu  plus 
ta.d  son  mari,  du  Mercure  national, 
ou  Journal  détat  et  du  citoyen , 
dont  qualie-vin^t-<ept  numéros  paru- 
rent \k\  ;M  tlifcmbre  1789  au  29  mars 


KER 


4c)'i 


1791.  On  la  ref;arde  encore  romme 
auteur  de  rt)uvra;;e  intitulé:  les  (.ri- 
mes des  reines  de  France,  depuis  le 
I  uinmencement  de  la  monarchie 
lusqu'a  MtirieAntoinettét  ,  l'aris  , 
1791.  la-H'  ,  Neufcliàlel,  1792,  soc. 
t>po;;r.,  iri'-12.  n(ju\ elle  édition  cor- 
rigée et  au^raentre  ,  l'aiis,  au  bu- 
leaude»  Ut'\olution>  de  l'aI;^,an  II, 
1793,  in  8". — Ce  volume  a  été  attri- 
bue à  Piudliomme  par  beaucoup  de 
personnes,  mais  nousMiairoe.s  poitrs  à 
le  croire  de  M""  Uoberl  [/ ry.  JU.- 
nKNGtK,  IV,  239);  cette  croyance  est 
appuyée  >ur  les  rap|Mirts  de  société 
et  de  collaboration  qu'elle  a\ait  d«-,À 
avec  Uoberl  ,  a\ant  leur  maiia^e,  et 
a\ec  l'iuiihomme,  ardent  résolution- 
naire  ,  auteur  des  He^^olutions  de 
Paris.  Si  quelque   doute  à  cet  é-^ard 

()0U\ait  être  encore  rle>é,  il  faudrait 
e  fonder  sur  l'iniluence  qu'aurait  pu 
conserver  sur  sa  ûlle  le  clie\alier  de 
Kéralio  qui  ne  mourut  qu'en  dérendire 
1793,  et  qui,  après  s'ctre  montic  d'a- 
bord parti.san  des  reformes,  délesta 
jusqu'à  la  Gn  de  sa  Me  les  excès  de  la 
révolution  ;  mais  M'"**  Uoland  nous  a 
fourni  la  preuve  que  cette  influence 
dut  être,  daps  les  deux  derniei  es  années 
de  l'existence  du  père,  plus  que  contre- 
balancée par  l'iniUience  toute-puiâsante 
du  mari  et  de  ses  amis.  Z. 

Ki:ilCKliElH:KK(JF.AN  (.^- 
I\Al\I>  ,  antiquaire  et  )ii>lorien  ^  naquit 
vers  l'année  1678,  à  Fauquemont, 
capitale  de  la  sei;;neurie  de  ce  nom, 
qui  faisait  autrefois  partie  du  duché  de 
Limbour;;  ,  sous  la  dénomination  de 
piiys-rëuni.  Il  fil  ses  humanités  à 
Macstricht,  et  alla  ensuite  étudier  la 
philosopliie  efla  théo!o;;ic  à  l'iiniver- 
sité  de  Louvain.  Ces  deux  (lenilers 
cour>-terminés,  il  se  consacra  à  l'éfuJe 
Adi  langues  saxantes,  de  la  critique 
sacrée  el  de  l'antiquité.  Puis  il  en- 
seigna les  belles-lettres  ,  el  donna 
un    roars    d'histoire   au   collèiie    des 


494 


KER 


Ïrois-Langues  à  Louvain.  Nommé  , 
en  1708  ,  historiographe  par  l'em- 
pereur Joseph  1^'  ,  il  en  remplit  les 
fonctions  jusqu'à  sa  mort,  le  16  mars 
1738.  On  a  de  lui  :  I.  Grmnmatica 
laiina^  Louvain,  1706,  in-12.  Cette 
grammaire  est  pleine  de  recherches 
qu'on  ne  trouve  pas  ailleurs,  11.5j.v- 
tiiimi  apocalyplicuni  Louvain,  1708, 
in- 12.  III.  Prodromus  Vanieli- 
cus,  sive  nopj  conatiis  liistorici,  cri- 
iici  in  celeherrimas  dijjicultaies  his- 
turiœ  veteris  T est  a  menti ,  nwnar- 
chiarum  Àsiœ,  etc.,  ac  prœcipue 
Danielem  prophefam  ,  Louvain  , 
1711,in-12;  ouvraf^^e  plein  d'érudi- 
tion, et  dans  lequel  les  hypothèses  de 
l'auteur  peuvent  éclaircirles  questions 
hisloriques  et  iiéooraphiques  de  l'Ecri- 
ture-Sainte.  IV.  De  monarchia  Ro- 
mœ  puganœ  secunduni  concurdiam 
in  ter  S  S  prophetas  Danielem  et 
Joannem  :  consequens  historia  a 
monurchiœ  conditoribus  iisque  ad 
urhis  et  imperii  ruinam  ;  accessit  sé- 
ries hisioriœ  aporalypticœ,  Louvain, 
1727,  in-12.  V.  De  situ  Para- 
disi  terres  fris,  ibid.,  1731,  in-12. 
L'auteur  place  le  Paradis  terrestre  un 
peu  au-dessus  de  la  Babylonie  entre 
les  bras  occidental  et  oriental  de  l'Eu- 
phraîe  jusqu'à  leur  embouchure.  Ce 
svstème,  différent  de  celui  de  lïuel, 
offre  autant  de  probabilités.  On  trouve 
dans  le  même  volume  une  Dissertation 
sur  le  nombre  des  années  que  le  Sau- 
iU'ur  a  instruit  le  peuple^  çt  une  au- 
tre inlitiiléc  :  De  Cepha  ter  corrupto. 
Vi.  J)c5  poésies  latines  dans  lesquel- 
les on  reconnaît  delà  ;^ràce  et  de  l'ima- 
fçination.  Kecrkhedère  a  laissé  plu- 
sieurs manuscrits  restés  inédits,  entre 
autres  :  Traite  des  LXX  semaines 
de  ])aniel,  qui  était  soumis  à  la  cen- 
sure lorsqu'd  mourut.        L — 1 L. 

KERCKOVE  (Jr..\N-IUi'TisTE 
Van),  né  à  Oost-Ecloo  en  Belgique, 
le  5  janvier  1790,  étudia  d'abord  au 


KEH 

collège  de  Gand,  puis  entra  au  sémi- 
naire de  cette  ville  en  1812.  L'évê- 
que,  M.  de  Broglie  [f-'^oy.  ce  nom, 
LÏX,  290),  par  suite  de  son  dévoue- 
ment au  pape  Pie  VII,  alors  prison- 
nier à  Fontainebleau,  était  lui-même 
relégué  dans  l'ile  Sainte-Marguerite. 
Napoléon  envoya,  pour  administrer  le 
diocèse,  un  ecclésiastique  dont  la  plu- 
part des  membres  du  clergé  ne  voulu- 
rent pas  reconnaître  l'autorité ,  et 
plusicufs  furent,  à  ce  sujet,  arrêtés  ou 
exilés.  La  même  opposition  s' étant 
manifestée  parmi  les  séminaristes  ,  les 
uns  furent  conduits  à  Paris  et  détenus 
à  Sainte-Pélagie;  les  autres,  au  nom- 
bre desquels  se  trouvait  Kerckove , 
furent  dirigés,  comme  conscrits,  sur  la 
citadelle  de  Wesel,  où  quarante  mou- 
rurent d'une  maladie  contagieuse.  La 
chute  de  l'empire  français  ,  dont  la 
Belgique  fut  alors  séparée  pour  faire 
partie  du  nouveau  royaume  des  Pays- 
Bas,  permit  à  Kerckove  de  venir  conti- 
nuer au  séminaire  de  Gand  ses  études 
théologiques  ;  et  bientôt  ,  quoique 
jeune  encore,  il  alla  exercer  le  profes- 
sorat à  Saint-Nicolas  et  à  Sainte- 
r»arbe.  Elevé  au  sacerdoce  ,  il  remplit 
d'abord  les  fonctions  de  vicaire  à  Si- 
nay,  puis  à  Courtrai,  où  il  organisa 
une  école  du  dimanche  pour  de  jeunes 
filles  pauvres,  et,  en  1826,  il  fut  nom- 
mé curé  de  Uupelmonde.  Il  consacrait 
ses  loisirs  à  la  traduction  en  flamand 
de  quelques  ouvrages  français,  et  insé- 
rait dans  divers  journaux  des  articles 
religieux  et  politiques,  l!  appuya  vive- 
ment les  réclamations  des  catholiques 
contre  les  mesures  restrictives  adoptées 
à  leur  égard  par  le  gouvernement  néer- 
landais; et,  après  la  révolution  belge  de 
1830,  il  fut  élu  député  au  congrès  na- 
tional, où  il  siégea  dans  les  rangs  de 
l'opposition.  Kerckove  mourut ,  le  1  3 
décembre  1832,  à  Stckène,  dont  l'é- 
vcque  de  Gand  l'avait  nommé  curé 
depuis  quelques  mois.  P — RT. 


iftR 


KKR 


405 


KFRESSTI  IIV  (  ALnYvJ., 

srf>ii  Jr),  M\ant  Imnf^rois,  né  (n 
fTH.'»,  fui  suffc»  i\emenl  profe>*eur 
«l'IiiNlolif  uiii%fr>flle  ft  H'hi^loire  po- 
liliniir  à  rarail^nneJf  Oraiid-Vaiadin, 
iiQ  il  nt  >«')o'triia  pas  moin*  Je  Ircnle- 
uii  aii«  ,  pui%  i  IVslh  où  il  en  |<2i%a 
seiie.  Birn  que  lecnaïqiiable  romme 
prores$eur,  c*c*t  surtout  fomine  écri- 
vain quM  se  ilisttn^^ua.  Il  a  rendu  an 
sti\\ct<  ricU»  l'Iiisloiredf  la  Hongrie, 
qimrqoe  la  manie  du  paradoxe  Tait  en- 
Il  aine  pluN  d'une  foi»  i  de*  liipottiHes 
trop  liardies.  Ain^i,  par  exemple,  il 
prétend  que  le*  Mad^iare»  desrendent 
des  Huns,  ce  qui  n'est  \rai  qu'en  éten- 
dant le  ^en»  qu'il  donne  an  mot  de 
Huns.  I.'rmpereur  François  I*',  pour 
lin  témoigner  son  c>time  particulière, 
lui  conféra  la  niddex^e  et  l.i  mrdaille 
du  mérite  ci\ il.  Kete^Nlurv  mouiutle 
•Jl  aMil  iS^'ï-Son  ou\in^r  le  plu* 
roniidrrable  est  le  ( .umtfrndiurn  his- 
toriiT  umWrsttlis  ,  l'e^lfi  ,  1 H 1 7  1 9  , 
^  \ol.  Mais  les  plus  reinaiqiuble&  sont 
'.  1)is-ifrtutio  tîr  llungnrorum  ori- 
^1  trutatir  pn'mis  iin  uruifiuh's,  Peslh, 
\H\\),  m-8''  ;c*est  là  qu'il  veut  prou- 
\er  l'origine  exclusivement  liunnique 
ilr<;  Mad^iatcs\  et  ses  iiissrrtatnmrs 
Itistnriio-i riticir  ocimionr  trnlami- 
uimi  puUIruntin  vulgdtir  ,  t^iteis 
lirhi  rriiis  uutiirii  trias  utffu-  de 
lu  :'^inr,  srrUhiis  a  sic  t  ici  s  tu  tnigni- 
lionr  aiiisipir  grstis  Mu^yaronim  , 
tnuVlioncs  ti(hrrsiis  noctiturum  ra- 
I uni  nias  et  figmenta  vhuiirantur  , 
IV  l'i.  181  V,  in  8"  Ja  disseiiation  lU 
iirionynii  Ueiœ  régis  ^uftirii  crtate, 
nvait  été  puliliec  seule,  ï'c.th  ,  181*2, 
in  8").  On  doit  encore  à  Keresstury 
l.inramrntn  his!  iriiv  prugnuitira 
llutigiiriiT  pasitidriilMS  distinrta  , 
l'i"<;th,  170G.  in  8'\  et  Ifis'uriaepis- 
lopatui  W.  Varudinensis{\)\  et  il 
pnrait  qu'il  a  laissé  au>si  quelques  ma- 
nuscrits. P — <)T. 

i)  r/esl-iMiir*-  Ji    r»t.>n»!-V,ifafliii 


KKKI VALANT  (1)  (NiroiKs 
\j.  DliST  de\  littérateur,  naquit  Ir 
•ir>  février  17:»0  ï  Nantes,  d'une  fa- 
mille lionorable.  Après  avoir  achevé 
ses  études  de  collr^c  avec  succès,  il  fil 
son  couit  de  droit  r\  fut  reçu  avocat 
au  pailement.  (^urlt}u?s  années  après 
il  acquit  une  rlia^^^e  de  maitre  des 
comptes  à  la  chambre  de  Hrrta^ne,  et 
dès-lors  ronsacra  v«s  loisii .  à  la  cul- 
turc  des  lettres.  |«a  ié\olQlion  le  priva 
de  sa  place,  sans  attaquer  sa  fortune; 
et  il  put  continuer  de  chercher  dans 
l'étude  des  consolations.  Il  s'était  per- 
fectionné dans  le  latin  par  la  lecture 
de^  meilleurs  auteurs  .  il  apprit  encore 
l'italien,  l'anglais,  r\  5e  rendit  familiers 
les  chefs- d'iruvre  écnts  dans  ces  deux 
lan;;ues.  A  l'a^e  de  près  de  rinquante 
ans,  nouveau  Frunmleu,  fommr  il  le 
disait  plaisamment  lui-mrme,  Kériva- 
lant  s'cNsaNa  dans  l'ail  des  \ers.  Des 
imitations  a;;iéablfs  de  la  Prière  uni- 
i'erseilf  de  Pope,  de  Veiegie  de  Tiray 
sur  un  cimetière,  d'un  hymne  d'Addi- 
son.etc,  insérées  dans  les  journaux  et 
dans  les  Almanarhs  tirs  Muses  ,  le 
filent  connaître.  Kncoura;;é  par  le> 
suffrages  de  critiques  érlairé^.,  il  prépa- 
rait des  travaux  plus  imp'irtanls  lois- 
que  des  chaurins  vinrent  empoison- 
ner et  abré«;er>on  existence.  Uesié  lon;;- 
lemps  veuf,  il  s'i'tait  remarié  et  rési- 
dait dans  une  maison  de  campagne 
près  dr  Fontenay-le-(^mte  (Vendée), 
avec  sa  jeune  épouse  qu'il  eut  la  dou- 
leur de  perdre  ;  et,  ce  qui  mit  le  com- 
ble \  son  affliction  ,  un  fils  qu'il  avait 
en  de  son  premier  mariai;e ,  se  tua 
sur  le  corps  de  .sa  belle- mère  ,  pour 
laquelle  il  avait  conru  une  passion  fré- 
nétique. Kérivalanl,  dé>c<pérc,  ven- 
<rtv*a  propriété  et  aciiota  ,  dans  les 
environs  de  Nantes,   la  terre   de   La 


(i)  Il  r>l  aoininé  Ki*»t4!«T  dans  la  t«bU- drs 
J4ammmtk<  J*t  Mmtfi  dr  1797  h  1800.  Cf  ne  fut 
<|ii'»o  ilui  qor  IVdiu-ur  dr  ce  recueil  lui  rendit 
voo  T^riuble  nom. 


496 


KER 


Ver(lièr<'  où  de  nouvelles  rallniités 
ralleiulnieiit.  Au  mois  traoùl  1815, 
lors  de  l'invasion  de  la  France,  des 
troupes  prussiennes  furent  dirij^ées  sur 
la  Loirc-Infcrieure.  Zélé  royaliste, 
Kcrivalant  icçut  ces  étranj',ers  com- 
me des  libérateurs  et  en  lo-;ea  un 
^rand  nombre  chez  lui  ;  mais  ,  peu 
sensibles  à  cette  hospitalité,  les  Prus- 
siens devinrent  plus  exigeants,  et  ils 
finirent  par  tout  briser  :  les  domes- 
tiques furent  maltraités  ,  les  femmes 
se  sauvèrent  ;  et  Kérivalant  lui-mê- 
me se  cacha  dans  un  grenier.  Il 
survécut  peu  à  l'émotion  qu'il  avait 
éprouvée  ,  et  mourut  le  1 5  octob. 
1815  ,  après  avoir  ordonné  que  ses 
manuscrits  fussent  envoyés  à  M.  de 
La  Bouisse,  son  ami,  pour  les  pu- 
blier. Ce  sont  des  imitations  en  vers 
des  plus  belles  pièces  à^ Ausone  , 
des  traductions  des  épigrammes  choi- 
sies de  Martial  et  d'Oav«  ,  et  de 
plusieurs  élégies  de  Jlhulle.  Outre 
une  foule  de  vers  dispersés  dans 
les  1  ecueils  du  temps  ,  on  a  de  Ke- 
livalant  :  \.  La  Vendée  ,  poème 
rlègiaquc  ,  Paris,  1814,  in-8". 
lï.  Ef)i grammes  choisies  d'Oa^en, 
Iraduiles  en  vers  français,  Lyon, 
1819,  in-lS.  L'éditeur,  M.  de  La 
liouisse,  annonçait,  en  182'2,  que 
les  imitations  à'/iiisone  étaient  prêtes 
à  paraître  ;  et  qu'il  travaillait  au  com- 
mentaire dont  il  se  proposait  d'accom- 
I)agiicr  la  traduction  des  épigrammes 
de  Martial.  Les  recueils  de  la  so- 
ciété académique  de  Nantes  ,  dont 
Kérivalant  était  un  des  fondateurs, 
contiennent  (année  1808)  l'analyse 
(\\\n  essai,  qu'il  avait  composé.  Sur 
forlgine,  les  progrès  et  le  génie  de 
la  langue  française.  On  y  trouve 
aussi  son  Eloge  prononcé  à  la  séance 
publique  de  1815.  Une  notice  sur 
Kérivalant  a  été  insérée  dans  le  Jour' 
nal  ânecdotique  de  Caslelnaudary  , 
18  septembre  1822.  W— s. 


KLR 

KER\  (Vincent  de),  chirurgien 
et  médecin  Ci'ilèbre,  naquit  à  Gratz  en 
Styrie,  le  20  janvier  17G0.  Son  père 
était  x\\\  assez  pauvre  employé  chez  le 
comte  de  Schalgotsch,  mais  il  avait  de 
l'instruction  et  le  mit  en  état  d'entrer 
au  collège  avec  avantage.  Avec  l'esprit 
et  la  facilité  qui  lui  méritaient  les  prix, 
Kern  montrait  beaucoup  de  fougue  et 
d'indiscipline.  Placé  au  sortir  de  ses 
éludes  chez  le  chirurgien  IMédérer  , 
il  s'abandonna  à  tant  de  folies,  que 
non-seulement  Médérer  le  renvoya, 
mais  que  la  maison  et  la  bourse  pa- 
ternelles lui  furent  fermées  ou  peu  s'en 
faut.  Fort  mal  secouru  par  ses  camara- 
des d'oro-ie  et  de  bal,  il  quitta  Gratz, 
non  encore  détermine  sur  ce  qu  il 
avait  à  faire,  chemina  au  travers  delà 
Haote-StyrieparZeiringet  Judenburg, 
et  finit  par  entrer  comme  domestique 
dans  une  maison  du  Salzbourg  ;  11  ser- 
vit de  même  plus  tard  à  Trieste  et  à 
Venise.  Ainsi  aux  prises  avec  les  dures 
nécessités  de  la  vie  ,  il  vint  rapide- 
ment à  résipiscence,  se  remit  aux  étu- 
des médicales  abandonnées,  mais  aux- 
quelles il  ne  pouvait  plus  consacrer,  ou- 
tre la  nuit, que  quelques  furlifs  moments 
delajou.née.  Désormais  il  ne  sortait 
plus  sans  un  livre  en  poche  ou  à  la  main. 
Il  devint  pliilosopiie  pratique  en  même 
temps  que  cliirurgien,  et  il  fit  à  lui  seul 
un  cours  complet  de  psychologie  phy- 
siognomonique  expérimentale.  Celle 
espèce  d'aulodidaxie  communiqua  beau- 
coup de  vigueur  et  d'originalité  à  son 
caractère  ,  et  par  suite  à  ses  écrits. 
Enfin,  en  1783,  11  avait  économisé 
une  petite  somme  qui  lui  servit  à 
prendre  le  grade  de  maître  en  chi- 
rurgie à  Vienne  (1784),  avec  le  litre 
d'aidc-accoiicheur.  Quelque  temps  cii- 
foic  pourtant  11  vécut  de  privations. 
Mais  Leber,  un  de  ses  professeurs  qui 
avait  deviné  ses  hauts  talents,  lui  ouvrit 
une  ère  nouvelle  en  le  faisant  nommer 
chirurgien  du  duc  de  Saxe-IIildburg- 


KER 

Iimmu,  MMlc  pra  biillint  «anidoiiif, 
m.iis  (jiii  l(  mil  j  l'abri  du  l>r-iiiii. 
KriM  ititifita  Jr  Na  nou\clle  (losi- 
lioii  pour  s^  pfrf(rflinnner.  Dour  du 
Ijirnt  de  l'olivrixalioii  ,  il  rcconniil 
à  de>  cures  oj»érrfs  prcNqur  vpniilanë- 
mciil,  soun  le  chaume  de  misérahles  ea- 
Itanes  ,  romhicn  la  naliire  fait  plu* 
que  le  rliarlataiiisme  mnlical  pour  la 
^uérison  i\e>  maladies,  et  combien  il 
V  avait  il  simplifier,  a  retrancher  dans 
les  lofi^s  et  fastueux  proredrs  de  pres- 
que tous  ses  confrères  (1).  Kn  m^me 
temps  il  voulut  voir  comment  opéraient 
et  médiramentaient  les  étran;;ers.  Son 
séjour  à  Venise  avait  élé  fécond  pour 
son  instruction  et  surtout  pour  son 
esprit.  Il  sentait  que  plus  il  \errait  et 
rompaierait,  mieux  il  apprécierait  l'u- 
tile, le  funeste  et  l'indiflrreiit,  mieut 
il  discernerait  cnmnierit  lui-même  de- 
m'a  <c  romluiie  au  ihe\et  des  malade, 
et  ce  qu'il  dexrait  ou  ajouter  ou  ôler 
.lux  méthodes  allemainlrN.  Dans  cette 
vue  il  sisila  une  paitie  i!e  l'Allemagne, 
la  France,  l'Italie,  entendit  les  théo- 
lies  aux  univerÀÎtcs,  examina  la  prati- 

<  I  )  Vu  fait  rrinir.lujljt.-  qui  »r  |irr*«ala  alors 
.1  «..n  I  l»«rr«  >'  .«'iir   •!••  !•   pon-i   •\e 

,1.  j.art   dr     t..  .r%    et    d*    !...i|r.      r 

iii..Jilicjlii>ii<    ,  ,  I  6l    tubir  «   lj  iIk- 

rur^ir.  In  |iju«rr  maMu-Mvr*  Je  i'«u<ir»it  i|a'il 
bjlii'uit  tiait  iffrct»  dri'uit  plutieun  a)itM~v« 
il'iiB  ulrVrr  (1«  mauvjiM  itaiarr  à  Ij  j«nil>«. 
Tout  lr>  UMi^rna  riaplo^rt  ii'a*airnl  ainnir  «u- 
rm.r  aim  lior:iti"n.  I.«  malade  fe  tlriiruiiiu  i 
cuti»ullrr  Ir  jeune  cbirurKicu.  krru  eumina  t« 
mal  a«rc  :itlrntiun  ,  r(  ,  ne  «nrant  pji  Ij  |>fMi- 
Itililf  de  rniKerver  Ir  tnt  luhrr  ,  «e  coulriHa  de 
|irr»cTir-  U  proiirrlé  ,  la  repo».  •!  de»  loiiuui 
jtvc  dr  l'eau  Iirde.  Uu  rrtir,  il  promit  au  ma- 
ladr  de  lui  fjirr  une  trcunde  TÏtile  au  b«>ul  de 
quriqui»  juur«;  niait  de  iininbrru»e«  occupa- 
lioai  lui  Qreot  oublier  m  pruno  ^»e,  el  le  uialade 
allriidit  Taineinent  »on  inrdriui  |xudant  plu- 
•ienrt  temaine^.  moi  pour  cela  diaronlinurr  le 
Iraiiffiiieiit  qui  lui  avait  été  ordonaé.  tnGn,  fa- 
tigue du  luti|;  rrj<oi  auquel  il  était  cnndainiié, 
il  envoya  M  feiBine  demauder  à  Kern  »'il  deTjit 
eiirure  faire  te*  lotions  liéde»  et  gjrdrr  le  iit, 
p(ii«i]ur   «j   j>int>e  riait  presque    t  t 

|;uerie.    Kern,  se  rapprljnl  alor*  !..  ,1 

avait  dnniire.  ««  batd  d'dllrr  trou\  ir  .1 

Quel  fut  >uii  i-Ionnriu>  lit  eu  voTai.l  lu  crrr  eu 
pleiiM  voie  de  gurruoa  !  C«  recuirai  ioe^pérc 
ne  fui   p*rHn    ni     jMuir  lui  .   !ij    pour   la    science. 

I)_l>_,. 

I.TVIII. 


KER 


497 


<|uedan^  le^  liApItaux,et  entra  en  lela- 
tion  avec  di\ers  naxants  de  ces  (»a\s. 
Il  se  lendil  ensuite  à  Vienne,  aver 
troii  cents  llorins  qu'il  axait  reçu*  en 
donnant  sa  démission  à  llildbui;;hau> 
*en  ;  el,  apirs  >  a\t)ir  suivi  les  ci)ur.s 
u*ueU  ^17HS  IH)  ,  toujours  aitic  des 
recororoantljlions  de  I.eber  nui  le  mi- 
rent à  même  de  sub\enir  à  ses  dépen- 
ses ,  il  fut  admis  an  docl«)rat  (de  chi- 
nir^ieV  Pi'ti  dr  temps  après,  l'archidu- 
chessr  Mane  Anne  le  nomma,  de  la 
manière  la  plus  (laiteuse,  chirurpen  de 
sa  maison;  mais  bienl(^t  il  quitta  ce 
poste  pour  voler  au  recours  du  comte 
de  I lalzfcld  ^ra\ eroent  maladeù  l'i a>;ue, 
qui  a\ai(  pour  lui  une  \i\e  affection  et 
qui  lui  avsura  une  pension  via;;ère. 
Kern  eul  la  douleur  de  ne  pouvoir  sau- 
ver ce  noble  ami  ;  va  réputation  nais- 
sante, loin  d'en  souiïni  aiiriin  échec, 
ne  fit  que  |;raiidir  de  jour  en  j«Mii .  Dès 
170.'»,  il  fut  ailaché  comme  chirur- 
pen  à  l'élablissemcnt  des  sourds- 
muets  de  Vienne.  De  17117  à  1805, 
il  remplit,  au  l>céc  de  La>bacli  .  la 
chaire  publique  de  chirurpe  et  d'ac- 
couchement, et  plus  t.ird  il  >  fit  aussi 
des  leçons  sur  l'éducation  phvsique.  Ja- 
mais auparavant  ce  cours  n'avait  eu  le 
caraclcre  cminemmeiil  chirur^iral  (|u'il 
sut  lui  donner.  Sans  né^li;;ei  la  théorie 
palliolo^ique  et  les  principes  qui  doi- 
vent dt)miner  les  opérai  ions,  il  s'appli- 
qua surtout  à  former  des  opérateurs 
tant  en  décrivant,  en  anaKsant  les 
instruments  dans  tous  leurs  dVlails,  y 
compris  leurs  modificalions  et  leurs  per- 
fectionnements, qu'en  démontrant  la 
manière  de  s'en  servir.  Joij;naiit  le  pré- 
cepte à  l'exemple,  il  avait  la  prestesse 
de  main,  la  sûreté  de  coii(i  d'ail  d'un 
grand  opérateur.  Il  v  réunissait  une 
activité  in(atij;ab!c,  professant ,  {guéris- 
sant, écrivant  en  même  temps  avec  la 
même  facilité.  En  17î>S.  l'autoiité  su- 
périeure du  pays  lui  demanda  une  in- 
stmction  populaire  sur  l'inoculation  : 

32 


498  KER 

il  s'empressa  iVen  rédiger  une  qui 
est  un  chef-tVœuvre  en  ce  f!;emc  et 
qui  fut  répandue  par  milliers  d'exein- 
plaiies.  Il  voulut  ini'me  parcourir  toute 
la  Cainiole  et  la  ('arintlile,  pour  re- 
futillir  lies  reii5ei;:;ncmeiits  sur  le  motie 
et  les  résultats  de  Tinoculalion  dans 
ces  provinces,  en  général  rebelles  à 
toute  innovation.  Si  la  lucidité,  la 
promptitude  et  les  succès  de  Kern 
[ilaisaiont  à  quelques  personnes  d'élile, 
les  formes  vives,  ncltes  de  son  esprit 
supérieur  froissaient  beaucoup  de  lourds 
cerveaux  qu'il  entreprenait  de  convain- 
cre. Ses  confrères  en  général  le  goû- 
taient peu  :  on  le  trouvait  trop  expédilif, 
faisant  trop  peu  sonner  les  diftlcullés  : 
on  eut  é!é  c'iarmc  de  le  trouver  en 
faute,  on  brodait  ses  paroles,  on  lui 
prélait  (las  intentions.  Les  médecins  se 
plaignaient  de  ce  qu'il  empiétait  sur  la 
médecine,  lui  racconnnodeur  de  bras  et 
de  jambes  cassés  ;  et  ils  criaient  à  l'usur- 
pation. Le  racconnnodeur  de  bras  et 
de  jambes,  pour  faire  cesser  leurs  cla- 
meurs, soutint  des  thèses  et  reçut  so- 
lennellement le  docte  bonnet  (1799). 
(^)uatre  ans  après,  toujours  visant  à 
cire  des  premiers  au  courant  de  la 
science,  il  alla  à  Venise  apprendre 
de  Pajola  la  cyslolomie  que  cet  ha- 
bile praticien  venait  d'imaginer;  puis, 
avant  de  reprendre  la  roule  d'Allema- 
gne, il  visita  les  hr-pitaux  de  Padoue  et 
de  Trieste.  Deux  ans  après  ce  voyage, 
Kern  enfin  quittait  Laybach  pour  oc- 
cuper la  chaire  de  chirurgie  et  de  cli- 
nique à  l'université  de  ^Vienne.  Ce 
choix  était  le  plus  heureux  peut-être 
qu'on  pût  faire.  Il  ne  manquait  pas 
«i'élèves  à  Vienne,  mais  il  y  mamjuait 
de  la  méthode  et  une  direction.  Kern, 
par  la  vivacité  même  de  ces  formes  qui 
blessaient  les  liéotiens  de  la  Carniole, 
plut  à  cette  effervescente  jeunesse,  et 
prit  sur  elle  un  ascendant  iunuense,  (pii 
tourna  au  profit  de  l'ordie.  Guidés 
par  un  maître  passionné  pour  l'utile  cl 


KEU 

pour  le  vrai,  les  jeunes  gens  s'habi- 
tuèrent à  mettre  de  coté  les  subtilités 
oiseuses  qui  avivent  l'esprit  de  sophis- 
me sans  rien  produire,  et  plus  encore 
à  ne  se  laisser  ni  prendre  à  l'attrait 
d'une  innovation  qui  pose  sur  une  base 
fausse  ,  ni  imposer  par  l'antiquité 
d'une  vieille  erreur.  Quant  aux  opé- 
rations, elles  se  présentaient  plus  nom- 
breuses et  plus  ardues  à  Vienne.  La 
rare  habileté  qu'y  déploya  le  nouveau 
professeur  fut  dès  le  premier  moment 
pour  beaucoup  dans  la  vénération  que  lui 
témoignèrent  ses  élèves  :  sa  réputation 
devint  bientôt  européenne  ;  d'illustres 
sociétés  étrangères  lui  ouvrirent  leurs 
portes.  A  l'intérieur  il  ne  cessait  de  pro- 
voquer des  améliorations.  C'est  sur  sa 
proposition  que  fut  fondée  la  biblîo- 
thè(|ue  annexée  à  l'école  de  clinique  , 
bibliothèque  qu'il  enrichit  de  plusieurs 
centaines  de  siens  volumes.  C'est  à  sa 
sollicitation  que  le  baron  de  Slifft  créa 
V liistitiU  d' opérations  chirurgicales, 
aux  élèves  duquel  Kern,  tant  qu'il  vé- 
cut, prodigua  gratuitement  les  leçons 
de  théorie  et  de  pratique.  De  cet  éta- 
blissement et  des  cours  de  l'université 
sont  sortis  des  centaines  d'opérateurs 
remarquables,  et  peut-être  vingt-cinq 
professeurs  qui  tous  reconnaissent  com- 
bien la  chirurgie  actuelle  en  Autriche 
doit  à  Kern  de  simplicité,  de  prestesse, 
de  précision,  de  sûreté,  et  le  regardent 
connue  un  des  hommes  (pii  ont  été  le 
i)his  utiles  à  leurs  semblables.  Sexa2.é- 
naire,  il  voulut  encore  laire  un  voyage 
scientifique;  et,  en  1821-22,  on  le 
vil  parcourir  rAlIcmagiic ,  la  France 
et  l'Italie,  jusqu'à  isaples.  Il  vécut 
encore  se[)t  ans,  et  mourut  le  1G  avril 
1829.  L'empereur  l'avait  créé  cheva- 
lier, et  dans  la  dernière  année  de  sa 
vieil  fut  vice-directeur  des  écoles  mé- 
dico-chirurgicales et  vétérinaires  de 
l'université  de  Vienne.  On  a  vu  quelles 
îjualilés  distinguaient  l'esprit  de  Kern  : 
son  caractère   était  le   même  ,    très* 


KKf\ 

xrai,  lii-  Icnnf  ,  tf^s-ijft,  liiï  ..ml 
|p  m(nsoni;r  rllinlii^up,  iiurrliant 
rn  lii^nr  ttroitr,  dcinjsqu.tiil  impitu^a- 
lilrmrnt  Ir  rliniUtariiftitie  ,  loujotirs 
«lierclianl  le  positif,  ne  comiMciunl 
*\f  pro;;rci  que  par  la  simpliucatiun. 
De  là  \f>  noiiiliicux  riinrmis  (]uM  eut 
parmi  les  hotnniei  nîoJiocre<.  Vourh:i, 
quoique  docteur,  il  ne  croyait  pas  à 
toutes  les  proiuewcs  Je  la  métlecine,  et 
il  lui  ani\ait  souvent  Je  le  Jirc.  Il  pen- 
sait clicfprtail  que,  sur  ^in^l  maladies, 
îa  nature  m  ^urrit  neuf  toute  seule  et 
II-  le  mcJerin.  Sa  foi  en  l'art 

c  .  '  ;jil  un  peu  plus  forte;  mais 

là,  enroir.  il  cro>ait  que  les  tio<s  quarts 
Ju  temps  la  nature  fait  tout  et  le  pra- 
ticien rien.  Si,  continuellement  occupe 
par  des  cours,  par  sa  clientèle  et  sej 
I  dations  avec  les  hommes  influents  , 
Kern  n'a  pas  eu  le  temps  J'écrire beau- 
coup ,  &a  plume  pourtant  n'est  pas  res- 
tée iiiactive.  Voici  ce  qu'on  lui  doit  : 
I .  Mnuonmihiw  pour  l'introdui  tiun 
ilr  rinmulotinn  m  (Àirniole  [Y.i'iu- 
nerun^  z.  KinPiihr.,  etc.),  I^^bach, 
179S.  C'est  l'instruction  populaire 
dont  nousa\ons  parlé.  II.  ^Ipfirl  aux 
lutLittmts  de  tu  (larniulr  pour  iud- 
mission ^tiiéralr du  rua //i.Ij\bacli, 
1798.  On  voit  qu'il  fut  des  pre- 
miers à  proclamer  la  belle  découverte 
de  Jcnner  :  il  a>ait  nume  exi^é  que 
son  fJLs  tout  jeune  fût  des  premiers  à 
recevoir  le  vaccin.  III.  linnuniucs 
sur  fusugr  des  hui/is,  La\bacli, 
1 80iî .  1 V .  Propositions  fundunien- 
tulcs  de  lu  partie  marwelle  de  lu 
ninlerine ,  ibiJ.  ,  1803.  V.  .Innu- 
It'S  de  rli/titfur  chirurgicale  à  îè- 
I  oie  supérieure  de  tienne  ,  Vienne  , 
1807-09,  2  vol.  VI  (en  français). 
.  h'is  au.i  chirurgiens  pour  les  enga- 
ger à  adopter  une  méthode  plus 
simple,  plus  naturelle  et  woins  dis- 
pendieuse dans  le  pansement  des 
bUssés^  Vienne  ,  1809;  2^  édition  , 
IbiJ.  ,    182G  ;    trad.    en    allemand  , 


KFR 


km 


.biJ  ,  ISIO.  Vil.  Disumrs  sur  le 
mérite  et  l'imfHtrtiini  e  de  Péducutio/i 
p/iysitj'ue,  IHII.  \  \\\ .  De  ht  ma- 
nière de  traiter  les  nududes  après 
rampututioit  ,  \  irnne  ,  181  i;  lî*" 
cJit.  ,  1H2G  ,  traJ.  en  ilalim  ,  ibid., 
1820.  Cet  ouvra;;e,  lumineu:>ement 
écrit,  contient  un  ensemble  de  pré- 
ceptes, d'applications  et  de  recomman- 
dations qui  ne  peu\ent  i-tie  liop  pré- 
sentes à  touN  ceux  qui  s'occupent  des 
.soin^  à  donner  au\  amputés.  IX.  lit 
murtjues  sur  lu  lithotritie.  ou  Situ- 
i-rlle  méthoile  de  traiUr  la  pierre 
jHtr  iM'iule  et  Le  Huy  ,  \  iciine  , 
18'i6.  \.  De  remploi  du  Jer  chaud 
dans  dii*erses  maladies  ,  ibid.  , 
1 828.  XI.  Pathologie  de  la  pierre 
et  de  lu  tystotomie ,  chez  tun  et 
r  autre  sexe ,  ibid.,  18*28.  Peu  d'ou- 
vrantes ont  été  le  frnit  d'une  expé- 
rience plus  imposante.  Kern  avait  prati- 
qué la  cv>totcmie trois  cent  trente  <rpt 
fois  ,  et  dix  nulades  seulement  a\ aient 
succombé  aux  suites  de  cette  onération. 
So!i  volume  est  un  trésor  de  vérités 
pratiques,  et  il  sera  toujours  classique 
pour  le  lithotome  ,  même  se  ser\ant 
des  procédas  deCixialeou  de  tout  au- 
tre qui  différera  de  l'appareil  lillioto- 
mique.  XII.  Les  sersfires  de  la  cli- 
nitpte  chirurgicale  à  Vienne  du  18 
acril  180.-)/;  182V,  Vienne,  1828. 
XIII.  ()iser\'ations  et  remarques 
du  domaine  de  la  chirurgie  prati- 
(pie  ,  ibid.,  1828.  XIV.  Traité 
des  lésions  de  la  tète  et  de  la  perfo- 
ration du  ceri'eau  ,  ibid.  ,  1829. 
On  y  reconnait  encore  la  m.iiii  d'un 
des  mailrcsdela  science.  XN  .  Divers 
articles  àMxsWilmanach  impérial  de 
Cempire  it Autriche,  et  le  Discours 
iPiUK^erture  à  fecole  supérieure  de 
J'iemw  en  180:>,  182V.  XVI.  ]\Iu^ 
nuel  de  chirurgie,  tiré  des  leçons  Je 
Kern  ,  publié  par  R.-F.  Hussian  , 
son  élève  ,  Vienn«  ,  1831  ,  ln-8" , 
tom.  r'.  P— OT 

32. 


:>oo 


KER 


KER 


KERPEX  (George,  baron  de), 
jjoiicral  aiitriclncn  ,  né  le  26  mars 
1741,  enlra  dès  sa  jeunesse  dnis  la 
cariiôre  di^;  armes  ,  et  servit  d'abord 
d.i'.îs  rarlillerie.  Après  avoir  fait,  sous 
]>.-îiidn!i  cl  le  prinrc  de  Cohourg ,  la 
j;uerrc  contre  les  Turcs,  il  lut  employé 
en  179 Va  Tarmce  du  prince  de  Co- 
houv^  contre  les  Français,  et  s'y  di>- 
tinp,ua  dans  différentes  occasions.  En 
février  1797,  il  fut  élevé  au  f;rade  de 
feld-maréclial-lieutenant,  et  employé  à 
l'armée  d'Italie,  où  il  servit  dans  le 
Tyrol.  Pour  récompenser  son  zèle  et 
son  courao;e  ,  l'empereur  lui  donna 
en  juillet  de  la  même  année  le  ré^i- 
merit  de  Pele;^rini  infanterie  ,  et  le 
nomma  ensuite  orand-maître  d'artil- 
lerie. Le  baron  de  Kerpcn  se  trouva 
jiarmi  les  f^énéraux  faits  prisonniers  à 
LIm  en  1805,  et  comme  eux  il  subit 
tontes  les  humiliations  de  celte  igno- 
minieuse capitulation.  Après  ce  mal- 
heureux événement,  il  vécut  dans  la 
retraite,  et  il  y  mourut  le  26  octo- 
bre   18-23.  M— D  j. 

KEUSSEXlînOCK  (Hi  hman 
de),  historien  allemand,  naquit  vers 
1.')26,  d'une  faniille  originaire  du 
comté  de  Lippe  qui  s'était  établie  à 
Aiunstcr.  Il  fui  témoin  des  excès  et 
de  la  tyrannie  exercée  par  la  secte 
anabaptiste  dans  cette  ville,  cl  forcé 
avec  sa  famille  et  beaucoup  d'au- 
tres d'émir;rer,  par  suite  du  refus 
d'un  nouveau  baptême.  Quand  les  ana- 
baptistes eurent  été  chassés  de  Muns- 
ter ,  il  y  revint  pour  continuer  ses  étu- 
des. Après  (ju'il  eut  dirigé  pendant 
deux  ans  l'école  de  H  arum,  le  chapitre 
de  la  cathédrale  de  Munster  lui  con- 
lia  le  redorât  du  gymnase  ou  collè^'^e 
de  celte  ville.  Le  pro;;ramMie  des  étu- 
des de  cet  établissement,  qu'il  pid)lia 
en  l.').")!,  annonce  un  homme  très- 
capable  de  diriger  l'enseignement. 
Ce.  qu'on  remarque  surtout  avec  sa- 
lisfaclioii  dans   ce  plan,  intitulé  Ha- 


tîo  sludiorum  scholœ  monasterien- 
si'Sy  c'est  l'efiort  tenté  par  le  recteur 
pour  faire  raisonner  chaque  semaine 
les  élèves  sur  ce  qu'ils  ont  appris ,  et 
porrr  établir  une  sorte  d'exauren  nni- 
tuel.  Kerssenbrock  employa  ses  loi- 
sirs à  écrire  en  latin  l'histoire  des  trou- 
bles causés  par  les  ana!)aptistes  pendant 
son  enfance.  11  lit  précéder  cet  ouvrag;e 
d'une  description  intéressante  de  la 
ville  de  Munster.  En  1573,  il  en 
envoya  le  manuscrit  à  Colof;;ne  pour  le 
faire  imprimer  ;  mais  les  magistrats 
de  Munster  ayant  appris  que  l'his- 
torien parlait  avec  peu  de  ménage- 
ment de  la  conduite  de  quelques  fa- 
milles pendant  les  troubles,  et  contes- 
tait le  titre  de  noblesse  à  une  classe  de 
bourgeois  qui  prétendait  avoir  cer- 
tains privilèges ,  lui  enjoignirent  de 
soumettre  le  manuscrit  à  la  cen- 
sure du  conseil.  Kerssenbrock  obéit, 
mais  il  avait  eu  soin  de  faire  faire  des 
copies  de  son  livre  par  les  éroliei's.  En 
1575  on  voulut  le  forcer  de  changer 
plusieurs  passages  de  son  histoire,  et, 
sur  son  relus,  il  fut  mis  en  prison, 
îlclàché  ensuite  sous  cautior»,  mais  in- 
sulté par  les  bour-geois  privilégiés,  et 
menacé  sans  cesse,  il  profita  de  la  sus- 
pension des  cours  du  collège  ,  pen- 
dant une  épidémie,  pour  aller  pren- 
dre les  fonctions  de  recteur  au  collège 
de  Padcrboiii.  Toutefois  il  ne  put 
quitter  IMrrnster  qu'après  avoir  payé 
une  amende  de  deux  cents  rixdales, 
à  laquelle  il  avait  élé  condamné. 
Son  ouvrage  intitulé  H/'slorla  Juro- 
ris  aiwuiiplistici  est  resté  manu- 
scrit; il  eu  existe  plusieurs  copies 
dans  les  bibliothèques  de  la  Westpha- 
lie.  Deux  siècles  après,  on  en  a  publié 
une  traduction  allemande  ,  in- V\ 
]\L  r)aston  a  fait  du  manuscrit  latin  un 
court  extrait  en  fiançais,  et  l'a  publié 
sous  le  titre  de  Jean  Bockclson,  ou 
Ln  roi  dé:  Munster^  fragment  histori- 
que, Paris  et  iîesançon,  1824,  in-8". 


(^)uniqiic  riiljrlië  de  quelque  \>ir- 
lialilc,  cet  ouuaj^c  r>l  Irrs- estimé 
comme  ëtini  le  récit  le  plus  détaillé  , 
lait  par  un  témoin  omlaire ,  de  ce  qui 
s'ctait  yi'^sé  à  .Mui):lrr  peiidanl  (|ue 
\rs  aiiabaptistfN  él.iTiit  Us  mailrrN  de 
la  \illr.  l  II  l.iit.tln^us  rpi'si  ufHirum 
inunusterirnsluni,  rrdi^épar  Kcrs^en- 
I  lorL,  eit  également  resté  manuscrit, 
aiiiM  que  son  apprl  au  public,  relali- 
\rnieiita  la  conduite  injuste  des  ma;;i^- 
ti.ils  de  Munster  en%e:s  lui  :  (ùtu- 
stirum  ntfttwitatis  Mu  g.  Ilrrm.  a 
Krrssrn/tnnk  sutcinrftt  narrutio  , 
t  uni  eurutudrm  vera  rt  sotiilu  con- 
tuliilionr  ,  etc.  Il  composa  cette 
.ipolo«;ie  i  Weil  ,  où  il  s'était  re- 
tiré après  avoir  quitté  Padrrhorn. 
Dans  cette  derniore  \ille  il  a>ait  fait 
paraître  un  (Àituiuf^us  rfn'sro/uirum 
l*inIrrf>ornrnsium.  Non  content  de 
r^polo^ie  qu'il  avait  rédigée,  son  indi- 
{;nation  contre  le  corps  municipal  de 
Munster  s'exhala  en  saliies  qui  ral- 
lumèrent la  fureur  des  conseillers,  et 
il  fallut  toute  la  protection  du  ma- 
^i>trat  de  NN'erl  pour  le  mettre  à  i'a- 
l»ri  dr  nouvelles  pcivérulions.  Kers^^en- 
luocL  mourut  dans  le  lieu  desaietraite; 
(•n  ignore  en  quelle  annce.  1^ — (;. 
IvI:KVKLK(;AN  vAit.istin- 
lii  f\N  Mu>-Fn\>n»is  LKGovnRK  nr\ 
né  en  Itrela^ncle  17  sept.  17  \S, d'une 
famille  très-lionorable  de  la  lioui^^eru- 
sie,  fut  nommé  fort  jeune  sénéchal  du 
présidial  de  Ouimper  ,  et  ,  malgré  les 
avanta<;es  de  cette  place  ,  manifesta 
dès-lors  tous  les  sentiments  de  jalou- 
sie et  d'inimitié  qui  animaient  dans 
ce  temps-là  contre  le  clerf;é  et  la 
noblesse  la  plupart  des  hommes  de 
^on  ordre.  Kn  17SS.  il  fit  imprimer, 
sous  le  titre  de  llrjlc.xions  il  un  plii- 
losophe  breton,  un  panijth'.et  très-vio- 
lent dans  lequel  on  remarquait  le  pas- 
saj;e  suivant  :  ••  I.a  noblesse  cl  le  cler- 
«  f;é,  ces  deux  ordres  rapaccs,  se  sont 
•<  approprié  tous  les  avaîit3£;es  de  la 


KLi; 


:>oi 


«  société,  se  sont  emparés  de  toute:» 
«  les  issues  qui  conduisent  aux  lion- 
m  neurs,  aux  di-tinct:ons;  ont  fait  ta- 
•«  rir  |»our  nous  toutes  les  sourceN  de 
««  ^ai^ance  et  de  la  prospérité.  Ou 
M  nous  a  vexés,  marrré>  à  peu  pi  es 
•«  comme  de>  bétei  de  somme...  ••  Cet 
écrit  ,  foft  audacieux  pour  l'époque, 
fit  une  grande  srnsationcn  Iiiela;;ne,  et 
l'année  Mutante  l'auteur  fut  rludrputé 
de  la  senechausNce  de  (^>uinip«'r,  aux 
étals  ;;énérauk  ,  où  il  se  rangea  dès  le 
commencement  parmi  les  plus  ardents 
ré\olulionnaire>.  Il  fit  paitie  de  ce 
fameux  comité  breton  que  les  dépu- 
té.* du  liers-etat  de  lirela;;ne  lor- 
mèrciit  à  Versailles  ,  et  qui  fut  le 
n(i>au  delà  fameuse  société  des  jaco- 
bins. Kervelé;;aii  parla  peu  à  la  tribun? 
de  l'assemblée  nationale,  où  il  fut  un  des 
membres  du  comilr  chargé  de  l'aliéna- 
tion des  domaines  nationaux,  qui  ne 
comprenaient  alois  que  les  biens  ec- 
clésiastiques. Il  eut  plusieurs  alterca- 
tions avec  ceux  de  ses  collègues  qui 
ne  professaient  pxs  les  mêmes  opi- 
nions que  lui  ,  entre  autres  avec  le 
vicomte  de  Mirabeau,  rnntie  b  quel  il 
se  battit  au  pistolet,  et  qu'il  blessa  lé- 
gèrement. Mais,  après  le  vo\aj;c  de 
Varennes,  il  chanf;ea  enlièrcincnt  de 
svstème,  et  ne  montra  pas  moins  d'é- 
nergie dans  le  parti  constitutionnel, 
qui  fut  renversé  par  la  révolution  du 
10  août,  qu'il  en  avait  d'abord  mon- 
tré parmi  les  plus  ardents  nnvateur.s. 
liéôlu  par  le  département  du  Finistère 
à  la  Convention  nationale  en  1702,  il 
V  vota  la  détention  de  Louis  XVI 
et  son  bannissement  à  la  paix.  At- 
taché au  parti  de  la  Gironde  ,  il  dé- 
nonça, dès  lo>  premières  séances,  la 
fcîîilic  incendiaire  de  Maral  ;  devint  , 
ensuite,  membre  de  la  commission  des 
dou7.c,  opposée  à  la  commune  de  Pa- 
ris, et  fut  décrète  d'arrestation  le  31 
mai  1793.  S'élant  évadé,  il  fut  mis 
hors    la  loi  ,   et  vint   à    bout   de  se 


5oi 


KET 


KET 


soustraire  aux  poursuites,  en  se  cachant 
dans  son  déj)aiMemcnt,  où  incmo.  il 
|trocina  un  asile  à  quelques-uns  de.  ses 
compagnons  d'infortune,  qui,  oblij^és 
depuis  de  s'éloif^ner,  furent  arrcte's 
jirès  de  Bordeaux.  Kervelégan  rentra 
dans  le  sein  de  la  Convention,  après  la 
chute  de  la  Mou/agne,  devint  membre 
d'j  comité  de  sûreté  générale,  montra 
le  plus  giand  courage  lors  de  Tinsur- 
reclion  du  l^^praiiial  (20 mai  1795), 
où  rassemblée  eut  à  lutter  contre  la 
populace  des  faubourgs  révoltés,  et  y 
fut  même  blessé.  11  passa  ensuite  au 
conseil  des  Anciens  dont  il  fut  secré- 
taire. Il  en  sortit  en  1798,  fut  réélu 
en  mars  1799  à  celui  des  Cinq-cents, 
puis  entra  au  corps  législatif,  dont  il  fit 
partie  pendant  toute  la  durée  du  gou- 
vernement de  Bonaparte  ,  et  pendant 
la  première  année  de  la  restauration 
où  cette  assemblée  prit  le  nom  de 
chambre  des  députés.  A  l'époque  du 
i20  mars  1815,  Kervelégan  se  retira 
dans  son  pays  natal  à  Quimper,  où  il  est 
mort  le  '24'fév.  1825.  B— u. 

KETEL  (Puchard),  bon  lati- 
niste, n'est  connu  que  comme  l'édi- 
teur du  recueil  dont  on  va  parler.  Né 
vers  1670,  peut-être  en  Hollande,  il 
était  en  1700  recteur  du  gymnase 
de  (iouda.  Ce  fut  cette  même  année  ou 
h  suivante  qu'il  mit  au  jour  son  re- 
cueil des  grammaiiiens  latins  ;  mais 
cette  première  édition  et  la  seconde  qui 
parut  peu  de  temps  après  sont  deve- 
nues si  rares  que  Chr.  Sax  n'en  avait 
pas  pu  découvrir  un  seul  exemplaire 
dans  les  bibliothèques  d'Allemagne 
(Voy.  Onumdsticun,  VI,  annlcrta, 
6li).  Le  catalogue  de  la  bibliothèque 
du  roi  ne  cite  que  la  troisième  édi- 
tion, dont  voici  le  titre  :  De  clcgan- 
tiori  lalinitate  comparanda  scripfo- 
res  sr.lecti,  Amsterdam,  1713,  in-V% 
Atwx  part.  Ce  recueil  qui  est  trcs-es- 
timé  contient  :  Card.  IIadriani  De, 
sermone  laiino  etvenalio. — Gifanii 


Ofjseronfionrs  singuïai'cs  inlinguam 
liitinam.  —  SciOPii  Obscrva/ioncs 
ling.  lat.  —  P.  Vavassoris  Obser- 
vationes  de  vi  et  usu  verburum  f/uo- 
rumdani  latinor. ,  et  De  ludicra  die- 
tione.  En  tête  de  la  première  partie 
est  une  bonne  préface  de  l'éditeur, 
intitulée  :  De  ratione  imilandi  opti- 
mo^:  ling.  lat.  scriptores.  AV — s. 
KETT  (Henri),  professeur  et 
homme  de  lettres ,  né  à  Norv^'ich  en 
1761 ,  passa  des  écoles  de  cette  ville  au 
collège  de  la  Trinité  dans  l'université 
d'Oxford,  et  s'y  fit  remarquer  de  AVar- 
ton,  alors  doven  de  l'établissement. 
Se  vouant  à  la  carrière  professorale, 
il  prit  le  grade  de  maître- ès-arts,  de- 
vint membre  du  corps  enseignant , 
étudia  profondément  la  théologie  et 
l'histoire  ecclésiastique,  et  au  milieu  de 
ces  travaux  trouva  le  temps  de  publier 
non  seulement  quelques  compilations, 
mais  encore  des  ouvrages  importants, 
qui  eurent  un  vrai  succès,  et  de  coo- 
pérer à  la  rédaction  du  Gentlemon's 
magazine  et  d'un  autre  recueil  pério- 
dique, l'O//^  ^oJr/V/«,  à  la  tête  du- 
quel étaient  Mcnro  et  Horne.  En 
1793  il  se  mit  sur  les  rangs  pour  la 
chaire  de  poésie,  mais  Hurdis  l'emporta 
sur  lui.  En  1808  il  résigna  ses  fonc- 
tions dans  lesquelles  il  eut  Ingram  pour 
successeur,  et  partagea  son  temps  entre 
le  séjour  du  collège  d'Oxford,  et  les  bé- 
néfices qu'il  obtint  à  diverses  reprises. 
Comme  beaucoup  de  ses  collègues,  il 
était  dans  les  ordres,  et  il  avait  fini  par 
avoir,  indépendamment  d'un  titre  de 
prédicateur  du  roià  WhitehalJ,  la  cure 
d'Hvlceham  (Lincoln),  laquelle  n'é- 
tait guère  qu'une  sinécure.  Il  n'eût 
tenu  qu'à  lui  d'y  joindre  d'autres  bé- 
néfices à  son  choix,  parmi  ceux  dont 
son  collège  avait  la  jouissance;  mais  il 
laissa  toujours  de  plus  jeunes  les  ob- 
tenir. Il  le  pouvait.  Sa  fortune  per- 
sonnelle ,  celle  de  la  femme  qu'il 
épousa  un  peu  tard  (en  1823),  se  mon- 


KCT 

Uif'nt  à  |>lii|>  (Je^ixrrnl  iiiillr  Gaiir^. 
Il  fl.iil  un  peu  moins  in«rn>iblr  à  h 
:;l(»Mr  d*é\it  |»rr>i«lrtil  liii  co!lr-r  :  mnls 
riru\  fois  va  fAiidiiLiturc  à  ce  lilrc 
(  rhoua.  Sa  mori  fut  I»rn5qiie  :  il  ite 
crowit  fort  liMH  nagrur;  en  \isiferhfz 
lin  de  ses  amis  à  Slanwell,  nprès  avdir 
aiment  et  copiensement  drjcim«?  ,  il 
"«'axisa  dr  vouloir  prendre  un  bain 
r;nid;  probablement  une  crampe  le 
aisit,  on  ne  retrouva  que  ses  babils 
v.T  le  riva;;e  [U)  juin  l8'i.')V —  Le» 
•  livrâmes  de  Kett  sont  :  I.  l/Ht's- 
I  !rr  intrrf/rrtr  tirs  f)rophrties  .  ou 
('oup  (firil  sur  1rs  prophrtirs  dr  la 
llifilr  rt  trur  arruntplissrmrnt  ,  etc. , 
()xU):d,  17»m  IM»,  3  vol.  in  t-»,  plu- 
-^eurs  fois  réimprima  depuis  en  2  \ol. 
iii-H".  Cet  ouvrage,  écrit  d'un  st^le 
Nimple  et  populaire,  est  un  des  meil- 
leurs qu'ait  inspirés  un  sujet  si  ricbe 
ri  si  Tappant.  KeU  \  montre  beau- 
coyp  de  sa\oir,  et,  ce  qui  vaut  mieux 
encore,  beaucoup  de  sa;:acilé  à  rap- 
procher les  oèncnierits  dr  la  prédic- 
tion ,  à  mettre  en  relief  leur  carac- 
tère inconnu,  à  y  découNcir  dr$  cir- 
roiisiances  et  îles  nuances  peu  saisies 
aupara\ant.  Tout  s'encbaine  avec  mé- 
thode, avec  aisance;  peu  ou  point  de 
controverse  ,  mais  l'art  avec  lequel  les 
faits  sont  tantôt  fjroupés,  tantôt  éche- 
lonnés, tient  lieu  de  discussion,  et  l'on 
peut  dire  qu'il  v  a  démuiisttation  sans 
preuve.  I/ensemhIe  peut  cire  lu  avec 
pl.ii>ir,  même  par  des  lecteurs  superfi- 
ciels, et  les  hommes  plus  sérieux  y 
puiseront  encore  des  choses  utiles. 
II.  I''Irmrnts  ^rnrrnux  t/rs  cori- 
ndisstinces,  ou  Inlnnlurtion  aux  //- 
crrs  utilrs  (liiTfi  1rs  hninrhrs  prin- 
I  ipalrs  de  la  littrraturr  rt  drs  arts , 
ISO'2,  2  vol.  in-8  \  auxquels  nous 
joindrons  les  Additions  auv  rlr- 
nwnts  grnrraur  drs  ronnaissanrrSy 
lS()-2,  in-8".  fji  netteté,  l'exactitude, 
la  conciMon  élégante  sont  les  (grands 
racrilcs  de  ce  manuel,  destine  spéciale- 


KET 


?o3 


mentaux  jt  -    de  runi\ersité. 

Outre  lesex;  -  principes  et  \n 

résumés,  on  v  trouve  une  partie  bt 
bl>o;;rapbi(]ue  fort  bien  f:«ile  et  qui 
indique  aux  lecteurs  1rs  litres  on  il. 
doivent  puiser.  Tes  l'.lrmrnts  ont 
eo  aassi  plusieurs  éditions.  III.  Im 
loi^iqur  rrndtir  aisrr,  ou  /W  stif- 
I  i::t  tr  dr  la  manirrr  dr  raisonnrr 
(f  Iristufr  ,  IStm,  in  li.  K.II  , 
cette  fois,  avait  usé  un  peu  trop  de 
sa  méthode  expciblive  :  on  peut  le 
voir  aux  inexactitudes,  aux  laruiirs,  à 
la  lé'N-reté  des  appréciations.  ïj  criti 
que  ne  se  fit  pas  faute  de  relever  ces  dé 
fauts  ;  il  eut  le  bon  esprit  non  seulement 
de  ne  pas  s'en  f.irlier,  ^r  ne  pas  e^sat  rr 
de  polémique,  mais  encore  de  retirer 
tout  doucement  le  plus  qu'il  put  d'exem- 
plaires de  la  circulation.  IV'.  Parsîrs 
dr  jrunrssr,  ITUIÎ.  On  ne  peut  louer 
tiaus  res  Porsirs  qu'une  facilité  dont 
l'auteur  a  quelquefois  abusé,  et  qu'il  a 
souvent  portée  jusque  dans  la  morale. 
Aussi  eut-il  regret  de  ces  péchéi  de 
jeunr-se,  et  mit  il  à  les  faire  di«;pa- 
raitre  une  activité  qui  en  a  rendu  les 
exemplaires  fort  rares.  Quant  à  la  va- 
leur poétique  de  l'œuvre,  nous  nous  en 
tenons  au  ju;;ement  deréj»i;iramnuti>tc 
(Th.  Warton)  qui  dit  à  peu  près  ; 

V«ii  c»  urt  .  fhliqne  {irrCidc  ! 
Pt  in  dir.'»  aT*c  r*i»on 
i}99  »i  Krtl  II  Vît  p4%  us  Ovid^, 
Du  muios,  ma  foi,  c'c*t  un  tNjton. 

V.  Voyagr  aux  lars  du  (lundtrr- 
land  rt  du  Jfrstmorr/tintl ,  1708 
(dans  le  Tiniristr  anglais  licMavor). 
Ce  voyage  ne  contient  j;uèrc  qu'une 
quarantaine  de  pa^es.  N  I.  Srrntons 
prêches  à  O.x for d,  1701,  in-S".  D'a- 
près un  lej;s  fait  par  Ibmpton,  1:20  liv. 
sunt  assij^nées  chaque  année  à  un  ec- 
clésiastique appartenant  à  l'université 
pour  T  prononcer  huit  discours  sur-  des 
matières  reli;;ieusc«:.  Ceux  de  Rett 
firent  quelque  sensation  dans  le  temps, 
parce  qu'il  débuta  par  y    juclificr  le 


io4 


KET 


caractèie  des  Pères  de  l'Eglise  comme 
historiens,  contre  les  imputations  de 
Gibbon ,  de  Mlddleton,  de  Prieslley. 
\IL  Emilie,  1809  ,  3  vol.  in-12  ; 
2^  édition,  très-auo;mentce,  1812.  — 
Mil.  Une  traduction  du  Génie  du 
christianisme  ,  de  Chateaubriand  , 
sous  le  titre  de  Beiiulrs  du  diristia- 
nismc  aoec  préface  et  notes ^  1812,3 
vol.  in-8".  i.c  titre  ne  porte  point  le 
nom  du  traduciciir,  mais  la  notoriété 
publique  a  toujours  altribué  cette  ver- 
sion à  Kett.  IX.  Mélanges,  lesquels 
liC  sonlautre  chose  qu'une  réimpression 
des  articles  en  prose  donnés  vers  1787  à 
voila  podrida.  Ces  lé^^crs  morceaux 
unissent  à  la  finesse  des  observa- 
tions et  au  bon  sens,  beaucoup  de  sel 
et  d'humeur.  X.  LesJIciirs de  fesprit, 
ou  Recueil  de  bons  mots  anciens  et 
modernes,  1814,  2  vol.  in-12,  Kett 
donna  aussi  une  nouvelle  édition  des 
Beautés  de  la  poésie  anglaise  de 
AVadlew,  1810,  2  vol.  in-12,  avec 
ujie  notice  sur  l'auteur.  Il  préparait  une 
I  eimprcssion  des  Proocrhes  grecs  de 
I.ubin  avec  traduction  anglaise,  et  l'on 
en  a  trouvé  la  co^ue  ti  ès-avancée  dans 
i>cs  manuscrits.  Enfin,  il  a  laissé  beau- 
coup de  sermons  manuscrits  aussi,  avec 
prurc  au  docteur  Mavor  son  ami,  de 
dt'cidcr  s'ils  devaient  ou  non  voir  la  lu- 
mière. Il  est  probable  qu'ils  ne  la  ver- 


ront pas. 


()T. 


KEI  TILHUADSSOi\ 

(Matts  ou  Matthias),  administra- 
teur du  rojaumc  de  Suède  ,  parvint 
par  son  seul  mérite  à  cette  dif;nlté 
cminentc.  Tous  les  historiens  s'ac- 
cordent à  dire  qu'il  était  d'une  fa- 
mille absolument  Inconnue.  Dès  sa 
jeunesse  il  se  iiistin[;iia  par  sa  bravoure 
dans  les  combats,  notamment  contre 
iesUussesqui,  en  1291,  avaient  envahi 
la  Finlande,  et  qui,  en  1293,  furent 
repoussés  jusque  dans  l'In^^rie.  Son 
couraf^e  qui  l'avait  mis  en  évidence,  et 
SCS  autres  qualités  brillantes  et  solides 


KET 

lui  valurent  d'être  admis  dans  la  fami- 
liarité des  ducs  Eric  et  Valdemar, 
frères  du  roi  Birger  [Voy.  Birger, 
IV,  514).  Ils  le  considéraient  com- 
me le  plus  vaillant  et  le  plus  avisé 
des  hommes  de  leur  cour.  Quand  ils 
se  soulevèrent  contre  ce  monarque,  en 
1304,  Keltilmundsson  leur  rendit  des 
services  signalés ,  et  leur  procura  des 
avanîao^es  dans  plusieurs  circonstances 
importantes.  Birger,  faible  et  ingrat, 
a^^ant  sacrifié  Torkcl  Knutsson  , 
son  tuteur ,  ses  frères  ne  tardèrent 
pas  à  devenir  plus  puissants  que 
lui,  et  s'emparèrent  de  plusieurs  villes 
fortes,  entre  autres  de  Stockholm  qui 
fut  prise  par  Kettllmundsson.  Après 
la  mort  de  ses  frères  causée  par  son 
infâme  trahison,  en  1317,  Birger, 
devenu  l'objet  de  la  haine  générale,  fut 
obligé  de  fuir  devant  l'armée  des  mé- 
contents :  Kettllmundsson  la  comman- 
dait; bientôt  il  convoqua  une  assem- 
blée des  grands  à  Skara,  s'y  fil  décla- 
jer  administrateur  du  royaume,  et  prit 
successivement  Nykœping,  Stegebnrg 
et  d'autres   places  ;  ensuite  il  fondit 


la    Se 


anic 


et  forç.-] 


le  roi  de 


Danemark  à  conclure  une  trêve.  Il 
réunit,  en  1319,  une  dicte  où,  con- 
trairement à  l'usage  ,  les  habitants 
de  la  campagne  et  les  bourgeois  des 
villes  furent  appelés  ,  et  parurent 
pour  la  première  fols  en  qualité  d'é- 
tals du  royaume.  La  diète  se  tint 
dans  le  champ  de  Mora  près  d'Upsal. 
Un  chevalier  parla  le  premier  pour  re- 
montrer à  l'assemblée  la  nécessité  de 
choisir  un  nouveau  roi,  les  crimes  et 
l'ineptie  de  Birger  ayant  occasionne 
tant  d'événements  désastreux  :  puis 
Kettllmundsson  s'avança,  portant  dans 
ses  bias  Magnus,  fils  du  duc  Eric,  et 
prononça  un  discours  si  énergique  et 
si  touchant  que  chacun  s'empressa  de 
prêter  serment  de  fidélité  et  d'obéis- 
sance au  jeune  prince,  à  peine  âgé  de 
trois  ans.  La  régence  fut  exercée  par 


KLi 


KL\ 


un  loiiMril  composé  de  mx  |nrl.«|.  ri 
de  \iii{;l-neuf  ^n^iifiir.-»  laïques.  <^)ticl- 
(|ue  ieni|>s  au(*arj\aiit  ,  un  e\rquc 
el  su  c);e\alit*rs  cUicnt  partis  pour 
OpNio,  alors  capitale  de  la  Nor\è^e, 
ahii  de  coineiiir  a\rr  le  conseil  su- 
pirme  de  ce  pa>s  de  la  marche  à  »ui- 
\ie  pour  le  ^ou\r[nement  des  deux 
io>.iuine>,  rcunis  sous  une  mfmc  main. 
Oiii^iioie  quels  niutir>  dclei  niinrtent 
!\r!tilmuri(lN()n  à  se  demedre  de  la  tu- 
irlic  du  jeune  loi,  el  de  la  cliar>;r  d'ad- 
miiii>lralrur,  qui  fut  occuper  par  Knut 
Jol:.ins5on.  Nranmoins  il  ronser\a  la 
pliLs  ^ranûe  Inilueuce  dans  les  affaires, 
ri  fa  rendre  de  sa;;es  ordonnances. 
II  a^randil  le  teiritoire  de  la  Surde  en 
>  rriMPssanl  la  Scanie,  la  lilelinjjie  el 
Ir  Ilalland  méridional,  qui  en  axaient 
»tf  lon{;lcmps  srpaiés.  Il  rclablil  la 
lianquillilc  >ur  les  fronllères  par  des 
campa;;nes  l»eureu>es  contre  les  I)i- 
nois,  les  Uu>NrN,  el  Canut  ,  duc  du 
Ilnlland  replcnlnonal.  F.niin  il  mit  un 
ffcin  à  Taxidité  dc>  >ille>  ar-^caliques 
qui  allumaient  des  pri\ilr;;cs  dont  leur 
romineicc  jouiNsail  en  Suède  et  en 
Nor\c^e.  \  sa  mort  ,  airi\éc  en 
i'.VM,  !\Ia(;nus  qui,  raiinée  précé- 
dente ,  axail  atteint  sa  majorité  prit 
lf<i  inies  du  gouvernement  el  les  tint 
peu  lialiilemeiit  (  f  oy.  M.MjNLS  , 
\\VÎ,  1V3}.  KetlilnanuKson  fut 
icdc\.«l'lc  de  >ei  premiers  sucres  daii> 
la  f;ueric  à  sa  force  corporelle,  qui 
riait  p(()di^icu>c,  et  dont  il  abu^a  quel- 
quefois. Les  liistoricns  de  .«^on  pa\s, 
tout  en  rendant  justice  à  son  acti- 
\ité,  à  sa  prudence,  mêlée  de  har- 
diesse, lui  reprochent  son  manque  de 
f;énciojité  ,  son  ingratitude  en\eis 
quelques-uns  de  ses  Lietifaileuis ,  et 
son  peu  de  préxovance  dans  les  con- 
cessions qu'il  fit  au  clergé.      E — s. 

KKVSLER  (Ji-an-Ckorges)  , 
antiqii.iir,  naquit  en  1(>89  à  Tliur- 
naw  dan>  rë\cché  de  lîamherj;.  Ayant 
achevé  .<es  éludes,  il  visita  la  Hollande 


el  l*An;;leterre  pour  perfectionner  ses 
connaivsanrrs.  Pendant  son  séjour  à 
Londre»  il  fut  admis  a  la  société  i  o^ale, 
aprè^  la  communication  d'un  mémoire 
sur  la  dce.NNp  .\r/mlanni  \tfm!tfur, 
divinité  des  anciens  (iermains  qui  pré- 
sidait  à  la  mer.  De  retour  en  Aiiema- 
pne,  il  N'rtabiit  a  /rll  dall^  le  Hano- 
vre, et  se  chargea  <Ie  l'eiiiicatiftii  de> 
retits  fils  du  comte  de  lin  n  toil,  dont 
un  a  rendu  drpiiis  de  si  ;;rjnd.s  service» 
au  DanrinarL.  Il  condiii>il  ^es  élrvr^  à 
raradrmie  de  Tuiilii^iie,  et  en  ITlîl) 
les  ac rompauna  ,  connne  ;;ouvcrneur, 
dar.s  les  principales  cours  de  {'Kuiopc. 
Avant  eu  l'occasion  de  faire  un  ^rand 
nombre  de  remarques  échapjiees  à  »es 
devanciers,  il  employa  les  dernières 
années  de  sa  vie  à  rédiger  ni  vo>a"es, 
et  mourut  au  château  de  Iicinslori  en 
17i3.  Ses  principaux  ou\ra;;es  sont  : 
I.  tntiifuitiilrs  sricilœ  scpteiitrio- 
luilrs  et  celtifit.  Ilanovie,  17*J0, 
inS",  fi^.,  rare.  Ce  volume  conlient 
six  di.vsertalions  :  sur  le  monumnit  du 
comté  de  Salisburv  connu  sous  le  nom 
de  Stuiit'-IIiiigr^  que  l'auteur  croit 
être  un  tombeau  ;  .sur  la  déesse  \rhu- 
irn  ^  avec  le  plan  d'une  m^tholnpc 
des  anciens  Germains;  sur  le  gui  des 
Druides;  sur  la  défense  faite  aux  («ei- 
mains  de  man-;er  de  la  chair  ih  che- 
val ;  sur  leurs  fêtes  religieuses  ,  et  les 
libations  qu'ils  faisaient  dans  leurs  sa- 
criGces  el  dans  leurs  festins;  sur  les 
driiidesscs  cl  la  farultc  qu'on  leur  at- 
tribuait de  prédire  l'avenir  ;  cl  enfin 
la  description  d'une  urne  sépulcrale 
découverte  en  171Î)  à  Neilin^,dans 
la  Basse-Marche.  II.  Ncuesfr  lui 
sf,  etc.,  Nouveau.x  vovnj;esen  Allf'ma- 
{^nesen  liohémc.en  Hont;rie, en  Suisse, 
en  Italie,  etc.,  Hanovre,  t7iO-Vl,2 
vol.  in-i''.  Après  la  mort  de  Kcyslcr, 
ses  Voyages  f:  e  it  réimprimés  avec 
des  additions  deCodcfr.  Schulz,  ibld., 
1751  ;  et  il  en  a  paru  une  troisième 
édition  en  1776,  2  vol.  in-V".  Ils  ont 


5o6 


KHE 


KHE 


cic  Uadiiits  eu  hollandais,  Amsterdam, 
IT.'î.'î,  ei  en  ant;lais,  Londres,  1750- 
57,  ï  vol.  in-4".  Les  critiques  ne  s'ac- 
cordent pas  sur  Iç  mérite  île  Ke\sler 
comme  voyageur.  J.-3Iath.  Gesner 
(ad  isagogen)  en  porte  un  juf^ernent 
très-lavorable  ;  mais  Gérard  llcnrkcns 
(  ^  oiahil.  lib.  Ici  11)^  en  lui  accordant 
uwt  Jurande  dilio;ence,  se  plaint  qu'elle 
ne  lût  pas  diriiiée  par  le  bon  sens 
[diligcntia  siolida] ,  et  le  cjlèbre 
^yinckelmann  dit  que  les  Voyages  de 
Iveysler,  pour  ce  qui  ref:;arde  les  ou- 
vrages de  l'art,  soit  de  Kome,  soit  des 
autres  villes  de  l'Italie,  ne  méritent 
pas  d'être  cités  ;  car  il  n'a  fait 
que  copier  les  plus  mauvais  livres  en 
ce  genre  (  préface  de  V Histoire  de 
/Vvr/,  trad.  de  Ja;isen).       W — s. 

KIIELL  (le  P.  Joseph),  savant 
numismate,  naquit  en  1714,  à  Lintz, 
dans  la  Haute-Autriche.  Avant  em- 
brassé la  règle  de  Saint-Ignace,  il  pro- 
fessa successivement  dans  divers  collè- 
ges de  la  société,  l'hébreu,  la  philoso- 
phie, l'histoire  et  la  critique  des  textes 
sacrés.  Ses  talents  ne  pouvaient  man- 
quer de  le  Caire  connaître.  Nommé 
conservateur  de  la  bibliothèque  Garclli 
{Voy.  ce  nom,  XVI,  468),  et  du  ca- 
binet de  médailles  de  l'académie  thé- 
résienne,  il  mourut  à  Vienne,  le  4 
nov,  1772.  Outre  une  édition  de  l'ou- 
vrage de  Frœlich  :  deFnmilia  Vabal- 
hithi,  nuniis  ilîuslruta,  précédée  de 
V Eloge  de  l'auteur  [Voy.  Frof.lich, 
XVI  ,  98),  on  a  du  1>.  Khell:  I. 
AucloriUis  iitriusqite  lihri  Macltii- 
baarum  canonico-hisforica  ndju/a  ; 
et  Froelicliianî  annales  asserli , 
Vienne,  1749,  in-4"  (1).  II.  Physira 
ex  recentioriini  ohseroationihiis , 
ibid.,  1752-53,  2  vol.  in-4".  C'est 
le  cours  qu'il  avait  composé  pour  ses 
élèves  de  philosophie.  111.  Kcloga 
observa /ionum  in  nooi   TcstaineiUi 


(  I  )  Ot  oavra^^e  anonyme  n'a  poinl  itqçoqmi 
de  Ddrbirr. 


libris ,  ibid.,  1756,  in-8°.  Cet  ou- 
vrage est  très-estimé.  W .  De  cpocha 
historiœ  Vwth^  ibid.,  in-12.  V.  Epis- 
iohx.  dnœ  de  iotidein  munis  œrris 
numopliYlacii  Haoeriani ,  ibid.  , 
1761,  in-4°.  Dans  la  seconde  de  sis 
lettres,  l'auteur  expose  ses  raisons  de 
suspecter  la  médaille  de  Vespasia 
Folla,  du  cabinet  de  Havern.  Celle 
opinion  trouva  des  contradicteurs.  Jo- 
seph Monsberger  défendit  l'aulhcnli- 
cité  de  cette  médaille  dans  une  disser- 
tation à  laquelle  le  V.  Khell  ne  jugea 
pas  à  propos  de  répondre.  VI.  J)c 
numismate  Angusli  uureo  jornux. 
maximœ  ex  ruderibus  Hcrcuhnti 
eruto  libellus,  in-4" ,  réimprimé  dans 
les  Arta  erudit.^  1763,  p.  591-616. 
Le  médaillon  qui  fait  le  sujet  de  celle 
curieuse  dissertation  est  celui  qui  a  été 
gravé  au  frontispice  du  tome  11  des 
Peintures  trouvées  à  Herculanum. 
VIL  La  traduction  latine  du  Tcsoro 
britannico  de  Haym,  Vienne,  1762- 
65,  2  vol.  in-4",  enrichie  des  notes 
qui  la  rendent  bien  supérieure  à  l'ori- 
ginal (Voy.  Hay.m,  XIX,  523). 
Vni.  Un  bon  supplément  d'après  les 
médailles  du  cabinet  thérésien,  à  l'ou- 
vrage de  Vaillant:  jS^umismata  iiii- 
perator.  rom anorum ,^  \cnney  1767, 
in-4°.  Ce  volume  n'est  pas  comnnin 
en  France  [Voy.  Vaillant,  XLVII, 
255).  VY— s. 

KIÏÉRASKOFF  (Michel- 
Matskiimtcii  de)  ,  poète  et  littéra- 
teur russe,  ne  le  25  octobre  1733, 
était  issu  d'une  famille  noble  de  Vala- 
chie,  qui  vint  s'établir  en  Riissie  sous 
le  règne  de  Pierre-le-Grand.  Son  père, 
ofGcier  dans  le  régiment  des  chevaliers- 
gardes  ,  le  destinant  à  l'élat  mili- 
taire, le  plaça  dans  le  corps  des  cadets. 
A  sa  sortie ,  en  1751 ,  il  reçut  le  brevet 
de  lieutenant,  et  pritrang dans  l'armée  ; 
mais  ,  plus  désireux  de  cueillir  des 
lauriers  sur  le  Parnasse  que  sur  les 
champs  de  bataille,  il  abandonna  bien- 


lAl  la  profo^inn  dw   aroin  pour  celle 
•'•  '^i'>  succrs  tljiit  ceU"?  inni- 

^  0  fuèirtit  rallciilion.  \«1- 

lOf..»  i'utiitrrMlr  Je  ^Io^fotl^lc^  sarrr.i 
liou  (IKO:)),  il  m  (!c\iut  plus  t.inl 
\f  curjU'ur.  Mcinhrc  de  racadéinle  iin 
pcriale  dcibcilcs-lellreiel  de  |ilusieiirs 
autres  coropa»nie«  savantes,  il  fui  en- 
core nomme  conseiller  de  cour  et  vice- 
prisulent  du  collf;;e  des  mines;  enfin 
il  fut  di'foré  de*  ordres  de  Saint -Via- 
diiiiir  et  de  Sainte-Anne.  KhcrajlnfT 
mourut  le  27  sept.  1S07.  Krnule 
des  Loroonosoiï  et  des  SoumoiolufT 
(/o).  ces  noms,  \\IV,  GGO,  et 
XI.III,  18i\  il  lient  un  ran;  distin- 
{;ué  auprès  d'eux.  I/adrairation  qu'il 
a  excitée  n'a  pas  été  ciiconscrite 
dan-,  .son  pa>$;  les  étran;;ers  ,  entre 
autres  l^\es<]ue  {ifisloirr  tir  liussir^ 
lom.  V),  lui  ont  donné  de  justes  clo- 
;;e4.  Chez  lui  la  rectitude  du  lanj;af;c 
n'en  affaiblit  ni  l'élévation,  ni  l'enjouv*- 
inent.  I/epopée,  le  drame,  la  poésie 
l>rique,  la  satire,  le  roman,  la  chanson 
même,  exercèrent  tour  à  tour  sa  verve, 
et  «lans  ces  cornpo^ition>  diverses  il  sut 
\arier  son  st>|e  selon  rex:;;ence  des 
sujets.  On  a  de  Miéraskoff:  I.  Des 
poèmes,  dont  plusieurs  sont  consacrés 
à  célébrer  la  gloire  de  la  Russie  :  la 
lltilaillf  (Ir  Tschrsmr,  lu  RussiaJe, 
.\ih'goro(l  tli'lL'réf  ,  qu'on  regarde 
comme  un  chef-d'œuvre  ;  ri'Lilité  tirs 
Irftres,  lu  Burharimlr^  Catlmus  rt 
htirnwnir,t{c.  II.  Des  Ira^éilies  re- 
présentées avec  succès  sur  diiïérenis 
théâtres,  et  parmi  lesquelles  nous  cite- 
rons :  lu  Hrli'girusr  vrnltirnnr ,  Pla- 
turnr,  Murfrsiu  rt  Trleslra,  liori'i- 
lue  ;  une  comédie  hôroujue  en  m\ 
ncte,  intitulée; /".-///i/-*-.  III.  Des  fa- 
bles, en  deux  volumes.  IV.  \)ts  odes, 
dcsépltres,  idylles,  élé;;ies ,  épic;ram- 
raes,  etc.,  et  une  héroïde  imitée  d'O- 
vide :  Ariadne  rt  Tlièsre.  V.  Des 
lettres  critiques  et  satiriques  en  vers  et 
en  prose,   dont  quelques-unes  furent 


MA 


5o7 


ioiéréfs  dans  l^s  journaux  lilléraiies 
de  17f»0à  ITtiV.  VI.  Suimi  r»m- 
ftilius,  innun  moral,  où  l'auteur  met 
dans  la  botirlir  de  la  n)mphe  K;;érie 
de  hauts  en^n;nemenls  sur  la  lé^.bla- 
tion  et  le  ;;ou\erneuient  des  peuples. 
(let  ouvrage  est  ,  comme  celui  de 
KIorian  ,    une   imitai  ion  du  'IVlrniw 

Îue  ,  car  KhérasLoff  était  très-versé 
ans  la  littérature  française,  et  faisait 
surtout  du  chef-d'œuvre  de  Fénrlon 
une  lecture  assidue;  mais  il  n'osa  ja- 
mais en  entreprendre  la  traduction.— 
K I!  t  n  \  sK«  ik  K  K  VJiuihrth  - 1  assilirx*' 
n  i-\ervnt'Jf ,  M'"*  de',  épotse  du 
précèdent,  née  le  9  noNembie  17V7, 
f'il  marii-e  l'^ort  jeune,  et  parla;;ea  le  :i)\û. 
de  son  mari  pour  la  poe>ie.  Outre  un 
poème  sur  le  Drsustrr  tle  LisUmne, 
on  a  de  cette  dame  des  odes  ana- 
créontiques,  des  héi  nVdes,  des  é^^loi'ues, 
desépitres.des  éléj;ies.  IMusieurs  de  ses 

rtroductions  parurent  dans  les  journaux 
ittéraires  de  Moscou,  et  lui  \aluient 
d'honorables  suffrages.  I^  célèbre  Sou- 
murolofflui  dédia  une  de  ses  alléjjoi  ies, 
et  lui  adressa  une  ode  dans  laquelle  il 

f»rodi^ue  les  encouragements  et  les 
ouan^es  à  celte  muse  moscovite.  On 
a  comparé  M""^  de  KhérasLoff  à  la 
comtesse  de  la  Snzc  pour  l'esprit,  le 
charme  de  la  con>ersation  et  l'elé^ance 
des  vers  ;  mais  elle  était  loin  de  lui 
ressembler  sous  d'autres  rapports,  l^ 
culture  i\ts.  lettres  ne  lui  fil  jamais  né- 
j;ri;;er  le  soin  de  ses  affaires  domesti- 
ques ;  et  l'affection  qu'elle  portait  à  son 
mari  lui  en  rendit  la  perte  d'autant 
plus  douloureu  e.  Elle  lui  survécut  peu 
de  temps,  et  mourut  eojan\ier  1809. 
L'empereur  .Mexandre  à  son  avène- 
ment au  troue  l'avait  décorée  de  l'ordre 
de  Saiîite-Catherinc.  '/■>■ 

K'IA-KII1\(;  est  le  titre  ho- 
norifique en  chinois,  ou,  en  mandchou, 
Sàiichoungu  Fengrhen  (  suprême 
félicite),  donné  aux  années  du  rc^ne 
du  dernier  empereur  de  la  Cfiine,  et 


30b 


Klà 


sous  lequel  ce  prince  a  élc  connu  en 
Europe.  Les  Cliinois  ne  connaissent 
pas  le  nom  de  leur  souverain  tant  qu'il 
est  vivant  ;  ce  n'est  qu'après  sa  mort 
que,  soumis  à  un  jugement  public,  il 
reçoit  un  tilre  plus  ou  moins  lionorable, 
suivant  qu'il  a  réj^né  avec  plus  ou 
moins  de  vertus,  de  talents,  de  f;loire 
cl  de  bonheur.  Cinquième  empeieur  de 
la  dynastie  réo;nante  Tuï-tsing  (la  très- 
pure  )  ,  d'origine  mandchoue,  Kia- 
Khinf;,  né  en  1759,  était  le  dix- 
septième  fds  du  célèbre  Rhian-Loung 
[f^oy.  ce  nom,  XXII,  367),  qui  abdi- 
qua en  sa  faveur,  le  8  février  1796.  Il 
monta  sur  le  trône  à  l'âge  de  37  ans,  et 
continua  pendant  trois  ans  à  recevoir 
les  instructions  de  son  père.  Il  avait 
alors  trois  frères  vivants,  dont  deux 
plus  âgés  et  l'autre  plus  jeune  que  lui. 
Le  nouvel  empereur  abusait  des  liqueurs 
fortes,  et,  dans  son  état  d'ivresse  pres- 
que continuel,  il  commit  des  actes  fré- 
quents d'injustice  et  de  violence,  qui 
furent  sinon  la  cause,  du  moins  le  pré- 
texte des  troubles  qui  agitèrent  son 
règne.  Ceux  qui  éclatèrent  dès  la  pre- 
mière année  paraissaient  avoir  pour 
but  un  changement  de  dynastie.  La 
secte  des  Pe-li  séduisit  et  bouleversa 
quatre  [irovinces.  Ria-Khing,  à  la 
nouvelle  que  ses  troupes  avaient  été 
battues,  avala  du  poison,  dans  un  accès 
de  désespoir,  et  serait  mort  s'il  n'eût 
été  promptcment  secouru.  Déjà  on  avait 
songé  à  prier  son  père  de  reprendre  les 
rênes  du  gouvernement.  Cène  fut  qu'a- 
près huit  ans  de  guerres  cruelles  que  les 
généraux  de  Ria-Kbing  parvinrent  à 
étouffer  le  feu  de  la  révolte  qui  s'était 
manifesté  dans  le  midi  et  dans  le  nord 
de  la  Chine.  En  1800,  l'empereur 
disgracia  et  fit  arrêter  le  premier  mi- 
nistre de  son  prédécesseur,  comme 
accusé  d'avoir  divulgué  les  secrets  de 
l'état,  intercepté  et  détruit  des  dépê- 
ches officielles,  relatives  aux  opéra- 
tions militaires,  soustrait  et  falsifié  des 


KlA 

décrets  impériaux,  toléré  la  mauvaise 
administration  de  quelques  mandarins; 
encouragé  la  paresse,  le  vol  et  la  men- 
dicité. A  ces  graves  accusations  se 
joignaient  d'autres  griefs  qui  auraient 
fort  peu  d'importance  en  Europe  , 
comme  d'éfrc  entré  à  cheval  dans  le 
palais  de  l'empereur  par  la  porte  à 
gauche  réservée  au  souverain  ;  d'avoir 
employé  pour  ses  appartements  l'ar- 
chitecture et  les  matériaux  spéciale- 
ment affectés  aux  demeures  impériales; 
enfin  d'avoir  possédé  deux  cents  col- 
liers de  perles,  nombre  excédant  ceux 
de  l'empereur.  Ses  biens  confisqués 
montèrent  à  plus  de  vingt-cinq  millions. 
Les  troubles  continuèrent  plusieurs 
années  dansl'intérieur,  et  les  deux  frères 
aînés  de  l'empereur,  soupçonnés  de  les 
favoriser,  furent  privés  juridiquement 
de  leurs  dignités  et  de  leurs  biens.  Une 
escadre  anglaise  ayant  débarqué  quinze 
cents  hommes  à  Macao,  le  21  sept. 

1808,  sous  prétexte  de  s'y  opposer  à 
une  descente  des  Français  ,  malgré 
les  protestations  des  Chinois  et  des  Por- 
tugais, l'empereur  Indigné  fit  des  pré- 
paratifs de  guerre  et  publia  des  éilits 
qui  déterminèrent  l'amiral  anglais  à 
rembarquer  ses  troupes.  Trois  mois 
après  il  destitua  le  vice-roi  de  Canton 
et  quelques  mandarins  pour  avoir 
manqué  d'énergie  dans  cette  occasion. 
Sans  interrompre  ses  relations  com- 
merciales avec  les  Anglais,  il  dé.'^cndit 
à  leurs  vaisseaux  de  remonter  la  rivière 
de  Canton.  Les   ravages  commis,  en 

1809,  dans  les  mers  de  la  Chine  par 
les  pirates  des  îles  des  Larrons,  et  l'im- 
possibilité de  les  réprimer,  amenèrent 
un  rapprochement  entre  les  deux  gou- 
vernements ;  mais  le  haut  prix  que 
les  Anglais  mirent  à  leurs  services 
fit  préférer  les  propositions  des  Portu- 
gais de  Macao.  —  Ria-Rhlng  n'é- 
tait pas  aimé  :  deux  fols  on  avait 
tenté  de  l'empoisonner.  Il  fit  mourir 
plusieurs    eunuques ,    instruments  de 


KlA 

ces  ron)plnt«,  ibnt  s«s  fr^rw  parai>- 
saifiii  rirf  1^  chfU.  A  cm  causf» 
tit'  mccoitlfntrinriit  se  jni^nirrnl  Jrs 
rinlams  dans  Ir»  firaiic^^.  f«a  mi- 
<fre  fl  la  fa:iiinp  laiiM-cs  par  les  »lc- 
Ikorilnncnls  ilu  II(>an;;-lIo  c\clliiciit 
rufin  nue  ri-\.>lle  telle  qu'on  n'en  avait 
|us  >u  en  C.liine,  Jepiiii  près  Je  deux 
siècles.  I.e  fatiatismc  t  avait  beaucoup 
de  part,  et  elle  paiaissail  avoir  pour 
but  de  lèl.iblir  l'ancienne  dv nantie. 
Klle  commença  dans  la  province  de 
lloiian  rt  s'étendit  jusqu'à  l'èLin;;. 
\n  lieu  de  prodij;uer  $e*  trésors  pour 
adoucir  les  mailienrs  publics,  l'empe- 
reur se  contenta  d'ouvrir  une  souscrip- 
tion dont  les  eflrts  furent  plus  lents  et 
moins  cflicaces.  Il  venait  de  se  livrer 
aux  plaisirs  de  la  chasse  à  Jeho  en 
Tartarie,  et  rentrait  dans  sa  capitale, 
le  18  ocr.  1813,  lorsque  des  rebel- 
les assaillirent  son  palais  et  en  occu- 
pèrent une  partie  durant  trois  jours. 
IMusieurs  de  ses  femmes,  craignant  de 
t.iml)er  vivant^'s  en  leur  pouvoir,  se 
donnèrent  la  in.)il.  Des  secours  arrivés 
de  Tart.-vrie  facililèrml  la  délivrance  de 
l'empereur  et  la  fuite  dci  séditieux, 
dont  la  cause  >'afraiblit  depuis  de  jour 
en  jour.  L'année  181  i  se  passa  en 
jugements  et  en  exécutions.  Plusieurs 
centaines  de  rebelles  périrent  par  di- 
vers supplices.  Kia-Kuin;;  avait  pu- 
blic ranii»*(.'  pr.'céJente  une  procla- 
mation écrite  de  sa  propre  main,  et 
ilaiis  laquelle,  er  d.'clarart  qu'il  n'a- 
vait jamais  opprimé  ses  sujets,  i!  avouait 
qu'il  n'avait  p.is  les  taler.Ls  de  ses 
prédécesseurs,  et  qtie  les  malheurs  de 
son  rè^ne  devaient  être  attribués  à 
ses  fau!e.->,  à  .sa  faiblesse,  ainsi  qu'à 
l'incapacité,  à  la  né^li;;ence  cl  à  la 
dciohiissancc  deses  ministres.  Le  vais- 
eau  anglais  Wttrcsle  avant  pris  un 
navire  américain  dans  une  rivière  de  la 
Chine,  en  18H,  cet  acte  d'hostilité 
fut  re;;arJé  par  l'empereur  comme  une 
■ola'ion  de    la   neutralité,  et  les  ré- 


MA  ^09 

sultats  de  cette  affaire  furent  av>ri 
•graves  pour  néce««siter  la  mission  ex- 
traordinaire de  ««ir  ricoi;;es  Staunton, 
qui  néanmoins  quitta  (^nton  avec  tous 
iei  .Vn;;laii,  la;>saiit  au  vice  roi  une  let- 
tre cachetée  pour  la  cour  de  Pékin.  1^ 
{:>ouverneur,  intimide  par  ciMte  démar- 
che, lui  dépêcha  un  exprès  pour  l'invi- 
ter à  venir  reprendre  les  conférences, 
à  la  suite  desquelles  furent  arrangés 
les  difii-remls  entre  la  factorerie  an- 
glaise de  Marao  et  le  vice-roi  de  Can- 
ton. !^  cour  de  Pel  ii;;  ménageait  les 
Anglais  dont  les  forct-s  maritimes  lui 
étaient  nécessaires  pour  proté'^er  ses 
cAfes  contre  les  pirates  des  ile^  des 
I«arrons,  qui  avaient  o.sé  attaquer  .Ma- 
cao. (^pendant  les  An^^lais,  qui  vi-^aient 
à  monopoliser  lecommerce  de  la  (^hine, 
trouvaient  des  rivaux  redoutable;  dans 
les  .Vméricains.  Kia-Khin;;  cherchait 
aussi  à  se  faire  des  amis  parmi  les  au- 
tres natioiis  chrétiennes.  Kn  ISOI  ,  il 
avait  accord»'  aux  missionnaires  pmt'»- 
^ai-.  le  libre  evercice  de  leur  re!i;;ion  , 
avec  des  terrains  pour  y  bâtir  df*^  é;;li- 
ses.  En  ISl.'»  ,  s'étant  fait  rendie 
compte  des  sentences  rendues  contre 
les  jésuites,  il  écrivit  au  ba;  du  rap- 
port avec  son  crayon  rou^e:  "  queTéciit 
du  1 1  janvier  172V  cesse  d'être  loi  de 
l'empire.  Il  n'est  qu'un  Diou,  et  ce 
I)ieu  ne  s'offense  pas  de  la  diversité 
des  noms  qu'on  lui  donne.  »•  F^.s  édits 
de  tolérance  de  1G9"2  et  de  1711, 
furent  donc  transcrits  de  nouveau  au 
tribunal  dos  rites,  et  une  copie  revê- 
tue du  sceau  impérial  fut  remise  à 
un  jésuite  portu;;ais.  Peu  avant  la  pu- 
blication de  cet  édil,  des  persécutions 
avaient  eu  lieu  dans  la  province  de 
SeT^cImen,  où  un  missionna-rc  fia?i- 
çais  fut  mis  à  mort  par  ordre  du  vice- 
roi.  L'ambas^idear  an;4lais,  lotd  Ain- 
herst,  arriva  en  Chine,  en  ISIG,  pour 
complimenter  l'empereur  sur  la  fin  de 
l'insurrection  et  pour  le  rassurer  sur  la 
crainte  qu'il  pouvait  avoir  conçue  de  la 


DTO 


ks% 


f^uenc  que  les  An:;Iais  avaient  faite 
à  son  voisin,  le  radjalidcNepaal.  Mais 
Cc'l  envoyé  ne  put  ni  remplir  l'objet  de 
sa  mission  ni  nicme  obtenir  audience, 
parce  qu'il  refusa  de  se  soumettre  aux 
pro.->tcrnalions  humiliantes  qu'on  y 
exij^e  des  étrangers  et  don\  lord  Ma- 
carliiey  s'était  seul  dispensé.  XJn  dé- 
cret impérial  du  4  sept,  expliqua  les 
intrigues  qui  avaient  nui  au  succès  de 
celte  ambassade,  laquelle  n'eut  d'au- 
tres résultats  qu'un  échange  de  let- 
tres et  de  présents.  L'empereur  dis- 
gracia ses  ministres  pour  ne  l'avoir  pas 
iîiformc  de  la  guerre  du  Nepau!,  et  pour 
n'avoir  pas  insisté  auprès  de  l'ambas- 
sadeur aniilais  sur  le  chanirement  d'ha- 
bit  et  les  neuf  prosternations  exigées 
par  le  cérémonial.  Les  égards  que  l'on 
témoigna  à  lord  Aniherst  et  à  sa  suite, 
tant  à  Péking  que  sur  la  route,  cessè- 
rent à  Canton  ,  où  le  vice-roi  leur  refusa 
des  provisions  et  de  l'eau  fraîche,  et  lit 
nȏme  canonner  leurs  vaisseaux  qui  ri- 
postèrent. Ces  hostilités,  dontrirasci- 
i)le  et  inlenipérant  Kia-Khlng  pouvait 
bien  cire  le  provocateur,  furent  le 
préambule  de  la  guerre  qui  devait  écla- 
ter souo  son  successeur.  En  1818,  ce 
monarque  dégrada  son  premier  minis- 
tre Soung-Tajin,  coupable  de  lui  avoir 
conseillé  de  ne  pas  visiter  les  tombeaux 
de  ses  ancêtres  ,  et  d'avoir  attribué  à 
l'intention  de  S.  M.  la  sécheresse  qui 
afiil;ieail  alors  la  Chine.  Kia-Ivliln» 
motiiut  le  2  sept.  1820  ,  après  un 
règne  de  vingt-quatre  ans.  Son  tes- 
tament ,  publié  le  jour  de  sa  mort  , 
traduit  de  l'anglais  du  révérend  Mo- 
rl.sson  et  revu  sur  le  texte  chinois 
par  ^L  Landresse,  a  été  Inséré  dans  le 
tome  P"^  du  Journal  asiatique,  mal 
182i2.  Le  monarque  y  rappelle  |)lu- 
sicurs  événements  de  son  règne  et 
rapporte  avec  assez  de  franchise  ce  qu'il 
a  fait  de  bien  et  de  mal.  \h\  décret  du 
conseil  impérial  de  Péking  décerna  à  ce 
prince  le  nom  de  Jouy-Ti  (l'empereur 


KIC 

ingénieux),  lequel  ne  donne  pas  une 
grande  idée  du  respect  des  Chinois 
pour  la  mémoire  d'un  empereur  qui 
abusait  des  liqueurs  fortes.  On  lui  a 
donné  aussi  le  nom  posthume  de  Jin- 
Tsoung  Jouy-IIoang-Ti  (l'auguste 
et  sage  empereur,  le  compatissant  pré- 
décesseur). Kia-Khlng  se  proposait  de 
laisser  le  trône  à  son  quatrième  fils,  mais 
après  une  longue  luttequi  entraîna  la  ré- 
volte de  plusieurs  provinces,  il  demeura 
à  son  second-fils  Mian-Ning^  dont  le 
règne  dure  encore  et  porte  le  titre 
chinois  de  Tao-Kouaug  {éâ2i\.àt\îi 
victoire).  A — t. 

KICIA^SKi  (Pie),  sénateur  cas- 
tellan  d'i  royaume  de  Pologne,  né  en 
1752,  dans  la  Grande  Pologne,  se  dis- 
posait à  recevoir  les  ordres  sacrés  chez 
les  jésuites,  en  1773,  lorsque  leur  so- 
ciété fut  dissoute.  Ayant  changé  de 
carrière,  il  fut  employé  dans  les  bu- 
reaux du  conseil  permanent;  en  1782, 
il  était  secrétaire  de  la  diète  dont  il 
publia  le  journal.  En  1783,  le  roi 
Stanislas-Auguste  le  nomma  premier 
secrétaire  de  son  cabinet,  emploi  que 
Klclnski  conserva  jusqu'en  1792. 
Il  était  en  même  temps  membre  de 
la  commission  qui  administrait  les 
finances.  Appelé  en  178i  ,  par  la 
confiance  de  ses  concitoyens  ,  à  la 
diète  de  Grodno,  et,  en  1788,  à  celle 
qui  dura  quatre  ans,  il  s'y  fit  remar- 
quer par  sa  sagesse  et  son  indépen- 
dance. Dans  la  séance  où  Ton  vota  la 
constitution  du  3  mai  1791,  choisi 
pour  parler  le  dernier,  il  rallia  à  la  ma- 
jorité l(!r.  membres  chancelants,  et  la 
constitution  fut  proclamée  presque  à 
l'unanimité.  Le  roi  ayant,  en  1792, 
signé  la  confédération  de  Targowicz  , 
la  position  de  Klclnski  devint  très- 
difficile.  Il  avait  été  combh' de  bienfaits, 
c!  la  bienveillance  royale  l'avait  depuis 
peu  nommé  sénateur  et  castcllan  de  Po- 
lanlec.  Il  fallait  choisir  entre  la  patrie 
et  le  roi  ;  sans  hésiter  II  i  envoya  à  Sta- 


tk 


KID 


iit-bs  SOI)  di|^Ioiiir  ilr  scnateiii .  l.c^ 
UuNb^  apiit  rir  r)iûS!>^  (Ir  Vjir  u\io 
un  uioU  (l*a\til  17'Jl,  Kicii^Li  fut 
ilio>»i  |iir  le^  iubilaiits,  |>oiir  adiiii 
ntsirrr  un  àe^  quartiers  tie  la  \ilir. 
Apièsia  inallirurrusc*  bataille  de  Ma- 
ciejoHicc  el  la  |»riiC  île  Vario\ie,  il 
^e  retira  dans  les  pro\inces  pulunai- 
sei  échues  i  1* Autriche,  (^nime  il 
a\ait  tutit  perdu  ,  la  |>(inccv>e  I.ubo- 
niirsla  luurnit  à  sesbeboins.  I.e  rovau- 
nir  de  P«iln;;ne  a\ant  été  rétabli  en 
1815,  Kicinsli  fut  rappelé  au  sénat, 
et  dan<  la  diète  de  1818,  il  \uta  avec 
r(tppo>iti(>n.  Il  emplu>a  les  derniers 
inunieiit>  de  sa  carrière  à  mettre  en 
tttdre  1rs  matériaux  qu'il  avait  lecueiU 
lis  sur  riiistoire  de  son  temps.  Il  était 
très  ricfio  en  di)cuturiits  sur  la  confé- 
d<  ration  de  Tar^uwicz.  Pendant  qu'il 
s'occupait  de  ses  travaux  littéraires,  un 
drcrrt  l'appela,  en  ISiG,  pour  sii-^er 
3u  tribunal  de  la  diète,  qui  devait  in- 
struire el  juj;er  la  cau^  de  ce  que  Ton 
appelait  la  Socirlê  ptitriotiiue  polo- 
naise. Le  jugement,  prononcé  au  moii 
do  mai  1S28,  déclara  qtie  les  accusés 
e:nprisonnés  depuis  deux  ans  étaient 
Innocents.  Mais,  avant  que  le  décret 
eût  é'.é  porte,  Kicinsli,  que  le  sort  de 
ses  compati iotes avait  vivement  touché, 
Fut  frappé  d'apoplexie  au  milieu  de 
la  discu.^sioo   et    mourut    subitement. 

G— Y. 

!v  I  ('  K  X.  (  Ji  AN  ] ,  pharmacien  , 
né  en  1772,  à  Druxellcs,  mourut  dans 
1.1  méiuc  ville  en  1831.  Sti  Flure  tîc 
lirii.i elles  f  le  premier  ouvrage  qu'il 
publia,  étendit  au  loin. sa  rcuiitation.  Il 
la  soutint  dignement  dans  la  suite,  par 
les  divers  travaux  auMpiels  il  se  Pivra. 
lin  des  plus  remarquables  est  son  lic- 
sumé  de  minéralogie  qu'il  a  eu  le  rare 
mérite  de  débarrasser  de  ces  détails 
technifji;cs,  de  ces  descriptions  scienti- 
fiques, ilonl  quelques  auteurs  sont  .si 
prodigues.  Malgré  son  extrême  mo- 
destie, la  plupart  des  sociétés  savantes 


voulurent  le  compter  dans  leur  >cin  : 
ainsi  il  fut  mriiibtcdu  ci-devant  jury 
de  médecine,  pui^  du  conseil  de  santé, 
de  l'académie  des  sciences  el  belles- 
lettres  de  r»ruxellcs.  Ses  écrits  sont  : 
I .  Flora  rtrui tllensts, e.i Iiiùens  tha- 
rucUres  generum  et  spetierujiipiu/t~ 
(arum  r in  uni  Uru.iellus  crescen- 
tium,seeuntîum  Liiuurutn  lîisfHtsita, 
lum  S)  noftyniis  aui  iorum;  t  uiuddi- 
tur  l^xieon  hutunirum,  in  y;/o  ter- 
mini  artis  Lre\ùter  e.ipumtntur  , 
Bruxelles,  181:>,  in-8^  II.  liehuion 
d'un  voyageftiit  a  la  grotte  de  Unn 
au  mois  tfaoùt  1822  ,  avec  de> 
notices  sur  plusieurs  autres  nrulles 
du  pavs  ,  Bruxelles ,  18*i3,  in-8" , 
orné  d'un  plan  lithographie  de  la 
girolle  et  de  quatre  planches.  III. 
llesume  du  cours  de  ininrralogie  et 
Je  botaniijue  donne  au  nntsre  des 
srîences  et  lettres  de  llruielles, 
Hruxelles,  l8iS.  in-18.  IV.  Tenta- 
men  minerulogituni^  seu  minera- 
lîum  noxui  distrihutio  in  classes,  or- 
diites^  gênera,  species;  eum  varieta- 
tihus  et  synopsis  auitotum  ;  cuî 
additur  Le.i ieon  niintralugicum  , 
Hruxelles,  1821,  in-8'.  ivicLx  c.^l  en- 
core auteur  de  plusieurs  dissertations 
insérées  dans  les  Mémoires  de  l'aca- 
démie de  liruxellos.        i)  —  i»  — 1\. 

KinnEKUVSTLR  (Ki- 

(.iiaui»),  abbc  de  l'ordre  de  Sainl-He- 
noit  et  docteur  d'Oxford  ,  natif  da 
Worcesiersliire,  fil  profession  à  l'àjje 
de  dix-sept  ans  chez  les  bénétlictins  de 
^^  inchcombe  dans  le  comté  de  Glo^ 
ccster.  Après  s<»n  cours  académique  à 
Oxford,  il  fut  nommé  prieur  de  \N  in- 
chcombe et  sut  si  bien  se  concilier  l'es- 
time de  ses  conlVèrcs  que,  TaLba^e 
étant  devenue  vacaiitc  en  1487,  ils  le 
choisirent  d'une  vo:x  utianuue  pour 
occuper  celte  place.  Sous  son  gouver- 
nement, les  bonnes  éludes  furent  re- 
mises en  vigueur,  la  discipline  monas- 
lîque  fut  rétablie,    et   diverses  institu- 


J12 


&I£ 


tions  propres  à  exciter  rdmulation  rt 
la  ré;4iilanlé  (îoîinèrcTit  à  ce  mona- 
stèn*  la  lessemhiaiite  d'une  pellte  uni- 
versité. Les  affaires  de  son  ablja^ye 
l'ayant  appelé  à  Rome  en  1501,  il 
s'y  occupa  surtout  d'en  étudier  les 
monuments  et  de  s'instruire  à  fond  de 
tout  ce  qui  pouvait  tendre  à  la  perfec- 
tion nionaslique.  Son  talent  pour  la 
prédication  lui  avait  fait  une  f];rande 
réputation  à  la  cour  de  Henri  Vlil. 
C'était  l'époque  où  les  nouvelles  opi- 
nions reli<^ieuses,  qui  commençaient  à 
ao;iter  les  esprits,  excitaient  de  vives 
disputes  entre  les  laïques  et  les  ecclé- 
siastiques, au  sujet  des  exemptions  du 
clergé.  L'abbé  Kiddermvster  prit  for- 
tement la  défense  des  prérogatives  de 
son  état  dans  un  sermon  prêctié  en 
1515,  à  Saint-Paul  de  Londres.  Le 
bruit  que  fit  ce  discours  lui  suscita  de 
grands  adversaires  parmi  les  ecclésiasti- 
ques courtisans,  et  il  fut  surtout  vive- 
ment combattu  par  le  docteur  Stan- 
dish,  gardien  des  cordeliers.  Cet  abbé 
n'eut  pas  la  douleur  de  voir  les  ca- 
lamités qui  affligèrent  son  pays  peu 
de  temps  après  sa  mort  ,  arrivée  en 
1531.  On  a  de  lui  :  L  Tracùi- 
tus  contra  dortrinam  Lutlierl  , 
1521.  IL  IJistoria  fundaiionis mo- 
nastc.rnde  IVinrJiconihe.  lU.  Cata- 
logjis,  vr.l  liistoria  uhhaliirn  monas- 
tp.ril  de.  WinchcomJie ,  etc.  Cette 
histoire  commence  à  l'année  988,  sous 
le  règne  du  roi  Edgar.  IV.  RenoQatio 
prioUrgiorum ,  charlarum ,  et  aliorum 
muriun/entorum  munasterii  de  IV in- 
chcondte.  T — D. 

K  I  E  F  F  E  R  C  Je AN-D.\NiEL  ) , 
orientaliste,  né  à  Strasbourg,  le  4  mai 
17()7,  se  voua  de  bonne  heure  aux 
études,  sous  la  direction  des  célèbres 
professeurs  de  l'université  de  sa  ville 
natale  ,  Oberlin  ,  Schweigha;user  et 
Dahler.  Il  se  destina  d'abord  au  mi- 
nistère évangélique  :  mais  le  goût  des 
langues  et  de  la  littérature  orienta- 


KIE 

talcs  l'emporta  ,  et  il  s*y  livra  dans  la 
suite  avec  ardeur  ,  pour  ne  plus  les 
abandonner.  Après  un  séjour  de  quel- 
ques années  à  Paris  employées  dans 
l'enseignement,  M.  llosenstiel,  dont 
plus  tard  il  épousa  la  fille  aînée,  le  lit 
attacher  ,  le  3  frimaire  an  III  (23 
nov.  1794),  en  qualité  de  traducteur 
d'allemand,  au  secrétariat  de  la  com- 
mission des  relations  extérieures.  En 
janvier  1795  ,  il  présenta  à  la  com- 
mission un  projet  pour  la  formation 
d'une  collection  des  actes  politiques 
de  la  France  avec  les  puissances  étran- 
gères et  des  puissances  étrangères 
entre  elles.  Ce  projet ,  dont  le  mé- 
moire original  se  trouve  aux  archi- 
ves du  ministère,  obtint  l'approba- 
tion du  gouvernement.  Le  3  mars 
1796  ,  Kieffer  fut  nommé  second 
secrétaire  interprète  de  l'ambassade 
de  France  près  la  Porte-Ottomane,  et 
partit  en  celte  qualité  avec  le  nouvel 
ambassadeur,  Aubert-Dubayet.  Lors 
de  la  rupture  avec  cette  puissance,  par 
suite  de  l'invasion  de  l'Egypte,  Kief- 
fer fut  emprisonné ,  ainsi  que  Fxuflin 
[Voy.  ce  nom  ,  XXXIX ,  269),  alors 
chargé  d'affaires  ,  au  château  des  Sept- 
Tours.  Ils  y  demeurèrent  trois  années. 
Cette  conmiunauté  de  disgrâce  mit  le 
jeune  orientaliste  en  rapport  journa- 
lier avec  l'un  des  hommes  dont  les 
vertus  et  les  talents  ont  le  plus  ho- 
noré la  diplomatie  française  dans  le 
Levant.  Il  s'établit  entre  eux  des 
liens  d'estime  et  d'amitié  qui  s'accru- 
rent de  jour  en  jour  et  durèrent  toute 
la  vie.  Pendant  cette  longue  capti- 
vité ,  les  leçons  de  Ruffin  et  celles 
de  Dantan  ,  l'un  des  inlerprèles  de 
l'ambassade,  initièrent  Kieffer  dans  la 
connaissance  ap[)rofondie  de  la  langue 
turque,  à  laquelle  il  joignit  celle  de 
l'arabe  et  du  persan  qui  en  sont  le 
complément  indispensable.  Sorti  d«*s 
Sept-Tours  le  25  août  1801,  Kieffer 
continua,  en   1802  et   1803,  à  faire 


Kii: 


Kin 


'-.i.T 


|iaitie  Je  la  légation  française  à  (l^tii- 
^laiiliaiiplr ,  et  srritiiJa  Kiilliii  tljiis 
I  i:iiiiie(iMti*  (le^  Irauiuv  rlii-clur>  )>)i  c 
iJernirr,  pour  obtenir  de  ia  l'orle  la 
ir>iilutiuii  dn  é•abilv^elllCllls  religieux 
et  de  roiiinierre  i|ui  apparteiiaieut  à 
b  France,  el  pour  faire  lenirer  les 
Fiançais  dans  tous  les  priv tirées  et 
immunités  dont  ils  jouiss^tient  en 
\rtlu  lies  jnctriiiirs  rapitulatiofiN.  Kn 
juillfl  1H(Ki,  Kicffer  fui  cliar;:é  d'ac- 
cumi'a^nrr  4  l'aiii  Saul-llalet-Kf- 
frndi,  le  piemiei  ambassadeur  otto- 
man qui  se  rendit  dans  cette  capi- 
tale apin  la  conclusion  de  la  paix. 
Au  moi»  de  fé\iior  180  V  ,  il  (ut  nom- 
mé secrétaire  inici  prête  au  niMiistère 
»l«'s  affaires  ctran^rres,  et  peu  de  temps 
après  suppléant  de  Ituffin  danâ  la 
cliaiie  de  turc  au  colle;;e  de  France. 
I:n  iSn.'»,  il  fut  ,  conjointement  a>ec 
son  collègue  l'uNicli,  chargé  de  tra- 
duite en  turc  les  bulletins  de  la  grande 
ifinée  française  et  d'en  sur\eillcr  l'im- 
pie sion  dans  cette  lahi^nr.  l'ar  relie 
piiLlicjlioii,  continuée  iMi  lîSt).'),  ISOG 
fl  tS(>7,  il  contribua  beaucoup  à  rrpan- 
die  dan>  tout  le  Levant  la  connais>ance 
des  faitï  prodigieux  «pu,  à  celle  époque, 
illubtièient  les  années  impériales.  De- 
puis plu^ieurs années  il  sciait  occupé, 
de  concert  a\ec  IVulGn,  de  la  coiu- 
posilion  d'un  dirlioiiiiaire  usuel ,  turc- 
liançai:»  Fii  181 1 ,  le  nnni>lre  des  re- 
lations extérieures  prit  un  vif  intérêt  à 
celte  publication .  D'api  es  scsordresjcs 
feuilles  de  ce  diclionnaiie  ,  que  Kicffer 
piepaiait  à  Paris,  claienl  portées  par 
Ic5  coutners  du  ministère  à  Consian- 
tinople  ,  d'où  Uuriin  les  renvoyait 
au  rédacteur  primitif  avec  les  additions 
«t  les  corrections  qu'il  avait  ju^éa  pro- 
pos d')  faire.  Ce  travail,  dont  le  ma- 
nuscrit fut  retrouvé  dans  les  papiers  de 
Kieffcr,  a  été  publié  aux  frais  de  sa 
\euNe  M'"^"  Loui-c  kieffer,  née  l\o- 
.senstiel,  el  de  M.  Uianchi ,  secrétaire 
interprète  adjoint    pour     les   langues 

LXVIIl. 


orientales,  qui  en  a  rc\u  le  texte  <l 
surveille  l'imprcAsion  à  l'Imprimeiie 
io\ale.  l'.iiriclii  d'ailleurs,  p.*.  cet  orien- 
taliste disiin;;né ,  d'un  assex  {;rand 
noubre  de  mois  nouveaux  qui  lui 
manquaient,  ce  dictionnaire,  qui  for- 
me un  fort  \oIume  in-octavo,  renfer- 
me pour  \e  turc  toute  la  substance  de 
rénorine  et  dispendieux  le\i({up  de  Me- 
Uln^ll,  ri  il  est  aussi  \e  complément  né- 
cessaire du  /  ot  ahuhiirr  frun^  itisturc 
donne  par  M.  Itianrln  m  181)1. — 
1^  '11  lanvicr  181.'»,  Kicffer  fut  nom- 
mé rhf\alier  de  la  Le^ion-d'iionneur. 
Fn  1S18,  dr  suppléant  qu'il  était  de- 
puis 18().'>,  il  devint,  a  la  demande 
même  de  lliiffin,  titulaire  de  la  cliaire 
de  ce  dernier  au  collejie  de  France,  l'ar 
ordonnance  royale  du  \)  nov.  IHlD, 
il  fut  nommé  premier  secrétaire  inler- 
ptèle  pour  les  laii;4iies  oriotilales ,  ri 
chargé  de  la  direction  de  l'école  des 
élé>es  interprètes  du  ;;ouvernefDenl 
attacliée  au  collège  Louis-le-^îrand. 
Appelé  en  outre  à  remplir,  comme  ses 
colle^ue>,  les  fonctions  de  profesvur 
dans  celle  école,  il  conliibua  beaucoup 
aux  pro^i  es  des  sujets  distingués  qui  sor- 
tirent de  cet  utile  établissement,  fondé 
par  Louis  \IV.  Il  perdit,  en  18-23.  I4 
place  de  premier  secrétaire  interprète 
du  loi  pour  les  lan;;ues  orientales,  qui 
avait  toujours  été  considérée  comme  un 
poste  de  retraite,  el  dont  ses  prédéces- 
seurs les  Cardonne,  les  N  eiiture,  les 
Kufiin  avaient  joui  à  ce  titre  jusqu'à  la 
fin  de  leur  carrière.  Déjà  l'on  avait 
\oulu  l'en  dépouiller  en  182G;  mais 
l'intrigue  qui,  à  celle  époque,  écboua 
devant  la  probité  consciencieuse  du 
baron  de  Damas,  réussit  à  la  fin  de 
l'ainiée  1829.  Kieffer  fut  ties-sen- 
sible  à  cette  disgrâce  non  méritée  ,  et 
qui  abrégea  ses  jours.  Il  chercha  néan- 
moins des  consolations  dans  l'étude. 
Dix  années  de  sa  vie  ont  été  consacrées 
à  donner  la  première  traduction  com- 
plète du  Nouveau-Testament   et   en- 

33 


5i4 


RIE 


suite  (le  la  Bible  eu  langue  uiii|iie. 
Intlépendainmenldes  longs  et  péiîil)los 
travaux  auxquels  11  se  livra  pour  Tac- 
cuniplisscmeut  de  cette  œuvre  ilc  pa- 
tience et  d'érudition,  Kiefler,en  hom- 
niede  lettres  aussi  modeste  qu'instruit , 
ne  déil:i!;^ua  point  deconsulter  plusieurs 
orieiUalistcs  se^  collègues,  et  il  entretint 
menje  avec  ceux  des  pavs  ttrangers  une 
correspondance  dont  le  résultat  fut 
tl'assurer,  par  les  éclaircissements  qu'il 
fil  Imprlincr,  le  succès  de  son  entrc- 
pr'u^e.  En  iôj  i ,  il  fut  élu  vice-président 
de  la  sociélé  asiatique,  dont  il  était  un 
des  fondateurs.  Jamais  la  sociélé  bibli- 
que n'a  eu  d'agent  plus  zélé  et  plus  in- 
fatigable. L'ardeur  avec  laquelle  il  s'ac- 
quitta de  sa  mission  était  telle  qjie, 
dans  le  courant  de  183-2,  il  distribua 
lui  seul  cent  soixante  mille  exemplaires 
(les  Saintes-Ecritures  ,  dont  presque 
toujours  il  accompagnait  l'envoi  d'une 
lettre  de  sa  main  ;  et  il  corrigeait  lui- 
même  les  épreuves  de  chaque  édition 
nouvelle.  Cette  ardeur,  il  la  portait 
dans  l'accomplif^cmcnl  de  ses  devoirs 
pour  les  grandes  comme  pour  les  p.itites 
choses  ;  et  il  y  joignait  une  exactitude  et 
nu  esprit  d'ordre  dont  les  hommes  pro- 
bes ;;|ijirécic!il  seuls  toute  l'importance. 
On  le  vil  trois  jours  avant  sa  mort,  ar- 
rivée le  29  janvier  ISlil»,  pouvant  à  [)tl- 
uesc  soutenir,  sortir  de  cliez  lui,  malgré 
le^  M^^lauccs  de  sa  famille,  pour  aller 
encore  au  co'iège  de  France  donner  ses 
dernières  leçons  (1).  (i — k — i). 
__KH:\iiAYER  (le  biron  Mi- 

(i)  Coinini:  Ws  cmirs  d'arak*»,  de  pfr:..)ii  «t  de 
tore  noiil  Irijdfs  à  l'.iris,  il-  »oiit  jj^ii  fiôipi.  nie, 
à  l'i  xrf(ilii>n  i\r  veux  c|iti  mil  lifu  .-m  ccdli-gi'  lU- 
l-mris-U'-Grjiid.  j«)iir  Us  jeunes  gMis  <|iij  sc  dc.« 
Xiwitl  à  Irf  dijdr.uiaii.-  r>ricn(;d<!.  Les  unirii.  Uiu*. 
ju  «olli';;»?  de  l-'uirc  q  l'à  l;i  nibliolh<-(|iic- ro\  .l'c, 
lie  oiiiiptenr  que  diiix  ou  trois  élove»  thuciin, 
el  quelqui-fois  iiK.iiis.  Kicflrr  (cl  nous  it'eiiteii- 
don- atlndilir  «"Il  ri<-n  !«•  mm  le  de  ce  snvjnl  »t 
niudctle  |iror>>.<ii;ur)  u'jv-'il  plus  qu'un  cU'vh 
qui,  aymt  «■niO'.ani  in-ul  inofil»'  de  sr»  Ir^ini», 
•n  «iis;)<isjit  a  |>r<n'lrr;  ri.ns'"  <lfl  lui.  •<  .\c  vous 
reiii'fz  \tiàS,  tni  di(  KiiCfir,  cur  on  supin imer.-i 
ma  «luire  i>i  |i'r^rinii<-  n'ai^iile  a  nnnirour-;  » 
f-t ,  pour  If.  tlii'ider  »  rr'>l<-i',  îl  lui  abaiuloriiia 
une  partie  de  (on  tr.ilUmentt  A — t. 


KIL 

CHEL  de),  général  autrichien,  né  veiT. 
1760,  d'une  famille  noble,  suivit  dès  sa 
jeunesse  la  carrière  des  armes,  et  se  si- 
eiiala  dans  la  "uerre  contre  les  Turcs 
sous  Laudon  cl  le  prince  de  (j(d)onrg. 
Devenu  major,  puis  colonel  d'un  rég:- 
ment  d'infanterie,  il  fut  employé  dans  la 
guerre  contre  la  France  en  1792,  com- 
me général-major,  puis  comme  lieutc- 
nant-feld-maréchal.  Il  se  trouvait  en 
celte  qualité,  en  1800,  dans  l'armée 
chargée  de  couvrir  la  SoUabe  et  le  Bris- 
gâw.  En  1805,  il  commandait  au.ssi  le 
corps  autrichien  chargé  de  couvrir  la 
Bavière ,  et  il  se  retira  vers  la  Bo- 
hème  ,  lorsque  Napoléon  marcha  sur 
Vienne,  après  la  capitulation  d'Ulni. 
La  troupe  du  baron  de  Kienmayer 
s'élant  réunie  au  corps  russe  de  Kou- 
talsoff,  il  fut  remplacé  par  le  comte 
de  Merfeeldl  ,  et  se  rendit  en  Bo- 
hême où  il  continua  de  combattre 
sous  les  ordres  de  l'archiduc  Ferdi- 
nand. Lorsque  ce  prince  évacua  l^ra- 
gue,  par  suite  de  l'armistice  qui  suivit 
la  bataille  d'Auslcrlitz,  Kienmayer  fut 
chargé  du  commandement  supérieur  en 
lîohcme.  il  fil  encore  avec  beaucoup 
de  distinction  la  campagne  de  î80î), 
sous  l'archiduc  Charles.  A.près  la  paix 
de  Vienne  ,  sa  santé  se  trouvant  af- 
faiblie ,  il  demanda  à  (Ire  employé 
dans  un  pays  dont  le  climat  fut  moins 
rude,  ce  qui  ne  lui  fut  point  accordé 
à  cette  époque  ;  mai.s,  après  la  mort  du 
comte  de  ]\iénau,  l'empereur,  s'élant 
souvenu  de  cette  demande,  le  nomma 
commandr.nt-g;:uî'ral  de  la  'i"ran:iylva- 
nie;  et  il  accompagna  celle  nomination 
d'une  lettre  autographe  trè.s-ilatleuse. 
En  ISIS,  le  même  prince  le  nomma 
comm.indanl-général  de  la  Moravie; 
et  c'est  dans  ce.^  fonctions  qu'il  est  mort 
en  1828.  M— i)j. 

KILIDJ-ARSLA  ^^  8 '^ 
second  sultan  Seldjoukide  d'Anatoîie, 
s'étant  retiré  en  Per.se  après  la  bn  tra- 
gique de  son  père  Soléiman   (f'^oy.  ce 


Kir 


KIL 


'M  5 


nnm,  \LIII,  1J),  fut  retfiia  pri- 
sonnier à  hpafian,  a%pc  <e^  fr^rr^.  jll^- 
qu'à  la  mort  An  suhaii  Melil-(^>iali, 
Ifiir  parrnl.  lU  rcfou%rèrenl  alor5  Ifur 
libfrl^  cl  rcntrrrent  dans  Nir^  l'an 
VHr,derijr-.  <109'2  •!«•  J.-C.V  Kiliclj- 
Arslan,  qui  étail  Tainf,  monta  aussilôl 
sur  If  IrAne  et  mit  fin  a  r.marciiic  qni 
iliirail  Jfpuis  sfpl  ans  {f^oy.  Aboil- 
(IvrfM.I,  88).  Apre*  avoir  rëlahli 
1*01  drr  clans  sfs  étal*,  par  la  dfpo^i- 
lion  t\r  p!:ts':cur«  émirs  amhitirux  ,  au 
noîiilin*  dr>q!ieU  était  If  j;ouvernpur  de 
Niçéf ,  frrrc  d'Abonl-Cacem,  il  les 
agrandit  par  di\ erses  ronquêtes  qu'il  fit 
»uf  les  <irrrs,  tant  en  teire  ferme  que 
Aim  1rs  îles  i\r  l'Arrliipel  ('e  prince, 
famnix  dans  l'histoire  de  la  première 
rroisâde  et  dans  le  poème  du 'las.se,  est 
nommé  mal  à  propos  Soléiman  par  les 
auteurs  ;;refs  et  latins  qui  l'ont  con- 
fondu a\ee  son  père.  Ouelque^-cns 
plus  exacts  l'ont  distinf;uc  sous  le  non 
de  So'r'ninn  le  jejne.  Ce  fut  en  i'JO  de 
riié-.  J(M)7  de  J.-C.)  que  les  diré- 
tiens  d'Occident  inondèrent  pour  la 
prnn'èie  fois  les  provinces  de  l'Asie- 
.^ï:r;rtMcqui  formaient  l'empire  de  Ki- 
lidj-Arsian.  11  reçut  sans  effroi  l'avant - 
^arde  de  leur  armée  so:is  les  ordres  de 
Pierre  l'Krmi'e  ,  de  (iautier  Sans- 
tooir  cl  de  pli!sieurs  autres  chefs  ohs- 
cnrs  ;  la  tailla  en  pièces  et  la  détruisit 
entièrement,  à  l'exception  des  jeunes 
f;ens  des  deux  sexrs  qui  furent  réduits 
en  ser\itude,  el  d'en\iion  trois  mille 
hommes  que  Pierre,  secouru  par  l'em- 
pereur Alexis  Comncne,  ramena  dans 
Constantinople.  Vi\  nouvel  ora'^c  fon- 
dit b:ent(^t  sur  les  états  du  sultan,  qui 
fit  de  vains  eflorts  po:ir  le  dissiper. 
Cinq  à  six  cent  mille  chrétiens,  com- 
mandés par  Godefroi  de  Rouillon  et  ses 
frères  Haudouin  et  Eir.lache,  par  lîohé- 
moi.d,  prince  deTarcnlc,el  Tancrède, 
son  cousin,  par  P\aimond  dcSaint-(iil- 
les,  comte  de  Toulouse,  Adhémar,  évé- 
queduPuv,    et  par   plusieurs  antres 


»eij;nef:rj  dt"stinj;ués  ,  »e  pré>entè- 
rent  devant  Nirre  ,  capitale  de  Ki- 
lidj-ArsIan,  et  en  formèrent  le  blocus 
le  15  mai.  (.!e  prince,  qui  était  allé 
chercher  de^  *ec,)urs  cher  ses  voisin», 
parut  bientàl  à  la  trte  de  cinquante 
mille  hommes  ;  a\ec  des  forces  si  iné- 
palrs  il  ne  crai;;nit  pas  de  combattre 
deux  jours  de  suite  les  croises,  et  ne  se 
relira  qu'aprrs  avoir  disputé  chèrement 
la  victoire.  Knfin,  un  $iè;;e  mcartrier 
de  trente  cinq  jours  força  la  ville  à  se 
rendre,  le  20  juin,  non  pas  aux  croi- 
sés, mais  à  l'emperear  Alexis,  par  l'a- 
dresse de  Butiiniite,  -énéral  des  trou- 
pes qu'il  avait  envoyées  pour  prendre 
part  à  celte  expédition,  l/arméechié- 
tieniie,  en  quittant  Nicée,  se  parta|:;ea 
en  deux  colonnes  qui  campèrent  a  drux 
milles  de  di  lance  l'une  de  l'autre  dans 
la  plaine  de  Dorviée  (KsLi-(!hehi). 
Kilidj-.KrsIan,  suixi  de  deux  cent  mille 
horames  qu'il  était  parvenu  i^  rassem- 
bler, surprit  la  colonne  de  ;;auche  com- 
mandée par  Hobémond,  le  2  juillet,  et 
l'aurait  exterminée  si  elle  n'eût  élé 
secourue  h  propos  par  (iodefroi,  qui 
commandait  la  droite,  f.e  sullan  vaincu 
abandonna  son  camp,  ses  munitions, 
ses  b3f;.T^es  ;  mas  sa  perte  en  hommes 
fut  moins  considérable  que  celle  des 
chrétiens.  Après  a^oir  essuyé  deux  au- 
tres défaites  dans  la  Pisidiect  la  Lvcao- 
nie,  il  >e  contenta  deliarcelcr  les  croisés 
dans  leiir  marche  et  de  leur  co:iper  les 
vivres,  sans  risquer  de  nouveaux  com- 
bats :  mais  ils  n'en  r3vaf;èrenl  pas 
moins  ses  états,  en  les  traversant  dans 
toute  leur  lonç;ueur  jusqu'à  leur  arrivée 
sur  les  frontières  de  Syrie.  Il  eut  bien- 
tôt sa  rcvanclie  sur  un  corps  de  quinze 
raîtic  Danois  qu'il  fil  tous  passer  au  fil 
de  l'épée  avec  Suénon,  (ils  de  leur  roi. 
L'aniu'e  suivante,  lorsque  les  croisés 
eurent  pris  Antioche,  Kllidj-Arslan 
se  distiii;;na  comme  auxiliaire  à  la  fa- 
meuse bataille  qui  cul  lieu,  le  28  juin 
1098,  sous  les  murs  de  celle  ville.  Il 

33. 


5r6 


KIL 


KIL 


attaqua  en  queue  rarmée  chrétienne, 
pour  lui  fouppr  les  communications 
avec  la  mer;  mais  ses  exploits,  dans 
celle  jounice  ,  ne  p;n\;ut  empêcher  la 
déroule  i\cs  Musidmans,  ni  la  prise  de 
«K'iUbalcni  ,  qui  en  fut  le  principal  lé- 
«-.allat.  (Z'o)'.  IjOUÏ.mo^d,  IV,  679; 
GoDEFUOi,  XVlI,54{J,el  Korbouga 
auSuppl.).  Quoique  les  forces  du  sul- 
tan fussent coiisuioiablcmcnt  diminuée; 
par  tant  de  combats,  par  la  perle  de 
sa  capitale,  par  la  ruine  de  ses  campa- 
gnes et  d'un  f;rand  nombre  de  villes, 
et  que  les  autres  parties  de  l'Analolie 
fussent  en  proie  aux  incursions  des 
(irecs  et  à  Tambllion  de  ses  émirs  ,  ce 
pilnce  ne  trouvait  pas  moins  de  res- 
sources dans  son  ^éme,  son  courage  et 
son  activité,  que  dans  les  secours  qu'il 
allait  solliciter  chez  tous  les  souverains 
de  l'Asie.  Au  mois  de  ramadhan  454 
(  juillet  1101),  11  détruisit  successive- 
ment trois  nouvelles  armées  de  croisés  ; 
la  pr  emière  forte  de  deux  cent  soixante 
mille  hommes  ,  lombards  ,  français  et 
allemands,  dont  à  peine  un  tiers  par- 
vint à  s'eLliapper  et  lut  ramené  à  Con- 
slantinoph;  [lar  les  comtes  de  Toulouse 
et  de  lilois;  la  seconde,  comj)osce  de 
quinze  mille  hommes  (les  femmes  non 
comprises),  dont  il  ne  se  sau\a  (jue 
sept  cents  hommes  et  le  comte  de  Ne- 
vers,  leur  chef,  qui  ga;.Mia  pcniblement 
Anlioche,  couvert  de  hailluns  et  à 
pied.  La  troisième,  commandée  par  le 
comte  de  Vermandois  et  j»ar  les  ducs 
d' Acjullaineet  de  Jîavlcre,  comptait  cent 
soixante  nj;!le  imllvldiis,  dont  une  fai- 
ble partie  LMta  l.'inioi  t  ou  l'esclavage, en 
se  réfu:^i:înt  à  Coribtanlinople,  à  l'cx- 
ceplion  du  duc  d'Aquitaine  qui  arriva 
au-)sl  jusqu'à  Anliodie,  en  mendiant, 
a\ec  six  de  ses  compa;^nons  d'infor- 
tune (1).  Des  démêlés  eurent  lieu  dans 

(  I  ,  l/liisioricri  ar;ili<!  Mm  (flAtliir  uiirilme  eu. 
(.■.•r<-  à  Kiliilj-Ar<>ljii  iiu<:  v.cluiru  sur  l'aimoud, 
f  o.u  fil<'S:>iiit-(JilleA,i|ui  IIP  se  sauvM  qu'avec  3 o<> 
hoaiinK»;  nuis  c'e»t  pciit-ètro  lu  même  qi^e  la 
|irfi:iiè.e  tl^>  trois  do  il  uou*.  vfi:on»  fl--  jurl'T. 


la  suite  entre  Kilidj-Arslan  et  Ibn-I)a- 
nischmend,  prince  de  Malathie ,  celui 
de  ses  vassaux  qui  avait  le  mieux  se- 
condé ses  efforts  contre  les  chrétiens. 
Cet  émir  ayant  baltu  et  fait  prison- 
nier Bohémond,  prince  d'Antioclie, 
le  relâcha  moyennant  une  rançon  , 
l'an  1102.  KllldjArslan,  qui  avait 
compté  sur  une  somme  plus  forte,  que 
l'empereur  Alexis  avait  offerte  pour 
que  le  prisonnier  lui  fut  livré,  fit  la 
guerre  avec  succès  à  Ibn-Danischmend, 
et  ne  lui  accorda  la  paix  que  par  la 
médiation  du  sultan  de  Perse,  Barkya- 
rok  (Foj.ceiiom,  III,  378).  N'ayant 
plus  à  lutter  contre  les  croisés  qui  , 
pour  se  rendre  dans  la  Palestine,  trou- 
vèrent des  routes  plus  courtes  et  moins 
difficiles  que  celle  de  l'Anatolie,  Ri- 
lldj-Arslan  mit  tous  ses  soins  à  rame- 
ner l'abondance  et  la  tranquillité  dans 
ses  états,  choisit  pour  sa  capitale  Ico- 
niura  (Cogny  ou  Konleh),  et  prit  plus 
de  part  aux  affaires  de  l'Orient.  Dja- 
waly,  autorisé  par  Mohammed  [Voy. 
ce  liom  ,  XXIX  ,  225)  ,  nouveau 
sultan  de  Perse,  avait  fait  périr  Djo- 
karmisch,  roi  deMoussoul,  qu'il  venait 
remplacer.  Los  habitants  ne  voulant 
pas  le  reconnaître  se  jetèrent  ,  ainsi 
que  le  fils  de  Ujokarmisch  ,  dans  les 
bias  de  Kilidj-Arslan,  le  second  po- 
tentat de  l'Asie  musulmane  par  sa 
puissance,  et  le  premier  par  sa  célé- 
brité. Ce  prince  marcha  vers  Mous- 
soul ,  força  Djawaly  iVcn  lever  le  siège, 
enli  a  dans  celte  ville  le  25  redjeb  500 
de  rhé;^;.  (22  mars  1107),  fit  procla- 
mer son  nom  dans  la  Lholhbah  et  se 
mit  ainsi  en  révolte  ouverte  contre 
jMohammed,  son  suzeiain.  Celle  dé- 
marche, dictée  par  l'orgueil  et  l'ambi- 
tion, le  rendit  odieux  à  tous  les  émirs 
de  Syrie:  ils  s'empressèrent  de  soute- 
nir Djawaly  qui  s'était  retiré  à  Ralia- 
bah.  Le  sultan  marcha  contre  lui,  lais- 
sant son  fils  Melik-Chah,  âgé  de  onze 
anr.  pour  goiiverner  Moussoul,  sous  la 


Kll. 


KIL 


liirfclitin  d'un  niiin.Ntrr  ilr  Cdiifijnrr 
l.fi  t\eu\  arm«*fN  »c  rfiironlrrrenr  le 
'JO  Jznulladali  [Ml  jiiillfi  )  sur  Irs 
hor(l>  du  Kliahour.  \  la  suite  d'une 
artion  lres->i\c,  Kilidj-Arslan  aban- 
d«»nne  des  .sien*,  el  entraîné  malgré 
lui  dans  leur  fuite,  \nnliit  tra^e^^el  la 
iMirre,  mais,  son  rliexal  s'elant  ab.iltu, 
il  se  nova  aprc*  un  ré;;nc  de  quinte 
auN.  Son  lils  se  sau\a  en  l*er>e  el 
Molls^o^l  toinita  au  pouvoir  des  vain- 
queurs On  doit  re^rcllri  que  re  ;;rand 
pi  iiire,  dont  1rs  auteurs  musulmans  ne 
lotit  presque  aucune  mention,  n'ait  pas 
tiouxe  parmi  eux  un  historien  di^ne 
de  lui.  I.^  troupes  qu'il  avait  laissées 
dans  s«  états  se  joij;nirenl  au\  (irecs 
pour  faire  la  ;;uerre  aux  chrétiens 
ocrideutaiix  ,  sur  qui  elles  c)l»lin- 
rent  de  grands  succès,  cl  re\inreiil 
«lans  TAnatolie  cliarj;érs  tic  présents 
de  l'empereur  Alexis.  Ce  pa^s  fut 
bientôt  replon;;c  dans  l'anarcb-r,  el  ne 
respira  que  sous  le  rèi;no  do  Ma-'oud, 
Ois  el  second  successeur  de  Kili<ij- 
Arslan(/o).  Masoip  1".  WMI. 
:iSV,  el  K  iiii>j-Ansi.vN  II  ,  III  cl 
IV.  t  \\ll.p  i1:>-VIÔ  .  A  T. 
KILMAIXK  (CnARirs-JKN- 
MNG$\  t;<^néral  français,  naquit  à  Du- 
blin, en  Irlande,  xcrs  ITTiO.  d'une  fa- 
mile  noble,  très-allacliée  à  la  relijjion 
catholique  ,  el  par  conséquent  foit 
opposée  au  joui;  de  rAn;;lcterre.  Ce 
fut  pour  le  soustraire  à  ce  )oufj  que,  des 
Tà^p  de  quinie  ans,  son  père  l'amena 
en  France,  et  le  fil  entier  conimr  sim- 
ple hussard  dans  le  [••-inienl  de  L:.u- 
zun.  Le  jeune  Kilmainc  suivil  ce  corps 
en  Amérique,  où  il  lil  la  ;;iicrrc  de  l'in- 
dépendance sous  I^favetlc  el  lîiron, 
•^011  colonel,  qui  sut  le  ilistin^upr  el  le 
fit  nommer  sous-lieutcnaiit.  l\e\cnu 
en  France  plein  des  iùccs  de  libcrlc 
el  d'insurrection  qu'il  avait  vues  triom- 
pher dans  le  Nouveau  ^Ioiiilc,ai!i-i  que 
la  plupart  des  ofticicis  qui  avaient  fait 
celle  f^nerre,  Kilmainc  vil  avec  joie,  en 


ITS'J  ,  érlaier  dans  sa  patiie  adoplivc 
une  révolution  qui  lui  parut  desti- 
née aux  mêmes  résultats.  Il  devin! 
alors  capitaine,  fl  coiitiibiia  beaucoup 
en  17'JI  à  retenii  sous  le  diapeau 
français  la  plus  grande  partie  de  son 
régiment  qui,  a  l'exemple  de  Ko\al  .M- 
lemand  el  des  hussardN  de  S.ive,  voulait 
déserter  tout  entier.  (  trace  au  léle  pa- 
Inrliqiie  de  kilinairie,  il  n't  eut  f;iiérc 
que  le,  »if:iriers  qui  rmi;:rèient,  et  ce  fut 
poui  lui  une  nouxelie  cause  d'axance- 
ment.  Il  devint  chef  d'esradrnn,  et  lit 
en  celte  qualité  lr«  première^  campa- 
gnes de  la  rexnlulinn  sons  l^fa>elte  et 
Duroouriez.  A  .lemma(*es,  où  il  s'était 
dislint:ué,  re  dein.er  le  nomma  colo- 
nel; mais  cette  nomination  ne  fut  pas 
confirmée  par  le  mniNtre  de  la  guerre, 
qui  l'en  d<'domnta.:ea  un  peu  plus  laid 
par  un  bie\et  de  mari-i  hal-de-camp. 
S'élanl  montic  f.i\or.ible  au  parti  de  la 
(^nxen'iun  iiatonair,  loi  s  de  la  défec- 
tion de  Diimoiiiiez,  Kitmaine  fut  nom- 
mé ;;énét.il  de  d  \ision;  et  il  commanda 
ra>ant-;:arde  de  Dampieire,  qui  rendit 
le  meilleur  l<  nioi-na;;»'  de  sa  conduite 
dans  les  affaires  mcnrtiières  des  1*^*^  el 
"2  mai  17'.)IJ,  ou,  silori  Icrappoit  offi- 
ciel, il  eut  deux  chrxaux  tues  ous  lui. 
Il  ne  deploxa  pa<.  moins  de  xaleur  cinq 
jours  a()iè>  dans  la  mallieiite;ise  ten- 
tatixequefil  encore  Dampicne  pour 
délivrer  Condé.  Ce  ;;énér^l  axant  cic 
tué,  I.amarchc  fut  mis  .t  sa  place,  et 
Kilm.iine  all.i  commander  un  corps  sé- 
pare dans  les  Ard'-nncs;  mais  il  x  re.sta 
peu.  Kcvenu  bientôt  sur  le  ihéàlie  des 
;;rands  événements,  il  s'v  trouva  dan<> 
les  circonstances  les  plus  critiques. 
Après  la  mort  de  Darapicrre  et  l'arres- 
tatïoii  de  CnsiiiiC,  l'armée  du  Nord, 
restée  sans  chef  «t  sans  direction  ,  ré- 
duite à  trente  mille  hommes,  et  con- 
duite au  ha-ard  par  d'ic;norants  con- 
ventionnels ou  des  ;;éiiéraux  sans  ex- 
périence ,  s'était  d'abord  éloignée  de 
Valenciennes,  pour  se  retirer  au  camp 


5i8 


KIL 


(le  C(\^<ir;  [luis  elle  avait  qtiiué  celte 
cx'eilt'iilc  [)o>ilioii  {>our  levemr  à  C'.'Hc 
de  Famars  (]ui  couvrait  Valciicicn- 
iic-.  Enfin  oblifi^ée  tl'abaiuloimcr  celle 
ville  à  ses  propres  ftf.ccs,  rarinéc  dti 
Nord  était  venue  encore  une  fois  se  ré- 
fugier derrière  l'Escaut.  C'est  là  que 
Kilmaine  la  joif^nit  dans  les  premiers 
jours  d'août.  Sa  position  semblait  toul- 
à-fait  désespérée',  et  en  présence  de 
l'échafaud ,  dressé  pour  tous  les  géné- 
raux vaincus,  ou  seulement  soupçonnés, 
personne  n'osait  en  prendre  le  com- 
mandement. 11  ne  l'accepta  que  pro- 
\isoiremenl,  et  en  attendant,  dit-il  au 
représentant  Delmas,  envoyé  pour  le 
surveiller,  qu'un  autre  plus  habile  vou- 
lut se  charger  d'une  si  grande  respon- 
sabilité. Posé  alors  sur  l'Escaut,  dans 
le  fatneux  camp  de  César  ,  Kilmaine 
allait  avoir  devant  lui  le  duc  d'York  et 
le  pi  ince  de  Cobourg,  à  la  tote  de  qua- 
tre-vingt mille  hommes.  S'il  essujait 
un  échec,  il  n'y  avait  plus  une  seule 
place  ,  une  position  ,  ni  une  réserve 
qui  pût  empêcher  les  alliés  de  pénétrer 
jusqu'à  Paris.  Et  déjà  la  Convention, 
qui,  après  tant  de  levées  et  d'enrôle- 
ments, ne  pouvait  plus  disposer  d'un 
bataillon,  et  n'avait  autour  d'elle  que 
des  orateurs  de  clubs  ou  des  égorgeurs 
de  prisons,  songeait,  comme  naguère 
devant  les  Prussiens,  à  abandonner  la 
capitale,  sans  pouvoir  se  retirer  der- 
1  icrc  la  Loire,  car  elle  y  eût  trouvé  les 
Vendéens  triomphants.  Et  dans  le 
même  temps  Mayence  avait  capitulé  ; 
loulon  était  au  pouvoir  des  Anglais; 
les  Espagnols  envahissaient  le  ilous- 
sillon  ;  les  Austro-Sardes  menaçaient 
à  la  fois  le  Dauphiné  et  la  Provence  ; 
enfin,  après  la  révolution  du  31  mai, 
qui  avait  assuré  le  triomphe  de  Uobes- 
pierre,  Lyon,  iSïarseilIc,  tous  les  dépar- 
tements du  midi,  tous  ceux  de  l'Ouest, 
s'étaient  soulevés  contre  l'oppression 
conventionnelle.  S'il  était  vrai  que  les 
rois  coalisés   voulussent    sincèrement 


KIL 

rétablir  la  monarchie  de  Louis  XVI , 
si,  comme  ils  l'avaient  si  hautement 
annoncé  dans  leurs  manifestes,  c'était 
pour  ramener  l'ordre  eu  France,  pour  y 
réprimer  la  révolution,  qu'ils  avaient 
pris  les  armes,  jamais  les  circonstances 
ne  leur  avaient  été  plus  favorables.  Ces 
circonstances  ressemblaient  sous  beau- 
coup de  rapports  à  ce  qui  s'était  passé 
en  Champagne  un  peu  moins  d'un  an 
auparavant  (Z^-^.  DuMOURir.z,  LXIH, 
160).  ^lais  à  ces  deux  époques  égale- 
ment décisives,  la  secrète  ambition  des 
puissances  et  les  Intrigues  de  leur  di- 
plomatie eurent  plus  d'influence  sur  les 
événements,  il  faut  bien  le  reconnaître, 
que  la  force  des  armes  et  les  promesses 
des  manifestes.  Il  semble  que ,  dans 
cette  seconde  campagne,  lorsqu'ils  fu- 
rent les  maîtres  de  Condé,  de  Va- 
ler.ciennes,  et  qu'ils  virent  que  le  che- 
min de  Paris  leur  était  ouvert  ,  les 
Autrichiens  voulurent  prendre  leur 
revanche  des  honteuses  tiansactions 
dont  ils  n'avaient  été  que  les  specta- 
teurs au  camp  de  la  Lune.  A  Dieu 
ne  plaise  cependant  que  nous  accu- 
sions le  généralissime  de  1793  d'a- 
voir joué  un  rôle  aussi  méprisable  que 
celui  de  1792.  Le  prince  de  Cobourg 
s'était  au  contraire  montré  d'abord 
très-franc  et  très-loyal.  Il  avait  promis 
sincèrement  à  Dumouriez  de  concou- 
rir à  son  projet  de  rétablir  la  monar- 
chie, et  il  s'était  engagé  pour  cela  à  four- 
nir un  corps  auxiliaire,  à  ne  point  dé- 
passer notre  frontière  ;  enfin,  il  avait 
solennellement  renoncé  ^  toute  espèce 
de  conquête.  Mais,  jJourde  pareils  en- 
gagements, il  n'avait  reçu  de  son  ca- 
binet ni  pouvoirs,  ni  instructions; 
et  ce  n'était  pas  ainsi  que  l'entendait 
Thugut  ,  alors  suprême  directeur  de 
la  diplomatie  autrichienne.  Dès  que 
cet  astucieux  ministre  eut  connais- 
sance de  ces  engagements,  il  les  fit 
improuver,  annuler  par  1  empereur  ; 
et  un  congrès  fut  formé  à   Anvers  , 


UL 

»B,  tl«  roncrri  avec  rAn^lelern-.  ou 

'  I  que  1rs    a" 
ia  ftiiitf  fir 
■  Us  f tour  ir  p/Aw  r.'  ilis  gniitnlus 
'  tir  l'a^'oir.   (]«  furenl    Ir<  r-^nrr-.- 
-     .!     ;  -le.  On  ei.    . 

!!        [    "       1-    I  .      1.1    |Mil  U*C.     I.  N 

vrnsfe  T  \irent  un  iii*(urinbrrtnrtit  i!e 
la  France,  beaucoup  lro|i  clairrmrnt 
annoncr.  Ce  qu'il  y  a  tle  .sûr,  c'e>t  qve 
dès-lors  il  ne  fut  plu«  qnrstinn  da 
Irnne  de  Ix)ui5  X\  11,  dont  Dumon- 
lirt,  de  conccil  a\ec  le  pnnre  de  (x>- 
Imtir^,  avait  prom!.*  le  rrlabli^^rment 
dans  sa  prurlamation  du  5  avril  ;  et 
l'on  ne  parla  pas  davanta*;e  de  riti- 
toituni*e  leine  Marie- Antoinette,  alors 
SX  prrs  de  l'écliaiaud,  et  qu'un  mut  de 
I  rnipercur  ,  son  nc\eu  ,  uu  nioute- 
nient  de  ses  aimées  pouNait  sau\er(l)  ! 
Certes,  il  fut  assez  évident  aloi>  que  ce 
n'rtait  pas  dans  des  inlén-ts  de  famille, 
et  bien  moins  encore  dans  reux  de  la 
monartliiedes  Houibon^^que  l'Autriclie 
faisait  la  ^ueire.  C'est  en  son  propre 
nom  qu'elle  pren.iit  pos^>c$»iou  k\c  nos 
provinces  et   de   nus  places;  cl,  après 

i}  (.V.e  ilan»  \e  inni.e  irinp*  que  Mjr»-t  n 
Sr':ioiniiIf  fumit  rtiTovr»  »n  Itaiic  psr  lei  co- 
•tiiies  de  l«  (.oiivrnliuu,  |>our  y  nrgi  rirr  avrc 
tlilfrrrnlrt  {luianct,  n  qu'il*  furmi  artnrt 
'ur  le  territoire  >ait»e  par  «r.tr-  .»..  r,l....,|  \^ 
Vienne,  ^ui  fit  faïkir  \o\k\  U  <  .  :   ■.,,  ■ 

Iruciion»  ,    aiw»!   que  le»  «i>  il.lr^ 

dont  il<  riaient  portenra.  lu  .■«.>  <-iit  <  mn  ieurs 
uialle»  60000  loui»  ru  or  et  dr  plut  forte»  utm- 
me»  ei»r«>re  m  (lapirr  de  rrrdit  »iir 'lilf^rro^ei 
pllre* .  A  qai  riait  dettiné  cet  argrnt  *  |U  n« 
l'eut  jjtii»!»  diii  mai*  tl  r»t  m\srt  fjiile  te  le 
ouiiprri.il,  r.  !t  1<  Coiiventinn ,  i!aiit  le  penl 
où  etle  -  u'ivait    pas  compte    »or 

«'•relit     1  itrl  oi>  ;  elle  1>  t  a«ail  <  !)• 

c«>re  tli.'.^  j  l'.\iitri(  lie  1j    drlivraiire 

•Ir  la  r'-ifte  d-  l-raitte,  et  m'^inr  relie  dr  tes  eii- 
fanlf.  Lorsqu'ils  te  virent  iiicarri-rr>  d.ii>»  la  ci- 
ladrlle  de  ^I^n'our,  lis  riiTu\c>  frai.i  jis  »e  hi- 
lArent  de  faire  coDoaitrc  cette  pirtie  de  Iruri 
in«tr«clioiia  ,  ne  doutai. t  point  qu'one  pareille 
coniinnnicJiion  ne  leur  fit  jussiiot  rrcouvrrr  la 
ISber<r  ;  mais  il  n'en  Tut  ri>-n  ;  on  \rs  m^ern  aa 
coolr-iirv  Javaiitagr  ;  rt  lorsque  rnfiu  l'A utricba 
con  riiiit  a  ouvrir  Us  porte*  de  leur  i  rison  ,  il 
y  ataii  Jeux  ans  qne  l'infortant-e  Marir-Autoi- 
ueile  était  iiioric  »ur  uue<li«faud  ;  et  »oii  61s, 
rbrriliT  du  irôD*  de  l.oui*  \V|,  était  aussi 
mort  dans  les  soorTraiicrs  d'une  loii^e  cap- 
t>«rte: 


KiL 


ItlCf 


au'clie  sr  Li  ainsi  emparée  de  (>Midé  el 
«le  N  jlrntit^inr»,  il  ne  s'a|*i^satt  (du^ 
po»r  rlle  que  de  ronipleler  une  fron- 
tière atift  l*a>s-I>a&,  lesquels  elle  avait 
aulrefuts  \ofilu  r.der  à  ta  rrut>e,  mais 
qu'en  ce  moment  Tliu^ul  foulait  con- 
server. Kl  dans  le  inmie  temps  le 
duc  d'^oik  ,  qui  avait  r^alemciit  de 
^on  cabinet  des  in>tiuctioiis  et  dos  or- 
dres p(»ur  s'emparer,  au  nom  «le  l'An- 
f;leletre,  de  la  place  de  Dunlerque, 
cet  ancien  objet  descunvoitisetsbiilati- 
nique»,  n'attendait  pour  cela  que  l'avis 
du  départ  d'une  eipédilion  maiiltme, 
prt'pai  ée  à  cet  effet  .  '  i:itieisde 

la'lamise.  Cfspr:  1  •  it  lon»s, 

et,  en  allendant,  le  pnnie  anglais  déli- 
beiadans  le>  inur>dc  ^  alenriennesavec 
le  ^«•n<'ranssime  atitr:r!'.ten,(V()Ui  .savoir 
si,  avant  d'entroprein'te  de  nouveaux 
sièges,  ils  ne  devaient  pas  frapper  nn 
dernier  coup  contre  l'aimée  fiançaisc 
et  la  mettre  hors  d'rlat  d'interrompre 
leurs  opérations.  C'était  une  question 
fort  simule  ,  el  cependant  ils  furent 
près  de  deux  semaines  à  la  ré^oudu*. 
N  alonciennes  avait  capiliilc  le  '2H  juil- 
let, et  ce  ne  fut  que  le  S  août  que  l'ar- 
mce  aiistro-bntaiiiiiqiir  parut  devant  le 
camp  de  César,  iin-ciséincnt  le  lende- 
main du  jour  où  Kilniaine  l'avait  éva- 
cué. On  a  dit  qu'il  fui  prévenu 
de  la  marche  des  coalist's  ,  el  cela  est 
assez  probable,  car  on  sait  qu'alors  les 
comités  de  la  Convention  avaient  de 
secrètes  iiilelli;;ciicesdans  tous  lesétals- 
raajois  et  même  dans  les  cabinets  de 
la  coalition.  Au  reite  Kilniaine  en  se 
retirant  ne  faisait  qu'obéir  à  la  né- 
ces:»ité.  H  quittait  une  position  où  il 
ne  pouvait  plus  tenir  ,  tant  son  ar- 
mée était  peu  nombreuse  et  démoia- 
lis«:e  !  Si  les  alliés  eussent  voulu  la 
suivre  sur  la  Scarpe  ou  sur  la  Somme, 
un  dernier  eiïort  pouvait  la  disperser 
complètement,  et  ils  étaient  les  maitres 
de  la  capitale  ;  \U  pouvaient  renverser 
la   révolution    dans  ses  bases.    Mais 


KIL 


KIL 


c'est  ce  que  n'ont  évidemment  jamais 
voulu  les  Anglais  ni  les  Autrichiens  ;  ils 
aimèrent  bien  mieux  dans  celte  occa- 
sion, comme  toujours,  profiter  de  nos 
désordres  et  de  nos  révolutions  pour 
s'emparer  de  nos  places  et  de  nos  pro- 
vinces, afin  de  s'assurer  des  indem- 
iiitrs  ,  des  garnnfirs  ,  et  laisser  /e 
volcan  se  consumer  hii-même^  com- 
me le  disait  naguère  un  prince  prussien. 
Jamais  ,  il  faut  en  convenir,  cette 
politique  ne  se  montra  plus  évidem- 
ment dans  sa  honteuse  nudité.  Ce  fut 
au  moment  où  Kilmainc,  après  avoir 
abandonné  le  camp  de  César,  qti'il  ne 
|>ouvait  plus  défendre,  et  s'ètie  retiré 
derrièi  e  la  Scarpe ,  barrière  encore 
plus  faible  que  celle  de  l'Escav.î,  se 
préparait  à  se  réfugier  sur  la  Somme 
son  dernier  asile,  que  les  deux  chcfi  de 
la  coalition,  qui  n'avaient  plus  besoin 
que  d'un  dernier  effort  pour  compléter 
leur  triomphe,  firent  tout-à-coup  voile 
face,  et  séparèrent  lcu?s  forces  ,  l'un 
pour  aller  s'emparer  de  J)imkerquc  , 
l'autre  pour  assiéger  le  Qiicsnov. 
On  sait  ce  qu'il  arriva  de  ces  deux 
conquêtes,  dont  la  première  ne  put 
s'accomplir,  et  dont,  au  bout  de  quel- 
ques mois  ,  il  fallut  rendre  la  seconde. 
Alais  ce  qui  doit  étonner  davantage, 
même  à  cette  époque  de  duplicité  et 
de  déception,  c'est  que  le  brave  Kil- 
maine,  qui  avait  rendu  un  immense 
service  à  la  nouvelle  et  si  précaire  ré- 
publique, qui,  par  sa  retraite  exécutée 
contre  l'avis  des  représentants  i\\i  peu- 
ple, et  par  conséquent  au  péril  de  sa  vie, 
avait  conservé  à  la  France  son  armée  la 
plus  importante,  fut  précisément  à  cause 
de  cela  dénoncé,  arrêté,  et  passa  près 
d'un  an  dans  les  cachots  de  Paris,  trcs- 
heut  eux  de  ne  pas  mourir  sur  l'échafaud , 
comme  Custinc  qui  l'avait  précédé 
dans  le  commandement ,  comme  son 
ancien  prolecteur  lîiron,  et  comme 
Mouchard,  enfin,  qui  avait  été  pendant 
quinze   jours  son  successeur,  et  qui, 


après  une  victoire  décisive  et  très- 
honorable  sur  le  duc  d'York,  ex- 
pia le  tort  si  grave  alors  d'avoir  mé- 
connu les  pouvoirs  d'un  représentant 
du  peuple.  Kilmaine  ne  recouvra  la 
liberté  qu'après  la  chute  de  Robes- 
pierre. Ktant  resté  alors  encore  quel- 
que temps  à  Paris  sans  emploi,  il  s'y 
trouvait  à  l'époque  de  rinsiirreclion 
du  r'' prairial  an  Ht  (20  mai  1795), 
et  il  seconda  avec  beaucoup  de  zèle 
Pichcgru,  dans  la  lutte  que  ce  général 
eut  à  soutenir  pour  la  défense  de  la 
Convention  nationale  contre  la  popu- 
lace insurgée  des  faubourgs.  Il  com- 
battit encore  pour  la  Convention  au 
13  vendémiaire  de  l'année  suivante 
avec  Bonaparte  ;  et  le  parti  révolu- 
tionnaire. Jl  suivit  ensuite  ce  géné- 
ral à  l'armée  d'Italie  ,  où  il  eut  part 
à  ses  premières  victoires;  comme  aussi 
à  celle  de  Castiglione  et  surtout  au 
siège  de  îvJantoue  qu'il  fut  chargé  de 
couvrir  dans  le  mois  de  sept.  1796, 
lorsque  Wurmser,  s'étant  présente 
avec  une  nombreuse  armée,  j'our  déli- 
vrer celte  place,  fut  contraint  de  s'y 
renfermer.  Kilmainc  contribua  beau- 
coup à  cet  heureux  résultat;  cl  il  aida 
encore  très-efticacement  le  général 
en  chef  dans  les  opérations  et  les 
intrigues  qui  précédèrent  la  prise  de 
N  enisc;  ce  qui  donna  souvent  à  Bo- 
naparte occasion  de  le  voir  et  de  l'ap- 
piécier.  Voici  ,  d'après  les  mémoi- 
res publiés  par  le  général  Montho- 
lon  ,  le  portrait  qu'il  en  traçait  à 
Sainte  -  Hélène  :  «*  Kilmainc  était 
«  un  excellent  officier  de  cavalerie;  il 
a  avait  du  sang  froid,  du  coup-d'œil; 
«  il  était  très-pro[)re  à  commander 
«  des  corps  d'observation  détachés,  à 
«  toutes  les  commissions  délicates 
«  qui  exigent  de  l'esprit,  du  discer- 
"  ncmenlcl  une  tcte  saine...  11  rendit 
«  des  services  importants  à  l'armée, 
«  dont  il  eût  été  un  des  principaux 
"  généraux  sans  la  faiblesse  de  sa  santé. 


RIN 

•«  il  a«ail  UDe  grande  connai  ^jncr 
••  tirs  Iroupr^  aiilncliirnnn.  Kamilirr 
f  i\rc  Inir  lartiijiie,  il  ne  s'en  lais>ail 
«  |>oinl  im|»o  rr  par  1rs  (.\u\  bruits 
••  qu'elles  snnl  dans  l'haliiludr  de 
"  rrpandre  sur  le*  dm  ières  d'une  ar- 
"  nier,  m  par  re<  trte.s  de  colonne* 
•  qii'rl|p>  jellenl  dan*  loiiles  Ifs  di- 
-<  rections  pour  faire  croire  à  la  pre- 
•«  .senre  de  {grande*  force»  où  elle»  ne 
•<  sont  pas.  Ses  opinions  pnlili(|ue« 
-  eiaienl  fort  modérées...  »•  I^  Di- 
rectoire \oulant  ,  en  17*JS,  donner 
le  cliaii»;c  îur  le  but  de  l'expriiition 
qu'il  p.eparail  pour  rK.;i\p:e,  pensa 
i\ur  \r  nom  d'un  Irlandais  serait  pro- 
pre a  faire  croire  «ju'plle  était  deslinee 
pour  l'Irlande  ,  et  il  le  noniiiia  i;éiiéral 
ci\  clief  de  Wirmre  li' An^lrtrrrr  qui 
n'eMsIa  jamais,  le  rôle  de  Kilmaine 
en  cette  occasion  sf  borna  donc  ï 
«juejqiies  courses  sur  les  cAtrsdc  France 
rt  de  Hollande.  Kn  1791),  le  L)i:ectoire 
lo  nomma  plus  sérieusement  ^jéncral  en 
clicf  dr  l'armée  d'IieUetie;  mais  sa 
^jiile  l'obbi^ea  bien'ôl  de  céder  ce 
comm.indcmrut  À  Masséiia.  Il  revint 
à  Paris ,  où  des  clia;:rins  domestiques 
aïoiilèient  à  ses  soulfiancrs.  Atteint 
d'une  maladie  ai^ui*.  il  mourut  le  1  .■> 
décembre  de  cette  aiiiue,  au  moment 
ou  rdcxalion  de  Bonaparte  allait  lui 
ou\rir  une  biillaute  carrière.  M  —  l»  j. 
k'i.\(i  John  ,  savant  é\èque  an- 
glais, iic\cu  de  Robert  Kinp,  premier 
évèquc  d'Oxford,  naquit  en  1559  à 
Woinal,  dans  le  comté  de  liucLin- 
gham.  1!  de\int  ciiapelain  delà  reine 
Elisabeth,  archidiacre  de  Noltint;ham, 
do\en  d«*  Christ-Church,  et  enfin  évo- 
que do  Londres  en  1611.  l)istinj;ué 
5U(tout  par  son  éloquence,  il  prêchait 
avec  beaucoup  de  ztle  et  d'assiduité. 
Jacques  II,  faisant  allusion  au  nom  de 
A/'nrr,  qui  en  anglais  s-^nific  roi\  l'ap- 
pelait le  rui  des  prédicateurs.  Sa 
mort  eut  lieu  en  16'21.  On  a  de  lui 
des  Sermons   et  des  Leçons  (lecta- 


KIN 


5ii 


res  )  A//r  Jonas  ^  159i.  —  Kin«, 
(  Henry  )  ,  éxèque  de  Cliicbestei  , 
était  fils  du  prnédent,  et  naquit  à 
WoTn.il  en  1591.  Successivement 
cbapfl.nii  dr  Jacques  l*"*^  rt  {\r  Chât- 
ies ^^  il  lut  elcve  en  Itiii  sur  le 
sièi;e  rpiscopal  ou  la  difficullr  des 
trmps  l'rxpo^a  à  la  peisérulion.  Uéduit 
à  .se  caihrr  pendant  la  ^iieire  ci\ile  ,  il 
recouvra  son  é^èch^  à  la  ir.slauration, 
et  moût  ut  en  1669.  Il  >emblait  avoir 
hérité  de  son  père  le  talent  de  la  pic- 
dicalion.  On  a  de  lui  des  .sermons 
imprimes  à  diverses  époqur^,  rt  »jurl- 
ques  .«litres  écrit*  :  I.  l.  xpmititni  île 
itirtii^on  din'iinii  (de,  1  (»:iS  et  1 6.')  \ , 
in-V'.  11.  Les  Psaumes  de  I)o%'id, 
mis  rn  vers,  d'aprr^  la  nouvelle  tra- 
duction de  la  Itible,  1651,  in-l'J. 
m.  Projtirid  frniissenirni  poussé 
au  r  funérailles  de  rinroiuftaraUe  et 
glorieux  monaripie  Charles  i*^'  , 
1619.  IV.  Pot  mes  ^  elrgies,  fut  ra- 
dotes et  sonnets,  1657,  in -8".  \  . 
Dii'ers  poèmes  latins  et  fi  r  ers,  elc, 
— Son  Irrre.  ./oA/i  KiNG,  orateur  pu- 
blic de  runiveisité  d'(  )\ford,  chanoine 
de  ^^  iiidsor  et  prebeiidier  de  Saiiil- 
Paul,  moirut  en  16i>9,  n'a\aiit  publié 
que  (jurlqiirs  ojuiscuies.  I.. 

KI\(i  \\  iiii\>i\  pnblicislean- 
glais  .  naquit  à  Slepnev  ,  dans  le 
Middlcsrx  en  16S5.  .\près  avoir  1er- 
miiH",  en  1701.  ses  études  riassiqiies 
au  rolle;;e  de  Hailiol  à  Oxford,  il  suivit 
la  carrière  du  droit,  et  prit,  en  1715, 
le  de;;ré  de  docteur.  Secrétaire  du  duc 
d'Ormond  et  du  comte  d'Arian  pen- 
dant qu'ils  occupaient  le  poste  de 
chancelier  de  l'université,  il  fut  fait,  en 
1718  ,  principal  de  Saint-Mar\- 
Hàll.  S'étant  présenté,  en  1722, 
comme  candidat  à  l'uniNersité,  il  rési- 
}jna  son  office  de  secrétaire,  mais  le 
docteur  Clarke,  son  concurrent,  TaNant 
emporté  sur  lui,  ;i  se  rendit  en  Irlande 
immédiatement  après  cet  échec.  On 
i^ore  les  véritables  motifs  de  ce  Toya- 


522 


KJN 


KIN 


ge,  que  ses  ennemis  attribuèreiil  ad  dé- 
sir (le  mettre  lui-même  en  vente  ses  ta- 
lents et  son  suffrage.  H  a  repoussa  vi- 
vement cette  accusation  et  rien  i:'a  pu 
faire  supposer  qu'elle  fut  fondée.  <«  A 
«<  aucune  époque  de  ma  vie,  dit  Tviuj^, 
«<  soit  en  Angleterre,  soit  en  Irlande, 
«  sous  le  f^ouvernemcnt  actuel,  comme 
"  sous  ceux  qui  Pont  précédé,  je  n\ii 
«<  essayé  par  aucun  moyen  d'obtenir 
«  une  place,  une  pension  ou  un  ein- 
«  ploi  de  quelque  espèce  que  ce  soit. 
«  Je  pourrais  assif^ner  différentes  rai- 
«  sons  pour  ma  conduite,  mais  il  en 
«  est  une  que  j'ai  toujours  été  dis- 
«  posé  à  donner.  J'ai  hérité  de  ma 
«  famille  un  patrimoine  suffisant  pour 
«  satisfaire  à  tous  mes  besoins ,  et 
«  pour  me  laisser  la  liberté  de  me 
«  livrer  à  ces  études  libérales  qui  dans 
«  ma  jeunesse  m'ont  procuré  les  plai- 
«  sir  les  plus  solides,  et  qui  ont  été 
M  les  délites  et  le  bonheur  de  ma 
«  vieillesse.  J'ai  d'ailleurs  toujours 
«  conçu  une  secrète  horreur  pour  un 
«  état  de  servilité  et  de  dépendance  ; 
«  et  je  n'ai  jamais  vu  qu'un  homme 
«  en  place  ou  un  courtisan,  dans  une 
«  classe  élevée  ou  inférieure,  prêtre  ou 
«  laïque ,  fut  son  propre  maîti  e.  » 
Pendant  soji  séjour  en  Irlande,  il  fit 
imprimer  un  poème  épique,  Ir.  Toast, 
sous  le  noui  de  Scheffer  ,  lapon ,  et 
supposé  traduit  par  Pere|^rine  Do- 
nald. C'était  une  saliie  politique  qui 
fut  donnée  à  des  amis,  mais  jamais  ven- 
due. Warton  pi  étend  qu'd  faisait  dans 
cette  satire  des  allusions  mordantes  à  la 
couilessc  de  Ncwbur^h.  Lors  de  la  dé- 
dicace de  la  bibliothèque  de  l\adcliffo, 
en  17  W,  il  prononça  sur  le  théâtre 
d'Oxford  un  discours  latin  qui  fut  ac- 
cueilli par  les  acclamations  d'un  nom- 
breux auditoire.  Warton  lui  accorda 
à  ce  sujet  de  grands  éloj^es  dans  ses 
Triomphes  (TLsis  (the  Triumphs  of 
Isis).  Mais,  loisque  ce  discours  eut  été 
imprimé,  il  ne  fut  pas  eit  géntral  aassi 


bien  acf:ueilli.  L'auteur  fut  attaqué 
dans  plusieurs  pamphlets  ;  on  lui  repro- 
cha d'écrire  en  latin  barbare,  de  cher- 
cher à  faire  délester  le  gouvernement 
et  à  poussc^r  les  jeunes  membres  de 
l'université  à  la  sédition  et  à  la  licence; 
accusations  très-graves,  si  on  ne  de- 
vait pas  présumer  qu'elles  sont  dic- 
tées par  l'esprit  de  malveillance  et  de 
parti.  xV  la  mémorable  élection  qui 
eut  lieu  en  1755  ,  dans  le  comté 
d'Oxford,  l'attachement  qu'il  montra 
pour  l'ancien  ordre  de  choses  lui 
attira  le  ressentiment  des  partisans 
de  l'ordre  actuel.  O.i  l'attaqua  vio- 
lemment dans  les  journaux  et  dans 
les  pamphlets,  et  on  l'accusa  d'être  wn 
Irlandais,  d'avoir  reçu  quinze  cents  li- 
vres sterlino;  pour  des  souscription.",  à 
des  ouvrages  qu'il  n'avait  jamais  pu- 
bliés, d'avoir  cherché  à  se  vendre  en 
Angleterre  et  en  Irlande  sans  qu'on 
eût  trouvé  qu'il  valut  la  peine  d'être 
acheté  ;  d'avoir  écrit  le  Londun  coc- 
Tu'ng  posl  ;  d'être  enfin  l'auteur  <ies 
Considérations  potitiques,  ouvrsge 
pubHé  en  1710,  sous  le  règne  de  la 
reine  Anne,  et  àwDreamcr,  qui  avait 
paru  en  1754,  sous  le  format  in-S". 
11  publia  à  cette  époque  son  Apolo- 
gie, dans  laquelle  il  se  justifia  assez  bren 
des  imputations  qu'on  lui  faisait,  tout 
en  s'avouant  néanmoins  l'auteur  du 
iJrcamer  et  en  récriminant  contre  ses 
adversaires.  Parmi  les  ouvrages  que 
King  a  reconnus  être  de  lui,  nous  ci- 
terons: \.  Miltoni  epistola  ad  Pol- 
liancni  (lord  Polwarth).  II.  Srrmo 
pedestris.  III.  Scnmmim,  er.loga , 
IV.  'Tenipliiin  lUiertatis,  en  trois  li- 
vres. V.  Tresoratiuncnlœ.  Vl.Epis- 
iula  o/jjiirgatoria.  VIL  Antonictti 
ducis  Corscorum  epistola  ad  Corscos 
de  rege  eligendo.  Vill.  Kulogiitiii 
Jacci  etoncnsis.  IX.  Avili  epistola 
ad  Perillam,  virginem  Scotam.  X. 
Oratiuncula  habita  in  domo  convo- 
vationis  ojoon.  cum  epistola  dedica- 


RIN 

\ti%h.  Kinp,  en  ' 

rrir;    fp    pl'i     iî     ' 


l'orj  r!.iv.M(jiif ,  d'un  orateur  cxrpllcnt  et 
«l'un  et  i  l>ain  au5<i  élégant  que  facile 
ni  laliii  et  m  aii;;lais  ï).  Il  mourut  le 
'M)  lier.  1703,  après  avoir  e«qui<sé 
fiii-mcmc  son  propre  caractère  dans 
une  rpitaplic  ou  il  avoue  ses  défauts, 
et  réclame  des  louaii;;cs  pour  5a  bien- 
veillance, sa  temnérnnce  et  son  cou- 
r.i;;e.  Celle  épil.i;'!  r  îîrvii't  éfre  'gravée 
sur  uneboîlecro  irson 

C(r»r  aurait  été  j  con- 

servé à  Saint-^lary-iiaii.  li  lut  en- 
terré dans  ré;;lise  d'Kalin;;,  mais 
l'inscription  est  sur  unetahlede  mar- 
l>r.^  de  la  chapelle  de  Saint-Marv- 
llall.  On  trouve  un  portrait  frappant 
du  docteur  Kin;;  dans  l'aperçu  donné 
par  \Vorl!di;e  de  rinslallation  de  lord 
^^  eNtinorlaiiii  tomme  chancelier  de 
riii.!\er>ilt*  d'Oxford,  en  1761.  On 
peut  aussi  consulter  sur  Kinj;  Nichols's 
fîouver  et  Swift.  I)  -  7.— s. 

KI\(1  (sir  KiCHARn) ,   vice-ami- 
i.<l   anglais,  fils  aîné  de   Tamiral  du 


M.rll.-.ro„-l.. 

d«*   Oarbutu.  K...„      -    ; - » c 

«ir  trr*  au'trre  :  oc  burjiil  que  d«  i  rau.  ii  pm* 
Mit  que  l'ope  aviil  »brt-|;r  se«  joum  eu  liuvtnt 
det  liqueiir«    *|i  t  de  mets  tr^»- 

«••aiv>noo4.  l!  r  dr»  nrr^ai» 

jnj;!  ran«,  .  l  -i  r\\:'\\s       m 

r|>  •««  et  prrr»  ,  un    ^-  \ 

K>Dt  inr>rt«,  dit  il.  U  > 

rt.».  i   al  r,  eu  I  -^1  .    .  r 

el   .  l  uii.v-rMU  .     ji:.  - 

sr.  mariaprdii  roi.   (ui 

•  <  ,    r  te    parlî     ja><'!>i;c 

dont  il  Dr  Urda  pa->  a  »«>rp«rt  r.— Ltirédacteort 
de  V EJ.nbmrgh  Jltrfm .  en  ai:oou(ant  la  deiuiè- 

mf         '    ■    f "J  tri  .  qui  parut   à   I  tm- 

li  l^utjust  ce  an  d^sinlérti- 

5-  Uoce  de  carjclirtt  de   ce 

t  L. 


KIN 


5i^ 


même  nom.  naquit  le  2W  sept.  1771. 
Entré  de  bonne   heure  dnns    la   ma- 
rine ,    il   «erv't    \  lM»rd    de    plusieunt 
•r   son  père,  et 
^  .  e   fixé   par  les 

reniements,  li  ohtmt  le  ranj^  de  capi- 
taine et  le  commandement  delà  fréj^ate 
.-/i/rorri.de^inpl-hnit  canons,  avec  la- 
quelle il  croisa  dans  la  station  de  l'Ir- 
lande, SOIS  les  ordres  de  l'afiiiral  Kinj;*- 
mill  jusqu'au  mois  de  juillet  17î>.'».  \ 
relie  époque  il  succéda  au  capitaine 
Re>nolds  dans  le  commandement  du 
Druitl.  de  ii  ente-deux  canons.  Sc^  bCt- 
viceaàbordde  ce  na\ire,  à\tc  lr(juel 
il  aecom;ia;Mia  un  ^jrand  nombic  de 
convois  allant  en  l'ortu^al  ou  en  ve- 
nant, furent  plutôt  dilTiciles  que  bril- 
lants. Le  7  janvier  1707,  il  s'empara 
de  la  /  l'Ilr  Hr  î,on\'nf,  ;;t  and  na>  ire  de 
transpoil  français  de  la  malheureuse 
expédition  de  Morard  de  (lalles,  diri- 
î;éc  contre  l'Irlande;  et,  pendant  l'été 
de  la  même  année,  il  passa  k  bord  de 
la  frégate  le  Strius,  plarée  sous  les  or- 
dres de  lord  Dnnraii  à  la  hauteur  da 
Tevcl.  L'année  suivante,  en  allant  re- 
connaître ce  port  ,  !e  capitaine  Kinj; 
rencontra  deux  navires  de  ^^uerre  hol- 
landais ,  nne  frégate  et  une  corvette. 
Oimme  \U  étaient  à  denx  milles  l'un  de 
l'auîre  et  hors  d'état  de  se  soutenir 
mutuellement,  il  attaqi:a  d'abord  la 
corvette  qu'.l  força  d'amener  son  pavil- 
lon, et,  après  une  assez  longue  chasse 
el  un  combat  d'une  demie-îieure,  il 
s'empara  é;;aleracnt  de  la  fré;;ate.  C'é- 
tait la  Furie,  de  trente-six  canons  et  le 
fViiakzfiamhriiJ,  de  quatorze,  sortis 
du  Texel  la  nuit  précédente  avec  des 
troupe*;  et  des  armes  deslinérs  pour 
rirhr.le.  Cette  affaire  est  remarqua- 
ble par  la  singulière  erreur  de  juge- 
ment dont  elle  fut  l'occasion.  Un  sloop 
de  guerre  anglais  se  trouvait  à  une 
très-petite  distance  du  Heu  du  combat 
etitre  le  navire  du  capitaine  King  et  la 
conrette  hollandaise  ;  mais,  malgré  les 


5î4  KIN 

vives  instances  de  ses  officiers  jimii 
aller  y  prendre  part ,  le  commandant 
de  ce  sloop  s'y  refusa  obstinément 
dans  Tinlime  persuasion  que  c'étaient 
trois  vaisseaux  ennemis  qui  fei^iinaicnt 
d'avoir  entre  eux  un  engagement 
pour  l'attirer  à  portée  de  canon.  Quoi- 
que le  capitaine  King  répondit  à  ses 
signaux  particuliers,  son  illusion  ne 
cessa  que  lorsque  l'affaire  fut  terminée. 
Une  profonde  mélancolie  s'empara 
alors  de  ce  mallieureux  commandant,  et 
lord  Duncan  sous  lequel  il  s'était  dis- 
tingué peiidant  la  guerre  précédente 
à  la  bataille  de  Camperdown  ,  ayant 
refusé  de  le  voir,  il  se  donna  lui-mcmc 
la  mort  quelques  semaines  après.  Le 
S/n'i/s  fit  depuis  différentes  captures 
sur  les  côtes  de  France,  mais  son  ca- 
pitaine n'eut  aucune  occasion  de  se 
signaler  particulièrement.  Le  26  jan- 
vier 1801  ,  il  donna  la  chasse  à  la 
Dédaigneuse,  fiégate  française  de 
Irente-six  canons,  el,  après  une  pour- 
suite de  deux  jours  et  un  combat 
acliarné  de  trois  quarts  d'heure  ,  il  la 
força  de  se  rendre  à  V Oiseau  et  au 
Sirius.  l.'Amrthist  s'était  aussi  jointe 
à  la  chasse,  mais  elle  ne  put  arriver 
qu'après  la  prise  du  bâtiment.  Ce  fut 
la  dernière  de  cette  guerre,  ^.ç^  Sirius 
ayant  été  désarmé  en  1802,  le  capitai- 
ne King  resta  à  terre  jusqu'en  1805, 
que  son  gouvernement  lui  confia  VA- 
c/iille,  de  soixante-quatorze  canons. 
On  le  voit  la  même  année  avec  le  jDr<?r/ J- 
//ow^///ctle6'o/o.v.î//.vsousCollingv\ood 
devant  le  port  de  Cadix,  d'où  ils  furent 
chassés  par  les  flottes  combinées  de 
France  et  d'Espagne.  Au  mois  d'octo- 
bre suivant,  il  se  trouvait  sous  les  or- 
dres de  Nelson  et  prit  part  au  com- 
bat de  'JVafalgar.  Engagé  successive- 
ment avec  les  vaisseaux  espagnols  le 
Mon  fanez  et  V  Argonaute,  il  força 
l'un  à  s'enfuir  et  l'autre  à  baisser  pa- 
villon. Deux  navires  français  le /ii^r- 
wick  et  V  Achille  se  présentèrent  pour 


KlIN 

l'cmpccher  d'animer  sa  prise;  une  ac- 
tion violente  et  désespérée  s'engagea 
alors  entre  V Achille  anglais  et  les 
nouveaux  antagonistes,  et  se  termina 
par  la  capture  du  Benvick.  Ij  Achille 
eut  dans  ces  affaires  treize  hom- 
mes tués  et  cinquante-neuf  blessés. 
L'année  suivante,  le  capitaine  King 
fut  présent  au  combat  dans  lequel  sir 
Samuel  llood  perdit  un  bras,  et  où 
quatre  grosses  frégates  françaises  fu- 
rent prises.  A  la  mort  de  son  frère  , 
arrivée  en  nov.  1806  ,  King  lui  suc- 
céda dans  le  titre  de  baronnet.  II 
servit  ensuite  au  blocus  du  Ferrol  el 
à  la  défense  de  Cadix,  où  l'équipage  de 
V Achille  fut  reparti  dans  des  chalou- 
pes canonnières  sous  les  ordresdu lieu- 
tenant Pearse.  De  Cadix,  sir  Richard 
passa  sous  les  ordres  de  sir  Charles  Cot- 
ton,  comme  capitaine  de  la  flotte  de 
la  Méditerranée,  et  il  servit  en  la 
même  qualité,  dans  la  flotte  du  Canal. 
Compris  dans  la  promnîion  du  mois 
d'août  1812,  il  joignit  la  flotte  de  sir 
Richard  Pellevv  stationnée  devant  la 
hauteur  de  Toulon  ,  avec  le  San-Jo- 
sepli,  de  cent  douze  canons.  Ce  vais- 
seau fut  un  de  ceux  qui  se  mesurèrent 
au  mois  de  novembre  1813,  avec  l'ef- 
cadre  française  commandée  par  l'ami- 
ral Emeriau  qui  avait  son  pavillon  sur 
le  Tf^agram,  de  cent  trente  canons. 
Mais  les  Français,  ayant  l'avantage  du 
vent ,  furent  en  peu  d'instants  hors 
de  portée,  et  le  feu,  auquel  s'étaient 
jointes  les  batteries  du  iSV^;^^,  cessa. 
J^a  perte  du  San- Joseph  fut  seule- 
ment de  deux  à  quatre  blessés.  Sir  Ri- 
chard venait  d'être  nommé  chevalier 
commandeur  de  l'ordre  du  Rain  , 
quand  au  printemps  de  1810  il  hissa 
son  pavillon  à  bord  du  Minden,  ayant 
reçu  le  commandement  de  la  station 
des  Indes-Orientales,  d'où  il  revint 
au  mois  d'oct.  1820.  Le  19  juillet 
1821,  il  reçut  sa  commission  de  vice- 
amiral,  et  il  fui  nommé  grand'-croix 


KIN 


KIN 


5i5 


«le  rniJrr  Ju  Bain  en  1K33.  Il  était 
tuinmaiiilant  rn  rhrfiians  la  MriLvuy 
lorN.|iie,  apreN  (li\  jnurs  ijr  inalatln*,  il 
l'iuiinit  dans  l'Iiotrl  «le  l'Amiianlé  à 
Slirrner*.  le  .'»  août  lK:ii.  Ses  ir^Jrs 
lurent  t)e|»ose5  ilans  i'é^lise  de  l'Ile  «le 
Slir|»|i\.  Sir  KichariJ  Kinj;  avait  eu  «le 
Min  premier  maria<;e  avrc  la  lili.*  lie 
l'amiral  DurLworlIi  qtialie  til'.  et  une 
filli'  ;  il  eu!  doti\  tiU  cl  ticut  ûlle-»  île 
^(,n  sri'onJ  mariage  a\ec  la  fille  de  l'a- 
nrtal  (motion.  D  — 7.  -  %. 

kl\4j  (PlFnnK  lotd).  publiriNte 
anglais,  descendait  du  lord  ^rand- 
rliancelier  du  mrme  nom.  Ne^eu  par 
sa  niere  du  crlcl>re  lxKKe(/'o>'.  Kl!<r, 
{l^irrre),  Wll  ,  V2V)  ,  61$  aine 
du  sixième  lord  Kin;»  et  de  Char- 
luile  tVedrrdfl  ,  il  naquit  le  31  août 
1770,  et  fut  élevé  à  l'université  de 
C^mbrid^e.  Il  était  encore  mineur 
i»)tsque  son  prie  mourut  au  mois  de 
nov.  17y;i.  11  ^uccéda  au  titre  de 
lurd  OcLItam,  et  devint  pair  d'An^le- 
Iciie.  Des  voti  eiilrce  à  la  cliambrc 
liaute,  lord  K'n^  li;;ura  dans  Ici  r3ni;5 
de  I  opposition  dont  il  >e  montra  l'un 
d«*smembies  les  plus  actifs.  11  attaqua 
dans  la  >eance  du  12  fc\rier  iStK) 
l'expédition  de  Hollande,  et  appu\a 
la  proposition  d'une  enquête  pimr  re- 
rliercher  les  causes  des  désasiies  qui 
en  avaient  rli-  la  suite.  lU'opposa  le  27 
a  ce  qu'on  suspendit  plu.s  lon^-teni[>$ 
l'acte  iï Ïiulu-Lis  corpus  ,  et  dit  que 
telte  mPNtiie  n  riait  propre  qu'à  au^- 
nu-ntcr  le  pouvoir  ministériel,  aux  dé- 
pens des  libertés  publiques.  Kii  1803, 
j1  prit  une  ;;rande  part  aux  discusMons 
qui  eurent  lieu  lorsque  la  banque  d'  \n- 
^Icteiie  su>pe:idit  ses  paiements,  et  il 
publia  à  ce  sujet  un  pamphlet  intitulé  : 
Pensrrs  et  reflexions  sur  les  restric- 
tions des  fHiieinents  en  espèces  aux 
bam^ues  iC  Angleterre  et  d'Irlande. 
11  fit  imprimer  aussi,  en  1811,  un  dis- 
cours prononce  par  lui  à  la  chambre 
des  lords  sur  le    hill  du    comte   de 


Stunliofte,  concernant  les  gtnnees  et 
les  hdletK  de  bampie.  Au  mois  t!c 
mars  iHlf»,  il  ipproclia  \i\ement  auK 
ministres  de  n'avoir  fait  aucune  dé- 
marche auprès  du  con;;rès  de  Vienne, 
pour  la  rentrée  ties  fonds  dus  au  ;;ou- 
vernement  anj;lais  par  l'Autriche  et  la 
Kussie  depuis  17l)fi.  Kn  1820  ^1«J 
août),  il  s'opposa  fortemoni  à  toutes 
les  mesures  proposées  contre  la  reine 
(>aroimp  ;  et,  en  1829,  il  publia  la 
/  ie  de  John  I.  tck".  un  volume  in-i*^ 
avec  des  extraits  de  .i  correspondance, 
des  journaux  et  di  coninum  place 
lUpok  ,  d'après  des  matériaux  orl^ji- 
naux  qui  rtaipiit  en  sa  possession.  Une 
5ect)nde  rdition  de  cet  cuvraf^e  a  paru 
en  1830,  dans  le  format  in-8",  avec 
d'importantes  additions  puisées  dans 
les  propres  notes  du  lord-chancelier. 
J/ord  Kinj;  se  fit  aus.si  remarquer  ver.i 
la  6n  de  sa  carrière  comme  un  ennemi 
violent  de  l'ét^lise  an;;luanr.  Il  mou- 
rut à  I.ondies  le  V  juin  1833.  Il  a\ait 
épousé,  en  180V,  Ilester  Fortescue, 
fille  du  comte  de  ce  nom,  et  nièce 
de  lord  (irenMJle,  dont  il  a  laissé  un 
(Ils  et  pluvieuts  filles.        I) — 7. — s. 

KI\SHi-:UC;K\  ^le  comte 
Jfsn-Mfm\i  van',  amiral  hollandais, 
né  le  V^  mai  1735,  à  I)op>bourR, 
dans  le  pa\s  de  (lueldres,  d'une  fa- 
mille noble,  entra  au  service  dès  l'àj^c 
de  neuf  ans  dans  l'armée  de  terre,  cl 
pas>a  dans  la  manne  cinq  ans  après. 
H  y  parcourut  avec  rapidité  tous  les 
grades,  et  il  était  vice-amiral  en  17(i7 
lorsque  la  i;uerre  éclata  entre  la  Porte 
et  la  Kussie.  A\ant  obtenu  du  stathou- 
der  la  permission  de  passer  au  service 
de  celle  dernière  puissance,  il  fut  ac- 
cucitti  avec  beaucoup  d'emjiressement 
par  l'impératrice  Callierme  II,  qui  lui 
confia  le  commandement  d'une  flolte 
de  cinq  vaisseaux  de  h^ne  et  de  quel- 
ques petits  bàliments  de  guerre,  a\ec 
laquelle  il  remporta  dans  la  mer  Noire 
une  victoire  importante  sur  la  flotte 


5?.6 


KIN 


turijiie,  composée  de  treize  vai<îscaux 
(le  li;;ne.  Il  lit  dans  celte  occasion  la 
première  expérience  d'une  nianœnNie 
très-ingénieuse  et  qui  depuis  a  été  imi- 
tée dans  toutes  les  escadres  de  l'Eu- 
rope. Ayant  observé  avec  soin  l'élat 
de  la  navigation  et  du  commerce  dans 
ces  parages,  il  remit  à  l'impératrice  un 
mémoire  que  cette  princesse  reç'it 
avec  beaucoup  d'intérêt.  Cependant 
Kinsbcrgen  quitta  la  Russie  ,  et  il 
revint  ,  en  1776  ,  dans  sa  patrie  , 
où  on  le  char£,ea  aussitôt  de  néiro- 
cier  la  paix  avec  l'empereur  de  Maroc; 
ce  dont  il  s'acquitta  avec  autant  de 
bonheur  que  d'habileté.  La  guerre 
avec  l'Angleterre  ayant  ensuite  éclaté, 
Kinsbergen  fut  mis  à  la  telc  d'une  di- 
vision de  sept  vaisseaux  de  ligne  sous 
les  ordres  de  l'amiral  Zoutman,  et  il  eut 
beaucoup  de  part  à  la  victoire  de  J)og- 
gersbunck,  qui  fut  remportée  sur  l'ami- 
ral Parker.  Lorsque  la  paix  fui  conclue 
(1783),  on  lui  fit  des  propositions 
avantageuses  pour  !e  service  de  Russie  ; 
niais  il  s'y  refusa  obstinément,  et,  ne 
voulant  plus  quitter  le  service  de  sa 
patrie,  il  rejeta  en  mrme  temps  de 
pareilles  offres  qui  lui  vinrent  de  la  part 
du  Danemark.  Reste  ainsi  l'un  des 
chefs  les  plus  distingues  de  la  marine 
hollandaise,  il  jouissait  d'une  grande 
fortune,  et  se  trouvait  dans  une  position 
très-brillante,  lorsque  la  révolution  de 
France  vint  porter  le  trouble  en  Eu- 
rope et  plus  particulièrement  en  IIol- 
l.iiulfi.  L'amiral  Kinsbergcn  concourut 
d'abord  avec  beaucoup  de  zèle  à  re- 
pousser les  premières  tentatives  d'inva- 
sion qui  furent  faites  par  inimouricz; 
niais(juand  les  Provinces-Unies,  si  lion- 
leusemenl  aJ>andonnées  par  leurs  alliés, 
furent  définitivement  tombées  au  pou- 
voir des  Français  en  17'.)5,  et  que 
ceux-ci  les  soumirent  à  leurs  systèmes 
de  rénovation ,  l'arairal  Kinsbergen 
fut  destitué  et  arrêté.  Il  ne  recouvra  la 
liberté  qu'aux  prières  de  son  ancien  ami 


KIN 

Schimmel-Péninck.  S'ëtant  retiré  dans 
une  de  ses  terres  près  de  Doesbourg,il 
ne  s'y  occupa  plus  que  de  sciences  et 
d'agriculture.  Ses  amis  firent  d'inutiles 
efforts  pour  le  tirer  de  cette  retraite  ; 
et  il  ne  la  quitta  pas  même  lorsque  le 
frère  de  Bonaparte,  devenu  roi  de 
Hollande,  le  nomma  son  chambellan- 
sénateur,  et,  en  mémoire  de  la  gloire 
qu'il  avait  acquise  en  combattant  les 
Anglais,  le  fit  comte  de  Doggers- 
bunck.  Ne  pouvant  pas  repousser 
ces  honneurs,  il  en  refusa  du  moins  tous 
l£s  traitements,  et  continua  de  vivre  à 
sa  belle  terre  d'Appeldoorn,  où  il  avait 
établi  des  serres  chaudes,  et  où  il  culti- 
vait des  plantes  de  tous  les  climats. 
C'est  là  qu'il  mourut  en  1820.  Le 
comte  de  Doggersbunck,  véritable  phi- 
lanthrope, fut  le  créateur  de  beaucoup 
d'élablissemenls  utiles.  C'est  à  lui 
que  la  Hollande  doit  l'institut  de  la 
marine  à  Amsterdam,  celui  des  sourds- 
muets  àGroningue,  les  académies  d'II- 
treclit ,  d'Harderwich  ,  etc.  Mem- 
bre ou  correspondant  des  principa- 
les sociétés  savantes  de  l'Europe,  il 
a  publié,  sous  le  nom  de  ses  élèves  , 
des  cartes  et  des  ouvrages  qui  sont 
devenus  classiques  :  1°  Ordre  etin- 
slruclioii  concernant  le  service  des 
vaisseaux;  ^^^  Exercice  du  canon  sur 
un  vaisseau  de  guerre  ;  3°  Manuel 
du  marin  ;  4"  Principe  de  la  tacti- 
que de  mer  ;  5*^  l'Artilierie  pratique 
de  la  marine;  6"  Description  de 
l Archipel ,  avec  une  cai  te  générale. 
Ce  dernier  ouvrage,  qui  est  très-es- 
timéjfut  traduit  en  allemand  en  1793.  - 
M— i)j. 
KIXSK"!  (  François-Joskph  ), 
général  autrichien,  naquit  à  Prague, 
le  G  décembre  1739,  de  l'une  des  fa- 
milles les  plus  illustres  de  !a  P>ohêmc, 
dont  son  père  ,  le  comte  François- 
Ferdinand,  était  chancelier  et  gou- 
verneur héréditaire.  Envoyé  de  bonne 
heure  à  l'académie  de  Vienne,  il  y  fit, 


RfN 


MN 


r^-. 


avrr  bottroup  t\c  siirrès,  $c$  premièi  es 
ëtinlr*.  (ju'il  ^int  terminer  à  riiiiiMT- 
sil«r  (le  rra;;u<'.  Iîf^liné  il'ahoi  J  4  la 
rirriffc  ci\iU,  il  se  livra  à  la  science 
(les  lois  ;  mais,  5on  gotU  particulier 
rentraiiiant  ytn  les  ariues,  il  entra, 
en  IT.'iî),  comme  volontaire,  dans  les 
cliex au -légers  ,  donl  son  frère,  le 
ciimle  Jo.trph,  é\iA  colonel.  Il  passa 
ensuite,  comme  sous-lie«iten»ul,  dans 
Ir  r^^imrnl  de  I^sc),  et  fil,  en  cette 
({ualitr,  les  premières  campagnes  de  b 
guerre  de  irpi  ans  ,  contre  les  l*rus- 
siens.  Kn  17G0,  il  faisait  naitie,  com- 
me capitaine,  du  corps  d  armée  com- 
po*i*  de  !\i.'<.$e$  et  d'Autridiiens  qui , 
scnis  les  ordres  de  Lascv  et  de  Cier- 
niclicfT,  snrpril  et  occupa  T.erlin.  Ce 
fut  lui  qui  en  porta  la  nouvelle  au  ma- 
réchal haun.  Il  devint  lientcM  major, 
puis  colonel  (176S\  Alors,  plein  de 
zèle  pour  l'inslruition  de  son  irj;imcnt, 
il  V  cré-1,  à  ses  frais,  en  faveur  dos  jeu- 
j  ;,  une  école  qui  fixa  le>  re- 

îipératricc  Marie  Thérèse, 
.  -  !■. il  (le  nio>!cle  à  quelques  établis- 
,  .'::s  du  même  •;eiirc.  Toujours 
.iNiiic  d'instruction,  il  ne  dédaignait  pas, 
mcnic  alors  qu'il  était  colonel,  de  sui- 
vre les  cour»  parliruliers  que  le  matîié- 
m.Tlicien  Tes-^aneL,  professeur  dislîn- 
>^v.r,  lennil  à  Prn;;uc.  Le  V  septembre 
177:î,  il  fut  nommé  général-major. 
Trois  ans  après,  le  désir  de  connaître 
toutes  les  branches  de  l'instruction 
l.ii  fit  entreprendre ,  d'après  le  dé- 
sir que  lui  en  témoi;;nait  l'impératrice, 
pi'ti  leurs  VON a^cs  pour  visiter  les  éco- 
les les  pl'.;s  renominécN.  S'étant  rendu 
d'abord  à  Stuttj;ard,  il  y  \h  l'acadé- 
mie militaire,  qui  alors  joiiissait  d'une 
nrande  réputation.  En  Suisse,  il  vi-^ila 
les  érole.>  formées  par  le  baron  de  Sa- 
lis el  Pesta!ozzi.  De  retour  de  ses  voya- 
ges, il  adressa  à  rimpérntnce  un  rap- 
port d.^ns  lequel  il  fil  des  rapproclic- 
ments  cui  ieux  sur  ces  établissements  et 
celui  de  Vienne.  En  1778,  le  comte 


Kinsli  commanda  une  Lri;;ade  à  l'aile 
(;.iuche  de  l'armée  qui  se  réunit  en  Ih» 
liéme  sous  les  oidres  de  I^udon.    On 
sait  que,  dans  cette  insignifiante  cam- 
pagne, le  j;rand   Fiédeiic  et  l'empe- 
reur Joseph  ,  séparés  par  l'Elbe,    ne 
fil  eut  la  gueire  que  par  des  marches  et 
contre-marches,  sans  jamais  en    venir 
aux  mains.  Il  entrait  alors  dans  le  sys- 
tème autiirliien    de   faire   passer    Iré- 
qurmment  les  pé  léraux  d'un    corp.s  à 
I  autre.  Ain>i,  depuis  tr  13  avril  177K, 
jusqu'au  moment  où  le- années  piircnt 
leurs    quartiers    d'hiver,     Kiii:»Li    &« 
trouva  successivement  sous  les    ordres 
des  {généraux  Wallis,  Ellriciisbausen, 
Albert  de  Saxe-Teschen,  el  NVurm- 
ser.  Après  la  pai\  deTeschcn,  qui  fut 
si;:née  le  13   mai  1779,  il  épousa   la 
fille  du  comte  de  Traulm.in.tijiifl ,  qui 
était  dame  d'honneur  de  rinipératrice^ 
et    cette  princes.se  le   nomma,  dans  La 
même    année  ,    colonel  -  prupilélalre 
d'un  régiment  d'inranterie;   puis  ,  en 
17S0  ,  .^ous  directeur    de    l'aradéiuie 
militaire  de  N  ienne-Neustadt.  Cet  éta- 
blissement célebie   fut  alors  réorganisé 
d'api  es  les  idées  et  les  plans  que  Kinski 
avait    conçus  dans  sr.s  vovaf;es;   et, 
lorsque  le  comte   Antoine  Collorédo, 
qui  en  était  le  premier  directeur,  moi»- 
rul  (1785),  il  lui  succéda  immédiate- 
ment.  En   lui   confiant   ces  foiirlions 
importantes,  l'empereur  Joseph  II  lui 
donna  le  titre  de  chambellan  et  le  ;;ra- 
de  de  feid-raaréchal-lieutenant.    Fen- 
dant sonadmlnistratio!!  de  ce  bel  éla- 
blissemeot,  quia  duré viii;;t-six  ans,  le 
comte  Kinski  forma  la  plupart  des  of- 
ficiers et  généraux  qui  ont  illustré  l'ar- 
mée autrichienne.  Dansle  même  temps, 
l'erîfpereur,  qui  l'aim.iit    beaucoup,  lui 
confia  encore  d'autres  fonctions;  mais 

Jamais  il  ne  quitta  ses  «lèves  qu'avec 
epliis  vif  rco;ret.  En  17S3,  il  accum- 
pa;;na  ce  prince  dans  son  voya^^c  en 
Italie;  et,  en  1788,  il  dut  le  suivre 
également  dans   sa   campagne    contre 


528 


KIN 


KIN 


les  Turcs  ^  où  il  fut  spécialeineiit 
rharj^é  île  ;iiiiger  rnrcli'iluc  Fiançois, 
depuis  empereur.  Kiiiski  suivit  avec 
beaucoup  d'alleiillon  les  opérations  Je 
cette  {];ucrrc,  et  il  les  fit  toutes  servir  à 
rinstruclloii  (lu  jeune  prince,  dont  la 
personne  ,  gravement  compromise  , 
dans  la  nuit  du  20  au  21  septembre, 
ne  fut  sauvée  que  par  sa  présence  d'es- 
prit. L'armée  autrichienne  se  retirait 
d'Iilovsasur  Caransebes,  lorsque  tout- 
à-coup  une  terreur  panique  saisit  l'ar- 
rière-(;ard;  et  se  répandit  dans  le  corps 
principal.  L'archiduc  se  trouvait  en 
ce  moment  à  la  première  colonne.  Le 
comte  Rinski  donna  sur-le-champ  , 
au  bataillon  qui  était  près  de  lui  , 
l'ordre  de  se  former  en  carré  ,  et  il 
plaça  au  milieu  le  jeune  archiduc,  qui, 
marchant  ainsi  pendant  la  nuit,  arriva 
sur  une  hauteur,  où  il  prit  position,  et 
se  trouva  en  sûreté  jusqu'au  jour,  où  il 
fut  rejoint  par  les  autres  colonnes. 
Plusieurs  coups  de  canon  furent  tirés 
sur  le  carré,  et  deux  hommes  furent 
tués  à  côté  du  prince.  Lorsqu'il  quitta 
l'armée,  au  mois  de  décembre  1788  , 
le  comte  KinsLi  retourna  à  son  acadé- 
mie, et  il  ne  s'en  éloigna  que  six  ans 
plus  lard,  quand  son  ancien  élève  , 
devenu  empereur  ,  sous  le  nom  de 
Fiançois  II,  lui  conGa  le  commande- 
ment d'un  corps  d'armée,  qui  se  réunit 
sur  le  Rhin  pour  combattre  les  Fran- 
çais. Envoyé  d'abord  dans  le  pays  de 
I  uxembourg,  pour  y  commander  une 
division,  il  fut  bientôt  dirigé  vers  les 
Pa\s-r>as,  où  la  grande  armée  austro- 
britannique  combatfait  sous  les  ordres 
du  prince  de  Cobourg  et  du  duc 
d'York.  11  )  arriva  dans  le  moment 
où,  a|ii  es  s'être  emparé  de  Condé,  de 
Valencicnncs  et  du  camp  de  Famars  , 
cette  armée,  qui  hésitait  depuis  doiix 
semaines ,  allait  enfin  occuper,  sans 
combattre,  le  camp  de  Cé.sar,  évacué 
par  les  Français  (Voy.  Kilmaink, 
dans  ce  vol).  Le  comte  Kinski  fut  placé 


ce  jour-là  (8  août  1793)  sous  les  or- 
dic:;  de  Glairfayt,  et  s'il  n'y  courut 
pas  de  plus  grande  dangers,  il  n'y  ac- 
quit pas  plus  de  gloire  que  le  reste  de 
l'année  dont  il  faisait  partie.  On  sait 
que  les  Français  avaient  déjà  opéré  leur 
retraite  sur  Jja paume  et  Aiias  ,  lors- 
que les  alliés  se  présentèrent  devant  le 
fameux  camp  de  César,  pour  l'atta- 
quer, et  qu'au  lieu  de  les  suivie  les  An- 
glais allèrent  faire  le  siège  de  Dunker- 
que,  et  les  Autrichiens  celui  du  Ques- 
noy.  Le  comte  Rinski  fut  au  nombre 
de  ces  derniers  ,  et  il  prit  beaucoup  de 
part  à  ce  siège.  Après  la  reddition  de 
la  place  (18  août),  sa  division  fut  diri- 
gée vers  Maubeuge,  et  chargée  encore 
de  couvrir  les  opérations  du  siège,  que 
Jourdau  contraignit  bientôt  les  Au- 
trichiens de  lever,  après  la  bataille  de 
Wattignies  [Foy.  Jourdan  ,  dans 
ce  vol.).  Le  comte  Rinski  reçut  alors 
l'ordre  de  joindre,  avec  Clairfayt  , 
l'armée  du  duc  d'York,  dans  la  West- 
Flandr e.  Le  25  octobre,  les  deux  gé- 
néraux, parlant  de  Tournay,  se  mirent 
en  marche,  et  ils  s'emparèrent  d?.  Me- 
nin  et  de  quelques  autres  places.  L'ar- 
mée française,  sous  les  ordres  de  Pi- 
cliegru,  avait  cerne  Y'pres  ;  ils  la  for- 
cèrent de  se  retirer  sur  Bailleul  et  Po- 
peringen.  Les  alliés  ayant  pris  alors 
des  quartiers  d'hiver  ,  Rinski  resta 
5.0US  les  ordres  du  duc  d'York  ,  avec 
dix-huit  bataillons,  vingt-sept  compa- 
gnies et  quatorze  escadrons  de  trou- 
pes autrichiennes.  T/empereur  Fran- 
çois étant  arrivé  dans  les  Pays-lîas  à 
celle  époque,  la  campagne  de  171)  i 
commença,  le  17  avril,  par  une  atta- 
que générale  que  l'on  fit,  du  Cateau  et 
Forest,  srrr  l'armée  française,  carrton- 
née  entre  Gurse  et  Landrecics.  Le 
jiilnce  de  Cobourg  avait  divisé  ses 
troupes  en  huit  colonnes  ;  la  troisième, 
dans  laquelle  se  placèrent  l'empereur 
et  le  général  en  chef,  était  sous  les  or- 
dres du  comte  Rinski.   Cette  colonne 


succrs,  auuuci   KiiisLi  rut  une  ;;ran(Jr 
[•art,    la   jM.icf    se   rendit   ['M)    a^rill 


UN 

enleva  les  postes  et  ie^  redoutes  qu'elle 
était  rliar^ée  d'allaquer  ,  et  rîlc  piit 
deui  canons.  I.e  lendemain  I.andie- 
cie»  fut  cerné.  Le  prince  héréditaire 
d'Orange  di[i;;eait  le^  traxauk  du 
siè^e.  I.e  '22  avril  ,  l'arrnre  d'ob- 
serralion  ,  dont  la  seconde  colonne 
était  sous  les  ordre^  de  KiiiNli  ,  at- 
taqua l'armée  française,  la  repoussa, 
et  s'établit  sur  les  deux  rives  de  la 
Sambre.  I.e  même  jour,  l'empereur  lui 
annonçait  ,  de  Hiu&elles,  par  un  billet 
de  sa  main  ,  qu'il  le  nommait  général- 
frld-zeu;;raeisler,  ou  -i and  maître  de 
l'artillerie.  l.e'JGaMil,  l'armerfran- 
çai»e  s'avança  p<nir  dé;;a;;er  I^ndre- 
cie>,  maiN  elle  (ut  rrpoussee.  Après  ce 
ucces,  auqi 
•art,  la  pi: 
N  rrs  le  milieu  de  mai,  l'armée  aulri- 
cliiennr.  partagée  en  six  c«)rps,  dont 
le  ({ualrieme  était  sous  le  commaniie- 
ment  de  Kiii>li,  entra  en  Flambe, pour 
en  chasser  le  général  Picbe^ru.  I.e  17, 
le  comte  KinsLi  s'empara  de  Houvi- 
nes ,  et  repoussa  au-delà  de  Marck 
le  corps  français  qui  était  devant  lui. 
I.e>  autres  corps  autrichiens  furent 
moins  heureux  ;  l'iche^ru  reprit  Lan- 
nov,  Turcoinj; ,  Waterloo;  et  l'ar- 
mée autrichienne  se  retira  sur  Tour- 
iiav.  Le  général  Iiender  avant  alors 
été  chargé  d'aller  prendre  le  comman- 
ilemenl  de  Luxeinbourj  ,  le  comte 
KinsLi  fut  nommé  rommandant-oéiié- 
ral  dans  les  Favs-Uas;  mais  il  eut  i 
peine  le  temps  d'entrer  en  fonctions 
que  l'armée  dut  se  retirer  sur  la  Meu- 
se, d'après  les  ordres  qu'avait  lais- 
sés l'empereur.  Le  12  juillet  il 
évacua  lîruxellcs  ,  où  les  Français 
entrèrent  immédiatement  ,  et  la  re- 
traite continua  jusqu'au  Uliin.  L'ar- 
mée autrichienne  prit  ses  quartiers 
d'hiver  sur  la  rive  droite  du  fleuve. 
Au  mois  de  janvier  179."),  ayant  été 
nommé  commandant  de  l'aile  gauche 
de  l'armée  autrichienne  ,    Kinski  fut 

LXVllI. 


KIN 


Sig 


cbar^é  de  défendre  le  passade  du  lUiin; 
mais,  depuis  deux  ans,  il  était  absent 
de  son  aradimie,  ou  ses  élèves  le  ré- 
clamaient i\cc  une  extrême  impatience. 
IjC  11  )uin,  il  reçut  enfin  ordre  de  re- 
mettre le  commandement  de  son  corps 
d'armée  au  générai  Sziarrav,  et  de  ve- 
nir reprendre  ses  fonctions  à  l'acadé- 
mie, qu'il  ne  quitta  plus,  )us<pi'au  rooi> 
i'aoùt  t7'.)H,  lorsque  l'armée  fran- 
çaise, s'etant  avancée  dans  le  Haut- 
Palatinat,  il  fut  envoyé  en  toute  hâte  à 
iVa^ue,  pour  y  assister,  au  moins  de 
ses  conseils,  le  général  Hender ,  et 
prendre  le  commandement  tles  trou- 
pes. SI  les  Français  pénelr.iieiit  en  Bo- 
hème. Mais  c'est  alors  que  liernadolle 
avant  été  battu  à  Neumairkt,  et  Jour- 
dan  à  .\mberj;  et  à  \\  urizbour;;,  la 
Hohèine  fut  hors  de  dan;;ei .  Kin<^ki 
relouiiia  vers  «^es  élè\rs.  .\ii  moi-;  de 
mai  iKtK'j,  comme  on  piévo\ail  qu'une 
nouvelle  guerre  avec  la  France  allait 
éclater,  l'empereur  François  voulut 
visiter  l'Autriche  supérieure,  et  Kinski 
reçut  ordre  de  l'accompaj^ner.  A\ant 
été  atteint  le  IS  mai  d'une  violente 
inllammation  de  poitrine,  il  (ut  trans- 
porté à  Nienne;  et  il  mourut  dans 
celte  ville  ,  le  *J  juin  de  la  même 
année.  D'après  ses  dernières  disposi- 
tions, ses  dépouilles  mortelles  furent 
déposées  au  cimetière  de  l'académie 
qui  avait  été  si  lon;;-lemps  l'objet  de 
ses  soins  et  de  son  affection.  Les  of- 
Bciers  de  l'armée  autrichienne,  presque 
tous  ses  élèves,  se  cotisèrent  pour  lui 
élever  un  monument  ,  dont  l'exécution 
fut  conGée  au  célèbre  Schaller.  Ce 
monument  est  [ilacé  au  milieu  du 
jardin.  Sur  le  piédestal  en  marbre,  de 
seizt  pieds  de  haut ,  on  voit  le  buste 
en  bronze,  de  j;randeur  colossale.  Les 
ouvraj^es  que  le  comte  ivinski  a  publiés 
pendant  le  tem(is  de  sa  direction  et 
pour  l'usage  de  ses  élèves,  tous  très- 
estiraés ,  sont  depuis  lona;-temps  élé- 
mentaires dans  l'armée  autrichienne  ; 

34 


53o 


KIR 


KIR 


savoir  :  I.  Abrégé  élémenfm'rc  de 
ce  qui  concerne  le  service  ini/ifaire, 
•2''  édit.,  2  part.,  tienne,  1795, 
ln-8".  II.  Mélanges,  6  part,, 
Vienne.  1786,  in-8^  III.  Frinci- 
pcs  généraux  sur  Vinstruction  pu- 
blique et  principalement  sur  Vin- 
struction luilitaire ,  1787,  in-8". 
Ces  divers  oiivraj^es  ont  eu  plusieurs 
éditions.  Une  souscription  fut  ouverte 
en  1825  pour  une  édition  complète 
dans  un  format  plus  classique,  afin  que 
tous  les  oificicrs  et  même  les  soldats 
pussent  en  faire  usage.  Dès  Tannée 
1775,  le  comie  Kinski  avait  j^ratifié 
la  ville  de  Pra^^ue  de  sa  collection 
de  machines  hjdrauliques  et  de  son 
cabinet  de  minéraux.  En  1776,  il  fit 
don  à  l'université  de  sa  bibliothèque 
particulière  et  de  celle  de  sa  famille. 
La  ville  reconnaissante  le  nomma  di- 
recteur de  la  bibliothèque  et  du  cabi- 
net de  minéraux  de  Tuniversité.  — Le 
comte  KiNSKi  {Joseph)^  frère  du  pré- 
cédent, fut  comme  lui  un  des  f;énéraux 
les  plus  distinj^ués  de  l'armée  aulii- 
chicnne.  C'était  surtout  dans  l'arme 
de  la  cavalerie  qu'il  excellait.  Jouis- 
.sant  d'une  faraude  faveur  auprès  de 
.ïoseph  H,  il  l'accompagna  dans  la 
^ueiic  de  la  succession  de  Ravière  et 
dans  celle  contre  les  Turcs.  Après  la 
niott  de  ce  prince  il  fut  rarement  em- 
ployé, devint  f^ouverncur  de  Vienne, 
et  mourut  dans  celle  ville  en  février 
ISOr.  M— Dj. 

KIUKi:  uni  TE.  Voy. 
\\  HiTi:,  I>,  i56. 

IvIKWAX  (KicuARF)),  chimiste 
célèbre,  né  en  Irlande  dans  le  comté 
de  Calloway  ,  vint  de  bonne  heure  à 
Dublin  et,  après  avoir  achevé  ses  pie- 
mières  études,  y  suivit  les  cours  de 
droit  à  l'université,  et  y  prit  ses  f; ra- 
des tant  de  liceucié  que  de  docteur 
ès-juiisprudsncc  ;  enfin  il  y  fut  reru 
avocat  et  plaida  rnèine  quelques  cau- 
ses. Mais  prolâblernent  les  profits  n'en 


lurent  pas  grands,  et  les  procès  lui  lais- 
sèrent assez  de  loisir  pour  qu'il  étudiât 
la  chimie  et  l'histoire  naturelle.  In- 
sensiblement il  se  trouva  qu'il  en  savait 
à-peu-près  autant  dans  ces  sciences 
d'observation  que  dans  l'inextricable 
labyrinthe  des  lois  anglaises,  et  qu'il 
comptait  dans  celte  carrière  bien  moins 
de  rivaux  qu'au  barreau.  Cependant, 
ne  croyant  point  devoir  rester  en 
Irlande  ,  il  se  rendit  à  Londres  où 
non  seulement  il  fut  reçu  membre  de 
la  Société  royale,  ce  qui  ne  coule  qu'un 
peu  d'argent  et  n'exige  que  de  fort 
médiocres  connaissances ,  mais  où  di- 
vers mémoires  remarquables  le  tirè- 
rent de  la  foule  des  membres  ses  col- 
lègues ;  et  où,  en  1782,  un  travail 
particuher  lui  valut  la  médaille  de  Co- 
pley.  Ainsi  classé  parmi  les  savants, 
Kirwan  revint  en  Irlande  en  1783, 
et,  désormais  voué  tout  entier  aux 
sciences  naturelles  ,  il  n'eut  plus  d'au- 
tre soin  que  d'en  étendre  le  domaine 
par  des  découvertes,  et  d'en  populari- 
ser les  résultats  par  tous  les  moyens 
que  peuveîit  amener  l'émulation  et  la 
publicité.  Les  nombreux  Mémoires 
dont  il  enrichit  les  Transactions  de 
la  société  royale  de  Dublin ,  et  une 
deml-ilouz.iine  d'ouvrages  d'exposi- 
tion contribuèrent  puissamment  à  ce 
double  résultat.  De   bonne  heure  la 


socic 


té  royale    de  Dublin 


lui  décerna 


la  présidence,  et  sa  renommée,  devenue 
européenne,  lui  valut  le  litre  de  mem- 
bre des  princi[iales  sociétés  savantes 
de  rKuro[)C.  Il  fonda  ,  sous  les  auspi- 
ces du  gouvernement  anglais,  un  corps 
îjavant  destiné  à  poursuivre  les  décou- 
vertes scientifiques  et  à  leur  donner  une 
direction  prati(]ue  et  utile.  Celle  so- 
ciété, appelée,  (lu  nom  de  son  créateur, 
société  kinvanienne  ,  existe  encore 
aujourd'hui  :  la  minéralogie  et  la  chi- 
mie lui  sont  redevables  de  progrès 
réels.  Kirwan  lui-même  donnait  l'es- 
sor et  l'élan  à  ses  collaborateurs,  pas- 


KIK 


KIR 


^3 


anl  a\fc  une  rapiJlté  mfrTeillpu<i^  dir 
la  botanique  à  la  minéralogie ,  dr  la 
minéralonie  a  la  chiinif  ,  de  la  rlii- 
mie  à  la  inéléoroloj^ic  ,  toujours  clirr- 
clianl  des  applications  à  IV^nono- 
mif,  à  la  fabricalion,  se  tenant  soi- 
j^neu^ement  au  courant  de  tout  ce  qui 
se  derou\rait  ailleurs  ft  «e  balançant 
point  à  se  déclarer  pour  l'idée  nou- 
velle dès  qu'elle  auiil  les  laits  pour  elle. 
C'est  ainsi  qu'en  un  temps  où  les  clii- 
mistes  an<;lais  ne  >oulairnt  point  en- 
core reconnaître  la  révolution  opérée 
par  T^Toisier  dans  la  théorie  fonda- 
mentale de  la  combustion,  Kirwan  finit 
bar  admettre  d'avsez  bonne  price 
l'oxi^ène  qui  ren\er  a.t  le  pblo«;istl- 
quc.  (^»mme  minéralo};iNte,  surtout,  il 
n'avait  aucun  rival  dan<(  toute  la 
C»rande  Hreia;;ne.et  il  fallait  pa^iser  la 
mer  pour  lrou\er  des  «^avanlsqui  l'em- 
portassent sur  lui.  liien  nu'crolifr  et 
arranj;eur  des  Allemands  le  plus  sou- 
vent, ceux-ci  ne  dédai;;naieut  pas  de 
lui  rendre  la  pareille  ,  et  plus  d'nn  mé 
moire,  plus  d'un  crand  ou\raf;e  de 
Riiwan,  ont  eu  los  Honneurs  de  la  tra- 
duction allemande.  Ne  pouvant  don- 
ner ici  la  liste  complète  de  ses  mé- 
moires, soit  dans  les  Transudiuris 
fthilusophiifurs  de  hi  sih  irtc  royale 
lit'  Londres  ,  soit  dans  celles  de  la 
société  royale  de  l)ithliii\,  nous  nous 
contenterons  d'indiquer  ceux  où  il 
rend  compte  de  sa  belle  série  d'expé- 
riences tendant  à  déterminer  les  pe- 
santeurs spécifiques  et  les  divers  de- 
j;rcs  d'affinités  chimiques  des  sels , 
ceux  qui  contiennent  ses  recherches 
sur  la  force  respective  des  acides,  et 
enfin  ses  travaux  sur  les  propriétés  de 
la  stronliane  et  les  caractères  par  les- 

3ucls  elle  se  distingue  de  labarUe.  On 
oit  de  plus  à  Kirwan  :  I.  Apprécia- 
tion de  la  température  sous  des  la- 
titudes différentes,  Londres,  1787, 
in-8"  (traduit  en  français,  par  Adet , 
Paris,  1789;  traduit  en  allemand,  par 


(>rell).  II.  Tableau  comparatif  des 
oôsm'atitms  météorologrtpies  faite 'i 
en  Irlanile,  acec  (fucltfues  indica- 
tions fMtur  former  des  prédictions 
sur  tes  changements  de  temps.  III. 
Eléments  de  minéraloi^ie,  Dublin, 
17'.)V-*)7,  2  vol.  in-H"  (Iraduil  en 
français,  par  (fibelin,  Paiis,  17S.'>, 
in-H";  traduit  en  allemande  C'est 
rouvra;je  capital  de  Kirwan.  F,n  don- 
nant à  r.\n;^leterre  ce  précis  dont  elle 
manquait  ,  il  eu»  soin  6'\  faire  en 
trer  toutes  les  découvertes  modernes, 
et  principalement  celles ties  Alleman<ls 
dont  é\idemment  les  manuels  lui  ont 
servi  de  modèle.  S'il  mérite  des  louanj;es 
rous  ce  rapport,  il  faut  avouer  qu'il  est 
un  peu  tiop  sobre  de  citations  et 
de  louan;;es  quand  il  s'apit  de  la 
France;  et  l'on  reconnaît  là  parfaite- 
ment l'impartialité  britatini(jue.  Au 
reste,  il  \  a  Aelléilé  de  méthode  par  tout 
l'ouvrage.  Le  point  «le  vue  auquel   se 

fdacc  Kir\san,  la  nécessite  de  fonder 
a  classification  minéraIoj;ique  ,  non 
plus,  comme  Werner,  sur  des  caractè- 
res extérieurs,  non  plus,  comme  Home 
de  Li-'le,  sur  1."»  forme  extérieure  des 
cristaux,  mais  sur  les  éléments  >rais 
dont  se  compose  la  molécule  co!:sti- 
tuanle,  enfin  surtout  les  analyses  déli- 
cates et  nombreuses  qu'il  donne  de 
divers  minéraux,  bien  qu'il  ne  faille 
pas  aveuglément  compter  sur  cette 
précision  mathématique,  assignent  un 
rani;  très-haut  à  l'ouvraf^e  de  Kirvsan, 
qui  est  bien  dépassé  aujourd'hui,  mais 
qui  n'en  est  pas  moins  le  point  de 
départ  d'une  ère  nouvelle,  et  où  se 
dessine  nettement  l'esprit  du  minéra- 
logiste moderne.  IV.  Essai  sur  Ta - 
nalyse  des  substances  minérales  , 
Dublin,  1799,  in-8''.  Kirwan,  dans 
son  zèle  pour  la  science  minéralor^i- 
que,  dans  son  impatience  d'en  répan- 
dre, d'en  faciliter,  d'en  préciser  les 
principes,  était  sans  cesse  tourmenté 
de  ridée  que  les  caractères  mécaniques 

34. 


:)ii 


KIR 


KLA 


ou  extrinsèques  sont  insuffisants,  que 
la  composition  chimique  seule  peut,  en 
révélant  la  vraie  nature  des  minéraux, 
fournir  les  vrais  moyens  de  les  recon- 
naître sûrement.   C'est  sous  l'empire 
de  cette  idée  qu'il    écrivit   l'ouvrage 
dont  le  titre  précède.  V.  Essai  sui'  le 
phlogislique  et   sur  la    nature  des 
acides  ,  Londres  ,  1787,  in-8°,   2** 
édition  (traduit  en   français  par  M"*^ 
Lavoisier,  avec  des  noies  de  Guyton- 
Morveau,  de  Lavoisier,  de  Laplace,  de 
Mono;e,  de  Berthollet,   Paris,  1788, 
in-8").     VL   Des  engrais  les  plus 
ui>antageux  et  de  leur  application 
aux  divers  terrains^  Dublin,  1796, 
in-8°  (traduit  en  français  par  F. -G. 
Maurice,    Genève,    1800   et  1806, 
in-8°  ;   puis  réimprimé  à  la  suite  du 
Traité    des  engrais,  du  même  au- 
teur, 18'25,  et  suivi  d'une  explication 
des  termes  chimiques  qu'emploie  Kir- 
wan;tradiiit  eu  nllcmandpar  A.-S.-L. 
Lentcn).    VIL    Essai  de  géologie, 
Dublin,  1799,  in-8"   (trad.    en  alle- 
mand par  Crell).  Kirwan  essaie,  dans 
ce  traité,  de  concilier  les  idées  de  la 
Genèse,  alk't;^orisées   et  largement  in- 
terprétées, mais  dans  des  Innites  que 
ne  condamne  point  rEç:;lise,  avec  les 
faits  de  l'histoire  de  la  terre  que  l'ob- 
servation permet   de   ref^ard.»r  corinne 
incontestables,  et  les  induclioiri  qu'il 
croit  pouvoir  en  tirer.    Kirwan,  dans 
toutes  ces  explications,  diffère  beau- 
coup de  Deluc  [Voy.  ce  nom,  LXII, 
291).   Les  ennemis  de  la  foi,  dans  leur 
manière   d'apprécier  les  splèmes  des 
deux  t^colo^iucs,  se  sont  montrés  fort 
opposés  à  Kirwan,  dont  eflcclivement 
les  théories  sont  imparfaites.  Mais  in- 
sensiblement les  pro;;rès  de  la  ^éolo- 
^ie  ont  montré  qu'il  n'a  point  eu  au- 
tant de  tort  qu'on  Ta  cru,  que  Deluc 
est  loul  au  moins  aussi  (gratuit  que  lui 
dans  ses  hvpothèses,  et  que  souvent  il 
est  aussi  loin,  peut-être  même  plus  loin 
des  faits.  P— ot. 


KLAPROTH  (Jules-Henri), 
orientaliste  célèbre,  né  à  Berlin  le  11 
oct.  1783,  était  fils  d'un  chimiste  dis- 
tinf^ué  [Voy.  Klaproth  ,  XXII  , 
458)  qui,  frappé  des  dispositions  qu'il 
montra  dès  rào;e  le  plus  tendre,  s'em- 
pressa de  les  cultiver.  Il  fit  dès-lors  de 
grands  progrès  en  chimie ,  en  minéra- 
logie ,  en  botanique;  mais,  à  mesure 
qu'il  approchait  de  l'adolescence,  ces 
études  perdirent  de  l'attrait  qu'elles 
avaient  pour  lui.  Une  impulsion  irré- 
sistible le  poussait  vers  l'étude  des  lan- 
gues orientales.  La  bibliothèque  royale 
de  Berlin  possède  une  collection  assez 
considérable  de  livres  chinois.  Dès  que 
Klaproth  les  vit,  le  désir  de  connaître 
cette  langue  s'éveilla  en  lui  ;  un  dic- 
tionnaire informe  rédigé  par  Mentzel 
{Voy.  ce  nom,  XXVIII,  327)  sous  la 
direction  du  P.  Couplet,  et  le  diction- 
naire chinois-espagnol  du  P.  Diaz,  ou- 
vrage également  imparfait  dont  une 
copie  se  trouve  dans  cette  bibliothè- 
que ,  lui  fournirent  les  premiers  moyens 
de  satisfaire  sa  curiosité.  Il  y  joi- 
gnit le  Muséum  sinicum  de  Bayer 
(Voy.  ce  nom,  III ,  603).  Une  note 
écrite  sur  son  exemplaire  de  ce  livre, 
le  21  juin  1835,  et  que  nous  lûmes 
ce  jour-là  même ,  porte  ces  mots  : 
"  Le  présent  exemplaire  a  été  le  pre- 
«  mier  secours  que  j'ai  eu  en  1797, 
«  époque  du  commencement  de  mes 
"  études  chinoises.»  Il  entreprenait 
donc  seul  à  quaiorze  ans  une  tache 
qui ,  selon  l'opinion  généralement  ré- 
pandue alors,  exigeait  en  Chine  mê- 
me la  vie  entière  d'un  homme  studieux. 
Son  ardeur  s'accrut  avec  le  succès  : 
les  résultats  neufs  et  curieux  qu'il  en- 
trevoyait excitaient  vivement  son  in- 
térêt,  et  bientôt,  captivé  par  les  étu- 
des de  son  choix,  il  négligea  toutes  les 
autres.  Aussi,  Interrogé  par  l'exami- 
nateur du  gymnase,  il  se  trouva  hors 
d'état  de  répondre  aux  plus  simples 
questions.  «  Mais  vous  ne  savez  donc 


KL\ 

**  rien!*  lui  dit  celui-ri  :  — Si  ,  mon- 
«  sieur  ,  je  «ais  le  cliiiinis.  — C/om- 
«  nient,  Ir  rlminis  !  qui  \ons  l'aurait 
M  enseigne  —  iVisoiinr  ,  je  l'ai  a(>- 
M  pris  tout  »eul.»  La  dessus  rexarm- 
nateur  de  se  récrier,  et  Kiaprolh  t\e 
courir  à  ses  radiers  où  il  montre  a 
l'eiaminateur  émerveille  des  copies  de 
texte,  des  e^ais  de  traduction  ,  des 
extraits  faits  sur  les  ori<;iiiaux  mêmes. 
H  répond  ensuite  à  toutes  les  aues- 
lions  ,  résout  toutes  les  difTicullrs  , 
révèle  en  peu  de  mots  le  facile  m\s- 
tère  du  lan;;a;;e  cliinois  ,  l'explique 
avec  clarté,  le  rommeiMr  a>ec  prrci- 
Mon.  Ses  maîtres  fuient  convaincus 
alors  qu'il  n'avait  pas  perdu  son 
temps,  et  son  peie,  bien  que  très-rli.i- 
^iin  de  renoncer  aux  projets  quil 
avait  formés  pour  lui,  eut  du  moins  la 
consolation  de  penser  que  ce  fils  pour- 
rait s'ouvrir  une  carrière  honorable. 
Cependant  il  exif^ea  que  Jules-Henri 
apprit  ce  qu'il  aurait  dii  savoir,  et  se 
livrât  aux  études  philologiques  pro- 
prement dites,  alors  presque  exclusi- 
vement en  honneur  en  Allem.i-ne. 
Afin  de  mieux  assurer  le  succès  de 
cette  résolution,  il  l'éloi^na  de  lier- 
lin  ou  la  tentation  de  cultiver  la  lan- 
gue chinoise  aurait  pu  l'enlraîner.  Ce 
fut  à  l'université  de  Malle  qu'il  l'en- 
vova  en  ISUl.  Le  jeune  Klaproth  v 
eut  lait  en  peu  de  mois  des  propres  qui 
étonnèrent  ses  maîtres;  et  comme  il 
ne  trouvait  dans  celle  ville  ni  ma- 
nuscrits ni  professeurs  capables  de  lui 
aplanir  la  voie,  il  alla  poursuivre  à 
Dresde,  dans  l'été  de  \H()2,  hs  tra- 
vaux qu'on  l'avait  forcé  d'inlcrroinpre 
à  Herlin.  \  la  fin  de  celle  même  an- 
née, il  publiait  ,  en  allemand  a  \\  ei- 
mar,  les  premiers  cahiers  de  son  Ma- 
gasin asiatiijur.  Ce  recueil  périodi- 
que attira  les  re|;ards  de  rAllemaf;nc 
savante;  et  de  ce  moment  date  la  renom- 
mée de  Klaproth.  On  était  surpris 
qu'un  jeune  homme  de   dix-neuf  ans 


KLA 


533 


déployât  des  connaissances  si  profon- 
des sur  «le>  sujets  à  peu  près  ij^norés  des 
hommes  les  plusdortes.  Alors  son  père 
reconnut  Teneur  de  ses  prevrntions,  et 
dans  le  même  temps  le  comte  Jean  l'o- 
to^ki,  avec  lequel  le  jeune  Klaproth 
avait  eu  l'occa-Mon  de  converser  à  Krr- 
lin,  frappé  de  la  pénétration  et  du  dis- 
cernement qu'il  montrait  en  pailani 
de  la  Chine  et  de  tout  ce  qui  la  con- 
cerne ,  s'einpre«-sa,  de  retour  à  Saint- 
IVtersbour^  ,  de  lecommander  au  mi- 
nistère rujxe  un  homme  que  «es  no- 
tions sur  l'empire  chinois  devaient 
rendre  très  inleressaiif  pour  la  Hus- 
sie,  liée  depuis  IGKD  i\f(  ce  vaste 
état  de  l'Asie  ,  par  de»  traiirs  nui 
n'ont  pas  rlé  enfreints.  Klaproth  lut 
appelr  a  Saint-l'elersbour;;  en  IHOV, 
et  l'acadrmie  des  >riences  se  l'associa 
en  qualité  d'ad|oint  pour  les  langues 
et  la  liltéralure  asiatiques.  Celte  dis- 
tinction n'était  pas  purement  honori- 
fique, et  le  désir  qu'il  avait  de  s'en 
montrer  ili(;ne ,  non  moins  que  les 
obligations  qu'elle  lui  imposait,  le  dé- 
termincrent  a  abandonner  sa  patrie  et 
les  travaux  qu'il  v  avait  rcimmenres. 
Des  l'année  suivante  une  ambassade 
extraordinaire,  destinée  pour  Pflinp, 
vint  lui  offrir  un  inoveii  d'étendre  .ses 
recherches.  On  n'était  pas  encore  fixé 
sur  le  choix  d'un  ambassadeur,  que 
Klaproth  était  <lr)à  désigné  pour  l'ac- 
conipa;;ner  comme  interprète.  F.e  comte 
Totoçki  fut  placé  à  la  tète  des  savants,  et 
(iolovkin  char^;e  de  la  politique.  Kla- 
proth n'attendit  pas  que  ceiui-ri  eût 
achevé  ses  préparatifs;  il  partit  au 
printemps  de  180.'),  visita  C.izan  et 
l'erm  ,  traver.Na  les  monts  Ourals  , 
^tei^nit  Ekalerinbourfî  en  Asie,  cA- 
tova  rirlich  depuis  Toboisk  jusqu'à 
Omsk  ,  d'où  il  j^a^^na  Tomsk,  Kras- 
novarsk  et  enfin  Irkoutsk  qui  était  le 
point  de  réunion  de  l'ambassade.  Il 
préféra  cette  route,  quoique  ce  ne  fut 
pas  la   plus  directe ,  afin  d'éviter  des 


534  l^LA 

passages  difficiles  dans  les  niontaf^nes, 
et  parce  qu'elle  présentait  plus  de  par- 
ties intéressantes  à  visiter.  Elle  le  con- 
duisit d'abord  cl.ez  les  Samoyèdes  et 
chez  plusieurs  de  ces  nombreuses  peu- 
plades Gnnoises  et  tartares  qui  habitent 
le  Ion»  de  l'Ob,  du  lenissei  et  du  lac 
Baïkal.  Dans  la  Sibérie  méridionale, 
il  rencontra  des  tribus  de  races  tur- 
que, monjj;ole  et  autres  ;  il  vécut  par- 
mi les  Bachkirs,  les  Dzoungars,  les 
Teléoutes  ;  parmi  les  Tongouses  de 
ïobolsk  et  d'Irkoutsk;  il  étudia  leurs 
mœurs,  recueillit  des  vocabulaires  de 
tous  leurs  dialectes,  s'appliqua  à  dis- 
tinguer leur  physionomie  nationale 
pour  parvenir  à  démêler  les  traits  ca- 
ractéristiques des  familles  dont  la  race 
s'était  croisée  avec  d'autres.  A  la  fin 
de  l'été  de  1805,  toute  l'ambassade 
fut  réunie  à  Irkoutsk  :  le  17  octobre 
elle  arriva  au  fort  de  Kiakhta  sur  les 
confins  de  l'empire,  où  des  difficultés 
suscitées  par  les  autorités  chinoises  la 
retinrent  jusqu'à  la  fin  de  l'année.  Ce 
séjour  forcé  fut  très-utile  à  Klaproth 
qui  en  profita  pour  apprendre  le  mon- 
gol, se  perfectionner  dans  le  mand- 
chou, recueillir  des  matériaux  ,  et  se 
procurer  une  collection  considérable 
de  livres  chinois,  tibétains,  mandchous 
et  mongols.  Enfin ,  le  1*^*^  janvier 
180t>,  on  put  franchir  la  frontière  et 
entrer  en  Mongolie  :  le  froid  était  de- 
venu excessif,  plusieurs  fois  le  mer- 
cure gela  dans  les  baromètres;  les 
voyageurs  en  souffraient  d'autant  plus 
qu'ils  ne  parcoururent  qu'en  quatorze 
jours  la  distance  de  soixante-quatorze 
lieues  qui  sépare  Riakhla  de  l'Ourga 
ou  Kouren  ,  ville  ou  plutôt  camp  où 
réside  le  gouverneur-général,  et  que 
dans  tout  ce  trajet  ils  n'eurent  d'autre 
abri  que  des  tentes  de  feutre.  J.à  se 
renouvelèrent  les  discussions  sur  le 
cérémonial  chinois  ;  l'ambassadeur 
russe  refusait  de  s'y  .soumettre,  allé- 
guant l'exemple  de  lord  Macartney , 


KLA 

qui  n'avait  fait  d'autre  salut  à  Tempe- 
reur  Khlang-Loung  que  celui  qui  en 
Europe  est  usité  en  pareil  cas  (Voy. 
Macartnky,  XXVI,  23).  Des  cour- 
riers furent  expédiés  à  Péklng,  et  l'on 
espérait  une  réponse  favorable  du  tri- 
bunal des  rites  ou  de  l'empereur 
même,  quand  survint  une  altercation 
sur  une  misérable  question  d'étiquette. 
Alors  les  négociations  prirent  une 
tournure  fâcheuse ,  les  esprits  s'aigri- 
rent; et  le  10  février  l'ambassade  fut 
congédiée  avec  dédain  par  une  lettre 
venue  de  Péklng.  Elle  revit  Kiakhta 
dans  les  premiers  jours  de  mars  ;  l'a- 
cadémie de  Saint-Pétersbourg  envoya 
aussitôt  de  nouvelles  Instructions  à  ses 
délégués.  Klaproth,  qui,  dans  les  con- 
férences entre  Golovkln  et  les  manda- 
rins, avait  fait  preuve  d'une  capacité 
peu  commune  et  d'une  véritable  con- 
naissance de  la  langue  chinoise  ,  fut 
chargé  de  continuer  à  visiter  les  fron- 
tières des  deux  empires  à  l'ouest  de 
Kiakhta  jusqu'à  Oustkamenogorsk  , 
sur  l'Irtlsch ,  près  du  step  des  Kirghlz. 
Dans  ce  voyage  il  traversa  l'Altaï, 
d'où  il  se  rendit  aux  anciens  temples 
bouddhiques  de  Semipalatnaya  et 
d'Ablaïkit  pour  recueillir  les  frag- 
ments tibétains  qui  pouvaient  s'y  trou- 
ver encore.  Il  gagna  ensuite  le  Kous- 
sougoul ,  lac  du  pays  des  Khalkha  , 
revint  à  Irkoutsk  dont  11  visita  les  en- 
virons, explora  les  bords  du  lac  Baï- 
kal, longea  les  monts  Sayaniens,  passa 
de  nouveau  la  chaîne  de  l'Altaï;  et, 
après  avoir  fait  une  excursion  depuis  les 
ilves  de  l'Irtlsch  jusqu'au  lac  Dzaï- 
sang  dans  le  pays  des  Euleuths  ou 
Kalmouks,  à  quelque  distance  de  la 
frontière  méridionale  de  la  Sibérie,  il 
se  dirigea  vers  Omsk  pour  reprendre 
la  roule  de  Saint-Pétersbourg  où  il 
arriva  au  commencement  de  1807, 
après  une  absence  de  vingt  mois,  pen- 
dant lesquels  il  avait  parcouru  un  es- 
pace d'environ  dix-huit  cents  lieues. 


KLA 


KLA 


.35 


F.tint  à  IiloutsL,  il  >it  un  officin  de 
la  marine  japonaise  qui  ,  joK^  pat  un 
naafrj{;e  jor  le*  rôtc^  orientales  de  la 
Sihérie ,  aNail  rlé  amcnr'  dans  celle 
tille;  les  entrptirns  de  Klaprulh  avec 
ce  marin  Irrs-instruil  PaidiTenl  k 
rrïmposff  un  vocal»ulaire  japonais. 
I.'aradémie,  à  laqucllr  il  rendit  compte, 
dans  un  rapport  drtaillé,  de  ses  occu- 
pations pendant  son  vo\a^e  aii^-si  ion^ 
qiir  pcniltle  ,  reconnut  tant  de  xrle  en 
le  nommant  académicien  extraordi- 
naire, diNtinction  qtii  n'est  accordée  à 
un  académicien-adjoint  qu'après  a>nir 
exercé  ses  fondions  pendant  six  ans. 
l/empereur  Alexandre  lui  accorda  une 
pension  de  trois  cents  roubles  et  lui 
donna  des  marques  de  bienveillance 
particulière.  On  lui  réserxait  une  ré- 
compense plus  flatteuse  en  lui  ména- 
;;eant  l'occasion  ile  se  distin;;uer  dans 
une  nouvelle  nnvsion.  Malgré  le>  \o\a- 
;:es  de  plusieurs  savants  en  (iror|;ie  et 
dans  les  monts  (^lucase,  le  ;;ouverne- 
nient  rus-^e  vo\ait  bien  qu'il  lui  restait 
encnie  beaucoup  à  apprendre  sur  ses 
nouvelles  possessions.  Klaproth  qui 
paraif.sait  plus  qu'aucun  autre  en  état 
d'examiner  convenablement  ces  con- 
trées, leurs  ressources  et  leurs  habi- 
tants ,  fut,  sur  la  proposition  du  comte 
Potoçli,  équitable  appréciateiii  de  «.es 
services  dans  la  précédente  expédition, 
a^réé  pour  le  vo\a;;e  à  entreprendre. 
Muni  des  instructions  de  son  protec- 
teur et  de  celles  de  l'académie ,  il 
quitta  de  nouveau  Saint-Pétersbourg 
le  1  .">  septembre,  et  alla  par  Moscou 
et  KliarkolTà  Novo-Tclierlask  ,  capi- 
tale des  Cosaques  du  Don.  Il  v  sé- 
journa quelque  temps  afin  d'étudier 
les  KalmouU  des  environs,  et  profita 
de  l'occasion  pour  compléter  les  no- 
tions qu'il  avait  rassemblées  en  Sibé- 
rie et  ailleurs  sur  la  relic;ioii  lamaïque. 
Kn  novembre,  il  traversa  le  step  du 
Don,  passa  par  Géorii^hievsk,  capitale 
du  gouvernement  du  Caucase,  où  il  re- 


cueillit des  renseignements  >ur  les 
Tclierlesses  et  sur  les  peuplades  vivant 
au  delà  du  Kouban  ;  et  visita  les  rui- 
nes de  Madjar  sur  la  Kouma,  le  mont 
Besch-Tau,  ses  eaux  minérales  et  l'é- 
tablissement des  missionnaires  anglais. 
Les  circonstances  l'obligèrent  de  se 
diriger  tout  de  suite  vers  Mosdol,  et 
de  prendre  sa  roule  par  la  petite  Ka- 
banlah  et  VladiLa\l.i^  sur  le  TereL 
Marcliant  avec  une  esnnte  militaire 
ccMisidetable,  il  remonta  le  Ion;;  de  ce 
fletne  dans  la  vallée  étroite  où  il  coule, 
et  qui  était  fermée  autrefois  par  les  cé- 
lèbres portes  caucasiennes.  I.e  '2Vt  dé- 
cembre il  franchit  le  (^louda  ou  mont 
de  la  Croix  {Khrrstoxuu'-Ouni'',  mon- 
ta;;ne  neigeuse  qui  fait  le  point  de  par- 
ta{;e  des  eaux,  et  sui\it  le  cours  de 
l'.Vra^vi  qui  tombe  dans  le  Kour.  Le 
1  i  janvier  1K()8,  il  entra  dans  Tillis, 
capitale  de  la  (iéor;;ie,  et  y  resta  jus- 
qu'au ')  mars;  il  revint  alors  dans  la 
vallée  de  l'.Krat^vi  et  vers  les  monts 
nei;;eux  où  il  découvrit  les  sources  du 
TereL.  Après  celte  campa;;ne  tres-pé- 
nible,  quoique  de  comte  durée,  il  re- 
vit Tiflis,  d'où  il  sortit  le  2  V  mars, 
et  fit  à  plusieurs  reprises  des  excur- 
sions dans  la  déorpie,  tant  à  l'est 
qu'à  l'ouest  de  la  capitale.  Les  mala- 
dies pestilentielles  qui  sévi>saient  de 
plus  en  plus  dans  les  vallées,  et  les  ap- 
préhensions d'hostilités  prochaines 
avec  la  l'erse,  ne  lui  permirent  pas 
d'aller  dans  ce  pavs  ni  même  à  lia- 
kou,  comme  il  l'avait  d'abord  projeté. 
D'ailleurs  l'académie,  qui  ne  pouvait 
plus  subvenir  aux  frais  du  vo\a^e,  le 
rappelait.  Il  retourna  donc  à  .Mos- 
dok,  où  il  fut  oblij;é  de  laisser  ses  com- 
p^nons  de  vovaj^e  trop  affaiblis  par 
la  maladie  pour  le  suivre  dans  de  nou- 
velles courses  à  la  petite  Kabardah  et 
aux  vallées  du  Caucase  septentrional. 
Quand  il  rentra  à  Mosdok  ses  compa- 
f;nons  étaient  morts.  «  Les  fati;;ues  du 
««   vo)at;e  dans  les  montagnes,  dit-il. 


536 


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KLA 


«<  et  l'influence  du  climat  extrêmement 
<<  malsain  des  bords  du  Terek  auquel 
«  je  n'étais  pas  accoutumé,  me  causè- 
«  rent  une  fièvre  violente.  Néanmoins 
«'  je  partis  de  Mosdok  le  24  août,  et 
«  je  ^at^nai  Géorghievsk.  La  fièvre 
"  s'étanl  un  peu  calmée,  je  fis  des 
«<  excursions  à  Madjari  ainsi  qu'à 
«  Oust-Labinsk  sur  le  Kouban  ;  mais 
«<  mon  mal  m'empêcha  d'en  profiter 
«  comme  je  le  désirais.  Je  restai  à 
«  Stavropol  pendant  les  mois  d'oclo- 
«  bre  et  de  novembre  ;  de  là  j'allai  en 
«  traîneau  par  Tcherkask  à  Voronèje, 
«  puis  je  retournai  par  Toula  à  Mos- 
w  cou  et  à  Saint-Pétersbourj^  où  j'ar- 
«  rivai  bien  malade ,  le  1 1  janvier 
<«  1809,  et  ma  santé  ne  fut  complè- 
«t  tement  rétablie  qu'en  automne.» 
Les  résultats  de  ce  vojaj^e  furent  suc- 
cessivement communiqués  à  l'acadé» 
mie  :  ils  concernaient  principalement 
les  recherches  de  Klaproth  sur  les 
langues  des  peuples  du  Caucase  et 
les  inductions  qu'il  en  avait  tirées  re- 
lativement à  beaucoup  d'idiomes  de 
l'Asie  et  d'autres  parties  du  monde,  il 
pensait,  que  pour  la  plupart,  ils  dé- 
rivent d'une  souche  commune.  Kn 
communiquant  sa  découverte  à  l'aca- 
démie, il  l'appuya  d'un  vocabulaire  de 
mots  caraïbes  qu'il  avait  rencontrés 
dans  les  langues  de  plusieurs  peuples  «lu 
nord  et  de  l'est  de  l'Asie.  Quoiqu'il 
n'ait  pas  donné  de  suite  à  ce  travail, 
il  était  à  propos  de  le  si-^naler,  parce 
qu'il  n'a  jamais  abandonné  complète- 
ment les  idées  qu'il  lui  avait  suggérées. 
L'aradémie  voulant  témoigner  le  haut 
intérêt  qu'elle  prenait  à  ces  recher- 
ches, décida  qu'une  des  dissertations 
de  Klaproth  ,  qui  concernait  les  Af- 
ghans, serait  imprimée  en  dehors  de 
ses  Mémoires,  à  ses  frais,  ainsi  qu'un 
recueil  en  allemand,  intitulé  Àrcliives 
pour  la  littérature  orientale.  Kla- 
proth ne  s'occupa  point  alors  de  la  pu- 
blication   de  son   voyage   :   peut-être 


l'autorité,  qui  en  Russie  soumet  tous 
les  ouvrages  à  la  censure  avant  qu'ils 
soient  imprimés  ,  arrêta-t-elle  le  sien; 
c'est  ce  qu'il  n'a  pas  expliqué.  Mais  11 
paraît  que  quoiqu'il  eût  été  décoré 
d'un  ordre  de  l'empire  et  gratifié  du 
titre  de  conseiller  aulique ,  il  ne  se 
trouvait  pas  à  son  aise  à  Saint-Péters- 
bourg. Ses  prétentions  avaient  semblé 
exagérées;  il  n'avait  obtenu  ni  les  ré- 
compenses, ni  les  indemnités  qu'il  ré- 
clamait ;  toutefois  sa  capacité  bien 
reconnue  lui  valait  une  grande  consi- 
dération. A  la  demande  du  prince 
Czartoryski,  curateur  de  l'université 
de  Vilna,  il  traça  le  plan  d'une  école 
spéciale  des  langues  asiatiques  pour 
cet  établissement.  Il  venait  d'y  être 
nommé  professeur,  et  se  disposait  à 
partir,  lorsqu'il  fut  retenu  par  le  mi- 
nistre de  l'instruction  publique  qui  le 
chargea  de  rédiger  le  catalogue  de  la 
riche  collection  des  livres  et  manuscrits 
chinois  et  mandchous  appartenant  à 
l'académie.  Envoyé  à  Berlin  en  1811 
pour  y  diriger  la  gravure  des  différents 
caractères  nécessaires  à  cet  ouvrage  ,  il 
saisit  avec  empressement  celte  occa- 
sion de  quitter  la  Kussie.  En  quatorze 
mois  la  besogne  dont  il  était  chargé 
fut  terminée.  Le  congé  qu'il  sollicita 
en  181  2  se  fit  long  temps  attendre  ;  en 
l'obtenant,  il  perdit  les  titres  de  no- 
blesse qui  lui  avaient  été  conférés,  ses 
lilics  académiques  et  les  autres  faveurs 
qu'il  tenait  du  gouvernement  russe. 
Celte  disgrâce  qu'il  avait  prévue  ne 
diminua  nullement  son  ardeur  pour 
l'étude,  quoique  l'époque  fût  peu  favo- 
rable pour  la  culture  des  lettres.  Il 
avait  commencé,  en  avril  1812,  l'im- 
pression de  son  voyage  au  Caucase; 
les  événements  de  la  guerre  le  forcè- 
rent de  l'interrompre  ainsi  que  ses  au- 
tres travaux,  en  1813.  Afin  de  pou- 
voir les  poursuivre  avec  sécurité  ,  il 
alla  se  réfugier  à  Warrabruon,  petite 
ville  dans  les  montagnes  qui  séparent 


KLA 

la  Ikolirinc  Je  la  Siléiif  ;  mais  bientôt 
ceUe  yroMnce  fut  fnTaliii»  et  une  partie 
(lu  mantisrn!  qu'il  rxpediait  à  Herlin 
fut  perdue.  Ouand  les  circonstance»  le 
permirent,  il  en  ache\a  l'impression  en 
181V,  puis  il  vo>a;;eaen  Italie  et  passa 
dans  l'île  d'Klhe,  où  il  fut  bien  reçu  par 
Napoléon,  qui  lui  parla  avec  intérêt  de 
ses  vo>a;;es  et  de  ses  travaux.  On  a  dit 
que  précédemment  il  avait  fait  d«  de- 
marrlics  pour  entrer  au  service  de  l'ran- 
re,  et  que  ce  fut  le  même  motif  qui  le 
conduisit  auprès  de  l'empereur.  On 
ajoute  que  sa  demande  fut  accueillie  et 
qu'on  lui  confia  comme  essai  la  rédac- 
tion d  un  mémoire  sur  les  difiérenles 
races  asiatiques  (;ui  liabilerit  les  fron- 
tières de  la  IVussie,  mais  que  la  chute  de 
la  puissance  qu'il  a\ait  invoquée  ne  lui 
laissa  pas  le  temps  de  l'achever,  (^uoi 
qu'il  en  soit,  on  ne  le  vit  pas  changer 
«l'opinion  aa  j;ie  des  circonstances,  et 
loujoiiis  il  manifesta  une  haute  estime 
pour  l'homme  extraordinaire  auquel  il 
a\ait  adressé  son  homma<^e  lorsqu'il 
était  déjà  ren>ersé  du  tiôiie.  Uesté  à 
Hoierice  dans  une  position  ties-difii- 
cile  ,  Klaproth  réunit  ses  dernières 
resNourccs  pour  venir  en  France.  Il 
arriva  vers  la  fin  de  1S1.'>  à  l*aris, 
qu'il  a  constamment  habite  depuis.  Le 
comte  Jean    PotoçLi,  dont  l'amitié  le 

uivait  partout,  l'en^a^ea  à  s'y  fixer, 
en  lui  représentant  que  c'était  là  qu'il 
trou\erait   le   plus  de   facilités  et    de 

ecours  de  tous  ;;enres  pour  mettre  en 
(t*u\re  les  nombreux  matériaux  qu'il 
avait  rassemblés  et  poursuivre  ses  re- 
cherches. Klaproth  vivait  à  Paris 
d'une  manijMC  assez  précaire,  lorsque 
le  baron  Guillaume  de  lliimboldt  le 
rencontra,  et  employa  toute  Tiiitluence 
que  lui  donnait  un  iiicrite  éminent, 
encore  plus  qu'une  haute  position  , 
pour  améliorer  le  sort  de  son  com- 
patriote. Il  ne  le  connaissait  que  pour 
l'avoir  vu  à  Dresde,  dans  une  si- 
tuation peu  heureuse,  après  la  bataille 


KLA 


537 


de  Leipzig  ;  il  n'i{;norail  aucune  cir- 
constance de  .son  vo>a^e  4  l^orto- 
Kerraio  ;  mais  il  appréciait  ses  tra- 
vaux, ses  nombreuses  coiiiiais>ances , 
et  prévovait  tout  ce  que  les  lettres 
devaient  attendre  de  lui  par  les  services 
qu'il  leur  avait  rendus.  Sur  sa  demande, 
le  roi  de  IVusse  conféra  à  Klaproth  , 
le  11  août  IKlti,  le  titre  de  profes- 
seur des  lan(;ue5  et  de  la  littérature 
isiatiqueN ,  en  lui  allouant,  outre  un 
traitement  considérable  ,  une  forte 
somme  pour  la  publication  de  ses  ou- 
vra^e>,  et  la  permission  de  rester  à 
Pans  jusqu'à  leur  achèvement.  C'eNl 
à  cet  encoura;;ement  que  l'on  doit 
plusieurs  li>res  importants  dont  il 
sera  question  plus  tard.  Assuré  dé- 
sormais de  son  avenir  ,  Klaproth  se 
livra  .sans  obstacle  à  son  ^oùt  favori. 
Ses  recherches  embrassaient  la  litté- 
rature ,  la  j;éo;:raphie  de  l'.Xsie  ,  et 
d'autres  sujets.  1.^  liite  de  ses  ouvra- 
;;es  qui  terminera  cet  article  donne 
lemo>en  de  suivre  les  proj;rès  de  ses 
études,  la  marche  de  ses  travaux,  jus- 
qu'aux habitudes  de  son  esprit  ,  cl 
d'apeicexoir  les  nombreux  résultats 
auxquels  l'ont  conduit  une  inj;énieuse 
sa>;acité  et  une  méditation  persévé- 
rante que  secondait  une  mémoire  vaste 
et  sure.  Mais  on  doit  regretter  tous 
les  moments  qu'il  a  consacrés  à  des 
discussions  aussi  inutiles  au  progrès 
des  lettres  qu'affligeantes  pour  ceux 
qui  s'intéressent  à  leur  j;loire.  Do- 
miné, on  peut  le  dire,  par  un  amour 
excessif  de  la  vérité,  par  une  anti[>a- 
thie  invincible  pour  les  théories  qui 
ne  s'appuyaient  pas  sur  les  faits,  par 
une  haine  implacable  pour  le  charla- 
tanisme quel  que  fût  son  masque,  pour 
ri;^norance  vaniteuse  ,  il  les  poursui- 
vait à  outrance.  Cependant  il  faut 
avouer  que  parfois  il  croyait  voir  cette 
sorte  d'ennemis  ;<ù  ils  n'étaient  pas, 
erreur  et  disposition  d'esprit  d'autant 
plus  fâcheuses    qu'elles  avaient    pour 


538 


KLA 


principes  un  dévouement  absolu  aux 
inlcrêts  de  la  science  et  une  conviclion 
profonde.  C'est  ce  qui  explique  celte 
critique  âpre  et  mordante  ,  souvent 
de'pourvue  des  ménaf;ements  et  des 
égards  qui  servent  si  bien  le  bon  droit, 
la  raison  et  la  vérité.  Mais  on  doit 
dire  aussi  que  nul  ne  fut  plus  oblio;eant 
et  plus  bienveillant  que  Klaprotli , 
pour  les  personnes  qui  réclamaient  ses 
conseils  ;  nous  en  avons  entendu  plu- 
sieurs témoigner  leur  satisfaction  et 
leur  reconnaissance  mêlées  de  surprise, 
car,  au  ton  de  sa  polémique,  elles  se 
le  figuraient  comme  un  homme  intrai- 
table et  désobligeant.  L'envie,  cette 
passion  des  âmes  basses,  était  absolu- 
ment étrangère  à  Klaproth.  Toujours 
il  s'empressa  de  rendre  justice  au  vrai 
mérite,  même  à  celui  de  ses  rivaux,  et 
cet  hommage  était  sincère.  Le  grand 
nombre  des  ouvrages  qu'il  a  publiés  , 
ses  éludes  variées  et  compliquées,  ses 
recherches  difficiles  toujours  si  scru- 
puleuses, ses  soins  minutieux  dans  tout 
ce  qui  tient  à  l'exactitude  des  faits, 
des  citations  et  de  l'orthographe,  pour- 
raient faire  supposer  que  c'était  un  de 
ces  érudits  qui,  constamment  livrés  à 
leurs  occupations  sérieuses^  restent 
étrangers  au  monde  et  à  ses  distrac- 
tions. Il  n'en  était  pas  ainsi  :  Kla- 
proth avait  le  goût  et  les  habitudes  de 
la  haute  société,  ainsi  qu'un  penchant 
très-décidé  pour  ce  qui  compose  une 
douce  et  élégante  existence  ;  il  n'était 
l'ennemi  ni  de  la  gaîté  ni  des  plaisirs. 
C'est  peut-être  à  ce  partage  entre  l'é- 
tude et  les  dissipations  mondaines 
qu'il  dut  le  déclin  rapide  de  sa  santé. 
Depuis  1833  des  palpitations,  sur  les 
symptômes  desquelles  il  avait  pu  se 
méprendre,  annonçaient  qu'il  portait 
en  lui  le  germe  d'un  mal  incurable  ; 
son  extérieur  trahissait  un  dépérisse- 
ment graduel  et  rapide.  Le  voyage 
(ju'il  fit  à  I>erlin  dans  l'automne  de 
183'!-  semblait  devoir  lui  procurer  du 


KLA 

soulagement  :  l'air  natal,  raccueil  dis- 
tingué de  son  roi,  les  suffrages  de  ses 
plus  célèbres  compatriotes  ,  les  mar- 
ques   d'affection    de    ses   vieux    arnis 
n'avaient  pu  ranimer  sa  vie  épuisée; 
il  revint  plus  souffrant,  luttant  Contie 
une  maladie  de  cœur  et  les  commence- 
ments  d'une    hydropisie   de  poitrine 
qui,  malgré  tous  les  secours  de  l'art  et 
les  soins  empressés  de  M.  le  docteur 
Breschet  ,    faisaient   des  progrès   ef- 
frayants. Malgré  ses  souffrances,  Kla- 
proth se  fit  long-temps  illusion  sur  la 
gravité  de  son  état,  et  conserva  l'es- 
poir d'une  guérison  prochaine.  Toute- 
fois, à  la  suite  d'étouffements,  de  dé- 
faillances ,  de  vertiges ,  il  s'apercevait 
de  temps  en  temps  que  ses  idées  se 
brouillaient  et  que  sa  mémoire  s'affai- 
blissait :  alors  il  se  laissait  aller  à  de 
tristes  pressentiments.  «  Sortez,  s'é- 
«  cria-t-il  un  jour,  au  moment  où  en- 
«  trant  chez  lui ,  nous  le  trouvâmes 
«   tenant  sa    tête    entre  ses   mains  , 
«   triste,  abattu,  tout  consterné  :  sor- 
«   tez,  je  deviens  fou,   je  n'ai  plus  de 
«  souvenirs ,    je  ne  puis  rassembler 
«   mes  idées;  la  pensée  m'échappe;  je 
«  suis  perdu  pour  la  science  ;  je  [>ré- 
«   fère  cent  fois  la  mort,  il  m'est  im- 
«   possible  de  soutenir    une   conver- 
«   sation  !  »    Nous   nous  retirâmes  le 
cœur  navré.    Quelques  jours  après  il 
était  plus  calme,  il  causait  avec  plaisir, 
il  nous  entretenait  de  ses   travaux,  il 
se  félicitait  de  l'acquisition  de  livres 
nouveaux.  Néanmoins  l'idée  de  sa  fin 
le  poursuivait  :  «  Vous  me  survivrez, 
((   nous   disait-il.    »    Et    comme  nous 
nous  efforcions  d'éloigner  cette  pen- 
sée, en  lui  représentant  que  nous  avions 
seize  ans  de  plus  que  lui  :  «  Non,  ré- 
«   pliquait-il ,  c'en  est  fait,  je  cesserai 
<(   bientôt  de  vivre.»  Saisi   d'une  at- 
teinte subite  ,  il  succomba  le  jeudi  27 
août    183.1,  à    une  heure  du   matin. 
Sa  dépouille  mortelle  fut  conduite  au 
cimetière    Montmartre    le    dimanche 


KLA 

»uiTant.  Parai  les  personnes  qu«  cette 
cért'inoiiie  a>alt  ra!>:>riiiblcoN  ,  on  ic- 
ni.it (]ii.iit  M.  Ir  baron  Alrx.iiiilrr  tic 
lliimliulJt  qui  honore  1rs  bcieiices 
.iiilant  qu'il  en  e^t  honoré  ,  et  qui 
j\ait  été  un  ile^  plus  zélé-»  protecteurs 
de  Kbpiolh  ;  le  secrétaire  de  la  léj;a- 
lion  pru.^ienne,  des  savants  rraiii^ais  et 
élran;;ers,  des  hommes  de  distinction 
ri  beaucoup  d'autres  qui  avaient  pour 
Klaprolh  un  véritable  attachement. 
^1  Boisard,  pasteur  de  ré;;lise  lulhé- 
I  irnne,  prononça  l'éloge  du  défunt  dans 
lin  di>cours  sim|i!e  et  louchant. —  Par- 
lons maintenant  des  ses  piiticipaux 
écrits.  I.  .hùitisrhrs  rnagudn,  elc 
(  Magasin  asiatitjur  runiftosr  par 
unr  sotièté  lie  gens  de  lettres,  et  pu- 
blié par  J.  Klaproth),  \N  eimar  , 
1802,  1  ^ol.  in-8'\  cartes  et  fi-.  (>t 
lunrage  périodique,  qui  contient  des 
mémoires  sur  tous  les  sujets  possibles 
Concernant  l'Asie,  est  préred»'  d'une 
introduction  datée  de  décembre  1801  ; 
ainsi  Klaprolh  n'avait  que  dix-huit 
an>  et  deux  mois  quand  il  la  si;;na.  Il 
.1  donné  dans  ce  recueil  :  Sur  les 
contrées  de  PAsIe  au-delà  du 
Muustag  qui  ont  été  lonnues  des 
anciens  ;  Sur  les  peuples  tflu- 
gog  et  de  Magog;  Sur  la  reli- 
gion de  to  en  Chine  ;  (Àjuquète 
ile  la  Chine  par  les  Mand<  hous  en 
ItJVi  ;  Traite  de  Caïuienne  littéra- 
ture des  Chinois  ;  Description  (les 
antiquités  des  monts  de  Hisotoun 
près  de  Kermanchàh  (  en  Perse  )  ; 
y  le  moire  dr  liager  sur  les  inscrip- 
tions babyloniennes  découvertes  ré- 
cemment ,  traduit  et  arcompa^^né  de 
remarques.  On  est  réellement  surpris 
de  la  variété  et  de  la  iiroforuieur  des  étu- 
des d'un  homme  de  dix  neufans,  quand 
on  lit  ces  divers  morceaux.  II.  Sur 
la  langue  et  F  origine  des  .Ighouans 
ou  Afghans  ,  Saint  -  Pélersbouri:; , 
1810,  in- i*^  (en  allemand).  Quelques 
auteurs  avaient  attribué  une  origine 


KLà  639 

hébraVqne  aux  Afj;hans  :  Klaprolh 
démontre  par  des  preuves  tiii-cs  de 
leur  idiome  qu'ils  a|>|iartiennent  à  la 
même  souche  que  les  Persans  ,  les 
Kourdes,  les  Ossctes  et  autres  peu- 
ples dont  la  lanj;ue  pré>f  nie  de  l'affi- 
nité a\ec  le  sanscrit,  et  que  depuis  les 
temps  histori(jues  ils  ont  habit»-  !•• 
pa>»  monla<;neux  situé  entre  l'Inde  et 
la  Per^e.  III.  irchii>esde  la  littéra- 
ture, de  r histoire  et  de  la  linguisti- 
que de  r.lsie,  Saint-Péteisbour^ , 
1810,  in-i"  (allemand',  volume  pre- 
mier et  unique.  Il  contient  :  i'ijral- 
lele  des  prim  ipau  i  tarai teres  d'é- 
criture de  C .  Isie  a\'ec  C alphabet  aile- 
mand  :  langues  du  i^iucase. — Les 
.  tghuuans.  —  Le  llabour  iSameh  , 
ou  Li^'re  des  conseils  de  F  empereur 
liabour.  —  Mémoire  de  sir  G. 
Sttiunton  sur  la  vaccine  ;  traduction 
du  traité  publié  en  chinois  il  Macao 
en  180.'».  —  Kxcerpla  ex  historia 
satraparum  arbelensium  in  majore 
trmenia.  I/auleur  de  cette  histoire 
e>t  Ktienne  Orpélian,  archevêque  de 
S>ounie  à  la  fin  du  XIIT  siècle. — 
Fragments  sur  F.i^ui  et  le  Pcgou, 
et  vocabulaire  boman  ou  biirman. 
-  Fragments  de  CiiliuttiC  des  Lieou- 
Khieuu.  —  lieniarques  sur  la  fron- 
tière russe  et  chinoise  rei  ueillis  dans 
un  voyage  fait  sur  les  lieux  en 
ISO-'j.  |\'.  Inscription  de  )u,  tra- 
duite et  expliquée,  lîe'^lin  ,  1811, 
in-i",  fi;;ures  (allemand).  Ce  monu- 
ment antique  de  la  Chine,  qui  remonte 
au  vin<;t-lroi.sième  siècle  avant  notre 
ère ,  avait  été  publié  et  commenté 
par  IIa;;er.  Klaproth  a  traité  ce 
sujet  plus  habilement ,  et  il  a  fait 
litho^raphier,  en  douze  feuilles  ^rand 
in-folio,  un  Jar  simile  de  celte  in- 
scription. V.  Mémoire  sur  la  lan- 
gue et  récriture  des  Ouigours,  licr- 
lin,  1812,  ln-8",  figures;  Paris,  1820, 
in-fol.  (allemand).  Ce  mémoire  avait 
d'abord  été  inséré  dans  les  Mines  de 


54o 


KLA 


V Orient ,  tom.  II.  On  était  indécis  sur 
Toi  i^ine  de  cepeuple  de  l'Asie  centrale, 
souvent  cité  par  des  auteurs  du  moyen 
â;;e.  Klaproth  conclut  qu'il  appartenait 
à  la  famille  turque.  ^' I.  Voyage  au 
Caucase  et  en  Géorgie  entrepris  en 
1807  et  1808,  contenant  une  des- 
cription complète  des  pays  cauca- 
siens et  de  leurs  habitants  ,  Halle  et 
Berlin,  1812,  1814,  2  vol.  in-8^ 
cartes  (allemand)  ;  traduit  en  ano;lais 
par  F.  Shoberl,  Londres,  1814, 
in-4°,  cartes;  en  français,  Paris, 
1823,  2  vol.  in-8^  carte.  —  Ce  li- 
vre renferme  beaucoup  de  renseigne- 
riens  sur  le  Caucase  et  ses  peuples;  on 
désirerait  que  l'auteur  eût  répandu  plus 
d'agrément  dans  sa  narration.  On  re- 
grette de  ne  pas  trouver  dans  la  tra- 
duction française  ,  revue  par  l'auteur, 
les  instructions  du  comte  Potoçki  ré- 
digées en  français  ,  et  quelques  au- 
tres parties  non  moins  importantes. 
Le  deuxième  volume  contient  de  plus 
que  la  version  française  :  Description 
des  pays  caucasiens  ;  Histoire  de 
Géorgie  ;  Renturques  sur  les  fron- 
tières de  la  Chine  et  de  la  Russie  ; 
Langue  et  écriture  des  Ouigours  ;  en 
revanche  on  trouve  dans  la  version  fran- 
çaise :  VII.  Langues  du  Caucase 
[Supplément  du  Voyage  au  Caucase 
et  en  Géorgie)  ,  Halle  et  Berlin  , 
1814,  in-8**.  Les  cantons  habités 
par  chaque  peuple  sont  décrits  som- 
mairement ;  des  vocabulaires  sont  joints 
à  ces  notices.  VHl.  Description  géo- 
grapliique  et  historirp/e  du  Caucase 
oriental  entre  le  Terek,  l'/lragi>i,  le 
Kouhan  et  la  mer  Caspienne,  Wei- 
mar,  1814,  in-S°.  Ce  volume  est  le 
supplément  du  Voyage  au  Caucase. 
Klaproth  n'avait  pu  parcourir  le  Cau- 
case oriental ,  mais  il  avait  recueilli 
sur  celle  contrée  de  nombreux  ren- 
seignements fournis  par  les  indigè- 
nes; ce  qui  le  mit  à  même  de  décou- 
vrir les  erreurs  de  Reineggs  [Voy.  ce 


KLA 

nom,  XXXVII,  281),  de  purger  l'ou- 
vrage de  Guldenstaedt  des  fautes  d'im- 
pression (FOJ.GULDENSTAEDT,  XIX, 
203)  ,  et  de  remplir  une  lacune  dans 
la  géographie.  IX.  Description  des 
propinces  russes  entre  la  mer  Cas- 
pienne et  la  mer  Noire ,  Berlin  , 
1814,  in-12.  X.  Supplément  au 
Dictionnaire  chinois  du  P.  Rasile 
de  Glemona  [imprimé  en  \S\'^  par 
les  soins  de  M.  Deguignes),  Paris, 
1819,  in-fol.  Ce  livre  est  destine 
à  corriger  et  augmenter  les  diction- 
naires chinois  publiés  par  les  mission- 
naires catholiques  ;  il  donne  aussi  plu- 
sieurs tables  utiles  aux  commençants  , 
lesquelles  étaient  contenues  dans  le 
manuscrit  du  P.  Basile  et  que  l'édi- 
teur avait  omises.  Un  Examen  cri- 
ligue  du  Dictionnaire  mis  au  jour 
par  M.  Deguignes,  précède  le  Sup- 
plément :  il  est  bien  écrit  ,  le  style 
spirituel  et  passablement  mordant 
peut  le  faire  attribuer  à  Rémusat.  Le 
Supplément  devait  avoir  une  suite 
qui  n'a  point  paru.  XI.  Tripartitum, 
seu  de  analogia  linguarum  libellus, 
Vienne,  1820-23,  in-fol.  oblong. 
C'est  un  ouvrage  fait  en  commun  avec 
le  baron  de  Mérian.  XII.  Catalogue 
des  livres  et  manuscrits  chinois  et 
mantchous  de  la  bibliothèque  de  Ber- 
lin, et  dissertation  sur  la  langue  et 
r  origine  des  Ouigours,  Paris,  1822, 
in-fol.  (allemand).  Chaque  article  est 
accompagné  d'éclaircissements  curieux 
et  de  notices  intéressantes.  XIH. 
Âsiapolyglotta,  Paris,  1823,  in-4" 
et  atlas  in-fol.  (allemand)  ;  2^  édition, 
ibid.,  1829,  qui  ne  consiste  que  dans 
un  titre  nouveau  et  60  pages  d'additions 
et  améliorations.  Les  peuples  de  l'Asie 
sont  rangés,  dans  cejlivre,  d'après  leurs 
idiomes  qui  sont  divisés  en  vingt-trois 
classes.  Les  principes  qui  dirigent  l'au- 
teur paraissent  généralement  admissi- 
bles ;  des  discussions  sur  divers  points 
sont  très-intéressantes  ;  l'ouvrage  corn- 


KL\ 


KLA 


mf  iice  par  un«  Apprrciatiun  raison- 
nef  tirs  historiens  iisiuliijtirs;  qui  f^l 
suixic  Jf  (Àittsiiirrufiims  sur  1rs  tir- 
lugfs  et  les  immdutiuns  ;  il  cnI  Icr- 
miiif  par  uiip  /  ie  de  IiuiuiJita,ét  riie 
ttapries  1rs  rrriis  des  Munffois. 
\l^  .  Miigiisin  asiutiiiue,  ou  Uevue 
géuiirup/iiifue  et  /listuriiiue  de  f  i- 
sie  rentruir  rt  srfiirndiunaU  ,  l*a • 
i»>,  ISJ.'»,  'J  carlp-.,  in-8".  Ce  recufil, 
oui  mjliie(ir(-u>riurn(  o*a  pas  t\t  con- 
liiiiir,  reiilcrrae  :  /  o)u^r  a  Khokitnd, 
fait  en  \^\:\et  181V,  par  IMi.  Na- 
sarov.  —  S  otites  géographiques  et 
historiques  sur  Khokand,  iaih- 
tutnd,  liudiikhi  h(in  et  autres  pays 
vitisins,  tritduites  du  tliiiutis.  — He- 
marifurs  utr  1rs  pruplrs  qui  hahi- 
tent  la  Jrontiere  cliinuise  ,  sur  les 
Tatars  trihutairrs  de  la  Russie  et 
sur  1rs  Soiouts  rt  Mongols  soumis  ii 
la  (.hine  recueillies,  J/r  1 772  <i  1 78 1 , 
par  le^or  l'csterev.  —  I)escription  du 
(.aucase  et  des  fHiys  qui  a\Hiisinent 
la  mer  Suire  et  la  mer  (Aispirnne , 
traduite  de  Carabe  de  Massoudi. — 
Urmoirr  sur  Ir  cours  du  }  aru- 
Dujnglfu- 1  chou,  ou  du  grand  fleui'c 
du  I  ubet  ,  suii'i  de  nuiicrs  sur  la 
source  du  liurrampoutrr.  —  /  o»  âge 
tluns  l.tsir  centrale,  par  Mir  lu«t- 
Llla  en  1812.  —  Notice  sur  les 
Samoyrdrs,  par  Va>slli  Krcstliiin. — 
lioute  de  J'ching- 1  ou-Fou,  en  (Jii- 
nr,  à  tra^'ers  le  Tubel  oriental  jus- 
quà  IV lassa  ou  Lassa  ^  traduit  du 
chinois.  —  Tableau  des  plus  hautes 
montagnes  de  la  (Jtine  ,  d'après  les 
ous'ragrs  gèugrapliiqurs  des  (Chi- 
nois.—  Description  du  Si-l)zang  ou 
Tubet. —  l'ous  ces  morceaux  sont  irn- 
poi  lanls  pour  la  connaissance  de  l'Asie. 
\\  .  I\ibleiiu.v  historiques  de  r .  isie, 
depuis  la  monarr  hie  deC.yrus  jusqu  à 
nos  jours,  accompagnes  de  rerher- 
ihrs  historiques  et  critiques  sur 
cette  partie  du  monde,  Paris,  182G, 
iii-i"   el  allas  in-foi.    Les  vin^l-sept 


cartes  qui  composent  cet  atlas  mon- 
trent les  clian^emenls  sur\entt>  lians 
les  difl^rmt^  pa>N  Je  l'.Vsie  depuis  C>- 
rus  jusqu'en  182'»;  à  cliarune  appar- 
tient une  explication  contenue  dans 
un  aperçu  grnrral  qui  termine  le 
volume  in-V".  Celui-ci  présente,  non 
l'histoire  circonNtancii'e  de  l'.Vsie,  mais 
le  tableau  général  et  moiivr  de  ses  ré- 
solutions. IMuNieurs  contrées  sont  à 
peine  numnH-e>  à  cause  du  manque  to- 
tal de  matériaux  authentiques.  Des 
morceaux  trè*  remarquables  de  cet 
ou>ra;;e  sont  :  .iprr^u  historiqur  rt 
et/inogntphique  des  pruplrs  de 
r  isie  moyenne  jusqu'à  l\in  HXM) 
de  notre  ère  ;  liecherches  sur  la 
grande  migration  des  peuples:  l'un 
et  l'autre  (»iïrent  des  aperrus  nfufs  et 
curieux  ;  l'origine  des  lluns  est  expli- 

Îuée  d'une  manière  très  salisfaisanle. 
.'Hermès,  journal  allemand,  ayant 
critiqué  ce  li\re  ,  Klaprolli  lui  répon- 
dit dans  sa  langue.  \VI.  Mémoires 
relatifs  it  P.  Isie,  contenant  des  re- 
cherches  historiques,  géographiques 
et  philologi(p/es  sur  les  peuples  de 
rOrient,  Paris,  1820-1828,  3  vol. 
in-8",  cartes  et  planches,  ('e  recueil 
a  obtenu  le  succès  qu'il  mnitait  :  on 
V  trou\e  :  De  la  frontière  russe  et 
chinoise,  mémoire  bon  à  consulter 
surtout  à  une  époque  où  un  élat  euro- 
péen a  la  prétention  de  fane  «lésirr  le 
{gouvernement  chinois  de  ses  antiques 
usages.  —  Description  de  la  Russie 
traduite  du  chinois  ,  morceau  inté- 
ressant sous  les  mêmes  rapports  que  le 
précédent. — Analyse  des  recherches 
sur  r  ancienne  histoire  de  la  Russie, 
par  M.  LehiberjT. — Sur  quelques 
antiquités  de  la  Sibérie. — l'examen 
d'un  extrait  d'une  histoire  des 
khans  Mongols  de  J.-J.  Scfmiidl, 
et  réponse.  RIaproth  expose  les  par- 
lies  faibles  de  l'ouvra^^e  que  Schmidl 
se  propose  de  traduire;  celui-ci  con- 
vient de  la  juNlesse  de  quelques-unes 


542  KlA 

(îes  observations. — Sur  raffmite  du 
cophte  aç>ec  les  langues  du  nord  de 
rAsie  et  du  nord-est  de  V Europe. 
— Comparaison  du  basque  avec  les 
idiomes  asiatiques  et  pî'inci paiement 
aç>ec  ceux  quon  nomme  sémitiques. 
— Mémoire  de  Jean  Ouosk'Jierdjan, 
suicide  vingt-huit  anciennes  descrip- 
tions arméniennes  :  le  litre  annonce 
de  plus  que,  pou  traduire  ce  mémoi- 
re ,  Ivlaproth  s'est  fait  aider  par  un 
Arménien;  l'auteur  avait  été  témoin 
des  événements  arrivés  en  Géorgie  et 
en  Arménie  à  la  fin  du  XVIIP  siècle 
et  au  commencement  du  suivant  ;  des 
notes  servent  à  mieux  comprendre  son 
récit  et  à  éclaircir  la  géo^^raphie.  — 
Notice  sur  V archipel  de  Jean  Po- 
foçki  dans  la  partie  septentrionale 
de  la  mer  Jaune.  Cet  archipel  n'a- 
vait pas  été  vu  par  les  navigateurs  an- 
glais dans  leurs  explorations  de  la  mer 
Jrtune  jusqu'en  1816.  Klaprotli  le  si- 
gnale d'après  les  cartes  chinoises  et 
paie  un  tribut  d'éloges  à  son  bienfai- 
teur, dont  il  impose  le  nom  à  ces  îles. 
— Description  de  file  Formose,  ex- 
traite des  libres  chinois;  —  Vocabu- 
laire Jormosan  ; — Phrases  en  for- 
jnosan  :  détails  très-curieux  sur  cette 
île  nommée  Thaï-Ouan  par  les  Chi- 
nois. On  sait  que  Psalmanazar  (JVj'. 
ce  nom,  XXXVÏ,  176)  avait  publié 
sur  l'île  Formose  et  ses  habitants  un  ro- 
man qui  a  long-temps  passé  pour  un 
ouNrage  sérieux  et  a  même  été  cité.  — 
Sur  l'origine  du  papier-monnaie  en 
Chine.  Il  y  fut  connu  ,  dès  l'an  119 
avant  notre  ère,  mais  ne  devint  d'un 
usage  général  que  dans  le  X*^  siècle  de 
J.-C.  :  ses  vicissitudes  sont  intéres- 
santes à  suivre;  11  disparut  en  14.').^).  fl 
fut  introduit  en  Perse  par  les  Mongols  ; 
INIarco-VoIo  en  a  fait  mention. — 
Examen  des  historiens  asiatiques, 
traduction  du  mémoire  de  Wtsia  po- 
lyglotla. — Lettre  à  M.  l'abbé  G  ro- 
sier, critique   des  assertions  de   M. 


klA 

Deguîgnes  le  fils ,  contraires  à  l'an- 
cienneté de  rhlstoire  de  la  Chine. — 
3Iots  sanscrits  comparés  avec  ceux 
des  autres  idiomes  indo-germani- 
ques et  avec  les  langues  de  V/lsie 
septentrionale.  —  Sur  l'origine  des 
Mandchous.  Ce  peuple,  dont  les  em- 
pereurs régnent  aujourd'hui  en  Chine, 
a  une  souche  commune  avec  les  Ton- 
gouses.  —  Voyage  à  la  montagne 
Blanche  y  traduit  du  mandchou. 
Cette  chaîne,  nommée  en  Chinois 
Tchhang-Pé-Chan^  est  située  dans 
le  pays  des  Mandchous  au  nord  de  la 
Corée.  —  Sur  les  Tatars,  explication 
de  ce  nom  souvent  employé  inexacte- 
ment.— Fragments  sur  les  races  et 
sur  les  langues  de  Vancien  et  du 
nomyeau  continent. — Vie  de  Boud- 
dha d'après  les  bWes  mongols,  tra- 
duite de  V/4sia  polyglotta. — Carac- 
tères primitifs  des  Chinois. — No- 
tice du  Babour-Nameh,  ou  Histoire 
du  sultan  Babour ,  écrite  par  lui- 
même  en  turc  oriental.  Ce  Babour 
est  le  fondateur  de  la  dynastie  mogole 
dans  l'Inde,  en  1525. — Description 
des  îles  Lieou-Khieou ,  extraite 
d'ouvrages  japonais  et  chinois.  — 
Description  des  îles  Mou-Nin-Sima, 
trad.  de  Vouvrage  japonais  San- 
Kokf-Tsu-Ban.  ■ —  Recherches  sur 
les  ports  de  Gampou  et  de  Zaï- 
thoum  en  Chine,  décrits  par  Marco- 
Polo,  et  qui  se  nomment  aujourd'hui 
Kan-Fou  et  Tsiuan-Tcheou-Fou.  Ce 
mémoire  est  un  essai  du  commentaire 
que  Klaproth  projetait  deptibliersur  la 
relation  du  célèbre  voyageur  vénitien. 
—  Histoire  delà  ville  de  Khotan. 
C'est  l'analyse  du  livre  de  Rémusal 
portant  le  même  titre. —  Observations 
critiques  sur  les  recherches  relatives 
à  l'hisloire  politique  et  religieuse 
de  V intérieur  de  ï  Asie,  publiées  par 
M.  Schmidt. — Eclaircissements  sur 
une  carte  chinoise  et  japoTiaise  de 
finde. — Lettres  sur  la  littérature 


KLA 

inunilihuue.  Kiirs  avaient  paru  |)tr- 
rrjrrnmfiit  avrr  un  titre  particulier 
|Mi(ir  riiacune.  Kllrs  sunt  dirigées  runti r 
f..inj;lèi».  —  l)r.u  riptwrt  du  Lu  Hm- 
ktil.  —  /  uKtfiulairr  htliit,  prrsun  ri 
lumun  (U  la  f^i/tliu/Iirifur  iJr  Fntn- 
ctsio  Vttnin  ha.  Ij  notice  qui  pré- 
cède le  M)cabuLtre  contient  de>  ren- 
seignements in-struclifs  sur  le>  Comans, 
peuple  crièbre  du  ini)>cn  à^e. —  Ao- 
( ici"  lie  la  tnrr  (Àispirnnr. — Obsrr- 
iui  fions  sur  la  tarir  tir  F  Asie  ^  pu- 
bliée en  1K:22,  par  M.  A.  Arroi»smit)i  : 
elles  relé\ent  les  nombreuses  imperfec- 
tions de  cette  carte.  —  Drsrriptiun 
(lu  grand  canal  de  la  (Jiine,  et  traite 
ii'ouK'ra<^rs  ihinitis.  —  Mrrnuirr  sur 
Ir  tours  de  la  grande  ri^'iere  du  Tu- 
het.  —  Sur  la  langue  des  Afghans. 
—  Notice  d^unr  carte  /afmnaise 
cunseri'ee  dans  le  Musée  hritan  - 
nitiue  de  Londres.  —  Hrinarques 
critiques  sur  la  traduction  allr- 
mande  des  uu^^res  de  Conjurius,  par 
Scliott .  X  V 1 1 .  /  oiaffulairr  et  gram- 
maire de  la  langue  géorgienne^  Pa- 
ri-, 18-J7,  in-8".  La  première  partie, 
contenant  le  \ocaliulaire  ^éorj^ien- 
{ran(;aisel  franç.ii5-;;éor^ien,a  seule  été 
publiée.  XVIII.  Lettre  sur  les  dè- 
cou\'ertes  des  hiérogly/dies  acroht- 
giqnrs  adressée  à  M.  le  comte  de 
Coulianoff,  Paris,  i8:>7 ,  in-8". 
\  I  \ .  Seconde  lettre  .sur  les  hiérogly- 
fthes  adressée  a  M.  I).  S... ,  Paris  , 
18/7,  in-8°.  L'auteur  pense  qu'au 
point  où  l'on  était  parvenu  dans  la 
connaissance  de  l'écriture  hiéro;;!)- 
pbique  des  EgNptiens,  les  signes  «jui 
foimaient  celle  écriture  étaient:  T'des 
caractères  phonétiques  reconnus  par 
Younr;  et  Cliampollion  ;  2"  des  si- 
{^nes  repré-^enlanl  les  initiales  des 
mots  ,  classe  découverte  par  M.  de 
(îoulianoff  et  que  Kiaprotli  appelle 
acrolo;;iques;  3"  de  >éritables  imaf;es, 
qui  si;;niûaient  ce  qu'elles  représen- 
taient ;  V  des  hléroj^lyphes  s)mboli- 


KL.\ 


543 


aue»,  classe  encore  peu  connue;  5°  des 
signes  anagl)  fthes ,  que  l'on  a  l'es- 
pérance  de  cunnaitre  plus  paiticuliè- 
rement  par  les  recbercbes  de  M.  de 
(■oulianofr.  Cliampollion  répondit  à  la 
premièie  lettre,  ce  (]ui  donna  lieu  à  la 
seconde.  X  X .  (lollet  tion  d'antiquités 
égyptiennes,  ferurilIlrN  par  M.  le  die- 
vaiier  de  Palin  ,  publiées  par  MM.  l)o- 
row  rt  Kbprotli,  ru  trentp-trois  plaii- 
clies  auxquelles  on  en  a  joint  une  tren- 
te-quatrième  représentant  les  plus 
beaux  scarabées  de  la  collection  de 
M.  J,  Pavsalacqua  ,  précédées  d'ob- 
servations critiques  sur  l'alphabet  bié- 
ro;;l\pbique  découvert  par  .M.  Qiam- 
poUion  jeune,  et  sur  les  pro«;rè-s  faits 
lusqu'à  ce  jour  dans  l'art  de  décliiffrcr 
les  anciennes  écritures  égyptiennes, 
avec  deux  planches,  Paris,  1821),  in- 
fol.  Klaproth  ne  conteste  pas  le  mé- 
rite de  Cliampollion  ;  il  reconnaît  qu'il 
a  corri;;é  les  méprises  de  Th.   Youn^; 

3u'à  celui-ci  appartient  la  découverte 
es  signes  biéro<;l>pliiques  des  an- 
ciens Égyptiens,  et  que  Cliampollion 
l'a  considérablement  aii;;mentée  ;  mais 
cette  décou>erle  ne  peut  conduire  qu'à 
la  lecture  des  noms  propies  des  rois  de 
quelcjues  autres  personiia;;es  ,  tantlis 
qu'elle  n'e^t  d'aucune  utilité  pour  la 
lecture  des  hiéro;;l\ plies  idco;;raplii- 
ques  et  symboliques,  et  que  Cliampol- 
lion échoua  presque  toujours  en  vou- 
lant expliquer  les  derniers.  Son  sys- 
tème ne  repose  pas  sur  des  bases  fixes, 
et  il  chanj^e  à  volonté  le  sens  qu'il 
attribue  aux  caractères  tant  phonéti- 
ques que  s\mbolJques.  La  connaissance 
imparfaite  de  l'ancien  idiome  de  l'E- 
j;v(<f,  que  nous  pouvons  nous  procu- 
rer par  le  secours  du  copie,  ne  sera 
jamais  suffisante  pour  exjiiiquer  le  sens 
d'une  inscription  hiéroglyphique,  en 
supposant  même  qu'elle  lût  écrite  en 
caractères  [ihonétiques;  raltération  de 
la  Tidjled'.  thydos.,  publiée  par  Cliam- 
pollion, donne  la  mesure  de  la  confiance 


544 


KLA 


que  niéiitent  ses  travaux  sur  les  anti- 
quités égyptiennes.  XXI.  Examen 
critique  des  travaux  de  M.  CJiam- 
pulliun  jeune  sur  les  hiéroglyphes, 
Paris,  1832,  in-8^  XXII.  Chresto- 
TTiathie  mandchou,  ou  Recueil  de  tex- 
tes mandchou,  destiné  aux  personnes 
qui  veulent  s  occuper  de  l'étude  de 
cette  langue,  Paris,  i828,  in-S''. 
On  y  trouve  V Eloge  de  la  lyillc  de 
Moukden  par  l'empereur  Khian- 
Loung,  avec  une  traduction  aussi  litté- 
rale qu'il  était  possible  de  la  donner  en 
français  sans  la  rendre  inintelligible. 
On  sait  que  la  version  du  P.  Amiot 
était  une  véritable  paraphrase  {Voy. 
Khian  -  LouNG  ,  XXII  ,  374  ). 
XXIII.  Notice  d'une  mappemonde 
et  dune  cosmographie  chinoises,  Pa- 
ris, 1833,  in-8*\  La  mappemonde  est 
un  mélange  d'idées  chinoises  et  euro- 
péennes. On  doit  donc  supposer  que 
l'auteur  s'est  servi  pour  la  composer 
d'un  planisphère  européen  dressé  dans 
la  première  moitié  du  XVP  siècle  , 
et  traduit  en  chinois  par  quelque  mis- 
sionnaire. Les  détails  offrent  des  cho- 
ses très-singulières. La  cosmographie  a 
pour  auteur  un  docteur,  qui  sous  le  rè- 
gne de  Rhang-Hi  {Voy.  ce  nom  , 
XXII,  351)  accompagna  son  père 
dans  ses  expéditions  contre  les  pirates. 
Le  livre  parut  en  1730;  RIaproth 
s'est  servi  de  l'édition  qui  fut  pu- 
bliée en  1793.  XXIV.  Lettre  à 
M.  le  baron  A.  de  liumholdt  sur 
tim^ention  de  la  boussole ,  Paris , 
1S3V,  in-8",  figures.  Dès  la  plus  haute 
antiquité,  les  Chinois  ont  connu  l'ai- 
mant, sa  force  attractive  et  sa  propriété 
de  se  diriger  vers  le  nord.  Mais  la  plus 
ancienne  menlion  de  celle  qu'il  a  de 
communiquer  le  magnélisnic  au  fer, 
ne  se  trouve  énoncée  que  dans  un  ou- 
vrage de  l'an  121  de  notre  ère.  Des 
livres  publiés  à  peu  près  cent  ans 
plus  tard  citent  l'usage  de  la  boussole 
pour  marquer  le  nord  et  le  sud  ;  d'au- 


KLA 

très,  qui  sont  de  1111  à  1117,  indi- 
quent l'inclinaison  de  l'aiguille  aiman- 
tée dont  la  découverte  chez  les  Euro- 
péens ne  fut  faite  que  par  Christophe 
Colomb,  dans  son  premier  voyage  en 
Amérique.  Tous  ces  faits  sont  appuyés 
sur  de  nombreux  témoignages  histori- 
ques. RIaproth  montre  de  la  même 
manière  que  les  Chinois  avaient  fait 
long-temps  avant  nous  beaucoup  d'au- 
tres découvertes,  telles  que  la  force  at- 
tractive dusuccin;  la  cause  du  flux  et 
reflux  de  la  mer,  la  poudre  à  canon,  en- 
fin l'imprimerie  qui  date  chez  eux  des 
premières  années  du  X*'  siècle,  et  qui 
de  là  fut  portée  dans  les  pays  voisins. 
Il  pense  que  plusieurs  de  ces  connais- 
sances ont  été  transmises  par  les  navi- 
gateurs arabes  aux  peuples  de  l'Asie 
occidentale,  puis  communiquées  de  pro- 
che en  proche  aux  Européens.  L'ou- 
vrage commence  par  des  recherches 
sur  l'ancienneté  de  la  connaissance  de 
l'aimant  en  Asie  et  en  Europe,  et  sur 
les  noms  par  lesquels  on  désigne  cette 
pierre  singulière  ainsi  que  l'aiguille 
aimantée,  dans  les  divers  idiomes  et 
dialectes  de  ces  deux  parties  du  monde. 
XXV.  Tableau  historique,  géogra- 
phique, ethnographique  et  politique 
du  Caucase  et  des  provinces  limi- 
trophes entre  la  Russie  et  la  Perse^ 
Paris,  1828,  in-8'\  Ce  livre  a  sou- 
vent été  mis  à  contribution  par  les 
écrivains  qui  ont  traité  des  pays  cau- 
casiens. RIaproth  a  publié  comme  édi- 
teur :  Voyage  en  Géorgie  et  en  ^t..i- 
rette,  Berlin,  1815,  in-8°,  et  Des- 
cription des  pays  caucasiens  par 
Guldenstaedt,    ibid.,    183i,   in-8". 

[Voy.  GULDENSTAKDT  ,  XIX  ,  203). 

—  Voyage  à  Pékin  ii  traorrs  la 
Mongolie  en  1820  et  1821  ,  par 
M.  G.  Timkovski,  Paris,  1827,2 
vol.  in-8"  et  atlas.  La  préface  de  cette 
publication  ,  que  nous  avons  signée 
conjointement  avec  RIaproth,  indique 
les    changements   que  nous  avons  du 


KLA 

faire  à  retle  relation  tcrAc  en  ru-i-;e  ri 
à  sa  traduction  par  M.  N...;  noi:^  \ 
a>ons  ajouta  un  indrv  ^éiifrat  qui  man- 
quait darw  ron;;inal.  —  l*rin  iftrs  Je 
trtudf  t  utn/HJ/utiii'r  iJr.s  liirtf^urs.  par 
le  lian)n  de  Mrnan,  l'ar-s,  182S, 
m  H".  Kbprolli  l«  ijt  suivre  dVM- 
s^rv'titiofis  sur  1rs  nu  lues  ilrs  lun- 
gurs  srmiinfurs,  et  dans  la  ptrface  tit 
rrln;;r  de  l'aulrur  qui  venait  de  mou- 
rir et  qui  a\ait  elc  Non  ami. — l  uyugr 
iluns  1rs  strps  d'Astrakan  ri  du  (mu- 
rasr.  llistuirr  />rimitiW  drs  pruplrs 
tfui  ont  hithitr  rrs  roiitrrrs.  Sttu- 
x'niu  prripir  du  Pont-l.uxin,  par  le 
rurale  Jean  l*olin;k.»,  l'ari*,  1829,  2 
vol.  in-H  ',  planclies  et  cartes.  Kla- 
prolli  a  arcompa^né  ces  volumes  de 
nole«  et  tie  tabler,  et  dans  la  preiace  a 
rtprimé  sa  sincère  reconnai>sanre  de» 
bienfaits  du  romle  Jean  l'oto^Li. — 
I)rs4  ri/ffion  du  I  uhrl ,  iraduitr  fHir' 
lirllrmrnt  du  i  hiiuds  rn  russr  par 
le  F.  Uracinlhe  Kilrliourin  rtdurussr 
rn  français  par  .M...,  soi^nrusrmrnt 
rr\'ur  ri  corrigrr  sur  turiginal  r/ii- 
nuis,  romplrirr  rt  acronipagnrr  tir 
nttfrs,  Paris,  1831,  in-S',  carte*  et 
plan. — \if}on  o  l)aï  iisiran,  ou  .tn- 
nalrs  drs  rmpcrrurs  du  Japon ,  tra- 
diiitts  par  M.  Isaar  Titsin{;h,  ai>rr 
l'uidr  dr  plusirurs  intrrprrtrs  atta- 
I  lirs  au  t  unipttn'r  hollandais  dr  .\  an- 
gasaki,  oui'ragr  rr^'u.romplr/rrt  cor- 
rigr  sur  l'original  japimais-rhinois, 
art  uni/Hignr  dr  nutrs  rtprnrdr  ifun 
aprrçu  dr  Cllistoirr  mythologiijue 
du  Japon,  Paris,  IS.H,  in-4  '.  l/.ir- 
licle  T1T.SINGH,  t.  Xf.VI,  p.  16.J, 
donne  le  détail  des  travaux  de  ce  vo>  a- 
^eur;  M.  f.jndresse,un  des  bibliol()é- 
caires  de  l'institut  de  France,  a  fait  la 
table  alphabétique  des  Anrudrs  de 
Da'tri.  —  Brri'r  A  otida  drl  rrgno 
drl  Tibrt  dal  fra  Francesco  OraJo 
drlla  Prnna  di  lirlli  1730;  publié 
d'après  le  manuscrit  autographe  de 
l'auteur,  Paris,  1835,in-8^.Klaproth 

LXVIlî. 


KLA 


?i45 


fut  redevable  aux  soins  de  M.  .'^aU;, 
savant  bibliographe  italien,  du  niinu- 
•.fr;t  de  ce  livre  dont  nous  avoli^  fait 
une  roenlmn  va;^!ie  à  l'arlicle  de  Tau- 
leur  [l  oy.   PiNNA,  XWIIl.  313). 

—  Abel  P.éinusal  avait  laissé  ini|iarfail 
la  l'ut  kour  ki  ,  ou  lirlalion  drs 
royaumrs  ImudiUiitptrs.  Après  la 
mort  de  ce  sa\anl,  Kla|»roth  se  chargea 
de  compléter  ce  qui  reNlait  inachevé; 
mais  la  mort  vint  l'arfcter  lui-même 
dans  sou  travail,  qui  a  élé  terminé  par 
M.  I^ndresse  «|ue  drja  il  s'était  associé 
pour  l'aider.  Rlaproth  a  ti aduit  de  l'ori- 
•;inal  japonais-chinois  San  hukf  tsou 
ran  tu  srts,  ou  Aprr^u  gmrral  drs 
trois  royaumrs.  Pans,  1832,  ;^raud 
in-8'\  cartes.  l/ouvra;;e  publu*  en 
1786,  à  Yedo,  contient  la  descrip- 
tion de  la  Oorée,  des  îles  de  f.ieou- 
Kliseou  et  de  l.i  i^rande  î!e  d'Vcso. 
Klaproth  a  lait  bcaticniip  «i  aiidiliuns 
à  ce  livre  qui  est  impôt  tant  pour  la 
^éoc^raphie. —  Il  a  encoie  f»)iirni  à  di- 
vers recueil»  de  nombreux  article>  , 
dont  plusieurs  ont  élé  publiés  à  pari, 
et  dont  voici  les  principaux  :  à  V En- 
cyrloprdie  modernr  de  Court  in  : 
luingurs.  —  Aprrçu  dr  F  origine 
des  dicrrsrs  rrrilnrrs  du  tnondr  , 
Paris,  1832,  in-8'\  p|.  —  \  la  tra- 
duction du  Vova»e  de  Denham  et 
Clapperton  :  Kssai  sur  la  langue  du 
liornou,  suii'i  drs  v:jra/tulairrs  du 
Brgharmi,  du  M  and  ara  rt  de  Tim- 
bouctou.  ibid.,  1820,  in-8".  —  Au 
Journid  asiatiqur  :  Mrmoirr  sur 
l'idrntité  drs  ()ssrtrsac>rr  1rs  Alains. 

—  Sur  1rs  amhassadrs  rn  Chinr.  — 
Liste  des  thés  1rs  plus  cèlchres  dr  la 
Chine.  —  Critiifur  dr  hi  description 
historique  dr  la  Chine  ,  par  M.  J. 
Orlow,  —  Extrait  dr  l'histoirr  du 
Karhmir.  —  Mémoire  sur  l'identité 
des  Thou  Khin  aoec  1rs  Turcs.  — 
yoyagrs  dr  M.  Ksoma  de  Koros 
dans  la  Haute- Asie. — Notice  sur 
la  mention  de  la    Chine  faite   par 

35 


546 


KLA 


Tlièophylacte  Simocatte.  — Nolire 
de  hi  grande,  encyclopédie  cidnuise, 
intitulée  :   Kou-Kln-Tchou-Chou. — 
Sur  le  pays  de  Tendue    ou    Ten- 
duch   mentionné   par    Marco  Po- 
lo ,  etc.  —  Au  JSouveau    Journal 
asiatique   :    Commentaire    sur    la 
description  des  pays  caucasiens  de 
Strabon.    —  iienuirques    géogra- 
phi  (pies    sur     les    promices    occi- 
dentales de  la  Chine  décrites  par 
JMarco  Polo.  —  Comparaisons  de  la 
langue   des  Tcliouoaches  avec    les 
idiomes  turcs. — Observations  sur  le 
dictionnaire  tubétain  imprimé  à  Sé- 
rampore.  —  Sur  les  clefs  chinoi- 
ses.— Foukoua  siriak,  ou  Traité  sur 
l'origine  des  richesses  au  Japon  écrit 
en  1706  ;  traduit  sur  l'original  Ja- 
ponais et  accompagné  de  notes.  — 
Extraits   d'une   topographie  de  la 
Géorgie.  —  Rapport    sur   un  mé- 
moire relatif  à  l'origine  des  Japo- 
nais,\}2iT  M.  D.   Siebold. — Extrait 
du  JJcrbend  Named,  ou  Histoire  de 
Derhend.  —  Observations  critiques 
sur  la  traduction  d'un  drame  chi- 
nois^ par  M.   Davis. — Rapport  sur 
Ir  plan  de  Pékin  y  publié  à  Saint- 
Pétersbourg  en   1829.  —  Rapport 
sur  V histoire  ottomane,  publiée  par 
M.    de  Hammer. — Description    du 
pays  de  Didocthi,  extraite  de  la  to- 
pographie   géorgienne.  —   Sur  les 
anciennes  églises  clirétiennes  dans 
le  Caucase  au-delà  du  Kouban. — 
Analyse  criliijue  de  l'Histoire  et  de 
la  dort rlne  du  bouddhisme,  par   M. 
K.  lipliain. — Rapport  sur  les  ouvra- 
ges du   P.  Hyacinthe    Bitcliourin 
relatifs  à  l'histoire  des  Mongols. — 
Rapport  sur  le  projet  de  voyage  au- 
tour du  monde,  par  M.  Buckingham. 
— Tableau  chronologique  des  plus 
célèbres  patriarches  et  des  événe- 
ments les  plus  remarquables  de  la 
religion  bouddhique,  rédigé  en  1 678. 
■ —  Notes  sur  le  Tubet.  —  Aotice  et 


KLA 

explication  des  inscriptions  de  Bol- 
gliari ;  les  ruines  de  Bol;;hari  sont  au 
sud  de  Kazan  sur  les  bords  du  Volga. 
—  Notice  de  f  Encyclopédie  litté- 
raire de  Ma-Touan-Lin. — Sur  les 
Da'iris ,  ou  Empereurs  du  Japon. — ■ 
Description  de  la  Chine  sous  le  règne 
de  la  dynastie  mongole^  d'après  Ra- 
cliid-Edpin. — Histoire  de  la  Géor- 
gicytic. — Aux  Nouvelles  Annales  des 
iwyages  :  Liste  des  points  de  la  Si- 
bérie dont  les  élévations  au-dessus 
du  niveau  de  la  mer  ont  été  détermi- 
nées.— Description  du  mont  Tche- 
konday  par  Sokolov,  l'un  des  compa- 
gnons de  voyage  de  Pallas  (trad.  du 
russe) . — Description  de  lile  de  Haï- 
non,  avec  une  carie. — V Almanach 

impérial  de  la   Chine Commerce 

de  la  Russie  avec  la  Chine,  écrit  en 
1823. — Notice  sur  H' Lassa,  capi- 
tale du  Tubet, Si\ec  un  plan. — Lésai- 
manachs  chinois.  —  De  la  religion 
des  Tao  Szu  en  Chine. — Notice  sur 
le  Japon,  extraite  des  livres  japo- 
nais et  autres  sources. — Description 
de  l'Arménie  russe. — yl perçu  du 
voyage  de  Hiouan-Thsang ,  prêtre 
bouddhiste  chinois ,  dans  l'Asie 
moyenne  et  l'Inde.  —  Montagnes 
couvertes  de  neiges  perpétuelles  dans 
riunnan  en  Chine. — A  la  Biogra- 
phie universelle  les  aiticles  Slrittcr, 
Taliclilchcv,  ThsaoThsan,  Tlisin-Clil- 
lIouang-Tl,Touiichen,Wang-Mang, 
Wan-I.y,  WenAYang,  Wiclimann, 
Wilford,  \^  ou-Heoii,  Wou-Wang, 
Y-Hiang,  Zie^cnhalg,  Zlzianow,  etc. 
—  Souvent  Klaproth  a  esquissé  et 
dessine  même  en  partie  les  cartes  qui 
accompagnent  quelques-uns  de  ses 
ouvrages.  Ses  voyages  et  ses  études 
lui  facilitaient  ce  travail.  Pendant 
plusieurs  années  il  s'occupa  d'une  carte 
de  l'Asie  centrale  ,  dont  il  fournit 
les  matériaux.  Kile  fut  exécutée  sons  sa 
direction,  mais  ne  parut  qu'après  sa 
mort,  sous  ce  lilrc  ;  Carte  de  l'A  sic 


KLA 

rntnih ,  àrrss^r  tTiiprh  des  car- 
te\  !r\*res  par  urilre  tir  i'rrnprrcur 
Khian-Loung.  fnir  1rs  imssioituiirrs 
dr  Prkt'n  rt  iC après  un  grand  nom  - 
brr  dr  mttions  rxtraites  rt  traduitrs 
dt  iiWrs  chinois,  Paris,  183.>,  4 
feuiilrs  f;raud  ai;;lf.  F.llc  repiésfnfe  les 
|»a>s  tic  V \ùe  entre  '2'»  el  .'»*i  de';rfs 
Jc'lat.  N.  et  entre  62  et  MU  de^t« 
lie  lonjjitiule  à  l't.l  île  Paris  ;  elle  jette 
iiti  ^ijii.l  "i!i  jur  cts  c«»nlrrc%  [eu 
ioti!;i)rs    l)r|>iti.  qu'il  a^ail  roncu   le 

I  rii;ct  Je  rrlte  carte,  Klaproll»  n  a^ait 
l'aN  rrssr  tle  comparer  1rs  retîsei,;ne- 
iiirnts  que  lui  fournisuiciit  les  libres 
diiiiiiis  a\ec  ceu\  que  les  mivsionnai- 
re^  avaient  communiqué»  à  d'Anville, 
rt  dont  ce  ^rand  ^ro';raplie  avait  fait 

II  .1 -r  pour  les  caries  qu  il  a  jointes  i 
Vîlistoirr  de  la  Chinr  de  I)uhalde 
[Voy.  ce  nom,  XII  ,  18:j;.  Parce 
rao^eu  il  avait  découvert  la  cause  tics 
efrrnr<  de  d'Aiiville,  qui  soi.l  a-NscZ 
II'  pour  le->  >  étions  occiden- 
li  ;ie>  de  riIimabVa.  Ila\ait 
recuclli  beo.uroup  de  nole>  qui  cu5^eni 
fait  la  base  d'un  mémoire  où  il  aurait 
exposé,  diicuté  les  molifs  d'après  les- 
quels il  s'était  décidé  dans  ses  déter- 
minations. Il  a  au>si  donné:  (larte  de 
la  Mvnfolir,  du  pays  des  Mand- 
chous, de  la  lAtrér  et  du  Japon  , 
Paris,  1S33.  11  a  puMié,  sous  le  nom 
do  Louis  de  l'Or  :  Lettres  à  la  sui  irlc 
tisiatiijue  de  Paris,  Paris,  1823, 
in-8".  Dans  la  première  il  critique 
l'onvrn^e  allemand  de  VVéd.  Adelun^;, 
iiilituk-:  (Mup-d\ril  sur  toutes  les 
langues  connues  et  leurs  dialectes; 
dans  la  seconde  il  censure  le  Monde 
primiiij  àt  Link.  Elles  sont  bien  rai- 
sonnées,  le  ton  n'en  c>t  pas  trop  amer, 
et  elles  contiennent  des  observations 
judicieuses  sur  la  nomenclature  et  la 
distribution  des  différentes  races  hu- 
maines. Klaprotli  a  fait  paraître  en- 
core sous  le  pseudonyme  de  JlHhelm 
LauterUich    (en  allemand)  :  Prèten- 


KLA  5^7 

dut  traduction  des  otn^rages  dr 
(Uinjurius,  iraprrs  la  langue  origi- 
nuit,  im/tosturr  littéraire  des  ou- 
i'rugrs  du  dm  trur  If  'ilhelni  Si  huit, 
IVipiig  et  Paiis,  1828,  in-8  avec 
le  texte  chinois.  O  petit  écrit  dé- 
Toile  l'ignorance  et  le  charlatanisme 
du  docteur  Schott  qui  annonçait 
a*.ec  emphase  que,  pour  compren- 
dre l'auteur  qu'd  traduirait  ,  il  s*é- 
tait  aidé  des  conseils  de  deux  Cln- 
nois  venus  eu  .Kllrma^oe;  or,  ces  deux 
habitants  du  céle>te  empire  étaient  dr> 
pavsans  du  district  de  Canton,  dont 
l'un  avait  été  cuisinier,  rt  qui,  d'après 
un  accord  passé  avec  un  bateleur,  se 
faisaient  voir  pour  de  l'argent.  Le  ^ou- 
vrniement  prus&<en  les  avait  ensuite 
en^a;;és  avenir  i  l'université  de  iialle, 
afin  d'v  former  des  élèves  pour  la  lan- 
gue chinoise.  Klaproth  démontre  que 
la  traduction  allemande  est  tout  sim- 
plement une  version  de  celle  que  Mars- 
ham  avait  publiée  en  anglais  a  S- :ain- 
por  dans  l'Inde,  et  dont  Uémusat  avait 
dévoilé  les  nombreuses  ine\actilude>. 
Cet  opuscule  présente  au>si  des  détails 
précieux  sur  l'étude  de  la  langue  chi- 
noise en  Europe.  Ij  liste  détaillée  de 
tous  les  écrits  sortis  de  la  plume  de 
Klaproth  se  trouve  dans  le  Catalo- 
gue dck  bibliothèque,  Paris,  1S39, 
in-8",  rédigé  par  le  libraire  Merlin  qui 
en  a  fait  un  livre  de  bibhof;ra|>hie  très- 
remarquable.  M.  C.  I^ndicssc,  quia 
t  raduit  les  titres  des  ouv  ra;^es  orientaux, 
y  a  ajouté  de  courtes  notices  sur  chaque 
ouvra;;e.  Klaproth  s'était  occupe  d'un 
nouveau  Mithridatès  qui,  intiépen- 
darnrpeiit  d'un  aperçu  grarumatical  et 
d'un  texte  analvsc  de  chaque  langue, 
devait  offrir  un  vocabulaire  comparatif 
des  idiomes  des  cinq  parties  du  monde 
et  le  tableau  du  système  graphique  en 
usage  chez  tous  les  peuples.  Il  avait 
conclu  dans  le  temps  des  arrangements 
avec  un  libraire  allemand  pour  la  publi- 
cation de  ce  grand  travail  qu'il  a  laiysé 

35. 


548 


KLA 


inachevé,  ot  dont  les  matériaux   exis- 
tants sont  indiqués  en  détail  à  la  (\n  de 
sonca!aloo;uc.  il  avait  terminé,  peu  de 
temps  avant  sa  mort,  une  Description 
{(ro^raj)liiqui',  stuti clique  et    liislo- 
riqiie  ilc  V empire  chinois,  qui  devait 
paraître  en  même  temps  à  Paris  et  à 
Londres,  en  français  et  en  anglais.  Le 
manuscrit  est   entre   les  mains  d'une 
maison  de  librairie  française.  Pendant 
plusieurs    années    Klaprolli  consacra 
une  partie  de  ses   veilles  à  un'  com- 
mentaire sur  Marco  Polo  :  il  recon- 
naissait le  mérite  de  celui  de  Mars- 
den  sur  ce   célèbre    voya^^eur  ;    mais 
le    docte  Anglais  ,    étranger  à  la  lan- 
gue chinoise,  n'avait  pu   donner  l'ex- 
plication  de  plusieurs  points  difficiles. 
il  ne  perdait  pas  de  vue  ce  sujet,  et  un 
jour  il  nous  aborda  d'un  air  satisfait, 
en  s'écriant  :  «  A  la  fin  je  suis  venu  à 
«   bout  des  obstacles  qui  m'embarras- 
"   saient  encore  dans  mon  travail  sur 
«   Marco  Polo.    11  n'en   restait  plus 
'<   que  deux  que  j'ai  surmontf's  re  ma- 
"   lin.  »  Nous  le  félicitâmes  sincère- 
ment   de   celle    heuretise  issue   après 
tant  de  recherches   assidues  pour  les- 
quelles il  avait  fons-.ilté,  rapproché,  ex- 
tfail,  traduit  même  tous  les  textes  chi- 
nois, tartaresct  persans  qui  pouvaient 
l'éclairer  sur  les  lieux    que    le  vova- 
{^eur  vénitien  avait  visités.   La   société 
de   géographie   de  Paris    devait   faire 
les  frais  de  cette  publication  ,  qui  au- 
rait puissamment  servi  à  l'intelligence 
du  plus  habile  des  vovap;eMr.s  «lu  moyen- 
age,et  àréchiircissement  d'une  lonlede 
points  géographiques  obscurs  de  l'Asie 
centiale.  Mais  la  plus  consiilérable})ai- 
lie  des  matériaux  de  ce  travail  n'exis- 
tait que  dans    l'admirable  mémoire  de 
Klaprolh;  ceux  qu'on  a  trouvés  dans 
ses  portefeuilles  consistent  dans  une 
liasse  de  papiers  contenant  des  passa- 
gesextrailsoutraduits  des  géographes  et 
des  historiens  orientaux  ;  des  collations 
de  textes,  des  notesdri  nouveau  commen- 


KLA 

taire;  les  cent  seize  premiers  chapitres 
<le  textedeRamusio,  c'est-à-dire  plus  de 
la  moitié  de  l'ouvrage,  revus,  corrigés 
et  annolé.s.  On  a  pensé  qu'en  réunis- 
sant ces   matériaux    aux  annotations 
manuscrites   dont  il    avait   chargé  un 
volume  II  de  Ramusio  et  l'édition  de 
Marco  Polo  publiée  par  la  société  de 
géographie  de  Paris  ,  il  serait  possible 
de  reprendre  et  d'achever  la  belle  en- 
treprise dont  il  avait  formé  le  dessein. 
Toutefois  nous  craignons  que  ce  vœu 
ne   puisse  s'effectuer;    Klaproth  seul 
pouvait    tirer  parti    de   ces   éléments 
dont  seul  il  avait  la  clé.  On  a  aussi 
trouvé    parmi    ses    manuscrits    beau- 
coup de  notes  et  de  fragments  con- 
cernant la  géographie  et  l'ethnogra- 
phie  de  la  Haute  et  de  la  Moyenne- 
Asie.  On  peut  dire  que  cette  partie 
du  monde  était  sa  terre  de  prédilection. 
11  a  enrichi  de  notes  d'une  haute  im- 
portance les  Fragments  de  géologie 
et  de  climatologie  asiati(pie  de  M. 
A.  de  Humboldt,  Paris,  1831,  2  vol. 
in-8".    Néanmoins  le  reste  du  globe 
ne  lui  était  pas  étranger,  et  ses  nom- 
breux ouvrages  en  font  foi.  Peut-être, 
dans  ses  travaux  sur  les  langues,  Kla- 
proth a-t-il  attaché  trop  de  valeur  à  la 
comparaison   des  vocabulaires,  et  pas 
assez  à  celle  des  grammaires.  «  Il  s'est 
«   malheureusement  presque  toujours 
«   borné,  dit  M.  Landresse,  à  confé- 
«   rer  des  listes  de  mots,  sans  chercher 
«   .à  pénétrer  dans  cette  structure  in- 
«   time  qui  les  rassemble  et  les  com- 
«   bine ,    comme    les   m.embres   d'un 
«   corps,  pour  leur   donner  de  la  \ie. 
<'    C'était  là  le  défaut  de  l'ouvrage  de 
«   Catherine   11  et  de    Pallas,  ce  qui 
«  fut  aussi  celui  (\c\\isia  polyglotta 
«f    qui  répond  trop  peu,  sous  ce  rappoi  t, 
«   aux  progrès  (ju'ont  faits  depuis  vingt 
«   ans  l'étude  philosophique   et  l'his- 
«   toire  critique  des  langues.  »  Le  résul- 
tat des  affinités  qu'il  avait  cru  découvrir 
entre  les  idiomes  qui  n'ont  entre  eux 


KLA 

quf  i\f<  I  appui  ts  |;ciiëi  ju\,  comrouii>  a 
loulcs  If*  lan^uf^,  fut  présente  «iain 
le  tfiops  à  rarailémie  de  Saint- l'r- 
tersb<»ur{;,  ri  a|<|)u\é  sur  un  vocabu- 
laire Je  mois  caraïbes  qu'il  avait  ren- 
contrés dans  le^  langues  de  plu>ieurs 
peuj)lc>  de  l'Asie  du  centre,  du  nord 
et  de  l'est.  Il  ne  parait  pas  qu'il 
ait  donné  suite  à  ce  tra\ail  ;  mais 
M.  I^ndre^se  a  ju^é  qu'il  était  im- 
porlaiit  de  le  signaler,  •«  parce  «jue 
••  Klaprolii  i»'a\ail  jamais  abandonne 
M  com[<letcincnt  les  idées  «ju'il  lui  avait 
**  su^érées.  Non-seulement  on  en  rc- 
«  trouve  l'inNimalion  tout  entitie 
«  dans  la  feuille  qu'il  a  publiée  sous 
«'  le  titre  bizarre  de  IJir  ci  uhitjur  , 
•«  mais  il  a  proenté  à  plusieurs  rcpri- 
«  ses,  quoique  avec  une  certaine  dé- 
•<  6ance,  des  vues  semblables  dans 
•<  X Asia  polyglutta  ,  ainsi  que  daiis 
««  plusieurs  autres  écrits;  elles  ont 
••  seulement  etémodiCôes  et  restieiii- 
•«  tes  par  tout  ce  (juerà^e,rexpcririicc 
•<  et  l'étude  doi\ent  apporter  de  ma- 
«  lurité  et  de  n-serve  dans  l'esprit 
M  qui  se  livre  à  ces  combinaisons.  »• 
— Klaproth  fut  un  des  fondateurs  cl 
des  membres  les  plus  lélcs  de  la  sociélé 
asiatique  de  l'aris.  M.  tendresse  lui  a 
consacré  une  notice  dans  le  cahier  «le 
sept.  1835  ,  du  journal  de  celle 
compaj;nic.  M.  de  I.a  Kenaudière  lui 
a  pave  le  même  tribut  dans  le  ca- 
hier d'octobre  des  Xi):wi'l/rs  .In- 
tuiUs  (les  voyages ,  dont  Rlaprnlh 
était  un  des  collaborateurs.  Nous 
avons,  avec  la  permi>sion  de  ces  deii\ 
auteurs,  mis  à  contiibution  leurs  noli- 
ccs,  et  nous  avons  puise  dans  nos  sou- 
venirs beaucoup  de  détails  sur  ce  sa- 
vant qui,  depuis  le  moment  où  nous  le 
connûmes,  nous  lémoiona  constam- 
ment de  l'afTeclion.  Nous  n'ignorons 
pas  qu'il  a  été  l'objet  d'imputations 
graves.  Si  l'on  nous  reproche  de  n'en 
avoir  pas  fait  mention  ,  nous  repon- 
drons que  parmi  les  faits  dont  on  l'ac- 


KIJ 


cu>a  quel(|ues-uiis  pouvaient  être  e\.i- 
;;éré>,  et  nous  n'a\ons  pas  \oulu  d'ail- 
leurs entrer  dans  une  discussion  sans 
utilité  pour  la  science,  et  qui  aurait 
donné  une  étendue  démesurée  à  notre 
article.  V.  -  s. 

kM:iu:iu;  ou  clkukiu; 

(Jl  am),  surnomme  le  huit  .tllrntiirnl, 
naquit  à  lie: ne  ou  a  Nurembci^  vers 
liH.*».  Il  embrassa  la  profes.<.ion  de 
marchand  ou  de  banquier ,  et,  jouis- 
sant d'une  ;;rande  fortune  ,  se  li- 
vra à  des  operaliiMis  Gnancières  trés- 
lucrati\es.  .S'il  était  de  Nurember;;,  il 
est  à  présumer  qu'il  fut  du  petit  nom- 
biede  ceux  qui,  fidèles  à  la  religion 
de  leurs  anrctres,  s'expatrièrent  lors- 
que, en  lô.JO,  les  habitants  de  celle 
ville  embrassèrent  le  protestantisme  , 
et  iignèrenl  la  confcsAion  d'Aug'-- 
bour^.  Quoi  (ju'il  en  soit,  Kleberg 
se  trouvait  à  Lvon  en  1.j3.'^,  à  l'é- 
poque où,  apiés  une  horrible  fami- 
ne, le  consulat  fonda  sou.s  le  titre  d'.  ///- 
musnc grnrralc  un  éLiblissemciit  des- 
tiné à  secourir  les  pauvies  et  les  mala- 
des, lorsque  la  ville  serait  en  proie  à  la 
disette  ou  à  quelque  épidcuiie.  Klc- 
berg  fut  un  des  premiers  souscripteurs 
de  cette  œu\ie  philaiitropique  ,  qui 
plus  tard  fut  réunie  à  1(111  des  hospi- 
ces de  la  ville.  On  a  calculé  que  dans 
rinter\alle  de  1533  à  15U»,  année 
de  sa  mort  ,  le  Ihih  Allcntand  avait 
donne  à  V Aumosnr  f^énrrale  une 
somme  de  huit  nulle  cinq  cent  quaran- 
tc-ciiKj  !ivre^.  Peu  de  temps  après 
s'èlre  {'i^éîi  Lxm,  il  avait  épousé  l*e- 
loiinc  de  Boiizin,  née  à  Tourii.T,  en 
Flandre,  veuve  de  Jean  de  La  For^c 
dont  elle  avait  un  fils  qui  fut  seij^neur 
d\\i  ..  File  lui  avait  apporté  en  dot 
une  jolie  viila,  voisine  de  F\on,  sur  la 
livc  gauche  de  la  Saône  ,  dont  une 
partie  des  b.itiments  existe  encore  , 
et  où  l'on  voit  une  tour  fort  an- 
cienne ,  appelée  vulgairement  Tour 
de  lu  ikllc- Allemande.  François  1""" 


55o 


KLÉ 


qui  avait  eu  plusieurs  fois  recours  à  la 
hoursc  lie  Kléberf;;,  le  nomma  son  valet 
(le  chambre  ordinaire  par  lettres-paten- 
tes du  dernier  mars  15i3.  Peu  de 
temps  après,  les  commissaires  royaux, 
chargés  par  le  roi  de  l'aliénation  des 
biens  du  connétable  de  Bourbon,  lui 
vendirent  les  tcires  du  Cliastelard  et 
de  Villeneuve,  en  Dombes.  Après  cette 
acquisition  il  ajouta  à  son  nom  le  ti- 
tre de  sieur  du  Cliastelard  ;  c'est 
ainsi  que  l'appelle  François  1*^',  dans 
une  lettre  qu'il  lui  écrivit  le  11  déc. 
de  la  même  année,  pour  le  remercier 
de  l'avoir  «<  secouru  en  prest  d'une 
«  bonne  somme  d'ar^i^ent.  »  Ce  prince 
lui  adressa  une  autre  lettre  qui  est  trop 
intéressante  pour  ne  pas  être  repro- 
duite ici  :  «  Seigneur  lehan  Clébert^e, 
«c  i'ay  receu  vostre  lettre  du  5*  de  ce 
«  mois,  et  par  icelle  veu  le  debuoir 
«<  et  dilij^cnce  que  vous  auez  faict  et 
«  faictes  pour  le  faict  des  emprunts 
«  que  ie  veux  faire  à  Lyon,  dont  ie 
«  vous  say  très  bon  gré  :  et  voyant 
«  ainsy  que  vous  me  mandez  que  les 
«(  marchands  n'y  veulent  entendre  que 
«  mon  filz  le  dauphin  ne  s'y  oblige 
«  comme  moi,  i'en  seray  content,  et 
««  désia  mondict  filz  l'a  ainsy  accordé, 
«<  dont  vous  pouvez  adueitir  les  mar- 
e<  chands,  à  fin  qu'ils  tiennent  leur 
«  argent  prest,  ainsy  que  me  Icman- 
»«  dez.  El  sur  ce  seigneur  lehan  Cle- 
•<  berge,  ie  prie  Dieu  qu'il  vous  ayt  en 
«  sa  garde.  Kscrit  à  Paris,  le  11® 
u  lourde  mars  1545,  signé  Françoys, 
«  et  plus  bas,  Bochetel.  »  Kléberg 
avait  encore  acquis,  le  11  mars  1544, 
un  tennement  qui  avait  appartenu  aux 
anciens  comtes  d'Auxerre,  situé  à 
Lyon,  à  l'angle  de  la  grande  cote  et  de 
la  rue  Neyret,  lequel  fut  ensuite  réuni 
au  monastère  de  Notre-Dame  de  la 
Déserte.  Cette  même  année,  il  fut  nom- 
mé, par  les  terriers  de  L)on,  conseiller 
«le  ville;  mais  il  refusa  ces  honorables 
fonctions  ,   donnant  pour  motifs   les 


KL 

soins  qu'exigeait  un  fils  âgé  de  cinq 
ans ,  les  affaires  dont  le  roi  l'avait 
chargé,  et  surtout  son  grand  âge.  On 
n'agréa  point  ses  excuses  et  son  nom 
figura  sur  la  liste  des  échevins.  Tou- 
tefois, le  bon  /iUemand  ne  vit  pas  la 
fin  de  son  consulat,  car  il  mourut  le  G 
sept.  1546,  dans  la  maison  dite  de 
Saini-Ambroise,  située  place  du  Plâ- 
tre ,  et  sur  l'emplacement  de  laquelle 
Louis  Tolosan  de  Montfort  a  fait  con- 
struire une  des  plus  belles  maisons  de 
Lyon.  Le  25  août  précédent ,  Klé- 
berg avait  dicté  ses  dernières  volon- 
tés à  ]\P  Pierre  Dorlin  ,  notaire.  Il 
partagea  sa  fortune  entre  sa  femme 
et  son  fils  unique  David  ;  il  fit  wn 
legs  de  quatre  mille  livres  à  VAu- 
mosne  gé né  j'aie  ;  quant  «  à  ses  ar- 
«  mures,  espées,  hacquebutcs  et  autres 
«  bastons  et  instruments  de  guerre,  » 
il  les  donna  à  son  beau-fils,  Etienne 
de  la  Forge.  On  a  voulu  conclure  de 
cette  dernière  disposition  que  Kléberg 
avait  été  militaire;  mais  il  y  avait  alors 
à  Lyon  une  compagnie  d'arquebusiers 
formée  des  citoyens  les  plus  notables 
et  tout  porte  à  croire  que  Kléberg 
en  a  fait  partie.  Un  siècle  après  sa 
mort ,  la  postérité  du  bon  Allemand 
était  éteinte  ;  mais  la  presque  tota- 
lité de  sa  fortune  avait  passé  entre 
les  mains  d'un  homme  non  moins  gé- 
néreux, l'avocat  Jacques  Moyrou,  qui 
la  transmit  à  VAumosne  générale 
par  son  testament.  Quelques  écri- 
vains veulent  qu'une  statue  en  bois 
placée  sur  un  rocher,  dans  le  quartier 
de  Bourgneuf,  soit  celle  de  Kléberg; 
mais  cette  allégation  n'est  justifiée  par 
aucun  document  authentique.  M. 
Kreghot  du  Lut  a  consacré  à  ce  per- 
sonnage ,  dans  ses  Mélanges  sur 
Lyon,  une  notice  où  nous  avons  puisé 
les  éléments  de  cet  article.     A.  P. 

KLEI\     fFnKDl'RIC-AuGUSTE)  , 

né   à  Friedricnstall ,  près  de  Ronne- 
bourg,  le  7  nov.  1793,  compta  parmi 


KLE 

*.«  nuitrfs  au  gTmna«e  «i'Allfnbour;^ 
le  c«irbre  I1irba^li>,  \nits  suimI  ^\tc 
iuccr>  \ts  CtJiirs  ai  .uUiuiqurs  fi' 1  nia 
(IHII-ISIV,  rrmporla  le  prix  tilio- 
uielie  au  séimiuirr  li()inilelu|tir,  obtint 
un  pftil  emploi  de  in.iitie  à  une  des 
écoles  lie  la  \ille,  el  enfin  se  lit  rece- 
voir dorleur  rn  |>lii!o^n|ihir  et  barlielier 
en  llieolo^ie  (1817k  llientàt  ses  Lft- 
ires  sur  if  christianisme  et  le  protes- 
Utnlisnie  lui  attirèrent  de  vives  atta- 
ques verbalement  et  par  écrit.  Quoi- 
que très-fecond  en  sarcasme»  et  très- 
blessant  pour  ses  adversaires,  il  se  fit 
pourtant  asseï  d'aini>  ou  assez  de  réf>u- 
lation  pour  être  nommé,  en  IHlW, 
diacre  et  prédicateur  de  la  garnison. 
Insensiblement  ses  niées  es%entielle- 
inent  progressive*  se  modi6rrent  en 
s'rlevaiit.  Mais  il  n'eut  pas  le  temps 
d'aller  bien  loin  dans  une  cainere 
on  sans  doute  il  se  fut  distin;;(ié. 
\  alétndinaire  des  l'enfance  ,  frappe 
de  la  fin  prématurée  de  sa  jeune  épouse 
(18:21),  qui  lui  laissait  un  fils  en  bas- 
ane, en  vain  alla-t  il  demander  la  santé 
aux  eauv  salines  de  Kup>en  ;  il  s'é- 
teignit dans  de  lon;;ues  souffrances, 
le  \'l  février  1S23.  Klein  n'était 
point  un  homme  de  {;enie,  mais  il 
réunissait  beaucoup  de  piécieu.ses  qua- 
lités, aussi  utiles  quelquefois  à  la  science 
que  le  génie.  l>ne  prodigieuse  mémoire 
en  était  la  moindre.  Ksprit  méditatif 
et  .souple,  des  qu'il  étudiait  un  système, 
il  en  pétiétratt  les  difficultés,  il  l'é- 
laborait, le  rapprochait  de  tous  les  au- 
tres. Kn  rapprochant  il  comparait  , 
en  comparant  il  apercevait  l'onomc 
des  divergences,  il  creusait  le  sol  jus- 
qu'à la  couche  où  la  disparité  n'est 
plus,  où  movennanl  quelques  rema- 
niements tout  est  homogène;  en  un 
mot,  il  conciliait  ou  comprenait  la  pos- 
-ibiiité  de  la  conciliation.  De  là  son 
N>stomc  de  religiosité  par  lequel  il 
pi  étendait  satisfaire  au  rationalisme  et 
au  surnaturalisme ,  après  avoir  touIo 


KLE 


55i 


faire  proclamer  le  surnaturalisme  par 
la  faculté  rationnelle.  In  autre  titre 
de  Klein  à  nos  honimages,  c'e^t  l'in- 
dépendance parfaite  de  son  esprit. 
Sa  droiture  de  caractère  n'était  pas 
moins  rem-irquable;  il  avait  en  hor- 
reur tout  d«'^'uis«Miient  de  la  pensée, 
notamment  d.iris  la  sphne  scientifique; 
aussi   la   critique   périodique  rt   semi- 

1tétio<1ique  telle  que  les  temps  actuels 
'ont  faite  lui  semblait-elle  immorale 
el  odieuse,  car  il  d'y  voyait  que  l'ex- 
pression  de  pa.ssions  alfeclucusrs  on 
haineuses,  insouciantes  de  vérilr.  Vjt 
n'est  pas  qu'il  eiit  beaucoup  à  s'en 
plaindre  ,  la  critique  avait  aidé  à  le 
laiie  connailre.  (>n  a  de  Klein  :  I. 
I/éliufuerif  e  ilit  ministre  de  réalise 
tnnsitleré  comme  ministre  de  Jesu.s- 
i.hrist,  Uipiig,  1818.  Dai.s  celte 
suite  de  lectures,  une  des  plus  utiles 
que  puissent  faire  ceux  qui  scdesliiirnt 
à  la  chaire  ,  Klein  a  eu  pour  but  de 
montrer  la  fausseté  des  idées  fonda- 
mentales trop  généralement  répandues 
sur  ce  que  doit  cire  b  prédication;  à 
son  avis  le  programme,  qu'au  reste  on 
ne  remplit  pas,  pèche  par  exagération 
et  par  lacune  ;  on  veut  trop  et  trop  peu  : 
trop,  quand  on  demande  une  théologie 
savante,  une  forme  élégante  et  fleurie 
à  l'orateur  sacré;  trop  peu,  lorsqu'on 
ne  lui  demande  pas  un  sens  religieux 
profond  ,  seul  moyen  de  donner  de  la 
vie  el  une  force  persuasive  au  discours. 
Quand  il  publia  ce  livre  assez  court, 
Klein  en  était  à  son  époque  de  transi- 
tion: il  avait  écrit  les  trois  ouvrages 
ou  recueils  qui  vont  suivre.  Il  mar- 
chait à  grands  pas  vers  l'invention  de 
son  système  de  religiosité.  II.  Douze 
dÎM-ours  prononces  à  VégUsc  de  lu 
ville  II  léna,  etc.,  Leipzig,  1818. 
Sans  être  comparables  aux  chefs-d'oeu- 
vre de  l'éloquence  sacrée,  ces  douze 
morceaux,  prononcés  avant  que  Klein 
eût  une  place  dans  l'église,  se  recom- 
mandent par  des  qualités  analogues  à 


DJ2 


KLE 


celles  dont  plus  tard  il  donna  la  théo- 
rie. S'il  n'a  pas  la  luxuriante  phraséo- 
logie, la  subtile  théoloo;ie,  il  expose 
nettement,  il  raisonne  sans  qu'on  s'en 
aperçoive ,  il  persuade ,  peu  s'en  faut 
qu'il  ne  .  captive  :  il  y  a  dans  tout  ce 
qu'il  dit  une  lumière  et  une  douce 
chaleur. ,  parfaitement  en  harmonie 
avec  les  vul(2;aires  proportions  de  la 
prédication  quotidienne.  Mais  est-ce 
hien  là  de  la  prédication  ?  Pour  éviter 
toute  objection,  Klein  a  intitulé  son 
recueil  Discours  et  non  Serinons  ou 
Homélies,  lll.  Lettres  écrites  dans 
l'intimité  ,  sur  le  christianisme  cl 
sur  le  protestantisme  {diM  sujet  du 
troisième  jubilé  séculaire  de  la  réfor- 
mation), léna,  1817.  Cet  écrit  extrê- 
mement remarquable  comme  phase  du 
développement  de  l'esprit  de  Klein, 
peut  être  lu  avec  profit  et  plaisir  par 
qui  sait  trier  le  bon  et  le  douteux. 
«t  Ni  le  Christ  ni  la  religion ,  dit-il 
«<  dans  sa  troisième  lettre  ,  ne  per- 
«  dent  ,  soit  en  dignité  ,  soit  en 
«  influence,  lors  même  qu'une  révé- 
«<  lation  extraordinaire  n'attesterait 
"  pas  leur  orig;ine  divine.  »  Et  plus 
loin,  «  Jésus  dut  sa  religion  au  JJicu 
«  interne,  au  logos  qui  se  manifes- 
«  tait  à  lui  avec  le  plus  grand  degré  de 
«f  clarté.  11  n'était  donc  plus  juif,  puis- 
«c  qu'jl  suivait  ses  révélations  propres, 
«  et  dès-lors  sa  religion  n'était  plus 
M  une  religion  positive,  c'est-à-dire 
«  reposant  sur  une  autorité  étrangère; 
«  sa  religion  était  \\n  rationalisme, 
«  car  le  rationalisme  est  une  manière 
«  de  penser  par  .soi-même,  d'après 
«<  des  principes  rationnels.  »  Evidem- 
ment il  était  impossible  qu'après  en 
être  venu  si  jeune  à  des  idées  si  pro- 
fondes, mais  si  insuffisantes,  si  insou- 
tenables sous  certains  rapports,  Klein 
n'allât  pas  bientôt  plus  loin,  c'est  ce 
que  nous  verrons  plus  bas.  IV.  De  lo- 
quendi  formula  yXùxrTuiç  XuMtv  f/uœ 
est  in  I  cp.  ad   Corintli.  et  in  A  et. 


KLE 

Apost.  ,  léna  ,  1816.  V.  Esquisse 
de  religiosisme  ,  ou  Essai  d'un 
nouveau  système  de  fusion  entre  le 
rationalisme  et  le  surnaturalisme , 
Leipzig,  1819.  Ici  Klein  est  sorti  des 
embarras  de  la  première  période  philo- 
sophique de  sa  vie:  il  ne  se  préoccupe 
plus  pour  commencer  de  rationnel  ou 
de  surnaturel;  débutant  par  une  haute 
synthèse  et  non  par  analyse ,  il  pose 
d'abord  l'homme  comme  religieux  ;  la 
religiosité  est  la  face  principale  de  son 
âme  ou  plutôt  son  àme  à  la  plus  haute 
puissance,  le  religiosisme  est  un  fait 
qu'opère  et  continue  sans  interruption 
la  religiosité.  Le  religiosisme  et  la  reli- 
giosité ne  sont  point  à  démontrer,  on 
ne  peut  évidemment  que  les  étudier  , 
les  analyser.  Or,  en  les  analysant,  on 
découvre  la  raison  d'un  côté,  le  sur- 
naturel de  l'autre;  ces  deux  éléments  y 
co-existent,  on  n'en  peut  douter,  et  dès- 
lors  co-exislent  harmonieusement,  que 
l'un  des  deux  prenne  ou  non  cette  har- 
monie.Klein  ne  veut  qu'expliquer  l'exis- 
tence et  la  légitimité  de  la  religion  en 
général  d'abord,  puis  du  christianisme 
en  particulier  ;  mais  remarquons  que 
c'est  un  protestant  ,  non  un  catho- 
lique qui  parle.  VL  Exposé  du  sys- 
tème dogmatique  de  l'église  éoan- 
gélique  protestante  (avec  remarques 
historiques  et  critiques),  léna,  1822. 
Ce  n'est  qu'un  précis,  nn  manuel  pour 
l'étude  approfondie  de  la  dogmatique  , 
mais  c'est  \\\\  précis  parfait.  Tous  les 
points  sommaires  décidés  ou  indécis, 
historiques  ou  dogmatiques  sont  effleu- 
rés en  passant,  et  la  plus  sûre  érudition 
a  présidé  à  tous  les  détails  offerts  aux 
jeunes  étudiants.  VU.  Divers  opuscu- 
les ,  savoir  :  1°  JJoit-il  et  va-t-il 
se  former  de  C église  luthérienne  une 
nouvelle  église  (anonyme)  ;  2"  Pour 
quel  parti  théologique  la  force  pu- 
blique doit- elle  être  intolérante  (ano- 
nyme) ;  3"  Indications  pour  t amélio- 
ration de  Vétat  de  t  église  et  de  Vin- 


KLL 


KLE 


553 


struitiun  (rédigées  surtout  en  vue  du 
grand-tlurlië  de  Sa«e-\Vf iraar,  fie), 
JéiJi,  IHJO;  \"  Jpprl  a  tous  Us 
Jrtini's- niu^urts  tU  C i.uroftr  /irhtrs- 
tante,  rtr  ,  léna,  ISfJ.  On  doit 
au5M  3k  klriii  une  édition  de  ï'hKU- 
sitislfs  on  tir  nififittr  cuncioiumdi 
d'Krasme.  Irn.i.   INJU.        1* — OT. 

KLKl.\S4:iinol>  (Galius- 
Aloys  (tASPARlt),  célèbre criminalisle 
allemand,  né  le  6  janvier  17G:i,  à 
NN  iirlzl)our^,  se  voua  de  bonne  heure 
à  l'élude  de  la  jurisprudence  a\cr  le 
devteni  d'v  opérer  une  révolution  dont 
la  necenNile.  dont  l'ur^iMiceolaicnl  sen- 
ties depuis  les  écrits  de  Ucccaiia,  de 
Filan^ieri  et  de  Montesquieu.  Ses  élu- 
des étaient  a  peine  unies  qu'on  attira 
sur  lui  les  re;;ards  du  prince-e\fque 
d'brtlial  qui,  de  Puniversitc  de  Ciurl- 
tin;;ue  où  il  prit  ses  de;;rés,  l'envova 
suivre  les  srances  de  la  chambre  im- 
périale de  \N  etziar,  rt  qui  ensuite  le 
nomma  professeur  de  droit  romain  et 
de  droit  criminel  a  \N  iir  ubti'jr;^.  11 
n'avait  encore  que  vin;;l-lrois  ans  : 
bientôt  a|irès  il  joignit  à  5a  chaire  le 
litre  de  conseiller  d'elal.  1^  variété 
même  des  travaux  nue  lui  imposait 
cette  double  sphère  d  acti>itf  le  char- 
mait, rt  pour  lui  c'était  un  bonheur  en 
même  temps  qu'un  trit)mplie  île  com- 
muniquer ses  idées  par  la  pa:olc.  Maisla 
mapniricence  du  résultat  ne  l'aveuglait 
pa^  sur  l'immensité  de  la  taclic,  et  il 
sentait  instinctivement  qu'il  ne  po.ssé- 
dait  pas  sous  forme  nette  et  scieuti6- 
que  les  piincipcs  f;eiicraux  qui  expli- 
quent et  conliennenl  toutes  les  parti- 
cularités du  droit  ,  qu'il  ne  pouvait 
arriver  aux  premiers  qu'en  étudiant 
séparément  et  succe-sivemeiit  les  se- 
condes. Si,  pour  bien  comprendre  les 
détails,  il  faut  avoir  quelque  idée  préli- 
minaire de  l'ensemble,  en  roanche, 
pour  saisir  parfaitement  cl  puissam- 
ment l'ensemble,  il  faut  a\oir  un  ^rand 
nombre  de   notions  de  détail.    Telle 


fut  la  marche  de  kleinschiod:  ne 
coramcnrant  point  |>ar  une  ambitieuse 
et  hypothflique  svnihèse,  il  porta  ses 
regards  sur  une  foule  de  points  séparés, 
inlerio^caiil  à  propo>.  de  rhariin  d'eux 
l'histoire  et  le  ïcns  intime,  et  tai  liant 
de  construite  pour  chacun  une  .solution 
philosophique,  c'est-à-dire  en  rapport 
avec  la  nature  de  l'honimt'  individuel  et 
avec  la  nature  delà  société,  la  procé- 
dure ciiiuinelle  attira  la  prcniiore  son 
allrntion.  (/est  dans  celle  partie  du 
droit  qu'il  v  avait  le  plus  d'abus  on 
d'iniquités  a  supprimer.  Il  examina 
d'abord  quelques-uns  de»  crime-,  et 
délits  ,  ainsi  que  les  peines  infli^oes 
au  criminel.  De  là  une  série  de  pe- 
tits traités  spéciaux  écrits  en  latin  , 
et  plus  tard  reunis  en  deux  volumes. 
Ce  ne  sont  pas  des  déclamations  de 
rhéteur  et  de  philanthrope,  ce  sont  des 
raisonnements  et  des  observations  re- 
marquablej  les  uns  et  les  autres  par 
une  justesse  qu'on  n'a  pas  contestée. 
I.es  premiers  en  date  roiilcnt  sur  l'ef- 
fet (le  finiper/ei/iuii  des  preu^'es  en 
matière  rriniinel/e ,  sur  l'iinjuitte' 
ment ,  sur  lu  nécessite  de  limiter 
r usage  de  la  confrontation,  sur  l'ap- 
titude du  délateur  a  déposer  comme 
témoin.  In  autre  traite  sommaire- 
ment J/*  la  perpétration,  de  l  his- 
toire et  de  la  pénalité  du  bracon- 
nage et  de  la  procédure  suii^ie  à  son 
égard  ;  dans  un  autre  il  discute  Vori- 
gine  de  Vidée  du  vol,  T essence  du  2^ol 
et  les  peines  (]u  y  applique  la  so- 
ciété, et  il  démontre  facilement  que, 
quelque  vive  (jue  doive  être  la  répro- 
bation sociale  pour  cette  manière  d'ac- 
qtrérir,  le  crime  contre  les  choses  ne 
peut  à  lui  seul  être  mis  sur  la  hgnc  des 
crimes  contro  les  (teisonnes  et  entraî- 
ner raisonnablement  la  punition  capi- 
tale. Déjà,  au  reste,  cette  conclus:oii 
était  vubaire,  mais  il  s'agissait  d'en  ad- 
ministrcr  la  preuve  mathématique,  sans 
phrase,  sans  appel  à  la  sensibilité  et  en 


554 


KLE 


remontant  à  la  nature  même  du  phéno- 
mène et  à  la  base  tla  jiif];ement  par  le- 
quel nous  appelons  vol  ce  mode  de 
translation  de  la  propriété.  Le  morne 
esprii  de  recherche  consciencieuse  et 
fondamentale  préside  à  V Essai  sur  la 
peine  (les  travaux  forcés^  à  Y  Essai 
sur  la  saisie  des  biens  d'un  suspect 
ou  d'un  criminel  (d'un  prévenu  ou 
d'un  condamné).  Vlus  de  maturité, 
plus  d'élévation,  plus  d'aisance  à  ma- 
nier les  idées  {générales  se  décèlent 
dans  son  Mémoire  pour  la  théo- 
rie de  l'adultère,  dans  ses  Recher- 
ches sur  les  conditions  d'un  mandat 
d'arrêt  en  affaires  criminelles  ou  au- 
tres, dans  sa  Théorie  de  la  répara- 
tion du  dommage  produit  par  h 
crime,  et  dans  la  Théorie  de  Vadhé- 
siun  en  matière  criminelle  (1).  Ces 
quatre  morceaux  forment  comme  la 
transition  de  ses  premiers  travaux  à 
l'ouvrage  qui  a  fondé  sa  réputation  et 
qui  ,  quoique  dépassé  aujourd'hui  , 
quoique  à  rectifier  en  plus  d'un  pas- 
saf^e,  quoique  composé  trop  exclusive- 
ment au  point  de  vue  du  système  pré- 
ventif ,  n'en  est  pas  moins  digne 
d'être  lu  et  médité  par  tout  juriste 
profond.  C'est  son  Développement 
systématique  des  idées  et  des  véri- 
tés fondamentales  du  droit  pénal, 
Erlangen,  1793-1796,  3  vol.  (3^  édi- 
tion, 1815).  On  peut  due  sans  exagé- 
ration que  cette  grande  publication  a 
largement  influé  sur  la  législation  et  le 
droit,  tant  en  contribuant  à  faire  partir 
désormais  toute  théorie  juridique  de 
principes  fondamentaux  sérieusement 
discutés  (  par  exemple  ,  des  droits  de 
la  société,  comme  supérieurs  aux  droits 
de  riiomme),  qu'en  soulevant  une  [)0- 
lémiqtie  décisive  sur  le  choix  d'un  prin- 
cipe exclusivement  à  tout  autre,  ou  sur 
la   combinaison   de   principes  diveis. 


(i)  Adhérer,  en  maliète  criminelle,  ilan»  le 
style  dn  la  juritpnidrricc  dllemande,  n'e»t  au- 
tre choie  que  s*  porter  partie  cirile. 


KLE 

Celui  de  Kleinschrod  n'est  pas  de  na- 
ture à  compter  une  infinité  de  parti- 
sans en  France  ;  mais  en  Allemagne, 
et  dans  tous  les  pavs  où  domine  l'es- 
prit conservateur,    il  excite  moins  de 
répulsion.  S'il  devait  avoir  contre   lui 
les  Feuerbach,  les  Almendingen,   eu 
revanche  il  allait  voir  partager  ses  opi- 
nions par  les  StUbel,   losTitlman,  les 
Grohnann.   Sans  être  absolument  le 
premier  à  les  émettre,    il   fut  le  pre- 
mier à  les  réunir  en   corps  de  doc- 
trine ,   à  les  lancer  dans    le    monde 
scientifique   et  politique  à    l'état    de 
système  ;  et  dès-lors  on  dut  voir  en  lui 
un  de   ces  chefs  d'école ,    dont  bien 
peu  sont  véritablement  les  invenletirs 
des  principes    qu'ils  combinent.   Ce 
fut   alors    pour  Kleinschrod   une  né- 
cessité de  s'élever  une  tribune  pour  y 
proclamer    et  défendre  ses  maximes. 
Uni  à  Klein,  il  fonda,  en  1798,  les 
Archives   du   droit   criminel,  aux- 
quelles prirent  part  d'autres  notabi- 
lités de  la  science,  et  dont  la  piemière 
série,  close  en  1817,  a  été  suivie,  sans 
interruption,  des  Nouvelles  archives 
du  droit  criminel  par   Kleinschrod, 
Konopack  et  Mittermaïer,  1818,  etc. 
Ce   recueil  est  d'une  haute    valeur; 
d'une  part ,  il  fait  fonction  de  biblio- 
graphie et  d'histoire  critique   des  pu- 
blications relatives  au  droit  criminel  ; 
de  l'autre,  on  y  trouve  traitée  une  foule 
de  questions  dogmatiques,  pratiques,  et 
c'est  avec  le  grand  ouvrage  de  Klein- 
schrod ce  qui  fait  connaître  le  mieux 
l'ensemble  des  doctrines  de  l'école  pré- 
ventive. Ce  n'est  pas  cela  pourtant  qui 
fonda  sa  gloire  :  bien  avant  1798,  et 
même  avant  l'apparition  du  Développe- 
ment systémati(jur,  sa  réputation  était 
faite.  Au  milieu  du  mouvement  général 
qui  portait  les  esprits  élevés  vers  la  lé- 
gislation, il  devait  nécessairement  être 
remarqué  :  LéopoldenToscane(1786), 
Joseph  II  dans  les  états   autrichiens 
(1787  et  1788)  avaient  donné  chacun 


KLi: 

un  ro(l<»  pliK  a^',e,  plus  dout  (jiie  crux 
qu'iU  at)uli<^aif  ut  ;  L  l'ru6.>e  tu  «-Inbo- 
lait  un  qui(l(r\ait  |)3raitre  fn  17iK'>;  U 
Fianrc,  tirn  qu'aver  des  formes  tîes- 
!i«clivc>  cl  en  avaul  le  «ioubic  tort  de 
fomnieucer  par  faire  table  ro-se  Je  tout 
le  pavsc  et  d'opérer   sa  révolution  Ic- 
^islati\epar  la  \iolence  et  par  les  mas- 
ses ,    suivait    en   l'exaspérant    (1791) 
l'exemple  des  princes.  D'Kitlial,  tou- 
jours c\èqur  de  N\  iirtibour;^,  voulait 
suspasser  encore  le  beau  code  criminel 
Sclinartzenberg,    monument  du  prin- 
cipal de  son  prrdrfev>eur  <ieor^e  d« 
Lnnbour»;.  Il  confia  à  son  référendaire 
Pflaum    ta   rédarlion  d'un  code  pénal 
basé   sur  rcsqui>se  du  code  pénal  de 
Quislorp  ;  puis  il    in\ita    kleinsclirod 
à  réviser  le  travail  de  Pllaum.    Cette 
tàcbe  ne  fut  terminée  qu'après  la  mort 
du   prélat,   et  parut  en  171)5,  sous  le 
titre  de    Codr  p<-mil  de   liamherg. 
Kleinsclirod    avait  \  peine   fini     que 
l'électeur   Maximilien-Joseph   de  IJa- 
vière,  frappé  des  imperfections  du  code 
ciiminel   bavarois,  et  plus  encore  du 
ruaniiue  de  gradation  des  peines  et  de 
leur  disproportion  avec  les  délits,  lui  de- 
manda un  projet  à  substituera  la  légis- 
lation draconienne  qui,  depuis  une  qua- 
rantaine d'annéeset  plus  '1751-t7îMP, 
réj;issait  ses  états.   De  là  le  Ihujrl  iht 
luiie  prnul pour  Us  états  du  Piilu- 
timit  et  de  Iiu\u'ère,  public  en   1S02, 
avec  le  nom  de  Kicinschrod.  Cet  es- 
sai  remarquable  lui  valut  des  éloges  et 
des  marques  de  munificence  de  l'élec- 
teur, des  critiques  acerbes  de  la  part 
de  ses  antagonistes.   Aujourd'liui  que 
la  postérité  a  commence  pour  Klein- 
sclirod, on  peut  faire  imparlialcmenl  le 
départ  du  bien  et  du  mal  :  autant  il  est 
vrai  que  son  Projet  laissait  à  désirer 
et  qu  il  est  au-dessous  des  lumières  ac- 
quises depuis  l'époque  de  son    appari- 
tion, autant  il  est  juste  de  reconnaître 
qu'il  l'emportait  de  beaucoup   sur  ce 
qu'on  arait  auparavant ,  et   que  les 


KLE  5f.5 

progrès  des  modernes  en  codifications 
sont  dus  en  partie    aux  pro^n>  fait» 
par    klrin->clirod.    Ou'on    n'ima^me 
pas  non  plus  que  son  ^vstème  préven- 
tif et  conservateur   entraîne    riiez  lui 
une  excessive   .sévérité.  Au  contraire, 
tout  conservateur  qu'il  e>t,  et  peut-être 
parce  qu'il  est  conservateur,  il  rejette, 
quoique  ancien,   ce   qu'il  ju<;e  inutile 
ou  destructeur  ;  et,  tout  en  voulant  pré- 
venir, il  ;;raduc  la  répresilon  :  sa  grada- 
tion même  est  quelquefois  minutieuse 
et  puérile.  Il  ne  prodigue  point  la  jieine 
de  mort.  (]bar;;é  par  son  prince  de  re« 
viser    un  procès  d«»nt    le  résultat  avait 
été  une  condamnation  à  mort  ,  il   ne 
pronoti(;a  (pie  la   détention  dans   une 
maison  de  correction.  Cependant  avec 
les  armes  françaises  s'imposaient  à  une 
partie  de  l'Allemai^ne  les  codes  fran- 
çais :    W  iirliboui;;   était    devenu    un 
(;rand-duclié  et    le    «;rand-duc    avait 
admis  la  léj^islation  civile    de  la  rive 
gauche  du    Kliin.  Kleinsclirod  donna 
une  attention  particulière  aux  branches 
de  celte   le;;islalion  qui  se  referaient  à 
sa  5péciallté;  le  ;;rand-duc  le  consulta 
sur  les   modlGcalions  à  faire  au  (^ode 
Napoléon  pour  en   approprier   les  dis- 
positions  au  pavs.   IMus   lard  (ISl.J) 
parut  son    Iritroitui  tion    dctuiUre   à 
la  théorie  de    la  juridirliun  pénale 
d'après  1rs  clauses  de  l'at  te  de  la 
ron/édératiun  du    H/iin,  dont  la  pu- 
blication lui  valut  bientfit  l'honorable 
mission    d'adapter  au  ^rand-duché  de 
^^  iirtzbour^  le  code  pénal  promulgué 
en  Autriche  en  1803.  Ce  travail  qu'il 
poussa  très-activement  touchait   à  sa 
fin,  lorsque  la  réunion  du  f^rand  duché 
a  la  lîavièrc,  tout  nouvellement  pour- 
\\ft  elle-même  d'un  code  pénal,  rendit 
ses   soins   inutiles.  Du  reste  il    f;arda 
.sa  chaire  et,  quand,  par  les  événements 
de  1814,   le  monarque  bavarois  eut 
été  consolidé  dans  sa  récente  acquisi- 
tion, il  reçut  de  lui  des  marques  d'es- 
time  (l'ordre  du  Mérite-Civil,    etc.). 


5jb 


KLE 


îyiembn;  du  sénat  de  la  ville,  puis 
d'un  comité  du  contentieux,  doyen  de 
la  laculté  de  droit,  il  remplissait  ces 
l'onctions  diverses  avec  une  ponctualité 
exemplaire.  Le  tome  Vil  des  Nouvel- 
les arcliîoes  du  droit  criminel  con- 
tient de  lui  un  dernier  article,  et  il  a 
laissé  divers  manuscrits  intéressants. 
Kleinschrod  venait  de  faire  un  voya^^e 
aux  rives  du  Rhin,  lorsqu'il  mourut  le 


17  nov.  18-24. 


P 


-OT. 


KLEÎST  de   NollendorJ  (le 

romteFr.ÉDKRlC-HENP.I-Fr.RDlNAND- 

Emile),  feld-maréclial  prussien,  né  le 
y  avril  1763  à  Berlin,  commença  par 
être  page  du  prince  Henri,  et  lit  ses 
premières  armes  dans  la  courte  guerre 
de  la  succession  de  Bavière.  Il  reprit 
ensuite  ses  éludes  à  l'école  militaire 
et,  par  ses  progrès,  il  s'attira  l'atten- 
tion de  Tempelhoff  qui  dirigeait  l'éta- 
blissement. Dès  que  la  révolution  fran- 
çaise ouvi  it  des  chances  de  guerre  à  la 
Prusse,  il  fut  compris  dans  l'élat-ma- 
jor,  et,  en  1792,  il  fut  attaché  au 
corps  du  prince  de  Hohenlohe  en  qua- 
lité de  capitaine.  Bien  que  dans  une 
sphère  très-inférieure,  il  fit  preuve  de 
connaissances  et  de  bravoure,  princi- 
palement à  l'affaire  d'Ober-Urzel.  Il 
reçut  pour  sa  conduite  en  celte  journée 
l'ordre  du  mérite;  et  Mœllendorf,  en 
prenant  le  commandement  de  l'armée 
prussienne,  laissé  vacant  depuis  la  dé- 
mission du  duc  de  Brunswick,  nomma 
Kleist  son  adjudant,  place  de  confiance 
où  il  se  félicita  sousent  de  l'avoir  mis. 
Devenu  chef  d'un  bataillon  de  gre- 
nadiers (1799),  il  en  fit  bientôt,  par  ses 
.soins,  un  des  plus  beaux  corps  de  l'ar- 
mée. Le  roi  Frédéric;-(inillaume  liilen 
témoigna  sa  .satisfaction  en  l'attachant 
à  sa  personne  comme  adjudai:t  général 
(1803).  Cet  emploi  ne  pouvait  manquer 
de  lui  faire  des  envieux,  et  la  critique 
ne  l'épargna  pas.  Massenbach  prétendit 
qu'il  s'en  acquittait  fort  mal,  qu'il  em- 
ployait mal  son  influence,  etc.  Tel  ne 


KLE 

semble  pas  avoir  été  l'avis  du  mo- 
narque ;  car  il  garda  cinq  ans  Kleist 
auprès  de  lui  ;  pendant  la  malheureuse 
guerre  de  180G  et  1807,  il  lui  confia 
le  commandement  d'un  réginient;  et, 
après  la  bataille  d'Iéna,  il  l'envoya 
au  quartier-général  de  Napoléon  à 
Oslerode  ,  répondre  aux  propositions 
de  paix  faites  par  le  général  Ber- 
trand. Epuisé  de  fatigue,  Kleist  obtint 
après  la  paix  de  Tilsitt  un  congé  indé- 
fini qui  le  rétablit  plus  promptemenl 
qu'il  n'espérait.  Au  commencement 
de  1808  on  le  vit  coopérer  à  la 
réorganisation  de  l'armée,  et  comman- 
der, avec  le  grade  de  major-général, 
la  brigade  de  Francfort-sur-l'Oder. 
Le  nombre  des  troupes  était  borné 
par  les  traités,  et  Napoléon  le  vou- 
lait toujours  insuffisant  à  la  défense 
du  royaume  :  Kleist  fut  de  ceux  qui 
réussirent  le  mieux  dans  leur  circon- 
scription à  remplir  les  vues  secrètes  du 
souverain,  en  donnant  au  peu  de  troupes 
sous  ses  ordres  un  perfectionnement  qui 
compensât  l'infériorité  numérique.  Il 
n'était  pas  difficile  de  comprendre  que 
la  lutte  reconunencerait  bientôt.  Peu 
s'en  fallut  que  ce  ne  fût  dès  1809,  et 
sans  l'inattendu  dénouement  de  Wa- 
gram,  qui  répara  Essling  et  découra- 
gea si  promptement  la  maison  d'Au- 
triche, l'héroïque  tentative  de  Schill , 
la  marche  hardie  du  ddc  de  Brun.s- 
Avick-CEls,  auraient  été  le  commence- 
ment d'une  coopération  prussienne  à 
la  guerre  de  la  quatrième  coalition. 
En  ce  moment  critique  et  quand  d'un 
instant  à  l'autre  la  Prusse  pouvait  ou- 
vertement rentier  en  lice,  Kleist  fut 
appelé  par  son  prince  au  commande- 
ment de  Berlin.  On  comprend  com- 
bien de  dextérité,  de  vigilance  et  d'in- 
corruptible fidélité  demandaient  de  pa- 
reilles fonctions  en  de  telles  clrcon- 
.stances.  La  confiance  du  souverain  ne 
fut  pas  déçue;  et,  quelque  impossible 
qu'il  fut  de  cacher  à  Napoléon  la  trop 


KLE 


KLE 


5V 


Juste  inimitié  île  la  IVu<;'e,  an  motn<; 
n'rut  il  pa^  la  salisfaclion  dr  pouvoir 
irpiofher  (^^^s  liostiliti^  Ib^^ranlrs.  l  ii 
Nfrobliiit  <1r  cuncoiilc  suliM>ta  ilonr 
troi«ann«'r^  au  milieu  de  rexi;;encr  des 
conirihulions  mililnires,  des  npionna- 
j;es  d'une  police  hrannique  et  de  tou- 
tes les  \etations  du  svstèine  rontincn- 
tal.  Kt  quand  fut  \cnue  la  dc'-astreu-^f 
expédition  de  Pni^^ie,  qunnd  la  Piuise 
n*o>anl  cisroie  rompre  eut  à  fournir 
un  lontiii^cnl,  Klei>t,  ronimr  ni.ijor- 
^^néral,  eut  une  brigade  à  ronimander, 
sous  les  ordres  du  ^cnrral  division- 
naire \orl.  Le  corps  entier  obéissait 
i  (ira\\ort,  K'(|upl  lui-mrme  fut  sou- 
mis à  Macdonald  ,  cliar;;r  d'opérer 
dans  les  [tiovinces  balliques  avec  cent 
mille  hommes  qui  formaient  la  (;au- 
tlie  de  la  grande  armée.  On  sait  avec 
combien  dr  rapidité  avancèrent  d'a- 
bord ces  troupes  auxquelles ,  sur  ce 
point  rorame  sur  les  autres,  les  Uusses 
n'opposeront  pas  la  redoutable  éner- 
jiie  qu'ils  mettaient  en  réserve  pour 
l'arrière-saison.  I^CourlanJe  fut  pres- 
que entièrement  conquise  sans  coup 
férir,  kleist  contribua  essentiellement 
au  ^aiti  de  la  première  afiaire  ,  en 
filant  avec  s.i  brij;ade  le  lon^;  du  ruis- 
seau d'Kckau  sur  le  flanc  et  le  dos  i\cs 
Russes,  pui>  les  attaquant  par  derrière 
tandis  que  isiawert  les  prenait  de 
front.  Il  fut  ensuite  cliar;;é  d'occuper 
Mittau,  pendant  que  le  f;énéral  fian- 
rais  faisait  les  pri'p.iratifs  t\ii  siè;;e  de 
l\ic;a.  Celte  opération  n'était  pas  de 
celles  que  les  Kusses  fussent  disposés 
à  souffrir,  et  d'ailleurs  le  moment  était 
venu  où  i'inceudie  de  Moslou  allait 
donner  le  si;;nal  d'hoslililés  sérieuses. 
Hessaisissanl  l'offiMisive  ,  les  Uusses 
marchèrent  sur  Mittau.  YorL,  qui  avait 
pris  le  commantlement  du  corps  prus- 
sien en  remplacement  de  (irawert 
alors  malade,  char^^ea  kleisl  de  pro- 
té<'er  les  tètes  de  pont  en  avant  de 
celte  ville  avec  trois  escadrons  et  cinq 


bataillons  :  il  ne  pouvait  abandonner 
i  l'ennemi,  sans  ess.iver  ou  sans  frin- 
dre  quelque  réMstanre,  un  point  dt*  si 
haute  importance  pour  la  ;;.iurlie  de  la 
positmn  prussienne  ;  mais  au  fond  on 
peut  croire  qu'il  ne  voulait  pas  la  con- 
server à  tout  prix  ,  et  en  réalité  les 
Prussiens  et  les  I\usses  se  ménagèrent 
mutuellement.  Kleist  n'envo>a  que 
quelques  coups  de  fusils  aux  tins- 
ses, qui  bientôt  se  trouvèrent  infini- 
ment supérieurs  rri  nombre;  et  alors 
5ui\int  un  ordre  d'\  ork  portant  de  >e 
retirer  sur  le  reste  du  corps  prussien 
en  arrièie  île  Mittau.  (Vpend.anl  il  n'y 
a\ait  point  rollii-Mon  «onij-j»  Je  ni.ore 
entre  les  auxiliaires  forcés  de  Napolmn 
et  les  Uusses  ;  et  qu?nd,  le  :29  sept., 
ceux-ci  voulurent  s  emparer  par  force 
du  parc  d'artillerie  de  hulieiid.ihl,  el 
qu'ils  franchirent  l'Aa  dans  cette  vue, 
York  et  Kleist  dépîovèrent  la  plus 
prande  vif;ueur  pour  repousse  cette  ten- 
tative. Ce  dernier  marchant  au  de\ant 
de  l'ennemi,  sur  la  rive  gauche,  le  forra 
de  repasser  la  rivirre;  mais  ce  ne  lut  que 
bien  a\.nnt  dans  la  nuit,  et  l'engage- 
ment recotnmenra  le  lendemain,  quoi- 
que sans  avantaj^c  pour  les  Kus.ses. 
Nous  ne  sui\rons  pas  Kle;st  d:»ns  tou- 
tes les  petites  affaires  auxquelles  il  eut 
part  avant  et  pendant  le  blocus  de 
Ki^a.  Ce  blocui  très-imjiarfait,  puis- 
qu'on ne  pouvait  intercepter  la  coiu- 
munication  de  la  citadelle  avec  la  mer, 
fut  levé  àès  le  commencement  de 
nov.  Les  Prussiens  pendant  ce  temps 
avaient  beaucoup  souffert.  Ils  bivoua- 
quaient sur  un  sol  maréc.i^eux  ;  le 
froid  se  faisait  vivement  sentir,  el  les 
adiuiiiistralions  françaises,  non  con- 
teîites  de  les  laisser  manquer  du  né- 
cessaire ,  retenaient  les  munitions 
et  les  armes  préparées  à  Pillau  pour 
leur  usaj^e.  Quand  le  corps  de  .Mardo- 
nald  les  eut  rejoints,  ils  fui  ont  placés 
à  l'arrière-garde ,  moins  sans  doute 
parce  que  l'on  comptait  sur  leur  6né- 


5  ",8 


KLE 


liléqiie  parce  que,  tant  qu'ils  ne  se  dé- 
clareraient pas  contre  la  France,  Ils  fa- 
ciliteraient toujours  d'autant  la  re- 
tiaite,  et  que  s'il  en  périssait  dans  les 
attaques  journalières  de  l'ennemi ,  la 
perte  serait  peu  regrettable  pour  Napo- 
léon. York  et  Kleist  dans  celte  situa- 
tion devinèrent  les  intentions  de  leur 
monarque  ;  ils  n'en  recevaient  point 
d'instruction  ,  mais  les  circonstances 
étaient  parlantes  :  les  détails  de  la  dé- 
sastreuse retraite  se  multipliaient  de 
jour  en  jour  et  devenaient  de  plus  en 
plus  incontestables.  C'était  le  moment 
de  prendre  la  revanche  dont  jamais 
la  Prusse  n'avait  perdu  l'espoir.  Le 
corps  d'York,  en  couvrant  le  mouve- 
ment rétrograde  de  Macdcnald  ,  ne 
(il  donc  pas  grand  mal  aux  Russes 
qui,  de  leur  côté,  ne  furent  pas  très- 
cruels  pour  lui  ,  bien  que  dans  les 
rapports  au  général  français  on  gran- 
dit les  afi'aires  et  l'on  haussât  les  per- 
tes. Il)  en  avait  toutefois  de  réelles, 
et  des  nuées  de  Cosaques  harcelaient 
incessamment  les  flancs  de  l'arrière- 
garde.  Mais ,  à  dire  vrai,  ces  excur- 
sions eussent  pu  être  plus  redoutables, 
et  l'on  sait  à  présent  que  dès  ce  mo- 
ment il  y  avait  secrètement  des  pour- 
pailers  entre  les  agents  des  deux  en- 
nemis qui  devaient  bientôt  devenir  des 
alliés;  ce  qui  paraissait  d'autant  plus 
naturel  que  le  corps  russe  chargé  de 
poursuivre  les  Prussiens  était  celui  du 
beau-frère  de  Kleist.  Les  fugitifs  tou- 
thaiciil  aux  frontières  prussiennes 
quand  W  ittgenstein,  par  une  suite  de 
manœuvres  moins  difhciles  sans  doute 
qu'on  ne  l'imagine  ,  enveloppa  les 
Prussiens  Irès-affaiblis  d'ailleurs  par 
leurs  pertes  et  par  la  désertion.  Il 
fallait  ou  passer  de  vive  force  ,  ce  qui 
ne  pouvait  s'effectuer  qu'au  prix  de 
perles  considérables,  ou  bien  capituler. 
C'est  à  faire  naître  l'occasion  de  ce 
dilemme  que  probablement  les  deux 
généraux    travaillaient    depuis    long- 


KLE 

temps.  York  non  seulement  posa  les 
armes  devant  les  ennemis  qu'il  eût 
combattus  à  regret  (30  déc.)  ,  mais 
encore  il  convint  de  faire  cause  com- 
mune avec  les  Russes,  pour  peu  que  le 
roi  ratifiât  sa  convention.  Kleist  sui- 
vit naturellement  la  fortune  de  son  su- 
périeur; et,  MassenTOch,  averti  à  temps, 
quoique  alors  il  fut  à  dislance  ,  se 
prononça  aussi  dans  ce  sens.  Cepen- 
dant le  roi,  croyant  ne  pas  devoir  en- 
core se  prononcer  franchement  sur 
ce  qui  venait  de  se  passer  ,  affecta  un 
grand  courroux  de  la  trahison  d'York. 
Mais  dès  le  19  janvier  11  transféra  le 
commandement  de  l'armée  à  Kleist,  ce 
qui  n'empêcha  pas  York  de  procla- 
mer le  27,  à  Kœnigsberg,  que  sa 
destitution  ne  lui  avait  point  été 
adressée  ;  et,  comme  si  le  cabinet  de 
Prusse  eût  pu  Ignorer  que  Kleist  était 
avec  son  supérieur,  il  quittait  Berlin 
pour  Breslau  en  compagnie  de  l'am- 
bassadeur français  Marsan  et  en  pro- 
testant de  son  dévouement  à  Napo- 
léon. Mais  personne  ne  fut  dupe  de 
cette  comédie ,  et  si  l'on  eut  été 
disposé  à  l'être  ,  les  antécédents  des 
hommes  qui  dès  lors  se  pressaient  au- 
tour du  roi,  les  Rlucher  ,  les  Scharn- 
host,  les  Gnelsenau  devaient  suffire 
pour  ouvrir  les  yeux.  Le  27  février 
en  effet  fut  signée  l'alliance  du  czar 
avec  le  roi  de  Prusse  ,  et  ,  le  mois 
suivant  ,  le  corps  russe  de  Wltt- 
genstein,  le  corps  prussien  d'York  et 
de  Kleist  entraient  à  lierlin  évacué 
par  Augereau.  Ces  deux  corps  à  la  fin 
de  mais  se  portèrent  en  avant  sur 
Magdebourg  :  York  fut  détaché  sur 
\Vittenberg,afin  d'en  faire  le  siège  ou 
plutôt  le  blocus,  et,  quand  la  place  fut 
investie,  Kleist  parut  à  la  tète  des 
colonnes  qui  se  hasardèrent  à  l'ouest 
de  l'LIbe.  11  coopéra  au  mouvement 
sur  Dessau,  occupa  le  passage  de  la 
Saaie  à  Halle,  et  le  28  avril ,  assailli 
par  Lauriston  et  huit  mille  hommes  en 


KLK 

avant  t)e  rflte  ville,  bien  qu'il  nVn 
tût  ^ut%t  que   liiiq  mille,  il  le^uu^^a 
tuult*%  le!^  aliaijue«.    lOulefui'»,   devant 
«!r.  foire»  supérieures  el   quand    l'ai- 
uK-e  .ill.rr  a\ait    résolu  un  mouvement 
^em-ral  de  retraite,  il   ne  jjouvail   se 
maintenir  à   Halle.    Il  partit  doiir  le 
surlendemain  à  U  nouvelle  de  la  perte 
de    Mer>rbour|;,  et  se  retira  sur  Skeu- 
ditx  pour  opérer  m  jonction  atec  la 
;;rande  armée,  aui  environs  de  Leip- 
ii|;.  lîienlot  eut  lieu  la  batadle  de  Lut- 
zen  {'2  mai).  Napoléon   avait  leparu, 
et    sa   pre>ence    accrlcrait    les  e\ene> 
inenis.  Pondant  que  U  mavse  des  deux 
aimées  ^e  disputait   les  Mila;;es  mren- 
dii  i  on    avant  de   (iro»s-(iirr>clien  , 
kloist,  placé  dans  l^ipii;;  aver  »a  bri- 
;;adp,  défendait  la  ville  contre  Lauris- 
t«in,  supéiieur  en  nombre  ,  et  tri:p  lai- 
ble  il  l'évacuait  il  trois  heures.  1^  len- 
demain   il  fit  un  effort  inutile  pour  y 
rrniror  :    les   alliés  étaient  en   pleine 
rrtratte  et  abandonnaient  la  l^ut  de 
l'KIbe;  foi  ce  fut  que  lui-môinese  reti- 
i.il  en   toute    liate.    Il  ^e   replia   sur 
\N  urlzcii  et  repassa  le  fleuve.  La  ba- 
taille   de   Iiautzen    .suivit   de    près   : 
klei.st    >    déplova  pendant    les    deux 
jours  un  dovouemenl  el  un  courage  qui 
lui  mériurent   les  é!o-es   de  l'empe- 
reur Alexandre,    il   occupait  avec   sa 
bii^ade  les  hauteurs  de  liuij;  et  de  lîa- 
saniwiti  ,   à   la   droite   de    lîautzen  , 
et  faisait  partie  de  la  première  li^ne. 
Tout  le  jour  il  défendit  le  passaj;c  de  U 
Sprée  contre  les  attaques   roitérées  de 
î\iarmonl  el  de  lieilrand  qui  voulaient 
le  »b  l'usquer,  et  qui,  mailres  de  la  ville, 
diii;;c;enl  leurs  attaques  sur    Nieder- 
Keina  dont    ils  enlevèrent    les    hau- 
teurs. Trois  mille  hommes  détaches  par 
liliicher  au  secours  de  Kleist  l'aiilè- 
rent  encore  à  prolonger  une  résistance 
desespérée,  pendant    lar|uellc   l'armée 
alliée  se  repliait  avec    lenteur  el  mé- 
thode.  Voyant  son  ilanc  c;auclie  me- 
nacé du  colé  de  Nieder-Keina  ,  et  , 


kLL 


55q 


d'autre  part,  les  Français  te  prépa- 
rant à  iLiverser  la  Spiee  du  rAlé  de 
Nieder-4iuika ,    Kleist    alla    se  refor- 
mer derrière  les  batterie^   de  Lilten  , 
et  c'est  alois  que  les  Kianrai.'*  s'avan- 
cèrent sur  tmiic  ta   h«;ne  jusqu'à    ce 
que  l'aile  ^aurhe  des  l^uftsesles  arrêtât. 
1^  lendemain,  quand  l'anivee  de  Ne? 
à  Klir   et  sa  jonction  avec   Bertrand 
eurent    brusquement    refoule   Harclav 
de    IoIIt    de   sa    pOMlion   de  N>  ind- 
muhlen-IWr^  ,  et  que  le  Ilanc  droit  de 
lUiirher  se  trouva  menacé,  Kleist  fut 
char{;é  d'aller  ntablir  les  aflaires  sur 
ce   point.  In  plein   ^urcès   couronna 
ses  efforts;  le  village  fut  eiiloTé  par  la 
parde    prussienne   et   le   ré*;imrnt    de 
Salberc;,  brillant  fait  d'armes  qui  em- 
pêchait Napoléon  d'envelopi»er,  com- 
me il    le  projetait,   toute  l'aile  droite 
de«  «ll-M,  et  qui  i  en«lait  bien  plus  rude 
la  tâche  de  c!ia<5er  lUiiciier  de  ^â  forte 
position   de    Kre(L>fcitt.    Il    est   vrai 
pourtant  que  cette  tàdie  fut  accomplie 
en  deux  heures  j>.ir  ^larmonl    et  lîcr- 
trand.  Cependant  l'aile  j;auchc  com- 
battait avec  avantaj;e,  la  droite  reculait 
sans  beaucoup  de  perte,  el  si  tous  les  al- 
lies renircnl  l'ordre  de  la  retraite,  ce  fut 
plutAt  pour  éviter  un  dé>astie  possible 
que  par  suite  d'un  desastre  réel,  fîar- 
clay  et  Kleist  formèrent  l'arrière-f^arde 
dans  colle  marche  ritrof;rade  ,   el  pla- 
cés sur  les  hauteurs  de  (icerilz,  bar- 
rant le  passade  à  Lauriston  et  à  Ney 
qui  eussent  voulu   atteindre  VVeissen- 
ber^;  avant  liliicher  et  Yoik,  ils  ne  se 
laissèrent  ni  couper  ni  mettre  en  dé- 
route :  la  cavalerie  française,  trop  peu 
nombreuse    et  mal    moulée,    facilita 
beaocoup   leur  lâche.  Les  deux  <^éné- 
raux   atteignirent   ainsi    Ixeichenbach. 
Bientôt   eut  lieu  le  célèbre  armistice 
de   Picisswilz  ,    qui    donna  le   temps 
aux    alliés  de    déterminer    la  défec- 
tion   de    l'Autriche.    C'est    à  Kleist 
que  Frédéric-fiuiilaume  donna  la  mis- 
sion d'aller,  concurremment   avec  le 


56o 


KLE 


russe  Sdiouvalov,  faire  les  cniidilions 
de  l'armistice,  qui  fut  si^iié  le  4  juin 
et  prorogé  jusqu'au  10  août,  A  la  re- 
prise des  hostilités ,  tandis  que  Blil- 
cher  restait  en  Silésle  oîi  bientôt  il 
devait  gagner  la  bataille  de  la  Katz- 
bach,  Kleist  chargé  du  commande- 
ment du  deuxième  corps  d'armée  prus- 
sien, celui  que  naguère  avait  commandé 
Blucher,  traversa  la  Bohême  et  alla 
joindre  la  grande  armée  de  Schwar- 
tzenberg.  Le  26  et  le  27  il  eut  part  à 
la  bataille  de  Dresde  :  s'avançant  de 
Leubnitz  contre  Strehlen  et  Gross- 
Garten,  il  formait  le  centre  qui  seul, 
tandis  que  les  Russes  et  les  Autrichiens 
aux  deux  ailes  étaient  forcés  à  se  re- 
plier, se  maintint  en  position.  Obligé 
enfin  de  suivre  le  mouvement  général, 
Kleist  se  rapprochait  des  montagnes 
de  la  Bohême,  quand  tout  à  coup  ar- 
rive un  ordre  du  roi  de  Prusse  d'aller 
au  secours  d'Ostermann,  qui  se  défen- 
dait héroïquement,  contre  les  trente 
mille  hommes  de  Vandamme  ,  dans  la 
plaine  de  Ruim  (30  août), mais  dont  les 
rangs  considérablement  éclaircis  sem- 
blaient garantir  l'entière  défaite.  Un 
premier  renfort  prussien  venu  1  après- 
midi  ,  puis  une  colonne  autrichienne 
avaient  rétabli  le  combat,  et  la  lutte  se 
poursuivait  avec  fureur,  lorsque  l'ap- 
parition de  Kleist  vint  tout  changer. 
Il  était  arrivé  la  veille  au  soir  à 
Glasliiitte  :  le  roi  l'avait  chargé  de  s'a- 
vancer parle  Geiersberg  ;  mais,  déses- 
pérant de  pouvoir  se  rendre  maître 
assez  tôt  de  ce  passage,  11  se  porta  par 
la  crête  de  la  montagne  vers  xNollen- 
dorf ,  pour  prendre  de  là  les  Français 
à  dos.  .Sa  présence  sur  ce  point  fut 
tomme  un  coup  de  foudre  pour  Van- 
damme. Laissant  une  résoi  ve  pour  oc- 
cuper les  hauteurs  de  Peterswalde,  il 
descendit  avec  la  rapidité  d'un  torrent 
sur  les  Français  déjà  pressés  de  deux 
côtés,  et  qui  se  trouvèrent  alors  cernés 
de  toutes  paris.  Après  avoir  courert  le 


KLE 

champ  de  bataille  de  leurs  morts,  dix 
mille  hommes  tombèrent  aux  mains 
des  vainqueurs,  les  autres  ne  trouvè- 
rent dans  les  forêts  qu'un  refuge  mo- 
mentané ;  toute  rartilleric  fut  prise, 
ainsi  que  les  bagages ,  les  munitions. 
Vandamme  lui-même,  qui  avait  cru  ga- 
gner en  cette  circonstance  le  bâton  de 
maréchal  promis  formellement  par  Na- 
poléon, resta  captif.  Les  journées  de 
la  Katzbach  et  de  Kulm  furent  pour 
l'armée  française  le  commencement 
d'une  série  de  revers  que  désormais 
la  victoire  ne  devait  que  rarement  in- 
terrompre. Kleist  reçut  de  la  main  du 
roi  de  Prusse  ,  pour  première  récom- 
pense, l'ordre  de  l'Algle-Nolr.  Ayant 
suivi  les  mouvements  de  l'armée  alliée 
hors  de  la  Bohême,  il  se  dirigea  sur 
Zwlckau  et  se  trouva  le  11  oct.  à  Bor- 
na. Le  jour  de  la  grande  bataille  de 
Leipzig  (16  oct.),  il  était  à  l'aile  gau- 
che dans  la  direction  de  Grœbern  et  de 
Gossa,  et  marchait  sur  Mark-Kleeberg 
dont  il  s'empara,  et  qu'il  garda  malgré 
les  efforts  réitérés  des  Français.  Il  s'a- 
vança ensuite  contre  le  plateau  élevé  de 
Wachau,  d'où  Napoléon  examinait  les 
mouvements  et  dirigeait  les  opéra- 
tions ;  mais,  malgré  la  persévérance  et 
le  courage  avec  lesquels  les  troupes  ne 
ceùicrenl  de  revenir  à  la  charge  jus- 
qu'à quatre  heures  du  soir,  il  ne  put 
déloger  les  Français  de  cette  forte 
position.  D'énormes  renforts  affluaient 
sans  cesse  des  deux  côtés,  et  bientôt 
les  environs  Immédiats  de  Wachau 
furent  un  des  principaux  théâtres  de 
la  lutte.  Le  corps  de  Kleist  s'était 
battu  sans  interruption  pendant  neuf 
heures  et  conservait  toujours  son  poste 
de  Mark-Kleeberg,  lorsque  enfin  le  gé- 
;!éral  Blanchi  vint  l'appuyer.  Le  sur- 
lendemain (car  on  sait  que  le  17  se 
passa  à  peu  près  dans  l'Inaction),  uni 
sous  les  ordres  de  Barclay  aux  lUisses 
de  Wittgenstein  et  à  un  corps  auxi- 
liaire saxo-pnissien,  .sous  le  grand-duc 


KLE 

(>)n.stantln  et  MiloraJo>ilcli,  il  s'avan- 
ça contre  NN  arliau  ;  (tuis  il  eiii^xtrta  U 
luilciif  tif  Ma\Nilorf  et  se  poita  sur  le 
\illa|;e  ilc  i'iub»t))e)tia.  qui  fut  dru\ 
fois  pris  par  les  PruNsien»  et  deux  foisi 
repris  par  les  Français.  Kiri^l  y 
rprou\a  de  prosses  peiles  ,  mais  celles 
(les  Français  ne  (uient  pas  moindres; 
et,  s'il  ne  put  se  maintenir  dans  le  lia- 
lueau  tant  contesté,  du  moins  sut-il 
inellre  son  artillerie  ,  ses  ba;;aj;e$  à 
f  ou\  ei  l ,  et  contenir  ses  adversaires  dans 
ProbNllie>da.  l'n  assaut  lui  livra  le  len- 
demain ce  malheureux  village  auquel 
les  Français,  p;»ur  prote;;er  leur  re- 
traite, mirent  le  feu  quoiqu'ils  y  eus- 
enl  leurs  bles>cs.  Kleisl  fut  a.s«.ez  gé- 
néreux pour  en  sauver  une  grande 
pattie.  Il  marcha  ensuite  contre  Kr- 
fuit,  dont  il  s'empara  sans  beaucoup 
de  peine  le  10  janvier  IHIV.  Ln 
mois  après,  le  Ci>i  ps  de  RIeist  , 
lies-reduil  par  les  combats  et  les  ma- 
ladies, allait  rejoindre  en  France  l'ar- 
mée de  Silésie  sous  liliicher,  et  dès 
le  7  il  s'était  tiouvé  à  Chalons-sur- 
Marnc.  Dans  celte  dernicie  partie  de 
la  ^ueire,  Kleisl  suivit  pailoul  liliicher 
et  eut  sa  part  de  tous  les  événements. 
Il  assista  aux  échecs  de  Monlinirail, 
de  Chateau-Thierr) ,  qui  punirent  la 
folle  idée  qu'avait  eue  liliicher  de  s'é- 
carter de  la  j;ra!ide  armée  el  d'agir 
séparément.  En  levanche  il  fut  un 
des  principaux  acteurs  à  l'affaire  de 
I^on  (8  mars)  :  c'est  lui  qui  fit,  uni 
au  général  YoiL,  la  charj;e  brillante 
par  laquelle  furent  défaits  le  corps  de 
Marmont  el  la  cavalerie  d'Arri^hi. 
Il  se  sif;nal.i  de  même  aux  combats  de 
la  Feitc-Gaudier,  de  Clave.  puis  à  la 
bataille  de  Paris  (30  mars],  qui  mit 
un  terme  à  la  lutte  de  la  révolution 
française  contre  l'Europe.  Le  roi  de 
Prusse  lui  donna  le  litre  de  comte  de 
Nolicndorf,  lui  assigna  comme  dota- 
tion le  domaine  ro\al  de  Sldlterlin- 
î^enbourg ,    dans    La    principauté    de 

LXVlll. 


KLE 


56i 


llalbersiadt ,  et  lui  conféra  le  :i\iè- 
me  ir^imenl  d'infanterie.  I.^rs  de  la 
visite  que  re  monarque  rendit  en  An- 
jjlelerrc  an  princc-ie;;ent,  Kleist  fut 
de  sa  suite.  Enfin,  après  le  relourdes 
armées  victorieuses,  il  reçut  le  com- 
mandement du  corps  placé  à  demeure 
sur  le  Khin  ,  el  fixa  son  quartier- 
{;énéral  à  Aix-la-(>hapelle.  C'est  U 
au'il  apprit  la  nouvelle  de  l'éva- 
sion de  l>onaparte  ^en  1K|.'»^  Dési- 
gné incontinent  ^éneial  en  chef  de 
i'armre  allemande  du  nord  ainsi  que 
du  deuxième  corps  d'armée  prussien, 
il  hâtait  les  préparatifs  de  départ  lors- 
qu'une lon;;ue  et  douloureuse  maladie 
le  mit  sur  le  bord  du  tombeau,  et  le  ré- 
duisit à  donner  sa  démission.  Uevenu 
à  la  santé,  il  fut  gratifié  par  le  roi  du 
commandement  général  du  quatrième 
corps  prussien  établi  en  Saxe.  Mais 
bientôt  les  habitants  le  virent  avec 
chagrin,  cédant  aux  malaises  phvsi- 
ques,  résultats  de  ses  fati;;iies  et  de  «es 
travaux,  résigner  un  commandement 
dont  lU  s'étaient  bien  trouvés.  Le  mo- 
narque en  acceptant  sa  démission  lui 
assigna  une  pension  et  lui  donna  le 
biton  de  feld-maréchal  (.5  mai  1821), 
le  jour  même  où  mourait  \]onaparte  à 
Sainte- Hélène.  RIeist  ne  survécut  que 
peu  de  temps  à  celui  qu'il  avait  tant 
contribué  à  vaincre  :  il  mourut  ,  le 
17  février  1823,  des  suites  d'une  in- 
flammation du  foie  ,  après  une  courte 
maladie,  à  lierlin  où  il  résidait  avec  sa 
famille.  11  avait  été  nommé  récemment 
conseiller  d'état.  Tous  les  souverains 
de  la  coalition  l'avaieul  décoré  de  leurs 
ordres ,  et  Napoléon  hu>m  lui  avait 
donné  la  croix  de  la  Lcgian-d  Hon- 
neur. Sa  dépouille  mortelle  repose  sous 
la  coupole  de  l'église  de  la  garnison,  à 
Berlin.  Son  buste  en  bronze,  par 
Rauch,  figure  dans  le  jardin  de  Pots- 
dam,  au  milieu  de  ceu.x  des  autres  gé- 
néraux qui  se  sont  fait  un  nom  dans 
les  dernières  guerres.  P — OT. 

36 


KLE 


RLE 


KLEIST  (Henri  de),  poète  al- 
lemand,  non   raoins  célèbre  que  son 
homonyme,  le  brillant  Ewald-Chris- 
tian    {i'oy.    Kleist,  XXI ï  ,  4o8), 
qui,  comme  lui,  servit  la  Prusse  sur  les 
champs  de  bataille ,  i»aquil  en  1776  à 
Francfort-sur-rOiler.  Il  entrait  dans  sa 
dix-sepliènie  année,  lorsqu'il  Bt,  en  qua- 
lité de  cadet,  cette  campagne  des  bords 
du  Uhin  si  remarquable  par  l'inutilité 
des  mouvements  stratégiques  et  les  pro- 
fits que  sut  y  ménager  le  généralissime 
pour  le  cabinet  prussien  et  pour  lui. 
Kleist  sans  doute  ne  comprit  rien  à 
cette  incompréhensible  manière  de  faire 
la  guerre,  manière  qui,  certes,  n'était 
point  celle  du  grand  Frédéric  ;  et  la 
mobilité  fiévreuse  et  fantasque  d'un  ca- 
ractère {dus  enclin  que  de  raison  à  la 
mélancolie  et  au   desenchantement  le 
porta  bientôt  à  abandonner  la  carrière 
militaire.  La  paix  de  Bàle  d'ailleurs 
avait  restreint  le  développement  guer- 
lier  de  la  Prusse.  De  retour  à  Franc- 
fort, Kleist  y  travailla  deux  ans  (1799 
et  1800)   avec  beaucoup  d'assiduité, 
menant  de  front  les  études  littéraires, 
celles  du  droit  et   des  sciences    admi- 
nistratives. Des  relations  de  famille  ne 
tardèrent  point  à  le  faire  recevoir  dans 
\c5  bureaux   du  ministère  des  accises 
tt    du    commerce     à    Berlin  ,    sous 
Slruensée.  Mais  la  régularité  bureau- 
cratique  était    peu    dans  ses    goûts. 
Aussi  fut-il   au  comble  de  ses  vœux 
quand  on  l'envoya  pour  quelques  dé- 
tails, moitié  diplomatiques,  moitié  com- 
merciaux, à  Paris.  Le  principal  point 
de  cette  mission  était  sans  doute  de 
fournir  des  cliifircs    plus    ou    moins 
inexacts  à  l'ambassade  pour  aidera  la 
fixation    de   la  grosse    indemnité   que 
devait  avoir  la  Prusse,   en    compensa- 
tion et  de  ce  qu'elle  cédait  sur  la  rive 
gauche  du    lUiin  et  de  la  force  morale 
que  son    inaction   depuis    179.')   (on 
pourrait  dire  depuis  1792)  avait  don- 
née   à   la   résolution  française.    On 


sait  que  cette  indemnité,  quadruple  au 
moins  pour  la  population  ,  et  sextuple 
pour  le  territoire,  fut,  sous  le  rapport 
du  revenu,  nominalement  quatorze  fois 
et  réellement  de  vingt-deux  à  vingt- 
quatre  fois  égale  à  la  perte.  Kleist 
passa  pour  cela  un  an  entier  à  Paris  ou 
à  Luiiéville,  puis  revint  en  Allemagne 
par  la  Suisse.  Mais,  arrivé  à  Dresde,  il 
eut  le  plaisir  d'y  trouver  l'ordre  de  re- 
tourner dans  la  capitale  de  la  France. 
11  retravtrsa  donc  encore  ce  poétique 
pays  de  Suisse,  dont  la  physionomie 
accidentée  ébranlait  en  lui  toutes  les 
fibres  maladives  et  rêveuses,  et  revint 
pour  aplanir  de  ces  difficultés  finan- 
cières que  rencontre  toujours  l'exécu- 
tion d'un  grand  traité.  Nous  ne  savons 
si  primitivement  ses  sentiments  pour  la 
France  telle  que  l'avaient  faite  la  ré- 
volution française,  puis  Bonaparte, 
étaient  de  l'amour  et  de  l'admiration; 
mais  évidemment  il  n'était  pas  be- 
soin d'avoir  sa  perspicacité,  son  irri- 
tabilité et  son  patriotisme  pour  perdre 
vile  ces  illusions  et  pour  passer  de 
l'affection  à  la  haine.  L'impudente 
ambition,  la  morgue  hautaine,  les  exi- 
geiices  de  plus  en  plus  impérieuses  de 
Napoléon  ,  et  plus  encore  le  mépris 
que  son  gouvernement ,  après  avoir 
leurré  ,  trompé,  deshonoré  et  réduit 
au  rang  de  complice  le  gouverne- 
ment prussien,  laissait  percer,  et  pour 
le  caractère  moral  et  pour  la  valeur 
matérielle  de  cette  puissance,  ne  pou- 
vaient que  blesser  profondement  un  en- 
fant de  la  Prusse,  bien  complètement 
au  courant,  sinon  du  passé,  au  moins 
du  présent.  Faisant  partie  de  l'admi- 
nistration des  finances  et  du  commerce, 
Kleist  surtout  sentait  quel  coup  mor- 
tel devait  porter  à  la  prospérité  prus- 
sienne cet  impitoyable  système  conti- 
nental. 11  ne  quitta  pourtant  Paris 
qu'en  180(),  lorsque  les  mésintelligen- 
ces entre  Napoléon  et  la  cour  de  Ber- 
lin  en  furent  venues  à  ce  point  qu'on 


RLF. 


RLE 


563 


II*  po«Talt  plus  mettre  en  doute  l'im- 
iM  iMiire  d'une  rupture.  Struensée  a\ait 
te  r  de  M\rr,  mais  KKist  n'rri  re- 
litiii\:i  ]n.  tTioiri-.  <a  plare  au  doparte- 
innil  l'.r.  tllaiirs  coinmcrnales  :  il  la 
roiisrr\a  |usqu  à  la  bAlaille  d'Iéiia,  qui 
fut  sîii\ic  vi  proroptempnt  de  l'occupa- 
lion  de  Heiliii  ,  de  la  reddition  ,  de 
Tocrupation  de  tontes  les  pirates  et  de 
loute^lespro\incesoctidentale5.  Kleist 
a\ec  les  lideles  s'était  porté  %crs  Kcr- 
iiij;sl»erp,  mais  il  n'y  retrouva  aucun 
rmploi.  Au  bout  de  quelques  mois  il 
♦•t.iit  de  retour  à  Uorlin  toujours  aux 
fii.iMis  *]>.  VV«i!i.v>  Son  départ  avait 
Hr  rr  Tiii.'  vu  •  i.rhjMC  sorte  comme 
une  dr^^'itiori  ,  l)(u.:ipatle  entendant 
q»ip  ,  (înns  tout  royaume  rcmquis,  les 
fonclionnaiies  reslasseii».  i  leur  poste 
tant  qu'il  ne  leur  ordonnerait  pas,  lui, 
d'en  sortir.  Kmigrer,  c'était  protester 
dtf  sa  lidolité  à  l'ordre  de  choses  de 
truil  ou  près  d'être  détruit  par  la  vic- 
toire, c'était  jeter  une  ombre  d'illégi- 
timité, dr  désapprobation  sur  le  droit 
de  *p:>liation  et  de  conquête,  c'était  se 
constituer  en  hostilité.  Kleist,  à  son 
retour,  fut  donc  saisi  et  dirigé  comme 
prisonnier  de  c^ucne  vers  rinténeur  de 
la  France:  Joux,  Chàlons-sur-Sac^ne 
furent  successivement  ses  prisons.  On 
peut  penser  ce  que  riniqinté  d'un  trai- 
tement si  contraire  au  droit  des  j;ens 
produisit  <ur  son  esprit.  C'est  la  sans 
doute  que  son  patriotisme  prit  le  ca- 
ractère de  l'exahalion,  et  que  cette 
exaltation  devint  de  la  fureur.  La 
paix  de  Tilsitt  le  rendit  à  l'Allema- 
gne; mais  après  a\oir  un  an  durant 
travailléà  Dresde  avec  Adam  Muller, 
son  ami  et  so!i  camarade,  au  PJ'ébus^ 
il  .se  rendit  à  l^a;;ue,  et  se  mit  en  route 
pour  Vienne,  afin  de  prendre  part  à  la 
f;iierrc  de  l'Autrirlie  contre  Napoléon. 
-Mais  c'était  au  moment  de  la  bataille 
de  \\  a^ram  ;  et  la  prompte  paix  de 
Vienne  vint  brusquement  mettre  un 
terme  à  ses  illusions,  et  le  réduire  à  re- 


tourner en  I'iu<>e.  On  peut  s'étonner 
qucle  ;;ou\ernemenl  français  >  ait  souf- 
fert son  retour,  l  n  seul  nom  de  poète 
était  alors  pli;«i  naiional  que  lesien,  c'é- 
tait celui  delliéodure  Ku-rner,  Tvr'.ée 
pernianiqur  ;  mais,  en  peisé\rrant  dans 
ces  appellaiions  antiques  données  à  des 
contemporains,  on  eût  pu  le  nommer, 
lui,  l'Arctinui  du  Nord.  Sa  lltttailin 
trilrrnumn  est  comme  une  Marseil- 
laise dansdcf;';;ante2ques  jToportions  ; 
et  rexa;;ération  tantdt  du  st^le,  tan- 
tôt des  situations,  rimpos*ibiiitc  de 
supposer  auxCîermains  du  <irrle  d'Au- 
çxï-^Xt  les  idées  et  le  ton  que  kleist  leur 
prête,  n'empêchaient  en  rien  toute  la 
jeunesse  alleniar  de  de  relire  et  de  répé- 
ter a\er  la  plus  chaude  admirât  ion  les  ma- 
gnifiques tirades  héroïijries  et  l\riques 
dont  fourmille  ce  f>oème  ,  qui  ^*.u  reste 
ne  fut  publié  en  son  entier  par  Voss 
que  lorsque  Klfist  n'existait  plus.  ï^ 
vie  intime  de  ce  poète  était  bien  celle 
de  l'artiste  excentrique  et  jeune  chez 
qui  la  lave  bouillonne,  encore.  K  me- 
sure qu'il  a\ançaitdans  la  vie,  sa  sen- 
sibilité allait  croissant  et  il  devenait  de 
plus  en  plus  hvpocondre ,  étranger  à  la 
vie  réelle  ;  mécontent  de  l'unixers  et 
de  lui-nicmc ,  malade  d'orj^ueil,  si- 
non coninje  homme,  d'i  moins  comme 
poète,  il  empirait  à  plaisir  sa  position, 
il  envenimait  ses  plaies.  L'nedame  ma- 
ladive, tout  aus>i  impressionnable,  tout 
aussi  hors  du  vrai  que  lui,  avait  quitté 
sa  maison,  son  mari  pour  croire  en  lui, 
pour  vivre  sans  cesse  à  coté  de  lui. 
Celait  M'""  Vof;el,  femme  d'un  né- 
gociant de  Berlin.  Gîtte  amie  (  car  ils 
se  donnaient  le  nom  d'ami)  ne  trouva 
pas-plus  le  bonheur  et  le  calme  près  de 
Kleist  qu'elle  ne  les  lui  fit  connaître. 
Las  enfin  des  amertumes  sans  nombre 
fruits  d'une  liaison  imprudente,  mais  se 
re;^ardant  comme  des  victimes  de  l'in- 
gratitude humaine  et  du  béotisme  des 
formes  s>>ciales,  Kleist  et  son  amie 
quittèrent  la  vie  en  1811  parle  sui- 

36. 


564 


KLE 


cille,  donnant  ainsi  à  la  foule  des  êlres 
médiocres  qui  s'impatientent  et  se  trou- 
vent incompris  un  exemple  trop  fidèle- 
ment suivi.  Nous  ne  justifierons  point 
Kleist,  mais  nous  le  plalndronr-,  el  nous 
ne  dirons  que  la  vérité  en  disant  qu'il 
V  avait  évidemment  chez  lui  tendance  à 
riiallucination,  tendance  exaltée  en- 
rôle par  toutes  les  a;j;itationsde  la  vie, 
et  que  le  contact  de  M'"*^  ^  oj];ei,  et  la 
sévérité  du  moj.Je  en  froissant  sa  Gère 
susceptibilité,  porta  au  plus  haut  degré. 
Nous  regretterons  surtout  que  cette 
prompte  mort  ait  enlevé  à  l'Allemagne 
un  poète  qui  eût  pris  rang  parmi  les 
premiers.  11  y  a  chez  lui  du  Jean- 
vJacques  Rousseau  et  de  l'André  Ché- 
nier,  quoiqu'il  n'ait  pas  tout  le  per- 
suasif du  (iénevois  et  ce  parfum  d'ex- 
quise et  d'intime  poésie  qu'exhalent 
les  vers  du  second.  Mais  la  sensibilité, 
la  chaleur,  caractérisent  tout  ce  qu'il  a 
laissé.  On  respire  chez  lui  une  atmo- 
sphère passionnée,  son  style  a  la  fièvre 
et  la  donne.  A  ces  hautes  qualités  du 
poète  de  premier  ordre,  il  en  joint 
d'autres,  le  grandiose  de  l'idée,  la  har- 
«iiesse  du  plan,  la  lécondité  des  dé- 
tails, la  richesse  de  l'expression,  la 
souplesse  et  la  limpidité  du  vers.  Il 
manque  pourtant  bien  des  choses  à 
Kleist:  grand  poète  lyrique  et  même 
épujue,  il  n  est  poète  drainatifjiio  (jue 
de  nom;  il  ne  sait  pas  vraiment  dialo- 
j;;ucr  ;  ses  personnages  ne  vivent  pas, 
ils  se  meuvent  comme  des  marionnet- 
tes sur  des  lignes  droites  ou  anguleuses 
(jiii  tuent  Tillusion  ;  les  caractères  ou 
sont  manques  ou  manquent  l'effet  :  l'ac- 
tion n'est  pas  conduite  avec  art  :  {)oint 
de  dégradation,  point  de  nuance.  Ces 
défauts  sont  moindres  dans  les  deux 
\ol(imes  de  contes,  notamment  dans 
jMiclicl  Kuhlhaar.  Ses  tragédies,  au 
iiombie  de  cinq,  sont  :  la  Famille 
(le  Srhrojfenstrin,  qui,  malgré  ses  dé- 
fauts, peut  sembler  à  beaucoup  de  lec- 
teurs nn  chef-d'œuvre  ;  Penth^siUe, 


KLE 

écrite  de  verve  el  où  l'on  pressent  déjà 
le  poète  qui  fait  tenir  un  si  énergique 
langage  à  Thusnelda  ;  Kœichp.n 
d' Itcilbronn,  qu'il  Intitula  drame  che- 
valeresque et  où  les  suites  fatales  de  l'a- 
mour, devenant  comme  le  mauvais  gé- 
nie de  l'homme,  irrésistible  et  entraî- 
nant d'abîme  en  abîme,  sont  rendues 
avec  une  effroyable  puissance;  enfin 
le  Prince  de  Hambourg  et  la  Ba- 
taille d'IIei'jîiann,  posthumes  l'une  et 
l'antre,  mais  dont  beaucoup  de  mor- 
ceaux étaient  connus  de  ses  amis. 
Deux  comédies,  Amphitryon  et  la 
Cruche  cassée,  complètent  la  liste  de 
ses  œuvres.  Les  deux  drames  posthu- 
mes ont  été  publiés  par  Tieck  qui  les 
a  fait  précéder  d'un  Discours  préli- 
minaire sur  la  vie  et  les  œuvres 
de  Kleist  (i).  P— ot. 

KLEXAU  (Jean,  baron  de  Ja- 
NOWITZ,  comte  de),  général  autri- 
chien, né  en  Bohême  vers  1760,  de 
l'une  des  plus  anciennes  familles  de  ce 
pays,  entra  fort  jeune  au  service,  et 
fut  officier  d'étal-major  à  la  fin  de  la 
guerre  contre  les  Turcs.  Venu  sur  les 
bords  du  Rhin,  dès  le  commencement 
de  la  guerre  contre  la  France ,  il  y 
servit  d'abord,  sous  le  général  Wurm- 
scr,  et  donna  dans  plusieurs  occasions 
des  preuves  de  valeur  et  d'habileté.  En 
1794,  étant  lieutenant-colonel  de  dra- 
gons, il  fut  chargé  de  commander  sous 
le  général  Latour,  la  ligne  des  avant- 


(i';  Ses  OEuvrex  ont  <I<';  rpuni«;s  et  pul>liëes 
par  Louis  Tieck,  Rcriin,  iSjio,  3  vol.  in-8°.  Ses 
Coiiifi  ont  (■l>'  traduits  «ni  fionrnis  par  M.  Chcr- 
linlio/.,  |)i<'i(d('s  d'une  Vie  de  l'auteur,  i83o, 
i  vol.  iii-i->.  On  peut  lire  ,  sur  ce  poAte,  des 
(iiticles  ••triHliis  (luiis  le  Cnlholiqne  (do  M.  I« 
l)aron  d'Iv  kstiiii),  Uiai  1818,  p.  249-314,  '"t 
dans  le  (iliilie  (a'ors  floctriuaire)  ,  septembic, 
1S28.  — l.a  fririuie  à  laqiutllc  il  s'était  attacha 
r'tait  alteiiii«>  d'un  mal  incnrabli;  :  elle  lui  fit 
jurer  (II-  lui  tlonucr  une  dftriiièfK  marque  d'a- 
piiiiur,  M.llf!  (|u'i.llc  l'exigerait  de  sa  tendresse  : 
«•'était  de  la  tuer.  Dans  un  hois  près  de  .Sans- 
Souci,  Kici."!  accomplit  sou  horrible  promesse, 
el  st*  tua  après.  11  avait  brûle  auparavant,  entre 
autres  manuscrits,  un  journal  ou  il  se  rendait 
compte  de  *<"«  eentiinents,  I-. 


KLE 


KLK 


5ii5 


postes  df\ant  l.i^;;e,  et  :>'y  dcfendit  le 
"27  juillet  ,  avec  le  plus  ;;iAnd  c»»u- 
la^c  ,  centre  un  ennemi  beaucoup 
plu5  nombreux.  Mais,  attaqué  ensuite 
>ur  se*  dertirres  par  les  habitants  (pii 
s'étaient  arme?.,  il  lut  obli;;é  de  se  re- 
tirer. Il  re\int  bienliU  à  la  fhar;;e  , 
pénétra  dans  le  faubourg  dWmer- 
cirur ,  rejeta  les  Français  de  l'autre 
cAté  de  rOurtlie,  et  s'etiipara  du  pont 
et  delà  porte  qu'il  fit  barricader.  Dans 
la  carnpa;;ne  de  17î>.*>,  il  était  sous  les 
ordres  de  Clairfa\t,  lorsque,  par  les 
mouvements  rapides  d'un  corps  de  ca- 
ralerie  qu'il  commandait,  il  garantit 
la  place  d'IIeideiberi;  près  de  tomber 
.111  poiixoir  des  Kranrais.  L'année  sui- 
vante il  passa  à  l'ariiiée  d'Italie,  où  il 
commanda  le  ré;;iment  des  hussards 
de  NN  urmser  a\ec  beaucoup  de  dis- 
tinction. Devenu  premier  aidc-de- 
camp  du  maréchal  de  \\  urmser,  il 
l'accompagna  dans  ses  malheureuses 
tentatives  pour  délivrer  Mantoue,  et 
fut  renfermé  comme  lui  dans  cette 
place.  Kn>o\é  à  Bonaparte  aGn  de 
proposer  la  capitulation,  il  fit  d'inu- 
tiles efforts  pour  en  imposer  à  ce  gé- 
néral sur  l'état  de  la  «garnison  qui  était 
désespéré,  et  fut  oblif;ë  de  consentir 
aux  plus  dures  conditions.  Napoléon 
parle  de  lui  a\ec  élo;;e  dans  se>  Mr- 
ninirrs  de  Sainte-llelène.  Kn  171)9 
klenau  servait  encore  à  l'armée  d'Ita- 
lie comme  {;énéral-major,  cl  il  fui  char- 
gé de  couvrir  le  sièf;e  de  Mantoue,  en- 
trepris par  le  j^énéral  Krav,  en  obser- 
vant avec  six  mille  hommes,  près  de 
Bologne  et  du  fort  l  rbano,  les  mou- 
vements de  Macdonald  qui  revenait 
de  Naples  avec  une  armée.  Apres 
s'être  emparé  de  Kerrare  ^2*2  mai'  , 
le  général  français  l'attaqua  près 
de  San-Giovani.  Klenau  lui  laissa 
passer  le  pont  ,  cl  tombant  sur  les 
colonnes  françaises  ,  avant  qu'elles 
eussent  le  temps  de  se  former,  il  les 
repoussa,  prit  leur  artillerie,  fit  grand 


nombre  de  prisonniers,  et  se  maintint 
pendant  toute  la  journée  dans  sa  posi- 
tion qu'il  ne  quitta  qu'à  la  nuit,  et 
lorsqu'il  apprit  qu'une  dniMon  autri- 
chienne axait  été  battue  près  de  Mo- 
dène.  Après  la  bataille  de  la  l  rebbia, 
il  cerna  le  fort  l'rbano,  et  marcha  sur 
Bologne,  où  il  coupa  la  retraite  au 
général  Hullin,$ur  Florence.  I/entrée 

3u'il  fit  alors  dans  cette  ville,  au  milieu 
es  applaudi^sements  de  la  population, 
fut  une  espèce  de  triomphe.  Il  fut  en- 
suite chargé  de  la  triple  mission  ,  de 
soutenir  la  révolte  des  Aretins  contre 
les  Français  ;  de  poursuivre  l'armée  de 
MacdonabI ,  et  de  se  mettre  en  com- 
munication a\ec  la  flolille  anglaise  qui 
croisait  devant  (iéiies.  Dans  sa  mar- 
che vers  les  cAles,  il  fit  près  de  onze 
cents  prisonniers.  Le  31  juillet,  il 
s'empara  de  Sariane  et  de  quatre  châ- 
teaux-forts  ,  et  poursuivit  l'ennemi 
jusqu'au  golfe  de  la  Spezia.  Comme 
le  corps  q;i'il  commandait  était  très- 
faible,  il  ne  chercha  point  à  s'engager 
dans  les  montagnes,  mais  avant  de  se 
retirer  derrière  la  Stura,  il  attaqua 
le  général  Miollis  et  se  rendit  maître 
deSestri,  de  Uapallo  et  de  Uecco.  Se 
trouvant  ensuite  devant  des  forces  su- 
périeures, il  se  relira  derrière  Sestri 
sur  le  Monte-Braco.  et  commença  le 
blocus  du  fort  de  Sanla-Maria. 
N'avant  point  d'arlillerie,  il  en  fil  ve- 
nir de  Lurra  et  des  diflérenls  forts  de 
la  cAte  avec  des  munilions  :  après 
deux  jours  de  bombardement,  le  fort 
se  rendit  et  les  six  cents  hommes 
qui  l'occupaient  furent  prisonniers. 
Dans  le  mois  de  décembre,  Klenau 
alla<^ua  les  positions  deSori,  Monte- 
G)rnue  etTorriglia,  s'en  empara  mal- 
gré les  difficultés  du  terrain  ,  et  re- 
poussa les  Français  jusque  sous  les 
murs  de  Gènes.  Les  habitants  de  cette 
ville  avaient  promis  que  ,  lorsque  les 
Autrichiens  se  montreraient  devant 
leurs  murs,  toute  la  population  se  sou- 


566 


KLE 


lèverait  coulre  la  garnison  française  ; 
mais  ceflc  promesse  ne  fui  point  exc- 
ciilcc  ,  et  les  Français,  profitant  de 
raflaiblisscincnl  du  corps  de  Iloîien- 
zollcrn  ,  avec  lequel  Klenau  devait 
ap;ir,  tournèrent  la  position  de  ce  der- 
nier pour  le  prendre  à  revers.  Ce  fut 
alors  qu'il  s'ouvrit  un  passage  au  mi- 
lieu des  corps  ennemis  par  une  mar- 
che aussi  habile  que  courageuse. 
Ayant  pris  ses  cantonnements  près  de 
Sarzanc  derrière  la  Magra,  il  fit  occu- 
per Sestri  par  ses  avant-postes.  A 
l'ouverture  de  la  campagne  suivante 
(1800),  il  fut  appelé  à  l'armée  d'Al- 
lemagne, sous  les  ordres  de  Kray. 
Le  18  décembre  11  eut  à  soutenir  un 
combat  très-vif  entre  Nuremberg  et 
Lauf,  contre  le  général  Augereau,  et  il 
le  rejeta  de  l'autre  côté  de  la  Rednitz. 
Nommé  à  cette  époque  feld- maréchal- 
lieutenant,  il  continua  d'être  employé 
à  l'armée  d'Allemagne  et  il  eut  le 
malheur,  en  1805,  de  faire  partie  de 
l'armée  que  commandait  Mack  et  qui 
capitula  si  honteusement  à  Ulm.  Lors- 
que cette  armée  défda  devant  Napo- 
léon, il  en  reçut  des  paroles  de  conso- 
lation fort  honorables.  Dans  la  guerre 
de  1807,  11  commandait  une  division 
en  lîohéme.  Le  jour  de  la  bataille 
d'Aspern  (1809),  il  fut  chargé  avec 
une  partie  de  l'avant-garde  de  pous- 
ser une  reconnaissance  sur  l'ile  de 
Lobau,  oîi  les  Français  avaient  réuni 
de  grandes  forces.  On  voit  dans  le 
bidlelin  de  l'armée  autrichienne  qu'il 
V  donna  de  nouvelles  preuves  de  ta- 
lent et  de  bravoure.  A  Wagram  ,  11 
conduisait  le  sixième  corps  en  rempla- 
cement du  général  Nlller,  qui  était 
tombé  malade.  Ce  corps,  qui  occupait 
d'abord  les  retranchemens  sur  la  rive 
gauche  du  Danube,  prit  ensuite  posi- 
tion sur  les  hauteurs  de  Slammers- 
dorf,  et  fut  destiné  à  attaquer  l'aile 
gauche  des  Français.  Klenau  se  mit 
en  mouvement  à  la  pointe  du  jour,  le 


KLE 

6  juin,  et  il  attaqua  les  Français  dont 
les  masses  d'infanterie  étaient  postées 
près  d'Aspern  et  dans  les  prairies  en- 
tre ce  village  et  Stadelau.  Quand  la 
retraite  générale  fut  ordonnée,  Klenau 
se  retira  en  combattant,  et  passa  la 
nuit  en  bataille  sur  les  hauteurs  de 
Stammersdorf.  Le  jour  suivant ,  11  for- 
ma r arrière-garde.  Arrivé  le  7  à  Korn- 
neubourg,  à  2  heures  de  l'après-midi, 
11  fut  attaqué  par  les  Français  et  ne 
quitta  la  ville  qu'après  s'être  battu 
jusqu'au  soir.  Le  8,  il  se  maintint 
pendant  toute  la  journée  dans  la  posi- 
tion entre  Stokerau  et  Malebern ,  et 
le  9  il  défendit  Tiollabrunn  contre  des 
attaques  impétueuses  qui  durèrent  sans 
interruption  jusqu'à  minuit.  Après  ce 
rude  combat,  les  troupes  de  Klenau, 
affaiblies  et  harassées  de  fatigues,  ren- 
trèrent en  ligne  et  furent  remplacées 
par  le  cinquième  corps.  On  voit,  dans 
le  bulletin  officiel  de  l'armée  autri- 
chienne ,  que  «  le  général  Klenau 
«  avait  rendu  de  grands  services  dans 
«  cette  occasion  par  la  fermeté  avec 
«  laquelle  il  avait  commandé  l'arrlère- 
«  garde,  et  que  S.  A.  L  se  plaisait  à 
«  lui  en  exprimer  toute  sa  satisfac- 
«  tion.  »  En  1813  il  fut  nommé  gé- 
néral de  cavalerie  et  employé  a  l'armée 
de  Bohême ,  où  sa  division,  engagée 
maladroitem.ent  dans  les  montagnes 
près  de  Dresde ,  essuya  un  violent 
échec.  A  la  bataille  de  Leipzig,  il  com- 
mandait les  troupes  autrichiennes  qui 
firent  partie  du  troisième  corps  com- 
posé de  Russes,  de  Prussiens  et  d'Au- 
trichiens, et  qui  fut  chargé  de  l'atta- 
que sur  la  rive  droite  de  la  Plelsse.  Le 
combat  que  cette  colonne  eut  à  soute- 
nir contre  les  troupes  de  Murât  et  de 
Lauriston  fut  le  plus  Important  de 
la  journée,  et  il  est  connu  sous  le  nom 
de  Wachau.  Le  comte  de  Klenau  se 
porta  ensuite  sur  Liberwoltkwitz  où 
Macdonald  et  Mortier  le  forcèrent , 
par  leur  supériorité,  à  faire  un  mou- 


RLE 


567 


\rafnt  rèlTO^âàt  mr  Sjrfriirlslirim. 
lou^  Ici  efforts  ^e  l'fnuraii  pcmr 
s'emparer  ilf  cette  po-nlion  Mnrent 
échuier  devant  la  ré>i5tMice  0|ilnia- 
Ire  de  Klrtiau.  On  si\l  que  la  lutte 
se  termina  le  16  dér.,  s«r  ce  point, 
à  Ta^aniaiic  des  allié».  Il  en  ftit  de 
mrme  le  IS  ,  où  le  IroiMpmc  corps 
IrioffDpha  près  de  /,uLrlliaa.«cn  ,  SweT- 
Nauendorf  et  Sloelteritz.  Aprrs  celle 
^ranile  bataille  des  nations  ,  Klenau 
réélit  loi  die  d'investir  la  ^ille  de 
])re>«le,  ilrlcndue  pai  trente  mille  hom- 
mes sous  les  ordres  de  (îou\ioii-Saint- 
Cvr  ;  et  il  es^uta  d'abord  (|iielqiies 
sorties  de  la  part  du  général  Mouton; 
mais  bientôt  le  naiechal  (fouvion- 
Sainl-Cvr,  épuisé  par  les  maladies  et 
Ir  manque  de  tivre^.  fut  obligé  de  ca- 
pituler sous  la  condition  cpie  la  garni- 
son retournerait  en  France,  et  q<i'rlle 
pourrait  servir  de  nouveau  au  bout  «le 
six  mois.  Celte  convention  était  sans 
doute  fort  convenable  pour  l'armée 
française,  mais  les  souverains  alliés  re- 
fusèrent de  la  ratifier  \  i'oy.  («orvioN, 
lAV,  .')H:i',  et  le  comte  de  Klenau 
retint  la  garnison  prisonnière,  à  peu 
près  aussi  dclovalement  que  les  Espa- 
gnols avaient  retenu  Dupont  à  lîav- 
len.  Il  lui  offrit  toutefois,  par  une  sorte 
de  dérision,  de  rentrer  dans  la  place, 
où  il  savait  bien  alors  qu'elle  ne  pou- 
vait plus  tenir.  Depuis  cette  époque,  le 
comte  Klenau  ne  prit  plus  de  part  à  la 
guerre.  In  peu  plus  tard,  il  fut  nommé 
commandant  de  la  Moravie,  et  il  mou- 
rut dans  ce  poste  honorable  en  ISIO. 
J/empereur  l'avait  nomme  conseiller 
intime,  puis  chambellan,  et  enfin  con- 
seiller de  j^erre  et  de  cour.  H  était 
colonel  titulaire  du  cinquième  régiment 
de  chevau-lt'i;ers,  et  il  avait  été  décoré 
de  la  grand'croix  de  Lcopnhî  et  de 
celle  de  commandeur  de  Marie-Thé- 
rèse. 11  avait  aussi  reçu  des  décorations 
de  la  plupart  des  souverains  de  l'Eu- 
rope. M — DJ- 


peintre  allemand,  naquit  au  riHa^e  de 
kesftel>dorf,  en  Sate,  le  .*>  mai  1751. 
Son  p^re  était  on  simple  fermier  :  hii- 
mème  pendant  sa  jeune^<<e  garda  soti- 
Tenl  les  moulons  :  aussi  les  scènes  de 
la  campagne  se  gravèrent-elles  rneffa- 
çablement  «lans  sa  jeune  imagination  ; 
et  quand  la  fortune,  l'enlevant  à  son 
humble  condition,  l'en!  mis  au  ranj;  des 
artistes  célèbres,  c'est  ji  la  reproduc- 
tion dos  scènes  ch.impètres  qn'il  vona 
son  pinceau.  Son  père,  qai  n'était  point 
ab>-ohimenl  pauvre  et  qui  avait  su  dis- 
tinguer en  lui  d'heiireusfs  dispositions, 
l'avait  placé  .i  domc  ans  dans  une  mai- 
son d'educal  ion  de  Dresde.  l/in«;tilu- 
teur  le  présenta  an  conseiller  Ifage- 
dorn,  alors  directeur  de  l'aradémiedes 
beaux-arts,  et  il  en  obtint  pour  son 
élève  la  permission  de  visiter  l'école 
de  tiessin.  Il  v  fit  des  progrès  rapides; 
et  C.  Mutin,  directeur  de  l'académie,  le 
prit  assez  en  affection  pour  en  faire  sou 
élevé  spécial.  Il  devint  ensuite  celui 
de  l'habile  professeur  Dictrich  qui 
fut  saisi  d'admiration,  en  le  vovant 
à  la  galerie  de  Dresde  copier  vn 
Rembrandt  avec  antanl  de  goût  que 
«le  vigueur.  Jusque  là  klengel  s'était 
surtout  voué  aux  grands  ^^enres,  à  l'his- 
toire, sous  Dietrich  :  il  se  mit  alors 
à  peindre  le  pavsage ,  les  animaux  , 
et  bientôt  il  sembla  s'apercevoir  que 
c'était  sa  vocation.  Il  s'appropria  si 
parfaitement  la  manière  de  son  maître, 
(jtic  souv  ent  les  connaisseurs  ont  confon- 
du ses  tableaux  avec  ceux  de  Dietrich, 
et  que  jdus  d'une  fois  dans  les  ventes  on 
a  payé  les  premierscommcles  seconds. 
Mais  il  ne  se  borna  point  à  ce  mo- 
dèle :  les  belles  t  ni  les  de  Rerghem  , 
de  Potter  étaient  souvent  les  objets  de 
ses  visites  à  la  galerie  de  Dresde,  et 
n>ême,  quand  il  fut  célèbre,  il  ne  re- 
gardait point  comme  au  dessous  de  sa 
dignité  de  les  copier.  Kn  même  temps  il 
s'exerçait  à  peindre  d'après  nature.  I^es 


568 


KLE 


sites  charmants  dont  Dresde  est  envi- 
ronné, fournissaient  assez  matière  à  ses 
pinceaux,  et  l'étude  des^rands  paysa- 
p;istcs  lui  avait  appris  ce  qui  manque  à 
tant  de  peintres,  à  bien  voir  encore 
plus  qu'à  bien  rendre  la  nature.  11  en 
résulta  que  ,  tout  pénétré  qu'il  était 
du  stvle  de  Dielricli  et  des  beautés  de 
Potier  cl  de  Bergliem,  ce  n'est  point 
véritablement  chez  eux ,  c'est  dans  la 
nature  seule  qu'il  puisa  ses  inspira- 
tions, et  que  sa  manière  porte  en  fjé- 
néial  un  cachet  d'originalité  que  n'ont 
pas  toujours  des  maîtres  plus  hardis 
et  qui  se  vantent  de  n'être  qu'eux- 
mêmes.  Klengel ,  pour  arriver  à  ce 
degré  de  talent  ,  eut  besoin  d'une 
persévérance  à  toute  épreuve  :  obligé 
de  se  suffire  à  lui-même,  ne  trafiquant 
point  encore  de  ses  tableaux,  et  déjà 
peut-être  un  peu  jalousé  ,  durant  qua- 
tre ans  il  passa  ses  jours  au  sein  des 
privations.  Enfin  ce  dur  apprentis- 
sage cessa  en  1771,  et  il  obtint  le  di- 
plôme nécessaire  pour  ouvrir  école  à 
son  tour.  11  travailla  pour  les  exposi- 
tions publiques  et  eut  le  bonheur  de 
voir  presque  tous  ses  tableaux  achetés 
avant  les  clôtures.  Il  devint  membre  de 
l'académie,  en  1783,  sur  la  recom- 
mandation d'Hagedorn.  Sa  réputation 
des  lors  était  établie,  et  jusqu'au::  pre- 
mières années  du  XIX'^ siècle  elle  ne  fit 
que  s'accroître,  bien  que  comme  tous 
les  artistes  de  quel(|ue  valeur,  il  ne 
manquât  ni  d'envieux  ni  d'ennemis. 
J/académie  des  arts  de  lierlin  le  nom- 
ma, en  1786,  membre  honoraire.  Qua- 
tre ans  après,  le  roi  de  Saxe  l'envoya 
passer  un  an  en  Italie.  Klengel  avait 
toujouis  passionnément  souhaité  ce 
voyage,  différé  par  des  difficultés  pécu- 
niaires et  plus  encore  par  cette  irrésolu- 
tion à  laquelle  souvent  on  n'échappe 
que  par  la  brusque  impulsion  du  de- 
hors. On  peut  comprendre  avec  com- 
bien d'affectueuse  reconnaissance  et 
de  plaisir,  il  se  mit  en  route  pour 


KLE 

cette  contrée  classique  des  arts  et  des 
antiquités.  Tout  en  visitant  les  su- 
perbes collections  et  les  monuments 
dont  chaque  grande  ville  de  l'Italie 
abonde,  Klengel  par  une  sage  distri- 
bution de  son  temps,  ou  plutôt  par  une 
activité  de  tous  les  moments ,  trouva 
moyen  de  travailler  Immensément  et 
revint  en  Allemagne  avec  d'énormes 
portefeuilles,  bien  garnis  d'études  de  la 
nature  italienne,  et  même  avec  des  ta- 
bleaux. Son  talent  gagna  beaucoup  à 
ce  voyage;  et  nul  doute,  pour  ceux  qui 
suivent  le  développement  du  génie  d'un 
artiste  ,  que  ses  idées  ,  ses  impressions 
d'Italie  n'aient  heureusement  modifié  sa 
manière  purement  germainejusqu'alors. 
S'il  est  vrai  que  ses  tableaux  de  sites 
toscans  et  de  scènes  romaines,  malgré 
leur  mérite  réel,  n'égalent  point  en  vé- 
rité, en  moelleux,  en  harmonie  intime 
et  douce  ceux  qui  représentent  les  scènes 
et  les  sites  de  son  pays,  il  est  certain 
aussi  que  celte  nature  léerique  et  bril- 
lante que  dore  si  délicieusement  le  so- 
leil, et  où  tant  de  variété  se  marie  à 
tant  de  beauté,  se  reflète  en  quelque 
sorte  dans  les  lignes  et  les  nuances  par 
lesquelles  il  rend  les  charmes  plus  ter- 
nes de  la  brumeuse  Allemagne.  A  ces 
travaux  de  paysagiste  ,  Klengel  avait 
encore  joint  jadis  ceux  de  portraitiste; 
mais  ne  consentant  jamais  à  faire  moins 
que  le  portrait  en  pied,  il  y  renonça 
complètement  dans  ses  dernières  an- 
nées. La  multiplicité  de  ses  occupations 
à  partir  de  1800  lui  rendait  inutile  ce 
moyen  dégrossir  son  revenu.  Il  avait 
été  nommé  professeur  à  l'académie  des 
beaux-arts,  fonctions  laborieuses  qu'il 
remplit  assidûment  sans  titulariat 
jusqu'en  1815;  et  en  qualité  de  titu- 
laire jusqu'à  sa  mort  ,  le  19  déc. 
1824.  Klengel  était  un  excellent  dé- 
monstrateur ;  et  comme  à  la  théorie  ■ 
il  joignait  sans  cesse  l'exemple  ,  on  ne  f 
s'étonnera  pas  qu'il  ait  formé  beaucoup 
d'élèves  remarquables.   C'est  sous  lui 


MX 

quf  les  MfnrLf ,  Ifs  Sfamm  ,  1rs 
\\  fhlf ,  lf>  Hcirhfl,  les  Fabcr,  s'i- 
nilirreiit  aux  |»rliifi|)r<i  de  l'art,  et  c'e>l 
à  lui  niif  b  Saxe  iloil  l'Iioiineur  il'rtre 
re;;arilrf  rDinmc  la  pirmicrf  école  »le 
rAllrma;:iir  pour  Ip  j»a^«-a.,e.  KluJicr 
et  to|iifr  1rs  inodèlrs,  m  |p.%éiuiliaiit  et 
Ifs  r(t|»iaiit  apprendre  a  voir  la  nature, 
telle  elait  la  liase  de  son  enNei^nement. 
Kuss\  s\le\ail-il  de  loules  ses  force* 
contre  la  prétention  des  modernes  de 
peindre  d'aprè«  leurs  seules  inspira- 
tions, ou  même  d'après  nature,  (^elleop- 
pasition  aux  mcllio.les  nouvelles  déj;é- 
nérait  piifois  en  hoiilades  et  en  debla- 
térations  fort  hyperboliques.  I^  fond 
des  choses,  c'est  qu'à  la  con\iction  du 
dan';ei  et  de  l'insuffisance  des  expé- 
dili%es  doctrines  de  l'art  par  inspira- 
tion et  sans  élude,  se  joif;nait  lacile- 
It  le  regret  de  sentir  qu'il  était 
,  que  du  premier  ran«;  il  re- 
tombait au  second  ,  qu'on  osait  dé- 
sormais accueillir  a\ec  froideur  ,  non 
seulement  le:i  ouvrages  de  la  vieillesse 
du  peintre  ,  mais  ceux  de  l'époque 
brillante  de  sa  vie.  Il  ne  recevait  donc 
pas  avec  aménité  les  jeunes  ^ens  qui 
s'adressaient  à  lui ,  et  .m  parfois  il  té- 
moignait de  la  bonté  à  ceux  qui  Vé- 
coutaient  comme  une  voix  dernière 
d'un  svstème  qui  s'en  va  ,  d'un  siè- 
cle qui  s'éteint,  le  plus  souvent  son 
abord  découra;;eait  les  adolescents. 
Ce  qui  surtout  lui  donnait  cette  ré- 
putation ,  c'est  qu'il  ne  pouvait  se 
décider  à  peindre  devant  témoin  ; 
cet  effet  d'ime  timiilitc  qu'il  ne  pou- 
vait vaincre  était  attribué  ,  par  ceux 
3 ni  le  connaissaient  peu  ,  à  la  crainte 
e  laisser  pénétrer  le  secret  de  sa  ma- 
nière ,  frayeur  puérile  et  qui  jamais 
n'entra  dans  «a  tète.  Klcn<;el  i^ravait 
habilement,  et  c'est  en  partie  à  l'habi- 
tude qu'il  avait  prise  de  ;;ravcr  sou- 
vent qu'est  due  la  fermeté  de  son  pin- 
ceau. Sa  composition  en  général  est 
s^e  plu.>  qu'ingénieuse  ,  son  dessin  est 


KLE  569 

correct  ,  son  coloris  bien  entendu, 
parfois  magique,  surtout  s'il  s'agit  de 
dégrader  des  nuances,  de  peindre  des 
ciels  en  second  plan  ou  des  lointains  : 
il  excelle  par  iirulierement  à  icndre  les 
eaux  et  les  feuillages.  Son  (envte  n'a 
point  été  recueilli  ,  et  probablement 
ne  saurait  l'être.  I.a  majeure  partie 
de  ses  tableaux  à  l'huile  ,  de  grande 
dimension  ,  ornent  les  châteaux  en 
lU>sie  ou  en  l*olo;;ue  :  le  prince  de 
llaratinsli  surtout  en  possède  de  fort 
beaux.  Quelques  autres  ont  été  acquis 
par  les  rois  de  Ba>ière  (la  Hnol/r  du 
fromrnt^  iH'i.'J;  et  un  paysage  Un- 
lirn  au  rrrpusrulr,  \H'2'y\  par  le  roi 
de  Saxe  (.//WA;/i  gn niant  1rs  Ihrufs 
(f  hlmètr  ,  srrne  de  rrèpusi  nie  , 
1H*J.'»  ,  par  le  duc  Auguste  de  SaxeCio- 
\\\^  {\  Krole  de  village.  ISI'J).  Nous 
remarquerons  encore  sa  t  iirèt,  sa  ('es- 
rade  au  luucher  du  soleil,  et  parmi 
les  d(»uze  ou  quinie  belles  loile.^  ori- 
ginales qu'il  laissa  en  mourant,  indé- 
pendanimeiit  de  quelques  copies  do 
llerghem  ,  V Entrée  du  huis.  \  Idylle ^ 
ou  la  Jeune  Iniigneuse  ,  la  Tent' 
pète  (  ou  l'on  voit  au  loin  des  bran- 
ches de  grands  arbres  pliées  par  l'ou- 
ragan et  deux  bergers  qui  fuient 
épouvantés),  le  Sarcophage  (scène 
italienne  où  l'œil  erre  sur  un  groupe  de 
cvprès,  sur  des  temples,  sur  des  rui- 
nes ,  sur  une  chute  d'eau  et  sur  des 
figures  de  baigneurs),  un  autre  déli- 
cieux Paysage  d'Italie. où  .sont  réunis 
collines,  vallées,  arbres  verdoyants  et 
arides  rochers,  mer  et  courber  du  so- 
leil, le  tout  animé  par  des  bergers  et 
letn s  troupeaux  ;  entiii,  un  (>lair  de 
lime,  avec  de  fortes  masses  d'arbres  et 
un  temple  de  Minerve.  Outre  ces  tra- 
vaux majeurs,  Klengel  n'a  cessé  de  don- 
ner de  charmantes  pages  in-fol.  ou 
in-i",  qui  ont  tic  gravées  les  unes 
à  part,  les  autres  en  recueil,  et  quantité 
de  vignettes  pour  les  publications  de 
Gerlach  à  partir  de  1780.   Parmi  les 


O'JO 


KLE 


recueils  de  f];ra\ures,  nous  indiquerons 
ses  (Kiwres  griwècs  à  Veau- forte  , 
Dresde,  1800,  80  feuilles,  petit  in-fol. 
(il  n'en  a  clé  tiré  que  25  exemplai- 
res au  plus).  Ces  80  feuilles  contien- 
nent 132  sujets.  Parmi  les  estampes 
isolées  ou  qui  se  vendent  deux  à  deux, 
\ Auberge ,  la  Scène  de  camp  à 
Dresde ,  Y  Incendie  nocturne  mé- 
ritent une  mention.  P — ot. 

KLETTE?^  (George-Ernest 
de),  né  le  13  avril  1759,  à  Kitzinf];en 
(évêché  de  Wiirtzboiirg),  et  mort  à 
Vienne  le  22  déc.  1827,  avait  été  mé- 
decin en  cViel  de  l'armée  suédoise  pen- 
dant la  fameuse  campagne  de  Finlande 
sous  Gustave  II T,  puis  avait  rempli  les 
chaires  académiques  à  Greifswald 
(1794-1806),à  Wittenberg,  à  Hal- 
le ;  enfin,  ayant  donné  sa  démission 
(1816),  il  était  venu  achever  paisi- 
blement ses  jours  à  Vienne  On  lui 
doit  :  I.  Gazette  mensuelle  médicale 
de  Vienne  (Wiener,  medizin.  Mo- 
natschr.),  1789,  4  vol.  II.  Essai 
d'une  histoire  de  la  propension  des 
femmes  à  augmenter  leur  beauté^ 
1792.  III.  Idées  critiques  sur  cette 
question  :  Quelle  est  la  manière  d'ex- 
poser la  médecine  pratique  qui  va  le 
mieux  au  but?  1798.  IV.  Mémoire 
pour  la  criti/jue  des  opinions  ré- 
cemment proclamées  en  médecine, 
1801.  V,  Divers  opuscules  tels  que: 
1  ''  Oratio  de  ingénia  medici,  1797  ; 
2^^  De  constitutione  morborum 
alrabilaria  seri  autumni  propria  y 
1<S06  ;  3"  De  perversa  in  reb.  me- 
dicis  inquirendis  et  explicandis  phi" 
losopliandi  ratione,  1 807  ;  4"  De 
inepta  remediorum  débilitant,  de- 
nominatione,  1S07  ;5''  De  constitut. 
morborum  neroosa  ,  1 8 1 0-1 2  ;  6" 
De  varia  malignitatis  ratione  in 
Jebre  scarlat.^  1811;  T'  De  mo- 
derando  aqu<z  frigidœ  usu  externo 
in  dio.  morbis  curand.  V  I.  Une  édit. 
ailem.  da  Lexique d«  Biaacard.      Zr. 


KLE 

KLEUKER  (Jean-Frédéric), 
mythologue  allemand,  naquit  eu  \l\^y 
à  Oslerodc  près  du  Harz  ,  remplit 
long-temps  les  fonctions  de  prorecleur 
au  gymnase  de  Lemgo,  devint  en- 
suite recteur  de  Fécole  des  savants  à 
Osnabriick  (1791^,  et  sept  ans  après 
obtint  la  chaire  de  théologie  à  l'uni- 
versité de  Kiel,  où  s'écoulèrent  ses 
ving;t-neuf  dernières  années.  Kleuker 
mourut  le  l^'^juin  1827,  la  même  an- 
née que  Rode,  celui  de  tous  les  alle- 
mands avec  Kleuker  qui  a  le  mieux 
mérité  de  la  religion  de  Zoroastre. 
Nous  diviserons  les  ouvrages  de  Kleu- 
ker en  cinq  catégories  d'après  les  su- 
jets qu'ils  traitent.  I.  Sur  les  religions 
étrangères  au  christianisme  :  1"  le 
Zend-Avesta,  ou  la  Parole  vioante 
de  Zoroastre,  1776;  2^  édition, 
1786,  3  vol.  in-4°  (c'est  une  traduc- 
tion pure  et  simple  du  Zend-Avcsla 
d'Anquetil,  lequel  avait  été  traduit  sur 
les  textes  zend,  pehlvi  et  parsi  que  pos- 
sèdent les  Guèbres,  mais  qui  n'avait  pu 
être  ni  précédée  d'une  récension  criti- 
que du  texte,  ni  complètement  irré- 
prochable comme  version)  ;  2"  Appen- 
dice au  Zend-Ai)esta,\7S\  et  1783, 
2  vol.  in-i",  dont  l'un  en  2  part,  et 
l'autre  en  3  (cet  appendice,  qui  forme 
un  tout  complet  avec  le  Zend-Avesta 
même,  se  compose  en  grande  partie  de 
mémoires  d'Anquetil,  de  l'abbé  Fou- 
cher  ,  etc.,  dispersés  dans  le  recueil 
de  l'académie  des  inscriptions  et  dans 
le  Journal  des  savants,  plus  des  té- 
moignages des  Grecs  et  des  Romains 
sur  la  religion  des  anciens  Perses)  ; 
3"  le  Zend-Aoesta  en  petit  ;  4"  une 
traduction  de  la  Relation  historique 
meroeillcuse  de  CJIindousfan  et  du 
Bengale  d'IIoUvcIl,  avec  un  Traité 
sur  la  philosophie  des  Hindous, 
1778;  5'^  le  Système  religieux 
brahmanique,  1797;  6"  Genius  e 
srriptonmi  antiquit.  rnonumentis 
haurientUis,  1776.  11.  Sur  le  chfis- 


tiaiii^me:  i"  Jrttn,  Pirrrr  rt  Piiui 
»  onsiiJerts  cuminr  amwnçunf  ie 
(Jirist,  1785;  '1'  jSuUi'ri  r.nifiirn  rt 
nUtinissrmrnt  des  priiu  Ijnilrs fjreu- 
sfts  dr  la  V  ritr  du  t  Jiri^iùiniinir  rt 
dr  ht  rrv>r/u/iun,  1 7S7 - D  l ,  J  \o\.  ; 
3"  Di'st  usxion  ilrtuillrr  drs  fonde- 
tnrnts  dr  Cauthrnticitr  rt  dr  la  rrr- 
diiilitr  drs  sounrs  ri ritrs  du  ihris- 
tianisfnr,  179.'»,  Il  vol.  ;  V"  l^ttrr  à 
i/nr   arnir   rhrrtirwir  sur  fitux'ra^e 

l'Urrdrr  intitulr  <lii  Ktls  de  Dieu  , 
iSO-i;."»'  l)is%.  dr  Jrsu  Christi  srr- 

itii>rh  hominum  rci  Usùt  rt  ecclr- 
>iis;  <r'  Prnsrrs  sur  Crtat  dr  /*<•- 
glisr  èvHingrlitfur  rt  sitr  1rs  hihlrs 
ihrrtirnnrs.  III.  Kxé^è^e  et  trailuc- 
lioiis  bibliques:  1"  Ecrits  dr  Sulo- 
mon,  1777,  1780  et  1786,  M  part. 
en  2  vol.  ;  2"  llumnwntatiu  dr  iirxu 
ifutilis  intrr  uirunufur  fa  dus  pro^thr- 
lùn  ad  Prlri  I  rp.,  I,  :>  ,  10,  12, 
17*^*-;  X^  drs  .tpui  ryphrsdu  ^uu- 

rau-irstamrnt,  17î>S;  X'^  de  Co- 
ri^inr  rt  du  l/ut  drs  itttrrs  drs  afuj- 
trrs  suû'ant  1rs  auteurs  riLi-mrmrs^ 
1791)  ;  '>"  de  Furiginr  dr  C .ipina- 
lypsrdr  saint  Jran,  1800.  IV.  Pl.i- 
lo>upliie  et  tliéolo^ie  lationiteile  :  1" 
Lrttrrs  sur  1rs  miracles^  1781; 
'1'  instrui  tiun  sur  la  tulrranrr,  la 
raisim,  la  rr^^rlatiuii^  Li  thruJogie, 
Ir  passi/fir  dr  Itt  mer  IlcMf^r  ei  la 
rrsurrrrtitin  ilu  Christ ^  1778;  3'^ 
de  la  naturr  et  dr  furigine  dr  la 
iliu  trinr  dr  rrinanation  dans  la  Ca- 
halr.  17S6  ^ouvra^c  couronnée;  \° 
drs  Oui  rt  ^un  dr  la  thrulugir  bi- 
Idique  chrétienne  rt  de  la  thcolugie 
rationnelle,  \S\9. y .  Opuscules,  coni- 
pilalions  ou  articles  de  recueils  pcrio- 
iliques,  par  exemple  :  l*'  Chrrstoma- 
thia  ital.,  1787,  '2  vol.,  et  un  Dic- 
tionnaire pour  les  lecteurs  de  la  Chres- 
tomatliie;  2"  cinq  volumes  de  traduc- 
tion de  Platon,  1778-92,  plus  la 
traduction  de  la  liépuhli^/ue  i\u  nx-me, 
1805;  'S"  des  remarques  et  additions 


KLl 


57. 


pour  b  traduction  par  FicL  de  l'/Z/j- 
tuire  drs  antitfuitrsy  îles  arts  rt  drs 
sciences  de  r Asie,  par  W'ill.  Jones; 
V'  la  prëfacr  de  Vllistuirr  dr  .Irsus 
iPapers  saint  Mathiru,  par  \N  itzcn- 
niann,  etc.,  etc.  /, 

KLiyiBEUr.  (Charles  de), 
liomroe  d'état  et  savant  suédois,  naquit 
le  9  nov.  17(17,  à  (iellle  ,  où  son 
pèfe  élait  fabricant.  A)ant  aciievéses 
éludes  à  I  iiniverMtéd'Upsal,  il  sc  ren- 
dit à  SlocLliolin  pour  V  sui\re  la  car- 
rière civile.  11  entra,  en  1788,  an  col- 
lège du  commerce  où  il  obtint,  en 
1802,  b  place  de  greffier  et,  six  ans 
après,  celle  d'assesseur.  I^s  talents  et 
le  lèle  qu'il  v  déploNa  lui  méritèrent  la 
confiance  du  roi,  qui  le  chargea,  en 
1817,  du  portefeuille  des  Gnanres  et 
du  commerce.  A  l.i  tète  de  cette  vaste 
administration,  kiintber^  rendit  les 
services  les  plus  ;;rands  au  commerce 
et  à  l'industrie  ;  et  les  améliorations 
qu*il  introduisit  dans  son  ministère 
portent  l'empreinte  de  son  amour 
pour  la  prospérité  publique.  I<a  même 
année  le  vit  décorer  de  l'Ktoile-l'o- 
laire,  et  trois  ans  après  il  fut  anobli. 
I.^  mort  d'Edoîcrantz  avant  laissé  va- 
cante la  présidence  du  collège  du  com- 
met ce  en  1S21 ,  les  re^^ards  sc  ûxèrent 
sur  riiomme  e\péiir»ienté  qui  a\ait  dé- 
plové  dans  tous  ses  rappoits  au  roi  le 
;;éi»ie  d'un  homme  d'état  consomme,  et 
kliiitberf;  fut  nomme  président  du 
collèf;e  où  trente-trois  ans  auparavant 
il  était  venu  commencer  sa  carrière. 
11  serait  trop  lon^  d'énuraéicr  les 
comités  dont  il  fit  partie.  Les  prin- 
cipaux furent  l'administration  des  doua- 
ne:*, et  le  bureau  d'assurance  contre 
l'inrendie.  Il  avait  été  nommé  ,  en 
ISl.'V,  membre  de  l'académie  des  scien- 
ces de  Stockliolm,  et  deux  ans  après 
élu  président  de  celte  société.  Il  pro- 
nonça en  quittant  le  fauteuil  un  discours 
sur  les  principaux  cïmngements 
des  droits   des  ports  de  la  Suède^ 


572  KLU 

tonrJianl  les  vaisseaux  de  l'état  et 
irux  de  T étranger, depuis  les  temps 
les  plus  reculés  de  la  monarcliic 
jusqu'à  nos  jours  y  où  il  déploya  ses 
vasles  connaissances.  Jouissant  d'une 
bonne  santé,  Klintberg  ne  se  croyait 
pas  si  près  de  sa  fin.  Comme  il  revenait 
de  sa  maison  de  campagne  le  1 5  juillet 
1 826,  pour  se  rendre  à  Stockholm,  les 
chevaux  prirent  le  mors  aux  dents,  en- 
traînèrent la  voiture  et  causèrent  la 
mort  du  président.  B — L — m. 

KLUJIER  (JosEPii-Louis) ,  pu- 
hliciste  allemand,  né  en  1762,  à 
Tliann  {);  es  Fulde,  s'adonna  de  bonne 
heure  à  l'élude  du  droit  administra- 
tif, et  dès  l'année  1786  occupait 
nne  chaire  de  jurisprudence  à  Erlan- 
gen.  En  1804,  il  fut  appelé  com- 
me référendaire  particulier  à  Carls- 
ruhe  qu'il  quitta  trois  ans  après  pour 
aller  enseif^ner  le  droit  à  l'université 
de  Heidelberg.  En  1808  ,  il  fut  nom- 
mé conseiller  d'état  et  conseiller  inti- 
me à  Carisruhe.  11  a  publié  sur  le 
droit  public  des  ouvrages  qui  lui  ont 
fait  une  grande  réputation  :  I.  Précis 
des  Jonctions  de  référendaire^  Er- 
Jangen ,  1808.  II.  Instruction  sur 
lu  cryptographie,  ibid.,  1808.  IIÏ. 
Organisation  des  postes  telle  quelle 
existe  et  telle  quelle  devrait  être, 
ibid.,  1811.  Il  obtint  de  sa  cour 
la  permission  de  1  érider  à  Vienne  pen- 
dant toute  la  durée  du  congrès  qui  se 
tint  dans  cette  ville  j  cl  là  il  trouva 
l'occasion  de  réunir  pour  l'histoire  de 
cette  époque  de  riches  et  précieux  ma- 
tériaux qu'il  fit  paraître  sous  le  titre 
de  :  W.  Actes  du  congrès  de  Vienne 
pendant  les  années  181i  et  181.J, 
Erlangen,  1815  à  1819,8  vol.  Il 
donna  en<;uite  une  édition  séparée  des 
deux  actes  les  plus  importants  sous  ce 
titre  :  Acte  final  du  congres  de 
Vienne  et  acte  de  la  confédération 
germanique,  Erlangen,  1810;  2^ 
édit,,  1818.   Cette  édition  se  distin- 


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gue  par  l'exactitude  rigoureuse  du 
texte  et  par  les  notes  critiques  qui 
l'accompagnent.  En  raison  de  ses  con- 
naissances profondes  et  variées,  et  de 
sa  présence  comme  témoin  à  la  rédac- 
tion du  nouveau  système  fédératif , 
Kliiber  fut  choisi  pour  présenter  dog- 
matiquement le  droit  fédératif,  et  c'est 
ce  qu'il  fit  dans  un  ouvrage  intitulé  : 
V .  Droit  public  de  la  confédération 
germanique  et  des  états  fédérés  , 
Francfort,  1817;  3"  édit.,  1831.11 
publia  encore  :  VI.  Recueil  de  pièces 
originales  sur  le  droit  public  de  la 
confédération  germanique,  3^  édit., 
Erlangen,  1830.  En  même  temps  il 
traitait  le  droit  public  européen  dans 
son  Droit  des  gens  moderne  de  V Eu- 
rope, Stuttgard,  1819,  2  vol.:  d'a- 
bord en  français,  puis  en  1821,  en 
allemand.  Depuis  1814,  Kliiber  avait 
reçu  de  pressantes  sollicitations  pour 
entier  au  service  de  Prusse.  Il  s'y  dé- 
termina en  1817,  et  fut  aussitôt  nom- 
mé conseiller  d'ambassade.  Harden- 
berg,  dont  il  avait  éprouvé  de  tout 
temps  les  bonnes  grâces  et  la  vive 
amitié,  était  chancelier.  Dès  lors  sa 
vie  devint  toute  politique.  Mais  à  peine 
avait-il  donné  la  seconde  édition  de 
son  Droit  public  de  la  confédéra- 
tion germanique  (1822)  ,  que  cet 
ouvrage  le  fit  accuser  d'hérésie  po- 
litique. Une  instruction  fut  même  di- 
rigée contre  lui  après  la  mort  de 
Hardenberg  ,  ce  qui  le  décida  ,  en 
1823,  à  quitter  le  service  de  la  Prusse. 
Dans  les  dernières  années  de  sa  vie, 
il  a  publié  divers  traités  sur  l'histoire, 
sur  les  sciences  administratives  et  ju- 
diciaires, qui  ont  Jeté  un  grand  jour 
sur  des  points  de  droit  intéressants. 
Kliiber  est  mort  en  1840.  D — i) — r,. 
KLl'GE  (ChrétienTiikophile), 
prédicateur  et  orientaliste  allemand,  né 
le  6  août  1742,  à  Wittenberg,  où  son 
père  était  archidiacre  ,  finit  ses  études 
et  prit    ses   degrés  à  l'université    de 


KLU 

ffllf  villf .  Hacliflifr  fn  lhéolo»;if  en 
17GH  ,  diacrf  rti  1770,  il  rfni(»lii 
quatre  ans  durant,  à  titre  extraordl- 
iiairr,  unecli.tirc  j  Scljulj»((»rta  (1771- 
177'>\  pni^  fui  apprio  à  Meii  en 
comme  piofeiieur  d'Iubreu  à  l'érolc 
proMnriale  et  eomme  pasteur  à  l'o^Iise 
•l*"  Sainte-.VnVe  ,  fonctions  dont  il 
acquitta  pendant  près  d'un  demi- 
Mecle  avec  autant  de  surcc-i  ([uc  de 
zèle,  mais  qui  mallieiiiriisement  ne  lui 
laissèrent  que  peu  de  loisir  pour  écrire. 
(Cependant  à  l'étude  approfondie  de* 
lant;tie«  orientales  ,  il  joignait  des 
connaissances  numismaîiques  tres->a$- 
les  et  tarifes  qui  l'eussent  mis  à  même 
d'enrichir  la  pliiloIo;;ie  sacrée  ou  pro- 
fane de  tra\au\  précieux.  Ses  fils  du 
moins  pioGtèrent  de  cette  science,  en- 
fouie dans  le  professorat  ou  la  prédi- 
cation ,  et  un  d'eux  ,  orientaliste  et 
;;éooraphe  distin;;ué,  nous  a  dédomma- 
j;és  de  cette  perte,  klu^e  était  devenu 
surintendant  à  /jlin;  mais  ne  pouvant, 
à  cau^e  de  son  à^e,  en  faire  marcher 
les  fondions  avec  ses  autres  occupa- 
tions, il  donna  sa  démission  de  la  surin- 
tendance en  lS()r>.  Seize  .iris  après, 
dans  sa  quatrc-vinoiièmc  année  ,  il 
ithtint  sa  retraite  en  f;ardant  se;;  émolu- 
ments (1821  \  qui  ne  lui  furent  pas 
loiii;- temps  pa>és.  Il  mourut  le  1:2  avril 
IS-Ji.  L'académie  de\N  ittenberj;,  lors 
de  son  jiihilé  en  1802,  ra\ait  gratifié 
du  diplôme  de  docteur  en  théolof;ie. 
On  a  de  lui  deux  dissertations:  l'une 
Dr  EUgantiu  illrtionis  poetirœ  in 
mrmhris  Jiumanis  efferlimm  loropo- 
sitis,  Wittenberf; ,  17G6-G7,  in-V"; 
l'autre  Je  lerbis  Pauli  ad  Ehr.^ 
11,  2,  ô  <^i'  à'^iAwv  >.x).Y.^-'.;  >.'>:;,  etc., 
iid  legem  si  nui  tira  m,  quatn  dirurit 
angelonim  rni/iistrrio  latam  ,  uiale 
rrcun//is,  adj.  varia  S.  S.  luca  iii- 
terprelandi  tcntaminr,  ^^  itlenberf;, 
1802;  plus  une  demi-douzaine  de  Ser- 
mons imprimés  séparément  en  1775, 
77.79,  80  et  81.  /. 


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673 


KLIIGEL  ((iEORGFS-SiM(i\), 
professeur  de  mathématiques  et  de 
physique  à  Halle,  et  membre  de  plu- 
sieurs académies,  né  à  Hambourg,  le 
19  août  17;J9,  commcnra  se*  éludes 
dans  celte  ville.  11  avait  il'abord  le 
[•rojet  d'étudier  la  théolof;ie,  mais  une 
vocation  toute  particulière  et  la  con- 
naissance qu'il  fit  de  l>usc)i  l'attirèrent 
rers  les  mathématiques,  l'ours'v  livrer 
a\ec  plus  de  succès,  il  se  rendit  à  l'u- 
nivor-ité  de  (jirtlin{;uc.  Knsuite  il 
passa  deuK  ans  en  Hanovre  où  il  publia 
son  Magasin  tir  Utirios're.  Vm  17CG, 
il  fut  appelé  à  llclmsladl  comme  pro- 
fesseur ordinaire  de  mathématiques. 
Kri  1788,  il  suivit  Karsten  i  Mille,  où 
il  mourut  le  V  août  1812.  N  oici  les 
plus  remarquables  de  ses  écrits:  I.  En- 
tyc/uftrdir,  ou  Altrègé  de  toutes  les 
connaissances  usuelles  (G  vol.,  3* 
ëdit.,  Berlin,  180G),  ouvrage  conti- 
nué par  Stein  [7*^  vol.,  lîerlin,  1816). 
1 1 .  l'ri.K  iprs  d'astronomie  (5"  édit . , 
1819).  III.  Connaissantes  ration- 
nelles usuelles  (2*  édit.,  Leipzig, 
1791  :  ouvrage  fait  en  commMii  avec 
SCS  collè^jucs  \N  elthusen  ,  llcnLe  , 
Bruns  et  Crell).  IV.  Dictionnaire  Je 
mallirmatiifues  (3  vol.  ,  Lcipzi;;  , 
1803-1808),  continue  par  MolKeidc 
[K  vol.,  Leipzig,  1813;,  mais  non 
achc\é.  D — n  — n. 

kLUPFEL  (EMMANUEL-Cuni.- 
tophe),  ministre  protestant,  né  dans 
le  duché  de  Saxe-Gotha,  était  déjà  pas- 
teur lorsqu'il  accompagna  le  Gis  du 
duc  Frédéric  III  de  Saxetiotha,  daii.s 
un  voyage  en  Allemagne  et  en  France. 
Pendant  son  séjour  à  Paris  ,  il  de- 
vint l'ami  de  (irinim,  et  par  lui  il 
connut  J.-J.  Rousseau.  Les  trois  amis 
se  trouvèrent  souvent  ensemble,  et 
ne  passèrent  pas  toujours  leur  temps 
d'une  manière  édifiante  ,  à  en  jugfr 
par  une  partie  de  plaisir  dont  Jean- 
Jacques  raconte  tous  les  délails  dans 
ses  G)nfe.ssions.   De  retour   dans    sa 


574 


RLU 


patrie,  et  ayant  remis  son  élève  en- 
tre les  mains  de  ses  parents,  Kluj;- 
fel  reprit  ses  fonctions  ecclésiasti- 
ques ;  et  il  fut  membre,  puis  vlce-prcsi- 
dent  du  consistoire  protestant  du  du- 
ché de  Gotha.  Un  autre  f^ouverneur 
des  jeunes  princes,  Guillaume  de  Ixot- 
berf^,  venait  également  de  terminer  l'é- 
ducalion  de  son  élève,  et  il  était  entré 
dans  la  carrière  administrative,  oii  il 
occupa  les  premières  places,  telles  que 
celles  de  ministre  d'état  et  de  prési- 
dent de  la  chambre  ducale.  Celui-ci 
essaya,  en  1763,  une  imitation  des 
Eirennes  mignonnes  sous  le  titre 
à' Almanach  nécessaire,  qui  ressem- 
blait plutôt  à  la  spéculation  d'un  pa- 
petier qu'à  l'ouvrage  d'un  littérateur. 
Pour  l'année  suivante  il  s'associa  Kl'iip- 
fel  ;  et  ce  dernier,  sachant  écrire  en 
français,  se  chargea  de  la  rédaction. 
Alors  l'entreprise  devint  plus  litté- 
raire; l'ouvrage  parut  en  176i,  sous 
le  titre  à'Alinanach  de  Gotha  ,  et 
11  a  été  continué  jusqu'à  nos  jours  ; 
cependant  ce  ne  fut  que  peu  à  peu 
qu'il  acquit  le  degré  d'utilité  qui  lui  a 
valu  sa  réputation.  En  iTG.'),  le  ré- 
dacteur y  ajouta  la  partie  astronomi- 
que. Dès  la  première  année  il  donna 
la  généalogie  des   familles  régnantes. 


KLU 

surtout  celle  de  la  maison  de  Saxe,  des 
notices  sur  les  curiosités  de  la  nature  et 
de  l'art,  sur  la  géographie  et  l'histoire 
naturelle,  etc.  En  1768,  Klupfel  y 
joignit  des  gravures  représentant  d'a- 
bord des  sujets  mythologiques  et  allé- 
goriques, puis  des  scènes  dramatiques, 
tirées  du  répertoire  des  théâtres  alle- 
mands. L'almanach  eut  un  grand  suc- 
cès, et  se  débita  partlcuUèrement  dans 
les  cours  où  l'on  s'en  servait  pour  la 
partie  généalogique.  Kliipfel  mourut  en 
1776.  Son  ancien  collègue  Rolberg 
reprit  alors  la  rédaction  de  l'almanach. • 
— ;  Klupfel  (Engelherl) ,  théologien 
allemand,  né  en  1733  et  mort  en  181 1 , 
a  publié:  I.  Noi>a  hihliotheca  eccles. 
Frihurg.,  Fribourg  et  Ulm,  1775  à 
1790,  7  vol.  in-8°.  IL  Institutiones 
theologiœ  a'ogmaticœ,  3®  édit.,  Vien- 
ne,1807, 2vol.  in-8".  Iir.  Vollsiœn- 
âigeSammlung,  etc.,  collection  com- 
plète de  tous  les  écrits  provoqués  par 
les  édits  de  tolérance  et  de  réforme 
principalement  à  Vienne,  Strasbourg, 
1784-86,  6  vol.  in-8^  Le  dernier 
contient  les  mandements  et  lettres  pas- 
torales des  évêques,  surtout  de  ceux 
d'Allemagne,  pour  servir  à  l'histoire 
des  progi  es  des  lumières  dans  la  science 
ecclésiastique.  1) — g. 


FIN    DU    SOIXANTE   HUITIEME   VOLUME. 


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